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Version finale

36th Legislature, 2nd Session
(March 22, 2001 au March 12, 2003)

Tuesday, November 19, 2002 - Vol. 37 N° 130

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de M. Dieter Hertrampf, consul général
de la République fédérale d'Allemagne à Montréal

Présence de M. Paul-Gérin Lajoie et d'élèves venus souligner
le 25e anniversaire de la Fondation Paul-Gérin-Lajoie

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures douze minutes)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place.

Affaires du jour

Mme la leader adjointe du gouvernement, nous sommes aux affaires du jour.

Mme Vermette: Merci, M. le Président. Alors, je vous demanderais, s'il vous plaît, de regarder l'article 25 de notre feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 143

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, on prend ça en considération, Mme la leader. Alors, M. le ministre du Travail propose l'adoption du principe du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives. Alors, M. le ministre du Travail, je vous cède la parole.

M. Jean Rochon

M. Rochon: Oui, M. le Président. Le projet de loi n° 143 qui modifie la Loi sur les normes du travail représente une révision substantielle de la Loi des normes du travail qui date déjà de plus de 20 ans. C'est en effet en 1979 que le gouvernement du Parti québécois adoptait la première loi qui allait assurer aux personnes salariées du Québec des conditions minimales de travail.

En 1999, au début du mandat actuel du gouvernement, on a pris l'engagement de moderniser les lois du travail afin de les adapter aux nouvelles réalités du monde du travail. Le premier volet de cet engagement portait sur le renouvellement du Code du travail, la loi qui régit le processus de la négociation collective et qui s'applique aux salariés syndiqués ou ceux qui sont en voie de l'être. Cet engagement a été réalisé en juin 2001.

Le second volet de cette modernisation concerne la Loi sur les normes du travail, une loi fondamentale pour la majorité des personnes salariées au Québec, qu'elles soient syndiquées ou non. À preuve, en 1901, on dénombrait au Québec environ 3 millions de salariés et, de ce nombre, 1,6 million étaient des salariés non syndiqués, soit un peu plus de 58 % de la main-d'oeuvre québécoise, et ces personnes, il faut se le rappeler, n'ont que la Loi des normes du travail pour établir leurs conditions de travail. Par ailleurs, des 181 474 employeurs au Québec, 80 % d'entre eux n'ont généralement que cette loi aussi pour encadrer les conditions de travail de leurs employés. C'est donc dire toute l'importance que revêt cette loi dans la société québécoise.

Je rappelle que la révision des normes du travail a fait l'objet de consultations que j'ai menées en mai et juin derniers sur la base d'un document de consultation intitulé Revoir les normes minimales du travail: un défi collectif. Ces consultations ont été très riches et nous ont permis de recueillir des commentaires de près d'une quarantaine de groupes relativement aux modifications proposées par la loi.

Cette révision que nous présentons vise essentiellement à atteindre trois objectifs: d'abord, élargir la protection de la loi à un plus grand nombre de salariés; deuxièmement, soutenir davantage la conciliation du travail avec la vie personnelle et familiale; et, enfin, assurer une meilleure protection aux salariés, et cela, il faut bien le rappeler, tout en tenant compte de la réalité des entreprises québécoises.

Il est également important de souligner que des modifications proposées dans ce projet de loi s'inscrivent dans une cohérence gouvernementale de plusieurs de ses politiques dont les objectifs poursuivis sont complémentaires. Ainsi en est-il de la politique de lutte contre la pauvreté, la politique familiale, la politique en matière de condition féminine, la politique de la jeunesse et le plan d'action à l'égard des aînés.

L'ensemble des modifications qui sont proposées dans le projet de loi s'articulent autour de sept thèmes principaux, qui sont les suivants: le renforcement du caractère universel de la loi, le harcèlement psychologique, la conciliation du travail avec les responsabilités familiales et les responsabilités de la vie personnelle, les jours fériés, chômés et payés, la protection des salariés, la garantie du paiement du salaire minimum et le licenciement collectif. Alors, pour une meilleure compréhension de ces modifications, je pense qu'il est bon de les aborder brièvement chacune en succession.

D'abord, le renforcement du caractère universel de la loi. Cette première modification touche les salariés agricoles, les gardiennes de personnes et les domestiques qui résident chez leur employeur. D'abord, les salariés agricoles. Présentement, la loi et la réglementation distinguent plusieurs catégories de salariés agricoles en les excluant d'une ou de plusieurs normes du travail. C'est le cas notamment d'un salarié d'une petite ferme. Le terme «petite ferme», qui ne désigne pas nécessairement une ferme ayant une petite superficie ou un faible chiffre d'affaires, c'est un terme qui désigne plutôt une ferme où ne travaillent habituellement que trois salariés ou moins, peu importe le nombre de salariés occasionnels, ce qui représentait, lors de l'adoption de la Loi des normes du travail, en fait, une petite entreprise familiale.

Cependant, la réalité d'aujourd'hui est différente avec la modernisation et l'automatisation des fermes. Compte tenu du caractère d'exclusion qui est lié au nombre habituel de salariés, c'est-à-dire trois ou moins, la très grande majorité des travailleurs agricoles sont privés de l'application du salaire minimum et de la durée de la semaine normale de travail. Dans la pratique, cependant, la plupart des producteurs agricoles offrent une rémunération qui est au moins égale au salaire minimum même si aucune obligation ne leur en est faite en vertu de la loi.

Le retrait des exclusions se rapportant à l'agriculture pourrait aider le secteur agricole, particulièrement celui de l'horticulture, à attirer un plus large bassin de travailleurs et à les garder en emploi. Ainsi, le projet de loi propose d'accorder à tous les salariés agricoles le droit aux différentes dispositions relatives au salaire, dont le droit au salaire minimum, tout en maintenant cependant l'exclusion de la durée de la semaine normale de travail.

Le deuxième groupe de personnes, les gardiennes et les gardiens de personnes. Présentement, la Loi des normes du travail exclut le salarié ou la salariée dont la fonction exclusive est d'assumer ? et je cite la loi ? d'assumer la garde ou de prendre soin dans un logement d'un enfant, d'un malade, d'une personne handicapée ou âgée, y compris le cas échéant, d'effectuer des travaux ménagers qui sont directement reliés aux besoins immédiats de cette personne, si l'employeur ne poursuit pas, par des fins lucratives, au moyen de cette activité... Fin de la citation.

Aucune raison de principe, en fait, ne peut justifier que des gardiens et des gardiennes de personnes ne soient pas protégés par la loi. L'absence de protection accordée à ceux et à celles qui gardent et prennent soin d'une personne au domicile familial relève plutôt d'un problème pratique qui est lié principalement à la capacité de payer des familles.

Le projet de loi prévoit d'assujettir les gardiennes et les gardiens de personnes sauf pour la durée de la semaine de travail et le prélèvement des cotisations. Toutefois, la loi ne s'appliquerait pas lorsque cette fonction est exercée de manière ponctuelle ou si elle est fondée sur une relation d'entraide familiale ou communautaire. Cet assujettissement ne serait mis en force que progressivement au cours des cinq prochaines années suivant l'adoption de la loi afin de bien appréhender la réalité et de faire les ajustements nécessaires.

Enfin, dans la couverture qui est proposée pour la loi, nous avons les domestiques qui résident chez leur employeur. Actuellement, le domestique qui réside chez son employeur reçoit un salaire minimum de 288 $ par semaine depuis le 1er octobre 2002. Comme on le sait, ce salaire sera porté à 292 $ par semaine à compter du 1er février 2003, et ce, pour une semaine de travail de 49 heures. Alors, en fait, il s'agit d'un salaire minimum au niveau de 5,88 $ et, en février, de 5,96 $, alors que le régime général prévoit un taux horaire de salaire minimum à 7,20 $ de l'heure depuis le 1er octobre 2002 et salaire qui sera porté à 7,30 $ à compter de février 2003, et ça, pour une semaine normale de travail de 40 heures plutôt que 49 heures.

n (10 h 20) n

L'existence de deux régimes de rémunération concernant le salaire minimum et les heures supplémentaires entre les domestiques résidentes et les domestiques non résidentes qui sont couvertes par les termes généraux de la loi, cette différence de régime entre les deux types de domestiques soulève une question d'équité entre ces deux groupes de travailleuses qui exercent pourtant les mêmes tâches.

La loi prévoit donc, le projet de loi prévoit donc que les domestiques qui résident chez leur employeur auront aussi droit au taux général du salaire minimum, et la durée de leur semaine normale de travail serait de 40 heures.

Deuxième thème couvert par le projet de loi: le harcèlement psychologique au travail. Le harcèlement psychologique au travail est une réalité qui entraîne des coûts individuels et sociaux très importants, et les recours actuels ne permettent pas d'assurer aux salariés une protection efficace. En effet, les recours civils sont souvent longs et coûteux pour le salarié. La Loi sur les normes du travail présentement n'interdit pas spécifiquement le harcèlement psychologique et seules certaines situations peuvent être couvertes indirectement par les articles 122 et 124. D'autres recours peuvent être exercés en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles mais ne permettent d'intervenir uniquement qu'à la fin d'un processus et qu'à la suite d'une lésion professionnelle constatée. Et le droit de refus de travailler, qui est prévu, lui, dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail, ne peut être exercé qu'en cas de danger pour la santé ou la sécurité. Finalement, il y a un recours possible en vertu de la Charte québécoise des droits et des libertés de la personne, et ce recours permet une intervention devant la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse ou devant le Tribunal des droits de la personne uniquement pour les cas de harcèlement qui sont basés sur un motif de discrimination prévu à l'article 10 de cette loi.

Ainsi, notre projet de loi envisage de nouvelles dispositions afin d'introduire dans la loi d'abord une définition de la notion de harcèlement psychologique ainsi que le droit pour tous les salariés de bénéficier d'un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique et une obligation faite aux employeurs de prendre les moyens nécessaires pour assurer un tel milieu de travail. De plus, un recours spécifique contre la harcèlement psychologique au travail est ainsi institué par le projet de loi n° 143. Parallèlement à l'introduction de ces nouvelles dispositions, un travail est actuellement en cours pour développer des outils afin d'aider les employeurs à prévenir le harcèlement psychologique en milieu de travail et pour établir des mesures de soutien pour les personnes qui en sont victimes.

Un troisième thème du projet de loi est la conciliation du travail avec les responsabilités familiales et la vie personnelle. Ce thème réfère à quatre volets bien précis: d'abord, les absences pour cause de maladie ou d'accident; deuxièmement, les congés parentaux; puis les absences pour des raisons familiales; et, enfin, la durée du travail.

Les absences pour cause de maladie et d'accident. Présentement, la loi interdit à l'employeur de congédier, de suspendre ou de déplacer un salarié qui a trois mois de service continu pour le motif qu'il s'est absenté pour cause de maladie ou d'accident durant une période de plus de 17 semaines au cours des 12 derniers mois. La loi n'établit pas cependant expressément le droit de s'absenter pour maladie ou accident. Cette ambiguïté crée de la confusion entre les parties. Ce type de plainte représente, année après année, à peu près 40 %, soit un peu plus de 1 000 plaintes, si on se réfère à l'année 2001-2002, et les motifs de ces plaintes qui sont évoqués lors du dépôt se réfèrent à la notion d'une pratique interdite.

Quant à la durée maximale du congé, la période de 17 semaines est insuffisante. En effet, les absences pour maladie exigent souvent un arrêt de travail qui est supérieur à cette durée. Le projet de loi prévoit donc l'insertion, au chapitre des normes du travail, du droit du salarié de s'absenter sans salaire durant une période d'au plus 26 semaines, au lieu de 17, au cours des 12 derniers mois, l'employeur devant réintégrer le salarié dans son poste actuel.

Maintenant, les congés parentaux. Dans le cadre de la politique familiale qui a été annoncée en 1997, l'adoption de la Loi sur l'assurance parentale, loi qui n'est pas encore en vigueur, exige une meilleure harmonisation des dispositions de la loi. En effet, si les remplacements de revenus de travail durant les congés parentaux déterminent grandement leur utilisation, encore faut-il que les parents qui bénéficient de ces mesures soient assurés de réintégrer leur emploi habituel après le congé. Par ailleurs, rappelons que, depuis le 31 décembre 2000, la Loi sur l'assurance-emploi prolonge à un an les congés parentaux qui sont payés en vertu de cette loi. De plus, l'absence pour un congé parental étant considéré comme un congé sans solde, les régimes de retraite et d'assurance collective prévoient généralement que les cotisations sont entièrement payables par le salarié.

Dans un premier temps, les dispositions pertinentes à l'harmonisation avec la Loi sur l'assurance-emploi entreraient en vigueur dans les meilleurs délais. Quant à celles relatives à l'harmonisation avec la Loi sur l'assurance parentale, incluant le nouveau congé de paternité de cinq semaines, elles entreront en vigueur à la même date que cette dernière loi.

Donc, notre projet de loi propose de préciser à cet effet des périodes d'absence similaires aux périodes d'admissibilité à des prestations de remplacement du revenu. Il prévoit aussi que la participation du salarié aux régimes de retraite et d'assurance collective reconnus à son milieu de travail ne doit pas être affectée par son absence, sous réserve du paiement de ce dernier des cotisations qui sont exigibles et dont l'employeur assume sa part habituelle. Enfin, le projet de loi stipule qu'à la fin d'un congé le salarié a le droit de réintégrer son emploi habituel lors de son retour au travail avec les mêmes avantages, y compris le salaire auquel il aurait droit s'il était resté au travail.

Un troisième volet, l'item de la conciliation du travail avec les responsabilités de la vie familiale et personnelle, se réfère aux absences pour des raisons familiales. Actuellement, un salarié peut s'absenter cinq jours par année, sans salaire, pour remplir des obligations qui sont reliées à la garde, à la santé ou à l'éducation de son enfant mineur lorsque sa présence est nécessaire en raison de circonstances imprévisibles ou hors de son contrôle. Les salariés qui doivent prendre soin de leur enfant majeur, de leur conjoint ou de parents âgés ne bénéficient pas de la même protection en cas d'absence pour ces raisons. La nécessité de leur présence dans ces situations ne devraient pas leur faire craindre cependant de perdre leur emploi.

Ainsi, le projet de loi prévoit de passer de cinq à 10 jours par année durant lesquels un salarié pourrait s'absenter sans salaire lorsque sa présence est nécessaire auprès de son conjoint, de son enfant, de l'enfant de son conjoint, de son père, de sa mère, d'un frère, d'une soeur ou de l'un de ses grands-parents. Il est aussi prévu qu'un salarié qui a trois mois de service continu pourra désormais s'absenter sans salaire pour une durée maximale de 12 semaines au cours des 12 derniers mois lorsque sa présence est nécessaire auprès d'une personne identifiée précédemment ? la liste que je viens de citer ? et qui serait atteinte d'une grave maladie ou qui aurait été victime d'un grave accident. Le salarié devrait cependant aviser son employeur de son absence et, à la demande de l'employeur, lui fournir un document qui justifie cette absence.

Enfin, la durée du travail, sous le thème de la conciliation du travail et des obligations familiales. En principe, la loi permet à un employeur d'obliger le salarié à faire des heures supplémentaires. Cependant, cette prérogative n'est pas absolue. En effet, le salarié a droit à un repos d'une durée de 24 heures consécutives à chaque semaine dans la loi actuelle. Aussi, outre ces motifs, le salarié peut faire des heures supplémentaires demandées, sauf en cas de danger pour sa santé ou sa sécurité ou si le travail est susceptible de porter atteinte à son intégrité physique. Le refus d'obtempérer sans motif valable constitue une faute suffisante permettant de rompre le contrat de travail.

Une proportion importante de salariés travaillent peu d'heures alors que d'autres en font beaucoup. Cette pratique permet à des employeurs de s'adapter aux exigences de la demande sans avoir à embaucher et à payer de nouvelles charges sociales. De plus, une durée de travail excessive peut avoir un impact nuisible sur la santé physique ou mentale ou sur la sécurité au travail et sur la vie familiale. Donc, le projet de loi augmente de 24 à 32 heures consécutives la durée minimale de repos hebdomadaire.

n (10 h 30) n

Le projet de loi prévoit aussi d'introduire dans la loi un droit de refuser de travailler soit plus de quatre heures au-delà des heures habituelles quotidiennes de travail ou plus de 14 heures par période de 24 heures, selon la période la plus courte; ou, dans le cas du salarié dont les heures quotidiennes de travail sont variables ou effectuées de manière non continue, plus de 12 heures de travail par période de 24 heures. Le salarié peut aussi refuser de travailler au-delà de 50 heures par semaine. Cependant, le droit de refus de travailler ne pourrait s'exercer dans trois types de situation: d'abord, s'il y a un danger pour la vie, la santé ou la sécurité des travailleurs ou de la population; deuxièmement, s'il y a un risque de destruction ou de détérioration grave des biens meubles ou immeubles, ou autres cas de force majeure; et, enfin, lorsqu'il y a des obligations de respecter un code de déontologie professionnel.

Quatrième thème de notre révision proposée: les jours fériés, chômés et payés. La loi prévoit sept jours fériés et chômés. Parmi ces jours, il y a quatre lundis, si on inclut le congé pascal. Pour que le salarié ait accès à l'indemnité, il faut que le congé férié coïncide avec un jour ouvrable. Ce critère s'applique facilement lorsque le salarié compte un emploi standard, à durée indéterminée, mais, compte tenu de la diversité grandissante des statuts d'emploi, emplois temporaires, occasionnels, sur appel, et encore d'autres variantes, et de la variété, en plus, des horaires de travail afférents à ces différentes situations, cette référence est de moins en moins valable, surtout pour les personnes qui travaillent selon un horaire autre que celui du lundi au vendredi. En plus de la difficulté d'application de ce critère, cette balise fait en sorte que les salariés sans horaire conventionnel n'ont souvent pas le droit à une indemnité ou à un congé compensatoire. De plus, le salarié doit justifier de 60 jours de service continu pour avoir droit à un congé ou à une indemnité, ce qui empêche les nouveaux employés d'en bénéficier. Cette norme, au Québec, est la plus exigeante de tout le Canada.

La notion de jours ouvrables est particulièrement préjudiciable aux salariés qui n'ont pas d'horaire fixe et qui ne travaillent pas ordinairement les lundis, comme cela est souvent le cas pour les salariés à temps partiel dans les commerces de détail, d'hôtellerie ou la restauration. De plus, ces emplois sont généralement peu rémunérés, sans compter qu'ils sont proportionnellement plus souvent occupés par des jeunes qui sont souvent des étudiants. Par ailleurs, l'indemnité serait équitable si elle correspondait à la quantité de travail fournie par le salarié dans la période qui a précédé le congé, à l'instar de ce qui existe déjà pour le calcul de l'indemnité afférente aux congés annuels, c'est-à-dire les vacances.

Donc, le projet de loi recommande de retrancher la notion de jour ouvrable ainsi que l'exigence de service continu pour déterminer l'admissibilité du salarié à une indemnité ou à un congé compensatoire. En supprimant ces deux conditions, l'admissibilité à une indemnité ou à un congé compensatoire serait établie uniquement en fonction du salaire gagné au cours d'une période donnée. Le retrait de l'exigence d'une période de service continu profitera aussi aux salariés qui occupent un emploi depuis peu de temps. Le calcul du quantum de l'indemnité sera également remplacé par une indemnité égale à un vingtième du salaire gagné au cours des quatre dernières semaines de paie précédant la semaine dans laquelle tombe le congé férié, sans tenir compte des heures supplémentaires cependant. Quant au congé pascal, l'employeur aurait le choix entre le Vendredi saint ou le lundi de Pâques pour donner ce congé à ses salariés.

Le cinquième thème de notre révision vise la protection des salariés et comprend trois situations particulières: d'abord, le maintien du statut de salarié; deuxièmement, le recours à l'encontre d'un congédiement sans cause jugée suffisante; et, enfin, le recours à l'encontre d'une pratique interdite.

Le maintien du statut de salarié, ce qui réfère en fait à ce qu'on appelle communément le «faux travailleur autonome». Certains employeurs, en effet, tentent d'éviter l'application de la loi en modifiant des postes pour les qualifier d'emplois autonomes. Cette modification est parfois imposée au salarié qui n'a d'autre véritable possibilité que d'accepter. S'il refuse, il risque de s'exposer à la perte de son emploi. Cette question est également liée de près à la précarisation du travail et elle prive les salariés de leurs droits en favorisant l'évitement de l'application des lois du travail et le paiement des charges sociales. Même si la jurisprudence fournit plusieurs critères pour déterminer le véritable statut d'un salarié, la loi doit indiquer, pour être efficace, doit indiquer clairement que ce dernier a le droit au maintien de son statut réel, et ce, malgré toute qualification par les parties. Ainsi, notre projet de loi prévoit que le salarié bénéficiera du recours s'il refuse de consentir à la modification de son statut de salarié en celui d'entrepreneur ou de prestataire de services lorsque les changements apportés ou proposés par l'employeur au mode d'exploitation de son entreprise n'auraient effectivement pas pour effet de modifier vraiment le statut du salarié. Il en sera de même en raison d'une enquête que la Commission des normes du travail pourrait faire dans le but de mieux faire observer la loi dans une entreprise.

La deuxième situation concernant la protection des salariés vise le recours à l'encontre d'un congédiement sans cause juste et suffisante. Présentement, le salarié qui possède trois ans de service continu au sein d'une même entreprise et qui croit avoir été congédié sans cause juste et suffisante peut soumettre une plainte à la Commission des normes du travail. Cependant, la période de trois ans empêche plusieurs salariés d'exercer ce recours qui vise à contrer des congédiements abusifs et arbitraires. Le projet de loi propose de diminuer de trois à deux ans la période de service continu requise pour condition d'exercice de ce recours.

Enfin, le recours à l'encontre d'une pratique interdite pour la protection des salariés. Présentement, la loi interdit à un employeur ou à son agent de congédier, de suspendre ou de déplacer un salarié, d'exercer à son endroit des mesures discriminatoires ou des représailles ou de lui imposer toute autre sanction pour une série de motifs qui sont énumérés dans la loi. Cependant, le recours du salarié en certains cas est parfois insuffisant ou incomplet pour lui assurer la protection nécessaire à son maintien en emploi ou bien à ses conditions de travail.

Les dispositions concernant le droit de s'absenter pour cause de maladie ou d'accident feront l'objet d'une nouvelle section de la loi au même titre que les autres normes. Ainsi, en cas de contravention, le salarié bénéficiera du recours prévu à la loi en cas de pratique interdite. Le projet de loi comprend donc une interdiction à un employeur ou à son agent de congédier, de suspendre ou de déplacer un salarié, d'exercer à son endroit des mesures discriminatoires ou des représailles ou de lui imposer toute autre sanction pour le motif que le salarié aurait refusé de travailler au-delà de ses heures habituelles de travail, vu la nécessité de sa présence auprès d'un proche, bien qu'il ait pris les moyens raisonnables à sa disposition pour assurer autrement ses obligations familiales et parentales. Il s'agit d'une adaptation en fait d'une disposition qui existe déjà dans la loi.

Le sixième thème, dans notre révision, vise la garantie du paiement du salaire minimum et comprend les points suivants: d'abord, le droit de recevoir le salaire minimum; deuxièmement, le salaire habituellement pour pourboire; et le paiement de l'uniforme, de même que le paiement des outils, des frais de voyage et des coûts de la formation qui est exigé par l'employeur.

D'abord, le droit de recevoir un salaire minimum. La loi permet à l'employeur de verser le salaire sur une base autre que horaire, notamment sur la base de rendement, à commission ou sur facturation. Malgré leur pertinence, ces modes de rémunération font parfois en sorte que des salariés sont payés en dessous du taux général de salaire minimum. Ainsi, le droit fondamental au salaire minimum n'est pas toujours respecté quand les salariés sont payés sur une base autre que le taux horaire. Alors, le projet de loi propose donc de stipuler spécifiquement dans la loi que tout salarié a le droit de recevoir un salaire au moins équivalent au salaire minimum.

Maintenant, la situation du salarié habituellement au pourboire. Présentement, ni la loi ni son règlement ne définissent clairement le salarié au pourboire. C'est la régularité des pourboires, c'est-à-dire le nombre de clients qui en laissent, qui permet de déterminer si le salarié est payé au pourboire. Cette interprétation est trop restrictive et elle est inéquitable pour plusieurs travailleurs de la restauration rapide car, même s'ils reçoivent effectivement des pourboires de façon habituelle, la règle actuelle ne tient pas compte de leur importance pour assurer le taux général du salaire minimum prévu par la loi.

Par ailleurs, il est de pratique courante que les salariés au pourboire conviennent de répartir entre eux les pourboires qui leur appartiennent ou d'en distribuer une partie à d'autres salariés de l'établissement. Cependant, le salarié qui bénéficie d'une redistribution des pourboires ne devient pas de ce fait un salarié devant être rémunéré à un taux de salaire minimum qui est appliqué au salarié au pourboire.

n (10 h 40) n

Le projet de loi prévoit d'introduire dans le règlement une définition du salarié au pourboire à qui s'appliquerait le salaire de 6,45 $ l'heure au lieu de 7,30 $ l'heure et de permettre une convention de partage des pourboires si le salarié qui a rendu le service y consent. De plus, il sera interdit à un employeur d'exiger d'un salarié de payer les frais qui sont reliés à l'utilisation d'une carte de crédit ou qui sont attribuables aux pourboires.

Le paiement de l'uniforme. La loi prévoit que, lorsqu'un employeur rend obligatoire le port d'un uniforme, il doit le fournir gratuitement au salarié payé au salaire minimum. En outre, l'employeur ne peut exiger une somme d'argent du salarié pour l'achat, l'usage ou l'entretien d'un uniforme qui aurait pour effet que ce travailleur, dans les faits, reçoive moins que le salaire minimum. Certains employeurs versent à leurs salariés un salaire légèrement plus élevé que le salaire minimum, mais insuffisant pour couvrir les frais encourus par le salarié. De plus, il est devenu de pratique courante que des vendeurs soient tenus d'acheter des vêtements disponibles dans la boutique ou le commerce où ils travaillent pour les porter sur les lieux de travail. Ces vêtements ne sont pas vraiment des uniformes, mais il y aurait lieu d'intervenir afin que, si l'employeur exige qu'un salarié fasse d'une certaine manière la promotion des vêtements en vente dans son établissement, il en assume alors les coûts.

Le projet de loi prévoit donc que, lorsqu'un employeur rend obligatoire le port d'un vêtement particulier, il devrait le fournir gratuitement au salarié qui est payé au salaire minimum. L'employeur ne pourrait exiger une somme d'argent du salarié pour l'achat, l'usage ou l'entretien d'un vêtement particulier, faisant ainsi en sorte comme résultat que le salarié reçoive moins que le salaire minimum. L'employeur ne pourrait non plus exiger du salarié qu'il paie pour un vêtement lorsque celui-ci est particulier à l'établissement et qu'il identifie le salarié à cet établissement. Enfin, il serait interdit à un employeur d'exiger d'un salarié l'achat de vêtements ou d'accessoires dont il fait le commerce.

Il y a aussi maintenant la situation des outils, des frais de voyage et des coûts de formation qui est exigé par l'employeur. Certains employeurs rendent parfois obligatoire l'usage de matériel ou d'outils de travail et exigent que les salariés en défraient les coûts d'achat, d'entretien et de réparation. On note aussi que des employeurs ne remboursent pas aux salariés les frais de voyage ou de formation encourus à leur demande expresse. Certains de ces salariés sont rémunérés au taux de salaire minimum ou à peine un peu plus, mais, dans les faits, si l'on tient compte des frais encourus, ces derniers travaillent pour moins que le salaire minimum. Cependant, compte tenu de la difficulté d'application d'une règle générale dans cette matière et dans tous les milieux de travail, et tenant compte aussi d'une pratique parfois bien établie dans certains secteurs quant à la fourniture par le salarié de ses propres outils de travail ? on pense à la situation des mécaniciens et des travailleurs forestiers ? il ne serait pas approprié, dans ces cas, d'exiger que l'employeur fournisse gratuitement tous les équipements requis à l'exercice des tâches de tous les salariés. En effet, leur rémunération, déjà, tient généralement compte des frais d'exécution du contrat de travail même si elle est parfois insuffisante ou inadéquate dans certains cas.

Le projet de loi propose d'introduire de nouvelles dispositions afin d'interdire à un employeur d'exiger d'un salarié payé au salaire minimum de fournir le matériel, les matières premières ou la marchandise pour l'exécution d'un contrat. L'employeur ne pourrait pas non plus exiger une somme d'argent pour l'achat, l'usage ou l'entretien de ressources matérielles faisant en sorte que le salarié reçoive moins que le salaire minimum. L'employeur se verrait également interdire de faire payer au salarié des frais reliés aux opérations et aux charges sociales de l'entreprise. Enfin, il serait prévu que l'employeur devrait rembourser au salarié les frais raisonnables qui sont encourus dans l'exercice de ses fonctions lorsqu'un voyage est effectué à sa demande, comprenant donc les frais de transport, de coucher et de repas, ainsi que les frais liés à une formation qu'il a suivie expressément à la demande de l'employeur. Cette protection s'appliquerait à tous les salariés sans égard à leur niveau de rémunération.

Finalement, le septième et dernier thème qui est celui des licenciements collectifs. Les dispositions actuellement en vigueur pour les licenciements collectifs sont prévues dans la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, qui a été adoptée en 1969. Cet encadrement législatif est non seulement inusité comparativement aux autres provinces et aux autres pays, mais il engendre aussi des effets indésirables de deux ordres: d'abord, la visibilité des dispositions est mal servie par une loi qui est peu connue de la grande majorité des entreprises et des administrés, ce qui a pour effet d'accroître les possibilités d'infraction; de plus, les dispositions actuelles ne prévoient aucun recours pour le salarié en cas de défaut par l'employeur de respecter le délai d'avis de licenciement qui est prévu dans la loi. Par ailleurs, les comités d'aide au reclassement sont des outils qui se sont avérés inadéquats pour des licenciements collectifs de moins de 50 personnes.

À l'instar donc de ce qui prévaut dans les autres provinces, l'inclusion des dispositions relatives aux licenciements collectifs dans la Loi sur les normes du travail permettra d'améliorer grandement leur visibilité et du même coup d'éliminer des infractions qu'on pourrait qualifier d'involontaires à cause de la mauvaise connaissance de la loi.

Le projet de loi propose donc d'inclure de nouvelles dispositions concernant les licenciements collectifs dans la Loi des normes du travail et interdit que les conditions d'emploi soient modifiées unilatéralement pendant le délai d'avis. Par ailleurs, les amendes en cas d'infraction relative au délai prescrit pour l'avis de licenciement seraient versées au Fonds de développement du marché du travail, qui est administré par Emploi-Québec, pour la mise en oeuvre et la gestion des mesures d'aide au reclassement.

Enfin, l'application des dispositions concernant la constitution d'un comité d'aide au reclassement lors du licenciement de plus de 50 personnes permettrait à Emploi-Québec d'intervenir plus rapidement auprès des salariés des petites entreprises.

En terminant, M. le Président, je suis persuadé que la modernisation de la Loi sur les normes du travail est nécessaire dans le contexte actuel du monde du travail. Elle contribuera à l'instauration de meilleures conditions de travail pour les salariés, mais aussi facilitera le recrutement et la rétention de la main-d'oeuvre et favorisera en fin de compte la création d'emplois de qualité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre du Travail, de votre intervention. Nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives. Je reconnais le porte-parole officiel de l'opposition en matière de travail et député de Mont-Royal. M. le député, la parole est à vous.

M. André Tranchemontagne

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. À mon tour, il m'est très agréable d'intervenir sur cette importante loi, loi qu'on appelle la loi qui modifie la Loi sur les normes du travail ainsi que d'autres dispositions législatives.

Comme vous savez, M. le Président, et comme le ministre l'a dit, c'est une loi qui est absolument importante et essentielle pour un très grand nombre de travailleurs au Québec. On a, en tout, environ 1,5 million de travailleurs au Québec qui sont non syndiqués et qui donc peuvent facilement être touchés par cette importante loi.

Cette loi, comme vous le savez, M. le Président, elle remonte à 1978. C'est une loi qui a été introduite par le Parti québécois, mais qui a été révisée d'une façon fondamentale en 1990 par le Parti libéral. Et déjà en 1998, lors de l'élection de 1998, le Parti libéral plaidait pour justement une refonte en profondeur de cette loi si importante pour, comme je le disais, une très grande quantité de travailleurs du Québec, 1,5 million de travailleurs environ. Alors donc, dans l'ensemble, M. le Président, je dois dire que le Parti libéral est favorable au principe de la révision de cette Loi sur les normes du travail, puisque nous l'avons changée nous-mêmes en 1990 et puisqu'elle faisait partie du programme du Parti libéral en 1998. Alors donc, M. le Président, il m'est agréable de dire que nous sommes favorables au principe de cette loi-là.

Nous avons, par contre, certaines inquiétudes à manifester, et je vais essayer d'en toucher quelques-unes ce matin. Nous avons sûrement quelques inquiétudes qui ont trait... La première et la plus globale, peut-être, des inquiétudes, c'est évidemment l'accumulation de réglementation que le gouvernement du Parti québécois, au cours des dernières années, a introduite et qui touche les entreprises. Et, conséquemment, si ça touche les entreprises, ça touche leur productivité, ça touche leur compétitivité et ultimement ça touche les travailleurs soit par des pertes d'emplois ou même, dans certains cas, par des fermetures d'entreprises. C'est donc important de souligner quelques inquiétudes.

n (10 h 50) n

Ces inquiétudes, comme je vous le disais, ont trait à la très grande réglementation. Qu'on pense, par exemple, M. le Président, au niveau de, par exemple, l'équité salariale. Pas l'équité salariale en soi, mais tout le processus de l'équité salariale. Pour une PME, c'est un processus qui est très laborieux. Je sais que, cette semaine, le ministre doit déposer un rapport d'étape, je crois, sur l'équité salariale, et, dans ce rapport d'étape, vous allez voir que les PME, les petites et moyennes entreprises, et souvent aussi les très petites entreprises, ont de la difficulté à s'adapter au concept de l'équité salariale à cause justement de la complexité du processus qui a été mis en place par le Parti québécois. Alors donc, c'est une... Il y a eu des révisions au Code du travail aussi. C'est des choses qui, pour une petite et une moyenne entreprise et une très petite entreprise, sont laborieuses et c'est des choses qui sont difficiles à suivre.

Très souvent, ces petites entreprises là n'ont pas le bénéfice d'avoir une personne en charge des ressources humaines, et donc, par conséquent, le propriétaire doit tout faire, doit être le président, évidemment, le directeur des ventes, mais aussi celui qui va s'occuper des ressources humaines. Donc, c'est important de le mettre dans la perspective des PME, parce que finalement cette loi sur les normes minimales du travail, ce n'est pas une loi qui touche la grande entreprise. Vous savez, les Bombardier de ce monde sont au-delà des exigences de la loi du salaire minimum, sont au-delà des exigences couvertes par la loi qui modifie les normes du travail. Donc, on parle surtout... Il faut penser, réfléchir en termes de petites et moyennes entreprises, et même de très petites entreprises.

Et, à ce titre, j'aimerais souligner par exemple une lettre ouverte que j'ai lue dans La Presse la semaine dernière ? je ne sais pas si le ministre a eu l'opportunité de la lire ? une lettre qui vient de Mme Nicole Desautels, d'Anjou. Mme Nicole Desautels parle au ministre du Travail, lui relate son expérience dans le domaine de la santé et des résultats qu'on en vit aujourd'hui et continue en disant: «Maintenant, au ministère du Travail ? et je la cite, vous le notez ? vous vous apprêtez à faire de nouveau du grabuge dans la Loi sur les normes du travail. En tant que gestionnaire d'une PME de 14 employés, je ne peux que m'inquiéter de ce qui m'attend avec vos décisions. Le Conseil du patronat, la fédération canadienne des entreprises vous ont fait des propositions il y a à peine six mois, et vous en faites fi. Vous êtes un ministre, pas le bon Dieu, écoutez donc ceux qui travaillent dans le privé. Actuellement, vous n'écoutez que les syndicats. On entrevoit très mal, par exemple, ce que vous êtes en train de faire avec l'assujettissement de la machinerie de production. Votre salaire est payé par tous les travailleurs, monsieur, ne l'oubliez pas.» Et elle parle d'elle-même, mais elle parle aussi de ses 14 employés.

Alors, tout ça, c'est simplement pour vous dire, M. le Président, que c'est absolument important d'être à l'écoute de la PME. La grande entreprise, on n'a pas besoin de se préoccuper tellement de la grande entreprise parce que, comme je vous le disais, elle est au-delà de ces normes. Alors donc, si on regarde donc toutes les exigences qu'on impose à un propriétaire de PME, c'est énorme, et celles-ci vont venir s'ajouter.

D'ailleurs, M. le Président, je ne sais pas si vous le savez, mais, au Québec, la majorité des nouveaux emplois qui ont été créés au cours de la dernière décennie l'ont été par des petites et des moyennes entreprises. Ce ne sont pas les grandes entreprises qui ont créé la majorité des emplois. Certains même avancent... Par exemple, le chef de l'économie au niveau de la CIBC avance que 90 % des nouveaux emplois ont été des emplois ont été des emplois créés chez les PME au cours des dernières années. Donc, c'est important de réaliser que, oui, il faut protéger le travailleur, mais il faut aussi s'assurer que l'entreprise peut fonctionner de telle sorte que le travailleur ait un emploi.

Et, dans cette optique-là, M. le Président, la première inquiétude que nous avons, spécifique, c'est la tenue de la commission parlementaire. Nous l'encourageons, la tenue de la commission parlementaire. Évidemment, nous sommes entièrement d'accord. C'est une commission parlementaire qui va être sur invitation particulière, et on n'a pas de problème avec ça, sauf que, de notre côté, M. le Président, on pense qu'il y a des groupes importants qui ont été oubliés. Permettez-moi d'en souligner quelques-uns ici.

Par exemple, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Bien, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, si, elle, elle ne s'occupe pas de PME, je ne sais pas qui est-ce qui s'en occupe. La grande, grande majorité des membres de la FCEI, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, sont des petits et très petits entrepreneurs. Donc, ce serait important d'entendre ce qu'eux ont à dire.

Le Conseil québécois du commerce de détail. Le commerce de détail, y a-t-il commerce plus visé par les normes du travail que le commerce de détail? Alors, je pense qu'il serait important d'ajouter le Conseil québécois du commerce de détail à la liste de gens qui ont des choses sûrement à nous dire au sujet de cette Loi sur les normes du travail.

Les Manufacturiers et exportateurs du Québec n'ont pas été inclus non plus dans la liste des gens qu'on pourrait et qu'on devrait entendre.

La Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec, d'importants intervenants ? tantôt, le ministre nous parlait, par exemple, des salariés à pourboire ? bien, ça, c'est des gens qui fonctionnent avec des salariés à pourboire, donc ce serait important de les entendre.

Un nouveau groupe qui vient d'être formé aussi, c'est le Conseil des chaînes de restaurants. Les chaînes de restaurants par opposition à restaurants, c'est, par exemple, les St-Hubert barbecue, etc., alors qui font partie de ce groupement-là. Je pense que ce serait aussi important d'entendre ce qu'ils ont à dire.

