(Dix heures trois minutes)
Le Président: Bien. À l'ordre, Mmes, MM. les députés! Nous allons nous recueillir un moment.
Bien. Veuillez vous asseoir.
Présence de participants québécois
à la première session du Parlement
francophone des jeunes
Alors, nous allons débuter. Avant d'aborder les affaires courantes, j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes des deux participants québécois à la première session du Parlement francophone des jeunes, tenue à Québec en juillet dernier. Il s'agit de Frédérique Saucier, étudiante au collège François-Xavier-Garneau de Québec, et de Jean-François Bisson-Ross, étudiant au collège Champlain de Lennoxville. Alors, ces jeunes gens sont accompagnés de leur enseignant en histoire, au Petit Séminaire de Québec, qui agissait comme professeur accompagnateur lors de cette activité, M. Pierre Beaudoin.
Affaires courantes
Bien. Nous abordons maintenant les affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.
Dépôt de documents
Rapport intitulé Une carte
d'électeur numérisée avec photo:
de la faisabilité à l'opportunité
Au dépôt de documents, je dépose le rapport intitulé Une carte d'électeur numérisée avec photo: de la faisabilité à l'opportunité, que m'a transmis le Directeur général des élections. Ce rapport fait suite au mandat que l'Assemblée a confié au Directeur général des élections en décembre 2000.
Bien. Alors, est-ce qu'il y a consentement, par ailleurs, pour déroger à l'article 59 afin de permettre au député de Montmorency de déposer un document en rapport avec le Parlement francophone des jeunes? Alors, M. le député de Montmorency.
Charte du jeune citoyen
francophone du XXIe siècle
M. Simard (Montmorency): Alors, merci beaucoup, M. le Président. Je serai très bref. Comme vous le savez, du 8 au 10 juillet dernier, l'Assemblée nationale du Québec a vécu une première. Nous avons en effet reçu en nos murs le premier Parlement francophone des jeunes, qui réunissait 83 participants provenant d'une quarantaine d'États membres de l'Assemblée des parlementaires de la Francophonie, dont vous êtes, M. le Président, le grand manitou et dont notre ami député de Sainte-Marie?Saint-Jacques est l'ancien vice-président.
Monsieur, comme vous le savez, ces jeunes ont travaillé d'arrache-pied à la rédaction d'une Charte du jeune citoyen francophone du XXIe siècle pendant ces trois journées, une charte qui contient différents chapitres notamment qui traitent d'éducation, de culture, de libertés fondamentales, de prévention des conflits et d'environnement. Alors, c'est avec un très grand plaisir que je fais ce dépôt en Chambre.
Des voix: Bravo!
Le Président: Bien. Alors, ce document est déposé.
Dépôt de rapports de commissions
Maintenant, au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des institutions et député de Portneuf. Bien, je pense qu'on va l'attendre. Mme la présidente de la commission des affaires sociales et députée de Saint-François.
Étude détaillée du projet de loi n° 36
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé les 27, 28 novembre 2001 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 36, Loi sur la santé publique. La commission a adopté le texte de projet de loi avec des amendements.
Le Président: Bien. Alors, ce rapport est déposé. Mme la présidente de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et députée de Marie-Victorin.
Consultations particulières
sur le projet de loi n° 53
Mme Vermette: Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui a siégé le 28 novembre 2001 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 53, Loi concernant le transfert de certains employés municipaux exerçant des fonctions reliées à l'inspection des aliments.
Le Président: Bien. Alors, ce rapport est déposé. Mme la présidente de la commission de l'éducation et députée de Mégantic-Compton.
Étude détaillée du projet de loi n° 59
Mme Bélanger: Merci. M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'éducation qui a siégé les 27 et 28 novembre 2001 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi reportant la date de la prochaine élection scolaire générale et modifiant la Loi sur les élections scolaires. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.
Étude du projet de règlement sur
la délivrance des documents de l'état civil
Le Président: Bien. Alors, je constate que le président de la commission des institutions n'est pas encore avec nous, alors je vais déposer le rapport de la commission des institutions sur l'étude du projet de règlement sur la délivrance des documents de l'état civil.
Alors, maintenant nous allons immédiatement aborder la période de questions et de réponses orales... Oui, M. le leader de l'opposition.
M. Paradis: ...une question d'information au leader du gouvernement. On sait et on a été prévenus que le premier ministre se retrouvait à New York aujourd'hui, que Mme la vice-première ministre se retrouve à Miami, en Floride. Est-ce que le leader du gouvernement peut nous indiquer qui le Conseil des ministres a désigné pour agir à titre de premier ministre, les deux étant à l'extérieur du pays présentement?
M. Brassard: M. le Président.
Le Président: M. le leader...
Des voix: ...
M. Brassard: M. le Président, il me fait plaisir...
Des voix: Guy! Guy! Guy!
Le Président: Alors, devant l'intérêt de la question soulevée, ce serait bien si on avait le silence pour entendre la réponse.
n
(10 h 10)
n
M. Brassard: M. le Président, ça me fait plaisir de répondre à cette question et de démontrer, en y répondant, combien ce gouvernement est prévoyant, parce que nous avons en quelque sorte prévu une situation semblable dès le mois de mars 2001 par un décret, adopté par le Conseil des ministres, qui prévoit que celui qui assume les fonctions de premier ministre, temporairement, bien sûr, pendant cette période, c'est le ministre des Transports.
Des voix: Bravo!
Des voix: Guy! Guy! Guy!
M. Brassard: M. le Président, il s'agit en quelque sorte d'un dernier petit cadeau pour ses 25 ans au service de la population. Mais en même temps j'en profite aussi pour poser la question au leader de l'opposition: Qui, de votre côté, assume les fonctions de chef de l'opposition?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paradis: Comme notre formation politique a l'avantage de compter une adjointe au chef de l'opposition, c'est une femme qui agit comme adjointe au chef de l'opposition.
Le Président: Alors, M. le leader de l'opposition officielle, dois-je présumer que Mme la députée de Saint-François va commencer la période de questions?
Des voix: Ha, ha, ha!
Questions et réponses orales
Le Président: Alors, M. le ministre des Transports, préparez-vous.
Annulation d'une rencontre entre la ministre
déléguée à la Lutte contre la pauvreté
et l'exclusion et le CRD-Estrie
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, ma question ne s'adresse pas au premier ministre désigné. À la demande de la ministre déléguée à la Lutte contre la pauvreté, le CRD-Estrie avait organisé, dans le cadre de la tournée de la ministre, une consultation avec la population sur une stratégie de lutte contre la pauvreté. La rencontre devait avoir lieu mardi dernier. Le CRD-Estrie, s'inspirant du titre du document fourni par la ministre, Ne laisser personne de côté!, a décidé d'ouvrir la consultation de façon démocratique et transparente à l'ensemble des personnes intéressées et des groupes qui voulaient donner leur point de vue à la ministre. La ministre, constatant que le cadre de la consultation ne lui plaisait pas, sans raison valable, elle a refusé de se présenter à la rencontre et elle a décommandé sa présence vendredi, obligeant ainsi le CRD à annuler la rencontre.
Selon le CRD, le cabinet n'était pas à l'aise avec une formule qui donnait la parole au milieu, et c'est en ces termes que s'est exprimé le président du CRD, M. Janvier Cliche, et je cite: «En déclarant forfait, la ministre Léger a non seulement tourné le dos à un événement créé autour d'une démarche constructive qui lui aurait été fort utile pour établir une stratégie nationale, mais elle a aussi tourné le dos à des dizaines de personnes expertes de l'Estrie en matière de lutte à la pauvreté, qui ont investi une fois de plus beaucoup d'énergie pour lui partager une réalité et des perspectives d'avenir.» M. le Président, pourquoi la ministre a-t-elle refusé de participer à cet événement? Pourquoi s'est-elle défilée? Pourquoi a-t-elle laissé tomber les gens de l'Estrie qui luttent contre la pauvreté? Pourquoi un tel affront?
Le Président: Mme la ministre déléguée à la Lutte contre la pauvreté et l'exclusion.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Oui, M. le Président. D'abord, j'aimerais dire que la pauvreté est un phénomène que toutes les nations du monde y sont confrontées, et le Québec n'y échappe pas. Évidemment, le gouvernement du Québec en a fait une priorité particulièrement au printemps dernier en intensifiant cette lutte-là. Nous avons mandaté les CRD du Québec, son infrastructure qui réunit tous les partenaires, pour faire cette démarche de stratégie nationale de lutte à la pauvreté, particulièrement dans une démarche de validation, pour valider un document qui s'appelle Ne laisser personne de côté!.
Évidemment, j'ai rencontré presque toutes les régions du Québec, plus de 15 régions que j'ai rencontrées présentement, et, avec l'Estrie, nous avons eu une entente signée avec le CRD de l'Estrie, et ils ne répondaient pas encore tout à fait à toute la procédure qui est demandée pour cette rencontre-là. Mais ça va me faire plaisir de rencontrer le CRD de l'Estrie quand ils auront complété leurs travaux.
Le Président: Mme la députée.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, comment on peut excuser, comment la ministre peut-elle excuser son geste, qui est impardonnable, en accusant et en blâmant le CRD? La région ne veut plus voir la ministre, maintenant. Votre rôle, Mme la ministre, c'est d'écouter, c'est d'écouter la population, pas de blesser ou encore d'insulter qui que ce soit, surtout pas les gens qui travaillent au quotidien avec la pauvreté.
Et je comprends, M. le Président, pourquoi la coordonnatrice ministérielle des rencontres, Édith Bédard, disait dans le journal ce matin, citait dans le journal La Tribune ce matin que la ministre n'a fait que suivre la recommandation de son cabinet et des organisateurs des rencontres en reportant la rencontre qui devait se tenir à Sherbrooke mardi.
M. le Président, l'Estrie a choisi une façon différente de faire les choses, et, comme le disait le président du CRD, l'emballage pouvait être différent, mais le contenu, lui, hein, le contenu était là.
Alors, Mme la ministre, est-ce que vous êtes tannée d'entendre parler de la pauvreté? De quoi avez-vous peur? Avez-vous peur de croiser le fer avec la réalité, Mme la ministre?
Des voix: Bravo!
Le Président: Mme la ministre.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: M. le Président, quand j'entends des situations comme celle-là et quand j'entends la représentante du chef de l'opposition venir dire des choses comme celles-là... J'ai sillonné tout le Québec, j'ai sillonné tout le Québec tout cet automne pour aller voir des gens qui vivent dans la pauvreté, pour voir des gens qui travaillent avec des organismes communautaires, pour voir des gens qui s'occupent de lutte contre la pauvreté, et, oui, évidemment, dans l'Estrie, on s'occupe de la lutte contre la pauvreté. Et, je répète, ça va me faire un grand plaisir d'aller rencontrer les gens de l'Estrie.
J'y suis allée dernièrement. Je ne sais pas si la députée le sait, je suis allée dernièrement dans l'Estrie rencontrer les gens qui vivent dans la pauvreté, et je réitère: Je vais retourner dans l'Estrie, mais, évidemment, le travail du CRD... Je vais rappeler ce que le CRD devait faire: de présenter les résultats d'une démarche préalable de validation du document Ne laisser personne de côté!. Est-ce que ce document-là correspond... Si les gens de l'Estrie font les choses différemment, ils me le diront. S'ils font les choses différemment, ça va me faire plaisir...
Des voix: ...
Mme Léger: ...ça va me faire plaisir...
Des voix: ...
Mme Léger: ...ça va me faire plaisir de l'entendre. La pauvreté...
Des voix: ...
Le Président: Mme la ministre.
Mme Léger: M. le Président, ça va me faire plaisir d'aller rencontrer les gens de l'Estrie, je le réitère ici aujourd'hui. Mais il y a un travail à faire, c'est celui de présenter le portrait de pauvreté dans leur région, d'une part, de présenter l'état de concertation et de mobilisation régionales, locales dans la lutte contre la pauvreté. Il y a un travail de fond qui doit se faire pour me présenter les priorités régionales qui seront là. Alors, il y a un travail vraiment de concertation de base. S'il est fait, s'il est fait, M. le Président, ça va me faire plaisir de les rencontrer. Je suis allée dernièrement dans l'Estrie et je retournerai dans l'Estrie, parce que la pauvreté, la pauvreté, M. le Président, c'est quelque chose, du côté du gouvernement, pour lequel on se préoccupe et pour lequel on fait des choses.
Le Président: M. le député de Laurier-Dorion, en question additionnelle.
M. Christos Sirros
M. Sirros: N'est-il pas exact que la ministre se présente dans les consultations quand c'est elle qui écrit le scénario? Aussitôt qu'il y a un geste qui est posé, qui est ouvert et transparent, elle se défile. Et comment est-ce que la ministre peut nier que, en agissant ainsi, elle donne la preuve, finalement, M. le Président, que cette consultation dans son ensemble, cette démarche, elle est «biaisée, contrôlée, manquant totalement de transparence et d'indépendance», pour citer le Front commun des personnes assistées sociales ? c'est une citation? Et la ministre ne convient-elle pas finalement qu'elle fait elle-même la preuve que cette consultation, c'est une consultation bidon?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: Comment le député de Laurier-Dorion peut nous parler d'une consultation bidon quand il n'a même pas participé à cette consultation-là de Montréal lundi dernier? Les gens l'attendaient, à Montréal, lundi dernier.
Le député de Laurier-Dorion, je l'ai invité plus de quatre fois, lors d'une interpellation, pour qu'il se présente à Montréal, parce qu'il est député de Montréal. Ç'aurait été intéressant d'entendre le député de Laurier-Dorion à cette grande rencontre là. Il y avait plus de 300 personnes qui étaient là, à Montréal, lundi dernier pour la lutte contre la pauvreté, des gens intéressés à la lutte à la pauvreté et des gens qui veulent travailler à la lutte à la pauvreté, pas juste dire des choses qui se disent là, présentement, ce matin, M. le Président.
Le Président: M. le député.
M. Christos Sirros
M. Sirros: M. le Président, n'est-il pas exact que c'est lors de l'interpellation que la ministre s'est réveillée, quand je lui ai fait remarquer que sa consultation nationale...
n(10 h 20)nDes voix: ...
Le Président: M. le député.
M. Sirros: Je disais, M. le Président: N'est-il pas exact que la ministre, effectivement, m'a invité quand je lui ai rappelé que, dans sa stratégie d'élaboration d'une stratégie nationale, elle avait mis sur pied un comité consultatif, de députés ministériels strictement, et que, si cette stratégie était pour être nationale... Comment est-ce qu'elle peut expliquer, M. le Président, que ce comité qui a été constitué, et je la cite, «pour contribuer aux travaux et pour participer à la démarche de validation et de mobilisation»... Alors, si la stratégie est pour être nationale, comment est-ce que la ministre peut expliquer que ce ne sont que les députés du Parti québécois qui en font partie, de la nation, dans ce cas-ci? Et, deuxièmement, pourquoi conscrire les députés du Parti québécois pour aider à la mobilisation, comme elle dit, si ce n'est qu'il s'agit effectivement d'une démarche partisane, si elle vend les intérêts du Parti québécois plutôt que ceux du Québec, M. le Président?
Des voix: Bravo!
Le Président: Mme la ministre.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: M. le Président, comment le député de Laurier-Dorion peut me parler de démarche partisane quand il a été lui-même invité à participer lundi dernier? Alors, je ne vois pas où est la partisanerie, premièrement.
Deuxièmement, nous avons fait toute cette démarche-là en collaboration avec l'Association des CRD du Québec. À ce que je sache, l'Association des CRD du Québec, les députés, même de l'opposition, peuvent participer. Quelques-uns sont même membres des CRD. Donc, ils ont été invités. Tous les députés ici présents de l'opposition ont été invités à cette démarche-là, et, dans cette démarche-là...
Faut quand même dire qu'une démarche de mobilisation est absolument essentielle dans cette intensification, je pourrais dire, de lutte contre la pauvreté. Tous les gens sont appelés, sont appelés à être mobilisés derrière cette lutte contre la pauvreté et l'exclusion. Si on a fait les choses d'une telle façon, il faut peut-être faire les choses d'une façon différente et d'essayer que cette lutte à la pauvreté soit l'affaire de toutes et de tous. La pauvreté nous concerne, tout le monde, M. le Président.
Le Président: Mme la députée de Saint-François.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, est-ce que la ministre réalise que, si elle était venue à Sherbrooke, elle aurait pu justement rencontrer la députée de Saint-François puis le député d'Orford, qui s'est frappé le nez sur la porte, s'est cogné le nez sur la porte le matin même de la rencontre? Mme la ministre, l'Estrie était... Ce n'est pas d'aujourd'hui que l'Estrie travaille sur la pauvreté. Il y a longtemps...
Des voix: ...
Le Président: Je m'excuse, Mme la députée de Saint-François, vous êtes près de moi et je ne vous entends pas.
Des voix: ...
Le Président: Mme la députée.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Alors, Mme la ministre, elle a peur de croiser le fer avec les gens qui vont lui dire la vérité. Mme la ministre, je peux vous dire une chose, c'est que, dans l'Estrie, vous avez blessé la population de l'Estrie. C'est un affront. Et vous recevrez le rapport par écrit, par le courrier, mais ils ne veulent plus vous voir dans l'Estrie, Mme la ministre. Je regrette, mais vous les avez profondément blessés.
Le Président: Mme la ministre.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: M. le Président, je ne veux pas blesser les gens de l'Estrie. Je vais aller voir les gens de l'Estrie. Ça va me faire plaisir de retourner voir les gens de l'Estrie. Si les députés de l'opposition, comme dit la députée, sont si branchés, comment il se fait qu'ils se cognent à la porte? Parce que c'est le président du CRD lui-même qui a décidé d'annuler cette rencontre-là, premièrement.
Maintenant, j'ai fait 15 régions sur 17. Il ne me reste que l'Estrie et le Grand Nord. Alors, M. le Président, j'ai écouté et je continuerai d'écouter, parce que le gouvernement du Parti québécois écoute.
Le Président: Deuxième question principale, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, maintenant.
Rénovation du Département de gériatrie
de l'hôpital Notre-Dame, à Montréal
Mme Nicole Loiselle
Mme Loiselle: M. le Président, si le gouvernement du Parti québécois, comme dit la ministre, écoute, on va voir s'il est capable d'agir, ce matin. Encore une fois, nous avons la preuve que les grands oubliés du gouvernement du Parti québécois, ce sont les personnes âgées, malades, sans voix et sans défense. Cette semaine, devant l'inaction de ce gouvernement, les médecins du Département de gériatrie de l'hôpital Notre-Dame ont dénoncé publiquement les conditions de vie des personnes âgées, que les médecins considèrent et qualifient d'insalubres, voire même de dangereuses. M. le Président, selon le Dr Jean-Marc Boucher, de l'hôpital Notre-Dame, près de la moitié des patients âgés seraient contaminés par des bactéries résistantes aux antibiotiques dans les lieux de l'hôpital. Ça fait quatre ans que les médecins se font dire par ce gouvernement que leur dossier est prioritaire. Ça fait quatre ans que les médecins espèrent l'aboutissement de ce projet de rénovation afin d'améliorer les conditions de vie des personnes âgées qui vont à cet hôpital.
Devant l'urgence, devant l'extrême urgence de cette situation, le ministre de la Santé peut-il ce matin nous confirmer, oui ou non, si le centre gériatrique de l'hôpital Notre-Dame recevra, pas dans un an, pas dans deux ans, pas dans trois ans, mais dans les prochains jours les argents nécessaires pour la rénovation de ce Département?
Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Premièrement, M. le Président, quand on observe et qu'on voit des événements comme ceux-là, les événements qui sont décrits, c'est vrai que ça nous rend inquiets, c'est vrai que ça nous pose des questions et que ça nous fait réfléchir, et c'est immédiatement ce que nous avons fait, pour employer un langage qui n'est pas trop carré, là, parce que, au téléphone, c'était plus carré que cela. À la Régie de Montréal, là, je leur avais dégagé 12 millions de dollars pour des maintiens d'actif, avec priorité aux personnes âgées. La semaine passée, j'ai dégagé, pour tout le Québec, 90 millions de dollars pour du maintien d'actif, pour faire en sorte que les conditions de confort aux personnes âgées dans nos centres qui accueillent ces personnes, que ce soit en centre hospitalier ou en centre d'hébergement... d'y aller vite et de donner une réponse positive, et c'est dans les prochaines heures que je recevrai la réponse, M. le Président.
Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata, maintenant.
Méthode de mesurage du volume de bois
récolté dans les forêts publiques
M. Claude Béchard
M. Béchard: Oui. M. le Président, la situation de l'industrie forestière et de la forêt est très difficile au Québec, comme on le sait, parce que, en plus de la crise et maintenant, en plus, la crise sur le bois d'oeuvre, les coupures dans les approvisionnements qu'on a vues l'année passée et du marché qui est extrêmement difficile, il semble qu'en plus présentement les méthodes de mesurage font perdre des millions aux travailleurs et entrepreneurs forestiers qui sont aussi des victimes de la crise forestière. Et je profite de l'occasion pour saluer les travailleurs forestiers de toutes les régions du Québec, Bas-Saint-Laurent, Côte-Nord, Gaspésie, Matane, qui sont venus nous voir aujourd'hui et surtout écouter les réponses du ministre.
Des voix: Bravo!
M. Béchard: N'échappez rien en bas sur la tête du ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Béchard: Est-ce que le ministre des Ressources naturelles est d'accord avec les entrepreneurs et les travailleurs forestiers pour dire qu'il y a un problème de mesurage avec le bois qui, additionné aux autres aspects de la crise forestière, risque de faire perdre encore plus d'emplois dans nos régions et de créer des faillites d'entreprises dans toutes les régions du Québec?
Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, on le sait, que la méthode qui est utilisée pour le mesurage du bois, c'est ce qu'on appelle la méthode de masse-volume. Elle est appliquée depuis 30 ans au Québec et elle est également utilisée, d'ailleurs, ailleurs au Canada. C'est une méthode qui permet au gouvernement de facturer adéquatement, moi, j'en suis convaincu, les redevances qui sont dues à l'État pour les volumes récoltés sur les forêts publiques.
En 1997, le MRN a fait réaliser un audit par une firme externe, la firme Caron, Bélanger, Ernst & Young, qui portait sur la capacité des systèmes de contrôle à assurer l'intégralité des revenus générés par les droits de coupe, parce qu'il y avait des accusations à cet effet, que l'État ne percevait pas totalement toutes les redevances qui lui étaient dues. Eh bien, cette firme a fait un certain nombre de recommandations. Nous les avons appliquées, pour l'essentiel. Vingt-trois ont été réalisées sur les 26.
n(10 h 30)n Le ministère est toujours disponible pour examiner les cas problèmes qui lui sont soumis. Ses représentants se sont d'ailleurs rendus sur le terrain avec le porte-parole de cette Association, l'Association des entreprises forestières indépendantes, l'année dernière, en Mauricie. On leur a dit: Vous avez des cas, vous avez des dossiers, des exemples à nous soumettre où on fait défaut, où on est défaillants? Bien, allons-y, sur le terrain, et c'est ce qu'on a fait en Mauricie l'année dernière. Il y a une offre similaire qui a été faite récemment pour traiter des problèmes potentiels sur la Côte-Nord. Cette Association a prétendu ou affirmé qu'il y avait des problèmes semblables sur la Côte-Nord. On leur a dit: Très bien, allons-y, sur la Côte-Nord, et on leur a lancé l'invitation. Nous attendons la réponse de l'Association suite à cette invitation, et on va faire ce qu'on a fait également en Mauricie.
Moi, ce que je dis globalement, c'est que la méthode masse-volume est reconnue à travers tout le Canada comme une méthode efficace, adéquate pour qu'on puisse percevoir adéquatement et justement les revenus qui sont dus à l'État. S'il y a des problèmes, encore une fois, l'invitation est lancée, nous sommes prêts à aller sur le terrain pour les examiner.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député.
M. Claude Béchard
M. Béchard: M. le Président, est-ce que le ministre des Ressources naturelles se rend compte que ce qu'il est en train de dire, c'est que, lui, ce qui compte, c'est qu'il ait ses redevances à lui, les redevances de l'État, ce qui est bien correct? Ce que les gens, eux, veulent, les entrepreneurs forestiers, les travailleurs qui sont ici aujourd'hui, c'est que leurs redevances à eux pour leur travail soient aussi rendues, et ça, c'est un élément de la problématique.
L'autre élément de la problématique, M. le ministre, vous dites que vous connaissez le problème depuis un an. Il y en a présentement, des faillites. Il y a des travailleurs qui sont ici, ils ne sont pas venus en promenade. Ils sont venus entendre vos réponses à des questions qui les préoccupent depuis plusieurs années et qui, dans les derniers jours, suite au dernier budget... Quand ils appellent au ministère des Finances, on leur dit qu'il n'y a rien pour eux autres pour les aider. Quand ils appellent au ministère de l'Industrie et du Commerce, on leur dit que c'est les Finances. Donc, il n'y a rien de plus pour eux autres. Et là vous dites aujourd'hui que, vous, vous leur offrez une tournée dans le bois.
Ce qu'ils veulent, M. le Président, là, ces gens-là aujourd'hui, c'est que, oui, l'État ait ses redevances, mais c'est surtout qu'eux aient les redevances pour le travail qu'ils font, pour les opérations qu'ils font, et que finalement ils ne soient pas acculés à la faillite et à des pertes d'emplois dans nos régions.
Le Président: M. le ministre.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Bien, M. le Président, il y a quand même un lien direct, là, entre les redevances perçues par l'État en vertu du système de mesurage masse-volume et ce qui est versé aux travailleurs qui font la récolte et surtout, évidemment, qui la transportent également. Il y a un lien direct. Si on se trompe dans le mesurage et si l'État ne perçoit pas toutes les redevances qui lui sont dues, ça veut dire que le système est défaillant. On a vérifié le système, la conclusion, c'est qu'il n'est pas défaillant. On perçoit exactement les redevances qui nous sont dues. À partir de ce moment-là, évidemment, les travailleurs devraient recevoir aussi leur dû, c'est évident.
Et sauf qu'à partir du moment où ils se plaignent et ils nous disent: Nous ne recevons pas ce qui nous est dû dans telle région, à tel endroit, qu'ils nous indiquent les endroits, et ce qu'on dit, nous, c'est qu'on est prêts à aller avec eux sur le terrain faire les vérifications qui s'imposent, et, s'il y a défaillance, bien on apportera les corrections qu'il faut. Ceci étant dit, moi aussi, comme le député, je salue la présence des travailleurs qui sont parmi nous.
Le Président: M. le député de Verdun, maintenant, en question principale.
Droit de regard des retraités concernant
l'utilisation des surplus des caisses de retraite
M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: Merci, M. le Président. C'est un bien triste anniversaire aujourd'hui. Il y a un an, cette Assemblée adoptait le projet de loi n° 102, le projet de loi qui a privé les retraités de la possibilité de gérer leurs surplus actuariels, qui constituent la majeure partie de leurs épargnes, M. le Président. Depuis, en mai dernier, j'ai déposé le projet de loi n° 193 qui vient corriger ces inéquités.
Le nouveau ministre de la Sécurité sociale, le député de Charlesbourg, dans un débat de fin de séance en juin, s'était engagé devant cette Chambre, et je le cite, «à revoir l'ensemble de la question».
En juillet, et je vais citer, à ce moment-là, son attachée de presse, Mme Parent, après avoir rencontré l'Association de retraités ? mais il faut dire que nous étions en période d'élections partielles, dans le comté de Jonquière, et qu'on voulait peut-être amadouer les électeurs ? vous disiez: «On est prêts à regarder ce qu'ils nous ont proposé; on va aller aussi loin qu'on peut dans ce processus et on verra bien où ça nous mènera.» Alors, ma question est très simple, au ministre: Aujourd'hui, un an après, êtes-vous prêt à corriger les inéquités de la loi n° 102 envers les centaines de milliers de retraités?
Le Président: M. le ministre d'État au Travail et à la Solidarité sociale.
M. Jean Rochon
M. Rochon: Alors, M. le Président, on se rappellera qu'il y a un an effectivement qu'une décision a été prise, qu'il y a une loi qui a été adoptée par l'Assemblée nationale après un long examen, un long débat où toutes les questions ont été soulevées quant au projet de loi qui était présenté par mon collègue qui était responsable du ministère de la Solidarité sociale à l'époque. Et je pense qu'on peut dire sincèrement, là, que le tour de la question a été fait deux fois plutôt qu'une. Et la décision a été prise après qu'il y ait eu un processus où tout a été respecté, tout le monde a été entendu et tous les arguments ont été analysés.
Lorsque j'ai pris ces responsabilités, que les gens ont demandé à me rencontrer, j'ai effectivement dit que j'étais pour les rencontrer ? je les ai rencontrés ? je les entendrais, et on verrait s'il y avait d'autres éléments nouveaux, différents, d'autres arguments, d'autres développements qui auraient pu ne pas être considérés à l'époque.
La question étant examinée, on reprend exactement la même discussion, M. le Président, on tente de revenir à la case de départ, et il n'y a rien dans l'examen du dossier qui indique qu'il y a une façon différente de voir, qui n'a pas déjà été dite, qui n'a pas été donnée. Et il n'est pas juste du tout de dire que ce projet de loi a enlevé des droits à qui que ce soit. Ce projet de loi a bonifié le régime de gestion des régimes complémentaires. Ce régime a été bonifié, mais il y a des gens qui demandaient qu'on change un régime qui fonctionne sur une base contractuelle à un régime légal. Et ça, après l'examen de la question, on n'en est pas venu à la conclusion qu'il fallait faire ça. Alors, il y a changement de titulaire de fonction, mais il y a une continuité de gouvernement dans ce gouvernement-ci, M. le Président, et on va continuer avec la même cohérence qu'on a développée jusqu'ici, M. le Président.
Le Président: M. le député.
M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: Ça va, M. le Président. Si je comprends bien le ministre, vous répondez aux retraités, qui aujourd'hui vont manifester: Vous n'avez pas de raison de manifester. Premièrement. Deuxièmement, vous leur dites: La seule manière de corriger les inéquités comprises dans la loi n° 102, c'est de défaire le gouvernement actuellement et d'élire un gouvernement libéral. Merci.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre. M. le ministre du Travail.
M. Jean Rochon
M. Rochon: M. le Président, loin de moi l'idée de dire à des gens qu'ils ne peuvent pas ou qu'ils manifestent pour rien. Je pense qu'on va toujours continuer à écouter ce que les gens disent et voir s'il y a un débat qui reprend ou qui évolue.
Ce que je dis, M. le Président, c'est qu'on reste à l'écoute, qu'on garde le contact toujours avec les gens. Mais, maintenant, je vous le dis sincèrement, il n'y a pas d'éléments nouveaux qui ont été amenés dans ce dossier-là qui justifient qu'on reprenne un examen qui a été fait en profondeur. Et ce qu'il faut dire, si on veut parler de démocratie puis de système démocratique, c'est: Quand on a un système démocratique, que des décisions sont prises dans le cadre de ce système-là, il faut savoir les respecter, M. le Président. Et je pense que la population va être capable de reconnaître la cohérence et la justesse du fonctionnement du gouvernement. Et, évidemment, on verra bien aux prochaines élections ce que la population fera, comme tout le monde.
n(10 h 40)nLe Président: Mme la députée de Jonquière, en question principale.
Des voix: ...
Mme Gauthier: En parlant d'élections? Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Bien. Mme la députée de Jonquière.
Assise légale d'une décision du responsable
de l'accès à l'information au ministère
de la Santé et des Services sociaux
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: Merci, M. le Président. Hier, le ministre responsable de la loi à l'accès à l'information a déclaré en cette Chambre qu'il était pleinement satisfait de la réponse de son collègue à la Santé qui, lui, nous avait expliqué qu'un document sur support informatique n'était pas un document au sens de la loi. Pourtant, l'article 1 de la loi est fort clair, M. le Président. À l'alinéa 2 de l'article 1, on dit que la loi «s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre.» M. le Président, comment le ministre responsable de la loi à l'accès à l'information peut-il continuer à défendre l'indéfendable? Est-ce qu'il ne réalise pas honnêtement que cette défense n'est qu'un faux-fuyant et qu'elle repose sur une opinion juridique complaisante, si tant est qu'elle existe? Est-ce que, au moins, le ministre responsable a pris la peine de faire valider cette opinion juridique par son propre service du contentieux?
Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.
M. Joseph Facal
M. Facal: M. le Président, j'ai eu l'occasion de dire hier que je n'avais aucune raison de douter de la bonne foi ni de la compétence du responsable de l'accès à l'information du ministère de la Santé et des Services sociaux. Je maintiens cette réponse aujourd'hui. Comme ministre, je n'ai pas non plus à interpréter la loi, puisqu'il existe un organisme indépendant, à distance du gouvernement, dont c'est la mission et qui s'appelle la Commission d'accès à l'information.
L'article 135 de la Loi d'accès est d'ailleurs parfaitement clair. Il dit que, dans le cas où un requérant se voit refuser l'accès en tout ou en partie à ce qu'il demande, la Loi sur l'accès prévoit que le requérant peut demander à la Commission d'accès à l'information de réviser toute décision rendue par le responsable du ministère.
Bref, si l'opposition tient absolument à faire durer le plaisir, qu'elle aille en appel devant la Commission, comme elle en a le droit, et le ministre de la Santé se conformera, bien entendu, à la décision.
Le Président: M. le député de Châteauguay, en question principale.
Demande d'accès à un document ministériel
concernant l'accès aux soins de santé
et aux services sociaux en langue anglaise
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Oui. M. le Président, non seulement la défense du ministre de la Santé est frivole, cousue de fil blanc, mais celle du ministre responsable est encore pire. Il fait semblant que la réponse qu'on a reçue, c'est de nous dire que le document existe mais qu'il nous refuse l'accès. La réponse, c'est: le document n'existe pas. C'est parce qu'on l'a appris par d'autres sources qu'il existait. Et là on nous invente une nouvelle réponse. S'il nous dit que la Commission d'accès est capable d'y aller, j'espère qu'il va l'inviter, qu'il va joindre l'action à la parole, qu'il va inviter la Commission d'accès à aller faire enquête, c'est ce qu'on demandait hier.
Mais, juste pour revenir sur le fond de la question au ministre de la Santé, puis ça va peut-être vous intéresser aussi, voir comment ça fonctionne, votre loi, dans le ministère de la Santé. Le 7 mai... parce que non seulement la loi est claire, la jurisprudence est claire, mais l'application était claire. Le 7 mai dernier, le responsable de l'accès à l'information de la Régie de la santé de l'Estrie nous a transmis une fiche informatique ? c'est une imprimerie, ici, de l'écran cathodique ? et reconnaissait ainsi qu'il s'agissait d'un document au sens de la loi. Le 31 janvier, Claude Lamarre, celui dont on parle justement, le responsable de la santé, nous a remis un cédérom, reconnaissant ainsi qu'il s'agissait d'un document au sens de la loi. Puis, tout à coup, coup de théâtre, le ministre fait changer d'idée à Claude Lamarre, qui vient dire: Bien là ça n'existe plus.
Alors, nous, la question qu'on se pose à ce stade-ci, là, depuis la façon dont ça a été interprété avant et la toute nouvelle interprétation qui sort du supposé contentieux du ministre de la Santé, c'est: Qui ou quoi a amené Claude Lamarre à changer son interprétation?
Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Bien, M. le Président, quand il y a de telles affirmations, bien sûr qu'on vérifie les choses au quart de tour, hein? On fait des vérifications très détaillées, et ce qu'on peut indiquer ce matin, c'est que le responsable d'accès à l'information au ministère, en son âme et conscience, a agi conformément à la loi. Le responsable a vérifié parmi les documents disponibles. Il a considéré que ce document ne faisait pas partie de la liste formelle des documents officiels du ministère. Il a considéré que c'était un document préliminaire de réflexion déposé à une séance de travail privée à la demande d'un commissaire de la commission Larose. Il a considéré qu'il ne croyait pas que des copies d'acétates papier ayant servi au support informatique pour la présentation pouvaient être considérées comme des documents transmissibles à la commission.
En conséquence, le responsable, M. le Président, a donc respecté une obligation de moyen raisonnable et a ainsi agi de bonne foi et conformément à la loi. Pas de blâme à M. Lamarre quant à son travail qu'il a effectué et aux vérifications qui avaient été faites par le sous-ministre en titre et le secrétaire général du ministère. Et, comme vient de le dire le ministre responsable de l'application de la loi: Bien, s'ils ne sont pas contents, qu'ils utilisent l'article 135 puis qu'ils aillent à Commission d'accès à l'information.
Avec tout ce brouhaha, M. le Président, il y a une seule conclusion qui s'impose ce matin. D'après moi, là, le député de Châteauguay, en fin de semaine passée, il est allé au cinéma, il est allé voir Harry Potter à l'école des sorciers.
Le Président: M. le député.
Motif du refus d'accès à un document
ministériel sur l'accès aux soins de santé
et aux services sociaux en langue anglaise
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: En principale, M. le Président. Il ne s'agit pas d'un sujet léger, là, M. le ministre. Il s'agit du droit à l'information dans une démocratie saine, et ce n'est pas ce à quoi on assiste présentement. C'est une question importante, c'est une question d'intégrité, une question d'intégrité sur l'abus de pouvoir du gouvernement, un gouvernement coupable dans ce cas-ci d'illégalité pour fausse déclaration, pour cacher l'existence d'un document.
Est-ce qu'il se rend compte que sa défense, qui commence à se multiplier... Hier, la défense était que c'étaient des documents sur support informatique et que ce n'est pas couvert. On lui fait la démonstration, là, puis on en a plus qu'une, puis la jurisprudence est constante, la loi est claire, ce n'était pas une bonne défense.
Là il est obligé d'en ajouter un petit peu plus aujourd'hui. Là il nous dit que le responsable, finalement, il savait, là, qu'il y avait un document. Le responsable le savait, qu'il y avait un document, mais il a jugé que ce n'était pas un document qui liait le ministère, et donc il aurait peut-être dû nous répondre ça. Mais ce n'est pas ça qu'il nous a dit: Que ce n'est pas...
Des voix: ...
M. Fournier: C'est en principale. Calmez-vous. Ce n'est pas parce que vous êtes dans l'embarras... C'est en principale.
Des voix: ...
Le Président: Bien. Non. Je n'ai pas décidé que... J'avais déjà reconnu en principale, en septième question principale, le député de Châteauguay.
M. Fournier: Le document en question, le document en question vient de la Direction des affaires ministérielles et extraministérielles. C'est le directeur de cette direction, qui est tout de suite en dessous du sous-ministre, qui est allé faire la présentation; il présente les décisions de la ministre, les décisions du ministère, les avis sur ce qu'ils vont faire à l'avenir à l'égard des services en anglais pour la santé des concitoyens.
La question, elle est très, très simple. Il est clair, il est clair, malgré tous les faux-fuyants, qu'il s'agit d'un document visé par la loi, et normalement, si le responsable de l'accès avait suivi son interprétation antérieure, celle qui lie tout le monde, il nous l'aurait dit, que le document existait, il nous l'aurait fait parvenir. Je veux savoir comment ça se fait qu'il a changé l'interprétation et pourquoi la Commission d'accès ne viendrait pas faire enquête pour savoir si, dans ce cas-là, il ne s'agit pas d'un cas d'ingérence du ministre ou de son cabinet qui ont influencé le responsable pour cacher une information qui embêtait le gouvernement.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, à l'égard de cette question, les vérifications ont été faites et les officiers du ministère et le ministère se sont parfaitement bien conduits et, en âme et conscience, ont eu le bon comportement. Le député pose une question simple, dit-il, mais il y en a, une réponse simple: Ce n'est pas l'Assemblée nationale qui va se transformer en tribunal. Vous pouvez demander une révision de la décision à la Commission d'accès à l'information. Alors, allez-y, faites-le, allez devant la Commission d'accès à l'information, c'est prévu pour ça, il y a un mécanisme à distance qui est indépendant et qui va vous donner une réponse, et, si la réponse est différente, M. le Président, on va s'y conformer en toute transparence.
Le Président: M. le député.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Est-ce que le gouvernement du Parti québécois est en train de nous dire qu'à chaque fois qu'on nous répond qu'un document n'existe pas nous devons nous porter en appel parce qu'on ne peut pas avoir confiance dans ce gouvernement?
