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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, April 8, 1998 - Vol. 35 N° 166

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Table des matières

Affaires du jour

Présence du haut-commissaire de l'Organisation des États des Antilles orientales, M. George Randolph Earle Bullen

Dépôt du document intitulé Réforme parlementaire

Décision du président concernant le remplacement de motions de censure jugées irrecevables

Dépôt des motions de censure modifiées

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures sept minutes)


Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Je vous souhaite la plus cordiale bienvenue. Nous allons débuter nos travaux par les affaires du jour.


Affaires prioritaires


Reprise du débat sur la motion du ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur les motions de censure

Aux affaires du jour. À l'article 1 de notre feuilleton, aux affaires prioritaires, l'Assemblée reprend le débat sur la motion de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement, et sur les motions de censure présentées par M. le député de Laporte, M. le député de Rivière-du-Loup, M. le député Verdun, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce et M. le député de Vaudreuil et chef de l'opposition officielle.

Je vous informe qu'il y a maintenant 10 h 48 min d'écoulées à la première étape du débat. Il reste 1 h 37 min au groupe parlementaire formant le gouvernement, 45 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et 20 minutes aux députés indépendants.

Je cède maintenant la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, permettez-moi de réagir au budget 1998-1999, un budget de vaches maigres qui donne l'illusion que le gouvernement se préoccupe de l'économie et de la création d'emplois. Mais en réalité il s'agit d'une vaste opération de saupoudrage: 75 mesures en tout qui coûtent 213 000 000 $ cette année et 363 000 000 $ l'année prochaine, sur un budget total de 41 000 000 000 $.

Claude Picher, dans La Presse du 1er avril dernier, a accueilli ce budget avec beaucoup de scepticisme, et c'est le moins que l'on puisse dire. Dans un article intitulé À l'an prochain... , Claude Picher écrit ceci: «Cela fait une bonne quarantaine de budgets que je couvre, à Québec, à Ottawa, et même quelques-uns à Toronto. Jamais, jamais je n'ai vu une telle masse de documents que celle pondue hier par le ministre de l'Économie et des Finances: 12 livres, plus de 1 000 pages bien tassées. Et pourtant, rarement budget aura-t-il eu aussi peu d'impact sur les finances publiques et sur notre vie de tous les jours.»

Quand on décortique ce budget, M. le Président, le premier constat qui saute aux yeux, c'est que les contribuables n'auront pas de répit. En effet, le budget n'apporte rien de bon. Les contribuables n'auront aucune baisse de taxes ni d'impôts, et ce, malgré le fait que la croissance économique ambiante a été forte, même plus forte que prévu.

(10 h 10)

Et ce n'est pas tout. Malgré le climat économique favorable qui prévaut aux États-Unis et ailleurs au Canada, le Québec n'a réussi à créer que 13 % des emplois par rapport à l'ensemble canadien durant les deux dernières années. Il n'a, de plus, attiré que 17 % des investissements privés. Pire encore, en 1997, les données d'Emploi-Québec ont révélé le triste bilan de ce gouvernement en matière d'emploi, surtout d'emploi des jeunes. En effet, il s'est perdu, durant cette seule année, 15 000 emplois chez les jeunes de 15 à 24 ans, par rapport à 1996. Le ministre des Finances nous annonce dans le budget des mesures pouvant créer 5 000 emplois pour les jeunes. Mais que fait-on pour les 10 000 autres qui ont été perdus? Le ministre reste muet sur cette question.

Le budget prévoit aussi la création de 20 000 places de stages études-travail. Bonne nouvelle! Il faut se rappeler qu'il ne s'est créé que 50 stages sur les 1 000 promis lors du Sommet de novembre 1996. Triste bilan.

Le ministre prétend garder le cap sur le déficit zéro. En réalité, le déficit est rendu dans les poches des contribuables, parce que le gouvernement n'a fait que le transférer à d'autres instances, notamment aux hôpitaux, 400 000 000 $; aux universités, un autre 400 000 000 $; aux commissions scolaires, 500 000 000 $; et aux cégeps, où 30 collèges sur 48 sont déficitaires.

En parcourant le discours sur le budget, j'ai cherché à trouver une mesure, une seule mesure qui puisse bénéficier aux citoyens de mon comté. La Pinière est un comté de gens d'affaires, de professionnels, d'entrepreneurs, un comté avec des jeunes familles, et il n'y a rien dans ce budget qui puisse alléger le fardeau des contribuables de mon comté ou stimuler l'économie en général.

Au contraire, le 1er janvier 1998, trois mois avant le dépôt du budget, les citoyens de mon comté et ceux du Québec ont dû subir une hausse de 1 % de la taxe de vente, qui est passée de 6,5 % à 7,5 %. Les jeunes familles n'ont eu droit qu'à un maigre 25 000 000 $ pour les garderies pour les enfants de trois ans, un montant nettement insuffisant quand on sait que l'ouverture de 35 000 places pour les enfants de quatre ans a coûté à elle seule 81 500 000 $.

Quant aux entreprises, aux petites et moyennes entreprises en particulier, le ministre des Finances n'a fait que reporter l'échéance d'un éventuel allégement fiscal à l'an prochain. Les vraies décisions sont reportées aux calendes grecques parce que le ministre des Finances n'a aucune marge de manoeuvre. C'est tellement vrai que le gouvernement a été contraint de dépenser 96 % de son Fonds de suppléance avant même que l'année commence.

Au chapitre de son bilan social, le gouvernement péquiste n'a cessé d'appauvrir les Québécois. Les hôpitaux regorgent de malades qui congestionnent les corridors des urgences; les listes d'attente pour les opérations chirurgicales s'allongent; les centres jeunesse débordent; et des enfants abusés ou maltraités sont obligés d'attendre des mois avant d'avoir accès à un centre de rééducation. La situation est criante en Montérégie; elle est dénoncée de tous. Mais le gouvernement préfère investir dans ses chimères de séparation au lieu d'investir dans la protection de notre jeunesse.

Je termine là-dessus, M. le Président, puisque le temps qui m'est alloué est terminé, mais j'aurai long à dire sur ce budget. On reprendra à d'autres moments. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de La Pinière. Nous cédons maintenant la parole au ministre d'État des Ressources naturelles et ministre d'État aux Régions. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. D'abord, ce n'est plus ministre d'État aux Régions. Depuis le 1er avril, c'est ministre des Régions, parce que depuis le 1er avril on a notre ministère.

Donc, M. le Président, tout en gardant le cap sur le déficit zéro, le gouvernement du Québec a pris les moyens pour stimuler les investissements privés, pour favoriser la mise en valeur de nos ressources naturelles puis pour stimuler également la création d'emplois, particulièrement dans nos régions ressources.

Comme ministre des Régions tout comme ministre d'État des Ressources naturelles, c'est un budget extraordinaire. Puis je pense que pour tout député dans cette Chambre, même si ce sont les députés d'en face, ils devraient se réjouir: il n'y a aucune augmentation de taxes, pour aucun citoyen. Ça, c'est la première des choses, donc on dit bravo!

Deuxième chose, c'est un budget pour les jeunes. Je ne sais pas à combien de reprises le ministre des Finances et de l'Économie a stipulé que les sommes additionnelles qu'il mettait pour les jeunes... Et ça, je pense qu'au lieu de se targuer dans un discours vide, on a voulu concrétiser dans les faits ce qu'on mettait au service des jeunes pour que ces jeunes aient une lueur d'espoir au niveau de l'emploi.

Et, quant à moi, comme ministre, d'abord, des Richesses naturelles, je rencontrais dernièrement, avec mon collègue de Laviolette – j'allais dire mon ami Jean-Pierre Jolivet, mais, comme on doit l'appeler par son nom de député, c'est le député de Laviolette et ministre délégué aux Forêts... Nous avons été très heureux de voir que le ministre des Finances a répondu à notre invitation – je ne dirais même pas à notre invitation, c'était une demande incessante – de corriger les sommes pour la forêt privée. Quand je l'avais rencontré, avec mon ministre délégué, M. le député de Laviolette, il manquait de l'argent pour permettre une plus grande équité et pour maintenir au moins égal à ce qui se faisait dans le passé dans toutes les régions ressources... il manquait un 5 000 000 $. Nous avions réussi à aller chercher de l'argent dans un fonds, le Fonds de lutte à la pauvreté. Mais nous avons expliqué notre cas au ministre des Finances puis on a dit au ministre des Finances: C'est important, la forêt privée au Québec, c'est important qu'on puisse réinvestir autant, mais, en même temps, qu'on corrige les iniquités, parce qu'il y a des régions qui n'ont presque pas d'argent puis d'autres où, à cause du passé, à cause du BAEQ, à cause du Plan de l'Est, à cause de toutes sortes de programmes ponctuels, il y avait des sommes du double par rapport à ce qu'il pouvait y avoir dans d'autres régions. On a corrigé cela.

Et je suis très heureux, moi, du fait que le ministre nous donne 25 000 000 $ pour la mise en valeur des forêts privées, 25 000 000 $, à savoir 5 000 000 $ par année dans les 17 agences, ce qui va porter notre budget à 34 500 000 $. Et ce 5 000 000 $ va nous permettre de mettre 350 emplois de plus annuellement, en plus. Donc, c'est un grand merci, non pas seulement un merci en tant que ministre, c'est un merci au nom des agences de forêts privées. C'est un merci au nom des 17 régions qui ont des agences de forêts privées. C'est un merci aux travailleurs de la forêt qui y trouvent leur compte et qui sont très heureux de cette mesure.

D'ailleurs, M. le Président, je pense qu'on a là, en forêt privée, un bel exemple de partenariat parce qu'on sait très bien que le monde municipal, le ministère des Ressources naturelles, l'entreprise québécoise dans le domaine de la forêt et également le propriétaire foncier, si on parle de terrain privé ou de forêt privée, c'est un bel exemple de partenariat. Et je dois vous dire que la contribution de l'industrie et des producteurs, par exemple, est de 16 000 000 $. C'est beaucoup, ça, uniquement pour l'aménagement, pour du développement de la forêt privée. Bravo à tout ce monde-là. Bravo d'avoir accepté de travailler en partenariat. Le Québec est à l'avant-garde là-dessus dans le domaine de la forêt privée, et c'est tout à notre honneur.

(10 h 20)

Quant au secteur énergétique, je rappellerai que le budget de M. le ministre des Finances nous donne 8 000 000 $ pour l'extension du réseau gazier dans les régions de Saint-Hyacinthe, Coaticook, Thurso, Beaupré. Ça, c'est intéressant aussi parce que l'industrie va trouver son compte sur le plan de la compétitivité des énergies. Le réseau gazier s'étend. Il y a l'alimentation de 20 parcs industriels en Estrie, en Montérégie, dans les Laurentides, en Mauricie, à Québec, au Saguenay puis en Beauce. C'est un atout de plus pour les entreprises de ces régions qui auront accès à une nouvelle source d'énergie.

Il y a l'efficacité énergétique. J'en profite, M. le Président, pour parler un peu de notre bilan énergétique. Vous savez, vous, dans la région de Shawinigan, vous connaissez ça, l'énergie. Eh bien, en deux ans seulement, le présent gouvernement, qu'est-ce qu'il a fait? Il a publié sa politique énergétique; il a créé la Régie de l'énergie; il a créé, par loi, l'Agence de l'efficacité énergétique. Les rendements d'Hydro-Québec sont passés de 330 000 000 $ par année, en bénéfices nets, à plus de 760 000 000 $. Le pourcentage de rendement est passé de 3,3 % à 6 % et quelques.

Il y a véritablement eu un essor dans le domaine énergétique depuis deux ans, deux ans et demi, et le ministre des Finances, pour donner un coup de pouce additionnel à cette Agence fraîchement née, cette Agence de l'efficacité énergétique, nous donne des crédits de 1 500 000 $ , et vous verrez naître au cours des prochains mois de beaux programmes d'efficacité énergétique en partenariat avec Hydro-Québec, en partenariat avec les municipalités, en partenariat probablement avec les travailleurs, avec la Société d'habitation du Québec, avec une foule de partenaires, et nous verrons une véritable industrie de l'efficacité énergétique naître au Québec, j'en suis convaincu.

C'est générateur d'emplois dans le domaine de la rénovation, que ce soit la fenestration, que ce soit l'isolation générale, que ce soit ce qu'on appelle l'isolation des toits, etc., toutes les portes, les fenêtres qui dégagent des pertes d'énergie. Tout cela, avec l'efficacité énergétique, pourra être revu. Donc, un programme extrêmement important.

Dans le secteur des mines, eh bien, on a eu 18 000 000 $ de plus sur trois ans, pour des investissements totaux de 200 000 000 $. Ce 18 000 000 $ là va générer des investissements de 200 000 000 $ additionnels – fantastique! merci au ministre des Finances d'avoir encouragé ces investissements privés – et, également, sera générateur et créateur d'emplois, j'en suis convaincu. On me dit même, selon les pronostics, que ce sera 1 000 emplois. Donc, dans le domaine minier, bravo! Et il y aura de nouveaux avantages fiscaux pour les entreprises qui font de l'exploration dans le nord du Québec. Il y aura une allocation de 25 % applicable à la fois aux droits miniers et à l'impôt. Donc, une nouvelle mesure fiscale pour les entreprises qui s'occupent des résidus miniers, pour stimuler la recherche pour favoriser la meilleure utilisation possible de nos ressources.

Il y a bien sûr, à l'intérieur de ce budget-là, plusieurs mesures intéressantes. D'abord, je pense, par exemple, à la prolongation pour cinq ans du programme FAIRE, le programme FAIRE qui sert au démarrage de plusieurs entreprises ou à l'amélioration de plusieurs entreprises, pour 500 000 000 $. Je peux vous dire une chose: hier, je rencontrais un promoteur qui, grâce au programme FAIRE, viendra consolider toute une région. Ce sera annoncé incessamment dans un comté dans les environs de Québec dans le domaine des pâtes et papiers.

Il y a une nouvelle société Innovatech qui est dédiée aux régions ressources, 50 000 000 $, pour l'Abitibi, pour la Gaspésie, pour le Saguenay–Lac-Saint-Jean, ces régions ressources comme les Laurentides. Pensez-y 30 secondes: avec 50 000 000 $ de capitaux de risque pour développer dans les régions ressources, je suis convaincu que ces projets technologiques là verront le jour dans plusieurs de ces régions ressources.

Et 40 000 000 $ par année consacrés par Emploi-Québec pour la formation de la main-d'oeuvre dans le cadre des projets d'investissement. Extraordinaire!

M. le Président, vous avez vu également se modifier le mandat de la SDBJ. Prochainement, un projet de loi sera déposé ici – la Société de développement de la Baie James – avec plus de crédits, 40 000 000 $ d'investissements privés. On verra des sociétés d'État plus fortes, on verra un échange positif se faire entre diverses sociétés d'État.

Les conseils régionaux de développement se sont vu octroyer 5 000 000 $ de plus. Innovatech – je l'ai dit tantôt – pour les régions ressources. Et je pourrais continuer, M. le Président: le Fonds de diversification de l'économie de la capitale, la création d'Investissement-Québec et son rôle de stratégie avec des ministères sectoriels. D'autres mesures pour les régions: la bonification du Programme d'aide à l'investissement, le financement conjoint avec l'entreprise des projets de recherche, le développement et la transformation des produits du terroir. Et pour l'amélioration de l'offre touristique, 7 100 000 $ dans nos régions.

M. le Président, si j'avais eu le temps... Dix minutes, c'est trop court pour regarder comment l'ensemble du budget contribue à améliorer le sort de nos régions.

Et je dois vous avouer que ça, c'est au-delà des mots, au-delà des mots. On a voulu assainir les finances publiques. On y arrive; à la fin du présent budget, ce sera déficit zéro. Tout en même temps, on a fait un développement des mesures sociales-démocrates comme on n'a pas vu dans les histoires du Québec: l'équité salariale, les pensions alimentaires, la politique de la petite enfance, les garderies à 5 $. Et mettez-en: 12 ou 13 mesures du genre et, M. le Président, on arrive avec un budget qui pense aux jeunes, qui pense aux payeurs de taxes, qui pense aux régions, qui pense aux régions ressources, qui pense au développement de nos ressources naturelles, au plus grand profit de nos contribuables. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre des Ressources naturelles et ministre des Régions. Nous cédons maintenant la parole au député de Frontenac. M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai écouté avec grande attention l'orateur qui m'a précédé, M. le ministre, député de Joliette, ministre qui a la responsabilité du développement des régions. Je reconnais qu'il a fait un effort pour essayer de convaincre ceux et celles qui nous écoutent, ceux et celles justement qui résident, qui demeurent en région, mais je ne suis pas convaincu que le ministre a réussi à les convaincre que ce budget-là, le dernier budget dont le ministre des Finances a donné lecture mardi dernier... Je suis absolument convaincu, certain, que personne n'a bien saisi le message du ministre responsable des régions. Personne n'a été convaincu que le ministre avait raison que ce budget-là, justement, pense aux citoyens et citoyennes du Québec, aux Québécois et Québécoises qui demeurent dans nos régions. Il y a 11 régions administratives, au Québec, M. le Président, et je dois vous avouer que les réactions des leaders de ces régions-là ont été extrêmement modérées quant à la valeur du budget déposé la semaine dernière, pour une raison évidente: c'est qu'il n'y a rien dans le budget, il n'y a rien dans ce budget-là qui vient soutenir l'activité économique en région.

Puis je voudrais, très rapidement parce que je veux passer – puis on n'a pas beaucoup de temps, M. le Président, pour discuter de documents aussi importants que le budget déposé par le ministre des Finances, la semaine dernière – rapidement sur ce volet-là... Il faut se souvenir que le gouvernement du Parti libéral avait toujours... Et ça ne s'est jamais démenti, M. le Président. De 1985 à 1994, il y a eu toutes sortes de mesures très concrètes, des programmes d'activité économique, de création d'emplois, très concrets qui ont été mis en place au cours des années 1985-1994.

Je vais donner deux exemples. Fonds décentralisé de création d'emplois, programme extrêmement souple qui était administré par les leaders régionaux, évidemment avec la collaboration du gouvernement et même de l'opposition, puisque les députés avaient une place de choix à l'intérieur de ces structures très, très souples. Fonds décentralisé de création d'emplois. À titre d'exemple, dans le comté de Frontenac, je me souviens, moi, qu'une année on avait créé au-delà de 250 ou tout près de 300 emplois strictement avec ce programme: Fonds décentralisé de création d'emplois.

Un autre exemple de la volonté du gouvernement libéral de l'époque de supporter l'activité économique en région, le programme des MRC désignées. Onze MRC au Québec avaient eu un support très concret du gouvernement du Québec pour, encore là, créer de l'emploi en région, de l'emploi solide, de l'emploi durable. Au même titre que le Fonds décentralisé de création d'emplois, le programme des MRC désignées en était un géré par le milieu.

Dans le budget du ministre des Finances, il n'y a rien, rien, rien de concret, rien de palpable qui nous permette de croire, d'espérer une création d'emplois directs au cours des prochains mois, bien au contraire. Il y a des mesures, et le ministre y a fait référence tout à l'heure, extrêmement timides pour les entreprises pour 1999, pour 2000 et pour 2001. C'est maintenant que les régions ont besoin du support du gouvernement du Québec. C'est maintenant que les entreprises, le réseau des petites et moyennes entreprises qu'on retrouve dans nos régions a besoin d'un coup de pouce de l'État pour créer de l'emploi, maintenant, pas en 1999, pas dans 14 mois, pas dans deux ans, pas dans trois ans. Alors, le budget, sous cet angle-là, est extrêmement décevant.

(10 h 30)

J'écoutais mon collègue de Joliette, tout comme ceux et celles qui sont intervenus pour défendre le budget du ministre Landry, parler du déficit zéro. M. le Président, le déficit, pour l'année qui vient de se terminer, 1997-1998, ça apparaît dans le discours du budget, il est de 2 069 000 000 $. Ce sont les chiffres du gouvernement. Ce sont les chiffres du ministre des Finances. Mais ce n'est pas la réalité. Les chiffres du ministre des Finances et de ses associés qui siègent avec lui au Conseil des ministres, ces chiffres-là, M. le Président, ne sont pas vrais. Ce n'est pas ça, la réalité. Le déficit de la collectivité québécoise – parce que le gouvernement, ça représente toute la population du Québec – il n'est pas de 2 000 000 000 $, il n'est pas de 2 069 000 000 $, il est de beaucoup supérieur à ce chiffre, d'ailleurs très élevé, 2 069 000 000 $. Mais, si c'était la réalité, si c'était vrai qu'il y a, au Québec, un déficit de 2 000 000 000 $, on pourrait féliciter le ministre, dire: Vous avez réussi, parce que c'est à peu près ce que vous aviez prévu l'an passé.

Qu'est-ce qui s'est passé, au cours des 12 derniers mois, M. le Président? On le dit du côté de l'opposition officielle, plein d'intervenants au Québec le disent: le gouvernement du Parti québécois a développé l'astuce suivante, qui n'est pas une astuce, c'est devenu maintenant tellement évident, de transférer une partie de l'endettement de la collectivité, de transférer une partie de l'endettement de l'État, du gouvernement, sur le dos des partenaires du gouvernement du Québec.

Il faut aller vérifier ce qui se passe. Il faut aller vérifier la comptabilité de l'ensemble des centres hospitaliers du Québec, des hôpitaux. Il faut aller vérifier ce qui se passe dans nos universités, dans le réseau des collèges. Et aussi, évidemment, il faut aller vérifier ce qui se passe dans nos commissions scolaires. Commissions scolaires, universités, cégeps, hôpitaux, c'est le gouvernement du Québec qui a à absorber les dettes, les déficits de ces partenaires de l'État.

Alors, qu'est-ce que le gouvernement fait? On a autorisé les hôpitaux – ça, c'est du jamais vu, ça a commencé l'an passé – l'ensemble des hôpitaux du Québec à emprunter pour à peu près – on verra les chiffres au cours des prochaines semaines – 250 000 000 $. Ce n'est plus le gouvernement du Québec qui emprunte. Ce n'est plus le gouvernement du Québec qui s'endette. C'est le gouvernement du Québec qui dit aux hôpitaux, aux directions des hôpitaux: Vous allez le faire à notre place. De sorte que le déficit n'est pas de 2 069 000 000 $, il est de 2 069 000 000 $ plus 250 000 000 $ domptés sur le dos des directions des hôpitaux au Québec.

Et ça ne s'arrête pas là, M. le Président. Combien les universités ont emprunté au cours de la dernière année, plutôt que cet emprunt soit effectué par le ministère de l'Éducation? Ce n'est pas le ministère de l'Éducation, pour partie, qui a emprunté, ce sont les universités. C'est du pareil au même. Ça sera, en bout de ligne, toujours le même citoyen qui paiera. C'est, en bout de ligne, la collectivité québécoise qui a la responsabilité, qui devra supporter l'endettement des universités. Au cours des dernières deux années, on parle d'un endettement de plus ou moins 400 000 000 $ effectué par les universités du Québec.

Alors, le déficit, tel qu'établi à 2 069 000 000 $, ce n'est pas vrai. Il faut ajouter 250 000 000 $ pour l'ensemble des hôpitaux, il faut ajouter l'endettement des universités et il faut ajouter également, M. le Président – et le temps court, c'est ce que vous m'indiquez – l'endettement dompté sur le dos des commissions scolaires partout au Québec.

Le déficit pour l'an prochain est évalué... On parle pour 1998-1999, le ministre des Finances espère un déficit de 1 127 000 000 $. Mais, si le gouvernement et son ministre des Finances continuent à jouer avec les chiffres comme il l'ont fait dans la dernière année, si on continue à obliger les partenaires de l'État que sont, et je me répète, les hôpitaux, les commissions scolaires, les universités, les cégeps, les municipalités du Québec, à emprunter à la place du gouvernement du Québec, on n'aura que trompé la population. On aura fait des exercices comptables qui ne sont même pas habiles. Il n'y a plus personne qui est dupe de cette stratégie, de cette astuce du gouvernement du Québec d'obliger les partenaires à emprunter à sa place, de sorte qu'on pense à première vue que le gouvernement a un déficit raisonnable. Mais ce n'est pas ça, la réalité des choses.

Et je conclus en disant qu'il faut aussi se souvenir des 375 000 000 $ dont les municipalités ont écopé, au cours des dernières années. Alors, un déficit de 2 000 000 000 $, c'est faux, M. le Président, ce n'est pas ça, la réalité des choses. Et ça, il faut le dire à la population du Québec. Et il faut espérer que la population dira, dans les régions du Québec, aux députés du Parti québécois: Vous tentez de tromper la population, mais ça ne réussit pas, on a compris vos astuces. Et on espère que l'an prochain, le ministre des Finances, s'il est encore en poste évidemment, s'il n'a pas changé de côté de la Chambre, aura un discours du budget plus franc, plus honnête, plus collé à la réalité des choses. Merci, M. le Président.

(10 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac. Nous cédons maintenant la parole au député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue et également ministre des Affaires municipales. M. le ministre.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Et aussi ministre responsable de la région de l'Abitibi-Témiscamingue, puisque, le 31 mars dernier, à l'occasion du troisième budget déposé par notre collègue le ministre des Finances et ministre d'État de l'Économie, eh bien, avec mes collègues de la région de l'Abitibi-Témiscamingue, le député d'Abitibi-Ouest et sa longue carrière à l'Assemblée nationale, avec mon collègue d'Abitibi-Est, qui entreprend une carrière fructueuse à l'Assemblée nationale également, nous avons eu au moins 10 bonnes raisons de nous réjouir de ce budget tourné vers l'avenir pour une région comme l'Abitibi-Témiscamingue. Nous avons eu aussi, avec mes collègues de ces régions-ressources, l'occasion de nous réjouir à titre de ministre des Affaires municipales, puisque – et nous aurons l'occasion d'en parler – nous aurons eu l'occasion, avec le ministre des Finances, d'apporter une réponse concrète aux municipalités de petite taille du Québec et de la région de l'Abitibi-Témiscamingue en matière de rénovation ou encore de développement d'infrastructures, que ce soit en Abitibi-Est, que ce soit en Abitibi-Ouest, que ce soit à Rouyn-Noranda, que ce soit au Témiscamingue ou partout sur le territoire du Québec, et nous nous sommes donné des réponses satisfaisantes.

M. le Président, nous avons déjà eu l'occasion, dans notre région, ensemble, comme équipe régionale du côté gouvernemental, d'exposer les 10 belles raisons ou les 10 bonnes nouvelles du troisième budget de M. Landry, du ministre d'État de l'Économie et des Finances dans ce budget 1998-1999, et nous avons eu l'occasion, pas plus tard qu'au début d'avril, d'indiquer à une assemblée de quelque 400 femmes et hommes d'affaires à Rouyn-Noranda que, probablement, les trois meilleures nouvelles de ce budget, nous pouvions les retrouver dans ce dépliant que le ministre publie à chaque année lorsqu'il annonce le budget. Probablement que les trois meilleures nouvelles, elles sont aux pages 3, 5 et 9 de ce résumé.

La première bonne nouvelle, M. le Président, c'est que nous aurons encore réussi, dans la foulée de ce qu'avait entrepris le député de Crémazie et ministre des Finances, à la première année du gouvernement, à juguler le déficit et relever le défi d'atteindre le chiffre zéro l'an prochain, en matière de déficit du Québec.

M. le Président, nous avions pris l'engagement, avec la collectivité québécoise, cette année, pour le budget 1998-1999, et ça, ça vaut pour les citoyens de l'Abitibi-Témiscamingue, comme ailleurs à travers tout le Québec, d'atteindre un niveau de déficit, avec des efforts, avec grande difficulté, avec de l'énergie, avec du travail et de la détermination, de réduire le déficit à 1 200 000 000 $.

M. le Président, le premier élan, il a été donné par le député de Crémazie en réduisant, à la première année de notre véritable budget, le déficit à 3 900 000 000 $. Nous avons réussi. L'année subséquente, ça a été 3 200 000 000 $. Nous avons réussi. La dernière année, ça a été 2 200 000 000 $. Encore là, avec beaucoup d'efforts. En Abitibi-Témiscamingue, à Rouyn-Noranda ou au Témiscamingue, avec beaucoup d'efforts, nous avons tous réussi ensemble et nous allons relever le défi du déficit zéro en l'an 2000, pour le Québec, pour les jeunes et pour l'ensemble, et en particulier les régions-ressources.

Il y avait donc, M. le Président, 10 bonnes raisons de se réjouir, dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue, à la publication de ce troisième budget du ministre de l'Économie et des Finances. La première grande raison, c'était donc que nous allons atteindre nos objectifs financiers.

La deuxième: Pour la première fois depuis 20 ans à l'Assemblée nationale, le ministre des Finances a pu parler aux régions-ressources comme à l'ensemble du Québec pour dire: Cette année, le gouvernement n'aura plus besoin d'emprunter pour payer les dépenses courantes de l'épicerie. Ça nous fatigue. Ça nous fatiguait. C'était une situation inacceptable, M. le Président. À chaque fois que les excellents personnels dans les ministères et les organismes du gouvernement du Québec, en Abitibi-Témiscamingue, en Abitibi-Ouest comme en Abitibi-Est, comme à Rouyn-Noranda–Témiscamingue, recevaient leur paie à chaque semaine, nous devions, à cause de l'incurie des gouvernements précédents et, en particulier, des 10 dernières années, emprunter pour payer nos employés à chaque semaine. C'est terminé, cette situation.

Troisième bonne nouvelle, M. le Président – elle est à la page 9 de ce résumé – il y aura une réforme de la fiscalité des entreprises. Les petites et moyennes entreprises de la région de l'Abitibi-Témiscamingue, qu'elles soient, encore une fois, à Rouyn-Noranda, au Témiscamingue, à La Sarre, à Amos, à Val-d'Or ou sur l'ensemble du territoire, il y aura une autre réforme de la fiscalité des entreprises. Nous allons aussi réduire le fardeau financier qu'on a dû imputer... Compte tenu des 10 dernières années de mauvaise gestion financière au Québec, nous avons dû leur imposer des taux qui sont complètement inacceptables. Le ministre des Finances...

Et j'ai pu constater, la semaine dernière, M. le Président, au tout début d'avril 1998, comment les femmes et les hommes d'affaires de notre région-ressources ont accueilli avec enthousiasme cette réforme de la fiscalité des entreprises, après celle de la fiscalité des particuliers que nous aurons réussi à implanter à compter du 1er janvier 1998.

M. le Président, le premier grand motif de bonnes nouvelles pour les gens de l'Abitibi-Témiscamingue, c'est qu'en 1998-1999, pour les citoyens et les citoyennes de la région de l'Abitibi-Témiscamingue, il n'y aura aucune hausse des impôts et des taxes. Réduire le déficit à zéro, travailler très fort et annoncer aux gens qui nous écoutent qu'il n'y aura aucune augmentation de taxes et d'impôts, c'est magistral.

Deuxième bonne raison, M. le Président: La création d'une Société Innovatech pour les régions-ressources du Québec. L'Abitibi-Témiscamingue aura enfin son grand instrument technologique pour implanter les nouvelles technologies dans le domaine de la forêt, dans le domaine de l'agriculture, dans le domaine des mines, dans le domaine du tourisme aussi. Pour l'ensemble de la région, avec les régions-ressources, 50 000 000 $ pour une Société Innovatech pour l'Abitibi-Témiscamingue, comme les autres régions-ressources du Québec.

Troisième bonne raison: La Société de développement de la Baie James qui a son siège social à Matagami et qui oeuvre dans le Nord-du-Québec, et qui a des retombées pour une région-ressources comme la région de l'Abitibi-Témiscamingue... un nouveau mandat pour la Société de développement de la Baie James et des investissements avec le secteur privé pour 40 000 000 $.

M. le Président, également dans le secteur des mines, une bonne nouvelle: Pour prolonger la vie des mines en Abitibi-Témiscamingue, 18 000 000 $ au cours des trois prochaines années pour des programmes visant à augmenter les réserves, les tonnages de minerai dans nos mines à travers la région de l'Abitibi-Témiscamingue. Et une première bonne nouvelle qu'on a pu annoncer cette semaine, donc au début d'avril 1998: 2 000 000 $ pour la mine Kiena, à Val-d'Or, et sa présidente, Mme Claire Derome, pour prolonger la vie de cette mine et pour les 250 travailleurs qui y oeuvrent.

