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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Thursday, November 18, 1999 - Vol. 36 N° 65

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bon matin. Un moment de recueillement.

Merci. Si vous voulez prendre place.


Affaires du jour

Aux affaires du jour, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous réfère d'abord à l'article 9 du feuilleton.


Projet de loi n° 82


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 9, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 17 novembre 1999 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 82, Loi sur l'administration publique.

Alors, je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. Mme la députée de Rosemont, je vous cède la parole.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi sur l'administration publique, que l'on reconnaît comme étant le projet de loi n° 82, que l'on recommande aujourd'hui pour approbation en première lecture, vise un peu à recentrer mais certainement à moderniser la fonction publique québécoise. Cette loi, elle apporte un cadre de référence beaucoup plus rigoureux pour assurer une meilleure efficacité, une meilleure efficience et, enfin, une meilleure responsabilité de la part du personnel pour lequel tous les contribuables québécois paient des impôts. C'est bien sûr, M. le Président, cette loi-là, elle n'est pas parfaite. Néanmoins, elle représente, je pense, un premier pas vers une meilleure gestion des fonds publics et surtout un meilleur service aux citoyens du Québec. C'est un grand défi, surtout dans une période où les citoyens sont très critiques vis-à-vis de leur gouvernement et de ceux qui les représentent.

En politique québécoise, la Révolution tranquille a créé une fonction publique professionnelle dont ceux qui m'ont précédée ici, hier et aujourd'hui, ont fait beaucoup d'éloges, et je partage cette estime pour la fonction publique, comme nous tous ici. Par ailleurs, quand on a créé cette fonction publique professionnelle, l'objectif était – on s'en rappellera – de bien séparer le pouvoir politique de la gestion administrative. C'est pour cette raison que la fonction publique québécoise a reçu la sécurité d'emploi, d'ailleurs – on s'en rappellera – par le gouvernement libéral de l'époque, en 1965. Après pratiquement 35 ans, cette fonction publique a changé. Elle a changé, tout comme les attentes de la population qu'elle doit servir aujourd'hui. Au fil des ans, cette fonction publique s'est un peu confortée dans son statut sécuritaire et, au fil des ans, cette sécurité d'emploi s'est transformée en une sorte de garantie ou d'assurance de l'objectivité administrative gouvernementale. Aujourd'hui, je pense que nous pouvons tous affirmer que les fonctionnaires du gouvernement du Québec sont convaincus de leur objectivité professionnelle. Quand on parle d'objectivité professionnelle, au gouvernement, nous comprenons tous ce que cela signifie: sans parti pris politique ou, si vous préférez, non partisan.

J'exagère à peine en affirmant que, parce qu'on a la sécurité d'emploi, et donc plus de problèmes de sécurité de revenu pour le reste de ses jours – parce que c'est ça que ça veut dire, la sécurité d'emploi – on a la conviction d'être objectif dans ses décisions administratives. Or, je ne partage pas cette impression. Par expérience, je pense qu'il n'y a pas plus de gens compétents ou incompétents dans la fonction publique que dans n'importe quelle des grandes entreprises de pareille taille. Statistiquement, les probabilités de compétences sont les mêmes, les probabilités de partisanerie sont aussi les mêmes. Le principe de Peter, selon lequel une personne peut atteindre son seuil de compétence, et généralement l'atteint, existe dans la fonction publique comme ailleurs.

Cela nous amène alors à questionner les mécanismes qui assurent la compétence, qui assurent la qualité et qui assurent le professionnalisme des décisions des employés de l'État dans l'exercice de leurs fonctions – c'est ça, l'objet de la loi n° 82 – alors que dans le privé les employés sont imputables. Ils peuvent recevoir des récompenses d'importance et ils peuvent être punis pour une infraction ou une erreur grave. Cela n'est pas nécessairement le cas dans la fonction publique. Il faut une infraction très grave et très publique pour une punition. Et encore, la punition ultime, celle de perdre son emploi, n'est pas applicable. Dans la fonction publique, il est plus difficile de récompenser comme de punir, et ce, à tous les niveaux.

Il y a des conséquences à cela. À court terme, les gestionnaires déplacent simplement leurs employés moins performants vers d'autres fonctions et de préférence d'autres ministères pour éviter l'affrontement et surtout pour éviter l'obligation de défendre devant un arbitre ou un tribunal les reproches qu'un gestionnaire peut faire à son employé ou même les griefs qu'il peut avoir envers lui. À long terme, le résultat de ce mécanisme de chaise musicale, c'est que la fonction publique ne se renouvelle pas, elle ne s'améliore pas, la loi naturelle du remplacement des espèces faibles ne s'applique pas.

(10 h 10)

La réforme de la fonction publique que nous présentons dans la Loi sur l'administration publique, elle doit aborder la question du renouvellement. D'ailleurs, durant la commission parlementaire consultative qui s'est déroulée sur le projet de loi n° 82, le seul point qui a été soulevé par certains groupes a été le renouvellement, mais le renouvellement par l'embauche de jeunes. C'est bien mince.

Il faut que les fonctionnaires acquièrent des compétences nouvelles, comme tout le monde, tout au cours de leur travail. Ils doivent le faire à l'intérieur de la fonction publique. Mais pourquoi ne pas envisager de le faire aussi à l'extérieur de la fonction publique?

Le renouvellement de la fonction publique passe par l'embauche de jeunes, mais il passe aussi par la formation continue et par des expériences nouvelles. Les fonctionnaires doivent comprendre les changements technologiques, et il y a des cours pour cela. Mais ils doivent aussi saisir les changements structurels de la société québécoise pour bien ajuster les façons de faire du gouvernement aux nouveaux besoins de la société.

La société moderne d'aujourd'hui est bien différente de celle des années soixante de la Révolution tranquille. Les connaissances requises de la part de l'administration publique sont très vastes et très complexes, beaucoup plus complexes que par le passé. Un gouvernement prend des décisions sur la foi des analyses de ses fonctionnaires. Il est du ressort du gouvernement de s'assurer des conditions pour que ces analyses soient complètes et de qualité, tout comme tous les services que les fonctionnaires doivent donner aux citoyens et aux citoyennes du Québec au nom de leur gouvernement.

Maintenant, avec la commission de l'administration publique, qui est une commission parlementaire qui entend les administrateurs publics, il est aussi du ressort des parlementaires de s'assurer que les fonctionnaires administrent efficacement et au meilleur coût les fonds que le public confie à ces derniers, et ce, dans le respect des citoyens et des citoyennes du Québec. C'est bien sûr une question de quantité, mais c'est aussi une question de qualité.

La Loi sur l'administration publique propose justement de renouveler la mission de la fonction publique. Ce renouvellement passe par un changement dans les façons de faire. Le projet de loi propose un cadre de gestion qui veut responsabiliser davantage les gestionnaires et, pour cela, il favorise la performance et veut faciliter la gestion par résultats. Tout est là: responsabiliser, assumer cette responsabilité et faire confiance. Pour avoir confiance aux autres, il faut d'abord avoir confiance en soi. Je pense que c'est quasiment une vérité de La Palice. Ce projet de loi tente d'établir les conditions favorables pour faire confiance aux fonctionnaires, aux gestionnaires, de façon à ce qu'ils aient confiance en eux et qu'ils nous donnent le meilleur d'eux-mêmes.

Dans la commission parlementaire sur l'administration publique, nous sommes en mesure de constater certaines déficiences de la gestion publique. J'en veux pour preuve les systèmes d'information qui étaient, il faut se le dire, dans un état lamentable au moment de notre prise de pouvoir et que nous avons rebâtis «bit by bit», b-i-t pour ceux qui comprennent le jeu de mots.

J'en veux aussi pour preuve des manques flagrants de planification dans des sphères qui n'avaient pas été envisagées par nos prédécesseurs – avec tout le respect que je leur dois – le manque de planification pour la modernisation de notre administration publique. Toutes ces choses exigent du temps, bien sûr, de la planification, mais aussi beaucoup de compétence et de rigueur.

Aussi, ce projet de loi ne changera pas tout, j'en suis bien consciente. C'est un premier pas, par contre, et j'espère qu'il sera suivi de beaucoup d'autres. Il faut continuer à évoluer, à changer, à s'améliorer, et, pour ce faire, j'aimerais proposer quelques questions additionnelles pour s'assurer de répondre aux attentes des Québécois et des Québécoises. Ces questions, je souhaite qu'elles soient discutées plus tard, à la prochaine commission parlementaire, au fur et à mesure que la réforme de l'administration publique aussi va se dérouler.

Par exemple, peut-on envisager un contrat d'emploi par employé – par employé – à tous les niveaux de la fonction publique, pour une durée de quatre ou cinq ans, renouvelable? Peut-on prévoir la possibilité d'échanges de personnel entre la fonction publique et les entreprises pour des périodes vraiment limitées et avec possibilité de retour après au moins trois ou cinq ans? Peut-on prévoir l'obligation d'acquisition de nouvelles compétences mesurables, comme le veut la loi, à tous les niveaux? Peut-on prévoir des périodes régulières et obligatoires de formation pour les fonctionnaires? Peut-on prévoir des tests pour mesurer les capacités de direction des fonctionnaires? Peut-on prévoir le changement, ou à tout le moins de nouveaux contrats d'embauche, de tous les hauts fonctionnaires à chaque changement de gouvernement?

La loi 82 propose une réforme importante du cadre de gestion. Elle accordera aux gestionnaires une plus grande liberté d'action dans l'utilisation des moyens, mais elle les rendra également davantage imputables de l'atteinte d'objectifs mesurables. Et c'est important. Il faut envisager de nouvelles solutions pour un monde nouveau où les qualités et les compétences requises sont bien différentes de celles dont nous avions besoin il y a 30 ans.

Enfin, est-ce qu'on ne peut pas prévoir une transition pour le renouvellement de la fonction publique, pour que la mémoire du gouvernement du Québec ne meure pas? Il faut planifier en conséquence le renouvellement de notre fonction publique. Et il ne s'agit pas de réembaucher au bout de 35 ans une série de jeunes, il faut prévoir une transition en douce.

J'espère, M. le Président, que ces questions seront discutées en commission parlementaire et que nous pourrons possiblement bonifier, si cela est possible, ce projet de loi que j'appuie entièrement, bien sûr, et dont je recommande, comme tous ceux qui appuient ce projet, l'adoption du principe ce matin. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Rosemont, de votre intervention. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 82, Loi sur l'administration publique, et je vais céder la parole au vice-président de la commission des finances publiques et porte-parole de l'opposition officielle dans les dossiers de services sociaux et député de Nelligan. M. le député, la parole est à vous.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai voulu faire une intervention à cette étape du projet de loi n° 82, Loi sur l'administration publique, Bill 82, Public Administration Act.

M. le Président, laissez-moi citer juste quelques grands objectifs de cette loi pour m'assurer que la population comprend qu'est-ce que nous sommes en train de discuter, parce que c'est un projet de loi qui va changer une centaine d'autres lois québécoises. Une centaine, M. le Président, ça peut avoir un impact assez vaste sur notre fonction publique.

Peut-être, avant de commencer, M. le Président, je voudrais aussi un peu, comme, je pense, tous les députés qui ont parlé jusqu'à maintenant, féliciter ceux et celles qui oeuvrent pour le public, qui travaillent pour la fonction publique. Dans mes contacts pendant mes 10 ans comme député, j'ai toujours eu une excellente coopération, collaboration avec ceux et celles qui travaillent pour l'État, pour la population québécoise. Ils sont loyaux, compétents et, selon beaucoup de mes contacts, très efficaces. Mais on peut toujours penser à l'avenir et on veut s'assurer que notre fonction publique change pour s'assurer qu'ils sont prêts pour le XXIe siècle.

M. le Président, je cite le projet de loi, le premier paragraphe des notes explicatives. C'est le suivant: «Ce projet de loi instaure, en vue d'affirmer la priorité accordée à la qualité des services aux citoyens, un nouveau cadre de gestion de l'administration gouvernementale qui est axé sur l'atteinte de résultats, sur le respect du principe de la transparence et sur une imputabilité accrue de l'administration devant l'Assemblée nationale.»

Je continue, le troisième paragraphe: «Le projet de loi permet la conclusion d'une convention de performance et d'imputabilité qui prévoira, à l'égard d'une unité administrative d'un ministère ou d'un organisme, un cadre de gestion plus flexible, adapté à sa situation, et une reddition de comptes portant sur les résultats spécifiques auxquels l'unité s'engage. Cette convention sera conclue entre le ministre responsable et le dirigeant de l'unité et comprendra, le cas échéant, une entente de gestion convenue avec le Conseil du trésor.»

(10 h 20)

Mr. Speaker, the explanatory notes of Bill 82 state: «This bill establishes a new results-based management framework in the Administration, centred on transparency and enhanced accountability to the National Assembly so as to affirm the priority given to the quality of the services provided to the public.

«Under a performance and accountability agreement, a more flexible management framework will be adapted to the particular situation of an administrative unit within a department or body and the administrative unit will be held accountable for the specific results targeted in the agreement. Performance and accountability agreements – I'll talk about those later – will be concluded between the Minister responsible and the director of the administrative unit, and will in certain cases include a management agreement with the Conseil du trésor.»

M. le Président, si on veut vraiment faire de la gestion par résultats, qui est un objectif louable, comme le député de Vaudreuil l'a déjà mentionné, il me semble que le gouvernement lui-même doit respecter ses propres objectifs. Et, selon moi, je pense, c'est un peu deux poids, deux mesures que je vois, avec le comportement de ce gouvernement. Il y a tout un système d'imputabilité et de reddition des comptes qu'on peut voir dans le projet de loi n° 82. Et, quand ça arrive pour leur comportement à eux-mêmes, ce n'est pas quelque chose d'important pour eux. Ils peuvent dire une chose et faire exactement le contraire.

Laissez-moi juste citer quelques exemples, M. le Président. Un exemple qui est encore dans les médias aujourd'hui, toute la Loi sur le tabac, la loi qui a été adoptée unanimement à l'Assemblée nationale, 18 mois passés, avec les objectifs, un échéancier et aussi les sanctions, les conséquences, les dents, qu'on appelle, là, les dents de la loi. Parce que, si on veut vraiment avancer quelque chose, comme on veut faire avec le projet de loi n° 82, on doit être assez clair avec c'est quoi, notre objectif, comment nous allons atteindre notre objectif, et comment on peut y arriver, et, si ça ne marche pas, qu'est-ce que nous allons faire.

Le gouvernement, il est bon avec les discours, mais, comme suivi, c'est une autre affaire. Le ministre supposé de la santé publique a vidé ce projet de loi: pour six, 12 mois, là, aucune sanction. Ce n'est pas important, pour lui, toutes les questions de santé publique. Ça ne fait rien que le tabac tue 10 000 Québécois et Québécoises par année. Ce n'est pas important pour lui. Est-ce que c'est ça la bonne façon de gérer? Est-ce que c'est la gestion par résultats, M. le Président? J'ai de forts doutes.

Un autre exemple qui a été utilisé hier soir – et je continue l'explication de cette fameuse saga – un autre dossier dans la santé, gestion par résultats, toutes les questions de services préhospitaliers d'urgence. Le Vérificateur général, qui a aussi fait des commentaires pour le projet de loi n° 82, a dit que le gouvernement n'a aucun leadership dans le dossier des services préhospitaliers d'urgence, et il dépense 200 000 000 $ par année avec aucune reddition des comptes, et aucune idée de ce qui se passe, et aucun système d'évaluation. Unanimement, la commission de l'administration publique a demandé que le gouvernement agisse dans cette question. La ministre a promis, au mois de mars, de faire quelque chose. Au mois de juin, elle a annoncé, à moi-même, à une question ici, dans cette Chambre, que, d'ici quelques semaines – c'est ça qu'elle a dit – elle va annoncer un programme d'action. Le sous-ministre, à l'époque, selon les instructions de la ministre, a dit qu'avant la fin de cette année 1999, peut-être au début de 2000, il va y avoir tous les plans d'action en place, après le comité. La ministre est arrivée; hop! elle a tout changé ses plans. En octobre, elle a annoncé la création de ce comité. Et l'excuse de ce gouvernement était: Bon, on veut s'assurer qu'il y ait les bons représentants, les mouvements syndicaux, et ça a été difficile cet été parce qu'ils ont eu les négociations. Mais j'annonce aujourd'hui, M. le Président, selon mes informations, que ces représentants ont déjà quitté ce comité.

Avec ça, M. le Président, où est la gestion par résultats? Où est la gestion par résultats quand la ministre a déjà retardé maintenant le dépôt de ce rapport pour septembre 2000? M. le Président, la gestion par résultats, c'est un objectif très louable. Mais le gouvernement, les politiciens, les ministres de ce gouvernement doivent montrer qu'ils sont capables de faire ça. J'ai déjà listé deux exemples: le tabac, les ambulances. Deux autres, vite, dans mon propre comté, M. le Président: ils ont retardé l'implantation de notre cégep francophone, que nous avons annoncée en 1994, et maintenant c'est enfin ouvert, quatre ans en retard et, M. le Président, quatre fois plus cher.

L'Hôpital du Lakeshore, résultat par objectifs... Ils ont fermé l'Hôpital de Lachine, une perte de 114 lits; le non-agrandissement du Lakeshore, un autre 106 lits. On perd, dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, 220 lits. Est-ce que c'est de la gestion par résultats, M. le Président? Non. Voilà plusieurs exemples.

Encore une fois, un dernier exemple encore dans le secteur de la santé, c'est toute la question des services jeunesse. Le gouvernement prétend que les jeunes sont en priorité. Ils ont fixé les objectifs, mais ils n'ont pas donné les moyens pour faire ça. Ça prend des moyens pour répondre aux objectifs. Dans le secteur des centres jeunesse, ils ont coupé 55 000 000 $ et, depuis les élections, les listes s'allongent. Et c'est nos jeunes, nos jeunes en difficulté, nos familles en difficulté.

Mon premier message que je veux passer, M. le Président: c'est une chose de parler de nos fonctionnaires, mais je pense que ce gouvernement doit aussi gérer par les résultats et il doit avoir plus de transparence, il doit avoir plus d'imputabilité, et c'est ça que je voudrais m'assurer que le gouvernement fait.

Sur le projet de loi n° 82, il y a une autre lacune dans ce projet. Comme le député de Vaudreuil, et je voudrais le féliciter pour son intervention hier, j'ai appris beaucoup de choses hier. Et je pense qu'ils ont bel et bien expliqué qu'il y a une lacune assez importante, et je vais toucher ça un peu plus tard. Il y a juste comment nous allons faire ça, le comment, et il n'y a pas le quoi dans le projet de loi. Je pense qu'on doit vraiment discuter c'est quoi, la mission de notre gouvernement, c'est quoi, la mission de l'État québécois. Est-ce que c'est correct que ça coûte 30 % de plus ici pour gouverner que chez nos voisins? Est-ce que c'est correct qu'on paie 5 500 000 000 $ – oui, M. le Président, milliards, 5 500 000 000 $ – de taxes de plus qu'en Ontario? C'est la question de la mission de notre État, et je pense que, avant de faire un projet de loi sur comment nous allons rendre l'État québécois plus efficace, on doit demander qu'est-ce que l'État québécois doit faire et c'est quoi, le rôle du gouvernement. M. le Président, on ne trouve pas ça dans cette réforme.

M. le Président, dans toutes les autres réformes auxquelles j'ai participé un peu avec cette commission, dans les autres réformes comme aux États-Unis, il y a le Government Performance and Results Act, en Grande-Bretagne, The Next Steps Initiative, en Suède et en Allemagne, un gouvernement fédéral, et dans plusieurs autres provinces, ils ont fait la même chose, selon mes informations, ils ont aussi ajouté la question de la mission, le rôle de l'État, le quoi. Ce gouvernement a mis ça de côté. Pendant la commission parlementaire, nous allons tout discuter le comment, qu'est-ce qu'il y a dans le projet de loi. Mais il y a une grande lacune: on ne discute pas, M. le Président, le quoi, c'est quoi, la mission de l'État. Et j'espère que, pendant la commission parlementaire, nous allons avoir une chance de discuter ça.

Il y a une autre lacune assez grave, dans mon opinion, M. le Président. Dans un projet de loi qui parle de plus en plus de transparence, d'imputabilité, de priorité ou de qualité de services, deux tiers des dépenses gouvernementales sont exclues de ce projet de loi parce que Santé et Services sociaux et Éducation ne sont pas inclus. Si on veut vraiment changer la façon de faire, M. le Président, il me semble que ça va être assez important d'inclure santé et services sociaux et éducation dans cette approche. M. le Président, je demande pourquoi. Est-ce que le gouvernement est sérieux? Après le document de consultation, après la commission parlementaire, il arrive avec un projet de loi qui exclut les deux tiers des dépenses gouvernementales. Est-ce que c'est une bonne façon de faire ça ou est-ce qu'on doit aller un peu plus loin?

(10 h 30)

Nos députés, jusqu'à maintenant, aussi, ont parlé de toutes les questions de gaspillage de ce gouvernement. Nous avons parlé du musée sur l'alcool. Nous avons parlé aussi des priorités du gouvernement qui offre aux compagnies multinationales des centaines de millions avant même qu'elles le demandent. Nous avons tous ici parlé des rénovations des bureaux de la ministre de la Santé. Tout le monde parle de ça. Quand je parle – je sais que de l'autre côté ils n'aiment pas qu'on discute de ça – dans mon bureau de comté, quand je parle avec les citoyens, tout le monde encore me questionne et dit: Russ, comment le gouvernement peut dépenser 842 000 $ en rénovation de bureaux? Ils ne comprennent pas ça, M. le Président. Et je n'ai pas de réponse. J'ai dit: Bien, c'est une démonstration des priorités de ce gouvernement, rénovation de leurs propres bureaux, c'est plus important que d'autres choses.

Moi, M. le Président, c'est assez clair qu'il y a un gaspillage de ce gouvernement. Et on arrive avec un projet de loi qui dit qu'il va rendre notre système de fonction publique plus imputable, plus transparent. C'est louable, et je suis convaincu que les représentants de la fonction publique vont travailler avec nous. Je demande au gouvernement: Est-ce qu'ils sont sérieux, eux-mêmes? Est-ce qu'ils sont sérieux? Je ne sais pas. Avec les dépenses, comme je l'ai juste mentionné, pour les rénovations dans les bureaux de la ministre de la Santé, je n'en suis pas convaincu.

Mais l'autre question que j'ai, et je vais demander ça pendant la commission parlementaire: Après tous les rapports, et tout ça, est-ce que nous allons avoir un système qui est simple et efficace? Quand je vois... Je n'entre pas dans les détails de chaque article de loi, nous allons avoir le temps de faire ça un peu plus tard. Je vois qu'il va y avoir des conventions de performance et d'imputabilité – j'ai déjà mentionné ça dans les remarques préliminaires – qu'ils vont avoir aussi un plan d'action annuel de l'unité administrative. Il peut y avoir aussi une entente de gestion, il peut y avoir aussi un rapport annuel de gestion et il peut y avoir un rapport distinct pour chaque unité administrative. Si j'ai bien compris, tout ça va être déposé en commission parlementaire, et nous allons avoir une chance de questionner le ministre et, le cas échéant, le sous-ministre. Je demande: Est-ce que c'est un système efficace? Est-ce que c'est assez simple pour assurer qu'on peut être assez flexible et répondre aux besoins et aux objectifs de la loi? Je ne sais pas, M. le Président, au moment où on se parle.

Mais, après tout ça, après toute cette analyse et reddition des comptes, évaluation des résultats, une fois qu'on arrive et dit: Effectivement, cette unité a fait un excellent travail, cette unité a répondu aux objectifs des résultats, ils ont eu une bonne moyenne, c'est efficace, et ils ont bien utilisé l'argent, qu'est-ce que nous allons faire? Est-ce que, dans le projet de loi, il y a une bonne reconnaissance de la performance?

Dans la documentation de consultation Pour un meilleur service aux citoyens , ils ont clairement dit que la reconnaissance de la performance est essentielle, c'est une pierre angulaire d'une approche, dans mon opinion, de gestion par résultats. Mais je n'ai pas trouvé ça dans le projet de loi. Peut-être que ça existe dans le projet de loi. J'attends le ministre plus tard.

Mais, si nous n'avons pas les moyens de dire qu'une fois que nous avons... Avec tout l'exercice que j'ai mentionné, avec les conventions de performance, d'imputabilité, les plans d'action annuels, les ententes de gestion, les rapports annuels et les rapports pour chaque unité, après tout ça, après une évaluation en commission parlementaire chaque année aussi – et on dit qu'effectivement c'est une unité qui marche – comment nous allons reconnaître la performance? Je ne sais pas, là, M. le Président. Je ne sais pas. Et, comme c'est marqué dans ce document, c'est essentiel. Si nous n'avons pas ça, je ne suis pas convaincu que nous allons avoir les résultats qu'on veut.

M. le Président, j'ai essayé de passer quelques messages aujourd'hui. Et nous allons avoir beaucoup de temps en commission parlementaire pour aller plus en détail dans ce projet de loi. Mais j'ai un message assez sérieux au gouvernement, là. Comme on dit en anglais: We'll have to make sure our own doorstep is clean.

And the Government is talking about making sure the Civil Service is transparent and functions with a new results-based management and enhanced accountability, but this Government itself doesn't seem to treat those issues very seriously. Are they really interested in more accountability? Are they really interested in respecting their word? Are they really interested in being more transparent? Everything I've seen from this Government is exactly to the contrary. So, yes, the objectives, Mr. Speaker, of this law are certainly worthy, worthy of serious study, but I ask myself: Is the Government, as usual, just trying to put the focus elsewhere? They have to show the leadership by management with objectives and results, by enhanced accountability and transparency, and I haven't seen it. That's number one.

Number two is that, if they really are serious, Mr. Speaker, why health and social services and education, two-thirds of the expense of Québec, are not included? If we really want to be able to get into more results in management, transparency and enhanced accountability, why not also go that far too, go into those two important sectors, health and education? And you've seen the Government has had a disastrous record, because they slashed and burned over $2 000 000 000 in health care alone. So there has to be a lot of work there.

Mr. Speaker, I also ask whether or not the system is simple enough and effective. This system that includes performance and accountability agreements, management agreements, annual action plans, annual management reports, separate reports, etc., is it really effective? I don't know. I'll hear it from the Minister during the debate. But, then, once we've evaluated a unit, a department, and we've determined that, in fact, they have responded to objectives, and have results, and are effective, what kind of recognition of performance, what kind of recognition of excellence have we built in here? I think that's missing, Mr. Speaker. So we have to make sure that that is in there. Without that... That's the cornerstone, I think, of good management, to be able to recognize good performance.

M. le Président, j'ai essayé, avec le bref temps pendant cette étape, d'expliquer quelques-uns de mes commentaires sur ce projet de loi n° 82. J'espère que, pendant la commission parlementaire, nous allons avoir une bonne chance d'avoir une réponse à mes questions. Et j'espère, pour cette fois-là, M. le Président, que le gouvernement va embarquer sur la question du quoi: c'est quoi, la mission de l'État, c'est quoi, le rôle de l'État, et pas juste sur la question du comment. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Nelligan de votre intervention. Nous poursuivons le débat sur le projet de loi n° 82 quant à son adoption du principe, Loi sur l'administration publique. Je vais céder maintenant la parole à la porte-parole officielle de l'opposition en matière de dossier de l'autoroute de l'information et des services gouvernementaux et députée de La Pinière. Mme la députée, je vous cède la parole.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour, je voudrais intervenir à cette étape de l'adoption de principe sur le projet de loi n° 82, Loi sur l'administration publique, qui a été déposé ici, en cette Assemblée, le 10 novembre dernier par le président du Conseil du trésor.

Il faudrait, M. le Président, référer aux notes explicatives pour mieux comprendre la portée de ce projet de loi et sa signification dans le fond: «Ce projet de loi instaure, en vue d'affirmer la priorité accordée à la qualité des services aux citoyens – parce que le président du Conseil du trésor prétend que ce projet de loi va améliorer la qualité des services aux citoyens – un nouveau cadre de gestion de l'administration gouvernementale qui est axé sur l'atteinte de résultats, sur le respect du principe de la transparence et sur une imputabilité accrue de l'administration devant l'Assemblée nationale.»

«Le projet de loi – selon les notes explicatives – prévoit de nouvelles responsabilités pour l'administration gouvernementale.»

Également: «Le projet de loi permet la conclusion d'une convention de performance et d'imputabilité qui prévoira, à l'égard d'une unité administrative d'un ministère ou d'un organisme, un cadre de gestion plus flexible, adapté à sa situation, et une reddition des comptes portant sur des résultats spécifiques auxquels l'unité s'engage.»

Enfin, M. le Président, dans les notes explicatives, le projet de loi vise également une «approche d'allégement les règles de gestion des ressources humaines, budgétaires, matérielles et informationnelles applicables à l'administration gouvernementale et actuellement prévues par la Loi sur l'administration financière et par la Loi sur la fonction publique».

(10 h 40)

Alors, dans le fond, M. le Président, ce projet de loi fait suite à une consultation qui a eu lieu en commission spéciale les 21, 22, 23 et 30 septembre dernier, suite à la publication, le 9 juin dernier, de l'énoncé de politique sur le nouveau cadre de gestion de la fonction publique.

C'est un projet de loi qui porte sur 243 articles. Il modifie une centaine de lois déjà existantes, y compris la Charte des droits et libertés. Il abroge également la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

En parcourant le projet de loi, M. le Président, je me suis rendu compte qu'il ne répondait pas vraiment à la question fondamentale qui intéresse les citoyens et que tout le monde se pose, celle qui touche réellement au rôle de l'État. J'ai écouté mon collègue le député de Vaudreuil, porte-parole dans le dossier, qui a admirablement bien argumenté ce point, sur la nécessité de mettre les points sur les i et de mettre en avant les vrais débats.

M. le Président, ce projet de loi, s'il avait été inscrit dans le cadre d'un débat préalable sur le rôle de l'État, il nous aurait permis d'avoir autre chose que le libellé qui est là-dedans. Le débat sur le rôle de l'État a déjà fait l'objet de discussions, de réflexions, de publications dans différents pays, notamment dans les pays de l'OCDE auxquels on a tendance à se comparer. Particulièrement aux États-Unis, des politiques, des lois ont été adoptées et mises en vigueur pour dégraisser l'appareil de l'État et rendre les services à la population de façon plus efficace et surtout moins coûteuse.

Alors, ce gouvernement, au lieu de s'inscrire dans une logique internationale et nationale, puisque cet exercice de révision du rôle de l'État a été fait aussi dans d'autres provinces, il décide, lui, de s'enfermer sur lui-même et il nage à contre-courant parce qu'il refuse de faire le vrai débat sur le rôle de l'État, qui est un débat préalable aux mécaniques qui nous sont proposées dans le projet de loi en tant que tel.

Or, on sait qu'au Québec le gouvernement péquiste non seulement il nage à contre-courant, mais il multiplie les interventions de l'État même dans des domaines et dans des secteurs d'activité qui ne relèvent pas nécessairement de lui. On n'a rien qu'à penser à toutes les interventions de l'État dans le domaine de l'entreprise privée, avec un support financier à même les fonds des contribuables à des entreprises qui sont performantes, qui font des profits, qui n'ont pas besoin nécessairement de l'aide de l'État. Mais le gouvernement, lui, dans un geste de gaspillage de fonds publics, trouve normal d'intervenir dans ce qui va bien dans l'économie du Québec. L'État-providence, M. le Président, est révolu, mais ce gouvernement refuse même d'avoir un débat sur le modèle québécois de la gestion des fonds publics.

J'écoutais et j'ai lu les extraits des travaux qui ont été faits lors de la commission spéciale en rapport avec la gestion de l'administration péquiste, et j'écoutais le président du Conseil du trésor qui disait que ce n'est pas nécessaire de faire ce débat parce que nous avons atteint le déficit zéro. Le déficit zéro, il faut se rendre compte – et il est temps de le dire, de le redire et de l'expliquer aux citoyens – qu'il n'est plus inscrit dans la comptabilité du gouvernement, mais le déficit zéro, il est toujours là. Il a été balayé en avant, à d'autres niveaux de gouvernement ou d'administration, notamment dans les municipalités, notamment dans les universités, notamment dans les cégeps, notamment dans les hôpitaux, notamment dans les CLSC, et tous ces organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux sont obligés aujourd'hui de faire des déficits.

Dans ma région, l'hôpital Charles-Lemoyne, on nous annonce un déficit d'au-delà de 2 000 000 $. Dans mon CLSC, qui a toujours été performant, pour la première fois ils ont commencé à faire des déficits. Et comment ils ont commencé à faire des déficits? Avec une lettre signée par le ministre de la Santé les autorisant à aller emprunter auprès de la Caisse populaire et des institutions financières.

Alors, c'est ça, M. le Président, ce débat sur le déficit, il n'a pas été fait parce que le déficit n'a pas réellement été atteint. Si ce gouvernement s'engageait à avoir une comptabilité consolidée de tous les organismes publics et parapublics, le déficit va apparaître et il va apparaître clairement. Alors, on est en train de cacher le déficit. Mais les contribuables, eux, ne sont pas dupes. Ils ne sont pas dupes parce qu'ils savent que le déficit est rendu dans leurs poches. Il est rendu dans leurs poches parce que ça leur coûte de plus en plus de taxes, parce qu'ils paient de plus en plus de taxes pour de moins en moins de services. C'est la réalité. On est les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord. On ne soutient pas la comparaison ni avec les autres provinces ni avec la moyenne canadienne. Et le gouvernement refuse de faire un vrai débat sur la gestion des fonds publics, il refuse de se questionner lui-même sur sa façon de faire.

Questionner le rôle de l'État à l'aube du troisième millénaire est une exigence fondamentale d'autant plus que l'économie mondiale entre dans une phase de concurrence et d'interdépendance très poussée, M. le Président. Alors, ce contexte de mondialisation a convaincu bien des gouvernements de la nécessité de revoir leurs façons de faire, de repenser leurs modes de gestion, leurs politiques, leurs programmes, leurs structures, leurs façons de prendre les décisions. Or, le gouvernement péquiste, lui, s'enferme dans ses certitudes idéologiques au lieu de considérer vraiment les intérêts supérieurs du Québec, les intérêts des citoyennes et des citoyens du Québec.

Dire, par exemple, qu'il n'est plus nécessaire de revoir le rôle de l'État, M. le Président, parce qu'on veut faire de la modernisation, la démonstration reste à faire. Dire qu'on veut responsabiliser davantage le personnel du gouvernement, oui, il faut le responsabiliser, oui, il faut aller dans le sens de l'imputabilité, mais je ne crois pas que la solution réside dans ce projet de loi, bien que, sur le principe même, on soit d'accord. Mais ce qui nous est proposé est largement insuffisant et souffre de carences, carences réelles. L'une d'elles, c'est que ce projet de loi n'a qu'une portée limitée. Il ne touche pas aux missions essentielles de l'État, notamment tous les secteurs de l'éducation et de la santé sont évacués du projet de loi.

Alors, M. le Président, si on veut parler d'une saine gestion de l'administration publique, comment est-ce qu'on peut écarter les deux tiers de l'administration publique qui ne sont pas concernés par ce projet de loi? Et il y a certainement des raisons pourquoi le gouvernement décide de ne pas inclure le secteur de l'éducation et de la santé dans ce projet de loi.

On veut responsabiliser, M. le Président, le personnel. Oui, on a une fonction publique dont on peut être fier. On a des fonctionnaires, des professionnels qui sont compétents, qui se dévouent au service des citoyens. Ça, on le sait. Mais, quand il y a des problèmes au niveau de la responsabilisation, est-ce qu'il faut à chaque fois amener un nouveau projet de loi? Je vous cite deux exemples.

Il y a eu récemment une nouvelle qui a été rapportée très, très rapidement, au courant du mois d'octobre, et on apprenait par RDI qu'une citoyenne de Cap-de-la-Madeleine avait acheté un ordinateur du surplus du gouvernement, qui provenait du ministère de l'Emploi et de la Solidarité. Arrivée chez elle, elle a eu la surprise de constater que l'ordinateur en question contenait – tenez-vous bien – les dossiers de 768 assistés sociaux avec toutes les informations nominatives relatives à leur situation familiale, médicale et financière.

(10 h 50)

M. le Président, ça, c'est une situation très grave parce que le gouvernement démontre son incapacité de gérer adéquatement la chose publique. Il s'agit ici d'informations nominatives confidentielles qui se ramassent dans un surplus du gouvernement. Est-ce que le gouvernement est arrivé avec un projet de loi? Non. Parce que la situation a été dénoncée, il est arrivé avec une directive émanant du Conseil du trésor pour corriger une telle situation et rappeler au personnel concerné qu'on ne peut pas élaguer des équipements informatiques sans prendre soin de vérifier et de vider le contenu de ces ordinateurs-là.

Un autre exemple qui a fait couler beaucoup... je ne dirai pas d'encre parce que ça s'est passé sur les ondes de la radio. Ces derniers jours, on apprenait que les fonctionnaires du gouvernement utilisaient la papeterie, les timbres du gouvernement pour participer à un concours touristique pour aller à Cuba. Les enveloppes timbrées venaient du ministère de la Justice, du ministère de l'Éducation, de la Régie du bâtiment, de l'Institut de la statistique et de plusieurs autres, du ministère du Revenu.

Donc, sur les ondes, ce qu'on se posait comme question: Comment ça se fait que le personnel du gouvernement utilise des biens qui appartiennent au gouvernement, qui leur sont fournis dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions, pour des fins personnelles? Et la question aussi se posait de voir s'il y a un pattern ici, parce que ce n'est pas juste un ministère, de façon isolée, mais c'étaient plusieurs dizaines d'enveloppes qui étaient envoyées à la radio en question, pour ne pas la nommer. Là encore, on a une directive qui doit être émise pour expliquer aux fonctionnaires qu'il y a une façon de gérer le bien public et de le gérer adéquatement.

Oui, donc, pour la gestion par résultats, mais quels sont les mécanismes qui, au-delà de ce projet de loi, sont mis en place pour faire en sorte que ces résultats-là soient réellement au rendez-vous? L'un de ces mécanismes que le gouvernement a mis de l'avant, c'est les unités autonomes de service. Il a, je pense, 15 ou 16 unités autonomes de service; on est rendu à ce chiffre-là. Un des exemples d'une unité autonome de service qui a fait parler d'elle longtemps et qui continue de faire parler d'elle, c'est Emploi-Québec.

Alors, comment ce projet de loi peut-il éviter le gâchis d'Emploi-Québec? Et pourtant on sait que, dans le cas d'Emploi-Québec, ce n'est pas la gestion des fonctionnaires qui était défaillante, c'est la gestion de la ministre qui était défaillante. C'est un problème politique et non pas un problème d'ordre administratif. Comment ce projet de loi peut-il réparer ou éviter le gâchis que nous avons connu dans Emploi-Québec? Pourtant, Emploi-Québec avait des ententes signées en bonne et due forme avec le ministère de la Solidarité et de l'Emploi au niveau de la gestion du matériel, de la gestion financière, de l'évaluation, des ressources informatiques, etc. Donc, tous les outils de gestion par résultats étaient là, mais ils n'ont même pas été utilisés. Comment donc ce gouvernement peut-il, par ce projet de loi, éviter les gâchis qu'on a connus dans Emploi-Québec?

