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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Tuesday, May 19, 1998 - Vol. 35 N° 180

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures trois minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.


Affaires du jour

Alors, nous entreprenons, ce matin, notre séance aux affaires du jour. J'inviterais Mme la ministre à nous indiquer la matière au menu. Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article 11, au feuilleton.


Projet de loi n° 424


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 11, Mme la ministre déléguée au Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 424, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Mme la ministre, je vous cède la parole.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. M. le Président, je soumets aujourd'hui à cette Assemblée, pour qu'elle en adopte le principe, le projet de loi n° 424, intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

Ce projet de loi a pour objet principal d'harmoniser la législation fiscale du Québec avec celle du Canada. Je suis certaine que mon collègue de l'opposition se réjouira de ces harmonisations et nous appuiera rapidement dans l'adoption de ce projet de loi.

À cet effet, ce projet de loi donne suite principalement aux mesures d'harmonisation prévues dans le discours sur le budget prononcé le 9 mai 1996 par le ministre des Finances ainsi que dans sa déclaration ministérielle du 19 décembre 1996. Ce projet de loi donne également suite à certaines mesures prévues dans le discours sur le budget prononcé par le ministre des Finances le 25 mars 1997.

Ce projet de loi, à l'instar de la plupart des projets de loi à caractère fiscal qui ont été présentés devant cette Assemblée au cours des dernières années, contient plusieurs mesures à caractère unique et à caractère technique. Il modifie principalement la Loi sur les impôts afin d'y apporter des modifications semblables à celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada par le projet de loi fédéral C-92, sanctionné le 25 avril 1997. Ce projet de loi, M. le Président, renferme quatre sujets principaux, lesquels affectent tous la Loi sur les impôts.

Le premier sujet traite des frais de garde d'enfants. Comme vous le savez sans doute, et plusieurs dans cette salle s'en rappelleront, la législation fiscale québécoise accorde un crédit d'impôt remboursable au particulier qui engage des frais de garde d'enfants au cours d'une année d'imposition. Ces frais doivent, règle générale, avoir été payés pour permettre au particulier ou à son conjoint d'occuper un emploi ou d'exploiter une entreprise. De plus, le crédit d'impôt est normalement accordé à celui des conjoints qui a le revenu le moins élevé pour l'année. Toutefois, le particulier dont le revenu est le plus élevé peut bénéficier du crédit si son conjoint fréquente à plein temps un établissement d'enseignement de niveau postsecondaire.

Le projet de loi que nous étudions ce matin, n° 424, bonifie le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants en reconnaissant à titre de frais de garde admissibles les frais de garde qui sont engagés pour permettre à un particulier ou à son conjoint de poursuivre des études de niveau secondaire.

La législation actuelle relative aux frais de garde d'enfants fait en sorte que, lorsqu'un particulier est chef d'une famille monoparentale et que son revenu d'emploi ou d'entreprise est inférieur aux frais de garde qu'il a engagés pour l'année du fait qu'il était aux études, ce particulier ne peut bénéficier pleinement du crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfants, puisque ses frais de garde ne seront admissibles que jusqu'à concurrence de son revenu net d'emploi ou, selon le cas, d'entreprise. Il peut en être également ainsi pour un couple dont les deux membres poursuivent simultanément des études et qui n'ont pas, de ce fait, un revenu d'emploi ou d'entreprise suffisamment élevé pour absorber entièrement les frais de garde.

Le projet de loi n° 424 modifie la Loi sur les impôts justement pour permettre aux chefs de familles monoparentales qui poursuivent leurs études au cours d'une année d'imposition ainsi qu'aux familles dont les deux parents poursuivent simultanément leurs études de bénéficier du crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfants, et ce, même s'ils n'ont pas ou ont peu de revenus d'emploi ou d'entreprise pour l'année. Pour ce faire, le montant des frais de garde admissible d'un particulier pour une année d'imposition sera dorénavant limité non plus par son revenu d'emploi ou d'entreprise pour l'année, mais par son revenu provenant de toute source.

Le projet de loi n° 424 modifie aussi la Loi sur les impôts pour faire passer de 14 à 16 ans l'âge à compter duquel un enfant, exception faite bien sûr de ceux qui sont atteints d'une infirmité, ne donne plus droit au crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants. Donc, on fait passer l'âge de 14 à 16 ans.

Le second sujet que je désire porter à votre attention ce matin, M. le Président, concerne le traitement fiscal qui est réservé aux pensions alimentaires, qui, comme on le sait, doivent de façon générale être incluses dans le calcul du revenu du bénéficiaire et peuvent être déduites de celui du payeur. Le projet de loi n° 424 modifie les règles d'inclusion et de déduction relatives aux pensions alimentaires afin que de tels montants versés pour l'entretien d'un enfant n'y soient plus assujettis s'ils sont versés en vertu d'une entente écrite conclue ou d'une ordonnance rendue après le 30 avril 1997 ou d'une ordonnance rendue avant le 1er mai 1997 si, dans ce dernier cas, le montant versé remplit certaines conditions.

(10 h 10)

Le troisième sujet concerne la déductibilité de certaines dépenses effectuées dans le cadre d'un projet de recherche scientifique et de développement expérimental. Pour mieux atteindre l'un des objectifs de la politique fiscale, qui est de ne reconnaître les salaires versés à certains employés qui sont aussi des actionnaires de la société qui les emploie ou qui ont un lien de dépendance avec cette dernière que dans la mesure où ces salaires reflètent la valeur des travaux de recherche et de développement que de tels employés exécutent plutôt que la rentabilité globale de l'entreprise, le salaire qui est versé à de tels employés, donc des employés qui sont aussi des actionnaires ou qui ont un lien de dépendance avec cette dernière, le salaire qui leur est versé et qui peut être déduit à titre de dépenses de recherche et de développement sera dorénavant limité à cinq fois le maximum des gains admissibles établi selon la Loi sur le régime de rentes du Québec.

Le quatrième sujet principal contenu dans le projet de loi n° 424 concerne le régime fiscal applicable à l'égard des ressources naturelles et plus particulièrement en ce qui a trait au mécanisme de financement par émission d'actions accréditives. Permettez-moi de rappeler à cet égard, M. le Président, que, selon ce mécanisme, un investisseur verse à une société exploitant son entreprise dans le secteur des ressources naturelles, en contrepartie d'actions accréditives, des fonds qu'utilise cette société pour engager des frais canadiens d'exploration, des frais canadiens de mise en valeur ou des frais à l'égard de biens canadiens relatifs au pétrole et au gaz.

Les règles relatives aux actions accréditives permettent à la société de renoncer à la déduction des frais en question en faveur des actionnaires qui ont financé la dépense, ces derniers étant réputés avoir effectué eux-mêmes les frais effectivement engagés par la société le jour où la renonciation prend effet. Dans certaines circonstances, les frais canadiens d'exploration et certains frais canadiens de mise en valeur engagés au cours des 60 premiers jours d'une année civile par une société peuvent être réputés avoir été engagés à la fin de l'année civile précédente, de sorte que les détenteurs d'actions accréditives qui les ont acquises au cours de cette année civile puissent bénéficier plus rapidement de l'avantage fiscal auquel ils ont droit.

Cette règle, semblable à celle qui permet à un particulier de contribuer à son REER pour une année bien que les contributions soient versées dans les 60 jours de l'année civile suivante, est connue sous le nom de «règle des 60 jours».

Dans un premier temps, M. le Président, le projet de loi n° 424 vient restreindre l'application du mécanisme des actions accréditives. Ainsi, ce mécanisme sera limité aux seules dépenses considérées à risque, soit celles qui sont reliées aux activités d'exploration et de mise en valeur au Canada. Les frais se rapportant aux coûts de biens miniers qui peuvent, de manière générale, être financés plus facilement par d'autres mécanismes et les frais à l'égard de biens canadiens relatifs au pétrole et au gaz ne seront, en conséquence, plus considérés comme des dépenses admissibles aux fins du régime des actions accréditives.

Dans un deuxième temps, des modifications sont apportées à la règle des 60 jours de manière que celle-ci soit dorénavant prolongée à une année complète. Ainsi, les frais d'exploration et les frais de mise en valeur engagés au cours d'une année civile donnée par une société pourront être réputés, après renonciation, avoir été engagés à la fin de l'année civile précédente par les détenteurs d'actions accréditives. Cette modification est apportée afin de donner aux sociétés un peu plus de temps pour engager certaines dépenses financées par le mécanisme des actions accréditives.

En terminant, la Loi sur les impôts est par ailleurs modifiée, à l'instar de certaines autres lois fiscales, afin d'y apporter diverses modifications de concordance et de terminologie. Le projet de loi n° 424 contient plusieurs autres modifications pouvant difficilement être regroupées en un seul sujet précis et qu'il serait fastidieux d'énumérer ici. Toutefois, les raisons motivant chacune de ces modifications font l'objet de notes techniques que nous aurons, bien sûr, la possibilité d'examiner lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 424 devant la commission des finances publiques.

J'invite donc, M. le Président, les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi n° 424. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre déléguée au Revenu. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Comme porte-parole de l'opposition sur le revenu, je voudrais faire quelques commentaires sur le projet de loi n° 424, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

M. le Président, souvent, devant cette Assemblée, j'ai plaidé la cause des contribuables qui ne sont pas capables de comprendre ces projets de loi. Devant nous, aujourd'hui, nous avons un autre exemple d'un projet de loi tellement compliqué qu'il est très difficile à comprendre.

Juste dans les notes explicatives, quand j'ai fait mon devoir en préparation de mon intervention sur ce projet de loi, je lis que, effectivement, c'est beaucoup d'harmonisation avec la loi fédérale, et je vais faire quelques commentaires sur ça plus tard. C'est une suite à la déclaration ministérielle du 19 décembre 1996, et aussi, de manière accessoire, il donne également suite à certaines mesures prévues dans le discours sur le budget du ministre des Finances du 25 mars 1998. Le 25 mars 1998. Nous n'avons pas eu un discours du budget le 25 mars 1998. Est-ce que la ministre... C'est 1997? Bon. Maintenant, la ministre a compris que déjà, dans le premier paragraphe du projet de loi, il y a une erreur, parce qu'il y est dit clairement... Le budget, c'était le 25 mars 1997, 31 mars 1998. Premier paragraphe, notes explicatives, nous avons déjà trouvé une erreur.

Et article après article, M. le Président, et je suis un contribuable, je ne suis pas un comptable, c'est assez difficile de comprendre ce projet de loi. Laissez-moi juste citer quelques exemples. Article 103. Je ne lirai pas tout l'article 103, je vais lire juste un paragraphe, qui est l'amendement 230.0.0.3.2:

«Pour l'application des paragraphes b et c du premier alinéa de l'article 230, lorsqu'une société emploie, au cours d'une année d'imposition de celle-ci se terminant dans une année civile donnée, un particulier qui en est un employé déterminé, que la société est associée à une autre société, appelée "société associée" dans le présent article, dans une année d'imposition de la société associée se terminant dans l'année civile donnée et que le particulier est également un employé déterminé de la société associée au cours de cette année d'imposition de la société associée, les dépenses engagées par la société et par chaque société associée, dans leurs années d'imposition se terminant dans l'année civile donnée, ne comprennent pas celles engagées dans ces années d'imposition pour le traitement ou le salaire de l'employé déterminé à moins que la société et toutes les sociétés associées n'aient produit au ministre une entente visée à l'article 230.0.0.3.3 pour ces années relativement à cet employé ou que l'article 230.0.0.3.5 ne s'applique à elles pour ces années relativement à celui-ci.»

M. le Président, comprenez-vous cet article de la loi? Pensez-vous que tout le monde peut comprendre ce projet de loi? Parce que la ministre peut dire que j'ai sorti juste un exemple, laissez-moi choisir un autre article de ce projet de loi, juste pour essayer de passer le message à ce gouvernement qu'effectivement nous avons besoin d'une refonte complète de nos projets de loi fiscaux.

Article 162. L'article 418.30 de cette loi est remplacé par le suivant:

«Lorsque, à un moment quelconque, le contrôle d'un contribuable qui est une société est acquis par une personne ou un groupe de personnes ou qu'un contribuable aliène la totalité ou la quasi-totalité de ses biens miniers canadiens ou de ses biens miniers étrangers et que, avant ce moment, le contribuable ou une société de personnes dont il était membre a acquis un bien qui est un bien minier canadien, un bien minier étranger ou un intérêt dans une société de personnes et qu'il est raisonnable de considérer que l'un des buts principaux d'une telle acquisition était d'éviter une restriction prévue à l'un des articles 418.16 à 418.21 ou à l'article 88.4 de la Loi concernant l'application de la Loi sur les impôts (chapitre I-4), dans la mesure où cet article réfère au paragraphe 25 de l'article 29 des Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu (Lois révisées du Canada (1985), chapitre 2, 5e supplément), en ce qui concerne la déduction à l'égard de frais engagés par le contribuable ou une société appelée "cessionnaire" dans les paragraphes e ou f de l'article 418.26, le contribuable ou la société de personnes, selon le cas, est réputé ne pas avoir acquis le bien aux fins de l'application, au contribuable ou à son égard, des articles 418.16 à 418.21 et de l'article 88.4 de cette loi, dans la mesure où cet article réfère au paragraphe 25 de l'article 29 de ces règles.»

(10 h 20)

M. le Président, comprenez-vous cet article de loi? Je présume que non. C'est assez difficile de comprendre ce projet de loi.

Avec ça, mon premier commentaire, M. le Président, aujourd'hui encore, comme je l'ai fait souvent en cette Chambre: je demande à ce gouvernement de refaire les projets de loi fiscaux, de refaire les lois fiscales, de s'assurer que les contribuables québécois comprennent mieux ce que le fisc veut dire, parce que, sinon, j'aurai besoin de continuer à faire mon rôle dans l'opposition officielle, pendant les commissions parlementaires, article par article, et j'aurai besoin de demander que la ministre explique chaque article de loi parce qu'on doit mieux comprendre les projets de loi avant qu'ils soient ratifiés.

Peut-être que dans le passé ils ont eu une tradition: on prend les projets de loi fiscaux en bloc, on passe ça tel quel, sujet par sujet, et peut-être que ça peut être une façon efficace, de temps en temps, de travailler. Mais, si on passe un projet de loi comme ça, on doit avoir une connaissance, pas juste des points saillants, pas juste des grandes lignes, comme on peut les trouver dans les notes explicatives, mais on doit avoir une bonne connaissance de ce que ça veut dire, chaque article de loi.

Et, déjà – parce que c'est une question de confiance aussi – dans le premier paragraphe des notes explicatives, je trouve une erreur. Ça n'existe pas, un budget déposé le 25 mars 1998. Combien d'autres erreurs est-ce que je peux trouver dans ce projet de loi? Combien d'autres erreurs de fond on peut trouver dans le projet de loi n° 424? Je ne sais pas la réponse à cette question, M. le Président.

En tout cas, le premier commentaire que je passe à ce gouvernement, et je vois que l'ancien ministre délégué au Revenu est ici aussi et je lui ai passé le commentaire à lui aussi: Nous avons besoin d'une réforme complète de nos lois fiscales parce que – je présume que la ministre a rempli aussi son formulaire d'impôts cette année – elles sont assez compliquées. C'est très difficile de comprendre. J'ai eu beaucoup de commentaires. Beaucoup de contribuables présument que c'est une stratégie de ce gouvernement de s'assurer qu'il n'y a presque personne qui peut comprendre les articles de loi parce que, après ça, la ministre peut interpréter le projet de loi tel qu'elle le veut, elle peut interpréter le projet de loi d'une façon la plus sévère contre les contribuables.

Avec ça, M. le Président, j'espère que cette fois-là le gouvernement et la ministre vont tenir compte de ce que les contribuables québécois demandent, de ce que l'opposition officielle demande. Nous avons besoin d'une réforme complète de ce projet de loi.

Sur les sujets. La ministre a expliqué les grands sujets. Effectivement, le premier sujet, c'est le crédit d'impôt. Mais le premier sujet, c'est l'harmonisation avec la loi fédérale. C'est souvent et c'est assez intéressant pour un gouvernement séparatiste devant nous qui présente un projet de loi qui suit mot par mot, concept par concept, la loi fiscale canadienne.

Souvent, j'ai demandé à la ministre: C'est quoi, la raison de cet article de loi? Souvent, j'ai eu une réponse: Parce que Ottawa fait la même chose. On suit Ottawa. Ce projet de loi, le premier paragraphe dit: Ce projet de loi a pour objet principal d'harmoniser la législation fiscale du Québec avec celle du Canada. Souvent, le ministre du Revenu suit exactement ce que le Canada fait. Et, dans les mesures qu'on a ciblées dans ce projet de loi, il y a quelque chose qui aide les familles, il y a autre chose qui est plus questionnable.

Mais, M. le Président, il me semble que, si nous avons un ministère, un ministre du Revenu, on peut avoir nos propres idées, on peut avoir nos opinions différentes. C'est clair et net, et je peux déposer tous les projets de loi qui ont comme titre «harmonisation avec les lois fiscales d'Ottawa». Mais, si le fisc de Québec, son maître à penser vient d'Ottawa, pourquoi ça prend autant de temps pour avoir ces projets de loi? S'ils sont déjà en place à Ottawa, pourquoi ça prend des mois et des mois et souvent des années avant que ça arrive devant l'Assemblée nationale?

Premier commentaire, M. le Président: Nous avons besoin d'une refonte complète de nos projets de loi fiscaux. Deuxième commentaire: Je tiens compte que, effectivement, c'est une harmonisation avec la loi fédérale. Et ça va être intéressant de savoir quelles études le ministère du Revenu du Québec a faites avant d'adopter 100 % de ces recommandations d'Ottawa.

Troisième commentaire, M. le Président: Pourquoi, le 19 mai 1998, nous sommes en train de discuter d'un projet de loi qui met en vigueur plusieurs éléments du budget pas de cette année, pas de l'année passée, mais du 5 mai 1996? Deux ans passés. Comment on peut vraiment avoir un débat de fond sur les principes dont on veut discuter quand c'est déjà deux ans en retard et, dans quelques exemples, il y a des mesures qu'on peut trouver qui sont déjà amendées? Avec ça, M. le Président, ce n'est pas une bonne façon de gérer. Ce n'est pas une bonne façon de gouverner, quand ça prend autant de temps... Excusez-moi. Oui, effectivement, c'était le 9 mai 1996. Pourquoi ça prend autant de temps d'arriver devant cette Chambre avec un projet de loi tel que nous avons devant nous avec le n° 424?

La ministre a discuté le premier sujet, le crédit d'impôt. Effectivement, M. le Président, nous avons eu des changements. Mais je vais utiliser la commission parlementaire pour savoir comment ça marche pour nos familles, comment ça marche pour nos familles qui me disent de plus en plus qu'elles sont appauvries par ce gouvernement, qu'il y a moins de revenu disponible. Leurs propres chiffres disent que nous avons 2,1 % moins d'argent dans nos poches que l'année passée. Avant, nous avons eu le cadeau de Noël de ce gouvernement, une augmentation de 15 % de la TVQ... de 6,5 % à 7,5 %, qui prend 675 000 000 $ dans nos poches. Avec ça, nous allons utiliser la commission parlementaire pour discuter effectivement de c'est quoi, la situation des familles québécoises. On peut discuter des crédits d'impôt, de l'assouplissement des règles relatives au crédit d'impôt remboursable pour les frais de garde d'enfants, mais on veut aussi discuter de la situation actuelle.

Le gouvernement va essayer de dire que tout est beau et tout est correct, mais les familles québécoises disent exactement le contraire. Ça fait mal. Ça fait mal avec les avalanches de taxes. J'ai mentionné la TVQ, le cadeau de Noël de 675 000 000 $. N'oubliez pas que là où je demeure et où le député de Verdun demeure nous avons eu une augmentation des taxes scolaires de 45 %. Ça fait mal à la famille québécoise. N'oubliez pas la taxe-médicaments. Ça fait mal à la famille québécoise. Si la ministre veut discuter de l'assouplissement des règles relatives au crédit d'impôt, elle peut faire ça, mais aussi je pense que c'est notre devoir, dans cette Assemblée, de discuter de la situation des familles québécoises.

Et est-ce que, après trois ans d'augmentation de taxes, et de taxes, et de taxes, les taxes directes et indirectes, est-ce qu'elles sont vraiment dans une meilleure situation qu'avant? La réponse est certainement non. Elles sont plus pauvres. Il y a moins d'argent. Ce gouvernement a ralenti l'économie québécoise, et ça fait mal aux familles québécoises.

(10 h 30)

Le deuxième point, la défiscalisation des pensions alimentaires pour les enfants. M. le Président, c'est un sujet, j'espère, qui intéresse les 125 députés de l'Assemblée nationale. Et on peut discuter des mesures qu'on peut trouver dans le projet de loi n° 424, mais on doit, comme premier sujet, discuter de ce qui se passe sur le terrain. J'ai eu déjà une opportunité de questionner la ministre sur la situation des pensions alimentaires. Encore, il y a eu des améliorations de temps de délai d'entrée sur les listes, mais les listes d'attente, d'une certaine façon... Parce que, encore une fois, il y a un problème entre l'inscription sur les listes et pour les parents d'avoir les chèques. Et c'est le pain et le beurre pour beaucoup de personnes.

Avec ça, je voudrais utiliser, encore une fois, l'opportunité... Parce que c'est difficile de voir ce gouvernement impliqué dans les dossiers de fond. Il veut commencer les débats académiques, il veut commencer les débats existentiels. Mais on veut discuter de ce qui se passe avec les familles québécoises. Et, pendant le débat sur le deuxième niveau de ce projet de loi, nous allons discuter de: Est-ce que ça va bien pour le programme de pensions alimentaires? Les familles disent non. Est-ce qu'il y a encore un problème pour recevoir les chèques? Plusieurs contribuables de mon comté disent: Oui, il y a encore un problème. M. le Président, nous allons certainement discuter de ça.

M. le Président, le troisième sujet – et nous allons avoir une autre chance, un peu plus tard ce matin, de discuter de toutes les questions de recherche et développement, et des programmes gouvernementaux pour ça, avec le projet de loi n° 425 qui suit ce projet de loi – le troisième point, la non-qualification de certaines dépenses à titre de dépenses de recherche scientifique et de développement expérimental. On doit avoir un vrai débat sur cette question parce que, ici, au Québec, nous n'avons pas d'une bonne façon, selon moi, encouragé assez la recherche et le développement.

Dans le futur, nous aurons besoin d'encourager nos jeunes et nos recherchistes à étudier. Est-ce que nous avons fait assez pour la recherche-développement ici, au Québec? La réponse, c'est non. Est-ce qu'on peut faire mieux? En mon opinion, la réponse est clairement oui. M. le Président, nous allons questionner la ministre sur ce projet de loi, mais aussi on doit questionner ce gouvernement pas juste sur ce qu'on trouve dans le projet de loi, mais je pense que le vrai sujet est: Qu'est-ce qu'on ne retrouve pas dans ce projet de loi présenté par la ministre?

Les contribuables québécois demandent un assouplissement pour beaucoup de choses. Ils veulent avoir une autre façon de payer leurs taxes. Ils veulent avoir un système plus équitable et plus juste. Mais ce n'est pas ça que la ministre nous donne aujourd'hui. Ce n'est pas ce qu'elle donne. Nous avons vu, une année après l'autre, une augmentation de taxes. Pensez-vous que d'augmenter les taxes, jusqu'ici, ça aide l'économie québécoise? Non. La ministre peut arriver avec un projet de loi et dire: Effectivement, nous sommes en train de légalement mettre en place quelque chose annoncé au discours du budget de 1996. Mais nous sommes en 1998 et ça fait mal à la famille québécoise.

Un point intéressant, M. le Président, le projet de loi n° 424 déposé la semaine passée, et on a fait un débat le 5 mai 1998, met en vigueur une déclaration ministérielle du 19 décembre 1996, juste avant Noël 1996. Laissez-moi citer une partie de cette déclaration ministérielle qui a été déposée par le ministre des Finances: «M. le Président, dans le cadre du Sommet sur l'économie et l'emploi, j'ai annoncé que le gouvernement du Québec entendait mettre en place une réduction des taxes sur la masse salariale afin de favoriser la création d'emplois à temps plein. À cette occasion, j'ai indiqué que les modalités d'application de cette mesure seront annoncées lors du prochain discours sur le budget. Toutefois, afin de favoriser le plus rapidement possible la création d'emplois, je suis particulièrement fier de rendre publiques aujourd'hui les modalités d'application de cette mesure. La réduction des taxes sur la masse salariale qui serait mise en place prendra la forme d'un crédit d'impôt remboursable, tout en simplifiant graduellement la tâche des employeurs qui ont droit au crédit d'impôt.»

Comme d'habitude, M. le Président, beau discours, belles annonces, beaucoup de monde, pas beaucoup d'actions, parce que le projet de loi n° 424 met en vigueur la déclaration ministérielle du 19 décembre 1996, mais le budget de cette année dit, et laissez-moi citer – et, moi, je vais citer le ministre des Finances. Ça ne vient pas du Parti libéral, c'est le ministre des Finances qui a dit ça – Maintenant, le même ministre des Finances a dit: «Le crédit d'impôt pour la création d'emplois n'a pas connu le succès espéré auprès des employeurs, notamment les grandes entreprises en raison des coûts inhérents à sa gestion.» Belles annonces, rien ne se passe.

Depuis le Sommet, le seul geste pour la création d'emplois a été ce crédit d'impôt. Mais ça ne marche pas. C'est trop compliqué. M. le Président, je pense que le gouvernement ne peut pas être fier de ces mesures. Voilà un bon exemple de la politique économique de ce gouvernement péquiste. C'est trop compliqué, c'est beaucoup trop dur. Mais il y a toujours un résultat nul. Ça n'augmente pas, ça n'aide pas l'économie québécoise. Et maintenant on apprend qu'on doit attendre jusqu'à l'année 2000 pour savoir si ces crédits d'impôt actuellement vont créer de l'emploi. Avec ça, je suis loin d'être satisfait de ce projet de loi. On arrive au printemps 1998, les contribuables québécois veulent avoir beaucoup plus de flexibilité, ils veulent avoir un système plus juste et équitable. Ils sont prêts à payer leurs taxes, ils sont prêts à travailler avec la ministre du Revenu, mais on arrive avec quelque chose qui est deux ans en retard, qui manque de vision, qui ne répond pas aux besoins des familles québécoises, qui, en grande partie, s'harmonise avec la législation fiscale du Canada, qui a été déjà ratifiée avec le Canada. Avec ça, je pense, M. le Président, on doit vraiment repenser notre façon d'approcher ces questions.

Mr. Speaker, a few comments about Bill 424 that is before us today, An Act to amend the Taxation Act and other legislative provisions of a fiscal nature. I'm very concerned, as I mentioned it many times in this House, that, presented before us, our tax laws often dated two or more years previously. This budget, this Bill actually puts in place many measures that you'll find in the 9th-of-May budget 1996, two years past. Many articles in this law you will find in Federal law that have already been implemented. So, I ask myself, and I presume you're asking yourself too, Mr. Speaker: Why does it take so long for the Government of Québec to come forward with these tax laws? Do we need a new method, a new calendar presenting these tax laws?

My second point, Mr. Speaker, and I'll only read one article of the two that I read in French before. Article 162 reads as following:

Section 418.30 of the said Act is replaced by the following:

«418.30. Where, at any time, control of a taxpayer that is a corporation has been acquired by a person or group of persons, or a taxpayer has disposed of all or substantially all of the taxpayer's Canadian resource properties or foreign resource properties, and, before that time, the taxpayer or a partnership of which the taxpayer was a member acquired a property that is a Canadian resource property, a foreign resource property or an interest in a partnership and it may reasonably be considered that one of the main purposes of the acquisition was to avoid any limitation provided in any of sections 418.16 to 418.21 or section 88.4 of the Act respecting the application of the Taxation Act (chapter I-4), to the extent that that section refers to subsection 25 of section 29 of the Income Tax Application Rules (Revised Statutes of Canada, 1985, chapter 2, 5th Supplement), on the deduction in respect of any expenses incurred by the taxpayer or a corporation referred to as a "transferee" in paragraph e or f of section 418.26, the taxpayer or the partnership, as the case may be, is, for the purpose of applying sections 418.26 to 418.21 and section 88.4 of that Act, to the extent that that section refers to subsection 24 of section 29 of those rules to or in respect of the taxpayer, deemed not to have acquired the property.» Mr. Speaker, I'm sure you couldn't give me, as we speak right now, a quick explanation of what that article does, and, if you could, you probably could do it much simpler than what you find in this article of law.

(10 h 40)

So, one of the things that I'm trying to impress on this Government is that it is now time to do a complete overhaul of our fiscal laws. We have to make them more coherent and more understandable by Quebeckers, because otherwise, all the Minister is doing is creating more and more job opportunities, to the back door, for accountants and fiscal lawyers. What we should have is a system that people understand and people can comprehend.

So, what I plead with this Government again, as I have on many occasions, is to redo these laws, make them simpler, make them more understandable, find a system that we can actually fully understand what this Government is trying to do. We need to have, along with these «projets de loi», clear documents. And maybe we need complicated legal articles. But I think what we need also is an explanation of what they stand for. We have to make sure that they're properly done. As I mentioned to the Minister, in the first paragraph, there is already a mistake of which budget this is actually based on. There was no budget on 25th of March 1998, as you find in the first explanatory note. But that can obviously be corrected.

The point is that we have to have a law that Quebeckers can understand. When we come out with fiscal laws that nobody can understand, that doesn't help people buying the tax system, that doesn't help people understand what the Government is doing. And frankly, I think, with the kinds of moneys governments spend at this point, we should be doing a much greater effort to make sure that people fully understand what the tax laws are, what principles they're based on and how fair they are.

The Government has talked of Bill 424 about responding to some of the various measures from budget speeches and ministerial declarations, particularly to refundable tax credits for child support programs. Those are programs that are implemented right now. We should look at these articles and see what they actually say. But we should also spend the time in parliamentary commission making sure that we understand what families are dealing with. Do the child support payments work? I'm hearing in my riding there are still serious problems. Do refundable tax credits for child care expenses actually help families? I'm hearing that our families are poorer and poorer each month with this Government.

The Bureau de la statistique du Québec has shown that families have less revenue in their pocket: 2,1 % last year from the year before, less money to spend, less money to spend on their children. You can give all the most wonderful speeches in the world if you want, but they have less money. And this was before the increase of the sales tax by 15 %, from 6,5 % to 7,5 %, which in one grab took 675 000 000 $ out of the taxpayers' pockets, out of the families' pockets. So, we should have the courage and the honesty to talk about what the real extent of family income is for Québec families.

On the issue of scientific research and experimental development expenses, I would like again to have a full debate as: How is Québec ensuring that research and development is growing, is being encouraged in the province of Québec? Do we facilitate research and development projects? We could certainly talk about the articles of this law, but I think again it is our responsibility to look at it in the global sense of saying: What is Québec doing for research and development? I mention that to the Minister so that we don't have the same problem as we've had in many «projets de loi» before, that the Minister comes and says: Well, the Minister of Finance, or Ottawa, or somebody else has told me to do this. We're implementing this law because somebody else has told me to do it. I asked: What does it do? What is the context of what is being presented? Many times, this Minister and previous ministers couldn't answer under what context it was being presented. I think we should clearly, Mr. Speaker, make sure that we have a full and total debate about that.

M. le Président, je sais que nous allons avoir beaucoup d'autres opportunités, pendant la commission parlementaire sur le projet de loi n° 424, de questionner la ministre. La stratégie, je ne le cache pas, ça a été ma stratégie avec ce gouvernement: j'utilise la commission parlementaire pour mieux comprendre le projet de loi. Souvent, je demande à la ministre d'expliquer le projet de loi et, souvent – et je ne blâme pas la ministre pour ça – elle ne comprend pas le projet de loi et on doit souvent demander à quelqu'un de l'expliquer. Au moins, pendant l'exercice d'une commission parlementaire, on peut mieux comprendre qu'est-ce que ça veut dire dans ce projet de loi. Parce que c'est une chose. C'est assez bizarre, ce que nous sommes en train de faire, M. le Président. En 1996, deux années passées – et je connais toujours la réplique de l'autre côté, c'est juste: Nous sommes en train de mettre en place légalement qu'est-ce qui a été annoncé quelques années passées; avec ça, on ne fait pas un débat. Non. Afin d'être responsable, on doit s'assurer que nous avons bel et bien compris ce projet de loi. Je vois qu'il y a plusieurs députés de l'autre côté qui veulent faire la même chose parce qu'ils veulent aussi connaître le projet de loi parce qu'ils n'ont peut-être pas compris tous les articles de la loi qu'ils ont à passer. Avec ça, M. le Président, j'espère que nous allons avoir une étude exhaustive de ce projet de loi et j'espère que nous allons avoir la chance de mieux comprendre tous les articles de la loi, incluant ceux qui sont une harmonisation avec Ottawa. Souvent, j'ai demandé à la ministre pourquoi il y avait cet article de loi: Ah! c'est une harmonisation avec Ottawa. Mais pourquoi Ottawa fait-il ça? Souvent, nous n'avons pas eu cette réponse. Je voudrais avoir ces réponses. Si on suit Ottawa, je voudrais savoir pourquoi. Est-ce que le Québec accepte un article de loi proposé par Ottawa ou est-ce que nous avons eu nos propres études? Je vais demander à la ministre une réponse à ces questions.

M. le Président, en terminant, j'espère que nous allons avoir une refonte des projets de loi. Nous avons besoin de simplifier ces projets de loi. Je sais que, souvent, quand les péquistes parlent de simplification, nous avons eu exactement le contraire. Vous le savez, la fameuse déclaration du ministre des Finances sur la réduction des taxes sur la masse salariale, qui ne marche pas parce que c'est trop complexe, c'est trop lourd. Alors, M. le Président, c'est deux choses différentes, le discours et la réalité. Et je souhaite que nous ayons le temps nécessaire pour étudier ce projet de loi. Comptez sur l'opposition officielle, comme d'habitude, pour s'assurer que les contribuables québécois comprennent ce qui est inclus dans le projet de loi n° 424 qui inclut 314 articles et, si on trouve des articles de loi qui, on pense, peuvent être mieux que ceux qu'on trouve dans le projet de loi, comptez sur l'opposition officielle pour proposer les amendements.

Je n'accepte pas que la ministre dise: Je ne peux pas, je suis juste le messager, c'est le ministre des Finances ou un autre ministre qui dit qu'effectivement c'est tout embêtant, je ne peux pas changer un mot, je suis juste le messager du ministre des Finances. Ce n'est pas ça qu'une commission parlementaire doit faire. Je comprends que ça peut être difficile pour la ministre de faire ça, mais, après une bonne discussion – et j'ai vu ça dans ses yeux souvent – elle a compris qu'effectivement l'opposition officielle a eu raison, que c'était un mauvais article. J'espère qu'elle va avoir le courage de dire: Effectivement, je vais changer ça, je suis prête à faire un amendement, je vais retourner au Conseil des ministres et je vais convaincre le grand patron, le ministre des Finances, qu'il doit changer ce projet de loi. C'est ça que nous allons essayer de faire.

Alors, M. le Président, j'espère que mes brefs commentaires, aujourd'hui, aident le débat. J'espère que la ministre pourra se préparer comme il faut pour la commission parlementaire. Je souhaite, après ce débat, avoir les notes explicatives, et nous allons certainement commencer le débat dans les plus brefs délais. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Il n'y a pas d'autres interventions. Je vais céder la parole à Mme la ministre pour son droit de réplique. Mme la ministre.

(10 h 50)


Mme Rita Dionne-Marsolais (réplique)

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Je dois réagir à quelques commentaires, ils seront brefs. Mais je pense le député, quand il prétend que je ne comprends pas le projet de loi, est allé un petit peu trop fort. Je pense que le député de Nelligan ne comprend pas comment ça fonctionne au niveau d'un projet de loi et au niveau de la fiscalité.

La réalité, M. le Président, c'est que, s'il avait posé les questions qu'il a posées – et qui sont valables – au moment du budget et au moment de la présentation du budget, nous aurions pu en discuter. Mais, à partir du moment où le budget est accepté sans – on s'en rappellera – pratiquement de questions de la part de l'opposition, il faut s'étonner qu'aujourd'hui, quand on le met en application et qu'on le traduit dans un projet de loi, ce qui est la responsabilité du Revenu, il faut s'étonner qu'on commence à poser des questions, qu'on se réveille, tout à coup, un an et demi plus tard: Ah! Bien, on a des questions à poser.