Un autre groupe qui s'est manifesté, on l'a vu dans les journaux, c'est le groupe Force Jeunesse. Il a des choses à nous dire, Force Jeunesse. Ils ont des choses à nous dire au niveau, par exemple, des clauses orphelin, ou des choses comme ça, qui ne sont pas couvertes dans la loi. Je pense que ce serait bon d'ajouter ce groupe-là aussi, parce que, justement, c'est une loi tellement importante que l'opportunité est là maintenant. Le ministre a eu l'opportunité, lui, en mai, je crois, d'entendre les groupes. L'opposition officielle, malheureusement, n'a pas eu ce bénéfice-là. Et je pense que ce serait important, si on veut s'assurer qu'on a une loi qui est vraiment applicable, qui colle à la réalité et particulièrement à la réalité des petites et moyennes entreprises, il faut entendre ces gens-là.

L'Association des économistes québécois n'a pas été incluse dans la liste. L'Institut économique de Montréal n'a pas non plus été inclus dans la liste. L'économiste Pierre Fortin, que le premier ministre encense régulièrement, n'a pas été invité. Et, finalement, j'ajouterais aussi l'Union partisane qui, comme vous le savez, est, si je peux dire...

Une voix: Paysanne.

M. Tranchemontagne: Paysanne, excusez-moi. Partisane, ha, ha, ha! C'est un bon lapsus. L'Union paysanne qui, comme vous le savez, est, si vous voulez, le compétiteur à l'UPA. Alors, ce serait important. Si on est prêt à entendre l'UPA, je pense qu'on devrait aussi être prêt à entendre l'Union paysanne ? et non pas l'Union partisane, merci de m'avoir corrigé.

Alors donc, c'est important, et on espère que le ministre reconnaîtra que ces gens-là ont aussi des choses à dire, ces gens-là qui n'ont pas été inclus dans la liste de personnes qui devraient être présentes à la commission. Que ce soit un travailleur, que ce soit un syndicat ou que ce soit un patron, je pense qu'on devrait se permettre de tous les entendre. On a pris tellement de temps, depuis 1997 qu'on nous promet une modification à cette loi-là, alors ce n'est pas une semaine de plus ou quelques heures de plus qui vont faire une grande différence.

Alors, sommairement, M. le Président, si on avait à sommariser les réactions à date, la majorité des travailleurs et des syndicats sont favorables à cette loi et la majorité des patrons ou des associations patronales ont manifesté plutôt une tendance à être contre.

Dans les nouveautés que le ministre introduit dans sa loi, il y a certaines choses qui, comme je le disais tantôt, nous inquiètent. Par exemple, tout le domaine de l'assujettissement des gardiens et gardiennes de personnes, nous allons évidemment écouter avec énormément d'attention les groupes qui vont venir nous parler en commission parlementaire, justement qui vont nous parler de qu'est-ce que ce projet de loi là fait pour eux positivement ou négativement ou des deux côtés. Alors, c'est important. Mais, pour nous, on a peut-être certaines inquiétudes qui disent: est-ce que c'est nécessaire d'aller aussi loin pour le groupe des gardiens et des gardiennes de personnes? Nous n'en sommes pas convaincus, mais nous demeurons ouverts à ce qu'elles soient, ces personnes-là, couvertes.

n (11 heures) n

Les salariés agricoles. Tantôt, je vous parlais de l'Union paysanne et aussi de l'UPA. Bien, c'est sûr qu'on est intéressés à entendre ce que ces deux groupes-là auront à dire sur le fait qu'on assujettit maintenant les salariés agricoles à la Loi sur les normes du travail, très important pour, encore une fois, coller à une réalité... Si on parle de salariés agricoles, on parle souvent dans le domaine agricole de petites et moyennes entreprises finalement. Alors donc, c'est important que nous donnions voix au chapitre à ces gens-là.

Finalement, la dernière section qui est ajoutée et qui est assujettie maintenant, ce sont les domestiques. Alors, la question des domestiques, je ne sais pas s'il y a des personnes que nous allons rencontrer ou des groupements que nous allons rencontrer qui auront des choses à nous dire au niveau des domestiques, mais, nous, du Parti libéral, nous aimerions certainement entendre ce que ces gens ont à nous dire.

Toujours dans le domaine des inquiétudes, M. le Président, la question du refus de travailler pour un employé après quatre heures de surtemps dans une journée, ou 14 heures dans un intervalle de 24 heures, ou plus de 50 heures par semaine, je le mets tout ensemble. La première chose que je voudrais dire au ministre, c'est que je vois un peu une contradiction, ou une difficulté de comprendre en tout cas, pourquoi on dit plus de quatre heures par jour, mais on arrête à 50 heures par semaine, ce qui voudrait dire que, finalement, un employé pourrait refuser de travailler après deux périodes de quatre heures dans une semaine plus une autre période de deux heures. Il me serait apparu logique, si on laisse le «plus de quatre heures par jour», que, pour la question de la semaine, nous aurions parlé de 60 heures par semaine. Autrement dit, ce serait logique qu'une personne ait le droit de refuser quatre heures par jour, cinq jours par semaine, ce qui fait 20 heures, et 20 heures, si vous l'additionnez à une semaine normale de travail, ça ferait le 60 heures. Je ne sais pas si le 50 heures est une espèce de compromis auquel on est arrivé.

Le refus de travailler passé quatre heures, en principe on n'est pas contre, mais on a certaines inquiétudes. Je vais vous donner un exemple très précis et très concret qu'on peut vivre. Dans le domaine de la santé, par exemple, on sait que les infirmières et les médecins sont souvent demandés de travailler deux quarts de travail d'affilée. Deux quarts de travail d'affilée, c'est absolument essentiel. Je comprends que le ministre peut me parler peut-être de cette petite parenthèse qui parle de si la santé publique, etc., n'est pas en jeu, mais ce n'est pas toutes les fonctions dans un hôpital, par exemple, qui sont fondamentales au niveau de la santé. Et, quand on exige de ces gens-là de travailler huit heures, si, après quatre heures, ils peuvent refuser, bien, je ne sais pas ce qui va se passer dans le réseau de la santé, mais il faudrait y penser, parce que nous avons certaines inquiétudes de ce côté-là que nous allons manifester au moment de la commission parlementaire encore une fois.

Toute la question des travailleurs à pourboire, je pense que c'est important. Je voudrais qu'on reconnaisse... nous, au Parti libéral, le droit fondamental au salaire minimum, on n'a aucun problème avec ça, et donc, à ce moment-là, il faut s'assurer que, même si quelqu'un est payé à commission, que cette commission-là est équivalente au salaire minimum, et c'est important. Et, dans ce sens-là, je pense que la loi est assez claire pour tenir compte du travailleur à pourboire, justement pour s'assurer. Nous voulons, par contre, entendre les associations de restaurateurs, que nous verrons, pour savoir si le 8 % des ventes que le ministre propose de rajouter au salaire pour, par exemple, la journée fériée... bien, nous osons espérer que ces petites et moyennes entreprises ? souvent, c'est des très petites entreprises, ces restaurants-là ? ont les moyens et les capacités d'être capables de le payer ou de le calculer, ce 8 % de commission quotidienne ou de pourboire quotidien que l'employé reçoit. Alors, ceci au niveau du travailleur à pourboire, donc c'est ce que je voulais dire. Nous sommes convaincus que c'est important de s'assurer que le droit fondamental au salaire minimum est respecté.

Au niveau du harcèlement psychologique. On sait que... en tout cas, si on a lu les journaux des dernières semaines, les patrons sont très inquiets de cette clause-là, et je dois dire, M. le Président, que je comprends très bien cette inquiétude. L'inquiétude est du côté, par exemple, de l'abus potentiel ou de la difficulté de démontrer le harcèlement psychologique. Non pas que le harcèlement n'existe pas, M. le Président; oui, le harcèlement existe. Mais, de tenir souvent le patron ou le propriétaire de l'entreprise responsable de ce harcèlement-là... c'est souvent pas lui nécessairement qui va le faire, le harcèlement psychologique. Il n'en est pas nécessairement conscient.

Alors, nous sommes inquiets au niveau du harcèlement psychologique. La définition que le ministre en donne dans le projet de loi est extrêmement large, et donc, peut-être est-elle trop large, peut-être laisse-t-elle trop place à interprétation. Et, à ce moment-là, ça risque d'embourber... d'abord, les plaintes au niveau de la Commission des normes elle-même et, ultimement, aussi, au niveau de la nouvelle CRT, la nouvelle Commission des relations de travail, qui doit débuter incessamment ou doit être créée incessamment et commencer à fonctionner. Alors, toute la question du harcèlement psychologique, on veut bien comprendre l'intention du législateur, on veut bien comprendre jusqu'à quel point ça peut aller et jusqu'à quel point ce serait une entrave ou si ce serait facile d'opération pour les entreprises de chez nous, les petites et moyennes entreprises ? encore une fois, je ne le répéterai assez jamais souvent.

Alors, le harcèlement psychologique qui est un nouveau domaine. On sait, par exemple, qu'au niveau de la Commission des... de la CSST, on a des plaintes de ce côté-là, puis que la CSST a énormément de difficultés à prouver ces choses-là, d'un côté comme de l'autre, soit positivement ou négativement. Alors, c'est vraiment un domaine qui n'est pas facile. Oui, le harcèlement psychologique existe, mais on n'est pas convaincus que la proposition du ministre répond vraiment à ce problème.

Du côté des avis de licenciement, on est très heureux de voir que le ministre intervient en disant, d'abord: S'il y a un avis de licenciement, il est interdit de changer les conditions de travail. C'est absolument essentiel. Et aussi, on n'a aucun problème, je pense, avec les délais qui sont proposés, qui sont de huit semaines, 12 et 16 semaines, selon le nombre d'employés mis à pied.

Pour ce qui est des mises à pied supérieures à 50 personnes, il est normal et fondamental, je pense, que l'employeur soit appelé à contribuer justement au comité d'aide au reclassement. C'est-à-dire, il est fondamental, d'abord, qu'il y en ait un, comité de reclassement, pour justement aider ces employés à se retrouver un emploi. Et finalement, il est normal et fondamental que l'employeur y contribue, si possible moralement, mais aussi financièrement.

Du côté de la protection du salaire minimum, toujours, le projet de loi propose, je dirais, le remboursement des dépenses par l'employeur, et nous trouvons ça absolument fondamental que... Si on demande à un employé de voyager, par exemple, de faire du transport, ou encore si on demande à un employé de porter un vêtement identifié à l'entreprise, bien, il nous apparaît fondamental que... Bon, c'est normal qu'on demande à l'employeur de rembourser et de payer la dépense qu'on demande à l'employé de faire. Du côté de la formation, nous sommes aussi d'avis qu'il est normal qu'un employé qui est en formation soit rémunéré pendant le temps qu'il est en formation.

Un mot sur la protection des salariés. On parle, dans la loi, du maintien du statut de salarié; autrement dit, on essaie, dans la loi, par un article, d'éviter qu'on crée encore de faux travailleurs autonomes. Il y a une jurisprudence qui existe, qui s'occupe de déterminer si une entreprise essaie de créer des travailleurs autonomes, alors que ce n'en est pas. Je ne suis pas sûr que l'article soit clair et précis pour aider à banaliser... à donner des balises, c'est-à-dire, pour justement empêcher la création de faux travailleurs autonomes, qui étaient autrefois des salariés. Nous allons travailler avec le gouvernement pour justement essayer peut-être d'améliorer cet article-là, pour peut-être le rendre plus précis.

n (11 h 10) n

Par contre ? ça, c'est du côté positif ? du côté inquiétude, il est certain qu'il ne faut pas non plus... Il ne faudra pas que ce texte de loi empêche une entreprise justement d'évoluer et puis d'être capable de faire de la sous-traitance, par exemple, avec peut-être des employés qu'elle a aujourd'hui, mais qu'ils se créeraient eux-mêmes une propre entreprise. Alors donc, c'est un sujet qui est assez délicat, et il va falloir faire des interventions plutôt à caractère chirurgical pour essayer de bien cerner ce problème.

Toute la question des absences, maintenant, j'aimerais en parler quelques instants. Le ministre couvre les absences en cas de maladie ou d'accident. On fait passer le nombre de semaines de 17 à 26, les semaines non payées par année que l'employé peut prendre, et ce, après trois mois de service continu. On n'a aucun problème avec ça, ça nous apparaît normal que, dans le cas où quelqu'un est malade soit suite à un accident ou à une maladie, là, que... Il nous apparaît normal que cette personne-là puisse s'absenter jusqu'à 26 semaines par année. Il nous apparaît aussi logique que, si l'employé désire continuer ses cotisations aux bénéfices marginaux, que ce soient les assurances collectives, la pension, quoi que ce soit... Bien, il nous apparaît normal qu'on demande à l'employeur de l'accompagner dans ce domaine-là.

Par contre, il y a un concept dans la loi qui nous inquiète passablement, c'est quand le ministre nous parle de réintégrer l'employé à son poste habituel au moment où il est tombé malade ou il y a eu l'accident. On sait fort bien que, de nos jours, les petites et moyennes entreprises doivent évoluer rapidement si elles veulent demeurer compétitives, et ce qui nous inquiète, c'est que si quelqu'un est absent 26 semaines, M. le Président... C'est long, une période de 26 semaines. Alors, si cette personne-là est absente pendant 26 semaines, il peut fort bien arriver des changements fondamentaux dans l'entreprise qui font que l'emploi que cette personne-là avait soit n'existe plus ou a été substantiellement modifié pour répondre justement aux besoins du marché, à la compétition, etc. Alors donc, on aurait aimé peut-être voir l'assurance que l'employé soit réintégré, mais, nous, ce qu'on pense peut-être, c'est un travail équivalent. Pour nous, travail équivalent veut dire si l'emploi n'existe plus, c'est un emploi similaire, le salaire sera identique, etc. On trouve ça un petit peu contraignant, le fait qu'on nous parle de réintégrer la personne au poste habituel, c'est-à-dire le poste qu'elle avait quand elle est tombée malade.

On va dire la même chose pour les autres absences. Au niveau des absences pour raison familiale, d'abord on encourage, on est d'accord avec le ministre. La famille, aujourd'hui, là, c'est plus que juste les enfants, aussi ça peut être les parents, etc., alors donc... Et puis, comme souvent les deux personnes travaillent dans la famille, donc il faut trouver des moyens pour leur donner la possibilité justement de s'occuper des pères, des mères, des grands-parents même s'il y a lieu, alors non seulement des enfants. Le ministre fait passer ça de cinq à 10 jours par année et aussi pouvant aller jusqu'à 12 semaines, si je ne me trompe pas, si un employé a plus de trois mois de service continu. Alors, ça nous apparaît ici normal.

On reparle aussi des cotisations aux bénéfices marginaux. Encore là, c'est fondamental que si l'employé est prêt à continuer à verser ses contributions aux bénéfices marginaux... C'est normal que l'employeur l'accompagne dans cet exercice.

Et, encore une fois, je réitère mon inquiétude sur la réintégration au poste habituel, là. Ça m'apparaît un peu restrictif pour l'entreprise. Si le poste existe toujours dans sa forme actuelle, ce n'est sûrement pas un problème, mais le poste peut avoir évolué d'une façon quelconque, même disparaître à la limite.

Au niveau des congés de maternité, bon, on fait intervenir, je pense, le nouveau concept du congé de paternité pour cinq semaines. Ni le ministre ni moi avons eu cette opportunité-là un jour dans notre vie. Une surprise en lisant le texte de loi, c'est quand on parle d'adoption de... Quelqu'un qui fait de l'adoption aurait le droit à 52 semaines de congé ? puis on n'a pas de problème avec ça ? mais on dit: «même si l'enfant est d'âge obligatoirement scolaire». On n'est pas sûr qu'on comprend pourquoi; si l'enfant est d'âge scolaire, donc il va aller soit à la maternelle ou à l'école. Donc, est-ce vraiment nécessaire d'aller jusqu'à 52 semaines dans ces conditions-là? Je ne suis pas sûr de ça. Encore une fois, je réitère notre inquiétude sur la réintégration au poste habituel.

Au niveau des plaintes pour congédiement injustifié, on passe de trois ans à deux ans. Ça nous apparaît une modification qui va dans la bonne direction. Je sais que les gens qui vont venir nous parler ? des gens comme Au Bas de l'échelle ou des groupes comme ça ? vont nous parler, eux, qu'ils préféreraient un an. C'est sûr. Deux ans m'apparaît un compromis raisonnable. On pourra toujours en discuter avec eux, écouter qu'est-ce qu'ils ont à dire, c'est quoi, leur raisonnement, leur argument pour proposer que ce soit baissé à un an plutôt que deux, et sûrement pas trois comme actuellement.

Au niveau des jours fériés, il y a eu tellement de changements dans le monde du travail que le fait d'éliminer, par exemple, les 60 jours consécutifs de travail, c'est une bonne chose, et on repropose de payer la journée fériée sur une base de... le vingtième des quatre dernières semaines. Alors, ça nous apparaît logique, puisque c'est...

Et une inquiétude qu'on n'est pas sûr qu'on comprend vraiment ? c'est mon dernier point ? c'est l'abolition de l'exception qu'on faisait autrefois d'être soumis aux normes du travail si l'employeur était Québécois, mais que l'employé allait travailler à l'extérieur du Québec. Nous, on se dit: Ça joue-tu contre nous, finalement? Supposons qu'un employeur réussit à prendre un contrat au Nouveau-Brunswick, pour prendre un exemple, et puis que les conditions, on le sait, de salaire minimum, etc., au Nouveau-Brunswick, ne sont pas les mêmes; s'il doit payer les gens du Québec sur la base du Québec alors qu'ils s'en vont au Nouveau-Brunswick, bien, je pense que, tout de suite, on va dire qu'il va avoir de la misère à avoir le contrat, parce que les salaires minimums au Nouveau-Brunswick sont inférieurs à ceux du Québec. Et mettons qu'il obtient le contrat, en plus de ça, je ne suis pas sûr qu'il va être encouragé à garder ses employés du Québec pour les envoyer au Nouveau-Brunswick s'il peut, au Nouveau-Brunswick, aller engager des gens à moindre salaire. Alors donc, on n'est pas convaincu de l'intention... en tout cas, on n'est sûrement pas convaincu du résultat de cette clause. L'intention est peut-être bonne, mais on n'est pas sûr que cette clause atteint le but qui est peut-être visé.

Alors, ce sont les inquiétudes que nous avons. Encore une fois, je répète, M. le Président, que nous sommes en faveur de la révision des normes du travail. Nous avons hâte de nous asseoir en commission parlementaire pour entendre les groupes qui sont touchés par ça. On a proposé au ministre d'en rajouter... neuf groupes, si je ne me trompe pas, qui sont des groupes qui sont des intervenants dans ce domaine-là, et nous espérons que le ministre entendra notre requête pour les inclure.

Nous avons aussi manifesté, M. le Président, nos inquiétudes. Nous ne sommes pas contre, nous disons que nous avons des inquiétudes, puisque nous n'avons pas eu, comme le ministre, l'opportunité d'entendre ces groupes-là il y a six mois, au mois de mai, quand le ministre a tenu à l'extérieur de l'Assemblée nationale ses consultations, que j'appellerais de privées, à l'extérieur de l'Assemblée nationale.

Alors, voilà, M. le Président, nous sommes heureux que le ministre ait finalement déposé ce projet de loi, ces modifications aux normes du travail, et nous lui proposons que nous travaillerons, comme toujours, d'une façon positive avec lui pour améliorer, si possible, ce projet de loi. Merci.

n (11 h 20) n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Mont-Royal, de votre intervention. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives, et je cède la parole à M. le député de Vimont. M. le député, la parole est à vous.

M. François Gaudreau

M. Gaudreau: Merci, M. le Président. Je débuterai cet exposé en y allant d'un constat fort simple mais tout de même assez important, pour que nous puissions y réfléchir et faire en sorte que le débat s'articule autour de ce dernier. Le monde du travail a beaucoup évolué depuis l'adoption, en 1979, de la première Loi sur les normes du travail. Cette évolution nous donne aujourd'hui la chance d'examiner de nouvelles façon d'agir pour que le monde du travail fonctionne autrement et, pourquoi pas, plus adéquatement. Aujourd'hui, en 2002, une refonte des normes du travail ainsi que des modifications intelligentes sont rendues essentielles. L'économie et la société québécoise se sont transformées au rythme des nouvelles technologies et des marchés internationaux, et le temps est venu d'adapter certaines lois de façon à modifier les conditions de travail des Québécois et des Québécoises. Cela permettra de respecter les nouvelles réalités auxquelles les travailleurs et les travailleuses font face et auront à faire face dans un avenir rapproché.

M. le Président, dans cet exercice, il nous faut non seulement y aller de modifications pour les travailleurs et travailleuses, mais une attention tout aussi attentive doit être portée à l'application des changements au sein des entreprises. On peut bien proposer des changements aux normes en gardant en tête des mesures pour améliorer le sort des travailleuses et des travailleurs, mais encore faut-il s'assurer de planifier pour mieux gérer les changements au sein des entreprises, des PME, qui sont le moteur de notre économie.

Le projet de loi n° 143, dans sa présentation actuelle, représente certes un pas dans la bonne direction. Hélas, il ne va pas assez loin. Le principe qui sous-tend le projet et qui vise à améliorer le climat et le cadre du travail au Québec est louable en soi, mais les propositions pour y arriver ne vont peut-être pas assez loin pour appuyer une volonté qui me semble timide à maints égards. Il suffit de penser aux nouvelles responsabilités familiales pour déjà entrevoir que les modifications envisagées ne sont qu'une amorce à ce qu'elles devraient réellement être pour vraiment aider et améliorer le sort des familles. Les habitudes de travail ont été littéralement bouleversées depuis quelques années, et c'est avec plus de vigueur qu'il nous faut maintenant adapter les normes pour répondre aux réalités du XXIe siècle qui se présentent à nous comme des défis de taille. Il ne faut pas avoir peur d'élargir nos horizons. Il nous faut prendre un virage qui se fera sous le signe de la souplesse et de la flexibilité pour y inclure le plus de travailleurs et travailleuses.

M. le Président, le Québec de demain sera fait d'une population vieillissante, et c'est dès aujourd'hui que nous devons appliquer des mesures qui sauront répondre aux besoins de demain. Les travailleuses et travailleurs auront, par exemple, à prendre soin des parents malades, et les demandes et exigences en ce sens devront être prises en considération par les employeurs. Nous avons la chance, en cette Chambre, de marquer le pas et de faire en sorte de planifier de nouveaux cadres et de nouveaux paramètres pour élargir les conditions de travail pour faire preuve d'un humanisme soutenu et d'une réelle écoute envers les Québécois et les Québécoises.

Il faudra, entre autres, repenser au nombre de jours durant lequel un salarié peut s'absenter pour des raisons parentales et familiales. Non seulement faut-il penser à augmenter le nombre de jours sans salaire, mais nous allons plus loin et nous proposerions de rémunérer certaines de ces journées de façon à réduire l'impact économique sur les familles. Cette volonté de souplesse pour les travailleurs et travailleuses peut être rendue possible, elle peut devenir réelle si une planification est mise de l'avant. Nous savons aujourd'hui de quoi sera fait demain. À nous d'agir en citoyens responsables pour être capables de relever les défis qui nous attendent. Nous sommes déjà conscients du faible taux de natalité et de la croissance importante d'une population plus vieille. Pourquoi ne pas penser aujourd'hui à un réel partenariat avec les entreprises pour remédier aux effets bouleversants que nous réserve l'avenir?

Afin de protéger davantage les salariés couverts par la Loi sur les normes du travail, nous sommes d'avis que les entreprises puissent aussi avoir un rôle à jouer. Dans notre optique, il est possible, dès aujourd'hui, de mettre à profit les entreprises et de leur proposer des façons de faire différentes qui contribueront à faciliter la mise en oeuvre de mesures élargies. Chacun y trouvera son compte.

Par l'adoption d'un plan quinquennal, il serait possible d'appliquer des mesures graduelles pour vraiment permettre aux entreprises de se mettre au diapason des changements de société et pour ainsi répondre adéquatement aux réalités de demain. Un tel plan, étalé sur une durée de cinq ans, ferait montre d'une réelle volonté à tendre la main aux entreprises pour qu'à leur tour elles puissent respecter les dispositions de la loi avec un but commun en tête: permettre des conditions de travail gagnantes pour fournir aux salariés la chance de faire face à leurs responsabilités familiales tout en laissant aussi la chance aux entreprises de se préparer. On éviterait ainsi de prendre les entreprises au dépourvu et on éviterait de leur imposer des mesures sévères et économiquement difficiles.

J'en ai fait la mention plus tôt, le projet de loi dans sa forme actuelle vise à corriger des situations qui ont changé en raison de l'évolution du monde du travail au Québec, et on ne peut que féliciter l'initiative. Sur le fond, nous sommes à 100 % derrière le projet, mais nous insistons pour dire haut et fort qu'il est essentiel d'aller encore plus loin et de prévoir un volet planification d'entreprise. Les besoins des salariés et les capacités économiques des entreprises ne vont pas l'un sans l'autre. Pour une transition en douceur de nouvelles normes, il faut mettre tout le monde à contribution en commençant par les créateurs d'emplois. Je suis assuré qu'il y a place pour davantage de latitude et de flexibilité dans ce projet de loi. Le travail, vous savez, c'est la responsabilité de tous, de l'employé et de l'employeur.

La réforme, comme elle est proposée aujourd'hui, manque de mordant. L'embryon est là, les pistes de solution efficaces commencent à s'articuler. Il faut toutefois reconnaître que d'autres mesures plus concrètes, plus près des réalités des travailleurs sont manquantes. En somme, pour nous, il reste d'autres choses à proposer pour assurer une meilleure planification en entreprise et pour un pas de plus vers un meilleur sort réservé aux travailleuses et travailleurs du Québec.

Nous croyons que l'État a le devoir de mieux soutenir à la fois les travailleurs et les entreprises pour que tous les éléments soient réunis pour que le travail assure un salaire minimum garanti, mais qu'il permette aussi une certaine souplesse pour que les Québécois puissent aspirer à tenir compte du bien-être de leurs proches. Ce n'est que de cette façon que nous parviendrons à atteindre un climat et un équilibre entre les valeurs qui nous transportent et qui nous caractérisent. C'est dès aujourd'hui que nous devons y voir pour assurer un avenir meilleur aux travailleuses et travailleurs salariés du Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Vimont, de votre intervention. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives. Et je reconnais la secrétaire d'État à la Condition féminine et députée de Terrebonne. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté que je participe à ce débat. Je suis très fière de faire partie d'un gouvernement qui a choisi d'agir, un gouvernement qui ne se contente pas de voeux pieux, qui n'exprime pas que des inquiétudes, mais qui propose des voies de solution, et les solutions que nous proposons nous ont évidemment été inspirées par les différents regroupements dans la société québécoise.

M. le Président, je suis très fière d'avoir eu le privilège de participer avec le ministre du Travail au niveau des consultations au printemps dernier. Je dois vous dire que le document de consultation qui a été présenté à la société québécoise, tout groupe ou toute personne qui souhaitait se faire entendre sur ce document a eu l'opportunité de le faire, tous ceux et celles qui ont demandé à être entendus ont été entendus au printemps, et ce que nous déposons aujourd'hui correspond parfaitement à ce qui avait été présenté au printemps dernier. Un ajout important, majeur, mais qui était rappelé à chaque groupe lors de chacune des audiences: que nous travaillions pour déposer un recours qui toucherait le harcèlement psychologique. Et tous les groupes nous en parlaient et ils l'attendaient.

Vous savez, M. le Président, ce que nous déposons là, c'est un projet qui est en parfaite cohérence avec l'ensemble de nos législations, le ministre du Travail l'a rappelé: cohérence avec notre projet de loi sur la lutte à la pauvreté, qui nous permet, par le projet de loi n° 143, d'apporter des mesures concrètes, directes, ce qui est demandé par les groupes; cohérence aussi, évidemment, du côté du ministère de la Famille, puisqu'il y a des mesures sur la conciliation famille-travail; cohérence, évidemment, aussi, vous en conviendrez, du côté de la condition féminine, et vous me permettrez, comme secrétaire d'État à la Condition féminine, de parler évidemment des avancées du côté des femmes.

n (11 h 30) n

Quand on pense aux normes du travail, on pense donc aux plus petits salariés aux plus faibles revenus. On parle de 1,6 million de personnes, et, parmi l'ensemble de ces personnes, nous parlons des deux tiers de personnes qui sont des femmes, M. le Président. Donc, de nous permettre d'élargir, de donner un caractère universel à cette loi, c'est évident que nous venons toucher directement, augmenter des mesures de protection au niveau des femmes. Dans l'élargissement, on parle des salariés agricoles, mais on parle aussi des gardiens et gardiennes de personnes, des domestiques qui résident chez les employeurs. Évidemment, vous conviendrez avec moi que nous parlons d'un nombre beaucoup plus important de femmes dans ces catégories d'emploi que du côté des hommes.

Du côté des mesures qui touchent la conciliation famille-travail, d'élargir... On l'a dit, la société est différente aujourd'hui, et de se limiter, au niveau de la famille, au conjoint, à la conjointe ou aux enfants, ce serait ne pas regarder la réalité actuelle de la société québécoise. Donc, d'élargir aux conjoint, conjointe, enfants, enfants du conjoint ou de la conjointe, qui vient bien sûr tenir compte de toutes les familles reconstituées au Québec, le père, la mère, frères, soeurs et évidemment les grands-parents, donc je pense que c'est tenir compte de notre réalité actuelle.

Mais il est primordial... Du côté du Parti libéral, M. le Président, tantôt on avait des inquiétudes sur une mesure qui nous apparaissait capitale. Elle était aussi capitale pour tous les regroupements qui sont venus défendre cette mesure-là: préserver le lien d'emploi du salarié qui s'absente pour toute la durée des congés parentaux et lui permettre de réintégrer son emploi habituel lors de son retour au travail. C'est majeur et c'est essentiel, puisque, dans le passé, M. le Président, lorsque les personnes se retrouvaient, du côté des congés parentaux et du côté des congés au niveau de la famille ? congés qui étaient très limités, il faut le dire ? évidemment, souvent, on se retrouvait que la personne qui revenait ne pouvait plus occuper son travail habituel et, donc, avec les conséquences qui en découlent, M. le Président. Donc, cet élément-là, même s'il amène certaines inquiétudes du côté du Parti libéral, de notre côté, c'est un élément majeur, c'est une avancée très progressiste.

Du côté du harcèlement psychologique. Parce que j'ai bien noté les inquiétudes du côté du Parti libéral, et toutes les inquiétudes qui ont été présentées, c'étaient, en fait, des inquiétudes qui se retrouvaient principalement par rapport aux entreprises. Et on nous donnait comme exemple que, du côté des entreprises, tout le processus de l'équité salariale, qui était réclamée évidemment par les femmes, tout ce processus de l'équité salariale, c'était compliqué, difficile pour les entreprises. Soit, M. le Président, sauf que, lorsqu'on veut vraiment apporter des progrès majeurs dans la société, des projets réels d'équité pour les personnes qui n'ont pas une équité au niveau de l'emploi, oui, il faut effectivement bousculer, il faut effectivement faire des changements, il faut décider de choisir d'appuyer l'équité. On ne peut pas, d'un côté, dire: Oui, nous voulons modifier les normes, mais, non, c'est trop compliqué d'appliquer des mesures d'équité, M. le Président. Oui, ça complique l'existence, c'est vrai, c'est réel, mais aucun droit, aucune équité ne peut s'appliquer dans aucune société sans que ça vienne changer les choses. Oui, ça apporte des changements, mais je pense qu'on a le devoir de les faire.

Du côté du harcèlement psychologique, il est maintenant reconnu, et nous pourrons le voir dans les études en commission parlementaire, lors du projet de loi, présentement, au Québec, il y a plus d'absentéisme, donc plus de pertes économiques aussi pour les entreprises et pertes aussi au niveau des travailleuses et travailleurs, au niveau de leur santé, au niveau de leur budget aussi évidemment, il y a plus d'absentéisme pour des raisons de harcèlement psychologique que pour des accidents de travail ou des accidents d'automobile. Donc, c'est un élément majeur qui existe maintenant. On a deux choix. On peut se fermer les yeux puis dire: Le harcèlement psychologique n'existe pas. Mais, si on reconnaît d'emblée que le harcèlement psychologique existe, on doit trouver un moyen, on doit trouver un recours.

Et la formule qui est présentée par le ministre du Travail est une formule simple qui permet d'abord un premier recours au niveau de la médiation directement sur le lieu du travail. Donc, on n'enclenche pas immédiatement une procédure très longue et très compliquée. Donc, il y a un premier recours proche, directement dans l'entreprise, avec un soutien de la Commission des normes du travail. Et c'est une avancée qui était réclamée. Effectivement, on faisait référence tantôt à la CSST, qui ne sait pas tellement comment travailler actuellement lorsqu'elle a des dossiers de harcèlement psychologique. Bien, justement, cela nous permet de tracer la voie et de donner de véritables solutions.

M. le Président, je sais que de nombreuses personnes attendent ce projet de loi. Je me suis fait parler de ce projet de loi là beaucoup dans les magasins, du côté des vendeuses, des vendeurs, dans les salons de coiffure, les coiffeuses, les coiffeurs, les petits salariés de la restauration, et beaucoup, depuis de nombreuses années, se retrouvaient dans une situation d'inéquité. Quand on pense aux congés fériés, on sait très bien que, dans tous ces domaines-là, la plupart du temps, le lundi, les employés étaient en congé, donc ne recevaient pas, jamais, ni de journée de congé ni de montant pour remplacer cette journée de congé qu'ils n'avaient pas, puisqu'ils ne travaillaient pas le lundi. Donc, de changer la formule pour permettre à tous les travailleurs, toutes les travailleuses au Québec, qu'ils soient à temps partiel ou à temps plein, de pouvoir obtenir leur juste part de congés fériés, c'est un élément qui m'apparaît tout à fait essentiel. De s'assurer aussi que le salaire minimum... C'est bien, d'instaurer un salaire minimum, mais de d'assurer qu'il va être réellement payé, c'est aussi essentiel, c'est tout aussi essentiel. Si on ne se donne pas d'outils pour s'assurer de la garantie de ce paiement de salaire minimum, on passerait tout à fait à côté de nos objectifs.

M. le Président, vous savez, nous avons travaillé de très près avec les groupes, qui ont été consultés constamment. Le dialogue a été constant entre le ministre du Travail et les différents représentants. Les syndicats sont venus s'exprimer aussi, c'est évident. Mais on sait que les normes du travail, finalement, c'est la convention collective des personnes qui ne sont pas syndiquées, des personnes qui n'ont pas de voix pour se faire entendre, des personnes qui n'ont pas de moyens pour défendre et revendiquer. Par contre, ils ont des regroupements au niveau communautaire qui défendent des objectifs. Et j'avoue que je suis très fière de ces regroupements, qui ont fait un travail exceptionnel. Donc, dans mon intervention, je leur donnerai une partie, évidemment, pour qu'ils puissent... pour vous rappeler un peu ce que ces regroupements-là nous ont dit.

Vous savez, tout au long de la démarche, le ministre a considéré à juste titre que le regroupement Au Bas de l'échelle était la voix de ces non-syndiqués au Québec. Donc, de considérer ce qu'Au Bas de l'échelle nous a présenté puis de considérer ce qu'ils pensent du projet de loi, pour moi, c'est capital. Alors, Au Bas de l'échelle, suite au dépôt du projet de loi, nous disait: «Au Bas de l'échelle applaudit le dépôt d'un projet de loi sur les normes du travail. Nous y retrouvons des avancées majeures pour les travailleuses et les travailleurs, particulièrement en ce qui concerne le recours contre le harcèlement psychologique au travail.» Et elle salue la volonté du ministre à ce sujet. L'organisme est aussi heureux des propositions relatives aux domestiques résidant chez leur employeur, demande réitérée depuis longtemps. L'organisme Au bas de l'échelle reçoit favorablement les dispositions visant à garantir la protection de la loi pour les travailleuses et les travailleurs qui gardent ou prennent soin d'enfants, de personnes âgées ou handicapées.

Vous savez, M. le Président, de ne pas reconnaître certaines catégories d'emploi dans la Loi des normes du travail, c'est comme si on se disait comme société qu'il y a certains emplois qui ne méritent pas la même chose que les autres, c'est de dire qu'il y a certains emplois dans notre société, comme les gardiennes de personnes ou comme les résidents domestiques, qui ne méritent pas d'obtenir la même chose que les autres types d'emplois, et ça, c'est inacceptable.

Toujours Au bas de l'échelle: «Les dispositions sur les absences pour maladie, accident et pour responsabilités familiales, sur les congés fériés, sur les travailleurs agricoles sont également considérées comme des avancées significatives.»

D'autres regroupements qui attendaient ces mesures avec impatience se sont aussi exprimés, M. le Président. Je pense, entre autres, à l'Association des aides familiales du Québec, que j'ai eu la chance de rencontrer quelques représentants, qui considère que le projet de loi contient des éléments importants pour la reconnaissance des aides familiales en tant que travailleuses à part entière de la société québécoise. Elles sont aussi heureuses évidemment de voir qu'on va pouvoir couvrir toutes les personnes qui prennent soin des personnes âgées, des personnes handicapées ou des enfants.

n(11 h 40)n

Du côté du CIAFT, cet organisme qui est l'organisme progressiste au niveau du travail pour les femmes, on salue les avancées du projet de réforme de la Loi sur les normes du travail. Le CIAFT est heureux que les mailles du filet de protection minimale offert à certaines catégories de travailleuses et de travailleurs s'élargissent, notamment pour les domestiques résidentes et les aides familiales. Le CIAFT aussi reconnaît l'avancée significative de donner un recours aux travailleuses contre la harcèlement psychologique en milieu de travail et, évidemment, accueille favorablement les dispositions qui concernent la conciliation famille-travail.

Enfin, et je terminerai avec ce regroupement, M. le Président, la Fédération des femmes du Québec nous titrait: Le projet de loi sur les normes est un baume pour les femmes. La Fédération est très heureuse que les milliers de femmes employées comme domestiques, gardiennes d'enfants, personnes âgées, malades, handicapées puissent enfin être couvertes par la loi.

M. le Président, je considère que nous avons, à cette étude de principe, devant nous un élément important, majeur de notre lutte à la pauvreté, et cela détermine que nous sommes un gouvernement qui ne travaille pas sur des voeux pieux, un gouvernement qui ne travaille pas sur des promesses, sur des propositions ambiguës, mais sur des propositions concrètes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Terrebonne, de votre intervention. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives.

Et je reconnais la porte-parole officielle de l'opposition en matière de relations avec les citoyens et d'accès à l'information. Mme la députée de Jonquière, la parole et à vous.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Merci, M. le Président. M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 143, d'autant plus que, dans un passé, passé lointain, j'ai beaucoup plaidé la Loi sur les normes du travail, j'ai beaucoup représenté les salariés en vertu de la Loi sur les normes du travail et j'ai beaucoup appris, M. le Président, dans le cadre de ma pratique de droit général. D'entrée de jeu, M. le Président, je vous dirais évidemment que tous les intervenants du Québec qui sont impliqués dans les relations de travail sont heureux d'apprendre que finalement, finalement le gouvernement du Québec a enfin entrepris de revoir la Loi sur les normes du travail.

Les gens effectivement, comme le soulignait mon collègue tantôt, du côté syndical, du côté ouvrier sont assez en accord avec le projet de loi, même si, M. le Président, je le répète, même si on constate que la grosse déception des intervenants du milieu ouvrier, syndical, c'est que le gouvernement n'a pas rendu ce qu'on attendait de lui, à savoir modifier, élargir la notion de salarié au sens de la Loi sur les normes. C'était, vous le savez, quelque chose que tout le monde attendait, du côté des employés, des syndicats, qu'on puisse enfin élargir cette notion de salarié afin, M. le Président, d'y inclure les travailleurs autonomes à client unique.

