(Dix heures neuf minutes)
La Présidente: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
n
(10 h 10)
n
M. Boisclair: Bonjour, Mme la Présidente. Veuillez prendre en considération l'article a du feuilleton de ce jour.
Projet de loi n° 88
La Présidente: À l'article a du feuilleton, Mme la ministre des Finances présente le projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi sur les corporations religieuses.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Alors, merci, Mme la Présidente. Ce projet de loi modifie la Loi sur les corporations religieuses afin notamment de réviser les pouvoirs du visiteur et de lui permettre de déléguer ceux-ci.
De plus, ce projet de loi permet que les affaires d'une corporation ayant pour objets d'organiser, d'administrer et de maintenir une congrégation puissent être administrées par la personne exerçant la fonction de supérieur de sa congrégation.
Enfin, ce projet de loi permet à toute corporation constituée en vertu d'une loi spéciale ou d'une loi générale de continuer son existence en vertu de la Loi sur les corporations religieuses dans la mesure où ses objets ne dérogent pas à cette loi.
Mise aux voix
La Présidente: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.
Dépôt de documents
Au dépôt de documents, Mme la ministre d'État à la Solidarité sociale, et à la Famille, et à l'Enfance.
Entente d'échange de renseignements entre
le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale
et la Régie des rentes, modification à une entente
d'échange de renseignements entre le ministère
de l'Emploi et de la Solidarité sociale
et la Régie des rentes et avis de la CAI
Mme Goupil: Merci. Alors, Mme la Présidente, je dépose l'entente d'échange de renseignements entre le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et la Régie des rentes, ainsi qu'une modification à l'entente d'échange de renseignements entre le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et la Régie des rentes accompagnée de l'avis favorable de la Commission d'accès à l'information.
La Présidente: Ces documents sont déposés. Mme la ministre déléguée à l'Emploi.
Convention de performance
et d'imputabilité d'Emploi-Québec
Mme Maltais: Mme la Présidente, je dépose la convention de performance et d'imputabilité d'Emploi-Québec.
La Présidente: Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.
Réponse à une pétition
M. Boisclair: Oui. Mme la Présidente, je dépose la réponse à la pétition du 5 juin courant présentée par le député de Gaspé.
La Présidente: Ce document est déposé. Au dépôt de rapports de missions, M. le député de Champlain et président de la délégation de l'Assemblée nationale pour la coopération interparlementaire.
Rapport des activités de la Délégation
de l'Assemblée nationale
pour la coopération interparlementaire
M. Beaumier: Oui. Mme la Présidente, j'ai l'honneur de déposer le rapport des activités de la Délégation de l'Assemblée nationale pour la coopération interparlementaire pour l'année 2001-2002.
La Présidente: Le rapport est déposé. M. le député de Masson et vice-président de la section du Québec de l'Association parlementaire Ontario-Québec.
Rapport des activités de la section du Québec
de l'Association parlementaire Ontario-Québec
M. Labbé: Merci, Mme la Présidente. J'ai l'honneur de déposer le rapport des activités de la section du Québec de l'Association parlementaire Ontario-Québec pour l'année 2001-2002.
Dépôt de rapports de commissions
La Présidente: Le rapport est déposé. Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des institutions et député de Bellechasse.
Étude détaillée du projet de loi n° 86
M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. C'est devenu une tradition. Je dépose le rapport de la commission des institutions qui a siégé le 6 juin 2002 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 86, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, la Loi sur les cours municipales et d'autres dispositions législatives. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.
La Présidente: Le rapport est déposé. M. le président de la commission de la culture et député de Champlain.
Consultations particulières
sur le projet de loi n° 104
M. Beaumier: Mme la Présidente, je dépose le rapport de la commission de la culture qui, les 15, 16 et 23 mai 2002, a tenu des audiences publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 104, Loi modifiant la Charte de la langue.
Étude détaillée du projet de loi n° 104
Et également, Mme la Présidente, dans le suivi des choses, je dépose le rapport de la commission de la culture qui a siégé les 31 mai, 4 et 6 juin 2002 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 104, Loi modifiant la Charte de la langue française. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.
Dépôt de pétitions
La Présidente: Les rapports sont déposés. Au dépôt de pétitions, M. le député de Richmond.
Reconnaître le statut d'attaché d'administration
à deux employées de Développement des ressources
humaines Canada transférées au ministère
de l'Emploi et de la Solidarité sociale
M. Vallières: Mme la Présidente, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec par deux pétitionnaires, résidentes de Victoriaville, dans le comté d'Arthabaska, et employées du gouvernement du Québec.
«Les faits invoqués sont les suivants:
«Attendu que, lors du transfert fédéral-provincial de la main-d'oeuvre ayant eu lieu le 1er avril 1998, le statut de conseiller en emploi que nous occupions à Développement des ressources humaines Canada avant le transfert équivalait à celui d'attaché d'administration au provincial, que ce statut de niveau professionnel ne nous a pas été reconnu comme il devait l'être suite au transfert au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, que le Comité paritaire a pris une décision sans égard aux informations qu'il avait en main quant au travail que nous exécutions, ce qui a eu pour conséquence une mauvaise classification de notre poste et que nous n'avons pas été intégrées, tel que convenu par l'Entente Canada-Québec, dans un emploi identique à celui occupé au fédéral;
«Attendu que le Protecteur du citoyen nous informait, le 26 mars 1999, ne pouvoir intervenir dans le cadre de relations de travail;
«Attendu qu'une réunion patronale-syndicale, soit le Comité ministériel de relations professionnelles, unité professionnels, tenue le 29 avril 1999, précisait, par la partie patronale, que les décisions du Comité paritaire d'évaluation des emplois des ex-employés fédéraux "sont finales et qu'il n'y aura pas de révision, à moins qu'il y ait vraiment des éléments nouveaux à considérer, qui n'apparaissaient pas au dossier lors des travaux du Comité";
«Attendu que le comité directeur des ressources humaines du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale nous informait, le 28 mai 1999, avoir acheminé une requête spéciale au président du Comité, considérant notre situation particulière, mais n'a pu y donner suite, après plusieurs avis juridiques, puisque aucune instance n'avait été prévue pour revoir des cas comme le nôtre;
«Attendu que l'appel que nous avons logé le 18 juin 1999 à la Commission de la fonction publique en vertu de l'article 33 n'a pu être entendu car on y disait que notre syndicat devait nous représenter via la procédure de règlement des griefs prévue à la convention collective;
«Attendu que le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec s'est désisté du traitement de notre grief le 21 janvier 2001;
«Attendu que la Commission de la fonction publique a décliné, le 21 janvier 2001, notre demande d'enquête sur le processus de détermination de notre classification, demande d'enquête que nous avions présentée le 21 décembre 1999;
«Attendu que toutes les instances que nous avons contactées reconnaissent que nous avons été lésées, mais qu'aucune instance n'a la juridiction pour corriger le statut qui nous a été attribué et qui ne correspond pas au travail réellement exécuté au fédéral;
«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:
«En conséquence, nous demandons à l'Assemblée nationale du Québec de bien vouloir corriger cette injustice et de nous reconnaître, comme tous s'accordent à le dire, en conformité avec les preuves fournies, le statut d'employé de niveau professionnel, soit attaché d'administration, et ce, en date du transfert, soit le 1er avril 1998.» Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.
La Présidente: Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Saint-Jean.
Allouer les fonds nécessaires
à l'agrandissement de l'école des Prés-Verts,
à Saint-Jean-sur-Richelieu
M. Paquin: Mme la Présidente, je dépose l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 848 pétitionnaires, citoyennes et citoyens de la région de Saint-Jean.
«Les faits invoqués sont les suivants:
«Considérant que l'école des Prés-Verts, située dans le secteur Saint-Luc de Saint-Jean-sur-Richelieu, est celle qui voit le plus grand nombre de ses élèves transférés vers une autre école parmi celles de la commission scolaire des Hautes-Rivières;
«Considérant que cette situation dure depuis plusieurs années;
«Considérant que nos enfants subissent les inconvénients et perturbations liés à cette situation année après année, c'est-à-dire changement de milieu social et scolaire, changement de matériel didactique, changement des règles et des consignes;
«Considérant que, tel que rapporté dans le journal Le Canada Français du 14 mai dernier, environ 135 parents se sont rendus à la rencontre des commissaires de la commission le 13 mai dernier afin de réclamer cet agrandissement et que tous les commissaires de la commission scolaire des Hautes-Rivières ont approuvé unanimement une résolution pour demander au gouvernement du Québec de fournir les fonds nécessaires à un agrandissement comprenant l'ajout de trois classes;
«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec de donner suite à cette demande et d'approuver les fonds nécessaires à l'agrandissement de l'école afin qu'il soit effectué le plus tôt possible, c'est-à-dire à temps pour la rentrée des classes de l'année 2002-2003, et, si cela s'avérait impossible, que l'agrandissement requis le soit pour septembre 2003 au plus tard.» Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.
La Présidente: Cette pétition est déposée. Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.
Je vous avise que mardi, le 11 juin, après la période de questions et de réponses orales, M. le ministre délégué responsable de la région de la Capitale-Nationale répondra à une question posée le 4 juin dernier par M. le député de Limoilou concernant le Domaine Maizerets. M. le leader du gouvernement.
M. Boisclair: Oui. Mme la Présidente, compte tenu de l'agenda très chargé, je vous proposerais de reporter cette réponse différée à mardi prochain.
La Présidente: C'est ça. Alors, il y a donc consentement.
Motions sans préavis
Avant d'entreprendre la période de questions, je sollicite le consentement de l'Assemblée pour déroger aux articles 53 et 185 du règlement de l'Assemblée afin de procéder immédiatement à la rubrique des motions sans préavis et de permettre à M. le chef de l'opposition officielle de présenter une motion conjointe avec M. le premier ministre et M. le député de Rivière-du-Loup. Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le chef de l'opposition officielle.
Demander au gouvernement fédéral
de reconnaître et de corriger le déséquilibre
fiscal constaté dans le rapport Séguin
M. Charest: Merci, Mme la Présidente. On vous avait informée mardi dernier de l'intention de l'Assemblée, suite aux discussions qui ont eu lieu, de vous présenter la motion que j'ai l'honneur de vous lire et qui se lit de la façon suivante:
n(10 h 20)n«Que l'Assemblée nationale, principalement en vue d'améliorer les services de santé, d'éducation et de soutien à la famille, demande au gouvernement fédéral de reconnaître et de corriger le déséquilibre fiscal constaté par le rapport Séguin en tenant compte de ses recommandations qui dessinent un cadre nouveau pour les relations financières et fiscales au sein de la fédération canadienne, notamment afin que cessent ses interventions dans le champ des compétences des provinces.» Alors, je suis convaincu que le texte de cette motion fera l'unanimité de cette Assemblée, Mme la Présidente. Et, de consentement, je crois qu'on vous a informée que le premier ministre serait le premier à prendre la parole.
La Présidente: Je cède maintenant la parole à M. le premier ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: Mme la Présidente, notre système parlementaire, comme la plupart des systèmes démocratiques du monde, n'est pas basé sur le consensus. En général, les divers partis divergent d'opinions et l'expriment, et de ce choc des idées jaillit l'intérêt public. Dans des circonstances extrêmement graves, ce système contradictoire se transforme en système consensuel. Ça n'arrive pas souvent et c'est des jalons historiques, généralement, que tous les députés, toutes les députées de cette Chambre pensent la même chose et le disent par voie d'une motion formelle et commune. C'est ce qui arrive ce matin, ce qui veut dire que ceux et celles que la motion vise, à l'ouest de la rivière des Outaouais, doivent écouter attentivement ce qui se dit ici, en prendre acte, en tirer les conséquences et enfin agir. En effet, la société québécoise a connu et connaît des succès remarquables dans bien des domaines, spectaculaires dans bien d'autres, et en particulier au chapitre des performances de notre économie nationale, et ce, en dépit des handicaps que nous impose une mauvaise répartition des ressources.
La commission Séguin a démontré que nous sommes frustrés collectivement de 50 millions de dollars par semaine. Que ceux et celles qui demandent des montants beaucoup plus modestes pour leur CLSC, pour la dernière école du rang, pour des investissements au service des familles imaginent ce que nous pourrions faire avec 50 millions de dollars de plus par semaine. Mais il y a aussi un aspect macroéconomique à ça. C'est 50 milliards qui n'est pas dans notre économie, 50 milliards qui est retiré de notre économie, et, malgré ça...
Une voix: Millions.
M. Landry: Millions. 2,5 milliards par année. Et, depuis Robert Bourassa, bien, 50 milliards et plus. Et, justement, je ferai appel à la mémoire de Robert Bourassa, parce qu'il avait établi une image d'économiste et de gestionnaire économique assez puissant en se raccrochant à la création de 100 000 emplois sur 12 mois. Vous vous en souvenez, de ça? Et, vraiment, moi-même qui n'étais pas de son parti à l'époque, j'avais trouvé que c'était une performance quand même admirable. Mais l'économie du Québec, depuis le début de l'année 2002, a créé 120 000 emplois.
Des voix: Bravo!
M. Landry: Alors, 120 000 emplois, c'est deux fois plus que le nombre d'emplois créés dans tout le Canada.
Ce matin, nous sommes rentrés au travail. Notre travail, c'est précisément de débattre de cette motion historique. Jamais dans l'histoire du Québec autant d'hommes et de femmes n'étaient rentrés au travail, moyennant salaire, que ce matin. C'est ça, la création de la richesse. Et une des meilleures façons de répartir cette richesse, en plus des soutiens aux individus et aux familles, c'est la capacité de gagner sa vie. Cela constitue une introduction intéressante à notre débat, car c'est bien du modèle québécois dont il s'agit, le modèle québécois qui a besoin de ressources pour distribuer la richesse et établir une solidarité sociale exemplaire. Et ce modèle québécois, et c'est normal, est souvent attaqué, critiqué. Mais là le modèle québécois, là, de la concertation des agents socioéconomiques, de la jonction des efforts des entrepreneurs privés, publics, coopératifs et associatifs, il vient de donner la preuve flagrante de son efficacité supérieure.
Il fait beau relativement partout sur notre continent actuellement. Le climat économique du Canada, c'est le même que celui du Québec ou de la Nouvelle-Angleterre, et pourtant notre Québec a créé deux fois plus d'emplois que le reste du Canada. S'il ne s'agit pas là d'un modèle performant, Mme la Présidente, ceux et celles qui le prétendent ont un énorme fardeau de la preuve sur leurs épaules. Cent vingt mille emplois créés en quatre mois, ça demande beaucoup d'arguties et d'argumentation pointue et théorique pour combattre une réalité aussi fantastiquement éblouissante.
Des voix: Bravo!
M. Landry: C'est dans ce contexte, Mme la Présidente, que, il y a trois mois jour pour jour, M. Yves Séguin, ancien membre de cette Assemblée et ancien membre du Conseil des ministres, remettait au gouvernement le rapport de la Commission qu'il présidait sur le déséquilibre fiscal. Le 2 mai dernier, le gouvernement inscrivait au feuilleton une motion semblable à celle que nous discutons aujourd'hui. Diverses réflexions font qu'aujourd'hui la motion est conjointe. Il faut évidemment nous en réjouir profondément. Il tombe sous le sens que la question du déséquilibre fiscal qui existe actuellement au détriment du Québec et des autres provinces du Canada...
Le débat que nous avons ici, il pourrait se faire à Queen's Park, et peut-être qu'on entendrait à peu près les mêmes mots. C'est une donnée fondamentale des relations à l'intérieur du Canada, une donnée à laquelle nous sommes confrontés depuis plusieurs années. Je dis que le débat pourrait avoir lieu à Queen's Park, il pourrait avoir eu lieu il y a 15 ans, et le regretté Gérard D. Levesque aurait sans doute, de son siège, prononcé des paroles semblables à celles qui sont prononcées aujourd'hui, les quantités devant être ajustées et les chiffres devant être ajustés, mais la réalité du temps était déjà implacable et les mots employés par Gérard D. Levesque et par Robert Bourassa étaient déjà d'une sévérité extrême. C'est la raison pour laquelle l'un des premiers gestes que j'ai posés en tant que premier ministre, dans le discours inaugural du 22 mars 2001, a été de confier à une commission le soin d'analyser en profondeur toute la question du déséquilibre fiscal, de ses causes, de ses conséquences et des moyens que l'on pouvait envisager pour y mettre fin.
n(10 h 30)n Le dépôt du rapport de la commission a donné au Québec une analyse approfondie du phénomène ? on peut dire une analyse scientifique ? de même que l'identification des pistes de solution pour y remédier, et la commission Séguin a eu l'habileté d'embaucher comme sous-contractants des agents de recherche comme le Conference Board, qui sont plus à distance évidemment de la réalité purement québécoise, de façon à donner plus de qualité objective au rapport. Donc, on peut affirmer que ce qu'Yves Séguin et les hommes et les femmes qui ont travaillé avec lui affirment est vrai, est prouvé. La base de notre discussion de ce matin est d'une solidité à toute épreuve. C'est la raison pour laquelle j'ai fait allusion à la nécessité d'écouter, requise sur la rive ouest de la rivière des Outaouais. D'abord, une preuve scientifique irréfutable.
Je me souviens de quelqu'un qui, rendant un hommage extrême à un autre, disait: Pour se quereller avec X, il faut être de mauvaise foi, parce que X, c'était vraiment quelqu'un qui discutait avec pertinence et logique de tous les sujets.
Une voix: ...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry: Je parle de quelqu'un qui siège aujourd'hui dans un endroit où le chef de l'opposition a déjà siégé. Mais ce que je souhaite, c'est que le premier ministre du Canada écoute la phrase que je viens de prononcer et qu'il démontre sa bonne foi. C'est de ça qu'il s'agit.
On sait quelles ont été les réactions d'un certain nombre de membres du Conseil des ministres d'Ottawa quand la commission Séguin a rendu son rapport. Je ne veux pas employer de mots excessifs, mais c'était puéril. Après un an de travail de scientifiques sur une question, en un quart d'heure on les réfute de façon puérile. Ça ressemble à de la mauvaise foi aussi. Quand on veut donner une réplique en respectant l'interlocuteur, on examine d'abord la question. Et la question, c'est que nous sommes privés de 2,5 milliards de dollars par année. Chaque semaine, 50 millions de dollars des impôts et taxes payés par les Québécois prennent ainsi le chemin d'Ottawa plutôt que de servir à financer les services de base en matière de santé, d'éducation, soutien à la famille.
Pire encore, la commission Séguin a fait la démonstration que le déséquilibre fiscal s'aggraverait sensiblement au cours des prochaines années au profit du gouvernement fédéral. En d'autres termes, nous perdons déjà 50 millions de dollars par semaine, et ça va aller en s'aggravant. Au bout d'un mois de discussion, vous savez ce que ça a coûté; au bout d'un an de discussion, ça a coûté 2,5 milliards. Les implications sont claires.
Dans de telles circonstances, le Québec n'aurait donc le choix que de hausser les taxes, réduire les services en coupant dans les dépenses, à moins de renoncer à respecter la loi sur les équilibres budgétaires et de s'endetter de façon considérable. Au détriment de qui? Bien entendu, au détriment des jeunes générations. Alors là l'équation est claire, tous les segments de la société québécoise, comme tous les partis, la voient bien: si Ottawa n'entend pas raison, les avenues qui nous resteront sont de couper dans les dépenses, priver des gens des services, hausser les impôts ou endetter nos jeunes d'une façon irresponsable.
La commission Séguin a présenté des recommandations extrêmement pertinentes afin de corriger ce déséquilibre fiscal. Une des plus importantes est celle d'éliminer les transferts fédéraux à la pièce destinés à la santé et à l'éducation et de transférer au Québec et aux autres provinces un espace fiscal additionnel. Alors, le système actuel, là, c'est ça, c'est à la pièce. On permettrait ainsi au gouvernement des Québécois et des Québécoises de disposer de ressources financières dont il a besoin pour remplir ses obligations constitutionnelles, soit plus de 2 milliards de dollars à court terme.
Cette recommandation s'inscrit dans la foulée des demandes formulées par tous les premiers ministres du Québec. Depuis le pittoresque Rendez-nous notre butin de Maurice Duplessis ? expression vieillotte et dépassée peut-être mais pertinente à l'époque ? en passant par Jean Lesage, Daniel Johnson père, René Lévesque, Jacques Parizeau, Robert Bourassa, Lucien Bouchard, tous les premiers ministres ont abordé la question des arrangements financiers entre le gouvernement fédéral et les provinces avec la même position de principe, et cette position de principe n'est nulle autre que le respect du caractère fédéral de la Constitution canadienne.
Je ne suis pas fédéraliste, ma formation politique ne l'est pas non plus. Nous cherchons de façon démocratique à modifier ce système dans lequel nous ne croyons pas. Nous croyons que la nation québécoise doit avoir le statut des autres nations, quitte à faire toutes les ententes voulues, comme le font les nations modernes, mais en attendant nous respectons strictement la légalité et les lois, ce dont le gouvernement du Canada ne peut s'enorgueillir. Quand il a changé cette Constitution, en 1982, contre la volonté exprimée par cette Assemblée, il a violé des principes sacrés. Il a violé un engagement que nos arrière-grands-pères et arrière-grands-mères avaient pris, à l'époque, pour un système qu'ils croyaient être une confédération. Ce système n'a pas été changé dans le sens que souhaitaient la plupart des partis politiques qui ont gouverné le Québec. Robert Bourassa a échoué, on le sait. René Lévesque a échoué, on le sait. Mais ces échecs ne justifient nullement qu'on ne respecte pas la Constitution de 1867.
Cette position, donc, est constante. La vision du Québec en ces matières est claire, cohérente et juste. Elle correspond à l'interprétation qu'ont les Québécois depuis le tout début de leur relation avec le Canada. Dans les juridictions confiées par cette Constitution, le Québec doit être souverain et responsable dans les domaines de sa compétence, suivant l'expression consacrée. À cette fin, le Québec doit disposer du revenu suffisant ? autrement, ça devient théorique, vous avez la juridiction, mais les moyens sont à Ottawa ? sans quoi donc le partage des compétences devient une pure et simple vue de l'esprit: Occupe-toi de la santé, mais, moi, je vais avoir l'argent pour la santé; surtout, je vais avoir l'odieux de m'en retirer. Parce que, quand les systèmes à frais partagés en santé ont été mis sur pied, c'était 50-50, moitié Québec, moitié Ottawa. C'est rendu à moins de 15, Ottawa, et les besoins de santé n'ont pas diminué, ils ont augmenté de façon exponentielle à cause de la technologie et du vieillissement de la population. On connaît tous les facteurs.
Alors, pourquoi donc le Québec a-t-il toujours prôné avec constance et acharnement la voie de l'autonomie fiscale? Parce que c'est la seule voie qui assure le plein contrôle de notre développement social, économique et politique. C'est pourquoi, depuis maintenant un demi-siècle, le Québec cherche à se développer lui-même en disposant de ses propres outils. Je suis heureux de voir que cette analyse est toujours aussi valide, comme nous l'a confirmé le rapport Séguin.
Le transfert de points d'impôt ? si on veut rentrer un peu dans la technique ? n'est pas avantageux uniquement pour des raisons d'autonomie et de bon fonctionnement. D'ailleurs, entendons-nous, là, quand on parle de points d'impôt, c'est une échelle; ce n'est pas forcément une technique. On peut, en transférant la taxe de vente en tout ou en partie, arriver, sur l'échelle des points d'impôt, à une certaine hauteur. Alors, il ne s'agit pas de se fixer, d'aucune manière ? d'ailleurs ce n'est pas ça que fait le rapport Séguin ? dans un transfert de points d'impôt au sens strict du terme. Il s'agit d'avoir l'équivalent de ce qui est nécessaire à nos responsabilités.
À l'appui de sa recommandation, Séguin nous rappelle combien il serait dangereux pour le Québec de demander une bonification du financement des programmes sociaux à même les canaux existants. Séguin met une croix, comme la plupart des gouvernements du Québec d'ailleurs, sur les canaux existants. L'union sociale, le gouvernement du Québec ne l'a pas acceptée, il l'a récusée. En effet, il n'y a aucune garantie quant à la pérennité du financement fédéral actuel dans le présent système. Le gouvernement fédéral détermine de façon arbitraire le niveau de sa contribution en l'ajustant au gré de ses propres besoins financiers. Bref, tout à fait le contraire de l'esprit d'un régime fédéral.
Lors d'une visite à Berlin, dans la capitale de la République fédérale d'Allemagne, les membres de ce qui est le Sénat des régions à Berlin m'ont remis un petit dépliant qui était en allemand mais aussi en anglais, en français et en espagnol. Et ça décrivait la doctrine de la République fédérale d'Allemagne, qui est une vraie fédération. Et le titre du document, c'était Sans les Länder, jamais! Le gouvernement central du Canada fait la même chose. Quand il s'inscrit dans les fédéralistes mondiaux, il se trompe et trompe leur interlocuteur. À Ottawa, c'est la maxime à l'opposé de celle de Berlin, c'est Avec les provinces, jamais! C'est l'arbitraire, c'est l'unilatéral. Nous n'avons qu'à penser aux coupures massives dont le Québec a fait les frais au milieu des années quatre-vingt-dix. Dans cette perspective, le financement de services aussi essentiels que la santé devient arbitraire et imprévisible.
n(10 h 40)n Alors, Séguin et ses collaborateurs et collaboratrices ont bien établi le diagnostic. Du côté fédéral, la réaction a été cinglante. Même avant le dépôt du rapport Séguin, certains ministres fédéraux faisaient le tour des chambres de commerce et des tables éditoriales en essayant de démontrer ? ils faisaient du mensonge préventif, qu'on appelle ? en essayant de démontrer que les Québécoises et les Québécois souffrent sans doute d'illusion collective, puisque le déséquilibre fiscal serait un mythe. C'est ce qu'on a dit, c'est ce qu'on a colporté dans les chambres de commerce. Je ne crois pas qu'il s'agit d'une façon correcte de se comporter lorsqu'on est un gouvernement démocratique digne de ce nom.
Alors, c'est la raison pour laquelle les trois partis représentés dans cette Chambre aujourd'hui font l'union sacrée ? si on peut dire ? au service de notre population, au service de la santé, pour les familles, au service des transferts sociaux aux individus dans le besoin, au service de notre système d'éducation. Alors, quand cette motion aura été adoptée, comme elle le sera, je vais demander à M. Jean Chrétien, premier ministre du Canada, député d'une circonscription québécoise, petit gars, comme il aime le dire, de Shawinigan, Québec, je vais lui demander de me recevoir à Ottawa et je vais aller, au nom de tous les députés présents dans cette Chambre et de toutes, mais au nom du Québec, dire: M. le premier ministre du Canada, notre système de santé, notre système d'éducation et nos familles ont besoin de 50 millions de dollars par semaine que vous retenez de façon illégitime et de façon injuste.
C'est pourquoi, Mme la Présidente, en terminant, je vais relire la motion ? le chef de l'opposition l'a déjà fait ? pour qu'elle se grave bien dans l'esprit de nos compatriotes.
«Que l'Assemblée nationale, principalement en vue d'améliorer les services de santé, d'éducation et de soutien à la famille, demande au gouvernement fédéral de reconnaître et de corriger le déséquilibre fiscal constaté par le rapport Séguin en tenant compte de ses recommandations qui dessinent un cadre nouveau pour les relations financières et fiscales au sein de la fédération canadienne, notamment afin que cessent ses interventions dans le champ des compétences des provinces.» Si la bonne foi existe, si le sens de l'équité existe, cette motion de ce matin se traduira par des gestes concrets qui auront une importance matérielle extrême: nous aurons beaucoup plus d'argent pour la santé, pour l'éducation. Sinon, nous devrons conclure à la situation tragique dans laquelle se trouve le fédéralisme canadien de ne pouvoir ni s'ajuster en droit, ni s'ajuster en fait, ni s'ajuster financièrement aux besoins des hommes et des femmes du Québec.
Des voix: Bravo!
La Présidente: Je cède maintenant la parole au chef de l'opposition officielle.
M. Jean J. Charest
M. Charest: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, par la voix de son Assemblée nationale, nous posons un geste qui est important aujourd'hui. En fait, le Québec aujourd'hui parle d'une seule et unique voix pour demander à nos partenaires canadiens, tant du côté du gouvernement fédéral que des autres gouvernements, de reconnaître et de corriger ce déséquilibre fiscal qui a été décrit dans le rapport Séguin.
D'emblée, Mme la Présidente, je tiens à souligner une différence dans l'approche que propose aujourd'hui le premier ministre et l'approche que nous proposons. Lorsqu'il a commencé ses remarques, il s'adressait à des gens qui étaient à l'ouest de l'Outaouais. Pour nous, il est très clair que ce message s'adresse également aux gens qui sont à l'est de l'Outaouais et au nord de l'Outaouais. Il ne s'agit pas seulement d'un enjeu pour le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral, mais c'est un enjeu qui interpelle l'ensemble des gouvernements canadiens.
Le Québec, d'une seule et unique voix, lance un appel à la collaboration avec le gouvernement fédéral. Et l'objectif, pour nous, est très clair, puis il y en a un seul, c'est d'améliorer les services que nous allons et que nous voulons livrer aux citoyens du Québec. Le Québec, d'une seule et unique voix, propose donc aujourd'hui à tous les gouvernements du Canada de collaborer à l'élaboration d'un cadre nouveau pour les relations financières et fiscales au sein de la fédération canadienne. Le Québec envoie donc un message fort et un message clair au gouvernement fédéral ainsi qu'aux autres gouvernements: il est temps d'initier une nouvelle ère de coopération, ce, dans un seul et unique objectif, soit celui de livrer de meilleurs services aux citoyens du Québec et du Canada. L'amélioration de la qualité de vie de tous les citoyens doit être la principale préoccupation de ceux qui veulent disposer des moyens financiers nécessaires pour livrer ces meilleurs services.