Je veux bien croire que c'est ardu, lire des textes du budget, mais, avec toute l'éloquence qu'on connaît du ministre des Finances, on comprend du premier coup normalement ce qu'il nous dit. Et, quand on ne le comprend pas, on le lit.

Ceci dit, d'abord, si le député avait écouté ma présentation, il aurait compris – parce que c'est ce que j'ai dit dans ma présentation – qu'il y avait une erreur de frappe, dans les notes explicatives, quant à la date du 25 mars 1997. Je l'ai même dit dans mon discours. Il aurait dû porter un peu plus attention à ce que j'ai dit dans mon discours, ça l'aurait aidé à comprendre le reste.

Il indique aussi que les contribuables ne sont pas capables de comprendre les lois de l'impôt. Ceci dit, les lois de l'impôt, si on en était resté, au Québec, aux premières initiatives, en début de siècle, au niveau de l'impôt, on aurait plus de facilité aujourd'hui, c'est vrai, dans notre fiscalité. Sauf que, alors que c'était, si ma mémoire me sert bien, la ville de Montréal qui avait imposé les premiers impôts dans le port de Montréal, avec le temps, le fédéral s'est mis de la partie – le Québec y était déjà – pour mélanger tout ça.

Mais aujourd'hui, on se retrouve avec des lois de l'impôt qui sont complexes, parce que nous vivons dans une société complexe, parce qu'il existe, au fur et à mesure où la technologie nous appuie, des nuances qu'il faut apporter. Et l'harmonisation entre la loi fédérale et la loi du Québec, une fois que le ministre des Finances du Québec décide d'appliquer et de retenir certaines suggestions, certaines propositions, certaines actions prises par le gouvernement fédéral qui, malheureusement, a des juridictions sur lesquelles nous n'avons pas toujours le loisir de nous prononcer – on peut peut-être se prononcer, mais on ne peut pas agir – c'est pour cela qu'il faut des modifications et des projets de loi comme le projet de loi n° 424.

Il y a 12 lois qui sont modifiées par ce projet de loi, et ce sont des modifications qui devraient améliorer, je pense... Je sais que le député de Nelligan est très sensible à améliorer la réalité financière des contribuables, et je pense que les modifications que nous proposons aujourd'hui vont en ce sens.

Je trouve ça un peu étonnant aussi quand il nous dit qu'il faudrait tout remettre en question, tout d'un coup, parce que, dans le passé... Il a été d'ailleurs en cette Chambre avant moi, et il était membre du parti au pouvoir dans les années qui nous ont précédés. Mais qu'est-ce qu'il a fait pour faire entendre sa voix et pour apporter des modifications pour donner plus d'argent justement aux contribuables, pour assumer plus de responsabilités, pour alléger la présentation des projets de loi? Pas grand-chose.

En fait, ou bien, dans le temps, c'est l'opposition... Quand on nous demande de changer les façons de faire, ou bien c'est parce que, nous, on questionnait au bon moment, c'est-à-dire au moment du budget, ou bien alors, quand le Parti québécois est au pouvoir, le député de Nelligan voudrait changer toutes les règles du jeu, refaire toute la loi, refaire toutes les règles pour que, justement, ça serve un peu plus ses intentions, plutôt que le contribuable.

Alors, là-dessus, là, j'arrêterai mes commentaires, parce que je pense que mon point est fait, comme on dit souvent dans la réalité, dans l'industrie.

On nous a demandé, le député de Nelligan demande qu'on simplifie davantage, mais c'est exactement ce qu'on a fait. S'il avait vu son dernier budget, le budget de l'an passé, nous allons avoir, en 1998, une formule simplifiée d'impôt qui va permettre à chacun de mieux comprendre et de mieux remplir son rapport d'impôts. La simplification la plus efficace dans nos impôts, ce serait qu'on ait un seul point pour payer nos impôts, c'est-à-dire au Québec. Si on se défaisait du fédéral, il n'y en aurait plus, de projets de loi pour harmoniser avec le fédéral. Ce n'est pas compliqué!

Une voix: Ça, c'est de l'économie.

Mme Dionne-Marsolais: Enfin, le député mentionne que les efforts de recherche et développement au Québec sont insuffisants, mais je lui donnerai les derniers chiffres qui ont été présentés à l'ACFAS la semaine dernière. 33 % de la recherche industrielle qui est faite au Canada est réalisée au Québec. 33 %. On doit faire quelque chose de bien, puisque c'est un tiers de tout ce qui se fait au Canada par des entreprises. Alors, je pense qu'au niveau de notre approche par rapport au développement, par rapport à la recherche, par rapport au développement industriel, notre approche porte fruit, elle est celle qu'il faut suivre. Et ce projet de loi va nous permettre de continuer, de donner plus de flexibilité dans certains cas, notamment au niveau des sociétés d'exploration, dans le secteur du gaz et des mines, et je pense que, dans ce contexte-là, les contribuables du Québec seront mieux servis par cette autre façon que nous avons mise de l'avant depuis bientôt quatre ans. Alors, je termine là-dessus, M. le Président, ma réplique.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Je vais mettre aux voix le principe du projet de loi. Le principe du projet de loi n° 424, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, est-il adopté?

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division? Adopté sur division. Alors, Mme la ministre déléguée au Revenu.


Renvoi à la commission des finances publiques

Mme Dionne-Marsolais: Alors, M. le Président, je fais donc motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée. C'est avec plaisir que nous allons travailler à expliquer davantage ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

M. Williams: M. le Président, juste une brève question si je peux.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Brièvement.

M. Williams: Est-ce que je peux avoir les notes explicatives de ce projet de loi avant qu'on commence les travaux en commission parlementaire?

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Non seulement est-ce qu'il pourra les avoir, mais nous lui avons même offert de le sensibiliser et de lui donner un briefing sur ce projet de loi, ce qu'il a gentiment décliné. Alors, on lui transmettra les documents pour la commission parlementaire.

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors... Excusez. On ne peut pas...

M. Williams: Quand est-ce que je vais avoir ça? J'attends encore.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, écoutez, nous revenons maintenant à la proposition qui est devant nous. La motion qui a été présentée par Mme la ministre déléguée au Revenu est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la ministre déléguée au Revenu.

Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Alors, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 12 de notre feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi n° 425


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 12, Mme la ministre déléguée au Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 425, Loi modifiant la Loi sur les impôts et la Loi sur le ministère du Revenu concernant le contrôle de certains abris fiscaux. Mme la ministre, je vous cède la parole.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, je soumets aujourd'hui à cette Assemblée, pour qu'elle adopte encore le principe, le projet de loi n° 424, pardon, 425, le projet de loi modifiant la Loi sur les impôts... Attendez une seconde. 425, c'est ça. Le projet de loi... Excusez. Le projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts... Non. Je m'excuse, là. C'est ça. Oui. Attendez une minute, là. Loi modifiant la Loi sur les impôts et la Loi sur le ministère du Revenu concernant le contrôle de certains abris fiscaux. Voilà. Nous y sommes.

Alors, ce projet de loi donne suite à l'annonce qui a été faite par le ministre des Finances dans son discours récent, à l'effet d'introduire dans la législation québécoise des mesures de contrôle à l'égard de certains abris fiscaux. Je crois que, dans un premier temps, il y a lieu de rappeler les événements qui ont donné lieu à cette annonce pour bien comprendre la situation.

(11 heures)

La commercialisation d'abris fiscaux dans le domaine de la recherche scientifique et du développement expérimental a occasionné des situations regrettables pour de nombreuses personnes qui y ont investi des montants importants. Plusieurs de ces abris fiscaux à l'égard desquels les promoteurs faisaient miroiter l'obtention d'avantages fiscaux appréciables ont fait l'objet d'une révision par les autorités fiscales. De nombreux investisseurs qui avaient obtenu des remboursements d'impôts ont reçu de nouveaux avis de cotisation leur réclamant le paiement des impôts qui leur avaient été remboursés en trop. Ces nouvelles cotisations résultaient du fait que les dispositions législatives n'étaient pas respectées, dans certains cas. Et, dans certains cas, les activités qui étaient projetées n'avaient même pas été réalisées.

Un comité consultatif formé par le ministre des Finances et le ministre du Revenu de l'époque, le 23 octobre 1995, a fait des recommandations concernant la mise en place de certaines mesures afin de mieux protéger le public investisseur et l'État à l'égard du commerce des abris fiscaux. Le gouvernement a, M. le Président, souscrit en substance à l'ensemble de ces recommandations.

Avant de décrire les principales règles contenues dans le projet de loi n° 425, il me faut, M. le Président, rappeler que les tribunaux ont autorisé l'exercice d'un recours collectif à l'encontre du Procureur général du Québec et du Procureur général du Canada, de même qu'à l'encontre de certains promoteurs d'abris fiscaux pour la recherche et le développement. Je rappelle que le gouvernement aurait pu en appeler de la décision de la Cour d'appel autorisant l'exercice du recours collectif à l'encontre du ministère du Revenu du Québec, mais il a préféré accélérer le dénouement de ce litige par un débat sur le fond en faisant la preuve devant les tribunaux que le ministère du Revenu a agi correctement et qu'il ne peut être tenu responsable des préjudices subis par les quelque 1 700 investisseurs visés par le recours collectif.

Voilà, M. le Président. C'est dans ce contexte que le ministre des Finances a annoncé la mise en place de nouvelles règles à l'égard des abris fiscaux relatifs au financement de dépenses de recherche scientifique et de développement expérimental, afin d'en permettre un meilleur contrôle.

Ces nouvelles règles prévoient qu'un abri fiscal en matière de recherche scientifique et de développement expérimental ne peut faire l'objet d'une offre publique au Québec que s'il a fait l'objet préalablement d'une décision anticipée favorable du ministère du Revenu du Québec. Un abri fiscal ainsi contrôlé désigne toute forme d'investissement assujetti à la Loi sur les valeurs mobilières et comportant, pour un particulier investisseur, selon les déclarations et les représentations faites ou envisagées par un émetteur de l'abri fiscal contrôlé, des avantages fiscaux pour un montant égal ou supérieur au coût de l'abri fiscal contrôlé par l'investisseur. Le coût de l'abri fiscal pour un investisseur doit être rajusté afin qu'il représente le risque économique qu'encourt l'investisseur. Il incombe à l'émetteur d'un tel titre de demander la décision anticipée, et ça, c'est très important parce que c'est ce qui va nous éviter des retours douloureux, comme ça a été le cas dans le passé.

Toutefois, M. le Président, certains titres sont exclus, en raison notamment des règles de contrôle qui existent déjà à leur égard. Je ne mentionnerai que le cas d'une action émise dans le cadre du Régime d'épargne-actions, par exemple. L'obtention de cette décision anticipée est soumise à certaines formalités quant aux informations à fournir, de façon que toutes les informations pertinentes soient divulguées au ministère du Revenu. Par suite de son analyse, le ministère du Revenu peut rendre la décision anticipée s'il estime que les dispositions de la Loi sur les impôts sont respectées ou, dans le cas contraire, le ministère du Revenu peut refuser de rendre la décision anticipée.

Je me dois de signaler ici, M. le Président, la tâche qui incombera au ministère du Revenu du Québec par suite de l'adoption du projet de loi n° 425. La décision anticipée que doit rendre le ministère du Revenu à l'égard d'un abri fiscal contrôlé doit exposer le traitement fiscal applicable à l'investisseur dans l'abri fiscal contrôlé et identifier, à la condition qu'il y en ait, les facteurs de risque sur le plan fiscal pour l'investisseur dans l'abri fiscal contrôlé.

Compte tenu que la décision anticipée constitue le moyen de contrôle, des dispositions dissuasives sont introduites et vont s'appliquer lorsqu'un abri fiscal sera commercialisé sans qu'une décision anticipée ne soit obtenue de la part du ministère du Revenu au préalable, malgré les exigences de cette loi. Ainsi, un investisseur ne peut déduire ou réclamer un montant quelconque dans sa déclaration de revenus, au Québec, qu'à la condition que le ministère du Revenu ait rendu une décision anticipée à l'égard de l'abri fiscal. De plus, M. le Président, toute personne, y compris l'émetteur d'un titre qui offre un abri fiscal contrôlé au Québec sans qu'une décision anticipée favorable n'ait été préalablement rendue ou qui fournit des renseignements faux ou trompeurs, sera passible d'une pénalité et d'une amende. Par ailleurs, le ministère du Revenu peut intenter un recours en injonction dans ces cas pour faire cesser toute distribution de l'abri fiscal contrôlé.

J'invite donc, M. le Président, les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi n° 425, intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts et la Loi sur le ministère du Revenu concernant le contrôle de certains abris fiscaux. Je suis persuadée que l'opposition va appuyer ce projet de loi parce qu'il est dans l'intérêt des contribuables que nous l'adoptions le plus tôt possible. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Le projet de loi n° 425, Loi modifiant la Loi sur les impôts et la Loi sur le ministère du Revenu concernant le contrôle de certains abris fiscaux, c'est une admission de culpabilité par ce gouvernement, c'est son mea-culpa, c'est une admission qu'ils ont trompé la population québécoise, c'est une admission qu'ils ont mal fait leur travail, c'est une admission qu'effectivement le gouvernement n'a pas fait son devoir dans le passé et que ce gouvernement n'a pas eu assez de courage pour corriger tous les problèmes.

Je n'ai jamais dit que le gouvernement devant nous a commencé cette situation – la ministre a déjà fait un rappel des faits. Effectivement, c'était commencé pendant les années avant, mais juste à la fin du dernier mandat, et certainement depuis l'élection de ce gouvernement, nous avons compris qu'effectivement le gouvernement, selon moi, a changé les règles à mi-chemin. Et l'histoire de ça vient d'une triste histoire qui touche plus de 8 000 contribuables, des personnes qui, de bonne foi – de bonne foi – ont investi dans les projets de recherche-développement, qui, après les annonces et l'encouragement du gouvernement québécois et du gouvernement canadien, ont sorti de l'argent de leur poche, de leur banque; et souvent ils ont emprunté de l'argent, investi dans la recherche-développement selon les règles, année après année, ils ont participé dans ce programme, ils ont eu effectivement les crédits d'impôts, le remboursement de taxes, mais ils ont créé les projets de recherche-développement.

Le gouvernement sait qu'ils n'ont pas eu, dans certains projets, leurs recherches réalisées, lui-même l'a dit. Mais, dans la vaste, vaste, vaste majorité des projets, ils ont fait une excellente recherche, et nous avons créé des sociétés québécoise tellement intéressantes avec ces projets. Mais le gouvernement arrive et dit: Non, nous allons changer la règle à mi-chemin. Maintenant, avec le bulldozer, un peu, il essaie de nous convaincre qu'il tient compte du problème, qu'il va corriger le problème. Il arrive avec un projet de loi qui va commencer le 1er septembre 1998; il ne corrige pas le problème pour les 8 000 contribuables.

J'ai demandé à la ministre, au nom de tous ces contribuables: Est-ce qu'elle est prête à avoir quelques auditions publiques sur ce projet de loi, à laisser les personnes qui sont touchées par ce projet de loi plaider leur cause devant la commission parlementaire? Parce que, dans le budget, effectivement la ministre a dit que la commercialisation des abris fiscaux, tels ceux relatifs à des projets de recherche scientifique et de développement expérimental, a occasionné des situations regrettables pour de nombreuses personnes qui ont investi des montants importants. Le gouvernement a dit que ça a causé le problème. Ces contribuables – ça fait mal – il y en a plusieurs qui ont déclaré faillite à cause de ce programme.

(11 h 10)

L'opposition officielle a toujours essayé de convaincre ce gouvernement d'être plus souple, plus ouvert, plus flexible dans ce programme-là. Mais non, ils ont refusé tout au début. Ils ont créé un comité juste avant le référendum. On peut certainement comprendre leur stratégie pendant le référendum de ne pas avoir un autre 8 000 personnes contre ce gouvernement.

Mais le gouvernement maintenant arrive avec un projet de loi qui ne respecte pas la situation actuelle des personnes, qui est supposée être la raison de ce projet de loi. C'est assez bizarre. Oui, effectivement, ils ont clairement admis dans le budget qu'ils ont eu un problème. Ils ont dit: Les situations regrettables. Oui, effectivement, les faillites sont regrettables. De traiter 8 000 personnes de mauvaise foi, c'est regrettable. Particulièrement, elles sont à 100 % de bonne foi. C'est certainement regrettable pour ces personnes qui ont mis leur argent dans les projets de science et développement d'être traitées comme ça. C'est certainement regrettable. Mais maintenant, pour le futur, ils vont corriger quelque chose. Mais comment ils vont corriger la situation? Ils prétendent que, avec le projet de loi n° 425, ils vont corriger cette situation. Ce n'est pas correct. Ce n'est pas correct, ce n'est pas la vérité, M. le Président.

N'oubliez pas que le Protecteur du citoyen a embarqué avec l'opposition officielle dans ce dossier et, lui, a publié un rapport que la ministre ne veut pas mentionner souvent. Mais il a publié un rapport spécial. Selon moi, c'est presque la première fois, dans l'histoire du Québec, que le Protecteur du citoyen a publié ce type de rapport. Et il est dit qu'ils ont mal fait leur travail. Il a dit qu'effectivement le gouvernement québécois doit renoncer à la recotisation pour les deux années, 1990 et 1991. M. le Président, le 11 décembre 1996, le Protecteur du citoyen a déposé son rapport. Il a dit clairement que c'est la négligence et l'imprévoyance du gouvernement qui a piégé des milliers de contribuables ayant investi dans les abris fiscaux de recherche et développement.

Il a mal fait son travail, ce gouvernement. Mais maintenant il arrive, M. le Président, avec des changements pour le futur. Il dit que vous avez besoin d'avoir une autorisation approuvée à l'avance, une décision anticipée par le ministre du Revenu. La compagnie doit arriver, doit préparer son dossier – il n'y a personne qui est contre ça – elle doit déposer 200 $ de bonne foi et, après ça, le gouvernement va étudier le dossier. Il me semble que ça a l'air logique, mais, à la fin du projet, l'article qui change 1079.8.8, il dit: Après tout ça, après que la compagnie aura travaillé avec le gouvernement, après qu'ils auront passé tous les examens du gouvernement, après qu'ils auront déposé le 200 $ pour montrer qu'ils sont sérieux dans leur domaine, si le gouvernement trouve d'autres informations plus tard – c'est ça que dit l'article 1079.8.8 à la page 11 – après tout ça, s'il trouve d'autres informations qui étaient supposées être disponibles à cette époque – mais il trouve ça plus tard parce que, encore une fois, il n'a pas fait son devoir – il peut aller rétroactivement trois années passées et il peut cotiser ces contribuables.

Si j'ai bien compris le projet de loi, qui sort gagnant avec le projet de loi n° 425? Est-ce que c'est les contribuables, les 8 000 personnes qui sont supposées être la raison d'être de ce projet de loi? Certainement pas. Ils ont carrément mis ces personnes de côté. Ils refusent de discuter du programme avec eux, ils refusent d'accepter le rapport du Protecteur du citoyen, ils refusent de renoncer aux années 1990 et 1991, ils refusent de tenir compte que ce gouvernement est responsable. Ils arrivent avec un projet de loi qui est un pas, si c'est bien fait, qui peut être bon, mais sauf qu'ils arrivent, comme d'habitude, à la fin d'un projet de loi, avec une protection non pas pour le contribuable, mais pour le fisc, pour le gouvernement.

Le problème, M. le Président, c'est qu'il y a une combinaison de plusieurs critères dans la recherche et développement. Et je plaide encore une fois auprès de la ministre, si elle veut vraiment défendre son intransigeance, son incapacité de bouger, si elle veut vraiment défendre la position du gouvernement pendant la prochaine étape de ce projet de loi, elle peut inviter les représentants. Je ne demande pas qu'elle invite chaque personne, il y en a 8 000 qui sont touchées par cette triste expérience avec le fisc; elle peut inviter les groupes représentants de ces groupes, elle peut écouter ces groupes, parce que ce n'est pas ça que les contribuables demandent, ils demandent à avoir un propre traitement de leur cause.

Après ça, et dans le même temps, on peut discuter de ce qu'on peut faire pour l'avenir. Parce qu'ils ont eu plusieurs arguments des investisseurs. Ils ont dit, par exemple, que le fisc a failli à son obligation d'interpréter adéquatement la loi – c'est clair que le fisc n'a pas fait son travail – que le fisc a fourni des mauvaises informations aux investisseurs – c'est vrai – le fisc a retardé à vérifier sérieusement les déclarations de revenus – c'est vrai. Parce que n'oubliez pas, M. le Président, qu'un des problèmes n'arrive pas juste avec les programmes de recherche et développement, ça arrive parce que le fisc ne fait pas son travail la première année, ne fait pas son travail la deuxième année, mais pouf! troisième année, il resserre l'interprétation de la loi et il taxe rétroactivement avec les amendes et les intérêts. M. le Président, c'est inacceptable comme approche gouvernementale.

Mr. Speaker, this is one of the fiscal tragedies we've had in this province that haunts this Government. And Bill 425 is supposedly going to correct it. But if you read the «projet de loi», if you read this bill, what the government is saying is that companies could apply for a tax number; they will be investigated after they put down 200 $. They will check whether that company applies and complies with all the rules, and then they'll issue a tax identification number. And supposedly, then, the tax payer is protected differently than before. But it also says: if later on they get information different than what they had before, they can go back to the taxpayer and tax him. Where's the protection? Where's the new vision? Where's the correction for the problem that caused this situation in the first place?

M. le Président, 8 000 contribuables, peut-être plusieurs dans votre comté, qui ne sont pas des investisseurs à gros revenus – souvent c'est des familles à moyens revenus, des personnes qui travaillent dans nos écoles, nos policiers, des personnes qui travaillent dans la fonction publique – qui ont mis leur argent de bonne foi, avec aussi l'encouragement de nos gouvernements, ils ont mis leur argent dans ces projets de développement, mais pouf! à la toute dernière minute, le gouvernement arrive et dit: Non, ce n'est pas ça qu'on veut. Avec ça, M. le Président, comment on peut avoir confiance? Comment ce gouvernement peut avoir de la crédibilité dans ce dossier? Depuis le début du mandat de ce gouvernement, il refuse d'écouter ses contribuables, il refuse de tenir compte que les contribuables de bonne foi étaient maltraités.

Il me semble, M. le Président, que le gouvernement aujourd'hui manque une opportunité en or. Il manque une opportunité en or qui peut enfin corriger une situation qui a traîné pendant des années et des années. Si nous avons, dans le projet de loi n° 425, l'esprit et les recommandations du rapport du Protecteur du citoyen – et c'est ça que le Parti libéral a demandé depuis le début – si on peut trouver ces corrections et si on peut aussi trouver ce que le gouvernement peut faire dans le futur, à ce moment-là je pense qu'on pourrait dire les choses beaucoup plus positives de ce projet de loi.

(11 h 20)

Mais, M. le Président, c'est assez clair que le gouvernement veut vraiment juste jeter de la poudre aux yeux. Il veut donner l'impression que le gouvernement est en train de bouger sur le dossier. Et ce n'est pas vrai. Qu'est-ce que, après que cette loi aura été adoptée, la ministre pourra dire? Qu'est-ce que la ministre peut dire aux 8 000 contribuables? Est-ce qu'elle peut dire qu'effectivement maintenant elle a compris que ce n'est pas leur faute? Est-ce qu'elle peut dire que maintenant, avec le projet de loi n° 425, ils vont avoir leur dette renoncée? Non, la ministre arrive avec un projet de loi qui protège le fisc, qui ne protège pas en réalité – particulièrement avec l'article que j'ai mentionné – le contribuable.

Si on peut bonifier ce projet de loi, au moins, on pourra dire qu'il y a la protection des citoyens. Mais j'ai de la misère à comprendre, une fois que nous aurons adopté ce projet de loi, si ce n'est pas amendé avec les articles que j'ai mentionnés, comment les citoyens vont être mieux protégés si le fisc peut retourner trois années passées, qu'il peut cotiser encore une fois rétroactivement ces personnes qui ont investi dans la recherche et développement.

It doesn't make sense, Mr. Speaker, if we have a law that says: You apply to the official Government offices, you go through all the regulations and the criteria that meet fiscal law for research and development, you pay a deposit to make sure that that is a serious analysis of the situation, it is approved by the Government, and then, if I understand the law correctly, later on, if the Government says: Well, again we didn't quite do our homework like we didn't do it before, the Government can go back on the taxpayers. Where is the protection there, Mr. Speaker?

M. le Président, je n'ai jamais vu un gouvernement aussi sourd que ce gouvernement dans ce dossier. Ils ont eu une opportunité de montrer du leadership, ils ont une opportunité d'avancer dans la recherche et développement, ils ont eu une opportunité de rétablir la confiance en notre système fiscal... Parce que, maintenant, qu'est-ce que tout le monde a compris avec les comportement de ce gouvernement? Soyez prudents. Le gouvernement se protège lui-même. Ils se protègent eux-mêmes. Nous allons mettre quelques autres étapes maintenant avant que quelqu'un aie un numéro d'identification, mais soyez prudent, M. le Président, parce que vous n'êtes pas protégé si vous mettez de l'argent dans ces projets. Ils sont protégés, et, avec le pouvoir de cotisation rétroactive, les contribuables ne sont pas plus avancés qu'avant.

C'est pourquoi, M. le Président, je vais demander, je demande encore aujourd'hui officiellement: Est-ce que la ministre est prête à entendre ces groupes, à entendre ces personnes qui sont supposées – et ce n'est pas moi qui dis ça – qui sont supposées être la raison d'être de ce projet de loi? C'est dans le budget de cette année que le gouvernement a admis qu'ils ont eu... Annexe A, page 176, 5.7, Mesure additionnelle de contrôle à l'égard des abris fiscaux. C'est des personnes qui sont de bonne foi qui ont mis leur argent dans des projets de recherche et développement.

S'il veut vraiment corriger la situation du passé, il me semble que le minimum est qu'on doit écouter ces groupes, qu'on doit avoir leurs commentaires sur ce projet de loi et qu'on doit mettre des mesures réelles dans la loi fiscale qui, d'une main... Je ne mets pas en doute que le fisc doit être protégé, mais les contribuables doivent être protégés aussi, les contribuables – et je le répète – de bonne foi. Peut-être qu'ils ont eu quelques exceptions de ce projet de loi, mais la vaste majorité des 8 000 contribuables, c'est des personnes de votre comté, de mon comté, du comté d'Orford, de tous les autres, Ungava aussi, je présume, tout le monde, parce que ça touche tous les Québécois et les Québécoises. Ils ont mis leur argent de bonne foi. Ils vont être tellement déçus une fois qu'ils verront ce projet de loi, parce qu'ils veulent avoir une protection de cette situation.

M. le Président, 425... Et j'ai lu ça plusieurs fois parce que c'est un dossier qui me tient à coeur. Je ne trouve pas ça correct que le fisc puisse changer les règles à mi-chemin. Je ne trouve pas ça correct que le fisc puisse arriver avec une cotisation rétroactive. Je ne trouve pas ça correct que, avec une interprétation de la loi aussi sévère que ça, on puisse mettre des familles de bonne foi en faillite. Particulièrement, plusieurs de ces projets sont maintenant les grosses entreprises québécoises qui font un excellent travail. C'est à cause d'eux que nous avons avancé la cause.

Avec ça, je trouve ça incorrect que le gouvernement péquiste ait décidé que, non, ils vont juste jouer avec ces personnes encore une fois. Ils ont trompé la population une fois, ils vont tromper la population encore. M. le Président, c'est inacceptable. Et n'oubliez pas, c'est assez bizarre, le changement de perspective dans ce dossier. N'oubliez pas que, quand le premier ministre était, à cette époque, chef de l'opposition à Ottawa, il a fait, comme d'habitude, toutes ses sorties... ce n'était pas correct, il était contre le traitement de ces contribuables. J'ai déposé, je ne le dépose pas encore aujourd'hui, M. le Président... mais on sait que souvent le député du Lac-Saint-Jean à cette époque, le premier ministre maintenant, a dénoncé ce qui se passe. Mais maintenant, avec ce projet de loi n° 425, il dit non.

Officiellement, il est en train de mettre de côté toutes ces personnes. Une autre volte-face. Un autre virage. Une autre demi-vérité. M. le Président. Il est en train de dire à 8 000 personnes: «Forget it.» Oubliez ça. Les choses que j'ai dites à Ottawa, ce n'est pas ma parole maintenant. Je ne respecte pas ma parole. C'est ça que le premier ministre dit avec le projet de loi n° 425. Il est en train de dire aux 8 000 personnes: Oubliez votre chance d'avoir un traitement juste et équitable.

N'oubliez pas qu'il est en train de mettre de côté le Protecteur du citoyen. N'oubliez pas, M. le Président, dans ce cas, que le Protecteur du citoyen paie un prix aussi. Après le rapport du Protecteur du citoyen où il a recommandé la renonciation des recotisations 1991 et 1990, quand il a sorti ça, il a eu une visite – je sais que les députés de l'autre côté essaient d'oublier ça – une visite du chef du cabinet du premier ministre. Le chef de cabinet du premier ministre a dit: Non, à cause de votre avis que vous avez rendu public sur les abris fiscaux, nous n'allons pas renouveler votre mandat.

C'est grave, ce que je viens de dire. C'est grave, ce qui s'est passé. Une visite du chef de cabinet, M. Thibault, chef de cabinet du premier ministre, qui ne menace pas juste le Protecteur du citoyen, mais tous ceux et celles à qui nous avons demandé de protéger les intérêts des Québécois et Québécoises. Il menace leur carrière, il menace leur travail. Il dit: Si vous ne suivez pas la ligne du Parti québécois, nous n'allons pas renouveler votre mandat. C'est mettre en cause toute l'autonomie du Protecteur du citoyen, du Vérificateur général et de toutes les autres instances gouvernementales qui essaient de protéger les contribuables québécois. C'est grave, ça. Peut-être que c'est le plus grave de toute cette situation.

Mr. Speaker, the Premier sent his chief of staff to a private meeting with the Ombudsman after he made public his report on tax shelters for research and development. His report said: Do not backtax people for 1991 and 1990. It was a compromise position. He said: Everybody was in a sense responsible for that very difficult problem, he thought. After a full analysis, he came up with a report that said: That's a fair compromise. Don't put these people in bankruptcy.

The Ombudsman made that report public in a special report, one of the few in the history of Québec. What happened? He got a visit – he got a visit! – from the chief of staff of the Premier who said: Because you made this report, because you took the side of the taxpayers, because you took the side of 8000 people who, with good faith, invested in research and development, we are not going to renew your mandate. That is very serious, Mr. Speaker, very serious because it puts in doubt our democratic institutions. It shows clear political interference in the process. How will the Protecteur du citoyen or the Ombudsman be able to continue their work if the political offices of the Premier and other ministers interfere? It's very, very serious.

(11 h 30)

This is what's behind Bill 425. There are 8000 taxpayers, Mr. Speaker, encouraged by the Québec Government, encouraged by the Canadian Government, year after year, they put their moneys in a tax program for research and development, receive certain advantages – that's according to the rules – and now, retroactively, they're being backtaxed. The Government created a committee just before the referendum to again try to take away any movement building against them, but at the end of the day they didn't listen to the Ombudsman. They haven't listened to those taxpayers. They've come up with Bill 425. That is an admission of guilt. It is clearly an admission of guilt. The minister of Finance, in his budget, on page 176, 5.7, said: «There was a serious a problem. We will correct it in the future.»

Bill 425 is an admission of guilt that the Government was not doing its work, did not adequately protect the citizens. Because, otherwise, Mr. Speaker, why would we need this? Clearly, the budget stated that there was a problem and that laws were inadequate. Bill 425 attempts to correct it, poorly, in my opinion, but attempts to correct it. This is a clear admission of guilt by this Government that they were responsible for the difficult situation the taxpayers found themselves in in the dossier of research and development. I wish the Minister had had the courage to admit this before those people had to go to court. But, in front of the National Assembly today, we have, in black and white, in French and in English, an admission of guilt of this Government that the laws of Québec did not adequately protect those taxpayers.

My concern goes farther, though, Mr. Speaker, because 425, in my opinion, doesn't protect those same taxpayers. It creates a façade, it creates an image that those taxpayers are in fact being protected, because you now have to go through an exercise of getting an identification number from the Ministry of Revenue before you can, in fact, offer various investment opportunities. That, on the surface, looks good. You go through a process, you make an application, the company has to pay 200 $, but later on in the law you find that if the Ministry of Revenue, later on, finds out information, the information comes forward that changes that, they reserve the right to do exactly what they did before: back-tax people up to three years, because the other rule of three years falls in the place: three years again with fines, interests, three years of backtaxes that could put many people in bankruptcy.

Mr. Speaker, it's very clear that at the end of the day the citizens aren't more protected with 425 than they were before. I think this is a very, very serious situation, serious situation for the confidence in our tax system. If we, as taxpayers, see an example such as this time in and time out, that the Minister can go around and tighten up the tax rules... We've seen him do it with tips, workers with tips, we've seen him do it with bed and breakfasts, we've seen him do it with research and development, we've seen him do it in other things.

If the message is: Beware, the Ministry of Revenue, Big Brother is going to, particularly with all... the Bill 32 in which they are going to cross-reference everything, they're going to go back, change the rules retroactively and back-tax citizens. This is a very, very serious situation.

So, the Minister wants us to pretend this is in fact helping. It's not. It's not dealing with the fundamental issues; the Ministry is not doing its proper homework, doesn't, once it issues a certain tax... they can't stand by its word. And then, more importantly, is that, year after year, they're not actively working on dossiers. So, at the end of the three-year period, they race around and hit people retroactively. How can you plan to work retroactively on tax issues like that, Mr. Speaker?

M. le Président, j'ai plusieurs cas. Je ne répète pas les cas que j'ai mentionnés ici, dans cette Chambre. J'ai eu une interpellation ici, dans cette Chambre, j'ai questionné deux premiers ministres sur ce dossier. La question de rétroactivité, c'est inacceptable. Cette question de rétroactivité qui donne le pouvoir au fisc de changer les règles à mi-chemin et de rétroactivement taxer ces personnes qui, de bonne foi, ont mis leur argent dans des projets de recherche et développement est inacceptable. Le gouvernement, qui n'était pas là au début de ce problème, a eu une chance de corriger ce problème, et il n'a pas pris l'opportunité, il n'a pas défendu la population québécoise. Et, dans mon opinion, 425 n'aide pas les contribuables québécois.

M. le Président, recherche et développement, la ministre a sorti ses notes de ses fonctionnaires, elle dit: Tout va bien, tout est correct, dans la recherche et développement. Ce n'est pas vrai. On doit avoir des projets qui encouragent les PME, les petites entreprises, les chercheurs et recherchistes québécois. On doit encourager les contribuables à utiliser certains avantages fiscaux, encourager les abris fiscaux. Mais ce message de combinaison de refus de négocier avec ces contribuables et le projet de loi n° 425 qui aide le fisc plus que les contribuables est un message clair et net pour les contribuables. C'est un message clair et net que, un, le gouvernement est responsable, coupable dans le dossier, mais qu'il refuse d'ajuster les règles d'une façon qui protège les citoyens.

M. le Président, j'ai essayé de trouver des bonnes choses dans ce projet de loi. Quand j'ai commencé à lire ce projet de loi, j'ai dit: Peut-être qu'il a compris, peut-être que le gouvernement a compris. Mais, à la fin de ça, j'ai dit: Non, effectivement, ils n'ont pas compris. Ils n'ont pas compris que les citoyens – je ne peux pas répéter ça trop souvent – 8 000 contribuables de bonne foi, de vos comtés, de revenu moyen, ont compris, ont entendu les messages des gouvernements québécois et canadien, ils ont sorti leur argent qu'ils ont sauvé pendant des années, ils ont mis ça dans les projets de recherche et développement. Dans la vaste majorité de ces projets, ils ont trouvé un produit exceptionnel qui maintenant est à vendre. Mais le fisc arrive, après tout ça, et dit: Non, non, non, non! Maintenant, nous avons réétudié le dossier. On n'accepte pas les règles telles que nous les avons acceptées jusqu'à maintenant.

Avec ça, M. le Président, où est la responsabilité du fisc dans ce projet de loi? Je vais certainement proposer beaucoup d'amendements à ce projet de loi, qui peuvent protéger les citoyens. Parce qu'on voit qu'on arrive avec des projets de loi préparés par les comptables et les avocats du ministère du Revenu, qui ne pensent pas comment on peut protéger les contribuables, ils disent: Comment peut-on protéger le gouvernement? Je pense que notre rôle ici, dans cette Chambre, est de faire mieux que ça, de s'assurer que les contribuables soient beaucoup mieux protégés.