Le Président: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, toutes sortes d'insinuations malveillantes, toutes sortes d'insinuations malveillantes du député de Châteauguay, essayer de glisser que c'est, par exemple, des membres du cabinet qui auraient pris la décision... Ça ne marche pas comme ça, là. Ça, c'était dans le temps des libéraux, ça, c'était dans le temps des libéraux, c'est de même que vous fonctionnez, vous autres.
n(10 h 50)n Dans ce ministère, comme dans tous les autres ministères, il y a un responsable de la gestion de la loi d'accès à l'information et aux documents publics qui va cueillir les informations nécessaires pour prendre sa décision, et il y a d'autres personnes en autorité qui vérifient effectivement si tout cela est conforme à la loi. De vouloir inférer qu'il y a eu de l'interférence dans le travail de cet employé, c'est complètement faux, M. le Président, complètement faux. Et, puisqu'ils l'ont, le document, maintenant ? on ne sait pas comment ils se l'ont procuré ? puisqu'ils l'ont, ce document-là, ce serait peut-être intéressant aussi d'aller sur le fond de la question, et qu'il n'y aura pas de changement à la loi n° 142, qu'il n'y aura pas de changement à la loi pour garantir les droits individuels d'accès à des services aux anglophones au Québec.
Le Président: Mme la députée de Jonquière, en question complémentaire?
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: Oui, s'il vous plaît, M. le Président. Est-ce que le ministre responsable de la loi se rend compte que le recours en appel n'est pas le bon recours, parce qu'on ne nous a pas refusé... on ne nous a pas refusé l'information, on nous a dit qu'elle n'existait pas, l'information, M. le Président?
Est-ce que le ministre se rend compte, M. le Président, que le lien de confiance, le lien de confiance, qui est élémentaire, qui est essentiel, entre les citoyens du Québec et ce gouvernement vient d'être rompu et que dorénavant tous ceux et celles qui font une demande à l'accès à l'information ne savent plus si on répond la vérité, M. le Président?
Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.
M. Joseph Facal
M. Facal: M. le Président, je crois vraiment, vraiment que l'opposition essaie de créer quelque chose à partir de rien. Si la députée de Jonquière lisait attentivement l'article 135, elle verrait que la prémisse même de sa question est fausse, puisque l'article 135 dit: Dans le cas où le requérant se voit refuser l'accès à un document, en tout ou en partie, ou ? ou ? qu'il est informé par le responsable de l'accès de l'inexistence d'un document ? ce qui est le cas ici ? vous avez le droit de porter la question en appel. Alors, si vous croyez tant que ça, si vous croyez tant que ça aux vertus de l'accès à l'information et de la transparence, adressez-vous à l'organisme dont c'est la mission première. C'est tout.
Pour le reste, le ministre vient de dire que le fonctionnaire a agi de bonne foi, et je crois que nous présumons de la bonne foi. Le ministre réitère aussi qu'il n'y a eu aucune espèce d'ingérence de la part de son cabinet. Si l'opposition n'est pas satisfaite, qu'elle aille en appel, qu'elle suive les mécanismes prévus, et nous l'assurons que le ministre et le gouvernement se conformeront à la décision. C'est tout.
Le Président: M. le député d'Argenteuil.
M. David Whissell
M. Whissell: Oui, M. le Président, en additionnelle. Est-ce qu'on doit appliquer aussi un processus d'appel pour les demandes qui sont faites au ministère de l'Environnement? Parce qu'on a fait une demande, en octobre 2000, auprès du ministre de l'Environnement, à savoir d'obtenir les études qui ont été réalisées au cours des cinq dernières années portant sur l'impact, sur l'effet des OGM sur l'environnement, et, M. le Président, on nous répondait, au ministère: Le ministère n'a fait aucune étude sur le sujet. Alors, M. le Président, comment peut-on vraiment croire qu'il s'agisse de la vérité?
Le Président: M. le ministre.
M. Joseph Facal
M. Facal: M. le Président, chaque ministère a un responsable de l'accès à l'information et chaque demande est étudiée individuellement selon ses mérites. Il n'y a donc pas lieu de faire les généralisations ou les amalgames auxquels tente de parvenir le député.
Ce qui m'étonne cependant, M. le Président, pour revenir sur le fond de la question, c'est que l'opposition officielle n'a pas mis les pieds à la commission Larose, l'a boycottée, et là, tout d'un coup, semble s'intéresser à ce qui s'est dit là. Si ça vous intéresse tant que ça, l'accessibilité des services en santé aux anglophones, pourquoi vous n'êtes pas venus, vous-mêmes, comme opposition, à la commission Larose déposer un mémoire et faire connaître votre point de vue?
Le Président: M. le député de Vaudreuil.
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux: M. le Président, en complémentaire. Est-ce que le ministre réalise que ses propos ambigus laissent planer toutes sortes de doutes? M. le Président, le 6 septembre 2000, nous avons demandé au ministère de l'Éducation, en vertu de la loi sur l'accès à l'information, les ? et je cite ? «documents, rapports et données concernant le niveau de préparation des professeurs quant au nouveau programme, nouveau curriculum». Fin de la citation. Le 26 septembre 2000, nous recevons la réponse suivante: «Je vous informe que ? et je cite ? le ministère n'a pas produit le document que vous recherchez.» M. le Président, à la lumière de tout ce qui se passe présentement, et de tout le contexte qui prévaut, et des réponses ambiguës que nous recevons, comment peut-on croire une telle réponse maintenant, M. le Président?
Le Président: M. le ministre.
M. Joseph Facal
M. Facal: Bien, M. le Président, on voit très clairement là où l'opposition a choisi de s'en aller. Elle multiplie ? et c'est son droit ? les demandes d'accès à l'information dans tous les ministères. Évidemment, dans chaque cas, c'est la même procédure: il y a un responsable, il écrit la demande et il a 30 jours pour répondre. Dans certains cas, on donne le document en question; dans d'autres cas, se prévalant des dispositions de la loi, on donne une réponse qui évidemment risque de ne pas toujours satisfaire l'opposition. Et, si vous n'êtes pas satisfait de la réponse, la loi prévoit des mécanismes pour que vous puissiez aller en appel. Faites-le.
Le Président: Bien. Alors, cet échange complète la période de questions et de réponses orales pour aujourd'hui.
Motions sans préavis
Aux motions sans préavis, nous avons une motion conjointe de la députée de Mille-Îles et de la députée de Saint-François. Alors, Mme la députée de Mille-Îles.
Souligner le travail de l'AFEAS et l'appuyer
dans sa lutte contre la violence
chez les jeunes et envers les jeunes
Mme Leduc: M. le Président, conjointement avec la députée de Saint-François et chef de l'opposition aujourd'hui, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale réitère sa position face à la nécessité de lutter contre la violence chez les jeunes et envers les jeunes et, à ce titre, souligne le travail de l'AFEAS grâce à sa campagne annuelle de sensibilisation, l'Opération Tendre la main, qui se déroule pour la cinquième année consécutive à travers le Québec, du 25 novembre au 9 décembre 2001;
«Que l'Assemblée nationale engage la population et ses représentantes et représentants élus aux différentes instances à y participer dans leur localité avec les groupes de l'AFEAS.»Le Président: Alors, je comprends qu'il y a consentement pour discuter de la motion, Mme la députée. Mme la députée de Mille-Îles.
Mme Lyse Leduc
Mme Leduc: Je vous remercie, M. le Président. Alors, depuis sa fondation, en 1966, l'Association féminine d'éducation et d'action sociale, l'AFEAS, a pour mission de provoquer une réflexion individuelle et collective sur les droits et les responsabilités des femmes et de réaliser des changements dans leur milieu. L'AFEAS, je le souligne, M. le Président, rejoint les femmes et leur famille avec ses 17 000 membres et ses quelque 400 groupes locaux répartis dans 12 régions. L'objectif à long terme: la tolérance zéro à la violence dans toutes les communautés.
n(11 heures)n Constatant la présence de la violence en tous lieux et ses conséquences dramatiques pour les personnes qui en sont victimes, les membres de l'AFEAS ont convenu de travailler à changer les comportements tant des personnes violentes que des personnes violentées. La violence brise de nombreuses vies. Elle attaque l'intégrité des personnes et met en danger leur santé physique et mentale et parfois même leur vie. Mais la violence aussi isole les victimes, qui se sentent souvent coupables et même honteuses
d'avoir subi un tel traitement.
Afin d'aller plus loin, l'AFEAS a mis sur pied une campagne annuelle pour contrer la violence appelée Opération Tendre la main. Les campagnes ont d'abord visé la violence faite aux femmes et celle subie par les personnes âgées. Pour la troisième année consécutive, par contre, l'AFEAS cible en 2001 les jeunes du primaire et du secondaire, puisqu'ils constituent notre avenir, celui du Québec. Il ne suffit pas de parler de violence une fois dans une école pour se faire entendre. Il faut revenir sans cesse et souligner les dommages que crée la violence, car ce que nous recherchons, ce n'est rien que moins que des changements de comportement basés sur l'acceptation des valeurs de respect, d'égalité et de paix. Il faut expliquer et montrer comment s'y prendre pour agir autrement ou pour chercher de l'aide lors d'une agression. Avec le temps, les membres de l'AFEAS espèrent ouvrir les yeux, les oreilles et les coeurs face à cette réalité.
Dans le cadre de cette campagne, les participantes et les participants sont invités à porter le ruban blanc, symbole de paix, dont la forme de V inversé signifie: non à la violence. Au cours de la dernière semaine de novembre et de la première semaine de décembre, les membres de l'AFEAS montent des arbres de paix dans leur milieu. Ces arbres sont décorés de rubans blancs à la mémoire des femmes et des enfants tués par la violence au cours de l'année, d'éléments identifiant les organismes d'aide aux victimes de violence et aux personnes violentes et d'une banderole représentant une chaîne humaine, symbole du réseau d'entraide créé par l'AFEAS pour contrer la violence.
Ce travail de sensibilisation me paraît essentiel. Je voudrais rappeler qu'à Laval, le 24 octobre dernier, une femme, Mme Lise Desmarais, est décédée, tuée par son conjoint. Le Centre d'aide aux victimes d'actes criminels de la région lui a rendu hommage lundi dernier. On cherchait à dénoncer la violence faite aux femmes et à redonner espoir dans un monde meilleur.
Également, au printemps 2000, une recherche sur la violence entre les jeunes à Laval signalait que près de 30 % des élèves interrogés avaient déjà été battus ou frappés par d'autres jeunes. La plupart ont déclaré craindre les parcs et les rues. Est-ce vraiment ce que nous voulons pour nos enfants?
Par ailleurs, les événements du 11 septembre nous ont démontré que la plupart des personnes impliquées dans les attentats ont été conditionnées dès leur jeune âge à utiliser la violence comme moyen de résoudre des conflits et d'imposer leur idéologie. Il nous appartient donc par nos propres comportements d'enseigner à la relève montante le respect, la justice, l'égalité et la citoyenneté démocratique.
Permettez-moi aussi d'ajouter qu'en tant que présidente du Réseau des femmes parlementaires des Amériques j'ai pu être témoin de situations de violence dans divers pays et à différents degrés. Mais j'ai aussi constaté que la lutte à la violence est un enjeu prioritaire pour l'ensemble des femmes parlementaires des Amériques.
Le gouvernement du Québec participe lui aussi à lutter contre la violence. Pensons d'abord à la politique d'aide aux femmes violentées, à la politique en matière de condition féminine, à la politique de la santé et du bien-être, la politique de la périnatalité, à la lutte à la pauvreté, qui est une priorité gouvernementale. Mais il existe encore beaucoup de chemin à parcourir, et nous ne devons pas ménager nos efforts afin d'atteindre l'objectif d'un Québec sans violence.
Un Québec sans violence, c'est un Québec où il n'y aura plus de femmes battues, ni de bébés secoués à mort, ni de personnes âgées maltraitées, de décès à cause des guerres de gangs, plus de jeunes agressés sexuellement, d'enfants taxés ou de discours méprisants. Un Québec sans violence, c'est ça et bien plus encore. Certains diront que c'est irréaliste de croire qu'un jour nous réussirons à éliminer la violence. À ceux-là, je réponds que je préfère l'utopie à la résignation.
Nous vous invitons, ma collègue la députée de Saint-François et moi-même, à porter le ruban blanc durant toute l'opération de l'Opération Tendre la main, AFEAS-Lévis, et spécialement au lancement national qui aura lieu aujourd'hui, à 14 heures, dans le hall principal de l'hôtel du Parlement.
Permettez-moi de souligner l'engagement inconditionnel de Mme Hélène Cornellier, coordonnatrice du Québec de l'AFEAS. Merci également à toutes les bénévoles de l'organisme. C'est grâce à l'implication de personnes dévouées comme vous l'êtes que naissent les grandes réalisations sociales. Le Québec avance, et cette journée marque un pas de plus vers une société équitable, solidaire et sans violence.
Finalement, Martin Luther King n'a t-il pas dit: «La non-violence est une arme puissante et juste qui tranche sans blesser et ennoblit l'homme qui la manie. C'est une épée qui guérit.» Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Nous allons maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-François. Mme la députée.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de m'associer à ma collègue pour souligner le travail de sensibilisation de l'AFEAS dans sa lutte contre la violence chez et envers les jeunes. M. le Président, vous me permettrez, en premier lieu, de vous remercier pour la tenue d'un tel événement dans les murs de l'Assemblée nationale.
La violence, M. le Président, ne l'oublions pas, fait toujours mal, peu importe l'âge, le sexe, la couleur, le milieu économique et la culture. La violence ne discrimine pas. Elle fait des victimes dans la famille, à l'école, dans le milieu de travail, dans tous les milieux de vie, et les agressions proviennent aussi de tous les milieux et sont de tout âge. Verbale, physique, psychologique, sexuelle ou économique, la violence prend différentes formes, parfois jumelées les unes aux autres. Rappelons que, si la violence physique est la plus visible, les autres formes de violence, souvent silencieuses, sont tout aussi désastreuses pour les victimes.
Au-delà des coups qui marquent, la violence psychologique ou sexuelle laisse les âmes meurtries et génère le manque d'estime de soi, la maladie, la dépression ou des comportements autodestructeurs, voire même suicidaires. Un des moyens de venir à bout de ce triste phénomène qui gruge notre société est d'en parler ouvertement, de promouvoir la tolérance zéro violence partout, dans tous les milieux, privés et publics.
Selon Statistique Canada, en 1998, 56 % des victimes d'agressions sexuelles de sexe féminin étaient âgées de moins de 18 ans, dont 25 % de moins de 12 ans. C'est alarmant. Elles sont généralement agressées par un membre de la famille ou une connaissance. Une étude de 1999 de la Direction de la santé publique de Montréal-Centre menée auprès d'adolescentes de 14 à 19 ans montre que 54 % d'entre elles rapportent avoir été agressées sexuellement dans le cadre d'une relation amoureuse. Plusieurs de ces cas de violence sont prévisibles, comme celui de Chrystelle Lavigne-Gagnon, cette adolescente de 15 ans tuée en pleine rue par son ex-copain.
Dans La Presse du 15 janvier 2001, un article sur la violence chez les jeunes de 12 à 17 ans souligne qu'entre 1988 et 1998 une hausse de cas de violence de 127 % pour les jeunes filles et 65 % pour les jeunes garçons... Bien que les actes de violence rapportés chez les filles ? 4,7 sur 1 000 ? soient moins nombreux que chez les garçons ? 13,1 sur 1 000 ? le comportement des filles change drastiquement au sein des gangs.
Les auteurs de documents produits en 2000 par la Centrale des syndicats du Québec 2000 et destinés aux intervenants scolaires expliquent la hausse des statistiques des actes de violence chez les jeunes par une application plus systématique des stratégies d'intervention tolérance zéro, notamment les rapports d'incidents. Ils rapportent qu'en 1997 67 % des affaires de violence impliquaient des voies de faits simples, 16 %, des voies de fait graves et 7 %, des vols qualifiés. De plus, 6 % de actes violents impliquent l'usage de couteaux, 5 %, l'usage d'objets contondants et 1 %, d'armes à feu. Parmi les inculpés, 78 % étaient des adolescents et 22 % des adolescentes, alors qu'en 1987 84 % étaient des garçons et 16 %, des filles. Parmi les victimes, 54 % sont des adolescents de sexe masculin et 26 % des adolescentes.
n(11 h 10)n En 2001, le Conseil canadien de développement social a fait ressortir qu'un tiers des parents interviewés disaient, en 1996, que leur fils de 6 à 11 ans participait parfois ou souvent à beaucoup de bagarres. De plus, 8 % du groupe d'enfants de 12 à 13 ans avaient admis être victimes d'intimidation à l'école de temps en temps. Le Conseil note également que 60 360 enfants de moins de 18 ans ont disparu au Canada en 1999, soit 4 611 de plus qu'en 1995. Par ailleurs, la Coalition pour le contrôle des armes à feu dont l'AFEAS est membre montre qu'en 1995, au Québec, 46 % des jeunes de 15 à 24 ans se sont suicidés avec une arme à feu et, depuis 1989, selon les données compilées par le Collectif masculin contre le sexisme, les armes à feu sont utilisées dans de nombreux cas de violence conjugale et familiale. En 1998, sept femmes et trois enfants ont été tués par arme à feu; en 1999, on dénombre 10 femmes et deux enfants tués; en 2000, sept femmes et un enfant; en 2001, six femmes et six enfants.
Il est donc important, M. le Président, de supporter les initiatives mises sur pied à différents niveaux de la société pour venir en aide aux personnes violentées lors des agressions ou pour prévenir, diminuer la violence ou susciter les changements de comportement par le moyen de la sensibilisation aux conséquences de la violence.
L'Opération Tendre la main, AFEAS-Lévis va dans ce sens, elle rend visible la violence quotidienne et généralement invisible, mais combien néfaste. En transformant nos attitudes et nos comportements, c'est l'ensemble de la société que nous touchons. C'est dans cet esprit que Mme la députée de Mille-Îles et moi-même, nous vous avons convié à participer au lancement québécois de la campagne annuelle de sensibilisation qui se déroule ici même, cet après-midi à 14 heures, dans le hall principal de l'hôtel du Parlement. Nous serons heureuses de vous y accueillir en grand nombre avec les membres du conseil d'administration de l'AFEAS en provenance de toutes les régions du Québec.
Vous me permettrez, M. le Président, dans ce contexte, d'inviter la population à se joindre à la marche, dimanche prochain à 14 heures, au square Berri à Montréal, à la demande de Mme Simone Chartrand, qui est la tante de Marc-André Chartrand qui a été assassiné par le crime organisé, de vous inviter et d'inviter la population à participer à cette marche contre la violence. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Saint-François. Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Une voix: Vote par appel nominal.
Le Vice-Président (M. Pinard): Un vote par appel nominal. Appelez les députés, s'il vous plaît. On va appeler les députés.
n(11 h 13 ? 11 h 19)nLe Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît!
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Pinard): Messieurs, mesdames!
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre!
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre, s'il vous plaît!
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, veuillez vous asseoir. Ça vaudrait peut-être la peine de vous rappeler une règle de base: lorsqu'on signale le début des travaux, s'il vous plaît, bien vouloir regagner vos places.
Mise aux voix
Alors, nous allons procéder au vote sur la motion sans préavis déposée par Mme la députée de Mille-Îles ainsi que Mme la députée de Saint-François. La motion suivante:
n(11 h 20)n«Que l'Assemblée nationale réitère sa position face à la nécessité de lutter contre la violence chez les jeunes et envers les jeunes et, à ce titre, souligne le travail de l'AFEAS, grâce à sa campagne annuelle de sensibilisation, l'Opération Tendre la main, qui se déroule pour la cinquième année consécutive à travers le Québec, du 25 novembre au 9 décembre 2001;
«Que l'Assemblée nationale engage la population et ses représentantes et représentants élus aux différentes instances à y participer dans leur localité avec les groupes de l'AFEAS.» Alors, que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.
La Secrétaire adjointe: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Berthier), M. Brouillet (Chauveau), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Rochon (Charlesbourg), M. Bertrand (Charlevoix), M. Cliche (Vimont), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Julien (Trois-Rivières), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Portneuf), Mme Maltais (Taschereau), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Boisclair (Gouin), Mme Goupil (Lévis), M. Côté (La Peltrie), M. Boucher (Johnson), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), Mme Caron (Terrebonne), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Simard (Montmorency), M. Lachance (Bellechasse), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Charest (Rimouski), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Beaumier (Champlain), Mme Blanchet (Crémazie), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Laprise (Roberval), M. Geoffrion (La Prairie), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé), M. Duguay (Duplessis), M. Cousineau (Bertrand), M. Paquin (Saint-Jean), M. St-André (L'Assomption), M. Côté (Dubuc), M. Bergeron (Iberville), M. Labbé (Masson), M. Pagé (Labelle).
M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Bourbeau (Laporte), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), Mme Boulet (Laviolette), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Cholette (Hull).
M. Dumont (Rivière-du-Loup).
Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le secrétaire général.
Le Secrétaire: Pour: 90
Contre: 00
Abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, cette motion est donc déclarée adoptée.
Nous allons passer maintenant à la rubrique... Non. Je vais suspendre.
(Suspension de la séance à 11 h 24)
(Reprise à 11 h 25)
Le Vice-Président (M. Pinard): Nous en sommes toujours aux affaires courantes, à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader de l'opposition officielle, aux motions sans préavis.
Nomination du député de Montmagny-L'Islet
à titre de membre de la commission
de l'agriculture, des pêcheries
et de l'alimentation
M. Paradis: Aux motions sans préavis, M. le Président:
«Conformément à l'article 129 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin de nommer le député de Montmagny-L'Islet, M. Réal Gauvin, membre de la commission permanente de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Ce changement prend effet immédiatement.»Des voix: Bravo!
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion est adoptée? Adopté. Alors, M. le leader.
M. Brassard: Oui, aux avis touchant les travaux des commissions.
Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?
Une voix: Non.
Avis touchant les travaux des commissions
Le Vice-Président (M. Pinard): Donc, nous passons aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader.
M. Brassard: Alors, je voudrais aviser cette Assemblée, M. le Président, d'abord, que la commission de l'aménagement du territoire procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 56, Loi modifiant la Loi sur la Commission de la capitale nationale, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
Que la commission de l'économie et du travail procédera aux consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 46, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant certains secteurs de l'industrie du vêtement, aujourd'hui, de 15 heures à 17 h 30 et de 20 heures à 22 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;
Et que la commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 44, Loi modifiant la Loi sur les parcs, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif, et cette même commission procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 58, Loi modifiant la Loi visant la préservation des ressources en eau, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader du gouvernement.
La rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Donc, ceci termine les affaires courantes.
Affaires du jour
Nous allons donc procéder de ce pas aux affaires du jour, et j'inviterais le leader du gouvernement à appeler...
M. Brassard: Alors, il s'agit de poursuivre le débat sur le principe du projet de loi n° 60. C'est à l'article 16 du feuilleton.
Projet de loi n° 60
Reprise du débat sur l'adoption du principe
Le Vice-Président (M. Pinard): L'article 16 de votre feuilleton. L'Assemblée reprend le débat, ajourné le 28 novembre 2001, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 60, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. M. le député d'Abitibi-Ouest avait complété son intervention, et le débat avait été ajourné par le leader du gouvernement.
Alors, y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 60? Alors, je céderais maintenant la parole au député d'Orford. M. le député.
M. Robert Benoit
M. Benoit: Merci, M. le Président. Écoutez, j'ai demandé à mon leader et à mon whip de pouvoir intervenir sur le projet de loi n° 60. Il y a des aspects très importants dans le projet de loi qu'il nous faut regarder, mais, avant qu'on regarde certains aspects spécifiques du projet de loi, je voudrais rappeler aux gens qui viennent de se joindre à nous comment, dans les législations municipales, c'est le capharnaüm complet. Capharnaüm. Capharnaüm, qui est synonyme, M. le Président, de: On ne sait plus si on s'en vient ou si on s'en va; capharnaüm, qui est synonyme de: On est pas mal mélangé; capharnaüm, c'est que ce regroupement des municipalités, c'est loin de faire l'assentiment général ? on l'a vu dans les partielles, où on a eu des élections récemment.
Or, il faut comprendre, M. le Président, que la loi n° 60 fait suite à deux lois, la loi n° 170 et la loi n° 29. Ces deux lois ont été votées suite à des bâillons, c'est-à-dire que le gouvernement s'est servi de son poids, de sa majorité ici, à l'Assemblée nationale, pour tout simplement dire: Peu importe ce que les citoyens ont à dire, on ne veut pas les entendre et on va passer cette loi-là. C'est malheureux, en démocratie, quand on voit un gouvernement avec cette arrogance, cette arrogance.
Mais là, ici, ce qu'il y a d'épouvantable... on a vu des fins de gouvernement, on a vu la fin du gouvernement de M. Lévesque, on a vu la fin du gouvernement de M. Bourassa, mais, dans ces deux cas-là, on avait des chefs, on avait des premiers ministres d'une grande dignité, des gens qui appréciaient parler au plus simple des citoyens. Nous avions là des grands premiers ministres qui ont été à l'écoute, jusqu'au dernier instant, des populations locales, des régionaux, des gens mal pris, des gens pauvres.
n(11 h 30)n Ici, malheureusement, on a affaire à un premier ministre qui donne le premier exemple de l'arrogance. On l'a vu encore hier, on l'a vu hier, à la période de questions. C'était complètement épouvantable, les paroles du premier ministre. Cette arrogance qui commence à la tête, comment voulez-vous, M. le Président, que l'ensemble du Conseil des ministres, que l'ensemble des députés n'aient pas cette même arrogance? Eux-mêmes, les députés, nous le disent. Ils nous le disent, parce qu'on mange ensemble, ils nous le disent dans les corridors, comment ils sont mal à l'aise avec cette arrogance d'un bon nombre de leurs ministres et du premier ministre.
Alors, si je parle... On me rappelle à l'ordre, le député de Saint-Jacques a bien raison de le faire. Je vais lui dire, si je parle d'arrogance, c'est parce que les deux projets de loi desquels découle le projet de loi n° 60 ont été des projets qui ont été déposés avec arrogance, ont été déposés ici avec la loi du bâillon, où on a refusé d'entendre l'opposition. Dans un cas, il y avait des centaines, des centaines d'amendements, dans le cas de la loi n° 170. Et il y en avait à peu près le double dans la loi n° 29 des amendements. Même si nous nous étions retirés pour lire ces amendements-là, on avait calculé que ça nous prendrait trois semaines juste pour lire les amendements. Jamais le président n'a été capable de lire ni la loi ni les amendements.
Et là, aujourd'hui, on nous arrive avec une troisième loi. C'est bien évident qu'à la vitesse que les lois n° 170 et n° 29 ont été faites, c'est bien évident, M. le Président, qu'on se retrouve aujourd'hui avec des lois qui ont été mal pensées, mal écrites, mal ficelées, mal votées. Et aujourd'hui on nous demande, dans un capharnaüm de règles et de lois encore... Alors, on nous dépose une loi avec 143 articles, qui va d'à peu près tout à à peu près tout. Et on va parler de certains articles de ce projet de loi là.
Dans ce qu'on appelle les notes explicatives, on nous dit: «Le projet de loi prévoit que la Communauté métropolitaine de Québec a deux ans, à compter du 1er janvier 2002, pour établir son plan de gestion de matières résiduelles. Il autorise, de plus, le conseil de cette Communauté à nommer une seule personne pour occuper plus d'un poste parmi ceux de directeur général, de trésorier ou de secrétaire.» Parlons des déchets, M. le Président. Pour les gens qui me connaissent, ils savent que l'opposition, nous avons une grande préoccupation en environnement. La preuve, d'ailleurs, en fin de semaine, nous avons eu un colloque auquel plus de 680 groupes environnementaux avaient été conviés. Un bon nombre de ces groupes se sont présentés. M. le chef de notre formation, M. Charest, député de Sherbrooke, a été présent à l'ensemble du colloque. Il a écouté les intervenants du Québec lui parler d'environnement. Non seulement il les a écoutés, il a communiqué avec eux. La dernière partie de ce colloque, qui se tenait à Montréal, à l'Université du Québec, a été un grand succès, des panélistes de grande qualité, une organisation sans faille. Et les gens qui ont été là, pour 15 $, n'ont vraiment pas été déçus de pouvoir donner leur point de vue à un futur gouvernement, à un futur premier ministre, de ce que devrait être l'environnement au Québec. On a entendu plein de choses, M. le Président, sur l'environnement. Peut-être résumer un peu les principaux points qui nous ont été apportés.
Les matières résiduelles ont été indéniablement... ? et je reviens aux notes explicatives dans un instant ? les matières résiduelles ont été un des angles les plus importants de cette journée-là. Ce colloque avait un atelier présidé par M. Raymond Cloutier, de la région de l'Estrie, un expert en déchets qui est gradué de l'Université de Sherbrooke avec une maîtrise et qui est un consultant qui aide pas mal de gens à regarder. Et on s'entendait tous, dans cette commission, samedi, en présence de M. Charest, tout le monde s'entendait à dire qu'une loi, la loi n° 99, avait été votée il y a deux ans, presque jour pour jour.
D'ailleurs, je salue le député d'Argenteuil, le distingué député d'Argenteuil, jeune et dynamique, fougueux, travaillant, présent dans son comté, présent à l'Assemblée nationale, ce député d'Argenteuil, qui, après avoir écouté des centaines de mémoires, aux mois de septembre et octobre, sur le projet de loi, avait par la suite passé la loi n° 99. Nous avions voté pour, nous étions pour la loi. Et le député d'Argenteuil, constamment, demandait au ministre de l'Environnement numéro trois ? parce que nous sommes rendus au quatrième maintenant ? demandait régulièrement au ministre de l'Environnement... Vous savez, on a comme des... on connaît ça un petit peu, les gouvernements. Alors, on demandait au ministre numéro trois de l'Environnement: M. le ministre, quand est-ce que les règlements sortiront?
Il faut bien comprendre, ici, qu'une loi comme la loi n° 99, ça n'a pas grand effet. C'est une panoplie, finalement, de voeux pieux où on dit aux gens: Nous aimerions atteindre telle cible, comme ils ont fait d'ailleurs dans leur programme, hein? Si on parle du programme électoral ? je ne peux pas m'empêcher d'en parler, M. le Président ? lancé par Mme Marois en 1994, en environnement, on avait promis à peu près n'importe quoi, à peu près n'importe quoi. Mais il y a une phrase en particulier, quand on parle de matières résiduelles. Il ne faut pas l'oublier, c'est cette phrase où on dit, dans le programme du PQ, en 1994, déposé par la porte-parole en environnement à l'époque, qui deviendra ministre des Finances, ministre de la Santé, vice-première ministre... Et ce programme-là, il a été flushé, hein, M. le Président. Je vous rappelle une phrase où on disait, à la page 37 exactement: «Tous les sites de déchets du Québec devront devenir propriété publique.» Alors, sept ans après, non seulement les sites de déchets, les LES, comme on appelle, ne sont pas devenus des propriétés publiques, tout au contraire, nous sommes dans une situation maintenant où trois des plus grands centres de déchets du Québec, celui de Saint-Nicéphore, celui des Laurentides et celui des Cantons-de-l'Est, trois des plus grands sites de déchets du Québec, appartiennent à une entreprise qui est une multinationale américaine qui est listée sur les marchés boursiers américains. Alors, non seulement on n'a pas dit: Les matières résiduelles vont être l'affaire des Québécois puis on va les gérer chez nous par des gens de chez nous, mais c'est géré finalement par des multinationales américaines. Alors, ça a été ça, le programme environnemental du Parti québécois.
Bref, si je reviens à la loi n° 99 que le ministre de l'Environnement numéro trois a déposée, on a voté pour, il y avait là une panoplie de voeux pieux. Et le bon député d'Argenteuil constamment demandait au ministre: Oui, mais le règlement, oui, mais le règlement... Je vous laisserai tantôt le ministre d'Argenteuil répondre, quand il demandait au ministre... La réponse, je vais vous la donner, il vous la répétera dans quelques instants. La réponse, c'était: Les règlements, on va les avoir, on les a déjà imprimés. On va les avoir prochainement, ils sont déjà imprimés.
Et, dans la vraie vie, parce que le député d'Argenteuil et le député d'Orford travaillent ensemble, nous, après quelques mois, on a dit... Il y a eu une prépublication du règlement dans la Gazette officielle du Québec. On a regardé ça puis on a dit: Mais, franchement, ça n'a pas d'allure, ce règlement-là, ça n'a vraiment pas d'allure. Et là, de partout au Québec ? écoutez-moi bien, M. le Président ? de partout au Québec, les gens nous appelaient, nous écrivaient. Des groupes d'environnement, on en dénombre plus de 2 000 au Québec, tous ces groupes-là qui nous appelaient puis qui nous disaient: Ce règlement-là n'a pas d'allure, on ne protégera pas l'environnement, il nous faut des audiences publiques sur le règlement.
J'ai écrit au ministre de l'Environnement. Je lui ai dit: Écoutez, suite à la centaine de demandes que vous avez eues de groupes, de municipalités, d'entreprises ? oui, des entreprises; c'est correct qu'il y ait des entreprises là-dedans ? qui vous demandent des auditions publiques sur votre règlement... Et j'ai reçu une réponse il y a quelques mois me disant qu'on ne voulait pas écouter le bon peuple là-dessus, qu'il n'y aurait pas d'auditions publiques sur la réglementation, alors que c'est très important.
Alors, on s'est dit: Si le ministre ne veut pas avoir d'auditions publiques sur les règlements, c'est parce qu'il est décidé à les déposer. Il n'y a plus de raison... Je veux dire, si le règlement a été prépublié dans la Gazette officielle puis s'il ne veut plus écouter le monde suite à la prépublication, bien, imprimez-le, puis mettez-le dans la Gazette officielle, puis on va savoir où est-ce qu'on s'en va avec ça. Eh bien, aujourd'hui, on est au début de décembre, deux ans plus tard, deux ans plus tard, le règlement n'est toujours pas connu. Je vous pose la question suivante: Vous, M. le Président, vous êtes chez vous, vous êtes maire d'une municipalité, vous êtes propriétaire d'une entreprise qui est dans le secteur du recyclage, qu'allez-vous faire? Vous ne connaissez pas les règlements.
n(11 h 40)n La commission de l'environnement du Parti libéral, dans la dernière semaine, nous avons visité trois sites de récupération, celui de Granby, celui de Nicolet, celui de Victoriaville et celui de Sherbrooke, et nous avons visité un site de déchets. La commission de l'environnement est très active, au Parti libéral. Et, partout, ce qu'on s'est fait dire dans la dernière semaine, partout, ce qu'on s'est fait dire: Où est-ce qu'il est, le règlement? On voudrait bien, nous autres, être selon la loi, mais on ne connaît pas le règlement deux ans plus tard. Alors, imaginez-vous donc qu'on est après dire dans ce projet de loi n° 60, on est après dire à la Communauté urbaine de Québec ? je le relis: «Le projet de loi prévoit que la Communauté métropolitaine de Québec a deux ans, à compter du 1er janvier de l'an 2000...» M. le Président, on ne connaît pas les règlements.
Est-ce que les incinérateurs, dans le règlement, seront permis? On sait que, dans le projet du PQ, dans son programme électoral, on disait: Pas d'incinérateurs. Alors, si j'étais le maire de Québec, je me préoccuperais. Dans le programme électoral déposé à l'époque par la porte-parole en matière d'environnement, on disait: Pas d'incinérateurs. On sait que la ville de Québec a un incinérateur. Je vous pose la question: Dans ces règlements, est-ce que nous défendrons les incinérateurs? Est-ce que le comité d'environnement de la Communauté urbaine a la réponse? Est-ce que les citoyens de la Communauté, de la nouvelle Communauté de Québec savent s'il y aura ou pas un incinérateur? Le règlement n'est pas connu, et ce n'est pas dans la loi. Et là on dit: D'ici deux ans, vous êtes morts, la gang de Québec, vous devez déposer votre politique en gestion de matières résiduelles. Vous ne croyez pas là à une incohérence?
Une voix: M. le Président, je vous demanderais une question de règlement, de vous assurer qu'il y ait le quorum en cette Chambre.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, effectivement, il n'y a pas quorum, à l'oeil. Le quorum, ce matin, est de 21, puisqu'il n'y a pas de commissions parlementaires qui oeuvrent en même temps que nos travaux au salon bleu, alors...
n(11 h 42 ? 11 h 45)nLe Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! Veuillez frapper, s'il vous plaît. On est en ondes, alors, à ce moment-là, nous allons reprendre le débat.
Je tiens à vous signaler que le quorum, ce matin, est de 21, puisqu'il n'y a pas de commissions parlementaires qui travaillent en même temps que vous, ici, au salon bleu. Donc, M. le député d'Orford, il vous reste actuellement un temps de parole de 6 min 14 s. Alors, M. le député, 6 min 14 s.
M. Benoit: Alors, M. le Président, je viendrai directement au centre du projet de loi. Ce projet de loi n° 60 dit à la Communauté urbaine: Vous devez, pour le 1er janvier de l'an 2004, déposer votre plan de déchets. Comment peuvent-ils, alors que la Communauté urbaine ne sait toujours pas ce que sera la réglementation? Et, nous, de l'opposition, insistons. Encore ce matin, j'avais un appel d'une entreprise dans le secteur du déchet qui me disait comment tout est congestionné au ministère, comment il n'y a plus rien qui avance, comment finalement les citoyens du Québec sont pénalisés. Mais ça ne peut pas faire autrement, on a coupé 40 % des budgets au ministère de l'Environnement, on a coupé 28 % du personnel. Imaginez-vous, un ministère où on coupe 40 % des budgets, 28 % du personnel, ça ne peut pas fonctionner. Alors là le règlement n'est pas connu, puis on dit aux municipalités: Vous devez déposer. Et le cas de cette municipalité-là, il n'est pas unique. Toutes les MRC du Québec doivent déposer un plan de gestion des matières résiduelles et elles sont toutes dans la même problématique.
Je parlais, il y a une semaine, au président de la Fédération des municipalités, M. Michel Belzile, que je salue, noble citoyen du comté d'Orford, qui me disait: On ne sait pas où aller avec ça, cette affaire-là. Comment voulez-vous faire des consultations, on n'a pas le règlement? J'ai parlé ? et je le félicite ? à M. Roger Nicolet, le nouveau préfet de la MRC, qui fut élu hier soir le nouveau préfet de la MRC Memphrémagog, et lui aussi, lui aussi, il est préoccupé par la situation des déchets dans son milieu, avec raison. Il a été élu hier soir, on se parlait à 7 h 15, ce matin. M. Nicolet est préoccupé par la situation des déchets dans sa région, on ne connaît pas la réglementation.
Ce n'est toujours bien pas les deux derniers citoyens du Québec, Michel Belzile, président de la Fédération, Roger Nicolet, président de l'Ordre des ingénieurs, maire émérite de la municipalité d'Austin, ex-président de la Fédération, président des enquêtes sur le verglas et sur le transport en commun, sur le pont ou le transport en commun à Montréal, un homme qui a l'écoute du gouvernement, et pour autant sa MRC, comme toutes les autres du Québec, n'a toujours pas de règlement sur les matières résiduelles. Alors, j'invite, j'invite le gouvernement... Et j'aurais aimé, dans la loi n° 60, que le gouvernement se donne une propre discipline. Malheureusement, ce n'est pas ce qu'il a décidé de faire.
L'autre point sur lequel je veux insister, M. le Président, c'est l'article 131, et celui-là, il est machiavélique un petit peu. Il y a eu une cause qui a été entendue, c'est-à-dire que ? je vous explique ça rapidement ? une municipalité avait décidé de charger sur les équipements qui sont vissés au sol, taxe municipale, étant donné que pour eux ces équipements-là faisaient partie de l'édifice. Alors, la province a décidé de pousser ce débat-là jusqu'en Cour suprême. Il faut le faire, hein? Dans le cas présent, on parlait particulièrement des chaises. Alors, la province, n'écoutant que... devant son courage, a poussé la cause jusqu'en Cour suprême et elle a perdu en Cour suprême. La province... la Cour suprême a dit: Ce qui est vissé à terre fait partie de l'édifice, donc vous devrez, vous, comme gouvernement, payer, payer pour vos auditoriums où il y a des chaises, etc.
n(11 h 50)n Savez-vous ce qu'ils font avec l'article 131? Ils vont redéfaire finalement le jugement de la Cour suprême. C'est ça qu'ils vont faire. Et ça, il faut le faire, hein? On n'a pas tous les droits comme parlementaires. Moi, je ne crois pas, je ne crois pas qu'on puisse faire n'importe quoi. Je ne crois pas qu'on pouvait, lundi... Puis je veux en parler, je veux finir là-dessus, M. le Président, parce qu'il y avait... Les gens les plus démunis de l'Estrie avaient organisé un colloque, mardi, sur la pauvreté. Alors, moi, je pensais que, comme député, mon rôle, c'était, avec la députée de Saint-François, c'était d'être là. Dans mon cas, je me suis levé à 5 h 30. Et, 8 h 30, j'étais là, devant la porte, puis je trouvais donc qu'il n'y avait pas grand monde. La ministre avait décidé qu'elle ne viendrait pas écouter les gens, elle ne viendrait pas écouter les gens parce qu'elle n'avait pas tout contrôlé la réunion puis elle avait peur d'entendre des choses qui lui déplairaient. Et ça, là, en démocratie, ça ne se fait pas. Nous, au Parti libéral, quand on a fait notre colloque sur l'environnement, en fin de semaine, quand j'ai parlé aux gens quand ils rentraient le matin un après l'autre, là, je leur disais: Soyez francs, dites ce que vous pensez. Le chef va être là. Gênez-vous pas pour le dire. Puis le porte-parole en matière d'environnement est là. Puis, si vous n'êtes pas d'accord avec ce que le Parti libéral fait dans l'opposition depuis sept ans, gênez-vous pas pour le dire. Pas de problème avec ça, on alignera nos affaires.