Deuxième exemple – et ça implique directement le Conseil du trésor, l'administration publique – c'est l'exemple du Palais des congrès. Là encore, M. le Président, on se rappellera de toute la saga où le gouvernement a été obligé, via la SIQ – la Société immobilière du Québec – de faire trois appels d'offres consécutifs. Il y a eu des dénonciations publiques à répétition dans les médias avant de trouver une solution mitoyenne pour régler le problème. Ce gouvernement a fait la preuve que l'appareil gouvernemental, dans bien des cas, n'est pas en mesure d'opérer de façon efficace, transparente et surtout pas très coûteuse pour les contribuables, parce qu'il faut toujours, toujours se rappeler que la gestion des fonds publics, c'est d'abord et avant tout les contribuables qui paient pour. Or, M. le Président, des exemples de gaspillage dans l'administration publique, sous le gouvernement péquiste, sont multiples, et le gouvernement n'a rien appris de ses erreurs et il continue à travailler dans ce «mood» de gaspillage.

L'autre exemple, M. le Président, c'est toute la saga des contrats informatiques concernant les ordinateurs au gouvernement. C'est d'une incompétence notoire. Le gouvernement n'a jamais eu autant de poursuites judiciaires inscrites ou à venir et de contestations publiques autour du processus d'attribution des contrats. Or, dans ce projet de loi, particulièrement au chapitre V et au chapitre VI, le chapitre V traite de la gestion des contrats et des ressources matérielles et le chapitre VI traite de la gestion des ressources informationnelles...

Or, parce que ce gouvernement a fait montre d'une incompétence notoire dans la gestion des contrats du gouvernement, surtout en ce qui a trait aux contrats de l'autoroute de l'information, le projet de loi nous dit que désormais on va fonctionner par règlements. On va déterminer, M. le Président, les conditions des contrats par règlements. Or, ça, ça ouvre la porte à bien des arbitraires. D'ailleurs, l'application des règlements actuellement, dans l'état actuel des choses, fait problème, fait partie des problèmes tels qu'on les connaît, et le projet de loi est loin de les résoudre.

Alors, j'aurai l'occasion de revenir en commission parlementaire pour apporter des commentaires plus pointus sur chacun de ces articles. À cette étape-ci, nous sommes en faveur du principe, parce que nous sommes pour la saine gestion des fonds publics, nous sommes pour la saine gestion des finances publiques, mais ce n'est pas par le projet de loi tel que libellé qu'on va atteindre ces résultats. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 82, Loi sur l'administration publique, et je cède la parole à M. le président de la commission des institutions et député de Portneuf. M. le député, la parole est à vous.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, il me fait plaisir de prendre la parole à l'occasion de ce débat sur le principe du projet de loi n° 82, dont l'objectif est d'opérer une modernisation ambitieuse de l'administration publique québécoise. Je rappellerai que c'est au printemps dernier que mon collègue président du Conseil du trésor, ministre délégué à l'administration publique et député de Labelle présentait un énoncé de politique visant à retrouver le sens finalement du client dans l'administration publique, un énoncé qui tablait sur le citoyen comme étant le centre de notre action, de nos préoccupations, la qualité, par voie de conséquence, des services à rendre aux citoyens et la nécessaire modernisation et transformation de l'administration publique québécoise de façon à nous permettre justement de faire ce virage auquel nous sommes invités actuellement.

Donc, cette politique dont l'objectif est d'arriver à rendre de meilleurs services aux citoyens et des services, je dirais, plus centrés sur des résultats à atteindre, donc mise en place dans l'ensemble du gouvernement d'une gestion axée sur les résultats. En même temps, objectif d'accroître la liberté d'action des gestionnaires dans l'utilisation des ressources et des moyens qu'on met à la disposition justement compte tenu des résultats que nous voulons atteindre. Et également un objectif important d'accroître la transparence de notre action – on verra dans quelques minutes de qu'elle façon.

(11 heures)

Donc, un projet de politique qui comportait, grosso modo, en termes d'impact, trois volets: une réforme du cadre de gestion, la signature de conventions de performance et d'imputabilité et le renforcement de la reddition de comptes. Également, en ce qui regarde la réforme du cadre de gestion, à titre d'illustration: la présence d'engagements explicites dans l'administration, à tous les niveaux, sur des objectifs de qualité de service; l'introduction de plans stratégiques pluriannuels – sur plus qu'une année – de façon à mieux, je dirais, faire état et mieux planifier l'ensemble des gestes et des mises en oeuvre qu'on doit mettre en place pour arriver à nos objectifs.

Également, en termes de reddition de comptes: des rapports annuels de gestion, centrés davantage désormais sur les résultats que nous avons voulu atteindre et le degré d'atteinte de ces résultats-là, avec un certain nombre d'indicateurs, bien davantage que sur la simple présentation des activités qui ont été celles d'un ministère ou d'un organisme au cours d'une année donnée, qui au fond ne renseignent pas beaucoup sur l'impact véritable de l'activité gouvernementale sur ces services et ces résultats que nous voulons atteindre dans le meilleur intérêt de nos concitoyens.

Donc, le président du Conseil nous disait: Nous voulons moderniser – et je trouvais la comparaison intéressante pour bien comprendre le genre de virage qu'on veut faire – de façon à passer d'un réflexe de la norme et de la procédure à un réflexe de qualité par rapport à des services que nous voulons rendre à des citoyens, essayer de passer d'une dynamique de contrôle a priori sur les gestes, les mises en oeuvre et la dispensation des services vers davantage un contrôle a posteriori centré notamment sur les résultats que nous voulions atteindre – les avons-nous atteints ou pas, dans quelle proportion, etc.? Ce qui ne disconvient pas de l'opportunité d'examiner aussi les moyens mis en oeuvre.

Mais c'est à partir du moment où on connaît les résultats recherchés qu'on est en mesure en même temps de porter un jugement sur la pertinence des moyens qui avaient été mis en oeuvre. Juger de la pertinence de l'action d'un gouvernement, d'un organisme ou d'un ministère sur la simple base des services qu'on a voulu rendre et des processus qu'on a mis en place, finalement ça ne veut rien dire. On peut s'agiter pendant un an de temps, deux fois plus que l'année précédente, sans nécessairement avoir produit des choses plus pertinentes. Alors, vous voyez l'importance, au niveau de la réforme, de cette centration non seulement sur le client, sur le citoyen, mais aussi sur les résultats qui sont recherchés prioritairement à l'égard du citoyen.

Également, essayer de passer d'une dynamique de rigueur à l'égard d'un certain nombre de contraintes qu'on peut mettre dans l'utilisation des ressources ou de champ qu'on peut baliser à l'intérieur duquel un fonctionnaire ou un directeur d'établissement ou d'un ministère peut oeuvrer, mais davantage appliquer de la rigueur dans la mesure des résultats et donc du degré de leur atteinte. Et beaucoup d'autres aspects également de cette modernisation qui implique à toutes fins pratiques presque – j'oserais dire, pour les mathématiciens – une translation d'axe – je suis sûr que le député de Verdun sait à quoi je réfère quand je parle de translation d'axe: essayer de changer d'une certaine façon la façon de voir et d'évaluer la performance de l'administration publique.

Et, par voie de conséquence, et suite à ce dépôt de politique, le ministère notamment, mais également la commission parlementaire spéciale qui a été formée à cette occasion, ont procédé à un certain nombre de consultations. Par exemple, dans les ministères et organismes, plus de 30 séances d'information ont été tenues, 10 000 personnes ont formellement participé à ces consultations-là. En ce qui regarde la commission parlementaire que j'ai eu l'honneur de présider, on a tenu plus de trois jours d'auditions. Beaucoup de mémoires ont été présentés par différents organismes pertinents ou intéressés par ces questions, avec des résultats intéressants.

Premièrement, un large consensus que nous avons pu observer, comme membres de la commission parlementaire, sur les principes de cette transformation, sur les orientations, les objectifs et la nécessité d'une loi structurante. Également, des points qui rallient les intervenants de façon manifeste sur, par exemple: la qualité des services; la simplicité à induire dans les mécanismes; la flexibilité, la souplesse à introduire dans l'administration publique, ce qu'on appelle souvent – un des volets – la «débureaucratisation»; une adhésion également à cette approche de gestion axée sur les résultats, à ces objectifs de transparence par un certain nombre de dispositions qui sont prévues au projet de loi actuel; l'importance également d'une reddition d'autant plus facile et d'autant plus claire qu'existeront ces documents que devra produire l'administration à l'égard de sa performance et des objectifs qu'elle poursuivait; et également l'importance d'associer les personnes à l'intérieur de l'administration publique, et toutes les personnes, à tous les niveaux – j'y reviendrai un peu plus tard, vers la fin de mon exposé – à cette transformation.

Et des conditions de succès également dont on nous a parlé. La première condition de succès: affirmer la place des citoyens dans l'expression de leurs besoins; également faire preuve d'une volonté inébranlable, à tous les niveaux de l'administration publique, de réussir; et démontrer cette capacité des organismes, notamment des organismes centraux, de modifier leur rôle et de tenir le cap à l'intérieur de cette transformation; et miser bien sûr sur la compétence et l'expertise des personnes.

Alors, on se retrouve donc, par voie de conséquence... Je me souviens aussi, en commission parlementaire, qu'on nous demandait d'aligner davantage le projet de loi à développer, en termes de structure de projet de loi, sur l'énoncé de politique de juin dernier, ce qui a été fait dans le projet de loi qui est devant nous, réparti en un certain nombre de chapitres, le premier portant sur l'objet et les applications, le deuxième, sur les responsabilités générales, troisièmement, la gestion des ressources, les rôles du Conseil du trésor, etc.

En ce qui regarde le premier chapitre, on y affirme, comme législateur, la priorité accordée à la qualité des services aux citoyens par l'instauration d'un cadre de gestion justement axé sur les résultats. Donc, on voit bien là que les principes fondamentaux de la politique présentée se retrouvent au premier chapitre même de ce projet de loi.

Également, point important, M. le Président – on n'en a pas beaucoup parlé dans le débat jusqu'à présent – reconnaître le rôle des parlementaires à l'égard de l'action gouvernementale et leur contribution à l'amélioration des services aux citoyens en favorisant une meilleure, une plus grande, une plus forte imputabilité de l'administration gouvernementale devant l'Assemblée nationale, ne serait-ce que par la meilleure information qui sera disponible à l'intention des parlementaires, par exemple, en commission parlementaire, pour juger justement de l'atteinte des objectifs et de la performance, donc, de notre administration publique.

Au chapitre deux, en ce qui regarde les responsabilités générales, on retrouve justement des dispositions au niveau de la transparence, par exemple: l'obligation de rendre publique une déclaration sur la nature et la qualité des services; un plan stratégique pluriannuel; un plan annuel de gestion des dépenses; un rapport annuel de gestion; la nécessité également de reddition de comptes devant l'Assemblée nationale; d'autres dispositions comme, par exemple, la déclaration des services aux citoyens. Tous les ministères et tous les organismes en service direct par rapport à la population doivent faire une déclaration concernant leurs objectifs, le niveau des services offerts qu'ils visent et également la qualité des services à rendre à la population en général. On retrouve d'autres dispositions également qui sont conséquentes à la politique, notamment en ce qui regarde la convention de performance et d'imputabilité.

En ce qui regarde la gestion des ressources, le Conseil du trésor, dans l'ensemble, demeure responsable de l'élaboration des cadres de gestion en ce qui regarde les ressources humaines, les ressources budgétaires, les contrats et les ressources matérielles et les ressources informationnelles.

Cependant, on retrouve dans cet énoncé un assouplissement, je dirais, des contraintes. J'aimerais vous en donner un exemple. Le Conseil du trésor devra désormais associer davantage les ministères et les organismes dans l'élaboration du cadre de gestion qui leur est applicable. On parle de gestion de ressources humaines notamment, et je pense que c'est un pas très certainement dans la bonne voie.

(11 h 10)

Deuxièmement, en ce qui regarde la gestion budgétaire des dépenses, je relèverais uniquement deux exemples, deux illustrations de cette plus grande flexibilité, alors qu'on permettra de se donner une gestion des crédits sur plus d'un an, toutefois sans excéder trois ans. On permettra, à titre d'exemple, qu'un crédit non dépensé dans une année puisse être reporté dans une autre année, de façon à tenir compte de la réalité de la vie. Il peut se produire, en cours d'exercice budgétaire, certains événements qui empêchent l'engagement d'un crédit et qui rendent plus logique qu'on puisse effectuer une dépense, par exemple, au début de l'année suivante. Les règles actuelles ne permettent pas de recycler ce crédit-là l'an prochain à l'intérieur d'un cadre de planification budgétaire qui pourrait être sur plus d'une année. Ça va être possible désormais. On y retrouve également les allégements réglementaires conséquents, de même qu'une refonte de cinq règlements en un seul.

Le projet de loi n° 82 également, bien sûr, comporte des règles d'harmonisation et de concordance d'une centaine de lois. Juste pour dire, M. le Président, qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi léger, là, mais qui a une portée très large en ce qui regarde l'administration publique, entre autres, ça concerne la Loi sur l'administration financière, donc modification de cette loi, et la Loi sur la fonction publique, et également des modifications quant au processus d'appel sur les concours de promotion.

Le projet de loi prévoit également – et je pense que c'est une règle de bon sens sur laquelle, d'ailleurs, le député de Verdun est souventefois revenu – que, cinq ans après l'entrée en vigueur de la loi, il y a rapport sur la mise en oeuvre et sur l'opportunité de modifier la loi de façon à pouvoir en améliorer encore davantage les avantages et les bénéfices.

Pour sa mise en oeuvre, maintenant, M. le Président – il ne suffit pas d'adopter un projet de loi, encore faut-il avoir cette habilité, cette constance, cette détermination pour la mettre en oeuvre et être performant à cet égard – les défis seront de maintenir, dans cette transformation, le cap sur le citoyen et sur les résultats à atteindre, ce qui impliquera manifestement des changements importants dans la culture de nos organisations, beaucoup de transparence également et de vigilance dans les communications, la définition d'indicateurs très précis et très bien calibrés pour nous permettre de suivre notre évolution, et également des mécanismes de reconnaissance de la performance, une chose que nous devrions suivre de près comme parlementaires, puisque ces indicateurs devraient nous permettre, j'imagine, de mesurer la réelle performance de nos administrations eu égard aux mandats et aux compétences qu'ils et elles doivent exercer.

En terminant, M. le Président, j'aurai une pensée toute spéciale à l'égard de ceux et celles qui auront la responsabilité de faire vivre cette réforme, de l'actualiser et de la réussir, et je réfère ici non seulement aux chefs de nos grandes organisations, qu'il s'agisse de ministères ou d'organismes, mais également à l'ensemble du personnel de la fonction publique, qu'il s'agisse des cadres intermédiaires, qu'il s'agisse des professionnels, des techniciens, enfin l'ensemble de ceux et celles qui composent cette fonction publique à l'égard de laquelle j'ai entendu aujourd'hui – et j'appuie ce que j'ai entendu aussi – beaucoup d'appréciation très positive.

Vous savez, d'introduire le principe de fonctionner davantage en regard de résultats à atteindre et, par la suite, d'organiser les ressources et les efforts en fonction des résultats qu'on va atteindre, ce n'est pas nécessairement – et j'espère ne pas créer ombrage à mon collègue du Conseil du trésor actuellement – une approche nouvelle dans les grandes organisations. C'est au début des années quatre-vingt, finalement, notamment dans le secteur public mais également dans certaines organisations des réseaux publics et parapublics, que sont apparues, tranquillement pas vite, des façons de mobiliser les organisations en fonction de résultats à atteindre. Et j'aimerais ici féliciter mon collègue, le président du Conseil du trésor, pour avoir, lui, su mettre sur la table un projet aussi ambitieux que celui-là qui a connu, dans d'autres organisations, notamment dans le secteur privé, des résultats assez manifestes en axant essentiellement la dynamique de ces organisations-là sur des résultats, d'abord, qu'on recherche et, ensuite, en s'organisant, en organisant les services et les moyens pour les atteindre.

On aura connu quatre gouvernements successifs... Je dis que ça fait depuis le début des années quatre-vingt, là, ce n'est pas un blâme à l'égard de quiconque, parce que l'opposition officielle a agi comme gouvernement pendant deux mandats et nous en avons fait autant, mais il était temps, après quatre Législatures, puis-je le suggérer, M. le Président, qu'on arrive enfin avec un projet solide, un menu que nous offre ici le président du Conseil du trésor, qui m'apparaît à la hauteur des défis de l'administration publique. Enfin.

Et je reviendrais à cette nécessité de savoir – et je pense que ça va être le principal défi pour réussir cette transformation-là – mobiliser l'ensemble des ressources. Je sais déjà, par des discours que j'ai lus, des interventions récentes, par exemple, de la secrétaire associée à la réforme, également du Secrétaire général du gouvernement, et je sais que les sous-ministres et les présidents d'organismes sont très certainement derrière ce projet-là... Mais il va falloir aussi y associer l'ensemble des personnels, et j'ai une pensée particulière pour les gestionnaires au niveau intermédiaire, et pour le premier niveau de gestion, qui ne doit pas être rien qu'une courroie de transmission finalement du message, mais ces personnes-là doivent être également des principes actifs dans cette transformation que nous entreprenons aujourd'hui par l'étude de ce projet de loi que je recommande bien sûr à l'ensemble de mes collègues d'adopter au niveau du principe. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Portneuf. Nous poursuivons le débat sur le projet de loi n° 82 quant à l'adoption de son principe, et je vais céder la parole au vice-président de la commission des institutions, porte-parole officiel en matière de science, recherche et technologie, responsable du programme de la Régie des rentes et du RREGOP. M. le député de Verdun, la parole est à vous.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais vous signaler à quel point les parlementaires de l'opposition sont perplexes devant ce projet de loi. D'un côté, on est face à une réforme en profondeur de l'administration publique, mais ce projet de loi ne touche pas un volet important que nous aurions voulu débattre, qui est la question du rôle de l'État et de la taille de l'État dans notre économie. Alors, je vais me permettre de faire, dans mon intervention, M. le Président, un tour du projet de loi et d'en signaler les points forts et peut-être les faiblesses et, ensuite, d'indiquer la difficulté que nous avons de dire, lorsque nous nous prononçons en faveur de ce projet de loi: Oui, mais on réforme l'administration publique, mais on ne discute pas réellement de la taille même de cette fonction publique.

Et le député qui est intervenu, le député de Portneuf, l'a très bien rappelé, on a ici un changement important dans les rapports de la fonction publique. On a des changements importants: au lieu de gérer par objectifs, on va gérer par résultats, gérer par normes. On va attendre, on va avoir des contrats, on va avoir une vision beaucoup plus souple, où chaque unité aura des objectifs à atteindre, dans cette unité, objectifs qu'elle aura à négocier avec le Conseil du trésor. C'est une réforme majeure, M. le Président, qui s'inscrit dans un mouvement mondial du «new public management» qui était présent en Angleterre, aux États-Unis et aussi dans le reste du Canada. Comprenez-moi bien, essentiellement, chaque unité administrative, chaque ministère va dorénavant préciser avec le Conseil du trésor ce qu'il entend atteindre comme objectifs pour rendre un service meilleur aux citoyens.

(11 h 20)

Je dois dire, M. le Président, que nous sommes d'accord avec cette approche de la gestion de la chose publique. Je dois dire que cette mutation de la fonction publique est quelque chose auquel nous adhérons. Je dois dire aussi que toute la dimension de la reddition de comptes – parce que ça devient extrêmement important à partir du moment où on a une gestion par résultats – la question de la reddition de comptes devient un élément majeur dans la réforme de la fonction publique. La reddition de comptes va prendre une importance qu'elle n'avait pas jusqu'à maintenant. À titre personnel, étant le père ou le parrain de la loi 198, c'est avec une petite tristesse et un plaisir... une petite tristesse que je la vois disparaître dans ce projet de loi, mais un plaisir de la voir intégrée complètement dans l'article 29 de ce projet de loi, dans sa totalité, et devenir une pratique régulière de la Loi de l'administration publique.

Alors – la petite peine est un peu pour l'histoire – le plaisir, c'est de dire que l'objectif que nous avions en 1991 – donc, c'est il y a longtemps, lorsque nous étions des députés ministériels – était de devoir commencer à inscrire dans nos lois des principes d'imputabilité. Et le député de Labelle, qui était député de Labelle, qui est aujourd'hui président du Conseil du trésor, qui était porte-parole de l'opposition en cette matière à l'époque, avait contribué aussi à l'évolution de ce projet de loi. C'est avec plaisir qu'on la voit maintenant intégrée réellement dans la Loi de l'administration publique.

Je signalerai, M. le Président, toujours dans le projet de loi, si vous me permettez, des difficultés que nous aurons à aborder en commission parlementaire. Ma première difficulté, c'est le danger du quantitatif, et je m'explique. On va avoir des contrats de performance entre les unités administratives et le Conseil du trésor, des indicateurs. Il est facile souvent de déterminer des indicateurs quantitatifs. On a amélioré le temps de réponse au téléphone de tant de minutes, on s'est permis de diminuer ou d'améliorer tel ou tel indicateur lorsqu'il est mesurable par un chiffre.

Il y a une dimension qui est plus difficile à mesurer, ce sont les indicateurs qualitatifs. Et je vais vous donner un exemple facile, M. le Président. Il est facile de mesurer combien de temps va prendre une personne pour répondre au téléphone lorsqu'elle s'adresse à une officine gouvernementale pour obtenir tel ou tel renseignement; on ne peut pas mesurer par un indicateur quantitatif si la personne va avoir le sourire lorsqu'elle répondra, ou si elle sera agréable, ou si elle aura un air de boeuf parce qu'elle est surstressée et qu'elle renverra la personne qui s'adresse à elle d'une manière un peu cavalière. Alors, cette dimension du qualitatif, il va falloir que nous réfléchissions à l'intérieur des contrats de services pour être en mesure de l'inscrire aussi à l'intérieur des contrats de services. Il me semble important qu'on ne perde pas de vue que, bien sûr, il existe des indicateurs quantitatifs – le «benchmarking» est quelque chose qu'il faut maintenir – mais le concept de qualité dépasse de loin ces indicateurs quantitatifs.

Deuxième élément que je ne vois pas dans le projet de loi, que je voudrais revoir et améliorer, c'est toute la question – et je crois que le député de Portneuf l'a abordée tout à l'heure – des rapports d'activité des unités, autrement dit, comment les unités font leur rapport. Est-ce que l'évolution de ce contrat entre le Conseil du trésor et l'unité va être le seul rapport que va faire l'unité administrative ou y aura-t-il d'autres types de rapports, M. le Président? Il semblerait que le rapport annuel devrait être maintenu, mais on devrait mieux baliser, dans la réforme administrative, ce que doit contenir ou ce que devraient absolument contenir à chaque fois les rapports annuels. Vous conviendrez sans difficulté que par trop souvent le rapport annuel devient un rapport où on fait son auto-éloge et non pas où on évalue clairement ce qui s'est passé dans l'unité.

Ceci est pour dire, M. le Président, que l'opposition est d'accord avec les objectifs qui sont poursuivis dans le projet de loi. Ceci est pour vous dire que cette réforme est une réforme majeure – il faut bien en être conscient, il ne faut pas minimiser l'importance de la réforme – qui va demander une mobilisation de la totalité de la fonction publique. Et je crois, parce que j'ai suivi les auditions en commission parlementaire, que la fonction publique est prête à faire le virage de cette réforme. Nous y souscrivons, M. le Président. Mais, je vous l'ai dit d'emblée au début de mon intervention, il manque à l'intérieur de ce projet de loi une réflexion sur le rôle et l'importance que doit avoir l'administration publique ou doit avoir l'État dans notre société.

Le député de Vaudreuil l'a rappelé dans son intervention initiale, c'est interpellant pour nous, dans la société québécoise, de voir certains chiffres. 50 % du PIB est dans le secteur public au Québec. Si on compare avec d'autres provinces, c'est 38 % en Ontario, 32 % en Alberta. Vous voyez donc le rapport entre l'importance, le poids relatif, du secteur public par rapport au secteur privé.

On aurait dû, au moment où nous faisions cet effort de réflexion sur l'administration publique, au moment où on était en train de réfléchir sur comment être plus efficace, aussi se poser la question sur qu'est-ce que nous devons faire. Et, malheureusement, on ne l'a pas fait. Je comprends que le président du Conseil du trésor va nous dire: Ce n'était pas dans mon mandat; j'avais essentiellement comme tâche de revoir comment devait fonctionner l'administration publique. Je dois dire, de ce côté-ci de la Chambre, que nous aurions souhaité que cette réflexion fasse un pas de plus et qu'on se pose... Parce que c'est un véritable problème de société de dire, dans cette nouvelle ère qui va commencer – si tant est que ça ait un sens de dire qu'il y a une nouvelle ère qui commence avec un nouveau millénaire: Quel est le rôle que nous voulons attribuer à l'État dans cette nouvelle période?

Je vous dirai d'autres chiffres, si vous voulez, qui sont importants. Le poids de la fonction publique par rapport à l'ensemble des autres personnes qui travaillent, c'est de 18 %. 18 % des gens qui sont employés au Québec sont employés dans le secteur public; c'est 13 % en Ontario et ça va être 15 % en moyenne au Canada. Donc, on est à un endroit où la taille de notre fonction publique est plus importante, ici, au Québec, qu'elle n'est dans les autres provinces. Et, comprenez-moi bien, il faut bien que vous compreniez, il y a un lien direct entre la taille de notre fonction publique et évidemment les impôts que nous devons payer pour soutenir cette fonction publique, M. le Président.

Et un des éléments qui est extrêmement grave actuellement, pour vous comme tous les parlementaires, et probablement pour les personnes qui nous écoutent à l'heure actuelle, c'est de dire que, au Québec, nous sommes écrasés par la fiscalité la plus lourde et par rapport aux autres provinces du Canada mais aussi par rapport à l'ensemble des États américains qui nous entourent.

(11 h 30)

Alors, on se trouve, M. le Président, parce qu'on a en partie cette taille importante de l'État, parce qu'on n'a pas fait l'effort de réviser ou de réfléchir sur ce que devraient être réellement le rôle et la fonction de l'État, nous sommes amenés à devoir supporter un poids fiscal plus important. Simplement – et les calculs sont simples, vous le voyez – la ponction fiscale qui est faite auprès des Québécois et des Québécoises est de 5 000 000 000 $ plus importante au Québec qu'elle n'est en Ontario. Il faudrait réduire les impôts de 5 000 000 000 $ pour pouvoir avoir une fiscalité compétitive avec l'Ontario. Et, comprenez-moi bien, M. le Président, si vous avez une nécessité de réduire ces impôts, cette charge fiscale sur l'ensemble des Québécois et des Québécoises pour pouvoir recréer, restimuler l'économie, restimuler le marché intérieur, restimuler la consommation, vous ne pouvez pas le faire sans repenser réellement quel est le rôle de l'État. On ne peut pas le faire sans repenser quel est le rôle de l'État.

Malheureusement, ce projet de loi, qui, et je l'ai dit tout à l'heure, va chercher des éléments importants, entraîne une réforme en profondeur du fonctionnement de l'administration publique, ne se questionne pas, en aucune manière, sur la taille de la fonction publique et sur ce que je crois... je vais citer ou paraphraser le député de Vaudreuil: «sur le quoi».

On a abondamment parlé du comment, c'est-à-dire on a abondamment parlé sur comment nous devions administrer ou réformer, à l'heure actuelle, le fonctionnement de l'administration publique. On l'a probablement considérablement amélioré avec ce projet de loi, mais on ne s'est pas posé la question: C'est quoi? C'est-à-dire, que doit faire essentiellement l'État ou que doit faire la fonction publique?

Comme je l'ai rappelé, comme on l'a rappelé et qu'on va le rappeler mille et une fois, il y a un lien direct et un lien séquentiel absolument incontournable. On ne peut pas réfléchir sur la taille de la fonction publique si on ne réfléchit pas aussi sur le poids de notre fiscalité, parce qu'il y a un lien direct, vous comprenez bien, M. le Président, la majeure partie des dépenses de l'État étant des dépenses qui sont des dépenses de salaires. Donc, la taille de ce que doit faire l'État est directement liée à ce qu'on va chercher dans vos poches, dans les impôts que vous devez payer.

Deuxième élément. Si on veut réellement stimuler l'économie et soutenir la croissance de l'emploi, il est absolument nécessaire – et je pense que tout le monde s'entend, même nos amis ministériels actuellement – d'alléger le fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises pour permettre de stimuler la consommation intérieure. Parce que vous comprenez bien que, si vous consommez plus, à ce moment-là vous êtes en mesure de relancer l'économie locale. Et, parce que vous relancez l'économie locale, vous créez, à ce moment-là, plus d'emplois.

Donc, il y a un lien absolument direct, cette espèce de lien qu'il faut bien comprendre, et qu'on réfléchisse collectivement sur les implications qu'il y a entre la création d'emplois dans le secteur privé, la diminution du fardeau fiscal que nous supportons tous collectivement actuellement au Québec et la diminution du fardeau fiscal avec la réflexion que nous devons avoir sur le rôle actuellement du secteur public et de l'État dans la société québécoise.

Non, M. le Président, cette réflexion, malheureusement, n'est pas présente dans le projet de loi n° 82. C'est un peu comme si on avait mis la charrue un peu avant les boeufs. C'est comme si on se disait: Bon, bien, voici comment on pourrait fonctionner, mais on n'a pas réfléchi complètement à ce sur quoi on doit réellement concentrer nos efforts.

Alors, je réaffirmerai ce que nos parlementaires de ce côté-ci de la Chambre ont dit ici. Nous allons voter en faveur du projet de loi n° 82. Nous comprenons que le projet de loi n° 82 actuellement est une réforme majeure du fonctionnement de l'administration publique. Nous comprenons que le projet de loi n° 82 interpelle l'ensemble des fonctionnaires et l'ensemble des parlementaires parce que nous sommes aussi interpellés dans la fonction, ici, de surveillance du gouvernement.

C'est une réforme importante. C'est une réforme qui va dans le bon sens. Mais malheureusement il manque, à l'intérieur de ce projet de loi, ce qui était absolument nécessaire sur le plan de l'évolution de notre société, à savoir une réflexion sur la taille et le rôle même de l'État. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Verdun. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, suite à une entente avec l'opposition, nous ajournerions ce débat jusqu'à la semaine prochaine pour le reprendre avec un intervenant de l'opposition et la réplique du ministre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si je comprends bien, vous faites une motion d'ajournement du débat. Est-ce que cette motion d'ajournement du débat est adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement. M. le leader du gouvernement, je m'excuse.

M. Brassard: Oui, c'est exact – ha, ha, ha! – à moins qu'il y ait eu des changements entre-temps. L'article 33, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, avant d'appeler l'article 33, compte tenu que le porte-parole officiel de l'opposition n'est pas encore ici, je vais suspendre les travaux quelques instants afin de lui permettre d'être ici.

(Suspension de la séance à 11 h 36)

(Reprise à 11 h 39)


Projet de loi n° 54


Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place. M. le leader du gouvernement m'a informé d'appeler l'article 33. Alors, l'article 33, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 54, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général. Alors, Mme la ministre de la Justice, la parole est à vous.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, nous sommes rendus à la dernière étape de notre étude du projet de loi n° 54, soit la Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général. Comme vous le savez, ce projet donne suite à une décision de la Cour du Québec qui a invalidé une délégation administrative du sous-procureur général en faveur des substituts en chef et de leur adjoint. Avant de traiter précisément de cette question, il m'apparaît opportun, pour une meilleure compréhension, de rappeler la problématique générale des délégations administratives.

(11 h 40)

La Cour suprême reconnaissait déjà en 1977 dans l'affaire Regina contre Harrison que les responsabilités du Procureur général, comme d'ailleurs celles des autres ministres, sont si nombreuses qu'on ne peut pas s'attendre à ce qu'il les remplisse toutes personnellement. La Cour a considéré comme normal que le Procureur général puisse déléguer l'exercice de ses responsabilités.

En matière criminelle, la Loi sur les substituts consacre cette délégation en prévoyant les devoirs et fonctions des substituts. Par conséquent, ceux-ci sont habilités par la loi, et sans qu'une délégation particulière ne soit nécessaire au cas par cas, à examiner les procédures se rapportant aux infractions commises à l'encontre du Code criminel et à autoriser les poursuites contre les contrevenants en lieu et place du Procureur général. C'est d'ailleurs le sens du mot «substitut».

Dans le cadre de leurs fonctions, les substituts agissent sous l'autorité du Procureur général, qui encadre l'exercice de leurs fonctions par des directives administratives et qui demeure responsable de leurs actes devant l'Assemblée nationale. Cette situation n'est pas particulière au Québec, puisqu'elle prévaut également dans les autres provinces.

Le Code criminel lui-même reconnaît que les fonctions du Procureur général peuvent être exercées par ses substituts. En effet, le Code définit le Procureur général comme comprenant également ses substituts légitimes. Par conséquent, chaque fois que le Code criminel prévoit qu'une procédure est prise par le Procureur général ou qu'une poursuite est soumise à l'autorisation du Procureur général, ce sont, dans les faits, les substituts qui agissent.

Il n'existe que deux exceptions à cette règle. En effet, dans les deux cas, le Code criminel exige expressément le consentement personnel et par écrit du Procureur général, ce qui empêche, dans ces cas, de déléguer cette responsabilité aux substituts. Le premier cas est prévu à l'article 577 du Code criminel, qui concerne la décision de faire subir un procès à un accusé sans qu'il y ait eu d'enquête préliminaire ou malgré le fait que l'accusé ait été libéré après l'enquête préliminaire. Le deuxième cas qui demande le consentement par écrit du Procureur général, on le retrouve à l'article 485.1 du Code, qui concerne la décision de déposer une nouvelle accusation lorsque la poursuite initiale a été rejetée.

On voit qu'il s'agit de cas exceptionnels, et le Procureur général y a très rarement recours. Par ailleurs, dans notre système de droit criminel, toute personne peut intenter une poursuite criminelle en déposant une dénonciation auprès d'un juge de paix. Cependant, dans 13 cas, le Code criminel ne permet le dépôt d'une dénonciation qu'avec le consentement du Procureur général. L'objectif poursuivi est de protéger les justiciables contre des poursuites abusives prises par des citoyens et pouvant reposer sur des vindictes personnelles. Je vous donne quelques exemples de ces dispositions. Il y a le cas de la corruption d'enfants, de la propagande haineuse, des témoignages contradictoires, de la nudité dans un endroit public, mais le cas qui est le plus pathétique concerne l'enlèvement d'un enfant par un parent en l'absence d'une ordonnance de garde émise par un tribunal.

Avant 1969, le Code criminel exigeait également le consentement personnel et écrit du Procureur général dans ces 13 cas d'infraction. En effet, à cette époque, la définition de Procureur général ne comprenait pas ses substituts légitimes. La loi québécoise sur les substituts a été adoptée en 1969 et avait repris cette restriction en prescrivant que les substituts ont le pouvoir d'autoriser les poursuites en vertu du Code criminel, sauf dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise.

Toutefois, après l'adoption de la Loi sur les substituts, le législateur fédéral modifiait, dès 1969, le Code criminel pour permettre aux substituts légitimes du Procureur général d'autoriser eux-mêmes les poursuites dans les 13 catégories d'infraction dont je viens de parler. Depuis cette modification au Code criminel, la réserve qui est prévue dans la Loi sur les substituts perdait sa raison d'être pour ces 13 infractions mentionnées précédemment, mais la conservait pour les deux dispositions du Code criminel qui exigent toujours le consentement personnel du Procureur général. Toutefois, il faut reconnaître que la réserve qui est prévue dans la Loi sur les substituts a été une source d'ambiguïté et que l'autorisation donnée par les substituts a fait l'objet de contestations. C'est pourquoi, depuis 1993, ces poursuites n'ont été autorisées que par les substituts en chef ou par leur adjoint aux termes d'une délégation expresse du sous-procureur général.

Cependant, le 9 mars 1999, la Cour du Québec déclarait que cette délégation administrative aux substituts en chef et aux substituts en chef adjoints ne permettait pas à ces derniers d'autoriser la poursuite dans les 13 cas précisés, et ce, malgré la définition du Procureur général au Code criminel et en raison des termes de l'article 4 de la Loi sur les substituts, qui ne permet pas à ces derniers d'intervenir, ni aux substituts en chef, lorsque l'autorisation préalable du Procureur général est requise.

Alors, vous comprendrez que ce jugement a créé une insécurité juridique qu'il importe de dissiper rapidement. Selon le jugement, seuls le Procureur général, le sous-procureur général et le sous-procureur général adjoint responsable des poursuites publiques peuvent donner le consentement requis dans de tels cas. Comme je l'ai souligné lors de l'adoption du principe du projet de loi, la situation présente entraîne des inconvénients majeurs. Puisqu'il n'y a que trois personnes à pouvoir autoriser de telles poursuites, et ce, sur tout le territoire du Québec, les substituts doivent acheminer à l'une d'entre elles le dossier, et celle-ci a l'obligation d'en prendre connaissance. Vous comprendrez que cela entraîne forcément des délais importants.

De plus, des urgences peuvent survenir la nuit ou les fins de semaine. On n'a qu'à penser aux enlèvements internationaux d'enfants par un parent. Dans ces cas, il est primordial que la poursuite soit autorisée sans délai afin d'obtenir ensuite la délivrance d'un mandat d'arrestation permettant de rechercher l'enfant et le responsable de son enlèvement avant qu'ils n'aient quitté le pays vers une destination d'où il sera impossible de faire revenir l'enfant.

Les nombreuses responsabilités qui sont les miennes et celles du sous-procureur général et du sous-procureur général adjoint peuvent nous empêcher d'autoriser promptement ces poursuites malgré notre bonne volonté. La situation actuelle ne peut donc perdurer, M. le Président, d'où la nécessité de la présente intervention législative. Les substituts sont des spécialistes en ces matières. De fait, ils autorisent déjà, dans le cadre de leurs fonctions habituelles, le dépôt d'accusations relatives à des actes criminels graves, tels les meurtres au premier degré. Ils sont d'ailleurs les mieux placés pour autoriser efficacement et avec la célérité nécessaire les poursuites pour lesquelles le consentement du Procureur général est requis.

C'est pourquoi le projet de loi n° 54 propose de supprimer une disposition, qui est vétuste, de la Loi sur les substituts, qui les empêche d'autoriser ces poursuites. Ainsi, les dispositions du Code criminel qui les habilitent à agir pourront s'appliquer pleinement. Quant aux deux cas où le Code criminel exige le consentement personnel du Procureur général, je continuerai à agir personnellement pour autoriser ces poursuites s'il y a lieu, mais cela ne cause pas d'inconvénients, car ces situations ne se soulèvent que très rarement. Bien évidemment, je continuerai à assumer pleinement la responsabilité ultime des actes de mes substituts. Ils agiront en ces matières comme dans leurs autres attributions dans le cadre des directives que la loi m'autorise à donner pour déterminer leurs pouvoirs et leurs fonctions.