M. le Président, je voudrais juste conclure avec quelques autres commentaires sur l'histoire de ce projet de loi. Les contribuables qui sont la raison d'être de ce projet de loi sont maintenant, dans plusieurs cas, devant le tribunal. Il y a des recours collectifs. Je trouve ça triste, je trouve ça dommage que le gouvernement ait décidé, après qu'il ait harcelé ces personnes pendant des années, avec une complète non-acceptation de leurs problèmes, que maintenant il va harceler ces personnes encore. Il va utiliser l'argent public pour engager des avocats, pour jouer les gestes légaux devant les tribunaux pour, encore une fois, empêcher ces contribuables d'avoir leur juste part.

M. le Président, je trouve ça inacceptable que nous n'ayons pas trouvé une solution, avec ce projet de loi n° 425, qui dise qu'effectivement, pour les 8 000 contribuables, ils vont avoir un règlement de leur situation et qu'ensemble nous allons nous asseoir à la table et trouver une façon de protéger – la ministre du Revenu... il n'y a personne qui met ça en doute – les compagnies qui veulent créer des projets d'investissement, mais, d'abord et avant tout, nous allons protéger les investisseurs québécois et québécoises.

Je pense, M. le Président, que c'est notre rôle ici, particulièrement quand nous avons une histoire assez claire, dans les dossiers de recherche et développement, on doit être tellement prudent avec un projet de loi comme ça. On n'arrive pas avec quelque chose qui commence le 1er septembre 1998. On arrive avec un projet qui dit: Oui, on accepte que le gouvernement ait été responsable ou que les gouvernements aient été responsables. Nous allons avoir assez de courage pour faire ça et nous allons corriger ce problème et, dans le même temps, nous allons trouver la solution pour tous les Québécois et les Québécoises touchés par cette situation.

(11 h 40)

M. le Président, je peux continuer, je peux sortir tous les dossiers de toutes les familles touchées par ça, je peux sortir les dossiers des familles qui ont déclaré faillite à cause de cette question. J'espère que la ministre va accepter la demande d'au moins entendre les groupes qui représentent ces contribuables, parce que, dans ses propres mots, elle a dit qu'à cause de ces groupes-là, de ces personnes-là, elle arrive avec ce projet de loi. Avec ça, il me semble que c'est tout à fait logique. Je présume que la ministre va proposer ça elle-même: elle va faire une consultation limitée pour les personnes impliquées dans le dossier pour savoir ce qu'elles pensent de ce projet de loi. Est-ce que ça répond à leurs besoins? Et peut-être qu'ensemble... Parce que c'est eux autres qui ont été poignés par ces problèmes, c'est eux autres qui, après les annonces dans les journaux, ont engagé un comptable pour faire ça, c'est eux autres, c'est ces personnes-là qui sont frappées par cette inhumanité du ministère du Revenu. C'est pourquoi, M. le Président, je suis tellement déçu, avec les lacunes que je trouve dans le projet de loi n° 425, que le gouvernement, encore une fois, mette de côté les contribuables québécois, la question de la bonne foi de ces contribuables. Je trouve ça inacceptable que, de plus en plus, le comportement de ce gouvernement traite tous les contribuables comme de mauvais payeurs. Ce n'est pas correct. Je pense que la ministre doit sortir la charte québécoise peut-être une autre fois, la charte québécoise des droits pour les contribuables.

M. le Président, la ministre a le devoir de traiter tout le monde égal, de traiter les contribuables de bonne foi, de ne pas traiter 8 000 personnes de mauvaise foi, comme tous des fraudeurs. Elle n'a pas le droit de faire ça; elle a la responsabilité d'écouter le Protecteur du citoyen, de ne pas mettre tout ça de côté. Ce n'est pas vrai qu'ils ont eu une entente avec une grande partie des contribuables. Une entente avec un fusil à la tête, ce n'est pas une entente, une entente que vous êtes obligé de signer, avec un harcèlement du représentant du fisc, où on dit: Signez et renoncez aux droits ou vous allez être taxé plus haut et nous allons vous harceler. Ce n'est pas une entente, ce n'est pas une façon de gérer. Avec ça, mettez ça de côté, M. le Président, et je pense que, avec le projet de loi n° 425, au moins, nous avons une opportunité ici, dans cette Chambre, si les deux côtés veulent – certainement notre côté veut – on peut avoir un vrai débat sur ce problème, on peut avoir un vrai débat sur les solutions et ensemble on peut trouver une solution pour ces contribuables.

Je n'accepterai jamais que ce gouvernement mette de côté ces 8 000 contribuables, c'est inacceptable comme approche, c'est inhumain, et je n'accepterai jamais qu'il traite ces personnes comme des fraudeurs. Je ne vais jamais accepter qu'il ne les traite pas comme des personnes comme elles sont: de bonne foi, qui ont suivi les règles, et que c'est le fisc qui a changé les règles. M. le Président, j'espère qu'avec mes brefs commentaires la ministre maintenant comprend les lacunes qu'il y a dans le projet de loi n° 425 et j'espère qu'elle va les ressortir tout de suite et refaire... ou, ensemble, on peut améliorer ce projet et s'assurer, avant que ce soit passé, qu'il y a effectivement une protection pour les contribuables. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Merci, M. le Président. J'ai insisté pour parler sur ce projet de loi pour une simple, bonne et unique raison. La première, c'est qu'il y a un bon nombre de gens de ma circonscription qui sont pris dans ce méli-mélo de fonds de recherche et développement, et je vais l'expliquer un peu plus en profondeur tantôt. Deuxièmement, je voulais rendre un hommage au député de Nelligan qui, depuis trois ans et demi dans l'opposition, n'a jamais cessé – et c'est un des rôles fondamentaux d'un bon député, d'abord, mais c'est aussi un des rôles fondamentaux d'un député de l'opposition – de défendre les gens qui sont mal pris dans la société. Alors, le député de Nelligan, sans arrêt, que ce soit à la Place des Arts quand il y a eu un ralliement avec 2 000 ou 3 000 personnes qui se sont fait avoir par la ministre du Revenu, dans des fonds de recherche et développement, que ce soit à la conférence de presse dans Richmond, dans une entreprise qui, elle, a fait la recherche et développement – les produits étaient à l'arrière sur la table, et on prétend qu'ils ne l'ont pas faite – que ce soit avec des centaines de cas dans mon comté, ou dans le comté de la ministre du Revenu, ou dans le comté du premier ministre, qui est venu les rencontrer, ou ces gens-là sont venus le rencontrer, sans arrêt depuis trois ans et demi, le Parti libéral du Québec, dont je suis très fier de faire partie, avec notre porte-parole de Nelligan, sans arrêt, avec conviction, avec force, avec vigueur, avec honnêteté, a défendu les gens qui ont été pris dans la saga absolument extraordinaire des fonds de recherche et développement.

Il nous arrive de douter à l'occasion, comme parlementaires, de la véracité de nos arguments. C'est correct, ça. Alors, imaginez-vous que le Protecteur du citoyen, dans son rapport, nous a tous rappelé, sans exception, autant la ministre du Revenu que le ministre... Parce que la façon dont, là-bas, on gère les choses, au gouvernement, quand ça chauffe un peu trop, on change le ministre, on fait la chaise musicale, M. le Président. Alors, les intervenants recommencent. Leur stratégie, elle est aussi très évidente, très évidente, du côté du gouvernement.

Et je me souviens de cette bonne enseignante qui est venue me voir à mon bureau et qui ne comprenait ni le début ni la fin de ce qui lui arrivait. Ayant travaillé 25 ans comme conseiller financier, j'ai essayé de lui expliquer un peu ce qui lui arrivait et un peu ce qui était pour lui arriver, M. le Président. Mais je l'ai mise en garde, je lui ai dit: Ce gouvernement de coquins, ce qu'ils vont faire à vous, ma chère dame, et aux autres dans mon comté, c'est qu'ils vont vous essouffler. Ils vont vous faire des menaces – et ça n'a pas été long que les menaces sont entrées: Si vous ne payez pas, on va vous charger des intérêts, etc. – et là ils vont vous essouffler. À partir du moment où... Ils vont commencer avec les petits montants. Ils vont dire: Bien, il n'y en a plus 8 000 au Québec, il y en a 7 000, les autres, ils ont réglé. Comme disait si bien le député de Nelligan, ils ont réglé avec le fusil sur la tempe. Et, après ça, ils vont dire: Bien, il n'y en a plus 7 000, il y a juste 6 000, puis 5 000, puis 4 000. Et on va essouffler le monde. On va essouffler le monde.

Mais qu'est-ce qui s'est passé avec ce vrai monde là entre-temps? Dans Rock Forest, moi, j'ai des gens qui ont perdu leur résidence, M. le Président. Pas parce que c'étaient des gens malhonnêtes, c'étaient des petits couples avec des enfants, dans une banlieue sherbrookoise, dont les deux travaillent et qui, un bon jour, ont reçu, dans les années 1989... Ça date de loin, ça, M. le Président. Dans les années 1989, quelqu'un est allé leur proposer un produit d'investissement, comme à tous les jours en ce moment, des gens vont leur proposer le fonds de la FTQ, le fonds de la CSN, qui sont des abris fiscaux, et alors ces gens-là ont écouté. Ce sont des gens qui sont compétents dans certains secteurs et qui ne le sont pas nécessairement dans le placement, qui ont fait confiance à la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Et ça, Mme la ministre, elle ne nous le dit pas, elle nous dit: Maintenant, le ministère va vérifier ça, ils vont va exiger 200 $, un dépôt d'une garantie, etc. C'est tout bien beau dans le livre, mais, dans la vraie vie, il y a quelqu'un qui avait autorisé ça. La Commission des valeurs mobilières du Québec, qui est un organisme gouvernemental, avait approuvé ces placements-là, M. le Président. Et qu'est-ce qu'ils disaient, les gens, à l'époque, quand ils allaient voir cette ménagère à Rock Forest et son bon mari? Écoutez, la Commission des valeurs mobilières, elle a approuvé ça, il n'y a pas de problème. Si Mme la ministre pense qu'elle va tout régler avec le projet de loi n° 425, je lui souhaite bonne chance.

Mais pourquoi les gens sont allés vers ce genre d'investissement? Il faut peut-être aussi se poser la question, M. le Président. La réponse est bien simple: en terre d'Amérique, du Texas jusqu'au Groenland, de Saint-Jean de Terre-Neuve jusqu'à Vancouver, B.C., la table d'impôts la plus pesante chez un contribuable sur tout le continent nord-américain, c'est la québécoise, M. le Président. Et, prenez la table d'impôts dont vous venez de vous servir, les citoyens qui nous écoutez en ce moment, celle-là, elle est faite par Samson, Bélair, Deloitte et Touche, une des grandes firmes de comptables. Vous pouvez vous la procurer en appelant. Il y a même un numéro d'Internet. Ils vont vous la donner gratuitement.

Comparez n'importe quelle province canadienne dans n'importe quel niveau de revenu et vous allez vous apercevoir que vous êtes les plus taxés. Les gens du Québec sont les plus taxés. Je vous donne des exemples. Je choisis 24 000 $ de revenu: en Ontario, la personne paierait 4 500 $ d'impôts, d'après cette table d'impôts; ici, au Québec, 5 800 $. J'avais, justement hier, un jeune enseignant qui passait à la résidence nous saluer et qui me disait son revenu, qui venait de faire son rapport d'impôts. Il disait: Ça ne se peut pas, avec des revenus comme j'en ai, je vais être obligé de payer de l'impôt. Bien oui, c'est ça, on est au Québec. Alors, 48 000 $: à 48 000 $, en Ontario, la personne paierait 13 000 $ d'impôts; au Québec, 16 000 $. C'est incroyable! À 68 000 $ – on pourrait prendre n'importe quel chiffre – 22 000 $; 26 000 $ au Québec.

Alors, pourquoi les gens ont été tellement à l'écoute de ces courtiers, d'un peu tout le monde qui allaient leur proposer des abris fiscaux? C'est à cause de notre niveau incroyable d'imposition, le plus élevé en terre d'Amérique. Et jamais personne en cette Chambre, quand j'ai dit ça, le lendemain, est allé en conférence de presse puis a dit: Ce n'est pas vrai. Au Nouveau-Brunswick, c'est plus cher; ou, en Colombie-Britannique, c'est plus cher. Ce n'est pas vrai, M. le Président. Jamais personne n'a osé dénier ces chiffres-là.

(11 h 50)

Or, qu'est-ce qui arrive maintenant? Huit mille citoyens ont été pris à la gorge, ont été obligés de rembourser. Le Protecteur du citoyen – ce n'est pas moi qui le dis, le Protecteur du citoyen – je vous lis un bout de son rapport, c'est assez clair, il dit: «Le contribuable, de bonne foi, a cru que les remboursements d'impôts reçus année après année...» Parce qu'on a reçu des rapports d'impôts, on a accepté son rapport d'impôts. Moi, j'ai des gens qui sont allés deux ans, trois ans, quatre ans, les rapports d'impôts étaient vérifiés par le comptable, étaient vérifiés par le ministère de la ministre et on lui disait: Bravo! Tu investis dans la recherche et le développement. Or, cette personne-là de Rock Forest, je parle toujours de ce couple de Rock Forest qui a été obligé de laisser aller sa résidence, eh bien, on lui a confirmé année après année – c'est ce que le Protecteur du citoyen dit – la légalité des abris fiscaux.

Ce gouvernement qui nous parle toujours de partenariat, d'équité, des belles grandes phrases. Moi, j'écoute les deux députés péquistes de notre région qui viennent se péter les bretelles, qui nous parlent d'équité. Ça me «fait-u» rire quand ils me parlent d'équité dans mon comté, quand je vois des affaires comme ça, de partenariat. Ah! Bien, ça, le Protecteur du citoyen, il leur en parle, justement, de partenariat. Le Protecteur du citoyen a ainsi recommandé au ministère d'agir véritablement comme partenaire avec les contribuables. C'est ça qu'il dit, le Protecteur.

Qu'est-ce qui va se passer après ce rapport du Protecteur du citoyen? Et là, de peur qu'on ne me croie pas, je vais vous lire ce qu'un journaliste du Journal de Québec disait: «Il trouvait, dit-on, inacceptable la position critique de l'ombudsman dans le dossier des investissements et du développement. Ainsi, Daniel Jacoby, en poste depuis 1987, a bien failli perdre son boulot parce qu'il a fait trop bien son boulot.» Le Journal de Québec , le journaliste Franco Nuovo.

M. le Président, c'est grave, ce qui se passe. On ne reconnaît pas que des gens se soient fait avoir, même après la bénédiction de la Commission des valeurs mobilières, on ne reconnaît que des citoyens l'ont fait de bonne volonté, qu'ils l'ont fait en partenaires avec l'État, qu'ils l'ont fait dans un discours, aussi, où on dit aux citoyens: Implique-toi dans la recherche et développement.

Pire, M. le Président, j'ai vu de mes yeux vu dans des entreprises, avec le député de Nelligan et le député de Richmond, nous avons vu la recherche. Elle était là sur la table. Nous les avons vus, les casques de bicycles, nous les avons vus, les émetteurs, nous les avons vus, tous ces produits-là. Non, ils n'ont pas existé, aux dires de la ministre. Les citoyens, même, les ont vus. Non, ils n'ont pas existé! Vous ne croyez pas, M. le Président, que, dans la vraie vie, il y a du monde là-dedans qui vont s'en sortir très bien et d'autres qui vont s'en sortir très mal?

Comment se fait-il que la ministre ne revienne pas contre les promoteurs de ces produits-là? Et ça, c'est la vraie question, les courtiers, les promoteurs. Ah non, on laisse le citoyen revenir contre le promoteur, on laisse le citoyen revenir contre le courtier. Mais posons-nous une question aujourd'hui. Une très grande partie des gens dans cette Assemblée, j'imagine, ont acheté des actions dans le fonds de la FTQ. Que bien leur en soit fait. Que bien leur en soit fait. Est-ce qu'il se pourrait, M. le Président, que la ministre nous revienne dans un an, dans deux ans ou dans trois ans et nous dise: Le placement que vous avez fait, là, le placement fiscal que vous avez fait dans le fonds de la FTQ, on ne le reconnaît pas parce que, la FTQ, le président s'est acheté un condo quelque part, parce qu'il y a eu ci, il y a eu ça, n'importe quelle raison, finalement? On ne reconnaît pas l'avantage fiscal qu'on vous a donné dans le fonds de la FTQ. Il y aurait une levée de boucliers totale, M. le Président.

Mais, dans la vraie vie, c'est exactement la même chose qui s'est passée. On a dit à des individus: Allez investir dans des fonds de recherche et développement. On leur a donné la bénédiction, à la Commission des valeurs mobilières. On a laissé les courtiers enregistrés par la Commission des valeurs mobilières aller faire la vente de ces produits-là, M. le Président. Et, en bout de ligne, après qu'on aura connu un premier rapport d'impôts, un deuxième rapport d'impôts, un troisième rapport d'impôts, qu'on leur ait dit, le comptable, tout le monde, que le simple individu de Rock Forest, avec son épouse, dans son bungalow, reçoive une lettre de la ministre qui leur dit: Holà, homme honnête! Et maintenant, tu devras payer parce que tu es honnête. C'est ça qu'on fait avec le citoyen, M. le Président.

Le Protecteur du citoyen nous l'a dit, les firmes de comptables vous l'ont dit, le fédéral a eu une approche pas mal plus démocratique. Et, nous, on l'a pris à la gorge, nous, on l'a pris à la gorge. On l'a pris à la gorge puis on lui a dit: On va t'avoir. Comme disait si bien un de mes confrères député: On veut ton bien puis on va l'avoir! C'est exactement ce qui se passe, on veut ton bien puis on est après l'avoir. Parce que, de 8 000... Et j'espère juste que la ministre me sorte ce chiffre-là, on va lui sauter en pleine face, carré, M. le Président. Elle va nous dire...

Des voix: Ah!

M. Benoit: Elle va nous dire, M. le Président: Ils étaient 8 000, ils ont accepté, ils sont rendus probablement 3 000 à 4 000. On va lui rappeler comment ils ont accepté, avec le fusil sur la tempe. C'est ça. Mais, pire que ça, ces temples blanchis, M. le Président, temples blanchis...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: Il y en a une qui trouve ça comique, on va lui lire au complet la lettre du premier ministre. Je voulais juste lire un passage. Notre premier ministre du Québec a déjà été chef à Ottawa. Par les temps qui courent, il semble que c'est une mode, M. le Président. Que disait-il, ce bon premier ministre du Québec à l'époque, le 6juillet 1995? Que disait-il? Alors, pour cette bonne députée qui riait, je vais lui rappeler. Il disait: «Le Bloc québécois trouve inadmissible ce revirement rétroactif qui pourrait pousser à la faillite environ la moitié des contribuables touchés.» C'est votre premier ministre qui a écrit ça. «Ces derniers ont utilisé cette mesure en toute bonne foi et écopent maintenant pour l'incurie du ministère.»

M. le Président, c'est le premier ministre qui a écrit ça à des citoyens. Dans le cas présent, il a écrit à quelqu'un d'Alma. Il a écrit à des gens dans mon comté et il leur dit que c'est une incurie, il leur dit que c'est de bonne foi que les citoyens ont fait ça, il leur dit que c'est rétroactif, que ça n'a pas d'allure. Alors, imaginez-vous, quand il est arrivé chef, premier ministre, ici, nous, on est allé à la Place des arts, hein, où il y avait 2 000...

Une voix: Plus.

M. Benoit: ...4 000 personnes... Avez-vous déjà vu ça dans votre vie, M. le Président, 4 000 personnes avec leur rapport d'impôts dans les mains? Je n'avais jamais vu ça, moi. Bien, je l'ai vu, de mes yeux vu, M. le Président, à la Place des arts, 4 000 citoyens avec leur rapport d'impôts dans les mains, qui disaient à la ministre: Ça n'a pas d'allure, ce que vous êtes après nous faire. Moi, j'ai vu ça, puis le député de Nelligan qui les défendait vu ça aussi. Bien, cette lettre-là, elle a circulé toute la veillée, hein? Parce qu'on se disait: Coudon, il a écrit ça à Ottawa le 6 juillet 1995, il va bien faire quelque chose, hein? Il ne peut pas juste écrire n'importe quoi. Bien, non seulement il l'a écrite, non seulement il a essayé de nous faire accroire que les autres étaient coupables, mais, à partir du moment où lui est coupable, c'est encore la faute aux autres, M. le Président. Je veux dire, c'est bien difficile à comprendre, la logique d'un gouvernement comme celui-là.

Et là les groupes se sont organisés, ils sont venus voir la ministre. Ils sont venus dire à la ministre: Écoutez, là, on va essayer d'arriver à des compromis. Nous, on s'est fait avoir, c'est bien évident maintenant. Pourquoi vous n'actionnez pas le courtier qui a vendu ça? Ah! Pas de réponse. Pourquoi vous n'actionnez pas le promoteur qui a fait ça? Pas de réponse. Pourquoi vous n'actionnez pas la compagnie qui n'a pas fait la recherche?

Je donnerai un exemple à la ministre. Il y a plusieurs années, il y a eu des fonds de recherche et développement dans les mines pour trouver du minerai sur les terrains. Il est arrivé la même histoire, M. le Président, où des compagnies n'ont pas fait la recherche pour trouver des minéraux sur des terrains. Certains ont acheté des condos, d'autres ont fait ce qu'ils voulaient bien. Le ministère n'est pas revenu contre les gens qui avaient investi dans ces compagnies-là approuvées par la Commission des valeurs mobilières; le ministère est revenu contre les promoteurs de ces mines-là, il est revenu contre les gens qui avaient fait ces montages financiers là sans scrupule. Le ministère a pris ses responsabilités, il est revenu vers la personne qui a causé le trouble.

Or, ici, si on prétend qu'un citoyen, comme mes deux citoyens, un petit couple de Rock Forest qui investit dans une compagnie qui n'a fait sa recherche et développement, bien, revenons contre cette compagnie-là, ne revenons pas contre le citoyen, M. le Président. Revenons contre la compagnie qui n'a pas fait cette recherche-là.

Alors, on voudrait entendre les groupes en commission, M. le Président. Le député l'a dit, le député de Nelligan qui défend depuis toujours avec force et vigueur ces gens-là. On aimerait entendre différents groupes nous dire si ce projet de loi là va répondre aux aspirations auxquelles la ministre prétend qu'il va répondre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Alors, étant donné l'heure, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: Mmes et MM. les députés, nous allons débuter en nous recueillant quelques instants. Très bien, veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous allons débuter immédiatement les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

À la présentation de projets de loi, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article a du feuilleton.


Projet de loi n° 393

Le Président: Alors, à l'article a du feuilleton, M. le député de Rivière-du-Loup présente le projet de loi n° 393, Loi modifiant le Code du travail. M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Ce projet de loi prévoit que toute disposition d'une convention collective qui attribue à un nouveau salarié des conditions de travail moindres que celles accordées à l'ensemble des autres salariés est contraire à l'ordre public et prohibée par la loi.

Ce projet de loi prévoit que les dispositions semblables qui font déjà partie d'une convention collective en vigueur sont aussi contraires à l'ordre public et prohibées par la loi.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

M. Paradis: Simplement une question d'information au leader du gouvernement. Est-ce qu'il est de l'intention du leader du gouvernement d'appeler ce projet de loi pour qu'il soit adopté au cours de la présente session?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, nous regarderons cette question, d'autant plus que la date du 15 est dépassée.

Le Président: Alors, je comprends que l'Assemblée accepte d'être saisie...

M. Paradis: M. le Président, la date du 15 est dépassée mais, de consentement, tout est possible.

Le Président: Ça, je pense que tout le monde sait ça.


Dépôt de documents

Alors, au dépôt de documents, M. le ministre de la Justice.


Prévisions budgétaires du Comité sur la rémunération des juges de la Cour du Québec et des cours municipales pour les exercices financiers 1997-1998 et 1998-1999

M. Ménard: M. le Président, je désire déposer les prévisions budgétaires du Comité sur la rémunération des juges de la Cour du Québec et des cours municipales.


Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Le Président: Très bien. Alors, le document est déposé. En ce qui me concerne, j'ai reçu, dans les délais prescrits, préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux Affaires inscrites par les députés de l'opposition. Conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose donc copie de ce texte de préavis.


Dépôt de rapports de commissions

Alors, il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions. Oui? Ah, pardon! Il y a le président de la commission de l'économie et du travail et député de Laurier-Dorion qui a un rapport à nous présenter. M. le député de Laurier-Dorion.


Audition à huis clos du Dr Pierre Couture

M. Sirros: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 8 et 22 avril 1998 afin de procéder à l'audition à huis clos du Dr Pierre Couture et qui a siégé en séance de travail le 13 mai 1998 pour faire le point sur ce dossier. Ce rapport contient une recommandation, M. le Président.

Le Président: Très bien. Le rapport est déposé.


Questions et réponses orales

Puisqu'il n'y a pas de dépôt de pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous allons immédiatement aborder la période des questions et des réponses orales. M. le député de Frontenac, en principale.


Non-exécution d'un mandat de perquisition sur la réserve de Kahnawake

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. Le 28 avril dernier, j'ai reproché au ministre de la Sécurité publique de s'être ingéré dans le processus judiciaire en bloquant l'exécution d'un mandat de perquisition ordonné par la cour dans une enquête préliminaire sur la contrebande de cigarettes à Kahnawake. Le ministre de la Sécurité publique a nié.

Ma question aujourd'hui, M. le Président: Est-ce que le ministre, aujourd'hui, est encore prêt à nier qu'il soit intervenu, en avril dernier, auprès de quiconque pour empêcher l'exécution d'un mandat de perquisition à Kahnawake?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je réitère les propos que j'ai toujours tenus en cette Chambre et en commission parlementaire relativement à cette affaire.

Maintenant, le député de Frontenac fait référence à un article de journal qui est paru vendredi. J'aimerais porter à l'attention de cette Chambre que cet article fait référence à un procès criminel qui est présentement en cours, qui fait l'objet d'une ordonnance de non-publication. Donc, vous comprendrez, M. le Président, qu'à ce moment-là je ne peux même pas répondre à l'article, puisque le député de Frontenac me reprocherait...

Ce que le député de Chomedey pourrait reprocher, c'est-à-dire de nuire dans un processus judiciaire au niveau pénal, et surtout quand le procès fait l'objet d'une ordonnance de non-publication... D'aucune façon je ne peux me prononcer sur quelque chose qui peut faire, à ce moment-là, l'objet du fond du litige. Cependant, M. le Président, ce que j'ai fait dès que j'ai eu connaissance de cet article, c'est que j'ai demandé à la Cour supérieure d'être entendu et ce matin, sous serment, j'ai été entendu devant la Cour supérieure pour répondre devant le seul forum où je pouvais répondre.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, en rappelant au ministre qu'il a l'obligation de rendre compte...

Le Président: Vous êtes en complémentaire, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre réalise, est-ce qu'il comprend qu'il a l'obligation de rendre compte de ses gestes à l'Assemblée nationale? Et est-ce qu'on est rendu, au Québec, que le ministre de la Sécurité publique veut contrôler les tribunaux, un, en empêchant l'exécution des mandats de perquisition – c'est un ordre de la cour – et...

(14 h 10)

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Là, on me signale que cette affaire est devant les tribunaux et que notre règle de sub judice est claire à cet égard-là, d'autant plus que, selon les informations qu'on vient de me transmettre, non seulement c'est devant les tribunaux, mais le tribunal a décidé de siéger à huis clos. Alors, je vous inviterais au maximum de prudence. Je ne suis pas au courant de tous les détails de cette affaire, mais je crois que, à ce moment-ci, M. le député de Frontenac, autant que de l'autre côté de l'Assemblée, il y a lieu de se rappeler de nos règles du jeu que nous sommes nous-mêmes imposées à l'égard du respect que nous voulons avoir à l'égard du pouvoir judiciaire. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Sauf si on contredit l'information que j'ai, ce n'est pas à huis clos, M. le Président. Comme l'a indiqué le ministre de la Sécurité publique, il y a eu ordonnance de non-publication. Maintenant, on en convient, et, si vous suivez au texte la question du député de Frontenac, elle est respectueuse en tous points du règlement de l'Assemblée nationale, et il procède avec la prudence requise suite à la jurisprudence que vous avez émise et celle de vos prédécesseurs.

Le Président: À ce moment-ci, je pense qu'on se comprend bien, je n'ai pas demandé au député de Frontenac de retirer quoi que ce soit, je l'ai simplement avisé, lui comme tous les autres membres de l'Assemblée, cet après-midi, de la situation. Et, encore une fois, il s'agit d'une affaire pénale et, s'il y a une ordonnance de non-publication, ça augmente la situation. Alors, je pense qu'on se comprend et que les règles qu'on s'est imposées sont claires. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Sur la question de règlement. M. le Président, je veux vous faire remarquer que d'aucune façon, dans ma question principale, je n'ai fait référence à un procès qui serait en cours, c'est le ministre qui en a parlé. Ma question portait strictement sur un rappel d'un échange que nous avons eu ici, en Chambre, le 28 avril. Alors, dans les circonstances, le ministre doit répondre à mes questions, il est imputable devant cette Chambre. Les débats qui ont lieu devant la cour et les tribunaux, ça n'a rien à voir avec ce qui se passe ici, et je rappelle que ce n'est pas moi qui en ai parlé, c'est le ministre qui a fait référence lui-même à un communiqué de presse qu'il a émis vendredi dernier. Alors, il s'est piégé lui-même, M. le Président.

Le Président: Bon, un instant, c'était une question de règlement, là, la question complémentaire, c'est autre chose. Alors, je pense que si...

Une voix: ...

Le Président: Bien, là, écoutez, il faudrait s'entendre et ne pas jouer sur le règlement, c'est-à-dire que vous avez, à juste titre, invoqué le règlement pour apporter des précisions sur la façon dont vous étiez comporté à l'égard du problème que vous avez abordé en début de période de questions, mais, si c'est une question complémentaire en vertu du règlement que vous pouviez poser, à ce moment-là, c'est différent. Si vous voulez poser votre question complémentaire, alors allez-y.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre de la Sécurité publique réalise dans quelle situation il s'est placé? Un, on prétend qu'il aurait bloqué – c'est moi, ça, M. le Président, c'est moi, là – l'exécution d'un mandat de perquisition, ce qu'il a nié il y a une dizaine de jours et, subséquemment, parce qu'il a affirmé ne pas être intervenu dans l'exécution d'un mandat de perquisition, il se voit dans l'obligation de demander au tribunal d'être entendu. Alors, est-ce que le ministre réalise que son attitude est celle d'un ministre qui tente, qui essaie de contrôler le processus judiciaire, un, en intervenant pour bloquer l'exécution d'un mandat de perquisition et en s'imposant comme témoin dans un procès, parce que quelqu'un, M. le Président, aurait dit quelque chose qui ne fait pas son affaire? Est-ce que le ministre réalise...

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: M. le Président, ce que j'avais répondu le 28 avril dernier – c'est le 28 avril, la dernière fois qu'il m'a posé la question, le député de Frontenac – c'est la même réponse aujourd'hui. Donc, il a juste à regarder les galées, c'est la même réponse.

Maintenant, si, pour le député de Frontenac, le fait d'aller témoigner devant un tribunal... Parce que, on le sait, on peut demander d'être entendu devant un tribunal, mais c'est le tribunal et c'est le juge qui décide, oui ou non, s'il veut, à ce moment-là, ou s'il accepte que la personne soit entendue. Le juge a accepté que je sois entendu. J'ai été entendu et j'ai témoigné sous serment. Je pense que, au contraire, c'est très respectueux de nos instances judiciaires. Comme citoyen, je suis allé témoigner, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre réalise qu'une intervention politique qu'il aurait faite il y a une quinzaine de jours, soit à ce moment-là une intervention dans le processus judiciaire, l'a amené à devoir faire une autre intervention dans le processus judiciaire, demander lui-même à être entendu comme témoin pour expliquer des gestes qu'il aurait posés?

Est-ce qu'il réalise que, comme ministre de la Sécurité publique, c'est de l'ingérence pure et simple dans le processus judiciaire, et ce, M. le Président, à deux reprises en l'espace de trois semaines?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, quant à la première partie de l'affirmation du député de Frontenac, je lui ai déjà expliqué et j'ai déjà expliqué à cette Chambre que je n'ai d'aucune façon empêché un ordre de la cour d'être exécuté. Je l'ai déjà dit et je l'ai répété. Donc, je lui rappelle tout simplement les déclarations que j'ai faites à la fois quand on a fait l'étude des crédits. Je pense, M. le Président, qu'on en a quand même parlé abondamment, de cette question-là. On en reparle encore en Chambre. Donc, je le réfère tout simplement à ces propos.

Maintenant, M. le Président, c'est évident que quand, moi, je vais témoigner devant la cour, que je sois ministre ou que je sois citoyen, j'ai le droit d'être entendu par les tribunaux et j'ai le droit sous serment... Moi, je ne vois pas quel est le problème, M. le Président, pour un ministre, lui-même, de demander d'être entendu par la cour et, à ce moment-là, de déposer sous serment une déclaration. Je crois au contraire que c'est très respectueux.

Si le député de Frontenac a un problème avec ça, j'ai de la difficulté à l'imaginer, le problème qu'il peut avoir, alors qu'il a été ministre de la Justice. Il sait comment ça fonctionne, les tribunaux, puis il sait que la façon dont j'ai procédé, c'est très respectueux, bien au contraire, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Est-ce que le ministre, qui a déclaré que c'est comme citoyen qu'il avait été entendu par le tribunal ce matin, maintient que c'est comme citoyen ou est-ce que ce n'est pas plutôt comme ministre de la Sécurité publique et qu'à ce moment-là il s'est ingéré dans le fonctionnement de l'appareil judiciaire?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: M. le Président, si je comprends bien la question du député de Brome-Missisquoi, est-ce que le fait, pour un ministre, d'aller témoigner devant la cour, à chaque fois qu'un ministre va témoigner devant la cour, c'est de l'ingérence dans notre système judiciaire? C'est ça, là? C'est ça qu'il est en train de dire, le député de Brome-Missisquoi? Il est avocat, il me semble que, au contraire, son raisonnement devrait aller un petit peu plus loin que ça.

Je crois, au contraire, pour un, que, quand quelqu'un, qu'il soit ministre, qu'il soit citoyen, va témoigner en cour, c'est avant tout comme citoyen, parce qu'on prête serment de dire la vérité et juste la vérité. En plus, évidemment, je suis ministre de la Sécurité publique, c'est certain, mais je ne perds pas mes droits de citoyen pour autant et j'ai le droit d'être entendu devant un tribunal, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Paradis: Est-ce que c'est à titre de citoyen que, sur du papier à lettre du ministre de la Sécurité publique, il a émis un communiqué, en fin de semaine, insistant pour être entendu devant les tribunaux, s'ingérant ainsi dans le processus judiciaire?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, je crois que le député de Brome-Missisquoi aurait dû demander au député de Frontenac de regarder le document avant de me poser une question sur ce document-là. Le document que j'ai émis vendredi, ce n'était pas adressé à la cour, c'était tout simplement un communiqué de presse pour dire que, suite à l'article, j'avais demandé d'être entendu devant cette cour. Alors donc, j'ai un peu de difficultés à suivre le raisonnement. Je comprends qu'on est habitué à un raisonnement assez tortueux de la part du député de Brome-Missisquoi, mais là je crois qu'il bat la palme.

Une voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Chomedey, en principale.


Réaction du ministre de la Justice aux propos de la juge Monique Dubreuil

M. Mulcair: Oui. Merci, M. le Président. Jeudi dernier, en cette Chambre, pour justifier son refus de suivre les traditions, voire même les règles de nos institutions parlementaires, à savoir qu'un ministre de la couronne qui s'ingère dans les affaires du judiciaire doit démissionner, le ministre de la Justice a donné deux raisons: d'abord, selon lui, son ingérence était antérieure au dépôt des plaintes devant le Conseil de la magistrature; deuxièmement, selon lui, après tout, c'était seulement l'opposition officielle qui soulevait la question, et il n'avait pas besoin d'obtempérer.

Sur le premier point, si on prend acte de ce qui est contenu dans les transcriptions de la commission des institutions de l'Assemblée nationale du 5 mai 1998, soit plus de quatre mois après le dépôt des plaintes, on constate que le ministre de la Justice et Procureur général est allé beaucoup plus loin qu'il n'était jamais allé auparavant pour défendre et justifier les propos mêmes de Mme la juge Dubreuil, qui font l'objet d'une enquête par le Conseil de la magistrature en ce moment.