Alors, M. le Président, j'aimerais que ce gouvernement entende ce que les citoyens du Québec font, disent. Et, vous savez, c'est malheureux qu'ils l'aient entendu dans les partielles, hein? Et on espère, on espère qu'éventuellement les citoyens du Québec vont probablement le dire très fortement dans une élection générale. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Orford. Nous allons maintenant céder la parole au député d'Argenteuil. M. le député.
M. David Whissell
M. Whissell: Alors, M. le Président, nous sommes encore une fois à débattre d'un projet de loi qui s'inscrit dans la continuité du gouvernement, continuité, comme on commence à s'en apercevoir, qui est d'imposer une volonté aux citoyens qui n'a jamais été annoncée. M. le Président, on a vécu deux lois antérieurement, au niveau des affaires municipales, qui ont fait l'objet d'adoption sans débat, qui ont fait l'objet d'adoption dans des bâillons. Et, pour les gens qui nous écoutent, M. le Président, il est important de bien comprendre la notion de bâillon. Un bâillon, c'est qu'on suspend les règles de l'Assemblée nationale. Donc, l'opposition, les citoyens n'ont plus rien à dire, on adopte la loi, et, une fois la loi est adoptée, celle-ci devient en vigueur.
Alors, on a fait cet exercice dans deux projets de loi, au cours de la dernière année, et l'impact sur la communauté est majeur. On le sait, il y a eu les fusions forcées au niveau de Montréal, Québec, d'autres villes. Mais on avait fait ça tellement rapidement, M. le Président, que, après avoir adopté la première loi sans l'avoir lue, sans l'avoir exposée à la population, sans avoir obtenu les commentaires des citoyens et citoyennes de ces municipalités, sans avoir obtenu les commentaires des municipalités elles-mêmes, sans avoir obtenu les commentaires des groupes d'intérêt qui composent ces municipalités, on a réalisé en quelques mois que le projet de loi était fait d'une façon... sans aucune rigueur. Et on a été obligé de présenter un nouveau projet de loi à l'Assemblée nationale. Et, quand je dis «on», je parle du gouvernement. Le gouvernement a été obligé de présenter un deuxième projet de loi qui venait corriger toutes les aberrations qui avaient été laissées à l'intérieur de la première loi. M. le Président, ce n'était pas suffisant. On avait imposé la première loi et, la deuxième, on devait en faire de même.
Alors, il y a eu en cette Chambre de longs débats sur un projet de loi qui venait amender un projet de loi qui avait été sanctionné sans l'accord de l'opposition et des citoyens du Québec. M. le Président, ça démontre à quel point le gouvernement qui est en face de nous est un gouvernement de fin de régime, un gouvernement qui est à son deuxième mandat et un gouvernement qui a oublié pourquoi on a été élus, pourquoi on vient à l'Assemblée nationale. Et cet objectif, M. le Président, je pense qu'il est primordial dans nos fonctions, c'est de servir la population. Tout parlementaire qui a à coeur ses fonctions, qui a à coeur ses citoyens se doit de se le rappeler constamment. Nous sommes ici pour donner des services à la population. Et, lorsqu'un gouvernement est rendu à bâillonner, à adopter des projets de loi, sans même demander l'appui et l'accord à la population, c'est qu'on est face à un gouvernement qui frise la dictature.
Des voix: ...
M. Whissell: Et, M. le Président, j'entends les parlementaires, du côté gouvernemental, qui s'animent, mais, heureusement, dans notre système parlementaire, il y a un mécanisme qui s'applique aux quatre ans, un mécanisme, un mécanisme...
Des voix: ...
M. Whissell: M. le Président, je ne sais pas qu'est-ce que j'ai dit qui déplaît à la partie gouvernementale. Est-ce le mot «dictateur»? M. le Président, je vous demanderais de rappeler ces gens à l'ordre, en toute sincérité.
Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député d'Argenteuil, je crois que je vais exercer moi-même ma responsabilité. Et je crois que je suis suffisamment... j'ai suffisamment d'expérience pour savoir quand est-ce me lever en cette Chambre et quand est-ce reprendre les députés. Et je vous inviterais à continuer, tout en essayant de respecter vous-même l'article 35 et de ne pas créer, ou de ne pas prononcer des mots, ou encore de ne pas susciter de débat en cette Chambre, parce que nous sommes tous ici pour vous entendre religieusement. Alors, je vous inviterais à poursuivre.
M. Whissell: Bien entendu, M. le Président, et loin de moi l'intention de vouloir susciter un débat, comme vous le dites. Mais j'ai simplement dit que ce qu'on constatait comme parlementaires, et la population le constate, vous n'avez qu'à lire les journaux de chaque jour et vous constatez rapidement que la population, elle aussi trouve que le gouvernement qui est en face de nous commence à ressembler à une dictature. Et ça, M. le Président, c'est une réalité.
Vous savez, on a travaillé, la commission, hier, de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, sur un projet de loi qui vient d'être déposé, et tout ça, en réaction, encore une fois, aux mauvaises décisions qui ont été prises au niveau des affaires municipales. On a réalisé, une fois la première loi adoptée, une fois la deuxième loi adoptée pour corriger les aberrations de la première loi, on a réalisé que, là, il y avait un système d'inspection des aliments à Montréal et dans les grandes villes, Québec, Trois-Rivières, Sherbrooke. Et là on s'est dit: Bien là on vient de fusionner puis on n'a pas pensé qu'est-ce qu'on était pour faire avec ces organisations qui sont sous l'autorité de villes existantes, villes qui seront abolies sans demander la permission aux citoyens, villes qui seront abolies sans aller en référendum à la population. Alors, on s'est dit: Il y a quatre unités d'inspection dans quatre villes, Québec, Montréal, Trois-Rivières et Sherbrooke, qui seront un peu perdues dans tout ce brouhaha de fusions forcées.
M. le Président, pour démontrer à quel point les lois au niveau des Affaires municipales ont été réalisées sans aucune réflexion, sans aucune consultation, il y avait des scénarios, et le principal qui était présenté, un scénario avec des beaux diagrammes, ça fait partie du premier projet de loi, où on mettait les conseils d'arrondissement mais on mettait également, au niveau de la Sécurité publique, une division au niveau de l'inspection des aliments. Et ça, c'était pour la ville de Montréal, et il en allait ainsi pour les autres municipalités.
Alors, on disait: À Montréal, par exemple, nous avons une unité d'inspection qui fonctionne bien, qui applique rigoureusement ? et ça, je pourrai le démontrer un peu plus loin ? qui applique rigoureusement la réglementation faite par le gouvernement du Québec. Il n'y a aucune plainte qu'elle est mal appliquée. Les citoyens se sentent en sécurité. Parce que c'est ça, l'objectif, c'est d'assurer l'innocuité des aliments dans les établissements qui manipulent des aliments. Et là on s'est dit: Bien, ça ne fonctionne pas. Et comment allons-nous étendre ces organisations qui existent à l'intérieur de villes plus petites à des communautés métropolitaines maintenant plus grandes ou maintenant des villes plus grandes?
Alors, on a réalisé tout bêtement, un jour, au Conseil du trésor, qu'il y avait un problème financier, et ça, malgré le fait, M. le Président, que dans les lois on avait inscrit qu'il n'y aurait aucune perte d'emploi. On a donné l'assurance... Je me souviens très bien de la ministre des Affaires municipales et du premier ministre, à l'époque, qui disaient: Soyez assurés que les fusions municipales seront une bonne chose, qu'il n'y aura aucune perte d'emploi, qu'il n'y aura pas de réductions salariales, en aucun temps.
n(12 heures)n Alors là on est face à un problème. On a quatre unités, et le Conseil du trésor a décidé de régler, lui, la question et a, je pense, demandé au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de déposer, sans même comprendre et saisir la portée du projet de loi, de déposer un projet de loi qui abolissait les quatre unités, qui prenait des centaines d'hommes et de femmes, de techniciens, de chimistes qui travaillent dans ces unités pour les transporter, les transférer vers le ministère de l'Alimentation et des Pêcheries.
M. le Président, quand quelque chose fonctionne bien, pourquoi vouloir le changer? Et je reviens au fondement même de notre travail, de nos fonctions, qui est de s'assurer que la population ait toujours le meilleur service à sa disponibilité. Écoutez, dans l'exemple... Et c'est un exemple parmi tant d'autres, parce que, voyez-vous, au niveau de l'environnement, il semble qu'on étend l'inspection à l'ensemble des nouvelles villes. Alors, dans le cas de l'alimentation, c'est une chose. Dans le cas de l'environnement, ça fonctionne. Il n'y aura pas de perte d'emplois, on étend. Et le parallèle est identique. On a une loi provinciale, des règlements provinciaux qui sont appliqués par les fonctionnaires provinciaux sur l'ensemble du territoire, à l'exception de certains territoires, dont la ville de Montréal, et la ville de Montréal peut même réglementer encore plus, plus loin que ce qui est édicté dans les règlements provinciaux.
Pour vous montrer à quel point ce gouvernement a perdu le cap, à quel point ce gouvernement n'a plus de leader ? on sait que le premier ministre est un premier ministre désigné qui n'a jamais reçu un mandat de la population ? l'ancien ministre de l'Agriculture, maintenant ministre de la Santé, M. Trudel, nous disait, il n'y a pas très longtemps, le 24 octobre 2000, il nous disait, et c'est une citation sur un communiqué ministériel: «Le système d'inspection actuel permet d'atteindre les objectifs recherchés, et le succès de notre partenariat avec les villes sous entente y est pour beaucoup, a conclu M. Trudel.» Alors, il y a à peine un an, le ministre responsable du dossier, le ministre responsable de s'assurer que les citoyens du Québec aient des aliments conformes aux normes, des aliments qui ne sont pas contaminés au-delà de certains taux par des bactéries et d'autres produits, ce ministre se vantait, comme il aime bien le faire, d'avoir des ententes avec des municipalités qui fonctionnaient très bien. Le ministre ne nous a pas dit: Ça ne va pas bien, on va rapatrier ça sous le contrôle du MAPAQ. Il a dit: Ça va bien. Ça, c'était à peine il y a un an. Alors, on fait les fusions municipales, on bâillonne, on passe un projet de loi à toute vapeur, on ne lit pas les articles ? parce que c'est ce qui s'est passé ? et là on découvre qu'il y a un petit problème avec les unités d'inspection des aliments dans les grandes villes.
M. le Président, le 23 mai 2001, là on commence à comprendre ce qui arrive. Le ministre, qui a maintenant changé, Maxime Arseneau, ministre en titre, c'est-à-dire ministre responsable de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, écrit à la Communauté urbaine de Montréal, parce qu'elle existe encore, écrit à Mme Vera Danyluk: «Mme la présidente ? et ça commence ainsi ? dans le cadre des fusions municipales, le gouvernement a examiné différentes options concernant l'inspection des aliments sur le territoire des entités municipales.» Et là écoutez ça, M. le Président. On nous dit: «Afin d'optimiser l'efficience et l'efficacité de la gestion et du financement de ce service, lors du Conseil des ministres du 4 avril 2001, il a été statué sur le rapatriement au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation des activités d'inspection des aliments présentement réalisées par la Communauté urbaine de Montréal, les villes de Québec, Sherbrooke et Trois-Rivières.» Alors là, à partir du mois de mai, on vient de comprendre ce qu'on fait: le gouvernement a l'intention d'abolir quatre unités qui fonctionnent bien, qui rendent justice aux citoyens de quatre villes qui, je dois le rappeler, représentent, grosso modo, 50 % de la population du Québec. Alors là on dit: On abolit un service impeccable qui est donné à un Québécois sur deux.
Mais là on va plus loin que ça: «Pour donner suite à cette décision ? le ministre continue ? j'ai demandé à Mme Jocelyne Dagenais, sous-ministre adjointe, le soin de consulter les instances municipales concernées de même que les comités de transition mis sur pied pour assurer la mise en place des nouvelles villes et de convenir avec ces instances des modalités de transfert de la responsabilité en matière d'inspection.» Là, c'est le comble de l'ironie. On nous dit qu'on va consulter, qu'on va aller voir les comités de transition, qu'on va aller voir les entités municipales existantes, mais, M. le Président, pendant ce temps, on est en train d'adopter des lois qui viennent modifier ces entités municipales, d'adopter des lois sans même consulter ces entités municipales, sans même consulter les citoyens qui vivent, qui habitent, qui consomment des aliments dans ces quatre municipalités ou quatre territoires.
Et là, pour donner encore plus de piquant à sa lettre, le ministre de l'Agriculture nous dit: «Je tiens également à souligner que cette transition devra se faire de façon harmonieuse et équitable pour les organisations impliquées et particulièrement pour le personnel touché par cette décision. L'intégration des opérations et de la gestion des services d'inspection s'inscrit parmi les moyens reconnus par l'Organisation mondiale de la santé pour améliorer la sécurité alimentaire.» Alors, vous voyez, M. le Président, au mois de mai 2001, un ministre qui compose ce gouvernement venait avouer que l'adoption par bâillon des fusions municipales entraînait un cafouillage au niveau de l'inspection des aliments.
M. le Président, il y a, je l'ai dit tantôt, des hommes, des femmes qui composent ces unités. On a eu une pétition de façon unanime, 100 % des employés qui composent la CUM, le Service d'inspection. Et j'espère que les députés qui proviennent du territoire de la Communauté urbaine de Montréal vont écouter, parce que les employés qui composent ce Service disent clairement ? et le libellé: «Nous, soussignés, désirons demeurer dans la nouvelle ville de Montréal afin de maintenir la qualité des services d'inspection des aliments offerts aux citoyens.» Et c'est sur du papier à en-tête de la Communauté urbaine de Montréal et c'est signé par l'ensemble des employés. Alors, lorsqu'on regarde les grandes consultations désirées par le ministre, on a une réaction immédiate, immédiate. Il y a des employés, l'ensemble qui nous dit: On ne veut pas. M. le Président, ça, c'est les employés.
Un conseiller municipal du district de la ville de Montréal, M. Jacques Charbonneau, qui écrivait à la Communauté urbaine justement pour s'assurer que les inspections des aliments soient intégrées à même la nouvelle ville... Le politique qui parle, les gens élus, les gens qui représentent les intérêts des citoyens de leur quartier, la vraie vie, M. le Président, pas des ministres qui sont dans des tours d'ivoire.
Pour aller plus loin, le comité exécutif de la ville de Montréal, là on parle de gens qui représentent des centaines de milliers de citoyens, qui représentent un territoire où on retrouve beaucoup d'établissements qui sont inspectés par justement l'unité de la CUM. M. le Président, extrait d'un procès-verbal, le 17 mai 2001. Ça se fait dans la même semaine que le ministre nous disait qu'il voulait faire tout ça en harmonie et en consultation. Alors, on commence à dire au ministre ce qu'on veut. Alors, ça dit: «Attendu que la Loi portant réforme de l'organisation territoriale municipale des régions métropolitaines de Montréal, de Québec et de l'Outaouais ne contient aucune disposition relative à la compétence actuellement exercée par la Communauté urbaine de Montréal en matière d'inspection des aliments...» Alors là on est en train de dire: Vous avez tellement fait votre loi rapidement, sans même nous consulter, que vous avez oublié une section importante à inclure dans votre projet de loi.
n(12 h 10)n«...attendu que la Communauté urbaine de Montréal a été informée que le MAPAQ, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, a l'intention de reprendre à sa charge la responsabilité de l'inspection des aliments pour l'ensemble des municipalités...» Alors, le ministre, comme je vous le disais, venait de dire qu'il voulait tout rapatrier par souci d'une saine gestion. Alors, on est en réaction.
«...alors, il est résolu ? et c'est toujours le comité exécutif de Montréal qui nous dit ça, qui nous dit ? de signifier au gouvernement du Québec l'opposition de la CUM au rapatriement des activités relatives à l'inspection des aliments au niveau du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation...
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Pinard): Une minute, M. le député d'Argenteuil.
M. Whissell: ... ? oui ? de demander au gouvernement du Québec de modifier la loi portant sur la réforme de l'organisation territoriale municipale.» M. le Président, c'est un petit exemple dans l'ensemble du quotidien qu'ont à vivre les villes et les communautés urbaines au Québec, et l'exemple de l'inspection des aliments est un exemple facile à démontrer. Mais à combien d'endroits on a fait la même erreur? Dans combien d'autres domaines on va réaliser que des fusions municipales forcées, sans consultation, sont une erreur? Alors, je terminerai là-dessus en disant que le gouvernement continue à imposer, mais la population, elle, s'en souviendra.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Argenteuil. Nous allons maintenant céder la parole au député de D'Arcy-McGee. M. le député.
M. Lawrence S. Bergman
M. Bergman: Merci. M. le Président, c'est un privilège de m'adresser à vous ce matin devant l'Assemblée nationale pour l'adoption du principe du projet de loi n° 60, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, Bill 60, an Act to amend various legislative provisions concerning municipal affairs.
M. le Président, ce projet de loi introduit diverses règles relatives à l'administration municipale. Comme nous expliquent les notes sur ce projet de loi, le projet de loi modifie, en fait, la Loi sur le régime de retraite des élus municipaux, notamment en matière de rachat d'années de service antérieur et de distribution des surplus actuariels constatés au 31 décembre 2000. Aussi, le projet de loi propose des changements dans la formule d'établissement du crédit que doit comprendre le budget d'une municipalité locale de 100 000 habitants et plus pour le fonctionnement du vérificateur général. Il permet de plus aux municipalités, aux régies intermunicipales et aux communautés métropolitaines de créer des réserves financières pour le financement des dépenses d'immobilisation.
Aussi, le projet de loi propose également quelques changements en matière électorale municipale. Le projet de loi, M. le Président, contient enfin des dispositions relatives à certaines situations particulières en matière municipale. En fait, ce projet de loi fait suite aux projets de loi nos 170 et 29 sur les fusions forcées, «forced municipal mergers».
Nous, de l'aile parlementaire libérale, étaient et sommes toujours contre les fusions forcées, quelque chose qui a été forcé sur la population de la province de Québec sans leur gré, sans leur volonté et qui n'était pas présenté à la population lors de l'élection de 1998. Nous sommes contre aucun projet de loi relié aux fusions forcées, nous sommes contre un gouvernement et son premier ministre désigné qui sont autoritaires, arrogants, et qui n'écoutent pas la population, et, M. le Président, qui ne respectent pas les voix, les volontés de la population dans une société démocratique et libre.
M. le Président, on doit faire front devant cette Assemblée. Ce gouvernement péquiste devant nous est fatigué, et c'est clair qu'il veut quitter, c'est dans leur esprit. Il manque vraiment des nouvelles idées, il manque des idées qui sont constructives pour le bien-être de la population québécoise. Nous avons eu, en sept années, trois premiers ministres péquistes. Le présent premier ministre est seulement désigné. C'est un homme qui n'a été pas choisi par la population. Il lui manque la volonté de gouverner, il lui manque le respect pour la population, il est visiblement arrogant, c'est un homme qui manque d'idées maintenant pour le bien-être de la population québécoise.
M. le Président, les fusions forcées étaient quelque chose qui était imposé sur la population du Québec sans être présenté aux personnes concernées, soit les Québécoises et les Québécois, les payeurs de taxes. Vous vous rappelez qu'il n'y avait aucune mention relative aux fusions forcées, de la part des péquistes, lors de la campagne électorale de 1998. M. le Président, c'est une règle fondamentale qu'on ne doit jamais mentir à la population. La population va se souvenir, lors de la prochaine campagne électorale, la population du Québec va se souvenir de ce gouvernement autoritaire qui, pendant les débats sur les fusions forcées, a promis qu'il n'y aurait pas d'augmentation des taxes municipales suite aux fusions. Maintenant, nous savons que cela n'est pas vrai, et soyez certain que la population se souviendra de ces belles promesses lors de leur prochain choix d'un gouvernement. La population québécoise va se souvenir de ce gouvernement autoritaire qui, pendant les débats sur les fusions forcées, ont promis que les services municipaux vont être maintenus sans augmenter les taxes. On sait que ce n'est pas possible et on sait que la population va se souvenir.
Mr. Speaker, as I said a few moments ago, we have before us a PQ Government which is out of ideas, which is out of team, which does not have any longer the will to govern, a Government which has, as its premier, a man who has been designated but has not received a mandate from the population to govern... Mr. Speaker, as I said, it's well known that this Government is arrogant, authoritarian, and doesn't respect the wishes of the population, and, what better example, enforced municipal mergers, which have been forced down the throats of the population.
M. le Président, le projet de loi devant nous est un projet de loi omnibus. Le projet de loi contient vraiment des problèmes majeurs. Premièrement, il y a moins de moyens financiers pour le vérificateur général des villes, et on sait que la tâche du vérificateur général, dans aucune institution financière, c'est fondamental et important. Mais, pour que le vérificateur général fait tous les devoirs qu'il doit faire en vertu de la loi, il doit avoir les moyens, il doit avoir les personnes pour remplir ces tâches. M. le Président, un vérificateur général, c'est vraiment une bonne idée, il peut jouer un rôle important dans la surveillance des finances publiques, mais on doit lui donner des moyens pour agir, autrement il ne peut pas accomplir les tâches qu'on lui demande.
M. le Président, dans le projet de loi n° 29, en juin 2001, on a prévu un financement, pour ce département, à 0,17 % du budget de dépenses de fonctionnement des municipalités. C'était fixé en juin dernier, M. le Président, lorsque le gouvernement a fixé le budget du vérificateur général, un poste maintenant obligatoire dans les municipalités de 100 000 habitants et plus. Maintenant, avec le projet de loi devant nous, il y a des modifications pour la nouvelle ville de Montréal, des modifications où, au lieu de 0,17 % du budget de dépenses de fonctionnement pour le budget du vérificateur général, c'est maintenant fixé à 0,11 % de son budget de dépenses de fonctionnement, donc un manque à gagner de 2 millions de dollars pour le budget du vérificateur général. Le vérificateur actuel de la ville de Montréal a indiqué que ce n'est pas suffisant, son budget ne sera pas suffisant pour accomplir les tâches devant lui. M. le Président, on ne peut pas demander au vérificateur général de jouer ce rôle tellement important sans lui donner les bons outils. Si on ne lui donne pas les moyens, on risque de créer vraiment une coquille vide au domaine municipal, au département du vérificateur général.
n(12 h 20)n M. le Président, le deuxième problème majeur constaté dans ce projet de loi ? et, de toute façon, il y a des problèmes constatés partout avec le gouvernement péquiste ? mais le deuxième problème avec ce projet de loi: il y aura moins de taxes disponibles aux municipalités provenant des immeubles publics et parapublics dans les taxes imposées dans les biens meubles, et c'est vraiment un autre exemple de l'arrogance de ce gouvernement.
Le cas des items qui seront taxables a été soumis aux tribunaux. Une décision a été rendue par la Cour suprême après quelques années de contestation. M. le Président, le gouvernement péquiste a perdu sa cause. Étant malheureux du jugement et sachant son arrogance et son habitude d'agir dans une manière autoritaire, son manque de respect de nos cours, son manque de respect pour la démocratie, les péquistes ont décidé de se faire justice eux-mêmes, avec le projet de loi n° 60, en refusant de payer les taxes pour les équipements dans les laboratoires, pour vous donner un exemple. Il y a une règle fondamentale dans une société démocratique, laquelle est qu'aucune personne ne peut se faire justice soi-même. Mais nous savons que le premier ministre désigné pense et agit comme bon lui semble.
M. le Président, même en ces matières, le projet de loi a un effet rétroactif à 2001. On lit, dans l'article 131 de ce projet de loi, lequel se lit comme suit: L'article 41 a effet aux fins de tout exercice financier municipal à compter de celui de 2001. Vraiment, c'est un effet rétroactif. Ceci aura un impact négatif et difficile pour toutes les villes du Québec. Dorénavant, certains équipements dans les édifices comme les écoles, les collèges et les universités ne seront plus taxables. En fait, les villes perdront plusieurs millions de dollars en taxes. Le gouvernement vient ainsi d'épargner ces millions. Mais qui, à la fin de la ligne, va payer ces taxes? Ce sera le citoyen. Et c'est bien beau, pour le gouvernement, de dire qu'ils n'ont aucun déficit, mais ils n'ont aucun déficit, car le fardeau des taxes est fixé sur le citoyen par l'entremise des municipalités. Ainsi, le gouvernement n'aura pas un déficit à ce sujet et sauve de l'argent. Le maire de Sillery a dit, et je le cite: «Ça n'a pas de bon sens. La ministre ne devait plus toucher au pacte fiscal.» Fin de citation.
M. le Président, je soulève un troisième problème majeur dans ce projet de loi. Le projet de loi donne des pouvoirs accrus aux comités de transition. Le projet de loi donne aux comités de transition un pouvoir de décider de façon exécutoire en matière de départs volontaires. On sait que les membres des comités de transition ne sont pas des élus. Ce seront donc les nouvelles villes qui devront payer les factures, car le gouvernement remboursera seulement les intérêts sur ces départs volontaires, et ceci aura un effet rétroactif au 20 décembre 2000.
Quatrième problème, M. le Président, avec ce projet de loi: il n'y a aucune consultation possible lors de la création des mesures financières pour des projets d'immobilisation. Il y a, dans ce problème, une vraie perte pour les citoyens de se prononcer sur l'à-propos de cette mesure. Alors, en conclusion, nous avons devant nous un autre projet de loi du gouvernement péquiste mal conçu, mal planifié, autoritaire, un projet de loi dans lequel le gouvernement péquiste cherche à éclairer des zones grises provoquées même par son improvisation.
Avec ce projet de loi, le gouvernement prouve à nouveau que sa réforme municipale est une réforme qui était mal planifiée, une réforme qui manque de vision dans les affaires municipales, et on sait que cette réforme a été imposée sur les citoyens sans leur volonté, et les citoyens vont se rappeler de ça pour longtemps, longtemps d'ici à l'élection qui vient. Alors, nous, de l'aile parlementaire libérale, allons voter contre ce projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Toujours sur l'adoption du principe du projet de loi n° 60, nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de Sauvé. Mme la députée.
Mme Line Beauchamp
Mme Beauchamp: Merci. M. le Président, je veux ajouter ma voix à celle de mon collègue le député de D'Arcy-McGee et à celle de plusieurs autres de mes collègues qui ont tenu à prendre la parole sur le projet de loi n° 60 qui est la Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal.
Peut-être, M. le Président... Et les gens qui nous écoutent ne seront pas étonnés qu'on soit de nouveau, cette session-ci, devant un nouveau projet de loi, un xième projet de loi concernant le domaine municipal, et sûrement que les gens ne seront pas surpris qu'on leur apprenne que ce projet de loi, essentiellement, par son essence même, il existe pour corriger certaines lacunes découlant de la réforme municipale menée tambour battant par la ministre des Affaires municipales. J'imagine que les gens ne seront pas surpris de parler d'un projet de loi qui doit corriger des lacunes lorsqu'on sait dans quelles conditions se sont faites les adoptions des projets de loi qu'on a dû étudier ici, en cette Chambre, de façon très, très intempestive, et je pense que le mot est faible.
On fait un petit retour en arrière, M. le Président. Depuis la dernière élection de 1998, nous avons eu droit à une lignée de projets de loi dans le domaine municipal portant réforme en profondeur au domaine municipal alors que ? et je vous le rappelle, je pense que c'est essentiel ? en campagne électorale, ce sujet n'avait fait l'objet d'aucun engagement spécifique et clair de la part du Parti québécois. C'est important de le rappeler, M. le Président, parce que, ensuite, de façon intempestive, le gouvernement du Parti québécois a décidé de procéder à une réforme en profondeur du milieu municipal, et cela, en allant même parfois et très souvent à l'encontre même du souhait, des aspirations et des représentations que faisaient des députés du gouvernement, du parti ministériel. Donc, je vous rappelle que, depuis 1998, cette Assemblée a adopté de façon forcée ? on a procédé par bâillon ? les projets de loi nos 124, 150, 170 et 29.
Pourquoi est-ce qu'on est obligé aujourd'hui d'étudier le projet de loi n° 60? Bien, effectivement, c'est parce que les projets de loi, entre autres 170 et 29, ont été adoptés de façon tellement accélérée, le travail a été tellement bâclé, du côté du gouvernement, qu'aujourd'hui, moins de six mois plus tard, on doit revoir en profondeur certains articles de ces lois en amenant ici un projet de loi omnibus qui touche toutes sortes de sujets mais qui comporte à lui seul 143 articles.
n(12 h 30)n M. le Président, je pense qu'il est important de rappeler l'improvisation ? et là il n'y a pas d'autre mot, je pense que là c'est le mot-clé pour décrire le projet de loi n° 60 ? c'est l'improvisation qui semble régner du côté du gouvernement, non seulement l'improvisation de la ministre responsable des Affaires municipales, non seulement l'improvisation qui semble régner au niveau du Comité de la législation, parce que c'est étonnant qu'on laisse passer des législations aussi, aussi mal faites et qu'on doit perpétuellement et continuellement amender...
Mais je vous rappelle à votre bon souvenir, M. le Président, que le projet de loi n° 170, il comprenait, à son origine, 1 066 articles. Ce n'est pas ce qu'on appelle un petit projet de loi. C'est un gros projet de loi. C'est un projet de loi d'envergure et qui modifiait profondément, dans son essence même, l'organisation du milieu municipal au Québec, plus particulièrement à Montréal. Eh bien, M. le Président, on s'attend à ce qu'une réforme menée comme ça, une réforme importante, que ce soit une réforme qui fait l'objet de discussion, que ce soit une réforme qui fait l'objet de réflexion, que c'est une réforme qui, si les documents ne sont pas communiqués à l'opposition officielle, à tout le moins, c'est une réforme qui est discutée, hein, en caucus du Parti québécois, que c'est une réforme faite avec attention parce qu'on touche à l'identité même des citoyens du Québec qui souvent s'identifient, en un premier temps, à leur municipalité. Eh bien, malgré le fait qu'on était devant un projet de loi important, 1 066 articles, eh bien, la ministre des Affaires municipales est arrivée en pleine nuit, je vous le rappelle, en pleine nuit avec 361 amendements. Ça, c'était environ le tiers du projet de loi qui faisait l'objet d'amendements amenés sur la table.
Là, on se dit: Bon bien là ils ont dû avoir leur leçon. J'avoue honnêtement que c'est un peu gênant pour un gouvernement de se dire fier d'une réforme en profondeur, d'amener un projet de loi d'importance et de devoir, avant même qu'on ait procédé à son adoption, en modifier déjà, là, en pleine nuit, le tiers de ses articles. Bien non, il semble qu'on n'avait pas retenu la leçon, parce que l'histoire se répète, M. le Président, avec le projet de loi n° 29. Puis je vous dirais même que l'histoire est encore plus gênante, parce que le projet de loi n° 29, lui, il comprenait 250 articles, un petit peu plus modeste, celui-là, bien que sa portée était également d'importance.
Bien, M. le Président, je vais vous, je pense, rappeler la situation qu'on a vécue et qui frisait... je pourrais même dire qui atteignait le ridicule. C'est que, sur un projet de loi d'importance comprenant 250 articles, la ministre des Affaires municipales a réussi à arriver en pleine nuit ? on s'en rappellera, c'était assez frappant ? avec une liasse de papillons, qu'on appelle, c'est-à-dire les amendements, avec une liasse d'une telle épaisseur qu'il fallait les attacher. Parce que, pour un projet de loi de 250 articles, la ministre des Affaires municipales a réussi à arriver avec ? tenez-vous bien, M. le Président; vous êtes bien assis? oui ? la ministre est arrivée avec 404 amendements, plus d'amendements que le nombre d'articles qu'il y avait dans le projet de loi. Et pourtant, devant ce cafouillis, devant cette improvisation, bien, le gouvernement est obligé, à cette session-ci, d'arriver avec un nouveau projet de loi, le projet de loi n° 60, qui, lui, comprend 143 articles qui portent de nouveau amendement, entre autres, au projet de loi n° 170 et au projet de loi n° 29.
Ça pourrait sembler amusant, M. le Président, mais il faut réaliser, là, il faut que les gens réalisent qu'est-ce que ça veut dire, de ce qui se passe dans les officines gouvernementales. Il faut que les gens réalisent que ce que ça signifie, c'est que ce gouvernement-là passe des lois sans savoir tout à fait où est-ce qu'il s'en va, sans savoir tout à fait ce qu'il veut, sans avoir tout à fait ? ça, c'est très clair ? écouté les citoyens, écouté les élus municipaux. Puis, bien sûr, pendant ce temps-là, tout le monde se lève, de l'autre côté, pour nous dire que c'est la meilleure loi. Ça, là, la loi est excellente, tout le monde la défend corps et âme.
Ah! tiens, peu de temps après, quelques mois après, là il semblerait... Ah! il y a un élu qui nous a dit qu'il paraît qu'il faudrait faire telle affaire. Ah! tiens, les citoyens ont dit qu'il faudrait faire telle affaire, et de nouveau on apporte amendement. Vous me direz que c'est un moindre mal, au moins, il y a... Effectivement, et on l'a souligné, il y a certains aspects du projet de loi n° 60 qui sont des amendements méritoires, et je pense au fait qu'on donne droit de vote, le jour des élections municipales, à tous les citoyens qui ont 18 ans, par exemple. On s'est enfin mis un peu à l'écoute et on a apporté un tel amendement. Mais, tout de même, M. le Président, le projet de loi n° 60 amène, sur plusieurs de ses dimensions... nous apparaît de nouveau un projet de loi teinté d'improvisation et un projet de loi qui essaie tout simplement de ? bien, faut le dire ? réparer des pots cassés, tout simplement.
M. le Président, je voudrais profiter du fait que je prends la parole aujourd'hui, en ce 29 novembre, où on a déjà procédé à la période de questions, pour ramener aussi une dimension que vous ne trouverez pas telle quelle dans le projet de loi mais qui m'apparaît d'importance, c'est le fait que la ministre des Affaires municipales, son cabinet, a refusé de communiquer les notes explicatives, qu'on dit confidentielles, les notes explicatives qui devraient normalement accompagner le projet de loi. C'est assez banal, ça, c'est les notes qui devraient normalement expliquer le pourquoi, l'intention de la ministre derrière chacun des articles qu'elle présente dans son projet de loi. Eh bien, jusqu'à maintenant, on a refusé de communiquer les notes explicatives à notre collègue député de Hull et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales. C'est étonnant, M. le Président, c'est étonnant qu'on ne veuille pas communiquer ce qui est la base. On ne parle même pas du mémoire déposé au Conseil des ministres, là, on parle des notes explicatives de chacun des articles de la loi.
Et, lors de la période de questions de ce matin, je me suis dit: Il faut que les gens, les citoyens et citoyennes qui nous écoutent, réalisent que là on est devant ce qu'on peut appeler un trait de personnalité qui se développe de ce gouvernement. Ce matin, de quoi on a parlé durant une bonne partie de la période de questions? Eh bien, c'est d'un fait important, troublant, qui ébranle les fondements d'une démocratie saine, c'est le fait qu'un citoyen, un journaliste puis, bien sûr, des élus, particulièrement membres de l'opposition officielle, ont droit à avoir accès aux documents, peu importe leur support, produits par le gouvernement du Québec.
Eh bien, ce matin, on a pu entendre lors de la période de questions puis on a pu assister à la démonstration que, au niveau du ministère de la Santé, alors que l'opposition officielle a fait une demande en bonne et due forme, au niveau des procédures, des processus d'accès à l'information, pour avoir accès aux documents qui auraient été déposés dans le cadre des audiences du comité Larose sur les questions de l'avenir de la langue français au Québec, dans tout ce qui touche au niveau du réseau de la santé, l'opposition officielle a demandé des documents et a eu une réponse, une réponse qui disait tout simplement... Puis, M. le Président, notre système est basé sur la bonne foi, donc le fonctionnaire responsable de l'accès à l'information au niveau du ministère de la Santé et des Services sociaux a répondu à l'opposition officielle qu'un tel document n'existait pas. Et on a eu la démonstration, M. le Président, que ce document-là existait, qu'il existait sur une forme électronique, qu'il a aussi été déposé par écrit lors d'une rencontre entre des commissaires de la commission Larose et des représentants du ministère de la Santé et des Services sociaux.
Et je ne toucherai pas le fond du document, ce dont il traitait, même si c'est assez troublant, mais on est ici au niveau du processus de transparence, du processus... ou des principes, parce que c'est des principes fondamentaux de la démocratie, des principes qui veulent que des citoyens, des journalistes, des élus aient accès à la documentation produite par le gouvernement du Québec. Et vous avez eu la démonstration, M. le Président, ce matin qu'il s'est passé quelque chose de pas normal au niveau du ministère de la Santé et des Services sociaux. Il n'est pas normal qu'un document qui fait 68 pages ? je ne parle pas d'une note de service, là ? un document qui a 68 pages et qui étaye les prises de position du gouvernement du Québec en matière de services de santé et sociaux et de langue de service, la langue d'usage dans ce milieu, qu'on en vienne à dire, au niveau du ministère: Il n'existe pas, ce document-là. Et je ne vous cacherai pas que, lorsque je vois qu'au niveau des Affaires municipales... Je suis un peu devant, moi, je considère un peu la même situation: l'opposition officielle fait des demandes pour avoir ce qu'on appelle les notes explicatives du projet de loi, et la réponse, c'est: Non, nous gardons ces notes explicatives confidentielles.
M. le Président, je suis devant un gouvernement, on le sait, là, usé, c'est clair, mais aussi un gouvernement qui, je pense, au mépris, là, de principes de base de la démocratie, décide que les citoyens n'ont pas le droit de savoir, décide que c'est lui qui juge quels documents auxquels le citoyen peut avoir accès, lesquels auxquels il ne peut pas avoir accès. On est en train d'avoir un gouvernement qui décide qu'il contrôle tout.
n(12 h 40)n On en a aussi eu l'illustration, ce matin, lors de la période de questions, lorsqu'on a appris que, parce que le CRD de la région de l'Estrie n'avait pas organisé, là, selon le scénario de la ministre responsable de la Lutte à la pauvreté... le fait que le CRD n'avait pas organisé une rencontre selon le scénario établi par la ministre, la députée de Pointe-aux-Trembles, un scénario de rencontre avec le milieu communautaire qui oeuvre pour la lutte à la pauvreté, bien, que la ministre, elle a tout simplement décidé de ne pas se présenter. On voit qu'on est donc devant un gouvernement qui tente vraiment de tout contrôler, de tout imposer, et je pense que je n'apprends rien, entre autres aux responsables, aux dirigeants du réseau de la santé, qui, on le sait, se font trop souvent dire, même s'ils ont des postes parfois d'élu dans le réseau de la santé, des postes de gestionnaire, qu'ils n'ont pas le droit de parler, que c'est ce gouvernement-là qui contrôle au complet l'information.
C'étaient des principes de base, M. le Président, que je voulais vous rappeler, comme je veux vous rappeler que de discuter de nouveau d'un projet de loi concernant le domaine municipal, ce n'est pas très glorieux pour les parlementaires que l'on est quand on se rappelle comment s'est faite l'adoption, comment s'est faite les adoptions des projets de loi n° 170 et n° 29. Je vous rappelle que ces projets de loi ont été mis... C'est des projets de loi importants, là. Je parle d'un qui avait 1 066 articles, 361 amendements. Bien, c'est des projets de loi qu'on a décidé de mettre dans le bâillon, c'est des projets de loi qui ont été adoptés en pleine nuit. Mais, pire que ça, je pense, M. le Président, ce que tout le monde a constaté, qui est devenu un peu irréel pour le fonctionnement d'une Assemblée, c'est que c'est des projets de loi, c'est un projet de loi, entre autres le 170, où il n'y a personne ici, en cette Chambre, aucun élu, ni du côté ministériel ni du côté de l'opposition, qui avait pu prendre connaissance, seulement avoir le temps de lire les amendements qui étaient amenés en pleine nuit et qu'on devait voter.
