(Dix heures deux minutes)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Affaires du jour
Affaires inscrites par les députés de l'opposition
Motion proposant d'entendre le premier ministre
sur son projet de réingénierie de l'État québécois
Je vous remercie. À l'article 12 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, M. le député de Richelieu présente la motion suivante:
«Que la commission des institutions se réunisse d'urgence afin d'entendre le premier ministre du Québec sur son projet de réingénérie de l'État québécois.» À la suite d'une réunion tenue avec les leaders afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat, le partage a été établi de la façon suivante: l'auteur de la motion disposera d'un temps de réplique de 10 minutes; 10 minutes sont allouées aux députés indépendants; 50 % du temps, du reste, est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement et 50 % du temps restant alloué au groupe formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes pourra être utilisé par l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par les députés indépendants sera redistribué entre les deux groupes parlementaires. Les interventions ne seront soumises à aucune limite.
Je suis maintenant prête à entendre le premier intervenant, M. le député de Richelieu.
M. Sylvain Simard
M. Simard: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Si nous sommes réunis ce matin, vous venez de le rappeler, c'est afin de débattre d'une motion, une motion du mercredi, qui demande la réunion urgente de la commission des institutions afin d'entendre le premier ministre sur ce qu'il est convenu d'appeler... Ces derniers jours, on a eu quelques petits problèmes sémantiques, mais, jusqu'à plus ample informés, nous allons utiliser le vocabulaire que le gouvernement a bien voulu donner à cette entreprise ? j'aperçois la présidente du Conseil du trésor qui se joint à nous ? donc nous allons parler de réingénierie. Donc, ce matin, nous sommes réunis pour débattre justement de cette réunion demandée de la commission des institutions afin d'entendre le premier ministre sur ce projet de réingénierie.
En fait, nous assistons depuis quelque temps, je dirais depuis quelques années mais particulièrement ces derniers mois, d'abord à une vaste entreprise de démolition de l'État. D'abord, on dit de cet État qu'il a tous les défauts. On prétend, dans certains milieux, que l'objectif politique et économique que devraient viser tous les Québécois, c'est d'avoir le moins d'État possible. Je vous souligne en passant que ce n'est pas très original, que des mouvements de droite de ce genre ont sévi ou sévissent encore dans beaucoup de pays du monde, et je vous souligne que, là où ces mouvements sont allés jusqu'au bout de leur terme, c'est-à-dire ont pu réaliser leur idéologie, les résultats ont été, en général, assez catastrophiques, surtout pour la classe moyenne et les plus défavorisés de notre société.
L'État québécois, ce n'est pas un objet de mépris, ce n'est pas une institution, un instrument dont on doive, pour suivre la mode libérale ou adéquiste, dire du mal tous les matins en se levant. L'État québécois a produit des résultats admirables. La société québécoise s'est dotée, au cours des années soixante et soixante-dix, d'instruments collectifs extrêmement efficaces qui ont permis aux Québécois d'avancer dans la voie de leur libération économique, qui ont permis aux Québécois d'atteindre des hauts niveaux d'éducation, qui ont permis au Québec de se doter d'un réseau d'institutions sociales, hospitalières de très, très grande qualité. L'État québécois a permis, en résumé, aux Québécois d'atteindre, de rejoindre la modernité. L'État québécois, c'est ce qui est issu de cette Révolution tranquille où des hommes de très grande valeur, nous pensons ici à Jean Lesage, à Paul Gérin-Lajoie, nous pensons à René Lévesque, nous pensons à Jacques Parizeau... Nous pensons à des hommes et des femmes qui ont travaillé à moderniser l'État québécois de façon à nous permettre aujourd'hui de profiter de l'un des standards de vie les plus élevés au monde et d'avoir une société qui est enviée à peu près par tous les pays.
Alors, dire du mal de l'État québécois, faisons très attention. Je pense qu'on devrait mesurer un petit peu ses propos lorsqu'on entreprend la dénonciation quotidienne. Lorsque la présidente du Conseil du trésor signe un texte où elle dit que l'État ne fait rien de bon, ne peut plus rien faire de bon, je pense qu'elle présente là la vision, le mépris à l'égard de l'État et de ses propres fonctionnaires de cette administration qu'elle est censée diriger et dans laquelle elle démontre tous les jours son manque absolu de confiance, au point d'ailleurs où ? nous l'avons appris hier soir ? où nous aurons bientôt des policiers dans les différents étages des ministères pour surveiller si des fonctionnaires font bien leur devoir et ont un devoir de réserve absolue sur les documents dont ils prennent connaissance.
Mme la Présidente, l'État québécois mérite notre considération, l'État québécois doit constamment requérir notre considération afin d'être constamment amélioré. Il n'est pas question ici, de ce côté-ci de la Chambre, de penser que nous sommes les défenseurs d'un statu quo, d'un conservatisme qui ferait que tout ce qui existe est bon et que tout ce qui existe doit être préservé. Nous avons d'ailleurs constamment travaillé à cette modernisation de la fonction publique québécoise. Je pense notamment à tout ce qui est issu de la Loi de l'administration publique que nous avons votée il y a quelques années, qui a introduit cet élément très moderne de gestion qui est partagé par plusieurs grandes administrations à travers le monde, la gestion par objectifs, l'imputabilité. Maintenant, à tous les niveaux de l'appareil d'État, les fonctionnaires sont obligés de... devant les fonctionnaires... sont imputables devant les fonctionnaires de leur administration. Ils doivent se fixer des objectifs et rendre compte de l'atteinte de ces objectifs. Les ministères, les organismes doivent présenter des déclarations de services aux citoyens et montrer comment ils atteignent leurs objectifs.
Je vais prendre un exemple que j'ai bien connu, celui des bourses aux étudiants, le service de l'aide aux étudiants qui présentait, il y a quelques années, des défauts importants. Il y avait eu une commission parlementaire d'ailleurs, et le Vérificateur général avait constaté des temps d'attente inacceptables. Vous savez, c'était l'époque des boîtes téléphoniques où il fallait appuyer sur un bouton à peu près 25 fois pour s'y retrouver, c'étaient des heures d'attente pour rejoindre un fonctionnaire. Et cette unité, ce service de l'aide aux étudiants au ministère de l'Éducation, à la suite de la Loi de l'administration publique et par l'impulsion du gouvernement, s'est modernisé au point aujourd'hui où les étudiants peuvent atteindre, rejoindre leurs dossiers directement en ligne, au point où les temps d'attente ont diminué pour pratiquement disparaître, au point où nous avons maintenant une gestion qui demande moins de personnel et qui est très, très efficace.
n(10 h 10)n Et constamment comme cela, nous avons tenté et il faut constamment tenter d'améliorer la compétence, la capacité de nos organismes et de nos ministères à bien servir la population, parce que l'objectif, c'est toujours le même: le service à la population. Des services que la population attend de son État, ce sont des services, des services qui soient facilement disponibles au meilleur coût possible. Il y a toujours place à l'amélioration. Et l'amélioration n'est jamais basée sur la destruction, elle n'est jamais basée sur le mépris, sur une décision idéologique qui consiste à dire ? et le résumé, je pense, parlera assez clairement ? que moins d'État c'est mieux d'État, qu'il faut faire reculer l'État sur tous les fronts, que partout où il y a de l'État il y a de l'inefficacité et, surtout, surtout ce préjugé que nous voyons dans toutes les déclarations de l'autre côté de la Chambre, que partout où le privé se trouve le citoyen y gagne. Je pense que c'est une erreur fondamentale, et nous allons tout faire au cours des prochains mois pour démontrer au parti gouvernemental et à la population du Québec qu'il y a là une erreur fondamentale.
Je parlais tout à l'heure de l'exemple qui est venu d'ailleurs, c'est d'ailleurs une mode que nous prenons très en retard au Québec, cette mode de la droite conservatrice incarnée par la présidente du Conseil du trésor et le premier ministre du Québec: Mme Thatcher a détruit le système ferroviaire britannique, Mme Thatcher a détruit le système d'éducation britannique, Mme Thatcher a mis à mal tout le système de santé britannique, et ça fait maintenant près de sept ans que l'on tente de recoller les morceaux en Angleterre, et ce sera l'oeuvre de plusieurs générations de réparer tout le mal qui a été fait.
L'Ontario vient de tourner la page à une dizaine d'années d'administration conservatrice, à un régime de droite qui a été présidé pendant plusieurs années par Mike Harris, un homme pour lequel le premier ministre du Québec a toujours eu la plus grande admiration. D'ailleurs, c'était le modèle qu'il voulait suivre, rappelons-nous de l'élection de 1998, il voulait faire la même révolution du bon sens que Mike Harris, c'est-à-dire s'attaquer à l'État, s'attaquer aux services aux citoyens, faire en sorte que la classe moyenne, que les plus démunis, que l'ensemble des citoyens ne puissent plus se tourner vers l'État pour recevoir l'appui nécessaire dans leur vie quotidienne.
Un processus de modernisation qui aurait eu pour objectif d'améliorer le fonctionnement, sans préjuger, en jugeant ouvertement chaque... en jugeant objectivement, de façon ouverte, chaque aspect de l'administration publique eut été une entreprise que nous aurions immédiatement applaudie. Au lieu de cela, nous avons un processus qui se fait derrière des portes closes, qui se fait hors de tout débat, qui s'est fait par des questionnaires au plus haut niveau de la fonction publique qui n'ont, dans aucun cas, amené la collaboration des employés de l'État. Lorsque vous voulez transformer une entreprise, lorsque vous voulez transformer un groupe, lorsque vous voulez faire avancer une société, vous allez chercher l'appui de vos employés, de vos collaborateurs, vous allez chercher l'appui de vos cadres, vous les amenez à partager votre vision et à participer à votre entreprise. Au lieu de cela, il s'agit jusqu'à maintenant d'une entreprise limitée à quelques personnes, qui veut imposer à l'ensemble de l'appareil d'État un virage à 180 degrés vers lequel aucun des employés n'a été jusqu'à maintenant associé.
Mais plus grave que cela, comme il s'agit de changements fondamentaux, on aurait pu s'attendre à ce que le gouvernement ouvre le débat à l'ensemble de la société. D'ailleurs, c'est l'objet de cette motion aujourd'hui. Par cette motion, nous voulons signifier très nettement notre profonde déception de voir la population du Québec totalement absente du débat sur la réforme de l'État. Cette réforme de l'État, ce n'est pas banal, ça touche à la sécurité du revenu, ça touche à l'éducation, ça touche à la santé, ça touche à la vie quotidienne, ça va avoir des effets sur la vie quotidienne de l'ensemble des Québécois au cours des prochaines années. Et, malgré cela, les Québécois, en aucune façon, ne sont consultés.
Ah, je connais la réponse de l'autre côté, puis on va l'entendre tout à l'heure, on va l'entendre à satiété. On va nous dire: Mais oui, il y a eu des élections le 14 avril, les Québécois nous ont donné tous les mandats que nous leur avons demandés. J'ai des petites nouvelles pour eux, et ils vont s'en rendre compte au cours des prochaines années, Mme la Présidente, les Québécois, là, n'ont pas du tout eu l'impression, lorsqu'ils sont allés voter le 14 avril, qu'ils donnaient un chèque en blanc au Parti libéral pour détruire l'État. Je peux vous dire que, dans le comté de Richelieu, là, à Sorel-Tracy, à Yamaska, à Sainte-Victoire, à Saint-Jude, ou à Saint-Aimé, ou à Massueville, il n'a jamais été question une seule fois de réingénierie. Le mot n'est pas encore rendu à Massueville, je peux vous assurer de ça, là. Il n'y a pas eu de débat sur la réforme de l'État, il n'y a eu aucun mandat accordé à qui que ce soit. Jamais mon adversaire n'a employé ces mots-là, jamais il n'a ouvert le débat là-dessus. Ça a été totalement absent du débat électoral.
Ne nous dites pas que vous avez un chèque en blanc qui vous permet de tout faire dorénavant sans vous préoccuper des Québécoises et des Québécois. D'ailleurs, les Québécoises et les Québécois commencent à vous le dire. De toutes les parties du Québec, vous allez voir, petit à petit, de plus en plus, les Québécois se mobiliser pour vous dire que votre entreprise ne peut pas se faire sans eux, qu'ils ont droit au chapitre, qu'on ne peut pas détruire cet instrument collectif extraordinaire dont les Québécois se sont dotés depuis 40 ans pour leur épanouissement sans leur demander leur avis. On ne peut pas faire des changements comme ceux-là, les priver de services importants, et c'est ça qui sera le résultat de cette opération, sans leur demander leur avis.
Alors, au lieu d'associer la population, au lieu de dialoguer, au lieu de faire avancer, et ça a été toujours une caractéristique de la société québécoise d'avancer par consensus, d'avancer par persuasion, par pédagogie, par dialogue, au lieu de cela, le Parti libéral du Québec est en train de semer la haine, semer l'agressivité, semer la méfiance. Et nous assistons actuellement à des scènes de provocation. La lettre du premier ministre publiée dans les journaux il y a une quinzaine de jours était, et tout le monde l'a reconnu, une provocation manifeste à l'égard notamment des syndicats. Pourquoi gouverner par provocation? Pourquoi chercher la bataille? Pourquoi chercher la division? Pourquoi chercher la lutte au lieu de chercher le compromis, au lieu de chercher la discussion et le dialogue?
Et je suis extrêmement déçu de voir la méthode employée par le Parti libéral du Québec, qui est axée essentiellement sur une vision autoritaire du pouvoir politique au lieu d'une vision de leadership. Le leadership aurait consisté à prendre tous les moyens pour mettre sur la table un certain nombre de débats fondamentaux, et à dialoguer avec la population, et ensuite ? et c'est ça qu'un gouvernement responsable fait ? et ensuite prendre ses décisions, prendre les décisions qui s'imposent. Et la démocratie veut que ce soient les législateurs, le législateur, les députés qui prennent les décisions. Le parti majoritaire a tous les droits de prendre ses décisions, mais à la suite d'un processus de dialogue avec la population, pas de façon impérieuse, de façon autocratique, de façon actuellement autoritaire qui braque les Québécois.
Je vous le dis, vous semez actuellement ? je mets en garde nos amis d'en face ? vous semez actuellement un vent de confrontation, un vent d'affrontement qui va nuire à la paix sociale au Québec et enlever à la vie sociale et économique québécoise l'un de ses aspects les plus importants, la paix sociale. Votre ancien chef, le premier ministre Robert Bourassa, disait que la paix sociale, c'était ? et Dieu sait s'il avait eu maille à partir avec ça dans sa vie et qu'il avait une solide expérience ? que c'était l'atout économique le plus important d'une société. Eh bien, la paix sociale, vous êtes en train de la compromettre simplement pour venir à bout... pour aller jusqu'au bout d'un rêve idéologique, de ce néolibéralisme, de cette aventure qui nie à l'État la capacité d'intervenir dans une société de façon positive et de façon efficace.
n(10 h 20)n Vous vous comportez... Mme la Présidente, le gouvernement se comporte actuellement en apprenti sorcier, c'est-à-dire qu'il mélange des ingrédients qui risquent, lorsqu'ils seront mélangés, de donner des résultats désastreux pour notre société. Et c'est pour cela que nous avons absolument besoin de savoir quelles sont les intentions réelles de ce gouvernement, parce que, derrière ces grands propos idéologiques, derrière cette volonté de réduire la taille de l'État, il y a aussi la volonté, évidemment, de réduire les coûts de l'État. Et, lorsque j'ai demandé à la présidente du Conseil du trésor, hier après-midi, en cette Chambre, de chiffrer, de nous dire quels étaient les objectifs de ce gouvernement... On ne peut pas imaginer un seul instant qu'un gouvernement entreprenne une telle opération, investisse des millions de dollars dans une opération, mobilise ses ressources dans une opération de cette taille sans savoir quel est l'objectif à atteindre.
Vous comprendrez, Mme la Présidente, que le gouvernement a certainement un objectif à atteindre. Quelle est la taille de l'État souhaitée au bout de cette opération? On ne peut pas dire, comme semblait le dire la présidente du Conseil du trésor hier, que, au bout, tout cela, ce qui sera perdu d'un côté sera réinvesti de l'autre. Si l'objectif, comme l'a dit le premier ministre à New York, si l'objectif, c'est de réduire la taille de l'État, vous comprendrez bien qu'on a besoin de savoir jusqu'où on veut la réduire, et ça, ça se mesure, il y a une mesure.
Tous ceux qui suivent nos travaux, qui suivent les documents de cette Assemblée savent que, chaque année, le Conseil du trésor et le ministère des Finances publient ? c'est dans le message de la présidente du Conseil du trésor, elle le connaît bien ? la part du produit intérieur brut québécois occupée par les dépenses de programmes, auxquelles il faut ajouter évidemment le service de la dette. Eh bien, nous savons où en est... quelles sont les dépenses de l'État québécois, combien coûte, par rapport à notre richesse collective, l'État québécois. Il coûte presque 18 % de notre richesse collective, 17,9 %. Ceci dit, il ne faut pas se scandaliser, ça a déjà été 23 % du temps que les libéraux étaient là, en 1992. Il n'y a pas à se scandaliser que ce soit à 18 %, mais, dans certaines provinces, c'est beaucoup moins.
On a le droit de savoir, face à une opération comme celle-là... Les citoyens qui sont inquiets dans toutes les régions du Québec, qui sont inquiets dans les groupes communautaires, qui sont inquiets dans les syndicats, qui sont inquiets dans leur vie quotidienne face aux services qu'on s'apprête à remettre en question, à éliminer, à transformer, les Québécois ont le droit de savoir quel est l'objectif que s'est fixé le gouvernement. Jusqu'où veut-on réduire la taille de l'État? Le rêve de ce gouvernement, le rêve du premier ministre du Québec, le rêve de la présidente du Conseil du trésor, c'est d'avoir moins d'État, l'État le plus petit possible. Ils ne s'en cachent même plus. On a le droit au moins de savoir jusqu'où ils veulent rétrécir l'État québécois. On sait que c'est le fruit de leur idéologie ultralibérale, on sait qu'ils aimeraient bien que le Québec redevienne une province comme les autres avec le moins de moyens possible, ne plus exercer des pouvoirs souverains dans plusieurs secteurs, ne plus correspondre à ce que doit être, en tout cas à l'intérieur d'une confédération, le rôle d'un État national comme l'est l'État du Québec.
Nous sommes ici à l'Assemblée nationale, nous ne sommes pas dans une législature provinciale. Nous sommes là où se prennent des décisions qui affectent un peuple, une nation, et nous nous sommes dotés, les grands visionnaires de la Révolution tranquille nous ont dotés d'instruments pour guider ce peuple. C'est le Parti libéral qui a donné la Société générale de financement, je vous le rappelle. Ce sont les grand penseurs et les grands leaders de la Révolution tranquille qui nous ont donné la Caisse de dépôt et placement. Ce sont eux qui ont doté le Québec d'instruments qui correspondent aux besoins et aux nécessités de notre société.
Alors, actuellement, nous assistons à une opération sauvage, sans balises, sans critères, sans orientations. Et, lorsque nous posons des questions pour savoir où s'en va le gouvernement, nous sommes renvoyés à la patience: il faut être patients. Pendant ce temps-là, tout se fait dans l'ombre, derrière des portes closes. Et, pendant que tout se fait derrière des portes closes et dans l'ombre, la population devient chaque jour de plus en plus inquiète.
Mme la Présidente, je vais à ce moment-ci conclure mon intervention ? je reviendrai un peu plus tard ? en demandant, en demandant au gouvernement de changer d'avis, de comprendre la voix de ces milliers et milliers de Québécois qui se font entendre de plus en plus tous les jours et qui disent leur inquiétude et qui voudraient que ce gouvernement réponde aux questions, aux questions de leurs élus. Que le premier ministre vienne devant une commission parlementaire ? c'est la commission des institutions où il est reçu habituellement ? nous le recevrons, je m'y engage comme président de cette commission, avec les plus grands égards. Mais nous allons lui poser les questions qui s'imposent, des questions normales, des questions démocratiques. Nous allons lui donner la tribune nécessaire afin qu'il lève le voile sur ses véritables intentions, qu'il fasse acte de démocrate, qu'il vienne dire ce qu'il entend faire. Et je pense que, ce faisant, en acceptant notre proposition, Mme la Présidente, le premier ministre montrerait qu'il n'a rien à cacher, qu'il est capable de présenter à la population du Québec son programme, ses intentions, son ordre de marche pour les prochains mois et les prochaines années, et de cette façon nous verrions clairement. Pas quand les décisions seront prises, maintenant, au moment où les débats s'amorcent, qu'il vienne ouvrir les livres de façon à ce que les Québécoises et les Québécois puissent vraiment débattre de cette question et puissent se faire entendre. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Richelieu. Maintenant, je suis prête à reconnaître la présidente du Conseil du trésor, et ministre responsable de l'Administration gouvernementale, et députée de Marguerite-Bourgeoys. Madame.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je suis heureuse aujourd'hui de pouvoir parler de modernisation de l'État, de réingénierie de l'État. Je viens d'entendre mon collègue, n'est-ce pas, s'exprimer sur la réingénierie de l'État, jouer aux cassandres, nous faire voir, nous faire entrevoir un désastre prochain dans la démarche que nous entreprenons. J'ai un peu de sympathie, je vais vous dire, je suis très sincère, j'ai un peu de sympathie parce que, évidemment, quand on est dans l'opposition, c'est là le rôle de l'opposition. Alors, manifestement...
Une voix: ...
Mme Jérôme-Forget: ...il joue son rôle d'opposition, comme nous l'avons fait pendant quatre ans, et bien sûr ça va finir, M. le Président, un de ces jours, peut-être dans trois, quatre mandats encore, mais enfin, à se comporter comme on se comporte aujourd'hui...
La Vice-Présidente: Je m'excuse, Mme la présidente.
Une voix: ...
Mme Lamquin-Éthier: Oui, bien, j'allais, si vous me permettez, Mme la Présidente, faire un rappel à l'article 36 du règlement pour dire qu'aucun député ne peut interrompre celui qui a la parole. Or, c'est notre collègue qui a la parole et elle subit des interruptions de la part des députés de l'opposition officielle.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'opposition.
M. Boisclair: Sur la question. Vous l'avez vu comme moi, là, s'il y a quelqu'un qui a interrompu quelqu'un, c'est la leader adjointe du gouvernement qui a interrompu sa collègue. En termes d'inélégance, on a rarement vu si bien dans cette Assemblée.
La Vice-Présidente: Alors, moi, je peux vous dire que j'ai aussi entendu le député de Richelieu. Vous savez qu'en vertu de l'article 32 vous avez l'obligation de garder le silence. Alors, je vous demanderais, s'il vous plaît, de respecter, chacun de votre côté, le temps de parole. La parole est actuellement à la présidente du Conseil du trésor. Madame, à vous la parole.
Mme Jérôme-Forget: Merci, Mme la Présidente. Alors, moi, je disais, Mme la Présidente, que j'ai beaucoup de sympathie, n'est-ce pas, pour le député de Richelieu qui joue son rôle d'opposition, un peu de cafard.
Mais, Mme la Présidente, rappelons-nous que les citoyens sont très conscients de ce qui est en train de se passer, ils sont enthousiastes de ce qui est en train de se passer, et je me réjouis de ce qui arrive aujourd'hui. D'ailleurs, c'est amusant, Mme la Présidente, je rencontrais aujourd'hui les cadres de la fonction publique, ce matin. Savez-vous quel était le titre de leur colloque de deux jours? Réinventer l'État du Québec. Eh oui, ces gens qu'on n'a supposément pas consultés se réunissaient, ils étaient 400 à justement, pendant deux jours, se pencher sur l'intention du gouvernement de réinventer l'État québécois.
D'ailleurs, je voudrais juste informer le député de Richelieu qui se plaît à le dire, puisqu'il y a un membre de mon bureau qui a sorti une phrase, n'est-ce pas, que j'ai dite dans un discours, et qui veut insinuer que j'ai dit, à quelque moment que ce soit dans ma vie, qu'il n'y avait rien de bon dans l'État, pour une femme qui a oeuvré toute sa vie dans la fonction publique ? je dis bien toute ma vie ? vous comprendrez que, depuis le jour numéro un, je sais et je connais pertinemment le rôle que l'État joue. D'ailleurs, nous tous, ici, qui siégeons à titre de députés, nous savons pertinemment que nous sommes venus nous joindre à l'État québécois justement parce que nous croyons dans l'État.
n(10 h 30)n Par ailleurs, il y a eu une élection, et nous sommes maintenant de ce côté-ci de cette Chambre et nous avons compris le mandat que les Québécois nous ont donné le 14 avril dernier, à savoir celui du changement. C'est clair, au fil des ans, nous convenons tous que l'État est devenu beaucoup plus lourd et coûteux. Le nombre de structures n'a cessé d'augmenter. Une multitude de programmes et de services ont été créés et ajoutés, et le sens des priorités a graduellement été mis de côté. Dans les cinq dernières années seulement, Mme la Présidente, 60 nouveaux organismes ont vu le jour, c'est-à-dire un organisme par mois. D'ailleurs, pendant tout ce beau temps, la dette a augmenté de 11 milliards de dollars. Or, notre capacité budgétaire est limitée, et nous nous devons d'en tenir compte.
D'ailleurs, Mme la Présidente, vous vous souvenez, on a voulu à tout prix, comme le souhaite actuellement le député de Richelieu, définir vite, vite, vite qu'il fallait arriver au déficit zéro. Vous vous rappelez de ça. Or, rappelez-vous la démarche qu'on a faite. On a décidé, parce que ça faisait notre affaire, il y avait un surplus à la CSST, on a donc décidé d'inclure dans le périmètre comptable le surplus de la CSST. Ça faisait leur affaire. Pourquoi? Parce qu'on s'était donné un objectif de réduire le déficit à zéro vite, vite, vite. En plus de ça, Mme la Présidente, pendant qu'on faisait ça, ça ne paraissait pas, par en arrière, il y avait une dette qui s'accumulait ? je vous disais: 11 milliards de dollars de plus en cinq ans.
Pendant ce temps-là, encore parce qu'il fallait faire vite, vite, vite, on a donné, rappelez-vous, les retraites anticipées. Il fallait se départir de nos employés et nous priver de la mémoire du gouvernement. Qu'est-ce qu'on a fait? On a remercié, on a invité à quitter 35 000 employés. Trois milliards plus tard, c'est ce que ça a coûté, on en avait réembauché 55 000.
C'était ça, les décisions prises d'avance, qu'on a faites très rapidement parce qu'il fallait se donner un objectif. Était-il atteignable? On s'en préoccupait peu, on avait un chiffre en tête. C'est ça que le député de Richelieu veut que je lui donne. Un chiffre en tête. Non, M. le député, vous ne l'aurez pas, ce chiffre. Parce que, nous, on ne pense pas comme ça. Vous ne l'aurez pas, certainement, de la présidente du Conseil du trésor, parce qu'on ne va pas se comporter de façon cavalière.
La démarche que nous entreprenons est une démarche structurée, sérieuse, qui va faire appel à des analyses, à de l'investigation qui va nous assurer que les décisions que nous prenons ne devront pas être corrigées le lendemain, comme ce qu'on a fait quand on a donné les départs assistés à des employés et qu'on a vidé ? vidé ? les hôpitaux du Québec de l'expertise qu'il y avait au sein de nos établissements.
Je disais donc, Mme la Présidente, que, dans le contexte actuel, la modernisation de l'État n'est pas un luxe mais une nécessité. Je demeure convaincue que nous aurions dû procéder à un tel exercice bien avant. En fait, certains membres du précédent gouvernement ont exprimé le souhait de moderniser l'État québécois. Rappelons-nous mon prédécesseur, Joseph Facal lui-même, qui n'est plus en politique aujourd'hui. Même la députée de Taillon a exprimé au Point récemment qu'il fallait probablement revoir l'État et même éliminer des programmes. Oui, éliminer des programmes. Mais, par manque de courage politique, l'ancien premier ministre a cavalièrement ignoré le rapport de mon prédécesseur au Conseil du trésor, Joseph Facal, qui, lui aussi, croyait essentiel de moderniser nos façons de faire.
En fait, M. Facal a même dit dans une lettre ouverte dans La Presse, en septembre 2002, et je cite: «Le PQ doit moderniser sa pensée. Le gouvernement devrait se concentrer sur les préoccupations quotidiennes d'une classe moyenne qui finance l'essentiel des services publics et se tenir à une saine distance des groupes d'intérêts.» Plus loin, il dit: «Le gouvernement peut changer. Il doit simplifier, alléger, débureaucratiser la gestion des grandes missions de l'État. Plus de responsabilités peuvent être accordées aux organisations communautaires et nombre de services publics peuvent être pris en charge par les collectivités locales.» Il est même allé jusqu'à parler de partenariats public-privé. Imaginez-vous, il en a parlé. Il ne l'a pas fait, mais il en a parlé. Et qu'est-ce qu'il a dit sur ça? «Une combinaison du public-privé qui miserait justement sur la responsabilité sociale du privé afin d'en arriver à ce que davantage de solidarité émane de la société civile.» D'ailleurs, j'entendais le député de Richelieu nous parler de Mme Thatcher. Bien, moi, je vais lui parler de Tony Blair, le travailliste Tony Blair. Ce n'est pas parce que Tony Blair, n'est-ce pas, c'est un gars de droite. Peut-être que, pour ces gens-là, ce travailliste, Tony Blair, est bien devenu un homme de droite. Peut-être, mais rappelons-nous que Tony Blair lui-même, Mme la Présidente, pour un peu calmer les craintes de l'opposition, a mis en place 500 partenariats public-privé. Je ne parle pas de Mme Thatcher, là, je parle de Tony Blair. Parce que, dans un partenariat public-privé, ce qu'oublie et que ne connaît probablement pas le député de l'opposition, c'est que, dans un partenariat public-privé, ce n'est pas de la privatisation justement, l'État garde toujours la maîtrise de l'objectif et la maîtrise des services qui vont être offerts. Donc, on ne se déleste pas de nos responsabilités.
En mai dernier, d'ailleurs, toujours dans le magazine L'actualité, Joseph Facal a même invité sa famille politique à cesser de confondre l'égalité des chances et l'égalité des résultats. C'est ça, un partenariat public-privé, Mme la Présidente, c'est justement de nous assurer non pas que nous délestons de nos responsabilités, mais que nous en assumons... nos responsabilités.
La réingénierie de l'État, réinventer l'État, moderniser l'État, c'est quoi? Bien, je vais vous dire, Mme la Présidente, à certains égards, ce que ce n'est pas. Ce n'est pas rétrécir l'État, mais c'est le recentrer et le redynamiser. Ce n'est pas une fin en soi, mais un outil, un outil pour mieux soigner, pour mieux instruire, mieux protéger et mieux respecter chacun de nos concitoyens. Ce n'est pas un exercice de compression. C'est un mandat d'architecte, pas de comptable. Ce n'est pas une invitation au sacrifice, c'est une invitation au discernement. Il faut travailler des deux côtés du rapport qualité-prix des services publics. Ce n'est pas d'exiger de chaque ministère le même pourcentage d'efforts de rationalisation, comme l'a fait le gouvernement précédent. C'est pourquoi nous avons soumis les cinq questions. Ce n'est pas un exercice secret et improvisé, il mettra tous les ministères et les employés à contribution pendant des mois suite à des évaluations rigoureuses.
n(10 h 40)n Comme vous le savez déjà, la démarche s'articule autour de six grands travaux. Chacun des travaux est dirigé par un ministre qui s'adjoindra la collaboration de personnes-ressources. Il y a donc six comités de pilotage. Celui que je préside, à savoir la révision des structures de l'État et des programmes gouvernementaux, a déjà amorcé le travail; la révision des modes d'intervention du gouvernement dans l'économie, qui est sous la responsabilité du ministre du Développement économique et régional, en collaboration avec le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille; le troisième comité de pilotage, la réorganisation des services de santé, sous la responsabilité du ministre de la Santé et des Services sociaux; le quatrième comité de pilotage, la décentralisation, déconcentration, sous la responsabilité du ministre du Développement économique et régional, en collaboration avec le ministre des Affaires municipales, des Loisirs et des Sports ainsi que la ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme; le cinquième comité de pilotage, recentrage du réseau de l'éducation sur l'élève et l'étudiant, sous la responsabilité du ministre de l'Éducation; et finalement, le sixième comité, simplification et allégement du fardeau fiscal, sous la responsabilité du ministre des Finances, en collaboration avec le ministre du Revenu.
La composition du Comité de gouverne, où siègent notamment le premier ministre à titre de président, les six ministres responsables des comités de pilotage, le secrétaire du gouvernement, le secrétaire du Conseil du trésor et moi-même à titre de coordonnatrice, démontre bien, Mme la Présidente, le sérieux accordé à la démarche. D'ailleurs, la première réunion du Comité de gouverne et des comités de pilotage a eu lieu le 9 octobre dernier, et nous avons convenu d'un échéancier très exigeant. En ce qui a trait aux comités de pilotage, nous avons convenu des travaux à réaliser dans le cadre de mandats lors de notre première journée, soit le 9 octobre dernier. Nous attarderons donc, au cours des prochains mois, à revoir les structures et les programmes gouvernementaux. Nous reverrons l'ensemble des modes de prestation de services. Nous travaillerons à implanter un gouvernement en ligne. Oui, nous ouvrirons l'État au partenariat public-privé.
Pour parvenir à moderniser l'État comme on le souhaite, les ministères et organismes ont certaines étapes déterminantes à franchir. Ils doivent d'abord préparer un plan de travail global sur la révision de l'ensemble des programmes et des structures et, une fois ces étapes franchies, ils doivent préparer un plan de mise en oeuvre de la modernisation de l'État à partir des orientations retenues.
Je vous rappelle, Mme la Présidente, les cinq grandes questions qui guideront les ministères et organismes dans cette opération. La première question: Ce programme répond-il toujours à une mission de l'État? Il me semble que ce n'est pas farfelu que de nous interroger aujourd'hui, à savoir si un programme répond toujours à l'objectif qu'on s'est donné.
Deuxièmement, même si on a mis un programme en place et qu'on souhaite atteindre tel objectif, avons-nous atteint l'objectif? On a pu dépenser des sommes énormes et ne pas atteindre l'objectif qu'on s'était donné.
D'ailleurs, la troisième question, est-ce que, si on atteint l'objectif, est-ce qu'on le fait de la façon la plus efficace possible?
Est-ce que, quatrième question... sommes-nous le bon niveau de gouvernement? Est-ce qu'il n'y a pas lieu de penser à régionaliser des services ou des décisions que nous prenons ici, à Québec? Est-ce qu'il y a lieu de nous délester pour justement les gouvernements municipaux? C'est une question très importante à nous poser.
Et finalement, et non la moindre: Avons-nous les moyens de nous offrir un tel programme?
Ces questions sont essentielles, et chacun des ministres doit faire l'inventaire de ses programmes et services et se poser ces cinq questions. Vous voyez encore une fois le travail rigoureux de chacun des ministres et de leur personnel. Personne ne pourra dire que l'on manque de discernement suite à cette démarche qui se veut des plus rigoureuses.
Alain Dubuc, dans le journal Le Soleil, a parlé de nos cinq questions le 4 octobre dernier, dans un éditorial, et je le cite: «Est-ce que ce sont des questions folles? C'est au contraire un exercice salutaire, qui consiste à tout mettre sur la table. Ce qui ne veut pas dire tout mettre à la poubelle. L'étonnant, ce n'est pas que les libéraux le fassent, mais qu'on ne l'ait pas fait au Québec de façon systématique, en se rendant au bout du processus, comme le fédéral l'a fait il y a 10 ans. Il est normal, au bout de 40 ans, que l'on fasse le point.» Fin de la citation.
La réaction de l'opposition cache bien mal ses intérêts partisans. Pourtant, les citoyens du Québec ont envoyé un message sans équivoque le 14 avril dernier. Oui, ils souhaitent du changement. Oui, ils veulent des services aux citoyens. Oui, ils veulent que l'on donne des services médicaux aux malades. Oui, ils veulent qu'on s'occupe des élèves, des étudiants, à tous les niveaux que ce soit. D'ailleurs, Mme la Présidente, l'État que nous voulons mettre en place, l'État que nous voulons refaire, réinventer, ce sera un État moderne qui répondra justement aux besoins des citoyens.
Je tiens à préciser certaines choses qui me semblent essentielles. On tente de créer en face une pseudocrise en criant haut et fort que nous allons couper partout. Eh bien, c'est faux, archifaux. D'abord, nous ne ferons pas de changements pour faire des changements. Oui, nous prendrons des décisions dans le cadre de la modernisation de l'État. Oui, nous ferons des choix. Oui, certaines décisions ne feront pas l'unanimité, mais les principes qui guideront nos actions seront toujours les mêmes. Ces principes sont ceux que vous connaissez et auxquels vous efforcez de répondre depuis des années: offrir des services de qualité aux citoyens du Québec en favorisant la contribution optimale du personnel et tout en respectant notre capacité financière, une mission fondamentale. Ces décisions seront prises en tenant compte de nos principes et de nos valeurs, tels l'attachement à la démocratie, la primauté des libertés individuelles, l'identification au Québec, l'appartenance canadienne, l'accent sur le développement économique, l'engagement de justice sociale et le respect de la société civile.
Je tiens d'ailleurs à parler du défi stimulant qui attend nos employés. En fait, je dirais même que la réussite de la modernisation de l'État dépend d'eux. Réinventer l'État n'est pas, comme certains présentent actuellement, un exercice en vase clos. L'expertise et les connaissances du personnel de la fonction publique seront hautement sollicitées au cours des prochains moins. Il est vrai que la plupart des travaux réalisés à ce jour ont davantage sollicité le personnel de la haute direction, mais il nous fallait, dans un premier temps, mettre en place une structure décisionnelle qui soit la plus efficace et transparente possible. Il n'y a pas de place pour l'improvisation dans une démarche de telle ampleur.
Dans le cadre de ce mandat, chaque activité et chaque programme seront analysés, et, au terme de l'exercice, nous poserons des gestes déterminants. Ainsi, nous déciderons si nous poursuivons dans la même voie, si nous transférons le service à une autre unité, si nous développons un partenariat avec le secteur privé ou encore si nous cessons d'offrir ce service qui ne répond plus aux besoins d'aujourd'hui. Le premier ministre a été clair, jamais nous ne remettrons en question les missions fondamentales de l'État québécois. Au contraire, nous voulons plutôt recentrer sur nos missions essentielles un État qui s'est éparpillé et qui a perdu le sens des priorités.
À titre d'exemple, Mme la Présidente, le député de Richelieu nous parlait justement de notre institution, la Caisse de dépôt, à laquelle nous tenons, vous le savez, ardument. J'aimerais simplement lui rappeler combien nous l'avons interpellé de fois alors que cette même Caisse de dépôt avait perdu 16 milliards de dollars. C'est l'équivalent, Mme la Présidente, d'une année des revenus de l'impôt des particuliers, une année au complet. On a perdu ça dans quelques années. Nous les avions prévenus; pourtant, on a été complètement muets à cet égard.