Par ailleurs, M. le Président, comme tout le monde a pu remarquer, c'est non seulement l'opposition, mais un observateur aussi chevronné de la scène politique que Michel Vastel, dans Le Soleil de vendredi, qui mentionne que, selon lui, c'est évident aussi que le ministre de la Justice doit démissionner. Et il mentionne même que, d'après lui, le premier ministre est aussi en accord avec ça parce que, lui, il est respectueux des institutions. M. le Président, notre question est fort simple: Quand est-ce que le ministre de la Justice va comprendre et va démissionner?

(14 h 20)

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Ménard: M. le Président, j'ai très bien compris et je ne démissionnerai pas. Sur la première question soulevée par le député de Chomedey, j'ai déjà répondu amplement, au moins deux fois à cette question.

Quant à l'addition à son club de Michel Vastel, je ne crois pas que ça le renforcisse beaucoup. D'abord, la conclusion de M. Vastel vaut ce que valent ses prémisses. Or, il cite des paroles que je n'ai jamais prononcées, ni de près ni de loin. En les lisant, je me rappelais un poème que je garde dans ma serviette depuis un certain temps et que vous connaissez peut-être parce que vous avez fait le cours classique comme moi, ce très beau poème de Rudyard Kipling, qui commençait ainsi: «Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir...» Bien, il y avait un quatrain qui s'appliquait particulièrement: «Si tu peux supporter d'entendre tes paroles travesties par des gueux pour exciter les sots et entendre mentir sur toi ces bouches folles sans mentir toi-même d'un mot...» M. le Président, je resterai franc.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Chomedy.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre réalise que ce n'est pas en citant de la poésie qu'il peut répondre à une question aussi fondamentale sur les institutions parlementaires qui sont le fondement même de notre démocratie? Et est-ce qu'il réalise que la décision qui doit être rendue très bientôt par le Conseil de la magistrature risque d'être sérieusement entachée? Le public ne saurait jamais si c'est le Conseil de la magistrature qui parle ou si le Conseil en question reflète seulement les diktats d'un ministre de la Justice qui s'est mis le nez là où il n'avait pas affaire à le mettre. Et c'est pour ça que, poésie à part, citation oblique à part, le ministre de la Justice doit comprendre qu'il doit démissionner.

Le Président: M. ministre de la Justice.

M. Ménard: M. le Président, je n'ai jamais fait d'ingérence dans le processus judiciaire et j'ai déjà amplement répondu à cette question pour l'expliquer.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, la question des sanctions insuffisantes...

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: En question principale, M. le Président.

Le Président: En principale, très bien.


Indépendance du pouvoir judiciaire

M. Mulcair: M. le Président, la question des sanctions insuffisantes dans les affaires de viol fait encore l'objet de manchettes dans les journaux, aujourd'hui.

Dans l'affaire Dubreuil, ce qui s'est produit, c'est que deux hommes ont été condamnés pour un viol vicieux, collectif. Citant le contexte culturel, Mme la juge Dubreuil a dit: Je ne les mets même pas en prison pour une journée. Ça a soulevé l'ire de plusieurs groupes et individus qui ont porté une plainte devant le Conseil de la magistrature.

En commission parlementaire, le 5 mai 1998, contrairement à ce qu'il vient d'affirmer, le ministre de la Justice a dit: Le mot «culturel» lui a échappé. Là, je ne l'ai pas vérifié après, sinon que c'est la seule explication que je vois pour laquelle La Presse n'aurait pas publié le fameux mot «culturel». Je comprenais parfaitement que, dans le contexte, «culturel», c'était par rapport à psychopathe, qu'il a agi comme son avocat de la défense.

On ne saura jamais si le Conseil de la magistrature va pouvoir agir en toute liberté, oui ou non, et c'est pour ça qu'un ministre de la couronne, Procureur général, qui fait ce genre d'ingérence n'a d'autre choix que de démissionner. Qu'est-ce qu'il attend pour comprendre?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. ministre de la Justice.

M. Ménard: M. le Président, j'ai, à au moins deux reprises, peut-être même trois, donné toutes les explications sur ces paroles qui rappelaient des paroles antérieures. Je pense que les réponses se trouvent là et qu'il n'y a pas lieu de rien y ajouter.

Le Président: M. le député de Frontenac, en principale.


Colis suspect vérifié par un membre des Hell's Angels à la prison de Rivière-des-Prairies

M. Lefebvre: M. le Président, on apprend que jeudi, le 14 mai dernier, à la prison de Rivière-des-Prairies, où on trouve plus ou moins 500 détenus, 200 gardiens, entre autres des sympathisants Rock Machine et des sympathisants Hell's, on aurait, avant la période de récréation, vérifié les lieux, la cour de récréation, puis il n'y avait rien à remarquer. M. le Président, après la récréation des Hell's, cependant, on aurait trouvé un colis suspect. Les gardiens suivent le protocole, alertent leurs supérieurs et les autorités font une brève enquête auprès des Hell's, et un Hell's se dit prêt à aller vérifier. Il se dit artificier, propose aux autorités de la prison de Rivière-des-Prairies de les accompagner pour aller vérifier le colis suspect. Il le propose, et, ce qui est absolument incroyable, ça s'est fait. Le colis suspect a été vérifié par un détenu Hell's Angel en compagnie des autorités de la prison Rivière-des-Prairies.

M. le Président, ma question au ministre de la Sécurité publique qui... Encore une fois, je lui rappelle qu'il a l'obligation de rendre compte, ici, à l'Assemblée nationale, de ce qui se passe dans nos centres de détention. Comment le ministre explique un tel fouillis, qu'un Hell's Angel soit lui-même, en compagnie des autorités, impliqué dans la vérification, supposément parce qu'il est artificier, en train de vérifier avec les autorités un colis suspect? Comment le ministre peut-il expliquer un tel scénario rocambolesque?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Dès que les faits ont été portés à ma connaissance, j'ai demandé qu'un rapport écrit me soit fourni le plus rapidement possible. Je l'ai demandé d'ici sept jours parce que je suis excessivement préoccupé et même très troublé par certaines allégations relativement aux faits, dont certains faits répétés par le député de Frontenac, mais d'autres pour lesquels, je pense, le député de Frontenac aurait peut-être intérêt à attendre que les faits s'avèrent avérés ou pas. Mais, en particulier, je voudrais savoir si, effectivement, on a donné la permission à un détenu de désamorcer un engin qu'on pensait explosif, dans quelle circonstance une telle autorisation aurait pu être donnée, car, moi aussi, j'ai peine à concevoir qu'une telle autorisation ait pu être donnée et je peux vous assurer que je ne prends pas la chose à la légère. Au contraire, dès que j'aurai un rapport détaillé, je ferai connaître à ce moment-là les suites qui vont être portées justement à cette affaire qui est préoccupante, M. le Président, très préoccupante.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: Il attend un rapport. M. le Président, est-ce que le ministre n'admet pas que cet incident-là nous indique qu'il a perdu le contrôle des centres de détention et qu'il y a urgence à ce que le ministre s'assoie avec le Protecteur du citoyen qui est en train, présentement, d'enquêter sur le fouillis dans nos centres de détention? Protecteur du citoyen, M. le Président, auquel le ministre n'a jamais voulu répondre. Est-ce qu'il ne réalise pas que ça presse de s'asseoir avec quelqu'un qui comprend ce qui se passe, le Protecteur du citoyen?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, le député de Frontenac revient sur ses vieux dadas: le Protecteur du citoyen. On en a déjà parlé, que la collaboration entre les autorités des centres de détention et le Protecteur du citoyen, elle est là. Et, à chaque fois que le Protecteur du citoyen nous demande à ce moment-là la collaboration, mon ministère lui offre toute la collaboration nécessaire afin qu'il puisse y avoir enquête ou qu'il puisse y avoir une vérification des faits qui sont portés à la connaissance du Protecteur du citoyen.

Maintenant, aussi, il faudrait faire attention avant de partir dans n'importe quelle direction, avant qu'on ait exactement tous les faits, M. le Président, parce que ce que le député de Frontenac ne sait pas, c'est qu'on avait pris toutes les mesures nécessaires, au moins au niveau du périmètre de sécurité, pour faire en sorte qu'il n'y ait personne qui puisse être blessé si jamais un tel engin explosait.

Maintenant, reste le fait quand même que j'ai beaucoup de difficultés, comme ministre de la Sécurité publique, à concevoir qu'on ait pu donner la permission à un détenu de désamorcer un engin, même si on me dit, au moment où on se parle, que cet engin avait une très faible puissance au niveau de la détonation. Cependant, M. le Président, moi, je ne peux accepter ça et j'ai demandé un rapport pour exactement avoir tous les faits et pour qu'on puisse, à ce moment-là, regarder exactement quel est le protocole qui a été respecté et, s'il n'y a aucun protocole qui a été respecté, au moins en mettre un d'urgence en application pour éviter qu'une telle situation se reproduise.

(14 h 30)

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: Est-ce que le ministre espère que les parlementaires de cette Chambre, que les observateurs vont se contenter d'une réponse aussi confuse, M. le Président? Est-ce que le ministre réalise que, pour un incident aussi incroyable qui s'est produit il y a cinq jours, il n'est pas en mesure, aujourd'hui, sachant, j'imagine, qu'on allait le questionner, de nous expliquer ce qui s'est passé il y a cinq jours dans quelque chose d'aussi incroyable? Est-ce que le ministre ne réalise pas qu'il a perdu le contrôle? Puis, lui aussi, il devrait peut-être réfléchir en compagnie du député-ministre de la Justice. Ça presse qu'il comprenne que ça ne fonctionne plus dans son réseau de prisons.

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, au moins, aujourd'hui, on sait quel est le thème de la période des questions.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger: Maintenant, je pense que le député de Frontenac, avant de commencer à faire une montée de pression, devra au moins réaliser qu'il y a des choses qu'on doit savoir avec certitude. Premièrement, moi, je veux savoir: Le certificat, M. le Président, ou le rapport des artificiers, à savoir la bombe était composée de quels éléments? Est-ce que c'étaient des éléments qu'on pouvait facilement trouver? Est-ce que c'est des éléments qui provenaient de l'extérieur? Je pense que c'est important d'avoir l'ensemble des...

Le Président: Je m'excuse.

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je crois qu'il faut absolument, dans ces circonstances, avoir toutes les circonstances avant de vraiment pouvoir prendre les sanctions appropriées. Donc, on parle de quelques jours – on ne parle pas de quelques semaines – afin que tous les faits soient exactement avérés et, à ce moment-là, qu'ils nous permettent de cerner où a été le problème, parce que je vois plusieurs problèmes, probablement, dans toute cette chose et dans le déroulement de cette chose.

Alors, je crois que, oui, c'est préoccupant, et nous allons y apporter des correctifs le plus rapidement possible. Mais, avant de dire n'importe quoi, je pense qu'il faut attendre d'avoir tous les faits, M. le Président, et ne pas faire comme le député de Frontenac et essayer d'ameuter tout le monde.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre réalise qu'à date tout ce que j'ai fait, c'est que j'ai posé des questions, que je n'ai pas eu de réponses? Est-ce que le ministre réalise que, compte tenu de la gravité de l'événement qui s'est passé il y a plus ou moins cinq jours... Est-ce que le ministre ne devrait pas s'engager... Je lui demande cet après-midi de nous faire rapport demain. Lorsqu'on en est rendu à imaginer que des Hell's Angels agissent comme artificiers dans les prisons du Québec, le ministre devrait comprendre que c'est trop long, cinq jours, pour évaluer un telle situation. Est-ce qu'il peut s'engager cet après-midi à nous donner une réponse demain, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, avant de donner une réponse et avant de donner exactement les suites qui vont être données à cette affaire, je veux avoir à ma connaissance et à ma disposition tous les faits et que ces faits soient vérifiés. Donc, pour quelques jours, je crois que ça vaut la peine, à ce moment-là, d'avoir tous les faits à notre connaissance pour connaître exactement notre position.

Une voix: Bravo!

Le Président: En principale? Mme la députée de Prévost.


Perception des taxes applicables aux immeubles de terrains de camping

Mme Papineau: M. le Président, en décembre dernier, l'Assemblée nationale adoptait le projet de loi n° 175. Cette loi modifie, entre autres, le mode de perception des taxes foncières applicables aux immeubles de terrains de camping portés au rôle d'évaluation municipal et faisant en sorte de rendre les exploitants de terrains de camping responsables, au lieu des propriétaires de ces immeubles, du paiement des taxes imposées à leur égard.

L'association des propriétaires de campings du Québec a à plusieurs reprises signifié son inquiétude en raison des difficultés que générera auprès de ses membres ce nouveau rôle qu'ils devront assumer en 1999 en lieu et place des municipalités. Plusieurs municipalités ont aussi demandé à ce que cette disposition législative soit retirée.

Ma question au ministre des Affaires municipales est la suivante: Étant à l'écoute du milieu, M. le Président, le ministre des Affaires municipales a-t-il pris acte des différents arguments qui lui ont été soumis? Et, si oui, quelles suites entend-il donner à ce dossier?

Le Président: M. le ministre du Tourisme.

M. Cliche: Oui. Je vais donner une très courte réponse et ensuite passer la parole, si vous me permettez, M. le Président, à mon collègue des Affaires municipales.

Cette question permet de diffuser tout doute, des doutes qui sont semés dans l'esprit des gens par l'opposition officielle. Il n'est pas question de taxer les campeurs au Québec, et je veux dissiper tous les doutes qui sont semés par l'opposition officielle là-dessus. Ceci étant dit, lorsqu'une maison mobile cesse d'être mobile, à ce moment-là, elle devient dans la juridiction de la fiscalité municipale; à cet égard, je cède la parole à mon collègue des Affaires municipales.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: Alors, comme dirait le ministre de la Sécurité publique, on va changer de thème, M. le Président. Oui, j'ai entendu les arguments de l'association des propriétaires de campings du Québec, et, non, il n'y aura pas quelque nouvelle forme de taxe que ce soit pour les campeurs, pour le camping, pour les propriétaires de roulottes pendant l'été ou pour les mois à venir. Non, il n'y aura pas de nouvelle taxe, quoi qu'on en dise, quoi qu'on prétende dans certains milieux.

M. le Président, la séquence est bien simple. Les unions municipales et les municipalités du Québec nous ont demandé d'habiliter les municipalités, de faire en sorte que les propriétaires de campings perçoivent les taxes sur les immeubles dans les campings. Or, depuis ce temps, nous avons eu une décision du Bureau de révision de l'évaluation foncière du Québec ainsi qu'un avis de la Commission d'accès à l'information, et les informations nécessaires aux municipalités pourront être disponibles par les propriétaires de campings, si bien que ceux-ci n'auront pas à transmettre dans leurs prix de location de terrains les frais relatifs aux taxes municipales.

La conclusion, M. le Président, c'est: Non, il n'y aura aucune nouvelle taxe, sous quelque forme que ce soit, à l'été 1998 pour les campeurs ou pour les campings.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Bourassa, en principale.


Ressources allouées aux CLSC

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, en août 1997, le ministre de la Santé diffusait un bel encart glacé couleur qui vantait les changements positifs apportés par la réforme en cours, notamment, et je cite M. le ministre, «l'accessibilité, la variété et la continuité des services pour la population».

Des voix: ...

Le Président: Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, ce bel encart a coûté 580 000 $.

Par ailleurs, la réalité est tout à fait autre. On apprend que le CLSC de Hochelaga-Maisonneuve doit couper les heures de sans rendez-vous, ne prend plus de nouveaux patients et n'offre pas de services médicaux le soir, aucun; une situation, d'ailleurs, que connaissent la moitié des CLSC à travers le Québec et qui est décrite dans La Presse du 16 mai 1998 par Lysiane Gagnon, qui dit: «La moitié des CLSC n'offrent de consultation médicale que sur rendez-vous et certains n'acceptent même plus de nouveaux patients, avec ou sans rendez-vous. Il faut des semaines, généralement des mois, pour obtenir un rendez-vous avec un médecin spécialisé.»

M. le Président, le ministre invite la population à se présenter aux CLSC, donc à délaisser les urgences des centres hospitaliers. Les CLSC n'ont pas les ressources nécessaires pour recevoir les patients, répondre à leurs besoins et répondre à l'augmentation, et ce, contrairement au beau discours de M. le ministre, un beau discours qui nous coûte 580 000 $.

Des voix: ...

Le Président: Écoutez... Alors, encore une fois, ça serait moins compliqué si on laissait le président faire son travail. Je vous invite, de part et d'autre, justement à apprécier le temps que le président donne à un côté et à l'autre, et vous allez voir que finalement ça s'équilibre à la fin du compte. Mme la députée, votre question.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, comment le ministre peut-il inviter la population à se présenter aux CLSC si les CLSC n'ont pas les ressources permettant de répondre à leurs besoins?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

(14 h 40)

M. Rochon: Bon, M. le Président, il faut d'abord se rappeler que les CLSC offrent toute une gamme de services en plus des services médicaux comme tels: il y a des équipes multidisciplinaires qui offrent des services sociaux, des équipes d'infirmières, des services de travail en collaboration dans les écoles, des services de maintien à domicile. Je veux juste qu'on se rappelle que le CLSC, c'est une gamme de services de santé et de services sociaux qui sont offerts, y compris des services médicaux.

Maintenant, à Montréal, la situation est un peu particulière et en partie associée à la culture médicale montréalaise, où les services médicaux sont essentiellement assurés à partir du cabinet des médecins. Il y a un certain nombre de médecins qui travaillent dans les CLSC. On fait des efforts pour que les équipes médicales des CLSC aient des nombres critiques plus confortables, et, avec le temps, je pense qu'on va y arriver. Il y a des moyens qui sont en discussion avec les médecins présentement. Mais je pense qu'on peut dire que, traditionnellement, depuis toujours, à peu près depuis 20 ans qu'existent les CLSC, les services médicaux, à 85 % sûrement, à Montréal, sont assurés par les cabinets des médecins.

Ce qui est visé présentement, c'est, un, de trouver des moyens pour rendre la carrière en CLSC plus attrayante pour les jeunes médecins; deux, d'assurer une continuité puis une complémentarité de travail entre les cliniques médicales et les CLSC. Et on sait qu'il y a à se mettre en place présentement un département régional avec des instances locales de médecine familiale, où les médecins regroupés, collectivement, vont assumer la continuité des services 24 heures par jour, sept jours par semaine, et la gamme complète des services, en collaboration avec les CLSC. Et la réalité montréalaise fait qu'à mesure que le nombre de médecins devra augmenter dans les CLSC l'accessibilité aux services médicaux va être assurée par la collaboration des deux: le CLSC et les cabinets des médecins.

Le Président: Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, ça, c'est le discours. Dans la réalité, le président du conseil d'administration...

Le Président: Vous avez maintenant assez d'expérience, Mme la députée de Bourassa. Vous savez que vous êtes en complémentaire. Et, jusqu'à ce que nos règles soient changées, vous posez votre question de façon réglementaire, s'il vous plaît.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, est-ce que le ministre peut répondre au président du conseil d'administration du CLSC Hochelaga-Maisonneuve, qui dit: Un patient doit-il mourir pour que le gouvernement bouge? Ça, c'est la réalité.

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Ce n'est sûrement la situation présentement avec ce gouvernement-ci, M. le Président. Je le répète, il y a une situation qui existe dans la région de Montréal principalement, beaucoup plus qu'ailleurs au Québec: les médecins ont organisé fortement une pratique en cabinet. Il y a un certain nombre de médecins, graduellement, qui vont de plus en plus vers les CLSC, mais le choix des médecins a été jusqu'ici d'aller dans les cabinets.

Ce qui est important pour la population, malgré que je souhaite, et on va continuer à faire tous les efforts pour, augmenter les équipes médicales en CLSC – il faut qu'il y en ait plus, de médecins dans les CLSC – ce qui est important pour le moment surtout, c'est d'abord d'assurer une collaboration pour que les médecins, sur un territoire, rendent les services accessibles 24 heures par jour, sept jours par semaine. Ça, ça demande une meilleure coordination des médecins entre eux. Ils sont d'accord là-dessus. Ils ont accepté ça. Et on est après se donner les moyens pour, dans les prochaines semaines, dans les prochains mois, avoir un meilleur fonctionnement de la médecine de famille à Montréal. Tout le monde souhaite ça, y compris les médecins, M. le Président.

Le Président: M. le député de Marquette, en principale.


Violence dans les écoles secondaires

M. Ouimet: Manchette de La Presse du 16 mai...

Le Président: M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Situation pas trop drôle, M. le Président: Un prof agressé tous les quatre jours à la CECM . Qu'est-ce qu'on y apprend? Cheveux arrachés, morsures, coups de poing au visage, visages griffés, menaces de mort. Voilà où on en est rendu à la CECM et dans beaucoup trop d'écoles secondaires à travers la province.

La violence augmente. Et pourtant, la ministre a obligé les écoles à couper les services professionnels qui encadrent ces élèves violents et ces élèves avec des troubles de comportement. Les enseignants voient disparaître les psychologues, les psychoéducateurs, les techniciens en toxicomanie, les travailleurs sociaux, les animateurs de vie étudiante, toutes des ressources qui intervenaient directement auprès de ces élèves. Pas étonnant qu'on en soit rendu là, il n'y a plus d'encadrement dans les écoles.

M. le Président, la question que je pose à la ministre de l'Éducation: Réalise-t-elle qu'elle est en grande partie responsable de l'aggravation de la violence dans les écoles secondaires? À cause de ces coupures après coupures, après coupures, les profs ne sont plus en mesure d'enseigner, ils doivent plutôt faire de la discipline dans les salles de classe.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Et pourtant, M. le Président, au nombre d'élèves constant, il y a plus de travailleurs sociaux, il y a plus de psychologues, il y a plus d'orthophonistes maintenant qu'il n'y en avait sous le gouvernement qui nous a précédés.

Cela étant, cette situation qui existe dans un certain nombre de nos écoles reste une situation inacceptable, bien sûr. Toute forme de violence, de toute façon, devrait être bannie de notre société et de nos écoles en particulier, il me semble que cela va de soi. Alors, cette situation, elle existe dans un certain nombre d'établissements.

Ce matin, je participais à une rencontre de directions d'école qui se préoccupent des conditions de réussite dans les écoles en milieu difficile, en milieu défavorisé, et les stratégies qui sont proposées par les écoles ne sont pas nécessairement des ajouts de personnes au niveau professionnel, peu importe l'aide que ces personnes peuvent apporter, sachant évidemment que c'est une aide significative. Les stratégies qui ont le plus d'impact, qui réussissent le mieux sont celles qui misent sur un engagement de la collectivité, sur une approche auprès des jeunes, qui mobilisent ceux qui sont peut-être un petit peu plus difficiles dans les classes mais qui, si on canalise leur énergie, vont devenir des actifs pour l'école et surtout des actifs pour eux-mêmes.

Ce que j'ai fait, donc, par la loi n° 180, c'est de permettre aux écoles d'avoir plus de latitude et plus de possibilités de choisir des stratégies inscrites dans le cadre de vie collectif de ces écoles, que ce soit la vie de quartier, la vie de village, l'école de quartier, l'école de village ou l'école en milieu semi-urbain, et je pense que c'est de cette façon-là – et tout le monde met l'épaule à la roue – que nous éradiquerons la violence dans nos écoles, qui, de toute façon, en toute circonstance, reste inacceptable, M. le Président.

Le Président: M. le député de Marquette, à nouveau en principale.


Ressources allouées aux écoles secondaires

M. Ouimet: Principale, M. le Président, parce que la ministre va devoir cesser de nier la réalité qui existe dans les écoles.

Une voix: Bravo!

M. Ouimet: Il y a un avis qui lui a été transmis en 1996 par le Conseil supérieur de l'éducation.

Des voix: ...

Le Président: Bien. M. le député de Marquette, en principale.

M. Ouimet: M. le Président, un avis du Conseil supérieur de l'éducation, en 1996, dénonçait les compressions et l'effet sur les services complémentaires. Même chose au niveau de la CEQ qui rendait public un document trois semaines après l'opposition officielle. Dans un rapport qui lui a été transmis au mois de mai 1998 – je vais le lui lire parce que je n'ai pas l'impression qu'elle l'a lu – à la page 51, au terme de son analyse, on observe que «des réductions budgétaires ont touché directement la quantité et la qualité des services aux élèves, qu'il y a un écart croissant entre les ressources accessibles et les besoins des enfants. Le Conseil recommande à la ministre de l'Éducation de financer ces services en proportion des besoins réels».

Ça continue, M. le Président. À la page 57, on parle des services complémentaires: «Ils ont d'ailleurs largement été touchés par les compressions budgétaires. Il y a eu une grande diminution qui aurait des conséquences très lourdes pour les élèves. Peut-on laisser des élèves s'enliser dans la marginalité scolaire sans penser à leur avenir, sans penser à leur possible décrochage social et scolaire plus tard?» Ça, c'est la réalité, ce qui se vit dans les écoles au niveau du taxage, au niveau de la violence. C'est inacceptable. Dans son plan d'action ministériel, la ministre n'a rien prévu et elle doit réformer l'éducation.

(14 h 50)

Quand va-t-elle s'attaquer aux véritables problèmes et injecter des ressources pour donner à nos élèves et donner aux enseignants les ressources dont ils ont besoin pour pouvoir réussir dans leur cheminement scolaire?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Je dois comprendre des propos de notre collègue, M. le Président, que les ressources qu'allouait l'ancien gouvernement n'étaient pas suffisantes, puisque nous sommes à la même hauteur, et le nombre d'élèves n'a pas bougé. Alors donc, on a quelques problèmes. Bien, c'est ça, la réalité, alors il faut quand même être capable d'en faire état ici, devant cette Assemblée. Et, à différentes occasions, cette question a été soulevée – à la commission de l'étude des crédits, cela est soulevé ici à nouveau, devant cette Assemblée – et j'ai dit et je le réaffirme que, effectivement, un certain nombre de services ont été resserrés, mais je ne peux toujours bien pas vous dire qu'il y a moins de psychologues s'il y en a davantage qu'il y a quelques années, qu'il y a plus de psychoéducateurs, etc. C'est vrai, il y a moins d'animateurs de vie pastorale. Il y en a moins, là, bon, mais il y a, par ailleurs, des techniciens spécialisés.

Je suis d'accord que, effectivement, au niveau des services complémentaires, nous devons les préserver à tous égards. Et c'est dans ce sens que les commissions scolaires ont agi depuis le début, M. le Président, à partir du moment où on leur a demandé de procéder à des rationalisations. Qu'est-ce qui a été protégé? En tout état de cause et partout, ce sont toujours les services complémentaires, et on a privilégié des réductions dans les services administratifs, dans le personnel d'encadrement, dans le personnel de gestion. Et, en ce sens, je reste convaincue que nous devons cependant appuyer et soutenir les écoles, l'école montréalaise en particulier, à l'égard de cette question de la violence qui, je le répète, ne devrait pas être admise ni tolérée d'aucune espèce de façon dans nos institutions, M. le Président.

Le Président: Alors, rapidement, M. le député de LaFontaine, dernière question.


Principe de la taxe de 2 $ sur chaque nuit d'hébergement

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Dans un communiqué émis le 7 mai, le ministre du Tourisme déclarait avoir l'appui de l'Association des hôteliers et de son président dans le dossier controversé de l'imposition d'une taxe de 2 $ sur les nuitées d'hôtel en région. Or, dans une lettre datée du lendemain, soit le 8 mai, le président de l'Association des hôteliers – et je vais le citer – dit: «Nous avons été estomaqués à la lecture de votre communiqué. Le processus d'adhésion à la taxe d'hébergement dont il est question dans le communiqué n'a jamais fait l'objet de discussions ni au groupe de travail sur la taxe spécifique sur l'hébergement ni au Forum de l'industrie touristique. À quoi ont servi les rencontres du groupe de travail?» Et il continue, M. le Président, un peu plus loin: «Nous n'avons maintenant d'autre choix que de subir votre décision, mais, de grâce, cessez de laisser croire que nous sommes associés à cette démarche, comme le prétend le communiqué émis par votre comité.»

Ma question est la suivante: Pourquoi le ministre émet-il des communiqués mensongers? Et va-t-il s'excuser auprès du président de l'Association des hôteliers du Québec?

Le Président: M. le député de LaFontaine, je pense qu'on se comprend, là, il y a moyen de faire une question, de qualifier sans nécessairement utiliser des propos... Alors, je vous demanderais de retirer ce...

M. Gobé: M. le Président, en effet, c'est un propos, certainement, qui peut paraître antiparlementaire, alors je déposerai la lettre du président de l'Association des hôteliers dans laquelle il dit lui-même que c'est un communiqué qui est erroné, qui ne correspond pas à la réalité.

Et ma question, à ce moment-là, revient au ministre: Quand allez-vous vous excuser auprès de l'Association des hôteliers du Québec et rétablir les contacts avec eux afin de travailler et de négocier pour s'entendre avec des industries importantes qui ferment des hôtels actuellement par manque de politique gouvernementale?

Une voix: Bravo!

Le Président: Alors, M. le ministre délégué au Tourisme.

M. Cliche: Merci, M. le Président. John F. Kennedy avait eu cette phrase à laquelle me font penser beaucoup les libéraux: Il n'y a pas de fumée sans machine à fumée. Et le critique officiel de l'opposition se fait toujours un devoir d'essayer de créer des problèmes où il n'y en a pas. Je vais répondre très brièvement, mais, quand même, il faut dire certaines choses. Ce à quoi fait référence le critique officiel de l'opposition, c'est l'application de la loi n° 78 par laquelle on pourrait prélever 2 $ de chaque nuitée passée par les touristes dans nos établissements touristiques qui offrent de l'hébergement. Les modalités d'application ont été discutées par un groupe de travail. Suite au rapport de ce groupe de travail qu'ils ont remis au ministre délégué au Tourisme et au Forum de l'industrie touristique, je me suis engagé à faire la tournée de certaines régions du Québec et des associations professionnelles les plus concernées, notamment les pourvoyeurs, notamment les hôteliers, notamment les aubergistes, les associations touristiques régionales, et de leur présenter ma position quant aux modalités d'application de la loi.

Ce sur quoi nous sommes entendus avec les hôteliers – et j'ai parlé à M. Authier, et il ne remet aucunement ça en question – c'est que j'allais rencontrer ces hôteliers. D'ailleurs, la rencontre avec les pourvoyeurs est terminée. La semaine prochaine, je rencontrerai à Québec... Dans un premier temps, j'ai envoyé 1 200 lettres d'invitation à tous les hôteliers du Québec, et à Montréal et à Québec, et j'aurai l'occasion de présenter, suite à l'invitation faite à 1 200 hôteliers, ma proposition en ce qui concerne les modalités d'application.

Donc, il n'y a pas de malentendu; le seul malentendu, c'est le député de l'opposition qui veut le dire. J'ai toujours respecté la décision des hôteliers. Certains hôteliers et leur association demeurent contre en principe; ce sur quoi nous sommes entendus, c'est qu'ils me permettent d'aller les rencontrer pour leur expliquer ma position en matière de modalités d'application de cette loi qui permettrait de générer, au Québec, un montant de l'ordre de 25 000 000 $ par année qu'on pourrait investir dans la promotion touristique du Québec, grande destination du Québec, et de faire du Québec une grande destination touristique internationale, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: La période de questions et de réponses orales est terminée pour aujourd'hui. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, il y avait demande de consentement pour dépôt de la lettre de Jean Authier, président de l'Association des hôteliers du Québec, qui contredit le ministre.


Document déposé

Le Président: Je comprends qu'il y a consentement pour le dépôt. Alors, chacun se fera une opinion à ce moment-là.

Alors, il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés aujourd'hui, mais nous en arrivons aux motions sans préavis. Alors, M. le leader...

M. Jolivet: À la motion sans préavis, je vais demander l'accord du leader de l'opposition pour présenter la commission parlementaire qui est en consultation.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, compte tenu qu'il s'agit de consultation, exceptionnellement, il y a accord, M. le Président.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Alors, il y a consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, aujourd'hui, jusqu'à 18 heures, dès maintenant jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.


Motions sans préavis

Le Président: Très bien. Alors, cet avis étant donné, aux motions sans préavis, M. le leader du gouvernement.


Souligner la tenue de la Semaine de l'arbre et des forêts

M. Jolivet: Oui, M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que cette Assemblée souligne la tenue de la Semaine de l'arbre et des forêts qui permet aux Québécois et aux Québécoises de mieux connaître l'importance économique, sociale et récréative de nos forêts.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion?

M. Jolivet: ...de chaque côté, M. le Président,

Le Président: Très bien, mais, M. le leader, avant que vous débutiez votre intervention, je demanderais aux collègues qui doivent quitter l'enceinte du salon bleu de le faire maintenant, rapidement.

Alors, s'il vous plaît, rapidement; ceux qui veulent «caucusser», qu'ils le fassent à l'extérieur de l'enceinte, là. Alors, M. le leader du gouvernement.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, pour bien s'entendre, une personne de chaque côté.

M. le Président, à titre de ministre délégué aux Forêts, je présente aujourd'hui à cette Assemblée une motion pour souligner la Semaine de l'arbre et des forêts qui se tient cette semaine, du 17 au 23 mai, et dont le but est de promouvoir la conservation des forêts, tel qu'il a été prévu à l'article 209 de la Loi sur les forêts.

Je vous indiquerai, M. le Président, que j'avais l'occasion, dans le comté de Shefford, avec le député de Shefford, dimanche dernier, d'ouvrir, à Granby, la Semaine de l'arbre et des forêts et que je terminerai cette semaine en passant par Maniwaki, Fort-Coulonge, en Abitibi-Témiscamingue, dans ma propre région, pour terminer finalement, samedi prochain, au Domaine De Maizerets, ici, à Québec.

Cet événement, M. le Président, permet de sensibiliser la population à l'importance sociale, environnementale et économique de la forêt dans notre quotidien. Pour la deuxième année consécutive, les activités se déroulent sous le thème Les forêts, ça compte . Et, quand on indique les forêts, M. le Président, comme on le sait très bien, en vertu de la loi, il y a deux forêts: la forêt publique et la forêt privée.

(15 heures)

Les forêts, ça compte, parce que près de 92 % des forêts québécoises sont publiques et appartiennent donc à tous les Québécois et à toutes les Québécoises. Les forêts comptent également parce qu'elles sont l'un des grands maillons de notre économie. En effet, le Québec est un important fabricant de pâtes, papiers et bois de sciage.

L'industrie forestière est une industrie d'avant-garde utilisant des technologies de pointe. Elle joue un rôle primordial dans le développement socioéconomique du Québec et de ses régions. D'ailleurs, M. le Président, les chiffres le démontrent, l'industrie forestière continue de croître et de fournir des emplois de haute qualité, ce qui est essentiel pour maintenir la vitalité économique du Québec et de ses régions.

Donc, voilà quelques chiffres qui vont nous permettre de bien saisir cette dimension. L'industrie forestière contribue annuellement à la balance commerciale du Québec pour plus de 9 000 000 000 $, alors que l'équivalent de la balance commerciale pour l'ensemble des biens et services offerts au Québec se situe à 6 700 000 000 $. Plus de 87 % de la production des pâtes, papiers et bois de sciage est destinée à l'expédition, et la valeur annuelle des livraisons est évaluée à 19 000 000 000 $. Le secteur forestier lui-même contribue, au Québec, à fournir près de 85 000 emplois directs auxquels se rattachent des salaires de l'ordre de 3 000 000 000 $. L'industrie forestière est le principal moteur économique et souvent le seul employeur manufacturier dans quelque 250 municipalités réparties sur tout l'ensemble du territoire québécois.

À la découverte de nouveaux marchés, l'industrie forestière innove et se tourne dorénavant vers la seconde transformation et la fabrication de produits à plus grande valeur ajoutée, tout en maintenant un important secteur de première transformation. J'ai eu l'occasion de participer à un colloque sur la valeur ajoutée à Trois-Rivières, il y a environ un mois, M. le Président, et je peux vous dire qu'à ce moment-là on a vu comment les Québécois sont imaginatifs et comment ils peuvent même utiliser du bois qui, soudé à du papier, peut devenir un matériau flexible, pliable, sans casser, alors que du bois, vous le connaissez très bien, ça ne se tourne pas comme on veut. Ainsi, l'industrie peut songer à exporter vers les marchés extérieurs, en plus de prendre de l'expansion sur le marché québécois lui-même.

Comme on peut le constater, les forêts, ça compte pour l'économie, mais elles ne comptent pas que pour l'économie, elles comptent aussi parce qu'elles sont le lieu de nombreuses activités de plein air. Dimanche, au centre d'activités au lac Boivin, nous avons eu l'occasion d'ouvrir une piste multifonctionnelle qui a été mise sur pied grâce aux gens du milieu, mais en même temps au Programme de mise en valeur du milieu forestier, grâce aux argents qui sont payés par les industriels mais retournés dans chacune de nos régions pour le bien-être des gens du plein air.