Cinquième bonne nouvelle, M. le Président, 180 000 000 $ d'investissements à réaliser dans les municipalités de petite taille, pour les réseaux d'aqueduc, d'égout et de traitement des eaux usées. Ça veut dire, pour les 400 municipalités de petite taille à travers le Québec, une bonne nouvelle. Ça veut dire, pour les 84 municipalités de petite taille dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue, une bonne nouvelle. 30 000 000 $ supplémentaires pour les équipements culturels. Nous avons des projets à La Sarre, nous avons des projets à Ville-Marie, nous avons des projets à Val-d'Or. Nous aurons les moyens de réaliser nos engagements, M. le Président.

Le Conseil des recherches en agro-alimentaire de l'Abitibi-Témiscamingue pourra profiter, pour participer au nouveau centre de recherche en agroenvironnement qui sera créé à Saint-Hyacinthe, en collaboration avec les régions et les instances régionales au niveau de la recherche... M. le Président, 8 000 000 $ pour l'extension du réseau gazier, ça veut dire des possibilités pour des communautés comme Notre-Dame-du-Nord. Et, M. le Président, ce que ça veut dire aussi, ça veut dire que la création de la nouvelle SDI et d'Investissement-Québec, avec des possibilités pour 500 000 000 $ par année, ça veut dire du capital pour développer des entreprises dans le secteur des mines, dans le secteur de la forêt, dans le secteur du tourisme et également dans le secteur de l'agroalimentaire.

M. le Président, avec mes collègues de l'Abitibi-Témiscamingue, à la fin de mars 1998, nous avons eu encore une fois 10 bonnes raisons de nous réjouir, au nom de la population de l'Abitibi-Témiscamingue, d'un excellent budget qui mise sur le développement, qui mise sur l'emploi, qui mise sur l'avenir et, M. le Président, avec ce qu'on s'est donné comme instruments, nous sommes en mesure de franchir le cap du nouveau millénaire avec de bons outils, de bons instruments.

M. le Président, je conclus en affirmant avec mes collègues de la région de l'Abitibi-Témiscamingue que cette équipe qui est au service de la population depuis un grand nombre d'années va continuer d'être au service de cette population, de la défendre et surtout de développer les instruments qui vont faire que la prospérité, la fierté pour réussir et bâtir un pays, nous l'aurons dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue et à travers tout le Québec parce que nous l'avons décidé et que nous avons la volonté d'être toujours à l'action pour réaliser ce défi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Affaires municipales et ministre responsable de la région de l'Abitibi-Témiscamingue.

Nous cédons maintenant la parole au député de Sauvé en lui rappelant que son temps de parole est de cinq minutes. M. le député.


M. Marcel Parent

M. Parent: M. le Président, que j'aimerais donc pouvoir partager l'enthousiasme de mon collègue d'en face, le député d'Abitibi-Témiscamingue! J'aimerais ça être enthousiaste pour vanter ce projet de budget là. Mais je me demande qu'est-ce que le député d'Abitibi-Témiscamingue va pouvoir répondre à ses commettants quand il va lui falloir expliquer comment le ministre des Finances a pu combler un montant de 1 500 000 000 $ que le Vérificateur général évaluait en inscrivant aux livres la modique somme de 73 000 000 $ aux états financiers. Ça, ça va être plus difficile, M. le député d'Abitibi-Témiscamingue, dans votre discours, d'expliquer ça à vos gens, ça va être pas mal un plus gros contrat que de faire un discours en Chambre.

M. le Président, malgré six années de croissance économique, le gouvernement péquiste n'a même pas réussi à se dégager une marge de manoeuvre pour réduire les impôts, réduire les taxes ou encore améliorer les services de santé et d'éducation. C'est simple, M. le Président, il y a une raison pour ça, c'est que, depuis qu'ils sont au pouvoir, le gouvernement du Québec traîne de la patte. On a réussi à créer à peine 13 % d'emplois au Québec alors qu'on a 25 % de la population. La moyenne canadienne est de 17 %. On a attiré des investissements privés 75 % moins que partout ailleurs au Canada. Et pourquoi? C'est simple, c'est que notre produit intérieur brut, comparativement à celui du reste du Canada, est de l'ordre de 2,4 % à 4,2 %. Il y a des questions à se poser, M. le Président.

(10 h 50)

On n'a pas augmenté les taxes. On dit qu'on n'a pas augmenté les taxes. Mais non. Mais on a pelleté, par exemple, dans la cour des hôpitaux, un déficit de 400 000 000 $ et, aux universités, un autre 400 000 000 $; 30 cégeps sur 48 ont des difficultés financières. Les commissions scolaires, il leur manque 500 000 000 $ pour mener à bonne fin leurs projets.

Mais où est passé l'argent? Où sont passées les dépenses? Ces dépenses-là, elles sont passées dans des fonds, dans des fonds camouflés, le fonds routier, le fonds des départs hâtifs. Est-ce que les gens qui nous écoutent réalisent que ce gouvernement a fait un détournement de fonds? Il a pris de l'argent qu'il devait payer cette année et il l'a réparti sur une période de 10 et 15 ans de façon à ce que le prochain gouvernement, qui sera certainement un gouvernement du Parti libéral du Québec, aura à payer pendant 10 ans à 15 ans cette politique qui manquait d'envergure, qui manquait de prévision, qui a été mise de l'avant par ce gouvernement.

Ce gouvernement-là a l'habitude de dire: Vous nous avez laissé des déficits, les libéraux. Mais ce gouvernement-là oublie de nous dire, par exemple, qu'entre 1976 et 1985 ils ont triplé la dette du Québec. Et qu'est-ce que les libéraux ont fait? Ils ont payé les intérêts sur leur incurie. Rappelez-vous-en! Rappelez-vous-en, M. le Président, les taux d'intérêt, à ce moment-là, étaient de 13 %, 14 %, 15 % et 17 %. On payait les intérêts sur la dette que ce gouvernement-là a laissée en héritage aux Québécois.

Le ministre des Finances se vante de présenter un budget sans hausse de taxes ni hausse d'impôts. Il ne faut pas oublier que la TVQ a été augmentée le 1er janvier de 6,5 % à 7,5 %. Les taxes sur les cigarettes ont aussi été augmentées, en février.

L'emploi chez les jeunes. On en parlait de l'emploi chez les jeunes, le député de Joliette, tout à l'heure. En 1997, les statistiques de l'emploi au Québec démontrent qu'il s'est perdu environ 15 000 emplois par rapport à 1993 chez les jeunes de 15 à 24 ans. Et aujourd'hui le ministre nous annonce des mesures pour favoriser la création de 5 000 emplois sur deux ans. Que prévoit le ministre pour ces 10 000 autres jeunes qui ont perdu leur emploi et qui attendent toujours?

Pour ce qui est de la promesse de 20 000 places-stages, rappelons qu'au Sommet de novembre 1996 des 1 000 stages promis pour les jeunes seulement 50 stages ont vu le jour; il en manque 950. On en promet 1 000, puis il en manque 950 plus d'une année après.

Fiscalité des entreprises. Comment le ministre peut-il encore une fois mettre en lumière l'importance des PME québécoises dans le processus de création d'emplois et les objectifs ambitieux du gouvernement en cette matière et reporter au prochain millénaire les mesures allégeant le fardeau fiscal des Québécois?

M. le Président, je pourrais continuer, je pourrais en parler pendant des heures. Vous m'avez dit que vous me donniez cinq minutes. Vous savez combien je suis docile et obéissant. Tout ça pour vous dire, M. le Président, qu'il n'y a aucun député dans cette salle, qu'il soit de n'importe quel côté de la Chambre, qui pourra voter pour ce budget. On va voter contre et on ne l'acceptera jamais. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Sauvé. Nous cédons maintenant la parole au député de Sainte-Marie–Saint-Jacques et leader adjoint du gouvernement. M. le député.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, quelques-uns des députés de l'opposition ont profité de ce débat sur le budget pour y aller de leurs vieilles rengaines. Ils ne sont même plus à l'ère du disque compact, ils sont plutôt encore à l'époque du vieux gramophone, du 78 tours qui griche. Alors, nous avons entendu je ne sais pas combien de fois les collègues dire: Oui, mais l'obsession souverainiste, le coût de la séparation... Comme si le fédéralisme, c'était gratis. S'il y a une obsession de la souveraineté, de ce côté-ci, il faut dire que, de l'autre côté, il y a un à-plat-ventrisme fédéraliste éhonté.

Une voix: Bravo!

M. Boulerice: Le fédéralisme, ce n'est pas gratuit. Regardez. Quelle nouvelle avons-nous apprise cette semaine? Ottawa veut dépenser 750 000 000 $ pour des sous-marins. À chaque dollar qui est dépensé par Ottawa, le quart provient des contribuables québécois. 750 000 000 $ pour des sous-marins. Je vois un jeune couple, ici, qui assiste à nos débats. Est-ce que c'est votre priorité, des sous-marins? Avez-vous d'autres priorités que les sous-marins? Je serais curieux de connaître leur réponse et je peux voir, par leurs yeux, que les sous-marins ne sont pas la priorité de ce jeune couple. Leur priorité, c'est probablement l'éducation des enfants qu'ils ont ou qu'ils auront, la santé, l'emploi. 750 000 000 $ pour des sous-marins, comme le fédéral a dépensé 1 000 000 000 $ pour construire un pont avec l'Île-du-Prince-Édouard. Très belle île, je suis d'accord, mais nous en avons payé, nous Québécois, 250 000 000 $. Ça n'a pas créé d'emplois au Québec, et la peinture pour le pont n'a pas été achetée chez Rona-Dépôt. 250 000 000 $ qui ont été siphonnés des poches des contribuables québécois pour faire un pont à l'Île-du-Prince-Édouard où il y a moins de population qu'il ne peut y en avoir dans ma circonscription électorale, 250 000 000 $. Voilà l'à-plat-ventrisme fédéraliste.

Et puis, en plus... Vous n'êtes pas tannés de vous faire voler? Je ne vais pas reprendre cette phrase qu'on voit au Grand Théâtre, puisqu'il y a un mot qui est antiparlementaire. Vous n'êtes pas tannés de vous faire voler? 14 000 000 000 $ de péréquation qui n'est pas revenue au Québec, et c'est nous qui avons dû assumer. Ah! le fédéral. Mais c'est Ottawa; ils peuvent nous voler, tu sais, ils peuvent nous voler. Oui, papa, ce n'est pas grave. L'à-plat-ventrisme fédéraliste des députés du bloc canadien qui sont en face de nous, qui oublient qu'ils ont été élus à l'Assemblée nationale du Québec pour défendre les intérêts du Québec. Dans leur cas, eux, l'option passe bien avant la patrie, bien avant. L'à-plat-ventrisme fédéraliste, M. le Président.

Et puis le Québec a dit: Oui, mais nous allons harmoniser, nous, la taxe de vente avec la taxe sur les produits et services; on l'a fait. Les Provinces maritimes ont reçu une compensation pour ce faire; le Québec aurait dû s'attendre à recevoir 1 000 000 000 $ pour avoir fait cette conciliation des deux, cette harmonisation. Combien avons-nous reçu? Zéro! Le fédéralisme rentable! Le fédéralisme rentable! 1 000 000 000 $! Qu'est-ce que vous auriez fait avec 1 000 000 000 $, vous, madame, monsieur? Qu'est-ce que vous auriez fait? Avec 1 000 000 000 $, on aurait peut-être pu penser à construire des HLM pour les gens qui, malheureusement, n'ont pas toutes les ressources financières. On aurait pu intensifier le programme de coopératives d'habitation, qui est la meilleure forme d'accession à la propriété pour des jeunes couples. Voilà, 1 000 000 000 $! Ah, bien non! Mais c'est Ottawa. Il ne faut pas s'en faire, voyez-vous; c'est Ottawa, que voulez-vous. Ils peuvent nous voler, ils peuvent nous piller, ils peuvent nous égorger, c'est Ottawa et c'est notre option. On aime la feuille d'érable! On aime la feuille d'érable! L'à-plat-ventrisme fédéraliste.

Est-ce que M. le député de Sauvé est d'accord? Est-ce qu'il est d'accord que l'on dépense 750 000 000 $ pour acheter des sous-marins, alors que sa collègue de Bourassa va probablement, à la période des questions cet après-midi, citer quelqu'un à qui il manque quelque chose, ou bien donc le député de Marquette va se plaindre qu'il manque de livres dans nos écoles. Avec 750 000 000 $, combien de livres pouvons-nous acheter et mettre dans les écoles? Et après, ils nous ont fait la sempiternelle – c'est bien le mot, voilà – sempiternelle... L'incertitude, oui! Il y a une incertitude politique immense au Canada. L'incertitude est que le fédéralisme est figé, le fédéralisme n'est pas renouvelé et le fédéralisme ne sera jamais renouvelé. On nous a envoyé Pierre Elliott Trudeau, doux messie qui disait: Votre non est un oui, nous allons mettre nos sièges en jeu. Il parlait de sa tête quand il parlait de son siège.

Des voix: Ha, ha, ha!

(11 heures)

M. Boulerice: Oui. Nous allons mettre notre siège en jeu. En 1980, qu'est-il arrivé? Rien. En 1995, l'autre grand messie, Jean Chrétien: Votre Non dit un Oui. Et nous avons eu un «love-in» digne de la plus belle période hippie où tout le monde s'embrassait: Vive le Canada, et: On vous aime, Québec.

Le renouvellement du fédéralisme, il est où? Il est où? C'est quoi, là? Il est où? Il n'y en a pas. Il n'y en a pas. Et là on nous annonce le troisième, peut-être le dernier messie, un député fédéral conservateur qui va devenir chef du Parti libéral, M. Charest, qui, lui aussi, est en train de vouloir nous dire: Votre Non est un Oui. Il va réussir, lui aussi? Pas du tout.

Et, quand j'entends nos bons amis d'en face nous dire: Mais vous allez faire un référendum et la population n'en veut pas. Vous allez être obligés d'en faire un, référendum, vous autres aussi, si jamais vous arrivez au gouvernement. Et, comme on dit en Angleterre: «Perish the thought, sir!» Vous allez être obligés d'en faire un. L'entente de Calgary, vous allez faire comment? Un vote du Parlement, de l'Assemblée nationale, aussi fragile que le vote d'entrée du Québec dans la Constitution canadienne, une voix de majorité? Vous êtes tenus à un référendum, vous aussi.

Et c'est quoi, Calgary? Un sous-tapis, une sous-carpette, que même Robert Bourassa n'aurait même pas osé présenter. Et ça nous joue, après ça... chicaniers. Quand nous défendons les intérêts du Québec, nous sommes chicaniers. Quand eux se mettent à genoux, à plat ventre devant le fédéral, c'est de la bonne entente cordiale. Distorsion du discours, M. le Président, distorsion des faits.

Le budget qui a été présenté, M. le Président, est un budget courageux, compte tenu du contexte. Le saccage fédéral au niveau des finances du Québec, avec ses ponctions atroces, le lourd héritage, oui, qu'ils ont laissé... Et, quand j'entendais le député de Sauvé qui disait: Mais oui, mais, vous, en 1976, vous l'avez augmenté. Ça me fait un peu penser à quand je suis arrivé, une fois, chez moi, en sortant de l'école, puis en disant: Papa, j'ai eu zéro en mathématiques, mais je n'étais pas tout seul. Mon père m'a dit: Ce n'est pas parce qu'il y a un deuxième insignifiant dans la classe que tu dois t'excuser d'être le premier. Mais le 6 000 000 000 $ qu'ils ont fait, M. le Président, on le paie chèrement, encore aujourd'hui. Et, en plus de nous avoir endettés, ils sont d'accord qu'on vienne nous voler. Ça, c'est l'à-plat-ventrisme fédéraliste.

M. le Président, je ne sais pas combien de minutes vous m'accordez pour terminer... Mais Duplessis était un chicanier, Lesage était un chicanier, Bourassa I-Bourassa II était chicanier, Johnson I-Johnson II était un chicanier, Lévesque était un chicanier, Bouchard est un chicanier, parce qu'ils voulaient défendre les intérêts du Québec. Ils voulaient défendre les intérêts du Québec. Ce n'est pas de la chicane, c'est se tenir debout et non pas devenir des béni-oui-oui et en train de prostituer le mandat que vous avez eu des électeurs québécois.

Vous avez peut-être été élus, M. le député de Sauvé, M. le député de Robert-Baldwin, en fonction d'une option différente de la mienne, mais jamais vos électeurs québécois vous mandatant de les représenter à l'Assemblée nationale du Québec ne vous ont demandé de devenir un capitulard et de laisser Ottawa faire tout ce qu'il voulait au nom de votre option. Ce n'est pas le mandat que vous avez reçu des électeurs de Robert-Baldwin ni de ceux de Sauvé, M. le député du même nom.

Alors, pensez-y. Pensez-y. Essayez un peu de vous secouer et de ne pas vous transformer en l'équivalent d'un «Canadian Block». Vous êtes députés à l'Assemblée nationale. Et, si le nom de votre parti vous gêne parce que vous le partagez avec un grand frère fédéral, changez. Mais rappelez-vous que votre mandat est de défendre les intérêts du Québec. Donc, cessez de vous mettre à genoux quotidiennement devant le grand frère fédéral, alors qu'il vient fouiller dans vos propres poches. À ce moment-là, vous devenez presque inconscients. Pensez-y! M. le Président, merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques et leader adjoint du gouvernement. Nous cédons maintenant la parole au député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie bien, M. le Président. Vous allez me permettre de rappeler au député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, lorsqu'il parle des électeurs du comté de Robert-Baldwin, que c'est avec beaucoup de fierté que nous avons voté tous ensemble à 90 % pour le Non au projet du gouvernement du Parti québécois. Alors, s'il veut venir faire un tour dans notre comté, il sera sûrement le bienvenu pour en parler.

M. le Président, j'aimerais revenir au dossier qui nous concerne aujourd'hui, c'est-à-dire le budget du gouvernement, et dire à quel point l'opposition officielle, nous sommes extrêmement déçus. Nous sommes déçus surtout pour les contribuables qui, eux, depuis l'arrivée au pouvoir – bientôt quatre ans – du gouvernement du Parti québécois, auraient pu avoir un soulagement, une baisse de taxes. Eh bien, rien n'a été fait de ce côté-là. C'est toujours les mêmes taxes qui se poursuivent, M. le Président.

Pour les jeunes, on aurait espéré des incitatifs pour trouver des emplois. Mais non, du saupoudrage, M. le Président. On maintient toujours les coupures aveugles dans le domaine de la santé. La quatrième année, les listes d'attente augmentent, les urgences continuent d'être engorgées. Et les députés du parti ministériel, eux autres, continuent d'appuyer leur ministre de la Santé, qui est en train de donner un véritable spectacle de démolition au réseau de la santé qui a été bâti pendant des années. Nous sommes vraiment en difficulté, avec ce gouvernement, M. le Président.

Sans parler des coupures aveugles dans le domaine de l'éducation. Dernièrement, je rencontrais des gens qui sont responsables des universités. Les gens allaient jusqu'à qualifier maintenant qu'on va mettre bientôt en doute la qualité de certains diplômes, la formation de nos étudiants parce qu'on manque de ressources. C'est ça, les choix du gouvernement, M. le Président.

Malgré les six dernières années de croissance économique, le gouvernement péquiste n'a pas réussi à dégager de marge de manoeuvre soit pour réduire les impôts ou les taxes ou encore améliorer les services de santé et d'éducation. Les raisons sont simples. La performance économique du Québec traîne la patte à cause du gouvernement péquiste. Le Québec n'a réussi à créer que 13 % des emplois canadiens, au cours des deux dernières années, à attirer 17 % des investissements privés, et sa croissance économique est de 75 % inférieure à celle du reste du Canada en 1997.

M. le Président, le ministre atteint son objectif de déficit zéro en pelletant dans la cour des hôpitaux: 400 000 000 $ de déficits accumulés, du jamais vu dans l'histoire des hôpitaux; près de 300 000 000 $ dans le secteur des universités; les cégeps, 30 sur 48 sont en déficit. Les commissions scolaires sont obligées d'augmenter les taxes. Les municipalités: du pelletage jusqu'à près de 500 000 000 $.

Le ministre des Finances se vante de présenter un budget sans hausse de taxes ni hausse d'impôts. Je me permets, M. le Président, très rapidement, de faire une liste des hausses de taxes et d'impôts qui ont déjà eu lieu dans les budgets précédents. Augmentation des taxes scolaires. Je pense que tout le monde, lorsqu'il a reçu son dernier compte de taxes, s'est aperçu d'une augmentation importante. Les personnes âgées ont été véritablement ciblées par le gouvernement du Parti québécois. On leur a enlevé les crédits d'impôt pour les personnes vivant seules, en raison de l'âge, des revenus de la retraite; des limitations à l'aide fiscale à la retraite; limitations aux crédits d'impôt pour frais médicaux.

(11 h 10)

M. le Président, la liste est longue, et ça se poursuit: pelletage de la fiscalité municipale; hausse de la TVQ, la taxe de vente du Québec de 1 % depuis le 1er janvier dernier; et les hausses de taxes relatives aux produits du tabac.

Eh bien, M. le Président, c'est sans parler de l'augmentation de l'assurance-médicaments. On a toujours dit que c'était un impôt déguisé. Le ministre de la Santé a toujours prétendu le contraire. Cependant, c'est à ce moment-ci sur le rapport d'impôts qu'il faut débourser le premier 175 $. Ça, c'est un impôt déguisé, et j'en passe. Il y a aussi également la hausse des tarifs et des frais de branchement d'Hydro-Québec.

M. le Président, les jeunes... On nous fait miroiter que le Parti québécois s'occupe des jeunes. Eh bien, ici, en cette Chambre, on a présenté une motion. Je vous la relis, elle n'est pas longue. C'était le député de Kamouraska-Témiscouata, député libéral, qui a dit: «Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement péquiste d'abolir les articles de lois québécois qui permettent la mise en place des clauses orphelin dans les conventions collectives.» Les clauses orphelin, c'est ce qui fait que les jeunes subissent de la discrimination par rapport à d'autres. Eh bien, le résultat du vote pour cette motion, pour arrêter la discrimination envers les jeunes: 45 votes pour; et tous les députés péquistes ont voté contre l'abolition des clauses orphelin, contre des mesures qui auraient aidé les jeunes.

Eh bien, M. le Président, vous me faites signe que le temps est déjà écoulé. Je me permets tout simplement de rappeler que c'est ce gouvernement qui appauvrit les Québécois. Regardez combien il nous reste, chacun d'entre nous, dans nos poches. Eh bien, c'est de moins en moins d'argent qu'on peut garder. Ce gouvernement-là continue de nous appauvrir. Mais il y a une solution qui s'en vient: cette solution-là, c'est le gouvernement du Parti libéral. Et bientôt le gouvernement du Parti québécois ne sera qu'un véritable cauchemar passé. Merci, M. le Président.

Le Vice-président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Nous cédons maintenant la parole au député de Bellechasse. M. le député.


M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, M. le Président. Je suis à mon tour également très heureux d'intervenir dans la foulée du troisième budget de l'actuel ministre des Finances et député de Verchères. Un budget, bien sûr, qu'on peut qualifier de sobre, un budget non spectaculaire, mais un budget correct, un bon budget. Un budget qui maintient le cap et qui laisse enfin entrevoir une situation financière nettement améliorée pour le Québec et son avenir.

M. le Président, on a toujours hâte de voir les commentaires suite à l'adoption d'un budget ou au dépôt d'un budget, et les commentaires que j'ai pu recueillir un peu ici et là sont très positifs dans l'ensemble. Je vous cite quelques extraits de journaux du lendemain. Le Devoir : Fini l'emprunt pour l'épicerie . Bien, je pense que ça, c'était le temps que ça se produise. Ça ne s'était pas fait depuis 20 ans. Et il faut se rappeler qu'en 1994, lorsqu'on a pris le pouvoir, il y avait plus de 4 000 000 000 $ sur 6 000 000 000 $ qui allaient pour payer l'épicerie, chose qui n'avait pas de bon sens. Québec réalise ses engagements budgétaires . Encore là, contrairement à ce à quoi on avait été habitués dans le passé, on a fait ce qu'on avait dit qu'on ferait, même si ça a été difficile. Un bon budget, jugent les économistes , dans La Presse du 1er avril. Place aux jeunes: 20 000 stages et 5 000 emplois , dans Le Soleil du 1er avril toujours. Et, finalement: Le monde des affaires fait preuve de satisfaction sans verser dans l'euphorie . Alors, une autre preuve comme quoi ce budget a été très bien accueilli.

M. le Président, dans un comté rural comme Bellechasse, parce qu'on est un des rares comtés ruraux au Québec, avec l'absence véritablement de ville, il y a un certain nombre de mesures positives de ce budget qui retiennent particulièrement mon attention et qui vont profiter aux gens de la circonscription que je représente.

D'abord, je pense aux 5 000 000 $ additionnels versés pour la forêt privée. Je pense également à l'aide financière de 180 000 000 $ qui va être accessible pour les municipalités de moins de 5 000 habitants – il n'y en a aucune de 5 000 et plus dans ma circonscription – qui va servir à réaliser des travaux d'aqueduc, d'égout et d'assainissement des eaux.

Il y a également une chose intéressante pour les producteurs agricoles: c'est 81 000 000 $ additionnés pour passer de 319 000 000 $ à 400 000 000 $, pour le Programme d'aide à l'investissement en agroenvironnement, le programme PAIA. Alors, 26 000 000 $ vont être disponibles dès cette année, et c'est une mesure extrêmement attendue, avec la bonification du programme, pour le remboursement sur une période de deux ans au lieu des neuf ans, comme c'était le cas auparavant.

Et je voudrais, dans un comté où il y a un grand nombre de kilomètres, accueillir avec beaucoup de satisfaction l'addition de 119 000 000 $ par rapport au budget de l'an passé pour les travaux de voirie. Et, à cet égard, M. le Président, vous me permettrez certainement de citer le ministre qui, la semaine dernière, au moment d'annoncer la programmation des travaux pour 1998, disait ceci. M. Brassard, le ministre des Transports, disait: «À titre de ministre des Transports comme à celui de ministre responsable de la Société de l'assurance automobile du Québec, il m'est impossible d'oublier que, tous les jours, des familles vivent des drames directement reliés à l'utilisation de la route. Qu'il se produise un gros ou un petit accident, l'action de mon ministère est remise en cause, scrutée à la loupe.» Fin de la citation.

À cet égard, M. le Président, il y a une préoccupation que je voudrais relater ici, à l'Assemblée nationale, aujourd'hui, c'est celle qui concerne la sécurité des usagers sur la route 277, une route nord-sud qui relie les municipalités, particulièrement, de Saint-Henri et de Saint-Anselme dans ma circonscription. Un drame épouvantable s'est produit le 19 mars dernier lorsque, avec des vents latéraux aux effets sournois, sur cette route-là, un accident a provoqué la mort de deux jeunes filles de 18 et 20 ans, deux jeunes filles dans la pleine force de toutes leurs possibilités, Émilie et Rachelle Marceau, qui circulaient comme ça sur la route 277 sur un pavage sec. Tout à coup, en arrivant à un endroit où il n'y avait plus de boisé, soudainement, elles se sont retrouvées avec une chaussée glissante, et ça a été l'impact avec un camion-remorque. Et, évidemment, ce genre d'accident ne pardonne pas.

Quelle tristesse pour M. et Mme Marceau, les parents de ces deux jeunes filles, de perdre comme ça, subitement, un bel avant-midi, leurs deux seuls enfants! Je me suis rendu, évidemment, au salon funéraire, et les parents attristés, accompagnés de beaucoup de leurs amis, m'ont dit comme député: Nous souhaitons que le départ, que la mort de nos enfants n'ait pas été inutile et que ça va permettre d'entreprendre des travaux le long de cette route pour éviter à d'autres le sort que nos enfants ont subi.

Alors, M. le Président, avec la collaboration du ministre des Transports, avec la collaboration aussi du directeur régional du ministère des Transports dans ma région, M. Bossé, je peux assurer ces gens-là et tous les usagers que des efforts vont être faits à très court terme, dans les meilleurs délais possible, afin que des correctifs appropriés soient amenés pour éviter la répétition de tels drames humains. Et, déjà, je peux annoncer que, la semaine prochaine, vendredi de la semaine prochaine, il y aura une rencontre pour faire part aux autorités municipales de Saint-Anselme et de Saint-Henri des correctifs qui sont envisagés pour solutionner ce problème-là sur une période de long terme.

M. le Président, en terminant, il y a un autre sujet important qui préoccupe beaucoup les électeurs et les électrices de mon comté, et en particulier les producteurs agricoles, c'est tout ce qui concerne la crise dans le secteur de la production porcine. La production porcine au Québec, ce n'est pas rien. Et ça, c'est surprenant, juste à titre de comparaison, il s'est exporté, l'an passé, en 1997, pour un total d'environ 600 000 000 $ de produits porcins à l'extérieur du Québec. Ça, c'est à peu près un chiffre semblable à ce qui existe pour les exportations d'électricité à l'extérieur du Québec. Ce sont des milliers d'emplois, des emplois directement et indirectement parce que plusieurs personnes vivent dans l'entourage des producteurs de porcs.

Même si cette crise qu'ils vivent présentement n'a pas été, à l'origine, une crise qui vient d'ici, les producteurs, actuellement, sont anxieux. Il sont dans une situation où ils se demandent à quel moment ils vont voir la lueur au bout du tunnel. Et je me fais le porte-parole de ces gens-là pour attirer l'attention une fois de plus sur l'urgence de les aider pour éviter que plusieurs de ces centaines, même de ces milliers de producteurs de porcs, par l'effet d'une crise qui perdure, soient obligés d'abandonner leur production.

(11 h 20)

Alors, M. le Président, c'est bien sûr que, quand on regarde ça, on peut penser directement aux producteurs, mais on peut également penser à tout ce qu'il y a autour, comme le domaine de la construction, les quincailleries, les producteurs d'équipement de ferme, les meuneries, les abattoirs, les charcuteries, domaine des transports de distribution, et tout le reste. Alors, ça a un impact considérable, et très certainement qu'avec mes collègues des comtés où il y a une production porcine au Québec et on pourra dire aussi comme consommateurs que nous sommes préoccupés par ce qui se passe à l'heure actuelle dans ce domaine-là.

Je peux les assurer que nous allons faire tout en notre pouvoir pour enfin trouver avec eux des solutions qui vont leur permettre de voir l'avenir avec des jours meilleurs, le jour où la situation va se rétablir et où on va pouvoir continuer à vendre ces produits de qualité qui sont réputés un peu partout à travers le monde grâce à des technologies et à des préoccupations que les producteurs ont eues pour améliorer leurs performances au cours des 10, 15 dernières années.

Alors, voilà, M. le Président, les principales préoccupations dans ce laps de temps trop court qui m'est imparti. Je suis heureux de ce budget dans l'ensemble et je suis surtout heureux qu'on ait réussi à assainir les finances publiques pour faire en sorte que, très bientôt, on puisse enfin en arriver à regarder l'avenir avec beaucoup plus d'optimisme. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Bellechasse. Nous allons maintenant céder la parole au député de Westmount–Saint-Louis. M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Vous comprendrez que je diverge un peu d'opinions avec le précédent intervenant. Tout en ayant écouté le précédent intervenant et pouvant comprendre ce qu'il peut dire sur le budget, je suis obligé de constater, M. le Président, que le budget – je n'ai pas beaucoup de temps, alors je ferai le plus rapidement possible – a été assez surprenant à deux points de vue.

Tout d'abord, pour le document budgétaire, le document économique le plus important de l'année pour un gouvernement, il était inconvenant, M. le Président, d'y retrouver une espèce de rhétorique séparatiste d'un bout à l'autre de ce cahier, d'un bout à l'autre du discours. Une politique de chicane, une politique de chamaillage, une politique qui est à l'enseigne de ce gouvernement, une politique finalement qui n'aide personne.

Ce gouvernement, dans son budget, le ministre des Finances, le premier ministre n'ont pas corrigé les dépenses, les coupures de dépenses qui sont faites dans le budget à la santé. À la santé, cette année, au lieu d'avoir une augmentation de 540 000 000 $ de crédits, il y en aura une de 370 000 000 $. Pourquoi 540 000 000 $? Parce que ce sont les coûts de système. C'est quoi, des coûts de système, M. le Président? Des coûts de système, c'est l'augmentation des salaires, l'augmentation des coûts d'énergie, l'augmentation des coûts de téléphone, des augmentations que tout un chacun vit chez soi. Si vous n'envoyez pas l'argent, si le ministère de la Santé n'envoie pas l'argent pour financer les coûts de système, vous avez automatiquement une diminution des crédits. Or, en vérité, au ministère de la Santé, cette année, malgré le mauvais service que les Québécoises et les Québécois ont eu l'an dernier, il y aura encore 160 000 000 $ de coupés dans le réseau de la santé et des services sociaux à travers le Québec, 158 500 000 $ pour être plus précis.

