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Version finale

36th Legislature, 2nd Session
(March 22, 2001 au March 12, 2003)

Tuesday, June 12, 2001 - Vol. 37 N° 36

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Table des matières

Déclaration du président concernant des événements survenus lors de la séance
du 8 juin 2001 mettant en cause l'ordre et le décorum à l'Assemblée
ainsi que l'autorité et la neutralité de la présidence

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures onze minutes)

Le Président: Bien. Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir un moment.

Bien. Veuillez vous asseoir.

Déclaration du président concernant
des événements survenus lors de la séance
du 8 juin 2001 mettant en cause l'ordre
et le décorum à l'Assemblée ainsi que
l'autorité et la neutralité de la présidence

Alors, avant d'aborder les affaires courantes, j'aurais une déclaration à faire, et je demande la collaboration de tous les membres de l'Assemblée pour que cette déclaration puisse être rendue avec toute la tranquillité qu'il sied. Alors, lors de la séance de l'Assemblée du 8 juin dernier...

M. Mulcair: Question de règlement.

Le Président: Je m'excuse, M. le député, j'ai commencé une déclaration et je vais terminer. J'entendrai les questions de règlement par la suite.

M. Mulcair: ...

Le Président: La déclaration du président... Le président, en vertu de la tradition parlementaire, peut faire une déclaration au moment où il le pense opportun pour les fins de remplir son mandat: bien diriger les travaux de l'Assemblée.

M. Mulcair: ...

Le Président: Je m'excuse, je ne vous reconnais pas, M. le député de Chomedey, en question de règlement. J'ai la parole, et la présidence n'entend pas reconnaître qui que ce soit avant qu'il ait terminé sa déclaration.

M. Mulcair: ...

Le Président: M. le député de Chomedey, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît! Merci.

n (10 h 10) n

Alors, lors de la séance de l'Assemblée du 8 juin dernier, au moment de la reprise des travaux après la suspension de 18 heures à 20 heures, des événements remettant fortement en cause l'ordre et le décorum à l'Assemblée ainsi que l'autorité et la neutralité de la présidence sont survenus. Le deuxième vice-président de l'Assemblée et député de Saint-Maurice occupait alors le fauteuil. Compte tenu de la gravité des événements et de l'impact qu'ils peuvent avoir sur la dignité et la bonne marche de nos travaux, je considère qu'il est du devoir de la présidence, dans les circonstances, de faire le point sur toute cette affaire.

Au surplus, j'ai reçu, ce matin, une lettre du leader de l'opposition officielle sur cette question et un avis de violation de droit et de privilège de la part des députés suivants: MM. les députés de Vachon, de Champlain, de Drummond, de Bertrand, de Saguenay, de Nicolet-Yamaska, d'Iberville, de Dubuc et de Mme la députée de Marie-Victorin. Selon ces députés, le leader de l'opposition officielle aurait contrevenu, lors de la séance de vendredi dernier, aux paragraphes 5 et 6 de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale. Je répondrai plus tard à cette question que je prends d'ailleurs en délibéré. Mais, avant, j'ai décidé de faire une déclaration sur l'ensemble de l'affaire.

Puisqu'il s'agit de la neutralité, de la crédibilité et de la capacité à diriger les travaux de cette Assemblée dont il est principalement question ici, il importe, avant de traiter spécifiquement des faits qui se sont produits vendredi soir, de revenir de façon plus générale sur toute la problématique relative à la capacité qu'ont les membres de la présidence de diriger les débats portant sur le projet de loi n° 29, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière municipale, particulièrement lié au vaste dossier des fusions forcées.

Mercredi le 6 juin, je rendais une directive dans laquelle j'établissais un cadre pouvant guider les vice-présidents de l'Assemblée dans l'exercice de leurs activités politiques, et ce, afin de déterminer, dans la mesure du possible, de quelle marge de manoeuvre ils disposent à cet égard. Cette directive faisait suite à un rappel au règlement de la part du leader de l'opposition officielle, le vendredi 1er juin, par lequel il demandait si certaines prises de position publiques du premier vice-président et député de Chauveau l'empêchaient de présider les travaux de l'Assemblée sur le projet de loi n° 29.

Dans la directive précitée eu égard à la marge de manoeuvre politique des vice-présidents, je mentionnais ce qui suit, et je cite: «Des règles moins rigides s'appliquent aux vice-présidents. Ceux-ci peuvent présenter des motions, participer aux débats ainsi que voter à l'Assemblée et en commission parlementaire. Cela dit, même si les règles sont plus souples à leur égard, les vice-présidents doivent cependant faire preuve de sensibilité politique avant d'intervenir ou de voter sur une question. Ils doivent avoir à l'esprit qu'ils ont également une nécessaire crédibilité à conserver pour présider les débats de l'Assemblée. C'est la raison pour laquelle, selon une pratique établie depuis un certain temps déjà, les vice-présidents votent presque uniquement lorsqu'il y a unanimité sur une question. Cela relève toutefois de leur discrétion.

«Quant aux activités politiques à l'extérieur des travaux parlementaires, une attitude de prudence est également de mise. Certes, ils peuvent participer aux activités politiques de leur parti à l'extérieur de l'Assemblée. Ils peuvent notamment prendre part aux réunions du caucus. Tout comme leur participation aux travaux parlementaires, les règles à cet égard ne sont pas très précises. Encore là, les vice-présidents doivent adopter un comportement de nature à conserver la confiance des parlementaires lorsqu'ils président des débats de l'Assemblée.» Fin de la citation.

Plus loin, je mentionnais que, en cette matière, il est très difficile de tracer une frontière entre ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. C'était une question de perception et de sensibilité politique. Je soulignais également que, en fonction du contexte politique, une activité d'un vice-président pourrait être considérée acceptable dans le cadre d'un dossier, alors que la même activité pourrait être jugée plus sévèrement dans le cadre d'un autre dossier.

Cela dit, même en admettant qu'il est impossible d'établir un cadre précis d'intervention des vice-présidents sur la scène politique, je faisais part à l'Assemblée des règles qu'avaient consenti à suivre de bon gré les membres de la vice-présidence, lesquelles règles établissent de façon générale ce qui suit.

Les vice-présidents éviteront dorénavant de participer aux travaux de l'Assemblée ou à ceux d'une commission parlementaire, surtout sur un sujet contesté. Si un vice-président prenait néanmoins position dans le cadre des délibérations parlementaires sur une question dont l'Assemblée est saisie, il devrait éviter de présider les débats sur cette question.

Les vice-présidents devraient voter uniquement lorsqu'il y a unanimité ou encore lors du vote final sur une question. Lorsqu'un vice-président se prononce sur une question précise dont est saisie l'Assemblée, cela ne devrait pas l'empêcher de présider les travaux sur une autre question dont serait ultérieurement saisie l'Assemblée, et ce, même si ces questions portent sur le même sujet. Dans toute autre circonstance, les vice-présidents verraient à faire preuve de prudence et de réserve dans leurs interventions, conformément aux principes énoncés précédemment.

C'est en tenant compte de ces règles et du fait que ses positions sur les regroupements municipaux avaient été clairement énoncées sur la place publique que le premier vice-président avait alors choisi de ne pas présider les débats portant sur le projet de loi n° 29. Une chose est certaine, même si cela n'avait pas été dit directement dans la directive, la participation du premier vice-président aux travaux d'une commission parlementaire sur le sujet concerné par le projet de loi n° 29 a évidemment influencé grandement sa décision.

Lors de la séance du 8 juin, en après-midi, le même genre de question a été posée à l'endroit du troisième vice-président, le député de Jeanne-Mance. Le député de Marquette et le leader de l'opposition officielle, le député de Brome-Missisquoi, à l'instar de ce qui avait été fait à l'égard du premier vice-président, ont mis en cause la capacité du troisième vice-président de diriger les débats sur le projet de loi n° 29 compte tenu que ce dernier a récemment appuyé un candidat à la mairie de Montréal en vue des premières élections de la nouvelle ville fusionnée qui doivent se tenir l'automne prochain. Selon le leader de l'opposition officielle, il faut voir un lien entre un tel appui et un appui à la fusion municipale sur l'île de Montréal.

Le leader a également soulevé, en privé, une autre situation qui avait pour effet d'empêcher le troisième vice-président de diriger les travaux de l'Assemblée sur le projet de loi n° 29. Il s'agit d'une situation qui concerne le troisième vice-président à titre personnel. Le rappel au règlement soulevé par le député de Marquette et le leader de l'opposition officielle a alors été pris en délibéré par le troisième vice-président, et ce dernier s'est retiré de la présidence des débats pour le reste de la séance, cédant le fauteuil au deuxième vice-président.

À la lumière des faits qui ont été soulevés ainsi que du cadre d'intervention politique des vice-présidents établi dans la directive que j'ai rendue la semaine dernière, le troisième vice-président est-il apte à poursuivre la direction des débats de l'Assemblée sur le projet de loi n° 29? Il n'y a aucun doute dans mon esprit que cette question doit être répondue par l'affirmative. Voici maintenant pourquoi j'en arrive à une telle conclusion.

Premièrement, à aucun moment le troisième vice-président n'a participé aux travaux de l'Assemblée ou à ceux d'une commission parlementaire sur le projet de loi n° 29. Deuxièmement, il n'a pas voté lors du seul vote à avoir eu lieu à ce jour sur le projet de loi n° 29, soit celui de l'étape de la présentation du projet de loi. Troisièmement, même s'il a voté à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 170, Loi portant réforme de l'organisation territoriale municipale des régions métropolitaines de Montréal, de Québec et de l'Outaouais, et que le projet de loi n° 29 vise notamment à modifier cette loi, cela ne peut avoir pour effet de l'empêcher de présider les travaux sur le projet de loi n° 29.

Malgré le fait que les deux mesures législatives portent sur le même sujet, on ne peut, à défaut d'une prise de position publique claire ou d'une participation active dans le cadre des travaux parlementaires, présumer de la position du troisième vice-président sur le projet de loi n° 29. Quant à la prudence et à la réserve dont doivent faire preuve de façon générale les vice-présidents dans leurs interventions, je ne crois pas que le troisième vice-président, député de Jeanne-Mance, a rompu l'équilibre entre ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas.

En l'occurrence, l'adéquation entre l'appui d'une candidature à la mairie de Montréal et l'appui aux regroupements municipaux ne peut être faite. D'abord, le projet de loi n° 170 a été adopté à l'Assemblée par l'Assemblée, sanctionné par le lieutenant-gouverneur, et il a force de loi. Les élections découlant de l'application de cette loi doivent avoir lieu à l'automne, et le troisième vice-président a fait part de ses opinions à cet égard. Il est bon de rappeler à nouveau que le troisième vice-président a voté contre, l'an dernier, l'adoption du projet de loi n° 170. Cela étant, on ne peut pas dire aujourd'hui que son appui à un candidat à la mairie fait maintenant en sorte qu'il est en faveur des regroupements municipaux et encore moins que cela le rend inapte à présider les débats de l'Assemblée sur le projet de loi n° 29.

En ce qui a trait à l'intérêt personnel que pourrait avoir le troisième vice-président dans l'adoption du projet de loi n° 29, j'ai décidé de ne pas le prendre en considération, puisque, à la lumière des faits soumis en privé à la présidence, je ne peux, de façon crédible, avoir les mêmes craintes que le leader de l'opposition officielle. Il s'agit ni plus ni moins d'une crainte purement hypothétique et spéculative, et je préfère ne pas en dire plus sur ce sujet.

n (10 h 20) n

Maintenant, j'en arrive aux événements qui se sont déroulés au cours de la même séance mais lors de la reprise des travaux de l'Assemblée, à 20 heures. Dès cette reprise, alors que le deuxième vice-président s'apprêtait à rendre une décision sur une question prise en délibéré avant la suspension de 18 heures, le leader de l'opposition officielle a soulevé un rappel au règlement par lequel il remettait en cause la capacité de ce vice-président de diriger les travaux de l'Assemblée dans le cadre de débats portant sur le projet de loi n° 29. Le leader de l'opposition officielle s'appuyait sur diverses déclarations qu'aurait faites le deuxième vice-président eu égard aux regroupements municipaux dans sa région. Sans reprendre ici de façon précise le contenu de ces déclarations, je ne peux y voir, avec égard pour l'opinion contraire, une source quelconque d'incapacité du deuxième vice-président de présider les travaux de l'Assemblée sur le projet de loi n° 29. À aucun moment le vice-président a participé aux travaux parlementaires sur cette question. De même, je suis d'avis qu'il n'a d'aucune façon manqué à son devoir de prudence et de réserve sur le sujet concerné.

Que les choses soient bien claires: Nos règles de droit parlementaire n'empêchent pas les vice-présidents d'avoir des activités et des opinions politiques et, dans ce dernier cas, de les exprimer. Ces règles sont même à l'effet contraire. Certes, les travaux de l'Assemblée peuvent parfois ressembler à ceux de tribunaux, notamment en ce qui a trait aux points de procédure qui peuvent être soulevés, mais la comparaison doit s'arrêter là. Les vice-présidents ne sont pas des juges, ils sont d'abord et avant tout des élus du peuple qui doivent passer par le processus électoral pour pouvoir siéger à l'Assemblée. Ils doivent donc forcément prendre des positions publiques de toutes sortes sur toutes sortes de questions qui par la suite peuvent se retrouver débattues par les membres du Parlement. Exiger d'eux qu'ils n'aient jamais prononcé un mot sur une question pour pouvoir présider un débat sur le même sujet revient ni plus ni moins à imposer des règles qui feraient en sorte que personne ne pourrait présider les travaux de l'Assemblée. À titre d'exemple, il s'agirait simplement qu'un vice-président se soit prononcé sur d'éventuels regroupements municipaux dans sa région lors de la campagne électorale pour le rendre inapte à diriger des débats sur une question connexe. Comment pourrait-on assurer la bonne marche de nos travaux dans un tel contexte?

Cela dit, à partir du moment où un vice-président respecte les règles minimales de réserve, on ne peut mettre en cause sa conduite à tout moment. La sagesse de notre droit parlementaire fait en sorte qu'on ne peut mettre en cause la conduite d'un député sans recourir à une procédure formelle, c'est-à-dire une motion de fond. Cela est d'ailleurs expressément prévu aux règles... au règlement, aux articles 35.5° et 315.

En ce qui a trait à la mise en cause de la conduite d'un membre de la présidence, le droit parlementaire va encore plus loin. Non seulement on ne peut mettre en cause la conduite d'un membre de la présidence sans recourir à une motion de fond, mais une telle mise en cause sans motion de fond est susceptible de constituer une atteinte aux droits et privilèges de l'Assemblée. Les auteurs en droit parlementaire sont unanimes sur cette question. À titre d'exemple, la présidence de la Chambre des communes prévoit qu'on ne saurait critiquer le comportement ou les actions du président sans encourir de sanction pour atteinte aux privilèges. Il n'est pas permis de dénigrer son travail, même indirectement, au cours d'un débat ou de quelconques travaux de la Chambre si ce n'est par voie de motion de fond.

Aux mêmes effets, la présidence de l'Assemblée nationale a mentionné, dans une décision rendue en 1995, que la mise en cause d'un acte accompli par un membre de la présidence doit se faire par une motion de fond que les auteurs qualifient de motion de blâme, de motion de censure ou de motion de non-confiance.

Je constate malheureusement aujourd'hui que cette règle est loin d'avoir été respectée correctement, ce qui a considérablement affaibli l'institution et la présidence de l'Assemblée. Aussi, désormais, la présidence de l'Assemblée entend faire respecter à la lettre ces importants principes. Dans aucun cas la présidence de l'Assemblée n'acceptera d'être mise en cause sans le recours à une motion de fond. La présidence n'hésitera pas d'ailleurs à utiliser son pouvoir disciplinaire. Les vice-présidents ont fait leur bout de chemin la semaine dernière en se donnant des règles de conduite concernant leur droit de réserve. Ces règles sont maintenant connues de l'Assemblée, et c'est à l'intérieur de ces paramètres qu'ils évolueront.

Si jamais, malgré le respect de ces règles par les vice-présidents, des députés de l'Assemblée veulent mettre en cause la neutralité de l'un d'eux, ils devront se conformer à la règle voulant qu'une motion de fond est nécessaire. Par ce geste, le député s'exposera donc lui-même à ce que sa conduite soit mise en cause si les accusations ne sont pas fondées. J'avise donc cette Assemblée que la présidence n'entendra plus aucun rappel au règlement sur la base de l'impartialité et de la neutralité de la présidence.

Un principe de base du fonctionnement adéquat d'un système parlementaire doit être rappelé. La présidence est constituée de membres en règle de l'Assemblée et non de fonctionnaires choisis pour leur neutralité politique. La joute parlementaire est donc arbitrée par des députés qui agissent au vu et au su de tous, et que le règlement autant que la tradition les mettent à l'abri des coups portés durant les affrontements.

En somme, on ne doit pas chercher à marquer des points en frappant sur l'arbitre, et cela, même si des erreurs doivent être commises par un député siégeant au fauteuil présidentiel. En fait, les règles du jeu parlementaire sont telles que tous et toutes doivent accepter que le président a le dernier mot, autrement rien n'est possible.

Enfin, avant que ce point ne soit soulevé, je vais maintenant dire un mot sur la façon dont le deuxième vice-président a utilisé son pouvoir disciplinaire à l'égard du leader de l'opposition officielle, le député de Brome-Missisquoi, lors de la séance de vendredi dernier. À la suite de trois rappels à l'ordre consécutifs, après... à chaque fois que le leader de leader de l'opposition officielle l'eut traité de menteur, le deuxième vice-président a exclu le leader de l'opposition officielle de l'Assemblée. Selon l'article 42 du règlement, lorsqu'un député commet une violation d'une règle nuisant au maintien de l'ordre et du décorum, le président peut le rappeler à l'ordre. En cas de refus d'obtempérer de la part du député, le président peut lui retirer son droit de parole ou, s'il y a lieu, l'expulser de gré ou de force de l'Assemblée. Le président peut retirer la parole à un député lorsque celui-ci ne se soumet pas à deux rappels à l'ordre consécutifs. En principe, pour s'exposer à une exclusion de la Chambre, le député doit avoir perdu son droit de parole. S'il ne respecte pas l'interdiction de parler qui a été prononcée contre lui, le président l'avertira une dernière fois. En cas de récidive, ce dernier pourra alors ordonner son exclusion de l'Assemblée pour le reste de la séance.

Vendredi dernier, le deuxième vice-président a exclu de la Chambre le leader de l'opposition officielle sans lui avoir retiré son droit de parole. Même si, je l'admets, il s'agit d'une irrégularité procédurale, je ne peux, dans les circonstances, cependant blâmer le deuxième vice-président qui a dû faire face à une situation extrêmement difficile.

Certes, l'Assemblée a connu dans le passé des débats houleux et des débordements excessifs. Toutefois, je suis d'avis que nous avons assisté vendredi soir à des excès intolérables qui ont donné lieu à un spectacle indigne d'une institution parlementaire comme la nôtre. Tous les efforts que nous mettons à redorer le blason de l'Assemblée sont annihilés par de tels comportements. Alors, comment tenir rigueur au deuxième vice-président qui, dans le feu de l'action, a fait son possible pour maîtriser la conduite des débats parlementaires?

n (10 h 30) n

Au surplus, je considère qu'une faute plus lourde en droit parlementaire a été commise, soit celle d'avoir mis en cause de façon inacceptable la conduite de la présidence sans procéder selon la procédure appropriée. Dans l'affrontement politique démocratique, il y a des limites à ne pas franchir si l'on veut protéger l'intégrité et la viabilité même du système parlementaire.

En terminant, soyez assurés que j'aurais préféré ne pas avoir eu à faire cette déclaration aujourd'hui. Toutefois, je considère que mes responsabilités de président ne me laissaient aucun choix. La situation, sans contredit, à mon sens le commandait.

Bien. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, vous avez clarifié les choses relativement à toute la question de la partialité ou de l'impartialité de la présidence, du président et des vice-présidents, c'est fort bien, mais vous avez terminé aussi en décrivant sommairement ce qui s'est passé vendredi soir. L'Assemblée nationale malheureusement s'est métamorphosée en fond de ruelle, et le leader de l'opposition a adopté un comportement, une conduite et des gestes indignes de cette Assemblée.

Une voix: ...

Le Président: Il y a une question de règlement que j'entends. Je vais en entendre une à la fois. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, je vous interpelle à cet égard. Vous avez décrit avec un ton plutôt modéré une situation inqualifiable et indigne qui s'est produite, hier. On a remis en cause la conduite d'un vice-président, ce qui ne se fait pas en cette Chambre, on l'a traité de menteur à plusieurs reprises, on a refusé d'obtempérer à un ordre de la présidence, ce qui a fait en sorte que les travaux de cette Chambre n'ont pas pu se poursuivre normalement, donc une entrave à l'Assemblée elle-même. C'est ça qui s'est produit hier. Un refus d'obtempérer à un ordre du président, c'est extrêmement grave; c'est extrêmement grave, ce qui s'est produit hier. Ça nous interpelle tous, mais ça vous interpelle aussi. Et, une fois que vous avez décrit cette situation et que vous avez montré à tout le monde la conduite indigne, dégradante, déshonorante du leader de l'opposition, qu'est-ce que vous entendez faire? Qu'est-ce que vous entendez faire?

M. Mulcair: M. le Président, question de règlement.

Le Président: M. le député de Chomedey, maintenant. Je vais répondre immédiatement après, M. le leader du gouvernement, j'ai d'abord une autre question de règlement. M. le député.

M. Mulcair: M. le Président, vous êtes saisi ce matin et vous avez dit que vous alliez prendre en délibéré les questions en vertu de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale. Si le leader du gouvernement veut s'ajouter à la liste des députés de sa formation politique qui ont utilisé notre règlement, qu'il y aille. Mais, nous, on ne participera pas à un «kangaroo court». Si tout le but de l'exercice... si tout le but de l'exercice, c'est de faire valoir l'importance de nos institutions, je prie mon bon ami le leader du gouvernement d'au moins respecter les fondements de notre règlement.

Sur la question que vous avez prise en délibéré, M. le Président, nous désirons savoir si vous allez entendre l'opposition sur les demandes qui vous ont été faites en vertu des paragraphes 5° et 6° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale. Et, très brièvement, en rapport avec ce que vous venez de dire, on se permet de souligner trois choses en particulier. On diverge d'opinions avec vous, avec tout le respect qu'on vous doit, lorsque vous dites que c'est une simple faille de procédure, le fait de ne pas avoir retiré la parole de quelqu'un. C'est plus qu'une faille de procédure, c'est fondamental, il y a une jurisprudence constante là-dessus.

S'il y a des choses à dire sur le comportement d'un côté, je pense que le fait de se mettre debout, de crier: Dehors! et faire un, deux, trois, comme si on était au WWF, ça aussi, c'est un manque fondamental de respect pour les règles dans notre démocratie parlementaire. Qui plus est, M. le Président, je pense qu'une preuve tangible et concrète du fait que le règlement n'a pas été suivi, c'est que le sergent d'armes a refusé ? et c'était à bon droit et à bon escient ? a refusé d'obtempérer à l'ordre de la présidence, sachant fort bien que les choses n'avaient pas été faites selon le règlement. Et, question de perception toujours, M. le Président ? mais, lorsque vous nous invoquez l'importance de nos institutions, on ne peut pas s'empêcher de le faire remarquer ? vous avez choisi de demander à un officier de notre police d'État de tenir la masse aujourd'hui et de représenter le pouvoir de ce gouvernement. C'est votre choix, on s'en dissocie.

Et, en terminant, M. le Président, une dernière chose sur le fond. Vous nous dites qu'à aucun moment le député qui siégeait à titre de vice-président vendredi s'est prononcé sur le fond du dossier en Chambre. Si vous écoutez attentivement les débats de vendredi, vous allez voir que c'est tout le contraire. Non seulement il a fait des déclarations qui ont été amplement rapportées, notamment dans le journal Le Nouvelliste de Trois-Rivières, mais, en Chambre, il a dit ceci concernant la fusion à Shawinigan: «J'ai assuré...»

Le Président: Non, écoutez, je ne permettrai pas actuellement de faire ce que j'ai indiqué qu'il ne serait plus permis de faire, c'est-à-dire que, si vous voulez mettre en cause la conduite du vice-président, vous avez une motion que vous pouvez utiliser, vous allez le faire.

Je veux vous répondre maintenant, M. le député de Chomedey, immédiatement sur les questions. Prenons la dernière d'abord. Il y a une convention qui a été signée entre l'Assemblée nationale et le ministère de la Sécurité publique, depuis le 6... en date du 6 juillet 1994, approuvée par le Bureau de notre Assemblée, qui prévoit que le sergent d'armes de l'Assemblée est depuis lors un officier de la Sûreté du Québec. Et j'ai demandé à ce que le sergent d'armes en exercice exerce ses fonctions dorénavant comme il se doit.

En ce qui concerne le refus de celui qui était responsable de cette fonction vendredi dernier, je ne partage pas votre point de vue, il n'avait pas à discuter les ordres de la présidence, quels qu'ils soient.

Et, troisièmement, la faille de procédure. Je n'ai pas indiqué qu'il ne s'agissait pas d'une faille de procédure, j'ai indiqué qu'à mon sens c'est plus grave. Dans la gravité des accrocs au règlement, il y avait, à mon sens, une gravité plus importante à l'égard de l'institution de la présidence de l'Assemblée. Cela étant, il ne s'agit pas par ailleurs de diminuer la portée de ce manquement.

Je voudrais répondre au leader du gouvernement. Après ce que j'ai indiqué, je ne crois pas, dans une séance nouvelle, que la présidence a lui-même à sanctionner le comportement d'un membre de l'Assemblée; il appartient à l'Assemblée. Si des députés veulent initier la procédure pour sanctionner un membre de l'Assemblée, fût-il le leader de l'opposition officielle, le règlement prévoit des dispositions. Mais je n'ai pas aujourd'hui à aller plus loin que ces rappels au règlement, d'une part, et les indications claires quant à la conduite des choses pour l'avenir. Et je pense par ailleurs avoir été assez clair sur ma désapprobation quant à ce qui s'est déroulé vendredi soir dernier.

Une voix: ...

Le Président: Écoutez, là. Un instant! Un instant, s'il vous plaît, là! On va s'entendre. J'ai entendu et vu le leader du gouvernement, j'ai vu également le leader de l'opposition officielle, le leader adjoint. Puisqu'il n'a pas encore pris la parole et qu'il est en partie concerné, je crois, alors M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, depuis une dizaine d'années que j'occupe les fonctions de leader soit du gouvernement soit de l'opposition officielle, il est arrivé, dans le cadre de débats qui touchent la démocratie, que le débat s'envenime à l'Assemblée nationale. Il y a une pièce en arrière de vous, là, qui indique que c'est pas un précédent; ça s'est passé tout au long de l'histoire de l'institution comme telle. Mais qu'un débat s'anime entre le leader du gouvernement, le leader de l'opposition, entre des députés ministériels et des députés de l'opposition, c'est normal, ça fait partie du processus démocratique. Le rôle de la présidence est de calmer le jeu, non pas de sauter dans l'arène et de devenir une partie prenante, à cette occasion, lorsqu'on discute des droits fondamentaux de la population.

Des voix: Bravo!

M. Paradis: Ceci étant dit, M. le Président, vous avez eu à quelques occasions à intervenir et à appliquer l'article 42 du règlement. Je vais vous rappeler comment vous le faites, M. le Président.

Dans un premier temps, vous allez même un peu plus loin que la lettre du règlement: s'il y a des propos antiparlementaires qui sont prononcés, vous invitez le député à retirer ses propos. Nous en avons été témoins à maintes reprises dans cette Assemblée. Quand vous effectuez des rappels à l'ordre, M. le Président, vous y allez avec le doigté et le temps que ça doit prendre. C'est pas: un, deux, trois, dehors, M. le Président. C'est pas une faute qui est sans conséquence.

n(10 h 40)n

Troisièmement, M. le Président, quand j'ai senti que le président perdait le contrôle, j'ai invité la présidence à suspendre quelques instants, à suspendre quelques instants, M. le Président, pour prendre connaissance de votre décision à l'Assemblée nationale du Québec. En tout état de cause, les autres vice-présidents et la présidence actuelle ont toujours accepté de suspendre quelques instants pour relire une décision et pour entendre les leaders de part et d'autre, M. le Président. C'est ça, l'histoire qui s'est passée vendredi soir. Il y a eu un arbitre qui a sauté dans la mêlée.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, je dois vous dire très franchement que je ne partage pas votre point de vue dans le sens suivant. Et j'ai indiqué qu'il y avait eu effectivement erreur qui avait été commise par la vice-présidence à l'égard du processus d'expulsion d'un membre de l'Assemblée.

Mais, cela étant, j'ai, moi aussi, visionné ce qui s'est déroulé, entendu les propos, et je crois qu'on ne peut pas dire qu'un vice-président a sauté dans la mêlée quand, finalement, il a été qualifié de menteur et qu'on a mis en cause son impartialité, qu'on ne l'a pas fait selon les procédures habituelles. Alors, en conséquence, il y a aussi un accroc au règlement grave, que, j'espère, vous reconnaissez avoir commis vous-même, dans la façon dont les choses se sont faites. Et la dynamique, vous l'avez enclenchée. Le processus... Le résultat, tout le monde le connaît. Mais je pense qu'on ne peut pas faire porter au vice-président, au deuxième vice-président et député de Saint-Maurice, le poids seul de tout ce qui s'est produit vendredi soir dernier. Je pense que ce serait carrément excessif dans l'interprétation des événements. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je me serais attendu que le leader de l'opposition se soit levé pour exprimer de façon très claire et sans équivoque des excuses en bonne et due forme à l'égard de la présidence et du vice-président. Au contraire...

Des voix: Bravo!

M. Brassard: Au contraire, M. le Président, j'ai assisté à un effort déplorable pour justifier l'injustifiable plutôt que de faire des excuses comme il se devait.

M. le Président, on perd vraiment tout sens des valeurs. Invoquer la démocratie, faire appel à la démocratie alors qu'on a traité le président de menteur à quatre reprises, qu'on a refusé d'obtempérer à un ordre et à une décision très clairs de la présidence, qu'on a refusé de quitter les lieux, qu'on a empêché l'Assemblée de délibérer normalement, il faut avoir un culot assez absolu, M. le Président, hein?

Et le pire dans tout ça, c'est quand on voit le leader de l'opposition l'objet d'une ovation de la part de ses collègues et applaudi par le chef de l'opposition dont on sait qu'en ce Parlement l'autorité est plutôt ténue pour ne pas dire inexistante, hein? On se serait attendu à ce que le chef de l'opposition, oui...

Des voix: Bravo!

M. Brassard: On se serait attendu, M. le Président, à ce que le chef de l'opposition fasse preuve d'un peu d'autorité, parce qu'on sait qu'en cette Chambre et en ce Parlement il en a pas du tout. On voit maintenant par l'ovation qui est le chef en cette Chambre du caucus libéral. Il aurait pu obliger son leader à s'excuser, c'est ce qu'il a pas fait.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Charest: Monsieur...

Des voix: ...

Le Président: On vient de passer un long moment à parler de décorum, et de comportement, et de la dignité qui doit prévaloir, il y a des termes que j'entends qui n'amélioreront pas finalement la discussion ce matin. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Charest: M. le Président, j'espère que le leader du gouvernement réalise que les mots qu'il prononce contredisent, sont en contradiction avec la façon dont il choisit de les livrer et que, si on doit aujourd'hui faire le point sur le débat qui a eu lieu vendredi de la semaine dernière ? et vous avez choisi de faire une déclaration ce matin, ce qui est parfaitement votre droit, sur les travaux de l'Assemblée ? c'est dans le but justement de peut-être faire le point sur des événements qui ont eu lieu ici et qui doivent faire l'objet, je pense, d'une analyse pour qu'on puisse finir la session correctement.

M. le Président, d'emblée, je veux dire, je veux vous dire à vous que, de ce côté-ci comme de l'autre côté, comme du côté de la présidence, je pense que tout le monde doit accepter une part de responsabilité, hein, et que...

Une voix: ...

M. Charest: Bon. Alors, le leader du gouvernement dit non. Parfait. Moi, je vous offre très sincèrement ce commentaire pour vous dire que tout le monde doit accepter une part de responsabilité. Il ne se sent aucune responsabilité, parfait.

Bon, cela étant dit, M. le Président, moi, j'ai eu le privilège de présider dans un autre Parlement. Une des premières choses qu'on apprend, c'est que, lorsqu'une personne accepte la présidence, elle accepte aussi les responsabilités qui viennent avec. Vous avez indiqué ce matin que la question de l'impartialité est une question qui doit faire l'objet d'un jugement de la part de chacun de ceux qui choisissent ou qui acceptent de présider dans le fauteuil. Vous avez déclaré ce matin ? je ne suis pas très sûr si j'ai bien compris ? que vous n'accepterez plus de remise en question de l'impartialité.

Je tiens à vous souligner qu'on est déjà dans une situation où il y en a un des vice-présidents qui, suite à une interpellation du côté du gouvernement, en est venu effectivement à la conclusion qu'il y avait un problème d'impartialité et qu'il a choisi de se retirer. C'est donc dire que l'opposition officielle avait raison, les faits confirment que l'opposition avait raison de le soulever, puisqu'il en est venu lui-même à la conclusion qu'il devait se retirer. C'est une question de fait qui est indéniable. Alors, on ne peut pas, on peut pas dire à l'opposition, surtout suite à ces événements-là, on peut pas nous retirer ou venir moduler en quelque sorte notre droit de poser ces questions-là alors que les événements nous démontrent qu'on avait tout à fait raison de le faire.

Là où je pense qu'il y a effectivement un examen de conscience à faire du côté... et je le dis en tout respect pour le député de Saint-Maurice, parce que j'ai visionné, moi également, la cassette, c'est que le devoir de la présidence et des présidents, qui sont dans une situation très difficile surtout dans les fins de session, c'est d'abord de calmer le jeu, hein, et je pense, je le dis sincèrement, amicalement au député de Saint-Maurice, que vendredi soir, de toute évidence, au moment où il présidait, que l'atmosphère était surchauffée, oui, mais que des efforts supplémentaires auraient pu être faits pour calmer le jeu. Il y a eu une offre faite du côté de l'opposition officielle pour suspendre les travaux. Je le dis amicalement, je pense que c'est une offre qui aurait dû être acceptée, et surtout dans les circonstances.

L'autre élément que je relève, c'est qu'au moment où un président... Et vous connaissez très bien la procédure parlementaire, il y a pas un acte plus sérieux qu'un président peut poser que celui d'expulser un député. C'est très grave, c'est une décision... c'est une des décisions les plus sérieuses qu'un président peut poser. Et, lorsqu'il pose ce geste-là, il doit le faire en respectant rigoureusement les règles et en prenant tout le temps nécessaire pour s'assurer et pour éviter de se rendre jusqu'à ce point-là. La tradition parlementaire là-dessus est très, très claire. Or, ce qui est arrivé vendredi soir, je le dis encore comme je l'ai vu, reflète pas, et je pense que le leader du gouvernement lui-même le reconnaît, reflète pas cette tradition de prendre le temps nécessaire avant d'arriver à ce geste ultime.

Alors, M. le Président, je veux pas prolonger le débat aujourd'hui, mais je me lève...

Des voix: ...

n(10 h 50)n

M. Charest: Je vais finir, je vais terminer. Je veux terminer mes remarques comme j'ai commencé, parce que vous semblez pas accepter cette remarque-là. De part et d'autre, il y a des responsabilités dans cette affaire-là: du côté ministériel, du côté de l'opposition officielle, du côté de la présidence. Et j'ai cru sentir dans vos propos ce matin que vous avez voulu conclure cette affaire-là en disant: Bon, il y a des responsabilités à partager, tirons-en les bonnes leçons, procédons aux travaux de l'Assemblée nationale.

Le Président: Maintenant, M. le premier ministre.

M. Landry: M. le Président, que le chef de l'opposition officielle souhaite que cette affaire se termine part d'un bon naturel, et je vais faire une suggestion qui me semble honnête pour que cette affaire se termine.

D'abord, vous avez bien liquidé, M. le Président, ce matin, en faisant appel à la jurisprudence et aux principes les plus fondamentaux du parlementarisme, l'opinion qu'on doit avoir de l'impartialité de nos vice-présidents, qu'ils soient élus sous la bannière libérale ou sous notre bannière. Votre exposé était limpide. Nous sommes des hommes et des femmes politiques élus et nous ne pouvons pas prôner l'asepsie du langage en période électorale. D'abord, personne ne sait s'il sera président, ou vice-président, ou quoi que ce soit. Ça reviendrait à stériliser le débat politique. Et je pense que vous avez tout à fait raison, et c'est une grande décision et c'est une grande déclaration qui sera retenue par la jurisprudence de cette Assemblée.

Par ailleurs, quand j'ai... Je vais vous dire en toute candeur, quand j'ai, moi aussi, pris connaissance de ce qui s'est passé, j'ai trouvé ça invraisemblable. Ça fait 15 ans que je siège dans cette Assemblée, mais ça fait 40 ans que je suis la vie publique québécoise. Je vais vous dire le cheminement de ma pensée. Le leader de l'opposition officielle, qui est un député aussi depuis longtemps, qui est un homme respectable, auquel j'ai témoigné mon respect personnel à plusieurs reprises, et je pourrais même dire que l'on vit de bonnes relations personnelles, j'ai conclu, ayant appris qu'il avait traité cinq fois le président de menteur, qu'il le regretterait honnêtement et amèrement.

Si, M. le Président, je vous avais traité cinq fois de menteur, je me serais senti extrêmement coupable par rapport à vous et par rapport à l'institution parlementaire. Mon réflexe, c'est que le député de Brome-Missisquoi était pour passer à travers cette période de refroidissement... Parce qu'il est vrai que les choses s'échauffent, et nous sommes des êtres humains. Je l'ai rappelé la semaine dernière, il nous arrive même d'employer le langage du peuple. Nous sommes les élus du peuple. Cela dit, un parlementaire du calibre du député de Brome-Missisquoi doit bien savoir que traiter ouvertement, à la face de l'Assemblée et de la population du Québec, notre président de menteur cinq fois de suite n'est pas un geste acceptable.

Alors, la manière de mettre fin à cette affaire, le président a fait son devoir, il a réglé de façon jurisprudentielle la question de l'impartialité, le chef de l'opposition pourrait peut-être se joindre à moi pour demander ? sans chercher à le coincer ou à l'humilier, puisque ça s'est fait dans le feu de l'action ? demander au député de Brome-Missisquoi de s'excuser, honnêtement et noblement, pour ce qu'il a fait vendredi dernier.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Oui, M. le Président, le témoignage du premier ministre me touche. C'est vrai que nous entretenons des rapports personnels qui sont corrects. Mais, dans le débat parlementaire, on peut devenir virulent de part et d'autre et on peut tenter de tendre des pièges à l'adversaire, et le premier ministre n'est pas malhabile dans cette façon de procéder.

Ceci étant dit, M. le Président, comme le chef de l'opposition l'a indiqué, il s'agit d'un débat où il y a des responsabilités partagées. J'accepte de la partager si les autres acteurs la partagent également.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je pose la question: De quoi dois-je m'excuser? De quels propos? J'ai tenu aucun propos antiparlementaire en cette Chambre. J'ai toujours respecté scrupuleusement la présidence et ses décisions. J'ai jamais remis en cause, d'aucune façon, en aucun temps, même dans des situations difficiles, les décisions présidentielles. Jamais. De quoi vais-je m'excuser, M. le Président?

Là, le chef de l'opposition tente de mettre dans le même paquet des faits anodins et des gestes extrêmement graves. Entre traiter de menteur à quatre reprises un vice-président...

Des voix: ...

M. Brassard: ...à cinq reprises ? c'est encore pire ? et puis...

Des voix: ...

Le Président: Je vous inviterais tous à vous en tenir à l'ordre qui a prévalu pendant l'intervention du chef de l'opposition et du premier ministre. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je le dis très, très, très calmement, je n'ai pas à m'excuser de quoi que ce soit. Si le chef de l'opposition pense que j'ai à m'excuser de quoi que ce soit, qu'il me dise de quoi, parce que, moi, j'ai pas violé aucune règle en cette Chambre, j'ai pas remis en cause l'institution, je l'ai pas discréditée, je l'ai pas dégradée, puis j'ai respecté scrupuleusement, à chaque fois, les décisions présidentielles. Quand le président rend une décision, moi, je ne me lève jamais, je l'accepte.

Des voix: Bravo!

Le Président: Bien. Cela étant, je crois que cet échange a permis de clarifier un certain nombre de questions. Pour le reste, chacun est responsable de ses gestes et de ses choix.

Et, en ce qui me concerne, avant d'aborder les affaires courantes, puisqu'on a suggéré à certains de s'excuser, je vais prendre, je vais saisir la balle au bond pour, à mon tour, m'excuser auprès du député de Rivière-du-Loup envers qui, la semaine dernière, j'ai eu en privé, mais malheureusement dans un lieu où on peut même pas parler en privé, c'est-à-dire dans un lieu où il y a beaucoup de journalistes, des propos qui étaient prononcés sous le feu de la frustration et de la colère. Et je le prie de m'excuser sincèrement pour ces propos qui auraient dû rester privés, mais qui, pour des raisons qui sont particulières, ne l'ont pas été.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Alors, j'ai pris connaissance de ça avec stupéfaction, je dois vous dire, M. le Président. J'accepte vos excuses. Et j'ai écouté tout à l'heure vos explications, parce que ce qui est grave là-dedans... Et vous nous avez dit tout à l'heure, bon, qu'il fallait procéder par motion, qu'on ne pouvait pas remettre en cause la neutralité de la présidence. Je veux dire, d'aucuns, dans des décisions futures qui pourraient m'affecter, affecter des droits de parole, je veux dire, d'aucuns pourraient facilement y faire un lien, d'autant plus ? et là, là-dessus, bon, je pense que vous connaissez les précédents dans le règlement ? que les motions de violation de droit ou de privilège ne s'appliquent pas, selon une décision de 1995, du 14 mars 1995, du président Bertrand, ne s'appliquent pas lorsque c'est la présidence qui parle.

Il était pas de mon intention d'y aller d'une motion. Je souhaite toujours que les choses s'arrangent noblement, comme vous venez de le faire. Il n'en demeure pas moins que, dans le cas qui nous occupe, on était dans un débat sur le déménagement du bureau du premier ministre, qui est un choix politique du premier ministre. Bon, dans tous ces événements-là et par ces déclarations-là, le président... le premier ministre cherchant à faire couvrir sa décision par la Société immobilière du Québec, par la présidence, par le Bureau de l'Assemblée nationale, à mon avis, vous êtes placé dans une situation bien inconfortable en matière de neutralité. Bon, vous connaissez bien les articles 3 et 4 de notre règlement. Et, si ce n'était pas... si la position personnelle, en ce qui me concerne, est une saute d'humeur temporaire et non pas votre opinion, comme vous dites, qui n'aurait pas due être entendue, pour le moins, pour le fond du dossier, à mon avis, la présidence ? et c'est un dossier sur lequel on reviendra sans doute ? s'est mise dans une position tout à fait inconfortable.

n(11 heures)n

Le Président: Alors, vous avez raison de rappeler la décision de mon prédécesseur, mais je croyais que, néanmoins, ça serait l'occasion de vous donner la possibilité à vous aussi d'exprimer votre point de vue sur cet incident. Et le reste, bien, il appartiendra à tous de juger comment la présidence se comportera à votre égard et comment il s'est comporté à votre égard depuis qu'il occupe ses fonctions.

Affaires courantes

Cela étant, nous allons aborder les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles aujourd'hui ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Au dépôt de documents...

M. Brassard: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je voudrais déposer la cassette de la séance de vendredi soir.

Des voix: ...

Le Président: Écoutez, je pense que... même s'il y a consentement, ce n'est pas un document qu'on peut déposer comme ça à l'Assemblée, c'est un document qui est déjà public. Alors, je voudrais éviter qu'on poursuive sur cette lancée.

Alors, au dépôt de documents, M. le ministre d'État aux Régions, de l'Industrie et du Commerce et responsable du Loisir et du Sport.

Rapport annuel de la Société
générale de financement

M. Baril (Berthier): M. le Président, je dépose le rapport annuel 2000 de la Société générale de financement.

Le Président: Bien. Alors, ce document est déposé.

Addendum au document intitulé
Travaux de la Commission permanente
de révision 
? Rapport au 31 mars 2001

Pour ma part, je dépose un addendum au rapport de la Commission permanente de révision, lequel a été déposé le 31 mai dernier. Cet addendum comprend l'avis de la Commission permanente de révision, du Directeur général des élections, et constitue une annexe 2 du rapport précité.

Rapport d'activité de l'Assemblée nationale

J'ai également l'honneur de déposer le rapport d'activité de l'Assemblée nationale pour l'année 2000-2001. Ce deuxième bilan annuel est le reflet du travail des parlementaires et du personnel de l'Assemblée pour maintenir et consolider la démocratie représentative au Québec. Ce document est également disponible sur le site Internet de l'Assemblée, et cette version électronique permet un accès à d'autres informations portant sur l'Assemblée elle-même.

Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, maintenant, M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.

Étude détaillée du projet de loi n° 7

M. Lachance: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé le 8 juin 2001 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 7, Loi modifiant la Loi sur la voirie. La commission a adopté le projet de loi sans amendement.

Le Président: Bien. Alors, ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, maintenant, M. le député de Hull.

Exclure la ville de La Baie du projet
de fusion au Saguenay
?Lac-Saint-Jean

M. Cholette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, vous allez me permettre de saluer les gens qui sont avec nous aujourd'hui, provenant du Saguenay, une cinquantaine de personnes, notamment le maire de la ville de La Baie, M. Réjean Simard, ainsi que deux ex-députés du Parti québécois pour le comté de Dubuc, soit Gérard Morin et M. Hubert Desbiens. Et je tiens à vous souligner, M. le Président, je tiens à vous souligner que c'est une pétition conforme.

Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec par 21 pétitionnaires des villes de La Baie et de la municipalité de Saint-Honoré.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le gouvernement du Québec a comme mission, outre d'assurer aux Québécois et aux Québécoises des conditions de vie et de développement acceptables, de promouvoir et de développer la réalité culturelle du Québec;

«Considérant qu'en ce sens le gouvernement légifère régulièrement pour garantir la conservation des biens culturels, monuments historiques et patrimoniaux du Québec;

«Considérant qu'une éventuelle ville de 150 000 habitants s'étendant sur une distance de plus de 60 kilomètres, tel que prévu dans le projet de fusion du Saguenay, entraînerait la marginalisation, voire la disparition de la page historique entourant l'établissement de la Société des 21 sur les rives de la Baie des Ha! Ha! en 1838;

«Considérant les liens de proximité unissant prioritairement ville de La Baie aux municipalités du Bas-Saguenay;

«Considérant que la région du Saguenay ne connaît pas de problème d'équité fiscale et que le maintien de l'autonomie de ville de La Baie influencerait peu la population globale et le dynamisme urbain de la nouvelle ville de Saguenay.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, sollicitons l'intervention de l'Assemblée nationale auprès du gouvernement afin que La Baie, à titre de ville historique, soit exclue du projet de fusion au Saguenay, contribuant ainsi à maintenir le lien sacré de la ville fondatrice du Saguenay?Lac-Saint-Jean avec son histoire.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Bien. Cette pétition est déposée.

Maintenant, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, évidemment, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme, pétition signée par les citoyens de Natashquan et de Baie-Johan-Beetz, M. le Président, qui réclament, qui désirent...

Le Président: Juste un instant, Mme la députée, j'attends le consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui, M. le Président, comme le député de Duplessis est absent, j'accorderais mon consentement pour que la pétition se fasse demain.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, Mme la députée de Bonaventure pourrait la déposer en présence du député de Duplessis.

Le Président: Très bien. Alors, cette pétition sera déposée à un autre moment, et je comprends vraisemblablement à une autre séance.

Interventions portant sur une violation
de droit ou de privilège

Conduite du député de Brome-Missisquoi
lors de la séance du 8 juin dernier

Alors, maintenant, à l'étape des interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ? je l'avais indiqué dans ma déclaration tantôt ? une dizaine de députés ministériels ont présenté une question de violation de droit ou de privilège en rapport avec les incidents de vendredi dernier. J'ai indiqué que j'avais pris cette question en délibéré. Alors, je rendrai ma décision dans les meilleurs délais, aujourd'hui ou demain au plus tard.

Maintenant, nous allons aborder la période de questions et de réponses...

M. Mulcair: ...je vous ai... Au début de mon intervention de tantôt, je vous ai posé une question, à savoir, sur ces différentes questions de violation que vous avez soulevées en vertu des articles cinquième et sixième... paragraphes 5° et 6°, pardon, de l'article 55, si vous aviez l'intention d'entendre l'opposition et, si oui, quand. Vous ne m'avez jamais répondu là-dessus.

Le Président: Bien, je n'ai pas l'intention d'entendre l'opposition, parce que ce n'est pas l'habitude de la présidence d'entendre des représentations sur l'appréciation, la recevabilité des questions de droit ou de privilège. Quand la présidence est saisie de telles questions, il a à lui-même se prononcer et il n'ouvre pas à chaque fois une discussion en Chambre pour savoir si, oui ou non... Parce que finalement on ferait à ce moment-là indirectement ce qu'on pourrait peut-être éviter de faire directement, c'est-à-dire, si jamais la question était refusée, je crois qu'à ce moment-là il y aurait pas lieu qu'il y ait des échanges à ce sujet.

M. Mulcair: Vous me permettez, M. le Président? Oui. On voulait pas être entendu sur la recevabilité. Évidemment, ça, c'est de votre ressort exclusif, et on voulait pas intervenir là-dessus à ce stade-ci. On veut savoir de votre part si vous avez l'intention d'entendre les deux côtés sur le fond.

Le Président: C'est-à-dire que je vais d'abord rendre la décision sur la recevabilité. Et, si la question était recevable, on verra par la suite la suite à donner selon nos procédures parlementaires. Alors, dans ce genre d'affaire là, vous pouvez être certain que je vais m'en tenir aux procédures de l'Assemblée, écrites et traditionnelles également.

Questions et réponses orales

Alors, maintenant, nous abordons la période de questions et de réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle, en question principale.

Projet de fusion de municipalités
au Saguenay
?Lac-Saint-Jean

M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. M. le Président, ma question s'adresse au gouvernement, au député du Lac-Saint-Jean en particulier, qui est en verve ce matin, puis c'est sur un sujet qui va beaucoup l'intéresser, celui de la démocratie, la démocratie municipale. Parce qu'il y a dans sa région, il le sait, une politique de fusions forcées, des fusions forcées, au niveau municipal, pour laquelle son gouvernement n'a jamais reçu de mandat pendant la campagne électorale de 1998. Ils en ont jamais parlé, M. le Président. Ils ont fait passer ici, à l'Assemblée nationale, un projet de loi, le projet de loi, depuis... de ce temps-là, la loi n° 170, passée en plein bâillon, dans le milieu de la nuit, sans même qu'on ait eu l'occasion de lire les articles à l'Assemblée, M. le Président. Alors, le leader, le député du Lac-Saint-Jean s'en rappelle très bien, je suis convaincu.

Et, depuis ce temps-là, le député... le ministre régional doit savoir que la population de La Baie, entre autres, s'oppose avec férocité à cette politique de fusions forcées et que son gouvernement, avec la loi n° 124, a imposé 13 décrets à travers le Québec, qui touchent à une cinquantaine de villes, et qu'ils sont en ce moment, là, en pleine opération pour forcer ces citoyens-là à adhérer à un nouveau cadre municipal qu'ils rejettent, et rejettent avec force, M. le Président. Ces citoyens-là ont pris tous les moyens pour se faire entendre. Une autre pétition ce matin. Ils auront même pris des recours devant les tribunaux, qui malheureusement ont été rejetés. Un jugement rendu aujourd'hui a fait en sorte que ç'a été rejeté.

Et j'aimerais savoir de la part du député du Lac-Saint-Jean, qui vient de nous faire un beau discours avec beaucoup de conviction sur les questions de démocratie, pourquoi il applique pas ses beaux principes de démocratie dans sa propre région. Est-ce qu'il va nous faire la démonstration, M. le Président, devant les citoyens de sa région, qu'il a la même fougue, la même conviction, hein, la même vigueur pour défendre les citoyens de sa région, M. le Président?

n(11 h 10)n

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, parfois, la vie parlementaire et la vie privée ont de curieux recoupements. Ce matin, notre leader a été interpellé par une question extrêmement grave, le respect de l'Assemblée, de procédures parlementaires, et il s'est comporté de façon brillante, au service de la population, au service de l'Assemblée, comme il le fait toujours.

Une voix: Bravo!

M. Landry: Il est de nouveau interpellé comme ministre régional. Et, s'il y a quelqu'un qui incarne plus le Saguenay?Lac-Saint-Jean depuis tant d'années avec tant de dignité que notre leader, je dirais, d'une certaine manière: Qu'il se lève. Mais, ce à quoi je veux en venir, c'est: toute cette accumulation de faits politiques arrive précisément le jour, au sens propre, de sa fête. Alors, on lui souhaite bon anniversaire.

Quant au fond de la question, M. le Président, la ministre des Affaires municipales, bien entendu, qui la connaît par coeur, y répondra. Mais je voudrais dire, en qualité de chef du gouvernement, à la fois mon espérance et mon désarroi. Je suis profondément convaincu qu'il faut que naisse au Saguenay?Lac-Saint-Jean une des villes les plus importantes du Québec, avec plus de 100 000 habitants et... 150 000 habitants, et se classer au rang de la sixième ville du Québec. Et, quand je dis «sixième ville du Québec», je pourrais être plus réaliste et plus brutal encore, parce que maintenant les villes ont un rôle dans le monde à cause de ce qu'on appelle «la globalisation des marchés», et c'est au coeur de la doctrine de la ministre des Affaires municipales. On lit ça, dans toutes les publications économiques en particulier, chaque jour, qu'on assiste non plus uniquement à une concurrence de pays à pays, mais d'une concurrence de ville à ville. Il faut que les villes aient la taille, aient les moyens, et le Saguenay?Lac-Saint-Jean en mérite une, et le gouvernement aura le courage de la lui donner.

Ceci dit, ceci dit, j'ai vraiment un désarroi considérable à constater que des gens que j'estime, qui sont de nos amis depuis toujours, ne puissent pas se rallier à ce projet. Vraiment, j'en conçois une grande tristesse, sauf qu'avec la ministre des Affaires municipales et mes autres collègues nous allons tenter encore, fraternellement et amicalement, de les convaincre du rôle exemplaire que La Baie, La Baie, qui est le lieu fondateur du Saguenay?Lac-Saint-Jean... le lieu fondateur doit assumer aussi sa responsabilité d'être le lieu de la modernité.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Alors, les coïncidences se succèdent M. le Président. Le député du Lac-Saint-Jean, ministre régional, doit savoir qu'hier c'était la fête du Saguenay?Lac-Saint-Jean également, des fondateurs de la régions qui ont tenu à s'exprimer dans les termes suivants: «À titre de berceau historique du Saguenay? Lac-Saint-Jean, ville de La Baie accueille, chaque 11 juin, les fêtes régionales et les représentants des municipalités de tout le royaume. Pourtant, cette année, plusieurs n'avaient pas le coeur à rire ? contrairement au député de Lac-Saint-Jean aujourd'hui ? car, depuis plusieurs mois, ville de La Baie, chef-lieu du comté de Dubuc, conteste la manière brutale avec laquelle on veut l'effacer de la carte du Québec. Après avoir vaillamment lutté contre les effets dévastateurs du déluge de 1996, après avoir mis au monde La fabuleuse histoire d'un royaume, érigé à force de bras la pyramide du millénaire, les 21 000 citoyens et citoyennes de cette communauté dynamique tournée vers les arts et le fjord du Saguenay demandent tout simplement au gouvernement du Parti québécois de pouvoir continuer à apporter leur contribution au Québec moderne, ni plus ni moins.»

Le problème du député du Lac-Saint-Jean, c'est qu'il risque de fêter tout seul aujourd'hui, M. le Président. Mais, en cela, il y a peut-être un reflet de l'attitude de son gouvernement, parce que les mêmes citoyens du fjord pour un regroupement municipal harmonieux poursuivent leur bataille pour faire entendre raison à un gouvernement, et je cite, «qui est devenu, de toute évidence, sourd, muet et aveugle dans le dossier des fusions municipales».

Pourquoi le député se lève pas aujourd'hui à l'Assemblée pour dire aux citoyens de sa région qui sont venus le rencontrer sa position dans ce dossier-là?

Le Président: Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. M. le Président, je voudrais également faire écho à des propos qui ont été publiés dans le journal Le Quotidien, hier, d'un citoyen de La Baie, M. Roger Harvey, ville de La Baie, et qui faisaient référence aux réjouissances qui s'étaient déroulées lors de la dernière réunion des élus municipaux, réjouissances qui portaient sur les 25 ans de la ville de La Baie.

Et la ville de La Baie dont parle la pétition, est-ce celle regroupée par fusions dites forcées, mais qui sont, M. le Président, des fusions par législation, c'est-à-dire des fusions démocratiques qui sont décidées ici même, à l'Assemblée nationale? Et je fais évidemment référence, M. le Président, à cette législation que le gouvernement de M. Bourassa a fait adopter il y a 25 ans maintenant pour regrouper, par législation, les villes de Grande-Baie, de Port-Alfred, de Bagotville, et donc qui est devenue cette ville de La Baie dont on vante, à raison, les mérites maintenant et qui a fait l'objet de cette fête des élus municipaux récemment. Alors, ce citoyen de ville de La Baie écrivait hier: «Quelle réussite! Quel succès flamboyant que ce regroupement remontant à plus de deux décennies. Je me souviens des pleurs et des grincements de dents du temps. Aujourd'hui, tout est oublié et c'est le bonheur total. En 2026, donc dans 25 ans ? et je cite, là, c'est pas de moi, ça ? des zouaves diront la même chose pour la grande ville, à savoir: Quel succès! Et les luttes de 2001, pour ceux qui s'en souviendront, paraîtront bien futiles.»

Alors, M. le Président, je pense que l'occasion m'est donnée de faire un appel à la population de La Baie. Au-delà d'une première réaction compréhensible, voudraient-ils retourner en arrière, du temps d'avant le regroupement de Grande-Baie, de Port-Alfred, de Bagotville? Voudraient-ils le faire? Évidemment pas, pas plus que les citoyens d'Arvida et de Jonquière, pas plus... de Kénogami aussi.

Alors, M. le Président, au-delà d'une première réaction compréhensible de résistance au changement, je pense qu'ils doivent réclamer de leur élu de se mettre à l'ouvrage avec la vaillance, le talent, l'enthousiasme, l'envergure qu'on leur connaît pour faire de cette nouvelle ville du Saguenay la ville dont ils auront la fierté et qui fera la fierté du Québec tout entier.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, maintenant, M. le député de Hull.

Projet de création de la ville de Saguenay

M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. La ministre nous cite un citoyen. Est-ce qu'elle a pris connaissance d'un sondage publié hier où 72 % de la population de la région se dit contre la fusion forcée? Est-ce qu'elle peut regarder, là, le portrait plus large puis considérer que les gens sont pas d'accord avec son projet?

Mais ce qui est encore plus outrageant, c'est que, depuis un an, la ministre nous parle de quoi? Elle nous dit: Le statu quo n'est plus acceptable. Eh bien, ça s'adonne qu'à La Baie, au Saguenay, ils vous ont écoutée et ils ont proposé, ces gens-là, une nouvelle façon de fonctionner. Ils ont proposé une nouvelle MRC, une MRC du fjord regroupant 15 municipalités, 45 000 citoyens. Au lieu d'appliquer du mur-à-mur, M. le Président, la ministre pourrait peut-être reconnaître les caractéristiques locales ? locales ? particulièrement au Saguenay?

Est-ce qu'elle peut nous dire aujourd'hui pourquoi ça ne fait pas son affaire quand il y a une proposition qui vient du local? Pourquoi il faut que ce soit du mur-à-mur puis piler sur le corps des citoyens pour imposer des fusions forcées?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.

Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, j'ai eu l'occasion récemment, en visite à La Baie, de reconnaître que... À bon droit, là, j'ai reconnu que la population n'est pas informée comme elle devrait l'être sur le projet de regroupement de la grande ville. Et je voudrais vous rappeler qu'en raison de la contestation devant les tribunaux, contestation initiée par les villes de La Baie et de Laterrière, nous étions mis en cause et astreints à un certain devoir de réserve, et nous n'avons pas publicisé l'information comme nous l'avons fait dans les villes, dans les nouvelles villes de Montréal et de la Rive-Sud de Montréal. Mais, M. le Président, qu'à cela ne tienne, nous le ferons auprès de la population de cette nouvelle ville au Saguenay.

n(11 h 20)n

Je voudrais, M. le Président, cependant certainement souligner ce matin... d'autant plus que le juge Caron, de la Cour supérieure, a déposé au greffe de Chicoutimi sa décision dans cette affaire qui amenait les villes de La Baie et Laterrière à vouloir la nullité du regroupement en voie de se réaliser... Alors, le juge Caron dit ceci: «Le tribunal fait siens les propos de M. le juge Tellier.» M. le juge Tellier, c'était l'an passé dans la cause de Mont-Tremblant. Et je dois vous dire que, à Mont-Tremblant, dernièrement, j'apprenais que la diminution de taxes cette année est de 10 %, la nouvelle ville de Mont-Tremblant.