Dans diverses régions du Québec, elles sont le rendez-vous de centaines de milliers de Québécois et de touristes qui s'adonnent à la randonnée pédestre, à la descente de rivières en eau vive, à la natation, à la motoneige, au ski de fond, au camping, au canotage, à la chasse, à la pêche, à la villégiature, et j'en passe, allant jusqu'à ceux qui veulent récolter des petits fruits ou simplement prendre des photos en forêt.

Vous le savez, M. le Président, la forêt est importante pour tous les Québécois et les Québécoises. Elles font véritablement partie de la vie des gens d'ici, et ce n'est pas étonnant, puisque les forêts recouvrent plus de la moitié du territoire québécois. Les forêts sont abondantes, c'est vrai, et le gouvernement s'assure que leur aménagement soit fait en conformité avec les normes et les règlements de façon à respecter le rendement soutenu et la pérennité de la ressource et, dans certains cas, dans certains milieux, allant sur le rendement accru. Cette semaine est donc un moment privilégié pour célébrer les forêts. C'est d'ailleurs ce qui se fait dans toutes les régions du Québec. Que ce soit dans les écoles primaires ou secondaires, dans les municipalités, les compagnies forestières, de plus en plus d'organismes se joignent à nous pour fêter.

Il est évident, M. le Président, que nous devons faire appel à nos concitoyens et concitoyennes, dans la mesure de l'état actuel de la température où des feux de forêt sont déclenchés malheureusement par le fait de la négligence humaine. Il est évident que, si c'est par la foudre ou par d'autres moyens comme ceux-là, les tempêtes, c'est une autre chose; il faut, dans ces cas-là, les subir. Mais, quand l'être humain est là, il doit, à mon avis, prendre plus de précautions, compte tenu de la température spéciale que nous avons depuis le mois d'avril dernier.

Avant de terminer et de laisser à mon collègue le soin de donner son information sur cette Semaine, M. le Président, je vous dirai aussi et vous rappellerai que nous avons eu l'occasion, le 13 mars dernier, avec tous les gens qui travaillent dans le secteur de la forêt privée, les industriels, les gens du sciage, les organismes de gestion en commun, les coopératives, les municipalités, les gens qui, de près ou de loin, incluant le ministère, travaillent à développer notre forêt privée, de participer au suivi du Sommet de 1995, en vous disant que, avec le député de Montmagny-L'Islet qui avait été invité à cette rencontre, nous avons eu l'occasion, dans les semaines qui ont suivi le budget du ministre des Finances, de finalement permettre de répondre à des demandes très importantes du secteur de la forêt privée.

Pour une fois, M. le Président, dans votre région comme dans les autres régions du Québec, pour cinq ans, des budgets ont été développés dans les budgets du ministère, dans les budgets qui servent à la mise en valeur du milieu forestier, volet 1, volet 2 et volet 3, ainsi que dans les programmes d'employabilité. Nous avons donc un programme pour les cinq prochaines années qui va permettre au secteur privé de participer, comme le secteur public, au développement de notre forêt québécoise.

Donc, M. le Président, j'invite tous mes collègues à participer à ces activités durant cette semaine et à célébrer cette Semaine de l'arbre et des forêts 1998, parce que, tous les Québécois et les Québécoises, nous devons leur faire comprendre, et je pense qu'ils le savent très bien, mais le leur rappeler, que les forêts, ça compte dans notre vie. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le leader du gouvernement et ministre délégué aux Forêts. M. le député de Montmagny-L'Islet.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: M. le Président, Jacques Cartier, en découvrant le Canada, cherchait de l'or. Ce qu'il a trouvé et découvert sur notre continent, c'est de la forêt, une immense forêt, ce qu'on peut appeler l'«or vert».

La forêt au Québec a toujours été au coeur de notre vie collective car, avant d'être ce qu'on connaît aujourd'hui du Québec, il fut d'abord et avant tout une immense forêt. La forêt fut, au fil des siècles, au centre de notre économie. Sans l'exploitation, la mise en valeur de ce qu'on appelle aujourd'hui la matière ligneuse et papetière, nos régions ne seraient sûrement pas ce qu'elles sont aujourd'hui. Mais ma région en est un exemple marquant. Le développement autant économique que démographique de Montmagny-L'Islet a été profondément marqué par l'industrie du bois. On peut en dire de même pour plusieurs autres régions au Québec, comme la région de l'Outaouais, la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, de l'Abitibi, de la Beauce, des Laurentides, de la Côte-Nord.

Au fil des ans, les techniques ont évolué, les produits également. La population a également transformé sa perception de l'arbre et de la forêt. Nos entreprises québécoises en sont conscientes et, année après année, elles tentent de développer des nouvelles technologies qui font que l'industrie peut transformer plusieurs matières ligneuses, plusieurs, en fait, ressources naturelles de nos forêts avec beaucoup plus de succès, récupèrent un pourcentage beaucoup plus élevé de la forêt. Et on investit des centaines et des millions de dollars. Et ça, on le doit, je pense, à nos entreprises qui se sont conscientisées sur la valeur de nos ressources.

Parce qu'on réalise son importance, on réalise également l'importance de préserver cette ressource qui n'est pas inépuisable. C'est ainsi qu'un effort de sensibilisation collectif comme la Semaine de l'arbre permet à chacun des Québécois et des Québécoises de redécouvrir nos arbres, le plaisir de retrouver ses racines, de connaître les différentes espèces qui peuplent nos forêts. C'est également l'occasion, M. le Président, de réaliser les bienfaits de la récupération pour justement préserver cette ressource. C'est donc avec enthousiasme que nous appuyons les efforts de sensibilisation des gouvernements successifs, axés toujours sur la Semaine de l'arbre.

(15 h 10)

Je voudrais terminer en suggérant aux membres de cette Chambre de songer à la place que prennent les produits du bois dans notre vie quotidienne. Essayons d'imaginer un gouvernement sans papier, l'industrie de la construction sans bois, nos régions et nos industries forestières.

Malheureusement, comme l'a mentionné le député juste avant moi, nous avons présentement, M. le Président, probablement au-delà de 350 feux en activité. Je pense qu'il est important de rappeler à la population, comme l'a fait mon collègue, que nous devons être très vigilants. C'est des ressources qui appartiennent aux Québécois depuis toujours et c'est des ressources sur lesquelles comptent ceux qui vont nous succéder, qui vont nous suivre, nos enfants d'abord. Donc, j'invite tous les Québécois et les Québécoises à la très grande prudence à l'occasion de leurs activités en forêt. Au coeur de nos régions et au coeur de l'histoire, la forêt du Québec doit être préservée et enrichie pour le bien-être de tous. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Alors, cette motion est-elle adoptée? Oui. Alors, M. le leader du gouvernement, à nouveau.


Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 444

M. Jolivet: Oui, M. le Président. J'ai une autre motion qui est la suivante. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission des affaires sociales procède à des consultations particulières sur le projet de loi n° 444, Loi sur le tabac, les 27, 28 et 29 mai 1998, à la salle du Conseil législatif et, à cette fin, entende les organismes suivants:

«Le mercredi 27 mai 1998: de 15 heures à 15 h 30, remarques préliminaires; 15 h 30 à 16 h 30, Conseil québécois sur le tabac et la santé; de 16 h 30 à 17 h 30, Association des restaurateurs du Québec; de 20 heures à 21 heures, Société canadienne du cancer, division Québec; de 21 heures à 22 heures, Association nationale des distributeurs de tabac et de confiserie et Conseil canadien de distribution alimentaire, conjointement; de 22 heures à 23 heures, Association des détaillants en alimentation du Québec; de 23 heures à 24 heures, Ordre des infirmières et infirmiers du Québec;

«Le jeudi 28 mai: de 11 heures à midi, Collège des médecins du Québec; de 12 heures à 13 heures, Conseil canadien des fabricants des produits du tabac; de 20 heures à 21 heures, Coalition québécoise pour le contrôle du tabac; de 21 heures à 22 heures, Ordre des pharmaciens du Québec; de 22 heures à 23 heures, Conseil du patronat du Québec; de 23 heures à 24 heures, Association québécoise des pharmaciens propriétaires;

«Le vendredi 29 mai: de 11 heures à midi, Association pour les droits des non-fumeurs; de 12 heures à 13 heures, Conseil des directeurs régionaux de la santé publique; de 15 heures à 16 heures, le Festival international de jazz de Montréal, le Grand Prix du Canada et le Festival d'été international de Québec, conjointement; de 16 heures à 17 heures, Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec; de 17 heures à 18 heures, Regroupement des exploitants de distributrices à cigarettes; de 20 heures à 21 heures, M. Pierre Ouellette, responsable de l'équipe de rédaction de l'étude d'impact commandée par le ministère de la Santé et des Services sociaux; et, de 21 heures à 21 h 30, remarques finales;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques finales, partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que le ministre de la Santé et des Services sociaux soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Vous avez remarqué, M. le Président, que nous terminons à 24 heures, puisque nous sommes dans la première semaine de la session intensive.

Le Président: Bien sûr. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Simplement une clarification: à deux reprises, vous avez indiqué que, après les auditions, il y aurait une période de 30 minutes pour les remarques finales. Est-ce que c'est deux fois 30 minutes ou un seul 30 minutes?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Je vais me relire. J'ai dit «finales», je m'excuse, c'est «préliminaires». Les remarques préliminaires dans le premier 30 minutes, et le deuxième, c'est remarques finales.

Le Président: Ça va?

M. Jolivet: Oui.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que la motion est adoptée? Adopté. Très bien. M. le leader adjoint de l'opposition officielle, le député de Châteauguay.

M. Fournier: Oui, merci, M. le Président. J'aimerais déposer la motion sans préavis suivante et solliciter le consentement de la Chambre pour en débattre:

«Que l'Assemblée nationale procède à des auditions publiques sur l'état du système de santé au Québec, notamment en ce qui concerne les conséquences des compressions budgétaires et de la réforme du ministre de la Santé sur l'accessibilité et la qualité des services offerts aux Québécois et aux Québécoises et qu'à cette fin entende les individus et organismes représentant les malades, les infirmiers et infirmières, les médecins, les administrateurs, le personnel de soutien, les professionnels de la santé, les bénévoles;

«Que le gouvernement convoque donc, à compter du 2 juin prochain, la commission des affaires sociales et demande aux individus et aux organismes de transmettre au Secrétariat des commissions leur mémoire au plus tard le jeudi 28 mai 1998.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Alors, il n'y pas consentement, M. le député de Châteauguay; cette motion ne peut pas être discutée. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Strictement une clarification. C'est la deuxième fois que cette motion est présentée à l'Assemblée nationale; elle l'a été la semaine dernière par Mme la chef de l'opposition officielle, elle l'est aujourd'hui par le leader adjoint de l'opposition officielle. La semaine dernière, le leader du gouvernement nous avait indiqué qu'il n'avait pas eu de préavis, même si ce sont des motions sans préavis, est-ce que c'est toujours le même motif qui tient pour refuser une telle motion?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, tout simplement parce que nous avons un travail très important à faire sur l'ensemble de tout le menu législatif d'ici la fin. Deuxièmement, le député sait très bien que la façon dont il pourrait initier une telle demande peut l'être par les règlements prévus par les commissions parlementaires. Alors, qu'il voie, au comité directeur, à proposer quelque chose à la commission parlementaire qui, en séance de travail, décidera si elle doit tenir ou pas une telle rencontre.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, on vient d'en annoncer une sur le tabac, à laquelle nous avons concouru; la semaine dernière, le gouvernement a annoncé une commission parlementaire sur Calgary, comme telle. On sait que, sans l'accord du gouvernement il n'y a pas de commission parlementaire, je pense que le leader du gouvernement a suffisamment d'expérience pour savoir cela. Est-ce qu'il y a, oui ou non, accord ou volonté de procéder du gouvernement? C'est ce que nous voulons savoir.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Nous vous disons de faire appel à la commission parlementaire, on verra ensuite.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Très bien. Alors, aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement, est-ce qu'il y a d'autres avis?

M. Jolivet: Vous les avez, M. le Président.

Le Président: Bon, moi, j'ai les miens, mais vous n'en avez pas d'autres? Très bien. Alors, pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique va se réunir demain, le mercredi 20 mai 1998, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est d'entendre le Curateur public en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion de Mme la députée de Saint-François et chef de l'opposition officielle, et cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Parti québécois de déclencher immédiatement des élections générales.»


Affaires du jour

Très bien, s'il n'y a pas d'autres renseignements sur les travaux de l'Assemblée, nous allons passer à la rubrique des affaires du jour. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Veuillez prendrez en considération l'article 25 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 439


Adoption du principe

Le Président: À l'article 25, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 439, Loi sur l'Institut national de santé publique du Québec. Alors, je suis prêt à reconnaître une première intervention. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, ce projet de loi vient confirmer en fait l'existence de l'Institut national de santé publique du Québec qui a déjà été créé en vertu de la loi sur la santé et les services sociaux, avec un statut légal temporaire, pour mettre en place l'Institut et l'amener jusqu'à une formule définitive qui fait l'objet de ce projet de loi.

C'est peut-être bon de se rappeler brièvement l'évolution de la santé publique au Québec dans l'époque contemporaine pour bien voir comment ce projet de loi amène la création d'un institut qui se place tout à fait en continuité et en complément avec ce qui a été fait auparavant dans le domaine de la santé publique. On se rappellera que le Québec a toujours pu s'enorgueillir d'avoir un système de santé publique qui, jusqu'à un certain point, je pense qu'on peut le dire correctement, fait l'envie ou a attiré l'attention de beaucoup d'autres dans le monde.

Tout ça a commencé, si on recule de quelques décennies, par un réseau d'unités sanitaires qui, à l'époque des années cinquante et soixante, constituait, dans le cadre de cette période, un réseau complet de santé publique qui assurait un contrôle de la salubrité des milieux, la prévention de la santé maternelle et infantile, la santé scolaire, qui assurait aussi un contrôle des maladies infectieuses par le dépistage de même que la vaccination et, au besoin, l'application de la quarantaine. Ce réseau existait de façon locale et travaillait en étroite collaboration avec les autorités municipales.

(15 h 20)

Au début des années soixante-dix, lorsque s'est fait, je pense, ce qu'on peut appeler la première organisation d'un système de santé au Québec, avec les hôpitaux, le réseau des CLSC, ce qui était les centres de services sociaux à l'époque, vraiment les différents établissements de santé et de services sociaux ont été regroupés dans une même organisation. Avec un ministère des Affaires sociales, à l'époque, il avait été décidé de ne pas laisser en parallèle ce réseau des unités sanitaires et d'intégrer la santé publique – qui a pris, à l'époque des années soixante-dix, le nom de santé communautaire – de l'intégrer dans 32 départements de santé communautaire qui étaient sous la responsabilité, chacun de ces départements, d'un hôpital désigné. Trente-deux hôpitaux au Québec avaient été choisis pour intégrer un certain nombre d'unités sanitaires chacun et pour continuer à développer de façon mieux intégrée dans l'ensemble des services de santé la santé publique à partir de ces 32 départements.

On se rappellera que, dans les années soixante-dix, c'était encore l'époque où on travaillait beaucoup avec un modèle, en Amérique du Nord, de l'hôpital général comme étant un peu l'organisme de santé principal pour une communauté, qui assurait l'ensemble des services. Les CLSC n'existaient pas encore comme réseau. Les CLSC ont commencé à se développer dans les années soixante-dix, et ce n'est que 10 à 12 ans plus tard qu'on a eu ce qui était vraiment un réseau de CLSC qui a commencé, avec les médecins dans leurs cabinets, avec les groupes communautaires, à tisser ce qui est devenu vraiment le réseau de première ligne au Québec. Alors, ces départements, je pense, ont fait un travail important, ont intégré, à partir des unités sanitaires, la santé publique.

On a développé plus de services préventifs. Les relations et la collaboration avec les écoles et les commissions scolaires ont continué à s'intensifier, et on a pu commencer à développer certaines expertises plus pointues dans différents problèmes de santé publique, parfois en lien avec la santé mentale, avec la santé environnementale et avec différents secteurs de spécialisation. Je pense que c'est à partir des années 1975-1980 qu'on a vraiment vu se pointer au Québec le développement, d'une part, d'une bonne structure de santé publique de base à partir des hôpitaux désignés, et de certaines pointes de spécialités pour faire face à des problèmes particuliers qui pouvaient se présenter.

C'est dans les années quatre-vingt que s'est consolidé ce réseau, avec peut-être une faiblesse qui avait été notée dès ce moment-là, dans les années quatre-vingt, à l'effet qu'au niveau du ministère et pour l'ensemble du Québec il manquait peut-être d'un point de référence, d'un point qui donnait un peu la note pour des priorités d'ordre national et pour certains programmes qui avaient mérite et profit à être articulés de façon plus structurée pour l'ensemble du Québec et plus standardisés entre les différentes régions du Québec.

Lorsque s'est organisé, vers la fin des années quatre-vingt, le réseau de santé que l'on connaît maintenant, c'est-à-dire qu'à partir des hôpitaux et des conseils régionaux qui avaient un rôle de consultant, d'aviseur pour le ministre dans les années 1991-1992 le gouvernement précédent a créé les régies régionales et a commencé dans la loi, a inscrit ce qui était, en fait, les jalons d'une éventuelle décentralisation vers des régies régionales qui devenaient responsables, mandatées dans la loi, avec un mandat beaucoup plus puissant que l'étaient les conseils régionaux. Il ne s'agissait plus seulement d'aviser le gouvernement, mais bien de coordonner les services sur un territoire, d'assurer la participation de la population, de consulter régulièrement et d'allouer les ressources sur une base régionale.

La décision a été prise, à ce moment-là, de continuer à faire évoluer le système de santé publique et de modifier les 32 départements pour en faire 16 directions générales de santé publique dans chacune des régies régionales. On voit donc cette évolution à partir d'un réseau d'unités sanitaires qu'on a évité de laisser en parallèle, qui s'est intégré dans le réseau de santé, dans les années soixante-dix, dans 32 départements, où le point de référence était l'hôpital, et, finalement, avec les régies régionales, on a organisé les directions.

Pendant toute cette période, toute l'époque où il s'est bâti, à partir des départements et, par la suite, les régies régionales, on a vu aussi, dans les universités, en étroite collaboration avec le réseau, comme c'est le cas pour beaucoup d'activités dans le domaine général de la santé, où l'enseignement et la recherche se sont développés par une implication très, très, très serrée des milieux universitaires, des milieux de l'éducation et du réseau de la santé et des services sociaux, on a vu se développer des programmes de formation de premier cycle, des programmes de spécialisation. S'est créée dans les années soixante-dix la spécialité médicale de santé communautaire qui est une spécialité comme toute les spécialités médicales qui existent maintenant. Les universités ont développé des maîtrises et des doctorats dans le domaine de la santé publique et de la santé communautaire.

On arrive donc au début et au milieu des années quatre-vingt-dix avec un réseau fortement ancré dans les régions, qui a aussi développé, en plus de ses liens avec l'université, un certain nombre d'unités spécialisées. Et ça vaut la peine de se les rappeler: il y a le Laboratoire de santé publique du Québec qui donne un soutien technique dans tout ce qui regarde les maladies infectieuses et les domaines de contamination possible; il y a un soutien technique professionnel, aussi, qui est assuré par le Centre de toxicologie du Québec qui est un autre centre; il y a aussi le Centre antipoison du Québec qui s'occupe du contrôle des toxiques et des empoisonnements; il y a, de plus, un service spécialisé qui est le service provincial de dépistage par laboratoire pour les dépistages audiologiques et les radiographies de masse.

Alors, on s'est retrouvé avec tout l'avantage de ce réseau qui s'est développé avec beaucoup de force, mais toujours, ce qui avait été noté dans les années quatre-vingt, ça manque un peu de point central, ce qui a été comblé en partie par la création, dans le début des années quatre-vingt-dix, d'une direction générale de santé publique au ministère, avec une responsable sous-ministre adjoint à la santé publique, et qui a permis graduellement de préparer, de développer ce qui a été rendu public il y a moins d'un an, sept grandes priorités de santé publique qui donnent un peu le ton dans le domaine du sida, par exemple, des maladies infectieuses, de la périnatalité, des traumatismes intentionnels ou non intentionnels. Alors, il y a maintenant sept grandes priorités de santé publique que les régions appliquent en les spécifiant dans les régions, et les régies régionales prennent la suite pour des programmes plus spécifiques. Donc, on a eu cette unité-là.

Il restait un point qui posait problème, c'est-à-dire que toute cette expertise de la santé publique qui avait commencé à se développer avec cinq centres ou laboratoires, d'une part, et avec des équipes dans des directions de santé publique des régions, des équipes spécialisées, des équipes d'experts qui s'étaient développées surtout dans les régions universitaires – il s'entend, à Montréal, à Québec, à Sherbrooke – des équipes qui s'étaient développées quand se sont développés des problèmes particuliers et qui restaient un peu isolées et avec un manque très clair d'unification pour rendre l'expertise disponible pour l'ensemble du Québec, pour toutes les régions.

Pour assurer un développement de cette expertise en évitant trop de duplication et en s'assurant qu'on a des masses critiques d'experts ou que les équipes d'expertise dans différents domaines travaillent un peu plus en réseau les unes avec les autres plutôt qu'isolées, comme elles l'étaient actuellement, pour que nos centres, laboratoires et les équipes d'expertise puissent travailler mieux ensemble pour appuyer la Direction de santé publique qui a maintenant son programme national, si vous voulez, avec les régions, a été conçu...

Et ça, c'est une idée qui a été mise sur la table avant le gouvernement actuel. Je pense que c'est en 1993 qu'on a commencé à travailler sur un projet d'un institut, et toujours très rapidement, en ayant à l'esprit un institut plutôt virtuel. Je pense qu'on peut vraiment l'appeler comme ça, parce que l'idée n'est pas de construire un édifice à 10, 12 étages, de déplacer toutes les équipes qui sont sur le terrain et de les ramener dans un édifice centralisé soit à Montréal ou à Québec. Le concept de l'Institut est de laisser les équipes où elles sont, de leur permettre de continuer leur travail, mais d'être reliées à une programmation générale, si vous voulez, pour pouvoir mieux supporter le département, le développement de l'expertise et aussi mieux appuyer la formation continue. Comme je vous le disais tout à l'heure, les milieux universitaires ont très bien développé la formation de base au niveau des professionnels de la santé et de la formation spécialisée au niveau des maîtrises et des doctorats, mais la formation continue se fait un peu sans encadrement présentement.

(15 h 30)

Alors, tout ça a donné lieu à identifier quatre fonctions pour lesquelles il y avait lieu de donner une autorité, soit une fonction d'abord de service, pour réunir les différents laboratoires et centres auxquels j'ai fait référence qui sont présentement confiés à un hôpital ou l'autre qui en fait simplement une gestion purement administrative, donc de les rattacher pour que tous les services spécialisés soient coordonnés pour l'ensemble du Québec.

Une fonction importante d'information à l'ensemble de la population sur l'évolution de l'état de santé, sur les déterminants de la santé pour qu'on ait une population de plus en plus informée, qui sache assumer la responsabilité – individuellement et collectivement – de sa santé et aussi une information de plus en plus disponible pour l'ensemble de toutes les personnes qui désirent travailler dans le domaine de la santé, que ça soit des chercheurs, d'autres professionnels sur le terrain qui souhaitent connaître une bonne information, validée, sur l'état de santé de la population. Alors, là, il y aura une collaboration qui va s'établir entre cet Institut et l'institut de Statistique Québec pour assurer que Statistique Québec puisse avoir une bonne information épidémiologique, médicale et biomédicale pour bâtir des statistiques dans le domaine de la santé.

Troisièmement, une fonction importante de formation continue, en collaboration avec les milieux de formation, les universités ou autres milieux de formation.

Et, finalement, une fonction d'expertise qui est de regrouper fonctionnellement ce réseau d'équipes d'experts à travers le Québec.

Alors, on voit donc – et c'est ce qui a commencé à se mettre en place depuis six ou huit mois présentement – des équipes – c'est le portrait qu'il faut en avoir – qui demeurent sur le terrain, mais qui bénéficieront, se donneront collectivement un encadrement autour des quatre grandes fonctions que j'ai nommées. Et là je pense que nous pourrons avoir un complément à ce qu'est le système de santé publique du Québec, avec une direction générale pour la programmation, la coordination des activités de santé publique, l'Institut qui répondra de son mandat, sera imputable au ministre et au ministère, et le réseau, avec les régies régionales qui, maintenant, décentralisent les activités plus régulières de la santé publique, avec les CLSC qui sont responsables au niveau d'un territoire très bien identifié. C'est donc un complément, c'est une continuité, c'est un chaînon manquant qu'il fallait ajouter à la chaîne et qui sera cette loi qui va encadrer l'Institut, qui a déjà commencé, à toutes fins pratiques, à fonctionner.

Je termine en rappelant que cet Institut sera dirigé par un conseil d'administration de 15 personnes. Six de ces personnes proviennent du réseau de la santé et des services sociaux, dont deux sur les six sont des directeurs ou des directrices de santé publique, quatre sont en provenance du milieu de l'éducation, qui font déjà partie du conseil d'administration, et quatre autres membres proviennent des différents secteurs socioéconomiques, bien sûr avec le souci d'assurer que les gens du conseil d'administration viennent de différentes régions du Québec.

Le budget de cet Institut ne crée de demande pour aucune ressource nouvelle, ce sont les budgets, déjà, des centres ou des laboratoires qui sont en opération, les budgets qui servent, dans les régies régionales, à l'expertise, qui vont continuer à fonctionner sur place mais qui vont être identifiés à la programmation de l'Institut, et l'expertise médicale qui est présentement rémunérée comme tout travail médical au Québec par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Alors, tout ça ensemble regroupera les ressources qui vont être regroupées et qui vont permettre à l'Institut – virtuel, encore une fois – d'assurer cette coordination en appui avec l'ensemble des régions et en s'assurant que toutes nos connaissances en santé publique sont développées de façon coordonnée et sont vraiment mises à la disposition de tout le monde.

Alors, voilà, M. le Président, je pense, ce qui résume ce qu'est ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président. Vous me permettrez de souligner notre surprise de voir le projet de loi n° 439 être présenté aujourd'hui. Surprise d'abord parce que, d'un côté, ce gouvernement qui nous avait indiqué qu'il voulait diminuer les structures, il a créé un comité d'étude avec certains de ses députés. Le comité a comme nom... Et, comme rapport, le rapport Facal, le nom du député de Vimont, et qui devait...

Une voix: De Fabre.

M. Marsan: ...diminuer – le député de Fabre, je m'excuse, M. le Président – les structures.

Alors, au moment où, d'un côté, on a dit: Voici, il y a un groupe de députés qui se sont penchés pour diminuer les structures, eh bien, de l'autre côté, le ministre de la Santé nous présente un ajout de structure, un institut national qui aura son conseil d'administration composé d'une quinzaine de membres, un président, un P.D.G., des activités et évidemment des obligations en vertu de la loi.

M. le Président, au meilleur des informations que nous possédons par rapport aux gens qui ont à travailler dans le domaine de la santé publique dans le réseau de la santé et des services sociaux, nous questionnons la création de cet Institut et son mandat, par rapport à celui qui est dans le projet de loi versus celui qui aurait pu être une meilleure coordination des directions de santé publique à travers la province.

Je vous lis, M. le Président, la mission qui est suggérée actuellement dans le nouveau projet de loi, parce que, si je parle de nouveau projet de loi, je veux faire allusion, aussi, à la loi existante. Et on verra comment, dans la loi existante, les préoccupations du ministre en ce qui concerne la santé publique sont déjà, à notre avis en tout cas... on rencontre les responsabilités qui sont dévolues avec la loi existante.

Alors, ce qu'on suggère ici, c'est: «Cet Institut a pour mission de soutenir le ministre de la Santé et des Services sociaux et les régies régionales dans l'exercice de leur mission de santé publique.» Alors, là aussi, nous pensons qu'une coordination beaucoup plus simple aurait été avantageuse pour les différentes directions de santé publique, M. le Président.

«Le projet de loi accorde à l'Institut le statut de personne morale, mandataire de l'État et prévoit, pour le diriger, un conseil d'administration composé de 15 personnes représentant les différents milieux [...] de la santé publique.» Est-ce que ça n'aurait pas été beaucoup mieux, au lieu d'avoir cette nouvelle structure, de s'assurer que les directions de santé publique puissent se rencontrer sur une base régulière et discuter avec eux des enjeux au niveau d'une région par rapport à une autre région, au niveau provincial également, M. le Président?

On continue dans les notes explicatives: «Outre des dispositions encadrant l'organisation de l'Institut, le projet de loi prévoit des dispositions pour permettre au ministre d'obtenir la collaboration étroite et immédiate de l'Institut lorsque la santé publique est menacée à la suite d'un événement ou d'une situation particulière ayant un caractère d'urgence.»

Eh bien, là encore, M. le Président, à notre connaissance... peut-être le ministre pourra nous l'expliquer davantage, j'aimerais voir dans quelles sortes de situations on peut penser avoir besoin d'un tel projet de loi et de légiférer pour faire face à un caractère d'urgence. Quelle est cette situation qui n'est pas prévue actuellement dans le cadre de la Loi sur les services de santé et les services sociaux?

Et on parle aussi «des dispositions transitoires, notamment celles relatives au transfert des activité des laboratoires dont l'administration est confiée à l'Institut». On verra un peu plus tard, M. le Président, que, là, le ministre se donne un droit de vie ou de mort sur ces organisations, et, là aussi, ça peut être inquiétant, sachant ce qui s'est passé, par exemple, dans le milieu hospitalier mais aussi dans l'ensemble des établissements de santé.

Alors, dans le projet de loi, M. le Président, la mission du nouvel Institut consiste notamment «à contribuer au développement et à la mise à jour des connaissances dans le domaine de santé publique – eh bien, là encore, on peut se questionner, parce que c'était déjà prévu dans la loi actuelle – à informer le ministre des impacts des politiques publiques sur la santé et le bien-être de la population – ça aussi, c'est déjà prévu, M. le Président – à informer la population sur son état de santé et de bien-être, sur les problème en émergence, leurs déterminants et les moyens efficaces de prévenir ou de résoudre ces problèmes». Eh bien, là encore, je pense, la qualité des différentes directions de santé publique nous permet de penser que ces gens-là sont à la fine pointe des problèmes en émergence et qu'ils sont en mesure de faire les recommandations nécessaires.

(15 h 40)

On parle, dans ce projet de loi, de «collaborer avec les universités à l'élaboration et à la mise à jour des programmes de formation de premier, deuxième et troisième cycles dans le domaine de la santé publique». Là aussi, au meilleur de mes connaissances, je pense qu'il y a des choses assez importantes et intéressantes qui sont faites quant à la formation dans ce domaine. Et je ne pense pas qu'on ait besoin d'un projet de loi pour améliorer la qualité de la formation en santé publique.

«Élaborer et mettre en oeuvre, en collaboration avec les universités et les ordres professionnels concernés, des programmes de formation continue en santé publique». Eh bien, M. le Président, vous allez me permettre de croire que ça fait partie des tâches régulières des différentes directions de santé publique. Je sais qu'elles l'assument de façon vraiment intéressante et intelligente aussi. Alors, pourquoi l'intégrer dans un projet de loi?

«En collaboration avec les différents organismes de recherche [...] offrant des subventions, à développer et favoriser la recherche en santé publique». Eh bien, là aussi, je crois même savoir que le Fonds de recherche en santé du Québec reçoit régulièrement des demandes de subvention dans des secteurs qui relèvent de la santé publique, et qu'il s'en préoccupe au plus haut point, et que tout ça, c'est fait en collaboration avec les experts qui sont sur le terrain. On sait que, lorsqu'il y a des projets qui sont présentés au FRSQ, bien, ce sont des comités d'évaluation qui sont formés par les pairs qui sont en mesure de faire les recommandations.

«Établir des liens avec différentes organisations, à l'échelle canadienne et internationale, de manière à favoriser la coopération et l'échange de connaissances». Là aussi, M. le Président, je pense qu'une coordination élargie aurait permis d'atteindre cet objectif. «Exécuter tout autre mandat que lui confie le ministre», bien, ça, c'est déjà prévu.

J'ai sorti la Loi sur les santé et les services sociaux pour voir de quelle façon on assumait nos responsabilités dans la santé publique actuellement. Eh bien, je vous la lis, et c'est les régies régionales qui ont d'abord à gérer ces dossiers: «gérer le programme de santé publique, à l'instar de n'importe quel autre programme déterminé par le ministre, et, à cette fin, établir les priorités, organiser les services, allouer les ressources et créer une direction de la santé publique.» C'était au moment, évidemment, de l'application de la loi 120.

«Le ministre nomme, sur recommandation de la régie régionale, le directeur de la santé publique.» Là aussi, je pense que le ministre, il a un pouvoir d'intervention qui est quand même important. Et on parle des responsabilités de ce directeur sur un territoire qui est... Puis là on va retrouver l'ensemble des éléments qui ont été mentionnés: informer la population de l'état de santé général des individus qui la composent, des problèmes de santé prioritaires des groupes les plus vulnérables, des principaux facteurs de risque et des interventions qu'il juge les plus efficaces, d'en suivre l'évolution et, le cas échéant, de conduire des études ou recherches nécessaires à cette fin.

Autre responsabilité de cette direction: d'identifier les situations susceptibles de mettre en danger la santé de la population et de voir à la mise en place des mesures nécessaires à sa protection; et enfin, d'assurer le développement d'une expertise en prévention, en promotion de la santé au bénéfice de l'ensemble des programmes confiés aux différentes régions.

On nous indique que le directeur exerce tout autre mandat qu'une régie peut lui confier dans le cadre de ses fonctions et que le directeur doit informer sans retard le ministre de toute situation d'urgence ou de toute situation mettant en danger la santé publique. Dans le passé, ces gens-là ont eu à informer le ministre de désastres potentiels au niveau de certaines, peut-être, épidémies. Là aussi, je pense que ça a été fait avec toute la diligence à laquelle on s'attendait des représentants du gouvernement.

M. le Président, on mentionne également les nouvelles fonctions de l'Institut, qui regroupe quatre laboratoires, celui de la santé publique du Québec – et on sait que c'est le laboratoire qui est spécialisé particulièrement dans les maladies infectieuses – d'administrer, également, le Centre de toxicologie du Québec, le Service provincial de dépistage et le Centre antipoison. La question qu'on peut se poser, c'est: Est-ce qu'on n'est pas satisfait de ce qui se passe actuellement en termes de gestion de ces différents laboratoires? Est-ce qu'il y aurait eu des améliorations à apporter? Et est-ce qu'il fallait faire un projet de loi pour le faire?

Là où on commence à être un peu plus inquiet, c'est quand on va un petit peu plus loin dans le projet de loi, et là le ministre se donne des pouvoirs pour lesquels lui doit sûrement prétendre qu'ils sont nécessaires, mais «le ministre peut donner des directives à l'Institut portant sur ses objectifs et son orientation. Ces directives doivent être soumises [...] pour approbation». «Le ministre peut exiger de l'Institut qu'il mette fin aux activités de l'une ou l'autre de ces organisations ou qu'il modifie leur mission.»

M. le Président, avec les coupures que nous avons connues depuis l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement, est-ce que le ministre ne serait pas tenté de trouver là une autre possibilité de diminuer les services à la population? En tout cas, il se donne des pouvoirs.

Au niveau de l'organisation, eh bien, là on forme un conseil d'administration, on ajoute une quinzaine de personnes, un P.D.G.; ça va sûrement prendre des locaux, des secrétaires. On nous dit que ça ne devrait pas coûter plus cher. Mais allons voir, M. le Président, on pourra sûrement se questionner. On parle des rencontres et des articles habituellement prévus lorsqu'on crée ce genre de structure. Mais, encore une fois, nous pensons que la loi actuelle prévoyait tout ce qui est indiqué dans ce projet de loi et que peut-être, avec une concentration ou un meilleur effort de concertation des différentes directions de santé publique, nous aurions pu atteindre les mêmes objectifs.

Un peu plus loin, un chapitre que l'on consacre aux travaux confiés par le ministre en situation d'urgence. Eh bien, là aussi, la loi actuelle prévoit toutes ces situations.

Les effectifs médicaux. Là on est inquiet, M. le Président, parce que, chaque fois que le ministre de la Santé et des Services sociaux du gouvernement péquiste a voulu régimenter les effectifs médicaux, on s'est aperçu qu'on a aggravé les situations de pénurie sur plusieurs territoires, et on craint que ça se reproduise encore. D'ailleurs, on indique: «L'Institut doit tenir compte, dans l'élaboration de son plan, des objectifs de croissance ou de décroissance que lui signifie le ministre.»