Malheureusement, on n'y retrouve pas cet élargissement dans la Loi sur les normes du travail, même si, à l'article 53 du projet de loi, on y indique qu'on veuille protéger une modification d'entreprise pour évidemment soustraire à l'application... pour maintenir le lien de salarié avec un employeur. Je constate, comme mon collègue vous le soulignait tantôt, qu'effectivement le libellé de l'article 53, qui se lit comme suit: «Un salarié a droit au maintien de son statut de salarié lorsque les changements que l'employeur apporte au mode d'exploitation de son entreprise n'ont pas pour effet de modifier ce statut en celui d'entrepreneur ou de prestataire du services.» Je trouve sincèrement, M. le Président ? et on le fera en commission parlementaire, soyez-en assuré ? qu'on pourrait trouver un libellé de cet article-là qui, je pense, correspondrait mieux à l'esprit que recherche le ministre dans son intention à l'article 53, M. le Président.

Évidemment, il y a des représentants qui ont applaudi à ce projet de loi, Mme la Présidente. Et je suis un peu surprise, en prenant connaissance des personnes qu'on a appelées à venir témoigner en commission parlementaire, je suis surprise que les représentantes des AFEAS n'aient pas été invitées à la discussion parlementaire. Et j'aurais souhaité que la ministre, députée de Terrebonne suggère à son collègue qu'on puisse inviter ces femmes à venir. Parce qu'on m'a informée que pour les femmes des AFEAS le dossier prioritaire sur lequel elles travaillent pour l'année 2002-2003, c'est justement la Loi sur les normes du travail. Alors, il aurait été intéressant, M. le Président, de les entendre en commission parlementaire.

Ceci étant dit, j'ai pris connaissance du projet de loi, M. le Président, et il y a certains aspects qui m'apparaissent, d'entrée de jeu, assez conflictuels à prime abord. Entre autres, par exemple, une notion qu'on veut prioriser, c'est les travailleurs à pourboire. Alors, moi, j'étais de celles qui plaidaient, il y a plusieurs années de cela, M. le Président, que le pourboire devait être une notion incluse dans le salaire du salarié à pourboire. La Cour d'appel, effectivement, a reconnu que le pourboire était inclus dans la notion de salaire. Cependant, lorsque je regarde le projet de loi à son article 11 et à son article 18, M. le Président, je me pose la question si, effectivement, on ne refera pas encore tout ce débat jurisprudentiel qu'on a eu dans les années 1980, 1990.

Je m'explique, M. le Président. Et, encore une fois, en commission parlementaire, on pourra peut-être éclaircir. Je m'explique, parce que, à l'article 11 du projet de loi, M. le Président, on y indique que «le pourboire versé directement ou indirectement par un client appartient en propre au salarié qui a rendu le service et il ne doit pas être confondu avec le salaire qui lui est par ailleurs dû». Or, M. le Président, à l'article 18 du projet de loi, on mentionne que toutefois, malgré toute disposition contraire de la convention collective ou du décret, l'indemnité pour un jour chômé et payé se calcule, dans le cas d'un salarié visé à l'article 42.11 et 1019.4 de la Loi sur les impôts, sur le salaire augmenté des pourboires attribués.

Doit-on comprendre, M. le Président ? et sûrement que les plaideurs vont chercher à établir cette notion ? doit-on comprendre que, par l'article 59.1 amendé de la Loi sur les normes du travail, on a voulu restreindre la notion du pourboire à salaire dans le cas uniquement... dans le calcul des jours fériés et chômés? C'est la question que je me pose. Peut-être que ce n'est pas l'intention du ministre, M. le Président. Mais, en commission parlementaire, vous conviendrez avec moi qu'on aura effectivement intérêt, si tel est le cas, à modifier les articles pour éclairer effectivement tout l'imbroglio juridique que ça pourra apporter.

Vous savez aussi, M. le Président, qu'on a beaucoup parlé de l'introduction dans la loi de la notion de harcèlement. Personnellement, je constate que la définition qu'on y retrouve au projet de loi correspond grosso modo aux définitions qu'on retrouve dans des décisions jurisprudentielles tant de la CLP, la Commission des lésions professionnelles, ou encore de la Cour d'appel du Québec. Effectivement, vous conviendrez avec moi que toute définition a ses contraintes et, effectivement, c'est une question factuelle que le salarié devra démontrer, M. le Président.

Ce que j'aurais souhaité, ce que je me pose comme question, c'est que le salarié ou la salariée victime de harcèlement a un recours, en vertu de l'article 123 de la loi, d'une pratique interdite, et son recours est de 60 jours à partir du moment où l'acte reproché est arrivé. Alors, moi, je me questionne, M. le Président, parce que, je vous le disais d'entrée de jeu, j'ai représenté tout le temps, tout le temps les travailleurs en vertu de la Loi sur les normes du travail et la notion de délai était importante. Alors, j'aurais souhaité, M. le Président, que le délai qu'on retrouve à l'article 123 soit le même. Quand on parle de pratique interdite, que ce soit une pratique interdite au sens du nouvel article ou encore au sens de l'article 122, le délai devrait être le même pour empêcher que le salarié ou la salariée victime puisse se tromper dans les délais. Et Dieu sait, M. le Président ? moi, je l'ai vu dans ma pratique ? qu'on s'était trompé dans le calcul des délais ou encore on s'était trompé dans la lecture du délai! Moi, je pense qu'on devrait harmoniser le délai du recours, qu'il passe carrément de 45 à 60 jours pour toute pratique interdite, que ce soit non seulement pour du harcèlement, mais pour toutes les autres pratiques interdites au sens de l'article 122, M. le Président.

n(11 h 50)n

Mme la députée de Terrebonne, elle faisait état tantôt que... On parlait de la réintégration d'un salarié, d'une salariée, d'un congé de maternité, d'un congé de maladie ou autres, dans son emploi. Mon collègue vous a précisé qu'effectivement à partir du moment où une salariée ou un salarié a un congé de maladie, M. le Président, pendant le laps de temps où il est parti, il y a des modifications qui peuvent arriver dans l'entreprise. Alors, réintégrer dans son poste, M. le Président, des fois, ça ne veut rien dire. Et, vous le savez, la jurisprudence est constante là-dessus, lorsque le poste est aboli, il n'y a pas d'obligation pour un employeur de réintégrer dans le poste. Alors, quand mon collègue vous suggère de dire «ou un poste équivalent», ce n'est pas pour restreindre l'application de la loi. Au contraire, il faut voir que c'est pour effectivement faciliter, faciliter, M. le Président, la réintégration dans l'emploi.

Je vais vous raconter ? j'ai vu plusieurs exemples ? je vais vous donner un exemple qui est assez illustrant, là, pour démontrer que, effectivement, lorsqu'on a affaire à des hommes de mauvaise foi, il est difficile de donner suite à une ordonnance de réintégration. J'ai eu un cas, M. le Président, où un salarié avait eu la mauvaise... avait décidé de partir un syndicat. C'était elle qui avait été le leader. Et, évidemment, s'ensuivit un congédiement, suite à ses activités syndicales, évidemment une plainte s'ensuivit et une ordonnance de réintégration. M. le Président, l'ordonnance de réintégration disait: Réintégrer à l'emploi. C'était ça, l'ordonnance de réintégration. Lorsque est venu le temps de faire exécuter l'ordonnance que nous avions, l'employeur a tout simplement fait en sorte que la salariée soit réintégrée à l'emploi, mais non pas dans ses fonctions habituelles. On l'avait carrément installée dans un bureau de travail, avec un calepin, M. le Président, et un crayon au plomb, puis on avait dit: Ce sera ça dorénavant, tu répondras aux questions qu'on voudra bien te poser. Ce n'était pas réintégrer vraiment dans son emploi, M. le Président. Alors, ce qu'il faut faire, M. le Président, dans le projet de loi, c'est effectivement répondre aux suggestions de mon collègue, et, quand on parle de poste, on parle de poste équivalent pour évidemment donner plus d'application à la loi.

La même chose, M. le Président, pour l'article 123.15, une salariée ou un salarié victime de harcèlement, on prévoit, à l'article 123.15, réintégrer le salarié. Mais réintégrer le salarié où et comment, M. le Président? Vous le savez, dans les petites entreprises, on peut avoir comme... Pour bien faire, je pense. Des fois, pour bien faire, on va réintégrer quelqu'un, mais pas nécessairement dans ses fonctions. Pour éviter effectivement la confrontation entre le collègue harceleur, alors on va mettre... on va déplacer la salariée victime. Je pense que ce n'est pas l'objet, le but recherché par la loi. Alors, encore une fois, à notre avis, M. le Président, il faudra aller chercher l'intention du législateur et préciser dans quel emploi: un emploi similaire, comparable, à des conditions comparables.

Mon collègue a parlé aussi du délai, de la période de temps, pour un salarié, pour être assujetti à la Loi sur les normes, pour être couvert par l'article 124, M. le Président. Le projet de loi prévoit un délai de deux ans. Le Code canadien prévoit un délai d'un an. Deux ans, un an, je ne comprends pas pourquoi, là. Mais, je me dis, encore une fois, dans le but d'harmoniser et rendre les choses plus faciles pour le justiciable, je pense qu'on pourrait évidemment aller dans le sens du Code canadien du travail, qui effectivement est plus facile d'application que notre Loi sur les normes du travail, M. le Président.

Puis, quand je parle de délais, M. le Président, j'aimerais vous dire que, lorsqu'on pratique en région, les délais sont exécrables. Je peux vous témoigner... On peut compter des fois un an à partir du moment où un salarié est congédié et la date où on a une date d'audition devant... encore devant le Commissaire du travail. En région, c'est comme ça que ça se passe. C'est incroyable. C'est insoutenable, M. le Président. C'est insoutenable et pour le salarié et pour l'employeur aussi parce que, imaginez-vous, quand on gagne, quand le salarié gagne, on doit le rémunérer pendant l'année où il a perdu son emploi. C'est des sommes qui sont énormes pour l'entreprise. Moi, je pense que, si on veut faire un bon travail, on devrait favoriser dans le projet de loi... introduire des délais d'application entre le dépôt de la plainte et le dépôt d'une audition devant un commissaire ? maintenant la Commission des relations de travail ? en région ou partout au Québec. Il faut que ce soit plus rapide, M. le Président. J'en étais rendue, moi, M. le Président, à conseiller aux salariés de choisir le recours civil parce que les délais étaient moins longs. C'est lourd pour le salarié de supporter pendant plusieurs mois l'incertitude de savoir qu'est-ce qui va arriver.

Parce que, vous savez, le droit au travail, M. le Président, à mon sens à moi, ça devrait être un droit qui devrait être élevé au statut du quasi-constitutionnel. Pour moi, le droit au travail, c'est un droit fondamental, M. le Président. Alors, quelqu'un qui est victime de congédiement, souvent, malheureusement, injustifié, qui doit vivre l'inconfort de sa situation pendant des semaines, des mois et des mois, M. le Président... Vous ne pouvez pas savoir combien de fois on reçoit de téléphones: Avez-vous eu une date d'audition? Avez-vous eu une date? Savez-vous quand est-ce que ma cause va passer? Puis on n'a pas de date, M. le Président.

Et je vous dirais que les dernières... Présentement, au moment où on se parle, M. le Président, ne pensez pas d'avoir des dates d'audition à Roberval au mois de janvier, ne pensez pas d'avoir des dates d'audition à Dolbeau au mois de février, M. le Président. Comme par hasard, nos dates d'audition sont toujours reportées au printemps ou à l'été. Mais, pour le malheureux salarié qui a été congédié à la fin du mois d'août, c'est extrêmement long, M. le Président. Je le répète, c'est extrêmement long pour le salarié, c'est extrêmement long aussi pour l'employeur, sa petite entreprise qui devra faire les frais de cette situation, M. le Président. Parce que c'est comme ça que ça se passe. C'est comme ça que ça se passe dans la région chez nous et c'est comme ça que ça se passe ailleurs dans les régions au Québec. Alors, moi, je crois sincèrement qu'on devrait introduire dans le projet de loi des notions qui favoriseraient effectivement des délais moins longs, M. le Président.

L'objet de la Loi sur les normes du travail, c'est effectivement que ce soit moins compliqué pour les salariés, moins onéreux pour les entrepreneurs, aussi pour les entreprises, M. le Président, et surtout moins long. Il n'y a pas de procédure écrite au sens où on l'entend devant les tribunaux de droit commun, M. le Président. Or, malheureusement, pour des questions administratives, on a détourné l'objet de cette loi-là de son efficience, M. le Président, et c'est ça que je déplore. Et je pense que, si on prend la peine de revoir la Loi sur les normes du travail, de revoir les délais, on devrait effectivement se questionner: Est-ce qu'on rencontre les délais qu'on devrait nécessairement rencontrer dans ce genre de cas? Parce que, je le répète, réintroduire un salarié congédié après un an, ce n'est pas évident. Surtout, et mon collègue vous le soulevait aussi, la Loi sur les normes s'applique dans le cas de petites et moyennes entreprises, alors, quand un salarié est parti depuis un an dans des conditions assez difficiles, M. le Président, vous conviendrez que le réintégrer dans son travail, dans un poste, dans son poste de travail, ce n'est pas évident.

Et vous conviendrez aussi, M. le Président, que c'est la difficulté, pas juste dans le cas de harcèlement... la difficulté vient aussi du fait qu'il n'y a pas de syndicat dans l'entreprise pour faciliter le retour au travail. Alors, moi, j'ai vu beaucoup des commissaires du travail appliquer l'article 128. Parce que l'article 128 donne la possibilité au commissaire du travail de rendre toute ordonnance qui lui semble appropriée. Et souvent, malheureusement trop souvent, M. le Président, les commissaires disent: On va le compenser pécuniairement et on ne le réintègre pas dans l'emploi parce qu'on ne remettra pas le salarié dans la gueule du loup. J'ai vu souvent ce genre de décision là, M. le Président. Or, avoir une indemnité pécuniaire, c'est correct, mais, dans le contexte actuel, ça ne redonne pas l'emploi. Et, évidemment, ce genre de décision là arrive malheureusement lorsqu'on a pris trop de temps avant d'avoir une date d'audition, trop de temps avant d'avoir une décision. Des fois, M. le Président, c'est plus d'un an que le salarié attend. Parce que les jours où on nous prévoit une journée d'audition, alors qu'un congédiement, on le sait, on ne s'en sort jamais en bas de trois jours, et là on est reporté aux calendes grecques, et ça n'en finit plus, c'est lourd pour le salarié de supporter cela et c'est effectivement lourd pour les entrepreneurs aussi, M. le Président. Alors, sincèrement, je souhaite qu'en commission parlementaire on puisse discuter de cet aspect-là qui me semble fondamental, M. le Président, fondamental parce que c'est une question de dignité pour bien des hommes et des femmes du Québec qui sont victimes de ce genre de situation là, M. le Président.

n(12 heures)n

La Loi sur les normes, M. le Président, effectivement, est quelque chose de socialement avancé au Canada. Je pense que nous devons être fiers de cette loi-là. Mais nous devons faire en sorte de rendre cette loi-là à la hauteur du XXIe siècle, M. le Président, avec les nouveaux éléments. Les relations de travail changent beaucoup, ça change beaucoup, on évolue beaucoup. Alors, je pense que la suggestion qu'on peut faire, effectivement, de faire en sorte qu'à tous les cinq ans on révise la Loi sur les normes du travail, la législation en matière de relations de travail, je pense que c'est une idée qui devrait peut-être trouver preneur, M. le Président.

Parce que, écoutez, vous le savez, je veux dire, on parle beaucoup de négociations, maintenant, on négocie des conditions de travail régulièrement, M. le Président. Et les relations changent très vite. On fait face à la mondialisation des marchés, et, effectivement, il faut s'ouvrir sur des nouvelles façons de faire. Et je pense qu'il faut le faire en respectant, en respectant ce qui est pour moi fondamental, le salarié, la salariée, mais en respectant aussi le donneur d'ouvrage parce que le donneur d'ouvrage, c'est lui qui fait en sorte que notre société puisse avancer, M. le Président. C'est le donneur d'ouvrage, effectivement, qui va faire en sorte qu'on ait des emplois pour les hommes et les femmes du Québec. Et je pense que de plus en plus on doit travailler ensemble non pas dans la confrontation, M. le Président ? et ça, les syndicats l'ont bien compris, je le pense ? non plus dans la confrontation mais, en fait, ensemble pour qu'on puisse avancer ensemble. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Jonquière, pour votre intervention. Et, sur ce, je vais suspendre les travaux jusqu'à 14 heures, cet après-midi. Bon appétit à vous tous.

(Suspension de la séance à 12 h 2)

 

(Reprise à 14 h 5)

La Présidente: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence de M. Dieter Hertrampf,
consul général de la République fédérale
d'Allemagne à Montréal

Alors, j'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes cet après-midi du consul général de la République fédérale d'Allemagne à Montréal, M. Dieter Hertrampf.

Présence de M. Paul-Gérin Lajoie et
d'élèves venus souligner le 25e anniversaire
de la Fondation Paul-Gérin-Lajoie

À l'occasion du 25e anniversaire de la Fondation Paul-Gérin-Lajoie, j'ai aussi le plaisir de souligner la présence parmi nous d'une centaine d'élèves qui sont venus de la métropole pour souligner ce 25e anniversaire en présence de M. Paul-Gérin Lajoie.

Affaires courantes

Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Alors, au dépôt de documents, Mme la vice-première ministre et ministre des Finances... Non. M. le leader du gouvernement.

Rapports annuels de divers fonds

M. Boisclair: Au nom de la vice-première ministre et ministre des Finances, je dépose des rapports annuels 2001-2002, celui du Fonds québécois de la recherche sur la nature et les technologies, le Fonds de la recherche en santé du Québec et le Fonds de recherche sur la société et la culture.

La Présidente: Alors, ces documents sont déposés. Mme la ministre d'État à la Culture et aux Communications.

Rapports annuels de la Société de développement
des entreprises culturelles, du Conseil des arts
et des lettres et son annexe

Mme Lemieux: Merci, Mme la Présidente. Je dépose les rapports annuels 2001-2002 de la Société de développement des entreprises culturelles et du Conseil des arts et des lettres ainsi qu'une annexe du Conseil des arts et des lettres.

La Présidente: Alors, ces documents sont déposés. Mme la ministre d'État aux Relations internationales.

Rapport d'activité 1999-2001
de l'Office Québec-Amériques pour la jeunesse

Mme Beaudoin: Oui. Mme la Présidente, je dépose le rapport d'activité 1999-2001 de l'Office Québec-Amériques pour la jeunesse.

La Présidente: Ce document est déposé. Mme la ministre déléguée à l'Emploi.

Rapport annuel et
plan d'action 2002-2003 d'Emploi-Québec

Mme Maltais: Mme la Présidente, je dépose le rapport annuel de gestion 2001-2002 d'Emploi-Québec ainsi que le plan d'action 2002-2003 d'Emploi-Québec.

Préavis d'une motion
des députés de l'opposition

La Présidente: Ces documents sont déposés. Pour ma part, j'ai reçu dans les délais prescrits préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose copie du texte de ce préavis.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous abordons maintenant la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Plan d'action en matière de services de santé

M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, le premier ministre est le premier à savoir que gouverner, c'est établir des priorités. Gouverner, c'est également choisir. C'est ce que nous croyons, nous, de notre côté. C'est pour cette raison-là que nous avons choisi plusieurs semaines à l'avance, peut-être même plusieurs mois à l'avance, de dire à la population du Québec les choix que nous proposons pour l'avenir. Le premier ministre a dû en prendre connaissance, nous proposons de prioriser la santé et donc un réinvestissement en santé; l'éducation, un réinvestissement en éducation. Oui, on propose une façon de faire différente, une révision du fonctionnement de l'État, des partenariats public-privé, un gel des budgets des autres ministères et de faire des choix à l'intérieur de cette enveloppe. Et nous proposons des choix que nous avons pris également la peine de chiffrer.

n(14 h 10)n

Aujourd'hui, son gouvernement rend public un bilan de huit années de gouvernement du Parti québécois, un bilan très triste de votre administration du système de santé, un bilan qui évoque les ratés, les mauvaises décisions et le fait qu'il y a des citoyens du Québec qui ne reçoivent pas les soins auxquels ils ont droit. Pourtant, le gouvernement, en même temps, nous dit qu'il met le système de santé québécois sur la liste d'attente. Vous refusez de prioriser et vous refusez de faire des choix et de réinvestir. À la place, le gouvernement, après la commission Clair, après le rapport Arpin, après le rapport de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, après les rapports du Vérificateur général, nous annonce une nouvelle ronde de consultations où de toute évidence c'est un vieux film qu'on va nous faire rejouer: on va nous annoncer à nouveau que c'est de la faute du gouvernement fédéral, que c'est de la faute des gouvernements précédents.

Ma question est fort simple: Pourquoi le premier ministre n'accepte pas ses responsabilités? Pourquoi il ne nous dit pas aujourd'hui qu'il est prêt à faire de la santé une priorité, et donc de choisir, puis, au lieu de blâmer les autres, dire qu'il va poser des gestes concrets pour faire en sorte que les Québécois reçoivent les services de santé auxquels ils ont droit?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Premièrement, Mme la Présidente, le bilan de notre système de santé n'est pas triste, il est complexe, comme dans tous les pays du monde qui ont eu le courage de se donner un système de santé public. Dans les pays qui ont choisi le privé, là c'est vraiment triste, ça va jusqu'à 30 % de la population qui n'a pas droit aux soins. Ici, ce n'est pas cela, et les meilleurs témoins, ce ne sont pas les gens de cette Assemblée, malgré qu'il y en a de très bons ? le ministre et l'ancienne ministre connaissent bien la question ? les meilleurs, ce sont les patients et les patientes. Et toutes les études démontrent que le taux de satisfaction des personnes traitées dans notre système de santé sont à hauteur de 90 % et 95 %, ce que jamais un gouvernement n'a eu pour l'ensemble de son action globale, ni d'un côté de la Chambre ni de l'autre. Alors, je n'admets pas que l'on dise que le bilan est triste.

J'admets qu'il y a des problèmes, des imperfections, comme il s'en trouve partout. S'il n'y avait pas de problèmes, le gouvernement du Canada n'aurait pas mis sur pied la commission Romanow, à l'instar de la commission Clair que nous avons mise de l'avant nous-mêmes. Oui, il y a des problèmes, mais il y en aurait beaucoup plus si certains gestes courageux n'avaient pas été posés par ce gouvernement, à défaut de nos prédécesseurs de l'avoir fait. Je pense au virage ambulatoire. Quel désastre si ce tournant majeur n'avait pas été pris! Parce qu'on hospitaliserait encore des gens pendant trois, quatre jours, alors qu'une demi-journée suffit. Rien que ça, ça a sauvé le système. Ça ne l'a pas guéri de tous ses maux. C'est pour ça que le ministre, avec une franchise et une transparence, même une franchise brutale qui est à son honneur, met les chiffres sur la table pour maintenant et pour l'avenir.

Et, quant au déséquilibre fiscal auquel le chef de l'opposition a fait allusion, je lui rappelle qu'il a convenu avec nous que le fédéral nous prive de 50 millions par semaine, 2,5 milliards par année. Et il aura beau essayer toutes les dénégations pour se sortir de ce consentement qu'il avait très honnêtement donné, que rien ne l'en sortira. Qu'on nous donne 50 millions de dollars par semaine, et les choses seront plus simples et les malades seront mieux traités.

La Présidente: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Le premier ministre l'a peut-être oublié, mais, dès 1997, c'est une situation que je dénonçais non seulement ici, au Québec, mais partout ailleurs au Canada, cette question du déséquilibre fiscal. Et j'ai été tellement constant dans ma défense justement de cette idée ? je le dis avec fierté ? que j'ai suggéré à son gouvernement de se l'approprier en 1999, ce que son gouvernement a refusé de faire. Ils ont ridiculisé la proposition qu'on leur a faite. Alors, là-dessus, on n'a pas de leçons à prendre.

Mais, puisque le premier ministre nous dit qu'il faut parler vrai, est-ce qu'il ne reconnaît pas que les services offerts varient d'un territoire à l'autre, que les lieux d'accès aux services sont mal connus de la population, les horaires de divers établissements ne sont pas les mêmes, une partie importante de la population n'a pas de médecin de famille, l'absence de liens étroits entre les cliniques médicales, les centres locaux de services communautaires font que ni un ni l'autre n'offre des services répondant entièrement aux besoins des personnes qu'ils traitent, que de plus les personnes qui ont des problèmes à la fois médicaux et sociaux ont de la difficulté à obtenir les bons services au bon moment, au bon endroit? Nous avons aussi de la difficulté à prendre soin des gens dans leur milieu de vie et à leur offrir près de chez eux des soins continus et adaptés à leurs problèmes sociaux et de santé les plus courants. Ça, c'est exactement le bilan que vous avez admis aujourd'hui. Or, ça fait huit ans que vous formez le gouvernement du Québec.

La question que je vous pose est directe: Allez-vous prendre les malades du Québec en otages? Allez-vous faire un débat politique dans le but d'essayer de vous faire réélire sur leur dos ou est-ce que vous n'allez pas plutôt, en reconnaissant vos fautes, poser des gestes concrets pour réinvestir puis agir maintenant? Pas une autre tournée de consultations, réinvestir dès maintenant dans les soins à domicile, par exemple, pour qu'on puisse venir en aide aux personnes âgées au lieu d'aller faire une autre tournée de consultations et les faire souffrir davantage.

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Mme la Présidente, tout le monde aura remarqué que la voix du chef de l'opposition reflète plus la colère partisane et la surenchère que la compassion pour les malades. La compassion pour les malades...

Des voix: ...

M. Landry: ...la compassion pour les malades, c'est de ce côté-ci de la Chambre que nous l'avons eue quand on a eu le courage de faire une chose qui avait été proposée par le dernier ministre de la Santé, bien connu, du gouvernement libéral, Marc-Yvan Côté, qui a été lâché par son premier ministre qui n'a pas voulu aller jusqu'au bout d'une réforme fondamentale que nous avons eu le courage de faire. Alors, moi, je vous dis que le premier ministre du Québec ne lâchera pas son ministre de la Santé dans les réformes admirables qu'il fait: son entente avec les omnipraticiens, son entente avec les omnipraticiens, la série de groupes de médecine familiale qui seront lancés dans quelques jours et qui feront que des centaines de milliers de Québécois et de Québécoises auront un médecin de famille.

Et pourquoi est-ce qu'on n'a pas tout fait en même temps? Parce que ce n'est pas possible. Ce n'est tellement pas possible que, dans votre programme absurde, vous voulez geler ? c'est bien ça que vous avez dit ? les crédits de tous les ministères, sauf la Santé et l'Éducation. Bravo pour reconnaître l'importance de la santé et de l'éducation! Mais ça veut dire que vous allez réduire, par l'inflation, les budgets de tous les autres ministères. Alors, des garderies à 5 $, les 50 000 places qu'il manque, on fait une croix dessus. Si on a des problèmes de criminalité accrue puis on a fait une bataille fantastique contre la criminalité et les bandes de motards criminalisés, on fait une croix dessus. S'il y a des problèmes dans l'environnement, on fait une croix dessus. Si la conjoncture économique se détériore et qu'il faut mettre de l'argent dans l'aide sociale, les gens souffriront, on met une croix dessus. C'est ça, l'édifice libéral absurde sur le plan du cadre budgétaire, tellement que la plupart de vos collaborateurs le démolissent de semaine en semaine. Ils vont dans les milieux des garderies puis ils disent: Ah! ne vous en faites pas, on va, là, augmenter les taxes. Hein, ils vont dans les milieux d'environnement, ils vous disent: Ne vous en faites pas, on va mettre de l'argent.

La Présidente: En conclusion.

M. Landry: Alors, nous avons ici un ministre cohérent, franc, sincère et un gouvernement qui va avec.

La Présidente: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Je comprends mieux pourquoi il apprécie tellement son cabinet qu'il leur a tous suggéré de démissionner en bloc il y a quelques semaines. Il va falloir qu'il se lève plus vite que ça dorénavant à l'Assemblée si...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charest: Et le premier ministre, on le sait, il est expert dans le domaine de la démolition, puisque son gouvernement aura fait une oeuvre qui n'est pas près d'être répétée en termes de démolition dans le système de santé québécois, parce que vous êtes, après huit ans, le gouvernement qui a réussi à réduire les dépenses per capita au dernier rang parmi les provinces canadiennes. Ça, ce n'est pas la faute du gouvernement fédéral, ce n'est pas le choix du gouvernement fédéral. Le fait que vous ayez choisi de faire le Programme de départs volontaires, ce n'est pas le choix du gouvernement fédéral. Les coupures dans les facultés de médecine, ce n'est pas le fédéral qui a choisi ça, c'est vous qui avez choisi de le faire. Les coupures en sciences infirmières, c'est vous. Aujourd'hui, vous nous annoncez une décentralisation vers les régions. Le 21 juin 2001, par bâillon, vous avez forcé un projet de loi qui recentralise justement vers Québec l'administration du système de soins de santé puis les régies régionales.

La question que je vous pose: Si vous voulez faire des vrais choix, pourquoi vous calez 28 millions de dollars d'argent des contribuables québécois dans Métaforia, vous dépensez des centaines de millions de dollars inutilement dans la Cité du commerce électronique? Vous en faites, des choix. On vous demande aujourd'hui d'en faire un vrai choix et de ne pas tenir les citoyens du Québec en otages, ne pas les faire attendre pour le but de vous faire réélire lors de la prochaine campagne électorale. On vous demande un peu de compassion pour reconnaître qu'il y a des gens qui ont besoin de soins. Alors, au lieu de faire attendre les gens, au lieu de mettre la santé sur une liste d'attente, pourquoi pas agir maintenant et choisir dès maintenant d'aider les malades?

n(14 h 20)n

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: D'abord, votre rengaine sur le moindre effort québécois en matière de soins de santé, vous savez qu'elle sonne faux parce qu'elle est fausse. Et je vous suggère une excellente étude de M. Claude Picher, qui est un excellent analyste et qui montre que, eu égard à ses moyens, le Québec fait aussi bien que les autres sinon mieux que la plupart des autres. Tout le monde était en mesure de lire cette analyse il n'y a pas longtemps.

Deuxièmement, là, vous avez remêlé d'une façon que je n'ose qualifier les efforts que l'on fait pour relancer l'économie. Un instant! C'est parce qu'il y a des gens qui paient des impôts qu'on a pu augmenter les budgets en santé. S'il y a des gens qui paient des impôts, c'est parce qu'il y a plus de monde qui travaille dans l'économie du Québec qu'à aucun autre moment de notre histoire. Le taux de chômage à Montréal est plus bas qu'à Toronto, et, à Québec, dans notre capitale nationale, il est plus bas qu'à Montréal, et, à Drummondville, il est plus bas qu'à Québec, puis, au Lac-Mégantic, il est plus bas qu'à Drummondville. C'est ça, le succès économique qui fait rentrer de l'argent dans les coffres de notre État que vous étiez en train de ruiner. Et c'est pourquoi notre État national est fier de pouvoir maintenir son système de santé malgré le déséquilibre fiscal.

Ce que vous appelez de l'argent gaspillé dénote encore une fois votre manque de perception des réalités économiques. Je vais vous en donner, des réalités économiques, moi, qui dénotent l'effort fabuleux de notre gouvernement en matière de développement: le Québec est le premier au Canada en matière de recherche et développement avec 44 % du total. C'est là qu'est l'avenir. Et, si vous voulez voir l'économie rejoindre la santé d'une façon spectaculaire, je vous signale que le Québec est en première place pour les produits aérospatiaux et pièces. Mais également produits pharmaceutiques et médicaments sont au coeur d'un système de santé moderne. Instruments de navigation, oui, de mesure, oui, mais instruments médicaux et chirurgicaux. C'est ça, une économie moderne et qui secrète la prospérité. Et plus il y aura de prospérité, plus il y aura de l'argent pour la santé, si les fédéraux arrêtent de nous prendre abusivement 50 millions de dollars par semaine.

La Présidente: En principale, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne.

Dépôt et mise en vigueur
d'une politique de soins à domicile

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je dirais au premier ministre que, oui, au Québec, nous sommes aussi les premiers au Canada à ignorer les conditions de vie et la détérioration des conditions de vie des personnes âgées en lourde perte d'autonomie. Nous sommes les premiers. On a pu constater, Mme la Présidente, ce matin, lors de la conférence de presse du ministre de la Santé, que son nouveau slogan, maintenant, il l'a répété à maintes reprises, c'est Dire la vérité. Mme la Présidente, pour le ministre de la Santé, dire la vérité, c'est aussi admettre que son gouvernement, le gouvernement du Parti québécois, après huit ans de pouvoir, ils ont fait le mauvais choix, le mauvais choix de sous-financer la santé. Dire la vérité, c'est admettre aussi d'avoir ignoré pendant près de trois ans le rapport de la commission Clair. Dire la vérité, c'est aussi avoir ignoré tous les rapports accablants qui démontrent la détérioration des conditions de vie des personnes âgées au Québec soit par le manque de soins à domicile ou par le sous-financement des centres de soins de longue durée.

Ma question, Mme la Présidente: Le ministre de la Santé ne convient-il pas que tout ce qu'il a annoncé ce matin dans son plan de la santé, c'est qu'il allait faire des débats, des débats qui ont déjà été faits, des débats sur les besoins et des débats sur le financement? Dans ce nouvel élan de vérité, le ministre de la Santé peut-il admettre que la politique des soins à domicile maintes fois promise par tous les ministres de la Santé, qui est prête, qui est tablettée depuis près de deux ans, ne sera jamais, jamais déposée, jamais mise en application avant les élections générales?

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, j'aime mieux un slogan où on dit la vérité qu'un slogan où on promet tout à tout le monde. Parce que c'est ça, le Parti libéral du Québec, on promet tout à tout le monde. C'est ça qui devrait être le slogan imprimé sur la première page du cahier de propositions du Parti libéral.

Mme la Présidente, la vérité, la vérité, c'est qu'au Québec, au Québec comme partout ailleurs dans le monde, on doit relever le défi, entre autres, du vieillissement de la population. On a une population qui est vieillissante, on a des nouveaux médicaments qui soignent mieux, on a des nouvelles technologies qui permettent justement de mieux soigner les gens, de les faire vivre plus vieux, mais aussi de les garder en santé plus vieux, et je pense qu'on devrait se féliciter justement d'avoir fait toutes ces découvertes. Mais, Mme la Présidente, il y a un impact sur les coûts, il y a un impact majeur sur les coûts. On prévoit, quand on additionne justement les impacts du vieillissement, des médicaments, des nouvelles technologies, qu'il faudra augmenter les budgets de la santé de 5,2 % par année ? c'est un minimum ? et qu'il y aura aussi un rattrapage à faire. Or, qu'est-ce que propose le Parti libéral du Québec?

Nous, de notre côté, Mme la Présidente, si on parle des soins à domicile, au cours des cinq dernières années, on a doublé le budget des soins à domicile. Qu'est-ce qui est proposé par le Parti libéral du Québec? On propose d'aller piger dans les autres ministères, mais on change d'idée à la dernière minute. C'est ça qui est proposé par le Parti libéral du Québec. Et là ce que les journalistes me demandaient ce matin: Comment les libéraux peuvent-ils proposer des baisses de revenus, des baisses d'impôts, alors qu'il nous manque des revenus actuellement? Moi, je les invite à répondre à cette question-là parce qu'il commence à y avoir un consensus au Québec pour dire que ça n'a pas de bon sens de promettre tout à tout le monde comme le fait le Parti libéral du Québec.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Est-ce que le ministre de la Santé, qui, il est clair, ne veut pas dire la vérité aujourd'hui, peut avoir l'honnêteté intellectuelle d'admettre que, dans notre plan de la santé à nous, les débats ont été faits? Pendant quatre ans, nous avons fait des tournées, nous avons rencontré... Le débat a été fait, et nous, pour les personnes âgées qui sont en perte d'autonomie, il y a 625 millions, incluant plus 5,1 % du coût du système. Nous, on va protéger, on va redonner la dignité aux personnes âgées, la dignité que vous avez enlevée à ces personnes âgées là.

Alors, je vous repose la question. Votre plan, ce matin, dites-nous la vérité. Est-ce que c'est seulement un outil, un exercice de diversion, de diversion afin de faire oublier le bilan lamentable du Parti québécois envers les personnes âgées du Québec, le bilan lamentable du Parti québécois au niveau de la santé et du sous-financement de la santé au Québec?

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, on a doublé les budgets en services à domicile. On a doublé les budgets. Mais évidemment que pour les libéraux ce n'est rien, on est habitué à vivre avec des déficits de 6 milliards par année. Mme la Présidente, qu'est-ce qu'on propose dans ce plan, dans ce plan des libéraux? On dit: On va financer la santé en réduisant les budgets dans les autres ministères. Sauf que le député de Chapleau a dit: Sauf dans les affaires internationales, où on va augmenter le nombre de délégations à l'étranger. Sauf le député de Notre-Dame-de-Grâce qui dit: Dans la famille, on va continuer à mettre des crédits supplémentaires pour le ministère de la Famille. Sauf la députée de Sauvé qui nous dit qu'en culture on n'aura pas de gel, mais on va augmenter les budgets. Sauf le chef de l'opposition qui nous dit: En environnement, on va augmenter les budgets. Sauf l'autre député qui nous disait la semaine dernière qu'on va augmenter les logements sociaux si le Parti libéral est au pouvoir. Mme la Présidente, par-dessus ça, ce qu'on nous dit, c'est qu'on va baisser les impôts, les revenus de 5 milliards de dollars. Mme la Présidente, c'est irresponsable!

Quand on parle aux personnes âgées, là... Je souhaite que les gens du Parti libéral aillent les rencontrer, les personnes âgées, puis qu'ils leur expliquent que, eux, ce qu'ils vont faire, c'est qu'ils vont diminuer les revenus, diminuer les ressources pour les personnes âgées. Ce n'est pas ça qu'on propose, de notre côté. On propose la vérité. On propose de prendre ses responsabilités. C'est ça qui est proposé par le gouvernement du Parti québécois.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Oui, Mme la Présidente. Toujours dans cet élan de vérité, est-ce que le ministre de la Santé peut admettre qu'avec le virage ambulatoire vous avez fermé 11 000 lits en promettant d'investir les économies dans les soins à domicile? Promesse non tenue. Pouvez-vous au moins admettre cette vérité-là? Pouvez-vous admettre aussi que, s'il y a des rapports du Vérificateur général, deux rapports accablants sur la détérioration des soins pour les personnes âgées en perte d'autonomie au Québec, s'il y a un rapport qui s'appelle L'exploitation des personnes âgées du Québec, par la Commission des droits de la personne, c'est que vous n'avez pas fait votre travail, vous n'avez pas priorisé la santé? Vous avez fait les mauvais choix. Êtes-vous capable aujourd'hui de vous lever en cette Chambre et au moins dire cette vérité-là?

n(14 h 30)n

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, je le répète, on a doublé les budgets. Et ce qu'on propose ici, c'est d'avoir un débat public, un vrai débat public avec la population pour être capable de faire les bons choix sociaux parce qu'on est effectivement à un moment critique. La population du Québec a le droit de connaître la vérité, a le droit de connaître les impacts du vieillissement, les impacts des nouvelles technologies, des nouveaux médicaments. Maintenant, qu'est-ce que les libéraux proposent dans leur plan? Une augmentation de 5,1 % par année. Mme la Présidente, tout ce qu'on fait avec ça, c'est de maintenir les coûts de système. Il n'y a pas de rattrapage dans le plan des libéraux. Donc, Mme la Présidente, j'invite les libéraux à nous expliquer: Où vont-ils prendre l'argent pour investir dans des services supplémentaires aux personnes âgées? Est-ce que c'est la pensée magique? Mme la Présidente, je ne vois rien, rien qui est proposé dans le programme du Parti libéral.