Le déséquilibre fiscal, Mme la Présidente, ça peut sembler un concept compliqué et peut-être pour experts seulement, mais je vais, dans quelques minutes, tenter de vous expliquer un peu de quoi il s'agit. D'abord, au point de départ, dans l'ordre de partage des compétences, chaque niveau de gouvernement se fait attribuer des responsabilités. Les gouvernements provinciaux, incluant le gouvernement du Québec, ont la responsabilité de livrer les services de soins de santé, l'éducation, le droit civil, l'administration de la justice. Le gouvernement fédéral a la responsabilité des Forces armées, la Banque du Canada. Il y a des responsabilités partagées, comme l'environnement, par exemple, où, en passant, on a vraiment intérêt à ce que ce soit partagé, parce que, si on veut régler des questions qui relèvent de notre environnement, on a intérêt à pouvoir influencer les décisions qui se prennent ailleurs. Alors, voilà un exemple de responsabilité partagée.
Dans le cas qui nous concerne, le portrait est le suivant. Les deux niveaux de gouvernement prennent des taxes des citoyens. Dans le cas du gouvernement fédéral, il retire des impôts, des taxes des citoyens du Québec et du Canada. Ils prennent cet argent-là; ils le filtrent à travers une Loi canadienne sur la santé qui établit cinq conditions pour transférer de l'argent au gouvernement du Québec. Donc, il prend l'argent dans vos poches, ça remonte au gouvernement fédéral, l'argent repart de l'autre côté, filtré dans une Loi canadienne sur la santé qui impose cinq conditions, et l'argent revient dans les coffres du gouvernement du Québec, qui, lui, prend cet argent-là et traduit ça en services pour les citoyens du Québec.
Et de quels services nous parlons? Les hôpitaux, les centres d'hébergement de soins de longue durée, les centres de santé, les CLSC. C'est à nous, à l'Assemblée nationale, à qui revient la responsabilité de déterminer, par exemple, comment fonctionne le réseau de la santé. C'est le gouvernement actuel qui avait pris la décision du Programme de départs volontaires. Vous connaissez nos opinions là-dessus, vous connaissez la nôtre. Ce n'est pas de ça dont je veux parler, mais juste pour rappeler aux citoyens que c'est le gouvernement du Québec qui a pris ces responsabilités-là, qui prend ces décisions-là, ce n'est pas le gouvernement du Canada. Et ça ne doit pas être le gouvernement du Canada. Le pire scénario, ce serait un scénario où le gouvernement fédéral, à distance, essaie de téléguider les décisions du gouvernement du Québec ou d'un autre gouvernement. Ce serait la pire chose qui pourrait arriver.
Mme la Présidente, dans un contexte comme celui-là et dans un système politique qui fonctionne de façon adéquate, nous croyons que c'est extrêmement important pour le citoyen qui paie ses taxes de savoir exactement qui prend les décisions, les bonnes comme les mauvaises. D'ailleurs, on aura une élection générale bientôt au Québec, du moins on l'espère. Ça va être ça, l'objet de la campagne électorale. On va demander aux partis politiques... au Parti québécois, qui est au gouvernement, de rendre des comptes, de répondre de ses décisions. On offre une alternative, on dit ce qu'on ferait de différent. Et les citoyens sont appelés à prendre un choix. Bien, dans un contexte comme celui-là, nous croyons, nous, au Parti libéral du Québec, qu'il est extrêmement important qu'il y ait de la transparence dans les décisions, qu'il y ait cette notion d'imputabilité, c'est-à-dire que les citoyens sachent exactement qui prend nos impôts, qui prend les décisions.
n(10 h 50)n Et, dans ce que nous proposons comme changement, depuis très longtemps, parce qu'on est les premiers à l'avoir proposé, ce que nous proposons, c'est qu'on vive dans un système où nous, à l'Assemblée nationale, allons retirer les impôts pour la santé et l'éducation directement, nous serons appelés à prendre les décisions et à en rendre compte. Et le transfert de points d'impôt, c'est exactement ça, l'objectif poursuivi, c'est-à-dire que le fédéral nous cède l'impôt qu'il retire directement des citoyens du Québec, qu'il fasse en sorte que ce soit l'Assemblée nationale du Québec qui retire cet argent-là. Je tiens à préciser une chose pour que ce soit très clair pour ceux qui nous écoutent. Il n'est pas question, et je veux être honnête avec le gouvernement et tous les députés... Ils ne proposent pas plus au gouvernement que de ce côté-ci d'augmenter les impôts de quiconque, là. Il ne s'agit pas d'augmenter les impôts, il s'agit de faire en sorte que l'argent qui est déjà pris par le fédéral soit directement sous la responsabilité, la compétence de l'Assemblée nationale du Québec.
Nous croyons qu'en agissant ainsi on va pouvoir donner des ressources à l'Assemblée nationale pour les compétences qui nous sont attribuées dans la Constitution. C'est pour ça que, au point de départ, j'insistais pour rappeler aux gens que c'est à nous à qui revient la responsabilité, pas au gouvernement fédéral. Donc, les ressources financières doivent en quelque sorte être le miroir des responsabilités que nous avons. Et, de surcroît, j'ajouterais ceci, Mme la Présidente, c'est un principe d'administration publique d'une très grande importance, parce qu'on se donne plus de chance d'avoir de meilleures décisions de nos gouvernements, peu importe le parti au pouvoir, quand il y a de la transparence puis quand il y a de l'imputabilité.
Alors, ce n'est pas juste une question de détail. Moi, je crois que c'est fondamental pour les citoyens du Québec. Et il y a derrière ça, pour nous, au Parti libéral, une volonté de rendre des services aux citoyens. Alors, vous voyez, ce n'est pas une question de détail. C'est devenu un enjeu plus important, je vous le rappelle, dans le contexte du budget du gouvernement fédéral en 1996, parce qu'il transfère de l'argent de deux façons aux gouvernements provinciaux: par des points d'impôt ? il y a déjà une partie qu'on reçoit en points d'impôt ? et par des transferts directs en argent. Or, lors du budget fédéral de 1996, après le référendum de 1995, après que le Parti québécois ait plaidé que le gouvernement fédéral était en faillite puis il fallait quitter le Canada pour cette raison-là, le gouvernement fédéral a décidé de prendre le taureau par les cornes puis de réduire ses dépenses. Or, l'histoire nous apprend qu'il a réduit les transferts en argent comptant de l'ordre de 40 % d'un seul coup et de façon unilatérale. Bon. Eux, à l'époque, ont plaidé que c'était le contexte. Ils ont été tellement convaincants que le premier ministre du Québec de l'époque, M. Lucien Bouchard, admettait, en juillet 1998, qu'il était d'accord avec les coupures du gouvernement fédéral. C'est pour dire à quel point il y avait un contexte qui, à l'époque, venait, pour le gouvernement fédéral, justifier le geste qu'il posait.
Mais ça nous ramène spécifiquement à l'enjeu, là, et à l'importance de ce qu'on propose ce matin. Parce que ce que nous proposons, c'est important dans le contexte où on doit pouvoir sortir des circonstances immédiates et aborder des solutions à long terme pour éviter justement cette espèce de montagnes russes qui fait en sorte qu'un contexte justifie une décision puis ensuite un autre contexte la modifie, alors qu'il faut avoir une vision à plus long terme du rôle des niveaux de gouvernement. Et c'est pour cette raison-là qu'on insiste tant sur cette question-là.
C'est tellement important pour moi personnellement que depuis 1997 que je défends cette idée-là. J'ai fait une campagne électorale là-dessus, pas ici, mais au niveau canadien. Je me suis fais amplement critiquer pour ça et j'en ai payé le prix politique, parce que c'est une question de conviction. À ce moment-là, on proposait ce qu'on appelait un nouveau pacte confédératif: transfert de points d'impôt. Alors, ce n'est pas nouveau. Moi, j'y crois fondamentalement. C'est une des raisons pour lesquelles je suis en politique. J'irais même plus loin que ça, Mme la Présidente, ça va être un des principaux éléments du mandat, j'espère, d'un futur gouvernement libéral. Et une de mes ambitions, c'est de faire en sorte qu'on puisse réellement mettre en place un nouveau changement qui interpelle l'ensemble, l'ensemble, pas juste des citoyens du Québec, mais ailleurs au Canada, toujours dans le but de faire mieux fonctionner cette fédération.
Alors, voilà le contexte de cet enjeu important. Et je veux vous rappeler que, pour nous, ça n'a pas juste été un discours, qu'au moment où la commission Séguin a annoncé ses travaux on a présenté un mémoire devant la commission. Dans le mémoire qu'on a présenté, qui, je vous le dis sans prétention, je pense, est un des meilleurs mémoires qui aient été présentés devant la commission Séguin, il y a trois choses qu'on relevait là-dedans. On proposait de remplacer le Transfert canadien pour la santé et les programmes sociaux, qui est le titre du programme de transfert d'argent ? parce que ce n'est pas juste la santé, c'est l'éducation postsecondaire et les programmes sociaux ? nous, on proposait de le changer avec un transfert de points d'impôt. Je reviens à ce que je vous racontais il y a une minute, c'est-à-dire prendre une partie de ce que le fédéral prend en impôts puis faire en sorte que c'est le gouvernement du Québec qui le retire. Première chose.
Deuxième précision extrêmement importante à faire ce matin ? il ne faut surtout pas l'oublier; je pense que le premier ministre voulait en parler, mais il avait beaucoup de choses à dire ? il faut également changer en même temps la formule de péréquation. Pourquoi? Bien là je vais être très précis, parce que, il faut être très lucide, on s'embarque dans quelque chose de très important. Parce que, si on changeait seulement la formule de points d'impôt, ce n'est pas évident que le gouvernement du Québec recevrait davantage d'argent. Pour être très clair, on pourrait recevoir moins que ce nous recevons actuellement. Or, attention, là! D'ailleurs, dans la partie fédérale, c'est exactement ce qu'on va nous dire au point de départ, ils vont dire: Écoutez, là, Charest, c'est bon, ton affaire, mais veux-tu vraiment recevoir moins d'argent que tu en reçois aujourd'hui? Parce que le transfert de points d'impôt, c'est lié à la taille de notre économie.
Or, pour cette raison-là, dans le mémoire qu'on a présenté avec d'autres gouvernements, on propose de changer ce qu'on appelle la formule de péréquation ? péréquation, c'est quoi? bien, c'est des transferts d'argent qui nous viennent de provinces, de juridictions plus riches, si vous voulez, vers ceux qui sont moins bien nantis, dont l'économie performe moins bien; c'est malheureusement le cas pour le Québec ? de telle sorte qu'on puisse au net recevoir davantage que ce qu'on reçoit. Or, il faut réinsister là-dessus aujourd'hui, là, on ne peut pas, nous, à l'Assemblée nationale du Québec, seulement proposer un transfert de points d'impôt, il faut également changer la formule de péréquation.
Troisième chose, parce qu'il y a toujours un pendant politique à tout ça, puis on ne peut pas dissocier les deux, c'est-à-dire: si on a une nouvelle formule de financement, il faut qu'il y ait un pendant politique qui nous permette de le gérer correctement puis d'éviter ce qu'on a vécu depuis les dernières années, cet effet de montagnes russes qui fait en sorte qu'on est en déficit pendant quelques années, donc on change les règles du jeu, on est en surplus, on change les règles du jeu. Il faut éviter, dans la mesure du possible, ces aléas de la vie politique.
Donc, on propose la création d'un conseil de fédération. Et là aussi je veux être précis, il ne s'agit pas d'amender la Constitution, il ne s'agit pas de créer quelque chose qui est... non plus très nouveau pour le conseil... pour le cadre fédéral. Il existe déjà des forums où les gouvernements se réunissent. Je pense au Conseil canadien des ministres de l'Environnement, qui a même un secrétariat permanent à Winnipeg, le Conseil canadien des ministres de l'Éducation, qui fonctionne très bien, en passant, et les gouvernements, les ministres du Parti québécois qui ont travaillé dans ces forums-là pourront le dire, j'en suis convaincu. Ça fonctionne bien, comme forums. Et ce qu'on propose, c'est un forum du même type qui nous permettrait justement, sur le plan politique, d'avoir un contact et de pouvoir gérer ces nouvelles ententes, entre autres pour la Loi canadienne sur la santé. Parce que, voyez-vous, si on veut vraiment mettre en place un changement puis on veut faire en sorte que le système de santé fonctionne mieux, il faut qu'on puisse interpréter conjointement la Loi canadienne sur la santé.
Moi, je trouve ça inacceptable que le gouvernement fédéral, alors que c'est notre compétence à nous, à l'Assemblée nationale, la santé, nous transfère des fonds filtrés par une Loi canadienne sur la santé où ils sont les seuls à interpréter le sens de la loi, alors que nous savons très bien qu'on a beaucoup de travail à faire pour pouvoir réparer le système, mieux le faire fonctionner. C'est notre compétence, puis, lui, il est le seul à interpréter le sens de la loi. Bien, ça, ça ne reflète pas, de notre point de vue à nous, un fonctionnement adéquat du système fédéral. Il faut changer ça. Il faut donc, sur le plan politique, créer un pendant, un conseil de fédération qui va nous permettre de mieux gérer ces nouvelles ententes.
Nous y croyons beaucoup, à cette question-là. Pour cette raison-là, Mme la Présidente, moi, j'ai fait une tournée. J'ai rencontré les premiers ministres des provinces, j'ai rencontré les chefs d'opposition, les chefs de tiers partis dans certains cas. Je l'ai fait parce que, sur un sujet comme celui-là, il faut reconnaître que c'est tellement important comme changement que tout le monde est à la table. D'ailleurs, la démocratie, là, la démocratie, en 2002, se pratique différemment d'il y a 50 ans. On l'apprend des fois à nos dépens. Les gouvernements l'apprennent. Et, quand on entreprend des changements qui sont de cette envergure, je crois ? et je vous dis ça par expérience ? que c'est très important d'amener tous les élus à la table et de faire participer ceux et celles qui ont une influence sur le sens des choix que nous serons appelés à faire.
n(11 heures)n Nous y croyons tellement qu'on est allés devant la commission Romanow ? je regrette que le gouvernement n'ait pas fait la même chose. On a déposé le rapport Séguin justement pour lui rappeler qu'un des principaux enjeux qu'il doit traiter, c'est la question du déséquilibre fiscal. Nous nous attendons donc, parce qu'ils viennent de terminer leurs travaux, en tout cas, de rencontres avec le public, qu'il réponde à cette attente que nous lui avons soumise et qui est reflétée également dans le rapport Séguin.
Mme la Présidente, c'est dans cet esprit qu'on a toujours défendu les intérêts du Québec et que nous allons continuer à le faire. Et la question que nous devons nous poser aujourd'hui, c'est: Comment allons-nous maintenant avancer dans ce débat, comment allons-nous faire en sorte que nous puissions progresser? Parce que, là aussi, il faut être très lucide, c'est tellement important comme enjeu, puis ce n'est pas vrai que ça va se régler dans l'espace de quelques mois. C'est le genre de changement qui exige des efforts importants, et il faut donc s'interroger sur le sens de notre approche.
Et c'est là où ? je le dis amicalement au premier ministre ? où on a refroidi beaucoup après le dépôt du rapport Séguin, lorsque le premier ministre a décrit le rapport Séguin comme étant un puissant instrument pour faire de la pédagogie sur la souveraineté. Et je lui dis honnêtement, je lui dis amicalement, lorsqu'il prononce une phrase comme ça, évidemment il met l'opposition officielle sur les talons, parce que là on se fait proposer une motion à l'Assemblée nationale, puis là, bien, évidemment, on s'interroge: Est-ce qu'on est en train de s'embarquer dans une démarche qui est de nature partisane? Depuis ce temps-là, évidemment on a eu l'occasion... Puis on avait, nous, déposé une motion, d'autant plus, au mois de novembre 1999, la députée de Marguerite-Bourgeoys en avait déposé une, c'était dans le contexte de réduction d'impôts, que le gouvernement avait repoussée. Là, on revient puis on nous en propose une, on parle de puissant instrument pour faire la pédagogie de la souveraineté. Avouons que ça nous refroidit un petit peu.
D'ailleurs, là-dessus, je veux faire une précision, parce que le gouvernement, ses ministres disent souvent, bien, c'est 50 millions de dollars par semaine. Plaçons les choses dans son contexte. Le gouvernement se rappellera sans doute que, dans le cadre des travaux de la commission Bélanger-Campeau, il y a eu des travaux de faits là-dessus, sur les conséquences économiques de la souveraineté, l'indépendance, et que Pierre Fortin, qui est un économiste réputé ? je ne suis pas toujours d'accord avec tout ce qu'il dit ? avait publié un rapport à ce moment-là où il disait ceci: «Les études ? il en avait fait deux ? concluaient que le passage à la souveraineté, s'il avait eu lieu en 1990-1991, se serait traduit par un déficit budgétaire important, de l'ordre de 13,2 milliards, soit 8,3 % du PIB québécois ? c'est gros, là ? plaçant le Québec dans le peloton de queue des pays industrialisés du point de vue des finances publiques.» En passant, le document que je vous cite, là, c'est le résumé de La conséquence économique de la souveraineté du Québec, analyse exploratoire. Ça, c'est le résumé des documents déposés par le ministère des Affaires intergouvernementales dans la mise à jour. Ce n'est pas nos documents à nous. Puis j'ai insisté là-dessus parce que je sais que c'est très facile de prêter des intentions partisanes. Puis je tenais absolument à vous citer, Mme la Présidente, les documents qui ne viennent pas de chez nous, qui ne viennent pas du gouvernement du Parti québécois mais qui viennent d'un observateur neutre.
Et, dans la mise à jour que le gouvernement a commandée, payée, ces deux économistes qui ont fait ce travail-là pour... c'est MM. Claude Fluet et Pierre Lefebvre. Et dans les documents déposés il y a quelques semaines, ça conclut en disant ceci: «Le changement de statut politique du Québec s'accompagne par conséquent d'un manque à gagner non négligeable se situant entre 6 et 8 milliards pour les années considérées. Ce manque à gagner est du même ordre de grandeur qu'en 1990-1991. Par rapport au PIB, il représente entre 2,8 et 3,5 % du PIB, comparativement à 3,2 % en 1990-1991.» Au net, c'est quoi? C'est 115 millions de dollars de moins par semaine. Je voulais le rappeler pour mettre les points sur les i, qu'on sache de quoi on parle pour qu'on puisse comparer les oranges avec les oranges et placer ça dans le contexte des choix que certains peuvent nous proposer ou être tentés de nous proposer dans le cadre de ce débat.
Je reviens à la question qu'on se posait il y a une minute: On fait quoi à partir d'aujourd'hui? Bien, de notre point de vue à nous, effectivement, ce n'est pas juste à l'ouest de l'Outaouais. Les relations que doit entretenir le prochain gouvernement du Québec ne sont pas des relations bipolaires. On doit se sortir de ce carcan qui fait en sorte qu'on a l'impression qu'on parle juste à un autre gouvernement. L'évolution du système fédéral dépend de la capacité du prochain gouvernement du Québec de bâtir des alliances avec les autres gouvernements qui partagent un intérêt commun. Et je vous rappelle que ces gouvernements-là ont beaucoup évolué dans leur vision du système fédéral depuis les 10 dernières années, de façon assez spectaculaire dans certains cas. Je pense, entre autres, à l'Ontario et à la Colombie-Britannique, en particulier, que je connais très bien, mais aussi l'Alberta, qui a toujours partagé une vision du système fédéral très près de celui du gouvernement du Québec, très près. Je le sais pour en avoir discuté avec plusieurs de ses leaders, pour en avoir fait l'expérience sur deux paliers. Je peux vous l'affirmer, Mme la Présidente.
On doit donc faire quoi? Le premier ministre dit aujourd'hui qu'il veut rencontrer le premier ministre du Canada pour en discuter. De notre point de vue à nous, il passe une étape, c'est de s'asseoir avec ses collègues des autres paliers de gouvernement pour bâtir une alliance, puisqu'on a des intérêts communs. C'est tellement vrai, ce que je vous dis là, que, dans ma tournée, quand j'ai rencontré le premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, M. Grimes, lui me disait en point de presse, sans qu'on lui demande ? je ne m'attendais pas à ce qu'il dise ça ? que le Parti libéral du Québec était beaucoup plus avancé dans ses travaux sur cette question-là que les premiers ministres à travers le Canada. C'est donc dire à quel point on a encore du travail à faire, et c'est là où la question du leadership québécois entre en ligne de compte; il faut absolument que nous exercions notre leadership.
Je me serais attendu aujourd'hui à ce que le premier ministre nous annonce qu'il va en faire un point majeur à l'ordre du jour de la Conférence des premiers ministres qui va avoir lieu au mois d'août. Ça tombe sous le sens. Il y a une conférence annuelle chaque année au mois d'août. Or, il risque d'y avoir deux questions majeures: Kyoto et cette question-là. Il faut le dire... Oui, la ministre dit: Oui, ça tombe sous le sens. Bien, il faut le dire. C'est ça, le sens de notre intervention aujourd'hui. Sinon, on envoie quel message? Ça, c'est la première étape, puis il faut exercer ce leadership.
Mme la Présidente, il faut s'entendre aussi sur les objectifs que nous poursuivons. Je réitère que, du point de vue du Parti libéral du Québec, il s'agit, pour nous, de livrer des meilleurs services aux citoyens. Je suis content aujourd'hui que le premier ministre ait été silencieux sur la question d'un référendum sur les points d'impôt. Je voudrai pousser plus loin l'échange là-dessus, le débat sur cette question-là, mais avouons que c'est une mauvaise idée, qu'un référendum, ce n'est pas un objet de politique partisane, que ça doit être pris très au sérieux, c'est une mesure d'exception et que c'est un instrument qui est à la disposition des citoyens du Québec et non pas des partis politiques, et qu'évidemment nous nous objectons à ce qu'un gouvernement puisse même mettre sur la table une idée comme celle-là dans le but de faire avancer un agenda qui est différent. Alors, voilà, Mme la Présidente, une question qui est de première importance pour les citoyens du Québec.
Je conclurai en vous disant ceci: que, au fond, dans la démarche qu'on vous propose, celui de bâtir des alliances, d'exercer ce leadership, de poursuivre le travail qui peut se faire assez rapidement, il y a un dernier élément qu'il faut ajouter, c'est celui du mandat. Nous croyons et nous avons la conviction que la population du Québec partage ce point de vue, que c'est une question de mandat de gouvernement, et que nous sommes rendus à l'étape où nous devons offrir à la population du Québec le choix de mandater son prochain gouvernement sur une question aussi importante que celle-là, et qu'en bout de ligne, aujourd'hui, on va continuer à le dire aussi, que le gouvernement actuel serait bien avisé de déclencher des élections générales afin que nous puissions utiliser l'ultime, l'ultime outil dans ce rapport de force avec ses partenaires, celui d'un mandat de gouvernement, et que la question que nous serons appelés à résoudre lors de cette campagne, une des questions, c'est: Qui est le mieux placé pour pouvoir faire avancer ce dossier dans l'intérêt des citoyens du Québec?
J'invite le premier ministre à réfléchir sur la démarche que nous lui proposons au nom des citoyens du Québec, et nous lui annonçons que nous sommes prêts pour ce rendez-vous ultime.
Des voix: Bravo!
La Présidente: Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui, merci, Mme la Présidente. Je suis très heureux enfin qu'on puisse se prononcer, comme Assemblée nationale, comme représentants de la population du Québec, sur le rapport Séguin. D'entrée de jeu, je dois dire, il y a plusieurs mois, le premier ministre avait mandaté Yves Séguin pour faire une étude, faire un rapport sur le déséquilibre fiscal. Au moment où ça avait été fait, il y avait des gens qui étaient sceptiques. Il y a plusieurs personnes, incluant moi-même, qui se posaient la question: Est-ce que ça va être vraiment fait comme un travail complet? Est-ce qu'il y a un agenda partisan derrière? Je dois dire aujourd'hui que le premier ministre avait raison, qu'il a mandaté la bonne personne, de la bonne façon, et que, le rapport Séguin, il n'est pas juste bon, il est excellent.
n(11 h 10)n C'est un rapport, d'abord, qui est l'objet, le résultat de consultations vastes, de consultations extrêmement élargies au sein de la société québécoise, dans toutes les sphères d'activité. Et c'est surtout un rapport ? et là j'ai peut-être un biais personnel d'économiste ? c'est un rapport qui est documenté, qui n'est pas basé sur des perceptions du moment, qui n'est pas basé sur des chicanes, qui est basé sur des données et qui s'est fait appuyer par des données du Conference Board, donc qui est un document chiffré, appuyé, étayé, et sur la base duquel je me disais d'entrée de jeu que les émotions, les interprétations sont toujours sujettes à chicane. Or, les données, les faits sont généralement beaucoup plus propices à l'amorce d'une discussion constructive.
Ce que je suis en train de dire, c'est à quel point ma déception a été décuplée face au rejet du revers de la main qui a été fait d'entrée de jeu par le gouvernement fédéral. Parce que je ne m'imaginais pas, voyant le rapport puis le parcourant au tout début, je ne m'imaginais pas que, face à des données, face à un document qui était chiffré, qui était appuyé sur des thèses documentées, on puisse ne même pas avoir le réflexe, le sain réflexe de prendre un recul, de dire: On va l'étudier; on va revérifier les chiffres; on va contrevérifier. C'est une analyse, on va en faire une autre; on va pouvoir échanger. Que d'entrée de jeu l'approche soit politique dans le sens le plus partisan du terme et un rejet du revers de la main de ce rapport.
Et c'est connu, et, dans plusieurs débats, j'ai eu l'occasion d'échanger là-dessus avec le premier ministre ou d'autres membres du gouvernement, je ne suis jamais l'apôtre de dire que c'est la faute des autres. Je suis un tenant de la responsabilisation dans tous les dossiers. Je dis toujours: Il faut que le Québec prenne ses responsabilités, utilise de la meilleure façon possible les moyens qu'il a plutôt que de mettre le blâme sur le voisin. Mais ça ne nous empêche pas, lorsqu'il arrive un débat aussi crucial que celui du déséquilibre fiscal, de se mettre les yeux en face des trous et de constater l'existence d'un déséquilibre fiscal et d'en réclamer la résolution.
Aujourd'hui, d'une certaine façon, je pense que, comme Assemblée nationale, oui, comme toujours, on s'adresse à la population du Québec; mais, aujourd'hui, l'Assemblée nationale s'adresse en même temps aux citoyens des autres provinces, aux dirigeants des autres provinces, s'attaque en même temps à tous les parlementaires fédéraux qui sont sûrement sensibles à cette question. On s'adresse au gouvernement fédéral évidemment et à son premier ministre, M. Chrétien, qui sont les premiers visés par cette demande du Québec.
Je pense qu'on doit dire à tous ces gens-là, d'abord, que les Québécois sont fatigués. Bien oui, les Québécois sont fatigués des chicanes de drapeaux. Les Québécois sont fatigués en même temps de faire des propositions, de s'efforcer à participer, de mettre sur la table des suggestions et de ne pas être écoutés par le gouvernement fédéral, de ne même pas être capables, dans plusieurs cas ? et d'autres provinces se sont retrouvées dans la même situation ? de se rendre à l'étape d'envisager ou d'engager le dialogue avec le premier ministre du Canada ou ses représentants. Mais, si les Québécois sont fatigués d'un certain nombre de chicanes, ils ne sont pas moins déterminés, dans quelque chose d'aussi concret, d'aussi tangible que le déséquilibre fiscal, à aller chercher leur dû, à aller chercher la part des taxes et des impôts qu'ils paient pour répondre aux besoins qui sont les nôtres.
La reconnaissance du déséquilibre fiscal qui est demandée par la motion, constatée par le rapport Séguin, cette reconnaissance-là est d'autant plus cruciale que le rapport Séguin ne fait pas que constater une perte annuelle, pour le Québec, de 2 milliards, il fait une chose de plus: il constate que la chose va aller en se détériorant. Donc, que la tendance naturelle des choses, que la conséquence d'un laisser-aller, ce n'est pas la correction naturelle du problème, mais c'est l'aggravation du problème. Et, à moyen terme, on va jusqu'à parler d'une perte de 3 milliards de dollars.
On est directement au coeur de ce qui est ou de ce que doit être le bon fonctionnement du système canadien ou d'un système fédéral. L'allocation des ressources vers les besoins, la capacité d'un système, quel qu'il soit, à aiguiller les ressources, des ressources qui sont le fruit du travail des gens, là, leurs taxes et leurs impôts, à les aiguiller le plus efficacement possible vers les besoins, c'est une des mesures les plus sensibles, une des mesures les plus fiables de la capacité d'un système à bien fonctionner.
Donc, ce qui est constaté dans le rapport Séguin, le dysfonctionnement à bien allouer les ressources qu'on est allé chercher dans les poches des gens vers l'endroit où les besoins se trouvent, c'est une déficience de fonctionnement qui n'est pas bénigne, qui est majeure et qui ne peut pas être reportée à plus tard, à laquelle on doit s'attaquer immédiatement. Et on parle de quoi, lorsqu'on parle des enjeux sociaux qui sont liés au déséquilibre fiscal? On parle de la santé, quelque chose qui est absolument fondamental, et, je disais tout à l'heure, le déséquilibre va aller en s'aggravant. Mais la réalité en matière de santé, elle aussi, elle va aller en s'aggravant. On pense qu'on a un portrait dur à l'heure actuelle de ce qui est vécu dans la santé puis dans le réseau, c'est vrai, mais on n'a rien vu. On n'a rien vu s'il n'y a pas quelque chose qui se passe, parce que le vieillissement de la population, on y entre, on en vit les premiers échos à l'heure actuelle. Donc, on parle de santé, on parle d'éducation, on parle de nos jeunes, on parle de la famille, on parle des préoccupations sociales de premier niveau de la population. Et je pense que l'Assemblée, par une prise de position unanime, réitère l'importance de ces enjeux-là et d'un sain fonctionnement du système fédéral pour réallouer les ressources d'une façon acceptable aux besoins qui sont vécus.