Alors donc, le tribunal fait siens ces propos de M. le juge Tellier: «Le rôle des tribunaux dans une affaire comme la présente est limité à déterminer si le pouvoir législatif et/ou exécutif ont agi à l'intérieur de leurs compétences constitutionnelles respectives ou encore si la mesure adoptée contient des dispositions qui vont à l'encontre des droits fondamentaux des citoyens garantis par l'une ou l'autre des chartes. Au-delà de ces limites, les tribunaux n'ont pas à s'immiscer dans des débats politiques. La preuve ne permet pas de conclure au non-respect des objectifs prévus dans la Loi sur la réorganisation territoriale municipale lors de l'adoption du décret par le gouvernement ou à une atteinte aux droits fondamentaux. Et, pour ces motifs, le tribunal rejette l'action des demandeurs ainsi que la demande d'injonction qui était jointe.»

Le Président: M. le député de Hull.

M. Roch Cholette

M. Cholette: En additionnelle. Est-ce que la ministre peut comprendre que «légal», ça veut pas dire «moral»? Est-ce que la ministre peut comprendre que ce que le Saguenay a de besoin, c'est pas de la propagande du Parti québécois, c'est de l'écoute et de la compassion? Est-ce que la ministre peut nous dire qu'est-ce qu'elle comprend pas exactement? Il y a 50 personnes du Saguenay qui sont ici pour lui dire non aux fusions forcées. Il y a une pétition de 4 300 noms qui a été déposée par les députés en votre absence, qui ont dit non aux fusions forcées. Il y a 21 familles fondatrices qui signent une pétition aujourd'hui pour dire non aux fusions forcées. Il y a l'ex-présidente du Parti québécois dans Dubuc qui dit non aux fusions forcées. Il y a le maire de La Baie qui dit non aux fusions forcées. Il y a deux députés péquistes, ex-députés péquistes, qui disent non aux fusions forcées. Qu'est-ce que vous ne comprenez pas, Mme la ministre?

Le Président: Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.

Mme Louise Harel

Mme Harel: En tout cas, M. le Président, ce que je comprends, c'est que l'opposition, qui s'est faite la championne du statu quo au niveau constitutionnel et national, est maintenant la championne du statu quo au niveau municipal. Ça, M. le Président, je le comprends.

M. le Président... Ce que je comprends, M. le Président, c'est que l'opposition n'a pas d'ambition pour les régions. M. le Président, le projet d'avenir qui est en cause, c'est de faire de cette sixième grande ville du Québec, de faire de cette nouvelle ville du Saguenay la ville qui va rayonner, avec Saguenay International, avec ses deux ports de mer en eaux profondes, avec son nouveau parc industrialoportuaire sur lequel travaillent présentement bien des gens, et qui va rayonner pour créer la prospérité de sa population.

M. le Président, évidemment, ce à quoi le député fait écho, c'est à un projet où la municipalité de La Baie, où se trouvent ces deux ports en eaux profondes et où pourrait se trouver ce parc industrialoportuaire, où il y a déjà cet aéroport qui a été transféré par le gouvernement fédéral, la ville de La Baie serait la capitale du monde rural. M. le Président, il est quand même incohérent d'entendre le député de Hull nous parler d'une ville de 65 km, d'une nouvelle grande ville de 65 km, alors que ce à quoi il souscrit, ce serait une capitale ? La Baie ? du monde rural qui serait à distance d'au moins 100 km du Petit-Saguenay et qui serait à distance évidemment non pas seulement géographique, mais à distance aussi d'un monde rural puis sociologique qui a à trouver, qui a à trouver sa propre mission pour une occupation dynamique du territoire. Les...

Le Président: Mme la ministre, vous êtes en complémentaire. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Est-ce que j'ai bien compris la ministre, M. le Président, ce matin, qui somme toute dit à la population, là, du comté de Dubuc: Ce sont des pauvres innocents qui ont rien compris à ce qu'on leur proposait, que, dans le fond, ils offrent une alternative, M. le Président ? parce qu'il y a personne qui propose le statu quo ? mais ils offrent une alternative, mais, dans le fond, ce sera jamais aussi bon que la décision qu'elle va prendre seule? Et, lorsqu'elle parle de statu quo, M. le Président, est-ce qu'elle sait qu'on n'est pas seuls à dénoncer la situation? On est en bonne compagnie. Gérard-Raymond Morin est ici, à l'Assemblée nationale, c'est un ex-député du Parti québécois du comté de Dubuc; M. Hubert Desbiens, ex-député du Parti québécois du comté de Dubuc; Mme Lise Bouchard est ici, c'est une ex-présidente régionale du Parti québécois, M. le Président.

On n'est pas seuls, M. le Président, à vouloir demander, à demander à ce gouvernement-là de se raisonner, mais on est toujours aussi intrigués par le comportement, ce matin, du député du Lac-Saint-Jean. Il était tellement vivant il y a quelques minutes, plein de vie, plein de conviction, hein? Le ton était très élevé. Là, soudainement, il s'est dégonflé complètement. Là, il est devenu muet soudainement, alors que c'est sa région.

Ces gens-là qui sont ici aujourd'hui, là, c'est son monde, il a quoi à leur dire, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, en matière de sentiment d'appartenance à ma région d'origine, que je représente depuis près de 25 ans ici, en cette Chambre, le chef de l'opposition n'a pas de leçons à me donner, d'aucune façon. J'ai toujours représenté avec dignité, avec force et vigueur les intérêts de la population complète, totale du Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Des voix: Bravo!

M. Brassard: Je me dégonfle pas, ma position était très claire. J'étais assis aux côtés de la ministre des Affaires municipales, de l'ancien premier ministre, Lucien Bouchard, alors, du premier ministre, qui était ministre des Finances, on était tous assis à la même table quand on a annoncé cette décision de donner suite au rapport du juge, de l'ex-juge Bergeron.

Récemment, dans la presse régionale, on faisait état d'un phénomène très grave, extrêmement préoccupant, dans ma région comme dans les autres régions-ressources, c'est le phénomène du déclin démographique, M. le Président, le phénomène de l'exode des jeunes parce qu'on ne crée pas suffisamment d'emplois. C'est un phénomène extrêmement grave, et ça interpelle tout le monde, et tout le monde doit mettre l'épaule à la roue de façon solidaire pour assurer un meilleur développement de notre région, et la grande ville Saguenay va être un instrument extraordinaire de développement.

Une voix: Bravo!

Le Président: Bien. Maintenant, en question principale, Mme la députée de Bonaventure.

Situation économique et démographique
en Moyenne et Basse Côte-Nord

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Oui, merci, M. le Président. En parlant du manque d'ambition pour les régions invoqué par la ministre des Affaires municipales, j'aimerais, M. le Président, qu'on parle ce matin du manque d'ambition du gouvernement péquiste à l'endroit des régions. Et j'aimerais leur parler de Natashquan ce matin, M. le Président, de la piètre performance du gouvernement péquiste à l'endroit des villages, des petits villages au Québec.

À écouter le premier ministre et le ministre des Régions, M. le Président, on a l'impression que tout va pour le mieux dans l'ensemble des régions du Québec. Le discours triomphaliste du premier ministre et du ministre des Régions démontre à quel point ils sont déconnectés de la réalité. Et je prends à témoin, M. le Président, la lettre, une lettre qui a été envoyée au premier ministre le 30 avril dernier par le maire de Natashquan, M. le Président. Et ses propos en disent très long sur le manque d'écoute de son gouvernement à l'endroit des villages de la Basse et de la Moyenne Côte-Nord.

En fait, M. le Président, c'est un véritable cri du coeur, un véritable cri du coeur qu'envoie le maire de Natashquan au premier ministre et à son gouvernement en affirmant, et vous me permettrez de citer: «Les populations sentent un désintéressement du gouvernement face à la pauvreté que nous vivons dans nos petits villages. Au point où nous en sommes rendus, c'est la mort de nos petits villages à plus ou moins brève échéance.»

n(11 h 30)n

Dans ce contexte, M. le Président, et face à un taux de chômage oscillant entre 19 et 63 % pour les villages de la Moyenne et de la Basse Côte-Nord, est-ce que le premier ministre, est-ce que le premier ministre peut nous dire donc concrètement quelles sont les mesures qu'il a prises pour répondre à l'appel à l'aide lancé par le maire de Natashquan depuis le 30 avril dernier?

Le Président: M. le ministre d'État aux Régions.

M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, le gouvernement a répondu présent lors du dernier budget de ma collègue la ministre des Finances, a répondu présent et a démontré sa sensibilité vis-à-vis des régions qui sont confrontées actuellement, M. le Président, par des problèmes économiques plus importants, par des taux de chômage plus élevés, et c'est pour ça que nous avons annoncé un budget important, de 800 millions de dollars ? 800 millions de dollars ? en faveur de sept régions-ressources, ce budget qui donne les outils et les instruments à ces régions pour être en mesure de changer d'une façon importante le cours des choses et particulièrement de faire baisser, durant les prochaines semaines et durant les prochains mois, le taux de chômage.

Nous avons annoncé pour la Côte-Nord, M. le Président, une aide financière de 102 millions de dollars répartie sur trois ans. Nous avons même reconnu davantage certains problèmes à l'intérieur de cette région et nous avons mis un plan d'action pour la relance de la Basse-Côte-Nord avec une aide financière de 8,5 millions. Mais nous allons faire plus, M. le Président, parce que, depuis deux semaines, je dois dire que les gens du ministère des Régions, de la Côte-Nord, ont rencontré à deux reprises les gens de Natashquan pour bâtir avec le CLD de la Minganie un plan d'action pour être en mesure d'identifier très rapidement des projets économiques générateurs d'emplois, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: M. le Président, M. le Président, celui qui a plus d'ambition que pour lui-même, pour lui-même que pour les régions du Québec, M. le Président, quand il nous parle de taux de chômage pour les régions, est-ce qu'il se rend compte justement que les régions... les gens des régions quittent leur territoire? Puis, plutôt que de se faire péter les bretelles sur son 800 millions, ce matin, on lui parle de gens qui souffrent, des gens de Natashquan, de Baie-Johan-Beetz, de Blanc-Sablon, M. le Président, des gens qui vivent dans les petits villages sur la Moyenne et la Basse-Côte-Nord. Est-ce que le ministre des Régions peut également admettre que sa stratégie en matière de développement des régions manque cruellement de vision, justement?

M. le Président, ça fait plus d'un mois qu'ils ont la lettre du maire de Natashquan. Ça a pris un article dans Le Soleil pour réveiller le député de Duplessis, pour réveiller le premier ministre, pour révéler... réveiller le ministre des Régions et son gouvernement. Alors, M. le Président, à quand donc une véritable stratégie pour venir en aide aux plus petites municipalités au Québec qui souffrent, M. le Président? Parce que les gens qui sont en région revendiquent le droit de travailler, de vivre et d'élever leurs enfants. Est-ce qu'on peut, M. le Président, leur accorder ce droit-là une fois pour toutes?

Le Président: M. le ministre.

M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, le premier à reconnaître dans cette Chambre qu'il y a encore trop de détresse, trop de désespoir, trop de misère humaine dans notre société, c'est le député de Berthier puis le ministre d'État aux Régions. La chose que je peux dire, c'est que le dernier budget que nous avons déposé il y a à peine deux mois est un instrument puis un outil pour faire reculer la détresse et la misère humaine. C'est un budget qui est porteur d'espoir, il met en place des actions porteuses d'espérance. C'est un budget puissant, musclé, qui va donner aux citoyens et citoyennes des régions un instrument pour changer d'une façon importante le cours des choses.

Nous, nous avons une stratégie, M. le Président, en matière de développement régional. Quelle est la stratégie, quelle est la vision, quelles sont les idées de l'opposition officielle en matière de développement régional? Je voudrais citer, M. le Président, M. Jean-Jacques Samson, du Soleil, le 28 mai 2001. Il parlait naturellement du Conseil général du Parti libéral: «Le comité qu'elle préside ? Mme Normandeau ? a toutefois accouché de toute la litanie habituelle des principes qui devraient présider au redressement des régions et de deux axes passe-partout dans toutes les réflexions sur le développement régional ? c'est-à-dire la décentralisation et une concentration des efforts sur les spécificités, les potentiels et les forces de chacune des régions. Difficile de faire mieux dans le choix de lieux communs et de répétitions.»«Répétitions», ça veut dire «radotage», en politique, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: M. le Président, le ministre des Régions, qui est aussi l'organisateur politique du premier ministre, a sûrement pas de leçons à nous donner. Notre stratégie à nous, c'est moins de photos et plus d'action, M. le Président.

Le Président: Directement à votre question complémentaire, Mme la députée.

Mme Normandeau: M. le Président, est-ce que le ministre des Régions se rend compte que sa politique des régions équivaut à une politique d'exclusion?

Le Président: M. le ministre.

M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, je dois dire, à ce stade-ci, puisque depuis deux mois nous avons fait le tour des régions avec ma collègue des Finances, le ministre de l'Agriculture, hein, avec le ministre responsable de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean: Nous avons rencontré au-delà de 2 000 personnes, M. le Président. Le budget a été accueilli avec beaucoup, beaucoup d'éloges dans chacune de ces régions.

Je vais citer, par exemple, la rectrice de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Qu'est-ce qu'elle nous a dit quand on a fait l'annonce budget région-ressource Mauricie? «Merci au gouvernement d'avoir fait confiance dans la région... de notre région et dans le développement d'une économie du savoir au coeur de cette région. L'annonce par le gouvernement du Québec d'une stratégie de développement économique convenant aux orientations souhaitées par les partenaires de la région est un geste concret, enthousiasmant pour les acteurs du milieu qui veulent relever le défi d'une Mauricie dynamique, technologique et réellement au coeur de demain. Nous ne pouvons que vous en féliciter fortement et vous dire: Voilà ce qu'une région peut souhaiter et attendre d'un gouvernement.»

Le Président: Quatrième question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.

Coût du déménagement du cabinet
du premier ministre et du Conseil exécutif

M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. La semaine dernière, alors que je questionnais le premier ministre sur les grands déménagements de la colline, le premier ministre a fourni des informations, des réponses, pour maintenir un langage parlementaire, qui ne se sont pas vérifiées dans les heures et les jours qui suivaient. Le premier ministre nous a dit que son déménagement était ni plus ni moins qu'obligé par la Société immobilière du Québec. Ce qu'on a découvert par la suite, c'est qu'il y a des travaux... des travaux étaient obligés par la Société immobilière du Québec, mais pas le déménagement; à preuve, son prédécesseur qui lui-même avait prévu revenir dans ses locaux après que les travaux soient exécutés.

Le premier ministre nous parlait tout à l'heure... Je suis pas sûr que j'ai bien compris ce qu'il disait dans le premier débat sur le fonctionnement de l'Assemblée. Il disait qu'on utilisait parfois le langage du peuple. Je sais pas s'il identifiait le langage grossier au langage du peuple, mais, en ces matières-là, si je peux lui parler le langage du peuple, là, le monde à l'impression qu'il est en train de flauber leur argent, le monde a l'impression qu'il est en train de se payer du luxe sur leur bras.

Alors, ma question au premier ministre: Est-ce qu'il peut minimalement nous dire que c'est sa décision d'aller dans un édifice de prestige, que c'est un choix politique? Est-ce qu'il peut nous dire pourquoi c'est mieux? Combien ça coûte puis combien de monde ça va faire déménager en tout?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Bon, d'abord, je trouve que notre approche en ce qui concerne l'édifice qui est au sud de la Grande Allée est dictée tout simplement par des impératifs techniques et technologiques impérieux, et le peuple est plus sévère... Le peuple, vous parlez du peuple. Je sais pas dans quel langage il le dit, d'ailleurs. Et que le peuple ait un langage vert n'a rien d'insultant. Nous faisons partie du peuple, et, encore une fois, celui qui n'a pas employé une fois ou l'autre un langage verdoyant, ou celle, qu'il se lève. Voyez-vous, ça arrive. Et le président s'est excusé, puis d'autres auraient dû l'imiter, d'ailleurs. J'ai déjà donné mon opinion là-dessus.

Mais ce que les gens nous disent de ce qu'on appelle le «bunker», là, ils disent: Rasez ça au sol, c'est une horreur qui déshonore l'esthétique d'une des plus belles villes du monde, notre capitale nationale. Alors, il y a le problème esthétique, mais, je l'ai dit, il y a plus que ça. J'ai vu de mes yeux vu, même à l'époque où on n'était pas au pouvoir ? j'étais venu consulter des fonctionnaires dans cet édifice ? des chaufferettes, comprenez-vous, l'hiver, branchées dans des bureaux parce que la ou les personnes qui étaient dans ce bureau avaient froid. Est-ce que, franchement, là, c'est un geste politique que notre État national continue à tolérer des situations pareilles? Alors, l'affaire du «bunker», là, je vais la faire réétudier soigneusement à la lumière de pressions que j'ai d'en faire un beau parc en face pour enjoliver notre ville. C'est pas sûr que ça sera la solution retenue, je suis pas architecte, ingénieur ni comptable, mais je m'engage à la faire regarder, premièrement.

Deuxièmement, pour le logement de l'Exécutif, l'Assemblée nationale a un grand rôle là-dedans. M. le Président, si je comprends bien, le Bureau n'a pas encore tranché, et nous nous en tiendrons à la décision du Bureau. Mais je vais vous donner mon opinion. Mon opinion, c'est que, s'il y a un lieu où l'Exécutif doit loger, c'est dans les beaux édifices patrimoniaux de l'Allée des premiers ministres, nommés du nom d'un grand premier ministre fondateur du Parti national, Honoré Mercier. Il faut avoir le sens de l'histoire, il faut avoir le sens de la dignité de l'État conciliable avec les intérêts des contribuables.

n(11 h 40)n

Alors, j'y viens, aux intérêts des contribuables. Cet immeuble a pas été retouché, je pense, depuis 1930.

Une voix: 1922.

Une voix: 1927.

M. Landry: 1922, pardon. Excusez-moi, 1922. Il présente des risques d'incendie, il y a des problèmes d'aération. Tous ceux qui ont siégé au Comité de législation en particulier, de notre côté de la Chambre ou de l'autre, vous confirmeront que c'est un endroit exécrable et difficile à travailler. Alors, ça fait beaucoup de raisons. Et, si le Bureau de l'Assemblée nationale décide qu'on doit retourner dans ces édifices patrimoniaux, mon confort personnel, pour employer une expression du peuple, j'en ai rien à cirer, comprenez-vous, c'est une question de dignité nationale, de fonctionnalité, de santé et de sécurité.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. M. le Président, la question demeure la même: Combien de personnes... Le premier ministre démarre un effet domino. Combien de personnes ? 700, 800, 1 000 personnes ? vont déménager à cause de sa propre volonté et combien ça va coûter? Est-ce que le premier ministre, est-ce que le premier ministre saisit bien que c'est deux choses? S'il y a des chaufferettes à l'heure actuelle au «bunker» puis qu'il faut le réparer... Réparer un logement, ou réparer une maison, ou réparer un édifice puis déménager, c'est deux choses. Sa décision et celle que je veux qu'il justifie, c'est celle de partir un grand bal de déménagement du Vérificateur qui vient d'entrer dans ses locaux, qui va en ressortir aussitôt... Le premier ministre peut nous expliquer: C'est-u 1 000 personnes qui vont déménager? Combien ça coûte, ça?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: C'est à cause de cette imagination débordante du député de Rivière-du-Loup que le président a eu des excès de langage à son égard.

Des voix: Oh!

M. Landry: Je n'en aurai pas moi-même. Je n'en aurai pas moi-même. Mais non. M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: Je vous invite, M. le premier ministre, à aller directement à la réponse.

M. Landry: C'est parce que, M. le Président, je cherchais un petit mot poli pour, sans insulter personne, dire au député qu'il a tort dans cette affaire. D'abord, quand il parle de domino, il parle comme le ministère... comme le Pentagone quand il parlait d'effet de domino dans le communisme. C'était supposé se rendre jusqu'à Saint-Georges de Beauce.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Par exemple, nos journalistes, là, nos journalistes de la Tribune, qui font un noble métier puis qui ont droit de le faire en paix et en toute tranquillité, se sont fait exciter volontairement par des rumeurs qu'on pourrait appeler des rumeurs urbaines, pour prendre le vocabulaire contemporain. Ils sont dans l'édifice André-Laurendeau, et nous ferons tout pour que ces journalistes restent dans le nom de l'édifice d'un des plus célèbres journalistes du Québec. Donc, cet effet de domino tenait de la légende urbaine pour exciter une presse qui a besoin de toute sa concentration pour continuer son magnifique travail.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: M. le président me fait signe que j'en ai assez mis; je vais arrêter.

Le Président: Dernière question, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: M. le Président, est-ce que le premier ministre considère pas que c'est un effet domino? D'abord, est-ce qu'il considère pas que les rumeurs qui ont été parties, puis il ne sait pas par où... Elles ont été parties par son directeur de cabinet qui cavalièrement a convoqué les journalistes de la Tribune parlementaire pour leur annoncer le grand déménagement sans avoir parlé à personne. Alors, c'est comme ça que les rumeurs sont parties.

Et, deuxièmement, est-ce qu'il considère pas qu'il commence à y avoir un effet domino quand un gars décide qu'il veut un édifice de prestige et que vont déménager 255 fonctionnaires qui sont au André-Laurendeau, 250 employés du Conseil exécutif, le personnel du ministère de la Famille et de l'Enfance, le Secrétariat à la condition féminine, le ministère des Régions, les Affaires autochtones, le Vérificateur général puis du personnel de l'Assemblée nationale, commence à y avoir un effet domino qui écoeure le gars qui paie la moitié de sa paie en impôts?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, le gars qui paie la moitié de sa paie en impôts, d'abord, nous faisons partie de cette catégorie, et il y a beaucoup d'hommes et de femmes au Québec qui ne paient, à cause de nos politiques sociales-démocrates, aucun impôt, et les classes les moins favorisées en paient beaucoup moins à leur niveau qu'en Ontario. Alors, quand on attaque la fiscalité québécoise, là, et quand on a des tendances de droite qu'on ne peut plus camoufler, là, on devrait penser qu'il y a ici un gouvernement social-démocrate qui a introduit des impôts sociaux-démocrates.

Et le payeur de taxes québécois ou la payeuse de taxes du Québec n'aime pas qu'une secrétaire ou un secrétaire ait à brancher une chaufferette dans un édifice public pour pas geler l'hiver. C'est ça, penser au peuple, aussi. Et le peuple québécois est parfaitement capable de comprendre que, quand l'opération se fait à coût pratiquement nul, puisqu'il faut rénover deux édifices, sous réserve que le «bunker» ne le serait peut-être pas si une décision de démolition était prise... Si un édifice qu'il faut rénover de toute façon et un autre qu'il faut rénover de toute façon deviennent un lieu de transfert du point A au point B et que le seul coût est le transport des boîtes et des meubles, je pense que le peuple québécois est capable de comprendre parfaitement, à moins de le sous-estimer, que c'est une opération positive et qu'il faut faire.

Le Président: M. le député de Châteauguay, maintenant, en question principale.

Renouvellement des appareils
de radiologie dans les hôpitaux

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, M. le Président. Je ne peux pas m'empêcher de dire: Et tout ça pendant que des patients sont alités sur des civières, leur sérum au bras.

Des voix: Ah!

M. Fournier: Il parle des chaufferettes, M. le Président. On devrait regarder ce qui se passe ailleurs au Québec. Il dit qu'il faut avoir le sens de l'État, mais l'État devrait garder ses sens aussi à l'égard des citoyens du Québec.

Parlant de choses qui ont pas l'air à trop bien aller au Québec, il y a le Vérificateur général qui a remis un rapport la semaine dernière où il a rappelé des faits troublants en ce qui concerne l'imagerie médicale. En résumé, je passerai pas tout le texte, mais il nous dit ceci, le Vérificateur ? ce n'est pas l'opposition, là, c'est pas la démagogie, c'est le Vérificateur: «Un ministère sans planification et sans inventaire de ses équipements, entraînant leur désuétude, avec pour conséquence de mauvais diagnostics ? on sait ce que ça peut entraîner, des mauvais diagnostics, quand tu traites pas les gens ? et même à une exposition indue à des doses de rayons X...» M. le Président, ça fait pourtant au moins deux ans que l'Association des radiologistes a mis le gouvernement au courant de cette situation dangereuse, et il a toujours refusé d'agir. C'est rien d'autre que de l'aveuglement volontaire coupable.

Ma question est simple, M. le Président: Pourquoi, pourquoi le gouvernement a-t-il nié pendant deux ans que son refus d'agir avait placé nos concitoyens en situation de danger, en bien plus grand danger que celui que courent les gens avec les chaufferettes au «bunker»?

Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, on pourrait répondre aussi laconiquement: Parce qu'on manquait d'argent. On a mis 440 millions, au cours des deux dernières années, dans les équipements médicaux, M. le député de Châteauguay, on en a mis pour 100 millions dans l'imagerie médicale, et ce n'est pas suffisant. Et ce n'est pas suffisant. On a investi à même les fonds québécois, et vous le savez, comment l'argent est difficile, au niveau des investissements, puisque, en rajoutant simplement, cette année, 2 milliards de dollars, nous en arrivons tout juste, tout juste à répondre aux besoins des Québécois et des Québécoises parce que la population vieillit et que les besoins sont grandissants. Oui, on le sait très bien, et ce ministère, les fonctionnaires qui y travaillent, les hauts fonctionnaires, toutes les équipes qui sont au niveau des nouvelles technologies, de la technologie, en particulier en Montérégie où on a une équipe spécialisée au niveau de l'imagerie médicale, on connaît très bien les besoins.

Mais là il faut répéter une chose, et j'espère que le député de Châteauguay va se montrer d'accord aussi avec cette partie du rapport du Vérificateur général: les besoins sont à l'est de la rivière Outaouais puis les moyens pour y arriver, pour répondre, ils sont de l'autre côté de la rivière. Voulez-vous traverser la rivière avec nous puis voulez-vous ramener ici les moyens nécessaires pour qu'on ait l'équipement médical adéquat pour bien soigner les Québécois?

Le Président: M. le député.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: En additionnelle, M. le Président, est-ce que le ministre a lu la page 135 du Vérificateur? «Le gouvernement fédéral, dans le cadre du transfert relatif à la santé, versait au Québec un montant de 239 millions de dollars réparti sur les deux prochaines années. Ce transfert est destiné à la modernisation du parc d'équipements médicaux, incluant l'imagerie médicale. Compte tenu des besoins du réseau, il est primordial ? j'espère que j'ai l'écoute du ministre ? que la répartition de ces investissements soit faite de façon judicieuse et qu'elle découle, comme nous l'avons mentionné précédemment, d'une planification bien établie.»

n(11 h 50)n

Est-ce que le ministre comprend que j'y parle pas d'argent, en ce moment? J'y parle du fait qu'ils ne sont même pas capables d'avoir un inventaire des équipements. Conséquence: il y a désuétude des équipements. Conséquence: il y a des mauvais diagnostics. Il y a des gens, dans des roulottes à patates frites, qui gèrent mieux leur inventaire, M. le Président, que le ministre gère le sien, à son gouvernement, pour la santé. Ce que je demande au ministère, ce que je demande au gouvernement: Quand est-ce qu'ils vont prendre leurs responsabilités? Ça fait sept ans qu'ils sont là. On en a jusqu'ici de voir qu'ils font des beaux discours, mais il y a jamais rien sur le terrain.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, point besoin de traiter les gestionnaires de la santé et des services sociaux, qu'ils soient à Québec ou dans chacune des régions du Québec, de gérants de cabane à patates frites parce que... parce que nous avons des moyens limités. Oui, nous avons des moyens limités pour répondre aux défis de la technologie et des moyens qui doivent être à la disposition des radiologistes en particulier, des spécialistes pour répondre aux besoins de diagnostics des autres spécialistes. Non, nous avons du personnel qui est très compétent. Nous savons très précisément où sont les 146 appareils ? pas 145, 146 appareils ? d'imagerie médicale dans le réseau public, et nous savons parfaitement où sont situés également les 105 autres appareils dans le réseau privé, et nous savons très bien l'état de situation à l'égard de ces appareils, et nous savons très bien également qu'il y a besoin de renouvellement, qu'il y a besoin d'investissement massif, mais qu'il y en a besoin aussi dans d'autres équipements médicaux. Pourquoi vous pensez que l'an passé on a investi 20 millions de dollars dans les petits équipements médicaux pour les infirmières qui bossent tous les jours, avec du travail extrêmement difficile, dans nos hôpitaux puis qu'encore cette année il faut ajouter des petits équipements médicaux modernisés pour les infirmières qui sont au travail quotidiennement et qui ont besoin de ces éléments pour rendre leur travail et rendre les capacités de travail plus... en termes de rendement qui donne des résultats et davantage d'efficacité?

M. le député de Châteauguay, il y a une rivière qui sépare les besoins de la réponse à ces besoins en termes d'argent. Quand allez-vous vous mettre à la construction d'un pont avec nous pour rapatrier ici les moyens pour qu'on puisse répondre efficacement aux besoins des radiologistes, des infirmières et du monde hospitalier au Québec?

Une voix: Bravo!

Le Président: Bien. La période de questions et de réponses orales est terminée.

Motions sans préavis

Alors, maintenant, nous allons passer aux motions sans préavis. D'abord, M. le leader du gouvernement.

Substituer le nom du ministre délégué
aux Transports et à la Politique maritime
à celui du ministre des Transports
comme parrain du projet de loi n° 13

M. Brassard: Oui. Alors, M. le Président, je voudrais faire motion afin «que le nom du ministre délégué aux Transports et à la Politique maritime, M. Jacques Baril, soit substitué à celui du ministre des Transports, M. Guy Chevrette, à titre de parrain du projet de loi suivant: le projet de loi n° 13, Loi modifiant la Loi sur les véhicules hors route».

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que la motion est adoptée? Elle est adoptée. Très bien. Alors, je crois que vous avez une autre motion sans préavis, M. le leader?

Procéder à des consultations particulières
sur le projet de loi n° 13

M. Brassard: Une motion sans préavis qui a fait l'objet d'un accord entre les parties et qui porte sur une consultation particulière. Alors, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que la commission des transports et de l'environnement tienne des consultations particulières sur le projet de loi n° 13, Loi modifiant la Loi sur les véhicules hors route, le 13 juin 2001, à compter de 20 heures, et, à cette fin, qu'elle entende les organismes suivants: le 13 juin, de 20 heures à 20 h 15, remarques préliminaires du groupe parlementaire formant le gouvernement; de 20 h 15 à 20 h 30, remarques préliminaires du groupe parlementaire formant l'opposition; de 20 h 30 à 21 h 15, Fédération des clubs de motoneigistes du Québec; 21 h 15 à 22 heures, Regroupement québécois des courtiers d'assurance; 22 heures à 22 h 45, le Bureau d'assurance du Canada; 22 h 45 à 23 heures, remarques finales du groupe parlementaire formant l'opposition; 23 heures à 23 h 15, remarques finales du groupe parlementaire formant le gouvernement;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, partagée également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques finales, partagée également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 15 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 30 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition; et

«Que le ministre délégué aux Transports et à la Politique maritime soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, nous en sommes aux motions sans préavis. M. le député de Hull.

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale appuie les citoyens de ville de La Baie dans leur lutte pour préserver leur municipalité qui leur assure une place bien à eux, tel que décrit dans le serment de la chaise vide que plusieurs milliers de citoyens de cette municipalité ont transmis au premier ministre.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Brassard: Non, il n'y a pas consentement parce que la coutume voulant qu'on nous transmettre préalablement ce genre de motion n'a pas été suivie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il n'y a pas consentement. Alors... Oui, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, à ce moment-ci, je retiens le consentement du leader du gouvernement à l'effet qu'elle sera présentée demain.

M. Brassard: Le leader de l'opposition fait une mauvaise interprétation.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député de Saint-Jean, la parole est à vous.

Attester que le photographe Denis Tremblay
a pris une photographie panoramique de l'hôtel
du Parlement à minuit, le 1er janvier 2001

M. Paquin: M. le Président, je demande le consentement de l'Assemblée pour présenter la motion conjointe suivante de la députée de Sauvé et de moi-même, motion sur la photo du millénaire.

«Nous proposons que l'Assemblée nationale du Québec atteste que M. Denis Tremblay, photographe québécois de réputation internationale, a pris une photographie panoramique de l'hôtel du Parlement du Québec à 0 heure, heure locale, le 1er janvier 2001; elle l'en remercie et elle le félicite pour l'ensemble de son oeuvre.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Brassard: ...consentement pour qu'il y ait de brèves remarques de part et d'autre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de Saint-Jean.

M. Roger Paquin

M. Paquin: M. le Président, c'est aujourd'hui l'occasion pour notre Assemblée, à travers cette motion, de féliciter quelqu'un qui est un grand technicien de la photographie en même temps qu'un grand artiste, un ambassadeur pour le Québec à l'étranger et un innovateur sur le plan de la technologie. M. Tremblay, qui est présent ici avec son épouse, qui est un résident de la circonscription de Saint-Jean, pourrait beaucoup mieux être considéré comme un citoyen du monde, compte tenu du travail qu'il fait. Aujourd'hui, donc, dans un premier temps, nous allons attester d'un travail qu'il a fait et, ensuite, un peu célébrer sa qualité de photographe.

M. le Président, le 1er janvier de cette année, au jour de l'An, alors que la plupart s'apprêtaient à réveillonner, il y avait un groupe enthousiaste de citoyens ici, à l'avant de l'Assemblée nationale, dans la neige, dans une journée qui avait été d'ailleurs très, très, très neigeuse, c'est le moins qu'on puisse dire, et on a profité d'une éclaircie, qui était arrangée avec le gars des vues, à minuit, et on a pris cette photographie exceptionnelle. Qu'est-ce qu'elle a d'exceptionnel, M. le Président? Il faut le comprendre, puisque, pour l'exposition, il a fallu que la photo commence à se prendre quelques minutes avant minuit et qu'elle s'achève quelques minutes après. Il s'agit d'une photo de 400 degrés d'angle. C'est donc que la photo chevauche deux années, deux siècles et deux millénaires. M. le Président, c'est la seule photo connue au monde ? et, dans le milieu spécialisé, on en parle comme de la photo du millénaire ? c'est la seule photo au monde qui fasse l'objet d'un procès-verbal attesté par un juge d'un lieu quelque part sur la planète, dont la photo a été prise en chevauchant deux millénaires. La prochaine fois, monsieur, c'est dans 1 000 ans, et je pense que, compte tenu de l'ensemble des sites qui étaient disponibles pour le photographe pour cette occasion qui va marquer le milieu de la photographie, eh bien, il faut nous réjouir qu'il ait choisi de photographier son Assemblée nationale.

M. le Président, le procès-verbal qui a été dressé à cette occasion, puisqu'il s'agit d'attester d'un événement, je vous demande la permission de le déposer, en même temps que les caractéristiques de la photo et une sommaire biographie du photographe, avec votre permission, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour déposer les documents dont le député a fait référence?

Des voix: ...

Documents déposés

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ces documents sont déposés.

n(12 heures)n

M. Paquin: Alors, la photo, donc... Le procès-verbal a été dressé par Michel Lessard et était en présence aussi des gens de la capitale nationale et le juge Robert Poupart qui ont contresigné la photographie avec moi-même.

M. le Président, donc, un événement unique, et l'Assemblée nationale d'ailleurs s'en portera acquéreur, de la copie originale, mais la copie sera aussi vue dans plusieurs lieux un peu partout dans le monde. Et, en particulier, M. le Président, le... dans le... il y aura... Dans différentes revues et pour des compagnies de photographies dans le monde entier, pour la carte de Noël de l'année prochaine, ce sera cette photographie qui sera là. Elle sera aussi la photo vedette de l'album préparé pour le quatrième centenaire de la ville de Québec.

Simplement quelques mots sur les prouesses de ce photographe-là. J'ai ici une revue en mandarin, publiée en Chine, sur le plus beau site à visiter dans le monde, et je vous le dis en mille, M. le Président, c'est la ville de Québec, avec des photos de Denis Tremblay. Et j'ai absolument aucune idée du texte, c'est écrit en mandarin. Il y a également, au niveau de l'innovation technologique, un nouveau procédé qui a été mis au point au Québec et qui respecte l'environnement et qui permet de faire des prises photographiques, d'immenses présentations. On appelle ça l'Elcographie. Ça a été mis au point par un technicien d'une grande valeur, qui est M. Adrien Castegnier. Et les photographies de M. Tremblay vont maintenant être diffusées dans le monde entier en format populaire, sur des grandes bannières, et les deux premières photographies, ce sont la place Saint-Marc à Venise et la place Royale de Québec.

M. le Président, donc, je tiens à ce que nous attestions de cet événement et, surtout, que nous remerciions le photographe d'avoir choisi l'Assemblée nationale pour ce faire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Jean, de votre intervention, et je cède maintenant la parole à la critique officielle de l'opposition en matière de culture et communications. Mme la députée de Sauvé, la parole est à vous.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Et c'est avec un grand honneur aujourd'hui que je joins ma voix à celle de mon collègue député de Saint-Jean pour souligner le travail non seulement d'un grand technicien de la photo, mais vraiment d'un très grand artiste, d'un très grand créateur, et peut-être, M. le Président ? et je pèse mes mots ? peut-être du plus grand photographe que le Québec aura connu. Car, effectivement, Denis Tremblay se spécialise à capturer le charme des endroits les plus fameux à travers le monde, employant une technologie qu'il a mise au point, une technologie de la vision panoramique 360°...

Des voix: ...

Mme Beauchamp: ...ce qui donne un effet des plus saisissants à ses photographies...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée, s'il vous plaît. Si vous voulez poursuivre.

Mme Beauchamp: M. Tremblay est dans nos loges et, effectivement, j'apprécie ce moment d'attention, M. le Président.

J'ai eu l'occasion, à l'invitation de mon collègue député de Saint-Jean, l'année dernière, alors que j'étais en visite dans la région de Saint-Jean lors du Festival de montgolfières, de pouvoir contempler et admirer une exposition d'oeuvres du photographe Denis Tremblay sur le lieu même, sur le site même du Festival, à Saint-Jean. Et, M. le Président, je peux vous dire que j'ai été très fortement impressionnée et en même temps légèrement chagrinée de voir que, dans le cas de M. Tremblay, malheureusement, le vieux dicton qui dit que nul n'est prophète dans son pays se vérifiait peut-être un peu trop bien, puisque M. Tremblay a droit à une renommée et à une reconnaissance, ici, au Québec, pour l'ensemble de son oeuvre.

M. le Président, je tiens à vous souligner que M. Tremblay est le photographe officiel, entre autres, de plusieurs festivals de montgolfières, ici, bien sûr, au Québec, le Festival de montgolfières de Saint-Jean, mais aussi au Canada, aux États-Unis et en Europe, et que, seulement dans ce cadre-là, dans le cadre de festivals de montgolfières, M. Tremblay nous donne des photos panoramiques vraiment extrêmement saisissantes.

M. Tremblay a exposé ses photos en Belgique, en France, en Italie, en Suisse, aux États-Unis, au Canada. Il est le détenteur de records. Il a pris la plus grande photo de groupe au monde, il a réuni 2 600 personnes sur une même photo. Et il a fait également ? et ce n'est pas rien, M. le Président, et j'ai pu en voir une réplique sur le site du Festival, à Saint-Jean, l'été dernier ? il a également pris la plus longue photo du monde, soit une photo de 120 pi ou, si vous préférez, de plus de 36 m. Ses photos en 360° sont utilisées par Microsoft dans plusieurs logiciels, dont l'Encyclopédie Encarta, et aussi dans la Canadian Encyclopedia, par China Airlines et aussi par Air Canada.

M. le Président, je voudrais vous souligner que, si vous allez sur Internet... En fait, je vous invite très fortement à aller consulter le site qui s'appelle www.photopanoramique ? en un seul mot ? .com. C'est le site de M. Tremblay où il nous présente une galerie d'oeuvres. C'est la plus grande collection de photos panoramiques que vous allez trouver à travers le monde. Ces photos ne représentent qu'une portion des milliers d'images que M. Tremblay a prises tout au long de sa carrière. Sur son site Internet, vous pourrez admirer des photos panoramiques prises en Égypte, en Jordanie, au Maroc, en Tunisie, en Australie, en Belgique, en Angleterre, en Italie, en Israël, en Hollande, aux États-Unis, au Canada, au Vatican, au Danemark, en France, en Suisse, M. le Président. Ici même, M. Tremblay a réalisé la photo panoramique du salon bleu de l'Assemblée nationale et il a également pris une vue imprenable de la ville de Québec du haut du clocher du Parlement.

Je vous invite également à vous procurer la dernière publication de M. Tremblay. On peut admirer plus de 100 photographies panoramiques de M. Tremblay dans la dernière publication, qui est un livre qui porte sur l'Égypte, que j'ai pu également voir ? il l'avait en sa possession l'été dernier ? c'est le livre qui s'appelle The Miracle of Israël.

Je tiens à souligner que M. Tremblay, son apport est non seulement artistique, mais je vous disais également qu'il est technologique. M. Tremblay a été président de l'Association internationale des photographes panoramiques. Il a pris le temps très gentiment, l'année dernière, de m'expliquer que la photo panoramique avait été un genre délaissé, que c'était un genre très populaire au XIXe siècle, au début de ce siècle, mais c'est un genre qui avait été délaissé techniquement, M. le Président, et c'est vraiment à M. Tremblay qu'on doit le fait qu'à travers le monde la photo panoramique, la photo 360°, grâce à ses prouesses technologiques développées ici, au Québec, eh bien, ce genre panoramique a retrouvé toutes ses lettres de noblesse.

M. le Président, je terminerai en vous soulignant que l'Assemblée nationale, ici même, propose aux Québécois et aux Québécoises de venir admirer les oeuvres de M. Tremblay, puisqu'il y aura au moins une dizaine d'oeuvres exposées ici, à l'Assemblée nationale. Je crois que cette reconnaissance de l'Assemblée nationale va nous aider à faire mentir ce fameux dicton que Nul n'est prophète dans son pays, et cette reconnaissance, je vous prie de me croire qu'elle est vraiment bien méritée par M. Tremblay.

Donc, en terminant, au nom de l'opposition officielle, donc on joint notre voix à celle du député de Saint-Jean pour remercier M. Tremblay qui, par son expertise et son sens artistique, fait rayonner le Québec à travers le monde. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. Tremblay, est-ce que vous pourriez vous lever pour qu'on vous salue, toute l'Assemblée nationale? Alors, félicitations pour l'excellence de votre travail.

Mise aux voix

Est-ce que cette motion conjointe présentée par Mme la députée de Sauvé et M. le député de Saint-Jean est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le député de Papineau, responsable des Loisirs et des Sports pour l'opposition officielle.

M. MacMillan: Oui, M. le Président. Avant de demander le consentement de déposer une motion... préavis, j'aimerais féliciter le député d'Ungava, qu'on me dit, en fin de semaine, a réussi un trou d'un coup dans un tournoi quelconque. Alors, de la part de l'opposition, on voudrait vous féliciter, M. le député d'Ungava, qui joint le groupe comme le député de Mont-Royal, le député de Pontiac l'an passé.

Féliciter les joueurs de L'Avalanche du Colorado
pour leur conquête de la coupe Stanley

M. le Président, je veux déposer une motion:

«Que l'Assemblée nationale félicite les joueurs de l'équipe L'Avalanche du Colorado ? et je dois mentionner, comme Louise Bédard, l'adjointe de M. le député de Verdun, dirait ? (les ex-Nordiques de Québec) pour leur solide performance qui leur a mérité le trophée le plus convoité, la coupe Stanley», M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Boisclair: Sans débat.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement sans débat. Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Paradis: ...Nordiques qui va prendre quelques brefs instants pour souligner cet événement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. Il y aurait consentement, mais sans débat. Est-ce qu'il y a consentement? Sans débat. Oups!

M. Paradis: ...dans le cadre des commissions parlementaires, il y aurait consentement à ce que les avis pour ces commissions où il y a des auditions publiques soient donnés immédiatement, de façon à faciliter le débat.

M. Boisclair: Il y a aussi de la législation qui attend, M. le Président. Sans débat.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, rapidement, M. le député.

M. Dupuis: Compte tenu de l'attitude du gouvernement sur cette motion, est-ce que je peux me permettre de solliciter la permission de déposer un amendement à la motion et d'y ajouter... à la motion et d'y ajouter...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, vous pouvez pas faire un amendement s'il y a un consentement pour une motion sans débat.

M. Dupuis: ...de déposer un amendement à la motion sans préavis?

n(12 h 10)n

M. Boisclair: M. le Président, dans ce contexte-là, je vais retirer mon consentement puis il y aura pas de motion, ça va régler le problème. Alors, il y a la motion, elle est acceptée sans débat ou, sinon, on passe à d'autre chose.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bon, bien, est-ce que... Oui, là, écoutez... pas pour discuter de ça pendant une heure, là. Est-ce que la motion est adoptée sans consentement?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je suis prêt à reconnaître un autre... Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis? M. le député de Saint-Laurent.

Féliciter particulièrement un fils
du comté de Saint-Laurent,
M. Raymond Bourque, à la suite
de la conquête de la coupe Stanley

M. Dupuis: Est-ce que je peux me permettre de déposer la motion sans préavis suivante, en faisant référence à la motion qui vient d'être adoptée sans débat:

«Que l'Assemblée nationale félicite particulièrement un fils du comté de Saint-Laurent ? dont tous les Laurentiens sont extrêmement fiers ? M. Raymond Bourque»?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Une voix: Sans débat.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement sans débat. Est-ce que cette motion présentée par M. le député de Saint-Laurent est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?

Avis touchant les travaux des commissions...

Féliciter M. Martin Robitaille,
récipiendaire du titre de
Grand Champion international
de la finale internationale de la dictée PGL

M. Boisclair: Il y a une motion que je voudrais déposer au nom de mon collègue. Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la victoire de Martin Robitaille, de la région de Québec, qui a remporté le titre de Grand Champion international, catégorie classes francophones, lors de la finale internationale de la dictée PGL.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: ...entendre soit l'auteur, soit son représentant.

Une voix: Sans débat.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sans débat? Alors, est-ce que la motion présentée par M. le leader de l'opposition... du gouvernement est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sans débat. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?

Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement... M. le leader adjoint.

M. Boisclair: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 27, Loi sur le Protecteur des usagers en matière de santé et de services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 23 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.

J'avise aussi cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code du travail, instituant la Commission des relations du travail et modifiant d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

J'avise cette Assemblée que la commission de la culture entreprendra les consultations particulières sur le projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 12 h 45, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 23 h 45, à la salle du Conseil législatif.

Et, finalement, j'avise cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre: d'abord, le projet de loi n° 203, Loi concernant la Ville de Sept-Îles; ensuite, le projet de loi n° 230, Loi concernant la Régie intermunicipale d'assainissement des eaux de Sainte-Thérèse et Blainville, le mardi 19 juin 2001, immédiatement après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vos avis sont déposés.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Affaires du jour

Nous passons maintenant aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président, l'article 44.

Projet de loi n° 149

Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 44. M. le ministre de l'Environnement propose l'adoption du projet de loi n° 149, Loi sur les réserves naturelles en milieu privé.

Est-ce qu'il y a des intervenants? M. le ministre de l'Environnement.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, les terres privées au Québec abritent un patrimoine faunique et floristique inestimable, des habitats prioritaires et plusieurs milieux naturels de grande importance pour la collectivité québécoise. Pouvoir assurer une protection à long terme de ces sites naturels par leur propriétaire s'inscrit dans une démarche volontaire au maintien de la diversité biologique au Québec. Autre avantage direct de cette protection, c'est l'amélioration de la qualité de vie de nos concitoyens et concitoyennes tant en campagne qu'en ville, bien sûr. C'est pourquoi mon prédécesseur, M. Paul Bégin, le député de Louis-Hébert, a présenté, le 31 octobre 2000, le projet de loi sur les réserves naturelles en milieu privé, le projet de loi n° 149. Je rappelle que ce projet de loi a pour but d'assurer la conservation des caractéristiques patrimoniales des propriétés privées qui présentent un intérêt sur le plan écologique, faunique, floristique, géologique, géomorphologique ou paysager en permettant au ministre de l'Environnement de reconnaître de telles propriétés comme réserves naturelles, et ce, à la demande du propriétaire.

Par le projet de loi sur les réserves naturelles en milieu privé, nous répondons aussi aux attentes pressantes exprimées par la population et les organismes de conservation qui veulent être étroitement associés à la protection des milieux naturels sans avoir à se départir de leurs terrains. Je veux souligner que les initiatives de ceux-ci seront soutenues, car les dispositions législatives que nous avons adoptées en commission demeurent suffisamment simples et souples pour favoriser la création de réserves naturelles en milieu privé. L'engagement personnel et volontaire des propriétaires représente une précieuse contribution à la préservation de la biodiversité. Il était donc, M. le Président, important d'agir en ce sens.

M. le Président, nous en sommes maintenant rendus à la troisième lecture du projet de loi sur les réserves naturelles en milieu privé. Les avantages à adopter le projet de loi n° 149 sont nombreux. J'en rappelle quelques-uns.

D'abord, le projet de loi vise la conservation de propriétés privées par leur propriétaire ou par l'intermédiaire d'organismes de conservation, sans acquisition de la part de l'État et sans nécessité d'une obligation de donation. Ainsi, avec un statut de réserve naturelle, le propriétaire garde son droit de propriété sur le terrain qu'il veut sauvegarder et, en même temps, du même souffle, la collectivité peut, pour sa part, s'enrichir d'un site protégé, et ce, pour le bénéfice des générations tant actuelles que futures.

Deuxièmement, le projet de loi n° 149 ne nécessite pas la gestion de terres privées par le gouvernement. Ce projet de loi reconnaît le rôle essentiel que d'autres acteurs de la société québécoise peuvent jouer. On sait, M. le Président, que l'ampleur de la tâche de conservation à réaliser sur l'ensemble du territoire québécois est telle que le gouvernement du Québec ne peut plus faire tout et tout seul. Par ailleurs, le savoir-faire déjà acquis par les citoyens et les organismes du milieu spécialisés en conservation volontaire représente une avenue que je qualifierais d'extrêmement prometteuse. L'existence d'une volonté collective et d'une cohésion de plus en plus marquée de plusieurs intervenants d'orienter, je dirais même d'harmoniser leurs actions respectives vers la conservation et l'utilisation durable du territoire et des ressources constitue maintenant un atout de taille.

Le projet de loi sur les réserves naturelles en milieu privé, troisièmement, M. le Président, établit par ailleurs les conditions préalables à la reconnaissance, l'une de ces conditions étant la conclusion d'une entente portant notamment sur les mesures ? vous comprenez les mesures de conservation ? à observer par le propriétaire. Par cette entente qui sera prise avec le ministre de l'Environnement ou avec un organisme de conservation, le propriétaire s'impose lui-même les conditions de conservation. En d'autres termes, le propriétaire peut proposer des mesures correspondant à des degrés divers de protection ou encore favoriser le maintien ou l'autorisation de certains usages jugés compatibles, bien sûr, compatibles avec les usages et les objectifs de conservation.

Aussi, M. le Président, comme net avantage, le projet de loi n° 149 peut garantir l'action de conservation à perpétuité lorsque désiré par le propriétaire ou pour un terme minimal de 25 ans. De plus, M. le Président, le projet de loi prévoit aussi que l'entente peut être éventuellement modifiée pour mieux répondre aux besoins de conservation, des besoins de conservation, vous le comprenez, qui sont évolutifs, et que le ministre de l'Environnement peut, dans certains cas, révoquer.

M. le Président, ce projet de loi comporte un dernier avantage important. Ce projet de loi offre la possibilité au gouvernement du Québec de reconnaître l'action de conservation volontaire en site privé et ouvre, bien sûr, des opportunités à des programmes d'aide, à des programmes d'appui à la conservation volontaire, tant pour les propriétaires de ces terrains que pour les organismes de conservation.

Finalement, M. le Président, on se rappellera que le projet de loi n° 149 a fait l'objet de consultations particulières en commission parlementaire le 1er février dernier. À cette occasion, nous avons entendu différents organismes qui sont venus nous démontrer les avantages inhérents aux initiatives de conservation de la part du secteur privé au Québec. De plus, nous avons eu l'occasion, le 8 février 2001, de procéder à l'étude article par article du projet de loi n° 149, lequel a fait l'objet d'un certain nombre d'amendements, et je voudrais remercier le député de l'opposition pour sa contribution.

Je profite de l'occasion, M. le Président, aussi pour remercier du même souffle tous les organismes qui ont accepté de témoigner de leur appui au projet de loi n° 149. Ils nous ont gracieusement fait part de leurs commentaires et ont partagé avec nous le fruit de leur expérience. Cela augure très bien, M. le Président. Cela augure très, très bien dans la mise en oeuvre de cette loi par le secteur privé, qui est désireux de participer concrètement à l'augmentation du nombre d'aires protégées en terres privées.

Par le projet de loi sur les réserves naturelles en milieu privé, le gouvernement donne aux citoyens et aux citoyennes une nouvelle assise juridique de manière à accroître le nombre d'initiatives de conservation des milieux naturels. Et, de ce fait, je sais pertinemment que des propriétaires fonciers, des organismes de conservation sont anxieux d'utiliser les dispositions de la nouvelle loi.

n(12 h 20)n

En conclusion, je souligne non seulement la contribution du député d'Orford, mais aussi celle de mes collègues députés ministériels, des députés qui ont été particulièrement actifs lors des débats en commission parlementaire.

Je demande donc, M. le Président, que l'on procède à l'adoption du projet de loi sur les réserves naturelles en milieu privé, qui servira la conservation volontaire au Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre de l'Environnement. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du projet de loi n° 149, Loi sur les réserves naturelles en milieu privé, et je reconnais le porte-parole officiel de l'opposition en matière d'environnement et député d'Orford. M. le député, la parole est à vous.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Je prendrais les... On a le droit à cette étape-ci à 60 minutes, j'en prendrai 40 pour faire oeuvre de pédagogie.

Vous savez, le ministre l'a dit, le député de Gouin, que l'opposition avait voté avec le gouvernement. Et je pense qu'il faut bien expliquer ce projet de loi, et je vais... Je l'ai fait et je vais continuer à le faire tout au long de ma carrière politique, et probablement après ma carrière politique, parce que j'y crois à ce point, à ce projet de loi là, comme étant une des façons d'améliorer notre patrimoine collectif ici, au Québec, qui a tardé.

Or, je vais faire oeuvre de pédagogie. On va expliquer pourquoi ce projet de loi là a été fait, comment il a été fait, quels sont les avantages pour les milieux, pour les individus, pour les communautés, et, bien sûr, il faudra aussi faire remarquer aux gens qui nous écoutent les aspects un peu moins forts de ce projet de loi là, parce que c'est jamais parfait, même si on est pour, M. le Président.

D'abord, peut-être quelques mots sur le ministère avant que nous embarquions d'emblée sur le projet de loi. Il faut se rappeler que le ministre Paul Bégin, qui avait déposé ce projet de loi là, avait parlé une minute exactement, une minute, de 17 h 59 à 18 heures, sur le projet de loi n° 149. Et moi qui croyais que ce projet de loi là... En tout cas, nous, de l'opposition, on était pour. On pensait que c'était bon, on pensait qu'il fallait l'expliquer, parce que ici il va falloir embarquer les populations dans ce projet de loi là. Vous-même qui présidiez ? je me souviens très bien, M. le Président ? vous-même qui présidiez à cette séance-là, vous étiez un peu surpris, je ne veux pas... je veux pas mettre d'intention. Mais je vous avoue que de notre côté, du côté de l'opposition, on était tellement surpris de voir que le ministre ne venait pas ici prendre l'heure qui lui était donnée pour expliquer le bien-fondé de son projet de loi. Et j'ai dû attribuer ça à une fausse humilité finalement, que j'ai regrettée d'ailleurs, qu'il ait malheureusement pu expliquer ce projet de loi là en profondeur.

Peut-être pourquoi il a parlé seulement une minute... Vous savez, ce gouvernement-là est rendu à quatre ministres de l'Environnement en six ans. Probablement que, si on remontait dans l'histoire de la Confédération et du Québec, on trouverait probablement pas une province au Canada où on a eu quatre ministres de l'Environnement en six ans. C'est exceptionnel, et ça a pour effet négatif d'arrêter la machine, de la repartir. Et le nouveau ministre, avant qu'il soit familier avec les projets de loi et puis que ça reparte... Alors, le Québec indéniablement a pris des reculs ? d'ailleurs, je vous lirai tantôt des passages d'éditoriaux dans les dernières semaines ? le Québec a pris de très grands reculs au niveau de l'environnement. Et ça démontre indéniablement un gouvernement qui commence à être fatigué.

On sait que c'est pas évident, être ministre de l'Environnement. C'est un ministère, hein, où on doit gérer le passé, le présent puis le futur, et c'est un ministère compliqué. Et, qu'on ait changé quatre fois le ministre en six ans, c'est un peu extraordinaire.

C'est tellement extraordinaire, M. le Président, que j'ai l'impression que de fois en fois, les nouveaux ministres ont pas eu le temps d'aller voir le ministre des Finances, qui est maintenant le premier ministre, pour le convaincre, le convaincre de l'importance des budgets dans ce ministère-là. Et c'est tellement vrai, ce que je vous dis là, que le regroupement des avocats en droit de l'environnement disait il y a quelques jours, dans le journal Le Devoir, que les budgets entre 1995 et l'an 2001 ont baissé de 40 %. 40 % de budget baissé au ministère de l'Environnement, c'est pas rien, ça, M. le Président, 40 % de baisse en cinq ans. Ce gouvernement-là a dilapidé le ministère de l'Environnement. Le ministère est rendu le seizième sur une vingtaine de ministères au Québec. Et, dans la priorité des gens, l'environnement, qui, en 1995, au moment où nous allons quitter le gouvernement, était dans les quelques premières priorités... même si nous sortions d'une crise économique en 1995, les gens mettaient l'environnement en deuxième ou troisième priorité, si vous retournez voir les sondages de l'époque.

Au moment où on se parle ? et je vous les citerai tantôt, les écrits là-dessus ? l'environnement au Québec est devenu en seizième position. Demandez-vous pas pourquoi on n'atteint pas nos objectifs en récupération, demandez-vous pas pourquoi on a tant de problèmes en trois bassins versants. Alors, l'environnement a été laissé pour compte, 40 % de coupe dans les budgets, quatre ministres, et c'est là qu'on est rendu.

Et je pourrais vous lire d'ailleurs... Je pourrais vous lire, dans Le Devoir de la fin de semaine ? et on sait que ce journal, qui est un leader finalement au Québec en écrits environnementaux... Et on doit déplorer que très peu de médias, sauf quand il y a des crises, suivent les débats environnementaux. Alors, le regroupement des grandes chaînes médiatiques, je sais pas ç'a été quoi, le phénomène, mais on doit lever notre chapeau, on doit lever notre chapeau au journal Le Devoir qui, année après année, avec les moyens du bord... Et je tiens à souligner d'une façon particulière leur journaliste Louis-Gilles Francoeur qui, année après année, se sont donné une mission de bien couvrir les débats environnementaux, et souvent non seulement les couvrir mais être bien en avant des dossiers environnementaux.

Alors, quand je vous dis que le Québec a pris un grand recul en environnement, laissez-moi vous lire ce que Le Devoir du 9 de juin de l'an 2001, donc il y a quelques jours, Marc-André Côté écrivait. Il disait: «Née au début des années quatre-vingt-dix, l'industrie ? il parle de l'industrie de l'environnement ? profitait d'un taux de croissance d'environ 10 % par année.» Hein! De 1990 à 1995, je vous rappelle que le Parti libéral est là. C'est Marc-André Côté qui dit: «Née au début des années quatre-vingt-dix...» On se souvient du discours de Gérald Tremblay, la «grappe de l'environnement». Alors: «...l'industrie profitait d'un taux de croissance d'environ de 10 % par année, mais entre 1995 et 1997, le secteur ? donc, là on sait que c'est le gouvernement péquiste qui arrive ? entre 1995 et 1997 ? et on sait à ce moment-là que l'économie est repartie, en 1995 ? le secteur a connu une décroissance importante de 5,4 %.» Alors, alors qu'il y a une récession, la grappe en environnement a une progression de 10 %; alors qu'il y a une reprise économique, là, l'environnement va avoir une décroissance de 5,4 %.

«Ce ralentissement surprend d'autant plus que l'industrie a poursuivi sa croissance ailleurs au Canada.» C'est pas l'opposition qui dit ça, c'est Marc-André Côté qui écrit pour Le Devoir le 9 de juin. Manon Laporte souligne ? elle est la présidente d'un regroupement ? que «le secteur fait vivre près de 20 000 personnes au Québec». Et, plus loin, elle nous dira qu'ils sont arrivés à ces chiffres-là en parlant à 740 entreprises qui ont une activité dans le secteur de l'environnement, M. le Président. Et ils finiront l'article en disant: «L'industrie québécoise reste indépendante d'une réglementation environnementale qui s'avère désuète dans plusieurs secteurs. Le niveau réglementaire du Québec a pris du retard par rapport à celui des provinces et des pays voisins avec qui il peut être comparé.»

Et ça, là, c'est pas une gang de verts, c'est pas une gang de Greenpeace, ce sont 740 entreprises au Québec qui disent: Écoutez, on a pris des retards extraordinaires, décroissance de 5 % depuis que la reprise économique a pris. Et puis, à l'époque où les libéraux étaient là, il y avait croissance de 10 % par année dans cette industrie-là. Alors, c'est inquiétant. C'est inquiétant, et on peut se demander: Est-ce que l'industrie va reprendre la place qui lui revenait en environnement au Québec?

n(12 h 30)n

Nous avons, il y a quelques jours, parlé de ce projet de loi là ici, à l'Assemblée nationale, le ministre était présent. Et, tout comme nous l'avions fait en commission parlementaire ? parce que le ministre a souligné l'apport important de l'opposition dans le projet de loi ? d'abord, nous avons apporté des amendements ? j'y reviendrai tantôt. Mais nous avions à l'époque invité le ministre à ajouter, aux mots «Loi sur les réserves naturelles en milieu privé», «et public». On avait presque convaincu le ministre Paul Bégin. Il m'avait même dit, à l'arrière du trône: Écoutez, M. le député, apportez-moi un amendement ce soir puis on va le passer. Alors, le soir, je suis arrivé avec l'amendement. Il m'a dit: Écoutez, j'ai parlé à mes gens, c'est pas si évident que ça, ça va demander une petite étude, etc. Alors, on a reculé un peu. On a reculé, de l'opposition, parce qu'on voulait tellement que le projet de loi passe.