Nous, de notre côté, on proposera, au cours des prochains mois, des solutions pour financer ces besoins. Mais, Mme la Présidente, oui, il y a des besoins, il faut le reconnaître. Il faut dire la vérité à la population. Arrêtez de promettre tout à tout le monde. Ils ne sont plus crédibles.

La Présidente: Dernière complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Oui. Est-ce que le ministre de la Santé peut cesser d'avoir cet élan de déformer la vérité? Dans notre plan de la santé et de priorités d'action, nous disons: Oui, nous allons assumer les coûts de 5,1 % des coûts du système, mais nous allons ajouter, seulement pour les centres de soins de longue durée et les personnes âgées, pour les soins à domicile, 625 millions. Et, au bout de six ans, c'est 6 023 000 000 que nous allons ajouter toujours en couvrant les coûts de système. Est-ce que le vrai débat, Mme la Présidente, ce n'est pas justement d'appeler les élections générales? Et on fera les débats lors de cette campagne-là. On fera la comparaison du système à deux vitesses de l'ADQ, un pour les riches et l'autre pour les pauvres, et on fera le bilan du gouvernement du Parti québécois.

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, quand la députée nous dit qu'on propose, dans le plan des libéraux, 625 millions, c'est 625 millions sur cinq ans. Donc, il faut diviser ça par cinq ans. Ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas ça qu'il y a dans la politique de services à domicile; c'est beaucoup plus que ça qu'on a besoin pour être capables d'offrir tous les services à la population.

Et ce que ne nous dit pas la députée, aussi, c'est: Où va-t-elle prendre cet argent? Où va-t-elle prendre cet argent, Mme la Présidente? Ce n'est sûrement pas en diminuant...

La Présidente: Un instant, là! Un instant! Le ministre a droit à une réponse avec le même niveau d'écoute que la députée a eu. M. le ministre.

M. Legault: Mme la Présidente, on est dans un débat crucial pour l'avenir de notre système public de santé. Et là où je rejoins la députée, c'est que c'est vrai qu'il y a des représentants d'un autre parti qui proposent des solutions simplistes qui ne règlent rien.

Mais, Mme la Présidente, si on veut vraiment régler le problème du système public de santé au Québec, il faut être capables de dire la vérité à la population, cesser de promettre tout à tout le monde, cesser de dire qu'on peut à la fois baisser les revenus et à la fois qu'il nous manque de revenus, qu'il nous en manque tellement qu'on veut aller chercher des points d'impôt à Ottawa. Je vous invite et j'invite le Parti libéral, Mme la Présidente, à un peu plus de cohérence.

La Présidente: En principale, Mme la députée de Mégantic-Compton.

Hausse du nombre de demandes
d'admission en centre d'hébergement
et de soins de longue durée

Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: Oui. Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, des personnes âgées en lourde perte d'autonomie se retrouvent dans des résidences privées sans permis. Or, quand la condition d'une personne âgée s'alourdit dans une résidence privée, les responsables de ces résidences doivent référer ces personnes au CLSC afin de les réorienter dans des centres d'hébergement publics. Malheureusement, Mme la Présidente, on sait que, selon le rapport du Vérificateur général, plus de 3 000 personnes âgées en perte d'autonomie sont en attente d'une place en centre d'hébergement et de soins de longue durée.

Alors, ma question, Mme la Présidente: Qu'est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux va faire pour régler cette problématique qui ne peut qu'aller en s'amplifiant avec le vieillissement de la population?

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, dans le plan qui a été présenté ce matin, à la page 12, on prévoit que, pour améliorer les services aux personnes qui sont hébergées justement en CHSLD, il faudrait créer 2 200 nouvelles places pour répondre aux besoins; il faudrait un investissement de 152 millions de dollars.

Or, j'ai une question, moi, pour la députée: Où va-t-elle prendre le 152 millions de dollars et où retrouve-t-elle ce 152 millions de dollars dans le programme du Parti libéral du Québec?

La Présidente: En complémentaire.

Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: Mme la Présidente, est-ce que je peux dire au ministre de la Santé et des Services sociaux que, depuis que le gouvernement du Parti québécois est au pouvoir, on a coupé 4 000 places en soins de longue durée? Moi, je vous parle des résidences privées sans permis, où la clientèle s'alourdit.

Alors: Est-ce que le ministre réalise que le Vérificateur général a dénoncé cette situation, que le rapport de la Commission des droits de la personne sur l'exploitation des personnes âgées a dénoncé cette situation et que l'enquête du coroner sur le décès de Mme Bernard est en train de dénoncer cette situation?

Qu'est-ce qu'il va faire pour s'assurer que les personnes âgées en perte d'autonomie reçoivent les soins appropriés par les CLSC?

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Oui, Mme la Présidente. D'abord, nous avons déjà pris en considération les recommandations du Vérificateur général concernant les remarques sur les centres privés d'hébergement pour les personnes âgées. J'ai écrit aussi aux responsables de ces centres pour demander qu'un plan d'évaluation soit fait pour chaque patient, parce que c'était une des recommandations importantes du Vérificateur général. On est aussi, avec un projet de loi qui a été déposé, à constituer des registres pour suivre justement la qualité des services qui sont donnés dans les centres d'hébergement. On est aussi à établir, avec la FADOQ, des critères justement pour faire ces évaluations. Déjà, il existe un programme, qui est pour l'instant sur une base volontaire, mais pour répondre justement... pour mieux évaluer les services qui sont donnés.

Mme la Présidente, en 1994, le budget était de 151 millions de dollars. On l'a doublé, le budget dans ce domaine-là. Mme la Présidente, on reconnaît qu'il y a encore des efforts à faire. On le reconnaît dans le plan qui a été déposé ce matin. Mais on va le faire à la mesure de nos moyens, et c'est pour ça que c'est important d'avoir un débat au Québec.

Parce que, oui, je suis d'accord avec la députée que les personnes âgées ont le droit à toute la dignité puis ont le droit à tous les services qu'elles devraient avoir et que parfois, avec les ressources qu'on a, avec justement les difficultés qu'on a à faire face à ces défis du vieillissement, des coûts des médicaments puis des nouvelles technologies, il faudra avoir plus de ressources. Mais il faudra avoir le courage de le dire à la population et non pas de prétendre, comme le Parti libéral du Québec, qu'on peut tout promettre puis qu'on peut tout régler tout en baissant les impôts de 5 milliards, avec un chausson avec ça!

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Oui, Mme la Présidente. Toujours dans l'élan de dire la vérité de ce matin au ministre de la Santé: Peut-il au moins reconnaître que c'est à cause de votre décision de sous-financer la santé qu'on retrouve dans l'accablant rapport du Vérificateur général que, dans les recherches qu'elle a faites dans des résidences privées sans permis, on a révélé que, dans une proportion de 71 %, les personnes âgées en perte d'autonomie ne recevaient aucun service des CLSC? Êtes-vous capable au moins d'admettre cette vérité-là?

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, on peut prendre des questions tout l'après-midi, où on a des suggestions d'ajouter des budgets, d'ajouter des budgets dans les CLSC pour les services à domicile, d'ajouter des budgets dans les centres d'hébergement pour les personnes âgées, mais, à un moment donné, il faut être capable de trouver l'argent quelque part. Il n'y a pas de magie, là, on ne peut pas inventer cet argent.

Donc, Mme la Présidente, c'est pour ça qu'on a fait, justement ce matin, une opération vérité, pour expliquer à la population que non seulement il y a des besoins qu'on n'arrive pas à combler actuellement, mais que, lorsqu'on regarde avec une certaine vision les années qui s'en viennent, à cause des impacts du vieillissement de la population entre autres, on aura des besoins encore plus grandissants, les besoins en santé vont croître à un rythme plus grand que les revenus du gouvernement du Québec. Il me semble que ce n'est pas compliqué à expliquer. Donc, s'il nous manque de revenus, on ne promet pas, comme le Parti libéral du Québec, de diminuer les revenus... de diminuer les impôts. Il faut être responsables. Si vraiment on veut avoir un peu de compassion auprès des personnes âgées, on ne propose pas un plan comme celui du Parti libéral du Québec.

n(14 h 40)n

La Présidente: En principale, M. le député.

Réglementation en matière d'importation
et de traitement de matières dangereuses

M. Robert Benoit

M. Benoit: Mme la Présidente, le Québec reçoit chaque année des centaines de milliers de tonnes de matières dangereuses en provenance des États-Unis. Avec son projet de règlement, le gouvernement a sur les matières dangereuses... le gouvernement ouvre la porte à encore plus d'importation, puisque le processus pour obtenir un permis d'incinération des matières dangereuses sera beaucoup plus simple et rapide que les mesures qui sont en ce moment aux États-Unis. Écoutez bien ce que je vais vous lire, c'est signé par les deux ministres, le ministre n° 4 et le ministre n° 5 de l'Environnement, conjointement. C'est le mémoire qu'ils ont déposé au Conseil des ministres. Je prends pour acquis qu'ils l'ont lu avant de le déposer.

Alors, les deux ministres, conjointement et solidairement, écrivaient la chose suivante: «Le processus de délivrance des permis oblige le gouvernement des États-Unis à informer la population sur les demandes de permis à l'étude ainsi que la décision rendue après l'analyse de la demande.» Et, un peu plus loin, on voit que la population peut demander des audiences publiques, Mme la Présidente. Plus loin dans ce même document signé par ces deux ministres, on y lit: «Au Québec, par contre, il n'y a aucun mécanisme d'information et de consultation de la population pendant le processus de délivrance du permis visé à l'article 70.9.»

La question que je pose à ces deux ministres, conjointement et solidairement, qu'ils nous répondent tous les deux, qu'ils nous répondent tous les deux: Est-ce qu'on n'est pas après affaiblir environnementalement le Québec, alors que les populations ne seront pas au courant et ne pourront pas se battre contre l'arrivée dans leur patelin d'incinérateurs, Mme la Présidente?

La Présidente: M. le ministre.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Bien. Merci à vous, Mme la Présidente. D'abord, je remercie beaucoup mon collègue le critique de l'opposition officielle pour sa question.

Vous vous souviendrez, il y a 15 jours, j'avais rappelé au député que je me posais, moi aussi, une question. Je me demandais s'il réalise à quel point son parti ne le suit pas en matière environnementale? Et preuve en était ce résumé synthèse de la plateforme électorale du Parti libéral dans laquelle on retrouve une très belle et grande photo du chef de l'opposition mais pas un seul mot ni sur l'écologie, ni sur l'environnement, ni sur le développement durable.

Alors, le critique s'était levé, Mme la Présidente, vous vous souviendrez, puis il m'avait dit: M. le ministre, c'est parce que vous n'avez pas lu ma plateforme électorale. Alors là, j'ai bondi là-dessus tout de suite après la période des questions, Mme la Présidente.

Il m'avait référé à la page 24, dans un document de 45 pages. Je me suis dit: Enfin, Mme la Présidente, on va trouver des idées intéressantes, au Parti libéral, en matière d'environnement. Je m'attendais à quatre, cinq pages. Je n'en n'ai pas trouvé quatre, je n'en n'ai pas trouvé trois, je n'en n'ai pas trouvé deux, je n'en n'ai même pas trouvé une. J'ai trouvé, Mme la Présidente, pour tout vous dire, même pas un quart de page, trois phrases sur le développement durable, trois petites phrases, et, comme... comme il aime bien lire des documents, Mme la Présidente, je demande le consentement de cette Chambre pour déposer la soi-disant plateforme électorale du Parti libéral en matière environnementale.

Document déposé

La Présidente: Alors, y a-t-il consentement? Consentement. M. le député d'Orford. Bon. En complémentaire, M. le député d'Orford.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Mme la Présidente, on est dans une situation très sérieuse. Des déchets toxiques peuvent rentrer chez nous, rentrent chez nous en quantité industrielle, et on se fait parler du programme du Parti libéral.

La question que je repose: Est-ce qu'il est acceptable que deux ministres de l'Environnement...

Des voix: ...

La Présidente: Un instant! M. le député d'Orford...

Des voix: ...

La Présidente: M. le député d'Orford a le droit de poser sa question dans un climat qui va nous permettre de la comprendre. M. le député d'Orford.

M. Benoit: Mme la Présidente, est-il acceptable que, dans un mémoire présenté au Conseil des ministres, cosigné par deux ministres, on se mette dans une situation aussi faible vis-à-vis des États-Unis, quand on sait qu'on a déjà un problème d'importation et qu'on ne permettra pas aux citoyens de donner leurs points de vue, alors qu'on peut installer tout près de chez eux un incinérateur pour brûler ces produits chimiques là, Mme la Présidente?

La Présidente: M. le ministre.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Eh bien, Mme la Présidente, il y a en filigrane de la question du député l'idée selon laquelle le Québec serait une espèce de poubelle de l'Amérique. Or, grâce à l'action énergique du gouvernement du Québec et de mon collègue le ministre d'État à l'Environnement, nous avons mis de l'avant une réglementation qui est aussi et sinon davantage restrictive que celle qui existe déjà aux États-Unis et qui a pour nom le «Landfill Restriction». Dorénavant, nous avons donc des critères équivalents à nos voisins américains, ce qui a réduit, depuis quelques mois, considérablement l'arrivée chez nous de matières dangereuses.

À cet égard, j'aimerais rappeler à l'ensemble de la population qui nous écoute et particulièrement à mon collègue critique de l'opposition que, parlant de matières dangereuses, il y a des matières qu'on reçoit au Québec, mais on les reçoit toujours en fonction d'un traitement et d'un recyclage avant quelque enfouissement que ce soit pour assurer la sécurité de la santé publique, primo; secundo, il y a des matières dangereuses que nous ne traitons pas au Québec et que nous envoyons tantôt en Alberta ? c'est le cas des BPC ? tantôt aux États-Unis ? c'est le cas des déchets biomédicaux. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Présidente: En question principale, Mme la députée d'Anjou.

Remboursement du coût d'une prothèse
auditive facilitant l'intégration au travail
d'un employé d'Emploi-Québec

Mme Lise Thériault

Mme Thériault: Merci, Mme la Présidente. Dimanche dernier, Le Soleil rapportait qu'un travailleur de la région de Québec semble être victime, encore une fois, de l'application d'une norme insensible concernant l'octroi d'une subvention d'Emploi-Québec qui lui aurait permis de se procurer une prothèse auditive conforme aux besoins de son emploi. Voici l'extrait de la décision, et je cite: «Selon le cadre normatif, Emploi-Québec ne paie pas pour les prothèses auditives, qu'elles soient numériques ou analogiques, étant donné que ces prothèses sont utilisées dans l'ensemble des activités de la vie quotidienne de la personne handicapée et non seulement de façon spécifique pour des activités reliées au travail.» Malgré l'intervention de son député, le dossier n'a pas avancé.

J'aimerais savoir, Mme la Présidente, de la part de la ministre de l'Emploi, qu'est-ce qu'elle a fait dans ce dossier depuis qu'il a été porté à sa connaissance.

La Présidente: Mme la ministre.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Mme la Présidente, la question qui devrait être posée ici n'est pas: Est-ce que le gouvernement du Québec paie pour des prothèses? Parce que le gouvernement du Québec paie pour des prothèses auditives, elles sont remboursées par la RAMQ. La question posée devrait être: Qui doit payer dans le cas de ce citoyen? Or, Emploi-Québec paie pour les personnes handicapées, paie pour l'adaptation des postes de travail. D'ailleurs, ce citoyen a reçu une subvention pour l'adaptation de son poste et de son téléphone de bureau, tout cela. De plus, son employeur reçoit une compensation de 40 % du salaire de l'employé ? il faut le dire, ce qu'on fait pour l'intégration des personnes handicapées en emploi ? dans le cadre du programme Contrat d'intégration au travail.

Les prothèses auditives, elles, sont fournies par le programme des aides auditives du ministère de la Santé et des Services sociaux, qui est administré par le régime d'assurance maladie du Québec, et le règlement régissant ce programme spécifie qu'il répond aux besoins des personnes malentendantes en situation d'intégration. Donc, le programme de remboursement des aides auditives géré par le ministère de la Santé et des Services sociaux complète déjà toute une palette d'outils que nous gérons effectivement à Emploi-Québec.

Par ailleurs, les personnes handicapées, actuellement, sont très heureuses de voir que les programmes d'intégration au travail font maintenant partie des outils réguliers d'intervention pour l'employabilité des personnes et sont très bien gérés à l'intérieur d'Emploi-Québec. Il y a eu augmentation des budgets pour les contrats d'intégration au travail à l'intérieur des budgets d'Emploi-Québec, donc à l'intérieur des postes de... Ce qu'on fait comme interventions, on le fait bien, on le fait de mieux en mieux.

Quant au programme des aides auditives, il y a un programme, mais il est à la RAMQ.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée d'Anjou.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault: Oui, merci, Mme la Présidente. Est-ce que la ministre de l'Emploi peut se rendre compte du ridicule de la situation? Le monsieur travaille au téléphone, il a besoin d'une prothèse auditive, et on refuse de lui payer. Sans prothèse, ce citoyen-là, il va avoir des problèmes avec son emploi. Qui sait, peut-être qu'il n'en aura plus. Est-ce que la députée peut être une véritable ministre de l'Emploi et favoriser l'emploi pour tous les Québécois, Mme la Présidente?

La Présidente: Alors, M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, Mme la Présidente, en complément d'information. Je pense qu'il est important... on mentionnait tout à l'heure que le programme des prothèses auditives relevait de la RAMQ. Effectivement, et nous avons procédé à un certain nombre d'expertises, de consultations auprès d'experts pour justement savoir si des prothèses auditives numériques sont bien meilleures que les prothèses auditives analogiques, actuellement couvertes par le régime d'assurance maladie. Or, de toutes ces consultations, il apparaît qu'il n'y a aucune évidence que les prothèses auditives numériques soient meilleures que les prothèses auditives analogiques, et, lorsque celles-ci sont bien ajustées, elles offrent effectivement, parce qu'elles sont disponibles gratuitement, aux personnes concernées tout le support nécessaire, donc notamment au niveau de l'intégration en emploi. Il n'y a donc pas de justification actuellement à inclure les prothèses programmables dans la liste des aides en question. Merci, Mme la Présidente.

n(14 h 50)n

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée d'Anjou.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault: Merci, Mme la Présidente. Est-ce que le ministre peut se rendre compte que... Ici, j'ai une lettre, j'ai un témoignage de l'employeur de cette personne-là qui dit: «Lorsque M. Girard a fait l'essai de la prothèse auditive numérique, j'ai immédiatement remarqué une bonne amélioration de sa compréhension, que ce soit au téléphone, en personne ou avec un groupe de personnes, dans un milieu bruyant ou en toute autre circonstance. J'ai constaté une meilleure compréhension et aussi une réduction des erreurs. La même constatation a été dite par ses collègues de travail.» J'ai aussi le rapport de l'audioprothésiste. Parce que cet homme-là a essayé la prothèse en question. Je ne comprends absolument pas pourquoi le ministre parle d'études et de dossiers alors qu'ici on a la preuve que, oui, cette prothèse-là fonctionne, et on ne veut pas la payer à monsieur.

Rendez-vous compte une bonne fois pour toutes, là, que cette personne-là risque de se ramasser chez elle. Et, en bout de ligne, qui va payer? Encore l'État.

La Présidente: M. le ministre.

M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Mme la Présidente, en l'espèce, les choses sont très simples. Je rappelle que, avant d'introduire un nouveau dispositif, un nouvel appareil, nous devons procéder à de très sérieuses vérifications de la valeur ajoutée, par exemple, d'un nouveau type de prothèse. Or, toutes les consultations que nous avons faites sont à l'effet effectivement qu'on peut, avec les appareils actuellement disponibles gratuitement, avec bien sûr les ajustements qui vont de soi, compte tenu des caractéristiques de la personne, avoir un rendement équivalent à celui des prothèses auditives numériques. Voilà, Mme la Présidente.

La Présidente: En principale, M. le député de Verdun.

Bilan des activités de l'organisme
Valorisation-Recherche Québec

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Oui, Mme la Présidente. Voici. Valorisation-Recherche Québec, c'est un organisme sans but lucratif qui a essentiellement comme mandat d'accroître les retombées pour la société québécoise des recherches universitaires. On s'entend là-dessus.

Alors, j'ai écrit au président de VRQ, Valorisation-Recherche Québec, la semaine dernière pour savoir non seulement quels étaient les projets subventionnés, mais aussi, mais aussi quels étaient les effets structurants que les projets avaient pu avoir sur l'économie québécoise.

Alors, on m'a répondu la chose suivante: «Je suis dans l'obligation de vous informer que VRQ ? c'est-à-dire Valorisation-Recherche Québec ? bien qu'entièrement subventionné par le gouvernement québécois, possède un statut d'organisme privé, et, à ce titre, VRQ n'est pas assujetti à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics. Les documents transmis à VRQ dans le cadre des projets de recherche retenus pour le financement sont donc confidentiels.»

Alors, je m'adresse à la ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie qui, elle, a l'information, qui, elle, a déjà plaidé sur de nombreuses tribunes qu'elle voulait être transparente. Je lui dis: Est-ce qu'elle peut nous dire à l'heure actuelle devant cette Chambre, un, à quoi ont servi les 220 millions d'argent public qui ont été donnés à VRQ, premièrement? Deuxièmement, quels effets structurants ces 220 millions ont eus? Troisièmement, peut-elle nous informer et nous donner les rapports de ces différents projets de recherche?

C'est assez simple, si vous voulez être transparents, informez-nous, s'il vous plaît.

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Alors, je réponds favorablement à la demande du député de Verdun et je déposerai à une prochaine séance l'ensemble de l'information demandée, Mme la Présidente.

La Présidente: Alors, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales.

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. M. le leader du gouvernement, auparavant.

M. Boisclair: Oui. Je solliciterais le consentement de l'opposition officielle pour faire un des avis touchant les travaux des commissions, particulièrement la commission des affaires sociales. Déjà, ils nous attendent en commission.

La Présidente: Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Oui.

Avis touchant les travaux des commissions

La Présidente: Il y a consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Boisclair: Alors, Mme la Présidente, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales complétera les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, dès maintenant jusqu'à 16 h 50, à la salle du Conseil législatif.

Motions sans préavis

La Présidente: Alors, nous en sommes maintenant aux motions sans préavis. M. le député de l'Acadie.

Souligner la Semaine
québécoise de la citoyenneté

M. Bordeleau: Alors, merci, Mme la Présidente. Alors, je sollicite les consentements des membres de l'Assemblée nationale afin de présenter la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine québécoise de la citoyenneté qui se tiendra du 19 au 23 octobre 2002;

«Que ce rendez-vous avec tous nos concitoyens et concitoyennes du Québec permette une réflexion personnelle à l'égard de nos droits mais également de nos devoirs en tant que citoyens.»

La Présidente: Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Consentement. M. le député de l'Acadie.

M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Alors, Mme la Présidente, suite à l'initiative du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour souligner la Semaine québécoise de la citoyenneté qui aura lieu du 19 au 23 novembre.

La Semaine québécoise de la citoyenneté nous donne l'occasion de reconnaître la contribution de citoyennes et de citoyens, d'organismes et d'entreprises de la société québécoise. À cet effet, plusieurs événements importants auront lieu au cours de cette semaine ici même, à la salle...

Des voix: ...

La Présidente: M. le député de l'Acadie, j'apprécierais que nous puissions entendre votre motion. M. le député.

M. Bordeleau: Alors, merci. Alors, je disais qu'à cet effet plusieurs événements importants auront lieu au cours de cette semaine ici même, à la salle du Conseil législatif.

De plus, dans diverses régions du Québec, des activités seront organisées au cours des prochains jours pour souligner l'apport exemplaire ou exceptionnel de certains concitoyens pour promouvoir les valeurs fondamentales de la société québécoise et pour favoriser le maintien des relations harmonieuses entre les Québécoises et les Québécois de toutes origines.

Cette Semaine québécoise de la citoyenneté nous fournit également l'occasion de réfléchir sur ce que signifie précisément être un citoyen. Essentiellement, être un citoyen, c'est avoir des droits politiques mais aussi des devoirs envers sa patrie et ses concitoyens.

Quand une personne a qualité de citoyen, elle a des droits politiques, dont le plus important est de pouvoir, dans une société démocratique, choisir ses dirigeants politiques qui reçoivent alors le mandat d'agir en leur nom et de défendre leurs intérêts. Par contre, ce privilège que constituent des droits politiques doit aussi être accompagné des devoirs envers sa patrie et ses concitoyens: respect des valeurs fondamentales de la société canadienne et québécoise, respect des lois et des principes de vie démocratique, respect des libertés de chaque concitoyen.

Si, dans une société comme la nôtre, le pouvoir de décider est partagé et appartient à chaque individu, cela exige évidemment que les choix politiques, religieux ou ethnoculturels soient exercés librement et respectés, le tout dans le partage des valeurs et des façons de vivre communes que nous avons adoptées comme société. Les diverses activités organisées contribueront aussi, et c'est très important, à sensibiliser un large public à l'apport de l'immigration au Québec et ses régions, notamment auprès de tous les employeurs en ce qui a trait à l'insertion des immigrants au marché du travail.

Comme société d'accueil, nous nous devons de prendre conscience du rôle absolument essentiel que joue le travail dans le processus d'intégration de l'immigrant. En plus d'acquérir une capacité linguistique qui lui permet de communiquer et éventuellement de partager les valeurs de la société d'accueil, le fait de pouvoir exercer un travail constitue la clé de voûte de son intégration à sa nouvelle patrie.

Sa société d'accueil doit lui donner alors les moyens de pouvoir rêver, d'avoir des ambitions, lui donner la satisfaction de se sentir une personne à part entière, capable de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille, de voir l'avenir avec optimisme, lui fournir la possibilité de se sentir satisfait de lui-même et d'avoir l'impression qu'il pourra se développer sur le plan personnel.

Au premier chef, les gouvernements, quelle que soit leur juridiction, se doivent de donner l'exemple à ce chapitre en s'assurant que leur processus d'embauche et de promotion respecte la diversité de la population et exclut toute forme de discrimination. Malheureusement, en dépit du climat de réjouissance associé à la tenue de cette Semaine québécoise de la citoyenneté, je me dois, à la demande de nombreux concitoyens issus des communautés culturelles, de souligner que le bilan du gouvernement du Parti québécois est, à ce niveau, très loin de répondre aux attentes de ces derniers.

Il faut souligner également que les engagements récemment réaffirmés du gouvernement actuel à l'égard de la représentation accrue des communautés culturelles dans la fonction publique seront enfin réalisés, contrairement à ce qui s'est effectivement passé au cours des huit dernières années.

n(15 heures)n

Il n'y a rien de pire, Mme la Présidente, pour les nouveaux arrivants et pour les résidents venus de d'autres horizons que de se sentir exclus de facto des forces actives de la société d'accueil. La présente situation est créatrice de tensions fort négatives et est carrément intolérable dans une société comme la nôtre.

Malgré les quelques critiques que je me devais de formuler, je dois mentionner qu'il est plutôt rare en cette Chambre, où les débats sont souvent très animés et empreints de la ligne de parti, que nous pouvons unanimement, dans un esprit de concertation et de respect mutuel, exprimer en tant que parlementaires notre appréciation sincère et profonde à l'endroit de tous nos compatriotes québécois d'origine ou québécois venus des quatre coins du monde pour se joindre à nous dans le but de développer le Québec et le Canada. La vie démocratique se nourrit de l'apport de personnes et de groupes de toutes origines et de toutes croyances, et ce, dans un climat d'appréciation réciproque. Le Parti libéral du Québec que représente l'opposition officielle a toujours trouvé son inspiration, sa force et sa vigueur dans cette diversité humaine propre au Québec.

En terminant, Mme la Présidente, permettez-moi, en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière des communautés culturelles et de l'immigration, de souligner plus particulièrement l'apport exceptionnel de tous nos concitoyens issus des nombreuses communautés culturelles qui ont choisi, au fil des ans, de venir avec nous et de contribuer chacun à leur façon à faire du Québec ce qu'il est devenu aujourd'hui, soit une société ouverte, tolérante et respectueuse de la diversité ethnoculturelle. Tous ensemble, nous pouvons être satisfaits de ce que nous avons fait du Québec, mais il reste encore beaucoup à faire, et c'est ensemble que nous ferons face aux défis de l'avenir. Tous les Québécois et Québécoises, de toutes origines, doivent être convaincus qu'ils sont tous aujourd'hui et dorénavant des citoyens et des citoyennes à part entière, avec les droits et les devoirs correspondants.

C'est avec joie, Mme la Présidente, que je m'associe à mes collègues de... aux collègues de ma formation politique, dis-je, pour souligner cette Semaine québécoise de la citoyenneté et souhaiter à tous nos compatriotes que cette période soit une occasion de réflexion, d'ouverture à la diversité et de respect mutuel. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de l'Acadie. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le député de Chauveau, de m'avoir donné la parole. Oui, je tiens à joindre ma voix à cette motion, effectivement, que l'Assemblée nationale souligne cette Semaine québécoise de la citoyenneté qui se tient dans le cadre des Rendez-vous québécois de la citoyenneté du 18 au 25 novembre ? tout le monde le sait ? et dont le lancement a eu lieu ce dimanche 17 novembre au ministère des Relations même avec les citoyens et de l'Immigration, sur la rue McGill, dans le magnifique édifice qui porte le nom, sans aucun doute, d'un des ministres de l'Immigration les plus appréciés et les plus aimés que le Québec ait connus, notre regretté collègue, mon ami Gérald Godin.

Dans le cadre des Rendez-vous québécois de la citoyenneté, la cinquième édition de la Semaine québécoise de la citoyenneté convie cette année encore l'ensemble des Québécoises et des Québécois à exercer leur citoyenneté en posant de manière toute particulière des gestes de rapprochement et des gestes de solidarité qui visent à favoriser le maintien et le renforcement de relations civiques et interculturelles harmonieuses.

L'exercice de la citoyenneté au Québec en est un de droits, de libertés, mais aussi, également, M. le député de Chauveau, de responsabilités. Être citoyen, c'est faire siens les libertés et les droits fondamentaux qui nous protègent et qui encadrent notre vie en société, soit l'exercice, oui, de la démocratie, le respect des libertés individuelles et la résolution pacifique des conflits, fondement essentiel d'ailleurs de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec.

Être citoyen, c'est être, à l'exemple du ministre d'État, mon collègue, et moi-même, c'est d'être ouvert au pluralisme et à la diversité sous toutes ses formes. Être citoyen, c'est adhérer au projet de développement de la nation par le biais d'une pleine participation civique au processus démocratique qui anime le Québec. À cet égard, la vaste consultation sur la réforme de nos institutions démocratiques à laquelle est conviée l'ensemble de la population en ce moment illustre très bien ce processus démocratique dont le Québec peut être fier. Les citoyennes et les citoyens des quatre coins du Québec pourront débattre d'enjeux majeurs et ainsi actualiser les valeurs démocratiques qui encadrent l'exercice de la citoyenneté au Québec.

M. le Président, le temps ne me permet pas de vous raconter comment l'expérience vécue par notre collègue le député de Borduas, ministre chargé de la réforme des institutions démocratiques, comment l'expérience qu'il a vécue samedi soir auprès de la communauté lusophone de Montréal et regroupant nos compatriotes d'origine portugaise, d'origine brésilienne ou d'origine angolaise, enfin les pays dont la langue maternelle est le portugais... Samedi soir, M. le Président, 150 personnes studieusement appliquées à discuter de ce grand enjeu.

La citoyenneté est un processus qui repose sur l'évolution constante de notre histoire, de nos luttes sociales et de notre volonté en tant que peuple québécois à travailler à l'élaboration d'un projet commun dans le but de construire une société plus juste, plus inclusive. Le Québec a fait le choix fondamental de la pluralité, du respect de la diversité et de la solidarité, qui contribuent puissamment à la vitalité de notre démocratie.

La Semaine québécoise de la citoyenneté, qui est au coeur de ce processus, comprend, cette année, trois temps forts en plus, forcément, d'une série d'activités en région. Le premier temps fort était hier avec la cérémonie d'hommage au civisme, au cours de laquelle le gouvernement du Québec honorait ici même le courage et la conduite exemplaire de 27 citoyennes et citoyens qui ont porté assistance à des personnes dont la vie était en danger.

Le deuxième temps fort: la première édition de la cérémonie nationale de bienvenue qui se tiendra en ces lieux ce jeudi 21 novembre. À cette occasion, le gouvernement du Québec reconnaîtra publiquement l'apport bénéfique de l'immigration au développement de la société québécoise et exprimera directement aux personnes immigrantes la fierté de la nation québécoise de les accueillir au Québec et de se réjouir qu'ils veulent bien partager notre destin nord-américain.

Enfin, le troisième temps fort de la Semaine: lundi 25 novembre prochain, ici même, toujours à l'Assemblée nationale, le gouvernement du Québec soulignera avec éclat les actions accomplies par des Québécoises et des Québécois de toutes origines, le dévouement et l'engagement d'organismes et d'entreprises, tant privés que publics, qui oeuvrent en matière de rapprochement interculturel, de lutte contre le racisme et de reconnaissance des valeurs démocratiques en remettant les Prix québécois de la citoyenneté. Il s'agit des prix, vous le savez tous, des prix Jacques-Couture, pour le rapprochement interculturel; Claire-Bonenfant, pour les valeurs démocratiques; et, au bénéfice du député d'Abitibi-Ouest, Anne-Greenup, pour la lutte contre le racisme et la promotion de la participation civique; et, pour la deuxième année, le Prix pour les entreprises et les organismes publics en matière d'accès à l'emploi, de gestion de la diversité et d'adaptation des services.

n(15 h 10)n

Ce qui contredit les propos, tantôt, du député de l'Acadie qui, profitant d'un moment solennel en cette Assemblée, avait des propos qui, à mon point de vue, étaient déplacés et qui ne cadraient malheureusement pas... heureusement pas avec la réalité, M. le Président. Parce que, durant que l'administration précédente faisait adopter à cette Assemblée ? et j'avais le bonheur d'y être et j'y ai souscrit avec le plus grand des enthousiasmes ? une déclaration sur les relations interculturelles... Le papier est bien beau, mais il faut également des actions. Et, pour lutter contre les exclusions, je me serais attendu aujourd'hui à ce qu'il y ait une deuxième question relative à l'immigration dans cette Assemblée nationale ? que depuis 1994 c'est le vide absolu de la part de l'opposition ? et qu'il aurait eu l'honnêteté intellectuelle de féliciter le gouvernement pour le succès accompli vendredi dernier dans cette entente historique avec le Collège des médecins qui vise à reconnaître les diplômes obtenus à l'étranger pour celles et ceux de nos compatriotes qui, établis ici, ont fait des études de médecine à l'extérieur.

Mais je n'ai pas souvenance que cela ait été la préoccupation du gouvernement précédent, je n'ai pas souvenance que cela a été. Non, je n'ai pas souvenance aussi qu'il ait été dans la préoccupation du gouvernement précédent de nommer un de nos compatriotes de race noire juge à la Cour supérieure du Québec. Ça, c'est encore le gouvernement actuel qui le fait, qui lutte chaque jour contre l'exclusion sous toutes ses formes, mais il a travaillé pour le respect et l'avancement des individus. Et il y a d'autres petites actions partisanes de petits partis qui essaient de manger leur petite soupe dans leur petit coin. Ils s'imaginent que nos compatriotes d'origine immigrante sont des chasses gardées. Ils auront des surprises, n'est-ce pas? Ils auront des surprises, n'est-ce pas?

Et, de plus, une série d'activités et d'événements organisés par les partenaires du milieu communautaire et socioéconomique ? et je vois la ministre de la Culture avec son enthousiasme débordant qui, oui, approuve ces propos ? les organismes partenaires du milieu communautaire et socioéconomique, ont lieu tout au long de la Semaine au Québec sur des thèmes qui sont fortement liés à cette participation civique, au maintien des relations interculturelles harmonieuses, une meilleure connaissance de la part de l'immigration au développement de la vie démocratique au Québec.

L'immigrant n'est plus ? que nos compatriotes le sachent ? n'est pas le voleur de job; l'immigrant est créateur d'emplois. L'immigrant contribue fortement, M. le Président, chers collègues, fortement ? d'ailleurs il y a un député ici qui en est un exemple vivant, vous savez ? l'immigrant contribue au développement économique du Québec, et il y a chez l'immigrant, M. le Président, une volonté de travail qui est tout à fait exceptionnelle.

Et je tiens à souligner qu'au moment du lancement de la Semaine québécoise de la citoyenneté nous avons rendu public un ouvrage très attendu qui est la sixième édition du Répertoire des organismes ethnoculturels, qui a été intitulé À la découverte de la diversité québécoise, qui, à mon point de vue, est un outil indispensable de référence, qui va permettre de faire connaître les secteurs d'activité de plus de 80 communautés ethnoculturelles et de 1 200 organismes qui contribuent au développement socioéconomique et culturel du Québec. Voilà une richesse.

Outre ces activités ? et je conclurai là-dessus ? qui visent à ancrer notre citoyenneté dans l'action, cette Semaine se veut symbolique, surtout en raison des événements internationaux qui depuis un an interpellent le construit de notre cohésion sociale. Cette année encore, la Semaine québécoise de la citoyenneté marque notre volonté éminemment québécoise de mieux vivre ensemble dans un esprit d'ouverture et de solidarité. Nous voulons aussi actualiser les valeurs qui animent en ce début de siècle, en ce nouveau millénaire, la nation québécoise: démocratie, justice, acceptance, tolérance, ouverture au pluralisme.

Bref, M. le député, parce que nous avons fait le choix de vivre au Québec, nous sommes des citoyennes et des citoyens québécois. Certes, ce choix implique des droits mais ? M. le Président, j'ai dit «député», président, pardon ? aussi des responsabilités. C'est pourquoi j'invite les Québécoises et les Québécois que nous sommes à exercer leur citoyenneté, bien sûr, tout au long de l'année mais aussi à profiter pleinement de ce moment tout à fait privilégié de la Semaine québécoise de la citoyenneté pour participer à la promotion des valeurs fondamentales de la société québécoise. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député et ministre. Y a-t-il d'autres interventions que celle-là? Alors, je mets donc cette motion aux voix...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, M. le député de... de Vimont, excusez-moi. M. le député de Vimont, je vous cède la parole.

M. François Gaudreau

M. Gaudreau: Merci, M. le Président. Et je vais surprendre, je serai bref et j'irai droit au but. La Semaine québécoise de la citoyenneté, qui se déroule cette semaine, est une occasion toute spéciale pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Il s'agit en effet d'un moment privilégié pour s'arrêter et souligner l'apport des citoyens et citoyennes, d'organismes et d'entreprises dans notre société. Cette semaine toute particulière a débuté hier par la cérémonie de l'hommage au civisme. Au nom de ma formation politique, j'aimerais donc féliciter les récipiendaires qui ont été honorés pour leur courage et leurs gestes de bravoure extraordinaires qu'ils ont accomplis pour sauver des personnes en graves difficultés, souvent au péril de leur propre vie.