En terminant, M. le Président, je voudrais remercier l'opposition, qui s'est ralliée à notre point de vue lors de l'étude détaillée du projet de loi et dont les articles ont été adoptés à l'unanimité. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre de la Justice. Simple rappel aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 54, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général. Je cède maintenant la parole au porte-parole officiel en matière de justice pour l'opposition et député de Marquette. M. le député, la parole est à vous.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Effectivement, nous nous sommes ralliés au point de vue de la ministre dans le cadre de nos travaux en commission parlementaire. C'est un petit peu le but d'une commission parlementaire lorsque nous faisons l'étude détaillée des différents articles, c'est afin de pouvoir éclairer les parlementaires. Je signale à la ministre également qu'elle aurait pu nous éclairer avant si elle nous avait transmis la copie du mémoire qui était pour l'usage du public, mais elle a décidé de ne pas le faire. Dans le cadre d'un nouveau projet de loi dont nous serons saisis fort probablement cet après-midi, je remercie la ministre d'avoir eu cette gentillesse à mon endroit, de me faire parvenir copie du mémoire déposé au Conseil des ministres, le volet qui est permis au niveau de l'usage pour le public.

Maintenant, M. le Président, je vais être moins gentil à l'endroit de la ministre à partir de ce moment-ci parce que je pense être inquiet des décisions prises par la ministre de la Justice dans au moins cinq dossiers que nous avons eu la chance de regarder récemment. Et, si j'étais le leader du gouvernement, je serais inquiet également pour ma région. Il va comprendre assez rapidement ce à quoi je vais faire référence.

Dans un premier temps, c'est la lettre du président de l'Association des procureurs-chefs et chefs adjointes et adjoints du Québec, Me Jean Lortie, qui nous avait saisis d'une demande urgente, le 11 juin 1999, concernant l'intervention que souhaite faire la Procureur général dans le projet de loi n° 54. Je vais juste citer un court extrait de la lettre qu'il nous avait fait parvenir, et on se rappellera que le leader de l'opposition s'était empressé de demander un débat d'urgence à l'Assemblée nationale parce que la teneur de la lettre commandait l'urgence et commandait un geste urgent de la part de l'Assemblée nationale.

(11 h 50)

Or, le président Jean Lortie disait ceci: «Il m'appert, tant personnellement qu'au nom de l'association que je représente, que retarder à octobre ou novembre – et nous sommes rendus au mois de novembre, M. le Président – prochains l'adoption de cet amendement nous plongerait dans cinq ou six mois d'incertitude.» Nous avons vécu sous la Procureur général collectivement, comme société, cinq ou six mois d'incertitude au dire même de la personne dont elle vient de nous dire: J'assume pleinement leurs faits et gestes devant les tribunaux. Substituts du procureur de la couronne, la ministre vient de nous dire: J'assume pleinement leurs gestes.

Alors, ces gens-là avaient avisé la Procureur général, l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale sur l'urgence de la situation en disant: «Donc, il m'apparaît personnellement, au nom de l'association que je représente, que retarder à octobre ou novembre prochain l'adoption de cet amendement nous plongerait dans cinq ou six mois d'incertitude pendant lesquels ne fût-ce qu'une seule situation ou, à titre d'exemple, un enlèvement d'enfant réussi constituerait un drame de trop pour le Québec.»

Or, M. le Président, nous avons vécu cinq ou six mois d'incertitude à cause de la ministre de la Justice. Pire que ça, à cause – je l'ai dit dans des questions il y a deux semaines – du caractère insouciant de la Procureur général. Elle a ouvert le débat linguistique au Québec avec le jugement qui a été rendu par la Cour du Québec sur toute la question de l'affichage commercial. Il y avait cinq blâmes directs de la part du juge de la Cour du Québec à l'endroit de la Procureur général, qui n'avait pas fait ses devoirs, qui s'est présentée devant les tribunaux sans preuve. C'est du jamais vu, du jamais dit.

M. le Président, il faut se présenter devant le tribunal préparé, prêt à faire sa preuve avec des arguments solides. Ça n'a pas été le cas dans ce dossier-là, et on voit dans quelle situation ça nous a plongés. J'imagine que la Procureur général a maintenant porté la cause en appel. Et, dans le cadre de cet appel-là, j'imagine qu'elle va demander à la cour de pouvoir déposer une preuve, parce que là on vit dans une situation d'incertitude sur le plan linguistique, sur le plan de l'affichage commercial. Ça, c'est le deuxième dossier pour lequel je suis très inquiet.

Avant-hier, on apprenait qu'un juge de la Cour du Québec à Trois-Rivières avait indiqué depuis belle lurette à la Procureur général qu'il fallait remplacer des juges à la Cour du Québec, que son rôle était encombré et que le retard de la part de la Procureur général à nommer un seul représentant pour siéger au comité de sélection pour recruter les juges qui vont remplacer ceux qui partent à la retraite... Bien, le juge a dit... Puis c'est rare, M. le Président, que les juges décident de s'exprimer sur les agissements de l'Exécutif. Ce juge-là l'a fait parce qu'il voyait bien les inconvénients qu'il occasionnait aux justiciables.

Et, M. le Président, ça a été suite à la parution de l'article dans Le Nouvelliste du jeudi de la semaine passée qu'au ministère de la Justice on s'est agité, et soudainement la ministre a décidé ce jour-là de nommer son représentant. C'est grâce à l'intervention d'un journaliste que le dossier va avancer, M. le Président.

Hier, un nouveau blâme à l'endroit de la Procureur général, par le juge Dalphond de la Cour supérieure du Québec, dans le dossier de la commission scolaire de Montréal. Le ministre de l'Éducation dit: Nous, on s'est fondé sur l'avis de la Procureur général, qui nous disait que d'aller devant les tribunaux, ça prendrait bien trop de temps, de demander un jugement déclaratoire ou une injonction.

M. le Président, le juge, dans son jugement, a félicité les avocats et toutes les parties impliquées pour la rapidité avec laquelle le tout a été tranché. La commission scolaire de Montréal avait adopté une résolution vers la fin du mois de septembre. Le ministre de l'Éducation, pour des intérêts, comme le disait le député de Kamouraska-Témiscouata, très politiques, très partisans, veut conserver à la tête de la commission scolaire de Montréal une personne qu'il contrôle. Ça, c'est son respect de la démocratie. Il a réussi à faire élire cette dame-là avec sa formation politique, et là le ministre de l'Éducation était prêt à empiéter sur toutes sortes de principes de droit pour faire en sorte de mettre en tutelle l'exécutif de cette commission scolaire là et ainsi sauvegarder l'autorité de la présidente. Mais le juge de la Cour supérieure leur a donné tort. Et ce qui m'inquiète, c'est toujours sur la base des gestes posés par la Procureur général que, après coup, on découvre qu'il y a eu des erreurs.

Si j'étais le leader du gouvernement... Il semble avoir à coeur les intérêts de sa région, et en particulier l'usine Gaspésia. Le premier ministre a dit à un moment donné sur la base de l'avis que lui a fourni la Procureur général: Pas question de prendre une injonction, pas question d'aller prendre un jugement déclaratoire pour déterminer la véritable portée juridique des ententes signées avec M. Weaver, qui devient le bouc émissaire de cette affaire-là. Est-ce qu'on a sérieusement exploré ces possibilités-là?

Moi, je dis au leader du gouvernement: Je serais inquiet si j'étais lui, j'irais chercher un autre avis juridique, juste pour me rassurer. Parce que, avec ce qu'on vient de voir dans quatre dossiers, des manquements graves à l'exercice de sa fonction comme ministre, M. le Président, il faut traiter ça de façon sérieuse parce qu'il s'agit de droits des citoyens devant la justice. Il s'agit de décisions prises par l'Exécutif, par le Conseil des ministres, où la Procureur général agit également comme jurisconsulte. Elle conseille l'ensemble de ses collègues à la table du Conseil des ministres, et à chaque fois, M. le Président, on la prend en défaut, il y a des blâmes qui sont logés par des juges directement dans des jugements.

Quand ce n'est pas les juges, c'est ses propres représentants, c'est les substituts du Procureur général qui écrivent à l'Assemblée nationale. Ils sont obligés d'écrire au leader de l'opposition pour dire: Intervenez, ça n'a pas de bon sens, ça prend trop de temps, et avec des lettres qui ne peuvent pas être plus claires que ça, M. le Président. Et, après avoir été plongé pendant cinq ou six mois dans une certaine incertitude, c'est aujourd'hui que la ministre va procéder. Or, M. le Président, il y a cinq dossiers comme ça. Si j'étais le premier ministre – je ne sais pas s'il nous écoute – je serais dorénavant prudent...

Des voix: ...

M. Ouimet: Non, non, non, mais c'est parce que, lui aussi, il s'est mouillé dans l'affaire de l'usine de la Gaspésia. C'est lui qui a dit tout d'un coup: Les clauses que nous avons signées ont une portée juridique. Mais, par la suite, il décide de faire volte-face et de dire: Savez-vous, on n'ira pas devant les tribunaux. D'après moi, la Procureur général a dû lui dire, pareil comme dans le dossier de la commission scolaire de Montréal: Ça va prendre trop de temps. Pourtant, il y a un jugement qui a été rendu hier qui donne tort à la Procureur général. Alors, messieurs, mesdames du Conseil des ministres, là, prudence. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que le projet de loi... Très bien. Alors, compte tenu de l'heure...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous avez un droit de réplique, vous reviendrez cet après-midi, si on rappelle le projet de loi. Alors, je suspends les travaux, à moins qu'il y ait consentement.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non, ce n'est pas ça que je voulais dire. Est-ce qu'il y a consentement...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre a droit à un droit de réplique qu'elle veut utiliser. Il est midi. Alors, si je peux lui permettre d'exécuter son droit de réplique, je dois avoir un consentement de cette Assemblée. Est-ce qu'il y a consentement? Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Deux ou trois minutes, M. le Président.

(12 heures)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour deux ou trois minutes? Alors, il y a consentement. Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil (réplique)

Mme Goupil: Alors, M. le Président, j'aimerais apporter quelques précisions parce qu'il y a des choses qui ont été dites et qui ne sont pas tout à fait exactes. Alors, dans un premier temps, je voudrais juste rappeler au député que, lorsque l'on veut débattre d'une motion d'urgence, encore faut-il le faire en temps utile, et, au moment où ça a été présenté, il savait très bien qu'on ne pouvait pas le faire. Alors, j'étais déjà en commission parlementaire dans un autre projet de loi, et il n'était pas possible de procéder.

Ceci étant dit, je veux le rassurer tout de suite, parce que nous avons souhaité le déposer auparavant. Mais vous savez que j'ai appris également que, dans le cadre de commissions parlementaires, il fallait que nous ayons l'accord de l'opposition dans bien des dossiers pour être capables d'avancer, et d'ailleurs c'est la raison pour laquelle j'ai remercié l'opposition pour sa collaboration pour que nous ayons pu le déposer aujourd'hui.

Maintenant, il n'est arrivé aucun événement malheureux, parce que les substituts font un travail exemplaire. Ils l'ont toujours fait de cette façon, ils ont continué à le faire, et on peut assurer tous les gens du Québec qu'il n'y a aucun problème à cet égard-là.

Maintenant, je vous dirais, en ce qui concerne la nomination des nouveaux juges, M. le Président, comme je l'ai dit en cette Chambre, que les délais sont tout à fait normaux. Parce que, lorsque nous avons à nommer des juges, il y a des comités qui sont en place, avec des représentants du Barreau, de la magistrature et des citoyens, et nous ne sommes nullement en retard, les délais sont tout à fait ce qu'ils doivent être pour s'assurer que les nominations seront de bonnes nominations, et ça, c'est pour assurer la protection de tous les citoyens du Québec.

Maintenant, quand on parle du juge Dalphond, eh bien, je vous dirais que j'invite le député de Marquette à relire le jugement d'un couvert à l'autre. Il n'y a pas eu de réprimande. Au contraire, le juge a félicité que les procédures s'étaient faites rapidement, dans un bon délai, et félicitait les gens. Et, à cet égard, je tiens à rendre hommage à la magistrature, qui a mis en place, avec le comité tripartite sur lequel siègent le Barreau, les représentants de la population, à l'effet qu'il améliore les délais pour les citoyens qui se présentent devant les tribunaux... Et nous pouvons être fiers. Et je tiens également à rendre hommage à mon prédécesseur qui était dans ce dossier, qui a mis en place, au cours des dernières années, des outils pour s'assurer que les délais devant les tribunaux soient réduits, et on peut être fiers de cela, M. le Président.

Maintenant, en regard du dossier Gaspésia, je vous dirais que le député de Marquette n'a pas répété ce que le premier ministre a dit, et les propos qu'il a tenus sont tout à fait inexacts. Alors, je l'invite à relire les notes qui ont été dites devant cette Assemblée, M. le Président. Et, en terminant, je suis convaincue qu'on va adopter ce projet de loi là tout à l'heure, après la période de questions. Merci beaucoup.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Le projet de loi n° 54, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général, est-il adopté? Adopté.

Compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de cette Assemblée jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 3)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir un moment.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous abordons immédiatement les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

À l'étape de la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui, M. le Président, je vous réfère à l'article e du feuilleton.


Projet de loi n° 224

Le Président: En rapport avec cet article, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 224, Loi concernant les fonds FÉRIQUE. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Alors, je dépose ce rapport. Et, en conséquence, M. le député de Westmount–Saint-Louis présente le projet de loi d'intérêt privé n° 224, Loi concernant les fonds FÉRIQUE.


Mise aux voix

L'Assemblée accepte-t-elle d'abord d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Brassard: Alors, dans ce cas-là, M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques et pour que le ministre d'État à l'Administration et à la Fonction publique en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Bien. La motion est adoptée? Très bien.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


Rapport annuel du ministère de l'Éducation

M. Legault: Oui. M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998-1999 du ministère de l'Éducation.

Le Président: Bien. M. le ministre de l'Environnement, responsable de la région de Québec, maintenant.


Rapport annuel de la Commission de la capitale nationale du Québec

M. Bégin: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998-1999 de la Commission de la capitale nationale.

Le Président: Alors, ce document est déposé, comme le précédent évidemment. M. le ministre délégué au Tourisme.


Rapport annuel de la Société du Centre des congrès de Québec

M. Arseneau: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998-1999 de la Société du Centre des congrès de Québec.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Oui, je dépose l'extrait d'une pétition non conforme présentée à l'Assemblée. Je demande d'abord le consentement, M. le Président, la pétition est non conforme.

Le Président: Il y a consentement.


Maintenir le statut de zone à risque du boulevard de la Rive-Sud et le transport scolaire des élèves de la commission scolaire des Navigateurs

M. Bordeleau: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition non conforme présentée à l'Assemblée nationale par 7 308 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec, domiciliés dans le comté de Lévis.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Nous sommes en désaccord avec la décision de la commission scolaire des Navigateurs d'abolir le transport scolaire du matin et du soir à compter de l'année scolaire 1999-2000 pour les élèves de quatrième, cinquième et sixième années et en 2000-2001, pour ceux de la maternelle, première, deuxième et troisième années;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous désirons que le boulevard de la Rive-Sud redevienne une zone à risque de la route des Îles à la route Kennedy, et ce, pour la sécurité de nos enfants.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, maintenant.

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Je sollicite, moi aussi, le consentement de cette Assemblée afin de déposer un extrait d'une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement. Alors, Mme la députée.


Accélérer la négociation en cours pour le renouvellement des conventions collectives dans le secteur de l'éducation

Mme Carrier-Perreault: Oui. Alors, M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 127 jeunes, très jeunes pétitionnaires, élèves de l'école du Bac, de Saint-Lambert-de-Lévis, aussi dans la commission scolaire des Navigateurs, donc dans le comté des Chutes-de-la-Chaudière, qui ont choisi ce moyen sous les conseils de leur direction plutôt que de manifester sur les ponts.

«Alors, les faits invoqués sont les suivants:

«Monsieur le premier ministre, voici une lettre que vous lirez peut-être si vous avez le temps;

«Considérant qu'à l'école on nous a remis une lettre du syndicat qui dit diminution dans l'éducation;

«Monsieur le premier ministre, nous aimons tous l'école, nous ne sommes pas tous des bols mais nous faisons tous des gros efforts;

«Considérant que si les profs font la grève, qui prendra la relève, qui viendra enseigner à nous les élèves?

«Monsieur le premier ministre, nous ne voulons pas la grève, nous voulons l'harmonie pour tous nos amis;

«Considérant que depuis que nous allons à l'école, pour nous récompenser des efforts fournis, nous avions des sorties;

«Monsieur le premier ministre, nous voulons nos sorties, nous les avons méritées, qu'est-ce que vous en pensez?;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Finies les compressions, finies les diminutions, allez! les négociations et vive l'éducation.»

Je certifie, M. le Président...

Des voix: ...

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, il est possible que cette pétition soit aussi présentée au Parlement écolier, sait-on jamais. Alors, en attendant, celle-ci est déposée à l'Assemblée nationale. Maintenant, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de cette Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement.


Octroyer l'approvisionnement en bois à la Scierie Claude Pelletier et fils de Rivière-Bleue

M. Béchard: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée au ministre des Ressources naturelles par 1 171 pétitionnaires travailleurs de la Scierie Claude Pelletier et fils et des résidents du Kamouraska-Témiscouata.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«La Scierie Claude Pelletier et fils inc. de Rivière-Bleue est présentement en arrêt de travail faute d'approvisionnement en bois.

«Comme les allocations de bois pour les prochaines années devront être confirmées sous peu, il nous semble important de vous faire connaître la position des travailleurs en chômage et des gens du milieu à ce sujet.

«Du tremble, il y en a en quantité dans la région et nous pensons que les entreprises à qui ont été allouées ces quantités n'ont pas besoin d'autant de bois pour répondre à leurs besoins.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«La quantité demandée pour permettre le fonctionnement de l'usine à l'année (20 000 m³ de tremble) étant minime, nous souhaitons que, dans le cadre de la mise à jour des plans généraux d'aménagement forestier, nous puissions, l'entreprise et nous, travailleurs, obtenir ce minimum vital.»

(14 h 10)

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est aussi déposée.

Puisqu'il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous allons immédiatement aborder la période de questions et de réponses orales. Mais, auparavant, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Au début du mois, là, précisément le 2 novembre, M. le Président, la députée de Beauce-Sud adressait une question au premier ministre concernant le tordage de bras pratiqué par Revenu Québec en matière de recouvrement des sommes contestées par le contribuable. Le premier ministre prenait avis de la question au nom du ministre du Revenu. Il s'exprimait comme suit: «Je vais demander au ministre du Revenu de procéder rapidement aux vérifications et de fournir la réponse.» Quand allons-nous obtenir la réponse?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, d'abord, l'expression «tordage de bras» n'est tout à fait pas appropriée, mais la réponse, elle, viendra la semaine prochaine.


Questions et réponses orales

Le Président: Alors, nous allons aborder maintenant la période de questions et de réponses orales. Première question, Mme la députée de Saint-François, en question principale.


Financement des universités


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Le réseau québécois des universités a connu depuis 1994 des coupes importantes dans ses budgets de fonctionnement. Alors que le Parti québécois et le premier ministre lui-même promettaient d'établir l'éducation comme priorité, jamais le réseau de l'enseignement supérieur n'a subi autant de compressions. On se souviendra également d'une déclaration du premier ministre lors d'une entrevue, alors qu'il blâmait les recteurs parce qu'ils n'avaient pas fait leur travail. Et je cite: «Il y a un travail de rationalisation dans les universités qui n'a pas été fait.»

On sait fort bien, M. le Président, qu'il n'y a plus de gras à couper dans nos universités et qu'on est en droit de s'inquiéter. Nos universités sont les moteurs de notre économie québécoise, et surtout dans nos régions. Je pense, entre autres, à la région de Sherbrooke, combien, par exemple, l'université joue un rôle important pour le développement économique. Les besoins des universités actuellement s'élèvent, selon les recteurs, à 1 000 000 000 $.

Donc, ma question, M. le Président, au ministre de l'Éducation: Est-ce que le ministre de l'Éducation pense comme son premier ministre? A-t-il l'intention de se battre pour donner un peu d'oxygène à nos universités? Et à quoi peuvent s'attendre les recteurs quant à leur demande de 1 000 000 000 $?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, nous suivons de très près la situation financière des universités. D'ailleurs, je veux souligner l'excellente collaboration que j'ai avec chacun des recteurs, rectrices des universités au Québec.

M. le Président, on se rappellera, dans le budget du ministre des Finances, au mois de mars dernier, qu'on injectait 170 000 000 $ pour réduire le déficit des universités, donc le ramener au même niveau qu'à la fin des années quatre-vingt. Donc, quand on dit que la situation a empiré... On a une situation actuellement, au niveau du déficit accumulé dans nos universités, qui est à peu près la même que ce qu'on avait à la fin des années quatre-vingt, donc au moment où les libéraux étaient au pouvoir.

Je rappellerai aussi, M. le Président, qu'à ce 170 000 000 $ s'attachaient des conditions. Pour recevoir ces montants, chaque université devait présenter un plan de redressement prévoyant, à l'intérieur d'une période de trois à cinq ans, l'équilibre financier. Nous avons à ce jour reçu, pour toutes les universités, un plan de redressement prévoyant le retour à l'équilibre, sauf pour l'Université du Québec. Nous avons actuellement une situation particulière à l'Université du Québec. Les gens de mon ministère, des gens de mon cabinet ont eu plusieurs rencontres avec le président de l'Université du Québec, et nous cherchons des solutions dans ce cas-là

Je rappellerai aussi en terminant que nous sommes à travailler actuellement sur une démarche très cohérente avec les recteurs, rectrices des universités, une démarche en trois temps. D'abord, un énoncé de politique qui a été annoncé le 26 octobre dernier. Actuellement, on est en consultation pour une présentation finale d'ici la fin de l'année. On aura une deuxième étape pour une politique de financement pour moderniser nos règles de financement. Et nous aurons une troisième étape, qu'on a déjà commencée, qui est le plan de réinvestissement. On a demandé à chaque université de nous soumettre un plan de réinvestissement et nous allons donc continuer, à partir des priorités qu'on s'est données, des orientations qu'on s'est données, de réinvestir.

Donc, je dirais, M. le Président, en terminant que nous avons commencé, cette année, à réinvestir dans nos universités. Nous allons continuer de le faire, mais nous allons le faire de façon responsable, selon nos moyens.

Le Président: En question principale, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, maintenant.


Investissements dans le réseau universitaire


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. Le ministre de l'Éducation déclarait dernièrement: «Quand je regarde les sommes investies aux États-Unis, ça me fait peur pour la compétitivité de nos universités. Il faut que le gouvernement y mette plus d'argent et qu'on puisse payer davantage les professeurs les plus en demande. Si on ne le fait pas, disait-il, dans 10 ans, nous serons une société d'arriérés.» Il indiquait aussi qu'il préparait une politique pour les universités et qu'il remettait même en question sa présence à Québec si des sommes substantielles n'étaient pas réinvesties. Il terminait en disant: «Je ne suis pas en politique pour gérer la continuité.»

Est-ce que le ministre de l'Éducation, qui, à l'évidence, depuis un an, agit dans la continuité des coupures de sa prédécesseure, qui est en train de remettre en question la qualité de nos universités au Québec, peut nous dire à combien lui-même, personnellement, évalue sa présence comme ministre à Québec et combien son collègue des Finances devra lui donner dans le prochain budget pour le garder à Québec?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président, on ne peut pas oublier le contexte des quatre dernières années où le gouvernement du Parti québécois a dû réparer le gâchis qui avait été laissé par les libéraux, un gâchis de 6 000 000 000 $ de déficit par année.

Oui, M. le Président, il a fallu appliquer des restrictions budgétaires pour atteindre le déficit zéro. Ça n'a pas été facile, mais, dès cette année, nous avons déjà réinvesti plus de 600 000 000 $ additionnels dans le réseau de l'éducation, dont plus de 200 000 000 $ dans nos universités. On a un rapport – et le député de Kamouraska-Témiscouata en a sûrement vu un résumé ce matin dans le journal Le Devoir – où on nous explique qu'au Québec on investit plus en termes de dépenses par habitant qu'à peu près partout au Canada. En fait, la seule province qui est en avant du Québec, c'est la Colombie-Britannique. Il y a eu un rapport qui a été publié, M. le Président, par le Centre canadien des politiques alternatives, qui est basé sur certains critères, entre autres la qualité, l'équité, l'accessibilité et l'obligation... donc des institutions universitaires, où on regarde les grands principes de base. Et ces gens ont publié le rapport et conclu que la Colombie-Britannique arrive première, le Québec arrive deuxième, l'Ontario arrive bon dernier. Et on dit que le Québec remporte la palme, entre autres au chapitre de la qualité, de la responsabilité publique des institutions et de l'accessibilité.

M. le Président, nous prenons nos responsabilités.

Le Président: En principale à nouveau, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


Compétitivité des universités québécoises


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, M. le Président. Le ministre aime bien nous citer des choses. Je vais lui en citer une, moi. Le recteur de l'Université de Montréal dit: «Je m'en fous, du PIB. C'est malheureux, mais c'est l'effort absolu qui compte. Je suis en concurrence avec Boston, pas avec l'Université de Rabat.» Aujourd'hui, on apprend qu'il y a un déficit supplémentaire de 88 000 000 $ dans les universités, imprévu. Hier, le ministre nous disait que l'exode des cerveaux, c'est un phénomène mondial. Peut-être qu'il cherche encore où ils vont.

Mais, M. le Président, est-ce que le ministre de l'Éducation se rend compte que la réalité d'aujourd'hui au Québec, c'est que nos institutions d'enseignement supérieur, nos universités qui étaient le joyau, la fierté des Québécois et Québécoises, depuis quatre ans que son gouvernement est là, de coupures, ils sont en train de détruire ce que nous avons mis des centaines d'années à bâtir? Qu'est-ce qu'il va faire? Combien il veut d'argent pour rester ministre de l'Éducation?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, d'abord, je dirais au député de Kamouraska-Témiscouata qu'aujourd'hui nos universités, au Québec, sont parmi les meilleures au monde, et on doit en être fier.

Deuxièmement, M. le Président, le député de Kamouraska-Témiscouata continue à avoir des difficultés à expliquer les chiffres. Il nous parle du pourcentage du PIB. J'ai mentionné hier, et je le répète: On dépense plus par habitant – pas en pourcentage du PIB, par habitant – au Québec, dans nos universités que n'importe où ailleurs au Canada. Donc, je pense qu'il faut être clair, on n'est pas en train de parler de pourcentage du PIB.

Maintenant, M. le Président, pour ce qui est de l'exode des cerveaux, le député de Kamouraska semble se moquer du fait que c'est un phénomène mondial. S'il avait la chance de lire quelques revues, par exemple, comme la revue The Economist , il verrait que tous les pays industrialisés font face à cet enjeu actuellement. Nous sommes en train, via notre politique à l'égard des universités, de regarder ce phénomène pour le Québec et de trouver des solutions. Ce n'est pas simple. On n'est pas les seuls. Oui, c'est un phénomène mondial, mais on va y faire face avec nos recteurs et rectrices d'université.

(14 h 20)

Le Président: En question principale, Mme la députée de La Pinière, maintenant.


Qualité de l'air au collège Édouard-Montpetit


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Le ministre de l'Éducation semble être le seul à ne pas réaliser ce qui se passe dans notre système d'éducation. En janvier dernier, le collège Édouard-Montpetit a publié un rapport d'inspection de la qualité de l'air intérieur. Il démontre que la ventilation est déficiente et que les étudiants ainsi que le personnel administratif et enseignant sont exposés quotidiennement à des taux élevés de monoxyde et de bioxyde de carbone. Aussi récemment que la semaine dernière, les représentants de la Fédération étudiante collégiale du Québec sont venus dénoncer cet état de fait devant la commission des finances publiques.

M. le Président, qu'attend le ministre de l'Éducation pour corriger une telle situation et permettre ainsi aux étudiants du collège Édouard-Montpetit d'avoir accès à des locaux qui répondent aux normes minimales de la santé publique?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, selon les informations que j'ai, nos écoles et nos collèges répondent aux normes, entre autres en termes de ventilation. Je ne suis pas au courant du problème exact du collège Édouard-Montpetit, donc je vais prendre avis de la question.

Le Président: M. le député de Papineau, en question principale, maintenant.


Disponibilité de mobilier au cégep de Trois-Rivières


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Lors de la campagne électorale du 30 novembre 1998, le premier ministre visitait le cégep de Trois-Rivières. Il s'indignait du fait que des étudiants en étaient réduits à suivre les cours assis sur des poubelles, faute de mobilier – il trouve ça drôle! Dans un élan de grandeur, le premier ministre avait promis sur-le-champ de régler le problème, M. le Président, immédiatement après les élections, qui avaient comme thème J'ai confiance . Les poubelles sont toujours là.

Le ministre de l'Éducation est-il au courant ou bien fait-il semblant d'ignorer cette réalité criante?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, je ne suis pas au courant qu'on a des étudiants qui étudient sur des poubelles, mais, si c'est le cas, on va s'assurer de leur trouver des chaises.

Le Président: M. le député de Verdun, en question principale.

M. Gautrin: Oui. M. le Président, il y a trois ans...

Des voix: ...

Le Président: Un instant. M. le député de Verdun.


Niveau de scolarité de bénéficiaires de programmes de formation financés par le Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Il y a deux ans très justement, on a créé le Fonds de lutte à la pauvreté, et, sagement, dans le Fonds de lutte à la pauvreté, les principales dépenses ont été des dépenses de formation, et nous ne contestons aucunement cette question.

Mais où j'en interpelle aujourd'hui le ministre de l'Éducation, c'est au fait suivant. Qu'a-t-il à répondre au fait que plus de 30 % des personnes qui ont bénéficié des programmes de formation du Fonds de lutte à la pauvreté détenaient déjà soit un diplôme collégial, soit un diplôme universitaire? Ne se sent-il pas interpellé quant à la déficience du système universitaire si ceux qui doivent bénéficier d'un programme de formation détiennent déjà soit un diplôme collégial soit un diplôme universitaire?

Le Président: M. le ministre de la Solidarité sociale.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, nous pourrions être nombreux à compléter la réponse que je donnerai. Ma collègue de l'Emploi, mon collègue de l'Éducation, l'objectif que nous cherchions à atteindre, c'est d'aider des gens qui n'étaient pas en emploi à trouver le chemin le plus court pour que ces personnes puissent réintégrer le marché du travail et puissent le faire en toute dignité. Il est arrivé qu'à juste titre, et le député en convient, nous privilégiions la formation, et souvent des formations courtes pour que des gens à qui il manque quelques compétences pour avoir accès au marché du travail puissent le faire rapidement. M. le Président, de ce côté-ci de cette Chambre, on s'en réjouit.

Le Président: En question principale, M. le député d'Anjou, maintenant.


Éligibilité de stagiaires et de nouveaux diplômés aux concours de recrutement dans la fonction publique


M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Merci, M. le Président. La situation des jeunes dans la fonction publique est catastrophique. En effet, les jeunes de moins de 30 ans ne représentent qu'environ 1,3 % des effectifs permanents. Le gouvernement a créé il y a quelques années un programme de stages dans la fonction publique, programme qui a été dénoncé le 10 octobre dernier comme étant du «cheap labor». Eh bien, M. le Président, non seulement c'est du «cheap labor», mais ces jeunes ne pourront pas accéder à mieux. En effet, les jeunes stagiaires, tout comme l'ensemble des diplômés récents, ont appris hier qu'ils ne sont pas éligibles pour obtenir un emploi dans la fonction publique, puisque le recrutement pour les jeunes par le Conseil du trésor ne se fera que sur les campus.

M. le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du trésor: À quelques mois du Sommet du Québec et de la jeunesse, a-t-il l'intention de suivre la recommandation du Conseil permanent de la jeunesse et d'élargir le concours?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: D'abord, M. le Président, je vais noter la fausseté de l'argumentation, à l'heure actuelle, que le député amène ici. Les nouveaux diplômés qui sont en stage ont accès à tous les concours de la fonction publique, et nous avons de plus demandé à tous les ministères de réduire, dans la mesure du possible – dans toute la mesure du possible – tous les concours aux exigences minimales, c'est-à-dire de ne pas requérir d'expérience pour avoir accès à l'emploi.

Le résultat, M. le Président, c'est que, de tous ces concours, les concours qui ne requièrent plus d'exigence d'expérience sont passés de 31 % à 53 % – de tous les concours de la fonction publique – et beaucoup de jeunes y ont accès dorénavant, y compris les stagiaires. Et c'est ce que nous leur disons de faire, et nous sommes en train de mettre sur pied des mécanismes pour les aider à postuler sur ces concours.

Cependant, en ce qui concerne les concours sur les campus universitaires, c'est une disposition de la Loi de la fonction publique qui existe depuis 1983 au moins, mais qui n'était plus en fonction, en valeur ou appliquée depuis 1989. Nous avons commencé à l'appliquer, mais cette disposition s'applique aux étudiants qui sont sur les campus et non pas qui ont terminé leur cours.

Le Président: M. le député.


M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: En additionnelle, M. le Président, est-ce que le ministre de l'Éducation et vice-président du Conseil du trésor a l'intention de faire pression sur son collègue afin qu'il élargisse son recrutement à tous les jeunes? Sans quoi les jeunes devront comprendre que le message que le grand organisateur du Sommet du Québec et de la jeunesse leur envoie, c'est: Trouve-toi un emploi immédiatement quand t'es encore à l'école, sinon la fonction publique, pour toi, c'est fini.

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, la disposition s'applique pour les étudiants sur les campus, et puis c'est une disposition convenue, votée par l'Assemblée nationale.

Mais je reviens sur le fait que les stages pour les nouveaux diplômés conduisent déjà les nouveaux diplômés – ceux qui ont terminé leur cours universitaire – à des emplois. Déjà, il y en a plus d'une trentaine qui ont arrêté leur stage parce qu'ils ont obtenu un emploi. La moitié d'entre eux ont été admis dans des postes à la fonction publique. Donc, il y a une voie importante qui a été ouverte dans les dernières années pour eux.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourassa.


Nombre de places en centres d'accueil et d'hébergement


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. La ministre de la Santé déclarait hier en cette Chambre, et je la cite: «Nous avons investi dans l'ajout de nouvelles places en centres d'accueil et d'hébergement.»

M. le Président, si sa déclaration est vraie, la ministre de la Santé peut-elle alors nous expliquer pourquoi le nombre de lits d'hébergement est passé de 46 000 à 42 000 entre 1994 et 1998, et ce, tel qu'en attestent les statistiques provenant de son propre ministère?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je n'ai pas par-devers moi le document que cite notre collègue, et à cet égard je ne peux spécifiquement répondre à la question qui est posée, si ce n'est le fait que nous avons consenti des investissements considérables nous permettant d'augmenter le nombre de places.

(14 h 30)

Est-ce que la donnée – je ne veux pas la contester ni la discuter – présentée par la députée de Bourassa tient compte de toutes les places, entre autres de celles en centre d'hébergement et de soins prolongés qui sont des centres privés conventionnés? Est-ce qu'elle tient en compte l'ensemble des places en ressources intermédiaires ou alternatives? Ce sont tous ces faits que je pourrai ramener ici, s'il y a lieu, au moment de la prochaine période de questions, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, est-ce que, puisque la ministre semble surprise, je peux procéder au dépôt des statistiques provenant de son propre ministère?

Le Président: Alors, il y a consentement?

Une voix: Oui.


Document déposé

Le Président: Alors, allez-y, madame, pour votre question complémentaire. Il y a consentement pour le dépôt. Alors, je comprends qu'il y a simplement un dépôt. M. le député de Nelligan, en question principale.


Traitement des demandes de fauteuil roulant et d'aide à la locomotion


M. Russell Williams

M. Williams: Oui, M. le Président. Nous apprenons avec consternation que le gouvernement péquiste a instauré un véritable barrage administratif à la RAMQ pour l'obtention d'une chaise roulante, incluant un changement des critères d'admission et des frais de 60 $ par demande. La liste des cas en traitement est passée de 1 500 à 3 700 personnes au centre de réhabilitation Lucie-Bruneau, mais le gouvernement péquiste a coupé près de 3 000 000 $ pendant les derniers trois ans, et la liste d'attente se prolonge.

Ma question, M. le Président: Comment la ministre de la Santé peut-elle justifier cette coupure de près de 20 %, alors qu'il y a une augmentation de la demande de 30 %? Et pourquoi, encore une fois, comme en déficience physique, en déficience intellectuelle, les centres jeunesse et dans le transport adapté, la ministre rallonge les listes d'attente au lieu de répondre aux besoins essentiels de la population?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vais rectifier un certain nombre de faits, M. le Président, qui sont complètement erronés.

D'abord, la réglementation en vigueur à la Régie de l'assurance-maladie du Québec n'a pas été modifiée. Il n'y a donc pas eu de resserrement au niveau de critères d'attribution d'aide à la locomotion, et pas plus qu'au niveau du traitement des demandes. Les données de la RAMQ nous indiquent que les délais de traitement actuellement seraient conformes aux normes en usage, soit 15 jours, et il n'y aurait aucun cas en attente de traitement. Moi, je ne peux pas comprendre, à ce moment-ci, M. le Président, l'affirmation à l'effet qu'il y aurait 3 700 cas en attente, parce que la RAMQ n'a pas, d'une part, de liste d'attente – alors, la RAMQ n'a pas de liste d'attente – et que, d'autre part, ce nombre exprimé apparaît démesuré, puisque la Régie de l'assurance-maladie rembourse 4 500 fauteuils roulants par année.

Quant au coût du programme, il n'a pas bougé depuis trois ans à l'égard des coûts remboursés pour les fauteuils roulants, puisqu'il comprenait, en 1995, d'autres types d'appareils qui sont couverts autrement, M. le Président. Voilà quant aux faits.

Le Président: M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: La ministre a parlé de traitement, mais est-ce qu'elle comprend qu'un fauteuil roulant, une chaise roulante, c'est un appareil suppléant? Et est-ce qu'elle ne réalise pas l'importance de cette chaise roulante pour une personne handicapée? Il y a les listes d'attente, les listes d'attente se prolongent. Viens dans nos bureaux de comté, nous avons tous entendu les demandes de ça. Et je sais, je vois là où il y a les problèmes.

Est-ce que la ministre peut s'engager maintenant à mettre fin à ce barrage? N'écoute pas la RAMQ, viens-nous voir. Est-ce qu'elle peut arrêter ce barrage administratif et injecter les sommes nécessaires afin d'éliminer cette liste d'attente et rendre les chaises roulantes accessibles à ceux et celles qui en ont besoin? Est-ce qu'elle peut rendre ces appareils suppléants accessibles à des personnes handicapées, aujourd'hui?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, je conviens avec le député de Nelligan que les appareils que nous fournissons, qu'il s'agisse de chaises roulantes, qu'il s'agisse de marchettes pour les personnes âgées, qu'il s'agisse d'appareils auditifs ou autres, sont des appareils absolument essentiels pour les personnes qui vivent avec un handicap. Et, dans le cas de fauteuils roulants, évidemment, c'est généralement parce que le handicap est plus sévère.

Le député de Nelligan, je comprends qu'il peut se fier peut-être à l'article de journal qui a été publié cette semaine, mais je veux le rassurer: non seulement nous n'avons pas baissé le budget, mais je lui ajoute une autre information. En ce qui a trait aux fauteuils roulants en particulier, nous avons procédé par des appels d'offres qui nous ont permis de réduire le coût d'achat de chacun des fauteuils, ce qui a fait qu'avec la même somme, qui n'a pas baissé depuis trois ans, M. le Président, nous achetons davantage de fauteuils. Et en ce qui a trait à la RAMQ, elle n'a pas effectivement, directement, de liste d'attente. Je ne nie pas cependant qu'il puisse y avoir des demandes, dans certains établissements, qui ne sont pas complètement comblées.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Sauvé.


