(Dix heures deux minutes)
Le Vice-Président (M. Gendron): Bonjour. Alors, chers collègues, on va se recueillir pendant quelques instants.
Alors, veuillez vous asseoir.
Affaires du jour
Affaires prioritaires
Motion de censure proposant que l'Assemblée
dénonce le gouvernement pour l'ensemble
de ses politiques conservatrices
Aujourd'hui, chers parlementaires, nous appliquons l'article 87 du règlement, aux affaires prioritaires, et, aux affaires prioritaires, le mot le dit, à l'article 1 du feuilleton, ce que nous avons comme travaux, M. le chef de l'opposition officielle présente, en vertu de l'article 304 du règlement, une motion de censure qui se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement libéral pour l'ensemble de ses politiques conservatrices.» Je vous avise qu'à la suite d'une réunion avec les leaders la répartition du temps de parole a été établie de la façon suivante: l'auteur de la motion, à savoir le chef de l'opposition, disposera d'un droit de réplique de 20 minutes; 20 minutes sont allouées aux députés indépendants, 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement, 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes parlementaires s'ajoute à celui de l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par les députés indépendants peut être redistribué entre les deux groupes parlementaires majoritaires. Enfin, les interventions ne sont soumises à aucune règle de temps, alors les intervenants peuvent parler le temps qu'il leur semble bon.
Alors, nous en sommes à entendre M. le chef de l'opposition officielle. Je vous cède la parole sur la motion de censure d'aujourd'hui. M. le chef de l'opposition officielle.
M. Bernard Landry
M. Landry: M. le Président, une petite remarque préliminaire qui apparaît technique mais qui l'est moins qu'on pourrait le croire. Vous avez siégé, M. le Président, avec moi au Conseil des ministres pendant les deux ans et quelques mois où j'ai été premier ministre. Et vous souvenez-vous que le Conseil commençait à la seconde près? Et je pense que c'est ça qu'il faut faire; par respect pour nos concitoyens, etc., la plus haute instance décisionnelle exécutive doit commencer à l'heure, mais la plus haute instance décisionnelle législative aussi, et c'est là qu'il y a un problème technique. J'étais à l'extérieur, et une horloge, de l'Assemblée aussi, indiquait qu'il n'était pas 10 heures, ma montre indiquait qu'il n'était pas 10 heures, puis la grande horloge qui est là, qui est magnifique d'ailleurs, indiquait dix heures et trois minutes. Est-ce que, M. le Président, on pourrait mettre nos pendules à l'heure au moins là-dessus?
Le Vice-Président (M. Gendron): ...vous assurer, M. le chef de l'opposition officielle, que, lorsque nous présidons ici, on s'adresse à la présidence... Alors, la présidence va prendre les mesures de vérifier si effectivement cette magnifique horloge, qui devrait donner l'heure juste, est à heure juste.
M. Landry: Moi, en bon serviteur public, je suis prêt à changer ma montre à l'heure n'importe quand, m'ajuster sur celle-là, mais il faudrait que celle-là dise la vérité, ce que je vais essayer de faire maintenant dans ma critique du gouvernement, M. le Président.
En effet, tous les observateurs de la société québécoise, de Claude Ryan, qui est un sage, jusqu'à Louis Cornellier, un intellectuel du Collège de Joliette, très courageux et qui publie une intéressante revue, en passant par d'autres publications, d'autres intellectuels, des chefs syndicaux, qui souvent n'ont pas un langage intellectuel, disent durement qu'il se passe au Québec un phénomène qu'on n'a jamais connu dans notre histoire contemporaine. Et ça fait partie de ce que j'appellerais l'imposture de la dernière campagne électorale. Les Québécois pensaient voter pour un gouvernement libéral, et là ils se rendent compte, de tous les horizons, qu'ils ont élu un gouvernement conservateur. Ce n'est pas arrivé depuis des temps immémoriaux, parce que Alexandre Taschereau a dirigé le Parti libéral pendant 25 ans, ensuite un nouveau parti est né, l'Action libérale nationale, fusionnée avec l'Union nationale, Union nationale... mais qui était à l'origine un parti progressiste, oubliez pas ça, là. C'était quoi, l'Union nationale? L'électrification rurale, des écoles partout, des hôpitaux partout, le crédit agricole, donc un gouvernement progressiste. Pour la Révolution tranquille, inutile de dire que le gouvernement de Jean Lesage, dont faisait partie René Lévesque, Eric Kierans et d'autres, était également un gouvernement progressiste, qui ont donné naissance à la plupart des institutions qui font aujourd'hui notre fierté.
Alors, les Québécois et les Québécoises étaient en droit de penser que le gouvernement libéral aurait des politiques libérales. Ça ne veut pas dire qu'il faut toujours faire la même chose, dans l'histoire d'un peuple, mais il faut une continuité historique. C'est une question d'honnêteté. Si, quand le président républicain a été élu aux États-Unis ? de justesse, ça va de soi, puis, malheureusement, les Américains ne votent pas beaucoup ? on avait retrouvé les politiques de Franklin Roosevelt, ou de Jimmy Carter, ou de Bill Clinton, on aurait dit: On a été floués, on a été trompés.
Bien, ici, au Québec, dans un sens politique différent, c'est le contraire qui est arrivé. Pensant élire un gouvernement libéral alors qu'il y avait un parti très, très à droite, l'ADQ, qui était en lice, on se retrouve avec le genre de gouvernement qu'on a qui dès les premières heures s'est mis à faire des déclarations qui, sur le plan théorique, étaient très inquiétantes. Là, c'était encore juste la théorie; on a dit: j'espère qu'ils ne passeront pas de la théorie à la pratique. Et la théorie, bien, c'était reprendre les thèses des intellectuels les plus à droite, là, genre von Hayek ou genre mon ami Jean-Luc Migué, de l'École nationale d'administration publique ou de l'Institut économique de Montréal. Et, moi, j'ai du respect pour tous les intellectuels, de droite comme de gauche, là. Jean-Luc Migué, j'aime quand il fait une sortie parce que ça fait ressortir la sagesse des politiques sociales-démocrates et des politiques progressistes. Et il faut, dans une société, qu'il y ait une dialectique droite-gauche, là, on n'est pas dans la pensée homogène ni magique.
n(10 h 10)n Alors, eux, ils sont allés dans cette pensée dès les premières déclarations qu'ils ont faites. Par exemple, une pâle imitation d'une très belle phrase du président Kennedy, Kennedy qui dit: «Don't ask what your country can do for you, ask what you can do for your country.» Oui, mais, «country», ça, c'est vaste, là. Ça, c'est la nation, c'est l'idéal, c'est la droite comme la gauche, c'est le grand effort collectif des Américains, de Thomas Jefferson et John Quincy Adams. Mais là, dans un ersatz médiocre de cette phrase, on a entendu le ministre des Finances dire: «Ne demandez pas ce que l'État peut faire pour vous mais ce que vous pouvez faire pour l'État.» Vous l'avez tous entendu. Mais cette phrase est d'une médiocrité inimaginable. Moi, je ne veux rien faire pour l'État. L'État, ce n'est pas un absolu. Je ne veux pas que l'État fasse quoi que ce soit pour moi, non plus, je veux que l'État soit la représentation organique de l'intérêt public. Si on n'avait pas besoin d'État, l'État, en soi, ça ne veut rien dire. Je suis prêt à faire tout pour mon pays. «Don't ask what you can do... your country can do for you.» Ça, je suis prêt à faire n'importe quoi. Mais, l'État, c'est un instrument, absolument essentiel par ailleurs. Et là c'est ce que les libéraux n'ont pas compris.
Est-ce qu'il y a des gens qui font des choses pour l'État au Québec? Oui, les travailleurs de l'État, les travailleurs et les travailleuses de l'État. C'est des employés, et puis ils sont généralement, à cause de nos conventions collectives et de nos traditions, bien traités, respectés. Ça, c'est très important. Moi, j'ai passé ma vie pratiquement dans le secteur public. J'ai été fonctionnaire, moi-même, j'ai dirigé des milliers et des milliers de fonctionnaires. Quand j'ai entendu la présidente du Conseil du trésor dire que l'État ne fait rien de bon, je l'ai pris comme une injure personnelle, et j'imagine que des dizaines de milliers d'hommes et de femmes qui sont rentrés lundi dernier pour travailler à la Régie de l'assurance automobile ou au ministère du Revenu, qui font leur travail d'une façon impeccable, mieux que dans le privé dans bien des cas...
Je comprends que c'est démagogique de taper sur les fonctionnaires puis dire que, non, ils ne travaillent pas, puis ils sont paresseux, puis ils sont ci, ils sont ça. C'est radicalement faux. D'abord, le secteur public, ce n'est pas juste les fonctionnaires, c'est le parapublic aussi. L'État, c'est la salle d'urgence, les hôpitaux du secteur public. L'État, c'est aussi une institutrice qui est rentrée au travail ce matin devant une classe de 35 étudiants, étudiantes qui des fois sont faciles, qui des fois ne le sont pas. Tous ces services rendus quotidiennement sont l'objet du secteur public québécois, de l'État que nous avons fait naître essentiellement vers les années soixante, à la Révolution tranquille.
Avant, il y avait un État, oui, l'État provincial du Québec, alors qui devait... n'avait pas le budget, à cette époque-là, d'un ministère de petite taille aujourd'hui, de l'ensemble du gouvernement. Mais on était en retard, aussi, sur toutes les autres sociétés, pour des raisons historiques, pour toutes sortes de raisons. Le secteur de la santé, c'étaient largement des institutions religieuses. Les communautés religieuses avaient des hôpitaux, puis ils faisaient des choses extraordinaires aussi, hein, puis les soeurs n'étaient pas syndiquées, hein! Elles donnaient leur vie pour leurs semblables. Le secteur de l'éducation était régi à peu près de la même manière. Plusieurs d'entre nous avons été dans des écoles de prêtres ou de soeurs. Puis, après ça, on est allés dans les collèges classiques de prêtres, religieux. Et, même quand je suis arrivé à l'Université de Montréal, l'Université de Montréal était dirigée par Mgr Lussier, un monsignor; ce n'était pas un évêque, mais c'était bien juste, et puis c'était une université pontificale.
Oui, c'était ça, le Québec d'avant 1960, mais on en a construit un nouveau, un moderne, un qui ressemble aux sociétés avancées dans le monde. Et là on assisterait à sa déconstruction rétrograde, en le déconstruisant dans l'estime qu'on peut avoir pour notre État national, en disant: L'État ne fait rien de bien, en laissant sous-entendre que les gens qui travaillent dans la fonction publique sont excédentaires, donc, s'ils sont excédentaires, ça veut dire qu'ils ne travaillent pas. Bien, ça a été très mal commencé, ce régime qui est devant nous maintenant et qui a été applaudi sans réserve par un groupe ? et ça, ça confirme tout ce que je viens de dire ? le Conseil du patronat du Québec. Eux, ils ne se tiennent plus de joie. Ça en dit long sur ce que doivent penser les classes moyennes. Qui représente les classes moyennes au Conseil du patronat? C'est une organisation de grandes sociétés, de multinationales, de transnationales ou de grandes sociétés québécoises multinationales et transnationales. J'ai beaucoup de respect pour tout ce monde-là, mais, quand le Québec sera dirigé par les multinationales ou les gens qui ne se réclament que des multinationales, ce sera une catastrophe socioéconomique, pas juste sociale, économique aussi.
Alors, je pense que ce que le gouvernement devrait faire... Et, nous, on n'est pas ici pour que ça aille mal, on est ici pour que aille bien. On pourrait dire, à courte vue: si ça va mal, on va les planter plus vite. Non, ce n'est pas ça qu'on veut. On veut que le Québec aille bien. Alors, ce qu'on demande au gouvernement, c'est d'abord d'avoir un discours de ce siècle. Même aux États-Unis d'Amérique, censée être La Mecque du libéralisme, je dirais que la plupart des États, la grande majorité des États qui composent les États-Unis d'Amérique ont des gouvernements actifs, souvent interventionnistes et, dans certains États, presque aussi avancés que le Québec. Évidemment, là, je ne parle pas du Texas, de la Californie, mais on n'en sait rien, on le saura dans les semaines qui viennent. Alors, je pense que le gouvernement doit clarifier le discours et remettre en place, comme le demande Claude Ryan, des valeurs au moins libérales ? au moins libérales ? dans le discours.
Mais là je n'ai parlé que du discours. Le discours est néfaste, dangereux, rétrograde, mais il faut avoir bien plus peur des actions ou des non-actions qui vont découler de ce discours. S'ils ne faisaient que parler, ils feraient déjà du mal. On peut faire du mal en parlant. Ah oui! Le ministre des Finances a juste à dire qu'il va tout couper puis que son budget va ralentir l'économie, puis l'économie va ralentir même s'il ne faisait rien. Il faut dire qu'en plus il l'a fait, là... Mais ça paraît, aussi, dans les régions en particulier.
Vous savez, vous, M. le Président, mieux que quiconque ce qu'est la problématique des régions. Et vous savez mieux que quiconque ce que l'État québécois et le gouvernement qui l'a dirigé avant celui-ci ont fait pour les régions. La problématique des régions, elle est tellement évidente que le laisser-faire, automatiquement, ne peut que les tuer. Le laisser-faire, c'est que le vent souffle contre les régions. Dans le monde entier, le vent souffle vers les grands centres. Les Français, on le sait, depuis plus d'un siècle, ont tendance à quitter des endroits merveilleux pour aller vivre à Paris. Ils sont rendus 30 millions de Mexicains dans la cuvette de leur capitale nationale, Mexico. Aux États-Unis, c'est New York, c'est Chicago, c'est Boston, c'est L.A. Donc, il y a un vent difficile à comprendre. C'est un grand chansonnier français qui ? ce n'est pas Jacques Brel, qui était plutôt belge d'ailleurs, quelqu'un va peut-être m'aider ici, là ? qui disait: Quand on voit un vol d'hirondelles, comment peut-on imaginer que...
Des voix: Jean Ferrat.
M. Landry: C'est Jean Ferrat, merci beaucoup. Je vois qu'en dépit de votre libéralisme effréné vous n'êtes pas dépourvus de tout sens de la culture, ce qui est un début de rachat ? ce qui est un début de rachat. Alors, c'est ça, hein? Le printemps arrive et les hirondelles arrivent. Alors, dans les régions, c'est ça qui est arrivé, malheureusement: des régions merveilleuses, à l'écologie fantastique, à l'air pur, aux beaux lacs, à tout ce qu'on veut, avec des traditions fabuleuses, les gens quittent ça puis s'en vont à Montréal ou s'en vont à Québec. Bien, ça, ça veut dire que l'État national du Québec doit prendre acte de ce phénomène et être interventionniste et soutenir les régions.
Or, le dernier budget a abandonné littéralement tous les grands stimulants régionaux ou leur a fait très mal. Alors, des fois, ils ne les ont pas abolis complètement, ils en ont coupé 25, 30 %, 50 %. Dans certains cas, ils les ont abolis complètement, dans certains cas, ils les ont paralysés et gelés.
n(10 h 20)n J'ai reçu hier dans mon bureau des industriels de la haute technologie, des gens brillants, là, dans ce que notre système d'éducation a produit de meilleur, qui travaillent depuis sept ans à des innovations technologiques soutenues, oui, par l'État, comme l'État américain soutient l'innovation technologique directement ou indirectement, et là ils vont faire faillite parce que leur dossier est gelé, bloqué, parce qu'ils relèvent de l'Innovatech Régions ressources, que nous avons mis sur pied. Et Innovatech Régions ressources les a accompagnés pendant des années et là ne peut plus le faire. Ils ne sont plus capables de faire la paie. Ils ont déjà perdu les trois quarts de leurs chercheurs au cours des dernières semaines, là.
Alors, c'est beau, la théorie, là, la théorie de droite et d'extrême droite puis le non-interventionnisme. Le ministre de l'Industrie puis des Régions, il a dit: Quand une usine ferme, elle va ouvrir ailleurs. O.K. Bien là il y en a une qui va fermer à Rimouski, là. Voulez-vous me dire où est-ce qu'elle va ouvrir et quand? C'est ça, la différence entre la théorie puis le destin de jeunes hommes et de jeunes femmes qui ont consacré la science et la technologie au coeur de leur activité et dont le destin va être saboté par un gouvernement irresponsable, sans vision et théoricien.
Le député de Rivière-du-Loup devrait s'inquiéter de ça aussi, parce que Rivière-du-Loup, c'est un des endroits les plus prospères du Québec, un des taux de chômage les plus bas. Et, contrairement à ce qu'un examen superficiel pourrait laisser croire, ce n'est pas à cause du député, je le regrette, parce que le député n'était pas au pouvoir, c'est à cause des programmes du gouvernement, qui se sont appliqués à un haut niveau à Rivière-du-Loup ainsi que dans toute la région. Ce dont je parle, là, c'était de Rimouski, parce que la députée de Rimouski voit, là, la tragédie sous ses yeux. J'ai parlé d'une entreprise, mais il y en a beaucoup plus qu'une. Bon. Alors, Rimouski est devenue un fleuron de technologie, à cause du Carrefour de la nouvelle économie en particulier, CDTI, CNE. Rivière-du-Loup en a profité aussi.
Alors, j'enjoins les députés régionaux du Parti libéral à se joindre à nous pour convaincre ce gouvernement qu'il est en train de faire des ravages qui seront difficiles à réparer. Quand ça fait sept ans que tu montes une boîte de haute technologie à Rimouski puis que tu perds tes chercheurs, ça va prendre combien de temps pour la refaire? Je comprends qu'on peut rigoler, là, les profs d'université de droite, là, d'une université que j'aime bien d'ailleurs, mais il y avait aussi à l'UQAM des gens progressistes, dont je faisais partie. On peut rigoler, député à ville de Laval, théoricien de droite; parfait! Mais, moi, je parle de monde qui va perdre leur job à Rimouski, et également dans le comté de la députée de Matapédia, et bien d'autres.
Vous savez ce qui se passe en Abitibi, M. le Président, vous en êtes. Une ville de la taille de Rouyn-Noranda apprend 300 mises à pied à peu près dans l'espace de quatre jours. Au niveau de ville de Laval, ce seraient 25 000 jobs de perdues. Est-ce que ça vous fait rire, M. le député de Laval? Puis parlons-en, de Laval, d'ailleurs; vous êtes déjà sous pression, là, par les entreprises de haute technologie, dans le secteur des biotechnologies en particulier, qui sont terrorisées par les annonces qui ont été faites par vos ministres et par les coupures que vous avez faites dans ces secteurs. Parce que, moi, j'ai déjà été député aussi de ville de Laval. Ça a été une des belles périodes de ma vie, puis j'en ai gardé des contacts qui me téléphonent presque quotidiennement pour me dire: Vous n'êtes plus au pouvoir, mais vous avez le pouvoir indirect de l'opposition, voulez-vous ramener le gouvernement à la raison pour ne pas saboter ce qui a été construit dans l'île de Laval sur le plan de la technologie au cours des 10, 15 dernières années? Alors, je fais appel à vous aussi pour dire au ministre, là, de lire d'autres livres que les ouvrages périmés sur lesquels il base ses actions et d'aller voir dans des États avancés, au nord de l'Europe, d'aller voir en Irlande, ça lui ferait le plus grand bien.
L'Irlande, par des politiques ressemblant à celles du Québec, a réussi à faire passer son produit national brut par tête en haut de celui de la Grande-Bretagne. Alors, deux remarques: Si l'Irlande n'avait pas été indépendante, est-ce qu'ils auraient dépassé la Grande-Bretagne? Réponse: non, évidemment. C'est l'indépendance nationale du peuple et de la nation irlandaise qui ont donné à son État national les moyens d'agir. Et, deuxième remarque... Ah non! Il dit non, là, lui. Voulez-vous dire que l'Irlande ne devrait pas être indépendante? Que l'Irlande devrait être encore une colonie britannique dominée par la Grande-Bretagne, alors que ce problème-là a été réglé en 1917? Les Irlandais du monde, là, s'ils vous voyaient ce matin, là... Faites attention! Le langage visuel compte, à l'Assemblée nationale, le langage visuel compte.
Et l'Irlande, comme elle a évidemment tous ses moyens, a pu appliquer les politiques du Québec, mais avec une efficacité double. Parce que quand le Québec donne des crédits d'impôt, il les donne dans sa sphère de juridiction, c'est-à-dire la moitié de l'assiette fiscale, même moins parce qu'on paie les deux tiers de nos impôts à Ottawa.
Alors, il y en a, des exemples dans le monde de pays qui réussissent, qui ont réussi, et le Québec était un de ceux-là, là, jusqu'à ces tout derniers temps. L'année 2002, on dit, c'est la meilleure année économique de l'histoire du Québec. On a reçu dernièrement une délégation du Wisconsin à Montréal, la semaine dernière, je crois, qui savait ce que nous avions fait et qui sont venus voir ce que nous faisions pour s'en inspirer, avec la déception profonde que, entre le temps où ils ont décidé de venir à Montréal puis le jour où ils sont arrivés, il y a un gouvernement qui est venu démolir ce qu'ils admiraient et ce qu'ils venaient utiliser comme modèle pour eux-mêmes.
Alors, les régions, l'économie du savoir. Quand un industriel, au début du printemps dernier, voulait savoir dans quelle province du Canada il allait investir en haute technologie, la réponse lui sautait aux yeux: Québec est en avance de tout le monde pour les crédits d'impôt à la recherche et au développement. Aujourd'hui, le même industriel, s'il regarde les provinces du Canada, il se rend compte qu'on est redescendu au niveau de six autres provinces. Alors, si, par hasard, cet industriel trouve beaucoup plus facile d'aller dans un milieu anglophone... Avant, il venait quand même ici, dans un milieu francophone, à cause de l'accueil à l'économie du savoir, puis là il va aller ailleurs. Ça ne paraîtra pas tous les jours, ce ne sera pas écrit dans les journaux à tous les jours, ça va être écrit dans les journaux de Calgary, mais ce ne sera pas écrit dans les journaux de Montréal que cette entreprise serait venue à Montréal si. Et ça va vite.
Moi, tout le monde sait que, d'une façon presque exagérée, j'ai passé ma vie dans l'économie du Québec. Quand je n'étais pas à l'oeuvre au premier rang de l'action comme gouvernant, comme ministre, je l'étais comme enseignant ou comme animateur; j'ai participé au débat sur le libre-échange. Et donc, j'ai toujours été obsédé par les questions économiques, en essayant d'équilibrer avec les questions culturelles et sociales, bien entendu. Mais ça a été pour moi une émotion fabuleuse, le jour où j'ai vu le taux de chômage à Montréal, une ville qui avait été décomptée, là ? quand on est arrivés au pouvoir, une montagne de poussière grise, l'image de Montréal ? ...voir le taux de chômage à Montréal passer en-bas de celui de Toronto. Et ma plus grande peine, ça n'a pas été le résultat de l'élection ? c'est le peuple qui décide ? ça a été de voir que, peu après cette élection, le taux de chômage à Montréal est repassé plus haut que celui de Toronto. C'est eux qui ont le SRAS puis c'est nous autres qui avons le chômage. J'en conclus, assez rapidement d'ailleurs, que c'est pire d'avoir un gouvernement libéral que d'avoir le SRAS!
Des voix:...
n(10 h 30)nM. Landry: En toute sympathie pour les victimes des deux fléaux!
Maintenant qu'on avait entendu des gens s'inspirer de doctrines désuètes et de vieux manuels, on les entend s'inspirer d'une doctrine tellement ésotérique qu'elle n'a pas de nom: la réingénierie. Elle n'est pas dans les dictionnaires, sauf un, paraît-il, là, qui vient d'admettre ce mot comme mot utilisable en langue française, mais c'est un calque de l'anglais, «reengineering». Puis, en anglais, c'est une catastrophe, c'est très, très péjoratif, puis en français aussi. Alors, on n'est même pas capable de trouver le mot. Il y a un secrétariat à la réingénierie, un sous-secrétariat à la réingénierie, mais là ils ont dit que ce n'était pas ça, c'était la «réinvention». Alors, j'imagine qu'ils auront changé le nom la semaine prochaine pour «sous-secrétariat à la réinvention».
Mais, comme je l'ai dit à quelques reprises, au-delà des mots, les choses. Et c'est quoi, les choses? On le voit bien, c'est une tentative désespérée de redonner de la crédibilité à un cadre financier qui n'en a aucun. Ils avaient dit: Nous allons couper, bloquer tous les ministères, sauf la Santé et l'Éducation. C'était ça, leur cadre financier. Ils se sont vite rendu compte que ça n'a aucun sens. Juste les coûts de système en éducation, si tu bloques ça, tu diminues les services, puis, en santé, c'est encore pire. Et puis, les ministères qui ne sont pas la Santé et l'Éducation, les ministères qui ne sont pas la Santé et l'Éducation, est-ce que c'est des ministères non importants et non essentiels? Si on dit au ministère de la Justice: Ce n'est pas grave, son affaire, lui, il peut diminuer son budget, ce n'est pas la santé, ce n'est pas l'éducation. Aïe! perdre le contrôle des motards criminalisés, là, ça peut faire mal aussi bien à la santé, à l'éducation qu'à l'ensemble de la société. C'était encore là une approche doctrinale. Gouverner l'État, c'est gouverner l'État. Et on a le plus grand respect pour les ministères de la Santé et de l'Éducation, ils sont fondamentaux, c'est eux autres qui dépensent la plus grande part du budget de l'État, mais on ne peut pas penser que la justice, dans une société avancée, n'est pas importante, ou que la sécurité publique, dans une société avancée, n'est pas importante, ou que notre réseau diplomatique, dans une société avancée, n'est pas un réseau important.
On avait des diplomates plus ou moins retraités qui, d'une façon à peu près bénévole, allaient à l'étranger représenter le Québec dans les endroits où on n'est pas représenté en permanence et formellement. Je pense que ça coûtait 100 000 $ par an. Ils ont coupé ça. Ces bénévoles devaient travailler pour à peu près 3, 4 millions, parce que c'est tous des gens très expérimentés qui connaissent la diplomatie, qui connaissent les pays en question. On leur coupe leurs billets d'avion pour 100 000 $, ce qui est dépensé à peu près dans un quart d'heure, même pas, dans quatre minutes dans le réseau de la santé, 100 000 $, pour se priver d'argent parce que ces diplomates bénévoles qui assuraient qu'on avait un contrat de plus au Caire, par exemple, ou un contrat de plus à Caracas payaient leurs frais, les frais de tous les autres multipliés par un facteur d'à peu près 50. Ça ne prend pas un gros contrat pour que l'État québécois et nos entreprises recueillent 100 000 $. Difficile à comprendre. Même quand on voudrait avoir de la sympathie, d'avoir l'esprit vif, comprendre une telle manoeuvre dépasse la possibilité humaine ordinaire.
Et puis on voit aussi où cela doit mener. Et c'est vrai que le député de Rivière-du-Loup était mal placé, lui qui a fait une campagne plus à droite que les libéraux, pour dénoncer leur politique de droite, mais il l'a quand même fait avec assez d'habileté dans une période de questions récente: Où est-ce que ça mène, tout ça? Ça mène à faire semblant de baisser les impôts. C'est-à-dire que ce n'est pas fait encore, il y a des promesses de baisses d'impôts. De toute façon, les objectifs sont modestes parce qu'ils veulent baisser les impôts de 5 milliards, et l'ancienne ministre des Finances et moi-même les avons baissés de 15 milliards. Mais, en tout cas, s'ils pensent qu'ils peuvent les baisser de 5, oui, mais les baisser pour vrai. De quoi nous sommes-nous aperçus au cours des derniers mois? Des hausses de tarifs, ouvertes ou déguisées, déjà réalisées ou promises dépassent déjà en volume la baisse d'impôts promise pour la première année et qu'on n'a pas évidemment. Alors, payez d'abord, puis peut-être que vous paierez ensuite aussi parce qu'on n'a pas l'assurance de ce qui va arriver dans l'avenir. Mais la manoeuvre est grossière, d'abord parce qu'elle trompe la population. On dit: On va baisser les prélèvements de l'État, et puis la première chose qu'on fait, c'est qu'on les monte. Déjà, ce n'est pas bien parce que ce n'est pas transparent, ce n'est pas vrai. Mais il y a pire que ça.
L'impôt est juste. L'impôt est juste, car il prélève davantage des riches que des moins riches. Je ne dis pas des pauvres, parce que l'impôt ne prélève pas des pauvres. Les pauvres ne paient pas d'impôts au Québec. Il y en a 40 % de nos contribuables qui ne paient pas d'impôts, et c'est bien comme cela. Sauf que, si on remplace l'impôt par le tarif, là les pauvres paient le tarif et puis les classes moyennes, au tarif, paient la même chose que les très riches. Alors, non seulement ce n'est pas transparent puis ce n'est pas vrai, mais, en plus, c'est socialement injuste.
On nous avait promis... Et ça, ça ne m'avait même pas blessé parce que je trouvais ça ridicule, le chef de l'opposition du temps, premier ministre aujourd'hui, disait qu'il me tenait personnellement responsable des problèmes de la santé ? vous vous rappelez de ça? ? personnellement responsable, ce qui était déjà pervers sur le plan démocratique. Nos problèmes de santé, le gouvernement en est responsable et l'ensemble de la population en est responsable. Je l'ai assez dit durant la campagne électorale, c'est une responsabilité collective. Bien, moi, je n'aurai pas la bêtise de dire au premier ministre, député de Sherbrooke: Vous êtes personnellement responsable des problèmes de santé, parce que ce ne serait pas vrai. Mais son gouvernement en est responsable, par ailleurs. Et il est tellement peu informé des dossiers de la santé, le premier ministre, je pourrais avoir beau jeu, là, moi, si j'étais aussi mesquin qu'il l'avait été à mon endroit, de dire: Vous êtes personnellement responsable. Il a confondu les objectifs et les résultats.
M. Dupuis: M. le Président. M. le Président, je vais...
M. Landry: Il aime bien le secteur privé...
Le Vice-Président (M. Gendron): Un instant, M. le chef de l'opposition.
M. Dupuis: Avec votre permission, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Gendron): Question de règlement?
M. Dupuis: ...je vais bien sûr invoquer l'article 35 de notre règlement, mais j'aurais souhaité ne pas être obligé d'invoquer l'article 35 parce que le minimum de gentilhommerie devrait faire comprendre au premier... au chef de l'opposition que ce genre de propos, que ce genre de propos qu'il vient de tenir n'est pas acceptable non seulement en vertu du règlement, mais en vertu simplement de principes naturels de gentilhommerie. Alors, il peut faire...
Des voix: ...
M. Dupuis: Il peut faire son discours, il peut faire son discours, nous acceptons les critiques à l'endroit du gouvernement, c'est son rôle, nous le comprenons très bien, mais il ne peut pas descendre plus bas que cette critique à l'endroit du gouvernement.
Le Vice-Président (M. Gendron): Simplement... M. le chef de l'opposition, tout simplement, c'était une question de règlement, il faut que je l'entende. Oui, je reconnais qu'il y a eu un peu de plaidoirie sur la question de règlement plutôt que juste la signifier. L'article 6... l'article 35, pardon, paragraphe 6°, est assez clair, mais c'est clair pour tous les parlementaires: oui, autant que possible, dans les propos, on n'impute pas de motifs indignes à un député. Et je crois, par contre, dans une motion de censure et au moment où on vit présentement... ou la situation qu'on vit présentement, moi, je n'ai pas cru qu'il y avait là eu un motif imputé indirectement à un parlementaire qui vient de s'exprimer suite à une période des questions. Je reconnais cependant la fragilité. Il faut faire attention aux termes utilisés. Et, M. le chef de l'opposition, je vous inviterais à être, comme d'habitude, avec l'expérience que vous avez, prudent dans les termes choisis.
M. Boisclair: Dans l'appréciation de la question de règlement soulevée par le leader du gouvernement, pouvez-vous apprécier la chose suivante du chef de l'opposition de l'époque qui a tenu personnellement responsable l'ancien chef du gouvernement, l'actuel chef de l'opposition, pour les problèmes vécus dans le réseau de la santé? Il l'a tenu personnellement responsable. Qu'est-ce qu'il y a là, M. le Président, de plus indigne: les propos que nous venons d'entendre ou ceux du chef de l'opposition de l'époque? Il serait intéressant de connaître aussi votre appréciation sur ces questions.
Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, mais, écoutez, là, un instant à tous les deux, s'il vous plaît, ou à l'ensemble des parlementaires. Vous voyez combien ma remarque était pertinente de faire attention, parce que, moi, je ne peux pas gérer le passé, je ne peux pas gérer la situation passée puis je ne peux pas gérer les propos qui ont déjà été prononcés ici. Ça ne mène nulle part. Alors, en conséquence, c'est pourquoi qu'il y a un article du règlement qui dit: faire attention aux propos, parce qu'on peut toujours trouver une référence pour revenir sur une situation antérieure qui nous place dans la situation qu'on vient de vivre. Alors, je préférerais, moi, entendre le chef de l'opposition sur la motion de censure. Alors, allez, M. le chef de l'opposition.
n(10 h 40)nM. Landry: Quelle sagesse, M. le Président. Ce n'est pas des intentions qu'il m'avait prêtées d'ailleurs, celui qui est devenu le premier ministre et qui était chef de l'opposition. D'ailleurs, le lapsus vient encore d'être commis par le député, le ministre.
Une voix: ...
M. Landry: Vous êtes député aussi, et vous êtes ministre. Vous êtes les deux. Non, il voulait m'appeler le premier ministre, comme son chef. C'est quoi, un lapsus? Je ne suis pas psychiatre, mais on est capable de lire des livres là-dessus, là. Pendant la campagne électorale, celui qui est devenu le premier ministre, qui avait promis qu'après le 14 avril il serait le premier ministre du Canada... Remarque qu'il a l'air à prendre plus les intérêts du Canada que ceux du Québec depuis qu'il est là, remarque. Ça fait que les lapsus, les lapsus sont significatifs.
Mais c'est quoi de ne pas accepter votre rôle de gouvernant? Vous n'acceptez pas dans votre esprit que c'est vous le gouvernement et que c'est vous qui êtes responsable de la détérioration de l'économie du Québec, de la paix sociale au Québec? Alors, c'est pour ça que je me suis défendu poliment. Mais, moi, «gentilhomme», c'est une expression que je n'emploie plus depuis très, très longtemps parce que je sais que la gentillesse, ce n'est pas réservé aux hommes et que «gentilhomme», ce qui faisait appel à de grandes vertus, c'est des vertus partagées également par les hommes et par les femmes. Alors, c'est un langage du XVIIe siècle qui, aussi, est peut-être un lapsus de la part du ministre.
Alors, pour résumer, pour résumer tout ça, ce qui nous menace le plus présentement et qui va faire mal à notre économie comme à nos services sociaux, comme à notre vie culturelle, c'est la rupture du lien de confiance sociale. L'économie du Québec comme sa vie sociale et culturelle ont été basées sur la concertation, et c'est une des belles choses que le Québec a faites et dont il a donné l'exemple au monde. C'est sûr que, dans des grands pays à 300 millions d'habitants, la concertation à la québécoise, là, c'est beaucoup plus difficile. Mais, au Québec, c'est possible parce que les dirigeants patronaux, syndicaux, des groupes sociaux peuvent se connaître personnellement, peuvent se parler, et on peut faire de grandes choses dans le dialogue.
Quand nous sommes arrivés au pouvoir en 1994, le déficit de notre État national annuel était de 6 milliards de dollars. C'était une tragédie. On s'en allait à la débandade et on s'en allait justement vers un moment où l'État ne pourrait plus agir parce que, totalement impuissant, il n'aurait pas d'argent pour le faire. Alors, on a réuni la société. Le Conseil du patronat a été poliment invité à la table et était bien représenté dans le temps, et les centrales syndicales étaient là, et les groupes populaires étaient là. Nous avons décidé d'une opération difficile, périlleuse, austère, qui était l'atteinte du déficit zéro. Et puis nous l'avons fait et nous l'avons maintenu pendant cinq ans. Et, pendant ce temps-là, la paix sociale a été maintenue, la confiance sociale a été maintenue et le Québec est resté une société solidaire.
Mes craintes économiques sont justifiées, ça paraît déjà dans les chiffres. Mes craintes sociales sont justifiées, ça paraît déjà dans les moyens mis à la disposition des gens de l'économie sociale. On les rencontre dans les régions, les divers groupes communautaires. Déjà, on voit la rupture: rupture économique, rupture sociale. Mais le résultat des deux, c'est: perte de l'harmonie sociale, du dialogue social, et ça, ça peut faire plus mal et pendant plus longtemps que toutes ces autres politiques mal inspirées qui font des dommages sectoriels, ponctuels ou régionaux.
Par conséquent, cette motion que nous présentons pour dénoncer le gouvernement libéral pour ses politiques conservatrices, ce n'est pas uniquement pour faire notre rôle d'opposition officielle, c'est notre devoir de censurer un gouvernement qui agit mal, mais c'est surtout notre préoccupation pour la société québécoise. Ce que je viens dénoncer aujourd'hui, si le gouvernement s'amendait, revenait à une politique simplement libérale, ce serait déjà un progrès par rapport à leurs politiques conservatrices, nous serions là pour les appuyer, parce que nous tenons, au-delà de tout, à ce que le Québec soit prospère, qu'il répartisse la richesse qu'il crée et que cela se fasse dans l'harmonie et dans le dialogue, suivant nos traditions et nos valeurs.
Alors, je demande au gouvernement de méditer sur les valeurs qui sont celles de la société québécoise et celles qui ont marqué l'histoire de leur propre parti, le Parti libéral. Qu'ils relisent les ouvrages de M. Ryan sur la lutte à la pauvreté en particulier et qu'ils s'en inspirent. Et, s'ils reprennent des attitudes acceptables et des politiques au service du Québec, on sera là pour les appuyer. Mais, comme ils ont l'air plutôt opiniâtres dans leurs mauvaises orientations, bien, la population du Québec peut compter sur nous pour dénoncer le Parti libéral déguisé, dénoncer ce parti conservateur et nous mettre au service des véritables intérêts du Québec. Même si on n'est pas le gouvernement, on a le pouvoir indirect, par l'opposition, de servir nos compatriotes dans les meilleurs intérêts de la société.
(Applaudissements)
Le Vice-Président (M. Gendron): Je remercie M. le chef de l'opposition officielle. Et, maintenant, je cède la parole, pour poursuivre le débat sur cette motion de censure, au ministre du Développement économique et régional, M. le député de Laporte. Alors, M. le ministre, à vous la parole.
M. Michel Audet
M. Audet: M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui pour relever et répondre à un certain nombre d'affirmations qui ont été faites dans les dernières minutes et dans les derniers jours, particulièrement par le chef de l'opposition. Au fond, je vais essayer de regrouper mon intervention autour de trois thèmes.
Ce que le chef de l'opposition reproche à la population, il reproche, au fond, à la population du Québec, c'est d'avoir voté pour du changement. Il ne se console pas de voir que la population du Québec ait décidé de voter pour du changement alors qu'en fait les deux tiers de la population ont voté pour du changement. J'y reviendrai.
Deuxième élément de ma présentation, il reproche au gouvernement qui s'est fait élire pour faire du changement de précisément mettre en place un certain nombre de mesures pour revoir les façons de faire de l'État, les faire de la façon plus efficace pour, précisément, faire ces changements au bénéfice de la population et le faire avec le concours et la participation de la fonction publique.
