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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Wednesday, November 3, 1999 - Vol. 36 N° 58

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures une minute)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants. Merci. Veuillez vous asseoir.


Affaires du jour


Affaires inscrites par les députés de l'opposition


Motion proposant que l'Assemblée fasse sien le constat des promesses non tenues par le gouvernement à la suite du Sommet socioéconomique de 1996

À l'article 37 de votre feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec fasse sien le constat généralisé des promesses non tenues par le gouvernement péquiste suite au Sommet socioéconomique de 1996.»

À la suite d'une réunion avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat, le partage du temps a été établi de la façon suivante. L'auteur de la motion disposera d'un droit de réplique de 10 minutes; cinq minutes sont allouées au député indépendant; 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement; et 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes s'ajoutera à celui de l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par le député indépendant pourra être redistribué entre les groupes parlementaires. De plus, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, nous célébrions un anniversaire hier, un troisième anniversaire du Sommet économique qui s'est tenu à Montréal en 1996. Ça avait été, si on se rappelle, un événement marquant et un événement remarqué, qui était télévisé, où on avait convié tous les leaders d'opinion, que ce soit du milieu des affaires, du milieu syndical, du monde de l'économie sociale. Il y avait des représentants d'étudiants et de groupements de femmes. Enfin, tous les leaders d'opinion se retrouvaient autour de cette table avec comme but d'essayer de trouver une façon de réduire l'écart qui séparait la performance du Québec de la performance dans l'ensemble du Canada et des principaux partenaires commerciaux au niveau de l'emploi, au niveau de la pauvreté, au niveau du fardeau fiscal, au niveau du déficit et au niveau des investissements. Or, qu'est-ce qu'on peut conclure trois ans plus tard de cet exercice qui avait absorbé tant d'énergie, tant de préparation et autant de temps? Eh bien, quant à nous, au Parti libéral du Québec, nous concluons que le suivi de cette démarche-là s'est accompagné d'un déficit au niveau de l'emploi, un déficit au niveau des investissements et un déficit au niveau du fardeau fiscal.

Je me pencherai principalement au niveau du déficit sur le fardeau fiscal des Québécois. L'écart entre le Québec et le Canada s'est agrandi de façon importante. L'écart qui nous séparait, en 1995, au niveau du fardeau fiscal, était de 1 900 000 000 $, l'écart entre le Québec et l'Ontario. Cet écart aujourd'hui entre le Québec et l'Ontario est de 5 500 000 000 $. Qu'est-ce que ça veut dire, cet écart? Cet écart, M. le Président, c'est essentiellement appliquer au Québec le taux de taxation qu'on impose aux Ontariens et appliquer le même taux de taxation aux Québécois. Donc, l'écart est aujourd'hui de 5 500 000 000 $.

On voit donc qu'il y a eu un élargissement de cet écart et que, effectivement, par rapport à nos concurrents commerciaux, la situation s'est nettement détériorée. D'ailleurs, ce qui est intéressant, c'est que le gouvernement de l'Ontario s'apprête encore à baisser les impôts de 20 % alors qu'il avait déjà baissé les impôts de 30 %. Alors, on se rend compte que cet écart, qui est de 5 500 000 000 $ aujourd'hui, bien, il va se traduire par un écart de près de 8 000 000 000 $. Alors, c'est très important, c'est très important non seulement avec notre partenaire commercial qu'est l'Ontario, mais c'est également très important avec d'autres partenaires commerciaux, notamment nos voisins avec qui nous faisons de plus en plus de commerce, c'est-à-dire les États-Unis, qui accaparent, suite à l'Accord de libre-échange, une partie de plus en plus importante du commerce international que nous faisons avec eux.

Qu'est-ce qui s'est passé, M. le Président? C'est que cet écart se traduit par une augmentation au niveau de l'impôt des particuliers qui est substantielle. Qu'est-ce que ça veut dire, 5 000 000 000 $ de plus pour l'ensemble des Québécois? Cela veut dire que, pour les Québécois qui sont des payeurs d'impôts, généralement entre 20 000 $ et 100 000 $, cela se traduit par une diminution des impôts de 1 600 $ en moyenne. Essentiellement, c'est un calcul simple. Ce n'est pas ce qui arriverait si on remettait l'argent aux citoyens; on présume qu'on pourrait utiliser une formule différente. Mais, ayant pris une formule fort simple, prenons le 5 500 000 000 $ et une simple division arithmétique avec le nombre de Québécois qui paient de l'impôt, on arrive à 1 600 $ par payeur d'impôts, net. Qu'est-ce que c'est, ça, 1 600 $ par payeur d'impôts, net? C'est l'équivalent d'une augmentation salariale de 3 000 $. Quand on pense à toutes les cotisations que nous payons lorsque nous avons un revenu, c'est l'équivalent d'une augmentation de salaire de 3 000 $. Donc, l'écart qui s'est agrandi et qui est passé de 1 900 000 000 $ à 5 500 000 000 $, ça s'est traduit par un appauvrissement des Québécois, un appauvrissement qui fait que le revenu net par rapport à leurs voisins, nos voisins les Ontariens, s'est nettement détérioré.

Rappelons-nous d'ailleurs, M. le Président, qu'on a l'impression parfois que ce sont les riches Québécois qui paient de l'impôt et que ce sont les gens qui gagnent 100 000 $, 50 000 $. Rappelons-nous que l'impôt des contribuables est payé à 50 % par les gens qui gagnent entre 20 000 $ et 50 000 $ par année et que l'autre 50 % est payé par ceux qui gagnent au-dessus de 50 000 $. C'est donc dire que ce dont je parle, le 1 600 $ par personne, net, après impôts, ça s'applique également aux gens qui gagnent 20 000 $. Alors, ce n'est pas négligeable comme écart. C'est la raison pour laquelle je pense qu'il est important de soulever l'urgence de baisser les impôts, ce pourquoi il faut baisser les impôts. Il ne faut pas les baisser l'an prochain, il faut commencer maintenant.

(10 h 10)

Il faut commencer maintenant. Et d'ailleurs, c'est intéressant de remarquer que même le premier ministre Bouchard, qui avait ridiculisé le programme du Parti libéral lors de la dernière campagne électorale, donc je disais qu'il avait ridiculisé la proposition que le Parti libéral faisait de baisser les impôts, eh bien, il reconnaît aujourd'hui les vertus de baisser les impôts à l'effet que ça crée de l'emploi. C'est comme une découverte spontanée, subite, que réussit à observer le premier ministre.

Pourquoi baisser les impôts et surtout pourquoi baisser les impôts maintenant? Pourquoi il est urgent d'apporter un correctif et de le faire de façon organisée, suivant un plan établi sur cinq ans, établi sur sept ans? Il est important de le faire pour notamment apporter au Québec un changement de vision, apporter un virage, apporter un espoir que nous allons pouvoir nous comporter autrement et effectivement pouvoir espérer avoir plus d'argent dans nos poches.

Pourquoi baisser les impôts? Bien, parce qu'il a été souvent démontré... Je pense qu'il ne faut pas avoir suivi de grands cours d'économie pour savoir que, quand on baisse les impôts, on crée de l'emploi. Ça, c'est reconnu: Si vous voulez diminuer vos revenus d'État, souvent vous augmentez vos impôts, et, chose étrange, vos revenus peuvent tomber.

D'ailleurs, ce qui est remarquable, c'est que nos voisins de l'Ontario, qui ont baissé leurs impôts de 30 % et qui ont mené l'ensemble de leur fardeau fiscal à 44 %, par ailleurs, ils ont créé, depuis janvier 1996, 540 000 emplois. Alors, vous voyez qu'on peut diminuer les impôts, augmenter d'ailleurs ses revenus parce qu'on augmente l'emploi. Et, si on augmente l'emploi, c'est qu'on multiplie le nombre de contribuables qui paient de l'impôt. Et c'est la raison pour laquelle on dit que l'impôt tue l'impôt, parce que, à un moment donné, les gens diminuent leur semaine de travail, les gens trouvent qu'il n'est plus intéressant de travailler plus fort, donc manquent de motivation pour travailler plus fort et plus longuement, et c'est la raison principale pourquoi souvent, également, tout à coup, se développe un marché noir, un marché clandestin où on s'échange des services sans payer nos impôts.

Alors, c'est la raison pour laquelle, baisser les impôts, il y a des vertus, il y a des vertus importantes qui s'accompagnent de bénéfices importants tant au niveau de l'emploi et également au niveau des investissements. Parce que non seulement on veut créer de l'emploi et que cela peut paraître farfelu de le dire, mais, quand on laisse de l'argent aux citoyens qui font des choix, on leur laisse la chance, à ce moment-là, d'investir et, quand ils investissent... parce que, s'ils ne le dépensent pas, automatiquement, ils peuvent investir, et des investissements également créent de l'emploi. Alors, non seulement la consommation crée de l'emploi, mais l'investissement crée l'emploi.

Donc, pour créer de la richesse, pour redistribuer la richesse... Parce que, des impôts, il y a des vertus à taxer les gens, ça remplit un rôle important dans notre société. Les gouvernements sont là pour redistribuer de la richesse; donner des services, mais notamment redistribuer la richesse entre les citoyens. Or, qu'est-ce qu'on remarque, quand on voit que tout à coup on est plus riches? C'est qu'il s'avère qu'on redistribue la pauvreté. Et, quand on essaie de redistribuer la pauvreté, effectivement, ça nous donne moins de ressources et ça nous donne évidemment moins de marge de manoeuvre pour offrir des services de qualité aux citoyens, notamment des services publics auxquels les citoyens sont en droit de s'attendre et auxquels nous nous sommes habitués à travers les années, des services de très grande qualité.

Alors, je dis que c'était une opportunité manquée. C'était une opportunité manquée parce que nous avions l'occasion de faire un virage important. Et, aujourd'hui, trois ans plus tard, nous voilà dans une consultation, une consultation importante pour baisser les impôts, au niveau des quatre prochaines années, de 1 300 000 000 $; donc, si ma mémoire est bonne, c'est quelque chose comme 500 000 000 $ ou 400 000 000 $ l'an prochain.

Je dis que c'est une opportunité manquée parce que, dans la vie d'une société, il y a peu d'occasions qui s'offrent où il nous est possible de baisser les impôts de citoyens sans en augmenter d'autres. Ordinairement, quand on fait des changements, c'est qu'on enlève à Pierre pour donner à Paul. Là, à cause d'un surplus important qui se dessine cette année et d'un surplus qui se dessine pour les cinq prochaines années, il est clair qu'on a une opportunité qui s'offre à nous, et il va falloir attendre en juillet prochain pour pouvoir bénéficier des baisses d'impôts.

Ce pour quoi il fallait le faire au dernier budget, au budget de mars l'an dernier, ce pour quoi il fallait aborder ce problème-là, c'est qu'il y a un vent de prospérité qui passe en Amérique du Nord, et d'ailleurs ça fait la première page de tous les journaux économiques. C'est sans précédent, la croissance économique. Et, quand on traverse une période de croissance économique de cette envergure, il faut savoir en profiter. Et, pour en profiter, il faut essayer de donner beaucoup de latitude au système pour qu'il puisse en profiter.

Or, c'est la raison pour laquelle je pense que nous ratons une occasion. Nous ratons une occasion parce qu'on nous a annoncé que nous aurions un déficit zéro encore l'an prochain alors qu'on sait qu'il y aura des revenus d'à peu près entre 700 000 000 $ et 1 000 000 000 $. Je nous le souhaite, que nous ayons un surplus de cette envergure, parce que ça donnera beaucoup d'air à respirer à tout le monde et ça ouvrira des portes. Mais, je pense, d'après toutes les prédictions qui sont faites, qu'elles viennent de l'économiste Pierre Fortin, qu'elles viennent de la Banque Royale, de chez John McCallum, que les pronostics sont très bons pour avoir des surplus importants. Or, hélas pour nous, c'est que le ministre des Finances décide de jouer, à mon avis, un jeu, le jeu de dire: Il n'y aura pas de surplus. Nous aurons un déficit zéro. Un peu comme l'an dernier, en décembre, il annonçait qu'il y aurait un déficit de 1 200 000 000 $ et, deux mois plus tard, il nous annonçait un déficit zéro. Alors, il fait la même opération aujourd'hui: il annonce un déficit zéro et il aura un surplus de près de 1 000 000 000 $. C'est donc dire, M. le Président, que nous manquons une occasion. Nous avons perdu une année, une année importante qui aurait pu constituer un virage important.

Pourquoi il faut baisser les impôts? Il ne s'agit pas de l'idéologie. Il ne faut pas être fanatique vis-à-vis de tout ça. Ce n'est pas écrit dans les livres, là, qu'il est absolument mauvais de taxer. Mais ce qu'il est important de se rappeler, c'est que, à un moment donné, au niveau de la taxation, il y a une perte. Il y a une perte. Vous investissez 1 $ de services et, d'après toutes les études qui ont été faites, en particulier à l'OCDE, il en coûte 1,40 $, pour des raisons qu'on a de la misère à s'expliquer. Et d'ailleurs, dans certaines sociétés... on a vu dans les sociétés communistes où tout était centralisé et dépensé publiquement qu'il y avait des pertes énormes, et on a vu des entreprises devenir des opérations vétustes et on a vu des rendements absolument décroissants, au niveau des rendements.

(10 h 20)

Alors, essentiellement, M. le Président, ce que je dis, c'est que nous avons raté une occasion, depuis trois ans que nous avons un déficit au niveau du fardeau fiscal, et il va falloir qu'on fasse un virage important, un virage quant au poids de l'État; il faudra faire les choses autrement.

Je sais que tout le monde regarde des avenues nouvelles pour réinventer notre façon de faire, réinventer le gouvernement. Il y a eu un ouvrage que je recommande à bien des gens de lire, le livre de Osborne et Gaebler, Reinventing Government , qui est un ouvrage intéressant, et, dans cet ouvrage, on fait la démonstration que les services publics peuvent être parfois excellents et très compétitifs. Mais il faut qu'il y ait de la concurrence. C'est ça qui est important, il faut qu'il y ait de la concurrence, et, quand il y a de la concurrence, tout le monde s'ajuste à cette concurrence.

Alors, M. le Président, je n'ai pas parlé, et je vais en parler très brièvement, du taux de taxation pour certains groupes de citoyens, suivant l'étude qui a été faite, et qui est reconnue de tous maintenant, des taux de taxation à 100 % pour certains individus. Je sais pertinemment que c'est là un problème difficile à solutionner, mais il est clair que des taux de taxation à 100 % créent des désincitatifs au travail, des désincitatifs importants et qui contribuent à empêcher les gens d'avoir recours à de nouveaux défis, à de nouvelles expériences et certainement de vouloir travailler plus fort. Autrement dit, on vous dit: Tu es mieux de ne pas travailler plus fort, rester à la maison, travailler 35 heures au lieu de 45 heures, c'est parfait. Parce que le dollar additionnel que cette personne-là pourrait faire serait taxé à 100 %.

D'ailleurs, il y a des gens, et il y en a beaucoup plus qu'on pense... On m'avait dit à un moment donné qu'il y avait très peu de familles qui étaient taxées à plus de 100 %, bien, plus de 75 %, il y aurait plus de 300 000 familles. Alors, ce n'est pas négligeable comme problème. Ce sont des taux absolument aberrants de taxation, et il va falloir apporter des correctifs à ce point. C'est la raison pour laquelle, M. le Président, je dis qu'il y a un déficit au niveau du fardeau fiscal.

Essentiellement, à titre de conclusion, un système d'impôts doit être juste, efficace, économique et simple. Je dirais que notre système d'impôts est injuste, inefficace, antiéconomique et complexe. En somme, je dirais que, du Sommet économique, la note de passage que je donnerais, c'est E pour échec.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et critique officiel de l'opposition en matière de finances. Nous allons maintenant céder la parole au président du Conseil du trésor. M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: Merci, M. le Président. En 1996, le gouvernement du Québec a tenu deux grandes conférences socioéconomiques qui ont porté respectivement sur les finances publiques et sur l'économie et l'emploi. Ce fut alors un grand moment, un grand moment politique au Québec, une réorientation importante. Le Québec était alors confronté à quatre difficultés majeures: la première, un déficit budgétaire chronique; deuxièmement, une croissance anémique de l'emploi; en troisième lieu, des services publics inadaptés aux besoins de la société d'aujourd'hui; un climat de morosité qui touchait singulièrement la région de Montréal. C'était l'héritage des libéraux.

Nous venons d'entendre la critique du Parti libéral. Je ne peux m'empêcher de penser que, quand on ne peut plus mal faire par soi-même, on se met à donner des conseils aux autres. Ils en sont l'illustration vivante, M. le Président.

Des voix: Bravo!

M. Léonard: Devant l'ampleur du défi à relever, il fallait mobiliser tous les Québécois pour renverser de telles tendances en sollicitant d'eux un immense effort collectif. Le gouvernement, dans ce contexte, qui était pressé et désireux d'agir, à l'inverse de nos prédécesseurs, l'a fait avec les représentants de tous les secteurs de la société, et ce fut alors une vaste opération de concertation qui a été couronnée de succès, malgré ce que les adversaires en disent.

Lors de ces sommets, des consensus ont été élaborés entre le patronat, les grandes centrales syndicales, divers groupes sociaux et évidemment le gouvernement. Ces sommets ont été l'occasion de poser un diagnostic sur l'économie québécoise, de proposer des orientations pour la création d'emplois, de présenter aussi des projets spécifiques à cet effet. Et ces sommets ont donné lieu à des engagements du gouvernement sur des modifications à apporter à son intervention et à des actions qui étaient immédiates.

Ce Sommet sur l'économie et l'emploi a mené à des gains majeurs pour la société. Le plus bel exemple est sans doute l'atteinte du déficit zéro un an plus tôt que prévu, avec une rigueur et un souci d'équité qui ont été soulignés par de nombreux observateurs. M. le Président, on a toujours tendance à rappeler que nous avons résorbé un déficit des libéraux de 5 800 000 000 $, mais il ne faut jamais oublié que, durant la même période, le gouvernement fédéral, en termes récurrents, a diminué ses transferts de 4 200 000 000 $. L'effort total du Québec au titre de l'assainissement des finances publiques, année après année, a été de 10 000 000 000 $, plus du quart du budget de programmes, M. le Président. Le Québec a réalisé ce redressement spectaculaire de ses finances publiques grâce à la force qu'a créée l'adhésion des grands partenaires du Sommet. Chacun a respecté sa parole sur ce plan-là. Ce fut un immense succès et c'est un immense succès de la concertation québécoise.

Les cibles de déficit par ailleurs ont été respectées à chaque année, ce qui n'est pas peu dire. Premier résultat: la confiance des marchés financiers continue de s'améliorer sous notre gouverne. Les deux grandes agences américaines de cotation de crédit, Moody's et Standard & Poor's, ont récemment reconnu l'amélioration des finances publiques au Québec en révisant favorablement la perspective associée à la cote attribuée au Québec. Moody's, en particulier, a indiqué ceci, je le cite: «Après plusieurs années de déficits budgétaires importants et récurrents, des efforts concertés ont permis d'aboutir à un budget équilibré sur la dernière année fiscale avec un an d'avance sur le calendrier prévu.» M. le Président, c'est là le succès. Ce n'est pas nous qui le disons, c'est Moody's, une agence internationale de cotation.

Le résultat de cette appréciation de nos finances publiques, c'est que le taux de rendement sur les titres du Québec, le taux d'intérêt a diminué. Maintenant, nous avons un écart qui est passé de 96 points de base en 1994 à 54 points seulement maintenant, en 1999, une amélioration significative, M. le Président. Donc, nos emprunts maintenant nous coûtent moins cher à cause de cet assainissement des finances publiques.

Je vais juste rappeler, M. le Président, que tout récemment il y a une émission mondiale d'obligations du Québec qui s'est faite très rapidement, portant sur 1 500 000 000 $US. On ne peut pas en dire autant du dernier mandat des libéraux alors que le Québec était plongé dans l'incertitude financière et que le déficit avait atteint le 6 000 000 000 $ en 1994-1995, que la dette totale avait plus que doublé. De 1985-1986 à 1994-1995, elle est passée de 31 000 000 000 $ à 75 000 000 000 $ durant cette période de 10 ans. La dette totale du gouvernement est passée, en pourcentage du PIB, de 29 % en 1985-1986 à 44 % en 1994-1995, héritage des libéraux encore une fois. Les dépenses avaient augmenté à un rythme supérieur à l'inflation entre 1985-1986 et 1994-1995. Et tout cela les avait conduits à augmenter les impôts de 10 000 000 000 $ durant la même période.

(10 h 30)

La conclusion, la conséquence, qui est évidente, c'est que le Québec a connu six décotes par les agences de crédit durant la même période.

Lors du Sommet, les partenaires ont convenu que le gouvernement du Québec devait poursuivre la lutte au travail au noir et à l'évasion fiscale. Les mesures que nous avons prises pour enrayer l'économie souterraine ont permis de récupérer 1 200 000 000 $ pour l'année financière 1998-1999. Nous avons mis fin au laxisme des libéraux de plusieurs années.

Le fardeau fiscal, c'est dans la motion de blâme des libéraux, on va en parler. Le fardeau fiscal des Québécois est trop élevé, nous le reconnaissons tous. On l'a mentionné lors de la Commission sur la fiscalité en 1996, nous y sommes revenus dans Objectif emploi et, dans le document de consultation qui a été déposé au dernier discours sur le budget, nous avons fait la même constatation et nous avons convoqué une commission parlementaire sur cette question, qui a siégé durant le mois d'octobre, M. le Président.

Malgré l'effort budgétaire récurrent annuel de 10 000 000 000 $, nous avons posé des gestes concrets. Au budget de 1997-1998, nous avons annoncé une réduction de 6 % des impôts des particuliers, 841 000 000 $, M. le Président, en valeur récurrente. Dans le discours du budget de 1999-2000, nous avons annoncé une réduction d'impôts supplémentaire de 3 %, une baisse de 400 000 000 $. Nous nous sommes engagés, au cours de la dernière campagne électorale, à réduire les impôts de 15 %.

M. le Président, la commission parlementaire siège, les conclusions en seront tirées, mais notre priorité, c'est de réduire le fardeau fiscal des particuliers tout en préservant les acquis en termes de services publics. L'Ontario a réduit l'impôt, mais elle a maintenu son déficit, mais le Québec, lui, a éliminé son déficit. Grosse différence, M. le Président. Le Sommet de 1996 avait privilégié l'élimination du déficit plutôt que les baisses d'impôts empruntées, c'était notre cas, et, par suite du lourd fardeau que nous ont laissé les libéraux, il était évident qu'il fallait placer la priorité là où on l'a placée, c'est-à-dire l'assainissement des finances publiques d'abord.

Par ailleurs, notre gouvernement s'est engagé, lors de ce Sommet, à revoir sa politique économique. Nous avons révisé toute la stratégie de développement économique, et cette opération ne s'est pas faite en vase clos, loin de là. Plusieurs experts ont été invités à creuser diverses questions et à donner leurs avis sur les orientations à venir, ce qu'ils ont fait, et ils ont contribué ainsi à l'élaboration de la stratégie.

En particulier, dans le document Objectif emploi , que nous avons déposé au budget de 1998-1999, plusieurs gestes concrets ont été posés pour la mise en oeuvre de cette stratégie, malgré le passage obligé par le ménage des finances publiques encore une fois: d'abord, une réforme de la fiscalité des entreprises qui s'est traduite par une réduction de 397 000 000 $ de la taxe sur la masse salariale et de la taxe de vente pour les PME; qui s'est traduite aussi dans des mesures pour le développement du secteur financier; qui s'est traduite dans des mesures pour le développement des secteurs de la nouvelle économie, en particulier des CDTI et de la Cité du multimédia, qui est un succès phénoménal à Montréal; qui s'est traduite aussi par un plan d'action en matière d'allégements réglementaires, par un appui à la création de stages, par une augmentation du salaire minimum, par la réduction progressive de la durée de la semaine normale de travail de 44 heures à 40 heures par semaine, ce qui était un engagement du Sommet économique de 1996, M. le Président.

Nous avons également créé de nouveaux outils pour accroître les investissements privés, nous avons regroupé un bon nombre de sociétés d'État sous la SGF, nous avons créé Investissement-Québec et nous avons prolongé, jusqu'ici en tout cas, le programme FAIRE. Nous avons misé davantage sur les partenariats technologiques et sur la nouvelle économie. L'objectif était de susciter pour 19 000 000 000 $ d'investissements privés sur cinq ans.

Le bilan. Le bilan, au mois de juin dernier, révèle que 3 000 projets ont été approuvés, qui totalisent 4 200 000 000 $ de nouveaux investissements, et qui seront déclenchés. À terme, ces projets vont entraîner la création de plus de 24 000 emplois et les projets actuellement à l'étude représentent un minimum de 11 000 000 000 $ d'investissements.

Selon le magazine Site Selection , l'édition de mai 1999, Investissement-Québec se classe au rang des 10 meilleures agences de développement économique en Amérique pour l'année 1998. Un succès, M. le Président! Ce n'est pas nous qui le disons, c'est d'autres.

En 1998, simplement pour exemple, le rendement de la SGF s'établit à 8,2 %, un rendement intéressant. Et donc, en 1998, les investissements privés du Québec ont augmenté de 4 %, alors qu'ils ont diminué au Canada de 0,1 %.

En 1999, les investissements privés augmenteront plus rapidement au Québec, c'est-à-dire de 9,4 %, plus qu'en Ontario dont l'augmentation est de 8,1 %, et plus qu'au Canada où l'augmentation est de 6,4 %. C'est la première fois depuis 10 ans qu'on constate un tel phénomène. Les dirigeants d'entreprises ont confiance en notre économie. Ils investissent avec nous dans l'avenir.

Et l'économiste de Desjardins, M. Soucy, économiste en chef, dit ceci dans La Presse du 27 octobre: «La croissance des investissements au Québec s'approche de celle des États-Unis. On fait presque aussi bien, ce qui est nettement plus fort que dans le reste du Canada.»

Faut-il rappeler, M. le Président, que, lors du dernier mandat des libéraux, les investissements privés au Québec chutaient trois fois plus rapidement au Québec qu'au Canada? C'est, encore une fois, l'héritage libéral.

Une autre façon de voir les choses. Le ou la critique dit que les investissements privés en pourcentage du PIB sont plus faibles au Québec qu'au Canada. Je lui dirai ceci: Le taux d'investissements privés au Québec est passé de 11,4 % en 1994 à 13,4 % en 1999, une hausse de deux points. Au Canada, le taux a augmenté de 1,5 % contre 2 % pour nous. Deux points de pourcentage pour nous. Et cela tranche avec la baisse de quatre points de pourcentage sous les libéraux. Moins quatre, les libéraux; nous, plus deux. Mieux que le Canada. Bonne différence, M. le Président! Pour des critiques, ils repasseront.

Le taux d'investissements à l'époque, lorsque les libéraux sont arrivés, était de 15,4 %, mais, quand ils ont laissé le pouvoir, il était descendu à 11,4 %. Nous l'avons repris de 11,4 % à 13,4 %. Plus deux points de pourcentage.