M. le Président, il faudrait aussi voir ce que le réseau pense du projet de loi comme tel. D'abord, je me permets de vous citer la CSN. On sait que la CSN est un des partenaires privilégiés quant à la cause de l'indépendance, le projet d'indépendance de ce gouvernement. Alors, ce partenaire nous dit ceci et nous manifeste une inquiétude, même pas des inquiétudes, des irritants: «La CSN a dénoncé à Montréal la manière dont le ministre de la Santé entend mettre sur pied dans les prochains mois l'Institut national de la santé publique. Cet Institut, dont la création a été décrétée en octobre dernier, serait beaucoup plus centralisateur qu'il ne devait l'être dans le projet initial, ont déploré les représentants, M. Marc Laviolette, vice-président de la CSN, et M. Michel Tremblay, président de la Fédération des professionnels salariés et des cadres du Québec.» Alors, selon eux, le projet initial consistait en un institut virtuel qui aurait mis en réseau les directions. Et c'est là, M. le Président, qu'on peut rejoindre l'hypothèse qui, je pense, au début, en tout cas, était sur la table et qui était de mieux coordonner les différentes directions de santé publique.

Le nouvel Institut puisera presque tout son personnel dans les directions de la santé publique de Montréal-Centre, soit 55 professionnels, agents de recherche, psychologues, intervenants sociaux, 55 médecins, et serait doté d'un budget de 25 000 000 $. Alors, pour les gens de la CSN, cette concentration de subventions de recherche au sein de l'Institut pourrait faire perdre des expertises et une certaine qualité d'intervention dans la région.

(15 h 50)

Alors, M. le Président, on peut continuer. Et, cette fois, c'est le directeur de la santé publique de Montréal qui est repris par une journaliste de la Gazette , Mme Yvonne Zacharias: «Local officials see Health Minister's decision to set up a new Provincial Public Health Institute in Québec City as a simple power grab on which will cannibalize Montréal area public health resources, getting important services in the metropolis. There will be a very important impact and they are underestimating it, says Dr Richard Lessard, directeur de la santé publique pour la région de Montréal.»

M. le Président, on pourrait continuer d'autres témoignages. J'ai pu lire, ou, en tout cas, je crois savoir que même le maire de Montréal souhaiterait pouvoir ajouter sa voix à ceux qui pensent qu'on est en train d'élaborer une nouvelle structure juste pour élaborer une structure. Alors, nous avons déjà des réactions qui sont négatives par rapport au projet du ministre de la Santé. Pourtant, les réactions, au début du projet, étaient quand même encourageantes, lorsqu'on a parlé de mettre les directions de santé publique en réseau, et il y avait un intérêt certain de l'ensemble des directions de santé publique à travers le Québec d'agir de cette façon-là. Mais non, ça, c'est trop simple, ça nous prend une bâtisse, une structure, un P.D.G., des membres de conseil d'administration, des secrétaires, des locaux, et c'est ça, le gouvernement du Parti québécois en fin de mandat.

M. le Président, j'aimerais faire une suggestion au ministre, ce serait d'avoir une commission parlementaire restreinte. Il ne faudrait surtout pas reporter le projet de loi, mais on voudrait écouter ce que les gens ont à dire, et je pense que les gens viendraient dire que le besoin actuellement dans les directions de santé publique, c'est de travailler davantage en réseau, c'est d'avoir une meilleure coordination. Et est-ce qu'on ne pourrait pas écouter, par exemple, les directeurs de santé publique concernés par la création de cet Institut? Est-ce qu'on ne pourrait pas écouter la CSN? Ils veulent nous dire quelque chose, j'aimerais ça qu'on puisse les entendre. Est-ce qu'on ne pourrait pas écouter le département de médecine sociale et préventive de l'Université de Montréal? Là aussi, je pense qu'il y aurait des choses extrêmement valables. Et peut-être aussi les centres de recherche, je pense au Fonds de recherche en santé du Québec. Et la question que j'aurais aimé poser au Fonds de recherche en santé du Québec, c'est: Est-ce que l'Institut, tel que prévu dans la loi, va améliorer la recherche au Québec? Et ça, M. le Président, vous allez me permettre d'en douter. Actuellement, je pense que les mécanismes actuels peuvent répondre de bonne façon.

M. le Président, c'est dommage. J'espère qu'on pourra rediscuter du projet de loi, peut-être le revoir pour s'assurer que le véritable besoin identifié par les gens du réseau... Et, là encore, je mets le ministre de la Santé au défi d'écouter quelques intervenants en commission parlementaire. Eh bien, je pense qu'on aurait avantage, de part et d'autre de cette Chambre, à écouter les gens qui peuvent nous conseiller de bonne façon.

M. le Président, en terminant, je vous informe que, notre formation politique, nous allons donc voter contre le principe dans sa présentation actuelle, en souhaitant que le ministre puisse faire une consultation, une commission parlementaire restreinte pour écouter les gens qui nous livrent leur message d'une façon ou d'une autre. Ils doivent aussi le livrer au ministre, mais on souhaiterait que le ministre puisse aussi écouter ce que les gens ont à dire, et c'est la raison pour laquelle nous allons donc voter contre le principe du projet de loi n° 439, projet de Loi sur l'Institut national de santé publique, malheureusement, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Y a-t-il d'autres intervenants? Oui. M. le député de Verdun. Alors, je vous cède la parole.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Et je suis heureux d'intervenir sur ce projet de loi aujourd'hui parce qu'il va nous permettre d'avoir une discussion importante sur la manière dont on voit l'organisation de la santé publique au Québec. Je suis convaincu que, avec ce projet de loi, le ministre va totalement à contre-courant et je ne comprends pas comment il peut, à l'heure actuelle, le présenter. Je comprends qu'un ministre de la Santé puisse présenter un tel projet de loi, j'ai du mal à comprendre qu'un ancien directeur de département universitaire sur la santé publique puisse présenter un tel projet de loi.

Je fais partie de ceux qui croient profondément à l'importance de toutes les mesures préventives en santé, je fais partie de ceux qui croient que la santé communautaire, la santé publique – enfin, ce qu'on a appelé la «santé publique» – c'est une dimension importante de la médecine. Mais le lien qu'il doit y avoir entre la santé communautaire... c'est que tous les programmes soient adaptés aux populations qu'elles veulent desservir, et on ne peut pas avoir des positions mur à mur; au contraire, les actions qu'on doit avoir en santé communautaire, M. le Président, doivent être le plus décentralisées possible. Je fais partie de ceux qui pensent que la loi 120 était une erreur, lorsqu'elle a aboli les départements de santé communautaire pour les concentrer au niveau des régies régionales.

Dans Montréal – et il y a ici, même chez les ministériels, un certain nombre de députés de Montréal – vous savez parfaitement que les déterminants de la santé publique – et c'est le terme qu'on utilise dans le jargon – la pauvreté, la scolarisation, les éléments dans lesquels les gens vivent, les modes de vie, sont bien différents d'un quartier montréalais à un autre quartier montréalais. Même parmi mes collègues ministériels, la situation de la population – et je vois, par exemple, le député d'Anjou et la députée de Rosemont – ce n'est pas le même type de débat à l'intérieur des déterminants de santé communautaire.

Lorsqu'on a aboli les départements de santé communautaire pour les concentrer à la Régie régionale de Montréal, on a été, à mon sens, à contre-courant en pensant qu'on pouvait avoir des politiques mur à mur, applicables à toute une région, comme la région de Montréal qui regroupe plus de 1 000 000 d'habitants, avec des populations aussi diverses que celles que vous pouvez avoir dans le comté de mon collègue de Jacques-Cartier, ici présent, et que la députée de Pointe-aux-Trembles, avec des populations qui sont aussi diverses l'une de l'autre. Et vous comprenez, M. le Président, que, d'après moi, il faudrait non pas recentraliser, comme on essaie de le faire, dans un institut, mais, bien au contraire, avoir des tendances de décentralisation.

Bon, regardons ce qu'il y a comme fonctions dans l'Institut. Une des principales fonctions, c'est celle d'informer la population sur son état de santé, sur les déterminants qui peuvent déterminer la situation de la santé. Vous comprenez bien et vous le savez parfaitement, n'importe quelle personne qui a quelque connaissance de sociologie va vous le dire, vous n'avez pas la même approche, en type d'information, suivant la clientèle que vous voulez desservir. Ce n'est pas les mêmes problématiques, suivant que les gens sont plus ou moins jeunes, sont plus ou moins âgés, sont des clientèles plus ou moins à risque, suivant certains types de maladie, et l'approche essentielle en santé communautaire, c'est d'avoir une approche qui soit aussi proche que possible des populations.

(16 heures)

Si on m'avait demandé mon avis – mais on ne me l'a pas demandé, mon avis, à l'époque – j'aurais presque été... Parce que je comprends le ministre, lorsqu'il a fait son exposé historique – et je crois que son exposé historique était parfaitement correct – il a rappelé que, au moment où on avait rattaché les départements de santé communautaire à des hôpitaux, c'était au moment où on avait une vision de l'hôpital régional, avant la création des CLSC. Ça, je n'en disconviens pas. Nous avons ensuite fait le pas, la création du CLSC. La logique, d'après moi, aurait été immédiatement de réassocier les cartes de départements de santé communautaire à la carte des CLSC. Ç'aurait été, d'après moi, la logique, et non pas reconcentrer comme on l'a concentré. Parce que, lorsqu'on prétend que les régies régionales, ça a été une décentralisation, c'est, à mon sens, totalement faux. On concentre.

Comprenez-moi bien, on a, à Montréal, actuellement, une espèce de monstre qui est la Régie régionale avec des budgets qui voisinent le 1 000 000 000 $ et on me dit: On a décentralisé. Soyons donc sérieux, s'il vous plaît. On a, au contraire, reconcentré les pouvoirs qui avant étaient dans un des 32 départements de santé communautaire, on les a remontés au niveau de la Régie régionale. Et là non seulement on veut faire un pas de plus, on ne va pas non plus aller au niveau des régies des 16 régions du Québec, mais on va faire quelque chose qui est uniforme pour l'ensemble de tout le Québec en créant cet Institut. Il va s'appeler comment? L'Institut national de santé publique du Québec.

Vous comprenez bien, M. le Président, la base même de l'argumentation que j'essaie de faire avec vous, c'est que tout programme de santé communautaire ou de santé publique doit être adapté à la population qu'il veut desservir, et les populations qu'il veut desservir sont diverses. On ne peut pas avoir le même programme pour le Centre-Sud de Montréal, où le problème du virus du VIH est un problème présent et réel, que pour, par exemple, certains autres quartiers de Montréal ou quartiers de l'île de Montréal où le problème du VIH n'a pas la même importance ou n'est pas aussi incisif.

Alors, je crois, moi, que c'est une chance, ce projet de loi. Il nous ouvre la porte à la chance de pouvoir faire un débat sur comment on voit l'organisation de la santé communautaire et de la prévention dans le régime de santé au Québec. Je suis de ceux qui pensent que le plus décentralisés nous pourrons être... Et j'aurais souhaité qu'on puisse même décentraliser au niveau de la carte des CLSC. Peut-être que ce n'est pas faisable. Mais le plus décentralisés pourrions-nous être dans les programmes de santé communautaire, le mieux serions-nous en mesure de répondre aux besoins de la population.

Alors, le ministre va se lever et va dire: Oui, bon, il y a évidemment la question de l'information. Peut-être nous donnera-t-il raison, peut-être nous donnera-t-il tort, mais il y avait, disait-il, les unités spécialisées en santé communautaire: c'étaient le Laboratoire de santé publique, le Centre de toxicologie, le Centre antipoison et le Centre de dépistage. C'étaient trois centres.

M. le Président, je comprends bien qu'on ne va pas – et je ne suis pas fou non plus – être en train de vouloir un centre antipoison – ha, ha, ha! – dans chaque territoire de CLSC ou un centre de toxicologie dans chaque territoire de CLSC. Il fallait bien que ceci soit centralisé. Mais on a deux universités au moins, si ce n'est trois, qui ont des départements qui s'occupent de santé communautaire. Ça s'appelle «médecine sociale et préventive» à l'Université de Montréal; je crois qu'il y a un terme analogue à l'Université Laval et à l'Université McGill. Il serait très simple de rattacher ces laboratoires et ces centres de toxicologie, ces centres antipoison aux universités, de dire – parce qu'une des fonctions de l'Institut, je me permettrai de vous le rappeler, c'est aussi de faire de la formation continue auprès des intervenants en santé communautaire, et, bon Dieu, dans d'autres secteurs, on ne crée pas des instituts chaque fois qu'on reconnaît l'importance de la formation continue: Les institutions universitaires qui ont des départements de médecine sociale et préventive, de santé communautaire ont aussi dans leur territoire une responsabilité sur la formation continue, c'est-à-dire le maintien à niveau des intervenants dans ce secteur-là. Et on aurait intégré facilement ces quatre laboratoires aux universités.

Ça ne sera pas la première fois que les universités ont des laboratoires qui sont en partenariat avec le milieu, qui peuvent à la fois faire de la recherche fondamentale, comme le font d'ailleurs certains de ces laboratoires en milieu universitaire, mais aussi de la recherche appliquée et des interventions en milieu, et ça aurait été quelque chose qui aurait été beaucoup plus simple.

Alors, M. le Président, pour nous, je crois qu'il y a une tendance, il y a pour nous la chance de pouvoir faire un débat ici, au niveau de cette vision surcentralisée et contre-productive de la santé communautaire. On pourrait facilement régler sur les questions qui touchent les laboratoires, c'est-à-dire la nécessité de donner une certaine expertise. Bien sûr, il est nécessaire d'avoir un endroit où on a une concentration d'experts en toxicologie pour donner rapidement un diagnostic sur un empoisonnement ou quelque chose comme ça. Ça pourrait parfaitement être intégré dans le réseau universitaire. Dans les quatre fonctions que vous voulez, M. le ministre, actuellement, donner à l'Institut, il y en a trois que vous pouvez facilement intégrer dans les fonctions universitaires, soit le labo de service, la dimension formation continue des intervenants en santé communautaire et la fonction d'expertise. Ça, c'est trois fonctions qui pourraient facilement être intégrées dans les trois universités qui ont des départements de médecine sociale et préventive. Je dis trois, il y en a peut-être quatre, je ne suis pas sûr, mais enfin, disons, la nécessité de pouvoir intégrer ces laboratoires à l'intérieur du réseau universitaire.

Mais, dans ce qui touche la fonction information, dans ce qui touche réellement la nécessité, dans la médecine sociale et préventive, d'être proche de la population, de pouvoir intervenir directement et d'avoir des programmes qui soient adaptés aux réalités de la population qu'on dessert, je me permets de plaider et de replaider ici avec extrêmement de force que les problèmes ne sont pas les mêmes, qu'on ne peut pas avoir des visions horizontales. On doit adapter à la réalité des populations que l'on veut desservir, et la population du sud-ouest de Montréal n'a pas les mêmes problèmes que la population de l'ouest de Montréal, n'a pas les mêmes problèmes que ceux de l'extrême-est de Montréal, qui ne sont pas les mêmes problèmes que ceux du centre-sud de Montréal, et les informations qu'éventuellement les gens qui agissent en santé communautaire vont devoir donner à ces populations ne seront pas les mêmes. Alors, je plaide aujourd'hui contre le mur-à-mur. Je plaide actuellement contre les visions uniformes de la santé communautaire. Je plaide contre cette vision où on veut avoir le même programme qui s'appliquera à tout le monde partout, de la même manière, et c'est ce, à l'heure actuelle, sur quoi je suis en train de m'élever et, je crois, qu'on est en train de mettre dans l'Institut.

L'action en santé communautaire, l'action en prévention se veut être une action qui agit sur les déterminants de la santé publique. C'est une problématique souvent assez complexe qu'on ne peut pas traiter d'une manière uniforme sans être conscient des problématiques des gens qui doivent recevoir le message parce que, dans le fond, qu'est-ce qu'on essaie de faire en santé publique et communautaire? On essaie de changer, de faire en sorte que les individus changent leur façon de vivre, leur façon d'être, leur façon de s'alimenter, leur façon d'interagir les uns avec les autres de manière à mieux protéger leur santé, de manière à pouvoir se maintenir dans une meilleure santé. C'est ça, la base même de la santé communautaire, et, si vous ne le faites pas en tenant compte des réalités dans lesquelles vivent les populations, je m'excuse, vous allez avoir une vision uniforme qui ne répondra pas aux besoins de chacune des populations.

Vous ne pouvez pas parler, M. le Président... Prenons certains cas dans les grandes lignes. Et, je dois dire, je partage les sept grands axes d'action en santé communautaire. Je vais vous les rappeler puis je vais vous prendre un exemple pour que vous compreniez bien. Il y a sept grands axes, actuellement, en santé communautaire: le développement et l'adaptation sociale des enfants et des jeunes, les maladies évitables par l'immunisation – ça, c'est ce qu'on peut avoir par vaccination – bon, le VIH, le sida et les maladies transmises sexuellement, le dépistage du cancer du sein, le tabagisme, les traumatismes non intentionnels et intentionnels – ça, c'est toute la dimension de la violence, du suicide, etc. – l'alcoolisme et la toxicomanie.

(16 h 10)

Dans une population qui est beaucoup plus âgée, si vous avez une population âgée, par exemple, vous allez avoir une approche au tabagisme ou une approche à la violence ou au suicide qui sera différente de celle d'une population beaucoup plus jeune. Ça ne sera pas le même type de message. Vous allez adapter votre message ou vos interventions en fonction des populations que vous voulez amener à changer leur comportement. Si on essaie d'avoir une vision uniforme, comme déjà, malheureusement... Et je dois le dire en toute honnêteté, malheureusement le fait d'avoir aboli ce qu'on appelait les 32 départements de santé communautaire pour les ramener, à Montréal particulièrement, en un seul département de santé communautaire, à mon sens, ça a été une erreur, ça a été à contre-courant.

Alors, une fois que je vois qu'on a été à contre-courant en faisant ce geste-là, j'ai l'impression que, lorsqu'on crée un institut qui va être un institut qui aura une fonction non plus simplement à l'intérieur d'une régie régionale mais une responsabilité horizontale pour tout le Québec, je dis: Wo! Un instant! Si déjà la concentation, parce que j'appelle ça de la concentation, au niveau de la Régie régionale de Montréal, des départements de santé communautaire en un seul département était une chose que je trouvais néfaste et allant à l'encontre de la direction dans laquelle on devait aller, a fortiori, vous comprenez bien que la concentation au niveau de tout le Québec au-dessus des régies régionales va, elle aussi, encore plus aller à contre-courant.

Alors, c'est ça, M. le Président, qu'on voudrait débattre. Il est clair qu'on ne va pas ici débattre sur un point ou pas, mais ce qui est sous-jacent à cette loi-là, c'est comment, comme société, on aborde la question de la prévention. Nous pensons, de ce côté-ci, que tous les programmes de prévention doivent être le plus décentralisés possible, le plus près des populations concernées. Par le projet de loi, ce gouvernement va exactement, d'après moi, à contre-courant. Il est en train de concentrer, de remettre ça, les responsabilités, et au niveau du ministère et au niveau de cette nouvelle créature qu'on est en train de générer ou à laquelle on nous propose d'adhérer, qui est l'Institut national de la santé publique du Québec.

M. le Président, je plaide réellement pour qu'on change l'orientation, qu'on redécentralise au maximum. Je me permets de vous rappeler que les fonctions qui doivent être centralisées peuvent être mises à l'intérieur des universités, sans difficulté: les trois laboratoires, la fonction d'expertise et la fonction de formation continue. Mais en ce qui touche l'information, en ce qui touche tout ce qui est les politiques de prévention, à mon sens, elles doivent être le plus décentralisées possible. Je crois que ce projet de loi va à contre-courant par rapport à ce que je crois, moi, en termes de santé communautaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, j'aimerais intervenir dans le débat de principe sur le projet de loi n° 439, Loi sur l'Institut national de santé publique du Québec; Bill 439, An Act respecting Institut national de santé publique du Québec.

Je pense qu'il y a une question fondamentale que tout parlementaire doit se poser avant d'accepter la création d'une nouvelle structure. On a longuement plaidé que les finances publiques sont dans un état très, très difficile. On a dit qu'on n'a pas les moyens pour répondre souvent aux besoins très importants de la population. Alors, avant d'embarquer, avant de donner notre approbation à la création d'un institut qui va coûter au moins 23 000 000 $, 24 000 000 $ par année, je pense qu'on a le devoir de dire comme il faut: Est-ce qu'on a vraiment besoin de ça?

Parce qu'il y a toujours la tendance pour les élus de créer des choses, parce que ça donne une bonne nouvelle, ça donne l'impression qu'on est en train de s'occuper des problèmes de la population. Pour un ministre, des deux côtés de la Chambre, il y a au moins trois événements publics qu'on peut faire: il y a l'annonce, il y a certaines conférences de presse, une certaine attention médiatique; quelques mois après peut-être que le ministre va arriver, pelle en main, pour la première pelletée de terre; et, troisièmement, il peut couper un ruban. Alors, il y a trois activités au moins associées avec une bonne nouvelle.

Mettre la clé dans quelque chose, fermer quelque chose, comme élu, on n'aime pas ça, parce qu'il n'y a pas d'annonce, il n'y a pas de publicité, pas de réception vins et fromages où on peut annoncer la bonne nouvelle, quand on met la hache dans quelque chose, qu'on met des personnes à la porte. Alors, je pense qu'il y a toujours une tendance dans notre système de créer des institutions, de créer des structures, de créer des organismes. Et juste les difficultés de mettre fin, le gouvernement a annoncé en grande pompe un petit comité, présidé par le député de Fabre, qui publiait un grand rapport de 200 pages. Mais, en bout de ligne, ils ont identifié uniquement 11 organismes de l'État qu'on peut fermer.

Et le gouvernement nous a rassurés, au moment de l'adoption de ce projet de loi, qu'il n'y avait aucune incidence budgétaire, parce que ces 11 organismes n'existaient que sur papier; ils n'avaient aucune fonction, c'était des choses qui étaient complètement désuètes. Alors, ils ont trouvé le courage politique, M. le Président, de mettre la hache dans ces 11 organismes très obscurs.

Alors, je pense, comme parlementaire, qu'on a toujours le devoir de poser des questions sur les besoins avant de procéder à quelque chose qui va nous coûter cher. Je me rappelle que j'ai fait un discours semblable au moment de la création du ministère de la Famille. Et on a vu en un an les frais de gestion pour les services de garde augmenter de 500 %, M. le Président, 500 %. Alors, un programme qui coûtait 6 000 000 $ par année coûte maintenant 30 000 000 $ par année de frais de gestion.

Alors, je pense qu'on a tout intérêt à faire une mise en garde. Ces choses deviennent plus dispendieuses que prévu. Ça va coûter cher. Alors, est-ce que ça répond aux besoins réels? Est-ce qu'on a vraiment une proposition ici qui va corriger une situation ou est-ce qu'il y a d'autres structures existantes qui peuvent prendre la relève?

Et, quand j'ai fait la lecture du projet de loi n° 439, il y a plusieurs endroits où je me posais la question que peut-être, avec les organismes existants, on pourrait faire les choses prévues dans le projet de loi. Alors, à l'article 3, au 3°, on parle d'un devoir d'«informer la population sur son état de santé et de bien-être, sur les problèmes en émergence, leurs déterminants et les moyens efficaces de prévenir ou de résoudre ces problèmes».

Quand on parle de la prévention, quand on parle de vraiment informer la population, moi, je pense que c'est essentiel que ça soit fait au moins sur une base régionale, sinon au niveau local. Parce qu'informer la population, on a des clientèles cibles. Si c'est une question des maladies sexuelles, c'est avec les écoles, c'est là où on va trouver les jeunes. Alors, on veut un partenariat avec les commissions scolaires, on veut un partenariat avec les CLSC pour aller chercher ces clientèles cibles pour donner l'information sur la prévention. Ce n'est pas quelque chose ici, à Québec, qui va être capable d'établir ces partenariats pour informer bien la population sur ces enjeux. Il faut aller sur le terrain. Et, si on a des enjeux qui sont très particuliers dans une région ou une autre ou une population ou une autre, c'est une autre raison pour chercher les partenaires qui sont près de ces clientèles, de ces populations, pour les informer.

Alors, quand je regarde ce devoir d'un nouvel institut, je me demande: Est-ce que ça, c'est la bonne place pour le faire? Ou est-ce qu'il y a des partenaires existants? Et, moi, je trouve qu'il y en a. Entre le ministère, les régies régionales, les universités, les CLSC, les commissions scolaires, on a déjà un réseau pour faire l'information à la population, entre autres.

Et ajouter un autre acteur, ça va juste multiplier les rencontres, ça va probablement retarder le développement des programmes au lieu de l'accélérer, parce que ça va être une autre étape. Chaque fois qu'on ajoute une étape dans le cheminement d'un dossier, c'est un autre trois mois ou six mois. Ça prend du temps, ça prend des rencontres, tout le monde doit se déplacer vers Québec pour régler le dossier; alors, je trouve qu'on va retarder au lieu d'accélérer. Alors, ça, c'est le premier.

(16 h 20)

Quand je vois, au 5° dans le même article 3, «de mettre en oeuvre [...] des programmes de formation continue en santé publique», encore une fois, je pense que c'est quelque chose qui se fait dans les universités en collaboration avec d'autres partenaires, soit les commissions scolaires, les cégeps. Alors, je pense qu'on a tout ce qu'il faut déjà en place pour actualiser l'alinéa 5° et je pense qu'on n'a pas besoin d'ajouter un autre acteur, de créer une autre étape avant la mise en place.

Au 6° du même article, quand on parle de «développer et de favoriser la recherche en santé publique», on a déjà notre Fonds de recherche en santé du Québec, le FRSQ, qui fonctionne bien. Je pense que ça va être peut-être une surprise pour le ministre, mais, au moment où il y avait des tractations avec le gouvernement fédéral, il y avait plusieurs chercheurs de mon comté, qui travaillaient à l'Université McGill, qui m'ont écrit pour appuyer la position du ministre, pour défendre les intérêts du Québec dans l'octroi des subventions, parce que le FRSQ fonctionne très bien.

Alors, je me demande, si ça fonctionne très bien, au lieu de donner le mandat de développer et de favoriser la recherche en santé publique à une autre structure, peut-être qu'on a tout intérêt à peut-être préciser le mandat du FRSQ ou à ajouter un autre volet, santé publique, pour s'assurer qu'on a des projets qui vont aller de l'avant. Parce que ça fonctionne bien. Le ministre a toujours dit que le FRSQ fonctionne bien. Alors, au lieu de faire un dédoublement, d'ajouter une autre structure, je pense qu'on a tout intérêt à voir si, à l'intérieur du réseau existant, plein d'acteurs, peut-être qu'on peut arriver avec une solution autre qui réponde aux choses qui sont ici.

Même chose, je ne suis pas un expert, mais je n'ai jamais entendu des problèmes avec la gestion des laboratoires spécialisés qui sont mentionnés dans l'article 4. Alors, on va voir en commission parlementaire, mais, à date, il n'y a personne qui m'a dit que les laboratoires spécialisés en microbiologie, en toxicologie, en audiologie, en radiologie et en intoxications, que ces laboratoires fonctionnent mal, que ça ne marche pas. Alors, il y a une preuve à faire avant de dire qu'il faut tout chambarder, qu'il faut tout changer, qu'il faut enlever ça des hôpitaux et le transférer à l'Institut à Québec. Je pense qu'il y a une preuve qui doit être faite que le système existant ne marche pas. Comme je dis, à ma connaissance, et je ne suis pas un expert et je n'ai aucune prétention de l'être, il faut faire la preuve tangible – et le fardeau de la preuve est sur le ministre – avant de chambarder le système, parce que, sinon, peut-être que... Au lieu de créer un institut, une structure qui risque de devenir dispendieuse, peut-être qu'on a tout intérêt à voir si les acteurs et le système existants peuvent mieux fonctionner.

La même chose, et je pense qu'on a tout intérêt... On parle, dans les articles 20 et 21, de mémoire, d'un rôle de l'Institut dans une situation d'urgence. Une situation d'urgence souvent a un caractère local. Je pense, si on peut faire une comparaison, on voit le ministre de la Sécurité publique avec nous autres, dans la tempête de verglas, ce n'était pas tout le Québec qui était affecté, mais c'étaient certaines régions. Il faut établir les acteurs sur le terrain pour réagir rapidement, mettre les partenaires en place. Même chose s'il y a une question de santé publique, souvent il y aura un caractère local. On n'a pas besoin d'une équipe de gestion de crise loin de la situation. Je pense que c'est beaucoup mieux d'avoir ça sur place. Les départements de santé publique qui existent déjà à travers le Québec, il y aurait une tendance à les remplacer par un état major ici, à Québec, qui risque de prolonger les délais dans le traitement de la crise.

Je pense qu'encore une fois le fardeau de la preuve dans la situation des urgences... Quand il est question de la santé publique, est-ce que le système existant fonctionne ou non? Je pense qu'on a tout intérêt à regarder ça, surtout pour Montréal, parce que malheureusement il y a des phénomènes à Montréal qu'on ne trouve pas ailleurs. À cause de sa population, de sa démographie, des composantes de sa population, il y a des choses qui sont uniques à Montréal. Avant de créer du mur-à-mur, avant de créer une structure pour répondre à tous les maux, à toutes les questions, peut-être qu'il faut développer davantage les expertises à Montréal. On le voit dans les réactions du Dr Gilles Thériault de l'Université McGill qui a dit qu'il y a effectivement des dossiers précis, que, si c'est une question de campagne de prévention du sida, avant tout, ça, c'est un dossier très important dans la région montréalaise. Ce n'est pas dire que ce n'est d'aucune importance dans le reste du Québec, mais, avec le taux d'incidence des personnes qui sont affectées par le VIH dans la région montréalaise, c'est un dossier prioritaire dans la région de Montréal.

Il y a également le défi multiculturel. On a juste à penser au thalassemia qui est une maladie du sang. Il y a des tendances surtout dans les populations d'origine de la Méditerranée. Entre autres, mon épouse a cette condition dans son sang. Alors, c'est quelque chose qui est très important chez les Grecs, chez les Italiens, curieusement également, de mémoire, je pense, dans le comté de Charlevoix où il y a une tendance aussi vers la thalassémie. Mais ce n'est pas quelque chose de mur à mur, ce n'est pas quelque chose qui est important à travers le Québec, mais, dans certaines clientèles cibles, dans certaines populations, ça, ça a une importance extraordinaire.

Alors, encore une fois, je pense qu'un institut, à Québec, qui doit voir les problèmes sur un plan provincial, peut-être qu'il ne sera pas assez sensibilisé à l'importance de cette condition pour certaines clientèles et certaines régions de la province. Alors, pour moi, j'ai tout intérêt à dire que c'est les régies régionales en place qui connaissent mieux leur population, et, comme j'ai dit, dans la région montréalaise, surtout pour, entre autres, la communauté d'origine grecque, la communauté d'origine italienne, ça serait un enjeu très important. Alors, moi, je veux garder cette expertise, garder ces personnes sur le terrain à Montréal au lieu de les transférer à Québec parce que je pense que c'est très important d'avoir cette expertise sur le terrain pour travailler avec les clientèles en question.

Même chose, on peut prendre un dossier comme le suicide, et je pense qu'on a juste à penser à la population chez les Cris ou les Inuit, dans le comté du député d'Ungava, ce sont des enjeux qui sont fort différents de la tragédie qu'on a vue dans Coaticook, dans les Cantons-de-l'Est. Et prétendre qu'il y a un institut avec une approche qui va répondre aux besoins de toutes ces clientèles, je pense que c'est complètement faux, M. le Président. Alors, je pense qu'au lieu d'essayer de centraliser et de généraliser l'expérience on a tout intérêt à garder la diversité, la différence de ces enjeux, même à l'intérieur du même phénomène. Et, pour un phénomène aussi nébuleux que le suicide, la prévention, c'est quelque chose dont on ne peut pas dire que, ça, c'est le plan, ça, c'est la façon de prévenir le suicide. Malheureusement, ça n'existe pas. Alors, il y a différentes méthodes, mais tout le monde est d'accord que ça doit être sensible aux clientèles en question, aux besoins locaux, et je pense que, pour éviter un plan national qui va tout faire, il faut garder l'importance des départements de santé régionaux. Et, dans ce sens, je pense que la proposition qui est devant nous aujourd'hui, comme l'a dit notre collègue le député de Verdun, va à contre-courant.

Et on a un exemple fort personnel, fort tangible de l'importance de garder l'expertise sur le terrain et de ne pas faire comme le Dr Richard Lessard, du département de santé publique de la Régie régionale du Montréal métropolitain, qui a dit dans l'approche qui est proposée: «They – c'est-à-dire le ministre, le ministère – are taking kind of an academic approach by taking people out of the field in which they practice and putting them into an institute to become consultants.» Alors, il trouve que c'est une approche un petit peu trop tour d'ivoire d'enlever les personnes qui travaillent sur le terrain et de les mettre dans une tour d'ivoire plutôt théorique où elles vont se pencher sur les enjeux de la santé publique au lieu d'avoir les personnes qui travaillent sur le terrain.

(16 h 30)

Et, effectivement, peut-être, la journée la plus difficile que j'ai vécue comme député du comté de Jacques-Cartier a été le 2 avril 1995, au moment où on a reçu la nouvelle au sujet d'un couple de la ville de Beaconsfield, qu'il y avait eu un meurtre dans leur maison, pas loin de chez moi. Et, quelques jours après, on a également appris que c'étaient trois jeunes de notre communauté qui avaient été les acteurs de cette tragédie, de ce meurtre très, très violent. Et, comme député, avec le maire, la police, la commission scolaire et les autres organismes communautaires, mes collègues les autres députés de l'Assemblée nationale, nous avons dit qu'il fallait faire quelque chose, mais ce n'est pas quelque chose de facile. C'est quoi, la démarche appropriée? Comment est-ce qu'on peut travailler avec la communauté, avec tout le monde qui a été blessé par cet événement, pour essayer de guérir, pour aider les personnes qui ont été blessées? Et grâce, entre autres, à la présence du Dr Lessard, qui a accepté notre invitation de venir avec ses collègues Robert Perreault et André Bergeron, on a eu leur expertise à notre disposition pour faire un genre de réaction et on a organisé, entre autres, un grand colloque communautaire. Camille Bouchard est venu, a participé. C'était vraiment une soirée extraordinaire où une communauté... Je pense qu'il y avait 400 personnes qui sont venues pour témoigner de la façon dont elles ont été blessés par cet événement et voir comment on peut travailler auprès de nos jeunes et nos étudiants pour, dans la mesure du possible, prévenir un autre incident horrible.

Et, moi, je crois que la disponibilité de ces experts sur l'île de Montréal, pas loin de chez nous, qui étaient capables de se déplacer rapidement était un atout précieux dans cet incident, et je ne veux pas éloigner cette expertise et ces experts des besoins de la région montréalaise. Alors, pour cette raison, je ne peux qu'appuyer les déclarations du Dr Lessard, qui a indiqué qu'il faut garder les personnes sur le terrain, proches des problèmes, proches des personnes qui souffrent des ces problèmes, au lieu de les éloigner.

So, Mr. Speaker, what we have before us is a bill that... I don't think the proof has been made that we need another structure. There are a lot of problems that are raised with what is before us today. Many of the activities outlined in the bill can be done by other people already or are being done by other people, whether it's the CLSCs, whether it's the regional health boards, whether it's the ministry itself, whether it is universities, colleges, or school boards. There are a lot of people already working in the public health sector to create an institution which will have an annual budget, if we can believe what we've read in the papers, of about 23 000 000 $ or 24 000 000 $. That's just projected. Once we get to actually opening it, it will probably be much higher. I think it's just going to add another obstacle instead of trying to keep these services as close to the population, as close to the people who need access to these services, so that the people who are asked to come up and design programs of prevention are also working with the populations who are affected. So, instead or creating something that removes frontline workers and draws them in to an ivory tower, as Dr Richard Lessard of Montréal has said, you would have people kept in the local areas.

Pour ces questions, je pense que c'est fort important, M. le Président, en terminant, qu'on puisse avoir l'occasion d'inviter certains témoins experts, des personnes qui travaillent dans la santé publique, des personnes qui travaillent dans les universités, les régies régionales, de poser la question: Est-ce qu'il y a moyen, avec les structures existantes, de répondre aux défis, à la mission qui est décrétée par le ministre, sans qu'il y ait une autre structure qui risque de devenir très dispendieuse pour le contribuable? Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, je voudrais intervenir sur le projet de loi n° 439, Loi sur l'Institut national de santé publique du Québec. Quand j'ai lu ce projet de loi, le premier constat qui m'est venu spontanément à l'esprit est que ce projet de loi, qui nous propose en fait une nouvelle structure, ne répond pas aux besoins de la population en matière de santé publique et, surtout, en santé tout court.