Coût, contenu et diffusion du rapport annuel du Musée du Québec


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. La fin de semaine dernière, dans deux grands quotidiens du Québec, nous trouvions un encart haut en couleur: le rapport annuel 1998-1999 du Musée du Québec. Le même rapport a été déposé ici, en cette Chambre, en incluant les annexes où on trouve les états financiers du Musée. La directive du Conseil du trésor concernant la production et la distribution des rapports annuels des ministères et organismes du gouvernement nous dit qu'un rapport annuel doit respecter des normes éditoriales, graphiques et techniques.

Permettez-moi, M. le Président, de vous citer quelques directives qu'il faut respecter. «Le tirage d'un rapport annuel est fixé à un maximum de 600 exemplaires.» Le rapport annuel du Musée du Québec a été distribué à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires. «Les illustrations et les photographies sont interdites.» Le rapport du Musée en compte 36 en couleurs, dont une de la ministre de la Culture, une du premier ministre et une du ministre de la Sécurité publique. Cherchez l'erreur! Les rapports annuels sont...

Des voix: ...

Le Président: Alors, ce petit intermède humoristique me permet de rappeler à Mme la députée que maintenant elle devrait poser sa question.

Mme Beauchamp: Je vous préciserai avant tout que les rapports annuels doivent être produits de la façon la plus économique possible, et je vous laisse en juger.

M. le Président, est-ce que la ministre de la Culture peut admettre que le rapport annuel du Musée du Québec est un document inutilement coûteux, qui va complètement à l'encontre des directives du Conseil du trésor, ou préfère-t-elle admettre que ceci est un outil de propagande pour faire la promotion des ministres du Parti québécois, payé à même l'argent des contribuables?

Le Président: Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: M. le Président, effectivement, il arrive que les photos des ministres soient dans les rapports annuels et dans les outils de promotion, non pas de propagande mais de promotion. Je suis désolée, M. le Président, si c'est ma photo qui apparaît, mais c'est de ce côté-ci qu'il y a eu des gens qui ont été élus pour former le gouvernement.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce!

Une voix: ...

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement et député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, je crois que les commentaires que vous venez de faire sont inutiles. Je crois que Mme la ministre a la réponse, et nous l'attendons.

Mme Maltais: Alors, M. le Président, ce rapport annuel a été conçu comme étant un outil de promotion d'abord. Il s'agissait d'allier deux opérations: faire la promotion de la mission éducative du Musée du Québec, lui donner une image, une visibilité à travers tout le Québec, l'utiliser comme un instrument de promotion aussi à travers le monde, parce que nos musées aujourd'hui sont en réseau à travers le monde. Donc, il y a eu distribution, visibilité, promotion de la mission éducative du Musée, et, par ailleurs, le rapport annuel s'y trouve.

Il ne s'agit pas de sommes faramineuses, M. le Président, c'est un coût de fabrication de 70 000 $ pour distribution dans Le Devoir et dans Le Soleil , partout à travers le Québec. Donc, c'est une approche originale, polyvalente, que je salue, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: M. le Président, est-ce que vraiment la ministre essaie de nous faire accroire que ceci est un outil de promotion, alors qu'il porte en toutes lettres: Rapport annuel 1998-1999?

Est-ce qu'elle peut revenir un peu sur le terrain et constater que le milieu de la culture est en pleine crise et que les artistes, entre autres les artistes en arts visuels, auraient définitivement préféré que les argents soient attribués aux créateurs plutôt qu'ils servent, ces argents, à publier la photo couleur de la ministre et du premier ministre?

(14 h 40)

Le Président: Mme la ministre.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: M. le Président, je suis très heureuse de voir que la députée est plus sensible que d'autres députés de l'opposition au sujet des arts visuels, puisqu'ils se sont permis d'attaquer la politique des concours d'architecture toute la semaine dernière, et tout à coup ils se portent à la défense des artistes en arts visuels. J'en suis ravie, je suis heureuse de voir le cheminement qu'est en train de faire l'opposition, d'abord. Deuxièmement, je rappelle que c'est un outil de promotion. Il faut le voir comme un outil de promotion qui est aussi son rapport annuel.

Ensuite, parlant du Musée du Québec et de son action qu'il fait pour les artistes en arts visuels, vous serez intéressé sûrement d'apprendre que grâce, par exemple, à l'exposition Rodin, qui a généré des surplus, le Musée du Québec a créé un fonds de dotation pour l'acquisition d'oeuvres d'artistes québécois, qui s'élève à 300 000 $, qu'ils réinvestissent en acquisitions.

Le Président: Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: M. le Président, ma question complémentaire s'adressera au président du Conseil du trésor: Est-ce qu'il autorise ou pas la publication de rapports annuels qui ne respectent aucune directive émise par son propre Conseil du trésor? Quelle est la position du président du Conseil du trésor, s'il vous plaît?

Le Président: Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: M. le Président, j'ai bien expliqué, il faut remarquer, pour une fois, il y a vraiment une société d'État qui s'est appliquée à utiliser, à ramasser deux fonctions importantes. C'est le budget...

Des voix: ...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Alors, il y a encore plusieurs minutes à la période de questions. S'il y en a qui veulent poser des questions complémentaires, nous avons le temps. Mais, pour le moment, je crois que la députée de Sauvé, qui avait la parole, a posé une question. Nous attendons la réponse, et les autres membres de l'Assemblée doivent respecter le règlement. Mme la ministre.

Mme Maltais: M. le Président, l'argent qui a permis de produire et ce rapport annuel et cet outil de promotion important et de qualité a été pris dans l'argent des Communications et financé, en partie, par Les Amis du Musée, et Les Amis du Musée, ce n'est pas le gouvernement qui les finance, ce sont les gens qui vont chercher de l'argent. Donc, c'est une opération de promotion, de diffusion importante, de qualité. Et, puisqu'il semble qu'on s'intéresse vraiment beaucoup à la culture, à l'impact sur les arts visuels, de l'autre côté, enfin je me permets d'ajouter que, derrière, il y a la publicité de l'exposition Tissot, qui s'en vient, qui sera une importante exposition à saveur internationale, importante pour les impacts touristiques, économiques dans la région de Québec et que, s'il y a surplus, peut-être que les artistes en arts visuels profiteront, encore une fois, de l'impact des grandes expositions et de l'originalité du travail du Musée du Québec.

Le Président: En question principale, maintenant, M. le député de Marquette.


Accès des contribuables aux jugements rendus par les tribunaux


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, récemment, la ministre de la Justice annonçait une bonne nouvelle pour le gouvernement, mais une mauvaise nouvelle pour tous les citoyens qui doivent se défendre contre son gouvernement. La ministre va créer une banque de données où l'on retrouvera tous les jugements rendus par la Cour d'appel, la Cour supérieure, la Cour du Québec et le Tribunal du travail. Là où le bât blesse, c'est que l'accessibilité à cette banque de données sera réservée exclusivement à la ministre, à son ministère, à son gouvernement et à leurs procureurs. On parle d'environ 20 000 jugements qui sont publiés par année. Les citoyens, eux, n'auront accès qu'à 25 % des informations que détiendra le gouvernement, d'où l'injustice. En d'autres mots, le citoyen qui se présente devant les tribunaux ne peut lutter à armes égales contre un gouvernement «Big Brother».

La question que je pose à la ministre de la Justice: Pourquoi la ministre de la Justice empêche-t-elle les citoyens d'avoir les mêmes moyens de défense que son gouvernement devant les tribunaux?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: D'abord, M. le Président, je ne suis pas surprise que, pour une fois, on aurait pu avoir une bonne nouvelle puis qu'il n'y ait pas de mauvaise nouvelle qui soit soulevée de la part du député de Marquette. Mais il n'y a jamais de bonne nouvelle, selon lui.

D'abord, M. le Président, oui, c'est exact que nous mettons à la disposition les jugements pour tous ceux et celles qui occupent des fonctions importantes et qui se doivent d'être bien informés sur tous les nombreux jugements qui sont sortis. Cependant, vous comprendrez que, collectivement, tous les Québécois et Québécoises ont fait des efforts importants pour assainir les finances publiques, et nous faisons en sorte que graduellement... Au fur et à mesure que les moyens financiers nous le permettront, nous ferons en sorte que les jugements pourront être disponibles, nous le souhaitons, un jour pour tous les citoyens du Québec.

Mais, entre-temps, il est possible pour les citoyens d'obtenir les jugements par, déjà, des logiciels qui le permettent, entre autres REJB, où les jugements sont accessibles à l'ensemble de la population, tous ceux et celles qui ont accès au système Internet. Alors, M. le Président, lorsque les moyens financiers nous le permettront – et j'ose espérer que ce sera dans les meilleurs délais – nous ferons en sorte que les jugements pourront être disponibles pour l'ensemble des citoyens du Québec.

Le Président: M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, la ministre réalise-t-elle que la justice au Québec n'est pas monnayable, qu'on parle d'un entrepôt de documents électroniques, que, si elle donnait la consigne, là, à peu de frais, ça serait disponible pour tout le monde, parce que ce sont des jugements que son gouvernement, ses procureurs et tout l'appareil gouvernemental vont avoir, que les autres citoyens n'auront pas? Elle est en train d'instaurer une justice à deux vitesses au Québec.

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, d'abord, vous savez que les jugements sont publics. Il est possible pour les citoyens, en s'adressant... pour pouvoir obtenir les jugements.

Alors, nous essayons de mettre en place un système qui sera disponible pour l'ensemble des citoyens au fur et à mesure que les moyens financiers nous le permettront. Cependant, ce qui est important, c'est que nous puissions assurer aux citoyens du Québec une justice qui soit accessible, et nous mettons en place des outils importants. Pensons à la médiation civile commerciale que nous venons de mettre en place, pensons à la médiation familiale, il y a énormément d'outils qu'actuellement nous mettons à la disposition des citoyens pour, peu importe la façon qu'ils choisissent, qu'ils puissent avoir accès à la justice, M. le Président. Et nos sous, nous les mettons en priorité au service des citoyens.

Le Président: En question principale, M. le député de Limoilou.


Sondage de la Commission de la capitale nationale sur les fusions de municipalités


M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. La semaine dernière, un sondage Léger & Léger a été rendu public par la Commission de la capitale nationale. Une section du sondage portait sur la fusion des municipalités. La ministre des Affaires municipales, elle, a vu un signal. Le journal Le Soleil titrait: Sondage de la Commission de la capitale nationale – Une majorité pour les fusions: Harel y voit un message clair .

Par contre, M. le Président, les maires de banlieue de la région de Québec ont émis un communiqué, et je les cite: «Il est incroyable que la ministre Harel voie une réponse claire à une question de sondage aussi mal foutue. Il s'agit d'une question hypothétique posée à un échantillonnage mal défini dans un but évident de propagande politique.»

Et, comme par hasard, le ministre responsable de la capitale est en même temps membre du comité et président du comité de la région de Québec pour évaluer les différents scénarios de fusion.

Ma question au ministre responsable du comité de la région de Québec pour étudier les scénarios de fusion et ministre responsable de la Commission de la capitale, j'aimerais savoir: Le ministre peut-il nous dire pourquoi il a utilisé la Commission de la capitale pour faire de la propagande politique au sujet des fusions des municipalités?

Le Président: M. le ministre responsable de la région de Québec.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, je suis très heureux de dire, pour ceux qui ne le savaient pas, que, la semaine dernière, s'est tenu à Québec un colloque organisé par Québec-Capitale, c'est-à-dire un groupe présidé par le recteur de l'Université Laval, qui comprend les chambres de commerce et un ensemble d'intervenants de la région de la capitale, qui a pour mission de s'assurer que les dossiers de la région cheminent bien.

Alors, nous avons tenu un colloque ici, à Québec, où étaient présentes environ 150 personnes qui ont assisté toute la journée, d'une part à une présentation d'un bilan de ce qui est arrivé dans la région de la capitale, et que j'ai fait moi-même, et par la suite à des ateliers où mes collègues de la région de Québec ont procédé à la confection de plans d'action pour chacun de leur ministère à l'égard de la région de la capitale nationale, tel que prévu dans la politique sur la région de la capitale nationale. Donc, on a échangé avec tous les gens, et ils étaient extrêmement satisfaits.

Les organisateurs du colloque, M. le Président, étaient l'Université Laval et le président de la Commission de la capitale nationale. Ils ont jugé à propos dans le cadre du colloque, au-delà de ce que je viens de dire, d'avoir durant la soirée présentation d'un sondage qui avait été fait à la demande de la Commission de la capitale. Ce que nous voyons, c'est les résultats de ce sondage, et je n'ai évidemment pas, comme le voudrait tellement le député de Limoilou... je ne me suis pas ingéré dans le travail de la Commission pour savoir si elle devait le faire ou ne pas le faire. C'est un organisme autonome, je l'ai déjà dit. C'est une grande fille, dirais-je, et elle se comporte comme telle. Elle se comporte comme une adulte et sait ce qu'elle avait à faire.

(14 h 50)

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Hull.


M. Roch Cholette

M. Cholette: En additionnelle, M. le Président. Alors, comment comprendre que la ministre des Affaires municipales commente, dans Le Soleil du 12 novembre dernier, le sondage de la CCN de la façon suivante, et je cite: «C'est une vague de fond. Ça prouve que les gens sont favorables au changement et que la résistance n'est pas dans la population. Je pense que c'est un signal pour les décideurs à tous les niveaux, y compris au gouvernement.»

Ce n'est pas compliqué, M. le Président: Pourquoi un sondage est un message clair à Québec, alors qu'un référendum ça ne vaut rien au Mont-Tremblant?

Le Président: Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Je comprends, M. le Président, que les villes de banlieue de la Communauté urbaine de Québec ont elles-mêmes fait faire un sondage et engagé une firme pour ce faire et qu'elles prétendent que les résultats du sondage fait par cette firme qu'elles ont engagée contredisent les résultats du sondage fait par la Commission de la capitale nationale. Quoi qu'il en soit, je constate simplement que 85 % de la population interrogée dans la grande région de Québec est favorable à des fusions sur la région de Québec, et 85 % sont nettement favorables à des fusions importantes sur le territoire de la capitale nationale. Je m'en réjouis. Je m'en réjouis, bien évidemment. Mais ce qui m'étonne, et c'est très ironique...

Le Président: ...Mme la ministre.

Mme Harel: Oui. Je termine en vous disant que c'est très ironique, M. le Président, que le député de Hull, qui tous les jours, de l'autre côté de la rivières Outaouais, a devant les yeux l'exemple d'une fusion imposée par le gouvernement ontarien, dans les villes d'Ottawa-Carleton, trouve que c'est raisonnable quand c'est fait en Ontario et que ça devient déraisonnable quand c'est fait au Québec.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Hull.

M. Cholette: Non, en principale.

Le Président: En question principale, très bien.


Orientations en matière de fusions de municipalités


M. Roch Cholette

M. Cholette: M. le Président, la ministre des Affaires municipales a déposé, comme on le sait maintenant, la semaine dernière, le projet de fusion de Tremblant avec ses voisines. Pourtant, plusieurs des membres de l'Assemblée, aujourd'hui et hier, ont dénoncé cette démarche dictatoriale. On pouvait d'ailleurs lire, la fin de semaine dernière, dans un hebdo régional la déclaration de l'un de ses collègues, et je cite: «Je ne pense pas que le législateur doive intervenir pour forcer les villes à fusionner. Vous savez, un mariage forcé n'est jamais bon.»

Comment la ministre des Affaires municipales peut-elle continuer à faire la sourde oreille, alors que les cris proviennent de son propre parti?

Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je comprends que c'est de bonne guerre pour une opposition de citer des bouts d'extraits d'une conférence faite devant une chambre de commerce localement. J'ai commencé par dire que le gouvernement n'avait même pas encore publié son livre blanc et que, dans notre parti, il était possible de pouvoir donner des opinions jusqu'au moment où on est lié par une décision et on devient solidaire de cette décision.

Si, dans leur parti, ils pensaient un tant soit peu aux sujets ou aux objets de discussion présentement, on aurait tout au moins des questions intelligentes et on verrait peut-être des idées qui satisferaient votre conseiller politique qui dit qu'à être incohérent et inconséquent on perd toute crédibilité.

Le Président: M. le député de Hull.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Est-ce que la ministre réalise que son collègue, celui qui nous a dit: «Vous savez, un mariage forcé n'est jamais bon», ce n'est pas le ministre des Transports, c'est son propre premier ministre, dans un article paru le 14 novembre dernier, il y a quatre jours, dans Le Réveil de Jonquière?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je ne crois pas que le député de Hull avait la responsabilité de sonner une récréation quelconque. Alors, en terminant, M. le député de Hull.

M. Cholette: Alors, vous allez me permettre de déposer la citation du journal en question. Et je me réjouis de voir que le premier ministre est endossé par certains collègues de l'autre côté. Et quand va-t-elle comprendre... Bien, M. le Président...


Document déposé

Le Président: C'est bien. Je voulais que vous en arriviez à votre question. M. le député.

M. Cholette: Alors, la question, ce n'est pas compliqué, M. le Président...

Une voix: ...

Le Président: Il va finir de poser sa question, M. le ministre.

Une voix: Oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Écoutez, à ma connaissance, il n'a pas encore neigé aujourd'hui à Québec. Alors, on peut se calmer un peu. En terminant, M. le député de Hull, s'il vous plaît.

M. Cholette: M. le Président, de toute évidence, il y a une grogne chez les péquistes. Quand va-t-elle comprendre qu'elle est la seule à vouloir forcer la fusion au Québec?

Le Président: Alors, M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Bon. Puisque le premier ministre est en cause, je voudrais répondre de deux façons à cette importante question. Premièrement, de ce côté-ci de la Chambre, contrairement à l'autre côté, nous favorisons le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, non pas le droit des municipalités. Un. Et deuxièmement, dans le cas qui nous occupe, si le député connaissait un peu l'histoire municipale du Québec, il se souviendrait que, dans le cas qui nous occupe, autrefois, Mont-Tremblant faisait partie de Saint-Jovite, et ça a été sorti de Saint-Jovite pour des intérêts purement particuliers, les intérêts Ryan. Ce qui revient aujourd'hui, c'est la nature des choses: Mont-Tremblant revient dans Saint-Jovite.


Motions sans préavis

Le Président: Bien. Alors, nous allons passer maintenant, puisque la période des questions et des réponses orales est terminée, à l'étape des motions sans préavis. D'abord, Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance... M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, étant donné que le ministre de l'Éducation doit aller en commission pour entendre des témoins, nous préférerions que ce soit la motion du député de Kamouraska-Témiscouata qui soit discutée en premier.

Le Président: Alors, puisqu'il y a consentement, je vais céder la parole au député de Kamouraska-Témiscouata.


Féliciter les gagnants québécois au Mondial des métiers et leurs enseignants

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. Je dépose la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale félicite les gagnants québécois du 35e Mondial des métiers et leurs enseignants pour avoir réussi à relever ce défi de calibre international.»

Le Président: Bien. Il y a consentement. Alors, vous pouvez faire votre intervention, M. le député.

M. Béchard: Oui, M. le Président. Comme nous le savons, en fin de semaine dernière se tenait à Montréal...

Le Président: Je voudrais simplement demander à nos collègues un peu de collaboration. Si des discussions doivent avoir lieu entre vous, elles pourraient avantageusement se faire à l'extérieur de l'enceinte de délibérations. M. le député.

(15 heures)


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, M. le Président. Merci. Effectivement, en fin de semaine dernière, au Stade olympique, 611 participants étaient au Mondial des métiers, le 35e, et la cérémonie de clôture a couronné les efforts de 118 d'entre eux, dont trois Canadiens et plusieurs Québécois, six, qui se sont démarqués. Et, comme le mentionnait le président d'honneur de ce 35e Mondial des métiers, il faut se réjouir de la popularité de cette compétition internationale, et nous pouvons être convaincus que le XXIe siècle sera celui des métiers et des techniques.

En effet, M. le Président, sur les Québécois et Québécoises qui se sont démarqués, nous pouvons relever, parmi les 25 participants et participantes du Québec, entre autres Mme Karine Desroches, qui a mérité une médaille de bronze en services de restauration, Jessica Lessard, qui a obtenu une médaille d'or en soins esthétiques, une discipline en démonstration, et, par ailleurs, quatre Québécois et Québécoises qui ont eu un certificat de compétence pour avoir obtenu plus de 500 points dans leur compétition et deux d'entre eux ayant obtenu une quatrième place, à savoir Frédéric Martin en réfrigération et Émilie Dubois en couture pour dames. Les deux autres compétiteurs qui ont reçu un certificat sont M. Yves Roussel en tôlerie et carrosserie et Yannick Dupuis en pâtisserie et confiserie, Yannick Dupuis, un jeune de Rivière-du-Loup, comté voisin du mien.

Je pense, M. le Président, que nous pouvons tous et toutes être fiers à la fois de la réussite de cet événement, à la fois de la vitrine que cet événement a donnée à la formation professionnelle et technique, mais aussi pas seulement pour l'effet comme tel, mais il a réussi à envoyer un message au niveau international qu'au Québec, oui, en formation professionnelle et technique, il se fait des choses extrêmement intéressantes, il se fait de belles choses, et que les jeunes, les professeurs qui les accompagnent ont cette flamme de faire en sorte que les métiers ont toujours leur place et sont en plein développement au Québec, et que nous sommes capables de nous démarquer à ce niveau-là.

M. le Président, par cette motion-là que nous présentons aujourd'hui, en plus de les féliciter, on doit démontrer et on doit faire ressortir que, malgré le succès de la fin de semaine du 35e Mondial des métiers, il y a encore beaucoup de place... Il y a seulement 30 % des finissants qui choisissent aujourd'hui soit une formation professionnelle ou une formation technique. Quand on sait qu'un emploi sur deux présentement au Québec demande un type de formation soit professionnelle soit technique, je pense que les efforts doivent être mis pour qu'il y ait de plus en plus de jeunes qui soient sensibilisés aux débouchés d'emplois extrêmement précis, et ouverts, et adéquats qu'offre une formation professionnelle ou technique. D'autant plus intéressant de présenter cette motion quand on sait qu'il y a un jeune de la région du Bas-Saint-Laurent, de Rivière-du-Loup, qui a réussi à se démarquer, et qui a réussi à faire de son métier une véritable passion, et qui a démontré qu'il était en mesure de compétitionner avec les meilleurs au monde et de se démarquer face à ces gens-là.

M. le Président, je vous dirais, en terminant, que les efforts qui sont faits par les professeurs, les efforts qui sont faits par les jeunes devront, au cours des prochaines années, être appuyés encore davantage par le ministère de l'Éducation, appuyés aussi par toutes les entreprises du Québec dans plusieurs domaines, entre autres pour faire en sorte qu'on laisse aux jeunes de plus en plus la chance de terminer leur diplôme, de terminer leur formation avant d'aller les recruter pour que ces gens-là aient vraiment un diplôme en main. Je pense qu'il en va d'une responsabilité sociale que tout le monde mette l'épaule à la roue pour réussir en ces domaines-là. Nous devons faire en sorte de plus en plus que des programmes souvent techniques, précis, qui donnent une couleur à une région, comme des programmes également professionnels... qu'on puisse appuyer les milieux, les commissions scolaires, les collèges dans le développement de ces programmes-là et que ces gens-là trouvent, au ministère de l'Éducation, une oreille attentive, trouvent des gens qui sont ouverts, qui sont prêts à accorder ces formations-là professionnelles et techniques afin que tous, au Québec, nous puissions relever le défi de diminuer le taux de chômage dans nos régions et de faire en sorte que l'on continue de se démarquer au niveau de la formation professionnelle et technique. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Nous allons maintenant céder la parole au député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Je veux, moi aussi, féliciter tous les jeunes qui ont été récipiendaires de prix lors du Mondial des métiers, mais aussi tous les participants qui, s'ils étaient rendus là comme participants, représentants du Québec, c'est qu'ils avaient franchi des étapes avant, c'est que, dans leur domaine, ils s'étaient avérés être les meilleurs au Québec et même au Canada. Je pense que c'est une fierté de voir – j'ai eu l'occasion de visiter le Mondial – avec combien d'énergie, avec combien de passion pour leur travail ces jeunes-là participaient aux compétitions.

Je veux, évidemment, parmi ceux dont le travail leur a permis de se rendre au plus haut niveau, féliciter Yannick Dupuis, qui est du comté de Rivière-du-Loup, que j'ai eu, je dirais, le privilège d'encourager dans sa démarche et qui fait aujourd'hui la fierté de notre ville, de notre région. Je voudrais aussi souligner l'effort des professeurs – c'est des mois de préparation – l'effort de l'équipe qui a organisé le Mondial des métiers, sous la présidence de M. Gérald Tremblay, qui ont mené tout ça de main de maître. Il fallait voir l'organisation, la qualité du bénévolat et l'enthousiasme qui se dégageait partout sur les lieux de l'activité.

Je dois faire une parenthèse évidemment en soulignant le Mondial des métiers. Plusieurs membres du gouvernement sont passés sur place, quelques-uns en profitaient pour parler de l'importance de la formation professionnelle. On doit quand même souligner combien, en cette matière-là, alors qu'il y a un taux de chômage presque nul dans la plupart des domaines, le travail du gouvernement est mal fait, comment on dit, d'un côté, vouloir valoriser la formation professionnelle, alors qu'on est encore incapable de la décloisonner. Les gens qui finissent avec des diplômes professionnels, qui veulent traverser au cégep, qui veulent aller plus loin sont parfois obligés de recommencer des formations, le décloisonnement n'est pas réussi. Alors qu'on dit que la formation professionnelle, c'est important, combien, à cause des déboires et du scandale d'Emploi-Québec, de groupes en formation professionnelle ne sont pas partis, hein, dans le langage du milieu, des groupes qui ne sont pas partis? À chaque groupe, c'est huit jeunes, 10 jeunes, 15 jeunes, 20 jeunes, ou des moins jeunes, qui auraient pu avoir de la formation professionnelle, qui auraient pu réussir dans ces métiers-là, qui auraient pu gagner leur vie et qui, à cause du scandale de la dernière élection à Emploi-Québec, n'ont pas pu le faire.

Alors, oui, bravo au Mondial des métiers, bravo à la formation professionnelle, et qu'on arrête d'en parler, et qu'on commence à la valoriser par des gestes concrets.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Nous allons maintenant céder la parole au ministre de l'Éducation, également député de Rousseau. M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. C'est avec beaucoup de fierté que nous avons accueilli à Montréal le 35e Mondial des métiers. J'ai pu y aller, effectivement, passer une bonne partie de la journée jeudi dernier. J'ai reçu aussi des délégations à l'ITHQ vendredi soir. On a reçu aussi d'autres délégations à la Polymécanique, à Laval, lundi soir, et j'ai assisté hier soir à la remise des médailles. Je pense que c'est effectivement un événement qu'on est chanceux d'avoir ici, à Montréal, et on est d'autant plus chanceux que, quand on regarde l'équipe canadienne, sur 39 participants à l'équipe canadienne, il y avait 25 Québécois et Québécoises, donc 25 Québécois, Québécoises sur une équipe de 39 au Canada. Je pense que c'est la preuve qu'on fait des bonnes choses.

Je comprends que le député de Rivière-du-Loup est là pour chialer contre le gouvernement, mais je pense qu'il a manqué une bonne occasion de féliciter le gouvernement pour le travail qui est fait en formation professionnelle et technique. M. le Président, je veux particulièrement féliciter, parmi les 25 Québécois, Québécoises, quelques Québécois et Québécoises qui se sont particulièrement distingués. D'abord, Karine Desroches, Karine qui a mérité une médaille de bronze en services de restauration. J'ai eu l'occasion de luncher avec elle jeudi dernier. Elle était confiante, déterminée, puis on a vu le résultat. C'est une étudiante de l'ITHQ, donc encore une preuve qu'il y a des choses qui se font bien ici, au Québec. Il y a aussi Jessica Lessard, qui était dans une discipline en démonstration, qui a gagné une médaille d'or en soins esthétiques, et on a aussi, parmi les Québécois, cinq Québécoises et Québécois qui ont mérité ce qu'on appelle un certificat de compétence pour avoir obtenu plus de 500 points dans leur compétition. Donc, en plus des deux que j'ai déjà mentionnés, on a aussi Frédéric Martin en réfrigération, on a Émilie Dubois en couture pour dames, et on a aussi Yves Roussel en tôlerie-carosserie, Yannick Dupuis en pâtisserie-confiserie et, finalement, M. Jimmy Roy en installation électrique. Donc, c'est quand même extraordinaire qu'on ait toutes ces distinctions.

Je voyais, l'autre soir, M. le Président – puis, effectivement, il ne faut pas s'asseoir sur nos lauriers – que la grande majorité des médailles a été gagnée par les pays asiatiques, donc le Japon, la Corée, Taiwan. Donc, on voit, là, qu'il ne faut vraiment pas s'asseoir sur nos lauriers. Ces résultats sont quand même supérieurs aux résultats qu'on avait eus en Suisse en 1997, donc on s'est grandement amélioré.

(15 h 10)

On a pu voir – et puis j'ai été fasciné de voir ces jeunes – des démonstrations dans des métiers, oui, qui ont beaucoup d'avenir, et je pense que, effectivement, ce que j'essaie de faire, c'est d'utiliser toutes les tribunes. On a des mentalités encore à changer au Québec parce que la moitié de nos emplois au Québec, donc 50 % de nos emplois, exigeraient idéalement une formation professionnelle ou technique. Or, seulement 30 % de nos diplômés sortent en formation professionnelle et technique. Les programmes sont disponibles dans nos écoles secondaires, dans nos cégeps, on a investi des centaines de millions de dollars pour se préparer. Il faut maintenant convaincre les jeunes puis, il faut bien le dire aussi, les parents de l'importance de s'inscrire en formation professionnelle et technique. J'espère que les jeunes vont pouvoir convaincre d'autres jeunes de s'inscrire dès l'année prochaine, j'espère aussi qu'on aura réussi à modifier les mentalités un petit peu au Québec.

Je veux également réitérer l'appel que j'ai fait hier soir, M. le Président. Il y avait les cérémonies de clôture, il y avait plusieurs employeurs de nos grandes entreprises au Québec qui étaient présents à l'aréna Maurice-Richard, et j'ai lancé un appel, que je lance encore aujourd'hui, aux dirigeants d'entreprise au Québec pour qu'ils ouvrent davantage leurs portes, leur usine pour montrer aux jeunes, comme on l'a fait pendant quatre jours au Stade olympique, ce que ça veut dire, en pratique, ces métiers. Je souhaite donc qu'ils ouvrent leurs portes et qu'ils viennent aussi dans nos écoles secondaires, dans nos cégeps parler de leurs métiers pour donner le goût à des jeunes de s'inscrire dans ces métiers. J'en profite, en terminant, pour rendre hommage aussi, bien sûr, aux enseignants, aux enseignantes qui sont souvent dans l'ombre, qui ont instruit, conseillé, encouragé les jeunes, qui leur ont transmis leur métier avec passion. Ils travaillent donc sans relâche, et on ne dira jamais assez à quel point ils et elles sont importants et importantes pour le développement économique de la société. Donc, je crois qu'ils et elles méritent toute notre admiration.

Et, M. le Président, il faut d'abord dire aussi que le gouvernement du Québec s'est impliqué de façon importante financièrement dans des commandites en fournissant des équipements. Il y avait plus de 30 000 000 $ d'équipements. La majorité de ces équipements qui étaient au Stade olympique vont se retrouver dans nos écoles, dans nos cégeps. Donc, il y a Emploi-Québec qui a mis de l'argent, le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, le ministère des Affaires municipales et de la Métropole, Tourisme Québec, le ministère des Relations internationales, le ministère des Régions et le ministère de l'Éducation.

En terminant, M. le Président, je veux féliciter les organisateurs, les bénévoles qui ont fait du 35e Mondial des métiers ce qu'il a été, et je suis convaincu qu'on aura encore de meilleurs résultats en 2001 à Séoul, en Corée.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Le débat étant terminé, est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Alors, toujours au chapitre des motions sans préavis, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Il y a eu entente avec l'opposition à l'effet que nous fassions un premier avis de commission de façon à permettre à M. le ministre de l'Éducation nationale et au porte-parole de l'opposition de se diriger en commission parlementaire.

Le Vice-Président (M. Pinard): Il y a eu consentement, M. le leader...

M. Boulerice: Alors, je fais l'avis, M. le Président, que la...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vous écoute, M. le leader adjoint.


Avis touchant les travaux des commissions

M. Boulerice: Je vous remercie de m'écouter, M. le Président. Alors, j'avise donc cette Assemblée ainsi que vous-même, puisque vous m'écoutez, que la commission de l'éducation poursuivra la consultation générale sur la place de la religion à l'école aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que le mardi 23 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Et, quant aux motions sans préavis, M. le Président, il s'agira de Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.


Motions sans préavis (suite)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.


Souligner l'anniversaire de l'adoption par l'ONU de la Convention relative aux droits de l'enfant

Mme Léger: Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de souligner «le dixième anniversaire de la journée marquant l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant, au 20 novembre, et qu'elle réitère ainsi son adhésion aux principes de cette importante Convention adoptée par l'Organisation des nations unies en faveur des droits des enfants», M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Consentement. Mme la ministre.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Alors, M. le Président, je suis fière de proposer aux membres de cette Assemblée l'adoption d'une motion pour souligner le dixième anniversaire de l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant. Les droits des enfants demeurent une préoccupation du gouvernement du Québec qui, je vous le rappelle, s'est engagé formellement à respecter les dispositions de cette Convention le 9 décembre 1991 par l'adoption d'un décret. En fait, le gouvernement du Québec s'est donné, au fil des ans, divers moyens de veiller au respect des droits des enfants et du même coup à la couverture de leurs besoins.

Permettez-moi d'en mentionner quelques-uns. Il y a la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse qui voit à la protection de l'intérêt de l'enfant et au respect de ses droits reconnus par la loi. Il y a aussi, depuis juin 1997, le Conseil de la famille et de l'enfance chargé de conseiller le gouvernement du Québec sur les questions relatives à l'enfance et la famille. Enfin, il y a le ministère de la Famille et de l'Enfance que nous avons créé en juillet 1997. Il a le mandat prioritaire de favoriser l'épanouissement de la famille et de l'enfance en assurant la mise en oeuvre de la politique familiale et de ses dispositions.

Je vous rappelle aussi que le gouvernement du Québec a adopté, le 21 octobre dernier, un projet de loi sur le travail des enfants ayant notamment pour but de rendre la législation québécoise conforme aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant. Considérant la place qu'occupent les enfants au coeur de nos choix et la priorité qu'il importe d'accorder au respect de leurs droits fondamentaux, j'invite les membres de cette Assemblée, M. le Président, à adopter la présente motion non seulement pour confirmer leur adhésion au principe de la Convention relative aux droits de l'enfant, mais aussi pour donner leur appui à tous ceux et celles qui oeuvrent à son application.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la ministre. Nous allons maintenant céder la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce et également porte-parole officiel de l'opposition en semblable matière. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de joindre ma voix à celle de la ministre déléguée sur la motion qui souligne le dixième anniversaire de la Convention relative aux droits de l'enfant de l'Organisation des Nations unies et qui réitère l'adhésion de l'Assemblée nationale à cette importante Convention. Cette Convention, comme l'a indiqué la ministre déléguée, a été adoptée le 20 novembre 1989 et, depuis lors, ratifiée par tous les pays dans le monde, sauf deux. Intéressant. L'un, c'est la Somalie, pour des raisons que peut-être on peut comprendre, compte tenu de la situation politique et économique qui demeure, mais l'autre, c'est les États-Unis qui n'ont pas ratifié cette importante Convention. Et c'est là une situation beaucoup plus complexe, évidemment.

L'entrée en vigueur a été le 2 septembre 1990, après la ratification d'un nombre suffisant de pays signataires de cette Convention. Les objectifs de cette Convention, très clairs, c'est de protéger les droits des enfants mais également d'assurer leur développement et leur épanouissement dans le monde. Évidemment, nous sommes, je pense, tous, comme Québécois et Québécoises, fiers que le gouvernement du Québec y adhère et que le gouvernement du Canada soit signataire de cette Convention internationale. Alors, aujourd'hui, l'Assemblée nationale réitère sa propre adhésion à ces principes.

Nous avons fait beaucoup de progrès, au Québec, M. le Président, depuis 10 ans, pour assurer le développement des enfants, mais, malgré ce progrès, nous avons encore du travail à faire. Je vous donne quelques exemples. Au chapitre de la lutte contre la pauvreté, une préoccupation qui m'est chère, force est de constater qu'il y a encore du progrès à faire au Québec et au Canada. Il y a, au Québec, 180 000 enfants qui vivent, dans les ménages, de l'aide sociale. Je pense que, de part et d'autre dans cette Chambre, des deux côtés de la Chambre, on serait assez franc pour dire que les enfants qui vivent, dans les ménages, de l'aide sociale, ce sont des enfants essentiellement qui vivent dans la pauvreté, il n'y a pas de doute là-dessus. En tout cas, il n'y a pas de doute dans mon esprit qu'on a 180 000 enfants qui vivent de l'aide sociale, qui vivent dans des conditions de pauvreté. Le nombre est en décroissance, mais il demeure trop élevé.

(15 h 20)

M. le Président, la question de la pauvreté est assez cruciale pour l'avenir du Québec, et on a pu noter depuis un certain nombre de mois une situation qui se dégrade. Il y a un article de presse de l'année passée: La situation se dégrade pour les enfants pauvres . C'était dans La Presse de décembre 1998. Montréal au premier rang des villes canadiennes avec un taux de croissance de 8 %, mais un taux de pauvreté absolument égal... En tout cas, probablement la ville la plus pauvre, le centre urbain le plus pauvre au Canada. Et un article du Devoir de janvier 1999 indique que la pauvreté gagne du terrain à Montréal. Près de 40 % des familles montréalaises avec enfants vivent sous le seuil de la pauvreté, rappelle le Conseil scolaire de l'île de Montréal.

M. le Président, ce matin, un groupe qui s'appelle l'Association pour la défense des droits sociaux a témoigné devant la commission des finances publiques à l'occasion de la consultation générale sur la réduction de l'impôt des particuliers, et cette Association, qui est connue par son acronyme ADDS, a cité, entre autres, un rapport du Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies. C'est un comité indépendant de l'Organisation des Nations unies qui veille au respect des droits et libertés fondamentales à travers le monde. Je vous donne une simple citation: «Le Comité – c'est-à-dire le Comité des Nations unies – est préoccupé par le tour critique que prend le problème des sans-abri parmi les jeunes et les jeunes ménages. D'après les informations communiquées par le Conseil national du bien-être social, plus de 90 % des mères célibataires de moins de 25 ans vivent dans la pauvreté.» M. le Président, on ne parle pas d'un pays en voie de développement mais on parle du Canada. Alors, une critique assez sévère de la part d'un organisme communautaire de la région de l'Outaouais.