Le troisième élément, c'est bien sûr, de son intervention, c'est la nostalgie, la nostalgie de ne pas pouvoir proclamer l'indépendance. On avait 1 000 jours, maintenant c'est 2 000 jours. Alors, évidemment, là-dessus, j'avoue que je ne peux pas le consoler, puisque, là aussi, les électeurs ont décidé à sa place. Donc, j'y reviendrai plus tard.
Le premier sujet. Donc, il reproche, le chef de l'opposition nous reproche ou reproche plutôt aux électeurs d'avoir voté pour du changement. La meilleure réplique que j'ai trouvée à ça, c'est dans le journal La Presse d'aujourd'hui, un article de Claude Picher que le premier ministre de l'époque, du gouvernement précédent, donc le chef de l'opposition actuel, avait louangé à de multiples reprises pour la profondeur de ses analyses, alors donc quelqu'un qui n'est pas, ne peut pas être qualifié comme, tout à l'heure le chef de l'opposition l'a fait, comme quelqu'un de droite ou quelqu'un d'ultraconservateur, mais un analyste sérieux.
Qu'est-ce que nous dit, ce matin, M. Picher? Il nous dit ceci. Je vais citer quelques extraits, puisque ça reflète bien, je pense, la meilleure réponse qu'on peut apporter aux interventions qui viennent d'être faites: Le 14 avril dernier, ça fait à peine six mois, 3,9 millions de Québécois, donc, sont allés aux urnes. Près de 1,8 million, donc 46 %, ont voté pour le Parti libéral dans une course à trois. Et il mentionne plus loin que l'autre partie importante a voté pour l'Action démocratique et, donc, pour du changement aussi.
n(10 h 50)n Et, pendant cette campagne, M. Charest a joué à fond la carte du changement. Pour ceux qui ont la mémoire courte, voici quelques extraits du programme diffusé, j'insiste là-dessus, il y a à peine quelques mois. Et il y a une liste, et là, évidemment, on parle de la remise en question des régies régionales de la santé, la réduction des listes d'attente en faisant appel aux cliniques privées et aux cliniques spécialisées; décentraliser le pouvoir de décision au niveau local ? on le verra, on aura l'occasion d'en parler prochainement; établir des partenariats privé-public; lorsque le gouvernement n'est pas le mieux placé pour rendre le service, déléguer sa responsabilité et rendre imputable le partenaire ainsi désigné; augmenter le nombre d'heures d'enseignement; produire un bulletin des écoles; ramener le fardeau fiscal des Québécois au niveau de la moyenne canadienne ? quel scandale de partir du niveau le plus haut au Canada, de tendre à se rapprocher de la moyenne canadienne; réduire le nombre des ministères, d'organismes et de sociétés d'État. En somme, éliminer le gaspillage.
C'est écrit en toutes lettres dans un document abondamment distribué pendant la campagne électorale, et les libéraux n'ont jamais tenté de cacher leurs intentions à leur égard, comme en témoigne éloquemment cet autre extrait du programme: «Nous visons un État plus efficace, plus transparent et moins coûteux.» Me semble que c'est assez clair, dit effectivement le chroniqueur Picher.
Évidemment, un train de réformes aussi ambitieux suppose une remise en question fondamentale du rôle, de la taille et du fonctionnement de l'État, ce que M. Charest n'a jamais cherché à cacher non plus.
On peut être pour ou contre cette vision des choses, mais ceux qui reprochent aujourd'hui au gouvernement Charest d'agir sans mandat feraient mieux de se calmer le pompon, dixit, évidemment, M. Picher. Donc, M. Charest se prépare à faire ce qu'il a dit qu'il ferait. Que voulez-vous demander de plus à un homme politique?
À moins de prendre les Québécois pour des nonos, il faut tenir pour acquis qu'ils savaient ce qu'ils faisaient lorsqu'ils ont élu les libéraux.
Donc, cette réplique, que je trouve très pertinente, de M. Picher répond largement aux admonestations, aux grandes craintes, au langage très excessif, pour ne pas dire ampoulé, du chef de l'opposition à l'égard des changements que veut faire le gouvernement.
Le deuxième point, c'est que, évidemment, on a... on nous reproche donc, en conséquence de quoi, ce qu'on vient d'évoquer, qu'on doit faire donc des remises en question. Moi-même, actuellement, depuis cinq ou six mois, je suis en train de faire une analyse de réingénierie ? on n'en a même pas parlé ? je suis en train de regrouper ce qui était auparavant cinq ministères en un. Avez-vous vu une levée de boucliers? Ce qu'on fait essentiellement, c'est de regrouper des fonctions qui vont dans le sens du développement économique et régional, de faire travailler les fonctionnaires ensemble, et cet exercice-là se fait avec les fonctionnaires, avec leur support, et c'est eux qui contribuent à faire des propositions justement pour que les services du ministère du Développement économique et régional soient meilleurs et coûtent moins cher. Donc, c'est un exercice qui se fait, qui va amener des économies et qui va amener le ministère à donner un meilleur service à la population, à faire en sorte, en somme, que les gens en aient plus pour leur argent. Est-ce qu'on peut, finalement, nous reprocher cet exercice?
C'est en définitive ce que vont faire et font actuellement plusieurs ministères sous ce chapitre qu'on appelle la réingénierie, donc une réévaluation des façons de faire: Est-ce que les programmes qu'on fait actuellement donnent le service voulu, qui était visé à l'origine? Est-ce que ça se fait avec les meilleures ressources? Est-ce que la population dans les territoires, les entreprises particulièrement dans le cas de mon ministère sont mieux servies maintenant que... pourraient être mieux servies, pardon, qu'elles le sont maintenant avec les programmes actuels? Voilà l'exercice en cours. Voilà un exercice tout à fait sain d'un gouvernement qui prend ses responsabilités et qui veut rendre l'État plus efficace.
Mais cet exercice-là, on doit évidemment le faire aussi dans les sociétés d'État. Et là, évidemment, c'était la marque de commerce du gouvernement précédent d'investir, entre guillemets, évidemment, dans les sociétés d'État, particulièrement la Société générale de financement, pour évidemment ravoir des rendements beaucoup plus élevés plus tard et nous permettre de nous financer plus de services. Qu'en est-il, M. le Président? En 1998 ? donc, c'était le dernier plan quinquennal, qui s'est terminé justement l'année dernière et que le gouvernement précédent avait renouvelé d'ailleurs sur la même base ? on adoptait un plan ambitieux à la Société générale de financement, d'investissement de 10 milliards sur cinq ans. Ce 10 milliards était financé à même une contribution de 400 millions du gouvernement du Québec, oui, 400 millions qu'on a empruntés sur le marché pour transférer à la Société générale de financement. L'objectif de ça, c'était évidemment que... c'était que la Société générale de financement se lancerait dans des projets avec des partenaires, et ces projets seraient tellement rentables que ? le plan le mentionne ? on pourrait retourner à l'État non seulement les 400 millions, mais un rendement sur cet investissement qui pourrait aller jusqu'à 15 %.
M. le Président, qu'en est-il après cinq ans? Le 2 milliards en question, il a été versé, il a été versé à la Société générale de financement. Le résultat du dernier exercice financier... D'abord, la moyenne des cinq dernières années, le rendement a été nul. Donc, zéro, carrément zéro. Mais, bien plus que ça, la dernière année, le rendement, il est négatif, puisque la Société générale de financement a rendu public son rapport annuel qui représente une perte de 180 millions. Donc, pour l'année 2003, alors qu'on aurait dû avoir, mettons, 15 %, peut-être pas tant que ça, mettons que ça aurait été 10 % de rendement sur le 2 milliards, on aurait dû s'attendre à avoir des dividendes de la Société générale de financement de 200 millions. Au lieu de ça, on a eu quoi? On a eu une perte de 180 millions. Ça veut dire qu'on est en quelque sorte dans le rouge de 380 millions.
Qui est-ce qui paie ça? Ce sont les payeurs de taxes, parce que c'est consolidé avec les revenus du gouvernement. Et il faut couper dans les services publics de santé, d'éducation, de bien-être pour financer cette aventure, ces aventures, n'est-ce pas, du gouvernement dans toutes sortes d'opérations. On aura l'occasion d'en parler dans les prochains mois, lorsque le rapport du comité de travail de la Société générale de financement me sera communiqué. Mais, dès maintenant, on sait que, pour les années dernières, perte de 200 millions.
Qu'en est-il depuis ce temps-là? Parce que ça, ça se terminait... La Société générale de financement avait comme pratique d'annoncer ses résultats six mois après la fin de l'année financière. L'année financière étant le 31 décembre, j'ai rendu publics les rapports annuels au mois de juin dernier. Quand on a demandé au comité de travail de refaire son travail ? justement, ça fait partie d'un exercice de mise à jour et de transparence ? on a rendu publics les résultats après les six premiers mois de l'année. Les six premiers mois de l'année, qu'en est-il? Une autre perte, tenez-vous bien, cette fois-là de 180 millions sur six mois et une tendance qui ne s'améliore pas.
Conclusion, c'est que, encore une fois, pour les six premiers mois de l'année et si la tendance se continue, cette année, non seulement on n'aura pas les 200 millions de dividendes qu'on devait avoir, mais on va devoir assumer, encore une fois à même les crédits du gouvernement, puisque, encore une fois, c'est consolidé, certainement plus de 200 millions, peut-être 300 millions, on ne le sait pas, l'année n'est pas terminée, mais, encore une fois, on aura un écart certainement de 500 millions, hein, en gros, au moins, entre ce qu'on aurait dû recevoir en vertu de la politique du gouvernement précédent et ce qu'on va recevoir.
n(11 heures)n Ça veut dire quoi? Ça veut dire que notre marge de manoeuvre, elle est grugée par les aventures du gouvernement précédent dans le domaine industriel et commercial où, en passant, il y avait beaucoup d'apprentis sorciers, parce que, pour gérer tout ça, on avait un super président, mais on avait aussi 10 présidents de division, tous bien payés et, tenez-vous bien, dont le rendement, le boni annuel était fondé sur quoi? Sur le niveau de dépenses qu'ils faisaient. Donc, en définitive, s'ils rencontraient... réussissaient à dépenser le 400 millions que le gouvernement leur avait donné, on leur donnait un boni. S'ils ne le dépensaient pas, ils n'avaient pas de boni. Ce n'était pas donc le rendement, ce n'était pas pour s'assurer que le gouvernement recevrait son 200 millions qu'il était en droit d'avoir, c'était pour s'assurer qu'ils dépensent l'argent public qu'on leur donnait. Conclusion: bien sûr que les bonis ont été versés et avec le résultat... en dépit des résultats que je viens de donner, c'est-à-dire des résultats négatifs et très déficitaires.
C'est ça, la gestion, c'est ça, la situation qu'il faut corriger. Est-ce que c'est de l'idéologie, ça? C'est une politique de responsabilisation sociale d'éviter de couper des services publics pour financer des aventures industrielles et des «power trips» de gens qui auraient pu faire cet exercice-là dans un secteur privé, qui utilisaient des fonds publics pour faire un exercice financé par le secteur et les fonds publics. Ça, c'en est un, exercice de réingénierie qu'il faut faire, qu'on fait et qu'on n'a pas le choix de faire. On ne le fait pas pour des raisons idéologiques, on le fait pour se donner une marge de manoeuvre pour éviter de gruger et de continuer de gruger dans le financement des services publics pour financer la Société générale de financement.
Qu'en est-il évidemment de d'autres... je pourrais donner d'autres exemples, mais vous me permettrez d'en citer un, parce que le premier ministre en est très fier quand il parle de ses emplois... l'ex-premier ministre, pardon, M. le chef de l'opposition en est très fier parce que, comme premier ministre à l'époque, il était très impliqué dans la promotion des zones désignées, des sites désignés. Alors, le chef de l'opposition devrait maintenant connaître un peu le résultat de l'exercice.
J'ai donné le résultat de la première tranche, n'est-ce pas, de cette stratégie qui était la Société générale de financement; l'autre stratégie majeure, c'était la création d'emplois dans les sites désignés. Savez-vous, en 2003, combien nous coûte par emploi... combien nous coûte l'emploi créé, les emplois créés dans les sites désignés? Je les cite, hein: Carrefour de la nouvelle économie; Cité du Multimédia; carrefour de la nouvelle technologie de Québec, Cité du commerce électronique évidemment qui est le principal; et le centre de développement de technologie de l'information. Au moment où on se parle, il y a 5 370 ? arrondissons ? 5 400 emplois qui ont été créés dans toutes ces organisations.
Savez-vous combien on paie actuellement chaque année et on paiera pendant les 10 prochaines années pour ces emplois? 47 000 $. Quelle est la moyenne des salaires versés dans ces secteurs-là? Entre 30 000 $ et 35 000 $. Donc, on verse 47 000 $ actuellement, annuellement, pour 5 400 emplois qui ont été créés. En définitive, le coût pour chacun de ces emplois, qu'on verse pendant les 10 prochaines années, va être plus élevé que le salaire, n'est-ce pas, que vont recevoir ces individus-là pendant cette période-là. Et ce n'est pas tout: ça ne comprend même pas les avantages fiscaux que les compagnies ont eus en congés de taxe sur la masse salariale, congés de taxe sur la capitale et congés de taxe sur les profits. On ne comptabilise même pas, on passe strictement à des engagements financiers.
Or, le gouvernement, oui, a mis fin aux nouveaux projets mais continue et a continué de respecter ces engagements-là. Ça veut dire quoi? Quand je multiplie en gros 5 400 emplois nouveaux par 47 000 $, c'est 253 millions de dollars par année qu'on prend dans nos crédits, hein, pour financer ces emplois-là, les emplois dont se vante le chef de l'opposition. 253 millions de dollars par année qu'on va continuer de verser pendant huit ans, parce que ça fait deux ans qu'ils ont été donnés, en moyenne. C'est ça, la gestion dont vient de se vanter le chef de l'opposition. Est-ce qu'on a le choix? Est-ce que c'est de l'idéologie que de remettre ça en question? La réponse est non, on n'a pas le choix. Pourquoi faut-on le faire? Au nom de la responsabilité sociale du gouvernement, parce que, si on ne le fait pas, on n'aura plus le moyen de donner des services de santé, d'éducation et de bien-être qu'on s'est engagé à donner, comme société québécoise, et qui sont en tête de liste des priorités du gouvernement libéral. Donc, encore une fois des mesures qu'on nous reproche de prendre, c'est des mesures essentielles et qu'on ne prend pas pour des raisons encore une fois idéologiques mais essentiellement parce que c'est fondamental si on veut donner les services de qualité.
L'autre élément évidemment de la déclaration du chef de l'opposition... et, hier, il en a fait allusion beaucoup, évidemment. Il fait beaucoup courir la rumeur qu'il y a des problèmes. Oui, il y a des problèmes en région, les problèmes particulièrement liés au bois d'oeuvre. Il y a des problèmes liés à des conjonctures, à une remontée du dollar effectivement qui est subite et qui frappe les régions.
En dépit de ça, je pense que le chef de l'opposition devrait connaître un certain nombre de mesures qui ont été annoncées ces dernières semaines et dont il n'a absolument pas parlé. J'ai annoncé ? puis je vais en donner un certain nombre ? huit ou 10 projets dans les régions du Québec au cours des dernières semaines: à McGill, un pavillon... on a mis en place un pavillon d'innovation pour Génome Québec, 52 millions de dollars d'investissement.
Alcan, deux projets... D'ailleurs, je vois que le député de Chicoutimi et le député de Dubuc étaient... les députés du Saguenay étaient à l'annonce d'ailleurs, ils étaient très heureux. J'ai annoncé, au cours du dernier mois, deux investissements majeurs de l'Alcan au Saguenay. Un investissement dans... Pour la première fois au Saguenay, on va construire des pièces pour l'automobile, en aluminium. Donc, c'est des pare-chocs qu'on va construire, c'est un investissement d'une trentaine de millions de dollars, et l'entreprise va démarrer en production dès l'an prochain.
Toujours dans l'aluminium, on a, la semaine dernière, le 17 octobre, annoncé un projet d'usine de traitement des brasques usées. Donc, c'est un investissement de 160 millions, et ça, c'est un projet extrêmement prometteur sur le plan de l'environnement, puisque on va enfin pouvoir traiter les brasques qui étaient soit entreposées soit exportées et qui étaient un produit dangereux. Elles vont être maintenant traitées, en faire des produits utiles et monnayables et vendables sur le marché. C'est un investissement de 160 millions que l'Alcan fait avec le support des programmes réguliers du gouvernement du Québec.
On a annoncé ? et aussi, là, je voyais la députée de Rimouski tout à l'heure qui était à l'annonce et qui était très heureuse ? la confirmation du projet de modernisation du réseau de TELUS dans l'Est, un investissement de 800 millions qu'on a appuyé également par des programmes réguliers et des programmes qui avaient été annoncés un peu avant la campagne électorale mais qui avaient été lancés de façon très globale. Il n'y avait rien d'attaché, alors on a renégocié des morceaux, et maintenant on est en mesure de démarrer le projet et de s'assurer qu'on va financer pour des emplois réellement créés dans les régions du Québec à travers cet investissement donc de 500 millions qui va créer donc 800 emplois au Québec.
On vient d'annoncer dans la région de Québec, et ça, avec l'appui... on parlait tantôt d'Innovatech ? soi-disant qui a des problèmes ? Innovatech, 2 millions et demi; Investissement Québec et la SGF sont partie d'un grand projet qui a été annoncé à Québec récemment, Medicago. Donc, on continue de faire du travail et on continue d'appuyer des projets qui sont prometteurs.
Pas plus tard que le 20 octobre, donc au début de la semaine, j'annonçais le projet de la phase III du Centre québécois d'innovation en biotechnologie à Laval, donc avec des collègues, un projet de 2 millions de dollars où on contribue à la fois au financement et au développement, puisque c'est très prometteur en termes de technologies. Je pourrais en annoncer... parler d'autres; 51 millions pour Génome Québec également qu'on a appuyé. Donc, il y a des investissements qu'on continue et qu'on va continuer à faire. Donc, là aussi, il faut éviter de caricaturer.
Le gouvernement dépense et va continuer de dépenser, en fait, 55 milliards de dollars, donc c'est déjà beaucoup d'argent. Le problème, c'est que le gouvernement précédent a grugé les marges de manoeuvre qu'on n'avait pas, donc il n'y avait plus d'argent. Ce qu'il faisait puis ce qu'il a fait, quand il faisait des baisses d'impôts, il les faisait payer pour les 10 prochaines années, hein? C'est ça, les... Quand il faisait des subventions, comme on a vu tantôt dans les cités, il va les financer dans les 10 prochaines années.
Donc, actuellement, on a à peu près 250 millions de dépenses de subventions qu'il faut assumer pendant les 10 prochaines années et 250 millions de baisses d'impôts qu'il faut assumer pendant les 10 prochaines années. C'est 500 millions par année qui sont déjà dépensés, qui ont été grugés, et ça, c'est une... ça veut dire une partie importante de la marge de manoeuvre qui serait disponible pour financer des services publics. Ça a été ça, la gestion, M. le Président, et c'est ça qu'il faut changer.
n(11 h 10)n Je voudrais également, enfin, faire allusion à, soi-disant, l'inquiétude des investisseurs. Alors, celle-là, elle est bien bonne. J'étais moi-même à New York avec le premier ministre, et on a rencontré beaucoup d'investisseurs qui donc... Et la réaction des investisseurs, on peut la voir, M. le Président, dans l'évolution de ce graphique qui montre l'évolution de l'écart des taux d'intérêt entre l'Ontario et le Québec depuis le 14 avril. Regardez la courbe, je pense qu'on peut la voir, vous pouvez la voir à l'écran. Je peux déposer le document, et vous y verrez que l'écart qui était d'autour... qui a été au moment du référendum d'ailleurs... pour l'information du chef de l'opposition, qui a atteint un maximum de près de 40 points au moment du référendum de 1995, qui avait baissé légèrement mais se tenait autour de 15 points d'écart entre l'Ontario et le Québec, varie actuellement entre deux et trois points d'écart. Ça veut dire que le Québec actuellement peut emprunter sur des marchés internationaux au même prix que l'Ontario. Ça veut dire quoi? Strictement pour les emprunts de cette année, une économie de 10 millions de dollars strictement pour les emprunts qui vont être encourus d'ici la fin de l'année. Ça, c'est ça, les marchés... La sanction des marchés internationaux, c'est la meilleure façon de l'exprimer.
Quant aux investisseurs privés...
Le Vice-Président (M. Gendron): M. le ministre.
M. Audet: Oui.
Document déposé
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, juste une seconde, M. le ministre. C'est pour les fins des parlementaires, je crois que, avec raison, vous avez cité un document qu'il serait intéressant qu'on puisse le constater. Si vous n'avez pas d'objection, je voulais formaliser le dépôt officiel puis, après ça, poursuivre votre débat, parce que vous avez tout le temps que vous voulez.
M. Audet: Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, M. le ministre, excusez-moi.
M. Audet: Je dépose les documents pour qu'ils soient accessibles effectivement à cette Assemblée.
Le dernier élément, évidemment, ce sont les investisseurs privés. J'étais aussi à New York avec le premier ministre, et on a rencontré beaucoup d'investisseurs privés, et je vous jure que l'image que le Québec a eue depuis le 14 avril, ce n'est pas la terreur, comme l'a dit le premier ministre, c'est une terre d'accueil effectivement, et on l'a senti. J'ai rencontré beaucoup de présidents de compagnies, on leur dit cependant qu'il y a moins de risques, ils n'ont plus l'hypothèque référendaire sur la tête. On va peut-être donner un peu moins de support financier, on va en donner moins, on n'a pas... J'ai dit tantôt qu'on changerait les choses, mais ils peuvent investir en toute confiance. Et qu'est-ce qu'un investisseur qui met beaucoup d'argent veut avoir comme perspective d'avenir? C'est la confiance. Donc, on lui dit d'avoir confiance dans l'avenir. On va modifier certaines règles du jeu, mais on va appuyer et continuer d'appuyer les investisseurs, les grands investisseurs comme les petits.
Parlant de petits investisseurs, qu'est-ce qu'on a fait depuis quelques mois? Effectivement, on nous prête beaucoup, encore une fois, de décisions qui soi-disant... Mais les seules décisions concrètes qui ont été prises sont favorables aux investisseurs. Le plus bel exemple, on a fait quoi? On a aboli la taxe sur le capital pour les entreprises qui ont moins de 600 $ de capital. Ça veut dire que les trois quarts des entreprises du Québec, à compter du 1er janvier prochain, ne paieront plus de taxe sur le capital, les trois quarts. Ça va monter graduellement pour faire disparaître graduellement la taxe sur le capital. Mais, dès le 1er janvier prochain, la taxe sur le capital n'existera plus pour les PME.
Pour ces mêmes PME, qu'est-ce qu'on a annoncé? On a annoncé une mesure qui est à la fois un allégement réglementaire et un allégement fiscal. Et là je m'adresse particulièrement à la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, parce qu'on a crié beaucoup sur la mesure qui a été prise, mais je me souviens de discussions qu'on avait eues à l'époque où Mme la députée, la ministre de l'époque, avait passé le projet de loi sur la formation de la main-d'oeuvre, la loi n° 90. Elle nous avait dit: L'objectif de la loi, ce n'est surtout pas de collecter de l'argent, il faut que les entreprises dépensent pour justement former leur main-d'oeuvre. C'était l'objectif de la loi. Il se trouve que ça s'est réalisé pour les grandes entreprises. Et, effectivement, les entreprises sont équipées pour faire des programmes de formation et rencontrer les exigences de la loi, la paperasse qui est assez lourde, beaucoup trop lourde, mais ça en prend quand on gère un programme comme celui-là.
Malheureusement ? et on s'en souviendra ? la première année, on avait dit: Il faut commencer avec les entreprises qui ont un minimum de taille. Donc, on avait décidé que c'était 1 million de dollars, la masse salariale. Ça s'est réduit par la suite à 250 000 $, et non indexé. Ça veut dire quoi, 250 000 $? Ça veut dire quelqu'un qui a à peu près quatre ou cinq employés, qui est un petit restaurant qui a fait un peu de formation au départ, mais qui n'a pas l'équipe, qui n'a pas les ressources pour déposer à Revenu Québec toute la paperasse qu'il faut pour éviter la taxe. Son comptable l'apprend à la fin de l'année, lui apprend que... Est-ce que tu as ton programme de formation? J'en ai fait, mais je n'ai pas tout ça. As-tu la liste de tes formateurs, l'endroit où ça s'est tenu? Est-ce que c'était une formation transversale? Est-ce que tu... Alors là il va dire: Écoute, là, on a un problème à gérer ça. Alors là il va dire: Ça coûte combien? Il va dire: Bien, pour une masse salariale d'un demi-million, 5 000 $. Bien, si je te remplis tout ça, ça va me coûter bien plus cher que 5 000 $. Conséquence, c'est que les gens payaient la taxe, à telle enseigne que les trois quarts des fonds versés au Fonds national de formation étaient versés par les entreprises qui avaient moins de 1 million de masse salariale parce qu'elles n'étaient pas équipées pour faire face à la loi. Et, en plus, ces entreprises-là n'étaient pas équipées non plus pour avoir accès au Fonds national de formation.
Alors, ce qu'on a fait, c'est qu'on a dit: À compter du 1er janvier prochain, les entreprises qui ont une masse salariale de moins de 1 million de dollars ne paieront plus la taxe sur la masse salariale. Elles n'auront pas cependant congé de devoirs; elles vont continuer de devoir travailler à la formation de la main-d'oeuvre, et un programme spécial d'appui va leur être fourni pour le faire. Donc, il va y avoir des mesures incitatives plutôt que des mesures punitives parce que les gens ne sont pas capables de rencontrer la paperasse qui était entraînée par l'administration de cette loi-là.
Concrètement, ça veut dire quoi, M. le Président? Ça veut dire que, sur les 34 000 entreprises environ qui sont assujetties actuellement à la loi, 24 000, 24 000 n'auront plus à payer de taxe. 24 000 des 34 000 entreprises étaient actuellement assujetties, mais c'est les 24 000 qui payaient, c'étaient les 24 000 qui étaient les plus petites. Et c'est elles qui finançaient le Fonds national de formation qui, lui, finançait des grands projets de grandes entreprises.
On a donc modifié cette disposition et, à compter du 1er janvier prochain, ces entreprises feront l'économie de 10 000 $ par année sur leur masse salariale. C'est très substantiel pour des entreprises qui habituellement, surtout quand elles démarrent, sont en manque de cash-flow. Alors, voilà deux mesures concrètes à la fois d'allégement réglementaire et d'allégement fiscal qui sont déjà en vigueur maintenant.
Est-ce que c'est ça, détruire le climat de l'investissement? Moi, je peux vous dire que j'étais en fin de semaine au congrès de la Chambre de commerce du Québec ? où je suis parti un peu rapidement, et on n'avait pas eu le temps de me saluer, donc on a voulu, au congrès, en fin de semaine, me saluer ? et où, quand j'ai présenté ces mesures-là, j'ai eu une ovation debout. Alors, contrairement à la citation que disait hier le chef de l'opposition, je peux vous dire que tous les représentants des entreprises ? et il y en avait 350 là ? ont applaudi à cette mesure-là parce qu'ils y ont vu justement à la fois une réduction de la paperasse et une réduction de la fiscalité. Ça, c'est ce qu'on a dit qu'on ferait. C'est ce qu'on a fait, puis on l'a fait rapidement, puis on va continuer d'agir dans ce sens.
Alors, voilà, M. le Président, un certain nombre de mesures, d'illustrations qui montrent que le Québec effectivement est actuellement à l'oeuvre, le gouvernement du Québec est à l'oeuvre pour revoir un certain nombre de programmes. Et je corrige immédiatement le tir. Ayant été, moi, très longtemps dans la fonction publique, à titre de... comme sous-ministre, je peux vous jurer que je travaille étroitement avec la fonction publique, avec mes sous-ministres, et il y a cet aspect de collégialité. Ce n'est pas fait contre la fonction publique. Au contraire, c'est fait avec eux parce que les gens sont contents de participer à cet exercice, cet exercice qui est prometteur pour tout le monde, puisque l'objectif, encore une fois, c'est de donner des meilleurs services à la population et bien sûr de revoir les structures quand il le faut et s'il y a lieu. C'est ce que l'on fera dans les prochaines semaines.
Alors, M. le Président, j'ai été très heureux de pouvoir corriger une certaine perception qui a eu cours dans cette salle avec les discours absolument, je dirais, catastrophiques du chef de l'opposition. Je pense qu'il faut placer les choses en perspective. Le Québec actuellement, le monde de l'entreprise au Québec, oui, ils vivent des périodes difficiles pour des raisons conjoncturelles, on le sait. On travaille actuellement avec beaucoup de régions qui ont à vivre des difficultés, puis on va le faire, et on va les appuyer.
Mais c'est justement notre objectif. C'est d'appuyer les régions qui sont en difficulté, d'appuyer les entreprises qui sont en difficulté, mais de ne plus subventionner à coups de 250 millions par année des entreprises pour créer des emplois qu'elles auraient créés de toute façon. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le ministre du Développement économique et régional. Et je cède la parole maintenant au député de Rivière-du-Loup. M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Merci, M. le Président. Je suis aujourd'hui un peu surpris d'avoir à intervenir sur cette motion. D'abord, on connaît la procédure à notre Assemblée qui est la motion de censure et une procédure quand même assez extrême, radicale.
Le gouvernement est en poste depuis à peine six mois, et que l'opposition arrive aujourd'hui avec une motion comme celle-là, c'est un peu surprenant. Ça l'est d'autant plus que c'est une motion qui y va d'un énoncé général, qui reproche au gouvernement quelque chose d'assez difficile à cerner, dénonce le gouvernement libéral pour l'ensemble de ses politiques conservatrices.
n(11 h 20)n D'abord, prenons ça morceau par morceau. Je ne pense pas qu'on puisse dénoncer des politiques par le seul fait qu'elles soient d'inspiration conservatrice. Le Parti québécois lui-même, je pense, il y a quelques années à peine, dirigé par Lucien Bouchard notamment, a appelé l'ensemble du Québec à une grande corvée autour d'une politique très conservatrice: l'élimination du déficit.
Le premier ministre de l'époque, M. Bouchard, avait identifié, pour un certain nombre de raisons: parce que, depuis des années, on empruntait pour payer l'épicerie, parce qu'on était en train de léguer aux générations futures une situation financière épouvantable... il a appelé, sommets à l'appui, grande convocation de toute la société québécoise... Et, nous, comme parti, on a appuyé son gouvernement là-dedans, et l'opposition officielle de l'époque aussi. Finalement, il y avait unanimité à l'Assemblée même autour d'un projet de loi sur le déficit zéro, politique très conservatrice dans son inspiration, personne ne va nier ça. Mais on ne pouvait pas dénoncer une politique parce qu'elle est supposément d'inspiration conservatrice.
Même chose, on avait vu, à Toronto, un gouvernement conservateur créer une grande ville de Toronto. Le gouvernement du Parti québécois semble s'être inspiré d'une politique qui avait été conservatrice ailleurs, création de grandes villes, pour fusionner, entre autres à Montréal, l'ensemble des villes pour faire une île, une ville.
Or, il y a quelque chose d'un peu léger dans l'approche de faire une motion de censure dans laquelle on qualifie avec un mot, «conservatrices», des politiques, pour dire qu'on devrait dénoncer le gouvernement là-dessus sans être capables de nommer des choses quand, dans leur propre parti, ils ont mobilisé la société, il y a quelques années à peine, autour de politiques conservatrices et que beaucoup de gens ont appuyées et que même des gens qui étaient supposément à gauche ont appuyées en disant: Bien, à un moment donné, il faut arrêter de faire des déficits, il faut arrêter de pelleter chez les générations futures les déficits. Et, aujourd'hui, le Parti québécois nous arrive avec ça.
Deuxièmement... Bon, première chose, on ne peut pas dénoncer des politiques en soi parce qu'elles sont conservatrices. Deuxième chose, bien, il faudrait vérifier si, jusqu'à maintenant, le gouvernement libéral élu a eu la moindre politique conservatrice, parce que, pour la dénoncer, il faut qu'il y en ait, des politiques conservatrices. Là, les principales actions du gouvernement libéral jusqu'à ce jour: augmentation des tarifs d'hydroélectricité pour augmenter les revenus de l'État; augmentation des primes d'assurance médicaments pour augmenter les revenus de l'État; augmentation des frais de garderie pour augmenter les revenus de l'État. Ah! là, on est dans l'économie nouvelle.
Si toute une série de mesures pour rentrer plus d'argent au niveau du gouvernement, pour pomper l'argent de la poche des contribuables et de la classe moyenne pour rentrer ça au niveau du gouvernement, si ça, c'est des politiques conservatrices, bien, il manque un bout. Et je pense là-dessus que les gens du Parti québécois, bon... C'est André Pratte, cette semaine, qui disait qu'il y a des gens qui frappaient à grands coups dans le vide avec une énergie telle que bien des gens ont fini par croire qu'un monstre les menace vraiment. Bien, je pense qu'il y a beaucoup de ça dans la motion qui nous est présentée aujourd'hui.
Parlant de politiques supposément conservatrices, bien, la réalité, là, c'est que les décisions qui ont été prises par le gouvernement jusqu'à maintenant, bien, elles vont pas mal dans le sens de ce que l'ancien gouvernement, de ce que le Parti québécois avait fait. Ils promettent des baisses d'impôts pour plus tard, puis, entre-temps, aller chercher, petit morceau par petit morceau, l'argent dans les poches de la classe moyenne. Là, j'essayais de construire, avec des chiffres un peu approximatifs... par exemple, une mère monoparentale, classe moyenne, revenu de 35, 40 000 par année, qu'est-ce que ça veut dire, là, pour elle, aujourd'hui, l'élection d'un gouvernement libéral? Bon, assurance médicaments, une soixantaine de piastres; l'hydroélectricité, 90, 100 $, avec l'augmentation qui est annoncée; frais de garderie, ça peut facilement représenter un 1 500 $ dans l'année. Bon. On arrive... La personne, là, en augmentation des revenus de l'État, la personne vient de sortir de sa poche peut-être quelque part entre 1 500 et 2 000 $. Elle s'est fait déjà annoncer ça.
Bien là je suis obligé de poser la question: quelles politiques conservatrices? On est dans des politiques... du déjà-vu au Québec ? augmentation des revenus de l'État, hein? On fait des discours, on parle des baisses d'impôts, un jour. Ah! supposément, on voit la réingénierie de l'État; tous les termes généraux sont là. Mais, concrètement, allez demander aux gens, là... et ils entendent des discours politiques, mais les gens, là, qu'est-ce qu'ils savent qui est sûr, qu'est-ce qui est certain dans leur vie? C'est qu'il y a de l'argent de plus qui va sortir de leurs poches.
Et ça, j'aurais peut-être été intéressé à voter pour une motion de censure où on avait dit: L'Assemblée nationale dénonce le gouvernement libéral pour l'ensemble de ses politiques contre la classe moyenne. On aurait pu dire... C'était peut-être un petit peu vite dans le mandat pour une motion de censure, mais, au moins, ça porte sur des choses réelles, concrètes, où des citoyens du Québec ont été frappés par le gouvernement libéral. Les citoyens de la classe moyenne, eux, six mois après l'élection, il n'y a plus de question, il n'y a plus... ils savent ce qui les attend: les augmentations sont annoncées, les augmentations sont claires, les chiffres sont sur la table dans la plupart des cas.
Il y a toute une autre série de rumeurs qui les menacent. Bon. On parle d'augmenter la taxe sur le carburant pour financer le transport en commun; augmenter les passes de transport en commun; peut-être augmenter l'immatriculation pour le transport en commun; peut-être augmenter les primes d'assurance auto à cause du «no fault». Alors là, il y a toute une série de possibilités supplémentaires d'aller chercher d'autre argent, hein, par toutes sortes de moyens, de faire sortir d'autre argent des poches de la classe moyenne.
Alors, ce que cette motion traduit, je pense, c'est beaucoup plus le déséquilibre dans lequel l'opposition officielle se retrouve aujourd'hui face à une nécessité qui est là, hein, d'agir différemment au niveau de l'État, de moderniser le gouvernement du Québec, de moderniser l'État québécois.
Et je pense que, s'il y a un rôle que les partis d'opposition et que, nous, à l'ADQ, on va jouer, que les partis d'opposition doivent jouer, c'est de s'assurer que ce gouvernement-là va donner des orientations, des orientations qui sont cohérentes, des orientations qui sont logiques, alors que le gouvernement a l'air complètement perdu, alors que le gouvernement nage en pleine confusion, incapable de donner des exemples. Quand la présidente du Conseil du trésor se risque à donner un exemple, l'exemple tourne au ridicule, et c'est ça qui est grave, à l'heure actuelle.
C'est sûrement ce qui a amené d'ailleurs André Pratte, dont je partage l'essentiel des opinions... dans un éditorial d'hier, il a dit: «Que nous vaut cette levée de boucliers de la part du Parti québécois? Rien. Le gouvernement Charest n'a encore déposé aucun projet concret. Tout au plus a-t-il fait part d'assez vagues intentions. La réingénierie?» Personne ne sait exactement est-ce qu'on aura des changements majeurs, est-ce qu'on aura des changements cosmétiques? Personne ne peut juger encore de l'action du gouvernement libéral.
Alors, je reviens à dire que... hein, il y a des choses. On aurait pu dénoncer dans cette motion l'ensemble des politiques du gouvernement libéral contre la classe moyenne. Nous, de l'ADQ, on aurait certainement été intéressés à débattre d'une motion comme celle-là qu'on aurait pu alimenter avec des faits, avec des chiffres, avec des réalités vécues par les gens de la classe moyenne, et appuyer une motion comme celle-là.
On aurait probablement dénoncé le gouvernement libéral pour le fait que, malgré son slogan, il n'était pas prêt, que, six mois après l'élection... Et je donnais l'exemple hier: il y a 18 ans, quand les libéraux avaient été élus en 1985, six mois après, on avait des rapports ça d'épais. On avait des travaux sur la déréglementation, on avait... Ils n'ont rien fait, remarquez, dans la plupart des cas. Mais, six mois après, il y avait au moins des mesures, des données ? rapport Scowen, rapport Gobeil, rapport Fortier. On sentait qu'il y avait une volonté de faire des choses.
Là, six mois après l'élection, on en est rendus à l'étape que, pour occuper l'espace politique, le premier ministre qui fait une lettre ouverte ? procédure exceptionnelle, hein, un premier ministre ? mais fait une lettre ouverte, il n'y a pas tellement d'élévation, finalement. Il fallait que ce soit écrit en lettres, en caractères gras «premier ministre du Québec» pour qu'on ne pense pas que c'est un simple courrier des lecteurs, là.
Et le premier ministre s'exprime en général pour dire: Bien là on pense bien qu'on va changer quelque chose dans l'État, puis là, si on brasse des gens, on aimerait ça qu'ils ne soient pas trop choqués. Mais on ne sait pas exactement ce qu'on va faire, mais on a été élus pour du changement puis on pense bien qu'on va faire quelque chose. Et ça ne sonnait pas comme une lettre ouverte d'un premier ministre qui sait où il s'en va, qui a des orientations claires.