Nous irons jusqu'au bout de la démarche. Les échéanciers seront serrés. Le travail sera exigeant. Il y aura des résistances, mais nous ne reculerons pas, l'exercice est nécessaire et incontournable. J'ai finalement la certitude que ce qui est aujourd'hui une vision sera bientôt une réalité. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la présidente. Alors, je suis maintenant prête à reconnaître le leader de l'opposition officielle et député de Gouin.
n(10 h 50)nM. André Boisclair
M. Boisclair: Merci, Mme la Présidente. J'ai écouté avec intérêt à la fois mon collègue député de Richelieu, j'ai écouté avec intérêt la présidente du Conseil du trésor, et je voudrais d'abord vous dire ce qui frappe l'auditeur attentif, à avoir entendu la présidente du Conseil du trésor, elle qui déclarait, et je la cite: «Le Québec doit cesser de chercher ses repères dans les années soixante. Nous devons lucidement prendre acte de notre démographie puis de notre géographie.» C'est dans ces termes que la présidente du Conseil du trésor s'exprime. Elle est donc là, elle se lève devant nous, à l'Assemblée nationale, pour venir nous dire que nos repères seraient ceux des années soixante. Ainsi donc, il y aurait eu un gouvernement, celui du Parti québécois, qui a administré la chose publique pendant plus de neuf ans, pour qui le modèle qu'avaient créé les Lesage, Lévesque, Johnson, Gérin-Lajoie, Lapalme, Parizeau, pour qui ces personnes auraient fondé une espèce de cité grecque immuable qui n'aurait pas bougé dans le temps, dont vous auriez aujourd'hui hérité alors que vous êtes au pouvoir. M. le Président, à la face même du texte, et de l'argument, et de la déclaration de la présidente du Conseil du trésor, on s'aperçoit bien que la proposition, à sa face même, est une caricature indéfendable et que la présidente du Conseil du trésor doit immédiatement rejeter cette grille d'analyse si elle veut nous convaincre d'aller plus loin dans une discussion sur la réingénierie.
Quels sont les faits, M. le Président? Est-ce qu'il se trouve un député ou une députée de cette Assemblée nationale qui est prêt à soutenir quelques instants que, depuis les années soixante, l'État québécois n'a pas bougé? Celles et ceux qui siégeaient à l'Assemblée nationale au dernier mandat du gouvernement du Parti québécois et au mandat précédent ont bien compris le nombre de lois que nous avons votées, ont bien compris les réflexions qui se sont faites, et je donne quelques exemples si la mémoire de quelques-uns est un peu courte. Toute l'opération déficit zéro, ça a été quoi, si ce n'est pas, si ce n'est pas, Mme la Présidente, une grande réflexion sur ce qu'est la capacité d'agir de l'État québécois, sur ce qu'est rendue la société québécoise, sur les pressions qui s'exercent sur elle, mais aussi sur son formidable potentiel de développement? S'il y a bien un dossier que nous avons regardé, c'est bien celui de la contribution du gouvernement du Québec et de ses discussions avec le monde municipal. Nous avons fouillé ce dossier, nous avons retourné toutes les pierres et nous avons même proposé des regroupements à l'Assemblée nationale...
Une voix: ...
M. Boisclair: J'entends un député, Mme la Présidente, qui porte une certaine couleur, que vous ne vous plaisez pas à rappeler à l'ordre, alors que vous l'avez fait à plusieurs reprises pour les gens de chez nous. J'apprécierais, Mme la Présidente, que vous rappeliez le député à l'ordre.
La Vice-Présidente: Alors, je demanderais la collaboration de chacun dans cette Chambre afin que l'on puisse poursuivre nos débats. Merci.
M. Boisclair: Alors, le député de Hull, je le prends à témoin, Mme la Présidente, on a revu considérablement la façon de discuter, on a revu la façon d'entretenir des relations avec les administrations municipales et les compétences des uns et des autres. On a vu, Mme la Présidente, comment on a été capable d'élaborer un pacte fiscal, le premier, le premier pacte fiscal signé avec l'Union des municipalités du Québec et la Fédération québécoise des municipalités. En somme, quoi qu'on en pense, de ces mesures, je ne veux pas, ici, plaider le bilan de notre administration, je veux juste simplement dire que le Québec a considérablement bougé avec le temps et que le Québec d'aujourd'hui n'est pas celui d'hier, et que le Québec d'aujourd'hui n'est certainement pas celui des années soixante. En somme, le Québec bouge, Mme la Présidente, et il bougera aussi dans les années à venir. La question, c'est de savoir dans quelle direction.
Et il n'y a personne, Mme la Présidente, qui hésite à suivre la ministre présidente du Conseil du trésor lorsqu'elle pose la question de l'efficacité; une administration doit toujours se poser cette question de l'efficacité, et on doit constamment être à la recherche d'une plus grande efficacité. Pourquoi? Parce qu'on gère l'argent des contribuables, parce qu'on doit en obtenir le plus possible pour l'argent dont ils nous confient la gestion, parce que les besoins de la population changent et qu'à chaque fois de nouveaux besoins apparaissent. Donc, l'État est toujours en constante mutation puis en profond changement. Donc, tant mieux si la ministre nous indique qu'elle va poursuivre sur cette voie d'une plus grande efficacité des services publics, je la suis sur ce chemin.
Mais, là où je marque une rupture sur la réingénierie proposée par l'administration libérale, c'est que d'abord cette réingénierie s'appuie sur une vision conservatrice et porte en elle des valeurs qui ne sont pas les miennes. Et j'ai le droit de le dire ici, Mme la Présidente, dans cette Assemblée nationale, j'ai le droit de le dire au nom de milliers de Québécois et de Québécoises qui se sont exprimés à la dernière élection, j'ai le droit de le dire au nom de milliers de Québécois et de Québécoises qui n'ont pas tout à fait bien compris les messages qui étaient aussi ceux du Parti libéral alors qu'il était en campagne.
Et je m'explique. Qui a donné un mandat au premier ministre du Québec pour qu'il soit arrogant comme il l'est et qu'il dise aux travailleurs du réseau de la santé: Je ne vous entendrai même pas sur la question des fusions des accréditations syndicales? Quel Québécois ou quelle Québécoise a donné un mandat au premier ministre du Québec pour que, dans son exercice de réingénierie de l'État québécois...
La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le député. Mme la leader du gouvernement.
Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais faire encore une fois un rappel au règlement, à savoir l'article 35. Je crois que le terme «arrogant», c'est un terme qui, en vertu de la jurisprudence, est considéré comme étant un propos non parlementaire, et j'inviterais notre collègue à retirer l'utilisation du terme «arrogant».
La Vice-Présidente: Alors, effectivement, M. le leader de l'opposition officielle, le terme «arrogant» a déjà fait l'objet d'une décision de la présidence le 8 mai 2002, par votre collègue, Mme Louise Harel. Alors, je vous demanderais, s'il vous plaît, de retirer vos propos.
M. Boisclair: ...je persiste à le penser, Mme la Présidente. Quel Québécois ou quelle Québécoise a donné... Je le retire.
La Vice-Présidente: M. le leader, je vous demande de le retirer simplement.
M. Boisclair: Je l'ai retiré et je prends mon temps de parole pour dire que je le pense tout autant. Je ne peux pas m'empêcher de faire ça, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Allez.
M. Boisclair: On se comprend? Merci.
La Vice-Présidente: Poursuivez.
M. Boisclair: Alors, Mme la Présidente...
Des voix: ...
M. Boisclair: Mme la Présidente...
Des voix: ...
M. Boisclair: Mme la Présidente, quel Québécois ou quelle Québécoise a donné un mandat au premier ministre du Québec pour qu'il se mette à genoux devant l'administration fédérale et qu'au terme de son mandat notre Assemblée nationale ait moins de pouvoirs qu'elle en a aujourd'hui?
Le recul de la présence du gouvernement du Québec dans le financement des initiatives régionales...
Des voix: ...
La Vice-Présidente: Alors, s'il vous plaît! Mme la leader du gouvernement, leader adjointe.
Mme Lamquin-Éthier: De nouveau, Mme la Présidente, un rappel au règlement. Je pense que je peux comprendre que notre député s'enflamme dans le débat, mais je l'inviterais encore une fois à avoir des paroles qui soient respectueuses et qui soient conformes au règlement et à ne pas prêter des intentions à notre premier ministre.
Encore une fois, l'article 35 est très clair, et on ne peut attaquer la conduite. S'il veut le faire, qu'il le fasse par voie de la procédure.
La Vice-Présidente: Alors, M. le leader de l'opposition officielle, je vous demanderais votre collaboration, s'il vous plaît.
M. Boisclair: Je n'ai rien dit qui était contraire, Mme la Présidente. On est devant une administration qui est à genoux devant l'administration fédérale. Le recul de la présence du Québec dans le développement régional, qu'est-ce que ça signifie, si ce n'est pas que l'administration fédérale va venir prendre la place des initiatives menées auparavant par les CLD?
Quand vous voyez les budgets que le gouvernement fédéral consacre en ce moment... Puis écoutez le bulletin de nouvelles aujourd'hui. Écoutez le bulletin de nouvelles, ils vont vous en parler. Quand on voit le recul du gouvernement du Québec et la place que le gouvernement fédéral prend en matière d'initiatives et de soutien aux initiatives régionales, on se rend bien compte, Mme la Présidente, qu'au net tout ça se traduit par une perte de compétences.
Quel Québécois ou quelle Québécoise a donné le mandat au premier ministre du Québec pour qu'il porte atteinte à leurs droits fondamentaux puis remette en cause la protection de la vie privée par les initiatives de la présidente du Conseil du trésor qui menace de faire sauter les verrous de protection de renseignements personnels entre chacun des ministères pour mieux signer et convenir de partenariats public-privé?
Puis encore pire, Mme la Présidente. Quel Québécois ou quelle Québécoise a donné un mandat au premier ministre du Québec pour qu'il mette de côté les standards éthiques, les hauts standards éthiques dont s'était dotée l'administration précédente et qu'il tergiverse encore à faire signer une directive à ses ministres? Puis, s'ils en ont signé une, directive, ce qui apparemment est dur à faire, pourquoi le premier ministre ne la rend-elle pas publique, cette directive?
Ce sont celles et ceux qui, à une autre époque, ont reçu des retours d'ascenseur du secteur privé. Pensez à Pierre Fortier, Mme la Présidente, peu de temps après avoir adopté une loi à l'Assemblée nationale, qui s'est retrouvé chez Desjardins. Pensez, Mme la Présidente, à Lawrence Cannon qui s'est retrouvé...
M. Cholette: ...
La Vice-Présidente: Je m'excuse encore une fois. Écoutez, la parole est maintenant au député de Gouin. Je vais vous demander votre collaboration, M. le député de Hull, afin qu'on entende son intervention jusqu'à la fin. Je sais que vous aurez votre temps de réplique après. Alors, s'il vous plaît, respectez le temps de parole de la personne qui a à discuter présentement.
M. Boisclair: Je suis en colère, Mme la Présidente, et je le répète. Comment se fait-il que le premier ministre du Québec n'a pas encore publié la directive qu'il aurait fait signer apparemment à ses ministres et aux attachés politiques? Le cas de Lawrence Cannon, c'est le plus bel exemple. Il appuie la réglementation ici, dans cette Assemblée nationale, alors qu'il était ministre des Communications. Peu de temps après, il se retrouve à l'emploi de Rogers. Ça, ça s'appelle, en bon français, là, un retour d'ascenseur.
n(11 heures)n Et, alors que le gouvernement veut multiplier les partenariats avec le secteur privé, il importe et il presse qu'il se dote de hauts standards éthiques, il importe et il presse qu'il fasse de la protection de la vie privée un droit contenu à la Charte québécoise des droits et libertés, contenu à la loi d'accès et à la protection des +renseignements personnels, contenu à notre Code civil, qu'il érige ce principe et qu'il le fasse sien, ce principe, dans sa révision de la mission de l'État.
Alors, Mme la Présidente, ce que j'essaie de dire ? je le comprends et je vous le concède, avec de la colère ? ce que j'essaie de dire, c'est que la réingénierie de l'État, ça n'a pas existé sous l'administration... ce n'est pas apparu soudainement, depuis que la députée de Marguerite-Bourgeoys est présidente du Conseil du trésor. L'État québécois a constamment bougé avec le temps. Vous avez assisté, Mme la Présidente, à des débats nombreux à l'Assemblée nationale. Donc, l'État évolue à chaque jour, sauf que ce à quoi on assiste en ce moment, c'est une opération de compressions sauvages. Pourquoi? Parce qu'ils veulent financer leurs baisses d'impôts. Et c'est là où, encore, il y a une rupture forte entre l'opposition et le gouvernement de M. Charest.
Cette rupture, elle s'appuie sur quoi, Mme la Présidente? D'abord, sur une administration libérale qui manifeste, par ses propos puis par les déclarations des ministres, du mépris à l'endroit de la fonction publique québécoise. Et je pèse mes mots, Mme la Présidente. Quand je vois, par exemple, des ministres du gouvernement envoyer la Sûreté du Québec faire enquête pour être sûrs que les règles soient bien protégées, qu'est-ce qu'on laisse entendre, Mme la Présidente, dans l'opinion publique? Que ces gens sont si incompétents, si peu responsables qu'on est obligés d'envoyer la police, donc qu'on serait bien mieux si le secteur privé faisait ça? Hé! que ce serait bon si le secteur privé faisait ça! Mme la Présidente, vous la connaissez, l'expression: Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage. Et, avec le mépris qu'ils manifestent à l'endroit de la chose publique, le mépris qu'ils manifestent à l'endroit de nos succès collectifs, on comprend bien qu'ils en soient rendus où ils sont rendus, Mme la Présidente. Il faut dire ces choses dans notre Assemblée. Quand même, là, un ministre de la Sécurité publique qui envoie la Sûreté du Québec discuter avec les fonctionnaires pour leur rappeler ce que sont les règles qu'ils doivent observer... ça puis de l'intimidation, là, c'est pas loin, Mme la Présidente, c'est pas loin, et la présidente du Conseil du trésor aura à s'expliquer sur ces questions.
Il faut aussi dire que, si l'État bouge et continue de bouger, bien il faut aussi être capables d'avoir une certaine estime de ce que nous sommes capables de faire ensemble. Mais toute l'analyse des libéraux nous laisse croire que ce que nous aurions fait ensemble doit nous amener à conclure que c'est trop lourd, trop gros, que ça a peine à bouger, alors que, pourtant, combien de choses que nous avons faites ensemble que nous ne serions pas capables de faire individuellement? Les jeunes qui nous écoutent aujourd'hui à la télévision, qui bénéficient d'un système d'éducation de grande qualité, ils le font pourquoi? Bien, parce qu'il y a une génération ou deux qui est passée avant elle, qui nous ont donné des services publics de qualité. Même chose pour un réseau de la santé.
Il faut donc être capables, lorsqu'on parle dans cette Assemblée nationale des choses... et de parler, avec une certaine hauteur, une certaine élévation, de nos succès collectifs, et de ne pas les mépriser, puis de rappeler aussi qu'à travers ces succès nous l'avons fait parce que nous avons été capables de dialoguer avec les gens, dialoguer avec des partenaires.
Ici, je veux conclure, Mme la Présidente, avec un bel exemple de réingénierie de l'État. Ces formules de... ces sommets socioéconomiques où nous sommes assis les uns avec les autres, c'était quoi si ce n'est pas une nouvelle façon de dialoguer avec la population et la société? Ça a été quoi si ça n'a pas été une façon d'en arriver à dessiner une voie porteuse pour le Québec? Est-ce qu'on aurait été capables de faire l'opération déficit zéro, de signer... de rouvrir des conventions collectives signées avec nos employés, de les signer à moins six, si on ne s'étaient pas assis avec eux autres pour partager notre information, partager nos connaissances, partager notre vision des choses?
C'est pour ça que la motion que nous débattons aujourd'hui est essentielle. Non pas parce qu'on veut coincer le gouvernement, mais parce qu'on veut entendre M. Charest s'exprimer pour qu'il nous dise c'est quoi, la place qu'il réserve à la défense des intérêts du Québec dans son projet de réingénierie, quels sont les standards éthiques qu'il va imposer à ses ministres ou aux attachés politiques dans son projet de réingénierie, quelles seront les conséquences de la réingénierie sur les finances publiques, quelle place il fait à la consultation dans son projet de réingénierie.
Voilà quatre questions auxquelles le premier ministre n'a pas encore répondu, ni même la présidente du Conseil du trésor. Et cette discussion que nous pourrions faire en commission parlementaire, bien ce serait une belle occasion aussi de mettre les livres sur la table, de les ouvrir, les livres, alors qu'on s'apprête à rentrer dans une période difficile, de tourmente, d'essayer de partager l'information avec nos partenaires, les mettre alentour de la table et essayer, essayer de s'entendre avec eux, non pas commencer en les pointant du doigt et en les blâmant, comme le premier ministre l'a fait dans sa lettre ouverte.
Le dialogue a ses vertus. Robert Bourassa avait compris que la paix sociale avait, elle aussi, ses vertus. Il est temps que le gouvernement se ressaisisse, Mme la Présidente. Il est temps que ce gouvernement se drape dans la transparence, prenne une décision, soit au moins à la hauteur de ses espérances. Il est temps que le premier ministre s'assoie à table, qu'il vienne en commission parlementaire et qu'il nous explique sur quels principes va s'appuyer sa réingénierie. Nous sortirons tous grandis de cette expérience, et je suis convaincu, Mme la Présidente, que les premiers contents seront non seulement les députés de l'opposition, mais plusieurs députés libéraux d'arrière-ban qui sont tenus dans le noir comme plusieurs Québécois et Québécoises.
La Vice-Présidente: Alors, il reste, au temps du Parti libéral, 24 minutes. Je serais prête à reconnaître le prochain intervenant, le député de Hull et adjoint parlementaire à la présidente du Conseil du trésor et à la ministre responsable de l'Administration gouvernementale. S'il vous plaît, M. le député.
M. Roch Cholette
M. Cholette: Merci, Mme la Présidente. Ça aurait été une belle occasion que l'ensemble des parlementaires puissent être avec nous, puisque j'aurais aimé répondre à certains propos qui viennent d'être tenus, pour le moins étonnants, et surtout souligner que c'est une occasion ratée. C'est dommage, hein, l'opposition aurait eu une belle occasion, à la rentrée parlementaire, de faire acte d'une ouverture, hein, de faire acte d'une ouverture à l'effet que l'opposition réalise que, oui, il y a des choses à changer au Québec et qu'il fallait y participer. Bien non, on a deux témoignages éloquents de ça, d'un rendez-vous manqué, soit hier et aujourd'hui.
Alors, on va commencer par hier. Moi, je m'attendais à une période de questions extraordinaire hier. Étant de l'opposition jadis, je me disais... je me souviens, moi, comment est-ce qu'on préparait ça, une période de questions à la rentrée parlementaire, quand le gouvernement a l'intention de faire des choses importantes. Puis là je me préparais, puis, mon Dieu! c'était excitant. Première question du premier ministre hier: «Réingénierie», ce n'est pas dans le dictionnaire, vous savez. Ça, c'est notre chef de l'opposition. Puis, aujourd'hui, le leader de l'opposition officielle, au lieu d'avoir des propos intelligents sur le fait que, oui, il fallait faire une réingénierie puis, oui, il y avait des choses à améliorer, a décidé de sortir son venin puis de salir des citoyens du Québec en utilisant son immunité parlementaire. Pas n'importe quel citoyen du Québec, quelqu'un de chez nous. Alors, j'aimerais le défendre. Il a sali Lawrence Cannon tantôt. Mais ça ne m'étonne pas beaucoup du député de Gouin, on est habitué. Moi, je l'ai eu en face de moi pendant quatre ans et je suis habitué de l'entendre comme ça. Mais, aujourd'hui, c'était assez particulier. Première fois qu'il se levait en Chambre, à cette nouvelle session, il décide de salir l'ancien député libéral Lawrence Cannon, maintenant conseiller municipal. Il décide de le salir en pleine Assemblée nationale en utilisant son immunité parlementaire. Je trouve ça particulièrement cheap, Mme la Présidente, puis je voulais vous le dire parce que je ne trouve pas que c'est édifiant, au niveau de notre institution.
Maintenant, au niveau des propos qui me poussent à me lever aujourd'hui, c'est ce grand vent de changement qui souffle sur le Québec, qui a débuté dès le 12 septembre dernier, une date que le Parti québécois n'aime pas se rappeler. C'est une date qui a marqué l'histoire du Québec, l'histoire récente du Québec, avec la publication d'un plan de match gouvernemental de l'équipe libérale qui dit: Voici, noir sur blanc, où on s'en va, et qui a mené évidemment à l'élection, le 14 avril dernier, du nouveau gouvernement libéral. Ce grand vent de changement souffle pourquoi, Mme la Présidente? Bien, parce que l'équipe libérale a été mandatée, lors du 14 avril dernier, de procéder à des changements que le Parti québécois a été incapable de faire. Puis, les changements que le Parti québécois a faits ont été faits dans la controverse, souvent sans consultation, qui ont amené les finances publiques dans un état lamentable, ont amené la société civile à être en colère contre le gouvernement, et on a dit une fois pour toutes: Bon, allez donc faire vos devoirs dans l'opposition, il est temps que vous fassiez vos classes, parce que là vous êtes en panne d'idées.
n(11 h 10)n Parlant d'idées, Mme la Présidente, on a eu l'automne de l'idée, de la seule idée qui a émergé du Conseil national du Parti québécois la fin de semaine dernière. Puis là j'étais content, j'entendais le premier ministre nous dire: Pour une fois, le PQ va commencer à brasser la cage, il va avoir des nouvelles idées. Puis là il était ouvert à toutes sortes de choses. Première chose qu'on sait, il y en a un qui a osé avoir une idée divergente du premier ministre, un seul militant, première chose qu'on a su: Bang! il s'est fait ramasser pas à peu près, en disant: Aïe! tu as une idée contraire à moi, il n'est pas question que tu dises ça publiquement. D'ailleurs, Joseph Facal l'a compris, hein? Quand, lui, il a des idées différentes, on a vu qu'il n'a pas pu l'exprimer au sein du gouvernement du Parti québécois. Qu'est-ce qu'il a fait? Il est parti chez eux.
Alors, dans le fond, là, ce que l'ancien premier ministre a dit, c'est, tout le monde qui sont assis dans les banquettes, là, là, hein, tout le monde qui sont assis avec le chef de l'opposition, c'est: Pas un mot, tu vas suivre ce que la ligne va dire, tu vas suivre ce que le premier ministre va dire. Tu n'as pas un mot à dire, de toute façon. C'est ça, le lancement de la grande réflexion, des idées, au Parti québécois. Il n'y en a pas, c'est un vide complet.
Bien, nous, Mme la Présidente, on en a, des idées, on a une équipe formidable. Puis je suis excessivement chanceux d'avoir la chance d'être adjoint parlementaire à une femme extraordinaire qui a un courage, qui a une détermination, qui a une vision, qui a toutes les qualités nécessaires, la présidente du Conseil du trésor, pour mener à bien quoi? Pour mener à bien une réflexion sur l'État que l'on a.
Est-ce que, Mme la Présidente, on peut dire: «Business as usual», puis tout va bien, puis on fait juste continuer comme c'était? Non, certainement pas. On avait des soins de santé lamentables, parce qu'on n'avait pas accès à ces soins-là, on avait un système d'éducation en carence, avec des besoins financiers importants. On est les plus taxés en Amérique du Nord. J'en sais-tu quelque chose, moi! Je vis dans une région frontalière, il y a des gens, à chaque jour, qui partent du Québec pour aller vivre en Ontario pour sauver 20 %, 25 % d'impôts.
On a un système qui fait que l'élastique est au maximum, on n'a pas d'argent, nos routes sont défaites, on a besoin d'infrastructures, puis là on a un ancien gouvernement qui dit: Ah non, surtout pas, ne changez rien. Surtout pas. Brassez pas la cage, continuez comme on a fait. Nous autres, on pense que c'est merveilleux, ce qu'on a fait pendant neuf ans, on a imposé des fusions forcées, on a traité les malades comme des vauriens, on a dit: C'est de votre faute, c'est de votre faute si vous êtes malades. On a dit aux enfants dans les écoles: Prenez votre temps, la réforme... C'est vous qui devez vous acclimater à la réforme. Bien, on ne fera pas ça, nous.
Et, le gouvernement a un mandat clair, on a dit: On va se donner des marges de manoeuvre pour être capables de respecter les aspirations les plus hautes des Québécois et des Québécoises qui veulent vivre dans un Québec moderne, qui veulent vivre dans un Québec à la hauteur de leurs aspirations, que c'est l'État qui est au service des citoyens et non l'inverse. Il faut que ce soit terminé, le temps où c'est le Québécois qui est à la remorque de l'État puis c'est les quotas qui décident tout, puis qui te prend de la maternelle puis de la garderie puis qui t'amène jusqu'aux soins de longue durée, puis c'est l'État qui a géré ta vie. Il est temps qu'on fasse d'autre chose que ça, Mme la Présidente.
Et notre plan, pas très compliqué, on a demandé aux ministères: Est-ce qu'on peut se poser des questions sur qu'est-ce qu'on fait? Puis là je peux comprendre le Parti québécois. Je le comprends, bien honnêtement. Puis je comprends qu'ils n'ont rien à dire puis que c'est pour ça qu'ils insultent le monde. Mais je comprends qu'ils se disent: Ah, mon Dieu! je m'imagine ce qu'ils vont trouver. Ah! ils vont trouver tout le gaspillage qu'on faisait. Ah! ils vont trouver absolument tous les programmes inutiles que l'on avait. Ah! ils vont trouver tout ce qu'on faisait de pas correct. Ah! ils vont avoir des idées nouvelles. C'est une notion inconnue de leur part. Je les comprends de ne pas vouloir brasser la cage, parce que, eux autres, ça fait 30 ans qu'ils ne brassent pas la leur.
Mais, nous autres, ce qu'on va faire, ce n'est pas très compliqué, on va demander à l'État québécois de se regarder en pleine face puis dire essentiellement... Je vais prendre un langage populaire, parce que, là, écoutez, là, on se parle entre nous, on va demander à l'État de regarder ce qu'il fait, puis en disant: On est-u dans la bonne business? Ça a-tu du bon sens, ce qu'on fait? On a-tu... On est-u dans le bon travail? Est-ce que c'est notre mandat? Puis, quand on va avoir répondu à cette question puis, si on répond oui, c'est notre job, bien on va demander la question suivante: Est-ce qu'on la fait bien, cette job-là? Est-ce qu'on la fait avec efficience? Est-ce qu'on la fait avec efficacité? Est-ce qu'on le fait avec économie? Puis on peut-u faire mieux? Puis, il y a des fois que la réponse va être non, on est extrêmement performants, au grand salut des fonctionnaires de l'État puis au grand salut de notre administration.
Mais savez-vous quoi? Je pense que quelquefois peut-être qu'on va répondre: Non, on pourrait faire mieux. Parce que, moi, je suis un éternel optimiste, je pense que c'est possible de faire mieux dans la vie, Mme la Présidente. En tout cas, c'est ça que j'essaie d'inculquer à mes enfants, que c'est bien des fois, mais c'est mieux autres fois, puis on peut travailler mieux, puis on peut toujours s'améliorer. Parce que, quand on pense qu'on a la vérité incarnée, on se ramasse dans l'opposition, voyez-vous? Moi, je pense qu'on a des grands chantiers devant nous. Et, grâce à l'équipe présidée par la députée de Marguerite-Bourgeoys, bien on va y arriver. Puis on ne s'est pas envoyé en l'air partout, là, puis on ne sait pas où est-ce qu'on s'en va. Au contraire, c'est structuré. On a commencé par l'appareil de l'État, puis là on a dit: Là, vous avez des questions à nous répondre, voici les questions. La présidente en a fait état tantôt, il y en a cinq. Puis là la fonction publique doit se faire un examen de conscience puis faire un ménage, puis un remue-ménage, puis nous donner des réponses.
Et là, au niveau gouvernemental, on a décidé de lancer des grands travaux, six grands travaux, six grands travaux qui consistent à ceci: c'est toujours présidé par un ministre, composé de députés, mais aussi de l'appareil, d'experts, puis des grands travaux comme, par exemple: On peut-u se questionner sur les structures de l'État? Est-ce que j'ai besoin de rappeler, Mme la Présidente, que, sous l'ancien règne, on a créé un organisme par mois pendant cinq ans? Ceux qui sont forts en maths, là, c'est 60 organismes, Mme la Présidente! Le Parti québécois, quand il avait une bonne idée, au lieu de se redemander: Ça a-tu du bon sens de remplacer quelque chose, c'est: On va l'ajouter, on va en mettre plus pour que ça coûte plus cher.
Une petite parenthèse, Mme la Présidente. Le PQ ne s'est jamais posé la question: Pourquoi ça nous coûte de 30 à 40 % plus cher, administrer notre État, que l'Ontario? Pourquoi? Non. Même s'ils sont plus nombreux de l'autre côté. Le PQ n'a jamais posé cette question-là. On va en rajouter par-dessus, puis envoie! Il n'y en a pas, de problème, on en a, de l'argent! On n'a rien qu'à l'enlever dans le système de santé; on n'a rien qu'à le cacher à Toronto; on a juste à ne pas mettre ça dans les cours d'école puis dans les systèmes d'éducation; on a juste à ne pas réparer nos routes. C'était ça, la réponse traditionnelle du Parti québécois. Mais les Québécois ont dit: Non, merci. Puis la réponse, le 14 avril, ils leur ont dit: Allez donc penser à tout ça. 60 organismes en cinq ans de pouvoir, Mme la Présidente!
Alors, première chose qu'on va faire, il y a un grand chantier sur l'organisation de l'État. Ça a-tu du bon sens, comment on est organisé! Ça fait longtemps que le secteur privé aurait fait cette réflexion-là, quand on regarde des ratios comme on a, 30 %, 40 % plus cher, puis de l'inefficacité. Alors là on a posé cette question-là.
Deuxièmes grands travaux: le rôle de l'État dans l'économie. Je vais vous conter une histoire. Il faut se poser cette question-là: Ça a-tu du bon sens d'investir massivement dans GM, dans General Motors? Ça a-tu du bon sens de créer ces CDTI, Cité du multimédia? Il va manquer des lettres de l'alphabet, Mme la Présidente, pour décrire le nombre d'organismes qui interviennent dans l'économie. Moi, je suis pris, là, avec une organisation qui a bénéficié d'une subvention CDTI. Donc, il était dans un immeuble A. Pour avoir la subvention, il ne crée pas une job, il est obligé de déménager dans l'immeuble B. Mais là il y a quelque chose d'épouvantable qui est arrivé: le PQ n'a jamais prévu ça, là, mais il a pris de l'expansion. Ça a bien été, ses affaires. C'est rare, au PQ, qu'on a réalisé ça. Mais là, cette entreprise-là, lui, il a grossi, puis il est meilleur, puis il est plus concurrentiel, puis il est sur les marchés extérieurs. Mais il n'a plus de place, puis là il faut qu'il déménage. Puis savez-vous la réponse traditionnelle de l'État? Ah bien! Là tu perds tous les avantages qu'on t'avait donnés et que tes concurrents ont toujours. Parce que lui est obligé de déménager parce qu'il est trop gros. Pensez-vous pas que ça mérite une réflexion quelque part, ça? Pensez-vous pas que simplement cette illustration-là doit dire: Aïe! si je veux aider quelqu'un, pourquoi je le pénalise quand il devient un peu plus gros? Puis, s'il devient un peu plus gros, j'ai-tu vraiment besoin de l'aider? Est-ce qu'on peut se poser cette question-là?
Puis, lié à ça, il y a le troisième grand chantier, Mme la Présidente, très certainement ? puis, mon Dieu, le temps file ? c'est le chantier de la fiscalité. On est les plus taxés en Amérique du Nord. Ça a-tu du bon sens de commencer à voir... Écoute, ça a-tu du sens, là, de penser à ça, de dire: On peut-u ramener ça à une moyenne canadienne?
Évidemment, un chantier sur la santé, qui est notre grande priorité, parce que, avec le profil démographique, il est clair que nous avons des défis énormes devant nous pour revoir ce système-là. Je trouvais ça drôle, dans le journal, je voyais le député de Richelieu comparer notre réingénierie à la réforme ratée Rochon. Alors qu'il la défendait il n'y a pas deux mois, trois mois, qu'il défendait la réforme Rochon, là il est en train de dire: Faites attention, j'espère que ce ne sera pas un autre Rochon, votre affaire. C'est assez particulier de la part du député de Richelieu, n'est-ce pas? Alors, évidemment, un chantier en santé, un chantier en éducation, un chantier en déconcentration, en régionalisation pour permettre une prise de pouvoir réelle dans les régions, pas du maquillage puis du faire-semblant, que tout est contrôlé à Québec puis qu'on va vous laisser avoir un petit bras agissant dans les régions, mais, au contraire, faire confiance aux régions.
n(11 h 20)n Tout ça, Mme la Présidente, pour vous dire que ce qu'on souhaite, nous, évidemment, c'est d'avoir un bon brassage d'idées pour avoir un État plus performant. Mais pourquoi? Pourquoi est-ce qu'on fait ça? Est-ce qu'on fait ça parce qu'on n'avait rien d'autre à faire puis on a imaginé ça, là? Est-ce qu'on fait ça, là, parce que, je ne sais pas, ça nous est arrivé comme ça du ciel? Non, Mme la Présidente, on fait ça pour un objectif très précis: pour donner des meilleurs services aux citoyens du Québec, toujours avec un impôt moins élevé. L'objectif, c'est d'en avoir plus pour notre argent, Mme la Présidente. L'objectif, c'est de mettre les citoyens au coeur de nos préoccupations, contrairement à ce qui s'est passé durant les neuf dernières années, c'est de donner plus de services aux citoyens puis de diminuer le fardeau fiscal, c'est de donner plus de lest à l'administration publique, plus de marge de manoeuvre, plus d'oxygène à l'administration publique pour être capable de faire des choix qui vont nous amener justement plus loin, plus loin, plus loin dans ce XXIe siècle.
En fait, Mme la Présidente, je fais partie d'une équipe où on a un moteur de l'année 2003. C'est un moteur puissant, c'est un moteur dédié, c'est un moteur qui a une vision, c'est un moteur qui est enligné vers le changement, mais on vit encore avec une carrosserie de 1940. Puis on a vu des bouleversements extraordinaires. Moi, j'ai 40 ans; 40 ans passé, Jean Lesage a révolutionné le Québec. On a eu l'hydroélectricité, le ministère de l'Éducation, l'assurance hospitalisation. Ça a été des grands changements, un bouleversement extraordinaire de la part de Jean Lesage. On en est maintenant rendu là, et il y aura encore un bouleversement extraordinaire pour le mieux, pour se doter, nous, le Québec, d'une carrosserie des années 2003, pour vivre avec le moteur des années de 2003 qu'est le gouvernement du Parti libéral, le gouvernement de Jean Charest. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Alors, je vais reconnaître immédiatement le député de Rivière-du-Loup. Je vous rappelle, M. le député, que vous disposez d'un temps de 10 minutes.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui. Alors, merci, Mme la Présidente. Alors, mes premiers mots seront pour informer le député de Hull que la campagne électorale est terminée et qu'on n'est plus à l'étape des grands discours d'intention émotifs, là. Son parti a gagné l'élection, on les en a déjà félicités, et maintenant on est à l'étape d'un gouvernement qui va livrer la marchandise, qui va expliquer en des termes clairs à la population ce qu'il a l'intention de faire. Et si, de notre côté, notre formation politique va appuyer cette motion de l'opposition officielle, c'est exactement parce que cette motion réclame que la commission des institutions puisse se réunir pour entendre le premier ministre sur ses intentions, sur son projet.
Je veux mettre en relief la façon avec laquelle le gouvernement et le premier ministre ont inquiété la population au cours des derniers mois sur toutes sortes de fronts. Parce qu'on avait un discours inaugural, il arrivait quelques semaines seulement après l'élection. Je n'ai pas entendu personne s'étonner de son caractère général. Tout le monde comprenait qu'au lendemain d'une élection le gouvernement est à l'étape... évidemment, le premier ministre vient de nommer son équipe et le gouvernement en est à l'étape des grands principes. Donc, ces grands principes étaient énoncés, des groupes de travail étaient mis en place, et on disait: Oui, on veut restructurer l'État, puis on en a des idées très générales, le recentrer sur ses missions essentielles: transparence, efficacité, décentralisation, etc. Et là les mois ont passé. Et, juste avant la rentrée parlementaire, le premier ministre, dans un geste, un geste qu'on doit qualifier de surprenant, parce que, de façon générale, lorsqu'un premier ministre s'adresse par la voie d'une lettre ouverte à la population, c'est dans des circonstances exceptionnelles... C'est un ton qui doit être très élevé, qui doit aller vraiment transcender un peu toutes les opinions pour s'adresser vraiment à la population et mobiliser la population autour de grands projets de changement. On se retrouve avec une lettre ouverte. Le premier ministre dit qu'il écrit pour reparler de sa vision des changements à l'État. Et je l'ai lue et relue, cette lettre-là, et, ma foi, elle est plus générale que le discours inaugural; les intentions sont encore plus vagues, c'est: Oui, on veut changer l'État, mais, finalement, bon, un peu plus d'efficacité... Les gens de tous points de vue finalement pourraient se reconnaître là-dedans, parce qu'il n'y a pas d'intentions tellement clairement exprimées.
Et ce dont je veux parler aujourd'hui, c'est... La dernière fois qu'il y a eu un gouvernement libéral, 1985, 2 décembre 1985 pour être précis, le gouvernement libéral est élu, juste avant Noël... Six mois après, donc au début juin, le même gouvernement avait des documents extrêmement complets. Le rapport Scowen sur la déréglementation, on parle d'un document de 290 pages qui avait déjà fait l'étude détaillée: dans quelle direction ils allaient, qu'est-ce qu'on devait faire au niveau de la déréglementation. Et là je vais parler aussi de l'autre bout, parce qu'ils ne l'ont jamais fait... Parce que le Parti libéral, à ce moment-là, était arrivé avec une foule d'intentions; il y avait eu le rapport Scowen, il y avait eu le rapport Fortier, aussi, sur la privatisation des sociétés d'État ? ça, il y en a eu un petit peu de fait ? et il y avait eu le rapport Gobeil sur les organismes à l'intérieur de l'État. Et ils ont fini leur mandat, puis, des organismes, il y en avait plus qu'avant. Ils devaient en abolir tout un paquet. Mais ça a été la même chose que le rapport Facal, là: des rapports, des rapports, des rapports, il y en a eu sur le nombre d'organismes, mais on n'a jamais rien fait.