D'autre part, jeudi aura lieu la cérémonie nationale de bienvenue qui accueillera les nouveaux immigrants et soulignera l'apport important des immigrants au Québec. Notre société québécoise multiculturelle, telle qu'on la connaît aujourd'hui, ne peut passer effectivement outre le fait que des personnes provenant de différentes cultures ont participé et participent encore au développement du Québec. Je suis donc heureux de leur souhaiter en avance la bienvenue dans notre société, une société dont je suis fier, qui est distincte, puisque nous sommes la seule société majoritairement francophone dans les Amériques, où la langue française joue un rôle prépondérant dans toute la gamme des institutions qui forment le tissu d'une communauté, notre société qui vit son originalité à l'intérieur des cadres de la démocratie libérale en accordant une très grande place aux libertés individuelles et à la protection des droits des minorités.

Enfin, M. le Président, j'aimerais souligner l'événement qui aura lieu lundi, le 25 novembre, soit la cérémonie de remise des Prix québécois de la citoyenneté qui va clore cette Semaine de la citoyenneté. Cette journée sera un moment fort important, puisque des personnes, des organismes et des entreprises de la société québécoise seront reconnus pour leur contribution exceptionnelle au renforcement de la vie démocratique et de l'exercice de la citoyenneté. Je tiens par conséquent à féliciter les futurs lauréats des prix qui seront décernés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Vimont. D'autres intervenants?

Mise aux voix

Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Y a-t-il d'autres motions? Oui, Mme la députée de Jean-Talon, je vous cède la parole.

Souligner le 40e anniversaire
de la Délégation générale du Québec à Londres

Mme Delisle: Alors, la Délégation générale du Québec à Londres a 40 ans. Ah, excusez, M. le Président, je vais recommencer. Je sollicite le consentement de l'Assemblée pour présenter la motion suivante:

«La Délégation générale du Québec à Londres a 40 ans!

«Que l'Assemblée nationale souligne sa fierté et sa reconnaissance envers tous ceux et celles qui ont contribué au développement du Québec sur le plan international et au rayonnement de son expertise, sa culture et son dynamisme sur le continent européen.»

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Consentement.

Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. L'an dernier, nous fêtions en très grande pompe les 30 ans de la Délégation générale du Québec à Bruxelles et les 40 ans de la Délégation générale du Québec à Paris. Ces deux délégations sont probablement les plus médiatisées à cause de notre grand intérêt pour la construction européenne, d'une part, et de notre relation privilégiée avec la France, d'autre part. Cette année, nous célébrons le 40e anniversaire d'une délégation générale un peu plus discrète mais qui, à mon avis, est tout aussi importante pour le Québec, puisqu'elle est située sur le territoire de notre deuxième partenaire commercial après les États-Unis, donc le Royaume-Uni.

La Délégation générale du Québec à Londres ? puisque c'est de celle-là dont on parle ? a été établie en 1962, mais les relations entre le Québec et le Royaume-Uni, malgré quelques interruptions, ont une origine bien plus lointaine. En effet, entre 1816 et 1833, il existait dans la capitale anglaise une agence du Bas-Canada. Par la suite, à partir de 1871, le Québec envoyait régulièrement des envoyés spéciaux à Londres. En 1908, l'ouverture d'un bureau du Québec fut décidée, mais la grande dépression eut raison de lui. Enfin, en 1963, Jean Lesage, premier ministre et chef du Parti libéral du Québec, inaugurait la Délégation générale du Québec à Londres, rouverte officiellement en octobre de l'année précédente.

n(15 h 20)n

Comme vous le savez, M. le Président, le Québec est présent sur quatre continents avec un dispositif remarquable de six délégations générales, quatre délégations, sept bureaux et 12 antennes. Mais notre installation à Londres est certainement le fleuron de notre réseau à l'étranger. Sa position rend son rôle névralgique, puisque Londres est la place financière la plus importante d'Europe avec ses 600 banques, ses 170 maisons de courtage étrangères et ses 137 sièges sociaux européens de sociétés multinationales. En comparaison, Paris ne compte que 35 sièges sociaux européens de sociétés multinationales. En 1997, la valeur des échanges commerciaux entre le Québec et le Royaume-Uni se chiffrait à 3,9 milliards de dollars; en 1999, 5,1 milliards de dollars; et, en 2001, 7,9 milliards de dollars, ce qui représente le double de nos échanges avec la France.

Vous aurez remarqué que, même si ces chiffres sont loin de rivaliser avec la valeur de nos échanges avec les États-Unis ? il s'agit de 81 milliards de dollars en 2001 ? la croissance de notre commerce avec le Royaume-Uni est extraordinaire. C'est certainement dû, pour la large part, à la grande qualité des produits québécois, mais également au dévouement des serviteurs du Québec à l'étranger. Les intérêts du Québec dans la région sont défendus par une équipe très compétente qui organise de nombreuses activités, accompagne systématiquement les exportateurs québécois désireux de se lancer sur les marchés formidables que représentent les 87 millions d'habitants de cette partie de l'Europe, 87 millions, parce qu'il faut se rappeler, M. le Président, que la mission de cette Délégation générale touche non seulement le Royaume-Uni, mais également l'Irlande, le Danemark, la Finlande, l'Islande, la Norvège et la Suède.

Outre le volet économique, la Délégation générale a aussi pour mandat de faire connaître et de diffuser la culture québécoise, d'informer les décideurs du Québec de l'évolution économique et financière des pays couverts, de renseigner les décideurs britanniques et scandinaves sur le Québec, de représenter les intérêts du Québec sur toute question, qu'elle soit d'ordre culturel, économique ou autre.

Ayant personnellement effectué un séjour à Londres en mai 2001, je peux vous assurer que ce travail est bien fait et très bien fait. Vous me permettrez donc de saluer tout particulièrement M. Daniel Audet, le délégué général, ainsi que tous les membres du personnel de la Délégation générale du Québec à Londres, desquels je garde un excellent souvenir. Je veux, par la motion qui est présentée, bien sûr souligner le 40e anniversaire de la Délégation générale du Québec à Londres, mais également mettre en lumière ce travail exceptionnel qui se fait là-bas. Même s'ils ne font pas souvent la manchette des journaux... aussi souvent la manchette des journaux que leurs collègues de Paris ou de Bruxelles, les personnes qui nous représentent à Londres n'ont pas à les envier, parce que nous sommes tout à fait conscients des choses extraordinaires qu'elles réalisent.

Je tiens, en mon nom ainsi qu'au nom du Parti libéral du Québec, à les encourager, parce qu'ils forment, avec l'ensemble du personnel à l'étranger, des artisans indispensables au rayonnement du Québec à l'échelle internationale. D'ailleurs, à la lecture du rapport Pelletier, vous comprendrez qu'il s'agit toujours, pour le Parti libéral du Québec, d'une préoccupation majeure. Depuis l'énoncé de la fameuse doctrine Gérin-Lajoie, sur laquelle est basée l'action internationale du Québec, en 1965, notre volonté de voir le Québec prendre sa place dans le monde n'a jamais faibli.

J'invite donc tous les députés, quelle que soit leur formation politique, à voter en faveur de la motion proposée. J'espère sincèrement qu'elle sera adoptée à l'unanimité. M. le Président, je conclus en disant, comme le diraient nos amis britanniques: «Small is beautiful». Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre d'État aux Relations internationales. Mme la ministre.

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, je veux m'associer bien évidemment à cette motion présentée par la députée de Jean-Talon. En effet, M. le Président, l'année 2002 marque le 40e anniversaire de la Délégation générale de Londres ouverte en 1962 et inaugurée officiellement par Jean Lesage en 1963. Il y a en effet 40 ans, après une présence au XIXe siècle en Europe, le Québec commença à nommer des envoyés spéciaux dans les îles britanniques et sur le continent. Le gouvernement du Québec a décidé qu'il était temps de pérenniser davantage sa présence à Londres et de rouvrir ce qui est maintenant la Délégation générale du Québec.

L'année 1962 marque d'ailleurs le début de l'établissement d'un réseau de délégations et de bureaux qui couvrent l'Europe, les Amériques, l'Afrique et l'Extrême-Orient. En voyant directement à ses propres intérêts internationaux, le Québec assume résolument la place qui lui revient sur la scène internationale moderne. À l'heure de la mondialisation, nous vivons sur une planète qui subit de profondes transformations, où les États comme le nôtre sont appelés à jouer un rôle de plus en plus marqué, et, pour assumer ce rôle, le Québec a absolument besoin de son réseau international.

Lors de la fête nationale de juin dernier, les célébrations entourant le 40e anniversaire de la Délégation générale de Londres, qui se tiendront tout au long de l'année 2002-2003, ont été lancées officiellement. La réception du 24 juin dans le Square St. James a réuni près de 500 interlocuteurs de la Délégation générale. Mais le temps fort de ces célébrations du 40e a été la mission que le premier ministre et moi-même y avons effectuée les 21 et 22 octobre dernier et lors de laquelle il s'est notamment ? le premier ministre ? adressé à la communauté économique et financière de la Cité réunie à Mansion House, la résidence officielle du Lord Mayor. Devant près de 350 convives, le premier ministre y a dressé un portrait du Québec d'aujourd'hui, insistant sur le dynamisme de la relation économique entre le Québec et le Royaume-Uni. Une grande soirée culturelle aussi, sorte de vitrine du Québec à Londres, a, quant à elle, le même soir rejoint près de 450 personnes qui ont été conviées à célébrer les 40 ans de notre Délégation générale à Londres.

Le Royaume-Uni qui occupe une place à la fois historique et capitale dans les relations internationales du Québec: historique parce que, de 1760 jusqu'à environ 1930, le Royaume-Uni a été la puissance coloniale sous l'égide de laquelle le Québec s'est développé et que cela a tissé des liens de toute nature; capitale parce que le Royaume-Uni est le principal partenaire économique du Québec en Europe et qu'il exerce, surtout de Londres, sa capitale et la métropole de l'Europe, une influence culturelle, économique, intellectuelle, médiatique, politique et financière de toute première importance.

Le Royaume-Uni est également le pays européen qui a le plus d'investissements au Québec. Ceux-ci portent parfois des noms très connus: Rolls Royce, Rio Tinto, Imasco, Standard Life, Astra, Zeneca, Lloyd's, etc. Le phénomène est à double sens, puisque plusieurs sociétés québécoises sont maintenant établies au Royaume-Uni, dont Bombardier, le plus gros employeur privé d'Irlande du Nord, Alcan, Quebecor, Cascades, CGI, sans oublier des partenaires publics comme la Caisse de dépôt et placement qui ont ainsi accès au marché unique que constitue l'Europe des 15 aujourd'hui ? et bientôt l'Europe des 24 ? avec des résultats remarquables, puisque le total des échanges commerciaux entre le Québec et le Royaume-Uni s'approche maintenant du 10 milliards de dollars. Et, dans le secteur financier, ce sont d'importantes activités en liaison avec plus de 250 institutions financières britanniques qu'opère la Délégation générale sur le territoire.

Je suis fière de dire, bien sûr, que la présence du Québec à Londres est plus qu'économique. Elle est la conséquence directe du désir de reconnaissance de la société québécoise sur la scène internationale. Nos interlocuteurs britanniques, d'ailleurs, le comprennent très bien. Laissons parler ainsi l'honorable Chris Smith, jusqu'à tout récemment ministre d'État à la Culture dans le cabinet Blair, qui a fait le commentaire suivant: «Québec is home to a wide range of vibrant cultural activity. From the diversity of the Montréal Film Festival to the development of new and exciting music, Québec has so much to offer. Making that rich variety known and accessible to a British audience has been one of the great gifts of the London Québec Office over so many years.»

n(15 h 30)n

La présence du Québec à Londres est notamment culturelle. En effet, cette extraordinaire présence des artistes québécois sur le sol britannique... comme Robert Lepage, La La La Human Steps ou Marie Chouinard ont atteint la notoriété grâce à une collaboration qui dure depuis plus de 20 ans avec des producteurs britanniques et qui a été magnifiquement illustrée lors de la visite du premier ministre à Londres, en octobre dernier. En effet, en reconnaissance de son travail inlassable à faire connaître la culture québécoise au Royaume-Uni, le producteur et agent Michael Morris a été fait chevalier de l'Ordre national du Québec. Le Financial Times du 2 novembre publie un portrait de Michael Morris qui y déclare, et je le cite ? je vais le faire en français, M. le Président: «La chose remarquable à propos de cet honneur, ce n'est pas que je l'aie reçu, mais c'est que le premier ministre du Québec conçoit la culture comme étant au coeur même de l'action politique.» Fin de la citation.

Dans un domaine plus large, la présence du Québec à Londres englobe également les affaires publiques. S'il fallait préparer un éphéméride pour la seule année en cours, on y retrouverait toute une série d'activités et d'événements. En avril de cette année, je suis allée signer avec le British Council une entente de coopération en matière d'éducation, de culture, de science, de technologie qui réaffirme et élargit les domaines de coopération entre le Québec et la Grande-Bretagne. Le programme d'assistant de langue, qui dure depuis maintenant 20 ans et qui permet, M. le Président, à de jeunes Québécois d'aller enseigner le français au Royaume-Uni et à de jeunes Britanniques de venir enseigner l'anglais au Québec, est une occasion unique pour les deux sociétés de se connaître, ainsi que les nombreuses activités pour rendre présent le Québec dans le réseau des études dites canadiennes et l'octroi aussi des Prix du Québec.

Nous venons de le voir ? et je terminerai là-dessus, M. le Président ? le résultat net est qu'au fil des ans la Délégation générale a développé un réseau qui s'étend sur un vaste territoire et qui comprend maintenant des milliers de personnes pour qui le Québec est devenu familier. Aussi suis-je heureuse de souligner avec vous et devant vous, en m'associant à cette motion, le 40e anniversaire de la Délégation générale du Québec à Londres, présence primordiale au maintien et à l'intensification de nos liens avec nos partenaires britanniques, et je veux remercier le délégué général, tous ceux qui se sont succédé depuis 1962, Hugues Lapointe, le premier, qui était de Québec, originaire de Québec, et tous ceux qui lui ont succédé jusqu'à Daniel Audet, Colin Hicks, qui est un Britannique et qui s'occupe donc des relations culturelles entre Québec et le Royaume-Uni, MM. Péloquin et Turcotte, respectivement responsables du secteur économique et de celui des affaires publiques. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saguenay. M. le député.

M. François Corriveau

M. Corriveau: Oui. M. le Président, je ne ferai pas un cours d'histoire, je pense que l'histoire a été bien desservie par les deux allocutions précédentes. Je ferai, par contre, un parallèle en rapport au fait que ces délégations... comme la Délégation à Londres est composée de gens, de personnes qui, souvent, doivent aussi s'expatrier, et le parallèle là-dessus est avec aussi tous les députés qui composent cette Chambre qui doivent, à toutes les semaines, s'expatrier de leur milieu pour réussir à venir faire valoir leur point de vue ici, à l'Assemblée nationale, et défendre les droits des gens qu'ils représentent. Alors, ce genre de... En fait, cet éloignement qui oblige tous ceux qui travaillent pour le Québec à agir en dehors des frontières du Québec se doit aussi d'être souligné puis d'être vraiment mis à l'avant-plan. Des gens qui aiment le Québec, qui en sont fiers et qui doivent donc quitter nos frontières avec leur famille ou, des fois, loin de leur famille afin de permettre de faire rayonner le Québec, ces gens-là aujourd'hui, c'est leur, en quelque sorte, 40e anniversaire de courage et d'ardeur au travail pour faire représenter nos intérêts.

Donc, c'est au coeur de cette mondialisation qu'on vit tous les jours que ces personnes-là apportent leur expérience au rayonnement du Québec et également profitent de cette expérience-là afin d'acquérir une richesse sur le plan culturel et sur le plan humain qui nous sera d'autant plus utile lorsque ces personnes-là pourront revenir au pays.

Alors, la contribution que ces personnes-là apportent est essentielle au fonctionnement du Québec, et les six délégations générales, les quatre délégations, les sept bureaux comme les 12 antennes qui, à travers le monde... Et là on peut penser à ce qui se passe à Tokyo, à Londres, à Chicago, Mexico, Santiago, pour en faire un bref tour. Donc, ces délégations-là, ces antennes de toutes sortes jouent un rôle éminemment important dans le contexte de la mondialisation et sont, en quelque sorte, de petits observatoires de la mondialisation. Et donc, c'est à juste titre que l'Action démocratique aujourd'hui prête également sa voix, là, de façon très fière et de façon reconnaissante à tous ceux et celles qui ont contribué à l'avancement du Québec au travers de ces autres frontières mondiales.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saguenay. Il n'y a plus d'autre intervenant.

Mise aux voix

Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. La prochaine motion. M. le député de Papineau, je vous cède la parole.

Hommage à M. Alex Légaré,
ex-président du Tournoi international
de hockey pee-wee de Québec, et
condoléances à sa famille

M. MacMillan: Merci, M. le Président. J'aimerais le consentement de cette Chambre pour déposer une motion:

«Que l'Assemblée nationale souligne le décès de M. Alex Légaré, ex-président du Tournoi international de hockey pee-wee de Québec.»

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il consentement? Il y a consentement. Alors, M. le député.

M. Norman MacMillan

M. MacMillan: M. le Président, la semaine dernière, la société québécoise perdait l'un de ses grands bâtisseurs, qui faisait partie de la grande et belle histoire sportive de la Vieille Capitale.

Père d'une famille de six enfants ? j'aimerais signaler, M. le Président, la présence de la fille de M. Légaré, Ginette, et de son conjoint, M. Patrick Dom ? chimiste de formation, M. Légaré était un homme engagé dans de nombreuses causes communautaires mais surtout a consacré une bonne partie de sa vie à la jeunesse.

Il y a 26 ans, il était venu en relève de M. Gérard Bolduc, le fondateur du Tournoi pee-wee, et il fut un digne successeur. Pendant un peu plus de 25 ans, un quart de siècle, il dirigea d'une main de maître le plus grand rassemblement de jeunes hockeyeurs au monde et aussi a réussi à déployer ses ailes au-delà des frontières du Canada, des États-Unis et de l'Amérique, pour mériter à l'organisme ses lettres de noblesse et en faire un tournoi international dont, M. le Président, j'ai participé pendant trois ans ? même été chanceux une année, en 1972, d'être l'instructeur d'une équipe de Buckingham, de la classe C, qui a remporté le tournoi dans la classe C, aux pee-wee.

Et aussi, qui se rappelle de Guy Lafleur qui a participé. Beaucoup d'autres joueurs de la Ligue nationale qui ont participé à ce tournoi qui... Et, pendant que je dis ça, j'entends la chanson puis, si j'avais une belle voix, j'aimerais la chanter, mais je n'ai pas ce don-là. Pee-Wee pendant le temps du Carnaval... c'est une chanson qui est reconnue à travers le monde.

On se souviendra de lui comme un être engagé, généreux, un capitaine doté d'un calme olympien. Partenaire dans l'aventure des sportifs du Québec, membre des Chevaliers de Colomb, M. Légaré était un bénévole dans l'âme, un vrai, un bâtisseur et un rassembleur qui travaillait toujours en équipe. Son plaisir était de partager la réussite. Il a pleinement mérité l'hommage que lui ont rendu les milliers de Québécois.

À son épouse, à ses enfants et à tous les membres de sa famille, nous offrons notre plus profonde sympathie. Nous le saluons et le remercions pour le travail accompli. M. Légaré, bon repos, et je me permets de citer un bénévole en lui souhaitant: «Bon voyage vers le seul vrai panthéon de la renommée.» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Papineau. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre aux Loisirs et aux Sports. M. le ministre.

M. Richard Legendre

M. Legendre: M. le Président, samedi, le 9 novembre dernier, nous apprenions une triste nouvelle qui a ébranlé le monde sportif de la capitale nationale mais de tout le Québec. En effet, M. Alex Légaré, bénévole bien connu, ex-président du fameux Tournoi international de hockey pee-wee de Québec, nous a quittés, laissant dans le deuil sa famille ainsi que toute la communauté sportive.

Chimiste de profession, M. Légaré s'est engagé dans de nombreuses causes sociales, notamment au sein des Chevaliers de Colomb et pour le Patro Roc-Amadour. Il s'est également mérité l'estime de tous en assumant pendant 26 ans ? 26 ans, M. le Président, soit de 1975 à 2000 ? la présidence du Tournoi international pee-wee de Québec qui est un des événements les plus populaires, les plus importants pour la communauté sportive au Québec.

En plus de faire rayonner la région de la Capitale-Nationale et le Québec à l'échelle internationale, il a permis à des milliers de jeunes sportifs, venant de partout dans le monde, de participer à un tournoi qui leur donne la possibilité, bien évidemment, de mettre en valeur leur talent de hockeyeur mais aussi de fraterniser avec d'autres jeunes sportifs et de vivre une expérience unique. Pour plusieurs de ces jeunes, le Tournoi que présidait M. Légaré demeurera sûrement le plus beau souvenir de leur jeunesse et de leur vie sportive.

n(15 h 40)n

Personnellement, je n'ai pas eu le plaisir ni de jouer, ni d'entraîner au Tournoi, mais j'ai... ça fait partie de mes beaux souvenirs de jeunesse et d'enfance que le Tournoi, le fameux Tournoi pee-wee. Vive les pee-wee du Carnaval! comme on disait, un souvenir à titre de spectateur. Et, des spectateurs, il y en avait beaucoup; il fallait arriver tôt le matin.

Pour certains d'entre eux, ce Tournoi aura aussi servi de tremplin vers de plus hauts sommets dans leur carrière de hockeyeurs. En effet, de nombreux joueurs ? mon collègue le député de Papineau a mentionné Guy Lafleur ? mais plusieurs joueurs sont passés par le Tournoi de Québec et ont atteint la Ligue nationale de hockey.

Ce Tournoi a aussi permis à des milliers de familles québécoises d'exercer leur sens traditionnel de l'accueil et de l'hospitalité et à des centaines de milliers de spectateurs du Québec d'assister à des matchs de hockey fort enlevants.

Par surcroît, les différentes manifestations tenues dans le cadre du Tournoi ont rapporté près de 1,5 million de dollars au Patro Roc-Amadour, et M. Légaré a évidemment joué un rôle majeur en ce sens. En s'impliquant de la sorte, M. Alex Légaré a permis à plusieurs personnes de bénéficier des retombées positives d'un tel événement. La région de la Capitale doit se considérer privilégiée d'avoir eu la chance de compter sur un bénévole de cette qualité. Il a fait preuve d'un leadership exemplaire et a obtenu la participation et la collaboration de centaines de bénévoles chaque année. Son action aura marqué l'histoire du hockey et celle du Québec.

Père d'une grande famille, mon collègue l'a mentionné, on le connaît comme un grand rassembleur, une personne aux grandes qualités humaines, capable de trouver dans le calme des solutions à tous les problèmes. En 2000, le Secrétariat au loisir et au sport reconnaissait justement l'extraordinaire contribution de M. Légaré au développement sportif en lui remettant le prix Dollard-Morin du bénévolat en loisir.

En terminant, M. le Président, en mon nom personnel et au nom du gouvernement du Québec, nous voulons offrir nos plus sincères condoléances à la famille. J'aimerais à mon tour souligner ? sa fille Ginette et son conjoint, M. Patrick Dunn ? et offrir nos sincères condoléances à tous les amis de M. Alex Légaré, et ils sont fort nombreux. M. Alex Légaré, bravo, et, surtout, merci! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Vimont. M. le député.

M. François Gaudreau

M. Gaudreau: Merci, M. le Président. Bien, écoutez, j'ai écouté mes deux collègues parler de la longue carrière de M. Légaré. Alors, je voudrais tout simplement, au nom de ma formation politique ainsi que moi-même, offrir mes sincères condoléances aux membres de la famille de M. Alex Légaré. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, y a-t-il d'autres intervenants? Pas d'autres intervenants.

Mise aux voix

Alors, je demanderais de mettre la motion aux voix. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, enfin, nous arrivons maintenant à madame... Oui, il y a une autre motion, oui. Mme la ministre de la Culture et des Communications. Mme la ministre.

Hommage à M. Émile Ollivier,
romancier, essayiste et professeur
de l'Université de Montréal, et
condoléances à sa famille

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, je propose ? je vais essayer d'improviser le texte, il me manque des bouts de papier ? mais je propose que l'Assemblée nationale adopte une motion pour souligner la contribution exceptionnelle d'Émile Ollivier.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement? Il y a consentement, Mme la ministre d'État. Je vous cède la parole.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je voudrais donc que mes collègues de l'Assemblée nationale se joignent à moi pour déplorer la disparition du romancier, essayiste et professeur émérite de l'Université de Montréal, M. Émile Ollivier, qui nous a quittés dimanche dernier.

Né à Port-au-Prince en 1940, M. Ollivier a combattu le régime Duvalier avant d'être contraint à l'exil pour des motifs politiques. Après un court séjour en France, c'est en 1966 qu'il choisit le Québec comme terre d'accueil. À ce moment, la Révolution tranquille bat alors son plein et l'artiste et le pédagogue qu'il est a fait qu'il a prêté un concours enthousiaste à ce vaste mouvement de modernisation de la société québécoise.

Pendant près de 40 ans, ce grand humaniste a continué de contribuer activement à la vie intellectuelle de son pays d'adoption. Romancier et essayiste, son oeuvre est l'un des dons les plus généreux qu'Haïti ait offerts au monde des lettres. D'ailleurs, en commentant ses qualités d'écrivain et son art romanesque, il disait lui-même: «J'ai appris à préférer à la rigidité du réel les plages du rêve et de l'imaginaire.»

Il était professeur de la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université de Montréal de 1977 à l'an 2000. Il y a mis toute son énergie et son talent au service de l'éducation en général et de l'éducation des adultes en particulier. Et d'ailleurs l'Université de Montréal l'a récompensé pour souligner sa contribution exceptionnelle à la sociologie de l'enseignement en lui décernant, en 2001, le titre de professeur émérite.

Reconnu par ses pairs, il a été élu membre de l'Académie des lettres du Québec, et sa notoriété a très vite franchi nos frontières et, en 2000, la République française l'a fait chevalier de l'Ordre des Arts et des Lettres de France. Ses oeuvres de fiction lui ont valu de nombreux prix dont le prix Jacques-Roumain, en 1985, le Grand Prix de la prose du Journal de Montréal, en 1987, le Grand Prix du livre de Montréal, en 1991, et le prix Carbet, en 1996. Il disait: «La migration n'est pas une catastrophe», et c'est vraiment une de ses citations. Et c'est la démonstration qu'il s'est parfaitement intégré à notre communauté tout en gardant une place de choix dans son coeur pour sa patrie, Haïti. D'ailleurs, les thèmes de ses ouvrages reflètent cette double appartenance. M. Ollivier reste un modèle qui saura inspirer ceux et celles que la vie a amenés à quitter leur lieu de naissance pour venir s'établir chez nous, y fonder des familles, participer à la vie culturelle, économique et sociale du Québec.

Nous trouvons rarement les bons mots pour désigner et exprimer le chagrin causé suite à la disparition d'un être si important. Je me permettrai de reprendre ceux qu'il a prononcés lors du décès d'un de ses collègues et un ami intime, le sociologue Pierre Dandurand. Il a dit: «Maintenant qu'il contemple une lumière sans poids, un jour sans barre ni commencement, s'il le pouvait, de sa voix au timbre grave et chaud, je sais qu'il nous demanderait de continuer à vivre les yeux ouverts. Désormais, il reviendra à nous, proches, parents, collègues et amis, de perpétuer sa mémoire.» Alors, je crois que ces paroles sont tout à fait de circonstance aujourd'hui encore.

Alors, au nom du gouvernement du Québec, je voudrais donc présenter nos plus sincères condoléances à la famille de M. Émile Ollivier et l'assurer de ma plus profonde sympathie. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre d'État. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viau. M. le député.

M. William Cusano

M. Cusano: M. le Président, le Québec a perdu, la semaine dernière, un grand homme, humain et humaniste. Romancier et essayiste, Émile Ollivier était sociologue et professeur à la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université de Montréal. Opposé au régime Duvalier, Émile Ollivier a quitté Haïti en 1965. Il a été forcé à l'exil. Première escale pour cet intellectuel, Paris, où il a étudié la littérature. L'année suivante, M. le Président, il arrive au Québec, en Abitibi, lui qui craignait la neige et le froid canadien, dit-on. Émile Ollivier s'installera à Montréal peu après son arrivée. Il continuera ses études en éducation et en sociologie, deux disciplines qui occuperont une place importante dans sa vie.

M. Ollivier a enseigné dans plusieurs établissements au Québec et ailleurs dans le monde où il a été professeur invité. Il s'est toujours beaucoup intéressé aux questions d'origine, d'appartenance et d'exil. Il a écrit de nombreux textes portant sur ces sujets dans des publications spécialisées. Il a également fait des études de philosophie à l'École normale supérieure de Haïti et des études de psychologie en France. Sociologue, il s'intéresse à la formation des adultes, aux phénomène migratoire et à l'éducation interculturelle.

Émile Ollivier a aussi beaucoup écrit sur Haïti, sur sa situation politique, mais son île d'origine se trouve aussi dans ses romans. Animé par des profondes convictions reposant sur une réflexion rigoureuse, une excellente écoute, une grande sensibilité et un merveilleux sens de l'humour, Émile Ollivier a, toute sa vie, mené un combat pour la dignité, la justice sociale et la démocratie. Il l'a fait par son écriture, son enseignement, sa réflexion et son engagement. Le prix Jacques-Roumain, en 1985, prix décerné par la revue Étincelle à un écrivain de la diaspora haïtienne, lui a été remis pour son premier roman: Mère-Solitude. En 1987, il a reçu le Grand Prix de la prose du Journal de Montréal pour La discorde aux cent voix, et, en 1991, le Grand prix du livre de Montréal pour son roman Passages. En 1996, il a obtenu le prix Carbet pour Les urnes scellées. En 2000, il a reçu le titre de chevalier de l'Ordre des arts, des lettres de la France et a été élu membre de l'Académie des lettres du Québec. Il est membre de l'Union des écrivains et des écrivaines québécois.

n(15 h 50)n

Émile Ollivier aimait dire: Les êtres humains peuvent être divisés en deux catégories, les sédentaires et les errants. Parmi les errants, il y a les flâneurs, les promeneurs, les vagabonds, les migrants, et je suis un errant, disait-il, M. le Président. C'est en cette qualité qu'Émile Ollivier a toujours marché dans les différents lieux qu'il a traversés, que ce soit en Haïti ou les quartiers montréalais. Il se disait Québécois le jour, Haïtien la nuit.

M. le Président, je tiens à souligner que la disparition de M. Ollivier nous attriste tous très profondément. Mais, heureusement, il demeurera à jamais parmi nous grâce à son oeuvre. J'offre, en mon nom personnel et au nom de mes collègues, nos plus sincères condoléances à sa famille, ses collègues et ses amis. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viau. Il n'y a plus d'autres intervenants.

Mise aux voix

Alors:

«Que l'Assemblée nationale souligne la contribution exceptionnelle de M. Émile Ollivier et offre ses condoléances à sa famille.»

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, ceci met fin aux motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Et j'inviterais Mme la leader adjointe du gouvernement pour les avis touchant les travaux des commissions. Je vous cède la parole, madame.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des transports et de l'environnement entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et la Loi sur la Société québécoise de récupération et de recyclage, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien, merci. Alors, nous sommes rendus aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Y a-t-il une demande de renseignements? Pas de demande. Alors, ceci va donc mettre fin à la période des affaires courantes.

Et nous allons débuter les affaires du jour. Avant de céder la parole à Mme la leader adjointe, je vais vous indiquer que nous avons deux débats de fin de séance pour ce soir.

Le premier débat, Mme la députée d'Anjou questionnera le ministre délégué à l'Emploi concernant les difficultés rencontrées par un travailleur qui désire obtenir une prothèse auditive qui lui permettrait de travailler; et, au cours du deuxième débat, M. le député d'Orford questionnera le ministre délégué à l'Environnement concernant les déchets toxiques en provenance des États-Unis.

Alors, Mme la leader adjointe, je suis prêt à vous entendre.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je demanderais de prendre en considération l'article 25 de notre feuilleton. Alors, c'est pour poursuivre le débat que nous avons entamé ce matin.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est bien l'article 25?

Alors, avant d'aller plus loin et de répondre à votre demande, je dois donner un autre renseignement sur les travaux de l'Assemblée; on vient juste de me le communiquer. Vous permettez qu'on fasse un petit retour?

Je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Chomedey proposant que le principe du projet de loi n° 190, Loi concernant la procédure de sélection des personnes nommées par l'Assemblée nationale et modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale, soit adopté.

Affaires du jour

Projet de loi n° 143

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Alors, nous revenons donc. Nous en sommes aux affaires du jour. À l'article 25, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives. Je vais maintenant céder la parole au premier intervenant, M. le député de LaFontaine. M. le député.

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, le projet de loi n° 143, de prime abord, est un projet de loi qui, pour nous, est un projet extrêmement important. Du moins, le principe de ce projet de loi là est très important, car, en effet, M. le Président, depuis 1995, 1996, d'une manière plus ou moins informelle, lors d'échanges que nous pouvions avoir avec le ministre du Travail de l'époque, le député de Matane, M. Matthias Rioux, et moi-même et d'autres collègues ? et il faut dire qu'à l'époque j'occupais le poste de porte-parole de l'opposition en matière de travail ? depuis cette époque nous demandions au gouvernement de procéder à une révision et une réforme de la loi sur les normes minimales de travail. En même temps, le gouvernement nous promettait, bien sûr aussi, une réforme du Code du travail.

Alors, pourquoi nous disions au gouvernement, demandions au gouvernement de dire: Oui, une réforme du Code du travail est nécessaire, le monde du travail a évolué? La façon dont les entreprises se comportent avec leurs employés en termes de cadence de travail, en termes de conditions de travail, en termes de nouvelles technologies, en termes d'horaires, eh bien, ne sont plus les mêmes qu'il y a 20 ans ou 30 ans, lorsque ce Code du travail avait été écrit, avait été fait.

Et nous disions: Eh bien, c'est la même chose en ce qui concerne les normes minimales de travail, parce que, au Québec, il faut savoir qu'il y a à peu près 3 millions de salariés, 2 980 000 et quelques qui sont des salariés. Mais, pour 1,5 million d'entre eux qui ne sont pas couverts par des conventions collectives, hein, ou par des ententes contractuelles de travail, eh bien, la seule convention collective qui existe, ce sont les normes minimales de travail. C'est la seule loi qui fait en sorte que les travailleurs du Québec qui ne sont pas couverts par ces conventions collectives négociées avec les employeurs et les syndicats, eh bien, c'est la seule loi qui fait qu'ils peuvent avoir une certaine protection, une certaine... pas protection parce que le mot «protection» n'est peut-être pas le mot exact, mais une certaine codification des conditions dans lesquelles ils doivent travailler. Et c'est très important, M. le Président, parce que, sans cela, eh bien, on assiste, comme dans certaines sociétés moins évoluées que la société québécoise ou que les sociétés occidentales, eh bien, on assiste, de la part de certaines entreprises, certains employeurs, eh bien, à une exploitation du travailleur ou de la travailleuse.

Bien souvent, M. le Président, ce sont des femmes, ce sont des jeunes, ce sont des gens aussi ? ça peut être des hommes, bien sûr ? qui sont peu scolarisés, qui occupent des emplois peu spécialisés et peu rémunérateurs et qui sont à la merci d'employeurs qui, quelquefois, eh bien, pouvaient, en l'absence de certains scrupules ou d'une certaine conscience morale, faire en sorte de leur imposer des conditions de travail extrêmement dures, difficiles, peu de repos ou pas de repos du tout, pas de vacances, pas de congé, pas de protection sociale et des licenciements arbitraires à n'importe quel moment, selon le bon vouloir de l'employeur, ou simplement, eh bien, pour n'importe quelle autre considération.

Alors, M. le Président, nous, au Québec, ce n'est pas notre cas quand même. La Loi sur les normes actuelle donne un filet de sécurité quand même très intéressant pour les travailleurs et les travailleuses, et on doit s'en féliciter. Et je rappellerai que c'est des normes qui ont été adoptées dans le temps du gouvernement libéral de M. Robert Bourassa, et on ne peut que s'en féliciter. Et c'est là certainement une des choses importantes qui a été faite à cette époque-là.

Alors, aujourd'hui, il faut le réviser, M. le Président. Parce que, si on a fait la réforme du Code du travail, eh bien, il faut passer à la réforme des normes. On ne peut pas continuer à laisser ces travailleurs aux mêmes conditions de travail, aux mêmes protections, aux mêmes ? j'allais dire ? engagements de la part de leur employeur envers eux qu'il y a 20, 25, 30 ans. Il faut moderniser ça.

Alors, ça touche beaucoup de choses parce que le monde du travail a beaucoup évolué. À l'époque, eh bien, on se rappellera que, lorsqu'il y avait des gens qui travaillaient, ils étaient majoritairement des hommes, hein? On se rappellera que la main-d'oeuvre, traditionnellement, était des hommes et que les femmes étaient plutôt, avec des familles un peu plus nombreuses, à la maison. Et, lorsqu'elles travaillaient, eh bien, c'est lorsque leurs enfants étaient plus âgés, un peu plus élevés. Il a donc fallu, M. le Président, adapter ça. Il faut l'adapter, il faut faire en sorte qu'on s'adapte à cette condition-là.

n(16 heures)n

Il y avait aussi, M. le Président, tout ce qui est... les améliorations en termes d'accidents. Eh bien, il faut aussi faire en sorte que la loi soit adaptée et que les travailleurs puissent y retrouver des avantages semblables à ceux qui sont couverts par des conventions collectives.

Il y a tout le problème du personnel de maison, ceux qu'on appelait dans le temps le personnel domestique, qu'on appelle aujourd'hui des gens de maison. Eh bien, M. le Président, ce sont des gens qui ne sont pas couverts.

Il y a aussi le nouveau problème des travailleurs à domicile, ceux qui font du travail à domicile, chez eux, et qui sont soumis à des cadences, qui sont soumis à des rythmes qui ne sont pas couverts par aucune convention ou par aucune norme minimale.

Il y a un nouveau phénomène aussi qui se dégage, c'est maintenant les gens qui vont faire du travail chez les gens, à domicile, c'est-à-dire ceux qui sont des aides soignants, des aides sociaux, ceux qui sont engagés, par exemple, avec le fameux programme Desjardins, le programme du gouvernement qui permettait aux CLSC d'envoyer des gens faire du service à domicile, de l'aide familiale entre autres... et qui reçoivent un chèque de la part de Desjardins. C'est lui qui en est le fiduciaire, mais l'engagement et l'affectation, l'assignation, se fait par le CLSC. Bien, si je vous disais, M. le Président, que ces gens-là ne sont pas couverts par la CSST!

Vous savez, quand on regarde les normes minimales, chaque travailleur au Québec, selon la loi, doit être couvert par la CSST, hein, la Commission en santé et sécurité du travail. Bien, si vous prenez ces travailleurs et ces travailleuses qui oeuvrent auprès d'un CLSC ? mais ils ne sont pas payés par le CLSC, ils sont payés par Desjardins, parce que le gouvernement envoie l'argent à Desjardins pour qu'il les paie à travers le CLSC, se dégageant ainsi de ses obligations sociales ? eh bien, on se retrouve avec ces gens-là qui n'ont pas de couverture en cas d'accident de travail. Et pourtant ? et c'est un exemple que je prends, et c'est un exemple très intéressant ? et pourtant ces gens-là sont sujets aussi aux accidents de travail.

Prenez le cas d'une femme ou d'un homme qui est envoyé par le CLSC pour aider une handicapée qui réside à sa maison, qui est maintenue à domicile ? on parlait du maintien à domicile, hein, du programme de maintien à domicile ? et qui l'aide à prendre son bain, eh bien, en déplaçant la handicapée de son fauteuil et pour l'installer dans le bain, cette personne peut très bien se déplacer une vertèbre et souffrir de maux de dos et avoir de la difficulté par la suite à continuer son travail. Eh bien, elle n'aura aucune indemnité de CSST.