Or, si une motion aujourd'hui était venue dénoncer cette incapacité d'un gouvernement qui... d'un parti qui n'était pas prêt, qui arrive au gouvernement et qui improvise, puis qui, en improvisant inquiète tout un paquet de monde, gèle un paquet de processus...
n(11 h 30)n Bien, il faut comprendre que, quand les municipalités ne savent pas qu'est-ce qui les attend, quand les entreprises ne savent pas ce qui les attend, quand un paquet d'organisations ignorent qu'est-ce qu'il va y avoir comme réformes, qu'est-ce que les gens font? Bien, on va attendre pour voir parce que, là, si on bouge dans une direction puis que le gouvernement va dans une autre... Bien là on va attendre pour voir. Et là, depuis six mois, bien, les gens attendent pour voir, et ça paralyse beaucoup de choses dans la société québécoise.
Alors, dénoncer des choses concrètes comme celles-là, qui sont dans le vécu du Québec, on aurait été prêts à ça. Dénoncer des politiques soi-disant conservatrices, alors que le Parti québécois lui-même nous a invités, il y a quelques années, à l'appuyer dans des politiques conservatrices comme le déficit zéro et alors qu'à l'heure actuelle la plupart des mesures du Parti libéral ont été dans le sens d'augmenter les revenus de l'État, donc il n'y a rien de conservateur là-dedans. C'est une motion, malheureusement, qui est vide de sens et qu'on va devoir s'opposer. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je remercie M. le député de Rivière-du-Loup. Et je reconnais maintenant la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé et services sociaux. Mme la députée.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Je crois bien, M. le Président, que les Québécoises et les Québécois se demandent avec consternation si la définition du changement du présent gouvernement, ce n'est pas plutôt le changement pour le pire que le changement pour le meilleur. Et je crois qu'ils sont stupéfaits de ce qu'ils constatent au fil des jours durant les derniers six mois.
Tantôt, j'écoutais le ministre du Développement économique, en fait, exprimer avec un manque de vision incroyable, exprimer notamment cette confusion entre l'investissement en formation professionnelle, qu'il a appelé finalement une taxe, n'est-ce pas... Alors que, au Québec, on compte au-delà de 220 000 entreprises, qu'il n'y en avait que 35 000 assujetties à la loi de formation dans l'entreprise, donc 15 % à peine, il n'en restera maintenant que 5 % si le gouvernement va de l'avant malgré le désaccord de tous les partenaires en matière ? tous les partenaires, je dis, patronaux comme syndicaux ? en matière de relations de travail. Alors, on voit bien l'absence, vraiment, de vision de l'avenir. Parce que la formation, c'est l'avenir d'une société.
Alors, M. le Président, le ministre de la Santé et des Services sociaux avait plutôt bien commencé son mandat. En mai dernier, moi-même, je me suis fiée aux premières apparences, en fait, notamment au premier discours du ministre dans les semaines qui ont suivi sa nomination, et j'étais plutôt bien disposée, comme vous le savez, disposée aussi au nom de l'opposition officielle à pouvoir établir une opposition constructive. Mais, en cours de route, cet été, les choses se sont gâtées. Il faut comprendre qu'il a, d'une part, attrapé une structurite aiguë, n'est-ce pas? Il a annoncé dernièrement trois projets de loi, et trois projets de loi qui ne portent que sur des brassages de structures. Alors que les Québécoises et les Québécois attendaient en ces matières des changements dans les soins, dans les services donnés, ils vont se retrouver ? c'est ce que le ministre a confirmé ? ils vont se retrouver avec des brassages de structures importants. Et j'y reviens.
Et puis aussi, cet été, quelle déception j'ai ressentie, mais je ne suis pas la seule, je suis convaincue, bien d'autres collègues, sans doute, dans cette Assemblée, y compris du parti ministériel, mais aussi vraiment beaucoup, beaucoup de gens dans la population ont dû ressentir la même déception lorsqu'ils ont compris que le langage du ministre de la Santé et des Services sociaux était codé et que, pour le comprendre, il fallait le traduire, c'est-à-dire exactement comprendre qu'il allait faire le contraire de ce qu'il avait dit qu'il ferait.
Alors, j'en ai comme démonstration le discours d'ouverture lors du congrès de l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec que l'actuel ministre de la Santé et des Services sociaux a prononcé le 22 mai dernier. J'étais à ce congrès de l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec et, avec le millier de personnes présentes, je me suis réjouie que le ministre de la Santé et des Services sociaux poursuive dans le sens déjà commencé d'un plus grand investissement, d'une plus grande importance donnée aux services de première ligne qu'on appelle les services de proximité, qui sont le maintien à domicile, qui sont les services d'hébergement de longue durée, qui sont les services de médecine familiale.
Alors, le ministre, maintenant, je me rends compte, c'est une illustration, mais c'est, d'une certaine façon, Dr. Jekyll et Mr. Hyde. Alors, Dr. Jekyll, au congrès des CLSC et des CHSLD, en mai dernier, parlait notamment de liaison plus fonctionnelle entre les services dispensés par les hôpitaux, les CLSC, les cabinets de médecins, il parlait d'établir entre eux une liaison fonctionnelle, d'instaurer des corridors de services. Il parlait également d'un réseau d'établissements ? qu'il nommait: centres hospitaliers, CLSC, CHSLD ? qui allait servir de nouvelle base à la planification et à l'organisation des services. Il parlait de liens fonctionnels, de coordination ? page 12 de son discours ? de nouveaux mécanismes de concertation, et ainsi de suite, alors que, M. le Président, alors que le ministre aura divulgué, vendredi dernier à Montréal et lundi à Québec, aura divulgué de tous autres intentions... de toutes autres intentions, plutôt, et notamment sa volonté d'abolir tout le réseau des CLSC et d'intégrer les services dispensés par les CLSC dans des mégahôpitaux généraux.
Alors, s'il y avait un changement majeur qui devait convaincre les députés de l'ADQ de voter en faveur de cette motion de censure, c'est certainement cette annonce que le ministre de la Santé et des Services sociaux a faite et qu'il a finalement tirée du modèle conservateur de Ralph Klein. C'en est une illustration, M. le Président, des orientations conservatrices que le gouvernement libéral entend donner au secteur de la santé, qui, jusqu'à maintenant, fort heureusement, y avait échappé. Et c'est d'autant plus déconcertant que les CLSC sont considérés partout au Canada comme un modèle qui devrait être utilisé dans les provinces canadiennes. Et j'en veux à preuve les déclarations de Roy Romanow, président et commissaire, en fait, de la Commission royale d'enquête sur l'avenir des soins de santé au Canada, et je le cite, qui trouvait «very, very exciting», donc très, très séduisants les CLSC du Québec et qui disait: Ce modèle pourrait être utilisé dans le reste du Canada.
Imaginez, qu'au moment où le gouvernement du Québec s'apprête à massacrer ce réseau des CLSC, à jeter par terre, là, les 30 dernières années d'interventions en matière de santé communautaire, au même moment, les candidats aux dernières élections ontariennes, eux, parlaient justement de la mise en place d'un réseau de CLSC pour l'Ontario. Alors, je cite Le Devoir du 15 septembre dernier, qui mentionnait que le chef libéral ontarien ? devenu premier ministre de l'Ontario et qui sera, je le comprends, au Québec demain ? donc, que le chef libéral ontarien entendait mettre sur pied un réseau de CLSC si son parti était porté au pouvoir.
Alors, au moment même où tout le monde veut nous imiter, où le fleuron, n'est-ce pas, de ce réseau sociosanitaire inspire partout à l'étranger ? y compris la reine de Jordanie, qui était venue pour le visiter l'an dernier ? au même moment, le ministre de la Santé et des Services sociaux et son gouvernement va... M. le Président, entend l'abolir et confier les services de première ligne, les services de proximité, confier ces services à des hôpitaux généraux qui vont déterminer les services de première ligne dans des mégahôpitaux.
Pourquoi c'est si inquiétant? Non pas que des regroupements semblables ne puissent pas se réaliser à l'occasion. Je veux simplement rappeler qu'avec la loi actuelle ? il n'a pas besoin de nouvelle loi ? il y a eu de tels regroupements, regroupements entre établissements hospitaliers, CLSC et également centres de soins de longue durée, mais ces regroupements ont eu lieu dans des communautés de petite taille, habituellement, où le bassin desserte de population est très homogène et où les missions sont respectées.
n(11 h 40)n Et, encore dernièrement, nos collègues le député de Bertrand et le député de Labelle écrivaient au ministre, en juin dernier, pour favoriser un tel regroupement de centres hospitaliers, centres locaux de santé communautaire et centres de soins de longue durée dans la région de Sainte-Agathe, donc, en plaidant cependant que «le rôle du CLSC ? et je cite ? comme porte d'entrée du système de santé doit être maintenu dans ses aspects: service de suivi à domicile, assistance aux personnes âgées, programmes de prévention ? on ne parle plus de prévention, le mot "prévention" est disparu du budget du ministère de la Santé et des Services sociaux ? programmes de vaccination, programmes de soutien aux personnes handicapées, programmes de suivi en santé mentale». Et mes collègues ajoutaient: «La population doit savoir que, bien qu'il y ait un conseil d'administration unique, les trois missions sont clairement identifiées et valorisées, et ce, pour le plus grand bien des citoyennes et des citoyens.» Donc, M. le Président, ce n'est pas un refus doctrinal, n'est-ce pas? Mais ce qui est inquiétant dans l'approche gouvernementale, c'est la disparition de la vision sociale de la santé, la disparition de la vision sociale pour finalement adopter une vision strictement médicale. Et pourquoi c'est si inquiétant? Parce que finalement ça rend le système québécois... En fait, c'est un effort pour rendre le système québécois conforme au système et au modèle canadien. Pourquoi? La Loi canadienne de la santé ne couvre pas les services sociaux. Dans la Loi canadienne de la santé, les services sociaux ne sont pas couverts, alors qu'au Québec, depuis 30 ans, on a fait de nos CLSC la porte d'entrée du réseau de la santé et des services sociaux. Et c'est une vision qui est d'ailleurs tout à fait respectueuse de la définition qu'en donne l'Organisation mondiale de la santé.
Il faut savoir que, depuis plus d'une décennie maintenant, l'Organisation mondiale de la santé définit la santé comme «un état complet de bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie». C'est d'ailleurs ce qu'on retrouve à l'article 1 de la Loi sur la santé et les services sociaux adoptée au Québec, alors, qui se lit comme suit: «Le régime de services de santé et de services sociaux institué par la présente loi a pour but le maintien et l'amélioration de la capacité physique, psychique et sociale des personnes d'agir dans leur milieu et d'accomplir les rôles qu'elles entendent assumer d'une manière acceptable pour elles-mêmes et pour les groupes dont elles font partie», c'est-à-dire une vision englobante où finalement la personne n'a pas besoin d'entrer à l'hôpital. Parce que c'est ça, l'immense danger.
Avec une vision médicale, hospitalocentrique, comme on dit dans ce milieu, ça signifie que c'est d'abord l'hôpital qui va déterminer les priorités de services de proximité à donner dans les milieux, alors que justement tous s'entendaient sur la nécessité de déplacer le centre de gravité le plus loin possible de l'hôpital pour assurer des services ? maintien à domicile, médecine familiale, hébergement de longue durée ? qui auraient permis à nos concitoyens de ne pas se retrouver à l'hôpital. Là, il va falloir qu'ils se retrouvent à l'hôpital s'ils veulent avoir des soins, alors que la pensée qui était à l'origine de l'unanimité en faveur de ce qu'on appelle la première ligne était justement d'éloigner le plus possible les soins, d'insister sur ceux qui devaient être donnés à l'extérieur de l'hôpital. C'est une approche doctrinale mur à mur, extrêmement inquiétante. Et le ministre doit s'attendre à une levée de boucliers vraiment importante contre ce projet d'abolition des CLSC, ce projet, finalement, de regroupements forcés, il faut bien le dire, dont ils ne nous ont jamais parlé en campagne électorale.
D'autre part, M. le Président, je voudrais également rappeler que, dans cette attaque de structurite aiguë, là, dont le ministre semble, cet été, avoir été atteint, il y a aussi ce projet de regroupement des unités d'accréditation syndicale et de décentralisation des négociations. Pourquoi, M. le Président? Parce que le contexte dans lequel cela se fait est extrêmement inquiétant. Ce n'est pas des appréhensions qui sont imaginaires, là. Les 220 000 travailleurs et travailleuses de la santé au Québec sont très inquiets parce que, si l'approche gouvernementale, telle qu'elle a été rendue publique par le premier ministre dans la lettre qu'il a publiée récemment, c'est une approche de sous-traitance dans les hôpitaux, ça signifie que le projet de loi modifiant le Code du travail, déjà annoncé, l'article 45, et ça signifie aussi que le projet de loi, déjà divulgué aux directions d'établissement par le ministre de la Santé et des Services sociaux, sur le regroupement des unités syndicales d'accréditation et de décentralisation des négociations est fait dans la perspective de la sous-traitance.
Ça, M. le Président, il faut voir qu'il y a une différence fondamentale entre, par exemple, l'approche du gouvernement précédent, qui était favorable à un regroupement des unités d'accréditation syndicale mais qui l'annonçait dans un contexte de stabilité du réseau de la santé, c'est-à-dire dans un contexte où on ne recommençait pas en entier à reconfigurer tout en transformant. Alors, d'une part, c'est une approche fondamentale extrêmement différente, ça ne concernait que les établissements tels qu'on les connaît maintenant. Alors qu'avec le projet déjà divulgué du ministre de la Santé et des Services sociaux de bouleverser, n'est-ce pas, les établissements, CLSC et CHSLD et centres hospitaliers généraux, on comprend que ce serait deux fois, là, une première fois pour regrouper les unités par établissements et ensuite une seconde fois pour les regrouper dans les regroupements. Avez-vous idée des bouleversements que ça peut occasionner, tout cela?
Et, en plus, l'objectif n'était pas de faciliter la sous-traitance. C'est tellement vrai qu'en juin dernier c'est avec intérêt, moi, que j'ai constaté que même la Fédération de santé et services sociaux de la CSN, qui n'a pas toujours eu bonne réputation, avait accepté, par résolution, dans son congrès, d'explorer les modalités de regroupement des unités d'accréditation syndicale, qui, le fait est, sont trop nombreuses. Mais avez-vous idée, avec les annonces de sous-traitance qui ont été faites et répétées à satiété par le gouvernement, avez-vous idée du blocage que tout ça a provoqué? Et non sans raison, parce que, en plus, la décentralisation des négociations, notamment sur tous ces sujets qui constituent... ces 32 sujets, là, qui constituent une annexe importante des conventions, les met à découvert. Alors, ce n'est pas sans appréhension fondée qu'on comprend qu'il entrevoit cette idée de regroupement d'unités d'accréditation syndicale pour faire en sorte que la sous-traitance soit plus facile à faire.
Alors, vous voyez bien, ça, ça me fait penser, M. le Président, à quelqu'un qui dirait: Je veux bien me marier, mais pas avec quelqu'un qui veut ensuite se divorcer pour pouvoir profiter du patrimoine familial. Alors, je pense que les employés disaient: Je veux bien me regrouper, mais pas si c'est pour faciliter, finalement, la sous-traitance pour me remplacer. Alors, je crois, M. le Président, que tout ça est plus qu'inquiétant, et ça l'est parce qu'on met à terre, en fait, le modèle québécois en matière de santé, qui pourtant faisait la fierté de tous encore récemment, y compris en mai dernier, dans le discours du ministre de la Santé et des Services sociaux.
n(11 h 50)n Et puis, le troisième projet de loi que le ministre a déjà annoncé est celui de la création d'un poste de commissaire à la santé. Alors, évidemment, ce poste de commissaire à la santé, on ne peut pas être contre la vertu, mais, comme il veut en faire l'équivalent d'un vérificateur général en santé, il faudra bien voir comment il entend, n'est-ce pas, s'ajuster avec le mandat du Vérificateur général actuel, notamment lorsque le Vérificateur s'est doté d'analyses pour répondre, en fait, aux enquêtes, le Vérificateur qui existe présentement qui... Je pense, entre autres, à cette vérification qu'il a faite en matière d'hébergement de personnes en perte d'autonomie, laquelle vérification avait permis d'évaluer le processus d'allocation des ressources, l'organisation des services, leur accessibilité, leur continuité. Alors, qu'est-ce que le commissaire à la santé va faire de plus ou de moins que ce que l'actuel Vérificateur général a pu faire à l'égard de son mandat?
Et, M. le Président, pour toutes ces raisons et parce que ce modèle qu'on veut nous imposer, c'est un modèle qui est à saveur albertaine ? hein, c'est qu'on sait ? comme le signalaient d'ailleurs les quotidiens en juillet dernier, Une réforme à la sauce albertaine, on ne peut pas trouver, je pense, vision plus conservatrice que celle-là, et je crois que, pour toutes ces raisons, il faut voter en faveur de cette motion de censure. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je remercie Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Et, pour la poursuite du débat sur une motion de censure, je reconnais le député de Laval-des-Rapides pour le temps qu'il nous reste.
M. Alain Paquet
M. Paquet: M. le Président, est-ce qu'il y aurait consentement pour que je puisse continuer après le... un peu passé midi ou vous préférez que je reprenne cet après-midi?
Le Vice-Président (M. Gendron): Bien, écoutez, moi, le problème que j'ai, une motion de censure, c'est un débat prioritaire, elle doit durer toute la journée. Il me reste huit minutes à l'horloge officielle de l'Assemblée nationale. Mais, s'il y a consentement pour débuter votre intervention... Moi, je ne fais que ce qu'on m'indique. Et, s'il y a consentement pour suspendre tout de suite et ajourner jusqu'à 2 heures, moi, je n'ai pas d'objection. Mais il n'y a personne qui m'indique ça pour le moment, donc je dois vous donner la parole pour le temps qu'il vous reste. Et c'est sûr que vous allez poursuivre votre intervention après la période de questions, puisque c'est une affaire prioritaire. M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Alors, merci, M. le Président. Alors donc, nous avons l'occasion aujourd'hui de débattre de la motion de l'opposition officielle qui veut dénoncer les politiques du gouvernement libéral et donc, par le fait même, dénonce la décision qu'a prise sagement la population le 14 avril dernier.
L'objectif du gouvernement et l'objectif qu'on a expliqué à la population et que la population... sur lequel elle a consenti, c'est de s'assurer que toutes les actions que nous avons initiées et que nous allons mettre en opération visent l'amélioration de la qualité et du niveau des services publics et aussi l'augmentation du niveau de vie de l'ensemble des Québécois.
Évidemment, c'est une façon très différente de faire de l'ancien gouvernement. Parce que l'ancien gouvernement ? et le chef de l'opposition officielle tout à l'heure se plaisait à le répéter ? c'était, dans le fond, de mettre des structures, de couper des rubans, de faire des interventions qui sont remarquées, du tape-à-l'oeil. Mais, dans la réalité, qu'est-ce qu'il en était? Ce qu'il en était en particulier, c'est que, par exemple, on a créé peut-être 5 370 emplois avec des mesures comme la Cité du multimédia et autres qui ont coûté beaucoup plus cher que ce qu'ils rapportaient par ailleurs et plus cher que les salaires des personnes en question mais qui ont surtout aussi déménagé 12 181 emplois, donc 250 millions pour déménager 12 181 emplois, et c'est sans compter tous les autres impacts de crédits et autres qui ont été accordés et qui ont coûté très cher aux contribuables et à l'ensemble des Québécois.
Mais ça, c'était la vision, certainement, de l'ancien gouvernement, qui aussi expliquait pourquoi que la part des investissements privés au Québec... la part des investissements privés du Québec... au Canada était inférieure, largement inférieure à notre part de la population et la taille... notre part... proportion de l'économie canadienne. Alors, il est très, très clair aujourd'hui pour le gouvernement et pour la population que la réussite de l'État québécois, la réussite de l'État québécois d'aujourd'hui et de demain, ne doit pas se mesurer à sa taille et à son poids mais à la réussite de ses citoyens et de ses entreprises pour créer de la richesse dans une économie qui est basée sur le savoir.
Les temps ont changé. Les activités et les programmes du gouvernement du Québec n'ont jamais subi d'examen critique d'une rigueur comparable à celle adoptée par nos concurrents ou même par le gouvernement fédéral. L'État québécois a pris l'habitude de mesurer plutôt sa réussite dans le passé sur le fait qu'un programme ou un service public dépensait toutes les sommes qui lui étaient dédiées et qui ont été effectivement dépensées. Je ne dis pas que, dans certains cas, ce n'est pas utile, mais, au même moment, il y avait des programmes qui manquaient de ressources, des programmes qui pouvaient être très utiles, mais on concentrait les sommes dans des programmes qui étaient très visibles pour couper des rubans mais qui ne donnaient pas de résultat concret pour la population.
Et jamais je ne veux que notre gouvernement, notre gouvernement, le gouvernement du Parti libéral soit jugé sur le nombre de rubans qu'il coupe mais sur la réalité concrète des réalisations d'augmentation du niveau de vie et de la qualité des services. C'est ça, le gage à partir duquel nous allons mesurer le résultat de notre gouvernement.
Il faut donc redessiner et moderniser le rôle de l'État québécois afin d'offrir aux Québécois un secteur public mieux ciblé et plus efficace. Ce n'est pas que les gens qui travaillent à l'emploi du gouvernement ne font rien d'efficace. Au contraire, il y a un tas de gens qui se démènent, qui font un très bon travail. L'ensemble de nos employés font cela. La question, c'est qu'ils réalisent la frustration d'un tas d'initiatives qu'ils avaient pour améliorer les services et qui étaient bloquées par les structures et par la machine.
Lorsqu'on regarde que le coût de l'État québécois, les gouvernements provincial et municipaux et locaux ensemble coûtent 37 % de plus au Québec qu'en Ontario, 28 % de plus au Québec que dans le reste du Canada, ça, c'est les contribuables qui le paient, et c'est le niveau de vie des gens à faibles revenus, même de ceux qui ne paient pas d'impôts, c'est eux qui étaient pénalisés, qui sont pénalisés par une telle situation qui ne donne pas des résultats pour les citoyens.
Est-ce qu'on va me dire, donc, qu'il faut continuer comme ça à dépenser davantage, à taxer davantage et à être plus endettés? Bien, c'est exactement ce que dit le chef de l'opposition officielle, c'est exactement ce qu'il a défendu. Et, respectueusement... je respecte sa vision là-dessus, mais ce n'est pas la vision certainement que notre gouvernement partage et ce n'est clairement pas la vision de l'ensemble de la population du Québec et des citoyens de Laval-des-Rapides. Alors donc, lorsqu'on parle d'un État qui serait au service du citoyen, toute action sociale, politique ou administrative doit se justifier et être entreprise en fonction de son impact véritable sur le bien-être des citoyens. Et ce n'est pas une question dogmatique, ce n'est pas une question d'idéologie.
C'est facile pour le chef de l'opposition officielle de commencer à traiter de noms, de parler de droite puis de gauche. Vision très simpliste de la réalité, hein? On est sur une ligne droite, on est à droite ou à gauche. Les gens qui conduisent sur la route savent très bien qu'il faut regarder en haut, qu'il faut regarder... tenir compte aussi du temps qu'on occupe lorsqu'on se déplace d'un point à l'autre. Mais la réalité est beaucoup plus complexe que la droite ou la gauche. La réalité, c'est le service aux citoyens, c'est la qualité de nos services et leur niveau de vie et leur bien-être.
Alors, l'idée n'est pas de tout jeter par les fenêtres, mais il faut tout revoir rigoureusement. Il faut mesurer et s'assurer qu'on ait un processus continu d'évaluation. C'est anormal que le Québec ait pris autant de retard à remettre en cause et à revoir objectivement, rigoureusement les façons de faire.
L'ancienne façon de faire du gouvernement précédent, c'est ce que j'appelle le millefeuille de programmes. Si un programme ne fonctionnait pas, qu'est-ce qu'on faisait? On ajoutait une autre couche de feuilles, une autre couche de programmes. Quelque chose ne marchait pas encore? Au lieu de le remettre en cause, de dire: Ça ne fonctionne pas, il faudrait peut-être changer les façons, changer ce programme-là, peut-être l'éliminer, dans d'autres cas, le bonifier, non, on rajoutait une nouvelle feuille. On est rendu avec le millefeuille de programmes, mais je dois avouer que le millefeuille est pas mal sec, il n'y a pas grand costarde ou de crème fouettée dedans. Et c'est les citoyens du Québec qui vivent cette réalité-là.
Alors donc, notre façon de faire, notre façon de revoir l'ensemble de l'intervention de l'État, ce n'est pas de tout de jeter par les fenêtres, c'est de recentrer sur les missions essentielles de ce que les citoyens veulent avoir. Et donc, on parle donc d'une vision, d'une analyse qui est basée sur des valeurs, des valeurs libérales, oui, effectivement, valeurs libérales qui sont partagées par des gens pas nécessairement de notre formation politique, qui sont axées évidemment sur la justice sociale, une véritable justice sociale qui aide les gens les plus démunis, et aussi des valeurs qui sont basées sur le respect des libertés individuelles, la démocratie et l'identification au Québec. Alors donc, dans ce contexte-là, finalement, ces valeurs-là animent clairement notre formation et notre gouvernement, et c'est ce que la population du Québec attend de nous.
J'ai eu l'opportunité et l'occasion de travailler avec Claude Ryan. Je suis un des auteurs du rapport Ryan sur l'État québécois et la pauvreté qui avait été déposé en 1998 par M. Ryan, au Parti libéral du Québec, qui avait été salué par l'ensemble des intervenants du dossier. Et je me sens très à l'aise avec ce qui est là-dedans et très à l'aise avec les valeurs qu'on a mises de l'avant. Mais ces valeurs-là, donc, le social et l'économique, vont ensemble. Trop souvent, et c'est ce que le chef de l'opposition officielle et les gens de l'opposition essaient de faire, c'est essayer d'opposer le social et l'économique. On est soit pour l'économique et donc contre le social, ou pour le social et contre l'économique. Ce n'est pas ça. C'est une façon de droite et de gauche, très simpliste de voir la réalité. L'économie et le social vont ensemble. Et, cet après-midi, j'aurai l'occasion de développer davantage sur ces points-là et d'illustrer concrètement comment notre évaluation des façons de faire va rendre des services et des résultats concrets pour les citoyens. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, M. le député de Laval-des-Rapides. Et effectivement vous allez poursuivre cet après-midi. Compte tenu de l'heure, les travaux sont ajournés à cet après-midi, 2 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 59)
(Reprise à 14 h 4)
Le Président: Bonjour, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Je vous réfère à l'article a du feuilleton, M. le Président.
Projet de loi n° 10
Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre du Revenu présente le projet de loi n° 10, Loi donnant suite au discours sur le budget du 1er novembre 2001, à l'énoncé complémentaire du 19 mars 2002 et à certains autres énoncés budgétaires. M. le ministre du Revenu.
M. Lawrence S. Bergman
M. Bergman: M. le Président, je ferai un résumé des notes explicatives du projet de loi n° 10. Ce projet de loi vise à modifier la législation fiscale afin de donner suite à des mesures annoncées par le gouvernement précédent lors du discours sur le budget du 1er novembre 2001, de l'énoncé complémentaire à la partie budgétaire du 19 mars 2002 et de plusieurs bulletins d'information publiés par le ministère des Finances en 2001 et en 2002. Aussi, il intègre des annonces faites dans le cadre du discours du budget du 12 juin 2003.
Les modification relatives à la Loi sur les impôts concernent le régime d'imposition des particuliers, la remise des retenues à la source et des cotisations d'employeurs, la taxe sur le capital, les crédits d'impôt des entreprises et diverses autres mesures.
Ce projet de loi modifie la Loi concernant l'impôt sur le tabac afin de refléter l'augmentation des montants d'impôt applicables à l'égard des produits du tabac. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté? Adopté.
Dépôt de documents
Dépôt de documents. M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille. M. le ministre.
Rapport d'activité du Fonds national de formation
de la main-d'oeuvre et document intitulé Adapter
le Régime de rentes aux nouvellesréalités du Québec
M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport d'activité 2002-2003 du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre et un document de consultation de la Régie des rentes du Québec intitulé Adapter le Régime de rentes aux nouvelles réalités du Québec.
Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs. M. le ministre.
Rapports annuels du ministère des Ressources
naturelles et de la Régie de l'énergie, rapport
d'activité de l'Agence de l'efficacité énergétique
et plan stratégique 2004-2008 d'Hydro-Québec
M. Hamad: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de gestion 2002-2003 du ministère des Ressources naturelles, aussi le rapport annuel 2002-2003 de la Régie de l'énergie, ainsi que le rapport d'activité 2002-2003 de l'Agence de l'efficacité énergétique du Québec et le plan stratégique 2004-2008 d'Hydro-Québec.
Le Président: Ces documents sont déposés. Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Mme la ministre.
Rapports annuels de la Régie des marchés agricoles
et alimentaires et du ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation
Mme Gauthier: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de gestion 2002-2003 de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec ainsi que le rapport annuel de gestion 2002-2003 du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre du Revenu. M. le ministre.
Sommaire statistique du ministère du Revenu
intitulé Renonciation et annulation
des intérêts, des pénalités et des frais
M. Bergman: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le sommaire statistique 2002-2003 du ministère du Revenu intitulé Renonciation et annulation des intérêts, des pénalités et desfrais.
Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le ministre.
Rapports annuels du ministère de la Santé et
des Services sociaux, du Protecteur des usagers
en matière de santé et de services sociaux et
des régies régionales de la santé et
des services sociaux de l'Estrie et de Québec
M. Couillard: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de gestion 2002-2003 du ministère de la Santé et des Services sociaux, le rapport annuel de gestion 2002-2003 du Protecteur des usagers en matière de santé et de services sociaux et, enfin, les rapports annuels 2002-2003 des régies régionales suivantes: l'Estrie et la région de Québec.
Le Président: Ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement.
Renvoi des rapports des régies régionales
à la commission des affaires sociales pour examen
M. Dupuis: Oui, M. le Président. Conformément à l'article 392 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, je présente la motion suivante:
«Que l'étude des rapports annuels 2002-2003 des régies régionales de la santé et des services sociaux de l'Estrie et de Québec soit déférée à la commission des affaires sociales et que le ministre de la Santé et des Services sociaux soit membre de ladite commission, et ce, pour la durée du mandat.»Mise aux voix
Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.
Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni dépôt de pétitions.
Questions et réponses orales
Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales. Je suis prêt à reconnaître M. le député de Chicoutimi.
Indépendance du Procureur général
dans le procès des Hell's Angels
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: Merci, M. le Président. Le premier ministre sait ou devrait savoir que le processus judiciaire répond à des impératifs de transparence et de règles strictes.
Alors, au nom des citoyens du Québec, qui ont le droit de savoir, je donne l'opportunité au premier ministre de clarifier la situation et pose à nouveau la question dont il a la responsabilité de répondre clairement: Est-ce que quelqu'un de son cabinet ou du Conseil exécutif est intervenu de quelque matière que ce soit auprès du Procureur général, de son entourage ou du ministère dans le dossier du mégaprocès des Hell's Angels? Et dans quelles circonstances?
Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.
n(14 h 10)nM. Dupuis: M. le Président, j'invoque évidemment l'article 35, troisième paragraphe. Ce dossier fait encore l'objet devant les tribunaux d'un nombre de procédures importantes, dont une décision à venir sur toute la question des produits de la criminalité. Dans les circonstances, M. le Président, c'est plus qu'une règle de prudence à laquelle je convie le député de Chicoutimi, c'est une négation totale. En vertu de l'article 35.3°, je vous suggère, M. le Président, qu'aucune question ne peut être posée tant, d'une part, que les délais d'appel ne sont pas expirés... Et, à ma connaissance, ils ne le sont pas. Et, le député de Chicoutimi peut s'informer, il y a un nombre important de procédures à être encore discutées devant le juge Paul dans ce procès-là.
Le Président: Alors, à cet effet-là, j'invite à la prudence. Nous sommes en matière criminelle, le ministre peut refuser s'il considère contraire à l'intérêt public... Alors, je suis prêt à entendre le ministre.
M. Dupuis: M. le Président, question de règlement toujours.
Le Président: Question de règlement.
M. Dupuis: Ce que je vous soumets, M. le Président, ce n'est pas la règle de prudence. Ce que je vous soumets, c'est qu'on ne peut pas parler d'une affaire qui est devant le tribunal. Et toute la jurisprudence est constante à l'effet que, lorsqu'il s'agit d'une affaire criminelle, c'est un empêchement qui est de rigueur.
M. Bédard: M. le Président, simplement sur la question de règlement...
Le Président: Sur la question de règlement, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.
M. Bédard: ...je vous aviserais que les délais d'appel sont expirés en date d'hier. Alors, ce dossier maintenant ne peut pas faire l'objet d'appel. Donc, ce que je demande simplement, c'est une réponse à une question très simple.
Le Président: Dernière intervention.
M. Dupuis: Bien, M. le Président, le député de Chicoutimi sait très bien qu'il y a encore, dans cette affaire-là, des choses à être réglées devant le juge Réjean Paul, et des questions qui sont d'une importance capitale pour les parties qui sont impliquées, de telle sorte que toute espèce de référence à ce dossier-ci risque d'avoir des impacts devant le tribunal. Et je pense que le député de Chicoutimi, comme le gouvernement, n'a pas intérêt à ce que ça se fasse. Et je convie le député de Chicoutimi au respect total du règlement sur cette question-là. Un jour ou l'autre, cette affaire-là sera terminée, et on verra à ce moment-là.
Le Président: M. le leader, je ne connais pas toutes les causes, je dois m'en remettre au ministre, qui peut refuser de répondre en vertu de l'article 82, 83. Donc, je m'en remets au ministre.
M. Marc Bellemare
M. Bellemare: M. le Président, compte tenu que cette affaire n'est toujours pas réglée et que le juge Paul a encore en sa possession la cause au complet, les parties... Bien sûr, le Procureur général est partie à ce litige, puisqu'il porte les accusations. L'affaire est toujours devant le juge Paul concernant les confiscations de biens prétendument issus de la criminalité. Alors, dans les circonstances, il m'apparaît que, par respect pour le système judiciaire, par respect pour le juge Paul, il m'est impossible de répondre à la question du député de Chicoutimi.
Le Président: M. le député de Chicoutimi, en question additionnelle.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: M. le Président, sous le même respect du processus judiciaire, sous le même respect, tout ce que je demande au premier ministre, c'est de dire... Et il a tout simplement à nier, à confirmer ou à nier le fait que quelqu'un de son entourage est intervenu auprès du Procureur général dans le dossier du mégaprocès.
Le Président: Alors, M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: M. le Président, je veux que les députés comprennent bien, que les Québécois comprennent très bien notre prudence dans cette affaire-là parce qu'on a une affaire qui est devant les tribunaux, qui n'est pas terminée. Le député de Chicoutimi sait très bien qu'on doit, nous, comme parlementaires, faire preuve de responsabilité.
Maintenant, cela étant dit, sa question est tellement générale, là, que ça peut se prêter à n'importe quelle sorte d'interprétation. Et, s'il est en train de nous demander si, oui ou non, moi, je suis intervenu, si j'ai posé des gestes, ou quelqu'un de mon bureau, dans une affaire qui est devant les tribunaux, la réponse, évidemment, c'est non. Ça ne peut pas être autre chose que ça parce qu'on respecte intégralement le mandat qui nous est donné.
Maintenant, je remarque également, M. le Président, ma vive déception concernant le député de Chicoutimi, qui semble vouloir fréquenter beaucoup la basse-cour. Non seulement, non seulement il nous interpelle là-dessus...
Le Président: S'il vous plaît, je vous rappelle à la prudence, monsieur... Je ne veux pas, quand même, qu'on ait des propos indignes à l'intention des députés. Alors, si vous voulez reprendre votre discussion.
M. Charest: Parce qu'on va profiter de l'occasion pour vider tout ça. Le député de Chicoutimi m'a écrit le 16 octobre dernier, me demandant des informations au sujet de l'affaire du ministre de la Justice et de sa fille, nous demandant à nouveau une chronologie des événements, alors que tout ce qu'il y avait à dire là-dessus a été dit par le ministre personnellement. Il l'a dit en public, dans des circonstances très pénibles. Et le député, aujourd'hui, là ? je ne sais pas si c'est conforme au mandat qui lui a été donné par son parti ? réécrit là-dessus pour revenir sur ces choses-là. Alors, je demande au député de Chicoutimi quel genre de carrière politique il veut avoir au juste puis c'est quoi, ses vrais objectifs.
Le Président: En question additionnelle, M. le député de Chicoutimi.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: M. le Président, je vous avouerais que, si quelqu'un flirte avec des manquements au règlement, c'est bien le premier ministre, actuellement. Et d'aucune façon, par rapport à l'affaire dont il a fait mention... Et je pense que mon comportement a été exemplaire à ce niveau-là. Alors, j'inviterais le premier ministre à...
Des voix: ...
Le Président: Alors...
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Soyons calmes. Les propos ne sont pas pertinents. Alors, question additionnelle, M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Et permettez-moi de rajouter que, quant à ma carrière politique, ce n'est pas au premier ministre à décider où est-ce qu'elle s'en ira, mais les citoyens de mon comté de Chicoutimi. Alors...
Le Président: Alors, la question, M. le député.
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, simplement... Et je prends acte du fait que personne de son entourage... C'est ce que j'ai compris. Et, si c'est le cas, c'est ce qu'il aurait dû répondre hier, dans l'affirmative. Alors, je demande aujourd'hui au premier ministre: Est-ce que le dossier a été évoqué en Conseil des ministres alors que le Procureur général était présent?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Bien, M. le Président, chaque député à l'Assemblée nationale du Québec sait très bien qu'on n'évoque pas en public les délibérations du Conseil des ministres. Est-ce que ça a été évoqué au Conseil des ministres de son gouvernement à l'époque où ils étaient là? Hein? Est-ce que le premier ministre de l'époque se lèverait aujourd'hui pour dire: On a discuté de cela, on a discuté de ceci, alors qu'il sait très bien, il sait très bien qu'on ne discute pas publiquement de ces choses-là?
Mais, si le député de Chicoutimi a des allégations à faire... Parce qu'on sait dans quoi il patauge. Ça me ferait plaisir de la déposer, sa lettre, sa lettre où il connaît déjà les réponses. Il nous demande la chronologie des événements. Il fait une autre partie de pêche. Mais, si vous avez des choses à affirmer, s'il y a des faits qui ont été portés à votre connaissance, autres que des rumeurs qui sont galvaudées par je ne sais pas qui, levez-vous, ayez la franchise de les affirmer, vous avez l'immunité parlementaire. Dites-le, puis on va y répondre. Mais ne venez pas salir tout le monde d'un coup de phrase en insinuant des choses qui sont totalement fausses.
Le Président: Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée qu'il ne faut pas imputer des motifs à un député, il faut respecter la parole du député. M. le député, en question additionnelle.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: M. le Président, simplement, est-ce que le premier ministre se rend compte que la basse-cour à laquelle il fait référence, c'est M. Boisvert, de La Presse, qui évoquait effectivement que le premier ministre était intervenu dans le dossier, que le bureau du premier ministre était intervenu? Et c'est l'article auquel je référais. Et, en termes de privilèges parlementaires, je tiendrais à rappeler au premier ministre que, en matière de poursuites criminelles, le Procureur général jouit d'une indépendance absolue.
Le Président: Votre question, M. le député.