Autre élément. En 1998, le Québec a connu l'une des meilleures croissances des dix dernières années, un taux de croissance de 2,9 %. Le Canada a connu un taux de 3,1 %. Et, depuis le début de l'année, la croissance du Québec est supérieure à celle du Canada. Nous avons 3,7 %, le Canada a 3,4 %. Et, si on analyse la croissance par habitant, on observe, en 1998, une croissance supérieure au Québec qu'au Canada. C'est-à-dire que, par habitant, c'est 2,5 % au Québec, 2,1 % au Canada, de sorte que, entre 1994 et 1998, le PIB réel par habitant s'est accru plus rapidement au Québec qu'au Canada: notre croissance 7,4 %, au Canada 7,2 %.

(10 h 40)

Je reprends Desjardins, 8 septembre 1999, sa conclusion: «Le niveau de confiance des particuliers et des entreprises est au sommet de la décennie. Il n'est donc pas étonnant d'assister, depuis le début de l'année 1999, à une vive reprise de la demande intérieure annonciatrice de création d'emplois.» Conséquence aussi, M. le Président, cette performance économique a eu des impacts significatifs sur le marché du travail du Québec.

Les emplois. Ce qui intéresse les gens: en 1998, 67 000 emplois ont été créés, l'une des meilleures performances depuis 10 ans. Plus de la moitié chez les jeunes: 34 000 chez les jeunes, soit la plus forte création d'emplois chez les jeunes depuis les 25 dernières années. Depuis 25 ans, les jeunes n'avaient pas obtenu autant d'emplois qu'en 1998. Depuis le début de l'année 1999, la création moyenne d'emplois est de 70 000, tous des emplois à temps plein, et les jeunes ont continué de récolter près de la moitié des emplois créés, soit 26 900, c'est-à-dire, je mettrais le tiers plutôt.

Depuis que le taux de chômage a baissé sous la barre des 10 % en octobre 1998, soit il y a un an, le taux de chômage a été à 10 % ou moins à tous les mois, sauf en juillet où le chômage était de 10,4 %. Ce mois-ci, il a atteint son plancher, son plus bas niveau de la décennie: 9 %. Tout le monde dira que c'est encore trop, 9 %, on n'a pas connu ça depuis 10 ans.

Et ainsi, M. le Président, depuis le début de l'année, le taux d'emplois du Québec, 56,3 %, a atteint lui aussi son plus haut niveau depuis 1990. Le marché du travail se fait de plus en plus accueillant, puisque l'indice d'offre d'emplois ne cesse de s'améliorer depuis le début de l'année, soit plus 14 %.

M. le Président, je vous donne des chiffres parce que les libéraux font des discours. Je vous donne des résultats, M. le Président. Je sais que ça peut être lourd, mais il y a une réalité derrière ces chiffres. En 1998 aussi, conséquence de nos politiques de développement économique, d'investissements, d'assainissement des finances publiques, le Québec a connu sa plus importante baisse des prestataires à l'aide sociale, c'est-à-dire moins 9 %. Et, depuis le début de l'année, ce nombre continue de baisser, soit moins 8 %. Et il continue de baisser.

Depuis le Sommet, il y a eu une centaine de projets précis ou de mesures qui ont eu un effet direct sur l'emploi, qui avaient été annoncés lors du Sommet et qui ont permis la création de plus de 40 000 emplois, dont quelque 10 000 en relation avec l'économie sociale. Depuis le Sommet, 218 900 emplois ont été créés au Québec, de telle sorte que l'écart entre les taux de croissance de l'emploi au Québec et au Canada est moindre que celui qui était observé historiquement.

Depuis novembre 1996, à taux annualisé, la croissance de l'emploi au Québec a été de 2,4 % et elle est inférieure de seulement 0,2 % à celle du Canada qui est de 2,6 %. À l'encontre du portrait noir que veulent tracer les libéraux, je dirai aussi qu'entre 1976 et 1996 la différence était de l'ordre de 0,5 %. De plus, depuis novembre 1996, le taux de chômage a diminué plus fortement au Québec qu'au Canada. Au Québec, cette baisse a été de 3,6 %, pour atteindre 9 % en octobre dernier, alors que pour l'ensemble du Canada cette diminution était de 2,5 %. Le taux d'emploi, un autre indicateur majeur, a quant à lui augmenté davantage au Québec qu'au Canada au cours de la même période, soit une hausse de 2,4 % comparativement à 2,1 %.

Conclusion. Je ne la tirerai pas moi-même, M. le Président, je la ferai tirer par Desjardins: «La situation de l'emploi, qui s'est grandement redressée depuis trois ans, continuera de s'améliorer l'an prochain.» Ainsi, le taux de chômage moyen au Québec s'établissait à 11,8 % en 1996, reculera à 9,3 % l'an prochain. Il devrait même briser le plancher des 9 % en deuxième moitié de l'an 2000, un niveau inégalé en près d'un quart de siècle. Et je parle là du taux de chômage moyen et non pas du taux atteint dans un mois, ce qui est une mesure importante et intéressante. M. le Président, je pourrais continuer sur cette lancée, citer des chiffres. Nous en avons, nous en avons à démolir n'importe quel discours des libéraux.

Qu'est-ce qui s'est passé juste dans les derniers jours? Je conclus là-dessus, mais c'est une conséquence de nos politiques. Dans les derniers jours, la société Nortel a annoncé hier la création de 1 450 emplois spécialisés à Montréal. La Société internationale de télécommunications aéronautiques de Montréal a annoncé lundi la création de quelque 200 postes à Montréal d'ici 2001, des investissements additionnels de 14 000 000 $ par année uniquement en salaires. L'entreprise Ultravision déménage de Calgary à Saint-Hubert. L'entreprise, qui fabrique et commercialise des lentilles cornéennes, investira 60 000 000 $ et elle s'engage à créer entre 130 et 150 emplois d'ici 2001. Elle a déménagé en particulier à cause de la qualité de la main-d'oeuvre. Ericsson a obtenu un nouveau mandat mondial de recherche et de développement. Le projet d'investissement s'élève à 196 000 000 $, 130 emplois. Excel, à Montréal, 284 emplois qui vont être créés au cours des trois prochaines années. Pheonix International, investissement de 56 000 000 $, 450 emplois d'ici cinq ans. Aliments Ultima, en Estrie, un autre investissement à Granby, avec Investissement-Québec, de 1 300 000 $.

M. le Président, ce sont les conséquences. Je pense qu'après avoir entendu tout cela mes collègues vont voter avec enthousiasme contre la résolution ou la motion de blâme des libéraux. Ils n'ont aucune raison de le faire, sinon de l'amertume, du regret. Et, comme je le disais au tout début, quand ils ne peuvent plus mal faire par eux-mêmes, ils se mettent à donner des conseils aux autres. Mais prenez garde de faire comme eux!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le président du Conseil du trésor. Nous allons maintenant céder la parole au député de Vaudreuil. M. le député.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Je suis heureux aujourd'hui d'intervenir sur la motion qui a été présentée par ma collègue de Marguerite-Bourgeoys pour constater l'échec du Sommet économique de 1996. En effet, en novembre 1996, on s'en rappellera, le gouvernement du Québec a convoqué un gigantesque sommet. C'était, disait-il, une concertation unique en Amérique du Nord, qui a suscité beaucoup d'espoir mais dont les résultats sont décevants.

Rappelons-nous qu'un des objectifs du Sommet économique qui avaient été fixés était que le Québec, sur le plan des indicateurs économiques, rattrape la moyenne de ceux du Canada. Or, trois ans après, nous devons constater que nous sommes très loin du compte et qu'encore une fois les promesses faites n'ont pas été tenues. Et nous nous retrouvons aujourd'hui avec un déficit important sur le plan du fardeau fiscal, sur le plan de la création d'emplois et sur le plan des investissements.

Ma collègue de Marguerite-Bourgeoys a abondamment démontré le déficit au niveau fiscal, et je ne reviendrai pas sur ce sujet, car il est clair, et elle l'a dit avec beaucoup de conviction, qu'un niveau aussi élevé est un frein à la création d'emplois et à la croissance économique. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si les sociétés les moins taxées sont aussi celles où on compte le moins de chômeurs. Le premier ministre et le ministre des Finances l'ont d'ailleurs reconnu en disant qu'une baisse d'impôts était requise pour générer et reprendre vraiment une croissance économique. Au lieu d'agir, évidemment le ministre des Finances a, encore une fois, dit: On va faire des consultations, même si déjà, en 1996, il y avait eu une commission sur la fiscalité.

(10 h 50)

La croissance économique, M. le Président, elle se mesure par divers indicateurs. Un des plus importants est celui de la croissance comparative du produit intérieur brut. Or, si nous examinons la croissance comparative du produit intérieur brut du Québec par rapport à la moyenne canadienne depuis 1995, donc depuis que le Parti québécois est au pouvoir, ce que nous pouvons constater, c'est que la croissance du produit intérieur brut du Québec est constamment en retard par rapport à la moyenne de la croissance du produit intérieur brut canadien. Si on regarde pour 1999, donc ce que le ministre a évoqué tantôt, c'est vrai, il y a eu au Québec une croissance du PIB de 3,5 %, mais au Canada elle a été de 3,8 %, maintenant encore l'écart qui existait dans les années antérieures.

L'estimé de 1999 de Desjardins, donc numéro des Études économiques d'octobre 1999: pour 1999, on prévoit pour le Québec 3,5 % de croissance de PIB, pour le Canada 3,8 %; et, si Desjardins fait la projection pour l'année 2000, 2,7 % pour le Québec, 3 % pour le Canada. Ce qui veut dire que nous maintenons l'écart négatif de croissance économique entre le Québec et le Canada.

Sur le plan de la création d'emplois, le grand Sommet de 1996 est un échec lamentable. Mon collègue de Mont-Royal en a fait la démonstration hier et en reparlera aujourd'hui. Simplement pour ajouter que l'écart négatif s'agrandit encore entre le taux de croissance de l'emploi au Québec depuis 1996 et le taux de croissance de l'emploi dans le reste du Canada.

Passons maintenant, M. le Président, aux investissements qui, vous le savez, constituent un facteur important de croissance économique et de création d'emplois. En 1999, les investissements privés au Québec représentent 9,5 % du PIB contre 11,6 % du PIB pour le Canada. Cette différence de 2,1 % signifie un déficit d'investissements de plus de 4 000 000 000 $. Si nous avions, en d'autres mots, au Québec, le même niveau d'investissements privés que la moyenne canadienne, nous aurions 4 200 000 000 $ d'investissements de plus.

Évidemment, le ministre des Finances nous dit que nous connaissons en 1998, légèrement, et en 1999 un taux de croissance annuel pour les investissements privés qui est supérieur, au Québec, à celui du Canada. Là, il nous dit: Écoutez, la situation est bien meilleure au Québec, vous le voyez, qu'elle ne l'est au Canada. Je pense que c'est un raisonnement qui est faux. On ne peut pas évaluer une croissance des investissements sur une année seulement; il faut établir des comparaisons sur plus d'une année. Je pense qu'on peut dire que, oui, nous sommes bons, mais il faut toujours se comparer aux autres pour voir si nous sommes aussi bons ou si nous les rattrapons.

Je vais prendre un exemple qui est très simple. Je pense que tout le monde peut comprendre. Vous avez deux élèves dans une classe et puis qui ont leurs notes de mathématiques dans le dernier bulletin. Le premier, lui, voit sa note passer, en mathématiques, de 30 % à 45 %. Donc, une croissance de 50 %, ce qui est extraordinaire. Le deuxième, lui, a déjà une note de 80 % au bulletin précédent. Là, il voit sa note passer à 88 %, une croissance de 10 %. Si le professeur regarde ça, est-ce que le professeur va nous dire que le premier élève, celui qui a obtenu une croissance de 50 % à un bulletin, est meilleur que le deuxième élève, lui, qui n'a obtenu qu'une augmentation de 10 %? Est-ce que c'est ça que le professeur va dire pour évaluer les deux élèves, dire: Bien, écoutez, oui, le premier est meilleur parce que la croissance de sa note est cinq fois plus grande que la croissance de la note du deuxième? Je pense, M. le Président, que poser la question, c'est y répondre.

Si on constate, depuis quatre ou cinq ans, l'évolution des investissements privés au Québec par rapport à la moyenne canadienne, on doit conclure qu'on n'a pas rattrapé le retard. Et là je voudrais prendre non pas, vous savez, un document qui a été élaboré par l'opposition officielle, mais un document intitulé Statistiques sur les investissements Québec-Ontario au Canada qui a été préparé en septembre 1999 par la Direction de l'analyse de la conjoncture industrielle du ministère de l'Industrie et du Commerce, qui a fait une révision à la mi-année des projections d'investissements.

Si nous allons au tableau 4, sommaire de cette publication du ministère de l'Industrie et du Commerce, ce que l'on constate, si on regarde le ratio des immobilisations du secteur privé, Québec versus Canada, les projections pour 1999 indiquent que les investissements du secteur privé au Québec représenteraient 18,3 % des investissements du secteur privé au Canada. Si nous reculons à 1994 – parce que le ministre aime toujours faire des comparaisons – cette proportion des investissements privés du Québec par rapport à l'ensemble des investissements privés au Canada était de 18,5 %.

Et je vous ferai remarquer qu'en 1995 – évidemment, l'année où s'est tenu le référendum – la proportion des investissements du secteur privé au Québec a chuté de 18,5 %, l'année précédente, à 17,1 %, en 1995, par rapport à l'ensemble des investissements privés au Canada. Et, partant de 17,1 %, nous sommes rendus à 18,3 %, mais nous n'avons pas encore rattrapé la proportion des investissements privés au Québec versus le Canada en 1994. Et ça, ce retard qui n'a pas été rattrapé, comme vous pouvez le constater, c'est malgré de nombreuses subventions que le gouvernement du Québec distribue largement à beaucoup d'entreprises présentement. Même à des entreprises qui, après coup, indiquent qu'elles auraient investi même sans subvention.

Par exemple, dans le cas de Cognicase, dans La Presse du mois d'octobre 1998, c'est-à-dire pour Spectra, à Boucherville, on dit: «M. le vice-président aux acquisitions a admis que Spectra aurait sûrement fait l'investissement même sans aide gouvernementale, car nous avons une des capitalisations les plus saines au Québec.» Dans le cas de Cognicase, on dit dans La Presse : «Sans doute, a reconnu Ronald Brisebois, président et chef de la direction de Cognicase, lors de la conférence où il annonçait la création de 2 000 emplois. Sans subvention aucune, Cognicase est passée de 150 à 1 500 employés en un an.»

Alors, pourtant, évidemment, le ministre des Finances continue de faire beaucoup d'inaugurations, des annonces, et à distribuer l'argent qui lui vient des contribuables, l'argent qui est perçu à même les taxes. Et on vous a parlé tantôt du fardeau énorme de taxes que nous avons au Québec. Nous sommes les plus taxés en Amérique du Nord. Et, pendant ce temps-là, vous savez ce qu'on remarque – et nous en avons discuté hier – même si nous continuons de donner des subventions, beaucoup plus largement que partout ailleurs en Amérique du Nord de façon générale, on constate que le total, le ratio des investissements privés au Québec n'a pas rattrapé le ratio des investissements privés par rapport à l'ensemble canadien que nous avions en 1994.

D'ailleurs, lorsqu'on regarde les projections de Desjardins auxquelles nous avons référé tantôt, on dit que, pour l'an prochain, pour l'année 2000, ce que l'on prévoit, c'est un ralentissement des investissements des entreprises au Québec: «L'avance du Québec s'estompera l'an prochain.» Donc, déjà, on prévoit un ralentissement pour l'an prochain, ce qui veut dire que nous aurons encore beaucoup plus de difficultés à rattraper notre proportion d'investissements privés par rapport à l'ensemble du Canada.

(11 heures)

M. le Président, simplement pour conclure que, dans le domaine des investissements, comme c'est le cas dans le domaine de la fiscalité et dans le cas de la création d'emplois, le gouvernement a un déficit important. On ne s'est pas rapproché de l'objectif – et on vous a rappelé au début les objectifs du Sommet – de vouloir combler de plus en plus l'écart qui existe entre le pourcentage d'investissements privés au Québec par rapport à l'ensemble des investissements privés au Canada. On est peut-être content de dire: Oui, écoutez, ça s'est amélioré pour un an ou deux, mais on doit l'évaluer sur une base à long terme, car, comme on dit, une hirondelle ne fait pas le printemps. Et, donc, dans ce sens-là, c'est encore un échec lorsqu'on fait la comparaison avec l'ensemble du Canada, tout en excluant l'Ontario, parce que, à ce moment-là, la comparaison révélerait un avantage négatif encore plus important. Donc, M. le Président, j'appuie sans aucune réserve la motion qui a été présentée aujourd'hui par ma collègue de Marguerite-Bourgeoys. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Vaudreuil. Nous allons maintenant céder la parole au leader adjoint du gouvernement, député de Gouin et également ministre de la Solidarité sociale. M. le ministre.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, après que les spécialistes des déficits se sont exprimés, il est temps de leur dire de s'ouvrir les yeux. M. le Président, les choses vont mieux au Québec. Et c'est peut-être d'ailleurs parce qu'elles vont mieux que vous avez remarqué comme moi que les porte-paroles libéraux qui se sont exprimés tout à l'heure l'ont fait avec si peu d'enthousiasme et si peu de conviction.

M. le Président, les choses vont mieux au Québec. En 1998, 67 000 emplois ont été créés. Il s'agit de l'une des meilleures performances depuis 10 ans. Et je suis fier de rappeler que plus de la moitié des emplois créés l'ont été chez les jeunes, soit la plus forte création d'emplois chez les jeunes depuis les 25 dernières années. Depuis le début de l'année, la création moyenne d'emplois est de 70 000, tous des emplois à temps plein. Et les jeunes, faut-il encore le rappeler, ont récolté près de la moitié des emplois créés, environ 27 000.

Et, depuis que le taux de chômage a baissé sous la barre des 10 %, en octobre 1998, soit il y a un an, le taux de chômage a été à 10 % ou moins à tous les mois, sauf une exception au mois de juillet. Et, ce mois-ci, il atteint son plus bas niveau de la décennie, 9 %. Ainsi, depuis le début de l'année, le taux d'emploi du Québec, à 56,3 %, a atteint son niveau le plus élevé depuis 1990. En 1998, et je suis bien placé pour en parler, le Québec a connu sa plus importante baisse de prestataires à l'aide sociale, soit moins 9 %, et, depuis le début de l'année, ce nombre continue de baisser.

Donc, M. le Président, concrètement, il y a plus de Québécois et de Québécoises qui sont sortis de la pauvreté. Il y a davantage de Québécois et de Québécoises qui ont recouvré de la dignité. Il y a davantage de Québécois et de Québécoises qui contribuent à faire tourner la grande roue de l'économie et qui y ajoutent, par la force de leur talent, par la force de leur imaginaire, qui, à chaque jour, construisent le Québec, et ce, à la hauteur de leurs ambitions.

Pourquoi, M. le Président, en est-il ainsi? En partie parce que, en 1996, le gouvernement du Québec a tenu deux grandes conférences socioéconomiques qui ont porté, faut-il se le rappeler, respectivement sur les finances publiques et sur l'économie et l'emploi. Et les députés qui ont pris la parole n'étaient pas à l'Assemblée nationale n'étaient pas actifs comme ils le sont aujourd'hui, auraient avantage à discuter avec leurs collègues qui étaient au pouvoir et qui ont connu la défaite électorale. Et le député de Mont-Royal connaît cette atmosphère; la députée aussi de Marguerite-Bourgeoys connaissait cette atmosphère. Ils ont eux-mêmes dénoncé le déficit budgétaire chronique auquel le Québec était confronté. Ils ont eux-mêmes dénoncé la croissance anémique de l'emploi au Québec. Ils ont eux-mêmes dénoncé des services publics inadaptés aux besoins de la société d'aujourd'hui. Et particulièrement pour ceux et celles qui vivent à Montréal, ils comprenaient très bien, et ils l'ont aussi dénoncé, le climat de morosité qui touchait singulièrement la région de Montréal.

Et c'est parce que nous faisions ce constat de l'inaction à l'époque des libéraux que nous avons tenu ce Sommet. Et on l'a fait parce que, devant l'ampleur des défis, M. le Président, nous avions la profonde conviction qu'il fallait mobiliser les Québécois et les Québécoises, parce qu'on ne renverse pas de lourdes tendances de façon simple. On renverse ces lourdes tendances uniquement au prix d'un immense effort collectif. Et, parce que nous étions pressés, parce que nous étions désireux d'agir, M. le Président, le gouvernement a organisé avec les représentants de tous les secteurs de la société une vaste opération de concertation qui fut couronnée de succès, et ça s'est appelé le Sommet de l'économie et de l'emploi.

Et cette mobilisation s'est aussi poursuivie. Le gouvernement et ses partenaires ont donné des suites concrètes à ce Sommet et aux engagements que nous avons contractés. Et, bien sûr, aujourd'hui, la société québécoise – et personne ne le prétend de ce côté-ci de l'Assemblée – n'a pas réglé tous ses problèmes. Mais le mouvement de relance et de reprise de confiance est, lui, définitivement lancé et il produit des effets tangibles. Le déficit budgétaire est éliminé. Les grands services publics sont en grande partie rénovés; je pense à la réforme de la sécurité du revenu, je pense à l'assurance-médicaments, je pense à la politique familiale. Je pense à bien d'autres services où, concrètement, nous avons agi et déposé et débattu ici, à l'Assemblée nationale, de l'ensemble de cette question.

M. le Président, la croissance économique se raffermit, les investissements privés s'accroissent, et nous connaissons, comme je l'expliquais tout à l'heure, une remontée de l'emploi. Bien sûr, je le répète à nouveau, il ne faudrait pas crier victoire à ce moment-ci, tant nous savons aussi que nous avons du boulot encore à abattre. Mais n'importe qui qui nous écoute, M. le Président, tout observateur objectif conviendra très certainement que le climat aujourd'hui n'a rien à voir avec le climat d'il y a trois ans. Et pourquoi? Parce que nous avons mobilisé des gens, parce que nous nous sommes assis avec eux et parce qu'on a, à bien des égards, livré la marchandise et créé de l'emploi.

M. le Président, nous avons, comme équipe gouvernementale, au prix d'un dur labeur, procédé à de grandes restrictions budgétaires et travaillé aussi avec acharnement pour assurer la relance et la croissance de l'emploi. Mais ces dernières années sont également marquées, comme je le disais, aux fruits de nombreuses réformes, celles des pensions alimentaires, de l'assurance-médicaments, de la politique familiale, de l'aide juridique, de l'augmentation du salaire minimum, de l'économie sociale, du partage du travail, du Fonds de lutte contre la pauvreté et de l'équité salariale. Ce sont aussi des années de baisses d'impôts, de l'aide au logement et de l'accroissement des budgets consentis aux organismes communautaires.

Le gouvernement, M. le Président, demeure convaincu que les résultats positifs obtenus jusqu'ici ne sont certainement pas étrangers à ce qu'on pourrait appeler une espèce d'esprit de consensus et de cohésion qui a animé les partenaires économiques et sociaux. La concertation – et je l'affirme avec conviction, M. le Président – élargie qui s'est instaurée a créé un véritable climat de solidarité qui a résisté à tous les découragements et aux tentatives d'isolement ou de recul dans lesquels les libéraux voudraient aujourd'hui que nous retombions. À ça, nous disons: Jamais.

(11 h 10)

M. le Président, aux yeux de plusieurs personnes, le Sommet de l'économie et de l'emploi, tenu en octobre 1996, fut un moment privilégié où les représentants des entreprises, les syndicats, les organismes communautaires et le gouvernement ont laissé quelques instants leurs divergences de côté pour s'entendre sur des moyens concrets de relancer l'emploi au Québec. On pourrait croire que ce résultat est arrivé spontanément sous l'effet d'une forte médiation de l'événement. Bien au contraire, M. le Président, la concertation, la mobilisation, elle, ne surgit pas comme une génération spontanée. Elle se pratique au Québec depuis de nombreuses années sous des formes très variables.

Quant au Sommet d'octobre 1996, il fut précédé de six mois de travail persistant consenti par des centaines de personnes, de patrons, de représentants syndicaux et d'agents des secteurs communautaires. Ces partenaires, qui étaient soutenus dans leur démarche par des fonctionnaires et par des ministres, ont multiplié les sessions de travail et ils ont cherché ensemble des projets de création d'emplois et des conditions qui permettent de relancer pour de bon l'économie du Québec. Le Sommet ne fut, tout compte fait, que le point de rassemblement de cet impressionnant mouvement de mobilisation des agents économiques du Québec. Cette mobilisation, elle donne des fruits, et cette mobilisation d'ailleurs se poursuit.

M. le Président, pour nouer un véritable dialogue social, au-delà des chiffres et des statistiques, pour instaurer un mode crédible et efficace de concertation, le gouvernement et ses partenaires ont accepté d'emblée de s'influencer mutuellement, et on oublie de le rappeler. Le programme d'action du gouvernement a été d'ailleurs principalement influencé par les grandes décisions du Sommet de l'économie et de l'emploi. À plusieurs égards, les consensus du Sommet ont préparé la mise en place d'outils législatifs, d'outils fiscaux et réglementaires ou autres qui concourent aux objectifs de développement économique et d'équité sociale.

Dans certains cas, le Sommet sur l'économie et l'emploi a favorisé l'aboutissement de dossiers sur lesquels la société québécoise faisait du surplace depuis plusieurs années. Et il faut à cet égard rappeler deux succès. D'abord, l'économie sociale, qui a été le fruit d'une réflexion menée par une grande Québécoise, Nancy Neamtan, qui, avec plusieurs députés, plusieurs groupes communautaires, a fait une proposition fondamentale au Sommet. De nombreux besoins sociaux n'étaient pas satisfaits parce qu'ils n'étaient pris en charge ni par le gouvernement ni par le secteur privé. Et pourtant, Mme Neamtan nous a fait la démonstration qu'il était possible de générer de l'activité créatrice d'emplois durables en répondant à ces besoins. L'aide domestique pour les personnes âgées, les services à la petite enfance, le recyclage des matières résiduelles et l'aménagement d'habitations sociales, pour ne nommer que ces exemples, illustrent les possibilités concrètes d'accroître les services à la population et en créant des emplois stables. Telle est la prémisse sur laquelle repose le concept d'économie sociale qui a fait consensus au Sommet.