Dans le mémoire que l'ADQ présentait devant la commission Séguin, parlant de l'attitude, parlant des décisions unilatérales du gouvernement fédéral, on disait: «En conséquence, l'ADQ dénonce vigoureusement le gouvernement fédéral pour sa pratique impériale du fédéralisme quant à sa politique de paiements de transfert.» Le mot «impériale» réfère certainement à plusieurs des caractéristiques de la façon d'opérer du gouvernement fédéral actuel: décisions unilatérales, conférences fédérales-provinciales où seul le gouvernement fédéral se réserve le droit de convoquer et de déterminer l'agenda unilatéralement. Et je pense que l'approche de fédéralisme impérial est tout, sauf la base de la collaboration que les citoyens attendent aujourd'hui de la part de gouvernements responsables. Et on est dans une semaine, semble-t-il, où il y a du mouvement à Ottawa, où il y a une situation assez particulière, assez unique avec le ministre des Finances, le premier ministre. J'espère que d'une contestation qui, de l'extérieur, a l'air partisane, j'ose espérer qu'au moins à l'intérieur il y a opportunité de mouvement, il y a des gens qui réfléchissent, il y a des remises en question concernant un certain nombre de pratiques qui ne sont plus ni acceptables ni acceptées par la population du Québec en matière de fédéralisme, qui a pris trop de caractères impériaux.
Je reviens au rapport Séguin, sur ses grandes, grandes conclusions, conclusions formulées, des recommandations fort simples. L'équilibre fiscal au sein de la fédération doit être rétabli, ce qui implique, pour le rapport Séguin, l'abolition du Transfert social canadien, un nouveau partage de l'espace fiscal, correction des règles de péréquation. Et deuxième proposition, qui n'a pas moins d'importance, il faut se donner les moyens de répondre dans l'avenir à toute nouvelle cause de déséquilibre dans les relations financières entre les deux ordres de gouvernement, donc la fin des décisions unilatérales, la fin de l'approche où quelqu'un dicte et les autres sont dans la position d'écouter, le début d'une approche où les opinions, où les données, où les faits, où les chiffres peuvent parler, où le système est basé sur l'écoute et la recherche commune de solutions pour améliorer la vie des gens.
n(11 h 20)n Cette motion aujourd'hui, elle est importante. Le premier ministre y a fait référence. Ce n'est pas quotidien que l'Assemblée nationale parle d'une seule voix. Mais, à travers l'Assemblée nationale, c'est la population du Québec qui parle d'une seule voix. Les Québécois sont des gens fiers et, dans le système, ils veulent se faire respecter. Les Québécois sont des gens honnêtes qui ont la conviction de faire leur part, de contribuer, de payer leur part à l'intérieur du système et qui veulent obtenir justice à l'intérieur du même système, qui veulent obtenir une écoute par rapport à leurs besoins à l'intérieur du même système.
J'ai déjà eu l'occasion de me prononcer ? à partir de cette Assemblée, de notre Assemblée nationale qui parle d'une seule voix ? de m'exprimer sur la pertinence d'un référendum, une idée qui a circulé. Je suis convaincu que le premier ministre a pu prendre connaissance de ça, je ne veux pas y revenir.
Aujourd'hui, à l'occasion d'une motion unanime, j'invite le gouvernement à continuer à faire, ce qui est ma conviction, ses devoirs. Ses devoirs en matière de promotion, d'explication du rapport Séguin dans toutes les capitales du Canada. Et le premier ministre vient de nous dire qu'il avait l'intention de rencontrer le premier ministre du Canada, M. Chrétien, de demander une rencontre. Je peux lui dire qu'en ce qui me concerne il peut transmettre au premier ministre du Canada, à M. Chrétien, à travers la motion, il peut lui transmettre l'insistance, la fatigue, la volonté très ferme des gens que je représente à l'Assemblée nationale que le déséquilibre fiscal soit constaté et que les solutions y soient apportées. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente: Alors, je cède maintenant la parole à six intervenants sur la motion, et immédiatement Mme la ministre d'État à l'Économie et aux Finances.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Alors, merci, Mme la Présidente. Je rappelle que le dépôt du rapport Séguin, le 7 mars dernier ? et nous l'avons mentionné déjà, mais je veux le rappeler ? constitue un point tournant dans l'épineux dossier du déséquilibre fiscal.
En fait, ce rapport, il présente un tableau qui est absolument implacable par sa limpidité même, un tableau implacable de l'état actuel des relations financières entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec et celui des autres provinces. Et surtout, il présente un tableau implacable des conséquences qui en résultent pour tous nos concitoyens et toutes nos concitoyennes et aussi des réponses que l'on doit apporter aux problèmes soulevés.
En fait, il y a une conclusion à ce moment-ci qui s'impose, c'est l'urgence, l'urgence d'agir pour corriger une situation qui prive le Québec d'une partie importante de sa capacité financière, donc bien sûr de notre capacité à financer adéquatement la santé et l'éducation.
En fait, la commission fait d'abord un premier constat, elle dit: «Le déséquilibre fiscal, ce n'est pas un mythe.» Et elle projette, elle fait des projections quant à ce qui se passera pendant les 20 prochaines années à l'égard des revenus des provinces, des revenus du Québec, des revenus d'Ottawa et du niveau de dépenses. Et ces projections, elle a... En fait, cette étude ou cette analyse et les projections qui en ont découlé ont été confiées à un organisme d'une grande crédibilité, puisqu'il s'agit du Conference Board du Canada, et qui vient démontrer que le gouvernement fédéral se dirige vers des surplus annuels qui vont avoisiner 90 milliards de dollars d'ici 20 ans.
Ces surplus, ils proviennent d'où? De nos taxes et de nos impôts, Mme la Présidente. Ils représentent deux fois le budget actuel du gouvernement du Québec. En fait, le paradoxe vient du fait que, pour maintenir le niveau actuel de services publics, sans augmenter le fardeau fiscal, sans augmenter la taxe des Québécoises et des Québécois, le gouvernement du Québec, lui, devrait faire des déficits croissants qui pourraient atteindre 5 milliards de dollars en 2020. Pendant ce temps-là, le gouvernement fédéral, lui, serait en mesure de rembourser la quasi-totalité de sa dette au cours des 20 prochaines années, alors que la nôtre, celle du Québec, risquerait de s'accroître de près de 60 %.
Le gouvernement fédéral prélève de fait plus de taxes, plus d'impôts que ce dont il a besoin pour le niveau de services dont il assume la responsabilité. Le Québec, lui, de son côté n'a pas assez de ressources pour répondre aux besoins essentiels de la population québécoise. Et, dans l'étude du Conference Board, on estime que le surplus fédéral pour 2001-2002 serait... Il y a quelques mois qu'on a fait cette étude, on dit: Pour 2001-2002, le surplus d'Ottawa devrait être à 5,6 milliards de dollars. Parce que, effectivement, des ministres et députés d'Ottawa ont critiqué le rapport Séguin, ont critiqué l'étude du Conference Board en disant qu'on exagérait. Ah oui! Alors, 2001-2002, le Conference Board nous dit: Ottawa devrait avoir un surplus de 5,6 milliards de dollars. Dans les faits, et c'est M. Chrétien lui-même qui l'a reconnu, et nous le savons, le surplus fédéral pour 2001-2002 devrait atteindre 10 milliards de dollars. Oui, le Conference Board s'est trompé, mais il s'est trompé en sous-évaluant le surplus d'Ottawa.
Alors, il me semble que la preuve ne peut pas être plus éclatante à cet égard qu'existe bien ce déséquilibre. Par contre, et regardons du côté du Québec, le Conference Board prévoit malheureusement des déficits. Nous avons réitéré bien sûr notre objectif de maintenir l'équilibre budgétaire. Toutefois, l'atteinte de cet objectif demeure précaire. En effet, c'est le fruit d'efforts importants pour contenir la croissance des dépenses en deçà des niveaux nécessaires au maintien du niveau actuel des services publics. Les Québécois, et c'est vrai des autres, de la population des autres provinces, paient, on le sait, suffisamment d'impôts pour se payer des services de qualité, et cela, sans faire de déficit.
Il y a une seule solution logique, qui a l'appui de tous les partis du Québec ? nous le constatons ce matin ? de tous les ministres des Finances du Canada. Et le chef de l'opposition s'inquiétait ce matin... c'est la première chose que j'ai faite, Mme la Présidente; lorsque le rapport a été déposé, j'ai fait le tour du Canada, j'ai rencontré tous mes homologues, tous les ministres des Finances. Nous avons tenu une rencontre avec le ministre fédéral il y a quelques semaines et nous avons convenu unanimement, à l'exception du ministre fédéral des Finances, qu'il y avait effectivement déséquilibre fiscal. Non seulement il y a déséquilibre fiscal, mais nous avons souhaité, et toutes les provinces ont convenu de cela, procéder à une étude plus en profondeur pour constater l'effet de ce déséquilibre sur les budgets des autres provinces. Et je rassure aussi le chef de l'opposition: le premier ministre du Québec rencontrera ses homologues des autres provinces en août prochain, et sera à l'ordre du jour cette question du déséquilibre fiscal, Mme la Présidente.
La Présidente: En conclusion.
Mme Marois: Je conclus. Je crois que, par simple respect pour les Québécoises et pour les Québécois, le gouvernement fédéral a le devoir d'entamer des discussions approfondies avec le Québec et bien sûr avec les autres provinces. Le consensus québécois qui se dégage au sujet de l'ampleur du déséquilibre, de la gravité de ses conséquences nous convie à une obligation de résultat. Je crois que nous devons agir, parce que cela est urgent, pour pouvoir nous permettre de répondre aux besoins de nos concitoyens et de nos concitoyennes en matière de santé, d'éducation, d'aide aux familles et de lutte à la pauvreté. Je vous remercie, Mme la Présidente.
Des voix: Bravo!
La Présidente: Alors, avant de céder la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, j'indique qu'elle aura un temps de parole similaire, c'est-à-dire sept minutes. Et j'invite les intervenants qui suivront à intervenir dans le temps qui leur est imparti, c'est-à-dire cinq minutes. Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, ça fait trois ans et demi que j'ai été élue dans cette Assemblée, ça fait trois ans et demi que je siège dans cette enceinte et, je vous dirai, ça fait trois ans et demi que nous défendons l'idée qu'il y a un déficit... déséquilibre fiscal et qu'il faut obtenir un transfert de points d'impôt.
n(11 h 30)n À titre de porte-parole des finances, une responsabilité que m'a confiée le chef de l'opposition officielle, et également avec l'appui de tous mes collègues dans le caucus du Parti libéral du Québec, nous avons défendu cette idée qu'il fallait apporter un correctif au déséquilibre fiscal, puisqu'il pénalise le Québec, et non seulement le Québec, mais également toutes les autres provinces, dans son fonctionnement au niveau fédératif, Mme la Présidente.
Mme la Présidente, il n'y a rien de nouveau pour nous aujourd'hui. C'est là un cheminement d'ailleurs qui est très intéressant parce que, quand nous avons discuté pour la première fois, M. Charest et moi... pardonnez-moi, M. le chef de l'opposition officielle, je m'excuse, Mme la Présidente...
Une voix: Le député de Sherbrooke.
Mme Jérôme-Forget: Le député de Sherbrooke, c'est ça. Quand nous en avons discuté pour la première fois, ça allait, c'était normal pour lui de supporter cette idée, puisqu'il avait défendu cette idée alors qu'il oeuvrait précisément sur la scène fédérale. C'est donc dire qu'il y a une continuité dans la démarche que nous défendons aujourd'hui. Nous sommes cohérents, nous sommes consistants et nous continuons à défendre ce point de vue que nous avons défendu depuis trois ans et demi.
Mme la Présidente, en 1999, dès le mois de mars 1999, nous donnions une conférence de presse à ce sujet-là, au niveau du déséquilibre fiscal. Le 4 novembre 1999, le Parti libéral du Québec déposait une motion, motion qui a été refusée par le Parti québécois, demandant justement de revoir le transfert de points d'impôt et de défendre cette position du déséquilibre fiscal. Alors, Mme la Présidente, nous avons été constants quant à notre réflexion, nous avons été constants quant à notre position et nous avons été consistants quant à notre engagement de défendre avec détermination auprès du gouvernement d'Ottawa et des autres gouvernements provinciaux l'idée d'un déséquilibre fiscal.
D'ailleurs, Mme la Présidente, le Parti libéral du Québec a rédigé un mémoire important qu'on a déposé à la commission Séguin. Encore là, nous avons mis beaucoup de temps et d'efforts pour offrir une alternative et amener la commission Séguin à endosser la position que nous avions défendue depuis trois ans et demi. Nous l'avons chiffré, ce document, nous l'avons documenté, et nous l'avons si bien chiffré et documenté que le rapport Séguin s'est largement inspiré, et ils nous l'ont confirmé, ils nous l'ont confirmé, ils se sont largement inspirés de la position du Parti libéral du Québec, qui était transparente, qui était équilibrée et qui dévoilait ouvertement et clairement les failles dans le système actuel.
Mme la Présidente, la ministre parlait qu'elle a toujours défendu, n'est-ce pas, plus tôt, la cohérence dans sa position et qu'elle s'est faite la défenderesse, n'est-ce pas, de ce déséquilibre fiscal auprès de ses homologues ministres des Finances à travers le Canada. Moi, j'aimerais bien, au moins, qu'aujourd'hui on se rende compte d'un autre volet. Si ce gouvernement du Parti québécois est sérieux dans toute cette démarche. Je ne veux pas faire trop de partisanerie, Mme la Présidente, mais, comme Pierre Fortin... On a mis une étude de Pierre Fortin, comme le mentionnait très bien le chef de l'opposition officielle plus tôt. Peut-être que, si on est pour faire un référendum, quelque référendum que ce soit, qu'on dise franchement et clairement aux citoyens qu'advenant la souveraineté du Québec il y aurait encore aujourd'hui un manque à gagner de 6 à 8 milliards de dollars. C'est donc dire que, Mme la Présidente, il ne faudrait pas avoir deux poids deux mesures, d'une part, se... supporter les chiffres du Conference Board, que j'endosse totalement, et, d'autre part, ne pas reconnaître une étude faite pour la commission Bélanger-Campeau, remise à jour par votre propre gouvernement, remise à jour à l'effet qu'il y aurait un déséquilibre fiscal de 6 à 8 milliards de dollars, M. le Président.
À titre de conclusion, Mme la Présidente ? je sais que vous regardez l'horloge... À titre de conclusion, Mme la Présidente, la commission Séguin a été claire, elle a dit... elle a invité le gouvernement à poursuivre les efforts entrepris auprès des autres provinces afin d'établir une stratégie pour mettre fin au déséquilibre fiscal. Moi, je vous pose la question: Qui est le mieux placé pour faire des alliances avec nos partenaires des autres provinces? Qui connaît le mieux le reste du Canada pour aller vendre cette idée et persuader et, de façon crédible, aller défendre cette position dans le reste du Canada? Est-ce qu'il ne serait pas opportun pour le premier ministre aujourd'hui de se rendre compte que, s'il veut défendre cette position, il doit absolument obtenir un mandat de l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Et, s'il obtient un tel mandat de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, à ce moment-là, il partira de façon crédible défendre cette position dans l'ensemble du Canada. Merci, Mme la Présidente.
Des voix: Bravo!
La Présidente: Alors, je cède maintenant la parole au ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. Et je vous informe que le temps imparti aux intervenants qui suivent est de cinq minutes. M. le ministre.
M. François Legault
M. Legault: Oui. Mme la Présidente, c'est avec beaucoup de plaisir que je prends aujourd'hui la parole en cette Assemblée pour parler d'un sujet fondamental pour l'avenir du système québécois de santé et de services sociaux. J'emploie le mot «fondamental», Mme la Présidente, mais je pourrais ajouter que de dénoncer ce déséquilibre fiscal, c'est la position la plus responsable que nous puissions prendre pour maintenir un réseau de services de santé et de services sociaux accessible, public, universel, gratuit et équitable.
Mme la Présidente, même si on gère nos finances publiques de façon responsable, on ne fait plus de déficit depuis 1998, il faut quand même admettre qu'on a un grave problème de financement, et ce problème, Mme la Présidente, il est structurel. Avec les effets, les impacts du vieillissement de la population, l'augmentation du coût des médicaments, les nouvelles technologies qui nous permettent de mieux soigner nos gens, nous permettent de les garder en santé plus longtemps, on a une évolution des coûts de la santé qui devrait être de l'ordre de 5 à 6 % par année. C'est vrai au Québec, c'est vrai partout dans le monde, Mme la Présidente. Et, pendant ce temps-là, nos revenus, à Québec, augmentent à un rythme d'environ 3 %, ce qui est très bien, Mme la Présidente, mais ce qui ne nous permet pas de concilier nos revenus avec nos dépenses. Donc, pas besoin d'être comptable, bien savant pour dire que ça ne peut plus continuer, que ça va s'accentuer au cours des prochaines années.
Il y a une partie des dépenses de santé au Québec qu'on est incapable de financer. Et, pendant qu'on se serre la ceinture, pendant qu'on se demande à chaque année comment on va concilier l'inconciliable, le fédéral accumule des milliards de dollars. Cette année, qui pourtant n'est pas la meilleure année, on parle de 10 milliards de dollars. Et je voudrais faire remarquer au chef de l'opposition, quand il parlait des déclarations de Lucien Bouchard tantôt, je voudrais faire remarquer que ces déclarations ont eu lieu au moment où le gouvernement fédéral faisait des déficits. Il a maintenant des surplus. Et je n'ai pas beaucoup entendu parler le chef de l'opposition des surplus de 50 millions de dollars par semaine qui sont à Ottawa et qui devraient être au Québec pour s'occuper de nos services sociaux.
Mme la Présidente, c'est important, il faut que les Québécois et les Québécoises récupèrent leur argent. Et il faudra bien un jour, il faudra bien un jour, Mme la Présidente, que les dirigeants du gouvernement fédéral, qu'ils s'appellent Jean Chrétien ou qu'ils s'appellent Paul Martin, qu'ils reconnaissent ce déséquilibre. Et, tant que ceux-ci n'accepteront pas de s'asseoir pour régler ce déséquilibre, il ne faut rien exclure pour se donner un rapport de force face à Ottawa. Parce que c'est urgent d'agir, Mme la Présidente. Ce n'est pas théorique, nous avons besoin de cet argent pour donner des services de santé, des services sociaux à toutes les personnes au Québec, incluant aux personnes âgées, qui sont de plus en plus nombreuses et qui ont le droit à ces services.
Mme la Présidente, je suis particulièrement heureux que nous débattions de cette motion aujourd'hui, parce que je crois qu'il est temps qu'on explique à la population de façon concrète que nos vraies priorités, elles sont ici, dans les champs de compétence de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire en santé et services sociaux, en éducation, dans l'aide à la famille. C'est ici que sont les priorités. Ce n'est pas à Patrimoine Canada, c'est moins à la Défense nationale. C'est ici que les gens, les Québécois et les Québécoises, veulent voir leur argent investi.
n(11 h 40)n Et, Mme la Présidente, je dirai, en conclusion, que le Québec est aujourd'hui à la croisée des chemins pour sauver ses programmes sociaux. Pourtant, Mme la Présidente, et le premier ministre le disait tantôt, nous vivons une période de croissance économique exceptionnelle. Mais, à cause de la réduction des transferts du gouvernement fédéral, ces surplus s'accumulent à Ottawa. Or, nous, au Parti québécois, nous croyons qu'on a le devoir d'utiliser les effets de cette croissance économique, de cette richesse, pour protéger nos acquis sociaux les plus importants, à commencer par notre système de santé public, et pour partager cette richesse avec les jeunes en investissant en éducation, dans nos familles. C'est urgent de corriger ce déséquilibre fiscal. Nous avons tous le devoir de faire avancer le Québec, Mme la Présidente. Et je dirais une dernière phrase, Mme la Présidente.
Des voix: ...
La Présidente: Avec le consentement. Avec le consentement? Consentement. Une dernière phrase, consentement.
M. Legault: Une dernière phrase. Le rapatriement des points d'impôt, ce n'est pas la souveraineté, mais c'est plus de souveraineté pour le Québec. Merci.
La Présidente: Je cède maintenant la parole au député de Châteauguay.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Merci, Mme la Présidente. Déjà, en 1997, l'actuel chef de l'opposition officielle soulignait la problématique du déséquilibre des ressources entre le fédéral et les provinces et proposait déjà, à cette époque, un nouveau partage de points d'impôt. Depuis, le Parti libéral du Québec a utilisé tous les forums mis à sa disposition pour faire avancer ce dossier: ici même, à l'Assemblée nationale, par une motion déposée par ma collègue de Marguerite-Bourgeoys en 1999, et dans chacune des capitales provinciales, lors des rencontres entre le chef du Parti libéral du Québec et les premiers ministres et chefs d'opposition de chacune des provinces, et tout récemment encore, devant la commission Romanow, pour bien faire sentir à cette instance l'importance, d'une part, de respecter les compétences des provinces et, d'autre part, de reconnaître l'important accroissement des coûts associés à la médecine moderne et l'importance de bien répartir les moyens pour rencontrer ces coûts.
L'actuel gouvernement fédéral ne peut pas tout simplement édicter que le déséquilibre n'existe pas. À l'instar de la commission Séguin, les Québécois souhaitent que le gouvernement du Québec déploie ses meilleures ressources pour établir une stratégie commune avec les autres provinces pour faire prévaloir le souhait de chaque Canadien, du Québec et d'ailleurs, à l'effet d'avoir de meilleurs services.
Aujourd'hui, nous soulignons l'importance de la contribution fédérale, mais nous n'oublions pas que la santé est la juridiction des provinces, et nous devons accepter d'être responsables de nos responsabilités. Nos concitoyens, à raison, n'acceptent pas de se faire répondre que c'est toujours de la faute de l'autre. Ils savent que l'amélioration de leurs soins nécessite la collaboration de tous.
Ainsi, nous savons tous que le gouvernement du Québec doit adopter des nouvelles orientations à l'égard du budget actuel, actuellement dévolu à la santé. On peut en avoir plus. On peut en avoir plus pour chacun de nos dollars santé si, à titre d'exemple, on améliore l'organisation du travail, comme nous en parlions hier à l'égard du nombre trop élevé d'unités d'accréditation syndicale dans les établissements de santé. On peut aussi tirer un meilleur profit de nos équipements payés à gros prix mais qui cessent de fonctionner à 16 heures et qui dorment la fin de semaine. Pour prendre un cas concret, que dire des trois salles de chirurgie cardiaque à l'hôpital Laval payées 20 millions mais ouvertes seulement deux mois par année? On peut faire mieux avec ce que l'on a déjà. Et la motion d'aujourd'hui ne doit pas servir à occulter cette réalité.
Par ailleurs, si notre plaidoyer pour convaincre Ottawa de prioriser la santé veut être crédible, si notre motion veut être utile, le gouvernement du Québec doit lui-même montrer l'exemple. Si on prend les données de l'ICIS, l'Institut canadien d'information sur la santé, entre 1994 et 2001, le Québec a augmenté son budget de santé de 22 %, le plaçant au dixième et dernier rang des provinces en termes de pourcentage d'augmentation des dépenses en santé. La neuvième position est occupée par le Nouveau-Brunswick, avec une hausse de budget de 37 %. Si on prend les chiffres du gouvernement du Québec, la hausse entre 1994 et 2001 ne serait pas de 22, mais de 32 %. Malheureusement, même avec ces chiffres, le Québec arrive encore au dernier rang. Annuellement, le gouvernement du Québec a décidé de moins prioriser la santé que les autres provinces. Pas étonnant que nous soyons passés de la troisième position à la dixième en termes de financement de la santé per capita.
Par ailleurs, de 1996 à 2002, les crédits d'impôt aux entreprises sont passés de 800 millions à 1,8 milliard annuellement, une hausse de plus de 100 %. Le gouvernement du Québec a choisi une autre priorité que la santé, et le malheur, c'est que les résultats ne sont pas au rendez-vous. En 1996, nous avions 18 % des investissements privés; maintenant, c'est 16,7. Comme le disait Alain Dubuc, comment se fait-il que le gouvernement du Québec consacre tant de ressources au développement économique et récolte de si décevants résultats? Lorsqu'on regarde la situation au Québec, M. le Président, la vérificatrice le disait encore, on constate les soins pour les personnes âgées, l'exploitation de celles-ci, le dernier rang du Québec pour les soins à domicile, les listes interminables en réadaptation, la désuétude de nos équipements, l'essoufflement de nos ressources humaines, le caractère minimaliste de nos actions en prévention.
Les Québécois aspirent à ce que le gouvernement prenne un nouveau départ en santé. Ils l'exigent de leurs gouvernants à Ottawa et à Québec. L'Assemblée nationale donne suite aujourd'hui à leur requête. Nous demandons au gouvernement fédéral de reconnaître l'importance de revoir les moyens, et nous le faisons en reconnaissant que le gouvernement du Québec va lui-même changer de cap et montrer l'exemple. On peut gérer mieux à l'égard du budget actuel de la santé, on peut prioriser mieux à l'égard du budget global du Québec, on peut collaborer mieux à l'égard du partage des ressources entre les gouvernements. Les Québécois le demandent, le Parti libéral du Québec s'y engage. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre d'État à la Solidarité sociale, à la Famille et à l'Enfance, vous avez la parole.
Mme Linda Goupil
Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, c'est un privilège également de pouvoir prendre la parole à un moment aussi important de notre histoire. Vous savez, je me plais à dire, quand je rencontre les gens avec les responsabilités ministérielles et avec l'équipe qui travaille avec moi sur ces dossiers, c'est que c'est le visage humain du Québec que j'ai le privilège de représenter, que ce soient les femmes, les aînés, nos familles.
M. le Président, le déséquilibre fiscal, c'est exact de dire que ça peut paraître complexe en soi parce que c'est des chiffres, et souvent on a de la difficulté à l'expliquer aussi clairement que nous le souhaiterions. Cependant, M. le Président, je peux vous dire qu'à tous les jours, et particulièrement durant la période des questions, nous entendons différents députés ici, de chaque côté de la Chambre, qui expriment vouloir avoir de meilleurs services pour les femmes et les hommes qu'ils représentent. Je suis déçue quand j'entends parler de partisanerie. Parce que chaque parti, bien sûr, essaie de faire valoir son point de vue. Ce n'est pas de la partisanerie, M. le Président, c'est de représenter les femmes et les hommes à partir des principes et des valeurs que nous croyons.
Je fais partie d'une équipe qui propose au Québec la souveraineté du Québec. Et, comme femme qui a eu 40 ans il n'y a pas tellement longtemps, j'ai eu le privilège de pouvoir bénéficier d'un système d'éducation, de soins de santé et de mesures sociales qui nous ont permis de faire en sorte que le Québec est où il est rendu, M. le Président. Cependant, quand on parle de l'urgence d'agir maintenant, c'est parce que nous avons des besoins qui sont ici, à Québec. Quand les femmes et les hommes, les aînés, les enfants, les familles, les jeunes demandent plus de soutien, ce n'est pas dans un an, dans deux ans, dans trois ans ou dans quatre ans, c'est maintenant, M. le Président, que ces hommes et ces femmes sont en droit de s'y attendre. Plus de 50 % des impôts que les Québécois et Québécoises paient s'en vont à Ottawa. Et, avec les études qui ont été démontrées, c'est confirmé hors de tout doute, M. le Président, que c'est 50 millions par semaine de moins que nous avons.
Alors, M. le Président, quand on nous dit qu'on n'est pas tout à fait d'accord avec les chiffres exacts, les hommes et les femmes du Québec qui paient des impôts, ils ne veulent pas savoir exactement quel est le chiffre. Une chose est certaine, ils paient des impôts à Québec, ils en paient à Ottawa. Et, quand vient le temps de nous retourner notre argent, M. le Président, actuellement, nous avons des manques à gagner de l'ordre de 50 millions de dollars.
Alors, M. le Président, ce que les femmes et les hommes de cette Assemblée ont dit aujourd'hui, ils ont dit que, unanimement, nous reconnaissions que l'argent des contribuables du Québec qui va à Ottawa ne revient pas chez nous. Alors, si nous voulons être de crédibles parlementaires de cette Assemblée, ce n'est pas dans six mois, dans un an ou dans deux ans que nous devons bouger, mais c'est aujourd'hui, maintenant qu'il nous faut, avec nos Québécois et nos Québécoises, aller chercher notre argent pour que nous choisissons le Québec. Et, ensuite, quand nous aurons récupéré ce qui nous appartient, les femmes et les hommes choisiront qui ils veulent pour les représenter à cette Assemblée, Mme la Présidente.
n(11 h 50)nDes voix: ...
La Présidente: La parole est au député de Chapleau.
M. Benoît Pelletier
M. Pelletier (Chapleau): Merci. Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, j'affirmerai d'emblée que le déséquilibre fiscal n'est pas un mythe, c'est une réalité. Et, selon nous, le déséquilibre fiscal est un problème structurel et non pas conjoncturel, qui commande des solutions durables. Toutes les provinces canadiennes, y compris le Québec, ont besoin d'un financement stable qui les mette à l'abri des compressions unilatérales d'Ottawa dans les transferts monétaires. Elles ont aussi besoin que le fédéral évacue financièrement les champs de compétence qui leur appartiennent en propre en vertu de la Constitution canadienne.
La solution au déséquilibre fiscal passe par la récupération par les provinces de points d'impôt ou d'un espace fiscal. Nous croyons d'ailleurs que cette question devrait être abordée conjointement avec celle du renforcement de la péréquation au Canada. Le but ultime, c'est que le Québec et les autres provinces disposent des recettes fiscales qui leur permettent d'assumer pleinement et adéquatement leurs responsabilités.
Mais la question se pose, Mme la Présidente, de savoir qui donc en cette Chambre serait le mieux placé pour atteindre cet objectif, donc, qui est celui de réduire le déséquilibre fiscal au Canada. Et j'imagine aisément le chef de l'ADQ, donc, vouloir assumer ce rôle, se présenter devant ses homologues provinciaux, les premiers ministres des autres provinces du Canada, et leur dire: J'ai besoin de votre aide pour réduire le déséquilibre fiscal. Alors, ils vont lui demander: Mais est-ce que vous êtes fédéraliste ou êtes-vous souverainiste? Il va leur dire: En 1995, j'étais dans l'autobus du Oui; par la suite, j'ai affirmé que j'étais à la fois fédéraliste et souverainiste; et, maintenant, je peux vous rassurer, je ne suis ni l'un ni l'autre, je ne suis ni fédéraliste ni souverainiste. Aidez-moi, cependant, à récupérer des points d'impôt ou un espace fiscal, aidez-moi à combattre le déséquilibre fiscal, puis je vous dirai après, chers premiers ministres, je vous dirai après si, moi, je vais me servir de ça pour promouvoir la cause, l'amélioration du fédéralisme canadien ou la cause de la souveraineté du Québec. Bien, les premiers ministres vont lui dire: Cher ami, retournez chez vous, branchez-vous, quand vous aurez pris une décision, vous viendrez nous dire, après ça, si vous voulez aider le Canada ou si vous voulez faire la promotion de la souveraineté, puis, à ce moment-là, on pourra commencer à parler.