Et c'était tellement gênant, je pense, M. le Président, aux yeux de l'ensemble de la population du Québec que je vous rappellerai ? puis c'est tout à votre honneur aussi ? que, avec la présidence, les deux formations politiques ont décidé de revoir le règlement de l'Assemblée nationale, et le président de l'Assemblée nationale l'a annoncé il y a maintenant quelques jours. Nous nous sommes entendues, les formations politiques en présence, pour adopter un nouveau règlement sessionnel ? on va l'essayer ? mais un règlement qui ne permettra plus à des gouvernements de procéder ainsi, parce que c'était, je pense... De visu, à sa face même, on pouvait considérer qu'on avait atteint là un seuil de non-respect des élus puis, bien sûr, des citoyens que ces élus représentent ici, au Québec.
M. le Président, je vous disais que le projet de loi n° 60 contient, selon moi, dans ses principes mêmes, des éléments avec lesquels on ne peut pas être en accord, et l'un des premiers que je veux vous rapporter, c'est le fait que ce projet de loi n° 160 contient des éléments où, de façon rétroactive, le gouvernement décide d'aller arranger des lois qui ne font plus son affaire parce qu'il est le premier coupable, le premier visé par ces lois. Moi, j'ai eu l'honneur d'être élue par les citoyens et citoyennes du comté de Sauvé en 1998 et je vous avoue que, quand je suis arrivée à cette Assemblée, je ne pensais pas qu'un des premiers projets de loi que je serais appelée à voter, ce serait un projet de loi qui ferait en sorte que le gouvernement, de façon rétroactive, se donnerait raison face à des citoyens qui avaient gagné en cour contre le gouvernement. M. le Président, je vous parle du projet de loi sur Hertel?des Cantons qui faisait en sorte que, alors que des citoyens avaient combattu le gouvernement... Puis vous pouvez vous imaginer ce que ça signifie pour ces citoyens: c'est David contre Goliath. C'est très clair. Mais des citoyens avaient combattu un gouvernement qui, par décret, avait décidé de procéder à l'installation de lignes de transport électrique en défiant les règles d'usage dans ce domaine. Les citoyens s'étaient battus et ils avaient gagné.
Un des premiers projets de loi que j'ai été appelée à voter en cette Chambre, M. le Président, ça a été un projet de loi qui, de façon rétroactive, en est venu à dire à ces citoyens: Vous aviez gagné, là, devant les tribunaux? bien là vous venez de perdre, parce que le gouvernement du Parti québécois a décidé que c'est lui qui avait raison puis qu'il pouvait rétroactivement décider que les citoyens avaient tort, même si les tribunaux leur avaient donné raison.
Un autre projet de loi qui contenait un élément de rétroactivité, que j'ai été appelée à voter en cette Chambre, parce qu'il n'y en a pas eu juste un, M. le Président, là, il y en a eu un autre, on s'en souviendra, c'est le projet de loi qui concernait... Puis c'est intéressant parce que c'est un projet de loi qui mettait en cause le comportement ministériel, la responsabilité ministérielle de celui qui est devenu notre premier ministre désigné, le député de Verchères, qui était alors responsable du ministère du Revenu. Et on sait, on se rappelle que la députée de Rosemont, à une époque, a dû démissionner de son poste parce qu'on avait divulgué des informations confidentielles concernant des informations de type nominal. Or, il s'est produit la même chose, on a pu démontrer qu'il s'était produit la même chose, exactement la même chose sous le règne du député de Verchères, alors responsable du ministère du Revenu. Est-ce que le député de Verchères a démissionné? Non. En ne respectant pas les principes d'usage et d'honneur qui avaient prévalu pour la députée de Rosemont, qu'est-ce qu'a fait le député de Verchères? Le député de Verchères a amené cette Assemblée ? en fait, ses collègues ? à voter de façon rétroactive une loi qui disait: Si j'avais tort, là, bien, on oublie ça, on efface ça, parce que maintenant j'ai une loi qui dit de façon rétroactive que j'ai raison.
Le projet de loi n° 60, c'était la même chose. Depuis 10 ans, des municipalités s'étaient battues ? puis c'est allé jusqu'en Cour suprême, M. le Président, en Cour suprême du Canada ? des municipalités s'étaient battues sur des causes concernant les «en lieu» de taxes. Elles voulaient faire reconnaître qu'elles avaient droit à pouvoir obliger le gouvernement à payer ses taxes dans certains cas, entre autres quand des biens meubles étaient vissés, installés dans un bâtiment. Vous devinerez la suite de l'histoire, M. le Président: les municipalités ont gagné. Ça, ça voulait dire que le gouvernement du Québec devait payer 1 million ? je donne un exemple pour ici, la ville de Québec ? 1 million à la ville de Québec en taxes.
Qu'est-ce qu'a fait le gouvernement? Bien, par le projet de loi n° 60 qui est devant nous et de façon, bien sûr, rétroactive, le gouvernement dit, entre autres, à la ville de Québec: Vous avez gagné. Vous aviez raison. Vous avez défendu vos citoyens et citoyennes payeurs de taxes de façon rétroactive. Je vous annonce que maintenant vous avez perdu. Bien, on est tannés de perdre avec le gouvernement du Parti québécois, M. le Président, et c'est pour ça, entre autres, qu'on sera contre le projet de loi n° 60.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Sauvé. Nous allons maintenant céder la parole au leader du gouvernement.
M. Brassard: Oui. Bien, c'est pour faire une motion d'ajournement du débat, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Une motion...
M. Brassard: Une motion d'ajournement du débat.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, comme il y a une motion d'ajournement du débat, nous allons tout simplement procéder, nous allons ajourner le débat et... M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: Je vous demande de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je suspends donc nos travaux à cet après-midi, 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 48)
(Reprise à 15 h 12)
Le Vice-Président (M. Brouillet): Mmes et MM. les députés, je vous inviterais à vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous allons poursuivre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais M. le ministre du Revenu à nous indiquer l'ordre du jour, s'il vous plaît.
M. Julien: M. le Président, j'aimerais que vous preniez en considération l'article 20 de notre feuilleton.
Projet de loi n° 122
Reprise du débat sur l'adoption du principe
Le Vice-Président (M. Brouillet): Voilà. À l'article 20, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 24 octobre 2001, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives. Alors, je serais prêt à céder la parole au prochain intervenant, M. le député de Hull. Alors, je vous cède la parole.
M. Roch Cholette (suite)
M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, ça me fait plaisir de poursuivre, en fait, l'intervention que j'ai débutée il y a quelques jours, et je crois qu'il me reste encore une dizaine de minutes à discourir sur le projet de loi n° 122. Et le hasard, vous savez, fait bien les choses, M. le Président, puisque, aujourd'hui même et depuis maintenant deux jours à l'Assemblée nationale, nous traitons de ce sujet à la période de questions. Vous allez me permettre d'y revenir dans quelques instants, mais je voudrais simplement replacer tout le débat, essentiellement qu'est-ce qu'on fait avec le projet de loi n° 122, et la feuille de route du gouvernement en matière de protection de renseignements confidentiels et personnels. En fait, ce n'est pas une feuille de route très reluisante.
M. le Président, dans le projet de loi n° 122, il y a deux grandes rubriques, il y a deux grandes rubriques, M. le Président: une grande rubrique qui protège bien, bien comme il faut les informations provenant de sociétés d'État, de filiales de sociétés d'État, de la couronne... Alors, le gouvernement est assez habile, très habile même, à protéger ces informations contre les regards de groupes intéressés, d'individus, de l'opposition officielle. Alors, dans le n° 122, on parle de cela puis on parle aussi du fait qu'on est en train de permettre tous azimuts, à, par exemple, l'Institut de la statistique de recueillir des informations personnelles et confidentielles sur votre vie privée à vous, M. le Président, comme la vie privée de tous ceux et celles qui nous écoutent aujourd'hui. Alors, dans les quelques minutes qui nous restent, nous allons aborder donc les deux grands volets de ce projet de loi, le projet de loi n° 122.
Alors, M. le Président, une démocratie ne peut qu'être vivante s'il y a un flot d'informations minimum qui est accessible aux gens intéressés par la chose publique, la chose publique étant importante pour des groupes d'intérêts, évidemment pour les parlementaires, pour des citoyens préoccupés, pour des citoyens touchés par des situations particulières. Or, il est important de se doter d'une politique qui permet l'accès à certains documents, pour justement avoir l'heure juste sur certains agissements du gouvernement, de sociétés d'État ou de leurs filiales. Eh bien, imaginez-vous, M. le Président, que le gouvernement a imaginé une façon d'extraire certains agissements du gouvernement de l'oeil préventif, justement, de l'accès à l'information.
n(15 h 20)n Prenons, par exemple, la société, la filiale de Loto-Québec, Casiloc. Prenons, par exemple, la filiale d'Hydro-Québec, Hydro-Québec International. Ces organismes ne sont pas assujettis à la loi d'accès à l'information. Ça veut donc dire que, M. le Président, les citoyens n'ont pas accès, n'ont pas accès à ces documents, même via une demande en bonne et due forme via la loi d'accès à l'information. Ça me touche particulièrement dans mon comté, ça, M. le Président, parce que Casiloc est un joueur important à Hull, étant donné la construction, on le sait bien, d'un casino, magnifique, il faut le dire, bien, une terre d'accueil de beaucoup de touristes, le casino de Hull, et récemment l'arrivée d'un nouveau complexe hôtelier, le Hilton Lac- Leamy, construit par Casiloc.
Mais là où le bât blesse, c'est que Casiloc a décidé aussi d'aller de l'avant avec la construction d'un terrain de golf, et ce terrain de golf là suscite beaucoup de passions, beaucoup d'opposition, il y a bien des gens qui sont contre, dans mon comté, pour des raisons de toutes sortes, des raisons environnementales particulièrement. Et, puisque le maître d'oeuvre est Casiloc, il n'est pas assujetti, évidemment, à la loi d'accès à l'information. Or, ça cause des problèmes certains à ces groupes qui veulent avoir un minimum d'informations. Au lieu de prêcher par la transparence, eh bien, le gouvernement décide de continuer à exclure les filiales de sociétés d'État... d'exclure ces filiales donc de la loi d'accès à l'information. Ça veut donc dire qu'il y a une très grande tentation chez les ministres, chez le gouvernement de faire faire des travaux ou des agissements par des filiales de sociétés d'État, en sachant très bien que leurs gestes ne sont pas assujettis à la loi d'accès à l'information. Comme pratique démocratique, on repassera, M. le Président.
Évidemment, il y a tout l'autre côté aussi, je vous en parlais il y a deux instants. Donc, on n'est pas beaucoup transparent de la part du gouvernement. Les cachettes, on aime bien ça, on garde nos fauteuils bien scellés, c'est-à-dire qu'il n'y a pas grand-chose qui peut percoler du gouvernement, la loi n° 122 s'en assure. Il y a des filiales qui sont exclues, donc, de la loi d'accès à l'information. Mais, d'un autre côté, c'est le bar ouvert de l'accès aux informations personnelles et confidentielles des citoyens du Québec. Et là le scrupule, il n'y en a plus beaucoup, M. le Président. Toutes les bonnes raisons que le gouvernement invoquait pour protéger des informations de nature, par exemple, d'affaires, des négociations de contrats, des choses comme ça, toutes les bonnes raisons que le gouvernement invoquait pour soustraire des filiales comme Casiloc de la loi d'accès à l'information, bien, ces bonnes raisons ne tiennent pas lorsque vient le temps de votre vie privée à vous, M. le Président, ou, tout comme le leader adjoint du gouvernement, alors, sa vie privée à lui. Il n'y a personne qui sera exempté de ça, et, lorsqu'on regarde les objectifs poursuivis par la loi n° 122, M. le Président, on voit très bien que c'est une aberration de penser ceci.
L'Institut de la statistique pourrait, M. le Président, colliger des informations de bon nombre d'organisations sur votre situation personnelle et confidentielle. Ce serait une banque d'information complète sur des informations que l'État détient sur votre compte. Par exemple, l'Institut de la statistique pourrait aller puiser à l'intérieur de la Société de l'assurance automobile, la SAAQ, toutes sortes d'informations concernant vos démêlés, par exemple: Est-ce que vous avez eu des accidents? Avez-vous des contraventions? Quel genre de voiture vous avez? Il y a en fait 4,4 millions, donc, de personnes qui détiennent un permis de conduire, et les informations détenues sur ce permis de conduire ? la taille, la couleur des cheveux, des yeux, etc. ? seraient possiblement colligées à partir de la SAAQ mais destinées à l'Institut de la statistique du Québec pour des motifs autres, M. le Président, que les motifs initialement invoqués pour colliger ces informations à la SAAQ pour, par exemple, vous donner un permis de conduire.
Mais, si c'était juste ça, tu dirais: Bien, coudon, une banque de données plutôt qu'une autre, qu'est-ce que ça change? Puis vous auriez raison, M. le Président, de vous questionner. Mais poursuivons. Est-ce que ça se limite à la SAAQ? M. le Président, vous le savez très bien, la réponse, c'est non, ça ne se limite pas qu'à la SAAQ. La Régie de l'assurance maladie du Québec serait aussi une pépinière fertile d'informations pour, par exemple, l'Institut de la statistique. Alors, on pourrait faire des croisements, M. le Président, des croisements entre la SAAQ, qui a vos données sur le permis de conduire, notamment sur votre historique de conduite, et avec la Régie de l'assurance maladie, où est-ce qu'il y a plus de 7 millions de dossiers, M. le Président. Alors, il y en avait 4,4 millions, de dossiers à la SAAQ, il y en a maintenant 7 millions à la Régie de l'assurance maladie, et ces 7 millions de personnes là, donc, leurs informations, les informations de ces personnes seraient transmissibles vers ce qu'on appelle en langage courant le Big Brother du Québec, le Big Brother québécois, à l'Institut de la statistique qui pourrait utiliser ces informations à des fins, je le répète, à des fins autres que celles qui étaient initialement destinées.
M. le Président, je pourrais continuer, le temps file. Il me reste évidemment quelques minutes, M. le Président, c'est bien ça, j'imagine? Il me reste deux minutes? Alors, M. le Président, je devrai faire vite. Non seulement donc la Société de l'assurance automobile, la Régie de l'assurance maladie, Revenu Québec va être une pépinière d'informations, la CSST va envoyer des informations à l'intérieur de l'Institut de la statistique, la Régie des rentes ainsi que la Sûreté du Québec, pour faire un beau gros bouilli d'informations à l'Institut de la statistique, pour qu'on mette ça sur le poêle, qu'on brasse cette soupe-là pour avoir une banque d'informations complète sur votre compte, M. le Président.
Et ça, c'est totalement inacceptable, considérant le bilan de la protection des renseignements personnels et confidentiels de ce gouvernement. On se rappellera que ça a coûté le siège de la députée de Rosemont ? le siège de ministre de la députée de Rosemont ? qui avait donné des listes confidentielles à une firme de sondage. Elle a eu le courage de démissionner parce que, évidemment, elle était dans l'erreur. Le gouvernement avait fait une erreur colossale en matière de protection de renseignements personnels et confidentiels.
Et, pour ce qui est de la transparence, M. le Président, on a eu encore une fois la démonstration aujourd'hui, à la période de questions, que, lorsque vient le temps de donner des informations, le gouvernement est pas mal meilleur pour aller en chercher qu'en donner, parce que le gouvernement a caché un document qui avait été présenté à la commission sur l'avenir de la langue, la commission Larose, caché un document. Lorsqu'on a fait une demande d'accès à l'information, encore une fois les gens du ministère nous ont dit: Il n'existe pas, alors qu'en réalité il y avait un document de plus de 60 pages qui faisait état de la position gouvernementale.
Alors, M. le Président, comment résumer tout cela en 10 petites minutes, M. le Président? Eh bien, le gouvernement est bien cachottier pour ce qui est de ses affaires mais a le bras long pour aller chercher vos affaires dans vos poches, dans vos chambres à coucher. Ça, c'est le bilan du gouvernement du Parti québécois.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député de Hull. Y a-t-il un autre intervenant? Alors, M. le député de Marquette, je vous cède la parole.
M. François Ouimet
M. Ouimet: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole sur ce projet de loi, qui aurait pu être un projet de loi très important, dans le fond.
Rappelez-vous des propos de l'ancien premier ministre, M. Bouchard, qui avait commencé son mandat en donnant comme directive aux différents ministres qu'il fallait oser, qu'il fallait avoir de l'audace. Eh bien, voici un projet de loi où manifestement et le ministre et le gouvernement manquent d'audace et n'ont pas osé.
Pourtant, la présidente de la Commission d'accès à l'information et son prédécesseur ont bien noté les lacunes importantes dans notre système, particulièrement en ce qui concerne le droit du public à l'information, un droit qui est inscrit dans notre Charte québécoise des droits et libertés de la personne, un droit qui est reconnu dans la Constitution canadienne, un droit qui a été à maintes fois réexprimé et confirmé par la Cour suprême du Canada, entre autres dans un jugement rendu par l'honorable juge Laforest, en 1997, qui disait très clairement que, dans le fond, c'est au coeur même d'une démocratie que de permettre au citoyen d'être bien informé sur les faits et gestes du gouvernement, pour pouvoir participer dans le processus de débat, dans le processus démocratique.
Le juge Laforest disait ? et j'ai un extrait en anglais, M. le Président, dont je vais vous faire part: «The overarching purpose of access to information legislation is to facilitate democracy, which it does in two ways to insure that citizens have the information required to participate meaningfully in the democratic process, and secondly that politicians and bureaucrats remain accountable to the citizenry.» J'étais en commission parlementaire lorsque les groupes... Et le député d'Iberville également était en commission parlementaire lorsque nous avons entendu un certain nombre de groupes qui sont venus devant nous exprimer leurs inquiétudes par rapport au projet de loi n° 122, où le gouvernement ne va pas suffisamment loin dans le processus de rendre disponibles, de rendre accessibles les différents documents qui émanent soit d'un ministère ou soit d'un organisme public.
M. le Président, je me souviens des propos de Mme Stoddart, nouvellement élue à la présidence de la Commission d'accès à l'information, qui disait dans l'édition du Devoir du 10 octobre 2000, et c'était véritablement un vent de fraîcheur... On se rappelle que son prédécesseur l'avait lui-même invoqué au niveau du rapport annuel, mais le journaliste, M. Dutrisac, commençait l'article de la façon suivante: «La Commission d'accès à l'information envisage de proposer l'adoption d'une loi de divulgation automatique de l'information gouvernementale, à l'exemple des États-Unis.» Il faut comprendre que, dans le système américain, les organismes, les ministères, les départements du gouvernement rendent publics tous leurs documents sans que les citoyens ne soient obligés d'en faire une demande par le biais d'un processus d'accès à l'information. Les Américains donnent accès à toute information possible, imaginable, pour permettre à leurs citoyens de participer dans le processus démocratique.
Mme Stoddart disait: «Il faut penser sérieusement à aller vers un modèle où il y a une divulgation automatique, sans que le citoyen n'en fasse la demande.» Je constate, M. le Président, tout comme les organismes et les groupes qui sont venus en commission parlementaire devant nous au printemps dernier... On constate que le gouvernement a décidé de maintenir le culte du secret. Parce que c'est comme ça qu'il a été dénoncé, entre autres par la Fédération des journalistes du Québec et par le Conseil de presse, cette manie du gouvernement à vouloir cacher des informations. Et on a devant nous un gouvernement qui est véritablement passé maître dans cet art.
Moi, je me souviens de Jacques Parizeau, lorsqu'on avait découvert le plan O qui allait toucher l'ensemble des Québécois, à savoir quels gestes le gouvernement entendait poser au lendemain d'un référendum par rapport aux avoirs des Québécois. Et on parlait, je pense, d'une vingtaine, si ce n'est pas d'une trentaine de milliards de dollars.
En Ontario, ces documents-là ont été divulgués. Le cabinet de l'époque, le cabinet Harris, si ma mémoire est bonne, ou le cabinet de M. Rae, avait indiqué publiquement quels faits et gestes ils allaient poser si jamais le Québec s'aventurait dans cette voie périlleuse de l'indépendance. M. le Président, jamais, jamais, jamais, ni M. Parizeau ni Lucien Bouchard n'ont permis à ce que les Québécois puissent voir ce que contenait ce fameux plan O.
On peut dire la même chose également au niveau des études de Richard Le Hir. Rappelez-vous que le gouvernement refusait de rendre public l'ensemble de ces études-là. Le gouvernement ne rendait publiques que les études qui faisaient son affaire, mais les autres études, le gouvernement avait décidé de les cacher jusqu'à temps que l'opposition intervienne et que nous puissions, nous, les rendre publiques, ces informations-là.
On a connu la même chose dans le dossier des fusions municipales. Rappelez-vous comment la ministre des Affaires municipales et de la Métropole ne voulait pas divulguer l'ensemble des études, l'ensemble des rapports qui avaient été commandés par son ministère, payés à même les fonds publics. M. le Président, j'ai moi-même fait l'exercice en commission parlementaire, un exercice très, très, très simple, avec l'actuel ministre responsable de la Commission d'accès à l'information.
n(15 h 30)n Je lui ai simplement demandé... Il avait un document, un outil de travail entre les mains, et c'était une compilation des résumés des mémoires qui avaient été déposés en commission parlementaire. Il l'avait entre les mains. Je voyais bien qu'il se basait sur ce document-là pour poser des questions aux différents organismes. Je lui ai fait séance tenante une demande d'accès à l'information, je lui ai dit: M. le ministre, auriez-vous la gentillesse de rendre accessible le document que vous avez entre vos mains, qui ne contient aucune note manuscrite, aucune note personnelle, afin que les parlementaires des deux côtés de la Chambre puissent bénéficier du même outil de travail? Ça a été un refus catégorique de la part du ministre qui est censé mettre de l'avant les principes d'accès à l'information.
Je lui ai fait la demande à deux ou à trois reprises; je revenais à tous les jours. Pourtant, c'est un outil de travail bien simple et bien banal que je souhaitais avoir pour les collègues qui étaient de l'opposition ainsi que les collègues du côté ministériel, mais ça a été un refus systématique. Il m'avait demandé, au départ, de pouvoir délibérer sur le sujet, et lorsque j'ai revenu à la charge une troisième fois, alors là, à ce moment-là, ça a été un refus catégorique. Il aurait fallu que je passe, comme parlementaire, par un processus de demande d'accès aux documents pour pouvoir mettre la main sur le document que le ministre avait, et il ne s'agissait de rien de moins, M. le Président, qu'un résumé des mémoires des différents participants en commission parlementaire.
Je me suis livré à un exercice semblable pour voir à quel point c'est pénible pour les citoyens aujourd'hui d'obtenir de l'information de la part de ce gouvernement-là. Je me suis rendu, à un moment donné, au comité de transition de Montréal. Je leur ai demandé de consulter la liste de classement des documents qu'ils sont censés avoir, afin de pouvoir favoriser et faciliter l'exercice de mon droit d'accès aux documents. M. le Président, je me suis buté à des personnes qui ne voulaient rien savoir au départ.
Premièrement, ils m'ont dit que la liste de classement n'existait pas. Je leur ai dit: Écoutez, c'est impossible. La loi prévoit que tous les organismes publics ? et le comité de transition est un organisme public ? doivent confectionner une liste de classement qui contient les documents émanant de l'organisme et les documents reçus par l'organisme en termes d'études et de rapports. Alors là j'ai eu le droit à la visite de l'attaché de presse de la présidente du comité de transition parce que j'ai commencé à élever un peu la voix. Comme parlementaire, je devenais frustré. On me privait, comme citoyen, de pouvoir consulter sur place une liste de classement de documents.
Or, finalement, ça a pris à peu près une heure. Au départ, on m'a laissé entendre que c'était une liste qui comportait à peu près 600 pages. J'ai dit: Je vais être patient, je vais attendre. Finalement, on m'a livré une liste, une liste d'à peine 50 à 60 pages. Alors là j'ai consulté la liste sur place et là je leur ai dit: J'aimerais, sur place, pouvoir consulter les documents suivants ? j'en ai identifié quelques-uns. Alors là j'ai eu le droit à la visite du responsable de l'accès à l'information qui, lui, m'a dit: Je ne peux pas vous donner accès à ça, vous allez devoir m'en faire la demande par écrit. J'ai dit: Ça n'a pas de sens. Regardez l'article 9 de la loi. L'article 9 de la loi stipule en toutes lettres que j'ai le droit de consulter sur place des documents. Et je lui ai dit: Je suis sur place. Je viens de consulter la liste de classement et j'aimerais voir ces documents-là en particulier.
Alors là ça a été un refus, parce que le responsable de l'accès à l'information pour le comité de transition de Montréal m'a dit candidement: Il faut que je vérifie avec le ministère des Affaires municipales et de la Métropole. Ah! là je me suis rendu compte de qui contrôlait le comité de transition: c'était le cabinet politique de la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Alors, la consultation a pris à peu près 30 minutes et là je savais d'ores et déjà la réponse que j'allais recevoir. Le fonctionnaire est revenu me voir pour me dire: Écoutez, j'ai consulté le responsable de l'accès au cabinet de Mme Harel, et la réponse, c'est non. Faites-nous-en la demande par écrit, et puis on statuera.
Imaginez-vous, M. le Président, je suis un parlementaire. J'étais porte-parole aux affaires de la métropole, porte-parole dans le dossier de l'accès à l'information, et on me refusait, comme parlementaire et comme porte-parole, de pouvoir consulter des documents publics, payés à même les fonds publics. Je me suis dit: Imaginez, si c'est ça qui m'arrive comme parlementaire averti, imaginez-vous le pauvre citoyen qui, lui, veut avoir de l'information.
Alors, le système ne marche pas, le système ne fonctionne plus, à tel point que les organismes qui sont venus en commission parlementaire nous ont dit: On ne se donne même plus la peine, on ne se donne même plus la peine d'en faire, des demandes, parce que le processus est beaucoup trop long. Lorsqu'on veut obtenir les documents, l'organisme en question se cache derrière quelques exceptions de la loi pour nous les refuser. C'est une grande perte de temps, et, au bout de l'exercice, on n'arrive même pas à obtenir l'information que l'on souhaitait.
M. le Président, la preuve la plus récente dans ce domaine-là: des journalistes de Radio-Canada et du journal La Presse vont voir la Régie des installations olympiques pour leur demander accès à un certain nombre de documents. Ils ont dû aller devant la Cour supérieure... la Commission d'accès à l'information, pardon, pendant au moins trois ou quatre fois, deux fois ils ont dû aller en appel devant la Cour du Québec, pour finalement recevoir des documents qui avaient été tellement raturés que les documents n'avaient plus aucun sens. En lisant ces documents-là, on voyait combien de paragraphes, de pages avaient été effacés. Et j'ai fait le même constat avec le ministre responsable de la Régie des installations olympiques, M. le Président, qui, en prétendant être transparent, nous disait qu'il déposait l'ensemble des documents dans un dossier. Or, je constatais à chaque fois que des documents qui étaient pertinents, certes qui étaient embarrassants pour le gouvernement ? mais, quand même, comme parlementaires, nous avions droit de les consulter... Le ministre responsable avait décidé de ne pas les rendre publics, ces documents-là, il avait plutôt décidé de les cacher. Or, M. le Président, le ministre responsable de l'accès à l'information rate cette réforme dès en partant, et je suis convaincu, je suis convaincu qu'il le sait, je suis convaincu qu'il sait qu'il passe à côté des véritables enjeux.
Il lit les rapports annuels de la Commission d'accès à l'information, il a pris connaissance des mémoires de la Fédération des journalistes du Québec, Conseil de presse du Québec et combien d'autres organismes qui lui ont dit: Ça prendrait une réforme en profondeur, il faudrait permettre ce que la présidente de la Commission d'accès à l'information appelait une divulgation automatique sans que le citoyen n'en fasse la demande, et ça, c'est un enjeu fondamental parce qu'il en va de tout le processus démocratique, il en va d'un droit qui est prévu dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, le droit à l'information, le droit du public de pouvoir être informé pour prendre part dans les débats dans notre société.
Si vous n'avez pas accès à l'information, M. le Président, comment pouvez-vous prendre part de façon intelligente à un débat? Comment pouvez-vous suivre les décisions gouvernementales? Comment pouvez-vous vous attendre à une certaine imputabilité de la part d'un ministère ou d'un organisme alors qu'on vous cache des informations? C'est un problème important. C'est un problème qu'on vit avec le gouvernement du Parti québécois depuis leur élection en 1994. Combien d'exemples qu'on pourrait donner? Encore ce matin, lors de la période de questions, mon collègue le député de Châteauguay en a donné un autre exemple avec le député de Nelligan, M. le Président. Et, si je ne m'abuse, je pense même que le ministre nous aurait induits en erreur avec une réponse qu'il aurait donnée en Chambre. Mais on aura l'occasion de clarifier ces choses-là bientôt.
n(15 h 40)n M. le Président, c'est une réforme ratée, qui passe à côté des véritables enjeux, qui ne règle pas le problème. C'est véritablement le reflet d'un gouvernement qui a fait la sourde oreille par rapport aux demandes des différents organismes et des différents groupes de notre société. Pas étonnant que l'opposition va voter contre un tel projet de loi. Et je me dis à quelque part: Le ministre, dans son âme et conscience, doit sûrement savoir... Il a probablement eu des commandes très précises de la part du cabinet du premier ministre pour fermer la porte à certaines demandes qui auraient pu faire en sorte que nous ayons un système beaucoup plus transparent, beaucoup plus ouvert, beaucoup plus axé sur le droit des citoyens de participer, le droit des citoyens d'avoir droit à l'information. Et, avec un processus comme la divulgation automatique, les citoyens n'auraient que, par exemple, consulté le site Web d'un organisme pour prendre connaissance de l'ensemble des rapports, l'ensemble des études qui ont été préparées par l'organisme, alors qu'aujourd'hui, manifestement, ce n'est pas le cas.
L'exemple que je donnais au niveau du comité de transition de Montréal, je leur avais demandé... Il y avait une rubrique qui s'intitulait Cadre financier de la nouvelle ville, 2002 à 2004. Je savais qu'il y avait des simulations, qu'il y avait eu des études faites sur le compte de taxes. Jamais on ne m'a remis ces documents-là. Pourquoi? Parce que le responsable de l'accès à l'information prenait ses commandes directement, directement du cabinet politique de la ministre qui, elle, avait tout intérêt à ne pas divulguer la réalité des choses qu'on est en train de découvrir de toute façon, que nos comptes de taxes vont augmenter et que la baisse de taxes promise ne sera pas au rendez-vous.
Mais pourtant, M. le Président, un gouvernement qui se dit démocratique est un gouvernement qui devrait apporter ces réformes-là pour que, à la fois dans la loi et puis par la suite dans la culture organisationnelle, il puisse y avoir des changements. Aujourd'hui, le droit à l'information est l'exception et le refus de donner accès aux documents est devenu la règle. C'est ça qui est le problème, pas juste au niveau des ministères, mais au niveau de tous les organismes publics. La première chose que le responsable de l'accès à l'information fait dans un organisme public: Est-ce que c'est compromettant pour l'organisme? Est-ce que, si on donne accès à ces informations-là, ça pourrait avoir un effet de nous embarrasser ou de nous causer un certain problème? Alors là, si la réponse, c'est oui, alors là on va chercher les exceptions prévues dans la loi pour tenter de dissimuler, pour tenter de faire en sorte qu'on n'est pas obligé, on n'est pas obligé de donner accès aux documents.
Les cas d'Hydro-Québec où Hydro-Québec, M. le Président, se paie les meilleurs avocats pour faire traîner en longueur des processus, des procédures en passant par la Commission d'accès à l'information, puis, par la suite, l'appel devant la Cour du Québec, et, à l'occasion, de tenter des appels devant la Cour du Québec... On donne un mandat pour étirer le temps le plus possible, pour que ça dure trois ans, quatre ans, cinq ans devant les tribunaux, et, par la suite, les citoyens qui font des demandes de documents ne peuvent même pas, ne peuvent même pas payer, M. le Président, pour lutter face à un organisme comme Hydro-Québec. Alors, manifestement, le ministre a raté la réforme. Merci.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Et le prochain intervenant sera M. le député d'Orford. M. le député.
M. Robert Benoit
M. Benoit: M. le Président, je viens d'entendre, je viens d'écouter le député de Marquette. Les citoyens qui nous écoutent, là, ont dû être grandement impressionnés. Moi, je vais vous parler de l'individu un peu, mais, avant ça, peut-être résumer un peu sa pensée. Il n'y a pas un citoyen... S'ils avaient à voter sur le projet de loi n° 122, il n'y a pas un citoyen qui a écouté le député de Marquette qui voterait pour ce projet de loi là. Avec les arguments sans faille, fondés, expérience, il n'y a personne qui peut penser pour un instant que le projet de loi n° 122 est un bon projet de loi.
Qui est ce député qui vient de parler? Bien, c'est un ami, c'est un gars extraordinaire. Mais ça, une fois que j'ai fini cette parenthèse-là, M. le député de Marquette, c'est un jeune père de famille, mais, en plus, il a travaillé dans la fonction publique, il a été président d'une commission scolaire, et non pas la moindre, celle de la région de Montréal. Alors, il est familier avec toutes ces structures administratives, toutes ces officines, tous ces hauts-commissariats, tous ces bureaux de ministre, et ce qui n'est pas évident pour un individu qui arrive de l'entreprise privée dans les premières années, mais le député de Marquette, lui, il a vécu ça. Il est habile à manoeuvrer dans toutes ces organisations-là, beaucoup plus habile qu'un grand nombre de nous, députés, et il nous dit: Même avec toute l'expertise, toute l'expérience que j'ai de ces milieux-là, je me bute à la porte la première journée où je demande des informations, et, pire que ça, je suis responsable, je suis responsable pour l'opposition des dossiers de la ville de Montréal.
Parce qu'il faut bien comprendre qu'en démocratie il y a le ministre puis il y a la contrepartie, qui est le porte-parole de tel sujet ou de tel autre sujet à l'opposition, et on devrait, d'ailleurs, en démocratie, donner la même chance à l'opposition qu'au gouvernement en accès aux documents, aux budgets, etc. Je referme cette parenthèse-là aussi, ce n'est pas là qu'est mon propos aujourd'hui.
Alors, ce député de Marquette, avocat par surcroît, bon avocat, grand avocat, se présente, suite au projet de loi de regroupement des municipalités, et dit: Écoutez, la loi est claire, vous devez tenir un lexique des documents que vous recevez. Puis-je voir les documents? Il est celui qui s'assure qu'en démocratie les choses vont bien aller. Il faut bien comprendre que, s'il n'y avait pas d'opposition, on aurait, vous savez quelle sorte de gouvernement, un gouvernement qui pourrait tout cacher, qui pourrait à peu près dire ce qu'il veut, et c'est parce qu'il y a une opposition qui vérifie constamment...
Alors, le bon député de Marquette, il a fait ce qu'un bon député, nommé par son chef, responsable d'un dossier, devait faire: aller au fond des choses et vérifier. Et, s'il y a quelque chose qu'on apprend dans l'opposition, ce n'est surtout pas parce que le ministre vous l'a dit, ce n'est pas le Saint-Père le pape qui vient de parler, ce n'est pas l'infaillibilité. Alors, il s'est présenté puis il a dit: Est-ce que je peux voir les documents? Et ça, là, le député de Marquette est à mes côtés en ce moment, on parle de 2 millions d'individus qui seront touchés par le regroupement, plus ou moins, des villes de la grande ville de Montréal. 1,5 million.
Il y a des conséquences à ça, il y a des conséquences probablement quotidiennes à ça. D'ailleurs, il faut se rappeler que la principale dépense d'un citoyen en ce moment dans sa vie, ce n'est pas sa voiture, ce n'est pas son alimentation, c'est probablement son hypothèque. Donc, une des principales préoccupations du citoyen dans une ville comme Montréal ? en tout cas, quand il regarde ses finances ? c'est le milieu dans lequel il va oeuvrer. Et probablement que sa principale préoccupation, après avoir payé son hypothèque, c'est: Dans quel milieu je vais élever mes enfants? Quelle sorte de services je vais avoir? J'ai fait un choix. Est-ce que ces services-là vont demeurer?
Il était tout à fait à l'honneur du député de Marquette de faire sa job, de se présenter là et de dire: Puis-je voir les documents? Je comprends que le fonctionnaire qui le reçoit lui dit: Écoutez, je ne suis pas très familier avec cette loi-là, on en vote, on en vote des piles et des quantités à tous les jours. Même nous qui les votons, franchement, il y a des fois qu'on n'est pas très familiers avec ces lois-là. Je comprends que le fonctionnaire aurait pu dire: Écoutez, M. le député de Marquette, donnez-moi cinq minutes, je vais vérifier tout ça, je vais vous donner une réponse. Mais ce n'est pas ça qu'il fait. Et là on voit le contrôle de l'État politique sur la machine, la machine de la haute fonction.
Alors là il appelle au ministère, le ministère dit: Aïe! ne donne pas ça à Marquette... ne donne pas ça au député de Marquette. S'il fallait qu'il nous pose une question à l'Assemblée nationale là-dessus! En plus qu'on ne l'aime déjà pas trop, imagine-toi s'il fallait que tu lui donnes des documents. Ne va pas donner de documents. Et là on traite le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales de la même façon qu'un citoyen qui nous écoute en ce moment serait traité.
Et des fois je me dis: Imaginez-vous, si je n'étais pas député, combien de temps j'aurais attendu sur la ligne au ministère. Un bon jour, d'ailleurs, un journaliste m'avait demandé qu'est-ce que ça m'avait donné d'avoir été nommé adjoint parlementaire du premier ministre, puis ma réponse, ça avait été que j'attendais moins longtemps sur la ligne, quand j'appelais des ministères, que quand je disais que j'étais un simple citoyen.
M. le Président, le projet de loi n° 122, on va être contre. Et attendez, attendez quelques minutes. Je sais que vous êtes anxieux de tous nous entendre l'un après l'autre. Je vous vois, là, vous voulez tous nous entendre un après l'autre. C'est correct, vous faites un ouvrage absolument fantastique. Attendez d'entendre ma consoeur dans quelques minutes, une femme qui recherche ses dossiers, qui va au fond des choses, qui trouve, hein? Combien de dossiers qu'elle a fouillés en profondeur et combien de fois elle a embarrassé le gouvernement avec toutes sortes de contrats mal ficelés, des contrats qui pouvaient coûter quelques milliers de dollars qui vont finir, qui vont finir presque dans les milliards, si ça continue, cette histoire-là?
n(15 h 50)n Au début, c'était un petit «computer». Moi, je pensais qu'elle parlait d'un petit «computer» de table, au début, quand elle parlait. À un moment donné, je me suis aperçu que c'était pas mal plus gros. Et là plus on pose des questions, plus on s'aperçoit qu'ils ont complètement perdu le contrôle de cette situation-là. Et quelle difficulté elle aura de mettre la main sur les documents! Quelle difficulté elle aura de mettre... Et, vous savez, tantôt je parlais de l'État politique sur l'état de la haute fonction publique. Bien, nous, on leur parle, à ces bons fonctionnaires-là, sur une base quotidienne, quotidienne. Moi, au ministère de l'Environnement, j'appelle des gens, des fonctionnaires tout à fait corrects, et on me répond: Écoutez, on ne peut pas, on ne peut pas vous répondre.
Je vous conte un incident. Hier ? hier, je peux vous donner les noms, les heures ? je veux savoir si le bill privé de la ville de Coaticook est dans la liste des bills privés qui vont être lus avant la fin de la session. C'est-u correct ou pas correct qu'un député qui s'occupe de la ville de Coaticook veuille savoir si le bill privé, qui a des conséquences économiques absolument incroyables pour ces citoyens-là, soit entendu avant décembre ou s'il y aura possiblement des auditions en janvier ou en février? Alors, j'ai rejoint... Bon, d'abord, ça a été bien long, là. Appelle un, appelle l'autre, ce n'est pas lui, c'est le troisième. Tu appelles le quatrième, il n'est pas là. Le cinquième te dit qu'il va te rappeler. Finalement, j'ai fini par parler à celui qui avait l'information. Savez-vous ça a été quoi, l'information? M. Benoit, je suis au courant, je le sais. J'ai tout ficelé l'affaire, mais vous devez parler au cabinet du ministre. Ah bon!