On pensait que ce projet de loi là était à ce point bon qu'il ne fallait pas le mettre... le mettre en situation de péril en voulant apporter des amendements, si ce n'est que, lors de ma dernière présentation ici, je suis allé voir le ministre, le nouveau ministre, le député de Gouin. Je suis allé le voir. J'ai dit: Écoutez, votre prédécesseur n'a pas apporté l'amendement, pour toutes sortes de raisons. C'est un avocat, il a vu ça à partir de la loupe d'un avocat. Vous qui n'êtes pas un avocat, peut-être que vous pourriez demander à vos gens de regarder ça de nouveau. Et il m'a dit, un peu comme le ministre Paul Bégin... Et c'est pas un reproche, ça montre une certaine ouverture du gouvernement face à l'opposition, ce qui n'est pas toujours le cas, M. le Président. Vous êtes là depuis assez longtemps, je vous garantis que c'est pas toujours le cas. Il a été aimable, il m'a dit: Écoutez, oui, j'ai pas de problème à regarder ça.

Je me serais attendu, aujourd'hui, hein, je me serais attendu, aujourd'hui, dans cette Semaine de l'environnement au Canada, que le ministre de l'Environnement nous annonce... Puis je l'ai écouté, hein, j'ai pas quitté quand il a pris la parole. Je me suis dit: Peut-être que son heure de gloire approche, peut-être qu'il va nous annoncer un amendement où le projet de loi n° 149 aurait été non seulement pour les terres privées, mais aussi pour les terres publiques. Et là, là le gouvernement aurait donné le signal de quelque chose de sérieux qu'on voulait faire, et là on n'aurait pas créé un précédent.

Je vous rappellerai que, dans bien d'autres législations, la province a, elle, d'abord marqué le pas, hein? Je peux vous donner plein d'exemples où elle a dit: Nous, le gouvernement, nous allons d'abord le faire, et ensuite on va inviter l'entreprise privée à le faire. Il y a eu plein de législations dans ce sens-là. Or, ici, si on avait dit: Écoutez, on va le faire simultanément, le privé et le public...

Et l'euphorie de la situation, c'est que, dans le comté du député Bégin, ex-ministre de l'Environnement, il y a des gens qui voudraient que des terres publiques puissent se qualifier à ce genre de fiducie foncière là, et on parle d'une commission scolaire qui est propriétaire d'un immense boisé. Ils avaient acheté ça il y a des années et des années, et là ils font une évaluation démographique de leur municipalité, de leur commission scolaire. Ils arrivent à la conclusion que ces terres-là ne serviront... ces boisés-là ne serviront jamais à la commission scolaire et ils disent à ces gens-là: Écoutez, trouvez-vous une façon. Nous, on n'a pas de problème, on n'a pas de problème à ce que ça demeure des terres publiques, mais, nous, commission scolaire, c'est pas notre mission, c'est pas notre métier de préserver un boisé dans le milieu d'une municipalité. Alors, vous, bons citoyens, trouvez une solution.

Alors, ces citoyens-là sont allés voir leur député, ils sont venus voir l'opposition officielle. Je les ai invités à aller voir le ministre et je me disais: Mon Dieu! si on pouvait avoir le projet de loi n° 149 qui s'applique aussi aux terres publiques, peut-être qu'on pourrait préserver ce boisé-là. Mais, parce que c'est pas là, ces citoyens, qui m'écoutent probablement ce midi et qui nous lisent sur Internet, seront bien déçus, parce qu'on a espéré jusqu'à la dernière minute, on a espéré jusqu'à la dernière minute que ce gouvernement se rende compte qu'en ajoutant le mot «public» il aurait probablement aidé d'abord ce boisé. Et c'est ça, hein?

On dit souvent qu'être un environnementaliste... Je dis ça au nouveau ministre de Gouin... au nouveau ministre de l'Environnement, député de Gouin. Je lui dis qu'être environnementaliste, ça fait peut-être un peu cucul, M. le Président, mais on prétend que c'est de parler au nom des arbres, de parler au nom des poissons. Dans ces débats publics là, on entend les citoyens, on entend M. le maire, on entend les échevins, on entend les coupeurs d'arbres, on entend tout ce beau monde là, mais on n'a jamais entendu un arbre, hein? Dans le débat de la pollution de la Yamaska, on a entendu bien du monde, bien des promesses depuis bien longtemps, mais il n'y a pas encore un poisson qui est venu nous dire comment il se sentait, lui, dans la rivière Yamaska. Alors, être environnementaliste, c'est peut-être avoir un peu le courage de dire: Écoutez, ce boisé-là, il faut peut-être le protéger, pas juste pour le cas de cette commission scolaire là.

C'était un beau cas, c'était dans le comté du ministre de l'Environnement. Mais combien de boisés appartiennent à l'État? Je vous donne des exemples. Combien de centres d'achats appartiennent maintenant, via toutes sortes de filiales, à la Caisse de dépôt? Combien de ces centres d'achats là ont à l'arrière une crique, une petite rivière, un marais? Et je pense à certains en particulier où la Caisse de dépôt n'a que faire de ces terrains-là qui sont pour eux des ramassis de grenouilles, de castors et de maringouins et qui pourraient être préservés, valorisés, et tout le monde y serait gagnant. Mais cet outil ne s'appliquera pas.

Je veux aussi vous rappeler, M. le Président, que, si nous étions au Vermont, au New Hampshire, au Maine, où l'État représente, dans le chiffre d'affaires, hein, dans le produit... dans le PIB, 30, 31, 32 %, je vous dirais: Bien, une petite partie de l'activité économique de l'État vient de l'entreprise privée-publique. Mais, dans le cas du Québec, c'est pas le cas, c'est plus de 51 % qui vient du secteur public: municipalités, santé, scolaire, etc. Or, c'est la moitié de l'activité économique de la province, donc, souvent propriétaire de grandes partielles de terres.

Si on se rappelle, par exemple, comment les commissions scolaires ont été bâties, souvent en achetant, en tout cas de mon vivant, les grandes parties de terres qui appartenaient souvent à des communautés religieuses... Je pense, à titre d'exemple, à Sainte-Anne-de-la-Pocatière où le cégep est devenu une propriété publique après avoir été une propriété privée. Je suis convaincu que Sainte-Anne-de-la-Pocatière, quand ils ont acheté ça, ils ont acheté aussi de très grandes parcelles de terres qui ne sont probablement pas valorisées à leur juste milieu et qu'un projet de loi n° 149 pourrait permettre aux gens là-bas de valoriser... Or, c'était ça, l'amendement que j'aurais apprécié que le ministre nous apporte aujourd'hui. Vous me voyez déçu, malheureusement, qu'il n'ait pas décidé de le faire.

Est-ce qu'on a inventé quelque chose, la province de Québec? Étions-nous avant-gardistes ou est-ce que ça a été fait avant? Les gens qui nous écoutent aujourd'hui se demandent si on vient d'inventer au Québec quelque chose d'extraordinaire. Eh bien, non, M. le Président, c'est inventé depuis tout le temps. Les rois et les reines d'Angleterre, avec les nobles de l'époque, il y a plusieurs centaines d'années, eux acquéraient les bords de rivière, acquéraient les plus belles terres de chasse. Bien sûr qu'il y avait un côté peut-être pas si environnementaliste que ça à leur affaire. Ce qu'ils voulaient, c'était de préserver les territoires de chasse et de pêche. Mais il est arrivé, dans le temps, que l'Angleterre a eu et a encore des bords de rivière protégés, et, dans les plus belles terres protégées, parce que, à l'époque, des gens s'y sont préoccupés et parce que ces terres-là étaient publiques, bien, elles le sont demeurées.

Les grand pays comme les États-Unis ont aussi des fiducies foncières dans à peu près tous les États. Si vous prenez cette «trail» qui commence dans le Vermont, qui descend jusqu'en Floride, ou cette autre «trail» qui commence en Colombie-Britannique, qui descend jusqu'en Californie, dans ces deux cas, vous allez vous apercevoir que ces sentiers ont été bâtis plus souvent qu'autrement par des fiducies foncières qui ont été capables, à travers les temps, via des successions, des communautés, des municipalités, de l'entreprise privée, d'en faire l'acquisition.

Des tout petits pays comme les Bermudes sont arrivés à faire la même chose. Alors, il n'y a pas juste des grands États. Des tout petits pays comme les Bermudes, où on sait que les terres sont probablement les plus dispendieuses de la planète ou à peu près, ont été capables, avec le Bermuda Land Trust, d'acquérir des grandes parcelles de terres aux Bermudes, et le mot «grand» est très relatif quand on parle des Bermudes, ce petit pays de 21 milles de long par un quart de mille de large. Ils sont arrivés tranquillement à mettre la main sur des très belles partielles de terres souvent de grandes familles qui quittent les Bermudes pour toutes sortes de raisons. Alors, la province est loin d'être avant-gardiste là-dedans. La preuve, c'est qu'il y en avait déjà une quinzaine, de ces fiducies foncières là, qui furent créés avant que la loi soit créée.

Et je veux souligner ici des gens que j'ai eu l'occasion de revoir samedi et qui nous disent qu'ils suivent ça sur Internet. C'est les premiers citoyens que je rencontre qui nous disent qu'ils suivent les débats sur Internet. Alors, je les ai rencontrés samedi. C'était assez intéressant de voir comment ils nous avaient écoutés. C'est les gens de la Fiducie foncière de la Vallée Ruiter, qui sont venus d'ailleurs en commission parlementaire, et, eux, c'est dans le comté de notre distingué et ami Pierre Paradis, dans la région de Mansonville...

Des voix: ...

M. Benoit: Alors, mon ami Pierre Paradis, mon député, mon député Pierre Paradis, grand batailleur de l'environnement, ex-ministre de l'Environnement, ex-ministre de l'Environnement qui a apporté des grandes réformes à l'Environnement et dont...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Chers amis, on va laisser le député s'exprimer, il a encore beaucoup de temps, et j'apprécierais qu'on ait la même attitude vis-à-vis le ministre de l'Environnement qu'on va avoir avec le député de...

Des voix: ...

n(12 h 40)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député d'Orford. Je vous demande votre collaboration.

M. Benoit: Je parlais donc...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Je parlais donc, M. le Président, que la Vallée foncière de Ruiter est dans le comté de Pierre Paradis, mon ami, mon député et...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, il faudrait identifier le député que vous nommez par son nom de comté, s'il vous plaît.

M. Boisclair: M. le Président, pour moi il parle du député Clifford Lincoln. Quel était son comté, déjà?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non. S'il vous plaît. Alors, je vous rappelle d'appeler le député par le nom de son comté.

M. Benoit: Alors, je parlais donc du député de Brome-Missisquoi, résident de Bedford, qui a été un des députés... le député qui a aidé la Vallée-de-Ruiter à vraiment mettre en place... Ça a été une des premières au Québec, et le député de Brome, ex-ministre de l'Environnement...

Et on a ri quand j'ai dit «des grandes réformes». Je voudrais rappeler à ces personnages qui connaissent peu l'environnement ? évidemment, M. le Président, parce qu'ils n'auraient pas ri ? que le grand moratoire sur les sites de déchets au Québec fut appliqué par le Parti libéral du Québec. Si nous avons aujourd'hui une politique qui va finir par arriver, si j'ai bien compris, en récupération, c'est grâce à ce moratoire que le député de Brome avait mis à l'époque. Alors, je tiens à saluer de façon particulière les gens de la Vallée-de-Ruiter, particulièrement le médecin que j'ai eu l'occasion de rencontrer samedi, qui me disait qu'il suivait nos débats sur Internet.

Je veux aussi rappeler à ce gouvernement une parole de Louis-Gilles Francoeur. Est-ce qu'on a inventé ça, là, nous? Alors, M. Francoeur dit, dans Le Devoir: «Il n'est donc pas étonnant que les fiducies de conservation soient aussi actives, structurées juridiquement et approuvées par l'État chez nos voisins anglo-saxons. Le Québec accuse ici un retard d'autant plus compréhensible que notre conception de la nature suscite chez nous un devoir de la dompter.» C'est intéressant, ce qu'il dit, M. Francoeur. C'est qu'on est probablement, sur le continent, dans les derniers, et, nous, là, l'environnement, il tout faut mettre ça sous contrôle, hein? Il faut harnacher la rivière, il faut mettre du ciment sur le bord, puis les oiseaux dans le parc, puis envoie donc. Alors, lui, il dit: Les Anglo-Saxons, là-dessus, ont eu une approche, ont eu une approche très proactive il y a très, très longtemps.

Au Québec, il y a, à ce qu'on prétend, une vingtaine de fiducies foncières et il y en a eu d'autres qui sont pas des fiducies foncières, où les municipalités, à travers l'État, ont été capables d'acquérir des terrains, et, à cet égard, je reviendrai d'ailleurs tantôt, mais on prétend qu'au moment où on se parle il y aurait 150 demandes au ministère de gens qui s'enquièrent de ce projet de loi n° 149. Il est assez intéressant, il est assez intéressant, et c'est peut-être là le «sales pitch» que je veux ? passez-moi l'expression ? le «sales pitch», M. le Président, que je veux donner ici aux gens qui nous écoutent. L'amendement que nous avons apporté, nous, c'était de permettre que les groupes d'environnement puissent être mandataires de gens qui pourraient être intéressés à prêter, donner, faire gérer par l'État une partie de leur patrimoine individuel qui deviendra un patrimoine collectif. Or, le ministre a acquiescé à notre demande, et maintenant les groupes d'environnement reconnus peuvent être... avec une procuration, peuvent venir au ministère et faire les démarches. À cet égard-là, je sais que le ministre les a rencontrés, j'ai eu l'occasion aussi de les rencontrer la même fin de semaine, ce qu'on appelle les CRE, les conseils régionaux de l'environnement.

Il y en a 17 à travers le Québec. Ce sont des organismes qui, dans certains cas, ont été créés il y a une dizaine d'années ? je pense à ceux de l'Estrie. Il y a d'autres cas où ils ont été créés il y a à peu près cinq ans. Les budgets sont inégaux. Dans les crédits, on pouvait voir qu'un CRE avait tout près de 1 million de dollars de budget, il y en avait d'autres qui avaient 40 000 $. Alors, il y a une grande inégalité dans les CRE du Québec, mais ils ont tous une même mission, c'est de faire de la concertation, de la promotion de l'environnement, et c'est très noble, puis je pense qu'au total ils le font très bien.

Moi, j'ai invité les CRE, c'est un des messages très forts que j'ai eus à leur égard. Les CRE me font penser un peu aux MRC quand ce fut créé. Les MRC cherchaient leur chemin. Elles disaient: Bien, nous, ça va être de l'aménagement du territoire. Et, de l'aménagement, tranquillement, on s'aperçoit maintenant qu'elles ont des missions en environnement, elles ont des missions en politique visuelle du territoire, elles s'en vont vers le transport, le réseau routier, etc. Or, les MRC, au début, certaines ont été plus proactives, se sont donné des missions environnementales plus fortes. Je pense à la MRC de Memphrémagog qui... Une de ses premières missions a été de regarder son plan d'eau, d'où venait l'eau pour tous les gens de la région. Deux cent mille personnes prennent leur eau dans le lac Memphrémagog. Alors, la MRC s'est tout de suite préoccupée de ce plan d'eau là.

Et je me souviens aussi d'un autre débat où M. Nicolet, qui est le maire d'Austin, qui est membre de la MRC, s'est préoccupé d'un des panoramas, celui du mont Orford, en provenance, sur l'autoroute, de Montréal. Alors, la MRC s'est donné une politique, bien humble à l'époque, d'environnement visuel. Alors, les MRC ont pu aller de l'avant en élargissant leur mandat et en se donnant des missions plus environnementales.

Alors, j'ai invité les CRE et je suis sûr que c'est à l'intérieur de leur mandat de faire la promotion du projet de loi n° 149. Moi, là, je suis plus vendu au projet de loi, je pense, que le ministre l'est, M. le Président, parce que c'est une façon extraordinaire, avant qu'il soit trop tard, de mettre la main, comme société, sur... des plus beaux coins de cette province. Ça coûte rien à personne, ça va coûter quelques centaines de dollars à la province, et on y arrivera tantôt, si on a du temps, à l'article 16.

Alors, j'invite les gens qui nous écoutent aujourd'hui, d'abord les groupes d'environnement, j'inviterais même le ministre... Je sais pas s'il m'écouterait. On pourrait lui fournir, nous, à l'opposition, la liste de tous les groupes d'environnement du Québec s'ils l'ont pas. Il pourrait écrire à tous ces groupes-là et leur dire: Écoutez, le projet de loi, là, il vous permet de faire des choses extraordinaires. Pourquoi, vous, ne prendriez-vous pas votre bâton de pèlerin, hein? Saint François serait fier de lui, saint François, patron des environnementalistes. Je cosignerais même la lettre avec lui. Ça me ferait plaisir de cosigner la lettre avec lui, M. le Président, et on pourrait même demander à saint François, on pourrait même demander à saint François...

Le ministre me fait signe. Si je parlais moins longtemps, on pourrait peut-être cosigner la lettre avant 1 heure cet après-midi, mais, c'est malheureux, je devrai me rendre jusqu'à 1 heure. Alors... Mais, après 1 heure, là, après 1 heure, je suis prêt à cosigner la lettre avec lui puis demander à saint François de mettre son étampe sur la lettre. Je suis sûr que saint François nous admirerait qu'on invite les groupes de citoyens du Québec, les groupes de citoyens, mais commençons par les groupes d'environnement. Commençons par les CRE, à leur dire: Écoutez, il y a un projet de loi qui va dans la bonne direction; pourquoi vous nous aideriez pas, nous?

Parce que, vous savez, dans un ministère, j'imagine à peu près comment ça se gère, ça. On gère de crise en crise, semaine après semaine. Il y a M. le ministre Untel qui m'appelle, il y a M. le maire ou Mme la mairesse Unetelle qui m'appelle parce que l'eau n'est plus potable, et puis il y a l'autre, et puis il y a l'autre, et puis, dans le comté d'Orford, il y a un site de déchets, puis là on sait pas trop si ça se déverse dans le bassin d'eau potable des gens. Alors, imaginez-vous, au ministère, si ça, c'est une préoccupation versus le projet de loi n° 149. Alors, demandons aux gens, sur chacun de leur terrain dans leur région, de regarder comment...

Et, moi, je vais vous dire, depuis que je réfléchis à ça, juste dans mon coin de pays, là, dans la région de Magog-Orford-Coaticook-Rock Forest, je vois que les communautés religieuses... Pas plus tard qu'à Coaticook, hein, dimanche, une communauté religieuse quittait la ville. Elle laissait là plein de choses, hein? Elle est arrivée en 1940, elle a bâti un hôpital. C'est l'histoire du Québec qu'on est après vivre, là, et, ces gens-là, je me disais, mon Dieu, ils ont-u une belle parcelle de terre qu'ils vont laisser là! Est-ce qu'on pourrait pas, nous, comme citoyens, essayer de sécuriser ça pour les générations à venir? Or, il faut absolument inviter les gens qui nous écoutent à regarder. Qu'ils regardent, eux, mais d'une façon particulière, qu'ils regardent comment, eux, ils peuvent aider ce projet de loi là à prendre place.

Maintenant, vous savez, avec cette loi-là, des gens comme Louis-Gilles Francoeur prétendent... Encore une fois, qui est Louis-Gilles Francoeur, pour les gens qui nous écoutent? C'est le journaliste au Québec qui fait la promotion de l'environnement. Il a un réseau de contacts, de connaissances extraordinaire, il met la main sur les documents que le ministre a jamais lus avant. C'est extraordinaire. Lui, sa prétention, dans un article qu'il écrivait en l'an 2000, le 13 de juin de l'an 2000, il prétend que ça pourrait aller, dans le temps, là, chercher peut-être 1 % des terres qui pourraient devenir préservées. C'est déjà ça. C'est déjà ça quand, au Québec, on a seulement 2,75 % de notre territoire de protégé, et ça, c'est dramatique. Ça, c'est dramatique quand on sait que la norme internationale est de 8 %. Des petits pays comme la France et l'Allemagne, avec des densités de population 10 fois comme nous autres, avec des territoires six, sept fois moins grands que les nôtres, ont été capables de mettre 8 % de leur territoire protégé. Nous, le Québec, on est à 2,75, M. le Président.

n(12 h 50)n

Et la Colombie-Britannique nous annonçait il y a quelques jours, avant l'élection, qu'ils viennent de monter la norme à 12 %. Alors, au moment où on arrivera à 8 %, ? puis c'est pas demain la veille, je vous le dis tout de suite ? au moment où on arrivera à 8 % au Québec, bien, les autres seront déjà rendus à 12, alors de là l'importance d'essayer de voir, avec tous ces gens qui auraient des parcelles, comment ils peuvent y trouver leur compte, parce que, oui, en quelque part, les citoyens pourraient y trouver leur compte.

Comment un citoyen pourrait y trouver son compte? Bien, laissez-moi vous redonner le cas de la famille Baldwin, à Baldwin Mills. C'est une famille anglophone qui a un grand patrimoine. Ce sont des agriculteurs, ils gèrent de la foresterie, ils le font en forêt privée ? vous savez, dans l'Estrie, la forêt est gérée surtout par la forêt privée ? et la famille Baldwin a une belle réputation, une longue réputation. Ce sont des citoyens bien impliqués dans leur milieu, parlant les deux langues, et des gens tout à fait corrects, ce qu'on peut avoir de mieux dans une société.

La famille Baldwin était propriétaire d'une montagne qu'on appelle Le Pinacle de Baldwin, et du sommet du Pinacle de Baldwin ? c'est juste, juste à la barrière des États-Unis ? vous pouvez voir une très grande partie de la Nouvelle-Angleterre. J'ai eu l'occasion d'aller au sommet à quelques occasions, dont l'an passé avec mon épouse, mes petits-enfants, et c'est extraordinaire. Et de là on voit... on voit toute la Nouvelle-Angleterre. Du côté droit, on voit finalement les montagnes des Cantons-de-l'Est, les monts Sutton, Jay Peak, Shefford, Bromont, Écho. Alors, on voit toutes ces montagnes-là. On voit aussi les lacs, alors c'est extraordinaire. On prétend même que par beau temps on peut voir le lac Champlain. Or, c'est un pinacle sur lequel on a 360 degrés de perspective.

Et, à travers les temps, les gens de l'Estrie, les gens de Montréal, les gens de la Montérégie ont envahi cette montagne-là, et la famille Baldwin s'est vue avec un problème. Alors, ils sont venus voir le distingué député d'Orford puis ils ont dit: Qu'est-ce qu'on fait avec ça? À l'époque, la loi n° 149 n'existait pas, il y avait pas moyen d'aider ces gens-là à trouver une solution au problème. On a dû le faire via la municipalité. Je salue ici d'une façon particulière le maire de Coaticook, M. Langevin, qui a collaboré avec le maire de Barnston, à l'époque, qui a collaboré à mettre en place les mécanismes pour qu'on puisse assurer à la famille Baldwin...

La famille Baldwin, elle voulait rien, hein? Quelques dollars. Elle ne voulait plus assumer la responsabilité légale de tous ces gens qui allaient sur cette montagne. On l'a vu en fin de semaine, d'ailleurs, là, cette auto qui est tombée dans un carrière, cinq jeunes qui sont décédés. Est-ce que... Le propriétaire, qui a été interviewé, puis je le sais pas, s'il aura raison ou pas, mais il dit: Écoutez, moi, j'en ai mis, des barrières, j'en ai mis, des barrières, mais les gens voulaient venir se baigner, les gens défonçaient, ils tassaient les roches, ils tassaient les blocs de ciment, ils ont tassé les barrières de métal. D'ailleurs, je voyais les photos de ce magnifique lac.

Alors, la famille Baldwin avait le même problème. Elle a une montagne avec des escarpements incroyables face à l'ancien député Georges Vaillancourt. Il y a là une falaise qui doit avoir 1 000 pieds de haut. Alors, la famille Baldwin était confrontée à comment tu gères des centaines de gens qui ont accès à ta montagne, que tu voudrais qu'ils aient accès. La famille Baldwin était heureuse que les gens aient accès. D'autre part, il y avait tout cet aspect de responsabilité, et, quand ils sont rentrés en contact avec le député d'Orford, bien, la façon, ça a été de demander à la municipalité d'en prendre la responsabilité, d'en gérer finalement le territoire, et la famille Baldwin... M. Baldwin, le père, est vieillissant, et les fils sont très heureux de la transaction.

Alors, le projet de loi n° 149, finalement, c'est ce que ça permettrait de faire soit à une communauté religieuse soit à une famille qui pourrait se départir... La famille Baldwin est à ce point satisfaite... Je vais vous le donner entre mille, M. le Président, je les ai rencontrés samedi. Je vais sortir leur carte d'affaires, ici. J'ai rencontré Keith Baldwin, le fils, dimanche, à Coaticook, et il me disait qu'il était à ce point satisfait, il était à ce point satisfait qu'ils ont aussi un lac, un très beau lac, qui est propriété privée... Et je lui ai parlé du projet de loi n° 149. J'ai dit: Écoutez, c'était moins problématique, le lac; la montagne l'était beaucoup plus. Je lui ai parlé du projet de loi n° 149, et il m'a dit: Écoutez, envoyez-moi ça, ça m'intéresse. Ça m'intéresse que notre famille pourrait se départir effectivement de ce lac-là pour la collectivité. Alors, vous montrer... Et là il y aurait des avantages et on aurait... Possiblement, on pourrait encore passer par la ville, mais ce serait beaucoup plus facile de le faire.

D'ailleurs, une des choses qu'on a reprochées au ministre pendant cette commission parlementaire, c'est l'article 16. On lui a pas reproché... Finalement, c'est... Je vais le lire, M. le Président, parce que c'est le pivot du projet de loi: «Le ministre peut élaborer et mettre en oeuvre des programmes en vue de soutenir la création, la conservation, la surveillance et la gestion de réserves naturelles. Il peut accorder, dans le cadre de ces programmes, une aide financière ou technique.» Le ministre nous a dit dans un discours la semaine dernière qu'il avait mis de côté 1 million. Alors, soyez assuré qu'aux crédits on va lui demander combien de ce million a été dépensé pour ce genre de situation. Et, si je comprends bien, il pourrait, dans certains cas, payer les taxes municipales, s'occuper de l'entretien de la propriété, s'assurer que les actes notariés sont bien faits, etc.

Nous, ce qu'on aurait aimé, ce qu'on aurait aimé, c'est que l'article 16, qu'il nous énumère un certain nombre de moyens. Ç'aurait été un peu plus facile, parce que la première question que nous pose un citoyen quand on va le voir, que ce soit la famille Baldwin ou d'autres, c'est: Quels sont ces moyens que vous allez nous offrir? Et, malheureusement, jamais le ministre a voulu nous donner les types de moyens. On peut les imaginer, mais jamais le ministre n'a voulu nous donner les types de moyens qu'il voulait se servir. Alors, vous comprendrez, dans les quelques minutes qu'il me reste, que nous allons voter pour le projet de loi, ce qui n'est pas le cas de d'autres projets de loi qu'on pourra faire peut-être cet après-midi. Mais on y reviendra en temps et lieu. Ceux-là, on va se batailler pas mal plus sévèrement. L'attitude du ministre, d'ailleurs, a été beaucoup plus cavalière à notre égard. On y reviendra. Pas juste à notre égard ? ça, on est habitués ? à l'égard du Barreau, d'ailleurs, qui a été carrément insulté des propos du ministre. Mais on reviendra à ce projet de loi n° 25 au moment où on y arrivera. Finissons sur 149.

Le projet de loi, si je me résume, a de grands mérites. Il a de grands mérites dans la mesure où on va le mettre en application. Vous savez, il y a des projets de loi qui ont été votés ici, qui ont jamais été, à toutes fins pratiques, mis en application. Le but était bien bon, mais, pour toutes sortes de raisons, ça n'a jamais été la priorité au ministère. Le ministère n'a jamais décidé que c'était la priorité, et on sait trop souvent qu'en politique les priorités sont établies par les gens, par le peuple, par les élus à d'autres niveaux. Alors, j'invite les gens du Québec à ne pas hésiter à appeler au ministère, à Information Québec d'abord.

Je regarde le ministre, là, qui est à la veille de nous quitter pour d'autres fonctions dans quelques minutes. Il est important qu'Information Québec ait toute l'information sur ce projet de loi là, parce que, au moment où on se parle, ils ne l'ont point. Il est important que tous les groupes d'environnement du Québec soient bien informés du projet de loi. Il est plus qu'important que les CRE soient tout à fait au fait et qu'ils puissent tenir la main des gens qui pourraient être d'accord de se départir d'une partie de leurs avoirs aux biens de la société. C'est bien sûr que ces terrains-là doivent avoir des qualificatifs. Vous ne pouvez pas, si vous avez un vieux pit de gravelle avec rien d'environnement là-dedans, dire: Je vais donner ça au ministre, c'est autant de taxes municipales que je ne paierai pas. Je crois pas que nous allons vous aider beaucoup. Mais, si vous aviez un marais à l'arrière de chez vous, si vous aviez un paysage...

Parce que, oui, M. le Président, dans le projet de loi, on va aussi loin que de dire: «Toute propriété privée dont les caractéristiques sur le plan biologique, écologique, faunique, floristique, géologique, géomorphologique ou paysager présentent un intérêt qui justifie leur conservation peut, sur demande faite par son propriétaire dans les conditions établies ci-après, être reconnue comme réserve naturelle.» Même un beau paysage, et ça, c'est nouveau. Il y a pas, à ce que je sache, une loi en ce moment qui mettait le mot «paysage». En commission parlementaire sur la foresterie, c'est revenu jour après jour, hein? L'ingénieur Bélanger, là, qui écrit dans Le Devoir en fin de semaine, là... Pour la forêt, le Parti québécois est bien un parti de droite, hein? Il n'y va pas avec le dos de la cuillère, là. M. le Président, presque tous les mémoires en foresterie nous ont parlé de paysage, et là, dans le projet de loi n° 149, on pourrait utilement s'en servir.

Alors, vous me faites signe que mon temps est terminé. Je refais l'invitation au ministre que nous envoyions une lettre...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je ne vous fais pas signe que votre temps est terminé, vous avez droit encore... vous avez droit à 60 minutes. Mais je vous faisais signe qu'il va être 1 heure bientôt. Si vous voulez terminer avant, c'est votre choix.

M. Benoit: Alors, je finirai en disant au ministre de l'Environnement que saint François doit être fier de lui et, j'espère, de moi et que, s'il désirait signer une lettre à tous les groupes d'environnement au Québec pour mettre en application ce projet de loi là, nous, de l'opposition, serions prêts à l'aider n'importe quand. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Orford, de votre intervention. Le projet de loi n° 149... Est-ce qu'il y a un droit de réplique?

Mise aux voix

Le projet de loi n° 149, Loi sur les réserves naturelles en milieu privé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, je suspends les travaux de cette Assemblée à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 heures)

 

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mmes et MM. les députés, veuillez... Nous allons nous recueillir quelques instants tout d'abord.

Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. J'inviterais Mme la leader adjointe du gouvernement à nous indiquer quel est l'article à l'ordre du jour cet après-midi.

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, nous pourrions peut-être prendre l'article 12 et commencer l'étude du projet de loi, puis on pourra suspendre quand le ministre sera présent pour l'autre projet de loi. Alors, à l'article 12, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 33

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...article 12, M. le ministre délégué à la Recherche, à la Science et à la Technologie propose l'adoption du principe du projet de loi n° 33, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Alors, le prochain intervenant sera M. le ministre. Je vous cède la parole, M. le ministre.

M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président. À l'étape de l'adoption de principe de ce projet de loi, j'en ferai une très courte présentation et surtout, dans un premier temps, expliquer le contexte par lequel ce projet de loi a été présenté à l'Assemblée nationale vendredi, il y a 10 jours.

D'abord, le projet de loi donne suite à un des engagements de la politique science et innovation, de la politique de la recherche, de la science et de la technologie qui a été adoptée par le gouvernement en janvier de cette année, qui avait été préparée par mon prédécesseur, le député de Charlesbourg et qui, dans le milieu de la recherche, de la science et de la technologie, fait essentiellement l'unanimité. J'ai été en mesure de le constater, M. le Président, dans mes multiples rencontres, tournées régionales, que cette politique fait l'unanimité dans le milieu de la recherche, de la science et de la technologie.

Et ce que cette politique dit en ce qui concerne les fonds subventionnaires, dont je vais dire quelques mots... En ce qui concerne les fonds subventionnaires, qui sont de la responsabilité du ministre et du ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, c'est qu'il fallait, selon les voeux du milieu, adapter ces fonds aux nouvelles réalités scientifiques, aux nouvelles réalités dans le domaine de la recherche, de la science et de la technologie. Et, comme ces fonds avaient été décrits brièvement dans la Loi sur le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie adoptée en 1999, il y a deux ans... D'ailleurs, la semaine dernière, nous célébrions avec les employés du ministère le deuxième anniversaire du ministère. Comme ces fonds sont brièvement décrits dans la loi qui a institué le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, donc vous comprendrez que cette loi qui est devant nous, qui est à l'Assemblée nationale devant nous, vise à modifier, à amender la Loi sur le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie.

Il faut se rappeler que ces fonds, M. le Président... Il faut le rappeler... que ces fonds sont un outil essentiel au développement de la recherche au Québec. Le Québec, avec l'Alberta, est la seule province qui gère ses propres fonds de subvention et d'aide à la recherche dans les grands domaines de la recherche scientifique. C'est dès les années soixante qu'on a mis en place le premier fonds d'aide à la recherche dans le domaine de la santé, et je tiens à le rappeler, que c'est le Dr Jacques Genest, qu'on reconnaissait la semaine dernière lors d'une touchante cérémonie, qui, à l'âge de 82 ans, a été reconnu par ses pairs scientifiques comme ayant été un des précurseurs de la recherche au Québec, dans la mesure où il a créé le premier fonds discrétionnaire, le premier fonds subventionnaire de la recherche en santé, et il a également été le premier à créer un institut de recherche clinique auprès des patients, l'Institut de recherches cliniques de Montréal, l'IRCM.

Donc, ces fonds sont... le premier fonds dans les années soixante, le deuxième... les deux autres dans les années soixante-dix et, en ce moment, les trois fonds, dont ils ont légèrement modifié, adapté les mandats et les champs couverts, se nomment, comme vous le savez, M. le Président, le premier communément appelé par son acronyme, quoique je n'aime pas tellement les acronymes, mais tout le monde y fait référence comme étant le FCAR, qui est le Fonds pour la formation des chercheurs et l'aide à la recherche; le deuxième, c'est le Fonds de recherche en santé du Québec, le FRSQ; et le troisième, c'est le Conseil québécois de la recherche sociale, le CQRS.

n(15 h 10)n

Alors, pourquoi faut-il adapter ces fonds pour les modeler, les adapter à la réalité scientifique qui correspond aux besoins des chercheurs? Dans deux cas, M. le Président ? donnons deux contre-exemples, deux exemples aux extrêmes ? dans certains cas, les fonds sont trop restreints dans leur application. Par exemple, le Fonds de la recherche en santé du Québec, en ce moment, son mandat se limite aux recherches et aux activités et aux équipes de recherche qui sont dans les institutions, dans les centres de recherche médicaux, dans les centres hospitaliers universitaires, les CHU, alors que nous voudrions, par exemple, que ce fonds puisse couvrir l'ensemble de la recherche dans le domaine de la santé, mais que ces recherches puissent s'effectuer dans des lieux autres que les centres hospitaliers universitaires. Voici l'exemple d'un mandat trop étroit qu'il faut essentiellement élargir.

L'autre exemple, qui est le contre-exemple qui est à l'autre extrême, c'est un mandat trop large du FCAR, qui ne permet pas de donner une impulsion à certains champs à l'intérieur de ce FCAR auxquels on veut donner une impulsion toute particulière. Et j'ai parlé des sciences naturelles et du génie, parce qu'en ce moment le Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche, le FCAR, peut soutenir des équipes de recherche, ce qu'il fait bien, mais dans une panoplie, dans l'ensemble des champs scientifiques, et nous voudrions que les champs scientifiques, par exemple, dans le domaine de la santé, dans le domaine des sociales, dans le domaine de la culture qui sont présentement couverts, appuyés par le FCAR, le soient par un nouveau fonds sur la santé et par un nouveau fonds en termes de recherche sur la société et la culture. De sorte que le projet de loi vise à adapter, comme je viens de le décrire très, très brièvement, les exemples de choses qu'on veut modifier, qu'on veut adapter, et je vais être plus précis dans les minutes qui suivent sur les nouveaux fonds, comment ils vont répondre à la nouvelle réalité.

L'autre chose que... l'autre chose que l'on veut faire, on veut confirmer les besoins de concertation des organisations de soutien à la recherche, parce que, les mots-clés ? les mots-clés ? en termes de recherche scientifique, en ce moment, qu'on retrouve un peu partout, c'est à la fois la synergie entre les différents groupes de chercheurs, au Québec.

Ce matin, on annonçait l'aide de 35 millions à l'Institut national de l'optique, et on y rappelait, lors de cette annonce, la nécessité que, l'Institut national de l'optique, ce qu'ils font soit un travail en réseautage avec l'Institut de recherche en laser de l'Université Laval, avec le Centre de recherche de la Défense nationale de Valcartier, et également, qu'ils puissent faire affaire avec l'ensemble des étudiants gradués, tant au niveau de la maîtrise, du doctorat et même du postdoctorat, qu'ils proviennent de Québec, de Montréal ou de la région de l'Outaouais où il y a de la formation. De sorte que, un des termes-clés, c'est la synergie, la mise en commun, la mise en réseautage.

Un autre terme autant clé, qui est de plus en plus la marque de commerce des grandes équipes de recherche, c'est la notion de multidisciplinarité. Et, par la mise en place d'une table permanente entre les trois présidents-directeurs généraux des fonds, d'une table permanente de concertation, on va s'assurer qu'il y ait effectivement une bonne concertation entre ces trois fonds, qu'il y ait une analyse toute particulière, toute spéciale, une attention toute particulière de données aux équipes de recherche qui se donnent des vocations de multidisciplinarité, parce que, dans certains cas de recherche très globaux, on a besoin de multidisciplinarité. Et cette table de concertation, cette table permanente des fonds aura également le mandat de s'assurer d'alléger les processus administratifs, qu'il y ait, par exemple, uniformisation au niveau des formulaires de demande, au niveau de la façon dont on peut faire les demandes. Et il y aura également un seul fonds qui gérera les bourses de maîtrise et les bourses de doctorat qui auront été acceptées par les fonds. Il y a également, dans ce projet de loi, quelques allégements administratifs que je vais décrire très brièvement.

Donc, comme je l'ai dit, M. le Président, dans un premier temps, le projet de loi vise à remplacer les Fonds FCAR par un organisme dont le mandat serait recentré, un fonds qui se concentrerait sur les champs scientifiques importants au coeur de notre développement, auxquels on veut donner une impulsion nouvelle, que sont les sciences naturelles et le génie, afin de favoriser l'innovation technique et le développement durable et la prospérité économique du Québec. Le fonds de ce nouveau fonds serait, et sera lorsque la loi sera adoptée ici, le Fonds québécois de la recherche sur la nature et les technologies, et là j'hésite à donner l'acronyme parce que je voudrais qu'on apprenne d'abord le nom en son entier avant que l'on passe à l'acronyme.

Le mandat de ce nouveau fonds, sciences naturelles et génie, sera essentiellement de promouvoir et aider financièrement à la recherche dans ces domaines de sciences naturelles et de génie; de promouvoir et aider financièrement la diffusion et la connaissance dans ces domaines; d'établir tous les partenariats nécessaires entre les universités, les collèges, l'industrie, les ministères et les organismes publics concernés ? et c'est au coeur des mandats des fonds, ils utilisent l'effet levier de ces 120 millions de dollars qu'ils gèrent annuellement, qui transitent par le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, ils utilisent ces millions en effet levier pour créer de la synergie entre les équipes de chercheurs, où qu'ils soient situés et pour qu'ils appuient les projets de recherche, comme je l'ai dit, qui font appel au concept de la multidisciplinarité ? promouvoir et aider financièrement la formation des chercheurs en octroyant des bourses d'excellence aux deuxième cycle et troisième cycle des études postdoctorales. Et là c'est important, M. le Président, c'est ce fonds qui va gérer, pour lui-même et pour le compte des deux autres fonds, l'ensemble des programmes de bourses pour les étudiants de deuxième et de troisième cycles, pour qu'il y ait une simplification dans l'administration des bourses, pour qu'il y ait pas trois administrations et pour qu'il y en ait seulement une.

Mon collègue de l'Environnement, qui a hâte de parler de son brillant projet de loi également, me demande d'être plus succinct, ce que je serai, M. le Président.

Le deuxième fonds, c'est de remplacer... de remplacer le Conseil québécois de la recherche sociale par ? et là le nom, je pense, est important ? le Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture. Et ce fonds, dont le financement, dont le montant sera plus important que le fonds actuel du CQRS, parce que certaines des recherches qui étaient présentement effectuées au FCAR seront transférées dans ce fonds qui aura le mandat de promouvoir le développement de la recherche dans les domaines des sciences sociales et humaines, des arts et des lettres, dans le but d'améliorer la qualité de vie de la population. Et la personne que nous allons nommer à la tête de ce fonds, la présidente-directrice générale ou président-directeur général, aura le mandat de faire la promotion de ce champ de sciences sociales, de sciences de notre culture, de notre société qui a autant d'importance que les autres champs que j'ai visés. Et ce fonds aura un statut juridique similaire aux deux autres, parce que, en ce moment le fonds, le CQRS, le Conseil québécois de recherche sociale, n'a pas de statut juridique similaire aux deux autres fonds.

Et, finalement, il y aura un élargissement du Fonds de recherche en santé du Québec pour qu'il puisse couvrir et soutenir les équipes de recherche et les lieux de recherche non seulement dans les centres hospitaliers universitaires, mais également dans d'autres lieux de recherche à l'extérieur de ces centres.

Il y aura, comme je l'ai dit, par ce projet de loi la création du Comité permanent des présidents-directeurs généraux des fonds de recherche du Québec dont le mandat... Ce comité qui n'aura pas sa propre structure, ce sera une structure très légère qui sera une jonction des trois P.D.G., des trois présidents-directeurs généraux des fonds, et on veut s'assurer qu'on n'ait pas à financer directement ce comité permanent pour être économe et s'assurer que le maximum d'argent aille auprès des chercheurs, mais son mandat sera d'harmoniser les programmations stratégiques, assurer la cohérence et la complémentarité des actions des fonds, intégrer, lorsqu'il est avantageux de le faire, la gestion des programmes des fonds, simplifier les procédures de financement, harmonisation, ça va de soi, et conseiller le ministre quant au développement des programmes de soutien à la recherche et aux fonds.

n(15 h 20)n

Finalement, M. le Président, quelques modalités d'allégement administratif. Bien sûr, les fonds préparent des plans triennaux, chaque fonds a son plan triennal. Auparavant, comme c'est le cas, le plan triennal, à chaque année, doit être déposé au Conseil des ministres. Alors, ce qu'on propose, c'est que ces plans triennaux, à leur origine, soient soumis au Conseil des ministres pour approbation, et ils seront déposés en cette Chambre, parce qu'on aura l'occasion, lors de l'étude des crédits annuels, d'étudier ces plans, d'étudier l'utilisation que font les fonds, comme on a eu le plaisir de le faire cette année. Et les modifications légères à ce plan triennal ou les plans annuels conséquents à ces plans triennaux seront néanmoins seulement approuvés par le ministre responsable de la Recherche, de la Science et de la Technologie, mais que le dépôt à l'Assemblée nationale, comme je viens de le dire, des plans triennaux, lui... cette obligation, elle ? cette obligation, pardon ? sera maintenue.

Il y a également les... Dans ces plans triennaux, nous allons faire en sorte que l'on retrouve les modalités et les règlements relatifs aux demandes d'aide financière. Ils seront donc connus, ils seront donc déposés dans les plans triennaux. Mais jusqu'à ce jour, les modalités réglementaires d'administration et de déboursés des fonds, les modalités étaient du domaine réglementaire. Alors, on sait, M. le Président, que faire adopter un règlement, c'est lourd, et ces modalités, lorsqu'elles seront déposées dans les plans triennaux, eux-mêmes adoptés par le Conseil des ministres, les modalités annuelles seront subséquemment approuvées par le ministre.

Alors, M. le Président, je termine là-dessus en disant que c'est un projet de loi qui est attendu dans le milieu de la recherche, de la science et de la technologie. La semaine dernière, dans deux activités publiques que j'ai eues avec des responsables de ces fonds... Ils attendent impatiemment ce projet de loi qui peut vous apparaître technique, mais qui, pour le milieu de la recherche, de la science et de la technologie, correspond à un besoin réel d'adaptation. Alors, ce projet de loi est attendu.

Je sais que nous sommes dans les dernières journées, les dernières semaines de nos travaux à l'Assemblée nationale. J'espère que j'aurai, comme je l'ai eu dans les quelques semaines que j'ai eu cette responsabilité ? maintenant quelques mois ? la bonne collaboration positive du député de Verdun, et que, suite à l'adoption de ce principe, du principe de ce projet de loi, nous puissions rapidement travailler ensemble, article par article, à ce projet de loi en commission, dans les meilleurs délais. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué à la Recherche, à la Science et à la Technologie. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'ajourner le débat sur le projet de loi n° 33. Et je vous référerais à l'article 36.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce que la motion d'ajournement du débat est adoptée?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.

Projet de loi n° 25

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Et c'est l'article 36, hein, que vous avez demandé? Bon. À l'article 36, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 25, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement.

Et je vais céder la parole à M. le ministre de l'Environnement. M. le ministre.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier mon honorable collègue de m'avoir permis de m'immiscer dans ce débat et de pouvoir, à mon tour, parler du projet de loi important que je présente, en convenant que les initiatives proposées par mon collègue ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie sont celles qui véritablement sont structurantes, puisqu'il convient de rappeler que l'investissement que nous faisons au Québec dans la connaissance, dans la science, dans le développement de ces compétences et de cette science sont ceux qui, à terme, M. le Président, nous permettront d'avoir et de bénéficier d'un environnement de meilleure qualité. Investir dans la science et la recherche, c'est lutter contre la pauvreté. Investir dans la science et la recherche, c'est lutter contre la désintégration de certaines communautés. Investir dans la recherche et la science, c'est investir en faveur du développement durable. Donc, je tiens à saluer l'initiative de mon collègue et je tiens à l'assurer de ma collaboration.

D'ailleurs, M. le Président, celui qui m'a précédé dans les interventions a d'ailleurs été titulaire du ministère de l'Environnement, et je sais que je peux compter sur son appui alors que de nombreuses problématiques environnementales trouveront source... trouveront réponse, plutôt, dans les investissements qui pourront être faits dans le développement de nouveaux procédés qui nous permettront de mieux traiter différents polluants qui peuvent se retrouver dans l'atmosphère de façon particulière. Il me fera plaisir, M. le Président, de solliciter sa contribution et son appui pour qu'on puisse ensemble... Et, je sais son engagement et je le sais sensibilisé au problème, M. le Président. Le ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie sera un de ceux qui m'aideront à régler la question des surplus de phosphore dans des municipalités... en surplus, et je compte sur son appui.

M. le Président, voilà donc... Nous voilà donc de retour à discuter du projet de loi n° 25, loi modifiant sur la qualité de l'environnement. Nous sommes ici aujourd'hui, puisque, le 5 juin dernier, les membres de la commission parlementaire ont procédé à l'étude de ce projet de loi, aux deux articles qu'il contient. Nous avons eu une longue discussion avec les membres de la commission. J'ai essayé de répondre du mieux que j'ai pu à l'ensemble des préoccupations qui ont été soulevées par l'opposition et, je dois vous dire, M. le Président, c'est la première fois que je passe autant de temps en commission sur un projet de loi de deux articles. Et je salue donc l'engagement du député d'Orford ? et des autres membres de la commission ? qui a vraiment soulevé un débat de fond, là, on est allés... je pense, on a fait le tour de la question. Très certainement, M. le Président, si on n'a pas fait le tour de la question, on a au moins fait le tour des deux articles que contient le projet de loi. M. le Président, qu'en est-il de ce projet de loi? Ce projet de loi, en rappelant ses grandes lignes, nous permettra de réglementer l'entreprise de façon nouvelle, de façon originale, de façon moderne. Et, plutôt que de s'inspirer du vieux principe qui, encore, nous guide dans beaucoup de réglementation en environnement qui est inspirée d'un principe où d'abord on commande un comportement et ensuite on le contrôle... C'est une façon de s'exprimer, cette façon de réglementer, on l'appelle «commander et contrôler». Plutôt que de s'inspirer de cette façon de faire, on se donne les moyens par un pouvoir habilitant... C'est l'objet de la disposition législative; par un pouvoir habilitant, on se donnera le pouvoir d'utiliser, comme mode de réglementation, ce qu'on appelle des instruments économiques.

Je comprends, pour un observateur de la question environnementale, même pour un membre de cette Assemblée qui n'est pas nécessairement familier avec l'ensemble des mécaniques... des mécanismes derrière les règles de marché, derrière les règles aussi de contrôle et de discipline de ces marchés, que le débat peut sembler éminemment théorique, peut sembler à la limite un peu déconnecté des préoccupations environnementales plus immédiates, mais, toutefois, il y a dans ce débat une vision et il y a aussi un certain nombre de préoccupations qui sont posées.

D'abord, M. le Président, je voudrais faire le tour des questions qui ont été posées par les députés puis je veux à nouveau, puisqu'elle m'invitait ce matin à être bon pédagogue... Je suis bon prince, M. le Président, et j'accepte son invitation. Je vais donc reprendre, au bénéfice des députés de cette Assemblée, au bénéfice aussi des gens qui nous écoutent, les explications que j'ai fournies en commission parlementaire.

Essentiellement, sept questions étaient posées: Que sont les instruments économiques? Que sont les permis échangeables ou négociables? Qui émettra ces permis? Comment les permis échangeables assurent-ils la diminution de la pollution? Quels mécanismes de contrôle qui vont encadrer le marché des permis? Comment assurer l'efficacité du système alors que l'adoption d'un règlement nécessite actuellement un certain nombre de mois? Et pourquoi le projet de loi n'a fait l'objet, prétendaient-ils, d'aucune consultation? Alors, je vais répondre, M. le Président, du mieux que je peux à l'ensemble de ces questions. Je le fais par souci de transparence et aussi par souci de vouloir correctement répondre aux préoccupations des membres de la commission et de la population en général.

D'abord, que sont les instruments économiques? Les instruments économiques, M. le Président, contrairement aux règles qui fixent les normes et surveillent le respect... et en surveillent le respect, dis-je, utilisent des prix pour amener les entreprises et les individus à modifier leur comportement et améliorer ainsi la qualité de l'environnement. Parce qu'ils utilisent les mécanismes du marché, les instruments économiques permettent d'atteindre les objectifs environnementaux à moindre coût que l'approche traditionnelle. Les instruments économiques offrent aux agents économiques plus de flexibilité dans les façons d'atteindre les objectifs environnementaux fixés. Ce sont, enfin, des instruments qui sont davantage adaptés aux nouvelles réalités environnementales. On le sait, M. le Président, les enjeux ne sont pas que québécois, ils sont planétaires. Le nombre de sources de polluants est à la hausse, et ces sources de pollution sont souvent, toutefois, de moins en moins importantes, moins dommageables pour notre environnement.

n(15 h 30)n

L'utilisation d'instruments économiques pour la protection de l'environnement est déjà relativement répandue aux États-Unis, et les autorités américaines y ont de plus en plus recours, surtout au niveau fédéral, mais également au niveau des différents États. On note aussi la même tendance dans les pays de l'Union européenne et dans l'ensemble des pays de l'OCDE. Et que recouvre ce terme d'«instruments économiques»? Bien, M. le Président, ces instruments économiques, on peut les regrouper dans deux grandes catégories: les instruments qui sont d'abord fiscaux et les autres, qui seraient non fiscaux.

Dans la première catégorie des instruments économiques, on trouve des instruments assez connus. Par exemple, les redevances d'élimination et les redevances d'utilisation ainsi que des redevances d'émission, qui sont en quelque sorte le prix de la pollution, des encouragements fiscaux qui ne doivent être utilisés que dans la mesure où ils favorisent la recherche sur des technologies plus propres ou des processus de recyclage. En effet, les subventions, en plus d'augmenter les dépenses publiques, peuvent avoir des effets pervers dans certains secteurs à fort potentiel polluant. Il peut s'agir de garanties financières et des assurances, il peut s'agir de consignation, qui est un montant imposé à l'achat qui est remboursé en partie ou en totalité au retour du produit ou des résidus pour fins de réutilisation ou de recyclage. La consignation d'ailleurs est bien connue au Québec. J'en ai même encore parlé récemment.

Dans la deuxième catégorie, on retrouve l'utilisation de l'information comme les écologos, la divulgation d'information et la divulgation des contrevenants et aussi des permis échangeables, sur lesquels nous allons nous attarder un peu plus.

Que sont, M. le Président, deuxième question, des permis échangeables? Beaucoup de personnes se demandent ce que sont ces permis. J'espère... j'espère, M. le Président, que les explications que je vais donner vont permettre de dissiper toute forme d'incompréhension. Les permis échangeables établissent des allocations d'émission ou de rejet. Au départ, les autorités publiques doivent déterminer un niveau maximal d'émissions polluantes acceptables. Ensuite, elles octroient gratuitement ou vendent des permis d'émission jusqu'à concurrence du plafond qu'elles se sont fixé pour une période donnée. Les entreprises doivent posséder autant de permis qu'elles ont d'émissions. Celles qui n'en ont plus besoin, soit parce qu'elles ont amélioré leurs performances environnementales soit parce que la demande de leurs produits a baissé, peuvent les vendre aux entreprises dont les coûts de réduction sont plus élevés que le prix des permis. Ainsi, un système de permis échangeables établit un marché. Assez classique, M. le Président, comme... comme explication. Il faut ajouter que l'achat de permis peut ne pas seulement se limiter aux entreprises. On pourrait, par exemple, imaginer que des groupes environnementaux les achètent sans les utiliser, réduisant ainsi la pollution en deçà du plafond fixé par les autorités publiques.

Troisième question: Qui émettra ces permis? Eh bien, M. le Président, comme vous l'avez certainement compris et comme vous avez compris les explications que je viens de vous donner, ce sont les autorités publiques ou leurs fondés de pouvoir qui émettent au départ les permis échangeables. Par la suite, les permis sont échangés entre les agents économiques comme sur un marché libre. Il est même possible de concevoir une bourse sur laquelle ils s'échangent, comme cela vient de se créer à Chicago.

Quatrième question: Comment les permis échangeables assurent-ils la diminution de la pollution? Bien, M. le Président, de façon fort simple. Les objectifs de réduction de la pollution sont déterminés par des autorités publiques, et l'allocation des permis est faite en fonction de cet objectif. Par exemple, si l'objectif est de réduire, en 2008, les émissions de dioxyde de soufre, les SO2, à 50 % de leur niveau de 2001, alors les permis dont le nombre décroît d'année en année seront alloués à chacun des émetteurs de façon à ce que l'objectif visé soit atteint en 2008. Grâce au développement et à l'application des systèmes de permis échangeables, les Américains, par exemple, ont atteint au cours des dernières années les objectifs environnementaux précis dans des domaines aussi diversifiés que les précipitations acides, le plomb dans l'essence et le smog, tout en réduisant aussi de façon substantielle le coût pour les entreprises d'y parvenir. Je pense qu'à terme le même système avec les mêmes résultats peut être développé et appliqué au Québec pour réduire sinon éliminer leurs sources de pollution. Et c'est précisément ce que permettra le projet de loi n° 25.

Cinquièmement, M. le Président: Quels mécanismes de contrôle encadreraient le marché des permis? Comme vous le savez, même dans une économie de marché, le gouvernement doit intervenir pour assurer le bon fonctionnement de celui-ci. Pensez aux commissions et aux régies de toutes sortes qui servent de chiens de garde dans le fonctionnement de l'économie québécoise. La valeur du marché des permis échangeables peut être si importante qu'on ne peut concevoir son développement et son fonctionnement sans un bon système de contrôle. À titre d'exemple, aux États-Unis, en mai 2001, le permis de dioxyde de soufre, SO2, s'échangeait à 200 $ la tonne et celui de l'oxyde d'azote, le NOx, à 1 500 $ la tonne. Il suffit de multiplier ces prix par les quantités de ces émissions pour avoir une bonne idée de l'ampleur des marchés et de la nécessité de contrôle, comme à la Bourse bien sûr. Pourquoi? Bien, pour éviter les fraudes.

Par ailleurs, la mise sur pied d'un tel système de contrôle fiable rendrait, surtout au début, le système plus facilement acceptable tant pour les participants que pour le public. Cela étant dit, la conception du système de contrôle à mettre sur pied fait partie intégrante de la conception du marché des permis échangeables dans son ensemble. La conception du système de contrôle sera facilitée par les nouvelles technologies de l'information.

Sixièmement, comment assurer l'efficacité du système alors que l'adoption d'un règlement nécessite actuellement un certain temps? Eh bien, une préoccupation, M. le Président, exprimée par l'opposition concerne l'efficacité éventuelle du système. Le député se base, à cet effet ? et particulièrement le député d'Orford, qui a posé bien des questions et qui interviendra tout à l'heure ? se base, à cet effet, sur certains règlements dont l'adoption requiert parfois un certain temps.

À ce propos, je tiens à souligner qu'il faut distinguer «efficacité dans l'adoption d'un règlement», dont les délais peuvent dépendre des enjeux et des groupes d'intérêts impliqués, et «efficacité des mesures ou des instruments économiques utilisés». On peut ? et c'est un de mes objectifs ? penser qu'en élargissant la gamme des outils disponibles pour atteindre les objectifs environnementaux donnés on pourra ainsi réduire les coûts de mise en oeuvre des mesures. Normalement, une telle réduction des coûts devrait faciliter l'acceptation et l'adhésion des milieux impliqués, ce qui a pour conséquence, bien sûr, de réduire les délais.

Pourquoi, prétend le député, ce projet de loi n'a pas fait l'objet de consultations? Parce que, à la mémoire... à la rubrique du mémoire Consultations entre les ministères, c'est écrit qu'il n'y a pas eu de consultations. Il faut comprendre le sens de cette rubrique, M. le Président. Le mémoire a été adopté à l'Assemblée... au Conseil des ministres; il a fait l'objet de discussions dans deux comités ministériels. Il a fait l'objet de débats aussi au Comité de législation; il a été étudié par les gens du Conseil exécutif. Donc, tout l'appareil gouvernemental a été consulté. Il n'y a pas eu de consultations particulières dans le sens d'une commission parlementaire ou d'une consultation publique, comme parfois on en connaît. Pourquoi? Parce que ces instruments et cette réflexion ont déjà eu lieu au moment de l'adoption de la politique québécoise sur les changements climatiques, de même aussi que la commission D'Amours sur la fiscalité a soulevé le débat public sur la question de l'utilisation de ce type de règlements.

Alors, c'est pas parce que, M. le Président, le député a manqué ces débats qu'il peut prétendre qu'il n'y a pas eu consultation, et j'ai donné les références correctes, normales, qui ont permis sans doute de faire comprendre au député qu'en retournant un peu dans ses archives ou dans la bibliothèque de son centre de recherche et dans celle de l'Assemblée nationale il peut retrouver de nombreuses références à ces discussions.

Autre question, M. le Président: Quelle est la situation au Canada? Eh bien, l'adoption du projet de loi n° 25 permettra au Québec de s'inscrire dans la mouvance nord-américaine et internationale. En effet, plusieurs provinces canadiennes, dont l'Ontario, l'Alberta et la Nouvelle-Écosse, ont déjà modifié leur législation afin d'y inscrire des pouvoirs nécessaires à l'utilisation des instruments économiques. Elles sont aussi dotées de pouvoirs généraux permettant notamment la mise en place des systèmes de permis échangeables afin d'atteindre des objectifs environnementaux.

De son côté, le gouvernement canadien s'est doté, dans le cadre de la loi C-32, du pouvoir de créer des systèmes de permis échangeables au Canada, qui s'appliqueraient, tant au niveau pancanadien qu'à un niveau régional aussi, qui s'arrimeraient à un marché international. Ces actions canadiennes s'inscrivent dans la ligne de force des négociations internationales relatives aux changements climatiques, et plus particulièrement celles qui portent sur le protocole de mise en oeuvre de Kyoto. Dans ce contexte, le Québec se doit d'agir autant pour protéger son environnement que pour se doter d'outils d'intervention davantage performants et moins coûteux pour les agents économiques oeuvrant sur son territoire.

Et, en dernier lieu, M. le Président, les avantages. Les avantages: d'abord, ce projet de loi s'inscrit dans le courant gouvernemental d'allégement réglementaire et permet d'utiliser la gamme d'outils considérés plus performants, tant au plan économique qu'environnemental. Deuxièmement, cela facilite l'introduction d'instruments qui favorisent l'innovation technologique chez les entreprises et contribue ainsi, de façon significative, à réduire les coûts. Troisièmement, ce projet de loi permet au Québec d'être un acteur actif en matière d'instruments économiques, dont des systèmes de permis échangeables, et d'occuper pleinement sa place dans le cadre du processus d'élaboration et d'adoption de la stratégie canadienne à l'égard du Protocole de Kyoto sur les changements climatiques. Autre avantage, M. le Président, le projet de loi n° 25 évite des délais associés aux changements législatifs nécessaires dans l'adoption du cas par cas. Et, finalement, ces instruments économiques, bien sûr, ne répondent pas à l'ensemble des attentes que nous pouvons avoir, mais c'est un outil très efficace, et il est clair, M. le Président, que leur succès est en grande partie tributaire de la conception de l'instrument en regard de l'objectif environnemental visé et des efforts consacrés à sa mise en oeuvre.