Ce qui est inquiétant dans ce cas-ci, c'est qu'alors que, six mois après les élections il y a 18 ans, la dernière fois que le Parti libéral avait pris le pouvoir, alors que, six mois après les élections, on avait des documents, des travaux à exécuter, des intentions claires, des projets très précis, des changements à mettre en place, cette fois-ci, six mois après les élections, on rentre en session parlementaire puis on a une lettre ouverte du premier ministre qui nous dit: Bon, bien, moi, là, j'ai été élu, puis on a bien l'intention de faire quelque chose, là, on regarde ça, là, mais on ne sait pas encore trop, trop comment est-ce qu'on va s'y prendre puis on ne sait pas encore trop quoi; on va changer bien des choses, par contre, là.
Et, pendant ce temps-là, bien tout est un peu paralysé, les gens dans les municipalités... les gens dans les municipalités, tout est sur la glace, parce que là... ils sont dans celles qui ont vécu des fusions, ils sont menacés, puis, les autres municipalités, tous les projets sont un peu sur la glace. Les gens dans les organismes communautaires, bien là ils ne savent plus trop pour leur financement. Et je pourrais nommer un paquet de secteurs d'activité où tout est un peu paralysé, parce qu'on se dit: Bien, on va attendre les intentions du nouveau gouvernement. Puis, les intentions ne sont pas plus précises six mois après les élections qu'elles l'étaient le jour du vote.
Je suis obligé d'être dur avec le slogan, d'être dur avec le slogan sur lequel le parti qui forme aujourd'hui le gouvernement avait été élu, parce que le slogan, c'était: Nous sommes prêts. Le slogan aurait pu être bien des choses qui soient encore... qui soient encore prises au sérieux aujourd'hui. Mais, s'il y a un slogan, aujourd'hui, début de session, octobre, six mois après les élections, s'il y a un slogan qui est devenu farfelu, c'est bien celui-là: Nous sommes prêts, parce qu'on peut voir à quel point ils n'étaient pas prêts. Je leur accorde que, sur un volet, ils étaient prêts. Toute la quantité de nominations, hein, c'est, toutes les semaines, les amis du régime libéral qui sont placés dans toutes les plus belles fonctions. On nomme les amis du régime libéral. Je pense que, là-dessus, ils étaient prêts effectivement, et on doit leur accorder... les citoyens du Québec doivent accorder au gouvernement libéral qu'en matière de nominations partisanes ils étaient prêts. Et ceux qui ont compris le slogan de cette façon-là, qu'ils avaient une liste d'amis à nommer puis que ces gens-là, peu après l'élection, allaient se voir récompensés pour leurs services, puis être nommés partout dans la machine, puis être nommés... puis il y a un paquets de nominations qui ont été faites. Mme la Présidente, je dois vous confesser, quand on regarde le curriculum vitae, ce n'est pas des mauvaises personnes, je n'ai rien à dire contre ces gens-là individuellement. Mais on cherche la ligne dans leur curriculum vitae qui pourrait être reliée à l'emploi qu'ils viennent d'obtenir, hein, dans des domaines quand même... dans des sociétés d'État qui gèrent des milliards de nos actifs, puis où on a des domaines très spécialisés, où une entreprise évidemment qui irait chercher des dirigeants pour des compagnies dans un secteur d'activité, ils iraient chercher des gens qui sont des sommités dans le domaine. Si on veut gérer une compagnie énergétique, on a besoin des gens qui sont les sommités dans le domaine énergétique. Alors là le domaine où le Parti libéral était prêt, il faut leur accorder, ils avaient une liste d'amis, des gens autour de leur régime politique qu'ils étaient prêts à récompenser.
Mais, en matière de préparation à poser les gestes qui vont véritablement améliorer les services publics, moderniser l'État, ils n'étaient pas prêts. Et là bien on commence à s'inquiéter, parce qu'on se retrouve dans un début de session parlementaire, et ce qu'on a, c'est un mot, un mot avec lequel... bon, hier, on s'est amusés à la période de questions, le premier ministre et le chef de l'opposition ont joué avec le mot «réingénierie», puis là il semble que c'est un néologisme, parce que son entrée dans la langue française se fait progressivement. Mais, outre ça, on va faire quoi? On va faire quoi dans chacun des domaines? Il y a un exemple, parce que les gens... de toute façon, les grands concepts, c'est une chose, mais ce que les gens attendent, c'est les exemples plus concrets.
Il y a un exemple concret qui a été donné d'une façon différente pour l'État d'intervenir, d'un rôle supplémentaire que le secteur privé pourrait jouer en relation avec le gouvernement, c'est l'exemple de l'eau. L'exemple de l'eau, il a été donné par la présidente du Conseil du trésor. Et, dans les minutes qui ont suivi ? soyons généreux, disons dans les heures qui ont suivi ? bien, toute son intention était tombée à l'eau. Elle avait été rabrouée par son chef, et l'ensemble des intentions en cette... Le seul exemple, qu'à force de questionner, le seul exemple que les journalistes avaient réussi à gratter, puis de dire: Bon, O.K., là on a un exemple, tous ces mots-là un peu vagues qu'ils nous sortent, ça pourrait être ça. Mais, finalement, non, ce n'est pas ça du tout. Donc, on sait ce que ce n'est pas, sur un volet, mais on ne sait pas ce que c'est. Et, après six mois... Aïe! on a déjà jugé des gouvernements, et même des gouvernements ont déjà demandé à être jugés: Jugez nos 100 premiers jours. Hein, les 100 jours de tel premier ministre, c'est une expression consacrée. Là on est six mois après et on ne sait toujours pas où on s'en va avec ce gouvernement.
n(11 h 30)n On a par ailleurs, sur un certain nombre de leurs intentions, déjà des contradictions qui sont assez flagrantes. Et je pense au sujet que j'ai abordé hier avec le premier ministre à la période des questions, la classe moyenne, où là on a des intentions clairement exprimées. Et, ma foi, hier, dans une entrevue exclusive, le premier ministre en a mis plus que le client en demande: Les prochaines années vont être les années de la classe moyenne, la classe moyenne va voir son pouvoir d'achat augmenter. Ça fait que, là, quand on entend des déclarations aussi spectaculaires, on retourne voir les actions, dire: Qu'est-ce qu'il y a de fait, là? Depuis le 14 avril jusqu'à aujourd'hui, qu'est-ce qu'il y a de fait que la classe moyenne pourrait déjà avoir les prémisses, les premiers signes que son pouvoir d'achat va augmenter?
Tarifs d'hydroélectricité, les plus grosses augmentations qu'on a vues depuis longtemps, deux coups de 3 % qui sont demandés. Assurance médicaments, augmentation. Et là je pourrais donner tous les exemples puis les autres exemples qui sont à l'étude pour comprendre qu'il y a là des contradictions entre les beaux discours et les résultats. Et c'est justement pour éviter le vague, l'inconnu, l'incapacité de donner des explications, pour s'assurer qu'ils ne vont pas dire une chose et faire le contraire qu'on appuie cette motion. Ce n'est pas qu'on est contre que des changements arrivent à l'État québécois. Nous, notre parti, on est pour, mais on pense qu'il est urgent que le premier ministre vienne expliquer quelles sont les intentions de son gouvernement devant une commission de notre Assemblée. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Alors, maintenant, il reste 10 minutes au temps du Parti libéral. Je reconnais la députée de Jean-Talon et whip adjointe du gouvernement.
Mme Margaret F. Delisle
Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Alors, je crois qu'il est pertinent, ce matin, de rappeler à l'opposition un événement qui s'est déroulé il y a un peu plus de six mois. Après tout, la mémoire est une faculté qui oublie. Le 14 avril dernier, les Québécoises et les Québécois ont voté majoritairement pour le Parti libéral du Québec et pour son plan d'action novateur. Le 14 avril dernier, les Québécoises et les Québécois nous ont, en effet, porté au pouvoir avec le mandat clair de moderniser l'État québécois. Nous n'avons rien caché à la population, notre projet de modernisation est écrit noir sur blanc dans notre programme électoral et dans notre plan d'action qui avait été déposé six mois auparavant, en septembre 2002. Nos concitoyens et concitoyennes ont exprimé leur volonté de recevoir des services de meilleure qualité avec des moyens adaptés aux réalités actuelles. Nous nous sommes engagés à mettre un gouvernement au service des citoyens et non l'inverse, comme l'a fait le Parti québécois pendant neuf ans.
Le plan d'action que nous avons déposé six mois avant l'élection présentait déjà notre intention de moderniser l'État québécois. On pouvait y lire, et je cite: «Un État réinventé, c'est un État au service des citoyens, plus efficace, plus transparent, moins coûteux.» Ces mots sont tous, sans exception, dans le dictionnaire. Six priorités d'action ont alors été établies pour recentrer l'État sur le citoyen: réduire le nombre de ministères, d'organismes et de sociétés d'État; maintenir l'équilibre budgétaire, éliminer le gaspillage; mettre la technologie au service des citoyens; décentraliser le pouvoir de décision, déléguer des responsabilités; gérer les ressources humaines et gouvernementales; et, la sixième priorité, un gouvernement intègre et transparent.
Le Québec que nous proposions avant et pendant les élections, c'est un Québec qui offrira plus de services avec moins de structures. Faut-il rappeler que le Parti québécois a créé pendant son mandat 60 nouvelles structures, une structure par mois, par année, 60. C'est le Québec que les citoyens ont choisi le 14 avril dernier. Les citoyens du Québec savent que la structure gouvernementale est trop lourde. Ils le savent, ils nous en parlent et ils s'attendent à ce qu'on allège les processus. C'est être très responsable que de vouloir ce qu'il y a de mieux pour le Québec.
Aujourd'hui, le Québec est arrivé à un nouveau tournant de son histoire. Le fonctionnement de l'État n'a jamais réellement et vraiment été remis en question, et il est temps d'y voir. Pendant neuf ans, on a écouté les hommes, les femmes, les aînés, les jeunes, les étudiants, les ouvriers, les infirmières, les infirmiers et infirmières auxiliaires, les médecins, les enseignants, les groupes communautaires et combien d'autres. C'est le reflet de leur volonté et de leur vision que nous traduisons aujourd'hui dans ce vaste projet de réingénierie de l'État.
Ce qu'on qualifie aujourd'hui de réingénierie, il y a 40 ans, on le baptisait Révolution tranquille. Il est inutile de vous rappeler que cette grande modernisation de l'État québécois dans les années soixante a été entreprise par une équipe libérale visionnaire dirigée par M. Jean Lesage. Qu'on se rappelle l'instauration de diverses mesures avant-gardistes et qui, il faut l'avouer, avait fait crier bien du monde. Qu'on pense à l'assurance hospitalisation, la création du ministère de la Santé, la création du ministère de l'Éducation, la nationalisation de l'électricité et combien d'autres.
La Révolution tranquille, Mme la Présidente, a permis à l'État québécois de faire un pas en avant et à ses citoyens de profiter de services de plus grande qualité. On ne peut certainement pas, en cette Chambre, nier l'impact de cette Révolution, à l'époque, sur le Québec. Comme l'a dit notre premier ministre, et je le cite, «l'État qui nous a jadis permis de faire un grand bond en avant est en train de nous ralentir. Il faut actualiser sa mission. Nous pouvons le faire. Il faut faire de notre État d'hier un gouvernement d'aujourd'hui. C'est ce virage que je veux faire. C'est ça, réinventer l'État.» Fin de la citation. Comme je l'ai mentionné, l'objectif de notre gouvernement est essentiellement et prioritairement de recentrer l'État sur ses missions essentielles et sur les besoins des Québécoises et des Québécois. Nous voulons un État qui se concentre sur la santé, l'éducation, la prospérité, la sécurité et l'identité.
Pour les citoyens qui nous écoutent et à qui on parle quotidiennement, ça signifie quoi? Ça signifie que nos malades et nos aînés bénéficieront de meilleurs soins de santé, des soins accessibles en tout temps et dans des délais beaucoup plus raisonnables. Pour nos jeunes, ça signifie qu'ils bénéficieront d'un meilleur système d'éducation. Pour les contribuables, ça signifie une baisse d'impôts d'environ 27 % en cinq ans. Pour nos citoyens, ça signifie aussi un allégement de la bureaucratie et une adaptation moderne et une accessibilité aux services gouvernementaux qui soit beaucoup plus rapide et beaucoup plus adaptée aux méthodes d'aujourd'hui. Ça signifie aussi, entre autres, pour les citoyens et les citoyennes des régions qu'elles auront le pouvoir de prendre en main... qu'ils et elles auront le pouvoir de prendre en main leur propre avenir en participant activement aux décisions qui les concernent et qui les touchent directement.
La réingénierie, ce n'est pas un projet improvisé. Comme vous avez pu le constater, c'est un projet qui nous tient à coeur depuis un bon moment, depuis assez longtemps pour qu'il soit inclus dans notre programme, depuis assez longtemps pour que, en 2002, le Parti libéral du Québec parle déjà de cette nouvelle façon de revoir les structures gouvernementales, depuis assez longtemps pour que la population ait eu le temps d'y penser, de poser des questions et d'aller voter pour le parti, notre parti, lors des dernières élections. C'est un projet mobilisateur pour l'ensemble du gouvernement, pour l'ensemble de la population.
J'en profite ici pour saluer l'initiative de la présidente du Conseil du trésor, qui a impliqué les députés à divers niveaux dans le projet. Elle nous a entendus, comme elle a entendu différents groupes et différents intervenants qui se sont impliqués dans la modernisation de l'État. Aussi, les six grands travaux annoncés par le premier ministre, coordonnés par notre collègue la présidente du Conseil du trésor reflètent le sérieux de notre démarche pour mener à bien cette modernisation et cette réingénierie de l'État.
Les six grands travaux sont en cours, dirigés par un ministre responsable, mettent à contribution les députés, les experts, des personnes-ressources, des employés de l'État et de la fonction publique. Tout le monde met la main à la pâte pour s'assurer que ce projet soit une réussite. L'agenda est tracé, Mme la Présidente, les premiers rapports seront déposés en décembre. Il y aura par la suite un plan d'action et, d'ici... assez prochainement, on pourra annoncer à la population et aux citoyens qu'ils auront davantage de services, qu'ils seront moins coûteux, ils seront plus efficaces, il y aura moins d'impôts à payer et ils seront surtout au meilleur coût possible. Tous les programmes et les services offerts par le gouvernement seront revus afin de s'assurer qu'ils constituent toujours une mission essentielle de l'État. Leur efficacité, leur efficience ainsi que notre capacité de nous les offrir seront évaluées.
n(11 h 40)n J'aimerais inviter les membres de l'opposition à voir en la modernisation de l'État plus qu'un simple exercice de compressions budgétaires. La réorganisation que nous entreprenons va bien au-delà de la partisanerie politique, elle propose de nouvelles façons de faire, et je demande leur collaboration. Il n'est pas question de couper des services aux citoyens. Il est question de se doter d'outils afin de nous permettre de s'offrir comme collectivité ? nous en faisons tous partie ? un maximum de services au meilleur coût possible. C'est ça que les citoyens souhaitent, c'est ce que nous ferons, nous en avons pris l'engagement.
Un État qui fait davantage appel à la concurrence, aux nouvelles technologies et aux innovations sera mieux outillé pour affronter les nouveaux défis auxquels nous devrons faire face pour ainsi offrir ce qu'il y a de mieux à ces citoyens et citoyennes. Le processus de réorganisation de l'État était à ce point nécessaire que même les membres du Parti québécois la considéraient essentielle. Qu'on pense, entre autres, à la députée de Taillon, ex-ministre des Finances, ex-ministre de l'Éducation, ex-ministre de la Santé, ex-présidente du Conseil du trésor, qui récemment nous annonçait qu'elle n'avait rien contre l'allégement de l'État, elle n'était ni contre la révision ni contre l'élimination de d'autres structures.
Mme la Présidente, je termine en disant que le changement est à la base du progrès. Alors, je tiens à rassurer tout le monde que nous procéderons avec toute la diligence et la transparence qu'un projet de cette envergure mérite. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, le député de Blainville, en vous signalant qu'il reste 10 minutes à votre formation politique.
M. Richard Legendre
M. Legendre: Merci, Mme la Présidente. Alors, la motion que nous débattons ce matin, Mme la Présidente, est évidemment très importante et, je dirais, particulièrement importante pour les régions du Québec. Je pense que, six mois après l'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral, c'est important, à ce moment-ci, de faire le point sur cette réingénierie libérale en regard des régions et d'essayer de définir pour les gens qui nous écoutent qu'est-ce que ça veut dire, cette réingénierie libérale en fonction des régions et surtout les impacts malheureusement négatifs que ça a eu jusqu'à maintenant sur les régions.
Alors, concrètement, c'est quoi? Et là on ne veut rien inventer, on ne veut pas en créer de crise. Je vous rapporte, moi, ce qui s'est passé depuis six mois dans les régions du Québec. Quatre choses, essentiellement. Premièrement, la réingénierie libérale, ça a été quoi? Ça a été la pire réduction du premier budget libéral, la pire réduction au niveau du poste budgétaire. Qui a subi la pire réduction? Les régions: 23 % de réduction, 178 millions sur un budget de 759. Alors, il n'y a aucun autre poste budgétaire dans le premier budget libéral qui a souffert autant, 23 % de réduction. Ça a été essentiellement l'ensemble du budget antérieur du ministère des Régions, le ministère des Régions qui a été fusionné à Développement économique et régional, sauf que, en le fusionnant, bien ça a fait disparaître à peu près l'ensemble de son budget.
Deuxièmement, réduction majeure des mesures favorisant le développement en région. Et là j'en ai une nomenclature: réduction de 25 % des crédits d'impôt au bénéfice des régions; abolition des crédits d'impôt pour encourager le retour des jeunes en région; abolition des carrefours de la nouvelle économie, qui avaient créé 700 emplois en région; diminution substantielle du programme FAIRE.
Troisièmement, la réingénierie, pour les régions du Québec, ça a aussi été de réouvrir le débat sur les structures. C'est intéressant d'entendre parler nos amis d'en face des structures. Bien là la première décision: nouvelle structure au niveau de la gouvernance régionale, créer une nouvelle structure, Conférence régionale des élus. Alors, ce que ça fait, c'est qu'au lieu de travailler sur un plan d'action, plan d'action qui, soit dit en passant, était prêt suite au Rendez-vous national des régions l'an dernier... Dans chacune des régions, on avait des plans d'action, on était prêt à bouger. Là qu'est-ce qui se passe? On rediscute, on s'obstine à savoir quelle va être la structure, et ça, bien honnêtement, sans savoir même quelles seront les nouvelles responsabilités, les nouveaux mandats qui seront accordés à la nouvelle structure et même sans savoir les moyens, les ressources, l'argent qui ira avec ça. Donc, des débats extrêmement stériles. Évidemment, bien, au niveau des CLD et des CRD, qui ont fait du bon travail depuis les dernières années, bien, ils sont dans l'incertitude totale, ils sont en sursis, ils ne savent pas qu'est-ce qui va leur arriver dans six mois. Donc, réingénierie en région, ça veut dire débat de structures.
Quatrièmement, une autre décision gouvernementale qui ralentit et, je dirais même, qui paralyse le développement régional, ce sont évidemment les défusions. C'est intéressant d'entendre le nouveau gouvernement dire: On va décentraliser, on va envoyer plus de responsabilités aux municipalités. Or, on ne sait pas lesquelles municipalités, on ne sait plus c'est qui, les municipalités. Alors, le Saguenay?Lac-Saint-Jean va attendre de savoir ce qui va se passer avec Saguenay; l'Outaouais va attendre de savoir ce qui va se passer avec Gatineau; l'Estrie avec Sherbrooke; Chaudière-Appalaches avec Lévis. Et on en a pour un petit bout à attendre parce qu'on ne le sait pas et, en plus, si ça défusionne, bien là on sait ce que ça peut donner au niveau du développement économique. Évidemment, la réingénierie donc immobilise, met le Québec en attente.
En résumé, Mme la Présidente, la réingénierie libérale en région a été beaucoup plus synonyme de réduction. D'ailleurs, c'est assez dur à dire, cette réingénierie, disons donc plutôt «réduction», ça, ça se dit bien, la réduction des régions. Réduction record du budget des régions. Réduction des mesures favorisant les régions. Réduction de l'activité, de l'action sur le terrain en région, puisque, là, on augmente les discussions, les obstinations en région. Réduction des services en région. J'entendais la députée dire: Il n'y a pas de réduction de services. Comment est-ce qu'il ne peut pas y avoir de réduction de services alors que le budget a baissé de 23 %? Il ne faut pas prendre les gens pour des valises, là. Réduction du rôle de l'État en région. Drôles de choix, Mme la Présidente, pour le prétendu parti des régions. Alors, voilà ce que ça a été, la réingénierie en région, la réduction en région, depuis six mois.
Quels sont les résultats? Quels sont les impacts en six mois? Bien, d'abord, beaucoup, beaucoup d'incertitude et d'inquiétude en région. Je vous le disais, les CLD et les CRD ne savent pas à quoi s'attendre, on n'a pas d'indication, on n'a pas de direction. On est six mois plus tard, là. S'ils étaient prêts il y a six mois, ils devraient être prêts pas à peu près six mois plus tard. Et ce n'est pas le cas. On nage dans l'incertitude en région. Beaucoup d'immobilisme à cause du débat de structures. Moi, j'ai participé à une belle réunion lundi, dans les Laurentides. On s'obstinait sur les structures. 300 personnes. On aurait pu travailler ensemble à agir. Là, on placotait sur les structures. Beaucoup de paralysie dans le développement économique faute de moyens et de ressources. De plus en plus d'insatisfaction, évidemment. Après six mois, Mme la Présidente, la chance au coureur s'impatiente sérieusement, et à raison, parce que les chiffres, ils sont là également.
Je vous ai parlé de choses non mesurables, mais là je vais vous parler de choses palpables, très mesurables. Et les chiffres sont inquiétants au niveau de l'emploi. Et là ce n'est pas nous qui les inventons, c'est l'Institut de statistique du Québec. Depuis le 14 avril, là, depuis six mois, 1 700 emplois perdus en Mauricie, 4 000 en Abitibi-Témiscamingue, 7 000 dans les Laurentides et sur la Côte-Nord, 10 000 dans Lanaudière, 14 000 dans le Centre-du-Québec. Au global, 18 000 emplois perdus au Québec pendant que l'Ontario en créait plus de 40 000. Je vais vous dire qu'au rythme de 18 000 emplois perdus par six mois, imaginez dans quatre ans.
Nous ne crions pas au loup, Mme la Présidente, nous n'inventons pas des chiffres, la situation, elle est sérieuse en région, et on ne peut pas continuer dans cette direction. Ce n'est pas une pseudocrise, comme disait la présidente du Conseil du trésor. C'est une crise en gestation, une crise en puissance, seulement six mois plus tard.
Le gouvernement va devoir changer de direction, Mme la Présidente. Et ce n'est pas juste nous qui le disons. Regardez l'article d'hier: La Fédération des chambres de commerce du Québec préoccupée par la «réingénierie». La Fédération des chambres de commerce du Québec, ça doit dire quelque chose à notre ministre du Développement économique et régional, n'est-ce pas? Québec doit intervenir pour «tonifier» les régions. Et le nouveau président de la Chambre, qu'est-ce qu'il dit? «Si on veut que le Québec soit autre chose que Montréal et la bande qui l'entoure, il faudra de l'interventionnisme de la part de l'État. Ça va à l'encontre du discours de l'actuel gouvernement et de celui des chambres de commerce, mais au-delà des principes, il faut coller à la réalité.»n(11 h 50)n Bien oui, Mme la Présidente, il faut coller à la réalité, la réalité des régions du Québec. Et la réalité, c'est que les régions du Québec ont besoin de leur État, elles ont besoin de leur gouvernement. Ce n'est pas parce qu'elles manquent d'entrepreneurship, là, les régions du Québec. C'en est insultant, ça, de mettre en opposition entrepreneurship et interventionnisme: Ah, vous n'avez pas été assez entrepreneurs, donc vous n'avez pas de bons résultats. Il y en a, des entreprises, il y en a, des entrepreneurs, et il y en a, de l'entrepreneurship en région. Mais c'est la meilleure combinaison possible, que l'État qui vient aider judicieusement les régions du Québec parce que les réalités sont très différentes en région que dans les grands centres urbains ? il me semble que ça tombe sous le sens, ça ? et l'intervention de l'État et l'entrepreneurship, bien ça donne la meilleure combinaison possible pour faire le meilleur développement possible partout au Québec.
C'est pour ça, Mme la Présidente, qu'il est urgent d'entendre le premier ministre devant la commission des institutions, de l'entendre sur la réingénierie pour mieux connaître le plan de match ? actuellement, les régions ne le savent pas ? et surtout de l'encourager à modifier le plan de match pour les régions. Mme la Présidente, le plan de match actuel de non-interventionnisme, de réduction ? oubliez la réingénierie, là, c'est de la réduction en région actuellement ? bien, ce plan de match là, il nous conduit tout droit à la défaite, la défaite des régions du Québec, Mme la Présidente. Merci.
La Vice-Présidente: Alors, j'invite maintenant le député de Richelieu... Réplique finale de 10 minutes.
M. Sylvain Simard (réplique)
M. Simard: Merci, Mme la Présidente. Le député de Verdun est impatient de m'entendre, et je le comprends, lui qui a été un chef syndical, lui qui a dirigé un parti de gauche au Québec et qui participe, par son silence et sa solidarité, à une opération qui est totalement à l'encontre des idées qu'il a défendues toute sa vie.
L'opération que mène actuellement le gouvernement ? et nous en avons eu des confirmations au cours de la dernière heure ? est une opération, d'abord, qui se fait, qui se déploie sans aucune utilisation des services, des compétences, des lumières des serviteurs de l'État, de ceux et celles qui se dévouent chaque jour pour faire avancer le Québec. Jamais, en aucun moment, nous n'avons entendu aujourd'hui la volonté exprimée d'utiliser à leur mérite les gens qui font actuellement fonctionner l'État québécois. Même de ça, la présidente du Conseil du trésor est allée rencontrer ses employés et elle leur a dit qu'elle n'utiliserait pas les structures syndicales, qu'elle ne reconnaissait pas la représentativité des structures syndicales, donc qu'elle consulterait directement ? on ne sait pas ce que ça veut dire, là, mais on sait, habituellement, lorsque les patrons disent ça, ce que ça veut dire ? qu'elle consultera directement ses employés sans passer par des structures. Alors, c'est un refus du dialogue, c'est un refus d'utiliser, de prendre en compte les compétences des gens qu'elle utilise.
Mme Lamquin-Éthier: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Oui, je m'excuse...
M. Simard: Il y a les grands principes qui sont...
La Vice-Présidente: Je m'excuse, monsieur. Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. Je crois que nous n'avons pas quorum. En conséquence, je vous demanderais de vérifier le quorum, s'il vous plaît.
La Vice-Présidente: Le quorum est de 20? Le quorum est de 20?
Des voix: ...
Mme Lamquin-Éthier: Mme la Présidente, je suis informée que la séance de travail de la commission de l'administration publique a terminé ses travaux. Le quorum, en conséquence, n'est pas respecté.
La Vice-Présidente: Alors, je vous demanderais d'appeler les députés, s'il vous plaît.
n(11 h 54 ? 11 h 58)nLa Vice-Présidente: À l'ordre, Mmes, MM. les députés! Alors, compte tenu de l'heure, nous devons normalement terminer nos travaux à midi, il reste encore plus de sept minutes pour la réplique du député de Richelieu, alors je vous demande s'il y a consentement à ce que nous prolongions nos travaux d'autant. Est-ce qu'il y a consentement, madame...
Une voix: ...
La Vice-Présidente: Alors, je vous invite à poursuivre.
M. Simard: Mme la Présidente, nous venons d'assister à un précédent. Ça ne s'est pas produit au cours des neuf dernières années, que le gouvernement réclame le quorum. Et je peux certifier, Mme la Présidente, à la leader adjointe du gouvernement que nous allons là-dessus l'imiter, et trouver en elle un exemple extraordinaire, et choisir à toutes les occasions le respect de cette institution, et imposer ce quorum qu'elle espère tant. Et je pense que les députés de l'opposition vont... les députés du gouvernement vont apprendre ce que c'est qu'une maladresse en Chambre, ce qu'elle signifie et ses conséquences. Je vous remercie.
n(12 heures)n Revenons à la réingénierie de l'État. On vient d'assister à un bel exemple de réingénierie du règlement. Mme la Présidente, le gouvernement a décidé, derrière des portes closes, sans aucune consultation, sans dialogue, dans l'affrontement, de transformer complètement l'État québécois, d'annoncer que l'on confierait à une firme privée le soin de conseiller le gouvernement sur les privatisations. Le gouvernement a choisi de faire de cette opération de réingénierie une opération... un coup de force contre l'État québécois, manifestant dès le départ sa méfiance complète à l'égard de cet État, de cette administration, des gens compétents qui y oeuvrent, ne faisant aucunement confiance aux députés de cette Chambre. Je me souviens d'un Jean Charest, d'un premier ministre du Québec, qui était alors chef de l'opposition, qui disait que la réingénierie, les changements profonds, les décisions seraient pris par des commissions parlementaires. Où sont-elles, aujourd'hui, les commissions parlementaires qui étudient l'importance de chaque organisme, qui étudient chacune des questions du questionnaire envoyé par le Conseil du trésor aux différents organismes? Où sont les députés qui devraient aujourd'hui oeuvrer à cette analyse en profondeur du rôle de l'État? Ils sont mis à l'écart, à part évidemment quelques députés libéraux qui, à la suite d'une mutinerie au caucus, ont réussi à se faire nommer dans des fameux comités de réingénierie et qui évidemment ne rendent compte à aucun moment en cette Chambre. Les députés sont totalement absents de cette opération. La population est absente. Tout cela se ferait dans la confrontation.
D'ailleurs, on aura le dépôt, dans les prochains jours, de projets de loi qui visent à paver la voie à cette réingénierie de l'État, notamment en transformant, en s'attaquant de façon frontale à notre Code du travail, en faisant de la sous-traitance maintenant une réalité encouragée par l'État, sans aucun souci du bien-être des travailleurs. Est-ce que notre espoir, est-ce que notre rêve pour notre société, c'est des gens qui gagnent 8 $ à 10 $ de l'heure ou est-ce que ce sont des gens syndiqués, protégés, qui gagnent de bons salaires? Nous allons avoir...
Et je comprends très bien que le seul, aux nouvelles, tous les soirs, qui applaudisse avec enthousiasme à toutes les mesures prises par ce gouvernement, ce soit le président du Conseil du patronat. Alors, lui, il y trouve tous les jours son compte. Méfiez-vous, je le dis à nos amis d'en face, méfiez-vous, quand vous serez seuls et que vous aurez à défendre vos politiques devant la population, l'appui du président du Conseil du patronat ne vous suffira pas. Quand la colère de la population face à l'arrogance dont vous faites preuve actuellement commencera à grandir et se manifestera, ce n'est pas le Conseil du patronat ni son président qui pourront vous sauver.
Je vous le dis avec le plus de compréhension possible, vous devriez aller chercher dans la population un appui à vos mesures, celles que vous pensez valables, celles qui peuvent passer le test du débat démocratique, celles qui méritent d'être mises sur la place publique et débattues. Vous y gagneriez énormément. Les changements, c'est important, et il faut constamment faire des changements. Mais on doit associer les gens aux changements. On n'a pas le droit d'entreprendre une opération idéologique de dépeçage du rôle de l'État sans demander aux citoyens s'ils sont d'accord pour l'abolition d'un certain nombre de services, sur la diminution de certains services sans avoir évalué les attentes de la population dans chacun des secteurs qui seront concernés.
Je ne peux pas comprendre aujourd'hui que le gouvernement ne soit pas enthousiaste à la proposition qui est dans notre motion. Tout le monde devrait être content aujourd'hui. Et je sais que les députés libéraux se plaignent, je sais que d'anciens députés... Même un leader libéral, M. Ryan, faisait valoir l'autre jour ses inquiétudes profondes et il avait peur que des couches entières de la société soient oubliées dans cette réingénierie de l'État, que les fameuses valeurs libérales qu'il défend soient complètement mises de côté dans cette opération.
Nous aurions une excellente occasion, au cours des prochaines semaines, si, en commission parlementaire, le premier ministre acceptait de venir répondre à nos questions, préciser ce qu'il entend. Que veut-il privatiser? Est-ce qu'il ne veut privatiser que les fonctions rentables de l'État et laisser à l'administration publique et au gouvernement les aspects non rentables? Est-ce que cette privatisation se fera dans le respect absolu des règles de protection des droits à la vie privée des citoyens? Est-ce que l'éthique sera préservée? Il y a des questions fondamentales qui se posent, il y a des questions extrêmement importantes qui concernent la vie quotidienne de l'ensemble de nos concitoyens. Nous demandons aujourd'hui... Ce n'est pas une chose... ce n'est pas une méfiance dangereuse, ce n'est pas un manque de confiance, nous demandons simplement au premier ministre d'agir comme un leader. Le leadership, c'est de convaincre, de persuader et d'entraîner derrière soi. Nous lui demandons de venir convaincre le Parlement, l'Assemblée nationale que les mesures qu'il entend prendre sont les meilleures. Qu'il vienne répondre aux questions des députés, qu'il vienne échanger avec nous, qu'il vienne dévoiler les grands objectifs de son plan. Est-ce qu'il s'agit de mesures de compressions sauvages sans aucune vision ou s'agit-il d'une vision pensée, réfléchie, planifiée, qui nous mène vers un meilleur État québécois? Mais rien dans les plans actuels, rien dans ce que nous avons entendu des ministres, rien de ce que nous avons entendu de la présidente du Conseil du trésor ne nous rassure à ce sujet-là.
Mme la Présidente, je fais un dernier appel au gouvernement de prendre conscience de l'importance des gestes qu'il pose ces jours-ci, ces semaines-ci dans cette réingénierie de l'État. Je lui demande d'accepter la motion de l'opposition et que le premier ministre accepte de comparaître devant la commission des institutions et répondre démocratiquement de ce programme. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Alors, Mmes et MM. les députés, je vais maintenant mettre aux voix la motion du député de Richelieu, qui se lit comme suit:
«Que la commission des institutions se réunisse d'urgence afin d'entendre le premier ministre du Québec sur son projet de réingénérie de l'État québécois.» Cette motion est-elle adoptée?
Une voix: Mme la Présidente, vote nominal reporté.
Vote reporté
Mme Lamquin-Éthier: Mme la Présidente, conformément à l'article 223 de notre règlement, je vous demande de reporter le vote à la période des affaires courantes de ce jour.
La Vice-Présidente: Alors, je suspends les travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 7)
(Reprise à 14 h 5)
Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Alors, je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Présence de membres de l'Amicale
des anciens parlementaires du Québec
Alors, mes chers collègues, il y a 10 ans, je me levais en cette Chambre pour déposer le projet de loi créant l'Amicale des anciens parlementaires du Québec. L'Assemblée nationale répondait ainsi au voeu des anciens parlementaires qui souhaitaient garder contact avec l'institution et avec leurs collègues.
Qu'ils aient siégé d'un côté ou de l'autre dans cette salle d'Assemblée, regroupés en association, ils demeurent actifs en apportant leur contribution à la promotion des institutions parlementaires du Québec et à l'information sur le parlementarisme.
Ils sont venus ici aujourd'hui pour célébrer leur 10e anniversaire. Je suis heureux de les saluer tous dans les tribunes, tout spécialement les membres du conseil d'administration. M. Denis Hardy, président ex officio. M. Hardy. M. Jean-Paul Champagne, le nouveau président de l'association, de l'Amicale. M. Antoine Drolet, que vous avez vu circuler dans cette Assemblée durant de nombreuses années, qui est maintenant vice-président. M. Jean-Hugues Boutin, le nouveau trésorier, de l'Abitibi.
Alors, tous ensemble, une bonne main d'applaudissements, et levons-nous pour les saluer tous.
(Applaudissements)
Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.
M. Boisclair: Oui. M. le Président, avec l'accueil que nous venons de réserver aux nouveaux officiers de l'Amicale des anciens parlementaires, je suis convaincu qu'ils n'auront pas à soumettre leur plan de réingénierie à la présidente du Conseil du trésor.
Le Président: Alors, M. le leader, je crois que votre...
Des voix: ...
Le Président: Alors, la présidence ne commentera pas.
Affaires courantes
Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: M. le Président, simplement, on a noté que... on n'a pas remarqué que M. Facal est dans les galeries, mais je suis certain qu'il est du côté du gouvernement, s'il y est.
Le Président: MM. les leaders, ça s'arrête là. Assez, c'est assez. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Veuillez appeler l'article a du feuilleton, M. le Président.
Projet de loi n° 17
Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs présente le projet de loi n° 17, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Ressources naturelles et d'autres dispositions législatives. M. le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs, je vous cède la parole.
M. Sam Hamad
M. Hamad: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le projet de loi n° 17, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Ressources naturelles et d'autres dispositions législatives.
Ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère des Ressources naturelles afin de remplacer les désignations du ministre et du ministère qui y apparaissent par celles du ministre et du ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs.
n(14 h 10)n De plus, ce projet de loi modifie plusieurs autres lois à des fins de concordance et contient une disposition d'harmonisation législative en ce qui concerne le pouvoir du ministre de conclure des ententes.
Mise aux voix
Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté? Adopté? Adopté.
Dépôt de documents
Dépôt de documents. Mme la ministre de la Culture et des Communications.
Rapports annuels de la Commission
des biens culturels, de la Commission
de reconnaissance des associations d'artistes
et des associations de producteurs,
du Musée d'art contemporain
de Montréal et de la Régie du cinéma
Mme Beauchamp: J'ai l'honneur de déposer les documents suivants: le rapport annuel de gestion 2002-2003 de la Commission des biens culturels du Québec; le rapport annuel 2002-2003 de la Commission de reconnaissance des associations d'artistes et des associations de producteurs; le rapport annuel 2002-2003 du Musée d'art contemporain de Montréal; et le rapport annuel de gestion 2002-2003 de la Régie du cinéma.
Le Président: Alors, les documents sont déposés. Mme la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.
Rapports annuels du ministère
des Relations avec les citoyens
et de l'Immigration et de l'Office
de la protection du consommateur
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de gestion 2002-2003 du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, de même que la rapport annuel de gestion 2002-2003 de l'Office de protection du consommateur.
M. Boulerice: ...
Le Président: S'il vous plaît, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques. Je vous écoutais, mais vous n'avez pas la parole. Ces documents sont déposés.
Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni de dépôt de pétitions.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.
Je vous avise qu'après la période des questions et des réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de M. le député de Richelieu débattue aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.
Questions et réponses orales
Nous en sommes maintenant à la période des questions et des réponses orales, et je cède la parole à M. le leader adjoint de l'opposition, et porte-parole de la justice, et député de Chicoutimi.