Qu'en est-il alors que de l'autre côté on nous reproche de manquer à notre parole? En date du 31 mars 1999, 8 000 emplois ont été créés dans les entreprises de l'économie sociale, dans les projets découlant du Sommet de l'économie et de l'emploi. Depuis le début de l'année financière, le ministère de la Santé et des Services sociaux a versé 1 000 subventions salariales à des personnes travaillant dans des entreprises d'économie sociale. Pour la même période, les engagements s'élèvent à 6 500 000 $. De plus, plus de 700 emplois ont été consolidés ou protégés. Environ 450 000 000 $ ont été injectés dans les entreprises de l'économie sociale, 380 000 000 $ provenant du gouvernement du Québec, 70 000 000 $ provenant de source non gouvernementale. À lui seul, M. le Président, le Fonds de lutte contre la pauvreté a injecté 48 000 000 $ dans les entreprises d'économie sociale en date du 31 mars 1999. En avril 1999, soucieux d'aller encore plus loin, nous avons annoncé une aide additionnelle de 13 000 000 $ pour consolider nos appuis aux entreprises d'économie sociale, pour appuyer le réseautage de ces entreprises et pour financer davantage le chantier d'économie sociale qui poursuit le travail visant la reconnaissance et le développement de l'économie sociale.

J'aimerais entendre dire, de la part de l'opposition, que l'économie sociale est un modèle qui fonctionne, est un modèle qui est créateur d'emplois durables et qui répond à des besoins sociaux qui sont grandissants. Je les mets au défi, avant la fin de ce débat, de se lever et de dire que ça marche, sans quoi on comprendra que l'opposition, avec ses beaux débats, plutôt que de vouloir aider les gens qui sont à l'aide sociale et les exclus de la société, cherche tout simplement une occasion de leur planter un poignard dans le dos.

M. le Président, si le rythme de développement et de croissance des entreprises de l'économie sociale se maintient, les objectifs ambitieux de création d'emplois annoncés lors du Sommet, 20 000 emplois, devraient être atteints d'ici deux ou trois ans.

Je pourrais aussi vous parler du Fonds de lutte à la pauvreté dont j'ai la responsabilité comme ministre. Le premier ministre, il y a deux jours, a rappelé que les participants au Sommet de l'économie et de l'emploi n'ont pas voulu que le redressement des finances publiques – laissées, rappelons-le encore une fois, dans un état misérable par nos prédécesseurs – nous n'avons pas voulu que ce redressement se fasse au détriment des plus démunis de notre société. Avec l'appui de nos partenaires, des milieux communautaires, de l'entreprise privée, particulièrement des institutions financières, nous nous sommes engagés à mettre un fonds de 250 000 000 $ sur trois ans financé par les travailleurs, les entreprises et les institutions financières du Québec. En date du 31 août 1999, le Fonds de lutte a financé plus de 20 000 participations afin d'aider des milliers de personnes à cheminer vers leur réintégration au marché du travail. Des engagements de plus de 200 000 000 $ ont été signés.

Quand je dis ça, M. le Président, comment, après, voulez-vous que quelqu'un de crédible se lève pour voter la motion inscrite par la députée de Marguerite-Bourgeoys? Puis je la relis:

«Que l'Assemblée nationale du Québec fasse sien le constat généralisé des promesses non tenues par le gouvernement péquiste suite au Sommet socioéconomique de 1996.»

M. le Président, si c'était le code Morin qui régissait les procédures de notre Assemblée, une motion comme celle-là aurait été jugée non recevable, nulle et non avenue parce qu'on n'est pas capable de faire la démonstration de ce qu'on avance. Comment pourront-ils se lever, sans doute cet après-midi, puis appuyer une motion comme celle-là? Est-ce qu'ils vont dire que le Fonds de lutte, ça n'existe pas? Est-ce qu'ils vont nous dire que l'économie sociale, ça n'existe pas? Est-ce qu'ils vont nous dire que la politique familiale, pour laquelle ils ont pourtant longtemps discouru à l'Assemblée nationale, n'existe pas? Voyons donc, M. le Président, un peu plus de rigueur, un peu plus de cohérence, s'il vous plaît, de la part des députés de l'opposition!

Et je sais que, chez eux, quelques bons esprits se cachent, la députée de Bonaventure, par exemple, qui reconnaît la pertinence de l'intervention du Fonds de lutte à la pauvreté, particulièrement dans le secteur forestier dont on parle beaucoup ces temps-ci. Est-ce que je peux rappeler à tous ceux et celles qui s'intéressent au secteur forestier que, pendant la première année et demie du Fonds de lutte, environ le quart de tous les emplois subventionnés étaient consacrés dans le secteur forestier? Est-ce que je peux rappeler que plus de 30 000 000 $ ont été investis dans ce secteur? Est-ce que je peux rappeler, M. le Président, que cette orientation marquée en faveur du secteur forestier a été donnée sur des avis de comités locaux d'approbation de projets qui réunissent des intervenants de tous les secteurs d'activité dans chacune des régions du Québec?

Je mets au défi la députée de Marguerite-Bourgeoys d'aller jaser un petit peu avec sa collègue députée de Bonaventure pour nous dire que le Fonds de lutte à la pauvreté, c'est quelque chose qui n'a pas aidé les hommes et les femmes de son comté, que c'est quelque chose qui n'a pas aidé les hommes et les femmes de la Gaspésie, M. le Président. Un peu de cohérence, s'il vous plaît, de la part de l'opposition!

Je pourrais poursuivre longtemps, M. le Président, et continuer cette démonstration. J'aurais particulièrement souhaité faire le point sur la question de la fiscalité, mais le temps me presse. Je voudrais tout simplement rappeler un certain nombre de choses au sujet de la fiscalité, lorsque l'on compare la situation du Québec et de l'Ontario. Et j'aimerais savoir ce que la députée de Marguerite-Bourgeoys en pense.

Nous avons, au Québec, un régime d'impôts plus progressif qu'ailleurs, plus progressif qu'ailleurs au Canada, et, sans doute, à bien des égards, qu'ailleurs aux États-Unis. Le régime québécois d'imposition des particuliers est, je l'affirme, le plus progressif en Amérique du Nord, accentuant l'écart du fardeau fiscal supporté par les ménages à revenus moyens et élevés par rapport au reste du Canada et aux États-Unis. Cet écart ainsi que le degré de progressivité plus élevé du régime fiscal québécois sont correctement illustrés dans des documents qui ont pourtant été remis à la députée. Au Québec, certains contribuables paient moins d'impôts que partout ailleurs au Canada. Ce sont principalement des couples avec enfants, gagnant 40 000 $ ou moins, ou des personnes vivant seules dont les revenus sont inférieurs à 15 000 $. Il faut rappeler cette situation, M. le Président.

(11 h 20)

Et quand j'entends les gens de l'opposition faire des comparaisons Québec-Ontario, il faut se rappeler que, dans le choix qu'une personne a à faire de s'établir dans un lieu plutôt qu'un autre, l'impôt est un facteur, mais n'est pas le seul, et il faut tenir compte beaucoup, beaucoup, beaucoup, de l'écart dans le coût des biens et des services et aussi de l'écart de rémunération entre les juridictions. Et des démonstrations ont été faites que les comparaisons d'écarts d'imposition entre le Québec et les juridictions avoisinantes ne permettent pas à elles seules de conclure que chaque ménage qui paie plus d'impôts au Québec se retrouve dans une position moins avantageuse que s'il résidait dans une juridiction où les impôts sont moins élevés. Je tenais à rappeler rapidement cette situation.

M. le Président, parce que je sais que d'autres de mes collègues veulent intervenir, je conclurais et je le ferais de la façon suivante, en rappelant les propos de la députée de Marguerite-Bourgeoys il y a quelques jours, en commission parlementaire, sur la réduction de l'impôt des particuliers.

La députée de Marguerite-Bourgeoys a sérieusement défendu les politiques ontariennes en mesures d'aide sociale. Elle a, avec force, avec conviction, défendu les politiques de Mike Harris. Elle a vanté la générosité du régime ontarien d'aide sociale. Eh bien, M. le Président, j'espère que la député de Marguerite-Bourgeoys va bientôt faire le tour des familles à Toronto pour leur annoncer la bonne nouvelle, car ces familles de Toronto doivent payer des loyers deux fois plus élevés qu'à Montréal. Dans les faits, les familles prestataires de Toronto sont plus pauvres que les familles prestataires de Montréal.

La députée disait à maintes reprises que la pauvreté est quelque chose qui est relatif au Canada, et je cite: «Il y a des pauvres, il va toujours y avoir des pauvres parce qu'il y a des gens qui ne vivent pas comme l'ensemble de la société.» Déclaration de la députée, 27 octobre 1998. Bien, M. le Président, après l'Halloween, il était normal que les masques finissent par tomber. Voilà, M. le Président, le vrai visage de la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Solidarité sociale et député de Gouin. Nous allons maintenant céder la parole au député de Mont-Royal, en vous rappelant, M. le député, qu'il reste un temps de parole de 20 minutes à votre formation politique. M. le député.


M. André Tranchemontagne

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. J'aimerais, dans les minutes qui vont suivre, joindre ma voix à celle de ma collègue de Marguerite-Bourgeoys, qui nous a démontré clairement tantôt que le gouvernement du Parti québécois n'a rien fait pour alléger le fardeau fiscal des Québécois et, conséquemment, n'a rien fait pour améliorer la croissance économique du Québec par rapport à l'ensemble canadien et nord-américain.

J'aimerais aussi joindre ma voix à mon collègue de Vaudreuil, qui, lui, nous a clairement démontré qu'on a un déficit au niveau investissements privés de 4 200 000 000 $ au Québec par rapport à l'ensemble canadien. 4 200 000 000 $ d'investissements de moins, M. le Président, je ne sais pas si vous réalisez ce que c'est, mais c'est exceptionnel comme retard du Québec par rapport au Canada. Et ça, ça veut dire que, quand il y a moins d'investissements, il y a évidemment beaucoup moins d'emplois qui sont créés dans notre province de Québec par rapport à ce qui se crée en Ontario, en Alberta ou dans le reste du Canada.

Alors donc, ce matin, j'aimerais joindre ma voix à ceux de mes collègues qui ont clairement démontré, je pense, au cours des deux allocutions précédentes, le retard que le Québec a pris au cours des dernières années et le retard particulièrement que le Québec a pris au niveau des promesses qui ont été faites lors du Sommet économique d'il y a trois ans.

Permettez-moi de vous adresser la parole ce matin un peu plus spécifiquement au niveau de l'emploi comme tel. L'emploi, M. le Président, comme vous savez, c'est la conséquence très souvent des mesures que le gouvernement adopte, ou des mesures que le gouvernement n'adopte pas, devrais-je dire, si on parle, par exemple, de taux d'imposition ou si on parle d'investissements, comme mon collègue de Vaudreuil en a parlé. Les conséquences d'un taux d'imposition élevé et d'un désinvestissement dans notre société québécoise, le résultat net de ça, c'est des emplois qui sont perdus ou des emplois qui ne sont pas créés.

M. Bouchard, lors du Sommet économique, avait déclaré, au niveau de l'emploi évidemment, et je le cite textuellement, que «l'objectif était de rejoindre, au niveau emplois...»

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député.

M. Boulerice: Oui, sur une question de règlement. Je l'ai observé à plusieurs reprises hier, je ne suis pas intervenu, mais j'aimerais que vous fassiez la remarque à M. le député de Mont-Royal, qui, gentilhomme comme je le connais, suivra fidèlement le règlement et utilisera non pas le nominatif du personnage, mais son titre. Il s'agit du premier ministre du Québec.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député, veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

M. Tranchemontagne: Alors, je vais donc reprendre, en prenant soin du conseil du député.

Alors, lors du Sommet économique d'il y a trois ans, le premier ministre du Québec avait déclaré, au niveau de l'emploi, et je le cite textuellement, que «le Québec rejoindrait la progression canadienne et même dépasserait la progression canadienne, ce qui lui permettrait donc d'améliorer son taux d'emploi». Or, j'aimerais vous citer quelques chiffres, M. le Président. Avant le Sommet économique, dans la période de 16 ans qui a précédé le Sommet économique, le taux d'emploi ou la progression du taux d'emploi au Québec a toujours été en retard sur la progression du taux d'emploi canadien. Spécifiquement, au cours des 16 dernières années, la création d'emplois au Québec a progressé de 1 %, alors qu'au Canada elle progressait de 1,4 %. Donc, on avait, au Québec, un retard de quatre dixièmes de point annuellement, historiquement, si vous voulez, au cours des 16 années qui ont précédé le Sommet économique.

Maintenant, regardons les chiffres dans les années qui ont suivi le Sommet économique. En 1997, M. le Président... Comme vous savez, dans cette période des années 1997, 1998 et 1999, on a fait face à une croissance économique particulièrement explosive partout en Amérique du Nord, que ce soit aux États-Unis, au Canada et même au Québec. Mais ce que je veux vous démontrer ici ce matin, c'est que le Québec, malheureusement, à cause des décisions du gouvernement du Parti québécois, n'a pas réussi à suivre la croissance de ses voisins, c'est-à-dire les Américains, les Ontariens et le reste du Canada. Alors donc, je reviens à la période de l'année 1997 et, pour l'année 1997, la croissance de l'emploi au Québec a été de 1,5 %, alors qu'au Canada elle était de 1,9 %. C'est donc dire que, encore en l'année 1997, c'est-à-dire l'année qui a suivi le Sommet économique, le retard que le Québec avait sur l'ensemble du Canada n'a pas changé et est demeuré à 0,4 %.

L'année 1998, l'année subséquente, la croissance de l'emploi au Québec a été de 2,1 %; celle du Canada, 2,8 %. L'écart maintenant, M. le Président, je veux vous faire remarquer que non seulement il a été de 0,4 %, comme historiquement il avait été, mais qu'il a crû jusqu'à 0,7 %. Donc, on a eu affaire à une détérioration du rythme de croissance de l'emploi au Québec quand on se compare à nos voisins, et c'est la seule façon aujourd'hui de regarder et de faire une analyse objective de ce qui se passe au niveau économique. Avec la tombée des barrières interprovinciales, des barrières entre les pays et l'avènement du libre-échange, on doit se comparer aux autres, parce que, pour réussir, pour être vraiment dans le peloton de tête, ce qu'il faut faire, c'est être meilleur que nos voisins contre lesquels on compétitionne.

(11 h 30)

Donc, je reviens maintenant à l'année 1999. Dans l'année 1999, les projections du groupe Desjardins, qu'on a déjà citées d'ailleurs du côté du Parti québécois, sont que la croissance du taux d'emploi sera au Québec de 1,8 % et que celle au Canada sera de 2,7 %, donc un écart défavorable, encore une fois, pour le Québec de 0,9 %. C'est donc dire que, au cours des trois dernières années, c'est-à-dire depuis le Sommet sur l'économie, depuis ce temps-là, M. le Président, on n'a pas réussi à rattraper le taux de croissance canadien. Et je vous rappelle, autrefois on perdait 0,4 % sur l'ensemble canadien; la première année après le Sommet économique, on a perdu encore 0,4 %; la deuxième année, ce taux de perte s'est accéléré à 0,7 %; et, finalement, dans l'année en cours, le taux de perte par rapport à l'ensemble canadien sera de 0,9 %. Si vous prenez ce déficit annuel des trois dernières années et que vous le calculez sur l'emploi du Québec, ça veut dire que les Québécoises et les Québécois ont été privés, à cause des décisions du gouvernement du Parti québécois, à cause de son manque de perspicacité au niveau économique, de 100 000 emplois. C'est important, c'est majeur, et je ne comprends pas qu'on essaie de nous faire croire que le Sommet économique a été un succès. Et, quand le président du Conseil du trésor parle que chaque partenaire a livré selon ses objectifs, je dirais que les partenaires ont livré, sauf le gouvernement du Québec, aussi bien au niveau des taux d'imposition, au niveau de l'investissement ou au niveau de l'emploi.

Alors, je vous dis que les chiffres que je vous présente sont des chiffres qui sont fondés, qui sont sur une base annuelle, contrairement à ce dont le député de Gouin nous parlait tantôt, quand il a parlé d'un taux d'emploi de 56,7 % pour le dernier mois comme étant un succès. Il a choisi de prendre le chiffre d'un seul mois. Alors, comme vous le savez, une hirondelle ne fait pas le printemps, et un seul mois de chiffres ne donne absolument rien de solide.

Moi, ce dont je vous parle quand je vous parle de l'écart entre le Québec et le Canada, je vous parle de données qui sont annuelles, des années 1997, 1998 et 1999, c'est-à-dire les trois années qui ont succédé au Sommet économique. Alors, je vous le rappelle encore une fois, le Parti québécois a été la cause première d'un déficit de 100 000 emplois au cours de ces trois dernières années. Important déficit.

J'aimerais aller un petit peu plus loin et vous les présenter différemment, ces chiffres-là. Depuis l'arrivée au pouvoir de M. Bouchard, nous pouvons constater que, sur tous les emplois... De M. le premier ministre. Je vais finir par apprendre, M. le Président. Ha, ha, ha! Alors, depuis l'arrivée au pouvoir du premier ministre et du Parti québécois, il s'est créé au Québec seulement 15 % de tous les emplois qui ont été créés au Canada. 15 %. Pour vous montrer le recul que ça peut représenter, on représente, au Québec, 25 % de la population active au Canada et on n'a créé que 15 % des emplois, donc un écart de 10 points, un déficit de 10 points depuis l'arrivée au pouvoir du Parti québécois.

Pendant ce temps-là, juste pour vous donner l'exemple, comment l'Ontario a performé? L'Ontario a atteint 47 % de tous les emplois créés au Canada. Nos voisins, nos amis, la province voisine contre laquelle on doit dire qu'on compétitionne surtout. On a créé 15 % des emplois canadiens, ils en ont créé 47 %.

Maintenant, permettez-moi de regarder, parmi ces chiffres-là, l'année qu'on vient de passer. Il s'est créé seulement 13 % au Québec de tous les emplois qui ont été créés au Canada en 1999. Alors, si on parle de succès du Sommet économique, je ne sais pas de quels chiffres on parle, M. le Président, parce que, moi, mes chiffres, ce n'est pas ça qu'ils me donnent.

Finalement, j'aimerais vous dire que, si on avait atteint ce que le premier ministre nous avait promis, c'est-à-dire, si on avait rejoint le taux d'accroissement de l'emploi du Canada, nous aurions eu 100 000 emplois de plus. Permettez-moi de rêver un peu et de vous dire que, si on avait atteint son deuxième objectif, qui était de récupérer sur le taux d'emploi canadien, si on avait récupéré et si on avait atteint aujourd'hui le taux d'emploi canadien qui est de 65,5 %, si on applique ce pourcentage-là à la population du Québec, on obtiendrait à ce moment-là 225 000 emplois nouveaux, additionnels, que les Québécois et les Québécoises auraient, dont ils bénéficieraient aujourd'hui, si ce n'était, encore une fois, des politiques gouvernementales. M. le Président, soit 100 000 ou 225 000, c'est un déficit énorme à combler et malheureusement, très souvent, les retards que l'on prend dans ce domaine-là ne sont pas rattrapables.

C'est facile de parler d'emploi, mais il faut aussi parler de chômage, et le taux de chômage s'est amélioré au Québec comme il s'est amélioré au Canada, comme il s'est amélioré aux États-Unis. Mais, malgré tout, encore ici, le corollaire du taux d'emploi, c'est-à-dire le taux de chômage, a mieux performé au Québec que dans le passé, mais s'est détérioré par rapport ou en comparaison avec l'ensemble canadien, et surtout avec l'ensemble nord-américain. Je vous rappelle qu'aux États-Unis le taux de chômage est de l'ordre de 4,2 %, au Québec, il est au-delà de 9 %, il se promène entre 9 % et 10 %, et, en Ontario, il est de l'ordre de 6 %. Des résultats incroyables.

J'aimerais vous rappeler une certaine réalité. Vous savez, le taux de chômage, c'est fait à partir d'une étude. Maintenant, il a été publié récemment les chiffres de ce qu'on appelle l'assurance-emploi. Ça, c'est vraiment des chèques qui sont donnés à des personnes. Et, au cours du mois d'août dernier, il s'est versé 509 500 chèques en assurance-emploi au Canada et, sur ces 509 000 chèques, 179 250 ont été versés au Québec. Ça, ça veut dire que 35 % de tous les chèques qui ont été versés au Canada en assurance-emploi sont venus au Québec, versus encore une fois – et je vous le rappelle – une population de 25 %. Encore une fois, on retrouve un écart de 10 points de pourcentage, le Québec en arrière du Canada.

Permettez-moi de reprendre ces mêmes chiffres là et de les comparer juste pour l'Ontario. Je vous ai dit tantôt qu'il s'est versé 179 000 chèques d'assurance-emploi au Québec; en Ontario, il s'en est versé 101 000. Le rapport entre les deux chiffres est de 1,8, si vous voulez, ou, autrement dit, il s'est versé au Québec 80 % de plus de chèques d'assurance-emploi au mois d'août qu'il s'en est versé en Ontario, alors que, comme vous le savez, la population du Québec, si on la compare à celle de l'Ontario, n'est que de 65 % de celle de l'Ontario. Alors, on représente 65 % de l'Ontario puis, par contre, quand on se compare, on représente 180 points ou 180 % de ce que eux autres reçoivent en assurance-emploi. Des chiffres dramatiques, M. le Président. Si c'est ça qu'on appelle de la performance, j'aimerais mieux ne pas savoir ce qu'ils veulent dire quand ils parlent de non-performance.

M. le Président, le gouvernement du Parti québécois doit apprendre à faire les choses différemment et, pour ce faire, il doit reconnaître que le gouvernement ne peut pas, lui, vraiment créer de l'emploi. La seule façon de créer de l'emploi, c'est de s'assurer que le climat économique est tel que l'entreprise privée va, elle, créer de l'emploi. Mais, pour arriver à ça, M. le Président, il faut absolument que le gouvernement du Parti québécois, le gouvernement au pouvoir mette des conditions qui sont telles que le développement économique se produise, pour qu'il se réalise. Et, pour que le développement économique se réalise, M. le Président, il faut absolument des baisses d'impôts qui sont substantielles. Toutes les autres provinces l'ont reconnu.

Laissez-moi vous parler particulièrement de l'Ontario qui est tout près de chez nous. Ils ont baissé à date leurs impôts de 30 %. Mais, malgré cette baisse de 30 %, les revenus de l'Ontario ont crû de 9 % dans cette période-là. C'est la quadrature du cercle, M. le Président, ils ont réussi la quadrature du cercle, mais, nous autres, on est trop smattes, on n'est pas capables de réaliser ça. On n'est pas capables de comprendre qu'une baisse d'impôts au niveau de la population crée une demande pour des produits additionnels, que ce soient des biens durables ou des biens de consommation courante. Cette progression entraîne une progression économique qui, elle, entraîne des investissements, comme mon confrère de Vaudreuil le disait, et finalement entraîne de la création d'emplois.

S'il y a création d'emplois, les gens qui travaillent paient des impôts au gouvernement, et ce retour-là, c'est ça qui a permis au gouvernement ontarien de faire croître – et je vous le répète – ses revenus autonomes de 9 %, alors qu'il avait baissé les impôts de 30 %. Pendant ce temps-là – tantôt, ma collègue de Marguerite-Bourgeoys vous donnait quelques chiffres sur la performance au niveau de l'emploi en Ontario – c'est incroyable les résultats qu'ils ont obtenus, et je pense qu'il y a là un exemple à suivre. Je vous parle de l'Ontario, je pourrais également parler de l'Alberta où les chiffres sont tout aussi dramatiques.

(11 h 40)

Finalement, M. le Président, j'aimerais endosser d'une façon exceptionnelle la proposition de ma collègue de Marguerite-Bourgeoys à l'effet que, depuis le Sommet économique, le gouvernement du Parti québécois n'a pas réussi à améliorer la situation du Québec au niveau économique, que ce soit au niveau des taux d'imposition, que ce soit au niveau des investissements et que ce soit au niveau de l'emploi. C'est dramatique, M. le Président, mais ce qu'il y a de plus dramatique, c'est qu'on essaie de nous faire accroire que c'est rose, depuis le Sommet économique. Une seule personne, au Sommet économique, n'a pas accompli la tâche qu'elle s'était fixée, et c'est le gouvernement du Parti québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Mont-Royal. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles et également ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, en vous rappelant, madame, qu'il reste à votre formation politique un temps de parole de huit minutes. Madame.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, je pense que l'opposition nous donne l'occasion aujourd'hui de rappeler les réalisations du gouvernement du Québec suite au Sommet. Effectivement, dans le cadre du Sommet économique de l'emploi en 1996, M. Bouchard a annoncé une des grandes politiques du Québec, la politique familiale.

Issues du plan d'action des partenaires en matière familiale, qui a mobilisé des représentants en matière familiale, le mouvement familial, le monde municipal, les milieux patronal et syndical, le secteur de l'éducation, le réseau de la santé et des services sociaux et une vingtaine de ministères et organismes gouvernementaux, toutes ces actions, M. le Président, ont pavé le chemin aux nouvelles dispositions que le gouvernement du Québec a introduites dans la politique familiale.

Trois nouvelles dispositions ont été annoncées par le premier ministre lors du Sommet de l'économie et de l'emploi dans la politique familiale: celle des services de garde éducatifs repensés, une allocation familiale remodelée et un éventuel régime québécois d'assurance parentale.

Conscient de cette réalité, le gouvernement du Québec a mis en place, en septembre 1997, un ensemble de services éducatifs et de garde à l'enfance. Ces services nous apparaissent comme l'une des pièces maîtresses de la politique familiale. Ils poursuivent deux grands objectifs auxquels tous les acteurs familiaux ont souscrit: celui de favoriser le développement des enfants et l'égalité des chances pour chacun d'eux et d'offrir aux parents des services éducatifs et de garde accessibles et stimulants.

La maternelle à temps plein, M. le Président. La première initiative du gouvernement du Québec à ce chapitre, c'est d'avoir instauré cette maternelle à temps plein. Auparavant, la maternelle était fréquentée à mi-temps par les enfants de cinq ans. Depuis septembre 1997, les enfants ont accès à la maternelle toute la journée, selon le choix des parents. Il en résulte qu'aujourd'hui plus de 98 % des enfants de cinq ans fréquentent la maternelle à temps plein.

Simultanément à l'instauration de la maternelle à temps plein, le gouvernement du Québec a innové en créant le réseau des centres à la petite enfance et en procédant à la mise en oeuvre de services de garde éducatifs et de la petite enfance. Ce réseau, M. le Président, nous apparaît de plus en plus comme un acteur de premier plan à l'intérieur du continuum des services enfance-jeunesse-famille qui ont vu le jour au Québec au cours des 30 dernières années. Les centres de la petite enfance offrent actuellement, pour les enfants âgés de moins de cinq ans, des services de garde éducatifs et de qualité, aussi bien en milieu familial qu'en installation de type garderie.

À moyen terme, le réseau des centres de la petite enfance sera appelé à offrir progressivement des horaires flexibles répondant aux besoins des parents, par exemple, on pouvait dire: le week end, le soir et la nuit, des services complémentaires comme la halte-garderie ou des jardins d'enfants. Le réseau des centres à la petite enfance vise à assurer, en garderie et en milieu familial, les conditions favorables au développement global des jeunes enfants, à la prévention et au dépistage des obstacles à ce processus, à la stimulation précoce et, le cas échéant, à une intervention auprès des enfants et de leur entourage.