M. le Président, 300 000 000 $ de coupés dans le dossier de la formation des jeunes, de la maternelle à l'université, 300 000 000 $ de moins en investissements dans ce que nous avons de plus précieux, la jeunesse au Québec. Ça, ça veut dire, dans les écoles primaires et secondaires, moins d'orthophonistes, moins d'orthopédagogues, pas d'orienteurs, plus de psychologues, aucun service à l'élève. Les professionnels de l'enseignement dans les écoles primaires et secondaires sont des gens inestimables, sont des gens dont les qualités sont reconnues partout dans le système. Mais ils n'existent plus; ils ont tous été mis à la porte, ils ont tous été évacués, compte tenu du poids des compressions budgétaires que le réseau primaire-secondaire a connues.

Dans le réseau des cégeps, M. le Président, vous en avez un, cégep, chez vous, vous verrez dans votre cégep, comme partout ailleurs dans notre province, la première chose qu'on a coupée dans les cégeps, qu'on a été obligé de couper, c'est les centres de placement pour les étudiants. Ce n'est pas étonnant, il n'y a aucune autre place où on pouvait faire des économies, compte tenu du plus grand nombre, de la grande partie du budget des cégeps qui est conventionnée.

M. le Président, ce budget nous annonce la création d'emplois, une vision gouvernementale, enfin création d'emplois pour les jeunes au Québec de 5 000 places en deux ans. Qui, dans ce gouvernement, premier ministre ou ministre des Finances, a oublié que, l'an dernier, en 1997, les jeunes de 18 ans à 24 ans au Québec ont perdu 16 000 emplois? Pour compenser la perte de 16 000 emplois, ce gouvernement nous présente dans son budget la création de 5 000 sur deux ans. Est-ce que le gouvernement veut continuer longtemps de rire des jeunes du Québec?

On nous annonce dans ce budget: création de 20 000 stages études-travail pour les années à venir. Au Sommet de Montréal, le premier ministre s'est engagé, la main sur le coeur, annonçant qu'il y aurait création de 1 000 stages spécialisés. Il y en a eu 58 de créés, deux ans après. Comment peut-on prendre au sérieux un gouvernement qui annonce qu'il y aura 20 000 stages d'ici deux ans quand il n'a pas été foutu d'en faire plus que 58 dans les deux dernières années, des stages permettant à des jeunes de se spécialiser en milieu de travail?


Motion de censure

M. le Président, on ne peut pas prendre au sérieux un gouvernement qui, en même temps, ne fait pas en sorte de répondre aux besoins essentiels d'une clientèle aussi importante que la jeunesse, et cela, le gouvernement, avec sa rhétorique séparatiste, sa politique de chamaillage, sa politique de chicane, ne fait qu'une chose, ne fait qu'augmenter l'indice d'insécurité économique, ne fait qu'augmenter l'indice de chômage, ne fait qu'augmenter la misère et la pauvreté chez les jeunes. C'est pour ça que je déposerai cette motion de censure:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois pour avoir "omis" d'inclure dans son budget 1998-1999 des mesures spécifiques à la création d'emplois au Québec répondant aux véritables besoins des jeunes tout en ayant réduit les dépenses en éducation et en formation professionnelle.»

Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Votre motion... Nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de Matapédia. Mme la députée.


Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Le discours sur le budget du Québec livré par M. Bernard Landry, ministre d'État de l'Économie et des Finances, nous a démontré que nos efforts collectifs portent fruit. Les objectifs du dernier budget ont tous été atteints. Nous avons même fait mieux en ce qui concerne le déficit: alors que nous avions un objectif de 2 200 000 000 $, le déficit pour 1997-1998 est plutôt de 2 069 000 000 $. Les Québécoises et les Québécois comprennent que, à gaspiller l'argent comme l'ont fait les libéraux au cours de leurs 10 années passées au pouvoir, on finit par ne plus pouvoir investir là où il le faut et comme il le faut. Ils nous ont fait vivre sur nos cartes de crédit. N'oublions jamais l'intense travail de démolition des finances publiques accompli par les libéraux.

De 1989 à 1994, le gouvernement libéral a malheureusement mis de côté toute notion de gestion responsable des finances publiques. Durant cette période éprouvante pour le Québec, la dette totale a doublé, le déficit a triplé, les cibles de déficit ont systématiquement été ratées à chaque année et les dépenses ont connu une croissance folle, dépassant largement celles des provinces canadiennes, et ce, avec les supposés champions économiques du Parti libéral du Québec, ne l'oublions pas. Rappelons-nous les Lortie, les Gobeil, les Fortier, les Scowen, le groupe des sages. Le résultat: de 31 000 000 000 $ en 1985-1986, la dette totale du Québec a fait un bond prodigieux, au cours du règne de nos amis d'en face, pour atteindre 74 000 000 000 $ en 1994-1995. Bravo!

(11 h 30)

Malgré tout cela, les libéraux ont le front d'arpenter nos comtés, de se présenter en sauveurs. Quels grands mécènes ayant toujours à coeur le bonheur de leurs concitoyens, concitoyennes alors qu'ils sont à la source même de nos problèmes! Non, mais quelle hypocrisie! La semaine dernière, la députée libérale de Jean-Talon, porte-parole de l'opposition en matière d'affaires municipales, Mme Delisle, et son collègue de Montmagny-L'Islet sont venus rencontrer des élus municipaux dans mon comté. Ils se sont présentés en grands bienfaiteurs, des gens de solutions constructives: Les compressions sont allées trop loin; il faut que ça cesse. Nous avons des alternatives crédibles, ont-ils fait valoir aux élus.

Non, mais est-ce que je rêve? Il faut avoir un front de boeuf pour venir ainsi nous faire la morale, alors que l'on sait très bien que c'est par la faute de leur inertie crasse que nous avons dû prendre les bouchées doubles. Pendant qu'ils se pavanent dans les médias et ailleurs, le gouvernement...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, M. le Président, si le budget était aussi important pour le gouvernement, je voudrais savoir si nous avons quorum, maintenant.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous avons quorum. Alors, je prierais Mme la députée de Matapédia de bien vouloir poursuivre.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. Si le discours du budget est important, pouvez-vous m'expliquer comment se fait-il que nous avons été 1 h 30 min sans présence d'aucun député de l'opposition?

M. Williams: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan, M. le leader adjoint du gouvernement, vous savez très bien que, en vertu de notre règlement, nous n'avons point à formuler de tels propos.

Alors, tout cela, actuellement, nous le prenons sur le temps qui est dévolu à Mme la députée de Matapédia. Je prierais Mme la députée de bien vouloir poursuivre son allocution.

Mme Doyer: Oui. Je continue.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la députée.

Mme Doyer: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Une question de règlement. Je présume que le député n'a pas le droit de dire les choses qu'il a dites. C'est assez honteux que les pupitres soient vides, là, devant moi.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan, si vous m'avez bien suivi, j'ai bel et bien noté au leader adjoint du gouvernement que de tels propos étaient absolument insoutenables en cette Chambre.

Alors, Mme la députée de Matapédia, si vous voulez bien poursuivre.

Mme Doyer: Merci. Alors, je disais que le gouvernement du Parti québécois prend ses responsabilités, relève le plus grand défi des dernières années. Sourire devant les caméras, c'est une chose; gérer un État, c'est tout autre chose.

Heureusement, pour reprendre l'expression de M. Landry, l'ancien cercle vicieux des libéraux se mue désormais en cercle vertueux. Mon gouvernement a annoncé un surplus au chapitre des opérations courantes et maintient l'objectif du déficit zéro pour 1999-2000. Pour 1998-1999, le déficit sera de 1 200 000 000 $. Nous n'emprunterons plus pour payer l'épicerie. Il faut le dire haut et fort pour qu'on prenne bien conscience du travail accompli par notre gouvernement.

En dépit de la facture de près de 2 000 000 000 $ occasionnée par le grand verglas et des coupures massives dans les transferts du fédéral, 11 000 000 000 $ au total dans les dernières années, notre gouvernement a bouclé son budget pour l'année 1997-1998 et atteindra sa cible de réduction du déficit sans augmenter les taxes et les impôts.

Depuis le début du grand ménage de nos finances – 5 700 000 000 $ de déficit légué par les libéraux – nous avons réalisé 80 % de l'ambitieux mais nécessaire objectif que nous nous étions fixé. L'an prochain, le Québec aura enfin retrouvé sa santé financière. Dès lors, les surplus qui se dégageront pourront servir, dans une très large mesure, à réduire le fardeau fiscal des Québécois et Québécoises, et c'est ensemble que nous pourrons en profiter.

Par ailleurs, les mesures prévues dans le budget montrent bien la sensibilité du gouvernement face aux enjeux majeurs de notre société. Priorité est donnée à l'emploi et aux jeunes. Les mesures contenues dans le présent budget, qui totalisent quelque 182 000 000 $, démontrent que nous souhaitons les aider, les épauler dans leurs démarches.

Le gouvernement du Parti québécois consacrera 83 000 000 $ pour accroître l'offre de stages en milieu de travail. Le crédit d'impôt remboursable pour les entreprises qui reçoivent des stagiaires est prolongé de trois ans, permettant à près de 20 000 jeunes d'en bénéficier à chaque année. 5 000 nouveaux emplois seront créés pour les jeunes: 2 000 dans le secteur des technologies de pointe par l'ajout de 21 000 000 $; 1 500 emplois stratégiques dans les PME par l'injection de 22 000 000 $ au programme Impact PME; 1 000 emplois dans la fonction publique par l'allocation de 4 500 000 $. Dans un comté comme le mien, aux prises avec de sérieux problèmes socioéconomiques, cette bouffée d'air frais est grandement appréciée.

À propos de problèmes socioéconomiques, un simple aparté. N'est-ce pas simpliste, de la part de votre futur chef, M. Charest, d'accuser le mouvement souverainiste de tous les déboires économiques du Québec? Que se passe-t-il dans certaines parties des Maritimes, par exemple, aux prises avec la pauvreté, l'endettement chronique? Y aurait-il là-bas des mouvements souverainistes dont j'ignore l'existence? Discours simpliste encore une fois. Comme le mentionnait Michel David dans Le Soleil d'hier, en page B-7, M. Charest a démontré une remarquable aptitude à éviter les sujets le moindrement litigieux. Pour le moment, il flotte sur son petit nuage, mais il lui faudra bien s'expliquer un jour ou l'autre.

La réalité, c'est que depuis décembre nous avons un ministère des Régions au Québec. La réalité, c'est que des mesures importantes sont prises par le gouvernement pour favoriser les régions, dont la région du Bas-Saint-Laurent. La nouvelle Société Innovatech qui desservira le Bas-Saint-Laurent montre la volonté d'améliorer la situation de l'emploi. On parle d'un investissement de 50 000 000 $ visant les régions ressources. 180 000 000 $ sont injectés sur cinq ans pour l'assainissement des eaux, les infrastructures d'aqueduc et d'égout des municipalités de moins de 5 000, et j'en ai plusieurs dans mon comté.

Je me réjouis aussi de la bonification de 5 000 000 $ par an du Programme d'aide à la mise en valeur de la forêt privée portant l'investissement annuel à 34 500 000 $ pour les cinq prochaines années au Québec. L'aménagement des boisés privés constitue la pierre angulaire de l'activité économique dans les communautés forestières du haut-pays du Bas-Saint-Laurent. Au cours de ces années, ces communautés ont fait preuve d'un dynamisme sans précédent, établissant un record de participation démontrant leur volonté de se prendre en charge, de vivre de leur principale ressource, la forêt. Le programme de mise en valeur des boisés privés a connu un tel succès qu'aujourd'hui plus de 6 900 des 10 000 propriétaires y participent. L'implication des forestiers aura permis, au cours de la seule saison 1996-1997, la création de 2 700 emplois directs et de générer une activité économique de 40 000 000 $, ce qui n'est pas rien pour une région comme la nôtre. Pour les résidents de plusieurs municipalités, l'aménagement forestier est le seul rempart contre l'aide sociale et l'exode.

Enfin, négligées sous le règne des libéraux qui ne leur consacraient même pas 1 % du budget, la culture et l'industrie culturelle retrouvent une place de choix parmi les priorités budgétaires du gouvernement du Parti québécois. Il importe de mieux soutenir par des actions concrètes ce qui constitue le coeur de notre identité, un important vecteur de création d'emplois. Voilà pourquoi notre budget comporte une série de mesures totalisant 49 000 000 $ destinées à soutenir la culture et les industries culturelles.

En conclusion, M. le Président, il s'agit d'un excellent budget. Il nous ouvre toutes les portes sur l'an 2000, prépare le Québec à relever les nombreux défis économiques et sociaux qui se présenteront. Je suis fière de ce budget qui s'inscrit dans la continuité des efforts rigoureux accomplis jusqu'à présent. Un budget responsable, courageux, ce budget nous montre que nos efforts collectifs portent fruit et que c'est ensemble que nous profiterons de ces efforts pour améliorer la vie des nôtres. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Matapédia. Nous cédons maintenant la parole au député de Nelligan, en vous rappelant, M. le député, qu'il reste à votre formation un temps de parole de 12 minutes. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai écouté le dernier discours du côté ministériel et, avec cette façon d'essayer de nous convaincre que c'est un bon budget, je pense que le défi était assez difficile pour la députée. Elle est tout de suite tombée dans les critiques personnelles contre notre futur chef, et je trouve que voilà une bonne démonstration de leur manque de confiance.

(11 h 40)

Aussi, ils sont déjà sur la défensive à propos de leur budget, mais aussi de leur propre chef, parce qu'ils sont loin d'être fiers de ce budget, j'en suis convaincu. C'est pourquoi les pupitres près de moi sont vides, et il n'y a presque personne dans cette Chambre. Malheureusement, c'est le budget. J'ai dit dans cette Chambre, M. le Président, je n'ai pas dit un côté ou l'autre. C'est certain que c'est de l'autre côté que c'est vide. Je voudrais encourager le côté ministériel à sortir de son discours fourni par le bureau du ministre des Finances, à visiter le vrai monde, à parler avec le vrai monde du nombre de jeunes qui sont en chômage, des chômeurs sur tout le territoire du Québec. Je voudrais inviter ces personnes à sortir de leur bureau, à sortir des briefings avec le ministre des Finances et à discuter de ça avec le vrai monde. Est-ce que ça va bien au Québec? Non, M. le Président. Est-ce que ça va être mieux dans quelques secteurs? On peut dire que nous avons eu une croissance de quelques secteurs, mais moins que le reste du Canada.

Avec ça, M. le Président, je trouve assez faible comme défense du budget de critiquer personnellement un futur chef qui n'est pas ici dans cette Chambre. Je trouve que ça démontre que le gouvernement est loin d'être fier de son budget, son budget qui, selon mon opinion, ne répond pas, dans presque aucun sens, aux besoins réels de la population québécoise.

Nous sommes, au Québec, les plus taxés au Canada. Oui, vous avez raison, oui, vous êtes d'accord avec moi, là, nous sommes les plus taxés à cause de ce gouvernement, M. le Président. Nous sommes les plus taxés comme particuliers et aussi comme corporations, comme société. Est-ce que j'ai vu des coupures de taxes? Est-ce que mes impôts ou les impôts des citoyens de mon comté vont baisser? Non, M. le Président. Il n'y a pas vraiment une baisse des impôts. Et, n'oubliez pas, le ministre des Finances essaie de nous convaincre qu'il n'y a pas d'augmentation de taxes. Voyons donc!

Le 1er janvier, le cadeau de Noël de ce gouvernement, c'était une augmentation de 15 % de la TVQ – bien, c'est 15 %: 6,5 % à 7,5 %, c'est 675 000 000 $ de vos poches. C'est nous autres qui allons payer pour ça jour après jour après jour. Et c'est les travailleurs à faibles revenus qui vont payer pour ça. C'est une augmentation de taxes. Vous pouvez dire que ce n'est pas une augmentation de taxes, vous pouvez appeler ça comme vous voulez, mais vous allez fouiller dans les poches québécoises. Un montant de 675 000 000 $ d'augmentation de la TVQ, c'est honteux, M. le Président. C'est une augmentation de taxes.

Et tout le monde sait, peut-être que les péquistes ne le savent pas, mais le reste de notre société est au courant que nous avons moins d'argent dans nos poches, nous avons moins de revenus disponibles. Ça vient d'où, ce chiffre, cette déclaration? Ça ne vient pas du Parti libéral, M. le Président, ça vient du Bureau de la statistique du Québec qui dit qu'avant l'augmentation de la TVQ, avant l'augmentation de 15 % de la TVQ, nous avons eu 2,1 % de moins de revenus disponibles dans nos poches, moins d'argent. Ce gouvernement est en train d'appauvrir la société québécoise.

Est-ce que nous avons vu un changement de stratégie dans ce budget? Non, M. le Président. Nous avons vu une rhétorique choquante. Dans un budget – le document le plus important de l'année, le budget – on voit un discours de séparation, on voit qu'il est encore prisonnier de son obsession de séparation. Il essaie encore de dire que tout va être beau, que tout va être correct si nous sommes isolés et séparés. La société québécoise est beaucoup plus sage que ça. Ils ont déjà rejeté cette option deux fois et ils sont tannés d'écouter ce discours. Ils veulent avoir un gouvernement qui met les finances en place. On ne voit pas ça, M. le Président, dans ce budget.

Laissez-moi citer – ce n'est pas encore juste le critique du Parti libéral, M. le Président – Salomon Brothers, en février 1997, il dit: «Québec's political and economic status within Canada remains unresolved and therefore political uncertainty will continue to limit economic prospects.» M. le Président, The Economist also said: «Le Canada a enregistré une note de 8,5 sur un total possible de 10, mais cette note aurait été plus élevée n'eût été deux facteurs: les impôts élevés – j'ai déjà dit que nous sommes les plus taxés au Canada à cause du Parti québécois – et aussi l'incertitude politique entourant l'avenir du Québec.» Ce n'est pas le Parti libéral qui dit ça; vous savez que c'est des instances financières assez importantes. Mais qu'est-ce que nous avons trouvé dans le budget? Un discours séparatiste, un discours politique, un discours qui met, comme d'habitude, de côté les intérêts de la population québécoise et qui avance l'option de la séparation.

M. le Président, on trouve une autre tendance assez inquiétante, c'est encore la philosophie du Parti québécois d'être un gouvernement interventionniste. Il veut être présent, il veut tout décider pour nous. Il veut décider ce qui est bon pour les familles – vous avez entendu la ministre de l'Éducation assez souvent sur ça – il veut décider ce qu'il y a de bon pour l'économie québécoise, ce qu'il y a de bon pour nos sociétés. Le reste du monde est en train d'aller exactement dans l'autre direction. On doit ouvrir le marché, on doit donner plus de flexibilité. Mais qu'est-ce que nous avons trouvé? Une augmentation d'importance du fardeau de l'État dans l'économie. La fameuse Société générale de financement arrive, une omniprésente société qui, dans mon opinion, est une logique des années passées comme, je pense, aussi l'obsession de la séparation, juste pour vous dire.

Tout le reste du monde a compris qu'on ne peut pas relancer l'économie québécoise, canadienne, en Amérique du Nord, mondiale avec la présence de l'État comme le seul générateur de cette affaire, comme le seul moteur économique. On doit laisser le secteur privé faire ce qu'il peut faire. Mais qu'est-ce que les péquistes disent? Ils veulent être encore un gouvernement interventionniste, il veulent tout décider pour notre société. In English, we say it's a government in your face, a government omnipresent, always trying to tell us what to do. The business community, the private sector are saying what they need is more flexibility, more openness, less taxes, less bureaucracy. We see one bureaucracy after another.

Et j'espère que le ministre des Finances puisse peut-être parler avec les autres ministres des Finances, parce qu'ils vont dire: Ça n'a pas de bon sens. Ce n'est pas une façon de relancer l'économie. N'oubliez pas que c'est le même ministre des Finances qui a blâmé le taux de chômage ici, au Québec, à cause de la météo. Quelle brillance! Il a blâmé le taux de chômage à cause de la météo. C'est le même ministre des Finances. Voyons donc, M. le Président.

On peut trouver aussi une autre stratégie qui m'inquiète: le fait que ce gouvernement n'est pas capable de relancer l'économie. C'est clair que c'est beaucoup plus lent que le reste du Canada et aussi beaucoup plus lent que le reste de l'Amérique du Nord. Sur 28 indicateurs économiques, nous sommes en arrière de la moyenne 23 fois. C'est gênant! je m'excuse, 25 fois. Je m'excuse. Nous sommes en avance, nous sommes au-dessus de la moyenne juste trois fois sur 28, et c'est inacceptable. Je comprends pourquoi les pupitres sont vides devant moi.

M. le Président, on trouve une stratégie qui est maintenant une des marques de commerce de ce gouvernement. Il est en train de harceler, de taxer le monde à faibles revenus. Il est en train de choisir, parce qu'il n'est pas capable de relancer l'économie, il est en train de vraiment, selon mon opinion, harceler le monde à faibles revenus. Je peux noter le monde des travailleurs à pourboire. Il est en train de les taxer rétroactivement, avec les intérêts et les amendes. Ils ont ciblé les restaurants, ils sont en train de cibler les chauffeurs de taxi, ils ont mentionné qu'ils vont cibler le secteur du vêtement.

Oui, on doit avoir une stratégie qui assure que tout le monde paie les sommes dues au Québec, mais ce gouvernement a une stratégie machiavélique. Ils ont choisi ceux et celles qui, pensent-ils, ne peuvent pas montrer une opposition contre le harcèlement du fisc. Ils sont en train de faire ça dans ce budget. Ils ont produit un cahier juste pour ça. Ils sont fiers de cette façon de harceler tout le monde. Pensez-vous que vous allez payer toutes vos dettes sur le dos des travailleurs à faibles revenus? Peut-être que les députés du côté ministériel ne sont pas au courant: 50 % des travailleurs à pourboire gagnent moins de 15 000 $.

M. le Président, il y a beaucoup d'autres choses que je peux mentionner: le fameux déficit zéro qui cache un déficit dans les hôpitaux de 400 000 000 $, un déficit de 400 000 000 $ dans nos universités, dans nos cégeps, et les commissions scolaires, un autre 500 000 000 $. Ce n'est pas une bonne façon de gérer l'économie québécoise. Nous avons un État omniprésent, 52 % du PIB est d'instance publique. Tout le monde sait que, si c'est au-dessus de 30 %, ça ne marche pas. Mais ce gouvernement est en train de cacher son déficit, il est en train de couper tous les services et il est en train d'effectivement augmenter les taxes et de rendre les Québécois plus pauvres. C'est complètement inacceptable.

(11 h 50)

M. le Président, depuis l'entrée de l'actuel premier ministre, nous avons vu une avalanche d'augmentations de taxes, de frais d'usager, des augmentations de taxes une année après l'autre. La population québécoise a voulu avoir beaucoup plus de marge de manoeuvre et a voulu avoir une baisse de taxes, elle a voulu avoir une relance économique. Mais non, nous avons vu un gouvernement obsédé par son option déjà rejetée deux fois par la population québécoise et qui dit: Ça va être la séparation à tout prix. À tout prix, vous allez payer, vous allez payer et vous allez payer. Mais la chose qui m'inquiète le plus est que leur stratégie est en train de cibler le monde qui travaille pour un faible revenu, et je trouve que c'est inacceptable comme approche.


Motion de censure

C'est pourquoi je voudrais proposer cette motion de censure:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement péquiste qui ne cesse de harceler les contribuables à faibles revenus, notamment les travailleuses et travailleurs à pourboire.»

Merci beaucoup, M. le Président. Je dépose la motion.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan, et votre motion est maintenant déposée. Alors, nous allons céder la parole maintenant au député de Salaberry-Silence... Solange...

M. Deslières: Ha, ha, ha! Merci, M. le Président. Solange, c'est notre collègue!

Une voix: Ha, ha, ha!


M. Serge Deslières

M. Deslières: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir d'intervenir dans le cadre de l'adoption de ce budget présenté par notre collègue de Verchères et ministre des Finances du Québec.

J'écoutais notre collègue de Matapédia tout à l'heure qualifier ce budget de bon budget et la réplique de notre collègue de Nelligan qui disait: Je ne vois pas où elle prend ça, je ne vois pas où notre collègue de Matapédia... Mais ce n'est pas de la partisanerie politique, la déclaration de notre collègue de la Matapédia, elle se base sur un jugement des économistes qui ont qualifié de bon budget ce budget présenté par notre collègue le ministre des Finances. Mais ce budget mérite d'autres qualificatifs. Et j'utiliserais, bien sûr, une formule bien connue, la formule des 3R. Mais cependant je vais utiliser les qualificatifs suivants et non pas ceux que vous connaissez dans la formule des 3R. Je qualifierai ce budget d'un budget responsable, d'un budget rigoureux et d'un budget réaliste.

Oui, M. le Président, ce budget, sur deux points, peut être qualifié de responsable. D'abord, on le note, tous les chroniqueurs financiers l'ont indiqué dans leur chronique: aucune augmentation, aucune hausse de taxes, d'impôts et de tarification quelconque tant pour les individus que pour les entreprises. Bien sûr, le gouvernement a tenu compte du fait que les Québécois et les Québécoises sont les contribuables les plus taxés en Amérique du Nord, héritage des neuf dernières années de nos amis libéraux qui ont été au pouvoir de 1985 à 1994.

M. le Président, ce budget est également responsable parce qu'il met l'accent sur la création d'emplois. M. le ministre des Finances, à l'occasion de son discours du budget, a déposé une politique qualifiée Québec Objectif emploi . Il serait, bien sûr, trop long de faire le pourtour de cette politique dans les quelques minutes qui me sont allouées, mais mentionnons le fait que cette politique 1998-1999 dote le Québec d'une série de nouveaux instruments pour accroître les investissements privés de 19 000 000 000 $ sur cinq ans. 12 000 000 000 $ d'investissements privés avec les sociétés d'État. On parle de la Société générale de financement, de renouveler son mandat, de créer 10 000 000 000 $ d'investissements sur cinq ans, de créer 75 000 nouveaux emplois. Voilà un des pivots de cette politique Québec Objectif emploi .

Également, un deuxième pivot excessivement important, c'est les 7 000 000 000 $ d'investissements privés qu'on demande à Investissement-Québec, la création d'Investissement-Québec, où on lui donne un mandat de développer l'économie sous toutes ses formes dans des secteurs privilégiés dans toutes les régions du Québec, M. le Président. Et sans oublier, bien sûr, la création d'Emploi-Québec qui viendra soutenir les besoins de formation de main-d'oeuvre des investisseurs. Voilà les deux pivots, les deux piliers de cette politique déposée par le ministre des Finances lors de son budget.

C'est également, M. le Président, un budget rigoureux. Le gouvernement du Parti québécois s'était engagé dans une lutte à finir, la lutte au déficit. Nous gardons le cap; ce que nous avons pensé, nous l'avons dit, ce que nous avons dit, nous allons le faire. On se dirige tout droit, tel que prévu dans notre échéancier, 1999-2000, vers un déficit zéro, c'est-à-dire que les Québécois et les Québécoises n'emprunteront plus, ne créeront pas de déficit, n'augmenteront pas la dette énorme qu'on possède déjà.

M. le Président, ç'a été une lutte de tous les instants, ça n'a pas été une lutte facile, ce que nous avons demandé à nos concitoyens et concitoyennes, aux Québécois et aux Québécoises, mais c'était un gouvernement responsable. Il fallait avoir de la vision, il fallait voir dans quelle situation les libéraux avaient laissé – une catastrophe financière – les finances publiques lorsqu'ils ont été mis dehors du pouvoir par les Québécois et les Québécoises.

Juste vous rappeler, M. le Président, quelques éléments. En neuf ans, le Parti libéral a augmenté la dette des Québécois et des Québécoises de 34 000 000 000 $. Il faut le dire, le redire. Et eux qui nous disaient: On va s'occuper de l'économie, on va s'occuper des finances publiques, on va s'occuper des intérêts des Québécois et des Québécoises, ils sont partis avec les intérêts, ils sont partis avec le capital en même temps, lorsqu'ils ont été au pouvoir. Incroyable mais vrai; les chiffres sont là, et une partie de ces chiffres-là vient de leurs propres états financiers, M. le Président.

Ils nous disaient – et ça, M. le Président, je sais que vous allez écouter ça avec beaucoup d'attention parce que ça vous intéresse, vous, comme tous ceux qui nous écoutent... Petite histoire des prévisions budgétaires du Parti libéral au pouvoir au cours des années, particulièrement au cours du dernier mandat. Je rappelle les faits, M. le Président, concernant les déficits prévus et l'augmentation de la dette du Parti libéral du Québec lorsqu'ils étaient au pouvoir.

1991-1992, prévisions en termes de déficit: 3 480 000 000 $. Je vous le donne en mille, M. le Président, où ils ont fini: 722 000 000 $ plus loin. Déficit: 4 200 000 000 $. Je saute quelques années, le temps m'étant compté. 1993-1994 – et là on voit toujours que le déficit augmente – selon leur prévision, on prévoyait, à ce moment-là, 4 145 000 000 $. Ils finissent avec 4 894 000 000 $, un écart encore de 749 000 000 $. Et là, tous azimuts, les champions des champions dans toute l'histoire du Québec, 1994-1995, avant qu'ils se fassent sortir par les Québécois et Québécoises, prévision de déficit, toujours en augmentation: 4 425 000 000 $. Ils finissent avec le déficit record de l'histoire du Québec: 5 710 000 000 $, un écart sur ce qui était prévu comme déficit de 1 285 000 000 $. M. le Président, c'est tout à fait honteux, l'héritage qu'ils nous ont laissé.

(12 heures)

Et je termine en disant: d'une façon réaliste. Parce qu'on vient de comprendre qu'on n'avait plus de marge de manoeuvre. Il nous est resté quelques centaines de millions pour mettre en disponibilité à nos concitoyens; ce qu'on a fait, on a priorisé la famille et les jeunes. C'est ce que nous avons fait, parce que, nous, on ne veut pas emprunter, parce que, nous, on ne veut pas faire de déficit. Et également, 49 000 000 $ dans la culture. Et, si le temps me le permettait, on pourrait aller en profondeur dans toutes les mesures touchées par ces 49 000 000 $, la culture si importante pour le peuple québécois, les Québécois et Québécoises.

M. le Président, je vais conclure en disant ceci: Il est clair et net que les Québécois et les Québécoises se rappellent et vont se rappeler que les rouges ont mis le Québec dans le rouge, et ça, ils vont s'en rappeler, ils s'en rappellent et ils vont... Pas un mot également des collègues du Parti libéral en Chambre sur les coupures du fédéral. 11 000 000 000 $ au total depuis quelques années: 7 000 000 000 $ en santé, 3 000 000 000 $ en éducation, 1 000 000 000 $... Pas un mot! Le silence total, la tombe! Et ils défendent leur idéologie: ce sont des fédéralistes, et tout va bien, Mme la Marquise, au Canada, au détriment des intérêts des Québécois et des Québécoises. On se demande où ils siègent, au Québec ou à Ottawa. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Messieurs dames, il est actuellement 12 h 1. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour que nous poursuivions le débat?

Des voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, puisqu'il y a consentement, nous allons céder la parole maintenant au député de Saint-Hyacinthe. M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Vous savez, quand on parle après plusieurs personnes, il y a un avantage et il y a un inconvénient. L'inconvénient, c'est qu'on risque de répéter des choses qui ont déjà été dites. L'avantage, c'est qu'on se rend compte d'une chose, c'est que, quand plusieurs personnes qui ne se sont pas concertées arrivent aux mêmes conclusions, il y a de bonnes chances que ce soit la réalité. Et l'objet de mon discours, c'est aussi pour démontrer que le budget qui a été présenté par le ministre des Finances est un budget responsable.

C'est sûr que, quand j'ai écouté parler les représentants de l'opposition qui se sont plaints qu'on ne mettait pas assez d'argent dans la santé, dans l'éducation et ces choses-là, vraiment ça m'a touché. J'ai trouvé que c'étaient des gens qui étaient sensibles aux besoins de la population. Ils me faisaient rêver, vraiment, ils me faisaient rêver d'un monde idéal où on pourrait aller au maximum dans tout et faire en sorte que la vie soit plus facile pour nos concitoyens. Mais, quand je revenais à la réalité, eh bien, je me rendais compte que ce n'est pas tout à fait ça, la réalité que l'on vit.