Travail du Procureur général
concernant le procès des Hell's Angels
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, ma question s'adresse au ministre de la Justice: Le ministre de la Justice et Procureur général peut-il déposer en cette Chambre la chronologie des événements entourant son intervention dans le dossier du mégaprocès des Hell's Angels?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Marc Bellemare
M. Bellemare: M. le Président, mon collègue député de Chicoutimi sait très bien que le Procureur général, en semblable matière, celui qui porte des accusations de nature criminelle au Québec, celui qui gère l'ensemble de la poursuite des affaires criminelles au Québec, ne peut pas divulguer des informations qui relèvent de la stratégie, qui relèvent de l'organisation, qui relèvent de l'étude et de l'évaluation de la preuve. Alors, malheureusement, je ne saurais divulguer les informations qui ont été échangées avec le sous-ministre, avec le sous-ministre adjoint aux poursuites publiques ou avec les procureurs généraux, les procureurs de la couronne. Alors, c'est bien évident, M. le Président, que tout ça relève de la stratégie, et mon prédécesseur, qui était le député de Drummond, sait très bien, comme tout le monde, qu'il n'est pas possible de divulguer ce type d'informations.
Le Président: En question complémentaire, M. le député de Chicoutimi.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: M. le Président, ce que nous demandons au ministre tout simplement, c'est d'expliquer aux membres de cette Assemblée la nature de ses interventions et nous expliquer finalement qu'est-ce qui s'est passé dans le chassé-croisé burlesque qui a failli faire avorter le mégaprocès, au point où on assiste aujourd'hui à une véritable chasse aux sorcières dans le ministère de la Justice.
Le Président: Un simple rappel avant de reconnaître M. le leader du gouvernement, c'est que nous sommes encore dans un délai d'appel aujourd'hui. Le délai d'appel n'est pas écoulé, alors j'attire... Tous les membres de cette Assemblée, je leur demande d'être très prudents sur ce sujet. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Alors, M. le Président, vous venez de faire mieux que je ne l'aurais fait, ce sur quoi je voulais attirer votre attention, d'une part. D'autre part, il m'apparaît évident que la question du leader adjoint de l'opposition est un appel indirect qui est contraire à l'article 81 de notre règlement. Il se plaint du fait que la réponse du ministre n'était pas satisfaisante. Il n'a pas le droit de le faire. Alors, c'est deux admonestations que je vous demande de lui faire.
Des voix: ...
Le Président: Alors... S'il vous plaît! Alors, il y a aussi l'article 82, que je vais vous lire:
«Le ministre auquel une question est posée peut refuser d'y répondre, notamment: s'il juge contraire à l'intérêt public de fournir les renseignements demandés; si les renseignements ne peuvent être colligés qu'à la suite d'un travail considérable[...].
«Il doit refuser d'y répondre si sa réponse aurait pour effet de contrevenir aux paragraphes 2° et 3° de l'article 35», où on parle du sub judice. M. le député de Chicoutimi.
Indépendance du Procureur général
dans le procès des Hell's Angels
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: Alors, M. le Président... En principale. Je comprends de la réponse du ministre de la Justice que, lorsque les délais d'appel seront écoulés, nous aurons plus d'information quant à la nature de ses interventions.
Dans le dossier entourant ce cafouillage du ministre de la Justice et du Procureur général sur le mégaprocès des Hell's, on a pu lire dans les journaux que le cabinet du premier ministre a fait des pressions dans le dossier.
Alors, le premier ministre peut-il nous dire aujourd'hui qui, de son cabinet ou du Conseil exécutif, est intervenu de quelque manière que ce soit auprès du Procureur général, de son entourage ou du ministère dans ce dossier et quelle a été la nature et le contenu de ces interventions et dans quelles circonstances?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Les propos du député de Chicoutimi frôlent l'irresponsabilité, M. le Président. Là, c'est une partie de pêche, là. Ce qu'il vient d'affirmer, c'est fondé sur absolument rien, sauf des racontars qu'il a ramassés à gauche ou à droite.
Le gouvernement s'est comporté de façon parfaitement conforme dans toute cette affaire-là, et j'invite le député à agir de façon plus responsable dans ses questions.
Le Président: En question additionnelle, M. le député de Chicoutimi.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: Alors, M. le premier ministre... M. le Président, plutôt, plusieurs commentateurs ont fait référence à des interventions, et j'y réfère tout simplement.
Ce que je veux savoir du premier ministre aujourd'hui ? il se requiert de sa propre bonne conduite et de son entourage ? ce que je demande simplement au premier ministre: Est-ce qu'il est, oui ou non, lui ou les membres de son entourage, intervenu dans le dossier des Hell's Angels auprès du Procureur général?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: M. le Président, je viens de dire au député de Chicoutimi ma déception ? je pense qu'il l'a compris ? dans la façon puis les questions qu'il pose, qui sont basées sur, j'ai-tu bien compris, des commentateurs? Est-ce que vous êtes rendu là, vous, dans vos questions? C'est basé sur des commentateurs? Quels commentateurs? Donnez-nous des noms. Ce que je peux vous...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Je demande votre collaboration. La parole est au premier ministre. M. le premier ministre.
M. Charest: Alors, basé sur des affirmations qu'auraient faites des commentateurs sans nom ? parce que vous ne nous en donnez pas, là ? aujourd'hui vous posez ces questions-là en allant à la pêche, sachant très bien qu'on s'est comportés de façon conforme aux règles. Alors, si le député a plus à dire, bien, qu'il le dise. Mais, outre ça, je ne pense pas que ses questions soient responsables, M. le Président.
Le Président: Alors, une dernière question additionnelle, M. le député de Chicoutimi.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: M. le Président, je m'étonne grandement de l'absence de dénégation de la part du premier ministre quant à des interventions. Les commentaires auxquels je me réfère sont des commentaires auxquels il se réfère régulièrement en cette Chambre. Alors, tout simplement, il a à informer cette Chambre si, oui ou non, il est intervenu et si cette question a été abordée au Conseil des ministres.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Le député de Chicoutimi choisit une drôle de journée pour demander, poser ce genre de questions là. Je prends à témoins les gens, là, qui sont en majorité dans les tribunes aujourd'hui. Là, il nous demande les débats ou les discussions qui auraient eu lieu au Conseil des ministres. C'est une partie de pêche.
Vous avez parlé de commentateurs. De quels commentateurs vous parlez? Des commentateurs à la radio, je suppose? C'est de ça dont vous parlez, hein? Est-ce que c'est le plan de match, là, de la députée de Taillon dont on est témoins aujourd'hui? Est-ce que c'est ça que je dois comprendre? J'ai été témoin, moi, comme tous les autres Québécois, du programme politique de la députée de Taillon, tel qu'elle l'a énoncé dans un film qui a été largement diffusé. Est-ce que c'est de ça dont on est témoins aujourd'hui?
n(14 h 20)nLe Président: Question principale, M. le chef de l'opposition officielle.
Bilan du nombre d'emplois en région
M. Bernard Landry
M. Landry: M. le Président, je suis réjoui qu'autant de nos anciens collègues, hommes et femmes, soient dans nos galeries aujourd'hui. Ça dénote une fidélité démocratique et civique qui les honore et qui nous réconforte. Mais ce qui nous honore ou nous réconforte également, c'est qu'aucun d'entre eux ni d'entre elles n'ont fait partie d'un gouvernement conservateur ou n'ont appuyé, comme députés, un gouvernement conservateur. Pour avoir des conservateurs vrais dans cette Chambre, il faut remonter à Sir Mathias Tellier, député de Joliette, sauf depuis six mois. Nous avons ici devant nous un gouvernement se présentant sous des couleurs libérales, ce qui ? pour la population, c'est extrêmement frustrant ? nous donne un gouvernement conservateur.
Hier, nous avions devant notre parlement...
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Nos anciens parlementaires sont ici, puis...
Des voix: ...
Le Président: ...et ils sont certains que vous vous êtes améliorés.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Et ils savent très bien que, quand une personne a la parole, c'est la seule personne qui a la parole. Et, je l'ai dit hier, je vous demande votre collaboration, et ça devrait être toujours comme ça. Alors, M. le premier ministre... chef de l'opposition.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry: M. le Président, je comprends parfaitement que le premier ministre puisse avoir des lapsus et m'appelle «le premier ministre». Ça fait une dizaine de fois qu'il le fait, et c'est qu'en son for intérieur il est tourmenté par le fait qu'il n'est pas assis au bon siège. De sa part, ça ne me surprend pas. Mais, vous, M. le Président, je n'ai jamais pensé que vous aviez des ambitions de cette sorte, surtout pas quand vous étiez au Nouveau Parti démocratique.
On a donc devant nous, M. le Président, un gouvernement conservateur. Hier, on a eu des représentants de 50 groupes de la société civile représentant des millions de personnes des classes moyennes, des millions de personnes des classes moyennes ou des milieux défavorisés, ce qui témoignait de l'inquiétude et de l'angoisse semées par ce gouvernement conservateur dans de larges segments de notre société. Mais, normalement, les gouvernements conservateurs plaisent aux milieux d'affaires et essaient au moins de favoriser l'économie. Mais ce n'est pas ça du tout. Les milieux d'affaires sont aussi perturbés que les groupes populaires et les syndicats. Le nouveau président de la Fédération des chambres de commerce ? on n'est plus à groupes populaires ou syndicats, là: «Tous sont conscients du fait que leur économie se fragilise.» Québec devra faire preuve d'un plus grand interventionnisme pour améliorer le sort des régions.
La question, elle est bien simple: Est-ce que le premier ministre du Québec et son gouvernement conservateur se rendent compte de l'émoi qu'ils sèment dans les régions et que des milliers d'hommes et de femmes, depuis qu'ils sont au pouvoir, ont perdu leurs emplois, ont peur de les perdre ou n'ont pas ceux qu'ils espéraient avoir?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Merci, M. le Président. Je vais rendre service au chef de l'opposition officielle, je ne dirai pas à son prédécesseur, Lucien Bouchard, ce qu'il vient de nous affirmer à la Chambre. Il se rappellera peut-être, s'il n'en connaît pas, d'anciens parlementaires qui ont siégé ici, qui ont fait partie d'un gouvernement conservateur, il y en a un qui s'appelait Lucien Bouchard. Et, à ce que je sache, il y a... Hein? Je présume qu'il a dû profiter de chaque occasion pour lui reprocher, à ce moment-là... Mais je trouve...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: M. le premier ministre.
M. Charest: Je le trouve, malheureusement pour lui, un petit peu malheureux dans son nouveau rôle parce qu'il semble avoir un peu de difficultés à justifier son anxiété. Mais je vais essayer de le rassurer aujourd'hui. Puisqu'on parle justement d'anciens parlementaires, la journée est bien choisie. Je lui rappelais hier que son ancien ministre, président du Conseil du trésor, M. Facal, qui n'est plus en politique, écrivait tout récemment que le gouvernement actuel a raison de faire ce que certains appellent la réingénierie, ou la modernisation ? il choisira bien le mot qu'il veut ? qui disait, pas plus tard que le 4 octobre dernier, qu'il faudra expérimenter des façons inédites de produire, distribuer les services publics: Le débat sur le modèle québécois étant notre version locale d'un débat qui eut lieu dans toutes les sociétés capitalistes avancées, nous gagnerions aussi à être moins nombrilistes et à nous ouvrir aux expériences étrangères.
Mais il n'est pas le seul des anciens ministres de l'ancien gouvernement à penser que notre travail n'est pas si mal. Aujourd'hui, dans le journal Le Devoir, le gouvernement reçoit les félicitations de Mme Louise Beaudoin, M. le Président, dans le dossier de la diversité culturelle, faites suite au travail de notre ministre des Communications, entre autres. Elle dit ceci: «Le nouveau gouvernement a repris à son compte» ce que son gouvernement faisait, et nous en félicite.
Mais il y a mieux que ça, M. le Président. J'ai encore mieux que ça pour rassurer le chef de l'opposition officielle. Son ancien ministre de la Santé, sur l'enjeu majeur, disait hier à la télé que ce que nous faisions... On lui a demandé, à son ancien ministre, si ce qu'on faisait, nous, dans le domaine de la santé, c'étaient des bonnes solutions. Il a dit, et je cite: «Je ferais la même chose. Je pense qu'on est vraiment dans un enlignement qui a le potentiel de vraiment améliorer les services à la population.» Votre président du Conseil du trésor dit qu'on a raison, votre ministre de la Culture dit qu'on a raison, votre ancien ministre de la Santé dit qu'on a raison. Est-ce que vous croyez, vous, personnellement, qu'on a raison, oui ou non, de moderniser l'État ou allez-vous être le seul dans cette Chambre à continuer à plaider pour le passé?
Le Président: Alors, je rappelle au chef de l'opposition et au premier ministre que la première question a été de trois minutes. Alors, si vous pouviez écourter le temps pour qu'on puisse passer à plus de questions principales, j'apprécierais. En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.
Stratégie visant à contrer
les pertes d'emplois en région
M. Bernard Landry
M. Landry: On a des experts sur le parlementarisme dans nos galeries, et ils savent que, quand quelqu'un ne veut pas répondre aux questions, il dit n'importe quoi. Il peut le faire pendant un certain temps, mais la population finit par s'en apercevoir. Hier, ils n'ont pas répondu.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le chef de l'opposition officielle.
M. Landry: Hier, pendant la période de questions de notre nouvelle Assemblée, ils n'ont pas répondu sur la réingénierie. Ils n'ont même pas répondu sur le mot. S'il y avait eu quelqu'un comme Joseph Facal dans leurs rangs au Conseil du trésor, on aurait peut-être eu des réponses. On n'en a pas eu. Aujourd'hui, je pose des questions sur l'économie, le premier ministre vient de répondre sur tout autre chose. Je ne lui parle pas de sa réingénierie, c'était hier qu'il aurait dû nous répondre. Je lui parle du fait que, dans le Centre-du-Québec, il s'est perdu 14 000 emplois depuis leur arrivée au pouvoir. En Abitibi-Témiscamingue, il s'en est perdu 4 000. Sur la Côte-Nord, il s'en est perdu 7 600. Alors que nous avions eu l'honneur de dire depuis quelques années que, pour la première fois depuis des temps immémoriaux, le taux de chômage était plus bas à Montréal qu'à Toronto, il a repris sa place libérale puis il est redevenu plus élevé à Montréal qu'à Toronto. L'écart que nous avions resserré de façon brillante est redevenu ce qu'il était traditionnellement.
Est-ce que le premier ministre, au lieu de chercher des échappatoires dans les questions d'hier, pourrait répondre aux questions d'aujourd'hui et s'adresser aux hommes et aux femmes qui ont perdu leur emploi et qui perdent espoir, dans les régions, pour nous dire quand il quittera son attitude ultralibérale et ultraconservatrice, là? Quand son ministre dit: Une usine ferme, ce n'est pas grave, ça rouvrira ailleurs, bien là ça ne rouvre pas, ni ici, à Québec, à Montréal, ni ailleurs. Est-ce que le premier ministre voudrait nous dire quelle est sa stratégie pour empêcher la dégradation de notre économie et par conséquent... provoquer le désespoir des hommes et des femmes qui voudraient travailler et qui ne peuvent pas?
n(14 h 30)nLe Président: Alors, c'était une question principale. M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Bien, M. le Président, le chef de l'opposition n'est pas très bien placé pour faire des leçons à quiconque sur les questions d'économie. Voyons ce qu'il nous a laissé en héritage. La Caisse de dépôt, dans les deux dernières années, a perdu 13,2 milliards de dollars alors que, lorsque nous étions dans l'opposition, on avait interpellé le gouvernement de l'époque à plusieurs reprises pour intervenir, pour s'assurer qu'il se gouvernait correctement. La SGF a perdu, dans la dernière année, 172 millions de dollars alors que celui qui est aujourd'hui chef de l'opposition officielle se vantait qu'il empruntait à 6 % puis qu'il allait avoir 5 % ou 6 %, qu'il allait avoir une rentabilité à 15 %. Vous nous avez laissé une impasse budgétaire de près de 4 milliards de dollars. Vous avez présenté un budget bidon avec des augmentations de dépenses, puis aujourd'hui, nous, on est pris avec ça, de telle sorte que le budget du Québec est toujours à l'ultime limite. Ça a été ça, votre héritage, les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord, parmi les plus endettés, avec des mauvais services.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le député. M. le premier ministre.
M. Charest: Je sais que c'est difficile pour l'opposition d'entendre ça et qu'ils aimeraient mieux ne pas l'entendre, mais je peux lui donner une autre source s'il cherche une appréciation objective, de l'extérieur, de la façon dont le gouvernement se comporte. Je sais qu'il s'intéresse beaucoup à ce qui se dit dans The Economist. Dans leur publication du mois de septembre, du 27 septembre au 3 octobre, la page couverture, c'est Canada's new spirit. Et, dans l'éditorial de la revue The Economist, qui est quand même réputée, hein ? ce n'est pas un organe du Parti libéral du Québec ? on dit ceci: «To keep its new cool, Canada must therefore overhaul the way its government allocates power and money. Québec's new Liberal Government could lead the way: it wants the private sector to help to deliver public services, as well as some further devolution. The rest of the country should follow.» Hein? Alors, ça, c'est l'évaluation qu'on fait maintenant du nouveau gouvernement du Québec, du nouveau Québec sous un leadership qui s'occupe des vraies affaires au lieu d'essayer d'intervenir partout en même temps.
Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition.
Planification en matière
de développement économique
M. Bernard Landry
M. Landry: Le premier ministre étale encore ses problèmes d'identité. Parce que, si The Economist avait été le journal d'un parti, ce ne serait pas celui du Parti libéral, ce serait celui du Parti conservateur. Alors, c'est pour ça qu'il a tenté d'avoir quelques bons mots à l'endroit du gouvernement conservateur que nous avons ici, mais il a résisté à la tentation et il a employé le mot «could».
Alors, le premier ministre a fait une deuxième erreur, qui est celle de prendre des objectifs pour les réalités. En santé, il s'est fait prendre, au cours de l'été, il a dit que les problèmes étaient réglés, mais il parlait des objectifs, il ne parlait pas des vrais chiffres.
Mais, en économie, moi, je lui parle des vrais chiffres. Puis les vrais chiffres, c'est qu'ils sont en train de semer la terreur économique dans plusieurs régions du Québec actuellement, avec un PNB qui ou décroît ou croît d'une façon timide et morose, flirtant avec la récession. C'est ça, la réalité.
Et ce que je lui demande, c'est de me parler de son plan, de son attitude, de sa philosophie en matière de développement économique, pour qu'on renoue avec la prospérité. 2002 a été la meilleure année de l'histoire économique du Québec. Nous en avons le regret et la nostalgie. Et j'ai hâte de pouvoir féliciter le gouvernement, s'il peut y arriver, de faire aussi bien que ce qui est arrivé en 2002.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: Il n'y a que le chef de l'opposition officielle qui se lèverait à l'Assemblée nationale pour se vanter de la performance de son gouvernement, qui a permis que la Caisse de dépôt et de placement perde 13,2 milliards de dollars dans l'espace... Ah oui! Il fait comme ça; c'est exactement le problème.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre.
M. Charest: Il lui reste quelle crédibilité, quand la SGF a perdu 172 millions de dollars? Il avait promis des rendements qui allaient être de 12 % à 15 %, puis le rendement a été en deçà de 1 %. Il vous reste quelle crédibilité? À Métaforia, à Montréal, alors que vous avez fait perdre une vingtaine de millions de dollars aux contribuables québécois, il vous reste quelle crédibilité? Les dépassements de coûts pour le métro de Laval? La liste est longue, on pourrait tous les nommer.
Mais, dans l'attitude et le vocabulaire qu'utilise le chef de l'opposition, il parle de terreur. Aujourd'hui, André Pratte, dans le journal La Presse, dit ceci: «Beaucoup de gens, notamment au Parti québécois, conviennent que des changements doivent être apportés pour que l'État québécois soit plus efficace et moins coûteux. En montant tout de suite sur leurs grands chevaux, les syndicats et autres lobbies se font les défenseurs du statu quo à tout prix, d'une malsaine glaciation bureaucratique.» Ce n'est pas juste un retour en arrière, c'est l'époque glaciaire où le chef de l'opposition voudrait nous ramener. Puis, le 14 avril dernier, la population du Québec a décidé du contraire.
Le Président: En question principale, M. le député de Richelieu. M. le député.
Procédure d'appel d'offres
auprès de firmes-conseils en vue
de la restructuration de l'État
M. Sylvain Simard
M. Simard: Oui, M. le Président. Est-ce qu'il n'y a pas quelques problèmes ? et plusieurs s'en inquiètent, même à l'OCDE ? est-ce qu'il n'y a pas des problèmes éthiques lorsque le gouvernement embauche à titre de consultants des firmes qui viendront par la suite soumissionner sur des appels d'offres? Est-ce que la présidente du Conseil du trésor ou son personnel ont rencontré certaines des firmes qui sont soumissionnaires, actuellement, pour les juteux contrats pour l'élaboration de la réingénierie? Quels critères l'ont amenée à rencontrer certaines de ces firmes et à ignorer les autres? Quelles garanties avons-nous que ces firmes ne seront pas candidates pour les nombreux projets de privatisation issus de leurs conseils?
Le Président: Alors, Mme la présidente du Conseil du trésor, la parole est à vous.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Je suis un peu étonnée que le député de Richelieu m'interpelle sur le sujet, lui qui a lui-même recommandé à un membre de son comté d'aller consulter Oxygène 9 pour avoir un juteux contrat du gouvernement précédemment et qui a donné naissance à la loi sur le lobbyisme, M. le Président. Alors, c'est ça...
Des voix: ...
Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.
Mme Jérôme-Forget: M. le Président, j'espère que le député de Richelieu a quelque mémoire, qu'il se souvient de tout ce tralala qu'on a connu alors qu'on était de l'autre côté et que lui-même conseillait à tout le monde d'aller consulter les amis du Parti québécois.
Non, M. le Président, nous, on ne procède pas comme ça. La transparence, la limpidité, c'est à la base de ce que nous allons faire comme démarches. J'ai fait appel à des firmes. Il y en a 44 qui ont soumissionné, 44 qui ont soumissionné. Je peux vous dire que, M. le Président, nous allons être d'une grande éthique et d'une grande clarté dans toute cette démarche.
Le Président: Un petit rappel ici: il faut faire attention à l'article 35.6° .
En question additionnelle, M. le député de Richelieu.
M. Sylvain Simard
M. Simard: Oui. M. le Président, très rapidement, puisqu'on n'a eu aucune réponse, hein, c'est... Insulter, ce n'est pas répondre. Est-ce que la présidente du Conseil du trésor ou son personnel ou des membres du bureau du premier ministre ont rencontré certaines des firmes ? qui s'en vantent publiquement ? qui ont présenté des soumissions pour les juteux contrats pour l'élaboration de la réingénierie de l'État du Québec?
Est-ce que... Quelle garantie cette Chambre a-t-elle que ces firmes ne seront pas candidates pour les nombreux projets de privatisation qui seront issus de leurs judicieux conseils?
Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: M. le Président, nous avons rencontré plein de gens, plein de gens qui venaient de tous les milieux; oui, des firmes qui sont venues nous rencontrer, mais il y en a 44, et je peux vous dire, M. le Président, que le député de Richelieu devrait savoir qu'il y a une culture au Conseil du trésor et que les fonctionnaires qui sont en place, qui sont toujours en place et qui sont là, vont faire leur travail de façon professionnelle. Et je suis outrée de voir le député de Richelieu s'interroger sur les façons de faire du Conseil du trésor, alors que je n'ai rien à faire pour choisir, pour choisir quelque entreprise.
Peut-être, par ailleurs, que, si je lui parlais de GIRES, hein? Peut-être qu'on pourrait lui parler de GIRES, où il s'est perdu des centaines de millions de dollars; peut-être que ça lui dirait quelque chose, parce que c'est la façon avec laquelle vous avez travaillé.
Des voix: ...
n(14 h 40)nLe Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! En question principale, Mme la députée de Taillon.
Financement des groupes d'alphabétisation
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Le gouvernement, dans son opération réingénierie-compressions, a fait d'autres victimes. En effet, les groupes d'alphabétisation ont vu leurs subventions retardées de façon importante, et, entre-temps, ces groupes connaissent des difficultés majeures. Certains employés n'ont pas été payés. Les groupes fonctionnent sur leur marge de crédit, certains même sur leur marge de crédit personnelle. Deux groupes ont même dû fermer leurs portes temporairement. Et, bien sûr, les intérêts encourus sur les emprunts devront être remboursés à même la subvention reçue en retard, M. le Président.
Est-ce que le ministre de l'Éducation peut nous dire à quelle hauteur il dédommagera les groupes d'alphabétisation pour les problèmes administratifs encourus par les retards et l'inefficacité du Conseil du trésor?
Le Président: Alors, M. le ministre de l'Éducation.
M. Pierre Reid
M. Reid: Merci, M. le Président. Je désire souhaiter, parce que je n'ai pas pu le faire hier, à tous les membres de cette Assemblée, de tous partis, de tous côtés, une bonne session parlementaire, et en particulier à la députée de Taillon...
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre, vous n'avez pas la parole, laissez votre collègue; c'est à lui que la question est adressée. M. le ministre, si vous voulez poursuivre.
M. Reid: M. le Président, je pense qu'on associe à tort la question de la réingénierie, ici, avec des changements qui ont été apportés, des changements importants qui ont été apportés par le gouvernement précédent dans l'organisation de l'aide aux organismes, en particulier les organismes d'alphabétisation et de décrochage scolaire, et tout ça, et que la réingénierie est une réflexion importante.
En particulier en éducation, c'est une réflexion qui regarde vers l'avenir, en s'assurant que le système d'éducation québécois, qui existe dans sa forme actuelle depuis 40 ans, depuis qu'il a été conçu par le rapport Parent, a rendu des services énormes. Mais la réingénierie vise d'abord et avant tout à recentrer l'éducation sur l'étudiant et à s'assurer que, les 40 prochaines années, le système d'éducation rende les mêmes services qu'elles ont rendu depuis 40 ans. C'est le véritable objectif de la réingénierie. Il ne s'agit pas du tout de ce qui s'est passé dans le gouvernement précédent.
La situation que nous avons connue, M. le Président, et qu'ont connue les organismes qui ont attendu effectivement pour recevoir des fonds, fonds qui ont été débloqués, je voudrais assurer la députée de Taillon, les dernières autorisations ont été données hier et, comme on dit, le chèque est dans la poste ? en fait, il s'agit d'une question de jours, maintenant ? cette question-là résulte... En fait, les difficultés, oui, résultent... Les difficultés qui ont été connues résultent d'une réorganisation totale par le gouvernement précédent, qui n'est pas une mauvaise réorganisation. Changer les choses ne veut pas forcément dire que c'est mauvais. Mais ces résultats-là font en sorte que les autorisations nécessaires, selon les règles habituelles du gouvernement, ont pris du temps parce que des choses avaient été changées durant l'année dernière. Ce problème-là est terminé, M. le Président.
Le Président: En question additionnelle, Mme la députée de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre, au lieu de défendre le Trésor vis-à-vis les groupes d'alphabétisation, ne devrait pas faire l'inverse, M. le Président, et défendre les groupes d'alphabétisation vis-à-vis les contraintes imposées par le Conseil du trésor? Et j'ai bien compris qu'il n'a pas répondu à la question, puisqu'il ne dédommagera pas les groupes qui subissent actuellement des préjudices, M. le Président?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Pierre Reid
M. Reid: M. le Président, s'il fallait penser dédommagement, il faudrait penser aux torts, et les torts appartiennent peut-être à ceux qui ont fait des changements et qui les ont faits de façon tardive et complexe; il s'agit plutôt du gouvernement précédent. Plutôt que de parler de torts, M. le Président, nous avons augmenté les sommes disponibles à ces organismes par rapport à ce qu'il y avait dans le gouvernement précédent.
Le Président: En question principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Financement de logements avec services
du programme AccèsLogis
Mme Louise Harel
Mme Harel: Le journal La Presse révélait dimanche dernier qu'une jeune femme de 31 ans était forcée d'habiter dans un CHSLD où la moyenne d'âge est de 80 ans. Atteinte de dystrophie musculaire et propriétaire d'une petite entreprise d'infographie, Marie-Claude Lépine, qui a d'ailleurs écrit au premier ministre pour lui demander son aide, réclame la réalisation des 10 logements pour jeunes handicapés, planifiée depuis des mois par les partenaires gouvernementaux, municipaux et communautaires de Lanaudière. Il s'agit d'un projet du programme AccèsLogis de la Société d'habitation du Québec, réalisé à une condition: garantir des services de maintien à domicile pour un montant annuel de 300 000 $. En avril dernier, la Régie régionale de Lanaudière disait oui. Ils se sont ravisés depuis. Avec le changement de gouvernement, faute d'argent, ils n'ont plus les fonds suffisants pour garantir les services à domicile.
Ma question au ministre de la Santé et des Services sociaux: Pourquoi le ministre a-t-il consacré, au mois d'août dernier, 4 millions de dollars pour lancer des appels d'offres pour privatiser la construction des nouvelles places en CHSLD, alors que des dizaines de projets de partenariat avec la SHQ, à bien meilleur coût que l'hébergement en institution, sont mis en péril ou déjà abandonnés faute de fonds suffisants pour des soins à domicile?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: D'abord, bien sûr, M. le Président, nous espérons tous que l'état de cette personne va s'améliorer et qu'elle recevra les services auxquels elle s'attend. Parce que, plus qu'un crime, le gouvernement précédent a commis deux fautes en santé, et je pense que je vais prendre l'habitude chaque jour de les répéter: un, l'arrêt presque total du financement du réseau entre 1994 et 1997 ? on est encore aujourd'hui à rattraper les dégâts que ça a causés; deux, les pénuries d'infirmières et de médecins suite aux mises à la retraite des années quatre-vingt-dix, dont on aura jusqu'à 2010 pour se remettre, M. le Président.
Alors, quand...
Des voix: ...
Le Président: M. le ministre.
M. Couillard: Alors, quand j'entends l'opposition nous dire que nous subordonnons, soi-disant, nos politiques à des impératifs budgétaires, quels étaient les impératifs pour mettre à la retraite 1 500 médecins et 4 000 infirmières, M. le Président?
Le Président: En question additionnelle, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux est informé ou conscient qu'il n'est pas dans l'opposition et qu'il doit répondre aux questions? Alors, je la lui répète, parce que je la lui répète au nom également de Marie-Claude Lépine, mais je la lui répète au nom également de centaines et de milliers de personnes, jeunes personnes handicapées, ou déficients intellectuels, ou en grande difficulté et qui attendent les fonds suffisants pour que leurs projets d'hébergement, autres qu'en institution soient acceptés par la Société d'habitation du Québec.
Alors, M. le ministre: Pourquoi abandonner des projets concrets de partenariat en hébergement plus efficaces, moins coûteux qu'une place en CHSLD qui coûte 58 000 $ annuellement?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: M. le Président, d'abord, rétablissons les faits. Notre gouvernement a fait plus en investissements récurrents cette année que le gouvernement précédent depuis 1999, en hébergement et en soins à domicile, et les chiffres le démontrent très bien.
Maintenant, l'exemple dont parle... les projets dont parle notre consoeur la députée de d'Hochelaga-Maisonneuve, il ne s'agit pas de construire des places en CHSLD, c'est l'opposé que nous voulons faire, nous voulons sortir les gens du milieu institutionnel, bâtir des milieux de vie...
Des voix: ...
Le Président: La question a été posée. La réponse...
M. Couillard: ...bâtir des milieux de vie, M. le Président, où les patients et les personnes qui perdent leur autonomie verront leurs services personnels financés et donnés par le réseau public. Je l'ai expliqué plusieurs fois et je le redirai chaque fois qu'il le faudra.
Maintenant, si on veut fermer la porte à de l'aide extérieure à l'État, j'ai ici trouvé par hasard, au cours de mes lectures vespérales, un extrait d'un discours inaugural de M. Parizeau, en 1994, dont j'aimerais vous citer le dernier paragraphe, 1994: «Lors de notre dernier passage au pouvoir, il nous semblait que l'État devait être l'outil privilégié, qu'il fallait en certains cas en étendre la présence, et nous l'avons fait souvent avec succès. Mais nous pensons aujourd'hui que, là où l'État agit seul, il agit mal.»n(14 h 50)nLe Président: En question principale, Mme la... En question complémentaire, Mme la députée de Taschereau.
Mme Agnès Maltais
Mme Maltais: M. le Président, est-ce que le ministre des Affaires municipales responsable de l'habitation... peut-il nous dire combien de logements avec soutien, maintien à domicile ? je parle du programme AccèsLogis, volet 3, qu'on a nommé ? combien sont menacés parce que le ministre de la Santé n'a pas assuré le financement nécessaire au maintien à domicile? C'est ça, la question.
Le Président: Alors, M. le ministre responsable de l'habitation et ministre des Affaires municipales.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: M. le Président, notre collègue est bien au courant que la situation qui a été décrite dans la question initiale, qui amène l'additionnelle, n'est pas une situation nouvelle. Du temps du précédent gouvernement, ces questions-là et ces cas-là étaient... se voyaient en nombre innombrable. Ce que le ministre de la Santé vient de dire il y a quelques instants ? à moins que vous ayez manqué ce qu'il a dit ? c'est qu'il travaillait à ce que nous puissions trouver les solutions alternatives de manière à ce qu'il n'y ait pas toujours comme solution unique le recours aux CHSLD, et c'est dans ce sens-là que nous travaillons. D'ailleurs, si vous vous inquiétez d'AccèsLogis, sans doute avez-vous manqué le fait que nous avons accéléré la livraison des logements.
Le Président: En question additionnelle, Mme la députée de Taschereau.
Mme Agnès Maltais
Mme Maltais: Combien de logements, M. le ministre?
Le Président: Madame, pourriez-vous répéter votre question?
Mme Maltais: J'ai demandé: Combien de logements, M. le ministre?
Le Président: Alors, M. le ministre des Affaires municipales.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Oui. M. le Président, je suis bien prêt à fournir l'ensemble des statistiques que ma collègue demande dès que je le pourrai. Mais, encore une fois, il faudra se référer ici aux statistiques concernant l'ensemble des logis d'AccèsLogis, et, à cet égard-là, je vais fournir ces statistiques-là.
Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.
Résultats attendus de la restructuration de l'État
M. Bernard Landry
M. Landry: M. le Président, le premier ministre, précédemment dans cette séance, a éludé assez maladroitement mes questions sur l'économie, auxquelles il voulait visiblement échapper pour parler de réingénierie, alors que c'est hier qu'il aurait dû répondre là-dessus, puis il n'a pas répondu, et la présidente du Conseil du trésor encore moins.
Je l'entendais vanter les mérites du Conseil du trésor. Elle a dit il y a quelques jours que l'État ne faisait rien de bien, et, ce faisant, elle a insulté des dizaines et des dizaines de milliers d'hommes et de femmes qui travaillent pour l'État, qui font leur travail d'une façon extraordinaire, qui ne sont pas si bien payés qu'on le dit et qui sont motivés par le service public. J'ai hâte de voir ce que cette personne conservatrice pourra donner quand elle sera, elle, motivée par le service public.
Mais, en attendant, tout le monde est dans la perplexité ? c'est le mot faible ? ou l'angoisse quant à cette soi-disant réingénierie. Même le mot n'est pas dans le dictionnaire; il faut le faire! Il y en a un autre qui nous a parlé que ce n'était pas «réingénierie», c'était «rafraîchissement». Il y a des facultés d'ingénierie, mais je ne connais pas de faculté de rafraîchissement encore.
Alors, les gens... Écoutez, là, c'est sérieux, M. le Président. Les gens sont angoissés, voudraient savoir ce que ce mot, qui se retrouve sur les lèvres de tous les ministres avec différentes variantes, veut dire. Mais pas rien que le mot, la chose. Si c'est pour faire une vaste opération qui va modifier profondément l'État... Et il doit l'être dans certains domaines, tout le monde le sait. On a déjà appliqué...
Des voix: ...
M. Landry: Ah oui! Bien! On a déjà appliqué le rapport Facal, nous, il y a déjà quelques années...
Le Président: Si vous voulez poser votre question, M. le chef de l'opposition.
M. Landry: Alors, ma question, elle est simple, et j'espère, là, qu'elle va déboucher sur d'autre chose que sur des échappatoires, et sur du concret.
La population du Québec... l'opposition officielle, parce que c'est son rôle, mais la population et ses divers segments voudraient savoir c'est quoi, la réin-génierie, pourquoi, ça va rapporter quoi, ça va coûter quoi, qui est-ce que ça va priver de services publics, s'il y a des compressions sauvages et des coupures.
Alors, ma question au premier ministre...
Des voix: ...
M. Landry: Je l'ai, ma question.
Le Président: C'est un peu long aujourd'hui. Alors, je vous demanderais de poser votre question immédiatement.
M. Landry: Oui. Mais, pour être sûr que la question serait courte, je vais lire le texte: Le premier ministre va-t-il démontrer sa bonne volonté, faire un pas pour corriger son manque total de transparence, dans sa fameuse réingénierie, et avoir le courage de se présenter en commission parlementaire pour qu'on en parle pour vrai?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Jean Charest
M. Charest: M. le Président, je ne veux pas manquer l'occasion de prendre acte du pas en avant fait par le chef de l'opposition officielle aujourd'hui, parce que, au-delà de tous nos débats, là, il s'est quand même dit quelque chose d'important dans le long préambule ? qu'on a eu beaucoup de difficultés à suivre, soit dit en passant. C'est un effort d'attention que d'essayer de... entre les mots «et rafraîchissant», puis finalement arriver à sa question écrite.
Mais...
Des voix: ...
Le Président: M. le premier ministre.
M. Charest: Ça me rappelle des souvenirs de débats, effectivement, mais je veux...
Des voix: ...
Le Président: M. le premier ministre.
M. Charest: Mais il y a un pas qui a été franchi aujourd'hui, parce que le chef de l'opposition officielle vient de dire qu'il est d'accord avec la modernisation de l'État. Alors, j'en prends acte. C'est la deuxième journée seulement que nous siégeons, et je pense que tout le Québec aujourd'hui, grâce à la déclaration du chef de l'opposition officielle, vient de faire un pas en avant. Je comprends que l'ensemble des députés à l'Assemblée nationale du Québec acceptent le fait qu'il doit y avoir une modernisation de l'État, M. le Président.
Le Président: Alors, ceci met fin à la période...
Une voix: ...
Le Président: Un petit 30 secondes, rapidement.
M. Charest: Rapidement. Parce que le chef de l'opposition soulève des questions d'économie, je vais lui en donner juste quelques données. La demande intérieure, au Québec, est assez forte depuis le début de l'année: hausse de 4,1 % pour les sept premiers mois de 2003 comparativement aux sept premiers mois de 2002; les ventes au détail connaissent une croissance: hausse de 4,8 % pour les sept premiers mois de 2003 versus les sept premiers mois de 2002; la construction résidentielle est en hausse: hausse de 23,1 % pour les huit premiers mois de l'année comparativement aux huit premiers mois de 2002. S'il y a eu des pertes d'emplois au Québec depuis le début de l'année 2003, 80 % de ces pertes d'emplois là ont eu lieu alors que le chef de l'opposition était au gouvernement.