L'une des grandes forces, M. le Président, des centres à la petite enfance, c'est certainement l'application d'un même programme éducatif. Celui-ci s'adapte non seulement à l'âge de l'enfant, mais aussi au temps que le bambin passe en milieu de garde. Notez qu'en matière de qualification du personnel de garde des exigences réglementaires accrues nous garantissent une application optimale du programme éducatif et, du même coup, la qualité des services de garde éducatifs offerts en garderie et en milieu familial.

Le réseau des centres de la petite enfance apporte un soutien appréciable aux parents aux prises avec la difficulté de concilier le travail et la famille et leur permet aussi de jouer pleinement leur rôle auprès de leurs enfants. Fidèle à son énoncé d'orientations initial, le gouvernement du Québec reconnaît à ce moment-ci le rôle prépondérant des parents dans le développement des enfants.

Dans ce vaste chantier social que nous développons, qui a été échelonné de 1997 à 2006, ce plan prévoit 14 700 nouvelles places, qui ont été créées en 1998-1999, 17 000 nouvelles places en 1999-2000 et, au terme, un total de plus de 100 000 nouvelles places qui seront accordées en services de garde au Québec. À ce moment-là, le réseau des centres de la petite enfance et autres services de garde totaliseront plus de 200 000 places que nous avons données aux parents et aux enfants dans le système de garde québécois.

En cette fin de cette gigantesque opération de développement, ce sont plus de 11 000 nouveaux emplois qui auront été créés. C'est là un des impacts économiques qui découlent de cette disposition de la politique familiale québécoise et du Sommet de l'économie et de l'emploi.

Ce n'est pas tout de créer de nouvelles places dans ce réseau, il faut aussi s'assurer que les places de services de garde demeurent accessibles au plus grand nombre. Pour cela, nous avons opté pour l'instauration progressive d'un tarif de 5 $ – des garderies à 5 $ – par jour appliqué aux places des services de garde éducatifs. Ce tarif couvre un montant maximal de 10 heures de garde, un repas, deux collations et le matériel pédagogique. Ce tarif s'applique aux enfants de quatre ans depuis septembre 1997, aux enfants de trois ans depuis septembre 1998, aux enfants de deux ans, septembre 1999, et moins de deux ans en septembre 2000 qui viendra. Alors, ce tarif de 5 $ par jour correspond grosso modo au quart de ce qu'auparavant il en coûtait aux parents. Cette mesure s'est révélée extrêmement populaire auprès des parents québécois. Ajoutons que les familles prestataires de la sécurité du revenu ont un accès gratuit aux services de garde éducatifs pour leurs enfants âgés de trois, quatre ans.

Par ailleurs, le gouvernement du Québec a décidé d'appliquer un tarif semblable aux services de garde en milieu scolaire. C'est pour les enfants de cinq à 12 ans. Rappelons que ces services sont tous sous la responsabilité du ministère de l'Éducation.

M. le Président, le réseau des centres de la petite enfance est en contact quotidien avec sa clientèle d'enfants et de parents. Cela lui confère une position stratégique en amont des besoins des familles. À ce titre, il se trouve bien placé pour agir en prévention et pour assurer un dépistage précoce des besoins.

Dans ce contexte, on peut souhaiter que les centres de la petite enfance deviennent un lieu d'échange et d'entraide pour les parents. On peut également espérer que les centres de la petite enfance organiseront des services à l'intention des parents ou qu'ils travailleront, afin de les rendre plus accessibles, en concertation avec les partenaires du milieu, le réseau de la santé et services sociaux, le réseau des centres de la protection de l'enfance et de la jeunesse, le réseau de l'éducation, les municipalités et, surtout, les groupes communautaires et familiaux.

En créant le réseau des centres de la petite enfance en septembre 1997 et en mettant l'accent sur les services de garde éducatifs, le gouvernement a donné un ultime coup de coeur en faveur des enfants et des familles du Québec. Il s'agit d'un investissement à court terme et moyen terme qui se révélera bénéfique pour la société québécoise. Comment? Entre autres, en contribuant à faciliter l'évolution des services enfance-jeunesse-famille vers une approche de plus en plus préventive et intégrée.

Après ce survol des services éducatifs et de garde au Québec, soulignons qu'on ne peut les dissocier de l'ensemble des dispositions de la politique familiale, et notamment de la nouvelle allocation familiale et du projet d'assurance parentale. Je ne peux élaborer plus longuement sur ces deux mesures, mais elles sont un grand pas de plus pour les familles québécoises.

Il faut prioritairement aussi dire, M. le Président, la création du ministère de la Famille et de l'Enfance. Il a été créé en juillet 1997 et il a doté ainsi le Québec d'un outil majeur pour développer sa politique familiale. Il s'agit là de l'une des rares initiatives du genre en Amérique du Nord. Le ministère a pour mission de valoriser la famille et l'enfance et de valoriser le plein épanouissement.

Alors, en conclusion, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vous remercie beaucoup, Mme la ministre. Je sais que vous aviez besoin de beaucoup plus de temps, mais, voilà, le temps imparti à votre formation politique est terminé.

Alors, afin de terminer ce débat, je cède de nouveau la parole à l'auteure de la motion. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, vous avez un temps de parole de 10 minutes.


Mme Monique Jérôme-Forget (réplique)

Mme Jérôme-Forget: Alors, nous avons fait le bilan, M. le Président, d'un sommet des espoirs déçus. On a entendu des refrains. Si on regarde dans le rétroviseur pour avancer en avant, on regarde encore en arrière pour être sûr qu'on planifie bien l'avenir, bien, j'ai des nouvelles à apprendre au monde, c'est que, quand on regarde en arrière, ordinairement on n'avance pas en avant.

(11 h 50)

On a oublié d'ailleurs, dans le bilan, certaines démarches qui avaient été faites et posées par le gouvernement du Parti québécois. Je vais quand même leur rafraîchir la mémoire. Ils ont oublié les années quatre-vingt, ils ont oublié, par exemple, la nationalisation de l'amiante au Québec, qui a coûté 600 000 000 $ aux Québécois, et la note n'est pas finie. Ils ont oublié également la nationalisation de Quebecair, M. le Président, qu'on a reprivatisée par la suite. D'ailleurs, au niveau de l'amiante, après avoir dépensé 600 000 000 $, on va se rappeler qu'il y avait 2 600 postes qui étaient perdus quelque temps plus tard. Alors, histoire de se rafraîchir la mémoire, je pense qu'il va falloir que tout le monde se rende compte des erreurs et des échecs passés.

Le bilan, M. le Président, au niveau du Sommet économique, c'est un échec au niveau de l'emploi, c'est un échec au niveau de l'investissement et c'est un échec au niveau du fardeau fiscal. Et, si ça va mieux durant la dernière année, comme se sont plu à nous le rappeler le président du Conseil du trésor et le député de Gouin, on a les effets de la queue de la comète. C'est ça qu'on a. Parce que ça fait cinq ans qu'il y a une croissance inégalée à travers l'Amérique du Nord, et, nous, finalement, ça commence à nous rattraper. S'il y a un manque d'enthousiasme de voir le bilan de ce gouvernement suite au Sommet économique, je pense qu'il n'y a rien à se réjouir à être les plus taxés en Amérique du Nord, de traîner la queue au niveau de l'emploi et des investissements et d'avoir la médaille d'or quant à ce que ça nous coûte par année, nous, les contribuables.

C'est un échec au niveau de l'emploi, comme l'a très bien indiqué mon collègue le député de Mont-Royal. On nous a inondés de chiffres. Le président du Conseil du trésor a donné un chiffre: 200 000 emplois. Le député de Gouin, hop, 67 000. Mais, moi, je vais leur rappeler un chiffre, par ailleurs. Ça, c'est une statistique qui vient de Statistique Canada, d'accord? Ce sont des chiffres que tout le monde respecte. Le taux d'emploi au Québec, en 1989, était de 58 %. Le taux d'emploi, M. le Président, on ne peut pas se tromper, ce sont les gens qui travaillent par rapport à l'ensemble de la population. Alors, c'est le chiffre qu'on suggère aujourd'hui d'utiliser parce qu'il est le plus fiable. Or, le taux d'emploi était de 58,4 % en 1989, il est de 56 % aujourd'hui.

Alors, peut-on se réjouir? Même si ça va un peu mieux, est-ce qu'on peut se féliciter que ça va très bien puis qu'on est très content et que, finalement, c'est ce dont on doit se contenter? Je pense qu'il n'y a pas un bilan pour se réjouir, je pense que nous avons un bilan triste des derniers quatre ans parce qu'on vit finalement sur une façon de faire, une façon de régler les problèmes à coups de millions qu'on donne, des subventions à des entreprises qui souvent n'en veulent même pas.

M. le Président, pendant que, nous, on se réjouit d'avoir un taux d'emploi de 56 % – on a atteint 56,3 % ou quelque chose comme ça – nos amis... Ne prenons même pas l'Ontario, prenons l'ensemble du Canada – ce qui comprend Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick – le reste du Canada, excluant le Québec, est à 61 %. Alors, qu'on ne vienne pas me dire aujourd'hui qu'on doit se féliciter et se réjouir d'avoir un tel bilan. Je pense qu'il n'y a pas là de raisons de se réjouir même si on a quelques effets, cinq ans plus tard, d'une croissance économique inégalée.

Je pense, M. le Président, que c'est la jeunesse du député de Gouin qui explique son incohérence et la faiblesse de ses arguments. Je lui pardonnerai. Quand on est jeune, on démontre beaucoup d'enthousiasme même si parfois nos arguments n'ont pas grand fondement. Il a fait référence au Fonds de lutte à la pauvreté. Effectivement, lors du Sommet économique, les gens se sont regroupés et ont décidé d'investir 250 000 000 $ pour lutter contre la pauvreté.

Or, les compressions, au niveau de la pauvreté, de ce gouvernement, en 1996-1997, ont été de 244 000 000 $ et, en 1997-1998, de 167 000 000 $, pour un total de 412 000 000 $. Je pourrais leur faire un refrain de toutes les compressions qu'il y a eu au niveau du support pour les pauvres, M. le Président: l'abolition du barème de disponibilité; la réduction du barème de participant; la comptabilisation des avoirs liquides; l'augmentation des contrôles et des sanctions. Enfin, il y en a pour un total, sur deux ans, de 412 000 000 $. On ne va pas me faire rire qu'on défend les pauvres et qu'on est à la rescousse de tous les gens qui sont dans la misère dans cette province. Au niveau de l'impact des ménages, ça veut dire une perte de plus de 800 $ par famille.

Le député de Gouin a cité un propos que j'aurais tenu lors de la commission parlementaire alors qu'on discutait, de façon théorique, sur le consensus de mesurer la pauvreté. Bien, M. le Président, un pauvre au Québec, c'est un pauvre de trop, et le pauvre qui est pauvre, il le sait – lui ou elle – qu'il est pauvre. Et je vous assure que ce n'est pas par une statistique qu'on va nous faire oublier ce que c'est que d'être pauvre et qu'est-ce que ça peut représenter.

Le Parti québécois, par le président du Conseil du trésor, se félicite à cause d'une croissance qu'on aurait aujourd'hui plus forte qu'on a déjà eue. Effectivement, on a eu, à travers le Canada et à travers l'Amérique du Nord, une croissance inégalée, si bien que les revenus autonomes du gouvernement sont passés, en 1994, de 29 000 000 000 $ à, l'an dernier, 37 000 000 000 $, une augmentation de 8 000 000 000 $. C'est donc dire qu'il y a une partie de ça, M. le Président, qui était des impôts additionnels qu'on a payés, par la non-indexation des impôts et, en dépit du fait qu'on veut nous faire croire qu'on a baissé les impôts de 800 000 000 $, je pense qu'il s'agit là d'une erreur grave parce qu'on a augmenté la TVQ et que les revenus du gouvernement ont augmenté, même au niveau de l'impôt des particuliers, de 2 000 000 000 $.

D'ailleurs, si les Québécois savent que ça va mieux, ils savent qu'ils paient pour. Ils savent, eux, que, quand ils ont une augmentation, ça ne se traduit pas nécessairement par plus d'argent dans leurs poches. Ils le savent, ils le sentent, ils en sont conscients et ils le disent quotidiennement qu'il faut baisser les impôts. Pas demain, pas au prochain budget, aujourd'hui, c'est urgent et ça presse. Ils savent que nous avons le championnat au niveau de l'impôt, qu'on a gagné la médaille d'or au niveau de l'impôt des particuliers. Ils sont conscients de ça, M. le Président.

À titre de conclusion, un gouvernement qui se réjouit d'avoir le plus haut taux de taxation, de traîner la patte au niveau de l'emploi, d'être un bon dernier au niveau des investissements, c'est un gouvernement dans un deuxième mandat, un gouvernement qui vieillit, un gouvernement qui peut simplement voir le bon côté des choses et qui n'est pas prêt à apporter les correctifs nécessaires pour changer la vie et l'environnement des Québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le débat étant maintenant terminé, je vais mettre aux voix la motion de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale du Québec fasse sien le constat généralisé des promesses non tenues par le gouvernement péquiste suite au Sommet socioéconomique de 1996.»

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vote nominal. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, en vertu de l'article 223 de notre règlement, je vous demande de reporter ce vote à la période des affaires courantes de ce jour.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le vote sera reporté à cet après-midi, le mercredi 3 novembre, aux affaires courantes.

Sur ce, considérant l'heure, je suspends les travaux de l'Assemblée nationale à cet après-midi, 3 novembre, à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés! Nous allons nous recueillir un moment, s'il vous plaît.

Très bien, veuillez vous asseoir.

Alors, vous permettrez au président de souligner l'anniversaire de naissance de notre doyen de l'Assemblée, le député d'Abitibi-Ouest, M. Gendron.


Affaires courantes

Très bien. Alors, aux affaires courantes, il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

À l'étape de présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous réfère à l'article c du feuilleton.


Projet de loi n° 22

Le Président: Alors, à cet article de notre feuilleton, M. le ministre délégué à la l'Administration et à la Fonction publique, en fait président du Conseil du trésor, présente le projet de loi n° 22, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite dans les secteurs public et parapublic. M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi apporte diverses modifications aux principales lois concernant les régimes de retraite dans les secteurs public et parapublic.

Ainsi, le projet de loi permet de revaloriser, à la suite d'une évaluation actuarielle, les crédits de rente qu'un employé a obtenus au moment où il a cessé d'être visé par un régime complémentaire de retraite pour participer au régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics. Le projet de loi modifie de plus certains délais prévus dans la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics. C'est ainsi qu'il prolonge, à l'avantage des employés, les délais de rachat de service antérieur. Il prolonge aussi le délai accordé à l'arbitre pour rendre une décision et modifie le délai dont dispose la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances pour réviser le montant d'une pension.

Par ailleurs, le projet de loi accorde des pouvoirs accrus aux comités formés par des représentants des employeurs et des employés, mis sur pied pour assurer le suivi des mesures d'application temporaires dans le cadre du Programme de départs volontaires à la retraite. Enfin, le projet de loi prévoit l'assujettissement de nouveaux organismes au Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics et comporte d'autres précisions relatives à l'administration des principaux régimes de retraite administrés par la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Maintenant, à l'article g, M. le Président.


Projet de loi n° 220

Le Président: Alors, en rapport avec cet article, j'ai reçu du directeur de la législation un rapport sur le projet de loi n° 220, Loi concernant la Municipalité de Saint-Joachim. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce rapport.

Et M. le député de Charlevoix, en conséquence, présente le projet de loi d'intérêt privé n° 220, Loi concernant la Municipalité de Saint-Joachim.


Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Brassard: Alors, en ce cas, M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Alors, cette motion est-elle adoptée? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


Rapport annuel de la Commission des programmes d'études

M. Legault: Oui. M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998-1999 de la Commission des programmes d'études.


Dépôt de pétitions

Le Président: Alors, le rapport est déposé. Au dépôt de pétitions, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière et présidente de la commission de l'économie et du travail.


Faire respecter le code de commercialisation des substituts du lait maternel émis par l'OMS et l'UNICEF

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 2 299 pétitionnaires, par le Groupe MAMAN, Mouvement pour l'autonomie dans la maternité et pour l'accouchement naturel. D'ailleurs, plusieurs représentantes sont ici, avec nous, aujourd'hui. Je voudrais en profiter pour les saluer.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que l'allaitement maternel est une priorité nationale de santé publique au Québec;

«Considérant que seulement 48,7 % des Québécoises adoptent cette pratique comparativement à 78 % des mères ontariennes et 87 % des mères vivant en Colombie-Britannique;

«Considérant que cette priorité nationale vise à ce que d'ici 2002 le taux d'allaitement maternel à l'hôpital augmente à 80 % et qu'il soit de 60 % à 30 % respectivement aux troisième et sixième mois de vie de l'enfant;

«Considérant que, malgré l'interdiction de faire la promotion des substituts du lait maternel par l'Organisation mondiale de la santé depuis 1981, la Société canadienne de pédiatrie endosse des publicités de lait artificiel;

«Considérant que sur 523 hôpitaux canadiens ayant une politique écrite sur l'allaitement maternel, il n'y a que 4,6 % d'entre eux qui ont rapporté qu'elle était conforme à toutes les mesures suggérées par l'OMS et l'UNICEF;

«Considérant que les pratiques de plusieurs hôpitaux et les techniques de marketing des fabricants de substituts du lait maternel semblent jouer un rôle important dans le retard du Québec en ne respectant pas le code de l'OMS et de l'UNICEF.

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés et soussignées, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux afin qu'il fasse respecter le code de commercialisation des substituts du lait maternel émis par l'OMS et l'UNICEF.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition, M. le Président. Merci.

Le Président: Alors, la pétition est déposée, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de privilège ou de droit.

Avant de passer à la période de questions et de réponses orales, je vous avise que, par la suite, nous aurons un vote reporté sur la motion de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.


Questions et réponses orales

Alors, maintenant, je reconnais d'abord le chef de l'opposition officielle en question principale.


Fermeture de l'usine Gaspésia à Chandler


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Encore une fois, une surprise pour le gouvernement du Québec, on fait encore une fois face à une très grave crise dans la région de la Gaspésie avec la fermeture de l'usine Gaspésia à Chandler. Et, encore une fois, ce sont les citoyens et les citoyennes du Québec qui en paieront le prix, et des citoyens qui se sentent obligés aujourd'hui de prendre la rue pour pouvoir finalement attirer l'attention du gouvernement.

Pourtant, jeudi dernier, quelques minutes avant l'annonce de la fermeture de l'usine Gaspésia à Chandler, le premier ministre, par la voix de son leader, refusait d'appuyer, ne serait-ce que moralement, les familles des travailleurs de la Gaspésia face au désastre que cette nouvelle représentait pour eux. L'opposition libérale a présenté une motion qui se lisait comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Québec qu'il respecte l'engagement personnel du premier ministre et qu'il assure aux familles de la Gaspésie que tout sera mis en oeuvre pour préserver les emplois de l'usine Gaspésia à Chandler.»

(14 h 10)

M. le Président, est-ce que le premier ministre peut nous expliquer aujourd'hui pour quelle raison ni son ministre des Finances, ni son ministre délégué aux Régions, ni son ministre responsable de la région de la Gaspésie, ni le député de Gaspé, personne dans son bureau n'était au courant que cette annonce-là allait se faire? Comment se fait-il que son gouvernement était tellement débranché de la région qu'il n'était pas informé de cette intention de la compagnie Abitibi d'annoncer la fermeture de l'usine Gaspésia?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je pense que le chef de l'opposition ferait bien d'adresser cette question au président de la compagnie, M. Weaver, en lui demandant comment a-t-il fait pour cacher son intention de contrevenir à sa signature pendant aussi longtemps, puisque même son partenaire, M. Bérubé – c'est lui-même qui nous l'a dit – ne l'a appris que dans les journées précédentes. Alors, si l'opposition, au lieu de jouer un rôle constructif tel qu'elle s'y était engagée au début de la session et d'aider la population à trouver des solutions en appuyant le gouvernement, dirigeait son irritation plutôt vers les responsables de la situation, ce serait un peu plus juste, un peu plus équitable puis ça apporterait également une pierre au moulin de ceux qui veulent forcer la compagnie à respecter sa signature, M. le Président.

J'entends la rhétorique du chef de l'opposition qui, parlant de ce désastre – parce que c'en est un – qui sévit là-bas, qui tombe sur la tête de ce pauvre monde là-bas, passe son temps à parler de l'engagement du premier ministre, «qu'il respecte son engagement». Écoutez, il y a eu un contrat de signé par quatre personnes, signé par le ministre des Ressources lui-même, signé par M. Weaver, le président de la compagnie, signé par M. Gilles Bérubé, le président de Cedrico, et son fils. Les quatre personnes ont signé l'engagement, et trois personnes sur les quatre sont parfaitement disposées à respecter leur engagement. Il y a une personne qui ne le respecte pas, c'est M. Weaver. Alors, si on cherche un coupable, qu'on aille à la bonne place, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Je ne suis pas surpris, M. le Président, que le premier ministre, encore une fois, cherche à blâmer puis à faire porter la responsabilité sur les épaules des autres. Pourtant, il avait pris l'engagement d'intervenir personnellement, d'en faire une affaire personnelle. Ça, c'est un engagement que lui a pris, et le premier ministre aurait eu intérêt à poser le même geste que j'ai posé, moi, que lui a refusé de poser, de rencontrer les gens de la Gaspésie, d'aller sur le terrain, ce que j'ai fait au mois d'août dernier. Et, suite à cette rencontre-là, j'ai écrit au premier ministre, le 30 août dernier.

Permettez-moi de lui rappeler, M. le Président, ce que je lui ai dit à ce moment-là: «Récemment, au cours d'une tournée dans la région de la Gaspésie, j'ai été à même d'observer l'inquiétude qui règne dans cette région principalement en raison de la morosité économique qui y persiste. Les difficultés rencontrées par la co-entreprise liant Abitibi-Consolidated et le Groupe Cedrico, à Chandler, à conclure un partenariat avec ses employés de la Gaspésia, ainsi que la fermeture de l'usine en juin dernier pour une période indéterminée contribuent sans contredit à entretenir ce climat.» Ça, c'était au mois d'août.

Le premier ministre, qui dit qu'il n'a pas de responsabilité là-dedans puis qui avoue que son propre ministre des Ressources naturelles a signé un document, me répondait ceci le 7 septembre: «La formation d'une co-entreprise constitue donc une bonne nouvelle. Toutefois, bien que nous le souhaitions ardemment, une entente sur les relations de travail avec les parties n'a pas encore pu être conclue. Une telle entente reste évidemment au centre du projet de relance, mais le gouvernement ne peut certes se substituer à l'une ou l'autre des parties.» En d'autres mots, il déclinait sa responsabilité à ce moment-là.

M. le Président, j'aimerais savoir pourquoi le premier ministre n'a pas tenu sa parole. Pourquoi il a refusé d'entendre les cris du coeur des gens de la Gaspésie qui, au mois d'août – au mois d'août – lui demandaient d'intervenir personnellement, comme il avait promis de le faire? Pourquoi le premier ministre n'a pas tenu sa parole?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, pendant que le chef de l'opposition s'amusait à faire de la correspondance, nous, nous travaillions. Personnellement, M. le Président, j'ai rencontré à de nombreuses reprises les dirigeants de la compagnie, et je peux dire que nous avons eu des négociations extrêmement difficiles, où le gouvernement en a ajouté constamment, en termes d'ajouts au point de vue des subventions, en termes de discussions sur le niveau des garanties d'approvisionnement forestier, en termes de savoir si ça serait deux machines ou une machine. Ça a été très compliqué. Ça s'est terminé dans mon bureau au terme d'une séance qui a duré trois heures, directement avec le président, où enfin nous nous sommes donné la main et nous avons signé, M. le Président.

Alors, que le chef de l'opposition trouve normal, sans même dire un mot, que quelqu'un qui a traité avec le chef du gouvernement du Québec en présence d'un ministre, en présence d'un partenaire, en présence de tout le monde et qui a signé un engagement, qu'il trouve ça normal, qu'il n'ait pas un mot à dire contre cette personne et qu'il s'en prenne au président du gouvernement, ça, je trouve ça un peu étrange.

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Je ne veux pas interrompre le président de la république dans ses grands rêves, M. le Président, dans ses hallucinations sur ce qu'il aurait fait ou pas fait, d'autant plus que, justement dans cette correspondance où il ne peut pas, aujourd'hui, nier qu'il a été informé de ce qui se passait, qu'il y avait une crise, il aurait pu poser un geste fort simple. D'ailleurs, je lui ai réécrit le 13 septembre, en réponse à sa lettre à lui, et je lui disais ceci: «Enfin, comme je le faisais le 30 août dernier, je vous rappelle l'importance de convoquer les parties impliquées dans le but de favoriser la reprise du processus de négociation.» Ça, c'était au mois de septembre, alors qu'il aurait pu agir. Il s'agit là d'une piste de solution qui ne coûte rien puis qui est susceptible de dénouer l'impasse.

Ce premier ministre, qui se pense président, aurait pu intervenir, il aurait pu poser un geste, mais il a hésité à le faire. Il n'a pas voulu le faire. Il a ignoré les appels que les gens de la Gaspésie lui ont faits à ce moment-là. Pourquoi il n'a pas agi? Pourquoi il a refusé d'assumer ses responsabilités? Pourquoi il a abandonné les gens de la Gaspésie?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition tente de cacher la réalité des choses. Ce qui est arrivé dans ce dossier, c'est d'abord un gouvernement qui s'est assis en face d'une compagnie, de son partenaire, qui a participé à l'élaboration d'un projet, qui a fait des concessions pour que ce projet se réalise et qui a obtenu des engagements écrits de la part de l'investisseur et de son partenaire de procéder à une modernisation du moulin, un investissement de 100 000 000 $, en contrepartie des concessions que le gouvernement a faites.

Après ça, M. le Président, il s'agit de réaliser un projet. Alors, les parties ont commencé à réaliser tout de suite... plusieurs semaines après, puisque, au début de mai 1999, elles ont souscrit un engagement très large, beaucoup plus élaboré, qui incorporait dans leur entente de partie à partie – je parle de M. Bérubé et de la compagnie Consol Abitibi – un ensemble de provisions, un ensemble de dispositions qui permettaient de réaliser le projet.

Mais il est arrivé un événement par la suite, c'est le deuxième, auquel vient de faire allusion le chef de l'opposition, qui confond les deux volontairement. Le deuxième, c'est que le nouvel employeur de la corporation qui était créée pour réaliser le projet s'est tourné vers le syndicat des employés et leur a dit: J'ai besoin d'une diminution de coûts de main-d'oeuvre et je voudrais que vous réduisiez le niveau des salaires et des conditions normatives. Alors, là, évidemment, il s'est engagé une discussion extrêmement difficile entre un syndicat et un employeur. Le gouvernement était un tiers par rapport à cette discussion, comme l'était la population, mais nous avons fait plus que cela. Quand nous avons vu que ça discutait difficilement puis que ça bloquait, nous avons envoyé un médiateur, on a fait des pressions sur les parties, on n'a pas cessé de faire des pressions sur les parties pour qu'elles s'entendent, mais c'était difficile, cette discussion.