J'imagine de la même façon le premier ministre du Québec actuel se rendre voir ses homologues provinciaux et leur dire: Écoutez, quant à moi, c'est clair, je suis souverainiste et, je vous le dis d'emblée, je ne suis pas ici pour améliorer le fédéralisme canadien; néanmoins, il me fait plaisir de présenter le rapport Séguin, qui est un outil précieux de promotion de la cause de la souveraineté du Québec. Alors, les autres premiers ministres vont lui dire: Oui, mais, M. le premier ministre, on sait que vous êtes un souverainiste, vous l'avez dit à maintes reprises, vous l'avez déclaré clairement, mais, nous, ce qui nous préoccupe, c'est aussi le renforcement de la péréquation au Canada. Mais, à ce moment-là, j'imagine que le premier ministre actuel va leur répéter ce qu'il a dit dans le journal La Presse le 17 février 1999. Il va dire ça aux premiers ministres de l'Atlantique, aux premiers ministres du Manitoba, Saskatchewan, aux premiers ministres finalement des différentes provinces canadiennes, il va leur dire: Faites-vous-en pas, «la péréquation ? et je cite ? c'est un écran de fumée, c'est l'aide sociale au niveau étatique, une sorte de BS pour État sous-national». Bien, vous allez obtenir les résultats que vous souhaitez. On va vous dire non. Parce que le seul parti qui est crédible pour défendre la cause du déséquilibre fiscal en cette Chambre, c'est le Parti libéral du Québec.
Des voix: Bravo!
M. Pelletier (Chapleau): Cette cause du déséquilibre fiscal, c'est celle qu'on a défendue dans notre rapport rendu public en octobre dernier, c'est celle qu'on a défendue dans notre Plan d'action pour un prochain gouvernement libéral, c'est celle qu'on a défendue dans le rapport qu'on a soumis devant la commission Séguin, c'est celle qu'on a plaidée devant tous les premiers ministres provinciaux, les chefs de l'opposition, les ministres des Affaires intergouvernementales que le chef du Parti libéral et moi-même avons eu l'occasion de rencontrer au cours d'une tournée pancanadienne il y a de cela quelques mois. Et tout cela fait de nous, Mme la Présidente, cette cohérence, cette démarche déjà pancanadienne que nous avons entamée, tout ça fait de nous, le Parti libéral du Québec, le parti le plus sérieux, le plus crédible et le plus sincère pour défendre âprement les intérêts du Québec, mais dans l'ensemble du fédéralisme canadien.
Des voix: Bravo!
La Présidente: Alors, que l'on fasse l'appel aux députés. Est-ce que cette motion est adoptée? Oui, M. le leader du gouvernement.
M. Boisclair: Compte tenu de l'importance du sujet, je pense qu'il serait approprié que nous fassions un vote nominal.
La Présidente: Alors, je réitère que l'on fasse l'appel aux députés. Je vais suspendre quelques minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 56)
(Reprise à 11 h 59)
La Présidente: Nous reprenons donc nos travaux. Et je demanderais aux membres de l'Assemblée nationale de regagner leur siège. Alors, je demanderais, avec célérité, que chacun regagne son siège. Mme la députée de Bourassa.
Mise aux voix
Alors, je mets maintenant aux voix la motion conjointe présentée par M. le chef de l'opposition officielle, M. le premier ministre et M. le député de Rivière-du-Loup, qui se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale, principalement en vue d'améliorer les services de santé, d'éducation et de soutien à la famille, demande au gouvernement fédéral de reconnaître et de corriger le déséquilibre fiscal constaté par le rapport Séguin, en tenant compte de ses recommandations qui dessinent un cadre nouveau pour les relations financières et fiscales au sein de la fédération canadienne, notamment afin que cessent ses interventions dans le champ de compétences des provinces.»n(12 heures)n Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Vallières (Richmond), Mme Boulet (Laviolette), M. Gobé (LaFontaine), M. Laporte (Outremont), M. Williams (Nelligan), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), Mme Mancuso (Viger).
M. Landry (Verchères), M. Boisclair (Gouin), Mme Marois (Taillon), Mme Beaudoin (Chambly), M. Charbonneau (Borduas), M. Brouillet (Chauveau), M. Legault (Rousseau), Mme Goupil (Lévis), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Jutras (Drummond), M. Julien (Trois-Rivières), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Rochon (Charlesbourg), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Baril (Arthabaska), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Legendre (Blainville), M. Simard (Montmorency), M. Morin (Nicolet-Yamaska), Mme Lemieux (Bourget), M. Facal (Fabre), Mme Papineau (Prévost), Mme Maltais (Taschereau), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Côté (La Peltrie), M. Boucher (Johnson), Mme Charest (Rimouski), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Caron (Terrebonne), M. Geoffrion (La Prairie), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Bertrand (Charlevoix), M. Côté (Dubuc), M. Payne (Vachon), M. Lachance (Bellechasse), M. Paré (Lotbinière), M. Beaumier (Champlain), M. Rioux (Matane), Mme Doyer (Matapédia), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Laprise (Roberval), M. Lelièvre (Gaspé), M. Bergeron (Iberville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Labbé (Masson), M. Boulianne (Frontenac), Mme Barbeau (Vanier), M. Cousineau (Bertrand), M. Pagé (Labelle), M. Désilets (Maskinongé).
M. Dumont (Rivière-du-Loup).
La Présidente: M. le leader de l'opposition officielle.
M. Paradis: Simplement solliciter les consentements des membres de cette Assemblée pour que le député d'Orford puisse également enregistrer son vote.
La Présidente: Il y a consentement.
La Secrétaire adjointe: M. Benoit (Orford).
La Présidente: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? M. le Secrétaire général.
Le Secrétaire: Pour: 89
Contre: 00
Abstentions: 0
La Présidente: M. le leader du gouvernement.
M. Boisclair: Oui. Je voudrais prendre quelques instants pour solliciter votre collaboration particulière, Mme la Présidente. Vous êtes celle qui représentez notre Assemblée nationale auprès des Québécois et des Québécoises, mais auprès aussi des autres citoyens du Canada et ailleurs dans le monde. Je pense, compte tenu de l'importance de la motion qui vient d'être adoptée à l'unanimité par l'ensemble des parlementaires présents, qu'il convienne que vous fassiez parvenir cette motion adoptée par les députés à la fois aux Législatures des autres provinces mais aussi au président de la Chambre des communes du Canada. Je pense, sur cette question, avoir l'appui des membres de l'opposition à vous proposer aussi.
La Présidente: Alors, je comprends qu'il y a consentement, et c'est un honneur pour moi que de transmettre cette motion que l'Assemblée vient d'adopter à l'unanimité.
Questions et réponses orales
Alors, nous abordons maintenant la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.
Publication des propositions d'ententes
territoriales avec la nation innue
M. Jean J. Charest
M. Charest: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je veux demander au premier ministre de nous éclairer sur un dossier qui fait l'objet d'un vif débat dans certaines régions du Québec, entre autres le Saguenay?Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, le Nord-du-Québec, c'est toute la question de l'approche commune. Et là ça prend une tournure plutôt inquiétante. Au fil des assemblées publiques, la population, les populations des régions manifestent leur inquiétude de façon de plus en plus virulente. Et avouons que cette inquiétude est alimentée par le fait que le gouvernement refuse de rendre publics les textes des négociations.
Or, Mme la Présidente, hier, il y a eu une réunion, dans le Saguenay?Lac-Saint-Jean justement ? ce qui était autrefois la ville Saguenay ? et, au moment de cette assemblée, les fonctionnaires ? parce qu'il n'y avait pas d'élus ? puis les fonctionnaires, qui font leur travail honnêtement ? on n'a pas de raisons de remettre en doute ce que ces gens-là font, bien au contraire ? ont dit qu'il n'était pas question de rendre les textes publics, que c'était trop compliqué. Et je vais...
Permettez-moi de vous citer un texte du journal Le Quotidien d'aujourd'hui, là où le titre, c'est: Approche commune ? Pas question de livrer le texte maintenant, et où il est dit ceci: «La raison, expliquent l'adjoint au négociateur du Québec, Yannick Routhier, le négociateur fédéral en chef associé, Anicet Gagné, et le sous-ministre adjoint aux affaires autochtones, Christian Dubois, est qu'ils n'ont pas encore été paraphés par tous les négociateurs, que les ministres n'en ont pas encore pris connaissance et que, de toute façon, ils sont trop techniques.» Drôle de réponse à donner à une population qui est appelée à payer la note. C'est trop technique pour leur donner le texte mais pas trop technique pour qu'ils paient la note. Alors, je pense que le gouvernement serait bien, bien, bien avisé, Mme la Présidente, d'agir rapidement puis avec célérité avant qu'il y ait trop tension, puis d'expliquer le contenu et de rendre publics les textes.
Une voix: Bravo!
La Présidente: M. le premier ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: Absolument. Et le ministre sectoriel, qui fait très bien ça, aurait pu répondre, mais je veux répondre formellement au nom du gouvernement.
Cette approche commune que nous poursuivons est louable en soi. Mais, dans le mot «approche» il y a justement «commune», et rien ne sera fait sans une information complète et totale de toutes les populations concernées. Donc, je comprends, là, les fonctionnaires, j'ai beaucoup de respect pour eux, je l'ai été moi-même déjà, mais le gouvernement décide de rendre tous les textes disponibles à l'ensemble de la population dans les meilleurs délais.
Pourquoi ne l'avons-nous pas fait jusqu'à maintenant? Et, en cela, les fonctionnaires n'avaient pas totalement tort, c'est parce qu'il y a une troisième partie à l'entente, le gouvernement du Canada, qui n'avait pas encore paraphé. Alors, le ministre sectoriel a déjà écrit à M. Robert Nault, qui est ministre des Affaires indiennes, le 27 mai 2002. On n'a pas eu de réponse, nous n'attendons plus, nous rendons les textes publics pour qu'il y ait un débat en profondeur.
n(12 h 10)n Je pense que le Québec, dans ses relations avec les aborigènes, est une terre exemplaire sur cette planète. Cela a été dit par les leaders cris, en particulier. Cela a été dit après notre entente avec les Inuits. Il faut continuer dans cette voie, mais justement avec cette mentalité que tout le monde doit gagner et nul ne doit perdre. Et c'est dans cette optique que les populations autochtones comme non autochtones seront informées, consultées, et ce n'est que dans deux ans que nous ferons des choses plus définitives.
La Présidente: En complémentaire.
M. Jean J. Charest
M. Charest: Mme la Présidente, on n'achète pas du tout, nous, ce blâme à l'endroit du gouvernement fédéral. Il n'y a rien, mais absolument rien qui empêche le gouvernement de rendre publics les textes. Et de blâmer le gouvernement fédéral, ça ne marche pas, surtout pas dans un dossier comme celui-là. Puis, ce qui nous inquiète, Mme la Présidente, c'est que ce n'est pas la première fois que le gouvernement nous le dit.
Pour mémoire, au mois d'août 2000 ? au mois d'août 2000, là, on approche bientôt le deux ans ? un papier publié dans Le Quotidien avait comme titre La deuxième phase sera plus limpide, et là je cite: «Le ministre délégué aux Affaires autochtones convient que le gouvernement aurait pu agir plus rapidement en termes de transmission de l'information à la population. Sur ce point, il s'engage à ce que la seconde phase des discussions puisse être suivie régulièrement par les représentants politiques et les différents groupes d'intérêts.» Ça, c'était le ministre des Affaires autochtones de l'époque, il y a deux ans.
En 2001, plus précisément le 7 mai 2001, dans un échange entre le député de Jacques-Cartier et le ministre en commission parlementaire, le ministre de l'époque, qui était M. Chevrette, disait ceci: «Puis il semble qu'on ne veut pas flouer personne. On veut véritablement faire en sorte que les gens sachent ce qui se passe concrètement dans ce dossier.» Ça, c'était au mois de mai 2001, il y a un an.
Il y a quelques jours, le 5 juin 2002, le ministre actuel... et le titre du papier, dans Le Soleil, c'était Le message passe mal ? Rémy Trudel admet que le plan de communication sur les négociations territoriales est un échec. Un échec, qu'il faut partir à zéro. Et je cite: «"J'admets que les gens concernés par l'entente n'ont peut-être pas été suffisamment informés des déroulements. Il faut impliquer les populations dans le processus de négociations entreprises avec les Innus", avait-il dit.» Sauf qu'hier vos fonctionnaires, incluant votre sous-ministre... il dit exactement le contraire, qu'il ne peut pas rendre les textes publics parce qu'ils sont trop techniques, la population ne pourra pas comprendre.
Alors, qui dit vrai? Ça remonte à... il y a maintenant... 2000, 2001, une déclaration, le sous-ministre hier soir, le premier ministre dit une chose aujourd'hui. Alors, qui doit-on croire sur ce dossier-là? Et à quel moment exactement allez-vous rendre les textes publics? Parce que là on arrive au bout de la crédibilité du gouvernement dans ce dossier-là.
La Présidente: M. le ministre d'État.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Mme la Présidente, dès avril 2000, lorsque nous avons adopté, au gouvernement, la base de négociation d'une entente avec la nation innue, l'approche commune, nous avons rendu cette approche publique et nous avons convenu d'entamer une nouvelle phase des échanges avec la nation innue pour en arriver éventuellement à un traité de paix et de développement. Et, comme le disait le premier ministre, en pareille matière, nous commençons à avoir une feuille de route qui est exemplaire dans le monde entier maintenant.
Deuxième élément de la réponse au chef de l'opposition. Avec les demandes d'information et d'échanges pour discuter à la table de négociations, nous avons constitué des tables de concertation avec les conseils régionaux de développement, les CRCD, et les élus municipaux dans les trois sections, dans les trois secteurs concernés: la Haute-Côte-Nord, la Moyenne et la Basse-Côte-Nord, et nous avons constamment travaillé avec ces tables avant de se présenter à la table de négociations en vue d'en arriver à une proposition d'entente.
Maintenant que nous avons sur la table une proposition d'entente, nous avions convenu aussi, parole donnée, par respect pour la troisième partie qui est autour de la table, le gouvernement fédéral... nous avons demandé de parapher ces textes dans les meilleurs délais possible. Parce que, par respect pour la population, nous voulons rendre rapidement disponibles ces textes. C'est maintenant chose faite. Le gouvernement du Québec, après avoir demandé avec insistance au gouvernement fédéral, encore en date du 27 mai, du 27 mai dernier... nous prenons la décision, avec l'accord des leaders des communautés innues, de la nation innue, de donner cette information complètement ouvertement ? et nous regrettons que le gouvernement fédéral n'ait pas pris la même décision aussi rapidement ? par respect pour les populations concernées, chez la nation innue comme chez les Québécois, Mme la Présidente.
La Présidente: En complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui, Mme la Présidente. Je n'aurai pas de principale aujourd'hui, c'est sur le même sujet, je vais raccourcir le tout.
Ma question au ministre, elle est fort simple: Compte tenu de l'importance que cette question prend dans les élections partielles qui sont en cours dans le comté de Lac-Saint-Jean et compte tenu de l'interprétation qu'on sait d'avance que le gouvernement fera si jamais il gagnait le comté, qu'il a un mandat pour signer après coup, est-ce que le ministre peut nous assurer que les textes, qu'il dit maintenant que le gouvernement s'engage à rendre publics, qu'ils vont être rendus publics au cours des prochains jours pour que les gens, le 17 juin, sachent de quoi ils mandatent le gouvernement du Parti québécois?
La Présidente: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Oui, Mme la Présidente, nous rendrons publics ces documents dans les meilleurs délais possible, ça veut dire au cours des prochaines heures et des prochains jours, et de façon à ce que la discussion publique puisse être permise. Et le chef de l'ADQ pourra très certainement méditer sur les textes qui sont déposés et la déclaration de son candidat dans le comté de Lac-Saint-Jean comme de quoi ces nations autochtones se promènent maintenant en avion et en gros char et pratiquent la chasse 24 heures par jour, sept jours par semaine. Il pourrait méditer aussi là-dessus, s'il veut contribuer d'une façon autre à ce que nous ayons une entente de paix et de développement au Saguenay?Lac-Saint-Jean, comme partout ailleurs au Québec.
La Présidente: En complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui, dernière complémentaire. Est-ce que le ministre peut aussi assurer les gens du même comté, du comté de Lac-Saint-Jean, qui ont vu des séances d'information se tenir de chaque côté de chez eux mais eux être privés d'une séance d'information, ce qui a été réclamé dans le milieu, est-ce que le ministre s'engage aussi à ce qu'une séance d'information du même genre se tienne dans cette partie-là de la région qui est touchée?
La Présidente: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Mme la Présidente, nous tiendrons toutes les séances d'information qui seront nécessaires jusqu'à plus soif, en termes d'information et d'échanges, parce que, comme l'indiquait par ailleurs le premier ministre il y a quelques minutes, l'approche commune suppose une connaissance commune, un partage commun également du destin des deux nations qui sont concernées, et qu'on en arrive à un traité de paix et développement, comme on est arrivé avec la nation crie, avec la nation crie et avec la nation inuit. Et c'était tellement de toute beauté hier de voir, de voir, à Val-d'Or, 400 leaders socioéconomiques de la nation crie et de la nation québécoise être ensemble dans la même salle et discuter partenariat, développement, création de richesse pour que nous soyons en mesure de davantage répondre aux besoins de tous les Québécois et les Québécoises et les nations qui partagent l'occupation du territoire national.
Ça, ça devrait amener également le chef de l'ADQ à apporter une contribution en termes de paix et de développement pour que nous puissions en arriver à ce mode de vie sur le territoire québécois, et qu'il parle un petit peu à son candidat également, dans Lac-Saint-Jean.
La Présidente: En principale, Mme la députée de Laviolette.
Maintien des services à l'urgence
au Centre hospitalier du Centre-de-la-Mauricie
Mme Julie Boulet
Mme Boulet: Merci, Mme la Présidente. Considérant la situation dramatique qui sévit à l'urgence de Shawinigan, qui ferme actuellement ses portes toutes les nuits, de 21 heures le soir à 8 heures le matin depuis le début du mois, et ça, pour tout le mois de juin ? et on anticipe que ça va être encore pire en juillet et en août;
Considérant que le Dr Renald Dutil, président de la FMOQ, a demandé au ministre de la Santé d'intervenir personnellement dans ce dossier et de poser des gestes rapidement ? et je cite: «Les médecins omnipraticiens de Shawinigan ne suffisent plus à la tâche d'assurer l'ensemble des services à l'urgence et auprès des patients hospitalisés au Centre hospitalier du Centre-de-la-Mauricie» ? la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec presse le gouvernement de négocier sans délai les mesures appropriées pour corriger la pénurie chronique des médecins dans cette région;
Considérant, Mme la Présidente, que la Mauricie est la région où le niveau d'accès réel aux soins de la santé est le plus bas de tout le Québec et que sa population est très inquiète ? qui plus est, j'aimerais également préciser que ça fait plusieurs mois que l'inquiétude perdure et que ça fait également plusieurs fois que j'interviens à ce sujet en cette même Assemblée et que nous n'avons toujours pas de solution ni de réponse ? ma question est fort simple, Mme la Présidente:
Qu'est-ce que le ministre entend faire pour assurer le maintien des services à l'urgence au Centre hospitalier du Centre-de-la-Mauricie? Qu'est-ce qu'il répond à la population? Qu'est-ce qu'il répond aux administrateurs et aux médecins, qui sont épuisés de chercher des solutions en vain?
n(12 h 20)nLa Présidente: M. le ministre d'État à la Santé.
M. François Legault
M. Legault: Oui, Mme la Présidente, nous sommes très conscients de ce problème potentiel à l'hôpital à Shawinigan. Nous avons eu plusieurs rencontres depuis le mois d'avril. Hier, on a présenté une cinquième proposition de lettre d'entente aux médecins du CHCM. Ce qu'on essaie de faire, Mme la Présidente, dans cette lettre d'entente, c'est premièrement de voir comment on peut libérer certains de leurs collègues pour qu'ils puissent pratiquer, les autres, à l'urgence. Parce que c'est important de le dire aussi, parce qu'il y a beaucoup de choses qui ont été dites à Shawinigan, entre autres par le Dr Martin. Et, hier, le Dr Kerkerian, qui est le directeur des services professionnels au Centre hospitalier du Centre-de-la- Mauricie, nous disait ? et c'est rapporté dans Le Nouvelliste ce matin ? que le Centre hospitalier du Centre-de-la-Mauricie n'est pas du tout d'accord avec certains propos tenus par le président de l'Association des médecins omnipraticiens de la Mauricie, le Dr Pierre Martin. Le Dr Kerkerian, donc, qui est directeur des services professionnels, dit qu'il ne manque pas de spécialistes et que la population peut recevoir les meilleurs soins possible.
Donc, Mme la Présidente, le problème se limite vraiment à la situation dans les urgences. Nous avons bonifié, pour une cinquième fois, hier, dans notre proposition, la rémunération des médecins, nous avons aussi bonifié la rémunération des médecins dépanneurs, nous avons ajouté des forfaits à l'urgence, nous avons déplafonné, aussi, la rémunération des médecins, nous avons mis en place une mixité de modes de rémunération à ce centre hospitalier, Mme la Présidente; nous avons aussi bonifié les salaires pour les confrères et les consoeurs qui peuvent libérer justement d'autres médecins pour aller travailler à l'urgence, Mme la Présidente. Il y a 376 000 $ aussi qui avaient été ajoutés par la régie régionale pour des bonifications, 200 000 $ aussi qui a été ajouté pour la formation, pour convaincre les gens d'aller travailler à Shawinigan.
Mme la Présidente, nous mettons tout en oeuvre actuellement pour arriver à trouver des solutions, avec la Fédération des médecins omnipraticiens, avec les médecins du Centre hospitalier du Centre-de-la-Mauricie, pour éviter toute rupture, et, Mme la Présidente, j'ai confiance que d'ici peu on va être capable de s'entendre. Et j'inviterais la députée à appuyer les dirigeants du Centre et de la régie régionale dans les efforts plutôt que de critiquer, Mme la Présidente.
La Présidente: En complémentaire, Mme la députée Laviolette.
Mme Julie Boulet
Mme Boulet: Mme la Présidente, est-ce que le ministre réalise que ce n'est pas moi qui ne les appuie pas, mais c'est bien lui qui ne les appuie pas, c'est bien lui qui n'était pas capable de nous trouver de solution concrète qui pourrait faire en sorte qu'on aurait des solutions à long terme et non des solutions de dépannage?
Est-ce que le ministre réalise que tout ce qu'il propose, c'est des solutions financières, et que ça n'a rien donné à date? Le problème, c'est une répartition équitable des effectifs médicaux sur tout le territoire. Vous avez mis des médecins à la retraite, ça a coûté plus de 2 milliards aux contribuables québécois, tout ça pour nous mettre dans le trouble en région. Aujourd'hui, on n'a plus de médecins pour soigner la population. C'est quoi, votre solution, M. le ministre, à ce problème-là?
La Présidente: M. le ministre.
M. François Legault
M. Legault: Oui. Mme la Présidente, je pense que la députée de Laviolette d'abord devrait vérifier ses sources d'information, parce qu'on me rapporte qu'il y a des médecins dans la région qui vont pratiquer plus de 900 heures à l'extérieur de la région pour avoir des meilleures bonifications de leur rémunération, Mme la Présidente.
Mme la Présidente, on en est au cinquième projet d'entente, et, à chaque fois, ce qui est demandé dans l'entente, c'est de bonifier la rémunération. On a accepté. Dans certains cas, les bonis atteignent 90 % de différence par rapport à Montréal, Mme la Présidente. On essaie de s'entendre, on essaie aussi de gérer avec nos ressources.
Et j'inviterais la députée de Laviolette a peut-être dire un petit mot à un citoyen qui est bien connu à Shawinigan, qui s'appelle Jean Chrétien, qui pourrait peut-être nous aider à en faire encore plus, parce que, oui, oui, Mme la Présidente, c'est important d'investir plus de fonds dans notre système pour être capable de mieux desservir la population. C'est ça aussi, être responsable. Mais, être responsable, ce n'est pas seulement à Québec, c'est aussi les Jean Chrétien d'Ottawa qui doivent l'être, responsables. Et l'ancienne candidate du Parti libéral du Canada, la députée de Laviolette, devrait avoir ses entrées peut-être pour aller en discuter avec ses petits amis à Ottawa. On a besoin de cet argent pour mieux servir la population, Mme la Présidente.
La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Laviolette.
Mme Julie Boulet
Mme Boulet: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais préciser au ministre que ce n'est pas le fédéral qui a mis les médecins à la retraite puis qui les a payés pour s'en aller chez eux.
Des voix: Bravo!
Mme Boulet: Mme la Présidente, étant donné que, la semaine dernière, M. le ministre me proposait ses services de comptable, bien, aujourd'hui, ça va me faire plaisir de lui proposer mes services de pharmacienne. Et, à juste titre, je vais lui proposer d'excellentes pilules pour augmenter le niveau de concentration, pour qu'il comprenne ma question puis qu'il réponde correctement à ma question. C'est quoi que vous allez faire pour le Centre hospitalier régional de la Mauricie? C'est quoi que vous allez faire pour qu'on ait des médecins chez nous?
Des voix: Bravo!
La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé.
M. François Legault
M. Legault: Mme la Présidente, il y a des limites à utiliser le coup, là, de la retraite des médecins. Ça fait cinq ans. La plupart, de toute façon, seraient à la retraite aujourd'hui. Donc, à un moment donné... Mme la Présidente, ça prend du temps, ça prend 10 ans, former un médecin. On a augmenté le nombre d'admissions de 60 % depuis 1998. Le résultat qu'on vit aujourd'hui, c'est le résultat des décisions qu'on a prises il y a 10 ans. Qui était là il y a 10 ans? Le Parti libéral du Québec. C'est ça, la vraie réalité.
Des voix: Bravo!
M. Legault: Mme la Présidente, nous multiplions les efforts pour trouver des solutions structurantes. Actuellement, avec les deux fédérations de médecins, nous entreprenons des négociations pour renouveler les ententes avec les deux fédérations de médecins, et déjà il a été convenu qu'au coeur... la première priorité de cette négociation, ce serait de travailler sur l'accessibilité. Donc, on va discuter la rémunération. On va discuter aussi les planifications d'effectifs, donc la répartition des effectifs à travers le Québec.
Mme la Présidente, à court terme, ce qu'on essaie de faire, c'est d'avoir une entente qui vise trois objectifs: un, reconnaître les efforts supplémentaires qui sont déployés par les médecins à cause du manque de personnel; deux, inciter les médecins à organiser leur travail en fonction du maintien du service de l'urgence ? il faut que l'urgence soit une priorité, ce n'est pas comme ça dans la tête de tous ceux qui travaillent là-bas, Mme la Présidente; et, troisièmement, attirer par des incitatifs intéressants des nouveaux médecins. On n'exclut aucune hypothèse, Mme la Présidente.
Et j'invite encore une fois la députée de Laviolette à travailler avec nous pour améliorer l'accessibilité. On a un beau régime de santé, c'est important de le préserver universel, accessible, gratuit, public. On a besoin de l'argent d'Ottawa pour y arriver, Mme la Présidente. Qu'ils soient donc un peu cohérents, de l'autre côté, avec...
La Présidente: En principale.
M. Benoit: En complémentaire, Mme la Présidente.
La Présidente: En complémentaire.
M. Robert Benoit
M. Benoit: M. le ministre, les médecins quittent la région; ils sont mis à la retraite par votre gouvernement. Qu'est-ce que vous dites aux citoyens qui ne sont pas capables de faire renouveler leurs prescriptions? Ils se présentent à la pharmacie, ils sont malades, ils disent à la pharmacienne ou au pharmacien: S'il vous plaît, renouvelez-moi ma prescription. Et on leur répond: Écoutez, vous devez, la loi oblige que ce soit signé par un médecin. Ils ne sont pas capables de trouver le médecin. Que dites-vous à ces gens-là?
La Présidente: M. le ministre.
M. François Legault
M. Legault: Mme la Présidente, c'est incroyable, ce qu'on vient d'entendre! Le député est en train de nous suggérer qu'on renouvelle des prescriptions qui sont expirées sans l'accord du médecin, sans la prescription du médecin. Ça n'a aucun bon sens! C'est irresponsable, Mme la Présidente!
Des voix: Bravo!
M. Legault: Mme la Présidente, nous travaillons avec toute l'énergie possible...
Des voix: ...
La Présidente: M. le ministre, juste un instant. C'est inadmissible, les bruits que j'entends du côté... à ma gauche, n'est-ce pas? Alors, la parole est au ministre d'État à la Santé.
n(12 h 30)nM. Legault: Mme la Présidente, nous faisons des efforts incroyables, avec la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, pour trouver des incitatifs, pour être capables, avec les médecins dépanneurs, de couvrir toutes les régions. Il faut s'assurer, Mme la Présidente, que toutes les personnes du Québec aient accès à un médecin. Mais on ne peut pas faire des suggestions comme le député vient de le faire, de renouveler des prescriptions sans avoir une prescription du médecin. Nous allons continuer à faire des efforts. Si le député veut me parler d'une région qui est moins couverte, qu'il m'en parle, on va s'en occuper. Actuellement, il y a quelques cas qui sont urgents, où c'est vrai que c'est difficile, Mme la Présidente. On fait des efforts. On a annoncé encore cette semaine la création et le démarrage des groupes de médecine familiale; ça va nous permettre d'augmenter l'accessibilité.
Des voix: Bravo!
La Présidente: En conclusion.