M. Bédard: Est-ce que le premier ministre sait que le Procureur général jouit d'une indépendance absolue et que d'aucune façon il ne doit rendre compte ni au premier ministre ni au cabinet de ses interventions ou de ses décisions ? alors, M. le premier ministre ? et que ses pouvoirs, M. le Président, sont assimilables à un juge qui exerce dans ses fonctions? Alors, la question est simple, M. le Président: Est-ce que le dossier a été évoqué au Conseil des ministres en présence du Procureur général?
n(14 h 20)nLe Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: M. le Président, j'aimerais bien que le député me cite la chronique de ce M. Boisvert, que je lis de temps en temps, pour qui j'ai beaucoup de respect. Mais qu'on me cite les paroles de M. Boisvert où il y a cette allégation d'intervention. Qu'il me le dise, parce que, moi, j'ai lu une chronique. On dit: Le bureau... Il allègue. Il dit: «Le bureau du premier ministre est nerveux. On met beaucoup de pression.» On met beaucoup de pression, c'est quoi, ça? Il n'a jamais été question d'aucune intervention ou de pression sur quiconque, jamais, jamais, dans cette affaire-là. Et là, aujourd'hui, là, vous venez, dans une partie de pêche, essayer de salir tout le monde?
Si vous avez des choses à alléguer, si vous avez une information, vous avez l'immunité parlementaire. Vous pouvez l'affirmer sans que quiconque puisse même vous poursuivre. Vous pouvez vous lever et dire ce que vous voulez ici. Dites-le. De quoi avez-vous peur? Ou c'est-u parce que vous n'avez pas d'information, vous avez, à la place, une mission, une mission de salissage que malheureusement vous essayez de remplir?
Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition.
État des négociations entourant
la somme des paiements de péréquation
M. Bernard Landry
M. Landry: M. le Président, nous avons appris, au cours des dernières heures ? une nouvelle qui n'en est pas une, du reste ? que le gouvernement central aurait des surplus de 7 milliards de dollars, c'est-à-dire deux fois ce qui avait été prévu dans des hypothèses conservatrices. Nous avions fait une unanimité des provinces contre le gouvernement central dans une conférence célèbre où, pour le Québec seulement, nous étions revenus avec 1,8 milliard de dollars, qui est en train d'être dépensé d'ailleurs à bon escient, je l'espère.
Durant la campagne électorale, le premier ministre a dit: «Ce que je dis aux Québécois, c'est que, le lendemain de l'élection, il va y avoir une bataille en règle sur le déséquilibre fiscal. Ça va être la première de nos priorités dans nos relations avec le reste du pays. Je pèse mes mots: je ne parle pas de mois, je parle de semaines.» Bien, ça fait au moins 24 semaines et un peu plus qu'il a dit ça. On n'a pas vu la moindre concession du gouvernement central, qui nie toujours même l'existence du déséquilibre fiscal, et, pendant ce temps, le gouvernement national du Québec perd ? ça a été bien établi, vous étiez d'accord avec nous sur les chiffres; on a eu une motion ici auquel s'est joint le député de Rivière-du-Loup ? 50 millions de dollars par semaine.
Alors, 24 semaines plus tard, ça fait combien? Et pendant combien de semaines allons-nous encore perdre 50 millions avant que le premier ministre fasse ce qu'il a dit qu'il allait faire, la bataille impitoyable au sujet du déséquilibre fiscal?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Je veux remercier le chef de l'opposition officielle pour la question parce que c'est un enjeu très important pour le Québec. Il a été beaucoup évoqué non seulement lors de la dernière campagne électorale, mais aussi dans tous les travaux préparatoires que nous avons faits, nous, lorsque nous étions à l'opposition officielle, pour le jour où nous serions appelés à gouverner, ce qu'a confirmé la population du Québec le 14 avril. Et le chef de l'opposition se rappellera que nous avions pris la peine de déposer devant la commission d'enquête, la commission Séguin, un mémoire fort étoffé sur cette question-là. Je rappellerai même au chef de l'opposition officielle que j'avais personnellement défendu cette idée-là, un certain nombre d'idées sur le déséquilibre fiscal, lors de l'élection générale fédérale de 1997, alors que j'assumais un autre rôle. Alors, il y a une parfaite constance dans nos idées.
Maintenant, ce qu'on avait proposé en toutes lettres et présenté aux Québécois pour l'élection générale, c'était la création d'un conseil de fédération. Dans les semaines qui ont suivi, effectivement, au mois de juillet, la Conférence annuelle des premier ministres, cette question-là, cette suggestion a été acceptée, et pas plus tard que ce soir et dès demain on va continuer à en discuter avec nos partenaires, avec les autres gouvernements.
On avait également dit que, dans les semaines qui allaient suivre, on allait proposer la création d'un secrétariat sur cette question du déséquilibre fiscal, et, grâce au travail fait par le ministre des Finances et par l'équipe, cette proposition a été acceptée, M. le Président. Alors, il est donc vrai, je peux confirmer au chef de l'opposition officielle que le gouvernement a effectivement agi dans les semaines qui ont suivi son élection.
Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition.
M. Bernard Landry
M. Landry: Ce n'est pas tout à fait de ça que je parlais dans ma question, M. le Président. Je parlais d'argent, moi. Je parle de 50 millions de dollars par semaine, 2,4... 2,5 milliards par an.
Une voix: 2,5 milliards.
M. Landry: 2,5. Le premier ministre me parle de structures, hein? Alors qu'ils sont en train de massacrer des structures utiles dans notre État national, ils cherchent à en créer non seulement d'inutiles, selon moi, mais de très dangereuses. Son Conseil de la fédération, il a été examiné par un certain André Burelle, que les gens qui connaissent la question constitutionnelle connaissent bien. André Burelle, c'était un conseiller de Trudeau, même, et de Mulroney, et il trouve cette affaire de conseil de la fédération imprudente, voire téméraire, cette initiative qui pourrait être bonne mais est imprudente et téméraire parce que le premier ministre du Québec n'a exigé aucune garantie politique qu'on lui accordera l'équivalent, par exemple, de l'accord du lac Meech qui est revendiqué par son ministre. Alors, il s'embarque dans des structures, selon moi, inutiles, superfétatoires, imprudentes et téméraires, alors que ce qu'on veut, c'est de l'argent. C'est de l'argent pour l'éducation, pour les hôpitaux. Pas des structures inutiles et dangereuses.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Alors, hier, c'était de la terreur; là, aujourd'hui, c'est un massacre. Alors, il faut dire que, du côté du vocabulaire, en tout cas... Et la session a commencé... on a trois jours de faits. Alors, on est déjà rendu... La première année du gouvernement n'a pas été faite encore, déjà on est rendu à ce niveau de vocabulaire. Franchement, ce n'est pas très crédible, je regrette de le dire au chef de l'opposition.
Il y a une chose, par contre, qui est crédible comme démarche, c'est tout ce qu'on a fait, nous, pour préparer justement cette proposition. Ça a été rendu public il y a plusieurs années, cette idée d'un conseil de fédération. On l'a fait approuver dans les instances de notre parti au mois de novembre 2001, puis on a continué à pousser la réflexion sur la foi de ce que le ministre des Finances avait fait comme travail sur la question du déséquilibre fiscal en proposant la création de ce secrétariat.
Ce qu'il y a derrière cette idée-là, soit dit en passant, c'est la volonté de faire en sorte qu'on puisse travailler ensemble, ce qui représente une contradiction à vos yeux pour ce qui est de l'avenir du Québec. On va dire les choses comme elles sont, travailler avec les autres gouvernements, pour vous c'est une contradiction par rapport à vos principes, vos croyances, alors que pour nous il y a là les intérêts des Québécois et Québécoises. Alors, on l'a proposé au mois de novembre 2001, on a poussé l'idée puis là on va faire avancer les intérêts du Québec en créant cette nouvelle institution qui n'est pas une institution constitutionnelle ou même quasi constitutionnelle.
Mais, lorsque vous citez les autres, vous auriez intérêt à les citer au complet parce que M. Burelle, dans le même papier, dit aussi qu'il est en faveur de notre initiative.
Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.
M. Bernard Landry
M. Landry: Burelle dit clairement que cette initiative est imprudente et téméraire, et voilà des mots forts, et, soit dit en passant, des mots qui sont dans le dictionnaire et que les gens peuvent comprendre, et non pas comme ceux que vous employez vous-même.
Et ce Conseil de la fédération, auquel nous sommes opposés totalement, ce n'est pas en regard de nos principes, c'est en regard des principes d'à peu près tous les gouvernements du Québec depuis 1960, y compris celui évidemment de Robert Bourassa qui n'a jamais accepté que le Québec soit une province comme les autres. Le vice majeur de ce Conseil, c'est qu'il représente une reddition sans condition, et c'est pour ça qu'il y a eu des félicitations de l'ensemble du Canada. Mais il n'est pas premier ministre du Canada, il est premier ministre du Québec. Il faut qu'il explique ce soir même...
n(14 h 30)n Il rencontre ce soir même ses homologues des autres provinces. Qu'il s'engage devant nous à leur redire ce que je leur disais moi-même, que le Québec constitue une nation, que ce n'est pas une province comme les autres et qu'en attendant il manque de 50 millions de dollars par semaine. Et ça, ce n'est pas des structures, ni des principes, ni même des convictions, c'est extrêmement matérialiste, et son ministre de la Santé en a besoin pour la santé, son ministre de l'Éducation en a besoin pour l'éducation. Alors, arrêtons les sérénades et faisons la bataille qu'il a dit qu'il ferait sur le déséquilibre fiscal, puis on va le supporter à fond.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Le chef de l'opposition ne se rend pas service quand il affirme des choses sans compléter par ailleurs l'appréciation de ceux et celles qui ont constaté notre succès dans la réalisation et dans la mise sur pied d'un conseil de fédération. Le chef de l'opposition officielle sait très bien que ça a été bien accueilli au Québec, que les commentateurs, les analystes ont très bien accueilli ce qu'on proposait et que ces gens-là sont Québécois, eux aussi, hein? Eux aussi, ils ont bien le droit d'apprécier ce que sont les intérêts du Québec.
On fait, nous, ce que... et on va réussir là où son gouvernement a échoué. Parce que, s'il y a un constat objectif qu'on peut faire, c'est que vous avez échoué, et votre échec a été lamentable eu égard aux intérêts des Québécois et Québécoises. Il est vrai qu'il y a une bataille à faire, sauf que, nous, on s'est donné les moyens de la gagner. Et, là où, vous, vous avez eu des discours, nous, on substitue votre discours à de l'action.
Le Président: En question principale, M. le député de Rousseau... À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement, vous n'avez pas la parole. M. le député de Rousseau.
Plan d'action dans les négociations entourant
la somme des paiements de péréquation
M. François Legault
M. Legault: Oui. M. le Président, il y a quelques semaines, le ministre des Finances nous a fait deux grandes révélations très importantes. Premièrement, il nous a dit que le Québec se dirige vers un manque à gagner de 3 milliards de dollars pour le budget qui commence dans cinq mois, le 1er avril 2004. Première révélation.
Deuxième révélation, il nous a avoué que la fameuse réingénierie, que lui préfère appeler «rafraîchissement»? je ne sais pas ce qu'en pense la présidente du Conseil du trésor ? il a dit, et je le cite, que «ça n'apportera pas d'économies significatives». Or, M. le Président, c'est l'inquiétude partout. Je suis certain que le ministre de la Santé, le ministre de l'Éducation, le ministre de la Solidarité sociale, s'ils se promènent un peu sur le terrain, dans leurs comtés, dans les régions, ils voient de l'inquiétude, parce que les gens se disent: Le ministre des Finances annonce qu'il faut trouver 3 milliards.
Le premier ministre, ça n'a pas l'air à l'inquiéter beaucoup, là, il dit: Aïe! vous y allez avec des gros mots: «un massacre». 3 milliards, ce n'est pas un gros massacre!
M. le Président, on sait qu'une des raisons importantes de ce manque à gagner de 3 milliards, c'est la baisse des transferts du gouvernement fédéral. Or, ma question est bien claire: Dans ses discussions avec le gouvernement fédéral, quel objectif se fixe le ministre des Finances? Combien veut-il récupérer du gouvernement fédéral? Et quel échéancier se donne-t-il pour récupérer cet argent?
Le Président: Alors, M. le ministre des Finances.
M. Yves Séguin
M. Séguin: Oui. Merci, M. le Président. Je remercie le député de Rousseau de cette première question dans un domaine qui m'intéresse beaucoup. Effectivement, tel que l'a mentionné le premier ministre...
Des voix: ...
M. Séguin: ...tel que l'a mentionné le premier ministre, c'est un dossier sur lequel on travaille énormément. Il y a eu deux objectifs, dans cette première période de ces quelques mois: un, il fallait à tout prix corriger l'erreur qu'a faite l'ancien gouvernement dans son budget du 11 mars, à surestimer la population du Québec, à la péréquation, de 800 millions. Le gouvernement fédéral nous a avisés, suite à la revue par Statistique Canada, que la surestimation de 800 millions était même pire que l'on croyait, puisque, en plus de la corriger, il nous demandait de rembourser 308 millions, ce qui faisait un écart de près de 1,2 milliard. Et ça a été ma première priorité, et je suis heureux de confirmer aujourd'hui que le gouvernement fédéral a accepté, M. le Président, de corriger l'erreur et de renoncer à nous demander le remboursement de 300 millions. Donc, on vient de faire 300 millions de plus.
Le Président: En question additionnelle, M. le député...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! En question additionnelle, M. le député de Rousseau.
M. François Legault
M. Legault: Oui, M. le Président. On espérait avoir une réponse, mais... Écoutez, là, M. le Président, c'est grave, ce qui se passe, on est en train de préparer, dans les réseaux de la santé et de l'éducation et de la solidarité sociale, des coupures de 3 milliards de dollars.
Le ministre des Finances, le ministre des Finances, M. le Président, on lui demande une question claire: C'est quoi, son objectif, M. le Président? Puis je vais lui en suggérer un, objectif. Le chef de l'opposition l'a dit tantôt...
Des voix: ...
Le Président: Alors, le député va maintenant poser sa question. Veuillez la poser.
M. Legault: Est-ce que le ministre des Finances... M. le Président, est-ce que le ministre des Finances peut s'engager dans cette Chambre à réclamer rien de moins que 2,5 milliards par année, c'est-à-dire 50 millions par semaine, dans ses négociations avec le gouvernement fédéral? Est-ce qu'il s'engage à réclamer ces sommes ou s'il va se contenter de miettes, et s'il va procéder avec la présidente du Conseil du trésor à des coupures inacceptables dans les réseaux publics, M. le Président?
M. Dupuis: Question de règlement.
Le Président: Question de règlement. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Ce n'est pas de notre faute si le chef de l'opposition ne lui a pas donné assez de temps il y a deux fins de semaine, là; il ne faudrait pas qu'on paie pour ça, là.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement, je crois que ce n'était pas opportun de faire une question de règlement dans ce sens. Alors, M. le ministre des Finances.
M. Yves Séguin
M. Séguin: Merci, M. le Président. Oui, je trouve intéressant de citer un passage d'un texte qu'a fait paraître le collègue, le député de Rousseau, récemment, au mois de septembre. Il dit ceci: «Le ministre des Finances, Yves Séguin, déclarait que le Québec se dirige tout droit vers un déficit de 3 milliards de dollars, au minimum. Si l'on tient compte de la baisse des transferts du gouvernement fédéral, des besoins croissants en santé et la situation économique, ce simple calcul m'amènent au même résultat». Donc, il admet, lui aussi, que nous faisons face à une impasse de 3 milliards. Je vais vous donner un exemple...
Des voix: ...
M. Séguin: ...je vais vous donner un exemple, chers collègues...
Des voix: ...
Le Président: M. le ministre, je m'excuse. Vous n'avez que... la parole, c'est à vous. Alors, si on veut l'écouter, j'apprécierais. M. le ministre.
M. Séguin: Je vais donner un exemple du problème que nous avons à gérer, pour le fameux 3 milliards, qui est bien reconnu par nos collègues de l'opposition, qui vient d'ailleurs de leur gestion.
Cinq cités désignées ont reçu des crédits d'impôt, et, si j'y ajoute la zone commerciale, la Zone de commerce électronique et la Zone de commerce international, Mirabel ? parce que nous avons mis fin aux nouvelles attestations ? bien, vous allez comprendre tout de suite pourquoi le 3 milliards est à l'horizon. C'est par année: on a supposément donné des crédits d'impôt pour 17 000 jobs; il y en avait 12 000 existantes, on en a créé 5 000. Ça coûte actuellement au Québec ? et ça va durer jusqu'en 2010, parce que j'ai mis fin aux crédits d'impôt, mais on a reconnu les attestations antérieures, qui continuent ? ça va nous coûter 3 milliards d'ici 2010, selon les dernières évaluations qui sont disponibles depuis une semaine. On va dépenser 3 milliards à créer des jobs qui étaient existantes et qui se sont déplacées dans les zones désignées, particulièrement à Montréal. C'est ça, le problème auquel nous faisons face, et c'est ça qu'on va diminuer.
Le Président: Alors, dernière question additionnelle, M. le député de Rousseau.
M. François Legault
M. Legault: Même question, M. le Président, très simple; le ministre des Finances ne nous répond pas: Combien va-t-il réclamer du gouvernement fédéral? Est-ce qu'il va se tenir debout ou s'il va s'écraser devant le gouvernement fédéral? Une question simple.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Yves Séguin
M. Séguin: Je vais y répondre de deux façons. La première: Ça fait 24 ans, au Québec, qu'on se bat pour faire reconnaître à la péréquation, dans les négociations avec le gouvernement fédéral, de faire reconnaître à l'assiette fiscale des valeurs résidentielles, de faire reconnaître la valeur des maisons à la valeur marchande, et pour la première fois ? et c'est probablement une des meilleures réformes auxquelles on peut se féliciter au Québec ? le gouvernement fédéral nous a informés il y a deux semaines qu'il acceptait la proposition du Québec. Parce que c'est nous qui l'avons formulée, et ce n'est pas vous qui l'avez formulée, c'est nous qui l'avons formulée, c'est nous qui l'avons discutée, et ça a été accepté, et ça, c'est un événement historique au Québec.
n(14 h 40)nLe Président: En question principale, M. le député de Mercier.
Tenue d'un mandat d'initiative
sur la création du Conseil de la fédération
M. Daniel Turp
M. Turp: M. le Président, cette semaine, l'opposition officielle a proposé à la commission des institutions de se pencher sur la création du Conseil de la fédération et d'examiner son mandat, sa structure, son fonctionnement, son financement et de voir les textes. Des députés libéraux ont voté contre cette proposition. On a aussi demandé, à l'opposition officielle, que cette question soit débattue ici même, à l'Assemblée nationale. Le leader du gouvernement a refusé que l'on fasse ce débat.
Ma question au ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes: Pourquoi le gouvernement empêche-t-il les membres de cette Assemblée nationale de s'intéresser au Conseil de la fédération? Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de débattre d'une motion concernant ce Conseil? En fait, pourquoi veut-il créer le Conseil de la fédération derrière des portes closes?
Le Président: Alors, M. le ministre délégué aux Affaires intercanadiennes.
M. Benoît Pelletier
M. Pelletier: Merci, M. le Président. M. le Président, effectivement, les membres de cette Assemblée, plus particulièrement les membres de la commission des institutions, ont jugé qu'il était approprié, parce qu'il était prématuré, de ne pas tenir immédiatement donc un mandat d'initiative concernant le Conseil de la fédération. Et, étant donné que j'ai un grand respect pour les parlementaires et que je me dois de respecter l'autorité de cette Assemblée et de la commission, je me plie volontiers à leur décision.
Le fait est que... Le fait est que, M. le Président...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, mes chers collègues. M. le ministre, si vous voulez poursuivre votre réponse.
M. Pelletier: Le fait est que, M. le Président, le Conseil ne sera pas créé demain. Le Conseil... Demain, il y aura des discussions parmi les premiers ministres. Ils vont progresser, évidemment, dans leur réflexion en ce qui concerne le Conseil de la fédération. Au moment où je vous parle, il n'y a rien qui est définitivement arrêté. Lorsque les travaux des premiers ministres auront suffisamment progressé, nous informerons les membres de cette Assemblée de la nature même du Conseil de la fédération.
Mais je dois dire qu'ayant entendu le premier ministre tout à l'heure critiquer vertement le Conseil j'ai comme l'impression que votre idée est déjà faite et que, dans le fond, peu importe l'information que nous vous fournirons, une fois de plus, vous ne nous écouterez pas et, une fois de plus donc, forcément, vous ne porterez pas d'intérêt au sens même de ce Conseil de la fédération auquel les premiers ministres ont convenu bien entendu de la création.
Le Président: Merci, M. le ministre. En question additionnelle, M. le député de Mercier.
M. Daniel Turp
M. Turp: M. le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales s'intéresse à ce que l'on pense de son Conseil de la fédération? Il a certainement lu aussi les conclusions d'André Burelle, dont le chef de l'opposition officielle a parlé tout à l'heure. Je le répète: M. Burelle dit que le gouvernement est téméraire en n'exigeant aucune garantie politique équivalente à l'accord du lac Meech en échange du renforcement de la fédération.
Est-ce que c'est là la raison... M. le ministre, est-ce que c'est ça, la raison pour laquelle le gouvernement manque aujourd'hui de transparence et refuse aux élus de l'Assemblée nationale d'étudier le Conseil de la fédération?
Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires intercanadiennes.
M. Benoît Pelletier
M. Pelletier: M. le Président, mettons les choses au clair. Le Conseil de la fédération n'est pas une instance constitutionnelle et ne le sera pas. Ça s'inscrit hors du cadre constitutionnel, et donc nous ne voulons pas mélanger les dossiers. Et le Conseil de la fédération ne sera pas l'objet d'aucun troc, ne sera pas l'objet d'aucun troc, de la part du Québec, qui mettrait en cause le dossier constitutionnel ni qui mettrait en cause les intérêts supérieurs du Québec, que nous avons toujours défendus âprement et que nous allons continuer à défendre âprement, soit dit en passant.
Mais, d'autre part, le fédéral va être absent du Conseil de la fédération, alors comment voulez-vous qu'on dise au fédéral: Donnez-nous l'équivalent de Meech pour un conseil dont finalement ils ne feront pas partie? Nous n'avons pas de monnaie d'échange avec le fédéral en ce qui concerne le Conseil de la fédération. C'est une institution strictement interprovinciale qui vise à consolider les liens entre les provinces et à redonner au Québec son leadership historique, ce même leadership que vous lui avez fait perdre dans le passé.
Le Président: En question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.
Objectifs visés par la création
du Conseil de la fédération
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. En question principale, je vais poursuivre sur le sujet dont on discute depuis plusieurs minutes, parce que c'est important.
Rarement dans l'histoire du Québec un premier ministre sera rendu à participer à des discussions sans que ses objectifs aient été mieux connus par les parlementaires comme par la population. Quand Robert Bourassa s'est présenté aux premières discussions sur Meech, il y avait cinq notions minimales, il y avait un cadre très précis. Là, on a un certain nombre d'orientations. On comprend que le fédéral n'en ferait pas partie, mais ce n'était même pas certain, parce que, dans les documents libéraux, il semblait au point de départ que le fédéral allait en faire partie. On vient de nous dire que ce ne serait pas constitutionnel, mais ça pourrait amener un certain encadrement du pouvoir fédéral de dépenser.
Au même moment où le premier ministre va se réunir avec ses homologues pour parler, en théorie, de la création d'une structure, le gouvernement fédéral... on est dans la semaine où le gouvernement fédéral fait un affront énorme aux provinces en générant un surplus beaucoup plus élevé que prévu et ne remettant pas aux provinces ce qui est attendu pour la santé.
Ma question au premier ministre, elle est fort simple: Quels sont les objectifs que le premier ministre se fixe avec ce Conseil de la fédération? Quels sont les objectifs précis en termes d'encadrement du pouvoir fédéral de dépenser, en termes d'élimination du déséquilibre fiscal, en termes d'obtention de sommes pour la santé? Est-ce que le premier ministre part avec des objectifs précis et est-ce qu'on peut en être informés?
Le Président: Alors, M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Je veux donner peut-être quelques informations au député de Rivière-du-Loup. Il dit qu'il n'est pas informé. Moi, j'ai la chronologie du développement des politiques du gouvernement actuel. Ça a commencé au mois de mai 1999: un conseil général du Parti libéral à Saint-Hyacinthe, alors que le mandat a été donné à l'actuel ministre des Affaires intergouvernementales; création de son groupe de travail; février 2000, conseil général, présentation du ministre actuel; octobre 2000, congrès des membres, présentation du ministre; publication d'un rapport préliminaire d'un comité... Parce qu'on a mis tout ça sur papier, en passant. Si vous avez le goût de le lire, allez-y, lisez-le, vous allez voir là tous les objectifs, c'est en noir et blanc. On a fait adopter ça, le rapport préliminaire, en mars 2001; 2001, présentation devant les instances du Parti libéral; septembre 2001, dépôt du mémoire sur le déséquilibre fiscal; novembre 2001, l'adoption du rapport final... Novembre 2001, vous avez quand même eu un peu de temps! Je ne sais pas ce que vous faisiez, là, si vous aviez le goût de lire pour savoir c'est quoi, nos objectifs, c'est là-dedans. Il y a eu, en septembre 2002, M. le Président...
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Mme la députée de Marie-Victorin, là...
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Mme la députée de Marie-Victorin, là, je vous demande votre collaboration. Si vous voulez poursuivre, M. le premier ministre.
M. Charest: Je vous remercie, M. le Président. Alors, j'étais en train de dire à la députée de Marie-Victorin aussi, puisqu'elle est intéressée, de toute évidence, qu'on avait dévoilé nos engagements en mars 2003, pendant la campagne électorale, entre autres sur la question du Secrétariat qu'on allait créer, proposer pour Québec. Il y a eu l'élection, il y a eu le discours inaugural, tout ça. Alors, écoutez, tout ça, là, c'est consigné noir sur blanc. On a un mandat.
Mais, tant qu'à se poser des questions sur les positions des uns et des autres, on pourrait peut-être en profiter aujourd'hui pour vivre une journée historique à l'Assemblée nationale; vous, vous pourriez répondre à la question la plus simple, à laquelle, le chef de l'opposition et moi, on a répondu depuis longtemps: Est-ce que vous, comme député de Rivière-du-Loup, et l'ADQ, est-ce que vous êtes fédéralistes ou souverainistes?
Le Président: En question additionnelle, M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Dumont: Est-ce que le premier ministre... est-ce que le premier ministre...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît. En question additionnelle, M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: ...premier ministre saisit bien que tous les documents dont il parle, on les a vus. Mais ce qu'on y constate... Encore ce matin, le ministre, dans une entrevue, baisse la barre. Ce qu'on y constate, c'est que la barre est basse, c'est que le Québec sera une province comme les autres, c'est que lui, comme premier ministre, semble tourner le dos à un bon nombre de principes que ses prédécesseurs, incluant Robert Bourassa, ont toujours défendus. Est-ce qu'il comprend qu'il n'a pas été élu pour pratiquer le fédéralisme à genoux?
n(14 h 50)nLe Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: M. le Président, pourtant, je viens de poser une question qui est fort simple au député de Rivière-du-Loup, une question... Je comprends qu'il y a des Québécois et Québécoises qui, eux, peuvent s'interroger sur l'avenir du Québec, mais je pense que, quand on veut être chef d'un parti politique au Québec, quand on prétend l'être... Et j'ai beaucoup de respect pour le chef de l'opposition officielle, de part et d'autre, on est capables de répondre à une question fort simple: Est-ce qu'on est souverainistes ou est-ce qu'on est fédéralistes? Et, si on n'est pas capables de répondre à cette question-là, on n'invoque pas le nom de Robert Bourassa, parce qu'on ne lui vient même pas aux genoux, de Robert Bourassa.
Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui. Est-ce que le premier ministre, qui sera jugé à la fin de son mandat sur à la cheville et aux genoux de qui, lui, il va, est-ce que le premier ministre peut...
Des voix: ...
Le Président: Le député pose sa question, veuillez porter attention à la question qu'il posera. M. le député.
M. Dumont: Est-ce que le premier ministre pourrait cesser de faire ce qu'il a fait toute la semaine, des diversions, qui fait qu'il ne répond jamais aux questions très simples qu'on lui pose? Les gens le voient partir pour aller rencontrer...
Une voix: ...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Vous trouvez ça drôle, mais ce n'est pas drôle. M. le député de Rivière-du-Loup.
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît, à votre question.
M. Dumont: Alors, est-ce que le premier ministre peut au moins donner une barre, nous dire: Est-ce que lui pense qu'avec ce Conseil de la fédération il va régler le problème du déséquilibre fiscal et que dès les prochains jours les Québécois vont pouvoir voir, à travers ses démarches avec ses homologues des autres provinces, une position ferme pour que le Conseil de la fédération réclame immédiatement que les 2 472 000 000 $ pour la santé au Québec qui sont attendus, que le ministre de la Santé aimerait bien avoir, qu'on puisse en voir la couleur immédiatement?
Le Président: Alors, M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Vous avez raison, M. le Président, quand vous dites que ce n'est pas drôle. Ce n'est pas drôle pour le député de Rivière-du-Loup de se lever puis d'affirmer dans une phrase, là, qu'on dit des généralités, alors qu'il est toujours incapable de répondre à une question pourtant qui est fort simple et à laquelle un chef... à laquelle une personne qui prétend être un chef de parti devrait pouvoir répondre.
D'ailleurs, là-dessus, on n'a pas beaucoup de leçons à prendre du député de Rivière-du-Loup sur la défense des intérêts du Québec. La dernière fois que j'ai lu un discours du député de Rivière-du-Loup, qui a été prononcé à Toronto, il n'a pas dit un seul mot sur la défense des intérêts du Québec. Et, pour mémoire, je lui rappellerai que, moi, quand je suis allé à Toronto, moi, j'ai parlé des intérêts du Québec, que j'ai fait une campagne électorale, moi, au niveau fédéral où j'ai défendu les intérêts du Québec. Et, M. le Président, j'en ai payé le prix politique, le vrai prix politique de défendre des positions. J'en suis extrêmement fier. Et je tiens à dire au député de Rivière-du-Loup que, moi, je ne changerai pas d'idée. Si j'ai été constant il y a cinq ans, il y a six ans, si j'ai été constant pendant le mois d'avril, je vais être constant pendant les mandats ? au pluriel ? que je vais remplir au nom de la population du Québec.
Le Président: En question principale, M. le whip de l'opposition officielle et député de Nicolet-Yamaska.
Offre de compensation
aux producteurs de bovins de réforme
M. Michel Morin
M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, M. le Président. Nous connaissons tous, Québécois et Québécoises, nous connaissons tous les conséquences désastreuses de la crise de la vache folle, qui affecte les producteurs et productrices de bovins du Québec, qui ont subi des pertes financières énormes, évaluées à 52 millions.
Malgré une aide financière incomplète de 10 millions d'argent neuf annoncée le 15 octobre dernier, qui couvre à peine le cinquième des pertes anticipées, la ministre de l'Agriculture a laissé tomber les 16 000 producteurs et productrices de bovins de réforme, qui ont eu droit à aucune compensation. Elle a refilé le problème à Ottawa.
Donc, ma question est la suivante: Qu'entend faire la ministre de l'Agriculture pour compenser le plus rapidement possible les pertes énormes subies par les 16 000 producteurs et productrices agricoles de bovins de réforme du Québec?
Le Président: Mme la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, je vous cède la parole.
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: Alors, merci, M. le Président. D'abord, d'entrée de jeu, je rappellerais à mon collègue qu'il y a eu une première phase d'aide, on a investi... il y a un programme de 58 millions de dollars qui a été donné à nos producteurs agricoles.
Certes, M. le Président, nous avons été dans une deuxième phase d'aide aux producteurs agricoles, et, lors de l'annonce, j'ai annoncé effectivement que ce n'était pas la Cadillac des programmes.
Cependant, lorsque je compare le programme que nous avons offert, au Québec, par rapport aux autres provinces du Canada, je vous dirais qu'au Québec notre programme couvre 335 $ la tête de bouvillon, par rapport à l'Ontario, qui est de 330 $; en Alberta, 375 $; au Manitoba, 245 $; et en Saskatchewan, 313 $. Alors, on peut voir qu'on est la deuxième province qui a offert un des meilleurs programmes sur le plan canadien.
D'ailleurs, M. le Président, je rappellerais à mon collègue que lui-même avait reconnu que c'était un bon début. Dans Le Nouvelliste, dans Le Nouvelliste du 16 octobre dernier, je peux lire que «le député de Nicolet-Yamaska considère que l'aide financière de 20 millions annoncée hier aux producteurs de bouvillons par la ministre de l'Agriculture est un bon début».
Le Président: Alors, ceci met fin à la période de questions et de réponses orales.
Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Il y aurait consentement de part et d'autre pour que nous puissions procéder à un avis concernant les travaux des commissions, une commission qui doit entendre des gens.
Avis touchant les travaux des commissions
Le Président: Est-ce qu'il y a un consentement? M. le leader de l'opposition officielle, est-ce qu'il y a consentement pour un avis? Il y a consentement chez les députés indépendants? Consentement. Alors, consentement, M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de la culture poursuivra les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du document intitulé Une réforme de l'accès à l'information: le choix de la transparence, aujourd'hui, de 15 h 30 à 17 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.
Motions sans préavis
Le Président: Cet avis est déposé. Nous en sommes aux motions sans préavis. M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.
Souligner la Journée internationale
pour l'élimination de la pauvreté
M. Béchard: Merci. Merci, M. le Président. M. le Président, je dépose la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, qui s'est déroulée le 17 octobre 2003, en rendant hommage au courage des personnes qui font face à la misère ainsi qu'à la générosité de tous les citoyens, qui par le biais des organismes communautaires, participent à la lutte contre la pauvreté et à l'exclusion sociale au Québec.»Le Président: Consentement pour débattre de cette motion? Consentement. Alors, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, la parole est à vous.
M. Claude Béchard
M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. Aujourd'hui, il me fait grand plaisir de souligner la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, qui a eu lieu vendredi dernier, le 17 octobre. Et d'ailleurs, des activités ont été organisées un peu partout à cette occasion, et, ce matin, nous avons eu l'occasion d'assister, un bon groupe de parlementaires, à un des plus grands rassemblements de parlementaires pour cette cause.
Et il ne faut pas oublier que c'est le 17 octobre 1987 que le père Joseph Wresinski, fondateur de l'organisme ATD Quart Monde, organisait un rassemblement au Trocadéro, à Paris, lieu de la signature de la Déclaration universelle des droits de l'homme en 1948, pour rendre hommage aux victimes de la faim et de la violence.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Ah! un instant. Chers collègues... Chers collègues de l'Assemblée nationale, c'est parce que, moi, je préside, là, puis je n'entends pas ce qui se passe. Et il faut rappeler à l'ensemble des collègues que, ce matin, cette activité-là, en tout cas, avait l'air à être très significative pour beaucoup de citoyens et citoyennes du Québec. Si on prend la peine de le souligner par une motion, encore faudrait-il l'entendre.
Un instant! Alors, M. le ministre de la Solidarité sociale, si vous voulez poursuivre.
n(15 heures)nM. Béchard: Oui. Plus de 100 000 personnes avaient répondu à son appel et ont ainsi assisté à l'inauguration d'une dalle commémorative, sur laquelle on peut lire le message suivant: «Là où des hommes sont condamnés à vivre dans la misère, les droits de l'homme sont violés. S'unir pour les faire respecter est un devoir sacré.» Depuis cette date, le 17 octobre est reconnu comme étant la Journée mondiale du refus de la misère. C'est en 1993 que le secrétaire général de l'ONU de l'époque, Javier Pérez de Cuellar, fait adopter une résolution afin que l'ONU reconnaisse officiellement cette Journée, que l'on connaît sous son nom actuel: Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté. Par la suite, en 1997, l'ONU déclarait que la décennie à venir, soit jusqu'en 2006, était la Décennie pour l'élimination de la pauvreté. De plus, dans le cadre de l'élimination... dans le cadre de la Déclaration du Millénaire, les pays membres de l'ONU se sont fixé des objectifs pour l'élimination de la pauvreté. Parmi ces objectifs, on y retrouve: réduire de moitié l'extrême pauvreté et la faim d'ici 2015; assurer une éducation primaire pour tous; réduire de trois quarts la mortalité maternelle et des deux tiers la mortalité infantile; combattre les maladies meurtrières; promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomination des femmes.
Bien que les préoccupations des Nations unies portent principalement sur la situation des pays en voie de développement, le Québec est pour sa part très actif dans ce domaine, et depuis plusieurs décennies. Dès le début des années vingt, le Québec se dotait d'une Loi sur l'assistance publique. Dans les années soixante, il y a eu plusieurs autres régimes de créés pendant la Révolution tranquille: les services de Régime de rentes, d'assurance maladie, de services de garde, d'éducation universelle, d'aide juridique, les lois sur la protection du consommateur, sans oublier bien sûr la Charte des droits et libertés de la personne. Et, dernièrement, il y a bientôt un an, en décembre dernier, nous adoptions, à l'unanimité de cette Assemblée, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Et d'ailleurs, je tiens à souligner que, pour l'adoption de cette loi, et tous les débats qui ont mené à cette loi, il y a eu de nombreux efforts, de nombreuses collaborations pour faire en sorte que cette loi s'élève au-dessus de la partisanerie politique et devienne un consensus de l'ensemble des parlementaires de l'Assemblée nationale.
Alors que, je vous dirais, l'ensemble de la communauté internationale se concentre sur l'élimination de l'extrême pauvreté, le Québec peut être fier d'affirmer, lui, qu'il a entrepris des démarches pour éliminer non seulement l'extrême pauvreté, mais la pauvreté dans son ensemble. Aujourd'hui, on rend hommage aux personnes qui vivent la pauvreté, aux organismes qui oeuvrent auprès d'elles. Et, au Québec, le geste concret se traduira bientôt par le dépôt d'un plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la pauvreté et d'exclusion sociale. Ce plan sera déposé bientôt, je le rappelle. Avec ce plan d'action, le Québec pourra démontrer à la communauté internationale son leadership dans la lutte à la pauvreté et sa capacité d'en faire une cause pour tous, une cause à laquelle tous croient et un défi que tous veulent relever.
Ce plan d'action bien sûr contiendra des mesures qui permettront de s'attaquer autant aux causes qu'aux conséquences de la pauvreté. Il visera à canaliser les efforts de plusieurs ministères. C'est un objectif du gouvernement vers un objectif commun d'améliorer les conditions de vie des Québécois qui en ont besoin. Il favorisera aussi la création de nouvelles dynamiques entre l'État, les instances locales et les organismes, par le biais de partenariats novateurs, au service des gens qui vivent la pauvreté.
Ce plan d'action ne marquera pas la fin de la pauvreté... la fin d'un processus ni la fin de la pauvreté. Il faudra continuer à travailler pour faire en sorte que ce plan d'action ne soit pas vu comme le remède final et le dernier élément que l'on doit mettre en oeuvre. Il s'agit plutôt d'un point de départ. Dans l'esprit du message d'espoir du père Wresinski, ce plan d'action visera à unir l'ensemble de la société québécoise pour faire respecter le droit de ses citoyens de ne pas vivre dans la misère. M. le Président, je salue la détermination des personnes qui font face à la misère, aux difficultés, qui cherchent à s'en sortir. Je salue la persévérance des citoyens qui, à travers les organismes communautaires, par du bénévolat, par une heure, une demi-heure, une journée qu'ils donnent une fois de temps en temps, font en sorte que l'ensemble de la société est plus solidaire, que nous aidons ceux qui en ont le plus besoin et que nous faisons tout pour faire en sorte que les gens puissent mettre leurs idées, leurs compétences, leur détermination, leur passion au service de leurs concitoyens et concitoyennes. Et il faut aussi saluer le courage de l'ensemble de nos concitoyens qui sont derrière nous, qui nous appuient, par le biais de nous qui les représentons, à faire du Québec et à doter le Québec de moyens concrets, d'une loi unique en Amérique du Nord qui, je le souhaite et j'en suis convaincu, aura des effets bénéfiques, aura des effets directs et des effets dont nous pourrons être fiers sur l'ensemble des problématiques qui touchent les plus démunis de notre société. Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le ministre. Toujours sur cette même motion sans préavis, le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. M. le député de Vachon.