M. le Président, la réalité aujourd'hui puis ce qu'il y a de plus important, là, c'est ce qui se passe là-bas. Nous avons une situation sociale qui est grave, là-bas. C'est une ville mono-industrielle, c'était le seul employeur, la seule véritable industrie, qui payait environ 40 000 000 $ de salaires par année, ce qui est très, très important. Ça veut dire que, là-bas, il y a des gens qui ont acheté des maisons, qui ont pris des hypothèques et qui se retrouvent maintenant dans une situation désastreuse, dans une ville où il n'y a pas de chance d'avoir d'emploi et où d'ailleurs ils constituent eux-mêmes l'ossature économique de la ville.

Alors, hier, j'ai eu une rencontre très longue avec les représentants du syndicat de même que du milieu économique, y compris le maire et le préfet, et on m'a fait un portrait, je dirais, très inquiétant de la situation au point de vue social, parce qu'il y a des gens là qui n'ont plus d'assurance-chômage ou qui vont bientôt perdre l'assurance-chômage et qui ne pourront pas se qualifier pour l'aide sociale parce qu'ils ont certains actifs normaux, des maisons, etc.

(14 h 20)

Alors, le gouvernement, ce matin, en Conseil des ministres, a pris des décisions. Premièrement, il a demandé au ministre de la Solidarité sociale de préparer d'ici 24 heures un programme spécial d'intervention pour les familles des employés de Gaspésia, en ce qui concerne le problème de l'aide sociale et de l'éligibilité. Nous avons également donné un mandat de mettre au point dans les plus brefs délais, au cours des prochaines journées, un ensemble de mesures pour toute la Gaspésie, des mesures pour vérifier les projets qui sont en cours – il y a des projets d'investissement sur lesquels on travaille d'arrache-pied avec les gens du milieu depuis plusieurs mois – pour essayer de les faire aboutir plus rapidement, M. le Président. Nous pensons que, du côté du moulin, du côté de l'usine même, il faut travailler ensemble, tout le monde, il faut mobiliser l'opinion publique, et je convie l'opposition à poser des gestes constructifs pour associer sa voix et sa crédibilité et son autorité à une démarche collective pour que nous contraignions cette compagnie à respecter sa signature. C'est ce que nous demandons à l'opposition. Nous verrons s'ils vont aider le Québec dans cette affaire-là.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bonaventure.


Négociations avec la firme Abitibi-Consolidated concernant l'usine Gaspésia


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Depuis l'annonce de la fermeture de la Gaspésia, c'est toute la Gaspésie qui est sous le choc. Des centaines de travailleurs, des familles, des entreprises qui sont touchés ont décidé aujourd'hui de descendre dans la rue pour exprimer leur peine et leur désespoir. Les Gaspésiens et les travailleurs en ont gros sur le coeur et se demandent aujourd'hui pourquoi, pourquoi le premier ministre les a abandonnés.

Dans un article paru dans le journal Le Quotidien du 15 mai 1998, après l'annonce de la relance de l'usine Kénogami, on apprend que, M. le Président, et vous me permettrez de citer: «L'entreprise – en parlant d'Abitibi-Consol – subissait une forte pression de Québec, qui accorde les territoires d'approvisionnement forestier ainsi que les droits pour utiliser le pouvoir hydroélectrique des rivières. Tout le monde a eu un peu le couteau sur la gorge.»

Dans ce contexte, ma question au premier ministre: Est-ce que les Gaspésiens doivent comprendre aujourd'hui que le premier ministre a troqué l'usine Gaspésia pour sauver l'usine Kénogami, située dans son propre comté?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: Quand une opposition veut faire de la démagogie devant un problème qu'on subit, elle fait des choses comme celle-là, M. le Président.

Il n'y a pas de problème d'approvisionnement forestier là-bas. La compagnie ne nous a jamais dit que, si elle fermait le moulin, c'était parce qu'il n'y avait pas de bois. Au contraire, tout est là, et la compagnie, dans son communiqué de presse, et le syndicat, tout le monde a reconnu que le gouvernement avait pourvu tout le monde de ce qu'il fallait pour fonctionner. Ce n'est pas elle, la question, M. le Président. Ça, c'est détourner la question.

J'ai eu hier une rencontre très difficile, dans le sens que j'avais en face de moi des gens catastrophés, des gens qui vivent dans l'immédiat, dans leur milieu ce qu'ils perçoivent d'angoisse morale présentement. C'est évidemment qu'il y a des gens présentement qui sont en train de penser à retirer leurs enfants de l'école aux Fêtes pour essayer de déménager dans une ville où ils pourront trouver de l'emploi. Donc, c'est très grave pour cette communauté. Et ce que je dis, c'est que je n'ai pas senti, en aucune façon – et je le dis parce que j'étais là, puis il y avait du monde avec moi – que ces gens-là trouvaient que le gouvernement les avait abandonnés, en aucune façon. Nous avons eu une rencontre constructive et nous nous sommes donné la main pour construire une solidarité québécoise, une solidarité totale, avec l'opposition – nous l'avons souhaitée – pour pouvoir forcer la compagnie à réaliser le projet qu'elle s'était engagée à réaliser.

Ceci étant dit, M. le Président, nous sommes conscients que la compagnie invoque des motifs pour se retirer du projet. La compagnie dit: Le papier journal, il y en a trop sur le marché, on ne peut plus en produire. On se surprend, parce que, au mois de mai, c'était la même situation et puis ils ont signé l'accord, au mois de mai.

Mais, ceci étant dit, ce que nous souhaitons, c'est que la compagnie, si elle ne peut pas réaliser ce projet particulier, qu'elle propose d'autres solutions qui vont arriver au même objectif, c'est-à-dire maintenir les emplois et permettre la relance de l'usine. Nous ne sommes pas attachés à la lettre, à la virgule de l'entente. Ce qu'il faut, c'est que les gens reprennent de l'emploi, qu'il y ait une solution transitoire d'emploi durant le temps des investissements. Et nous sommes ouverts pour discuter avec la compagnie, nous le lui avons dit. Il y a eu quelques petites portes qui ont été ouvertes, mais, pour le moment, je crois qu'il faut accentuer la pression pour qu'elle respecte sa signature. Et on a besoin de ça, de l'unanimité, on a besoin de ça, d'une solidarité, on a besoin d'une opposition constructive dans ce dossier.

Le Président: Mme la députée.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: En additionnelle. M. le Président, s'il n'a pas abandonné les Gaspésiens, pourquoi le premier ministre, sur la base de son engagement personnel, ne met-il pas le couteau sur la gorge d'Abitibi-Consol, comme il l'a fait dans le dossier de Kénogami, pour régler le problème de la Gaspésia? Est-ce qu'un travailleur de la Gaspésie vaut moins qu'un travailleur situé dans son propre comté?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, ce genre d'expression, «mettre le couteau sur la gorge des compagnies», je ne suis pas de ceux qui pensent que c'est comme ça que ça marche, l'économie. Et, dans le dossier de Kénogami, nous n'avons pas fait cela non plus, nous ne l'avons pas fait non plus. Nous avons discuté très ouvertement, très correctement avec cette compagnie – la même compagnie, d'ailleurs – pour faire en sorte que... Puis ça a été pareil dans le cas d'Alma. À l'époque où j'étais député à Alma, on a fait la même chose, le même comité qui a fonctionné à Alma, qui a fonctionné à Kénogami, et nous souhaitons que ça fonctionne comme ça en Gaspésie aussi.

Je crois, M. le Président, que les tentatives d'aller trop loin, comme... Par exemple, notre ami le maire de Chandler, qui est un homme qui veut trouver des solutions puis qui cherche à droite et à gauche – et je le comprends – a évoqué à quelques reprises l'expropriation. Bon, si c'est ça qu'on veut dire du côté de l'opposition – j'attends de voir ce que ça veut dire pour eux, «le couteau sur la gorge» – eh bien, évidemment, ça pose un problème. Dans une société d'économie ouverte, ce n'est pas aux municipalités puis au gouvernement d'exproprier les biens industriels, il faut travailler autrement. Il faut travailler en discutant honnêtement, correctement, signer des contrats, comme nous l'avons fait, avec des gens qui respectent leur signature, pour faire en sorte qu'on puisse faire marcher l'économie. Si l'opposition demande au gouvernement d'exproprier, qu'elle nous le dise.

Le Président: En question principale, M. le député de Marquette, maintenant.


Considérations juridiques liées à la fermeture de l'usine Gaspésia


M. François Ouimet

M. Ouimet: Question principale. Toujours dans le dossier de l'usine Gaspésia – et nous sommes une société de droit – le premier ministre déclarait hier, et je le cite au texte, il disait ceci: «Pour nous, ce contrat-là existe, il a une portée juridique, et ce n'est pas pour rien qu'on a négocié, qu'on a pris des engagements et qu'il s'en est pris de part et d'autre.» Hier, tout comme aujourd'hui, le premier ministre demande à Abitibi-Consol et à M. Weaver de respecter sa signature. Il convie même l'Assemblée nationale pour mettre une pression pour que la signature soit respectée. Tantôt, le premier ministre a fait état d'un décret qui a été adopté par son gouvernement ce matin.

La question que je pose, elle s'adresse à la Procureur général: A-t-elle été, premièrement, consultée dans ce dossier-là? Deuxièmement, est-ce qu'elle a reçu un mandat ce matin par le biais du décret? Et, troisièmement, quels moyens juridiques entend-elle prendre pour, elle aussi, proposer des solutions – c'est ce que demande le premier ministre – afin de forcer la compagnie Abitibi-Consol à respecter sa signature pour éviter la fermeture permanente de l'usine Gaspésia?


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: ...pour éviter qu'involontairement le député crée une confusion dans les esprits – parce que ça serait bien involontaire qu'il puisse tenter de créer une confusion, ce n'est pas son genre, M. le Président! – je voudrais préciser que, ce matin, la décision que nous avons prise concernait la mise en place d'un programme spécial au point de vue de la gestion de l'aide sociale et qu'il n'y a pas eu de décret d'adopté à d'autres fins que celle que je viens de mentionner. Voilà. S'il a des questions à poser, il peut les poser à qui il voudra.

Le Président: M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, la question s'adresse à la Procureur général: A-t-elle été consultée dans le dossier? A-t-elle reçu un mandat de la part du premier ministre pour faire toute l'analyse de la situation juridique? Parce qu'il prétend, le premier ministre, que le contrat n'a pas été signé. Et, si oui, quelles mesures concrètes entend-elle prendre afin de faire respecter la signature d'Abitibi-Consol?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, encore une fois, le député de Marquette essaie toujours de mêler les dossiers en cette Chambre. Alors, il veut mêler la jurisconsulte à toutes sortes de dossiers, même quand les dossiers ne la regardent pas. Il veut également mêler la jurisconsulte lorsqu'une lettre est adressée à un collègue. Je comprends qu'il souhaiterait que nous intervenions dans tous les dossiers, mais ça ne serait pas d'assumer notre rôle, mon rôle, qui est celui d'être Procureur général et d'être jurisconsulte.

Ce que notre premier ministre vient de mentionner en cette Chambre, oui, comme membre du Conseil exécutif et comme membre du Conseil des ministres, j'en ai été informée, et la décision, elle a été prise, et ce qui a été décrété, c'est une entente avec l'aide sociale, et c'est sous la responsabilité de mon collègue que vient la première responsabilité. Alors, à cet égard, M. le Président, je n'ai pas à intervenir comme Procureur général ni comme jurisconsulte dans un tel dossier.

Le Président: M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Doit-on comprendre de la réponse de la Procureur général qu'aucun moyen juridique ne sera entrepris par son gouvernement pour forcer le respect de la signature de M. Weaver et d'Abitibi-Consol, contrairement à ce qu'a laissé entendre hier le premier ministre? Et, dans cette situation-là, sommes-nous Gros-Jean comme devant?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, je comprends que le député de Marquette souhaiterait que l'on soit tout mêlés dans nos dossiers, comme lui l'est dans ses questions.

(14 h 30)

Alors, M. le Président, nous intervenons au fur et à mesure que les dossiers le demandent, et, à ce stade-ci, notre premier ministre a informé en cette Chambre des décisions que nous avions prises au Conseil des ministres.

Le Président: En question...


M. Jean J. Charest

M. Charest: Supplémentaire, M. le Président.

Le Président: ...complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Charest: D'abord, je veux souhaiter la bienvenue à la Procureur général à la période de questions et donner l'occasion à son premier ministre justement de rectifier le tir, lui qui vient d'invoquer la légalité des contrats. Il l'a fait avec beaucoup d'énergie et il vient d'apprendre que sa Procureur général n'est pas au courant, qu'elle n'est pas impliquée, puis pourtant il invoque la légalité des contrats.

Est-ce qu'on pourrait prendre une seconde, M. le Président, pour demander au premier ministre qu'il informe la Procureur général de la question de la légalité des contrats?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: Je me mets à la place des gens de Chandler qui écoutent le chef de l'opposition, là, puis qui trouvent qu'il doit s'enfarger dans des détails bien insignifiants par rapport aux problèmes qu'ils ont. M. le Président, nous avons une entente, elle est dûment signée, elle a été confirmée par un renouvellement entre les parties cinq semaines après, au début de mai 1999. Tout le monde peut les voir, ces documents-là, et nous pensons que ces signatures lient leurs auteurs.

Ceci étant dit, M. le Président – nous en avons d'ailleurs discuté hier avec les représentants du milieu et du milieu syndical aussi – c'est que les gens, là-bas, ce n'est pas un procès qu'ils veulent avoir, là. D'annoncer aux gens aujourd'hui qu'on va faire un procès qui va durer 10 ans à la compagnie puis qu'au bout de 10 ans on verra, ça, là, ce n'est pas la solution qu'ils privilégient, puis nous autres non plus. Ce que nous privilégions, c'est que la compagnie se rende compte qu'elle a signé un contrat, qu'il y a des obligations juridiques et qu'il y a également des obligations d'honneur qui en résultent, quand ce contrat-là a été signé avec un gouvernement. C'est une grande corporation qui agit dans le monde, c'est la plus grande corporation productrice de papier journal du monde, qui a une réputation à soutenir, et nous pensons qu'elle voudra la soutenir aussi dans ses rapports avec le gouvernement du Québec.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourassa, maintenant.


Services d'urgence du Complexe de santé de la Sagamie, à Chicoutimi


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Au moment où je vous parle, il semble qu'il n'y ait pas de médecin pour assurer la garde à l'urgence de l'hôpital de Chicoutimi. En effet, le premier ministre s'entête dans ce dossier parce qu'il n'a pas digéré que des médecins ne se plient pas à sa volonté. Est-ce que le premier ministre peut confirmer aux personnes malades, qui ont besoin de services, s'il entend, oui ou non, mettre son orgueil de côté, mettre son entêtement de côté et enfin régler ce dossier?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je peux rassurer les gens qui font affaire ou qui ont besoin de services à l'hôpital de Chicoutimi, que les services sont assurés aux urgences actuellement et pour les plages horaires qui viennent. Je veux aussi informer les membres de cette Assemblée que nous sommes actuellement en discussion. Il y a une réunion, au moment même où nous siégeons à cette Assemblée, au ministère de la Santé et des Services sociaux, où des représentants de l'hôpital sont là, où des représentants des médecins sont là et où la Régie est impliquée, de telle sorte que nous travaillons à trouver des solutions pour une couverture adéquate, correcte pour l'ensemble des services d'urgence du Complexe de santé de la Sagamie, à Chicoutimi, M. le Président.

N'oublions pas qu'il y a derrière toutes ces discussions et derrière tous ces échanges une question, évidemment, de rémunération différenciée selon qu'on oeuvre dans telle ou telle région, ou dans tel ou tel établissement. On sait, pour en avoir débattu hier et à d'autres moments, que des décisions que nous prenons à l'égard de cette rémunération différenciée font en sorte qu'il y a parfois des effets pervers aux décisions, qui nous amènent un résultat, donc, que nous ne souhaitions pas. Et c'est pour ça que nous prenons le temps de bien travailler avec les médecins et avec la direction de l'hôpital, et je suis assurée que nous trouverons des solutions. Mais, pour l'instant, il y a des services disponibles au centre hospitalier, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Bourassa.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, la ministre de la Santé et des Services sociaux peut-elle nous dire pourquoi – si, comme elle le prétend, les services et les plages sont assurées – le maire de Chicoutimi, il y a plus d'une heure, a affirmé à quatre reprises qu'il y a des personnes qui meurent? Il a bien dit «qui meurent», quatre fois, à quatre reprises, sur TVA; il y a des personnes qui meurent parce que le premier ministre est incapable de régler ce dossier-là.

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je pensais que la députée de Bourassa était capable de porter elle-même un jugement sur de tels propos et ne pas les colporter ici, M. le Président. Il n'y a pas de personnes qui meurent, il y a des services disponibles. Quand ce n'est pas au complexe de la Sagamie, c'est à Jonquière, M. le Président. Et, dans les faits, à quelques minutes de distance des services, c'est évident qu'on peut assurer que la vie des gens n'est pas en danger. Je considère que c'est complètement irresponsable que de tenir de tels propos dans notre Assemblée.

Le Président: Mme la députée de Bourassa.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, est-ce que la ministre est consciente que je ne colporte pas n'importe quel propos mais que je rapporte les propos du maire de Chicoutimi qui, à quatre reprises, il y a un peu plus d'heure maintenant, a affirmé sur le réseau TVA qu'il y avait des gens qui meurent à Chicoutimi parce que le premier ministre ne peut pas régler le problème?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, tel que je l'ai déjà dit aux membres de cette Assemblée, et je vais le répéter, nous nous assurons qu'il y a des services d'urgence de qualité disponibles dans tous les centres hospitaliers du Québec et, pour ce faire, nous avons mis en place des équipes de dépannage, des équipes de médecins qui se rendent disponibles et assurent ainsi les services. D'ailleurs, Mme la députée de Bourassa devrait s'informer auprès de ses collègues qui, eux, se sont dits satisfaits des solutions que nous avions trouvées ailleurs à travers le Québec, qu'il s'agisse de Lac-Mégantic ou qu'il s'agisse d'autres régions, M. le Président. Et c'est de la même façon que nous traitons le cas de la région de Chicoutimi et du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Et je peux assurer la population québécoise que, malgré les propos démagogiques de notre collègue, il y a des services actuellement disponibles.

Le Président: En question complémentaire?

Mme Lamquin-Éthier: En principale, M. le Président.

Le Président: En principale. Mme la députée, vous me permettrez d'abord de donner la parole au député de L'Assomption qui l'avait réclamée.


Construction d'un hôpital dans Lanaudière


M. Jean-Claude St-André

M. St-André: Merci, M. le Président. Alors, depuis maintenant 10 ans, la population du sud de Lanaudière attend la mise en chantier de son nouvel hôpital. Le centre de services ambulatoires du sud de Lanaudière a fait l'objet d'un engagement formel de la part de Jacques Parizeau – alors député de L'Assomption et premier ministre du Québec – en 1994 et des six candidats du Parti québécois de la région en 1998. Les installations actuelles n'étant plus adéquates, la direction de l'hôpital Le Gardeur, avec en tête Mme Gisèle Boyer, ainsi que le personnel soignant font des miracles pour offrir des services de qualité. Vous me permettrez d'ailleurs de profiter de l'occasion, M. le Président, pour les saluer, pour leur rendre hommage et pour leur dire à quel point nous leur sommes reconnaissants.

En fin de semaine, par l'entremise d'un article paru dans un hebdomadaire régional, l' Hebdo Rive-Nord , j'ai pris connaissance d'une bonne nouvelle. Je cite ici la directrice générale de l'hôpital Le Gardeur: «On nous dit que le projet est dans le sprint final. On pense avoir une bonne nouvelle d'ici Noël.»

M. le Président, est-ce que la ministre de la Santé et des Services sociaux peut nous confirmer aujourd'hui cette bonne nouvelle?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, si la députée de Bourassa voulait avoir des preuves de l'engagement des membres de mon caucus sur leurs dossiers, elle en a le plus bel exemple aujourd'hui.

(14 h 40)

Alors, je vais reprendre, pour l'essentiel, les propos que j'ai tenus à ce sujet la semaine dernière. Nous sommes actuellement à évaluer les projets d'immobilisation. Vous savez qu'il y a des demandes importantes à cet égard dans le réseau de la santé et des services sociaux et que ce projet, comme tous les autres, est toujours à l'étude pour l'ensemble des plans d'investissement du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de L'Assomption.


M. Jean-Claude St-André

M. St-André: En additionnelle, M. le Président. J'aimerais savoir si le plan d'immobilisation va être adopté avant Noël et si, bien sûr, le Centre de services ambulatoires du sud de Lanaudière y sera incorporé?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Il est évident, M. le Président, que nous devrons adopter d'ici quelques semaines ce plan d'immobilisation et, comme je le mentionnais tout à l'heure, il va de soi que le projet de Le Gardeur est à l'étude, au même titre que d'autres projets.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourassa.


Déficit du régime d'assurance-médicaments


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. On apprend dans La Presse que les coûts du régime d'assurance-médicaments ont connu une hausse de 156 000 000 $, soit 15 % du coût total du régime, et ce, pour une année. Selon une source qui serait bien au fait du dossier, ce serait littéralement une catastrophe pour les finances publiques.

La ministre, M. le Président, peut-elle nous confirmer à combien elle estime le déficit du régime d'assurance-médicaments?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. On doit d'abord constater une chose, c'est qu'on avait craint que les personnes n'utilisent pas pleinement le régime à cause des primes qui leur étaient demandées ou de la contribution qu'ils devaient fournir. Or, on constate, dans le fond, que nous sommes victimes de notre succès. Le régime a donné les résultats escomptés et même davantage.

Il y a en fait, M. le Président, deux types de dépassements au régime. Il y a d'abord le dépassement où il s'agit de la contribution gouvernementale, compte tenu que nous couvrons les médicaments ou les coûts que devraient assumer les personnes assistées sociales ou les personnes à la retraite avec de très bas revenus. Donc, sous cet angle-là, on parle d'un manque de l'ordre de 130 000 000 $, et il y a, au fonds lui-même du régime, parce que le régime a attiré un beaucoup plus grand nombre de personnes que ce qui était prévu à l'origine... On parlait d'une participation de 1 200 000 personnes. Or, dans les faits, nous approchons plutôt une participation de 1 500 000 personnes parce que le régime est plus intéressant que les régimes auxquels contribuaient les gens. Les bénéfices sont meilleurs, et il y a, à cet égard, un manque à gagner de l'ordre de 80 000 000 $, environ, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, la ministre de la Santé et des Services sociaux a-t-elle l'intention de nous dire aujourd'hui si elle a, encore une fois, pour solution de faire payer les personnes âgées et les personnes les plus vulnérables, d'autant plus que ce gouvernement a déjà puisé un peu plus d'un demi-milliard dans les poches des personnes âgées?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, la députée de Bourassa devrait se souvenir que c'est plutôt l'inverse que nous avons fait lorsque nous avons apporté certaines corrections au régime, le printemps dernier, pour les personnes les plus démunies.

Et, en ce sens, on doit plutôt comprendre que la députée de Bourassa n'a pas retenu l'information ou n'a pas compris ce que nous avions posé comme geste à ce moment-là, puisque nous avons amélioré, je le répète, le régime pour les personnes à la sécurité du revenu et pour lesquelles on constatait qu'il y avait un effet non souhaité et une baisse de consommation. Pour le reste, M. le Président, vous savez qu'il y a une obligation d'évaluation du régime et de l'ensemble de ses composantes, ce à quoi nous travaillons actuellement, et éventuellement nous proposerons un certain nombre de mesures pour nous permettre de corriger la situation.

Le Président: Mme la députée.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, est-ce que la ministre peut répondre à ma question et me confirmer si, oui ou non, elle compte encore puiser dans les poches des personnes âgées et des personnes les plus démunies pour payer le dépassement dont elle vient de nous parler?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je comprends difficilement la question de la députée de Bourassa, M. le Président, quand on sait que le régime a permis de couvrir 1 200 000 personnes qui, autrement, n'avaient aucunement accès à des médicaments, gratuits ou pas. On n'avait pas accès aux médicaments, M. le Président. C'est ce que nous avons fait. Et nous avons tenté – et je pense que nous avons réussi – d'être équitables, de telle sorte que la contribution, elle est basée sur le revenu. On peut être âgé et avoir d'excellents revenus, et c'est normal, à ce moment-là, que l'on contribue comme n'importe quel autre citoyen qui a de bons revenus. On peut être âgé et avoir des revenus très bas, trop bas pour nous permettre d'assumer nos besoins, et, à ce moment-là, la contribution, elle est infime, M. le Président. C'est vrai aussi pour les personnes à la sécurité du revenu.

Je crois que nous avons fait des gains importants pour l'ensemble de la population québécoise en implantant ce régime. Nous l'avons fait en respectant les règles d'équité, et je crois que les gens, maintenant, qui ont accès à ce service en témoignent tous les jours.

Le Président: M. le député de Hull, maintenant, en question principale.


Fusion entre Mont-Tremblant et Saint-Jovite


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, on apprenait ce matin que le gouvernement péquiste s'apprête à forcer la fusion entre Mont-Tremblant et Saint-Jovite, et ce, malgré le fait que le député de Bertrand et adjoint parlementaire à la ministre des Affaires municipales ait retiré récemment le projet de loi privé qui forçait, justement, la fusion de ces deux municipalités. M. le Président, nous savons tous qu'au mois d'août dernier la population de la municipalité de Tremblant a été consultée par référendum. La question posée était la suivante, je vais la lire: «Êtes-vous favorable à la fusion de la municipalité de Mont-Tremblant avec la ville de Saint-Jovite et la paroisse de Saint-Jovite? Oui ou non?» Les résultats, eh bien, 96 % des résidents se sont prononcés contre le projet de fusion.

Ma question s'adresse au député de Bertrand et adjoint parlementaire à la ministre des Affaires municipales. Au Mont-Tremblant, il y a eu un référendum avec une question claire et une réponse très claire. Qu'est-ce que le gouvernement péquiste ne comprend pas là-dedans? Pourquoi le gouvernement péquiste refuse-t-il toujours de reconnaître ce référendum et pourquoi continue-t-il de s'acharner sur la population de Mont-Tremblant?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor et ministre responsable de la région.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, j'ai lu, comme le député, ce matin cet article dans le journal, et effectivement le gouvernement s'intéresse beaucoup à la question. Mais, en temps et lieu, nous prendrons une décision.

Le Président: M. le député.


M. Roch Cholette

M. Cholette: M. le Président, est-ce que le ministre responsable de la région des Laurentides et président du Conseil du trésor... Lui, il a le droit de se lever pour répondre, il faut comprendre. Est-ce qu'il peut dire aux citoyens de Mont-Tremblant pourquoi leur vote ne compte pas, pourquoi le référendum ne compte pas, mais surtout pourquoi, dans le fond, l'opinion du monde ordinaire ne compte pas?