J'aimerais également souligner ? et cela complétera les réponses aux préoccupations du Barreau du Québec ? que la modification législative proposée est volontairement générale, tout comme en Ontario et en Alberta, puisque l'on se situe dans un domaine où les principaux bénéfices découlent de la flexibilité qui permettra d'innover en matière d'intervention environnementale.

n(15 h 40)n

Je termine donc, M. le Président, en soulignant l'importance d'adopter le projet de loi n° 25 modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. J'espère que j'ai pu apporter plus de réponses aux questions qui étaient posées. J'espère avoir répondu aux préoccupations de l'opposition officielle et aux citoyens qui suivent attentivement nos débats, et je remercie les membres de la commission pour leur contribution.

Petite mise en garde, en concluant, M. le Président. Le député a été étonné de voir qu'il avait, lui, entre les mains un avis du Barreau qui lui est rentré par fax la veille, très tard en soirée. Je ne l'avais pas entre les mains. Je l'ai reçu par la poste le lendemain. J'ai fait les recherches. Je tenais à dire, M. le Président, d'abord que nous faisons un suivi très rigoureux, M. le Président, de notre correspondance. Mais, au nombre de personnes, M. le Président, qui m'écrivent, qui me sollicitent, il arrive parfois que, dans les fax, il y a un délai d'un jour. Je m'en excuse, je m'en accuse, mais, M. le Président, vous voyez tout simplement là l'intérêt que les Québécois et les Québécoises portent au travail du ministère de l'Environnement. Et je suis convaincu, M. le Président, que, si les gens étaient aussi intéressés aux travaux du député d'Orford et à ses réflexions, que lui aussi parfois, de temps en temps, il prendrait peut-être plus que six ou sept heures avant de voir l'ensemble et de lire tout ce qu'il peut recevoir par fax. Il est pas dans la même situation que moi. Je comprends que nos travaux suscitent davantage d'intérêt, M. le Président, et je sais aussi que les appuis que nous avons recueillis à l'étude de ce projet de loi sont nombreux. Et je pense qu'il est de bon ton d'espérer que l'Assemblée adopte ce projet de loi le plus rapidement possible. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de l'Environnement. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Merci, M. le Président. Bien, c'est ça, nous en sommes à un rapport d'étape de la commission, qui a siégé la semaine dernière sur le projet de loi n° 25. Qu'est-ce que c'est, le projet de loi n° 25, pour les gens qui nous écoutent, M. le Président? C'est une loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et c'est un projet de loi où il y avait deux articles. Un article, c'est la mise à date, c'est-à-dire qu'on dit: Indique la date de la sanction de la présente loi. Et l'autre, c'était l'article 1, qui modifie un aspect de la loi de l'environnement. Alors, ce que ça disait dans les notes explicatives... Il faut être brillant pour comprendre, M. le Président, un projet de loi de cette importance. Je vous lis les notes explicatives et ensuite je vous montrerai ce que la Barreau a écrit.

Alors, les notes explicatives: «Ce projet de loi modifie la Loi sur la qualité de l'environnement afin d'accorder au gouvernement un pouvoir réglementaire lui permettant de recourir à des instruments économiques pour protéger l'environnement et atteindre des objectifs en matière de qualité de l'environnement.» Aïe! ça, c'est large, hein. Alors, à ça le Barreau va répondre... Imaginez-vous bien qu'il y a bien du monde qui a pas compris ce qu'il voulait dire. Alors, le Barreau va répondre par une lettre de deux pages, laquelle le ministre avait pas reçue au moment de la commission parlementaire et que, nous, de l'opposition, qui lisons notre courrier, faisons notre ouvrage très attentivement, avions reçu et avons posé les questions que le Barreau du Québec nous a posées en long et en large, au ministre, qui a eu de grandes difficultés à nous répondre, je vous le dis tout de suite. Heureusement, un haut fonctionnaire qui l'accompagnait finalement a démélangé les affaires un peu, et on a fini par comprendre où est-ce que le ministre s'en allait avec son projet de loi n° 25.

Quand le ministre dit: L'opposition a posé beaucoup de questions... On aurait pu en poser pas mal plus. Parce que je vous dirais que c'est un nouveau concept, hein, et c'est ce que le Barreau dit, c'est un... Je vous lis une phrase de la lettre du Barreau. On dit: «D'une part, il faut reconnaître que ces instruments économiques constituent des mécanismes à la fois nouveaux ? hein, à la fois nouveaux ? et fort complexes.» Le ministre, lui, nous a répondu à ça que, lui, il avait étudié ça au cégep, économie 101 puis, bingo, il passait à d'autre chose. On lui a dit: Wo! Relaxez, M. le ministre, là. Le bureau... Le Barreau, eux autres, c'est-u drôle, ils ont fait l'université en plus du cégep, puis ç'a l'air qu'ils ont pas étudié ça. Ils nous disent que c'est à la fois nouveau et fort complexe. Nous, de l'opposition, on n'a pas tous vos fonctionnaires, on n'a pas toutes vos bibliothèques, on n'a toutes vos photocopieuses, vos limousines, vos grosses têtes pour tout comprendre ça. Nous, on vous dit tout de suite: On n'a pas tout compris. On n'a pas tout compris. Vous allez nous expliquer ça en long puis en large, puis, quand j'aurai compris, on votera dessus. Mais je vais vous dire, une chance qu'il y avait ce haut fonctionnaire qui était avec lui, parce que je pense qu'on serait encore assis là. Plus ça avançait, plus c'était mélangé, jusqu'à ce que son haut fonctionnaire nous fasse un parallèle, à l'EPA, aux États-Unis, puis ici ce qui va se passer, et puis là, là, je pense que non seulement, nous, on a compris à ce moment-là, mais je pense que le ministre a compris ce que son projet de loi avait l'air.

Bon, mais avant qu'on aille dans le fond du sujet du projet de loi, il me faut rappeler pour les gens qui nous écoutent que comment ça se fait que ça arrive comme ça, vite, vite, fin de session, on n'a jamais entendu parler de cette affaire-là. Le rapport D'Amours, je viens de relire ça. Le rapport d'Amours, là, oui, on parlait de l'écofiscalité, mais je pense pas que nulle part on parlait de ce genre de véhicule là. Ça nous est arrivé à peu près de nulle part.

Je vais vous dire d'où ça nous arrive. C'est que ce gouvernement-là ne sait plus comment venir piger dans toutes nos poches, hein, dans toutes nos poches. Là, il reste la petite poche en haut qu'ils sont pas venus piger encore, mais ce sera pas bien, bien long. Alors, c'est une nouvelle source de revenus pour le gouvernement et c'est pour ça, c'est pour ça la panique, là, de déposer ça vite, vite, vite avant la fin de la session.

Je vais vous donner quelques chiffres, là, sur le ministère de l'Environnement. Et ici, je veux saluer les gens qui travaillent au ministère, qui font un ouvrage... Même si les budgets ont été coupés de 40 % depuis six ans, ces gens-là font un ouvrage extraordinaire. On en a eu une démonstration au moment du projet de loi n° 25, la qualité des hommes et des femmes, de l'économiste, particulièrement, qui était là, de la qualité de l'ouvrage que ces gens-là font.

D'abord, le ministère de l'Environnement a été un des grands ministères, hein. Je vous rappelle les Marcel Léger, les Mme Bacon, les Pierre Paradis, les Clifford Lincoln qui ont été des grands ministres de l'Environnement. C'était un ministère à grand panache. Depuis 1995, on a coupé les budgets de 40 % ? de 40 %. Vous savez qu'en Ontario le premier ministre de l'Ontario est amené en cour en ce moment par les gens de la région de Walkerton parce que, eux, leur prétention, c'est qu'ils avaient coupé de 50 % au ministère de l'Environnement en Ontario et de là est arrivée la situation de Walkerton. Et là les gens ont dit: C'est trop facile pour le premier ministre de l'Ontario de juste se laver les mains puis de dire: La municipalité, occupe-toi de ça. Alors, eux, ils vont amener le premier ministre de l'Ontario en cour puis ils vont essayer de démontrer que la cause des sept décès puis des 1 200 gens qui ont été malades, ça a été finalement les coupures des budgets qui ont eu lieu au ministère de l'Environnement, 50 % en Ontario. On les suit, on les suit de très près, hein, 40 %, 40 %.

Or, on peut se poser de sérieuses questions. Je vous rappellerai que ce ministère-là est rendu le seizième sur 20 ministères au Québec. Alors, ça a été la dégringolade, là. À un moment donné, à chaque journée, quand on ouvrait le journal, là, c'était ou bien du personnel, ou bien des escouades spéciales, ou bien des missions qui étaient enlevées au ministère, et ça faisait mal de voir ça. Et sans parler du dernier grand coup de hache qu'ils ont donné dans le ministère quand ils ont pris toute la section des parcs, de la faune puis qu'ils ont envoyé ça au ministère de la gravelle, hein, au ministre de la gravelle, le distingué député de Joliette. Et là, ça a été quasiment la fin du ministère, imaginez-vous, le ministre de la gravelle qui était soudainement responsable des chevreuils, des orignaux, des nénuphars puis des parcs du Québec. Ça avait ni queue ni bon sens, ça avait pris des générations à bâtir ça, et, soudainement, d'un trait de plume, pour faire plaisir à ce ministre-là, on a saccagé le ministère au complet. Enfin.

Pire que ça, pire que ça, si on veut donner dans les statistiques un petit peu, nous en sommes rendus au quatrième ministre ? vous avez bien compris, M. le Président, vous me regardez avec un point d'interrogation au-dessus de la tête, je vous comprends ? nous en sommes rendus au quatrième ministre de l'Environnement en six ans, hein. Six ans, quatre ministres. Moi, je vous dirais que, dans la Confédération canadienne, on n'a pas de statistique, mais je mets au défi un étudiant, là, quelque part, d'une université de faire une recherche là-dessus, il y a probablement jamais eu un ministère de l'Environnement, dans toute l'histoire de la Confédération canadienne, un gouvernement où il y a eu six... quatre ministres de l'Environnement en six ans. C'est du jamais vu.

Alors, qu'est-ce que ça veut dire, ça? Le premier qui a été là, il a fait une bonne job, il a fait une bonne job, il a mis ça en place, l'agriculture, il a travaillé fort, je le salue, c'est un député de la région de Laval. Mais là ils l'ont enlevé puis ils en ont mis un autre. Puis là il a bien essayé lui aussi. Puis là ils l'ont enlevé, ils en ont mis un troisième. Il a bien essayé. Puis là on est rendu avec le quatrième. Lui, je peux lui assurer qu'il ne sera pas là plus qu'une moyenne de 700 jours, hein, c'est à peu près ça qu'ils ont fait, parce qu'il y aura une élection d'ici 700 jours. Alors, lui, je peux lui assurer qu'il sera pas là plus de 700 jours, puis ça va recommencer. Vous savez, on bâtira pas une grosse tradition environnementale au Québec...

Une voix: ...

M. Benoit: Oui, c'est ça. Alors là, après, le prochain gouvernement nommera un ministre, et puis il sera bon, puis il va être là pour un bon bout de temps, puis il va poser des gestes dynamiques pour pas mal longtemps.

n(15 h 50)n

Ceci dit, pourquoi, M. le Président, nous allons voter sur division sur ce projet de loi là? D'abord, indéniablement, indéniablement, quand le ministre me disait, au premier discours qu'il a fait ici: Tout le monde est pour le projet de loi... Là, je lui ai rappelé que, quand il fait ça comme ça, tout le monde, il y a toute la moitié en arrière... Il est pas capable de faire l'autre moitié, hein. Ça, c'est la moitié qui nous a écrit. Tout le monde, là, c'était juste la gang d'en avant, si j'ai bien compris, qui était pour. Parce que, quand on a fait des tests, quand on a appelé des gens, quand on a reçu du courrier, on s'est aperçus que c'était pas tout le monde qui était pour, loin de là. Je vous lirai la lettre du Barreau tantôt. Alors, c'est une forme de taxe. C'est pas pour rien que ça s'appelle de l'écofiscalité, il y a une taxe là pour les entreprises.

Pourquoi on va voter sur division? Jamais le ministre, et on a été là un bon bout de temps en commission parlementaire... De notre côté, on a été trois, quatre députés, le gouvernement, la même chose, y en a pas un qui a parlé du côté du gouvernement. Je pense qu'ils avaient eu mission, là, de pas parler, pas un qui a posé une question, alors que le Barreau nous dit: C'est à la fois nouveau et fort complexe, hein, une lettre datée du 1er juin. Pas un député du gouvernement va poser une seule question. Tout compris ça, eux autres! J'aimerais ça être intelligent comme eux autres, ç'a pas de l'air que ça va m'arriver dans ce projet de loi là. Eux autres, ils avaient tout compris ça, ils ont jamais posé une question. Nous, on a dû faire la job pour laquelle le peuple nous a élus, de questionner ce genre de projet là.

Alors, quand on a demandé au ministre: Quels sont les objectifs environnementaux que vous voulez rencontrer... Si y a une taxe, si y a une fiscalité environnementale, y a un but à ça, j'imagine. Par exemple, quand on a décidé de charger 3 $ par pneu quand on change les pneus, y avait un but, c'est-à-dire que c'était de récupérer les millions de pneus qui traînent dans le paysage, les 7 millions, annuellement, qui sont des nouveaux pneus. Bon, y avait un but, on le savait puis on se disait: En 2008, tous les pneus vont être ramassés, puis voici ce qu'on va faire avec, et puis... On pouvait être d'accord ou pas d'accord ? c'était une des 17 taxes qu'ils nous ont ajoutées ? mais on savait où ce qu'on s'en allait. Alors, le bon monsieur, la bonne madame sont assis chez eux, ils disent: Ben, je suis pas d'accord avec le 3 $, mais je sais où c'est que je m'en vas avec ça, et puis peut-être ben que ç'a de l'allure.

Dans le cas présent, on nous parle de fiscalité environnementale, mais on leur dit: C'est quoi, le but ultime? Ça va nous mener où, ça? Qu'est-ce qui va arriver en bout de ligne? Pas de réponse. Pas de réponse. Tantôt, je vous ai lu le préambule du projet de loi ou la note explicative. Alors, on dit: Afin d'accorder au gouvernement un pouvoir réglementaire. On dit: M. le ministre, est-ce qu'on peut les voir, ces règlements-là? Si ça vous donne un pouvoir réglementaire, pouvons-nous les voir, nous, néophytes, nous qui se joignons au Barreau du Québec qui disent que c'est à la fois nouveau et fort complexe? Aidez-nous, M. le ministre, faites notre éducation, pas rien que la nôtre, celle de l'ensemble du peuple, celle de l'ensemble des environnementalistes. Alors, il dit: Non, les règlements, ça, on verra, puis ça peut prendre pas mal de temps.

Là, y nous a référé au rapport D'Amours, et là on a lu ça, le rapport D'Amours, et c'est pas évident, hein? C'est loin d'être évident que c'est dans le rapport, c'est loin, loin, loin. Je le lis et je le relis, et c'est loin d'être évident que c'est dans le rapport D'Amours. Y a peut-être des insinuations, mais, tel qu'il nous l'a présenté, c'est questionné et questionnable.

Ensuite, y nous dit ? et, là-dessus, y a raison ? que, effectivement, le fédéral a maintenant une loi semblable et l'Ontario... la loi 35 en Ontario et la loi 32 au fédéral. Bon. À ça, moi, je réponds: On nous dit société distincte, est-ce qu'il faut que ça soit identique? Est-ce que, etc.? On n'a pas vraiment eu de réponse.

Là, on a décidé, pour essayer de comprendre un peu mieux... Nous avions notre porte-parole en matière d'agriculture, que je salue, un jeune député tout à fait dynamique. Lui, y dit: Écoutez, M. le ministre, là, on va prendre un cas précis, on va prendre... Vous nous dites dans votre discours... Quand vous avez présenté le projet de loi, vous nous avez parlé que ça pourrait être appliqué aux agriculteurs. On a dit: Expliquez-nous ça avec du lisier de porc. Prenons la rivière de la Beauce, le bassin versant à peu près le plus pollué au Québec avec la l'Assomption puis la Yamaska, puis là expliquez-nous, parce que c'est vous qui en avez parlé, comment ça va fonctionner, ces instruments économiques dans le cas du lisier de porc. Et y nous a expliqué ça. Je m'excuse, mais on n'a pas vraiment compris, et c'est là que son économiste est venu à sa rescousse, et là on a un peu mieux compris qu'est-ce que ça pourrait donner dans le cas des agriculteurs.

En passant, j'ai eu l'occasion, jeudi dernier... Le caucus des députés de l'Estrie ? on a un caucus très dynamique de députés libéraux ? avons rencontré l'UPA de notre région. On rencontre toute sorte de monde, on le fait sur une base régulière. Là, il y avait cinq, six personnes de l'UPA, nous, les six députés de l'Estrie, je vous les rappelle, c'est le député de... M. Vallières...

Une voix: De Richmond.

M. Benoit: ...de Richmond, Mme Gagnon, de Saint-François, M. Charest, le député de Sherbrooke, M. Paradis, le député de Brome, M. Benoit, le député d'Orford, Madeleine Bélanger, la députée de Mégantic. Nous étions tous là, nous avons rencontré l'UPA, nous avons discuté avec eux. Ce fut un dîner fort agréable, comme toujours, avec l'UPA. Et, à un moment donné, voulant faire un brin d'humour, j'ai dit: Est-ce que vous êtes au courant des nouveaux mécanismes fiscaux que la province a peut-être l'idée de mettre sur les cochons du Québec? Là, je vous garantis que ça a coupé l'appétit à toute la gang de l'UPA, l'autre bord; ils avaient jamais entendu parler de ça. Ils savaient mais savaient absolument pas de quoi je parlais! Je leur ai dit: Inquiétez-vous pas, je le savais pas, moi non plus, il y a une semaine quand le ministre m'a envoyé ça. Et puis, si, vous autres, vous le savez pas, inquiétez-vous pas non plus, parce que, le Barreau le connaît... nous dit que, eux autres aussi, pour eux, c'est un mécanisme qui est à la fois nouveau et fort complexe.

Alors, vous comprendrez, M. le ministre, que, nous, M. le Président, que, nous, nous aurions voulu avoir des auditions, entendre des gens qui auraient pu nous expliquer ça; pas juste la parole du ministre que «tout le monde était d'accord». Là, on parle au Barreau; ils ont jamais entendu parler de ça. On parle à l'UPA; ils sont pas au courant de ça. Alors là, si le monde était d'accord, il y a de moins en moins de monde qui en ont entendu parler.

Or, nous voulions des consultations. Dès le moment où le ministre... où le leader ici a déposé le projet de loi, je me suis levé ici, puis j'ai immédiatement, n'ayant jamais vraiment entendu parler de cette histoire-là, demandé que nous entendions des gens, et nous étions bien intentionnés. Nous étions bien intentionnés; nous avions pas d'agenda parallèle. Nous voulions, entre autres, entendre ? et on sait probablement qu'ils seraient favorables à ça ? les papetières, hein?

On sait que ça vient de l'entente de Kyoto, cette affaire-là. Donc, les compagnies qui émettent, dans l'air, des produits de quelque acabit... je pense ici peut-être aux municipalités qui ont des incinérateurs, je pense aux aciéries qui peuvent émettre des produits, etc., probablement que ces gens-là seraient d'accord, fondamentalement. Alors, on a dit: On va les inviter. Il y a les groupes d'environnement, les CRE, etc., qui auraient pu être entendus. Moi, je pensais pas, là, d'être ici pendant des mois, là; une dizaine de groupes, comme on a fait sur les fiducies foncières. Puis, après ça, on s'est fait un chapeau puis on est parti puis on a voté pour. Alors, ça a été refusé, il y a pas eu de consultations. Supposément, tout le monde était d'accord, et vous comprendrez que c'était pas le cas.

Dans le projet de loi, il y a quelque chose que les deux autres projets de loi de l'Ontario et du Québec n'ont pas. On a essayé de lui faire expliquer: «d'émission, déversement ou de mise en décharge ? ou de mise en décharge». Alors, on a essayé de dire au ministre: Oups! qu'est-ce qui se cache là-dedans, là? Je vous rappellerai un de nos savants confrères qui disait que le diable se cache dans les détails. Alors «de mise en décharge», qu'est-ce que ça cache, ça, là? C'est-u les sites de déchets? Y va-tu avoir des permis d'émis pour les sites de déchets? Bon. On sait qu'il y a toute une politique qui s'en vient là-dessus, les matières résiduelles. Alors, on n'a pas eu vraiment de réponse. Il nous a dit que c'était un exemple dans le projet de loi. Mais on est restés un peu... en anglais, ils disent «suspicious»; on est restés un peu sceptiques. Et c'est une des raisons, entre autres, pour laquelle on va voter sur division.

M. le Président, le projet de loi n° 25, il a été mal annoncé, il a été mal vendu; il a pas été présenté au public. Et là, le Barreau pose tellement de questions que... Et on n'a pas eu toutes les réponses, hein? On n'a pas eu toutes les réponses. Alors, je vous lis quelques bouts de la lettre. Alors, ils disent, dans le quatrième paragraphe: «Il y a donc de grands risques que le pouvoir réglementaire s'avère inadéquat pour mettre en place des instruments économiques avec toute l'efficacité et la flexibilité que requiert la nature même de ces instruments.» le Barreau du Québec.

Un peu plus loin, dans la deuxième page... encore une fois ? encore une fois, les explications du ministre, c'était quatre lignes. Le Barreau écrira deux lettres... deux pages complètes nous disant qu'ils se questionnent, eux autres: «En outre, le libellé du projet de loi soulève d'importantes questions.» Ça, c'est le Barreau, signée par Me Francis Gervais, bâtonnier du Québec. On se ramasse pas bâtonnier du Québec comme ça, là, je veux dire, hein? Alors, lui, il pose des questions au ministre et, encore une fois, il va être bien déçu, pauvre bâtonnier, parce qu'il aura pas eu la réponse à ses questions.

n(16 heures)n

Je vous les lis, ces questions-là; le ministre pourrait y répondre lors d'une autre présentation: «Quelle est la nature des permis ou des droits qui font l'objet du nouveau paragraphe e.1 de l'article 31 tel que proposé dans le projet de loi?» Pas de réponse. «S'agit-il des nouveaux permis?» Pas de réponse. «Quelles sont les obligations et que sont les droits rattachés à ces droits et permis?» Pas de réponse. «De quel autre instrument économique s'agit-il?» Pas de réponse. «Quels sont les moyens de contrôle pour assurer le respect de quotas d'émission ou de déversement dans l'environnement?» Ça, c'est celle où on a eu le moins de réponses. Et l'expérience américaine là-dessus est très questionnable. Dans la littérature américaine...

Je me suis fait un devoir d'appeler quelques universitaires américains pour essayer de comprendre comment ça fonctionnait, les contrôles, et ce qu'on me dit, finalement, c'est: Le gros problème, c'est les contrôles de toute cette histoire-là, comment tu contrôles des émissions dans l'eau, comment tu contrôles des émissions dans l'air, comment tu contrôles... Alors, c'était le grand problème. Les deux dernières questions que le Barreau n'a pas eu réponse: «De quelle manière ces droits et permis pourront-ils être négociés? Quelles sont les limites de ces négociations?»

Alors, je finis avec la conclusion où le Barreau dit: «...doit encadrer et préciser davantage le pouvoir de réglementation du gouvernement et comporter des réponses aux questions de fond que l'utilisateur des instruments économiques soulève en matière de protection de l'environnement.» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Orford. Y a-t-il d'autres intervenants?

Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 25, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement, est-il adopté?

Des voix: Adopté sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, je vous demanderais de revenir à l'article 12, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 33

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. À l'article 12, M. le ministre délégué à la Recherche, à la Science et à la Technologie propose l'adoption du principe du projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, et M. le ministre avait terminé son intervention. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.

M. Gautrin: Excusez-moi, M. le Président, est-ce que vous avez... Je crois que le chiffre n'est peut-être pas exact. J'ai cru comprendre 23 dans votre présentation, et c'est 33.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le projet de loi...

M. Gautrin: Mais je pense qu'on appelle bien le même projet de loi. C'est bien cela? Alors, si c'est...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, c'est bien le projet de loi n° 33. C'est bien.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Si c'est 33, j'ai beaucoup de choses à dire. Merci. Merci, M. le Président. Je me lève sur ce projet de loi, et je dois commencer par dire ma perplexité devant ce projet de loi, et je vais essayer de l'expliquer à la Chambre pour en arriver peut-être à une conclusion quant à la manière dont nous allons voter sur le projet de loi. En un mot, ce projet de loi vient modifier la structure des fonds subventionnaires de la recherche et vient aussi modifier la manière dont ces fonds subventionnaires sont gérés et, ensuite, créer un petit comité de coordination entre les présidents de ces fonds. Il n'est pas... il ne me semble pas inutile, M. le Président, de commencer par rappeler la situation actuelle qui prévaut en matière de subvention des activités de recherche.

Vous avez essentiellement trois... trois... trois fonds, enfin deux fonds et un conseil actuellement qui aident à financer la recherche: le Fonds québécois de recherche en santé, communément appelé le FQRS, FRSQ, plutôt, le Fonds de recherche en santé du Québec, excusez-moi, le FRSQ ? dans les acronymes, des fois, M. le Président, on s'y perd dans ce monde-là ? vous avez le Fonds FCAR qui subventionne la recherche universitaire, principalement dans tout ce qui n'est pas du secteur de la santé, et vous avez aussi le Conseil québécois de recherche sociale, le CQRS, qui, lui, n'a pas le statut actuellement de fonds, c'est-à-dire est strictement un département du ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie.

Historiquement, M. le Président, vous le savez, avant la création du ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, le Fonds FCAR était rattaché au ministère de l'Éducation, le FRSQ était rattaché au ministère de la Santé et des Services sociaux, le Conseil québécois de la recherche sociale avait une mission différente mais était rattaché aussi au ministère de la Santé et des Services sociaux. Lorsque nous avons, ici, en cette Chambre, créé le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, on a rapatrié sous la juridiction du ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie l'ensemble de ces organismes, rappelons-le, un étant... n'ayant pas de structure de fonds et étant seulement un conseil, les deux autres étant une structure de fonds.

Vous allez me dire: Est-ce qu'on est en train de couper... Quelle différence vous faites entre un conseil et un fonds? C'est une distinction un peu ésotérique, je suis d'accord, pour ceux qui nous écoutent. Un fonds va avoir son conseil d'administration, aura plus d'autonomie, quant à la gestion de ses fonds, qu'un conseil qui, lui, est une entité directement sous l'autorité du ministre, quoique, en pratique, M. le Président, le ministre peut donner des directives au fonds. Et, en pratique, dans ce qui s'est passé en réalité, c'est que le ministre a laissé beaucoup d'autonomie au Conseil québécois de la recherche sociale, ce qui fait qu'il y avait pas vraiment, vraiment de distinction.

Alors, on a devant nous, M. le Président, une loi qui va perturber un peu ces équilibres. Il est bon de rappeler néanmoins qu'il y avait des missions qui étaient différentes. Le Fonds FCAR, qui touchait l'ensemble des disciplines, que ça soit les disciplines scientifiques qu'on appelle les disciplines scientifiques dures... Je salue aussi l'autre ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie, et ça me fait plaisir, donc, de le lui expliquer aussi. Il y avait donc ce fonds qui couvrait l'ensemble des disciplines dures et, au fil des années, avait pris aussi de plus en plus de responsabilités au niveau de la recherche sociale, voire des recherches en art et voire des recherches en littérature au fil des années. Si vous remontez il y a 10 ou 15 ans principalement, l'activité du Fonds FCAR était concentrée dans ce qu'on appelait les sciences dures.

Le Conseil québécois de la recherche sociale, quant à lui, M. le Président, avait une mission qui était bien différente. Au lieu de faire de la recherche, disons, très fondamentale, il faisait beaucoup plus de la recherche avec le milieu, avec les différents intervenants. On avait, par exemple, des programmes où pouvaient être impliqués dans les activités de recherche financées par le CQRS des gens qui n'avaient aucun lien avec le milieu universitaire mais qui étaient impliqués avec des CLSC ou des départements de santé communautaire. Donc, une mission qui était légèrement différente.

Que vient faire le projet de loi? Le projet de loi, M. le Président, vient, disons, rationaliser en quelque sorte ces différents organismes qui distribuent les fonds. Il vient dire: D'un côté, on va les rationaliser en grands secteurs. On va identifier le secteur de la santé, le secteur de ce qu'on appelle les sciences naturelles et le génie, et on va identifier un autre secteur, qui va être le secteur de la recherche sur la société et la culture, qui englobera, à ce moment-là, les sciences sociales, les lettres et voire les arts, qui seront, à ce moment-là, subventionnés par ce nouveau fonds.

n(16 h 10)n

Alors, sur le premier élément, bon, on dit... Je vais vous dire à la fois, M. le Président, les éléments positifs dans le projet de loi et les éléments négatifs. Positivement, il y a un élément intéressant de faire en sorte qu'on suive ce qui se fait au fédéral. Vous savez que bien souvent les recherches sont subventionnées à la fois par le gouvernement fédéral et par le gouvernement provincial, et, au fédéral, vous avez distingué entre le Conseil des arts, bon, maintenant les instituts de recherche sur la santé et le CNRSNG, le Conseil national de recherches sur les sciences humaines... les sciences naturelles et le génie. Alors, le fait de séparer d'une manière sectorielle comme veut le projet de loi a un avantage de pouvoir développer des programmes en meilleure complémentarité avec les programmes qui sont mis de l'avant par le fédéral.

Je vois néanmoins deux problèmes, M. le Président, et ça, c'est mon questionnement et qui n'est pas résolu à l'heure actuelle à l'intérieur du projet de loi. Premièrement, la disparition du CQRS. Je comprends qu'on crée un fonds de recherche sur la culture et... la société et la culture. Néanmoins, ce fonds de recherche, à moins que dans le débat on soit en mesure de bien me l'expliquer, me semble la copie en quelque sorte de ce que sera le... ce qu'était le FCAR, et on va perdre la dimension recherche sur le milieu, recherche en implication locale qu'avait le CQRS, le Conseil québécois de recherche sociale. Alors, évidemment, c'est pas dans le projet de loi qu'on perd cette dimension, mais, quand je vois que dans le projet de loi on voit l'abolition du CQRS, je ne suis pas complètement sûr, M. le Président, que le type d'intervention qu'avait le CQRS va pouvoir être conservé à l'intérieur du nouveau fonds, et c'est un élément sur lequel je vais vouloir m'assurer... au moins, du moins, poser des questions au ministre lorsqu'on fera le débat article par article.

Maintenant, il y a une grande question qu'on doit se poser, qui est la suivante: Est-ce qu'il ne serait pas mieux d'avoir un seul organisme qui subventionne toutes les activités de recherche, comme ça existe dans d'autres pays, particulièrement certains pays européens, plutôt que faire le fractionnement par grandes sous-disciplines? Parce que, comme vous le savez parfaitement, M. le Président, ce qui est l'élément souvent le plus dynamique en matière de recherche se fait aux confins des disciplines. Ce n'est pas dans les disciplines traditionnelles, mais c'est aux confins des disciplines. Alors, vous allez arriver à avoir des difficultés à savoir si ce qui est aux confins des disciplines et qui est souvent les recherches les plus prometteuses doivent être subventionnées par un fonds ou par un autre fonds que ce soit. Alors, je pense, par exemple, dans ma tête, sur le projet qui était tout ce qui supportait la recherche en santé mentale. Vous savez que la recherche en santé mentale, M. le Président, est une recherche qui dépend en partie, si je puis dire, purement de recherches biomédicales, mais c'est aussi une recherche qui touche la psychologie et les sciences sociales. Et est-ce que ça va tomber dans la juridiction du nouveau FRSQ ou dans la juridiction du Fonds de recherche sur la société et la culture? Donc, la difficulté, lorsqu'on multiplie les fonds, M. le Président, à... ne pas avoir ces problèmes d'interface entre deux secteurs disciplinaires qui souvent sont les secteurs les plus prometteurs.

Donc, questionnement sur le principe de maintenir trois fonds. À l'inverse, M. le Président ? c'est drôle que je fais à la fois l'argument d'un côté, mais je présente le contre-argument ? à l'inverse, l'intérêt de maintenir des structures différentes va permettre d'adapter mieux les programmes de soutien à la recherche à la réalité des disciplines. Il est clair ? et vous l'avez actuellement ? que les mécanismes de soutien qui sont propres, par exemple, au FRSQ sont légèrement différents des mécanismes qui ont été prévus par le Fonds FCAR, qui va devenir maintenant le Fonds de recherche sur les sciences de la nature et la technologie, qui ont eu des types d'intervention qui étaient différents. Je pense, par exemple, à la présence ou non de subventionnés, de chercheurs-boursiers, comment on subventionne les équipes dans un cas ou dans un autre. Le questionnement va devenir aussi: Quel type d'intervention va choisir ce nouveau Fonds de la recherche sur la société et la culture?

Donc, d'un côté, je vois d'énormes avantages d'avoir un seul organisme subventionnaire pour les activités de recherche. De l'autre côté, je peux plaider aussi pour dire: Avoir deux ou trois organismes va permettre une meilleure adaptation des différents programmes de soutien aux réalités de chacune des disciplines. Donc, on aura à faire cet équilibre entre les deux: d'un côté, cette vision qui est de pas pénaliser en quelque sorte les disciplines frontières, et avoir une adaptation réelle aux réalités de chacune des disciplines.

Alors, vous voyez, M. le Président, la difficulté dans laquelle je suis au niveau de m'exprimer sur ce projet de loi, parce qu'on n'a pas vraiment le corpus. Il est beaucoup plus important de savoir qu'est-ce que vous allez soutenir en matière de recherche, quels sont les programmes que chacun de ces fonds va mettre de l'avant, plutôt qu'une structure assez administrative qui est présentée à l'intérieur du projet de loi.

Élément intéressant, vous remarquez, dans le projet de loi, chacun des fonds va conserver l'attribution des mécanismes de soutien des étudiants du deuxième et troisième cycle. On pourrait longtemps débattre actuellement comment on devrait soutenir les étudiants du deuxième et troisième cycle. Par mesure de simplicité sur le plan de la gestion, ce qui se fait déjà... On confie la gestion. Et il faut bien faire attention de ce qui est présidé au point... au 4°, entre le concept de gérer, c'est-à-dire de gérer mécaniquement, d'attribuer, d'envoyer les chèques, etc., et la décision qui est la décision à caractères scientifique et pédagogique, qui est l'attribution des bourses. Autrement dit, le mécanisme d'attribution des bourses reste la responsabilité de chacun des fonds, mais le mécanisme de gestion en quelque sorte de ces bourses va être confié au fonds... enfin ce qui était le Fonds FCAR, qui devient le Fonds québécois de la recherche sur la nature et les technologies. Alors, dans les échanges qu'on aura, M. le Président, en commission parlementaire, il est clair qu'il va falloir préciser la situation des disciplines en interface.

Nouveau changement à l'intérieur de ce projet de loi, le phénomène de l'introduction d'un président-directeur général des fonds plutôt qu'une structure bicéphale d'un président et d'un directeur. Là, j'aurais besoin réellement d'être convaincu par le ministre de la démarche qu'il fait. Il y a... Je le signale, à l'heure actuelle, on a les deux modèles. Il y a, dans la tradition... On a même les deux modèles ennemis. Ha, ha, ha! On a, dans la tradition du CQRS, par exemple, un directeur général qui s'occupe de la gestion, etc., et un président qui est une autorité scientifique dans le domaine, qui préside le fonds.

Au niveau du Fonds FCAR qui va devenir le Fonds de la recherche sur la nature et la technologie, il a été choisi d'aller déjà dans ce mécanisme du président-directeur général où le président-directeur est moins une autorité scientifique qu'une autorité administrative. Au niveau du FRSQ, vous aviez une structure bicéphale, avant, avec un président et un directeur général. Lorsque le président, je crois, a pris sa retraite, si je ne m'abuse, ou a vu son mandat terminé ? je voudrais vérifier à cet effet-là ? on a actuellement un directeur général qui fait office de président. Je reste... Personnellement, je préfère ? mais il faudra qu'on me convainque ? je préfère la structure bicéphale où à la fois vous avez une personne responsable réellement de la gestion quotidienne, bon, des dossiers, comment les dossiers... que les groupes de pairs se réunissent, que les choses se fassent correctement, et une autorité scientifique dans le domaine qui préside le fonds. Ce n'est pas le choix qu'a fait actuellement le projet de loi, on préfère confier ça sous la même autorité. Je ne suis pas personnellement convaincu qu'on fait le bon choix lorsqu'on va dans ce sens-là.

M. le Président, il reste un dernier point que je voudrais aborder ici. Bon, le projet de loi a bien sûr des mesures transitoires techniques qu'on aura la chance d'aborder lorsqu'on discutera article par article. La question qui me préoccupe est la suivante. Nous sommes aujourd'hui le 12 juin. Le projet de loi, pour des raisons techniques ? et je n'en fais pas grief actuellement au ministre; je comprends qu'il peut y avoir des retards, etc. ? a été déposé hors délai. Vous savez que, si on veut aller dans cette direction-ci, c'est-à-dire avoir des fonds qui sont des fonds tels qu'ils sont inclus à l'intérieur du projet de loi, on ne peut pas retarder indéfiniment... Vous savez, M. le Président, puisque vous venez du milieu universitaire, qu'on ne peut pas nécessairement... Si on passe une loi, par exemple, à la session d'automne, ça n'aura seulement d'effet qu'une année plus tard parce que ça ne pourra pas avoir d'effet en 2001, compte tenu des délais qu'il faut et du mode de fonctionnement à l'intérieur de nos universités et de nos centres de recherche.

n(16 h 20)n

Alors, la préoccupation que j'ai aussi, M. le Président, tout en ayant soulevé les difficultés que je peux voir dans ce projet de loi et le fait que j'aurais pu voir à écrire, si j'avais dû l'écrire, un projet de loi qui aurait pu être différent, c'est que ne pas le voter rapidement va pénaliser indûment le secteur de la recherche, dans la mesure qu'on va se trouver dans une... on va allonger les périodes de transition, c'est-à-dire qu'on allongerait les périodes de transition entre la situation où j'appellerais la situation CQRS par rapport à la situation Fonds de recherche sur la société et la culture.

Alors, M. le Président, avec toutes ces remarques-là, je pense qu'on va voter avec réticence. Je pense que j'ai essayé de faire état actuellement de mes réticences et des problèmes que je vois à l'intérieur du projet de loi. On va voter en faveur du projet de loi non pas parce que je pense que ça va changer grand-chose, mais parce que, bon, c'est une manière de réorganiser les activités de recherche différemment. Personnellement, j'aurais probablement, compte tenu de l'importance de la multidisciplinarité, penché plus vers un seul fonds, avec les programmes qui auraient été différenciés suivant les secteurs d'activité, mais c'est pas le choix que le gouvernement a fait.

Je terminerai, M. le Président ? quoique j'aie le temps, c'est vrai, excusez-moi ? en rappelant que je ne suis pas convaincu du mécanisme de coordination. Le ministre a dit: Oui, je sais, il existe des secteurs qui sont des secteurs aux confins des responsabilités d'un fonds et de l'autre, et, pour cela, je vais créer le comité souple des présidents-directeurs généraux de fonds qui verront à harmoniser... À partir du moment où les présidents-directeurs généraux ne sont pas... sont plus des gestionnaires que des scientifiques, en quelque sorte ? c'est ce que je vois à la lecture de ce plan ? je vois la difficulté quant à l'harmonisation dans les secteurs tampons. Alors, M. le Président, j'ai donc un questionnement aussi sur ce comité, mais le gouvernement reste le gouvernement. Je pense que je leur fais le choix de... je leur reconnais le choix de faire ce choix de structure quant à l'organisation des fonds de recherche. Ce n'est pas celui que j'aurais recommandé, moi, si j'avais été à la place du ministre, mais, malheureusement, M. le Président, je n'y suis pas, et, dans ces conditions-là, nous allons quand même souscrire au projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Verdun. Il n'y a pas d'autres interventions sur le projet de loi?

Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 33, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'économie et du travail

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Je vous référerais maintenant à l'article 6, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous avez bien dit 6, hein? Alors, j'aimerais qu'on me... J'aimerais que la table m'apporte, si vous voulez, l'article 6. Est-ce que vous avez... On n'a pas ça dans nos...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je m'en vais voir dans le feuilleton.

Projet de loi n° 20

Adoption du principe

Alors, c'est bien le projet de loi n° 20 au feuilleton, Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Comme nous en sommes au niveau de l'adoption du principe, alors je vais donc mettre en débat l'adoption du principe de ce projet de loi n° 20. Alors, Mme la ministre...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...des Finances, hein? Très bien. Je vous cède la parole.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je serai très brève. Le projet de loi n° 20 modifie la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales, et cela, conformément au discours du budget du 29 mars 2001. En effet, ce projet de loi vise à exempter les personnes morales et les groupements immatriculés par l'Inspecteur général des institutions financières de l'obligation de produire une déclaration annuelle durant l'année de leur immatriculation. Cette mesure permettra de réduire le fardeau administratif et financier des nouvelles entreprises. En effet, 24 000 personnes morales et groupements immatriculés pourront ainsi économiser au total environ 1,7 million de dollars par année.

De plus, j'entends profiter de l'occasion pour présenter des amendements visant à permettre en particulier de ne pas rendre publiques les adresses des établissements qui hébergent des personnes victimes de violence, ce qui était souhaité et ce qui est souhaitable, M. le Président. Vous conviendrez avec moi que, pour la sécurité même des personnes, surtout des femmes qui vont chercher refuge dans de tels établissements, il est inacceptable que ces adresses soient obligatoirement des informations publiques. Actuellement, toutes ces adresses se retrouvent, en vertu de la loi, à l'état des informations... à l'état des informations du registre de l'Inspecteur général, et elles sont donc très facilement accessibles. La loi sera modifiée de telle sorte que ces personnes ne soient plus obligées de déclarer leurs adresses mais qu'elles puissent choisir plutôt d'identifier un fondé de pouvoir.

En somme, M. le Président, nous avons à étudier des dispositions légales qui ont pour but d'alléger le fardeau réglementaire et financier d'entreprises et de dispenser, dans des circonstances particulières, des personnes de rendre publiques certaines informations. Je crois que c'est un projet qui est intéressant sous l'angle de l'amélioration de l'efficacité administrative à tous égards, et je souhaite évidemment qu'il reçoive un accueil favorable de cette Assemblée. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre des Finances, et je vais céder la parole maintenant à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: ...M. le Président. Alors, tout de go, M. le Président, je vais rassurer la ministre que nous allons bien sûr appuyer le principe de ce projet de loi. M. le Président, ce que veut faire ce projet de loi, c'est presque un amendement, finalement, ce sont des amendements à la loi actuelle, et ce qu'on essaie de faire, c'est de diminuer les coûts aux entreprises, aux gens qui doivent s'inscrire auprès de l'Inspecteur général des institutions financières.

Je ne veux pas parler longuement, je veux simplement nous rappeler par ailleurs le fait que l'Inspecteur général des institutions financières, par les contributions qu'il va chercher auprès du monde, n'est-ce pas, du secteur financier, contribue de l'ordre de 25 millions de dollars par année aux coffres de l'État, en plus finalement de payer ses propres dépenses. C'est également le même phénomène qui avait lieu il y a pas très longtemps avec la Commission des valeurs mobilières. Je pense, M. le Président, que c'est de faire indirectement ce qu'on ne veut pas faire directement. Je pense qu'on peut... On doit exiger du milieu financier qu'il finance ces institutions et qu'il les finance dans la proportion qui est nécessaire pour accomplir leur travail correctement et dans l'intérêt des Québécois et des Québécoises, sauf que, là, à mon avis, on pèche par excès. On pèche par excès parce que, si on demande à l'Inspecteur général des institutions financières de financer le gouvernement à même les revenus qu'il va chercher de ce secteur spécifique, bien, on peut s'interroger quant à la façon dont fonctionne ce gouvernement.

Bien sûr, je me réjouis, la ministre a annoncé qu'il y aura là des économies de 1,7 million de dollars. On peut se réjouir, ce sera là une baisse, n'est-ce pas, des cotisations de ce secteur à l'endroit du gouvernement. Mais on aurait souhaité, quant à nous, qu'il y ait une révision en profondeur de cette façon de taxer ce secteur pour financer d'autres programmes. Je pense que, quand on dit qu'un secteur doit être financé à même une cotisation particulière venant d'un milieu particulier, je pense qu'on ne peut pas, à ce moment-là, utiliser ces fonds pour faire d'autres activités que celle pour laquelle on a recueilli ces sommes d'argent.

n(16 h 30)n

Alors, M. le Président, nous allons appuyer le principe de ce projet de loi. C'est une façon d'alléger le fardeau au niveau réglementaire, et, par conséquent, ça répond, n'est-ce pas, aux demandes et aux recommandations non seulement du groupe-conseil qui avait suscité les modifications au niveau du budget qui a été déposé récemment, mardi dernier, mais également, M. le Président, ça répond aux attentes du rapport Lemaire qui avait demandé... et dans lequel rapport il est contenu à plusieurs endroits la nécessité de diminuer la réglementation pour les entreprises.

Alors, M. le Président, simplement pour rappeler à ce gouvernement qu'il y a du travail à faire encore pour alléger ce fardeau de taxation fait indirectement à un secteur en particulier pour financer des activités gouvernementales, moi, je pense qu'il y aurait lieu de se pencher à nouveau lors de la prochaine session et de nous assurer qu'on ira chercher de ce secteur l'argent dont on a besoin, le faire correctement, ouvertement. Et, quand on taxe, M. le Président, on taxe directement et on informe les citoyens où va leur argent.

Alors, M. le Président, en dépit du fait qu'on va bien appuyer le principe de ce projet de loi, je pense que je voulais apporter cette réserve, qui m'apparaît nécessaire, vu la façon détournée de financer le gouvernement à même cette taxe indirecte. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Il n'y a pas d'autres intervenants?

Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales, est-il adopté? Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission des finances publiques

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Je vous réfère donc à l'article 14, M. le Président.

Projet de loi n° 184

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 14, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du principe du projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Alors, merci, M. le Président. Présente sur l'ensemble du territoire, l'agriculture constitue un important moteur de développement économique pour toutes les régions du Québec. Avec ses 33 000 entreprises agricoles qui emploient environ 65 000 personnes, elle génère des recettes de l'ordre de 5 milliards de dollars annuellement. Il importe donc, M. le Président, de mettre en place des outils qui assureront à ce secteur un avenir des plus prometteurs. Cet essor cependant doit se faire dans une perspective de développement durable et en assurant une cohabitation harmonieuse des activités agricoles et des autres activités qui s'exercent sur le même territoire. C'est afin de concilier ces objectifs que je propose d'importantes modifications au régime de protection des activités agricoles via le projet de loi n° 184 et les amendements qui y seront proposés.

Vous me permettrez, M. le Président, peut-être à cause de ma formation, mais aussi à cause de l'importance du sujet, de tracer un bref historique qui nous amène au projet de loi n° 184 et à en débattre. Les 15 dernières années ont permis la mise en place progressive de différents éléments du régime de protection du territoire agricole et a favorisé une prise de conscience de plus en plus grande face à la nécessité d'en arriver à la pratique d'activités agricoles durables, donc dans une perspective de développement durable.

En 1978, est entrée en vigueur la Loi de protection du territoire agricole, qui vise à sauvegarder les terres agricoles, c'est-à-dire à leur conserver leur vocation initiale et à contrôler leur réaffectation à des usages non agricoles. Cette loi a longtemps et de belle façon rempli son rôle, je dirais, de protectrice des terres vouées à cet important métier qu'est l'agriculture.

Toutefois, au fil des ans, de nouvelles réalités et de nouvelles préoccupations en matière de protection des activités agricoles ont rendu souhaitable la mise en place de nouveaux outils. C'est en mai 1995, avec mon collègue, dans une entente de principe auquel ont adhéré plusieurs partenaires ? le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, le ministère de l'Environnement et de la Faune, à l'époque, le ministère des Affaires municipales, l'UMRCQ, l'UMQ, l'UPA ? que les pistes de solution furent explorées en premier lieu. Cette entente établit pour une des premières fois la distinction entre la pollution et les trois inconvénients que sont les bruits, les odeurs et les poussières. Nous avons donc, à ce moment, établi une distinction entre la pollution d'origine agricole et les inconvénients que sont les bruits, les odeurs et les poussières. Un an plus tard, en juin 1996, est adoptée la loi n° 23, ou Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole et d'autres dispositions législatives, afin de favoriser la protection des activités agricoles. Elle prendra effet en juillet 1997 en remplacement de la Loi de protection du territoire agricole.

Cette nouvelle loi amène des mesures particulières favorisant d'abord la prise en compte des activités agricoles dans la planification et l'aménagement du territoire. Deuxièmement, elle prévoyait l'utilisation prioritaire du sol en zone verte justement à des fins agricoles et elle prévoyait aussi la coexistence harmonieuse des activités agricoles et non agricoles. La loi n° 23 établit une distinction très importante, M. le Président, entre, d'une part, la pollution agricole, qui demeure sous la responsabilité du ministère de l'Environnement du Québec, et, d'autre part, les inconvénients, que j'ai mentionnés tantôt, liés à la pratique des activités agricoles, qui, eux, tombent sous la responsabilité des municipalités. Ce partage des responsabilités et les éléments nouveaux introduits dans la loi ont donné naissance à ce qu'il est convenu d'appeler le régime de protection des activités agricoles.

Aujourd'hui, quatre ans après... quatre ans après la mise en application de ce régime, nous nous rendons compte, M. le Président, que des difficultés persistent, plus particulièrement en ce qui a trait à la mise en oeuvre des paramètres afférents aux distances séparatrices reliées aux odeurs. Le régime, qui devait initialement favoriser le développement des activités agricoles en zone verte et l'essor des entreprises agricoles, a eu un effet limitatif pour bien des entreprises agricoles du Québec. Dans ce contexte, M. le Président, pour bien comprendre le bien-fondé des correctifs à apporter au régime, il est essentiel de se rappeler certains des éléments qui caractérisent l'agriculture québécoise.

D'abord, premièrement, l'agriculture se développe principalement en périphérie des villes, ce qui occasionne bien sûr, par cette proximité... Bien qu'elle ne cesse de stimuler la croissance, la prospérité et le développement de l'agriculture, cette réalité accentue paradoxalement les contraintes qui s'exercent sur l'agriculture. Elle a contribué à la multiplication des usages non agricoles en zone verte, ce qui entraîne parfois des difficultés de cohabitation.

n(16 h 40)n

Deuxième élément lié au développement de l'agriculture québécoise, et cet élément remonte très loin dans l'histoire du Québec, M. le Président: L'organisation du territoire ou la division des terres en rangs. Ce système de lotissement que nous avons au Québec, qui est tout à fait particulier, en rangs, nous vient du régime seigneurial, à l'époque du régime français, et se traduit par une étroitesse des terres, ce qui a comme conséquence nettement visible que les bâtiments sont situés très près l'un des autres et en bordure du chemin public. Or, c'est précisément cette proximité des usages agricoles et non agricoles qui contribue à exacerber l'effet contraignant des distances et qui limite le développement de certaines exploitations agricoles.

Vous savez, M. le Président, nombre d'exploitations agricoles déjà en place avant l'entrée en vigueur du régime se sont vu limiter dans leur expansion, dans leur développement pour des raisons de distance insuffisante en regard d'une habitation, d'un immeuble protégé, d'un édifice public, ou du périmètre urbain, ou encore tout simplement à cause de la présence du chemin public. Cette situation entraîne, pour ces fermes, l'impossibilité d'accroître leur cheptel à moins de recourir à des mécanismes de servitude qui ont eux-mêmes engendré des effets pervers qui empêchent les petits agriculteurs ou les agriculteurs moyens de développer leur entreprise. Cet état de fait donne lieu à des situations inéquitables pour les producteurs, monnayage des terres, sans pour autant solutionner le problème.

D'autres entreprises sont également bloquées dans leur développement puisque, au départ, la distance pour accroître le cheptel de façon notable est insuffisante. Ainsi, la seule possibilité de développement pour certaines entreprises sans recourir aux mécanismes de servitude, de par l'augmentation du cheptel de quelques unités animales, ce qui ne permet pas l'essor de ces mêmes entreprises ou sa prise en charge par la relève. Nous avons eu beaucoup de préoccupations de la part du monde agricole, puisque cette situation rend difficile la prise en charge par la jeunesse des entreprises existantes compte tenu du fait que, pour rentabiliser l'entreprise agricole, il est parfois essentiel d'augmenter la production et, bien sûr, le nombre d'unités animales.

De plus, M. le Président, certaines des entreprises présentement bloquées pour des motifs de distance ne peuvent réaliser des adaptations qui seraient nécessaires pour diminuer leur impact sur l'environnement, par exemple procéder à l'installation de structures étanches de fumier. Ils sont même empêchés d'améliorer leur performance et leur réalité en regard même de la protection de l'environnement.

Alors, voilà d'où nous vient la nécessité du projet de loi n° 184. Et, compte tenu justement des difficultés d'application du régime, les ministres du ministère des Affaires municipales et de la Métropole, du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec ont confié, en décembre 1999, à Me Jules Brière le mandat de cerner les problèmes les plus susceptibles d'avoir nui à l'atteinte de l'objectif fondamental du régime et de proposer, en consultation avec l'Union des producteurs agricoles, avec la Fédération québécoise des municipalités et avec l'Union des municipalités du Québec, les correctifs ou les ajustements qu'on pourrait apporter au régime de façon à permettre une expansion minimale des entreprises agricoles du Québec.

Dans le cadre de ce processus consultatif, un projet d'entente a été négocié entre la FQM et l'UPA, et je tiens à mentionner ici la collaboration fort importante du monde municipal, qui reconnaît justement l'importance de l'activité agricole pour le développement de ces collectivités dans leur collaboration pour en arriver à cette entente qui a permis, avec le rapport Brière, de fixer les grands paramètres avec lesquels nous pouvons justement présenter un projet satisfaisant pour l'ensemble des intervenants. On retrouvait donc, M. le Président, dans cette entente une disposition qui visait particulièrement les exploitations existantes limitées dans leur développement.

Les recommandations contenues dans le rapport Brière, déposé en décembre 2000, ont beaucoup influencé aussi le projet de loi n° 184 de décembre dernier. Ce projet de loi modifie la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles afin d'édicter des mesures visant à préserver le maintien ou la capacité de développement des activités agricoles dans certains cas particuliers. Il modifie également la procédure relative aux demandes à portée collective soumises à la Commission de protection du territoire agricole du Québec. Entre autres, seule, maintenant et dorénavant, une municipalité pourrait soumettre une telle demande, laquelle ne pourra porter que sur des îlots déstructurés ou des lots regroupés dans des secteurs identifiés en zone agricole.

Ce projet de loi, M. le Président, modifie, de plus, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme afin de permettre à une MRC d'adopter un règlement de contrôle intérimaire comportant des normes sur les usages en zone agricole ou sur les distances séparatrices afin de suspendre l'application des dispositions de règlements municipaux incompatibles avec ces mesures. Il permet ? ce projet de loi ? en même temps de suspendre l'exercice par une municipalité, avec le règlement de contrôle intérimaire, du pouvoir d'adopter de tels règlements jusqu'à l'entrée en vigueur d'un schéma d'aménagement révisé conformément aux orientations gouvernementales spécifiques à la zone agricole.

Par ailleurs, ce projet de loi modifie la Loi sur La Financière agricole afin d'assujettir l'élaboration et la gestion des programmes qui y sont prévus au respect, par les producteurs, de normes environnementales. Cette mesure découle du principe fort important, M. le Président, d'écoconditionnalité qui viendra contribuer à l'accélération du virage vert auquel souscrivent depuis plusieurs années, M. le Président, une majorité de producteurs agricoles du Québec.

En conclusion, nous sommes maintenant à un moment-clé où l'Assemblée nationale devra se prononcer sur un outil législatif renouvelé. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de remettre au leader, à l'occasion... hier, de prendre connaissance des amendements que je lui ai fait parvenir, et je pense que c'est un gage aussi de ma bonne volonté pour permettre justement à cet outil crucial pour l'avenir des communautés locales de cheminer rapidement. Cet outil, M. le Président, résulte d'une collaboration importante entre les principaux partenaires dans un travail collectif qui nous a permis d'en arriver à un consensus satisfaisant pour toutes les parties.

Ce projet de loi et les amendements qui seront proposés visent à concilier l'essor des entreprises agricoles avec le respect de l'environnement et le développement durable. Ils visent également à assurer une cohabitation harmonieuse entre, d'un côté, les activités agricoles et les autres activités s'exerçant sur le même territoire, et ce, M. le président, au grand bénéfice des régions du Québec et des communautés pour lesquelles l'agriculture constitue, depuis des années, un important levier de développement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et également député des Îles-de-la-Madeleine. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je vous demanderais, à ce moment-ci, de suspendre le débat sur le projet de loi n° 184 pour qu'on puisse appeler un autre article de notre règlement, de notre feuilleton.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté?

Mme Carrier-Perreault: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition officielle. Un instant.

M. Paradis: M. le Président, si la demande du leader du gouvernement est à l'effet de suspendre le débat pour qu'on puisse entendre en commission parlementaire des groupes intéressés sur lesquels on pourrait, là, conjointement, dresser la liste, il y aurait consentement de notre côté. Si c'est parce que les amendements qui ont été déposés hier à mon bureau, à 17 h 30, qui sont beaucoup plus volumineux que l'actuel projet de loi et qui sont d'une complexité... Je viens de communiquer avec l'Union des producteurs agricoles, là, je pense que l'adage est approprié, une chatte y retrouverait pas ses petits, M. le Président, là. À ce moment-là, si le gouvernement est pas prêt, qu'il le dise clairement.

Pour le moment, nous, ce qu'on souhaite, compte tenu de l'état du dossier, c'est que les gens qui ont été entendus en commission parlementaire puissent être réentendus, compte tenu que les amendements sont beaucoup plus nombreux que le corps principal du projet de loi, et on sait plus où on s'en va. Il faut se rappeler que, dans le cadre de ce débat-là, à deux reprises, le gouvernement a voulu légiférer pour donner un droit de produire et, à deux reprises, le gouvernement s'est trompé et ce sont les agriculteurs qui en paient actuellement le prix.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

n(16 h 50)n

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, tout simplement pour rappeler qu'il y a eu effectivement des consultations en février dernier sur ce projet de loi là, qu'il y a des amendements. Je conçois que l'opposition a reçu quand même ces amendements-là. À une certaine époque, M. le Président, au moment où, moi-même, j'étais dans l'opposition, je peux vous dire que ces amendements-là, on les recevait uniquement en commission. Donc, je comprends que l'opposition a déjà en main les amendements.

Moi, ma demande est tout simplement de suspendre à ce moment-ci le débat sur le projet de loi n° 184. Ça permettra donc à l'opposition de poursuivre, bien sûr, les vérifications, si elle a les amendements en main, pour qu'on puisse passer à un autre article de notre feuilleton.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Paradis: Est-ce qu'on comprend que la leader adjointe du gouvernement propose une suspension des travaux de l'Assemblée nationale à ce moment-ci? Parce que ça existe pas, là, ce qu'elle nous demande.

Le Vice-Président (M. Pinard): Suspension... Madame?

Motion d'ajournement du débat

Mme Carrier-Perreault: Ce que je propose, M. le Président, c'est de suspendre le débat pour le projet de loi n° 184. Alors...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...c'est une motion d'ajournement du débat que vous nous proposez? Bon. Alors, est-ce que la motion d'ajournement du débat est adoptée? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, cette motion donne des droits de parole à chaque parti politique.

(Consultation)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, quel article? En vertu de l'article 101... je vais lire l'article 101 de notre règlement qui stipule: «Temps de parole ? concernant un ajournement du débat ? L'auteur de la motion et un représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un temps de parole de 10 minutes. L'auteur de la motion a droit à une réplique de cinq minutes.»

Alors, je serais maintenant prêt à... Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement et députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Effectivement, j'ai proposé... Puisque j'ai proposé moi-même cette motion de suspendre, en fait, d'ajourner le débat temporairement sur le projet de loi n° 184, je vais donc vous expliquer le pourquoi de la chose, M. le Président.

Le leader adjoint du gouvernement... de l'opposition, pardon, désire entendre des groupes supplémentaires, nous dit-il. Il pensait d'être bon pour avoir d'autres groupes ou faire à nouveau des consultations publiques, alors qu'on le sait très bien, au moment où on se parle ? et je tiens à le rappeler quand même pour les gens qui sont pas au courant, sur ce projet de loi là ? le gouvernement, en février, a fait une commission parlementaire. Plusieurs groupes sont allés effectivement... ont envoyé des mémoires. Il y a eu des... On a eu des audiences, à ce moment-là. Et, bien sûr, il y a des amendements qui sont apportés au projet de loi.

Vous savez comment ça fonctionne, M. le Président. On dépose un projet de loi. On invite les gens qui sont concernés ou les intervenants les plus intéressés par le projet de loi à venir, bien sûr, se prononcer sur les changements qu'on propose par le biais d'un projet de loi. Et c'est le déroulement normal, ça, de toute façon, de la majorité ? la très grande majorité ? de nos projets de loi. Alors, les gens, bien sûr, suite à ces appels, nous envoient leurs commentaires et, par la suite, le gouvernement qui écoute, bien sûr, les gens qui viennent nous dire, nous donner des suggestions, nous faire des recommandations ou, en fait, désirent échanger avec le gouvernement sur le projet de loi, bien, suite à ces consultations, c'est tout à fait normal qu'on retrouve, bien sûr, une série d'amendements. Si on n'en retrouvait pas, M. le Président, on pourrait nous taxer de ne pas écouter la population. Vous comprendrez que c'est tout à fait normal, en échangeant comme ça, avec les différents intervenants qui sont, bien sûr, les plus concernés, bien, c'est comme ça qu'on peut avoir aussi... arriver, à toutes fins pratiques, à améliorer nos différents projets de loi.