Le budget qui nous a été présenté, c'est un budget responsable parce qu'il est réaliste, parce qu'il est fondé sur notre réalité concrète avec laquelle il faut travailler. Et notre réalité, M. le Président, elle prend sa source d'abord dans l'héritage qu'on a reçu, l'héritage qu'on a reçu du parti de l'opposition, l'héritage que nous ont laissé les libéraux quand ils ont laissé le pouvoir avec un déficit de 6 000 000 000 $, 6 000 000 000 $ de plus que ce qu'ils étaient capables de dépenser normalement. Après avoir habitué la fonction publique et tout le monde à des dépenses exorbitantes, ils nous laissaient le paquet comme ça.

Ça, c'est la réalité avec laquelle il a fallu jongler et avec laquelle il a fallu travailler pour arriver à faire en sorte que nous puissions créer les conditions nécessaires pour le développement qui amène la richesse que l'on peut ensuite distribuer, M. le Président. Mais ça, c'est seulement un aspect de notre réalité.

Il y a un autre aspect de notre réalité qui est celui-ci, c'est le fait que depuis quatre ans, M. le Président, le fédéral a coupé 11 000 000 000 $ dans les transferts qu'il nous devait, au Québec, 11 000 000 000 $: 7 000 000 000 $ dans la santé, 3 000 000 000 $ dans l'éducation, 1 000 000 000 $ dans la sécurité du revenu. Ça, c'est notre réalité. Et c'est face à ces coupures répétées qu'il a fallu réagir pour éviter de tout perdre et réussir à conserver l'essentiel de notre système de santé, de notre système d'éducation.

Mais ce n'est pas tout, M. le Président. En plus, le fédéral a transformé les règles d'attribution des remboursements à l'assurance-chômage de façon qu'il a fait basculer 40 000 familles à l'aide sociale, grevant ainsi nos budgets de millions, de milliards et de centaines de millions de dollars. Seulement dans l'assurance-chômage, dans le bien-être social, ils ont coupé 1 400 000 000 $. C'est beaucoup, ça, M. le Président. Malgré ça, on a été obligé de rajouter au moins 400 000 000 $ pour éviter le pire. C'est bien sûr que la situation s'est gâtée pour eux, mais, au moins, on a réussi à éviter le pire grâce à la débrouillardise et à la générosité du reste de la société.

Mais ça, ce n'est rien qu'une partie de notre héritage. On sait que, alors que le fédéral, à l'occasion de l'harmonisation des taxes, a donné 2 000 000 000 $ et plus aux Maritimes, au Québec, il nous a privés de cela. 2 000 000 000 $ de moins dans nos coffres à cause des ententes qui favorisent les autres et qui laissent le Québec avec tous les problèmes, M. le Président. Mais ce n'est pas tout. Ça, c'est des choses qui se sont passées depuis plusieurs années.

Mais tout dernièrement, à l'occasion du verglas, où le fédéral se vante qu'il assume 90 % des coûts de ce qu'a coûté la tempête du verglas, eh bien, c'est faux; ça dépasse à peine le 40 %. Entre autres, le fédéral refuse de rembourser pour les frais qui ont été dépensés, qui ont été effectués par Hydro-Québec, et, sur ce seul montant, près de 400 000 000 $ que le fédéral nous doit et qu'il refuse de rembourser. Ça, c'est notre réalité.

Le budget qui a été fait, M. le Président, c'est un budget responsable parce que c'est un budget réaliste. Évidemment, on dira que le gouvernement a été dur pour les pauvres, que les besoins sont considérables pour la santé, et tout cela. C'est vrai, les besoins sont considérables, et, pour les satisfaire, il faut beaucoup d'argent. Et, pour avoir beaucoup d'argent, il faut créer beaucoup de richesse. C'est pour ça que, malgré que le budget n'ait dégagé qu'une faible marge de manoeuvre, toute cette marge de manoeuvre a été affectée sous forme de levier pour développer la richesse. Parce qu'on sait que, pour avoir de la richesse, ça prend trois choses: ça prend des capitaux, ça prend des travailleurs et ça prend en plus des produits qui sont de nature à se vendre.

Alors, dans le budget, on trouve tout ce qu'il faut. D'abord, pour maximiser les investissements au Québec, on prévoit des investissements de plus de 15 000 000 000 $ au total, au Québec, grâce à des montants relativement minimes mais quand même significatifs: 400 000 000 $ de plus dans la Société générale de financement, plusieurs centaines de milliers de dollars à Investissement-Québec pour s'assurer d'attirer au Québec le plus d'investissements possible, parce que, M. le Président, pour créer de la richesse, ça prend de la richesse, pour créer de la richesse, ça prend de l'investissement. Le capital crée de la richesse, le capital crée des emplois.

Mais il ne faut pas oublier le contraire aussi. Ce sont les emplois qui créent le capital. Donc, il faut faire en sorte que nos Québécois et nos Québécoises soient préparés à occuper des emplois. Il faut faire en sorte qu'ils soient capables d'occuper tous les emplois disponibles, et, pour ça, ça prend de la formation. Donc, M. le Président, tout le programme du gouvernement, et le budget y fait référence, est fait de telle sorte qu'il puisse maximiser le plus possible la formation des futurs employés, des jeunes, de façon à ce qu'ils soient en mesure d'occuper les emplois disponibles.

Et enfin, M. le Président, pour réussir à développer notre économie, pour réussir à distribuer de la richesse, donc à en créer d'abord, il faut avoir des produits qui se vendent. Ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'avec une population de 7 000 000 l'expansion de notre économie ne sera possible qu'en maximisant les exportations. Pour ça, il faut que nos produits soient capables de compétitionner avec tous les produits du monde. Et, pour que ça fonctionne, M. le Président, faut être capable d'avoir un système de recherche et de développement de nos entreprises et de nos produits qui soit à point. Voilà pourquoi le budget a prévu des sommes importantes dans ce domaine.

En particulier, M. le Président, en ce qui concerne mon comté, une somme importante a été prévue pour investir dans un institut de développement et de recherche en agroenvironnement. On sait à quel point le développement de l'agriculture, c'est un des secteurs où on crée le plus d'emplois au Québec, un des secteurs où il y a la plus grande possibilité d'expansion économique, un des secteurs où on a le plus de possibilités d'exporter. Mais, pour ça, il faut avoir des produits de pointe, des produits transformés et surtransformés qui soient uniques et nous permettent non seulement de garder notre part de marché sur le plan mondial, mais qui nous permettent d'exporter davantage. Voilà pourquoi ces fonds qui ont été mis dans la recherche et le développement sont importants.

Voilà pourquoi aussi, dans ce budget, on a fait en sorte d'aider les jeunes en particulier. Plus de 40 000 000 $ ont été rendus disponibles pour soulager l'endettement étudiant. Pourquoi cela? Pour stimuler les jeunes, les encourager à terminer leurs études, à obtenir leur diplôme, et à obtenir des emplois, et à faire en sorte que nos produits soient les meilleurs sur le marché.

(12 h 10)

J'ai très peu de temps, M. le Président, mais je veux terminer en disant ceci: Le budget qui nous a été présenté par le ministre des Finances est un budget responsable. C'est un budget responsable parce qu'il est réaliste, parce qu'il tient compte de nos richesses, parce qu'il tient compte de nos forces. C'est un budget responsable parce qu'il est imaginatif. Avec très peu, très peu d'argent, il réussit à servir de levier et il réussira à provoquer des investissements massifs au Québec. Il est réaliste parce qu'il se fonde sur nos richesses agricoles, nos richesses culturelles, nos richesses minières. C'est un budget intelligent, il est réaliste parce qu'il se fonde sur la confiance, la confiance dans nos jeunes qui sont les meilleurs au monde en mathématiques. Il faudrait les applaudir très fort, les jeunes du Québec, pour ce qu'ils ont réussi.

Des voix: Bravo!

M. Dion: M. le Président, il est réaliste et il est responsable parce qu'il s'inspire de la fierté d'un peuple, d'un peuple qui sait s'administrer, d'un peuple qui arrivera à un déficit zéro, d'un peuple qui saura prendre les décisions qu'il faut pour se donner un pays, un pays libre et responsable.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe, et nous allons compléter, ce matin, avec l'allocution du député de Vachon. M. le député.


M. David Payne

M. Payne: M. le Président, on parle beaucoup ces temps-ci de confiance et d'investissement. Ça me rappelle une petite histoire que j'ai vécue à Londres il y a quelques années, lors d'une visite éclair de la part du premier ministre du Québec, où j'ai coordonné, organisé un souper avec un groupe d'investisseurs industriels britanniques du Québec dans un club privé, donc à huis clos.

À la fin de la soirée, un éminent porte-parole de l'aristocratie britannique, président d'une grande multinationale en aérospatiale que je ne nommerai pas, se vantait avec raison que, autour de la table, la vingtaine d'hommes d'affaires représentaient à eux seuls quelque 4 000 000 000 $ d'investissements réels à ce moment-là au Québec. Et, à la fin, cet éminent aristocrate s'est levé pour dire au premier ministre du Québec: M. le premier ministre, après votre référendum, peu importe le résultat – qu'on ne favorise pas nécessairement – on se retrouvera ensemble avec vous pour poursuivre nos investissements. La souveraineté, concluait-il, on en a vu d'autres.

«We've been through the growth and the decline of our empire over the last 200 years. You are a model of democracy to the world, he said. If some make your referendum a problem, we will make it an opportunity.» On a vu l'émergence, il disait, et le déclin de l'empire durant 200 ans. Ce n'est pas la question nationale du Québec qui nous dérange. Si c'est un problème pour certains, nous, on va faire en sorte que ça devienne une opportunité. «That, my friends, is business.» Ça, mes chers amis, c'est les affaires.

Je voudrais vous dire quelques mots, M. le Président, des éléments qui stimulent, à mon avis, la confiance des investisseurs étrangers: d'abord, une compétitivité favorable, c'est le cas du Québec; une main-d'oeuvre qualifiée et dévouée avec des infrastructures hautement développées, c'est le cas du Québec; un régime fiscal favorable aux entreprises, qui peuvent accroître leur capacité de production, c'est le cas du Québec; un gouvernement qui tient parole et qui gère avec responsabilité ses dépenses, c'est le cas du Québec; une agglomération d'industries modernes et de pointe, c'est le cas de Québec; et, finalement, une culture et une qualité de vie exceptionnelles. Demandez à nos diplomates et aux gens d'affaires étrangers qui travaillent, au moment où on se parle, au Québec. Le coût de la vie, la générosité des Québécois et Québécoises, la joie de vivre, c'est le cas du Québec.

Nos entreprises du Québec, ici, se démarquent au niveau mondial dans les domaines reliés, par exemple, à l'informatique. Savez-vous, par exemple, qu'actuellement il y a 3 400 entreprises en informatique au Québec? Beaucoup de jeunes entrepreneurs et des grands, comme Nortel, CGI, Téléglobe, Matrox; dans l'aérospatial, on connaît tous Bell, CAE, Spar, Héroux Aerospace; l'industrie pharmaceutique: Bristol-Myers Squibb, Merck Frosst, Ciba-Geigy, BioChem Pharma; et, bien sûr, l'énergie électrique: GEC Alsthom; et à la protection de l'environnement comme SNC. Et ça bouge. Ça bouge partout. Ils se sont tous agrandis d'une façon exponentielle dans les derniers quatre ans du gouvernement du Parti québécois. Quelle incertitude nous avons, autre qu'on voit de l'autre côté de la Chambre?

Nos exportations internationales avec les autres provinces maintenant se situent à 54 %, 54 % de notre produit intérieur brut. Moi, je me souviens, avant l'entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange, ça se situait aux alentours de 44 %. Et, nous, c'était nous, les péquistes, qui étions les protagonistes de cette entente de libre-échange. On était prêt pour la concurrence. Et qu'est-ce qu'on exporte? Des produits auxquels on a ajouté une valeur. Et notre plus grande valeur, c'est nos ouvriers, nos amis, nos familles, nos spécialistes, nos techniciens, nos chercheurs, nos femmes d'affaires, nos jeunes entrepreneurs, des Québécois et des Québécoises qui ont la confiance.

On travaille nos produits manufacturiers. Maintenant, contrairement au passé, on ajoute quelque chose, ce qu'on appelle la valeur ajoutée. On transforme et on exporte. Qu'est-ce qu'on exporte avant tout? Notre savoir-faire, notre transfert de technologie. Ça, c'est de la fierté. Et notre fierté québécoise, M. le Président, ça ne se crée pas du jour au lendemain. Mais je vous dis quelque chose, dans mon humble expérience, c'est monnayable et c'est exportable.

Si on veut assainir nos finances publiques, c'est pour payer cette scandaleuse hypothèque que le gouvernement libéral ajoutait jour après jour et, surtout, ajoutait sur les jeunes. Nous, il faut investir dans les jeunes. On se donne une stratégie Emploi-Québec et une panoplie de mesures concrètes pour faire du Québec une économie d'avant-garde, créatrice d'emplois, une pratique de partenariat véritablement québécoise avec un accent sur les investissements privés. Ambitieux, vous dites! Effectivement, parce qu'on a des ambitions. Ça prendrait l'opposition... 19 000 000 000 $ dans cinq ans, une réforme de la fiscalité des entreprises et le plan d'action pour favoriser le développement du secteur financier.

Imaginez un gouvernement libéral élu, par hasard, il y a quatre ans. Pouvez-vous vous imaginez pour une seconde le résultat fou d'un gouvernement libéral? Oui, libéral, c'est le mot qui se donnait allègrement à une politique de laisser-faire et même pire: «spend, spend, spend», dépenser, dépenser, dépenser, sans plan d'action, sans orientation, sans confiance peut-être, comme s'il n'y avait pas de demain, s'il n'y avait pas de lendemain?

(12 h 20)

Au moment où les grandes maisons de crédit annonçaient une éminente décote de crédit, il y a quatre ans, le Parti libéral nous aurait amenés au bord d'un précipice, mais les Québécois heureusement, ils ont vu cette folie, ils l'ont mis dehors juste à temps, juste à temps. Imaginez l'hypothèse contraire, l'effet immédiat sur les coûts d'intérêts pour le gouvernement et les conventions collectives, le 6 000 000 000 $ devenu maintenant, imaginez, 10 000 000 000 $. Imaginez les compressions, et bien pires qu'actuellement, d'un gouvernement libéral. Quel cauchemar!

Ils nous disent, en privé: Vous faites ce que, nous, on aurait bien voulu faire si on avait eu un peu plus de temps. Nous, on s'est assis avec le secteur public, on a convenu d'une série de préretraites pour une vingtaine de milliers d'employés de l'État. On a convoqué un sommet. Ce n'était pas vraiment un sommet du gouvernement, c'était un sommet des leaders et du peuple québécois. On s'est donné un plan d'action.

Tout cela nous permet d'annoncer l'allégement de la fiscalité des particuliers et des entreprises. Le budget de l'an passé a permis de diminuer l'impôt sur le revenu de 841 000 000 $, et 200 000 contribuables additionnels ne paient plus d'impôts en 1998. Les impôts et taxes des contribuables sont réduits de 50 000 000 $. Pour les entreprises, une baisse de 37 % de la taxe sur la masse salariale de nos PME, et ça, ça va être appliqué dans deux phases.

Oui, on crée des conditions pour l'emploi, oui, on crée des conditions pour les investissements accrus, oui, on crée des conditions pour favoriser l'intégration des jeunes, oui, on crée des conditions pour donner au Québec une confiance que l'opposition n'aurait jamais et ne pourrait jamais donner aux Québécois et aux Québécoises. On le fait avec confiance, c'est la seule garantie du Québec, c'est la seule garantie du succès. Merci, M. le Président.


Poursuite du débat en commission parlementaire

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Vachon. Mmes, MM. les députés, la première étape de 13 h 30 min étant terminée, je vous avise que, conformément aux dispositions de l'article 275 de notre règlement, le débat sur le discours sur le budget est suspendu à l'Assemblée et se poursuivra à la commission des finances publiques, M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances étant membre de la commission pour la durée de ce mandat.

Alors, considérant l'heure, nous allons tout simplement suspendre nos activités, et je vous invite à réintégrer le salon bleu cet après-midi, à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 23)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Présence du haut-commissaire de l'Organisation des États des Antilles orientales, M. George Randolph Earle Bullen

Alors, pour débuter la séance, j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes du haut-commissaire de l'Organisation des États des Antilles orientales, Son Excellence M. George Randolph Earle Bullen.


Dépôt du document intitulé Réforme parlementaire

Alors, avant de débuter, chers collègues, je vous présente aujourd'hui un nouveau document sur la réforme parlementaire. Cette présentation marque l'étape finale dans le processus de propositions de réforme parlementaire que j'ai amorcé depuis mon entrée en fonction. D'ailleurs, dès le 12 mars 1996, je souhaitais que la réforme parlementaire cesse d'être un rêve sans lendemain et j'indiquais alors que notre Parlement pourrait non seulement être plus respectable, mais aussi plus efficace.

Alors, depuis 1996, quelques étapes de cette réforme ont été franchies et mises à l'essai dans cette enceinte. Je pense, par exemple, aux nouvelles heures concernant les travaux de notre Assemblée ainsi qu'à l'organisation des commissions parlementaires, qui comporte notamment l'ajout d'une nouvelle commission, soit celle de l'administration publique.

Toutefois, nous le savons bien tous, l'essentiel reste encore à faire. Et voilà pourquoi j'ai convenu avec les leaders parlementaires d'un plan de travail comprenant 11 items prioritaires.

Aujourd'hui, j'ai donc le plaisir de déposer, pour discussion, une série de propositions touchant chacun des 11 sujets. Par le biais de ces propositions, j'espère susciter une nouvelle impulsion afin que, ensemble et rapidement, nous transformions notre culture parlementaire. Moins de deux ans avant l'an 2000, le temps est venu d'adopter de nouvelles règles parlementaires et d'expérimenter des modes de fonctionnement qui seraient à la hauteur de notre institution démocratique. Alors, je dépose donc ce document.


Décision du président concernant le remplacement de motions de censure jugées irrecevables

Par ailleurs, toujours avant de procéder aux affaires courantes, je désire vous informer de ma décision concernant le remplacement des motions de censure qui ont été jugées irrecevables. Alors, dans le cadre du débat sur le discours du budget, j'ai eu à me pencher sur la recevabilité des motions de censure qui ont jusqu'à maintenant été présentées. Or, après l'examen de ces motions, j'en suis venu à la conclusion que quatre d'entre elles étaient irrecevables parce qu'elles contenaient toutes de l'argumentation, ce qui est contraire aux dispositions de l'article 191 du règlement. Les motions concernées sont celle présentée par M. le député de Laporte le 12 avril dernier, celle présentée le même jour par M. le député de Rivière-du-Loup, celle présentée hier, le 7 avril, par M. le député de Kamouraska-Témiscouata, de même que celle présentée également hier par le député de Notre-Dame-de-Grâce.

En vertu de l'article 193 de notre règlement, le président doit refuser toute motion contraire au règlement. Le deuxième alinéa de ce même article permet cependant au président de corriger la forme d'une motion pour la rendre recevable. Mais, dans le cas des quatre motions dont il est question, il ne s'agit nullement de vices de forme. Alors, j'ai fait part au leader de l'opposition et au député de Rivière-du-Loup de ma décision et j'ai convenu avec eux que je prendrais l'initiative de saisir l'Assemblée de cette question et que je solliciterais le consentement de l'Assemblée afin de déposer les motions corrigées qui remplaceront celles préalablement présentées à l'Assemblée. Alors, si l'Assemblée consent à ce remplacement, de nouvelles inscriptions seront faites aux documents officiels de l'Assemblée.

Alors, est-ce qu'il y a consentement pour substituer aux motions jugées irrecevables précitées de nouvelles motions conformes au règlement?

Des voix: Consentement.


Dépôt des motions de censure modifiées

Le Président: Il y a consentement. En conséquence, je dépose le texte de ces motions.


Affaires courantes

Alors, aux affaires courantes, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Il n'y a pas non plus de présentation de projets de loi aujourd'hui.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Rapport d'activité de la Caisse de dépôt et placement du Québec et document intitulé Survol des activités 1997: une gestion éclairée pour la sécurité des capitaux

M. Landry (Verchères): M. le Président, je dépose le rapport d'activité 1997 de la Caisse de dépôt et placement du Québec ainsi qu'un document d'information intitulé Survol des activités 1997: une gestion éclairée pour la sécurité des capitaux .

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre de la Justice.


Rapport annuel de l'Ordre professionnel des conseillers et conseillères d'orientation du Québec

M. Ménard: M. le Président, je dépose le rapport 1996-1997 de l'Ordre professionnel des conseillers et conseillères d'orientation du Québec.


Décision du Bureau de l'Assemblée nationale

Le Président: Très bien. Ce rapport est déposé également.

Pour ma part, je dépose la décision 871 du Bureau de l'Assemblée nationale.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission de la culture et député de Lévis.


Consultation générale sur les cartes d'identité et la protection de la vie privée

M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de la culture qui a siégé les 4, 5, 6, 18, 19, 20 mars, les 27 et 28 août ainsi que le 4 septembre 1997 afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques dans le cadre de son mandat d'initiative sur les cartes d'identité et la protection de la vie privée. La commission s'est également réunie à 12 reprises en séance de travail et remet un rapport qui contient deux recommandations principales adoptées à l'unanimité de ses membres.

Le Président: Alors, ces rapports sont déposés.

Puisqu'il n'y a pas de dépôt de pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous allons immédiatement aborder la question... Ah! Vous avez un autre rapport. M. le député de Lévis.


Consultation générale sur le rapport quinquennal de la Commission d'accès à l'information sur la mise en oeuvre des lois sur l'accès à l'information

M. Garon: M. le Président, je dépose également le rapport de la commission de la culture qui a siégé les 7, 8, 16, 22, 23, 28 et 30 octobre et le 6 novembre 1997 afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur le rapport quinquennal de la Commission d'accès à l'information sur la mise en oeuvre de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. La commission s'est également réunie en séance de travail à cinq reprises. Le rapport que je dépose contient 14 recommandations adoptées à l'unanimité des membres de la commission.

Le Président: Alors, merci, M. le député de Lévis. Le rapport de la commission est déposé.


Questions et réponses orales

Nous allons donc immédiatement aborder la période des questions et des réponses orales. M. le député de Chomedey, en principale.


Processus d'enquête de la Commission d'accès à l'information sur la divulgation de renseignements personnels

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Au mois de novembre, le premier ministre a décrété la tenue d'une enquête par la Commission d'accès à l'information pour supposément faire toute la lumière sur l'utilisation d'informations fiscales personnelles et confidentielles pour fins politiques partisanes au sein de son propre bureau.

(14 h 10)

Puisque la Commission avait à deux reprises statué que seulement les avocats payés par le gouvernement auraient le droit de contre-interroger, l'opposition officielle a dû s'adresser aux tribunaux. Mais, avant que la cause ne commence, cette même phalange d'avocats du gouvernement a tenté de faire déclarer irrecevable la demande formulée par le député de Westmount–Saint-Louis au nom de l'opposition.

Dans sa décision sur cette question, le juge Gratien Duchesne, de la Cour supérieure, révèle que Mme la ministre déléguée au Revenu, par son procureur, s'est objectée à ce que notre avocat puisse aussi poser des questions à l'enquête parce que, et je cite: «Elle risquerait d'être lésée lors du contre-interrogatoire, à titre de témoin, que lui ferait subir M. Chagnon.»

Ma question à la ministre est la suivante: Pourquoi craint-elle d'avoir à répondre à des questions dans une enquête publique qu'elle a elle-même, à titre de membre du gouvernement, demandé à la Commission d'accès à l'information de tenir?

Le Président: Mme la ministre déléguée au Revenu.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, j'ai participé, de plein gré, activement aux audiences de la Commission d'accès à l'information et j'ai répondu à toutes les questions qui m'ont été posées.

Le Président: M. le député.

M. Mulcair: Quelles sont – pour reprendre les termes de son propre avocat – les questions auxquelles la ministre craint d'avoir à répondre devant la commission d'enquête...

Le Président: M. le député de Chomedey, je m'excuse, il y a une question de règlement de la part du leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article 35. Est-ce que vous pouvez demander au député d'être très attentif aux questions qu'il va poser, de façon à éviter quelque dérapage que ce soit?

Le Président: Effectivement, je pense que, comme tout le monde le sait, cette question-là est devant les instances judiciaires. À ce moment-ci, ça n'interdit pas nécessairement qu'on aborde la question à l'Assemblée nationale, comme, d'ailleurs, on l'a fait à plusieurs reprises depuis plusieurs semaines, sauf que, évidemment, je prends pour acquis que les membres de l'Assemblée qui vont questionner ou répondre sur cette affaire vont tenir compte aussi des dispositions du règlement et de la tradition de notre Assemblée. Alors, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Donc, notre question pour la ministre est la suivante: Quelles sont les questions auxquelles elle craint d'avoir à répondre si des questions lui sont posées par des avocats autres que cette phalange d'avocats tous payés par le gouvernement du Parti québécois?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, j'ai répondu à toutes les questions que la Commission m'a posées et j'invite le député à relire les enregistrements qui ont été faits s'il a des questions auxquelles il veut avoir des réponses. Je n'ai rien à cacher, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Mulcair: Si la ministre n'a rien à cacher, pourquoi alors a-t-elle mandaté son avocat de tenter d'empêcher l'opposition officielle d'avoir le même droit que tous les autres avocats, c'est-à-dire le droit de la contre-interroger et de contre-interroger les autres membres du gouvernement qui comparaissent devant cette Commission?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, le député sait bien que je ne suis pas avocate, et j'ai répondu à toutes les questions, et je respecte les décisions à la fois du tribunal et du président de la Commission d'accès.

Le Président: M. le député.

M. Mulcair: Est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il a discuté avec la ministre de l'à-propos de la décision par ses avocats de s'objecter à la demande de l'opposition officielle d'avoir le statut de participant et ainsi de pouvoir poser des questions aux témoins comme la ministre du Revenu?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, que je sache, je n'ai émis aucune instruction. Je n'ai demandé rien à qui que ce soit concernant le déroulement de cette procédure judiciaire. J'ai compris comme tout le monde que la Cour supérieure a été saisie d'une requête en révision judiciaire de la décision de la Commission. Et le caucus du Parti libéral souhaitant que son avocat puisse également poser des questions en contre-interrogatoire, je ne suis pas intervenu, en aucune façon. J'ai attendu comme tout le monde que la décision soit prise. Et nous respecterons les décisions ultimes qui seront prises par les instances autorisées, bien entendu.

Le Président: M. le député.

M. Mulcair: Puisque l'ensemble des avocats qui représentent le gouvernement se sont objectés d'une même voix, la question qu'on voudrait poser à la ministre est la suivante: Est-ce qu'elle a discuté avec les fonctionnaires – qui, rappelons-le, sont censés être neutres – ou est-ce que ses avocats ont parlé avec les avocats des fonctionnaires avant que ceux-ci ne s'objectent à ce que les membres de ce Parlement aient les mêmes droits que les membres du gouvernement de poser des questions? Est-ce que cette discussion-là aussi a eu lieu?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Je le répète, M. le Président, j'ai été convoquée devant la Commission et j'ai répondu à toutes les questions qui m'ont été posées. Et, pour ce qui est des décisions, on va les respecter, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Examen des engagements financiers du ministère du Conseil exécutif

M. Chagnon: Oui, M. le Président. Vous faisiez vous-même allusion à la réforme parlementaire il y a un an, un an et demi, où on a créé une nouvelle commission parlementaire qui était ni plus ni moins que la commission des comptes publics, mais rajeunie de 32 ans, parce qu'on n'a pas eu de commission des comptes publics dans notre Parlement depuis une trentaine d'années.

Donc, on a créé la commission de l'administration publique qui a pour mandat de vérifier, pour mandat d'abord d'étudier en profondeur les rapports du Vérificateur général, ce que nous avons toujours fait, et aussi, vous nous avez donné comme mandat de reprendre l'étude des engagements financiers faits par l'ensemble des ministères du gouvernement depuis déjà trois ou quatre ans. Il y avait 13 000 engagements financiers en arriéré.

Nous avons eu le temps de les étudier à peu près tous, sauf, je dirais, M. le Président, que nous retrouvons une certaine résistance, une certaine résistance au ministère de la Santé, que j'invite publiquement à essayer de revenir compléter l'ouvrage de l'étude de ses engagements financiers. Nous avons eu un silence du ministère du Conseil exécutif, un silence depuis un an, silence auquel j'aimerais aujourd'hui, puisque j'ai déjà écrit au premier ministre... Le ministère du Conseil exécutif est le ministère présidé par le premier ministre. M. le Président, j'ai écrit au premier ministre il y a un mois, un mois et demi, j'ai reçu un accusé de réception sibyllin, insignifiant, pas digne d'un bureau du premier ministre, que j'ai retourné au bureau du premier ministre, à son chef de cabinet.

M. le Président, au nom des principes que nous défendons dans cette Assemblée, qui sont l'imputabilité des personnes politiques par rapport à leurs dépenses, au nom de la transparence de ces dépenses, au nom de nos institutions, je demande au premier ministre quand le Conseil exécutif viendra-t-il défendre ses engagements financiers depuis 1994 devant la commission parlementaire? Est-ce que le premier ministre, lui ou, comme notre règlement le prévoit, l'un ou l'autre des membres du Conseil du trésor, pourra faire en sorte de faire procéder à l'étude des engagements financiers du ministère du Conseil exécutif?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je défends les crédits de mon ministère à chaque année après le dépôt des crédits. J'aurai l'occasion, j'imagine, cette année, de les défendre encore. Je dois signaler à la Chambre que depuis 1988, donc de 1989 à 1994 en particulier, pendant les cinq années des dernières années du régime libéral, le Conseil exécutif n'a pas eu à défendre des engagements financiers. Alors, je constate qu'on veut créer une nouvelle tradition. Nous allons examiner la question, M. le Président, nous n'avons rien à cacher. On verra ce qu'il sera possible de faire, on va vérifier ce qu'il en est de la demande qui est formulée aujourd'hui et on aura l'occasion, éventuellement, d'y donner réponse.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le premier ministre ne fait pas la différence entre les crédits... Puis c'est justement la raison pour laquelle j'ai posé la question cette semaine... Est-ce que le leader du...

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, le premier ministre est avec nous depuis maintenant trois ans, ne sait-il pas qu'il y a une différence entre l'étude des crédits et l'étude des engagements financiers? L'étude des crédits, c'est normal, tous les ministres doivent passer par cet examen à chaque année. Mais l'étude des engagements financiers est le corollaire des crédits qui ont été adoptés dans chacune de vos commissions parlementaires, et c'est pour cette raison, je pense, que le premier ministre devrait nous signaler aujourd'hui s'il a l'intention, dans les plus brefs délais, de faire en sorte que lui ou un de ses représentants – lui qui devrait donner l'exemple, effectivement – puisse faire en sorte de procéder à l'étude des engagements financiers du Conseil exécutif, qui n'ont pas été étudiés depuis 1994.

(14 h 20)

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je prends bonne note de la demande, et nous aurons l'occasion d'ici peu de temps d'y faire réponse.

Le Président: En question principale, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


Conflit de travail dans le secteur de la construction résidentielle

M. Béchard: Merci, M. le Président. En ce qui a trait au conflit dans la construction résidentielle qui risque de toucher 20 000 travailleurs, on se souvient tous qu'hier le ministre du Travail nous disait en cette Chambre que ça allait bien, qu'il n'y avait pas de problème, que ça allait bien. Pourtant, on a appris ce matin que l'injonction émise par la cour n'est pas respectée. On apprenait aussi que les personnes âgées qui vivent près de ce chantier se sentent prises en otages, que des téléphones de menaces ont été faits aux travailleurs au cours de la nuit et même qu'un appel à la bombe a été logé au bureau de l'APCHQ. Mais ça allait bien, il n'y avait pas de problème! Le porte-parole syndical disait ce matin que, oui, c'est officiel, ce mouvement-là va s'étendre à la grandeur de la province dans les prochaines semaines. Ça va encore bien!