Il demande de quel endroit je tiens mon mandat. Je lui rappelle que, le 12 septembre 2002, on a rendu public un plan où on dit ceci: «Un gouvernement du Parti libéral du Québec reverra le rôle, le mandat de tous les ministères, organismes du gouvernement et les sociétés d'État afin d'en réduire le nombre.» On a annoncé plusieurs mois à l'avance ce qu'on avait l'intention de faire, et les Québécois nous ont appuyés.
Le Président: Alors, ceci met fin à la période des questions et réponses orales.
Des voix: ...
Votes reportés
Motion proposant d'entendre
le premier ministre sur son projet
de réingénierie de l'État québécois
Le Président: S'il vous plaît! Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le député de Richelieu, débattue aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Cette motion se lit comme suit:
«Que la commission des institutions se réunisse d'urgence afin d'entendre le premier ministre du Québec sur son projet de réingénérie de l'État québécois.» Est-ce que, MM. les whips, ça va? Ça va.
n(15 heures)nLe Président: Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe: M. Landry (Verchères), M. Boisclair (Gouin), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Marois (Taillon), M. Charbonneau (Borduas), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Legault (Rousseau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Bertrand (Charlevoix), M. Létourneau (Ungava), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Côté (Dubuc), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Jutras (Drummond), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Caron (Terrebonne), Mme Charest (Rimouski), M. Valois (Joliette), M. Legendre (Blainville), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Bédard (Chicoutimi), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Richelieu), Mme Lemieux (Bourget), M. Deslières (Beauharnois), M. Cousineau (Bertrand), Mme Richard (Duplessis), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Beaudoin (Mirabel), M. Turp (Mercier), M. Bourdeau (Berthier), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Maltais (Taschereau), M. Bouchard (Vachon), M. St-André (L'Assomption), Mme Papineau (Prévost), M. Thériault (Masson), M. Tremblay (Lac-Saint-Jean), Mme Champagne (Champlain).
M. Dumont (Rivière-du-Loup), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Grondin (Beauce-Nord), Mme Roy (Lotbinière).
Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), M. Dupuis (Saint-Laurent), M. Séguin (Outremont), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), M. Bellemare (Vanier), M. Couillard (Mont-Royal), M. Reid (Orford), M. Audet (Laporte), Mme Gauthier (Jonquière), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Corbeil (Abitibi-Est), Mme Théberge (Lévis), Mme Normandeau (Bonaventure), M. Pelletier (Chapleau), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), Mme Boulet (Laviolette), M. Fournier (Châteauguay), Mme Beauchamp (Bourassa-Sauvé), M. Mulcair (Chomedey), M. Vallières (Richmond), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Courchesne (Fabre), M. Després (Jean-Lesage), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Brodeur (Shefford), M. Bordeleau (Acadie), M. Cusano (Viau), M. MacMillan (Papineau), Mme Lamquin-Éthier (Crémazie), M. Chenail (Huntingdon), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Ouimet (Marquette), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), Mme Thériault (Anjou), M. Auclair (Vimont), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Descoteaux (Groulx), M. Clermont (Mille-Îles), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Charest (Matane), M. Bouchard (Mégantic-Compton), M. Blackburn (Roberval), M. Bernier (Montmorency), M. Dubuc (La Prairie), M. Gabias (Trois-Rivières), Mme Gaudet (Maskinongé), Mme Hamel (La Peltrie), Mme L'Écuyer (Pontiac), Mme Legault (Chambly), M. Lessard (Frontenac), M. Moreau (Marguerite-D'Youville), Mme Perreault (Chauveau), M. Paquin (Saint-Jean), M. Paquet (Laval-des-Rapides), M. Morin (Montmagny-L'Islet), M. Rioux (Iberville), M. Tomassi (LaFontaine), Mme Vien (Bellechasse).
Le Président: Y a-t-il des abstentions? Aucune abstention. M. le secrétaire général.
Le Secrétaire: Pour: 45
Contre: 67
Abstentions: 0
Le Président: La motion est rejetée.
Motions sans préavis
Motions sans préavis. M. le député de Johnson. M. le député de Johnson.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Nous en sommes aux motions sans préavis. M. le député de Johnson.
Féliciter le lanceur Éric Gagné d'avoir établi
une marque des ligues majeures de baseball
M. Boucher: M. le Président... M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale félicite l'athlète québécois Éric Gagné pour avoir établi une marque des ligues majeures de baseball en devenant le premier releveur de l'histoire à sauvegarder 55 parties consécutives au cours d'une même saison.»Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Consentement. M. le député de Johnson.
M. Claude Boucher
M. Boucher: Alors, M. le Président, c'est le 2 septembre 2003, jour de mon anniversaire de naissance, mais je n'étais pas encore critique... oui, je l'étais effectivement...
Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, s'il vous plaît! On va juste donner deux secondes pour que ceux qui ont à vaquer à d'autres affaires puissent le faire. Mais faites-le rapidement et en silence, s'il vous plaît! Alors, s'il vous plaît!
Alors, M. le député de Johnson, si vous voulez reprendre, s'il vous plaît.
M. Boucher: Les estrades devraient se remplir, M. le Président, et non pas se vider. Alors, M. le Président, c'est le 2 septembre 2003 que le releveur québécois Éric Gagné a établi une marque de baseball dans les ligues majeures, en sauvegardant une 55e partie consécutive. Il battait ainsi un record établi par Tom Gordon des Red Sox de Boston, en 1998-1999.
Cet athlète de 27 ans, originaire de Mascouche, évolue au sein des Dodgers de Los Angeles depuis déjà 1999. Il avait auparavant représenté le Québec au Championnat canadien junior de baseball, en 1994 et 1995, et a représenté le Canada au Championnat du monde junior, en 1993-1994.
À son arrivée dans les ligues majeures...
Le Vice-Président (M. Sirros): Je m'excuse encore une fois, M. le député, je m'excuse véritablement. Est-ce que je peux demander à ceux qui ont des conversations privées à tenir à les tenir soit à l'extérieur ou à un autre moment? Alors, s'il vous plaît! M. le député, s'il vous plaît! Alors, s'il vous plaît, également, de l'autre côté. Alors, s'il vous plaît, M. le député de Johnson.
M. Boucher: Je trouve ça triste, M. le Président que, de l'autre côté de la Chambre, on ne m'écoute pas. Parce que je vis ici, à Québec, à mon appartement, j'héberge un des lanceurs de la ligue de baseball majeure, Éric Cyr, qui lance pour les Padres de San Diego, et qui est le conjoint de ma nièce qui est sur l'équipe canadienne de ski alpin. Et ils sont à la télévision en train de voir ce spectacle de gens qui n'ont pas de considération pour un joueur d'un tel talent qui est Éric Gagné. Alors, je fais appel à leur compréhension et à leur écoute.
Je reprends donc. À son arrivée dans les ligues majeures, il a été nommé meilleur nouveau lanceur d'impact pour l'an 2000 par Baseball America. Depuis ce temps, il établit sa marque d'excellence au sein des Dodgers de Los Angeles. C'est un ambassadeur fantastique pour la nation québécoise. C'est un homme qui disait, lorsqu'il a établi son record: «Confidence is everything in baseball.» Il parlait à un commentateur américain. «C'est une question de confiance, disait-il. Quand je monte au monticule, si mon coach a confiance en moi, alors je reprends davantage confiance en moi.» Et c'est de cette façon qu'il a réussi, avec l'entraînement évidemment, à obtenir la confiance qu'il fallait pour qu'il réussisse.
Les experts chroniqueurs sont unanimes au sujet du talent extraordinaire de Gagné. En fait, durant cette saison, 55 % de ses retraits l'ont été sur des prises. En 77 sorties, il a lancé 82 manches et un tiers, il a réussi 137 retraits sur des prises, il n'a donné que 37 coups sûrs, 20 buts sur balle et 12 points, dont 11 mérités.
Il y a 30 équipes dans les ligues majeures, aux États-Unis, et, bien sûr, elles ont chacune ce qu'on appelle dans le baseball un «closer». Il est un de ces 30 «closers»; il est le meilleur. Il est certainement en liste pour remporter le prestigieux trophée Cy Young remis au meilleur lanceur des ligues majeures. Imaginez la gloire pour un joueur québécois, dans un sport où les Québécois sont historiquement si peu représentés.
Je vous le dis, M. le Président, et j'en suis témoin à chaque jour, parce que, je le disais tout à l'heure, je vis avec un de ces lanceurs des ligues majeures, ici, à Québec, que ça exige un entraînement, un courage et une discipline extraordinaires, autant dans la musculation que dans l'entraînement, le conditionnement physique, et ça exige un état de santé formidable. Et je le vois à chaque jour, ces jeunes travailler si fort pour atteindre ces degrés de performance.
Alors, en mon nom et au nom de tous les parlementaires, je tiens à féliciter Éric Gagné pour sa persévérance et son adresse. Souhaitons-lui évidemment une longue carrière marquée par la victoire et le trophée Cy Young. Merci.
n(15 h 10)nLe Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le député de Johnson. M. le ministre des Sports et du Loisir.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup de plaisir que je joins ma voix à celle de mon collègue pour saluer les exploits d'Éric Gagné. Je ne referai pas la liste de ses états de service, ayant participé au Championnat du monde junior déjà dans le passé, mais je voudrais relever ceci, cependant. Il a été le choix de 30e ronde des White Sox de Chicago, en 1994. Il a signé comme agent libre avec Los Angeles en 1995, et on est maintenant en 2003. Ce n'est pas juste cette année dont on parle de lui, il a déjà été performant un peu avant.
Mais ce que je veux souligner, c'est que, ce qu'il nous démontre, c'est d'abord et avant tout une qualité essentielle pour l'ensemble des citoyens: la persévérance. Il a commencé tôt, il a gravi chacun des échelons, passé chacune des étapes pour se rendre à l'étape ultime, la reconnaissance de ses pairs. Ceux qui sont les experts, ceux qui jouent avec et contre lui reconnaissent non seulement un talent indéniable, «le» talent, le talent parmi tous les talents.
Et c'est un Québécois qui n'hésite pas à revenir au Québec propager l'exemple qu'il démontre; il n'est pas le seul athlète québécois qui a cette générosité. Mais je pense que je peux profiter de la motion de mon collègue pour remercier Éric Gagné de cette générosité et remercier en même temps tous les athlètes qui sont des exemples pour notre jeunesse ? et pas juste les jeunes très jeunes, les jeunes moins jeunes qui ont encore besoin d'exemples ? qu'il est possible de s'activer, qu'il est possible d'être en meilleure santé lorsqu'on fait un peu d'exercice. Et il est clair que des exemples comme celui d'Éric Gagné, pour la jeunesse d'abord, bien sûr, pour s'assurer qu'on peut encore avoir le goût de participer à un sport quand on voit un modèle qui performe, c'est souvent comme ça qu'on s'engage dans une activité.
Mais, plus profondément et, je pense, avec encore plus de valeur, le fait qu'on retrouve là un individu qui a décidé d'aller au bout de ses rêves malgré les embûches, ce n'est pas toujours évident. Notre collègue disait, à juste titre, combien il y a des efforts qui doivent être faits pour devenir performant. Mais, des fois, il y a aussi des blessures, des fois il y a aussi des balles qu'on échappe, et, des fois, il y a un entraîneur qui n'est pas toujours, durant toutes les années, si généreux dans sa confiance; il faut presque seul décider de passer l'étape au-dessus, d'aller plus loin encore.
M. le Président, c'est pour ça que je suis heureux de joindre ma voix à celle de mon collègue dans une motion tout à fait justifiée pour saluer tous ceux qui donnent des exemples à notre jeunesse et, dans ce cas-ci, un exemple fondamental. Ce n'est pas juste... La persévérance, ce n'est pas juste pour le sport, c'est pour la vie de tous les jours, c'est pour l'école pour ces jeunes.
D'ailleurs, Éric Gagné est généreux, il retourne vers les écoles, il va voir les jeunes comme beaucoup d'autres athlètes, et je pense qu'on doit féliciter tous ceux qui ont cette générosité de dire: Ce que j'ai... comme modèle, ce que je suis allé chercher à force de travail, de labeur, je l'offre aux autres. Et retenons-le, bien sûr, pour les jeunes, mais, nous aussi, profitons-en, nous aussi, dans notre travail: se souvenir que c'est en étant persévérants, intègres, en allant au bout de nos convictions qu'on peut faire le meilleur.
Je suis sûr que, pour les parlementaires de cette Assemblée, peu importe de quel côté nous soyons, nous avons l'honnêteté de nos convictions, nous voulons aller au bout des choses. On n'est peut-être pas toujours d'accord, on n'est peut-être pas toujours dans la même équipe, mais on fait ce qui doit être le mieux, être un modèle pour tous ceux parmi nos concitoyens... Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Beauce-Nord.
M. Janvier Grondin
M. Grondin: Alors, merci, M. le Président. C'est sûr que, en passant le troisième, je ne veux pas répéter ce que mes confrères ont dit au sujet de M. Gagné. Je crois que ce qu'il faut en retenir, c'est que ce n'est pas une mince affaire de sauvegarder 55 parties d'affilée. Si vous suivez le baseball, vous savez que les Expos n'ont pas de lanceur releveur de ce calibre. M. Gagné n'a pas perdu de partie depuis le 26 août 2002. Quand on parle de constance, on en a un bel exemple.
Je crois que ce qu'on peut retenir, c'est que M. Gagné est un bel exemple pour l'ensemble de notre jeunesse québécoise. Il est l'exemple parfait qu'avec beaucoup de volonté et de coeur on peut atteindre les plus hauts niveaux n'importe où sur la planète. Je veux dire aux jeunes Québécoises et Québécois: Visez haut, parce qu'il n'y a rien que vous ne puissiez faire, que ce soit ici, aux États-Unis, en Europe, en Asie, n'importe où. Encore, je me joins... ma formation politique se joint à toute l'Assemblée nationale pour vous dire: On félicite M. Gagné de sa belle performance, et qu'il continue, c'est un bel exemple pour notre jeunesse. Merci beaucoup.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci beaucoup, M. le député. Alors, cette motion est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Oui, M. le Président. Il y a d'autres motions sans préavis, mais, à ce stade-ci, il y aurait consentement pour que je puisse donner une partie des avis touchant les travaux des commissions, avec votre permission.
Le Vice-Président (M. Sirros): Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 35 du règlement? Consentement. Alors, M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Il y aurait une entente à l'effet que je puisse donner les avis touchant les travaux des commissions qui vont siéger avec audition de gens. Ça va?
Avis touchant les travaux des commissions
Le Vice-Président (M. Sirros): Il y a effectivement consentement? Consentement. Alors, M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Alors, M. le Président, conformément à ce consentement-là, j'avise cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du projet de loi n° 9, Loi concernant la consultation des citoyens sur la réorganisation territoriale de certaines municipalités, aujourd'hui, à compter de maintenant jusqu'à 17 heures, et jeudi, le 23 octobre, de 9 h 30 à 11 h 5, à la salle du Conseil législatif;
Que, d'autre part, la commission de la culture poursuivra les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du document intitulé Une réforme de l'accès à l'information: le choix de la transparence, aujourd'hui, de 16 heures à 18 heures, et jeudi, le 23 octobre, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.
Motions sans préavis
Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le leader. Ces avis étant donnés, nous revenons aux motions sans préavis, et je suis prêt à reconnaître Mme la ministre de la Culture et des Communications.
Souligner la Semaine des bibliothèques publiques
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Permettez-moi de demander le consentement de cette Assemblée pour déposer une motion soulignant la cinquième édition de la Semaine des bibliothèques publiques, placée sous le thème Excès de plaisir.
Le Vice-Président (M. Sirros): Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Mme la ministre.
Mme Line Beauchamp
Mme Beauchamp: J'ouvre les guillemets: «Un livre, écrivait Réjean Ducharme dans son roman L'Avalée des avalés, est un monde, un monde fait, un monde avec un commencement et une fin. Chaque page d'un livre est une ville; chaque ligne est une rue; chaque mot est une demeure.» Le livre est à la base de notre culture et il demeure, malgré les avancées technologiques des dernières décennies, l'instrument par excellence de la conservation et de la transmission des connaissances au sens le plus large qui soit. C'est dans le livre qu'est consignée toute la pensée humaine; il en est la mémoire vivante.
La mission des bibliothèques publiques est de préserver cette mémoire et surtout de la rendre accessible à l'ensemble de la population. Elles jouent, dans ce sens, un rôle de tout premier plan dans la construction et dans l'évolution de la société québécoise, et c'est ce rôle que vient souligner la Semaine des bibliothèques en invitant la population à investir ces lieux de culture si conviviaux, à découvrir les nombreux services qui y sont offerts et à prendre bien sûr l'habitude d'y revenir.
Je souligne au passage que l'aide aux bibliothèques publiques québécoises a été légèrement majorée en 2003 et que le total des investissements publics dépasse maintenant les 24 millions de dollars. La somme se répartit ainsi: environ 15 millions pour les bibliothèques publiques autonomes; plus de 8 millions, environ 8,5 millions, pour les CRSBP, qui regroupent plus de 750 petites bibliothèques; et également 500 000 $ pour deux bibliothèques spécialisées.
Je voudrais rappeler que le gouvernement précédent a revu les critères d'attribution des sommes, des subventions aux municipalités. Cela explique que, ces jours-ci, parce que ces changements dans l'attribution des sommes aux bibliothèques publiques ont été étalés sur deux ans, donc ces jours-ci les municipalités reçoivent des subventions, la plupart à la hausse, parfois, certaines, à la baisse. C'est que cette aide gouvernementale est dorénavant versée selon des critères qui visent à assurer une meilleure équité dans l'attribution des subventions en favorisant davantage les municipalités les moins riches. Le calcul se fait maintenant en fonction de la population et de la richesse foncière des municipalités; on y ajoute une bonification là où il y a une gratuité de services.
À cet égard, je me permets de saluer l'initiative des bibliothèques qui accueillent gratuitement leurs abonnés. Cette mesure, qui touche maintenant 71 % de la population des municipalités québécoises où on retrouve des bibliothèques publiques autonomes, reste la meilleure invitation faite aux citoyens et aux citoyennes.
n(15 h 20)n Les bibliothèques affiliées aux CRSBP font aussi leur large part, puisque plus de 80 % d'entre elles n'imposent aucune tarification à leur clientèle. Je me permets ici de redire combien j'admire le travail accompli par les CRSBP. Ces centres de services font une oeuvre culturelle de première importance auprès de communautés qui vivent dans les municipalités de petite taille et dans toutes les régions du Québec.
Je m'en voudrais également de ne pas mentionner l'effort des municipalités qui voient à l'implantation et au développement du service de bibliothèque sur leurs territoires. Je tiens à les remercier de leur précieuse collaboration et, en particulier, du souci constant accordé à l'achat de livres et de périodiques d'ici, québécois, par leurs bibliothèques. Selon les prévisions budgétaires dont nous disposons pour l'année 2003, les 105 bibliothèques publiques autonomes québécoises achèteront pour plus de 7 millions de dollars en livres et périodiques édités au Québec. J'espère de tout coeur pouvoir collaborer avec les municipalités, car il est bien entendu que nous devrons redoubler d'effort pour augmenter non seulement le nombre de documents disponibles dans nos bibliothèques, mais aussi la fréquentation de nos bibliothèques publiques.
Je me souviens en passant que l'une des... bien, la première question posée par mon vis-à-vis le député de Gouin était justement sur cette question du soutien du gouvernement du Québec aux livres, à la lecture, aux bibliothèques, et de nouveau je veux lui réitérer ce souhait, je pense, que je partage avec lui que, d'ici quelque temps, nous soyons capables de se réjouir d'une nouvelle collaboration avec les municipalités, les secteurs privés, le gouvernement du Québec pour rendre encore plus accessibles le livre, la lecture, entre autres dans nos bibliothèques publiques, qui sont vraiment une clé de voûte dans cet accès à la lecture au Québec.
Si chaque habitué d'une bibliothèque arrivait à convaincre une seule personne de suivre son exemple, nous aurions déjà franchi un très grand pas. L'invitation est lancée. Je souhaite que tous les mordus de la lecture s'appliquent à transmettre cette merveilleuse passion à leur entourage. Pour s'assurer que le goût de la lecture sera lui aussi transmis d'une génération à l'autre, la Semaine des bibliothèques publiques vise plus spécialement, cette année, la clientèle des 12-17 ans. Des concours, des prix, des spectacles, des rencontres avec des auteurs, des bédéistes, des comédiens, des chanteurs, toutes sortes d'activités prisées des jeunes sont au programme. Le cinéma, la musique, la mode et l'informatique y sont également à l'honneur. Évidemment, une place de choix est réservée à la littérature, et plus particulièrement à la littérature jeunesse. Le Québec compte plusieurs bons auteurs, et il est primordial que chaque nouvelle cohorte les découvre et les lise.
Le soutien financier à la Semaine des bibliothèques publiques a été confié cette année à la Bibliothèque nationale du Québec. Nous avons voulu, par ce transfert de responsabilité, donner à ce nouvel organisme... Je vous rappelle, la Bibliothèque nationale est maintenant composée de deux entités fusionnées: la Bibliothèque nationale du Québec, mais ce qu'on appelait également auparavant la Grande Bibliothèque du Québec, qui est celle-là qui a vraiment une mission publique. Donc, nous avons voulu confier... donner l'occasion à cette nouvelle entité, la Bibliothèque nationale du Québec, l'occasion de jouer le rôle actif qui est dorénavant le sien, soit de participer au développement de toutes les bibliothèques de toutes les régions du Québec. Vous en rappelez, lorsque nous avons voté ce projet de loi à l'Assemblée nationale, instituant la Grande bibliothèque, c'est un projet de loi qui a été voté à l'unanimité. Il était clair à ce moment que la Grande Bibliothèque, devenue Bibliothèque nationale du Québec, devait devenir un navire amiral destiné à rendre dynamique le domaine du livre et de la lecture et des bibliothèques publiques dans toutes les régions du Québec.
Je voudrais, en terminant, M. le Président, féliciter l'Association des bibliothèques publiques du Québec, qui voit à l'organisation de cette semaine de sensibilisation et de festivités, ainsi que les bibliothécaires et les bénévoles qui animent nos bibliothèques publiques. Je voudrais également profiter de l'occasion pour remercier chaleureusement la comédienne Geneviève Rioux, qui a aimablement accepté d'être la porte-parole de cette cinquième édition de la Semaine des bibliothèques publiques.
Permettez-moi de vous lire quelques mots de son cru, pleins d'intelligence, de fantaisie, de sensibilité, qui disent tout son amour pour les livres ? j'ouvre les guillemets: «J'ai toujours aimé l'expression "plonger dans la lecture", comme si un livre était un sous-marin nous transportant dans le temps et dans le monde, avec ses propres tempêtes, trésors et mutineries. Les bibliothèques en sont les ports d'attache, nous pouvons y décider de notre itinéraire et y planifier nos escapades sans souci de nous ruiner.» Voilà des propos et des images qui vont certainement trouver un écho enthousiaste chez les jeunes. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la ministre. M. le député de Gouin, leader de l'opposition et porte-parole en matière de culture et communications.
M. André Boisclair
M. Boisclair: Oui, M. le Président, à mon tour de joindre ma voix à celle de ma collègue ministre de la Culture, notre collègue de l'Assemblée nationale, pour souligner cette cinquième édition de la Semaine des bibliothèques publiques. Joindre ma voix mais aussi essayer de joindre mon appui au sien pour faire en sorte que la lecture au Québec puisse prendre la place qui lui revient dans les politiques publiques.
Nous aurons au cours des prochains mois ? j'espère pendant pas trop d'années cependant, mais disons dans les prochains mois ? à débattre ensemble, moi dans l'opposition et ma collègue avec les responsabilités ministérielles, nous débattrons des questions culturelles. Et, à l'occasion de l'étude des crédits, je lui ai dit qu'il y a deux choses essentiellement sur lesquelles je souhaite voir le Québec bouger ? il y en a dans bien d'autres domaines, mais en particulier dans le secteur culturel: la question du livre, de la lecture et du soutien aux bibliothèques et, je l'espère aussi, cette réflexion sur la diversité culturelle qui pourra prendre véritablement son envol dans le concert des nations.
J'avais à l'époque rappelé les propos d'une des prédécesseures de l'actuelle ministre, les propos de Mme Bacon qui, lorsqu'elle tirait un peu les grandes lignes de son action politique, faisait le sommaire, la liste des bons coups mais aussi profitait de l'occasion pour identifier quelques regrets de choses qu'elle n'avait pu accomplir peut-être faute de temps ou faute de moyens. Elle plaçait au premier rang la question de la lecture, du soutien au livre et la question des bibliothèques. Et j'invitais tout simplement l'actuelle ministre à reprendre le collier, là où d'autres l'avaient laissé, pour pousser plus loin cette réflexion.
Je veux le dire à ce moment-ci: j'ai la profonde conviction que, de la lecture, naît la liberté. Je pense à ces jeunes dans les écoles de mon propre comté qui n'ont guère accès à des bibliothèques garnies. Il faut faire le tour des écoles primaires de Montréal, de l'est de Montréal, un quartier que la députée... la ministre connaît bien, pour comprendre jusqu'à quel point c'est la désolation. Lorsqu'on rentre dans une école primaire de Montréal et qu'on va visiter la bibliothèque, on a plus souvent l'impression de se retrouver dans un pays en voie de développement que dans une société moderne et intelligente comme la nôtre. Donc, il y a un coup de barre qui doit être donné. Je comprends que tout ça suppose l'injection de sommes neuves et de nouveaux crédits.
Mais la ministre devrait profiter de cette semaine pour affirmer sa conviction. Et j'espère que les intentions de la ministre pourront se traduire par un plan d'action, par des initiatives nouvelles. Ces intentions, bien, elles sont reprises et soutenues par un réseau fantastique d'hommes et de femmes qui travaillent dans ces bibliothèques publiques, dans un réseau aussi d'hommes et de femmes qui, comme bénévoles, soutiennent l'activité des bibliothèques. Je veux les saluer, les remercier aussi pour leur travail.
Je voudrais aussi dire à la ministre qu'un des défis dans le soutien aux bibliothèques sera très certainement de voir dans les règles de financement nouvelles qui sont adoptées comment le principe de la gratuité sera, lui, maintenu. Et ce principe qu'elle a nommé, qu'elle a salué, que je partage, mais un principe qui m'inquiète cependant lorsque je prends connaissance de la documentation qui a été publiée par le gouvernement du Québec sous le titre Le partenariat d'affaires public-privé, recueil de projets, et, sous le chapitre de la culture, il y a deux projets qui sont identifiés: d'abord, la gestion des bibliothèques du Riverside County, en Californie, et la nouvelle bibliothèque de Bournemouth, au Royaume-Uni. Il s'agit de bibliothèques qui, si je comprends le document, ont été construites par, bien sûr, des gens du privé, mais aussi sont la propriété du secteur privé, particulièrement en ce qui a trait aux ressources informationnelles. Mais, dans les deux cas, après vérification, on parle là de bibliothèques qui exigent des frais d'entrée et des frais d'emprunt lorsque les gens se présentent dans les bibliothèques.
Si j'étais ministre de la Culture ou si j'étais à la place de l'actuelle ministre de la Culture, je n'aurais certainement pas pris ces exemples pour vanter les mérites des partenariats public-privé. Et bien des gens au Québec en ce moment se questionnent sur ce que signifiera véritablement, en particulier dans le secteur de la culture, la nature même des partenariats public-privé. Parce qu'il y a une chose qui est bien publique et qui doit demeurer bien publique, c'est bien le soutien aux arts et à la culture, qui repose essentiellement sur la capacité des Québécois et Québécoises de se développer des marges de manoeuvre, de se développer des outils pour faire en sorte que cette culture rayonne non seulement dans le coeur des Québécois, mais qu'elle rayonne aussi sur la scène internationale.
Et je veux aussi dire que la crainte de plusieurs gestionnaires de bibliothèques est d'autant plus vive que les engagements du gouvernement risquent... Et nous le savons tous, et je suis convaincu que c'est la réalité, et les prochains jours et les prochains mois nous l'apprendrons, mais le gouvernement actuel ne pourra pas baisser les impôts de 15 milliards de dollars, comme il promet de faire, sans envoyer une facture aux municipalités.
n(15 h 30)n La ministre se réjouit du dialogue, de l'appui des municipalités, mais il est clair, ça a été créé dans une boule de cristal. Les scénarios au Conseil du trésor, on les a un jour vus. C'est clair qu'il se dessine, dans les grandes manoeuvres du gouvernement et dans la réingénierie, non seulement un transfert de responsabilités, mais, bien avant, un transfert de revenus, un transfert de factures vers le monde municipal. Alors, le monde municipal déjà coincé, comment pourront-ils continuer d'assumer des services que nous souhaitons accessibles comme ils le sont aujourd'hui?
Les libéraux ne s'émeuvent guère des tarifs. Ils nous disent qu'on est les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord, mais jamais je n'ai entendu le premier ministre du Québec se lever puis dire: Je suis fier de voir qu'au Québec les bibliothèques sont d'accès gratuit puis que les Québécois et Québécoises n'ont pas à payer lorsqu'ils vont emprunter des livres à la bibliothèque. La ministre de la Culture s'en réjouit. Je l'appuie. Mais j'essaie simplement de l'aider pour que le premier ministre du Québec aussi entende son message et qu'il soit repris avec beaucoup de fierté par tous les membres du gouvernement.
En somme, réjouissons-nous du travail qui a été fait. Et je pense que, s'il y a des inquiétudes légitimes qu'il faut nommer dans cette Assemblée nationale, je sais aussi qu'il y a beaucoup d'espoir. Puis cet espoir, bien, il est entretenu par le talent des hommes et des femmes qui administrent ces bibliothèques, par les bénévoles qui les animent. Et, si j'avais à faire le pari entre l'espoir à l'ouvrage ou l'inquiétude animée et entretenue par les projets de partenariat public-privé soutenus par la ministre de la Culture ? elle s'en vante, elle en fait une fierté ? moi, bien, M. le Président, je me mets du côté de l'espoir de ces hommes de ces femmes qui travaillent dans ces bibliothèques, qui font un boulot fantastique avec beaucoup d'imagination. J'espère cependant que l'appui et l'enthousiasme qu'on manifeste à leur endroit se traduira aussi par autre chose que des paroles, mais aussi que la ministre prendra ses responsabilités pour faire en sorte que cet espoir ne soit pas déçu, M. le Président. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le leader de l'opposition officielle. Mme la députée de Lotbinière.
Mme Sylvie Roy
Mme Roy: Merci, M. le Président. Alors, la cinquième édition de la Semaine des bibliothèques publiques est une bouffée d'air frais pour les citoyennes et les citoyens du Québec. Vous savez qu'il y a des bibliothèques depuis le début de la colonisation, et la première bibliothèque qui a été considérée comme publique a été ouverte ici même, à Québec, en 1764.
C'est sous le thème Excès de plaisir que le réseau des bibliothèques publiques nous convie à redécouvrir nos bibliothèques, et cette année les adolescents y sont particulièrement conviés. Les bibliothèques publiques du Québec sont plus qu'un lieu pour s'adonner à la lecture, elles sont un lieu d'accès privilégié à la culture. La mission des bibliothèques publiques a été clairement énoncée par le Manifeste de l'Unesco sur la bibliothèque publique en 1994, soit la démocratisation de l'accès à l'information et à la culture, l'éducation continue et l'alphabétisation.
Je ne sais pas si vous avez été dernièrement, chers parlementaires, à votre bibliothèque, mais, un conseil, allez-y. Dans certains de ces endroits, le dynamisme qui y règne est contagieux. La modernisation des équipements fait son effet, et plusieurs bibliothèques offrent aux utilisateurs de leurs services un accès gratuit aux nouvelles technologies. Les 1 000 bibliothèques publiques desservent 91,5 % de la population du Québec. Elles ont 2 millions d'abonnés, et ce chiffre ne peut qu'augmenter puisque le taux de fréquentation est passé de 23 % à 36 % au cours des 20 dernières années.
Vous savez, chers collègues parlementaires, avant d'être élue députée de Lotbinière, j'étais mairesse de Sainte-Sophie-de-Lévrard, et le dernier projet que j'ai réalisé, c'est justement de relocaliser et de moderniser la bibliothèque que la municipalité avait, à la demande des citoyens. Le local était trop petit, inconfortable. Nous avons donc pris la salle municipale pour en faire une bibliothèque, parce que, si on s'était soumis aux normes, il aurait fallu... Je pense que le seul local disponible dans la municipalité pour faire la bibliothèque était le gymnase de l'école. Les normes étaient beaucoup trop énormes pour qu'une petite municipalité puisse se doter de tels équipements. Les coûts aussi étaient astronomiques. Finalement, il valait mieux ne pas avoir de subvention pour pouvoir réaliser notre accès aux livres.
Mais je salue quand même l'aide, la compétence puis le dévouement des employés du CRSBP qui, malgré le fait qu'on ne souscrivait pas au programme, nous ont beaucoup aidés en apportant leurs connaissances, en nous permettant de partager, par leur biais, l'expérience d'autres personnes, d'autres municipalités qui avaient réussi à s'en tirer à bon compte.
J'ai moi-même de très bons souvenirs de l'époque où ma mère et moi allions ensemble à la bibliothèque, et maintenant c'est mon fils que j'amène à cette bibliothèque. J'y ai même constaté qu'il y avait des livres pour les bébés, des livres spécialement conçus pour eux. Les jeunes enfants, les adolescents peuvent y emprunter, dans certains cas, des audiocassettes, des disques compacts et des vidéocassettes.
Je terminerai en citant le porte-parole de cette cinquième édition de la Semaine des bibliothèques publiques, soit Mme Geneviève Rioux: «Franchir la porte de notre bibliothèque publique, c'est s'ouvrir au rêve, au savoir et au ludique. Notre bibliothèque a besoin de nous: nos idées et nos demandes la rendront plus vivante, il faut insister pour qu'on la modernise, pour qu'on l'agrandisse. Ce n'est pas un lieu sacré mais c'est un sacré lieu! Et qui nous appartient à tous.» Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. Est-ce que cette motion est annoncée... annoncée, adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
Souligner la Journée mondiale de l'ostéoporose
M. Couillard: M. le Président, je sollicite le consentement de l'Assemblée pour que l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale de l'ostéoporose.
Le Vice-Président (M. Sirros): Est-ce que ce consentement est donné? Consentement. Alors, M. le ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: M. le Président, l'ostéoporose se caractérise par une réduction de la masse osseuse qui peut compromettre l'intégrité mécanique du squelette et augmenter le risque de fracture, et les conséquences de ces fractures sont loin d'être banales. Elles sont, en fait, très graves non seulement pour l'individu elle-même... ou lui-même, mais également pour l'ensemble du système de santé au Québec.
Au Canada, on dénombre annuellement environ 25 000 fractures de la hanche, surtout bien sûr chez les personnes âgées, surtout chez les femmes. Il ne s'agit pas d'une maladie bénigne, loin de là, puisque les complications qui en résultent sont si graves que 4 500 personnes meurent chaque année des suites d'une telle fracture. Donc, un taux de mortalité de 15 % à 20 %, très élevé pour des personnes âgées qui sont souvent, jusqu'à l'accident qui a causé la fracture, en très bonne condition. Ce qui nous amène à rappeler qu'une des causes principales d'altération de la santé chez nos personnes âgées, ce sont les chutes dans leur milieu de vie ou à domicile et que, si on veut avoir une action préventive efficace auprès des personnes âgées, c'est probablement dans la création d'un milieu de vie sécuritaire qu'il faut agir.
Cette maladie des os, donc l'ostéoporose, constitue le trouble du métabolisme osseux le plus répandu chez les personnes âgées. Au Canada, cette maladie invalidante touche plus de 1 million et demi d'individus de plus de 50 ans. Une femme sur quatre et un homme sur huit sont atteints d'ostéoporose, et donc les femmes représentent les 4/5 des personnes atteintes en raison des changements hormonaux qui accompagnent la ménopause.
La situation géodémographique du Québec nous fournit, M. le Président, tous les arguments pour faire à la lutte contre l'ostéoporose et les fractures de fragilité qui en découlent une place importante au sein de nos actions en santé publique. Notre population est en effet d'emblée confrontée à quatre facteurs de risque majeurs: la prédominance de la race blanche, la faible exposition solaire sur une base annuelle ? et j'explique que l'exposition solaire est liée à la production de vitamine D qui raffermit la masse osseuse ? l'inactivité physique consécutive au confinement pendant les mois d'hiver et le risque de chute lié au climat hivernal et à l'environnement ? j'en parlais plus tôt. Il est donc important d'envisager des stratégies préventives axées sur la réduction de la perte osseuse afin d'atteindre une masse osseuse maximale, de retarder le début de la perte osseuse et bien sûr d'en ralentir la perte.
Des interventions à visées préventives concernant le régime alimentaire et le mode de vie ont pour objet de maximiser et de préserver la masse osseuse. Elles ont de multiples bienfaits sur la santé et sont reconnues comme étant suffisamment rentables pour qu'on les recommande à la population du Québec. Elles visent à promouvoir de bonnes habitudes alimentaires riches en calcium et en vitamine D, d'encourager l'activité et les exercices physiques ainsi, encore une fois, que la prévention des chutes.
Les interventions à visées préventives ont aussi pour but d'éliminer les autres facteurs de risque tels que le tabagisme, la consommation excessive de caféine et d'alcool et, j'ajouterais, parfois de médicaments inappropriés... utilisés de façon inappropriée. Pour les femmes, ajoutons que le recours possible à une hormonothérapie sous surveillance médicale peut être recommandé dans certains cas, mais j'amène les femmes à être prudentes et à consulter leurs médecins avant de vouloir entreprendre un traitement semblable.
Lorsque la prévention ne suffit pas, les victimes de l'ostéoporose peuvent compter sur la compétence et l'aide de ressources d'une qualité exceptionnelle. Notre ministère accorde en outre une subvention annuelle de 20 000 $ à Ostéoporose Québec en vertu du Programme de soutien aux organismes communautaires ainsi que le Secrétariat à l'action communautaire autonome. La mission de ce partenaire important est d'informer et d'aider les femmes et les hommes de tous âges à prévenir et traiter l'ostéoporose. L'objectif premier de cet organisme, qui utilise la technologie de l'Internet, est d'inciter les Québécoises et les Québécois à réduire les risques de développer l'ostéoporose en les encourageant à se construire une bonne masse osseuse. Il se consacre à la prévention, à la réhabilitation ainsi qu'à la sensibilisation et à l'information de la population et des professionnels de la santé.
n(15 h 40)n Je profite de l'occasion, M. le Président, pour remercier Ostéoporose Québec pour les efforts soutenus que cet organisme consacre depuis 15 ans au combat contre cette maladie qui s'attaque au tissu vivant que sont nos os. J'espère également que le temps fort d'information et de sensibilisation qu'aura représenté cette Journée internationale de l'ostéoporose incitera les Québécoises et les Québécois à adopter les mesures et les habitudes de vie qui les aideront à se placer à l'abri de cette maladie silencieuse mais lourde de conséquences.