J'ai eu l'occasion à plusieurs reprises d'interpeller le ministre de la Santé et des Services sociaux ici même, dans cette Assemblée, pour lui faire remarquer qu'il y a des ressources qui manquent dans les régions, que, en Montérégie par exemple, il y a un sous-financement chronique, que les partenaires et les intervenants en matière de santé mentale sont aux prises avec des problèmes criants. J'ai eu l'occasion de lui signaler le problème grave que vivent nos jeunes dans les centres jeunesse faute de ressources. Le ministre a fait la sourde oreille à tous ces commentaires et à tous ces besoins qui se manifestent au quotidien.

Aujourd'hui, comme par hasard, il nous arrive avec un projet de loi qui ne propose aucune amélioration concrète aux services de santé et encore moins aux services de santé publique. Je m'interroge, M. le Président, sur la pertinence et sur l'utilité d'un tel projet de loi. De quoi s'agit-il exactement et à quels besoins ce projet de loi répond-il? La réponse est que c'est une structure de plus, rien qu'une structure, qui ne s'adresse à un aucun besoin, qui ne répond à aucun problème concret et qui non seulement ne répond à aucun problème, mais qui risque de créer des problèmes.

La santé publique est un domaine majeur qui repose essentiellement sur deux axes: la promotion de la santé dans le public, et le plus largement possible, et la prévention auprès des publics cibles. Mais où sommes-nous, au Québec, dans ce domaine? Objectivement parlant, la santé publique est un domaine d'expertise qui s'est développé au fil des ans et qui s'est consolidé surtout dans les années quatre-vingt. Les hôpitaux, les universités, les centres spécialisés ont développé également une expertise très pointue dans différents domaines. Il en va, par exemple, du Centre de dépistage, du Centre de toxicomanie, etc.

Par ailleurs, au niveau de la livraison des services comme telle, nous avons déjà les régies régionales de santé et de services sociaux qui ont pour mandat justement de coordonner les services de santé et services sociaux en région, y compris le mandat de la santé publique, et, à ce que je sache, M. le Président, exception faite du manque de ressources, les régies régionales font ce qu'elles ont à faire en matière de santé publique. J'ai eu moi-même l'occasion de participer à des activités en Montérégie et j'ai pu me rendre compte que les besoins sont pris en compte par les différents partenaires du milieu. Alors, sans compter, pour parler des structures toujours, qu'à l'intérieur même du ministère il y a une direction qui s'occupe de la santé publique, une sous-ministre qui est responsable de la santé publique. Alors, où est-ce qu'on va aller avec la superposition des structures? Cet Institut n'apporte absolument rien de nouveau.

Si on prend, par exemple, l'expertise qui a été développée dans les universités, pour illustrer le propos que je veux tenir, je dois dire que le Québec est, d'une certaine manière, à l'avant-garde en matière de planification et d'organisation des services de santé publique. Cette expertise, non seulement elle est connue chez nous, mais elle est également reconnue internationalement. De nombreux médecins, infirmières, personnels soignants participent d'ailleurs à des projets de médecine communautaire un peu partout dans le monde, à leur propre initiative, dans le cadre des programmes universitaires ou dans le cadre des échanges entre gouvernements. Par exemple, l'hôpital Sainte-Justine a coordonné et aidé au développement des services de santé de l'Hôpital pour enfants de Tunis – dans le domaine de la santé communautaire, je parle – l'Université Laval a apporté son concours à plusieurs projets de santé communautaire en Afrique, notamment aux Comores, l'Université de Montréal est pratiquement jumelée avec la Faculté de médecine de Sousse, en Tunisie, en matière de santé communautaire, l'Université de Sherbrooke a une grande expertise dans le domaine de la santé publique, notamment dans l'Afrique des Grands Lacs, le Zaïre, le Rwanda, le Burundi et également le Sénégal.

(16 h 40)

Alors, si toutes ces expertises-là sont connues et reconnues, si elles sont efficaces, si elles correspondent à des besoins, si ces besoins sont près de la population, pourquoi créer un institut national de santé publique? Ça correspond à quels besoins? Ça répond à l'attente de quelle clientèle? Dans quelle partie du Québec? M. le Président, c'est ça qui est incompréhensible et qui n'est pas justifié et motivé, qui ne repose sur aucun argument valable, dans ce que le ministre nous a présenté tantôt.

Comment donc créer une structure de toutes pièces, une structure centralisée – parce qu'on parle ici d'un institut national de la santé – alors que nous avons déjà des régies régionales dans toutes les régions du Québec qui s'occupent de la coordination et de l'organisation des services de santé? Et ces régies régionales ont été créées avec le mandat spécifique de répondre aux besoins de santé et services sociaux pour chacune des régions. Qu'est-ce que ça veut dire, répondre aux besoins des régions? Ça veut dire tenir compte de la réalité du milieu, tenir compte des besoins du milieu, tenir compte aussi des partenaires et des ressources du milieu. Ces structures-là existent, elles fonctionnent, et voilà que le ministre veut superposer une autre structure en créant l'Institut national de la santé publique.

Et, quand on regarde le projet de loi n° 439 article par article, on ne peut que s'étonner des motivations qui sont apportées notamment au chapitre II, Mission et fonctions. Alors, on apprend que cet Institut national de la santé publique a pour mission de soutenir le ministre de la Santé et des Services sociaux ainsi que les régies régionales dans leur travail. Comment ça se fait que tous ces organismes-là qui existent, qui fonctionnent, ne peuvent pas apporter leur concours et soutenir le ministre dans ce qu'il a à faire? Je n'arrive pas à comprendre cette motivation.

De plus, on nous dit que cette nouvelle structure va également coordonner le développement et la mise à jour des connaissances dans le domaine de la santé publique. Mais, M. le Président, il existe déjà un système de coordination à l'intérieur même du propre ministère de la Santé et des Services sociaux. Le ministre l'a dit lui-même, il y a un sous-ministériat qui s'occupe spécifiquement de la santé publique. Combien de couches de bureaucratie faut-il superposer pour que le ministre puisse être satisfait?

Ce projet de loi vise aussi «à informer le ministre des impacts des politiques publiques sur la santé et le bien-être de la population du Québec.» M. le Président, on est dans une société de l'information. Au Québec, on est branché sur Internet, on peut savoir ce qui existe dans tous les domaines, et le ministre, il crée une structure pour l'informer sur les impacts des politiques publiques en matière de santé et de bien-être. Ce n'est pas sérieux, ça ne fait pas sérieux.

Ce projet de loi, aussi, vise à informer la population sur son état de santé et son bien-être. M. le Président, là encore, le ministère est superéquipé de toutes sortes de supports d'information qui peuvent être diffusés dans la population en l'espace d'un quart d'heure par les médias de communication que nous avons.

Le projet de loi vise «à collaborer avec les universités à l'élaboration et à la mise à jour des programmes de formation», programmes de formation, M. le Président, qui existent déjà. Si ces programmes de formation existent et s'ils fonctionnent bien, c'est parce que justement ils ont été développés en fonction des besoins précis, dans des contextes précis et que ça nécessite une certaine flexibilité pour que ces programmes-là puissent se développer et se consolider, et non pas une centralisation comme le ministre souhaite imposer à tous ses partenaires de la santé publique à travers le Québec.

De plus, M. le Président, on apprend que l'Institut a également pour fonctions d'administrer le Laboratoire de santé publique du Québec, d'administrer le Centre de toxicologie du Québec et d'administrer, finalement, toutes les institutions existantes dans le moment. Qu'est-ce qui ne marche pas avec ces centres, M. le Président? Est-ce qu'il y a un problème quelconque d'administration qui fait que le ministre se voit justifié d'introduire une nouvelle structure de coordination et de gestion? Je ne comprends pas la raison d'être de ce projet de loi.

Quand on transfère des services de la région métropolitaine vers Québec, cela, M. le Président, on l'a vu dans des situations bien concrètes, notamment dans le transfert des greffes, ça a créé une situation chaotique, et le ministre peut s'en rappeler. Je ne comprends pas, encore une fois, M. le Président, cette motivation.

On l'a vu, je l'ai vu moi-même personnellement lors de la tempête de verglas, lorsqu'on a eu à recourir à des services centralisés, ceux de la Sécurité publique, à partir de Québec, ce n'est un secret pour personne que les fonctionnaires n'arrivaient pas à livrer la marchandise à la grandeur des régions sinistrées. Les fonctionnaires à Québec ne connaissaient même pas la géographie des régions. On ne peut pas faire pire que ça. Alors, si le modèle que le ministre nous propose est celui-là, il va comprendre que, nous, on est très soucieux des besoins véritables de la population. Et on va rappeler au ministre que ce projet de loi n'est pas dans l'intérêt des citoyens.

Et qu'est-ce qu'il apporte comme points positifs, ce projet de loi? Le ministre l'a dit, il n'apporte pas d'argent neuf. Ça veut dire que les services de santé ne seront pas améliorés pour autant. Alors, tout ce qu'il a à faire, c'est de recycler des budgets déjà existants. On sait ce que ça veut dire lorsqu'on veut recycler des budgets; ça veut dire déplacer du personnel, ça veut dire déconstruire, d'une certaine manière, ce qui est déjà construit et qui fonctionne bien. Et là on ne peut pas suivre le ministre dans cette voie.

Si le ministre était réellement sérieux, si le ministre voulait injecter des fonds nouveaux dans les services de santé et les services sociaux, on l'applaudirait, M. le Président. Mais, quand il s'agit de développer des structures à l'infini comme des poupées russes, il y a un moment où il faut rappeler ce gouvernement à l'ordre et lui dire: Assez, c'est assez. Encore un institut national avec un conseil d'administration, avec une composition. On va encore se chicaner pour savoir qui va être dans ce conseil d'administration. On va encore voir des gens qui ne se sentiront pas tout à fait inclus parce que d'autres le sont. Et pourquoi brasser toutes ces structures-là? À quelles finalités? À quels besoins? La question se pose et elle est extrêmement pertinente, d'autant plus que, lorsqu'on part du besoin des citoyens – et j'insiste là-dessus, M. le Président – le besoin doit être satisfait le plus près possible, de la population qui l'exprime, parce que c'est la meilleure façon de le faire.

Or, dans la grande région de Montréal, on a développé des services près de la population dans le domaine, justement, de la toxicomanie, en tenant compte de la réalité du milieu, des besoins des milieux urbanisés, où il y a des problèmes d'exclusion, où il y a des problèmes de décrochage scolaire. Et là, M. le Président, on va vouloir traiter cette réalité à partir de Québec? Comment est-ce qu'on va faire, alors que les véritables intervenants du milieu, qui vont faire la différence quand ils vont intervenir, ils sont sur le terrain dans la région de Montréal? Ils sont près de leurs jeunes, s'il faut parler des jeunes; ils sont près des personnes âgées, s'il faut parler des personnes âgées. C'est pourtant simple, et le ministre doit, en toute logique, comprendre les arguments qu'on lui apporte.

On a développé, dans la grande région de Montréal, des services adaptés à la population multiethnique, parce que c'est des besoins très particuliers. Ça touche une clientèle qui a une réalité différente. Des personnes âgées qui parfois ne parlent pas la langue. On a mis des années à bâtir des services adaptés à cette clientèle spécifique. Et on va dorénavant traiter ça à partir de Québec, M. le Président, des gens qui ne connaissent même pas la réalité, le vécu, le contexte et le besoin de ces clientèles-là? Nous parlons ici de 40 % de la population, si le ministre ne s'en rend pas compte. Là, il faut que le ministre comprenne que ces besoins-là sont réels et que, s'il y a des services à livrer, il faut les livrer le plus près possible de ces populations.

De plus, il y a des partenaires, aussi, dans le milieu, et ces partenaires-là, M. le Président, on ne peut pas les déplacer, il faut aller vers eux. Or, la manière dont les services sont organisés en ce moment, on est prêt à regarder s'il y a des améliorations, mais, chose certaine, on n'a pas besoin d'une structure pour régler quoi que ce soit.

(16 h 50)

Par ailleurs, M. le Président, le ministre a lui-même défini les priorités en matière de santé publique, et il les identifie au nombre de sept. Premièrement, «le développement et l'adaptation sociaux des enfants et des jeunes». Comment peut-on agir de façon efficace sur le développement et l'adaptation sociaux des enfants et des jeunes? Bien, en leur offrant des services adaptés à leurs besoins le plus rapidement possible par des intervenants qui connaissent leur réalité, qui savent comment entrer en contact avec eux, qui savent comment répondre à ce besoin-là. Ce n'est pas l'Institut national de santé publique du Québec qui va répondre à ces besoins.

Deuxième priorité identifiée par le ministre: «les maladies évitables par l'immunisation». Là encore, pour un système d'immunisation, il faut être le plus près possible du citoyen, et ce n'est pas à partir d'un institut national de santé publique à Québec qu'on va pouvoir répondre à ce besoin.

«Le VIH, sida, et les maladies transmises sexuellement». Ça, ça touche beaucoup les jeunes, et c'est extrêmement important que les services soient livrés, coordonnés, organisés le plus près possible de la population qui est visée.

«Le dépistage du cancer du sein». J'ai vu et j'ai rencontré des personnes atteintes de cette terrible maladie, et c'est extrêmement important, ne serait-ce que sur le plan psychologique, que ces personnes soient sécurisées, que ces personnes aient accès aux services le plus rapidement possible. Ce n'est pas l'Institut national de la santé publique qui va leur donner ça.

«Le problème du tabagisme». Là encore, les campagnes d'information, de sensibilisation et de prévention doivent être faites, organisées le plus près possible des clientèles visées.

«Les traumatismes non intentionnels et intentionnels, par exemple la violence et le suicide». Là encore, M. le Président, les besoins commandent que les services, l'organisation des services, la livraison des services soient faits le plus près possible de la population visée.

Et, finalement, la septième priorité que le ministre identifie, «l'alcoolisme et la toxicomanie». Il n'y a rien de plus nécessaire, comme services près de la population, que dans ce domaine-là, et ce n'est pas l'Institut national de santé publique qui va répondre à ces besoins.

Voilà, M. le Président. Je trouve que la montagne a accouché d'une souris. Le ministre vient de nous offrir encore une autre structure alors que la population s'attend, à juste titre, d'avoir des services adaptés le plus près possible et disponibles, s'il vous plaît, parce que actuellement, lorsqu'on regarde ce qui se passe dans les CLSC, c'est rendu très grave parce que les heures d'ouverture sont limitées, les services sont limités. Et, pendant ce temps-là, le ministre, dans sa grande sagesse bureaucratique, nous concocte un projet de loi qui crée encore une structure qui répond peut-être à sa philosophie à lui, la philosophie qu'il a de la santé, mais qui ne répond certainement pas aux besoins de la population et des jeunes en particulier. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de La Pinière. Nous allons maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je ne me suis pas levé tout de suite parce que je pensais que peut-être un des députés devant moi – il n'y en a pas beaucoup – voudrait dire quelque chose sur ce projet de loi, mais, malheureusement, ils sont tous bâillonnés par le ministre de la Santé. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours de la députée de La Pinière. Je pense qu'elle a vraiment ciblé beaucoup de points assez importants dans ce débat. J'espère que le ministre va tenir compte des interventions de la députée de La Pinière et de mes autres collègues de ce côté.

La loi n° 439, son titre est Loi sur l'Institut national de santé publique du Québec, Bill 439, An Act respecting the Institut national de santé publique du Québec.

J'ai essayé, comme la députée de La Pinière, de comprendre la logique en arrière de ce projet de loi. J'ai essayé de comprendre pourquoi ce gouvernement était en train de créer une autre structure. Il est en train de mettre encore une fois de l'argent sur une structure et n'aide pas les services. Et, M. le Président, finalement, j'ai compris la logique de ce ministre. Et j'ai trouvé ça à l'article 8 de ce projet de loi. L'article 8 de ce projet de loi – il y a 47 articles – laissez-moi lire cet article de ce projet de loi: «L'Institut – de santé publique – a son siège sur le territoire de la Communauté urbaine de Québec, à l'endroit déterminé par le gouvernement. Un avis de la situation ou de tout déplacement du siège est publié à la Gazette officielle du Québec

Avec ça, le ministre a décidé que – avant que nous ayons créé cet Institut – il veut avoir cet Institut ici, à Québec. Avec ça, je propose, M. le Président, que peut-être ça va être mieux de changer le titre. C'est présenté pas par le ministre de la Santé et des Services sociaux, c'est présenté par le ministre responsable pour le territoire du Québec. Parce que, comme d'habitude, il a mis des priorités, qui ne sont pas les priorités de santé, au-dessus des priorités de santé.

Je vais expliquer que dans le passé... C'est vrai, je vois que les députés sont d'accord avec ça. Avec ça, je présume que le vrai titre de ce projet de loi, c'est: comment je peux déplacer, comment le gouvernement péquiste, qui n'est pas capable de créer de l'économie ici, à Québec, comment il peut déplacer 125 travailleurs professionnels de Montréal et des autres territoires ici, à Québec. Parce qu'ils sont assez faibles qu'ils ne peuvent pas commencer l'économie québécoise ici, à Québec.

Avec ça, ils veulent déplacer les travailleurs et travailleuses professionnelles du département de santé publique de Montréal et les environs, ici, à Québec. Ce n'est pas un projet de loi basé sur une philosophie de santé publique. Il ne peut pas le cacher, parce qu'il le dit clairement. Déjà, il ne veut pas avoir de confusion; il veut créer une structure, il veut déplacer ça ici, à Québec.

Je n'ai rien contre. Ici, à Québec, on peut, tout le monde, travailler ensemble à créer des emplois. Mais le ministre a dit: Non. La santé n'est pas importante pour lui, la santé publique n'est pas importante pour lui. Il veut, en guise d'une nouvelle institution nationale, déplacer 125 postes ici, 125 personnes, 30 ou 40 effectifs médicaux et 40 autres professionnels. Nous avons eu un débat ici, dans cette Chambre. Déjà, il y a une pénurie des effectifs médicaux à Montréal. Je vais expliquer un peu plus tard ce problème.

Mais, moi, M. le Président, j'ai trouvé la raison d'être de ce projet de loi. Il veut créer un monument pour lui, parce que, dans tout le réseau de la santé et des services sociaux, ils sont complètement tannés, ils sont complètement fatigués des coupures qu'ils ont eues depuis trois ans et demi. Ils sont complètement à leur limite, parce qu'ils n'acceptent pas les coupures aveugles que le ministre a faites année après année.

Avec ça, il essaie de créer une autre chose. Il essaie de donner l'image qu'il est en train de bouger sur le dossier. Moi, M. le Président, j'ai toujours encouragé ce gouvernement à appuyer plus la santé publique. Je ne mets pas ça en doute. Mais, malheureusement, on ne voit pas ça dans ce projet de loi.

J'ai sorti tous les communiqués, M. le Président. Et, dans les communiqués, je trouve une chose intéressante. Plusieurs des communiqués sont signés, ou, à la fin, on donne le numéro d'une personne où on peut avoir plus d'information sur le contenu du communiqué. Ici, pour plus d'information sur les priorités nationales de santé publique, on peut téléphoner à Christine Collin, sous-ministre adjointe, direction générale de la santé publique, (418) 646-3487. Ça existe! Il existe une direction générale de la santé publique.

(17 heures)

Avec ça, où est le manque de coordination? Est-ce que le ministre est en train de dire que son propre ministère n'est pas capable de coordonner ses propres responsabilités? Vous savez, M. le Président, que ce ministre essaie d'abdiquer toutes ses responsabilités jusqu'à maintenant.

Voilà un autre exemple que le ministre n'est pas capable de prendre ses responsabilités. Il ne comprend pas ce qu'il peut faire avec ça. Il va créer un institut. Il va déplacer les personnes de Montréal, ici. Il va mettre, selon notre information, 24 000 000 $ dans cette affaire-là, sans donner plus de services à la population. On doit questionner ça. Et la population n'a pas confiance en ce ministre, pas du tout. Avec les coupures, avec tous les problèmes que ce ministre a causés dans notre système de santé et de services sociaux, il n'y a aucune confiance en ce ministre. N'oubliez pas que c'est le même ministre qui a décidé, pour des raisons partisanes, pour des raisons géographiques et pas pour des raisons de santé, de déménager les greffes pulmonaires de Montréal à Québec. C'est le même ministre. Le réseau a dit: Il ne peut pas faire ça. Après beaucoup d'efforts par les professionnels, finalement il a dit: Bon, j'ai essayé d'en passer une vite, mais ça n'a pas marché.

C'est le même ministre de la Santé et des Services sociaux qui, pendant le débat sur le sang contaminé, a refusé carrément de bouger sur la première entente faite avec les autres partenaires canadiens d'indemniser les personnes infectées par le sang contaminé, juste de 1986 à 1990. Moi-même, j'ai demandé dans cette Chambre: Est-ce que le ministre est prêt à aller plus loin? Il a toujours refusé, mais c'est à cause d'une motion proposée par le chef de l'opposition, M. Daniel Johnson, le député de Vaudreuil, appuyée par le premier ministre, que finalement il a compris qu'encore une fois il a mal fait son travail. Une journée, il a dit: Non, non, pas un autre sou, pas un autre, pas d'autres victimes; je vais juste indemniser les personnes de 1986 à 1990. Vingt-quatre heures plus tard, il a trouvé un autre 75 000 000 $, et maintenant – il a trouvé de la compassion, supposément – il pousse les autres gouvernements. J'espère que c'est vrai. J'espère que, de ce temps-là, le ministre met d'abord et avant tout les citoyens au centre de ses décisions.

Mais c'est clair dans ce projet de loi que ce n'est pas du tout ce que le ministre va faire. Il a essayé de cacher toute son affaire, mais c'est clair et net, avec l'article 8 de ce projet de loi, il dit, à la fin de tout ça, qu'il veut déménager le monde ici, qu'il veut créer un institut, peut-être avec sa photo dans le lobby, qu'il a fait quelque chose pour la santé et les services sociaux, il a fait quelque chose pour la santé publique. Mais ça existe déjà au ministère, une direction générale de santé publique!

Bon. J'ai essayé de comprendre. J'ai lu le projet de loi aussi. J'ai essayé de comprendre où sont les problèmes. Le ministre dit que ce nouvel Institut va administrer le Centre de toxicologie, les services professionnels de dépistage, le Centre antipoison, pour en nommer quelques-uns. Est-ce qu'ils ont eu des problèmes? Est-ce que son propre ministère, jusqu'à maintenant, ne peut pas faire ça? Je ne sais pas. Encore une fois, la seule chose que j'ai comprise comme logique en arrière de ce projet de loi, il veut déménager les professionnels de Montréal ici, à Québec, parce qu'il n'est pas capable de faire autre chose. S'il veut créer d'autres postes professionnels ici, à Québec, il y a autre chose qu'il peut faire que de déménager le monde de Montréal.

M. le Président, aussi, je vois que... Le conseil d'administration, c'est quoi, en arrière de ça? Est-ce qu'il y a une astuce? Parce qu'on cherche souvent les astuces. On trouve les astuces assez souvent. Il y a 15 personnes, il y a six personnes, quatre personnes, quatre personnes nommées par le gouvernement. Où est la consultation? Où est l'imputabilité? Comment puis-je m'assurer que ce n'est pas comme dans les autres cas, que ce n'est pas juste des amis du gouvernement? Nous avons vu ça dans les autres nominations par ce gouvernement. J'espère qu'il ne va y avoir aucun choix partisan dans ces cas-là. Je trouve ça complètement inacceptable. C'est ça qu'il veut faire. Là, c'est complètement inacceptable. Mais, avec tout le pouvoir qu'on peut trouver dans l'article 9, le ministre peut choisir ses membres, ses amis, il peut choisir ceux et celles qu'il veut. Il peut demander à ses collègues: Avez-vous quelques amis? J'espère qu'il va mettre plus de critères, qu'il va avoir des balises de choix dans ce projet de loi, M. le Président.

Mr. Speaker, it is clear, with the orientation of this Government: there is no reason to create another institution, another central institution that creates a body of 24 000 000 $, moves people from Montreal and doesn't help the issue of public health. The health care providers of Montreal have said: There is a serious problem. In Montreal, there are special needs. But the Minister doesn't care about that. He wants to because he can't create any economic development here. The only thing he can control is to move people from Montreal.

Where's the logic? Public health should be worked with partnerships, with CLSCs, with our universities, with the health care providers, we should be working hand in hand with them. But it's clear that almost 5 000 000 $ will be pulled out of Montreal. And also, Mr. Speaker, will those professional still do what they do well, work hand in hand, a hands-on approach, with the other health care providers? Already, public health, Mr. Speaker, has not been supported by this Government. Now, you're going to see all kinds of efforts to displace people, but to respond to the real concerns, the special needs of AIDS, of high drop-out rates of children in schools, low immunization rates, the whole issue of the multicultural community in Montréal, poverty. Are they going to be addressed by an office that's going to be put in an ivory tower here, in Québec city? Why does the Minister say it's got to be here, in Québec city? He has more friends here? He can make partisan nominations more easily here? Is that what's behind this «projet de loi»? I think it just might be, Mr. Speaker.

Je regarde, M. le Président, la mission. Je vois mal pourquoi nous avons besoin d'une autre institution. Nous en avons plusieurs, M. le Président. Est-ce qu'on peut faire ce qu'il veut faire, supposer une meilleure coordination de la santé publique avec ce qui existe maintenant? Toute la question de la recherche, nous avons déjà le Fonds de recherche en santé du Québec. Il y plusieurs groupes déjà en place qui peuvent répondre à ces mesures.

Sur la question du suicide, comme exemple, M. le Président, nous avons attendu pour des mois et des mois le plan d'action. Finalement, c'est arrivé. Est-ce qu'il est dans le projet de loi? Il dit qu'il n'est pas assez compétent – j'espère que non – pour répondre à ces besoins. Pourquoi il doit créer une autre structure, une autre boîte, plutôt que de répondre spécifiquement à la population québécoise? Et est-ce qu'on peut avoir un meilleur service, M. le Président?

May we have a better service, Mr. Speaker, if we take everybody who knows the community, who works with the community, who understands the community, move them to Québec? Do you think we will actually have better public health? Let me give you an example that happened recently in our community. During the ice storm, we all went through a very difficult time, some more difficult than others, but there was a clinic, a public health clinic in Pointe-Claire called Statcare. It was functioning. It only lost electricity for three days. They were one of the lucky ones. So, because of that, everybody was going to Statcare. Not because they were wasting time or money, it's because they needed health care, and every other clinics were closed. It made sense.

They phoned the Ministry. They phoned. Les personnes responsables à Québec didn't know anything, didn't explain anything. They said: Why are you... They were all hitting... and there is another issue here, of quotas, quotas and various ceilings that doctors are allowed to function with. They said: We have a serious problem. Québec said: Look, you have electricity, what's your problem? They said: That's exactly our problem, in a sense that more and more people are using our resources because nobody else has electricity. What does Québec say? Though luck. We won't change. Now, if that is going to be the reflection of the new Institute, I think we are in serious problem. It's a small example, Mr Speaker, but one that I thought was important to mention.

(17 h 10)

Aussi, M. le Président, localement, la santé publique, ce n'est pas nécessairement une affaire qui est efficace si vous êtes isolé et qu'il y a une distance entre les intervenants et la communauté. Nous-mêmes, dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal – mon collègue le député de Jacques-Cartier en a parlé – nous avons créé une coalition des intervenants, des jeunes en difficulté, contre la violence dans notre communauté, après un meurtre dans notre communauté. Malheureusement, trois jeunes étaient impliqués dans ça. Nous avons utilisé l'expertise de plusieurs des intervenants de santé publique pour commencer cette affaire. Bon, ils sont des experts, mais, aussi, ils connaissent le territoire. Et, s'ils sont tous déplacés à Québec, pensez-vous qu'ils peuvent vraiment faire quelque chose? Non, M. le Président. Je pense que c'est assez clair que nous sommes plus efficaces s'ils sont plus proches de la communauté.

M. le Président, aussi, quand vous êtes plus proche de la communauté, on peut adapter. Est-ce que le ministre est prêt à assurer aujourd'hui qu'ils vont avoir des représentants des communautés culturelles sur le conseil d'administration? Son bilan pour la communauté d'expression anglaise est horrible. Franchement, c'est un désastre. Depuis qu'il est entré, ils ont retardé le programme d'accès, ils n'ont pas changé le comité provincial. Avec ça, franchement, la communauté d'expression anglaise n'a eu aucune confiance. Est-ce qu'il va avoir une... Parce que, nous, quand nous étions au pouvoir, nous avons passé un article de loi qui dit qu'on doit tenir compte de la réalité ethnoculturelle, linguistique du Québec. Est-ce qu'il va tenir compte de ça ou il va juste placer ses amis, comme ils ont fait avec plusieurs autres institutions et conseils d'administration?

On doit s'assurer qu'il y a une bonne reconnaissance de la réalité québécoise. Je ne mets pas en doute, M. le Président – je sais que le temps achève beaucoup – que nous ayons besoin de coordination. Je suis prêt à travailler avec le ministre si on veut mieux coordonner toutes nos démarches de santé publique, mais c'est clair que créer un monolithe, que créer une grosse boîte pour répondre à l'ego du ministre, c'est complètement inacceptable. De répondre, de créer un autre institut, une duplication, une autre structure, je pense que ce n'est pas une bonne façon de travailler. M. le Président, ce n'est pas ça qu'on veut, et c'est pourquoi les professionnels, ils ont questionné la logique en arrière de ce projet de loi. Pour moi, je pense qu'on peut dire que, aujourd'hui, «The emperor has no clothes», c'est clair et net. Pour lui, c'est l'article 8, article 8 qui veut...

Peut-être que, dans son comté, il veut créer son institut parce qu'il n'est pas capable de créer de l'emploi ici. Avec ça, il a oublié – et ils ont fait ça souvent, trop souvent – qu'il était le ministre de la Santé et des Services sociaux. Souvent, il pense qu'il est l'adjoint parlementaire du ministre des Finances, parce qu'il a coupé, coupé, coupé, avec toutes les commandes du ministre des Finances, et maintenant il se dit: Ah! Je peux jouer maintenant comme ministre responsable de Québec. Je peux déplacer le monde de Montréal, malgré que ça ne marche pas, comme il a essayé avec la greffe pulmonaire. Ça ne marche pas. Les professionnels disent que ce n'est pas logique, ce qu'il est en train de faire.

Avec ça, M. le Président, c'est assez clair que, effectivement, le ministre n'a pas pensé d'abord et avant tout au citoyen. Il n'a pas avancé, avec ce projet de loi, la santé publique, et c'est pourquoi, si le ministre veut vraiment avoir un débat sur ça, je lui lance un défi aujourd'hui, tout de suite: Commencez une consultation populaire, laissez le monde discuter et, si tous eux autres disent que c'est une bonne affaire, ça va être assez étonnant. Avec ça, M. le Président, je pense que, si le ministre veut vraiment être responsable, il va dire: Effectivement, là, maintenant, tout le monde dit que c'était vraiment quelque chose qui ne marche pas, mais je suis prêt à faire les consultations populaires.

Mr. Speaker, it's very clear, the Minister, article 8, the reason behind this law, he wants to move people from Montréal, put them here, in Québec City. Why else would you put the head office of the Institute... located in the territory of the Communauté urbaine de Québec? It is very clear, straightforward that this Minister is interested in, under his wing, using his influence at the Conseil des ministres, at the Cabinet... to say: I'm going to bring people here from Montréal. But that's not what public health wants. Public health says: Let's work with our partners, let's work with the intervenants, let's work with the health care professionals, let's work and coordinate with our universities, let's not create another institution, let's not create more money, let's, in fact, put the money where it should be, and that is in direct health care and santé publique. If the Minister really wanted to do something, he wouldn't come along with this «projet de loi», he would put more money on the table for «santé publique». Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Nelligan. Maintenant, M. le ministre, vous avez un droit de réplique de 20 minutes. M. le ministre.


M. Jean Rochon (réplique)

M. Rochon: M. le Président, je pense que je vais prendre quelques minutes seulement pour repréciser certains éléments qui ont été soulevés dans les commentaires de l'opposition.

D'abord, quand on se pose des questions quant à la préparation, au mûrissement, à la maturité de ce projet de loi, je pense que c'est bon de se rappeler que, de 1991 à 1994 – donc sous l'ancien gouvernement, où l'idée est née, on a vraiment pris la succession d'une idée qui était née sous l'ancien gouvernement – il y a six documents qui ont été conçus, développés sur l'organisation de l'expertise en santé publique. Il y a trois de ces documents-là qui ont été faits par le ministère et trois qui ont été faits dans les directions de santé publique des régies régionales avec la Conférence des régies régionales.

Moi, je me rappelle très bien que, quand j'ai assumé les fonctions que j'assume encore présentement, un des premiers dossiers qu'on m'avait présenté était celui-là, souhaitant qu'on en vienne à concrétiser cet encadrement d'expertise de la santé publique.

À la suite de ça, on a quand même voulu dire – il y a six documents qui ont été faits sur trois, quatre ans – on est un nouveau gouvernement, on va refaire le point, évidemment. Alors, on a mis un groupe de travail sur pied qui a réuni des gens de santé publique, qui travaillent sur le terrain au niveau des régions, au ministère, qui ont reconsulté tout le monde, qui ont refait le tour. En 1996, on a eu un rapport que je peux appeler, je pense, un rapport d'experts sur ce sujet-là, qui nous a été présenté. C'est-à-dire qu'ils ont commencé en 1996, ils ont travaillé pendant presque une année, jusqu'en 1997, pour nous donner ce qui a été le rapport du groupe de travail sur la création de l'Institut national de santé publique, où ils ont structuré plus ce qu'on retrouve essentiellement dans le projet de loi présentement, et avec un appui assez fortement partagé par l'ensemble du réseau à ce moment-là.

Donc, pour la maturité du projet, je pense qu'on ne peut pas le potasser un peu plus, parce que, à un moment donné, ça va être assez mûr que ça va être trop mûr.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rochon: On sait ce qui arrive quand quelque chose devient trop mûr, M. le Président. Premier point.

Le deuxième sur lequel je veux revenir, c'est la question qu'on crée une nouvelle structure. J'entendais le député de Jacques-Cartier qui nous disait qu'il n'y a rien qu'un ministre aime mieux faire que de créer de nouvelles structures, que de lever des pelletées de terre, de couper des rubans. C'est très agréable de me faire dire ça, parce que j'ai eu des fonctions qui m'ont obligé à faire plutôt le contraire, à en diminuer, des structures, à intégrer et à fusionner. Et, dans le fond, c'est encore ce qu'on fait présentement, parce que, là, il ne faut pas oublier qu'il y a quatre laboratoires et centres qui existent un peu partout dans la nature qui vont être regroupés, qui vont physiquement rester où ils sont, mais il va y avoir une autorité et une meilleure collaboration entre ces centres-là parce que les ponts vont être ouverts plutôt que de les avoir isolés, administrés chacun par un hôpital ou l'autre tout simplement en fiducie dans un centre. Il n'y a pas d'encadrement vraiment technique, scientifique qui leur est donné, à ces laboratoires-là.

Donc, on crée une nouvelle structure mais qui en intègre d'autres. Ça, c'est tout à fait dans le sens du rapport Facal, où on peut, laissant les gens sur place, intégrer le fonctionnement sous une nouvelle organisation mais qui en fait disparaître quatre, cinq autres. Alors, dans ce sens-là, je pense qu'on gagne en cohérence.

Finalement, le député de Verdun, comme toujours, a fait une bonne analyse critique de la situation, mais je pense qu'il y a une petite chose qu'il faudrait distinguer, qui n'était pas évidente dans sa présentation, c'est la distinction entre ce qui est la pratique de la santé publique, les services qui sont rendus à la population, et le développement de l'expertise en santé publique. La pratique de santé publique, exactement comme il l'a très bien décrite, s'oriente vers une intégration de plus en plus des services de santé publique dans les CLSC, qui sont devenus, avec l'intégration, avec les centres de soins de longue durée, l'organisme public pivot pour l'organisation des services au niveau du territoire local, du territoire de la MRC en général. Et les activités de santé publique sont transférées présentement dans toutes les régions du Québec, de la régie régionale vers le CLSC, la régie assumant vraiment un rôle plus de planification de santé publique où là il faut travailler sur un dénominateur plus grand.