Alors, au cabinet du ministre, j'ai parlé à quatre personnes. Là, on voyait qu'ils étaient tous... C'était épouvantable. Je ne leur demandais pas la formule pour bâtir une bombe atomique, je ne leur demandais pas la solution magique pour renverser le gouvernement, je ne leur demandais rien de bien, bien compliqué. Un bill privé avec deux articles dedans va-t-il être entendu en décembre ou pas entendu? J'aurais appelé le maire, j'aurais dit: M. le maire, ça a l'air que ce ne sera pas en décembre, point à la ligne. On passe à d'autres choses.
Est-ce que c'est normal dans une société que des gens élus... Parce qu'il n'y a pas deux sortes d'élus. Dans mon livre à moi, il n'y a que de bons élus, des gens dont le peuple ont décidé de faire confiance, pour toutes sortes de raisons, même s'ils ont la majorité des votes, ce qui est le cas du Parti libéral, qui a eu la majorité, la pluralité des voix... qu'on soit dans l'opposition.
Une voix: Des votes à 10 $.
M. Benoit: Alors, on a décidé, on a décidé qu'on était dans l'opposition parce qu'on a une structure très vieille.
J'entends une mauvaise langue, ici: Des votes à 10 $. Je défie, M. le Président, je défie ce député dont je ne sais trop de quelle circonscription, je le défie, je le défie d'essayer de démontrer qu'on n'a pas un des meilleurs systèmes électoraux au monde. Et, s'il veut ouvrir ce dossier-là, je pourrais peut-être lui reparler des référendums où, dans un poll chez nous, 32 % des votes ont été refusés par l'organisateur du PQ, cette madame de 88 ans qui s'est présentée deux fois au poll, anglophone, bien sûr, et on lui a demandé l'adresse de la résidence où elle restait. Elle a répondu: Je reste à La Maison blanche, The White House. C'est comme ça que ça s'appelle. Avez-vous l'adresse, madame, de la White House? Elle dit: Excusez-moi, je ne la sais pas, j'ai 89 ans. Vous ne pouvez pas voter, madame. Tout le monde dans le village la connaît, cette dame-là. Elle est retournée chez elle, et là on a dit: Écoutez, ça n'a pas d'allure, on va retourner avec vous au poll. Vous êtes une citoyenne, vous avez toujours voté, vous êtes une femme tellement honorable, nous allons vous y ramener, au poll. On l'a ramenée au poll. Ils lui ont demandé son âge, ils lui ont demandé son nom. C'était bien, très bien qu'ils le fassent. Ils lui ont demandé: Où demeurez-vous? Elle a dit: Je demeure ? c'est une anglophone ? I live at The White House. Tout le monde la connaît dans le village, elle est native de là. L'adresse du White House, pauvre madame, elle ne savait pas l'adresse de son White House! Bien, elle n'a pas voté. Ça, c'est épouvantable! 32 % des votes dans ce poll-là, lors du dernier référendum, ont été complètement annulés. Est-ce qu'on peut accepter ça?
Alors, les gens qui essaient de laisser sous-entendre ici qu'il y a des magouilles électorales, que les choses ne vont pas bien, qu'on a besoin d'une carte d'électeur, etc., moi, je leur réponds: Soyons fiers du système démocratique que nous avons et n'essayons pas... S'ils veulent me parler d'Anjou, je vais leur parler, je vais leur de Sherbrooke. À chaque fois qu'ils vont nommer... Elle est rendue vice-présidente de leur parti, M. le Président. Elle a été voter illégalement, ils l'ont nommée vice-présidente du parti. Y en a-tu d'autres comtés que vous voulez me nommer comme ça? Je vais vous faire... je vais vous témoigner sur chacun des comtés. Faites bien attention, Mme Malavoy est rendue la vice-présidente de votre comté, le numéro un après votre chef, alors qu'elle a fraudé, ça a été reconnu, tout le monde l'admet. Mais elle a été sauvée par une technicalité de quelques jours. C'est ça qui a fait que Mme Malavoy est restée ici, à l'Assemblée nationale.
Une voix: Monique Simard.
M. Benoit: M. le Président, Monique Simard, et je pourrais continuer.
M. le Président, je reviens au projet de loi n° 122, je vois que ça les fatigue beaucoup quand on parle de technicalités électorales. Ce projet de loi, il va avoir...
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député...
Une voix: ...
Une voix: Quel règlement? Quel règlement? Quel règlement? Quel article?
Une voix: Bien, l'article...
Le Vice-Président (M. Brouillet): L'article, c'est que chacun doit intervenir quand il a un droit de parole. Alors, il y en a beaucoup qui interviennent sans avoir le droit de parole présentement. C'est ça, le règlement. Alors, je vous inviterais à être patients, et vous avez votre tour. Alors, vous pourrez répliquer tant que vous voudrez, vous avez 20 minutes chacun. Je vous inviterais, s'il vous plaît, de ne pas intervenir pendant les discussions, parce que ça aide à dégénérer, ça amène à dégénérer les débats. Alors, entendez et levez-vous quand vous aurez des rectifications à apporter, vous avez le droit de le faire. Mais attendez votre temps. Alors, M. le député d'Orford.
M. Benoit: Je reconnais votre bon travail, M. le Président, qui n'est pas évident. Je vous félicite de ramener les choses à l'ordre quand c'est nécessaire.
Alors, revenons au projet de loi n° 122. S'il y a quelque chose qu'on apprend de nos parents quand on vient, très jeune, au monde, c'est le respect de l'information. Moi, en tout cas, chez nous, quand on recevait du courrier, mes petites soeurs recevaient du courrier, j'aurais donc aimé ça pouvoir ouvrir l'enveloppe de la matante ou du mononcle et de savoir ce qu'il y avait dans cette enveloppe-là! C'était confidentiel, on ne pouvait pas. On était tout jeunes et déjà on nous donnait cette formation de la confidentialité. On n'était pas supposés écouter quand quelqu'un parlait sur la ligne. Parce que, oui, quand je suis venu au monde, on avait des lignes communautaires. On n'était pas supposés écouter ce qui se passait sur la ligne, et, si on avait écouté par erreur ou mégarde, on devait le garder pour soi. Ça faisait partie d'un protocole de société, et c'est comme ça qu'on apprenait à vivre.
Et là, tranquillement, les choses se sont compliquées. L'informatique est arrivée, on a eu des banques de données. En 1997, il y a eu une commission parlementaire ici, à l'Assemblée nationale, pour les gens qui nous écoutent, et on a regardé tous ces aspects-là. C'était palpitant, c'était incroyable, ce qu'on y a appris. Et je me rappelle, entre autres, ce monsieur qui était venu témoigner ? ou c'est peut-être quelqu'un d'autre qui est venu témoigner à son sujet ? qui nous racontait que, dans un État des États-Unis, on faisait le profil psychologique d'un individu à partir des banques de données qu'on pouvait obtenir de la pharmacie, du dépanneur, du locataire de cassettes vidéo. C'est tellement vrai qu'on a même dû passer une loi aux États-Unis pour défendre que les listes de clients et les films qu'ils allaient voir dans les cassettes vidéo soient publiés parce qu'un sénateur s'était fait prendre. Alors, aux États-Unis, il y avait une entreprise qui prenait toutes ces listes-là et qui les empilait. C'est le mot technique qu'il prenait, ils les empilaient une par-dessus l'autre. Alors, on s'apercevait qu'à la pharmacie il prenait telle sorte de médicament, qu'il louait ensuite des films qui pouvaient être des films de violence, etc., et on arrivait à la conclusion que le monsieur avait un profil d'homme très dangereux.
Alors, ce bon gars là, un bon jour, il avait été dans un édifice où la CIA supervisait cet édifice-là, aux États-Unis, croyant qu'il y avait des espions russes, etc., et ils ont, dans une banque de données... Ils ont malheureusement indiqué qu'il avait été rencontrer ces gens qui étaient supposément des espions américains, alors qu'il n'avait rien à foutre de ça, il avait été faire une visite à des amis dans cet édifice-là. Et, de là, pendant 10 à 12 ans, il ne pourra jamais se trouver un emploi aux États-Unis.
Un bon jour, il décida d'aller au fond des choses et de voir pourquoi, avec toute sa compétence, il n'était pas capable de se trouver d'emploi, et, bien sûr, on a vite découvert... il a vite découvert que ces banques de données qu'on avait empilées, qui étaient, dans son cas, absolument fausses, avaient nui à sa réputation et que plein de monde s'abreuvait à ces sources-là pour arriver à leurs conclusions. Or, c'est très préoccupant, M. le Président, et ici il n'y a rien qui nous garantit, il n'y a rien qui nous garantit, particulièrement avec les nouveaux pouvoirs qu'on va donner à l'Institut de la statistique du Québec en matière d'accès aux renseignements des citoyens, qu'on n'est pas après créer une manière de monstre, une manière de monstre dont il nous serait difficile de retenir... Et, comme on dit dans le langage un peu plus clair, il faut tenir le tigre par la queue, parce que ce n'est pas évident.
n(16 heures)n Est-ce qu'on n'est pas après créer un tigre ici, M. le Président, avec une quantité démesurée d'informations? Alors, nous, on se questionne énormément, énormément: Est-ce qu'on n'est pas en train de faire au Québec ce qu'on a appelé aux États-Unis un Big Brother, une organisation, une machine qui sait tout sur nous? S'ils savaient juste nos qualités, ce ne serait pas si tant pire, M. le Président, mais, comme on est tous des humains, il se pourrait qu'ils arrivent à connaître nos défauts aussi, qu'ils connaissent nos états financiers, nos niveaux d'endettement, nos maladies, nos relations avec toutes sortes de voisins, etc. Et déjà c'est préoccupant, déjà c'est préoccupant.
Vous écoutez comme moi toutes sortes d'émissions sur Internet, c'est-à-dire à la télévision, qui parlent de ce qui se passe sur Internet en ce moment, et on n'est plus trop sûr qui peut vérifier dans nos propres informatiques ce qu'il y a dedans, comment nos enfants sont capables de rentrer un peu partout. Alors, on a à se préoccuper de tous ces aspects-là, et ce n'est pas ça que je retrouve ici, tout au contraire. On va permettre à de l'information d'être compilée, et ça m'inquiète.
Je finirai avec un petit cas personnel. Il y a plusieurs années, j'avais donné, dans une exposition, mon nom pour recevoir de la littérature et j'avais fait... sciemment, j'avais changé le nom de Robert pour Roger Benoit. Je voulais voir jusqu'où ces «mailing lists» là, sur lesquelles on signe on peut partout, ça pouvait se multiplier. Eh bien, M. le Président, j'ai dû signer ce petit carton-là, dans cette exposition agricole, il y a une dizaine d'années, et je reçois encore, je reçois encore de partout, des États-Unis, de partout, de la littérature, et ça n'a plus aucun lien, aucun rapport avec, finalement, la première signature où j'ai signé mon nom, 10 ans plus tard. Alors, c'est évident, ces compagnies-là vendent leurs noms à d'autres compagnies, et puis elles revendent ça, puis elles rachètent ça, etc. Il y a tout un commerce de ces «mailing lists» là, et on se demande jusqu'où tout ça va, et jusqu'où ça peut aller, et combien les gens, finalement, savent sur nos vies privées.
Alors, devant tout ça ? et je suis très anxieux d'entendre ma consoeur, qui est une femme extraordinaire, qui fait toujours une recherche poussée de ces projets de loi là ? M. le Président, vous avez compris qu'on votera contre le projet de loi, et je vous invite à écouter ma consoeur qui est une femme extraordinaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Orford, et nous sommes prêts à entendre votre consoeur. Je crois qu'elle s'est levée pour prendre la parole, alors je vais lui céder la parole. Mme la députée de La Pinière.
Mme Fatima Houda-Pepin
Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Effectivement, je voudrais intervenir, comme mon collègue l'a dit ? merci beaucoup ? sur ce projet de loi n° 122 qui est un projet de loi extrêmement important. Et j'écoutais avec grand intérêt mon collègue le député d'Orford, qui est un député d'expérience, comme vous savez, M. le Président, et qui a vu, lui, a entendu des discours et il a vécu des choses, et vous voyez que, dans son discours, il réfère toujours à des exemples concrets, à son vécu, à ce qu'il connaît et aussi à sa connaissance qui est très vaste. Alors, je me sens privilégiée, M. le Président, de pouvoir compter sur un collègue d'expérience comme lui. Ça me rassure, M. le Président, et ça me permet de m'appuyer sur des valeurs sûres au Parti libéral du Québec.
Le projet de loi n° 122, M. le Président, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives. M. le Président, ce projet de loi de 120 articles va être modifié, puisque nous avons reçu hier les amendements pour une trentaine d'autres articles. C'est un projet de loi qui est extrêmement important par ses implications sur les citoyens, parce que, lorsqu'on parle d'accès à l'information, lorsqu'on parle de protection de la vie privée, on est au coeur de la démocratie, M. le Président, et ce sont des valeurs, les deux valeurs, c'est-à-dire l'accès à l'information et la protection de la vie privée, sont deux valeurs extrêmement importantes pour les Québécois et les Québécoises.
Uniquement dans sa facture, M. le Président, c'est assez impressionnant, parce que ce projet de loi, il relate les notes explicatives sur six pages. D'habitude, on a besoin d'une page, une page et demie pour introduire un projet de loi. Il modifie, M. le Président, 27 projets de loi, 27 projets de loi qui sont des lois assez importantes, notamment la Loi sur l'accès à l'information, le Code civil, la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur l'administration financière, la Loi sur les archives, la Loi sur l'assurance automobile, la Loi sur l'assurance-maladie, la Loi sur le bâtiment, le Code de la sécurité routière, le Code des professions, la Loi sur le Curateur public, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, la Loi sur les élections scolaires, la Loi électorale, la Loi sur l'établissement de la liste électorale permanente, la Loi sur l'Institut de la statistique du Québec, la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et instituant la Commission des partenaires du marché du travail, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, la Loi sur les services de santé et les services sociaux, la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris, La Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, la Loi sur la taxe de vente du Québec, la Loi sur le Bureau d'accréditation des pêcheurs et des aide-pêcheurs du Québec.
Si je vous fais la nomenclature, M. le Président, de ces lois qui vont être modifiées, c'est pour faire la démonstration de l'ampleur de ce projet de loi, de son impact, M. le Président. Alors, il faut dire, d'abord pour se situer dans le texte, que ce projet de loi n° 122 nous est présenté, M. le Président, avec quelques années de retard. Parce que, en fait, ça fait plus de quatre ans que la Commission d'accès à l'information a déposé son rapport.
On sait très bien que la Commission, conformément aux exigences de la Loi d'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, se doit de faire un rapport au gouvernement. Ce rapport est déposé depuis plus de quatre ans, et le gouvernement s'est traîné les pieds avant de nous présenter un projet de loi qui d'ailleurs fait beaucoup dans l'improvisation et qui est très mal attaché.
Il était nécessaire, M. le Président, de rafraîchir la loi sur l'accès à l'information parce que ça fait 20 ans que cette loi est entrée en vigueur. Et pourtant, M. le Président, le gouvernement a eu plusieurs années pour faire ses devoirs. La commission de la culture, M. le Président, unanimement avait réclamé que cette revue et cette réforme législative soit proposée, mais le gouvernement, M. le Président, a mis tellement, tellement de temps pour réagir. Durant les quatre ans, M. le Président, qu'on discute de la possibilité d'une législation, plusieurs choses se sont passées. D'abord, autour de nous, dans les autres législations, dans les autres gouvernements, dans les autres pays, la notion de l'accès à l'information, la protection de la vie privée a beaucoup évolué. Elle a évolué dans le sens d'une plus grande transparence et d'un plus grand respect de la vie privée des citoyens.
n(16 h 10)n Chez nous, M. le Président, c'est tout à fait le contraire. Et il y a aussi un certain nombre de défis qui se posent lorsqu'on parle d'accès à l'information et de protection de la vie privée. Le premier qui me vient à l'esprit à titre de critique en matière d'autoroute de l'information, c'est évidemment le défi des technologies de l'information. Il y avait, M. le Président, chez nous, au Québec, un vide juridique dans ce domaine. Et, encore une fois, le gouvernement, au lieu de s'inspirer de ce qui se fait autour de nous, au lieu de s'harmoniser avec les législations existantes, il nous a imposé une brique indigeste qui va faire l'objet... le bonheur, je dirais, des avocats, parce que ça va donner lieu à plusieurs interprétations, M. le Président, et cette loi, c'est la loi n° 161, qui établit un cadre juridique pour les technologies de l'information.
Mais on sait très bien, M. le Président, qu'au niveau de l'application cette loi-là ne réglera absolument rien, d'abord parce que c'est un cafouillis total. Il y a des dispositions là-dedans qui sont des dispositions qui impliquent, M. le Président, des obligations juridiques, d'autres qui sont des obligations, je dirais... ou plutôt des dispositions habilitantes. Alors, c'est un véritable supermarché, on verra très bien comment tout ça va finir.
La Commission d'accès à l'information, M. le Président, qui a déposé son mémoire autour de ce projet de loi n° 122, a exprimé un certain nombre d'inquiétudes, notamment le fait que certains organismes échappent encore à l'application de la Loi d'accès, notamment certaines sociétés d'État, Nouveler et la Société des casinos, entre autres. Et elle a plaidé, M. le Président, par souci de transparence, que les sociétés d'État soient aussi couvertes par la loi.
Également, M. le Président, il y a toute la question des technologies de l'information dans le domaine de la santé. On sait qu'il s'agit là d'un domaine névralgique parce que ça touche d'abord et avant tout la vie privée des gens. On sait que le gouvernement est allé de l'avant avec l'implantation d'une carte-santé, M. le Président, mais on sait très bien que le choix technologique qui a été fait est un choix qui est très discutable, que la sécurisation des données, M. le Président, n'est pas là et que, en fin de compte, le gouvernement va concentrer une quantité considérable d'informations personnelles et nominatives, et ces informations-là vont pouvoir circuler, M. le Président, dans un espace qui n'est pas contrôlé, qui n'est pas sécurisé, et ça, ce n'est pas quelque chose qui est rassurant pour les citoyens. Qui va utiliser ces banques de données, M. le Président? Est-ce que les médecins, le personnel soignant, dans le sens le plus large du terme, va devoir connaître toute la vie et le profil santé de l'individu, M. le Président, depuis sa naissance? C'est quelque chose qui est très préoccupant. Jusque-là, on avait des balises, M. le Président, puis des informations qui étaient colligées ne pouvaient être utilisées qu'aux fins pour lesquelles elles avaient été collectées, M. le Président.
Et il faut dire que, à ce chapitre, lorsqu'on parle des technologies, la technologie est là, c'est la modernité, on vit avec, mais cela ne nous dispense pas, M. le Président, de l'obligation de la protection des renseignements personnels. M. le Président, la Commission d'accès à l'information, d'ailleurs, sur ce point précis, l'a clairement démontré en commission parlementaire lorsqu'elle a recommandé au législateur de donner suite à l'article 17 du projet de loi, ne pas utiliser l'information personnelle à d'autres fins que celles pour lesquelles elle a été colligée.
Il y a aussi toute la notion des couplages des fichiers. Parce que, lorsqu'on parle de banques de données, de technologies de l'information, au sens numérique, entre autres, M. le Président, il y a de telles capacités qui permettent de coupler des fichiers. Donc, ça ouvre encore la voie à l'utilisation et à l'accès des informations personnelles, confidentielles et nominatives.
Il y a également, M. le Président, le droit d'accès à l'information qui est également au coeur du débat et au coeur du principe même de la démocratie, et on sait que ce gouvernement, et c'est une chose... C'est un paradoxe, M. le Président, que je constate. D'un côté, en ce qui concerne l'accès à l'information, le gouvernement se barricade, il met des verrous partout pour empêcher les citoyens d'avoir accès à l'information, pour empêcher l'opposition officielle d'avoir accès à l'information et, de l'autre, M. le Président, pour ce qui a trait à la protection des renseignements personnels et confidentiels, eh bien il ouvre les valves, parce que, M. le Président, ce gouvernement a montré son incompétence à gérer en particulier le dossier des technologies de l'information, et les exemples sont assez patents, M. le Président.
Aussi, M. le Président, le projet de loi élargit la portée d'application actuelle à des organismes comme les organismes municipaux, les CLD, les CRD, de façon à rendre la gestion de ces organismes plus transparente. On peut comprendre, M. le Président, que, dans ce cas précis, la Loi d'accès ne couvrait pas ces organismes, parce qu'ils n'existaient pas, et que l'étendre à ces organismes-là pourrait s'avérer utile. La loi s'appliquera également désormais aux ordres professionnels, qui ont notamment un caractère public, et il y a également des dispositions qui font en sorte que les décisions du Conseil exécutif, du Conseil des ministres, du Conseil du trésor, soient accessibles après 25 ans. Je pense que c'est une bonne chose, c'est des éléments sur lesquels on pourrait éventuellement s'entendre. Également, le projet de loi ramène le délai de 150 ans à 100 ans pour la divulgation des documents qui tombent sous la juridiction de la Loi sur les archives et à 30 ans après la date du décès d'un personnage, notamment les personnages publics; ça pourrait réjouir les historiens.
Mais, pour ce qui est du bilan de ce gouvernement dans le domaine de la protection de la vie privée et de l'accès à l'information, M. le Président, force est de constater que c'est un bilan qui est désastreux. Je vous ai parlé tantôt de la loi n° 161, qui a été adoptée par le bâillon, M. le Président, qu'on n'a même pas pu finir à étudier article par article en commission parlementaire et qui est une véritable catastrophe et pour le gouvernement et pour l'entreprise privée, M. le Président. Non seulement cette loi, qui est déjà adoptée, M. le Président, ne règle pas le problème de la sécurisation de la transaction, des données, mais, pas plus tard qu'hier, M. le Président, on avait à discuter, avec le directeur de l'état civil, des transactions électroniques. Vous vous rappelez, M. le Président, que le directeur de l'état civil avait mis un certain nombre de documents sur le site Internet, et ils ont dû les retirer et arrêter les transactions parce qu'elles n'étaient pas sécurisées. Et je vous parle, M. le Président, d'un organisme qui relève du ministère des Relations avec les citoyens.
Donc, lorsqu'on parle de l'État qui va communiquer avec les citoyens, lorsqu'on parle de l'accès à l'information, eh bien, ce ministère-là est appelé à jouer un rôle important. Et la seule chose qu'ils ont réussi à faire, M. le Président ? comme preuve d'incompétence ? c'est qu'ils ont fermé la shop, si on peut dire, parce qu'ils n'étaient pas en mesure de sécuriser ces transactions. Et ce que je peux vous dire du directeur de l'état civil peut aussi se dire des autres services gouvernementaux, qui ne sont pas, M. le Président, également, sécurisés dans leurs transactions.
Un autre exemple: l'adresse courriel. On se rappellera, à un moment donné, le gouvernement a fait une annonce assez tapageuse: On va donner une adresse courriel gratuite à tous les citoyens. Et on se lance la tête première, M. le Président, devant les caméras de télévision, et, quelques mois après, la Commission d'accès à l'information, M. le Président, décide de fermer le projet et de ramener le gouvernement à ses premiers devoirs, justement parce que l'impératif de la protection des renseignements personnels n'était pas pris en compte, M. le Président. Je vous dirai également, très rapidement, je vous rappellerai le scandale des renseignements fiscaux, le scandale des renseignements confidentiels, M. le Président. On sait très bien que ça a ébranlé le temple du ministère du Revenu et on sait aussi que, par après, ça a conduit à la démission de la ministre du Revenu elle-même.
n(16 h 20)n Dans ce projet de loi n° 122, M. le Président, il y a une disposition très importante qui touche l'Institut de statistique du Québec. Alors, M. le Président, en vertu de ce projet de loi, des pouvoirs vont être conférés à l'Institut de la statistique du Québec quant à l'accès aux renseignements personnels... En effet, le projet de loi prévoit l'obligation pour l'Institut d'adopter une politique sur la communication des fichiers de renseignements personnels à des fins de comparaison, de couplage ou d'appariement, politique qui sera soumise à la Commission d'accès à l'information pour avis et au gouvernement pour approbation.
L'article 110 du présent projet de loi, M. le Président, établit, et je cite:
«Toute communication de renseignements personnels d'un organisme public à l'Institut dans le cadre de la mission de ce dernier est réputée nécessaire à l'application...» de la Loi sur l'Institut de la statistique du Québec.
«Est également réputée nécessaire, la communication de renseignements personnels par l'Institut à un organisme statistique d'un gouvernement autre que celui du Québec.» Alors là, M. le Président, non seulement on se construit ce qu'on appelle en langage commun un Big Brother, avec un organigramme assez impressionnant, mais, en plus de ça, M. le Président, on va transférer ces données. On va pouvoir savoir combien telle personne a eu d'enfants dans sa vie, ou d'avortements, ou quelle maladie elle a eue, quelle sorte de médicaments elle prend. S'il y a une chose qui caractérise le Québec, qui est une des spécificités du Québec, même à l'intérieur du Canada, c'est d'avoir réussi à se donner une législation qui protège la vie privée, M. le Président. Et là, tout d'un coup, par un transfert technologique, on va réussir à concentrer l'information dans une banque de données, celle de l'Institut de la statistique du Québec, à l'intérieur de laquelle on va colliger toutes les données qui viennent d'Emploi et Solidarité, de la Régie des rentes du Québec, de la Sûreté du Québec, du ministère de l'Éducation, de la CSST, du ministère du Revenu, de la Régie de l'assurance maladie, de la Société de l'assurance automobile du Québec, et j'en passe.
M. le Président, pourquoi le gouvernement se lance-t-il dans des concentrations d'informations d'une telle envergure, lui qui a fait la démonstration de son incapacité à gérer véritablement les technologies de l'information?
Vous me faites signe, M. le Président, que mon temps est écoulé, mais j'avais aussi une lettre justement du Conseil du trésor, parce que nous avons fait une demande d'accès à l'information, et qui démontre, M. le Président, que le gouvernement, lorsque vient le temps de donner l'information à l'opposition, eh bien, il refuse. Si vous saviez, M. le Président... Sur plusieurs pages, on me dit non pas ce que j'ai le droit d'avoir, mais ce à quoi je n'ai pas droit. Essentiellement, c'est des documents qui engagent les fonds publics, mais qui sont cachés par le gouvernement, parce que tout ce qui peut le mettre en danger, en difficulté, il le cache, et il est le premier à ne pas respecter la loi d'accès à l'information, M. le Président.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Le prochain intervenant sera Mme la députée de Sauvé. C'est bien ça. Mme la députée de Sauvé.
Mme Line Beauchamp
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. À l'instar de mes collègues, je crois qu'il est important aujourd'hui de débattre du principe du projet de loi n° 122 qui, je vous le rappelle, est la Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives.
M. le Président, je pense qu'il est important qu'on se remette dans le contexte de l'étude de ce projet de loi qui est dans les cahiers de travail du gouvernement depuis un bon bout de temps. Parce qu'il faut rappeler que nous avons une obligation, comme Assemblée nationale ? c'est une obligation qui revient à la commission de la culture ? l'obligation d'étudier un rapport quinquennal, le rapport quinquennal de la Commission d'accès à l'information.
Or donc, la Commission d'accès à l'information a déposé son rapport en 1997. La commission de la culture a tenu, tel que l'y oblige la loi, des audiences, des consultations pour tenter de prendre le pouls des principaux intervenants et de citoyens pour tout ce qui a trait à la protection des renseignements au Québec, mais aussi, bien sûr, tout ce qui a trait à l'accès aux documents d'organismes publics au Québec.
Donc, la commission de la culture à cette époque ? et ça fait maintenant tout près de cinq ans, M. le Président ? a entendu 53 personnes en consultations. Et j'aimerais, M. le Président ? à cette époque-là, nous sommes en 1997, c'était donc avant la dernière élection ? vous rappeler les propos les plus pertinents, les propos les plus... dans le fond, ceux qui devaient le plus orienter les conclusions des membres de la commission de la culture, qui d'ailleurs à cette époque déposait un rapport unanime. Les principales recommandations des membres de la commission de la culture, donc à l'unanimité, peu importent les partis politiques en présence, étaient ceci. On recommandait que le régime général de transfert de renseignements personnels entre organismes publics, que cela, ça devait inclure un contrôle a priori d'opportunité, confié à la Commission d'accès à l'information. Autrement dit, M. le Président, ce qu'à ce moment-là recommandaient les parlementaires membres de la commission de la culture, c'était de confier un rôle-clé, un rôle majeur, de confirmer le rôle de contrôle que l'Assemblée nationale du Québec confie à la Commission d'accès à l'information.
Parce qu'il y a là aussi un rappel d'importance, M. le Président. Il faut rappeler à ceux qui nous écoutent que le président ou la présidente de la Commission d'accès à l'information, c'est un haut fonctionnaire élu par les membres de l'Assemblée nationale, et que, habituellement, ça se fait à la majorité, c'est-à-dire après entente entre les partis politiques en présence à l'Assemblée nationale. Ça signifie donc qu'on veut éviter que la Commission d'accès à l'information soit, d'une quelque façon que ce soit, sous le contrôle de l'exécutif, mais bel et bien plutôt au service et sous le contrôle des membres législateurs, des élus de l'Assemblée nationale du Québec.
Donc, une recommandation, en 1997, des membres de la commission de la culture, c'était vraiment de privilégier le fait que la Commission d'accès à l'information devait exercer un contrôle a priori, donc avant que toute chose se produise, par rapport à un régime de transfert de renseignements personnels entre différents organismes publics.
La deuxième chose... et nous verrons... M. le Président, je m'interromps tout de suite pour voir que déjà le projet de loi n° 122 qui est actuellement à l'étude amène une certaine brèche dans cette recommandation de vraiment instituer un rôle de contrôle a priori à la Commission d'accès à l'information.
La deuxième recommandation majeure des membres parlementaires, des membres de la commission de la culture, c'était ceci: La commission de la culture, ses membres croient fermement que la mission de protection du public confiée par le législateur aux ordres professionnels, sous le régime de l'Office des professions, commande que ces derniers ? les ordres professionnels ? soient soumis à un régime de transparence administrative comparable à celui des organismes publics relevant du gouvernement québécois. Et, à ce moment-là, deux hypothèses de travail étaient retenues, étaient soumises à l'attention du ministre responsable. Les deux hypothèses retenues étaient celles-ci: l'assujettissement des ordres professionnels à la loi d'accès à l'information, ou encore l'aménagement à l'intérieur du Code des professions d'un régime qui leur serait propre.
Donc, fondamentalement, M. le Président, à ce moment, les membres parlementaires, en 1997, ont dit: Oui. Les ordres professionnels devraient être soumis à un régime de transparence, comme n'importe quel autre organisme public. Mais voici deux chemins qui sont possibles: soit qu'on les assujettisse à la loi sur l'accès à l'information, ou encore, compte tenu du statut un peu spécial qu'ont les ordres professionnels sous l'Office des professions, soit encore qu'on introduise à l'intérieur du Code des professions un régime de contrôle d'accès à l'information, un régime de transparence qui leur serait propre.
n(16 h 30)n Or, M. le Président, le projet de loi n° 122 semble choisir le pire des deux mondes, puisque le projet de loi n° 122 ne tranche pas vraiment et nous amène vers un certain cafouillis. Si ce n'est pas administratif, ça pourrait même devenir un cafouillis juridique, puisque je tiens à rappeler que l'article 1 de cette loi traite justement du cas des ordres professionnels et fait en sorte de créer un régime un peu hybride, un peu des deux, un régime hybride d'assujettissement pour les ordres professionnels, dans la mesure où ceux-ci occupent une fonction de protection du public qui les rend soumis à la loi d'accès à l'information, mais en même temps qu'ils relèvent du secteur privé par leur nature d'associations professionnelles; ils sont donc soumis au Code des professions. Donc, un même organisme, parce qu'il a une mission, oui, je dois le reconnaître, complexe, une mission, entre autres, de protection du public... Mais le même organisme, sur un certain volet, on va déterminer qu'il relève de la loi sur l'accès à l'information et, sur d'autres volets, on détermine qu'il relève plutôt du Code des professions. Et nous voyons ici, M. le Président, que nous sommes devant, dans le fond, le pire des deux mondes, le fait qu'il sera assez complexe, dans l'application même de cette loi, de savoir au juste où se situent les ordres professionnels et, clairement, sous quelle législation ils doivent oeuvrer en ce qui a trait à l'accès à l'information et à la protection des renseignements personnels.
M. le Président, je disais donc qu'en 1997 nous sommes devant le plan quinquennal de la Commission d'accès à l'information, la commission de la culture rencontre 53 personnes, établit ses principales recommandations, et nous sommes non seulement devant une loi qui fait un peu fi des recommandations unanimes des membres de la commission de la culture, mais nous sommes aussi devant une situation où, dès 1997, le ministre alors responsable de cette loi, le député de Gouin, a dit: Ah, nous allons procéder rapidement, c'est trop important. La loi à l'accès de l'information a déjà une dizaine d'années, nous devons la revoir, et ce sera fait promptement. Je vous résume, M. le Président, les propos du député de Gouin alors. Mais il faudra constater, M. le Président, que nous sommes maintenant en 2001 et que les choses n'ont pas beaucoup évolué.
Je me souviens que, lorsque M. Robert Perreault, qui a démissionné de son poste de député à l'Assemblée nationale, était titulaire du ministère et le rendait responsable de la Commission d'accès à l'information... M. le Président, à moins que je me trompe, je crois qu'on peut affirmer qu'il ne s'est rien passé par rapport à la volonté gouvernementale de rafraîchir la loi de la Commission d'accès à l'information. Et, maintenant, donc plusieurs années plus tard, on a tenu de nouvelles consultations autour de la loi n° 122 déposée et, finalement, nous sommes maintenant devant l'étude détaillée du projet de loi n° 122, ce qui vous indique, M. le Président, la notion de temps très relative qu'on a du côté du gouvernement, puisque, dès 1997, on se disait pressé d'oeuvrer, que c'était urgent, puis qu'on allait travailler avec diligence, et tenir compte des recommandations de la commission de la culture, et amener une loi, là, rapidement. Et il faut réaliser que, quatre ans plus tard, les choses, vraiment, n'ont pas beaucoup évolué. La situation est tellement paradoxale, M. le Président, que cette loi n° 122, elle est là parce qu'on réagit au plan quinquennal de la Commission d'accès à l'information de 1997. Or, dès l'année prochaine, en 2002, la Commission d'accès à l'information est déjà prête, elle, à déposer son nouveau plan quinquennal, et nous, ce n'est même pas sûr qu'on aura fini nos travaux à partir de son plan quinquennal de 1997. Ce n'est pas très, très, très glorieux du côté du gouvernement qui a le pouvoir depuis 1994 pour agir, M. le Président.
Je disais qu'il y avait donc ce contexte en termes de... le fait que, en tout cas, jusqu'à ce moment, le gouvernement n'a pas montré beaucoup d'empressement, mais également il faut rappeler le contexte un peu plus politique dans lequel ce projet de loi doit être débattu. Peut-être que le gouvernement avait de très bonnes raisons de ne pas se pencher trop, trop sur la situation de la protection des renseignements personnels au Québec, M. le Président. Peut-être que ça ne lui tentait pas d'ouvrir une boîte de Pandore. Parce qu'il avait un peu raison d'avoir peur, parce qu'un monstre peut lui sauter en pleine face. Parce qu'il n'a pas non plus à faire la leçon à personne et il sait fort bien que ça veut dire lui rappeler de très mauvais souvenirs, des souvenirs douloureux.
Je veux vous rappeler, M. le Président, que, depuis 1997, depuis le dépôt du dernier plan quinquennal de la Commission d'accès à l'information, nous avons eu droit à l'affaire Lebel où un député du Bloc québécois à Ottawa a appris que des renseignements personnels avaient été communiqués au bureau du premier ministre du Québec. Ce n'est pas rien, M. le Président. On l'a dit et on le redit, ce n'est pas rien. Parce que peut-être qu'à ce moment-là M. Lebel a pu réagir et faire connaître cette situation qu'il jugeait inacceptable parce qu'il est un député, qu'il a un droit de parole qui porte et que c'est ça qui a fait en sorte que, tout d'un coup, les citoyens et les citoyennes, les journalistes ont porté attention à sa situation. Mais qu'en est-il du simple citoyen, celui qui est un peu moins connu, celui qui n'a peut-être pas de micro pour se faire entendre et qui peut vivre une telle situation? Donc, rappelons que cet épisode de l'affaire Lebel n'est pas très glorieux pour le mandat de protection des renseignements personnels par le gouvernement du Parti québécois.
Rappelons également, M. le Président, le fait que la députée de Rosemont, peu après la dernière élection de 1998, alors responsable titulaire du ministère du Revenu, a dû démissionner parce que son ministère avait transmis de façon illégale des renseignements confidentiels nominatifs du ministère du Revenu vers une entreprise privée. C'est dans l'honneur que la députée de Rosemont a dû à ce moment-là démissionner de son poste, M. le Président. Mais il faut reconnaître qu'elle l'a fait parce qu'il y avait eu erreur, parce qu'il y avait eu non-respect de la loi. Et c'est une deuxième tache à tout le moins au dossier du gouvernement du Parti québécois.
Encore plus récemment, M. le Président, rappelons, rappelons le phénomène, l'infiltration de taupes à la Société de l'assurance automobile du Québec, qui a fait en sorte que les citoyens et citoyennes du Québec ont appris avec une certaine consternation que leurs renseignements nominatifs personnels pouvaient être divulgués auprès d'individus pas toujours recommandables. Et, encore là, les gens de l'autre côté peuvent des fois prétendre qu'on se prête des scénarios noirs, mais, M. le Président, je crois que l'affaire Michel Auger nous donne le droit d'exercer une vigilance de tous les instants en cette Chambre sur la protection des renseignements confidentiels. Vous voulez entendre un scénario noir? Il y en a un ici, un tragique même, M. le Président. La Société de l'assurance automobile du Québec a coulé des informations vers des membres du crime organisé, et, M. le Président, il faut le rappeler, ça a failli coûter la vie à un journaliste du Journal de Montréal, Michel Auger.
Donc, on voit... Je vous refais cette remise en contexte, M. le Président, pour qu'on se rappelle qu'on ne parle pas de quelque chose de technique, on ne parle pas de piles de documents qui n'intéressent personne. Ce n'est pas de ça dont on parle, M. le Président. On parle de renseignements personnels qui constituent pratiquement, M. le Président, l'identité de chacun et de chacune des citoyens, des membres de cette communauté du Québec. Donc, ce n'est pas technique, ce n'est pas bureaucratique, non, c'est personnel. Le projet de loi n° 122 touche ici une dimension extrêmement personnelle de la vie de chacun des citoyens et citoyennes du Québec.
M. le Président, il faut aussi rappeler pour ceux qui nous écoutent que nous discutons du projet de loi n° 122 dans un contexte qui est assez particulier en cette journée du 29 novembre, puisque ce matin, à la période des questions, nous avons aussi dû aborder un cas, une situation où... Parce que le projet de loi n° 122, je vous le rappelle, M. le Président, il traite aussi de l'accès aux documents d'organismes publics. Et vous vous rappellerez, M. le Président, que ce matin on a eu la démonstration implacable à mon sens que le ministère de la Santé et des Services sociaux avait en sa possession un document à la fois électronique et à la fois écrit, M. le Président, 68 pages, qu'il a déposé devant le comité Larose. L'opposition officielle en fait la demande par la Loi d'accès à l'information et reçoit une réponse qui dit: Nous ne pouvons vous transmettre ce document, il n'existe pas. Or, en cette Chambre, le ministre de la Santé et des Services sociaux a reconnu que le document existait, M. le Président, et ensuite, je dois vous dire qu'il s'est un peu enfargé dans une multitude d'explications qui changent de journée en journée puis de minute en minute, M. le Président.