Alors, ces consultations ont déjà eu lieu. Et, ce que l'on me dit, effectivement ce que j'ai appris, c'est que le leader de l'opposition, je pense, est un des porte-parole au dossier ou l'était il y a pas si longtemps, et je sais que l'opposition a reçu... Le ministre a déposé, aux gens de l'opposition, la série d'amendements qui a été apportée, qui sont apportés pour améliorer le projet de loi. Le leader de l'opposition me fait signe qu'il y en a plusieurs et il me fait signe une épaisseur comme ça; bien, ça veut dire qu'on a beaucoup écouté, M. le Président, qu'on a beaucoup compris, et donc, qu'on a l'intention de beaucoup améliorer le projet de loi, ledit projet de loi.

Ce que je disais tout à l'heure, M. le Président, c'est que, vous le savez, comme d'autres députés en cette Chambre, on est quelques-uns quand même ? je vois ma collègue de Terrebonne qui opinait du bonnet aussi tout à l'heure ? on est quelques-uns ici aussi, de notre côté, à avoir... à avoir fait l'opposition officielle. Pendant cinq ans, moi, j'ai été une des députés, comme d'autres bien sûr, de notre groupe... de notre groupe parlementaire où, à ce moment-là, on était assis de l'autre côté de cette Chambre et on était l'opposition officielle. Donc, des demandes de consultation, on en a... on a eu à en faire. Bien sûr, là, aujourd'hui, on nous demande des consultations générales. À l'époque, on avait de la misère à avoir des consultations particulières. Mais il en reste pas moins qu'à l'époque aussi...

Des voix: ...

Mme Carrier-Perreault: Alors, voyez-vous, M. le Président, je pense que c'est normal qu'on rappelle ces choses-là aux gens de l'opposition, parce que je sais qu'il y en a plusieurs qui étaient pas encore élus, qui étaient pas députés en cette Chambre et qui doivent pas nécessairement savoir comment ça se passait aussi à cette époque-là. Mais je vois certains députés ici qui étaient là à l'opposition, hein, je vois la députée de Mégantic-Compton, je vois la députée... Je peux pas tous les nommer, c'est sûr, mais disons que j'en vois qui, eux, ont l'habitude aussi, qui ont vécu cette époque et qui peuvent comprendre très bien, même s'ils le diront pas trop fort, mais qui vont comprendre. Et je suis persuadée que certains députés qui étaient là, à l'époque, sont tout aussi d'accord avec moi.

Alors, M. le Président, à l'époque non seulement on avait de la misère à avoir des consultations particulières, mais je peux vous dire aussi que c'était très rare, en fait, c'était très difficile pour l'opposition d'obtenir d'avance les amendements qui étaient proposés par les différents ministres sur les projets de loi qui étaient apportés à l'étude en commission parlementaire. Je dirai pas «jamais», M. le Président. Effectivement, dépendant de certains... des gens qui obtiennent, qui tiennent les postes, dépendant de certains ministres, je dirais, oui, il y en a qui avaient cette espèce de bonne volonté et qui désiraient travailler en collaboration avec nous et qui nous déposaient les amendements avant qu'on arrive en commission pour qu'on puisse en prendre connaissance et, bien sûr, discuter de meilleure façon, hein. Alors, je comprends aujourd'hui que mon collègue le ministre de l'Agriculture a lui-même fait preuve de cette ouverture, qu'il a lui-même... en fait, qu'il a remis les amendements à l'opposition officielle. Donc, l'opposition a eu tout le loisir d'en prendre connaissance et pourra donc en discuter de meilleure façon.

Je vois le leader de l'opposition qui a l'air d'émettre des doutes. Je comprends que... Ça veut pas dire que l'opposition, M. le Président, va être d'accord avec tous les amendements, avec l'ensemble des amendements. J'imagine qu'ils voudront en amener d'autres, et c'est pas défendu non plus, M. le Président. Quand on va étudier un projet de loi en commission parlementaire, bien sûr c'est là pour ouvrir la discussion, faire en sorte de bonifier davantage le projet de loi. Et je suis persuadée que, si l'opposition officielle a des amendements qui semblent intéressants et qui permettraient d'améliorer le projet de loi, bien, à ce moment-là, je suis persuadée que mon collègue pourra les considérer. Habituellement, c'est comme ça que ça se passe.

Alors, M. le Président, oui, j'ai demandé qu'on suspende le débat, d'ajourner le débat sur ce projet de loi, précisément le projet de loi n° 184. Il y a, sur notre feuilleton, en fait, sur notre feuille de route qu'on a aujourd'hui, qui a été discutée aussi avec l'opposition officielle, il y a, bien sûr, d'autres projets de loi. Alors, je constate que peut-être... En fait, on a pensé que peut-être que l'opposition officielle aurait besoin de quelques heures supplémentaires pour pouvoir continuer de consulter la pile d'amendements, me disait le... très épaisse, me disait le leader de l'opposition. Alors, c'est pour ça que j'ai demandé, M. le Président, qu'on suspende le débat, qu'on ajourne le débat présentement sur ce projet de loi là et qu'on passe à un autre projet de loi, qui est aussi inscrit à notre feuilleton ? j'étais pour vous le proposer, en tout cas, je vais vous le proposer si on réussit à se rendre là, M. le Président ? et un autre projet de loi qui concerne aussi le ministre de l'Agriculture et qui fait moins problème, qui est connu de l'opposition, semble-t-il.

Bref, je pense que cette demande de suspension arrive à point nommé. Ça serait très intéressant, j'imagine, pour l'opposition qu'on ajourne ou qu'on suspende le débat. Et pour nous, de notre côté, bien, je pense qu'on pourrait continuer de travailler sur les autres projets de loi qui sont inscrits à notre feuilleton. Alors, de cette façon, on ne perd pas de temps, ni de part ni d'autre, et chacun pourra poursuivre son travail. Alors, c'est dans ce sens-là, tout simplement, M. le Président, que j'ai demandé qu'on suspende le débat sur le projet de loi n° 184, pas pour fermer la Chambre, pour passer à autre chose pendant que l'opposition poursuit l'étude de ces amendements. Merci, M. le Président.

n(17 heures)n

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement et députée des Chutes-de-la-Chaudière. Je céderai maintenant la parole... Vous avez un temps de parole de 10 minutes, M. le critique de l'opposition en semblable matière et député d'Argenteuil. M. le député.

M. David Whissell

M. Whissell: Merci, M. le Président. Pour bien, peut-être, expliquer à la leader du gouvernement pourquoi nous demandons un ajournement, c'est que c'est clair, c'est qu'on nous a déposé à 17 h 30, hier, une pile d'amendements sur le projet de loi n° 184, M. le Président. Pour vous situer, là, le projet de loi en lui-même a 32 articles, et les amendements, on en rajoute, on rajoute plus d'articles qu'il y en a dans le projet de loi lui-même. Juste pour vous donner l'exemple, sur les amendements qui sont proposés, huit viennent modifier des articles existants dans le projet de loi n° 184, 25 viennent supprimer ou remplacer carrément des articles du projet de loi n° 184 et, en plus, M. le Président, 18 nouveaux ajouts.

Je vois le député de Roberval qui nous écoute attentivement, lui qui a à coeur les intérêts des agriculteurs dans son comté. M. le Président, ce qu'on demande au gouvernement, c'est qu'on puisse entendre des groupes. Il faut se rappeler qu'en début d'année le gouvernement avait été en consultation à notre demande. Nous nous étions battus en cette Chambre pour que la population, pour que les agriculteurs, les productrices du Québec puissent être entendus en commission parlementaire sur le projet de loi n° 184. On se faisait rassurant, c'était le même discours de l'ancien ministre que du ministre actuel: Ça va régler les problèmes, ça va bien aller, les producteurs vont avoir un vrai droit de produire.

Mais, M. le Président, suite à nos exigences, en commission parlementaire, on a entendu la Fédération de la relève, l'Ordre des agronomes du Québec, la Fédération québécoise des municipalités, l'Union des municipalités du Québec, la Coalition pour le développement d'une agriculture durable, l'Association des aménagistes du Québec, l'Union québécoise de la conservation de la nature, le Barreau du Québec, la Coalition «Sauver les campagnes», la Chambre des notaires, la Commission de protection du territoire agricole du Québec, le Collège des médecins de famille du Québec et les regroupements nationaux de conseils régionaux en environnement, et on avait terminé par l'Union des producteurs agricoles. Et, étant donné que le ministre actuel était pas là, ça s'était terminé par l'Union des producteurs agricoles qui avait dit à l'ancien ministre: L'essentiel de nos revendications n'est pas dans le projet de loi n° 184.

Et là ce qu'on propose actuellement au gouvernement, c'est: Oui, on est prêts à ajourner si vous nous donnez votre consentement pour qu'on entende des groupes. On est prêts à vous dire, là, qu'on pourrait réentendre les mêmes groupes. Je pense qu'en trois jours, là, on avait entendu les groupes au mois de février. Je pense qu'en trois jours on peut réentendre les mêmes groupes sur les amendements qui sont proposés, M. le Président. Et, à l'heure où nous nous parlons, nous sommes en lien direct avec ces groupes, et personne ne se retrouve dans les amendements, personne n'a eu l'occasion de les étudier à fond. Même l'UPA, présentement, a une personne à plein temps qui regarde les amendements, et on nous donne pas un retour, on nous dit pas: Oui, c'est bon, oui, c'est pas bon, nos revendications sont à l'intérieur.

Alors, je pense que, M. le Président, il est essentiel qu'à cette étape-ci le ministre, lui qui a à coeur le droit de produire du monde agricole, lui qui a à coeur un développement durable du monde agricole... Il y a aucune raison que le ministre ne consente pas à notre requête qui est d'entendre à nouveau ces groupes. Et je pense que le ministre ne peut aucunement justifier son refus parce que, écoutez, M. le Président, il y a plus d'amendements que d'articles dans le projet de loi. Moi, là, ça fait trois ans que je suis à l'Assemblée nationale, j'ai jamais vu chose pareille, j'ai jamais vu qu'on dépose plus d'amendements que le nombre d'articles qu'il y a dans le projet de loi. Et, aujourd'hui, on fait une requête qui est justifiée, et je suis convaincu que le ministre, qui a à coeur son projet de loi, consentira à ce qu'on entende ces groupes.

Et, la session se termine la semaine prochaine, M. le Président, on a le temps amplement d'entendre ces groupes. On peut aller en commission parlementaire, là, dès 8 heures, ce soir. On peut appeler des groupes, il y a des groupes qui sont prêts à se déplacer. On peut entendre ces groupes. Le ministre dit que les amendements sont disponibles, ils les ont. Alors, qu'on entende ces gens venir nous dire si, oui ou non, ils se retrouvent à l'intérieur du projet de loi que je qualifierais d'amendé.

Et, quand on y regarde à fond, c'est à se poser la question si le ministre n'est pas en train de déposer un nouveau projet de loi. Quand on dit qu'il y a plus d'articles amendés qu'il y a d'articles dans le projet de loi, M. le Président, c'est que ça commence à sentir un nouveau projet de loi. Et la leader du gouvernement nous disait tantôt: On a fait des consultations sur le projet de loi. Bien, M. le Président, c'est plus le même projet de loi: on a changé l'essentiel, on a changé la base, on a changé l'intégralité du projet de loi, on change les concepts. Et, nous, ce qu'on demande et ce qu'on requiert du gouvernement, c'est de réentendre les groupes que j'ai nommés précédemment.

Et je me fais le porte-parole non seulement de l'opposition libérale du Québec, mais je me fais porte-parole du monde agricole, des producteurs laitiers, de la relève agricole, du Barreau du Québec, de l'UQCN, tous ces groupes qui sont venus nous dire conjointement: Le gouvernement du Parti québécois fait fausse route, le gouvernement du Parti québécois est en train de nous mettre encore pires que nous sommes présentement. Et il faut se rappeler que cette situation catastrophique qui est vécue présentement dans le monde agricole, les conflits qui sévissent entre les urbains et les ruraux, entre les urbains et les producteurs, ces conflits ont été créés par le Parti québécois, M. le Président, avec leur projet de loi n° 23 et les projets de loi... qu'on entendait les mêmes paroles. Je serais très surpris de ressortir le transcript du ministre à l'époque et probablement qu'ils ont pris le même discours. Étant donné que c'est les mêmes fonctionnaires qui écrivent leurs discours, probablement que c'est le même discours que le ministre actuel a pris, que le ministre... avec la loi n° 23.

Et, M. le Président, je vais juste vous prendre un exemple: le Barreau du Québec. On peut pas les qualifier de antiagricoles ou de proagricoles, c'est un organisme neutre qui défend l'intérêt général des citoyens et citoyennes du Québec. Alors, dans leur mémoire qu'ils nous avaient présenté à l'Assemblée nationale, ils nous disaient que le projet de loi était pas bon, que le projet de loi devait être retiré. Et, M. le Président, si je peux le retrouver, j'aurais aimé lire textuellement le projet de loi, parce que c'est une aberration totale mais impossible. Je vais vous dire, on nous a tellement laissé peu de temps qu'on a tenté de comprendre les amendements et on s'y retrouve pas. Et on voudrait qu'aujourd'hui on se positionne, qu'on vous dise non, il y a pas besoin d'avoir d'autres travaux en commission, qu'on n'est pas obligé d'entendre les groupes. Je peux pas accepter une telle situation. Mes collègues, ici... On ne peut refuser une telle situation. C'est un projet de loi qui est trop important, qui a trop d'impact sur la vie des citoyens du Québec, que ce soient des producteurs, que ce soient des gens qui font du tourisme, que ce soient des gens qui font de l'hôtellerie en région, que ce soit le monde municipal, que ce soient les citoyens urbains dans les zones périphériques de la zone rurale, c'est un projet de loi qui est trop important, M. le Président, pour que nous puissions pas entendre à nouveau les groupes qui représentent les citoyens du Québec.

Et j'aurais aimé entendre le ministre sur une contre... je dirais pas interrogation, mais une réponse suite à notre requête. Je m'explique mal comment le ministre actuel de l'Agriculture pourrait refuser d'entendre les groupes alors que son prédécesseur avait accepté, avait acquiescé à notre requête d'entendre ces groupes. Et il faut se rappeler les derniers propos de la commission parlementaire, M. le Président, en février, où l'UPA, par son président, M. Pellerin, était venue nous dire en commission parlementaire que l'essentiel des revendications du monde rural, du monde agricole n'était pas dans le projet de loi n° 184.

Alors, nous, ce qu'on aimerait de tout coeur, c'est d'avoir des consultations particulières qui se limiteraient, M. le Président, aux groupes que nous avons déjà entendus, consultations où nous aimerions de tout coeur que le président de l'UPA vienne nous dire: Le projet de loi rencontre nos attentes, ça rejoint nos revendications. Et, suite à ça, je pense qu'on pourrait procéder très, très rapidement.

n(17 h 10)n

Je vois la leader du gouvernement qui m'écoute attentivement et je suis convaincu que, si madame a des producteurs agricoles dans son propre comté, elle devrait accepter notre requête également. Et le député de Roberval qui, lui aussi, a à coeur l'agriculture, devrait accepter notre requête. Et le ministre qui, lui aussi, a à coeur l'agriculture, devrait accepter notre requête.

Alors, M. le Président, en terminant, nous demandons au gouvernement d'écouter les groupes qui représentent le monde agricole.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, M. le député d'Argenteuil. Alors, un droit de réplique? Mme la leader adjointe du gouvernement, vous avez un temps de parole de cinq minutes.

Mme Denise Carrier-Perreault (réplique)

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, j'avais demandé, moi, tout à l'heure, une suspension du débat, hein? De suspendre le débat, normalement, ça peut se faire sur consentement. Si on a offert de suspendre le débat, M. le Président ? je veux qu'on se comprenne; là, c'est un petit peu loufoque ? c'est clair, là, c'est par courtoisie, pour permettre à l'opposition de poursuivre les vérifications qui s'imposent concernant le nombre d'amendements.

On me répète depuis tout à l'heure que ça prend des consultations. Sur ça, il faut que ce soit clair, M. le Président, il y en a eu, des consultations...

Une voix: ...

Mme Carrier-Perreault: Il y a déjà eu des consultations là-dessus, et les gens ont été entendus, les amendements sont apportés. Ils font peut-être pas l'affaire, M. le Président, mais ce sera d'en discuter en commission parlementaire.

Donc, très clairement ? je veux qu'on se comprenne comme il faut, là ? des consultations, il y en aura pas, il y en a déjà eu; il faut se comprendre là-dessus. Des discussions en commission parlementaire, c'est prévu, M. le Président; il y a moyen de le vérifier ou de vérifier les choses et de poursuivre les discussions. Puis, moi, je demandais la suspension pour permettre à l'opposition de faire ses vérifications. Ça a tourné en ajournement du débat. Alors, on a pu plaider, chacun de nos côtés, la chose.

Maintenant, si l'opposition a pas besoin de plus de temps, moi, je voudrais bien qu'on se comprenne: On peut poursuivre aussi le débat, là, parce que, ce qu'on avait fait, nous, on l'avait fait dans une pensée généreuse, mettons. C'est par courtoisie aussi, en quelque part, pour dire: Bon, bien, qu'ils finissent leur travail; on en a d'autres aussi à vérifier, puis on va pouvoir continuer et procéder.

Alors, je voudrais que ce soit clair, M. le Président. S'il y a pas de suspension, nous, on n'est pas obligés de faire l'ajournement du débat si ça ne plaît pas à l'opposition; on va tout simplement poursuivre le débat sur 184. C'est pas plus compliqué que ça, M. le Président. Alors, voilà.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la leader adjointe du gouvernement. Alors, à ce stade-ci, nous avons terminé les allocutions concernant l'article 101 sur l'ajournement du débat. Alors, le débat sur le projet de loi n° 184 est donc ajourné.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader de l'opposition, vous demandez le vote par appel nominal.

Veuillez appeler les députés, s'il vous plaît.

Alors, nous allons suspendre quelques instants, le temps que les députés qui sont en commission parlementaire viennent nous rejoindre.

(Suspension de la séance à 17 h 13)

 

(Reprise à 17 h 21)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes, MM. les députés qui êtes debout, veuillez vous asseoir.

Alors, nous allons maintenant mettre aux voix la motion d'ajournement du débat du principe du projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives. Que ceux... M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: ...pour que le travail soit fait correctement, la mise aux voix est la motion présentée par Mme la leader adjointe du gouvernement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président, effectivement, c'était sur une suspension, une demande de suspension sur consentement, mais ç'a tourné en motion d'ajournement. Alors, on va voter là-dessus.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, madame, je comprends que c'est effectivement une motion d'ajournement du débat qui est présentée par Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière et leader adjointe du gouvernement en ce qui a trait à l'adoption du principe du projet de loi n° 184, que je relis, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives.

Que les députés qui sont en faveur de la motion d'ajournement veuillent bien se lever.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce que l'on peut proposer...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui.

M. Paradis: Est-ce que l'on peut proposer...

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous sommes actuellement sur le vote. Alors, sur le vote...

M. Paradis: Est-ce qu'on peut proposer...

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que votre question est sur le vote?

M. Paradis: Est-ce que le proposeur d'une motion peut voter contre sa propre motion?

Une voix: Évidemment.

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que ceux qui sont contre veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: Mme Marois (Taillon), M. Facal (Fabre), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), M. Bertrand (Charlevoix), M. Cliche (Vimont), M. Julien (Trois-Rivières), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Portneuf), M. Lachance (Bellechasse), Mme Beaudoin (Chambly), M. Morin (Nicolet-Yamaska), Mme Goupil (Lévis), M. Côté (La Peltrie), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), Mme Caron (Terrebonne), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Kieffer (Groulx), M. Simard (Montmorency), M. Beaumier (Champlain), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Charest (Rimouski), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Blanchet (Crémazie), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Laprise (Roberval), M. Gagnon (Saguenay), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé), M. Geoffrion (La Prairie), M. Cousineau (Bertrand), M. Bédard (Chicoutimi), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Signori (Blainville), M. Boulianne (Frontenac), M. Côté (Dubuc), M. Labbé (Masson), M. Bergeron (Iberville).

M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Bourbeau (Laporte), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa),M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou), Mme Rochefort (Mercier).

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a des députés qui s'abstiennent?

La Secrétaire adjointe: M. Gendron (Abitibi-Ouest).

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le secrétaire général, s'il vous plaît, les résultats.

Le Secrétaire: Pour: 0

Contre: 90

Abstentions: 1

Le Vice-Président (M. Pinard): La motion d'ajournement est donc rejetée.

Alors, nous allons... J'inviterais les députés qui ont à continuer... à poursuivre leur travail en commission à bien vouloir se retirer.

Des voix: Bravo!

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Verdun, M. le président du Conseil du trésor... Alors, messieurs, mesdames, s'il vous plaît. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, nous poursuivons nos travaux.

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Alors, la motion d'ajournement présentée par Mme la leader adjointe du gouvernement étant donc rejetée, nous revenons à l'article 14 de notre feuilleton sur l'adoption du principe du projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives. Je vous avise que M. le ministre de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Pêcheries a utilisé son temps de parole et je serais prêt, maintenant, à céder la parole au critique officiel de l'opposition en la matière. Donc, vous avez un temps de parole de 60 minutes, M. le député d'Argenteuil. M. le député.

M. Whissell: Alors, merci...

Des voix: Bravo!

M. David Whissell

M. Whissell: Alors, M. le Président, je pense que la leader du gouvernement me semble dans une humeur fracassante. C'est rare qu'on voit un proposeur d'une motion voter contre sa propre motion. Alors, écoutez, on se demande où se campe vraiment ce gouvernement. À croire que les propos de l'opposition contre la motion d'ajournement ont été convaincants, en ont fait réfléchir plus d'un, parce que, il faut dire, c'est assez aberrant de voir un gouvernement voter contre sa propre motion. En trois ans à l'Assemblée nationale, j'ai jamais vu un fait pareil.

M. le Président, ce qui vient confirmer les doutes de l'opposition...

Des voix: ...

M. Whissell: M. le Président, je vous demanderais peut-être de rappeler le côté gouvernemental au silence. Si, eux, le droit de produire, pour eux, c'est pas important, pour l'opposition libérale, c'est important. Et lorsqu'on voit un propre gouvernement...

Des voix: ...

M. Whissell: M. le Président, je vous demanderais de rappeler certains des...

Le Vice-Président (M. Pinard): Si vous permettez, M. le député d'Argenteuil, je vais présider les débats. Alors, vous avez la parole.

M. Whissell: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous avez un temps de parole de 60 minutes. On vous écoute religieusement.

n(17 h 30)n

M. Whissell: Alors, je vous demanderais d'être vigilant. Si les gens de l'autre côté savent pas pourquoi qu'ils ont voté contre la motion, nous, on le sait, et c'est ce qu'on a dit, c'est ce qu'on a exprimé en 10 minutes: c'est qu'on est méfiant des réformes du gouvernement du Parti québécois. Après une réforme de la santé, après une réforme de l'éducation, après une réforme municipale, on se propose de réformer un droit de produire qu'on a donné en 1997, qui a causé un fiasco dans nos campagnes. Le droit de produire, la loi qu'on avait passée à l'époque, la loi n° 23, M. le Président, était censée venir régler tous les maux qu'on rencontrait dans nos campagnes. Je veux juste vous lire un extrait. En 1996, le ministre, à l'époque, M. Julien, qui nous disait: «Cependant, je voudrais vous dire que ça va permettre d'assurer la protection adéquate du territoire agricole, qui va permettre aux agriculteurs et agricultrices d'exercer leurs activités à l'intérieur d'une zone agricole dans une perspective de développement durable et de cohabitation harmonieuse.

«Par-dessus tout ? une autre citation, M. le projet de loi... M. le Président ? ce projet de loi fournit à la population rurale québécoise les conditions lui permettant de dégager elle-même, à travers ses institutions locales et grâce à la concertation, les consensus nécessaires à la protection du territoire agricole et des activités agricoles, à la cohabitation harmonieuse en milieu rural, à la protection de l'environnement et au respect des responsabilités des élus locaux et régionaux.»

M. le Président, c'était en 1996. On passe le projet de loi n° 23 avec des beaux discours, comme on a entendu de la bouche du ministre actuel, et on s'est ramassé face à un fiasco. Et le gouvernement du Parti québécois en avait fait un enjeu à sa campagne électorale, en 1998, de régler ce dossier. Le Parti libéral du Québec avait également fait cet engagement. Et, M. le Président, l'année passée, le gouvernement a déposé un projet de loi qui s'intitule le projet de loi n° 184, projet de loi qu'on voulait passer en toute vapeur, que le gouvernement voulait passer en toute vapeur et que... l'opposition libérale a exigé des consultations. On était à la session d'automne 2000. Alors, nous nous sommes levés ici, à tour de rôle, pour exiger du gouvernement des consultations particulières. Nous avions soumis, M. le Président, une liste de groupes d'intervenants représentant les intérêts environnementaux, agricoles, municipaux, sociaux, de santé et nous avons eu gain de cause. Le ministre de l'époque avait eu la sagesse de reculer sur ses intentions et le ministre avait accepté notre requête d'entendre des groupes.

Nous avons entendu, au mois de février, M. le Président, le 6 février, la relève agricole, l'Ordre des agronomes du Québec, la Fédération québécoise des municipalités, l'Union des municipalités du Québec, la cohabitation pour le développement d'une agriculture durable, l'Association des aménagistes régionaux du Québec, l'Union québécoise pour la conservation de la nature, le Barreau du Québec, la Coalition «Sauvons les campagnes», la Chambre des notaires, la Commission de protection du territoire agricole du Québec, le Collège québécois des médecins de famille, le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec, et nous avions terminé avec l'Union des producteurs agricoles.

Le ministre de l'époque, dans sa conclusion, M. le Président, avait reconnu de vive voix, en commission parlementaire, que le projet de loi n'était pas bon. Et, je l'ai cité tantôt, le président de l'Union des producteurs agricoles, qui représente l'ensemble des fédérations, l'ensemble des différentes productions agricoles au Québec, est venu dire en commission parlementaire ici, à l'Assemblée nationale, que l'essentiel de leurs revendications n'était pas dans le projet de loi. Et, M. le Président, nous étions au mois de février 2001. Février, mars, avril, mai, juin, 11 juin, on nous dépose en catastrophe, à 17 h 30, hier, des amendements. Mais, M. le Président, je pense qu'une image vaut mille mots. Le projet de loi, vous voyez l'épaisseur, prenez les amendements, il y en a deux fois plus. Il y a deux fois plus d'amendements qu'il y a d'articles de loi, spécifiquement 32 articles de loi, 50 amendements. Est-ce qu'on appelle pas ça un nouveau projet de loi? Est-ce qu'on appelle pas ça reconnaître l'impasse vers laquelle nous nous dirigions et qu'il faut revoir le fondement même du projet de loi?

M. le Président, on nous a déposé ce volume à 5 h 30 hier après-midi. Et, au moment où nous nous parlons, les groupes n'ont pas fini de prendre connaissance des amendements. Les gens ont de la difficulté à se retrouver dans ce document. Déjà que le projet de loi n'était pas facile, était sujet à interprétation, les amendements, eux, sont incompréhensibles. Et le ministre, tantôt, nous disait que son projet de loi viendrait régler tout ça. Je vous défie, M. le Président, de demander au ministre qu'il nous explique les amendements. Probablement que lui-même n'a pas pris connaissance encore des amendements. Et il serait surprenant d'avoir des consultations particulières et que les groupes viennent demander au ministre qu'est-ce qu'il veut dire exactement, qu'est-ce que le gouvernement du Parti québécois entend vraiment par ces amendements. Et, en trois ans à l'Assemblée nationale, pour ma part, j'ai jamais eu à travailler dans un projet de loi où il y avait plus de nombre d'amendements qu'il y avait d'articles dans le projet de loi. Alors, c'est donc dire que le projet de loi n° 184 était bel et bien ce que l'ensemble des groupes est venu dire, M. le Président, en commission parlementaire, que le projet de loi ne réglait rien, que le projet de loi ne risquait que d'empirer la situation que le gouvernement du Parti québécois a lui-même créée.

Et je tiendrais à prendre le temps pour vous citer certains mémoires parce que c'est un projet de loi tellement important, M. le Président, pour la population du Québec, un projet de loi qui vient pas juste conférer ce qu'on appelle le droit de produire aux producteurs agricoles. Lorsqu'on parle de droit de produire, c'est la liberté, au monde agricole, de se développer en harmonie avec les groupes qui l'accompagnent en zone agricole et dans les zones périphériques de la zone agricole. Et, M. le Président, la Société, présentement, est unanime à dire à tout le monde, à dire à tous les députés du gouvernement du Parti québécois que l'essence même du projet de loi n° 184 ne règle rien. Et je pense pas que, par des amendements aussi substantiels, le ministre est lui-même convaincu qu'il réglera tous ces maux.

Vous savez, M. le Président, à l'époque, tout le monde du côté de la Chambre avait dénoncé ici... l'opposition libérale avait dénoncé activement le cul-de-sac vers lequel nous nous en allions avec le projet de loi n° 23. Je veux juste vous donner... Je vous parlais du Barreau du Québec. J'ai remis... J'ai mis la main sur le projet de loi. J'ignore si vous êtes avocat, mais j'estime que vous devez avoir beaucoup, quand même, d'estime envers le Barreau du Québec, qui est un organisme neutre, qui a l'intérêt commun à coeur. Je vais vous faire une citation: «De l'avis du Barreau, le projet de loi n° 184 doit être retiré pour les raisons exposées ci-après.»

Je vais vous prendre d'autres points, les extraits du texte: «Cette disposition introduit un régime juridique complexe.» C'était compliqué avec la loi n° 23; avec la loi n° 184, ça sera encore plus compliqué. «De l'avis du Barreau, le législateur doit revoir le régime abusif.» On nous dit même que... On nous parle d'abus de droit ou de mauvaise foi qu'il est possible de rencontrer avec ce projet de loi.

n(17 h 40)n

Et c'est pas pour rien qu'on terminait également en nous disant qu'il fallait retirer le projet de loi, que ça brimait le droit de produire des agriculteurs, que ça brimait la protection de l'environnement et les droits individuels, et c'était signé par le Bâtonnier du Québec. Et le Barreau était venu faire ses représentations en commission parlementaire, suite à notre demande.

Vous savez, M. le Président, en commission parlementaire, on a eu le loisir ? mais je vous dirais peut-être: On a eu le malheur ? d'entendre des témoignages. La relève agricole est venue témoigner en commission parlementaire sur les effets pervers que la loi n° 23 qui a été mise en place par le gouvernement du Parti québécois... les effets pervers que cette loi avait amenés dans nos campagnes.

On a entendu le témoignage de jeunes producteurs désireux de poursuivre la ferme de leur père, de leur grand-père ou de leur mère, et que, ces jeunes Québécois, ces jeunes Québécoises, désireux de poursuivre la production agricole sur notre territoire, s'étaient vu refuser le droit de poursuivre, de produire de l'agriculture, au Québec. On a même vu des témoignages de gens, de jeunes qui sont venus nous dire: Avec le contexte actuel, les servitudes, les réglementations abusives, tel qu'en fait foi le Barreau du Québec, nous sommes sujets à du chantage, que nos voisins nous demandent des enveloppes pour que les servitudes soient accordées.

M. le Président, après avoir entendu ces jeunes qui constituent notre futur agricole, nous sommes en droit de demander au ministre si les amendements substantiels, pour ne pas dire le nouveau projet de loi, rencontrera les attentes de la relève agricole. Et je pense que le ministre ne peut refuser à leurs représentants de venir s'exprimer à l'Assemblée nationale pour nous rendre leur témoignage au sujet de cette nouvelle loi. Parce que, M. le Président, il y a pas d'autre façon d'appeler maintenant la loi n° 184: c'est une nouvelle loi qu'on nous a déposée hier, à 17 h 30, à nos bureaux. Et les groupes qui représentent la société, eux, les ont reçus en cours de journée, et les premiers signaux que nous recevons, c'est que le ministre actuel n'a pas compris le message, n'a pas compris que le projet de loi n° 184 demeurait un cul-de-sac, comme solution.

J'ai rarement vu un projet de loi où autant de groupes sont venus dire à l'Assemblée nationale qu'un projet de loi était mauvais, qu'il ne réglait en rien la situation catastrophique que le gouvernement du Parti québécois a créée lui-même. L'union municipale... les unions municipales, M. le Président, sont venues nous dire qu'ils ne se retrouvaient pas, qu'ils avaient discuté, qu'ils avaient fait de la médiation avec l'Union des producteurs agricoles, et que l'Union ne retrouvait en rien ses attentes à l'intérieur du projet de loi n° 184.

Alors, avec un nouveau projet de loi déposé hier, à 5 h 30, nous voudrions bien réécouter à nouveau les unions municipales pour qu'elles nous disent, au nom de leurs citoyens, au nom de leurs payeurs de taxes, au nom des gens qui habitent ces municipalités, ces territoires, si le nouveau projet de loi n° 184 rencontre les attentes des citoyens du Québec.

M. le Président, il y a l'UQCN, l'Union québécoise de conservation de la nature, qui, elle aussi, désire une révision législative afin que le monde agricole puisse se développer tout en s'assurant que l'environnement soit protégé. Et l'Union québécoise de conservation de la nature est venue nous dire également en commission parlementaire qu'aucun fait nouveau, aucune mesure législative ne venait assurer justement que les campagnes ne seraient pas assainies au niveau environnemental.

Parce que, vous savez, M. le Président, une grande partie de ce débat que nous faisons sur la question du droit de produire vient de la cohabitation du monde rural et du monde urbain ou du monde rural, les producteurs agricoles, avec les résidents en territoire agricole, et 90 % du problème réside dans des questions environnementales: les odeurs, la protection des cours d'eau, la protection des nappes phréatiques et également les bruits, les poussières. Et, M. le Président, actuellement, dans le projet de loi, il y a rien qui vient rassurer la population du Québec à cet égard.

Et, M. le Président, je tiens à vous dire que, comme porte-parole de l'opposition, dans les deux dernières semaines, nous avons reçu un tollé de téléphones de producteurs agricoles, céréales...

Des voix: ...

M. Whissell: M. le Président, céréales, laitiers, maraîchers, des producteurs de l'ensemble du territoire qui nous téléphonent pour nous dire qu'ils sont en désaccord avec la direction que le Parti québécois a prise dans ce dossier, et l'enjeu, M. le Président, est tellement grand que ces gens nous demandent d'entendre des groupes, ces gens nous demandent qu'on les rassure, qu'on ait le temps de voir ce qu'il y a à l'intérieur du nouveau projet de loi n° 184.

Peut-être que, M. le Président, le ministre pourrait consentir... Afin qu'il y ait pas d'ambiguïté, on pourrait peut-être consentir à lui donner un nouveau numéro. Peut-être qu'il y a de la place à l'intérieur de notre liste pour qu'on puisse lui donner un nouveau numéro, au projet de loi, et, comme ça, il y aura pas d'ambiguïté. Et, lorsque nos producteurs agricoles nous téléphoneront pour savoir si la loi est bonne, nous pourrons vraiment savoir de quelle loi ils parlent, l'ancienne 184 ou la nouvelle 184.

Parce que, écoutez, avoir plus d'amendements que d'articles d'une loi, moi, j'ai jamais vu ça ici, et c'est la première fois que j'aurai à travailler dans un tel contexte. Imaginez-vous comment qu'on fait pour se retrouver. Déjà, avec la loi n° 184, il y avait tellement d'interprétation, il y avait tellement de distorsion dans cette loi, d'incohérence; là, on vient rajouter des amendements par-dessus la loi incohérente. Je pense que le monde agricole mérite plus, M. le Président, que les gens qui sont également dans les villes où on pratique des activités agricoles, que ces gens qui ont le droit aussi à une qualité de vie sereine soit en périphérie de la zone agricole ou soit à l'intérieur même de la zone agricole, que ces gens aussi doivent être rassurés.

Et, M. le Président, on a tout lieu de se méfier du gouvernement. Pensez à l'impact des fusions forcées sur le monde rural. Les agriculteurs, les agricultrices commencent à voir le fiasco que le Parti québécois est en train de faire dans leurs campagnes avec les fusions forcées. Le monde rural est en train de perdre sa place dans le Québec. Le monde rural, à cause du Parti québécois, est en train de perdre sa représentation au sein de la société québécoise. Et là on est en train de faire... de travailler sur une loi aussi essentielle que la révision du droit de produire, et le gouvernement, le nouveau ministre qui est en poste depuis le mois de mars refuse d'entendre ces groupes.

Parce que la leader du gouvernement, tantôt, l'a dit clairement: Il est pas question qu'on entende les gens, il est pas question qu'on entende les porte-parole des Québécois et des Québécoises. Il est pas question qu'on entende l'UPA venir nous dire si c'est bon ou si c'est pas bon, la nouvelle loi n° 184. Il est pas question qu'on entende les unions municipales nous dire si c'est bon ou pas bon, la loi n° 184. Et, M. le Président, dans la vie, lorsqu'on retourne à la base, ça marche jamais. C'est des principes de vie. Et, lorsqu'on parle avec nos producteurs, les gens dans nos rangs, dans nos campagnes, dans nos comtés, soit le comté de Brome-Missisquoi, le comté d'Argenteuil ou le comté de Roberval, ces gens qui sont dans nos campagnes, des vrais producteurs, pas des technocrates, pas des avocats qui sont dans des tours d'ivoire... Bien, lorsqu'on parle avec ces gens, ils nous disent que la loi n° 184, c'est pas bon.

n(17 h 50)n

Et il faut se rappeler ce que M. Pellerin était venu dire à l'ancien ministre de l'Agriculture: L'essentiel des revendications du monde agricole n'est pas à l'intérieur du projet de loi n° 184. Lorsque les gens qui sont le plus concernés viennent nous dire ici que l'essentiel, l'essentiel... M. le Président, il y a aucune autre façon d'interpréter que la pyramide, la base, la structure du projet de loi est déficiente, et c'est pas en proposant 50 amendements qu'on va venir corriger une fondation qui est toute croche.

Moi, M. le Président, parce qu'on devra prendre un vote sur le principe, je ne peux me positionner en faveur du principe du projet de loi n° 184 et également du nouveau projet de loi n° 184. Je peux vous dire, par contre, que l'opposition libérale est désireuse... Et on l'avait dit dans le programme électoral de 1998, qu'il faut trouver une solution à la cohabitation des producteurs agricoles et des résidents, et des autres usagers. Parce qu'il faut pas l'oublier, il y a d'autres usagers dans la zone agricole. Mais ce qu'on sait, c'est que la solution qui est mise sur la table par le gouvernement du Parti québécois n'est pas la bonne. Et, nous, ce qu'on prétend, M. le Président, c'est pas qu'on invente tout ça puis qu'on dit: On vote contre parce que eux sont pour, et, parce qu'on est dans l'opposition, il faut être contre. C'est pas ça. On ouvre tout grand nos oreilles. On a écouté attentivement l'ensemble des groupes qui sont venus. Malheureusement, le ministre actuel n'était pas parmi nous au mois de février. J'ose espérer qu'il s'est fait envoyer les transcripts de nos trois jours d'audiences en commission parlementaire, parce que tout le monde est venu dire au gouvernement du Parti québécois que la loi n° 184 était inadéquate, était non fondée, était mal structurée. Mais je suis pas convaincu que le ministre actuel a fait ce travail, surtout avec le discours qu'il nous a tenu la semaine passée dans le dossier des pomiculteurs. Moi, je pense que plutôt le ministre s'est fié à ses fonctionnaires, qui lui ont dit: Voyons, notre projet de loi, il est bon! On va le modifier un petit peu, ça va donner belle parure. Peut-être que les libéraux verront rien, peut-être que les producteurs de céréales verront rien, peut-être que les environnementalistes ne verront rien, peut-être que les unions des municipalités ne verront rien.

Mais, malheureusement, on est dans une démocratie qui fait preuve de transparence, on est dans une démocratie où le gouvernement est obligé de déposer ses amendements. Mais il les dépose, M. le Président, à 20 heures d'avis, et le gouvernement voudrait qu'en si peu de temps nous parlions au nom de l'ensemble de la population du Québec et nous disions que, oui, nous sommes en faveur du nouveau projet de loi n° 184. Moi, je peux pas. Je ne peux faire une telle chose au nom des producteurs et des productrices agricoles de mon comté. J'aurais trop peur que, dans six mois, les gens me disent: Mais qu'est-ce que vous avez fait avec le projet de loi n° 184? Vous avez mis la situation pire qu'elle était avec la loi n° 23, qui, elle, avait mis encore la situation pire qu'on l'avait avant.

M. le Président, je ne peux me prononcer à ce stade-ci sur le principe du projet de loi. Et tantôt, je crois que notre requête était fondée, qu'elle était sincère, d'entendre des groupes. M. le Président, on peut siéger jusqu'à trois commissions parlementaires à l'Assemblée nationale, quatre quand il y a suspension des travaux au salon bleu. Et on a tendu la main au ministre de l'Agriculture pour que nous entendions ces groupes. On l'a fait, la dernière fois, en trois jours d'audiences. Possiblement qu'on peut réduire les heures, les entendre, à tout le moins leur donner la possibilité de venir s'exprimer.

C'est un projet de loi trop important, M. le Président, parce que ça vient jouer dans le monde municipal, ça vient jouer dans la capacité du monde agricole de produire, de prendre de l'expansion, de protéger les acquis, également, parce que, on l'a vu, là, les jeunes agricoles qui pouvaient pas acheter la ferme de leurs parents parce que le contexte que le gouvernement du Parti québécois avait créé faisait en sorte qu'ils pouvaient pas continuer la production de leurs parents. C'est des témoignages qu'on a entendus ici. Alors, nous, M. le Président, on veut se faire convaincre du contraire parce que, quand on va se lever à l'Assemblée nationale, et qu'on va s'exprimer, et qu'on va voter sur cette loi, on veut être certains qu'il y a aucune ambiguïté, que c'est clair, que tout le monde, tous les citoyens du Québec savent dans quoi exactement nous nous engageons.

M. le Président, vous savez, la session passée, on a fait un débat sur La Financière. Ça a été le même scénario, il a fallu se battre pour entendre des groupes. Pourquoi ce gouvernement a arrêté d'écouter? Pourquoi ce gouvernement... Prenez le dossier des fusions municipales. Pourquoi on force, on impose aux gens? Pourquoi on veut pas faire des référendums, dans les municipalités, sur les fusions? Au niveau de l'éducation, c'est la même chose, on impose. Au niveau de la santé, on voulait enlever les gens élus par la population sur les conseils d'administration de nos hôpitaux. Et aujourd'hui, on veut nous imposer un nouveau projet de loi n° 184 que personne n'a encore pris connaissance.

Je veux juste vous donner une piste, M. le Président. Il y a à peine une heure, nous étions avec un groupe à discuter du projet de loi, du nouveau projet de loi n° 184, et les gens nous ont dit: Ç'a pas de bon sens! C'est les termes qu'ils ont utilisés. Et moi, quand je m'arrête puis j'écoute les producteurs agricoles qui nous ont appelés, là, depuis deux semaines, puis qui nous disent: Ç'a pas de bon sens, je me dis: Est-ce que le nouveau projet de loi a autant de bon sens? Est-ce que le projet de loi qu'on vient remplacer est mieux structuré? La seule façon de le savoir, M. le Président, c'est de laisser le temps aux gens d'en prendre connaissance et de venir nous dire si l'essentiel est maintenant dans le projet de loi. Je suis convaincu que l'ensemble de mes collègues voudrions bien entendre M. Pellerin venir parler au nom de l'ensemble de ces producteurs agricoles, de l'ensemble des fédérations, venir nous dire que l'essentiel est maintenant dans le projet de loi. C'est la seule chose que nous demandons, d'être rassurés pour ensuite pouvoir rassurer, M. le Président, nos propres producteurs agricoles dans nos comtés.

Je suis convaincu que les députés ministériels ont la même requête, d'être rassurés que le projet de loi n° 184... Probablement, M. le Président, une fois que j'aurai terminé tantôt, les députés ministériels pourront prendre la parole, et étant donné que c'est un dossier si important pour vos régions... Je vois la députée de Deux-Montagnes, je suis convaincu que la député de Deux-Montagnes pourra se lever et dire tout haut, tout fort que le nouveau projet de loi n° 184 est bon et que les producteurs laitiers de son comté, que les producteurs maraîchers de son comté, que les pomiculteurs de son comté n'auront jamais de répercussion négative à cause du nouveau projet de loi n° 184. Je suis convaincu que la députée de Deux-Montagnes a pris connaissance des 50 amendements sur les 32 articles du projet de loi n° 184.

M. le Président, tout ça démontre à quel point c'est un peu euphorique tout ça, que c'est un plan mal pensé, non planifié. D'arriver à la fin de la session avec une révision substantielle...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député d'Argenteuil, je me dois, considérant l'heure, de suspendre nos débats jusqu'à ce soir, 20 heures. Toutefois, je vous avise qu'il va vous rester un temps de parole de 28 min 53 s.

Question de règlement, M. le député d'Argenteuil?

M. Whissell: Bien, je suis convaincu que, durant l'ajournement, les députés ministériels pourront prendre connaissance des amendements et venir...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, M. le député d'Argenteuil.

(Suspension de la séance à 18 heures)

 

(Reprise à 20 h 9)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonsoir. Alors, nous allons nous recueillir quelques moments, quelques instants.

Merci. Si vous voulez vous asseoir.

Alors, l'Assemblée reprend le débat sur la motion de M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, proposant l'adoption du principe du projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives.

Lors de la suspension de la séance, M. le député d'Argenteuil avait la parole, et je lui indique qu'il lui reste 29 minutes à son temps de parole. M. le député d'Argenteuil, porte-parole de l'opposition en matière d'agriculture, la parole est à vous.

n(20 h 10)n

M. Whissell: Alors, merci, M. le Président. C'est toujours agréable de vous avoir comme président de notre Chambre. Alors, je suis convaincu que nos débats en matière d'agriculture et de bioalimentaire vous intéresseront grandement.

Alors, M. le Président, nous étions à débattre de l'adoption de principe du projet de loi n° 184, projet de loi très important pour le monde agricole, pour le monde rural qui cohabite avec le monde agricole. Alors, c'est un projet de loi, M. le Président, qui est nécessaire depuis que le gouvernement du Parti québécois a adopté ce qu'on a appelé la loi n° 23 qui était censée venir régler toutes les questions de droit de produire au Québec.

Cette loi, M. le Président, a été adoptée en 1997, et, comme toutes les réformes du Parti québécois, cette réforme est venue empirer la situation qui existait dans nos campagnes. Et nous avons eu des témoignages déchirants en commission parlementaire, parce que le ministre a déposé sa loi à la session d'automne 2000. Nous avons, à notre demande ? à la demande de l'opposition libérale ? écouté plusieurs groupes, et les gens sont venus nous rendre des témoignages, M. le Président, déchirants, que les producteurs agricoles vivaient une crise dans leurs campagnes causée principalement par le Parti québécois.

Nous avons entendu la relève agricole qui est venue nous dire, M. le Président, que certains jeunes ? des jeunes Québécois, des jeunes Québécoises ? désireux de prendre la relève, de poursuivre l'exploitation de leurs aînés, ne pouvaient, à cause justement du cul-de-sac dans lequel le Parti québécois les avait insérés.

Alors, le ministre avait déposé un projet de loi, et tous les groupes qui sont venus en commission parlementaire, M. le Président, nous ont dit clairement que le projet de loi n° 184 était une mauvaise chose pour l'avenir agricole du Québec. Et c'est pas n'importe quel groupe, M. le Président, qui est venu en commission parlementaire. Je vais les nommer parce que je pense que ces groupes représentaient l'ensemble de la population du Québec, de nos régions, et, vous savez, le dossier des régions est un dossier qui tient à coeur au Parti libéral du Québec. Nous pensons que le Québec peut se développer par ses régions et nous avions exigé, dès le début de l'année 2001, d'entendre ces groupes si importants.

Alors, bien entendu, nous avions commencé par La relève agricole, parce que, à notre demande... nous pensons que tout ce qui est relève, ce qui est jeunesse, ce qui est renouveau est très important. Alors, nous avions demandé d'entendre La relève agricole. Nous avons également entendu l'Ordre des agronomes du Québec, parce que ces gens ont une place importante dans le monde agricole, c'est eux qui conseillent, qui recommandent aux agriculteurs, qui recommandent également au monde municipal la pertinence de projets agricoles ou de projets d'utilisation à des fins autres qu'agricoles. Nous avions également entendu la Fédération québécoise des municipalités; l'Union municipale... des municipalités, pardon, du Québec; la Coalition pour le développement d'une agriculture durable; l'Association des aménagistes du Québec, les gens qui développent le territoire, qui font les règlements de zonage; l'Union québécoise pour la conservation de la nature, ce groupe qui représente fièrement les milieux environnementaux, parce que vous savez que le développement de l'agriculture doit se faire d'une façon durable, en harmonie avec notre environnement. Nous avions écouté le Barreau du Québec, qui est un organisme pour qui j'ai beaucoup d'estime, qui vient toujours nous donner une position neutre sur les projets de loi que nous adoptons ici, à l'Assemblée nationale; la Coalition «Sauver les campagnes»; la Chambre des notaires, parce que, au niveau agricole, ils sont beaucoup concernés au niveau du transfert de propriétés; la Commission de protection du territoire agricole du Québec, qui est un organisme d'État qui applique une loi spécifique, la Loi de la protection du territoire agricole. Nous avions également écouté le Collège québécois des médecins de famille, parce que eux sont venus nous parler de santé publique, de l'effet de certaines pratiques excessives en territoire agricole qui peuvent avoir des incidences sur la santé humaine; le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec; et, pour terminer, nous avions fini avec le dessert, l'Union des producteurs agricoles.

Alors, pour les gens qui nous écoutent présentement, qu'est-ce que le projet de loi n° 184 a démontré en commission parlementaire? Je vais commencer par l'Union des producteurs agricoles parce que, à cette heure, je suis convaincu que les producteurs de nos comtés qui nous écoutent, qui ont beaucoup d'intérêt dans ce dossier... Et l'Union des producteurs agricoles, via son président, M. Laurent Pellerin, qui parlait au nom des milliers et des milliers de producteurs agricoles et de productrices agricoles, qui parlait au nom des fédérations de producteurs agricoles, est venue dire au ministre, est venue dire au gouvernement du Parti québécois que l'essentiel de leurs revendications, que l'essentiel de leurs requêtes, que l'essentiel de leurs besoins, pour qu'une fois pour toutes cesse la situation aberrante dans laquelle le Parti québécois les a inscrits... le président est venu dire que l'essentiel n'était pas à l'intérieur du projet de loi n° 184. Et ça, ça l'a une portée énorme, M. le Président, lorsque quelqu'un vient nous dire que l'essentiel n'est pas là. C'est pas qu'il est en désaccord avec certains petits aspects du projet de loi. L'essentiel, M. le Président, ça forme un tout. C'est le coeur même du projet de loi.

Je vous parlais du Barreau du Québec. Je veux y revenir parce que c'est des gens qui représentent l'intérêt commun. Leur mémoire, je vais vous citer certaines parties. En page 2, on dit, et je cite: «De l'avis du Barreau, le projet de loi n° 184 doit être retiré pour les raisons exposées ci-après. Nos commentaires et nos observations concernent plus particulièrement...» Et là on part dans une foule d'exposés sur pourquoi le Barreau est contre ce projet de loi.

Et vous savez, ce Barreau parle au nom des citoyens et producteurs agricoles, parle au nom des citoyens environnementalistes, parle au nom des citoyens provenant du domaine municipal. Alors, le Barreau se veut le défenseur du bien commun. Je vais vous citer d'autres extraits de leur document: «Cette disposition ? on parle ici du projet de loi n° 184 ? introduit un régime juridique complexe.» C'est des mots qui ont toute une portée. On nous dit plus loin qu'il s'agit d'un régime d'immunité abusif, d'abus de droit ou de mauvaise foi. On nous parle de cas d'abus et on nous dit que les recommandations principales contenues dans le rapport Brière ne se retrouvent pas dans le projet de loi n° 184. Il faut se rappeler que le gouvernement du Parti québécois avait donné un mandat à Me Jules Brière de faire une étude pour trouver une solution, et le Barreau nous dit que l'essentiel des recommandations principales n'est pas dans le projet de loi. Alors, le Barreau nous dit clairement qu'il faut retirer ce projet de loi, qu'on se doit de...

Bon, il y a toute la question des droits acquis. Vous savez, quand vous avez une utilisation autre qu'agricole en terre agricole, zonée par le gouvernement du Québec, il y a toute la notion de droits acquis qui s'applique. Et, par ses amendements, par son projet de loi, le gouvernement du Parti québécois vient encore une fois bafouer les droits des citoyens du Québec. Sur ce point précis, M. le Président, de la question des droits acquis, nous avons reçu de nombreux téléphones de citoyennes, de citoyens mécontents qui ont peur de perdre certains acquis au niveau de leur propriété, parce que, avec cette loi, on vient retirer une partie du droit acquis que les citoyens et citoyennes du Québec ont ramassé avec les années.

n(20 h 20)n

Je vais vous prendre un autre extrait d'un groupe, ici, le groupe «Sauver les campagnes», qui est un groupe de pression qui a vu naissance dans certaines régions du Québec qui nous dit, et je cite: «Le projet de loi n° 184 qui est devant nous ne réglera aucun des problèmes de cohabitation, de développement et d'environnement rural. Au contraire, il risque bien davantage de les aggraver.»

C'est un autre groupe, M. le Président, qui vient s'exprimer en commission parlementaire en début d'année. On nous dit qu'on ne vise en rien à réduire les contraintes environnementales et les réglementations municipales. On nous parle de la qualité de l'eau, de la qualité des aliments, de la qualité de vie en campagne, le projet de loi ne vient en rien rejoindre les attentes de ces gens.

Un groupe bien connu de nous, qui fait beaucoup de représentations, la Fédération québécoise des municipalités du Québec, qui nous disait dans sa conclusion: «Nous suggérons que le projet de loi n° 184 soit réécrit pour bon nombre de ses dispositions qui ne reflètent pas les consensus intervenus.» Alors, la Fédération québécoise des municipalités venait également nous dire que le projet de loi n° 184 n'était pas bon.

Un autre groupe ici, la Commission de protection du territoire agricole, qui venait également nous parler du rôle des droits acquis au niveau de nos usages, que le projet de loi ne rencontrait pas leurs attentes, qui disait également que l'entente UPA-FQM n'était pas dans le projet de loi et que le gouvernement devait revoir ces articles de loi.

L'Ordre des agronomes du Québec, on peut pas leur reprocher d'être environnementalistes, d'être contre le développement agricole, ce sont des gens qui conseillent les producteurs agricoles, M. le Président, et ils nous disaient, ces gens: Aussi bien que dans son ensemble, le projet de loi n° 184 propose de nouvelles avenues qui sont soit intéressantes et soit souhaitables. Certains éléments qu'on y retrouve demeurent toutefois confus ou même problématiques, à notre point de vue. Et là on partait dans la discussion. Je vous cite un peu plus loin, on dit: «Quant à la transparence et à l'approche démocratique d'un processus qui restreint systématiquement les personnes intéressées à trois parties...» Alors, ici, on vient expressément parler de problèmes au niveau de l'approche démocratique. On nous parle de la notion d'îlots déstructurés, qui est introduite dans la loi n° 184, où on nous dit que la définition actuelle semble grandement laisser place à l'arbitraire, qu'avec cette loi on s'en va encore une fois dans l'inconnu, que, lorsqu'on parle d'îlots déstructurés, le législateur, dans sa loi, n'a rien prévu et qu'on risque de se ramasser en Cour supérieure et en Cour suprême avec cette loi.

La Chambre des notaires du Québec, on pourra pas leur reprocher également de faire partie de l'opposition officielle, on pourra pas leur reprocher d'être antiagricoles, parce que les notaires font beaucoup de transactions avec les producteurs agricoles. Encore là, on vient tout remettre en question les termes qui sont utilisés dans la loi n° 184. On nous dit qu'il est nécessaire d'ajuster les définitions, de mieux encadrer tout ça, M. le Président, et, encore là, on nous dit que le projet de loi est plein de lacunes, est plein de trous, et que le ministre se doit de revoir sa loi.

La Fédération de la relève agricole, je vous le mentionnais tantôt, ils nous disaient qu'il devenait impératif de se doter d'une loi qui soit en adéquation avec le développement tant souhaité du milieu agricole. Et, M. le Président, pour être un jeune politicien, je dois vous avouer que les témoignages de la relève agricole, des gens qu'ils avaient avec eux ont été, je vous dirais... Les témoignages ont été dévastateurs, en le sens qu'ils ont démontré à quel point la réforme du Parti québécois qui a été mise en place avec la loi n° 23 a laissé des traces marquées.

Pour démontrer à quel point le gouvernement du Parti québécois, dans le dossier du droit de produire, s'est, je dirais, bourré jusqu'à maintenant, je vous citerais ici le porte-parole du gouvernement, l'ancien adjoint du ministre de l'Agriculture, Jean-Guy Paré, et je le citerais ici dans un article qui disait: «C'est bien sûr, a-t-il dit, cette loi a eu des impacts négatifs. On admet justement que ça ne fonctionne pas rondement et qu'il faut revoir ces choses-là.» L'adjoint du ministre à ce moment était en train de remettre en question la loi que son propre gouvernement avait adoptée relativement au droit de produire.

Je vous citerais également ici les transcripts. En 1996, le ministre Julien qui nous disait, en nous parlant de la loi qui s'en venait, la loi n° 23: «Je voudrais aussi vous dire que ça va permettre d'assurer la protection adéquate du territoire agricole qui va permettre aux agriculteurs et agricultrices d'exercer leurs activités à l'intérieur d'une zone agricole dans une perspective de développement durable et d'une cohabitation harmonieuse.» Elle était tellement bonne, la loi n° 23, la loi que ce ministre a passée à l'époque que l'adjoint du ministre subséquent est venu dire que ça avait causé un tort irréparable au monde agricole.

Je vous ferai une autre citation ici qui est dévastatrice: «Finalement et par-dessus tout, ce projet de loi fournit à la population rurale québécoise les conditions lui permettant de dégager elle-même, à travers ses institutions locales et grâce à la concertation, le consensus nécessaire à la protection du territoire et des activités agricoles, à la cohabitation harmonieuse en milieu rural, à la protection de l'environnement, au respect des responsabilités des élus locaux et régionaux.» C'était le ministre Julien qui parlait à l'époque, le 4 juin 1996.

Elle est belle, l'époque du Parti québécois, M. le Président; quelles belles paroles! Mais, lorsqu'on regarde les réformes qu'on a vécues au niveau de la santé où on a envoyé des milliers d'infirmières, des centaines de médecins à la retraite, et qu'aujourd'hui on dit: Il faut aller en chercher à l'extérieur du territoire parce qu'on en manque, quand on regarde les réformes que nous vivons présentement au niveau de l'éducation ? j'ai des enfants, M. le Président, je peux vous dire que ça roule pas rondement ? et qu'on a un gouvernement qui nous dit que tout va bien, quand on a une réforme au niveau municipal qui... À chaque jour, on apprend des faits nouveaux qui sont dévastateurs, où le citoyen devra payer les pots cassés du gouvernement... Et, au niveau agricole, je dois vous avouer, M. le Président, que la réforme municipale sera destructrice parce qu'on est en train d'anéantir les milieux ruraux. Nos villages de campagne, nos villages agricoles, on est en train de les détruire en faisant des agglomérations, et dans ces agglomérations, M. le Président, le producteur agricole, la productrice agricole y perdra sa visibilité, y perdra son pouvoir au sein de sa communauté.

Alors, M. le Président, nous sommes en face d'un gouvernement qui a perdu tout entendement. On a une loi de 32 articles ? le projet de loi n° 184, 32 articles. Tout le monde est venu dire, sur ce projet de loi, qu'il était inacceptable, qu'il était inapplicable, qu'il était vraiment néfaste, qu'il viendrait même empirer l'erreur du projet de loi n° 23 que le ministre Julien avait mis en place en 1997.

n(20 h 30)n

Hier, à 17 h 30, nous avons reçu, par messagerie, les amendements du gouvernement du Québec sur le projet de loi n° 184. M. le Président, en trois ans de travail à l'Assemblée nationale, je n'ai jamais vu un projet de loi où il y a plus d'amendements qu'il y a d'articles de loi: 32 articles, 50 amendements. Non seulement on vient annuler les articles du projet de loi, on vient en modifier et on en rajoute, en plus, on rajoute jusqu'à 18 nouveaux articles. Alors, M. le Président, ça sent l'improvisé. On est à la veille de la session. Le ministre a fait ses consultations en début février, on est rendu à la mi-juin et on nous dépose les amendements sur un projet de loi que tout le monde est venu dire qu'il n'était pas bon. Et, M. le Président, depuis cet après-midi, j'ai parlé avec certains groupes, les gens ne retrouvent pas encore l'essentiel de leurs demandes, les gens nous disent que le projet de loi n'est pas bon. Et, M. le Président, lorsque nous avons suspendu les travaux, à 18 heures, nous avons tendu la main au gouvernement pour que les députés ministériels puissent prendre connaissance des amendements du projet de loi. Et j'ose espérer que les députés ministériels se lèveront, poursuivront nos débats à l'Assemblée nationale sur le projet de loi n° 184 pour dire également qu'ils se doivent de protéger l'intérêt de leurs producteurs agricoles, mais également l'intérêt de leur milieu urbain et également l'intérêt des citoyens qui habitent les campagnes.