Étant donné qu'on vient de voir qu'en 24 heures le conflit va beaucoup moins bien qu'hier, qu'il y a moins de solutions qu'hier, là, on «pourrait-u» savoir, M. le Président, ce qu'il attend, le ministre, pour intervenir dans ce dossier, combien de temps il va tolérer cette situation, combien de menaces, de pressions vont être nécessaires pour qu'il sorte de sa torpeur et qu'il agisse avant que des gestes regrettables se produisent, des incidents regrettables? Qu'est-ce qu'il attend pour agir?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, si le député avait écouté hier, il ne dirait pas les choses qu'il radote aujourd'hui. J'ai dit hier qu'il y avait dans l'industrie de la construction, dans le secteur résidentiel, un conflit important entre l'APCHQ et les syndicats. On ne s'entend pas sur quelque chose de majeur, l'APCHQ voulant une rémunération différente pour le résidentiel et les syndicats voulant que les conditions de travail dans les quatre secteurs s'appliquent indifféremment. C'est ça, l'enjeu du conflit. J'ai dit que c'était très sérieux. On a été très attentifs jusqu'à maintenant et on a tout fait pour remettre les parties à la table pour en arriver à une entente.

Il est également vrai que, dans le régime actuel, l'APCHQ a fait un lock-out en décembre 1995, ce qui lui a permis de changer les conditions de travail. Ça, c'est important. Aujourd'hui, les syndicats exercent des moyens de pression; rien d'illégal là-dedans.

Plutôt que de prendre panique et d'essayer de parler de conflit appréhendé, ce que je dis, c'est qu'hier, oui, sur le chantier dont on a parlé, il y a eu une demande d'injonction qui a été accordée. Aujourd'hui, il y a un nombre de piqueteurs limité à 10. Il y a deux agents syndicaux qui peuvent se promener sur le chantier. Sachez une chose, c'est qu'il n'y a pas de drame à l'horizon. C'est un chantier.

Là, le député essaie de faire croire à la population, en faisant de la vocalise, qu'on s'en va vers un drame terrible. Ce que je lui répète, c'est qu'on a 90 % de l'industrie de réglé. Il devrait se réjouir au moins de ça.

Le Président: M. le député.

M. Béchard: M. le Président, est-ce que le ministre du Travail pourrait au moins écouter les bulletins de nouvelles? Il y apprendrait que l'injonction n'est pas respectée, qu'il y a des menaces qui sont faites et que le porte-parole syndical a dit que, loin de se régler, ce mouvement-là va s'étendre à la grandeur de la province. Qu'est-ce que ça va lui prendre de plus, si ce n'est d'écouter les nouvelles, pour qu'il agisse dans ce dossier-là?

Le Président: M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, la FTQ-construction est en train de faire son tour de piste dans ses syndicats et la CSD fait exactement la même chose. Parce qu'il y a des choses qui ont changé. Maintenant, c'est la CSD qui est le partenaire de la FTQ dans les négociations dans l'industrie de la construction. La CSD a même dit hier – j'écoute les nouvelles, c'est mon ancien métier, puis j'essaie de les comprendre, surtout – la CSD a avisé que, lorsqu'elle aurait terminé sa tournée du Québec, on verra quelle action ils pourront mener désormais.

Mais ce qu'il m'importe de souligner en terminant, M. le Président, c'est qu'actuellement il n'y a pas de désordre dans l'industrie, il n'y a pas de drame dans l'industrie, et on s'occupe de nos affaires.

Le Président: M. le député.

M. Béchard: M. le Président, étant donné que le ministre est toujours convaincu que ça va bien, est-ce que le premier ministre pourrait répondre à l'appel lancé par l'APCHQ qui, eux aussi, comme nous, comme l'ensemble des Québécois et Québécoises concernés par ce conflit, à l'exception du ministre, sont inquiets et trouvent que ça ne va pas bien du tout dans le secteur de la construction résidentielle? Est-ce que le premier ministre, lui, pourrait répondre à l'appel de l'APCHQ et intervenir dans ce dossier avant qu'il ne se dégrade encore plus, qu'il y ait des incidents malheureux qui se produisent et que la santé et la sécurité des travailleurs soient remises en question? Est-ce qu'il peut intervenir, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Rioux: Quel flot de paroles inutiles, M. le Président! Quel flot de paroles inutiles. M. le Président, on a l'oeil sur les droits des travailleurs et des employeurs, mais, ne vous inquiétez pas, on a l'oeil aussi sur la durée, s'il devait y avoir un conflit majeur. On a l'oeil sur la durée, et ça, je m'y engage devant cette Chambre.

Le Président: M. le député d'Iberville.


Position de la Société Saint-Jean-Baptiste concernant le droit de vote des allophones

M. Le Hir: Alors, M. le Président, il y a à peine un peu plus d'un an, le 26 mars 1997, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité une résolution condamnant le nationalisme ethnique sous toutes ses formes et l'utilisation par qui que ce soit de ses thèmes, de ses stratégies et de son langage pour favoriser et entretenir la discorde entre les Québécois. Elle invitait en outre tous les groupes d'intérêts à s'abstenir de favoriser ou d'entretenir la discorde entre les Québécois sur la base de leurs origines ethniques.

Or, la semaine dernière, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, comparaissant devant la commission des institutions pour y présenter son mémoire sur les lois référendaires et électorales, a suggéré que la connaissance d'une des langues officielles du Canada devienne une condition à l'exercice du droit de vote au Québec, en évoquant la perspective d'une situation où le droit de vote au Québec pourrait devenir conditionnel à la seule connaissance du français, dans le but de s'assurer, et elle n'en fait pas mystère, qu'une majorité puisse éventuellement se dégager en faveur de la souveraineté qui concrétiserait la réalisation de son ambition ethnique.

Ma question au premier ministre est la suivante: Le premier ministre est-il prêt, en conformité avec la résolution adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, à condamner la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal pour ses propos et pour l'utilisation de stratégies empruntées au nationalisme ethnique?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, en ce qui me concerne et en ce qui concerne le gouvernement, nous nous dissocions de cette position de la Société Saint-Jean-Baptiste. Présentement, les citoyens ont droit de vote et, pour être citoyen, il faut avoir la maîtrise de l'une des deux langues officielles, soit l'anglais, soit le français.

Dans un Québec souverain, il est évident, M. le Président, que nos concitoyens de langue anglaise seront des citoyens et pourront avoir le droit de vote même s'ils n'ont pas la maîtrise du français.

Une voix: Bien sûr.

Le Président: M. le député d'Iberville.

M. Le Hir: M. le Président, le premier ministre peut-il expliquer au nom de quelle logique il accepte aujourd'hui de faire cette mise au point pour se dissocier des propos de la Société Saint-Jean-Baptiste alors que, s'agissant de la même question de principe, il a refusé de condamner son prédécesseur pour les propos ethniques irresponsables qu'il tenait encore il y a quelques mois, le qualifiant même de grand démocrate?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Alors, M. le Président, pour ce qui est de la question qui a été posée tout à l'heure, je pense que la réponse est claire. Je voudrais la répéter pour que ce soit clair. C'est que, dans un Québec souverain, nos concitoyens de langue anglaise, bien sûr, seront des citoyens, auront le droit de vote comme tel, et il ne sera pas exigé d'eux qu'ils aient la connaissance de la langue française pour avoir le droit de vote et pour être citoyens.

(14 h 30)

Deuxièmement, M. le Président, pour ce qui est de cette référence à mon prédécesseur, je crois que le député devrait se rendre compte qu'il fait référence à quelque chose de déjà ancien, une déclaration qui a fait l'objet ensuite d'une mise au point de la part de M. Parizeau. Et je crois que je devrai le référer à cette mise au point pour qu'il cesse de nous harceler avec cette question.

Le Président: Complémentaire? Complémentaire, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Additionnelle. Est-ce que le premier ministre, qui vient de repréciser ce qu'il vient de dire, veut dire par ça que ceux qui n'ont pas une maîtrise adéquate du français ou de l'anglais, dans un Québec souverain, comme ceux, par exemple...

Le Président: M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Pour compléter: Est-ce que j'ai bien compris du premier ministre, qui a bien dit que dans un Québec souverain ceux qui parlent anglais pourraient voter, évidemment ceux qui parlent français pourraient voter, est-ce qu'il peut ouvrir ça dans le contexte... Franchement, là, c'est ce qu'il a dit!

Des voix: ...

Le Président: Est-ce qu'on pourrait revenir à l'application du règlement et donc retrouver le silence? M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Est-ce que le premier ministre, qui a dit que ceux qui parlaient soit l'anglais soit le français pourraient voter... Qu'advient-il de ceux qui ne parlent ni l'un ni l'autre assez bien, dans son esprit, mais qui sont Québécois pareil?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il y a ceux qui sont citoyens, et tous ceux qui sont déjà des citoyens, bien sûr, auront le droit de vote, c'est évident. La question se pose pour les futurs citoyens, pour ceux qui vont arriver ici. Alors, actuellement, dans le régime de droit de citoyenneté canadienne, il est prévu que le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui a une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada. C'est déjà la loi, actuellement. Quelqu'un qui vient au Canada, donc qui vient comme immigrant reçu, avant d'avoir la citoyenneté, doit satisfaire à plusieurs conditions, et l'une d'elles est, au moment de l'examen final, de montrer une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada, de l'anglais ou du français. Il devient citoyen et, ensuite, il peut voter.

Alors, ce que nous disons, c'est que, dans un Québec souverain, un immigrant de langue anglaise qui vient au Québec deviendra citoyen du Québec même s'il n'a pas la maîtrise suffisante du français, mais ses enfants iront à l'école française. Pour quelqu'un qui, par exemple, n'a aucune des deux langues, qui arrive ici, bien, il va devoir évidemment s'initier à une des deux langues, comme au Canada, comme c'est présentement le cas au Canada, de sorte qu'il va devenir citoyen au moment où il aura la connaissance suffisante de l'une des deux langues, et, étant citoyen, il pourra voter. Voilà, c'est aussi simple que ça.

Le Président: M. le député des Îles-de-la-Madeleine.


Relance de l'usine de transformation de poisson de Newport, en Gaspésie

M. Farrah: En principale, M. le Président. La population de Newport, en Gaspésie, vit le désespoir, vit le désespoir parce que sa principale source d'emplois, qui est son usine de traitement de poisson, ne fonctionne pas depuis au-delà de trois ans et demi, et le désespoir également à cause de multiples promesses qui ont été faites par le gouvernement du Parti québécois. À preuve, il y a eu 14 promesses de faites par le Parti québécois de réouverture de cette usine: le ministre du Travail, en novembre 1994, le promettait pour janvier 1995; le député de Bonaventure le promettait, en décembre 1994, pour 1995; le 9 janvier, pour 1995; le 19 juin, pour août 1995; le 17 juin, pour août 1995 encore; le 20 juin, pour août 1995; et, le 18 août, ouvrir peut-être en 1996, et là j'ai une liste très exhaustive des promesses.

La saga se poursuit, M. le Président, compte tenu de la dernière vente qui avait été effectuée par leur gouvernement au mois de décembre 1996 alors qu'on avait trouvé une firme américaine qui s'appelait Newport Sea Products. Un an et demi plus tard, donc le 31 mars dernier, la compagnie a cédé ses droits au gouvernement, faisant en sorte que l'usine n'a pas fonctionné, ou un mois durant un an et demi, et la population est très déçue de la part du gouvernement.

L'autre élément, l'opposition officielle, en décembre 1996, avait questionné le gouvernement très fermement sur la pertinence de choisir cette firme-là, compte tenu qu'il y avait un autre promoteur, du nom de Tataris, qui est une firme de Montréal, dans le dossier. M. le Président, c'est important parce que la population vit le désespoir. L'opposition officielle a mis la main sur un document confidentiel de SOQUIA qui faisait référence aux deux offres qui étaient soumises au gouvernement par ces deux firmes-là.

Et je conclus, M. le Président, le document disant: «L'usine de Newport étant fermée depuis trois ans et la relance à partir de l'approvisionnement extérieur demeurant la seule voie de relance à court terme, le projet de M. Tataris s'avère plus crédible compte tenu qu'il comporte deux éléments déterminants: l'expertise démontrée au niveau de la commercialisation et un plan d'affaires élaboré avec détails.»

Les données ont changé alors que le premier ministre s'est mêlé du dossier, privilégiant la firme américaine au détriment d'une firme québécoise. Le clou dans le cercueil, c'est le ministre de l'Agriculture et des Pêcheries qui nous dit vendredi dernier: Ça a été une expérience qui nous donne des leçons, comme si la population de Newport était des cobayes.

Quelles leçons le premier ministre tire-t-il de cette aventure, compte tenu que c'est lui qui a pris la décision de choisir cette usine et que ça ne fonctionne pas pour les gens de Newport, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: M. le Président, je suis content de voir le fait que le député de l'opposition a soulevé toutes les dates potentielles. Ça a démontré vraiment l'importance qu'on accordait à ce dossier-là de se développer. La différence avec l'opposition, nous autres, on ne l'a pas fermée; c'est eux qui l'ont fermée, ils l'ont laisser fermer.

Quant au choix de l'usine, il faut se rappeler qu'on a engagé une firme de l'extérieur qui a analysé les plans d'affaires et qui nous a fait une recommandation que nous avons adoptée. Cette recommandation-là recommandait l'usine détenue par les Américains. Ces gens-là ont opéré l'usine.

Ce que le député de l'opposition soulève, c'est-à-dire la leçon, la leçon est la suivante: c'est la difficulté actuellement que nous avons par rapport à l'approvisionnement à l'extérieur versus les prix du marché. Il y a l'usine de Newport qui a vécu ce problème-là puis il y a d'autres usines actuellement qui le vivent. Donc, il va falloir trouver d'autres façons pour pouvoir permettre à ces usines-là de passer à travers la crise du poisson de fond. C'est aussi simple que ça.

Le Président: M. le député.

M. Farrah: M. le Président, ma question est au premier ministre: Compte tenu que c'est le bureau du premier ministre qui a décidé et qui a choisi la compagnie, dans une lettre confidentielle...

Le Président: Vous êtes en complémentaire. «Compte tenu», ce n'est pas une question complémentaire.

M. Farrah: En principale, M. le Président. Compte tenu... En principale.

Des voix: Ah!

Le Président: Merci.


Choix d'une firme américaine pour relancer l'usine de transformation de poisson de Newport

M. Farrah: Est-ce que le premier ministre se souvient, suite à une lettre qui a été envoyée à son chef de cabinet par le promoteur qu'il a lui-même choisi, M. Schaun, «vice-chairman» de Newport Sea Products, que le dossier a complètement changé et que le ministre n'a rien eu à faire là-dedans, parce qu'on sait que c'est une marionnette du «bunker», le ministre? O.K., M. le Président?

Le Président: Je pense que, compte tenu de votre expérience parlementaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine, et de votre esprit de gentilhommerie qui est très bien connu des membres de cette Assemblée, je vous demande de retirer les propos qui contreviennent à l'article 35.7°. On ne peut pas se servir d'un langage violent et injurieux ou blessant à l'adresse de qui que ce soit.

M. Farrah: Je retire le mot «bunker», M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Je pense que, si on veut éviter que l'Assemblée devienne... M. le député, je demande votre collaboration si on veut éviter de tomber dans le ridicule. Je vous demande de retirer les propos qui sont inacceptables.

M. Farrah: O.K., M. le Président. Est-ce que le premier ministre... Je les retire, monsieur, en passant, je m'excuse. Compte tenu que la demande, le dossier a changé de direction à partir du moment où le chef de cabinet du premier ministre est intervenu dans le dossier... C'est dans une lettre confidentielle que j'ai ici devant moi, qui lui a été destinée.

(14 h 40)

Alors, qu'est-ce que le premier ministre tire comme leçon de cette aventure à l'effet que la situation ne fonctionne pas? Parce que l'usine n'est pas ouverte, il n'y a pas eu d'emplois de créés à cette usine-là, et les gens sont dans le désespoir. Compte tenu que c'est lui qui a pris la décision, quelle leçon tire-t-il de cette expérience où il s'est lui-même immiscé, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: Alors, M. le Président, je vais rappeler encore une autre fois que le choix de cette usine-là, de ces propriétaires-là – parce que ce n'était pas une vente, c'était une location – a été fait après une étude par un bureau externe du gouvernement qui a analysé les plans d'affaires et qui nous a fait des recommandations. Et la recommandation nous donnait les Américains comme des gens potentiellement capables de gérer cette usine-là, et c'est ce qu'on a fait, c'est qu'on a traité avec eux, selon la recommandation de la firme externe du gouvernement. C'est là que la décision a été prise.

Le Président: M. le député.

M. Farrah: Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer quelles sont les sommes qui ont été investies par son gouvernement dans ce dossier avec cette firme-là, quelles sont les sommes que le gouvernement a investies là-dedans compte tenu que le gouvernement savait déjà, par des conseils qu'il a eus de la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires, qu'il ne fallait pas choisir cette firme-là? Et vous l'avez choisie quand même. Quelles sont les sommes que vous avez investies avec votre partenaire dans ce dossier-là sachant qu'il ne fonctionnerait pas au bout de la ligne?

Le Président: M. le ministre.

M. Julien: M. le Président, la recommandation par la firme d'experts de cette usine-là, c'est parce que, selon le plan d'affaires qui était déposé, elle a donné toutes les garanties de réaliser le bon fonctionnement de cette usine-là. Et ce que je veux expliquer et ce que j'ai expliqué tout à l'heure, c'est que le problème qu'on a vécu et qu'on vit dans d'autres usines, c'est un problème d'approvisionnement extérieur par rapport aux coûts du marché.

Alors, comme ça coûte plus cher, l'approvisionnement extérieur, versus les prix du marché, évidemment ce n'est pas rentable. Alors, ce n'est pas le plan d'affaires qui n'est pas bon, ce n'est pas les gens. Et je pourrais citer d'autres cas: des gens que ça fait cinq ans qu'ils sont dans le poisson de fond, que d'autres collègues connaissent, qui ont le même problème actuellement. Alors, il ne faut pas dire que ces gens-là n'étaient pas capables de gérer; je pense qu'ils avaient un bon plan d'affaires, ils pouvaient faire la job. Le problème, c'était un problème de marché, autant au niveau de l'approvisionnement que du marché de vente. C'est ça, le problème.

Des voix: Bon!

Le Président: M. le député.

M. Farrah: Est-ce que le ministre est conscient... Si c'était un problème de marché, pour quelle raison êtes-vous embarqués dans ce dossier-là? Et, deuxièmement, répondez à la question: Combien avez-vous investi là-dedans sachant que ça ne fonctionnerait pas? C'est les fonds publics.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Julien: Aïe! Il faut le faire! Pour le député des Îles, il faut vraiment le faire, ce qu'il vient de dire là. Moi, je pense qu'on doit donner toutes les chances aux gens dans les usines pour pouvoir faire la relance des pêches. Autant je le fais chez Madelimer ou chez Madelipêche, aux Îles-de-la-Madeleine, je fais la même chose, je l'ai faite dans Norpro. On le fait partout où on peut le faire; on vient de le faire avec les Fruits de mer de l'Est. C'est normal qu'on aide des gens qui veulent se prendre en main ou des gens qui ont un plan d'affaires pour relancer une usine. Si, dans Newport, il y a d'autres gens, d'autres personnes qui seraient intéressées à investir, qui ont un plan d'affaires, on va le regarder et on va tout faire en sorte pour que cette usine-là puisse être relancée. Il y a d'autres scénarios potentiels? On va les regarder, puis on va le faire.

Le Président: M. le député.

M. Farrah: Le premier ministre: Après 14 promesses, quand l'usine va-t-elle ouvrir, pour le bien-être de la population de Newport?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, c'est évidemment un problème regrettable qui pénalise une population qui a bien besoin d'emplois et qui sait d'ailleurs très bien que l'usine a été fermée avant l'arrivée du gouvernement actuel. Ce que nous avons fait, nous, c'est d'hériter d'un problème qui existait, qui nous a été laissé par le gouvernement qui nous a précédés, un gouvernement qui avait fermé l'usine. Mais nous avons décidé de faire des efforts, de multiplier les efforts pour relancer les activités de l'usine.

Le ministre vient de nous dire que nous avons eu, parce qu'il y avait... C'est vrai qu'il y avait deux projets, que c'était très débattu, très controversé; il y avait des arguments pour, des arguments contre. Qu'est-ce que l'on fait dans ce temps-là? On a référé le dossier à des experts externes qui ont adressé une recommandation au gouvernement. Le gouvernement a donné suite à la recommandation, et l'usine a fonctionné un bout de temps. Mais il est apparu que des problèmes structurels de marché, des problèmes d'approvisionnement en particulier, au coût où on pouvait se les procurer, ne pouvaient pas permettre à l'usine de fonctionner de façon rentable, compte tenu des prix d'écoulement sur le marché.

Alors, il y a là bien sûr un problème qui n'est pas facile à surmonter. Nous ne renonçons pas, M. le Président. Le ministre travaille d'arrache-pied pour trouver d'autres promoteurs pour pouvoir rouvrir cette usine qui a été fermée du temps des libéraux et que nous avons nous-mêmes rouverte.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Prévost.


Liste d'attente pour le Programme d'adaptation de domicile pour les personnes handicapées

Mme Papineau: Merci, M. le Président. La population peut remarquer que le gouvernement a injecté un montant additionnel de 6 500 000 $ au budget du Programme d'adaptation de domicile. Par contre, un certain nombre de personnes handicapées peuvent attendre près de 24 mois avant que leur dossier ne soit traité par la Société d'habitation du Québec.

Ma question au ministre responsable: Quels moyens le ministre responsable entend-il prendre afin de réduire ces délais et d'améliorer la situation?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: M. le Président, effectivement, l'an passé, nous avons injecté une somme supplémentaire de 6 500 000 $ pour porter à 10 700 000 $ les crédits pour l'adaptation de domicile pour les personnes handicapées. C'est encore insuffisant. Vendredi dernier, j'ai rencontré 10 organismes chargés d'accompagner et d'aider des personnes handicapées au Québec, en particulier l'Alliance québécoise des regroupements régionaux de l'intégration des personnes handicapées, avec M. Lévesque, Pierre-Yves Lévesque, la Fédération des CLSC, l'OPHQ, l'Ordre des ergothérapeutes du Québec. Également, nous étions en présence de la nouvelle présidente du conseil d'administration de la Société d'habitation du Québec, Mme Bissonnette, Mme Rita Bissonnette, et de tous les membres du conseil d'administration. Et nous avons convenu que la Société d'habitation du Québec pourrait engager pour 1998-1999 une somme totale de 20 000 000 $ pour éliminer complètement la liste d'attente des 2 620 personnes qui sont en attente d'adaptation de domicile au Québec, d'ici le 1er avril 1999.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, en principale.


Gestion des logements sociaux

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Alors, malgré le silence inhabituel du ministre des Affaires municipales, donc, pour les citoyens, très inquiétant, le gouvernement s'apprête à transférer la gestion du logement social aux municipalités, tel que recommandé par les députés péquistes signataires du rapport Facal et également par le Comité sur la décentralisation des logements HLM publics au Québec. Ce transfert préoccupe grandement des milliers de Québécoises et de Québécois qui vivent dans les 65 000 HLM au Québec et inquiète également les associations de la défense des droits des locataires à loyer modique, puisque ce transfert aux municipalités est un désengagement de l'État face au logement social et, du même coup, menace la survie même des HLM au Québec.

Est-ce que le ministre des Affaires municipales, qui semble vouloir se délester de ses responsabilités envers les plus démunis de notre société, a l'intention, oui ou non, d'appliquer la recommandation des députés péquistes et de transférer la gestion des HLM aux municipalités?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: M. le Président, je ne pensais pas d'avoir deux questions plantées, aujourd'hui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Effectivement, j'ai rencontré hier les représentants des groupes communautaires en matière de logement social au Québec ainsi que les représentants des Unions municipales pour mettre fin aux travaux qui avaient été entrepris pour examiner toute possibilité de décentralisation des logements sociaux au Québec. Le Comité a mis fin à ses travaux, et j'ai réitéré devant ce Comité notre engagement de maintenir nos responsabilités en matière de logement social, nos responsabilités envers ceux et celles qui habitent ces logements, et de maintenir les normes et, par ailleurs, d'inviter les membres de ce Comité qui n'existe plus maintenant à joindre le front des Québécois et des Québécoises qui réclame les 29 % de l'enveloppe fédérale qui est consacrée au logement social et qui nous revient.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.

Mme Loiselle: M. le Président, puisque nous sommes pas mal échaudés par le double langage de ce gouvernement, est-ce que, même si le Comité n'existe plus, on peut avoir la garantie par le premier ministre du Québec que le gouvernement ne fonctionnera pas de façon seule et ne transférera pas aux municipalités la gestion des HLM, au Québec?

(14 h 50)

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, il ne saurait être question de poser un geste de cette nature sans normes nationales et sans qu'au minimum les 450 000 000 $ qui nous sont dus par le gouvernement fédéral nous soient retournés. Et est-ce que la députée de l'opposition va se joindre à nous pour que le Québec ait son argent à lui pour s'occuper dignement du logement social au Québec? Répondez à cette question.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Bourassa, en principale.


Inscription de l'Aricept sur la liste des médicaments remboursables par la RAMQ

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, au Québec, plus de 40 000 personnes, des hommes et des femmes, souffrent de la maladie d'Alzheimer. En février dernier, un comité d'experts recommandait encore une fois que l'Aricept, seul médicament disponible et reconnu pour soulager efficacement les symptômes de cette terrible maladie, soit porté à la liste des médicaments remboursables par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Malgré les recommandations des médecins spécialistes, le 1er avril dernier, le ministre refusait encore une fois de rendre ce médicament disponible.

M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé peut expliquer aux personnes qui souffrent de cette terrible maladie, aux parents et aux proches qui en prennent soin au quotidien et qui souffrent au quotidien avec elles pourquoi il s'obstine à leur en refuser l'accès afin de soulager leurs souffrances et de soulager du même coup les souffrances de ceux et celles qui en prennent soin?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Oui. M. le Président, on a déjà eu des questions et des discussions au sujet de l'acceptation de médicaments sur la liste de médicaments qui sont offerts par le régime d'assurance du Québec. C'est une procédure qui est très bien établie, où il y a un conseil consultatif de pharmacologie. C'est un conseil de scientifiques qui fait l'étude des médicaments, de la preuve qui a été faite de leur efficacité et qui fait des recommandations au ministre.

Dans le cas du médicament qu'est l'Aricept, c'est un médicament qui a été soumis, qui a été étudié lors de la confection de la dernière liste, qu'on révise trois fois par année, donc au mois d'avril 1998, et il n'y a pas de recommandation à l'effet de rajouter ce médicament sur la liste parce que les études, jusqu'ici, n'ont pas démontré que le médicament avait une efficacité qui justifiait qu'il soit inscrit sur la liste. D'ailleurs, à ma connaissance, ce médicament n'est pas sur la liste, n'est pas couvert dans la plupart des autres provinces canadiennes. Vérification spécifique a été faite en Ontario et en Alberta, et ce médicament n'est pas encore à ce stade. Les études cliniques, jusqu'ici, démontrent qu'il y a une certaine efficacité du médicament pour la maladie qui est à un stade assez modéré, que la symptomatologie reste variable et qu'il n'y a pas d'effets à moyen et long terme qui sont démontrés. Alors, c'est dans le processus de tout médicament.

Tant que la valeur du médicament par rapport à ceux qu'on a déjà sur la liste et qui sont offerts aux gens qui souffrent d'une maladie en particulier n'a pas atteint un niveau où les scientifiques le recommandent, les médicaments ont un processus à suivre. Il y a d'autres études qui sont en marche présentement, et, si le médicament est effectivement un médicament efficace, qui doit être offert aux citoyens, quand cette démonstration-là sera faite, il sera sur la liste, comme ç'a été le cas de beaucoup d'autres médicaments et comme on en inscrit des nouveaux régulièrement sur cette liste, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, est-ce que le ministre est conscient de son rôle, est-ce qu'il est conscient de ses responsabilités et est-ce qu'il est conscient de son devoir d'agir? C'est le seul médicament...

Des voix: ...

Le Président: Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: C'est le seul médicament qui est disponible, c'est le seul médicament qui est reconnu comme étant efficace pour soulager les symptômes de la maladie d'Alzheimer.

Entend-il, oui ou non, le rendre accessible à toute personne qui souffre de cette terrible maladie qu'est la maladie d'Alzheimer?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, je peux vous assurer que le ministre est très conscient de son rôle et de ses responsabilités. C'est d'ailleurs pour ça qu'il s'entoure des meilleurs experts que nous avons au Québec pour prendre des décisions éclairées.

Le Président: Alors, cela met fin à la période de questions et de réponses orales pour aujourd'hui.

Nous abordons maintenant l'étape des motions sans préavis.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, s'il n'y a pas de motions sans préavis à être présentées, aux avis touchant les travaux des commissions, maintenant, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des transports et de l'environnement poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 416, Loi modifiant la Loi sur les transports et la Loi sur le transport par taxi, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 17 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des finances publiques, conformément à l'article 272 du règlement de l'Assemblée nationale, poursuivra le débat sur le discours du budget aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures ainsi que demain, le jeudi 9 avril 1998, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Pour ma part, je vous avise que la commission des affaires sociales va se réunir demain, le jeudi 9 avril, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'entendre les régies régionales de la santé et des services sociaux du Nord-du-Québec, de l'Abitibi-Témiscamingue et de Chaudière-Appalaches dans le cadre de l'étude de leurs rapports annuels 1993-1994 à 1996-1997, tout cela conformément à l'article 392 de la Loi sur les services de santé et des services sociaux.

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

S'il n'y a pas d'interventions, nous allons aller immédiatement aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Veuillez prendre en considération l'article 21.


Projet de loi n° 401


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et de l'amendement du ministre

Le Président: Alors, à l'article 21, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi n° 401, Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur concernant le commerce itinérant ainsi que l'amendement transmis en vertu de l'article 252 du règlement par le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Alors, cet amendement est déclaré recevable. Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport ainsi que sur l'amendement? Alors, M. le ministre.


M. André Boisclair

M. Boisclair: Je voudrais, très rapidement, M. le Président, rappeler à nouveau aux membres de cette Assemblée que nous avons convenu en commission parlementaire de proposer à cette Assemblée l'adoption du projet de loi. C'est un projet de loi qui a véritablement, je dirais, fait consensus chez les parlementaires, puisque, en effet, tous ceux et celles qui, attentivement, ont regardé les dispositions du projet de loi ont compris que l'énoncé que je présentais ici, devant cette Assemblée, lorsque je m'exprimais à la faveur de la défense des consommateurs, lorsque je rappelais que ce projet de loi venait concrètement augmenter la protection des consommateurs et aussi, du même souffle, répondre à un autre objectif que nous partageons tous qui est celui d'une meilleure circulation des biens et services à travers l'ensemble des provinces canadiennes, cet objectif que nous avons d'harmoniser nos règles et pratiques, donc la démonstration a été faite en commission parlementaire que les dispositions du projet de loi répondaient aux deux objectifs que j'ai présentés aux parlementaires au moment de l'adoption du principe du projet de loi.

Je voudrais dire aussi que cette commission parlementaire a été l'occasion d'apporter quelques bonifications au projet de loi. J'ai moi-même suggéré un amendement. Le député m'a fait part d'une recommandation à laquelle nous avons agréé. Lorsque l'opposition nous fait des remarques et des commentaires pertinents, il nous fait toujours plaisir, M. le Président, de ce côté-ci de l'Assemblée, d'en tenir compte. Nous souhaiterions que ça soit la même chose lorsqu'on se permet, sur le plan des politiques, de faire un certain nombre de recommandations à nos collègues, qu'ils puissent aussi en tenir compte. Je vais référence à la suggestion des plus pertinentes que mon collègue des Affaires municipales vient de faire à la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. J'espère qu'elle en tiendra compte dans le choix des positions du Parti libéral du Québec, particulièrement en matière d'habitation.

Mais, si je reviens, donc, à mon propos, je voudrais remercier le député ainsi que les gens qui l'ont accompagné au moment de cette étude. Nous avons eu de bonnes discussions et, rapidement, nous avons su aller à l'essentiel et nous entendre sur le fait que ce projet de loi répond correctement, répond avec ambition à deux objectifs: d'abord, être capable de renforcer les dispositions qui assurent une protection adéquate aux consommateurs et, du même souffle, répondre à une préoccupation que nous partageons tous ici, dans cette Assemblée, à savoir celle de mieux harmoniser nos pratiques législatives et réglementaires entre les provinces canadiennes.

Alors, c'est avec une certaine fierté, M. le Président, que je soumets à nouveau un projet de loi à l'Assemblée nationale qui, je le souhaite, sera adopté à l'unanimité. Je vous remercie, M. le Président.

(15 heures)

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de D'Arcy-McGee.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui dans le cadre de la prise en considération du projet de loi n° 401, Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur concernant le commerce itinérant.