M. Camil Bouchard
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, vendredi, le 17 octobre dernier, à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, la cuisine collective de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, dans le comté de Laporte ? c'est le comté qui est juste à côté du comté de Vachon ? cette cuisine collective m'invitait à un souper communautaire et à une marche à travers les rues de l'arrondissement de Saint-Hubert. Cette marche au flambeau avait pour but de manifester, M. le Président, et de démontrer que les personnes pauvres et toutes celles qui en connaissent les causes et les conséquences refusent la misère, refusent la détresse, reculent et veulent s'en sortir. Ils font tout ce qu'ils peuvent pour en sortir.
Ces personnes, M. le Président, lors de cette marche, revendiquaient le respect des droits fondamentaux en matière de logement, en matière d'alimentation, en matière d'habillement, en matière de participation à la vie sociale et économique. Ils revendiquaient un revenu décent, ils revendiquaient la dignité.
M. le Président, nous étions 40 personnes à marcher, 40 personnes à manifester. J'étais le seul élu de l'Assemblée nationale, et je me suis juré que nous serions au moins 200 l'an prochain au même rendez-vous. La mobilisation de toutes et de tous contre la pauvreté et la misère qui l'accompagne devrait être au centre de nos priorités, et chacun d'entre nous réunis dans cette Assemblée nationale peut contribuer à cette mobilisation.
Une société engagée dans une lutte acharnée pour la justice sociale et contre la pauvreté économique et l'exclusion sociale fait partie du caractère distinct, du caractère cohésif du Québec. Aucune autre juridiction en Amérique du Nord, M. le Président, ne s'y est engagée avec autant de fermeté et d'unanimité que le Québec, aussi bien à travers une tradition d'investissement dans ses programmes économiques et sociaux visant l'équité entre les personnes et les régions que par la loi n° 112 adoptée à l'unanimité en décembre 2002.
M. le Président, gouverner, c'est rechercher le bien commun. Dans une société, le bien commun, c'est autre chose, M. le Président, que la somme des réussites individuelles, des réussites individuelles qui ignoreraient ou même renieraient une qualité de vie accessible pour chacun et chacune d'entre nous. Le bien commun suppose au contraire la recherche constante d'une harmonie entre les citoyennes et les citoyens, et cette harmonie, cette paix, cette cohésion dépend largement de notre aptitude à soutenir chacun et chacune d'entre nous dans son développement, dans sa vie sociale et économique.
Tout gouvernement, M. le Président, qui recherche le bien commun, qui recherche le développement optimal de chaque personne, qui veut assurer son présent et son avenir économique doit se préoccuper de justice sociale. Sans justice sociale, les personnes laissées de côté, les exclus, perdent confiance, se méfient de celles et de ceux qui les ignorent, ne se sentent plus en mesure de participer pleinement à la vie sociale et économique, s'affaiblissent et affaiblissent notre capacité de développement collectif. Ces personnes nous renvoient quotidiennement le message que nous nous éloignons du bien commun et que, même si nous ne le voulons pas, nous nous développons à leurs dépens.
L'individualisme, M. le Président, le chacun pour soi, ne répond pas au voeu des Québécoises, ne répond pas au voeu des Québécois et ne correspond pas aux valeurs et aux actions adoptées par la population depuis les 40 dernières années. Dans cette société, nous avons réussi une des démarches sociales et économiques parmi les plus impressionnantes des pays occidentaux, parce que nous avons constamment, certes imparfaitement, mais constamment eu le souci de partager nos richesses, de penser à l'autre, sur qui on doit soi-même compter si on veut se développer, parce que nous avons préservé notre cohésion et nous avons protégé l'harmonie et la paix sociale.
n(15 h 10)n Quelle que soi la couleur partisane du pouvoir, quelle que soit sa velléité de «reengineering», M. le Président, une seule chose devrait nous préoccuper: associer toute la population dans le soutien, la protection et l'insertion sociale et économique des personnes les plus vulnérables. Le Québec a des acquis, M. le Président, en la matière, il faut les protéger, il faut surtout les renforcer.
On a encore beaucoup de chemin à faire, M. le Président, les statistiques internationales sont là pour nous le rappeler de même que la loi n° 112 qui nous fixe comme objectif de nous classer parmi les pays qui apparaissent dans le haut du palmarès des sociétés où il y a le moins de pauvreté. Pour y arriver, M. le Président, il n'y a pas 36 manières. Il nous faut s'y acharner, adopter un plan d'action ambitieux, global, qui touche à toutes les causes de la pauvreté. Il faut un plan d'action doté des budgets nécessaires, M. le Président, clair dans ses objectifs annuels de réduction de la pauvreté, capable de mobiliser l'ensemble des citoyennes et des citoyens reposant sur la prévention, sur une amélioration significative des revenus des personnes les plus vulnérables, sur la participation des premiers concernés à la planification, à la mise en oeuvre et à l'évaluation de ce plan.
Nous avons besoin d'un gouvernement, M. le Président, pour y arriver, courageux. Nous avons besoin d'un gouvernement capable de cerner ses priorités à partir d'une éthique du bien commun et qui... Nous avons besoin, M. le Président, d'un gouvernement qui renonce à une entreprise de déconstruction de nos solidarités. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Vachon. M. le député...
M. Picard: De Chutes-de-la-Chaudière.
Le Vice-Président (M. Gendron): ...de Chutes-de-la-Chaudière, oui. Oui, j'attendais pour... M. le député de Chutes-de-la-Chaudière, sur la même motion.
M. Marc Picard
M. Picard: Merci, M. le Président. C'est avec un plaisir que je vais remplacer à pied levé ma consoeur la députée de Lotbinière qui avait un rendez-vous médical de routine ce midi. Et on voit que le réseau fonctionne très bien, elle n'est pas encore ici, il est 3 heures.
Donc, comme je disais, c'est avec plaisir que je prends la parole pour appuyer la motion portant sur l'élimination de la pauvreté. Cette journée porte aussi le nom de la Journée mondiale du refus de la misère. Depuis 1987, chaque année, la Journée mondiale du refus de la misère est célébrée le 17 octobre. Elle est l'occasion pour le grand public d'entendre la voix des personnes qui vivent dans la grande pauvreté et de s'interroger sur les engagements que, tous, nous pouvons prendre comme citoyens pour refuser la misère. Partout au Québec, des activités étaient organisées pour sensibiliser nos concitoyennes et nos concitoyens à ce beau défi qu'est l'élimination de la pauvreté.
La pauvreté, ce n'est pas seulement une question d'argent, la pauvreté a plusieurs facettes. Le manque d'emploi n'est pas le seul facteur à mener à la pauvreté. Les changements dans la structure familiale, les ruptures d'union, les problèmes de santé, les séquelles d'un accident sans couverture par une assurance, surtout pour les personnes ayant un emploi précaire, l'endettement juxtaposé au chômage récurrent, les problèmes de dépendance tant au jeu qu'aux drogues et à l'alcool, tous ces facteurs peuvent contribuer à la détérioration d'un budget familial. Il ne faut pas lier la pauvreté au seul facteur de l'emploi. Comme je l'ai mentionné précédemment, plusieurs facteurs y mènent, sans oublier les sans-abri, certaines communautés culturelles, communautés autochtones et les dépendances intergénérationnelles quant à la sécurité du revenu.
La pauvreté peut devenir un cercle sans fin et on ne peut y remédier à l'aide d'une pilule magique. La société doit comprendre que la victoire contre la lutte contre la pauvreté n'est pas une question d'argent, c'est beaucoup plus une question de temps et d'efforts. En plus de l'argent, il faut donner de l'autonomie tant aux personnes vivant la pauvreté qu'aux organismes les aidant.
La pauvreté, ce n'est pas seulement en Afrique ou à Montréal qu'on la vit, la pauvreté se vit partout. Les enfants en sont malheureusement les premières victimes. Les Éditions de l'hôpital Sainte-Justine ont récemment publié le livre C'est bon d'en parler qui laisse la parole aux enfants. Voici un extrait de la sagesse des petits: «Une famille pauvre, c'est quand il n'y a pas d'amour ni de bonheur. On a les pauvres d'amour et les pauvres d'argent. La pire pauvreté, c'est quand les deux se rejoignent.» Fin de la citation.
En terminant, notre devoir, en tant que parlementaires, est de faire notre possible afin de briser le cercle de la pauvreté. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Comme je ne vois pas d'autre intervenant sur cette motion, est-ce que cette motion est adoptée?
Alors, toujours à la rubrique des motions sans préavis... Alors, toujours à la rubrique des motions sans préavis, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
Souligner la Semaine
de sensibilisation aux maladies mentales
et la Journée mondiale de la santé mentale
M. Couillard: M. le Président, je sollicite le consentement de la Chambre pour que la motion suivante soit présentée:
«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine de sensibilisation aux maladies mentales, qui s'est déroulée du 5 au 11 octobre, et la Journée mondiale de la santé mentale, qui s'est tenue le 10 octobre.»Le Vice-Président (M. Gendron): Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Il y a consentement, M. le ministre?
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): M. le ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: M. le Président, les problèmes de santé mentale sont beaucoup plus fréquents dans notre société que bien des gens le croient, et on comprendra pourquoi nous en avons fait une de nos trois grandes priorités pour les prochaines années.
Selon la dernière enquête sociale et de santé, 20 % de nos concitoyens et concitoyennes ont un niveau de détresse psychologique élevé, et ce, dans tous les groupes d'âge mais particulièrement chez les jeunes hommes. De plus, une personne sur cinq connaîtra au cours de sa vie un problème de santé mentale. L'Organisation mondiale de la santé prévoit, quant à elle, que, d'ici une vingtaine d'années, les troubles mentaux représenteront 15 % de l'ensemble des maladies dans le monde, et nous avons le triste avantage, M. le Président, d'être doté au Québec d'un des taux de suicide les plus élevés du monde occidental, et, encore une fois, ça frappe notre population masculine jeune.
Déjà, l'exclusion du marché du travail reliée à ces problèmes connaît une croissance très inquiétante dans toutes les sociétés, avec des coûts économiques et sociaux considérables. Et, encore une fois, le taux de suicide dont nous souffrons au Québec est fort regrettable, et nous avons l'intention d'y apporter une attention particulière. Et je reviens d'un voyage pour aller voir les installations de santé et de services sociaux des populations nordiques où le taux de suicide là est deux à trois fois plus élevé que celui du Québec, avec des problèmes de détresse sociale, de toxicomanie et de chômage absolument dramatiques.
Derrière ces statistiques, il y a aussi des hommes et des femmes qui souffrent énormément, et on a tendance à rendre la maladie mentale taboue, secrète et à lui donner moins d'attention dans nos communications publiques que d'autres problèmes de santé physique qui semblent plus effrayants à nos oreilles habituées... par les médias. Pour surmonter leurs difficultés, les personnes présentant un problème de santé mentale doivent pouvoir compter sur des services adaptés à leur condition. Ceux-ci doivent être disponibles dans la communauté, c'est-à-dire le plus près possible du milieu de vie des personnes touchées, et aussi en milieu hospitalier lorsque cela devient nécessaire, et c'est parfois nécessaire, dans le but de protéger ces personnes.
Je voudrais insister aujourd'hui en particulier sur la santé mentale des jeunes et des enfants. Pour les aider, il faut intervenir davantage en première ligne pour éviter un recours trop grand aux services spécialisés de pédopsychiatrie, qui font cruellement défaut chez nous. On a un très faible taux de... nombre de pédopsychiatres au Québec. Il est extrêmement difficile d'avoir des rendez-vous en pédopsychiatrie, particulièrement en région, d'où l'importance de se doter d'une première ligne très, très solide.
Les autres priorités, outre les jeunes, sont bien sûr l'aide aux personnes suicidaires, le traitement et le suivi intensif des personnes présentant des troubles mentaux graves, comme la schizophrénie. Et j'ai eu le plaisir récemment d'inaugurer, à l'Université de Montréal, une chaire de recherche sur la schizophrénie et, quelques jours plus tard, à l'Hôpital Douglas, à Verdun, un programme d'action précoce en traitement et dépistage des psychoses.
Au-delà de ces services, les hommes et les femmes qui souffrent de maladie mentale ont besoin d'un appui compréhensif et chaleureux de la part de la communauté. Prévenir le suicide, faire que personne ne s'enferme dans sa détresse, redonner espoir à ceux et à celles qui autrement seraient seuls avec leur angoisse, c'est l'affaire de chacun d'entre nous. C'est en effet à la faveur d'une solidarité élargie que ces personnes pourront le mieux s'épanouir, s'intégrer et se rétablir. Pour briser l'isolement qui accompagne trop souvent les problèmes de santé mentale, il faut que la famille, le voisinage et l'ensemble de la collectivité soient impliqués. Ce n'est pas toujours une tâche facile, et nous comptons donc épauler le plus adéquatement possible l'entourage, les aidants naturels, les gens qui oeuvrent dans la communauté dont la démarche est à la fois généreuse et exigeante.
D'autre part, les personnes présentant des problèmes de santé mentale n'ont pas souvent l'occasion de se faire entendre; on ne les voit pas souvent, et avec raison, aux bulletins de nouvelles le soir. Je veux m'assurer qu'elles seront, par ma voix, par notre voix de parlementaires ici, mieux écoutées et mieux soutenues. En somme, j'en appelle ici, M. le Président, à une mobilisation collective afin de mieux aider celles et ceux qui croient leurs difficultés sans solution malheureusement. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Toujours sur cette motion sans préavis, je reconnais maintenant Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, l'opposition officielle tient elle aussi à souligner aujourd'hui la Journée mondiale de la santé mentale. Je tiens tout d'abord à remercier et à souligner le travail de tous les intervenants auprès des personnes qui souffrent de problèmes de santé mentale, autant dans le réseau de la santé et des services sociaux que dans les milieux communautaires et familiaux.
n(15 h 20)n La problématique de la santé mentale prend énormément de place dans notre société. En 1998, nous apprenions que 20 % des Québécoises et des Québécois de 15 ans et plus étaient à un niveau élevé de détresse psychologique. Dans une enquête de Statistique Canada, nous apprenions que, toujours en 1998, 4,7 milliards ont été investis par les gouvernements en soins de santé à des personnes souffrant de troubles mentaux. De plus, un Canadien sur 10 présente des symptômes relatifs à différents problèmes de santé mentale, soit 2,6 milliards de personnes. C'est donc dire que chacun d'entre nous côtoyons des personnes dont la santé mentale est fragile et qui ont besoin de soutien, d'accompagnement et de protection.
Au Québec, l'historique des services et des pratiques de santé mentale du Québec a beaucoup évolué depuis 40 ans. On pense aux années soixante d'ailleurs qui marquèrent tout le développement social du Québec, et le tournant le plus marquant est sans doute celui de la désinstitutionnalisation dont le mouvement a été amorcé dans les années soixante-dix. Les observateurs s'entendent pour dire que cette démarche vers l'intégration sociale est juste et louable. La désinstitutionnalisation, en 25 ans, nous indique que plus de 10 000 patients ont déserté, dans le fond, le milieu asilaire.
Aujourd'hui, une des priorités de notre société est malheureusement toujours d'informer, de sensibiliser et de mobiliser les citoyennes et les citoyens du Québec sur la santé mentale. Je dis «malheureusement», car la solidarité sociale comme ingrédient de base à l'intégration sociale n'est pas toujours facile à faire naître. Aujourd'hui, on parle maintenant de santé mentale et de ne restreindre qu'aux fins médicales le terme de maladie mentale. La santé mentale doit être une cause importante, doit être aussi importante que la santé physique et même, si on regarde dans un certain triangle, le physique, le mental, le spirituel, cultiver l'intellect et en exprimant davantage l'émotif.
Le ministre de la Santé et des Services sociaux veut laisser comme héritage aux Québécois et aux Québécoises une amélioration notable des soins de santé mentale. Je l'ai entendu en commission parlementaire nous dire que la santé mentale sera une de ses grandes priorités. Je l'invite à s'assurer que nous ne reculerons pas au Québec, à considérer que la problématique de la santé mentale est comme celle des maladies mentales, et que la réorganisation des services qu'il s'apprête à imposer au réseau de la santé et des services sociaux ira dans le sens de la santé mentale et non simplement maladie mentale, en conservant le cap de la santé mentale au Québec, et d'assurer la continuité du plan d'action pour la transformation des services en santé mentale. Alors, j'invite le ministre, assurément, M. le Président, à s'occuper autant de santé mentale que simplement des maladies mentales. Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Marc Picard
M. Picard: Merci, M. le Président, toujours en frappeur de relève, grâce à notre système de santé. Nous soulignons aujourd'hui la Journée mondiale de la santé mentale qui se tenait le 10 octobre dernier. Le thème de cette année était les troubles affectifs et comportementaux des enfants et des adolescents.
«Santé mentale», «psychiatrie» ou «folie», dans l'esprit des Québécois, les trois termes ne sont-ils pas liés? Pourtant, ici ou là, le mental conquiert une valeur moins péjorative. Nous n'avons qu'à penser que, lors d'événements sportifs, on dit que le mental aide les athlètes. Le trouble mental fait encore peur et l'image de celui qui en souffre et de ceux qui le soignent est toujours ambiguë. Pourtant, devant certains problèmes que connaît une société en crise, nous n'avons qu'à penser violence sans but, détresse psychique, etc., c'est encore à la psychiatrie que l'on fait appel, comme si l'on comptait toujours sur elle pour soustraire ces problèmes à nos regards.
En fait, la santé mentale ne saurait se réduire à la seule pathologie mentale, de quelque nature et de quelque intensité que ce soit. Elle concerne l'individu dans son environnement familial, social, économique, culturel, c'est-à-dire dans les interactions qu'il va développer avec lui. C'est dire que son approche dépasse résolument le seul aspect médical. Aucun d'entre nous n'y échappe, sa vie durant, aux questionnements sur sa propre vie psychique, sur sa santé mentale, à la crainte de perdre la tête, à l'angoisse, à l'anxiété, à la déprime. Il existe une réelle demande d'écoute et de prise en compte de nos problèmes psychologiques augmentés par les difficultés spécifiques de la société actuelle. Et les certaines difficultés, certaines souffrances qui semblent insolubles a priori, elles sont souvent l'effet de douleurs anciennes que le temps a occultées.
Au-delà de ces réflexions philosophiques, la santé mentale reste encore aujourd'hui très cachée. Combien de personnes auraient eu besoin de soins bien avant leur admission dans le système de santé? Les tabous entourant la santé mentale sont encore trop présents dans la société québécoise. Les familles se retrouvent démunies devant la souffrance mentale d'un des leurs. La santé mentale n'est pas une maladie contagieuse, mais la santé mentale, elle est contagieuse. Il faut en parler ouvertement, des maladies mentales, car c'est le meilleur moyen, pour les personnes qui en sont atteintes, de rechercher de l'aide. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Comme je ne vois pas d'autre intervenant sur cette motion, est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Mme la députée de Marie-Victorin.
Souligner la Journée nationale de visibilité
de l'action communautaire autonome
Mme Vermette: Oui, M. le Président. Alors, M. le Président, j'aimerais faire motion pour «que l'Assemblée nationale souligne la Journée nationale de visibilité de l'action communautaire autonome».
Le Vice-Président (M. Gendron): Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Il y a consentement. Alors, allez, Mme la députée, sur la motion.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Alors, M. le Président, je tiens à souligner aujourd'hui la Journée nationale de visibilité de l'action communautaire autonome pour que cette Assemblée reconnaisse, une fois de plus, le travail gigantesque abattu par des milliers d'organismes communautaires autonomes du Québec. Et j'appuie le terme «autonome» très fortement, puisque c'est dans cette reconnaissance que les groupes communautaires veulent avoir l'oreille du ministre et, en fait, l'aval du ministre pour reconnaître cette action autonome du milieu communautaire.
Et ce pour quoi j'insiste... Ce pour quoi j'insiste, M. le Président, c'est que, aujourd'hui, dans les journaux, il y a un autre ministre... le ministre de la Santé considérait, et c'est peut-être par méconnaissance ou manque d'expérience dans le domaine du communautaire, mais il considérait que le communautaire, c'est plus des prestataires de services ou des sous-traitants. Alors, il y a une confusion, et je sais qu'on entend peu parler ce gouvernement du monde communautaire. J'espère qu'on aura l'occasion d'en débattre plus régulièrement parce que ça touche des milliers de personnes dans notre communauté.
J'aimerais aussi apporter à votre attention le nombre de gens qui travaillent à l'intérieur du milieu communautaire. Ne serait-ce qu'au Québec, nous avons 3 800 groupes communautaires à l'heure actuelle. Ce n'est pas des chiffres que je lance en l'air, mais il y a eu un rapport, une enquête qui a été faite des groupes communautaires, dans l'ensemble du territoire du Québec, au niveau des différentes régions, et l'ensemble des données qui ont été colligées ont démontré hors de tout doute à quel point l'action communautaire autonome fait partie maintenant de notre société, elle est intégrée dans notre société. Et, comme gouvernement, nous devrions... vous devriez les reconnaître à titre de partenaires à part entière, non pas comme des sous-traitants, mais comme des partenaires capables de prendre des décisions au même titre que l'ensemble des autres corporations dans notre système démocratique.
Alors, M. le Président, j'aimerais vous dire, à part des 3 800 groupes qui militent dans différents milieux pour donner des services et du soutien, du support, de l'écoute au niveau de nos commettants respectifs, comme députés, et en l'ensemble de la population, il y a 3 000 membres dans les groupes communautaires aussi et il y a plus de 25 000 emplois, principalement des femmes. Donc, à peu près plus ou moins les trois quarts des emplois, ce sont des femmes qui les occupent, et peut-être qu'il y a une sensibilité au niveau des femmes et aussi... Peut-être aussi, quand on regarde les salaires que l'on retrouve à l'intérieur des groupes communautaires, on peut peut-être penser que ça fait partie aussi du sort que l'on réserve plus souvent qu'autrement aux femmes dans notre société. Et, comme je le disais aussi précédemment, il y a plus de 1,3 million de personnes qui reçoivent des services à cause des groupes communautaires dans notre société.
n(15 h 30)n Donc, je pense que, oui, effectivement, nous devons reconnaître les groupes communautaires, avec toute l'implication que cela représente, non pas comme étant des sous-traitants de services, mais comme des partenaires à part entière, qui, grâce à leur spécificité, à leurs particularités, sont capables de rejoindre des clientèles où d'autres organismes ne pourront jamais les rejoindre.
J'aimerais aussi... vous démontrer aussi que l'action communautaire autonome, c'est plus que donner des services à moindre coût dans notre société. Il est urgent que le gouvernement du Québec le reconnaisse et que le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille s'en fasse le porte-parole auprès de ses collègues, surtout, comme je le disais antérieurement, auprès de son ministre de la Santé, qui me semble, après ses propos que l'on peut retrouver dans le journal Le Soleil d'aujourd'hui... semble un petit peu manquer de réflexion par rapport à l'action communautaire autonome, lorsqu'il dit qu'il admettait que «lorsque cela permettrait de rendre de meilleurs services à moindre coût, nous serons par ailleurs ouverts à une plus grande participation des secteurs privé, communautaire et coopératif pour la prestation de services». C'est une vision à courte vue du monde communautaire. J'espère que vous allez le rappeler à l'ordre un petit peu ou que vous lui donnerez des leçons particulières sur le monde du communautaire.
Ces travailleurs, comme je le disais, M. le Président, souvent, sont d'une générosité à l'endroit de leurs semblables, ils donnent des heures de travail, incontestablement, à des conditions précaires et sont constamment en recherche de financement, et ce, dans tous les domaines, afin de boucler les mois. Et on le sait, comme députés, on les voit régulièrement frapper à nos portes. Et plus particulièrement maintenant, aujourd'hui, alors que ce gouvernement, le gouvernement libéral, présentement, parle de réingénierie, on ne sait pas qu'est-ce qu'il adviendra de l'ensemble des groupes communautaires, quel sort leur réservera-t-on. Et ce que l'on sait, à l'heure actuelle, c'est que, plusieurs d'entre eux, le seul contact qu'ils peuvent avoir eu avec le gouvernement, présentement, c'est le contact des coupures. Alors, monsieur, ça ne pressent pas rien de bon pour l'avenir, en tout cas, hein?
Et j'aimerais bien que le ministre puisse nous rassurer en ce qui concerne ses orientations, et que la politique de reconnaissance de l'action communautaire que nous avions mise de l'avant puisse maintenant être une certitude pour l'ensemble des groupes communautaires et qu'on les rassure quant à leur avenir.
Et il faudrait peut-être rappeler, à un certain moment donné, au ministre de la Solidarité qu'il y a déjà eu ici, à cette Assemblée nationale, du côté de l'opposition, à l'époque, une ancienne députée qui était la députée libérale de Mercier, Nathalie Rochefort, qui demandait au gouvernement, à l'époque, à notre gouvernement, qui étions au pouvoir, de faire... de donner plus de ressources financières pour répondre aux nombreux besoins de leurs clientèles, besoins qui, je n'ai pas besoin de le rappeler, sont croissants. Et ça, elle l'avait dit en commission parlementaire, au printemps 2002.
Donc, M. le Président, je terminerai sur cette note. Je demande donc formellement au gouvernement de maintenir la politique de reconnaissance de l'action communautaire autonome et de s'engager dès maintenant à tout mettre en oeuvre pour que leur processus d'engineering, de démantèlement de l'État, n'affecte en rien le financement des organismes communautaires. Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. Maintenant, je cède la parole, toujours sur cette même motion, au ministre de la Solidarité sociale.
M. Claude Béchard
M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. Au nom du gouvernement du Québec, c'est avec plaisir que je joins ma voix à celle de la députée et des députés de l'opposition officielle pour souligner cette Journée de visibilité du mouvement d'action communautaire autonome.
Et je salue la motion de notre collègue de Marie-Victorin. Et ça me fait plaisir de mentionner quelques mots pour lui souligner que, évidemment, partout, dans toutes les régions du Québec, aujourd'hui, il y a plusieurs hommes et femmes qui se rassemblent pour interpeller l'ensemble de la société afin de nous sensibiliser aux actions solidaires et essentielles que posent les organismes communautaires, et ce, jour après jour.
Et je veux vous dire, vous m'avez demandé d'être à l'écoute, soyez assurés que le gouvernement non seulement est à l'écoute, mais on l'a été aussi au cours des derniers mois. Et, quand vous dites que vous ne nous avez pas entendus parler beaucoup de l'action communautaire, on a quand même rencontré des groupes à plusieurs reprises, on est en train de travailler avec eux sur plusieurs dossiers.
Et je vous dirais que, dans ce contexte-là, quand je suis arrivé comme ministre de l'Emploi, Solidarité sociale et Famille, la première activité que j'ai faite, que j'ai eu la chance de faire de façon officielle, était la remise des prix Hommage Bénévolat-Québec, avec le premier ministre, d'ailleurs, où on a eu l'occasion d'être, je dirais, en contact direct avec des représentantes et des représentants des organismes communautaires qui oeuvrent un peu partout au Québec. Et je vous dirais que la première chose qu'il faut souligner aujourd'hui, c'est leur générosité, leur altruisme et l'exceptionnelle qualité de leur contribution au développement social du Québec, qui non seulement m'ont impressionné, mais c'est toujours aussi, je dirais, enlevant de voir des gens qui sont aussi passionnés. Et la passion qu'ils ont dans ce qu'ils font, je pense que c'est un message pour nous, qu'ils nous envoient, de les appuyer et de les aider du mieux qu'on peut.
Évidemment, les organismes communautaires jouent un rôle primordial dans notre société, et leur engagement direct nous permet et leur permet d'être en contact avec la réalité du quotidien. Eux sont sur le terrain jour après jour, ils voient la misère, ils voient les bons côtés, ils ont des interventions chaque jour, de façon quotidienne, et ils répondent directement aux besoins des personnes, tout en s'adaptant bien sûr aux changements.
Je vous mentionnais qu'on les rencontrait, je les ai rencontrés en juin dernier. Quelques semaines après notre nomination, je rencontrais le Comité aviseur de l'action communautaire autonome. Ils nous ont fait part de leurs revendications, les organismes qu'il représente, et, je veux vous dire, je l'ai réitéré, l'engagement de notre gouvernement que le soutien à l'action communautaire autonome était une de nos priorités. C'est important de reconnaître leur juste valeur, leur expertise, leur implication tout en respectant ? tout en respectant ? leur autonomie, c'est bien important. Le gouvernement du Québec verse actuellement environ 530 millions de dollars aux organismes communautaires dans un esprit de transparence. Nous travaillons présentement... De transparence. Je sais que le député des Îles-de-la-Madeleine, c'est un mot qui le surprend toujours, «transparence», le mot «transparence».
Nous travaillons avec le Comité aviseur de l'action communautaire ? que j'ai encore rencontré il y a quelques semaines ? afin d'avoir une réflexion sur le soutien gouvernemental versé aux groupes communautaires. Et je n'ai pas besoin de vous le dire, vous le savez, c'est très compliqué, parce qu'on respecte, d'un côté, leur autonomie, les groupes communautaires sont là, mais, de l'autre, on dépense aussi beaucoup d'argent, le nombre d'organismes augmente. On a présentement avec le Comité aviseur une très bonne réflexion là-dessus pour voir, un, si on ne peut pas simplifier les choses, respecter les principes d'imputabilité, mais aussi respecter leurs principes d'autonomie et faire en sorte qu'ils ont la marge de manoeuvre pour se concentrer sur ce qu'ils ont à faire, sur ce qu'ils font de mieux, aider leurs concitoyens et concitoyennes, au lieu de passer énormément de temps à remplir des papiers puis se débattre dans les dédales, d'un côté puis de l'autre, des façons de fonctionner qui ont été mises en place par le gouvernement précédent.
Je tiens à vous rappeler aussi que je me suis engagé auprès du Comité aviseur à leur soumettre en novembre une proposition de plan d'action gouvernemental. Ce plan d'action là va contenir des orientations en ce qui a trait aux objectifs de reconnaissance, de transparence, de simplification, d'harmonisation sur lesquels nous entendons construire les relations qu'on entretient... qu'ils entretiennent avec les ministères, peu importe où ils sont. Je vous dirais aussi qu'on va poursuivre nos efforts afin de mieux connaître les réalités du milieu communautaire, afin de bien saisir leurs besoins et de cibler efficacement le soutien qu'on leur donne. Il est important d'assurer une certaine uniformité entre les mesures de soutien qui sont offertes par les différents ministères afin d'appuyer le travail d'entraide qu'ils accomplissent. Donc, je vous dirais, M. le Président, que je m'engage à proposer au milieu communautaire des actions réalistes, cohérentes, concertées avec eux dans le respect de nos capacités bien sûr au niveau financier.
En cette Journée nationale de visibilité de l'action communautaire autonome, je tiens à me joindre à vous pour souligner leur travail exceptionnel qu'ils effectuent, les représentants et représentantes des organismes communautaires, qui possèdent... ceux-ci qui possèdent les compétences et la capacité de répondre concrètement aux besoins du milieu et qui constituent, en ce sens, des acteurs vraiment privilégiés, des acteurs de choix et extrêmement importants pour le développement social du Québec. Merci.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le ministre. Ne voyant pas d'autre intervenant sur cette motion sans préavis, y a-t-il consentement pour que cette motion soit adoptée... c'est-à-dire, est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, cette motion est adoptée. Ça met fin à la rubrique motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions
Nous en sommes maintenant à avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Alors, M. le Président, permettez-moi de présenter les trois motions suivantes. D'abord:
Que la commission des institutions poursuive l'étude détaillée du projet de loi n° 6, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant la perception des amendes, aujourd'hui, après les affaires courantes ? c'est-à-dire maintenant ? jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
n(15 h 40)n Que, d'autre part, la commission des affaires sociales entreprenne l'étude du projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance, mardi, le 28 octobre 2003, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine; et
Que, finalement, la commission des institutions poursuive l'étude détaillée du projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur la justice administrative, mardi, le 28 octobre, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.
Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le leader du gouvernement. M. le leader de l'opposition?
M. Boisclair: Juste comprendre. Est-ce que le leader du gouvernement a été informé des obligations personnelles du député de Chicoutimi qui, de 9 h 30 à 12 h 30, normalement ne devrait pas être à la commission des institutions?
M. Dupuis: Oui, effectivement, M. le Président, on a eu des conversations à cet effet-là, et, pour des raisons qui sont des raisons d'ordre gouvernemental, nous avons choisi de maintenir l'avis tel que je viens de vous le mentionner.
M. Boisclair: ...M. le Président, qu'il s'agit là d'un précédent dont nous prenons bonne note.
M. Dupuis: Je voudrais tout de même signaler que... Dans le cas spécifique du député de Chicoutimi qui siège à la fois à la commission des institutions et qui siège aussi à la commission de la culture, puisque ce sont des responsabilités dont il a hérité de la part du chef de l'opposition, je veux simplement signaler ? et je sais que le leader de l'opposition, bon prince, conviendra avec nous que nous avons accommodé de façon régulière le député de Chicoutimi ? que nous comprenons qu'il a des responsabilités qu'il doit assumer. Mais, pour des raisons d'ordre gouvernemental, malheureusement, cette fois-ci, nous devons décliner cette demande-là, ce qui ne préjuge en rien de notre attitude pour l'avenir.
Le Vice-Président (M. Gendron): Je pense que les explications sont fournies.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Je suis à la rubrique, maintenant, puisque les avis sont donnés, Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Est-ce qu'il y a des... Alors, je ne vois pas de demandes de renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Alors, la présidence a deux avis à vous transmettre sur les travaux de l'Assemblée. D'abord, premier avis, je tiens à vous indiquer que, pour ce qui est du débat de fin de séance, il y aura un débat de fin de séance après la séance d'aujourd'hui, et c'est le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui sera questionné concernant les compensations versées aux producteurs bovins du Québec, après les affaires courantes.
Deuxième avis de la présidence. Je vous avise que l'interpellation prévue pour le vendredi 31 octobre prochain portera sur le sujet suivant: L'impact de la réingénierie sur les régions du Québec. M. le député de Blainville s'adressera alors à M. le ministre du Développement économique et régional.
Affaires du jour
Affaires prioritaires
Reprise du débat sur la motion de censure
proposant que l'Assemblée dénonce le gouvernement
pour l'ensemble de ses politiques conservatrices
À ce moment-ci, les affaires courantes étant terminées, nous allons maintenant passer aux affaires du jour, et nous revenons au sujet prioritaire qui était la motion de censure de l'opposition officielle, et le député de Mille-Îles avait commencé son intervention...
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Le député de Laval-des-Rapides, tout à fait, excusez-moi. Le député de Laval-des-Rapides avait commencé son intervention, ne l'avait pas terminée. Donc, je cède la parole au député de Laval-des-Rapides.
M. Alain Paquet (suite)
M. Paquet: Merci, M. le Président. Alors, comme j'avais commencé ce matin, on a dit: Lorsqu'on parle de revoir les façons de faire de l'État québécois, l'objectif essentiel est de s'assurer d'avoir les services de meilleure qualité et de s'assurer d'augmenter le niveau de vie de l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Or, comme j'expliquais aussi, pour le gouvernement précédent, on privilégiait sûrement beaucoup plus les structures que les services.
J'ai parlé de millefeuilles de programmes. Lorsqu'un programme ne fonctionnait pas, qu'est-ce qu'on faisait? On créait un nouveau programme, une nouvelle structure, et le millefeuilles est rendu, de toute façon, très sec, très épais et sans beaucoup de goût, par ailleurs, pour les Québécois.
Et revoir les façons de faire, le moderniser, ce n'est pas une question budgétaire. Quand bien même que nous aurions un surplus budgétaire de 500 millions ou de 1 milliard de dollars, il faudrait quand même se poser les mêmes questions, revoir les façons de faire pour s'assurer que les gens en ont pour leur argent et qu'on réponde vraiment aux besoins des citoyens et des citoyennes de Laval-des-Rapides et de l'ensemble du Québec.
Évidemment, on conviendra que ce n'est pas le cas qu'on a un surplus de 500 millions ou de 1 milliard de dollars, parce que la population du Québec comprend aussi très bien l'impasse financière dont l'auteur était l'ancien gouvernement et le chef de l'opposition, avec une impasse financière de 4,3 milliards en avril dernier.
Évidemment, c'est aussi contraire, contraire à la vision passive du chef de l'opposition officielle de vouloir revoir des structures, lui-même qui a présidé à la création de 60 structures, 60 organismes en 60 mois, en cinq ans ? une par mois. Mais, pourtant, l'interventionnisme à outrance vient étouffer l'initiative, il vient nuire à l'entrepreneurship et vient miner la confiance des citoyens en eux-mêmes.
L'Irlande avait très bien compris cela. Le chef de l'opposition officielle, ce matin, voulait parler de l'Irlande; on peut en parler, de l'Irlande. L'Irlande avait tellement compris ça qu'ils ont changé leurs façons de faire, qui étaient beaucoup plus proches de celles de l'ancien gouvernement, pour s'approcher des façons de faire que nous, nous imprimons au Québec.
Les Québécois, demander qu'ils soient moins taxés, ce n'est pas un dogme, c'est une question d'évidence, une question d'être branchés sur la réalité de nos concitoyens. Sans une révision des façons de faire, sans une réduction du fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises, le Québec serait condamné à une croissance économique réelle qui serait anémique, ce qui veut dire une croissance économique réelle qui serait insuffisante pour permettre aux jeunes, pour permettre aux familles de contribuer à la création de la richesse et à retirer les fruits de leur labeur et de leurs investissements. Ça voudrait dire aussi que ça ne permettrait pas aux citoyens, et aux personnes âgées en particulier, d'obtenir des services de santé de qualité. Alors, lorsqu'on parle de réduire les impôts dans les années qui viennent, c'est de permettre de donner du souffle, de l'oxygène pour augmenter la croissance et la richesse de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, et de lutter effectivement contre la pauvreté, et de s'assurer de pouvoir donner des services.
Le chef de l'opposition officielle, ce matin, se disait: Oui, mais, écoutez, je les ai baissés, les impôts, de 15 milliards. Il nous disait ça ce matin. Je dois avouer maintenant que l'ancien professeur de sciences administratives de l'UQAM a besoin d'un rafraîchissement d'un professeur de sciences économiques de l'UQAM. Pourquoi? Parce que, lorsque le chef de l'opposition parlait de baisses d'impôts de 15 milliards, évidemment, première erreur, il n'a pas parlé de la hausse importante qu'il a faite dans les taxes sur la consommation, la tarification, la réduction des dépenses admissibles qui sont déductibles d'impôts. Il n'a pas parlé de la réduction substantielle, voire pratiquement l'abolition, en tout cas, une réduction très, très substantielle des allocations familiales pour les familles. Ça, il n'en a pas parlé.