Un autre exemple. Et ce sont des exemples vécus, des exemples que les gens qui sont concernés ont amenés à ma connaissance, depuis plusieurs années déjà. Parce que je vous rappellerai qu'en cette Chambre nous avons déjà demandé ? j'ai déjà demandé ? en période de questions au gouvernement de voir à changer cette situation et assujettir ces gens-là pour faire en sorte qu'ils soient couverts par la CSST, et ça ne s'est pas fait. M. le Président, l'exemple typique, c'est l'aide à la maison qui va aider une femme âgée, une personne âgée à faire sa cuisine. Et une casserole se renverse, comme ça arrive dans toutes les maisons, toutes les cuisines; tout le monde, c'est déjà arrivé, de renverser une casserole. Cette employée donc renverse une casserole où de l'huile jaillit sur son bras, et elle est brûlée très gravement. Et, là encore, elle ne peut plus travailler, elle ne peut plus prendre ces contrats-là. Elle perd donc son gagne-pain et elle n'est même pas indemnisée par la CSST. Et pourtant c'est un accident de travail, parce que c'est dans l'exercice de son travail qu'elle fait cette activité.

Alors, j'amène ces exemples pour illustrer, hein, l'importance d'avoir des normes minimales de travail qui font en sorte qu'il n'y ait pas d'échappatoire en ce qui concerne la couverture auquel les citoyens... par laquelle ils sont protégés. Et c'est très important aussi, M. le Président, parce que de là va découler, pour un certain nombre de citoyens qui sont sur la sécurité du revenu et qui cherchent à retourner au travail, un intérêt de retourner sur le marché du travail et ne pas rester à la sécurité du revenu.

Prenons un exemple, M. le Président, de quelqu'un qui est sur la sécurité du revenu. Lorsqu'elle part travailler, elle quitte la sécurité du revenu, se trouve un emploi. Eh bien, très souvent, ses revenus seront à peu près semblables à ce qu'elle avait sur la sécurité du revenu. Je ne dis pas qu'on doit rester sur la sécurité du revenu parce qu'on ne gagne pas assez cher. Tout le monde doit travailler, et je suis un de ceux qui dit que les gens doivent travailler et que la sécurité du revenu est un dernier recours. Mais encore faut-il que les conditions de travail et les salaires qu'ils vont avoir soient assez intéressants, soient, d'une façon générale, capables d'offrir des conditions supérieures à ce que les gens avaient sur la sécurité du revenu, pour qu'ils aient envie d'y aller et envie d'y continuer. Sinon, on assiste toujours au même cercle, au même chemin où les gens quittent la sécurité du revenu, vont travailler quelques semaines, quelques mois, réembarquent dans un programme d'assurance chômage. L'assurance chômage se termine, ils reviennent sur la sécurité du revenu.

Donc, je crois que les normes minimales de travail modernes qui correspondent à la réalité d'aujourd'hui, hein, qui donnent aux gens une couverture sociale, qui donnent aux gens des journées de vacances intéressantes, qui donnent aux gens la capacité d'aller... lorsqu'ils ont un décès dans la famille, d'avoir le droit de quitter leur travail pour s'y rendre sans perdre leur emploi, que les gens soient assujettis à des heures de travail minimales comme tous les autres, eh bien, et non pas des 45 ou 50 heures dans certains secteurs d'activité, cela est normal et cela est certainement incitatif à ces gens-là, eh bien, de se retrouver sur le marché du travail.

Alors, M. le Président, c'est vrai qu'il y a tout un débat. Je me rappelle lorsqu'on a fait le débat sur le salaire minimum, eh bien, il y a ce débat qui dit qu'une grande partie des gens qui sont assujettis à ces normes sont dans des petites entreprises, des PME ou des entreprises fragiles et qu'augmenter ces critères peut faire en sorte que les entreprises se déplacent ailleurs. Il est vrai que, dans certains cas, cela peut arriver. Mais, M. le Président, il faut reconnaître aussi que la majorité de ces travailleurs et travailleuses oeuvrent dans les activités de commerce ou de distribution ou de services d'entretien ménager ou de services d'aide à domicile, une bonne majorité de ceux-là. Alors, M. le Président, je ne vois pas les commerces du Québec ou les restaurants du Québec ou les McDonald's déménager parce que le salaire minimum est augmenté de 0,15 $, 0,20 $ ou 0,30 $. Au contraire, je vois un incitatif de plus pour les gens de vouloir y travailler et de faire en sorte d'être fiers de leur travail, d'être heureux de gagner leur vie et leur salaire convenablement et donc de donner une meilleure productivité pour l'entreprise. Parce que n'oublions pas que, lorsqu'un employé est bien traité par une entreprise, il est vrai... il est bien traité et couvert par des normes intéressantes, eh bien, il est vrai, M. le Président, que ça peut peut-être coûter un peu plus cher pour l'entreprise, mais, de l'autre côté, je suis assuré qu'il y a là, à ce moment-là, une meilleure facilité, une meilleure capacité pour l'entreprise d'aller chercher de la productivité supplémentaire, parce que, lorsque l'on est bien traité dans une entreprise, lorsqu'on est bien heureux ou qu'on est passablement heureux, quelquefois, eh bien, on veut garder son emploi et on veut aussi être heureux à l'intérieur de son emploi et on travaille de toute manière, des fois, avec une meilleure application, avec une meilleure détermination que lorsqu'on n'est pas heureux et que l'on traîne sa journée en espérant... en regardant la montre ou l'horloge en espérant que la journée se termine rapidement pour partir.

Alors, voyez-vous, je crois qu'il y a là aussi une réflexion à faire. Je ne crois pas que le fait de donner des conditions de travail à ces travailleurs soient une catastrophe économique pour les entreprises. Peut-être certaines peuvent être... peuvent être plus sensibles, et là il appartient, bien sûr, au chef de l'entreprise de s'organiser pour trouver des façons, eh bien, de compenser ces coûts additionnels, mais je crois que le meilleur coût... la meilleure façon de compenser ça, c'est d'augmenter la productivité.

Ceci étant dit, il faut quand même avoir... savoir de quoi on parle, et je crois qu'il serait important qu'il y ait des études qui soient faites et il serait important que le gouvernement... J'espère qu'il l'a fait, je ne sais pas. Le ministre nous a toujours dit qu'il faisait des études. Je me souviens, dans le temps des clauses orphelin, il nous parlait des études, on a fini par les avoir. Dans le temps du Code du travail, c'était la même chose, on a fini par les avoir. Dans le temps de l'assujettissement de la machinerie de production, on demandait des études, on a fini par les avoir, hein? Et je crois que, cette fois-ci aussi, le ministre, s'il a des études, il devrait aussi les déposer pour que nous puissions voir quel va être l'impact bien sûr sur les entreprises, et peut-être y a-t-il lieu aussi de la part de l'État qui emploie un certain nombre de catégories d'employés, eh bien, d'agir pour compenser d'une manière fiscale ou autre. Je ne sais trop de quelle façon, ça reste à déterminer. Il y a différentes façons qui sont possibles, pratiquées dans certains pays, en Europe en particulier, pour faire en sorte qu'il n'y ait pas une baisse de compétitivité de la part de ces entreprises qui emploient... Sur 1,5 million de personnes qui sont assujetties aux normes minimales de travail, il y a au moins un 300 000, 400 000 qui sont des gens qui sont à la limite entre la sécurité du revenu et un emploi aux normes minimales, au salaire minimum, et beaucoup des emplois dans le commerce et beaucoup des emplois dans la distribution ou les services de base. Alors, ce sont des emplois importants, tout emploi est bon, mais tout travailleur a droit au respect et a droit aussi à être traité d'une manière décente et à gagner sa vie honorablement.

n(16 h 10)n

Alors, dans le projet de loi, on retrouve beaucoup d'articles. Je ne les reprendrai pas. Le ministre a eu l'occasion d'en parler. Mon collègue qui parlait avant moi, le député de Mont-Royal, en a énuméré quelques-uns. Alors, je pense qu'on aura l'occasion de le voir en commission parlementaire article par article plus tard. Alors, je n'en ferai pas forcément l'énumération maintenant. Ce serait d'ailleurs assez fastidieux pour les gens qui nous écoutent, et je crois qu'ils ont écouté, les gens, ce que nos collègues avaient à dire avant et qu'ils connaissent maintenant l'essentiel de ce qu'il y a dans ce projet de loi.

Il y a certes des bonnes choses, mais je crois que, avant d'aller plus loin, étant donné qu'il y a des bonnes choses, mais qu'il y a certainement des choses... il y a certainement des dispositions qui ne sont pas là, des dispositions qui devraient être là, des dispositions qui sont là et qui peut-être ne devraient pas être là. Alors, le meilleur moyen de le savoir, ce n'est pas seulement les études du ministre. Le ministre a des études, bon, ou peut-être ne les a-t-il pas, peut-être va-t-il nous les produire après. Mais, connaissant comment fonctionne un gouvernement, une administration, je n'oserai pas croire qu'il nous amène, qu'il nous dépose un projet de loi à ce stade-ci de l'année, alors qu'il reste peu de temps dans la session, sans avoir d'études. Je crois qu'il a dû commander depuis un certain nombre de temps auprès de son ministère et des organismes qui sont intéressés à ce projet de loi là les études nécessaires pour voir les impacts.

Mais il y a plus que ça. Parce que les études nous démontrent la face, le côté mathématique, le côté froid d'une loi, tel la loi va produire tel effet, tel effet, le coût va être tant, l'impact sur les entreprises va être ci, va être ça, ou sera beau, sera positif, sera moins positif, en tel pourcentage. Ça, c'est beau. Ça permet de voir au loin, là, sur le radar exactement où est-ce que ça nous amène. Mais ce que nous voudrions, ce que l'opposition va demander et a demandé déjà par la voix du député de Mont-Royal, eh bien, ce sont des consultations. Il y a beaucoup de gens qui sont impliqués dans les organisations de travailleurs, et là je ne parle pas forcément des centrales syndicales parce que les centrales syndicales, elles sont sur le Code du travail. Alors, c'est évident qu'on ne parle pas forcément de la même chose. Ce n'est pas loin, mais ce n'est pas la même chose, parce que ces gens-là sont couverts par des conventions collectives. Mais il y a beaucoup d'organismes, comme Au Bas de l'échelle, enfin, c'est beaucoup de représentations de travailleurs non organisés qui vont certainement être très intéressés à venir nous rencontrer puis à venir expliquer aux parlementaires, en commission, eh bien, si le projet de loi correspond à ce que, eux, ils voient, à ce qu'ils pensent, à ce qui aurait dû être fait ou ce qu'ils, eux-mêmes, eh bien, recommandent.

Ce qui ne veut pas dire qu'on devra tout prendre ça. C'est comme une étude, on la regarde et on n'est pas obligé de l'appliquer à la lettre. C'est une indication. Alors, ces groupes devraient venir nous voir, faire valoir leurs points et nous expliquer en quoi le projet est bon, correspond à leurs attentes, ne correspond pas à leurs attentes, a des effets pervers, a des bons effets dans certains côtés, et ce sera après aux parlementaires, en commission, bien sûr, avec le ministre ? parce que le ministre va être là ? eh bien, de faire un peu le bilan de tout ça et de proposer peut-être des amendements au projet.

Et ça, malheureusement, il nous reste peu de temps. Nous sommes aujourd'hui le 19, nous sommes le 19 novembre, et je peux garantir à tous les téléspectateurs qui nous écoutent, à tous les citoyens qui nous écoutent que, le 19 décembre, nous ne serons plus là parce que la fin de la session se termine quelques jours avant Noël et, si on regarde les samedis et les dimanches, vous allez voir que... si nous sommes là, ce sera tard et ce sera afin d'adopter des lois rapidement, pour celles qui auront été acceptées par l'ensemble des parlementaires, et puis celles qui n'auront pas été adoptées seront ramenées à la session suivante.

Alors, moi, j'encourage le gouvernement à faire rapidement une entente avec le leader du gouvernement, avec le député de Mont-Royal et les autres parlementaires pour convoquer, inviter ? le mot «convocation» est toujours un peu... on vous convoque ? inviter les gens qui sont intéressés à se faire entendre sur ce projet de loi là, à nous faire leurs recommandations, que ce soient des intervenants du milieu social, du milieu du travail, même les gens des centrales syndicales. Je dis que ce n'est pas forcément leur champ de compétence direct, c'est vrai, mais on sait qu'il y a des syndicats qui sont très intéressés, en dehors de leur travail normal de conventions collectives et de gérer leurs membres, aux conditions sociales des travailleurs aussi. Il y a aussi peut-être des gens qui sont des économistes, des sociologues, et il y a des chefs d'entreprise aussi qu'on devrait pouvoir entendre afin qu'ils viennent nous dire en quoi ce projet est bon, en quoi il n'est pas bon, et ainsi on fera un meilleur projet pour l'ensemble des travailleurs du Québec et particulièrement pour les 1,5 million qui n'ont aucune autre protection que les normes minimales du travail. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Sauvé. Mme la députée.

Mme Blanchet: Crémazie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Crémazie, excusez. Aujourd'hui, là... Crémazie.

Mme Manon Blanchet

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir à mon tour cet après-midi sur l'adoption de principe du projet de loi n° 143, loi visant à réviser finalement la Loi sur les normes du travail. Effectivement, comme le député de LaFontaine le disait il y a quelques instants, cette loi, en tout cas la révision de la loi, va permettre d'améliorer les conditions de travail de plus de 1,6 million de travailleuses et travailleurs québécois, soit près de 60 % de la main-d'oeuvre au Québec qui n'est pas du tout protégée autre que par la Loi, justement, sur les normes du travail. Aussi, de ce groupe de travailleurs et travailleuses, nous pouvons y retrouver une grande proportion de jeunes de 15 à 29 ans.

Je voudrais aussi rappeler que la modernisation des lois du travail, telle que proposée aujourd'hui, vient réviser des lois qui ont été adoptées il y a plus de 20 ans par un gouvernement du Parti québécois et aussi que c'est un engagement du gouvernement en 1999, par le premier ministre de l'époque, M. Lucien Bouchard.

Pour résumer, le projet de loi n° 143 aborde principalement sept thèmes: d'abord, le renforcement du caractère universel de la loi, le harcèlement psychologique, la conciliation travail-famille, les jours fériés, chômés et payés, la protection des salariés, la garantie du paiement du salaire minimum et aussi les licenciements collectifs.

Pour ma part, j'aimerais plutôt vous entretenir, je dirais, du volet social de ce projet de loi. Depuis mon arrivée à l'Assemblée nationale en 1998, M. le Président, j'ai eu le privilège de participer aux diverses discussions sur justement la révision de la Loi sur les normes du travail présentée dernièrement par le ministre d'État, d'abord à titre d'adjointe parlementaire de la ministre d'État au Travail et à l'Emploi de l'époque et aussi comme membre d'un comité initié par mon collègue le ministre d'État aux Ressources humaines et au Travail pour justement pouvoir présenter le projet de loi que l'on a sur la table. Aussi, mes rencontres avec les citoyens et les citoyennes de la circonscription de Crémazie au fil des ans m'ont permis de pouvoir apporter quelques préoccupations, les souhaits des gens qui sont justement protégés par cette Loi sur les normes du travail dans le cadre de leur emploi.

Donc, comme je le disais plus tôt, près de 60 % de la main-d'oeuvre au Québec ne bénéficie que de la Loi sur les normes du travail pour encadrer leurs conditions de travail de tous les jours. Il faut aussi justement s'assurer que l'ensemble de ces travailleuses et travailleurs puissent bénéficier d'une protection sociale minimum. Le premier ministre l'a souvent affirmé, maintes et maintes fois au cours des dernières semaines et des derniers mois, la volonté du gouvernement du Parti québécois est de lutter contre la pauvreté, et je suis persuadée que cette révision de la Loi sur les normes du travail vient justement appuyer la démarche entreprise au cours des dernières semaines.

D'ailleurs, aujourd'hui, M. le Président, la commission des affaires sociales, dont je fais partie, termine la consultation générale sur le projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Donc, depuis le 1er octobre, nous aurons entendu plus de 130 mémoires et, on l'a souvent répété, le gouvernement tient à adopter cette Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion avant l'ajournement des travaux à la fin de décembre pour justement améliorer les conditions de vie de nos concitoyens et concitoyennes.

En ce qui concerne le projet de loi n° 143, celui-ci protégera à l'avenir des travailleurs et des travailleuses qui sont présentement exclus, par exemple les travailleurs agricoles, les gardiennes et gardiens de personnes et les domestiques résidant chez leur employeur. Cette nouvelle protection affirme justement la préoccupation de justice sociale du gouvernement du Parti québécois, particulièrement envers les travailleurs les plus vulnérables qui ne sont pas représentés par un syndicat, surtout que la majorité d'entre eux sont souvent des femmes.

n(16 h 20)n

Je voudrais revenir justement quelques minutes sur la protection proposée aux gardiennes et gardiens de personnes et aussi aux domestiques qui résident chez leur employeur. Vous savez, souvent, ces emplois sont très souvent occupés par des femmes et aussi, pour ce qui est des domestiques, très souvent, ces emplois sont aussi occupés par des femmes nouvellement arrivées au Québec qui, malheureusement, méconnaissent souvent quels sont leurs droits et leurs recours. Et, justement, les modifications apportées par le projet de loi n° 143 viennent mieux encadrer leur situation de travail pour justement faire en sorte qu'elles soient payées pour le travail qu'elles font et aussi qu'on puisse leur permettre des meilleures conditions de vie dans l'encadrement de leur travail. Particulièrement dans le projet de loi, on veut justement faire en sorte que, comme je le disais, de manière ponctuelle, on vienne vraiment reconnaître le travail de ceux et celles qui font vraiment... qui gardent vraiment des gens tous les jours à la maison et vraiment différencier ceux et celles qui, de façon ponctuelle, par des membres de la famille, viennent donner un coup de main et prendre soin de certaines personnes.

Pour ce qui est des domestiques qui résident chez leur employeur, on veut apporter une notion d'équité entre les domestiques qui habitent chez leur employeur et ceux qui n'habitent pas chez leur employeur, des conditions de travail qui sont reconnues différemment présentement, mais qui, avec le projet de loi n° 143, viendront donner l'équité entre les deux groupes de travailleurs et travailleuses.

Aussi, le projet de loi n° 143 introduit la garantie du paiement du salaire minimum à tous les salariés, parce que, effectivement, certains salariés, qui sont rémunérés présentement sur une autre base que le taux horaire, reçoivent souvent, ou parfois, moins que le taux horaire du salaire minimum. Et, justement pour s'assurer que le salarié reçoive au moins le salaire minimum, le projet de loi introduit la définition de «salarié au pourboire» pour justement différencier... Par exemple, les travailleurs et travailleuses qui sont dans le domaine de la restauration rapide ne sont pas considérés comme des employés à pourboire, ce qui porte à confusion présentement. Aussi, et je suis persuadée que cette modification vient grandement répondre aux besoins de plusieurs personnes, l'employeur qui exige le port d'un uniforme à ses employés dans le cadre de leur travail devra le fournir gratuitement et ne plus demander au salarié de payer cet uniforme-là, le salarié qui est payé au salaire minimum. Et aussi, par exemple, pour les employés qui travaillent ? souvent, ce sont des étudiants et des étudiantes à temps partiel ? dans des commerces, et des boutiques, et des grands magasins, il ne devra plus exiger l'achat des vêtements par ces employés-là, les vêtements que, lui, il vend tous les jours dans ces boutiques en question.

Je voudrais apporter quelques petites précisions, M. le Président, suite à l'intervention de la députée de Jonquière ce matin. Elle disait que, au sujet des travailleurs autonomes, il n'en était pas question dans le projet de loi. Oui, c'est vrai qu'il n'en est pas question dans le projet de loi n° 143, mais c'est parce qu'un rapport qui porte spécifiquement sur la question doit être déposé au ministre dans quelques jours, en quelque part en décembre, et le ministre, pour ne pas retarder la révision de la Loi sur les normes du travail, retarder indûment le processus législatif, a décidé de procéder avec le projet de loi et, selon les recommandations que ce rapport-là lui fera, bien, il y aura une législation qui se fera dans un deuxième temps.

Aussi, la députée de Jonquière disait ce matin que le gouvernement n'avait rien proposé sur la notion de salarié. Au contraire, pour ma part, je voudrais plutôt lui dire qu'on a clarifié la notion de statut de salarié justement afin d'enrayer la prolifération de ce que l'on appelle les faux occasionnels... les faux travailleurs autonomes, pardon. Et aussi, on donne une protection aux employés qui, présentement... des employés qui verraient leur employeur transformer leur poste de salarié en poste occasionnel, bien, ces gens-là, aujourd'hui, ils ne peuvent refuser, ils ne peuvent qu'accepter, c'est-à-dire leur transformation, au risque de perdre totalement leur emploi. Alors, avec le projet de loi n° 143, on permettra à l'employé de refuser cette transformation-là proposée par son employeur.

Donc, en terminant, M. le Président, comme mes collègues ministériels l'ont mentionné, je souhaite que l'adoption du principe de ce projet de loi se fasse le plus tôt possible pour que, comme l'espérait le député de LaFontaine, on puisse procéder à l'étude article par article de ce projet de loi dans les meilleurs délais.

Mon collègue le ministre d'État, au cours des derniers mois, a effectué des consultations auprès de plusieurs groupes. Les gens se sont montrés majoritairement satisfaits du projet de loi. Évidemment, il y aura certainement quelques corrections ou ajustements à apporter, mais ce qu'il faut surtout retenir, c'est que ce projet de loi, les modifications qu'on y apporte viennent soutenir et protéger plus de 1,6 million de travailleuses et travailleurs au Québec, et, là-dessus, je pense que personne ne peut être en désaccord que d'adopter le projet de loi en sa totalité le plus tôt possible est ce qui est le plus nécessaire pour ces gens-là pour lesquels on veut justement proposer de meilleures conditions de travail. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Crémazie. Alors, il n'y a plus d'autres intervenants?

Une voix: Non.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le principe du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission
de l'économie et du travail

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail et pour que le ministre du Travail en soit membre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 20 du feuilleton.

Projet de loi n° 135

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 20, M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration propose l'adoption du principe du projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages et la Loi sur la protection du consommateur. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président, pour la présentation à cette première étape du projet de loi n° 135, la Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages et la Loi sur la protection du consommateur. Alors, c'est un projet de loi qui est bien attendu par le milieu concerné, M. le Président, puisque cette loi, elle a un certain nombre d'années. En fait, elle a été adoptée en 1974, et il y a beaucoup de choses qui ont changé sous le beau ciel bleu du Québec depuis 1974. Et, en particulier, M. le Président, en matière de voyages, d'agents de voyages, de courtiers, de personnes qui interviennent dans l'organisation des voyages avec les consommateurs, eh bien, il y a beaucoup de choses qui ont changé, notamment depuis le 11 septembre 2001, suite aux événements tragiques de New York. Nous avons été, dès ce moment du 11 septembre triste à tous les égards, M. le Président, nous avons été en contact avec les agents de voyages définis largement.

Quand on les distingue dans leur catégorie particulière, on va retrouver effectivement, donc, des particularités, mais les agents de voyages donc, qui sont les intermédiaires entre les consommateurs et soit les transporteurs, soit d'autres intermédiaires qui vont réaliser des activités pour des voyageurs, que ce soient des voyageurs qui quittent vers l'extérieur du pays ou des voyageurs qui viennent ici, au Québec, pour participer à des activités de plus en plus... des personnes de plus en plus nombreuses pour jouir des activités et de tout ce que peut constituer, en termes d'attraction, le Québec, eh bien, il y a dans ces dimensions donc des professionnels qui agissent à titre d'intermédiaires.

En 1974, le législateur a voulu que nous nous donnions une loi qui, essentiellement, vise à protéger ces consommateurs qui, dans une proportion très, très, très large, vont être appelés à débourser des sommes d'argent importantes, d'avance très souvent, pour payer ce produit, qui est un voyage, un déplacement et une excursion souventefois, dans cette industrie ou pour toute autre activité. Dès le moment où le voyageur, le citoyen, le Québécois, l'utilisateur est appelé à un déboursé, on s'est assuré d'un mécanisme de protection au cas où il y aurait défaut pour l'un ou l'autre des membres de la chaîne de fournir la prestation requise par l'achat qui a été fait par le consommateur. Or, depuis le 11 septembre, pour être très bref et pour qu'on entende bien le message globalement, eh bien, on a vu qu'il s'est présenté des difficultés ? c'est le moins que l'on puisse dire ? certaines pour des transporteurs aériens qui ont carrément fait faillite dans bien des cas et pour d'autres qui ont dû déclarer forfait en quelque sorte sur les engagements qu'ils avaient pris vis-à-vis des consommateurs. Et heureusement que nous avions ici, au Québec, et dans plusieurs provinces canadiennes, des lois pour la protection du consommateur!

n(16 h 30)n

Mais, cependant, cependant, les événements du 11 septembre, la façon dont l'industrie du voyage s'est organisée depuis plusieurs années, les fractionnements différents, la spécialisation fait en sorte que la loi doit être modernisée, et, à la demande des agents de voyages, nous avons fait de très larges consultations depuis une année et nous arrivons enfin avec ce projet de loi qui est présenté aujourd'hui sur les agents de voyages. Et aussi nous allons en profiter pour modifier très légèrement, par un article, la Loi sur la protection du consommateur pour y ajouter un poste de vice-président, vu les responsabilités que nous allons ajouter en termes d'activités en matière d'agents de voyages spécifiquement, mais aussi sur les autres responsabilités, et pour pourvoir à un certain problème en cas d'incapacité d'agir du président.

L'essentiel, M. le Président, c'est de nous dire et de dire aux professionnels de cette industrie que nous allons répondre positivement à leur demande de réviser la Loi sur les agents de voyages. Et nous allons, suite au document d'orientation que nous leur avons présenté en juin dernier, procéder à un certain nombre de modifications en offrant d'abord ? et c'est le souci que nous avons ? en offrant davantage de protection aux consommateurs. Notamment, nous allons introduire la possibilité de poursuite, de recours civil pour un consommateur qui aurait eu affaire avec quelqu'un ne détenant pas un permis pour pratiquer une telle activité professionnelle en matière de voyages, ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant. Nous allons également modifier un assez grand nombre de dispositions pour mieux refléter, comme je le disais il y a quelques instants, la nature de cette industrie et la nature des professionnels qui y oeuvrent.

L'industrie s'est fragmentée avec un certain nombre de spécialistes, que ce soient, par exemple, les agences de voyages qu'on dit expéditifs, les agents de voyages réceptifs, c'est-à-dire les gens qui vont soutenir ou qui vont vendre des produits pour l'extérieur du Québec ou des gens qui vont vendre des produits à des touristes, à des voyageurs qui viennent de plus en plus nombreux en territoire québécois et pour lesquels évidemment la responsabilité n'est pas la même en termes de cautionnement, par exemple. Parce que vous savez que, pour obtenir un permis d'opérer, de travailler, de professionnel dans le domaine du voyage, eh bien, il vous faudra détenir un permis d'agent de voyages et pour lequel il y aura un cautionnement qui sera requis, au cas où il y aurait difficulté de fournir la partie produit pour laquelle le consommateur aura déboursé, et il y aura aussi une autre forme de cautionnement qui sera introduite en quelque sorte par... Si on est un grossiste du voyage et qu'on offre des produits également, on devra pourvoir à la protection du consommateur.

Cependant, il est un troisième segment qui n'est pas touché, puisque évidemment toutes les compagnies aériennes qui font du transport, par exemple, ne sont pas des compagnies québécoises, cela va de soi, et souventefois les agents de voyages de quelque catégorie qu'ils soient, qu'ils soient grossistes ou détaillants, sont soumis à des impératifs qui ne dépendent pas d'eux, qui dépendent de la situation financière ou du marché international. Alors, il est difficile pour ces gens de supporter cette situation, et nous allons tâcher de mieux définir dans la loi, en accord avec ces gens, les différentes catégories et faire porter les responsabilités sur les professionnels, organismes, ou organisations, ou entreprises qui véritablement sont en relation avec le produit qu'ils offrent au public. Nous allons donc modifier le libellé quant au champ d'application de la loi pour y ajouter nommément aussi des exceptions, des exceptions. Les exploitants d'établissement touristique, lesquels étaient assujettis à l'application de la loi pour l'organisation de forfaits, vont bénéficier maintenant d'une exemption lorsqu'ils offrent moins de six prestations touristiques, outre celles qu'ils offrent dans leur établissement. Les autres seront titulaires d'un permis ayant des conditions allégées.

Bon, de plus en plus, il est organisé des forfaits ? la formule qu'on connaît comme consommateurs ? des forfaits par des propriétaires d'entreprise. Et, lorsqu'ils offrent ces forfaits, eh bien, ils étaient, jusqu'à maintenant, d'une façon artisanale, disons, ils étaient soumis à la loi. Ils devaient obtenir le permis d'agent de voyages, le cautionnement. Disons que c'est un allégement, M. le Président, qui tient compte de la situation particulière et qui tient compte de l'esprit d'entrepreneurship de pourvoyeurs de services de taille beaucoup plus réduite et pour lesquels nous voulons apporter un bon nombre d'allégements.

Nous allons également introduire des exemptions à l'égard des producteurs de tourisme d'aventure qui organisent trois prestations touristiques et moins par année. C'est toujours la même chose, M. le Président, on a le souci de vouloir protéger ou exempter d'une bureaucratie trop lourde des petits producteurs de services qui franchement ne représentent pas une menace suprême pour la société, mais, au contraire, qu'on fasse les choses simplement, qu'on permette aux gens d'avoir cette initiative-là. Il existe des propriétaires donc d'entreprise hôtelière, par exemple, qui vont organiser des forfaits de tourisme d'aventure, mais à une, deux ou trois fois à l'année. On pense que c'est la loi qui était très rigide, on pense que c'est un peu abusif de leur exiger toute la panoplie de permis. Allégement, allégement, allégement, prise en considération de la situation des personnes pour faire en sorte que nous ne soyons pas étouffés, mais que nous ayons davantage d'oxygène pour réaliser ces activités-là.

La même chose pour un courtier immobilier et son agent qui seront exemptés de l'application de loi lorsqu'ils agissent dans le cadre de Loi sur le courtage immobilier. C'est-à-dire, lorsqu'ils font leur travail et pour lequel ils ont un permis professionnel, on ne les obligera pas à avoir deux permis. Ils sont déjà protégés, et les consommateurs sont protégés en vertu des dispositions de la Loi sur le courtage immobilier.

On va exempter aussi... Ce n'était pas le cas. En 1974, l'industrie était moins spécialisée, et ça obligeait même les bénévoles, imaginez-vous... Les bénévoles, par exemple, organisent des excursions scolaires. Parce que, quand on est dans une polyvalente, par exemple, ou n'importe quel type d'école... Eh bien, quand on faisait des excursions, des activités, il fallait détenir un permis d'agent de voyages. C'est un peu... On pense que c'est un peu abusif, et c'est l'examen qu'on a fait avec les gens de l'industrie, et ces gens-là pourront également profiter d'une loi allégée pour assumer leurs initiatives. On a également une exemption pour les voyages effectués occasionnellement et exclusivement au Québec ? les réceptifs ? et dont la durée ne doit pas dépasser 72 heures. Elle devra modifier cette limite de 72 heures pour une limite de 48 heures. On va permettre également à une personne d'être titulaire d'un permis pour une personne physique, et ça va apporter des précisions sur les détenteurs de ces permis. Actuellement, c'est des entreprises qui doivent détenir ces permis. Maintenant, une personne physique pourra le détenir.

Comme je le disais il y a quelques minutes, on va introduire la possibilité de recours civil et la responsabilité solidaire à l'encontre des personnes qui agissent comme agents de voyages sans détenir le permis, en permettant au client de demander l'annulation du contrat. On va également ajouter des pouvoirs supplémentaires au président de l'Office de la protection du consommateur pour davantage de souplesse, davantage de rapidité aussi et davantage d'efficacité dans la prise de décision en matière de délivrance, de renouvellement, de suspension ou d'annulation de permis. Disons qu'actuellement la réglementation à cet égard-là est assez rigide. Elle est lourde, à notre avis. Et, puisque nous faisons confiance non seulement à la fonction publique, mais aux hommes et aux femmes qui occupent la direction de nos organisations, bien, un peu de souplesse, là, le sens des responsabilités, le jugement... Mais, pour tout ça, il faut modifier la loi pour donner davantage de responsabilité de prendre des décisions et d'agir du président de l'Office de la protection du consommateur en matière de voyages.

On va ajouter aussi un autre article pour permettre justement au président lui-même de refuser un permis pour des raisons d'incapacité financière, d'intérêt public ou de non-respect des obligations applicables aux agents de voyages et tout en permettant un droit d'appel de la décision du président à l'Office de la protection de... Le président de l'Office, on lui permettra d'avoir un appel de cette décision. Mais on va introduire de la souplesse, de la responsabilité, de l'efficacité et de l'efficience.

n(16 h 40)n

Le pouvoir réglementaire sera élargi, le pouvoir réglementaire de l'Office, avec tout ce que ça comprend de publication dans la Gazette officielle du Québec et la possibilité de faire des observations de la part des citoyens et des citoyennes. On va élargir ce pouvoir-là pour permettre, entre autres, de déployer des règlements financiers, de prendre des projets de règlement financiers qui vont nous permettre d'assurer la protection des consommateurs. Qu'est-ce qu'on veut introduire par cela, M. le Président? Je viens de vous dire tantôt qu'il y avait des cautionnements qui étaient demandés lorsqu'on obtenait un permis d'agent de voyages ou encore lorsqu'on était grossiste en voyages. On doit payer une forme de... on doit effectuer des dépôts pour prévoir au cas où il y aurait défaut de l'un ou l'autre dans ce secteur d'activité là. Pourquoi alors permettre par règlement de modifier cela? Parce que, je l'indiquais, l'industrie est en pleine séquence de perturbation. Par exemple, les deux dernières faillites en matière de voyages, Canada 3000 et Charter Air Canada, eh bien, nous auront amenés à des déboursés pour les consommateurs de tout près, ou enfin dans les eaux de 6 millions de dollars. Alors, nous n'avions pas, M. le Président, ces 6 millions de dollars d'amassés par les fonds que nous avions, et pourtant la loi nous fait obligation, heureusement, heureusement, de rembourser les consommateurs qui ont ainsi été lésés.

Ce que va ajouter la loi, c'est la possibilité de prendre un règlement pour faire en sorte qu'on pourra procéder par emprunt de façon à payer les consommateurs, et d'autre part d'étaler d'une façon, disons, raisonnable les cautions et les prélever pour en arriver à assurer l'équilibre entre les déboursés de protection et les fonds accumulés en cas de défaut pour la production, pour la réalisation du produit, tandis qu'actuellement, si on s'en fie aux articles de la loi très strictement, c'est un euphémisme de dire «respecter strictement la loi». On la respecte ou on ne la respecte pas. Mais, comme il faut respecter la loi, ça voudrait dire qu'il faudrait aller voir grossistes et agents de voyages et, disons le mot très carré, collecter 6 millions de dollars d'un coup sec, et puis on mettrait en péril un certain nombre de ces organisations. Agissons de façon raisonnable, nous disons-nous, mais assurons-nous d'aucune faille dans la protection du consommateur pour s'assurer du remboursement lorsqu'on est lésé.

La prise de règlements par l'Office soumis aux mécanismes généraux des règlements du gouvernement et de l'État va nous permettre d'assurer par règlement des financements intérimaires, s'il y avait lieu, et de faire en sorte... pour en arriver aussi à exempter un certain nombre ou une certaine catégorie de personnes. Quelles catégories? Les réceptifs en particulier: les organisateurs de voyages, les agents, les professionnels, les agences professionnelles qui reçoivent de d'autres entreprises moult fois des voyageurs, des touristes et pour lesquels on organise des activités. Eux, ils ne sont pas à risque dans leur secteur d'activité, mais c'est assez lourd d'assumer la responsabilité pour l'ensemble, y inclus le déplacement, ce qui représente la grande partie de l'investissement, pour les voyageurs qui vont être ici. Ce sont en quelque sorte des organisateurs professionnels d'événements qui ne sont pas liés à la vente de produits de développement pour les voyageurs. On pourrait, en vertu de ces règlements, bon, s'assurer maintenant, à la demande de ces personnes, que les bonnes personnes du bon secteur d'activité, du bon segment dans ce secteur d'activité professionnelle du voyage, eh bien, elles puissent être justement traitées et les consommateurs totalement protégés d'une façon adéquate.

On va changer aussi le régime des amendes, des amendes qui vont être plus dissuasives. Bien, c'est ça. Les amendes qu'on prévoit dans une loi en 1974, parfois c'est assez léger. On va les hausser substantiellement de façon à ce qu'on obtienne l'effet dissuasif à cet égard. Et, finalement, nous allons créer un comité consultatif parce que... Bien sûr, c'est le conseil d'administration de l'Office de la protection du consommateur qui fait respecter... qui donne les avis à l'Office et au gouvernement à ces égards. Les professionnels de l'industrie ont insisté pour que nous créions un comité consultatif spécifiquement orienté vers l'industrie du voyage et le travail des professionnels dans ce secteur. Nous disons oui aussi à cette dimension. Finalement, comme je l'indiquais, nous allons modifier la Loi sur la protection du consommateur pour y ajouter un vice-président.

Je conclurai, M. le Président, la présentation. On aura l'occasion de tout regarder ça en commission parlementaire, article par article. Mais je me réjouis particulièrement qu'hier, hier, le 18 novembre... On a déposé notre projet de loi ici le 7 novembre, et il y a eu réaction hier de l'Association professionnelle des agents de voyages au Québec, qui regroupe une très grande partie des agents de voyages, et, ma foi, la réaction est très bonne.

Je conclus en lisant la vice-présidente: «La vice-présidente de l'Association professionnelle des voyages du Québec, Mme Catherine Béri, indiquait que l'Association est associée au projet de loi depuis le printemps. Elle précise que l'Office de la protection du consommateur a démontré une grande ouverture et a pris en considération plusieurs recommandations du groupe de travail. Jusqu'à ce jour, le processus va donc dans la direction souhaitée. Et, selon Mme Béri ? qui est donc la vice-présidente de l'Association professionnelle des agents de voyages ? le travail de révision a été fait avec beaucoup de sérieux et de façon très structurée.» Parce que ce n'est pas facile, M. le Président, c'est assez compliqué, et les professionnels et la direction qui a travaillé avec les avocats dans la rédaction de ce projet de loi là ont effectué, on le voit bien ici, un excellent travail. Elle continue en disant: «"L'Office de la protection du consommateur fait preuve d'une volonté réelle d'arriver à un produit fini convenable et gérable qui ne soit pas un boulet au pied", a-t-elle commenté. Elle indique que la constitution d'un comité consultatif assortie d'un président de l'Office de la protection du consommateur qui a plus de pouvoirs est une bonne chose», et ainsi de suite. Alors, je pense qu'on est dans la bonne direction.

J'espère qu'on pourra offrir ce cadeau de Noël aux agents de voyages du Québec, une loi sur les agents de voyages révisée, les consommateurs qui seront davantage assurés de la protection, plus de souplesse, plus de flexibilité et davantage de responsabilités pour les professionnels à qui nous confions la responsabilité justement de l'application de la loi. Alors, voilà une initiative qui va dans beaucoup de directions, qui répond à des demandes depuis longtemps formulées, je vous prie de me croire, M. le Président, et c'est avec plaisir mais ardeur que nous allons nous appliquer, d'ici la fin de la session, à tâcher de faire en sorte que l'Assemblée nationale dise oui aux professionnels des agences de voyages ou du voyage au Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Maintenant, j'invite le député de D'Arcy-McGee à s'adresser à nous. M. le député.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. le Président, c'est à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de protection du consommateur que je prends la parole aujourd'hui dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages et la Loi sur la protection du consommateur, Bill 135, An Act to amend the Travel Agents Act and the Consumer Protection Act.