M. le Président, je ne peux, dans un contexte pareil, voter en faveur du principe de ce projet de loi, parce que c'est un projet de loi qui nous semble beaucoup trop improvisé. Et, comme je vous le disais, de février à aujourd'hui, le ministre aurait pu nous déposer les amendements, le ministre aurait pu retourner en consultations particulières. On a proposé, à nos discussions à la fin de l'après-midi, on a proposé au ministre de réentendre les groupes que nous avions entendus en février. On nous a répondu qu'il en était pas question. La leader du gouvernement nous a dit: Il est pas question qu'on entende les gens qui sont concernés, il est pas question, compte tenu du fait qu'on vient chambarder le projet de loi n° 184, qu'on vient proposer plus d'amendements qu'il y a d'articles dans le projet de loi, il est pas question qu'on donne la parole à la population. Mais, M. le Président, moi, dans mon comté, dans ma région, le député de Brome-Missisquoi dans son comté également, la députée de La Pinière, nous, les élus du Parti libéral, nous sommes ici pour défendre les intérêts de nos citoyens, qu'ils soient agriculteurs, qu'ils soient citoyens urbains, qu'ils soient citoyens en zone rurale, que ce soient des gens qui font de l'hébergement ou qui font de la cohabitation avec le monde rural, nous ne pouvons accepter une telle situation.

Et, M. le Président, je le sais pas si c'est parce que c'est un gouvernement qui est en fin de règne, c'est un gouvernement qui est fatigué, qui est épuisé, mais il me semble que le gouvernement qui est en face de nous a oublié son mandat qui est d'écouter et de rejoindre les attentes de la population. Et, M. le Président, j'ai reçu trop de téléphones de producteurs agricoles de partout à travers le Québec, au cours des deux dernières semaines, qui nous disaient qu'ils étaient en désaccord avec ce qu'ils avaient vu dans le projet de loi n° 184 et qui nous ont dit d'être vigilants, de se faire les défenseurs de leurs droits et de s'assurer que le Parti québécois n'irait pas encore dans une réforme dévastatrice au niveau agricole. Parce que, s'il y a un domaine au Québec, M. le Président, qu'on peut développer, s'il y a un domaine où on peut faire de l'exportation, s'il y a un domaine où on peut développer, créer des emplois, c'est bien tout le domaine du bioalimentaire. Et, présentement, on ne sent pas de volonté de la part du gouvernement du Parti québécois de donner toute l'attention que le domaine agricole, que le domaine bioalimentaire requiert. Et je trouve que c'est bafouer le monde agricole que d'arriver, à 17 h 30 hier soir, avec plus d'amendements qu'il y a d'articles dans la loi. On s'est assis après-midi, M. le Président, pour essayer de comprendre et d'interpréter les articles de loi, et on ne s'y retrouve même pas. On a consulté des avocats; les avocats s'y perdent. Et, M. le Président, lorsque les gens ne peuvent comprendre un projet de loi, il y a de fortes raisons de se poser beaucoup de questions. Et j'ose espérer que les députés ministériels pourront se lever et dire pourquoi ils sont en faveur des amendements, parce que, dans le fond, M. le Président, il y a un nouveau projet de loi n° 184. Lorsqu'on est rendu à déposer plus d'amendements que d'articles, c'est comme dire qu'on a mis le projet de loi aux poubelles puis qu'on l'a réécrit mais qu'on lui a laissé le même titre et qu'on lui a laissé le même numéro. Mais, si le projet de loi est si fondamentalement modifié, on se doit de réécouter et d'entendre à nouveau les groupes de citoyens, les groupes de producteurs, les groupes d'élus municipaux qui représentent le monde municipal, et ça, M. le Président, le Parti québécois refuse.

Et pourtant, on a tendu la main après-midi au ministre, on a tendu la main au leader du gouvernement, et il s'est passé quelque chose que je n'ai jamais vu ? on me dit que ce n'est pas arrivé depuis des années et des années à l'Assemblée nationale ? le gouvernement a même voté sur sa propre motion aujourd'hui. Ils ont proposé de reporter nos travaux sur le projet de loi n° 184. Nous, ici, de ce côté-ci, on dit: C'est essentiel, le monde agricole et le monde municipal requièrent un projet de loi, requièrent une loi qui vient régler ces problèmes. Ils ont proposé une motion de report, M. le Président, et là j'ai l'impression qu'ils ont comme compris; avant de s'engager plus loin, ils ont voulu corriger leur erreur et ils ont voté contre leur propre motion. J'ai jamais vu ça. De ce côté-ci de la Chambre, on ne comprenait pas, mais, M. le Président, quand un gouvernement est rendu à voter contre ses propres motions, c'est qu'il y a un sérieux problème. Soit que le ministre a pas compris, soit que la leader a pas compris, ou soit que l'ensemble du côté du Parti québécois, on ne comprend plus.

Mais je peux vous dire une chose, M. le Président, le temps file, mais, de ce côté-ci de la Chambre, on est sûr d'une chose, c'est que la parole est aux citoyens, que la parole se doit d'être aux groupes d'agriculteurs, la parole se doit d'être du côté du monde municipal, la parole se doit d'être aux gens qui protègent l'environnement. Et lorsqu'un gouvernement est rendu à vouloir passer des lois à la sauvette, en dernière minute, rapidement, sans consulter ? et, M. le Président, on peut même penser qu'ils pourront passer ce projet de loi n° 184 dans le bâillon, ils sont rendus des spécialistes du bâillon ? alors il y a lieu de se poser de sérieuses questions.

Et j'espère que le ministre va, une fois pour toutes, arrêter de se fier à ses technocrates, à ses fonctionnaires et qu'il pourra corriger le tir. Parce que, M. le Président, le projet de loi n° 184 est trop important pour la collectivité, et on se doit de s'assurer qu'une fois que nous l'aurons adopté ce projet de loi sera vivable, ce projet de loi permettra de développer de nouvelles fermes, permettra de développer des nouvelles cultures, permettra d'accroître notre présence au niveau des marchés mondiaux en matière de bioalimentaire, mais que ce projet de loi aussi permettra la cohabitation d'une façon agréable avec les gens qui partagent le monde rural, avec les producteurs agricoles. Alors, merci, M. le Président.

n(20 h 40)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député d'Argenteuil. Nous poursuivons l'adoption du principe du projet de loi n° 184, et je cède la parole à M. le député de Lotbinière. M. le député, la parole est à vous.

M. Jean-Guy Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, M. le Président, j'aimerais faire quelques commentaires sur les propos du député d'Argenteuil qui laissait entendre plus tôt, lors de son intervention, qu'il ne collaborerait pas à l'étude du projet de loi n° 184 tant et aussi longtemps que Laurent Pellerin ? c'est le président de l'UPA, ça, M. le Président ? ne lui aura pas manifesté son assentiment aux amendements. Cet après-midi, j'ai discuté avec mon représentant, le président de l'UPA de Lotbinière-Mégantic, qui se propose... qui, lui aussi, a reçu ces amendements-là à 17 h 30 hier après-midi; il les a compris, lui, M. le Président.

Des voix: ...

M. Paré: Il se propose de les expliquer au député d'Argenteuil. Donc, vous avez seulement que, monsieur... Je me fais l'intermédiaire des représentants de l'UPA, qui souhaitent signifier à l'opposition que cette dernière n'a qu'à prendre le téléphone, à communiquer avec les représentants de l'UPA, lesquels attendent avec impatience... ils sont tout disposés offrir à l'opposition toutes les explications dont elle aurait besoin au sujet des amendements de la loi n° 184. Donc...

Des voix: Bravo!

M. Paré: Le ministre, quant à lui, est tout à fait disposé à lui réexpliquer, M. le Président, lors de l'étude article par article en commission parlementaire, tous les amendements un par un. Donc, vous allez avoir une deuxième explication, si vous ne comprenez pas la première fois, à partir de vos gens et de vos recherchistes.

Là-dessus, M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 184 modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles. Vous connaissez bien, M. le Président, le très beau comté de Lotbinière, comté d'agriculture, de petites et moyennes entreprises très diversifiées et très prospères. De Saint-Antoine-de-Tilly jusqu'à Saint-Pierre-les-Becquets, par la 132, des paysages extraordinaires. De Saint-Apollinaire à Saint-Louis-de-Blandford, sur la 20, 100 km sur la 20. Saint-Louis-de-Blanford, l'endroit des canneberges par excellence. De Saint-Narcisse-de-Beaurivage à Saint-Pierre-Baptiste, sur le plateau appalachien, nos 36 municipalités rurales attendent impatiemment, M. le Président, le régime de protection des activités agricoles, le projet de loi n° 184.

Permettez-moi de projeter le film des 15 dernières années des différents éléments du régime de protection du territoire agricole au Québec. D'abord, en 1978, la Loi de protection du territoire agricole ? on se rappelle, à cette époque, que le ministre de l'Agriculture était Jean Garon, du Parti québécois ? visant à conserver les terres agricoles pour leur vocation initiale et à contrôler leur réaffectation à des usages non agricoles.

Ensuite, en mai 1995, devant des préoccupations émergentes, l'ajout de nombreux outils s'avère essentiel. Deux ministères, l'Agriculture et celui de l'Environnement, conjuguent leurs efforts. Les deux unions municipales et l'Union des producteurs agricoles ont exploré des pistes de solution. Cette entente a été la première à faire la distinction entre la pollution ? la pollution, ça, M. le député d'Argenteuil, c'est... lorsqu'on appelle «pollution», c'est tout simplement le sol et l'eau ? et les trois inconvénients que sont les bruits, les odeurs et les poussières... l'entente de principe sur des questions afférentes à la protection et au développement durable des activités agricoles en zone agricole. Les trois éléments.

Un an plus tard, en juin 1996, est adoptée la loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole et d'autres dispositions législatives, afin de favoriser la protection des activités agricoles. Cette loi prend effet en juillet 1997, remplaçant la Loi de la protection du territoire agricole, âgée lors... dès lors de 19 ans. Cette nouvelle loi vise la prise en compte des activités agricoles dans la planification et l'aménagement du territoire, deuxièmement, l'utilisation prioritaire du sol en zone verte à des fins agricoles et, troisièmement, la coexistence harmonieuse des activités agricoles et non agricoles. En vertu de cette loi, la pollution agricole demeure sous la responsabilité du ministère de l'Environnement, donc l'eau et le sol. Quant à eux, les inconvénients, les bruits, les odeurs et la poussière, relèvent de la responsabilité des municipalités.

Quatre années après sa mise en application, la loi n° 23 n'apporte pas tous les résultats attendus. De sérieuses difficultés surgissent, dont la mise en oeuvre des paramètres afférents aux distances séparatrices relatives aux odeurs et ayant pour objet d'atténuer ou de limiter les inconvénients de voisinage. Cette loi devant favoriser en zone verte le développement des activités agricoles et l'essor des entreprises agricoles, a contrario, a eu un effet limitatif pour bien des entreprises agricoles. Dans le beau comté de Lotbinière toujours, M. le Président, un comté très agricole, sur un total de 700 fermes, nous avons relevé une douzaine de fermes problématiques. Je vous donne donc un exemple d'une ferme de mon village ? voisin ? bâtie, depuis trois générations, en plein centre du village. Au cours des années soixante-dix, une rue du village s'est développée à l'extrémité ouest de ses terres. Ce producteur, un jeune dans la trentaine, père de quatre enfants, donc de la relève, M. le Président... Vous auriez dû les voir, ces jeunes, au concours des jeunes ruraux, il y a deux semaines, paradant fièrement devant le juge avec leurs jeunes bêtes à l'exposition agricole de Bécancour. Croyez-moi, la relève de la ferme est assurée. Le producteur veut ajouter quelques unités animales. Pour y arriver, il doit avoir la signature de 22 propriétaires voisins, et cela, devant un notaire. C'est à la fois mission impossible et un processus fort dispendieux pour ce producteur.

Les membres de la commission de l'agriculture ont tous convenu, des deux côtés de cette Chambre, d'apporter des correctifs à cette loi. L'agriculture québécoise a des caractéristiques bien à elle. Celle de mon comté est typique de ce modèle québécois d'abord fortement basé sur la production animale, surtout laitière, en raison surtout du potentiel fourrager des terres et des conditions climatiques. Ensuite, notre agriculture est largement périurbaine, entourant mes 36 municipalités. Cette proximité des municipalités, bien qu'elle ne cesse de stimuler la prospérité de notre agriculture, accentue paradoxalement les contraintes qui s'exercent sur elle. Cette proximité a contribué à plusieurs usages non agricoles en zone verte, qui entraînent parfois des difficultés de cohabitation pour les usagers du territoire, peu compatibles, surtout résidentiels, avant 1978.

Mais, avec l'adoption de la Loi de la protection du territoire agricole, cette année-là, le développement de ces usages non agricoles a été diminué, freiné, mais pas totalement arrêté. En dépit des bonnes intentions des législateurs, certaines dispositions se sont révélées, dans certains cas, inefficaces. Devant cette réalité, le ministre de l'Agriculture a confié, en décembre 1999, à Me Brière le mandat de cerner le problème et, en concertation avec les acteurs du milieu, de suggérer des correctifs et des ajustements. Par la suite, nous avons eu, M. le Président, des auditions de la commission parlementaire de l'agriculture, à laquelle j'ai siégé. De plus, nous avons rencontré Me Brière pour connaître le contenu d'une entente entre la FQM et l'UPA.

Ce que fait ce projet de loi, M. le Président, il énonce des mesures visant à préserver la capacité d'accroissement ou le maintien des activités agricoles dans certains cas particuliers. Il modifie également la procédure relative aux demandes de portée collective soumises à la Commission de protection du territoire agricole. Précisément, seule une municipalité régionale de comté pourra soumettre une telle demande, laquelle ne pourra porter que sur des îlots déstructurés ou des lots regroupés dans des secteurs identifiés en zone agricole. Deuxièmement, les dispositions concernant le Commissaire aux plaintes sont abrogées et celles concernant le médiateur seront dorénavant applicables. Troisièmement, une autre mesure viendra permettre de compléter le règlement de contrôle intérimaire pour rendre inopérante toute disposition inconciliable d'un règlement d'une municipalité en ce qui concerne les dimensions et les volumes de construction, l'aire des planchers, et le reste.

Dans l'ensemble, les modifications proposées par l'entente sont de nature à permettre l'application de la volonté gouvernementale de planifier l'aménagement et le développement du territoire en accordant la priorité aux activités et aux exploitations agricoles en zone agricole, dans le respect des particularités du milieu, de manière à favoriser le développement économique des régions et du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Lotbinière. Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. Alors, M. le leader de l'opposition officielle et député de Brome-Missisquoi, je vous cède la parole.

M. Pierre Paradis

M. Paradis: Lorsqu'on traite, à l'Assemblée nationale du Québec, de dossiers d'agriculture, on parle et on traite de ce qu'on appelle l'épine dorsale de la société québécoise, dans toutes les régions du Québec. Le dossier du droit de produire, M. le Président, ne nous arrive pas dans le décor comme une surprise, à la dernière minute, au début d'un millénaire. Le dossier du droit de produire constitue, depuis la loi sur le zonage agricole, la revendication de base du monde agricole. Parce que, si on n'a pas le droit de produire en zone verte au Québec, M. le Président, on aura beau avoir toutes les annonces ministérielles, tous les programmes de stabilisation, toutes les luttes sur le contrôle de notre production, la meilleure médecine vétérinaire au monde, si on n'a pas le droit de produire, on nie à l'agriculteur et à l'agricultrice québécois et québécoise le droit d'exister et de pratiquer correctement, dans le respect de l'environnement, son métier, qui est le plus beau et le plus noble, M. le Président, peut-être avec celui de député en certaines circonstances.

n(20 h 50)n

M. le Président... M. le Président, le Parti québécois et le Parti libéral du Québec semblaient sincères, aux élections de 1994, quand les deux formations politiques majeures au Québec se sont engagées formellement, face aux producteurs et productrices agricoles, pour que cette Assemblée soit saisie d'un projet de loi simple, clair et précis qui garantisse aux gens qui pratiquent cette activité en zone verte dans nos comtés respectifs le droit de le faire. C'était pas tellement compliqué, M. le Président; c'était une unanimité politique.

On se retrouve en 2001, M. le Président. Qu'est-ce qui s'est passé? Bien, le Parti québécois a été élu, puis le Parti québécois a trompé la classe agricole du Québec à deux reprises avec le droit de produire, M. le Président. Le Parti québécois a passé une première loi sur le droit de produire ? moi, je m'en souviens comme si c'était hier, M. le Président ? la loi n° 23. Le ministre de l'époque avait fait le même discours que le ministre nous a fait aujourd'hui. Les députés ministériels avaient lu les mêmes notes préparées par les mêmes technocrates en cette Assemblée nationale du Québec, M. le Président. Mais ils avaient pas pris le temps, ils avaient pas pris le temps de consulter les agriculteurs de leurs circonscriptions électorales. Ils avaient pas pris le temps de se former une opinion qui était la leur et qui leur était propre. Tant et si bien, M. le Président, qu'on s'est retrouvé quelques années plus tard avec des déclarations qu'a citées le député d'Argenteuil.

L'adjoint parlementaire au ministre de l'Agriculture nous disait: Bien, vous savez, on s'est trompé. Le ministre de l'Agriculture de l'époque lui-même a renchéri: Bien, vous savez, on s'est trompé. Vous savez, M. le Président, que ces gens-là se soient trompés, moi, ça me dérange pas tellement, mais, qu'ils aient trompé tous les agriculteurs et les agricultrices du Québec, ça, ça me dérange pas mal. Qu'ils aient trompé...

Parce que, je me souviens, à l'époque, que le porteur du dossier à l'Union des producteurs agricoles, c'était un bon homme, un bon père de famille, M. le Président. M. Chagnon, de Saint-Hyacinthe, vice-président de l'Union des producteurs agricoles, qui s'est amené ici, à l'Assemblée nationale, avec les gens de l'UPA, puis qui sont venus nous voir à l'époque en disant: Écoutez, là; la loi, ça s'appelle le droit de produire. Ce qu'il y a dedans, on fait confiance au PQ puis on fait confiance au ministre. C'est ce qu'ils nous ont dit, M. le Président.

Mais vous savez ce que ça a coûté, cette confiance-là que M. Chagnon avait mise dans le Parti québécois puis dans le ministre de l'Agriculture du Québec, péquiste? Bien, ça lui a coûté sa fonction de vice-président de l'Union des producteurs agricoles. Parce que, quand la loi a été en application, les agriculteurs ont réalisé qu'ils avaient pas plus le droit, mais qu'ils en avaient moins, de droits.

Puis là, M. le Président, on a fait une autre campagne électorale au Québec, et les deux formations politiques majeures ? le Parti québécois puis le Parti libéral du Québec ? ont réitéré leur engagement de donner aux producteurs et aux productrices agricoles un droit de produire. Le ministre de l'époque ? le ministre qui est aujourd'hui à la Santé ? a lu le même discours préparé par les mêmes technocrates. L'adjoint parlementaire est venu à cette Assemblée nationale relire les mêmes notes préparées par les mêmes technocrates. Puis là, on a tenu une commission parlementaire, M. le Président, puis, dans cette commission parlementaire ? ça, il faut le faire, hein? ? une autre véritable réforme péquiste. On sait ce qui est arrivé avec la réforme de l'éducation, la réforme de la santé, la réforme Emploi-Québec, la réforme des municipalités, des fusions forcées. Bien, la réforme en agriculture a connu le même échec. On a réussi, là, à mécontenter en même temps tout le monde. On a retrompé les agriculteurs, on a mécontenté les environnementalistes. On a mécontenté le monde municipal, on a mécontenté le monde de la santé. Il faut le faire, M. le Président!

Puis là il y a eu un remaniement ministériel, après cette commission-là, puis le nouveau ministre de l'Agriculture nous est arrivé. Et, sur le plan législatif ? on siège depuis le mois de mars ? vous savez ç'a été quoi, sa priorité sur le plan législatif, M. le Président? Ç'a pas été de déposer des amendements à la loi sur le droit de produire. Sa première priorité législative ? il va sans doute passer à l'histoire ? ç'a été de modifier la Loi sur le mérite agricole. Moi, M. le Président, c'est une loi qui était importante; j'ai beaucoup d'amis agriculteurs qui ont reçu la médaille du Mérite agricole, mais j'en ai pas beaucoup qui sont venus me voir à mon bureau de comté pour me dire que l'urgence législative dont l'Assemblée nationale devait être saisie, c'est de changer le nom de la médaille pour que ça devienne la médaille nationale du mérite agricole, pour répondre à l'obsession du premier ministre; il y en a pas beaucoup.

Je sais pas si le député de Roberval, qui est un cultivateur, en a eu beaucoup, là. C'était ça qu'il fallait faire pour laisser sa marque en agriculture. Ça, c'était plus urgent, ça pressait plus, comme les cultivateurs disent, que le droit de produire. Bien, voyons donc, M. le Président! Puis là on a occupé le temps de la commission puis le temps de l'Assemblée nationale, puis on s'est dit: On va arriver à la dernière minute, là, avec un paquet d'amendements; on va essayer de faire un tas de boucane, puis ça va être assez compliqué que personne va s'y retrouver.

Moi, j'écoutais le député de Lotbinière tantôt, M. le Président. Il disait: Mon président de ma Fédération régionale va tout vous expliquer ça, les amendements, puis deux fois plutôt qu'une. Il doit être pas mal plus avancé que le président de la Fédération de Sherbrooke, que j'ai rencontré la semaine passée. Il doit être pas mal plus avancé que la Confédération de l'Union des producteurs agricoles qui font travailler, là, une technicienne à peu près jour et nuit, là, depuis qu'il y a les amendements, pour essayer de comprendre où le gouvernement s'en va là-dedans.

C'est pas vrai, ce qu'il a dit, M. le Président. Ce n'est pas vrai, ce qu'il a dit. Ce projet de loi là est compliqué, ce projet de loi là va venir compliquer la vie des producteurs. Moi, le ministre, sur le plan personnel, M. le Président, le ministre, c'est un bon gars; on peut-tu se le dire? Mais, une fois qu'on a dit ça, là, sur le plan technique puis de responsabilité ministérielle, M. le Président, c'est un petit peu plus compliqué.

Moi, la semaine dernière, il m'a prévenu, il m'a dit: M. Paradis, mes amendements sont pas prêts mais je vais vous donner les grands thèmes de mes amendements. Très correct comme attitude, M. le Président, tenter de déblayer le terrain. Et, si c'est bon pour les agriculteurs, on va collaborer, puis, si c'est pas bon pour les agriculteurs, on va voter contre. Puis, si on le sait pas... c'est la situation dans laquelle on se retrouve ce soir. Ce qu'on sait, c'est qu'on a été trompé deux fois, puis c'est tellement compliqué présentement... à moins que le député de Roberval puisse nous l'expliquer bien clairement tantôt, là, à partir de son expérience et de son vécu d'agriculteur.

n(21 heures)n

Bien, on va dire au gouvernement: Y a-tu moyen de ramener le monde en commission parlementaire? Y a-tu moyen que je revoie, moi, les deux jeunes agriculteurs de la relève agricole à qui l'ex-ministre de l'Agriculture, député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, a dit, les yeux dans les yeux: Le projet de loi va régler votre problème de relève. Mais, à date, on n'a rien trouvé dans le projet de loi qui répond à cet engagement pris par l'ex-ministre de l'Agriculture. Je sais pas si l'actuel se sent lié par les engagements de son prédécesseur, je sais pas s'il a regardé cet aspect-là, mais c'était touchant de voir l'ancien ministre dire: Je vais vous le régler, votre problème, les petits gars! Présentement, il est pas réglé, le problème, puis nous, de notre côté, on lâchera pas tant et aussi longtemps que les engagements qui ont été pris ne seront pas respectés. C'est pas tellement compliqué pour le ministre de respecter les engagements. L'Union des producteurs agricoles a signé avec la Fédération québécoise des municipalités une entente-cadre qu'ils voulaient voir incorporée intégralement dans le projet de loi comme tel. On la retrouve pas, M. le Président.

Moi, ce que j'ai entendu du ministre, il dit: Vous savez, M. Paradis, tous les problèmes qu'on a eus avec les servitudes que les agriculteurs sont obligés de signer. Pour que les citadins nous comprennent un peu mieux, un agriculteur, s'il veut agrandir sa soue, sa grange ou son étable, s'il a des voisins, actuellement, il est obligé, avec le droit de produire du Parti québécois, d'aller voir le voisin, de se mettre à genoux. Il dirait: Signerais-tu pour que je puisse agrandir? Puis, des fois, il y a des voisins plus exigeants que les autres, ils nous disent: Combien tu paies? Puis là, le ministre, il nous dit qu'ils vont enlever ça, les servitudes. On est d'accord avec lui, M. le Président. Mais, s'il enlève la servitude, il la remplace par quoi? Parce que, s'il fait juste enlever la servitude, il vient juste de réduire encore une fois le droit de produire des producteurs agricoles. Le principe est bon de l'enlever. On la remplace par quoi?

L'ancien ministre du Tourisme, il nous dit: En zone agricole, maintenant, dans l'industrie agrotouristique, les gens vont pouvoir s'établir ailleurs que dans les espaces disponibles en zone blanche au milieu du village. Le concept peut avoir du bon sens, M. le Président, mais comment ça s'applique face aux distances séparatrices pour les cultivateurs? L'établissement touristique va-t-il être content? Ça veut-u dire que le voisin pourra pas faire son épandage, pourra pas agrandir sa grange, pourra pas agrandir son poulailler ou sa porcherie? Pas de réponse de la part du ministre. On a même entendu dire, M. le Président, que le ministre avait accepté de réduire ce qui était contenu dans l'entente entre la Fédération québécoise des municipalités et l'Union des producteurs agricoles quant au nombre d'unités animales auquel... On s'était engagé de pouvoir augmenter le cheptel. Il paraît que ça a même été diminué, ça, M. le Président. On va le retrouver dans le projet de loi. Donc, diminution des droits des agriculteurs.

Puis, pendant qu'on discute du droit de produire, M. le Président, j'étais assis dans mon bureau l'autre jour, j'écoute mon bon ami le ministre de l'Environnement. Pendant que le ministre de l'Agriculture est en train de nous expliquer, d'un côté de la bouche, que les agriculteurs vont avoir le droit de produire avec son nouveau projet de loi amendé, le ministre de l'Environnement, lui, nous explique qu'il va réglementer ça avec une autre loi. Les deux lois sont présentement devant l'Assemblée nationale du Québec. J'ai été un petit peu estomaqué de l'entendre raconter à l'Assemblée nationale du Québec comment son nouveau pouvoir de réglementation ? sur lequel vous allez voter, vous autres, tantôt, pour lequel vous allez voter ? va lui permettre de créer ce qu'on appelle une «bourse de purin» au Québec. Je me suis dit: A-t-il consulté son bon ami le ministre de l'Agriculture là-dessus ou s'il est en train d'y en passer une petite vite, s'il est en train de s'accaparer de davantage de pouvoirs pour pouvoir nuire au droit de produire que le monde agricole tenterait de se donner?

La loi sur le droit de produire, M. le Président, ça doit pas être bien, bien compliqué une fois qu'on a pris l'engagement électoral de la passer. C'est une loi qui interpelle d'abord et avant tout trois ministères: au premier titre, le ministère de l'Agriculture, au deuxième titre, le ministère de l'Environnement, puis, au troisième titre, le ministère des Affaires municipales. On peut-u demander au ministre de l'Agriculture d'aller voir son collègue des Affaires municipales puis de lui dire qu'en zone verte, au minimum, quand le schéma d'aménagement est approuvé, ça prend la signature du ministre de l'Agriculture? C'est-u ben compliqué, ça? À partir de ce moment-là, au moins, le monde agricole va avoir un mot à dire sur le schéma d'aménagement en zone verte, puis on va éviter ce qu'on appelle les zonages de production puis ces choses-là qui sont non souhaitables.

Ça, il faut que le ministre de l'Agriculture se sente assez fort pour aller voir la ministre des Affaires municipales puis lui dire: En zone verte, là, c'est moi qui signe. Puis y peut-u aller voir, après ça, le ministre de l'Environnement puis lui dire, là, qu'on a fini, dans un nouveau siècle, de travailler avec des normes de pollution virtuelle? Parce que c'est ça qu'il y a dans la loi, actuellement, qui est devant nous, là, des normes de pollution virtuelle. On peut-u commencer, équipés comme on est, avec la technologie dont on dispose, à parler du réel? Parce que, si on le fait pas en 2001, là, une loi sur le droit de produire, ça revient pas à l'Assemblée nationale à toutes les cinq minutes ou à toutes les sessions. C'est un droit fondamental pour la classe agricole, puis, si le ministre de l'Agriculture est pas capable d'aller rencontrer ses collègues, qu'il est pas assez fort pour faire valoir le point de vue du monde agricole, bien, qu'on ait l'honnêteté de dire aux agriculteurs: Écoutez, une autre réforme qu'on a manquée, une autre fois qu'on s'est trompés.

Mais, moi, j'ai de la misère à penser que le ministre actuel va réussir. Puis, je le dis bien simplement, M. le Président, là où l'actuel ministre de la Santé a échoué, là où l'actuel ministre du Revenu, qui avait ça à coeur à l'époque, a échoué, moi, je vois pas, là, d'éléments nouveaux qui me permettraient de croire qu'après deux échecs on a appris quelque chose. Ce que je comprends, c'est qu'on a gardé les mêmes architectes, les mêmes ingénieurs de la loi puis qu'on a refait une autre patente qu'on essaie de passer de nuit, à l'Assemblée nationale du Québec, en toute fin de session, puis que, surtout, surtout, surtout, surtout, surtout, surtout, on veut pas entendre les intéressés. On veut pas soumettre ces amendements-là aux groupes écologiques. On veut pas soumettre ces amendements-là au monde municipal. On veut pas soumettre ces amendements-là au monde de la santé. On veut pas soumettre ces amendements-là à la Fédération de la relève agricole du Québec. On veut pas soumettre ces amendements-là, M. le Président, à l'Union des producteurs agricoles. On veut pas en discuter, en commission parlementaire, avec des experts en la matière. Mais, quand on a peur de se présenter en commission parlementaire pour en parler avec des experts, on comprend qu'on est en train d'en passer une autre petite vite au monde agricole.

Puis je me permets d'insister, M. le Président, parce que, quand on ne reconnaît pas le droit de produire dans nos régions du Québec, on assiste au dépeuplement des régions du Québec, on affaiblit nos institutions. Quand il n'y a plus de fermes, quand il n'y a plus de fermes familiales, il n'y a plus d'enfants dans nos écoles de village, puis là nos commissions scolaires, fusionnées et regroupées, décident de fermer l'école du village. Il n'y a plus de terrain de jeu, il n'y a plus de centre communautaire, il n'y a plus de communauté d'appartenance.

Le bois, l'agriculture, les mines constituent des secteurs d'activité économique traditionnels qui méritent bien plus de respect de cette Assemblée, bien plus de respect, par quelque gouvernement que ce soit, que de présenter en toute fin de session un cafouillis d'amendements dont on tente de saisir des députés qui sont en même temps saisis d'une foule de législations. Le respect du monde agricole, le respect du droit de produire commence par le respect d'une loi qui est simple, qui est claire puis qui répond aux engagements électoraux et du Parti québécois et du Parti libéral du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le leader de l'opposition officielle et député de Brome-Missisquoi, pour votre intervention. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 184, et je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. Alors, je cède la parole à la critique de l'opposition officielle en matière d'habitation et d'autoroute de l'information. Mme la députée de La Pinière, la parole est à vous.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, je voudrais joindre ma voix à celles de mon collègue le député de Brome-Missisquoi et le député d'Argenteuil et les autres collègues qui sont intervenus, M. le Président, sur le projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives.

n(21 h 10)n

Faut que je vous dise, M. le Président, que le comté de La Pinière est un comté urbain, comme vous le savez, de l'autre côté de la rive, sur la rive sud de Montréal. Mais, c'est surtout à titre de présidente du caucus libéral de la Montérégie, M. le Président, que je prends la parole sur ce projet de loi. Parce que, comme responsable, pour ma formation politique, de la région de la Montérégie, M. le Président, je vous rappellerai que c'est une région qui est identifiée comme étant le jardin du Québec, et il y a une raison à ça, M. le Président, pourquoi la Montérégie est considérée comme la région du Québec... Et il y a un lien aussi entre cette région-là, son dynamisme économique, sa réalité, M. le Président, socioéconomique et le projet de loi qui est devant nous.

La Montérégie, M. le Président, c'est un territoire à la fois urbain et rural. Elle est composée de trois zones, M. le Président. Une première zone qui est la banlieue de Montréal, à laquelle je faisais référence tantôt en parlant de mon comté. Cet espace urbain regroupe les municipalités de la MRC Champlain, Lajemmerais, Roussillon, La Vallée-du-Richelieu et, dans une moindre mesure on dirait, Vaudreuil-Soulanges. Ensuite, vous avez une deuxième zone de la Montérégie qu'on appelle la couronne. Elle est caractérisée en fait par la présence de cinq municipalités satellites, soit Salaberry-de-Valleyfield, Saint-Jean-sur-Richelieu, Granby, Saint-Hyacinthe et Sorel-Tracy. Et, on comprendra, M. le Président, que chacune de ces municipalités de chef-lieu, M. le Président, dessert de vastes territoires agricoles, et on sait très bien, M. le Président, que l'agriculture joue un rôle majeur en Montérégie. Et, finalement, on distingue la troisième zone qui est un territoire essentiellement rural, composé des MRC d'Acton, de Brome-Missisquoi, du Haut-Saint-Laurent, des Jardins-de-Napierville et de Rouville.

Tout ceci pour vous dire, M. le Président, que, la Montérégie, donc, qui est un territoire à la fois urbain et agricole, ce territoire-là est aussi... abrite également la technopole du Québec en matière de bioalimentaire. Et l'agriculture et le bioalimentaire jouent un rôle très important dans le dynamisme économique de notre région. La Montérégie représente environ 20 % du total des emplois du Québec, et sa population, M. le Président, représente 17,6 % de toute la population du Québec. En 1999, on dénombrait tout près de 635 000 emplois créés en Montérégie.

Il est très important de rappeler que le secteur bioalimentaire compte près de 70 000 emplois ? 70 000 emplois ? M. le Président, dans le secteur bioalimentaire, soit 16 % du total québécois. Le produit intérieur brut de cette filière bioalimentaire se répartit, M. le Président, entre l'agriculture, 30 %, la transformation des aliments et boissons, 28 %, le commerce de détail, 21 %, la restauration, 16 %, et le commerce de gros, 5 %.

Une des constatations que j'ai faites en analysant le projet de loi n° 184, c'est que, dans un document qui nous a été rendu public, M. le Président, pas plus tard qu'hier dans une assemblée générale du CRD de la Montérégie ? conseil régional de développement ? on avait identifié, dans notre plan d'action, M. le Président, un certain nombre de priorités. Et, parmi ces priorités, il y a la priorité numéro 2, et vous me permettrez de vous citer le texte du document, M. le Président, parce qu'il est parlant, ce texte-là: «La priorité, M. le Président, du Conseil régional de développement de la Montérégie, c'est de faire du bioalimentaire un levier de croissance et de développement pour l'ensemble de la Montérégie; mettre en oeuvre le plan d'action sur le bioalimentaire ayant pour objectif de stimuler le dynamisme régional de ce secteur; de protéger les ressources biophysiques du territoire et optimiser leur utilisation; d'augmenter la présence des produits agricoles et bioalimentaires montérégiens sur les marchés québécois et sur les marchés extérieurs; promouvoir l'industrie du savoir bioalimentaire et encourager la relève, et plus particulièrement la relève chez les femmes et chez les jeunes.»

Partant de cette analyse, M. le Président, du contexte de la région de la Montérégie, de l'importance du secteur agricole et bioalimentaire et également du fait que ce secteur-là est priorisé au niveau régional, je me suis dit: Est-ce que le projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives, répond, M. le Président, aux attentes de ma région? Est-ce que ce projet de loi résout la problématique dont je viens de vous faire le portrait, à savoir que, dans la région de la Montérégie, nous avons une cohabitation naturelle entre les citadins, M. le Président, les urbains et le monde rural et que cela se retrouve à différents degrés dans les différentes zones de la région.

Alors, que dit le projet de loi n° 184, M. le Président? Je lis les notes explicatives parce que ça nous permet de résumer l'essentiel du projet de loi: Ce projet de loi modifie la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles afin d'édicter des mesures visant à préserver la capacité d'accroissement ou le maintien des activités agricoles dans certains cas particuliers. Il modifie également la procédure relative aux demandes à portée collective soumises à la Commission de protection du territoire agricole. Entre autres, seule une municipalité régionale de comté pourra soumettre une telle demande, laquelle ne pourra porter que sur des îlots déstructurés ou des lots regroupés dans des secteurs identifiés en zone agricole.

En outre, les dispositions concernant le commissaire aux plaintes sont abrogées et celles concernant le médiateur seront dorénavant applicables.

Ce projet de loi modifie, de plus, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme afin de permettre à une municipalité régionale de comté, par l'édiction d'un règlement de contrôle intermédiaire comportant des normes sur les usages en zone agricole ou sur les distances séparatrices visant à atténuer les inconvénients reliés aux odeurs inhérentes à certaines activités agricoles, de suspendre l'application des dispositions de règlements municipaux incompatibles avec ces mesures. Il peut, par le même moyen, de suspendre l'exercice par une municipalité locale du pouvoir d'adopter de tels règlements jusqu'à l'entrée en vigueur d'un schéma d'aménagement révisé conformément aux orientations gouvernementales spécifiques à la zone agricole.

Par ailleurs, ce projet de loi modifie la Loi sur l'assurance-récolte et la Loi sur l'assurance-stabilisation des revenus agricoles afin d'assujettir l'élaboration et l'administration des programmes qui y sont prévus au respect, par les producteurs, de normes environnementales.

M. le Président, à chaque fois que j'analyse un projet de loi, je me pose toujours la question: C'est quoi, la pertinence de ce projet de loi qui est devant nous, le projet de loi n° 184? À qui va-t-il servir, ce projet de loi, M. le Président? Quelle problématique va-t-il résoudre? Est-ce qu'il va résoudre le problème, M. le Président, auquel il s'adresse ou va-t-il le compliquer? Et, à l'analyse, M. le Président, on constate que ce projet de loi ne résout absolument rien et, de plus, il complique l'existence pour les personnes et pour les organismes concernés, M. le Président, et, en l'occurrence, les producteurs agricoles.

n(21 h 20)n

Permettez-moi de rappeler le contexte dans lequel ce projet de loi est arrivé devant nous. En 1995, le gouvernement, M. le Président, du Parti québécois, après de longues tergiversations, a décidé de déposer non pas un projet de loi mais un avant-projet de loi sur le droit de produire. S'ensuit alors une série de consultations particulières auxquelles j'ai eu l'occasion d'ailleurs de participer et d'écouter les groupes sur les préoccupations qu'ils avaient, et je dois reconnaître, M. le Président, que, lorsqu'on écoute les différents points de vue, c'est une situation qui est loin d'être simple parce qu'il s'agit d'harmoniser finalement des positions parfois irréconciliables entre des producteurs agricoles qui sont préoccupés par l'importance de croître et de progresser dans leur production agricole, d'assurer la relève, M. le Président, de cette production dans leur famille, particulièrement pour les jeunes... Et, de l'autre, vous avez des préoccupations d'ordre environnemental, des préoccupations, M. le Président, de voisins, des gens qui sont, pour la plupart, issus du milieu urbain ou périurbain et qui se plaignent des inconvénients que leur cause le voisinage avec le milieu agricole.

Donc, M. le Président, ce n'est qu'en juin 1996 que le gouvernement a finalement déposé un projet de loi qui a été adopté malgré la mise en garde qui a été exprimée par l'opposition officielle. Et, finalement, M. le Président, on le constate, parce que, depuis l'adoption de la loi n° 23, de laquelle je parle, M. le Président, celle qui a été adoptée en juin 1996, on réalise, M. le Président, que cette loi, dans les faits, elle est inapplicable. Elle est inapplicable pourquoi? Parce que le gouvernement, M. le Président, a fait en sorte que les municipalités arbitrent finalement le conflit entre les producteurs agricoles et leurs voisins, et cet arbitrage se fait par la réglementation, hein, la réglementation, entre autres, sur les distances séparatrices, pour finalement repousser encore davantage les entreprises agricoles dans leurs derniers retranchements et pour décourager finalement... les décourager au niveau de l'établissement dans des nouvelles productions.

Cela pose un problème sérieux, M. le Président, parce que l'agriculture, c'est un secteur qu'on qualifie de primaire sur le plan économique, mais c'est un secteur qui se dépeuple de plus en plus, aussi bien au niveau du nombre de personnes qui y travaillent qu'au nombre des familles qui vivent de l'agriculture, M. le Président. Et c'est vrai que l'agriculture s'est industrialisée beaucoup et que l'agriculture familiale a perdu beaucoup de son poids et de son ampleur, mais cela pose un problème sérieux au niveau de la vivacité des communautés rurales, des petites communautés, M. le Président. Et, lorsque, nous, de notre côté, on réclame une politique de la ruralité et une politique du développement des régions, c'est parce qu'on est aussi préoccupés par cette problématique propre au monde rural et aux agriculteurs en particulier.

J'ai l'occasion, M. le Président, de sillonner le Québec, notamment avec mon mari, pour ne rien vous cacher, M. le Président, qui est un agronome. Alors, on parle d'agriculture souvent à la maison, et il est très préoccupé pour quelqu'un qui a travaillé dans ce milieu, M. le Président, et qui a aidé de nombreux agriculteurs à établir ou à faire établir leurs jeunes sur les fermes. Donc, je suis très, très sensibilisée à cette problématique-là, et ça me touche beaucoup pour avoir parlé aussi avec des agriculteurs qui étaient aux prises justement avec toute la difficulté d'aider leurs enfants à s'établir dans la ferme et à leur transmettre ce patrimoine qui est finalement un patrimoine familial. Alors, ce projet de loi, M. le Président, ne vient pas aider ces agriculteurs à les encourager justement à transmettre cette valeur, valeur économique, valeur sociale, valeur sentimentale, à leurs enfants parce que c'est un projet de loi qui est très contraignant, qui est très contraignant, puis le gouvernement, M. le Président, tout ce qu'il a fait finalement par ce projet de loi ou ce qu'il tente de faire, c'est de décourager encore davantage les producteurs agricoles, M. le Président.

D'ailleurs, certaines fermes existantes qui tentent de s'expansionner, M. le Président, et de croître, parce que c'est important pour l'entreprise agricole, comme toute entreprise, M. le Président, de se développer, bien le projet de loi n° 184 ne vient pas, M. le Président, faciliter cette expansion. Au contraire, il vient la limiter. Alors, le gouvernement, M. le Président, au lieu de régler la problématique de la cohabitation entre les agriculteurs et les voisins, il ne fait, M. le Président, que l'aggraver et, finalement, il a transmis la patate chaude aux municipalités en leur disant: Réglez ça entre vous. Et on voit bien ce que ça donne comme problème, parce que la situation, M. le Président, ne s'est faite qu'exacerber.

On comprend, M. le Président, les craintes des citoyens parce que, depuis un certain temps, il y a eu finalement tout un débat sur les éleveurs porcins, finalement, et qui sont pointés du doigt comme étant les grands pollueurs. Et justement, dans cette consultation particulière à laquelle j'ai participé, j'ai écouté, M. le Président, des groupes venir nous expliquer toutes les technologies modernes qui sont mises de l'avant pour atténuer justement ces problèmes liés à la pollution.

Et, par ailleurs, M. le Président, comme le projet de loi est assez complexe et que, de plus, il ne résout absolument rien, le gouvernement a déposé hier une série d'amendements dont on n'a pas eu la chance, M. le Président, de les analyser, de les évaluer, et surtout de consulter les groupes concernés sur les impacts de ces amendements. Et ça, M. le Président, c'est encore du travail mal fait, du travail qui est mal attaché par ce gouvernement qui fait davantage dans l'improvisation plutôt que dans une saine gestion, M. le Président, du menu législatif.

Alors, M. le Président, le milieu agricole, depuis longtemps, réclamait effectivement des modifications à la loi qui est devant nous, et particulièrement à la loi concernant la protection du territoire agricole, et, en mai 2000, après plusieurs mois de négociations, l'Union des producteurs agricoles, l'UPA, et la Fédération québécoise des municipalités en sont venues à une entente pour une proposition de modification législative. Malheureusement, M. le Président, le projet de loi n° 184 qui est devant nous ne tient pas compte justement de ce consensus qui s'est dégagé entre l'Union des producteurs agricoles et la Fédération québécoise des municipalités.

Tout ça, M. le Président, pour vous dire que l'Union des producteurs agricoles a émis un communiqué, hein, elle a émis un communiqué en date du 8 février 2001, et je voudrais vous en lire des extraits, M. le Président. Projet de loi n° 184 sur la protection des activités agricoles, la moitié du chemin reste à faire, selon l'UPA. Je cite au texte: «Dans sa forme actuelle et en dépit des présentations avancées lors de son dépôt, le projet de loi n° 184 ne fait que la moitié du chemin nécessaire pour parvenir à une véritable solution.» C'est ainsi, M. le Président, que s'est exprimé le président de l'UPA, Laurent Pellerin, M. le Président.

Tout ça pour vous dire, M. le Président, qu'au-delà de l'opposition officielle qui a évidemment une opinion bien arrêtée sur ce projet de loi dans la mesure où il ne sert pas les producteurs agricoles, dans la mesure où il ne règle pas la problématique de la cohabitation entre les producteurs agricoles et les voisins, M. le Président, alors, que disent les autres personnes qui sont venues se faire entendre sur ce projet de loi? Permettez-moi, M. le Président, de vous citer quelques extraits.

Laurent Pellerin, président de l'Union des producteurs agricoles, 8 février 2001, il a dit ceci, M. le Président, devant la commission parlementaire: «Ce qu'il y a dans le projet de loi n'est pas problématique pour nous, pour l'essentiel de ce qui est dans le projet de loi. Le problème vient surtout du fait de ce qu'il manque dans le projet de loi, M. le Président.»

Quelqu'un d'autre, M. le Président, s'est prononcé sur ce projet de loi, Michel Belzil, président de la Fédération québécoise des municipalités, le 5 février 2001, dans un communiqué de presse, je cite: «Les orientations gouvernementales devront être modifiées, parallèlement au processus législatif, de façon à reconnaître aux municipalités une plus grande marge de manoeuvre pour déterminer l'emplacement des nouvelles exploitations agricoles.»

M. le Président, j'ai beaucoup d'autres citations que j'aurais pu vous présenter pour étayer notre positivement par rapport au projet de loi n° 184, mais, comme on est pressé par le temps, M. le Président, je voudrais tout simplement joindre ma voix à celle de mes collègues qui m'ont précédée pour témoigner de toutes les inquiétudes que nous avons par rapport au projet de loi n° 184. Je vous remercie, M. le Président.

n(21 h 30)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de La Pinière. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 184, et je reconnais l'adjoint parlementaire au ministre de la Sécurité publique et député de Roberval. M. le député, la parole est à vous.

M. Benoît Laprise

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureux de m'inscrire dans une démarche pour émettre une opinion sur cette loi n° 184, le projet de loi n° 184, parce que j'ai vécu le virage vert depuis plusieurs années au coeur de l'action. Parce que le virage vert, vous savez, il a commencé dans les années soixante-dix, lorsqu'on parlait de la protection du territoire agricole, et c'est heureusement sous le gouvernement de M. René Lévesque, qui a réussi à appliquer cette loi-là, à pondre cette loi-là et la mettre en application, dans les années 1978... Après beaucoup de consultations, on a mis en place, on a réservé ce territoire vert pour la production agricole à travers tout le Québec. C'était une loi qui était difficile à passer, c'était une loi qui prenait du courage et de l'audace pour la passer, et le gouvernement précédent ne l'avait pas réussi, à la faire passer, dans le temps.

Et, suite à cette loi-là, ça l'a créé... Avant que la loi soit bien appliquée, avant que tous les zonages soient faits et que la Commission soit en place, il y a eu beaucoup de discussions avec les municipalités. J'ai déjà participé à certaines de ces discussions pour faire reconnaître des territoires qui permettaient aux municipalités de se développer.

Je pense, ce qui cause le problème majeur dans ce projet-là... Pas dans le projet de loi lui-même, mais dans cette entente-là avec les gens des villes, les gens du milieu urbain, c'est qu'on a toujours opposé le monde agricole au monde urbain, alors que l'agriculture peut devenir un associé de l'environnement. Et je pourrais vous le prouver parce que j'ai vécu des expériences, dans une autre vie, dans le monde municipal. Lorsque l'assainissement des municipalités s'est fait, il a coûté au-delà de 7 milliards, 7 700 000 000 $ qui a été payé à 85, à 90 % par le gouvernement. Les cultivateurs, les agriculteurs, de par leurs taxes, y ont participé alors qu'ils ont participé à 50 % dans leur propre assainissement au niveau des fermes. Ça a coûté au-delà de 500 millions. Dans mon comté, entre autres, je pense que les agriculteurs ont été aussi à l'avant-garde de l'environnement, comme n'importe quelle classe de la société. Ils ont été des artisans de l'amélioration de la qualité de vie de leur famille et de la qualité de vie également de leur entourage, de leur environnement.

Je pense que les agriculteurs du Saguenay?Lac-Saint-Jean, deux fermes sur trois actuellement ont réglé leurs problèmes au niveau des réserves d'engrais, des réserves d'engrais. Et vous avez également les agriculteurs... Dans ces années-là, lorsque la réforme est arrivée, quand même, le ministère de l'Agriculture a toujours été présent sur le plan technique auprès des agriculteurs pour d'abord protéger les sols contre l'érosion. Ça a été... On a appliqué des mesures culturales pour protéger les sols de façon systématique contre l'érosion. On en applique aujourd'hui pour protéger également l'environnement, parce que l'agriculture, comme tel, avec ces plantes qu'elle sème, elle peut même aider à purifier l'air, avec des plantes appropriées à cet effet-là.

Alors, je crois que l'agriculture est loin d'être un ennemi de l'environnement, elle est un partenaire excessivement important, et les agriculteurs, aussi bien comme n'importe qui, ont travaillé fermement à améliorer la beauté des fermes, la beauté des rangs, en étant beaucoup plus propres, et planter des arbres, faire des pelouses, planter des fleurs. On sait qu'il y a toutes sortes de concours qui ont été organisés par le ministère de l'Agriculture, qui a amélioré justement tout l'environnement de l'agriculture, et ça laisse présager, ça identifie bien les préoccupations des agriculteurs face à leur propre environnement.

Maintenant, si on revient, suite à 1978, à la Loi de la protection du territoire agricole, en 1992, après sept ans de pouvoir du gouvernement précédent, on n'avait pas encore réussi à se pencher sur le problème des activités agricoles. On a mis en place une commission, la commission Ouimet, qui a déposé un rapport. On a fait un projet de loi, la loi 123, et voici le résultat que ça a donné: Considérée décevante pour le secteur agricole car elle ne contient aucune mesure susceptible d'assurer la protection des activités agricoles. Et je pense que, dans la loi n° 184, dans toute la démarche qui a été faite par le gouvernement depuis l'élection de 1994, ça prouve que le dossier est important. Et je pense que ça a permis aussi à la population urbaine de se pencher sur l'importance de l'agriculture.

Dernièrement, j'assistais à l'inauguration d'un supermarché de 24 000 pi² dans le secteur chez nous, et tout le monde était émerveillé de voir l'étalement des produits agricoles sur toutes les tablettes: la viande, les légumes, les céréales. C'était extraordinaire de voir la qualité, la façon que c'était présenté. Et, comme on m'a invité à prendre la parole, alors j'ai invité les gens à réaliser que ce qui était sur les tablettes, ça avait été dans la terre, ça avait coûté des sueurs puis du travail de la part des agriculteurs, et ça poussait pas dans les tablettes, et ça méritait quand même quelques inconvénients de l'environnement pour dire qu'on assume pleinement de nourrir la population.

On attache beaucoup d'importance actuellement à l'essence puis à l'énergie électrique, mais qu'est-ce que ça ferait si on manquait de manger demain matin? Qu'est-ce que ça ferait dans le monde? Regardez les peuples qui n'ont plus de productivité agricole, c'est des peuples qui sont en sous-développement, alors que, nous autres, on est dans l'abondance des produits agricoles parce qu'on a eu des gens, des agriculteurs vigilants, dynamiques, préoccupés par cette qualité de produire, qualité de production.

Et, vous savez, dans les années soixante-quinze, quatre-vingt, quatre-vingt-cinq, quatre-vingt-dix, peut-être un petit peu avant ça même, encore une preuve que les agriculteurs étaient conscients de ça: on se faisait recommander, dans les années soixante... entre soixante et soixante-quinze, des plans de fertilisation très généreux au niveau des engrais chimiques. Actuellement... Vous savez, j'ai connu des agriculteurs, dans le temps, qui mettaient 30 à 35 t d'engrais chimiques par année sur un lot et demi, deux lots de terre. La même ferme aujourd'hui est une ferme biologique, elle ne met plus une graine d'engrais chimique, pas du tout, elle produit un fromage biologique, elle transforme son lait sur place, et c'est devenu quand même une ferme qui a une notoriété biologique importante.

Alors, je crois qu'il faut encourager les agriculteurs et je crois que cette loi-là, qui a été pensée, qui a été réfléchie, qui a été discutée... Imaginez, dans l'espace de six ans, on a fait quatre commissions parlementaires. Alors, quand on dit qu'il y a pas eu de consultations, on a fait quatre commissions parlementaires sur le projet de loi du droit de produire. On a consulté un paquet de monde. Mais je pense que le cheminement était bon, parce que justement on a fait réaliser au monde urbain que l'agriculture était importante, et je vous donnais un exemple comme de quoi l'agriculture est très utile à l'environnement.

Prenez comme l'assainissement des eaux. Moi, j'ai été maire de Saint-Félicien. On a fait l'assainissement des eaux en 1983. Alors, en 1992, c'était le temps de vider les étangs parce que c'étaient des étangs avec sédimentation, alors il y avait des boues usées. Alors, ça représentait, les boues, une activité importante au niveau financier pour la ville. Mais je me suis dit: Je serais aussi bien de retourner ça à ma population, ce serait quasiment comme un retour de taxes, on va leur retourner chacun leurs boues. Ça représentait à peu près un baril par personne. Alors, j'ai annoncé au conseil de ville qu'on allait distribuer un baril de boues usées sur les parterres parce que c'était un bon engrais, la pelouse serait belle, puis les fleurs seraient belles, puis le jardin serait beau, hein. Alors, moi, j'étais content, j'ai dit: C'est bien clair que tout le monde vont se garrocher pour venir chercher leur baril. Mais, le lundi d'ensuite, la salle était pleine, et puis ils ont dit... J'ai dit: À quelle place qu'on va mettre ça? Moi, je le savais, à quelle place qu'on allait le mettre. Je leur ai demandé: À quelle place qu'on va le mettre? Bien, mettez-le sur les terres. Alors, les terres sont devenues un réceptif à tout ce qui se passe de déchets au niveau de l'ensemble de l'urbanisation. Alors, on a servi à ça.

On fait face actuellement, au niveau des entreprises forestières, à un surplus de biomasse qui est en train de pourrir sur les terrains, c'est des centaines de 1 000 t que nous avons dans le comté de Roberval au niveau de la biomasse forestière. Actuellement, il y a un projet qui est sur la table, on est en train de regarder ça pour associer ça avec l'engrais de ferme pour faire un compost qui serait sans odeur et qui permettrait de s'étendre sur les fermes, qui... ça produirait pas d'odeur et ça réglerait à la fois un problème de matières organiques et un problème d'environnement pour les industries forestières, parce que, pour eux autres, c'est un problème très grave, c'est un problème qui va leur coûter énormément cher si on ne trouve pas une solution pour être capables d'utiliser à bon escient ces résidus-là. C'est bien clair.

Alors, ça représente quand même une collaboration de la part du monde rural à la protection de l'environnement. Et les agriculteurs, autant comme n'importe quelle profession dans nos collectivités, sont conscients de cette importance-là et de la collaboration qu'ils doivent apporter à la protection de l'environnement. Et je crois que la loi n° 184, justement, c'est une loi qui va permettre... qui a eu beaucoup de discussions, mais ça a permis aux gens de cheminer vers un consensus pour retrouver, chacun, leur importance dans ce dossier-là, chacun leur utilité. Les agriculteurs... L'agriculture est utile à l'environnement. Comme le monde urbain en a besoin, de l'agriculture, il a besoin également de protéger son environnement, tant dans l'industrie.

n(21 h 40)n

Au niveau des senteurs. C'est vrai, il y a des senteurs; j'ai été élevé là-dessus, moi. C'est pas mêlant, j'ai élevé neuf enfants parmi ces senteurs-là, puis ils sont pas plus malades pour autant, là, tu sais. Je les emmenais dans l'étable, ils étaient petits bébés, longs de même, dans des carrosses, puis ils sont pas morts pour autant, là, tu sais. Ils sont en santé, ceux-là qui vivent; celui-là qui est mort, il a pas pris sa maladie dans l'étable...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Laprise: ...il l'a prise ailleurs, hein? Alors, je pense, moi, que le monde agricole se doit d'être respecté. Parce que, vous savez, l'automne passé, au niveau des agriculteurs, ils avaient vraiment le moral à terre face à la contestation qu'il y avait, et je pense que le cheminement qui s'est fait, ça a permis de faire prendre conscience de l'importance de l'agriculture dans le domaine de l'environnement et que les agriculteurs sont prêts à s'associer, sont prêts à faire le virage vert. Il faut leur donner le temps, ça se fait pas dans 24 heures.

Il va falloir également... Vous savez que la Financière agricole, avec des programmes également, ils vont être en mesure de permettre aux agriculteurs aussi de régler leurs problèmes d'environnement de façon constructive, de permettre aux jeunes de s'établir même s'il y a un problème d'environnement. Peut-être, à l'occasion d'un problème d'environnement, ça va permettre de trouver une solution même pour l'établissement du jeune. Parce qu'on va regarder l'entreprise dans son ensemble; on va la projeter dans le temps, sur une période de 10, 15 ans, et ça va nous permettre de faire un financement adapté à un jeune qui aura la compétence pour le faire, lui donner l'opportunité de s'établir sur la ferme et d'y vivre avec sa famille.

En tout cas, je suis persuadé qu'on est rendu à terme au niveau de ce projet de loi là. Il faut qu'il soit passé; c'est urgent. Les agriculteurs ont besoin de cet élément de confiance là de la part du gouvernement et de la part de l'ensemble de la population. Et, c'est sûr, il y en aura peut-être, des petits aménagements après; c'est bien évident. Vous savez, une loi, on s'aperçoit qu'elle est bonne quand on l'applique. Tant qu'on l'a pas appliquée, on peut pas dire vraiment qu'elle est pas bonne. Alors, quand elle sera appliquée, qu'on se sera aperçu qu'il y aura des lacunes à différents endroits, on le corrigera en temps et lieu. Moi, je pense que ça fait partie des responsabilités des hommes élus, qui sont en mesure de corriger les lois comme d'en faire des nouvelles.

Alors, je vous remercie beaucoup, M. le Président, de m'avoir donné l'opportunité de m'adresser à cette assistance afin aussi d'éveiller la conscience collective face à l'importance de l'agriculture, à la fois pour donner de l'énergie... Parce que je vous parlais tout à l'heure de l'énergie, mais, l'agriculture, c'est l'énergie du corps humain. C'est doublement important, il ne faudrait jamais en manquer. Parce que, le matin qu'on manquera d'énergie pour le corps humain, on sera vraiment en perte de vitesse grave.

Alors, mes amis, j'invite mes collègues députés à voter de façon très ferme à ce projet de loi. J'invite même les gens de l'opposition ici à s'associer à nous autres; ils sont associés à la discussion. À un moment donné, on pensait qu'ils allaient voter avec nous autres à chaque fois qu'on allait passer un article. Je suis persuadé encore que, dans l'étude article par article, on va peut-être permettre encore d'assouplir ou encore de rendre encore la loi plus flexible, qui répond le plus aux besoins de l'agriculture d'aujourd'hui. Merci beaucoup, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Roberval. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives, et je reconnais le prochain intervenant, il s'agit du critique officiel de l'opposition en matière de transport métropolitain et de tourisme, M. le député de LaFontaine.

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. M. le Président, le projet de loi n° 184 est certainement un projet de loi extrêmement important pour le monde agricole, pour les citoyens du Québec qui résident en zone verte, mais aussi bien sûr pour le monde du tourisme. Car on sait, à partir de maintenant ? depuis quelques années, du moins, en particulier, mais de plus en plus actuellement ? d'une manière très, très précise qu'un grand nombre d'activités touristiques se déroulent dans les régions du Québec et que nous allons de plus en plus avoir à relever le grand défi, le défi que d'autres pays, d'autres nations ont su relever, M. le Président, qui est la cohabitation non seulement du monde agricole, des grandes installations de production ou d'élevage, mais aussi des résidences qu'ils ont autour, et bien entendu, M. le Président, du tourisme, des grandes installations touristiques ou des destinations touristiques plus traditionnelles.