Deuxième erreur du chef de l'opposition officielle, c'est que, lorsqu'il parle de 15 milliards, ce qu'il compte, ce qu'il dit, bien, une année, il a baissé de 1 milliard, la deuxième, il a baissé d'un deuxième milliard. Il dit donc: Une baisse de 2 milliards la deuxième année, donc un plus deux fait trois. La troisième année, il rebaisse d'un autre milliard, un plus deux plus trois, et on continue, plus quatre, plus cinq, au bout de cinq ans, il dit: Ça fait 15 milliards. Alors, il suppose, et c'est une erreur importante d'un point de vue économique, une erreur de base, il suppose que les contribuables québécois ont redépensé le même argent année après année. Ils ont dépensé 1 milliard la première, ils l'ont redépensé une deuxième fois la deuxième, une troisième fois la troisième, et ainsi de suite. Ce n'était pas une baisse d'impôts de 15 milliards.
Je ne doute pas, je ne doute pas une seconde des talents du chef de l'opposition officielle en termes de comptabilité créatrice. Il en a fait la preuve à plusieurs égards. Un exemple. Par exemple, si on prenait cette façon de calculer ces baisses d'impôts qui n'en étaient pas et qu'on appliquait la même méthode de calcul du chef de l'opposition officielle aux 2 000 jours pour l'indépendance, pour le prochain référendum, bien, une bonne nouvelle pour les Québécois et les Québécoises, une moins bonne pour les membres du parti du chef de l'opposition, c'est que, si on compte de la même façon ces 2 000 jours, ça veut dire qu'il faudrait compter une journée, plus deux journées, plus trois journées, et ainsi de suite jusqu'à plus 2 000, ce qui fait que l'indépendance n'arrivera pas avant 2 001 000 jours, soit 5 482 années. Bien, c'est la façon dont le chef de l'opposition officielle nous a habitués à compter et à jongler avec les finances publiques, et ça explique évidemment les pitreries du temps qu'on a eues en matière de finances publiques de la Caisse de dépôt puis de la SGF.
Le Québec que nous avons en tête, c'est un Québec capable de briller parmi les meilleurs, un Québec qui va pleinement se réaliser et qui va pleinement réaliser ses 7 millions d'ambitions, et ce n'est pas moi qui ai dit ça, c'est le premier ministre du Québec, Jean Charest, à Laval, il y a quelques semaines. Alors, c'est ça qui est la vision qui nous anime comme gouvernement, un Québec qui peut faire encore mieux grâce à son potentiel, qui va pouvoir réaliser pleinement son potentiel. Mais, pour ce faire, il faut dégager une marge de manoeuvre, dégager une marge de manoeuvre pour les citoyens de classe moyenne, ceux qui sont les plus taxés en Amérique du Nord. Il faut dégager une marge de manoeuvre pour augmenter le niveau de vie de l'ensemble des Québécois, des gens à faibles revenus, des gens sur l'aide sociale et de l'ensemble des Québécois et des Québécoises.
Pour ce faire, il faut mettre en place un environnement économique qui est propice à l'investissement privé et public. Et ça veut dire quoi? Bien, pourquoi? Parce que l'investissement privé et public, c'est ce qui est le signal de la capacité productive de l'économie dans l'avenir. Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire plus de revenus, des plus hauts salaires, ça veut dire plus d'emplois pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. La revue The Economist dernièrement disait justement que le reste du Canada devrait suivre, le reste du Canada devrait suivre l'exemple que le Québec est en train de prendre depuis le 14 avril.
n(15 h 50)n Et ça veut dire aussi des chiffres. On parle de réalité économique: Quelles sont les perspectives d'investissements privés au Canada, d'après Statistique Canada, pour 2003? Bien, d'abord, disons ce qu'elles étaient en 2002. En 2002, la croissance des investissements privés au Québec a été de 1,9 %. En 2003, quelle a été cette croissance? Et il ne faut pas oublier, M. le Président, que l'investissement privé aujourd'hui, cette année, dépend de ce que les investisseurs s'attendent, dans l'avenir, en termes de climat, d'environnement économique. Ça dépend donc de ce qu'on va faire, parce que ça dépend de la profitabilité de ces investissements dans l'avenir, parce que l'entreprise investit maintenant, mais ça va augmenter leur production dans les années qui viennent. Or, je l'ai dit, en 2002, la croissance des investissements privés au Québec a été de 1,9 %, mais les perspectives pour 2003, c'est 9,7 %. 9,7 %, c'est cinq fois... 5,1 une fois plus fort qu'en 2002, M. le Président, et ça, c'est signe d'avenir, c'est très encourageant pour l'économie québécoise et pour la marge de manoeuvre que nous allons dégager pour le Québec.
Et, M. le Président, lorsqu'on parle de revoir les façons de faire, ça veut dire quoi, en santé, par exemple? Le ministre de la Santé et des Services sociaux l'a expliqué dans certains discours dans les dernières semaines. Il a parlé, par exemple, évidemment de mise en place de réseaux intégrés d'établissements. Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire qu'au lieu d'avoir des structures qui ne communiquent pas entre elles, on a des structures qui communiquent, s'assurer que les services soient plus accessibles, plus continus, moins fragmentés. Ça veut dire aussi qu'on veut libérer le personnel médical, les infirmières, libérer les médecins de certaines tâches de paperasse, dont était très friand l'ancien gouvernement, pour leur laisser plutôt plus de temps pour soigner les patients. Ça, c'est une façon de faire très différente du chef de l'opposition officielle et de l'ancien gouvernement. Je comprends que ça change les choses, ça change les façons de faire, mais les citoyens vont en juger.
Mais ça veut dire aussi revoir les façons de faire, qu'on ne doit pas improviser, comme le gouvernement précédent l'a fait lorsqu'il a mis à la retraite de façon massive 1 500 médecins et 4 000 infirmières. Ça a été une des décisions les plus tragiques de l'histoire du Québec, et ça, c'est de la réalité.
Mais faire les choses différemment veut dire que nous allons procéder avec détermination, mais en revoyant objectivement l'ensemble des activités gouvernementales. Nous n'allons pas précipiter les choses. Évidemment, si on avait dit: Ah! en six mois, tout est changé, les mêmes défenseurs du statu quo qu'on voit chez nos amis d'en face auraient dit: Mais c'est épouvantable, ils précipitent les choses, ils font ça à l'improviste, ça n'a pas de bon sens. Nous, ce n'est pas une approche dogmatique, nous avons tracé le chemin, nous l'avons dit plus de six mois avant l'élection, et c'est le fruit de travail qui date de plus de cinq ans à l'intérieur du Parti libéral du Québec: ça a été débattu, discuté vis-à-vis la population. Et nous avons dit: Voici notre plan de match, nous allons regarder les choses objectivement, avec rigueur.
Mais il faut arrêter de se mettre la tête dans le sable ou de regarder en arrière, comme le fait si bien le chef de l'opposition officielle. Il faut éliminer les dédoublements entre les ministères, entre les organismes, entre les programmes pour s'assurer que vraiment ces programmes répondent aux besoins qui sont importants... auxquels il est important de répondre. À l'évidence, les recettes du chef de l'opposition officielle pour la soupe à l'alphabet d'organismes et d'entreprises publiques et les recettes pour les millefeuilles de structures et de programmes ne nourrissent pas le niveau de vie des Québécois et de l'ensemble des citoyens du Québec.
Alors, quand nous parlons de revoir les choses, de refaire les choses différemment, les citoyens de Laval-des-Rapides et de tout le Québec ont très clairement exprimé leur rejet du statu quo et de la vision passée d'un gouvernement qui pensait savoir mieux qu'eux ce qu'il fallait faire. Ils ont rejeté aussi les pertes de la SGF, les subventions ou crédits d'impôt pour déménager des emplois, avec des pertes élevées assumées par l'ensemble des contribuables. Ils ont rejeté les primes et les bonus pour les dirigeants de sociétés d'État qui font aussi des pertes.
Alors, une chose est claire, l'approche libérale du gouvernement est très différente de la vraie approche conservatrice de l'opposition officielle, parce qu'il faudrait avoir un esprit béatement conservateur pour mettre à l'abri d'une analyse rigoureuse des pratiques qui ont été instaurées dans un contexte différent il y a 40 ans simplement parce qu'elles ont été favorisées par ses prédécesseurs. Certaines de ces pratiques ont été un succès et sont encore utiles. Oui, nous avons le courage de les conserver. Mais celles qui ne fonctionnent pas, nous allons les revoir parce que c'est les citoyens du Québec qui nous l'ont demandé et qui nous le demandent. Et c'est ce que les citoyens de Laval-des-Rapides et de tout le Québec ont compris et ont demandé à leur gouvernement, le gouvernement qu'ils ont élu le 14 avril dernier, et une chose est certaine, M. le Président, nous allons livrer la marchandise. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. Maintenant, je reconnais M. le député de Hull.
M. Cholette: ...en vertu de 213, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Je pensais que c'était pour l'intervention. Alors, monsieur... Un instant! Alors, M. le député, en vertu de 213, il faut que je demande si vous acceptez qu'un de vos collègues vous pose une question en vertu de 213.
M. Paquet: Certainement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, allez, M. le député de Hull. Je vous rappelle quand même le règlement: il faut que la question soit assez rapidement posée et que la réponse soit la plus brève possible. Alors, M. le député.
M. Cholette: Merci, M. le Président. Parce qu'il y a quelque chose de très intéressant que mon collègue a annoncé à l'Assemblée. Si j'ai bien compris, pour faire une analogie, si je gagne... selon la comptabilité de l'ancien gouvernement, si je gagne 50 000 $ aujourd'hui, puis j'ai 1 000 $ d'augmentation par année pendant trois ans, puis je gagne donc 53 000 $ à la fin, est-ce que ça veut dire que le Parti québécois considère que j'ai eu une augmentation de 6 000 $ puis que, les libéraux, on pense que c'est une augmentation de 3 000 $? Est-ce que c'est ça, que j'ai bien compris, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Gendron): La question est posée. M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: M. le député de Hull a très bien compris la réponse... il a très bien compris la façon de calculer du chef de l'opposition officielle, effectivement.
Le Vice-Président (M. Gendron): Merci. M. le député des Îles-de-la-Madeleine, pour son intervention sur la motion de censure. Alors, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Maxime Arseneau
M. Arseneau: Merci, M. le Président. Maintenant que les députés libéraux d'en face se sont compris entre eux ? c'est très bien ? je pense que, à mon tour, M. le Président, je vais vous dire que je suis extrêmement heureux de pouvoir intervenir sur cette motion du chef de l'opposition, une motion pour dénoncer un gouvernement effectivement qui se dit libéral, qui porte le nom de libéral, pour dénoncer ses politiques qui, de toute évidence, et ça a été abordé par le député de Laval-des-Rapides, a des saveurs et des connotations de gouvernement conservateur. Et je vais en parler brièvement, de façon à démontrer ce que je dis.
M. le Président, en campagne électorale, les libéraux ont fait croire à la population qu'ils défendraient un minimum de valeurs libérales. En fait, le gros a porté sur les priorités qui seraient la santé et l'éducation. Évidemment, c'est tout à fait logique et normal d'investir en santé. Quelle ne fut pas ma surprise, M. le Président, de voir que, dès l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement libéral, les sommes prévues en santé étaient tout à fait identiques à ce qui avait été prévu par le gouvernement précédent. Priorité: où est-elle, la priorité? Où s'est sentie cette priorité pour la santé, depuis que ce gouvernement assume les décisions en ce qui concerne l'État du Québec? Tous les États modernes consacrent une part importante de leur budget et de leur enveloppe à la santé. C'est logique et normal. C'est prioritaire, c'est bien certain. Mais on n'a pas vu de priorité libérale, là.
L'éducation, M. le Président, je veux parler de l'éducation. C'était une priorité pour les libéraux, mais, quand on regarde les décisions qui ont été prises, on n'a rien de nouveau, il n'y a rien d'additionnel qui a été donné au secteur de l'éducation. Il y avait des promesses qui concernaient le maintien des tarifs de 5 $ pour les services de garde pour toutes les familles, la gratuité des médicaments pour les personnes âgées et les personnes démunies ? ça compte, ça, M. le Président, quand on parle de ça en campagne électorale ? services à domicile pour les personnes âgées. Or, depuis le 14 avril, qu'est-ce que les citoyens et les citoyennes du Québec entendent de ce nouveau gouvernement? Ils sont confrontés à une nouvelle réalité, celle d'un gouvernement qui se déchire, qui se perd entre des priorités qui seraient des priorités libérales, dans le discours, et des gestes et des décisions qui vont beaucoup plus du côté de mesures conservatrices, de droite qu'on pourrait dire.
M. le Président, ce n'est pas un simple discours ou ce n'est pas une simple discussion sémantique sur libéral et conservateur, et la droite et la gauche. Ce sont des gestes qui ont été posés par ce gouvernement qu'il faut regarder, qu'il faut voir sous l'éclairage des réalités et des attentes réelles des Québécois, en regard des décisions et des gestes qu'ils ont posés le 14 avril. Parce que les gestes de ce gouvernement vont du côté du démantèlement de l'État, des baisses d'impôts à tout prix. On sait, M. le Président, qui a gagné, dans ce discours ou dans ce déchirement. Le député de Laval-des-Rapides parlait tantôt des réalisations du gouvernement précédent en regard des baisses d'impôts; c'était une réalité, mais, en même temps, il fallait gérer de façon équilibrée, de façon normale, les finances publiques du Québec.
n(16 heures)n Qu'on revoie certains programmes, M. le Président, c'est tout à fait logique, c'est tout à fait légitime. Mais qu'on revoie le fonctionnement de l'État pour diminuer les services aux citoyens, là, ce sont des gestes et des mesures qui ne sont pas des mesures libérales, qui sont des mesures néolibérales, conservatrices, de droite.
M. le Président, si on prend une des deux priorités des libéraux, l'éducation, regardons les gestes qui ont été posés du côté de l'éducation. Bien, moi, je vous dis, M. le Président, je sais que la priorité n'y est pas, qu'on peut même constater une absence de vision de ce gouvernement. L'abandon de l'éducation par ce gouvernement, c'est ça qui caractérise le gouvernement libéral conservateur en place actuellement.
Il faut manquer de vision, M. le Président, pour supprimer l'enveloppe allant diminuer les frais chargés aux parents ? 15 millions de coupures ? surtout lorsque cette enveloppe était destinée en priorité aux parents provenant des milieux défavorisés.
Il faut manquer de vision, M. le Président, pour abolir l'enveloppe de 24 millions allant au plan de réussite dans les écoles. Si on parle de pauvreté, de diminuer la pauvreté, de donner la chance aux citoyens du Québec d'améliorer leurs conditions matérielles et sociales, d'être plus libres finalement, c'est par l'éducation et la réussite.
Il faut manquer de vision, M. le Président, pour abolir ce qui était prévu comme programme justement, le 10 millions pour que «ça bouge après l'école», pour que ces structures, que ces organisations servent aussi dans les communautés, M. le Président, dans toutes les régions du Québec, alors que, après 3 heures et quart ? après 16 heures, comme on dit ? elles sont vides.
La plateforme libérale, M. le Président, s'appelait Égalité des chances et réussite en éducation. Bien, je dis: On est loin du compte, comme on le constate, et ça s'explique par des choix de valeurs de ce gouvernement. Que dire des cégeps dont la présence en région, M. le Président ? et vous le savez, chez vous, même ? des centres d'études collégiaux dans les régions du Québec sont un levier de développement économique? Ils sont coupés de 30 millions sur deux ans. Même si le gouvernement ou les libéraux à l'époque ? avant de devenir conservateurs ? s'étaient engagés à les développer, les centres collégiaux de transfert technologique subissent les effets d'un moratoire sur le développement alors que c'était un outil pour les régions et leur développement économique.
Je veux, M. le Président, parce que je ne veux pas prendre tout le temps de cette Chambre, mais je veux absolument dire un mot aussi sur ce qu'on a réservé à l'alphabétisation, aux groupes d'alphabétisation. Loin des préoccupations libérales, M. le Président, ces groupes doivent actuellement absorber les effets de ce qu'on pourrait appeler une paralysie administrative au niveau du Conseil du trésor, très occupé bien sûr à charcuter et à prévoir comment on va toucher à cet élément essentiel du développement du Québec qu'est l'État du Québec, le gouvernement du Québec. Alors, quand on gère, M. le Président, les groupes populaires, communautaires comme on gère les multinationales, on n'est plus libéral. On n'est plus libéral, on est conservateur et on est même ultraconservateur.
M. le Président, je veux aussi aborder cette question parce qu'elle est essentielle, elle est fondamentale, elle touche aussi mes responsabilités comme critique de l'opposition officielle en matière d'emploi. J'écoutais précédemment le député de Laval-des-Rapides qui disait: On va prendre notre temps, on n'ira pas trop vite; on va regarder systématiquement, objectivement tous les programmes, et tout ça.
Je regarde un des programmes qui touchent à l'éducation, à la formation. Cette loi du 1 %, cette loi n° 90 qui permettait aux travailleurs et aux travailleuses du Québec, en grande partie dans des PME, alors que beaucoup de ces travailleurs-là ont des statuts précaires, n'ont aucune sécurité d'emploi, ça leur permettait d'assurer une amélioration de leur formation dans des formations transférables. On n'a pas mis de temps, M. le Président, a déposer un amendement réglementaire de façon à ? disons-le carrément ? faire en sorte d'annuler complètement les objectifs de cette loi. Où était la priorité, M. le Président, à ce moment-là? Quelle était l'urgence de procéder de telle façon? Où étaient les consultations de la Commission des partenaires du marché du travail, de ces gens qui font actuellement des expériences pour tenter de voir avec les PME et les petites entreprises s'il n'y a pas lieu de diminuer, oui, l'effort que ça demande aux petites entreprises, mais pour avoir du personnel plus qualifié pour faire en sorte que le ministre de la Solidarité sociale, M. le Président, ait moins de sommes à mettre pour réorienter ces gens vers l'emploi? N'aurait-il pas fallu, dans ce cas, M. le Président, prendre plus de temps? Oui. Mais ce gouvernement est pressé dans certaines mesures.
Quant aux universités, M. le Président, bien, on verra avec la commission de l'éducation. Mais leur financement sera revu, certes, dans le cadre d'une commission parlementaire. Souhaitons, et nous y veillerons, M. le Président, que ce ne soit pas là qu'un prétexte de réingénierie de l'État, donc de compressions, et donc probablement prétexte à un plus grand désengagement de l'État. Mais, au niveau de l'éducation, M. le Président, nous attendons encore la position gouvernementale à cet effet. Et beaucoup de groupes s'inquiètent en termes de choix sociaux que nous avons faits au Québec.
M. le Président, la plateforme électorale du Parti libéral, en campagne électorale, disait Ensemble, réinventons le Québec. On s'attendait donc, les Québécois et les Québécoises, à un gouvernement qui agirait sur le mode consultatif, sur le mode des consensus, sur le mode d'un regard dans les groupes sociaux pour connaître leurs opinions, leurs points de vue, pour s'informer aussi. Ce n'est pas, M. le Président, parce qu'on est membre nécessairement d'une chambre de commerce qu'on sait exactement ce qui est bon pour l'ensemble des entreprises ou des travailleurs du Québec. La population ne savait pas qu'«ensemble» ça voulait dire «à huis clos» au Conseil des ministres, en catimini.
M. le Président, j'ai la certitude que, lorsque l'on questionne les programmes, lorsque l'on questionne les mesures, lorsque l'on dit: Il faut revoir l'intervention de l'État, l'intervention de l'État est négative dans les régions, pour le développement de l'économie, j'ai la certitude qu'il y a une méconnaissance de la réalité des régions du Québec, M. le Président. Vous êtes vous-même d'une région, je suis personnellement, le comté des Îles-de-la-Madeleine, d'une région très éloignée, la Gaspésie et les Îles, et je peux vous dire que, sans l'intervention de l'État, sans un État qui est en mesure de redistribuer minimalement non seulement la richesse, mais de redistribuer l'espoir à l'ensemble des citoyens du Québec, l'État n'est plus un État libéral, l'État est devenu un État ultraconservateur, d'extrême droite, où le citoyen est laissé à lui-même, où les régions les plus démunies, les régions les plus en difficulté sont laissées à elles-mêmes.
Et j'ai la certitude que, n'eût été... et que, sans l'intervention de l'État dans des programmes qu'il faut revoir, dans des programmes adaptés aux régions du Québec, que l'économie non seulement ne va pas croître, l'économie va régresser. La richesse va s'accumuler dans moins de mains, si on veut, et l'État, à ce moment-là, aura abdiqué et ne jouera pas son rôle de répartiteur de richesses et d'espoir pour la collectivité. Il n'y a pas de miracle, M. le Président. Le gouvernement, quel qu'il soit, n'invente pas, ne crée pas nécessairement d'argent. Il prélève des impôts et des taxes sur les citoyens et les entreprises, mais les citoyens en paient une bonne part, et l'État a la responsabilité de gérer ces sommes qu'il prélève, en équilibre, en prévoyant des programmes et tout en prenant soin de défendre les plus démunis de notre société.
n(16 h 10)n M. le Président, je dirais, en terminant, que ce discours, le discours de ce gouvernement, la plateforme électorale de ce gouvernement, maintenant, quand on dit: Ensemble, réinventons sur un mode consultatif, était d'apparence libérale. Mais, quand ils disaient... Et, de par les gestes qu'ils ont posés depuis qu'ils sont au pouvoir, on ne retrouve pas cette sensibilité, ce partage.
Et, lorsqu'ils disaient qu'ils étaient prêts, je dirais que, dans certains secteurs, ils étaient prêts. Les attaques ont été virulentes. L'article 45 du Code du travail, le ministre nous l'a dit en Chambre, hier, en réponse à une question, qu'il voulait s'attaquer à l'article 45 du Code du travail. Ah! là, il était prêt. Sur la loi du 1 %, alors là ils étaient prêts, M. le Président. Dans certains gestes, dans certaines actions où il y a précipitation, on dénote un parti pris, M. le Président, qui n'est pas le parti pris libéral, comme beaucoup dans cette Chambre ont été libéraux avant de devenir membres d'autres formations politiques. Non, M. le Président, ces gens-là n'étaient pas prêts.
Et je voudrais, en terminant... parce que, vous savez, M. le Président, je tâche de m'intéresser à toutes les structures, à tous les organismes qu'on a ici, dans notre Assemblée nationale du Québec, on a aussi une télévision nationale. Et j'écoutais une émission qui parle des parlementaires ? forcément, qu'on doit écouter ? et j'entendais très bien le député de Brome-Missisquoi, qui aurait toute latitude à siéger dans cette Chambre, M. le Président. Dans ses propos, je devinais les propos d'un homme qui ne reconnaissait plus le Parti libéral du Québec. Et je dois dire que cet homme, que je respecte, le député de Brome-Missisquoi, puisqu'il était mon vis-à-vis alors qu'on était dans des sièges inversés, est un homme honorable, respectable, un libéral engagé, profond. Je dois lui dire que je lui donnais raison, M. le Président.
Alors, un autre libéral, un discours populiste en campagne électorale, des gestes d'un gouvernement de droite, M. le Président. Et voilà pourquoi il fallait déposer cette motion, celle du chef de l'opposition. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Et je reconnais le prochain intervenant. Alors, je vois le député des Chutes-de-Chaudière qui se lève. Alors, à vous la parole, M. le député des Chutes-de-Chaudière, sur cette même motion de censure. À vous.
M. Picard: Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): En vous rappelant cependant, à vous, parce que c'était plus facile de déterminer le temps, qu'il ne vous reste que neuf minutes. Pas de problème, monsieur, je peux vous dire qu'il vous reste neuf minutes, à la formation des indépendants.
M. Picard: O.K. Mais là on n'a pas grugé le neuf minutes, là, notre intervention?
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, non.
M. Picard: C'est beau.
Le Vice-Président (M. Gendron): Non, non. Non, non. Je vous indique que vous avez neuf minutes au nom du groupe des indépendants.
M. Picard: Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, allez.
M. Marc Picard
M. Picard: Il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui, en cette Chambre, dans le cadre du débat sur la motion de censure qui se lit, et je cite:
«Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement libéral pour l'ensemble de ses politiques conservatrices.» Mais de quelles politiques dites conservatrices parle-t-on vraiment? M. le Président, est-ce que de proposer d'augmenter les tarifs d'Hydro-Québec, c'est une politique conservatrice? Non.
Est-ce que d'augmenter les primes d'assurance médicaments, c'est une politique conservatrice? Non.
Est-ce que d'augmenter les frais de garderie, c'est une politique conservatrice? Non.
Est-ce que d'abolir le «no fault» et d'augmenter ainsi les primes d'assurance automobile, c'est une politique conservatrice? Non.
Est-ce que d'augmenter les droits d'immatriculation pour financer le transport en commun, c'est une politique conservatrice? Non.
Est-ce que d'augmenter la taxe sur l'essence, c'est une politique conservatrice? Non.
Est-ce que d'augmenter les laissez-passer mensuels pour le transport en commun, c'est une politique conservatrice? Non.
Est-ce que de vouloir partitionner les villes québécoises, c'est une politique conservatrice? Non.
Est-ce que de prévoir plus de fonctionnaires à l'emploi de l'État québécois l'an prochain qu'on en a cette année, est-ce une politique conservatrice? Non.
M. le Président, devant cette petite liste, un constat s'impose. Oui, il y a bien des raisons de dénoncer et censurer l'actuel gouvernement pour ses politiques, mais encore faut-il trouver le qualificatif juste pour le faire. Ces politiques ne sont pas cohérentes, se font sur le dos de la classe moyenne.
Évidemment, certains diront que le discours du gouvernement est parfois évocateur et laisse miroiter des politiques conservatrices telles que les baisses d'impôts et le dégraissage de la machine bureaucratique. Malheureusement pour les contribuables québécois, les beaux discours gouvernementaux n'ont pas été traduits en politiques gouvernementales. Au contraire, pendant que les libéraux font saliver la classe moyenne avec d'hypothétiques baisses d'impôts, les libéraux nous pigent dans les poches à coup de dizaines de millions de dollars de nouvelles augmentations de taxes, de tarifs ou de frais de toutes sortes.
D'ailleurs, en éditorial hier, l'éditorialiste en chef de La Presse, après avoir rappelé le libellé de la motion débattue aujourd'hui, André Pratte demandait, et je cite:
«L'ensemble de ses politiques conservatrices?
«Quelles politiques? Que nous vaut[...] ? ce levier ? de boucliers de la part du Parti québécois, des syndicats et des groupes communautaires? Rien. Le gouvernement[...] ? libéral ? n'a ? pas ? encore déposé aucun projet concret. Tout au plus a-t-il fait part d'assez vagues intentions. La réingénierie? Mettra-t-on à la porte 50 000 fonctionnaires ou se[...] ? contenterons-nous ? de quelques projets-pilotes de partenariat public-privé? Personne ne le sait. «Le Code du travail? Les libéraux ont dit qu'ils amenderaient l'article 45 encadrant la sous-traitance. Mais s'agira-t-il d'amendements importants ou mineurs? Mystère.» Fin de la citation.
Effectivement, au fil des semaines, au fil des derniers mois, les intentions gouvernementales sont devenues de plus en plus vagues, de plus en plus confuses, de plus en plus incohérentes et, surtout, de plus en plus néfastes pour la classe moyenne. Je pense que l'ensemble des observateurs avertis de la scène politique québécoise conviendront avec moi qu'on aurait tous souhaité dénoncer des politiques libérales qui attaquent de plein fouet la classe moyenne. Mais, en utilisant le terme «conservateur» pour qualifier les politiques libérales, les péquistes semblent avoir trouvé leur définition du mot «conservateur» dans le même dictionnaire que l'actuel premier ministre. D'abord, le gouvernement qui nous parle de réingénierie, alors qu'il aurait fallu parler de reconfiguration. Et là l'opposition péquiste qui parle de politiques conservatrices, alors qu'il aurait fallu parler de politiques incohérentes, confuses, transpirant l'improvisation.
M. le Président, on juge un arbre à ses fruits. Bien sûr, le gouvernement libéral a parlé un peu comme un adéquiste, mais, dans le concret, il a géré comme un péquiste. Il parle d'assainir les finances publiques, de baisser les impôts, de défendre la classe moyenne. En réalité, il augmente les taxes, a comme priorité d'alimenter les chicanes linguistiques à Montréal, il continue à faire augmenter la taille de la fonction publique.
D'ailleurs, n'y a-t-il pas quelque chose d'assez ironique dans le fait que les péquistes nous ont présenté hier, il y a à peine 24 heures, une motion pour réclamer que le premier ministre aille comparaître devant la commission des institutions afin d'expliquer son projet confus de réingénierie de l'État québécois? 24 heures plus tard, nous voici dans les mêmes lieux, avec une nouvelle motion, présentée encore par le Parti québécois, mais qui réclame cette fois-ci qu'on dénonce les politiques conservatrices du gouvernement. Comment le Parti québécois peut-il soulever judicieusement, comme il l'a fait hier, que les intentions du gouvernement sont confuses et demander au premier ministre de venir expliquer ce qu'il a en tête et, moins de 24 heures plus tard, se revirer de bord et venir dénoncer l'ensemble des politiques conservatrices du gouvernement? C'est aussi incohérent et confus que le Parti libéral.
Hier, André Pratte, que j'ai cité plus tôt, invitait les péquistes à se calmer un peu. Permettez-moi aujourd'hui de leur demander respectueusement de descendre de leurs grands chevaux et de se joindre à nous, de l'Action démocratique du Québec, afin de s'assurer que le présent gouvernement clarifie ses intentions et présente enfin des projets concrets. L'heure des lettres ouvertes et des discours creux est terminée; le temps de passer à l'action est venu. Merci, M. le Président.
n(16 h 20)nLe Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Maintenant, je cède la parole à Mme la ministre, oui, la présidente du Conseil du trésor. Mais, avant, je voulais lui indiquer qu'à sa formation politique il ne reste que 19 minutes. À l'opposition officielle. Ah, je m'excuse! J'ai fait une erreur. C'est à l'opposition officielle qu'il reste 19 minutes. Alors...
Oui, madame, vous avez tout à fait le temps qu'il faut, et on vous l'indiquera à la fin de votre intervention. Je m'excuse. Le 19 minutes, c'est l'opposition officielle, et, comme vous êtes au gouvernement, ça ne vous regarde pas. Alors, Mme la ministre.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, bien sûr, vous imaginez que je suis très contente de pouvoir participer à ce débat et je suis d'autant plus contente et confiante, M. le Président, que je suis très, très fière de la démarche que nous suivons.
Mais, comme on s'interroge aujourd'hui à savoir si nos positions appartiennent toujours à l'école libérale, je vais nous poser quelques questions. Qu'est-ce qui est libéral et qui est-ce qui est conservateur?
Moi, je dois vous dire, M. le Président, je me demande, je me pose la question: est-ce que d'être témoin que la Caisse de dépôt et de placement du Québec a perdu 13 milliards de dollars, ça, c'est social-démocrate? Dans mon école à moi, ce n'est pas vrai. Est-ce que, d'avoir dépensé et de s'engager à dépenser 3 milliards de dollars pour les cités du multibéton... Rappelez-vous les cités du commerce électronique, les cités du multimédia et tout ce flafla pour déménager des entreprises d'un coin de rue à l'autre, ça, c'est peut-être social-démocrate, selon l'opposition officielle.
Est-ce que, M. le Président, est-ce que, de gérer les listes d'attente... deviennent un outil de gestion? Peut-être que c'est ça, d'être social-démocrate, peut-être qu'on a oublié, c'est ça, d'être social-démocrate. Est-ce que de donner un bain par semaine, un bain par semaine aux personnes qui sont dans les CHSLD, c'est conservateur, libéral ou social-démocrate? Je ne sais pas à qui ça appartient.
Est-ce que d'être les plus endettés, n'est-ce pas, d'avoir ajouté durant les cinq dernières années 11 milliards de dollars et, dans la dernière année seulement, un autre 3 milliards de dollars... Ça fait 14 milliards de dollars, M. le Président, qu'on a mis à la dette et on a hypothéqué nos enfants. Je ne le sais pas, moi, où est-ce que c'est ça, si c'est social-démocrate, conservateur ou libéral.
Est-ce que le statu quo, rien changer... parce que les gens d'en face nous disent que tout est parfait, il ne faut rien changer. Moi, je vous dis, M. le Président, que ça, c'est d'être conservateur. Être conservateur également, peut-être que c'est... Ou peut-être que c'est leur école sociale-démocrate. Le déficit zéro, on n'était pas capables de l'atteindre? Ce n'est pas grave, on va aller chercher le surplus de la CSST et on va le rentrer dans le périmètre comptable. Un an plus tard, il y avait un déficit à la CSST; on l'a sorti du périmètre comptable. Pas plus long que ça. On s'en sert quand on a des surplus, on s'en débarrasse quand il y a un déficit. C'est de quelle école, ça?
Moi, je me pose des questions. M. le Président, tout cet exercice de réinventer le Québec... Et d'ailleurs je me réjouis, parce que je participais à un colloque des cadres du gouvernement au niveau des ressources humaines, et le titre de leur colloque, c'était Réinventer l'État du Québec.
Imaginez-vous que les cadres avaient assumé, assimilé la vision que nous voulions donner au gouvernement du Québec. Parce que toute notre démarche, M. le Président, est basée sur les valeurs libérales. Elles sont en continuité avec nos valeurs, et je puis vous dire que, dans mon âme et conscience, je me sens tout à fait à l'aise de respecter ces valeurs que nous avons toujours assumées et que ma formation politique a assumées avec grande fierté: c'est la justice sociale, le respect du citoyen, les libertés individuelles, l'identification du Québec, la tolérance, M. le Président ? oui, la tolérance ? la prospérité économique, oui, la régionalisation, parce que, nous, on y croit à la régionalisation, la compétence ? oui, la compétence de nos employés, M. le Président ? et bien sûr de nous assurer que nous allions réinventer le Québec.
M. le Président, au niveau de nos ressources humaines, on a voulu invoquer, parce qu'on avait... Mon bureau avait sorti une phrase d'un texte que j'ai publié et que je vais présenter prochainement. Au niveau des ressources humaines, pour mettre un peu les pendules à l'heure, je vous lirai un texte, je n'aime pas beaucoup me citer, là, mais je sens le besoin de le faire pour corriger une image qu'on veut donner, et le texte se lit comme suit:
«Au cours des dernières années d'opposition, notre formation politique a maintes fois critiqué les conséquences de l'éparpillement qui tenait lieu de philosophie de gestion au précédent gouvernement. Il y a un coût à vouloir s'occuper de tout sans discernement ni sens de priorités. Nous arrivons à la tête du gouvernement et nous constatons qu'il est impensable de continuer sur la même trajectoire.
«Malgré plusieurs années de conjoncture économique exceptionnelle à l'échelle nord-américaine, les Québécois demeurent les plus taxés et les plus endettés du continent. Pourtant, pourtant, la qualité et l'accessibilité des services publics essentiels n'est pas toujours au rendez-vous, faute de ressources mais aussi faute d'un recentrage capable de nous éloigner des habitudes de microgestion. Cela est d'autant plus déplorable qu'il est nombre de choses que le gouvernement du Québec fait très bien et de façon magistrale, mieux que quiconque.
«Mes propos ne constituent pas un jugement sur le dévouement et le professionnalisme de nos travailleurs, que je sais exceptionnels. Il n'en demeure pas moins qu'une volonté d'intervenir partout et pour tous a conduit à de l'éparpillement, lequel nous prive des moyens de faire mieux là où l'action de l'État répond véritablement à des besoins essentiels des citoyens. À vouloir s'occuper de tout, l'État n'arrive pas à s'occuper bien de ce qui est sa mission essentielle.» C'étaient là les propos que j'ai tenus et que j'ai écrits, M. le Président. Tout ça pour dire que le personnel de la fonction publique, les employés de l'État que nous dirigeons maintenant sont des citoyens remarquables. Et d'ailleurs ce sont ces gens qui, jusqu'à maintenant, nous ont aidés dans la démarche pour élaborer notre stratégie, élaborer les plans d'action et élaborer la réflexion que nous amorçons, oui, que nous ne faisons qu'amorcer, parce qu'il va falloir que ce processus se déroule durant les prochaines années. Ce n'est pas une question de quelques jours ou quelques mois. Quand on décide de tourner chaque pierre, quand on décide d'examiner chaque programme, manifestement, il faut à ce moment-là qu'on le fasse progressivement.
n(16 h 30)n Au contraire, M. le Président, il s'agit d'une vision large et stratégique qui dépasse nos intérêts personnels. Nous voulons donner au Québec une image moderne. Nous voulons nous occuper des vrais problèmes. Nous voulons recentrer, redynamiser l'État québécois, le recentrer sur ses missions essentielles. Et quelles sont-elles, ces missions essentielles? Bien, il va falloir, M. le Président, qu'on pense d'abord aux malades, aux patients; il va falloir qu'on arrête de penser toujours et de discuter de structures; il va falloir qu'on pense aux malades. Il va falloir que nos approches soient dirigées vers les élèves d'abord et avant tout. Il va falloir qu'on pense à la redistribution. Oui, la pauvreté, c'est un phénomène avec lequel on vit dans notre société, mais il faut qu'à chaque instant on soit intolérant à l'endroit de la pauvreté.
Un État qui se recentre sur ses priorités, un État qui se repositionne pour être bien sûr que ce qu'il fait, il le fait bien, ça, c'est fondamental, c'est à la base de notre approche, c'est la base de notre stratégie et c'est la base de notre philosophie. À vouloir tout faire, à vouloir être partout et pour tout, M. le Président, je pense que c'est là une erreur magistrale. Ça a été, je dirais, la marque de commerce de l'ancienne administration. Je comprends la nostalgie. J'imagine que, quand on s'est éparpillé partout pendant tant d'années...
Et, on a beau dire, M. le Président, les gens nous ont élus. Les gens... Le 14 avril, il a eu lieu. Il faudrait bien que vous reconnaissiez, que ces gens reconnaissent qu'il s'est passé quelque chose. Les gens ne peuvent pas tous s'être trompés. Ça fait longtemps qu'on dit: Les gens, on a mal expliqué, les gens ne nous ont pas compris, ils n'ont pas compris, il aurait fallu expliquer davantage. Ils ont parfaitement compris. Ils en avaient marre d'avoir un gouvernement qui pensait pour eux.
Nous, on a dit: On ne fera pas ça, on va se recentrer sur nos missions essentielles. Et, M. le Président, nos missions essentielles, elles ont été claires, elles sont basées sur des principes fondamentaux de l'école libérale, l'école libérale à laquelle nous appartenons tous, du côté de cette Chambre. Et je puis vous dire que nous respectons notre passé, nous nous en inspirons et nous allons garder ces principes de base constamment à l'intérieur de nos façons de faire pour être bien sûrs que nous transmettons ces valeurs à nos enfants et à nos petits-enfants. Merci, M. le Président.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la présidente du Conseil du trésor. Maintenant, je reconnais la députée de Rimouski.
Mme Solange Charest
Mme Charest (Rimouski): Merci, Mme la Présidente. Que l'Assemblée nationale du Québec dénonce le gouvernement libéral pour ses politiques conservatrices, tel que le stipule la motion. Je vous dirais, Mme la Présidente, que nous n'avons pas le choix de dénoncer, au nom des citoyens et des citoyennes du Québec, le conservatisme du gouvernement actuel.