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le ministre. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je voudrais souscrire, au nom de l'opposition officielle, à l'adoption de cette motion qui se lit ainsi:
«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale de l'ostéoporose.» M. le Président, jamais, en 1981, lorsque, pour la première fois, j'ai siégé dans cette Assemblée, j'aurais pu imaginer qu'un jour viendrait où il y aurait une Journée internationale de l'ostéoporose et où nous en parlerions dans ce Parlement. C'était alors considéré comme des maladies de femmes, c'était là d'ailleurs l'expression qui avait été utilisée par un premier ministre libéral mais en toute bonne foi évidemment, mais c'étaient là des maladies de femmes dont on ne parlait pas dans les Parlements. L'ostéoporose, la ménopause, c'étaient non seulement des maladies... la ménopause était considérée comme une maladie silencieuse, et il ne serait jamais venu à l'idée de personne qu'on puisse adopter une motion à cet effet.
Et je suis vraiment contente aujourd'hui qu'on puisse le faire pour souligner l'excellent travail d'Ostéoporose Québec. Il faut voir, sur leur site Internet... Je sais que tout le monde n'est pas branché à la maison, je lisais dernièrement que 47 % des Québécoises et des Québécois n'ont pas accès à un système informatique, mais il est toujours possible, soit par l'intermédiaire de cafés communautaires ou d'organismes communautaires, de se procurer les documents qu'Ostéoporose met à la disposition des hommes et des femmes du Québec, et qui nous permettent même de faire le test pour vérifier si nous sommes à risque à l'égard de cette maladie.
Il faut savoir qu'après 50 ans une femme sur quatre est atteinte d'ostéoporose; après 75 ans, une femme sur trois; et, après... c'est-à-dire, après 65 ans, une femme sur trois; et, après 75, une femme sur deux. Alors, il faut voir la prévalence, hein, de l'ostéoporose chez les femmes en particulier. Mais, chez les hommes, même si c'est à un moindre degré, la maladie frappe aussi. Et je me disais que ma grand-mère, qui est décédée après une fracture de la hanche, certainement n'a jamais su elle-même ni son entourage que c'était certainement des suites de l'ostéoporose.
Au Québec, annuellement, les statistiques sont à l'effet qu'il y a 21 000 fractures de la hanche dont 15 000 à cause de l'ostéoporose, c'est-à-dire une fracture aux 30 minutes. Par exemple, juste à l'occasion de la présente motion, sans doute y a-t-il une ou un de nos concitoyens de plus qui aura subi une fracture de la hanche. Les coûts sont énormes. Les coûts associés à l'ostéoporose au Québec sont évalués à presque 300 millions de dollars. Et l'impact est très grand, pas simplement sur les fractures du col du fémur, du poignet, de la hanche, des vertèbres, mais aussi parce qu'une étude récente a démontré que 80 % des femmes de 75 ans et plus ont indiqué qu'elles préféraient mourir que de subir une fracture de la hanche, à cause de l'énorme impact sur leur qualité de vie.
Il y a des risques plus grands, n'est-ce pas: risques climatiques aussi, risques environnementaux, risques aussi associés à la génétique. Et c'est certain que ces motions sont l'occasion de prendre des bonnes résolutions mais aussi d'inciter les gens qui nous écoutent à en prendre. Moi, cela fait 23 ans cette année que je siège à l'Assemblée, et je bois mon verre de lait tous les jours. Alors, je l'ai bu aujourd'hui, mais c'est... Alors, je ne suis pas la seule, nous sommes quelques-uns, hommes et femmes. Je crois que c'est important parce que il est maintenant démontré, par des études à l'appui, qu'en matière de nutrition les Québécoises et les Québécois boivent 15 % moins de lait qu'en 1971 et en boivent beaucoup moins que ce qui est nécessité, si vous voulez, tout simplement par la mise en santé... par une bonne santé. Alors, c'est donc une déficience en produits laitiers, qui constituent une source majeure de vitamine D, qui doit être corrigée. Et je crois qu'une motion comme aujourd'hui, c'est l'occasion de nous rappeler la nécessité ? n'en déplaise à Montignac ? la nécessité de consommer des produits laitiers et du calcium suffisamment, de la vitamine D, et toutes les études sont absolument concluantes à cet effet.
C'est de prévention dont il s'agit, et on ne guérit pas de l'ostéoporose, on la constate seulement dans un diagnostic. Donc, il faut investir dans la prévention. Et, moi, j'ai été très déçue que dans le dernier budget du gouvernement il n'y ait absolument aucun montant pour la prévention, et je suis très inquiète qu'on n'en parle plus. Oui, je suis inquiète qu'on n'en parle plus. Je suis inquiète qu'on rétrécisse notre vision de la santé. Moi, je crois à la définition qu'en donne l'Organisation mondiale de la santé. C'est un état de bien-être qui est à la fois physique mais qui est social également. Et je crains que, d'une vision sociale de la santé, on en arrive exclusivement à une vision médicale de la maladie. Je le dis en toute simplicité. Je crois nécessaire qu'on entende beaucoup plus le ministre de la Santé et des Services sociaux et son gouvernement parler de prévention et agir aussi en faveur de la prévention.
Alors, c'est donc une excellente motion, et je veux en profiter pour féliciter tout le personnel soignant et, en premier chef également, les bénévoles qui travaillent et saluer le travail qu'ils réalisent.
En terminant, jeune avocate adjointe au directeur régional de la santé et des services sociaux du Montréal métropolitain au début des années quatre-vingt ? on disait le CSSMM à l'époque ? j'avais été chargée de la mise en place d'une stratégie féministe dans l'intervention en matière de santé et services sociaux, et ça a été la première constatation que je faisais à l'époque, que ces dites maladies de femmes n'étaient d'aucune façon diagnostiquées ou même prises en charge. Alors, je suis heureuse de constater que, comme société, nous avons fait un pas de géant en ces matières. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, Mme la députée de Beauce-Nord.
Mme Roy: Non, Lotbinière.
Le Vice-Président (M. Sirros): Ah! Excusez-moi, Mme la députée, effectivement, Lotbinière.
Mme Sylvie Roy
Mme Roy: Merci, M. le Président. Je souscris également à la présentation de cette motion pour souligner la Journée internationale de l'ostéoporose au nom de ma formation politique. Je ne reprendrai pas toutes les statistiques; je vois qu'il y a une certaine unanimité. On a, tout le monde, été surpris ou, en tout cas, étonnés par le fait qu'il y a tellement de personnes qui sont touchées par cette maladie-là, que cette maladie-là est silencieuse. J'ai moi-même été étonnée, là, à la lecture... à la préparation de cette motion, de savoir que, à partir de 30 ans déjà, donc beaucoup de personnes, beaucoup de femmes surtout, commençaient à subir, de façon insidieuse, les méfaits, probablement, de cette maladie.
Je, par contre, vais joindre la voix de ma formation politique... notre voix à la vôtre pour souligner le bon travail, saluer le travail d'Ostéoporose Québec. C'est cet organisme qui va offrir les services d'identification des facteurs de risque d'ostéoporose aux personnes admissibles pour les sensibiliser, comme je l'ai été à la préparation, malheureusement, de cette motion.
n(15 h 50)n Cette tournée est née sous l'initiative de la même équipe qui a fait la renommée du Festival de la santé. D'ailleurs, je veux encore le dire, parce que je pense qu'il faut le redire, que la prévention est le meilleur moyen pour contrer cette terrible maladie. Et je veux porter à votre attention que nous avons beaucoup de travail encore à faire pour sensibiliser tant les femmes que les hommes aux risques de développer la maladie. Il est primordial que les Québécoises et les Québécois développent très tôt des habitudes saines, adoptent des attitudes également positives et se renseignent sur l'ostéoporose. Joignez-vous à la tournée santé pour vous renseigner auprès de cet organisme. Et je vous remercie beaucoup, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci beaucoup, Mme la députée de Lotbinière. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Alors, M. le député de Lac-Saint-Jean.
Souligner la Semaine québécoise
de réduction des déchets
M. Tremblay: Oui, M. le Président, merci. Je sollicite le consentement unanime de cette Assemblée pour proposer la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale souligne la tenue de la troisième édition de la Semaine québécoise de réduction des déchets, sous le thème Réduire, c'est agir!, qui se déroule du 20 au 26 octobre.»Le Vice-Président (M. Sirros): Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Alors, M. le député, la parole est à vous.
M. Stéphan Tremblay
M. Tremblay: Merci, M. le Président. J'aimerais remercier le leader de me faire passer un peu à l'avance, parce que je m'en vais aux audiences publiques sur l'environnement dans mon comté, alors vous comprendrez que je serai un peu pressé.
Alors, comme je le disais, du 20 au 26 octobre, nous sommes en pleine Semaine québécoise de réduction des déchets. C'est la troisième édition organisée par le Réseau des ressourceries du Québec, qui comprend environ 90 ressourceries partout à travers le Québec, organisée également par de nombreux partenaires. Cette Semaine est une occasion idéale pour sensibiliser: l'importance de réduire la masse des matières résiduelles que nous produisons et qui sont acheminées vers les sites d'enfouissement. Sous... Le thème Réduire, c'est agir! permettra de sensibiliser la population à adhérer aux principes des trois R, à savoir: réduction, réemploi et recyclage. D'ailleurs, à cet égard, j'ai écrit mon discours recto verso pour être dans le thème de cette Semaine.
M. le Président, le Québec génère encore trop de déchets. En fait, depuis que j'ai commencé à parler, une minute, le Québec a produit 20 tonnes de déchets, ce n'est pas peu. Même si nous recyclons plus, la consommation augmente, l'utilisation des emballages augmente et, pour toutes sortes de raisons, nous enfouissons toujours plus de déchets. Ainsi, le Réseau des ressourceries joue un rôle-clé par la réception des marchandises, par la mise en valeur de ces marchandises et la mise en marché, que ce soient des marchandises de provenance domestique, industrielle, commerciale ou institutionnelle.
Mais, encore plus, le Réseau des ressourceries s'occupe de sensibilisation et d'éducation, et, à ce titre, nous n'en ferons jamais assez. Autre élément majeur, c'est que les ressourceries créent de l'emploi. Et, à ce titre, je prendrai l'exemple de ma propre ressourcerie chez moi, au Lac-Saint-Jean, à Alma, Coderr-02, où son directeur, M. Gilbert Tremblay, me dit souvent: Stéphan, l'avenir est dans nos poubelles et par la réutilisation. D'autant plus que la ressourcerie chez nous fait un travail très intéressant au niveau de la réinsertion sociale. Donc, M. le Président, dans le cadre de cette troisième édition de la Semaine québécoise de réduction des déchets, le 25 octobre prochain, partout au Québec, ce sera portes ouvertes dans les ressourceries du Québec.
Mais, M. le Président, fait à noter, vous n'êtes pas sans savoir que le Québec s'est doté d'un plan québécois sur la gestion des matières résiduelles en 1998, un plan qui vise 1998 à 2008, visant à ce que 65 % des matières résiduelles soient détournées des sites d'enfouissement grâce à la réduction, la réutilisation, le recyclage et le compostage. Et, à ce titre, je crois que le ministre de l'Environnement s'est fait assez discret quant à cet objectif, a même avancé qu'il fallait être réalistes et que cet objectif était peut-être trop ambitieux. J'ai tendance à dire, M. le Président, que, dans la vie, il faut viser haut, quitte à ce qu'on n'arrive pas au sommet mais qu'au moins on vise le sommet. Et, si on vise juste la moitié de la montagne, on n'atteindra jamais le sommet de la montagne. Donc, je crois qu'il faut envoyer un message clair. Et j'ai bien hâte d'entendre, M. le Président, le ministre de l'Environnement par rapport à ce qui se passera avec le plan de gestion des matières résiduelles à l'égard de la Communauté métropolitaine de Montréal, qui a reporté en 2013 son objectif de 60 %. Mais, aujourd'hui, dans Le Devoir, on voyait que la firme Dessau-Soprin disait que l'objectif de 60 % était tout à fait réaliste pour 2008.
Alors, M. le Président, il faut donc, et ce, rapidement, trouver des alternatives à l'enfouissement, inciter la population comme tout le secteur industriel, commercial et institutionnel à trouver des solutions. Le Réseau des ressourceries du Québec est certainement une approche qu'il nous faut promouvoir. De plus, par l'organisation, depuis bientôt trois ans, de la Semaine québécoise de réduction des déchets, le Réseau de ressourceries ainsi que leurs partenaires informent et sensibilisent les Québécois à l'importance du geste quotidien de réduction des déchets.
Je veux souligner en terminant le support des collaborateurs, intervenants et partenaires, notamment le partenaire principal, RECYC-QUÉBEC, qui supportent la réalisation de cette Semaine. Nous espérons que le ministre permettra à cet organisme de poursuivre son mandat fort important pour l'environnement, car force est de constater que le travail est essentiel et que le climat d'insécurité qui sous-tend la réingénierie de l'État au sein du ministère de l'Environnement... Ainsi, j'invite donc le ministre à dire clairement quelles sont ses intentions quant à la structure actuelle de cet organisme.
En conclusion, M. le Président, j'invite toute la population québécoise à participer aux activités organisées dans les régions du Québec et vous suggère d'ailleurs de consulter le site Internet du Réseau des ressourceries afin de consulter toutes les activités qui vous sont suggérées pendant cette Semaine. Nous avons tous un rôle à jouer, et, comme le dit le thème de la Semaine, réduire, c'est agir ensemble afin de protéger et améliorer notre environnement. Merci.
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. M. le ministre de l'Environnement et député de Chomedey.
M. Thomas J. Mulcair
M. Mulcair: Merci, M. le Président. Je désire soutenir la motion présentée par l'opposition portant sur la Semaine québécoise de réduction des déchets, qui se tient du 20 au 26 octobre. Je profite de cette troisième Semaine québécoise de réduction des déchets pour rappeler à mes collègues et à l'ensemble de la population du Québec que la gestion des matières résiduelles est actuellement au coeur des préoccupations du ministère de l'Environnement.
Durant les quelques minutes pendant lesquelles le député du Lac-Saint-Jean a parlé, près de 100 tonnes de résidus se sont produites ici, au Québec, et un pourcentage encore trop important de ces matières résiduelles finiront leur vie utile dans les lieux d'élimination. Or, loin d'être des déchets, ces résidus sont souvent des ressources qui, lorsqu'on les récupère, peuvent être valorisées de mille et une façons.
Le député de Lac-Saint-Jean parlait des ressourceries. J'ai eu le plaisir d'ouvrir une nouvelle ressourcerie à Saint-Eustache, cette semaine. J'étais accompagné de ses collègues la députée de Deux-Montagnes et la députée de Mirabel. Mais c'est une activité qui se poursuit à travers le Québec, et c'est un exemple de ce qu'on peut faire.
Comme Normand Maurice ? qui, tout le monde qui connaît le domaine peut vous dire, est un peu le grand-père du recyclage ici, au Québec ? le dit si bien, parce qu'il travaille souvent avec des jeunes qui auraient beaucoup de difficultés à se trouver un emploi autrement ? et il l'utilise donc au sens métaphorique ? un déchet, c'est ce qu'on nomme quelque chose, ce n'est pas sa valeur intrinsèque.
En plus de contribuer à la protection de l'environnement, la valorisation favorise la créativité, entraîne le développement de nouvelles technologies ? c'est important aussi pour l'économie ? et suscite chez tout le monde une conscience plus vive de notre responsabilité personnelle et collective à l'égard des matières qui sont générées et qu'on consomme. La gestion des matières résiduelles est une question prioritaire pour notre gouvernement à cause de ses incidences sur la qualité de l'environnement, sur la santé publique, sur la qualité de vie et sur l'économie. Une gestion à long terme dans ce dossier est donc primordiale.
Et je réponds à l'invitation faite par mon collègue le député de Lac-Saint-Jean pour lui parler du report possible des objectifs de la CMM. Il a raison lorsqu'il dit que c'est ce qui est proposé dans le rapport de la CMM, mais il ne faut pas perdre de vue le fait que la CMM est en consultation en ce moment. Le rapport Dessau-Soprin fait partie du contexte dans lequel ça va être analysé. Aussi, ce que j'ai dit publiquement et ce que je lui répète ici aujourd'hui, c'est la chose suivante: On maintient le cap sur les objectifs. Mais je suis un optimiste de nature. Quand j'ai la CMM, qui représente plus que 50 % de la population du Québec, qui me dit: Oui, on peut atteindre l'objectif de 65 % de recyclage, je m'en réjouis, parce que je ne suis pas sûr qu'il y a 10 ou 15 ans on aurait eu une réponse pareille. Ça, c'est la partie optimiste. On peut regarder le verre comme moitié plein ou moitié vide. Je préfère le voir comme moitié plein. Ils sont en train de nous dire qu'ils vont faire ce qu'il faut pour atteindre cet objectif. Ils sont en train de plaider pour avoir plus de temps, et, oui, je vais être un réaliste quand je traite avec eux autres.
Sans changer les objectifs de quantités, j'ai l'intention d'être un réaliste lorsqu'il s'agit de regarder la durée des contrats actuels qui ont été signés; ça, c'est une réalité objective avec laquelle il va falloir composer. J'ai l'intention de regarder le fait que l'objectif était effectivement 1998-2008. Mais là on commence 2004, là. Est-ce que, en quatre ans, c'est réaliste d'atteindre ça? Je crois que les articles du Devoir, de Louis-Gilles Francoeur, auxquels il fait référence ont apporté certaines nuances aujourd'hui dans les réponses qui ont été faites par les gens de Dessau-Soprin.
n(16 heures)n Mais, quoi qu'il en soit, notre collaboration est acquise, c'est vers ça qu'il faut tendre. Puis, pour reparler de M. Maurice et son oeuvre notamment dans le coin de Victoriaville, quand on regarde ce qu'on est capables de faire avec un peu d'imagination, de conviction et de détermination, on peut y arriver. Mais, quand je dis qu'il faut une gestion à long terme dans ce dossier-là... M. le Président, le député du Lac-Saint-Jean et moi, on a déjà eu l'occasion de parler là-dessus. L'époque de la pensée magique, c'est fini. L'époque où un site, par ailleurs extraordinairement bien géré, comme celui de BFI se fait renouveler pour un an, pendant les élections, pour ne pas dire que c'est plus, et qu'on va faire semblant que, par enchantement, tout d'un coup, les ordures domestiques, par exemple, dans la région de Montréal vont disparaître à tel point qu'on n'aura pas besoin de renouveler, moi, je trouve que ce n'est pas jouer franc jeu avec le public.
Peu importe, parce que, en politique, on apprend qu'on n'est pas là ad vitam aeternam, ni dans une fonction ni ici, mais peu importe qui serait le ou la ministre de l'Environnement dans quelques années, moi, je désire une chose, que plutôt que de gérer à la petite semaine, plutôt que de regarder ça toujours sur un horizon un an ou deux, moi, je souhaite apporter une solution qui va durer pour 30 ou 40 ans, qu'on n'ait plus besoin de vivre ces gros problèmes sociaux qu'on a connus au cours des dernières années.
Ça s'en vient. On a fait du bon travail pour nettoyer un site qui, à mon sens, était tout à fait en deçà des normes acceptables qui étaient à Lachute. On va faire une extension du site, on va faire une expansion du site, on va pouvoir exproprier des maisons, des sommes ont été allouées pour ça, et on va pouvoir rectifier une situation à Lachute qui était, à mon sens, inacceptable mais qu'on avait fait perdurer. Il y a plusieurs sites à travers le Québec, des lieux d'enfouissement sanitaire, qui viennent à échéance un par un, on va s'y adresser. C'est ça, ce que j'appelle une gestion avec une vision à long terme, et c'est ce que nous préconisons.
Donc, la bonne gestion de ces lieux d'enfouissement ne doit pas nous faire oublier que nous considérons ces lieux comme la destination finale d'une partie seulement des résidus de nos activités domestiques, industrielles, commerciales, institutionnelles. Avant d'en arriver là, une grande partie de ces matières résiduelles devront avoir été récupérées et valorisées, pas seulement compostées. Selon un bilan établi en 2000, un peu plus de 7 millions de tonnes de résidus sont encore éliminées chaque année sur les 11 millions de tonnes générées ici, au Québec. Malgré les progrès réalisés au cours des dernières années, nous sommes encore loin de l'objectif proposé par la politique, soit la valorisation de 65 % des résidus qui peuvent être mis en valeur à chaque année.
Pour atteindre cet objectif, nous devons intensifier nos efforts. Nous sommes actuellement à mi-chemin de la période de mise en oeuvre de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles 1998-2008, et donc, d'ici la fin de l'année, comme il est prévu dans la politique elle-même, on doit examiner le travail accompli jusqu'à maintenant.
Tout au long de cette Semaine de réduction des déchets, un grand nombre d'activités seront proposées, et vous serez invités à relever chaque jour un défi différent. J'invite tout le monde à participer activement pour que les matières actuellement éliminées puissent connaître une seconde, une troisième et même une quatrième vie. De cette façon, on contribuera à l'atteinte des objectifs ambitieux mais nécessaires de la politique à laquelle on faisait référence tantôt. Pour reprendre le slogan de cette année, Réduire, c'est agir! Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le ministre. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Je suis prêt à reconnaître le ministre du Développement économique et régional.
Souligner la Semaine de la coopération
M. Audet: Merci, M. le Président. Je voudrais obtenir l'accord de cette Assemblée pour adopter la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine de la coopération qui s'est tenue du 12 au 18 octobre 2003, félicite tous les artisans du mouvement coopératif au Québec et invite la population à "faire l'expérience coopérative".»Le Vice-Président (M. Sirros): Y a-t-il consentement?
Une voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Sirros): Il y a consentement. Alors, M. le ministre.
M. Michel Audet
M. Audet: M. le Président, chers collègues, permettez-moi de souligner un événement important qui s'est tenu la semaine dernière, soit la Semaine de la coopération, qui avait pour thème Faites l'expérience coopérative! Cet événement annuel reconnaît l'apport essentiel des entreprises coopératives au développement économique du Québec et particulièrement de ses régions.
D'ailleurs, au cours de cette semaine particulière, dans tous les coins du Québec, ont eu lieu diverses activités: colloques, galas dans les régions du Saguenay?Lac-Saint-Jean et de Montréal; galas et remises de distinctions du mérite coopératif dans les régions la Mauricie, du Centre-du-Québec et en Estrie; lancement officiel d'un projet de coopérative de santé en Outaouais; tenue des états généraux de la coopération dans la région de la Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches. Les grands médias ont également publié des cahiers spéciaux et des articles pour présenter cette forme d'entrepreneuriat si productif dans toutes les régions du Québec.
J'en profite pour inviter les parlementaires à parcourir le dépliant en question. On y constatera que les coopératives constituent depuis plus d'un siècle un facteur dynamique de développement économique et social indispensable.
Laissez-moi vous présenter brièvement un portrait des entreprises coopératives. Le mouvement coopératif québécois, soit les coopératives de services financiers, les mutuelles d'assurance et les coopératives non financières, compte plus de 3 200 coopératives oeuvrant dans les secteurs les plus diversifiés. Elles sont présentes autant sur la scène internationale, notamment dans les exportations, que dans les services de proximité en région et les services à la personne. Elles procurent près de 80 000 emplois directs et versent en salaires plus de 3 milliards de dollars par année. Les coopératives financières gèrent des actifs de 90 milliards au Québec, tandis que le chiffre d'affaires des coopératives non financières atteint 7 milliards de dollars.
Au cours de la dernière année, le mouvement coopératif québécois s'est enrichi de 200 nouvelles coopératives qui répondent aux besoins de la population. Bon an, mal an, les coopératives créent environ 2 000 emplois nouveaux. Ce qui me réjouit le plus, M. le Président, à titre de ministre du Développement économique et régional, c'est que 75 % de ces emplois se retrouvent en région, avec un taux de survie exceptionnellement élevé. Ainsi, sur un période de cinq ans, le taux de survie des entreprises coopératives est de 64 %, comparé à 36 % pour les entreprises privées. On peut donc parler d'emplois durables.
On peut affirmer sans l'ombre d'un doute que les régions possèdent, par l'entremise des coopératives, un outil de développement économique des plus efficaces. J'aurai d'ailleurs l'occasion, dans les prochaines semaines justement, de déposer un projet de loi qui rafraîchira la Loi sur les coopératives et apportera un support concret aux coopératives, qui démontrera la volonté d'ailleurs du gouvernement justement de mieux supporter les coopératives en région.
En conclusion, étant donné la vitalité et la durabilité remarquables des entreprises coopératives, leur contribution importante sur le plan du développement local et régional, ainsi qu'au chapitre du développement économique et social, il m'apparaît tout à fait opportun que l'Assemblée nationale exprime, dans la foulée de la Semaine de la coopération, sa reconnaissance au mouvement coopératif et invite la population à faire l'expérience coopérative tout au cours de l'année. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Labelle.
M. Sylvain Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Alors, bien sûr, il me fait plaisir d'unir ma voix à celle du ministre au Développement économique et régional, mon collègue, afin de souligner la Semaine de la coopération, qui s'est tenue la semaine dernière, donc du 12 au 18 octobre dernier, de féliciter tous les artisans des mouvements coopératifs au Québec et, par la même occasion, bien sûr, d'inviter la population à faire l'expérience coopérative.
La Semaine de la coopération est un événement majeur qui permet de promouvoir les produits et services provenant des coopératives tout en valorisant le savoir-faire de la coopération. Les nombreux avantages de la coopération y sont présentés et discutés afin de permettre aux membres et à la population de vivre et de poursuivre l'expérience coopérative.
La Semaine de la coopération se veut également une opportunité d'afficher et de partager l'appartenance au vaste mouvement coopératif québécois, de sensibiliser le grand public à la diversité et à la pertinence ? à la pertinence ? de la formule coopérative. C'est aussi l'occasion de souligner le potentiel de développement économique et social qu'offrent les entreprises coopératives dans leur communauté, et ce potentiel est énorme, comme vous le savez tous et toutes.
En effet, le mouvement coopératif, le ministre en a fait mention tantôt, je pense qu'il faut le rappeler, c'est 7,5 millions de membres, producteurs, consommateurs, travailleurs; c'est maintenant 3 500 coopératives au Québec, qui génèrent 16 milliards de chiffre d'affaires dans des secteurs aussi variés que le secteur financier, les assurances, l'industrie agroalimentaire, l'habitation, l'industrie forestière, les services funéraires, le milieu scolaire, et bien d'autres. En fait, c'est près de 80 000 emplois à des Québécoises et des Québécois.
n(16 h 10)n Mais les coopératives au Québec, ce sont d'abord et avant tout des citoyens et des citoyennes qui oeuvrent à l'accomplissement d'un projet commun et qui s'engagent dans des entreprises durables, créant des emplois et une richesse collective, et ce, afin de répondre à leurs besoins, bien sûr, mais dans le respect des générations à venir. Et ce dernier point, à mes yeux, est très important.
Au fil des ans, les coopératives se sont taillé une place de choix au sein de l'économie du Québec. Et cela, bien sûr, s'explique entre autres par leur façon de travailler en équipe, leur capacité de s'adapter aux besoins de leurs membres, leur efficacité, leur durabilité. Plusieurs d'entre elles sont évidemment devenues de grandes entreprises dont nous pouvons être fiers, et tout le monde pensera évidemment à la Fédération des caisses Desjardins du Québec, au Groupe Promutuel, la SSQ, la Mutuelle des fonctionnaires du Québec, et bien d'autres.
Mais les coopératives constituent également l'un des principaux leviers de développement régional. Plus de 75 % ? le ministre le disait tantôt, là, il a parfaitement raison ? 75 % d'entre elles se situent effectivement dans les régions rurales ou semi-urbaines. Et d'ailleurs je vais me permettre une parenthèse pour souligner l'apport économique important du mouvement coopératif dans ma circonscription, notamment au niveau de la MRC Antoine-Labelle, qui... il y a quelques années, cette MRC avait le triste titre de faire partie des MRC parmi les plus défavorisées au Québec. Et les mouvements coopératifs, chez nous, ont joué un rôle important pour générer une économie plus dynamique dans la MRC Antoine-Labelle, et je voudrais leur rendre hommage.
Et une en particulier, soit la Coopérative forestière des Hautes-Laurentides, qui a vu le jour il y a 25 ans avec quelques membres, aujourd'hui compte plus de 300 membres et emploie jusqu'à 600 personnes. C'est l'une des entreprises qui est parmi les 500 plus gros employeurs au Québec et, bien sûr, le plus gros employeur de la MRC Antoine-Labelle. Son chiffre d'affaires consolidé, après 25 ans, atteint maintenant les 48 millions de dollars. Ce n'est pas rien. Je veux leur rendre hommage et souligner également que c'est un employeur un peu à prendre en exemple parce qu'ils ont réussi, compte tenu de la complexité de l'industrie forestière dans cette MRC, ils ont réussi à faire un maillage très bien orchestré avec les entreprises privées. Et, dernièrement, en plus, ils obtenaient la certification ISO 14001. Alors, chapeau et félicitations à la Coopérative forestière des Hautes-Laurentides.
Il est donc important de reconnaître l'apport inestimable et incontournable de ces coopératives pour les régions du Québec. Il faut donc mettre sur pied des mesures visant à accélérer la croissance des coopératives et leur diversification tout en augmentant l'emploi coopératif principalement en région. Je pense, entre autres, à la politique de développement des coopératives dont nous avions donné le coup d'envoi en mars dernier. Malheureusement, jusqu'ici... on annonce quelque chose, mais jusqu'ici le nouveau gouvernement a suspendu la mise en oeuvre de cette politique qui visait justement à stimuler ce secteur générateur d'emploi et de solidarité et à reconnaître la contribution particulière de ces entreprises au développement économique et social du Québec. D'ailleurs, nous avions prévu, en mars dernier, 20 millions d'injection pour les coopératives, sur trois ans. Jusqu'ici, le ministre des Finances... il n'y a pas un mot à l'égard de ces argents.
D'ailleurs, le président... M. le Président, rappelons que le Conseil de la coopération, qui réunit l'ensemble des regroupements coopératifs du Québec, s'était à ce moment-là, en mars dernier, montré très satisfait de ces mesures. Il souhaitait, le Conseil de la coopération, l'adoption pour cet automne d'une nouvelle loi sur les coopératives, tel que prévu dans ladite politique, et ce, afin d'établir un cadre réglementaire complet et mieux adapté à l'ensemble du monde coopératif. J'ose donc espérer que le ministre au Développement économique et régional poursuivra dans ce sens.
D'ailleurs, le Conseil de la coopération s'est montré fort déçu à la suite du dernier budget du ministre. Ce dernier n'a pas caché son inquiétude face aux changements apportés aux mesures fiscales touchant les entreprises. Ce régime a pour principal objectif de favoriser la croissance des coopératives en accordant une déduction dans le calcul du revenu imposable aux membres et aux travailleurs lors de l'acquisition de parts privilégiées.
Le gouvernement doit donc mettre sur pied les moyens d'action nécessaires afin d'accroître le développement du mouvement coopératif québécois. Pour ce faire, le gouvernement doit poursuivre la mise en oeuvre de la politique de développement coopératif tout en y investissant bien sûr les sommes adéquates. Il importe également de soutenir les divers partenaires impliqués, dont le Conseil de la coopération. Finalement, vous comprendrez qu'un réseautage est aussi essentiel afin d'échanger de l'information, des conseils et de l'aide technique pour s'offrir des services en commun, dans le but toujours d'améliorer la performance dans ce secteur coopératif.
En terminant, M. le Président, je tiens à manifester, de la part de ma formation et personnellement, notre appui indéfectible au mouvement coopératif, puisque ces associations, non seulement elles permettent d'être structurantes, elles permettent la prise en main, le développement social et économique, mais elles font appel aussi à des vertus dont on devrait tous s'inspirer, et c'est un message d'ailleurs que je lance au nouveau gouvernement, et, ces vertus, elles sont la concertation et la solidarité. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député. Je suis prêt à reconnaître M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Marc Picard
M. Picard: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de joindre ma voix à celles de mes collègues afin de souligner la Semaine de la coopération qui a eu lieu la semaine dernière sous le thème Fiers de notre patrimoine coopératif. Nous devons en effet être fiers de ce que le mouvement coopératif a accompli au Québec, un peu partout dans nos localités.
Le mouvement possède déjà une longue histoire au fil des ans. Il a su répondre aux besoins des communautés et contribuer de façon importante à la structure économique et sociale du Québec. Aujourd'hui, que l'on parle de coopératives financières, agricoles, d'habitation, de consommateurs, de coopératives de soins ou de garde, tous et chacun poursuivent un seul et même but, soit d'offrir des produits et services de qualité. Les services qu'elles offrent à leurs membres leur permettent de s'organiser pour lutter contre toutes sortes d'obstacles. De même, dans des milieux où la démocratie est encore assez jeune, les coopératives servent de modèle de prise de décision démocratique et de partage de responsabilités. Les caisses scolaires présentes dans plusieurs de nos écoles en sont un bon exemple.
Néanmoins, nombreux sont ceux qui sous-estiment encore la portée et l'ampleur du mouvement coopératif ainsi que la manière dont il intervient dans notre économie. Au Québec, c'est plus de 3 200 coopératives qui génèrent plus de 16 milliards en chiffre d'affaires. C'est beaucoup, et il s'agit d'un modèle incontournable, qui a fait ses preuves dans notre société.
Pour terminer, M. le Président, je voudrais rendre hommage à tous ceux et celles qui oeuvrent dans une entreprise coopérative. La vigueur du mouvement coopératif au Québec s'explique par la grande solidarité qui les anime et qui nous anime. Les coopératives rendent réellement le développement possible au quotidien et permettent aux gens de faire leur rêve de vie meilleure une réalité. Il faut être fiers de notre patrimoine coopératif. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le député. Alors, est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté.
Avis touchant les travaux des commissions
Aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.
M. Dupuis: Oui, je vous remercie, M. le Président. Permettez-moi de donner l'avis suivant:
Que la commission des institutions entreprenne l'étude détaillée du projet de loi n° 6, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant la perception des amendes, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, et aussi jeudi le 23 octobre, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.
Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le leader.
Aux avis... plutôt, aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Affaires du jour
Alors, s'il n'y en a pas, de demandes de renseignements, l'Assemblée ayant terminé la période consacrée aux affaires courantes, nous entamons maintenant les affaires du jour. M. le leader du gouvernement, pouvez-vous nous indiquer la volonté du gouvernement pour la suite des choses?
M. Dupuis: La volonté serait celle que vous appeliez l'article 3, M. le Président.
M. Boulerice: Vous le référez.
M. Dupuis: Référez, référez à l'article 3. Alors, je remercie le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques qui est une vigile extraordinaire et intelligente pour le leader du gouvernement.
Le Vice-Président (M. Sirros): Et pour les us et coutumes du parlementarisme. Alors, merci beaucoup, M. le leader du gouvernement.
Projet de loi n° 8
Reprise du débat sur l'adoption du principe
À l'article 3, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 21 octobre 2003 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Alors, y a-t-il des interventions? Alors, M. le député de L'Assomption.
M. Jean-Claude St-André
M. St-André: Alors, merci, M. le Président. Alors, aujourd'hui, ça me fait plaisir de m'associer à mon collègue le député de Joliette, porte-parole pour ce projet de loi de l'opposition officielle, et d'exprimer mon accord avec la fort brillante intervention qu'il a faite hier, en cette Chambre, et du travail qu'il accomplit d'ailleurs en ce qui concerne les questions reliées à la famille.
n(16 h 20)n Avant de débuter mon intervention, M. le Président, j'aimerais recommander à l'ensemble des députés, particulièrement aux membres du gouvernement, la ministre déléguée à la Famille, la lecture d'une opinion qui a été publiée ce matin dans Le Devoir, une opinion qui a été signée par plusieurs spécialistes de la question et qui résume, ma foi, fort bien l'ensemble des objections que l'opposition officielle peut avoir à l'égard du projet de loi n° 8 et également à l'égard du projet de loi n° 7. D'ailleurs, le titre de cette opinion parle de lui-même, Un dangereux précédent, en parlant des deux projets de loi qui sont à l'étude et particulièrement du projet de loi n° 8 sur lequel nous intervenons ici, aujourd'hui.
Quels sont les objectifs qui sont poursuivis par le projet de loi? D'abord, déclarer que les responsables de services de garde en milieu familial ne sont pas des salariées mais plutôt des travailleuses autonomes; deuxièmement, il prévoit la possibilité pour le gouvernement de conclure des ententes avec une ou plusieurs associations représentatives des responsables de services de garde en milieu familial; et, finalement, faire en sorte que les ententes, après approbation du gouvernement, s'appliquent à toutes les responsables de services de garde en milieu familial et à tous les titulaires de permis de centres de petite enfance.
Dans mon intervention aujourd'hui, je vais bien sûr reprendre les arguments tenus par mon collègue de Joliette hier, mais je voudrais également prendre du temps pour répondre à des arguments qui ont été avancés par la ministre hier et par des collègues députés ministériels.
D'abord, je trouve que la ministre a fait, en soi, une bonne intervention; c'était poli mais carrément aseptisé. Et, dans son intervention, elle a fait une omission, à mon sens, importante. Elle n'a pas parlé de la raison pour laquelle ce projet de loi se retrouve aujourd'hui devant l'Assemblée nationale: essentiellement parce qu'il y a eu un jugement du Tribunal du travail.
La ministre n'en a pas parlé dans son intervention hier, et ça, il me semble qu'on ne peut pas passer à côté de ça. On conviendra que, dans une société de droit, dans une société démocratique, un jugement qui est rendu par un tribunal, ce n'est pas rien, et la ministre n'en parle pas, c'est comme si ça n'existait pas. Et pourtant c'est la raison pour laquelle ce projet de loi se retrouve ici, devant nous.
Alors, la ministre nous a dit qu'elle veut confirmer le statut de travailleur autonome des responsables de services de garde en milieu familial. Elle a également dit, lors des consultations, que les responsables de services de garde en milieu familial sont propriétaires de leurs services de garde, qu'elles peuvent donner à leur entreprise l'orientation de leur choix et qu'elles sont les gestionnaires de leurs services de garde. Elle disait: Les responsables de services de garde sont des prestataires de services, donc des entrepreneures indépendantes ou, plus couramment comme on les désigne, des travailleuses autonomes.
Bien, M. le Président, c'est faux. C'est faux puis ce n'est pas l'opposition officielle qui le dit, c'est un tribunal. La juge Handman, dans la décision qu'elle a rendue le 1er mai dernier, dit: «Le[...] ? responsable de services de garde ? ne jouit pas de l'autonomie ni de l'indépendance économique caractéristique d'un entrepreneur indépendant. Le fait, pour un[...] ? responsable de services de garde ? de fournir ses qualifications personnelles et son travail dans un contexte où tant le service fourni que le rendement sont évalués, surveillés et contrôlés, ne correspond pas à un individu qui est en affaires pour lui-même; les faits démontrés ? les faits démontrés ? par la preuve constituent plutôt le portrait d'un salarié.» Et, aujourd'hui, on se retrouve avec une loi évidemment pour nous dire le contraire de ce que la juge a rendu comme décision.