M. le Président, ce projet de loi a pour but d'harmoniser les dispositions de la Loi sur la protection du consommateur avec les propositions du Comité des mesures et normes en matière de consommation, comité créé suite à l'Accord sur le commerce intérieur.

À la demande de l'opposition, le gouvernement du Parti québécois a apporté un amendement à ce projet de loi, comme a dit le ministre, qui sera avant tout avantageux pour le consommateur. En effet, nous avons vu qu'en suivant les propositions du Comité des mesures et normes de consommation le gouvernement péquiste n'avait pas indiqué, à la troisième phrase du deuxième paragraphe de l'annexe 1, le délai pour exercer une demande de résolution. Nous avons fait remarquer qu'en faisant cette omission le consommateur était ainsi induit en erreur et mal informé de ses droits.

La phrase en question peut donc maintenant se lire, et je cite: «Le délai d'exercice du droit de résolution peut aussi être porté à 1 an pour d'autres raisons, notamment pour absence de permis, pour absence ou pour déficience de cautionnement, pour absence de livraison ou pour non conformité du contrat.»

Toutefois, M. le Président, je regrette que plusieurs autres clarifications recommandées par l'opposition officielle n'aient pas été retenues par le gouvernement du Parti québécois. Permettez-moi de vous les résumer rapidement.

Premièrement, l'article 1 du projet de loi n° 401 modifie l'article 56 de la Loi sur la protection du consommateur en le remplaçant de la façon suivante, et je le cite:

«56. Les articles 58 à 65 s'appliquent au contrat de vente ou de louage de biens ou de services ainsi qu'au contrat mixte de vente et de louage conclus par un commerçant itinérant, à l'exception, toutefois, des contrats prévus par règlement.» Fin de citation.

Nous avions demandé que les mots «quel qu'en soit le montant» soient ajoutés pour protéger le consommateur, puisque, en remplaçant l'ancien article 56 par ce que je viens de vous citer, le gouvernement supprime l'exemption des contrats de moins de 25 $. Il est donc théoriquement possible pour le gouvernement, avec ce nouvel article 56, d'augmenter le montant de cette exemption par règlement ou le nombre de contrats tombant sous l'exemption, ce qui réduira ainsi l'efficacité de ce projet de loi. Nous devrons donc être très vigilants et surveiller de près tous les règlements qui pourraient être faits en vertu de cet article pour que la protection du consommateur n'en soit pas diminuée.

Également, je désire faire remarquer à cette Assemblée que le Comité des mesures et normes en matière de consommation, à l'article 5, sous-paragraphe 3 de la section Propositions pour harmonisation dans le domaine de la vente directe de son rapport, mentionne, et je vous cite: «La valeur du produit pris en échange dont il est question au paragraphe 1 doit être égale à: a) la valeur marchande des biens au moment où ils sont pris en échange; b) au prix ou à la valeur des biens aux termes de la définition du contrat selon le plus élevé des deux.» Fin de citation.

We must bring to the attention of this Assembly that the Government failed to accept our request to define more precisely the word «value» found in paragraph 2 of article 6 of this bill which is in fact an amendment to article 63 of the Consumer Protection Act.

M. le Président, le gouvernement du Parti québécois aurait dû démontrer plus de prudence quand il a suivi les recommandations contenues dans les propositions pour harmonisation que nous avons portées à l'attention du gouvernement. Mais, au moins, M. le Président, l'opposition officielle est d'accord avec le principe d'harmonisation et votera donc en faveur d'une loi qui démontre que l'union canadienne peut évoluer pour le bénéfice de nos citoyens. Une loi qui est un exemple probant de la façon dont le fédéralisme canadien peut fonctionner. Merci, M. le Président.


Mise aux voix de l'amendement du ministre

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee. Nous allons mettre aux voix l'amendement. L'amendement proposé par M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Le rapport de la commission de l'éducation portant sur le projet de loi n° 401, Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur concernant le commerce itinérant, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, nous allons débuter, si vous le permettez, un débat sur le rapport de la commission de l'économie et du travail, en prenant en considération l'article 2 de notre feuilleton.


Débats sur les rapports de commissions


Prise en considération du rapport de la commission qui a tenu des consultations particulières dans le cadre du mandat de surveillance d'Hydro-Québec

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 2 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a tenu des consultations particulières tant sur le rapport intitulé Examen des orientations de la société Hydro-Québec que sur le plan stratégique 1998-2000 d'Hydro-Québec dans le cadre du suivi du mandat de surveillance de cette société. Ce rapport contient des recommandations.

Je vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, cette prise en considération donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable. Suite à une réunion avec les leaders, je vous rappelle et je vous informe de la répartition du temps établi pour la durée de ce débat. Cinq minutes sont allouées à chacun des députés indépendants. Les deux groupes parlementaires se partageront également le reste de la période consacrée à ce débat. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par l'un des groupes ou par les députés indépendants pourra être redistribué. Les interventions ne seront soumises à aucune limite.

Alors, je suis maintenant prêt à céder la parole au premier intervenant, et je vais céder la parole à M. le président de la commission, M. le député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait effectivement plaisir de prendre la parole ici, en cette Chambre, suite au dépôt du rapport de la commission de l'économie et du travail qui a bouclé la boucle, en quelque sorte, en terminant, après un an, un travail qui avait été entrepris l'année passée.

L'année passée, on se rappelle que la commission avait décidé, dans le cadre d'un mandat d'initiative, de convoquer Hydro-Québec avant qu'Hydro-Québec présente ses orientations au gouvernement, pour justement pouvoir échanger sur ces orientations futures que la société d'État qu'est Hydro-Québec était pour déposer à l'Assemblée nationale... et par la suite venir devant la commission parlementaire plus tard durant l'année.

Nous avions estimé à ce moment-là que ce serait important, dans le cadre de l'exercice de notre rôle de représentants de la population, qui sont les actionnaires d'Hydro-Québec, d'avoir cet échange avec Hydro-Québec sur les perspectives d'avenir, parce qu'il y avait surtout dans l'air un environnement nouveau qui parlait beaucoup de déréglementation au niveau du marché de l'électricité, et ça donnait des perspectives différentes de celles qu'on était jusqu'à maintenant habitué à avoir avec Hydro-Québec.

Dans ces échanges, l'année passée, qui ont eu lieu au mois de mars 1997, nous avions vu avec Hydro-Québec un certain nombre d'éléments et nous avions déposé au mois de juin un rapport ici, en cette Chambre, qui avait également contenu des recommandations. Encore une fois, je souligne que ce sont là des recommandations unanimes des deux côtés de la Chambre. Tant des députés du Parti québécois que les députés du Parti libéral, on avait estimé qu'il y avait un certain nombre de choses sur lesquelles il y avait unanimité, qu'on trouvait assez importantes pour qu'on le souligne par l'adoption des recommandations à l'unanimité et qu'on les amène ici, en cette Assemblée, dans le cadre du premier rapport qu'on avait déposé au mois de juin.

Ce rapport, au mois de juin, visait à infléchir, à influencer les orientations qu'Hydro-Québec était pour déposer dans son plan stratégique quelques mois plus tard. Étant donné, on s'est dit, que ces orientations n'étaient pas encore formulées et qu'il y a eu échanges avec les représentants du peuple, Hydro-Québec, ça aurait été normal qu'elle tienne compte de ces échanges et des recommandations dans le dépôt du plan stratégique.

(15 h 10)

Or, nous avions constaté, avec le dépôt du plan stratégique, que la plupart des recommandations que nous avions faites au mois de juin avaient été écartées. Entre autres, on a constaté que le plan stratégique qu'Hydro-Québec proposait au gouvernement pointait une orientation tout à fait nouvelle, M. le Président, et une orientation qui représente un virage majeur par rapport à ce qui se faisait jusqu'à maintenant. Ce virage consiste à vouloir entreprendre des constructions d'ouvrages, soit des barrages, soit des déviations de rivières, de toute façon des ouvrages de production d'électricité pour des fins d'exportation, c'est-à-dire non pas pour fournir les besoins des Québécois au niveau de leur résidence, pas fournir au niveau des besoins du Québec, au niveau de son développement économique, mais potentiellement aller vendre le produit de ces ouvrages sur le marché aux États-Unis, mais sans avoir au préalable aucune indication qu'il y avait une offre ferme d'acheter ce qu'on voudrait bien exporter.

Alors, la commission, à ce moment-là, s'était dit que, étant donné que les investissements dont on parle représentent des milliards de dollars, étant donné que cette orientation s'apparente beaucoup à ce qu'une entreprise à capital de risque fait avec de l'argent privé, c'est-à-dire de dire aux investisseurs potentiels: Écoutez, voici un projet que je veux mettre de l'avant, voici les perspectives de mon marché, voici l'estimation que je fais de mes risques et de mes potentiels de gains, je vous demande d'investir votre argent, de sortir de vos poches votre argent, d'acheter mes actions à la Bourse, par exemple, pour qu'on puisse faire des affaires et prendre ensemble un risque qui peut rapporter, comme ça peut aussi ne pas rapporter... C'est ce qui se fait normalement dans le marché libre du capital, M. le Président. C'est ce que les capitalistes font. Alors, Hydro-Québec disait finalement: On va jouer aux capitalistes. On va voir s'il y a un marché. On va construire ici, au Québec, des ouvrages, des barrages, on va faire dévier des rivières, on va, en tout cas, entreprendre des ouvrages qui vont nous donner de l'électricité dont on n'a pas besoin pour nos propres besoins à nous mais qu'on va essayer d'aller vendre sur le marché. Et on va faire ça, évidemment, avec l'argent de qui? Bien, l'argent de la population, parce qu'Hydro-Québec appartient à la population.

Le gouvernement a dit à Hydro-Québec: Allez-y, on veut que vous nous rapportiez de l'argent. Objectif louable, on ne peut pas s'objecter. Personne veut ne pas faire de l'argent, surtout quand il s'agit des deniers publics, M. le Président. Mais, durant les premières auditions que nous avions eues avec Hydro-Québec, nous avions demandé un certain nombre d'explications quant au réel potentiel qui existe pour faire cet argent-là. Nous sommes restés, à ce moment-là, sur notre faim parce que nous avions été sans avoir les réponses auxquelles on s'attendait, et c'est pour ça qu'on recommandait, au mois de juin, qu'Hydro-Québec nous fournisse les informations, les études du marché qui correspondaient à cette orientation nouvelle qui comporte des risques certains. On parle ici de plusieurs milliards. Pas de millions, mais de milliards de dollars pour les investissements afin d'exporter et de jouer aux capitalistes avec l'argent de la société.

Nous avions vu le plan stratégique sans les réponses qu'on attendait et nous avions décidé à ce moment-là, M. le Président, d'entreprendre une deuxième phase de notre travail, et c'était de convoquer le public, ceux qui étaient intéressés par ces questions, à venir commenter soit le rapport qu'on avait déposé au mois de juin, soit le plan stratégique qu'Hydro-Québec avait déposé au mois d'octobre ou novembre, je pense, et la réponse a été grande. Au-delà d'une trentaine de groupes ont manifesté de l'intérêt et sont venus dire de façon presque unanime, allant des groupes environnementaux à des groupes de manufacturiers, d'associations, d'entreprises, de consommateurs d'électricité, que, effectivement, il y a des risques importants, que les chiffres qui étaient véhiculés par Hydro-Québec dans le plan stratégique ne donnaient pas véritablement les perspectives réelles qui existaient sur le marché américain, que ce n'était pas tout à fait certain que ce qu'on escomptait allait se réaliser et que ça comportait des risques, etc.

Et c'est pour cette raison que nous avions, avec ces 30 groupes, passé à travers un certain nombre de sujets qui touchaient le plan stratégique, ce qui nous a permis par la suite de faire un certain nombre de recommandations, 17 en leur nombre, M. le Président, encore une fois de façon unanime de part et d'autre, et nous avions... Et je reviendrai sur quelques-unes de ces recommandations tantôt, mais il y en a au moins une que je veux faire ressortir tout de suite, parce que je sais qu'il y a d'autres collègues qui veulent parler, et ils pourront peut-être se rapporter à d'autres recommandations.

Mais nous étions plutôt dans l'obligation de reprendre presque la recommandation principale qu'on faisait au mois de juin, qui était d'exiger des études de marché potentiel, et nous avons repris effectivement ça parce que, même après nos auditions, qui ont été suivies d'une autre série de trois jours où Hydro-Québec elle-même était devant la commission pour expliquer son plan stratégique... Parce qu'on se rappelle aussi que ce plan stratégique qui avait été déposé au mois de novembre et qui était supposé être examiné en commission parlementaire avant son adoption par le gouvernement a été adopté sans audition préalable par le gouvernement, qui a profité – il n'y a pas d'autres mots, M. le Président – de la tempête du verglas pour l'adopter en cachette. Et ce n'est qu'une fois que l'opposition, entre autres, a fait ressortir l'inacceptabilité de ce geste que le ministre responsable des Ressources naturelles a dû essayer de se couvrir un petit peu en disant que, de toute façon, même si c'était adopté, il allait voir à ce qu'on puisse apporter des modifications à ce plan stratégique.

Et là on l'a pris au mot, M. le Président. On l'a pris au mot, parce qu'on lui dit: Finalement, avec le dépôt de notre rapport, s'il est vrai que le plan stratégique peut être modifié, et donc retravaillé, et donc redéposé pour examen, voici une série de recommandations qui font l'objet d'un accord unanime entre les partis en cette Chambre, sur lesquelles vous devriez agir. Entre autres, on trouve insuffisantes les explications qu'Hydro-Québec nous a données par rapport à ses perspectives pour justifier ce virage.

Ici, je vais faire une petite digression, M. le Président, parce que je veux apporter un élément dans ce débat qui n'a pas fait l'objet de nos discussions en commission parlementaire mais que je trouve extrêmement important et révélateur quant au pourquoi de cette orientation et quant à la mentalité qui gouverne ce gouvernement. Le chat est sorti du sac, en quelque sorte, avec le budget que le ministre des Finances a déposé il y a à peine quelques jours ici, où il nous a annoncé que le gouvernement du Québec va créer une mégasociété générale de financement dans laquelle il va investir chaque année 400 000 000 $. Ou, en tout cas, ils vont investir 400 000 000 $ des dividendes de qui, pensez-vous? D'Hydro-Québec.

M. le Président, le virage qu'on demande, à Hydro-Québec, pourrait être acceptable si on nous démontrait qu'il y avait véritablement un potentiel de profits réels, avec des risques calculés, ça serait acceptable dans la mesure où on profiterait, comme société, de cet argent pour l'investir dans nos services publics, l'investir dans la santé, qui a été saccagée par des gestes inconsidérés de ce gouvernement obnubilé par la perspective de la réduction artificielle du déficit, sur l'autel duquel il a sacrifié la santé. On devrait prendre cet argent, si argent il va y avoir, pour le mettre dans le système scolaire, dans lequel on a des enfants qui sont sans manuels scolaires, dans lequel on met sur pied des garderies, etc., sans les financer adéquatement.

(15 h 20)

Peut-être, dans ce contexte-là, si on nous avait prouvé qu'il y avait un réel potentiel de profits, qu'on pourrait dire: Oui, ça serait une chose qu'on pourrait envisager, de faire d'Hydro-Québec une société plus commerciale qui prendrait certains risques qui pourraient nous rapporter afin d'améliorer le niveau de nos services publics.

Mais, au contraire, ce que le gouvernement veut faire, c'est de continuer à jouer au capitaliste, M. le Président, avec non seulement Hydro-Québec qui va prendre ces risques sur le marché d'exportation, mais, une fois, et si profits il y a, prendre ces argents non pas pour améliorer nos services publics, mais pour aller jouer au capitaliste de nouveau, mettre ça dans la Société générale de financement pour essayer de partir d'autres entreprises, où, normalement, l'entreprise privée ferait ce travail. Parce que, si profits il y a à faire dans une entreprise commerciale, il est pas mal certain qu'on peut se fier à ceux qui font ces choses-là pour aller faire de l'argent, de sortir leur propre argent de leurs propres poches pour aller faire de l'argent, plutôt que de prendre notre argent pour qu'ils fassent de l'argent et avec l'espoir que, éventuellement, nous aussi, on pourrait en faire, pendant que nos services publics se dégradent. Alors, c'est un peu comme si le gouvernement décidait de, je ne sais pas, moi, emprunter à la marge pour jouer aux actions à la Bourse. Ils vont prendre des risques avec Hydro-Québec pour faire de l'argent, pour essayer de prendre d'autres risques par la suite.

Il y a quelque chose, M. le Président, qui ne va pas bien, et c'est la démonstration que la mentalité qui anime le ministre des Finances et ce gouvernement, c'est une mentalité arriérée. On est à peu près 35 ans trop tard. Ça se faisait, ça, il y a 35 ans, dans les années soixante, où effectivement on sortait, au Québec, d'une situation où il n'y avait pas de capital de risque, où il fallait essayer d'injecter des sommes pour partir des affaires, pour faire en sorte que les Québécois francophones, en particulier, puissent accéder à des postes de commande, etc. On connaît tous l'histoire de la Révolution tranquille, mais nous sommes 35 ans plus tard. À moins qu'il n'y ait des gens qui sont endormis depuis les 35 dernières années et qu'ils veuillent nous faire revivre des choses qui sont dépassées et nous faire revivre ces choses-là, avec des risques qu'ils vont nous faire prendre pendant que nos services publics sont quasi inexistants, sont retournés à un niveau d'il y a 35 ans. Tout recule avec ce gouvernement.

Mais là je dis que je digressais, parce que le travail de la commission était un travail, quand même, non partisan, et j'admets volontiers que je digresse un petit peu, M. le Président. Pour revenir aux recommandations de la commission et au défi qu'on lance, finalement, au ministre des Ressources naturelles de voir à ce que le plan stratégique soit modifié afin de tenir compte de ces recommandations et du rôle réel que les parlementaires doivent jouer dans ce travail, il y a, au préalable de toutes les recommandations, une qui touche au coeur du rôle que nous avons comme parlementaires, parce que, l'année passée, on a aussi voté une loi qui a créé la Régie de l'énergie, et, trop souvent, j'ai entendu des gens dire: Bien, là, il y a la Régie qui va examiner Hydro-Québec, il y a la Régie qui va contrôler Hydro-Québec, donc les parlementaires et la commission de l'économie et du travail n'ont plus de rôle là-dedans.

Rien de plus faux, M. le Président, parce qu'il faut se rappeler que les régisseurs de la Régie ne sont pas des élus, ce sont des gens nommés par ce gouvernement – même pas par l'Assemblée nationale, nommés par le gouvernement – et, si les seuls qui vont pouvoir questionner fondamentalement Hydro-Québec sont les régisseurs, on va effectivement avoir un débat à propos, nécessaire au niveau de certains aspects plus techniques qu'on ne pourra pas faire ici et qu'on n'a jamais pu faire ici, au niveau, par exemple, des perspectives de tarifs, mais il demeure que nous avons le rôle, comme représentants de la population, d'examiner les orientations et les gestes posés par Hydro-Québec. Et la Régie devrait être vue par l'ensemble des parlementaires comme une opportunité de mieux aiguiller nos questions, M. le Président, de s'abreuver aussi à une expertise qui pourrait nous permettre d'être beaucoup plus pertinents par rapport aux questions et par rapport aux questionnements que nous avons vis-à-vis d'Hydro-Québec comme représentants du peuple, comme représentants des actionnaires, parce que le premier ministre et le Conseil des ministres, il faut se rappeler, c'est peut-être le conseil d'administration, en quelque sorte, mais les vrais actionnaires, c'est ici, à l'Assemblée nationale, que nous nous trouvons comme ceux qui représentent la population.

Et donc, la première recommandation que nous faisons, c'est que le gouvernement prenne les moyens nécessaires, que ça soit par des modifications législatives à la loi d'Hydro-Québec ou par d'autres moyens, pour que de façon statutaire, automatique, Hydro-Québec vienne devant la commission de l'économie et du travail chaque année pour répondre à des questionnements que les parlementaires peuvent avoir par rapport à ses orientations – le suivi, par exemple, sur le plan stratégique – ou d'autres gestes qu'Hydro-Québec aurait posés durant l'année. C'est fondamental. Rien de plus facile pour le gouvernement que de mettre ça en opération.

Il ne faut pas laisser ça à l'initiative des députés de la commission parlementaire, on sait combien d'autres sujets demandent et requièrent l'attention des membres de chacune des commissions et on sait également combien c'est important, Hydro-Québec. Cette importance devrait trouver écho dans un geste qui ferait en sorte que de façon statutaire, un peu comme le Vérificateur général doit venir statutairement devant la commission des institutions, Hydro-Québec vienne devant la commission de l'économie et du travail.

Les autres recommandations, je suis convaincu que d'autres collègues vont les reprendre une par une. J'ai déjà mentionné celles qui touchent à la nécessité qu'on puisse avoir des études plus approfondies du potentiel réel qui existe. J'aimerais mentionner également le fait que nous avons tous estimé que la notion d'efficacité énergétique qui, il y a à peine trois ans, faisait l'objet d'une directive précise de la part du premier ministre du temps qui mandatait son ministre des Ressources naturelles et de l'Énergie à faire de l'efficacité énergétique une source d'approvisionnement d'énergie, bien, maintenant, c'est complètement vidé de son sens.

Aucun geste n'est posé par Hydro-Québec pour s'assurer qu'on puisse faire de l'efficacité énergétique, qu'on puisse commencer à utiliser de façon plus efficace notre électricité et, ce faisant, épargner nos rivières de leurs diversions, ce faisant, épargner l'environnement de plus de dommages et, ce faisant, s'approvisionner en électricité qu'on pourrait peut-être vendre si on n'en avait pas besoin, nous autres. Si on en utilise moins, il nous restera à vendre, n'est-ce pas? Alors, on pourrait peut-être jumeler les deux, l'objectif d'exportation et l'objectif socialement et économiquement rentable, M. le Président, d'efficacité énergétique.

Alors, il y a d'autres recommandations sur l'interfinancement, par exemple, sur la recherche et développement. Je laisserai à d'autres collègues le soin d'aborder ces sujets. Il me fait tout simplement plaisir, en terminant, M. le Président, de souligner le travail exceptionnel que l'ensemble des membres ont fait. Le fait que nous ayons pu travailler de façon non partisane, même si des fois nous avons chacun nos obligations de parti, nous avons pu quand même arriver ensemble à 17 conclusions qui ont fait l'objet de recommandations unanimes. Nous ne pouvons qu'espérer qu'elles seront considérées sérieusement par le gouvernement et mises en pratique, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion et président de la commission. Je vais maintenant céder la parole à M. le vice-président de la commission, M. le député de Marguerite-D'Youville.


M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Les recommandations que vous ont déposées hier les membres de la commission de l'économie et du travail s'inscrivent dans un processus qu'il m'apparaît important de rappeler pour bien situer le contexte de ces recommandations.

Vous vous souviendrez qu'en février 1997, lorsque Hydro-Québec recevait son nouveau président, M. André Caillé, la commission avait jugé pertinent de le faire venir pour échanger avec lui sur les grandes orientations qu'il voulait donner à Hydro-Québec, et ce, en préparation du plan stratégique que la société d'État devait déposer au gouvernement à l'automne, ce qui effectivement fut fait le 31 octobre 1997. Par la suite, nous avons tenu, en février 1998, des auditions où une trentaine de groupes sont venus nous exposer leur point de vue, nous formuler leurs commentaires et leurs préoccupations quant aux orientations du plan stratégique. Tous les groupes qui avaient demandé à être entendus l'ont été.

(15 h 30)

Notre souci était d'assurer la transparence du processus et de faire en sorte qu'en dépit du fait que le gouvernement du Québec, dans des mesures tout à fait exceptionnelles, à la mi-janvier de cette année, se soit vu obligé d'adopter des décrets, dont l'adoption du plan stratégique dans un contexte qui visait à sécuriser la population du Québec contre la répétition des incidences d'une crise du verglas sans précédent, comme celle que nous avons vécue, il nous apparaissait pertinent, suite à ces auditions et aux échanges que nous avons eus par la suite avec le président d'Hydro-Québec, deux semaines après, à la fin de février, de formuler une série de recommandations qui, comme l'a souligné mon collègue le président de la commission, ont été entérinées à l'unanimité par les membres de notre commission.

Nous avons déposé 17 recommandations. Je ne veux pas m'attarder sur chacune de ces 17 recommandations, mais, à la lumière des lignes ouvertes, à la lumière des commentaires que j'ai entendus depuis deux jours sur ces recommandations, des questions également qui nous ont été posées, j'aimerais cibler quelques-unes de ces recommandations de façon plus particulière.

D'abord, au niveau du processus, tous les groupes presque sans exception – je pense, à l'exception d'un seul groupe – que ce soient les groupes écologistes, que ce soient les représentants du Conseil du patronat, sont venus nous dire qu'ils souhaitaient que la commission parlementaire de l'économie et du travail conserve une sorte de droit de regard sur les activités d'Hydro-Québec, d'autant plus que la nouvelle Loi sur la Régie de l'énergie soustrait aux parlementaires, dorénavant, le soin et l'obligation d'examiner annuellement les demandes d'augmentation de tarifs de la part d'Hydro-Québec.

Comme vous le savez, dorénavant ces demandes d'augmentation de tarifs seront examinées par la Régie de l'énergie sans aucun droit de regard de la part des parlementaires. Nous en avons tous décidé ainsi de manière à faire en sorte que les discussions techniques, à savoir si des augmentations de tarifs étaient justifiées ou non, puissent se faire entre pairs, c'est-à-dire entre personnes qui puissent contre-expertiser les avancées faites par Hydro-Québec, ce que les parlementaires étaient très peu habilités à faire, compte tenu des moyens réduits qui sont à notre disposition.

Ceci étant dit, j'aimerais souligner que, en ce qui concerne le processus, la commission recommande que le gouvernement du Québec reçoive annuellement la société d'État pour examiner l'évolution de l'implantation de ses orientations stratégiques. Je rappellerai également à cette Chambre que déjà un décret gouvernemental adopté le 30 juillet dernier prévoit qu'Hydro-Québec, à chaque deux ans, vienne devant la commission pour présenter et discuter de son plan stratégique même si l'horizon qu'il couvre est de cinq ans. Je vous rappelle également que ce décret a été adopté le 30 juillet, c'est-à-dire avant la crise du verglas, avant également les événements qui ont précipité des décisions majeures de la part du gouvernement, décisions qui s'expliquaient dans un contexte tout à fait sans précédent.

Compte tenu de ces changements majeurs qui se sont produits et compte tenu également du fait que le ministre des Ressources naturelles et même le premier ministre avaient annoncé que, par la force des choses, il devrait y avoir des ajustements au plan stratégique, nous avons jugé opportun et pertinent de recommander qu'Hydro-Québec puisse annuellement venir expliquer à la commission et échanger avec la commission, pas nécessairement sur une base de trois jours, mais qu'elle vienne, tout du moins, faire rapport sur l'évolution de l'implantation de ses orientations stratégiques.

Une autre recommandation qui semble avoir fait l'objet de plusieurs commentaires touche au type de documentation et d'information que la commission souhaiterait avoir en accompagnement, en particulier, des orientations d'Hydro-Québec concernant l'exportation d'électricité aux États-Unis et ailleurs. Le plan stratégique d'Hydro-Québec est fort mince en cette matière.

Et, comme nous avons eu l'occasion de le souligner – et d'ailleurs je tiens à dire également que c'était unanime à la commission, à notre commission – nous avons formulé la recommandation que des études approfondies sur les risques financiers que comporterait la construction d'équipement de production d'électricité destinée au marché d'exportation soient présentées à la commission avec différents scénarios, selon les variables de coûts, de demandes, de taux d'intérêt, de percées technologiques, que ces documents puissent nous permettre d'évaluer les risques ou les non-risques qu'encourrait le contribuable québécois dans l'éventualité d'exportation d'électricité selon divers scénarios.

Nous avons convenu, toutefois, qu'il n'était pas dans notre intention d'exiger qu'Hydro-Québec se déshabille sur la place publique, comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer. Nous sommes tous conscients... Et, d'ailleurs, nous avions l'honneur de compter parmi nos rangs deux anciens ministres des Ressources naturelles qui connaissent très bien l'importance de maintenir la confidentialité de certaines données fondamentales et surtout certaines données qui se rattachent à la compétitivité d'Hydro-Québec.

Je dois vous avouer que j'ai été moi-même assez frappé et même assez étonné, lorsque nous avons reçu M. Caillé en février 1997 et lorsque le président de la société d'État s'est exprimé en toute candeur et en toute franchise devant la commission, de constater que la salle d'audience était truffée d'observateurs et de compétiteurs d'Hydro-Québec. À ce moment-là, je me suis posé la question, je me suis dit: Oui, il faut que la population, que les actionnaires, que le gouvernement du Québec, que les partenaires soient informés des risques que nous encourrons selon différents scénarios d'exportation d'électricité, mais il ne faudrait quand même pas déshabiller sur la place publique notre société d'État au point où les données sous-jacentes et les données qui justifient ces exportations d'électricité soient étalées sur la place publique et soient à la merci et à la portée des compétiteurs d'Hydro-Québec.

De la même façon que des grandes sociétés, comme General Motors, Kodak, ou quelles qu'elles soient, déposent des études financières et déposent des scénarios aux différentes commissions des valeurs mobilières lorsqu'elles cherchent à émettre des titres sur les marchés financiers, nous avons pensé qu'il était possible et qu'il était souhaitable d'avoir ce même type de renseignement. À ma connaissance, il n'a jamais été question d'exiger des grandes entreprises manufacturières ou d'autres d'exposer leurs secrets industriels sur la place publique et ainsi de se livrer pieds et mains liés à la concurrence. Nous avons tous convenu, à la commission, que nous sortirions perdants de ce genre de comportement. Il m'apparaît important d'apporter ces précisions parce qu'il ne s'agit pas ici de brandir le manque de transparence d'Hydro-Québec à toutes les sauces sans savoir de quoi on parle exactement.

Une autre recommandation qui a fait l'objet de plusieurs commentaires consiste à recommander à Hydro-Québec de revoir ses propositions en matière d'efficacité énergétique. L'efficacité énergétique telle que présentée dans le rapport stratégique est encore une fois très mince et nous pensons, suite aux audiences que nous avons tenues et également aux rapports d'experts que nous avons consultés, qu'il y a là matière à un effort particulier, parce que le secteur de l'efficacité énergétique est une source d'emplois importante. Elle est également un domaine de recherche important.

Les recommandations que formule la commission à cet égard ne sont nullement incompatibles avec les orientations d'exportation d'électricité du Québec sur une base rentable dans le respect des communautés locales et dans le respect des processus d'évaluation environnementale, comme le stipule noir sur blanc le plan stratégique. Nous pensons que notre recommandation concernant l'efficacité énergétique est parfaitement compatible avec l'orientation d'exportation et d'ouverture sur les marchés extérieurs parce que, d'une part, en accentuant la conservation d'énergie et en modernisant nos mécanismes d'efficacité énergétique, nous épargnons autant d'énergie qu'autrement nous devrions produire à même des constructions additionnelles, ou des dérivations de rivières, ou des barrages pour répondre à la demande qui pourrait se produire dans les marchés extérieurs.

(15 h 40)

Ceci m'amène également à apporter les commentaires suivants sur le potentiel d'exportation d'électricité. Nous avons tous convenu que, si exportation d'électricité il devait y avoir, il fallait que ça se fasse en fonction des trois critères qu'Hydro-Québec elle-même nous présente dans son plan stratégique et que j'ai énumérés tout à l'heure, et qu'il m'apparaît important de répéter, c'est-à-dire la rentabilité, le respect des normes et des processus environnementaux et le consentement des autorités locales, ce qui comprend également les autorités autochtones.

Cette dimension porte à réflexion. Quand on regarde ce qui est en train de se passer en Ontario où, en raison de l'abandon ou de la négligence d'entretien du réseau de centrales nucléaires, l'Ontario, en désespoir de cause, est obligée maintenant d'avoir recours à des sources thermiques polluantes, lorsqu'on sait qu'aux États-Unis, au sud de la frontière, dans l'État de New York, en Nouvelle-Angleterre, l'énergie est produite à partir de sources thermiques, à partir de charbon, à partir de mazout, avec les effets de serre que cela comporte, avec les pluies acides également qui ont des retombées chez nous, puisque, entre autres, nos acériculteurs de la Beauce ont été affectés par ces pluies acides qui nous viennent des États-Unis, dans un contexte comme celui-là, on est en droit de se demander s'il n'est pas à notre avantage et à l'avantage également des Américains d'exporter une ressource propre, inépuisable, qui se compare très avantageusement avec les autres sources de production d'énergie dont nous disposons à l'heure actuelle et dont disposent nos voisins américains.