Mais vous voyez qu'il est tout à fait particulier mais aussi opportun de parler de l'étendue de la loi n° 122 dans un contexte où aujourd'hui même on sait que malheureusement le gouvernement nous invite pratiquement, à chaque fois qu'un citoyen, qu'un journaliste, qu'un élu fait une demande d'accès à l'information au gouvernement, ce matin, ce gouvernement nous a pratiquement invités, à chaque fois qu'on recevrait une lettre qui dirait: Un tel document n'existe pas, à faire appel, automatiquement, aller faire appel devant la Commission d'accès à l'information au cas où, au cas où finalement peut-être que le document existait mais que le gouvernement nous a induits en erreur.
n(16 h 40)n M. le Président, nous sommes devant un projet de loi n° 122 qui est tout à fait dans la suite logique des principes qui semblent animer ce gouvernement qui est devant nous. Je vous ai parlé des gaffes qu'ils ont faites en termes de protection des renseignements personnels, je vous ai rappelé de leur frilosité puis, je pourrais même dire, de leur inertie à communiquer des documents publics auxquels on devrait avoir accès, eh bien c'est tout à fait les principes qui semblent guider le projet de loi n° 122. Nous sommes devant un projet de loi qui augmente les pouvoirs du gouvernement d'avoir accès à nos informations personnelles et, à la fois, nous sommes devant un projet de loi qui diminue les pouvoirs du citoyen de protéger ses renseignements personnels, M. le Président.
M. le Président, le projet de loi a fait l'objet d'une consultation particulière, et il a été critiqué, M. le Président. Et je dois vous rappeler des aspects fondamentaux sur lesquels il a été critiqué. Non seulement, bien sûr, on a critiqué le fait que le gouvernement passait par-dessus, pratiquement, la Commission d'accès à l'information pour permettre des couplages de fichiers au niveau du Bureau de la statistique du Québec... Et, c'est important, M. le Président, je vous rappelle, la Commission d'accès à l'information, c'est un instrument de l'Assemblée nationale, des élus en cette Chambre. C'est nous ensemble, élus, représentants des citoyens et des citoyennes, qui nommons ensemble la présidence de la Commission d'accès à l'information.
Or, le projet de loi n° 122 vient dire que, si jamais le Bureau de la statistique du Québec voulait coupler, là, plusieurs fichiers provenant de la Société de l'assurance automobile, la Régie de l'assurance maladie, le ministère du Revenu, la CSST, la Régie des rentes, la Sûreté du Québec, le ministère de l'Éducation, le ministère de l'Emploi, le ministère de la Solidarité sociale... Si le Bureau de la statistique du Québec veut faire tout ça, coupler tous ces fichiers-là, oui, la Commission d'accès à l'information va devoir émettre une décision, mais habituellement, M. le Président, la décision, là, en ce moment, elle devient exécutoire. Or, le projet de loi n° 122 vient dire: Si la Commission d'accès à l'information dit non au Bureau de la statistique du Québec pour coupler des fichiers, eh bien le gouvernement ? ça, ce n'est pas juste... ce n'est même pas l'Assemblée nationale, là, ce n'est pas le niveau législatif, ce n'est pas les représentants de la population, on parle bien de l'exécutif, hein ? l'exécutif, le gouvernement, lui, aura le pouvoir de dire: Bien, on va le faire pareil. Sa seule l'obligation, ça va être de déposer une lettre ici, à l'Assemblée nationale, motivant sa décision, puis il y aura publication dans la Gazette nationale.
C'est un changement fondamental au principe qui anime jusqu'à maintenant la protection des renseignements personnels au Québec. Nous avions la Commission d'accès à l'information qui avait une distance certaine... Elle, elle est sous contrôle de l'Assemblée nationale. La Commission d'accès à l'information avait une distance certaine d'avec l'exécutif. Or, le projet de loi n° 122 vient créer la brèche où c'est maintenant l'exécutif ? on sait c'est quoi, l'exécutif, hein, c'est le Conseil des ministres, là, c'est ceux qui ont des intérêts à parfois cacher des choses, à parfois avoir des relations privilégiées avec des entreprises privées ? c'est maintenant l'exécutif qui va pouvoir dire: On s'en fout, de la Commission d'accès à l'information; je dépose une lettre, je publie dans la Gazette officielle, et tous vos renseignements, ce sera maintenant Big Brother qui va les contrôler, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Sauvé, de votre intervention. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 122, et je cède la parole à M. le vice-président de la commission des finances publiques et député de Nelligan. M. le député, la parole est à vous.
M. Russell Williams
M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai pensé, un membre du côté ministériel a voulu défendre le projet de loi, mais il me semble que non.
M. le Président, je voudrais faire quelques remarques sur le projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives, Bill 122, An Act to amend the Act respecting Access to documents held by public bodies and the Protection of personal information, the Act respecting the protection of personal information in the private sector, the Professional Code and other legislative provisions.
M. le Président, un bref rappel pourquoi nous sommes ici ce soir. À l'occasion du dépôt du rapport quinquennal remis par la Commission d'accès à l'information, 1997, la commission de la culture a commencé à étudier ce rapport ? 1997, M. le Président. Ils ont rencontré 53 personnes et groupes, et, M. le Président, on arrive avec un projet de loi quatre ans plus tard ? et bientôt, ça va être cinq ans plus tard ? et on doit recommencer toute ces questions. Je trouve ça ironique que nous sommes ici ce soir, on débat le projet de loi n° 122, particulièrement avec le débat que nous avons fait ici, en Chambre, cette semaine, et je vais retourner à ce sujet dans quelques minutes.
La dernière fois que nous avons discuté ce projet de loi, M. le Président, si ma mémoire est bonne, c'est le 24 octobre, la première journée de la nouvelle élue, de notre porte-parole dans le dossier. Et, M. le Président, depuis ce temps-là, nous n'avons pas discuté le projet de loi, et maintenant, on arrive avec un débat de principe. Mais, avec tous les amendements qu'ils ont déjà déposés, on arrive avec les autres, les autres amendements déposés hier.
M. le Président, c'est la session intensive qui a commencé cette semaine. On siège jusqu'à minuit avec plusieurs lois, et on touche la loi qui touche la confidentialité, accès aux informations confidentielles. On arrive avec les amendements, et nous n'avons pas eu le temps d'étudier ça d'une façon sérieuse. Et, M. le Président, j'ai pris note de ça et j'ai commencé à étudier ces amendements, parce que j'espère que ça réponde à des demandes de l'opposition, et malheureusement dans plusieurs cas, ça ne répond pas aux demandes de l'opposition.
Mais, M. le Président, j'ai cherché l'autre document, et je présume... On appelle ça un document, mais maintenant, avec ce gouvernement, on ne sait pas qu'est-ce que ça veut dire, un document, oui ou non. Parce que le gouvernement est en train de créer leurs propres lois en toute vitesse: est-ce qu'un document numérique est un vrai document, etc.? Avec ça, je ne sais pas si les papillons d'un projet de loi sont un document, mais j'espère que oui.
Mais je cherche un autre document, M. le Président: l'avis de la Commission d'accès à l'information. Et il me semble que nous sommes en train de discuter les changements fondamentaux de cette loi, et ça peut avoir un impact sur la confidentialité et la protection d'information pour tous les Québécois et Québécoises. Il me semble, minimalement, minimalement, nous allons avoir, particulièrement avec les amendements en session intensive, je peux avoir, comme législateur, l'avis de la Commission d'accès à l'information, mais je ne le trouve pas.
M. le Président, est-ce que le ministre a oublié ? un peu comme le ministre de la Santé a oublié ? de discuter ça avec la Commission d'accès à l'information? Le ministre Trudel a omis de soumettre à la Commission d'accès à l'information le projet de loi en préparation; c'est bel et bien là. Quelle grande surprise, ils ont oublié! Ce gouvernement, le Parti québécois, ne trouve pas que la question de la protection de l'information est une question sérieuse, importante. Nous, on trouve ça très, très important.
M. le Président, avec ça, il me semble ? et c'est un des messages que je passe au gouvernement ? ce n'est pas un genre de loi qu'on doit faire un débat pendant la session intensive. Il me semble qu'on doit donner assez de temps hors de la session intensive où on peut étudier le projet de loi. Mais laissez-moi... Parce que souvent le gouvernement, quand ils se lèvent, quand finalement ils ont le droit de parler ? parce que souvent ils ont une commande de leur leader de ne pas parler ? ils disent qu'on critique tout le temps, que nous avons fait juste des commentaires négatifs.
Laissez-moi mentionner au moins une chose positive que je pense ? sous réserve, parce que je n'ai pas une chance de lire tout ça ? que je trouve ça... peut-être ils ont écouté l'opposition, et c'est même... c'est avec l'article 98, et c'est une notion, un constat d'information professionnelle. Je n'entre pas dans le débat sur l'article aujourd'hui, M. le Président, mais il me semble que dans quelques autres juridictions il y a cette notion d'information, renseignement personnel et professionnel sur les activités des professionnels. Et il me semble que, M. le Président, ça peut être un sujet et un amendement intéressant à explorer. Mais il y en a plusieurs autres que je ne retrouve pas dans les amendements, et j'espère que nous allons voir ça bientôt.
n(16 h 50)n M. le Président, je me souviens de plusieurs débats dans cette Chambre sur les activités de Loto-Québec et Hydro-Québec et ses filiales. Je me demande pourquoi, quand il y a des articles qui touchent l'information sur les particuliers, il y a un échange incroyable ? je vais discuter ça un peu plus tard, M. le Président ? mais dans l'accès à l'information sur les filiales de Loto-Québec et d'Hydro-Québec, elles sont exclues. Encore une fois, qu'est-ce que le gouvernement veut cacher? Pourquoi ils ont... C'est de l'argent public. Souvenez-vous, M. le Président, la députée de Sauvé a juste parlé, elle a questionné le gouvernement sur l'achat de plusieurs millions de dollars de Loto-Québec sur le verre... Ils ont acheté du verre soufflé. Est-ce qu'il y a une raison que le gouvernement veut cacher l'information d'Hydro et de Loto? Il me semble qu'on doit demander la question, M. le Président.
M. le Président, n'oubliez pas que, cette semaine, nous avons commencé un débat sur la façon dont le gouvernement suit les règles d'accès à l'information. Nous avons demandé une question fort simple et fort directe sur un échange d'informations entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et le comité Larose: Quels documents ont été échangés? Nous avons reçu une réponse le 4 octobre: Aucun document n'existe. Mais, M. le Président, nous avons appris par hasard qu'il y a un document de 68 pages qui a été présenté le 3 avril au siège social du comité Larose, à Montréal, pendant une rencontre de deux heures et demie, par un haut fonctionnaire du ministère de la Santé et des Services sociaux qui a... Je n'entre pas dans le fond de ce document, M. le Président, mais c'est un plan d'action pour couper, vider la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour la communauté d'expression anglaise, les garanties, pour vider ces articles de loi. Mais la chose que je voudrais mentionner aujourd'hui, c'est: Voilà un exemple que le gouvernement ne prend pas cette loi d'une façon très sérieuse.
M. le Président, comme ancien porte-parole du revenu pour le Parti libéral, j'ai souvent questionné le ministre du Revenu, et nous avons juste eu une petite discussion sur ça, ce soir, sur les problèmes d'échange d'informations, le couplage d'informations. Quand le gouvernement veut fouiller dans vos poches, il met toute votre confidentialité de côté. Il a mis tout ça de côté pour faire des échanges avec n'importe quel ministère pour chercher de l'argent. Nous avons essayé de défendre la confidentialité et la «privacy» de la population québécoise, mais ce gouvernement a décidé que c'était leurs affaires, et nous avons à cette époque parlé de Big Brother. M. le Président, ce n'est rien en comparaison avec ce qu'on peut trouver dans le projet de loi n° 122 que je vais expliquer dans quelques minutes. Mais, avec le ministère du Revenu, nous avons vu que, oui, il veut ramasser une banque de données incroyable sur le revenu. Mais, malheureusement, nous avons vu qu'ils ont eu une fuite d'information, ils ont même eu des marchés d'information. M. le Président, il me semble qu'on doit protéger la population québécoise.
Une autre chose, M. le Président, qui m'a frappé beaucoup, c'est l'article 9.1 qui montre que, quand on parle d'échange d'informations, ce n'est pas juste Big Brother, it's very Big Brother. Avec l'Institut de la statistique, créé dans le projet de loi n° 120, on peut avoir l'échange d'informations qui viennent de la Société de l'automobile, 4 millions de personnes, l'échange d'informations de la Régie de l'assurance maladie, 7,2 millions de dossiers, l'échange d'informations du ministère du Revenu, environ 5 millions de contribuables, l'échange d'informations de la CSST, 1,5 million de dossiers; la Régie des rentes peut être aussi incluse dans ça, l'information personnelle, 3,6 millions de personnes; Sûreté du Québec, 6 millions de fiches; et, M. le Président, aussi l'échange d'informations, encore une fois, avec un mégafichier à l'Institut de la statistique; Emploi et Solidarité, 250 000 bénéficiaires; 660 000 prestataires de la sécurité du revenu, 294 000 ménages; en éducation ? la liste continue, M. le Président ? 3,5 millions de personnes en fréquentation scolaire, 4 millions d'élèves, 400 enfants du bureau d'admission, 350 000 clientèles adultes au ministère de l'Éducation. Tout ça, ça peut être échangé, M. le Président. Et vous avez vu quelques changements, M. le Président, de l'article 9.1, mais c'est assez clair qu'il peut faire l'échange d'informations malgré les changements que vous pouvez trouver, si j'ai bien compris les amendements déposés hier. Malgré ces changements, si le gouvernement veut faire cet échange, peut faire tout ce couplage d'informations sur votre vie, sur notre vie personnelle, il peut faire ça, d'une façon ou l'autre. Parce que, M. le Président, maintenant, le commentaire sur 9.1 parle de l'article 67 de la Loi d'accès aux documents, et l'article 67 parle qu'un organisme public peut, sans le consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement nominatif à toute personne ou organisme si cette communication est nécessaire à l'application d'une loi, au Québec.
M. le Président, je pense que vous avez vu ça assez clairement qu'il y a deux stratégies assez différentes: une pour les filiales de Loto-Québec ou Hydro, ils ne sont pas soumis à la loi d'accès à l'information, parce que le gouvernement veut garder cette information. Mais quand on parle d'échange d'information sur les Québécois et Québécoises sur le plan humain, il veut avoir un échange presque hors contrôle. Je peux vous le donner... parce que je vois que les députés sont un peu choqués et étonnés de voir cet échange, et même je peux déposer un peu plus tard ce diagramme, parce que, oui, j'étais très étonné de voir que le gouvernement cherche cette information. Et, imaginez-vous, M. le Président, une fois que nous avons toute cette information contrôlée dans un mégafichier, dans une banque de données, est-ce que notre «privacy» et confidentialité sont bel et bien protégées? J'ai mes forts doutes, M. le Président. Et n'oubliez pas, ce n'est pas juste l'opposition qui dit ça ce soir, pour critiquer la loi. L'expérience de ce gouvernement est assez claire que, depuis son élection en 1994, la protection de l'information personnelle, ce n'est pas un dossier important pour ce gouvernement.
Quand j'étais porte-parole du revenu, j'ai vu que le gouvernement a ramassé toute l'information, et ils ont créé les mégafichiers, ils ont fait le couplage des dossiers, toujours en guise d'une meilleure efficacité. Mais, souvent, M. le Président, j'ai pensé qu'ils ont eu les autres motifs en arrière de ça.
M. le Président, aussi, juste cette semaine, le comportement du gouvernement est loin d'être exemplaire sur les questions d'accès à l'information. Je sais que les députés qui suivent ce débat ce soir sont aussi étonnés, et s'ils ne sont pas d'accord avec moi, ils peuvent se lever tout de suite après moi et parler. Mais je présume que, s'ils ne se lèvent pas, ils sont d'accord avec moi. Si le côté ministériel ne se lève pas après mon discours, j'accepte ça que tous les députés qui sont ici, dans cette Chambre, sont d'accord avec qu'est-ce que j'ai dit, et ils étaient embarrassés par le comportement du gouvernement et du ministre dans le dossier d'accès à l'information. Parce que, M. le Président, c'était clair, noir et blanc, qu'ils n'ont pas...
Une voix: ...
M. Williams: Voilà un autre appui, M. le Président. C'était assez clair que le gouvernement n'a pas dit la vérité sur ce dossier. Je n'ai pas le droit de dire que le gouvernement a menti. Je n'ai pas dit ça, je n'ai pas le droit de dire ça. Mais quand vous ne dites pas la vérité, là, vous pouvez arriver avec votre propre conclusion.
Quand je demande: Est-ce qu'un document existe et que le gouvernement dit: Non, le document n'existe pas, et, M. le Président, j'ai le document, je suis au courant de leur rencontre, deux heures et demie, avec plusieurs témoins, M. le Président. Et une fois que je lis le document, je comprends pourquoi il a voulu le cacher, parce qu'il veut vider la Loi de la santé et des services sociaux pour la communauté d'expression anglaise.
Mais, M. le Président, je vois le projet de loi n° 122 maintenant cibler 27 lois, un couplage de dossiers, un échange d'informations comme j'en n'ai jamais vu. Very, very Big Brother! M. le Président, je pense que c'est dangereux.
n(17 heures)n Mr. Speaker, I will try to raise a few concerns tonight on Bill 122. One is the inconsistency of this Government when it comes to protecting some of its cash cows, Loto-Québec or Hydro-Québec. It has special rules for them. They don't want anybody to have any information about that. Let those organizations function outside access to information rules. Let them work... They're making lots of money for the Government, so don't subject them to the proper rules of access to information.
But when it comes to the population of Québec, this Government is basically saying: It's open bar! Exchange all of the information. I was shocked, when I was revenue critic, about the matching of dossiers between various ministries on revenue. But that was nothing, this was just a warm-up to Bill 122 that is an incredible amassing of private information. That bothers me. This Government wants to know everything about everybody. I'm very, very worried about it.
The amendments that I see here don't address some of our issues. And, Mr. Speaker, I'm astounded tonight, given the comportment, the behavior of this Government this week, I'm not entirely surprised, but here is a major law changing access to information rules, during intensive session, with a whole series of new amendments, very complicated, very important. Did this Government even bother, did it even think of going to the Commission of access to information to ask their opinion, their opinion on these amendments which will fundamentally change some of the privacy rules of the Province of Québec? I don't think they even bothered. Not surprising again, Mr. Speaker, the Minister of Health was going to set a system that will use smart cards: «We should explore these ideas but we should check about confidentiality.» Guess what happened, Mr. Speaker. He forgot. He forgot to even bother to ask the Commission of access to information. It shows you how important...
Put those two things together. Do you think the Minister of Health finds access to information and protection of confidential information important, given his behavior this week and given that he even forgets to check the law?
But now I ask myself the same question about Bill 122, a fundamentally important law: did they even bother to check with the Commission about what they thought of it? And why all of a sudden ? we haven't debated it ? it comes back on October 24th, nothing happens, we get amendments yesterday morning, and it is just called up tonight, in intensive session. Don't you think a five-year report that was tabled in 1997 ? in 1997 ? deserves better attention that this?
So, Mr. Speaker, I hope I've highlighted some of the concerns tonight. I'm worried that this Government doesn't take this issue seriously.
Je pense que la population a bel et bien vu que le gouvernement, le Parti québécois, trouve que la protection de l'information personnelle n'est pas un sujet très important pour ce gouvernement et pour ce parti. Nous avons une longue histoire de problèmes, même, nous avons eu des ministres qui étaient obligés de quitter, de quitter leur poste à cause de ça.
M. le Président, j'espère que nous allons utiliser les prochains jours pour nous assurer que, avec le projet de loi n° 122, nous allons bonifier ça, nous allons travailler pour assurer que ça protège la confidentialité, la «privacy» de la population québécoise, et j'espère cette fois-là que le gouvernement va respecter les interventions et les demandes du côté de l'opposition officielle et j'espère qu'avant qu'on commence le débat je peux voir l'avis de la Commission d'accès à l'information sur cette loi et ses amendements. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Nelligan, de votre intervention. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 122, et je vais céder la parole à M. le vice-président de la commission des transports et de l'environnement et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'immigration et de communautés cultuelles. M. le député de l'Acadie, la parole est à vous.
M. Yvan Bordeleau
M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, aujourd'hui, nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 122, un projet de loi qu'on décrit sommairement, au niveau des notes explicatives, comme suit: Ce projet de loi a principalement pour objet de modifier la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et le Code des professions pour y introduire diverses mesures dans le cadre du dernier rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de ces lois.
Alors, M. le Président, pourquoi j'ai voulu aujourd'hui intervenir dans le cadre de ce projet de loi, c'est qu'il s'agit d'un projet de loi qui a des conséquences très importantes pour tous les citoyens du Québec. Vous savez, quand on parle de protection des renseignements confidentiels ou de la vie privée, au Québec, c'est une valeur excessivement importante que les citoyens veulent conserver.
On sait trop souvent, et ça nous est mentionné trop souvent que... Les citoyens nous disent: Le gouvernement s'ingère partout dans nos vies. On demande toutes sortes de renseignements. On intervient dans toutes sortes de décisions personnelles que les citoyens ont à prendre, et souvent c'est le gouvernement qui intervient et qui décide à la place des citoyens ce qui est bon pour eux. Et ça, M. le Président, vous êtes certainement à même de constater, comme moi, que les citoyens sont tannés de cette façon de fonctionner et de se sentir continuellement sous la tutelle du gouvernement, à peu près dans tous les secteurs d'activité.
Alors, M. le Président, quand on parle de la protection de la loi privée, bien, ça répond à ce besoin-là, et je pense que c'est au Québec, mais c'est aussi vrai ailleurs dans d'autres pays ou dans d'autres provinces, cette tendance des gouvernements à intervenir de façon aussi massive dans la vie des individus. Et c'est la raison pour laquelle, au cours des dernières années, on a vu se développer une sensibilité beaucoup plus grande à la protection de la vie des citoyens, la vie privée. Aujourd'hui, on a un projet de loi qui touche à cette dimension-là, qui est une dimension importante. Ça paraît abstrait, l'accès aux documents, aux renseignements, mais, M. le Président, ça affecte les individus à tous les jours. Et le projet de loi en question, quand on regarde l'impact que ça peut avoir, je dis: L'impact est énorme. Il s'agit juste de regarder un peu l'ensemble des lois qu'on va toucher. Parce que, dans un projet de loi, quand on apporte des modifications comme ça, on dit: Bien, on va faire modifier telle, telle loi, telle, telle loi. Et, dans le cadre du projet de loi n° 122, M. le Président, on va modifier plus de 26 lois ? 26 lois ? et encore là des lois qui touchent le quotidien des citoyens.
Pensons à l'assurance maladie, la Loi sur l'assurance maladie. Est-ce qu'il n'y a pas quelque chose, M. le Président, qui, chaque jour, affecte les citoyens ? les citoyens ont recours à l'assurance maladie ? donne des informations dans le cadre de la Loi sur l'assurance maladie, et on va venir modifier ça? Alors, on voit, là, que les modifications qu'on va apporter vont avoir un impact à ce niveau-là, mais pas seulement à ce niveau-là, M. le Président, au niveau de l'assurance automobile. Encore là, c'est un autre endroit où il y a beaucoup d'informations personnelles qui existent, et les modifications qu'on va apporter vont venir affecter les renseignements personnels qui sont actuellement à la Régie de l'assurance automobile du Québec, à l'assurance maladie, chez le Curateur public, M. le Président, des renseignements qui sont très confidentiels. On va affecter cette loi-là. On va affecter le ministère de la Solidarité, alors toute la question de l'aide sociale. Les informations qui sont là seront affectées par les décisions qu'on va prendre dans le cadre du projet de loi n° 122. Le Revenu, encore là, M. le Président, je n'ai pas besoin de vous faire un dessin, hein, l'information qui est au Revenu, c'est une information qui est confidentielle. On va affecter le fonctionnement actuellement au niveau de l'accès à l'information par le projet de loi n° 122.
M. le Président, la Régie de l'assurance maladie, les régimes de retraite des employés du gouvernement, la taxe de vente, on pourra poursuivre. Je vous le dis, M. le Président: Il y en a 122, lois, qui seront affectées par le projet de loi en question. Et qu'est-ce que le projet de loi fait? Parce que, dans l'extrait que je vous ai lu tout à l'heure, des notes explicatives, ça ne dit pas grand-chose. Mais, concrètement, ce que ça veut dire, là, c'est qu'on va venir modifier les règles en matière d'accès à l'information, en rendant plus difficile, essentiellement, plus difficile l'accès aux documents pour les citoyens, puis on va augmenter, en parallèle, le pouvoir du gouvernement de se donner, à lui-même et aux personnes qui vont accepter, un accès à des fichiers pour des fins de couplage.
Alors, vous voyez, M. le Président, que, dans l'ensemble de l'appareil gouvernemental, il y a une foule d'informations qu'on a, au fil des ans, ramassées pour des bonnes raisons. Si on pense à l'assurance maladie, par exemple, évidemment, quand on a mis ça en place, on a créé de l'information. L'information rentre là. On paie les médecins. Les médecins mettent un certain nombre d'informations confidentielles, quand on va les voir, mais le gouvernement évidemment, pour payer, il doit savoir qu'est-ce qu'il doit payer. Alors, on a créé, avec le temps, ces informations-là qui se sont accumulées là.
n(17 h 10)n C'est vrai aussi au niveau de l'assurance automobile. Pensons, par exemple, à nos licences de conducteurs, avec les points de démérite, les infractions qu'on a commises. Pensons à l'importance que ça peut avoir, ces informations-là, M. le Président, pour des gens qui sont dans l'assurance. Bon.
Le revenu, évidemment, avec les années, on est allé chercher toutes sortes d'informations, toutes sortes de déductions. Quand on déduit des choses, c'est parce qu'on a posé des gestes et que la loi nous permet de les déduire. Mais tous ces gestes-là sont enregistrés au ministère du Revenu. C'est des renseignements personnels, confidentiels qui sont enregistrés. Et on peut poursuivre comme ça.
Alors, M. le Président, ce qu'on fait là, c'est qu'on a développé une foule de banques séparées d'informations personnelles, et là, depuis quelque temps, le gouvernement se donne le pouvoir de rassembler tout ça, de faire des croisements d'une banque à l'autre, de faire des croisements aussi avec d'autres données qui sont dans les mains du gouvernement actuellement, qui nous viennent des données du recensement. On sait qu'il y a un Institut de la statistique au Québec, et on en reparlera tout à l'heure. Alors, c'est ce genre de choses là qu'on est en train de travailler avec le projet de loi n° 122. Alors, c'est excessivement important. C'est important qu'on réalise qu'est-ce qu'on fait et qu'on en examine, au fond, les conséquences, puis qu'on soit prudent. Qu'on soit prudent, parce que la protection de la vie privée, M. le Président, c'est fondamental. Les citoyens du Québec y tiennent et y tiennent de plus en plus, au fur et à mesure que tous les gouvernements, que ce soit fédéraux, provinciaux ou municipaux, se donnent de plus en plus de pouvoirs ou demandent de plus en plus d'informations pour différentes raisons.
Alors, M. le Président, je veux juste rappeler quelques minutes dans quel cadre on a le projet de loi n° 122. Vous savez, le projet de loi n° 122, c'est un projet de loi qui traîne dans le décor depuis trois ans, depuis quatre ans même, et le ministre qui l'a présenté, c'était l'ancien député de Mercier, qui l'a présenté ici. Le projet de loi a ensuite été transmis à son successeur, le député de Richelieu, et maintenant on a le député de Fabre qui est rendu dans le même dossier et qui hérite du projet de loi n° 122.
Le projet de loi n° 122, M. le Président, fait suite à une obligation que le gouvernement avait d'évaluer la loi d'accès à l'information après un certain nombre d'années. Et, en 1997, le gouvernement a dû, à ce moment-là, répondre à cette exigence, et il y a eu une consultation publique ? et je vous le mentionne parce que c'est important ? une consultation publique sur le sujet en question, l'accès à l'information, aux renseignements personnels. M. le Président, il y a eu 53 mémoires qui ont été présentés. S'il y a eu 53 mémoires de présentés, c'est parce que ça affecte les citoyens ou les groupes qui sont concernés. Mais, en tout cas, 53 mémoires, c'est important. Et, si c'est si important, c'est la raison pour laquelle on doit être prudent quand on aborde ce projet-là. Alors, M. le Président, c'était en 1997.
De 1997 à mai 2000, il ne s'est rien passé, le gouvernement n'a pas bougé. En 2000, le gouvernement nous présente le projet de loi, dépose le projet de loi, à ce moment-là, n° 122. Ça, c'était en 2000. On est rendu en 2001, et là on a le projet de loi devant nous. Le projet de loi, en passant, là, il contient 120 articles, et on nous a déposé ce matin, là... Je n'ai pas eu le temps de regarder, évidemment, en détail, mais on nous a déposé une soixantaine d'amendements. Alors, on voit, M. le Président, qu'encore ici, là, il y a de l'improvisation. Vous savez, quand on fait une consultation puis qu'on écrit un projet de loi après, trois ans après, il me semble qu'on aurait eu le temps d'aller chercher les informations nécessaires pour que le projet de loi, quand on l'a fait puis qu'on l'a déposé, réponde aux besoins des citoyens. Mais non, on nous présente un projet de loi trois ans après les consultations et on est encore obligé de déposer une soixantaine d'amendements sur un projet qui contient 120 articles.
Alors, M. le Président, qu'est-ce qui nous agace dans le projet de loi en question? Le premier sujet que je voudrais aborder, M. le Président, c'est l'article 24 du projet de loi. Je vais vous en faire une lecture rapide. Je ne ferai pas toute la lecture de l'article, mais peut-être de l'élément sur lequel je veux intervenir. On dit: La loi est modifiée par l'insertion, après l'article 70, du suivant ? on va ajouter un nouvel article:
«70.1. Un organisme public ne peut, sans le consentement des personnes concernées, communiquer un fichier de renseignements personnels à un organisme public ou à une personne qui le requiert pour le comparer, le coupler ou l'apparier à un fichier qu'il détient, à moins que le requérant n'ait été autorisé par la Commission ou le gouvernement.» Qu'est-ce que ça veut dire, ça, M. le Président? On a une Commission d'accès à l'information au Québec qui a le mandat de surveiller pour que l'esprit et la lettre de loi soient respectés, c'est la Commission d'accès à l'information. Mais ici, ce que dit cet article-là, c'est qu'on ne pourra pas communiquer des renseignements personnels à un organisme ou à une personne qui le requiert pour des fins de le comparer, de le coupler ou de l'apparier à un autre fichier à moins d'obtenir le consentement de la Commission ou du gouvernement. Quand on dit «ou du gouvernement», M. le Président, ça veut dire concrètement que, si la Commission dit non, ça ne correspond pas à la loi, vous n'avez pas le droit de le faire. Le gouvernement se donne le droit, lui, de passer par-dessus la décision de la Commission d'accès à l'information et d'autoriser, M. le Président, le transfert d'informations confidentielles de nature, là, à peu près comme j'ai essayé de l'illustrer au début de mon intervention, M. le Président. C'est quand même important. On a des organismes, on a une loi, on a une commission qui est chargée de s'assurer que c'est fait conformément à la loi, mais le gouvernement se donne le pouvoir par-dessus ça de donner l'autorisation de faire des transferts d'information.
Alors, vous avouerez que le gouvernement se donne beaucoup de pouvoir, M. le Président, à ce niveau-là. Alors, c'est un point qui nous paraît difficile à accepter. Ou il y a une loi, puis on a un organisme, puis on doit le respecter, et ça engage le gouvernement aussi, mais le gouvernement n'est pas au-dessus de la loi. On va dire: On n'est pas au-dessus de la loi, c'est dans la loi. M. le Président, les citoyens vont comprendre qu'est-ce que je veux dire. C'est évident que c'est dans la loi, mais c'est le gouvernement qui fait la loi et le gouvernement se donne dans la loi un pouvoir que personne d'autre a, c'est-à-dire de passer par-dessus la lettre de la loi et même les décisions de la Commission d'accès à l'information.
Alors, M. le Président, un autre article qui a une incidence assez grande, M. le Président, c'est l'article 110. L'article 110 se lit comme suit:
Cette loi est modifiée par l'ajout, après l'article 9, des suivants :
«9.1. Toute communication de renseignements personnels d'un organisme public à l'Institut ? on parle ici de l'Institut de la statistique du Québec ? dans le cadre de la mission de ce dernier est réputée nécessaire à l'application de la présente loi au sens de l'article 67 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.
«Est également réputée nécessaire, la communication de renseignements personnels par l'Institut à un organisme statistique d'un gouvernement autre que celui du Québec.» M. le Président, quand on dit qu'un renseignement est réputé nécessaire à l'Institut, qui, lui, peut le transférer à n'importe quel autre organisme de statistique d'un autre gouvernement, ça veut dire que tous les renseignements, M. le Président, qui sont dans les banques de données actuellement du gouvernement, compte tenu que maintenant l'Institut de la statistique peut aller n'importe où là-dedans, que le gouvernement pourrait, à la limite, si la Commission d'accès à l'information leur disait: Vous allez trop loin, le gouvernement peut passer par-dessus la décision.
n(17 h 20)n Et ce qui est plus vicieux à ce niveau-là, M. le Président, c'est que tout est réputé nécessaire, donc toute information doit être transmise à l'Institut de la statistique du Québec, toute information, M. le Président, qui est détenue par l'assurance maladie, toute information, M. le Président, qui est détenue par l'assurance automobile relativement à votre fichier de conducteur, toute information relative, parce que c'est déjà en banque, ça, toute information relative aux caractéristiques personnelles des individus, qui ont été accumulées lors de recensements, alors la résidence, le type de résidence que vous avez, le type de dépenses que vous effectuez au ministère du Revenu ? je vous le mentionnais tout à l'heure ? les revenus que vous avez, les dépenses que vous avez faites, que vous avez mis contre les impôts que vous aviez à payer, parce que c'était la loi qui l'autorisait; tout ça, c'est là, M. le Président. Et le gouvernement va pouvoir, sans aucune restriction... c'est-à-dire l'Institut de la statistique va pouvoir, sans aucune restriction, aller piger n'importe où là-dedans, M. le Président, les maladies que vous avez eues, les médicaments que vous avez pris, n'importe quel type de données, M. le Président, l'Institut de la statistique va pouvoir y aller. Vous avouerez, M. le Président, que c'est inquiétant.
C'est inquiétant et c'est d'autant plus inquiétant, cet esprit, qu'on a affaire à un gouvernement qui a comme attitude de base, M. le Président, de cacher le plus possible les renseignements, d'en donner le moins possible à l'opposition et aux citoyens du Québec qui, eux, ont le droit à avoir l'information parce qu'on est ici pour administrer leurs biens. Alors, ce gouvernement, M. le Président, essaie d'en donner le moins possible, et c'est systématique. C'est systématique, ça, M. le Président, il essaie d'en donner le moins possible et souvent, même, essaie d'en écouter le moins possible. Ce n'est pas un gouvernement qui est très chaud sur les consultations et très chaud surtout sur l'écoute. On peut entendre... On peut écouter c'est-à-dire, mais on ne peut pas, des fois, entendre. Vous savez, on a eu des consultations, et les gens qui demandent à pouvoir intervenir dans des dossiers, on l'a vu dans le cas des fusions municipales: Vous n'avez pas d'affaire à... On n'est pas intéressés à vous écouter. Alors, ça, c'est le gouvernement qu'on a, M. le Président, qui s'isole, qui donne le moins d'informations possible, qui veut écouter le moins possible pour ne pas être dérangé dans ses choix, dans ses orientations. Et, en bout de ligne, M. le Président, c'est le gouvernement qui, avec une certaine aisance, patauge un peu partout dans ces renseignements-là pour toutes sortes de fins.
Je dois juste vous rappeler, M. le Président ? ça a été fait par des collègues ? ce qui est arrivé au niveau du ministère du Revenu puis qui était sérieux, puisque ça a entraîné la démission de la députée de Rosemont qui était ministre du Revenu à ce moment-là. On a pataugé dans des données confidentielles. Et, ce n'est pas n'importe qui, c'est le bureau du premier ministre, M. le Président, qui est allé fouiller dans des renseignements confidentiels au ministère du Revenu sur un cas qui impliquait un député au gouvernement fédéral. Et, ensuite, les informations se sont promenées entre le cabinet du premier ministre et le cabinet du chef du Bloc québécois à Ottawa, M. le Président, des renseignements confidentiels. C'est un exemple.
Je pourrais vous en donner d'autres, exemples. La députée de Rosemont a eu l'honneur de démissionner parce qu'elle était responsable, comme ministre, de ce qui s'était passé. Le ministre qui l'a remplacée, qui était le ministre des Finances, M. le Président, de l'information confidentielle a également circulé pour faire des sondages par la suite. Le premier ministre actuel, qui était ministre des Finances à ce moment-là, n'a pas eu l'honneur qu'a eu la députée de Rosemont d'assumer ses responsabilités puis de démissionner, M. le Président. Mais on joue là-dedans de façon allègre.
On a eu le plan O. On y a fait référence, le plan O, M. le Président, ça consistait à s'accaparer, au lendemain d'un référendum, dans l'éventualité où, vous savez, la décision aurait été favorable à la séparation... de s'accaparer des ressources de l'Hydro-Québec et des ressources de la Caisse de dépôt pour jouer à essayer de maintenir le dollar canadien. M. le Président, cet argent-là appartient aux Québécois, et le gouvernement n'avait pas le droit de s'amuser comme ça. Et, on a essayé de camoufler l'affaire, tout ça, ça a été confirmé par le premier ministre de l'époque lui-même, M. Parizeau, après qu'il a eu quitté la vie politique, que ça existait bien, ce plan-là, M. le Président.
Alors, quand on a un gouvernement qui est si à l'aise, M. le Président, pour patauger puis de tout cacher, bien vous avouerez, quand on arrive avec un projet de loi comme ça où on donne plus de pouvoirs au gouvernement d'aller chercher des renseignements personnels confidentiels pour toutes sortes de fins, M. le Président, on est inquiets. On est inquiets puis on est prudents. On est prudents parce qu'on prend à coeur les intérêts des citoyens, M. le Président. Alors, c'est pour ça qu'on est inquiets par rapport à ce projet de loi là, c'est pour ça, M. le Président, que je tenais à intervenir sur le projet de loi, et vous allez comprendre, M. le Président, que je vais être évidemment très défavorable et que je n'appuierai pas ce projet de loi n° 122. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de l'Acadie. Alors, nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 122, et je cède la parole à M. le président de la commission de l'administration publique et député de Jacques-Cartier. M. le député, la parole est à vous.
M. Geoffrey Kelley
M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, c'est un grand plaisir d'intervenir enfin dans le débat sur le principe le projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives, Bill 122, An Act to amend the Act respecting Access to documents held by public bodies and the Protection of personal information, the Act respecting the protection of personal information in the private sector, the Professional Code and other legislative provisions.
Je dis «enfin», M. le Président, parce qu'on est devant un dossier où le gouvernement a démontré un laxisme total, une inconscience de l'importance de ce dossier pour la société québécoise. Bref, M. le Président: This Government just doesn't get it.
On est devant un système, on est devant une loi qui a été adoptée à l'Assemblée nationale, il y a 19 ans, par le gouvernement de René Lévesque, et le gouvernement de René Lévesque a décidé que ce sujet est assez important qu'on a mis l'obligation dans la loi que, chaque cinq ans, il y a un rapport quinquennal et il y a une révision de la loi. Alors, nous avons procédé à ça en 1987, on a procédé à ça en 1992. On a élargi et inclus la question de l'accès à l'information et la protection des renseignements confidentiels dans le secteur privé.
Alors, c'était vraiment un secteur où le gouvernement était activiste, le gouvernement de M. Lévesque et le gouvernement de M. Bourassa après, parce qu'on comprend que la protection de la vie privée est très importante. Et, dans l'ère du développement des nouvelles technologies, l'informatique et tout le reste, on ne peut pas s'asseoir et dire: Tout est bien, tout est beau. Il faut toujours être vigilant, parce qu'il y a des développements, il y a des changements, il y a des choses qui ont été ajoutés à notre loi pour s'assurer que c'est toujours à jour, qu'on est à la fine pointe des nouvelles technologies, qu'on est toujours vigilant pour la protection de la vie privée, et s'assurer que les citoyens ont accès à l'information de ce gouvernement.
Qu'est-ce qu'on a fait, ce mois-ci? On est maintenant devant le quatrième ministre. Moi, j'étais membre de la commission de la culture en 1997 quand 53 groupes ? individus, organismes ? sont venus... ils ont pris le temps d'écrire un mémoire à l'attention des députés de l'Assemblée nationale. Venir ici, passer une journée au complet, descendre de Montréal peut-être ou des autres régions du Québec, pour témoigner de l'importance de la protection de la vie privée et de l'accès à l'information.