Le Président: M. le ministre.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, le député sera très bien informé et il comprendra quand il verra le projet de loi.

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin.


Contribution d'Emploi-Québec aux services d'alphabétisation


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. Nous avons rencontré dernièrement les représentants du regroupement des 130 groupes populaires en alphabétisation du Québec. Nous avons appris que, malheureusement, Emploi-Québec est fermé aux centaines de milliers de personnes analphabètes au Québec.

Ma question à la ministre de l'Emploi: Aura-t-elle le courage de dire la vérité et de confirmer ce que les groupes populaires nous ont dit, à l'effet qu'Emploi-Québec est bel et bien fermé aux personnes analphabètes?

(14 h 50)

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, Emploi-Québec n'est fermé pour personne. C'est bien évident qu'actuellement, comme Emploi-Québec se remet en action, il y a beaucoup de problèmes qui sont en train de se résoudre. Le dossier de l'alphabétisation est un dossier effectivement que je surveille avec une certaine attention, c'est bien sûr, mais Emploi-Québec n'est fermé pour personne.

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Pourquoi la ministre, qui, dans sa vie précédente, n'hésitait pas à dire la vérité, aujourd'hui, pour des motifs politiques extrêmement douteux, refuse-t-elle de dire tout haut ce que tout le monde sait: Emploi-Québec est bel et bien fermé aux personnes analphabètes? Pourquoi défendre l'indéfendable, Mme la ministre?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, j'ai toujours eu la réputation de dire la vérité et de ne pas faire de charriage non plus. Et je le répète: Je pense que l'opposition joue à un jeu dangereux. Emploi-Québec est en train de se réactiver. Il y a beaucoup de situations qui ont été difficiles, effectivement, oui, ces derniers mois. Nous réactivons les dossiers. Des dossiers comme l'alphabétisation sont des dossiers sur lesquels on doit porter une attention. Par exemple, tous les projets qui ont trait à l'alphabétisation dans un contexte de milieu de travail se déroulent très correctement. Il y a des zones un peu plus difficiles, mais on y porte attention.

Mais ce n'est pas vrai, et je refuse que l'opposition officielle le laisse croire, qu'Emploi-Québec ne dessert pas des personnes qui sont en recherche d'emploi, des personnes qui sont en action pour se retrouver un travail. On n'a pas le droit de laisser croire aux Québécois et aux Québécoises que ces services publics d'emploi là ne fonctionnent pas. On met en péril des personnes!

Le Président: En question principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Relocalisation de services d'emploi offerts dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, en parlant des personnes qui sont mises en péril par les décisions du gouvernement du Parti québécois, le cafouillage au ministère de l'Emploi est contagieux. Nous apprenions dernièrement que le module Emploi-Québec, c'est-à-dire toutes les mesures de formation, de réinsertion au travail, du Centre local d'emploi de Notre-Dame-de-Grâce déménagera bientôt dans le quartier Côtes-des-Neiges et que seuls resteraient à Notre-Dame-de-Grâce les services d'aide sociale, c'est-à-dire l'émission des chèques et le contrôle sur les personnes.

Comment est-ce que la ministre concilie-t-elle cette décision d'éparpiller des services qui étaient offerts en un seul endroit avec son grand principe de guichet unique, qu'elle défend constamment?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, Emploi-Québec, c'est un réseau de 151 points de services qu'on appelle les centres locaux d'emploi, les CLE. D'ici la fin de l'année, 80 % d'entre eux seront localisés de manière permanente, parce que, jusqu'à maintenant, ils n'étaient pas localisés dans des endroits qui étaient convenables, considérant la mission de ces centres locaux d'emploi. Alors, d'ici la fin de l'année, nous aurons un réseau qui sera localisé vraiment, qui va pouvoir bien accueillir les gens... que les locaux soient disponibles, conviviaux et que l'information disponible à la clientèle le soit facilement.

Sur le territoire de Montréal, nous avons bien sûr un défi. Montréal, c'est quand même la moitié du Québec. Et c'est vrai qu'il y a eu des choix de concentrer certains services pour pouvoir être beaucoup plus efficace. Évidemment, je ne connais pas les modalités de chacun de ces centres locaux d'emploi, mais c'est vrai que, dans certains cas par exemple, on a décidé de concentrer les services aux entreprises au lieu de saupoudrer les interventions que nous devons faire auprès des entreprises. On fait en sorte qu'il y ait plus de professionnels qui s'occupent de ces questions-là. Alors, c'est des modalités pour permettre d'être plus efficace et d'être plus performant par rapport à la clientèle que nous voulons desservir.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, qu'est-ce que le ministre de la Solidarité sociale, lui, pense d'une décision pour laquelle... Les récipiendaires de l'aide sociale avaient un guichet unique dans Notre-Dame-de-Grâce. Le guichet pour l'aide sociale demeure sur le boulevard Cavendish, mais maintenant ces personnes-là sont obligées de se déplacer à un autre endroit. Est-ce que c'est ça, sa vision de desservir efficacement les citoyens et des guichets uniques, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Solidarité sociale.


M. André Boisclair

M. Boisclair: Je voudrais informer le député de Notre-Dame-de-Grâce que trois CLE permanents verront le jour dans sa circonscription. Les dates qui sont à ce moment prévues pour les CLE: Lachine, 28 août 2000; Notre-Dame-de-Grâce, 7 février 2000; Ville Émard, 9 juin 2000. Et, à ce jour, le gouvernement a respecté, sur ces questions, son engagement.

Maintenant, quant à l'organisation des services sur un même territoire d'arrondissement. Dans certains arrondissements, il y avait trois points de services. C'est le cas dans le cas du député de Notre-Dame-de-Grâce; c'était aussi le cas dans ma propre circonscription, dans mon arrondissement. Plutôt que d'éparpiller les ressources d'Emploi-Québec un peu partout, nous avons fait le choix de concentrer dans deux points de services les ressources d'Emploi-Québec, en rappelant qu'en tout temps une personne assistée sociale qui se présente dans un CLE aura accès aux mêmes services de base. Donc, tout l'équipement...

Une voix: ...ailleurs.

M. Boisclair: ... – non, pas ailleurs, dans le bureau – personnes-ressources en première ligne, équipement informatique, centre de documentation, ces ressources sont des services universels offerts dans l'ensemble des points de services.

Cependant, pour des interventions deuxième ligne, par souci d'efficacité – nous, ça nous intéresse, de ce côté-ci de l'Assemblée – par souci aussi de saine gestion, on a regroupé, pour les territoires d'arrondissement, parfois trois points de services en deux. Pour les services deuxième ligne. Et ça s'est fait aussi beaucoup à la demande des entreprises qui souhaitaient avoir dans un lieu plutôt que dans plusieurs autres lieux, avec des services diminués, accès à des services de qualité.

Donc, M. le Président, cela se fait dans le respect des grandes lignes de la réforme et, surtout, cela se fait dans le meilleur intérêt des gens.

Le Président: Alors, cette réponse complète la période de questions et de réponses orales pour aujourd'hui.


Votes reportés


Motion proposant que l'Assemblée fasse sien le constat des promesses non tenues par le gouvernement à la suite du Sommet socioéconomique de 1996

Nous allons passer au vote annoncé précédemment sur la motion de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. La motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale du Québec fasse sien le constat généralisé des promesses non tenues par le gouvernement péquiste suite au Sommet socioéconomique de 1996.»

Alors, que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, d'abord.

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Bourbeau (Laporte), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Legault (Rousseau), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Arthabaska), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), Mme Papineau (Prévost), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Signori (Blainville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Désilets (Maskinongé), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

(15 heures)

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:42

Contre:64

Abstentions:0

Le Président: En conséquence, la motion de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys est donc rejetée.

Nous en arrivons à l'étape des motions sans préavis. Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, je demande le consentement de cette Chambre pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale réclame du gouvernement du Québec le respect de l'engagement personnel du premier ministre et le respect des engagements des autres parties impliquées, assurant ainsi aux familles de la Gaspésie que tout sera mis en oeuvre pour préserver les emplois à l'usine Gaspésia, de Chandler.»

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: Y a-t-il consentement pour la présentation de la motion?

M. Brassard: M. le Président, je trouve bien triste que la députée de Bonaventure, qui vient de la Gaspésie...

Le Président: M. le leader du gouvernement, est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de la motion?

M. Brassard: Je ne consens pas à la petite partisanerie de bas étage.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Simplement, M. le Président, pour que vous demandiez à ce moment-ci au leader du gouvernement de retirer ses derniers propos, qui sont antiparlementaires, et la règle est bien établie que le consentement se donne ou se refuse sans commentaires. Il y a donc deux infractions. Lui demander de retirer les derniers propos, et le débat en restera là.

Une voix: Bravo!

Le Président: Je pense que, dans le contexte, M. le leader de l'opposition officielle, chacun a dit ce qu'il avait à dire. Je considère que la présentation de la motion n'est pas acceptée, qu'il n'y aura pas, donc, de débat et qu'il n'y a pas de commentaires à être apportés, à ce moment-là. Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, à ce moment-ci, si vous ne demandez pas au leader du gouvernement de retirer ses propos, je demanderais quand même qu'il y ait dépôt du texte pour que la population soit à même de juger du niveau de degré de responsabilité et de support aux gens de la Gaspésie qui subissent actuellement une situation qui les afflige. Le premier ministre était d'accord avec ça. Les gens sont à même de le juger à partir du texte de la motion. Il faut que ça fasse partie des archives de l'Assemblée nationale du Québec.

Le Président: Vous savez, M. le leader de l'opposition officielle, très bien, comme le leader du gouvernement le savait aussi, que, dans un cas comme dans l'autre, vous n'avez pas, ni l'un ni l'autre, respecté l'esprit du règlement qui prévoit qu'il n'y a pas de commentaires. Ce que vous demandez, de toute façon, est consigné au Journal des débats . Il n'y a pas besoin de déposer quelque chose qui, de toute façon, est dans les archives de l'Assemblée. À ce moment-ci, on en reste là, s'il vous plaît. Je pense que...

Des voix: ...

Le Président: Je veux savoir: Est-ce que c'est pour poursuivre un débat qu'il n'y a pas lieu d'avoir?

M. Paradis: ...

Le Président: Alors, sur une demande de consentement, M. le leader.

M. Paradis: Est-ce qu'il y a consentement de la part du gouvernement pour que le texte de la motion – je comprends qu'on ne veut pas en discuter – soit déposé à l'Assemblée nationale?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je viens de ne pas consentir. De toute façon, comme vous l'avez dit, elle sera consignée et la population jugera que l'opposition officielle est incapable de faire la distinction entre ceux qui font...

Le Président: On va en rester là, s'il vous plaît, M. le leader du gouvernement. Le document, de toute façon, est consigné au procès-verbal. Il n'y a pas de consentement pour en débattre, et, de toute façon, de part et d'autre, les gens et l'opinion publique porteront ces jugements en fonction de ce qu'ils choisiront de faire.

Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: En vertu du règlement et parce que j'aime beaucoup la langue française, que je déteste ne pas terminer mes phrases, est-ce que je peux terminer ma phrase?

Le Président: Je sais, M. le leader du gouvernement, que vous êtes un amoureux de la langue française et que cette belle langue nécessite en général que l'on termine ses phrases, mais vous savez aussi que le règlement prévaut à ce moment-ci sur les prérogatives linguistiques et qu'en conséquence je crois que, de part et d'autre, vous avez dit ce que vous aviez à dire et que le reste...

Alors, s'il n'y a pas d'autres motions sans préavis... M. le député de Nelligan, sur une motion sans préavis?

M. Williams: Oui.

Le Président: D'accord.

M. Williams: Je demande le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Québec la tenue d'une consultation publique élargie pour entendre les chômeurs, les personnes assistées sociales, les chercheurs d'emploi, les groupes communautaires et les entrepreneurs des différentes régions du Québec sur la gestion et l'administration d'Emploi-Québec.»

«That the National Assembly oblige the Government of Québec to hold public consultations to hear the unemployed, welfare recipients, those looking for employment, community groups and entrepreneurs of the different regions of Québec regarding the management and administration of Emploi-Québec.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de la motion? M. le leader adjoint du gouvernement. Il n'y a pas de consentement, M. le député de Nelligan.


Avis touchant les travaux des commissions

Nous allons maintenant passer, si vous le voulez bien, aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'éducation poursuivra les consultations générales sur la place de la religion à l'école aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle du Conseil législatif, ainsi que demain, le jeudi 4 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des transports et de l'environnement poursuivra les consultations générales sur le document intitulé Réforme du transport par taxi – Pour des services de taxi de meilleure qualité aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, ainsi que demain, le jeudi 4 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif; et

Que la commission de l'aménagement du territoire, quant à elle, terminera les auditions des intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi privé n° 210, Loi modifiant la Charte de la Ville de Québec, demain, le jeudi 4 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Le Président: Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Pour ma part, je vous avise que la commission de la culture va se réunir en séance de travail demain, de 8 heures à 9 h 30, à la salle RC.3.31 de l'hôtel du Parlement, afin d'étudier la troisième version du projet de rapport final dans le cadre du mandat d'initiative portant sur le passage à l'an 2000.

Je vous avise aussi que la commission de l'administration publique va se réunir aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, afin d'entendre le sous-ministre de la Solidarité sociale concernant le Fonds de lutte contre la pauvreté.

Nous allons maintenant aller aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

S'il n'y a pas d'interventions à cette rubrique, nous passons aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vous réfère...

M. Boisclair: J'aurais juste une petite question, si vous me permettez, dont j'aimerais discuter rapidement avec le leader de l'opposition. Les sous-ministres à la Solidarité sociale sont présentement en commission parlementaire pour un mandat d'imputabilité sur le Fonds de lutte à la pauvreté. Le sous-ministre en titre, M. Deroy, ainsi que le sous-ministre adjoint, M. Boudreau, sont présents en commission parlementaire.

Compte tenu du mandat que j'ai reçu du Conseil des ministres aujourd'hui, je ne sais pas s'il serait possible que nous puissions, par ordre de la Chambre, suspendre les travaux de la commission, je requerrais l'appui et la présence de mes sous-ministres à mes côtés. Je ne sais pas si l'opposition pourrait convenir d'une entente et revenir plus tard pour en discuter davantage, mais j'aimerais pouvoir discuter de cette question avec le leader de l'opposition.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: La coutume, M. le Président. Nous sommes ouverts à ce type de discussion. Nous aviserons la Chambre du résultat des discussions.

(15 h 10)

Le Président: Oui. Et j'espère que vous allez aussi aviser le président de la commission qui, en l'occurrence, remplit un mandat d'initiative en regard de la Loi sur l'imputabilité des... M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Comme la commission constitue un démembrement de la Chambre, je suis certain que la présidence veillera à ce que les messages soient acheminés.


Affaires du jour

Le Président: Très bien. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, sur les affaires du jour, maintenant.

M. Boulerice: Suite à cette interruption momentanée, M. le Président, je reprends en vous référant à l'article 20 du feuilleton de ce jour.

Le Président: Très bien. Alors, à cet article du feuilleton... Un instant, parce que j'en ai quelques-uns devant moi, là. Bien.

Une voix: ...


Projet de loi n° 27


Adoption

Le Président: Ça va. Non, non, ça va, je l'ai, là. Alors donc, en regard de l'article 20 du feuilleton, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du projet de loi n° 27, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux en matière d'accès au dossier de l'usager. Alors, je suis prêt à céder la parole à un premier intervenant. Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. En fait, nous en sommes maintenant à la phase d'adoption du projet de loi n° 27, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux en matière d'accès au dossier de l'usager dans le cadre d'activités de recherche. On sait que le dossier d'un usager contient des informations très privées concernant celui-ci. La Loi sur les services de santé et les services sociaux impose en conséquence des principes très stricts de confidentialité en ce qui concerne les informations qui y sont contenues. Cependant, pour faciliter la recherche médicale et l'enseignement, la loi permet depuis fort longtemps au directeur des services professionnels d'un établissement d'autoriser les professionnels de la santé oeuvrant en recherche ou en enseignement à consulter les dossiers des usagers sans le consentement de ces derniers.

Ce privilège important accordé au chercheur et qui constitue une exception de taille au principe général de confidentialité exclusive entre l'établissement et l'usager témoigne du souci que nous avons de favoriser la poursuite d'activités de recherche de haute qualité au sein du réseau de la santé et des services sociaux du Québec, en autant que ces activités soient conformes aux standards éthiques les plus élevés possible. C'est dans ce contexte que nous avons soumis à cette Assemblée le projet de loi n° 27, soit la Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux en matière d'accès au dossier de l'usager.

Essentiellement, que vient faire ce projet de loi? Il donne au directeur des services professionnels d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux les outils nécessaires à l'exercice de ses responsabilités à l'égard de la confidentialité des dossiers des usagers dans le cadre d'activités de recherche. Premièrement, il vient imposer au directeur des services professionnels l'obligation de déterminer une durée à l'accès aux dossiers des usagers par le chercheur. Pourquoi une telle mesure? L'accès aux dossiers des usagers à des fins de recherche, surtout lorsque ces dossiers contiennent des données médicales, constitue une incursion dans la vie privée des personnes, qui peut être légitime dans le cadre d'activités de recherche pour autant évidemment que l'on en détermine les conditions et que l'on en balise l'exercice.

Il est normal et approprié de limiter dans le temps l'autorisation accordée au chercheur. Cette autorisation est, je le répète, un privilège que confère le statut de chercheur, et ce n'est pas, en l'occurrence, un droit. Que l'on songe seulement aux données génétiques qui peuvent être contenues dans les dossiers médicaux; il s'agit là de renseignements très confidentiels. On comprends dès lors que l'accès à ce type de renseignements ne puisse être accordé pour un temps illimité.

Sans imposer de durée précise dans la loi, une disposition qui oblige le directeur à fixer une limite de temps à l'accès obligera aussi le chercheur à redemander une autorisation si, à la date fixée par le DSP, soit le directeur des services professionnels, son étude n'est pas terminée. Cela permettra au directeur de réévaluer la pertinence de maintenir l'accès et constituera une forme de suivi périodique des projets de recherche. De plus, si l'on compare les dispositions de l'article 125 de la Loi sur l'accès et celles de l'article 19 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, on constate que la Loi sur l'accès impose à la Commission l'obligation de fixer une durée lorsqu'elle accorde à une personne l'autorisation de recevoir à des fins d'étude, de recherche ou de statistiques la communication de renseignements nominatifs.

Déterminer une telle limite dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux introduit une cohérence juridique normale entre les deux textes. Le cadre juridique actuel, lequel se définit maintenant à la lumière d'un récent jugement de la Cour d'appel, ne permet au directeur des services professionnels d'un établissement d'examiner que trois aspects d'une demande d'accès aux dossiers pour des fins de recherche. Le chercheur doit, lui, démontrer que les motifs de la recherche ne sont pas frivoles, que le but de la recherche ne peut être atteint que par l'accès à des données nominatives et que les données seront utilisées en respectant leur caractère confidentiel. Une fois ces conditions satisfaites, le directeur est tenu de donner accès aux dossiers même si d'autres raisons pourraient légitimement être invoquées soit pour reporter dans le temps ou pour refuser l'accès aux dossiers. La tenue simultanée de plusieurs projets de recherche avec la même population sur le même sujet pourrait être un exemple de cela.

La seconde mesure de ce projet de loi vient, en conséquence, donner au directeur des services professionnels le pouvoir de refuser l'accès à une demande de renseignements s'il est d'avis que le projet ne respecte pas les règles d'éthique ou d'intégrité scientifique généralement reconnues. Vous le comprenez, il s'agit, ici, de donner au directeur des services professionnels les moyens du pouvoir que lui accorde la loi. Comment le DSP, le directeur des services professionnels, peut-il se faire une opinion concernant les aspects éthiques d'un projet de recherche? Il peut, par exemple, consulter le comité d'éthique de son établissement si son établissement en a un, il peut demander l'avis du comité d'éthique d'un autre établissement avant d'exercer son pouvoir discrétionnaire, il peut finalement se contenter de l'avis du comité d'éthique que le chercheur lui aura fourni.

Alors, ce projet de loi et les dispositions qu'il contient sont tout à fait cohérents avec les lignes directrices nationales et internationales en matière d'éthique de la recherche et d'intégrité scientifique. En effet, que ce soient les organismes subventionnaires, tels le Fonds de la recherche en santé du Québec ou le Conseil québécois de la recherche sociale, le guide d'éthique des trois conseils canadiens ou le Plan d'action ministériel en éthique de la recherche et en intégrité scientifique rendu public en juin 1998 par le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, tous ces textes, qui s'inspirent largement des grandes déclarations internationales, rapprochent au plus près la responsabilité de l'institution auprès de laquelle sont recrutés les sujets. Conformément à l'ensemble des textes internationaux en la matière, toute recherche biomédicale ou sociale doit respecter des standards élevés en éthique de la recherche et en intégrité scientifique. Permettre au directeur de s'en assurer ne constitue finalement qu'une protection de plus pour la population visée, et j'ai confiance dans le fait que les directeurs des services professionnels s'acquitteront de cette responsabilité avec le discernement nécessaire.

Le Plan d'action ministériel en éthique de la recherche et en intégrité scientifique consacre le principe de la responsabilité institutionnelle et de l'imputabilité des établissements au regard des activités de recherche et recommande, conformément à l'ensemble des directives internationales en matière de recherche, l'examen de celles-ci par un comité d'éthique. La mesure proposée a pour effet d'étendre la notion de responsabilité institutionnelle à l'égard des activités de recherche à une responsabilité liée à la transmission des dossiers des personnes dans le cadre d'une activité de recherche exercée ailleurs que dans l'établissement.

Par ce projet de loi, nous venons aussi déterminer les règles minimales en matière de consentement de l'usager à la communication de son dossier dans le cadre bien sûr d'activités de recherche. En concordance avec ce que l'on retrouve déjà dans la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le consentement de l'usager à la communication de son dossier dans le cadre d'une activité de recherche doit être donné par écrit. Il doit aussi, selon l'expression consacrée, être libre, éclairé, être accordé pour une activité précise avec une durée limitée. Finalement, en concordance, le projet de loi apporte des modifications similaires à la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris.

(15 h 20)

Le Québec fait actuellement figure de chef de file au plan de l'éthique de la recherche, et, en cela, nous assumons pleinement les responsabilités qui sont les nôtres. Ce projet de loi n'est donc pas un geste isolé, il s'inscrit dans une série d'actions qu'il convient de rappeler. Premièrement, publication d'un plan d'action en éthique de la recherche et en intégrité scientifique, plan auquel j'ai fait référence plus tôt; ensuite, modification à l'article 21 du Code civil en matière de protection des personnes mineures et majeures inaptes dans le cadre d'activités de recherche; publication des normes et des standards de fonctionnement des comités d'éthique de la recherche désignés par la ministre en vertu du nouvel article 21; désignation des comités d'éthique de la recherche chargés de l'examen et du suivi des projets de recherche avec des personnes mineures et majeures inaptes; mise en place, enfin, du comité de suivi de l'implantation du Plan d'action en éthique de la recherche. C'est à ce comité de suivi que reviendra la tâche de veiller à l'implantation des mesures qui sont présentées dans ce projet de loi. La composition de ce comité est garante de sa représentativité et permettra de détecter les problèmes que pourraient occasionner ces mesures et de proposer les correctifs qui s'imposeraient.

En conclusion, le projet de loi que nous examinons vient renforcer le dispositif de protection des personnes que nous avons mis en place sans pour autant freiner inutilement les activités de recherche. Nous avons toujours le souci de maintenir cet équilibre, mais, si, pour une raison ou pour une autre, il devait être rompu, il est clair que ce serait en faveur de la protection de la personne. Ceci, M. le Président, nous permet de mieux comprendre en quoi consiste le projet de loi n° 27, quelle est sa nature et qu'est-ce qu'il permettra.

Vous me permettrez, M. le Président, à ce moment-ci de vous demander s'il est possible de vérifier... Je crois qu'il y avait des amendements de prévus à la loi et je me rends compte que je n'ai pas avec moi le texte de ces amendements. Est-ce qu'il me serait possible de vérifier pour m'assurer que tout est conforme et que nous avons tous les outils nous permettant de prendre la décision? J'imagine qu'une minute ou deux de suspension nous permettraient de compléter le...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, très bien. Alors, il est possible qu'il y ait des amendements présentés par la ministre à ce moment-ci, là, et, moi, personnellement, je n'ai pas de texte. On peut peut-être effectivement suspendre quelques minutes pour aller aux sources et s'assurer s'il y a des amendements, oui ou non. Alors, on suspend pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 22)

(Reprise à 15 h 24)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Nous poursuivons nos travaux. Nous sommes en débat sur l'adoption du projet de loi, et, Mme la ministre, vous avez une proposition à nous faire?

Mme Marois: Oui. Je vous remercie, M. le Président. En fait, c'est un amendement qui nous avait été suggéré par l'opposition, ce qui explique que je ne l'avais pas par-devers moi, parce qu'on voulait vérifier le libellé. Alors, c'est un amendement à l'article 6 qui se lit comme suit: Remplacer l'article 6 par le suivant: «Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par le gouvernement.»

Et je vous propose, à ce moment-ci, M. le Président, que l'on puisse procéder directement aux écritures et donc que nous n'ayons pas à nous transformer en commission plénière, puisque nous sommes essentiellement d'accord sur l'amendement. C'est l'opposition qui nous l'a suggéré, et, comme dans nos règles, je dois, comme ministre, le présenter à ce moment-ci, c'est ce que je fais.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Il y a donc une proposition pour que nous procédions aux écritures sur cet amendement. Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui? Alors, consentement. Est-ce que la motion de Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux proposant que l'Assemblée se constitue à partir de maintenant en commission plénière est adoptée? Adopté.


Commission plénière


Étude de l'amendement de la ministre

Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, je vous prierais, s'il vous plaît, de me faire parvenir le texte de l'amendement. Il est ici? C'est bien. Alors, je me permets de le relire avant de vous le proposer pour adoption. L'amendement de Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux se lit comme suit: Article 6, le remplacer par le suivant:

«6. Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par le gouvernement.»

Alors, est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Est-ce que le rapport de la commission plénière est adopté? Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

En conséquence, nous allons poursuivre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 27, et je suis prêt à entendre un autre intervenant. Mme la députée Bourassa, je vous cède la parole.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, nous sommes donc rendus à la phase de l'adoption finale, finalement, du projet de loi n° 27, à savoir la Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux en matière d'accès au dossier de l'usager. Je dois dire que je suis un petit peu étonnée qu'on soit rendu aussi rapidement à l'adoption dudit projet de loi. Lorsque nous étions intervenus précédemment, lors des différentes étapes, la prise en considération, et l'étude article par article, et, au tout début, lors de la première étape, on avait fait valoir à l'attention de Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux que le sujet de la recherche, c'est un sujet qui est extrêmement important, que ça implique de nombreux chercheurs qui entreprennent de nombreuses études qui sont multicentriques, d'une part – donc, ça soulève un très grand intérêt – deux, des études qui sont interhospitalières, alors vous comprendrez que c'est important, un, pour l'objet sur lequel ça porte, à savoir la recherche et l'éthique, et, deux, c'est aussi important quant aux impacts que ça peut avoir, puisque de nombreux chercheurs font de nombreuses études qui sont, comme je le disais précédemment, multicentriques et interhospitalières.