À Montréal, si on veut comprendre ce qui se passe, comment évoluent les déterminants de la santé publique, il faut être capable de comparer ce qui se passe entre les différents quartiers, entre les différentes parties de l'île, parce que c'est par comparaison en épidémiologie qu'on travaille et qu'on dégage des profils. Donc, la régie prend son rôle, qui en est plus un de planification, de programmation, et les CLSC, très correctement, comme le député de Verdun l'a expliqué, prennent la relève d'une bonne partie des fonctions des départements de santé communautaire des hôpitaux, auparavant, et on est plus ancré sur le terrain.

(17 h 20)

Et les sept grandes priorités de santé publique, ça fait partie des services de santé publique, et qui sont coordonnés sur le plan national pour ce qui doit se faire, comme un programme de dépistage de cancer du sein: il n'y a pas 56 façons de faire, c'est vraiment un programme très standardisé. Et là la Direction de la santé publique du ministère prend sa place, prend son rôle sur ces sept grandes priorités. Les régions ont un rôle de programmation spécifique pour les régions, et les services sont rendus par le CLSC. Donc, ça, je pense, c'est très centralisé et ça se développe très bien présentement. C'est parti, ça.

Ce qui restait pour l'expertise, là on a le problème contraire, on a le problème de l'atomisation du savoir et des connaissances. C'est ça, le problème. L'expertise est atomisée dans le réseau. Il y avait les quatre centres ou laboratoires et des petites équipes d'experts qu'on retrouvait dans différentes directions de santé publique. C'est parce que, à un moment donné, il y a eu un problème d'environnement x à un endroit, un problème de contamination y dans un autre endroit qu'on a développé une expertise pour faire face à cette situation. L'équipe a continué à fonctionner et à devenir de meilleure en meilleure là-dessus, mais isolée. Le pouvoir spécialisé pour les services spécialisés et l'expertise spécialisée est atomisée, et l'Institut vient la regrouper, refaire des liens entre ces différentes petites unités là et assurer une collaboration avec l'université.

D'ailleurs, les universités, par CREPUQ, par la Conférence des recteurs, ont nommé quatre personnes, quatre représentants sur le conseil de l'Institut. Donc, regrouper et lutter contre cette atomisation du savoir, assurer un lien avec l'université – parce qu'il n'est pas question de faire le rôle que les universités doivent faire, mais de venir jouer un rôle d'application des connaissances, donc en lien avec ce fonctionnement de la santé publique qu'on a décrit – c'est un peu un pont entre l'université ou entre les universités et le réseau de santé publique que vient jouer l'Institut, et c'est là qu'on avait un peu ce que tout le monde avait décrit comme le chaînon manquant qui vient vraiment consolider et renforcer les deux côtés de l'opération.

Alors, c'est ces trois points-là que je voulais rappeler, M. le Président, parce que, à certains égards, je pense qu'on fait les mêmes analyses. Mais on ne crée pas une nouvelle structure, on simplifie; on crée un pont entre le monde universitaire et la pratique de la santé publique. Avec le nombre d'études qu'il y a eu, je pense que, si on recommençait à étudier ça encore, on radoterait, tout simplement.

Alors, j'ose espérer que le travail en commission va nous permettre, au besoin, de bonifier le projet de loi qu'on a là, mais de donner une réalité, de camper le rôle de l'Institut qui le fait déjà très bien de façon définitive. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 439, Loi sur l'Institut national de santé publique du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'aimerais que vous preniez en considération l'article 12.


Projet de loi n° 425


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 12 de votre feuilleton, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 425, Loi modifiant la Loi sur les impôts et la Loi sur le ministère du Revenu concernant le contrôle de certains abris fiscaux. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe? Lors de la suspension des travaux, M. le député d'Orford avait terminé son intervention. Nous cédons maintenant la parole au député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Alors, avant de parler de ce projet de loi, il faut le remettre un peu en contexte et voir ce qui a donné naissance à ce projet de loi. Et, sans difficulté, je n'essaie pas ici de savoir si c'était sous l'ancien gouvernement ou le nouveau gouvernement...

Une voix: C'est dans la continuité.

M. Gautrin: ...c'est dans la continuité. Alors, si vous me permettez, en 1989-1990, il y a des gens qui, de bonne foi, ont investi dans la recherche et le développement. Il faut que vous soyez bien conscient de l'effort que le Québec fait en recherche et développement par le biais des abris fiscaux. Le député de Portneuf et ministre de l'Industrie et du Commerce le reconnaîtra sans difficulté, c'est plus de l'ordre du demi-milliard de dollars, c'est-à-dire 500 000 000 $, que, par le biais des abris fiscaux actuellement dans la recherche et le développement, le Québec fait comme efforts. Alors, des gens de bonne foi, à cette époque-là, ont investi dans des projets de recherche et de développement. Les deux premières années, le ministère du Revenu a accepté leur déclaration d'impôts, mais, une année, donc en 1993 – rappelez-vous, en 1993 – on est revenu en disant: Ce sur quoi vous avez investi, le véhicule que vous avez choisi pour investir ne faisait pas vraiment de la recherche et du développement.

De surcroît, M. le Président – et c'est là le point que je voudrais réellement faire, parce que le projet de loi n° 425 ne vient pas corriger, en aucune manière, ces questions-là – ça a été décidé purement et simplement par des fonctionnaires fédéraux. Dans le cadre des revenus... Et, pour ceux qui sont un peu dans ce domaine-là, il y a – pour rester le plus parlementaire possible – de grandes questions que d'aucuns peuvent se poser sur l'objectivité des experts utilisés par le ministère du Revenu du gouvernement fédéral. Et notre ministère du Revenu, les yeux fermés, accepte immédiatement chacune des décisions qui sont prises à ce moment-là par le partenaire qui est le ministère du Revenu fédéral, si tant est que les parlementaires ici, du Québec, sur ces sujets-là, on ne peut jamais questionner, parce que le principe est le suivant: On a une entente et, automatiquement, ce qui a été décidé par les partenaires fédéraux est entériné par la contrepartie, le ministère du Revenu du Québec.

M. le Président, je ne voudrais pas ici rentrer, mais vous comprenez bien que, dans ce cadre-là, aussi bien vous que chacun des parlementaires, qu'ils soit ministériel ou de l'opposition, dans ce qu'on a appelé les exercices d'imputabilité où, dans le fond, les parlementaires questionnent le fonctionnement du gouvernement, vous ne pouvez questionner ni un ministre du Revenu ni les fonctionnaires du ministre du Revenu dans les forums qui sont prévus pour cela, c'est-à-dire où les parlementaires questionnent les décisions gouvernementales, que ça soit dans les engagements financiers, dans le cadre des crédits ou dans les exercices d'imputabilité, parce que le principe est simple: Nous suivons aveuglément ce qui a été déjà décidé par les partenaires du ministère du Revenu fédéral.

Alors, c'est ça, M. le Président, qui a un peu posé des questions. Le député d'Orford avait bien signalé que, parmi les projets qui, en 1991, 1992 et 1993, avaient été refusés – le député de Nelligan, le député d'Orford ont même été sur place voir de quoi il s'agissait, voir réellement s'il y avait eu une action de recherche et développement. Prima facie, ça avait été quelque chose qui correspondait à de l'innovation, mais, pour toutes sortes de raisons – sur lesquelles je n'épiloguerai pas ici, si vous me permettez – les experts – et Dieu sait à quel point, moi, j'ai horreur de ce terme, «les experts» – avaient décidé que ce n'était pas de la recherche et du développement.

(17 h 30)

M. le Président, le projet de loi n° 425, si tant est qu'on peut le comprendre – parce qu'il est écrit dans un langage... je vous donnerai tout à l'heure des exemples, M. le Président, vous allez voir à quel point c'est d'une limpidité – ne semble pas, à mon sens, corriger ce phénomène-là. Il prévoit pour le futur – donc il ne corrige pas le passé; ça, c'est déjà un premier point, il ne corrige pas le passé – mais, pour le futur, il ne précise pas encore les mécanismes pour qu'un projet dit projet de recherche devienne – alors, je vais vous dire le terme qu'on utilise – un abri fiscal contrôlé. D'ailleurs, je n'aime pas le terme. «Abri fiscal contrôlé», ça a l'air de vouloir se soustraire aux impôts normaux, alors que – et je suis sûr que le député de Portneuf va partager ce point de vue là – il s'agit d'une stratégie, avec laquelle on peut être d'accord ou non, de développement industriel où on veut soutenir la recherche et le développement par le biais d'avantages fiscaux pour inciter les gens ou les compagnies à investir dans la recherche et le développement.

Et je vous signale que j'ai un long historique avec les juristes du ministère du Revenu. Déjà, le titre utilisé, Abris fiscal contrôlé, me semble peu conforme avec le discours qui avait été celui du ministre des Finances à l'époque – je n'avais jamais, à l'entendre, utilisé ce terme – lorsqu'il parlait des investissements qu'il voulait susciter dans la recherche et le développement.

Mais continuons un peu plus loin, M. le Président. Je ne vois nulle part où on va réellement redonner au ministère, ou aux fonctionnaires, ou au ministère du Revenu la possibilité de décider par lui-même de ce dans quoi on veut investir, de ce qu'on identifie comme étant une recherche ou un développement susceptible de pouvoir bénéficier des abris fiscaux. Et là est réellement mon premier problème.

Je ne veux pas qu'on refasse à nouveau deux fois tourner la roue... qu'on est en train de mettre des empêchements de tourner en rond dans les investissements qu'on veut faire sur la recherche et le développement. Mais, premièrement, j'ai l'impression qu'il faudrait quand même s'assurer que les fonctionnaires du ministère du Revenu aient une possibilité de pouvoir donner leur avis. Deuxièmement, la mesure qui est mise sur pied pour avoir cette espèce d'autorisation me semble d'une lourdeur à prendre un temps énorme. Alors, si tant est que j'aie compris quelque chose, je dis bien si tant est que j'aie compris quelque chose... Et je vais vous lire après des morceaux du projet de loi, et vous allez me dire ce que, vous, vous comprenez ou ce que les auditeurs comprennent, parce qu'il y a des morceaux que, moi, je suis encore à me demander si je dois le dire comme ça ou comme ça pour essayer de comprendre.

Mais, si tant est que j'aie compris ce qu'il y avait dans le projet de loi, il semblerait qu'on reste quand même sur les liens avec... qu'on suit les décisions du ministère du Revenu fédéral, premièrement, et, deuxièmement, qu'il y a une espèce de système assez complexe que je n'ai pas pu analyser parce que... mais sur lequel réellement, en commission parlementaire, je veux vous voir analyser, le temps que cela va prendre.

Autrement dit, il ne faut pas qu'on mette sur pied une mesure telle qu'elle soit à l'opposé de ce qu'on veut atteindre. Autrement dit, il ne faut pas qu'on mette une mesure où, pour finir que le projet de recherche et développement soit accepté, ça prenne à peu près six mois ou huit mois et qu'il devienne complètement obsolète, M. le Président. Et je suis sûr que le ministre de l'Industrie et du Commerce partage ce point de vue là. Dans le domaine de la recherche et du développement, le temps est une variable extrêmement importante et, si on ne joue pas, si on ne suit pas la rapidité du développement dans les investissements de recherche et de développement, on va manquer complètement le bateau.

M. le Président, je vais vous lire – simplement pour me permettre de faire de la lecture avec vous pour que vous compreniez, et vous allez peut-être essayer de me dire après ce que vous avez compris – un article, par exemple, et vous allez essayer de voir... Je vous lis, par exemple, l'article... C'est une seule phrase. Faites attention, comptez avec moi, c'est une seule phrase, elle a 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17 lignes. Je commence.

Une voix: ...

M. Gautrin: Dix-sept lignes; non, simple interligne. Alors, vous aussi, simplement pour que vous compreniez, et vous pourrez m'expliquer après ce que ça veut dire.

«Lorsque, au moment donné où il détermine, pour une année d'imposition qui se termine après le moment où une décision anticipée a été rendue à l'égard d'un abri fiscal contrôlé, l'impôt à payer en vertu de la présente partie par un particulier qui a acquis l'abri fiscal contrôlé ou un montant que celui-ci est réputé lui avoir payé en acompte sur son impôt à payer en vertu de la présente partie, le ministre estime, compte tenu des informations à sa disposition à ce moment donné, qu'un montant que le particulier pourrait, à l'égard de l'abri fiscal contrôlé et en l'absence du présent article, soit déduire dans le calcul de son revenu, de son revenu imposable, de son revenu imposable gagné au Canada ou de son impôt à payer pour cette année, soit être réputé avoir payé au ministre pour cette année en acompte sur son impôt à payer, excède le montant que ce particulier pourrait ainsi déduire ou être réputé avoir payé au ministre si ce montant était déterminé en tenant compte des informations que le ministre détient à ce moment donné, le ministre peut, aux fins de déterminer l'impôt à payer par le particulier ou un montant que celui-ci est réputé lui avoir payé en acompte sur son impôt à payer, tenir compte de ces informations.»

Dix-sept lignes. C'est limpide et clair. Alors, c'est comme ça que le ministère du Revenu – et ça fait huit ans ou neuf ans que je m'oppose à cela – écrit ses lois, dans un langage abscons, non compréhensible, et je vous le lis. Alors, vous comprenez, M. le Président, je vais encore être gentil avec vous, c'est la moitié de l'article.

Il y a une deuxième phrase qui vient, qui va éclairer, si vous voulez...

Des voix: ...

M. Gautrin: Vous comprenez? Elle est aussi éclairante, si vous voulez. Elle a quatorze lignes, celle-là. Bon. Et, quand vous vous posez des questions, que vous voyez la manière dont le ministère du Revenu écrit ses lois... Et je le dis ici, en Chambre, et je le dis réellement, je l'ai dit en commission et je vais continuer à le dire: Les juristes du ministère du Revenu ont une manière d'écrire les lois telle qu'aucun citoyen ne peut les comprendre. Normalement, quand on écrit des lois pour le ministère du Revenu, on devrait faire en sorte que les citoyens soient en mesure de les comprendre.

J'en ai pris un là-dedans, M. le Président, je pourrais vous en donner d'autres, et je pourrais m'asseoir, et, comme je l'ai déjà fait... Je l'ai déjà fait avec plein de ministres du Revenu qui étaient de notre formation politique, m'asseoir et leur dire: Expliquez-moi cette phrase. Je pourrais parfaitement le faire. Et vous allez voir que, en commission parlementaire, je vous le dis tout de suite, on va essayer de se comprendre pour comprendre ce que veut dire l'article 1079.8.8.

C'est une manière d'écrire des lois – vous les avez dans les mains – qui fait en sorte que le citoyen normal qui, de bonne foi, veut investir dans des véhicules de recherche et de développement parce qu'il a écouté le ministre de l'Industrie et du Commerce ou la ministre du Revenu à l'époque où elle était ministre de l'Industrie et du Commerce, ou le ministre des Finances, et qui se dit: Bon, oui, je vais comprendre quelque chose... Et il investit de bonne foi dans un véhicule de recherche et de développement. Pour des raisons absolument incompréhensibles, on décide, au bout d'un certain temps, que le type d'investissement qu'il avait fait ne correspond pas à ce qui pourrait être prévu à ce genre d'article aussi clair que je ne sais quoi. Ha, ha, ha! Vous en lisez? Vous pouvez lire la loi dans l'ensemble, je pourrais vous en lire, il y en a des plus belles encore dans ce sens-là dans ce genre de loi. Et après la personne essaie de comprendre.

M. le Président, le point sur lequel je m'oppose réellement dans la rédaction des lois du ministère du Revenu, c'est que cette espèce de langage absolument incompréhensible, et je dis bien incompréhensible... Il n'y a pas un grammairien qui, à moins de faire l'exégèse pendant à peu près une heure pour savoir où est le sujet, va être en mesure de comprendre la manière dont on écrit actuellement nos lois du Revenu. C'est une perversité qu'un petit groupe de juristes, aussi bien du gouvernement fédéral que du gouvernement provincial, parce qu'ils s'entendent à merveille ensemble... L'un dit: Ah! il faut que je sois cohérent avec ce qu'a fait mon collègue du ministère du Revenu fédéral, et ensemble, dans ce langage où nul n'est censé... Faites attention! Nul n'est censé ignorer la loi, mais, sans l'ignorer, il faut, au minimum, qu'il la comprenne.

Chers collègues ministériels, je pourrais, après, vous demander, à chacun des collègues ministériels, lorsque vous aurez voté cette loi, parce que le poids de la majorité va faire en sorte que vous allez voter cette loi-là, de me dire – et il y a d'autres articles, hein, je pourrais vous en citer aussi qui sont de même nature – lorsque vous allez voter ces articles-là, ce qu'ils veulent dire, et, vous, M. le Président, vous allez interpréter ça et on va dire: Oui, on a voté quoi? Je plaide aujourd'hui et je continuerai à plaider dans cette Chambre pour que le ministère du Revenu écrive des lois que le citoyen puisse comprendre.

(17 h 40)

Dans un autre cadre, la Régie des rentes avait aussi une tendance à utiliser ce langage aussi brillant, et abscons, et non compréhensible. La Régie des rentes, actuellement, fait un effort de simplification. Alors, c'est pour ça que je vous dis: Ça peut être fait. La Régie des rentes fait un effort de simplification pour faire en sorte que les citoyens comprennent un petit peu. Évidemment, ça les touche directement, c'est leur pension, de savoir quand ils ont droit à une rente de conjoint survivant, quand ils ont droit à une rente d'invalidité, quand ils auront droit à leur pension, combien ils gagneront et comment on calcule leur pension. Évidemment, avant, c'était écrit dans le même langage, aussi clair, si je puis dire avec trois points d'ironie ou bien une quinzaine de points d'ironie, mais maintenant ils ont fait un effort, ce qui démontre qu'on peut faire un effort dans la rédaction.

Alors, c'est la même chose actuellement dans ce projet de loi où on pourrait, au minimum, essayer d'avoir quelque chose qui soit compréhensible. Et je prends chacun des collègues ici ministériels, et leur poser la question, on va s'asseoir ensemble, et me dire ce que veut dire cet article, et on pourra reprendre chacun ce que veut dire cet article ou quoi que ce soit. Alors, c'est la manière dont fonctionnent actuellement les juristes au ministère du Revenu.

Alors, comprenez donc à quel point, pour les gens qui, entre 1990 et 1991, de bonne foi, ont fait des investissements dans des abris fiscaux, qui, de bonne foi, en 1990-1991, ont cru réellement, lorsqu'on leur a dit: Voici, on autorise et on accepte les investissements que vous avez faits, on leur a envoyé un petit papier en disant: Oui, c'est accepté... Comprenons à la fois, parce que quelqu'un a interprété ces textes aussi clairs, limpides, etc., en se fiant à des experts nommés, d'ailleurs, par le ministère du Revenu fédéral, que ces gens-là en arrivent à être furieux. C'est ça, la réalité pour les personnes qui ont été touchées en 1991-1992. Vous devriez venir avec nous. Le député d'Orford rappelait ça tout à l'heure, les 4 000 personnes qui sont furieuses parce qu'elles considèrent avoir été trompées. Et il n'y a rien de pire, M. le Président, que quelqu'un qui pense avoir été trompé, parce qu'ils ont fonctionné de bonne foi, à l'époque.

Et le débat que je fais ici est non partisan, parce que – la ministre pourra le rappeler tout à fait – ça s'est passé en 1991. Je suis parfaitement... Je le sais, que ça s'est passé en 1991. Je sais que la décision a été rendue en 1993. Je le sais, que vous êtes arrivés au pouvoir en 1995. Je sais tout ça. Mais, quand même, ça n'empêche pas que le monde est furieux de la manière dont ça se passe.

Alors, de grâce, deux choses. Essayons, d'une part, de régler la chose dans le passé. La manière dont je comprends – et je ne suis peut-être pas complètement idiot – ce projet de loi, j'ai l'impression qu'il ne répond pas – mais je vais dire la manière dont je le comprends – à tout le problème qui est l'arrimage entre les deux ministères du Revenu. Et le fait qu'on laisse complètement aux experts, entre guillemets, si guillemets, fédéraux décider de ce qui est un projet de recherche ou de développement acceptable, je ne crois pas que ça y réponde. Je dis que je ne crois pas parce que je vous ai dit, à l'heure actuelle, que c'est écrit dans un langage tellement clair, avec six points d'ironie, tellement clair qu'il y a des fois où je ne suis pas sûr si je le comprends. Je plaide une dernière fois pour que, bon Dieu, le ministère du Revenu fasse au moins des projets de loi qui ressemblent à quelque chose que le commun des mortels puisse au moins comprendre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Nous cédons maintenant la parole au député de Châteauguay. Alors, M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Alors, dans la foulée de mon collègue de Verdun, je pense qu'il a fait une démonstration plutôt claire de la façon dont les gens sur... Il y a notre collègue de Salaberry-Soulanges qui, lui, dans son comté, ne doit pas en avoir, de gens qui ont eu des problèmes en recherche et développement, parce que, s'il y en avait dans son comté, ils seraient allés le voir à son bureau de comté et ils lui auraient tapé sur les doigts, ces gens-là. Justement, ils ont des raisons de taper sur les doigts de leurs législateurs, de leurs gouvernants, M. le Président.

Ce sont des gens qui ont été amenés, incités à encourager des fonds dans la recherche et le développement, qui ont investi là-dedans sur la foi d'encouragements et d'informations qui leur étaient donnés par les gouvernements. Et puis ils se sont retrouvés dans une situation passablement embarrassante, M. le Président, après avoir, de bonne foi... Et c'est prouvé que ces concitoyens pour qui mon collègue de Verdun parlait tantôt étaient de bonne foi. C'est prouvé, ça. Personne ne met en doute... Il ne s'agit pas de cas où on va essayer de nous faire croire qu'il y a de la fraude ou de la présumée fraude. Il s'agit de cas où tout le monde s'entend pour dire que c'est des gens qui ont investi pour aider la recherche et le développement au Québec, pour encourager l'avenir du Québec. Et là on leur tape sur les doigts. Ce gouvernement a décidé de leur taper sur les doigts.

Moi, j'en ai dans mon comté. Moi, il y a des gens qui sont venus me voir puis qui ont dit: On ne comprend pas comment ça se fait que le gouvernement ne corrige pas le tir, comment ça se fait qu'il vient encore nous chercher de l'argent dans nos poches alors qu'on a fait ce que le gouvernement voulait qu'on fasse. Et là aujourd'hui il nous dit: Bien, vous n'auriez pas dû le faire, vous n'auriez pas dû nous écouter, comme gouvernants.

Je pense qu'on envoie... Au-delà de la recherche et du développement, au-delà des crédits d'impôt, je pense qu'il y a là un danger certain à l'égard des institutions, à l'égard du respect par la population qu'on doit servir. Lorsqu'on aborde un projet de loi, et je vais y revenir tantôt... Mon collègue de Verdun avait un point. Si on veut que la population accepte le genre de société qu'on lui offre, il faut qu'elle comprenne les lois qui sont faites. Une première chose, mon collègue a tout à fait raison.

Je vais citer tantôt la deuxième phrase de l'article en question, une partie, une partie seulement, parce que justement à l'égard de cette deuxième phrase, un paragraphe de 14 lignes, on s'aperçoit que le problème n'est même pas réglé ou, en tout cas, on peut avoir des doutes. Il n'y a rien de certain lorsqu'on lit des phrases de 14 lignes. Mais, une chose est sûre, lorsqu'on aborde l'étude d'un projet de loi comme celui-là, il faut penser aux citoyens. Il ne faut pas penser aux juristes du Revenu, il ne faut pas penser à Mme la ministre, il ne faut pas penser à l'Exécutif; il faut penser aux citoyens qu'on est là pour servir.

Si vous voulez bien, M. le Président, je vais d'abord commencer par citer un passage d'un communiqué du Protecteur du citoyen. Si on veut penser aux citoyens, allons voir ce que dit le Protecteur du citoyen à l'égard de ce problème qu'ont eu certains de nos concitoyens, et, je vous l'annonce, M. le Président, qu'auront d'autres de nos concitoyens. Parce que ce projet de loi ne semble pas régler le problème du passé et l'histoire risque de nous rattraper.

Le 11 décembre 1996, le Protecteur du citoyen, Me Daniel Jacoby, recommande que les autorités fiscales renoncent pour les années 1991 et 1992 aux réclamations adressées aux contribuables qui ont investi dans les projets de recherche et de développement. Le Protecteur du citoyen estime que le ministère du Revenu, en acceptant les avantages fiscaux en 1990 et 1991 pour les années d'imposition 1989 et 1990, a renforcé la conviction des contribuables que les avantages réclamés leur étaient accordés.

Ce que le Protecteur du citoyen nous dit, c'est: Il va falloir une loi remédiatrice, une loi réparatrice qui va venir s'occuper de ces concitoyens floués. Cette loi, elle nous arrive sur la table, c'est le projet de loi n° 425. Il ne règle en rien la demande du Protecteur du citoyen. Premier constat devant ce projet de loi: échec, échec parce que ce que l'on devait chercher à corriger n'est absolument pas envisagé par le projet de loi. On n'envisage absolument pas le passé. On essaie, je dis bien, on essaie et on n'y parvient pas, on essaie de se prémunir contre l'avenir.

Et ça me fait penser justement à un autre projet de loi de la ministre, à d'autres interventions du ministère du Revenu, dont celui des travailleurs à pourboire, M. le Président. Vous savez, le ministère du Revenu a décidé d'aller chercher rétroactivement de l'argent dans les poches des contribuables. Encore, s'ils avaient eu de l'argent dans les poches, ces contribuables-là, ces travailleurs à pourboire, des petits salariés, s'ils avaient eu de l'argent dans leurs poches, peut-être que ç'aurait pu être faisable. Mais ils ne l'ont même plus dans leurs poches. C'est des travailleurs qui sont au bas de l'échelle et qui ont besoin, pour essayer d'arriver, de raccrocher les deux bouts, bien, ils ont besoin des petites sommes qu'ils ont.

Le ministère du Revenu a même amené – c'est des témoignages dans mon comté, M. le Président – des travailleurs à pourboire à la faillite. Il y a des gens qui ont fait faillite à cause des manoeuvres du ministère du Revenu. Alors, vous savez, quand, moi, je me lève et que je vois ce gouvernement, j'ai beaucoup de difficultés à comprendre sa philosophie d'action.

Dans le cas, donc, des travailleurs à pourboire, qu'est-ce que le ministère du Revenu a fait? Plutôt que d'être équitable, d'être juste, plutôt que de se dire: Bon, oui, il y avait un problème pour le passé, réglons-le pour l'avenir et soyons justes à l'égard du passé... Plutôt que d'inventer des pourboires qui n'avaient jamais été payés... Parce que ça, c'est arrivé, ça, j'ai les preuves. C'est ça qu'on a fait, on a décidé que tout le monde était présumé coupable. Quelle société! Je vous demande de me nommer un pays au monde qui présume que ses concitoyens sont coupables et fraudeurs. Nommez-m'en un. Au Québec, c'est comme ça que ça se passe. On a un gouvernement du Parti québécois qui présume que les gens que l'on sert sont des fraudeurs. Moi, je n'aime pas beaucoup ce genre de comportement.

(17 h 50)

Qu'est-ce que ce gouvernement-là a fait? Il a déposé un projet de loi, M. le Président, qui établit de nouvelles règles, à l'égard des pourboires, qui n'empêchera pas que ce qui s'est passé il y a trois, quatre ans et cinq ans puisse se répéter à nouveau. Donc, oui, on fait des discours, oui, on amène des pièces législatives au menu. Ah! on peut passer à la télévision pour déblatérer n'importe quoi. Mais au moins si c'était utile, au moins si on attaquait le coeur du problème!

Exactement comme dans le cas du pourboire, nous arrivons aujourd'hui avec une pièce législative qui n'envisage absolument pas les recommandations du Protecteur du citoyen. À l'opposé complètement. Ça ne regarde pas le passé. Mais on nous dit: Bon... Et puis, jusqu'à un certain point, on peut toujours se dire: On veut réparer l'avenir, on veut corriger tout ça.

Je lis dans les notes explicatives de ce projet de loi: Ce projet de loi modifie la Loi sur les impôts afin d'y prévoir qu'un abri fiscal visé par ces mesures de contrôle ne peut faire l'objet d'une offre publique que si une décision anticipée est obtenue au préalable du ministère du Revenu. À cet effet, il prévoit que l'émetteur d'un abri fiscal doit lui divulguer toutes les informations qui lui sont nécessaires pour une analyse complète et détaillée. On a l'impression que, avec ce projet de loi, ce qu'on veut faire, c'est donner une plus grande confiance aux contribuables. Ils ont été échaudés une fois; on leur dit: Bien, là, la prochaine fois, on va se prémunir, tous ensemble, contribuables et nous, le ministère du Revenu, on va surveiller ça de plus près, ça n'arrivera plus.

Je ne sais pas si j'ai bien compris la deuxième phrase de l'article 1079.8.8 qui est amené par l'article 4 de ce projet de loi. Je ne sais pas si je la comprends. Je ne la lirai pas au complet, M. le Président, je vais en lire un petit bout. Je pense que ça rappelle un peu l'essentiel. C'est un petit bout.

«Lorsque le ministre a, à l'égard d'un particulier ayant acquis un abri fiscal contrôlé, procédé à une détermination pour une année d'imposition en tenant compte, conformément au premier alinéa, des informations à sa disposition au moment de cette détermination, qu'il obtient après ce moment de nouvelles informations à l'égard de l'abri fiscal contrôlé [...] – là, je saute un passage – le ministre doit déterminer de nouveau l'impôt à payer par le particulier ou le montant que celui-ci est réputé lui avoir payé en acompte sur son impôt à payer, pour cette année, en tenant compte de ces nouvelles informations.»

On ne dit pas ici, M. le Président, que les mesures de contrôle offrent une garantie. On ne dit pas ici: Vous pouvez; il y a un engagement du gouvernement à reconnaître. À moins que je ne me trompe; je ne pense pas que la ministre va se lever pour me corriger. Je ne sais pas si elle l'a lu, cet article 1079.8.8. J'ai bien hâte d'entendre les explications en commission parlementaire. Une chose est certaine, si ce projet de loi vise à éviter que ce qui s'est passé se reproduise, je pense, M. le Président, que ce projet de loi passe à côté de l'objectif. Je pense qu'au contraire ce qu'on est en train de nous dire ici, c'est que le gouvernement s'est prémuni, s'est gardé une porte de sortie et il pourra dire à l'avenir: Oui, je supervise ça un peu plus, mais, vous savez, si on décide de vous recotiser, on va vous recotiser.

Encore une fois, c'est comme dans le cas du pourboire. C'est un projet de loi qui, non seulement ne répond pas au souhait du Protecteur du citoyen, non seulement ne répond pas au souhait des citoyens de mon comté, et peut-être d'autres qui se plaignent d'avoir été injustement traités par le gouvernement du Parti québécois, non seulement on ne règle pas les cas du passé, mais on nous garantit pour l'avenir la même chose. Difficile d'être pour ça, M. le Président, à moins qu'il y ait des explications. Bon.

Vous allez dire: C'est le Parti libéral du Québec; ils sont dans l'opposition, alors il faut qu'ils chicanent. Il y a le président du Conseil du trésor qui vient dire: Exactement. Je vais quand même lui rappeler... Peut-être qu'il aura l'occasion d'assister à un conseil des ministres prochainement. Je sais qu'il y a quelques-uns de ses collègues qui vont peut-être être éjectés bientôt, mais, dans son cas, il sera peut-être encore là. C'était à la Chambre des communes, et je vais vous lire un petit bout.

D'abord, une lettre du 6 juillet 1995. Ça vient du Bloc québécois. Patrick Charette, attaché politique, unité à la correspondance, disait ceci: «Le Bloc trouve inadmissible ce revirement rétroactif qui pourrait pousser à la faillite environ la moitié des contribuables touchés. Ces derniers ont utilisé cette mesure en toute bonne foi et écopent maintenant pour l'incurie du ministère fédéral du Revenu.» Ça, c'était le Bloc à Ottawa. C'est le premier ministre du Québec qui dit ça à la ministre du Revenu du Québec. L'incurie de la ministre du Revenu du Québec, la faillite de gens, de contribuables qu'on a à représenter. Je vois que le président du Conseil du trésor a baissé la tête et est retourné dans ses lectures. C'est moins drôle.

Une lettre du 10 juillet 1995. Ça vient d'Alma. C'est signé par Rose-Aimée Goulet, adjointe. Elle nous dit ceci: «Au nom du député du comté du Lac-Saint-Jean, l'honorable Lucien Bouchard, j'accuse réception de votre lettre datée du 6 juin 1995, reçue le 6 juillet dernier, concernant l'élimination d'un crédit d'impôt pour l'investissement en recherche et développement. Le Bloc québécois – ils sont smattes, eux autres – a vivement dénoncé la décision du gouvernement libéral d'annuler ce crédit d'impôt en place depuis quatre ans. Au moins 15 000 Québécois s'en sont prévalus et, maintenant, Revenu Canada leur demande de rembourser les déductions reçues en plus des intérêts, des sommes de trois à quatre fois plus importantes que ce qu'ils ont épargné en impôts. Le Bloc – je cite toujours cette lettre du Bloc, M. le Président; ce n'est pas le Parti libéral du Québec, ça – trouve inadmissible ce revirement rétroactif – parlant de revirement, là, il y en a un pas pire, hein, avec le premier ministre du Québec qu'on a là – qui pourrait pousser à la faillite environ la moitié des contribuables touchés. Ces derniers ont utilisé cette mesure en toute bonne foi et écopent maintenant pour l'incurie du ministère du Revenu.»

M. le Président, il y a 8 000 personnes qui sont touchées. Je sais que la ministre et le président de la commission sur les finances publiques... Et la ministre, en copie conforme, recevra ou a reçu aujourd'hui une lettre de l'Association des contribuables ayant participé à des projets de recherche et développement. Je n'aurai malheureusement pas le temps de faire lecture de cette lettre. J'attire l'attention de Mme la ministre sur la déception profonde qu'ont ces gens, nos concitoyens, des gens qui paient le salaire de leurs élus non pas pour qu'ils viennent à Québec triturer, dessiner, parce que c'est presque un dessin quand on voit des phrases qui durent des pages...

Ils ne nous paient pas pour venir faire des projets de loi, qu'a si bien décrits mon collègue de Verdun tantôt, qui n'ont le seul objectif, semble-t-il, que de ne jamais être compris. On dirait qu'on s'est donné le mandat au cabinet de Mme la ministre du Revenu, on s'est dit: On va écrire quelque chose, on va voir jusqu'où on peut écrire des affaires que le monde ne comprendra pas. C'est incroyable! Je vais montrer ça à la caméra, là. Vous avez ici l'article 1079.8.8, c'est deux paragraphes, c'est deux phrases, et c'est incompréhensible.

Les gens qu'on représente ne nous demandent pas de faire ça, au contraire. Dans la recherche et développement, ils nous supplient de faire le contraire. Ils nous disent: Nous voulons savoir quels sont nos droits; nous avons été plongés une fois dans l'embarras; le gouvernement, au lieu de prendre ses responsabilités, a décidé de nous taper sur la tête, nous qui étions de bonne foi; nous supplions le gouvernement de nous respecter, de nous donner des indications législatives pour l'avenir qui vont éviter que ça revienne.

Le minimum qu'on peut faire, le minimum que ce gouvernement peut faire, c'est d'entendre ces gens et tous les autres intervenants en commission parlementaire venir lui expliquer ce qui s'est passé, parce que ce projet de loi nous promet que cela se répète. Plutôt que de corriger la situation, le projet de loi vient nous plonger dans une grande possibilité, celle de répéter des actes, des actions qui ne doivent pas être commis à nouveau.

Alors, M. le Président, je termine là-dessus. Je termine en souhaitant que ce gouvernement puisse enfin se rappeler que son pouvoir lui vient de la population. Le pouvoir d'un gouvernement, il ne le tient pas de son premier ministre. Nous n'avons pas à accepter un régime comme celui que le Parti québécois a mis en place, où il semble y avoir une telle distance entre nos concitoyens et ceux qui ont à initier des actions gouvernementales. J'espère qu'on pourra entendre les intervenants. J'espère que Mme la ministre va nous revenir avec une pièce législative corrigée, transformée, compréhensible, pour qu'on sache à l'avenir où le gouvernement loge et qu'on sache, pour le passé, comment ce gouvernement veut traiter les citoyens qui ont été lésés et qui sont pourtant de bonne foi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Châteauguay. Considérant l'heure, nous allons maintenant ajourner nos travaux à mercredi, 20 mai, à 10 heures.

(Fin de la séance à 18 heures)


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