Les libéraux ont fait croire, en campagne électorale, à la population, qu'ils défendaient un minimum de valeurs libérales. Ils se présentaient comme un parti, hein, qui dénonçait les intentions de droite de l'ADQ. Mais même le député libéral de Brome-Missisquoi, que tous connaissent très bien, puisqu'il a oeuvré dans cette chambre 22 ans de temps et qu'il est en période de réflexion, a cru bon, lui aussi, de rappeler aux membres de son parti, aux membres du gouvernement actuel, c'étaient quoi, les valeurs libérales traditionnelles de son parti.
Alors, aujourd'hui, le gouvernement libéral accuse tous les groupes progressistes du Québec, de la société québécoise qui n'apprécient pas du tout leur approche d'être des habitués de l'État, d'être des individus, des organismes qui dépendent de l'État comme tel. Et, pour faire taire la grogne qui monte de plus en plus de toutes les régions du Québec, le Parti libéral répète à tous les jours qu'ils ont reçu un mandat clair. Ils le répètent pour s'en convaincre eux-mêmes. Et c'est pour mieux se convaincre que, à tous les jours, ce mandat, supposément sans limites, leur a été accordé. Alors, ils s'imaginent, je pense, d'avoir un chèque en blanc pour tout démolir les outils de développement du Québec.
Vous savez, le conservatisme du Parti libéral s'exprime d'abord en économie. Le laisser-aller économique du ministre du Développement économique et régional est vraiment inquiétant. Il est surtout inquiétant pour toutes les régions du Québec qui ont besoin de leviers économiques soutenus par l'État pour croître et créer de l'emploi, surtout pour supporter, aider, donner le petit coup de pouce qu'ils ont besoin aux secteurs économiques en émergence tels que les biotechnologies, tels que les nouvelles technologies de l'information, des communications. Et je pense que toutes ces entreprises, qui n'ont pas le même contexte économique dans chacune des régions, parce que ce n'est pas la même structure économique qui existe d'une région à l'autre, elles ont besoin de bénéficier d'un appui de l'État québécois pour participer au développement économique, pour devenir concurrentielles, pour développer leur compétitivité sur les marchés extérieurs, pour devenir des entreprises reconnues non seulement à l'échelle locale, mais aussi à l'échelle internationale.
Alors, le laisser-faire économique, l'apanage des conservateurs, le laisser-aller économique, ce n'est pas rentable au Québec, ça, il faut qu'on se le dise. Et le ministre des Finances lui-même avait prédit, hein, dans son propre budget, que son budget allait provoquer un ralentissement économique important. Mais ça y est, on le voit, on le constate et on le sent sur le terrain, et les citoyens et les citoyennes engagés dans le développement social, politique, économique, culturel du Québec nous le disent à tous les jours. Et ça n'inquiète pas seulement les péquistes, là, en passant, je tiens à le préciser, parce qu'on a entendu la semaine dernière le président de la Fédération des chambres de commerce du Québec qui soutient lui aussi que l'appui de l'État est nécessaire pour que la prospérité économique des régions et pour que la création d'emplois dans les régions demeurent une réalité.
Alors, le conservatisme économique des libéraux a des conséquences très graves, Mme la Présidente, sur la vitalité des régions. Plus rien ni personne ne bouge sur le terrain, tout est gelé partout, tout le monde attend. Les entreprises n'osent plus investir, elles ne savent pas ce qui va arriver, elles se demandent quelles seront les politiques gouvernementales du Parti libéral conservateur du Québec: Est-ce qu'on va nous couper nos moyens pour nous aider à émerger? Et on a des craintes aussi par rapport aux outils de développement économique régional parce qu'ils sont remis en question, ces outils-là, et ils sont plutôt menacés de disparaître. Et je pense, entre autres, aux CLD, aux CRD, au programme Accès Capital d'Investissement Québec, et j'en passe.
Le laisser-aller économique qu'impose le gouvernement actuel, qui est un geste typiquement conservateur, cause déjà des torts irréparables ? et je mesure mes mots, Mme la Présidente ? ce sont des torts irréparables dans plusieurs régions du Québec, et ce, en dedans de six mois. Ce n'est pas seulement les groupes sociaux, ce n'est pas seulement le Parti québécois qui regrettent les gestes ou plutôt qui dénoncent l'absence de gestes concrets du gouvernement libéral en matière d'économie. Les chambres de commerce, les incubateurs d'entreprises, surtout les incubateurs de biotechnologies, le monde de la recherche et du développement est en émoi. Le gouvernement a même laissé planer le doute sur certains projets qui avaient été dûment autorisés par le gouvernement précédent. Je pense, entre autres, à TELUS Québec.
Vous savez, le 9 octobre dernier, le ministre du Développement économique régional est venu à Rimouski confirmer que l'entente que le gouvernement précédent avait signée avec TELUS Québec était une excellente entente, mais ça lui a pris six mois pour le dire. Ce que ça veut dire, c'est qu'il y a 1 200 employés à Rimouski qui se sont levés à chaque matin en ayant une épée de Damoclès au-dessus de leur tête. Est-ce qu'ils allaient conserver, oui ou non, leur emploi? Et ça a aussi figé l'entreprise, c'est-à-dire que ça a obligé l'entreprise à attendre avant de décider s'ils allaient investir un demi-milliard de dollars au Québec. Alors, je pense que là-dessus, Mme la Présidente, le conservatisme économique du Parti libéral a des effets très pervers sur le terrain.
Le conservatisme libéral, il est aussi fiscal, il n'est pas seulement économique. D'abord, le gouvernement libéral privilégie la taxation à la fiscalité. Parce qu'on sait très bien que la fiscalité québécoise est progressive, elle est faite en fonction du revenu et protège donc les personnes les plus démunies et celles vivant avec des revenus modestes. Elle est un facteur d'équité, d'équité sociale. Les tarifs, par ailleurs, eux, ça s'applique à tous, sans distinction. Vous savez très bien que la livre de beurre coûte le même prix pour tout le monde, peu importe le revenu que nous avons. C'est la même chose pour les tarifs d'électricité. Ça veut dire que ça pénalise les personnes les moins bien nanties. Ils sont un facteur d'iniquité. Alors, on voit tout de suite la différence entre le conservatisme libéral qui est aussi fiscal, puis entre un gouvernement qui recherche l'équité sociale.
n(16 h 40)n Je vous ai parlé des tarifs hydroélectriques qui sont une source d'inéquité, on pourrait parler aussi de la hausse des frais de garderie, la hausse des frais chargés aux parents pour la surveillance des enfants le midi, à l'école, on pourrait parler aussi de la hausse des primes de l'assurance médicaments, et j'en passe. Mme la Présidente, c'est parce que le gouvernement libéral privilégie dans son approche conservatrice des baisses d'impôts plutôt que des services directs aux citoyens que le gouvernement actuel s'investit d'une tâche de réingénierie. En persistant dans sa volonté de baisser les impôts des particuliers et des entreprises, le gouvernement actuel fait fausse route, et ça, je vous le dis parce que la réingénierie, ça n'existe pas. Elle n'apparaît dans aucun document du Parti libéral du Québec. Elle n'a pas été discutée en campagne électorale. Et c'est surtout au moment où le Parti libéral a compris que son cadre financier de la dernière campagne électorale ne balançait pas qu'il a dû trouver une astuce, un genre de «buzzword». Toute cette mascarade sert à faire avaler les coupures draconiennes que ce gouvernement doit faire subir aux Québécoises et aux Québécois afin de baisser les impôts des plus fortunés.
Alors, Mme la Présidente, ça, là, le Parti libéral, il le sait que son cadre financier ne fonctionne pas. Non seulement il le sait, mais il tente, sous le couvert de la fameuse réingénierie, de couper au maximum dans les ministères de services pour dégager une marge de manoeuvre pour donner suite à son engagement conservateur, qui est à la fois irresponsable, de baisses d'impôts. Et des exemples de coupures, de compressions budgétaires, il y en a dans tous les secteurs d'activité. Et, malgré que le gouvernement actuel ait prôné, durant la campagne électorale, que ses priorités d'action seraient l'éducation et la santé, on se retrouve avec des coupures de 90 millions en éducation, de 350 millions au ministère de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille ? on ne me fera pas accroire que ce ministère sert les riches, là; au ministère de la Solidarité sociale, il me semble que ce sont les plus démunis de la société québécoise qui ont recours à ses services ? et plus de 100 millions en santé et services sociaux, 200 millions ne serait-ce qu'au développement des régions. Et, vous savez, si je cumule toutes ces sommes, on arrive rapidement à à peu près 1 milliard de dollars. Je trouve que ça ressemble drôlement au montant qui a été promis par le premier ministre en baisses d'impôts pour l'année fiscale et financière de 2004-2005.
C'est quoi, les conséquences de cette politique fiscale conservatrice? Bien, elles vont toucher directement les citoyens et les citoyennes démunis et de la classe moyenne. Le gouvernement actuel pénalise les parents, les personnes âgées, les personnes à faibles revenus, les familles, les étudiants, les femmes, etc. Il faut chercher longtemps, très longtemps pour trouver quelqu'un qui ne sera pas victime des politiques conservatrices du gouvernement libéral.
Vous savez, quand nous avons un nouveau gouvernement, il est tout à fait normal de vouloir revoir les choses, d'analyser les programmes, d'évaluer leur rentabilité, leur efficacité. Ça, nous n'avons rien contre. Mais il y a une différence entre ça et jeter le bébé avec l'eau du bain. Alors, c'est sans réserve que nous convenons que la révision des programmes et des façons de faire de l'État est souhaitable et que l'efficacité de la livraison des services par le gouvernement du Québec et de ses réseaux est incontournable. Mais il y a une différence entre faire cela et un désengagement irréfléchi de l'État pour servir une idéologie conservatrice à outrance qui ne peut être conciliée avec la qualité des services offerts aux citoyens et aux citoyennes, ni avec la prospérité du Québec et ni avec la prospérité de toutes les régions du Québec.
Alors, le désengagement de l'État envers les utilisateurs du système de santé et des services sociaux est également présent, et ça, ça va avec le conservatisme des politiques libérales du gouvernement actuel. Vous savez, les conséquences de l'irresponsabilité financière du Parti libéral en matière de santé et de services sociaux en pigeant dans la réserve et en investissant trop peu dans les services de première ligne comme les groupes de médecine familiale, les CLSC, les services à domicile, les centres hospitaliers de soins de longue durée pour les personnes âgées est un désengagement flagrant de l'État qui aura des conséquences importantes sur tous les Québécois et les Québécoises, et ce, pour de nombreuses années, tout ça au profit de baisses d'impôts qui ne profiteront qu'à une poignée de citoyens qui verront de toute façon leurs primes d'assurance médicaments augmenter, leurs tarifs d'électricité augmenter, etc. Où est le gain pour les Québécoises et les Québécois?
Il y a également le désengagement de l'État envers les étudiants du primaire, du secondaire, du collégial, envers les universitaires et leurs professeurs. En coupant des dizaines de millions de dollars en éducation et en laissant savoir que le gel des frais de scolarité, ça ne pourrait pas être maintenu plus que d'un an, le gouvernement démontre encore une fois son intransigeance conservatrice sans égard aux conséquences sur les parents et sur les étudiants. Ce n'est pas tout le monde qui a le moyen de se payer des frais de scolarité plus élevés que ceux que nous payons présentement. Oui, c'est vrai, c'est au Québec que les frais de scolarité sont les moins élevés au Canada, mais c'est un choix social que nous avons fait, c'est un geste de solidarité envers les populations, pour leur donner une plus grande accessibilité à la formation que ce choix a été fait et qu'il a été maintenu durant de nombreuses années.
L'économie du savoir, c'est l'avenir du Québec. Les jeunes doivent avoir les ressources nécessaires pour occuper des emplois, des emplois de l'avenir. Ce n'est pas en coupant en éducation ou en augmentant les frais de scolarité que nous leur donnerons des outils pour réussir, pour bâtir leur vie, pour bâtir le Québec de demain. Les enfants qui ont des difficultés d'apprentissage doivent également pouvoir compter sur des professionnels, des professeurs qui ont le temps et les ressources pour les aider à réaliser leur potentiel. Les coupures en éducation frappent déjà de plein fouet les élèves et leurs parents. C'est ça, les effets concrets de l'approche conservatrice du gouvernement libéral.
Et je voudrais aussi parler du désengagement de l'État envers les familles, et ça, c'est tragique pour le Québec. Tout le monde connaît la baisse de la courbe démographique, qui est un des enjeux majeurs du développement futur du Québec. Bien, les familles québécoises doivent pouvoir compter sur une politique familiale généreuse pour avoir le choix, le véritable choix d'avoir des enfants. Or, le gouvernement libéral, dans une vision tout à fait conservatrice, nous propose des baisses d'impôts, mais les familles du Québec vont donc bénéficier de baisses d'impôts qui, somme toute, ne paraîtront que trop peu sur leurs chèques de paie, mais pourraient payer, par exemple, 50 $ par mois de plus par enfant pour des services publics ou des services de garde.
Parce que, vous savez, toute la guerre actuelle sur l'augmentation des tarifs en services de garde, je pense, moi, personnellement, que c'est beaucoup plus que ça qui est remis en question. C'est toute la politique familiale du Québec qui est questionnée et qu'on tente plus ou moins d'amocher en quelque sorte par des augmentations de tarifs qui vont faire qu'il y a bien des familles qui n'auront plus accès à ces services de garde. Les services de garde au Québec, ce ne sont pas des parkings d'enfants. Les services de garde au Québec, ce sont des services avec des programmes pédagogiques qui permettent à des enfants de se développer d'un point de vue cognitif, d'un point de vue de la motricité, et j'en passe. Alors, je pense que les services de garde au Québec ont fait leurs preuves et qu'il ne faut absolument pas qu'il y ait désengagement de l'État à ce niveau-là.
Et je vous dirais que le désengagement, hein, de l'État à l'égard des familles les pénalise de façon concrète dans leur vie de tous les jours, et ça, ce n'est pas possible pour les familles qui ont des revenus très bas ou des revenus même moyens. Parce que, quand on parle qu'on veut protéger la famille moyenne, vous savez, la capacité de payer des familles moyennes, elle est limitée, et je ne pense pas qu'en coupant des services, en augmentant les tarifs qu'on aide nécessairement les familles de classe moyenne, même si on leur promet des baisses d'impôts. Donner d'une main pour retirer de l'autre, ça finit que ce sont les goussets des citoyens, de ces mêmes citoyens qui paient d'un côté ou de l'autre.
n(16 h 50)n Alors, l'approche conservatrice, qui est même dogmatique, du gouvernement libéral, qui privilégie exclusivement la voie des services des garderies privées, en ce moment même, les... Vous m'avez déconcentrée. Il me reste une minute? Alors, je vais rapidement conclure pour dire que les places... Voyons, je recommence. L'approche conservatrice du gouvernement libéral, qui privilégie exclusivement la voie des services des garderies privées, prive en ce moment même les parents de places en centre de la petite enfance et leurs enfants d'un milieu éducatif stimulant dont tous les spécialistes ont vanté les mérites et les effets à long terme sur le décrochage scolaire. C'est ça, les effets concrets des politiques conservatrices du gouvernement libéral.
Et, pour conclure, Mme la Présidente, je vous dirais que le chef du Parti libéral renie les valeurs libérales traditionnelles de son parti. Le Parti libéral privilégie une approche conflictuelle basée sur la confrontation plutôt que sur la concertation. L'équilibre entre les partenaires...
La Vice-Présidente: ...de vous arrêter, Mme la députée, votre temps est maintenant écoulé. Alors, je serais prête à reconnaître un nouvel intervenant, le député d'Iberville et adjoint parlementaire à la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
À vous la parole.
M. Jean Rioux
M. Rioux: Merci, Mme la Présidente. C'est avec...
La Vice-Présidente: Il reste 33 minutes au groupe formant le gouvernement.
M. Rioux: C'est avec plaisir et honneur, encore me sentant nouveau député, d'intervenir à l'Assemblée nationale. Mais jamais je n'aurais pensé intervenir sur une motion de censure où on aurait qualifié le Parti libéral avec des valeurs conservatrices, avec le programme que l'on a donné à la population le 12 septembre. Je trouve cela très arrogant, arrogant vis-à-vis un parti qui a eu un programme qui était très clair, arrogant d'un parti qui a imposé des fusions sans avoir de mandat lors de son élection.
Nous avons un programme, nous avons un mandat. Nous ne sommes pas seuls à penser ça. Si on regarde l'esprit qui anime le Parti québécois, lors de son dernier conseil, il y a eu une proposition où on demandait «que le Conseil national et l'aile parlementaire préviennent solennellement le gouvernement libéral qu'il sera tenu responsable de la détérioration de l'activité économique et de la situation de l'emploi, découlant d'une utilisation trop timide des outils d'intervention de l'État québécois et d'une restriction, par sa réingénierie annoncée, de notre capacité collective d'agir sur le développement du Québec».
On n'est pas tout seuls à trouver ça arrogant. On avait un mandat qui était très clair, de changer la société, d'avoir un nouveau modèle. Les gens l'ont dit clairement qu'ils voulaient du changement. M. Samson, le journaliste du Soleil, dans un article du 17 octobre, nous dit: «Il faut tout de même une certaine suffisance pour prévenir "solennellement" une autre formation politique contre ses foudres, au nom du peuple québécois. En quoi une résolution du Conseil national du Parti québécois devient-elle une mise en garde officielle ou solennelle? Quelle autorité réelle ou morale le PQ détient-il pour s'autoriser des semonces?» Ce parti qui, sans mandat, je répète, a fait les fusions des municipalités vient nous dire aujourd'hui qu'on est conservateurs, et c'est ce parti qui ne veut pas de changement dans notre société. Qui est conservateur, pour ne pas dire réactionnaire pour s'opposer aux changements auxquels nous appelle notre société? La société a changé, mais le Québec ne semble pas... le Parti québécois ne semble pas s'être adapté aux nouveaux défis pour assurer la réussite de tous ses citoyens.
La population, elle a été très claire, le 14, elle connaissait notre programme du 12 septembre, où nous avons été clairs qu'on ne voulait plus un gouvernement interventionniste mais un gouvernement qui croyait aux valeurs individuelles. Nous avons une mission qui est claire, celle d'améliorer les services aux citoyens, avec des moyens adaptés aux réalités d'aujourd'hui, et c'est ce que nous faisons présentement. On nous reproche de faire ce que l'on a dit, qu'on changerait cette société-là et qu'on assurerait aux gens finalement d'avoir plus de liberté individuelle mais en assurant évidemment la justice sociale.
Les citoyens ont dit clairement: Nous sommes tannés d'être les citoyens les plus imposés en Amérique du Nord, d'être les plus endettés en Amérique du Nord. Mais, à côté de ça, est-ce qu'on a les services chromés qui devraient aller avec? Les citoyens ont compris, le 14, qu'il y avait une distorsion entre les deux. Comment sommes-nous arrivés à cette situation, d'être les plus endettés et d'être les plus taxés, après avoir connu 10 années de prospérité unique, d'arriver avec un budget que l'on n'est pas capables d'équilibrer? On est arrivés avec un 4,3 de déficit qui nous attendait. Comment est-ce qu'un gouvernement peut arriver à une situation comme ça après 10 années de prospérité? Je pense que les citoyens se la sont posée, la question, et qu'il n'y avait pas les services qui étaient avec.
On a compris, quand on est arrivés ici: on avait un gouvernement de la gauche au caviar. Comment ça? On subventionnait plus au Québec que l'ensemble de toutes les provinces; selon certaines études, de quatre à cinq fois plus qu'en Ontario, et pourtant leur population est beaucoup plus élevée. Mais, si on regarde les résultats de ces subventions qui ont été données aux entreprises, nous n'avons seulement que 17 % des investissements au Québec et pourtant nous formons 24 % de la population. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans le système qu'on avait. C'est ça que ce gouvernement-là veut maintenir, ce précédent gouvernement, qui est conservateur. Il nous disait, à nous autres: On veut changer le système, on veut changer pour s'assurer que les acquis de l'ensemble des citoyens... qu'ils puissent continuer à se faire soigner, se faire éduquer et ne pas arriver avec des résultats comme on a connus dans les hôpitaux, les listes d'attente qu'on connaît dans les hôpitaux. Et, pensons, est-ce qu'on va faire des... On va faire des changements sans être sûrs de ces changements-là. Pensons aux préretraites, aux médecins, aux infirmières, on en paie le coût encore aujourd'hui. Et le ministre, ce matin, de la Santé nous disait qu'on en a jusqu'à 2010 à subir ces contrecoups. Les gens ont perdu des services, mais aussi ont perdu une culture de travail qui est partie au niveau des hôpitaux.
Au Parti libéral, nous en avons, des priorités, des priorités d'assurer les services, de s'assurer que les acquis, on va les maintenir pour qu'il n'y ait plus de pauvreté au Québec, que tout le monde soit inclus dans la société. Les libertés individuelles, là, ça fait partie de ça, de pouvoir être inclus, de ne pas être exclu de la société, et je pense que les gens le comprennent bien.
Donc, nos premières valeurs pour changer cette société-là, maintenir nos acquis, donc notre première priorité est la santé. Ainsi, nous préserverons notre système de santé tout en l'améliorant. Nous nous sommes engagés à réinvestir dans le réseau de la santé pour le rétablir. À preuve, nous avons injecté 1,3 milliard dans le réseau, à partir du budget Séguin, Nous allons remettre les patients au centre des décisions. Nous aurons un système de soins accessibles en tout temps et dans les délais raisonnables.
L'éducation, si on regarde les résultats du précédent gouvernement, vous avez entre 27 % à 50 % de décrocheurs dans certaines régions. Ce matin, l'ex-ministre de l'Éducation, M. Legault, nous disait que, dans sa région, le taux allait jusqu'à 50 %. Est-ce que ces gens-là vont faire partie intégrante de la société? Est-ce qu'on leur donne les mêmes chances? Est-ce qu'ils vont pouvoir faire partie des 6 millions de Québécois qui vont avoir des ambitions, qui vont pouvoir réussir dans cette société? C'est notre deuxième priorité, c'est l'éducation. Nous allons réinventer dans la formation professionnelle et technique. Nous allons augmenter le nombre d'heures d'enseignement au primaire, semaine de 25 heures. De plus, nous allons lutter contre le décrochage scolaire et enseigner l'anglais dès la première année.
Au niveau des impôts, on l'a entendu, les citoyens du Québec sont tannés d'être les plus imposés en Amérique du Nord. On est plus bons que ça, les Québécois, on est plus fiers que ça, on est capables de faire mieux, on est capables d'être plus efficients, puis on va le faire. On va assurer une meilleure prospérité économique, nous allons baisser les impôts de 1 milliard par année pendant cinq ans et nous allons alléger la réglementation. On ne fera pas le calcul du précédent gouvernement. Si on l'avait fait, je pense qu'on pourrait parler, à ce moment-là, de 16 milliards qu'on ferait de réduction d'impôts. On va être honnêtes, c'est 1 milliard par année qu'on va réduire.
n(17 heures)n Ensuite, nous voulons aussi que les gens des régions puissent bénéficier de services de qualité de façon équitable. Nous allons donc rapprocher les centres de décision vers les régions. Nous parlons ici de décentralisation et de déconcentration. Nous voulons aussi rendre les services de plus en plus accessibles aux citoyens, 24 heures sur 24, sept jours sur sept, par Internet et par téléphone. Pour ce faire, nous utiliserons les nouvelles technologies pour mettre en place le gouvernement en ligne. Ça, ça en est, du changement. Ça, ce n'est pas des valeurs conservatrices.
De façon générale, je vous rappelle que les gens qui nous disent que nous sommes conservateurs... Dans le dernier budget, les dépenses gouvernementales ont augmenté de 3,8. Si c'est ça, un gouvernement conservateur, comment peut-on qualifier le discours du chef de l'opposition ce matin qui veut arrêter tout développement, qu'on maintienne la situation telle qu'elle est présentement? C'est de valeur, les Québécois, le 14, ont dit qu'ils en voulaient, du changement, et on avait un programme clair, et c'est ce qu'on va leur donner, et je pense que c'est ce qu'ils attendent. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant. Oui, excusez-moi. Oui. Alors, c'est le député de Mercier?
M. Gautrin: Est-ce qu'il reste du temps à l'opposition, Mme la Présidente?
La Vice-Présidente: Exactement, vous avez raison. Il n'en reste plus, de temps, à l'opposition. Alors...
M. Gautrin: Merci, Mme la Présidente...
La Vice-Présidente: Parfait.
Une voix: ...
La Vice-Présidente: Non, nous n'avons pas terminé le temps de parole du groupe formant le gouvernement. Alors, je serais prête à reconnaître...
Une voix: ...
La Vice-Présidente: Je m'excuse, je m'excuse. Je serais prête à reconnaître le député de Verdun.
M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les interventions des collègues qui sont maintenant dans l'opposition officielle. J'ai l'impression d'avoir entendu le discours du statu quo. De fait, à l'heure actuelle, Mme la Présidente, il y a un débat de fond qui nous divise, qui nous sépare, entre vous et nous. Vous êtes les tenants d'une société qui n'évolue pas, vous êtes les tenants à l'heure actuelle du statu quo. Nous sommes, nous, Mme la Présidente, et nous l'avons démontré dans nos textes, un gouvernement qui veut aller de l'avant, qui veut adapter un gouvernement aux réalités du Québec du XXIe siècle. C'est ça, la différence fondamentale, Mme la Présidente, qui nous oppose avec nos amis d'en face.
Alors, ils se permettent de sortir des textes en disant qu'ils veulent blâmer le gouvernement pour l'ensemble de ses politiques conservatrices. Soyons sérieux, s'il vous plaît, deux minutes. Nous avons devant nous le statu quo, la vision antique d'un gouvernement. Nous représentons, Mme la Présidente, une vision moderne, dynamique de ce que sera l'État de demain. C'est ça, la différence, c'est ça qui nous divise.
Et, Mme la Présidente, je vais vous rappeler une chose. Il y a encore un point qui nous divise, il y a un point majeur entre nos amis d'en face et nous: faisons ce qu'on a dit que l'on allait faire. Nous faisons ce qu'on a dit que l'on allait faire, Mme la Présidente. Alors, il n'y a pas de difficulté, il n'y a pas de cachette, il n'y a rien. Il y a un document, ça s'appelle Un gouvernement au service des Québécois. Ça a été sorti le 12 septembre 2002. Le chef du gouvernement, le premier ministre l'a publié. Et vous avez là-dedans l'intégralité des politiques que l'on met de l'avant. L'intégralité des politiques que l'on met de l'avant sont déjà contenues à l'intérieur.
Alors, Mme la Présidente, il est important de rappeler, de rappeler parce qu'on oublie. Nous, le Parti libéral, nous avons d'abord un certain nombre de valeurs, de valeurs qui nous unissent et qui sont incluses à l'intérieur de ce document, des valeurs qui sont d'abord de tout orienter l'attraction en fonction du bénéfice aux citoyens, et, deuxièmement, de vouloir améliorer la qualité des services, de chercher l'efficacité et la performance, de voir à la décentralisation et au partenariat, de s'assurer de la transparence, de l'intégrité du gouvernement et de toujours avoir en tête les questions de justice sociale. Ce sont les lignes, Mme la Présidente, qui ont guidé ceux qui ont rédigé ce document, et ça constitue actuellement la ligne et le guide du gouvernement dans l'ensemble de ses politiques.
Reprenons, si vous me permettez, un certain nombre de points. Nous avons dit: Nous allons... nous sommes engagés de faire de la santé une de nos priorités. Vous rappelez, Mme la Présidente, dans la campagne électorale, nous l'avons dit, nous l'avons réaffirmé sur l'ensemble des tribunes. Nous sommes engagés de réinvestir, dès la prise de pouvoir, dans le secteur de la santé. Nous avons pleinement rempli cet engagement.
Le ministre, député de Mont-Royal, le ministre de la Santé et des Services sociaux l'a rappelé tout à l'heure, l'investissement dans le secteur de la santé dès le premier budget, malgré les difficultés de l'ardoise que vous nous aviez laissée, l'ardoise cachée que vous nous aviez laissée. Dès le premier budget, nous avons réinvesti en santé 1,3 million. Sur ce 1,3 million...
Une voix: 1 milliard.
M. Gautrin: Milliard, merci. 1,3 milliard. Vous avez raison, merci. Vous avez 1,3 milliard. Merci, M. le député de Jacques-Cartier. 1,3 milliard ont été réinvestis dans le secteur de la santé. Sur ce 1,3 milliard, il y a 250 millions qui sont de l'argent neuf, de l'argent qui ont été utilisés pour faciliter l'accès aux urgences, pour régler les cas des personnes en difficulté, particulièrement les personnes âgées. Je me permets de vous rappeler, les 250 millions, comment ils ont été dépensés. Vous avez pour les urgences un 25 millions récurrent; pour réduire les listes d'attente, 60 millions récurrents; 30 millions pour accroître les services en première ligne; 20 millions pour assurer la protection de la population face au virus du Nil; 40 millions pour soutenir les personnes en difficulté; 50 millions pour accroître le maintien à domicile; 15 millions pour contrer les pénuries et soutenir les équipes du réseau.
Mme la Présidente, c'est déjà une preuve que nous avons, dans le domaine de la santé, malgré l'ardoise de plus de... Bien, le trou de plus de 4 milliards de dollars que nous a laissé le gouvernement précédent et qui ont été attestés par M. Breton, l'ancien Vérificateur général, malgré ce trou de 4 milliards de dollars, nous avons fait l'effort, dans le premier budget Séguin, de réinvestir en santé. Il y a là une différence fondamentale avec le gouvernement d'en face, une différence fondamentale avec le gouvernement d'en face. Ce gouvernement d'en face, depuis 1995, depuis 1995, n'avait pas réinvesti réellement en santé, n'avait pas réinvesti en dollars constants, si on prend le dollar constant, n'avait pas réinvesti en santé, sauf des réinvestissements ponctuels pour combler des déficits qui étaient apparus dans certains hôpitaux. Voici une différence fondamentale, Mme la Présidente, un gouvernement qui tient ses engagements.
Deuxième question. On avait... et nous sommes profondément concernés par les questions de pauvreté et les questions de réinsertion sur le marché du travail. Le député de Kamouraska, ministre des services... du soutien au revenu et des services... et de la Solidarité sociale, a déposé, Mme la Présidente, dès la prise du pouvoir, un plan tout à fait nouveau et prometteur pour inciter ? et comprenez bien qu'on veut sortir les gens de la pauvreté, là est la première chose ? pour réussir à réinciter les gens à réintégrer le marché du travail. D'ici, et il faut comprendre les courbes démographiques, d'ici cinq ans, nous allons être en pénurie de main-d'oeuvre. Nous allons être en pénurie, Mme la Présidente, de main-d'oeuvre. Et quel est le défi actuellement pour sortir les gens de la pauvreté? ? Et diable! s'il y a des gens qui sont sensibles aux problèmes de la pauvreté, c'est bien les gens de ce côté-ci ? C'est de faire en sorte de permettre aux gens de réintégrer le marché du travail, d'obtenir un salaire décent et un niveau de vie correct. Voici essentiellement ce qu'a mis de l'avant le député de Kamouraska, le ministre de la Solidarité sociale.
Et de plus, Mme la Présidente, il y a eu un engagement, un engagement de notre part, un engagement qui n'avait jamais été tenu par les gens d'en face, de maintenir un barème plancher, de faire en sorte de dire qu'il y aura un niveau en dessous duquel on ne coupera pas les prestations de dernier recours. C'est là, Mme la Présidente, un point de vue, un sentiment réellement, de ce côté-ci, de savoir respecter une des valeurs fondamentales du Parti libéral, à savoir la justice sociale, Mme la Présidente.
n(17 h 10)n Continuons, à l'heure actuelle, dans les grands chantiers que l'on a mis de l'avant. La régionalisation. Vous savez à quel point les régions du Québec ont été abandonnées, lâchement abandonnées par le gouvernement d'en face, et se sont retrouvées dans une situation où, petit à petit, les gens quittaient les régions. La députée de Bonaventure et le député de Laporte ont pensé, à l'heure actuelle, et ce qui était à l'intérieur de notre programme... Parce qu'il faut bien être conscients que c'est... on applique intégralement, à l'heure actuelle, ce qui était dans notre programme, Mme la Présidente, de voir à la régionalisation. Ça veut dire quoi? Ça veut dire de donner aux régions, Mme la Présidente, la possibilité de se prendre en main, de ne pas décider, ici, au centre, à Québec, quels sont les programmes de développement économique qui sont valables pour chacune des régions, mais de permettre aux régions de se prendre en main et réellement pouvoir se développer.
Là, à l'heure actuelle... Et j'ai écouté récemment le discours de la députée de Bonaventure responsable du développement régional qui rappelait que ce n'est pas nécessairement les mêmes programmes qui sont valables pour soutenir le développement de la Gaspésie que ceux qui vont être appliqués pour le développement de la Mauricie. Mme la Présidente, nous respectons aussi, dans ce thème qui est majeur à l'heure actuelle, pour le Parti libéral... nous respectons l'ensemble de nos engagements.
Mme la Présidente, dès notre programme... Et je ne jouerai pas ici sur les mots. Je comprends, de l'autre côté, ils s'amusent à savoir doit-on parler de réingénierie, de réinventer, de rajeunir. La question qui a été importante, la question qui a été importante lorsqu'on regarde actuellement l'État, c'est de se dire: Ce fonctionnement, le fonctionnement de l'État québécois, tel qu'il est aujourd'hui et qu'on l'a conçu dans les années soixante, est-il le plus efficace pour rendre les services que l'on veut donner aux citoyens? Et, lorsqu'on parle de réingénierie, lorsqu'on parle à l'heure actuelle de l'ensemble des chantiers que la députée de Marguerite-Bourgeoys et présidente du Conseil du trésor est en train de coordonner, lorsqu'on parle de ces chantiers, on a essentiellement et d'abord, d'abord un point de vue qui est le service au citoyen, amener à chacun de nos concitoyens un service... un État qui soit le plus efficace et être capables d'être au service, au service du citoyen.
Alors, qu'est-ce qu'on fait? Lorsqu'on dit: On est en train de tout mettre, oui, Mme la Présidente, on regarde tout. Tout est mis sur la table. Pourquoi? Parce que la présidente du Conseil du trésor et députée de Marguerite-Bourgeoys veut faire un travail absolument parfait, c'est-à-dire regarder chaque fonction qui est faite soit par un organisme soit par un ministère, l'analyser au crible des principes qui sont les principes du Parti libéral, la justice sociale, l'efficacité, la transparence et le bien de nos concitoyens, et, à la lumière de ces principes, Mme la Présidente, de pouvoir dire: Oui ou non, on va maintenir, on va changer, on va voir si on ne peut pas faire différemment, faire différemment et d'une manière plus efficace.
Le collègue député d'Iberville, tout à l'heure, nous a rappelé, il y a... nous trouvons aujourd'hui avec des moyens de communication, des moyens de communication qui n'existaient pas dans les années soixante où on a conçu l'État québécois tel qu'il existait. Et je parle actuellement des nouvelles technologies ou les technologies de l'information, et il est fondamental, fondamental qu'on aille de l'avant et qu'on instaure ce qui est une des priorités du premier ministre, M. Charest, de... fondamental de constituer et d'instaurer ce qu'on appelle le gouvernement en ligne. Et on ne peut pas revoir, repenser l'État ou le fonctionnement de l'État et fonctionner, l'ensemble des organismes de l'État québécois, dans un cadre de gouvernement en ligne comme on le concevait dans les années soixante, au moment où on a constitué l'État québécois.
Et qu'est-ce que fait actuellement l'énorme chantier de réingénierie de l'État, ce que nos amis d'en face essaient de faire passer pour un vulgaire travail de compressions et de coupures? Nous sommes, au contraire, dans un cheminement de recherche de l'efficacité maximale. On cherche, à l'heure actuelle, de faire en sorte que les fonctions étatiques habituelles puissent être le plus efficacement remplies et soient le plus correctement remplies pour donner le meilleur rendement sur l'investissement, Mme la Présidente.
Nous avons pris un engagement aussi sur la démocratie. Nous avons pris un engagement aussi sur la démocratie et nous le respectons. Le député de Châteauguay, qui est ministre des Affaires municipales, Mme la Présidente, respecte, dans son projet de loi n° 9, absolument un des engagements de notre parti qui est le respect de la démocratie. Vous rappelez, Mme la Présidente, parce que vous étiez en Chambre lorsqu'on a imposé, ici, la loi n° 170 qui a forcé les fusions, qui, au détriment, actuellement, de ce que voulaient les citoyens, les a obligés, dans leurs structures municipales, d'avoir des structures qui n'étaient peut-être pas celles que les citoyens voulaient. Nous avons réaffirmé et nous réaffirmons un préjugé favorable aux villes, mais nous réaffirmons aussi notre croyance fondamentale à la démocratie, notre croyance fondamentale que le citoyen peut choisir à l'heure actuelle dans quelles structures il veut fonctionner.
Mme la Présidente, nous recherchons actuellement à moderniser, à adapter, à rendre cet État québécois apte à faire face aux défis du XXIe siècle. Et, loin d'être un gouvernement qu'on appellerait conservateur, voire du statu quo, nous sommes au contraire un gouvernement qui, profondément, allons de l'avant, allons de l'avant pour obtenir, à la fin des quatre ans de mandat qui va être le nôtre, à avoir profondément changé le fonctionnement de l'État québécois et à avoir eu des gains d'efficacité, avoir changé les rapports entre le citoyen et l'État. Voici le défi, le défi qui est le nôtre, le défi, et qui n'est pas nouveau, Mme la Présidente, nous avions complètement annoncé nos couleurs à l'intérieur de notre programme. Ce n'est pas actuellement des choses qu'on n'a pas dites, c'est des choses qu'on a promises. Nous avons promis que nous allons être en mesure de réinvestir et de réanalyser l'ensemble des manières de fonctionner de l'État québécois, c'est ce que nous faisons.
Et, il y a évidemment quelque chose de bizarre, il y a quelque chose de bizarre parce que nous sommes probablement le premier gouvernement qui remplit ses promesses; nous sommes probablement un des premiers gouvernements qui fait ce qu'il a dit aux concitoyens qu'il allait faire; nous sommes probablement un des premiers gouvernements qui ne va pas, après avoir été élu et avoir fait des promesses électorales, faire différemment. Le gouvernement qui est le nôtre aujourd'hui, Mme la Présidente, va suivre intégralement ce que nous avons inscrit à l'intérieur de notre programme. Je peux même vous dire une chose et je peux même actuellement parier avec vous, je vais parier avec vous... Et je ne connais pas actuellement quel sera le prochain discours du budget du ministre des Finances, mais je parie avec vous qu'il y aura, dans le prochain discours du ministre des Finances, des réductions d'impôts de 1 milliard de dollars parce que nous avons promis ces réductions d'impôts de 1 milliard de dollars à nos concitoyens et que nous tenons promesse, Mme la Présidente. Je parie avec vous. Je parie avec vous, Mme la Présidente, parce que, malgré la situation difficile qui est la nôtre, la situation difficile et pénible ? parce que, comme l'a rappelé le ministre des Finances, nous devons supporter un trou budgétaire de plus de 4 milliards de dollars et récurrent sur 3 milliards de dollars dans le prochain budget ? malgré ces difficultés budgétaires dans lesquelles nous sommes, nous allons remplir nos promesses. Et, vous devez toujours avoir ceci dans la tête, nous allons remplir nos promesses, Mme la Présidente.