En quelque sorte, et toujours, comme l'a souligné la commission, sous réserve de la rentabilité de ces exportations et d'un risque minimisé pour le contribuable québécois, pour l'État du Québec et pour le consommateur d'électricité québécois, il me semble qu'il y a là un intérêt pour nous à vendre de l'énergie propre à nos voisins du Sud de façon à éviter, dans la mesure du possible, les retombées environnementales négatives qui nous viennent de la production énergétique à partir de sources polluantes.

Autre élément qui a fait l'objet de recommandations de la commission, c'est tout ce qui concerne la recherche et le développement. Une économie moderne, une économie actuelle et une économie compétitive est basée sur sa recherche fondamentale. Une société qui ne fait pas de recherche est vouée à devenir une société, une économie de sous-traitants. Or, le plan stratégique d'Hydro-Québec au chapitre de la recherche et du développement est non seulement assez mince, mais, aux yeux des membres de la commission, il nous est apparu fort contestable, dans la mesure où on semble privilégier la recherche appliquée au détriment de la recherche fondamentale. Et c'est une dimension qui me préoccupe particulièrement, puisque dans ma région se trouve la pépinière de recherche d'Hydro-Québec, l'IREQ, avec l'ensemble des ingénieurs qui gravitent autour de l'IREQ, des chercheurs et des projets qui mûrissent à l'intérieur de ses murs.

La recherche fondamentale est d'autant plus importante pour le Québec quand on sait qu'à peine un diplômé supérieur en sciences sur 19 au Québec trouve du travail chez nous. Quand on sait également que la recherche appliquée, commercialisable à court terme, j'en conviens, découle de la recherche fondamentale, une fois épuisée la commercialisation de cette recherche appliquée, que nous reste-t-il à vendre si nous n'avons pas établi un juste équilibre entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée?

C'est un peu comme le processus, et comme l'importance, et comme la priorité qu'on doit accorder à la reforestation dans l'industrie forestière. Si on se limite à couper des arbres, à un moment donné on n'aura plus d'arbres à vendre et l'industrie forestière va s'effondrer. C'est un peu la même chose dans le domaine de la recherche. Or, il nous apparaît préoccupant qu'Hydro-Québec semble, pour des fins de rentabilité à court terme, canaliser ses efforts essentiellement dans la recherche appliquée.

J'aimerais, ici, profiter de l'occasion pour illustrer comment la recherche fondamentale, même si, de prime abord, on n'y trouve pas de rentabilité commerciale immédiate, a quand même des retombées importantes. J'aimerais rappeler à cette Assemblée deux projets qui nous tiennent à coeur, entre autres, et que la commission a étudiés, le projet Tokamak, de Varennes, de fusion nucléaire et le projet de moteur-roue.

Le projet Tokamak de Varennes, qui était financé conjointement par Hydro-Québec et par le gouvernement fédéral au rythme de 7 500 000 $ chacun, pour un budget total annuel de 15 000 000 $, est sérieusement en péril du fait que le gouvernement fédéral annonçait l'an dernier que, d'ici l'an 2000, c'est-à-dire d'ici deux ans, il se retirait du projet, laissant Hydro-Québec sans partenaire.

Lorsque le président d'Hydro-Québec s'est présenté en commission parlementaire en février 1997, nous lui avons posé la question à savoir si Hydro-Québec allait chercher des partenaires pour remplacer le gouvernement fédéral dans ce projet. Le président d'Hydro-Québec s'était engagé à rechercher des partenaires. Nous avons pu constater un an après, lorsque nous l'avons encore reçue, qu'Hydro-Québec, en réalité, n'avait pas fait d'efforts sérieux pour rechercher des partenaires et que ce projet risquait de tomber à l'eau et de se terminer d'ici deux ans. J'attire votre attention sur cette situation précaire parce qu'il s'agit, ici, d'un projet de recherche fondamentale dont les retombées sont beaucoup plus immédiates qu'on pourrait le croire, et je vais vous en donner des illustrations.

Les résultats de la recherche au Tokamak de Varennes ont engendré des retombées commerciales majeures pour le Québec dans plusieurs industries et dans plusieurs secteurs. MPB Technologies, par exemple, a développé une expertise unique au monde en matière de laser, de fibre optique et de radiométrie. Apollo Microwaves a développé une expertise incomparable dans les composantes micro-ondes à grande puissance. Decatron est devenu un spécialiste dans le domaine de l'électronique grande puissance. Usifibre, en développant des produits dans le domaine des matériaux isolants, se démarque nettement comme une entreprise de haute technologie dans ce secteur. L'Institut national d'optique profite amplement des activités du Tokamak de Varennes pour développer des applications informatiques en matière de systèmes optomécaniques. L'Institut des matériaux industriels, quant à lui, profite également des activités du Tokamak de Varennes pour être à l'avant-garde en matière de matériaux ou de revêtements résistant aux chocs thermiques. Et, finalement, même Marine Industries a été un sous-traitant important du Tokamak de Varennes.

Je vous rappellerai également que l'autre projet de recherche fondamentale qui a attiré l'attention de notre commission, le projet du groupe traction moteur-roue, inventé par le physicien bouchervillois Pierre Couture, a été conçu à partir des travaux que son inventeur a faits sur le Tokamak de Varennes en matière de fusion nucléaire.

Alors, voilà, M. le Président, il me semble, des exemples probants que la recherche fondamentale, même si certains ne lui voient pas ou lui voient peu de retombées commerciales à court terme, est susceptible, malgré tout, d'avoir des retombées intéressantes pour l'économie québécoise. Et c'est dans cet esprit que la commission de l'économie et du travail recommande, en matière de recherche et développement, qu'Hydro-Québec modifie son plan stratégique pour établir un équilibre entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée.

Une autre dimension, M. le Président, mérite d'être soulignée quand on parle de recherche fondamentale. Jusqu'ici, et surtout depuis la Deuxième Guerre mondiale, ce sont des inventions, des recherches à but militaire qui ont été privilégiées dans le secteur de la recherche fondamentale industrielle. Nous pensons, nous, à la commission, qu'il est temps de mettre notre ressource inépuisable et propre qu'est l'hydroélectricité de même que nos cerveaux au service de l'amélioration de la qualité de vie mondiale, au service de la paix, au service de la recherche, au service de l'environnement, de manière à assurer une meilleure qualité de vie à l'ensemble de la planète et, du même coup – du même coup – assurer notre propre compétitivité et notre propre prospérité. Je ne vois absolument rien de mal ou d'incompatible dans ces objectifs, et c'est dans cet esprit que la commission de l'économie et du travail a déposé ses recommandations.

(15 h 50)

Je terminerai en soulignant que les recommandations que nous avons faites ne visent nullement à remettre en question, à abolir ou à annuler le plan stratégique. Les recommandations que nous avons formulées visent à bonifier le plan stratégique de manière à ce que les grandes orientations qui lui serviront de base pour les cinq prochaines années reflètent la préoccupation des citoyens, les préoccupations des parlementaires et surtout soient dans l'intérêt du Québec dans son entier. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marguerite-D'Youville. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Mont-Royal.


M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Au mois de février dernier, nous avons eu des auditions en commission parlementaire avec Hydro-Québec. Le plan de stratégie avait déjà été accepté, et, moi, je me suis aperçu, ainsi que mes collègues, qu'il y avait beaucoup de réponses qui n'étaient pas tout à fait complètes, que les orientations d'Hydro dans le plan de stratégie et dans la philosophie du gouvernement avaient changé. Alors, ce que nous avons fait, c'est que nous avons tenu une séance du travail de la commission parlementaire pour élaborer certaines recommandations parce qu'on était un peu inquiets. Dans mon cas, j'avais demandé certaines informations sur les coûts des travaux pour les exportations. Alors, nous voulions avoir plus d'information, nous étions inquiets un peu sur les nouvelles orientations d'Hydro-Québec.

Nous avons fait des recommandations qui sont unanimes. Unanimes, ça veut dire qu'il n'y a pas une question de partisanerie politique dans les recommandations que nous présentons, elles ont été acceptées par les deux côtés de la Chambre, par des représentants des deux partis politiques, le gouvernement et l'opposition. Et pourquoi avons-nous fait ces recommandations? Le souci principal que nous avons, c'est la protection de la population, des consommateurs, des payeurs de taxes, de ceux qui vont être appelés à payer la note pour les investissements d'Hydro-Québec, ceux qui sont responsables de payer la note dans le sens qu'il va y avoir... ou qui va affecter les tarifs d'Hydro-Québec. Ou, si les tarifs ne sont pas augmentés, les investissements doivent être payés d'une autre façon. Alors, c'était le but de ces recommandations.

Je voudrais parler de deux, seulement de deux recommandations. La commission recommande qu'Hydro-Québec fournisse des études approfondies sur les risques financiers que comporterait la construction d'équipement de production d'électricité destinée au marché d'exportation pour la société d'État et pour les consommateurs québécois, d'après différents scénarios. La raison pour cette recommandation, M. le Président, c'est que c'est clair qu'on veut tous appuyer la rentabilité d'Hydro et encourager les exportations pour augmenter les revenus.

J'ai fait partie d'un gouvernement où on a appuyé ces exportations, on a élaboré des plans, et c'est quelque chose qui n'est pas contraire à nos moeurs d'Hydro-Québec, aux moeurs de faire affaire, commerciales et autres. Mais ce que nous disons, c'est qu'il faut faire une distinction entre certains risques. Hydro-Québec va prendre un certain risque dans les investissements qu'elle doit faire pour les exportations. Il y a deux sortes de risques, il y a un risque qui peut être balisé ou il y a un risque qui est purement spéculatif, et la raison de faire les recommandations que nous avons faites, c'est d'éviter les risques spéculatifs.

Il est vrai que le marché de l'électricité a changé ou va changer avec la déréglementation, mais il ne faut pas oublier que la déréglementation va avoir comme résultat de baisser tous les prix de l'électricité. Je me souviens que nous avions fait des contrats d'exportation. C'est vrai qu'il n'y avait pas de déréglementation, mais on avait fait des contrats d'exportation où l'électricité se vendait, à New York, 0,17 $ le kilowattheure, et on avait garanti de fournir l'électricité à 0,07 $ le kilowattheure pendant 20 ans à l'État de New York, au New York Power Authority. Le contrat a été cancellé.

Et pourquoi je porte ça à l'attention, M. le Président? C'est pour vous dire qu'il ne faut pas croire que les décisions prises par nos partenaires sont toujours des décisions économiques, parce que, pour canceller un contrat où, au lieu de payer 0,17 $ le kilowattheure, vous allez payer 0,07 $, mais vous allez canceller ce contrat-là, c'est clair que la décision n'était pas économique. Il y avait d'autres raisons pour canceller le contrat. Et c'est une mise en garde qu'on fait à Hydro-Québec de dire: Avez-vous évalué les possibilités qu'il peut y avoir, ce genre de décision qui serait prise pour une raison ou une autre?

La façon dont on peut le démontrer, parce que nous sommes les gardiens, on agit comme gardiens pour les consommateurs, c'est qu'on demande à Hydro-Québec, comme ils l'ont fait dans le passé: Présentez-nous les différents scénarios. Il y a des scénarios optimistes. Ça veut dire: Bon, voici, nous investissons x milliards de dollars avec un scénario optimiste de vendre tant d'électricité; voici ce que ça signifie pour Hydro-Québec et pour le consommateur. Il y a d'autres scénarios, des scénarios moins optimistes et des scénarios minimaux, et le but de demander ces informations à Hydro...

Et ça ne dévoile pas des informations privilégiées. C'est la même chose que quand une compagnie va aller voir ses actionnaires. Dans leur rapport annuel, ils vont dire: Écoutez, voici l'année que nous avons faite, voici ce que nous préconisons pour l'année prochaine. C'est pour protéger le consommateur, et je crois qu'il est important d'avoir ces informations d'Hydro-Québec pas pour empêcher le principe de l'exportation, mais pour que les décisions soient prises en connaissance de cause et que la population sache ce à quoi elle peut s'attendre si certaines décisions qui sont prises ne sont pas complétées ou si les résultats n'arrivent pas tel que prévu.

Parce que, inutile de le dire, je pense que ça serait naïf, simpliste et utopique de croire que nous allons vendre toute l'électricité que nous voulons, toute l'électricité que nous allons produire sur le marché international. Je pense que ce n'est pas la façon dont le commerce se transige. Il y a des écueils, il y a des difficultés, et tout ce que nous demandons à Hydro-Québec dans la recommandation n° 4, c'est de nous donner le coût, parce que ça, c'est des informations que, moi-même, j'ai demandées, puis je ne les ai pas encore reçues, des installations pour l'exportation. Et, si ces exportations ne sont pas vendues, quelles seront les conséquences sur les tarifs et sur le consommateur québécois? Je pense que c'est le moindre que nous avons le droit d'exiger d'Hydro-Québec, et, comme je vous le dis, ça a été une recommandation que nous avons suggérée, c'est une des recommandations qui ont été acceptées à l'unanimité par la commission.

(16 heures)

L'autre aspect, M. le Président, des recommandations, c'est l'interfinancement. Nous demandons à Hydro-Québec, et c'est dans la recommandation 5, la commission recommande que le plan stratégique soit modifié de manière à préciser qu'Hydro-Québec ne proposera pas à la Régie de l'énergie des modifications à la situation d'interfinancement entre catégories tarifaires. Ça veut dire ceci: dans le passé et présentement, Hydro-Québec fait moins de profits sur l'électricité qui est vendue dans le secteur résidentiel. Il y a des raisons très valables pour ça. Premièrement, c'est un marché captif; deuxièmement, le résidentiel, quand il paie cette électricité-là, il ne peut pas la déduire de son impôt. Et, dans le passé, malgré les pressions qu'Hydro-Québec a faites, le gouvernement a toujours résisté à augmenter le profit d'Hydro-Québec sur le résidentiel au même niveau que sur le commercial et l'industriel, parce que le commercial et l'industriel, ils ont des alternatives et, en plus, ce qu'ils paient à Hydro-Québec, ils peuvent le déduire de leurs impôts.

Alors, il y a plusieurs raisons pourquoi ce principe doit être maintenu. Chose curieuse, c'est que, à la commission parlementaire, le président d'Hydro-Québec a dit: Ah, bien oui, je suis favorable à l'interfinancement. Mais les documents à l'appui démontrent qu'il n'y a pas d'interfinancement, parce que les documents du plan stratégique prévoient le coût de production.

Alors, la seule chose qu'on demande c'est que les représentations que le président a faites en commission, l'appui qu'il a donné à nos représentations en ce qui concerne l'interfinancement, soient acceptés dans le plan stratégique, soient acceptés par écrit, par le gouvernement et par Hydro-Québec, pour protéger le consommateur. Si le président dit qu'il est d'accord... Parce que mon expérience, c'est que, entre la parole donnée en commission parlementaire et les écrits produits en commission, dans les documents, ce sont toujours les écrits qui ont préséance. Alors, nous voulons clarifier cette situation. Pourquoi? Pour protéger le consommateur, pour continuer en sorte qu'il ait le même bénéfice dans les tarifs, dans la différence des tarifs, et dans les tarifs les plus bas, un des tarifs les plus bas en Amérique du Nord, pour ne pas que, si Hydro-Québec ou la Régie de l'énergie, d'après les règles qui seront données, enlève le principe d'interfinancement, pas l'année prochaine, pas l'année après, parce qu'Hydro nous a déjà... Le gouvernement a dit que les tarifs ne seront pas augmentés pour les deux, trois années qui viennent, mais, après, il faut protéger ce principe d'interfinancement pour la protection du secteur résidentiel, pour la protection du consommateur.

M. le Président, les recommandations que nous faisons, c'est pour éclairer la population, c'est pour éviter qu'il y ait de la pure spéculation, parce que ce sont des deniers publics, et je ne pense qu'on puisse spéculer avec les deniers publics. Il faut rendre compte. Et ce qu'on dit, c'est: Avez-vous un plan si vous ne vendez pas toute l'électricité sur le marché de l'exportation? Parce qu'on parle de 10, 15 ans d'avance. Quelles sont les alternatives?

Dans le passé, ce que nous faisions, nous devancions les travaux. Alors, si, par exemple, l'électricité était nécessaire pour l'année 2005, on devançait les travaux pour l'année 2000. Alors, nous avions cinq ans pour vendre l'électricité à l'exportation. Mais, arrivé à un certain moment, si on ne la vendait pas, c'étaient les besoins internes qui prenaient cette électricité-là. On avait des garanties.

Alors, je voudrais savoir quelles sont maintenant les mesures qu'Hydro-Québec prend pour s'assurer que tous les milliards et milliards de dollars qui seront dépensés pour l'exportation ne seront pas faits aux dépens du consommateur, aux dépens de tous ceux qui paient les tarifs d'Hydro-Québec, les actionnaires d'Hydro-Québec, du gouvernement ou de la population.

Alors, M. le Président, ce sont les deux recommandations sur lesquelles je voulais faire une intervention. Je veux souligner encore une fois que ce sont des recommandations qui ont été acceptées unanimement par les membres de la commission. Et je crois que ces informations et ces garanties sont dans l'intérêt de tous les Québécois. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Mont-Royal. Je vais céder la parole maintenant à M. le député de Groulx. M. le député.


M. Robert Kieffer

M. Kieffer: Merci, M. le Président. Permettez-moi, d'entrée de jeu, de vous raconter la rencontre que je viens d'avoir, avec d'autres membres de la commission, avec le Club d'électricité du Québec. Intéressant, le Club d'électricité du Québec quant à sa composition, quant aux emplois qui découlent directement de son existence, à toutes fins pratiques, et quant aux recommandations qu'il nous a faites vis-à-vis du plan stratégique d'Hydro-Québec.

Le Club d'électricité du Québec, c'est autour de 135 membres corporatifs, 375 membres individuels qui se situent, pour à peu près 60 % de ses membres, dans le secteur de la transformation et de la production de marchandises et, pour 40 %, dans le secteur des services. Si on parle de l'industrie de transformation qu'on retrouve dans le Club de l'électricité, bon, ce sont, par exemple, les fabricants de câbles, ce sont un certain nombre de compagnies qui interviennent directement dans la construction des infrastructures à caractère hydroélectrique. Quand on parle des services, on pense en premier lieu, évidemment, aux firmes d'ingénierie qui, au Québec dans les années soixante, sont nées, à toutes fins pratiques, avec notre grand projet hydroélectrique. On se rappelle René Lévesque qui, par la nationalisation de l'hydroélectricité, a permis à ces jeunes ingénieurs de se constituer en firmes et d'avoir des projets.

Le Club d'électricité du Québec, c'est, en termes d'emplois directs, autour de 15 000 emplois au Québec. C'est important, 15 000 emplois, surtout, comme le disait mon confrère, que ce sont en général des emplois très bien rémunérés, parce qu'on parle de techniciens spécialisés et/ou d'ingénieurs. C'est donc un débouché pour la population québécoise, pour la génération montante, qui est vital et, je dirais même, qui est un peu le reflet de ce que peut être un Québec dynamique.

Ces gens-là sont venus nous présenter tantôt leurs recommandations vis-à-vis du plan stratégique, et ce qui m'a frappé le plus, c'est que, d'entrée de jeu, ils nous ont dit: On est contre le plan stratégique parce qu'on trouve qu'il ne va pas assez loin. Alors, là, évidemment, bon, c'était une image qu'ils utilisaient pour nous dire: Écoutez, notre croissance à titre d'entreprise qui est née au Québec, qui crée de l'emploi au Québec, qui fait de la recherche et du développement au Québec est intimement liée à la capacité d'Hydro-Québec de continuer sa croissance. On nous a montré des tableaux où le parallèle entre la croissance d'Hydro-Québec et aussi sa décroissance, s'il y a lieu, sont étroitement associées à la croissance et/ou la décroissance de ces firmes-là.

Donc, M. le Président, quand j'écoute ces gens-là, ce que je me dis, moi, c'est qu'Hydro-Québec, qui est notre navire amiral, qui a présidé avec quelques autres industries à la Révolution tranquille au niveau de l'économie québécoise, continue à jouer un rôle tout à fait essentiel dans notre stratégie de développement économique à la fois à l'interne – et ça, il nous l'ont dit très clairement – mais aussi à l'international. Le Québec ne sera jamais plus fort que sa capacité à pénétrer les marchés extérieurs, et c'est normal, dans la mesure où, notre population étant ce qu'elle est, de l'ordre de 7 500 000 à 8 000 000, notre croissance économique dépendra de notre capacité et de notre efficacité à pénétrer les marchés internationaux, et en premier lieu, évidemment, le marché de nos voisins du Sud que sont les États-Unis.

(16 h 10)

Évidemment, vous me voyez venir, dans la mesure où, si je parle des marchés du Sud, si je parle de la Nouvelle-Angleterre et des États limitrophes que sont l'État de New York ou du New Jersey et aussi de l'Ontario, je vais aussi vous commenter la décision d'Hydro-Québec de pénétrer ces marchés-là et d'avoir une politique d'exportation dynamique de notre énergie hydroélectrique.

Dans les recommandations de la commission vis-à-vis du plan stratégique, il y en a quatre qui touchent plus spécifiquement le projet d'Hydro-Québec de pénétrer les marchés des États-Unis, les marchés américains. Il y a celle qui dit la chose suivante et qui est probablement une des plus importantes. Alors, la commission demande à Hydro d'apporter des précisions sur la nature du plan des ressources d'Hydro-Québec afin de limiter les risques pour les clients québécois, le développement d'équipement de production pour fins d'exportation d'électricité ne faisant pas partie du plan des ressources d'Hydro-Québec, puisque les risques et bénéfices de ces développements sont assurés par l'État à titre d'actionnaire. Ce que ça dit, cette recommandation-là, c'est de s'assurer qu'Hydro-Québec, si elle vend son électricité à l'étranger... Et, comme le soulignait le député de Mont-Royal tantôt, de faire en sorte que les consommateurs québécois ne soient pas pénalisés en bout de ligne vis-à-vis une erreur d'évaluation, par exemple, que pourrait faire Hydro-Québec quant à la potentialité du marché du Nord-Est des États-Unis.

La commission recommande aussi de s'assurer que les activités économiques d'Hydro-Québec bénéficieront aux économies de toutes les régions du Québec ainsi qu'aux communautés locales. Bien, écoutez, c'est exactement ce que nous disait tantôt le Club d'électricité. Il disait: Écoutez, là, si on va sur les marchés étrangers, il faut que ça se fasse en synergie à la fois avec les communautés locales et avec les entreprises de ces communautés locales là. Il faut qu'il y ait des maillages entre l'entreprise privée, d'une part, et Hydro-Québec, d'autre part, dans la pénétration des marchés étrangers.

Autre recommandation qui est intéressante aussi: la commission dit qu'il faut accentuer la visibilité de la contribution d'Hydro-Québec à l'effort international de réduction d'émission de gaz à effet de serre. Là, je vais me sentir à l'aise, évidemment, tantôt de vous en parler. Qu'il me suffise de vous dire que, par exemple, les États de la Nouvelle-Angleterre, qui sont nos premiers clients, utilisent principalement comme sources d'énergie électrique le gaz, le charbon, l'huile et le nucléaire. Je ne pense pas qu'il faille être allé à l'université pendant beaucoup d'années pour réaliser que ces quatre principales sources d'énergie utilisées par les États de la Nouvelle-Angleterre sont, mais alors sans aucune hésitation, beaucoup plus polluantes, avec des émissions de gaz polluants beaucoup plus lourdes que l'hydroélectricité.

Et, enfin, autre recommandation: inciter Hydro-Québec à jouer davantage un rôle moteur dans l'économie et à accorder une place importante aux entreprises québécoises par la création de consortiums à l'international. Ça, j'ai trouvé ça intéressant, parce qu'on en a parlé tantôt, et c'est aussi une des recommandations du Club de l'électricité. Hydro-Québec International s'apprête à jouer avec les autres grands joueurs internationaux sur le marché de l'énergie. Que ce soit en Chine, que ce soit en Amérique du Sud, que ce soit au Moyen-Orient, ce que les gens du Club de l'électricité du Québec nous disent, c'est: Soyons des partenaires. Quelquefois, c'est nous qui avons déjà jalonné ces endroits-là. Donc, nous serons en mesure d'introduire Hydro-Québec International à ces marchés-là. En d'autres occasions, c'est Hydro-Québec qui a déjà jalonné, et nous nous joindrons à elle afin de faire en sorte que nous puissions former les consortiums qui ramèneront, qui rapporteront au Québec des contrats non seulement lucratifs, mais créateurs d'emplois.

Ce virage que s'apprête à faire Hydro-Québec, il ne peut se faire sans qu'il y ait des balises, sans qu'il y ait des paramètres qui soient respectés par Hydro-Québec vis-à-vis de son principal propriétaire – enfin, son unique propriétaire – qui est l'ensemble de la population du Québec et dont nous sommes ici les représentants, et donc vis-à-vis duquel nous devons jouer, en quelque sorte, un rôle de chiens de garde.

Ce qui est revenu constamment durant les travaux de la commission parlementaire lorsqu'elle rencontrait à la fois les groupes ou Hydro-Québec, c'est le fameux pacte social hydroélectrique qui a présidé à la création d'Hydro-Québec et qui a toujours servi par la suite à baliser le développement d'Hydro-Québec. Eh bien, là-dessus, le plan stratégique ne me pose aucun problème, et je vous citerai le texte même du rapport stratégique. À la page 25, orientation 1, on dit «Maintenir les tarifs et la qualité de service au Québec». On précise un peu plus loin: «Les éléments qui constituent ce pacte et qu'Hydro-Québec réaffirme sont, premièrement, des tarifs uniformes, par catégories de clients, sur l'ensemble du réseau – c'était le premier volet de notre fameux pacte social – deuxièmement, la stabilité tarifaire assurée par la filière hydroélectrique pour toutes les catégories de clients – deuxième élément de notre pacte social – troisièmement, des tarifs bas, particulièrement dans le secteur résidentiel, et, quatrièmement, la propriété publique de l'entreprise.» Voilà, Hydro-Québec réaffirme dans son plan stratégique les éléments qui sont au fondement même du pacte social hydroélectrique que nous avons élaboré en tant que société dans les années soixante, lorsque René Lévesque et son gouvernement avaient nationalisé Hydro-Québec.

L'orientation qu'Hydro-Québec veut prendre par rapport à l'exportation de notre énergie sur le marché américain, notre premier client, va demander effectivement la mise en place de nouvelles infrastructures, la construction de nouveaux équipements qui permettront à Hydro-Québec d'avoir l'énergie suffisante pour pénétrer le marché américain; on pense, entre autres, aux chutes Churchill. Hydro-Québec, à la page 34, fixe, il me semble, des balises fort intéressantes pour s'assurer justement que l'actionnaire d'Hydro-Québec n'ait pas, à la suite de mauvais calculs, à la suite d'une mauvaise stratégie, à assumer les coûts de décisions qui feraient en sorte que nous serions, par exemple, perdants dans l'échange avec les Américains. Elle dit, quant à la production et quant aux approvisionnements, la chose suivante: «C'est pourquoi Hydro-Québec entend poursuivre le parachèvement du potentiel hydroélectrique québécois. Les projets – de développement hydroélectrique – seront entrepris à trois conditions: premièrement, ils devront être rentables, à la lumière des conditions du marché et du tarif de fourniture moyen en vigueur, soit la composante "énergie" des ventes au Québec, estimée à 0,0287 $ du kilowattheure.»

À toutes fins pratiques, ça signifie que tout nouveau barrage, toute nouvelle installation qui permettrait d'augmenter la capacité énergétique d'Hydro-Québec devra se faire à 0,03 $ et moins le kilowattheure, première balise. Deuxième balise: «Ils devront – ces ouvrages – être acceptables du point de vue environnemental, conformément aux principes du développement durable.» C'est intéressant, cet aspect-là, aussi parce qu'il est revenu assez souvent au moment des audiences de la commission. Hydro-Québec s'engage de la sorte à s'assurer que toute nouvelle construction, toute nouvelle installation s'inscrive dans le respect des principes du développement durable.

(16 h 20)

Et, troisième paramètre, troisième balise, Hydro-Québec s'assure que les projets soient accueillis favorablement par les communautés locales. Donc, les lieux où des barrages ou des installations qui fourniront l'électricité, que ce soit à la population québécoise ou pour l'exportation, devront, dans un premier temps, faire consensus auprès des communautés locales. Et ce que j'ai trouvé intéressant dans ces trois balises-là, c'est lorsque les représentants de la communauté crie du Grand Nord, qui, vous le savez, ont été longtemps les adversaires du développement des installations hydroélectriques dans le Grand Nord, nous ont dit: On considère que cette ouverture d'Hydro-Québec vis-à-vis des communautés locales est un élément intéressant de son plan stratégique, et c'est dans ce sens-là que nous voulons entretenir des relations avec Hydro-Québec.

S'il fallait que nous ayons une preuve de plus, le ministre Chevrette, cette semaine, d'ailleurs, annonçait qu'il y avait eu des ententes de collaboration et de coopération avec les communautés autochtones au Québec, dans le sens justement de faire en sorte que le développement économique soit pris en main par les communautés locales qui y seront associées. Alors, on voit ici qu'il y a parallèle, qu'il y a mariage entre le plan stratégique d'Hydro-Québec et les communautés locales.

La question, maintenant, qu'il faut se poser: Est-il nécessaire, est-il utile, est-il rentable pour le Québec, pour sa population, qu'Hydro-Québec aille sur les marchés internationaux, qu'Hydro-Québec aille vendre, par exemple, son énergie aux Américains, mais aussi son savoir-faire, son expertise sur les marchés internationaux? Je vous répondrai à cette question par une autre question. Pourquoi serions-nous craintifs, en tant que communauté, vis-à-vis la vente de l'hydroélectricité, alors que nous ne l'avons jamais été, par exemple, vis-à-vis la vente d'autres matières naturelles que nous avons, d'autres matières premières que nous avons? Nous n'avons jamais hésité, par exemple, à utiliser la forêt pour créer de l'emploi, et pour vendre, et pour exporter. Nous n'avons jamais hésité à fouiller notre sous-sol pour en extraire les minéraux et les métaux qui allaient nous permettre aussi de pouvoir exporter et donc de récupérer les richesses et de créer des emplois. Pourquoi devrait-il en être autrement pour l'hydroélectricité?

Il y a une chose qui est claire, il y a une chose qui est certaine, c'est que les marchés se globalisent. Nous ne pouvons continuer à vivre en autarcie. Ce temps-là est terminé. Le Québec comme région productrice d'énergie pas chère, qui est propre, ne pourra longtemps continuer à se refermer sur lui-même sous prétexte qu'il y a des risques. Bien oui, il y en a, des risques. La globalisation du marché, ce que ça signifie, c'est que les plus compétents réussiront.

C'est qui, nos clients? Nos clients, c'est principalement deux régions: le Nord-Est des États-Unis et, plus récemment, l'Ontario. Pourquoi le Nord-Est des États-Unis? Si vous regardez à la page 14 du plan stratégique d'Hydro-Québec, on vous présente une carte des tarifs qui vous indique le prix moyen, dans le Nord-Est américain, du kilowattheure. Au Québec, on le situe à 0,036 $US livré, quand ils arrivent à votre maison – 0,036 $US, ça donne un peu plus que 0,05 $CAN – dans le Vermont, 0,095 $US; dans le New Hampshire, 0,117 $; dans le Massachusetts, 0,101 $; dans le Rhode Island, 0,104 $; dans le Connecticut, 0,105 $; dans le New Jersey, 0,104 $. Ce qu'on remarque, c'est que, partout dans la région du Nord-Est des États-Unis, le coût moyen de l'électricité pour un citoyen ou une citoyenne est entre trois fois et quatre fois supérieur à ce que paient les Québécoises et les Québécois.

M. le Président, quand je vois les prix que paient les Américains pour leur énergie, quand je réalise que cette énergie-là, elle est tellement plus polluante que ce qu'Hydro-Québec produit, quand je vois qu'à Kyoto nous avons été en mesure, à titre de représentants, de fixer des paramètres de réduction de la pollution climatique, ce que je vous dis, c'est que nous sommes très bien placés pour faire face à la compétition. Il ne s'agit pas de se fermer les yeux vis-à-vis d'Hydro-Québec; il faut continuer à surveiller Hydro-Québec. Le rôle que joue la commission parlementaire de l'économie et du travail est un rôle efficace. À preuve, nous avons été en mesure, la commission, de proposer des recommandations unanimes.