M. Legault: Oui. Mme la Présidente, grâce à ces GMF, on va avoir des médecins qui vont prendre en charge les patients en première ligne, on va continuer aussi partout au Québec à trouver des solutions à chaque fois qu'il y en a, malgré le fait que c'est difficile. Et j'inviterais le député à appuyer d'abord sa régie régionale qui fait des efforts incroyables pour régler les problèmes. Mais, s'il vous plaît, pas de suggestions qui n'ont pas de bon sens.
La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Laviolette.
Mme Julie Boulet
Mme Boulet: Oui. À ce que je vois, Mme la Présidente, M. le ministre, il va avoir vraiment besoin de ma pilule, il n'a rien compris.
La Présidente: En complémentaire.
Mme Boulet: Alors, ce que je veux savoir, M. le ministre, c'est que vos groupes de médecine familiale, on vous l'a dit...
Des voix: Question.
La Présidente: Oui, question.
Mme Boulet: O.K. Est-ce que le ministre réalise qu'avec ces groupes de médecine familiale ça ne règle en rien nos problèmes en région, qu'on n'a pas de problème à les regrouper, on a des problèmes à en trouver, et que les médecins que vous avez mis à la retraite, ça n'a pas fait des trous en région, ça a fait des cratères en région? Les gens, ils n'ont plus personne pour se faire soigner. Alors, quand vient le temps d'avoir un renouvellement de prescription, ils n'ont pas de médecin pour signer la prescription. C'est ça, le problème. Allez donc un peu sur le terrain; vous allez le voir, le vrai problème des gens.
Des voix: Bravo!
La Présidente: Je rappelle aux membres de cette Assemblée le règlement qui prescrit qu'on ne peut s'adresser directement à un député et qu'il faut donc le faire par l'intermédiaire de la présidente. M. le ministre d'État à la Santé.
M. François Legault
M. Legault: Oui. J'aimerais, Mme la Présidente, entendre de la bouche de la députée de Laviolette, qui est une pharmacienne, la réponse à son collègue, je veux dire le député d'Orford. J'aimerais ça, j'aimerais ça l'entendre pour voir si elle est d'accord avec ce que vient de dire le député d'Orford. J'aimerais ça l'entendre pour voir si elle trouve ça responsable, même venant d'une pharmacienne qui connaît bien le domaine.
Mme la Présidente, on va continuer à gérer ce système de santé et de services sociaux de façon responsable. On va continuer dans les négociations qui s'en viennent. J'ai demandé aux gens de mon ministère de me faire un inventaire complet, région par région, sous-région par sous-région, de tous les manques qu'on peut voir sur le territoire. On va proposer des nouvelles formules de rémunération, on va proposer aussi une nouvelle façon de répartir les effectifs. Ce n'est pas simple, la députée de Laviolette le sait. On va continuer d'agir de façon responsable pour garder notre système accessible à tous les Québécois et à toutes les Québécoises.
Des voix: Bravo!
La Présidente: M. le leader de l'opposition officielle.
Plan d'action visant
à contrer la pénurie
de médecins en région
M. Pierre Paradis
M. Paradis: Oui, en principale, mais sur le même sujet, Mme la Présidente. Est-ce que le ministre peut enfin porter attention aux questions qui lui sont posées? Le député d'Orford et la députée de Laviolette lui ont simplement demandé d'agir dans un dossier qui est intenable pour des gens. Dans des régions, celle d'Orford, celle de Laviolette et ailleurs au Québec, il y a des gens qui ont besoin de faire renouveler des prescriptions pour obtenir leurs médicaments et qui n'ont pas accès à des médecins. Parce que vous avez mis trop de médecins à la retraite, vous avez causé le problème.
Quelles solutions avez-vous à apporter? Au lieu de faire de la fabulation puis de la diversion, occupez-vous donc de vos dossiers puis des patients!
La Présidente: M. le ministre.
M. François Legault
M. Legault: Mme la Présidente, il faut dire des choses qui n'ont pas de bon sens, pour avoir deux députés, incluant le leader, qui sont obligés de se lever pour défendre le député d'Orford. C'est quand même incroyable.
Des voix: Bravo!
M. Legault: Mme la Présidente, mon prédécesseur a mis en place un groupe de médecins dépanneurs avec la collaboration de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. J'aimerais entendre les problèmes exacts du député d'Orford, la ville exacte. On va suivre le dossier. Avec le Dr Dutil, qui est le président de la Fédération des omnipraticiens du Québec, on a réussi jusqu'à présent, en l'espace de délais très raisonnables, à régler la grande majorité des problèmes. On va continuer de le faire. Mais, s'il vous plaît, pas de propos irresponsables.
La Présidente: En complémentaire.
M. Robert Benoit
M. Benoit: Jamais, Mme la Présidente, jamais le Parti libéral n'a proposé, ou moi, que nous offrions que des gens puissent obtenir des médicaments sans une prescription du médecin, ça, c'est bien clair. Le nom: la ville de Magog. Mme Suzanne Brulotte et Mme Tremblay, de la ville de Magog. Magog. Magog.
La Présidente: M. le ministre.
M. François Legault
M. Legault: J'accepte, Mme la Présidente, la rétractation du député d'Orford.
Des voix: Bravo!
La Présidente: M. le leader de l'opposition officielle.
M. Paradis: Oui. Mme la Présidente, auriez-vous l'obligeance de rappeler à l'ordre le ministre de la Santé qui fait preuve d'une malhonnêteté intellectuelle qui n'a jamais eu lieu, qui n'a pas sa place à l'Assemblée nationale?
Des voix: Bravo!
La Présidente: Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que je n'ai pas le pouvoir d'apprécier les propos qui sont tenus dans cette Assemblée, sauf s'ils sont contraires à notre règlement. Alors, en conclusion, M. le ministre d'État à la Santé.
M. Legault: Oui. Mme la Présidente, on va laisser ceux qui nous écoutent juger eux-mêmes de qui a des propos qui sont les plus déplacés. Maintenant, j'ai pris bonne note... J'avais demandé le nom de la ville, là; il m'a donné le nom de deux citoyens. Je ne sais pas si le député...
Des voix: Magog.
M. Legault: La ville de Magog. C'est ça. Il l'a dit après, mais il a dit aussi le nom de deux citoyens. J'espère que le député de Chomedey n'aura pas trop de problèmes, lui qui fait toujours attention aux données confidentielles. Mais je m'engage, Mme la Présidente, à revenir en privé au député d'Orford pour lui donner les informations pour le suivi, pour qu'on s'occupe bien de ces deux citoyens, Mme la Présidente.
Des voix: Bravo!
La Présidente: En principale, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Aide financière accordée
à Métaforia Divertissements inc.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Mme la Présidente, merci beaucoup. Pour le ministre de la Santé, je pense qu'il devrait écouter, parce qu'il nous a annoncé, n'est-ce pas, que ça prenait 10 ans à former un médecin. Je veux juste lui dire qu'en remercier un, ça prend une heure. D'accord? Alors, quand on veut comparer ce que ça prend pour former un médecin puis en remercier un, il y a une grosse différence.
Mais, moi, je voudrais revenir sur le gaspillage. Peut-être que le ministre de la Santé va être capable, à ce moment-là, de juger où va l'argent du gouvernement actuellement. Je voudrais parler, je voudrais revenir sur Métaforia. Métaforia, c'est ce centre d'amusement, n'est-ce pas, sur la rue Sainte-Catherine à Montréal, qui a fermé boutique, qui a fait faillite. Et, selon les chiffres, Métaforia, le coût aurait été... À un moment donné, la ministre des Finances nous a parlé de 18 millions, après ça c'était 23 millions., mais il semblerait qu'aujourd'hui ça a monté à 28 millions.
Moi, je voudrais savoir du premier ministre, parce que ça touche la SGF... À un moment donné, on a parlé que la SGF... Tout le monde était d'accord, y compris tous les journalistes, qui répétaient qu'ils avaient investi 12 millions de dollars. Dans les documents de la SGF, dans les crédits lors de l'étude des crédits, c'était marqué 16 millions. Là, de plus en plus, on entend 16 millions.
Est-ce que c'est 12 millions ou 16 millions qu'a investis et perdus la SGF? Et, si c'est 16 millions, peut-il nous dire depuis quand il a décidé que c'était 16 au lieu de 12? Et où est allé le 4 millions additionnel?
n(12 h 40)nLa Présidente: M. le premier ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: On ne décide pas si c'est 16 ou si c'est 12; les chiffres, c'est les chiffres.
Une voix: ...
M. Landry: Un instant. Les chiffres, c'est les chiffres, et on va les rendre publics. Je prends avis de la partie purement chiffrée, là. La Société générale de financement est une société transparente, une société admirable qui réussit à créer des dizaines de milliers d'emplois dans toutes les régions du Québec, et parfois elle se plante, comme on dit. Et là elle s'est plantée. Et il n'y a aucune honte là-dedans, parce qu'un entrepreneur qui ne se plante jamais, ce n'en est pas un.
La Société générale de financement, je vais vous dire son raisonnement là-dedans. Je l'ai suivi, puis je l'ai approuvé, puis je l'approuve encore. Métaforia avait conçu une technologie pour une exposition universelle qui a eu lieu en Europe de l'Ouest ? à Lisbonne, je crois. Oui, au Portugal. Et l'exposition était finie puis il y avait encore des queues devant le pavillon de Métaforia. Tout le monde, les Européens se ruaient sur cette espèce de plongée sous-marine artificielle. En tout cas, quelque chose, sur le plan technologique, de très, très bien. Alors, Métaforia, rentrée au Québec, a demandé la participation de la SGF pour refaire, rue Sainte-Catherine à Montréal, ce qui avait été un succès prodigieux à Lisbonne, et ça ne s'est pas produit. Ça a failli être repris par une société américaine. Ça ne l'a pas été.
Alors, en toute transparence, nous allons mettre tous les chiffres sur la table. C'est une question, là, de... Bien, la semaine prochaine, j'imagine. Mais, si j'avais une heure de plus, je les aurais. Mais je vous dis encore une fois: Je ne permettrai pas que l'on discrédite le modèle québécois, la Société générale de financement, ou autres critiques injustifiées. Quand l'économie du Québec est capable de créer 125 000 emplois en cinq mois, ça veut dire qu'il doit y avoir quelque chose qui marche bien.
Des voix: Bravo!
La Présidente: En conclusion.
M. Landry: Ça fait mal de perdre 28 millions. Ça a fait du bien en diable quand la Société générale de financement nous a envoyé, en liquidant un placement à Bécancour, quelque chose comme 200 millions de dollars, c'est-à-dire 10 fois plus!
Des voix: Bravo!
La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Merci, Mme la Présidente. Est-ce que, si le président de la SGF investit en fonction des lignes d'attente, est-ce qu'il va investir dans les hôpitaux, quand il y a des lignes d'attente dans les urgences?
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Jérôme-Forget: Je comprends, Mme la Présidente, que le premier ministre veuille prendre avis de la question. Moi, je vais simplement lui rafraîchir la mémoire. D'où vient l'écart? Parce que... la théorie du premier ministre, c'est qu'on investit à 5 puis on fait du 10. Vous vous rappelez? Ça, il l'a répété sur tous les toits à la grandeur du Québec. Je voudrais simplement lui rappeler que, cette année, il n'a pas reçu 200 millions de plus, imaginez-vous donc qu'il en a perdu près de 200 millions, parce qu'il a emprunté à 4,9 puis il a fait moins de 4 %. Ça fait 9 % de moins. Ça fait 180 millions de dollars qui s'est perdu.
La question, c'est bien simple: Est-ce que le premier ministre peut confirmer, au niveau de l'écart du 12 et du 16 millions de dollars, que la SGF est allée financer complètement, mais je dis bien complètement, l'investissement privé mis par Desjardins, qui avait été à moitié financé par Investissement Québec, et l'autre partie, il semblerait, financée par la SGF, donc zéro risque pour Desjardins? Le premier ministre peut-il nous dire, de son 5 et 10 % ? quand il emprunte à 5, il fait du 10 ? qu'est-ce qu'il pense de prendre zéro risque pour Desjardins et de prendre 100 % des risques pour la SGF?
La Présidente: M. Le premier ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: Bon, d'abord, je les ai eus, les chiffres, en attendant, là. C'est arrivé assez vite. La SGF a perdu, dans Métaforia, de la façon suivante, le montant suivant: 12,1 millions de dollars en capital-actions et 3,9 millions en garantie de prêt. Ça, c'est la SGF seulement. Investissement Québec a perdu 5,6 millions en capital-actions, 1,6 million en garantie de prêt et 5,6 millions en crédit d'impôt dans ce projet. Les fonds publics, donc: 28,8 millions de dollars.
Cependant, la SGF a investi et réalisé 178 projets, d'une valeur totale de 7,5 milliards. Sept fois et demie 1 000 millions de dollars contre 28. Voyez-vous la proportion, là? Oui. N'essayez pas de faire... Vous, vous aviez... l'abolir, la SGF, on s'en rappelle, avec vos idées rétrogrades et vos intentions de torpiller le modèle québécois qui donne des rendements aussi extraordinaires. Vous n'auriez pas perdu 28 millions, mais vous auriez perdu par ailleurs 7,5 milliards de dollars en investissements.
Des voix: Bravo!
La Présidente: En question complémentaire.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: En question complémentaire, est-ce que le premier ministre vient de confirmer le fait que le gouvernement a assumé 100 % des coûts et des risques alors que Desjardins a assumé 0 % des risques? Et, pour le premier ministre qui veut nous vanter les 178 projets de la SGF, je pourrais lui rappeler que, cette année, c'est du moins 4 % qu'ils ont fait, puis ils ont emprunté à 4,9. Ça fait moins 9 %, ça, M. le premier ministre. Imaginez-vous que c'est moins 200 millions. Alors, il faudrait arrêter, là, de se péter les bretelles avec une telle situation.
Une voix: Bravo!
La Présidente: M. le premier ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: Mais ce n'est rien à côté de Téléglobe. Téléglobe a...
Une voix: Téléglobe, c'est une compagnie...
M. Landry: Oui. Et la SGF, c'est une compagnie publique.
Une voix: ...
M. Landry: Un instant!
La Présidente: Écoutez...
Des voix: ...
La Présidente: Un instant. Un instant. Alors, je vous céderai la parole par la suite, M. le chef de l'opposition officielle, si vous la demandez. La parole est au premier ministre.
M. Landry: Métaforia aussi, c'est une compagnie privée. Et Téléglobe a perdu autour de 6 milliards de dollars et Métaforia a perdu sa chemise également, mais cela arrive, dans l'univers capitaliste. Et qu'une année sur l'autre la Caisse de dépôt, une des institutions les plus performantes d'Amérique ? ils ont été déclarés meilleurs gestionnaires en Amérique l'an dernier...
Mme Marois: Coté AAA.
M. Landry: Puis Standard & Poor's, trois fois A, Standard & Poor's. Et, cette année, la SGF a un rendement négatif... la Caisse de dépôt a un rendement négatif d'à peu près 5 %. Est-ce qu'une personne responsable peut aller se mettre à décrier la Caisse de dépôt parce qu'elle a un rendement négatif, moins négatif qu'à peu près tous les autres sur le marché? Ça arrive. Ça fluctue, les rendements. Mais la SGF, qui, aux livres, a effectivement une perte, à cause de ses judicieux placements, a un gain au compte de bilan.
Une voix: C'est ça.
M. Landry: Bien oui! Vous parliez qu'elle devrait investir pour les queues, là, dans les... Moi, je pense que non. La SGF devrait investir dans l'éducation des adultes, et la députée pourrait s'inscrire.
Une voix: Bravo!
La Présidente: En question complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: Mme la Présidente, est-ce que le premier ministre peut nous dire qu'est-ce qu'il y a de privé, qu'est-ce qu'il y avait de privé dans Métaforia? Le gouvernement a perdu 28 millions. Il y en avait combien de privé dans ça, puisque, Desjardins, il semble qu'ils ont perdu zéro sou dans tout ça? Il y en avait combien de privé? Il n'y en avait pas. C'était 100 % de l'argent du contribuable, M. le ministre.
Une voix: Bravo!
La Présidente: M. le premier ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: Je ne connais pas les dossiers de la SGF, là, dans les moindres détails puis ça m'intéresse de connaître les réponses aux questions qu'elle pose, sauf que la SGF prend toujours une participation avec un partenaire privé qui lui-même fait sa part. La SGF ne peut jamais posséder plus de 49,9 % des actions d'une entreprise. Alors, quel était le capital-actions de Métaforia et qui le détenait? Franchement, je ne le sais pas. La SGF a son conseil d'administration. Mais nous pratiquons la transparence, et, ce que je ne sais pas, je vais m'arranger pour le savoir et le dire à la députée à la prochaine occasion.
n(12 h 50)nLa Présidente: En principale, M. le député d'Outremont.
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des camions de la Société des alcools
M. Pierre-Étienne Laporte
M. Laporte: Mme la Présidente, ma question s'adresse à la ministre de la Culture et des Communications, responsable de l'application de la Charte de la langue française. Mme la ministre, vous n'êtes pas sans savoir qu'en 1988 ? je dis bien en 1988 ? la Commission de terminologie de l'Office de la langue française a retenu la formation «vin panaché», «rhum panaché» et «bière panachée» pour désigner en français les produits connus sous le terme anglais de «coolers». J'insiste, Mme la Présidente, pour dire qu'il s'agissait d'une décision importante, visant à la fois l'amélioration de la qualité de notre langue et l'illustration de notre couleur linguistique spécifique. La France, en effet, a retenu la forme «panaché de vin, de rhum ou de bière» afin de désigner les produits de type «cooler». Nous faisions donc preuve de distinction.
Or, quelle ne fut ma surprise de croiser sur la route un camion d'une société d'État ? la SAQ, pour ne pas la nommer ? qui affiche dans sa campagne de publicité de cet été: La SAQ affiche... ses coolers! La Société des...
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente: En conclusion.
M. Laporte: La Société des alcools du Québec fait des calembours aux dépens de la qualité de notre langue et en se moquant des recommandations de l'Office de la langue française.
Mme la ministre, faut-il croire que le gouvernement cautionne une pratique contraire à l'amélioration de la qualité de notre langue et à la diffusion élargie du bon goût linguistique québécois?
Des voix: Bravo!
La Présidente: Mme la ministre d'État à la Culture.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: Mme la Présidente, je cherche honnêtement la réponse la plus adéquate à cette question assez délicieuse. Alors, Mme la Présidente, non. Voilà. Écoutez, moi, je suis responsable de la Charte de la langue française. Nous avons tous ici des responsabilités au sujet de la langue française: les citoyens, les enseignants, les sociétés d'État et nous, comme membres de l'Assemblée nationale. Honnêtement, je ne sais pas comment résoudre cette situation-là. Je vais y réfléchir, ça me fera plaisir, mais je ne veux pas...
Tout de même, tout de même, nous avons une belle langue, on peut en être fiers, mais nous avons également cette capacité d'avoir de l'humour. Alors, je ne voudrais quand même pas qu'on monte en épingle une situation qui peut-être n'aurait pas lieu de l'être.
La Présidente: Alors, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales.
Il n'y a pas de votes reportés.
Nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Donc, il n'y a pas de motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions
M. le leader du gouvernement, nous en serions aux avis touchant les commissions.
M. Boisclair: Alors, Mme la Présidente, j'avise cette Assemblée que la commission des institutions entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 50, Loi modifiant le Code civil, suivi du projet de loi n° 62, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Justice relativement au fonds des registres, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif.
J'avise les membres de cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 98, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.
J'avise aussi cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire procédera aux consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 106, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, de 15 heures à 17 h 45 et de 20 heures à 23 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.
La Présidente: Alors, aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, y a-t-il des interventions?
Affaires du jour
Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons donc maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.
M. Boisclair: Mme la Présidente, je vous demande de prendre en considération l'article 37 du feuilleton de ce jour.
Projet de loi n° 84
Reprise du débat sur l'adoption
La Présidente: À l'article 37, il s'agit de la reprise du débat, ajourné le 6 juin 2002, sur l'adoption du projet de loi n° 84, Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation. Y a-t-il des interventions? M. le leader du gouvernement.
M. Boisclair: Mme la Présidente, compte tenu de l'importance de ce projet de loi et compte tenu aussi de l'heure qui devra bientôt nous conduire à la pause, il y aurait une entente entre les trois formations politiques pour que chacune d'elles puisse s'exprimer par l'entremise d'un de ses porte-parole pour une période maximale de deux minutes, pour que par la suite nous proposions un vote nominal pour que tous les membres de cette Assemblée puissent s'exprimer.
La Présidente: Dois-je comprendre qu'il y ait consentement pour qu'il y ait trois interventions d'une durée maximale de deux minutes chacune et que par la suite nous procédions, malgré l'heure, à l'adoption de ce projet de loi? Y a-t-il consentement? Donc, consentement. Alors, la parole est au premier ministre.
M. Bernard Landry
M. Landry: Oui, je la prends, la parole, Mme la Présidente ? vous me la donnez ? avec une immense fierté parce que nous nous apprêtons à poser un geste historique qui va mettre le Québec à l'avant-garde des nations évoluées sur la question de l'union civile et règles de filiation. Nous devons cette avancée majeure d'abord aux citoyens et citoyennes du Québec qui ont fait campagne pour qu'une telle chose se produise, et il y en a plusieurs qui sont ici, dans nos galeries. Non seulement ils et elles ont fait campagne et fait la pédagogie nécessaire et l'information nécessaire auprès de leurs concitoyens et de leurs concitoyennes et du gouvernement, mais ils et elles ont beaucoup souffert aussi de discriminations de toutes sortes, d'injures, de privation de droits. Le Québec, pourtant, était déjà, par sa Charte des droits et libertés, une terre exemplaire. Mais affirmer de grands principes, c'est nécessaire, c'est fondamental. Les appliquer par suite dans la pratique est une chose souvent plus vertueuse qu'afficher des grands principes. Nous l'avons fait. Et le monde entier sait que le Québec est un endroit avancé.
Je me souviens, c'est un peu anecdotique, mais j'étais allé à San Francisco, une journée, en mission économique et j'avais vu dans une vitrine, après je ne sais plus quel incident homophobe qui s'était produit au Canada: Boycott every product from Canada. Mais il y avait une parenthèse pour dire: Except Québec. Déjà, aux États-Unis d'Amérique, on savait que le Québec était une terre progressiste. Il en est une encore plus aujourd'hui, et je rends donc hommage à ceux et celles qui amènent et ont amené notre Assemblée nationale à poser ce geste, et aussi au ministre de la Justice. Si le mot «justice» a un sens et le mot «ministre de la Justice» a un sens, il l'a incarné d'une façon extraordinaire depuis quelques mois.
Des voix: Bravo!
La Présidente: En conclusion, M. le premier ministre.
M. Landry: Et je crois que la commission parlementaire que le ministre a dirigée est une des plus fécondes et des plus émouvantes de l'histoire du Québec parce que chacun y est venu donner son opinion en respectant celle de l'autre. Je suis fier aussi que ce que nous avons fait réalise un engagement du programme de notre parti. Ce n'est pas spontané, le Parti québécois depuis longtemps avait pris position sur ces questions. Mais aujourd'hui ça passe dans nos lois. Et, après cette législation, nous serons tous et toutes plus fiers d'être Québécois et Québécoises.
n(13 heures)nLa Présidente: M. le chef de l'opposition officielle.
M. Jean J. Charest
M. Charest: Merci, Mme la Présidente. Je veux saluer également les gens qui sont dans les tribunes de l'Assemblée nationale aujourd'hui et qui ont bien voulu se déplacer pour être témoins d'un moment très important dans l'histoire de l'Assemblée nationale du Québec, dans l'histoire de la société québécoise. Et sans doute que pour eux c'est un moment très important parce qu'il y a là le reflet d'une nouvelle ouverture de notre société envers leur réalité.
Et, Mme la Présidente, je veux souligner le travail de l'ensemble des parlementaires dans l'élaboration de ce projet de loi et ce débat qui, somme toute, n'est pas un débat qui est facile, qui est nouveau pour plusieurs de nos citoyens, qu'il faut aborder avec beaucoup de respect envers ceux et celles qui partagent ou des philosophies ou des visions différentes. Mais nous avons là un exemple de notre capacité à nous, à l'Assemblée nationale du Québec, justement de faire ces débats, d'arriver, je pense, aux bonnes réponses, ayant posé les bonnes questions. Et la bonne question qui a été posée dans le cas de ce projet de loi était la suivante ? et je pense, entre autres, à la question de l'adoption: Qu'est-ce qui doit être fait dans l'intérêt des enfants? C'était la bonne question qu'il fallait poser. Et je me réjouis du fait, aujourd'hui, Mme la Présidente, que nous ayons été capables ensemble de formuler justement la bonne réponse pour ces enfants qui méritent une chose, ce que l'ensemble des enfants du monde méritent: de l'amour, de l'amour de ceux et celles qui les entourent, peu importe leur orientation sexuelle. Et aujourd'hui je pense qu'on a raison d'être très fier, très fier de ce projet de loi.
Je veux souligner le travail... Parce que, vous savez, les projets de loi, c'est le gouvernement qui a le privilège de les proposer, dans 90 % des cas. L'opposition officielle fait son travail honnêtement, je le crois. Et, dans ce cas-ci, je tiens à souligner le travail exceptionnel fait par la députée de Bourassa, porte-parole de la justice pour...
En terminant, je veux informer le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques que, s'il veut traverser, il devra passer l'assemblée de mise en candidature...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Charest: Pas d'exception à la règle. Pas d'exception à la règle. Mais je constate qu'on termine, en tout cas, cette partie-ci de la journée sur une note très positive. Mme la Présidente, je veux souhaiter beaucoup de chance à ceux et celles qui, à partir d'aujourd'hui, pourront...
Une voix: ...
M. Charest: Sans doute un de mes supporters.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Charest: Qu'ils pourront partir, quitter l'Assemblée nationale, aujourd'hui, j'espère, avec peut-être un peu plus d'élan dans le pas, sachant qu'ils sont accompagnés par les citoyens du Québec dans leur vie, dans leur réalité et dans l'amour qu'on partage pour leurs enfants.
Des voix: Bravo!
La Présidente: M. le député de Rivière-du-Loup.
M. Mario Dumont
M. Dumont: Oui, Mme la Présidente. Alors, je serai bref. Je salue, moi aussi, les gens dans les tribunes, dont tout le monde a souligné le travail de sensibilisation, de conviction, la patience et l'acharnement. On termine un débat qui s'est déroulé en dehors du cadre partisan. Il semble que ce soit le thème de la journée, les choses qui s'adoptent en dehors d'un cadre partisan. Dans ce cas-ci, c'est particulièrement important, il s'agit d'une question qui est d'ordre humain bien plus que politique, et on va procéder à l'adoption du projet de loi de cette façon-là. Merci, Mme la Présidente.
Mise aux voix
La Présidente: Le projet de loi n° 84, Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation, est-il adopté? M. le leader du gouvernement.
M. Boisclair: Mme la Présidente, vote par appel nominal.
La Présidente: Vote par appel nominal. Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe: M. Landry (Verchères), M. Boisclair (Gouin), Mme Marois (Taillon), Mme Beaudoin (Chambly), M. Charbonneau (Borduas), M. Legault (Rousseau), Mme Goupil (Lévis), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Jutras (Drummond), M. Julien (Trois-Rivières), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Rochon (Charlesbourg), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Baril (Arthabaska), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Legendre (Blainville), M. Simard (Montmorency), M. Morin (Nicolet-Yamaska), Mme Lemieux (Bourget), M. Facal (Fabre), Mme Papineau (Prévost), Mme Maltais (Taschereau), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Boucher (Johnson), Mme Charest (Rimouski), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Caron (Terrebonne), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bertrand (Charlevoix), M. Côté (Dubuc), M. Payne (Vachon), M. Lachance (Bellechasse), M. Paré (Lotbinière), M. Beaumier (Champlain), M. Rioux (Matane), Mme Doyer (Matapédia), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Laprise (Roberval), M. Lelièvre (Gaspé), M. Bergeron (Iberville), M. Duguay (Duplessis), M. Labbé (Masson), M. Boulianne (Frontenac), Mme Barbeau (Vanier), M. Cousineau (Bertrand), M. Pagé (Labelle), M. Désilets (Maskinongé).
M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Vallières (Richmond), Mme Boulet (Laviolette), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Williams (Nelligan), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), Mme Mancuso (Viger).
M. Dumont (Rivière-du-Loup).
La Présidente: Que les députés contre ce projet de loi veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire général.
Le Secrétaire: Pour: 82
Contre: 00
Abstentions: 0
La Présidente: Le projet de loi est adopté. Et je suspends nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 8)
(Reprise à 15 h 3)
Le Vice-Président (M. Brouillet): Mmes, MM. les députés, veuillez vous recueillir quelques instants.
Merci. Alors, nous allons entreprendre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais Mme la leader adjointe à nous indiquer l'article à l'ordre du jour, s'il vous plaît.
Mme Vermette: Oui, M. le Président, je vous demanderais si vous voulez bien vous référer à l'article 35 de l'ordre du jour, s'il vous plaît, du feuilleton.
Projet de loi n° 65
Adoption
Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 35 du feuilleton, M. le ministre du Revenu propose l'adoption du projet de loi n° 65, Loi budgétaire n° 1 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires. Alors, le prochain intervenant, M. le ministre du Revenu, je vous cède la parole.
M. Guy Julien
M. Julien: Alors, M. le Président, effectivement je soumets à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 65, intitulé Loi budgétaire n° 1 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires, en vue de son adoption. Alors, ce projet-là donne suite principalement au discours sur le budget de la vice-première ministre et du ministre d'État à l'Économie et aux Finances du 29 mars 2001 et à plusieurs bulletins d'information émis par le ministère des Finances. Étant donné, Mme la Présidente, que ce projet de loi contient diverses modifications regroupées par sujet et que l'ensemble de ceux-ci a fait l'objet d'une étude détaillée, je n'en ferai qu'une description sommaire.