Et puis ça, je pense que c'est important de le dire, Mme la Présidente. En ce qui me concerne, lorsque, dans une société démocratique, dans une société de droit comme la nôtre, un tribunal, en fonction de lois d'ailleurs adoptées par l'Assemblée nationale, dit: Mon interprétation, c'est celle-ci: les responsables de services de garde sont des salariés, que le gouvernement présente une loi pour dire: Le juge, ce n'est pas important ce que tu as dit, moi, je pense que c'est un précédent qui est important... Puis d'ailleurs c'est la démonstration que tentent de faire d'ailleurs les nombreux spécialistes qui s'expriment ce matin dans Le Devoir.
Hier aussi, la ministre et plusieurs des députés de l'autre côté de cette Chambre ont affirmé qu'ils répondaient à un choix exprimé par la très grande majorité des responsables de services de garde en milieu familial. M. le Président, je vais me permettre d'employer une image pour démontrer que cet argument-là ne peut pas tenir debout, même si d'ailleurs il était vrai, ce dont je doute ? ce dont je doute.
M. le Président, j'imagine un homme qui se dit président d'un collectif masculin puis qui va rencontrer le premier ministre. Il dit au premier ministre: M. le premier ministre, je désire être une femme. Le premier ministre lui dit: Pas de problème, on va présenter une loi à l'Assemblée nationale. Vous êtes un homme. C'est merveilleux. Le problème est réglé. Voilà! M. le Président, un peu plus tard, notre même homme revient voir le premier ministre avec son examen gynécologique, et le gynécologue dit: Bien non, je l'ai examiné, notre homme n'est pas une femme, je vous confirme que c'est bien un homme. Le premier ministre dit: Ce n'est pas grave, ce n'est pas important, on va de l'avant, on adopte la loi, on transforme un homme en une femme. C'est un argument simpliste. C'est un argument simpliste que vous nous avez présenté.
Le député de Vimont aussi, dans son argumentation hier, nous a dit que le gouvernement précédent avait lui-même appuyé un appel devant les tribunaux. M. le Président, de ce côté-ci de la Chambre, nous respectons le processus judiciaire, et, les lois sont claires, le processus est clair, il appartenait au Tribunal du travail de trancher, et rien, rien, ne permet aux gens d'en face d'affirmer que le précédent gouvernement n'aurait pas respecté ce jugement. Moi, j'estime que, dans une société démocratique comme la nôtre, que, dans une société de droit, la responsabilité du gouvernement, c'est de respecter les jugements.
Mais évidemment, pour le gouvernement conservateur d'en face, tout est permis, et ça m'amène d'ailleurs à nous interroger: pourquoi le gouvernement, pourquoi la ministre déléguée à la Famille tient tant à faire en sorte que les responsables de services de garde en milieu familial soient confirmés, comme elle le dit, dans leur statut de travailleuses autonomes? Elle nous a dit hier: Nous voulons travailler à l'amélioration des conditions de travail de ces personnes-là. Nous en sommes aussi, et c'est ce à quoi le précédent gouvernement travaillait avec les représentantes de ces réseaux-là également.
Mais, si c'est bien là l'objectif du gouvernement que de vouloir améliorer les conditions de travail des responsables de services de garde en milieu familial, mais pourquoi présenter ce projet de loi là? Parce que, en confirmant le statut de travailleuses autonomes plutôt que de salariées, bien, celles et ceux qui désiraient se syndiquer ne peuvent plus le faire. Puis là, encore une fois, dans une société de droit comme la nôtre, le droit à la syndicalisation est un droit fondamental. Bien sûr, la ministre dit: Moi, je vais choisir les associations qui peuvent représenter ces personnes-là.
n(16 h 30)n M. le Président, à sa face même, on se retrouvait dans une situation où certaines ? certaines ? responsables de services de garde en milieu familial voulaient se syndiquer. Puis d'ailleurs je dirais, parce que j'en ai rencontré quelques-unes dans le passé, je dirais que ce n'est pas nécessairement de gaieté de coeur qu'ils ont fait cette démarche-là, mais elles en étaient venues à la conclusion que, pour faire progresser leurs conditions de travail, c'était le meilleur outil possible. Et, avec le projet de loi, on leur retire maintenant cette possibilité-là, ce qui est en soi inacceptable. Puis on voit bien d'ailleurs qu'on se situe dans la logique d'un gouvernement conservateur. Vous voulez faire une grande réingénierie de l'État. D'ailleurs, j'estime que ce projet de loi là s'inscrit en quelque part dans votre démarche de réingénierie. Dans votre esprit, les syndicats sont un obstacle, alors qu'ils devraient être des alliés et des partenaires de l'État et de l'ensemble de la société. Pour vous, les syndicats sont un obstacle, donc, logiquement, on va prendre les dispositions nécessaires pour réduire l'influence syndicale dans notre société.
Je rappellerai, M. le Président, que les mouvements syndicaux, que les syndicats et que l'action syndicale, quand on regarde ça dans une période, depuis le début du siècle, s'il y a un acteur, s'il y a un mouvement qui a fait en sorte qu'on puisse améliorer de façon substantielle les conditions de travail de l'ensemble des citoyens et des citoyennes, bien, c'est le mouvement syndical. C'est le mouvement syndical. Et, aujourd'hui, avec cette loi-là, vous niez ce droit-là.
Bien sûr, ça ne touche pas beaucoup de travailleurs et de travailleuses, c'est vrai. Mais ça lance un message puissant dans l'ensemble de la société, un message qui va être compris par bien des employeurs, comme l'a illustré d'ailleurs mon collègue le député des Îles-de-la-Madeleine, hier, un bien mauvais signal où les employeurs désormais vont prendre des moyens, vont prendre des moyens puis déployer un ensemble de moyens pour empêcher la syndicalisation de personnes qui voudraient améliorer leurs conditions de travail, pour leur retirer le droit de négocier leurs conditions de travail. Ça, c'est l'État qui fait ça, et c'est inacceptable. C'est pour ça que, nous, de l'opposition officielle, nous allons nous opposer vigoureusement à l'adoption de cette loi-là. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de L'Assomption. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce projet de loi là? Alors, M. le député de Vachon. Oui, M. le député de Vachon, sur, toujours, l'adoption du principe du projet de loi, allez.
M. Camil Bouchard
M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Mon collègue de L'Assomption a rappelé tout à l'heure les objectifs de cette loi, je n'y reviendrai pas. Je reviendrai cependant sur ce que je retire des interventions qui ont été faites hier, dans cette Chambre, lors de l'examen du principe du projet de loi n° 8 par nos collègues du parti gouvernemental.
Il me semble que le principal argument qui ait été évoqué du côté gouvernemental pour défendre le principe de la loi, c'est que les ressources de garde, des services de garde en milieu familial, les responsables de garde en milieu familial sont des travailleurs ou des travailleuses autonomes, puisqu'ils ou qu'elles le disent. C'est l'argument principal, c'est l'argument récurrent que nous ont servi hier les membres du gouvernement à ce sujet. Ils sont des travailleurs autonomes, puisqu'elles ou qu'ils le disent.
Lors de l'étude du projet de loi en commission parlementaire, la présidente du Conseil des syndicats nationaux, accompagnée de son vice-président, nous rappelait que la désignation du statut dépendait des faits et non pas des souhaits, dépendait des observations factuelles et non pas des désirs d'être ceci ou cela. Et elle employait une image très suave, elle nous rappelait, par exemple, qu'elle se sentait jeune et que son collègue se sentait jeune, et que c'est une perception et que cette perception les satisfaisait, mais qu'il fallait bien constater, en regardant l'acte de naissance, qu'ils n'étaient pas si jeunes que ça.
Alors, il me semble que cette image est assez forte pour nous faire comprendre que, dans une société où il y a eu des faits établis ? et, dans ce cas-là, devant un tribunal ? que ces faits-là priment dans la définition, même si personnellement nous souhaiterions, en tant qu'individus ou en tant que membres d'une organisation, pouvoir se donner un autre statut. Tel n'est pas notre régime de droit, tels ne sont pas les règlements et les lois qui nous régissent. Et nous devons en quelque part reconnaître que les faits ont parlé et que les travailleuses et les travailleurs en question ont été désignés comme des employés et non pas des travailleurs autonomes.
Alors, cet argument que les membres du gouvernement nous ramènent constamment, à l'effet que la grande majorité... Et là il faudrait mettre en doute cette grande majorité parce que, vous me permettrez cette parenthèse, M. le Président, mais, hier, j'entendais la députée de Soulanges affirmer que l'Association, par exemple, des centres de la petite enfance représentait 15 000 personnes, mais ce n'est pas vrai, ce n'est pas exact. L'Association représente quelque chose comme 2 000 ou 2 000 quelques cents membres sur une possibilité de 15 000, ce qui représenterait à peu près 16 % des effectifs dans les centres à la petite enfance. Et, si on compare l'opinion de ce 16 % contre les 12 % qui ont demandé une accréditation, dans des conditions souvent extrêmement pénibles, bien, on se demande où est le souhait de la majorité. On ne peut pas parler de cette façon-là.
Alors, il me semble que cette position du gouvernement est très fragile. Et la position ou l'analyse qu'en ont faite aujourd'hui ? et mon collègue de L'Assomption l'a mentionné tout à l'heure ? l'analyse qu'en ont faite aujourd'hui de cette position gouvernementale les experts et spécialistes en la question, dont Jean Bernier, qui a produit un rapport extrêmement important sur cette question... Et, de fait, peut-être que la ministre serait intéressée de savoir que, parmi ces experts, il y a un professeur des écoles des relations industrielles de l'Université de Montréal du nom de Jean Charest. Alors, ça vous permettrait d'avoir des références usuelles.
Mais ces 14 personnes, 14 personnes ? et c'est assez rare qu'on voit, comme ça, une telle cohésion, une telle coalition s'exprimer autour d'un point de vue de droit du travail ? ces personnes sont unanimes à dire et à répéter ce que je viens d'énoncer, à savoir qu'il ne revient pas... Et je cite, M. le Président: «Il ne revient pas aux parties à la relation de travail de qualifier la nature du lien d'emploi. Il s'agit là d'une question d'ordre public. Et ce n'est pas parce que certains préféreraient être considérés comme des autonomes qu'ils cessent pour autant d'être salariés. D'ailleurs, dans les affaires qui nous intéressent ici, disent-ils, les tribunaux auxquels il appartient de le faire se sont prononcés clairement.» Alors, voilà un premier argument qui nous conforte dans notre position, de ce côté-ci de l'Assemblée nationale, à l'effet qu'il faut se référer aux faits.
Deuxièmement, M. le Président, ces mêmes analystes et ces mêmes experts nous disent ceci: On semble confondre la négation... Alors, ça, c'est très important, et j'appellerais l'attention de ma consoeur ? pour reprendre une expression du ministre de la Santé, il nous appelle ses consoeurs et ses confrères ? ma consoeur ministre déléguée à la Famille, j'attire son attention sur ce deuxième argument. Ces experts nous disent ceci: «On semble confondre la négation de l'exercice d'un droit fondamental et les craintes que peut inspirer sur le plan financier le résultat d'une éventuelle négociation.» Alors, il y a deux éléments très importants là-dedans. Premièrement, la confusion. C'est-à-dire que, puisque ça pourrait éventuellement coûter cher, nous mettons en équilibre très instable ? et on pèse très lourdement dans un des plateaux ? le fait que ça peut coûter cher contre un droit fondamental d'exercice de la syndicalisation. Alors, à ce compte-là, est-ce qu'on va mettre... est-ce qu'on va mettre en péril notre droit de parole dans une société démocratique? Ça coûte cher, le droit de parole, Mme la ministre. Ça coûte très cher. Combien ça nous coûte, l'Assemblée nationale? Combien ça coûte, nos tribunaux? Combien ça coûte, tous nos journaux où on s'exprime librement? Est-ce qu'on va mettre en doute ce droit fondamental de la liberté de parole? Est-ce qu'on va mettre en doute, Mme la ministre, le droit fondamental au logement parce que ça coûte cher? Est-ce qu'on va mettre en doute le droit fondamental à la santé parce que les hôpitaux coûtent cher, parce que les CLSC coûtent cher, parce que les groupes communautaires coûtent cher? Mais qu'est-ce que c'est que cette philosophie? Business?
Non, ça ne marche pas. On ne peut mettre, on ne peut mettre en déséquilibre, d'un côté, les droits fondamentaux devant des enjeux financiers apparemment menaçants. Alors ça, c'est l'autre aspect de l'affaire, c'est «apparemment menaçants». Mais le droit à la syndicalisation, Mme la ministre, ce n'est pas la syndicalisation. Le droit à la syndicalisation, c'est une capacité de faire un choix pour un travailleur ou une travailleuse, de se donner les moyens, à travers le Code du travail, de négocier avec son patron. Ça ne veut pas dire qu'il va vouloir devenir syndiqué. Ça veut dire, tout simplement, qu'il a le droit de choisir son régime de travail. Alors, cet argument d'un fardeau financier éventuel n'est même pas, à sa face même, un argument valable et acceptable, puisque, quelque part, il est de nature extrêmement hypothétique. Et, comme le disait le vice-président de la CSN, pourquoi faire un tel projet de loi si vous pensez que la plupart ne veulent pas se syndicaliser et veulent demeurer autonomes?
n(16 h 40)n Il y a aussi, dans l'approche gouvernementale, une erreur de logique. Si, d'un côté, on argumente que, puisque tout le monde veut devenir autonome, on les empêche d'exercer leur droit à la syndicalisation, pourquoi, en même temps, devons-nous argumenter, du côté gouvernemental, qu'il faut les empêcher de se syndicaliser? Difficile à suivre, très difficile à suivre.
De fait, de fait, ce que ces experts nous disent, c'est que le but réel de la loi, c'est de retirer à ces personnes dont on parle le statut de salarié qui leur avait été reconnu antérieurement. Et ça, c'est l'aspect déclaratoire de la loi. C'est-à-dire que toutes les personnes qui s'étaient éventuellement ou... antérieurement acquis une syndicalisation à travers le régime de loi précédent, ces personnes-là se verront retirer leur choix, retirer, Mme la ministre, leur liberté d'association.
Mais c'est formidable! C'est formidable, pour un parti qui nous dit depuis le début qu'il est pour les libertés individuelles, et que chacune des personnes devrait exercer son choix, et que chacune des personnes devrait se révéler dans ses talents et ses forces, et d'invoquer à tour de bras la notion de liberté et d'arriver avec un projet de loi qui finalement nous dit et dit à l'ensemble des Québécoises et des Québécois: Attention, on peut n'importe quand, en tant que gouvernement, vous retirer le droit à la syndicalisation parce qu'on peut n'importe quand vous dire si vous êtes autonome ou si vous êtes employé comme travailleur. C'est fantastique!
Alors, ça, ça nous mène à l'autre argument. Ça nous mène à l'autre argument, et à l'autre constat, et à l'autre inquiétude où les experts nous disent: Mais quel mauvais exemple! On est en train, en tant que gouvernement, de dire aux employeurs qui utilisent constamment des faux-fuyants dans leur façon de négocier le statut de leurs travailleurs ? ils ne sont pas la majorité, mais il y en a un certain groupe ? à dire à ces employeurs: Vous avez raison, si ça ne fait pas votre affaire, on a seulement à changer la loi, et ces travailleurs dont vous ne voulez pas de statut d'employé deviendront travailleurs autonomes, et, comme ça, bien, vous n'aurez pas besoin de leur payer des régimes de pension, les avantages sociaux, oubliez ça, puis la négociation des salaires, faites-vous-en pas, ils n'auront pas besoin d'utiliser le Code du travail, ils n'auront pas l'occasion d'utiliser le Code du travail, ils en sont exclus. Mais, cependant, inquiétez-vous pas, parce qu'on sait très bien que tous les employeurs, y compris le gouvernement, sont des bons employeurs. Ils vont reconnaître votre association, on va s'asseoir à la même table puis on va être fins, fins, fins, très gentils avec vous.
C'est ça que dit le projet de loi. C'est ça que dit le projet de loi. Et il y a plusieurs des personnes qui sont venues témoigner dans les commissions parlementaires qui s'en mordront les doigts éventuellement d'avoir acquiescé à ce projet de loi parce que, quelque part, ce n'est pas vrai qu'un employeur, même si c'est l'État, est toujours disposé à reconnaître les besoins fondamentaux de ses employés. Ce n'est pas vrai. Et la simple démonstration de ça est évidente: puisque le gouvernement a peur que ça lui coûte cher, il enlève le droit de négocier. Alors, imaginez-vous ce que ça va avoir l'air quand les groupes vont arriver, les associations, devant la ministre ? ou le ministre ? et qu'ils vont dire: On a besoin de meilleures conditions de travail. La ministre, bien, elle va répondre: Mais non, mais, écoutez, je n'ai pas le budget, je suis étranglée financièrement, mon ministre des Finances me demande de couper. Je ne peux pas. Alors, voilà.
Et où vont être les leviers de négociation de ces groupes-là, M. le Président, pouvez-vous me le dire? Où vont être les leviers de pression que ces gens-là pourraient éventuellement ou auraient pu éventuellement utiliser à travers le Code du travail? Mais ils ne seront pas là. Ils ne seront pas là. Alors, voilà pour l'essentiel l'analyse que font ces experts. J'ai mis peut-être un peu de passion dans ma lecture, Mme la ministre, mais, pour l'essentiel, Mme la ministre, si vous lisez le texte, vous allez me reconnaître, hein? Bon. Alors, je n'ai pas faussé le texte, mais je voulais mettre en évidence cette pièce extrêmement importante d'information pour que vous puissiez continuer à réfléchir à ce que vous avez entrepris.
M. le Président, au-delà de cette très importante négation d'un droit d'exercice d'une liberté de syndicalisation, au-delà de cela, j'ai quelques autres inquiétudes concernant ce projet de loi. Et je ne veux pas jouer au juge qui pressent un dessein machiavélique de la part du gouvernement parce que je pense qu'on agit tous dans cette Chambre de bonne foi, cependant, j'ai certaines inquiétudes de voir un scénario se développer, d'étape en étape, où, à partir de l'argumentation que nous faisait l'Association des garderies privées, on voudrait désinstitutionnaliser les garderies en milieu familial, en d'autres mots, qu'on voudrait les débrancher, les déconnecter de la responsabilité des centres de la petite enfance et du contrôle de qualité que pourraient exercer les centres de la petite enfance à leur endroit. Et d'ailleurs c'était une des grandes plaintes qu'on entendait de la part des garderies privées, c'est qu'ils étaient fatigués d'avoir à répondre constamment à des demandes de compte rendu devant les centres de la petite enfance.
Une des conséquences de cette loi, c'est de mettre en présence directe, en communication directe les responsables des services de garde en milieu familial avec la ministre déléguée à travers leur Association. Et là je pose tout simplement la question: Est-ce qu'on ne s'en va pas vers deux réseaux, un réseau qui serait géré par les parents et, en lui-même, par les centres à la petite enfance, où on prendrait des décisions vis-à-vis de la qualité et du développement des services de garde, et un autre réseau, indépendant des centres à la petite enfance, où on aurait un lien direct avec la ministre et on négocierait un autre régime d'environnement pour les enfants? Il y a un danger, là, M. le Président, que cette chose-là puisse apparaître dans un scénario qu'on ne voit peut-être pas tout le monde ensemble.
Et même on peut aller plus loin, on peut se demander si un jour ces travailleurs autonomes ne voudront pas transformer leurs services de garde en services de garde à but lucratif. Et, devant l'attachement que la ministre déléguée montre vis-à-vis de ces ressources à but lucratif, on peut être inquiet que ne se dessine là une occasion en or d'augmenter, de boursoufler quelque part le réseau des services de garde à but lucratif. Et on aurait raison, à ce moment-là, de s'inquiéter de l'évolution de ce réseau en termes de qualité de services parce que toutes les études dont nous disposons, y compris la dernière étude québécoise de M. Tremblay ? le professeur Tremblay, de l'Université de Montréal ? font la démonstration que les services en garderie privée évoluent moins rapidement vers des environnements de qualité optimale pour les enfants que ne le font les centres à la petite enfance.
Alors, voilà un scénario qui m'inquiète, qui devrait inquiéter la ministre. Il y a des portes qui sont ouvertes par le projet de loi qu'elle mène et qui pourraient éventuellement déboucher sur un tel résultat. Et, en même temps, en même temps, il faut bien voir qu'on assiste à la création de deux catégories de travailleuses, une catégorie qui va être reconnue comme employée d'une installation et une autre catégorie qui fait exactement le même métier, qui reçoit les enfants dans des environnements qu'on souhaite les plus bienveillants et les mieux équipés possible pour recevoir nos enfants mais qui aura un statut de travailleuse autonome. Alors, deux catégories de travailleuses. Quelque part, on peut être sûr que ce double statut dans notre régime des services de garde va engendrer des querelles, des désaccords importants entre les travailleurs et les travailleuses concernés.
n(16 h 50)n Mais finalement qu'est-ce qui est en cause, au bout du compte, M. le Président? C'est la qualité de l'environnement des enfants. C'est la qualité de l'environnement des enfants. Et, dans la qualité de l'environnement des enfants, ce qui me préoccupe beaucoup, avec le projet que nous annonce la ministre, c'est la stabilité des éducateurs et des éducatrices dans cet environnement. Des personnes qui ne peuvent accéder à des outils d'amélioration de leur environnement de travail et de leurs conditions de travail sont, à notre point de vue, moins enclines à demeurer longtemps dans le système, à y oeuvrer longuement et à y apparaître constamment dans l'environnement des enfants. Or, la constance de la présence d'un adulte dans le développement d'un enfant, c'est primordial pour deux choses, pour l'attachement que va développer l'enfant envers l'adulte, un, et, deux, pour la capacité de l'éducateur et de l'éducatrice à suivre son développement et non simplement à suivre le développement des enfants, mais à suivre aussi l'évolution de la relation entre les parents et l'enfant. Changez d'éducateur et changez d'éducatrice et vous venez d'introduire dans la vie de cet enfant un obstacle supplémentaire dans son développement.
Nous sommes d'avis que le présent projet menace cette stabilité parce que, quelque part, il menace les conditions de travail que peuvent se donner les éducateurs et les éducatrices en services de garde. La syndicalisation, Mme la ministre déléguée... M. le Président, la syndicalisation n'est pas une garantie éventuelle pour ces travailleurs et travailleuses qu'ils vont améliorer leur sort aussi vite qu'ils le souhaiteraient, mais ils ont au moins la garantie d'avoir accès à des outils de défense de leurs droits, comme le Code du travail, par exemple, et cet aspect-là est essentiel, selon nous, à leur capacité d'améliorer leurs conditions de travail. Alors, pour les raisons que j'ai évoquées, M. le Président, il est clair que je ne peux supporter le principe du projet de loi n° 8. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Vachon. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'adoption du principe de ce projet de loi là? Je n'en vois pas. Alors, Mme la ministre déléguée à la Famille, pour le droit de réplique. Alors, Mme la ministre et députée de Lévis.
Mme Carole Théberge (réplique)
Mme Théberge: Merci. Merci, M. le Président. J'aimerais, pour conclure ces discussions, rappeler certains faits. Les responsables de services de garde ont toujours été des prestataires de services offrant une prestation de services de garde aux parents. Le projet confirme cette situation et ne change pas leur statut, malgré les interprétations du député de Joliette et celles des signataires de l'article publié dans le quotidien Le Devoir de ce jour. Nous ne sommes pas dans un contexte de relations de travail mais dans une relation d'affaires entre une personne responsable du service de garde et un parent, où les services offerts sont coordonnés par les centres de la petite enfance.
J'aimerais mentionner également que non seulement le député de Joliette ne semble pas avoir compris cet élément, mais ne semble pas aussi avoir une haute opinion non seulement de la fonction que j'exerce, mais également de la volonté des principales intéressées à demeurer travailleurs autonomes. Son attitude, M. le Président, est au bord du mépris. Je trouve ça désolant parce que ces femmes, majoritairement, offrent un service impeccable, ce sont des milliers de femmes qui offrent un service impeccable depuis plusieurs années à des centaines d'enfants, avec grand succès d'ailleurs.
On a également mentionné la décision du Commissaire du travail. Notre gouvernement s'inscrit dans la même dynamique que celle enclenchée par le précédent gouvernement, où la ministre précédente avait confirmé son intention d'en appeler de la décision. Une requête en révision judiciaire devant la Cour supérieure sera entendue en décembre prochain. Le député de Joliette a commenté abondamment les jugements des tribunaux en prétendant que le droit créé était définitif. Quant à moi, je ne commenterai pas ce processus de révision.
Lorsqu'on parle de reconnaissance d'associations représentatives, le projet de loi confirme notre intention d'entendre les représentants d'associations représentatives des services de garde, de leur donner un lieu de discussion, de leur permettre de nous communiquer leurs besoins et de définir des priorités d'action. Je vous dirais que c'est bien loin de ce qu'a fait le gouvernement précédent dans les dernières années, parce que la présidente de l'Association des responsables de services de garde en milieu familial nous disait, lors des commissions parlementaires, qu'elle a vainement tenté de parler et de rencontrer les ministres responsables depuis plusieurs années.
Alors, à l'effet de répondre ensuite sur la reconnaissance d'associations représentatives, nous rejoignons les propos du député des Îles-de-la-Madeleine, puisque ces échanges nous conduiront à l'amélioration des conditions d'exercice des responsables des services de garde. Et, tout comme il a été discuté lors de la commission parlementaire, dans le projet de loi, les associations syndicales ne sont pas écartées du processus de reconnaissance d'une association. Je me permets de rappeler aux députés de l'opposition que le gouvernement joue un rôle de législateur dans ce projet et non un rôle d'employeur. Le gouvernement n'est pas l'employeur d'un responsable, d'une responsable de services de garde et de centres de la petite enfance non plus.
M. le Président, j'aimerais conclure en disant que nous travaillons pour les enfants. Et, la députée de Lotbinière l'a bien saisi, toutes ces révisions, tous ces éléments qui touchent les services de garde, nous le faisons pour le bien-être des enfants et le bien-être, conséquemment, des parents du Québec. Nous travaillons pour eux et nous les avons assurés de notre écoute et de notre compréhension, et nous le ferons avec, je vous dirais, tout l'enthousiasme et toute la collaboration que nous pourrons avoir autant des députés qui se sentent concernés et surtout de nos partenaires en services de garde. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la ministre déléguée à la Famille et députée de Lévis. Je ne vois pas d'autre intervenant, puisqu'on vient d'entendre le droit de réplique. Alors, à ce moment-ci, je dois solliciter... Est-ce que le principe du projet de loi n° 8, qui s'intitule Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance, est adopté?
Des voix: Adopté.
M. Boulerice: Sur division, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, adopté sur division. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission des affaires sociales
M. Dupuis: Alors, je fais motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée et évidemment pour que la ministre déléguée à la Famille en soit membre.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Gendron): Est-ce que cette motion est adoptée?
M. Boulerice: ...
M. Dupuis: Nous sommes rendus... Je réponds évidemment au député de Sainte-Marie?Saint-Jacques. Nous sommes à l'étape de l'envoi en commission parlementaire pour l'étude article par article. Tout le monde sait qu'à cette étape... On verra ce qui arrivera en commission.
Le Vice-Président (M. Gendron): C'est ce que j'allais dire, ce n'est pas l'étape prévue pour... Ce n'est pas mon rôle, là.
M. Boulerice: ...
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, cette motion est adoptée, la motion de référence, bien sûr. M. le leader, pour la suite de nos travaux.
M. Dupuis: Je vous réfère, pour que le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques finisse la journée heureux, je vous réfère donc à l'article 2 de notre feuilleton.
Projet de loi n° 7
Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, à l'article 2 de notre feuilleton d'aujourd'hui, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 7. Le projet de loi n° 7 s'intitule Loi sur les services de santé et les services sociaux. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Allez, M. le ministre.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: Merci, M. le Président. Depuis plusieurs années, la société québécoise a fait le choix de maintenir dans la communauté les personnes ayant besoin d'être hébergées, tout en favorisant leur insertion ou leur réinsertion sociale. De plus, les ressources d'hébergement public non institutionnel, c'est-à-dire les familles d'accueil, les résidences d'accueil et les ressources intermédiaires, ont très largement contribué à la réussite de ce que l'on a appelé la désinstitutionnalisation ? il va falloir pratiquer ce mot-là de façon répétée. Ces ressources ont permis à de nombreuses personnes vulnérables de vivre dans un milieu de vie le plus proche possible d'un milieu naturel. Ce milieu de vie est difficile sinon impossible à reproduire dans un contexte d'institution, d'où la nécessité de conserver la souplesse actuelle de ce secteur. Aujourd'hui, le retour en arrière n'est plus possible. En effet, il est essentiel pour le plus grand bien des personnes vulnérables de ne pas reculer et de surtout ne pas retourner au modèle de l'institution. Au contraire, il faut conserver, développer et promouvoir des modèles d'hébergement public non institutionnel.
Depuis un certain temps, les ressources d'hébergement public réclament une amélioration de leurs conditions d'exercice. Certaines d'entre elles ont choisi de se tourner vers les tribunaux afin d'être reconnues comme des employés salariés de l'établissement avec qui elles sont rattachées par contrat. En procédant ainsi, ces ressources ont renoncé à plusieurs des avantages que leur procure leur statut de contractuel, notamment la liberté d'action qu'il implique.
Toutefois, le gouvernement ne croit pas que le fait que le responsable d'une ressource devienne un salarié de l'établissement puisse être une solution. Les ressources d'hébergement ne peuvent être des salariés des établissements sans que cela n'affecte l'essence même des milieux de vie qu'elles constituent. En effet, le statut de salarié est davantage susceptible de soumettre les ressources à un ensemble de règles rigides, sans possibilité de s'y soustraire. Cela est tout à fait contraire à l'esprit même de ces ressources dont les mots-clés sont souplesse, autonomie et milieu de vie naturel. Nous croyons que, pour favoriser l'autonomie des personnes qu'ils accueillent, les responsables des ressources doivent également jouir d'un niveau d'autonomie appréciable. Ce point est, semble-t-il, largement partagé.
n(17 heures)n Le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui est devenu nécessaire. D'ailleurs, il y aurait lieu d'indiquer qu'il a été présenté par le gouvernement précédent et n'a pu être adopté vu le déclenchement des élections. Il faudra donc faire preuve de ce que je qualifierais d'un contorsionnisme intellectuel assez particulier pour passer du moment où on pensait présenter un projet de loi... où on présentait un projet de loi à l'Assemblée nationale dans l'intérêt même des ressources pour, aujourd'hui, dire que soudainement on s'y oppose.
Ce projet de loi poursuit deux objectifs. Le premier objectif est de clarifier le statut des ressources d'hébergement. Cette précision est nécessaire afin de préserver la souplesse essentielle qui les différencie des services offerts en institution. Le deuxième objectif est d'offrir aux ressources une véritable opportunité de faire valoir leurs besoins et d'améliorer leurs conditions d'exercice. Le gouvernement propose d'établir des ententes pour déterminer les conditions générales d'exercice des activités de même que l'encadrement normatif des conditions de vie des usagers. Le gouvernement reconnaît ainsi le rôle que les organismes représentatifs des ressources ont à jouer.
Le 16 septembre dernier, le gouvernement a convié les principaux organismes représentatifs des ressources et des établissements à venir exprimer leurs points de vue sur ce projet de loi, le projet de loi n° 7. Dans l'ensemble, les positions des organismes sont les suivantes. Trois des quatre principales associations de ressources sont en faveur du projet de loi, il s'agit de la Fédération des familles d'accueil du Québec, de la Fédération des ressources intermédiaires jeunesse du Québec et de l'Association des ressources intermédiaires du Québec. Elles sont venues rappeler que ce sont les mauvaises conditions d'exercice qui incitent les ressources à demander le statut de salarié à défaut de pouvoir obtenir mieux.
La quatrième association de ressources, le Regroupement des ressources résidentielles adultes du Québec, qui s'est récemment associée avec la Centrale des syndicats démocratiques, a pris position contre le projet de loi. Toutefois, malgré le dépôt de plusieurs requêtes en accréditation par cette organisation, le président du Regroupement a confirmé que les ressources sont des travailleurs autonomes et qu'ils ne désirent pas être des salariés des établissements. D'ailleurs, les membres du RESSAQ préfèrent à court terme la voie de la négociation d'un contrat social avec le ministre. Pour eux ? et je cite un passage de leur mémoire présenté en commission parlementaire ? «cette voie offre davantage de flexibilité que celle de la négociation d'une convention collective pour bien tenir compte de la spécificité de leur situation».
Les six associations d'établissements regroupant environ 138 établissements gestionnaires de ressources, dont l'Association des hôpitaux du Québec, l'Association des centres jeunesse, l'Association des CLSC-CHSLD et l'Association des centres de réadaptation en déficience intellectuelle, sont venues affirmer que le projet de loi est essentiel à la survie et au maintien du réseau d'hébergement public non institutionnel de même qu'à la préservation de la qualité de vie des usagers concernés.
Des organismes syndicaux se sont opposés au projet de loi qui viserait, selon eux, à retirer le droit d'association. En fait, le droit d'association est une liberté fondamentale protégée dans la Charte des droits et libertés de la personne de même que dans la Charte canadienne des droits et libertés. Vous me permettrez de réitérer à nouveau que notre gouvernement respecte et protège ce droit d'association au Québec et qu'en fait le projet de loi n° 7 consacre ce droit aux associations.
Par ailleurs, rappelons à nouveau que le projet de loi n° 7 fait suite au projet de loi n° 151 présenté le 12 décembre 2002 par le précédent gouvernement et, rappelons-le, qui n'a pu être adopté en raison de la tenue des élections générales en mars et avril derniers. C'est dire également que l'importance de préserver et de développer le réseau d'hébergement public non institutionnel fait consensus quel que soit le parti politique au pouvoir.
Cela étant dit, permettez-moi de revenir à l'essentiel et rappeler toute l'importance de la mission remplie par ces ressources afin de mieux comprendre la nécessité de ce projet de loi en insistant sur la nature particulière des services qu'elles offrent ainsi que sur leurs origines. M. le Président, on le sait, quel que soit le lieu où ils sont offerts, les services sociaux et de santé doivent reposer sur une approche assurant l'humanisation et la personnalisation des soins et services. Tout spécialement, la valeur des services et des soins dépendra toujours essentiellement de la qualité des contacts que les personnes hébergées établissent avec ceux qui les entourent. Cela est aussi vrai dans les ressources d'hébergement public non institutionnel, soit les ressources de type familial, environ 90 % de la population qui nous occupe, et les ressources intermédiaires. Ces ressources accueillent tous les types de clientèle: des enfants en besoin de protection et de réadaptation, des personnes âgées en perte d'autonomie, des personnes présentant des déficiences intellectuelles ou des incapacités physiques, des personnes avec des problèmes de santé mentale et, enfin, des personnes avec des troubles de mésadaptation sociale ou de toxicomanie.
En résumé, les ressources d'hébergement public non institutionnel accueillent des personnes qui ne peuvent vivre sans encadrement mais pour qui le milieu institutionnel ne répond pas adéquatement à leurs besoins. Et, actuellement, il y a environ 33 000 Québécois et Québécoises qui vivent dans ces ressources. Toutes ces personnes ont les mêmes besoins et les mêmes attentes que nous, elles cherchent dans ce qui est devenu leur demeure ce que nous voulons trouver nous-mêmes chez nous: l'autonomie de penser et d'agir, la sécurité et la chaleur, le plaisir d'y manger, d'y dormir et d'y vivre librement, la possibilité de se sentir utile et, si possible, d'être important pour quelqu'un.
Les responsables des ressources d'hébergement public non institutionnel offrent aux personnes qu'elles accueillent un milieu de vie impossible à reproduire dans un contexte d'institution. Pour 90 % des 11 000 responsables de ressources, cet accueil se fait, rappelons-le, dans leur résidence personnelle. La stabilité de la présence d'une personne, le maintien de liens étroits avec leur famille d'origine et les personnes avec qui elles ont des rapports significatifs sont essentiels pour donner aux personnes hébergées une image positive d'elles-mêmes. Cela demande, entre autres choses, une attente constante, un encadrement soutenu, le souci de l'autre et une grande capacité d'écoute.
En évoquant comme je viens de le faire les responsabilités d'une personne ayant choisi d'ouvrir sa porte à des personnes vulnérables, je rappelle en même temps l'importance et la complexité de cet engagement. On comprend alors que ne devient pas qui veut responsable d'une ressource comme les ressources de type familial ou intermédiaires. Et ce n'est pas d'hier, vous savez, que les gens partagent leur domicile avec d'autres personnes avec qui elles n'ont aucun lien de parenté. Bien que le concept de ressources intermédiaires remonte, sur le plan légal, au début des années 1990, l'hébergement public non institutionnel existait bien avant ce que l'on appelé la désinstitutionnalisation. Voilà, j'ai réussi.
Si vous me le permettez, M. le Président, j'aimerais rappeler brièvement le contexte dans lequel le réseau d'hébergement public non institutionnel a pleinement pris la place qui lui revenait afin de mieux comprendre les enjeux actuellement en cours. Tout d'abord, pour les ressources de type familial, c'est en 1954 et 1955 que se font les premiers placements dans ce qu'on appelait alors les foyers nourriciers. Le placement s'effectuait alors par les agences de service social. En 1971, la Loi sur les services de santé et les services sociaux crée l'entité juridique nommée famille d'accueil qui consiste en une ressource d'hébergement pour les enfants, les adultes et les personnes âgées sous la responsabilité des centres de services sociaux, les CSS de l'époque. C'est à compter du 1er avril 1993 que la responsabilité professionnelle et administrative des ressources de type familial a graduellement été transférée aux établissements désignés par les régies régionales.
Bien que nous reconnaissions qu'il y a toujours place à l'amélioration et à l'adaptation aux nouvelles réalités auxquelles font face les ressources de type familial, des actions concrètes ont été entreprises au cours des dernières années. En 2002 est publié le rapport Familles d'accueil et intervention jeunesse ? Analyse de la politique de placement en ressource de type familial. La réalisation des 45 recommandations de ce rapport est une des priorités du ministère, et, à ce jour, soulignons que la moitié d'entre elles a été réalisée ou est en voie de l'être.
En avril dernier, le guide d'orientation intitulé La pratique professionnelle et la ressource de type familial a été rendu disponible. Ce guide donne les orientations que les établissements doivent s'approprier et appliquer dans leur pratique quotidienne en concertation avec les ressources de type familial. Sa réalisation, en collaboration avec les associations de ressources, les associations d'établissements et les régies régionales, concrétise l'une des recommandations du rapport Familles d'accueil et intervention jeunesse ? Analyse de la politique de placement en ressource de type familial.