D'autres groupes au Québec ont signalé certaines difficultés avec notre régime d'aide aux familles québécoises. Le Mouvement des femmes du Québec, qui est un regroupement de plusieurs associations féminines comme l'AFEAS, la Fédération des associations des familles monoparentales et recomposées du Québec, la Fédération des femmes du Québec, et ainsi de suite, a fait également, lors de sa présentation devant la commission des finances publiques, un important exposé de la situation de l'aide du gouvernement du Québec aux familles québécoises et apporte un jugement mitigé: évidemment, certains succès, mais certains ratés aussi. Et il indique très clairement que les besoins essentiels couverts par les divers programmes d'aide gouvernementale sont insuffisants. On indique que les besoins essentiels que couvrent ces programmes n'ont pas été indexés depuis 1993 et qu'ils sont nettement insuffisants. Une des recommandations de ce rapport, c'est de ramener, pour les fins de la fiscalité et de la politique familiale, les montants pour les besoins essentiels... de les augmenter de façon substantielle, M. le Président.

Ce même groupe et beaucoup d'autres également dénoncent la récupération des augmentations de la prestation fiscale canadienne pour enfants, récupération qui est faite par le gouvernement du Québec. C'est un nivellement, dans ce cas-là, vers le bas: quand le gouvernement fédéral augmente ses prestations fiscales canadiennes pour enfants pour des familles à faibles revenus et des familles sur l'aide sociale, le Québec récupère ces augmentations à 100 % pour ces familles, et c'est un nivellement vers le bas. Il est dénoncé par de nombreux groupes au Québec. Il a été dénoncé plus tôt cette année quand le même mouvement féminin a fait paraître dans Le Devoir un article qui disait: Québec accaparera-t-il l'argent que Québec donne aux enfants? Il posait la question au mois de mai 1999. La réponse, malheureusement, est oui, le gouvernement du Québec récupère ces sommes-là.

C'est quelque chose qui est également dénoncé par le Conseil national du bien-être social, qui est un organisme fédéral qui dénonce cette pratique. «Le Conseil national dénonce la pratique de récupération et somme le gouvernement fédéral de conclure une nouvelle entente avec les gouvernements provinciaux et territoriaux afin de mettre un terme à toutes les récupérations reliées à la prestation fiscale canadienne pour enfants au plus tard le 1er juillet 2000. Toutes les familles à faibles revenus, tant celles qui dépendent de l'aide sociale que celles qui ont un faible salaire, doivent toucher et conserver l'intégralité des prestations fiscales canadiennes pour enfants.» C'était le rapport prébudgétaire du Conseil national du bien-être social.

On pourrait en discuter, des conditions sociales difficiles pour plusieurs jeunes au Québec, M. le Président. J'ai assisté mardi à un forum public qui était organisé par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Le thème de ce forum public était Que signifient les droits fondamentaux pour les jeunes de la rue? et le colloque, de la durée de toute une journée, portait sur qu'est-ce qu'on fait avec ce qui est estimé être entre 4 000 et 5 000 jeunes sans-abri à Montréal. Ça, c'est des statistiques qui étaient relevées par la Direction de la santé publique de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre. Ces 4 000 à 5 000 jeunes – je parle de jeunes, des gens qui sont en bas de 18 ans – sont des sans-abri qui luttent presque quotidiennement, selon ce colloque, pour leur survie. Et on peut penser également, en terminant, à certaines communautés autochtones au Québec, les Innu, les Cris, pour qui les questions de pauvreté, d'alcoolisme, de toxicomanie, de suicide sont tellement importantes que ça devient un fléau social pour ces groupes. Pour les Innu du Québec et du Labrador, c'est 13 fois le taux de suicide canadien, 13 fois le taux.

Oui, nous avons fait des progrès au Québec et au Canada, mais la vie n'est pas toujours rose, même ici, chez nous. Nous avons, il me semble, comme parlementaires, la responsabilité de travailler pour l'amélioration des conditions de vie de dizaines de milliers d'enfants au Québec. Oui, le Québec adhère aux grands principes de cette Convention importante qui est la Convention relative aux droits de l'enfant, mais il ne faut pas que cette adhésion prenne uniquement la forme de voeux pieux. Il faut qu'on travaille pour améliorer la condition des enfants au Québec et au Canada. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce et également critique officiel de l'opposition en matière de dossiers de la famille et de l'enfance.


Mise aux voix

Le débat étant terminé, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Québec la tenue d'une consultation publique élargie pour entendre les chômeurs, les personnes assistées sociales, les chercheurs d'emploi, les groupes communautaires et les entrepreneurs des différentes régions du Québec sur la gestion et l'administration d'Emploi-Québec.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il n'y a pas de consentement. Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Deux-Montagnes, mais également vice-présidente de la commission de l'aménagement du territoire. Mme la députée.


Souligner la contribution des Patriotes de 1837-1838 à la liberté et à la démocratie

Mme Robert: M. le Président, je voudrais déposer une motion sans préavis afin:

«Que l'Assemblée nationale souligne la contribution immense des Patriotes de 1837-1838 à la liberté et à la démocratie.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Consentement? Mme la députée.


Mme Hélène Robert

Mme Robert: M. le Président, conformément au décret 2300, en 1982, concernant la Journée des Patriotes et adoptée par le gouvernement du Québec, je voudrais, ici, à quelque trois jours de cette Journée, déposer une motion visant à souligner dans cette Chambre la contribution immense à la liberté et à la démocratie de nos Patriotes de 1837-1838, laquelle sera aussi réaffirmée publiquement ce dimanche 21 novembre.

(15 h 30)

De tout temps, les peuples ont honoré la mémoire des leurs qui ont lutté et donné leur vie parfois pour la défense et la promotion de leur identité nationale et de leurs institutions démocratiques. Nos Patriotes, M. le Président, ont livré une lutte inégale à l'occupant anglais, dur et méprisant, froid et menaçant. Les hommes, armes peu nombreuses à la main sur divers sites de bataille, les femmes, les enfants et les familles, farouches complices de l'action des premiers, tenant tête sur leur terre et dans leur maison à un occupant qui brûlait, saccageait, volait et pillait tout ce qu'il rencontrait sur son chemin. Députés, membres ou sympathisants du Parti patriote, ils furent des centaines impliqués dans ce combat contre l'injustice, l'oppression et le despotisme colonial et à y perdre famille, biens et même la vie. Ce ne furent point des illuminés, bien au contraire. Il faut savoir gré à ces résistants de la première heure, malgré qu'ils aient été mal organisés et mal armés, d'avoir riposté aux provocations gouvernementales d'alors en se portant généreusement à la défense des leurs, de la démocratie et de la liberté qu'ils voyaient attaqués de toutes parts. Cette vaste mobilisation, M. le Président, en fut une de grand courage, et il convient de le souligner avec fierté et conviction.

Pour peu qu'il se soit alors brutalement achevé dans un bain de sang et de pendaisons, l'affrontement avec l'occupant ne fut pas vain. En effet, si plusieurs Patriotes de Saint-Eustache tombèrent sous les balles anglaises, 60, si d'autres, toujours de Saint-Eustache, furent emprisonnés, 112, si, au niveau de tout le territoire du Bas et du Haut-Canada de l'époque, nous pouvons compter 325 morts sur le champ de bataille, 66 exilés en Australie ou aux Bermudes, 1 700 prisonniers, environ 3 000 réfugiés aux États-Unis, 99 condamnés à mort, 12 pendus Au-Pied-du-Courant, si, enfin, leurs enfants et leurs familles se retrouvèrent devant un lendemain brutal fait de vide et de mépris, voire d'oubli, le combat, lui, n'était pas terminé pour autant. Non, M. le Président, ces fiers Patriotes de bien des villages et bien des paroisses avaient semé une graine de fierté et de solidarité nationale qui allait germer malgré les embûches, le défaitisme, les humiliations et les attaques politiques sournoises.

Je voudrais, M. le Président, à l'occasion de la toute prochaine Journée des Patriotes, que cette Assemblée honore ici la mémoire de nos Patriotes qui ont défendu avec un indéniable courage la liberté et la démocratie en cette terre du Québec. Je suis intimement convaincue que le Québec d'aujourd'hui, épris de liberté et ouvert sur le monde, leur doit beaucoup. Je crois qu'ils auront été les nécessaires artisans de nos outils et de nos instances politiques foncièrement démocratiques qui font modèle à travers le monde. En eux, nous retrouvons cette fierté première, laquelle se poursuit encore aujourd'hui dans notre démarche collective visant à nous assumer comme peuple. Les efforts auront été nombreux et soutenus, depuis ces tragiques événements, à jeter le discrédit sur la lutte menée alors par ces hommes et ces femmes animés d'une passion entière pour la liberté politique face à une oppression brutale et obtuse. Je déplore que «les bureaucrates», comme on les appelait à l'époque, ces bien-pensants d'une société au service de l'argent et du pouvoir, ils sont encore nombreux aujourd'hui. Je déplore qu'ils partagent avec une facilité désarmante les conclusions mesquines et partisanes du curé Paquin, en 1839, sur, et je cite, «la rébellion insensée et criminelle de ces ennemis dangereux des justes droits de l'homme du comté du Lac des Deux-montagnes». Fin de la citation.

Loin de taire et d'occulter ce passé, comme on aura tant cherché à le faire depuis ces événements, il faut plutôt, M. le Président, dire haut et fort notre admiration pour ces femmes et ces hommes qui ont mis rien de moins que leur vie au service de la liberté, de la démocratie et des générations qui allaient les suivre. La vie ne vaut vraiment la peine d'être vécue que pleinement libre. Leur sacrifice aura été un grand geste d'amour et de confiance pour notre pays encore à bâtir, faut-il le rappeler. À ce titre, je demande que cette Chambre rende un vibrant hommage en mémoire de leur essentielle contribution à la liberté et à la démocratie québécoise, précieuse matière première de notre action dans ces lieux et auprès des gens que nous représentons. Hommage, donc, à nos Patriotes.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Deux-Montagnes. Nous allons maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup d'humilité que l'on doit intervenir sur une telle motion. Humilité parce qu'elle rappelle des gestes – notre collègue de Deux-Montagnes l'a signalé – tragiques dans notre société et des jours sombres où notre Assemblée a été directement interpellée.

Brièvement, sans vouloir ici faire un cours d'histoire que je ne saurais faire proprement, il n'est pas inutile de rappeler ce qui s'était passé en 1834. M. le Président, en 1834, suite à de nombreuses assemblées et à un mouvement populaire réel, l'Assemblée nationale avait été amenée... l'Assemblée, qui s'appelait l'Assemblée législative à l'époque, avait été amenée à adopter un document qui s'appelait Les 92 résolutions . Les 92 résolutions, M. le Président – et vous comprendrez bien que je n'en ferai pas ici la lecture ni la présentation, des 92 résolutions – essentiellement demandaient des choses qui aujourd'hui semblent absolument banales, à savoir que le gouvernement, celui qui allait dépenser les impôts qui étaient perçus, corresponde à la volonté populaire, en Chambre. Et on appelait ça, dans un langage un peu juridique, le «gouvernement responsable».

Les 92 résolutions, M. le Président, ont été beaucoup plus larges que ça – je le sais comme vous, j'ai eu la chance de les relire pour préparer cette intervention – mais, essentiellement, ce qu'elles demandaient, c'était un droit banal et purement démocratique de pouvoir réellement, dans la province du Bas-Canada à l'époque, exercer pleinement un gouvernement. Et ça répondait à toute une philosophie qui avait donné naissance à la révolution américaine, en 1776, à la Révolution française, en 1789, où réellement la source réelle de la légitimité du pouvoir se trouvait d'abord et avant tout dans le peuple, M. le Président.

Pour faire une courte histoire, les 92 résolutions ont été adoptées, ont été présentées au Parlement britannique parce que nous étions une colonie. Et tout ce mouvement des Patriotes était d'abord et avant tout une lutte contre le colonialisme, M. le Président, et ces 92 résolutions sont présentées au Parlement de Londres. Vous savez ce qui en est arrivé. Je ne vous parlerai pas actuellement des 10 points de Lord Russell, qui ont été retransmis ici, à l'Assemblée nationale, enfin, à l'Assemblée législative du Bas-Canada, qui ne répondaient en aucune manière et qui maintenaient encore le principe que l'Exécutif était choisi par le gouverneur et n'était pas responsable devant les Chambres, c'est-à-dire devant l'Assemblée législative. Autrement dit, la réponse, qui est arrivée tardivement, qui est arrivée en 1837, du Parlement londonien, ne répondait en aucune manière aux aspirations qui étaient incluses à l'intérieur des 92 résolutions, qui avaient été débattues principalement, je le sais, M. le Président, dans le grand district de Montréal, mais qui avaient donné lieu à des assemblées qui pouvaient rassembler jusqu'à 6 000 ou 8 000 personnes, à Berthier, à Saint-Benoît, pour tenir compte...

(15 h 40)

Une voix: ...

M. Gautrin: ... – et à Sainte-Scholastique, je vous remercie – mais, M. le Président, ne répondaient en aucune manière.

Jour triste de cette Assemblée, je vous rappellerai pourquoi. Parce que c'est notre Assemblée, M. le Président. C'est bien important de comprendre ça. Il y a une filiation directe avec notre Assemblée, quelque chose qui ne pourrait même plus se concevoir aujourd'hui. Lorsque l'Assemblée législative du Bas-Canada a refusé d'endosser les 10 résolutions de Lord Russell, le gouverneur, qui s'appelait Gosford, à l'époque, a trouvé ni plus ni moins facile de dissoudre l'Assemblée. Autrement dit, il n'y avait plus de Parlement; on a dissous l'Assemblée. Et c'est parce qu'on dissolvait – c'était la dissolution de l'Assemblée – que la population, le peuple, qui s'était exprimé, qui voulait réellement s'exprimer à travers ces 92 résolutions, a commencé à avoir des réunions, bon, soit à Napierville ou dans la région du Richelieu, soit, je suis d'accord, dans la région du comté de Deux-Montagnes, pour commencer à avoir une réaction plus musclée, si je puis dire.

Il n'y avait pas unanimité. Vous vous rappellerez, par exemple, que Papineau n'était pas en faveur, s'est même fait huer à l'époque, quand Robert Nelson avait proposé le passage au mouvement armé. Point important, parce que c'est important de bien le comprendre, M. le Président, ce n'était pas réellement une opposition entre francophones et anglophones. Ce n'était pas ça. C'était un pouvoir colonial britannique, avec l'appui de l'Église catholique. Faites bien attention! Avec l'appui de l'Église catholique, n'oubliez pas. Je me permettrai de vous dire que Mgr Lartigue a menacé d'excommunication et de refuser l'absolution à toute personne qui participait au mouvement des Patriotes. Mgr Lartigue, évêque de Montréal à l'époque.

Alors, M. le Président, simplement pour l'histoire – parce que c'est important de bien comprendre ça, et la députée de Deux-Montagnes le sait certainement – j'ai relevé les noms du comité de Deux-Montagnes, qui, à côté d'une majorité de francophones, comportait quand même six noms anglophones: Phelan, Purcell, Ryan, Hawley, Hills, Watts, dans le comité des Deux-Montagnes, pour bien montrer que ce mouvement des Patriotes n'était pas un mouvement ethnocentrique mais bien une volonté de libération d'une poussée coloniale. Parallèlement, M. le Président, ce n'est pas inutile de le rappeler, au Haut-Canada, la même volonté de se libérer du mouvement colonial se faisait. Je ne vous rappellerai pas, et je n'aurais pas lieu de m'étendre longtemps là-dessus... mais sur M. Mackenzie. Mackenzie, comme vous le savez, qui était un Écossais qui avait travaillé longtemps sur la construction du canal Lachine, qui est devenu maire de Toronto en 1834 et qui, lui aussi, avait commencé à vouloir incarner le principe que, pour le Parlement du Haut-Canada... le principe de la responsabilité du gouvernement devant le Parlement.

Je voudrais, pour mémoire... J'ai sorti ça parce que je trouve que c'est important: La motion du Parlement du Haut-Canada envers le Parlement du Bas-Canada, à l'époque. C'est intéressant de le signaler. À l'époque, si on parlait du Parti patriote, parce qu'on parlait ici, dans le Bas-Canada... c'étaient les réformistes au niveau du Haut-Canada. Et je me permets de signaler la motion qui a été adoptée en juillet 1837 par le Parlement du Haut-Canada.

«Les réformistes du Haut-Canada expriment leur sentiment de chaleureuse gratitude et d'admiration envers l'honorable Louis Papineau, président de l'Assemblée du Bas-Canada, et ses compatriotes tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la Législature pour leur attitude d'indépendance constante, noble et virile dans leur lutte pour les libertés civiques et religieuses ainsi que pour leur opposition honorable et patriotique aux tentatives du gouvernement britannique visant à violer leur Constitution sans leur consentement, à détruire des pouvoirs et des privilèges de leur Parlement local, à les réduire par des mesures coercitives – honte, abandon – de leurs aspirations justes et raisonnables. Les réformistes du Haut-Canada sont appelés par leurs sentiments, leur intérêt et leur devoir à faire cause commune avec leurs concitoyens du Bas-Canada. Leur écrasement présagerait le nôtre – alors, c'est ceux du Haut-Canada qui parlent – tandis que la négation des injustices qu'ils subissent serait la meilleure garantie de redressement de celles que nous connaissons.»

C'est important, M. le Président, de bien comprendre que ce mouvement était réellement une lutte contre cette oppression coloniale, contre une oligarchie ecclésiastique – je vais être gentil – dont on pourrait sérieusement questionner ce qu'ils ont fait. Mme la députée de Deux-Montagnes a rappelé tout à l'heure le curé Paquin, je pourrais, après, parler maintenant des déclarations de Mgr Laflèche, des ultramontains qui viendront après avec Mgr Bourget; ce n'est pas nécessairement une période heureuse. Il est important que nous nous joignions aujourd'hui, des deux côtés de la Chambre, pour se souvenir et porter un souvenir à ceux qui, en 1837-1838, ont porté haut le flambeau de la liberté et de la démocratie.

Bien sûr, on pourrait dire qu'ils se sont fait écraser. C'est vrai militairement, mais leurs idées ne sont pas mortes, M. le Président. Et j'avoue aussi... Il me reste un peu de temps, j'aurais voulu quand même signaler... Il est important de bien comprendre aussi la noblesse qui portait ce... Je me suis amusé à rechercher, par exemple, la Déclaration d'indépendance du Bas-Canada, de Robert Nelson, qui à quel point... Et je me demande si je ne vais pas vous la lire pour vous donner à quel point il s'agit d'idées nobles, si je peux vous la retrouver ici sans perdre trop de temps, la Déclaration de... Alors, je ne la retrouve pas, M. le Président, c'est bien malheureux. Mais, bon, ce n'est pas plus grave que ça.

Mais, je voudrais vous signaler, cette Déclaration d'indépendance faisait appel à l'égalité des deux langues, l'anglais et le français, dans le Parlement du Bas-Canada, pour la première fois disait que les peuples autochtones doivent avoir les mêmes droits, disait qu'il est important d'avoir la séparation de l'Église et de l'État – pensez, en 1837, à quel point c'était novateur de demander la séparation de l'Église et de l'État – disait que «nous devons être contre la peine de mort» – 1837 – et je pourrais continuer comme ça, M. le Président. J'aurais voulu la lire, si j'avais pu retrouver le signet que j'avais mis dans un des volumes. Il est bien important de comprendre que c'était un mouvement éminemment progressiste.

Je terminerai, sans vouloir faire bêtement de partisanerie, puisque ce n'est pas la place, en disant qu'on doit être solidaires les uns des autres et que nos deux partis politiques sont issus du même filum. Mais rappelons-nous quand même que les Patriotes ont donné naissance après aux Fils de la liberté, qui ont donné mouvement, naissance au Parti rouge, qui a été longtemps un parti tout à fait minoritaire, pourchassé par les ultramontains, qui étaient majoritaires, qui étaient essentiellement le parti de l'Église, les ecclésiastiques un peu partout, mais néanmoins que le Parti rouge, après, a fini par redonner naissance à ce qui a été, disons, à la fin du XIXe siècle, le Parti libéral. Et, M. le Président, c'est avec plaisir que je m'associe avec les ministériels, et particulièrement la députée de Deux-Montagnes, ici, pour voter en faveur de cette résolution.

(15 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun et également vice-président de la commission des institutions.


Mise aux voix

Le débat étant terminé sur cette motion sans préavis, est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.


Avis touchant les travaux des commissions

Nous poursuivons les affaires courantes. Alors, au chapitre des avis touchant les travaux des commissions... M. le leader adjoint du gouvernement, concernant les avis touchant les travaux des commissions, je vous cède la parole.

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. Vous m'excuserez, j'étais un peu perturbé par une agitation derrière votre fauteuil.

Alors, M. le Président, j'aimerais aviser cette Assemblée que la commission des finances publiques procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 22, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite dans les secteurs public et parapublic, aujourd'hui, après les affaires courantes, c'est-à-dire maintenant, jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38b de l'édifice Pamphile-Le May;

Que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 210, Loi modifiant la Charte de la Ville de Québec, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de l'éducation poursuivra la consultation générale sur la place de la religion à l'école aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures – je vous l'avais annoncé – ainsi que le mardi 23 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des finances publiques, quant à elle, entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre: projet de loi n° 222, Loi concernant L'Industrielle-Alliance Compagnie d'Assurance sur la Vie, projet de loi n° 206, Loi modifiant de nouveau la charte de Les Filles de Jésus, le mardi 23 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Nous sommes maintenant aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Je vous rappelle que nous avons reçu jusqu'à maintenant deux avis concernant les débats de fin de séance à être tenus aujourd'hui: le premier sur une question adressée hier par M. le député de Hull à Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole concernant le dossier de la fusion forcée de Mont-Tremblant; le second sur une question adressée hier par M. le député de Kamouraska-Témiscouata à M. le ministre de l'Éducation concernant le dossier de la tutelle à la commission scolaire de Montréal.

Je vous rappelle également que l'interpellation prévue pour vendredi le 19 novembre portera sur le sujet suivant: Le plan de réinvestissement du ministre de l'Éducation et vice-président du Conseil du trésor. M. le député de Kamouraska-Témiscouata s'adressera alors à M. le ministre de l'Éducation.

J'ai également reçu un avis de débat de fin de séance de la part de Mme la députée de Sauvé, qui désire un débat de fin de séance avec Mme la ministre de la Culture concernant la publication, à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires, du rapport annuel 1998-1999 du Musée du Québec, et ce, contrairement aux directives du Conseil du trésor. Alors, ce sera le troisième débat de fin de séance de ce soir.


Affaires du jour

Alors, ceci met fin aux affaires courantes. Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Je vous réfère à l'article 34 du feuilleton de ce jour, le projet de loi n° 64.


Projet de loi n° 64


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 34 de votre feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et la Loi sur les cours municipales. Alors, Mme la ministre, comme la loi, également, vous le permet, si vous avez des amendements, il serait opportun de les déposer immédiatement. Alors, Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Effectivement, nous avons un amendement à proposer, alors je déposerais l'amendement immédiatement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre, est-ce que vous désirez qu'on se constitue en commission plénière pour l'étude de l'amendement ou si, effectivement, il y a consentement de part et d'autre pour qu'on procède aux écritures? Commission plénière.

Alors, nous allons suspendre immédiatement nos travaux pour se constituer en commission plénière.

(Suspension de la séance à 15 h 56)

(Reprise à 16 h 1)


Commission plénière


Étude de l'amendement de la ministre

M. Pinard (président de la commission plénière): Nous reprenons nos travaux. Nous sommes maintenant en commission plénière. Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, comme je le mentionnais, nous sommes maintenant réunis en commission plénière pour étudier l'amendement proposé par Mme la ministre de la Justice au projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et la Loi sur les cours municipales. Alors, l'amendement déposé se lit comme suit: Article 7.1: Insérer, après l'article 7 du projet de loi, l'article suivant:

«7.1. Un juge de la Cour du Québec dont le mandat de juge en chef adjoint a pris fin par l'effet de l'article 63 du chapitre 42 des lois de 1995 est réputé avoir accompli sa fonction de juge en chef adjoint pendant au moins sept ans, aux fins de l'application des articles 122 et 231 de la Loi sur les tribunaux judiciaires, tels que modifiés par les articles 3 et 5 de la présente loi.» Mme la ministre de la Justice.

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, effectivement, cet amendement-là édicte une disposition transitoire qui est liée aux articles 3 et 5 du projet de loi. Ces deux articles prévoient que la rémunération additionnelle versée aux juges en chef de la Cour du Québec est, au moment de leur retraite, ajoutée à leur traitement de juge pour les fins de calcul de leur rente de retraite s'ils ont complété leur mandat de sept ans à titre de juges en chef, ou de juges en chef associés, ou de juges en chef adjoints.

En 1995, à la Loi modifiant la Loi sur les cours municipales, la Loi sur les tribunaux judiciaires et diverses autres dispositions législatives, on a modifié la structure de la Cour du Québec notamment pour réduire le nombre de juges en chef associés et adjoints. Cette loi a donc mis fin au mandat administratif des juges en chef le 31 août 1995, qui correspondait, dans les faits, à la date d'échéance normale des mandats de la plupart des juges en chef, sauf pour un juge en chef adjoint qui avait été nommé le 9 décembre 1992. Alors, c'est pourquoi a été conservé à ce juge le droit de recevoir sa rémunération additionnelle jusqu'à la fin prévue de son mandat, soit le 9 décembre 1999. Toutefois, ce juge ne peut bénéficier des dispositions du projet de loi qui permettent d'intégrer la rémunération additionnelle des juges en chef à leur traitement pour les fins du calcul de leur rente de retraite, puisqu'il n'a pas complété son mandat de sept ans. Alors, c'est pourquoi l'amendement qui est proposé vise à ce que le juge soit considéré avoir complété son mandat afin qu'il puisse bénéficier, lui aussi, des modifications du projet de loi relatives à l'intégration de la rémunération additionnelle aux fins du régime de retraite.

Le Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. M. le critique officiel de l'opposition et député de Marquette.

M. Ouimet: Alors, j'essaie juste de bien comprendre, en français, ce que la ministre nous dit dans ces mots. Qu'est-ce qui est en train de se passer? Pourquoi avons-nous besoin d'une modification législative?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je vais répéter ce que je viens de dire. Considérant le fait que nous avons modifié la loi en 1995 et qu'il y a eu pour une certaine personne qui, elle, venait d'être nommée et qui n'a pas eu les sept ans continus... nous avons voulu nous assurer qu'il n'y ait pas d'injustice à l'égard de cette personne suite à la modification de la loi en 1995, et cet amendement-là permettra à cette personne de pouvoir avoir, elle aussi, son indemnité additionnelle, comme elle y a droit en vertu de ce projet de loi.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Ouimet: Est-ce que la personne se dirige vers sa retraite ou quoi?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Goupil: Je vous dirais que chaque individu a la liberté de choisir le temps où il veut prendre sa retraite. Il sera possible pour ce juge de la prendre ultérieurement, s'il désire le faire, très bientôt.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui, mais c'est ça, j'essaie de comprendre ce qu'il y a derrière la modification. Est-ce que, dans le fond, ça vise à faire en sorte que, si l'amendement est adopté, vos informations sont à l'effet que le juge en question va se diriger vers sa retraite parce que, là, on a corrigé une situation?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. le Président...

M. Ouimet: C'est juste pour ma compréhension, là, je veux juste...

Mme Goupil: ...nous n'avons pas d'information à cet égard. Ce que j'ai mentionné, c'est qu'il était possible pour ce juge de prendre sa retraite s'il le souhaitait, mais nous n'avons pas d'information, à ce stade-ci, s'il désire la prendre maintenant. Il a la liberté de la prendre au moment où, lui, il jugera opportun de la prendre.

M. Ouimet: Et ça s'applique uniquement à un individu, la modification?

Mme Goupil: Tout à fait, tout à fait. Cherchez, il n'y a rien d'autre.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Marquette, est-ce que vous avez autres questions sur l'amendement déposé par Mme la ministre?

M. Ouimet: Bien, j'essaie de comprendre. Parce que le projet de loi a été déposé le 28 mai 1999, n'est-ce pas? C'était dans l'autre session. Là, on arrive aujourd'hui, au mois de novembre, avec un amendement qui touche une personne. J'essaie juste de comprendre qu'est-ce qui s'est passé entre le 28 mai 1999, au moment du dépôt du projet de loi, et aujourd'hui, la modification qui vient toucher une personne.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. le Président, au moment où le projet de loi a été déposé, c'était pour faire suite au rapport Bisson I. Évidemment, au moment où nous sommes allés en commission parlementaire, il y a quelqu'un qui nous a appelés pour justement nous informer de ce cas particulier qui ne nous avait pas été soumis et qui n'avait pas été soulevé dans le cadre du rapport Bisson I. Alors, considérant que nous avons eu les informations ultérieurement, c'est la raison pour laquelle nous proposons cet amendement avant que le projet de loi ne soit adopté.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Ah! dans le fond, c'est parce que le rapport Bisson n'y faisait aucunement référence. Là, on s'est aperçu de ce que vous appelez une injustice à l'endroit d'une personne. C'est-u ça?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Goupil: M. le Président, c'est exactement cela.

M. Ouimet: Puis c'est la seule personne? Vous avez vérifié l'ensemble des juges de la Cour du Québec?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. le Président, selon toutes les informations que nous avions reçues, ce serait la seule personne qui serait visée par cet amendement-là.

M. Ouimet: O.K. Ça répond à toutes mes questions.

Le Président (M. Pinard): Merci. Alors, cet amendement est-il adopté?

M. Ouimet: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté.

Mme Goupil: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Alors, la commission plénière ayant maintenant...

Mme Goupil: M. le Président, si vous permettez, juste...

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi. Oui, effectivement, vous avez droit à des remarques finales.

Mme Goupil: En fait, non pas des remarques mais, suite à ce que vous venez de mentionner, je demande à ce que les dispositions du projet de loi n° 64 soient renumérotées en fonction de l'amendement que nous venons d'adopter.

Le Président (M. Pinard): Merci. Consentement?

M. Ouimet: Consentement.

Le Président (M. Pinard): Alors, la commission plénière ayant accompli son mandat, je mets fin à ses travaux. Je remercie tous ceux qui y ont participé et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire le plus rapidement possible. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 9)

(Reprise à 16 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le président.

M. Paquin (président de la commission plénière): Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié l'amendement proposé au projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et la Loi sur les cours municipales, et qu'elle l'a adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, ce rapport est maintenant adopté? Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

Nous allons donc poursuivre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et la Loi sur les cours municipales. Alors, Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil (suite)

Mme Goupil: Alors, merci, M. le Président. Nous sommes actuellement saisis du projet de loi n° 64 qui est à son étape d'adoption. Par ce projet de loi qui modifie la Loi sur les tribunaux judiciaires et la Loi sur les cours municipales, l'Assemblée nationale assure la mise en oeuvre législative de certaines mesures contenues dans la résolution de l'Assemblée nationale du 11 mai dernier. Cette résolution faisait elle-même suite aux recommandations du Comité de la rémunération des juges de la Cour du Québec et des cours municipales, qui a été présidé par l'ancien juge en chef de la Cour d'appel, M. Claude Bisson.

Ce projet de loi s'inscrit dans le nouveau processus de détermination de la rémunération des juges, que cette Assemblée a établi par la Loi concernant la rémunération des juges adoptée en décembre 1997 dans la foulée de l'arrêt de la Cour suprême du Canada du 18 septembre 1997. Dans cet arrêt, la Cour a décidé qu'à l'avenir toute modification au traitement des juges, à leur régime de retraite et à leurs autres avantages sociaux est soumise à un processus préalable obligatoire impliquant l'intervention d'un organisme indépendant efficace et objectif. Cet organisme est le Comité de la rémunération des juges que tant le gouvernement fédéral que les provinces ont l'obligation constitutionnelle d'établir pour leurs juges respectifs.

Alors, le Québec s'est rapidement conformé à cette obligation, puisque la loi créant le Comité de rémunération a été adoptée deux mois après le jugement de la Cour suprême. La loi prévoit que le Comité est formé de représentants de la magistrature et du gouvernement. Son mandat est d'évaluer à tous les trois ans si le traitement des juges, leur régime de retraite et leurs autres avantages sociaux sont adéquats et de transmettre ses recommandations au gouvernement. Le Comité peut également se voir confier entre les révisions triennales le mandat ponctuel d'examiner toute modification qu'on propose d'apporter au régime de retraite des juges de la Cour du Québec et des cours municipales de Laval, de Montréal et de Québec.

Pour assurer son objectivité, le Comité reçoit les observations de la magistrature, du gouvernement ainsi que, dans le cas des cours municipales, celles des municipalités et de leurs organismes représentatifs. Par ailleurs, le Comité doit prendre en considération certains facteurs qui tiennent compte tant des préoccupations de la magistrature que de celles des autorités gouvernementales et municipales, par exemple les particularités de la fonction de juge, la nécessité de leur offrir une rémunération adéquate et d'attirer d'excellents candidats, la conjoncture économique et l'état des finances publiques.

À la fin des ses travaux, le Comité fait rapport au gouvernement de ses constatations et lui soumet ses recommandations. Par la suite, le rapport est déposé devant l'Assemblée nationale, à qui il revient, par résolution motivée, d'approuver, de modifier ou de rejeter, en tout ou en partie, les recommandations du Comité. Il incombe ensuite au gouvernement de mettre en oeuvre la résolution de l'Assemblée. Toutefois, pour assurer l'efficacité du processus, la loi prévoit que l'Assemblée doit adopter sa résolution dans les 30 jours de séance suivant le dépôt du rapport de l'Assemblée, à défaut de quoi le gouvernement doit mettre en oeuvre les recommandations du Comité.

Les travaux du premier Comité de la rémunération des juges se sont inscrits dans le processus, qui n'est d'ailleurs pas particulier au Québec, puisque tant le gouvernement fédéral que ceux des autres provinces se sont maintenant conformés à cette obligation constitutionnelle. Le premier rapport du Comité de la rémunération a été remis le 4 août 1998 au ministre de la Justice de l'époque, qui l'a déposé à l'Assemblée nationale le 21 octobre 1998. Par la suite, l'Assemblée nationale s'est prononcée sur les recommandations du Comité dans sa résolution du 11 mai 1999. Il incombait ensuite au gouvernement de mettre en oeuvre la résolution de l'Assemblée.

Celle-ci peut se faire de deux manières. En effet, certaines mesures peuvent être mises en oeuvre par un décret du gouvernement. Dans le cas du traitement et des frais de fonction des juges de la Cour du Québec et des cours municipales de Laval, de Montréal et de Québec ainsi que de la rémunération additionnelle versée aux juges des cours qui exercent des fonctions de direction, le gouvernement a fait diligence en adoptant les décrets relatifs à ces questions le 2 juin 1999. Dans la foulée de la résolution de l'Assemblée nationale, le décret a fixé ainsi le traitement de ces juges: quant à la rémunération additionnelle versée aux juges qui exercent des fonctions de direction et de gestion à la Cour du Québec et aux cours municipales de Laval, de Montréal et de Québec, le même décret en a fixé également le traitement. Les dépenses annuelles de fonction auxquelles ces juges ont droit ont également été fixées par décret le 2 juin dernier. Par ailleurs, d'autres mesures prévues dans la résolution de l'Assemblée nationale ne peuvent être mises en oeuvre par décret et nécessitent donc que des modifications législatives soient apportées. Tel est précisément l'objet du projet de loi n° 64. Toutes les mesures législatives contenues dans ce projet de loi sont conformes aux recommandations du Comité de la rémunération et ont toutes été approuvées par l'Assemblée nationale dans sa résolution.

Je voudrais maintenant vous rappeler brièvement en quoi consistent ces mesures. La première modification vise à accorder aux juges en chef adjoints de la Cour du Québec un congé rémunéré consacré aux études juridiques lorsqu'ils ont complété leur mandat de juge en chef adjoint. Les juges en chef sont tous nommés pour un mandat de sept ans, et ce mandat ne peut être renouvelé. Le juge en chef et le juge en chef associé ont déjà droit à un tel congé après leur mandat administratif. Il leur permet de se ressourcer et d'actualiser leurs connaissances juridiques avant de reprendre leurs fonctions judiciaires. Il ne faut pas oublier que, pendant leur mandat, l'importance de leurs fonctions administratives les a empêchés de siéger régulièrement. De plus, il est important que ces juges en chef, après avoir exercé ces responsabilités de direction, puissent prendre du recul avant de reprendre leurs fonctions de juge.

Le Comité de la rémunération a recommandé d'accorder également aux juges en chef adjoints le droit à un tel congé à la fin de leur mandat de sept ans. En effet, eux aussi ont de nombreuses activités qui les empêchent de siéger régulièrement. Le congé consacré aux études et à la recherche juridiques leur permettra donc de se recycler et d'actualiser leurs connaissances juridiques, compte tenu de la rapide évolution du droit, avant de reprendre l'exercice de leurs fonctions judiciaires au sein de la Cour.

Une autre modification qui a été proposée par le projet de loi prévoit le versement d'une allocation de résidence de fonction au juge en chef de la Cour du Québec. C'est justement la situation de la juge en chef actuelle qui, lors de sa nomination en titre en 1996, résidait à Montréal. Or, on sait que la juge en chef doit, malgré sa résidence de fonction à Québec, séjourner régulièrement à Montréal dans l'exercice de ses fonctions, ce qui l'oblige à maintenir deux résidences pendant une période de sept ans. Le Comité de rémunération a donc recommandé de consacrer dans la loi le droit du juge en chef à une allocation de résidence de fonction à Québec dont le montant serait fixé par décret du gouvernement. Le Comité a recommandé que l'allocation soit fixée à 800 $; l'Assemblée a approuvé le principe de cette recommandation et a fixé à 1 000 $ par mois le montant de l'allocation. Ce montant serait plus conforme aux coûts réels qui sont vraiment supportés par le juge en chef.

Une autre modification vise à ajouter la rémunération additionnelle des juges en chef à leur traitement de juge pour les fins de calcul de leur rente de retraite et de leur prestation supplémentaire. À cet effet, deux amendements ont été apportés afin que ces nouvelles dispositions s'appliquent aux juges en chef qui auront exercé leurs responsabilités de direction pendant au moins sept ans. Les deux amendements introduits visent à mieux traduire les recommandations du Comité de la rémunération qui faisait de l'accomplissement de sept ans une condition à l'octroi de ce bénéfice. Je vous souligne que les juges de nomination fédérale et les juges des cours provinciales de plusieurs provinces canadiennes bénéficient déjà d'une mesure semblable.

Je compte présenter dans quelques instants un autre amendement que celui que nous venons de déposer en plénière. Comme je le mentionnais, il s'agit d'une disposition transitoire qui permettra justement au juge en chef de la Cour du Québec, par l'effet de cette loi, qui n'a pu compléter le terme de sept ans, considérant la modification à la loi en 1995...

Alors, il y a également une autre modification concernant l'octroi de congés sans traitement ou à traitement différé aux juges de la Cour du Québec. Jusqu'à présent, le juge en chef ne disposait pas du pouvoir d'accorder de tels congés aux juges de la Cour, malgré que ces mesures soient maintenant largement répandues dans notre société. Le Comité de la rémunération a donc recommandé de confier aux juges en chef de la Cour qui en font la demande... Toutefois, il est important de s'assurer qu'il y ait en tout temps un nombre suffisant de juges pour rendre la justice aux citoyens. C'est pourquoi le projet de loi prévoit que le juge en chef devra tenir compte des impératifs d'une bonne administration de la justice lorsqu'il accordera ces congés.

(16 h 20)

Les juges pourront bénéficier de deux types de congés: un congé sans traitement et un congé à traitement différé. Ce dernier type de congé est un congé autofinancé par le juge qui en bénéficie.