Nous avions promis de supporter la petite et moyenne entreprise. Nous avions promis de dire que la petite et moyenne entreprise, qui est probablement celle qui est la plus grande génératrice d'emplois... Eh bien, nous avons tenu, dans le dernier budget, notre promesse. Je me permets de vous le rappeler, parce qu'il y a beaucoup de gens qui n'en parlent plus: la taxe sur la masse salariale pour les petites et moyennes entreprises va être abolie au mois de janvier. Au mois de janvier 2004, la taxe sur la masse salariale, celle qui est la plus pernicieuse quant à la création d'emplois, va être abolie au 1er janvier 2004. Nous l'avions dit dans la campagne électorale, nous l'avions écrit dans notre programme, nous l'avons annoncé dans le budget de M. Séguin et nous le réaliserons le 1er janvier 2004. Pourquoi? Parce que le gouvernement qui est le gouvernement du Parti libéral fait ce qu'il a dit qu'il allait faire. Nous respectons nos engagements, et c'est ça, Mme la Présidente, un élément fondamental qui nous différencie actuellement des gens d'en face. Nous restons à l'heure actuelle un gouvernement profondément moderne qui va moderniser, actuellement, le fonctionnement de l'État. En face de nous, nous avons le gouvernement du statu quo, de l'ancienne vision, d'une vision passéiste, d'un vision qui date et qui, malheureusement, n'est plus à date.
n(17 h 20)n Mme la Présidente, je vois que vous me signalez que mon temps est en train de partir. Je voudrais vous rappeler néanmoins que, dans l'effort qui est le nôtre, dans l'effort qui est le nôtre, nous avons une énorme solidarité, une énorme solidarité avec l'ensemble de la population québécoise. Les citoyens savent bien, savent bien, Mme la Présidente, qu'il fallait changer. Il fallait du changement. Il fallait changer les choses. Les citoyens savent bien, et c'est pour ça que nous avons été élus le 14 avril dernier. Nous avons été élus parce que le statu quo n'était plus acceptable pour nos concitoyens. Nous avons été élus parce que les gens voulaient du changement. Nous avons été élus parce que nous proposions, Mme la Présidente, une vision différente, une vision différente de faire, une vision différente de fonctionner, mais une vision qui était profondément empreinte de compassion et de justice sociale. C'est ça, à l'heure actuelle, le Parti libéral. C'est ça, à l'heure actuelle, le gouvernement du Parti libéral.
Et vous voyez à quel point la motion a un côté ridicule, a un côté ridicule. On nous accuse quasiment de conservatisme parce que nous ne voulons pas être le gouvernement du statu quo. On nous accuse de conservatisme parce que nous ne faisons pas ce qu'ils ont toujours fait. On nous accuse de conservatisme parce qu'on n'est pas en train de répéter les erreurs que, ad nauseam, ils ont faites pendant neuf ans. Bien, Mme la Présidente, nous ne répéterons pas ce qui s'est fait avant nous. Nous sommes le gouvernement du changement. Nous sommes à l'heure actuelle le gouvernement qui amènera le Québec sur la piste du XXIe siècle, soyez-en assurée. Nous ne resterons pas, Mme la Présidente, dans une vision de statu quo, dans une vision passéiste, dans une vision qui nous... Et c'est ça, la différence. C'est ça, la différence fondamentale. C'est ça, ce qui nous distingue par rapport à nos amis d'en face.
Et croyez-moi, Mme la Présidente, moi, je vois cette réingénierie de l'État comme une immense mobilisation, un immense appel à l'ensemble de nos partenaires ? et j'ai le plus grand respect actuellement pour les fonctionnaires de la fonction publique ? un immense appel à nos partenaires de la fonction publique pour leur dire: Travaillez avec nous dans cette chance de modifier, de changer, de moderniser et d'adapter l'État à ce qu'il sera... de ce qu'il sera demain, Mme la Présidente.
Le premier ministre l'a rappelé bien des fois, il y a un leitmotiv et qui est notre leitmotiv, et j'aimerais que nos amis d'en face y adhèrent aussi. Nous voulons libérer l'ambition des Québécois. Nous voulons libérer les 7 millions d'ambitions qui sont en train de se trouver dans l'ensemble de nos concitoyens, Mme la Présidente, et nous allons, à l'heure actuelle, le faire. Nous allons le faire. Et soyez assurée que, lorsque nous représenterons devant l'électorat, le gouvernement du Québec aura changé, le Québec aura changé, nous aurons rempli pleinement notre mandat de changement, Mme la Présidente, parce que c'est ça, c'est ça, le mandat que nous avons devant nous. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Alors, merci, M. le député de Verdun. Alors, cette intervention met fin au débat, et je cède maintenant la parole à l'auteur de la motion pour son droit de réplique.
Une voix: ...
La Vice-Présidente: Alors, M. le... Alors, je veux simplement vous signaler que le droit de réplique appartient à l'auteur de la motion, la personne qui l'a présentée, à moins qu'il y ait un consentement à l'effet que le député de Vachon puisse faire la réplique.
M. Boisclair: ...et que, si je lis 189: «Avec sa permission, un autre député peut la présenter à sa place.» Donc, il y a des traditions longuement établies. Quelqu'un peut, au nom de l'auteur de la motion, s'exprimer au nom de l'auteur de la motion. Ce serait le cas, avec la permission du chef de l'opposition, ce serait le cas du député de Vachon, et je vous invite tout simplement à reconnaître le député de Vachon.
La Vice-Présidente: Est-ce qu'il y a consentement?
Une voix: Oui.
La Vice-Présidente: Il y a consentement. Alors, M. le député de Vachon, pour la réplique. Merci.
Question de règlement concernant
la possibilité pour un député d'exercer
le droit de réplique sur une motion
à la place de l'auteur de la motion
M. André Boisclair
M. Boisclair: Mme la Présidente, je ne voudrais pas interrompre mon collègue. Vous requérez un consentement. Je vous invite plutôt à prendre cette question en délibéré pour ne pas aujourd'hui qu'on reprenne inutilement le temps de l'Assemblée. Mais j'aimerais que vous statuiez sur le fait de la portée de 189. Puis est-ce que, sans le consentement, le député de Vachon pourrait s'exprimer au nom de l'auteur de la motion? Je vous invite juste à prendre cette question en délibéré.
Je comprends que vous avez demandé le consentement, que nous avons le consentement, et que le député de Vachon pourra s'exprimer, mais il serait bon de préciser cette question parce que je n'ai pas tout à fait la même interprétation que celle que vous donnez sur cette question.
La Vice-Présidente: Oui, M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: M. le Président, le leader de l'opposition, habilement, vous invite à réfléchir sur 189. Je vais vous le lire, 189: «La motion est présentée par le député qui en a donné préavis ? en l'occurrence, c'est le chef de l'opposition. Avec sa permission ? celle du chef de l'opposition; pas la vôtre, pas la mienne, celle du chef de l'opposition ? un autre député peut la présenter à sa place.» Manifestement, comme je suis obligé d'accepter la parole du leader de l'opposition, je suis obligé d'accepter sa parole que le chef de l'opposition a donné sa permission au député de Vachon pour qu'il présente la réplique. Et: «Un ministre peut toujours agir au nom d'un autre ministre», ce qui n'est pas le cas de l'opposition, je le déplore pour eux autres.
Alors, il n'y a pas de délibéré là-dedans, l'article est clair. Le chef de l'opposition a donné la permission au député de Vachon. Je ne peux pas ne pas prendre la parole du leader de l'opposition, il nous l'a dit, il l'affirme, et je le crois. Il n'y a pas de délibéré; qu'il s'exprime, ça nous fera plaisir de l'entendre.
M. Boisclair: ...l'argument, Mme la Présidente, est juste, il n'y a pas non plus de consentement à obtenir.
M. Dupuis: ...vous l'avez demandé, je vous l'ai donné par gentillesse.
La Vice-Présidente: Je m'excuse. S'il vous plaît...
Une voix: ...
La Vice-Présidente: Je m'excuse... Alors, j'ai entendu les arguments de part et d'autre, je vais tout de même prendre cette question en délibéré. Je reviendrai là-dessus la semaine prochaine. Il y a consentement à l'effet que le député de Vachon puisse faire sa présentation, la réplique. Alors, je lui cède immédiatement la parole.
M. Boisclair: ...Mme la Présidente, que c'est vous qui avez demandé le consentement. Vous l'avez fait à votre initiative, inspirée de je ne sais trop quelle jurisprudence. Alors, je vais lire attentivement votre décision lorsqu'elle sera rendue.
La Vice-Présidente: Et je peux vous assurer que le consentement aussi a été, je pense, accepté de bon gré de part et d'autre.
M. Dupuis: ...et j'ose espérer que la remarque du leader de l'opposition ne souhaitait pas porter un préjudice à la présidence, parce que, ça, malheureusement, on ne pourrait pas l'accepter.
La Vice-Présidente: Alors, soyez assurés que le tout sera pris en considération et qu'une décision vous sera rendue la semaine prochaine.
Affaires prioritaires
Reprise du débat sur la motion de censure
proposant que l'Assemblée dénonce
le gouvernement pour l'ensemble
de ses politiques conservatrices
Alors, j'inviterais immédiatement le député de Vachon à débuter son intervention pour qu'on puisse terminer à l'heure, tout le monde. Merci.
M. Camil Bouchard (réplique)
M. Bouchard (Vachon): Mme la Présidente, comment voulons-nous vivre ensemble? Vous pourriez peut-être penser que ça s'applique à la dernière discussion entre les leaders parlementaires, mais, en réalité, après quelques mois d'expérience à l'Assemblée nationale, je me rends compte que cette question nous occupe tous les jours et dans toutes nos interventions à cette Assemblée. Notre rôle est de répondre essentiellement à cette question: Comment voulons-nous vivre ensemble? Comment voulons-nous aider les citoyens et les citoyennes du Québec à organiser leur vie, à se développer sainement et à participer activement au développement de leur communauté et de leur société?
À cette question ? et j'arrive immédiatement dans le coeur du sujet ? à cette question, le parti gouvernemental répond: Le moins possible, nous voulons vivre ensemble le moins possible. Et, à cette question, nous répondons: Le mieux possible, nous voulons vivre ensemble le mieux possible. Et dans quel but? Le gouvernement répond: Pour favoriser la réussite individuelle, de chacun. Et nous répondons: Pour assurer une place à chacun dans notre société. Et c'est ça, la différence entre un gouvernement conservateur et un gouvernement progressiste... et un parti progressiste, Mme la Présidente. Un pense en termes de réussite individuelle et a comme croyance fondamentale que le développement collectif est fondé sur la réussite individuelle de quelques-uns, alors que l'autre pense que le développement collectif est fondé sur des réussites individuelles certes, mais parce que quelqu'un d'autre à côté, ceux et celles qui nous entourent nous auront permis de nous développer. Un parti progressiste pense avant tout à assurer le développement de notre voisin, de notre voisine, de ceux et de celles qui nous permettent d'être les individus riches, d'être les individus prospères, d'être les individus créatifs que nous sommes. C'est comme ça qu'un gouvernement progressiste devrait réfléchir, mais ce n'est pas comme ça que le gouvernement actuel réfléchit, Mme la Présidente.
n(17 h 30)n Est-ce que c'est tout simplement une vue de l'esprit de la part d'un membre de l'opposition? Or, peut-être, certaines et certains d'entre nous dans cette Assemblée se souviendront d'un journaliste fort apprécié de la tribune parlementaire, qui hantait les couloirs et les bureaux des parlementaires à une certaine époque, il n'y a pas très longtemps, et qui a déménagé ses pénates à Toronto, il s'agit de Konrad Yakabuski, qui était apprécié d'à peu près tous les membres de l'Assemblée nationale, quelqu'un qui fouille ses dossiers, quelqu'un qui réfléchit, qui analyse et qui ne fait pas la nouvelle pour la nouvelle.
Konrad Yakabuski a signé, le 10 octobre dernier, dans le Globe and Mail, un article qui s'intitule Les vraies couleurs de Charest? Tory blue. Bleu conservateur. Et, dans cet article, Yakabuski nous présente deux plateformes électorales. Une première plateforme qui se lit comme suit ? j'ouvre les guillemets: «"Le gouvernement a un rôle très important à jouer pour alimenter les instruments de croissance importants[...]. Notre stratégie d'investissement agressive permettra à nos manufacturiers de se maintenir à un niveau de prospérité. Nous travaillerons avec l'industrie pour créer un environnement de formation créatif et nous formulerons des politiques incitatives pour les investissements dans notre société."» Voilà une première plateforme, Mme la Présidente. Est-elle du Parti québécois? Non. Elle est du Parti libéral de M. McGuinty. Voilà une position d'un parti qui se dit, en Ontario, progressiste et qui décide d'intervenir massivement dans le développement économique en investissant dans le développement manufacturier et dans l'investissement judicieux auprès de ceux et de celles qui développent l'économie.
D'un autre côté, une plateforme conservatrice et qui se lit comme suit: «Le gouvernement est encombrant, il est intrusif. Il préside à nos choix et à nos décisions quotidiennement et il se met le nez dans nos affaires tout le temps. Notre plateforme est celle du XXIe siècle, qui est celle du siècle des individus qui prennent charge de leur propre développement.» Voilà cette autre plateforme, Mme la Présidente. Est-ce que c'est la plateforme du Parti conservateur ontarien? Non, Mme la Présidente. Yakabuski réfère au petit livre que le député de Verdun nous montrait tout à l'heure, il réfère au programme du Parti libéral.
Alors, d'un côté, vous avez un parti qui se prétend un parti libéral et qui a une plateforme conservatrice et, d'un autre côté, un parti libéral qui a une plateforme progressiste. Et ce n'est pas moi qui le dis, c'est Yakabuski. Alors, Yakabuski nous dit dans cet article, La vraie couleur du parti de M. Charest: La vraie couleur, elle est conservatrice. Et elle est conservatrice depuis 1998, à partir du moment où le chef du gouvernement actuel proposait d'inspirer le programme de son parti à partir de la révolution du bon sens de M. Harris, en 1998. Et, lors de cette élection, le parti d'en face proposait un programme qui était à peu près copié sur la stratégie de M. Harris et il était battu. Dans la dernière élection, le Parti conservateur, le gouvernement qui... le parti qui forme le gouvernement conservateur actuel, Mme la Présidente, a présenté un programme qui lui permettait, quelque part, de présenter une image libérale, mais qui cachait des éléments très importants du programme Harris dont il s'était inspiré pour 1998.
Et, encore une fois, Mme la Présidente, ce n'est pas moi qui le dis, j'invite mes collègues à l'Assemblée nationale à lire cet article de Yakabuski.
Or, il s'est produit quelque chose de très important aux dernières élections en Ontario, Mme la Présidente, c'est que les Ontariens ont décidé que c'en était assez de la révolution du bon sens, c'en était assez dans les coupures des services essentiels aux citoyens, c'en était assez de l'aggravation de la pauvreté, c'en était assez des politiques qui freinaient le développement économique de l'Ontario. Ils ont décidé de se tourner vers un programme vraiment plus progressiste que celui de Mike Harris et que celui du gouvernement actuel dont il s'inspire. C'est un avertissement extrêmement important que les électeurs ontariens servent au présent gouvernement. Les politiques de démobilisation, de déconstruction, de démotivation de nos acteurs principaux dans le domaine du développement social et du développement économique, ces politiques ne plaisent pas aux citoyens et aux citoyennes qui, de bonne foi, pensent qu'un gouvernement doit travailler constamment à la cohésion, à la collaboration, à la concertation entre les divers acteurs de la communauté.
Dans le fond, Mme la Présidente, qu'est-ce que c'est que gouverner sinon que de rechercher le bien commun? Et, le bien commun, ce n'est pas ? ce n'est pas ? la somme de nos réussites individuelles, ce n'est surtout pas la somme des réussites individuelles d'une minorité. Alors, celles et ceux qui parmi nous croient que la simple augmentation du produit intérieur brut est une indication de notre succès au niveau du développement économique et social se trompent, si cet indicateur est fondé tout simplement sur le fait qu'une minorité d'individus réussissent et réussissent très bien aux dépens d'un autre groupe social qui, lui, est sacrifié à leur développement.
Dans notre optique, de ce côté-ci de la Chambre, le bien commun concerne notre aptitude à soutenir chacun d'entre nous dans sa capacité à se développer, dans sa capacité à contribuer au développement de la communauté et à exprimer son individualité, Mme la Présidente. Mais il ne faudrait pas confondre individualisme et individualité, comme le font nos collègues d'en face. L'individualisme renvoie au chacun-pour-soi, tandis que l'individualité réfère à notre identité personnelle et à nos forces personnelles, qu'on ne peut construire qu'au contact de ceux qui nous entourent. Et, dans la mesure que ceux qui nous entourent sont forts, dans la mesure qu'ils sont bien traités, dans la mesure où ils se sentent quelque part appréciés comme citoyennes et citoyens, ils nous renvoient le message réciproque que nous sommes respectables, que nous sommes valables, que nous sommes aussi des citoyens attelés aux mêmes rêves, à la même construction d'une société... d'une communauté qui partage ses richesses, qui partage ses espoirs et qui partage ses rêves.
C'est ça, madame, la différence entre individualisme et individualité. Dans un cas on dit: Chacun pour soi, débrouillez-vous, que le meilleur gagne, et on invoque de temps à autre la compassion et l'égalité des chances pour faire bouche. Mais, dans le fond, ce qu'on souhaite, c'est que chacun prenne une responsabilité qui lui incombe, à lui et à elle seule, et qui lui donnera à la fin le mérite ou le démérite de sa réussite. Alors que, dans une collectivité où l'individualité est respectée, on se préoccupe de son voisin et de sa voisine et de son sort parce qu'on sait que c'est elle et que c'est lui qui construisent notre propre développement et notre propre individualité. Et un parti progressiste se préoccupe de cela, il se préoccupe de ce que le voisin, la voisine, de ce que les personnes qui nous entourent personnellement puissent, puissent partager, puissent partager les richesses et le dynamisme de la communauté.
Mme la Présidente, Mme la Présidente, l'individualité, la richesse de chacun se bâtit donc sur la justice sociale, la justice sociale qui se préoccupe... Et, dans toutes les décisions gouvernementales que nous devrions prendre dans cette Chambre, s'il y avait quelque part des inégalités qui s'introduisaient dans nos décisions, elles devraient constamment favoriser les personnes qui sont les plus vulnérables. C'est le principe de base de la justice sociale. Il se peut qu'on fasse des erreurs, il se peut que nous nous trompions, mais à chaque fois il faudrait souhaiter que ce soit en faveur des plus vulnérables. C'est la base de toutes les actions d'un gouvernement qui recherche le bien commun.
n(17 h 40)n Et il n'y a pas de recette infaillible, mais il y a des principes, cependant, qui sont extrêmement importants. Et un de ces principes, c'est d'éviter l'individualisme, c'est d'éviter le chacun-pour-soi. Parce que l'individualisme sème quoi? L'individualisme, Mme la Présidente, sème la méfiance envers l'autre. L'individualisme sème le cynisme, sème la dérision, sème l'agression, sème l'exclusion. L'individualisme, Mme la Présidente, sème le je-m'en-foutisme. Pourquoi? Parce que, quelque part, on se sent abandonné par sa communauté, voilà pourquoi. Quelque part, on se sent abandonné devant les obstacles qui se dressent devant nous.
Et l'illustration la plus intéressante de ce principe, les gens de ce matin, au petit déjeuner, nous l'ont livrée, c'est comme si, quelque part, on avait un groupe de personnes qui se trouvaient placées devant un escalier, un escalier roulant en direction du bas, et qu'on les regardait tenter de monter cet escalier alors que nous sommes confortablement installés, chacun dans notre petit cocon, dans l'escalier qui monte sans aucun effort et qu'on se demande: Mais comment se fait-il que ces gens-là ne montent pas aussi rapidement que nous? C'est ça, l'individualisme, c'est de ne pas voir comment nos décisions affectent les institutions, les organisations qui permettent aux gens de s'installer dans des situations un peu plus confortables, de progresser et de se développer convenablement.
Mme la Présidente, un gouvernement progressiste renforcerait les interactions de confiance, les interactions de confiance entre les individus et les communautés. Un gouvernement progressiste renforcerait la collaboration, il renforcerait la concertation, il renforcerait la contribution de la société civile, il verrait à ce que le soutien judicieux aux entreprises et aux investissements soit assuré et, en même temps, en même temps, il voudrait exercer un contrôle adéquat sur ces investissements. Il me semble que c'est ce à quoi nous avons assisté dans les quelques dernières années avant l'arrivée de ce nouveau gouvernement. Nous avons assisté à des années où la concertation, la collaboration, la mise en commun, l'interaction entre les individus créateurs en région et dans les milieux urbains ont été mises à contribution dans des termes de développement économique et de développement social sans précédent. Et nous nous éloignons dangereusement de cela avec les dispositions, les orientations et les engagements de l'actuel gouvernement, Mme la Présidente. Ce à quoi nous sommes en train d'assister, c'est à une fragmentation de nos solidarités, et on peut le voir à toutes sortes de niveaux, Mme la Présidente, à toutes sortes de niveaux.
Il me reste seulement cinq minutes. Je n'en aurai jamais assez pour compléter la liste, mais je vais quand même énumérer quelques-uns de ces éléments.
Premièrement, le manque de confiance dans les institutions locales. On nous parle de régionalisation, mais en même temps on met en doute la capacité, par exemple, des CLD de jouer leur rôle convenablement, alors qu'ils ont été des éléments de développement créatif absolument formidables dans plusieurs endroits du Québec.
Deuxième exemple: attaque frontale du réseau des CPE, où on avait là une occasion tout à fait extraordinaire d'inviter les parents à participer au développement des environnements optimaux de leurs enfants.
Troisième illustration: un braquage sans précédent par un gouvernement, dès les premières semaines de ses activités, un braquage sans précédent de très grands partenaires du développement social et économique, c'est-à-dire les syndicats, un braquage sans précédent qui se fait non pas par seulement des paroles, non pas simplement par des allusions, mais par la loi n° 8, par la loi n° 7 et par la loi... l'ouverture de l'article 45 du Code du travail, Mme la Présidente, un braquage sans précédent, une fragmentation de nos solidarités. Et ce n'est pas parce qu'on ne s'entend pas toujours avec des partenaires qu'il faut les renier, qu'il faut les braquer.
Voulez-vous un autre exemple de fragmentation de nos solidarités? La loi n° 9 sur les défusions. Il n'y a pas plus convaincant d'opération de fragmentation de nos solidarités que la loi n° 9.
Et, tout à l'heure, j'entendais la présidente du Conseil du trésor nous rappeler que ce gouvernement serait intolérant vis-à-vis de la pauvreté. Eh bien, parlons-en. Depuis le début, coupure de 200 millions dans le soutien financier aux personnes les plus vulnérables, à l'aide sociale. Annonce d'un autre 150 millions de coupures, dans le même ministère, pour les mêmes personnes les plus vulnérables. Comment fait-on la récupération de ces 200 millions, Mme la Présidente? On pousse vers la sortie de l'aide sociale 25 500 personnes à coup de pénalités. Voilà ce qu'on fait en même temps qu'on coupe 27 millions dans les programmes de formation à l'emploi. Tolérance zéro envers la pauvreté? Mais qu'est-ce que c'est que ce discours-là? Coupures importantes dans les budgets dédiés aux parents et aux enfants des écoles des milieux défavorisés. Tolérance zéro pour la pauvreté? Coupure dans les budgets d'entretien des offices municipaux d'habitation, dans le cas du logement social. Coupure de 450 millions dans le développement régional. Donc, quelque part, coupures dans nos préoccupations d'équité interrégionale, Mme la Présidente. Tolérance zéro pour la pauvreté? Recul énorme, recul énorme du gouvernement sur trois de ses promesses prises en campagne électorale concernant la lutte à la pauvreté.
Mme la Présidente, vous me dites deux minutes, je disais trois engagements. Mme la Présidente, est-ce qu'on appelle ça tolérance zéro envers la pauvreté, ou, comme certains groupes sociaux commencent à le penser et à l'écrire et à le publier, tolérance zéro envers les pauvres? On peut se poser la question comme ils le font, Mme la Présidente.
Mme la Présidente, pour toutes ces raisons, je pense que ce parti était bienvenu de présenter cette motion de censure qui condamne les approches et les politiques conservatrices du gouvernement actuel. Merci, Mme la Présidente.
(Applaudissements)
La Vice-Présidente: Alors, nous allons maintenant...
Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion, qui se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement libéral pour l'ensemble de ses politiques conservatrices.» Cette motion est-elle adoptée?
M. Dupuis: Appel par vote nominal, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Qu'on appelle les députés.
n(17 h 47 ? 17 h 53)nMise aux voix
La Vice-Présidente: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion, qui se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement libéral pour l'ensemble de ses politiques conservatrices.» Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe: M. Boisclair (Gouin), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Charbonneau (Borduas), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Bertrand (Charlevoix), M. Létourneau (Ungava), Mme Doyer (Matapédia), M. Côté (Dubuc), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Jutras (Drummond), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pagé (Labelle), Mme Charest (Rimouski), M. Valois (Joliette), M. Legendre (Blainville), M. Bédard (Chicoutimi), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Richelieu), Mme Lemieux (Bourget), M. Deslières (Beauharnois), Mme Richard (Duplessis), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Beaudoin (Mirabel), M. Bourdeau (Berthier), Mme Maltais (Taschereau), M. Bouchard (Vachon), M. St-André (L'Assomption), M. Thériault (Masson).
La Vice-Présidente: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), M. Dupuis (Saint-Laurent), M. Séguin (Outremont), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), M. Bellemare (Vanier), M. Couillard (Mont-Royal), M. Reid (Orford), M. Audet (Laporte), Mme Gauthier (Jonquière), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Corbeil (Abitibi-Est), Mme Théberge (Lévis), Mme Normandeau (Bonaventure), M. Pelletier (Chapleau), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Gautrin (Verdun), Mme Boulet (Laviolette), Mme Beauchamp (Bourassa-Sauvé), M. Vallières (Richmond), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Courchesne (Fabre), M. Després (Jean-Lesage), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Brodeur (Shefford), M. Cusano (Viau), Mme Lamquin-Éthier (Crémazie), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Ouimet (Marquette), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), Mme Thériault (Anjou), M. Auclair (Vimont), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Descoteaux (Groulx), M. Clermont (Mille-Îles), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Charest (Matane), M. Bouchard (Mégantic-Compton), M. Blackburn (Roberval), M. Bernard (Montmorency), M. Dubuc (La Prairie), M. Gabias (Trois-Rivières), Mme Gaudet (Maskinongé), Mme Hamel (La Peltrie), Mme L'Écuyer (Pontiac), Mme Legault (Chambly), M. Lessard (Frontenac), M. Moreau (Marguerite-D'Youville), Mme Perreault (Chauveau), M. Paquin (Saint-Jean), M. Paquet (Laval-des-Rapides), M. Morin (Montmorency), M. Rioux (Iberville), M. Tomassi (LaFontaine), Mme Vien (Bellechasse).
M. Dumont (Rivière-du-Loup), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière).
La Vice-Présidente: Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire général.
Le Secrétaire: Pour: 28
Contre: 62
Abstentions: 0
La Vice-Présidente: Cette motion est rejetée.
Débats de fin de séance
Offre de compensation aux producteurs
de bovins de réforme
Alors, nous allons maintenant procéder au débat de fin de séance prévu entre le député de Nicolet-Yamaska et la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation sur les compensations versées aux producteurs de bovins du Québec. Alors, M. le député de Nicolet-Yamaska, vous avez la parole pour une période de cinq minutes. Je vais demander à tous ceux qui veulent quitter de le faire immédiatement et en silence, s'il vous plaît!
Des voix: ...
La Vice-Présidente: ...à l'ordre, MM., Mmes les députés. Alors, je cède maintenant la parole au député de Nicolet-Yamaska pour cinq minutes.
M. Michel Morin
M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. Nous le savons tous, les conséquences de la crise de la vache folle sont désastreuses pour les producteurs et les productrices du Québec. Depuis le 1er septembre, soit depuis la fin de l'aide financière accordée cet été par la ministre, les producteurs ont subi des pertes financières énormes, évaluées à près de 52 millions. Il est important de rappeler que près de 60 % du commerce dans le secteur du bovin est toujours sous embargo. La crise est donc loin d'être finie, Mme la Présidente. Et, pour y faire face, les producteurs réclamaient et réclament toujours un programme d'aide de 30 millions qui couvrirait l'ensemble des secteurs de la production bovine québécoise et qui compenserait en grande partie l'écart entre le prix normal du marché et le prix réellement obtenu par les producteurs.
Le 15 octobre dernier, la ministre de l'Agriculture annonçait une aide financière incomplète de 10 millions d'argent neuf, une aide financière, Mme la Présidente, qui couvre à peine le cinquième des pertes anticipées par les producteurs de bovins du Québec, une aide financière qui ne compense actuellement que 16 000 producteurs de bovins de réforme qui ne sont pas compensés et qui subissent encore de façon dramatique une chute de prix du marché. Malheureusement, nous pouvons constater que la ministre de l'Agriculture a laissé tomber ces 16 000 producteurs et productrices de bovins de réforme en refilant le problème à Ottawa. Ces producteurs sont loin d'être satisfaits des mesures d'aide annoncées par la ministre.
n(18 heures)n Les réactions de l'UPA sont les suivantes, et je cite: «L'aide gouvernementale que vient d'annoncer Québec n'est rien d'autre qu'une mesure incomplète qui devra être bonifiée.» Une autre citation, du président de la Fédération des producteurs de bovins, M. Dessureault, qui dit que «cette annonce est loin de satisfaire et de répondre aux besoins de l'ensemble des producteurs de bovins, et ? pour la Fédération ? l'aide versée aux producteurs de bouvillons et de semi-finis est nettement insuffisante. Même en tenant compte des sommes annoncées, les producteurs perdent toujours plus de 300 $ par bouvillon mis en marché. Quant aux producteurs de bovins de réforme, la Fédération déplore fortement le fait qu'ils aient été laissés en plan par la ministre.» Le président de l'UPA a affirmé que les deux paliers de gouvernement devaient cesser de se renvoyer la balle. Il a également mentionné, et je cite: «On aurait pu croire que ces deux gouvernements issus de la même famille politique ? de sa même famille politique ? élargie pourraient s'entendre ? on entend toujours ? et on attend toujours.
«Une crise d'une telle ampleur commande des interventions d'urgence et ces mesures extraordinaires adaptées à une situation de crise et non pas des demi-mesures comme celles qui viennent d'être annoncées.» Dans La Terre de chez nous, cette semaine, le président ? et je vous montre La Terre de chez nous ? le président de l'UPA, M. Pellerin, et on voit le titre de La Terre de chez nous, on dit Les producteurs ne décolèrent pas: «Le premier vice-président de la Fédération des producteurs de lait du Québec soutient que la ministre se leurre en croyant que son programme d'aide de 10 millions va permettre à l'industrie bovine de passer à travers la crise de la vache folle.» Toujours selon ce dernier, les pertes de revenus nettes pour chacun des producteurs atteint 15 000 $. Une ferme laitière moyenne de 45 bêtes, en production de réforme, perd 25 % à 30 % à chaque année. Actuellement, un producteur perd plus de 500 $ par vache.
La Vice-Présidente: Si vous voulez conclure, M. le député.
M. Morin (Nicolet-Yamaska): Oui, merci. En conclusion, dans une entrevue à La Terre de chez nous, la ministre a affirmé avoir bon espoir qu'Ottawa annonce un second programme d'aide. Et ma question que je posais cet après-midi: Si la ministre pense qu'elle est si confiante d'obtenir une aide exclusive du fédéral, peut-elle nous expliquer pourquoi le premier ministre de l'Alberta a annoncé, le 10 octobre dernier, son intention ferme de mettre en oeuvre...
La Vice-Présidente: Malheureusement...
M. Morin (Nicolet-Yamaska): ...une compensation financière pour venir en aide aux producteurs...
La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Je dois maintenant... La parole est maintenant à la ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Madame, pour cinq minutes aussi.
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: Alors, merci, Mme la Présidente. Effectivement, Mme la Présidente, lorsque, le 20 mai dernier, on a appris effectivement qu'une vache, en Alberta, était décédée de la maladie de ESB, c'est avec consternation que les producteurs québécois et la ministre de l'Agriculture ont appris la nouvelle. Immédiatement, Mme la Présidente, nous avons pris le dossier en main, nous avons rencontré des gens de l'industrie et nous avons effectivement évalué les impacts que cela pouvait occasionner à l'industrie.
On se rappellera, Mme la Présidente, que, le 16 juillet dernier, nous avons été la première province au Canada à signer une entente bilatérale avec le gouvernement canadien pour aider nos producteurs. Nous avons réussi à avoir une aide de 58 millions de dollars, Mme la Présidente. Et je voudrais rappeler qu'effectivement, eu égard à la performance du Québec dans ce dossier, nous sommes allés chercher 11 % de l'enveloppe totale du gouvernement fédéral alors que la production bovine au Québec représente 5 % de l'ensemble de la production du Canada, Mme la Présidente. Or, j'ose espérer, Mme la Présidente, que nous avons... On peut constater que nous avons fait nos devoirs. D'ailleurs, le 5 août dernier, des représentants de l'industrie, des représentants effectivement de l'industrie bovine ont salué la célérité avec laquelle nous avions agi, ont aussi salué le programme que nous avions élaboré.
On se rappelle aussi, Mme la Présidente, que, le 8 août, il y a eu l'annonce partielle, l'annonce partielle de l'embargo par le gouvernement américain, levée partielle qui devait être effectuée le 1er septembre. Effectivement, le 1er septembre, il y a eu une levée partielle de l'embargo pour la viande de bouvillon âgé de 30 mois et moins. Nous sommes conscients effectivement qu'il fallait à ce moment-là évaluer, voir comment les marchés allaient réagir. On a constaté effectivement, quelques semaines après la levée de l'embargo, qu'il y a eu le rétablissement des prix pour le secteur de l'industrie, entre autres, des veaux de lait, des veaux de grain. Les prix se sont rétablis de façon substantielle, voire même ils ont dépassé ceux qui étaient affichés avant le 20 mai dernier.
On sait aussi, Mme la Présidente, nous sommes conscients que nos éleveurs de bouvillons, qui sont dans le même marché que les autres producteurs canadiens, faisaient face à une concurrence assez déloyale compte tenu du fait que les autres provinces du Canada avaient établi un programme d'aide pour le bouvillon d'abattage et le bouvillon semi-fini. Je vous rappellerai ? je l'ai dit cet après-midi, Mme la Présidente ? que les autres provinces ont effectivement établi des programmes d'aide pour le bouvillon d'abattage puis le bouvillon semi-fini et non pas pour le bouvillon de réforme ni la vache de réforme. Nous sommes dans la même situation que partout au Canada. Or, les chiffres que nous avons, et ils ne sont pas contestés, d'aucune façon, c'est que l'aide apportée par les autres provinces pour le bouvillon d'abattage et le bouvillon semi-fini, je le répète, soit pour l'Ontario 330 $ par tête, pour l'Alberta 375 $ par tête, pour le Manitoba 245 $ par tête, pour la Saskatchewan 313 $ par tête... Alors que pour le Québec, c'est 335 $, Mme la Présidente, nous sommes au deuxième rang tout de suite après la riche province de l'Alberta.
Je suis consciente, Mme la Présidente, je l'ai affirmé tout de suite, Mme la Présidente, que le programme d'aide pour nos producteurs de bouvillons, ce n'est pas la Cadillac, mais je suis certaine, Mme la Présidente, que cette industrie avait besoin de liquidités. D'ailleurs, c'est ce que les représentants nous donnaient comme information. Et d'ailleurs, immédiatement après l'annonce de ce programme, immédiatement après l'annonce de ce programme, déjà nos producteurs recevaient des informations de leurs banquiers à l'effet qu'on extensionnait leurs marges de crédit. Et déjà, Mme la Présidente, on peut sentir dans les parcs d'engraissement une activité qui reprend. Je pense que le programme, nonobstant le fait qu'il ne comble pas totalement la perte subie par nos producteurs, fait en sorte que cette industrie va pouvoir passer à travers cette crise sans avoir davantage de faillites.
Certes, Mme la Présidente, il y a un secteur qui n'est pas couvert. Contrairement à mon collègue d'en face, nous, le 22 septembre, nous n'avons pas baissé les bras. Et j'en appelle à la solidarité des gens d'en face pour nous aider à convaincre le gouvernement canadien de la justesse de notre prétention. Tantôt, j'entendais le député de Vachon parler d'effritement de solidarité. Alors, moi, je fais appel effectivement à votre solidarité. On a besoin... Le Québec n'est jamais aussi fort que lorsqu'il se tient debout ensemble. On a besoin d'être ensemble pour convaincre nos interlocuteurs fédéraux que cette crise est pancanadienne et que nous avons besoin de l'argent du Canada pour aider nos producteurs laitiers. Et j'ai bon espoir, j'ai très, très bon espoir, Mme la Présidente, d'y arriver. Merci.
La Vice-Présidente: Alors, je vous rappelle, M. le député de Nicolet-Yamaska, que vous avez une réplique de deux minutes.
M. Michel Morin (réplique)
M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. Ce midi, j'ai rencontré M. Dessureault qui était ici, en avant. J'aurais aimé qu'il entende votre réponse, mais probablement qu'il va l'entendre ce soir. Je ne suis pas sûr de ça, qu'il va être rassuré par votre réponse. On l'a dit et on l'a répété, la situation est désastreuse, et des actions concrètes doivent être faites, et le plus rapidement possible. D'ailleurs, Mme la ministre l'a répété, ce n'est pas la Cadillac, et les pertes subies depuis le 1er septembre dans certaines régions du Québec sont énormes. Les demandes qu'on avait faites ou qu'on avait aspirées, c'était de l'ordre de 52 millions. Actuellement, il y a un 10 millions sur la table d'argent neuf. On nous avait dit 20 millions, mais ce n'est même pas encore réglé pour l'autre tranche de 10 millions.
n(18 h 10)n Donc, je ne suis pas convaincu que le président de la Fédération des producteurs de bovins soit satisfait de la réponse de la ministre. La ministre refile encore une fois ce dossier-là au gouvernement fédéral et elle dit: On a bon espoir d'aller chercher le manque à gagner. Bien, moi, je lui dis: Faites comme en Ontario, avancez le montant, mettez-vous en oeuvre pour avancer ce montant-là et vous irez chercher vos sous après. Mais, pour l'instant, ce qui est important, c'est compenser, compenser les producteurs de bouvillons de réforme, et ça presse parce qu'il y a des régions entières qui souffrent de ce manque à gagner énorme. Et, Mme la ministre, je vous encourage à le faire rapidement au nom des producteurs de bovins de réforme du Québec. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Alors, ceci met fin à nos travaux. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Oui. Alors, je propose la motion pour que nous ajournions nos travaux au mardi 28 octobre, à 14 heures.
Ajournement
La Vice-Présidente: Alors, vous avez 10 minutes, M. le leader du gouvernement, pour débattre de cette motion. Vous avez également 10 minutes... Alors, je comprends que cette motion est adoptée. Adopté. Alors, j'ajourne les travaux à mardi, le 28 octobre, à 14 heures.
(Fin de la séance à 18 h 12)