Alors, on a eu quatre ministres et, quatre ans après, on a présenté un projet de loi qui a été présenté par l'ancien député, le ministre, député de Mercier qui a démissionné. Après ça, ça a été le député de Richelieu qui s'en occupait; maintenant, c'est le député de Fabre. On ne le sait pas, mais je pense, en blague, au moment où c'était le ministre député de Gouin qui était là au moment des consultations publiques, il y a quatre ans...
Mais, blague à part, on est presque dû maintenant pour faire un autre cycle. Le prochain plan quinquennal est dû en 2002, et on n'a même pas fait notre devoir de regarder le fruit de la consultation, en 1997. Alors, on peut dire: C'est une blague, et ce n'est pas très important. Mais, si on ne prend pas au sérieux la protection de la vie privée, il y a les conséquences pour les citoyens, il y a les conséquences pour ce gouvernement et, parfois, il y a même les conséquences pour les ministres de ce gouvernement.
Alors, j'ai sorti une énorme pile de documents: les coupures de presse, les avis, les incidents où le laxisme de ce gouvernement avait des résultats tangibles pour les citoyens du Québec: Des renseignements personnels bon marché. Files in half of Québec Departments not secure, study; Minister is told of any celebrity's tax woes; Renseignements personnels: deux fonctionnaires accusés; Child support details faxed to employers; Le sous-ministre admet que le cabinet de Bouchard pourrait avoir transmis de l'information confidentielle; Tenant's link to private eyes; Brèches à colmater: une employée d'Hydro a vendu des renseignements personnels; For sale: Private details about your life; Info sold by Hydro too; Le lien de confiance est rompu; Car insurance fraud linked to selling information, et: Huit têtes roulent au ministère du Revenu.
Ça, ce n'est pas un survol des derniers 25 ans, c'est les derniers quatre ans qu'on a les exemples, les incidents où le laxisme de ce gouvernement a mis les renseignements confidentiels en danger. Il y avait les dossiers très publics. Le dossier du député bloquiste M. Lebel; c'était probablement le plus fameux cas où quelqu'un, un député, a vu les informations confidentielles sur sa relation avec le ministère du Revenu être mises sur la place publique. Une grosse... la une sur LeJournal de Montréal, et tout le reste.
n(17 h 30)n Alors, c'est juste un exemple, mais il y en avait d'autres aussi, quand on a mis la vie en danger du journaliste Michel Auger en donnant accès à certains des renseignements confidentiels sur M. Auger aussi. Mais les alarmes sont là, elles sont nombreuses, mais le gouvernement n'agit pas.
Encore une fois, l'année passée, en regardant le ministère des Transports, on avait le Vérificateur général du Québec qui a examiné l'implantation des systèmes informatiques au ministère des Transports, et c'est ça qu'il a dit ? ça, c'est une vérification faite au début de l'année 2000: «Le ministère n'a fait aucune révision périodique des profils, des privilèges et des droits d'accès, pas plus qu'il n'a exploité périodiquement aux fins de contrôle les journaux des accès. Au surplus, des journaux ne sont pas tenus pour quatre des cinq fichiers informatiques examinés qui comportent des renseignements nominatifs: accidents du travail, acquisitions, fournisseurs de matériaux routiers, dossiers d'enquête. Le ministère ne peut donc confirmer que seuls les utilisateurs autorisés ont accès aux données et aux systèmes qui les concernent, ni qu'ils font un usage adéquat de leurs privilèges et droits d'accès.» Ça, c'est le constat il y a un an et demi, M. le Président. Nous avons reçu devant la commission de l'administration publique le sous-ministre, le nouveau sous-ministre, qui s'engage à corriger le tir, mais on est toujours... On traîne les pieds, on traîne les pieds, c'est long, et les conséquences de ça sont dramatiques.
Alors, encore une fois, M. le Président, on voit, la semaine passée, la SAAQ aux prises avec une autre affaire de fraude. Encore une fois, les personnes de la Société de l'assurance automobile du Québec qui ont accès à leurs données ont donné ces renseignements à un groupe de voleurs d'autos dans la région de Montréal. Alors, le gouvernement... Comme j'ai dit: The Government just doesn't get it. Il ne comprend pas que la protection de ces banques de données, de ces renseignements concernant les citoyens du Québec, c'est très important. Et pourquoi je me fâche aujourd'hui? Un petit peu parce que c'est quatre ans après. Il y a des personnes, il y a des indicateurs, il y a des signes d'alarme partout qu'il faut agir beaucoup plus rapidement quant à la protection de la vie privée, et, encore une fois, le gouvernement, comme j'ai dit, ne semble pas trop énervé par tout ça. Ce n'est pas vraiment important, on peut changer le ministre quatre fois, on peut attendre quatre ans avant d'agir. Et, moi, je dis: De notre côté de la Chambre, je pense que la preuve est là, on a assez de preuves... de dire aux citoyens du Québec que c'est important d'agir, qu'il y a des problèmes quant à la protection des renseignements confidentiels, surtout les renseignements qui sont tenus par ce gouvernement.
Si on ajoute à ça... Et les oublis continuent. Même cette semaine... On est en train de créer une autre banque de données, qui est très importante, qui va être liée à une carte à puce, dans le système médical. Donc, c'est fort important. Je vois ma collègue de Laviolette, qui a une certaine expérience déjà, parce que déjà la création d'un régime d'assurance médicaments a créé des banques de données fort importantes sur qui prend tel médicament. Et on sait fort bien, dans notre société, qu'il demeure des préjugés liés à certaines maladies. Alors, si quelqu'un est sur un médicament qui est lié au traitement de la santé mentale, malheureusement, dans notre société, il y a des préjugés liés à ça. S'il y a quelqu'un qui a des médicaments sur le sida, il y a aussi des préjugés dans notre société. C'est pourquoi la protection de ce genre d'information, c'est tellement important. Et c'est pourquoi je dis: This Government doesn't get it. Parce qu'il faut davantage «protecter» l'ensemble de ces genres de données, soit dans le domaine de la voiture, soit dans Hydro-Québec, soit dans les médicaments.
Mais on voit, cette semaine, encore une fois, dans La Presse, que la carte à puce, le ministre Trudel a omis de soumettre à la Commission d'accès à l'information le projet de loi en préparation. Oups! Oups! Parce que, cette carte à puce, il y a des avantages au niveau technologique d'avoir ensemble tout un dossier médical; alors, on peut voir une personne qui était dans un accident, elle prend tel médicament, il y a telle maladie, tout le reste. Alors, il y a des avantages de mettre tout ça dans une place, mais il y a un énorme risque, parce que tout le profil de santé va être sur la carte. Et je pense qu'il faut agir avec une énorme prudence avant de donner un feu vert à un projet comme ça. Je ne dis pas que je suis contre, mais je veux m'assurer qu'on prend tous, tous les moyens de s'assurer qu'on n'ait pas accès... Parce que l'état de votre santé, M. le Président, c'est votre affaire, ce n'est pas mon affaire. Mais il y a des assureurs, il y a beaucoup d'autres personnes qui aimeraient en savoir plus sur notre... sur l'état de notre santé. Est-ce que je vais vendre une police d'assurance vie à M. le président? Peut-être, si j'ai accès à ses données personnelles, je vais dire: C'est trop un grand risque, je vais vendre ça au député de Pontiac, parce qu'il marche à tous les jours. Ça, c'est une meilleure idée que vendre ça au député de Jeanne-Mance. Je fais des blagues, mais, à part de ça, c'est très important que ces choses soient... et le ministre l'oublie. Ah! Pas le temps, très occupé!
Mais, ce n'est pas la meilleure semaine pour ce ministre, il faut l'admettre, hein, parce qu'on a eu le ministre... qu'il est difficile de comprendre c'est quoi, un document. Parce qu'on a parlé longuement dans la période de questions, mais, quand je vois une pile de papier de 68 pages qui est laissée avec d'autres personnes, qui était également disponible sur un support technologique, Powerpoint, ça a l'air d'un document. If it walks like a duck and it talks like a duck, it's probably a duck. Alors, «it's a document», et c'est ça qu'on a vu, encore une fois. Mais, encore une fois, ce ministre ne comprend pas.
Mais, pour essayer de protéger son ami, le député de Fabre et ministre responsable pour l'accès à l'information a fait quelque chose que je n'ai jamais vu. Sept ans ici, en Chambre... Je ne suis pas un député expérimenté comme vous, M. le Président, mais il a essayé de modifier une loi sur-le-champ, parce qu'il a dit dans la réponse aujourd'hui... Il a cité l'article 135 de la loi sur l'accès à l'information qui donne droit à un appel si un document... et s'il y a un refus d'avoir accès à un document. Alors, il a inclus dans la réponse... Parce qu'il a dit: L'article 135 dit: Dans le cas où le requérant se voit refuser à l'accès d'un document en tout ou en partie ou ? et c'est le petit bout de phrase ici qui est intéressant ? il est informé par le responsable de l'accès de l'inexistence d'un document, qui est ce qu'on discuté aujourd'hui dans la période de questions. Alors, il a justifié le fait que le ministre avait raison par ce petit bout de phrase.
Moi, je suis allé voir l'article 135 pour lire ça, et c'est curieux, parce que ce petit bout de phrase n'est pas là. Et, M. le Président, vous savez comme moi, on a deux avenues pour changer une loi dans l'Assemblée nationale: soit qu'on peut aller au Comité de législation, on prépare un projet de loi, on publie ça dans le feuilleton, on arrive ici avec un projet de loi et on peut insérer ces mots...Et, je pense, de notre côté de la Chambre, on est intéressés de le faire. Alors, ça, c'est peut-être laborieux pour le ministre, peut-être qu'il veut aller plus rapidement. Il y a un autre moyen, qu'on dit dans notre jargon: On va mettre un papillon qu'on va insérer dans le projet de loi n° 122. Mais, si le ministre veut vraiment qu'on mette dans l'article 135 le bout de phrase, qu'«il est informé par le responsable de l'accès de l'inexistence d'un document», il n'a pas le droit, de son siège, de mettre ça dans la loi comme ça.
Ça ne marche pas comme ça dans une démocratie, on a des façons d'amender une loi, on a des façons d'aller présenter un amendement. S'il veut faire ça à l'intérieur de la loi n° 122, de notre côté de la Chambre, on va regarder ça avec intérêt, mais il ne peut pas créer la loi comme ça, il ne peut pas inventer les articles de loi dans la période des questions. Ça ne marche pas comme ça, M. le Président, et je pense qu'on a tout intérêt de peut-être expliquer au député de Fabre comment modifier un projet de loi, comment modifier la loi sur l'accès à l'information pour donner suite à son intention, si j'ai bien compris. Parce que sinon, pour dire le moins, il a induit la Chambre et, de façon plus importante, les citoyennes et les citoyens du Québec en erreur en faisant la réponse qu'il a faite à la question de mon collègue de Chomedey ce matin et ma collègue de Jonquière.
n(17 h 40)n Tout ça, c'est un dossier très important, et on arrive maintenant au projet de loi n° 122. Avec tous les grands enjeux, le développement de technologies, toutes les choses qui changent, qu'est-ce qu'on trouve dans 122? Beau projet de loi, il y a quoi, 123 articles. Alors, ça donne l'impression d'une affaire sérieuse, ça. Mais, si on regarde, c'est les choses qui ne sont pas là-dedans qui sont nettement plus importantes que les choses qui sont là-dedans. Et, en anglais, le mot pour ça, c'est «tinkering». On fait les tout petits ajustements ici, par là, mais on est en train de... Tout le barrage risque d'être noyé complètement, et on met un petit peu de «plaster» ici, un petit peu de «plaster» pour essayer de le retenir, et ça ne marche pas. Il faut une réforme en profondeur. Oui, qu'on extensionne l'accès à l'information aux CLD et CRD, bonne affaire, M. le Président; qu'on mette le monde municipal dans le coup aussi, bonne affaire, M. le Président; qu'on ait une petite chose qui est là-dedans pour les historiens qui donne accès aux archives après 100 ans plutôt que 150 ans, ça, c'est le «tinkering». Mais c'est toutes les nouvelles technologies, tout le risque de ces grandes banques de données.
La seule chose qui est ici, on facilite la tâche de ce gouvernement, entre autres, comme mes collègues l'ont décriée, la création de ce qu'on appelle un Big Brother québécois, c'est-à-dire un mégafichier créé, entre autres, à l'Institut de la statistique. Mais c'est une suite logique de la loi n° 32, adoptée il y a quatre ou cinq ans, où le couplage des fichiers se multiplie et multiplie. Et si l'accès n'est pas sécuritaire autour de ces banques de données, on juste multiplie les risques que la série de manchettes noires que je vais lire vont juste être de plus en plus nombreuses. Et c'est ça, le problème. Alors, dans le projet de loi, comme je dis, c'est le «tinkering»«, c'est les tout petits ajustements. Mais, quand on va au fond de l'affaire ? comme pour la question d'une carte à puce, qui est très importante, puis il y a les enjeux pour la protection de la vie privée, mais aussi pour assurer une qualité des soins de santé pour l'ensemble de la population québécoise ? enjeux importants, on ne trouve rien dans ce projet de loi.
Les champs de compétence. Qu'on ait accès aux CLD, bonne affaire. Le CLD de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, je pense qu'il a un budget de 700 000, alors on ne parle pas d'un enjeu faramineux. Mais les sociétés d'État ? qui était la recommandation, entre autres, de la Commission d'accès à l'information ? Loto-Québec, Hydro-Québec, la Caisse de dépôt ? on parle de milliards et pas de 700 000, comme le CLD de l'Ouest-de-l'Île ? on ne touche pas à ça. Et c'est pourquoi je pense que c'est très important... Tout le phénomène de GIRES, le développement de la nouvelle technologie, que les renseignements vont circuler davantage dans l'appareil gouvernemental. Est-ce qu'on a regardé... Est-ce qu'il y a des choses qu'il faut bonifier dans la loi pour s'assurer que la protection... que ces genres de couplages vont être plus difficiles? On ne le trouve pas, non plus, dans le projet de loi.
Comme je dis, le grand couplage des fichiers est permis maintenant à l'Institut de la statistique. Il faut faire attention, parce qu'ils vont mettre les 4,4 millions de dossiers de la SAAQ, les 7,2 millions de dossiers de la Régie de l'assurance maladie, les 5 millions de dossiers du Revenu, le 1,5 million de dossiers de la CSST, les 3,6 millions de la Régie des rentes du Québec, les 6 millions de dossiers de la Sûreté du Québec. Tout ça, ça va circuler. Et on l'a vu, il y a des exemples qu'il y a des personnes dans notre société qui prennent un très grand intérêt dans ces dossiers. Alors, oui, pour l'efficacité, il faut examiner la possibilité de faire ça, mais il faut rassurer la population que le gouvernement est vigilant, plutôt qu'un gouvernement qui a toutes les preuves et dort sur la switch. Alors, je pense, M. le Président, qu'on a tout intérêt... Oui, sur 122, on va faire le débat, notamment sur l'Institut de la statistique du Québec, mais j'invite le gouvernement à prendre ce dossier au sérieux.
Peut-être, en terminant, M. le Président, de prendre le dernier message de Paul-André Comeau, qui était le président de la Commission d'accès à l'information, qui a dit: «Toutefois, par rapport au modèle d'inspiration, c'est-à-dire le travail fait par le gouvernement de René Lévesque, force est de constater un certain retard, en tout cas un manque d'audace.»» Et, plus loin, il dit: «Le régime d'accès à l'information existe et fonctionne, mais il n'a pas franchi l'étape où l'offre s'affiche au vu et au su de tous. Pudeur, ou timidité, ou peut-être volonté de ne pas en offrir plus que le client n'en demande...» Alors, M. Comeau, dans son genre de testament, a dit: Il faut avoir plus d'audace, il faut faire un meilleur effort pour protéger les renseignements personnels de l'ensemble de la population québécoise. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Jacques-Cartier, de votre intervention. Alors, nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 122, et je cède la parole au prochain intervenant. M. le député de Pontiac, la parole est à vous.
M. Robert Middlemiss
M. Middlemiss: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, le projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives, M. le Président, c'est tellement important. Il est tellement important aujourd'hui... Avec la nouvelle technologie que nous avons, c'est tellement facile, tellement facile d'avoir accès à des documents qui révèlent des fois, M. le Président, des choses qui sont assez personnelles. Et, on l'a vu, plusieurs organismes et ministères du gouvernement, il y a des gens qui, pour faire un peu d'argent, ils sont prêts à tout faire.
Et qu'est-ce qui est déplorable, M. le Président, avec le projet de loi n° 122, c'est pourquoi que ça a pris tellement de temps. Comme le disait tantôt mon collègue le député de Jacques-Cartier, cette loi date de 19 ans, et, lorsqu'on a passé la loi, on a voulu que... C'était tellement important qu'on a voulu qu'à tous les cinq ans il y a une révision et que les gens soient consultés, pour s'assurer, tu sais, de bien réellement protéger. Je pense que c'est bon d'avoir accès à l'information, c'est très bon, parce que des fois il y a des renseignements qui sont absolument nécessaires pour des raisons de santé et d'urgence, et qu'ils soient là. Mais le but, c'est d'avoir un côté positif, c'est que tous ces renseignements-là soient disponibles pour qu'on puisse les utiliser à bon escient. Mais, malheureusement, ce n'est pas ça qui se produit.
Et, dans le cas du projet de loi n° 122, c'est en 1997, M. le Président, qu'on a eu la consultation qui est imposée par le projet de loi, et il y a 53 groupes qui sont venus, qui ont déposé des mémoires, 53 personnes et organismes ont présenté un mémoire. Et, de ces mémoires-là, tu sais, les principales recommandations ayant découlé de ces auditions sont les suivantes. «Le régime général de transfert de renseignements personnels entre organismes publics doit inclure un contrôle a priori, l'opportunité confiée à la Commission d'accès à l'information.» Ça, M. le Président, c'était une des recommandations que les gens disaient.
«La commission croit fermement que la mission de protection du public confiée par le législateur aux ordres professionnels commande que ces derniers soient soumis à un régime de transparence administrative comparable à celui des organismes publics relevant du gouvernement québécois, les deux hypothèses retenues étant l'assujettissement des ordres à la Loi sur l'accès ou l'aménagement à l'intérieur du Code des professions d'une régime qui leur serait propre.» La commission de la culture, à ce moment-là, M. le Président, recommande de maintenir le statu quo relativement à la question du droit d'appel. Et la commission endosse la position de la Commission d'accès à l'information en matière de nouvelles technologies, parce que la Commission avait entre autres recommandé que les organisations publiques et privées qui projettent d'utiliser l'autoroute de l'information procèdent au préalable à une évaluation des impacts éventuels de cette nouvelle technologie sur la protection des renseignements personnels et que des mesures de sécurité soient en place pour protéger ces renseignements.
Donc, M. le Président, c'est en 1997, là. On a fait des recommandations, et Dieu sait... Tantôt, notre collègue de Jacques-Cartier a énuméré toute une série de problèmes, M. le Président, où les gens ont eu accès à des documents, que ce soit au niveau de l'assurance maladie, que ce soit à la Société de l'assurance automobile du Québec, que ce soit au ministère du Revenu. M. le Président, c'était une passoire, une passoire où tout le monde avait accès à des documents personnels. Pourtant, M. le Président, en 1997, il y a eu une consultation qui a dit au gouvernement: Bougez dans cette direction-là. Mais c'est vrai, lorsqu'on regarde tout ça, M. le Président, il semblerait que... Au moment des consultations, c'était le député de Gouin qui était le ministre responsable. Ensuite, le projet de loi a été présenté par son successeur, le député de Mercier, qui aujourd'hui est parti. Ils l'ont donné un bout de temps au député de Richelieu. Maintenant, c'est le député de Fabre. Donc... puis je ne veux pas blâmer aucun des députés, mais il semblerait, M. le Président, que c'est un problème de gouvernement.
n(17 h 50)n Le gouvernement n'était pas trop anxieux de vouloir changer les choses. Est-ce que le fait de le changer, d'avoir un projet de loi qui va rendre ça plus difficile va remettre la situation telle que... Peut-être qu'aujourd'hui il y a des choses qui sortent et que ce n'est peut-être pas tellement... ils ne sont pas tellement offusqués qu'il y ait certaines choses qui sortent. Ça aide peut-être la situation.
Bien, M. le Président, lorsqu'on prend la peine de vouloir protéger les renseignements personnels, et surtout avec l'évolution des technologies, pourquoi avons-nous traîné nos pieds? Mais je pense que le pire de tout ça, M. le Président, lorsqu'on commence à parler de l'Institut de la statistique, c'est là où ça devient extrêmement, extrêmement dangereux, parce que là, pour le fonctionnement de cet Institut, ils vont être capables, M. le Président, d'aller dans tous, tous les dossiers pour faire le couplage, dans tous, tous les dossiers. Et vous le savez, hein, que ce soit à l'assurance maladie du Québec, que ce soit à la Société de l'assurance automobile... Dans le cas de l'assurance automobile du Québec, M. le Président, on parle de 4,4 millions de personnes qui détiennent un permis de conduire. Donc, M. le Président, après ça, là, on va dire: On s'en va à la Régie de l'assurance maladie, parce que les gens sont malades. Donc, qu'est-ce qu'il y a comme dossiers? 7,2 millions de dossiers de personnes admissibles au régime. Et dans ça, l'assurance maladie, M. le Président, c'est que, dans ça, il y a toutes les maladies qu'une personne peut avoir, et à ce moment-là ça devient facile d'accès, parce qu'on dit: Regardez, l'Institut, là, vous autres, vous allez avoir accès à tout ça; vous allez faire le couplage. Donc, on est en train de créer une situation où ça pourrait être facile, M. le Président, d'obtenir ces renseignements-là.
L'autre, le Revenu, le ministère du Revenu: 5 millions de contribuables produisent une déclaration annuelle de revenus, M. le Président. C'est censé être pas mal personnel, ça, tu sais? Ce n'est pas nécessaire que le voisin puisse savoir c'est quoi, nos revenus, toutes ces choses-là. Donc, M. le Président, on est en train de... Et c'est ça, là, ce projet de loi va créer cet Institut-là.
On va continuer. Dans la CSST, il y a 1,5 million de dossiers, M. le Président, de victimes d'accident de travail. Bien, ça aussi, c'est personnel. Est-ce que tout le monde devrait avoir accès au dossier d'un accidenté du travail? Je ne le crois pas, M. le Président. Ça, c'est des choses... Là, la Régie des rentes, il y a 3,6 millions de personnes inscrites au régime, informations provenant des relevés d'emploi et déclarations du revenu. Ça, M. le Président, il y en a 3,6 millions. Et on va regarder la Sûreté du Québec. Je ne sais pas si vous conduisez vite comme le député de Joliette, là, mais, si jamais vous faites ça, si jamais vous faites ça, vous pourrez finir d'être un des 6 millions de fiches que détient la Sûreté du Québec, M. le Président. Regardez, donc, à ce moment-là, certainement, il faut aller vite, mais, tu sais, il faut se hâter lentement aussi.
Donc, M. le Président, en plus, dans le domaine de l'éducation, il y a 3,5 millions de personnes qui fréquentent... la fréquentation scolaire, et il y a 4 millions d'élèves, fichiers de résultats scolaires; il y a 400 000 enfants; bureau d'administration à l'enseignement en anglais, il y a 350 000 personnes, clientèle adulte du ministère de l'Éducation du Québec, et il y a 1 750 000 élèves ayant fréquenté le collégial, depuis 1967. Dans ce domaine-là, M. le Président, il semblerait qu'on va apporter des amendements. Sauf qu'il me semble que, si on avait réellement voulu, là, ne pas avoir un Big Brother ici, au Québec, on n'y aurait pas pensé, à ça; on n'y aurait pas pensé. On aurait dit: Regarde, aïe! On a eu suffisamment de problèmes au Québec avec nos fichiers, avec l'accès à l'information, on n'ouvrira pas la porte plus grande que nécessaire. Mais, M. le Président, on l'a fait. Donc, d'un côté...
Puis, les gens voulaient qu'on puisse avoir de l'information, mais de l'information, M. le Président, qu'ils veulent protéger. Ce n'est pas dans l'intérêt de tout le monde de connaître ces choses-là. Et l'Institut de la statistique du Québec, je pense qu'on est en train de créer un monstre, M. le Président, qui serait facile d'accès, et Dieu sait qu'avec le temps, M. le Président, il va y avoir encore une perfection des technologies et que ça va être de plus en plus facile. Peut-être que ça ne sera pas nécessairement les gens qui travaillent au sein de ces organismes ou à la Commission d'accès à l'information, M. le Président, mais ça pourrait être des gens qui vont être capables de pirater ou d'aller chercher des renseignements auxquels ils n'ont pas le droit. Et, à ce moment-là, c'est que... Lorsqu'on mettra toutes ces choses-là ensemble, est-ce qu'on va être certain d'avoir un mécanisme qui va empêcher qu'on puisse aller chercher ces renseignements-là?
Donc, M. le Président, c'est un projet de loi qui est fort important, un projet de loi que... De façon générale, nous sommes tous d'accord, nous sommes d'accord qu'on doit protéger les renseignements, qu'on doit avoir accès, le gouvernement doit avoir accès à certains renseignements, mais, lorsqu'il a ces renseignements, il est le gardien de ces renseignements-là et il doit s'assurer, M. le Président, de prendre tous les moyens nécessaires pour empêcher que ces renseignements-là tombent dans les mains de ceux que ça ne concerne pas, qui n'ont pas le droit à ces renseignements-là. La seule chose, les gens qui veulent l'accès à des renseignements, c'est pour des fois, M. le Président, leur propre cause, comme un vendeur d'assurances, M. le Président, quelqu'un qui voudrait frauder quelque chose. On l'a vu dans le cas de la Société de l'assurance automobile du Québec. On a donné des renseignements sur des individus qui, malheureusement, ont eu des attentats contre eux, et c'est parce qu'on a donné ça à des gens qui cherchaient à créer... à se débarrasser d'un journaliste qui leur rendait la vie difficile.
Donc, M. le Président ? et en concluant ? j'espère qu'au niveau de la Commission ? puis les amendements, apparemment, il y a beaucoup d'amendements qu'on va soumettre au moment de la commission ? ces amendements-là vont apporter des changements qui vont bonifier... et de s'assurer que la Commission d'accès à l'information va réellement faire le travail pour lequel elle a été créée il y a 19 ans passés. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Pontiac. Et, sur ce, je vais suspendre les travaux de cette Assemblée jusqu'à 20 heures ce soir. Bon appétit à vous tous.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 20 h 8)
Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Alors, nous poursuivons les affaires du jour. Mme la leader adjointe, vous appelez?
Mme Carrier-Perreault: Oui. Alors, M. le Président, nous allons donc poursuivre sur l'article 20.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, si vous consultez votre feuilleton, à l'article 20, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 24 octobre 2001, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives.
Lors de la suspension, il restait 10 minutes à M. le député de Hull pour compléter son intervention. Alors, nous concluons donc que, l'intervention du député de Hull étant complétée, nous cédons maintenant la parole au député de Chapleau. M. le député.
M. Benoît Pelletier
M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. Ha, ha, ha! Merci, M. le Président. Alors, pour comprendre le projet de loi n° 122, pour bien le comprendre, je pense qu'il faut savoir que ça fait partie de l'héritage politique que veut laisser le député de Fabre à la population du Québec. Il n'y a pas d'autre façon de comprendre ce projet de loi que de penser que c'est la contribution ultime du député de Fabre pour la société québécoise. Non, évidemment, je blague, M. le Président, il s'agit d'un projet de loi beaucoup plus sérieux et que je vais aborder justement avec tout le sérieux dont je serai capable en vous disant d'abord, dans un premier temps, que c'est un projet de loi qui porte, et c'est important de le préciser pour les citoyens qui nous écoutent, c'est un projet de loi qui porte sur l'accès à l'information.
n(20 h 10)n Cependant, ce qui étonne dans ce projet de loi, c'est qu'on ne vient pas, ici, faciliter l'accès à des informations pour les citoyens ? et, normalement, ça devrait être le but poursuivi par un tel projet de loi ? mais, au contraire, on favorise l'accès à l'information pour l'État, c'est-à-dire que finalement on est en présence ni plus ni moins que d'un projet de loi qui vise à renforcer les mécanismes, qui vise à renforcer les mesures qui permettent à l'État d'avoir accès à davantage d'informations confidentielles et de manipuler, de gérer, je devrais dire, encore davantage d'informations confidentielles. Et, vous allez voir, M. le Président, je vais m'expliquer dans un instant à cet égard.
Mais donc je répète que le projet de loi n° 122 ne favorise pas l'accès, pour les citoyens, aux documents confidentiels. Au contraire, ça rend plus difficile, pour les citoyens, l'accès aux documents dits confidentiels du gouvernement. Ça augmente donc le pouvoir du gouvernement de se donner à lui-même accès à des fichiers et ça permet même, M. le Président, au gouvernement de donner aux requérants de son choix ? aux requérants de son choix ? accès à des fichiers qui contiennent des informations confidentielles.
On remarquera, à l'étude du projet de loi, qu'il contient aussi une section complète, une section complète qui porte sur l'Institut de la statistique du Québec. Et ça, finalement, qu'est-ce que ça veut dire? Ça permet à l'Institut d'avoir accès à à peu près toutes les informations confidentielles qui sont contenues ou qui sont détenues par les organismes publics au Québec.
Et on aborde aussi dans le projet de loi la question évidemment de la protection des renseignements qui sont transmis par les nouvelles technologies entre les organismes publics, mais malheureusement, M. le Président, on ne les aborde que trop sommairement. On ne va pas assez loin en ce qui concerne justement la protection de ces renseignements, et Dieu sait que les nouvelles technologies occupent une place de plus en plus prépondérante justement dans l'organisation gouvernementale, dans l'administration publique, que ce soit au Québec ou ailleurs dans le monde.
Donc, ce n'est pas vraiment l'accès à l'information pour le citoyen que le gouvernement a en tête, c'est l'accès à des fichiers pour le gouvernement. Et vous allez me dire: Qu'est-ce qu'il fait avec ces fichiers? Il y a plusieurs choses qui peuvent être faites avec les fichiers. Il y a une technique qui s'appelle le couplage, couplage d'informations, M. le Président, qui est justement la technique qui est ciblée par le projet de loi n° 122. La technique du couplage d'informations permet finalement d'additionner les données qui sont détenues par différents organismes publics, de les cumuler finalement, de les additionner, de faire en sorte que le système d'information du gouvernement du Québec contienne des informations, finalement, des informations intégrées, des informations confidentielles intégrées sur à peu près tout ce qui bouge sur le territoire québécois, et bien entendu sur vous, M. le Président, sur moi, sur les citoyens en général.
C'est ce qu'on appelle le Big Brother, finalement, le Big Brother québécois, c'est-à-dire cette espèce d'oeil tout à fait donc efficace qui vous regarde et qui vous épie dans les moindres mouvements de votre vie. Bien, figurez-vous que le Québec, bien, se dirige vers cette espèce... une imitation, une pâle imitation du Big Brother américain, mais une imitation quand même. Pour des gens qui vraiment veulent que le Québec se distingue de tout ce qui normalement est relié à la culture américaine, j'avoue que nous sommes ici en présence d'un projet de loi extrêmement étonnant.
Alors, M. le Président, qu'est-ce que le citoyen doit retenir, donc, du projet de loi n° 122? Il doit retenir d'abord que l'opposition officielle est contre le principe de ce projet de loi. On ne peut pas approuver le principe d'un projet de loi qui renforce finalement la capacité du gouvernement d'avoir accès à des informations personnelles. Par ailleurs, nous sommes en présence d'un projet de loi qui accroît les possibilités pour le gouvernement de faire du couplage de fichiers contenant des renseignements confidentiels. Je l'ai dit plus tôt, mais j'y reviens, en ce qui concerne les nouvelles technologies, ce que le projet de loi contient est très mince, trop mince même. Cette espèce de, je dirais, attitude qu'a le gouvernement de négliger les nouvelles technologies lorsqu'il en arrive à rédiger ses propres projets de loi est vraiment quelque chose d'extrêmement stupéfiant, d'extrêmement étonnant.
Et par ailleurs, M. le Président, comme si finalement le décor que je vous décrivais n'était pas déjà assez, eh bien, figurez-vous qu'on prévoit que les sociétés d'État et les filiales des sociétés d'État, les organismes paragouvernementaux, les sociétés d'État vont être à l'abri finalement des lois, des principales mesures en matière d'accès à l'information au Québec. Ce qui veut dire que finalement les citoyens ne pourront pas avoir accès aux informations qui sont détenues par les sociétés d'État, leurs filiales, les organismes parapublics, et ça, c'est extrêmement regrettable, parce que, vous le savez tout comme moi, ces organismes-là pourtant dépensent l'argent des contribuables et même possèdent beaucoup d'argent, effectuent des dépenses qui sont très importantes. Il ne serait que normal que le citoyen puisse avoir un plus grand droit de regard sur les activités souvent, je dirais, cachées en quelque sorte des sociétés d'État, des filiales et des organismes gouvernementaux.
M. le Président, je vous parlais tout à l'heure de l'Institut de la statistique, l'Institut de la statistique, si vous voulez, le monument que le Québec veut laisser avant de perdre le pouvoir, le monument le plus triste qui soit en ce qui concerne la protection des renseignements personnels. Parce que l'Institut de la statistique, ce qui est prévu dans le projet de loi, c'est que cet Institut-là peut obtenir tous les renseignements personnels qui sont détenus par les organismes publics, et ce, sans même que les citoyens en soient informés, M. le Président. Alors, c'est vraiment par l'Institut de la statistique que l'opération Big Brother, que je décrivais plus tôt, va fonctionner.
Et vous allez me dire: Oui, mais qu'est-ce que ça veut dire, ça, finalement, obtenir tous les renseignements personnels qui sont détenus par les organismes publics? Bien, ça veut dire ceci, M. le Président, ça veut dire que l'Institut de la statistique va pouvoir obtenir et en fin de compte intégrer dans un réseau unique, faire du couplage d'informations, faire de la comparaison d'informations, faire du traitement d'informations en ce qui concerne les organismes dont je vais vous donner quelques exemples. La liste que je vais dresser n'est pas exhaustive, M. le Président.
Eh bien, un des organismes qui verra ses données être intégrées par l'Institut de la statistique, c'est la Régie des rentes, M. le Président. Or, vous savez tout comme moi qu'il y a énormément de personnes qui sont inscrites à la Régie des rentes. Vous savez qu'on y retrouve là des informations très importantes en ce qui concerne les relevés d'emploi, en ce qui concerne les déclarations de revenus. Eh bien, figurez-vous que tout ça donc va dorénavant pouvoir être intégré dans le grand, grand réseau de l'Institut de la statistique.
Vous allez me dire que c'est déjà pas mal. C'est déjà pas mal, mais on peut en ajouter, M. le Président. Ajoutons donc la Sûreté du Québec. Les informations de la Sûreté du Québec vont, elles aussi, être traitées par l'Institut de la statistique. Ce qui nous donne le résultat suivant: les plaignants évidemment qui font affaire avec la Sûreté, les témoins, les suspects, les prévenus, tous les renseignements qui sont reliés aux marchandises volées, aux véhicules volés, aux événements criminels qui sont survenus ou à des événements que l'on prétend être criminels qui donc seraient survenus, toutes ces informations-là vont encore une fois être gérées par l'Institut de la statistique.
n(20 h 20)n Même chose, M. le Président, pour l'Emploi et la Solidarité. Ça veut dire quoi? Ça veut dire finalement que tout ce qui concerne la sécurité du revenu, tout ce qui concerne les mesures actives en emploi, à titre d'exemple, tout ça, toutes ces informations-là vont encore une fois aller à l'Institut de la statistique.
L'Éducation, c'est la même chose. Ça veut dire que des informations par rapport à la fréquentation scolaire, aux résultats, même, scolaires, finalement vont se retrouver gérées, administrées par l'Institut de la statistique.
La CSST. M. le Président, même chose en ce qui concerne évidemment les accidents de travail.
Le Revenu. Eh bien, figurez-vous que les informations du ministère du Revenu vont être intégrées par l'Institut de la statistique. Or, vous avez 5 millions de contribuables qui, à chaque année, produisent une déclaration de revenus.
La Régie de l'assurance maladie. Très inquiétant de penser que l'Institut de la statistique va avoir des informations sur les personnes qui sont admissibles au régime de l'assurance maladie.
Et sans compter ? et je termine avec cela dans ma nomenclature ? la Société de l'assurance automobile. Vous savez comme moi, tout ce qui concerne l'émission des permis de conduire, points de démérite, et ainsi de suite, tout cela donc sera traité par l'Institut de la statistique.
Alors, il faut comprendre qu'on est en train de construire un très gros réseau, un très grand réseau d'information finalement, et honnêtement j'ai peine à voir, après réflexion, quel peut être le but poursuivi par une telle mesure. C'est difficile de voir quel est le but qu'on poursuit en créant cet Institut de la statistique, si ce n'est finalement d'accroître le pouvoir de l'État sur le citoyen, si ce n'est pour l'État d'avoir un meilleur contrôle sur la vie des citoyens, si ce n'est finalement de tenter de poursuivre des objectifs qui sont reliés à la présumée sécurité publique, si ce n'est finalement, M. le Président, cette volonté du gouvernement du Québec de tout centraliser.
Et d'ailleurs, s'il y a un gouvernement qui est centralisateur au Canada ? c'est bien connu ? c'est bien le gouvernement du Québec actuel, M. le Président, qui finalement agit envers ses propres citoyens, agit envers les gens d'affaires, agit envers les familles, agit envers les régions par des décisions qui sont prises de façon tout à fait arbitraire et unilatérale dans des officines de fonctionnaires à Québec plutôt que finalement d'être moulées selon les besoins du milieu, adaptées aux besoins du milieu et adaptées aux circonstances ambiantes.
Alors, M. le Président, ici on a encore une fois un bel exemple de cette manoeuvre extrêmement centralisatrice, extrêmement intégrée, extrêmement dangereuse, je devrais dire, que constitue l'Institut de la statistique. Et on va essayer de nous convaincre que les informations qui vont être détenues par l'Institut vont être complètement étanches, M. le Président. Comment voulez-vous que nous croyions que ces informations-là demeurent tout simplement... demeurent en possession de l'État de façon tout à fait étanche alors qu'on sait très bien qu'il y a eu du coulage d'informations dans le passé au Québec, alors qu'on sait très bien que des personnes en ont souffert, de ce coulage d'informations, même lorsque les informations étaient détenues par des organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux?
Et, justement, ça m'amène à vous parler, ce que je viens de dire m'amène à vous parler de l'article 24 du projet de loi, M. le Président, l'article 24 du projet de loi qui n'est pas à sous-estimer, qui n'est pas à négliger et qui nous dit, entre autres, que le gouvernement s'autorise lui-même à permettre la communication de fichiers de renseignements personnels. Donc, je répète, le gouvernement s'autorise à permettre la communication de fichiers de renseignements personnels sans le consentement des personnes concernées, pour fins de comparaison et de couplage.
Alors, l'article 24 vient donc confirmer toutes les craintes que l'on pouvait avoir quant au danger que des informations personnelles se promènent, traversent l'étanchéité, la présumée étanchéité de la confidentialité des informations traitées par l'État, et finalement viennent affecter la vie des citoyens, parce que ces informations vont se retrouver dans des mains entre lesquelles elles ne devraient pas être et dans lesquelles elles ne devraient pas se retrouver.
Vous me permettrez par ailleurs, M. le Président, d'attirer votre attention sur un autre article qui, en fait, est extrêmement douteux. C'est un article du projet de loi qui propose de créer une nouvelle disposition. Donc, on veut créer une nouvelle disposition qui va dire essentiellement ceci, et suivez bien, M. le Président, parce que ça va vous étonner, tout comme moi. On dit ceci: «Toute communication de renseignements personnels d'un organisme public à l'Institut dans le cadre de la mission de ce dernier est réputée nécessaire», M. le Président. Ça veut dire quoi? Ça veut dire que toute information qui sera communiquée par un organisme public à l'Institut de la statistique va être réputée nécessaire. Va être réputée nécessaire, en droit, ça veut dire quoi? Ça veut dire que vous êtes en présence d'une présomption qui est irréfutable, vous êtes en présence d'une présomption qui est irréfragable, finalement. C'est ce qu'on appelle, dans le jargon juridique, une présomption juris et de jure. Alors, c'est en présence de cela que nous place le gouvernement. C'est absolument stupéfiant.