Dans un premier temps, ce projet de loi modifie la Loi sur les impôts afin:
1° d'améliorer l'aide fiscale accordée aux personnes qui ont recours à la voie médicale ou à l'adoption pour devenir parents;
2° de bonifier le crédit d'impôt remboursable pour le maintien à domicile d'une personne âgée;
3° d'instaurer un crédit d'impôt non remboursable relatif à l'acquisition d'actions émises par Capital régional et coopératif Desjardins; et
4° d'instaurer un crédit d'impôt remboursable pour les sociétés établies dans la Cité du commerce électronique; et divers autres crédits d'impôt remboursables pour soutenir les sociétés établies... tel qu'en Gaspésie, par exemple, et dans certaines régions maritimes du Québec; deuxièmement, dans la Cité de la biotechnologie de la santé humaine du Montréal métropolitain; et, troisièmement, dans le Centre de développement des biotechnologies de Laval.
De plus, M. le Président, ce projet de loi modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec afin notamment de prévoir l'introduction de mesures visant à favoriser l'observation des règles fiscales dans l'industrie du vêtement et d'apporter des précisions concernant l'exonération des services de transport scolaire.
Et j'aimerais, M. le Président, apporter quelques précisions quant à l'impact de la TPS et de la TVQ sur les commissions scolaires. Il faut se rappeler que, avant la mise en place du régime de la TPS et de celui de la TVQ, les commissions scolaires devaient payer l'ancienne taxe de vente fédérale et l'ancien impôt sur la vente au détail, qui constituaient leur fardeau fiscal en matière de taxes à la consommation. Les deux paliers du gouvernement, dans le cadre de l'introduction de la TPS et de la TVQ, ont décidé de ne pas augmenter ce fardeau fiscal. C'est pourquoi, dès l'entrée en vigueur du régime de taxation québécoise, le 1er juillet 1992, le gouvernement du Québec a instauré un remboursement partiel de la TVQ au taux de 23 %. Ce remboursement s'applique à l'égard des biens et des services acquis par les commissions scolaires afin d'effectuer leurs services à leurs étudiants, dont notamment le service de transport scolaire.
Conformément à l'engagement du gouvernement du Québec à l'effet de maintenir le fardeau fiscal des commissions scolaires inchangé, le taux de remboursement partiel a augmenté graduellement au cours des dernières années, de sorte que ce taux s'établit maintenant à 47 %. Dans ce contexte, vous conviendrez, M. le Président, qu'il était important que le gouvernement du Québec intervienne rapidement afin de réaffirmer sa volonté d'exonérer de taxe les services de transport scolaire et d'accorder aux commissions scolaires un remboursement partiel de la TVQ au taux de 47 %.
Dans un deuxième temps, M. le Président, j'aimerais clarifier quelques propos du député de Chapleau tenus en cette Chambre lors de la prise en considération du rapport de la commission des finances publiques. Il a mentionné que, jusqu'à présent, les commissions scolaires avaient droit à un remboursement de la TVQ de l'ordre de 47 % lorsqu'elles donnaient des contrats de transport scolaire et que, en vertu d'un jugement de la Cour d'appel fédérale, les commissions scolaires devraient avoir droit à un remboursement de 100 %.
M. le Président, permettez-moi de vous souligner que le jugement de la Cour d'appel fédérale a été rendu en matière fédérale et qu'en conséquence il ne donne pas droit automatiquement à un remboursement de la TVQ de 100 %. Le député de Chapleau, M. le Président, prétend que le gouvernement va à l'encontre de cette décision de la Cour d'appel fédérale qui a donné raison aux commissions scolaires. À cet égard, je vous rappelle que le gouvernement fédéral a aussi décidé que le résultat du jugement fédéral est incompatible avec la politique sous-jacente de la TPS. Ainsi, dans son communiqué du 21 décembre 2001, il annonce que les services de transport scolaire continueront d'être exonérés et bénéficieront d'un remboursement partiel de la TPS et non d'un remboursement total.
M. le député de Chapleau souligne également que le gouvernement fédéral n'est pas allé de l'avant avec la mesure. Et, selon ses prétentions, le gouvernement du Québec cherche à harmoniser sa loi avec une mesure fédérale inexistante. À ceci je répondrai, M. le Président, que la décision de procéder par modification législative a fait l'objet de discussions entre les deux ministères et que les deux annonces ont été faites à peu près en même temps, c'est-à-dire le 20 décembre pour le Québec et le 21 décembre pour le fédéral. Nous n'avons pas d'indication à ce moment-ci que le gouvernement fédéral n'entend pas procéder pour apporter la modification annoncée.
Finalement, M. le Président, le député de Chapleau se demandait pourquoi le gouvernement du Québec a agi avec autant de célérité à l'égard des services de transport scolaire. L'annonce du ministère des Finances du Québec du 20 décembre 2001 vise à éviter de poursuivre inutilement des litiges et à expliquer clairement la politique fiscale du gouvernement du Québec. Il était donc important que cette annonce soit faite avant que les tribunaux du Québec se penchent sur cette question.
n(15 h 10)n De plus, j'aimerais faire remarquer que nous avons procédé avec la même célérité à l'égard d'une mesure aussi rétroactive et à l'avantage des entreprises québécoises. En effet, lors de l'étude en commission parlementaire du projet de loi n° 65, le gouvernement a également introduit un amendement donnant suite à l'annonce faite le 20 décembre dernier, par le ministère des Finances cette fois-ci, au sujet de l'exportation des véhicules automobiles. Cet amendement, M. le Président, vient modifier les conditions donnant droit au remboursement de la TVQ payée à l'égard des véhicules exportés. Je vous rappelle que la mesure de remboursement de la TVQ payée par un exportateur de véhicules automobiles avait été annoncée par le ministère des Finances le 30 juin 1999 et que le remboursement n'était possible que lorsque certaines conditions étaient rencontrées.
Plus précisément, M. le Président, l'amendement assouplit les critères d'admissibilité au remboursement, ce qui est à l'avantage des entreprises qui font affaire dans le domaine de l'exportation des véhicules automobiles, d'autant plus, M. le Président, que cet amendement a une portée rétroactive à la date d'introduction de la mesure de remboursement, soit le 1er juillet 1999.
En terminant, M. le Président, je tiens à remercier mes collègues du gouvernement de même que les députés de l'opposition membres de la commission des finances publiques pour leur collaboration lors de l'étude de ce projet de loi. Alors, M. le Président, je demande donc à cette Assemblée de bien vouloir adopter le projet de loi n° 65 intitulé Loi budgétaire n° 1 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre du Revenu. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. M. le Président, nous sommes aujourd'hui à l'adoption finale du projet de loi n° 65, Loi budgétaire n° 1 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires, qui ont été prononcés à ce moment-là. Ce projet de loi, comme on a pu le voir dans le discours de M. le ministre, a pour but de modifier la législation fiscale québécoise afin de donner suite à de nombreuses mesures fiscales qui ont été annoncées à ce moment-là par le gouvernement du Québec. Il modifie 15 lois, mais les principaux changements touchent la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu et la Loi sur la taxe de vente du Québec.
Ce projet de loi n° 65, M. le Président, donne suite au discours du budget du 29 mars, comme je le disais précédemment, et bien sûr à celui du 14 mars 2002, et ces mesures sont déjà en application. Alors, les citoyens qui nous écoutent pourraient dire: Comment se fait-il que le projet de loi n'est pas voté, mais que les mesures sont déjà en application? Simplement une brève explication, M. le Président. C'est que, lorsqu'un budget est énoncé et qu'il est adopté par cette Chambre, hein, après un certain nombre d'heures de débat, une centaine d'heures entre les différents partis politiques, eh bien, le budget a force de loi et rentre en action. Sauf qu'après ça il faut harmoniser toutes ces mesures avec les différentes lois, qu'elles soient fiscales ou autres, et, bien sûr, ça se fait rétroactivement parlant. Donc, ce que nous faisons maintenant, ce n'est qu'entériner quelque chose qui fonctionne normalement, qui est déjà en vigueur.
Alors, M. le Président, le projet de loi, il vise bien sûr également à inscrire dans les lois les mesures fiscales énoncées par le biais des bulletins d'information du ministère des Finances. On sait que le ministère des Finances émet des bulletins d'information qui changent certaines réglementations, certaines dispositions, et bien sûr, après ça, il faut les adopter par la loi. C'est un privilège du ministère des Finances. C'est d'ailleurs le seul ministère qui peut se permettre ce genre de fonctionnement dans le gouvernement, parce que, sans cela... Chaque ministère doit faire adopter sa loi avant qu'elle soit mise en application. Bon. Alors, M. le Président, on parle des bulletins d'information 2000-2 à 2000-10 et ceux de 2001-1 à 2001-6. Bon, le ministre a un peu expliqué tout ça.
M. le Président, le projet de loi n° 65 comporte également un grand nombre de modifications à caractère technique, de concordance ou de terminologie. Lorsqu'on parle de concordance, pour les gens qui nous écoutent, concordance, bien souvent, c'est avec le budget fédéral, hein, la loi fiscale du gouvernement du Canada. Je sais que, ce matin, on a adopté une résolution qui vise à rapatrier des points d'impôt. Les gens qui ont peut-être suivi ça peuvent voir une certaine connotation avec ce que nous faisons cet après-midi. C'est-à-dire que, lorsque le gouvernement fédéral change sa loi de l'impôt, eh bien, nous devons nous aussi, par exemple, en termes de crédits d'impôt ou en termes de subventions ou de programmes partagés, eh bien, nous devons nous aussi faire en sorte de nous harmoniser avec la loi fédérale pour éviter que le citoyen québécois se retrouve avec des mesures différentes ou avec des lois qui ne correspondent pas les unes avec les autres, compliquant ainsi toute la mécanique.
Alors, voyez-vous, M. le Président, on peut le voir, ce projet de loi est assez semblable aux autres projets de loi du ministère, du ministère du Revenu. C'est un projet de loi somme toute assez technique. Et c'est pour ça qu'aujourd'hui, contrairement à mon habitude, je prends des papiers et j'ai un discours qui est écrit, parce que je crois qu'il serait hasardeux de discourir sur un sujet tel que celui-là sans avoir des papiers, sans avoir des notes, étant donné la complexité et la technicalité. M. le ministre me tend son dossier, mais je peux lui montrer que, moi aussi, j'en ai un aussi, bien sûr, mais j'apprécie grandement. D'ailleurs, je dois dire que, lorsqu'on discute ces projets de loi là, généralement, en commission parlementaire, c'est assez long, c'est assez spécial comme opération et ça prend généralement une collaboration entre le gouvernement et l'opposition si on veut venir à bout de passer à travers chacun de ces articles. J'ai eu l'occasion de le faire à plusieurs reprises et je dois vous dire que c'est quand même extrêmement intéressant, extrêmement enrichissant. Ça nous permet de faire le tour un peu de la fiscalité québécoise, du fonctionnement aussi des ministères et des programmes. Mais c'est quelque chose qui demande des connaissances techniques assez pointues, assez approfondies. Et c'est donc pour cela que cet après-midi j'ai décidé de ne point m'adresser en cette Chambre sans avoir des notes.
Alors, M. le Président, je ne passerai pas mon temps non plus à expliquer le projet de loi. Je pense que le ministre l'a fait d'une façon assez claire, assez succincte, il est vrai, mais, quand même, je crois qu'il a résumé dans les grandes lignes quel était l'intérêt de ce projet de loi et les différents programmes qui étaient affectés ou touchés, les différentes modifications qui étaient faites dans des programmes ou dans des règlements fiscaux existants. Donc, je me permettrai peut-être maintenant de faire peut-être une critique un peu plus générale de la situation.
Alors, M. le Président, on peut voir que, d'un projet de loi à l'autre, le gouvernement ? projet de loi fiscal bien sûr ? étale ses grandes théories avec tous les généreux crédits d'impôt ciblés en fonction des secteurs d'activité, en fonction des bâtiments, en fonction de périmètres. D'un projet à l'autre, le gouvernement établit des estimations d'emplois qui seront créés dans ces périmètres et dans ces entreprises réputées pour le haut savoir, pour l'innovation et pour la recherche. Or, malheureusement, M. le Président, bien que ça aille quand même assez bien au Québec ? on a vu ce matin le premier ministre nous annoncer qu'il s'était créé 120 000 emplois dans les cinq derniers mois, ce qui est très bien, et on doit féliciter l'ensemble des entreprises québécoises, les entrepreneurs, les développeurs et les commerçants, enfin tous les gens qui participent à cette création économique ? il n'en reste pas moins, M. le Président, que, malgré les milliards, quand même, de générosité fiscale que nous octroyons aux entreprises, nous sommes au Québec, malheureusement, toujours à 17 % des investissements privés alors que notre poids démographique dans l'ensemble canadien est de 24 % et que notre apport à l'économie canadienne est de 22 %. Alors, voyez-vous, là, malgré toutes ces choses-là, on se rend compte qu'il y a quand même un grand... Il y a un rattrapage à faire et il y a un décalage entre notre poids démographique, entre le nombre de gens qu'il y a au Québec et l'activité économique que nous représentons à travers le pays.
Selon une étude, payée par le gouvernement d'ailleurs, il semble que ce soit au Québec qu'il soit le moins coûteux pour une entreprise de s'établir. Là, c'est un paradoxe, parce que, si c'est moins coûteux pour une entreprise de s'établir, pourquoi ne s'établissent-elles pas plus nombreuses? Et c'est là une question, certainement, à laquelle le ministre devrait nous répondre à un moment donné, ou le gouvernement devrait répondre, M. le Président.
Et, si vous regardez au niveau nord-américain, on se rendra compte que le Québec se place au 57e rang sur 60 États d'Amérique du Nord, hein? Alors, on parle de l'Amérique du Nord, on parle des États américains plus les États canadiens, parce que, après tout, nous sommes dans une confédération, et une confédération est formée d'États. Alors, on peut donc donner le vocable au Québec d'État. Eh bien, M. le Président, il y a quelque chose, là, qui nous amène à nous questionner et qui nous interpelle. Pourquoi sommes-nous 57e sur 60 États en Amérique du Nord pour le niveau de vie, hein? Alors, il faut dire que ça peut être relatif, le niveau de vie. Il y a peut-être des avantages que nous avons ici qu'ils n'ont pas dans d'autres États américains. C'est vrai qu'il est toujours hasardeux de comparer, hein, parce que le Québec, son système social n'est pas forcément semblable à celui des autres États d'Amérique. Alors, quel est le critère qui permet de juger quel est le niveau, hein, ou le classement du niveau de vie des citoyens dans un État? Il faut faire attention aussi. Mais c'est quand même des chiffres qui circulent, c'est des chiffres officiels et que personne ne réfute jusqu'à dernièrement. Alors donc, nous devons nous tenir à ces chiffres-là.
n(15 h 20)n J'irai plus loin que cela. De 1996 à 2002, le coût des dépenses fiscales liées au régime d'imposition des sociétés, donc à l'impôt des sociétés, à la taxation, est passé de 862 millions de dollars à 1 854 000 000 $, dont 1 milliard est accordé en crédits d'impôt remboursables pour encourager l'innovation, faire de la recherche-développement, aider la nouvelle économie du savoir, favoriser l'investissement dans les régions, dans le secteur financier et dans le sectoriel.
Or, tous ces crédits d'impôt, toutes ces mesures fiscales sont normalement censées créer de l'emploi dans le domaine du haut savoir ou du moins contribuer à une émulsion dans ce domaine-là et générer des retombées économiques donc d'investissements ? on voit qu'on est seulement à 17 % au lieu de 24 % ? et bien sûr les emplois qui en découlent. En plus de ça, des emplois bien rémunérés parce qu'on parle du secteur de la haute technologie et du savoir, donc des employés qui gagnent, qui reçoivent une rémunération entre 35 000 et 100 000 $ ou 90 000 $. Donc, un secteur extrêmement intéressant. Parce que, après tout, il ne s'agit pas simplement de créer des emplois pour des emplois. Tout emploi est bon, et c'est parfait, il faut que tout le monde travaille, mais il y a toujours une plus-value pour la société lorsque les emplois créés sont de haut niveau, parce que ça permet justement d'embaucher, de faire travailler des gens qui sortent de nos universités, de nos cégeps et de nos écoles de techniques supérieures. Et ça, M. le Président, ça a une retombée, bien sûr, économique supplémentaire.
Alors, M. le Président, on est, malgré tout ça, selon les chiffres, eh bien, 57e sur 60 États en Amérique du Nord et nous sommes les 49e pour la productivité. La productivité, ça, pour les gens qui peut-être nous écoutent, eh bien, c'est... Lorsque l'on produit, lorsque l'économie produit, c'est le coût de la production, le rythme de production, à combien ça revient pour produire dans un endroit, dans un État, un certain nombre de produits par rapport à un autre. La productivité, ça comprend beaucoup de facteurs: ça comprend la main-d'oeuvre, ça comprend la fiscalité, ça comprend les coûts de l'énergie, ça comprend l'automatisation, ça comprend les cadences. C'est tout un panier de facteurs qui sont pris en considération pour établir le coût de productivité d'une société en particulier. Alors, vous voyez, nous, nous sommes au 49e rang, puis il y a 60 États. Alors, ce qui veut dire qu'on a encore, là, beaucoup de chemin à faire, et, M. le Président, c'est quelque chose qui doit aussi nous interpeller en cette Chambre.
J'aimerais parler un peu maintenant de la Cité du commerce électronique qui a été, justement en tenant compte de ça, qui a été établie dans la région de Montréal. Et, selon nos informations, actuellement il n'y a que deux entreprises qui ont reçu leur accréditation. On sait qu'il y a beaucoup de crédits d'impôt, de crédits fiscaux qui ont été mis à la disposition des entreprises pour aller s'établir dans cette Cité du commerce électronique, et seulement deux entreprises ont reçu leur accréditation. Et il faut savoir qu'elle est encore toujours en construction.
Les deux entreprises en question, et c'est là le point que je veux faire, M. le Président, sont de nature publique. Il est vrai qu'elles sont privées, mais vous allez voir par la suite... Ce sont CGI et CSC, Computer Service Corporation. CGI... Et c'est pour ça que je disais: Elles sont privées. Mais elles sont un peu de nature publique, parce que tout le monde en cette Chambre et à travers le Québec, les gens qui connaissent, les analystes mais aussi les simples citoyens qui connaissent un peu la situation, eh bien, savent que CGI est une firme qui obtient majoritairement ses contrats du gouvernement du Québec ou des sociétés d'État qui dépendent du gouvernement québécois ou de l'administration québécoise. Alors, voyez-vous, c'est la première. Au surplus, des contrats qui lui sont accordés sans appel d'offres. En effet, M. le Président, CGI, bien souvent ? et ce n'est pas un reproche que je fais à CGI... Je connais très bien cette firme. C'est une firme sérieuse, quand même des gens très qualifiés. Mais il n'en reste pas moins qu'une majorité de leurs contrats, bien sûr, sont donnés de gré à gré par les gouvernements et sociétés d'État qui sont ici, au Québec, et particulièrement au ministère des Transports où ils ont dernièrement encore obtenu quelque chose.
Alors, vous imaginez maintenant... Je vais vous dire pourquoi je vous dis ça. C'est que CGI, quand on parlait des programmes fiscaux qu'il y a ici au Québec, CGI est subventionnée à la hauteur de 35 % par le gouvernement à l'égard des salaires qu'elle verse à ses employés, et ça, pour les 10 prochaines années. L'exemple que je pourrais donner, c'est comme si une entreprise ou quelqu'un voudrait partir une entreprise dans la région de Laval, ou dans la région de Montréal-Nord, ou de Rivière-des-Prairies, ou de Pointe-aux-Trembles, ou quelque part ailleurs dans le Québec, eh bien, ils recevraient, on leur dirait: Pour les 10 prochaines années, 35 % des salaires de ces employés va être payé par l'État. Alors, vous comprendrez, M. le Président, c'est un avantage très, très, très important pour cette entreprise-là, bien sûr. Et ça, c'est un coup de pouce supplémentaire, parce qu'il obtient déjà des contrats du gouvernement. Alors, imaginez les concurrents, la concurrence bien sûr se trouve frappée en plein front avec ça. Et, d'après nous, c'est peu propice à l'effet que d'autres entreprises de même genre viennent s'établir ici, au Québec, développent le même genre d'activité puis aillent aussi compétitionner bien sûr au niveau de l'obtention des contrats gouvernementaux, obtenant peut-être un meilleur prix.
Alors, c'est un peu ça, le problème, hein. Il y a comme un vice dans les programmes de fiscalité lorsqu'on veut aider les entreprises de cette façon-là, c'est que d'abord on tue la concurrence et, deuxièmement, M. le Président, on fait en sorte d'empêcher ces entreprises de s'établir. Et, au lieu d'avoir plusieurs entreprises qui développeraient des marchés un peu avec le gouvernement mais qui iraient en chercher ailleurs à travers le monde ou à travers le Canada, eh bien, on se restreint à une seule ou alors à une ou deux autres qui ont un peu, des fois, quelques difficultés.
Alors, M. le Président, c'est un peu le constat qu'on doit faire. Même si je disais qu'on était passé à 1 850 000 000 $ en termes de programmes d'aide au niveau de la fiscalité, ce n'est pas toujours évident que l'on reçoit les avantages que l'on annonce en Chambre lorsqu'on annonce les programmes dans le budget.
Alors, M. le Président, lors de l'étude du projet de loi n° 65, le ministre du Revenu, qui est en face de nous d'ailleurs, nous affirmait que le coût estimé de cette nouvelle mesure fiscale pour CGI était de 32 millions en 2001 et de 51 millions en 2002. Par contre, le 21 mai dernier, la ministre des Finances, qui est sa collègue au ministre du Revenu, et le premier ministre du Québec d'ailleurs lui-même aussi, ils annonçaient en grande pompe à Montréal l'accréditation de près d'une douzaine d'entreprises qui s'établiraient dans la Cité du commerce électronique. ...cette annonce, elle avait déjà révisé ses estimations à la baisse, soit à 28 millions de dollars au lieu de 51 millions. Alors, vous voyez, c'est toujours comme ça, jamais moyen de savoir quels sont les vrais chiffres, quels sont les vrais... pas les vrais, quels sont les chiffres réels et quel est l'état réel ? parce que je n'ai pas le droit de dire que ce n'est pas vrai, M. le Président, en cette Chambre ? des coûts des dépenses fiscales et de leurs retombées. On a beaucoup de difficultés aussi à savoir combien d'emplois réels ont été créés par rapport à ceux qui ont déménagé. D'accord? Et je vais vous expliquer pourquoi, M. le Président: parce que ces programmes qui sont établis bien souvent sont des subventions au déménagement et non pas à l'emménagement.
Alors, je vais donner un exemple, M. le Président. Dans les technologies de l'information, votre lieu d'affaires est en dehors des périmètres désignés par la Cité du commerce électronique, les CDTI ou les CNE; le gouvernement vous dit que c'est tant pis pour vous, vous ne pouvez pas avoir de subvention. Alors, c'est la même chose pour la Cité de la biotechnologie et de la santé humaine du Montréal métropolitain. Si vous vous établissez dans la Cité, vous aurez droit à un crédit d'impôt remboursable de 40 % sur l'augmentation de votre masse salariale pour les cinq prochaines années. Et, si vous êtes établis dans le Centre de développement des biotechnologies de Laval, eh bien, là vous pourrez ajouter un congé fiscal de cinq ans à l'égard de l'impôt sur le revenu que vous auriez dû payer, en plus de profiter d'un crédit d'impôt de 40 % sur le salaire, d'un crédit de 40 % sur les frais d'acquisition et de location de matériel spécialisé. Et c'est sans parler que vous pouvez aussi réclamer un crédit d'impôt de 40 % sur les frais de location de votre place d'affaires. Enfin, si vous engagez un spécialiste étranger, ce dernier n'aura pas à payer d'impôts sur son salaire pour une période de cinq ans.
Vous comprendrez tous que, si vous oeuvrez dans le secteur des biotechnologies et de la santé humaine, et que vous fabriquez des médicaments, des vaccins, des appareils médicaux, et que votre place d'affaires est située à ville Saint-Laurent et non pas à Laval, eh bien, vous aurez... Et je m'excuse pour mon collègue le député de Chomedey, qui est député de Laval; je ne veux pas qu'il pense qu'on a quelques réticences contre Laval, mais c'est l'exemple que je prends parce que c'est un exemple important. Et nous sommes ici élus pour gérer l'ensemble du Québec, M. le Président, et non pas simplement nos circonscriptions, même si on doit avoir une attention particulière pour nos circonscriptions, hein. Eh bien, si vous étiez situé à ville Saint-Laurent, vous auriez un grand avantage à vous installer dans le centre de Laval, donc, eh bien, à déménager pour profiter de ces subventions et de toutes ces aides, ces crédits d'impôt, ces aides aux salaires, et tout ça.
Alors, ça veut dire, M. le Président, qu'on va mettre des incitatifs pour faire en sorte que des entreprises qui fonctionnent bien dans certains secteurs, en déménageant dans d'autres, eh bien, vont recevoir l'aide de l'État, alors qu'elles n'en ont pas forcément besoin, et qu'en même temps ça va créer un déséquilibre dans certaines régions parce que, vu qu'elles ne sont pas situées dans les périmètres qui sont... où les mesures fiscales s'appliquent, eh bien, elles n'iront pas... d'abord, certaines vont déménager puis d'autres n'iront pas s'y établir.
n(15 h 30)n Alors, c'est là un peu tout le questionnement que nous posons. Et c'est pour ça que je disais, je me disais, je faisais la réflexion dernièrement en me demandant si ce n'est pas une aide au déménagement. Parce que, plus simplement pour un citoyen, si on vous dit: Bien, si vous habitez dans le centre-ville de Montréal, hein, vous payez votre plein loyer, vos taxes; par contre, si vous déménagez à Ahuntsic, eh bien, vous allez avoir une aide pour payer votre déménagement, vous allez avoir une aide pour payer votre loyer ou payer votre hypothèque et, en même temps, eh bien, vous aurez des taxes moins fortes. Alors, résultat, M. le Président, eh bien, les gens vont quitter ce centre-ville pour aller s'établir dans cet endroit-là. C'est un peu la même chose que l'on fait avec les entreprises.
Alors, le but recherché par ces programmes fiscaux devrait être normalement, M. le Président, de développer au Québec une économie, une masse critique dans le secteur des nouvelles technologies, une forte concentration de chercheurs. Et pourquoi faire ça simplement dans les zones désignées? Je crois qu'on pourrait laisser les entreprises avoir les mêmes avantages, les mêmes incitatifs fiscaux dans des zones beaucoup plus larges. Ça pourrait être la grande région de Montréal, ça pourrait être la Gaspésie, ça pourrait être par région et non pas par quartier de ville ou quartier de région. Ça a l'air assez discriminatoire.
Alors, M. le Président, selon des sources fiables, provenant bien sûr de la documentation gouvernementale, de 1998 à 2000, au moins 11 entreprises ont reçu une aide gouvernementale dont le montant dépasse le coût total du projet. Alors, ça veut dire qu'elles ont reçu plus d'argent du gouvernement que le coût du projet, donc ce dont elles avaient besoin. Et le coût pour les payeurs de taxes est de 18 millions de dollars. Eh bien, lorsque l'on nous dit en cette Chambre, et assez souvent, que, bon, on n'a pas assez d'argent pour les services sociaux, pour les personnes âgées dans les centres d'accueil, que...
Dernièrement, j'avais, avec le ministre de la Jeunesse, un débat ? qui n'est toujours pas réglé d'ailleurs ? où on a besoin de fonds pour aider des groupes qui s'occupent des jeunes dans la rue, hein, des jeunes, des jeunes écoliers, des jeunes, pour leur éviter de tomber dans la délinquance, dans l'oisiveté. On me dit: On n'a pas d'argent. Eh bien, M. le Président, on a donné 18 millions de dollars en gaspillage juste en octroyant à des entreprises plus, le montant supérieur au coût total du projet qu'ils venaient développer.
Alors, M. le Président, ce n'est forcément... Je pourrais dire: c'est du gaspillage. Moi, je dirais plutôt que c'est de la mauvaise administration. On ne cible pas forcément les choses de la bonne façon et on se laisse croire, on se laisse leurrer par des programmes qui ne correspondent pas forcément aux réalités sur le terrain. Et je pourrais dire aussi peut-être que c'est des cadeaux aux entreprises, mais je n'irai pas jusque-là parce qu'on peut dire qu'un certain nombre d'entreprises qui ont reçu de ces aides malgré tout ont réussi à se développer, à progresser, et c'est tant mieux.
Mais, M. le Président, il ne faut pas oublier là-dedans que celui qui paie bien souvent, c'est le contribuable, le simple contribuable qui, lui, comme chacun le sait ici, au Québec, eh bien, est surtaxé, et que ce soit au niveau fédéral, au niveau provincial: au niveau de l'État fédéral, au niveau de l'État du Québec et au niveau des municipalités et de la commission scolaire. Le contribuable québécois est pressurisé comme un citron. Et il est toujours désolant de voir que des programmes très généreux pour des entreprises, eh bien, soient financés bien souvent sur le dos du simple contribuable.
M. le Président, malgré tout, il y a une certaine vigueur de l'économie. Pas «malgré tout» et tant mieux, il y a une certaine vigueur de l'économie, et les taxes, eh bien, rentrent plus fortement parce que, lorsque l'économie fonctionne bien, lorsqu'il y a une vigueur, on le voit au niveau nord-américain, au niveau canadien aussi. Le Québec n'est pas en dehors, le Québec n'est pas une île au milieu de l'océan, hein, qui fonctionne tout seul. Quand ça va bien partout, normalement ça doit bien aller chez nous; et quand ça va mal partout, eh bien, il faut, nous, faire en sorte que ça aille moins mal qu'ailleurs. Et, ceci étant dit, on est quand même tributaires des grands courants, de notre environnement. Particulièrement, notre économie est tributaire aussi des consommateurs, ceux des États-Unis et d'ailleurs parce que 75 % de notre production au Québec est exportée à l'extérieur.