Finalement, le projet de loi contient une disposition qui concerne particulièrement les juges des cours municipales autres que celles des villes de Laval, de Montréal et de Québec. Comme vous le savez, la rémunération de ces juges municipaux est fixée par décret du gouvernement aux termes de la Loi sur les cours municipales. Le Comité de la rémunération a recommandé que la nouvelle rémunération des juges municipaux ait effet à compter du 1er janvier 1999. Or, la loi actuelle ne permet pas que le décret puisse entrer en vigueur à une date antérieure à celle de sa publication à la Gazette officielle . C'est pourquoi le projet de loi propose une modification à la Loi sur les cours municipales pour prévoir que le décret relatif à la rémunération puisse entrer en vigueur à toute date antérieure fixée dans le décret. Je puis vous assurer que le décret gouvernemental sera par la suite pris avec diligence.

En terminant, je voudrais souligner l'esprit de collaboration dans lequel ce projet a été adopté par cette Assemblée, à qui la loi accorde maintenant d'importantes responsabilités dans le processus de détermination de la rémunération des juges. À cet égard, la sérénité de nos débats a été d'autant plus appropriée qu'elle concerne la magistrature. Je propose que le projet de loi n° 64 soit adopté par cette Assemblée. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière de justice, M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. La ministre de la Justice a tout à fait raison, les débats entourant le projet de loi n° 64 ont été très sereins, effectivement. Je signale à la ministre de la Justice que les débats auraient été tout aussi sereins si le gouvernement avait décidé de suivre l'engagement pris par la ministre de la Justice d'appuyer la totalité du rapport Bisson. Malheureusement, ce n'est pas le cas. On connaît le résultat: on a forcé, on a obligé les juges de la Cour du Québec à aller devant les tribunaux pour contester la légalité du geste posé par la ministre de la Justice et son gouvernement. C'est malheureux, mais je pense que tous les chroniqueurs, les éditorialistes l'ont bien vu, c'était une manoeuvre politique pour faire en sorte que le gouvernement n'ait pas de problème dans ses négociations avec la fonction publique. Malheureusement, on a pris un volet important dans le fonctionnement de notre société. Le volet s'appelle la «magistrature», dont les juges sont nommés par la province de Québec. On a pris la magistrature québécoise et on s'en est servi pour faire de la politique.

Je suis heureux de voir que les juges ont décidé de ne pas se laisser prendre à ce jeu-là et ont décidé d'aller devant les tribunaux. Dans d'autres circonstances à travers le pays – parce que la ministre y a fait référence – ailleurs dans d'autres provinces, dans la seule province qui s'est amusée à jouer ce jeu-là, eh bien, les tribunaux supérieurs ont donné tort à l'exécutif du gouvernement, ont donné tort à l'exécutif, et ça a fait en sorte que le dossier est revenu devant son Assemblée législative pour faire en sorte de prendre la décision qui s'imposait dans le cadre du rapport.

Il faut bien comprendre, là, la ministre n'a jamais donné de nouveaux motifs pour expliquer pourquoi le gouvernement refusait les recommandations du rapport Bisson. Pourtant, ses procureurs la représentaient lorsque le comité Bisson tenait ses audiences. Lorsqu'on compare ce qui a été plaidé par les procureurs de la ministre par rapport aux raisons qui ont été invoquées après le dépôt du rapport du comité Bisson, on constate qu'il n'y a eu aucun changement dans l'argumentation. Dans le fond, M. le Président, le plan de match de l'exécutif du gouvernement était établi bien à l'avance; il suffisait de gagner du temps, de faire en sorte de régler les négociations dans la fonction publique – je vous le signale, vous le savez comme moi, ce n'est pas encore réglé – mais de gagner du temps, d'obliger la magistrature à aller devant les tribunaux pour faire respecter le devoir constitutionnel qu'a l'Assemblée nationale de respecter la magistrature et sa sécurité financière pour faire en sorte qu'elle puisse prendre des décisions de la façon la plus indépendante possible. Donc, on se retrouve aujourd'hui et c'est sûr que nous allons adopter le projet de loi n° 64, mais il est malheureux que l'autre moitié du rapport Bisson n'ait pas connu la même fin, la même destinée que le projet de loi n° 64.

Quant au fait que la ministre prend l'engagement de faire diligence pour que le gouvernement adopte le décret, j'espère que ça sera un peu plus rapide que le temps qu'elle a pris pour nommer son représentant pour remplacer quatre juges de la Cour du Québec qui se dirigent vers la retraite. On se rappelle qu'un juge a dû alerter l'opinion publique – bien malgré lui, j'en suis convaincu. Il a été questionné par un journaliste, il a répondu aux questions. Sa frustration était palpable, puisque la ministre dormait sur la switch. C'est lorsque l'article a paru dans Le Nouvelliste , M. le Président, que, là, j'ai su qu'il y avait eu un branle-bas de combat au niveau du ministère de la Justice pour nommer la personne. C'est malheureux, mais, des fois, c'est comme ça. Alors, sur le projet de loi n° 64, nous serons favorables à son adoption.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette. Mme la ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique? Non?


Mise aux voix

Alors, à ce stade-ci, le projet de loi n° 64 dûment amendé, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et la Loi sur les cours municipales, est-il adopté? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président de l'Assemblée nationale. Alors, je vous réfère à l'article 7 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 80


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 7 de votre feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 80, Loi modifiant la Loi sur le recours collectif. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 80? Mme la ministre de la Justice...

M. Ouimet: ...juste avec votre permission.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi. Question de règlement, M. le député de Marquette?

M. Ouimet: Pas vraiment une question de règlement, mais j'ai compris qu'il y avait eu entente entre les deux côtés pour qu'il y ait un seul intervenant de chaque côté. Je sais que le député de Saint-Jean a joué un rôle important dans tout le processus menant à l'adoption du projet de loi n° 80. Moi, de mon côté, je consentirais à ce qu'il puisse prendre la parole sur le projet de loi. Je signale, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Marquette, je vais vous signaler que les ententes qui peuvent avoir lieu de part et d'autre peuvent être modifiées, comme on a assisté tout à l'heure à une modification importante de cette entente, et que les devoirs du président sont à l'effet de donner le droit de parole à tous les parlementaires qui veulent bien le prendre. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, je veux juste signaler, en terminant, que, lorsque j'ai appris qu'il n'y avait qu'un seul intervenant de chaque côté, j'ai moi-même avisé le député de Saint-Jean s'il souhaitait prendre la parole. Alors, c'est après une demande de sa part, là. Je veux que ça soit bien clair.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, le député de Saint-Jean a apprécié la sollicitude du député de Marquette, mais il s'en tient aux ententes qui ont été conclues entre les leaders, sachant fort bien que l'histoire lui sera reconnaissante de son rôle.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vais procéder selon les normes édictées par ce Parlement et par notre règlement. Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, merci, M. le Président. D'abord, je suis très heureuse de prendre la parole aujourd'hui pour l'adoption du principe du projet de loi n° 80 concernant la Loi modifiant la Loi sur le recours collectif. Mais, avant d'aborder le contenu de ce projet de loi, qui est fort simple, j'aimerais rappeler brièvement que le Fonds d'aide aux recours collectifs, en place depuis 1978, finance les recours collectifs qui sont intentés devant la Cour supérieure et qui répondent aux critères prévus par la loi. Il m'apparaît opportun, à cette étape-ci, de rappeler quelques notions relatives aux recours collectifs.

Le Code de procédure civile définit, à l'article 999, le recours collectif comme étant, et je cite, «le moyen de procédure qui permet à un membre d'agir en demande, sans mandat, pour le compte de tous les membres». Pour agir ainsi au nom d'autrui sans leur consentement, encore faut-il, comme le prévoit l'article 1003 du Code, que les recours que pourraient intenter individuellement chacun des membres soulèvent des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes.

(16 h 30)

Je me permets de mentionner un exemple qui nous fait rapidement comprendre la nature d'un recours collectif. L'exemple qui me vient à l'esprit est celui où le détenteur d'un laissez-passer mensuel de transport en commun se voit privé du service de transport à l'occasion d'une grève des employés du service en question. La première chose que ce détenteur doit faire est de demander au service de transport un remboursement partiel de son laisser-passer. En cas de refus, il est évident qu'il ne pourra exercer de recours judiciaire individuellement compte tenu de la modicité de la somme en jeu. Il pourra cependant, par le biais d'un recours collectif, s'adresser au tribunal au nom de toutes les personnes qui auraient acheté un laisser-passer pour le même mois, et du même service de transport.

En effet, il est facile de réaliser dans cet exemple que les questions de droit et celles de fait seront identiques pour tous, comme l'exige l'article 1003 du Code de procédure civile. C'est ainsi, pour ne mentionner que quelques cas, que les recours suivants ont déjà été autorisés: action en dommages et intérêts pour trouble et inconvénients, 300 $; perte de vacances, 100 $; et dommages exemplaires, 250 $, pour les acheteurs d'un plan de voyage qui n'ont pas reçu les services annoncés; action en remboursement d'un prélèvement sur certaines sommes perçu illégalement des chauffeurs de taxi par une firme de placement.

Il s'agit là de quelques exemples parmi plus de 400 recours qui sont intentés devant la Cour supérieure depuis l'instauration du programme. Pendant cette période, le Fonds d'aide aux recours collectifs a financé en moyenne près de 66 % des dossiers ouverts, financement qui, s'il n'avait pas été disponible, n'aurait pas permis aux justiciables d'obtenir justice. Et je ne voudrais pas oublier l'action en réclamation des bénéfices nets accumulés au fonds de retraite des anciens employés de la compagnie Singer du Canada limitée, de Saint-Jean-sur-Richelieu, action dirigée contre la compagnie elle-même et qu'il est convenu d'appeler le premier recours Singer.

Pour en revenir plus précisément au projet de loi qui nous occupe aujourd'hui, comme nous pouvons le constater à sa face même, ce projet de loi est fort simple. Il a pour objectif de permettre au Fonds d'aide aux recours collectifs d'accorder une aide financière à des résidents du Québec qui désirent exercer un recours collectif devant la section de première instance de la Cour fédérale du Canada. En vertu de l'article premier du projet de loi, pour que la demande puisse être admise, trois conditions doivent être remplies. Tout d'abord, le demandeur devra justifier de motifs sérieux l'introduction du recours devant la Cour fédérale plutôt que la Cour supérieure. Deuxièmement, le demandeur et au moins 50 % des membres du groupe devront résider au Québec. Finalement, le recours devra être exercé dans les matières pour lesquelles la section de première instance de la Cour fédérale exerce une compétence concurrente avec celle de la Cour supérieure, c'est-à-dire pour les réclamations pécuniaires contre le gouvernement fédéral.

Pour déterminer s'il attribue l'aide, le Fonds doit évaluer si, sans cette aide, le recours pourrait être exercé ou continué. Il doit également apprécier l'apparence du droit que le demandeur entend faire valoir ainsi que les probabilités d'exercice de recours. Par ailleurs, une disposition transitoire est prévue au projet de loi afin de permettre aux résidents du Québec qui avaient intenté une procédure de la nature d'un recours collectif devant la Cour fédérale au moment de la présentation du projet de loi de pouvoir bénéficier d'une aide financière du Fonds d'aide s'ils en font la demande.

Voilà donc, M. le Président, le contenu du projet. Bien qu'il ne contienne que deux articles, ce projet de loi est très important, principalement parce qu'il touche directement un groupe de personnes qui ne pouvaient jusqu'à ce jour bénéficier de l'aide accordée par le Fonds d'aide. Je parle ici des retraités de la compagnie Singer, qui, en intentant légitimement les recours, cette fois-ci dirigés contre le gouvernement fédéral, devant la Cour fédérale, se sont retrouvés privés de la possibilité de faire une demande d'aide financière au Fonds d'aide aux recours collectifs. Nous connaissons bien les difficultés auxquelles ont dû faire face les ex-employés de la compagnie Singer dans leurs démarches. Il nous est apparu important de tenir compte de leur situation particulière et des difficultés de financement qu'ils éprouvent afin d'élargir le fonds d'action du Fonds d'aide.

Il m'apparaît important ici de mentionner la contribution exceptionnelle du député de Saint-Jean, qui a fait du dossier des ex-employés de la compagnie Singer non seulement un engagement d'élu auprès de ses commettants, mais aussi un engagement personnel, un engagement qui traduit, je le dis bien, les valeurs de compassion et de justice qui l'habitent.

Je pourrais vous dire que, n'eût été de sa persévérance, sa conviction et ses nombreuses interventions depuis 1994, je suis convaincue que nous n'aurions pu aujourd'hui déposer le projet de loi à l'Assemblée nationale, et je tiens à le remercier en mon nom personnel et au nom, surtout, des gens qui pourront bénéficier du Fonds du recours collectif.

Il est évident que d'autres personnes vont pouvoir justifier des motifs sérieux d'introduction d'un recours de la nature d'un recours collectif devant la Cour fédérale plutôt que devant la Cour supérieure. Elles vont pouvoir bénéficier de cette même aide. Nous visons donc tant les recours qui pourraient être pendants à l'heure actuelle que ceux qui pourraient être intentés dans l'avenir.

En terminant, je tiens également à saisir l'occasion pour rappeler que le Fonds d'aide aux recours collectifs représente un fleuron du système de justice québécois. En effet, outre le Québec, seule l'Ontario s'est dotée d'un fonds d'aide aux recours collectifs, lequel est toutefois financé par le Barreau. De plus, le fonds d'aide ontarien ne finance que les déboursés du représentant des personnes pour lesquelles le recours est intenté, lesquels comprennent essentiellement les frais de cour, d'avis et d'expertise. Par contre, le fonds d'aide du Québec permet, pour sa part, un financement qui est complet des recours collectifs, qui comprend, en plus des déboursés, les dépens, les honoraires et les frais d'expert ou d'avocat-conseil, les honoraires du procureur des demandeurs, lesquels représentent évidemment la grande part des dépenses encourues.

Notre Fonds d'aide aux recours collectifs est un exemple de plus, M. le Président, de l'engagement exceptionnel du Québec pour l'accessibilité à la justice ainsi que de notre souci constant de venir en aide aux citoyens désireux d'obtenir réparation. Par le biais du projet de loi n° 80, nous élargissons donc le champ d'action du Fonds d'aide et concrétisons une fois de plus cet engagement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. C'est toujours un plaisir pour moi d'entendre la ministre de la Justice faire référence au concept de l'accès à la justice. Je me demande si, dans le cadre de la question que je lui posais aujourd'hui, c'est-à-dire de permettre à des citoyens d'avoir cet accès à la justice, les citoyens pourront avoir les mêmes moyens de défense que le gouvernement se donne devant les tribunaux.

M. le Président, je joins ma voix à celle de la ministre sur le projet de loi n° 80, et je suis heureux de constater, je pense, que le député de Saint-Jean va pouvoir prendre la parole. Je remercie le leader adjoint de lui permettre de prendre la parole sur un dossier sur lequel il a travaillé très fort, il a investi de nombreuses heures.

Je sais c'est quoi, M. le Président. Lorsque j'ai eu une difficulté dans ma propre circonscription électorale – le vice-premier ministre s'en souviendra, il s'agit de l'usine de la Dominion Bridge qui fermait ses portes à cause de la faillite – moi-même, j'avais investi énormément d'énergie pour tenter par tous les moyens possibles de donner un coup de main pour faire en sorte qu'il y ait un certain financement qui pourrait permettre la relance de l'usine. Et j'ai eu une excellente collaboration du vice-premier ministre, je tiens à le souligner, je le remercie au nom de tous les employés et des anciens employés de Dominion Bridge et des électeurs de la circonscription électorale du comté de Marquette.

Je vais écourter, M. le Président, ce que je voulais dire sur le projet de loi n° 80 parce que j'ai compris que mon temps sera cédé au député de Saint-Jean, et je tiens absolument à ce qu'il puisse prendre la parole, parce qu'il le mérite bien. Alors, voilà, nous allons appuyer le projet de loi n° 80.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Jean.


M. Roger Paquin

M. Paquin: M. le Président, je ne veux pas abuser du temps de la Chambre, mais je remercie mes collègues des deux côtés de me permettre de dire quelques mots aujourd'hui.

Je pense que le combat des gens retraités de la Singer pour obtenir justice est un combat qui est d'autant plus important qu'il ouvre des horizons pour l'ensemble des Québécois. Aujourd'hui, leur moyenne d'âge approche de 84 ans. C'est un long combat, c'est un combat important pour faire en sorte que les bénéfices des plans de pension puissent revenir aux gens.

Alors, de cette lutte, de ce combat, aujourd'hui émerge un projet de loi qui pourra bénéficier à toutes les Québécoises et à tous les Québécois. Je pense que c'est déjà une retombée éminemment positive. Je ne ferai pas l'historique du dossier à ce moment-ci, M. le Président, mais je voudrais remercier les ministres que j'ai eu à talonner, les trois ministres de la Justice qui se sont succédé depuis que je suis député de Saint-Jean, et en particulier la ministre actuelle qui porte le projet de loi à son terme, également le président du Conseil du trésor, et même les appuis qu'on a eus des différents ministres qui ont été impliqués, y compris du premier ministre. Je voudrais aussi remercier les députés de l'opposition.

(16 h 40)

Je me souviens qu'en 1997, lorsque j'ai présenté une motion sans préavis sur un sujet délicat parce qu'il était en partie sub judice et qu'il y a une certaine tradition autour, n'est-ce pas, des motions lorsque quelque chose est sub judice, et, à la suite d'une période de questions particulièrement houleuse où on ne peut pas dire que la bonne humeur régnait, il y a eu un consentement, au-delà des lignes de parti, pour des causes strictement humanitaires à une motion qui demandait instamment au gouvernement fédéral de donner droit aux revendications des employés de Singer.

Alors, j'utiliserai peut-être encore 30 secondes du temps de la Chambre pour réitérer cet appel solennel que nous avons, comme Chambre, ici, comme Assemblée nationale, adressé à la Chambre des communes, au gouvernement fédéral pour donner droit aux demandes, aux revendications parfaitement légitimes des gens de la Singer. Et, au demeurant, maintenant, ils ont un instrument supplémentaire pour tenter de l'obtenir. Alors, merci aux parlementaires de cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Jean. Alors, je m'en vais mettre aux voix l'adoption du principe. M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Strictement quelques secondes avant l'adoption de principe. Il s'agit d'un projet de loi, comme l'a mentionné le député de Saint-Jean, qui vise à rétablir une justice qui a trop tardé à venir pour des gens qui la réclament. Je tiens à féliciter le député de Saint-Jean de son initiative et de son travail dans ce dossier. Simplement le mettre en garde: Ce n'est pas la première fois que l'opposition l'appuie au niveau du principe d'un projet de loi, s'assurer qu'il va conserver l'appui du gouvernement au niveau de la commission parlementaire, de l'article par article et de l'adoption finale du projet de loi.

L'adoption du principe est une étape importante, mais, sans une adoption finale qui répond aux voeux exprimés par le député de Saint-Jean, il y a des dangers. Je ne veux pas rappeler de mauvais souvenirs au député de Saint-Jean. On avait vécu des éléments semblables dans un dossier de fusion de municipalités dans la région de Saint-Jean. Le député avait fait un travail remarquable. Il s'est retrouvé Gros-Jean comme devant parce que son gouvernement l'a laissé tomber. Moi, je tiens à l'assurer que, autant on ne l'a pas laissé tomber, de ce côté-ci de la Chambre, quand il représente bien les intérêts de sa population, on ne le laissera pas tomber dans ce dossier-là non plus. Mais j'espère que, cette fois-ci, fort de l'expérience du dossier des fusions municipales, il a pris les garanties, au niveau de son gouvernement, qu'il ne l'abandonnera pas dans les étapes subséquentes. De ce côté-ci, ce n'est pas de notre intention de l'abandonner. Au contraire, nous le félicitons pour son initiative, et il peut compter sur notre appui jusqu'au processus d'adoption.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, on peut bien passer à l'adoption du projet de loi, non? On va commencer par le principe. Le principe du projet de loi n° 80, Loi modifiant la Loi sur le recours collectif, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Vous me permettrez de remercier le chef de l'opposition officielle pour son appui et son témoignage envers le député.


Renvoi à la commission des institutions

M. le Président, je fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vous réfère maintenant à l'article 18 du feuilleton.


Projet de loi n° 92


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 18, M. le ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 92, Loi sur le ministère des Finances. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, comme vous l'avez dit, il s'agit de la Loi du ministère des Finances. C'est l'organisation du ministère des Finances, du Conseil du trésor et de l'ensemble de la gestion des ressources financières du gouvernement dont il s'agit, et qui sont actuellement dans la Loi sur l'administration financière. Cette loi date du début des années soixante-dix, et peu de modifications y ont été apportées. Donc, elle est un peu vieillotte et empoussiérée, c'est le moins qu'on puisse dire.

Le gouvernement a décidé donc de revoir ses façons de faire dans la gestion de ses ressources pour offrir de meilleurs services aux citoyens et aux citoyennes. Ainsi, trois projets de loi sont déposés cet automne à l'Assemblée nationale: le projet de loi n° 94, sur l'administration financière, qui a été présenté à l'Assemblée le 11 novembre... C'est une loi, celle-là, de portée générale qui encadre l'ensemble des opérations financières du gouvernement, et ce projet de loi remplace l'ancienne Loi sur l'administration financière. Il modernise le cadre de gestion des ressources financières, notamment pour l'adapter aux opérations des marchés financiers modernes, finaliser la réforme de la comptabilité gouvernementale amorcée en mars 1998 et l'harmoniser avec le nouveau cadre de gestion gouvernementale.

Le projet de loi n° 82, quant à lui, Loi sur l'administration publique, présenté par le ministre d'État à l'Administration et à la Fonction publique, mon collègue le président du Conseil du trésor, encadre la gestion des ressources humaines, budgétaires, matérielles et informationnelles. Ce projet de loi a été initié par un énoncé de politique sur la gestion gouvernementale qui a été déposé par mon collège également à cette Assemblée le 9 juin dernier. Comme pour les autres ministères, le ministère des Finances aura donc sa propre loi ayant pour objet de définir la mission et les fonctions confiées au ministre des Finances et de pourvoir à l'organisation du ministère qui le soutient dans ses fonctions.

Le nouveau cadre de gestion gouvernementale ne vise pas à revoir le rôle de l'État mais son fonctionnement et sa façon de mettre en oeuvre ses orientations et politiques. Ça ne veut pas dire qu'un débat plus vaste sur le rôle de l'État ne serait pas pertinent. Il importe d'harmoniser les responsabilités des organismes centraux et d'actualiser leurs fonctions en accord avec le nouveau cadre de gestion. Alors, on examine en particulier le rôle du ministre des Finances. Dans un cadre de gestion pour une administration publique qui se veut moderne, un ministre des Finances doit établir un climat qui assurera une économie dynamique, croissante et innovatrice. Il doit gérer les affaires financières de l'ensemble du gouvernement, il doit veiller au respect des équilibres budgétaires, il doit gérer efficacement, en tant que trésorier du gouvernement, les besoins financiers de l'ensemble du gouvernement et la dette publique. C'est en vérité et avec passablement de réalisme ce que nous avons fait au cours des dernières années.

Le projet de loi du ministère des Finances expose donc la mission du ministre en matières économique, fiscale, budgétaire et financière. Il parle de la mission du ministre des Finances, qui est celle de favoriser le développement économique du Québec. Le ministre des Finances doit donc à cet effet conseiller son gouvernement sur des politiques en matières économique et fiscale. Il propose également des politiques financières pour l'ensemble du gouvernement afin d'assurer une cohérence dans ses choix. Et le rôle du ministre des Finances est de favoriser globalement et de soutenir la croissance de l'économie, de l'investissement et de l'emploi en proposant, par exemple dans le cadre du discours du budget, des mesures d'aide financière et des mesures d'incitation fiscale.

Les fonctions reconduites dans ce projet – car le projet reconduit les fonctions et les actualise – sont les suivantes. Les fonctions actuelles du ministre des Finances, qui étaient auparavant dans la Loi sur l'administration financière, ont été reconduites dans la présente loi, à l'exception de celles concernant les prévisions budgétaires, et le budget de dépenses sera dorénavant déposé à l'Assemblée nationale par le président du Conseil du trésor. Mon collègue sera dorénavant le seul responsable de la répartition des dépenses du gouvernement programme par programme. Avant ça, vous savez que c'était le ministre des Finances qui déposait le budget des dépenses, qui déposait les crédits. Il y avait une incohérence là-dedans. La réalité des choses, c'est que c'est le ministre du Conseil du trésor qui les défendait et les illustrait et prenait les décisions.

En harmonie avec le nouveau cadre de gestion, pour s'assurer du respect de l'équilibre budgétaire, le ministre des Finances limite son implication à établir et proposer au gouvernement le niveau global des dépenses. Le ministre des Finances conseille également le gouvernement sur les orientations en matière de revenus et sur ses investissements. Il y est également prévu de travailler de concert avec le président du Conseil du trésor en ce concerne notamment les engagements découlant des conventions collectives.

Le nouveau rôle, maintenant, du Contrôleur des finances. D'ailleurs, nous avons nommé une personne dernièrement au poste de Contrôleur des finances, qui était devenu vacant au départ de M. Fiset, qui a été nommé sous-ministre du Revenu. Alors, le Contrôleur des finances – qui est une contrôleuse des finances, d'ailleurs – maintient son rôle de comptable du gouvernement, prépare les comptes publics pour le ministre des Finances et divers autres rapports financiers, pour cela cumule l'ensemble des données financières pour les consolider. Les ministères et organismes du gouvernement sont maintenant légalement responsables, quant à eux, de l'enregistrement de leurs transactions financières. Au niveau central, le Contrôleur des finances s'assure de l'intégralité du système comptable et de la fiabilité des informations financières. Son rôle, par conséquent, a évolué au cours des dernières années, mais la Loi sur l'administration financière n'a pas été modifiée pour refléter cette évolution. Avec le présent projet de loi sur le ministère des Finances, les responsabilités du Contrôleur des finances sont ainsi actualisées et adaptées au nouveau cadre de gestion.

(16 h 50)

En conclusion, ce projet de loi s'avère simple, puisqu'il est similaire aux différentes lois sur l'organisation d'un ministère. Le premier chapitre expose la mission et les fonctions du ministère des Finances. Une série d'articles dans le deuxième chapitre donnent des éléments de l'organisation du ministère. Le chapitre III énonce les responsabilités et le rôle du Contrôleur des finances, et ce, en accord avec le nouveau cadre de gestion gouvernementale. Le chapitre IV reconduit les articles de lois qui régissent les activités du Fonds de financement, qui étaient auparavant inclus dans l'actuelle Loi sur l'administration financière. Finalement, le dernier chapitre prévoit tous les changements de concordance qui doivent être faits dans d'autres lois. Alors, voici, M. le Président, ce que nous proposons comme modifications et ajustements à la Loi sur le ministère des Finances.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre des Finances. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Mme la députée.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. J'aurai peu de commentaires à faire au sujet de ce projet de loi. Je pense qu'il est normal que le ministère des Finances ait sa propre loi. Par ailleurs, comme le mentionnait bien le ministre des Finances, il y a une réorganisation au niveau de toutes les lois qui régissaient le ministère et les activités du ministre des Finances, et il a mentionné la loi n° 92, la loi n° 94. Il y aura, au niveau de l'administration publique, la loi n° 82. Et je lui rappellerai qu'il y avait également la loi n° 9, qu'on a passée déjà lors de la dernière session.

Alors, je pense, M. le Président, qu'il y a peu de choses, mais je vais soulever deux volets. D'abord, je voudrais féliciter le ministre – c'est rare que je le félicite – d'avoir une contrôleuse, parce que, au niveau de toute la batterie d'experts qu'il avait autour de lui tout le temps, je n'ai pas vu beaucoup de femmes. Alors, qu'il ait embauché une contrôleuse, je dois dire que je le félicite.

Au niveau, M. le Président, du projet de loi, il y a un article, l'article 3, qui décrit les responsabilités du ministre. Et, dans l'article 3, on voit une répétition ou, disons, un élargissement que je trouve pour le moins surprenant de voir dans un projet de loi. D'abord, l'article 2 est clair, il dit: «Le ministre a pour mission de favoriser le développement économique et de conseiller le gouvernement en matière financière.» Et l'article 3 élabore davantage: «Pour favoriser et soutenir la croissance de l'économie, de l'investissement et de l'emploi, le ministre élabore et propose au gouvernement des mesures d'aide financière et d'incitation fiscale.» Je pense que c'est là un élargissement au rôle du ministre des Finances, et nous allons certainement, lors de l'étude article par article, nous interroger quant à ce que peut vouloir dire ce nouvel article dans ce projet de loi, au chapitre I de la Loi sur le ministère des Finances. Ah! Au fait, peut-être que ce que je pourrais élaborer, c'est que j'ai l'impression qu'on est en train d'instaurer dans la loi un rôle que s'est donné le ministère des Finances, et en particulier ce ministre des Finances, d'intervenir, un rôle interventionniste dans l'État par le biais de subventions, de crédits d'impôt, de support. Et je pense que le ministre était tout à fait capable d'accomplir ses responsabilités sans faire appel à l'ajout dans la loi d'un tel article.

Par ailleurs, ce qui est le plus surprenant, et c'est là que je vais devoir avoir des explications, c'est le Fonds de financement. Si ma mémoire est bonne, on avait voté pour le projet de loi n° 9 pour créer Financement-Québec. Et il y avait là une mission différente entre le Fonds de financement et Financement-Québec. Le Fonds de financement devait financer ce qui apparaissait dans le périmètre comptable du ministère, du gouvernement, et Investissement-Québec, c'était pour financer des hôpitaux, des commissions scolaires, des universités. C'était un fonds pour venir en aide au niveau, en particulier, des immobilisations de ces institutions à l'extérieur du périmètre comptable. Or, dans la Loi sur le ministère des Finances, on voit, au chapitre IV, l'article 24, qu'est institué au ministère des Finances un fonds de financement et dont la mission est précisément de faire ce que Financement-Québec s'apprêtait à faire, c'est-à-dire financer, apporter un appui aux collèges d'enseignement général et professionnel, aux commissions scolaires, universités, services de santé et services sociaux et éventuellement aux municipalités.

Alors, je suis étonnée de voir que, là, on garde et le Fonds de financement et Financement-Québec pour venir financer les deux mêmes types d'organismes, les mêmes types d'organismes. On ne fait plus, on dirait, une distinction. Est-ce parce qu'on veut... Il y a chevauchement, et on doit garder l'ancien fonds de financement pour rencontrer les promesses et les engagements qu'ils avaient pris antérieurement? Est-ce que c'est temporaire, intérimaire? Je ne le sais pas, ça ne nous est pas communiqué dans le moment. Alors, essentiellement, M. le Président, c'est à peu près les points que je voulais faire.

Je veux rappeler au ministre des Finances le besoin, également, de transparence. Une des critiques que j'entends constamment à titre de porte-parole des finances, les gens me demandent constamment: Est-ce que les chiffres sont bons? Est-ce que ce qu'on nous donne dans les rapports annuels... Est-ce que, dans le budget... Est-ce que ce qu'on nous rapporte, c'est bien exact dans la réalité? Et, même moi, qui ai quand même été au courant et suivi ce qui se passait dans le domaine fiscal pendant de nombreuses années, bien, ce qui m'a frappé en arrivant au ministère des Finances... C'est que, tout à coup, en arrivant à titre de critique des finances – pardon, un lapsus – non seulement la dette était de 100 000 000 000 $, mais elle est probablement de 120 000 000 000 $, parce que toute l'immobilisation des hôpitaux, des écoles et tout ce secteur-là n'est pas incluse dans ça. Alors, c'est pour ça que les gens commencent à s'interroger, pour savoir qu'elle est la vraie facture, quelle est la note, quel est le niveau d'endettement, quel est... D'ailleurs, le Vérificateur général, pendant plusieurs années, a opposé à sa signature des réserves quant à la façon, et effectivement on a voulu inclure maintenant les régimes de pension, et c'est pour ça que la dette a augmenté de 13 000 000 000 $, parce qu'on a voulu inclure dans la dette des obligations qu'avait prises le gouvernement.

Mais je pense qu'il va falloir qu'on se penche sur la transparence. Tout le monde a intérêt dans cette Chambre à nous assurer que les gens nous croient quand on avance des chiffres, que les gens respectent les chiffres qu'on leur donne et qu'ils soient clairs, et qu'il soit presque impossible, d'un côté comme de l'autre, tout à coup, de trouver une nouvelle interprétation, un nouveau chiffre. Je parle simplement de la dette. Je pense que vous pouvez calculer la dette du Québec, la mettre à 86 000 000 000 $, à 100 000 000 000 $, à 111 000 000 000 $, et, si vous ajoutez ce dont je parlais tantôt, ça monte encore. Je pense que c'est ça, M. le Président. Peut-être qu'à cause de Financement-Québec on va être capable, justement, d'avoir tellement distinctement ce qui est dans le fonds consolidé et ce qui est à l'extérieur du fonds consolidé – et je le souhaite, certainement – qu'on sera capable, à ce moment-là, de déterminer l'envergure de la dette.

Alors, M. le Président, ce sont mes commentaires. Bien sûr que nous appuyons le principe de ce projet de loi, il est clair qu'on ne peut pas être contre que le ministère des Finances rajeunisse la loi qui le régit. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Il n'y a pas d'autres intervenants sur ce projet de loi? Non.


Mise aux voix

Alors, très bien, je vais mettre aux voix le principe du projet de loi n° 92, Loi sur le ministère des Finances. Est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Boulerice: Oui, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce que le projet de loi est adopté? Adopté. M. le leader adjoint.

(17 heures)

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je réfère à l'article 2 du feuilleton, au projet de loi n° 67.


Projet de loi n° 67


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 2, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 16 novembre 1999 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 67, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement. Est-ce qu'il y a des intervenants? Mme la députée de Sauvé... de Crémazie, hein? Excusez. Crémazie. Alors, ça fait longtemps que j'ai quitté la ville de Montréal, mais enfin je me retrouve. Alors, je vous cède la parole.


Mme Manon Blanchet

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui alors que nous débattons de l'adoption du principe du projet de loi n° 67, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement, présenté par la ministre du Travail en juin dernier.

Il y a quelques semaines, la commission de l'économie et du travail a tenu une consultation générale de plusieurs jours durant laquelle les membres de cette commission ont pu entendre plus d'une trentaine de groupes, d'associations ou d'individus venus présenter leur mémoire. En août 1998, la commission de l'économie et du travail avait également tenu des consultations sur le sujet. Les discussions avaient alors porté sur le phénomène des clauses orphelin et sur les moyens de le contrer. Plus de 40 groupes ont présenté leur position à ce moment-là. Donc, lors des dernières consultations, nous avons discuté du projet de loi n° 67 qui constituait la réponse du gouvernement à ce phénomène.

Le problème des clauses dites orphelin préoccupe le ministère du Travail depuis plus de 10 ans. En effet, depuis 1988, le ministère du Travail s'est penché sur la question à plusieurs reprises. Il y a eu publication de plusieurs études, comme par exemple La rémunération à double palier dans les conventions collectives au Québec , en 1992, ou, un autre exemple, Vers une équité intergénérationnelle , document de réflexion sur les clauses orphelin dans les conventions collectives, en 1998.

Lors des consultations de septembre et octobre dernier, plusieurs intervenants ont associé le phénomène des clauses orphelin à la situation des jeunes arrivés sur le marché du travail depuis plus d'une décennie. Toutefois, ce débat ne concerne pas que les jeunes. L'enjeu, c'est aussi la place que l'on fait aux travailleurs et travailleuses de tout âge qui sont déjà sur le marché du travail, parfois depuis plusieurs années, mais qui malheureusement doivent se retrouver un emploi parce qu'ils ont perdu le leur ou parce qu'ils sont retournés aux études. Ici, M. le Président, je pense, entre autres, aux femmes qui ont dû quitter temporairement le marché du travail pour s'occuper de leurs enfants à la maison.

Ces enjeux fondamentaux ont donc guidé la consultation générale dans son étude du projet de loi n° 67 qui vise à interdire les disparités de traitement fondées uniquement sur la date d'embauche entre les salariés qui effectuent les mêmes tâches dans un même établissement. J'aimerais rappeler, M. le Président, que ce projet de loi fait donc suite aux travaux de la commission de l'économie et du travail et à un engagement du gouvernement d'intervenir pour contrer le phénomène des clauses de disparités de traitement.

Nous savons, M. le Président, que la Charte des droits et libertés de la personne interdit, en matière d'emploi, toute discrimination, notamment dans l'embauche ou dans l'établissement de conditions de travail d'une personne pour un des motifs suivants: soit l'âge, le sexe, la race ou la religion. On y énonce aussi le principe d'un salaire égal pour un travail égal. D'un autre côté, la Charte reconnaît que des différences de traitement ou de salaire ne sont pas discriminatoires. Le projet de loi n° 67 ne vient donc pas dédoubler les dires de la Charte, mais plutôt les compléter en introduisant dans une loi du travail des protections pour tous les salariés.

Parlons maintenant, M. le Président, du projet de loi tel que présenté. Par le projet de loi n° 67, le gouvernement du Parti québécois a respecté son engagement électoral d'éliminer les clauses de disparités de traitement fondées uniquement sur la date d'embauche. Après quelques vérifications, il appert que le Québec est le seul État en voie d'adopter une telle législation ou qui pourrait en posséder une. Ce ne sera donc une surprise pour personne que l'adoption du projet de loi n° 67 au cours de la présente session parlementaire constitue une priorité pour notre gouvernement.

Dans ce projet de loi, le législateur énonce le principe qu'il faut interdire les disparités de traitement fondées uniquement sur la date d'embauche. C'est donc qu'à l'avenir aucune convention collective, aucun décret ou aucune politique d'entreprise ne pourrait accorder à une salariée ou à un salarié une condition de travail moins avantageuse que celle accordée à ses collègues. Si un salarié ou une salariée, syndiqué ou non, se croyait victime d'une clause discriminatoire, il ou elle pourrait faire appel à la Commission des normes du travail afin de faire corriger cette situation et aussi recevoir l'aide technique et juridique efficace et peu coûteuse.

Comme le mentionnait la ministre du Travail plus tôt cette semaine, ce projet de loi vise non seulement les salaires, mais aussi les pourboires, la durée de la semaine de travail, les heures supplémentaires, etc., pour ne donner que quelques exemples.

Le projet de loi n° 67 prévoit également une période de transition de trois ans. Cette période de transition permettra à toutes les parties concernées d'apporter les correctifs et les modifications nécessaires afin de respecter les dispositions énoncées dans la législation. Au cours des consultations que nous avons tenues, plusieurs se sont interrogés sur ce délai de trois ans. Traditionnellement, il est d'usage, lorsque des modifications législatives ont pour effet de rendre non conformes des dispositions de conventions collectives négociées de bonne foi et en accord avec les règles du moment, donc de prévoir une période de transition pour laisser aux parties concernées le temps nécessaire à la négociation de nouveaux aménagements. Ce délai d'ajustement a été déterminé en fonction de l'échéance de la majorité des conventions collectives actuellement en vigueur et qui se renouvelleront dans ce délai.