M. le Président, les notes explicatives nous indiquent que ce projet de loi modifie la Loi sur les agents de voyages afin de moderniser les dispositions applicables à ce secteur d'activité. Ainsi, le projet de loi modifie légèrement certains aspects de la Loi sur les agents de voyages par l'ajout de certaines exceptions et d'un nouveau pouvoir réglementaire. Le projet de loi nous donne un moyen de prendre un recours civil à l'encontre des personnes qui agissent comme agents de voyages sans permis. En matière de permis, le projet de loi permet à une personne d'en être titulaire pour une autre personne physique et prévoit les règles relatives au transfert des permis. Le projet de loi donne une responsabilité solidaire aux dirigeants des agences de voyages pour les sommes reçues des clients, qui doivent être déposées en fidéicommis.

En matière de surveillance des opérations des agences de voyages, les notes nous mentionnent que le projet de loi confie au président de l'Office de la protection du consommateur davantage de pouvoirs en matière de délivrance, de renouvellement, de suspension ou d'annulation de permis. Le projet de loi donne plus de pouvoirs au président de l'Office de la protection du consommateur pour nommer un administrateur professionnel, quand cela est nécessaire, pour protéger les clients d'un agent de voyages ou d'une personne qui agit sans permis.

n(16 h 50)n

M. le Président, toujours écrit dans les notes explicatives, ce projet de loi modifie le pouvoir réglementaire du gouvernement en ce qui concerne la constitution d'un fonds à des fins d'indemnisation des clients d'agents de voyages et... de permettre la constitution d'un comité consultatif.

M. le Président, le projet de loi modifie en plus la Loi sur la protection du consommateur afin de prévoir la nomination d'un vice-président au sein de l'Office de la protection du consommateur. M. le Président, on doit se rappeler qu'en 1971 le gouvernement du Québec a créé une organisation dont la mission était et demeure la protection du consommateur. Ainsi, la Loi sur la protection du consommateur a créé l'Office de la protection du consommateur. Le premier devoir du législateur, et notre premier devoir, est de protéger le consommateur et de trouver le bon équilibre entre le commerçant sur un côté et le commerçant sur l'autre côté. Mais, M. le Président, 30 années ont passé depuis la création de l'Office de la protection du consommateur. Les habitudes de consommation ont changé et, c'est bien évident, notre société a changé beaucoup en 30 années.

L'article 2 de la Loi sur la protection du consommateur se lit comme suit, et je cite: «La présente loi s'applique à tout contrat conclu entre un consommateur et un commerçant dans le cours des activités de son commerce et ayant pour objet un bien ou un service.» Fin de la citation. Depuis 30 ans, nous avons vu une diversification des biens et des services offerts, des nouveaux marchés, de la mondialisation, du commerce électronique, des nouvelle réalités, et vraiment un monde nouveau. Dans ce contexte, le gouvernement péquiste a imposé à l'Office de la protection du consommateur d'importantes compressions budgétaires, réduisant ainsi près de la moitié de ses ressources. Alors, l'Office a très peu d'enquêteurs pour faire une bonne surveillance de tous les commerces sous sa juridiction. M. le Président, les ressources de l'Office, les ressources humaines et technologiques de l'Office sont très limitées face à leurs responsabilités. Et, en plus de l'application de la Loi sur la protection du consommateur, l'Office surveille l'application pour le gouvernement de trois lois intitulées, premièrement, Loi sur les agents de voyages, deuxièmement, Loi sur les arrangements préalables de services funéraires et, troisièmement, Loi sur le recouvrement de certaines créances.

M. le Président, dans un article intitulé Protection des consommateurs: des lois désuètes, paru dans le journal Le Devoir du 20 septembre 2002, Mme Nicole Fontaine, présidente sortante de l'Office de la protection du consommateur, nous dit, et je la cite: «Si l'OPC a fait de son mieux pour obtenir des résultats, on ne peut malheureusement que déplorer l'état vétuste dans lequel est laissée la législation en matière de protection du consommateur. En effet, les quatre lois dont l'OPC assure l'application et la surveillance pour le gouvernement sont complètement désuètes.» Fin de la citation. Mme Fontaine nous explique que lesdites lois, et je cite, «ne correspondent plus, et depuis longtemps, à la réalité des consommateurs».

Dans ce même article, elle dit: «La situation actuelle de l'industrie du voyage ? et c'est ce projet de loi qui est devant nous ? est un exemple criant de la nécessité de revoir la législation. Les intervenants de ce secteur demandent depuis longtemps que la loi les régissant soit revue afin que celle-ci s'adapte à la réalité, le commerce électronique, entre autres. Les événements du 11 septembre 2001 ont davantage mis en évidence les lacunes de la loi. Aujourd'hui, consommateurs et voyagistes vivent avec les conséquences.» Elle dit aussi qu'«il est nécessaire de traiter la protection du consommateur comme un tout et non comme une série de chasses gardées. Il est essentiel d'adopter une vision d'ensemble et de mettre au point une politique globale qui correspond davantage à la réalité des citoyens, individus et entreprises qui, eux, vivent à l'ère de la mondialisation. Il faut un engagement véritable en ce sens. Les consommateurs seront en droit de se demander si le gouvernement les sert adéquatement.» Fin de la citation. M. le Président, l'extrait des remarques de Mme Fontaine résume les lacunes qui doivent être prises en compte lors de l'étude de ce projet de loi.

M. le Président, en étudiant le projet de loi n° 135, la réponse est très claire: nous, de l'opposition officielle, nous ne sommes pas satisfaits avec ce projet de loi, nous ne sommes pas satisfaits avec les modifications apportées par le projet de loi n° 135, à moins qu'on puisse bonifier ce projet de loi. Nous ne sommes pas d'accord avec la façon que le gouvernement traite le consommateur et même le commerçant. Le gouvernement n'a pas à coeur les revendications des consommateurs dans ce domaine.

M. le Président, ce projet de loi nous indique dans ses notes explicatives que le gouvernement peut moderniser les dispositions applicables aux secteurs d'activité qui sont couverts par la Loi sur les agents de voyages, mais, M. le Président, nous constatons, à la lecture, que ce projet de loi ne comporte aucun changement majeur important dans ce domaine. M. le Président, on se rappelle, dans les derniers mois, que les agents de voyages ont récemment été appelés à remplir pour un montant de 1,5 million de dollars le fonds de cautionnement collectif qui permet de faire partir ou rembourser le consommateur québécois touché par les faillites de transporteurs ou d'agences de voyages. Il y a un conflit réel entre les 135 détenteurs de permis de grossiste en voyages du Québec et l'Office, en vertu de cette réclame collective de 1,5 million de dollars.

Dans le projet de loi sur les agents de voyages, tout détenteur de permis de grossiste en voyages doit contribuer à un fonds collectif destiné à rembourser les consommateurs en cas de faillite ou problème subi par le consommateur. Oui, M. le Président, étant donné les nombreuses faillites des voyagistes au cours des dernières années, ce fonds collectif, géré par l'Office, a été affecté et vraiment était vide. Voilà la raison de l'existence de l'avis de cotisation qui a été envoyé à ces agences, un avis très mal reçu de la part des voyagistes. Le projet de loi devant nous ne répond pas aux questions et ne répond pas aux demandes des voyagistes, nonobstant les prétentions du ministre aujourd'hui. Le projet de loi devant nous nous laisse avec plus de questions que de réponses.

n(17 heures)n

En parlant de questions, M. le Président, je me permets d'en poser quelques-unes aujourd'hui au ministre. Premièrement, quand et dans quels cas et circonstances, est-ce qu'un client pourrait demander une compensation? Le projet de loi ne nous donne pas les critères qui seront employés par l'Office pour établir le moyen et la façon de faire les réclamations. M. le Président, pour bien protéger à la fois les clients, les consommateurs et les commerçants agents de voyages, nous devons savoir ces critères.

Deuxièmement, M. le Président, le projet de loi manque de précision en ce qui concerne la création et la gestion du fonds de cautionnement.

Troisièmement, le projet de loi ne donne aucune précision en ce qui concerne les sommes à être versées par les agents de voyages au fonds de cautionnement, ce qui crée un sens d'insécurité dans cette industrie. Qui a vraiment la responsabilité de remplir ce fonds de cautionnement? M. le Président, qui paie, combien, et qui gère ce fonds de cautionnement?

M. le Président, il y a une réponse qui est claire. Le gouvernement, par ce projet de loi, a d'énormes pouvoirs réglementaires, au sujet de ce fonds de cautionnement, qu'il peut donner à l'Office, qui, à son tour, peut les appliquer d'une manière inéquitable aux agents de voyages sans se soucier de la protection des consommateurs. Nous, de l'opposition officielle, nous voulons établir et trouver un équilibre pour, à la fois, bien protéger le consommateur et, deuxièmement, sur l'autre côté, pour être équitables aux commerçants.

Les agents de voyages ont droit à une réponse précise concernant les cotisations inéquitables qui ont été imposées sur eux. M. le Président, le projet de loi n° 135 n'est pas juste envers les agences de voyages et ne protège pas suffisamment le consommateur.

M. le Président, si le gouvernement veut vraiment moderniser la Loi sur les agences de voyages, il doit y avoir des consultations, tel que nous avons demandé à l'Assemblée nationale le jour du dépôt du projet de loi n° 135. Le gouvernement doit entreprendre des consultations publiques avec les agents de voyages, les voyageurs, le public pour établir un juste équilibre entre le consommateur et le commerçant.

M. le Président, lors de l'étude des crédits de l'Office de la protection du consommateur, au printemps dernier, en réponse à ma question en ce qui concerne la turbulence dans ce domaine, le ministre responsable de l'application de la Loi sur les agences de voyages m'a répondu par écrit comme suit, et je cite: «L'Office examine actuellement toutes les dispositions de la Loi sur les agences de voyages. Il a créé avec les intervenants de voyages une table de concertation et, ensemble, ils examinent les meilleurs moyens pour protéger à la fois les consommateurs et l'industrie. Toutes les questions relatives aux cotisations et aux fonds individuels et collectifs sont au centre de ces discussions.» Fin de la citation.

M. le Président, si le projet de loi que nous avons devant nous est la suite de la réponse du ministre à ma question lors de l'examen des crédits, le projet de loi ne mérite pas notre approbation. M. le Président, néanmoins, nous sommes ici pour être constructifs. Nous, de l'opposition officielle, nous offrons au ministre notre collaboration pour la tenue de consultations afin d'entendre les commerçants et les consommateurs affectés pour que nous puissions profiter de leur sagesse, de leur expérience et de leurs connaissances. Alors, nous pourrions bonifier le projet de loi conformément.

M. le Président, en addition aux commentaires de Mme Nicole Fontaine, présidente sortante de l'Office de la protection du consommateur, qui nous dit que la loi que nous étudions aujourd'hui est complètement désuète, l'ancien bâtonnier du Québec, Me Claude Massé, demande une révision en profondeur de la Loi sur la protection du consommateur et, par implication, de la loi que nous étudions. Il dit, relativement à la Loi sur la protection du consommateur, et je cite: «Elle a beaucoup vieilli», disant que nous devons prendre en compte la mondialisation, les échanges et le commerce électronique. Il dit aussi, et je cite: «Il faut y repenser dans un contexte global.»

M. le Président, le temps est maintenant venu de prendre la bonne décision. Laissons-nous le temps de tenir des consultations afin de bien bonifier et de moderniser cet important projet de loi devant nous, le projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages et la Loi sur la protection du consommateur.

En terminant, M. le Président, l'équipe de l'opposition officielle serait prête pour bonifier le projet de loi et, alors, l'appuyer, mais, à ce moment, sans avoir une bonification de ce projet de loi, on ne peut pas l'appuyer. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député D'Arcy-McGee. Y a-t-il d'autres collègues qui souhaitent intervenir à cette étape-ci sur le projet de loi n° 135? M. le député de Vimont.

M. François Gaudreau

M. Gaudreau: Merci, M. le Président. Alors, écoutez, l'augmentation du temps libre, du niveau de vie et de l'industrie du loisir a donné lieu depuis quelques années à une industrie du tourisme florissante. Cette réalité a fait en sorte qu'il est devenu essentiel de protéger le consommateur. Pour organiser la protection du consommateur et pour renforcer l'obligation de sécurité du voyagiste, un texte de loi a donc vu le jour il y a une trentaine d'années. La conjoncture actuelle n'est aujourd'hui plus la même, et le temps est maintenant venu de revoir la loi en profondeur.

Les événements dorénavant célèbres du 11 septembre ont causé des bouleversements importants à l'industrie du tourisme et des agences de voyage, grossistes et voyagistes, et la loi actuelle ne semble pas répondre aux problèmes que causent les situations particulières dans le domaine. Un regard nouveau doit donc être porté sur le texte de loi de façon à agir non pas pour étouffer les voyagistes, mais bien pour protéger le consommateur tout en offrant une certaine flexibilité à l'entreprise. Tant qu'à revoir les articles qui régissent la loi, aussi bien le faire de façon logique en proposant des nouvelles façons de faire.

La loi, comme elle est appliquée aujourd'hui, est complètement désuète et inadaptée aux conditions du marché et aux tendances de l'industrie. Les paramètres de réglementation doivent changer, et l'État doit proposer des mécanismes plus souples envers les grossistes. Ces derniers courent à leur perte si des mesures correctives ne sont pas adoptées pour prévoir les faillites et faire en sorte de les protéger des montants exorbitants à verser. Il y a là un non-sens qui, si nous ne stoppons pas l'hémorragie, mettra en péril une industrie au complet. Divers mécanismes sont envisageables. Encore faut-il prendre le temps d'analyser l'impact et les répercussions sur l'industrie. Une chose est certaine, une refonte en profondeur de la loi est souhaitée pour le bien des parties en cause. Il y va de la protection de l'industrie et de la protection du voyageur.

J'aimerais, par le fait même, M. le Président, mentionner qu'on a dû attendre la catastrophe avant de réagir. Depuis longtemps, les divers intervenants reliés au monde du voyage ont essayé à maintes reprises de sensibiliser l'OPC, le ministre des Relations avec les citoyens, le ministre du Tourisme, et jamais il n'y a eu d'écoute. Il a fallu attendre une situation catastrophique, avec le fonds collectif de cautionnement ou d'indemnisation, une situation qui était connue depuis 1996 de l'Office de la protection du consommateur, mais qui, à ce moment-là, a été tenue presque secrète, une situation qui a ébranlé les grossistes en voyages et qui inquiète toutes les agences de voyage, finalement, M. le Président, une situation qui inquiète au plus haut point l'industrie du voyage.

n(17 h 10)n

Alors, comme le parti d'opposition officielle, nous souhaitons des consultations dans le but de revoir le mécanisme au complet et nous pouvons assurer le gouvernement que nous serons positifs et prêts à participer à ce grand débat. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Vimont. M. le député de LaFontaine et porte-parole de l'opposition officielle en matière de tourisme.

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Alors, M. le Président, bien sûr, le projet de loi n° 135, si on écoute le ministre, se veut la solution à tous les problèmes que rencontrent les consommateurs ou les difficultés que rencontrent les consommateurs et les problèmes auxquels font face les agents de voyages et les voyagistes. Bon, il est vrai qu'à l'intérieur du projet de loi un certain nombre de choses et de changements peuvent améliorer un certain nombre de situations, mais il n'en reste pas moins, M. le Président, que ce projet de loi là ne correspond pas et ne répond pas aux voeux de l'ensemble des intervenants et des gens qui sont dans le milieu du travail du voyage.

Et, M. le Président, en particulier, eh bien il y a... Le ministre l'a mentionné rapidement, mais vous savez qu'au Québec il y a les agences de voyages qui vendent des forfaits, il y a les grossistes aussi, hein, qui vendent ça aux agences de voyages ou qui sont... les agents de voyages sont les intermédiaires des grossistes, et qu'ils vendent des voyages pour aller à l'étranger. Alors, un citoyen, un consommateur québécois qui veut aller avec sa famille passer une semaine à Cuba, ou au Mexique, ou en Floride, ou je ne sais trop dans quel paradis méditerranéen, enfin un peu partout, peut acheter, à ce moment-là, un forfait, peut acheter un voyage dans lequel il y a les prestations suivantes: le voyage en avion, il y a la prestation hôtelière et même quelquefois les repas et un circuit de golf ou, enfin, je ne sais trop quel attrait, dépendant bien sûr de ce que le consommateur, de ce que les gens recherchent. Ça, c'est la première catégorie.

Et il y a aussi les gens qui reçoivent ici, qui organisent pour des touristes qui viennent de l'étranger, dont le forfait, dont le circuit est vendu à l'étranger... Alors, ça peut être en France, on en reçoit 385, 390 000 par année; ça peut être en Allemagne, on en reçoit une trentaine de mille; ça peut être en Italie, on en reçoit plusieurs dizaines de milliers aussi; ou en Corée, on en reçoit quelques-uns aussi; ou tout simplement aux États-Unis. Et ces gens achètent dans leur pays, dans leur pays d'origine, dans lequel ils résident, un produit, un circuit, par exemple, au Canada ou au Québec, et donc, viennent chez nous. Et les gens qui les reçoivent, eh bien c'est ce qu'on appelle les réceptifs. Ce sont des gens qui sont dans l'industrie du voyage, qui ont un permis d'agence de voyages, mais qui ne vendent pas de produits aux Québécois pour l'extérieur mais qui reçoivent, qui sont payés par les «tour operators», par les grossistes internationaux pour recevoir leurs gens.

Et ces gens-là, M. le Président, lorsqu'il y a eu la débandade, la déroute du fonds de garantie, eh bien, ces gens-là se sont retrouvés eux aussi dans la même difficulté que leurs confrères qui, eux, vendent des forfaits alors qu'ils n'ont pas à garantir des prestations, parce que les prestations qui sont vendues dans le pays étranger sont garanties selon les lois de ce pays-là. Ce n'est pas au Québec à garantir... Si un «tour operator» français, ou américain, ou anglais, ou britannique, ou coréen, ou autre manque à ses engagements, ce n'est pas au Québec à en assumer les frais; c'est dans le pays d'origine, c'est à eux à voir à les rapatrier et à payer les différentes sommes qui sont nécessaires. Et tout ce qui peut arriver, quelquefois, c'est que l'agent réceptif, lui, perde de l'argent parce qu'il n'a, des fois, pas été payé complètement. Mais ça, ça fait partie des affaires et c'est comme dans tout commerce, lorsque vous achetez une marchandise, hein, et que ça ne fonctionne pas, vous faites une perte. Donc, les gens sont habitués à ça et sont prêts à courir ce risque. Mais ils n'ont pas à payer, à ce moment-là, au fonds de garantie parce qu'ils n'ont rien à garantir. Alors, ce qui est important, c'est de faire en sorte qu'ils ne soient plus assujettis à la même règle, à la même obligation de payer dans le fonds de garantie que les autres voyagistes québécois qui, eux, vendent à des Québécois.

Puis le plus bel exemple ? peut-être que ça peut être confus pour certains ? si, par exemple, un Québécois part à Cuba, hein, ou en France avec un tour organisé et, lorsqu'il arrive en France, eh bien, le voyagiste québécois a fait faillite ici, au Québec, ou la compagnie d'aviation qui le transporte, il y a une faillite, eh bien ce n'est pas au gouvernement français ni à l'Office de la protection du consommateur français de payer pour eux avec leur fonds de garantie à eux, s'ils en ont un, mais c'est au Québec. Alors, c'est la même chose à l'inverse. Et c'est pourquoi il doit y avoir maintenant deux catégories, et cela fait unanimité dans cette industrie.

Il y a d'autres dispositions de la loi, M. le Président, qui ne sont pas en parfait accord avec les gens de l'industrie. J'ai eu l'occasion cette semaine... la semaine dernière, pardon, de rencontrer des gens dans certaines entreprises de transport importantes ici, au Québec et au Canada et aussi des grossistes en tourisme, des voyagistes, et les gens ont un certain nombre de remarques et d'oppositions avec lesquelles... Ils ne sont pas d'accord vis-à-vis le projet de loi complètement. Il y a peut-être des bonnes choses dans le projet de loi, disent-ils, tout n'est pas mauvais, mais il ne correspond pas réellement à une bonne réforme et à des mesures favorables pour l'industrie.

Et ces gens-là, M. le Président, souhaitent se faire entendre. Ces gens-là souhaitent que le ministre amende son projet. Ils vont avoir des propositions intéressantes à faire. Alors, je crois que la moindre des choses de la part du gouvernement, ce serait d'avoir des consultations particulières, hein? Nous pourrions, mon collègue le député D'Arcy-McGee et moi-même, et je crois que les gens de l'Action démocratique ont fait la même demande, alors, au nom de l'opposition, je pourrais dire que le ministre devrait donc prendre la peine de s'asseoir avec nous et d'établir ensemble une liste de gens, quelques gens représentatifs et qui sont intéressés. Il ne s'agit pas d'appeler les gens pour dire: Veux-tu venir parler? Mais il y a des gens qui sont intéressés qui aimeraient bien comparaître devant nous, venir témoigner et nous faire des recommandations, nous faire des suggestions d'amendements, et cela se ferait dans l'intérêt général du projet de loi, dans l'intérêt général de l'industrie. Il ne s'agirait pas là d'un exercice futile ou inutile. Au contraire, ça permettrait d'avoir un projet de loi beaucoup plus précis qui correspondrait mieux aux réalités qui sont vécues sur le terrain.

Parce que, après tout, nous, nous pouvons toujours... Hein, on parle avec les gens, on lit un article de journal, on parle, on reçoit une lettre, et puis on consulte un peu comme ça, là, au niveau du gouvernement, puis on fait un projet de loi. Mais mon expérience en cette Chambre ? et je rentre, la semaine prochaine, dans ma 18e année, d'ailleurs en même temps que le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques va faire ? et mon expérience, M. le Président, en 18 ans, en 17 ans faits de vie politique, c'est que, à chaque fois, à chaque fois qu'un projet de loi a été déposé et qu'on a pris la peine d'écouter, les députés, en commission parlementaire, les groupes, les citoyens ou les organismes, les organisations qui avaient des choses à nous dire, qui avaient des remarques à faire, des propositions à nous faire, à chaque fois que nous avons pris la peine non seulement de les écouter, mais aussi de tenir compte de ce qu'ils nous disaient, donc de modifier, de bonifier ou de changer le projet de loi, la loi, eh bien, M. le Président, ça a permis d'adopter non seulement le projet de loi d'une façon harmonieuse, hein, parce que tout le monde y retrouvait son intérêt, mais aussi ça a permis de démontrer à nos concitoyens, eh bien, que la démocratie québécoise, ce n'est pas un vain mot. Et, lorsque les parlementaires font des travaux, légifèrent et qu'ils prennent la peine de les écouter, eh bien, c'est quelque chose de très positif et de très intéressant et d'efficace qui ressort de tout ça.

Alors, je sais que, jusqu'à maintenant, on n'a pas eu de confirmation de ces audiences. Même, on s'est fait dire quasiment non, là, ou presque non, hein? Mais peut-être que le ministre, voyant que l'opposition est unie dans cette demande et qu'aussi bien mon collègue qui s'occupe de la protection du consommateur que moi qui m'occupe du tourisme, donc qui ai à voir avec tous ces gens du voyage aussi, eh bien, nous sommes unanimes et nous insistons, peut-être va-t-il se mettre à nous écouter.

Il y a aussi, M. le Président, le problème du fonds de garantie. Bon, le ministre a donné... a fait un prêt sans intérêt sur trois ans pour permettre aux gens de pouvoir payer leur cotisation supplémentaire, pour éponger ce déficit important et qui perdure depuis longtemps, là. J'écoutais tout à l'heure le député de Vimont, qui nous disait que c'était quasiment secret. Et je crois, M. le Président, que ce n'était peut-être pas secret, mais c'était très confidentiel, hein? Ce n'était pas quelque chose que l'on parlait et qu'on essayait de mettre sur la place publique. On a donc laissé perdurer un problème, et ce problème-là, on l'a refilé sur les épaules, sur le fardeau de ces gens du voyage. Et on sait que, dans le voyage, les gens ne roulent pas dans l'or. Ce n'est pas vrai que les gens qui sont dans le tourisme, qui sont dans les agences de voyages, dans les grossistes font des fortunes. Ce sont des entreprises qui marchent, qui fonctionnent avec des marges extrêmement restreintes, avec des coûts qui changent selon les périodes, selon les fluctuations des monnaies, selon l'inflation dans certains pays, selon les coûts de l'essence, selon beaucoup de facteurs, le taux d'occupation des hôtels, qui ont des risques importants. Eh bien, M. le Président, ce fardeau supplémentaire est, pour moi, quelque chose, là, qui n'est pas acceptable, parce qu'il va falloir qu'ils le payent pareil, ce n'est qu'un prêt. On fait reporter, on reporte à quelques années la problématique. Et je crois qu'il faut trouver une solution, M. le Président, qui fasse en sorte de ne pas faire porter sur les seules épaules de ces gens-là ce fardeau de garantie.

n(17 h 20)n

Parce que, après tout, nous vivons aussi... Moi, j'aime bien la protection du consommateur, étant consommateur moi-même. Mes électeurs, ma famille, nous sommes tous, mes collègues, des consommateurs. On aime ça, avoir une bonne protection. Mais, M. le Président, il faut aussi penser à la responsabilisation des gens, hein, il faut aussi penser à ça. Et je crois qu'il est temps, en effet, de revoir la loi. Il est temps, en effet, de revoir tout ce secteur-là. La manière dont ça fonctionne maintenant, ce n'est pas la façon dont ça fonctionnait en 1970. Les clientèles ne sont plus les mêmes, les produits ne sont plus les mêmes. Les gens aussi ont évolué. En 1970, il est vrai, on découvrait tout ce monde merveilleux du voyage organisé, c'était le début de la grande aventure des vacances. C'est là que le tourisme de voyage a pris son essor. Et il y avait certainement, de la part des consommateurs, de la part des gens, une éducation à se faire. Et on a pu voir des expériences malheureuses. Mais il n'en reste pas moins que l'individu comme tel, par lui-même, est responsable de lui-même et des gestes qu'il pose et des décisions qu'il prend.

Alors, on ne peut pas non plus faire en sorte, hein, d'encadrer le citoyen, dans la société, comme s'il n'était pas responsable. Les gens sont responsables, puis les gens doivent être capables de prendre leurs responsabilités. Et, lorsqu'on achète un produit plutôt qu'un autre parce qu'il coûte moins cher ou parce qu'on a une aubaine, eh bien, on s'attend, si on paye moins cher, hein... Si quelqu'un paye 800 $ pour une semaine dans une île et l'autre paye 1 500 $, bien, celui qui a payé 800 $ ne s'attendait certainement pas, et je suis certain de cela, à avoir les mêmes prestations que celui qui a payé 1 500 $. Puis il n'y a pas de secret, il n'y a pas de miracle quelque part.

Alors, ça, c'est une responsabilisation aussi qu'on doit faire faire et qu'on doit amener. Et je pense qu'on doit faire confiance aux jugement des gens pour assumer eux-mêmes leurs propres décisions, ce qui ne veut pas dire tout laisser aller, ce qui ne veut pas dire abolir toute protection. Bien au contraire, il faut encadrer les commerces. Il faut faire en sorte que les permis ne soient pas délivrés à n'importe qui, n'importe comment aussi. Le gouvernement a une responsabilité, là. Lorsque le gouvernement délivre un permis à un transporteur pour pouvoir opérer ici, au Québec, s'il n'a pas pris les mesures ou il n'a pas fait les vérifications suffisantes pour s'assurer de la solvabilité, de s'assurer que l'entreprise va pouvoir fonctionner, bien, il a aussi une part de responsabilité. Et, après ça, si ce transporteur ou ce grossiste en voyage, hein, ou cette agence faillit à ses obligations, bien, on reporte le fardeau de la perte sur les épaules des gens qui, eux, sont sérieux, qui sont encore en affaires et qui font attention. Alors, il y a là aussi quelque chose qui est une sorte de situation un peu injuste.

Et, malheureusement, dans le projet de loi, on change quelques articles, on change quelques choses... C'est toujours des projets de loi cosmétiques. C'est ça, un peu, le problème. Quand est-ce qu'on va prendre la peine, en cette Chambre, de dire: La Loi sur la protection du consommateur, on la revoit de fond en comble, on fait des consultations, on rencontre les gens, on prend un an pour la travailler, de la même façon qu'on a fait le Code civil au Québec? Je me souviens, lorsque nous étions au gouvernement, dans les années... de 1985 à 1994, mais disons que ça a commencé vers 1989, 1990, 1991, le gouvernement de Robert Bourassa avait décidé qu'on ferait la réforme du Code civil. Eh bien, je dois vous dire que, pendant de nombreux mois, notre ministre de la Justice et la députée de... la députée Mme Louise Harel, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, eh bien, ont tenu des consultations, ont fait des séances de travail. Les députés se sont impliqués. Il y a eu des caucus, il y a eu des réunions, des séances, et, à la fin, eh bien, on a pu procéder à une modernisation, une réactualisation du Code civil au Québec.

Il me semble que, en ce qui concerne la Loi sur la protection du consommateur, particulièrement en ce qui touche les agents de voyages, le voyage... Je parle pour ça parce que je m'occupe du tourisme, mais je suis certain que mon collègue le député D'Arcy-McGee a la même idée que moi là-dessus pour ce qui concerne les autres domaines. Je crois qu'il est temps de dépoussiérer cette loi, de réactualiser en fonction, comme je le disais tout à l'heure, du nouveau comportement des consommateurs, d'une meilleure sensibilisation des gens à leurs décisions et aussi aux nouvelles techniques, technologies de vente et de marketing.

Parce qu'on peut acheter maintenant aussi... Si vous prenez votre ordinateur, M. le Président, vous allumez votre Internet et puis vous allez sur MSN, si, par hasard, vous tombez sur MSN France ou MSN... vous parlez espagnol, MSN Mexique, vous allez voir des publicités de voyages, hein, à des prix très alléchants. Eh bien, il n'y a rien qui vous empêche de prendre votre souris, d'appuyer dessus et de vous acheter un voyage à partir de Mexico ou de Paris pour aller dans un autre pays. Et c'est un consommateur québécois qui l'achète. C'est un exemple que je donne.

Mais aujourd'hui le monde change, le monde a tourné et aussi il est temps de responsabiliser les gens. Les gens sont responsables. Il ne faut pas les responsabiliser, il faut les laisser prendre leurs responsabilités. Arrêtez de faire en sorte que les gens pensent que l'État est là pour tout, qu'on peut faire à peu près n'importe quoi, que, de toute façon, quelqu'un va payer. Voilà, M. le Président, dans quel esprit on devrait aborder, d'après moi, ce projet de loi là. Malheureusement, le ministre ne nous a pas confirmé qu'il ferait des consultations. Malheureusement, on a un projet de loi d'une quarantaine d'articles, à peu près, et ça ne permettra pas de faire le tour de tout ça. Et encore, malheureusement, on l'amène à la fin d'une session.

Et j'écoutais le ministre, très sympathique, qui disait: Ah! un agent de voyages, dans le journal, a dit que c'est bon. Mais ça, M. le Président, c'est une vision, c'est une personne avec un groupe. Il y a beaucoup d'autres groupes, beaucoup d'autres gens qui sont impliqués là-dedans, qui y ont à voir et qui ne partagent pas forcément tout à fait l'opinion de cette personne, et qui, en plus, elle-même, dans sa description générale, n'a pas regardé ou n'a pas discuté, n'a pas regardé avec tous ses membres qu'est-ce que ça peut représenter pour eux, hein? Elle parle en son nom, au nom de son organisation, mais pas forcément au nom... On a vu combien de fois des organismes, des représentants d'organismes venir nous voir, dire: Nous, on est contre, nous, on est pour. Puis, quand on allait sur le terrain puis qu'on rencontrait leurs membres, qu'on rencontrait les gens qui étaient affiliés à cette organisation, eh bien, on le voyait qu'il y avait des gens qui faisaient sortir un certain nombre de points et que, bien souvent même, c'est les gens qui avaient dit au départ, de prime abord, de bonne foi: Eh bien, nous sommes favorables, retraitaient puis disaient: Oui, on est favorables, mais il faudrait réamender, il faudrait réamener ça.

Eh bien, M. le Président, je crois que, malheureusement à la fin de cette session-ci, pour ce genre de travail là, il est tard, il est tard parce qu'on va devoir le faire rapidement. Nous sommes, je le disais dans le discours sur le projet de loi précédent, sur les normes minimales de travail, où on fait la même chose, nous sommes à 5 h 30, 5 h 27, le 19 novembre, et je peux à peu près vous garantir que, le 19 décembre, si on n'est pas rendus chez nous, dans nos circonscriptions, pour voir nos électeurs pour les voeux de Noël, eh bien, on ne sera pas loin de l'être, ce qui veut dire qu'il nous reste à peu près trois semaines et demie pour faire ce travail: consultations, après les consultations, il faut bien que la commission parlementaire qui a écouté ça se réunisse et discute. Ce comme ca que ça devrait se faire, normalement, M. le Président? Il faut que le ministre prenne les notes qu'il aura eues puis les mémoires qu'il aura eus puis qu'il aille voir ses fonctionnaires, qu'il passe au comité de législation, revienne en commission, que ça se rediscute: Est-ce que les gens sont satisfaits, pas satisfaits? Et tout ça, M. le Président, à la va-vite parce qu'il va y avoir d'autres projets de loi puis ça va s'embouteiller dans le système, dans la machine.

Je crois que des projets de loi comme cela devraient être déposés, M. le Président, au printemps pour adoption à la session d'hiver, ce qui permettrait aux gens de pouvoir en prendre connaissance, d'avoir des débats, d'avoir des consultations; au gouvernement, de revenir avec un nouveau projet ou des amendements, si nécessaire, sans le faire à la va-vite. Et vous le savez, M. le Président, nous avons vu, dans plusieurs projets de loi, dernièrement, particulièrement ceux de la dernière session, hein, le gouvernement revenir, après avoir fait adopter rapidement, des fois à la vapeur puis des fois par bâillon, des projets de loi, revenir avec un autre projet pour modifier le projet de loi qui avait été adopté à la vapeur et par bâillon parce qu'il avait été mal adopté, on n'avait pas tout vu dedans, puis on avait oublié des choses, puis les gens le disaient après, et ça, M. le Président, ce n'est pas une bonne manière de légiférer.

Et je crois que, quitte à le faire maintenant, écoutons les gens du voyage, écoutons les grossistes, écoutons les consommateurs aussi, bien entendu, et faisons en sorte d'avoir quelque chose qui est moderne, qui correspond à l'ensemble des intervenants qui sont là-dedans et aussi un projet de loi qui vise à faire en sorte que tout le monde soit responsabilisé, et les consommateurs, et les commerçants, et les industriels de ce secteur-là. Je crois que, à ce moment-là, nous aurons fait une oeuvre utile, nous aurons fait une bonne oeuvre et que les citoyens du Québec, et les gens dans le voyage, et les consommateurs pourront dire: Les députés ont fait leur travail comme ils devaient le faire.

n(17 h 30)n

Alors, M. le Président, je réitère pour la quatrième fois... la sixième fois parce que mon collègue l'a dit deux fois, et la septième fois parce que le député de Vimont, dans son discours, l'a dit aussi, donc nous redemandons au ministre: S'il vous plaît, M. le ministre, écoutez-nous, entendez-nous, mais surtout entendez les gens qui sont derrière nous ou qui nous le demandent à travers nous, s'il vous plaît, des consultations pas larges, publiques, parce qu'on n'a pas le temps, mais au moins des consultations restreintes, le plus rapidement possible, pour qu'on puisse entendre tout le monde puis avoir un bon projet de loi dans le meilleur intérêt de l'industrie du voyage et des consommateurs québécois.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens et à l'Immigration.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, je vous remercie. Je tenais à parler, surtout après le député de LaFontaine parce qu'il faut toujours le ramener dans le droit chemin, comme d'habitude. Alors, c'est un voyage qui sera long. Le ramener dans un droit chemin est un voyage long, mais nous le ferons ensemble.

Au départ, j'aimerais dire à M. le député de LaFontaine que, s'il s'inquiète qu'il ne reste qu'environ un mois, la semaine prochaine, nous entreprendrons la session intensive, donc nous siégeons le vendredi, et, sans vouloir pratiquer mon ancien métier de leader adjoint, mais je vois le leader adjoint de l'opposition, nous pourrions siéger les lundis ? le règlement nous le permet ? ce qui ajoute en nombre d'heures et de jours de session à l'Assemblée nationale. Si tel est votre souhait, nous y répondrons avec un grand empressement, M. le député de LaFontaine.

Ceci étant dit, je crois que les deux plus grandes agences de voyages qui existent à la fois au Québec et à Montréal sont situées ? pardonnez, mais, que voulez-vous, je ne suis pas responsable de l'abondance qui me frappe ? sont situées dans la circonscription de Sainte-Marie?Saint-Jacques. Je les connais depuis longtemps. J'ai très souvent échangé avec eux pour savoir quels étaient les grands défis de cette industrie, industrie qui emploie énormément de gens au Québec, beaucoup plus qu'on pourrait le croire. Il faut être très, très, très prudents là-dessus.

Et, le 11 septembre 2001, arrive un événement qui est passablement tragique, un événement qui est passablement dramatique, un événement d'ailleurs qui, à toutes fins, aura changé bien des choses, et on n'a pas fini de faire le bilan, si jamais il est possible de faire un bilan, M. le Président. Et toute l'industrie, d'une part, aéronautique est forcément bousculée, bousculée complètement. Et il s'agit d'avoir regardé, ne serait-ce que quelques instants, les bulletins d'informations pour voir à quel point la situation était dramatique.

Chez nos puissants voisins du Sud, le gouvernement fédéral américain a dû investir des milliards, des milliards et des milliards, je calcule en dizaines et pratiquement en centaines presque de millions de dollars, pour soutenir l'industrie aérienne américaine. Vous avez les compagnies à la limite de la faillite qui se mettent sous la protection de la Loi de la faillite. On a vu ici aussi le transporteur aérien principal ? que le député de Chomedey appelle toujours, avec un brin d'humour, Air Monopoly, et je ne suis pas loin de partager son point de vue ? avoir des difficultés également. Mais, si l'industrie aéronautique a eu des difficultés, vous devez vous dire aussi que, par voie de conséquence, l'industrie de l'agence de voyages a eu énormément de difficultés. Et, dans ces difficultés aussi ? quoiqu'il n'y a pas nécessairement un impact direct avec le 11 septembre ? il y a des cas, on en a parlé, deux cas très tragiques, qui sont arrivés et dans lesquels il aurait pu y avoir de très graves conséquences, d'une part, pour l'entreprise comme telle et, d'autre part, pour certains. Mais le cadre de la loi, une loi vétuste, ne permettait pas nécessairement toute l'aide nécessaire.