Alors, M. le Président, donc je disais: Ça va bien pour l'instant, les taxes rentrent. Le gouvernement engrange à chaque année des revenus supplémentaires. Et, malgré tout, on retrouve un certain nombre de hausses ici, de taxes et de tarifs de toutes sortes. Alors, je vais juste les faire valoir rapidement; c'est toujours bon de le rappeler parce que, des fois, on a tendance à l'oublier, on a tendance à penser que, ah, bien, c'est fait, puis on oublie ça. Alors, je vais vous les dire un peu: Hausse des primes d'assurance médicaments. Et cet après-midi, après ce discours, je vais justement en commission parlementaire pour regarder ça. Et on voit que les primes ont plus que doublé, là, dernièrement. Les primes annuelles sont maintenant rendues extrêmement chères. Et, si on calcule les primes, les franchises, enfin, et tout ce qui vient avec, on peut parler que ça peut coûter à peu près 1 245 $ par année au citoyen.
Hausse de 6,5 à 7,5 %, le taux de la TVQ, ça veut dire une augmentation de 15 %, M. le Président. Hausse de la taxe sur les produits du tabac, 19 millions. Bon, il est vrai que le tabac n'est pas forcément la meilleure chose, mais il n'en reste pas moins que l'État va chercher là de l'argent. Financement des investissements routiers, on est allé chercher 28 $ de plus par immatriculation, par plaque, ce qui a rapporté 105 millions de dollars annuellement, 105 millions. Est-ce que vous pensez qu'on a bouché les trous dans les routes et les rues du Québec avec ça? Pas tellement. Je suis certain que les Québécois qui nous écoutent ou qui liront un jour cela, M. le Président, seraient d'accord avec moi à l'effet qu'on se demande où ce 105 millions de plus de dollars est passé. En tout cas, il n'est pas passé dans les trous. Je ne sais même pas dans quel trou il est passé, mais ce n'est pas celui des routes. Peut-être celui du gouvernement, je ne le sais pas.
Une nouvelle taxe, taxe sur les pneus neufs, qui rapporte 14 millions au gouvernement. Taxe sur les véhicules de luxe, 2 millions. Non-indexation des tables d'impôt. Et c'est là qu'on arrive à un point crucial, M. le Président, qui représente 167 millions de dollars par pourcentage d'inflation pour l'année 1999, et là je parle seulement de 1999, c'est les chiffres que j'ai pu avoir ? ça veut dire 400 millions de dollars, M. le Président, 400 millions de dollars qui auraient pu être redistribués dans la poche des citoyens, des Québécois et des Québécoises; taxe sur le Fonds de lutte contre la pauvreté; taxe sur l'essence de 0,15 $ par litre à Montréal. On voit encore une fois que c'est les Montréalais qui font encore l'effort principal. Non seulement l'économie est générée par la grande région de Montréal, une majorité de taxes et d'impôts provient de cette région-là, mais là on trouve le moyen de taxer de manière supplémentaire, eh bien, les Montréalais.
Au niveau du tourisme, je vois que le ministre du Tourisme est là, une taxe de 2 $ par nuitée pour les chambres d'hôtel, ce qui représente 25 millions de dollars annuellement depuis 1997 ? ce 25 millions là, M. le Président, c'est beaucoup aussi; taxation des forfaits touristiques, 10 millions annuellement depuis 1997. Introduction, on le sait, du revenu familial net ? on prend le revenu familial des deux conjoints, alors que, pour certains crédits, auparavant, on ne prenait qu'un seul des deux revenus; cela veut dire qu'on perd beaucoup de crédits après un revenu familial de 26 000 $. Récupération des crédits d'impôt non remboursables à partir d'un revenu de 26 000 $; compensation de plafonnement; abolition du remboursement de la TVQ; hausse des taxes scolaires. Voilà, M. le Président, un portrait qui est peu reluisant. Les municipalités, les villes, donc, les villes du Québec se sont vu forcer d'accepter des responsabilités additionnelles en plus d'une facture.
Alors, finalement, quand on fait le décompte de tout ça, M. le Président, on est obligé de constater que ça représente environ ? et peut-être que c'est un peu plus, je n'ai peut-être pas tous les chiffres ? mais ça représente 8,3 milliards de plus que le gouvernement, qui a été d'abord le gouvernement Bouchard et ensuite le gouvernement Landry, ont pigé ou sont allés chercher dans la poche des contribuables québécois depuis quelques années, et c'est quelque chose qui est extrêmement lourd et que les citoyens doivent supporter régulièrement et trouvent de plus en plus difficile. Et on voit aussi que le niveau de vie des Québécois et des Québécoises, particulièrement de la classe moyenne, s'est abaissé et que les gens, eh bien, font des sacrifices importants pour pouvoir supporter tout ça.
Et, en particulier, M. le Président, le revenu disponible des Québécois par rapport à celui des Ontariens ou de l'ensemble des Canadiens, l'écart s'est agrandi, et ça, M. le Président, eh bien, c'est difficilement acceptable pour nous qui sommes des élus. Nous ne sommes pas venus ici pour augmenter les taxes ou les impôts, mais nous sommes ici justement pour essayer d'améliorer la qualité de vie et le niveau de vie de nos compatriotes québécois et des Québécoises.
Et je donnerai, M. le Président, quelques chiffres. L'Observatoire économique canadien, en août dernier: Le Québec se classait au 57e rang sur 60, au classement des provinces canadiennes et des États américains, pour son revenu disponible médian, et donc au 57e rang pour notre niveau de vie en Amérique du Nord. Ça reprend les chiffres que je disais au départ. Alors, voyez-vous, et malgré les mesures interventionnistes qui ont été mises, on voit qu'on a progressé, mais on n'a pas progressé comme ç'aurait dû progresser, M. le Président.
n(15 h 40)n Alors, M. le Président, je pourrais continuer, continuer puis parler encore... je peux parler pendant une heure sur ce projet de loi là, mais je crois que le tableau que je viens de faire illustre assez clairement... et les chiffres que j'ai cités sont des chiffres émanant de documents officiels qui ont été dûment vérifiés et qui ne prêtent pas à polémique. Ils peuvent prêter à désappointement ou à mécontentement des gens lorsque je les énumère, mais ils sont sûrement des chiffres véridiques. Donc, il n'y a pas lieu à polémiquer sur la qualité ou sur la véracité des chiffres, il y a simplement lieu, M. le Président, à polémiquer pourquoi nous en sommes là et pourquoi le gouvernement ne prend pas les moyens de baisser le fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises, pourquoi le gouvernement se complaît dans des mesures interventionnistes, s'attribuant des succès dans la création d'emplois qui ne découlent pas forcément de ces mesures-là mais découlent ? parce que les chiffres que je vous donnais sont assez clairs ? découlent du dynamisme de l'économie nord-américaine et d'autres facteurs qui ne sont pas ceux qui sont énoncés par le gouvernement.
Mais on aime ça, dans ce gouvernement, se targuer d'interventionnisme, de modèle québécois, de société québécoise différente. Mais je vous ferai remarquer que d'autres sociétés, qui ne sont pas le modèle québécois, fonctionnent beaucoup mieux, sont à un niveau beaucoup plus élevé que les nôtres. Et, à ce titre, j'aimerais, en terminant, M. le Président, prendre un exemple qui est dans le milieu du tourisme. Et vu que le ministre du Tourisme est là et qu'on arrive à la fin de la session, je veux lui rappeler, au ministre du Tourisme, lorsqu'en 1994 le Québec représentait 19 % de la part canadienne, des recettes fiscales canadiennes du tourisme; eh bien, nous sommes rendus maintenant aux alentours de 13 %.
Alors, des fois, je vois le ministre qui se lève en Chambre, qui nous annonce des grandes réussites au niveau du tourisme. C'est vrai, il augmente, mais il augmente partout au Canada. Mais, nous, il augmente moins vite parce que, de 18,7, 19 % que nous étions, nous sommes rendus à 12,3 ou 13 ? je n'ai pas les derniers chiffres ? ce qui veut dire que nous avons baissé. Notre part, notre assiette, notre part de la tarte touristique canadienne s'est rétrécie. Alors, on peut toujours dire qu'on a augmenté, c'est vrai, mais, par rapport aux autres, on a beaucoup moins augmenté, et c'est le meilleur exemple que je peux donner de l'économie québécoise.
Si nous avions augmenté au même rythme que les autres depuis une dizaine d'années, depuis sept, huit ans en particulier, eh bien, aujourd'hui, nous serions en avant des autres, alors que là nous sommes en arrière. Et ça, M. le Président, quoi qu'en dise, quoi qu'annonce le gouvernement et quel que soit le discours qu'il tienne sur leurs mesures fiscales, force est de constater que ça n'atteint pas l'objectif qu'il croit atteindre et que, dans bien des cas, dans bien des cas, c'est des dépenses d'argents qui sont gaspillés ou qui pourraient être utilisés à d'autres choses, qui atteindraient d'autres résultats pour améliorer la qualité de vie des Québécois et des Québécoises, alors que là, M. le Président, ça ne fait qu'enrichir certaines entreprises, limiter la compétition, limiter la concurrence, et ce que ça fait aussi: augmenter les coûts de l'administration de l'État et de certaines sociétés d'État publiques.
Et voilà, M. le Président, pourquoi bien sûr nous ne pouvons pas être d'accord avec ce projet de loi, et même si, je le disais précédemment, nous avons travaillé avec le ministre. Je suis allé en commission parlementaire avec lui; ma collègue députée de Beauce-Sud y est allée aussi de nombreuses heures. Eh bien, le ministre a fait preuve d'une certaine bonne volonté quand même pour répondre à nos questions, mais le fait de répondre à nos questions ne fait pas que son projet de loi est bon. Alors, voilà, M. le Président, pour toutes ces raisons, eh bien, nous allons donc voter contre ce projet de loi, et ceci bien sûr mettra fin à mon intervention maintenant.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Le prochain d'intervenant? Il n'y en a pas.
Mise aux voix
Alors, je mets aux voix le projet de loi. Le projet de loi n° 65, Loi budgétaire n° 1 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Des voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.
Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Vermette: Oui. Alors, M. le Président, je vous demanderais de vous référer à l'article 33 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 89
Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude
détaillée et des amendements du ministre
Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 33, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 89, Loi sur le système correctionnel du Québec, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le ministre de la Sécurité publique. Ces amendements sont déclarés recevables. Il y a des interventions sur ce rapport? M. le ministre de la Sécurité publique, je vous cède la parole.
M. Normand Jutras
M. Jutras: Oui, M. le Président, merci. Seulement quelques remarques plutôt brèves.
Effectivement, au niveau du projet de loi n° 89, à savoir le projet de loi sur le système correctionnel du Québec, nous en sommes rendus à la prise en considération du rapport.
Alors, la semaine dernière, nous avons procédé à l'étude du projet de loi article par article. Il s'agit, M. le Président, d'un projet de loi de 208 articles, et je dois vous dire que cette étude article par article s'est très bien déroulée, dans un climat tout à fait positif. Nous avons étudié ses 208 articles en l'espace de 5 heures ou 5 heures et demie environ.
Alors, je veux remercier mon collègue le député de Chomedey pour son excellente collaboration dans ce dossier. Nous avons procédé à l'adoption d'amendements, à l'adoption d'amendements qui n'ont pas changé le fond de la loi mais qui ont amélioré le texte, en faciliteront la lecture et aussi vont en améliorer la compréhension.
Alors, il s'agit, M. le Président, d'un projet de loi qui est important, qui amène une réforme majeure du système de services correctionnels au Québec. Nous aurons, avec les mesures qui sont adoptées, qui seront adoptées dans ce projet de loi, par ce projet de loi, un système qui sera plus transparent, qui sera plus cohérent également et aussi surtout qui sera plus rigoureux.
Ce qui nous a guidés constamment, M. le Président, dans ce projet de loi, c'est, au premier chapitre, de voir est-ce que la réinsertion sociale des personnes contrevenantes demeure le principe moteur. Mais, aussi, nous avons toujours en tête, par rapport à la réinsertion sociale des personnes contrevenantes, d'être guidés par deux principes majeurs, à savoir le respect des décisions des tribunaux et aussi la protection de la société.
Alors, c'est un projet de loi qui a été bien accueilli par les intervenants du milieu. L'opposition, comme je l'ai dit, a collaboré à la procédure en commission parlementaire de sorte qu'aujourd'hui nous approchons de l'étape finale, et le rapport en ce sens vous a été soumis. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Sécurité publique. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey et leader adjoint de l'opposition.
M. Thomas J. Mulcair
M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour, je suis extrêmement heureux de pouvoir prendre la parole concernant le projet de loi n° 89 qui, comme le ministre vient de l'indiquer, porte réforme à notre système correctionnel au Québec.
Le projet de loi, M. le Président, fait suite à un événement tragique. Ça a été déclenché, du moins, par cet événement. C'est le meurtre du jeune Alexandre Livernoche en août 2000 par un dénommé Mario Bastien, qui était alors en absence temporaire de prison. Le public québécois s'est insurgé et s'est demandé: Comment ça se fait que ce monsieur-là était en dehors? Pourquoi il ne purgeait pas sa peine?
Il faut comprendre qu'il y a deux manières de sortir de prison. Une, c'est en finissant sa sentence avec ou sans une certaine rémission ou une mise en liberté, qui est contrôlée, cette partie-là, par la Commission québécoise des libérations conditionnelles. À l'intérieur de la prison pour certaines autres sorties, on appelle ça une absence temporaire, et ça, c'est régi par le système correctionnel, c'est-à-dire la prison elle-même. La loi va régler une grande partie de ces problèmes.
Sauf qu'il y a une chose qu'il faut retenir, M. le Président. C'est qu'en absence de ressources, c'est-à-dire si on n'a pas assez de sous pour appliquer ces bonnes idées ici, ça risque d'être autant de bonnes intentions qui demeureront juste des mots sur du papier.
Le journal Le Soleil, sous la plume de Claudette Samson, rapporte aujourd'hui une problématique soulignée notamment par le monde syndical, et on dit qu'il y a eu une promesse de 140 nouveaux professionnels. Et la question est de savoir: Est-ce que les sous pour payer pour ces nouvelles fonctions vont suivre? C'est quelque chose que nous allons suivre de près ici parce que c'est une chose de dire: On va faire une réforme, c'est une autre de s'assurer qu'on a assez d'argent pour la mettre en place.
Vous savez, si vous avez un membre de votre famille qui, malheureusement, attend pour avoir un remplacement d'une hanche ou une opération pour des cataractes, vous savez tout de suite qu'est-ce que ça veut dire lorsqu'on dit dans le Parti libéral qu'il manque de l'argent dans le système de santé. Lorsqu'il s'agit du système carcéral, c'est-à-dire des prisons ou le système de justice, c'est un peu moins évident.
C'est juste quand par exemple les commerçants ont commencé à se rendre compte qu'il y avait une augmentation importante dans les vols à l'étalage qu'ils se sont demandé: Mais comment ça se fait qu'il y a tellement de vols à l'étalage? Puis à l'autre bout on avait décidé de commencer à déjudiciariser, ça veut dire on ne poursuivait plus pour une première infraction. Ça a causé énormément de problèmes dans la société. Mais c'est moins évident puis c'est moins personnel, que le magasin qu'on fréquente a fait l'objet de plus de vols à l'étalage que si on a un membre de notre famille qui attend une opération. Sauf qu'il y a un coût social quand même puis même un coût financier direct, c'est-à-dire que le magasin va se faire rembourser ce qui a été volé, mais il va se le faire rembourser en chargeant plus cher aux gens honnêtes qui sont dans le magasin. Ça, c'est un exemple, M. le Président, pour dire que, dans le système de justice et le système carcéral tout comme le reste, il a manqué de l'argent au cours des dernières années. Ici, si on veut faire correctement ce qui est proposé, il va falloir que le gouvernement s'assure que les sous sont au rendez-vous.
n(15 h 50)n Le projet de loi innove à un égard, et je suis très content d'une entente avec le ministre là-dessus: on va être en train de mettre à contribution, d'une manière beaucoup plus systématique et vraiment d'une manière tout à fait correcte, les ressources dans la communauté qui, souvent, coûtent moins cher au gouvernement, sont structurées autrement puis produisent souvent d'excellents résultats. Sauf qu'on faisait face à un problème de taille.
Il n'y a rien de plus personnel que les examens physiques, psychiques, psychologiques, etc., qui vont être faits d'une personne qui sort de prison. Si on le sort du gouvernement ou du système professionnel, c'est-à-dire que, si ce n'est pas entre les mains d'un travailleur social membre de l'Ordre qui est astreint à un code de déontologie ou un avocat ou un psychologue membre en règle de son ordre professionnel, si ça s'en va dans d'autres groupes et que ce n'est pas dans le gouvernement, quelle est l'autorité que le gouvernement a, au cas où quelqu'un utiliserait cette information à d'autres fins que ce qui est proposé?
Le ministre a accepté une proposition, qui a été faite, de créer carrément une infraction pour quelqu'un qui utiliserait cette information, en d'autres mots, qui ne respecterait pas le libellé de son serment de discrétion à l'égard de cette information confidentielle, personnelle. Et je pense que c'est une bonne chose. Ça prouve le sérieux de la démarche du ministre et ça prouve que, tout en se fiant à ces ressources dans la collectivité, on va s'assurer qu'on va se lier par contrat avec eux autres. Mais cette disposition pénale vient porter, à notre sens, une garantie additionnelle que cette information des plus personnelles ne serait pas utilisée à mauvais escient.
Il y a aussi une question concernant l'indépendance de la Commission québécoise des libérations conditionnelles qui fait... comme on dirait en anglais: «We agree to disagree.» On s'entend qu'on ne va pas s'entendre là-dessus. Le ministre a été très gentleman, il nous a montré ? et il n'était même pas obligé de faire ça ? un avis juridique par un brillant juriste qui s'appelle Louis Borgeat, au ministère du Procureur général, qui disait qu'il n'y avait pas de problème juridique parce que la Commission en question n'était pas décisionnelle. Donc, si on asseyait la Commission des libérations conditionnelles à une table de concertation avec la partie ministérielle, les Services correctionnels, il n'y avait pas de problème de conflit, puis on ne pouvait pas porter atteinte à leur autonomie et à leur indépendance. On le suit largement sur cette question juridique, mais on porte un bémol et un caveat additionnel: on dit que c'est dangereux de demander à un groupe dont la seule préoccupation doit être l'application de la loi à la table avec des gens dont la préoccupation majeure, c'est de rencontrer les paramètres budgétaires du ministère... En d'autres mots, il ne faudrait pas qu'il y ait un autre Mario Bastien qui soit en liberté, parce que ces deux groupes-là se sont parlé puis ils se sont rendu compte qu'on avait des problèmes budgétaires, puis il fallait commencer à sortir plus de monde de prison.
Il faut suivre les décisions du tribunal. Pas ce ministre de la Sécurité publique, un autre avant, celui de Laval-des-Rapides, avait déjà laissé entendre que c'était la faute des tribunaux, qui mettaient trop de gens en prison. Les tribunaux font ce qu'on leur demande de faire, ils appliquent les lois, et les lois doivent s'appliquer également à tout le monde, selon ce que le législateur, ici, à Québec ou à Ottawa, a décidé dans son champ de compétence respectif. Ça ne devrait pas être une préoccupation pour les juges. Au contraire, aux États-Unis, les juges vont aller chercher les politiciens, puis il y a déjà eu des menaces de poursuites... il y a eu des poursuites d'outrage au tribunal aux États-Unis contre des politiciens, contre l'équivalent d'un ministre qui refusait d'avoir les ressources nécessaires.
Je termine en disant qu'il y a beaucoup là-dedans qui va aider la police et qu'il y a aussi de la protection améliorée pour les victimes qui vont être averties avant que quelqu'un qui était auteur d'un crime soit sorti. Pour toutes ces raisons, on est d'accord avec le projet de loi et on entend suivre le mouvement après son adoption pour veiller à ce que les sous promis soient au rendez-vous. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Pas d'autres intervenants?
Mise aux voix des amendements du ministre
Les amendements proposés par M. le ministre de la Sécurité publique sont-ils adoptés?
Des voix: Adopté.
Mise aux voix du rapport amendé
Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 89, Loi sur le système correctionnel du Québec, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.
Mme Vermette: M. le Président, j'aimerais que vous apportiez une attention à l'article 10 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 100
Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 10, M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du principe du projet de loi n° 100, Loi modifiant la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement et la Loi sur les permis d'alcool.
Interventions? M. le ministre de la Sécurité publique et député de Drummond.
M. Normand Jutras
M. Jutras: Alors, M. le Président, relativement au projet de loi n° 100, nous en sommes à l'adoption du principe. Il s'agit du projet de Loi modifiant la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement et la Loi sur les permis d'alcool.
Alors, M. le Président, depuis le début des années quatre-vingt-dix, le milieu de l'hôtellerie, de la restauration et des bars a présenté au gouvernement plusieurs demandes d'allégement législatif et réglementaire. En février 2000, la Régie des alcools, des courses et des jeux a d'ailleurs formé un groupe de travail, le comité Alcool, afin d'examiner les irritants reliés à l'application des dispositions législatives et réglementaires concernant l'acquisition, la conservation et la garde des boissons alcooliques en vue d'y apporter des solutions administratives et, le cas échéant, législatives. Les solutions retenues devaient tenir compte des intérêts de la population, des impératifs de contrôle du gouvernement en la matière et des objectifs de rentabilité, de développement et de saine administration de cette industrie.
Les travaux du comité ont permis de discuter de certaines pratiques commerciales et de constater que des modifications législatives et réglementaires sont nécessaires pour aplanir, dans la mesure du possible, des irritants identifiés par l'industrie. Les solutions législatives nécessiteront la mise à jour de la Loi sur les permis d'alcool, de la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques et de la Loi sur la Société des alcools du Québec.
Il importe de rappeler que les amendements législatifs apportés au cours des années aux lois régissant les activités reliées au commerce des boissons alcooliques afin de prévoir des exceptions aux prohibitions générales ou encore pour modifier les modalités de ces exceptions ont entraîné une lourdeur certaine de la loi et même généré certains anachronismes qu'il nous faut corriger. Sans un effort soutenu pour simplifier, alléger et moderniser la législation, il est devenu très difficile d'y apporter des changements ponctuels sans alourdir davantage cette législation déjà très complexe et souvent irritante pour l'industrie et pour ceux qui sont chargés de son application.
Pour sa part, le Groupe conseil sur l'allégement réglementaire, le groupe Lemaire, a relevé, en juin 2000, une multitude d'obligations et de contraintes dans la législation actuelle en matière de boissons alcooliques et le caractère obsolète de certains règlements. Pour solutionner ce problème, il a recommandé dans son rapport une révision globale du système de délivrance de permis ainsi qu'une modernisation et une simplification des lois et règlements applicables aux activités reliées au commerce des boissons alcooliques. De plus, le comité ACCES, qui est un acronyme pour action concertée pour contrer les économies souterraines, a aussi observé des lacunes dans la législation actuelle, notamment concernant l'immatriculation des appareils d'amusement et la présence d'insectes dans les boissons alcooliques.
Les amendements législatifs proposés par la Régie constitue la première étape d'une mise à jour des lois régissant le milieu des alcools. Ils permettront de corriger quelques-uns des irritants qui ont été identifiés par l'industrie. Ainsi, le permis de restaurant pour vendre autorisera désormais, comme c'est le cas actuellement pour les épiceries et dépanneurs depuis près de 30 ans, la vente pour emporter ou livrer de bière et de vin accompagné d'un repas durant la période comprise entre 8 heures et 23 heures. Nous avons à l'esprit les craintes que certains peuvent avoir relativement à la vente à des mineurs. En conséquence, les titulaires de permis auront la responsabilité de veiller à ce que cette vente ne se fasse pas à des personnes mineures, sous peine des sanctions prévues par nos lois sur l'alcool, qui vont de l'amende à la suspension ou révocation du permis d'alcool.
n(16 heures)n Davantage, on doit rappeler que les bouteilles qui sont vendues par ces commerces devront être étiquetées ou marquées en conformité avec nos lois et règlements, ceci afin d'éviter des activités de contrebande. Ainsi, si un restaurateur achète sa bière ailleurs que chez un distributeur autorisé pour éluder les taxes, l'étiquetage de cette bouteille, n'étant pas conforme, permettra de constater une infraction. Une nouvelle disposition permettra aussi aux corps policiers d'intercepter les véhicules de livraison pour vérifier le respect des dispositions de la loi, que ce soit sur l'étiquetage ou sur les heures d'affaires permises.
Quant au permis de restaurant pour servir, il autorisera le client du restaurant à y apporter, outre du vin, toute boisson alcoolique, sauf des alcools et des spiritueux, c'est-à-dire, donc, que les gens pourront apporter de la bière ou ce que certains appellent des coolers ? mais devrait-on dire plutôt, M. le Président, des bières panachées.
Pour leur part, les titulaires de permis de brasserie et de taverne pourront permettre la tenue d'une réception dans une pièce ou une terrasse de leur établissement autre que celle où leur permis est exploité. De plus, le projet de loi modifie, supprime ou ajoute certaines interdictions, notamment en ce qui a trait à la préparation à l'avance de carafons de vin pendant les heures d'affluence. Il sera en outre permis de faire des mélanges de boissons alcooliques contenant du vin ou de la bière, par exemple, le kir. On permettra encore l'utilisation d'un système de tuyauterie pour la distribution des alcools.
Par ailleurs, le projet de loi prévoit que nul ne pourra détenir, posséder ou utiliser un appareil d'amusement qui n'est pas immatriculé par la Régie des alcools, des courses et des jeux. Il existe déjà une disposition obligeant les fournisseurs de ces appareils à les faire immatriculer, mais les opérations du programme ACCES ont permis de constater souvent la difficulté d'identifier ce fournisseur en l'absence de vignettes. M. le Président, je me permets de souligner que les mesures proposées ont reçu l'appui d'Éduc'alcool, un organisme qui est impliqué dans la promotion de la consommation responsable de boissons alcooliques, qui croit que l'on doit favoriser l'éducation auprès des jeunes pour favoriser la consommation responsable à l'âge adulte.
Je tiens à préciser également que ces modifications législatives ne répondent qu'en partie aux demandes d'allégement formulées par l'industrie de l'hôtellerie et de la restauration parce qu'il y en a bien d'autres qui sont envisageables, comme, par exemple, la possibilité d'offrir des déjeuners dans les brasseries à compter de six heures sans droit de vendre de l'alcool, l'uniformisation des heures de fermeture des bars, brasseries et tavernes.
Toutefois, en adoptant le projet de loi, le gouvernement donnera un signal clair à l'effet qu'il s'engage résolument à solutionner des problèmes de cette industrie. Je tiens à leur souligner que la Régie a déjà entrepris les travaux qui devraient mener à une mise à jour complète de la Loi sur les permis d'alcool, de la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques et aussi de la section III de la Loi sur la Société des alcools du Québec.
Au cours de l'automne prochain, la Régie des alcools, des courses et des jeux me soumettra un document de travail qui précisera les modifications législatives envisagées en s'appuyant sur les balises suivantes: premièrement, assurer le respect de la législation et de la réglementation; deuxièmement, faire échec au monde criminel; troisièmement, protéger les revenus de l'État; et, quatrièmement, protéger la tranquillité publique.
Les principaux intervenants gouvernementaux susceptibles de contribuer à la mise en place de ces législations seront mis à contribution, soit le ministère de la Justice, le ministère de la Sécurité publique, le ministère des Finances, le ministère de l'Industrie et du Commerce, le ministère du Tourisme, la Société des alcools du Québec, le ministère de la Santé et des Services sociaux, le ministère des Transports, le ministère du Revenu, le ministère des Affaires municipales et de la Métropole, le Secrétariat à l'allégement réglementaire, la Sûreté du Québec et les corps de police municipaux.
La Régie sollicitera également l'avis des représentants de l'industrie sur une série de propositions concrètes visant, d'une part, à assurer la simplification et l'harmonisation des dispositions législatives qui auront été identifiées et, d'autre part, à adopter les règles concernant les boissons alcooliques à la réalité d'aujourd'hui.
M. le Président, je suis confiant que l'aboutissement de ces travaux permettra de doter le Québec de législations claires, faciles d'application et correspondant à la réalité actuelle d'un secteur important de l'activité économique. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Sécurité publique. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.
M. Geoffrey Kelley
M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, j'aimerais intervenir dans l'adoption de principe du projet de loi n° 100, la Loi modifiant la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement et la Loi sur les permis d'alcool, Bill 100, An Act to amend the Act respecting offences relating to alcoholic beverages, the Act respecting lotteries, publicity contests and amusement machines and the Act respecting liquor permits.
Et je dois avouer que ça fait maintenant huit ans comme parlementaire, M. le Président, presque, au mois de septembre, et je n'ai jamais vu un projet de loi si curieux que ce projet de loi. Et j'essaie toujours de comprendre, parce qu'il y avait un processus, et je pense qu'il y a le consentement des deux côtés... un consensus des deux côtés de la Chambre qu'il faut simplifier les règles du jeu dans l'industrie de l'hôtellerie, dans la restauration et les bars. On a vu, avec le temps, qu'il y a accumulé beaucoup de lois, beaucoup de règlements qui peut-être sont aujourd'hui désuets, et tout le reste. Alors, il y a le temps de faire le ménage. Mais, au lieu de faire le ménage comme il faut, le ministre arrive aujourd'hui avec un tout petit projet de loi qui corrige certains des éléments, certains des problèmes, mais laisse les autres de côté. Alors, ça a créé dans le milieu beaucoup de questionnement.
Alors, je pense qu'on a le devoir, comme parlementaires, de regarder ce projet de loi comme il faut pour mieux comprendre pourquoi les éléments qui sont inclus et pourquoi les éléments sont exclus du processus de... Parce que l'objectif, si j'ai bien compris le ministre, c'était de corriger tout de suite certains irritants dans l'espoir que peut-être un jour la vaste consultation qui a déjà commencé il y a deux, trois ans va compléter le processus. Parce que, de notre côté de la Chambre, on n'a pas accès, par exemple, au travail du comité Alcool, mais il y avait un comité interne qui a déjà travaillé avec l'industrie, avec les partenaires depuis deux ans pour regarder le problème et essayer de trouver les solutions. On trouve très peu de résultats de cette réflexion dans ce projet de loi. Alors, c'est un petit peu mystérieux, l'exercice qu'on est en train de faire cet après-midi, parce qu'on regarde le projet de loi et ça soulève beaucoup plus de questions, et je pense que ça va être le moment, en étude détaillée, de trouver les réponses.