Au niveau financier, notre gouvernement a augmenté la rétribution de base des ressources de type familial, soit pour les enfants et pour les adultes, en injectant une somme additionnelle de 4,8 millions de dollars en 2003-2004. De plus, notre gouvernement a majoré l'allocation pour dépenses personnelles versée aux familles d'accueil pour couvrir les besoins des enfants, et cela représente une somme récurrente annuelle additionnelle de 3,5 millions. Et, pour l'année 2003-2004, c'est un ajout budgétaire de 8,3 millions de dollars. Il est à noter que les rétributions versées à ce type de ressource n'avaient pas été révisées depuis 1993, mis à part l'indexation, donc un progrès considérable sur le plan financier et, en plus, un ajout budgétaire récurrent.
Le développement des ressources intermédiaires remonte donc à une vingtaine d'années environ. Au fil des ans, des ressources intermédiaires ont été mises en place suivant des modèles diversifiés et selon des modalités financières très différentes d'une région à l'autre. Ces nouveaux types de ressources d'hébergement ont vu le jour afin de répondre aux besoins plus complexes des personnes ayant déjà vécu dans un milieu institutionnel ou que l'on ne souhaitait plus orienter vers ce milieu. Une réflexion s'est avérée nécessaire afin d'assurer l'équité tant à l'égard de l'accès à ces services qu'à l'égard de l'encadrement et du financement des ressources. Cette réflexion menée par notre ministère avec les différentes associations de ressources, les associations d'établissements ainsi que les régies régionales a abouti, en 2001, à l'adoption d'articles de loi relatifs aux ressources intermédiaires et d'un cadre de référence bien connu maintenant dans le milieu. D'ici le 1er avril 2004, l'implantation du cadre de référence sera terminée. Bien qu'il reste du chemin à parcourir, il y a consensus à l'effet que l'implantation du cadre de référence pour les ressources intermédiaires, bien acceptée par ces ressources, s'est révélée bénéfique pour tous.
n(17 h 10)n Il est donc important de comprendre que c'est à la suite d'une prise de conscience sociale que ce réseau s'est pleinement développé. Dans le cadre de la transformation des services de santé et des services sociaux, ces ressources sont maintenant devenues essentielles, devenant partie intégrante du continuum de services offerts. Bien que le choix des organismes représentatifs prévus dans ce projet de loi ne soit pas fixé, il est clair que, depuis plusieurs années déjà, les ressources se sont dotées d'associations pour les représenter. Ces associations sont devenues des partenaires importants pour le ministère, les régies régionales et les établissements. Elles ont contribué à faire avancer, de part leur représentation et leur connaissance du milieu, la situation des ressources d'hébergement public non institutionnel. Elles ont, entre autres, participé et elles participent toujours à divers comités mis en place par le ministère afin de trouver des solutions aux problèmes rencontrés par les ressources. Récemment, elles ont également répondu à l'invitation qui leur était faite de venir exprimer leurs points de vue concernant le projet de loi n° 7, et j'ai un peu plus tôt résumé leurs points de vue.
C'est dans l'optique de poursuivre cette collaboration que le gouvernement désire travailler avec les associations de ressources afin d'y discuter d'une entente qui permettra d'améliorer les conditions de leur exercice. Certaines ressources n'ayant pas réponse à leurs revendications ou aux irritants ont choisi de se tourner vers les tribunaux et se sont fait reconnaître le statut de salarié de l'établissement. En choisissant d'inscrire une clause déclaratoire dans son projet de loi, le gouvernement ne passe pas outre ses propres lois comme certains organismes l'ont prétendu. Au contraire, il estime que cette clause s'imposait, et ce, essentiellement pour deux raisons. D'abord, le législateur doit intervenir lorsque, de toute évidence, l'intention qu'il avait en légiférant n'apparaît pas assez clairement et que, dans le doute, on fasse une interprétation qui ne correspondait pas, de toute évidence, à cette intention initiale. L'intention du législateur, M. le Président, n'a jamais été de reconnaître les ressources à titre de salarié. Les récentes décisions judiciaires obligent le législateur, et c'est son devoir, à préciser davantage son intention d'origine. D'autre part, le fait de ne pas rendre ce projet déclaratoire aurait de facto créé deux catégories distinctes de ressources à l'intérieur d'une même mission, ce qui aurait été excessivement difficile à gérer et mettrait en péril l'avenir des ressources résidentielles en provoquant inévitablement un retour à l'hébergement en institution.
Toutefois, lors de la consultation particulière du 16 septembre dernier, les organismes représentatifs des ressources nous ont indiqué que des progrès ont été réalisés, mais nous sommes conscients qu'il reste beaucoup à faire. Les règles actuellement en vigueur, particulièrement celles encadrant la pratique des ressources de type familial, n'ont pas été révisées depuis 1993, alors que celles des ressources intermédiaires plus récentes datent de 2001 ? le cadre de référence dont nous parlions plus tôt.
Certaines ressources de type familial ou intermédiaires se disent insatisfaites du soutien qu'elles reçoivent de la part de l'établissement auquel elles sont rattachées. Outre des règles justes et équitables, les ressources réclament également une amélioration des conditions d'exercice, et nous comprenons que cette situation est source d'insatisfaction. À cela s'ajoutent l'ensemble des transformations vécues par le réseau de la santé et des services sociaux au cours des dernières années. Outre les changements d'ordre organisationnel, il y a aussi d'autres changements, notamment démographiques, comme l'allongement de l'espérance de vie entraînant bien sûr l'alourdissement des clientèles, et cela n'a pas été sans impact, M. le Président, pour les ressources d'hébergement public dont nous parlons aujourd'hui.
Le présent gouvernement a entendu le message envoyé par les ressources, et c'est pourquoi il propose dans son projet de loi de conclure une entente avec elles, comme le faisait le projet de loi déposé par l'ancien gouvernement. Il désire travailler avec les ressources de même qu'avec l'ensemble des partenaires impliqués, notamment les établissements, afin de trouver des solutions aux problèmes qu'elles rencontrent. On l'a vu, les ressources d'hébergement public non institutionnel jouent un rôle important. Toutefois, permettez que j'insiste sur ce point, elles seules peuvent offrir ce type de services complémentaires à celui des établissements publics que sont les centres hospitaliers de soins de longue durée, les hôpitaux psychiatriques, les centres jeunesse et les centres de réadaptation. Dans les milieux ruraux de même que dans les milieux urbains, les ressources d'hébergement public non institutionnel permettent non seulement à des personnes de demeurer près de chez elles, mais elles offrent aussi la possibilité aux personnes qui les accueillent de demeurer actives sur le plan économique.
Bref, les ressources d'hébergement public non institutionnel sont essentielles tant pour les personnes qu'elles accueillent que pour le bon fonctionnement de notre réseau de la santé et des services sociaux et ces ressources, comme on l'a vu, ont une histoire de plus de 50 ans. Leur adaptation aux nouvelles réalités apporte toujours de nouveaux défis. En somme, les caractéristiques de ces ressources ? permettez-moi de le rappeler ? qui, dans 90 % des cas, partagent leur propre domicile avec les personnes hébergées, constituent un formidable défi sur les plans réglementaire et administratif, car l'ensemble des règles encadrant les activités de ces ressources doivent viser trois objectifs: d'abord, permettre de conserver la souplesse du réseau; ensuite, garantir la qualité des services offerts aux personnes hébergées; et, enfin, considérer à sa juste valeur la contribution des responsables des ressources non institutionnelles. L'atteinte de ces trois objectifs doit se faire tout en respectant la pleine autonomie des responsables de ces ressources, qui, après tout, sont dans leur propre maison, en respectant un milieu de vie répondant aux besoins des personnes hébergées. Il s'agit là, M. le Président, d'un défi considérable.
M. le Président, le développement de ces ressources fait suite au souci d'offrir des services de qualité tout en prenant en compte l'intérêt de toutes les personnes concernées, que ce soient les personnes responsables de ressources, les personnes hébergées et l'ensemble de notre population.
Le gouvernement propose donc que le projet de loi n° 7 visant à modifier la Loi sur les services de santé et les services sociaux de façon à lever toute ambiguïté sur le statut des ressources de type familial et intermédiaires soit adopté parce qu'il est convaincu qu'il permettra aux responsables de ressources d'améliorer leurs conditions d'exercice et, par conséquent, de maintenir et d'améliorer la qualité des services offerts. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je remercie M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants pour poursuivre le débat sur le principe de ce projet de loi? Je reconnais Mme la députée de LaFontaine... excusez, de Pointe-aux-Trembles. Vous avez tout à fait raison, je me suis trompé. Alors, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Merci, M. le Président. Anciennement LaFontaine.
Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, oui, je suis au courant.
Mme Léger: On est trois comtés qui sont aujourd'hui... maintenant à LaFontaine.
Alors, M. le Président, mes collègues députés, nous sommes ici aujourd'hui pour débattre du principe du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, et qui a comme principale incidence de retirer un droit acquis à certains travailleurs de notre système de santé public, le droit à la syndicalisation.
Vous me permettrez, M. le Président, d'abord de rendre hommage à toutes ces travailleuses et à tous ces travailleurs qui gravitent dans le réseau de la santé et des services sociaux et qui offrent des services particulièrement à nos plus démunis de notre société. Il est primordial de faire en sorte d'améliorer la qualité de vie de ceux qui se dévouent effectivement pour offrir ces services.
Le gouvernement leur enlève un droit fondamental prévu à nos chartes et à nos lois, celui de se syndiquer, un droit fondamental, un droit à la personne. Que propose l'État comme solution de rechange? L'adoption potentielle du projet de loi tel que présenté par le ministre de la Santé et des Services sociaux, les ressources intermédiaires et de type familial ne pourront plus être reconnues comme des salariés au sens des lois du travail.
Dans au moins deux jugements, les tribunaux du travail ont reconnu le statut de salarié aux ressources intermédiaires et de type familial. Refuser de reconnaître le jugement des tribunaux équivaut, d'une part, à nier le droit à la syndicalisation reconnu dans les chartes, mais, d'autre part, à nier aussi certaines protections sociales offertes par les lois du travail au Québec. Cela m'amène à souligner le manque de planification et de cohérence de ce gouvernement qui semble choisir de mettre le rapport Bernier sur la protection sociale des personnes en situation de travail non traditionnel... dont nous en reparlerons.
Il faut souligner aussi que le gouvernement, tout en ne prévoyant rien pour ces travailleurs qui ne sont pas dits autonomes, il dépose un projet de loi qui ne l'oblige nullement à négocier une entente à ce jour non définie. Quelle perspective! Ce même gouvernement qui va même jusqu'à prévoir une clause de rétroactivité à ce projet de loi qui annulera toutes les accréditations existantes au Québec pour les ressources non institutionnelles d'hébergement.
Tout d'abord, il faut savoir que ces ressources limitent le recours à l'institutionnalisation des personnes souffrant de divers problèmes, notamment de déficience intellectuelle, de perte d'autonomie, de toxicomanie, ou autres. La clientèle est donc très vaste et de tous les âges. Les ressources intermédiaires sont des ressources rattachées à des établissements publics, comme, par exemple, par les régies régionales qui, afin de maintenir ou d'intégrer à la communauté un usager inscrit à ce service, lui procurent par l'entremise de cette ressource un milieu de vie adapté à ses besoins et lui dispensent des services de soutien ou d'assistance requis par sa condition.
Une ressource de type familial, ressource intermédiaire, ce sont des familles, des milieux de vie qui essaient de retrouver ce milieu familial ou ce milieu de rôle parental. En 2002, plus de 1 300 ressources intermédiaires accueillaient près de 9 000 personnes de tous les âges et de toutes problématiques, des personnes souvent vulnérables, des personnes souvent sans famille.
n(17 h 20)n Pour ce qui est des ressources de type familial particulièrement, il existe deux types si on peut qualifier ainsi les deux types, soit celle des familles d'accueil qui accueillent au maximum de neuf enfants en difficulté qui leur sont confiés par un établissement public afin de répondre à leurs besoins et leur offrir des conditions de vie favorisant une relation de type parental dans un contexte familial... Il faut aussi parler, M. le Président, des résidences d'accueil qui accueillent au maximum neuf adultes ou personnes âgées qui leur sont confiées par un établissement public afin de créer ce milieu de vie se rapprochant le plus possible d'un milieu naturel. Il existe au Québec près de 10 000 ressources de type familial qui accueillent plus de 20 000 personnes. Et il est évident que, dans ce genre de milieu, c'est un milieu aussi qu'on appelle un milieu de vie, mais c'est un milieu aussi qui prend la personne dans son ensemble, ce qui veut dire aussi au plan émotif, au plan affectif, pour ses joies, pour ses peines, donc qui exige parfois une attention plus particulière, qui exige parfois aussi davantage de soins ou davantage d'accompagnement.
Depuis avril 2001, les ressources intermédiaires bénéficient d'un cadre de référence ? j'entendais le ministre en parler tout à l'heure, qui a dit qu'il était bénéfique pour tous, effectivement, mais il y a toujours des améliorations à y apporter ? et ce cadre de référence là est basé sur une réflexion menée par différents partenaires du réseau de la santé et des services sociaux, des associations représentatives, des organismes communautaires et bien d'autres.
Ce document définit les modalités d'application des articles de la Loi sur les services de santé et les services sociaux régissant les ressources intermédiaires et pour en faciliter la compréhension. Ainsi, on y précise la définition d'une ressource intermédiaire, la gamme de services donc qu'elle doit offrir, les types d'organisations résidentielles à l'intérieur desquelles les services peuvent être offerts, la classification de ces services, la rétribution qui y est associée, etc., rétribution, contribution, expertise, capacité d'intervention, les heures-soins, etc.
Les ressources de type familial bénéficient pour leur part, depuis avril 2003, d'un guide d'orientation qui, entre autres objectifs, fournit aux établissements un ensemble de standards de base à respecter dans le but d'assurer le développement, l'utilisation et le maintien de ressources aptes à répondre aux besoins diversifiés des usagers et qui favorisent une uniformité accrue, une plus grande transparence et une plus grande équité dans les pratiques en ce qui a trait aux relations des établissements avec les ressources de type familial et les usagers qui en dépendent.
On ne peut donc pas déclarer, et c'est ce que les tribunaux ont reconnu, que les ressources intermédiaires et les ressources de type familial sont des travailleurs autonomes, puisque leur travail est régi par un cadre, par des balises concrètes et des standards définis. Pour être considérées comme travailleurs autonomes, les ressources devraient, par exemple, pouvoir déterminer les tarifs de leurs services, choisir leurs usagers et déterminer leurs standards de qualité. Les ressources non institutionnelles d'hébergement ne sont pas indépendantes dans l'exercice de leur travail.
Lors des consultations, que nous avons eues, particulières sur le projet de loi n° 7 il y a quelques semaines, nous avons entendu divers groupes: des représentants des associations d'établissements, la Fédération des familles d'accueil du Québec, la Fédération des ressources intermédiaires jeunesse du Québec, l'Association des ressources intermédiaires du Québec, l'Association des résidences et CHSLD privés du Québec, entre autres, plus le milieu syndical.
La plupart de ces associations, sauf le milieu syndical, se disaient favorables au projet de loi et revenaient à la nécessité d'un statut différent pour les ressources intermédiaires et de type familial vis-à-vis les établissements publics. Le statut différent, c'est être reconnu. La reconnaissance d'un droit d'association permettrait, selon eux, de préserver la souplesse et l'intégrité du modèle des ressources non institutionnelles d'hébergement. Les établissements publics craignent une explosion des coûts et la création d'un vaste système dont la gestion serait complexe, entre autres à cause de l'application de certaines lois du travail, notamment la Loi sur les normes du travail, la Loi sur la santé et la sécurité du travail et la loi sur les services essentiels. Aussi, pour le réseau de la santé et des services sociaux, le fait que le statut des ressources non institutionnelles d'hébergement soit clarifié constitue une avancée. Pour les organismes que représentent ces travailleurs, cette clarification est aussi bien accueillie, du moins dans la majorité des cas.
La Fédération des familles d'accueil du Québec, la Fédération des ressources intermédiaires jeunesse du Québec, l'Association des ressources intermédiaires d'hébergement du Québec ont été unanimes à un point de vue: il est essentiel de préserver un statut distinct pour les ressources. Donc, les groupes sont venus nous dire: un, de préserver leur statut distinct; deux, cette reconnaissance gouvernementale à leur égard; trois, de respecter cette souplesse qu'il y a dans le milieu de vie qui n'est pas institutionnel; et, quatrièmement, clarifier leur statut.
Les groupes sont aussi essentiellement satisfaits de pouvoir conclure une entente avec le ministre sur leurs conditions de travail, ce qui est qualifié par tous de droit d'association. Par contre ? et c'est là qu'il faut se rappeler que chacun des groupes tient à ce que sa spécificité soit réservée et préservée ? la Fédération des familles d'accueil veut négocier pour les familles d'accueil, et ainsi de suite. Déjà, le ministre est avisé de la difficulté pour lui de négocier une seule entente avec tous les groupes qui représentent des membres aux intérêts pas nécessairement convergents. Quels seront les organismes représentatifs? Qu'est-ce que c'est, une seule entente?
Pour ce qui est des syndicats, c'est une autre paire de manches. Les grandes centrales syndicales du Québec ont déposé des mémoires devant la commission des affaires sociales. Elles sont unanimes, ce projet de loi leur apparaît comme un véritable scandale, «une bonne dose de mécontentement et de perplexité», disent-ils. Pour la Confédération des syndicats nationaux, la CSN, pour la Fédération des travailleuses et travailleurs du Québec, la FTQ, et la Centrale des syndicats du Québec, la CSQ, le gouvernement met en place des législations pour se soustraire à ses propres lois. Plus encore, le gouvernement décide de n'entendre ni l'Organisation mondiale du travail... internationale du travail ni les tribunaux. Mais, plus que tout, les syndicats sont venus rappeler au gouvernement que le droit à la syndicalisation est fondamental au Québec et qu'il est actuel. La CSN a même reconnu, devant la commission, que les ressources intermédiaires de type familial ne voulaient pas d'une convention collective comme celle du réseau de la santé et des services sociaux, c'est dire à quel point tous sont unanimes sur la spécificité du modèle des ressources non institutionnelles d'hébergement.
Dans notre société, M. le Président, le droit d'association et de négociation collective est protégé par la Charte des droits et libertés. Comment peut-on se soustraire à ces textes sans tenter d'imaginer une situation de rechange favorable à tous? Les tribunaux du travail se sont penchés sur la question du statut des ressources intermédiaires et de type familial, et, par deux fois, le Tribunal du travail a confirmé qu'elles avaient le statut de salarié.
En juin 2001, dans le cas du Centre du Florès, le juge Saint-Arnaud s'appuie sur deux arrêts où les juges en venaient à la conclusion qu'il existait une subordination juridique et économique entre les ressources et leurs donneurs d'ouvrage, dans ce cas-ci un centre de réadaptation en déficience intellectuelle.
En septembre 2002, l'honorable juge Louis Ménard en venait à la même conclusion dans le cas du Centre de réadaptation de l'Ouest de Montréal. La reconnaissance d'un statut de salarié va de pair avec l'application des lois du travail. La syndicalisation, telle que prévue au Code du travail, est un droit reconnu dans nos sociétés. Excusez-moi. On peut arrêter quelques secondes pour que j'aille boire de l'eau?
Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, on va suspendre pendant quelques minutes. Alors, la séance est suspendue.
(Suspension de la séance à 17 h 29)
(Reprise à 17 h 31)
Le Vice-Président (M. Gendron): Je cède à nouveau la parole à la critique de l'opposition officielle en cette matière, députée de Pointe-aux-Trembles. Mme la députée.
Mme Léger: Merci, M. le Président. C'est une toux sèche que j'ai. Mais le porte-parole du gouvernement, qui est le ministre de la Santé et Services sociaux, qui est un médecin, peut-être qu'il pourrait me donner des trucs pour la toux sèche aujourd'hui. Alors, je prends une petite pastille. Il me dit d'aller plus vite peut-être, là, pour terminer. Non, je regrette, il faut continuer.
Le Vice-Président (M. Gendron): ...s'occuper de vous. Alors, vous pouvez y aller, Mme la députée.
Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, ça ne m'empêchera pas d'avoir des convictions sur ce projet de loi.
La reconnaissance d'un statut de salarié va de pair avec l'application des lois du travail. La syndicalisation, tel que prévu au Code du travail, est un droit reconnu dans nos sociétés. Comment un gouvernement peut retirer ce droit? Là est la question aujourd'hui. L'État-employeur donne un bien mauvais exemple en se soustrayant à des décisions des tribunaux et en utilisant son pouvoir de législateur pour choisir le statut de certains travailleurs.
Il est indéniable aussi que le milieu syndical a aussi à s'adapter à ces nouveaux milieux de vie pour eux. La nécessité... Comme le disait, dans un des mémoires qu'ils nous ont laissés, la CSN, «la nécessité de prévoir plusieurs formules d'hébergement mieux adaptées aux besoins des bénéficiaires ne doit pas faire en sorte que les travailleurs et travailleuses qui leur dispensent les services ne soient pas considérés comme des membres de la main-d'oeuvre active à part entière. Ces travailleuses et ces travailleurs ont le droit d'être représentés par une organisation syndicale et non pas une association désignée par législation. Ces travailleuses et ces travailleurs ont aussi le droit de négocier.» Une réflexion s'est aussi effectuée au Québec au sujet de la protection sociale des travailleuses et travailleurs en situation de travail non traditionnel. Il s'agit de ce qu'on appelle communément le rapport Bernier. J'inviterais le Conseil des ministres à en prendre connaissance si ce n'est pas déjà fait, surtout le ministre du Travail, que nous n'avons nullement entendu sur cette question. Où est le ministre du Travail dans ces projets de loi, n° 7 aujourd'hui et n° 8 que nous avons terminé tout à l'heure? Que pense-t-il sur les projets de loi nos 7 et 8? Si, en tant qu'État-employeur, le gouvernement du Québec choisit de donner aux ressources intermédiaires et de type familial le statut de travailleur autonome, ce qui, pour être crédible, comporte des modifications profondes du mode de fonctionnement des ressources face aux établissements, encore faut-il s'assurer d'éliminer les exclusions et les écarts de traitement basés sur le statut d'emploi.
C'est ce dont le rapport Bernier traite. Il recommande, entre autres, de transformer la notion de «salarié» au Code du travail pour y inclure la notion de «personne travaillant pour un autre moyennant rémunération, salariée ou non, en vertu d'un contrat de travail et qui s'oblige à fournir personnellement une prestation de travail pour cette autre personne dans un cadre ou selon les modalités telles qu'elle est placée sous la dépendance économique de cette dernière». Le rapport Bernier recommande également que la définition de «salarié» soit également révisée pour la rendre pareille à celle recommandée par le Code du travail, mais surtout, sous ce rapport, un régime-cadre de représentation collective des travailleurs non salariés devrait être mis en place afin de favoriser leur accession à une meilleure protection sociale. Je ne crois pas que le projet de loi n° 7 nous amène sur cette piste.
En effet, le projet de loi n° 7 est discutable à plusieurs points de vue. Il s'agit, premièrement, de savoir si l'entente que le ministre promet sera vraiment une entente négociée ou alors imposée. Il est certain que le projet de loi, tel que présenté, n'est basé que sur la bonne foi du ministre et n'offre aucune garantie à aucune association, représentative ou non aux yeux du ministre. Jean Bernier, professeur en relations industrielles de l'Université Laval et président du comité qui a rédigé le rapport Bernier, parle de mode de détermination unilatérale des conditions de travail, de projet de loi purement négatif qui retire des droits et ne propose rien en échange.
Le ministre va-t-il maintenir les ressources intermédiaires et les ressources de type familial à la merci des contrats du ministère? Les conditions de travail seront-elles vraiment améliorées? Nous avons aujourd'hui d'ailleurs, dans La Presse, dans Le Devoir particulièrement, un article de plusieurs universitaires, dont Jean Bernier ? je ne sais pas si le ministre en a eu connaissance aujourd'hui ? et cet article est intitulé Un dangereux précédent. Les projets de loi 7 et 8 visent essentiellement à retirer le statut de salarié aux ressources intermédiaires. Il y a plus d'une dizaine d'universitaires qui ont signé cet article-là aujourd'hui. Je crois que, si le ministre de la Santé et des Services sociaux partage mon intérêt pour les conditions de travail des ressources non institutionnelles d'hébergement, il devrait se donner l'obligation, ne serait-ce que par diligence auprès des personnes se dévouant auprès des plus démunis, de négocier une entente juste, équitable, et de l'inscrire dans le projet de loi.
De plus, le projet de loi n° 7 ne définit absolument pas les modalités de négociation. Le gouvernement actuel semble n'avoir que peu de considération pour les instruments dont s'est doté le Québec pour encadrer des négociations collectives. Je fais ici référence au charcutage qui se prépare dans l'article 45. Évidemment, cela s'adresse au ministre du Travail. Où est le ministre du Travail? En ce qui a trait au projet de loi n° 7, rien n'est prévu d'ailleurs pour définir l'avenue de la négociation, comme c'est le cas dans le Code du travail pour la négociation de conventions collectives. Comment s'articulera cette négociation? Est-ce qu'il va y en avoir une? Il est clair que c'est le ministre qui possède tout le pouvoir de négociation.
Je m'inquiète également quand je lis que le ministre compte ne signer qu'une seule entente pour toutes les ressources non institutionnelles d'hébergement. Si je regarde le texte des notes explicatives, il est bien clair que ce projet de loi attribue, en outre, au ministre de la Santé et des Services sociaux le pouvoir de conclure, avec un ou plusieurs organismes représentatifs ? un ou plusieurs ? des ressources intermédiaires ou des ressources de type familial, une entente pour notamment déterminer les conditions générales d'exercice des activités à ces ressources et prévoir diverses mesures relatives à la rétribution de leurs services.
Nous avons aussi entendu en commission le Regroupement des associations d'établissements publics du réseau de la santé et des services sociaux. Nous avons pris bonne note de leur observation, mais il serait grand temps que le ministre nous informe sur la place que prendront ces institutions dans les négociations. Auront-ils leur mot à dire? Comment voit-il leur rôle dans le projet de loi n° 7? Mais c'est surtout la représentativité des organismes que le ministre doit répondre: Qui pourra négocier avec le ministre? Qui sera privilégié? Sur quelle base seront-ils choisis? Il existe de petites associations locales et régionales partout au Québec, dans toutes les régions du Québec, qui ont peur de ne pas être considérées dans la future entente. Il n'est pas simple d'imaginer comment toutes les ressources intermédiaires et de type familial se considéreront visées par cette entente.
Je voudrais citer M. Bernier encore une fois qui résume admirablement bien ce projet de loi: «Non seulement on leur enlève le statut de salarié, les privant ainsi de toute la protection sociale reliée au statut de salarié, on ne propose rien en contrepartie.» Dire qu'ils ont leur droit d'association... Le ministre, je l'entendais dire tout à l'heure qu'on ne leur enlève pas le droit à la syndicalisation: De toute façon, ils ont le droit d'association. Quelle sera la protection sociale dans ce droit d'association? Alors, j'espère qu'on entendra le ministre sur cette question. Dire qu'ils ont ce droit d'association, que l'État pourra conclure des ententes avec les associations représentatives, on parle d'une entente: Est-ce que c'est une entente pour tout le réseau? Est-ce que c'est une entente expressément pour les familles d'accueil? Est-ce qu'il y aura une entente... une autre entente pour les résidences telles et d'autres formes de résidence? Ce n'est pas clair, le ministre n'est pas clair dans son projet de loi à ce niveau-là.
n(17 h 40)n On ne leur reconnaît aucun droit, non plus, de négocier leurs conditions collectives de travail. On ne définit d'aucune façon les critères de représentativité des associations. Quels seront ces critères? Ils seront basés sur quoi? On n'en définit pas le mode de consultation, on ne leur reconnaît d'aucune façon le droit de recourir à des moyens de pression économiques. C'est ce qu'on a pu avoir dans le droit du travail, dans le Code du travail. Le droit de négociation, le droit de manifester, tous ces droits-là sont dans nos codes du travail.
Nous croyons que ce projet de loi est l'équivalent d'un chèque en blanc au gouvernement. Nous ne pouvons pas présumer que la négociation sera de bonne foi. C'est le Code du travail qui offre cette protection, et le ministre choisit de catégoriser les travailleurs afin qu'ils n'aient pas droit à la négociation de bonne foi. Je vois le ministre sourire, j'imagine qu'il a des réponses et qu'il aura des réponses pour nous à toutes ces questions. L'État-employeur donne un mauvais exemple aux entreprises privées en se soustrayant par projet de loi à une décision des tribunaux, comme si on pouvait choisir le statut des employés comme État. Une telle démarche doit impérativement suivre une vaste réflexion sur la protection sociale des travailleurs en situation de travail non traditionnel, ce qui ne semble pas être le cas pour le gouvernement. Je déplore une fois de plus ce silence total, l'absence du ministre du Travail également dans ce dossier.
J'espère que le ministre s'inspirera des avancées du Québec à l'égard de ces lois, à l'égard du travail, de ces luttes syndicales, de cette liberté syndicale, dois-je dire, à l'avancement des travailleuses et des travailleurs au Québec, de ces femmes souvent majoritaires dans ce milieu, qui méritent la reconnaissance et des conditions de travail dans le sens de l'amélioration et non d'un recul d'une démarche de réingénierie ou de défaire ce qui a été bien fait précédemment. Avançons, M. le ministre, ne reculons pas.
Alors, vous avez un projet de loi qui indique plus ou moins, je pourrais dire, d'avancement dans la suite des choses pour les travailleuses et travailleurs, et je suis inquiète évidemment, M. le Président, je suis inquiète de l'absence de réponse du ministre à des questions qui ont été posées durant la commission parlementaire. Effectivement, les groupes sont des groupes qui pensent qu'il y aura une avancée. Je souhaite, M. le ministre, que vous allez répondre aux besoins des gens qui sont venus devant vous nous dire qu'ils veulent améliorer leurs conditions de travail, nous dire évidemment aussi que peut-être ils ont peur à la syndicalisation, peut-être qu'ils n'ont pas le goût à la syndicalisation. Mais, ça, ça reste leur droit parce qu'ils pourront et ils ont ce droit-là à se syndiquer. Avec ce projet de loi, vous leur enlevez ce droit-là, et ça, c'est majeur pour que nous puissions adopter le principe aujourd'hui. Merci.
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles et porte-parole en ces matières. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants ou intervenantes sur le principe de ce projet de loi?
Je vois Mme la députée de La Pinière, alors je vous cède la parole, Mme la députée.
Mme Fatima Houda-Pepin
Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, je voudrais prendre la parole sur le projet de loi n° 7 à cette étape de l'étude de principe et appuyer le ministre de la Santé et des Services sociaux. J'ai écouté attentivement la présentation qu'il nous a faite et j'ai écouté également avec grande attention les remarques de notre collègue la députée de Pointe-aux-Trembles. Et mon premier commentaire, c'en est un d'interrogation parce que notre collègue de Pointe-aux-Trembles s'inquiète beaucoup du fait que le gouvernement puisse s'ingérer dans le droit, dans un droit qui est consacré par la Charte, et elle fait référence à la syndicalisation, le droit qui est consacré par la Charte étant bien entendu le droit d'association, et cela, nous le respectons, le ministre de la Santé l'a clairement indiqué. Je voudrais quand même préciser que le projet de loi n° 7 qui est devant nous, il reprend essentiellement les éléments du projet de loi n° 151 qui a été déposé par l'ancien ministre de la Santé et des Services sociaux devant cette Assemblée, lequel projet de loi n'a pas pu suivre les étapes subséquentes parce que, justement, il y a eu une élection. Alors, je m'étonne de voir notre collègue aujourd'hui argumenter dans le sens qu'elle l'a fait, alors qu'elle siégeait au Conseil des ministres lorsque le projet de loi n° 151 a été soumis à ce moment-là.
L'autre remarque que je ne peux m'empêcher de rappeler, M. le Président, nous avons fait ici même un débat très, très houleux autour de Hertel-des Cantons, un problème majeur justement où le gouvernement du Québec, à l'époque le Parti québécois qui était au pouvoir, a précisément procédé de la même façon, c'est-à-dire qu'il a présenté un projet de loi devant cette Assemblée pour contourner une décision des tribunaux, et, à ce moment-là, on était dans l'opposition, nous avons fait nos commentaires là-dessus.
Mais donc, M. le Président, ce n'est pas une procédure qui est complètement extraordinaire. Ce que le projet de loi n° 7 veut faire, c'est justement d'apporter les précisions et clarifier en fin de compte une situation qui pourrait être ambiguë. Et d'ailleurs, dans les notes explicatives du projet de loi, il est clairement indiqué, M. le Président, que «ce projet de loi modifie la Loi sur les services de santé et les services sociaux afin de préciser, de façon déclaratoire, qu'une ressource intermédiaire ou une ressource de type familial est réputée ne pas être à l'emploi ni être une salariée de l'établissement public qui recourt à ses services et que toute entente conclue entre eux pour déterminer leurs règles de fonctionnement est réputée ne pas constituer un contrat de travail». Donc, je ne vois pas dans cet énoncé, M. le Président, une violation de la Charte des droits ou d'un de ses articles.
Je voudrais également, M. le Président, rappeler pour ma mémoire, parce que, quand j'ai lu le projet de loi et écouté notre collègue le ministre de la Santé et notre collègue la députée de Pointe-aux-Trembles, je ne peux pas m'empêcher de rappeler qu'en janvier 2002, lorsque je suis rentrée des vacances de Noël, le premier dossier qui m'a été soumis dans mon bureau de comté, c'est une rencontre avec les représentants des ressources externes qui sont venus se plaindre que le gouvernement de l'époque, c'est-à-dire le gouvernement de la députée de Pointe-aux-Trembles, dont elle faisait partie d'ailleurs à titre de ministre; il annonçait la coupure de 50 % des ressources intermédiaires dans ma région, la Montérégie. Et ces gens-là étaient complètement abasourdis, et inquiétés, et préoccupés de voir que le gouvernement... non pas qu'il modifiait les règles de fonctionnement de ces ressources, mais les éliminait complètement, et laissait les jeunes en difficulté sans ressources, et laissait les personnes en difficulté sans ressources. Alors donc, M. le Président, je crois que le projet de loi n° 7, lui, il consacre finalement le rôle des familles d'accueil et des ressources intermédiaires comme des partenaires de premier plan des institutions publiques en santé et services sociaux.
Le projet de loi n° 7 donne donc suite au projet de loi n° 151 issu de l'ancien gouvernement. Il vise à préciser le statut des ressources intermédiaires, des ressources de type familial, c'est-à-dire des ressources d'hébergement publiques non institutionnalisées qui accueillent des personnes jeunes et moins jeunes qui ont besoin d'encadrement et de support. On parle ici de ressources intermédiaires qui hébergent des enfants qui ont besoin de protection ou de réadaptation. Nous en avons tous dans nos comtés respectifs, de ce genre de ressources. Ça vise également les personnes âgées en perte d'autonomie, les personnes atteintes de déficience intellectuelle, les personnes ayant des incapacités physiques, les personnes représentant un problème de santé mentale ainsi que les personnes avec des troubles de mésadaptation sociale ou toxicomanie. Donc, le spectre des besoins est très, très vaste, et, M. le Président, il faut, dans ce contexte-là, faire preuve d'une grande flexibilité et d'une grande souplesse pour pouvoir justement répondre à tous ces besoins et le faire avec une approche très humaine.
On sait, M. le Président, que ces ressources intermédiaires d'hébergement répondent à des besoins de quelque 33 000 personnes. C'est le chiffre que nous avons à date. Nous savons que, dans nos comtés respectifs, nous avons aussi entendu parler des préoccupations de ces ressources, mais c'était surtout au niveau de la qualité des services et au niveau de la pérennité de ces services. Et là, M. le Président, aujourd'hui, le ministre nous annonce non pas des coupures, mais des ajouts d'argent dans ces ressources, et ça, c'est une très, très, très bonne nouvelle, M. le Président.
n(17 h 50)n Et ce qu'il faudrait aussi se rappeler, c'est que, lorsqu'on parle de familles d'accueil ou lorsqu'on parle de ressources intermédiaires, le plus important, c'est le service qui est livré. Et ces services, il faut qu'ils soient adaptés, il faut qu'ils soient adéquats et qu'ils répondent à toutes les clientèles dans leur grande diversité, et dans leur grande diversité aussi selon les régions.
D'ailleurs, cet hébergement se fait largement en résidence personnelle. C'est le cas pour 90 % des 11 000 responsables de ces ressources. Cette proximité permet de tisser des liens étroits entre les résidents et les familles d'accueil. Ces résidents, qu'ils soient jeunes ou que ce soient des personnes âgées, c'est très important de savoir qu'on a l'encadrement autour de nous, qu'on a les gens qui peuvent nous supporter. Et c'est une tradition d'ailleurs qui n'est pas récente. Elle s'inscrit dans la tradition de solidarité qu'on connaît dans le Québec, notamment depuis que les foyers nourriciers existaient dans les années cinquante. Et, par contre, il a fallu attendre 1971 avant que le statut juridique des familles d'accueil soit établi dans la loi sur la santé et les services sociaux. Et plus tard, évidemment, cette responsabilité va être transférée graduellement à la régie régionale de la santé et des services sociaux qui va faire l'interface avec les ressources intermédiaires.
Bref, en 2000... 2002, on sait qu'il y a eu un rapport qui a été publié, Familles d'accueil et intervention jeunesse ? Analyse de la politique de placement en ressource de type familial, et de ce rapport, M. le Président, découlent un certain nombre de recommandations, 45 au total. Et on sait qu'à ce jour il y a au moins la moitié de ces recommandations qui sont réalisées ou en voie de l'être. Et, comme je le disais tantôt et que le ministre nous a annoncé dans sa présentation, il y a eu un ajout de 4,8 millions de dollars en 2003-2004 au niveau des ressources financières, qui ont été ajoutées, un autre ajout de budget supplémentaire de 8 250 000 $ pour 2004-2005 et 3,5 millions de dollars de plus pour l'allocation de dépenses aux familles, et tout ça pour répondre aux besoins des différents usagers et des différentes clientèles.
Donc, M. le Président, les ressources intermédiaires ne sont pas mises en péril et encore moins le droit de négociation ou la possibilité de signer des ententes avec les institutions publiques et les ressources intermédiaires. C'est quelque chose que le projet de loi n° 7 vient clarifier. Et c'est un projet de loi qui va dans la bonne direction, je crois, M. le Président, parce que notre priorité comme gouvernement, c'est d'offrir des services et des services de qualité et au plus grand nombre des usagers des services de santé et services sociaux.
Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, moi, je serai très enthousiaste à appuyer le projet de loi n° 7, et j'invite ma collègue et mes collègues de l'autre côté à regarder les aspects positifs et les solutions qui sont apportées par ce projet de loi. Et j'espère que, d'ici la fin du processus, on pourra éventuellement s'entendre pour voter ensemble sur le projet de loi n° 7, bien entendu en faveur. Merci, M. le Président.
Ajournement
Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière. Compte tenu de l'heure, il ne reste que cinq minutes... j'ai reçu des indications du leader du gouvernement, pour ne pas entamer le droit de parole du prochain parlementaire, nous allons ajourner les travaux à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 17 h 54)