On avait demandé antérieurement à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux si elle s'était donné le temps de consulter les milieux de la recherche et les principaux intervenants dans le domaine, parce qu'on croyait qu'il y avait un avantage pour ces milieux à être consultés de façon officielle sur l'impact de cette loi-là et sur ce que ça implique – donc, est-ce que ce serait faisable, à quelles conditions – et ce que ça impliquerait pour la recherche médicale au Québec. Également, il y avait un intérêt à regarder ledit projet de loi dans le contexte d'un caractère extrêmement compétitif au sein du milieu de la recherche québécoise par rapport au reste du Canada et aux États-Unis. Nous avions suggéré, parce que c'était extrêmement important, à Mme la ministre de consulter officiellement des instances telles que des vice-recteurs à la recherche des universités québécoises, l'Université de Montréal, l'Université Laval, l'Université de Sherbrooke, l'Université McGill et aussi des Universités du Québec.

On pensait également important... Et c'est ce qui m'étonne, qu'on soit rendu à l'étape de l'adoption finale. Je croyais comprendre qu'il y aurait aujourd'hui, au moment où on se parle, toujours en cours, des pourparlers entre le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie et le ministère de la Santé et des Services sociaux. Je suis également informée que le ministère de la Recherche aurait soulevé beaucoup d'interrogations, et, au moment où on se parle, aujourd'hui, donc, alors qu'on nous propose d'adopter à l'étape finale un projet de loi, il y a encore des pourparlers, il y a encore des interrogations qui se posent, notamment du côté du ministère de la Recherche.

Il est bien important, malgré la hâte qu'on peut avoir d'adopter un projet de loi, de l'évaluer complètement quant aux impacts qu'il a et qu'il aura pour les milieux concernés, impacts qu'il y a au niveau de la recherche et aussi impacts que nous pourrons avoir, par voie de conséquence, au niveau de l'intégrité scientifique. Je suis informée qu'il y a des pourparlers qui se tiennent au moment où on se parle, alors je ne comprends pas qu'on puisse nous proposer à ce stade-ci, immédiatement, d'adopter la loi à cette étape finale.

Nous croyions également qu'il était opportun qu'il y ait des échanges, des discussions avec le Collège des médecins et chirurgiens du Québec et nous ne sommes pas informés, pareillement, que de tels échanges se seraient passés. Il apparaissait également bien important de consulter des experts reconnus à l'échelle nationale en éthique, et je ne suis pas informée et nous ne sommes pas informés non plus qu'il y aurait eu des pourparlers, des discussions, des échanges entre lesdits experts au niveau de l'éthique. Je ne comprends pas pourquoi ces pourparlers-là n'ont pas été faits, parce que le projet de loi aura et a des implications extrêmement importantes au niveau de la recherche et au niveau de l'intégrité scientifique.

(15 h 30)

Qui plus est, M. le Président, il était également important et il demeure important aujourd'hui, au moment où on se rencontre, que Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux ait en main une évaluation de l'impact dudit projet de loi et aussi qu'elle ait des contacts fréquents avec les différents professionnels pour pouvoir bien, bien, bien vérifier la faisabilité dudit projet de loi ou sa conformité, tel qu'elle le mentionnait tout à l'heure. Mme la ministre nous disait que ledit projet de loi était conforme. Je ne suis pas informée que ledit projet de loi... Et ce n'est pas parce qu'on amende la date d'entrée en vigueur que l'opposition officielle sera en faveur de l'adoption du projet de loi ou en faveur dudit projet de loi. Ce n'est pas là qu'est la substance.

L'opposition officielle avait déposé deux amendements au niveau du caractère confidentiel des renseignements communiqués aux professionnels, et le premier amendement que nous avons déposé, lequel concernait l'article 19.2, a été refusé. Le souci de l'opposition officielle – et vous le comprendrez, M. le Président – était de nous assurer du caractère confidentiel des renseignements qui seront communiqués aux professionnels du réseau de la santé, et, malheureusement, l'amendement que nous avons déposé a été refusé.

Vous comprendrez à quel point il était important qu'on ait l'assurance du respect du caractère confidentiel des renseignements communiqués aux professionnels, parce que, encore une fois, ça implique de nombreux chercheurs qui font de nombreuses études, lesquelles sont multicentriques et, en plus, interhospitalières. Alors, vous comprendrez bien que ça implique plus d'un chercheur, dans plus d'un domaine, pour plus d'un établissement. Alors, ça demande des garanties autant de professionnels, autant de façons de faire qui sont différentes, autant d'établissements, aussi autant de risques, de façons de faire qui sont différentes.

D'ailleurs, dans le plan d'action ministériel évoqué tout à l'heure par Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, un plan ministériel qui porte sur le sujet qui nous occupe, à savoir l'éthique de la recherche et l'intégrité scientifique, le premier défi, la première difficulté de taille qui est mentionnée – et ça demeure un défi et ça le demeurera tant qu'il n'y aura pas des garanties – c'est de mettre en oeuvre les mesures du plan d'action qui sont contenues ici afin d'amener tous les acteurs à adhérer à un ensemble de valeurs et de comportements éthiques de haut niveau dans la réalisation d'activités de recherche, et en particulier au sujet de sujets humains. Le deuxième défi est de s'assurer que les actions nécessaires seront entreprises et qu'elles produiront les effets attendus. Je ne veux pas qu'on pense que je mets en doute la bonne foi des établissements de santé – ce n'est pas la question – ni, d'ailleurs, celle des chercheurs. Le défi, c'est: Vu le nombre de chercheurs, vu le nombre d'études, il est important d'avoir des garanties. Malheureusement, la demande d'amendement qui avait été déposée par l'opposition officielle eu égard au caractère confidentiel n'a pas été reçue. Elle a été refusée, donc le problème demeure entier.

Et le deuxième défi, c'est d'assurer de l'uniformité. Vous comprendrez qu'un plan d'action ministériel demeure très beau pour les principes qu'il contient. Cependant, ces principes-là, même s'ils contribuent à mieux encadrer les recherches, peuvent varier d'un endroit à l'autre. Déjà, c'est un défi au sein du milieu, et, sans garanties, je pense que ce défi-là, vous le comprendrez, M. le Président, va demeurer.

Nous avons également fait valoir un autre amendement, en ce qui avait trait à l'article 7 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, lequel se rapportait aux autochtones, à ce qu'il nous apparaissait également important, tout comme pour les usagers mentionnés précédemment, qu'on puisse insérer dans la douzième ligne du deuxième alinéa de l'article 7 de la Loi sur les services de santé auquel référait le deuxième paragraphe de l'article 4 du projet de loi n° 27... On référait aux autochtones, donc. On voulait aussi, ici, avoir la garantie qu'on puisse insérer des termes propres à nous confirmer le respect du caractère confidentiel des renseignements communiqués aux professionnels. Malheureusement, également, cet autre amendement que nous avons déposé a été refusé.

Alors, en substance, M. le Président, encore une fois, selon les informations qui me sont transmises aujourd'hui, le milieu s'étonnerait qu'on procède à l'adoption du projet de loi alors qu'il y aurait des pourparlers entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et le ministère de la Recherche.

Deuxièmement, le ministère de la Recherche se poserait beaucoup de questions et aurait soulevé beaucoup de questions, tout comme l'opposition officielle. Il semblerait que les demandes d'amendement que nous avons déposées n'ont pas été reçues. Donc, les ambiguïtés, les manques de garantie, le manque d'assurance demeurent... que le projet de loi qui vient préciser des pouvoirs aux directeurs des services professionnels, malheureusement, ça ne réglera rien dans la réalité du réseau de la santé et des services sociaux, bien que ça soit le souci qui occupe Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, et qui nous occupait, et qui nous occupe toujours, puisqu'on en est toujours à débattre dudit projet de loi.

Il semblerait, selon les informations qui m'ont été transmises ce jour par les milieux de la recherche, qu'il y a des objectifs du projet de loi qui étaient, et qui demeurent, et qui demeureront complètement conflictuels avec ceux du plan d'action ministériel en éthique de la recherche et en intégrité scientifique.

Et, encore une fois, les milieux de la recherche trouvaient un petit peu trop hâtif de procéder aujourd'hui à l'adoption du projet de loi, encore une fois parce que ça comporte des enjeux qui sont absolument fondamentaux, qui touchent à des sujets de la recherche portant sur des sujets humains, et ça touche également à des informations confidentielles. Faute d'assurance, M. le Président, je ne pense pas que nous allons donner notre accord à ce projet de loi là.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bourassa. Ceci met fin au débat sur l'adoption du projet de loi n° 27.


Mise aux voix

Le projet de loi n° 27, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux en matière d'accès au dossier de l'usager, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, pour la suite des choses.

M. Boulerice: Alors, M. le Président, je vais vous référer à l'article 2 du feuilleton de ce jour.

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 2. Bien, je m'excuse...

M. Boulerice: Je m'excuse. Je m'excuse, M. le Président, c'est ma numérotation à moi et non pas la vôtre...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah bon! Je m'excuse, j'étais un peu... Ha, ha, ha!

(15 h 40)

M. Boulerice: ...et non pas la vôtre, et c'est la place de stationnement de mon collègue de Richelieu.

Sur un ton plus sérieux, M. le Président, je vais plutôt vous référer à l'article 17 du feuilleton de ce jour, qui est le projet de loi n° 36.


Projet de loi n° 36


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Alors, je me retrouve, là, avec votre... À l'article 17, effectivement, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 36, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Alors, Mme la députée de Mille-Îles, je vous cède la parole.


Mme Lyse Leduc

Mme Leduc: Je vous remercie, M. le Président. Le projet de loi n° 36 se situe dans le cadre d'une préoccupation de transparence et de légitimité. Ce projet de loi avait pour but initialement d'attribuer à la Régie de l'assurance-maladie du Québec la fonction d'assumer la gestion de banques de données en matière de santé et de services sociaux.

Je vous rappelle que la commission des affaires sociales a tenu deux séances de discussion à l'égard de ce projet de loi, plus précisément le mercredi 9 juin et le mardi 15 juin 1999. Avec la collaboration de nos collègues de l'opposition officielle, nous avons convenu de remplacer dans la version originale du projet de loi la fonction «gestion de banques de données» par celle de «dépositaire de données».

Le nouveau libellé, qui a reçu l'aval de nos collègues de l'opposition officielle en commission des affaires sociales, se lit maintenant comme suit: «La Régie est dépositaire des données en matière de santé et de services sociaux que lui confie, par entente soumise à l'application de l'article 70 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, le – ou la – ministre de la Santé et des Services sociaux, une régie régionale instituée par la Loi sur les services de santé et les services sociaux, un établissement au sens de cette loi, un directeur de la santé publique ou le conseil régional institué par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris. La Régie assume, pour le compte de celui qui lui confie les données, la gestion de celles-ci.»

Je crois utile de vous rappeler que les conditions d'accès à ces banques ainsi que leur gestion sécurisée sont déterminées dans chaque entente confiant le dépôt d'une banque de données à la Régie, laquelle entente sera soumise au processus prévu à l'article 70 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

Il s'agit, M. le Président, d'un processus très formel, en ce sens que chaque banque aura fait l'objet d'une analyse dont le contenu sera intégré dans une entente, laquelle devra être soumise à la Commission d'accès à l'information pour avis et devra par la suite être déposée à l'Assemblée nationale et publiée à la Gazette officielle du Québec .

La Régie gère actuellement des données en matière de santé. Ses mandats lui sont confiés par le gouvernement en vertu du premier alinéa de l'article 2 de la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. À titre d'exemple, les services assurés rendus hors Québec en vertu de la Loi sur l'assurance-hospitalisation, l'administration du Programme de tierce responsabilité visé à la Loi sur les services de santé et les services sociaux et la Loi sur l'assurance-hospitalisation, les patients d'exception atteints de maladies graves ou chroniques auxquels sont fournis des médicaments non inscrits sur la liste, ainsi que plusieurs autres.

Compte tenu de l'ampleur grandissante de cette fonction de dépositaire de banques de données, qui représente un domaine de service important et stratégique de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, il nous apparaît important de faire ressortir d'une façon non équivoque ce rôle que la Régie exerce depuis plusieurs années. La modification proposée assure donc une transparence encore plus grande aux éventuels transferts de banques de données, alors que ceux effectués jusqu'à présent, en vertu du premier alinéa de l'article 2 de la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, ne font que l'objet d'une inscription au registre que la Régie doit tenir conformément à la Loi sur l'accès.

En conclusion, la proposition de modification législative qui est devant vous permet, au moyen d'ententes soumises à l'approbation de la Commission d'accès à l'information, d'apporter toutes les garanties nécessaires de gestion sécurisée des banques de données et de conformité aux principes et aux règles qui gouvernent la Commission d'accès à l'information. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Mille-Îles. Avant de poursuivre le débat, j'aimerais apporter une précision quant à l'adoption du projet de loi n° 27 que nous avons faite tantôt, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux en matière d'accès au dossier de l'usager. J'ai mentionné «adopté», mais effectivement le membre de l'opposition, à ce moment-là, n'avait pas exprimé clairement que c'était «adopté sur division». Alors, j'aimerais faire la correction immédiatement au su de tout le monde, là, et, dans les livres officiels, c'est «adopté sur division».

Très bien. Maintenant, une autre information concernant les débats de fin de séance. Je vous avertis déjà pour demain soir – c'est demain soir que ça se tiendra – le député de Robert-Baldwin interrogera la ministre d'État au Travail et à l'Emploi concernant le dossier de l'alphabétisation et Emploi-Québec. Alors, c'est un débat qui se tiendra demain en fin de séance.

Et nous sommes prêts à poursuivre les interventions sur le projet de loi n° 36. Mme la députée de Bourassa, est-ce que vous intervenez sur ce projet? Alors, je vous cède la parole.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président, vous êtes bien gentil. Alors, nous sommes rendus à l'étape de la prise en considération du projet de loi... du rapport de la commission des affaires sociales, suite à l'étude article par article du projet de loi n° 36, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Alors, vous comprendrez, M. le Président, que c'est aussi un projet de loi qui est extrêmement important en ce qu'il confie un nouveau mandat à la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Alors, dorénavant, il serait question que la Régie de l'assurance-maladie assume la gestion des données en matière de santé et services sociaux, données qui vont lui être confiées par la ministre de la Santé et des Services sociaux, par les régies régionales, les établissements du réseau de la santé, les directeurs de santé publique ou les conseils régionaux qui sont institués par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris également.

Alors, en substance, M. le Président, c'est un projet de loi qui contient deux articles. L'article 1 vient préciser que la gestion des données en matière de santé et services sociaux, comme je le disais précédemment, va être confiée à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, et on dit que ça doit faire l'objet d'une entente soumise à l'application de l'article 70 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Alors, ici, c'est bien important, on comprend qu'il doit y avoir une entente préalable, que cette entente-là doit être approuvée par la Commission d'accès à l'information. On comprend qu'elle doit être écrite et qu'elle offre des garanties formelles eu égard à la confidentialité, donc qu'elle comporte des mesures strictes de sécurité visant à assurer la confidentialité des données. Parce qu'il va être question, évidemment, d'échanges entre le ministère de la Santé et des Services sociaux, les régies régionales, les établissements, les directeurs de santé publique, le conseil régional institué par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris.

Alors, on comprend que ça va être un mégafichier qui va être créé et, en plus, qu'il va y avoir une cueillette de données, on va les engranger, ces données-là, et on va les transférer également. Alors, vous comprendrez bien que, vu l'ampleur... Parce qu'on peut penser qu'il y a 600 établissements dans le réseau de la santé et des services sociaux, il y a 18 régies régionales, il y a la Régie de l'assurance-maladie, il y a l'Office des personnes handicapées, et il y a une possibilité très certaine que viendront ensuite se greffer à ce réseau les cliniques médicales privées, donc des cliniques qui ne sont pas nécessairement conventionnées, alors donc, ça va être important de savoir de quelle façon l'entente pourra fournir des garanties ou être assortie de mesures pour garantir formellement le caractère confidentiel des données.

(15 h 50)

Et j'aimerais vous dire, M. le Président, que, lors de l'étude article par article, l'opposition officielle a déposé différentes motions préliminaires. Elles se sont toutes vu écarter par la ministre de la Santé et des Services sociaux, et, en quelque sorte, on a été littéralement boycottés. On n'a pas été en mesure, tel qu'on le demandait afin de pouvoir mieux apprécier ce que ça impliquait, donc aussi d'évaluer concrètement qu'est-ce qui arriverait au niveau de la cueillette, au niveau de l'engrangement des données, toujours confidentielles, puisque ça concerne le dossier des usagers, ça concerne des informations du domaine clinique, des informations du domaine financier... On voulait donc savoir concrètement, un peu comme on le disait tout à l'heure pour l'autre projet de loi, comment ça va fonctionner. Est-ce que c'est faisable? Est-ce que c'est réalisable? À l'intérieur de quelles conditions? Avec quelles garanties? Et nous avons donc demandé que la commission des affaires sociales, en ce qui a trait au projet de loi n° 36, avant de procéder à l'étude détaillée article par article, puisse procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur l'ensemble du projet de loi, et on avait demandé qu'elle entende à cette fin le Protecteur du citoyen. Cette première motion préliminaire a été écartée.

On a déposé une autre motion préliminaire. On avait demandé, encore une fois, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, que la commission des affaires sociales, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 36, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, procède, encore une fois, à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur l'ensemble du projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Commission d'accès à l'information.

Soit dit en passant, vous comprenez que la Commission d'accès à l'information avait déjà donné deux avis précédemment, des avis d'ailleurs qui sont carrément dévastateurs, où la Commission s'était déclarée insatisfaite du libellé de l'article, et la Commission d'accès à l'information avait à deux reprises dénoncé ses inquiétudes et requis que le ministère de la Santé et des Services sociaux lui fournisse des garanties formelles eu égard à assurer le caractère confidentiel du dossier, et ça, ça n'a pas été donné. Alors, au moment où on se voit aujourd'hui, les garanties doivent toujours être fournies. Donc, la Commission d'accès à l'information, la première fois, en octobre 1998, avait dénoncé certaines irrégularités, ses inquiétudes et, comme je le disais, avait demandé qu'on lui fournisse des garanties. Évidemment, ces garanties-là n'ont pas été données. La Commission avait dit, avant d'aller dans la direction d'adopter la loi: «Une réponse claire doit être apportée au sort que l'on entend réserver au dossier de l'usager. Doivent également être clarifiées toutes les règles relatives à la cueillette et à la communication des renseignements personnels par les différents intervenants.» Je vous répète que ça n'a pas été fait.

Dans un avis subséquent, la Commission d'accès à l'information, le 30 mars, revenait encore une fois avec un avis tout à fait dévastateur où elle se penchait toujours sur ledit article qui nous occupe et dénonçait encore une fois les inquiétudes qu'elle avait. On disait: La Commission invite encore une fois le ministère à lui fournir les renseignements, les garanties à l'effet que le projet de loi respectera les règles de confidentialité du dossier de l'usager, et plus particulièrement celles décrites aux articles 19, 346, 381, 394, 433 et 505, vingt-sixième alinéa de la Loi sur les services de santé et services sociaux. Évidemment, vous comprendrez que tous ces articles de la Loi sur les services de santé et services sociaux sont directement interpellés par le projet de loi n° 36 qui vient modifier la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Je vous rappellerais également que, dans son avis du 30 mars 1999, la Commission d'accès à l'information avait réitéré ses commentaires qu'elle avait formulés dans l'avis qu'elle avait émis en octobre 1998. Donc, les garanties n'ont pas été données, les questions valent toujours, et c'est parce que nous connaissions le contenu des deux avis que nous avions en main que nous avions, par le biais d'une motion préliminaire, demandé que la commission des affaires sociales, avant d'entreprendre l'étude détaillée, entende à l'occasion de consultations particulières la Commission d'accès à l'information. Encore une fois, cette motion a été écartée du revers de la main.

Comme on n'abandonne pas, on a également déposé une troisième motion préliminaire, motion qui a subi le même sort que les deux autres. On demandait, toujours conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, que la commission des affaires sociales, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 36, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur l'ensemble du projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Et ça a été refusé.

Ce qui est étonnant, c'est que, au moment où nous formulions et nous déposions cette motion préliminaire là, la ministre de la Santé et des Services sociaux était accompagnée de nombreux, nombreux, nombreux fonctionnaires, de très hauts fonctionnaires, qui travaillent au sein de la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Et, comme on ne nie pas que la Régie possède en ce domaine une expertise, le souci de l'opposition officielle était justement de se prévaloir de la présence, lors de l'étude article par article, des experts, des membres et des fonctionnaires de la Régie de l'assurance-maladie du Québec pour leur demander de nous fournir les explications requises par la Commission d'accès à l'information, qu'on a reprises parce qu'il n'y avait pas eu de réponse. On voulait qu'ils répondent à nos interrogations. On voulait en quelque sorte... Et ils étaient prêts à le faire. Ils étaient sur place et ils étaient prêts à le faire. Pour des raisons obscures, je ne sais pas pourquoi, on a été boycotté, littéralement boycotté, et on n'a pas pu, non plus, avoir accès aux informations, aux clarifications, aux précisions, aux garanties que nous demandions, parce que, encore une fois, cette autre motion préliminaire a été repoussée du revers de la main.

Ça serait peut-être important, M. le Président – et je sais que vous êtes sensible à la matière qui est devant nous – de rappeler les inquiétudes qui avaient été formulées par la Commission d'accès à l'information, lesquelles valent toujours parce que les réponses, les garanties n'ont pas été données. Alors, la Commission d'accès à l'information, dans son premier avis, l'avis du mois d'octobre, le 6 octobre, avait soulevé qu'on voulait donner un nouveau mandat à la Régie de l'assurance-maladie – évidemment, Régie qui assumait déjà en partie un mandat – et il s'agissait ici d'intégrer dans la mise en place du réseau de télécommunications sociosanitaire un vaste fichier ou un mégafichier pour pouvoir centraliser au sein de la Régie de l'assurance-maladie du Québec un ensemble d'informations qui proviendront, tel que je vous le mentionnais tout à l'heure, de 600 établissements du secteur de la santé et des services sociaux, de 18 régies régionales, aussi de la Régie, de l'Office des personnes handicapées et éventuellement et sûrement très, très, très prochainement des cliniques médicales privées, qui ne sont pas nécessairement conventionnées, et aussi d'autres partenaires sectoriels et intersectoriels.

Et là on voulait avoir des clarifications pour savoir de quels partenaires il pouvait s'agir, mais, là non plus, on n'a pas eu d'information. Donc, on ne sait pas de quels partenaires sectoriels et intersectoriels il peut s'agir précisément. On pourrait toujours hasarder, évidemment, qu'il s'agit de tels partenaires, sauf qu'on n'a pas de confirmation quant à l'exactitude de l'identité des partenaires sectoriels.

Alors, le ministère de la Santé et des Services sociaux, vous comprenez bien qu'il est le maître d'oeuvre de l'implantation de ce mégafichier, et il entend donc établir des véhicules d'échanges d'informations, et encore une fois des informations confidentielles, cliniques, financières et opérationnelles. Beaucoup de ces informations-là, vous le comprendrez, portent sur des diagnostics, sur des traitements, sur des conditions financières qui sont celles évidemment des personnes qui sont appelées à recevoir des services de santé et des services sociaux.

(16 heures)

Alors, toujours selon le premier avis de la Commission d'accès à l'information, la Commission disait: Un instant, là, un instant! Avant d'aller dans la direction que vous proposez, donc avant d'intégrer dans la mise en place du réseau de télécommunications un mégafichier concernant la santé ou les services sociaux et concernant les personnes qui reçoivent les soins et les services, il serait important que des réponses claires nous soient données quant au sort que l'on entend réserver au dossier de l'usager. Et, encore une fois, tel que je le mentionnais, la Commission disait notamment qu'elle voulait que soient clarifiées toutes les règles relatives à la cueillette, à la communication des renseignements personnels qui vont être fournis ou appelés à être fournis par les différents intervenants.

La Commission d'accès à l'information a émis un avis subséquent le 30 mars 1999 – un avis défavorable, soit dit en passant – et elle insistait à nouveau pour que le nouveau mandat confié à la Régie respecte les règles de la confidentialité du dossier de l'usager, et plus particulièrement celles mentionnées aux articles que nous avons évoqués tout à l'heure quant à la Loi sur les services de santé et aux services sociaux. Alors, la Commission d'accès à l'information avait formulé des commentaires précis sur chacun des articles 19, 346, 381, 394, 433 et quant au paragraphe 26° de l'article 505. Évidemment, elle avait pris la peine, pour chacun des articles, de faire part de ses inquiétudes et de préciser le degré de précision qu'elle considérait important quand on parle d'assurer la confidentialité du dossier de l'usager.

Vous savez qu'il y a une règle qui existe, et elle est confirmée à l'article 19 de la Loi sur les services de santé: le dossier de l'usager est confidentiel et nul ne peut y avoir accès sans son consentement. Alors, quand on parle de créer un mégaficher, de cueillir des données et qu'on parle évidemment de les transmettre, on aura accès à des dossiers et on n'y aura pas accès avec le consentement de l'usager. C'est donc important de donner des garanties. Évidemment, les garanties n'ont pas été données.

Quand on parle de la régie régionale, la régie régionale se voit également, en vertu de l'article 346 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, dans l'obligation de s'abstenir de consigner tout renseignement ou document qui permet d'identifier un usager d'un établissement ou un utilisateur des services. Alors, si on demande à la régie de cueillir des données, de les conserver pour pouvoir subséquemment les transmettre au ministère qui subséquemment les transmettra à la Régie, vous comprendrez bien qu'on est directement lié par les conditions fixées par le législateur qui dit que la régie doit s'abstenir de consigner. Encore une fois, on n'a pas eu de précisions et de clarifications.

La Loi sur les services de santé et les services sociaux maintient le même degré d'exigence quant aux renseignements qui sont transmis à la régie régionale par un établissement ou un organisme communautaire qui sont dans le réseau de la santé et des services sociaux. La loi précise clairement que les renseignements qui sont transmis soit par la régie ou par les organismes ne doivent pas permettre d'identifier un usager ou un utilisateur de services. Encore une fois, on n'a pas eu de précisions quant aux questions et on n'a pas de garanties quant à cet aspect-là. Et pourtant la loi est bien claire.