Je me souviens d'avoir eu devant moi un cas extrêmement précis qui était ce groupe de nos compatriotes d'origine marocaine qui avaient acheté des billets via une agence de voyages, et il faut se dire, là, que c'était fort probablement, pour la quasi-totalité d'entre eux, M. le Président, le voyage de retour au pays natal, où on allait sans aucun doute présenter aux grands-parents les petits-enfants, la petite-fille, les petits garçons qui étaient nés au Québec et que les parents, les grands-parents n'avaient jamais vus. Alors, c'était véritablement l'investissement d'une vie, d'une vie, une vie de travail, pour de nombreux Québécois d'origine marocaine. Et puis on fout le camp, il y a une faillite, en tout cas c'est nébuleux comme ce n'est pas possible. Heureusement, s'il y a des individus qui ont des consciences personnelles très fortes, il peut y avoir des entreprises aussi qui ont des consciences sociales très fortes. Donc, la RAM, la Royal Air Maroc, qui est le transporteur officiel, enfin le grand transporteur marocain, malgré les pertes que cela signifiait pour elle, cette compagnie, a décidé d'honorer chacun des billets qui a été émis.

Et puis tout ça, M. le Président, a commencé à bouillonner. Et je dois vous dire que je suis quand même relativement bien placé pour voir qu'est-ce qui se passe et qu'est-ce qui s'est passé. Oui, je vous l'ai dit, les grandes agences de voyages sont dans ma circonscription. L'Office de la protection des consommateurs est situé, vous le savez... relève du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Donc, je suis au fait de ce qui se passe. Donc, j'ai lu les dossiers, rencontré les gens, échangé avec eux, et il devenait évident qu'il nous fallait protéger les consommateurs. Et il fallait les protéger. Donc, il fallait également répondre aux demandes de l'industrie du voyage.

Pour consolider cette protection, il était mais plus qu'impératif qu'un projet de loi soit présenté de façon à corriger le plus rapidement possible la situation. Et, afin de consolider cette protection des consommateurs dont je vous parlais et de répondre aux demandes de l'industrie du voyage, il devenait, comme je vous disais, impératif qu'un projet de loi modifiant la Loi sur les agents de voyages soit déposé ici, à notre Assemblée nationale, M. le Président.

Afin d'améliorer les moyens de contrôle, d'une part, du président de l'Office de la protection du consommateur vis-à-vis, entre autres, la délivrance des permis, donc, avec le projet de loi que nous apportons, ce dernier pourra refuser d'émettre un permis si, par exemple, l'agence de voyages ne peut assurer, dans l'intérêt public, l'exercice honnête et compétent des opérations d'agent de voyages.

Et il est faux de prétendre que nous vivons dans un système où le capitalisme est devenu aussi bête et méchant qu'on ne pense qu'à prendre la piastre. Au contraire, l'Association professionnelle des agents de voyages ? c'est quand même un organisme sérieux et qui souhaite la meilleure des éthiques à l'intérieur de cette industrie, industrie, je vous le répète, importante ? a accueilli très favorablement, très favorablement le projet de loi que mon collègue ministre d'État à la Population et aux Régions et député d'Abitibi... de Rouyn-Noranda-Témiscamingue a déposé. Et, d'ailleurs, j'ai devant moi, ici, un extrait... La vice-présidente de l'Association professionnelle des agents de voyages ? comment s'appelle-t-elle donc? ? oui, c'est ça, Mme Catherine Béri, j'oubliais son prénom, qui est la porte-parole de cette Association dans le dossier, là, qui est là-dedans, rappelait que l'Association était associée au projet de loi depuis le printemps.

Alors, quand j'entends l'opposition dire: Ah, mais il n'y a pas de consultations, il n'y aura pas d'audiences publiques, il n'y aura pas ci, il n'y aura pas ça, bien il est faux de prétendre, M. le Président, que cela s'est fait en vase clos, que cela s'est fait en catimini. Je veux dire, tous ceux et celles qui, par la présente, pouvaient être concernés ont été consultés. Il y a eu une cueillette de données à savoir: c'est quoi la difficulté dans le cas x; c'est quoi le grand problème dans le cas y; et, si par hypothèse nous allions dans telle direction, quels seraient les effets. Alors, y aurait-il des effets restructurants, oui, non? Est-ce qu'il y aurait à ce moment-là des effets qui seraient ce qu'on appelle des effets pervers? La réponse était, à vue, non.

n(17 h 40)n

Mais, si cela arrivait, parce que la perfection n'est pas de ce monde... Personne ici, dans cette Assemblée, j'ose espérer, croit que nous allons voter la loi parfaite. Nous voulons voter les meilleures lois, mais il peut arriver, à un moment donné, qu'il y a un petit coin, là, qui était tellement nébuleux et qui a échappé à tout le monde. Et puis ça arriver régulièrement. Ça n'arrive pas juste, uniquement ici, ça arrive partout à travers le monde, et vous n'avez pas plus de drames que ça. Mais ils savent très bien que nous pourrions corriger tout petit effet pervers qui surviendrait avec simplement des aménagements au niveau de la réglementation. On pourrait le faire comme tel.

Le ministère du Tourisme aussi a été consulté, M. le Président. Tourisme Québec dit: C'est très bien. Le ministère des Finances a été consulté. Mais, finalement, si je fais la liste de tous les organismes, de tous les intervenants à qui nous en avons parlé et avec qui nous avons échangé, et sur des choses très concrètes, là, pas uniquement un petit tour de piste comme ci, comme ça, mais vraiment très à fond en se disant: Il nous faudra légiférer de façon à assurer une meilleure protection du consommateur, une meilleure protection de celui ou celle qui a l'intention de voyager, une meilleure protection aussi de la réputation de ce qu'être un agent de voyages et d'avoir une agence de voyages... Si ça avait été juste effleuré, peut-être. Mais non, mais non, je vous le dis avec la plus grande des sincérités et beaucoup, même, de candeur s'il le faut, jamais, moi, je n'ai vu autant d'intervenants être consultés, et de toutes les façons: rencontres, coups de téléphone, contre-vérifications, «ça va?», «ça ne va pas?», etc.

Si l'opposition juge qu'elle a un point de vue intéressant à faire valoir ? je ne veux pas présumer que l'opposition n'a pas de point de vue intéressant à faire valoir sur le sujet, M. le Président, mais la loi va quand même être étudiée en commission parlementaire, article par article, comme le veut notre procédure parlementaire ? il est loisible à l'opposition, notamment à son porte-parole le député de D'Arcy-McGee, de faire valoir son point de vue, de faire valoir son point de vue. Mais, si le député de D'Arcy-McGee est bien attaché à son dossier, ce dont je ne doute pas là non plus aussi, il a pris contact avec les intervenants dont je vous parle, il a pris contact avec l'Association professionnelle des agents de voyages, a sans doute eu des contacts avec de gros transporteurs aériens, a sans doute eu des contacts avec des gens peut-être financièrement moins gros, moins importants, si on peut employer le terme, mais qui sont quand même dans le domaine, et il les a sans aucun doute consultés. Et qu'est-ce que ces gens-là lui ont dit? Ces gens-là lui auront sûrement dit: Bien, écoutez, oui, nous sommes d'accord avec le projet de loi qui est là; le projet de loi qui est là nous semble bon; le projet de loi, il est très bien.

Et pourquoi reprendre, mais juste pour le plaisir de reprendre, ce qui a été fait et qui a été bien fait, comme je vous dis, avec l'ensemble des intervenants? Je n'ai jamais nié dans ce Parlement qu'il était bon... Et Dieu seul sait que j'ai vécu des commissions parlementaires où on est allé jusqu'à recevoir au-delà de 250 groupes. J'ai fait des commissions où on a battu tous les records, je crois, de ce Parlement: 275 interventions, donc pratiquement autant de mémoires à lire aussi, à la limite de l'overdose, M. le Président, vous vous souvenez, d'ailleurs vous y étiez autant que moi. Je n'ai jamais nié l'importance de recevoir, de recueillir l'opinion des gens qui sont dans le domaine comme tel ou d'autres qui, sans y être tout à fait, ont quand même un intérêt, un intérêt personnel, et qui souhaitent émettre une opinion, une opinion qui est structurée et qui est, encore là, très intelligente à recevoir. Je n'ai jamais nié cela.

Mais, sur le sujet dont je vous parle maintenant, il est... hors de tout doute, c'est la plus grande des évidences qu'ils ont été consultés, ils ont eu leur mot à dire. Et, si ce n'était m'aventurer dans un terme qu'on emploie rarement, moi, je dirais que c'était presque de la coécriture tellement, tellement nous voulions... Et mon collègue beaucoup plus, parce que c'est lui qui l'a piloté dans la très large mesure. J'ai été, au tout début, impliqué, dans les premiers temps, et après mon collègue a pris la relève. Mais c'est presque de la coécriture tellement le contact était direct avec celles et ceux qui, je vous le dis, par ce projet de loi, le projet de loi n° 135, sont concernés.

Alors, M. le Président, moi, je dis que cette industrie où malheureusement trop de gens ont été lésés, cette industrie qui est importante au Québec et qui est reliée à cette grande industrie qui est la première dans le PIB de tous les pays du monde, probablement à l'exception de la Corée du Nord, qui est le tourisme, elle aussi est extrêmement importante économiquement. Elle a un rôle majeur à jouer dans tous les pays, et on n'y échappe pas, heureusement. Et puis pourquoi ne pas profiter d'ailleurs de l'occasion pour dire que c'est tellement important et c'est tellement beau... Notre capitale nationale, Québec, dans le magazine Neslé, vient de remporter la palme, la troisième ville la plus attirante, la sixième, pardon, ou cinquième ? en tout cas, c'est dans le top 10, bon, pour employer l'expression ? plus attirante de l'Amérique du Nord, non, du monde, je crois, parce que ça bat... On est en avant de Paris, Bangkok, je crois, ou Bangkok a encore une petite longueur d'avance, mais je peux vous dire qu'on se classe fichument bien. Donc, c'est tout à l'honneur de la capitale, de cette belle ville qu'on appelle d'ailleurs affectueusement la Vieille Capitale. Alors, c'est tout à notre honneur, et je pense que ça doit rendre très fiers l'ensemble des Québécois et des Québécoises, surtout celles et ceux qui ont le bonheur d'y vivre, dans cette belle ville.

Donc, c'est très important, et je pense qu'il faut, il faut, il faut le faire, il faut voter cette loi le plus rapidement possible, parce que le projet de loi va augmenter, il va augmenter les pouvoirs de surveillance des opérations des agents de voyages par l'Office. L'Office aura beaucoup plus de pouvoirs maintenant, moins de laxisme. Il y a d'introduit un recours civil à l'encontre des personnes qui agissent sans permis ? c'est là aussi qu'était le danger. Il augmente le montant des amendes ? ça a un effet incitatif. Il permet l'adoption de nouvelles règles relatives à la constitution d'un fonds à des fins d'indemnisation des clients des agences de voyages, parce que le pouvoir réglementaire du gouvernement est changé par des modifications. Et il accorde un pouvoir d'emprunt auprès du ministre des Finances en cas malheureusement d'insuffisance de fonds, si, par malheur, la chose devait arriver.

n(17 h 50)n

Donc, je me tournerai vers le porte-parole de l'opposition en lui disant très amicalement: M. le député de D'Arcy-McGee, cette loi, en commission parlementaire, venez, venez, et ça, je sais que vous y viendrez de toute façon, et, vous verrez, les réponses à vos interrogations seront là et vous aurez la preuve par quatre que celles et ceux qui sont concernés par ça ont bien été consultés, ils sont d'accord. Et, moi, je sais fort bien que mon collègue accueillera toujours avec beaucoup de sympathie les remarques habituellement constructives que vous apportez quand vous abordez des dossiers qui sont de votre compétence. Je vous remercie, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres interventions sur le projet de loi? Puisqu'il n'y a pas d'autres interventions à cette étape-ci, est-ce que le principe du projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages et la Loi sur la protection du consommateur, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'éducation

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux. Ah oui, c'est vrai! Excusez. M. le Président, oui, avant de... Il ne faut pas précipiter les étapes. Alors, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'éducation et pour que le ministre d'État à la Population, aux Régions et aux Affaires autochtones en soit membre.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Oui. Alors là on arrive réellement à cette motion. Alors, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au mercredi 20 novembre 2002, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Mme la leader adjointe du gouvernement, je dois vous rappeler que nous ne pouvons pas ajourner à demain, puisque nous avons reçu deux demandes de débat de fin de séance. Alors, par conséquent, compte tenu de l'heure, je suspends nos travaux jusqu'à 18 heures pour permettre à nos collègues de venir se joindre à nous. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Mulcair: Oui. Question de règlement, M. le Président. La leader adjointe du gouvernement aurait souhaité ajourner. Vous avez, bien sûr, raison de dire qu'elle ne peut pas le faire parce qu'il y a des débats de fin de séance. Maintenant, il reste du temps de débat. Il y a des ministres, comme le ministre du Revenu, avec qui on aurait pu débattre de choses. Le temps de cette Chambre est payé par les payeurs de taxes. On est là pour s'occuper de la chose publique. Est-ce qu'on doit constater encore une fois le néant devant nous, que le gouvernement n'est même pas prêt à appeler un projet de loi important dans l'intérêt du public, comme celui dans le domaine du revenu, préparé à l'aide de ma collègue la députée de Beauce-Sud, qui va restaurer des droits aux contribuables? Est-ce que c'est vrai qu'on va encore suspendre nos travaux parce que le gouvernement n'a rien à dire, n'a rien à proposer, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Beaulne): M. le leader adjoint de l'opposition... Oui, M. le ministre.

M. Boulerice: Il est manifeste, M. le Président ? ce n'est pas à vous que je vais apprendre le règlement, vous le maîtrisez beaucoup mieux que moi ? que le leader adjoint du gouvernement, actuellement, est en train d'imputer des motifs aux parlementaires membres de la majorité. Alors, rappelez-le à l'ordre, un point, c'est tout.

Deuxièmement, s'il a le souci des contribuables, ce qu'il appelle des payeurs de taxes ? ce qui est un anglicisme ? nous l'avons, puisque, dans leurs transactions au niveau de leurs déplacements, nous voulons adopter une loi dont nous venons de discuter, et ils l'adoptent sur division. Je veux dire, brillant, comme logique!

Le Vice-Président (M. Beaulne): Bon. Mais, M. le leader adjoint de l'opposition...

M. Mulcair: Article 202...

Le Vice-Président (M. Beaulne): Oui, M. le leader adjoint.

M. Mulcair: ...propos mal compris ou déformés. Je tiens à rassurer mon collègue le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques que, loin de nous l'idée d'imputer des motifs, c'est tout le contraire. On aimerait bien connaître les motifs du gouvernement, on aimerait bien les entendre parler sur les projets de loi, de faire le travail pour lequel ils sont payés. Puis je lui donne raison, le mot «payeur de taxes» est effectivement un anglicisme, le mot «contribuable» sied mieux. Mais vous savez quoi? Je pense que le monde qui nous écoute comprend mieux le terme «payeur de taxes». Ils se disent: C'est avec mes taxes qu'ils sont payés, puis ils ne veulent même pas travailler. La semaine dernière, ils ont tiré la plug pendant une semaine pour faire leur Rendez-vous des régions, c'est encore la même chose aujourd'hui.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Là, là, bon, M. le leader de l'opposition, je pense que vous êtes en train de faire un débat ici qui est hors d'ordre. Je vous rappellerai et je rappellerai d'ailleurs à tous les collègues en cette salle qu'il m'est arrivé personnellement de présider bon nombre de ces sessions, de ces séances où nous avons suspendu nos travaux bien avant l'heure fixée pour permettre aux collègues d'arriver dans cette salle et participer aux débats restreints. Alors, je crois qu'il est malséant, de part et d'autre, d'imputer des intentions à qui que ce soit; ça fait partie de nos règlements.

Et, comme président de cette session, je suspends nos travaux jusqu'à 18 heures pour permettre à nos collègues qui vont participer aux débats de fin de séance de se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 17 h 55)

 

(Reprise à 18 h 4)

Débats de fin de séance

Remboursement du coût d'une prothèse
auditive facilitant l'intégration au travail
d'un employé d'Emploi-Québec

Le Vice-Président (M. Beaulne): Bien. Nous allons maintenant passer aux débats de fin de séance. Nous avons reçu à la présidence deux demandes qui ont été apportées à notre attention, la première s'adressant au ministre délégué à l'Emploi, concernant les difficultés rencontrées par un travailleur qui désire obtenir une prothèse auditive qui lui permettrait de travailler.

Je vous rappelle que le proposeur du débat a cinq minutes d'intervention; le ministre responsable, cinq minutes; et, Mme la députée, vous aurez un droit de réplique de deux minutes.

Alors, si vous voulez, vous avez la parole.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault: Merci, M. le Président. M. le Président, je posais une question à la ministre de l'Emploi concernant le paiement d'une prothèse auditive numérique. Comme à son habitude, le gouvernement a préféré faire la sourde oreille. Je trouve particulièrement aberrante cette situation.

M. Girard travaille pour le Service régional d'interprétation de l'Est du Québec. Comme agent d'administration, ses tâches de communication consistent principalement à effectuer le suivi auprès des clients, soit de personne à personne ou encore au téléphone. Il effectue la réception des appels de la clientèle et il prend des commandes. Une incompréhension, si petite soit-elle, entraîne des erreurs. Je vais vous donner des exemples, M. le Président: une commande erronée, un mauvais chiffre, un mauvais montant de chèque, un problème d'interprétation des directives de son patron ? imaginez ce qu'il peut, lui, décider de faire à ce moment-là ? placer un appel à la mauvaise personne lorsqu'on s'adresse à une autre personne. C'est sa réalité, c'est la réalité de M. Girard. Imaginez un environnement de travail où le moindre bruit peut créer une interférence et faire toute la différence au monde entre une journée productive et une journée qu'on aurait bien pu se passer.

M. Girard bénéficie du programme Contrat d'intégration au travail qui s'adresse aux personnes handicapées ou ayant une limitation physique. Dans le cadre de ce même programme, Emploi-Québec a consenti à défrayer certains coûts liés à l'adaptation de son poste de travail, sauf cette fameuse prothèse auditive numérique. Pourtant, dans un rapport d'évaluation produit par l'Institut de réadaptation en déficience physique du Québec, l'audiologiste recommandait fortement une prothèse numérique et non pas une prothèse analogique. Et pourquoi, pensez-vous, M. le Président? Parce que la prothèse analogique capte et amplifie tous les bruits et toutes les voix environnantes, tandis qu'une prothèse numérique discrimine la voix des autres bruits environnants. Ça fait toute une différence quand on a besoin d'un outil comme ça pour travailler, M. le Président. Vous comprendrez donc qu'avec la prothèse numérique M. Girard est plus efficace et plus performant à son travail.

La protectrice du citoyen invitait dans son dernier rapport les ministères à plus de souplesse dans l'application des normes. On voit que vous avez très bien entendu et reçu leur message. Lorsque le programme dont bénéficie M. Girard était géré par l'Office des personnes handicapées du Québec, il y a eu deux précédents concernant l'octroi de prothèses numériques pour intégrer ou maintenir une personne en emploi, M. le Président. Nous avons encore une fois un bel exemple du deux-poids-deux-mesures que le gouvernement du Parti québécois nous démontre.

Je fais appel au bon sens de la ministre afin que M. Girard puisse enfin recevoir sa prothèse numérique. Je trouve bien particulier que la raison invoquée pour le non-paiement de cette prothèse numérique soit le fait qu'elle pourrait servir à l'extérieur de ses heures de travail, comme si on était sourd seulement de 9 heures à 5 heures, M. le Président. On a pensé ici à l'utilisation que M. Girard pourrait faire de la prothèse et on ne s'est même pas attardé une minute à l'aide que cela pouvait lui apporter pour accomplir son travail de façon adéquate.

M. le Président, M. Girard ne peut même pas aller suivre des cours de formation. Imaginez ce qu'il entend. C'est totalement, pour lui, impossible d'aller suivre un cours de formation. Participer à une réunion de groupe avec ses collègues de travail, c'est totalement impensable qu'il pense s'asseoir à cette table-là sans avoir la prothèse dont on a mentionné plus tôt.

Pensez à tous les petits gestes de notre quotidien qui sont reliés à l'usage de l'ouïe. Pour nous, ça va, mais, pour M. Girard et les autres Québécois et les autres Québécoises qui sont aux prises avec des problèmes auditifs et qui veulent intégrer le marché du travail ou encore se maintenir en emploi, qu'en est-il, M. le Président? Qu'est-ce que la ministre pense de cette situation-là? Ce n'est pas une faveur que je demande pour M. Girard, car il est écrit clairement, noir sur blanc, qu'il souffre d'une surdité bilatérale de type mixte à caractère évolutif.

M. le Président, j'aimerais savoir: est-ce que la ministre... va-t-elle enfin consentir à aider M. Girard? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée d'Anjou. M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. J'aimerais tout d'abord rassurer notre collègue la députée d'Anjou. Effectivement, notre gouvernement est sensible à l'expression de ce genre de besoin. À preuve, Emploi-Québec s'implique dans de tels cas, par exemple, comme ma collègue nous en faisait part cet après-midi, par le paiement pour l'adaptation des postes de travail, par une compensation de 40 % du salaire de l'employé dans le cadre du programme Contrat à l'intégration au travail. Donc, notre collègue interpelle Mme la ministre alors qu'au niveau d'Emploi-Québec, là, ils ont fait leur bout de chemin.

n(18 h 10)n

Et, en ce qui regarde les prothèses auditives, nous sommes devant simplement la situation suivante: ce programme d'aides auditives est administré par la RAMQ, et le genre de prothèses auditives qui sont prévues au programme et donc défrayées complètement, donc gratuitement pour le client, sont des aides auditives non pas numériques, mais analogiques. Et ceci, ça ne résulte pas d'un hasard, ça résulte simplement du fait que le ministère de la Santé et des Services sociaux, à plusieurs reprises et encore tout récemment au cours de 2001, a procédé à un certain nombre d'expertises, a consulté différents experts de même que l'Agence d'évaluation des technologies et modes d'intervention en santé pour savoir justement si les prothèses auditives numériques étaient meilleures, avaient des propriétés qui n'étaient pas couvertes puis qui ne seraient pas couvertes par les prothèses auditives analogiques actuellement couvertes par la RAMQ.

Alors, les avis qu'on a reçus sont unanimes. Quand on rend disponibles de tels dispositifs, on doit s'assurer effectivement, au meilleur coût possible, d'avoir le meilleur dispositif possible. Or, tous les avis que nous avons eus jusqu'à présent sont à l'effet que les prothèses auditives analogiques fournissent un rendement équivalent à celui des prothèses auditives numériques. Et, bien sûr, il peut y avoir des problèmes d'ajustement, mais l'assurance qu'on nous donne, c'est que, lorsqu'elles sont bien ajustées, ces prothèses auditives analogiques donc toujours offertes gratuitement par la Régie de l'assurance maladie aux personnes sourdes et malentendantes admissibles au programme arrivent à corriger aussi bien que les prothèses programmables les problèmes de compréhension de la parole. Donc, si ce sont ces dispositifs qui sont couverts et fournis gratuitement, c'est que, selon tous les experts, tous les avis que nous avons eus, de tels dispositifs permettent de répondre aux besoins, quitte à, effectivement, ce qu'on procède à certains ajustements.

Je vous informe, M. le Président, que nous procédons quand même régulièrement à des vérifications, par exemple des expérimentations scientifiques, sur l'appareillage auditif et, notamment, numérique et que je suis bien prêt à consentir à ce qu'on revérifie encore une fois la performance de ces appareils. Et, si tant est qu'il se révélait prouvé scientifiquement que de tels dispositifs ? on parle à ce moment-là des appareils auditifs numériques ? comportent, dans certains cas, des avantages comme ceux qui sont évoqués par notre collègue la députée d'Anjou, on pourrait toujours envisager la possibilité d'ajuster les choses. Mais, à ce moment-ci, nous n'avons pas de telles informations.

Une remarque en terminant ? je n'en tiens pas grief à notre collègue députée d'Anjou ? j'espère qu'en accusant d'une certaine façon notre collègue de faire la sourde oreille on ne fait pas là des jeux de mots douteux dans les circonstances, mais on est devant un cas d'une personne qui manifestement souhaiterait avoir des dispositifs numériques. C'est impossible dans le contexte que j'expliquais tout à l'heure, mais j'espère qu'on ne tombera pas dans ce genre d'expression pour le moins étrange dans les circonstances. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Mme la députée, vous avez deux minutes de droit de réplique.

Mme Lise Thériault (réplique)

Mme Thériault: Merci, M. le Président. Pour sécuriser le ministre, non, effectivement, je ne fais pas de jeu de mots. Je trouve bien malheureux qu'il ait soulevé cette phrase-là, sauf que, évidemment, le gouvernement, très souvent, n'écoute pas ce qu'on lui demande; il fait très souvent la sourde oreille.

Donc, moi, ce que je me demande, c'est si le ministre va finalement faire quelque chose ou pas. Est-ce qu'il va entendre la voix de ce citoyen-là ou s'il va attendre que les citoyens lui expriment leur mécontentement face au genre d'État tentaculaire et aveugle que prône le gouvernement péquiste? Le ministre, il ne doit pas oublier qu'il est d'abord et avant tout un député, un député qui a été élu par les citoyens comme M. Girard. Il se doit d'être tout comme moi un député à l'écoute des besoins des citoyens et des citoyennes, M. le Président. Je trouve l'attitude du ministre totalement inhumaine et je fais appel à sa sensibilité. Est-ce que le ministre est au service de ses fonctionnaires ou de ses citoyens? On peut se poser réellement cette question-là, M. le Président.

Quant à nous, au Parti libéral du Québec, quand, nous, nous parlons de placer le citoyen au coeur de nos préoccupations, ce n'est pas des paroles qui sont vides de sens, ça, M. le Président. Nous ne voulons plus de ce genre d'aberration technocratique et bureaucratique face au citoyen.

Voici un exemple afin d'illustrer la situation de M. Girard, M. le Président. Pendant la période de questions, nous avons tous un petit écouteur qui nous permet d'entendre les questions et les réponses de nos collègues. Et je ne pense pas que nous ayons des problèmes de surdité, mais plutôt que les bruits environnants interfèrent et nous empêchent d'entendre clairement ce qui se dit dans cette Chambre, M. le Président. Alors, imaginez M. Girard qui a besoin d'aide et qui se heurte au refus du ministre. Faites donc preuve pour une fois d'un peu de coeur dans vos décisions, et je suis sûre que M. Girard se plierait volontiers à essayer les deux types de prothèse. Merci, M. le Président.

Réglementation en matière d'importation
et de traitement de matières dangereuses

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée. Nous allons maintenant passer au deuxième débat de fin de séance, qui a été inscrit par le député d'Orford et qui s'adresse au ministre délégué à l'Environnement concernant les déchets toxiques en provenance des États-Unis. M. le député.

M. Robert Benoit

M. Benoit: M. le Président, merci. D'abord, M. le Président, nous avons posé une question au ministre à la période de questions. C'est la deuxième fois que nous posons des questions, et nous devions en poser une la dernière journée. Malheureusement, avant la session, la période de questions s'est terminée avant que nous la posions. Donc, nous mettons beaucoup d'importance sur ce sujet-là.

Le ministre nous a répondu aux deux questions... d'abord, il ne nous a pas répondu aux deux questions, bien sûr, nous disant que le Parti libéral n'avait pas de programme, etc., en environnement. Alors, je veux consoler le ministre, je veux lui dire: D'abord, lui, qu'il lise son propre document en environnement, là, je veux dire, il va avoir honte. D'abord, ce n'est pas un programme, c'est une rétrospective de ce qu'ils n'ont rien fait. Alors, on s'entend-u là-dessus, là? Il n'y a pas un mot sur les matières résiduelles. Finalement, il parle de Kyoto, vous savez pourquoi? Ça ferait une très belle petite chicane avec Ottawa, Kyoto, hein! C'est ça qu'on essaie de faire, là. Alors, si tout va bien, ils vont l'avoir, la petite chicane avec Ottawa. Alors, on parle beaucoup de Kyoto là-dedans, motion le 11 décembre, etc. On parle beaucoup de Kyoto puis, si on pouvait avoir une autre petite chicane avec Ottawa, ce serait bien le fun.

Mais, sur le fond des choses, ils n'en ont pas, de programme électoral en environnement, et nous, ce qu'on leur dit, on a un comité en environnement, et ce programme-là, il est écrit, il sera déposé au moment où nous déciderons que nous devons déposer ce programme-là. Alors, je dis au ministre, ne vous inquiétez pas, le Parti libéral a des convictions environnementales très fortes. La première loi au Québec qui fut écrite en environnement a été écrite sous Robert Bourassa en 1972. Et, vous savez, le mot «environnement» n'existait pas, on parlait de santé à l'époque. Alors, ça a été la première loi. Et on a des convictions très profondes.

M. le Président, je vais vous lire un texte ici... Ah oui, mais avant de lire ce texte-là, je veux d'abord dire qu'il y a des citoyens qui nous écoutent qui sont éveillés. Le débat qu'on fait ce soir, là, c'est parce qu'il y a un citoyen au Québec qui, à un moment donné, lui, il a lu ça à la Gazette officielle du Québec, à la page 6079. Il faut le faire, là. Un citoyen assis dans son salon, le soir, il prend ça et se met à lire ça. Puis, à un moment donné, il lit... je vais vous le lire textuellement pour nommer l'individu ensuite. Il lit textuellement: «Pour les citoyens, l'abrogation du recours à la procédure d'examen des impacts sur l'environnement ne leur permettra plus d'exprimer leur point de vue.» Puis là il regarde en haut puis il lit: «Projet de règlement sur l'importation des déchets toxiques.» Là, il relit ça deux, trois fois, il dit: Coudon, je comprends-tu bien? Moi, comme citoyen, ils vont pouvoir m'installer un incinérateur à côté de chez nous ou à côté de l'école et je ne pourrai plus dire ce que je pense?

Alors, le monsieur en question, il s'appelle André Bélisle, un bon citoyen qu'on connaît pas mal tous en cette Chambre et puis dans le milieu environnemental. Et puis il a appelé le journaliste Louis-Gilles Francoeur puis il a dit à M. Francoeur, qui est l'autorité des autorités dans le monde environnemental médiatique, et il a dit à Louis-Gilles: Écoute, regarde donc ça, j'ai-tu raison ou si je rêve? Alors, M. Francoeur, qui en a vu d'autres, qui enseigne à l'université, il y est allé de sa plus belle plume et a décrié d'une façon absolument incroyable ce qui se passait.

n(18 h 20)n

Maintenant, je veux vous montrer comment c'était... parce que, là, on s'est mis à fouiller, et tout ça, tout le monde, les groupes environnementaux que le ministre a rencontrés il y a quelques jours. Je vais vous lire ce que ces deux ministres-là, le ministre n° 1 puis le ministre... n° 4 et n° 5 ? parce que, pour les gens qui nous écoutent, on est rendu au cinquième ministre en sept ans ici ? je vais vous lire textuellement ce que ces gens-là, conjointement, solidairement, avaient signé au Conseil des ministres sur l'importation des matières dangereuses au Québec, ce qui fait dire d'ailleurs aux journalistes: «Le Québec confirme son titre de poubelle de l'est du continent.» Êtes-vous fier de ça, vous, M. le ministre, là? Une médaille en environnement: on est la poubelle de l'est du continent! C'est grand, l'est du continent, hein? Ça part de pas mal loin en bas de New York, ça, là.

Voici ce que ces deux ministres écrivaient à leur Conseil des ministres. Grâce à l'opposition, on a mis la main là-dessus, je vous le lis entre mille. Alors, les deux ministres disent: «Le processus de délivrance des permis oblige le gouvernement des États-Unis à informer la population sur les demandes de permis à l'étude ainsi que sur la décision rendue après.» Et les citoyens aux États-Unis ont le droit de demander des audiences. Au Québec, voici ce que ces deux ministres ont écrit au Conseil des ministres: «Par contre, il n'y a aucun mécanisme d'information et de consultation de la population pendant le processus de délivrance du permis visé.»

Alors, M. le Président, c'est bien clair, ces gens-là, ces gens-là savaient pertinemment ce qu'ils faisaient. Ils étaient après donner un avantage. Et, quand on veut savoir combien de compagnies veulent se prévaloir de ça, le mémoire dit sept, le règlement dit cinq puis, quand on téléphone au ministère, on a dit trois compagnies. Le ministre va nous parler, qu'il nous dise si c'est trois, quatre, cinq ou sept compagnies qui ont fait cette demande-là en ce moment.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. M. le ministre délégué à l'Environnement.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Oui. Alors, je vous remercie beaucoup, M. le Président. D'abord, je tiens également à remercier le critique de l'opposition officielle de m'interpeller ce soir sur ce sujet fort pertinent et très d'actualité.

Les gens qui nous écoutent s'imaginent parfois qu'il y a des rivalités très fortes entre les individus, parce qu'on est d'un côté ou de l'autre de la Chambre et qu'on n'est pas des mêmes formations politiques. Or, la réalité fait en sorte que généralement on noue parfois des liens d'amitié et on ne peut s'empêcher que d'avoir beaucoup d'estime pour certaines personnes. Et c'est le cas pour le député d'Orford que je sais un grand environnementaliste. Personne n'en doutera ici, en cette Chambre, et personne au Québec non plus n'en doute. Il a beaucoup de passion lorsqu'il parle de ce sujet et, Dieu merci, pour l'écologie et l'environnement.

Son malheur, M. le Président, c'est qu'il est dans une formation politique qui ne le suit pas et qui l'ignore dans l'amour qu'il a de son dossier. Et preuve en est... Parce qu'il a lui-même fait référence à la plateforme électorale du Parti libéral. Imaginez-vous donc que le Parti libéral, dans un grand effort de synthèse, a publié récemment son plan d'action du prochain gouvernement libéral, sur plusieurs pages. Il y avait bien de la place pour mettre en gros la photo du chef de l'opposition, mais il n'y en avait pas assez, ils n'en ont pas assez trouvé pour qu'il puisse parler d'environnement. Là-dedans, il n'y a pas un mot sur l'écologie, il n'y a pas un mot sur le développement durable, il n'y a pas un mot en matière environnementale.

Et là le député me dit: Aïe, mon Jean-François, un instant, va-t-en voir notre programme, notre fameux plan d'action de 47 pages. On en a, des idées sur l'environnement à partir de la page 24, tu vas voir ça. Alors, M. le Président, en gars studieux comme je suis, je suis allé voir ça. Je suis allé voir ça puis, malheureusement, page 24... Moi, je me disais, à partir de là, bon, quatre, cinq pages. Il n'y en a même pas eu quatre, pages; il n'y en a pas eu trois; il n'y en a pas eu deux; il n'y en a pas eu une. Il n'y avait même pas la moitié d'une page. Regardez, j'ai mis en jaune, en caractères jaunes, l'espace qu'occupe le discours environnemental au Parti libéral, c'est trois phrases. L'action du prochain gouvernement libéral en matière d'environnement, ça se résume à trois phrases.

Puis là, bien entendu, mal pris qu'il est, le député, qu'est-ce qu'il me répond tantôt, puis les gens l'ont tous entendu? Bien, on n'avait rien dans notre synthèse, on a rien que trois phrases dans notre programme, mais là on a réalisé... Évidemment, par l'absurde, on vous prouve qu'on n'a aucune idée en matière environnementale. Alors, on va refaire nos devoirs puis on va peut-être vous proposer quelque chose éventuellement, dans le courant du mois de janvier. Bien, je vais vous dire une affaire, j'ai bien hâte de voir ça, M. le Président. Je laisse la chance encore au coureur, là. Je suis de bonne foi là-dedans. Mais ce n'est rien... rien à voir avec l'extraordinaire action gouvernementale générée par le gouvernement du Québec depuis son arrivée au pouvoir, à la fin de 1994, et un gouvernement qui ne s'assoit pas sur ses lauriers, un gouvernement qui, encore, génère de nouvelles idées en matière environnementale.

J'aimerais vous rappeler que mon collègue le ministre d'État va déposer dans les jours qui viennent une première politique nationale de l'eau sans équivalent dans notre histoire politique et dans notre vie parlementaire, une politique nationale de l'eau qui va faire de l'eau un bien collectif, qui va, dans la foulée du Fonds national de l'eau dont nous avons annoncé la création en cette Chambre dernièrement, financer l'eau par les redevances que nous allons, à terme, prendre de ces compagnies industrielles qui utilisent de l'eau pour fins d'embouteillage, qu'elle soit de l'eau souterraine ou encore de l'eau de surface.

Donc, pour ne nommer que la politique nationale de l'eau, pour parler de notre extraordinaire politique sur la biodiversité, pour parler de l'accroissement que nous avons de nos espaces protégés, pour ne parler que du souci extraordinaire que nous avons concernant les espèces menacées, je pourrais en parler longuement, le temps file. Mais nous avons une action environnementale énergique. Et je tiens à dire qu'eu égard au règlement auquel faisait référence le député nous sommes présentement en période de consultation, et il y a lui-même fait référence.

Je me suis rendu à Montréal tout dernièrement, la semaine dernière, mercredi soir, si ma mémoire est fidèle. J'ai rencontré plusieurs groupes environnementaux qui avaient des choses pertinentes à m'expliquer sur le règlement que nous avons prépublié. J'ai reçu avec beaucoup d'intérêt leurs commentaires. Ils m'ont présenté l'historique de ce règlement, parce que ce règlement n'est pas arrivé spontanément, il s'inscrit dans une série de règlements et d'amendements. Ils m'ont présenté leur point de vue eu égard à la valorisation des matières énergétiques, et nous en tiendrons compte.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. M. le député d'Orford, vous avez deux minutes.

M. Robert Benoit (réplique)

M. Benoit: M. le Président, si on veut parler de programme, on va parler du programme de 1994, quand ils se sont fait élire. Écoutez bien ce que je vais vous lire ? le ministre est là, il va l'entendre ? à la page 46 de leur programme électoral, article 2.21: «Établir un moratoire sur la construction de tout nouvel incinérateur devant servir à l'élimination des déchets dangereux et biomédicaux.» Je vais vous le répéter parce que ça n'a quasiment pas d'allure avec ce qu'ensuite ils vont signer au Conseil des ministres: «Établir un moratoire sur la construction de tout nouvel incinérateur devant servir à l'élimination des déchets dangereux et biomédicaux.»

Qu'est-ce que c'est qu'on est après faire, M. le Président? On est après dire aux compagnies américaines: Sortez-les de vos états financiers, vos déchets; ça vous coûte trop cher; amenez-les au Québec. Ils ne sont plus dans vos états financiers, puis, nous autres, même si on n'en veut pas, de vos déchets, même si le PQ avait dit dans son programme électoral de 1994 qu'on n'en bâtirait pas, d'incinérateur, bien là, M. le Président, dans le document qu'ils ont déposé au Conseil des ministres, ce qu'on dit: «Par contre, il n'y a aucun mécanisme...» Ce n'est pas moi qui dis ça, là, c'est le ministre, les deux ministres conjointement qui disent ça: «Par contre, au Québec, il n'y a aucun mécanisme d'information et de consultation de la population pendant le processus de délivrance du permis visé à l'article 70.9.»

Pire que ça, quand on leur demande au téléphone combien de compagnies qui veulent en importer, on nous répond: Trois. Quand on l'appelle... quand on regarde son règlement, c'est quatre, cinq compagnies qu'on nous dit, et, dans le mémoire qu'ils ont présenté au Conseil des ministres, c'est sept, M. le Président. Il va en rentrer combien, de déchets toxiques au Québec dans des nouveaux incinérateurs qu'eux-mêmes disaient qu'ils défendraient la construction? Merci, M. le Président.

Ajournement

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Ceci termine nos débats de fin de séance d'aujourd'hui, et, sur ce, j'ajourne nos travaux au mercredi 20 novembre, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 29)

 


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