Je répète quelles sont les dispositions de cet article pour que les gens en mesurent eux-mêmes les conséquences. «Toute communication de renseignements personnels d'un organisme public à l'Institut dans le cadre de la mission de ce dernier est réputée ? est réputée ? nécessaire.» Et je répète à nouveau qu'il s'agit là, lorsqu'on utilise le mot «réputée», il s'agit là ni plus ni moins que d'une présomption irréfutable. Et c'est un nouvel article 9.1, M. le Président, que l'on veut ajouter. Ce n'est pas l'article 9.1 du projet de loi, mais c'est un article du projet de loi qui a pour but d'ajouter un nouvel article 9.1.
Alors, vous me permettrez, M. le Président, de terminer en vous disant ceci, en vous disant que nous sommes bien loin de l'époque où, lorsqu'on parlait de protection de la vie privée, on parlait de la protection du domicile, on parlait de la protection de la résidence. On est bien loin de cette époque-là, hein? Aujourd'hui, le monde s'est complexifié. Fort heureusement, le concept même de la protection de la vie privée a évolué, et aujourd'hui la protection de la vie privée couvre évidemment à peu près tous les volets de la vie personnelle, tous les volets de la vie individuelle.
Cela dit, cependant, il faut être bien conscient que de plus en plus nous sommes en présence de menaces à la vie privée. Nous sommes en présence de menaces qui tiennent au fait qu'il y a de l'utilisation de renseignements, des renseignements qui nous concernent, des renseignements confidentiels, il y a l'utilisation de tels renseignements à des fins administratives et à des fins commerciales. Il y a des menaces également qui tiennent au fait que de plus en plus il y a des couplages de fichiers, des comparaisons de fichiers qui contiennent des informations confidentielles, sans le consentement des citoyens. Et une autre menace par ailleurs, c'est des transferts de fichiers d'un ministère à un autre, ou d'un organisme à un autre, ou encore de l'État à l'entreprise privée.
Eh bien, je peux vous dire que, par rapport à toutes ces menaces à la vie privée, le projet de loi n'apporte absolument aucune réponse. Au contraire, le projet de loi consolide le rôle de l'État, la fonction de l'État et la capacité qu'a l'État non seulement d'obtenir des informations confidentielles à votre sujet, mais également de les traiter, d'avoir accès aux fichiers, de transmettre les fichiers à qui que ce soit et de procéder à une comparaison et à un couplage des fichiers contenant des informations personnelles. Voilà. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Chapleau. Nous cédons maintenant la parole au député de Vaudreuil. M. le député.
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux: Merci, M. le Président. À l'instar de mes collègues, et notamment de mon collègue de Chapleau qui m'a précédé, M. le Président, j'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 122 intitulé Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives.
n(20 h 30)n C'est un projet de loi de 123 articles et qui modifie plus de 26 lois. Et on se rappellera que c'est un projet de loi qui a été déposé en mai . Et, lorsque le ministre en a proposé l'adoption en deuxième lecture, il nous a annoncé que d'autres amendements importants seraient déposés, et finalement ces amendements n'ont été reçus qu'il y a deux jours. Et il est toujours assez surprenant, M. le Président, de voir que le gouvernement dépose des projets de loi, les discute et arrive subséquemment avec des amendements substantiels qui en changent la nature sur plusieurs aspects.
M. le Président, c'est un projet de loi qui, à certains égards, apparaît... dont les objectifs apparaissent un peu contradictoires. D'un côté, on veut restreindre l'accès aux documents publics, ce qui s'inscrit bien dans la tendance du gouvernement à être plus centralisateur et à conserver le secret sur ses actions ou sur ce qu'il veut faire. D'autre part, c'est un projet de loi qui augmente pour le gouvernement l'accès à des renseignements personnels privés.
M. le Président, je pense que, pour les citoyens, c'est un projet de loi fort important, parce qu'on touche à des aspects extrêmement majeurs pour chacun des individus, soit sa vie privée, ce qu'il fait en privé, ce qu'il peut avoir comme renseignements, qu'on retrouve maintenant dans toutes sortes de banques d'informations. Et ça revêt de plus en plus d'importance parce que le gouvernement envahit davantage les champs d'activité et les champs d'action des citoyens. Et on peut donc comprendre pourquoi les citoyens sont extrêmement préoccupés par cet accès, qui est rendu beaucoup plus facile par la technologie, à des renseignements qui les concernent. Et on sait que la divulgation de tels renseignements peut être extrêmement nocive et préjudiciable à des individus.
Nous avons eu récemment, au cours des derniers mois, par exemple à la Société de l'assurance automobile du Québec, le journaliste Michel Auger. On parle maintenant ? le ministre de la Santé ? d'établir la carte à puce, qui contiendrait toute une série de renseignements extrêmement confidentiels sur chacun des individus, chacune des personnes. D'une part, oui, ça peut peut-être être utile et aider à rendre le système plus efficace. D'autre part, on doit être extrêmement rigoureux sur la faculté ou la possibilité pour un organisme de rendre ces renseignements publics ou de donner à des personnes accès à ces renseignements.
M. le Président, ce projet de loi, il est le fruit d'un long processus. D'abord, en 1997, la Commission d'accès à l'information a déposé son rapport quinquennal. Subséquemment, il y a eu une commission parlementaire, où 53 groupes sont venus témoigner et exprimer leur opinion sur le rapport quinquennal de la Commission d'accès à l'information, et le gouvernement s'était engagé à ce moment-là... En juin 1997, c'était le député de Gouin qui était responsable, qui était ministre des Relations avec les citoyens et qui affirmait, plus précisément le 18 juin 1997: «Il y aura bientôt 10 ans que la loi sur l'accès à l'information n'a pas été révisée en profondeur. Il m'apparaît donc essentiel de corriger cette situation en amorçant dès maintenant la révision des deux lois.» La période s'est extensionnée jusqu'en mai 2000, et ce n'est qu'aujourd'hui, cet automne, que le gouvernement reprend la discussion à l'égard de ce projet de loi là.
Vous savez, il est arrivé des événements malheureux au cours de cette période où le gouvernement devait réviser la loi. Nous nous rappelions, par exemple, l'épisode où le ministère du Revenu avait transmis à une entreprise privée des renseignements nominatifs, des renseignements confidentiels sur des contribuables, et ce qui avait entraîné d'ailleurs, à ce moment-là, la ministre d'alors à prendre ses responsabilités et à démissionner comme ministre du Revenu. On se rappellera que le vice-premier ministre, ministre des Finances, qui avait été nommé ministre du Revenu, lui, s'est auto-absous en faisant adopter une loi pour rétroactivement corriger ce qui avait été fait. Mais la ministre du Revenu du temps avait, sur son honneur, démissionné. On se rappellera également un autre épisode avec le ministère du Revenu, lorsqu'il y a eu cette question de renseignements qui ont été divulgués à l'égard d'un député du Bloc québécois à Ottawa et que des renseignements auraient circulé entre le bureau du premier ministre et le ministère du Revenu. Donc, ce sont là, M. le Président, des exemples extrêmement graves et qui sont de nature à insécuriser les citoyens vis-à-vis l'utilisation qui peut être faite de renseignements qui sont extrêmement confidentiels.
Il y a un aspect qui est très préoccupant dans le projet de loi, M. le Président, et c'est celui qui permet à l'Institut de la statistique du Québec de créer avec les technologies de l'information ce qu'on appelle un mégafichier, un fichier, M. le Président, qui peut contenir des renseignements qui proviennent de plusieurs organismes gouvernementaux. Mon collègue de Chapleau en a évoqué tantôt, je pense qu'il est important de les reprendre parce que les citoyens concernés doivent être informés de ce qui peut se passer.
Donc, l'Institut de la statistique peut avoir accès à toutes les banques de données de nature confidentielle que l'on retrouve dans différents organismes gouvernementaux, par exemple la Régie de l'assurance maladie, M. le Président. Et vous connaissez vous-même les renseignements qui peuvent être contenus sur vous, sur d'autres députés, sur tout citoyen du Québec, sur sa condition, par exemple, de santé, les professionnels de la santé qu'il peut avoir consultés. Eh bien, ces renseignements-là pourront être transmis à l'Institut de la statistique du Québec dans un mégafichier. La Régie des rentes, la même chose, qui contient toute une série de renseignements sur vos salaires, sur, le cas échéant, si vous êtes retraité, vos prestations de retraite, prestations, par exemple, pour conjoint qui est décédé, en fait, de survivant, etc. Donc, ça pourra être inclus dans le mégafichier de l'Institut de la statistique du Québec; la CSST également, la même chose; le ministère du Revenu, nous en avons parlé tout à l'heure, M. le Président. Donc, dorénavant, ça pourra être intégré, par la technique du couplage, dans ce mégafichier de l'Institut de la statistique du Québec.
Or, comment peut-on accepter, M. le Président, que tous ces renseignements puissent aussi facilement être intégrés dans une banque, un mégafichier? Et, vous savez, lorsqu'on parle du Big Brother ? je pense que l'expression en anglais traduit bien ce qu'on veut dire ? et qu'on regarde évidemment le couplage des renseignements de tous ces organismes qui peut être fait à l'intérieur de ce mégafichier de l'Institut de la statistique, je dirais, c'est presque épeurant, M. le Président. La Société de l'assurance automobile, renseignements sur 4,4 millions de personnes; la RAMQ, je l'ai mentionné, 7,2 millions de personnes; le ministère du Revenu, 5 millions de personnes; la CSST, 1,5 million; la Sûreté du Québec, comme l'a évoqué tout à l'heure mon collègue de Chapleau, donc 6 millions de fiches à la Sûreté du Québec; la Régie des rentes, 3 000 100 personnes. Et on pourrait continuer d'en énumérer d'autres.
n(20 h 40)n Alors, M. le Président, c'est extrêmement, je pense, pour les citoyens du Québec, insécurisant que de voir que le gouvernement va permettre la création d'un mégafichier longitudinal de cette ampleur-là. Et, vous savez, lors des consultations en commission parlementaire, il y a des organismes qui sont venus exprimer une opinion fort dissidente à ce sujet-là. Et je ne voudrais vous citer que le Barreau du Québec, le Barreau du Québec, qui disait, et je cite, en commission parlementaire: «Quant à nous, c'est inacceptable qu'on n'utilise pas, effectivement, le système actuel, de telle sorte qu'aujourd'hui tout organisme public pourrait transmettre, si le texte de loi est adopté tel que proposé, à l'Institut de la statistique les renseignements, sans aucune démonstration de la nécessité ou de la pertinence, cet ensemble d'informations.» Donc, M. le Président, c'est ce que le Barreau du Québec venait dire devant la commission parlementaire. Et il ajoutait: «On doit avouer que ce que vous proposez à l'article 9.1 me semble une première en l'espèce. Pour avoir fait le tour de la question, c'est la première fois qu'on dit qu'une communication est réputée nécessaire. Ça constitue, en droit, ce qui me semble être une présomption absolue.» Présomption absolue, il est assez difficile d'aller à l'encontre de ça, dans un premier temps. Alors, M. le Président, il n'y a pas seulement l'opposition officielle qui s'inquiète, également d'autres organismes qui sont venus présenter leurs commentaires et leur opinion en commission parlementaire.
M. le Président, un autre aspect qui est extrêmement préoccupant, c'est le suivant. C'est que les renseignements d'ordre personnel puissent être transmis également à d'autres entreprises, des entreprises privées qui pourront les utiliser et sans le consentement des personnes concernées. M. le Président, nous nous serions attendus à ce que le projet de loi vienne encadrer beaucoup mieux l'accès aux renseignements personnels, vienne en quelque sorte mieux sécuriser les citoyens et les protéger. Au contraire, le gouvernement vient augmenter l'accès, sa capacité d'accès à ces renseignements-là et augmenter également la possibilité de les faire circuler dans toutes sortes de directions, auprès de tout un ensemble d'organismes. Et je comprends que ça s'inscrit évidemment dans cette attitude du gouvernement actuel d'être bureaucratique, centralisateur, de vouloir tout contrôler. Bien, je pense que ça, là, ce qu'il fait, ce qu'il propose dans le projet de loi, ça va trop loin pour les citoyens.
Deuxièmement, on se serait attendu que le gouvernement, en ce qui a trait à l'accès aux documents publics pour les citoyens, puisse élargir ce volet-là parce que l'accès à des documents publics, dans une démocratie, c'est un principe inaliénable, M. le Président, pour les citoyens. Le citoyen a droit à la transparence, il a droit à l'information. Il a droit de connaître, de savoir ce qui se passe, droit d'information sur les affaires du gouvernement, sur les documents, sur les projets que le gouvernement veut mettre en place. C'est une liberté essentielle dans une société comme la nôtre, M. le Président. Et actuellement on a l'impression que le gouvernement, vous savez, tourne les coins ronds, je dirais même a des tendances à vouloir bafouer ce principe, M. le Président.
Et nous avons eu, au cours des derniers jours, un exemple probant à cet égard-là alors que mon collègue de Châteauguay est intervenu pour faire état d'une demande d'accès à l'information qu'il avait produite auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux. La réponse qu'il a eue, c'est que le document n'existait pas. Or, par hasard, il est apparu... il a été démontré que le document existait. Mon collègue de Châteauguay l'a obtenu. Et c'est un document qui, normalement, était couvert par la loi sur l'accès à l'information. Et vous vous rappellerez que le ministre de la Santé, dans sa première réponse, a commencé à dire: Je vais vérifier les dates. Le lendemain, il disait: Écoutez, c'est un document qui n'est pas couvert par la loi sur l'accès à l'information parce que c'est un document informatique. Et, comme les documents informatisés sont couverts par la loi sur l'accès à l'information, évidemment, le ministre, là, disait: Maintenant, j'ai eu un avis de mon contentieux, ça n'a pas été vérifié évidemment par la Commission d'accès à l'information, et l'opposition veut monter un ballon.
Or, M. le Président, ce qui est en cause ici, vous savez, c'est l'application de la loi sur l'accès à l'information. Comment pouvez-vous, dans notre système, si un ministère certifie qu'il n'y a pas de document, que l'opposition puisse même aller en appel là-dessus? Et je pense que le cas qui a été démontré avec le ministre de la Santé, c'est qu'il a mal interprété et mal appliqué la loi sur l'accès à l'information, d'autant plus que c'est un document qui avait été préparé par une direction du ministère, M. le Président. Donc, je pense que cet événement est de nature à nous préoccuper beaucoup. Et, vous savez, la transparence, dans notre société démocratique, je pense, c'est ça qui doit prédominer, ce n'est pas le secret. Le secret, ça permet au gouvernement de couvrir ses erreurs. Puis je pense que ce que nous avons vu avec le ministre de la Santé, c'est un bon exemple de ça, ou son incompétence, ou vouloir garder secrètes des choses, des informations auxquelles les citoyens ont droit.
Mon collègue de Marquette disait en commission parlementaire... c'est-à-dire ici, à l'Assemblée nationale, en ce qui concerne le projet de loi n° 122: «Des modifications importantes, des modifications de fond devront être apportées.» Mais les modifications les plus importantes, M. le Président, et, vous savez, malgré les lois, c'est également l'attitude et le comportement du gouvernement... Et ce que nous avons vécu au cours des derniers jours, M. le Président, est inquiétant. Parce que j'ai moi-même fait des demandes d'accès à l'information au ministère de l'Éducation. Dans certains cas, j'ai reçu la réponse: Le document n'existe pas. Est-ce que c'est la même chose que ce qui s'est passé au ministère de la Santé, où on avait dit: «Le document n'existe pas», mais le document existait? M. le Président, c'est une interrogation qu'on doit se poser. Et il me semble que le projet de loi devrait pouvoir clarifier les règles pour qu'on ne puisse pas avoir à répéter des situations comme celles-là.
Le projet de loi n° 122 modifie également le champ d'application de la loi. Il étend sa portée à un certain nombre d'organismes publics, bon, par exemple, les ordres professionnels, avec un système qui est assez complexe d'ailleurs et sur lequel on va revenir.
Il élargit la notion d'organismes municipaux. On va l'appliquer dorénavant aux CRD, également aux CLD ou encore à des organismes municipaux ? et je vous donne un exemple, M. le Président ? qui sont reliés à des municipalités et où au moins un élu municipal siège, et si la municipalité contribue financièrement. Donc, ces organismes ne seront peut-être pas très importants, mais on les soumet à la loi sur l'accès à l'information.
Pendant ce temps-là, vous savez, on exclut de la loi sur l'accès à l'information les organismes aussi importants que les sociétés d'État, que ce soit Hydro-Québec, la Caisse de dépôt, d'autres sociétés d'État qui utilisent les fonds publics, M. le Président, et des fonds publics beaucoup plus importants que les organismes municipaux ou paramunicipaux que je viens de mentionner. Il me semble que c'est illogique. D'ailleurs, des organismes sont venus devant la commission parlementaire demander d'assujettir à la loi sur l'accès à l'information les sociétés d'État. Je pense que, ça, c'est important de le faire.
Donc, M. le Président, en conclusion, je voudrais simplement vous dire ceci. Nous ne pouvons voter, être d'accord avec le principe du projet de loi n° 122 parce que, d'une part, ce projet de loi vient restreindre l'accès aux documents publics, ce qui est contraire, vous savez, à l'évolution de la liberté et de la démocratie. Donc, il vient restreindre l'accès à des documents publics de diverses façons, comme nous l'avons mentionné. D'autre part, il élargit l'accès à des renseignements d'ordre privé sur les citoyens, des renseignements personnels et confidentiels, pour le gouvernement ou pour certains de ses organismes. Donc, M. le Président, je pense qu'on ne peut pas accepter, dans ce contexte-là, le projet de loi, à moins qu'il y ait des modifications substantielles qui y soient apportées. Merci, M. le Président.
n(20 h 50)nLe Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Vaudreuil. Nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Alors, Mme la députée.
Mme Margaret F. Delisle
Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, d'entrée de jeu, M. le Président, je voudrais vous dire que j'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 122, qui est une loi qui modifie de façon assez importante la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi, également, sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives. C'est un projet de loi qui comporte 123 articles, qui amende 23 lois. Et, si on peut qualifier la plupart des lois d'importantes, je manquerais de temps évidemment pour vous faire une nomenclature des 27 lois qui sont amendées. Mais je dois vous dire que ce sont quand même des lois qui sont majeures, lorsqu'on considère que ces lois-là ont une portée importante sur la gestion quotidienne ou même par rapport à nos vies.
M. le Président, ce projet de loi modifie substantiellement les règles en matière d'accès à l'information. Et je dois vous dire que je suis très, très, très déçue de voir que le gouvernement a plutôt choisi de se protéger lui-même plutôt que de protéger le citoyen ou les citoyens et les citoyennes du Québec. Et je m'explique. Je me rappelle, lorsque la loi sur l'accès à l'information avait été votée ici, à l'Assemblée nationale, sans entrer dans l'ensemble des détails, je peux vous dire que, comme citoyen et comme citoyenne, c'était un outil important pour le citoyen puisque ça lui permettait d'avoir accès à des documents publics, à des décisions que des gouvernements, que ce soient des gouvernements locaux ou le gouvernement provincial, le gouvernement du Québec, pouvaient avoir prises comme décisions et ça lui permettait, pour toutes sortes de raisons, mais au moins d'avoir accès aux documents qui avaient motivé les décisions ou qui avaient conduit le gouvernement à prendre x ou y décision. Et le citoyen sentait évidemment qu'il avait un droit important de participer, finalement, comme citoyen, pas à la décision, mais certainement de mieux comprendre la décision du gouvernement ou des gouvernements locaux. Ça permettait aussi, très assurément, aux décideurs locaux, aux élus locaux, aux élus du gouvernement de faire peut-être un petit peu plus attention et de s'assurer que toutes les décisions étaient prises conformément aux lois, en fonction des règles établies ou des règlements qui étaient en vigueur à l'époque. Donc, vous voyez le portrait, M. le Président, je pense que c'était une bonne loi.
Est arrivé, au fil des ans, d'autres lois, dont celle sur la protection des renseignements personnels des citoyens. Alors, on pourrait croire que cette loi-là, cette deuxième loi-là nous protégeait comme citoyens, permettait aux citoyens de dormir en paix, puis ils avaient l'assurance que les informations qu'ils donnaient à des organismes publics, que ce soit dans le domaine de la santé, dans le domaine juridique et que ce soit à l'assurance automobile ou peu importe, les données qu'ils fournissaient aux gens avec qui ils travaillaient, ces gens-là les confinaient dans un dossier, et, pour les biens évidemment de la cause ou pour les biens de la situation qui les confrontait, ces gens-là pouvaient aussi dire: Bon, bien, je leur ai donné cette information-là, mais ça va rester là. Malheureusement, M. le Président, ce n'est pas tout à fait ce qui se passe maintenant.
Il y a des centaines d'exemples. Je n'ai même pas le temps de commencer à vous en énumérer plus que deux, trois, mais il y a des centaines d'exemples où on a non seulement empêché les citoyens d'avoir accès aux documents publics, on leur a rendu la tâche éminemment plus difficile, alors que le gouvernement est censé aider les citoyens dans cette démarche puisque c'est une loi que le gouvernement a votée. Et il y a des centaines, et des centaines, et des centaines d'exemples, certains qui sont très récents, où les informations, les renseignements de type personnel, donc, qui nous concernent comme citoyens, ont été rendus publics, ont été donnés pour des fins de sondage, pour permettre de monter des statistiques, et tout ça, évidemment, à l'insu du citoyen, et plusieurs fois, le citoyen même s'en est aperçu peut-être quelques années plus tard, dans le cadre d'un dossier dont il avait besoin.
M. le Président, à mon avis, c'est un peu le monde à l'envers. Les citoyens confient au gouvernement... C'est un privilège qu'on nous confie ici, à l'Assemblée nationale, autant au gouvernement qu'à l'opposition ? on est d'abord et avant tout des députés. On nous confie la responsabilité de s'assurer que, si monsieur ou madame X souhaitent avoir accès à un document, ces gens-là, on va leur faciliter la tâche. Mais ce n'est pas ça qu'on fait. On leur rend tellement ça compliqué, tellement coûteux en temps, en énergie, en stress et en argent, financièrement, que c'est décourageant même de vouloir tenter, tenter, M. le Président, d'avoir accès à des documents publics.
Pourtant, ça ne devrait pas être compliqué. La loi est là. Il y a des recours, c'est vrai. La Commission d'accès à l'information peut décider, lorsqu'un citoyen se fait refuser ou se voit refusé l'accès à un document, pour toutes sortes de raisons, qui sont peut-être justifiées, peut décider que ce n'est pas un document public. Là, c'est rendu que c'est quasi impossible d'avoir accès à des documents sans passer par de multiples... C'est une course à obstacles, en fait, M. le Président. Ce n'est pas plus compliqué que ça, c'est une course à obstacles.
Et j'en veux pour preuve nous-mêmes, qui sommes ici, qui sommes députés, donc, qui avons à protéger, nous aussi... Ce n'est pas parce qu'on est dans l'opposition qu'on n'a pas le droit de s'informer sur des décisions que prend le gouvernement. Donc, cette semaine, pas plus tard qu'hier et avant-hier... aujourd'hui et hier, notre collègue le député de Châteauguay, avec notre autre collègue qui est le député de Nelligan, ont tenté, par la voie de la loi sur l'accès à l'information, d'obtenir de l'information concernant les services qui sont dispensés dans le domaine de la santé à la communauté anglophone. Ils avaient entendu dire que c'était possible qu'on change certains articles de la loi n° 142, cette loi qui donne accès aux anglophones aux services dans la langue... leur langue d'adoption. Alors, mon collègue s'est fait dire qu'il n'y avait pas de document qui existait pour supporter une telle demande. Or, mes collègues avaient en main... Ils savaient fort bien qu'il existait un document. Ils ont fait la preuve hors de tout doute, en cette Chambre, en deux jours, que le document existait bel et bien, mais... Et là je ne veux pas blâmer personne, M. le Président, mais permettez-moi de vous dire qu'on a joué, du côté du gouvernement... Est-ce que c'est le cabinet du ministre? Est-ce que c'est quelqu'un dans son entourage? Moi, je ne suis pas ici pour blâmer qui que ce soit, mais, lorsqu'on demande un document et qu'on leur dit qu'un document n'a pas été déposé dans le cadre d'une commission d'information, on a joué sur le mot «document».
C'est vrai qu'un document, ça peut être du papier. Mais, aujourd'hui, en l'an 2001 ? puis les gens qui nous écoutent vont certainement être d'accord avec moi ? un document, aujourd'hui, peut être considéré... Pardon. Un document peut ne pas être uniquement du papier, ça peut être sous une forme écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. Et cette nomenclature de types de documents disponibles ou reconnus comme documents, on la retrouve non seulement dans la loi, mais aussi sur le site Internet de la Commission sur l'accès à l'information. Alors, pourquoi le gouvernement cherche-t-il à cacher, finalement, des documents ou refuse-t-il de les rendre publics? Et, M. le Président, le gouvernement tente de faire croire à la population que l'opposition cherche pouilles. On cherche la vérité, c'est tout ce qu'on fait, M. le Président, et ça fait partie de notre devoir.
M. le Président, quand je dis que le gouvernement rend ça beaucoup plus compliqué, c'est vrai. Quand je vous annonce ou que je vous affirme que le gouvernement complique la vie des citoyens qui cherchent à avoir des documents publics, je vous dirais également que le gouvernement aussi allège, dans un certain sens, l'encadrement ou les lois qui divulguent à gauche et à droite des renseignements personnels qui nous concernent.
n(21 heures)n Cette loi, M. le Président, va créer ou va faire en sorte qu'on va se retrouver avec ce qu'on appelle un Big Brother québécois, et je m'explique.
Pour les gens qui nous écoutent, je pense que c'est important de faire la nomenclature des milliers, pour ne pas dire des... Ah, puis, des milliers, mettons-en, des millions de dossiers que l'on retrouve uniquement dans les ministères québécois et qui concernent des millions, des millions et des millions d'informations sur nos vies personnelles.
Qu'on pense à la Société d'assurance automobile. Savez-vous qu'on y retrouve 4,4 millions de personnes qui détiennent un permis de conduire? Ce qui veut dire qu'il y a 4,4 millions de personnes dont les renseignements personnels se retrouvent dans ces fichiers. Et on sait ce qui est arrivé au journaliste Michel Auger, notamment. On sait ce qui est arrivé... on a retrouvé quelques taupes à l'intérieur de la SAAQ.
Si je vous disais qu'il y a 7,2 millions de dossiers à la Régie de l'assurance maladie, tout ce qui vous touche personnellement, vos maladies, vos opérations, les médicaments, je vous dirais même, si vous avez... si vous êtes une jeune fille ou une femme aujourd'hui, avez eu un avortement, c'est là-dedans, ça, là, là. Et, moi, je ne me sens pas très à l'aise de savoir que ces documents-là ne sont pas plus protégés que ça.
Au ministère du Revenu, on parle de 5 millions de contribuables qui produisent une déclaration annuelle de revenus. Ce sont encore des dossiers qui contiennent des informations personnelles sur notre compte. La CSST, 1,5 millions de dossiers de victimes d'accidents du travail. Que dire de la Régie des rentes où il y a 3,6 millions de personnes, 3,6 millions de personnes qui sont inscrites au régime, des informations qui proviennent de relevés d'emploi, de déclarations de revenus.
La Sûreté du Québec, 6 millions de fiches de plaignants, de témoins pertinents, de suspects, de victimes, de prévenus ainsi que de renseignements connexes sur des marchandises volées et les véhicules, lors d'événements criminels ou non.
Le ministère de l'Éducation, M. le Président, tous des dossiers qui touchent la fréquentation scolaire, 3,5 millions de personnes. Ça touche 4 millions d'élèves, des fichiers-élèves concernant les résultats scolaires, les miens et les vôtres. Pas tout à faut sûre, moi, que j'aimerais que mes résultats scolaires circulent, là, soit dit en passant. Ce n'est pas nécessaire d'aller les voir non plus. 400 000 enfants qui sont admis à l'enseignement en anglais, 350 000 personnes qui font partie de la clientèle adulte du ministère de l'Éducation; 1 750 000 élèves ayant fréquenté le collégial depuis 1967; 400 000 personnes qui ont soit été candidats ou bénéficiaires d'aide financière aux étudiants.
Ça, M. le Président, là, c'est ce qu'on appelle le Big Brother québécois; c'est un monstre. Je vous le dis tout de suite, c'est un monstre. Et le gouvernement voudrait que le Parti libéral du Québec soit d'accord avec le projet de loi n° 122. Impossible, M. le Président.
On se rappellera que la loi sur l'accès à l'information est tenue... la Commission, c'est-à-dire... la Commission d'accès à l'information doit périodiquement, aux cinq ans donc, revoir et faire des recommandations; la loi doit être revue sur une base quinquennale. En 1997, c'était le temps de revoir cette loi. Il y a eu en commission parlementaire des gens qui sont venus faire des commentaires sur l'application de la Commission d'accès à l'information. Plusieurs recommandations avaient découlé de ces auditions.
Laissez-moi, M. le Président, vous en nommer quelques-unes. «Le ? et je cite ? régime général de transfert de renseignements personnels entre organismes publics doit inclure un contrôle a priori d'opportunité confié à la Commission d'accès à l'information. La commission ? je fais ici référence à la commission de la culture ? croit fermement que la mission de protection du public, confiée par le législateur aux ordres professionnels, commande que ces derniers soient soumis à un régime de transparence administrative comparable à celui des organismes publics relevant du gouvernement du Québec.»
La commission de la culture recommandait de maintenir le statu quo relativement à la question du droit d'appel. La commission s'était également penchée sur toute la question des nouvelles technologies. La Commission d'accès à l'information avait, entre autres, recommandé que les organisations publiques et privées qui projettent d'utiliser l'autoroute de l'information procèdent au préalable à une évaluation des impacts éventuels de cette nouvelle technologie sur la protection des renseignements personnels et que des mesures de sécurité soient en place pour protéger ces renseignements.
Suite au dépôt de ce rapport-là, M. le Président, le gouvernement s'était engagé à déposer un projet de loi modifiant les lois actuelles en matière d'accès à l'information. Ça, c'est en 1997. On est à la fin de l'an 2001. Et il y a eu, au fil de ces quatre ans, des événements malheureux, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, il y a eu une ministre qui a dû malheureusement démissionner pour des fuites de renseignements; on se rappellera, entre autres, au ministère du Revenu, tout l'épisode du député bloquiste qui voulait se représenter aux élections fédérales et que son dossier s'était retrouvé entre les mains de personnes qui ne lui voulaient certainement pas du bien.
M. le Président, il y a, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, 123 articles dans ce projet de loi. Laissez-moi vous mentionner ceux qui attirent davantage mon attention, si vous le permettez. L'article 24, qui prévoit qu'un organisme public ne peut communiquer, sans le consentement des personnes concernées, un fichier de renseignements personnels à un organisme public ou à une personne qui le requiert pour le comparer ou le coupler à un fichier qu'il détient. En soi, ça a l'air bien correct. Pourtant, à ce chapitre, deux exceptions sont introduites, deux, afin d'autoriser cette transmission pour fins de couplage, soit, si c'est la Commission d'accès à l'information ou le gouvernement qui l'autorise, à celui qui en fait la demande. Le gouvernement donne donc, par cette disposition, le pouvoir d'autoriser des demandes pour fins de croisement de fichiers. Précisons qu'en cas de refus de la part de la CAI le gouvernement peut lui-même accorder une telle autorisation et fixer les conditions de transmission des fichiers.
M. le Président, cette loi est également modifiée afin d'y assujettir les renseignements détenus par les ordres professionnels et d'y prévoir l'obligation de veiller à ce que la confidentialité des renseignements personnels soit assurée lorsqu'ils sont transmis par un moyen technologique.
M. le Président, j'ai mentionné tout à l'heure l'importance que le gouvernement va accorder à l'Institut de la statistique du Québec, cet Institut qui devient tellement gros qu'il sera quasi impossible, à mon avis, d'empêcher les renseignements personnels qui nous concernent d'échapper à toute cette législation.
On se serait attendu, M. le Président, à ce que le gouvernement du Québec privilégie les droits des citoyens, privilégie la transparence. On se rend compte, dans ce projet de loi là, qu'il n'en est rien. Le gouvernement du Québec a plutôt choisi la course à obstacles pour empêcher les citoyens, empêcher l'opposition, empêcher les hommes et les femmes qui souhaitent avoir accès à l'information qui les concerne, une information à laquelle ils ont droit en vertu de la loi telle qu'elle a été déposée il y a plusieurs années... Donc, le gouvernement a plutôt choisi d'empêcher les citoyens d'y avoir accès et a rendu beaucoup plus facile la transmission des renseignements personnels qui nous concernent.
Donc, M. le Président, il est impossible, je ne peux pas voter en faveur d'un tel projet de loi qui fait fi de toute transparence. Merci.
Des voix: Bravo!
n(21 h 10)nLe Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Jean-Talon. Mme la leader adjointe du gouvernement.
Mme Denise Carrier-Perreault
Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Alors, M. le Président, depuis... Ça fait déjà plusieurs heures que j'entends les députés de l'opposition parler sur ce projet de loi. Comme vous le savez, M. le Président, ce projet de loi, sur lequel on est à débattre présentement, c'est un projet de loi qui a pour origine... On sait d'où ça vient. C'est d'abord obligatoire, c'est une révision de la loi qui date d'aussi loin que 1997. Donc, un processus qui est enclenché, qui est mis en branle depuis 1997. Comme on le sait aussi, M. le Président, la loi prévoit que nous avons cinq ans pour faire cette révision du projet de loi. Alors, c'est vrai qu'il a été présenté une première fois en cette Chambre le 11 mai 2000, il a été réinscrit par la suite le 5 avril 2001. Entre-temps, entre les deux périodes, comme tout le monde le sait, il y a eu aussi des consultations qui ont été effectuées. Donc, il y a des gens qui ont été rencontrés qui se sont exprimés, qui ont demandé des corrections, qui ont fait valoir leur point de vue, qui ont été entendus, qui ont été écoutés et, bien sûr, il y a une série d'amendements qui ont été préparés suite à ces consultations, amendements qui ont été réclamés à grands cris par les gens de l'opposition officielle et amendements qui ont aussi été reçus. Maintenant, au moment où on se parle, l'opposition officielle a en main ces amendements-là.
Donc, c'est effectivement un débat sur l'adoption de principe de ce projet de loi là qui dure depuis le 13 juin... Grosso modo, là, M. le Président, on peut, sans se tromper, dire que le débat sur l'adoption du principe, du bien-fondé d'adopter ce projet de loi là dure en cette Chambre depuis, minimum, le 13 juin 2000. Donc, on peut dire que c'est l'équivalent de 18 mois. Donc, ça fait 18 mois qu'on a entamé le processus d'adoption de principe de ce projet de loi là. C'est vrai que ça ne s'est pas tout fait dans la même séance, il y a eu plusieurs séances. On parle de quatre séances différentes, et j'ai les dates devant moi: on a donc débattu du principe le 13 juin 2000; on a recommencé les discussions sur le principe de ce même projet de loi le 18 octobre 2001; on a poursuivi le 24 octobre dernier; et, évidemment, on continue aujourd'hui à débattre de ce projet de loi. Du principe, toujours, M. le Président, alors que l'on sait que cette loi doit être révisée, revue, corrigée pour la date prévue par la loi elle-même. Alors, nous avons donc entendu jusqu'à ce moment une vingtaine de députés de l'opposition qui se sont exprimés longuement comme c'est leur droit, j'en conviens. Mais, mis bout à bout, tout ça, là, depuis les derniers jours, c'est à peu près six heures qu'on a de débats sur le principe encore. Donc, on peut voir, là, dans le temps, la durée importante que... En tout cas, le temps important qu'on a mis à débattre du principe.
Alors, moi, au moment où on se parle, M. le Président, je suis très consciente qu'il y a des choses qui sont à regarder, qui sont à surveiller et à étudier en profondeur. Si le principe, par exemple, était adopté dès maintenant, on pourrait, à ce moment-ci, aller en commission parlementaire et poursuivre le débat. Et, à ce moment-là, on ne serait pas sur du monologue, vous comprenez, M. le Président, on serait sur un dialogue. On pourrait donc, à ce moment-là, profiter d'un temps plus important pour corriger le projet de loi que de prendre le temps qu'on en a mis... Parce qu'il ne faudrait pas, surtout, remettre le même temps à débattre du principe, un principe qu'on débat depuis 18 mois. Alors, moi, je pense qu'à ce moment-ci, M. le Président, sur le principe, là, ça fait déjà... Je pense que j'ai fait une démonstration assez claire, là, que sur le principe... Je pense, ça fait assez longtemps que ça dure, qu'il serait grand temps, compte tenu des assertions puis des prétentions de l'opposition officielle, que je partage, c'est un projet de loi qui touche de près les citoyens... Alors, je suis convaincue qu'à ce moment-ci ce serait important, même urgent, voire urgent de se rendre en commission parlementaire pour pouvoir améliorer le projet de loi, s'il y a lieu de le faire.
Motion de mise aux voix immédiate
Alors, à ce moment-ci, compte tenu de ce que je viens de vous dire, M. le Président, je proposerais la mise aux voix immédiate du principe de ce projet de loi en vertu de l'article 202 de notre règlement.
Le Vice-Président (M. Pinard): En vertu de 212?
Mme Carrier-Perreault: 202, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Pinard): 202.
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la leader adjointe, je vais suspendre quelques instants. Je vais vérifier avec mes adjoints, et nous allons vous revenir concernant votre motion.
Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président.
Argumentation
Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Saint-Laurent.
M. Jacques Dupuis
M. Dupuis: M. le Président, vous avez le loisir, en vertu de l'article 203 du règlement, de rejeter d'office la motion qui est proposée par la députée des Chutes-de-la-Chaudière si vous estimez, par exemple, que le temps de parole des députés serait lésé si cette motion devait être adoptée.
La députée s'est tirée dans le pied elle-même lorsqu'elle a proposé la motion en disant: Je comprends et je conçois que ce projet de loi là est important et que les députés de l'opposition ont parfaitement le droit de s'exprimer. Elle a dit... Il y a une vingtaine de députés qui se sont exprimés à venir jusqu'à maintenant. M. le Président, nous sommes 49 députés d'opposition et nous sommes d'accord sur un point avec la députée des Chutes, c'est que le projet de loi est un projet de loi important, tellement important que nous avons besoin d'exprimer notre voix sur ce projet de loi là, ce projet de loi qui a des dispositions extraordinairement importantes pour la transmission de renseignements nominatifs, de renseignements personnels et de renseignements des organismes publics.
Et moi, je vais vous demander, M. le Président, je vais vous demander respectueusement d'exercer le droit qui est le vôtre, celui que personne ne peut vous enlever, celui que vous avez de faire respecter le droit des parlementaires et que vous avez, évidemment, en vertu de l'article 203, de décider d'office, sans avoir besoin de délibérer, que, le projet de loi étant un projet de loi important, le gouvernement l'admettant lui-même, les députés de l'opposition auraient tout à fait le loisir de s'exprimer sur ce projet de loi là.
Et moi, je vous dis, M. le Président, comme député de l'opposition, qu'il est clair dans mon esprit ? et je vous le soumets respectueusement ? que les droits des parlementaires seraient lésés, si vous deviez même considérer d'accepter cette motion-là, compte tenu du peu de députés qui ont été entendus à venir jusqu'à maintenant.
Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Laurent. Alors, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, nous ne procéderons pas en vertu de l'article 204 immédiatement. Je vais me retirer quelques instants et je vais vérifier, actuellement, quel est l'état du droit parlementaire dans ces circonstances.
(Suspension de la séance à 21 h 18)
(Reprise à 22 h 13)
Le Vice-Président (M. Pinard): Veuillez vous asseoir.Alors, avant la suspension, Mme la leader adjointe du gouvernement a présenté une motion de mise au voix immédiate. Question préalable. Alors, je prends en délibéré la question de savoir si elle est recevable ou pas et je rendrai une décision demain, aux affaires du jour.
Or, du consentement... Parce que, je tiens à vous mentionner, la dernière présentation a été faite en 1973 par M. Claude Charron et, avant lui, 20 ans antérieurs. Alors, ce n'est pas coutume en cette Assemblée, et on se doit de se pencher et de donner un verdict juste et équitable.
Or, du consentement de l'Assemblée, le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 122 se poursuit donc.
Je comprends que l'Assemblée est maintenant saisie d'une motion de report et que cette motion est rejetée.
Mme la leader adjointe présente une motion d'ajournement du débat et une motion d'ajournement de l'Assemblée. Ces motions sont donc adoptées.
J'ajourne nos travaux à demain matin, 10 heures.
Ajournement
(Fin de la séance à 22 h 15)