L'opposition officielle a souligné à quelques reprises que le gouvernement avait tardé à légiférer sur le phénomène des clauses de disparités de traitement. Permettez-moi de rappeler, M. le Président, que, lors de son congrès de 1987, la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec adoptait la proposition suivante, et je la cite: «Le congrès jeunes demande au gouvernement du Québec de légiférer pour empêcher désormais l'apparition de nouveaux cas de clauses orphelin lors de la négociation ou du renouvellement des conventions collectives dans les secteurs public, privé et parapublic.» Fin de la citation. Ai-je besoin de rappeler qu'à cette époque la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec s'adressait au gouvernement libéral. Étonnant également qu'après toutes ces années de règne libéral celui-ci n'ait fait aucun suivi de cette proposition, malgré la présence du député de Rivière-du-Loup à la tête de la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec en 1991 et 1992, et qui, aujourd'hui, dénonce les clauses orphelin.

M. le Président, il me semble que le gouvernement du Parti québécois n'a pas de leçons à recevoir des libéraux. Nous avons respecté notre engagement électoral en déposant le projet de loi n° 67 en juin dernier. Tout au long des consultations tenues dernièrement, les membres de la commission de l'économie et du travail ont gardé en mémoire la situation des jeunes d'aujourd'hui. Tous savent que les jeunes connaissent des moments difficiles. Souvent, ceux-ci font face à des problèmes de pauvreté, de chômage, d'insécurité et de précarité en emploi. Il faut convenir que tout doit être mis en oeuvre pour faciliter l'entrée des jeunes en emploi et aussi favoriser le lien entre les études et les stages en emploi. Les jeunes ne peuvent en même temps obtenir un diplôme et posséder 20 ans d'expérience. Il faut aussi faire la promotion de l'équité entre les générations afin d'obtenir un meilleur partage de la richesse. On le sait, la discrimination n'est pas saine dans une entreprise. Elle nourrit les rivalités, les conflits, nuit à la productivité et au sentiment d'appartenance à l'entreprise.

Donc, M. le Président, je crois que le projet de loi n° 67 déposé par la ministre du Travail pourra contribuer à corriger les situations discriminatoires vécues non seulement par les jeunes, mais aussi par les travailleuses et les travailleurs de tous âges. J'incite donc les membres de cette Assemblée à voter en faveur de l'adoption du principe. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Crémazie. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je suis, à mon tour, extrêmement heureuse d'intervenir sur ce projet de loi n° 67, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement, ou, ce qu'on a qualifié en termes plus courts, la loi sur les clauses orphelin.

(17 h 10)

M. le Président, ce projet de loi, dans ses notes explicatives, vise finalement à modifier «les normes du travail pour y interdire, relativement à des matières qui font l'objet de normes du travail, des disparités de traitement fondées uniquement sur la date d'embauche entre des salariés qui effectuent les mêmes tâches dans un même établissement.

«Le projet de loi prévoit aussi certaines exceptions à cette interdiction ainsi qu'une période de transition destinée à permettre une adaptation progressive des politiques et pratiques en matière de conditions de travail.

«Le projet de loi prévoit enfin la présentation au gouvernement et à l'Assemblée nationale d'un rapport sur l'application des dispositions qu'il comporte ainsi que la cessation éventuelle de leur effet.»

C'est un projet de loi régime minceur, M. le Président, il porte sur cinq articles, en fait quatre articles principalement, si on exclut le cinquième qui n'est qu'un article qui spécifie la date de mise en vigueur.

Alors, premièrement, il est nécessaire de rappeler le contexte dans lequel s'inscrit le phénomène des clauses discriminatoires d'embauche, les clauses dites «orphelin». Il faut remonter au contexte des années quatre-vingt où on a vécu une crise économique en Amérique du Nord, et, à ce moment-là, dans certaines conventions collectives, apparaissaient les clauses orphelin. C'est des clauses discriminatoires en fonction de la date d'embauche, qui, naturellement, discriminaient davantage les jeunes mais aussi d'autres catégories de citoyens.

La députée de Crémazie vient de rappeler que la Commission-Jeunesse du Parti libéral avait joué un rôle majeur et avant-gardiste. Elle s'était préoccupée, elle s'était penchée sur cette problématique-là et elle avait adopté des résolutions pour contrecarrer les clauses orphelin. Et, jusque-là, c'est tout à fait vrai, sauf que la députée de Crémazie a dit aussi, il y a quelques instants, que, malgré que le Parti libéral ait été au pouvoir, il ne s'est rien fait. Alors, je voudrais lui rappeler qu'en 1992 le ministère du Travail du gouvernement du Québec avait fait en sorte que les parties patronales et syndicales s'engagent à ne pas conclure des clauses orphelin, d'une part. De plus, pour donner une illustration quantitative, de 1990 à 1993, le nombre de personnes touchées par les clauses orphelin est passé de 25 000 à 9 000. Alors, ça, c'est un résultat concret d'une vigilance et d'une action qui a été posée par le Parti libéral au pouvoir pour enrayer le phénomène des clauses orphelin et lutter contre la discrimination à l'embauche, qui affecte principalement les jeunes.

Ce que la députée de Crémazie a dit aussi, c'est que la Charte des droits et libertés acceptait les clauses discriminatoires. J'ai eu l'occasion, M. le Président, lors des consultations sur cette question-là en commission parlementaire, d'entendre la Commission des droits de la personne. Et ce que la Commission nous a dit, c'est qu'elle considérait les clauses orphelin comme étant discriminatoires pour les jeunes et pour toutes les personnes qui sont affectées par ces clauses-là. La Commission des droits de la personne considère ces clauses comme une violation de la Charte des droits, considérant que, pour la Commission des droits de la personne qui est garante de la gestion de la Charte des droits, à chaque travail équivalent doit correspondre un salaire équivalent. C'est une règle d'équité, de justice qui est admise dans notre société.

Là où la Commission des droits de la personne a apporté quelques nuances, c'est qu'elle disait que la Charte permet des différences dans la rémunération en vertu de quatre critères: premièrement, l'ancienneté; deuxièmement, l'expérience; troisièmement, la formation; et, quatrièmement, la compétence. Alors, voilà, M. le Président pour la réplique que j'aurais à faire aux propos qui ont été tenus par la députée de Crémazie, qui m'avait précédée lors de la discussion sur ce projet de loi.

Alors, il y a eu une consultation publique en commission parlementaire, à l'été 1998. J'ai eu l'occasion d'y participer suite à la publication du document de réflexion sur les clauses orphelin dans les conventions collectives. Il y a eu tout récemment des consultations générales qui se sont déroulées aux mois de septembre et octobre, auxquelles ont participé une trentaine de groupes. Et ce qu'on constate, M. le Président, dans ces consultations, c'est qu'il y a un constat ou un consensus quasi général qui se fait contre la ministre de l'Emploi et du Travail qui a déposé le projet de loi n° 67 en juin dernier.

Alors, pourquoi est-ce qu'il y a un consensus? Tous les groupes n'apportent pas les mêmes raisons, les mêmes arguments, mais tous apportent des arguments contre la position du gouvernement. D'abord, du côté patronal, il y a eu des représentations qu'on a entendues en commission parlementaire. Les gens du côté syndical aussi ont apporté leur argumentation. Et, chose certaine, on est face à un gouvernement qui se sert des jeunes pour des raisons purement partisanes au lieu de répondre à leurs attentes, au lieu de leur offrir un avenir à la mesure de leurs attentes.

Alors, il faut se rappeler, pour bien illustrer ce que je dis, qu'en campagne électorale le premier ministre du Québec s'était engagé publiquement à régler une bonne fois pour toutes le problème des clauses orphelin. Il s'était engagé à présenter un projet de loi qui allait enrayer les clauses orphelin. Mais c'était à la veille d'une campagne électorale, c'était une façon de se faire du capital politique auprès des jeunes, d'attirer les jeunes vers le Parti québécois en leur disant: Le gouvernement, une fois élu, va penser à vous et il va enrayer des conventions collectives les clauses orphelin. C'était un leurre, M. le Président, c'était un leurre, parce que les organismes des jeunes ainsi que les jeunes qui ont entendu le discours du premier ministre sont extrêmement déçus parce qu'ils savent qu'on s'est servi d'eux et qu'on a brisé le lien de confiance avec eux.

Pas plus tard que le 13 novembre dernier, j'ai participé pendant toute la journée à un forum sur les jeunes, le Forum jeunesse de la Montérégie qui s'est tenu sur la rive sud de Montréal, auquel ont participé quelque 250 jeunes. Et ce que ces jeunes-là sont venus nous dire – et la plupart d'entre eux, ces 250 jeunes, sont des jeunes qui sont traditionnellement d'allégeance péquiste – ils sont venus dénoncer leur propre gouvernement péquiste justement sur la question des clauses orphelin. Ils sont venus nous rappeler que le premier ministre leur a fait une promesse, il a fait un engagement qu'il n'a pas tenu et qu'ils vont s'en rappeler, M. le Président.

En commission parlementaire, le groupe Force Jeunesse a présenté un mémoire dans lequel il a qualifié de «parachute troué» ce que la ministre du Travail leur a proposé. Et ils ne sont pas dupes, M. le Président, des démarches et des stratégies de ce gouvernement, qui visent, en fin de compte, tout simplement à enrober ce projet de loi de toutes les promesses pour les jeunes, mais dans un but purement précis qui est celui d'aller chercher leur vote, d'aller chercher leur adhésion. Mais, dans le fond, on trahit leur confiance. Et ça, c'est extrêmement regrettable parce que ça n'aide pas à rétablir le lien de confiance entre les élus et la population. C'est par des gestes comme cela que la population se désintéresse de la politique, que la population est désillusionnée vis-à-vis de certains élus.

Et, pour ma part, je le dénonce parce qu'il est temps que le gouvernement tienne ses engagements, respecte sa parole et donne aux jeunes ce qu'il leur a promis en période électorale, une fois qu'il a été élu, parce que c'est sur cette base-là que les gens ont voté pour le Parti québécois. Alors, cela démontre encore une fois que le gouvernement a proposé ce projet de loi uniquement pour donner l'impression qu'il voulait respecter ses promesses électorales, alors que, lorsqu'on regarde le projet de loi tel que libellé, on est vraiment, vraiment, vraiment loin du compte.

(17 h 20)

Le Parti libéral du Québec, M. le Président, lui, désire pour sa part qu'une législation vraiment efficace soit instaurée, soit implantée, pour contrecarrer le phénomène des clauses orphelin, sa prolifération et aussi pour donner l'exemple aux jeunes et aux citoyens qui ont entendu le premier ministre leur promettre une chose et qui se ramassent finalement avec très peu de choses. Mon collègue le député de LaFontaine et porte-parole de l'opposition officielle en matière de travail a eu l'occasion, devant cette Assemblée, d'argumenter brillamment pour expliquer, avec arguments à l'appui, toutes les faiblesses qu'il y a dans ce projet de loi qui est un non-projet de loi, en fait, parce que nous sommes en train de discuter d'un projet de loi qui ne répond même pas aux attentes des notes explicatives qui sont comprises à l'intérieur même de ce projet de loi.

Alors, je n'ai jamais vu, M. le Président, une chose aussi alambiquée que ça, qui est présentée par une ministre dont l'incompétence est notoire. Il est reconnu même par ses propres collègues que la ministre de l'Emploi et du Travail n'est réellement pas à sa place. On le déplore parce qu'on l'a vécu. Et la population du Québec l'a vécu avec le gâchis d'Emploi-Québec où on a vu comment le gouvernement a dépensé de l'argent sans compter, 80 000 000 $, avant la période électorale, justement pour attirer encore une fois le vote de la population. Et puis, après, on a décidé de pénaliser la population, de couper et de briser les engagements qu'on a pris avec des citoyens qui, de bonne foi, se sont présentés à Emploi-Québec, ont fait des projets, ont compté sur le gouvernement pour les aider à les réaliser et, tout d'un coup, ils se sont ramassés devant rien. Alors, ça, c'est le modèle de gestion de ce gouvernement qui se retrouve dans les différents dossiers qui sont menés par les différents ministres, et plus particulièrement par la ministre du Travail qui est loin de tenir sa parole, qui est loin de respecter ses engagements et les engagements de son propre gouvernement.

L'attitude de la ministre du Travail à l'égard des jeunes... Ils sont d'ailleurs venus, les groupes de jeunes, assez nombreux dans les consultations à la commission de l'économie et du travail, ils se sont déplacés. Les représentants sont venus dire au gouvernement quelles étaient leurs attentes, ce qu'ils voulaient avoir, comment ils vivaient cette discrimination dans les différents milieux de travail, comment ils se sentaient comme des citoyens de second ordre. Alors qu'on devrait préparer les jeunes à prendre le leadership de demain, ce que ce gouvernement leur réserve, c'est de la discrimination dans l'emploi. Et il n'est même pas prêt à le reconnaître, et encore moins à apporter les correctifs nécessaires pour y remédier. Alors, M. le Président, moi, j'étais à la commission de l'économie et du travail. J'ai écouté ces jeunes. J'ai été émue et touchée par ces jeunes. J'ai reçu des jeunes dans mon bureau de comté qui sont venus me voir pour me dire: S'il vous plaît, pour une fois, faites quelque chose, parce que ça n'a pas d'allure, la discrimination qui se vit sur le marché du travail.

J'ai reçu à mon bureau des jeunes policiers qui me disent à quel point, eux, leur situation est dramatique. On a vu des agents qui travaillent dans les centres correctionnels qui sont venus en force nous expliquer comment ils vivaient cette discrimination. Et ce gouvernement n'a vraiment pas été ébranlé. Comme d'habitude, il n'a pas d'écoute pour les besoins des citoyens, il n'a pas d'écoute pour la population, aucune sensibilité, aucune compassion, et surtout aucun sens de la responsabilité, aucune vision.

Quoi de mieux, M. le Président? La jeunesse, c'est l'avenir, hein? Et là ce gouvernement se prépare à épater la galerie avec un Sommet du Québec et de la jeunesse. Je vois ça d'ici, ça va être un grand show, ça va être une grosse opération de relations publiques, et on va se péter les bretelles comme quoi on s'occupe des jeunes, mais, dans le concret, quand vient le temps de poser les gestes qui comptent, de changer les choses dans l'intérêt des jeunes, ce gouvernement n'a pas le courage d'aller au bout de ses décisions et, surtout, de prendre les bonnes décisions; et je le regrette, je le dénonce au nom de toute la jeunesse, des jeunes de mon comté, des jeunes du Québec.

Et, quand je vois des députés, et surtout des députés jeunes, qui se lèvent de l'autre côté pour dire et applaudir à ce projet de loi, je trouve ça extrêmement déplorable de se servir encore de jeunes députés pour dire que le message va porter, qu'enfin on va convaincre les gens qu'il y a quelque chose dans ce projet de loi, alors que les jeunes ne peuvent pas compter sur le gouvernement, il n'y a pas grand-chose pour eux autres, M. le Président.

La situation qui prévaut actuellement va continuer à prévaloir si ce projet de loi est adopté tel qu'il est. Et, moi, je crois qu'on a une lutte à mener autour de ce projet de loi parce que c'est un projet de loi qui va avoir un impact majeur sur le monde du travail, sur notre jeunesse, et il faut, à un moment donné, être cohérent même si les intérêts autour d'un projet de loi comme celui-là sont divergents, parfois diamétralement opposés.

On peut le comprendre, les syndicats et le patronat ne sont pas toujours sur la même longueur d'ondes, mais le gouvernement doit avoir la responsabilité d'amener le patronat et les syndicats à négocier de bonne foi des bonnes conventions collectives au lieu de négocier sur le dos des jeunes et sur le dos de tous ceux et toutes celles qui n'ont pas encore accès au marché du travail. C'est déjà difficile pour ces gens-là qui cherchent un emploi, et, quand ils le trouvent, parce qu'ils sont les derniers à entrer dans le système, on les pénalise et on leur dit: Pour le même travail que vous allez faire, vous allez gagner 50 % de moins que celui qui l'a fait avant vous.

M. le Président, c'est de la discrimination. C'est inscrit noir sur blanc dans la Charte des droits et libertés que la discrimination en fonction de l'âge est interdite, alors comment ce gouvernement peut se fermer les yeux et prétendre qu'il n'y a pas de problème et prétendre qu'il va le régler, ce problème, avec un projet de loi insignifiant comme le projet de loi n° 67, alors que la problématique va demeurer entière, que les jeunes vont continuer à être exploités sur le marché du travail au détriment de leur dignité et de leurs compétences, alors qu'on devrait leur faire une place, surtout à l'occasion du Sommet du Québec et de la jeunesse, si ce gouvernement veut vraiment se montrer sérieux? Mais il ne l'est pas, M. le Président, et je le déplore. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey et leader adjoint de l'opposition. M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, il me fait plaisir de prendre la parole concernant le projet de loi n° 67, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement, Bill 67, An Act to amend the Act respecting labour standards as regards differences in treatment.

M. le Président, j'ai écouté avec attention l'excellente intervention de ma collègue la députée de La Pinière et je ne saurais être plus en accord avec elle. À l'instar de notre collègue responsable des questions de travail ici, en Chambre, le député de LaFontaine, nous sommes outrés de voir que le gouvernement du Parti québécois, comme c'est devenu son habitude, refuse de respecter ses engagements, engagements solennels pris notamment envers les jeunes. Rappelons que le sujet qui nous intéresse aujourd'hui, malgré le langage quelque peu laconique que je viens de lire dans le titre, est communément appelé les «clauses orphelin».

(17 h 30)

M. le Président, en matière de relations du travail, le Québec a connu une progression et une évolution des plus intéressantes. Rappelons qu'il y a une trentaine d'années à peine, en pleine effervescence des années soixante justement, après la Révolution tranquille, le Québec était un endroit, une juridiction où, en matière de relations de travail, on avait un «track record», si vous me passez l'expression anglaise, peu envieux. Par contre, fort de beaucoup de travail non partisan dans cette Chambre, on a réussi à élaborer un Code du travail qui maintenant fait l'envie de beaucoup de juridictions en Amérique du Nord, un Code du travail qui prévoit effectivement qu'il va y avoir un système simple pour reconnaître les associations de salariés, les syndicats. Au début du Code du travail, M. le Président, on explique quelle est la raison d'être même d'une telle association de salariés, et ça vaut la peine de le réitérer: Une association de salariés est un groupement «constitué en syndicat professionnel, union, fraternité ou autrement et ayant pour buts l'étude, la sauvegarde et le développement des intérêts économiques, sociaux et éducatifs de ses membres et particulièrement la négociation et l'application de conventions collectives».

M. le Président, c'est très important de savoir que le projet de loi n° 67 renvoie d'emblée à cette notion de la convention collective, car il est évident que le projet de loi en question s'adresse strictement au domaine du travail régi par décrets ou conventions collectives. En d'autres mots, on n'est pas en train de s'adresser à des gens qui sont dans le libre-marché du travail, aux autres employeurs. Mais il est aussi intéressant de constater le point auquel le gouvernement du Parti québécois refuse de tenir son engagement. D'un côté, il se lève puis il dit: On va vous présenter un projet de loi sur les clauses orphelin. Mais, d'un autre côté, lorsqu'on regarde attentivement les dates qui sont prévues, on se rend compte que c'est un leurre. Il n'y aura jamais une loi réelle, applicable pour enfreindre l'édiction d'une telle clause orphelin.

M. le Président, je pense que, lorsqu'on étudie le projet de loi n° 67, c'est notre devoir de se poser des questions sur les obligations respectives des employeurs et des syndicats, les associations de salariés auxquelles j'ai fait référence tantôt, ainsi que nos propres devoirs ici, en Chambre. Le point a été fait tantôt par la députée de La Pinière, et c'est clair, c'est incontournable: les clauses discriminatoires que sont les clauses orphelin sont discriminatoires justement en raison du fait que ces clauses sont contraires aux édictions claires de notre propre Charte des droits et libertés de la personne du Québec. On n'a pas le droit de faire de la discrimination basée sur l'âge, sinon la loi peut être frappée d'illégalité.

Mais – et c'est là une des astuces – les clauses orphelin ne sont pas contenues dans une loi, elles sont contenues dans une convention collective. Est-ce qu'elles sont moins illégales pour autant? Ce n'est pas notre opinion. Si une convention collective devait contenir une clause prévoyant que seulement des personnes de race blanche seraient embauchées dans une entreprise, on entendrait tout de suite les hauts cris, tout le monde comprendrait qu'à sa face même une telle clause est illégale, contraire à l'ordre public, contre la Charte, et ça prendrait peu de temps pour un tribunal de déclarer la clause illégale.

M. le Président, une clause orphelin, une clause disant que les nouveaux embauchés dans une entreprise vont avoir des conditions de travail moins avantageuses que les gens qui viennent d'être embauchés, avec la même expérience, s'entend, ils vont gagner moins cher, une telle clause, parce que ça frappe justement les plus jeunes, c'est discriminatoire basé sur l'âge et c'est illégal.

C'est pour ça que le Parti libéral du Québec a tenu un engagement ferme. C'est pour ça que le Parti libéral du Québec, malgré les pressions prévisibles et évidentes de certains groupes, représentant notamment les intérêts d'employeurs, maintient son opposition ferme, incontournable, sa position de principe contre les clauses orphelin. Et c'est pour ça, du même coup, que nous dénonçons l'attitude du gouvernement du Parti québécois qui, d'un côté, pour attirer la faveur des jeunes électeurs lors de la dernière campagne électorale, a promis quelque chose, alors qu'aujourd'hui la ministre reste silencieuse, incapable de répondre à ces critiques pour une bonne raison: elle sait que sa loi est pleine de trous. Elle sait que sa loi ne protège personne. Elle doit savoir que sa loi enfreint la Charte québécoise des droits et libertés de la personne.

M. le Président, le processus menant à une convention collective est souvent très difficile. S'il s'agit d'une première convention collective, bien entendu, il faut que les salariés, les gens qui travaillent dans une entreprise donnée, s'entendent sur leur désir de former un syndicat. On l'a vu avec l'exemple de McDonald, comment cela peut être parfois difficile, mais, bon an mal an, il y a de nombreux groupes qui réussissent à se syndicaliser, c'est-à-dire à avoir une adhésion suffisante pour qu'un syndicat, une association de salariés soit reconnue. Une fois que cette reconnaissance est acquise, l'association va procéder par plusieurs étapes et commencer à négocier ce qu'on appelle une convention collective, c'est-à-dire le contrat de travail qui va lier les membres de l'association et l'employeur.

M. le Président, je pense qu'on n'en a pas parlé suffisamment jusqu'à date, mais les syndicats ont aussi des responsabilités très importantes en matière de clauses orphelin. Lorsque j'ai lu la définition tantôt, j'ai dit: Une union, drôle de terminologie qui date d'une autre époque, un calque de l'anglais «union». Mais un syndicat ou une fraternité, moi, j'ai été à même de le constater, il ne faut pas souhaiter d'avoir des gens qui ont ce genre de fraternité là.

La Fraternité des policiers de Montréal, ce qu'elle a fait avec les jeunes qui sont cadets... Les cadets de la police de Montréal, si vous les avez déjà vus, M. le Président – sans doute, dans vos fonctions, vous les avez vus très souvent, pour contrôler les foules lors d'événements importants, etc. – ce sont des jeunes qui sont en train de faire leur cours, cours de trois ans, qui se donne en technique policière dans nos cégeps. Je présume que, dans d'autres juridictions, il y a quelque chose de semblable.

J'étais très étonné de constater il y a trois ans que, tout d'un coup, le salaire de ces cadets venait d'être diminué de quelque chose de l'ordre de 25 % ou 30 %, et ce qui était d'autant plus inquiétant, à mon point de vue, c'est qu'ils continuaient avec exactement les mêmes fonctions. Ils continuaient à payer leurs cotisations syndicales à la Fraternité des policiers de la CUM. Et pourtant cette même Fraternité existe pour une seule raison, c'est de représenter leurs intérêts économiques. Eh bien, contrairement à la compagnie d'assurances Allstate, bien connue, on était entre bonnes mains avec Allstate, mais, avec la Fraternité, ils étaient entre bonnes mains jusqu'à ce qu'on les laisse tomber, les jeunes. Pourquoi? C'était très clair, ça leur avait été expliqué. Lors de la renégociation de leur convention avec la ville de Montréal, avec la Communauté urbaine de Montréal, il manquait de l'argent pour les policiers. Où est-ce qu'ils ont coupé? Chez les jeunes.

Aïe! il y a une obligation sur un syndicat de représenter ses membres. Un syndicat n'existe pas pour le plaisir de ses dirigeants. Un syndicat n'existe pas seulement pour ses membres les plus âgés ou les plus expérimentés. Toute personne qui paie une cotisation à un syndicat a le droit légal d'être représentée pas juste lors d'un grief avec l'employeur. Mais est-ce qu'on tient en compte ces obligations? C'est proprement scandaleux non seulement de voir le gouvernement du Parti québécois nous présenter ce projet de loi là, mais de voir qu'il y a des syndicats qui s'adonnent encore à signer des conventions collectives qui contiennent des clauses orphelin. Car, si on voulait vraiment faire en sorte qu'il n'y ait plus de clauses orphelin au Québec, bien il faudrait s'y prendre non seulement en fermant tous les trous qui sont prévus ici, mais en assimilant la signature même d'une convention collective avec une clause discriminatoire, une clause orphelin, en l'assimilant, en édictant que c'est réputé constituer un défaut de représenter.

Mettons un peu de pression sur les syndicats, ce n'est pas juste les employeurs qui signent ça. C'est un peu l'illusion qu'ils se donnent. Oui, le gouvernement va intervenir à demi-mesure parce qu'il faut protéger les jeunes des clauses orphelin. Les clauses orphelin, ça ne tombe pas du ciel. Une clause orphelin est signée par un syndicat aussi, édictée par un employeur. Ils sont de connivence lorsqu'ils signent des clauses orphelin, M. le Président. C'est ça, le scandale, le vrai scandale des clauses orphelin.

Et comment ça se fait qu'on arrive là? Bien, c'est simple le gouvernement l'encourage. Dans les secteurs public et parapublic, on le voit à tous les jours, des concoctions... Ministère de la Justice: on va embaucher des jeunes avocats. Pas des stagiaires, on ne parle pas des gens qui sont en train d'effectuer leur stage de six mois, on parle d'avocats dûment reçus, inscrits au tableau de l'ordre du Barreau du Québec. Un avocat dûment patenté, en langage populaire. Il y a des conventions collectives au gouvernement du Québec, il y a des conditions de travail, il y a des échelles de salaire basées sur la formation et l'expérience. Qu'est-ce qu'ils font, dans le Parti québécois? Ils créent des postes de stage. Qu'on se comprenne bien, ils sont déjà avocats. Ce n'est pas du stage du Barreau qu'il s'agit. Ils créent des postes de deux ans soi-disant pour les aider à trouver une place sur le marché du travail.

(17 h 40)

Le seul petit hic, c'est que deux avocats avec exactement la même formation, sortant exactement à la même date de la même Faculté de droit, sortant exactement à la même date de l'École du Barreau et ayant terminé leur stage de six mois à exactement la même date se font embaucher au gouvernement du Québec. L'un se fait embaucher pour devenir avocat membre de l'association et va commencer à tel niveau. L'autre, qui peut être dans le bureau à côté en train de faire exactement la même chose, va avoir une autre échelle de salaire. Pourquoi? Parce qu'on a décidé que ça, c'était un stage pour l'intégrer au marché du travail, alors que l'autre est embauché comme avocat. C'est un non-sens. Ça ne se peut pas, de faire des choses pareilles.

Mais les syndicats marchent là-dedans. Les syndicats signent des conventions collectives et ils ne bronchent pas lorsque le gouvernement du Parti québécois se livre à de telles pratiques. C'est ça, le problème, M. le Président. Il faut le regarder en face. Nous, on est prêts à assumer nos responsabilités comme législateurs. Ce n'est pas facile, les lobbys se font forts: N'appuyez pas ça, ne respectez pas vos engagements. Vous devriez nous laisser avoir des clauses comme ça. Nous, au Parti libéral du Québec, on dit clairement, sans détournement, sans ambages, sans faux-fuyant comme on voit en face, on dit non aux clauses orphelin, non à l'illégalité, non à la discrimination fondée sur l'âge.

Et on dit, par ailleurs, M. le Président, qu'on fait fausse route lorsqu'on blâme tout sur les employeurs, on fait fausse route lorsqu'on oublie l'obligation du syndicat de représenter correctement ses membres. Et c'est à nous, comme législateurs, de s'assurer que toute mesure législative prise en vue d'enrayer ces clauses illégales discriminatoires que sont les clauses orphelin... Eh bien, qu'on fasse notre job, qu'on le fasse correctement.

Moi, j'ai hâte de voir comment les différents députés péquistes vont pouvoir rencontrer les groupes de jeunes, comment ils vont pouvoir, à Deux-Montagnes, à Portneuf, à Saint-Jean-sur-Richelieu, aller rencontrer des groupes de jeunes et dire: Vous vous souvenez quand on vous a convaincus de voter pour nous lors de la dernière campagne électorale? Bien, on avait les doigts croisés, ce n'était pas tout à fait ça. On n'a pas pu, on a eu trop de pressions, donc on a présenté un projet de loi plein de trous, avec des dates d'entrée en vigueur et d'expiration qui venaient faire en sorte que la loi ne voulait rien dire.

Et d'ailleurs c'est comme ça qu'ils se justifient auprès des groupes qui leur ont fait des pressions. Ils leur disent: Ne t'inquiète pas, on a présenté une loi, on va pouvoir dire qu'on a fait quelque chose, mais on sait tous que ça ne vous dérangerait pas tant que ça. Ça ne veut rien dire, ce projet de loi là. C'est comme ça qu'ils se justifient. Et c'est ce genre de tour de passe-passe, ce genre de jeu de fumée et de miroirs auquel se livre constamment le Parti québécois pour tenter de se donner bonne conscience.

On le voit tout le temps. Moi, je l'ai vécu dans mon comté, M. le Président, exactement le même genre de phénomène. À Laval, les péquistes avaient promis, juré, en 1994, que, s'ils étaient élus, Laval aurait un deuxième hôpital. Ils nous ont inventé un hôpital imaginaire, un hôpital virtuel qui s'appelle le Centre hospitalier ambulatoire régional de Laval. C'est absolument formidable comme rouerie. Ça n'existe pas, il n'y a rien. Il y a une adresse sur le boulevard Chomedey. Ils disent que peut-être un jour ça va pouvoir servir de lien entre les CLSC puis le seul hôpital qu'on a à Laval, qui est la Cité de la santé, pour transmettre les dossiers, mais que peut-être ils vont faire des petites choses. Ça ne fait rien.

Mais, aux dernières élections, aux élections de 1998, par hasard le Centre hospitalier ambulatoire invisible régional de Laval a été inventé juste à temps pour les dernières élections.

C'est comme ce qu'on a vu pour l'argent d'Emploi-Québec. Ils ont pris 460 000 $ d'Emploi-Québec, ils l'ont donné à un député, qui depuis lors est devenu ministre dans son comté, et il a fait une belle conférence de presse, en pleine campagne électorale, pour annoncer qu'ils allaient créer entre 400 et 1 200 jobs. Ça lui a valu la première page des journaux dans son comté. Ça lui a valu d'être réélu. Une couple de mois après les élections, l'entreprise était fermée. Pourquoi? Parce qu'ils avaient promis quelque chose puis ils n'ont pas livré la marchandise. Pas à Laval, pas dans le comté du ministre délégué à la Jeunesse et aux Services sociaux, pas plus en ce qui concerne les clauses orphelin. Ils ont fait une promesse aux jeunes; ils n'ont pas tenu leur promesse.

Et j'ai l'impression, M. le Président, que c'est aussi une indication du point auquel le Parti québécois est en train de vieillir, le parti qui est arrivé au pouvoir il y a 23 ans maintenant. Il y a 23 ans. Le Parti québécois est venu au pouvoir la première fois au mois de novembre, justement, 1976. C'était un parti avec des idées, avec des idéaux, avec des jeunes, des gens qui venaient de tous les milieux, du monde syndical justement, qui croyaient en quelque chose. Puis on les regarde aujourd'hui: fatigués, dépourvus d'idées. Jour après jour, on les voit ici, en Chambre, incapables de défendre quoi que ce soit, cherchant une seule chose: semer la zizanie, blâmer les autres pour les problèmes du Québec: c'est la faute du fédéral, c'est la faute des Anglais, c'est la faute de tout le monde, sauf du Parti québécois. Jour après jour, on entend ça ici, M. le Président.

Mais ils peuvent, à l'occasion, assumer leurs responsabilités. Ils peuvent, à l'occasion, faire quelque chose d'enrichissant et de valable sur le plan social. Ils peuvent aujourd'hui, en matière de droit du travail, faire quelque chose de réel, quelque chose pour protéger les droits de nos jeunes. Par le fait même, malgré leurs habitudes, ils seraient même en train de tenir parole. Mais non, faux-fuyant encore une fois: projet de loi n° 67, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de disparités de traitement. C'est illégal de prévoir que des gens qui entrent au même niveau aient un traitement différent de celui de ceux d'avant. La Commission des droits le sait, les gens en face le savent. Ils savent qu'ils sont en train de rompre avec les jeunes à qui ils ont fait une promesse.

Nous, M. le Président, on ne peut que réprouver la manière de faire du gouvernement du Parti québécois. On ne peut que leur dire que ce n'est pas correct vis-à-vis des jeunes, ce qu'ils sont en train de faire. Et on va le leur rappeler, et on va les faire penser à leur défaut de tenir promesse, et on va s'assurer que, à chaque occasion qu'on peut le faire, les jeunes se voient rappeler le défaut du gouvernement du Parti québécois de tenir promesse à leur égard, car ils vont permettre que l'on perpétue de la discrimination à leur endroit.

Je me demande ce que quelqu'un comme la députée de Crémazie va pouvoir faire vis-à-vis des jeunes dans son comté. Elle qui représente peut-être l'avenir de son parti, comment est-ce qu'elle va pouvoir regarder les jeunes de son comté dans les yeux et leur admettre qu'ils ont fait défaut de garder leur promesse, qu'ils ont fait défaut de défendre aux syndicats de signer des clauses discriminatoires, qu'ils ont présenté un projet de loi avec plus de trous qu'un fromage suisse?

M. le Président, on n'est pas du tout d'accord avec le gouvernement sur ce projet de loi là. Ils auraient dû tenir promesse et interdire les clauses discriminatoires. C'est pour ça qu'on va voter contre le projet de loi n° 67.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Chomedey. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Papineau.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de pouvoir intervenir sur le projet de loi n° 67, sur le projet de loi contre lequel, nous, comme parti, nous allons nous inscrire en faux à la suite de plusieurs interventions, plusieurs rencontres de la part de notre porte-parole, le député de LaFontaine, qui a rencontré plusieurs groupes pour discuter avec ces gens-là sur le projet de loi.

C'est un projet de loi qui vise à interdire les disparités de traitement sur le salaire, la durée du travail, les jours fériés, chômés et payés, les congés annuels payés, les journées de repos, l'avis de cessation d'emploi et de mise à pied, le certificat de travail, l'uniforme, les primes, les indemnités diverses, fondées uniquement sur le cadre d'embauche entre les salariés qui effectuent les mêmes tâches dans un même établissement. Il y a plusieurs exceptions à la règle.

(17 h 50)

C'est un projet de loi qui a été déposé suite à une promesse électorale, encore une fois. Un projet de loi que le gouvernement du Parti québécois, une fois élu pour une deuxième fois, ou pour une première fois sous le premier ministre actuel, M. Bouchard... qui, je pense, au bout de la ligne, et comme les jeunes de Force Jeunesse ont dit, est comme un parachute troué, M. le Président. Alors, autrement dit, un projet de loi qui ne satisfait pas du tout les jeunes.

Malheureusement, on a remarqué aussi qu'il y avait le député de Rivière-du-Loup qui avait fait toutes sortes de sorties contre ce projet de loi, mais on n'en a pas entendu parler du tout. On n'a pas le droit de signaler son absence, là, mais, si on avait le droit, M. le Président, on le ferait. On doit remarquer quand même que son propre parti, à la dernière élection, a fait une campagne pour les jeunes, sur la jeunesse, avec toutes sortes de promesses sur la table, et, quand on a une chance de faire le débat ici, à l'Assemblée nationale, on n'entend pas du tout leur opinion sur le projet de loi.

M. le Président, j'aimerais profiter de l'occasion pour discuter avec vous – ce ne sera pas long, si je peux le trouver ici, là – sur les jeunes libéraux du Parti libéral, qui nous ont passé une résolution à la dernière campagne ou à la dernière Commission-Jeunesse. Je vais prendre juste quelques instants. La voilà, la proposition des jeunes du Parti libéral du Québec qui a été présentée dernièrement, et je vais vous la lire pour vous dire clairement comment les jeunes de notre parti ont présenté cette résolution sur les clauses orphelin:

«Attendu que les jeunes Québécois ont de plus en plus de difficulté à se dénicher un emploi stable et de qualité;

«Attendu que les clauses orphelin se retrouvent dans des conventions collectives sous la forme de conditions salariales ou d'avantages sociaux négociés à la baisse pour les employés embauchés après une date fixée par l'employeur et le syndicat;

«Attendu que ces clauses peuvent être jugées discriminatoires en vertu des chartes, particulièrement envers les jeunes qui constituent la très grande majorité des nouveaux employés;

«Attendu que le Conseil du patronat et les syndicats sont enclins à vouloir faire reculer le gouvernement dans le débat entourant l'adoption du projet de loi portant sur l'élimination des clauses orphelin;

«Il a été résolu par le Conseil général du Parti libéral du Québec qu'on renouvelle ces engagements passés à l'effet de défendre le principe d'éliminer le recours aux clauses orphelin, tant pour les secteurs public, parapublic et privé, par un projet de loi adéquat, efficace et dont les modalités d'application seraient sous la surveillance de la Commission des normes du travail.»

On invite aussi dans cette résolution, M. le Président, le gouvernement, dans le cadre des présentes négociations du secteur public, à ne pas renouveler les clauses orphelin existantes, qu'un éventuel projet de loi modifie les lois du travail afin de définir de manière précise les clauses orphelin et qu'il empêche, lors des modifications ou des renouvellements de conventions collectives, le recours à des clauses qui prévoient deux échelles de conditions de travail pour une même occupation, avec pour seul critère de distinction la date d'embauche. Et aussi prenant acte de la volonté de la Commission-Jeunesse d'élaborer une politique pour les clauses orphelin...

Alors, je pense que ça résume la position du Parti libéral et de notre porte-parole, le député de LaFontaine, qui estime que la ministre du Travail devra trouver le juste équilibre entre la justice sociale, les forces du marché et la protection des jeunes Québécois et Québécoises. Je pense que c'est important, M. le Président. Je pense que c'est le message qu'on doit laisser dans ce débat-là aujourd'hui, dans les clauses orphelin. Et, je le répète, on devrait trouver un juste équilibre entre la justice sociale, les forces du marché et la protection des jeunes Québécois et Québécoises.

Notre porte-parole a rappelé que le projet de loi était incomplet. Le projet de loi comprend un trop grand nombre d'exceptions. D'abord, on impose une période de transition de trois ans avant la mise en vigueur et, ensuite, la période d'application n'est que de deux ans. Il est clair que le projet de loi, dans sa forme actuelle, ne permettrait pas au gouvernement de combattre sérieusement les clauses discriminatoires. Il s'agit en quelque sorte d'un mode d'emploi vers le bas pour les jeunes et d'une façon d'acheter du temps encore une fois, M. le Président. Ce genre de mesure affaiblit grandement la confiance que les jeunes ont envers ce gouvernement à la veille du Sommet de la jeunesse, et qui a été souligné par le député de LaFontaine.