Alors, M. le Président, le projet de loi n° 184 se voulait un projet de loi qui visait à trouver certaines solutions ou certaines ouvertures à ces problèmes-là. Et, malheureusement, M. le Président, force est de constater que le projet sous sa forme actuelle ne répond pas à ces besoins puis à ces demandes-là, particulièrement, M. le Président, dans le domaine touristique. Et c'est un domaine que j'aime beaucoup, car, vous savez, au Québec, le tourisme est une industrie assez importante, une industrie qui fait vivre, dans certaines régions, jusqu'à une personne sur trois; une industrie, M. le Président, qui fait en sorte que des jeunes restent dans les régions, des jeunes qui ne peuvent pas travailler dans l'agriculture ou dans l'élevage mais s'installent dans des hôtels, dans des activités touristiques, dans des auberges, des restaurants, des pourvoiries, enfin différentes activités, M. le Président, qui font en sorte que des dizaines, même des centaines de milliers de touristes, soit Québécois, mais aussi Européens, Américains ou d'autres pays à travers le monde, même du Japon, eh bien, viennent passer du temps chez nous, au Québec, et, M. le Président, viennent surtout parce qu'ils apprécient nos campagnes, apprécient la nature, apprécient les grands espaces, apprécient les berges sauvages et très, très, très belles, magnifiques, et uniques peut-être même, du fleuve Saint-Laurent, que l'on retrouve pas dans beaucoup de pays du monde.

Et, M. le Président, eh bien, de l'autre côté, nous avons aussi toute l'activité économique agricole, particulièrement l'élevage, qu'on connaît actuellement, dans le domaine du porc ou dans le domaine laitier, et cet élevage, eh bien, de plus en plus, est passé de l'activité traditionnelle d'agriculture qui était familiale, avec une petite ferme où la famille, et le père, les enfants, la mère et bien souvent le grand-père travaillaient sur la ferme, et avaient une ferme de grandeur moyenne, petite, même, bien souvent... Et là nous sommes passés maintenant dans un cycle très différent, nous sommes rentrés dans l'ère de l'industrialisation de l'agriculture, particulièrement de l'élevage. Et là nous avons de véritables entreprises, ce ne sont plus les petites fermes que nous connaissions, celles de nos grands-parents.

Il est vrai que, moi, M. le Président, étant arrivé seulement ici depuis 30 ans, j'ai pas connu les fermes québécoises d'il y a... de mes grands-parents, mais j'ai connu, en Bourgogne où ma mère réside, l'agriculture et les petites fermes, qui sont encore là, M. le Président. Et, quand je regarde ce qui se passe, quand je me promène, dans les tournées thématiques pour lesquelles le parti nous envoie, les députés libéraux, contacter les populations, prendre le pouls des citoyens, bien, quand je vois ces fermes, cette agriculture traditionnelle, il est vrai qu'elle existe encore, comme elle existe encore dans certaines régions de France, de Grande-Bretagne, d'Allemagne ou d'ailleurs, et même d'Italie, M. le Président.

Mais, tout à côté de ça, il y a, comme dans ces pays européens, comme dans ces pays industrialisés, eh bien, je le disais précédemment, l'industrie de l'élevage, l'industrie agroalimentaire qui, elle, M. le Président, eh bien, n'est plus la ferme traditionnelle. Et là, c'est là que ça apporte le problème de la cohabitation entre les citoyens et entre ces grandes industries, parce que, comme toute industrie, eh bien, M. le Président, ces exploitations ont besoin de se développer, ont besoin d'occuper de l'espace, ont besoin d'occuper du terrain et ont besoin d'avoir les moyens d'avoir des cadences et des productions importantes si elles veulent être compétitives sur le marché, parce que force est de constater que dans certains domaines... Je dis pas dans tous les domaines agricoles, mais, dans certains domaines, eh bien, M. le Président, particulièrement dans l'élevage, il faut avoir du volume, il faut avoir des installations importantes si l'on veut être capable d'avoir des coûts de production intéressants qui permettent de vendre ce qu'on élève, bien sûr, non seulement au Québec, mais à l'étranger.

Et on sait que le Québec est un des principaux exportateurs de porc au monde. On trouve du porc québécois aux États-Unis, on en trouve en Italie. On trouve du veau québécois aussi en Italie. On trouve en France, on trouve en Allemagne... Le porc québécois est devenu une denrée, une production très recherchée non seulement par sa qualité, hein, sa qualité de viande, mais aussi par les normes qui font que la viande ne recèle pas d'antibiotiques ou ne recèle pas de substances que malheureusement dans certains pays on retrouve trop souvent et que les consommateurs boycottent et boudent à juste titre M. le Président, parce que personne n'a envie, aujourd'hui, dans notre société, qu'elle soit canadienne, québécoise, américaine, ou européenne, ou même japonaise, eh bien, M. le Président, de faire... de consommer ou de faire consommer à sa famille, à ses enfants ou soi-même, eh bien, des viandes qui recèlent toutes ces substances chimiques.

Alors, M. le Président, c'est sûr que ça amène une révolution de l'agriculture, ça amène une révolution de la façon de produire, ça amène une révolution... aussi des changements dans l'occupation du terrain, et ça amène donc de nouvelles normes, ça amène de nouvelles façons de faire, et ça amène de nouvelles contraintes aussi.

Alors, le gouvernement, bien sûr, doit voir à départager les intérêts de chacun et agir dans le meilleur intérêt de l'ensemble de la collectivité québécoise. Et, M. le Président, on aurait pensé que, dans ce projet de loi là, eh bien, le gouvernement aurait trouvé des solutions et aurait fait en sorte de satisfaire tous les intervenants. Mais force est de constater qu'après les audiences publiques qui ont été tenues les 6, 7 et 8 février de l'année dernière... de cette année, pardon, M. le Président, eh bien, il n'y a pas eu de consensus. Les groupes, très majoritairement, les groupes qui sont venus se faire entendre en cette Chambre, en commission parlementaire, ont fait savoir, eh bien, que le projet ne réglait rien et que ça ne répondait pas aux questions et à la problématique du droit de produire, à la vision moderne et actuelle des contraintes et des problématiques que le monde agricole moderne, nouveau, a rencontrées ? et aussi le traditionnel, il est vrai aussi, pour une certaine partie ? mais que les citoyens aussi devaient vivre, les résidents, avec ces contraintes.

n(21 h 50)n

Et, pour le tourisme, M. le Président, j'aurais une anecdote à vous donner. Je parlais il y a quelque temps avec des gens en Gaspésie, M. le Président, qui me faisaient savoir qu'un très beau site, que je ne nommerai pas... C'est jamais très bien de faire de la publicité négative devant la télévision, hein, les gens, je crois, préfèrent que cette situation se règle à l'amiable plutôt que de la régler devant les caméras, parce que ça a toujours un impact, bien sûr, sur la fréquentation touristique. Eh bien, ils me disaient qu'un établissement touristique qui, malheureusement, était situé à 2 km et quelques centaines de mètres d'une de ces grandes fermes ultramodernes d'élevage, eh bien, connaissait des problèmes à cause des vents tournants et des odeurs de l'élevage, qui, ma foi, en campagne, sont des odeurs tout à fait naturelles mais qui, lorsqu'il y a du tourisme et d'autres activités, eh bien, peuvent être dérangeantes à l'occasion, eh bien, ça leur créait un certain nombre de problèmes. Et c'est là une des meilleures illustrations que l'on peut faire, M. le Président, de la problématique en ce qui concerne particulièrement le tourisme. Ce qui veut pas dire que les citoyens résidents n'ont pas cette difficulté.

Alors, comment trouver l'équilibre? Comment trouver l'équilibre entre le droit ou la plénitude de vie des citoyens et la capacité des institutions touristiques de fonctionner toutes sans pour autant aliéner ou compromettre cette grande activité agricole qui fait de notre province, de notre État québécois, notre État provincial à l'intérieur du Canada, eh bien, un des principaux... un des principal, pardon, producteur de certains produits agroalimentaires, M. le Président, en particulier dans l'élevage?

Eh bien, M. le Président, nous aurions pensé que le gouvernement, dans sa sagesse, aurait écouté les citoyens, aurait écouté les organisations qui sont venues lui parler, aurait écouté même nos porte-parole: le député d'Argenteuil, un jeune homme qui a beaucoup de passion envers ces problématiques, qui a fait un certain nombre de remarques au nom de notre aile parlementaire, et notre leader, le député de Brome-Missisquoi, qui, comme chacun le sait, est un spécialiste non seulement de l'environnement, mais aussi du monde agricole. Eh bien, le gouvernement a fait fi de cela et n'a pas tenu compte de ces remarques et de ces propositions.

Puis il y a pas seulement eux, M. le Président. Vous qui êtes un vice-président de l'Assemblée nationale, donc un député élu, mais qui avez aussi une formation juridique, vous savez comme moi que le Barreau du Québec est un organisme éminemment respectable, qui est respecté dans le Québec. Eh bien, même le Barreau, M. le Président, s'est prononcé sur ce projet de loi là. Je veux dire, pourquoi le Barreau se prononce sur l'agriculture? Bon, des esprits démagogues ou simplistes pourraient dire: Bien, voyons... Bien oui, M. le Président, parce que ça touche les droits des citoyens, ça touche la liberté des citoyens. Et je crois qu'il est sage et approprié que le Barreau du Québec, qui se prononce sur un grand nombre de nos projets de loi, eh bien, puisse se prononcer sur celui-là. Eh bien, M. le Président, le Barreau n'y va pas de main morte, parce que, une fois qu'il a eu fini l'analyse du projet de loi... je pourrais le lire, je pourrais, M. le Président... C'est parce que j'ai peu de temps. Mais j'aimerais peut-être faire juste un petit... un commentaire.

Le Barreau, il dit, en parlant des normes environnementales: De quelles normes environnementales s'agit-il? S'agit-il de règlements? Si oui, lesquels? Ce n'est pas précisé. Qui va édicter ces normes? Est-ce que les normes vont être édictées par le ministre? Est-ce qu'elles vont être édictées en fonction de pressions locales? Est-ce qu'elles vont être édictées sans collaboration ou sans consultation avec le milieu ou avec... Est-ce qu'elles vont être édictées pour supporter un lobby ou un autre lobby? Qui va édicter les normes? Qui va décider ça? Ce n'est pas précisé, M. le Président. Et vous savez comme moi que, lorsque ce n'est pas précisé, ça laisse place à l'arbitraire. Et, partout où il y a l'arbitraire, c'est jamais dans le meilleur intérêt des citoyens et de la société. Alors, M. le Président, c'est là un manquement grave que le Barreau du Québec fait ressortir.

Il y a aussi, M. le Président, peut-être cette mise en garde que le Barreau mentionne: Ces normes ne risquent-elles pas d'être négociées à la pièce? Eh oui, parce que, lorsqu'on fait place à l'arbitraire, eh bien, on négocie à la pièce: Tu me donnes ça, je te donne ça, ou tu me permets d'envoyer... d'établir telle catégorie d'élevage, et puis, de l'autre côté, bon, bien, moi, je vais établir tel genre d'habitation à l'autre bout. M. le Président, c'est à la pièce, et il n'y aura pas de vraie politique, il n'y aura pas de vraies normes. Et je pense que, pour les gens qui nous écoutent ce soir, c'est important qu'ils comprennent que nous sommes là devant un projet de loi qui est un projet de loi qui est pas bien fait, qui est mal ficelé, qui ne correspond pas au meilleur intérêt du citoyen, qui ne correspond pas à la concertation non plus et qui ne correspond pas à l'objectif pour lequel il est dit, soit de régler, je le disais au début, les problèmes de cohabitation entre l'agriculture, la nouvelle agriculture ? pas l'agriculture; l'agriculture, c'est pour cultiver ? entre le monde agricole, qui comprend bien sûr l'élevage, les citoyens qui résident pas loin et, M. le Président, bien sûr aussi, le monde touristique. Et, pour moi, c'est important parce que, comme porte-parole du tourisme pour le Québec, je sais l'importance et le nombre d'emplois, le nombre de personnes qui travaillent grâce au tourisme; et ne pas faire attention à cela serait mettre en péril une partie de cette industrie et créerait certainement dans les régions du Québec des dégâts, des dommages importants pour un certain nombre de citoyens.

Et qu'est-ce qu'il dit? Je vais continuer avec le Barreau, M. le Président: Pourquoi créer un régime de protection de l'environnement particulier en matière d'assurance agricole en marge du régime administratif et réglementaire établi sous l'autorité de la Loi sur la qualité de l'environnement? Oui, pourquoi le créer, M. le Président? Très bonne question que le Barreau pose. Ils continuent, M. le Président, les gens du Barreau. Et le Barreau, pour les gens qui nous écoutent, pour les Québécois et les Québécoises qui peut-être seraient un peu moins familiers avec ce terme, «le Barreau», c'est le regroupement des avocats du Québec, M. le Président. C'est eux qui établissent les normes. D'ailleurs, pour les citoyens qui nous écoutent, lorsqu'un de vos enfants va faire son droit à l'université, bien, quand il a fini son baccalauréat en droit, il ne peut pas pratiquer sa formation d'avocat. Il va falloir qu'il passe une année dans des stages et dans un cabinet d'avocats et qu'il suive des cours. C'est ce qu'on appelle faire son Barreau. Et là il sera reçu par le Barreau, donc par l'association ou l'organisation des avocats du Québec. Je ne me trompe pas, M. le Président, je pense, hein, quand j'explique ça? Je vous remercie. Vous-même, vous l'avez fait, d'ailleurs. Eh bien, et là il aura le droit de pratiquer.

Donc, c'est vraiment l'organisme suprême. Et, M. le Président, ces gens-là du Barreau, qui sont, après tout, la conscience de notre justice... c'est la conscience, c'est des gens qui n'ont pas d'intérêts politiques, ils ne sont pas avec un parti politique ou avec un autre, ils ne sont pas souverainistes, fédéralistes. Eux, ils sont là pour gérer l'administration du droit et des lois au Québec, pour le Québec. Ç'a n'a rien à voir avec le gouvernement fédéral, ç'a n'a rien à voir avec les autres provinces. C'est chez nous, ici. Ça se passe chez nous. On peut leur faire confiance, on peut les considérer comme étant crédibles. Et qu'est-ce qu'ils disent, M. le Président? Moi, j'avais... petite présentation, pour bien situer, pour nos téléspectateurs, pour les gens qui nous écoutent, c'était quoi, le Barreau. Ils disent: Le caractère vague et imprécis des normes à respecter en matière d'assurance récolte et d'assurance stabilisation reflète malheureusement le peu de crédibilité environnementale à accorder au projet de loi n° 184. M. le Président, c'est ça qu'ils disent, le Barreau. C'est pas le député de LaFontaine qui dit ça tout seul. Le député de LaFontaine, je vous le dirais, il a une expérience agricole, parce que, comme porte-parole au tourisme, il y a des gens qui viennent le voir, qui lui font des remarques, et aussi il aime beaucoup l'agriculture et il est conscient, comme tous les députés libéraux, d'ailleurs, de l'importance de l'industrie agricole, de l'importance de toute cette sphère d'activité là, M. le Président.

n(22 heures)n

M. le Président, j'irais même plus loin que ça. Vous savez, le projet de loi était tellement bon, c'est tellement un bon projet de loi, le gouvernement a tellement amené un projet de loi qu'il était prêt à bulldozer, prêt à passer par-dessus tout le monde en disant: Nous avons la vérité, nous avons encore la voie, nous connaissons les choses, et, les autres, enlevez-vous de là, nous avons raison, et c'est là que nous allons aller. Bien, savez-vous ce qu'il a fait hier, le gouvernement, M. le Président? En dernière heure, à la dernière minute, un article... un projet de loi qui a 32 articles, M. le Président, pour les Québécois et les Québécoises qui nous écoutent, 32 articles dans le projet de loi n° 184, eh bien, le gouvernement, hier soir, a déposé 74 amendements. Ça veut dire qu'il a travaillé des mois et des mois pour déposer un projet de loi dans lequel il met 32 articles, ça veut dire qu'il y a plus que deux changements par article dans ce projet de loi là, M. le Président. Ça vous démontre quel est le fouillis du projet de loi. Ça vous démontre le peu d'attention qui a été porté par les gens qui l'ont écrit. Est-ce que c'est le ministre? Est-ce que ce sont les fonctionnaires? Je ne le sais point. Je crois qu'il y a un peu un mélange de tout ça. Et pourtant, ce projet de loi a dû passer au Comité de législation. Il n'est pas tombé, comme ça, sur le bureau du ministre ou sur le bureau du député de LaFontaine. Il a dû passer dans le caucus des députés du Parti québécois. Bien que j'aie lu, M. le Président, j'ai lu dans un journal où... je veux pas mettre personne en cause, j'ai entendu et j'ai lu que les derniers projets de loi présentés par le gouvernement n'avaient jamais été soumis, pour une bonne partie d'entre eux, ou plusieurs d'entre eux ? je fais attention aux mots que j'emploie ? eh bien, à leur caucus.

Alors, M. le Président, on peut très bien comprendre ça parce que, si les députés... si le député, M. Laprise, avait vu le projet de loi avant, si d'autres députés l'avaient vu avant, hein, le projet de loi, bien, peut-être qu'on n'aurait pas eu 74 amendements sur 32 articles, peut-être que les amendements auraient déjà été dans l'article... auraient déjà été dans le projet de loi. Peut-être que, si le gouvernement était à l'écoute de ses propres députés, de sa propre députation et à l'écoute des agriculteurs du Québec, à l'écoute des citoyens du Québec, à l'écoute de l'industrie touristique du Québec, eh bien, M. le Président, on aurait un projet de loi, ce soir, qui correspondrait à un large consensus, du moins à une solution générale de la situation un peu particulière qui prévaut dans ce domaine-là.

Et c'est pour ça que, nous, comme députés, M. le Président, eh bien, nous devons, nous n'avons d'autre choix que, bien, de porter attention, de questionner le gouvernement, de l'interpeller, de lui dire: Attention, attention, si vous avez cru bon d'apporter 74 amendements sur 32 articles, hein, il est fort possible, fort probable que vous ayez pas tout vu, ce que vous n'avez pas vu la première fois, il y a là encore des choses à changer, des choses à améliorer. Donc, nous vous mettons en garde, nous invoquons auprès de vous la plus grande attention ? comment dirais-je? ? la plus grande réserve, la plus grande prudence avant de vouloir forcer l'adoption de ce projet de loi là ou de l'adopter tel qu'il est maintenant.

Et, M. le Président, je voudrais... le temps coule, le temps coule, et il y a tellement de choses à dire sur ce merveilleux monde qu'est le monde agricole, hein, en pleine mutation, comme je le disais, mais qui permet au Québec d'avoir des retombées phénoménales au niveau économique, mais aussi sur la vie des citoyens puis sur le tourisme québécois. Eh bien, il y a tellement de choses qu'on pourrait dire que ça nous prendrait une heure. Malheureusement, comme député, j'ai droit seulement qu'à 20 minutes. Alors, notre porte-parole, tout à l'heure, le député d'Argenteuil, lui, a pu parler pendant une heure pour essayer de convaincre le gouvernement, convaincre le ministre du bien-fondé de faire attention avant d'adopter ce projet de loi là. Et il y a pas juste lui.

Je vais lire, M. le Président, ce que disait le président de l'Union des producteurs agricoles au début de l'année, là, un peu plus tôt... un peu plus tard que le début de l'année, M. Laurent Pellerin: «Ce qu'il y a dans le projet de loi n'est pas problématique pour nous pour l'essentiel de ce qui est dans le projet de loi. Le problème vient surtout du fait de ce qu'il manque dans le projet de loi.» C'est M. Pellerin qui disait ça.

M. Michel Belzil, président de la Fédération québécoise des municipalités: «Les orientations gouvernementales devront être modifiées parallèlement au processus législatif de façon à reconnaître aux municipalités une plus grande marge de manoeuvre pour déterminer l'emplacement des nouvelles exploitations agricoles.» Un autre son de cloche différent.

M. Maxime Laplante, coalition «Sauver les campagnes» ? c'est pas n'importe qui, M. Maxime Laplante ? qu'est-ce qu'il dit, M. Laplante? «Oui, effectivement, on veut s'assurer que c'est viable, mais présentement on a un modèle d'agriculture qui fait que le démarrage est impossible.»

Bien, le projet de loi n° 184 ne répond pas à cette problématique du démarrage et de la relève agricole, M. le Président. Au contraire, il fait en sorte de créer de nouvelles embûches, et non seulement ne solutionne-t-il pas la cohabitation avec les citoyens, avec le monde du tourisme, avec d'autres industries, mais, en plus de ça, il y a rien là-dedans, M. le Président, qui fait en sorte que le monde de la relève, que les jeunes Québécois et les jeunes Québécoises vont pouvoir se lancer en agriculture, prendre la relève de leurs parents ou partir simplement de nouvelles industries ou de nouvelles exploitations agricoles.

Alors, M. le Président, c'est pour ces raisons-là que nous avons de nombreuses réserves sur le projet de loi et c'est pour ces raisons-là que nous demandons au gouvernement, nous l'exhortons de bien vouloir prendre tout le temps et de prendre toute l'attention qu'il faut pour avoir un projet de loi qui est cohérent, qui se tienne debout et qui soit dans le meilleur intérêt de tous les secteurs qui sont impliqués, qui vont être touchés par ce domaine agricole et industriel extrêmement important pour le Québec et les Québécois, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viger. M. le député.

M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. J'interviens, moi aussi, sur le projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives. M. le Président, je pense qu'à ce moment-ci le ministre a été toujours présent et il est encore actuellement à écouter beaucoup des recommandations de la part de l'opposition, et je pense que, étant donné qu'il est... J'ai eu l'occasion d'être avec lui en commission parlementaire sur d'autres projets de loi, je pense qu'il est très sensible aux recommandations et aux objections que l'opposition a vis-à-vis ce projet de loi là, M. le Président, et ce n'est pas seulement l'opposition officielle qui a des craintes sur la situation qui est libellée... de la façon qu'est libellé le projet de loi n° 184.

M. le Président, j'écoutais tantôt le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition officielle qui a dit au ministre ? et je voudrais pas lui répéter la même chose ? qui a dit au ministre que la première législation dans laquelle a pris vraiment... par une commission parlementaire, c'est celle sur le mérite agricole. C'est vrai, j'étais là, le ministre, il se souvient. Il sourit actuellement, justement, parce qu'on était là puis on a discuté longtemps sur cette situation-là, M. le Président, parce qu'on a présenté un projet de loi uniquement pour deux choses: pour ajouter le mot «national», mérite agricole national, et pour enlever, M. le Président, pour enlever le mérite à la restauration. On se rappelle, on a fait beaucoup de blagues avec le ministre à un certain moment, mais on a dit: Mais pourquoi présenter un projet de loi pour enlever le mérite à la restauration? Bien, il a dit: On l'a jamais adopté, on a toujours, disons... a été adopté en 1985, mais on l'a jamais mis en pratique. C'était seulement jusqu'en 1989, l'été 1989. À date, ç'a jamais été vraiment mis en pratique.

Mais, M. le Président, moi, je pense que le ministre, il devrait donner sa marque de commerce aujourd'hui, parce que, sur la question de produire, je pense que c'est primordial pour la classe agricole au Québec. M. le Président, vous savez sans doute que l'agriculture au Québec, c'est un peu le moteur de l'économie québécoise. M. le Président, les agriculteurs, ils font beaucoup d'efforts. Vous le savez très bien, il y a des années où ils font des efforts puis la récolte est pas tout à fait ce qu'ils s'attendent, et je pense que ces personnes-là, elles s'attendent, spécialement de la part du gouvernement, d'avoir certaines responsabilités, d'avoir certaines prises en considération de la problématique que vivent ces agriculteurs et ces agricultrices, M. le Président, mais j'ai l'impression ? j'espère que c'est seulement une impression ? j'ai l'impression que le gouvernement actuel, il fait de la sourde oreille à ces revendications et à cette problématique que vit le monde agricole, M. le Président. Et pourtant je pense que le ministre justement qui vient des zones agricole et maritime au même moment, parce que je pense qu'il vient des Îles-de-la-Madeleine, il devrait vraiment être conscient de cette situation et il devrait vraiment prendre en considération cette problématique que vivent ces personnes qui sont concernées par l'agriculture.

n(22 h 10)n

Et, M. le Président, je répète, ce n'est pas moi seulement ou l'opposition officielle qui pose des questions dans ce sens-là. Qu'est-ce que disait l'UPA, l'Union des producteurs agricoles? M. le Président, l'UPA, ils disaient: «Le projet de loi n° 184 sur la protection des activités agricoles, la moitié du chemin reste à faire, selon l'UPA.» Et je lis le communiqué de l'UPA, M. le Président. «Dans sa forme actuelle et en dépit des prétentions avancées lors de son dépôt, le projet de loi n° 184 ne fait que la moitié du chemin nécessaire pour parvenir à une véritable solution.» M. le Président, c'est l'UPA, c'est M. Pellerin qui prononçait ces paroles, puis ça fait pas longtemps, au moment du dépôt du projet de loi n° 184. Et je lis: «C'est en ces termes que le président de l'Union des producteurs agricoles, M. Laurent Pellerin, a commenté aujourd'hui le projet de loi n° 184 concernant la protection des activités agricoles qui fait l'objet d'une étude par les membres de la commission parlementaire de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Déposé en décembre dernier, le projet de loi n° 184 vise à corriger des irritants relatifs à la loi sur la protection des activités agricoles», la fameuse, M. le Président, loi n° 23 que, nous, de l'opposition, on a voté contre, on se rappellera, M. le Président, parce que, justement, on craignait des situations que, par après, elles se sont vérifiées et que les agriculteurs, ils ont décriées, M. le Président.

On se rappellera que l'opposition, elle avait mis en garde le gouvernement sur ce projet de loi n° 23, mais le gouvernement, il avait fait la sourde oreille, et c'est ça qu'il est en train de faire encore actuellement, M. le Président. C'est pour ça qu'on essaie de faire comprendre au gouvernement qu'il faut y aller dans les intérêts des agriculteurs et des agricultrices.

«Incidemment, c'est la quatrième fois en six ans que la CAPA tient une série d'audiences sur le dossier de la protection des activités agricoles, preuve de la complexité du sujet et de...» Rappelons, M. le Président, que «la principale difficulté qui persiste qui fait que bon nombre d'entreprises agricoles existantes avant la loi n° 23 voient toujours compromise la possibilité de se développer de façon durable. Or, le projet de loi n° 184 tel qu'il est libellé présentement ne remédie pas à cette situation, laquelle touche la plupart du temps des entreprises établies depuis des générations».

M. le Président, c'est toujours l'UPA qui parle, c'est toujours M. Laurent Pellerin, par un communiqué qui parle du projet de loi n° 184. «M. Pellerin ? et je continue, M. le Président ? M. Pellerin en a donc profité pour revenir à la charge en demandant que soient intégrés au projet de loi les consensus de l'entente intervenue à ce sujet entre l'UPA et la Fédération québécoise des municipalités. Rappelons qu'un peu plus tôt cette semaine l'UPA et la Fédération québécoise des municipalités, qui représente la très grande majorité des municipalités québécoises ayant une zone agricole, ont fait une sortie publique en ce sens.»

M. le Président, comme je disais tantôt, c'est pas seulement nous, de l'opposition, c'est l'UPA, l'Union des producteurs agricoles, c'est la Fédération québécoise des municipalités qui s'objectent à ce projet de loi là. M. le Président, et comme le disait mon collègue, mon collègue de LaFontaine, même le Barreau, il s'est opposé à ça, et même le Barreau, il va plus loin encore, M. le Président. Il demande pas des modifications au projet de loi, le Barreau, il dit: «De l'avis du Barreau, le projet de loi n° 184 doit être retiré.» Ça veut dire qu'ils veulent même pas en discuter dans la forme actuelle, M. le Président. C'est très grave.

La Fédération de la relève agricole du Québec. Du côté ministériel, on a toujours parlé de la relève agricole. M. le Président, c'est comme si la relève agricole, c'est elle qui devrait proposer ou amener des changements dans cette situation-là. M. le Président, moi, j'ai dû mener la relève agricole devant la commission parlementaire, et ces jeunes-là, ils ont fait toute une démonstration de leur savoir-faire, M. le Président.

Et pourtant, la relève agricole, elle dit quoi sur le projet de loi n° 184? «La Fédération de la relève agricole du Québec à qui revenait aujourd'hui le rôle d'être la première à se présenter devant la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui mène des consultations particulières sur le projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives...» Qu'est-ce qu'elle dit, la Fédération de la relève agricole du Québec? J'ai noté: «Ne pas régler les problèmes vécus dans les entreprises agricoles existantes, c'est décourager immédiatement toute une génération de jeunes producteurs et productrices désireux de s'établir en agriculture», a déclaré le président de la Fédération de la relève agricole du Québec, M. Serge Lapointe. M. le Président, c'est le président de la relève agricole qui parle. Il a rappelé que «le projet de loi, bien que contenant des points positifs, n'apporte aucune solution aux entreprises agricoles existantes aux prises avec des problèmes de distance séparatrice, ce qui rend difficiles les transferts de ferme aux membres de la famille». M. le Président, c'est la relève agricole, c'est les gens qui vont faire de l'agriculture demain qui disent que, dans la formule actuelle, de la façon que le projet de loi est libellé, de la façon qu'il est libellé actuellement, il ne va pas dans le sens pour donner plus de possibilités à la relève agricole et de faire le transfert, même entre membres de la famille, M. le Président. Comment le gouvernement, il peut faire, comme je disais tantôt, la sourde oreille à cette situation?

Et encore, dans le communiqué de la Fédération de la relève agricole du Québec: «M. Lapointe était accompagné devant la commission parlementaire de deux jeunes producteurs, M. Bernard Gilbert, de Saint-Hilarion, et Rodrigue Journault, de L'Islet. M. Gilbert est actuellement à l'emploi de la ferme familiale, limitée dans son développement par ses voisins qui refusent de donner leur accord à un projet d'agrandissement de l'étable de 27 vaches. Ce projet augmenterait l'espace disponible pour chaque animal tout en n'augmentant pas leur nombre. Alors que le projet ne changerait rien pour les voisins, ceux-ci s'opposent quand même à cette modernisation.»

M. le Président, c'est très clair, je pense que ces jeunes-là, ils nous ont démontré leur façon de voir les choses et ils en ont même fait une recommandation au gouvernement. M. le Président, je pense que le gouvernement, il ne veut rien entendre, il ne veut rien entendre, mais le ministre, je l'espère, je l'espère que vraiment il va prendre des dispositions du point de vue législatif et apporter les changements qui sont demandés par ces gens-là. M. le Président, et c'est tellement vrai que le gouvernement, il n'avait pas fait son devoir, M. le Président, que le projet de loi qu'on a devant nous, il contient 32 articles, M. le Président, le projet de loi, il a 32 articles, puis le gouvernement, il a amené aujourd'hui 74 amendements. M. le Président, ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'il y a plus que deux amendements pour chaque article. Je vous laisse comprendre, M. le Président, de quelle manière a été travaillé ce projet de loi là. Comment pouvez-vous amener 74 amendements sur un projet de loi de 32 articles? M. le Président, et, ces amendements-là, on ne sait pas s'ils vont dans la même direction qui a été demandée par les gens qui se sont présentés devant la commission.

Et, moi, personnellement, je pense, M. le Président, que c'est la responsabilité du gouvernement, c'est la responsabilité de nous, parlementaires, d'être sûrs que les amendements qui sont déposés vont dans le sens qui est réclamé par les producteurs et productrices agricoles. Et, pour faire... être sûrs, M. le Président, que ces amendements-là vont dans la bonne direction, il faudrait faire quoi? Moi, je pense, si un gouvernement est responsable, M. le Président, qu'un gouvernement qui amène 74 amendements sur un projet de loi de 32 articles, il devrait reconvoquer une commission parlementaire; il devrait faire revenir les gens devant la commission parlementaire, déposer les changements, les amendements qui sont apportés et demander à ces gens-là si vraiment ces amendements-là vont dans la bonne direction. Et on l'a demandé, on le demande encore au gouvernement. Un peu de responsabilité, un peu de bon sens. Parce que comment voulez-vous qu'on puisse être d'accord avec un projet de loi dans lequel on nous amène aujourd'hui 74 amendements?

M. le Président, nous voulons que ces amendements-là soient étudiés, soient regardés, soient analysés par les personnes qui sont concernées par ça. Et qui mieux que l'Union des producteurs agricoles et aussi la Fédération de la relève agricole du Québec et aussi la Fédération québécoise des municipalités? M. le Président, je pense que ça serait normal pour un gouvernement responsable de demander que ces gens-là viennent devant la commission pour dire: Voilà, oui, on est d'accord ou: Voilà, tel changement, il faudrait apporter tel changement au projet de loi.

n(22 h 20)n

M. le Président, personne ne peut aujourd'hui, en toute conscience, dire que les amendements qui ont été déposés par le gouvernement vont dans le sens qui est réclamé par les producteurs et productrices agricoles. Pourquoi ce gouvernement-là fait la sourde oreille? Est-ce qu'il a d'autres intérêts? Est-ce qu'il y a d'autres choses qui sont cachées dans ce projet de loi là? M. le Président, on se la pose, la question. On a tous les droits de se la poser, la question, parce que, en fin de session comme ça ? puis on l'a déjà vécu ? c'est un peu la marque de commerce de ce gouvernement, M. le Président, c'est qu'en fin de session des projets de loi qui sont très contestés, des projets de loi où il faudrait apporter des changements radicaux à l'intérieur de ces projets de loi là, le gouvernement, il les amène toujours en fin de session d'une manière qu'une journée il va s'amener puis il va dire: C'est assez, on va les amener dans le bâillon, on va les adopter, puis c'est tout, même pas de discussion. Et, M. le Président, c'est tellement vrai que ce gouvernement... c'est la façon de faire de ce gouvernement. On se rappellera ? vous vous rappelez très bien, M. le Président ? de la loi n° 188. On a passé des nuits, des jours, des nuits, des semaines, des mois à discuter de ce projet de loi là, puis, après seulement quelques mois, quelques années, M. le Président, on arrive avec des changements qui ne sont même pas contenus dans le projet de loi n° 188. Alors, c'est un gouvernement... Et il va faire la même chose, M. le Président. Je vais vous dire, il va faire la même chose avec le projet de loi n° 29, le projet de loi qui va amender le projet de loi n° 170 sur les fusions municipales. Vous vous rappelez ce projet de loi là, M. le Président, le 170, où on s'est battus, on s'est déchirés ici, en Chambre, pour faire comprendre au gouvernement qu'il fallait pas y aller dans ce sens-là, qu'il fallait discuter avec les gens, qu'il fallait que les gens puissent se prononcer sur ce projet de loi là, que les gens aient un mot à dire sur ça. Ce gouvernement-là, il n'a voulu rien savoir, M. le Président. Puis qu'est-ce qui est arrivé? Il a amené des amendements à la dernière minute. Ces amendements-là ont été intégrés au projet de loi n° 170. Puis qu'est-ce qui arrive après quelques mois? Il nous représente un autre projet de loi, le projet de loi n° 29, pour corriger les erreurs qui avaient été commises dans le projet de loi n° 170. M. le Président, c'est pour ça que je dis que c'est la marque de commerce de ce gouvernement.

Mais, aujourd'hui, nous voulons justement que ce gouvernement, il ne répète pas les mêmes erreurs. Nous voulons que ce gouvernement soit beaucoup plus responsable vis-à-vis spécialement la relève agricole du Québec. M. le Président, ces jeunes-là, ils ont besoin d'être protégés, d'être bien traités dans le projet de loi n° 184, et je pense que c'est la responsabilité du gouvernement de le faire. Si le gouvernement, il ne veut pas écouter, M. le Président, bien, ces gens-là, ils vont se rappeler de la façon cavalière, pour ne pas dire autre chose, de ce gouvernement. Ils s'en rappelleront très prochainement. Un jour pas très loin, ce gouvernement va être obligé d'aller en élection, M. le Président, puis ces gens-là, les producteurs et productrices agricoles et, majoritairement, je dirais, la Fédération de la relève agricole du Québec, les jeunes du Québec, les jeunes qui s'occupent de l'agriculture du Québec, ils vont dire à ce gouvernement: Assez, c'est assez! puis on va se débarrasser de vous parce que vous n'avez jamais écouté; on est venu vous dire exactement qu'est-ce qu'on avait besoin pour faire de l'agriculture au Québec, mais, vous, vous avez fait la sourde oreille, puis, aujourd'hui, vous allez en payer les conséquences. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Viger. Maintenant, je vais céder la parole au prochain intervenant, M. le député de Vaudreuil. M. le député.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Alors, suite aux interventions de mes collègues, je veux intervenir, moi également, sur le projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives.

M. le Président, je viens moi-même d'un milieu agricole, je suis originaire de la Beauce, mon père était agriculteur, et je suis en mesure de connaître l'importance pour les agriculteurs de pouvoir produire et, aujourd'hui, dans notre contexte, d'avoir un équilibre également sur le plan de l'environnement et également avec les autres citoyens. J'ai également dans mon comté, dans le comté de Vaudreuil, et dans la grande région de Vaudreuil-Soulanges, plusieurs agriculteurs: l'agriculture laitière, production laitière, beaucoup de production de céréales, céréalière, et c'est une activité économique qui est fort importante.

M. le Président, le projet de loi n° 184 a fait l'objet de consultations en commission parlementaire et, ce qu'on peut noter, c'est que les groupes qui sont venus présenter leurs commentaires et leurs suggestions sur ce projet de loi là se sont dits insatisfaits du projet de loi. Il y a une sorte d'unanimité qui s'est faite concernant les dispositions de ce projet de loi là et des commentaires de changements, de suggestions, de propositions qui ont été faits.

Il est sûr que, si on regarde... Il y a trois éléments, je pense, dans le projet de loi, entre autres, qu'on peut soulever. D'abord, le projet de loi ne règle rien en tout ce qui touche pour le droit de produire en zone verte. Le projet de loi, non plus, n'apporte pas de solution à la difficile cohabitation entre l'agriculture et les citoyens des régions et, également, tout ce qui touche l'écoconditionnalité, eh bien, le gouvernement exige des producteurs agricoles un virage agroenvironnemental, mais sans pour autant leur apporter l'appui nécessaire.

M. le Président, nous sommes aujourd'hui dans une situation où le gouvernement, encore une fois à la dernière minute, dépose une série d'amendements en catastrophe. C'est un projet de loi qui est relativement court, qui comporte une trentaine d'articles, et le ministre nous arrive, vers la fin de la session, avec 74 amendements. Vous savez, un projet de loi de 32 articles... Pourtant, il avait le temps de le faire. Les audiences ont été tenues au mois de février, M. le Président. Et, vous savez, on vous a parlé tantôt des commentaires de bien des groupes qui se sont présentés en commission parlementaire. Je voudrais, par exemple, vous citer certains des groupes, des citations de certains des groupes qui sont venus en commission parlementaire.

Par exemple, l'Union des producteurs agricoles, et je cite, M. le Président, le président de l'Union des producteurs agricoles, M. Pellerin: «Ce qu'il y a dans le projet de loi n'est pas problématique pour nous. Pour l'essentiel de ce qui est dans le projet de loi, le problème vient surtout du fait de ce qu'il manque dans le projet de loi.» Fin de la citation.

M. Michel Belzil, le président de la Fédération québécoise des municipalités, dans un communiqué de presse du 5 février 2001, et je cite: «Les orientations gouvernementales devront être modifiées parallèlement au processus législatif de façon à reconnaître aux municipalités une plus grande marge de manoeuvre pour déterminer l'emplacement des nouvelles exploitations agricoles.» Fin de la citation.

M. Maxime Laplante, de la Coalition «Sauvez les campagnes», en février 2001, et je cite: «Oui, effectivement, on veut s'assurer que c'est viable, mais présentement on a un modèle d'agriculture qui fait que le démarrage est impossible.» Fin de la citation.

M. Serge Lapointe, le président de la Fédération de la relève agricole, au mois de février. Et on sait, je pense, lorsqu'on connaît l'importance de l'agriculture et les problèmes qui existent aujourd'hui en termes de transmission des propriétés agricoles et des problèmes à avoir de la relève agricole... Et j'ai de la famille impliquée, dans la Beauce, dans ce domaine-là, et Dieu sait que je suis au courant des problèmes qu'ils peuvent avoir en termes de relève agricole. Alors, M. le Président, je cite M. Serge Lapointe: «Vous le savez, le transfert de fermes n'est plus ce qu'il était il y a quelques années. Ce transfert progressif est aujourd'hui freiné et même voire, dans certains cas, rendu impossible par différentes mesures dont, entre autres, des réglementations municipales irréalistes, des distances séparatrices, des servitudes contraignantes, et j'en passe.» Fin de la citation.

n(22 h 30)n

Enfin, M. le Président, le Barreau du Québec, M. Marc Sauvé, en février 2001, et je cite: «De l'avis du Barreau, le projet de loi n° 184 doit être retiré. Il y a la question de l'insécurité juridique et de l'incohérence juridique.» Fin de la citation. M. le Président, si nous allons au mémoire d'ailleurs du Barreau qui a été présenté au mois de février, on parle du caractère vague et imprécis des normes à respecter en matière d'assurance récolte et d'assurance stabilisation. On dit: «Ça reflète malheureusement le peu de crédibilité environnementale à accorder au projet de loi n° 184.» Et je continue: «L'approche conditionnelle en matière de versement d'indemnité ou de compensation aux producteurs agricoles exige, pour être crédible, le respect par les producteurs de normes environnementales prescrites.» Et je vous mentionnais tantôt, M. le Président, également l'incapacité du gouvernement ou la non-volonté du gouvernement d'apporter un appui financier pour un virage agroenvironnemental.

Et la conclusion du Barreau du Québec, M. le Président: «Le Barreau du Québec invite le législateur à viser un meilleur équilibre entre le droit de produire des agriculteurs, la protection de l'environnement et des droits individuels. Ce projet de loi n° 184 n'atteint pas l'équilibre recherché en ce qu'il ne comporte aucune mesure crédible de protection de l'environnement et affecte injustement les droits individuels des citoyens, notamment au chapitre des droits acquis. Le projet de loi ne correspond pas davantage aux principales recommandations contenues au rapport Brière ni à l'entente intervenue entre la Fédération québécoise des municipalités et l'Union des producteurs agricoles.»

D'ailleurs, M. le Président, vous aviez, dans un communiqué de l'Union des producteurs agricoles du mois de février 2001, qui dit: «Dans sa forme actuelle et en dépit des prétentions avancées lors de son dépôt, le projet de loi n° 184 ne fait que la moitié du chemin nécessaire pour parvenir à une véritable solution. Déposé en décembre dernier, le projet de loi n° 184 vise à corriger des irritants relatifs à la Loi sur la protection des activités agricoles. Incidemment, c'est la quatrième fois en six ans que la commission tient une série d'audiences sur le dossier de la protection des activités agricoles, preuve de la complexité du sujet.»

Or, le projet de loi n° 184, tel qu'il est libellé présentement, ne remédie pas à la façon de se développer de façon durable, parce que cette situation, elle touche la plupart du temps des entreprises qui sont établies depuis des générations. Et nous avons parlé tantôt de la relève agricole, M. le Président. Et M. Pellerin dit: «De tous les efforts qui ont été mis de l'avant dans ce dossier, celui qui a permis d'enregistrer les progrès les plus significatifs est l'entente de principe entre l'UPA et la Fédération québécoise des municipalités. Cet accord prévoit essentiellement des normes plus souples pour les entreprises agricoles existantes mais plus sévères pour les nouveaux établissements de production animale, ce qui a l'heur de satisfaire et le monde agricole et le monde municipal.»

Et, à bon escient, on rappelle, vers la fin du communiqué: «Mentionnons, en terminant, que rares sont les dossiers qui ont fait l'objet d'autant d'engagements politiques restés sans lendemain. Les premiers remontent aussi loin qu'en 1994, alors que les principales formations politiques s'engageaient dans leur programme électoral à accorder une protection des activités agricoles en zone verte. Même le rapport Brière, déposé en octobre 2000, n'avait pas permis de dénouer l'impasse. Autant de raisons qui expliquent pourquoi le monde agricole et le monde municipal fondent autant d'espoir sur les modifications qu'ils réclament du projet de loi n° 184.»

Donc, M. le Président, tous les organismes qui sont venus se faire entendre devant la commission parlementaire ont demandé des modifications importantes au projet de loi tel qu'il avait été déposé par le ministre. Dans le mémoire qui a été soumis justement par la Fédération québécoise des municipalités, c'était en date du 31 janvier 2001, on dit: «Nous suggérons que le projet de loi n° 184 soit réécrit.» On ne demande pas seulement des modifications mineures, M. le Président, ou certains ajustements d'ordre législatif à quelques-uns des articles, on dit: «Nous suggérons que le projet de loi n° 184 soit réécrit pour bon nombre de ses dispositions qui ne reflètent pas les consensus intervenus entre l'UPA ? donc l'Union des producteurs agricoles ? et la Fédération québécoise des municipalités. Rappelons, en terminant, que les discussions entre la Fédération et l'UPA se sont limitées au régime de protection des activités agricoles et plus précisément aux règles applicables pour la gestion des odeurs inhérentes aux activités agricoles. En aucun temps nous n'avons discuté d'un éventuel assouplissement aux règles applicables au plan de la réduction de la pollution d'origine agricole. Au contraire, la Fédération prône depuis plusieurs années un resserrement de ces normes. En ce sens, le ministère de l'Environnement bénéficie de notre appui.»

M. le Président, donc le gouvernement avait trois mois, quatre mois pour pouvoir procéder à un réaménagement et à des modifications, à une réécriture, comme le demandaient l'Union des producteurs agricoles et la Fédération québécoise des municipalités, entre autres, ainsi que le Barreau, à ce projet de loi n° 184. Or, que se passe-t-il? On constate, dans ce cas-là comme dans les autres cas de législation, M. le Président, depuis deux ans, présentés par ce gouvernement, que ce sont des projets de loi qui sont improvisés. Et, au lieu d'arriver avec un nouveau projet de loi qui soit réécrit, qui tienne compte des commentaires et des suggestions faites par les groupes, on arrive à la dernière minute, on présente un paquet d'amendements, des amendements qui sont plus importants que le projet de loi lui-même, et on demande à l'opposition et aux parlementaires d'adopter ce projet de loi là.

Nous avons eu un bon exemple de cette situation dans le cadre du projet de loi n° 170, M. le Président, l'automne dernier, ce projet de loi qui décrète des fusions forcées dans les régions de Montréal, de Québec et de l'Outaouais. C'était un projet de loi mal écrit, un projet de loi qui a été corrigé suite à des questions de l'opposition, suite à des représentations qui ont été faites par divers groupes, et, encore là, on est arrivé avec un projet de loi... Vous savez, le projet de loi n° 170 comportait à peu près 1 000 articles, et nous sommes arrivés avec plus de... le gouvernement est arrivé avec plus de 700 amendements la journée même de l'adoption de ce projet de loi n° 170, de sorte que, en tout, il y a eu deux heures de discussions sur ce projet de loi qui touche la réorganisation municipale des territoires de Montréal, l'île de Montréal, l'Outaouais et Québec, réorganisation qui est faite de façon forcée, sans demander l'opinion des citoyens. Et, encore une fois, on a passé ça à toute vapeur, à la dernière minute, 1 000 articles adoptés en l'espace de deux heures, même pas le temps, dans l'Assemblée nationale, M. le Président, d'étudier ce projet de loi là article par article, malgré les impacts importants qu'il a sur les populations qui sont concernées dans Montréal, Québec et dans l'Outaouais.

Et ce qui prouve que ce projet de loi n° 170 adopté sous le bâillon en décembre dernier, bâillon qui n'a pas permis d'étudier les articles de ce projet de loi là article par article... eh bien, on revient à cette session-ci encore avec des modifications importantes parce que ce projet de loi avait été mal conçu, mal écrit, avait été fait à la vapeur, et on n'avait pas été capable de bien évaluer les impacts de cette législation. Et, encore une fois, à cette session-ci, on demande d'approuver des amendements importants à ce projet de loi n° 170.

Dans le cadre du projet de loi n° 184 sur la protection du territoire et des activités agricoles, bien, nous sommes encore devant la même situation. Le gouvernement dépose aujourd'hui 74 amendements. Est-ce que ces amendements vont dans la direction des représentations qui ont été faites par les groupes qui se sont présentés au cours de la commission parlementaire, en février dernier, M. le Président? C'est difficile de l'évaluer en l'espace de quelques heures et ce serait irresponsable que de dire: Oui, ça correspond, lorsqu'on n'a pas eu le temps de vraiment les examiner et les analyser.

n(22 h 40)n

Mais ce qui est plus important, si le gouvernement est vraiment responsable, si le gouvernement veut réellement consulter, si le gouvernement veut tenir compte des opinions présentées par les groupes impliqués et qui auront... qui seront impliqués par ce projet de loi là, eh bien, c'est de réentendre les groupes. Parce que le projet de loi... Vous savez, le nombre d'amendements est plus important que le nombre d'articles dans le projet de loi. Alors, il serait tout à fait, il me semble, dans le cadre de la responsabilité gouvernementale... Si on dit vouloir consulter les citoyens, vouloir consulter les groupes qui auront à vivre avec ce projet de loi là dans le monde rural, eh bien, c'est, au minimum, de leur dire: Nous modifions le projet de loi, vous nous avez demandé de le faire, nous allons maintenant vous consulter à nouveau et vous demander quel est votre point de vue sur ce nouveau projet de loi là. M. le Président, il nous semble que c'est le minimum qu'un gouvernement responsable peut faire lorsqu'il dit que, oui, il respecte l'opinion des citoyens, qu'il respecte l'opinion des groupes qui sont intéressés et qui ont... qui sont vraiment... qui ont été ceux qui se sont impliqués d'ailleurs et qui ont pris le temps, au mois de février, de venir faire part de leur opinion pour bonifier le projet de loi.

Oh! Je sais... Vous savez, j'ai participé l'an dernier à une commission parlementaire sur l'assurance médicaments. Imaginez-vous! Au mois de février dernier, à peu près trois semaines d'audiences, d'auditions de la commission parlementaire des affaires sociales pour entendre à peu près 75 groupes sur les modifications proposées par la ministre de la Santé et des Services sociaux à l'assurance médicaments. Imaginez-vous, la ministre faisait une vaste consultation sur tous les aspects de la politique des médicaments au Québec, sur les impacts que ça pouvait avoir, sur les modes de financement, sur l'opportunité d'avoir une politique des médicaments, une meilleure utilisation des médicaments, un meilleur service, notamment pour les personnes âgées.

Savez-vous quel était le seul objectif de la ministre, dans le temps, pour tenir cette commission parlementaire? C'était de pouvoir augmenter les primes d'assurance médicaments. Et le seul résultat de cette grande consultation publique, que la ministre avait d'ailleurs initiée à toute vapeur ? elle avait donné à peu près 11 jours aux groupes pour préparer des mémoires et les déposer devant la commission parlementaire ? le seul résultat, ça a été de doubler les primes d'assurance médicaments l'an dernier. Cette prime-là est indexée annuellement, elle va être réaugmentée encore cette année, de sorte que les personnes âgées... une personne âgée qui payait 100 piastres en 1996 pour se procurer ses médicaments va devoir payer, selon son revenu, maintenant, jusqu'à 1 100 $, M. le Président. Cent piastres en 1996, 1 100 piastres en 2001, cinq ans après, un taux d'inflation qui est assez élevé. Donc...

Alors, on a l'impression que, dans le cadre de ce projet de loi, c'est un peu la même chose. On consulte, on demande aux gens de s'impliquer, de faire des recherches, mais, après, on dit: Écoutez, on vous remercie beaucoup d'être venus, mais, voilà, on va continuer à faire ce qu'on pensait devoir faire sans prendre votre opinion. Alors, M. le Président, devant ces modifications qui ont été déposées, plus importantes en nombre que le nombre d'articles dans le projet de loi, je pense qu'il siérait pour un gouvernement responsable de dire: On va, encore à nouveau, faire des consultations particulières et demander aux groupes concernés qui ont pris le temps de venir dans la commission parlementaire au mois de février, qui sont directement impliqués, de pouvoir également donner leur point de vue afin que ce projet de loi puisse répondre à leurs préoccupations, M. le Président, et surtout dans le milieu agricole.

Et le milieu agricole, comme je le mentionnais, dans mon comté, est important et constitue une activité économique qui est importante, M. le Président, et nous devons assurer un équilibre entre la production agricole, entre l'environnement et les droits des citoyens. Je pense qu'il faut avoir une politique qui soit claire, qui va être sécuritaire et qui va permettre également d'assurer un meilleur avenir pour notre industrie agricole, et surtout également pour favoriser la relève en agriculture, ce qui est fort important, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Vaudreuil. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Châteauguay et whip en chef de l'opposition. M. le député.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci beaucoup, M. le Président. Ça me fait plaisir de participer à ce débat concernant le projet de loi n° 184, et en fait peut-être plus concernant les amendements au projet de loi n° 184, parce qu'il a déjà, comme tel, si j'ai bien compris, il a déjà fait... il a déjà fait l'objet de consultations. Ce qui achoppe en ce moment, c'est les amendements qu'on nous propose à la dernière minute. En fait, ça se retrouve dans ce beau cahier qu'on nous dépose à la dernière minute.

Et, malheureusement, je le dis, malheureusement, c'est devenu une pratique gouvernementale. Je le dis comme je le pense, je veux pas... Je veux pas non plus lancer d'accusations, mais, à la longue, on finit par voir une espèce de modus operandi, dont l'illustration la plus grande reste encore la session dernière, quand on nous a déposé, vous savez, sur les fusions forcées, une brique. Je pense que c'était ça d'épais d'amendements au projet de loi, qu'on n'a même pas pu lire avant de nous demander, à nous, de se prononcer par vote.

Alors, nous, de notre côté, on a été obligés à ce moment-là de voter contre, parce que comment voulez-vous voter pour quelque chose qu'on vous refuse le droit même de lire? C'était dans le cadre d'un bâillon où on nous avait en plus empêché de parler. Alors, on nous empêche de parler... Remarquez qu'on aurait pas dit grand-chose... si on nous avait en plus empêché de lire les articles. Pour le gouvernement, il y avait une certaine cohérence: Ils parleront pas, ça fait qu'on n'a pas besoin de les faire lire, puisqu'ils ont pas le droit de parler. Mais, en bout de ligne, ça aide pas nos concitoyens à voir ce qui se passe, ça relève pas la noblesse de cette institution que nous devons tous défendre, et c'est devenu une espèce de modus operandi, comme je le disais. Le gouvernement fait fi du législatif en... et fait fi de l'ensemble des intervenants. C'est le cas pour ce projet de loi là, notamment pour les gens du domaine agricole. On les fait venir en commission, on les fait défiler...

Je sors de commission. Moi, ça fait deux semaines qu'on est en commission, on finit ça... Aujourd'hui, on a fini plus de bonne heure; d'habitude, on finit à minuit. Des groupes viennent nous voir jusqu'à 11 heures le soir ? le dernier groupe ? on les fait venir, ils viennent nous parler de projets de loi. Six mois après, on leur amène les projets de loi, puis on chamboule tout ça, puis c'est comme si la consultation initiale ne tenait plus, puis on leur dit: Bien, comme on les a déjà consultés, pourquoi les reconsulter encore? Bien, parce que c'est tellement changé, le nouveau projet de loi avec l'ancien, qu'il me semble qu'on est dans du droit nouveau, jusqu'à un certain point.

Dans ce cas-ci, on vous l'a déjà dit, M. le Président: un projet de loi de 32 articles pour lequel on dépose une cinquantaine d'amendements, donc plus d'amendements que le projet de loi n'en contient. D'ailleurs, je vais vous faire tantôt la liste, juste pour qu'on... Dans le fond, quand on fait le tour du cahier, on s'aperçoit justement de l'in-à-propos de pousser des mesures législatives qui n'ont même pas été analysées par les gens du terrain.

Parce que, après tout, on n'est pas désincarné, ici, l'Assemblée nationale. Je comprends que, surtout en session intensive, on siège, on arrive ici de bonne heure, on repart tard le soir. On s'aperçoit même pas de la température qu'il fait dehors. Puis ça nous pousse à un moment donné à perdre contact avec la réalité. Mais il faut lutter contre ça. Il faut pas qu'on devienne désincarné. Il faut donc prendre le téléphone puis dire: Qu'est-ce que tu penses de ces amendements-là? Ça nous arrive à la dernière minute. Les gens sont sur le terrain, M. le Président, ils disent: Écoute, donne-moi le temps, je viens de recevoir le cahier. Ils viennent de recevoir le cahier. Puis, nous autres, on nous dit: Parlez au nom du peuple. Mais le peuple a pas eu le temps de savoir ce qu'il y a dans les amendements.

Je veux dire... Pas évident, pas évident pour les législateurs que nous sommes, des deux côtés de la Chambre. Je comprends que, de l'autre côté, ç'a pas de l'air à appeler beaucoup au téléphone pour savoir qu'est-ce que leurs gens dans leurs comtés pensent. Je peux comprendre ça, c'est leur choix. Mais, nous, on fait partie de ces gens qui voulons savoir ce que la population en pense, parce que, après tout, on est les représentants de la population, et on nous met dans une situation où il nous est impossible d'aller vérifier chez nos gens leurs réactions à l'égard de mesures comme celles-là.

Faisons une histoire courte. Le projet de loi comme tel a été analysé en février lors d'une consultation où de nombreux groupes sont venus. Essentiellement, les gens ont dit: Bon, bien, c'est pas utile, comme ça. Je note... Mon collègue de Vaudreuil le disait il y a quelques minutes, il citait le Barreau du Québec qui trouvait qu'il y avait lieu de trouver un équilibre entre les droits du citoyen, le droit de produire, la protection et la promotion de l'environnement. Et pourtant, plaider pour trouver un équilibre entre ces trois éléments, me semble que ça devrait pas nécessiter une plaidoirie tellement longue. Je peux comprendre qu'en termes législatifs ça peut être compliqué. Ça, je peux comprendre qu'en termes de rédaction législative ça peut être compliqué de trouver le bon mécanisme qui va faire en sorte qu'il y ait justement cet équilibre. Mais, au niveau du principe, au niveau de la base, il me semble que c'est un... C'est tout un commentaire, en tout cas, à l'égard du gouvernement que de se faire dire par le Barreau: Vous êtes pas capable d'arriver à un point d'équilibre. Il y a un problème certainement là.

n(22 h 50)n

Par ailleurs, on dit... je ne suis pas un expert là-dedans, mais on me dit que l'UPA et la Fédération québécoise des municipalités, deux acteurs majeurs, majeurs dans le dossier, en sont venus à une entente et que le projet de loi réussi à ne pas refléter cette entente-là. Alors, dans ce cas-là, il y a un problème en quelque part. Je veux pas dire nécessairement, M. le Président, que c'est de la faute du ministre actuel. Je ne voudrais vraiment pas souligner ça. Il est avec nous ce soir, je le remercie de sa présence. Mais il faut noter que c'est un projet de loi qu'il n'a pas initié. C'est son prédécesseur qui l'a initié. Et j'ai à le rencontrer un peu plus fréquemment, son prédécesseur, ces derniers temps puisqu'il s'occupe de la Santé maintenant, et je peux comprendre qu'il lui a peut-être laissé quelque chose d'un peu plus compliqué. C'est pas toujours aisé ? il y a des collègues qui étaient avec moi en commission, qui sont avec nous ce soir ? de voir où il s'en va, notre ministre de la Santé actuel et dernièrement à l'Agriculture.

Alors, je veux pas dire que c'est la faute du ministre actuel, mais, lorsqu'on regarde le portrait général, on s'aperçoit quand même qu'il y a déjà eu des consultations... Je remonterai pas trop loin, là. Parce qu'on pourrait remonter au projet de loi sur le droit de produire, M. le Président, qui a eu... qui a servi ce qu'il devait servir pour un gouvernement du Parti québécois, c'est-à-dire ériger ce projet de loi avec valeur de symbole pour dire: Voyez comment on s'occupe du monde agricole, qu'on consacre le droit de produire, puis finalement, dans les faits, ça s'effrite puis ça veut plus rien dire. Puis depuis ce temps-là qu'on tente de réparer le dommage. Et on n'y arrive pas, parce que la capacité de leadership est pas là, parce que la capacité de décision est pas là, parce que, trouver le point d'équilibre, il faut s'intéresser à d'autre chose que l'image du gouvernement. Et c'est ça qui est le problème fondamental, c'est qu'il y a une recherche d'image qui est souvent beaucoup plus importante que l'essence même de ce qui doit être fait.

Alors, je le disais tantôt, M. le Président, on nous dépose 50 amendements à la va-vite, à la dernière minute, et on nous demande finalement de refléter la position d'une population qui n'a même pas le temps pour... Je ne parle pas de tout le monde, là. On va s'entendre, là: c'est pas tout le monde qui s'intéresse à chacune des pièces législatives qui sont déposées au salon bleu, ça, c'est évident. Mais, pour ceux qui s'y intéressent et qui suivent ? et il y en a, M. le Président, qui suivent nos débats, il y en a qui veulent savoir ce qu'il y a dans les pièces législatives parce qu'elles vont toucher leur avenir, toucher leur quotidien, toucher leur avenir ? bien, ils veulent savoir: Mais que se passe-t-il?

Or, ils me voient ce soir, M. le Président, pour ceux... Parce que là il y en a dans le champ, sur le terrain, qui ont déjà le cahier ? ils ont eu ça ce matin ou cet après-midi. Ils ont le cahier, puis là ils essaient de voir ce que ça veut dire. Puis, nous autres, on essaie de savoir ce que le monde pense sur le terrain, parce que c'est notre travail de les représenter. Puis ils nous disent: Bien, on n'est pas prêts, parce qu'on l'a pas lu encore. Alors, nous, on est en train de parler, alors que le gouvernement, qui avait, depuis le mois de février, quoi? cinq mois, M. le Président, pour faire ces amendements-là, il nous dépose ça le 12 juin, fin d'après-midi. Là, il faut qu'on soit capables de refléter une position de la population. Il faut qu'on soit capables, nous, d'identifier ce que le monde veut.

Bien, moi, j'aimerais mieux qu'on parle au monde, qu'on soit en contact avec la population, qu'on comprenne leurs problèmes réels, les difficultés qu'ils ont à l'égard des amendements, parce que, le projet de loi, on le sait, ils l'ont dit, c'est pas bon. Le gouvernement prend acte, il dit: Je le change, je fais des amendements, mais il a pas le temps, à la population, de dire aux gens intéressés, de dire en quoi ça les affecte et comment ça peut améliorer ou détériorer leur situation de fait. On en est là.