La loi est aussi claire à l'article 394 qui vient préciser que les renseignements ou les documents fournis par la régie régionale ne doivent pas permettre d'identifier un usager d'un établissement ou d'un utilisateur de services. Alors, encore une fois, on aurait aimé savoir comment il va être possible pour la régie régionale de transmettre ou de fournir des renseignements sans nécessairement et obligatoirement identifier les personnes concernées.

Et, encore une fois, également pour le paragraphe 26° de l'article 505, le ministre peut requérir d'un établissement, dans le cadre d'un règlement qui est préalablement établi, évidemment, les priorités, les objectifs et les orientations dans le domaine. On a vérifié, et, après vérification, il appert que le règlement qui vise l'acquisition de renseignements nominatifs ou non concernant les besoins et la communication des services n'aurait jamais été édicté. Donc, le ministère de la Santé et des Services sociaux ne se serait jamais prévalu du pouvoir qu'il avait de réglementer. Encore une fois, un trou, une incertitude, un manque de précision, de clarification.

Faute du gouvernement d'avoir exercé son pouvoir et faute du gouvernement d'avoir adopté un règlement balisant l'acquisition de renseignements nominatifs ou non et balisant la transmission, ou la cueillette, ou le fait qu'on conserve des renseignements qui portent sur les soins et les services, donc la consommation des services, on demeure tout à fait dans l'incertitude. Alors, on ne sait pas quel est le but. Pourquoi est-ce qu'on veut créer un mégafichier? Est-ce que c'est un État – encore une fois, dans la foulée de ces objectifs de contraindre ou de restreindre les dépenses – qui veut, dans le but évidemment de restreindre, de couper, de couper et de couper, constituer un mégafichier qui va en quelque sorte enlever à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, qui est d'abord un payeur... On veut peut-être lui donner une nouvelle mission, un nouveau mandat, à savoir que la Régie deviendrait le gardien des finances publiques de l'État et qu'elle régulariserait, parce qu'elle aurait toutes les données, toutes les informations nécessaires, autant au point de vue clinique que financier et qu'opérationnel... Elle serait bien placée pour restreindre évidemment l'accessibilité ou la consommation au niveau des soins et des services. Alors, on peut se poser la question, et ça demeure entier comme préoccupation. On s'interroge, M. le Président, puisque les réponses demandées et réitérées par la Commission d'accès à l'information n'ont pas été fournies, comment il se peut qu'on puisse procéder à l'adoption d'un projet de loi.

Alors, on peut, pour conclure, M. le Président, rappeler encore une fois qu'il s'agit de communiquer de façon massive des renseignements personnels entre la Régie de l'assurance-maladie du Québec, les régies régionales, les établissements de santé et de services sociaux et le ministère de la Santé et des Services sociaux. Le projet de loi ne précise aucunement les règles et les paramètres qui sont relatifs à la nature des renseignements nominatifs ou non, ne précise pas davantage ce qui a trait à la cueillette et ne précise pas davantage ce qui a trait à la communication des renseignements personnels entre les différents établissements du réseau de la santé et éventuellement entre des cliniques médicales privées, donc qui sont entièrement à l'extérieur du réseau de la santé et qui ne sont pas soumises à la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Alors, comment est-ce qu'on peut obliger des partenaires privés à respecter une loi lorsqu'ils ne sont pas des établissements au sens de cette loi-là? Vous conviendrez qu'il y a toute une interrogation qui se pose ici et qu'elle est extrêmement importante. On ignore toujours, au moment où je suis devant vous, donc où on va procéder à l'adoption, si la Commission d'accès à l'information a reçu de la ministre de la Santé et des Services sociaux, en ce qui a trait au projet de loi n° 36, alors qu'elle l'a fait à deux reprises, et la dernière fois en mars 1999, des réponses claires et des garanties quant au sort réservé au dossier de l'usager.

Encore une fois, on ne pourrait pas être d'accord avec un projet de loi qui ne garantit pas des règles assurant la confidentialité du dossier de l'usager et la confidentialité également des renseignements nominatifs qui sont contenus à ce dossier-là. On a été littéralement boycottés. On n'a pas pu entendre la Commission d'accès, on n'a pas pu entendre le Protecteur du citoyen, on n'a pas pu entendre la Régie de l'assurance-maladie du Québec qui était sur place et disponible. La Commission d'accès, on aurait pu l'entendre, d'autant plus qu'elle avait donné deux avis préalables dévastateurs. Donc, au moment où on est devant vous, on se retrouve avec des interrogations, des questions, des demandes de précision qui n'ont pas été répondues. Malheureusement, l'opposition officielle ne pourra pas être en faveur dudit projet de loi, M. le Président.

(16 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bourassa. Il n'y a pas d'autres intervenants?


Mise aux voix

Le rapport de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi n° 36, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, est-il adopté?

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je vous réfère à l'article 21 du feuilleton.


Projet de loi n° 41


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le leader adjoint. À l'article 21, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi n° 41, Loi abrogeant la Loi sur les grains et modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche et d'autres dispositions législatives. M. le ministre de l'Agriculture, je vous cède la parole.


M. Rémy Trudel


Motion d'amendement aux références contenues dans le projet de loi conformément à l'entrée en vigueur de la mise à jour des Lois refondues

M. Trudel: Des Pêcheries et de l'Alimentation, M. le Président. Il ne faut jamais oublier les pêcheries du Québec maritime.

M. le Président, merci beaucoup. Le projet de loi n° 41, qui est à la dernière étape, sera l'objet, donc, dans sa présentation, d'une motion que je vous lis: «Procéder à l'ajustement des références contenues dans les articles...» Enfin, j'ai oublié le terme, là.

Des voix: De refonte.

M. Trudel: De refonte. Une motion de refonte, M. le Président. Je m'excuse, j'ai eu un petit blanc. Alors, je dépose, à l'égard du projet de loi n° 41, une motion de refonte pour assurer la concordance avec les Lois refondues du Québec. Je retrouve mes fondements de droit. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion de refonte est déposée. Est-ce que nous avons à la lire? Ça a été lu par les partis?

Des voix: Ça a été lu.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ça a été lu par les partis. Alors, cette motion de refonte est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté, et nous revenons à notre projet de loi. M. le ministre...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Vous savez que, pour adopter une telle motion, ça prend un consentement pour déroger à l'article 257. À l'article 257, on prévoit des amendements. Alors, je crois qu'il y a consentement. Il y a consentement.

Alors, M. le ministre, nous revenons au débat sur le projet de loi et je vous cède la parole. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Trudel: Merci, M. le Président. On constate bien que vous apprenez vite. Merci beaucoup. Merci pour les dispositions sur la motion pour les Lois refondues du Québec et merci de la collaboration de l'opposition.

Nous en sommes, M. le Président, à la dernière étape de l'adoption du projet de loi n° 41, et j'énonce tout de suite qu'à la toute fin je déposerai des amendements, comme l'autorise notre règlement, des ajustements, des amendements techniques au projet de loi n° 41, puisque nous avons convenu d'apporter un certain nombre d'ajustements. À la manière de mon leader adjoint, je serai très court, illustratif, le plus clair possible et je suivrai mes notes pour être bien sûr d'être dans la bonne direction.

M. le Président, le projet de loi n° 41, il vise à amender une loi extrêmement importante pour les productrices et les producteurs agricoles du Québec. On peut comprendre qu'en début de session comme cela, par un beau mercredi après-midi, on adopte un projet de loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche et d'autres dispositions législatives, on peut comprendre que ça ne se bouscule pas dans les autobus pour venir assister à l'adoption de la loi, mais cette loi est une pièce extrêmement importante, puisqu'elle a été adoptée en 1963 et que c'est la loi pilier, la loi fondamentale, la loi sur laquelle repose probablement 90 % du succès des producteurs et des productrices agricoles au Québec. C'est celle qui permet d'utiliser, donc, les dispositions d'une loi pour assurer la mise en marché collective.

Qu'est-ce que c'est que la mise en marché collective, M. le Président? Deux ou trois minutes seulement pour dire que ça permet de regrouper les produits, le résultat d'un ensemble de petits producteurs, de mettre ça ensemble et de négocier une convention collective avec les acheteurs, les transformateurs, ceux et celles qui vendent au détail de façon à ce qu'on ne joue pas les uns contre les autres et qu'un producteur de Gaspé ne soit pas mis en compétition, par exemple, avec un producteur de Blainville, ou un producteur de Saint-Jérôme, ou un producteur de Saint-Jean, ou encore, même, un producteur qui écoulerait ses produits dans le quartier Ahuntsic à Montréal. Alors, qu'est-ce qu'on fait? On regroupe les produits, on regroupe l'offre, on signe une convention par analogie, comme une convention collective. Les employés effectuant le même travail reçoivent le même salaire et ont les mêmes conditions. Ça, c'est la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, et alimentaires, et des pêcheries.

Là, on va apporter quelques amendements parce qu'il faut moderniser – on est rendu, bon, à l'aube de l'an 2000 – et on a procédé, dans ces amendements à la loi fondamentale pour assurer les revenus stables aux productrices et aux producteurs agricoles du Québec, à d'intenses consultations parce que, en pareille matière, on est donc à gérer du commerce, on fait des affaires. Ce n'est pas une loi qui énonce des principes et qui voit à l'application d'un certain nombre d'orientations; ça gère très exactement, M. le Président, le commerce entre les producteurs et productrices qui désirent s'organiser, des transformateurs, des détaillants ou des distributeurs qui vont sur le marché et ça permet de négocier les prix. Alors, ça veut dire que les conventions sont extrêmement techniques, c'est extrêmement précis.

Nous allons, ici, apporter un certain nombre d'amendements. On va tenter en même temps de simplifier ça. On abolit la Loi sur les grains, on prend tout ça, puis on met ça dans la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et des pêcheries, puis on ajuste ça. On ajuste aussi un certain nombre de dispositions en ce qui concerne les règles qui vont présider aux conventions dans le lait. Dans le lait, M. le Président, ça, le temps qui nous est dévolu à l'Assemblée nationale ne serait pas assez long, si tout le monde prenait son temps ici, chacun son 20 minutes, pour comprendre ce qui se passe là-dedans parce que c'est d'une complexité cosmique. Pourquoi? Parce qu'on a une longue tradition, très longue tradition. On produit au-delà de 45 % du lait canadien et on approvisionne toute espèce de catégorie au niveau industriel, au niveau de la consommation, au niveau du fromage, au niveau des laits en poudre, au niveau des beurres, au niveau des laits à ultra haute température qu'on vend à Puerto Rico en particulier. Alors, on a des catégories. On a cinq catégories de lait, alors c'est très compliqué, mais tout ça dans une mise en marché ordonnée. On fait un tout petit peu de ménage pour s'assurer que les productrices puis les producteurs, ils en aient pour leur argent et qu'ils soient payés quand arrivent les ventes des produits laitiers faits à la ferme pour certaines catégories. Alors, on va ordonner ça.

En plus de cela, M. le Président, la modification à la loi à laquelle nous procédons aujourd'hui, ça va redonner au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, je dirais, un certain nombre de ses responsabilités. Sans faire le procès de personne de ce côté-ci ou de l'autre bord de l'Assemblée nationale, il y a un certain nombre de pouvoirs qui avaient été donnés à une régie. Le ministre actuel estime qu'on est ministre pour être responsable. On a à prendre les responsabilités. La Régie régit, puis le ministre administre. Bon. Alors, ça me semble assez simple, c'est des principes que nous avons discutés. Et puis le ministre, il administre parce que c'est lui qui doit être à l'écoute, dans notre secteur, des productrices et des producteurs agricoles puis que c'est lui qui doit porter la responsabilité puis l'imputabilité. Les régisseurs d'une régie, quant à ma conception – elle n'est pas exclusive, M. le Président – c'est des gens qui sont chargés de faire de la conciliation, de la médiation, de l'homologation de conventions puis des arbitrages: des juges d'un tribunal quasi administratif. Que les juges jugent, que les régisseurs régissent puis que les ministres administrent. Bon. Alors, ça a fait davantage d'imputabilité. On va, en termes d'émission de permis, retourner ça du côté du ministre.

(16 h 20)

D'autres dispositions aussi pour les encans d'animaux vivants. Je le sais bien, M. le Président, que ça ne se discute pas tard dans les discothèques le soir, les questions de vente des animaux vivants, mais il y a des gens dans toutes les régions du Québec qui vivent de cette production, dans l'ensemble des régions du Québec, dans chacune des régions du Québec; un petit peu moins à Montréal, j'en conviens, là. À Montréal, ils les consomment puis ils les achètent. Alors, c'est ça qu'on va essayer de régir pour garantir toujours aux productrices et aux producteurs qu'ils vont retirer le juste prix mais tout le prix qu'ils ont pour leur production.

Alors, M. le Président, c'est ça, le projet de loi n° 41, et je rappelle en tout dernier lieu, parce qu'il y a du monde qui nous écoute – ça ne se bouscule peut-être pas dans les autobus, mais ça nous écoute, les gens à la maison – que la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et des pêcheries au Québec, c'est la loi la plus fondamentale. Pour l'agriculture québécoise, c'est la prunelle de nos yeux. C'est celle qui permet la mise en marché ordonnée, ensemble, de signer des conventions puis d'avoir des revenus qui ont du bon sens pour les productrices et les producteurs agricoles de toutes les régions du Québec.

On apporte des ajustements techniques. Ces ajustements techniques, M. le Président, lorsqu'on a procédé à leur étude en commission parlementaire le printemps dernier, eh bien, on n'a pas adopté le projet de loi au mois de juin. Il y a des gens qui ont relu ça cet été, du côté des producteurs, du côté des productrices, du côté du contentieux du ministère, puis ils nous ont trouvé quelques petites coquilles. Ils sont venus me voir. Je vais vous dire franchement, ça avait du bon sens. Alors, on a discuté de ces questions avec l'opposition. L'opposition aura l'occasion de réagir à ces propositions. Je déposerais des amendements techniques – mais des amendements techniques, ça parle pareil, là, des amendements techniques, ça dit toujours quelque chose, ça, là – des amendements que nous avons soumis à l'opposition dans une prédiscussion.

Alors, M. le Président, non seulement, bien sûr, on est soumis à l'adoption, à cette étape-ci, du projet de loi, mais je dépose les amendements suivants pour être pris en considération. Et, suivant nos règles, si nous avons le consentement de l'opposition, nous pourrons procéder à ce qu'on appelle communément les «écritures» et subséquemment adopter le projet de loi avec les amendements qui y sont inscrits. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Y a-t-il consentement pour que nous procédions aux écritures?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement. Est-ce que la motion de M. le ministre proposant que l'Assemblée se constitue à partir de maintenant en commission plénière est adoptée? Adopté.


Commission plénière

M. le ministre m'a fait parvenir les amendements en question. Je m'en vais lire les amendements. C'est l'ensemble des amendements ici, là? Tout ça, là? Bon. Alors, il y a un certain nombre d'amendements. Nous procéderons par amendements. Nous pourrons les adopter à la suite. M. le ministre, oui.

M. Trudel: Avec le consentement de l'opposition pour procéder aux écritures, est-ce qu'on a besoin de se transformer en commission plénière? Je pense que notre règlement vous autorise maintenant...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, je vais vous expliquer, M. le ministre. C'est justement ça, de procéder aux écritures. On fait comme si... Ha, ha, ha! Alors, on est officiellement en commission plénière, là, mais nous restons à la place que nous occupons habituellement. C'est le sens de la procédure de procéder aux écritures.


Étude des amendements du ministre

Alors, le premier amendement, article 2(12): Remplacer, dans les cinquième et sixième lignes de l'article 2 du projet de loi, les nombres «26, 30, 37, 41 et 43» par les nombres «30, 37 et 41». Cet amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Un autre amendement, article 30.1: Insérer, après l'article 30, l'article suivant:

30.1. L'article 150 de cette loi est modifié par l'addition de l'alinéa suivant:

«Nul ne peut agir comme marchand de lait à moins d'être titulaire d'un cautionnement par police d'assurance délivré en application de l'article 149.2.» Alors, cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Le prochain amendement, article 55: Remplacer l'article 55 par le suivant:

55. L'article 42 de cette loi est modifié par le remplacement du paragraphe u – c'est bien la lettre u? bon, ça va – par le suivant:

«u) prescrire la préparation de registres, rapports et autres documents et en prescrire la communication au ministre.»

Cet amendement est-il adopté? Adopté.

Prochain amendement, article 70.1: Insérer, après l'article 70, l'article suivant:

«70.1. Les sommes perçues par la Régie en application de la section V de la Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés deviennent des sommes visées à l'article 149.4 de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche.» Cet amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le prochain et dernier amendement, article 72: Remplacer l'article 72 par le suivant:

«72. La présente loi entre en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi), à l'exception des dispositions de l'article 30 dans la mesure où il édicte les articles 149.2 à 149.5 de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche, de l'article 30.1, de l'article 45 dans la mesure où il abroge les articles 19 à 22 de la Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés, des articles 59, 63 à 65 et 70.1 qui entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par le gouvernement.» Cet amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Maintenant, est-ce que le rapport de la commission plénière est adopté?

Des voix: Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Nous revenons maintenant à notre débat sur l'adoption du projet de loi n° 41, et je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, à céder la parole à M. le député de Richmond.


M. Yvon Vallières

M. Vallières: Alors, je veux vous remercier, M. le Président, et j'essaierai d'être succinct, moi aussi, puisque déjà beaucoup de travail a été effectué en commission parlementaire sur le projet de loi que nous avons devant nous. Il plaira probablement au gouvernement de savoir que nous allons l'appuyer, et je pense qu'il est important pour les gens de savoir que, avant que nous ne passions à cette étape, beaucoup de travail a été effectué. Je pense qu'aujourd'hui force nous est de constater que le ministre a fait ses devoirs. Il les a même très bien faits, et les amendements que vous venez de déposer, M. le Président, en témoignent. Même s'ils sont très techniques, ils constituent des modifications qui avaient été abordées en commission parlementaire et qu'on retrouve aujourd'hui, et donc on a vraiment l'impression que et les gens du milieu – la Fédération des producteurs de lait en particulier – et les députés ont été largement écoutés par le ministre, puisqu'on retrouve aujourd'hui l'essentiel de ce que le ministre a qualifié de coquilles mais de plusieurs éléments que nous avions déjà soulevés en commission et que nous retrouvons aujourd'hui intégrés à l'intérieur d'un projet de loi qui va devenir loi.

Je veux également vous indiquer jusqu'à quel point pour nous, M. le Président, cette loi qui est amendée, en particulier la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche, est une loi fondamentale. Moi, je peux vous formuler un souhait ici, à cette Assemblée, comme député de l'opposition, c'est qu'à chaque fois qu'on touche à cette loi-là on puisse tous se mettre d'accord sur ce qu'on veut modifier, tellement elle est importante, tellement elle est une loi clé dans tout le secteur agricole au Québec. C'est vraiment la pièce maîtresse de tout ce qui régit les relations entre le monde agricole pris dans son sens le plus large. Alors, c'est ce qui vient dans plusieurs cas discipliner les relations entre les gens, c'est ce qui vient fixer les règles qui font en sorte que l'agriculture au Québec est un secteur qui est performant et qui va continuer de performer grâce à cet outil indispensable qu'est la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires.

Vous me permettrez également d'expliquer, M. le Président, pourquoi il est important de prendre le temps, comme il se doit, en commission et en cette Chambre, de se mettre d'accord sur une loi aussi fondamentale, puisque, de toutes pièces, elle donne des pouvoirs à la Régie des marchés agricoles, une régie qui, à mon sens, compte tenu de la nature des décisions qu'elle a à rendre, doit garder une crédibilité à toute épreuve. C'est la raison pour laquelle, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons voulu faire un travail très constructif à l'intérieur de ce projet de loi qui nous était présenté.

(16 h 30)

Je vous ferai grâce de tout ce qui correspond aux responsabilités de la Régie, mais je vais vous lire quelques-unes de ses responsabilités pour qu'ensemble on prenne conscience de ce qu'on vient de modifier aujourd'hui et jusqu'à quel point la loi que nous modifions est une loi importante, puisque la Régie assure une mise en marché efficace et ordonnée de nos produits agricoles et alimentaires au Québec. Également, la Régie assure le développement des relations harmonieuses entre les différents intervenants. La Régie, également, s'assure de la résolution des difficultés qui surviennent dans le cadre de la production et de la mise en marché de ces produits en tenant compte des intérêts des consommateurs et de la protection publique. La loi qui crée la Régie définit les règles de gestion des plans conjoints de mise en marché, des organes de coordination et d'accréditation des organismes impliqués. Elle réglemente le cadre des négociations, des conciliations, l'arbitrage, les enquêtes, les garanties, les paiements et les permis. Bref, M. le Président, la Régie est un organisme de régulation économique très important dans notre système.

Et je veux vous indiquer que, pour un, je trouve que le caractère indispensable de son mandat, qui est reconnu dans la loi, revient à l'intérieur des modifications qui sont proposées, et nous voulons ici vous indiquer que nous partageons, pour l'ensemble, M. le Président, les modifications qui sont proposées dans le projet de loi n° 41 que nous avons devant nous.

Ce projet de loi, M. le Président, abroge la Loi sur les grains. Ça veut dire, dans le fond, qu'il n'y aura plus de Loi sur les grains. Cette loi-là, elle est introduite, elle est impliquée, on la retrouve maintenant intégralement à l'intérieur du projet de loi que nous avons devant nous. Et il m'apparaissait pour le moins important que le ministre consente les amendements qu'il nous a présentés tantôt, puisque, en plus d'abroger la Loi sur les grains, le projet de loi que nous avons devant nous vient donc transférer les responsabilités vers la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec.

Le même projet de loi que nous avons devant nous modifie la Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés afin de confier au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation la responsabilité de délivrer les permis qui y sont prévus.

Ce projet de loi vient en plus permettre de regrouper dans la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche les pouvoirs de la Régie concernant notamment la fixation du prix du lait – et on sait jusqu'à quel point c'est un pouvoir important – et de l'administration du Régime de garantie de solvabilité des acheteurs de lait.

Le même projet de loi prévoit que le ministre devra, pour l'émission d'un permis, avoir obtenu un avis favorable de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec sur plusieurs sujets importants. Cet avis porte, entre autres, sur les conditions de mise en marché existant dans le secteur d'activité visé par la demande, les conditions d'approvisionnement des usines de transformation et les effets possibles de la délivrance d'un permis sur l'industrie laitière et les consommateurs.

Le ministre y faisait allusion tantôt, M. le Président, cette loi vient également modifier la Loi sur la protection sanitaire des animaux afin de transférer à la Régie la responsabilité d'encadrer la solvabilité des exploitants des établissements de vente aux enchères d'animaux vivants. C'est vrai qu'on n'en parle pas partout, de ça, M. le Président, mais ça demeure un point important, et la loi que nous avons devant nous vient apporter des précisions importantes à ce chapitre.

Enfin, le projet de loi vient modifier la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche afin d'y intégrer les dispositions pertinentes des lois auxquelles je faisais allusion tantôt, d'introduire des mesures permettant d'alléger le fonctionnement de la Régie par la Loi sur la justice administrative et la Loi sur l'application de la Loi de la justice administrative.

Enfin, M. le Président, plusieurs bonifications ont été apportées tant en commission parlementaire que, tantôt, par le dépôt qu'a fait le ministre. Et, même si nous avons procédé rapidement aux écritures, il m'apparaît important de mentionner que le ministre a retenu une des propositions qui avaient été faites en commission parlementaire, une des objections que nous avions faites, et qu'il a finalement supprimé l'abolition des articles 26 et 43 de l'énumération qui a été faite. Pour nous, c'était important, puisque l'article 26.1, que nous avions déjà introduit en commission parlementaire, était un compromis face au nombre de régisseurs qui pouvaient entendre des différends. Alors, l'article 26.1 va permettre, quand les parties sont d'accord, que les causes soient entendues par un nombre inférieur de régisseurs, mais que, pour d'autres causes où il n'y a pas d'entente, le nombre de régisseurs actuel puisse continuer de s'appliquer. Pour nous, c'était important, et ça a été retenu.

Au même titre que l'article 21 de la Loi sur les produits laitiers qui avait été abrogé par l'article 45 du projet de loi n° 41, cette disposition ne se retrouvait nulle part, M. le Président, dans le nouveau projet de loi qui avait été présenté, et ça nous apparaissait important que ce soit modifié. Le ministre l'a également retenu. Je veux simplement vous indiquer que cette disposition fait en sorte que «nul ne peut être marchand de lait ni agir comme tel s'il ne détient une police de garantie en vigueur, délivrée par la Régie en vertu de l'article 19 pour le montant qu'elle fixe selon l'échelle établie en vertu» de certaines dispositions de la même loi. Alors, ça, c'est important, M. le Président, parce que «nul ne peut être marchand de lait ni agir comme tel s'il ne détient pas une police de garantie en vigueur, délivrée par la Régie...» Entre autres choses, ce que ça veut dire, c'est que ça va éviter, ou ça peut éviter, que certains volumes de lait soient vendus par la Fédération, entre autres, et que les gens qui l'achètent aient des problèmes de solvabilité, puisqu'ils seront protégés à l'intérieur de la présente loi.

Alors, M. le Président, je ne veux pas être plus long, mais vous voyez que, si on s'y était attardé, nous serions encore à l'intérieur de plusieurs points techniques qui ont été largement étudiés en commission parlementaire, qui ont été revus et brassés, je dirais, par l'ensemble des députés en place, qui, à mon avis, ont fait un travail exceptionnel en commission parlementaire. Ce qui permet aujourd'hui de passer à une autre étape, qui n'est pas la moindre, qui est celle de l'adoption d'un projet de loi très important, il faut le rappeler, pour le monde agricole.

Et je veux, d'entrée de jeu, d'ores et déjà indiquer au ministre et à ses collègues que, pour un, quand le processus que nous avons suivi est adopté en commission parlementaire, où il y a une ouverture réelle de la part du ministre et du gouvernement de discuter sur le fond des amendements qui sont présentés... Je voyais même – juste pour vous indiquer, M. le Président – que l'opposition travaillait même avec ce qu'on appelle le «cahier du ministre», en commission. Donc, pourquoi on propose des amendements, etc.? Donc, il y a un niveau de collaboration qui est exceptionnel, et j'espère qu'on pourra continuer de l'appliquer dans d'autres projets de législation, ce qui permettrait à l'opposition d'exercer un rôle le plus constructif possible, ce qui ferait en sorte que les lois que nous adoptons ici, en Chambre, soient les plus bonifiées possible et satisfassent le plus possible les clientèles pour lesquelles nous sommes ici, en cette Chambre.

Alors, il va de soi, M. le Président, compte tenu des propos que je viens de tenir, que nous allons être d'accord et procéder à l'adoption du projet de loi, avec l'accord de l'opposition officielle.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Richmond, de votre intervention. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?


Mise aux voix

Le projet de loi n° 41, Loi abrogeant la Loi sur les grains et modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à demain, le jeudi 4 novembre 1999, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée? Adoptée. Donc, les travaux de cette Assemblée sont ajournés à demain, le 4 novembre, à 10 heures. Et on souhaite une bonne soirée à tous. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 38)


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