Et, quand on parle du Sommet de la jeunesse, M. le Président, vous vous rappelez, deux semaines passées, que j'ai relevé ici, en cette Chambre, que, sur les 16 régions du Québec qui participent présentement à des rencontres, à des journées, qui travaillent ensemble et qui ont parlé aussi des clauses discriminatoires – ces clauses-là ont été discutées – au Sommet de la jeunesse, il y a seulement trois chaises pour 16 régions, pour représenter chacune des régions. On a posé la question ici, en Chambre, on n'a pas eu de réponse du ministre, encore une fois. Et on s'en va vers un Sommet de la jeunesse, encore une fois, comme le sommet qu'on a eu deux ou trois ans passés: un show, un spectacle, avec les ministres du gouvernement qui vont s'asseoir alentour d'une grande table, qui va être à la télévision pendant deux, trois ou quatre jours, avec le résultat: nil, rien pour les jeunes. Encore une fois, une promesse électorale qui a été mise sur la table, M. le Président, promesse qui avait un thème, J'ai confiance .

Je vois les gens qui sont ici avec nous ce soir. Je leur dis, à quelques minutes de la fin de nos débats, qu'ils sont assis là et qu'ils laissent un projet de loi passer sous le nez, comme ça, sur le dos de nos jeunes qui n'ont vraiment pas l'appui du tout... même du groupe Force Jeunesse! Et vous connaissez le président de Force Jeunesse, tout le monde le connaît: pas trop, trop un ami du Parti libéral; un ami très, très proche du gouvernement actuel, qui n'est vraiment pas d'accord du tout avec le projet de loi qu'il a baptisé comme un «parachute troué», une loi qui a été déposée seulement et uniquement pour dire aux jeunes: Oui, on vous l'avait promis, la loi est déposée. Et même les jeunes du Parti québécois, même les jeunes...

Et on trouve ça drôle, de l'autre côté. On voit ça, les gens de l'autre bord qui ne se lèvent jamais, qui ne discutent jamais, le député de Bertrand qui est pour des groupements, des regroupements puis tout ce que tu veux, puis qu'on ne se lève jamais ici, en cette Chambre, pour donner son opinion.

Alors, M. le Président, nous, de la part du Parti libéral, on ne peut pas donner notre accord à ce projet de loi là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.


Avis touchant les travaux des commissions

M. Boulerice: Oui. M. le Président, à la demande du leader de l'opposition, je voudrais modifier l'avis touchant les travaux des commissions fait un peu plus tôt aujourd'hui de façon à retirer l'avis touchant le projet de loi n° 206, Loi modifiant de nouveau la charte de Les Filles de Jésus (Trois-Rivières), commission prévue pour le mardi 23 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Un consentement? Alors, M. le leader... Très bien. Alors, vous l'aviez déposé?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Maintenant, étant donné l'heure, nous allons ajourner, quoique nous devions... Comme il y a des débats de fin de séance, on doit encore prolonger, et l'ajournement sera reporté à plus tard.

Il y a trois débats de fin de séance. Je vais voir si les personnes, les protagonistes sont présents, et non pas les antagonistes, les protagonistes. Ha, ha, ha! Alors, le ministre de l'Éducation et M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Il y a Mme la ministre des Affaires municipales et M. le député de Hull.

Nous allons suspendre quelques instants pour permettre à toutes ces personnes de s'y rendre. Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 18 h 1)


Débats de fin de séance


Jugement de la Cour supérieure sur la légalité de la tutelle imposée à la commission scolaire de Montréal

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous reprenons nos travaux, et nous allons entreprendre le premier débat de fin de séance.

M. le député de Kamouraska-Témiscouata a l'intention d'interroger le ministre de l'Éducation concernant le dossier de la tutelle à la commission scolaire de Montréal. Alors, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, vous avez un cinq minutes.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Hier, en cette Chambre, nous avons posé une question relativement au jugement rendu par l'honorable Pierre-J. Dalphond, juge à la Cour supérieure du Québec, et qui venait dire que la décision du gouvernement de mettre la commission scolaire de Montréal en tutelle n'était pas la bonne et que, finalement, il recommandait clairement au gouvernement de faire en sorte que la tutelle soit levée et que, finalement, on se rende à la résolution adoptée par le Conseil des commissaires de la commission scolaire de Montréal à sa séance du 1er septembre 1999.

Pour rappeler les faits, M. le Président, je tiens d'abord à vous dire que la crise à la commission scolaire de Montréal dure depuis déjà plusieurs mois. Et, finalement, c'est en septembre dernier que, par résolution, les commissaires de l'opposition ainsi que cinq commissaires indépendants qui se sont discartés du parti au pouvoir ont décidé de passer une résolution pour changer le comité exécutif de la commission scolaire de Montréal. Et, dès ce moment-là, plusieurs personnes se posaient la question sur la légalité du geste, sur: Est-ce que le nouvel exécutif prend la place de l'ancien? Est-ce que tout ça est valide et applicable?

Pendant ce temps-là, le ministre a écrit à quelques reprises et a dit à quelques reprises qu'il devait étudier la situation. Il a nommé un enquêteur, il a suivi le rapport de l'enquêteur, mais le jugement d'hier amène certains points extrêmement importants.

D'abord, le jugement indique qu'avant même d'y aller avec la tutelle on aurait pu tester le modèle de tutelle comme tel et tester si la position qui était adoptée, la résolution, était valide ou pas. C'est-à-dire, est-ce que le nouveau conseil exécutif de Montréal pouvait remplacer l'ancien de la commission scolaire? Et le jugement dit: Une injonction ou un jugement déclaratoire, deux procédures traitées d'urgence par la cour, auraient permis d'avoir une bonne idée de la valeur du geste.

Plus loin, il indique qu'en résumé le législateur a voulu, toujours en matière scolaire, une administration décentralisée, significativement autonome et représentative en tout temps de la volonté de la majorité des commissaires élus par la population. C'est dans le jugement aussi. Et, finalement, M. le Président, le jugement indique: «Même si le dossier fait voir certains indices d'un empressement ministériel plus compatible avec un désir de mettre la nouvelle majorité des commissaires au pas plutôt que le maintien de la qualité des services éducatifs», effectivement, il y a une virgule, et, par la suite, il dit: On ne peut pas dire que c'est de mauvaise foi, mais il dit: «...le décret de la mise en tutelle apparaît pris dans la poursuite d'un intérêt public légitime.»

Donc, oui, ça a été fait de façon légitime, mais ça a été fait de façon inappropriée. Pourquoi, dès que la nouvelle résolution a été adoptée pour mettre en place un nouvel exécutif, le ministre n'a pas immédiatement testé la valeur de cette résolution-là?

Parce que, quand le ministre disait, hier... il a déclaré à plusieurs reprises, M. le Président, que, maintenant que, au niveau juridique – on a une idée de ce qui s'est passé – maintenant que le jugement est rendu, il lève la tutelle. Ce qu'il ne dit pas, c'est que finalement ce sont les commissaires dissidents qui ont demandé de tester la valeur juridique de la tutelle et de tester la valeur de la résolution de qui est maintenant sur le conseil exécutif et qui prend les décisions à la commission scolaire de Montréal. Et ça, il faut se poser la question. Si ces gens-là n'avaient pas été en cour – parce que c'est vraiment les dissidents qui ont été en cour, ce n'est pas le ministre qui a demandé à tester ça, ce sont les dissidents qui sont allés en cour – la tutelle continuerait probablement, et la situation telle qu'on la connaissait, c'est-à-dire de crise, serait encore là, M. le Président.

Quelles sont les raisons pour lesquelles le ministre a agi de cette façon-là? Selon nous, c'est clair. À plusieurs reprises dans les derniers mois... le ministre et le Parti québécois ont des liens extrêmement étroits avec la présidente de la commission scolaire de Montréal, et il semble qu'à l'évidence, pour eux, il était inacceptable de voir autant des commissaires de leur parti que des commissaires de l'opposition s'unir contre la présidente. Et je pense que c'est la raison fondamentale pour laquelle le ministre a décidé, par tous les moyens, de protéger le plus longtemps possible la présidente de la commission scolaire de Montréal au lieu de laisser place au choix, au vote et aux décisions des commissaires de la commission scolaire de Montréal, ce qui est regrettable, M. le Président, et ce qui fait en sorte qu'au lieu d'aider à régler le conflit on a nui au règlement du conflit. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre de l'Éducation.


M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président, le député de Kamouraska-Témiscouata répète que le juge Dalphond aurait dit que la décision n'était pas une bonne décision, ma décision de faire la tutelle. Or, c'est faux, le juge Dalphond l'a dit très clairement, nous dit, et je le cite: «Dans un tel contexte, le décret de mise en tutelle apparaît pris dans la poursuite d'un intérêt public légitime.» Il me semble que c'est assez clair.

M. le Président, moi aussi, je vais essayer de rappeler rapidement les faits pour que tout le monde comprenne. Le 1er septembre dernier, le Conseil des commissaires de la commission scolaire de Montréal a adopté une résolution pour modifier la composition du comité exécutif, qui avait été élu en bonne et due forme pour deux ans, le 2 juillet 1998. Donc, dès cet instant, les services juridiques de la commission scolaire de Montréal, donc de la CSDM, leurs propres conseillers juridiques nous ont dit: Selon nous, cette décision est illégale. Donc, ça posait, pour le moins qu'on puisse dire, un peu de doute sur la légalité du comité exécutif. Ce que ça voulait dire en pratique, c'est que tous les contrats, par exemple, qui pouvaient et devaient être signés par le comité exécutif avec des fournisseurs en informatique ou autre, pouvaient devenir des contrats illégaux. Donc, ça empêchait la commission scolaire et d'abord le comité exécutif du conseil scolaire, donc de la CSDM, de fonctionner. On avait un problème, à ce moment-là.

Donc, j'ai demandé au Conseil des commissaires de revoir sa décision, ce qu'il a refusé. J'ai ensuite nommé un enquêteur. L'enquêteur, qui est M. Pierre De Celles, qui est le directeur général de l'ENAP, de l'École nationale d'administration publique, a conclu, après avoir demandé un avis juridique, que la modification du comité exécutif était illégale. Donc, deuxième conclusion où on me dit: C'est illégal.

Quelles étaient les options qui s'offraient à moi, M. le Président? Il y en avait deux. Et, si le député de Kamouraska-Témiscouata veut nous faire des suggestions constructives, qu'il nous dise qu'il y en avait d'autres. Mais, selon moi, il n'y en avait que deux. La première possibilité, c'était d'aller contester en cour pour aller vérifier, comme il l'a dit, la validité ou non du changement de comité exécutif. Or, il y a un petit problème avec cette solution, ça prend des délais, surtout à Montréal, on le sait, dans le district judiciaire de Montréal, il y a des délais. Or, ce que ça veut dire, c'est que, durant la période durant laquelle on aurait contesté, le comité exécutif n'aurait pas pu prendre de décision, en disant toujours: N'importe quel contrat que je peux signer est peut-être illégal. Donc, on aurait eu un problème de légalité de tous les gestes du comité exécutif. Donc, cette solution ne pouvait pas être retenue en pratique.

(18 h 10)

La deuxième solution et la seule autre qu'on a pu trouver, c'est de dire: On va faire une tutelle partielle du comité exécutif. M. le Président, c'est la décision qu'on a prise, c'est la décision que j'ai prise. Je pense que, si j'avais à reprendre cette décision, je reprendrais la même décision, parce que personne n'a trouvé une autre solution.

M. le Président, c'est facile de dire: Maintenant, on a un jugement, donc la situation légale est claire. Il y a un jugement qui dit: Oui, c'était légal. Donc, maintenant, il n'y a plus de problème de légalité. Donc, qu'est-ce que j'ai fait? J'ai tout de suite levé la tutelle, M. le Président. J'ai fait ce qu'on devait faire. Donc, je pense que, dans ce dossier, toutes les décisions du gouvernement ont visé à assurer la sécurité juridique des gestes posés par la CSDM.

Le député de Kamouraska-Témiscouata essaie de nous dire: Il y a des liens entre le MEMO... Bon, il y avait des gens du MEMO, il y a des dissidents du MEMO. Ce qu'on sait, par contre, c'est que le regroupement d'opposition de M. Pallascio, lui, il a peut-être des liens avec l'opposition. Ça, on pourrait en discuter. Mais ce qu'on sait, c'est qu'il y avait eu au départ 15 commissaires qui avaient été choisis pour le MEMO. Donc, il y a eu ensuite des dissidents qui ont fait qu'on s'est retrouvé 10 contre 11.

Donc, M. le Président, encore une fois, maintenant que les incertitudes juridiques sont levées, qu'on a levé la tutelle, c'est clair, il me semble, donc je demanderais au député de Kamouraska-Témiscouata de nous faire des suggestions constructives au lieu de faire perdre le temps à tout le monde à venir rediscuter inutilement de ce genre de propos ce soir ici. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre de l'Éducation. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Kamouraska-Témiscouata pour deux minutes. M. le député.


M. Claude Béchard (réplique)

M. Béchard: M. le Président, le but de cette question ce soir est de démontrer que le ministre de l'Éducation, dans ce dossier-là, n'a pas agi de façon neutre mais de façon partisane. On va relater les faits. Le 1er septembre, il y a une résolution qui fait en sorte que la présidente – et amie du Parti québécois – de la CSDM est maintenant minoritaire. Qu'est-ce que fait le ministre? Le 3 septembre, il écrit aux commissaires pour leur dire qu'il leur reproche leur décision, et cette missive qu'il leur envoie, aux commissaires, leur demande de «reconsidérer leur geste et de permettre au comité exécutif, que votre Conseil des commissaires avait institué le 2 juillet, de poursuivre son mandat». Il leur dit sans même consulter quiconque. Deux jours après la résolution, il leur envoie une lettre pour leur dire: «Revoyez votre décision.» Il se base sur quoi à ce moment-là? Il se base sur lui-même. Il dit que ça aurait pris trop de temps. Le 1er septembre, la résolution est passée. À la mi-septembre, il nomme un enquêteur et, à la fin septembre, il nomme un tuteur.

Ça a pris un mois. Ça a pris 40 jours, rendre ce jugement-là, M. le Président. S'il avait immédiatement invoqué les procédures qui lui ont été suggérées, une injonction ou un jugement déclaratoire, tout de suite après le début de septembre, après le 1er septembre, une fois que la résolution était passée, il aurait eu immédiatement un avis avant d'aller plus loin. Mais ce que le ministre de l'Éducation a fait, c'est qu'il a tout mis en oeuvre pour tenter de prolonger le plus longtemps possible la prise de pouvoir et le maintien au pouvoir de la présidente de la CSDM.

Et, quand il dit qu'il ne sait pas s'il y a des liens ou pas, on va lui en dire, des liens. Au cours de la campagne électorale, à la commission scolaire de Montréal, par hasard, le parti de la présidente de la commission scolaire de Montréal, le MEMO... Par hasard, le MEMO, le Parti québécois et le Bloc québécois ont leur permanence dans le même édifice, M. le Président. Donc, il y a des liens évidents entre les trois partis et il y a une preuve évidente que le ministre a échoué dans sa tentative de garder à tout prix son amie au pouvoir.


Projet de fusion de Mont-Tremblant et des municipalités voisines

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député. Et ceci met fin au premier débat. Le deuxième, M. le député de Hull questionnera la ministre des Affaires municipales concernant le dossier de la fusion forcée de Mont-Tremblant. Alors, M. le député, pour cinq minutes.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, bien malheureusement, ce soir, on est obligé de parler d'un projet de loi qui bafoue la démocratie dans les villes du Québec, qui bafoue l'opinion des gens qui se sont prononcés à 96 % contre un projet de fusion forcée, des gens qui, de toute évidence, étaient informés de l'ensemble des enjeux et se sont prononcés contre ce projet. En faisant ainsi, la ministre a décidé aussi d'ignorer toute tentative de dialogue entre la municipalité de Mont-Tremblant et ses voisines, ses voisines qui se voient maintenant forcées de fusionner. Mais, vous savez, la vraie réalité dans tout ça, c'est qu'on est presqu'au Festival Juste pour Rire, version péquiste, parce que ça n'en finit plus, les contradictions dans le PQ au niveau des fusions forcées, et vous allez me permettre de relater certains de ces faits-là. Et on va commencer par les premiers ministres, et j'ai bien dit: Les premiers ministres.

On va commencer avec Jacques Parizeau, ex-premier ministre, qui, lui, dit ceci au sujet des fusions forcées: Il y a toujours eu des appétits dans les administrations gouvernementales pour fusionner par commodité pour le gouvernement, pas pour les citoyens. Les gouvernements sont toujours en faveur des fusions. C'est plus commode pour le ministère des Affaires municipales de faire affaire avec 200 municipalités plutôt que 1 400. Il est inutile de chercher à les justifier, ces fusions, en disant que c'est pour le bien des citoyens. Ça, c'est l'ancien patron de l'actuelle ministre.

L'actuel patron de la ministre dit: Je ne pense pas que le législateur doive intervenir pour forcer les villes à fusionner. Vos savez, un mariage forcé n'est jamais bon. Il n'a pas dit ça quand il était ambassadeur. Il n'a pas dit ça quand il était chef du Bloc. Il n'a pas dit ça quand il était en campagne référendaire. Il a dit ça il y a quatre jours, M. le Président. Ce n'est quand même pas loin, ça.

Le député de Saint-Jean, concernant le projet de loi n° 194, qui s'est vu torpiller par la ministre, a dit: Bien sûr, des regroupements municipaux, ça ne peut pas se faire par inadvertance, de façon involontaire. Ça doit se faire par volonté. Les gens doivent adhérer au projet. Ça doit être leur volonté. On doit avoir leur consentement, et il a dit ça à l'Assemblée nationale le 2 juin.

Le député d'Iberville, encore un député péquiste: Je tiens à vous assurer que cette fusion ne se fera pas contre la volonté des populations des différentes municipalités. En effet, des référendums sont prévus au projet de loi, et, advenant le rejet par la population de ce projet, la fusion ne sera pas effectuée. Il n'est pas dans notre volonté d'imposer contre sa volonté une fusion dont la population ne voudrait pas. Et ça, ça a été prononcé aussi à l'Assemblée nationale le 2 juin. Il continue en disant: C'est que, tout au long de ce processus-là qui va culminer en la création, on l'espère, d'une nouvelle ville le 24 juin 2000, la population va être consultée en tout temps. Elle pourra dire son mot, et ça va être fait dans un souci de la plus grande transparence possible. En tant que parlementaires, mais aussi en tant que démocrates, nous devons porter haut et fort le flambeau de la démocratie. Flambeau qui est éteint par la ministre actuellement.

Le député de Bertrand et adjoint parlementaire aux affaires municipales dit: Contrairement à ce que j'avais pensé, il n'y en a pas ou à peu près pas, de personnes ayant la volonté de procéder à une fusion à quatre – il parlait de Saint-Sauveur. Et il poursuivait en disant: Suite à ces discussions, aux rencontres que j'ai eues en période estivale et aux réflexions concernant ce dossier, j'ai fait retirer du feuilleton le projet de loi qui forçait la fusion.

On continue. Le ministre des Transports, ancien ministre des Affaires municipales, qui s'ennuie beaucoup de ses fonctions, a dit: Les fusions forcées, c'est prouvé, ça ne donne rien de bon. Ça ne fait qu'engendrer la haine et les chicanes stériles.

Le député de Borduas, président de l'Assemblée nationale, a dit: Peu importe le résultat, la ministre des Affaires municipales s'est engagée à respecter la volonté des citoyens. Nous avons obtenu cette garantie. La situation est différente de celle de Mont-Tremblant, où la fusion pourrait être imposée. Il ajoute que plusieurs citoyens de Mont-Saint-Hilaire et d'Otterburn Park ont manifesté des inquiétudes à la suite des récentes déclarations de la ministre des Affaires municipales, qui affirmait que les référendums n'étaient que consultatifs.

Et on finit en parlant du vice-premier ministre, ex-ministre du Revenu et actuel ministre des Finances, qui aujourd'hui s'est levé pour prendre la défense de son premier ministre en son absence et dire: Malgré le fait que mon premier ministre soit contre les fusions forcées, de ce côté-ci de la Chambre, contrairement à l'autre côté, nous favorisons le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et non pas le droit des municipalités. J'imagine qu'il n'avait pas compris qu'un référendum, c'est le monde qui votait là-dedans.

Et, finalement, la députée de Hochelaga-Maisonneuve et ministre des Affaires municipales dit: Il ne peut plus y avoir de statu quo; la population est souvent plus consciente de ça que certains élus municipaux. Effectivement, les citoyens de Mont-Tremblant ont été très conscients et se sont prononcés. Elle poursuit en disant, dans Le Devoir du 11 novembre: «Dans le domaine municipal, sauf en cas de notification de zonage et de règlement d'emprunt, les référendums sont strictement consultatifs et n'engagent pas le conseil municipal.» Si on peut comprendre que les gens doivent se prononcer sur un règlement d'emprunt ou un zonage, comment se fait-il qu'on ne respecte pas leurs voeux sur l'avenir de la municipalité, M. le Président?

(18 h 20)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Hull, et je cède la parole à Mme la ministre des Affaires municipales.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Le député de Hull voudrait nous faire croire qu'il n'y aurait qu'au Québec qu'un référendum municipal serait décisionnel en matière de regroupement. Ni chez nos voisins ontariens, ni au Nouveau-Brunswick, ni en Nouvelle-Écosse, ni aux États-Unis, ni en France... partout dans le monde, ça n'existe pas, ce droit des villes à disposer d'elles-mêmes. Le vice-premier ministre l'a dit clairement: il y a le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, mais pas les droits des villes à disposer d'elles-mêmes.

Et, M. le Président, je voudrais simplement rappeler le bilan des fusions obligatoires qui se sont déroulées au Canada dernièrement. Et, je le dis, c'est ironique de voir le député de Hull, qui est un spectateur au premier plan de ce qui se passe présentement dans la fusion imposée aux villes d'Ottawa-Carleton par le gouvernement ontarien, et qui trouve ça raisonnable quand c'est en Ontario et inacceptable quand c'est au Québec.

Peut-être quelques mots rapidement sur l'expérience du Nouveau-Brunswick, qui a adopté en décembre 1992 et mis à jour en mars 1996 une politique de renforcement des agglomérations urbaines, qui a mis en place un groupe de consultation, lequel groupe de consultation a amené le gouvernement à décider d'imposer le regroupement dans les cas suivants: région de la Miramichi, cinq municipalités furent regroupées le 1er janvier 1995; région du Madawaska, quatre municipalités furent regroupées en 1998; région de Saint-Jean, encore une fois, regroupement de neuf municipalités en janvier 1998. Expérience de la Nouvelle-Écosse: alors, groupe de travail formé là aussi, M. le Président, et la Nouvelle-Écosse a mis en place... le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a annoncé son intention de former la municipalité régionale d'Halifax et a adopté une loi en ce sens en mai 1995, et ainsi de suite.

Veut-on parler de l'Ontario? L'adoption par le gouvernement de l'Ontario du bill 26 en 1996 et, par la suite, la mise en place de commissions finales, sans appel, exécutoires... Ce n'est pas de ça dont il est question, M. le Président. Ici, nous, c'est l'Assemblée nationale. C'est ici qu'est le forum de la démocratie, où se fait l'arbitrage du bien commun. En Ontario, commissions nommées... Pas par des élus, là. Le gouvernement ontarien a nommé des commissaires qui avaient le pouvoir final, exécutoire et décisionnel. Adoption, est-il nécessaire de le rappeler, de la loi n° 163 qui fusionnait six municipalités dans la mégacité de Toronto. Je vous rappelle que chacune des ces municipalités avait tenu un référendum où le résultat était à 81 % non, que parmi les ténors de ce non il y a l'actuel maire de Toronto. Alors, M. le Président, c'est assez absurde, hein!

Je comprends que le député de Hull veuille décider qu'il est dictatorial au Québec, ce qui était bon pour le reste du Canada. Ça, c'était raisonnable, normal. Et d'ailleurs, il a fait partie d'une équipe à la direction de la municipalité de Hull qui plaide pour que l'équivalent de ce qui s'est fait en Ontario puisse se faire également au Québec.

Alors, c'est une prérogative de l'Assemblée nationale. Cela le fut toujours. Et la preuve, c'est que, dans le cas de Mont-Tremblant et Saint-Jovite, ce n'est pas d'un divorce dont il s'agit avec le projet de loi n° 81, c'est une réconciliation. Pourquoi, M. le Président? En 1940, l'Assemblée nationale, où nous siégeons, les mêmes sièges où nous sommes, adoptait une loi qui évinçait tout ce territoire de la municipalité de Saint-Jovite pour créer la municipalité de Mont-Tremblant. A-t-on consulté la population? La loi a été adoptée, elle est appliquée depuis bientôt 50 ans. C'est un jugement d'opportunité.

Est-ce que je plaide pour qu'il y ait des fusions partout au Québec? Non. Mais je plaide cependant pour qu'il n'y ait pas une idéologie qui fasse l'éloge du droit de disposer de son sort sans s'occuper de ses voisines. Je trouve ça absurde, absurde de prétendre que les municipalités qui vont rafler des investissements importants comme celui fait dans un territoire de 900 habitants peuvent complètement nier le droit également à leur région d'en bénéficier. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre des Affaires municipales, et je vais céder la parole à M. le député de Hull pour deux minutes.


M. Roch Cholette (réplique)

M. Cholette: Premièrement, j'invite la ministre à bien comprendre ce qui se passe à Ottawa. Elle va arrêter de dire à peu près n'importe quoi. Premièrement, il n'y a pas encore de fusion forcée, il y a trois scénarios sur la table. Deuxièmement, c'est le voeu de la population. Troisièmement, 70 % de la fiscalité était déjà regroupée au supramunicipal, bien loin de ce qui se passe présentement ici. Alors, qu'on arrête de charrier puis de dire à peu près n'importe quoi sur la fusion d'Ottawa.

Deuxièmement, en ce qui a trait à ma position là-dessus, je la mets au défi de me sortir une citation où j'ai dit que j'étais d'accord avec ça.

On va continuer. Quand on lui parle des fusions avec beaucoup de réussite, pourquoi est-ce qu'elle oublie de citer Baie-Comeau–Hauterive? Pourquoi est-ce qu'elle oublie aussi de citer que c'est son gouvernement qui a défusionné des villes au Québec comme, par exemple, Buckingham-Masson-Angers? Comme, par exemple, Cantley, dans la municipalité de Gatineau? Comment se fait-il qu'elle tait cette réalité où c'est son gouvernement qui a défusionné des municipalités?

M. le Président, il faut arrêter de charrier. Mais savez-vous quoi? On se retrouve dans un vrai film de science fiction. En anglais, le film s'appelle «Back to the Future». Puis, en français, c'est «Un retour vers l'arrière». Parce que, dans le fond, le gouvernement est en train de gérer le monde municipal avec les deux yeux braqués dans le rétroviseur. Puis elle nous cite des exemples de 1940 pour justifier un geste en 1999, parce que la vision du gouvernement péquiste, c'est justement de regarder en arrière et être nostalgique à des années où est-ce que ça allait peut-être mieux dans son cas, alors que présentement la situation actuelle dans le monde municipal ne favorise, mais pas du tout, ce genre d'activité là.

Et savez-vous ce qui est le plus bizarre dans tout ça? C'est qu'on choisisse Mont-Tremblant pour dire: Il faudrait vraiment fusionner pour être forts ensemble, alors que c'est le même lieu qu'ils ont décidé d'utiliser pour faire un forum sur le fédéralisme où est-ce qu'ils sont venus dire que la meilleure façon de gérer nos choses, c'est en défusionnant le Canada, c'est en séparant le Québec du Canada et en acceptant un résultat de 50 plus un à un référendum qu'ils tiendraient, alors qu'ils refusent de répondre à un résultat référendaire de 96 % où les gens ont dit non à un référendum. Pourquoi deux poids, deux mesures? Pourquoi Tremblant d'une façon et le reste du Québec d'une autre façon, M. le Président?


Coût, contenu et diffusion du rapport annuel du Musée du Québec

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Hull. Nous allons entreprendre le troisième débat. Mme la députée de Sauvé interrogera la ministre de la Culture – ah bon, alors c'est Mme la ministre des Affaires municipales – concernant la publication à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires du rapport annuel 1998-1999 du Musée du Québec. Je cède la parole d'abord à Mme la députée pour cinq minutes.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Effectivement, lors du dernier week-end, nous avons trouvé dans deux grands quotidiens du Québec un encart haut en couleur qui porte le titre suivant: Rapport annuel 1998-1999 du Musée du Québec . Ce même rapport avait été déposé ici, en Chambre, tel que l'exigent nos règlements, avec en annexe plus de détails, entre autres sur la situation financière du Musée. Donc, nous pouvons vraiment considérer ce document comme le rapport annuel du Musée du Québec.

M. le Président, le format assez luxueux de ce document en a impressionné plus d'un et fait en sorte qu'on s'est posé des questions. Et nous sommes allés voir les directives du Conseil du trésor qui concernent la production et la distribution des rapports annuels des ministères et organismes du gouvernement, et ces directives nous disent qu'un rapport annuel doit respecter des normes, entre autres graphiques et techniques, qui sont décrites dans la directive.

Et je vais vous donner un exemple. Par exemple, un rapport annuel, le tirage est fixé à un maximum de 600 exemplaires. Je vais peut-être, juste avant de continuer, vous citer aussi l'extrait. La directive du Conseil du trésor, c'est la directive 182916, du 27 avril 1993. Donc, cette directive dit que le tirage d'un rapport annuel est fixé à un maximum de 600 exemplaires. Or, le rapport annuel du Musée du Québec a été distribué à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires. Ça dit aussi que les illustrations et les photographies ne sont pas permises.

Or, le rapport du Musée en compte 36, dont une de la ministre de la Culture, une du premier ministre, en page 10, et aussi une autre – bizarre! – du ministre de la Sécurité publique. Ça dit aussi que les rapports annuels doivent être produits de la façon la plus économique possible, et c'est là-dessus aussi où on s'est posé des questions. Ça dit également qu'un rapport annuel devrait être produit et distribué par Les Publications du Québec, ce qui n'a pas été le cas dans la production du rapport annuel du Musée du Québec.

Laissez-moi, M. le Président, vous montrer ce à quoi ressemble habituellement un rapport annuel, c'est plutôt à ceci. Je vous présente le rapport annuel 1998-1999 du Conseil des aînés. Donc, ce rapport correspond en toutes lettres aux exigences du Conseil du trésor. Vous remarquez sa couverture sobre, aucune photographie, aucun graphique.

(18 h 30)

Et on s'attend à ce que la ministre des Affaires municipales, que ce gouvernement a désignée pour répondre à des questions touchant le dossier de la culture... Bien, il y a peut-être une réponse qui sera acceptable, qu'on espérait recevoir cet après-midi de la ministre de la Culture lors de la période de questions, et c'est le fait qu'il y ait eu dérogation, parce que le Conseil du trésor... Je vous lis ici un extrait du Recueil des politiques de gestion. On dit bien que le Conseil du trésor peut autoriser des dérogations particulières aux règlements et aux directives, ce qui nous permet, là, vraiment de spécifier qu'une directive du Conseil du trésor doit être respectée, qu'elle a pratiquement statut de règlement et que c'est par dérogation particulière aux règlements, aux directives que l'on peut se soustraire aux directives du Conseil du trésor. Donc, s'il y a eu dérogation du Conseil du trésor – là, le ministère de la Culture a eu l'après-midi pour préparer la réponse de la ministre des Affaires municipales – on s'attend à ce qu'il y ait dépôt de la directive en cette Chambre et on s'attend aussi à ce qu'il y ait plus de détails sur le coût de production de ce document.

La ministre de la Culture, cet après-midi, nous a mentionné des coûts de 70 000 $ en production. Il est clair qu'elle n'a pas mentionné également d'autres sortes de coûts, les coûts de la distribution de ce rapport dans deux grands quotidiens francophones du Québec. Et aussi la ministre a spécifié que, pour elle, ceci n'était pas tout à fait un rapport annuel mais bien un outil de promotion, puis elle a dit: C'est parce qu'on va le distribuer à une échelle internationale. Donc, il doit y avoir un programme, un plan de distribution de ce rapport. On aimerait savoir où est-ce qu'il sera distribué, à quels coûts, d'ailleurs, parce que nous en arrivons, M. le Président, vraiment à une question de coûts et de choix des dépenses de ce gouvernement. Ce gouvernement a toujours de l'argent pour lui, hein, pour réaménager des bureaux de ministre, par exemple, comme ça a été le cas dans le cas de la ministre de la Justice, pour avoir accès, par exemple, à des jugements de tribunaux pendant que le citoyen ordinaire, lui, n'y aura pas accès, comme l'a démontré mon collègue le député de Marquette lors de la période de questions cet après-midi. Là, bien, on avait de l'argent pour produire un rapport annuel qui est, en fait, clairement un outil de propagande pour les ministres du gouvernement du Parti québécois.

Donc, il est clair que ce gouvernement a toujours de l'argent pour lui personnellement mais jamais d'argent pour le citoyen, et, entre autres, pas beaucoup d'argent pour l'artiste. Et, si ceci n'est pas un outil de promotion, est-ce que la ministre des Affaires municipales peut vraiment nous expliquer sérieusement la place de la photo du ministre de la Sécurité publique dans un rapport du Musée du Québec?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Sauvé. Je vais céder la parole à Mme la ministre des Affaires municipales.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, c'est quand même un juste retour des choses que la ministre de la Culture soit présentement à Montréal pour inaugurer le Salon du livre de Montréal et qu'en tant que ministre de la Métropole je sois ici ce soir pour répondre aux questions posées par l'opposition. J'ai eu, moi, le bonheur de recevoir, la fin de semaine dernière, à Montréal, dans l'encart d'un grand quotidien, ce magnifique outil de promotion et je comprends que l'argent qui a été utilisé est de l'argent qui va bénéficier à 180 000 lecteurs, parce que c'est de ça qu'il s'agit.

M. le Président, je voudrais vous montrer les deux pièces à conviction. Il s'agit du rapport annuel, qui respecte en tous points les directives drabs qu'on peut émettre en termes de rapport annuel, et il s'agit de ce magnifique outil promotionnel du Musée du Québec dont je rêve de voir le Musée des beaux-arts de Montréal s'inspirer. D'abord, clarifions une chose au départ: pas besoin de dérogation, puisque le Musée du Québec est un organisme non budgétaire. Donc, c'est un organisme qui n'est pas assujetti aux directives du Conseil du trésor. Bien qu'il ne le soit pas, cependant, il s'en inspire fortement, et, à preuve, évidemment, ce document.

M. le Président, c'est un document promotionnel que le Musée du Québec a créé, et c'est un outil de promotion de sa mission éducative, et c'est une diffusion à l'échelle de l'ensemble du Québec. Le coût total – puisque cela semble préoccuper l'opposition – du document, incluant la fabrication, le graphisme, l'impression et la distribution, s'élève à 70 000 $, dont 5 000 $ du budget des Amis de la fondation du Musée du Québec. Il s'agit d'économies appréciables qui seront réalisées. Ce sont des économies. Pourquoi en est-il ainsi? Parce que ce budget émarge au budget de communication du Musée et que ce budget de communication du Musée avait déjà prévu la promotion de l'exposition Tissot, intitulée Les beautés de la vie moderne , dont la promotion, en fait, la publicité spéciale sera inaugurée au Musée du Québec le 15 décembre, et c'est une publicité qui a été élaborée en vue de soutenir le tourisme d'hiver à Québec. Alors, c'est une exposition qui débutera le 12 mars prochain.

Il faut savoir que le document a été conçu comme un outil de présentation du Musée à l'étranger et auprès d'institutions partenaires qui ne sont pas familières avec le Musée. En une quinzaine de pages, ce document promotionnel présente un portrait complet de l'institution, et il est prévu qu'il serve à cette fin de présentation au cours des trois prochaines années, ce qui va représenter une économie indéniable par rapport aux coûts de réalisation d'un livre institutionnel. Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, cet outil de promotion va certainement avoir des retombées significatives et positives pour Québec et sa région.

Ai-je besoin de vous rappeler à quel point les expositions ont un impact sur l'augmentation de la présence touristique? À preuve, évidemment, l'exposition Rodin. On sait qu'elle aura permis des retombées de 56 000 000 $ dans la région de Québec et qu'elle aura permis la mise en place d'un fonds de 300 000 $ permettant justement la conservation de tableaux. Et je comprends, M. le Président, que la députée de Bourassa a choisi de faire grief à la ministre de la Culture pour avoir finalement choisi une approche non conventionnelle, et je comprends que cette approche non conventionnelle, à tous égards, va rapporter au Musée de Québec, aux lecteurs, aux 180 000 lecteurs qui en ont bénéficié, va aussi diminuer les coûts promotionnels et, finalement, constitue certainement une initiative louable. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre des Affaires municipales, et je vais céder la parole à Mme la députée de Sauvé pour les deux dernières minutes de la séance.


Mme Line Beauchamp (réplique)

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je pense qu'on a eu droit, ici, à une très bonne démonstration de la façon de faire de ce gouvernement qui ne dit pas toute, toute, toute la vérité. Je vous rappelle, la ministre a pris les deux documents – moi, ils sont brochés – mais elle a dit: Voici les pièces à conviction. Puis, elle a présenté ce document blanc comme étant le rapport annuel. Or, ce document blanc, drab, comme elle l'a décrit, porte exactement le titre d'Annexe de rapport annuel. Mesdames, messieurs, c'est vraiment l'ensemble du document tel qu'il a été déposé en cette Chambre. Donc, il ne faudrait pas prendre la mauvaise habitude – mais elle est déjà fortement ancrée – de vouloir, là, faire détourner des choses puis, même si c'est écrit noir sur blanc, d'essayer de prétendre à la face de cette caméra que nous ne sommes pas ici devant le rapport annuel complet du Musée du Québec.

Moi, je veux inviter ce gouvernement vraiment à revenir un peu plus les pieds sur terre. Comme je le mentionnais, ici, on est vraiment devant un bon cas d'une décision douteuse de dépenses de l'argent public. Je le répète, ce gouvernement a toujours de l'argent, bizarrement, pour payer des publicités dans le journal, quand ça lui convient, pour, bien sûr, en profiter pour que, dans un rapport annuel, il y ait la photo du premier ministre, de la ministre de la Culture, du ministre de la Sécurité publique. Mais, pendant ce temps-là, M. le Président, bien, les artistes, eux, n'ont pas d'argent.

Il y a une crise importante d'Emploi-Québec qui affecte le milieu de la culture, il y a la crise dans les écoles qui fait en sorte que les artistes n'ont plus de boulot, puis ce rapport annuel, c'est la démonstration que ce gouvernement est déconnecté de la réalité. C'est la démonstration que ce gouvernement va mal parce que, lorsqu'on voit le premier ministre aller faire des entrevues pour montrer son côté humain à la télévision – même qu'ils mettent sa photo dans le Musée du Québec – je pense que c'est la démonstration que ce gouvernement-là va mal mais, surtout, M. le Président, qu'il est définitivement déconnecté de la réalité des artistes ici, au Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Sauvé. À l'heure qu'il est là, nous allons ajourner à mardi prochain, 10 heures. Bonne fin de semaine à tous, et bon vendredi!

(Fin de la séance à 18 h 40)


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