Comme je dis, le constat que nos lois sont désuètes, je pense qu'il y a un consensus. Je pense également que, depuis trois ans maintenant, à la fois dans les industries concernées, les détenteurs de permis de bar, les hôtels, les restaurants, il y a un engagement, ils ont travaillé pour faire une réforme. Alors, je pense qu'ils vont être un petit peu déçus avec les derniers paragraphes du discours du ministre qu'il semblerait qu'on va commencer à l'automne à consulter une très grande liste des personnes. Pour moi, ça va être un processus qui risque de durer une autre année ou deux avant de vraiment arriver avec la réforme promise depuis un certain temps maintenant.
Et le ministre, et, je pense, c'est important de rappeler les balises, il faut... Il y a certains constats qui sont très importants. Il y a le rôle du contrôle de l'État. Il y a la question de préserver l'intérêt public, la tranquillité publique. Il y a une sensibilité quant aux ventes aux mineurs. Il y a la question de la contrebande. Il y avait à la fois les efforts qui étaient faits dans l'industrie pour contrôler la contrebande, mais il y a un grand intérêt pour l'État aussi pour s'assurer qu'il n'y a pas de contrebande dans la vente des boissons au Québec. Il y a également la question d'une concurrence équitable, et, je pense, ça, c'est parmi les questions qu'il faut soulever aussi, que, si on est en train de changer les règles du jeu, il faut le faire d'une façon qui est équitable pour toutes les personnes qui sont dans l'industrie. Et il y a d'autres petits problèmes que, entre autres, nos collègues, ici, de l'Outaouais ont soulevé quant à la question de différence des heures d'ouverture à côté de la frontière ontarienne. Alors, il y avait des problèmes, notamment à Hull et à Gatineau et tout le long de la rivière Outaouais, d'avoir des heures d'ouverture qui étaient très différentes. Alors, ça, c'est les grands enjeux.
n(16 h 10)n Et, quand on regarde le projet de loi n° 100 pour voir comment ça va nous éclairer, il y a vraiment trois, quatre éléments là-dedans. Le ministre décrivait le grand problème des insectes dans les bouteilles, et ça, c'est... Je comprends, à la fin de la session, il faut agir rapidement pour corriger la situation pour les mouches à fruits qu'on trouve de temps en temps dans les bouteilles. Et il y a même, dans le projet de loi, un genre de clause «tequila», M. le Président, pour... Dans la fabrication, si on met l'insecte à l'intérieur de la bouteille expressément, ça, c'est correct. Alors, on a, comme je dis, une clause «tequila» pour protéger l'insecte qu'on va trouver dans les bouteilles de tequila qui viennent de nos voisins, au Mexique.
Deuxièmement, il y a la question des carafons. Parce que, pour les grandes salles de banquet, si j'ai bien compris, qui aimeraient voir à préparer les carafons quand il y a une grande réception, un mariage, il y a maintenant la possibilité de préparer ces carafons à l'avance. Ça répond à une demande qui a été faite par l'industrie de l'hôtellerie. Alors, je pense, c'est tout à fait intéressant. Mais je pense qu'il faut être très prudent quant à la contrebande parce que les règles du jeu existantes étaient mises là pour s'assurer qu'on n'utilise pas le vin qui était acheté autre part qu'à la Société des alcools du Québec. Alors, oui à une plus grande souplesse. Je pense, tout le monde peut comprendre que, s'il y a une réception ou un mariage où il faut mettre des centaines de carafons de vin sur les tables, d'avoir un certain temps pour préparer ces carafons, ce n'est pas mauvais. Mais le problème de départ, le problème qui a été identifié, c'est une question de contrebande. Alors, il faut s'assurer qu'il y a les mesures mises en place toujours pour s'assurer que le vin qui est dans ces carafons venait de la Société des alcools.
Peut-être, l'élément qui est dans le projet de loi qui a soulevé la plus grande controverse, c'est la notion de la livraison de bière ou de vin à la maison pour les... entre autres, avec une pizza ou avec un poulet, les compagnies qui font la livraison de la nourriture à la maison. On peut parler de ça la clause «coq au vin» peut-être. Et ça, c'est aussi quelque chose qui... D'où ça vient? Encore une fois, il faut se poser les questions: Est-ce que c'est nécessaire? Est-ce que c'est vraiment quelque chose qu'il y a une très grande demande de notre société, que, quand on prend le téléphone pour commander une pizza ou le poulet, il faut avoir accès en même temps à une bouteille de vin ou des bouteilles de bière?
Juste un avis pour le ministre. Mon fils a 16 ans, son père est député maintenant depuis huit ans, il ne m'a jamais parlé d'un projet de loi avant la semaine passée. Et mon fils de 16 ans a dit: Mes amis suivent de près le projet de loi n° 100. Et j'ai dit: Comment, ça ne se peut pas, mon fils regarde tout ça! Ah oui, on va trouver ça bien intéressant qu'on peut maintenant acheter de la bière en commandant de la pizza. Il a 16 ans. Alors, je dis oui à l'ouverture, je comprends, on veut libéraliser, faire une libéralisation dans le domaine, mais je pense qu'il faut porter une attention.
Au-delà de mon fils, également la Fédération des commissions scolaires du Québec, ils sont très inquiets parce qu'ils voient dans ça... Parce qu'une grande clientèle pour ces restaurants qui font la livraison à la maison, ce sont effectivement les jeunes. Alors, il faut voir: Est-ce que, en faisant cette ouverture, on va faire la promotion de la vente des boisons aux mineurs? Il faut faire attention. Et j'ai écouté le ministre dans son discours, mais de prétendre que la personne, qui est à la course pour livrer les pizzas en bas de 20 minutes ou 30 minutes ? je ne sais pas c'est quoi, la promesse ? va prendre le temps qu'il faut pour s'assurer que les personnes qui achètent la pizza et la bière ont 18 ans. Énorme point d'interrogation, M. le Président. Et je pense que, dans la mesure qu'on veut baliser ça ou voir comment ça va être appliqué, je pense qu'il y a là matière à réflexion.
Et, comme je dis, ce n'est pas uniquement mon fils qui a soulevé le problème, mais la Fédération des commissions scolaires ont soulevé des grosses inquiétudes à cette question. C'est un sondage qui a été réalisé par l'Association des distributeurs d'alimentation, les dépanneurs, qui ont fait un sondage, qui disent que 69 % de la population est contre cette mesure. Alors, prudence, encore. Alors, je pense qu'il faut, en commission parlementaire... comment on va baliser cette mesure parce que ça a soulevé beaucoup d'inquiétudes. Et la question de la boisson chez les jeunes, ça, c'est effectivement un problème. Mais on sait fort bien ? ma maison est témoin ? que les jeunes sont une très grande clientèle des pizzerias du Québec. Moi, je pense, dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, notre maison est peut-être le client préféré à cause des achats de mon fils et ses amis. Alors, il faut être très prudent dans cette question.
Alors, on va voir le pourquoi. Je pense qu'il y avait un article récemment publié par Robert Picard, qui est un ex-directeur de l'école secondaire Irénée-Lussier, et lui aussi pose les mêmes genres de questions: «Dans le cas de la vente à domicile, ce contrôle de la vente sera impossible. Que fera le livreur, une fois sur place, avec le repas et la bouteille de vin ou la bière commandés s'il se rend compte que le client est mineur? S'en retournera-t-il au restaurant sans avoir livré la commande? Qu'il soit permis d'en douter.» Alors je pense que ça soulève des questions.
Je pense aussi... Dans un éditorial du Soleil, de M. Samson, on a dit la même chose. Dans un éditorial: Put, Put, Put, Saint-Hubert: «Les gouvernements ont parfois le don de créer des problèmes. L'annonce-surprise d'une autorisation prochaine aux restaurateurs de faire la livraison de bière et de vin pour accompagner un lunch commandé par téléphone est une belle illustration. Pour une chaîne de rôtisseries ou de pizzerias qui s'acquittera correctement de ses responsabilités, surgiront vite des bineries qui improviseront un service de livraison et contourneront les lois sur la vente aux mineurs ou les heures de vente des boissons alcoolisées.» Alors, une crainte qui, je pense, est tout à fait légitime qu'avec cette ouverture ce n'est pas les entreprises responsables, mais il y aura des personnes qui vont toujours essayer d'utiliser cette ouverture, cette brèche pour vendre de la bière et le vin après 11 heures le soir, vendre aux mineurs, et tout le reste. Alors, je pense qu'il faut regarder ça: Ça va être quoi, les balises? Ça va être quoi, les mesures de contrôle? Parce que je pense que tout le monde convient qu'on ne veut pas faire la promotion de la boisson pour les personnes en bas de 18 ans. Alors, je sais, par contre, qu'il y a l'exemple que les dépanneurs, notamment indépendants, les petits dépanneurs, surtout dans les vieux quartiers de Montréal, avec la bicyclette, on fait la livraison à la maison depuis des années, alors, si ça marche pour les dépanneurs, je pense qu'il y a une certaine logique à l'ouverture. Mais je pense que ça va être une occasion pour regarder l'ensemble de ces mesures juste pour s'assurer qu'il y a un contrôle qui est mis en place.
Le mystère, c'est... On a, avec une couple d'autres mesures. Il y a une mesure pour les appareils d'amusement. Mais, règle générale, ça, c'est des éléments qui ont fait tout le processus, les irritants identifiés qu'on veut corriger maintenant, mais il faut se poser la question des autres éléments. Le ministre en a évoqué deux dans son discours. Il y avait les représentants de la Corporation des bars, brasseries et tavernes du Québec qui ont posé la question, eux, où sont leurs deux éléments, les deux problèmes qu'ils ont identifiés. On m'a dit, dans certains endroits, on utilise l'aire du bar à partir de 6 heures le matin pour offrir un petit-déjeuner. Alors, ce n'est pas une question d'offrir de la boisson, mais, apparemment, ce n'est pas... c'est illégal d'utiliser ces aires pour le petit-déjeuner. Notamment, les terrains de golf sont souvent cités comme un exemple ou le bar dans un petit motel que, le matin, on utilise pour offrir un petit-déjeuner. Un irritant. C'est la première fois que j'ai entendu parler de ça. Mais pourquoi est-ce que cet élément n'est pas assez bon pour mettre dans le projet de loi?
Également, il y a une question d'harmonisation entre les brasseries et les bars sur l'heure d'ouverture. Je pense que la question se pose parce que maintenant les conditions sont de moins en moins distinctes entre un permis de bar et un permis de brasserie. C'est un autre élément que le comité Alcool a identifié, qu'il y a un certain intérêt pour la Corporation des bars, brasseries et tavernes du Québec de régler ce problème maintenant. Il faut se poser la question. Comme je dis, je suis toujours un petit peu mal à l'aise, à quelques jours de la fin de la session, de commencer à introduire d'autres éléments aussi. Mais peut-être, en commission parlementaire, ça va être le moment qu'on peut questionner les experts, consulter davantage les acteurs pour voir pourquoi certains éléments ont été retenus et d'autres éléments ont été écartés.
Nous autres, dans l'opposition, on n'a pas accès à ce genre de renseignements, mais la question se pose. La Corporation des bars, brasseries et tavernes du Québec a participé sur le comité Alcool, était mêlée dans le processus de consultation. Alors, ils sont déçus que leurs deux irritants qu'ils ont identifiés n'étaient pas inclus. Les autres le sont. Alors, il faut poser la question. Ce n'est pas les objections majeures, mais je suis curieux. Et, comme je dis, l'opposition, on n'a pas accès aux délibérations de ce genre de comités internes, mais on aimerait savoir pourquoi certains éléments sont là, d'autres ne le sont pas.
n(16 h 20)n Je pense que c'est important aussi d'être à l'écoute parce que, quand on fait ce genre de changements, on ne veut pas trop changer les règles du jeu, trop changer la concurrence et, quand on voit quelqu'un qui est quand même un acteur important, c'est-à-dire l'Association des détaillants en alimentation, qui a émis un communiqué de presse cette semaine, le 4 juin, qui dit qu'il a reçu de nombreux commentaires de marchands qui se disent très préoccupés par la loi que le ministre de la Sécurité publique a fait adopter ? ce qui n'est pas tout à fait vrai ? à toute vitesse sous la pression de certaines chaînes de restaurants... Alors, eux autres aimeraient être entendus. Ils ont un mot à dire sur le projet de loi.
Comme je dis, on arrive à la fin de la session, ce sont des choses qui sont difficiles à organiser. Mais je sais que mon collègue le député de Saint-Laurent a demandé une certaine consultation pour voir: Est-ce qu'on fait le bon choix? On a vu qu'il y avait également la Fédération des commissions scolaires qui ont émis des réserves. Certaines commissions scolaires dans la région métropolitaine aussi ont soulevé des questions sur la notion de vente aux mineurs. Alors, ce sont les genres de questions que, de notre côté de la Chambre, nous allons poser en étude détaillée. Et, je pense...
Comme je dis, j'y reviens toujours, ça fait trois ans maintenant, on a des promesses de faire une réforme, on a une promesse de faire vraiment un examen de tous les éléments qui sont sur la question de la vente des boissons au Québec et on ne le voit pas encore. Et les petits morceaux qui sont là-dedans... Encore une fois, M. Samson, dans la conclusion de son éditorial, qui n'est pas très chaud sur le projet de loi, qui a dit: Voilà ce qui peut survenir quand un gouvernement n'a pas de plan de match et qu'il gère une société à la petite semaine en espérant rattraper quelques points ici et là dans les sondages avec les mesures disparates.
Alors, de notre côté de la Chambre, on préférerait avoir une vue d'ensemble, on préférerait voir comment tous ces éléments vont ensemble pour répondre aux demandes, aux suggestions, aux exigences de l'industrie, tout en gardant le rôle de contrôle de l'État; je pense, un souci pour la vente de boissons alcooliques aux mineurs qui est très important. Il y a aussi le problème de contrebande, qui est réel, qui existe dans ces industries. Alors, il faut être vigilant pour ne pas avoir l'utilisation de l'alcool qui vient d'autres sources que les sources prévues dans la loi pour l'approvisionnement des boissons alcooliques. Alors, c'est ça, les genres de questions.
Nous allons travailler avec le gouvernement, en commission parlementaire, pour essayer de mieux comprendre le projet de loi n° 100, pour mieux cerner pourquoi ça, c'est les éléments que le gouvernement a décidé d'agir rapidement et pourquoi il y a d'autres recommandations, suggestions, qui étaient laissées de côté pour le moment. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie M. le député de Jacques-Cartier. Alors, il n'y a plus d'autres intervenants. Je m'en vais, à ce moment-là, céder la parole à M. le ministre pour sa réplique. M. le ministre.
M. Normand Jutras (réplique)
M. Jutras: M. le Président, je voudrais dire quelques mots pour rassurer mon collègue le député de Jacques-Cartier, qui, en bon père de famille, a écouté les commentaires de son jeune de 16 ans, et je voudrais le rassurer avant de partir pour la fin de semaine et puis qu'il puisse parler à son jeune. Ce qu'il faut rappeler, M. le Président ? puis je suis toujours un peu étonné d'entendre ce raisonnement-là ? ça fait 30 ans au Québec que les épiceries, les dépanneurs peuvent livrer de la boisson à la maison. Ça fait 30 ans. Ça n'a jamais présenté problème, il n'y a jamais... Moi, je n'ai jamais entendu rien à ce sujet-là, de critique ou quoi que ce soit, d'abus. Là, on veut permettre la livraison avec un repas, puis là tout à coup: Ah, bien ça, c'est épouvantable! Alors, autrement dit: Les épiciers, eux, peuvent en livrer, ce n'est pas un problème puis ça ne crée pas de problème, mais, si un restaurateur, lui, veut en livrer avec sa pizza, ah bien, là: Ah bien non, voyons donc! Un restaurateur, lui, ne serait pas capable de faire ça, de faire ça adéquatement.
Moi, je me dis, M. le Président, pourquoi une situation qui n'a pas créé problème pendant 30 ans, on dit: Avec un restaurant, on permettra dorénavant de livrer de la bière ou du vin, là, ça, ce n'est pas pareil? Moi, je me dis, M. le Président, c'est la même situation. Et, en plus, ce qu'il faut rappeler, c'est que dans le projet de loi il va y avoir des balises, là, il va devoir y avoir un contrôle: Est-ce que, effectivement, on livre la bière ou on livre le vin à une personne qui est âgée de 18 ans et plus?
Mais ce qui me fait dire encore plus, M. le Président, que c'est un faux problème, c'est que ? puis là, c'est surtout là que je veux rassurer le député de Jacques-Cartier ? le jeune qui voudrait se commander, par exemple, comme de la bière ou du vin, bien, il faut lui dire que: Tu n'as pas 18 ans, tu n'as pas le droit de le faire. Ça, je pense que c'est la première chose qu'il faut lui dire. Mais les jeunes aussi, ils savent compter, M. le Président, ils sont intelligents. Alors, le jeune qui pourrait commander sa bière au dépanneur, puis elle va lui coûter 1 $ la bouteille puis, s'il la commande avec sa pizza, qu'elle va lui coûter 4 $ la bouteille, ou sa bouteille de vin, qui, au lieu de lui coûter 10 $, va lui coûter 30 $, pourquoi un jeune procéderait de cette façon-là? Ça ne résiste pas, M. le Président, à l'analyse. Je pense que les gens savent compter davantage.
Et le troisième argument que je voudrais donner au député de Jacques-Cartier pour le rassurer. La bière ou le vin, ce n'est pas mauvais en soi, ça, tu sais. Et d'ailleurs je vais le référer au dernier sondage qu'Éduc'alcool a fait dernièrement au Québec, qui dit à quel point maintenant, le vin ou la bière, ça fait partie de la vie des Québécois, ça fait partie de la fête, ça fait partie de la convivialité. Ce qui n'est pas bien, c'est l'abus d'alcool. Mais, par rapport à cela, M. le Président, je pense que nos jeunes, ce à quoi il faut les inviter, c'est à plus de responsabilité. Il faut leur faire confiance, mais il faut les inviter à une meilleure responsabilisation par rapport à eux-mêmes.
Et, dernier élément que je dis rapidement. Mon collègue se demande: Mais pourquoi ces dispositions-là? Je pense que je l'ai bien expliqué dans mon allocution, en premier lieu, en disant: Écoutez, il y a une réforme majeure à faire dans ce domaine-là, mais c'est une réforme majeure et qui va demander beaucoup de travail, alors, on se dit, bien, pour le moment, enlevons les principaux irritants de l'industrie. Parce que c'est une industrie qui nous demande depuis déjà un certain temps de dire: Bien, certains irritants, voulez-vous enlever ça? Alors, on envoie un signal, on dit: Oui, certains irritants, nous les enlevons dès maintenant, mais c'est un pas vers une réforme majeure qui viendra, là, au cours des prochains mois. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le ministre de la Sécurité publique. Ceci met fin au débat. Et je mets aux voix le principe. Le principe du projet de loi n° 100, Loi modifiant la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement et la Loi sur les permis d'alcool, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.
Renvoi à la commission des institutions
Mme Vermette: Alors, M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des institutions et pour que le ministre de la Sécurité publique en fasse partie.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, madame. Cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.
Mme Vermette: Oui, M. le Président. Alors, je vous demanderais d'appeler l'article 34 de notre règlement, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 97
Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 34, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 97, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Régions. Y a-t-il des intervenants? Il n'y a pas d'intervenants de part et d'autre.
Mise aux voix du rapport
Le rapport de la commission de l'aménagement du territoire portant sur le projet de loi n° 97 est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.
Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 11 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 108
Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 11, M. le ministre délégué à la Santé, aux Services sociaux, à la Protection de la jeunesse et à la Prévention propose l'adoption du principe du projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris et modifiant diverses dispositions législatives. M. le ministre, je vous cède la parole.
M. Roger Bertrand
M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, je vous remercie. Ce projet de loi vise à modifier la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris afin de permettre la création d'une direction de la santé publique au sein du Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James.
Cette modification législative donne suite aux discussions qui se sont tenues depuis le 10 novembre 1999 entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James. Ces échanges visaient à établir des paramètres acceptables aux deux parties en ce qui a trait aux services de santé et aux services sociaux pour les Cris dans le but d'améliorer la santé de la population.
n(16 h 30)n La création d'une structure régionale de santé publique dans la région crie supposait d'abord que l'on détermine le régime juridique en vertu duquel elle serait instaurée, puisqu'on apporte des modifications législatives requises afin de moderniser les responsabilités et le mandat de l'autorité de santé publique pour cette région. Il fallait aussi tenir compte de la demande des Cris de continuer à être régis par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris plutôt que par la Loi sur les services de santé et les services sociaux, qui régit les autres régions du Québec.
La Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris, qui constitue le cadre juridique actuellement en vigueur dans cette région, ne prévoit justement pas la possibilité de créer une direction de la santé publique identique à celle des autres régions du Québec. Elle prévoit seulement la possibilité de créer un département de santé communautaire, ce qui correspond d'ailleurs à la structure de santé publique que l'on connaissait dans l'ensemble des régions du Québec jusqu'en 1991. Mais cet ancien mode d'organisation et le mandat du chef de département de santé communautaire est devenu désuet. Dans les faits, les activités régionales de santé publique pour la région sociosanitaire des terres cries de la Baie-James sont actuellement assurées en vertu d'une entente de service avec la région de Montréal-Centre, une partie des ressources professionnelles étant établies à Montréal, et c'est le directeur de santé publique de cette région qui agit à titre de directeur de la santé publique chez les Cris.
Or, les problèmes de santé publique graves rencontrés dans cette région requièrent que la région dispose d'une organisation fonctionnelle et autonome de santé publique. C'est la clé pour pouvoir intervenir sur ces problèmes avec les communautés elles-mêmes, à l'instar de ce qui se fait d'ailleurs dans les autres régions du Québec. Le projet de loi qui est soumis à notre examen propose donc la création d'une direction de santé publique sur le territoire cri par une modification à la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris.
Cette région disposerait ainsi de la capacité d'agir en santé publique selon les mêmes paramètres que les autres régions du Québec. Cela traduit la volonté de notre gouvernement de reconnaître une plus grande implication du Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James dans l'organisation des services de santé publique sur le territoire. De façon plus précise, le projet de loi balise les modalités de choix, de nomination et de remplacement du directeur de santé publique par le conseil régional, après entente avec le ministre. Celui-ci conserve la responsabilité ultime de donner son aval à cette nomination ou de demander la révocation du directeur.
Le projet de loi énonce également les mandats de ce dernier, ainsi que les mandats spécifiques du conseil régional en matière de santé publique. Il assure aussi la concordance législative avec les autres lois qui confient des mandats et des responsabilités au directeur de la santé publique. Le projet de loi reconnaît que la situation des Cris est différente de celle qui prévaut dans les autres régions du Québec et respecte leur souhait de continuer à être régis par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris. Ce projet de loi tient donc compte des caractéristiques propres de la région et de sa population, tout en assurant à celle-ci le même accès à des services de santé publique de qualité. Il est important d'ajouter que la communauté crie est d'accord avec les mesures incluses au projet de loi.
En somme, ce projet de loi jettera les bases d'une meilleure prise en charge de la santé publique de la population de cette région du Québec, qui en a grand besoin. Il permettra aussi de poursuivre la collaboration fructueuse qui s'est établie entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James. Voilà, M. le Président. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le député de Jacques-Cartier, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires autochtones et du Grand Nord, à nous livrer ses commentaires sur ce projet de loi. M. le député.
M. Geoffrey Kelley
M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, j'aimerais participer dans le débat sur le projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris et modifiant diverses dispositions législatives, Bill 108, An Act to amend the Act respecting health services and social services for Cree Native persons and various legislative provisions.
D'entrée de jeu, on va indiquer notre appui pour ce projet de loi que je trouve dans la foulée d'une plus grande autonomie gouvernementale, une plus grande prise en charge des responsabilités par les premières nations de Québec. Ça, c'est un autre petit pas en avant. Et, je pense, comme le ministre l'a indiqué, ça répond à une demande qui a été formulée par les neuf communautés cries et le Grand Conseil des Cris d'avoir la création d'une direction de la santé publique sur le territoire cri, le territoire régi par la Convention de la Baie James. Je pense que c'est tout à fait approprié parce que, d'avoir une direction de la santé publique adaptée aux besoins et aux enjeux de la santé publique chez les autochtones, notamment les Cris, c'est tout à fait approprié.
Et, je pense, dans les dernières deux, trois ans, on a vu quelques dossiers où, effectivement, les enjeux pour les communautés cries sont fort différents pour l'ensemble de la population québécoise. On a juste à penser... Je pense que ça fait maintenant trois ans que le Journal de l'Association médicale canadienne, dans son numéro du 4 mai 1999, a publié une étude sur la question du diabète dans les communautés cries: Diabetes Rates High in Aboriginal Women. Et ça, c'est une étude qui était menée par Shaila Rodrigues, Elizabeth Robinson, Katherine Gray-Donald. Et les chiffres qu'elles ont découverts quant au niveau de diabète chez les femmes, et notamment pendant les grossesses, étaient le double pour l'ensemble de la population québécoise, qui atteint les 13 %. Alors, ça, c'est vraiment un enjeu qui est différent ou plus prononcé dans ces communautés que dans l'ensemble du territoire. Alors, d'avoir une direction de la santé publique qui peut se pencher directement sur cette question, qui peut faire les campagnes de sensibilisation, qui peut travailler sur les diètes et les autres questions liées à la bonne prévention du diabète et le contrôle du diabète dans la société, je pense que c'est le genre d'exemple que qu'est-ce qu'une direction de la santé publique crie peut faire.
Il y avait également, dans les autres documents qui étaient fournis par notre ministère de la Santé et des Services sociaux qu'on voit souvent que les problèmes liés à la drogue et à l'alcool sont beaucoup plus prononcés dans les communautés autochtones, chez les premières nations, que dans l'ensemble de la population. Alors, si on peut avoir les programmes, si on peut avoir les avis de la Santé publique pour contrôler le fléau de la drogue et alcool dans la communauté crie, je pense qu'on a tout à fait l'intérêt.
Il y a le problème persistant du mercure qui est dans les eaux. Il y avait, l'année passée, des problèmes liés aux eaux, pas loin de Chibougamau, Mistassini, dans le lac Chibougamau et le lac Eau dorée, où on a trouvé que les niveaux de mercure sont très élevés, et ça pose un risque à la santé de la population. Le ministère de l'Environnement, en travaillant avec le Grand Conseil des Cris, a émis des avis pour s'assurer qu'on ne mange que deux poissons qui sortent de ces lacs par mois, parce que, si on en mange plus que ça, ça risque d'avoir des incidences sur la santé des populations concernées.
Alors, c'est juste trois exemples, M. le Président, mais on voit qu'une direction de la santé publique qui va être... qui va se pencher spécifiquement sur les questions de la santé publique chez les Cris au Québec, je pense qu'il y aura le travail à faire, je pense qu'il y a les défis qui sont très importants et je pense que la création de cette nouvelle Direction, c'est un autre pas dans la bonne direction d'une plus grande autonomie.
n(16 h 40)n Mr. Speaker, for our Cree neighbors to the North, the bill today would create a direction of... a department of public health which would have the responsibility of looking at problems specific to Cree communities, would have the responsibility to form advice, whether it's a question of an epidemic or medical emergency, or any other issue that poses a specific threat to the health of the Crees in the Cree communities of Québec. So, I think we have a step forward. It will allow, this new Department of Public Health, to look at a number of the problems that are specific to the Cree or more pronounced in the Cree populations than in the general population, one that has been looked at many times, when there was a study in the Canadian Medical Journal three years ago about the incidence of diabetes in the Cree population, which is double the population in Québec. And I think we have every interest to put into place, whether it's information, whether it's advice, aid in changing dietary practices that would help the Cree control the diabetes in their population.
We saw it again in a number of the problems dealing with drug and alcohol in the Cree communities. And there's a Department of Public Health working with the Cree, Health Board working with the ministère de la Santé et des Services sociaux in Québec. If they could work together, there's a lot of problems, specific problems to Cree communities, and I think having a Public Health Department that would look at Cree problems is a big step forward.
We have argued on both sides of the House, we have supported anything that moves us towards a greater self-government for First Nations in Québec. What we're doing in Bill 108 is another step along the road to greater self-government for the Cree Nation of Québec.
Donc, en conclusion, M. le Président, de notre côté de la Chambre, on va tout faire pour donner un examen consciencieux mais assez rapide de ce projet de loi. C'est toujours dommage, les projets de loi qui arrivent très tard dans la session. C'est dommage qu'on n'a pas eu l'occasion de le regarder comme il faut dès le 8 mai, mais, j'imagine, il y avait des problèmes, des contretemps. Mais on va, dans la mesure du possible, donner un examen assez rapide parce que, comme le ministre l'a bien dit, ça répond aux besoins de la communauté. C'est les Cris eux-mêmes qui aimeraient voir la création d'une direction de la santé publique qui va s'en occuper, des problèmes des neuf communautés cries et l'ensemble de la population crie au Québec. Alors, je pense qu'on a tout intérêt à faire un examen rapide de ce projet de loi pour permettre la création d'une direction de la santé publique chez les Cris du Québec. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Y a-t-il d'autres collègues qui souhaitent intervenir sur ce projet de loi?
Mise aux voix
Alors, puisqu'il n'y a pas d'autres interventions, est-ce que le principe du projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris et modifiant diverses dispositions législatives, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.
Renvoi à la commission des affaires sociales
Mme Vermette: Alors, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales et pour que le ministre délégué de la Santé, aux Services sociaux, à la Prévention et à la Jeunesse en soit membre.
Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci. Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté. Mme la leader adjointe.
Ajournement
Mme Vermette: Oui, M. le Président. Alors, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à mardi, le 11 juin 2002, à 10 heures.
Le Vice-Président (M. Beaulne): Je pense que cette motion est adoptée. Alors, nous ajournons nos travaux à mardi prochain, le 11 juin, à 10 heures.
(Fin de la séance à 16 h 43)