Maintenant, quand on dit ça comme ça, on peut dire: 50 amendements, bon, c'est pas beaucoup; dans le fond, on a déjà vu pire. C'est vrai. Les fusions forcées, je me demande s'il y en avait pas 300. Il y en a...

Une voix: ...

M. Fournier: Un beau paquet. Alors, on peut toujours, du côté du gouvernement, nous dire: Écoutez, on vous en avait mis 300 dans la face, puis vous avez pas eu le temps de les lire ni de dire un mot ? d'ailleurs, on vous avait bâillonnés ? là vous en avez 50, de quoi vous vous plaignez?

Mais, juste, juste, juste pour faire image, juste pour qu'on comprenne comme il faut, M. le Président, ce à quoi on astreint les gens... Vous allez me permettre de le faire le mieux que je peux; je vais vous dire les articles qui sont amendés. Vous allez être assez impressionné, et ça, ça arrive à la dernière minute de la part d'un gouvernement brouillon qui a réussi à manquer son coup la première fois et qui s'apprête à le manquer une deuxième fois tout simplement parce qu'il n'est pas en mesure d'apporter des législations qui sont conformes aux souhaits de la population. On leur demande, aux législateurs, d'être désincarnés de la population justement pour qu'on soit pas plus fort que l'exécutif, qui est lui-même désincarné. Alors, il essaie de nous affaiblir.

C'est comme un combat de coqs entre l'exécutif et le législatif. L'exécutif, voyant sa faiblesse, se dit: Ouais, bien là, s'il faut que l'Assemblée nationale soit capable de nous faire des leçons, ça va aller mal; ça fait qu'à la place on va leur donner ça à la dernière minute, puis ils seront pas capables d'y arriver. Ça, c'est un espèce de truc, là, qu'on utilise. Comme je le disais tantôt, malheureusement, c'est un peu le modus operandi, qu'il faudrait changer le plus tôt possible. Je suis pas convaincu que ce gouvernement va y arriver. Peut-être un gouvernement en provenance d'une autre parti politique y parviendra beaucoup mieux.

Mais je reviens à ce que je voulais faire, M. le Président, et vous dire quels sont les articles qui sont amendés. C'est assez impressionnant. L'article... Ça commence bien, l'article 1. L'article 2, l'article 3. Je vous annonce, l'article 4, ça va bien, il est pas amendé. Ah, bien, bravo! Bravo! Bravo! L'article 5 est amendé, M. le Président, l'article 5.1 est amendé. L'article 6 est amendé, l'article 6.1, l'article 8. Ah! l'article 7 a l'air correct. Jusqu'ici, on a le 4 puis le 7, hein, c'est bien, je pense que les gens vont pouvoir faire leurs combinaisons de 6/49 avec ça. L'article 11 est amendé, l'article 12, l'article 13 visant le 79.2, l'article 13 visant le 79.2.1, M. le Président, l'article 13 concernant le 79.2.2, l'article 13 concernant l'article 79.2.3.

Je sais pas si vous me suivez, là, mais, ceux qui sont à la maison et qui nous écoutent, là, je suis en train de leur dire: les amendements qu'on nous apporte à la dernière minute, où... on est pas capable de les voir avec les gens sur le terrain, qui viennent de les recevoir eux-mêmes, comment ils vont vivre ces amendements-là, eux qui ont déjà été consultés en février mais qu'on a oubliés, à qui on a oublié de redemander l'avis. Au contraire, on a essayé de les mettre dans une position où ils n'étaient pas en mesure de donner un avis, étaient pas en mesure de digérer les informations.

Et la liste continue: l'article 13, 79.2.4; 13, 79.2.5; 13, 79.2.6 ? je pense que cette section-là, elle allait pas bien du tout, M. le Président; 13, 79.2.7, l'article 13.1, 13.2, M. le Président, et il y en a d'autres comme ça, ça n'arrête pas; 13.3, 13.4, c'est une autre section qui allait pas bien; 13.5, 13.6. 14, on est rendu à 14, là, bon, à 14, on change aussi; 17.1. 15, 16, ça allait bien. Alléluia! 17.1, M. le Président, fonctionne pas, 18 fonctionne pas, 19 fonctionne pas, 20 fonctionne pas, 21 fonctionne pas. Je vais arrêter. Je pourrais tourner les pages comme ça, sans arrêt.

Ce qu'on nous dépose à l'Assemblée nationale, c'est des brouillons. On fait venir des gens en commission, on les fait venir des fois à 11 heures le soir, parce que les commissions finissent à minuit, puis on leur dit: Qu'est-ce que vous pensez? Nous, on trouve qu'on a un excellent projet de loi. Les gens leur disent que, ça, ça a pas d'allure, ça marche pas avec ce qu'on vit sur le terrain: trouvez l'équilibre. Il faut quand même demander aux gens comment ils vivent dans le quotidien. Bien, juste là, tu leur demandes ça. Puis là, en mars, t'as l'occasion de réagir, puis d'apporter tes amendements, puis de les faire revenir, tu sais, dans une consultation un peu plus rapide. Mais, au moins, donne une chance aux gens de revenir sur les amendements.

Vous allez me dire: Ouais, mais c'est aussi long, puis c'est plus long que le projet de loi. C'est pas de ma faute. C'est pas de ma faute. Ils avaient rien qu'à le faire comme il faut la première fois. Mais ils auraient pu le faire en mars. Ils auraient pu le faire en avril. Ils auraient même pu le faire en mai. Ils auraient même pu le faire au début juin. Mais là on le fait à la dernière minute. On le fait à la dernière minute, et c'est pas à peu près.

n(23 heures)n

Ça, c'est comme un bulletin, dans le fond, ce cahier-là. Puis c'est pas mon cahier à moi, là, c'est le cahier qui vient du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Eux-autres, ils ont fait un beau cahier qui n'est ni plus ni moins que le bulletin que le ministère se donne lui-même, à moins que ce soit le bulletin du ministre actuel par rapport au ministre précédent, c'est possible; mais ne faisons pas dans les personnalités. C'est un bulletin que le ministère se donne à l'égard du projet de loi n° 184 qu'il avait déposé, et il se dit: J'étais pourri, je m'excuse. C'est ça qui se passe. Moi, je veux bien qu'il se qualifie lui-même de pourri puis de brouillon dans le travail qu'il a fait, mais minimalement, minimalement, puis je le dis à l'égard de ce projet de loi là... mais que le ministre de l'Agriculture ne s'en fasse pas là, c'est pas... comme je le disais tantôt, c'est pas dirigé vers lui, ça s'applique à tout le gouvernement. C'est dans tous les projets de loi, la même, même chose. Ça fait deux semaines, j'étais en commission avec le ministre de la Santé, on a eu le 28 puis le 27...

Une voix: L'ancien ministre de l'Agriculture.

M. Fournier: L'ancien ministre de l'Agriculture. Sur le 28, on était en commission, et tous les groupes ont proposé des amendements, et, à tout le monde, il a dit: Ç'a bien de l'allure! Ç'a bien de l'allure! Ç'a bien de l'allure! Là, ça fait une semaine qu'il a dit qu'il était pour faire beaucoup d'amendements. On les a toujours pas. Ça fait une semaine qu'il les a annoncés. La fin de session s'en vient, là, puis on les a toujours pas. On me dira: Oui, oui, mais il faut qu'il aille au Conseil des ministres. Moi, je veux bien, mais qu'est-ce qui l'empêche de les déposer, les amendements, quand même? Il pourrait au moins le dire au monde. Là, ils sont venus une fois... Je parle du 27... je vais parler du 28, puis je vais parler du 27 tantôt.Il les a entendus, les gens. Là, il va faire... il a dit à tout le monde qu'il les écoutait, puis ç'avait beaucoup d'allure... je vous le dis, littéralement, à tout le monde, il leur a dit que c'était intéressant puis qu'il était pour réfléchir. Je vous fais une prédiction: il y a pas le huitième de qu'il a dit qui va se retrouver dans les amendements, il va peut-être redéfaire ce qu'il avait fait sans que les gens puissent venir lui dire ce qu'ils en pensent, comment ils vont être affectés. Ça veut dire quoi, les consultations?

Même chose avec le 27 qu'on vient de faire. Depuis quelques jours, encore une fois, les groupes viennent. Il nous a même dit tantôt, M. le Président... celle-là, je vous le dis, c'est le premier moment public que je peux utiliser. Au sortir de la commission, dans ses remarques finales, il nous a dit qu'à l'égard de la capacité pour le Protecteur de l'usager de ne plus être nommé par le gouvernement, comme c'est le cas présentement, mais d'accepter la proposition de l'opposition et de faire en sorte qu'il soit nommé par l'Assemblée nationale, qu'il y ait une vraie indépendance, il nous a dit qu'il allait réfléchir à ça puis que c'était intéressant.

Juste, juste, juste pour vous rappeler là, ça, c'est un vieux débat entre le chef de cabinet actuel, du temps où elle était Protecteur de l'usager, Commissaire aux plaintes, et le Protecteur du citoyen. Gros, gros débat, il y avait eu une chicane entre les deux. Là, elle est chef de cabinet aujourd'hui. Poudre aux yeux, il nous dit qu'il y pense. J'ai hâte de le voir. Mais, quand on va le voir, il va commencer à être tard, il va être minuit moins cinq. Il va y avoir un bâillon, j'imagine, parce que ça, c'est le mode ici, le bâillon. Pas le droit de lire les amendements, pas le droit de parler, on passe en vrac. Après ça, Michaud arrive puis il dit: Aïe! vous votez des affaires puis vous savez pas sur quoi vous votez. C'est là où on est rendu, là. L'Assemblée nationale, ça ressemble à ça maintenant. Pas de parole, pas le droit de s'informer.

Dans ce cas-ci, on me dira: Bien, c'est pas comme les fusions forcées, vous l'avez avant le bâillon, là. Bon. Alors, on est chanceux, on l'a avant le bâillon. Mais notre travail, c'est pas juste de les recevoir dans notre bureau, puis de les lire avec la petite lumière tamisée, puis de se faire une opinion nous-mêmes. C'est correct si on pense qu'on est en possession tranquille de la vérité puis qu'il y a aucun doute dans notre esprit que peut-être quelqu'un à quelque part pourrait nous donner une bonne idée. Mais ça marche pas comme ça en démocratie. Quand on dit «les représentants du peuple», on représente le peuple. Comment est-ce qu'on fait... Moi, j'ai toujours dit... Ça fait quelques fois, M. le Président, j'ai la chance d'aller devant des groupes d'étudiants, puis on me demande: C'est quoi, la plus grande qualité d'un représentant du peuple? Les gens pensent que je vais leur dire que c'est de parler, parce qu'on fait ça beaucoup ici, parler, c'est ce que je fais en ce moment. Mais je leur dis toujours: La plus grande qualité est ici, c'est l'écoute, M. le Président, parce que, sans écoute, ce qu'on dit a pas beaucoup d'importance. Parce que, si ce qu'on dit, c'est juste ce que, nous, on pense, on n'est pas représentants de grand monde, on est représentants de nous-mêmes. Les gens nous élisent pas pour être représentants de nous-mêmes, M. le Président. Je pense qu'on fait une grave erreur en pensant qu'on est des représentants de notre petite personne.

Ce qu'on veut, là, c'est un gouvernement qui est sérieux. S'il a le respect des agriculteurs, s'il a le respect des citoyens, s'il a le respect de l'environnement à l'ensemble de notre collectivité, il va ouvrir ses livres, il va mettre cartes sur table, puis il va nous dire: Moi, je m'en vais par là, je veux savoir comment ça va vous affecter dans le quotidien. Puis, si, d'aventure, les gens lui disent: C'est pas bon, recommence, il dit: C'est parfait, on va prendre le temps, je vais le réécrire, puis on va se revoir, puis là on va vraiment se faire un projet de loi qui va être utile et bon pour tout le monde. Faire le contraire de ça, se dire qu'on va être capable d'en passer une petite vite à l'opposition en faisant semblant que le monde nous écoute pas puis qu'il y a pas d'intervenant dans le champ qui s'y intéresse, c'est en passer une petite vite à tous ceux qui sont intéressés par l'agriculture, qui sont intéressés par l'équilibre à atteindre entre le droit du citoyen, le droit de produire, s'assurer qu'on a une société harmonieuse.

Ça ne peut pas se faire, M. le Président, dans le catimini, dans la cachette, dans l'ombre. Ça se fait livre ouvert, avec les gens. Ça prend un petit peu de temps, la démocratie, mais là on avait déjà beaucoup de mois qui ont été perdus. La démocratie a besoin de temps et a besoin d'un gouvernement qui respecte et le temps et la démocratie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Papineau. M. le député.

M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de pouvoir discuter avec vous, M. le Président, sur la Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives.

M. le Président, j'avais décidé de pas intervenir sur le projet de loi n° 184. Il y a des gens qui disent: Bonne idée. J'ai pas entendu le député de Richelieu venir discuter de ce projet de loi là, M. le Président, mais, à 5 h 30 hier après-midi, les gens de l'opposition, les porte-parole de l'opposition en agriculture ont reçu un cartable qui, tant qu'à moi, changeait tout le projet de loi, complètement, avec des amendements, M. le Président. Il y a 32 articles, il y a 50 amendements sur le projet de loi, M. le Président. Alors, suite aux interventions des gens de notre parti, des porte-parole, le leader de l'opposition et le député d'Argenteuil, ils nous ont demandé d'intervenir sur un projet de loi qu'on pensait peut-être, à un moment donné, qui aurait pu faire plaisir aux gens, aux agriculteurs de chacun de nos comtés.

M. le Président, quand on reçoit à 24 heures ? même pas ? de notice un cartable qui change probablement tout le projet de loi, je suis pas avocat, je connais pas ça vraiment article par article, M. le Président, mais il y a quelque chose qui se passe. Pourquoi que tout à coup un projet de loi qui est déposé au mois de février en commission parlementaire ou dans des audiences publiques, on dépose un projet de loi et que tout à coup, suite à plusieurs interventions, on est obligé d'avoir 50 amendements dans un projet de loi qui a 32 articles, M. le Président? Et je suis sûr, M. le Président, si vous aviez la chance d'être assis à mon siège, vous diriez la même chose. Un projet de loi à la veille peut-être d'une adoption ? il y a des rumeurs peut-être qu'on finirait vendredi, je souhaite qu'on va aller vraiment jusqu'au bout pour pouvoir déposer tous les projets de loi que les gens du Québec veulent entendre ? on nous amène ça, M. le Président.

L'objet de ce projet de loi là, qui vise à modifier la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles afin d'assouplir les règles régissant l'expansion des entreprises agricoles, il a également pour but de rendre inopérants certains règlements municipaux visant à atténuer les inconvénients reliés aux odeurs qui ne sont pas compatibles avec le règlement de contrôle intérimaire des municipalités régionales, les MRC, et les orientations gouvernementales en matière de distances séparatrices. Le projet introduit également la possibilité de rendre l'assurance et le financement des activités agricoles... afin de rendre plus difficile l'utilisation de la zone verte à des fins autres qu'agricoles.

Le contexte, M. le Président. En 1993, le ministre libéral de l'Agriculture du temps, M. Yvon Picotte, reconnaissait la nécessité de revoir la disposition de la Loi sur la protection du territoire agricole et présentait un projet de loi qui devait finalement mourir au feuilleton. En 1995, le gouvernement péquiste présentait à son tour un avant-projet de loi sur le droit de produire, qui donnait lieu à des consultations particulières. Ce n'est qu'en juin 1996 qu'un véritable projet de loi fut déposé et débattu.

n(23 h 10)n

Malgré, M. le Président, la mise en garde et les réserves de l'opposition, la loi n° 23 fut adoptée en juin 1996. Rapidement, cette loi est devenue problématique dans son application. Motivées par la grogne des groupes de citoyens et d'environnementalistes, de nombreuses municipalités locales ont adopté des règlements municipaux sur les distances séparatrices afin de repousser ou de décourager des entreprises agricoles désireuses de s'établir sur le territoire. Dans certains cas, des entreprises agricoles déjà établies ont vu leurs possibilités d'expansion réduites, voire même anéanties par de tels règlements. Un nombre important, M. le Président, de municipalités ont exercé leurs pouvoirs réglementaires afin d'adapter à leurs besoins et au désir des citoyens agricoles de l'activité agricole sur leur territoire. Dans certains cas, des règlements... municipaux ? excusez ? se sont avérés nécessaires. En effet, les normes provinciales telles qu'établies par le ministère de l'Environnement ne tiennent pas compte des vents et des activités avoisinantes.

Je me rappelle, M. le Président, d'avoir siégé sur la commission parlementaire sur le projet de loi, et, avec les trois ministres qui étaient avec nous, les ministères de l'Environnement, l'Agriculture, et même les Affaires municipales qui représentait les MRC. Et j'ai vu, monsieur... à ce temps-là, M. le Président, qu'il y avait pas d'ententes entre les gens qui siégeaient entre les propres ministères et que les MRC du temps qui avaient, je pense, soumis des résolutions... pas des résolutions, mais un mémoire qui disait qu'il fallait absolument trouver des ententes... Par conséquent, les possibilités d'accroissement des activités agricoles se sont retrouvées confrontées à leur peur des citoyens des campagnes de voir leur qualité de vie réduire par les odeurs et la pollution. Les craintes de ces citoyens furent largement alimentées par la réputation de grands pollueurs attribuée aux élevages porcins. De plus, le rapport du groupe de travail sur la qualité d'eau présidé par M. André Beauchamp et la tragédie de Walkertown, qui aurait peut-être été causée par la pollution agricole, ont aussi contribué à créer un sentiment d'inquiétude, M. le Président.

Le milieu agricole réclamait depuis quelques années des modifications à cette loi importante que celle de la protection du territoire et des activités agricoles. En mai 2000, après plusieurs mois de négociations, l'Union, l'UPA, et la Fédération québécoise des municipalités en sont venues à une entente sur une proposition de modification législative. Bien que certains groupes aient refusé de souscrire à l'entente, dont le ministère de l'Environnement, il s'agit d'un premier consensus entre les producteurs agricoles, les municipalités sur cette épineuse question.

Le principal point du litige entre les deux, entre les deux organisations qui fut réglé par cette entente touche l'accroissement des activités agricoles. Cette entente prévoyait une possibilité de développement de 75 unités animales malgré les normes de distances séparatrices ou de contrôle des usages applicables à condition que cet accroissement ne porte pas plus à 300 le nombre d'unités animales de l'exploitation. Au-delà de 300 unités animales, les actuels baromètres de distances séparatrices s'appliqueraient.

En novembre dernier, M. le Président, estimant que le ministre Trudel, alors titulaire de l'Agriculture, avait suffisamment laissé, M. le Président, traîner les choses, les producteurs agricoles du Saguenay?Lac-Saint-Jean ont décidé de faire pression sur le gouvernement en interdisant aux motoneiges le passage sur les terres agricoles, ce qui risquait de nuire à l'industrie touristique de la région. Ils ont finalement levé le blocus au mois de décembre dernier dans lequel le gouvernement a déposé ce projet de loi, en catastrophe.

Il y a plusieurs articles, M. le Président, dans le projet de loi qui peuvent peut-être faciliter la compréhension. Ces articles sont ici regroupés par thèmes selon une séquence logique, M. le Président.

L'accroissement des activités agricoles. L'article 2 du projet de loi vient modifier l'article 40 de la loi afin de faire en sorte que des bâtiments voisins des entreprises agricoles situés eux aussi en zone verte et servant à des fins autres qu'agricoles ne puissent entraver l'accroissement des activités agricoles s'ils ont été construits postérieurement à l'entreprise agricole. Ainsi, dans ces cas précis, l'accroissement pourra se faire à l'encontre des règlements des MRC et des municipalités. De plus, les propriétaires ou des résidents de bâtiments ne pourront se prévaloir de normes sur le bruit, la poussière ou les distances séparatrices pour entraver le développement de l'exploitation agricole aux pratiques normales.

On se demande, M. le Président, et on a un débat, le projet de loi n° 29, qu'on dit que les fusions municipales, c'est pour donner, en certains cas, des pouvoirs, plus de pouvoirs aux municipalités, et, quand on regarde ce projet de loi là, je pense que, dans certains cas, on va enlever des pouvoirs aux MRC. Alors, si on met ça tout ensemble, la loi n° 29, la loi n° 184, qu'on dit qu'on veut regrouper des municipalités pour aider la mondialisation ? j'ai entendu ça dans des discours et dans les articles de journaux ? qu'on veut couper les taxes, il y aura pas d'augmentation de taxes, il va y avoir moins d'intervenants dans plusieurs des dossiers. Et, avec la loi n° 184, on veut enlever, tant qu'à moi, beaucoup de pouvoirs aux MRC et aux municipalités, dans certains cas, M. le Président.

Dans les faits, bien inspiré par l'entente entre l'UPA et la FQM, cet article est beaucoup moins précis. Le ministre devrait compléter cet article en chiffrant les nombres d'unités animales qu'une exploitation pourra ajouter, à défaut de quoi que cet article permettra un développement illimité. Par conséquent, cette question devra faire l'objet d'échanges, ultimement d'un amendement. On a parlé d'amendement au début, M. le Président, là on est rendu à 50 amendements, avec 32 articles. Alors, ça se suit pas, pas du tout, M. le Président.

Il y a des gens que je pense que tout le monde ici ont pris position, comme l'UPA, des gens, au mois de février, qui disent dans leur communiqué, M. le Président: «Dans sa forme actuelle et en dépit des prétentions avancées lors de son dépôt, le projet de loi n° 184 ne fait que la moitié du chemin nécessaire pour parvenir à une véritable solution. C'est en ces termes que le président de l'Union des producteurs agricoles ? l'UPA ? M. Pellerin, a commenté aujourd'hui le projet de loi concernant la protection des activités agricoles qui fait l'objet d'une étude par les membres de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Le projet de loi, qui avait déposé au mois de décembre, visait à corriger des irritants relatifs à la Loi sur la protection des activités agricoles. Incidemment ? c'était le projet de loi n° 23 ? c'est la quatrième fois en six ans que la CAPA tient une série d'audiences sur le dossier de la protection des activités agricoles, preuve de complexité du sujet et de la situation. Rappelons que la principale difficulté ? M. le Président ? qui persiste tient au fait que bon nombre d'entreprises agricoles existant avant la loi n° 23 voient toujours compromise la possibilité de se développer de façon durable. Or, le projet de loi n° 184, tel qu'il est libellé présentement, ne remédie pas à cette situation, laquelle touche la plupart du temps des entreprises établies depuis des générations.»

C'est l'UPA qui dit ça, M. le Président. J'ai pas eu la chance, n'étant pas le porte-parole de l'agriculture, comme mon collègue d'Argenteuil et mon collègue leader de l'opposition... J'oublie son comté.

Une voix: Brome-Missisquoi.

M. MacMillan: Brome-Missisquoi, merci. Je pense que c'est nous peut-être qui avons pu faire parvenir, M. le Président, les amendements. Les amendements, M. le Président, 52 amendements... ou 50 amendements pour 32 articles de loi.

Alors, au mois de février déjà l'UPA se posait des questions sur le projet de loi n° 184. On dépose le projet de loi. On a, M. le Président, des audiences publiques et, si j'ai bien lu, cinq ou six fois sur le même projet de loi, le projet de loi n° 23. On est revenu avec le projet de loi n° 184. Et maintenant, 24 heures qu'on vient à l'Assemblée nationale avec un projet de loi, on propose 50 amendements, M. le Président.

«M. Pellerin est revenu à la charge en demandant qu'il soit intégré au projet de loi des consensus de l'entente intervenue au sujet... entre l'UPA et la Fédération des municipalités. Rappelons qu'un peu plus tôt cette semaine, l'UPA [...] ? et ça c'est toujours au mois de février, M. le Président ? la majorité des municipalités ayant une zone agricole ont fait une sortie en ce sens.» Encore une fois, le gouvernement du Parti québécois n'écoute pas vraiment les gens. On en a la preuve avec le projet de loi n° 29, 11 h 20 le soir, on se répète. Mais c'est le message qu'il faut laisser aux citoyens du Québec, aux citoyennes du Québec. C'est la même chose dans tous les projets de loi.

Une voix: ...la vérité.

n(23 h 20)n

M. MacMillan: C'est la vérité, exactement. Il faut quand même laisser la chance aux gens de se faire entendre, mais se faire entendre dans le sens que... donner la chance aux gens de produire un projet de loi que les gens... C'est pas nous, c'est pas moi, c'est pas le député de Richelieu, c'est pas l'ancien député de... l'ancien ministre de l'Agriculture ou le nouveau ministre de l'Agriculture qui peut dire aux gens de l'UPA comment on doit régler les problèmes du droit de produire. C'est des gens d'expérience. C'est des gens qui travaillent à ça à tous les jours. Le but d'être un membre de l'Assemblée nationale, c'est d'écouter les gens, je pense que tout le monde vont être d'accord avec ça, écouter les gens et de soumettre un projet de loi qui va être à l'entente des gens qui sont parti pris directement.

Nous avons déposé... ou nous avons eu une audience publique, M. le Président, sur la violence sur le hockey, dont j'ai participé. Le but de ces audiences-là, c'était de trouver une solution aux problèmes sur la violence sur le hockey. Nous les avons écoutés. Le député de Saint-Jean a participé, il a été un atout formidable à l'audience publique de la commission de l'aménagement et territoire. Et là présentement six fois, le même projet de loi, il y a eu des audiences publiques. Nous, nous allons sûrement déposer un rapport pour aider à améliorer ou plus avoir de violence au hockey. Mais là ça fait six fois, le projet de loi n° 23, la loi n° 184. Personne écoute.

Ça a été la même chose pour les fusions. Chez nous, dans l'Outaouais, même chose: fusion forcée, fusion sans demander aux gens qu'est-ce qu'on en pensait. Puis c'est les gens qui décident. Mais on revient tout à ça, M. le Président. C'est les payeurs, les payeurs de taxes qui devraient décider, qui devraient nous conseiller, à nous, comment déposer un projet de loi et donner le projet de loi... Pas un projet de loi de conseillers politiques, pas un projet de loi de, excusez l'expression, mais de fonctionnaires, un projet de loi des gens qui sont pratiques, des gens qui participent au droit de produire à tous les jours. On ne les écoute même pas. L'UPA est contre. L'UPA n'avait même pas eu, au moment où on se parle, à 17 h 30, hier... Nous, le parti de l'opposition, ont eu les amendements, 50 amendements, nous avons eu ça, M. le Président, hier, à 17 h 30. C'est pas normal.

Je vois le député de Saint-Hyacinthe qui est un expert en agricole, qu'on me dit, un expert en agricole. S'il avait le choix de se lever ici, M. le Président, et de dire la vérité sur le projet de loi n° 184, je vous garantis qu'il viendrait s'asseoir à côté de moi puis il vous dirait la même chose: Donnez la chance à ces gens-là d'émettre leur opinion, M. le Président. C'est pas ça qu'on fait comme gouvernement, M. le Président. On prend les décisions, on passe le rouleau compresseur dans tous les projets de loi, complètement, complètement, M. le Président, le rouleau compresseur, sans écouter les gens. Aucune oreille, pas du tout. On passe notre temps de parler de souveraineté, de parler de l'État national, mais on ne parle pas des vraies choses, M. le Président. On parle pas de ces gens-là qui travaillent à tous les jours, sept jours par semaine. Et c'est un cas. Tous les gens qui sont en agriculture travaillent sûrement plus fort que beaucoup de nous autres ici, malgré qu'on travaille très fort, 70, 75, 80 heures par semaine, mais je suis sûr que ces gens-là en travaillent autant et même plus.

C'est un respect. Et ceux qui les représentent, c'est l'UPA, M. le Président. C'est leur syndicat. Pas toujours d'accord avec le syndicat de l'UPA, il y en a rien qu'un. Alors, c'est eux qui ont le privilège de prendre les décisions pour les agriculteurs, agricultrices du Québec. Mais là on nous le dit: On n'est pas d'accord avec tous ces amendements-là. Et on donne vraiment pas la chance, M. le Président, de pouvoir en discuter.

C'est difficile sûrement pour les députés du gouvernement de s'asseoir là et ne pas dire un mot, d'être silencieux dans ce projet de loi là. Je les comprends. J'ai déjà fait partie du gouvernement. J'étais un de ceux, quand j'étais pas d'accord, je pouvais me lever debout pour le dire, poliment, mais le dire quand même. Mais je n'ai pas vu tellement ici ce soir dire ça, M. le Président.

Il y a des gens ici qui ont des agriculteurs dans leur comté et qui n'ont pas la chance de pouvoir les défenses... de les défendre, excusez, et les défendre... Puis je le répète: Cinq ou six fois qu'on a eu des audiences publiques pour changer un projet de loi, puis y a rien qui arrive. Est-ce qu'on va finir cette session encore une fois avec des projets de loi qui vont mourir au feuilleton parce qu'on n'a pas écouté et on n'a pas amélioré ces projets de loi là? On devrait pas faire ça, M. le Président. C'est la même chose pour les fusions forcées, c'est la même chose pour le projet de loi n° 28 sur les gouvernes des régies, M. le Président.

Alors, M. le Président, comme je vous disais au début de l'intervention, je pensais sérieusement à ne pas intervenir dans ce projet de loi là pour laisser les experts pouvoir nous discuter et mettre sur la table quoi qui est le mieux pour les agriculteurs, agricultrices du Québec, et je m'aperçois, M. le Président, encore une fois que l'oreille est très sourde ici et que c'est grâce à l'opposition qu'on peut au moins discuter des problèmes qu'il y a en agriculture au Québec, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Papineau. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député.

M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. M. le Président, je suis obligé de commencer mon intervention en félicitant le député de Papineau. C'est un homme qui fait de la télépathie, M. le Président. Tout à l'heure, il a dit: S'il avait le choix, le député de Saint-Hyacinthe, de se lever, il est un expert, il nous dirait qu'est-ce qui en retourne de ce projet de loi là. Eh bien, eh bien, je me rends à votre invitation. Je me rends à votre invitation. Et, vous savez... Mais j'ai eu de la misère à vous suivre, par exemple. Vous disiez tout à l'heure... Évidemment, je ne dirai pas que vous auriez dû suivre votre première idée parce que vous disiez: J'avais l'intention de pas intervenir mais, après, j'ai changé d'idée. Non, non. Vous avez bien fait d'intervenir, je pense que vous êtes député pour cela. Et j'ai beaucoup de respect pour ce qu'a dit le député de Papineau, sauf que, mon problème, M. le Président, c'est de faire le lien entre ce qu'il dit et le projet de loi, le contenu du projet de loi. J'ai beaucoup de misère à faire ça, M. le Président. Et pourtant je me suis appliqué. Je me suis appliqué, mais j'ai pas vu grand-chose, grand information qui nous permettait d'avancer.

Voyez-vous, souvent l'opposition se lève en Chambre, à la période de questions ou à d'autres moments, pour dire: Allez-vous consulter sur tel projet de loi, allez-vous consulter sur tel autre projet de loi? Eh bien, oui. Non seulement il y a eu consultation, il y a eu avant-projet de loi afin de consulter tous ceux qui voulaient dire quelque chose sur la question du droit de produire, une longue consultation. Alors, l'opposition nous exhorte d'écouter ce que les gens ont à dire; alors, nous avons écouté. M. le ministre de l'Agriculture a écouté longuement ce que les gens avaient à dire et il en est venu à la conclusion qu'il fallait faire un certain nombre de modifications à la loi.

Et là je comprends pas ce soir, je comprends pas, M. le Président, l'opposition reproche au gouvernement, reproche au ministre de l'Agriculture d'arriver avec des amendements à la loi. Quand on modifie un projet de loi, on fait des amendements, d'habitude. Alors, c'est quoi, les contradictions qu'il y a entre... Vraiment, dans leur langage, c'est difficile à suivre, M. le Président. On fait notre possible pour suivre ces raisonnements-là, mais c'est pas toujours, toujours très aidant, M. le Président.

Vous savez, M. le ministre de l'Agriculture, une des choses les plus importantes pour lui quand il est arrivé en place pour ce mandat de ministre de l'Agriculture, la première chose qu'il a voulu régler, c'est cette question de la loi n° 184 parce qu'il sait qu'elle est au coeur, au coeur de la production agricole, au coeur du droit de produire et au coeur de l'harmonie entre les gens qui vivent dans le milieu rural. Alors, il s'est appliqué à cela. Et, tout à l'heure, le chef de l'opposition a fait des reproches au ministre en lui disant qu'il avait fait perdre son temps aux gens de la commission en les faisant travailler sur la loi n° 154 sur l'Ordre national du mérite agricole, et tout ça.

Eh bien, M. le Président, c'est vrai qu'on a beaucoup de travail et qu'il y a beaucoup de lois à adopter et il faut les adopter une après l'autre, mais celle que nous avons devant nous, M. le Président, c'est quelque chose de spécial. C'est une loi qui résulte de négociations entre les gens de l'environnement, ceux qui font profession de protéger le milieu de vie, le territoire, la nature, pour ceux qui y vivent présentement et pour les générations futures; donc, négociations entre ces gens-là, entre les gens des affaires municipales, qui ont à administrer au quotidien nos municipalités, entre les gens de l'agriculture, l'UPA en particulier, et le ministère de l'Agriculture.

n(23 h 30)n

Donc, vous voyez plusieurs intervenants entre lesquels il faut trouver un juste équilibre, un juste équilibre entre les intérêts des uns et les intérêts des autres. C'est un travail fin, M. le Président. Je dirais, pour employer une expression féminine mais particulièrement juste dans les circonstances, c'est un travail de broderie fine, c'est un travail de dentelle au fuseau, M. le Président, c'est un travail de chirurgie cardiaque, M. le Président, une chirurgie très précise, pour arriver à cet équilibre qui fait que chacun se retrouve peut-être pas complètement satisfait, mais dans un compromis social qui nous permet d'avancer chacun et tout le monde ensemble dans une dynamique de développement.

M. le Président, pour réussir à préparer un projet de loi comme ça, il faut une adresse exceptionnelle. Je dirais, M. le Président, et je pense que ce n'est pas exagéré, c'est l'art de passer entre l'écorce et l'arbre afin de trouver ce point d'équilibre qui va permettre aux gens de s'entendre et de voir au développement de l'agriculture, M. le Président. C'est magnifique. Moi, j'ai beaucoup d'admiration pour ce travail qui a été fait pour atteindre cet équilibre dynamique entre les intérêts des uns et les intérêts des autres afin de pouvoir assurer le développement de la production agricole et de pouvoir assurer en même temps l'harmonie entre les citoyens dans le milieu rural, M. le Président, dans ce milieu rural, dans ces belles campagnes qui sont les plus belles du monde, M. le Président. Alors, moi, je ne peux que dire à M. le ministre de l'Agriculture: Vous avez fait là un travail d'une grande qualité.

Vous savez, de quoi s'agissait-il? De quoi s'agit-il au juste? On peut dire n'importe quoi, mais de quoi s'agit-il, M. le Président, au juste là-dedans? Vous savez, M. le Président ? je retourne, en deux mots, un petit peu en arrière ? vous avez connu comme moi, parce que vous avez eu la chance de le faire pendant ces années que vous avez travaillé, vous avez connu les années soixante où le Québec s'urbanisait, c'est-à-dire où les gens partaient de la campagne et venaient de plus en plus à la ville, et là vous avez vu les villes s'étendre, s'étendre, s'étendre et commencer l'étalement urbain, les gens aller s'établir un peu plus loin, un peu plus loin vers la campagne, un peu plus loin dans tel chemin, et, peu à peu, la pression des ruraux non liés à l'agriculture a commencé à représenter pour les producteurs agricoles un problème de convivialité, un problème d'harmonie, et c'est là qu'ils ont commencé à demander, vers les années soixante-dix, une loi pour protéger leur territoire.

Ceux qui ont vu ce qui s'est passé, par exemple, dans le coin de Carignan et dans la région de Saint-Hubert dans les années soixante, soixante-dix, où on vendait des petits lots, des tout petits lots, il y avait des propriétaires situés partout en Europe, aux États-Unis, en Asie qui achetaient d'immenses terres et qui revendaient ça, des petits lots, des tout petits lots de 100 pi par 100 pi avec des numéros qu'ils avaient fait cadastrer, et ça se vendait partout dans le monde. Et qu'est-ce qui se passait là? Rien, M. le Président, sauf qu'on ne pouvait plus cultiver ces terres-là, elles n'étaient plus disponibles. Alors, les producteurs agricoles réclamaient une loi pour protéger leurs terres, et, pendant tout le début des années soixante-dix, rien ne s'est produit, M. le Président, malgré les cris et les appels des producteurs agricoles.

Il a fallu que le Parti québécois forme le gouvernement en 1976 pour qu'on commence à travailler sérieusement sur cette question du territoire agricole, et il a fallu le prédécesseur du ministre actuel de l'Agriculture, qui était alors M. Jean Garon, et le gouvernement de M. Lévesque pour adopter, en 1978, la Loi de protection du territoire agricole et mettre en place la Commission de protection du territoire agricole pour qu'enfin les producteurs agricoles trouvent une première réponse à leurs préoccupations. Et la situation a continué d'évoluer. De façon générale, il y a eu un frein à l'étalement urbain, pas un frein complet, mais un très grand ralentissement de l'étalement urbain, et qui a permis d'enrayer en partie le dommage qu'on faisait à l'agriculture en faisant en sorte qu'il y ait tellement de gens non liés à l'agriculture dans les campagnes que ces gens réclamaient toutes sortes de règlements à leur municipalité qui enfreignaient le droit de produire des producteurs agricoles.

Alors, vers les années 1985, 1986, les producteurs agricoles ont recommencé à réclamer une autre loi ou un autre mécanisme non seulement pour protéger le territoire, parce que ça s'avérait non suffisant, pour protéger cette fois le droit de l'utiliser d'une façon convenable pour produire des biens de consommation et nourrir le peuple du Québec, M. le Président, pour produire des céréales, pour produire... faire de l'élevage, produire de la chair de toutes sortes d'animaux afin de pouvoir nourrir le peuple du Québec. Alors, les producteurs réclamaient une loi sur le droit de produire.

Les libéraux étaient au pouvoir de 1985 à 1994, neuf ans au pouvoir, neuf longues années. Pendant toutes ces années, les producteurs agricoles n'ont pas trouvé d'oreille attentive à leurs demandes. Ils n'ont pas été exaucés dans leurs supplications. Et le gouvernement libéral de l'époque n'a rien fait pour satisfaire les besoins de la classe agricole en termes de développement et les besoins du monde rural en termes d'harmonie pour la vie dans le milieu. Ils n'ont rien fait. Alors, je comprends que, là, là, ils sentent tout d'un coup une urgence et ils disent au ministre: Bien, vous avez attendu 15 jours. Quinze jours, vous avez attendu pour présenter cette loi-là en Chambre. Vous avez perdu du temps, vous nous avez fait perdre du temps. Mais c'est quoi, ce langage-là, M. le Président?

Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité au moins... Bien, je comprends, M. le Président, que c'est l'opposition officielle. Alors, ils croient, ils ont interprété que, comme ils sont l'opposition officielle ? c'est le titre de la fonction ? ils doivent toujours s'opposer à tort et à travers et dire n'importe quoi. Mais c'est pas très bon, ça, M. le Président. C'est pas bon d'abord pour leur crédibilité et c'est pas bon pour le projet de loi. Si, au lieu de dire n'importe quoi, ils s'attaquaient à des choses importantes et faisaient en sorte non pas d'étirer les débats inutilement, mais de les concentrer sur les choses importantes, de les faire pas plus longs que le nécessaire et de passer à l'étude article par article rapidement parce que, même s'il y a des amendements, peut-être qu'on peut en apporter d'autres pour l'améliorer encore. Mais, pour cela, il faut étudier les articles un par un. Or, tout ce qu'on fait...

Bon, enfin, ils ont le droit. Ils ont le droit de parler aussi longtemps qu'ils veulent, les procédures le permettent. Sauf qu'ils ne viennent pas dire après qu'on fait perdre du temps aux gens, hein? Qu'ils viennent pas dire qu'on n'a pas le temps de modifier la loi, qu'on n'a pas le temps de l'étudier. Concentrons-nous donc sur la loi, sur les articles. Passons rapidement en commission, allons étudier article par article et faisons en sorte de l'adopter rapidement, mais après l'avoir étudié avec attention et apporté, s'il y a lieu, d'autres amendements.

Alors, M. le Président, cette loi-là, qu'est-ce qu'elle apporte? Parce que je veux expliquer en gros les principaux points que la loi apporte. Évidemment, il y a beaucoup de choses dans la loi; c'est pour ça que je souhaiterais qu'on passe rapidement en commission. Mais je pense qu'après tout ce qui s'est dit il faut reconcentrer le débat sur l'essentiel et sur les points les plus importants. Par exemple, par exemple, le producteur agricole, évidemment, lui, qu'est-ce qu'il veut? Il veut utiliser sa terre à sa guise pour pouvoir développer son entreprise. C'est pas raisonnable? C'est pas légitime? C'est tout à fait légitime. Celui qui est son voisin à la campagne et qui voit qu'il y a une grosse porcherie en arrière dans le champ ? parfois ça sent, pas tout le temps non plus; il ne faut pas exagérer, mais parfois ça sent, ça ne sent pas très bon ? alors, lui, qu'est-ce qu'il veut? Bien, il veut avoir un milieu le plus confortable possible, que ça sente pas trop puis qu'il puisse bénéficier des petits oiseaux puis de l'air pur, et puis tout ça. Et, quand il vient un brin d'odeur, eh bien, ça le mortifie un peu. Alors, comment faire pour trouver un équilibre à travers tout ça?

n(23 h 40)n

Il y a eu de longues négociations pour arriver à un consensus. Un consensus, M. le Président. La loi est le résultat d'un consensus, d'un compromis entre les gens de l'Environnement, l'UPA, les Affaires municipales et le ministère de l'Agriculture, et cette loi-là a été... a été dessinée de cette façon-là grâce à la collaboration de tous ces gens-là, et je veux leur en rendre hommage, M. le Président. Une des choses qu'elle va corriger, c'est faire disparaître une fameuse servitude, une clause de servitude. Vous savez, dans la loi n° 23, il y avait énormément de bonnes choses qui ont permis aux producteurs d'avancer dans le droit de produire. Mais il y avait aussi des choses, on s'en est rendu compte à l'usage, qui n'étaient pas parfaites ? M. le Président, toute oeuvre humaine est imparfaite et, si on attend de faire des choses parfaites pour avancer, on ne fera jamais rien ? donc, qui était imparfaites. Il y avait une clause de servitude en vertu de laquelle il fallait faire signer les voisins quand on voulait faire agrandir une grange et faire augmenter une exploitation. Et, dans certains cas, ça s'est avéré désastreux pour des petites entreprises familiales. Alors, on va enlever ça. La loi, là, elle va enlever ça. Alors, je pense qu'il y aurait intérêt à l'adopter au plus vite afin que ces entreprises-là puissent en bénéficier, afin qu'on puisse plus facilement favoriser les transferts des petites fermes familiales, de père en fils, et favoriser la relève, l'établissement de la relève en agriculture. Parce que souvent la relève, c'est sur les fermes de taille petite ou moyenne qu'elle peut s'établir, et puis peu à peu elle peut prendre de l'expansion. Alors, M. le Président, il est très important de favoriser ça.

Alors, la disparition des servitudes, c'est très important, parce que, ce qui se passait, c'est que les gens parfois ne voulaient pas signer, donc le producteur agricole ne pouvait pas procéder à une expansion raisonnable de son entreprise. Ou d'autres fois les gens disaient: Oui, je vais signer; ça va vous coûter 25 000 $, puis je vais signer. Alors, les petits producteurs souvent avaient pas les moyens de payer ces prix-là. Les gens qui ont d'immenses entreprises, les intégrateurs et d'autres, eux, payaient et faisaient signer. Alors, ça favorisait les très grosses entreprises, ça favorisait pas les entreprises qui sont à la taille des familles. Alors, M. le Président, la disparition de ça va favoriser des petites entreprises, des moyennes entreprises, va favoriser la relève agricole, va favoriser les fermes familiales, va favoriser le caractère humain de l'entreprise agricole, qui a toujours été conservé au Québec et qui font que nos campagnes sont si belles, et nos fermes si propres, et que nos producteurs sont si fiers d'être maîtres chez eux, et en même temps de nourrir leurs concitoyens.

Alors, M. le Président, la loi n° 184, avec les amendements, c'est ce qu'elle va faire. Ce qu'elle va faire aussi, elle va permettre certaines expansions, parce que les petites entreprises agricoles, évidemment, parfois il se peut qu'elles aient à rencontrer de nouvelles exigences pour protéger l'environnement, construire des plateformes pour engranger le fumier, tout ça, pour faire en sorte que tout ça se fasse de la façon la plus convenable possible et avec le moins de risques possible de polluer l'environnement.

Alors, dans ce cas-là, M. le Président, parfois il est arrivé souvent que, pour pouvoir agrandir et procéder à des investissements en plateforme pour conserver le fumier, bien, il fallait, pour justifier ces investissements-là, augmenter d'un certain nombre de têtes l'entreprise d'élevage. Alors donc, ce qui a été négocié entre tous les protagonistes, tous les intervenants, qu'est-ce qui a été négocié? C'est une possibilité d'augmenter le nombre de têtes d'élevage un peu, même passablement. On dit que... La loi dit qu'on pourra augmenter de 75 unités animales jusqu'à un maximum de 225... animales, pour le total des animaux élevés.

Qu'est-ce que c'est qu'une unité animale? Qu'est-ce que c'est? Est-ce que c'est un cheval? Un lapin? Une vache? Qu'est-ce que c'est? Alors, en gros, M. le Président, pour avoir des termes simples, en gros, une unité animale, ça correspond plus ou moins à une vache laitière, plus ou moins. Alors, si on a un porc, ça peut en prendre trois, trois et demi, hein, mais pour faire une unité animale. Alors donc, l'unité animale, c'est une unité qui est bien connue dans le monde agricole. Et, donc, la possibilité d'augmenter de 75 unités animales...

Une voix: ...

M. Dion: Pardon? Alors, vous voyez, M. le Président, il se fait un peu tard, et parfois évidemment, quand il se fait un peu tard, la fatigue aidant, évidemment on cède à l'envie de faire des plaisanteries mais qui sont toutes vraiment significatives, mais que je ne veux pas rapporter ici. Cependant, je reviens à mon propos d'augmenter de 75 unités animales jusqu'à un maximum, un total de 225. Ça vous donne une illustration, M. le Président, que c'est des augmentations considérables. Ajouter 75 vaches dans son étable, c'est pas mal, M. le Président. Et, jusqu'à un maximum de 225, c'est pas mal. Alors, M. le Président, ça permettra aux petites entreprises d'être rentables.

Cependant, elles ne pourront pas faire ça sans observer toutes les autres prescriptions de protection de l'environnement. Vous me faites signe, M. le Président, que je dois terminer, je le fais rapidement. Par exemple, ils devront être propriétaires du terrain pour l'épandage du fumier, ils devront détenir un plan agroenvironnemental de fertilisation, ils devront avoir des structures étanches pour entreposer le fumier, ils devront être membres d'un organisme de gestion des engrais, s'il y a lieu, ils devront respecter les normes de distance, et tout ça. Alors, M. le Président, ça se fera pas au hasard, ça sera dans le plus profond respect de l'environnement, et c'est pour ça que ç'a été accepté par tout le monde.

Alors, M. le Président, il me reste une chose très importante à faire. Réussir à trouver l'équilibre dans un problème aussi difficile, c'est une oeuvre d'art. Je veux donc féliciter tous les intervenants qui ont travaillé à cet équilibre-là pour nous préparer ce projet de loi là et, en particulier, notre ministre de l'Agriculture qui a réussi ce tour extraordinaire, ce chef-d'oeuvre qui est maintenant devant nous. Alors, j'espère qu'on va rapidement passer en commission pour l'étudier article par article. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette.

M. Ouimet: En vertu de l'article 213, est-ce que notre grand expert en matière d'agriculture accepterait une question?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui? Alors, M. le député de Marquette, oui, vous pouvez poser votre question brève.

M. Ouimet: Alors, M. le Président, de son propre aveu, le député de Saint-Hyacinthe disait tantôt que le ministre avait réussi à placer les agriculteurs entre l'arbre et l'écorce. Peut-il, lui, comprendre que, nous, nous souhaitons leur donner une meilleure position que celle-là?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Oui, certainement, M. le Président. Je regrette que M. le député de Marquette n'ait pas écouté ce que j'ai dit. J'ai dit que c'était un art, c'est un art qui était tellement rare que c'était comme passer entre l'écorce et l'arbre. Donc, ça prend un art très fin pour faire ça et c'est ce que le ministre de l'Agriculture a réussi à faire. Je veux l'en féliciter de nouveau.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien. Alors, merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Anjou. M. le député.

M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Merci beaucoup, M. le Président. Je vois que plusieurs de mes collègues ici, en cette Chambre, se demandent qu'est-ce que le député d'Anjou et député de l'est de Montréal vient faire ici dans ce débat concernant le projet de loi n° 184, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et d'autres dispositions législatives.

D'entrée de jeu, M. le Président, je vous dirai que j'ai écouté mon collègue le député de Saint-Hyacinthe, collègue pour qui j'ai beaucoup d'estime, collègue avec qui je siège d'ailleurs sur la commission de la culture, qui nous parlait d'oeuvre d'art, M. le Président, au niveau de ce projet de loi là.

M. le Président, on a un projet de loi...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît. Excusez-moi, M. le député d'Anjou. Je vous prierais, s'il vous plaît, de continuer comme s'est commencée la soirée et de garder silence. Alors, il reste encore 10 minutes. M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Je vous remercie infiniment, M. le Président, puisque, vous vous en doutez, j'ai beaucoup de choses à dire concernant ce projet de loi là. Initialement, M. le Président, l'oeuvre d'art, telle que décrite par mon collègue député de Saint-Hyacinthe, comportait 32 articles. On a ici devant nous, M. le Président, aujourd'hui 50 amendements. J'ai l'impression, M. le Président, que l'artiste en question a jeté à plusieurs reprises les esquisses qu'il avait dessinées concernant ce projet de loi là.

M. le Président, on est face à un projet de loi de 32 articles, qui est amendé, puis j'en ai ici un cartable avec une belle couverture couleur, M. le Président, de 50 amendements. En quelque part, M. le Président, on est obligé d'en venir à la conclusion, que l'on soit député d'une région rurale ou député d'une région urbaine comme moi ou le député de Marquette, d'en venir à la conclusion, M. le Président, qu'en quelque part le nouveau ministre de l'Agriculture ? et je salue sa lucidité ? en est venu à la conclusion que le projet de loi, tel qu'il avait été présenté par l'ancien ministre de l'Agriculture et nouveau ministre de la Santé... Et ça, M. le Président, s'il y a quelque chose de rassurant, c'est que l'ancien ministre de l'Agriculture est maintenant ministre de la Santé. C'est qu'on se retrouve face à un projet de loi qui avait 32 articles et qui aujourd'hui, M. le Président, avec très peu de délai, on se doit de nous présenter, M. le Président... J'ai encore une fois, M. le Président, le cartable ici, devant moi, 50 amendements pour faire en sorte dans le fond de réécrire de A à Z, de Z à A, ce projet de loi là, M. le Président.

n(23 h 50)n

Quand mon collègue de Saint-Hyacinthe, député pour qui j'ai beaucoup d'estime, député, M. le Président, je le rappelle, avec qui je siège au niveau de la commission de la culture... Et je lui ai dit l'autre fois, M. le Président, on aurait dû suivre sa voie lors de nos travaux concernant la rédaction, M. le Président, du rapport concernant la concentration des médias. Je suis obligé d'admettre ici aujourd'hui que son oeuvre d'art, M. le Président, ressemble, M. le Président, à quelque chose de bâclé que le nouveau ministre de l'Agriculture est aujourd'hui obligé, obligé, et je l'en félicite, M. le Président, obligé de corriger entièrement parce que l'ancien ministre de l'Agriculture qui, aujourd'hui, M. le Président, est rendu ministre de la Santé...

Et tout à l'heure, juste en écoutant les nouvelles, c'étaient les radiologistes, c'étaient les médecins de médecine familiale qui lui disaient que son projet qu'il a annoncé sans consulter les omnipraticiens, M. le Président... eh bien, qu'avec son projet de loi, son projet-pilote concernant les omnipraticiens, ça n'allait nulle part.

M. le Président, je vous l'ai dit, on est face à un projet de loi tout à fait refait aujourd'hui, M. le Président. Pourquoi? Parce que, en 2001, au mois de février, on a assisté, M. le Président, à des consultations où les différents intervenants du milieu sont venus nous dire: Le projet de loi tel que présenté par le ministre ne vaut absolument rien. M. le Président, ce projet de loi là a été décrié par les différents intervenants du milieu. Heureusement, je suis obligé de le dire aujourd'hui, le ministre se réveille, puis il le réécrit au grand complet. Je vous l'ai dit, j'ai ici avec moi les amendements qui sont proposés: article 1, supprimé avec les amendements; article 2, supprimé, M. le Président; article 3, un autre amendement; article 4, oh! surprise, le ministre de l'Agriculture aujourd'hui est d'accord avec ce qui avait été fait avant. Je vous ai nommé trois articles sur quatre qui ont été complètement modifiés. Et on vient ici, aujourd'hui, nous parler d'une oeuvre d'art entre l'arbre et l'écorce. Édifiant, M. le Président! J'en reviens pas, M. le Président. J'ai pas besoin d'être un expert en agriculture et je pense que les gens qui nous écoutent à la maison aujourd'hui ont pas besoin de vivre nécessairement dans ce milieu-là pour comprendre que le projet de loi tel qu'il avait été présenté par le ministre de l'Agriculture qui, aujourd'hui, s'occupe de vos urgences, M. le Président, avec ce projet de loi là, n'avait ni queue ni tête.

M. le Président, le Barreau du Québec nous a parlé ici qu'il n'y avait aucun équilibre entre le droit de produire, le droit des citoyens et le droit... et la protection de l'environnement. Il y a quelque chose de fondamental là-dedans, M. le Président, qui, je pense, je le pense sincèrement, mérite l'attention de l'ensemble des parlementaires. Ce n'est pas parce qu'un député de quelque côté que ce soit représente des populations qui sont peut-être plus ou moins concernées directement ou indirectement par ce projet de loi là... de faire en sorte que ces députés-là, M. le Président, fassent en sorte qu'ils ne se préoccupent pas de ce genre de questions. Nous, ce que l'on a dit, M. le Président, c'est qu'il fallait y aller modérément. Pourquoi ne pas consulter l'ensemble des intervenants concernant, M. le Président, et je vous le remontre à nouveau, ce guide-là... 50 amendements, je vous avoue que c'est particulièrement, c'est excessivement spectaculaire comme mesures.

J'ai pris la parole, M. le Président, parce que le projet de loi n° 184 avec les 50 amendements, ici, aujourd'hui, et pour les collègues qui n'ont pas eu l'opportunité de le réaliser, 32 amendements... 32 articles au début, amendés par 50 amendements. Moi, M. le Président, je vais vous dire une chose, ça me rappelle franchement le projet de loi sur les fusions forcées. Bon nombre de citoyens et de citoyennes dans mon comté me parlent encore de cette image tout simplement indélébile dans leur esprit où le gouvernement n'écoutait absolument pas ce qui était l'opinion des citoyens et des citoyennes de mon comté. Et c'est cette image du député de Brome-Missisquoi, leader du gouvernement, qui brandissait les amendements, M. le Président, qui nous avaient été lancés en pile. Le député de Brome-Missisquoi qui défendait mes citoyens et mes citoyennes ? ils lui en sont d'ailleurs reconnaissants, et je tiens à le souligner ici aujourd'hui ? et qui ont vu à la télévision... Puis je pense que l'ensemble des députés ici vont devoir, à un moment donné, se poser des questions. Est-ce que c'est normal que, comme opposition officielle, et on peut peut-être penser que, quand on est au gouvernement, c'est drôle, c'est amusant, parce que de toute façon les décisions sont prises au Conseil des ministres, mais de faire en sorte que les députés, puis pensez-y un peu, que les amendements... Il y a des amendements sur lesquels on avait déjà pris des positions.

Je vous rappelle, au niveau des fusions forcées, l'amendement concernant l'équité salariale qui visait justement... On avait posé des questions lors de la période des questions. Je me souviens encore de la députée, à l'époque ministre du Travail, qui est rendue à la Culture, qui nous disait: Bien, voyons, les députés libéraux s'énervent. Mais elle a quand même pris la peine, M. le Président, de soulever un amendement qui visait justement à éviter à ce que les personnes qui soient visées par l'équité salariale se voient contraintes d'accepter, dans le fond, une compensation sur une seule année. Puis la conséquence directe de tout ça, c'était que, évidemment, ces gens-là allaient être imposés sur un taux d'imposition beaucoup plus élevé.

On est arrivé, M. le Président, le soir même, je suis convaincu que vous allez vous en souvenir, le gouvernement est arrivé, on avait une pile de documents, une pile d'amendements que le leader du gouvernement défendait avec vigueur. Cette pile d'amendements là, M. le Président, on nous a dit: Comme parlementaires, vous n'avez pas le choix, ou bien vous votez en faveur de tous les amendements ou bien, M. le Président, vous êtes contre l'ensemble des amendements. Puis je pense que, comme députés de l'Assemblée nationale... Et je vois mon collègue député de Saint-Jean, qui est certainement quelqu'un de très calé en termes de droit parlementaire...

Des voix: Bravo!

M. Lamoureux: Oui, ça fait plaisir de le souligner. Ça nous ferait un très bon président ou vice-président, M. le Président, on retiendra sa candidature. Mais en quelque part, il y a quelque chose, il y a quelque chose, M. le Président, qui est très difficile à expliquer, que l'on soit dans l'opposition ou au gouvernement. Que l'on soit forcé, M. le Président, par une motion de bâillon, de voter en faveur de la totalité des amendements ou simplement contre la totalité des amendements, il y a quelque chose d'aberrant.

Est-ce qu'on ne devrait pas, M. le Président, s'assurer, comme Parlement ? comme Parlement, M. le Président, et c'est une réflexion que j'ai ici ce soir ? s'assurer, comme Parlement, qu'un projet de loi ne soit jamais adopté dans la même session, sauf que de très rares exceptions, ou justement que l'ensemble des parlementaires... ? et je vois certains de mes collègues, de l'autre côté de la Chambre, pour qui j'ai beaucoup d'estime, et je suis convaincu qu'ils ont des choses à dire, que ce soit sur la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles ou sur d'autres projets de loi ? de s'assurer que ces collègues-là, M. le Président, puissent apporter une contribution?

Parce que, dites-vous une chose, là ? puis on va se parler de façon très sincère ? les citoyens et citoyennes qui écoutent nos débats ne comprennent pas nécessairement qu'un projet de loi aussi fondamental que celui sur les fusions forcées ou celui, ici, sur 184, qui peut-être, M. le Président, peut-être, se retrouvera dans un autre bâillon, M. le Président... J'ose à peine le dire, mais c'est possible, M. le Président, qu'un autre bâillon nous soit imposé d'ici la fin de la session. Est-ce que vous trouvez ça normal, vous, M. le Président, que des députés aient à peine quelques jours de débats pour porter là-dessus?

Un autre commentaire qui a été apporté tout à l'heure par mon bon... mon collègue, mon bon ami le député de Saint-Hyacinthe, qui nous disait: Écoutez, les libéraux veulent prendre du temps. Je vous rappellerai simplement un événement, M. le Président, un événement dans ce projet de loi là, un événement qui est révélateur de ce qui se passe de l'autre côté de cette Chambre. C'est, tout à l'heure, l'ineffable leader adjointe du gouvernement a décidé d'ajourner le débat. Elle a fait sonner les cloches. Nous sommes tous descendus comme si l'incendie s'était déclaré dans l'Assemblée nationale: Est-ce qu'il y a le feu ou il faut voter, M. le Président? Il fallait voter. On est arrivés ici, en cette Chambre: Qu'est-ce qui se passe? La leader adjointe du gouvernement a décidé... Bien, elle savait pas trop si c'était une motion d'ajournement ou de suspension. Finalement, elle a décidé que c'était une motion d'ajournement. Mais elle voulait pas ajourner, M. le Président. Ça fait des semaines qu'ils disent à l'UPA: C'est les méchants libéraux qui nous empêchent de voter en Chambre. M. le Président, j'ai pas gagné un vote, depuis que je suis élu ici, monsieur, sans que le gouvernement soit d'accord avec nous. Qu'est-ce qui arrive, ici? Elle vote contre. On savait pas quoi faire, M. le Président. Les gens, ici, de l'Assemblée, se retournaient devant le gouvernement, disaient: Est-ce que les députés en faveur peuvent se lever? Il n'y en a pas un qui s'est levé, M. le Président. Mais elle avait débusqué le gouvernement, qui, depuis des mois, ne fait rien.

On vous l'a dit, M. le Président, au mois de février. Au mois de février, M. le Président, tout le monde leur dit que le projet de loi ne valait rien. Qu'est-ce qu'ils ont fait au mois de mars? Qu'est-ce qu'ils ont fait au mois d'avril? Qu'est-ce qu'ils ont fait au mois de mai? Rien. Ils ont changé de ministre. Ils arrivent ici, aujourd'hui, un nouveau cartable, des belles couleurs, M. le Président, il réécrit totalement le projet de loi du ministre de l'Agriculture de l'époque, qui est rendu ministre de la Santé.

Je vous vois, M. le Président, vous êtes sur le bout de votre siège, je vous retiendrai pas plus longtemps...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il est minuit, et puis je dois ajourner les travaux jusqu'à demain matin, 10 heures.

Ajournement

(Fin de la séance à minuit)



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