Mais, ceci étant dit, oui, je pense que le Québec est capable, oui, je pense qu'on est en mesure de faire face à la compétition des Américains et, oui, je pense qu'il y a un marché lucratif qui nous attend, aussi bien dans le Nord-Est qu'en Ontario. Là-dessus, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Groulx. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Laurent. M. le député.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. C'est la deuxième année consécutive que la commission de l'économie et du travail dépose une série de recommandations, et ce, comme le disait mon prédécesseur, de façon unanime. Je pense que c'est là le témoignage le plus éloquent du sérieux des membres de la commission qui, quand il s'agit d'un dossier comme celui d'Hydro-Québec, veulent s'assurer de bien la protéger, de bien l'entourer, de lui permettre d'accéder à son développement et à sa contribution à l'économie d'une façon la plus entière possible.

D'ailleurs, M. le Président, parmi les 17 recommandations qui font l'objet du rapport – et, comme le dit mon collègue, elles sont toutes unanimes – la toute première, vous me permettrez de la rappeler, et là il y va de notre rôle comme parlementaires, elle s'adresse à nous, parlementaires, membres de l'Assemblée nationale. Alors, notre commission recommande que le gouvernement du Québec oblige la société Hydro-Québec à comparaître annuellement devant la commission parlementaire compétente afin de permettre à cette dernière d'effectuer le suivi du plan stratégique.

(16 h 30)

Alors, nous sommes, de façon unanime, M. le Président, d'avis qu'il y va de la responsabilité des parlementaires de cette Assemblée d'avoir annuellement une rencontre avec les dirigeants d'Hydro-Québec pour voir de quelle façon le suivi du plan stratégique se déroule. Y a-t-il des modifications? Y a-t-il accélération? Y a-t-il retard? Les pourquoi. Et, forts de l'expérience, parce que la nouvelle approche d'Hydro-Québec, et je le dis bien, elle est nouvelle, nous avons la responsabilité de nous assurer qu'elle aura l'encadrement et que nous, les parlementaires, exerçions notre rôle, notre responsabilité que la population québécoise nous a confiée en nous déléguant comme membres de cette Assemblée. Alors, inutile d'allonger les propos, mais il nous semble que, comme première recommandation, il était important de souligner que, comme parlementaires, et ça, de façon unanime, nous souhaitons qu'Hydro-Québec vienne devant la commission, et ce, à chaque année.

Comme deuxième recommandation, M. le Président – et certains des collègues qui m'ont précédé y ont fait allusion – la commission recommande qu'Hydro-Québec élabore un programme de recherche visant à renforcer le réseau de transport en cas de verglas et impliquant en particulier des techniques de déglaçage de lignes. Il va de soi que, au moment où le plan stratégique a été rédigé et, bien sûr, déposé, en octobre dernier, évidemment, ça a précédé la période de verglas.

Alors, depuis ce temps, forts de l'expérience que nous avons connue, il nous semble essentiel qu'on retrouve à l'intérieur de ce plan le reflet de la préoccupation face à l'expérience du verglas que nous avons connue. Il me semble que c'est quelque chose qui est essentiel. Ça ne pouvait pas en faire partie au moment de sa rédaction, mais il nous semble que ça ne soit que normal, que logique que maintenant les citoyens du Québec retrouvent à l'intérieur du plan stratégique des précisions sur l'importance qu'accorde Hydro-Québec par rapport à son réseau de transport et quels sont les moyens qu'elle entend prendre par rapport à la situation du verglas et du déglaçage des lignes.

Les recommandations 4 et 5, mon collègue de Mont-Royal y a référé amplement, M. le Président. Évidemment, quand on échange en commission parlementaire, bien sûr que les dirigeants d'Hydro-Québec, par la voix de leur président ou des gens qui l'accompagnent, nous indiquent leurs volontés, leurs souhaits, le maintien à ce que, bien sûr, tout ça se fasse dans l'intérêt des Québécois. Et il va de soi qu'il ne saurait être de façon autre que toutes ces démarches soient faites dans l'intérêt des Québécois. Alors, avec mon collègue de Mont-Royal, qui a occupé la fonction de ministre responsable, et également le président de la commission, nous avons recommandé qu'Hydro-Québec fournisse des études approfondies sur les risques financiers que comportait la construction d'équipements.

Pourquoi il est important qu'il en soit ainsi, M. le Président? Les gens d'Hydro nous ont dit: Il n'y en a pas, de risques. Pourquoi il est important que ça soit reflété et que nous puissions avoir l'assurance que, effectivement, les propos que tient Hydro-Québec dans ce dossier-là puissent être évalués, et ce, de façon véridique? C'est parce que les conséquences d'une erreur de leur part, d'un mauvais calcul ou quelque chose qui échapperait à leur contrôle pour les résultats, bien, les conséquences sont que chacun de nous qui représentons des électeurs, électrices qui reçoivent un compte d'électricité peuvent très raisonnablement se retrouver dans une augmentation de la facture.

Alors, il est important que, comme représentants des actionnaires d'Hydro-Québec, nous puissions demander à cette entreprise de nous fournir les garanties nécessaires, toujours dans le respect, bien sûr – et certains des collègues y ont référé – pas dans le but de nuire à Hydro-Québec. On veut tous qu'Hydro-Québec réussisse, ce que nous souhaitons, parce que nous avons la responsabilité de représenter les consommateurs, les électeurs, les gens qui reçoivent leur facture... Il est important que nous exercions nos responsabilités en exigeant d'Hydro-Québec qu'ils puissent être protégés dans ce domaine-là.

La recommandation 5, que le plan stratégique soit modifié de manière à préciser qu'Hydro-Québec ne propose pas à la Régie de l'énergie des modifications à la situation d'interfinancement entre les catégories tarifaires. Les propos des dirigeants d'Hydro-Québec en commission parlementaire peuvent être, dans ce domaine-là, rassurants, mais il est important que les propos soient reflétés de façon précise par les écrits parce que c'est à ça qu'on se référera.

Bien sûr, le ministre s'est dépêché de nous dire: Écoutez, on vient de créer la Régie de l'énergie, ne commençons pas à lui indiquer des balises. Il me semble qu'il est important que le gouvernement, ses élus à l'Assemblée nationale indiquent clairement qu'il est le souhait de l'ensemble des élus en cette Assemblée, M. le Président, et exprimé par les dirigeants d'Hydro-Québec que la situation d'interfinancement soit maintenue.

Mon collègue de Mont-Royal y a touché tantôt. Il est important que les citoyens du Québec, dans le secteur résidentiel, clientèle, s'il en est une, captive du service d'Hydro-Québec, puissent continuer à bénéficier de la situation qui fait qu'Hydro-Québec fait moins de profits avec la situation domiciliaire qu'elle en fait avec les secteurs commercial et industriel. Alors, on veut que ça se reflète dans le plan stratégique d'Hydro-Québec.

La recommandation n° 6, c'est qu'Hydro s'assure que ses activités économiques bénéficient aux économies de toutes les régions ainsi qu'aux communautés locales, et permettez-moi d'y associer la recommandation n° 10: La commission recommande que la volonté d'Hydro-Québec de favoriser les régions du Québec... Donc, ça a été exprimé en commission parlementaire. Quand on demande aux dirigeants d'Hydro-Québec: Est-ce que vous avez l'intention, par votre plan stratégique, de favoriser les régions du Québec tant dans votre développement que dans vos opérations... Et là on dit: Que ce soit clairement inscrit dans le plan stratégique.

Si c'est ça, la volonté d'Hydro-Québec clairement exprimée en commission parlementaire, si c'est ça, la volonté de l'ensemble des élus de la commission parlementaire, il me semble qu'il va de soi que nous puissions la retrouver de façon on ne peut plus claire confirmée dans le plan stratégique d'Hydro-Québec. Et pourtant, selon l'ensemble des membres de la commission à l'unanimité, nous souhaiterions que ce soit beaucoup mieux inscrit dans le plan stratégique d'Hydro-Québec. Ça, il nous semble que pour nous c'est quelque chose de fondamental, M. le Président.

Permettez-moi également de vous entretenir de la recommandation n° 12: La commission recommande qu'Hydro-Québec joue davantage un rôle moteur dans l'économie et accorde une place importante aux entreprises québécoises par la création de consortiums à l'international. Mon collègue de Groulx y a fait référence, tantôt. Il y a là des débouchés qui semblent extrêmement prometteurs dans ce domaine-là. Donc, il est important que les entreprises québécoises qui, dans un très grand nombre, ont développé une expertise acquise suite à des responsabilités que leur a confiées Hydro-Québec ou ont accompagné Hydro-Québec dans des projets en territoire québécois s'assurent qu'Hydro-Québec tienne compte de ces compétences-là et que les entreprises québécoises fassent partie de façon intégrale de la création de consortiums à l'international. Il y va de l'intérêt de l'ensemble de la collectivité québécoise.

Mon collègue de Groulx disait, tantôt: Il y a là 15 000 personnes dont le revenu dépend de ce secteur d'activité important. Il parlait bien sûr des gens du Club de l'électricité. On sait l'importance de ces gens-là, les retombées économiques pour le Québec tout entier, l'importance de ces retombées dans les régions, M. le Président, la représentativité des connaissances, du know-how des Québécois dans ce domaine-là. Il est important que le plan stratégique reflète cette volonté qui est exprimée par l'ensemble des gens qui se sont prononcés dans ce dossier-là. C'est ça qu'Hydro-Québec nous a dit en commission parlementaire. C'est ce que chacun ou chacune des membres de la commission, lorsque nous échangions avec Hydro-Québec, souhaitait voir que le plan stratégique contienne. Donc, il est tout à fait normal, il nous semble, que ce soit inscrit de façon très claire dans le plan stratégique d'Hydro-Québec.

(16 h 40)

Les recommandations 13 et 14: La commission recommande que soit resserré le suivi de la filiale internationale d'Hydro-Québec, et ce, en raison de l'importance des investissements et des risques associés à ce genre d'activité. Voici, M. le Président. Dans le plan stratégique d'Hydro-Québec, à cause du potentiel qui semble y être identifié, on nous dit que des sommes importantes, et là, M. le Président, on parle de milliards de dollars, seront consacrées à ce secteur de développement d'activité économique, un, dans un premier temps. On dit même que, dans certains cas, il faudra compter de nombreuses années – de nombreuses années – avant que nous puissions commencer à percevoir les avantages, les bénéfices de ces investissements à l'international.

Donc, M. le Président, vous comprendrez qu'il est important que, maintenant qu'Hydro-Québec veut donner plus d'ampleur à ce secteur d'activité internationale, comme membres de la commission, nous parlions que soit resserré le suivi de la filiale internationale d'Hydro-Québec. Pourquoi c'est important, M. le Président? Parce que, encore une fois, ce sont les Québécois et Québécoises qui, par leur facture d'électricité, vont subir les conséquences de risques qui ne se seront pas avérés aussi profitables qu'il aurait été souhaité au départ.

On nous a dit qu'il peut arriver deux choses: ou bien donc, bien sûr, ce sont les citoyens, par leur facture d'électricité, qui vont le payer ou bien donc, nous, comme société Hydro-Québec, remettrons moins de dividendes au gouvernement. Mais les conséquences, c'est que, si le gouvernement ne reçoit pas d'Hydro-Québec la part qu'il aura comptabilisée dans le budget du ministre des Finances, les conséquences sont les mêmes, M. le Président, c'est le citoyen du Québec, ou par son compte d'électricité ou par d'autres façons que le gouvernement a de percevoir ses revenus, qui recevra la facture.

C'est pour ça que la recommandation 14 recommande qu'Hydro-Québec International tienne une comptabilité séparée de celle du reste de l'entreprise et que les états financiers soient publics. En d'autres mots, que les sommes investies dévolues à l'activité Hydro-Québec International apparaissent au bilan d'Hydro-Québec dans une comptabilité séparée: voici les sommes qui, d'année en année, auront été investies, la nature des projets, où nous en sommes rendus. Il est important que nous le sachions, parce qu'il y va de deniers qui appartiennent aux Québécois et aux Québécoises.

Alors, M. le Président, vous comprendrez bien que je ne vous ferai pas la liste des 17 recommandations que, comme commission, nous faisons à Hydro-Québec, mais ce qui est important de nous rappeler, en terminant, c'est que les citoyens puis les citoyennes que nous représentons, chacun dans nos 125 comtés, on a des citoyens qui sont en relation avec Hydro-Québec, les gens que vous représentez reçoivent, comme les miens, une facture d'Hydro-Québec. Alors, il est important que nous encouragions, mais que nous encadrions de façon responsable les activités d'Hydro-Québec, parce qu'il semble que ça, ça fait partie du devoir que les hommes et les femmes du Québec qui choisissent que nous les représentions dans cette Assemblée veulent qu'on prenne en leur nom, parce qu'ils sont les bénéficiaires quand ça va bien, mais ils sont les gens qui doivent acquitter les factures quand les espoirs ne sont pas au rendez-vous de ce qui aurait été souhaité.

Alors, dans ce sens-là, vous comprendrez, M. le Président, que, indépendamment de nos formations politiques, l'ensemble de ces recommandations sont émises à l'unanimité de la commission de l'économie et du travail. Je vous remercie de votre attention, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Laurent. Nous cédons maintenant la parole au député de Johnson. M. le député.


M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci, M. le Président. À l'instar de mon collègue qui vient de prendre la parole sur les recommandations de la commission de l'économie et du travail, j'aimerais, moi aussi, souligner le travail exceptionnel de notre commission qui a contribué à mettre de l'avant des recommandations – 17, comme vous le savez – qui vont dans le sens de mieux encadrer les activités d'Hydro-Québec.

Hydro-Québec est une société québécoise extrêmement dynamique, dirigée par des gens passionnés, qui ont la passion du Québec et de son développement. Ces gens-là, évidemment, ont besoin que les citoyennes et les citoyens du Québec puissent savoir ce qu'ils font, être témoins des orientations qu'ils prennent, y participer, d'ailleurs, et s'assurer que le développement d'Hydro-Québec, le transport de son électricité notamment, se fasse dans le respect des populations locales et dans le respect des gens de l'ensemble du Québec.

Dans ce sens-là, le plan stratégique prévoyait, comme vous le savez, M. le Président, dans son orientation 2, que trois critères devaient présider à toute action du gouvernement pour parachever le réseau: il devait être rentable, être acceptable du point de vue environnemental et être accueilli favorablement par les communautés locales.

Je m'attarderai un peu plus à cette dimension-là de l'action du travail d'Hydro-Québec, puisque, dans ma région, comme vous le savez, M. le Président, nous avons connu, évidemment comme dans l'ensemble du Québec, des difficultés assez particulières lors de la crise du verglas, ce qui a amené d'ailleurs Hydro-Québec à faire un constat qui est un constat que nous connaissons tous et dont je vous fais part dans un document qui a été publié le 21 janvier 1998.

«Rappelons que, depuis 24 mois, le Québec a subi l'impact de quatre événements climatiques exceptionnels.» Et là on était au 21 janvier, vous savez qu'on était en plein coeur de la crise du verglas. Dans mon comté d'ailleurs, comme vous le savez, 32 des municipalités ont été touchées par le verglas. Plus particulièrement, une vingtaine ont été privées d'électricité pendant plusieurs jours, quelques citoyens de mon comté l'ont été pendant plus de 30 jours. Alors, vous voyez le drame qui était vécu actuellement et qui était relié à des situations climatiques qui étaient exceptionnelles.

Et le constat qui a été fait était le suivant. Quatre événements climatiques exceptionnels ont frappé le Québec depuis 24 mois: le déluge de juillet 1996, au Saguenay – déluge d'ailleurs que nous avons connu aussi dans la région de l'Estrie; les citoyens de La Patrie, dans ma région, en savent quelque chose – un verglas de 50 mm en janvier 1997 dans Lanaudière, le verglas de 55 mm de novembre 1997 près de Churchill Falls et de 50 à 90 mm de verglas en janvier 1998 dans tout le Sud du Québec, M. le Président.

Et d'ailleurs, depuis la fin de cette crise, d'autres événements climatiques ont frappé le Québec. Il y a eu deux verglas d'importance sur la Côte-Nord, un autre à Terre-Neuve, la semaine passée, et nous connaissons actuellement, comme vous le savez, M. le Président, des déluges dans des régions importantes au Québec, déluges qui sont en train de se résorber, mais qui ont causé des torts très importants à plusieurs citoyennes et citoyens du Québec.

Cette concentration, donc, dans le temps, de phénomènes météorologiques dont chacun était jusqu'ici perçu comme hautement improbable nous conduit à envisager le risque d'une répétition sans préavis de la situation que nous sommes encore en train de subir. Il importe donc d'accroître la sécurité de notre réseau électrique. Vous savez que le dernier événement, comme on l'a dit ici, a frappé les régions de Montréal, Laval, Montérégie, Centre du Québec, Chaudière–Appalaches, Estrie, Outaouais, Lanaudière et Laurentides. Au 21 janvier, d'ailleurs, on constatait que 3 000 000 de personnes au Québec étaient privées d'électricité et l'ont été pendant plusieurs jours. Et le 21 janvier il en restait 450 000, M. le Président.

Tout ça a conduit Hydro-Québec et le gouvernement du Québec à conclure qu'il fallait améliorer la qualité du réseau et sécuriser l'approvisionnement des régions qui ont été touchées. Je pense à la région montérégienne, mais je pense aussi à la région de Montréal, je pense à ma région, l'Estrie. Ce qui a amené le gouvernement à adopter des décrets concernant l'implantation de lignes hydroélectriques, trois particulièrement mais une qui me concerne, moi, et qui concerne ma région, celle qui doit relier le poste des Cantons à Val-Joli, dans le comté de Johnson, le plus beau comté du Québec, comme vous savez, M. le Président, et aussi Saint-Césaire, en Montérégie, et Hertel, près de Montréal.

Cette ligne, qui a été demandée par le gouvernement du Québec pour s'assurer que les citoyennes et les citoyens de ma région, l'Estrie, de la région de la Montérégie et de la région de Montréal aient accès à de l'électricité en cas d'autres événements climatiques désastreux comme nous avons connu, cette ligne permettrait et va permettre de faire en sorte que l'électricité qui approvisionne ma région et qui vient de la Côte-Nord puisse aussi provenir de la Baie-James via la région montérégienne. Donc, l'électricité qui vient de la Côte-Nord pourra, par la ligne des Cantons-Hertel, alimenter la Montérégie et la région de Montréal, mais, à l'inverse, l'électricité via Boucherville qui viendra de la Baie-James pourra alimenter l'Estrie.

(16 h 50)

Évidemment, le gouvernement, compte tenu des conditions climatiques, a décidé qu'il fallait que cette ligne-là soit prête pour l'hiver 1998-1999. C'est bientôt, et, comme le plan stratégique prévoyait qu'un des critères qui devaient présider au parachèvement du réseau ou à la sécurisation du réseau était accueilli favorablement par les communautés locales, Hydro-Québec se devait donc à la fois de faire vite, mais à la fois de s'assurer que tout était fait dans le respect des gens, après que les gens eurent été consultés et qu'Hydro-Québec eut pu obtenir un consensus le plus large possible dans les régions concernées.

Dans ma région, Hydro-Québec avait décidé de commencer les travaux. Évidemment, cette recommandation-là du plan stratégique, dans les circonstances, nous semblait être mise de côté, ce qui ne nous convenait pas. Alors, plus particulièrement la MRC de ma région – et je salue les intervenants de ma région, dont le préfet – a fait un travail exceptionnel pour convaincre Hydro-Québec qu'on devait consulter les gens de ma région, et particulièrement de la MRC du Val-Saint-François, de sorte qu'il y ait un consensus le plus large possible. Je vous avoue que ça a été un travail assez difficile, de concilier l'urgence de la situation, l'urgence de la construction de cette ligne entre des Cantons et le poste de Saint-Césaire et le respect des gens de ma région qui vivent dans la MRC du Val-Saint-François.

Et je vous invite à la visiter, cette région-là, M. le Président, c'est certainement, en Estrie, un des plus beaux coins qui existent, comme je vous le disais tout à l'heure, l'Estrie étant une des plus belles régions du Québec. Ce coin-là est exceptionnellement beau. Ce coin-là cache des trésors au niveau de la faune, des trésors au niveau d'un site, par exemple, qui est un site historique d'ardoise. Ce trésor a une faille rocheuse exceptionnelle qui n'est traversée que par une route, qui est restée vierge, des terres agricoles extraordinaires, très performantes.

Donc, ce coin-là de ma région devait être protégé. Alors, il fallait donc s'assurer qu'on respecte tous ces trésors qui existent dans ce coin-là et la population qui y vit, mais en même temps les besoins du Québec en termes d'alimentation en énergie électrique. Alors, le travail de la MRC combiné à celui des militants environnementalistes... Et je salue en passant le groupe du RAPPEL qui a travaillé très fort pour convaincre Hydro-Québec de s'asseoir à la table avec nous et d'envisager un tracé qui soit le plus respectueux possible de l'environnement, de la beauté du paysage et des trésors que cache cette région-là, de s'asseoir à la table.

Et je vous avouerai, M. le Président, que j'ai travaillé la semaine passée, en concertation avec ces gens-là, à amener progressivement Hydro-Québec à comprendre que nous avions besoin de temps, que nous avions besoin de quelques semaines, au moins, pour nous assurer qu'on puisse comprendre toute la dynamique qui était en cause, à la fois l'urgence et à la fois nos besoins. J'ai travaillé très fort la semaine passée pour amener les différents intervenants au cabinet de M. Chevrette.

M. Chevrette lui-même, le ministre des Ressources naturelles, a été impliqué dans ce dossier-là, le cabinet du premier ministre, les autorités de la MRC, le Conseil régional de l'environnement, les groupes environnementalistes ont été impliqués, de sorte qu'Hydro-Québec a finalement accepté d'aller plus loin dans la consultation, de prolonger le délai et de s'asseoir à la table et même de mettre à la disposition des intervenants de ma région une ressource qu'Hydro-Québec va payer. La société va payer cette ressource-là elle-même pour que les gens puissent avoir une expertise à leur disposition, une expertise indépendante qui puisse les conseiller dans l'étude du tracé ou des tracés qui seront proposés.

Hydro-Québec nous a proposé un corridor qui a été adopté par décret, comme vous le savez, mais, à l'intérieur de ce corridor-là, identifié deux tracés qui, une fois étudiés par les intervenants de ma région, ne leur convenaient pas parfaitement. Alors, Hydro-Québec a donc décidé de mettre à la disposition des intervenants, chez nous, une ressource qui va les aider à regarder d'autres alternatives de tracés qui puissent faire en sorte qu'on ait une ligne électrique, comme je vous le disais, qui respecte les gens de ma région.

Il a été évoqué, vous le savez, dans les médias différentes alternatives, dont évidemment un corridor énergétique, corridor qui passe par l'autoroute 10 et l'autoroute 55. C'est une alternative extrêmement intéressante, vous le savez, et elle a un immense avantage: cette alternative-là ferait en sorte que la ligne hydroélectrique ne traverserait pas la MRC du Val-Saint-François et ne traverserait pas mon comté. C'est une perspective très intéressante pour moi, comme député du comté de Johnson, et pour les gens de ma région. Malheureusement, elle a l'inconvénient de traverser une autre MRC, celle de mon collègue député d'Orford, la MRC Memphrémagog, mais elle a l'inconvénient de traverser aussi le mont Orford et deux lacs et d'allonger le tracé de 67 km.

M. le Président, savez-vous combien coûte, au kilomètre, une ligne qui transporte l'électricité de 735 kW? Une ligne coûte 1 000 000 $ au kilomètre. Alors, si on passait par l'autoroute 10 et par la 55, on allongerait le tracé de 67 km, ce qui occasionnerait des coûts de 67 000 000 $ de plus pour sécuriser le réseau hydroélectrique. C'est une alternative qui est sur la table. Évidemment, les trésors environnementaux qui existent dans ma région doivent être conservés, on doit y voir de près, mais c'est une alternative qui sera considérée par les intervenants.

Je veux terminer, M. le Président, en vous disant que je suis extrêmement fier que, grâce au travail des intervenants de ma région, aux préfets, aux intervenants environnementalistes, aux élus, aux 22 municipalités de ma MRC, grâce à tout ce travail-là, le rôle qu'a joué ici la commission de l'économie et du travail pour bien encadrer le travail d'Hydro-Québec se prolonge dans les autorités et les intervenants de ma MRC, et nous aurons – et je termine sur ça – une véritable consultation qui fera en sorte qu'on assurera aux Québécois une alimentation en électricité qui soit adéquate et un respect des gens de mon milieu qui soit très adéquat aussi. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Johnson. Nous allons céder maintenant la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, je voudrais intervenir à cette étape de la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail relativement au plan stratégique d'Hydro-Québec. J'ai eu l'occasion de participer aux travaux de la commission de l'économie et du travail lors de l'examen des orientations de la société Hydro-Québec à deux reprises, tout au moins. La première fois, du 10 au 12 février 1998, où nous avons eu des consultations particulières, il faut rappeler que 36 groupes et personnes ont présenté des mémoires. Cela témoigne de l'importance que la population a accordée au plan stratégique d'Hydro-Québec; il faut dire que ce n'est pas seulement l'affaire des spécialistes, c'est aussi l'affaire des citoyens. Lors de ces trois journées de consultation, on a entendu beaucoup de questionnements à l'égard de la nouvelle stratégie commerciale d'Hydro-Québec.

La deuxième fois où j'ai eu à intervenir dans ce dossier, c'était lors de l'audition du président d'Hydro-Québec, M. André Caillé. Là encore, c'était au mois de février et, là encore, les membres de la commission et les députés participants ont soulevé de nombreuses questions, mais ils n'ont pas eu nécessairement toutes les réponses, même si les questions ne manquaient pas de pertinence.

(17 heures)

Lors de ces six jours de travaux parlementaires, il a beaucoup été question de la nouvelle stratégie commerciale – certains ont parlé de virage commercial d'Hydro-Québec – à la lumière de la tempête de verglas en particulier, parce que la population a été secouée par ce qui s'est passé, de voir ce vaisseau amiral se casser et de voir ces images de pylônes par terre suite à la tempête de verglas. On a abordé à cette occasion, c'est-à-dire lors des auditions avec le président d'Hydro-Québec, plusieurs questions, notamment en ce qui concerne les coûts de ce virage, les risques financiers à prendre, la fiabilité, entre autres, du système, a été abordée. À cet effet, un des points sur lesquels moi-même, je me suis penchée, étant une députée montérégienne – et on sait très bien que la tempête de verglas, M. le Président, qui a frappé 3 000 000 de citoyens, les deux tiers étaient en Montérégie, j'ai moi-même été sinistrée – j'ai questionné le président d'Hydro-Québec quant à la fiabilité du réseau après le verglas. Et on se rappellera que M. Caillé nous a fait la démonstration, images à l'appui, que les pylônes d'Hydro-Québec étaient conçus pour supporter un maximum de 45 mm de verglas. Or, le cumul des volumes de verglas qui est tombé dépassait les 75 mm. Donc, le président a reconnu devant la commission qu'Hydro-Québec savait que le réseau d'électricité allait être à terre et que la panne allait durer plusieurs jours, voire plusieurs semaines.

J'ai eu l'occasion, le 3 avril dernier, de dénoncer l'irresponsabilité du gouvernement, et de la Sécurité civile en particulier, qui n'a pas donné l'alerte avant la tempête de verglas. Car il faut se rappeler que l'alerte, ou plutôt les avertissements, ont été donnés par Environnement Canada dès le 3 avril, donc c'était prévisible – le 3 janvier, pardon, le 3 avril, c'était la journée de l'interpellation. Donc, avant que 3 000 000 de personnes sinistrées ne soient figées dans la glace, le gouvernement aurait dû avertir les autorités locales, aurait dû avertir les municipalités pour que les mesures nécessaires soient prises et qu'on ne soit pas pris de court à la dernière minute. Le gouvernement du Québec savait donc dès le 3 janvier 1998 que la tempête de verglas s'en venait, les bulletins de la météo d'Environnement Canada l'ont annoncée, comme j'ai dit, dès le 3 janvier. La panne d'électricité est survenue, comme on le sait, dans la nuit du 5 au 6 janvier.

On se rappellera aussi qu'après le déluge du Saguenay, un an et demi plus tôt, le gouvernement avait constitué une commission scientifique et technique, la commission Nicolet, qui a déposé son rapport en janvier 1997 et qui a soumis un certain nombre de recommandations dont une en particulier touchant le phénomène de l'alerte. La commission Nicolet a considéré l'alerte comme étant un élément clé dans une situation d'urgence comme celle vécue par les sinistrés du déluge du Saguenay et plus largement par les sinistrés du verglas.

Lors des auditions publiques, j'ai questionné le président d'Hydro-Québec quant à la fiabilité du réseau après le verglas, et M. Caillé a reconnu que le réseau d'Hydro-Québec n'a pas encore retrouvé sa fiabilité à 100 %. Il a estimé que le réseau, en particulier en Montérégie, était sécurisé jusqu'à 75 %. Ce n'est pas rassurant, M. le Président, pour la population, pour les abonnés d'Hydro-Québec. Et, au moment où Hydro-Québec s'apprête à prendre le virage commercial qui l'amènera à investir de façon massive – parce qu'on parle ici de milliards de dollars – dans le marché international, je tiens à réitérer l'obligation première qui est faite à Hydro-Québec d'investir d'abord et avant tout dans le réseau québécois.

Car Hydro-Québec, contrairement à ce que dit une publicité d'Hydro précisément – la publicité d'Hydro compare Hydro-Québec au Cirque du Soleil, M. le Président, c'est une société d'État dont les Québécois sont les seuls actionnaires. Elle doit d'abord et avant tout répondre aux besoins de la population du Québec en maintenant les tarifs et la qualité du service avant d'envisager d'exporter des surplus à l'étranger.

Pour revenir, M. le Président, aux recommandations qui sont contenues dans le rapport de la commission de l'économie et du travail, et qui sont au nombre de 17 – d'ailleurs, il faut signaler que ce rapport a été adopté à l'unanimité des parlementaires, des deux côtés de la Chambre – j'ose espérer qu'Hydro-Québec va s'y conformer et va y donner suite, au lieu d'agir dans la hâte, comme cela semble être le cas, en particulier lors de la tempête de verglas où le gouvernement, par la voix du premier ministre en particulier, a tenté de court-circuiter le processus pour faire prendre à Hydro-Québec le virage commercial avant même que la commission de l'économie et du travail ne dispose du plan stratégique.

Plusieurs groupes, M. le Président, sont venus en commission et ont dénoncé cette façon de procéder. Ils ont accusé le gouvernement de détournement de démocratie. J'espère, M. le Président, qu'Hydro-Québec va entendre raison et qu'à l'avenir, avant de prendre des décisions qui sont lourdes de conséquences, le processus sera suivi et respecté.

C'est pourquoi, M. le Président, la recommandation 1 dans le rapport de la commission de l'économie et du travail, cette recommandation oblige la société Hydro-Québec à comparaître annuellement devant la commission parlementaire afin de permettre à cette dernière d'effectuer le suivi du plan stratégique. Car il ne s'agit pas seulement de se lancer dans le virage commercial, encore faut-il donner les assurances nécessaires aux parlementaires et à la population que ce virage se fait dans les intérêts des Québécois et non au détriment des Québécois. Je tiens à souligner, M. le Président, que, lors de l'audition du président d'Hydro-Québec, on n'a pas eu toutes les réponses. Par conséquent, il y a des questions qui demeurent posées et auxquelles on aura probablement des réponses dans un processus de rencontre annuelle avec Hydro-Québec.

Une autre recommandation qui a retenu mon attention concerne la nécessité de fournir des études approfondies sur les risques financiers. C'est un élément qui est revenu à répétition dans les audiences que nous avons eues, M. le Président. Lorsqu'on parle de virage commercial et d'investissement à l'étranger, il faut savoir qu'Hydro-Québec va investir aux États-Unis, cela va de soi, mais aussi dans des pays du Sud: on a parlé du Kazazhstan, on a parlé du Pérou, on a parlé de l'Afrique, on a parlé d'Asie. Ce sont des pays qui politiquement, dans certains cas, sont instables et qui financièrement ne sont pas très solides. Alors, avant d'investir les yeux fermés dans ces régions-là au nom de la compétition internationale, il faut s'assurer que cela va se faire dans les intérêts des citoyens.

Comme députée de la Montérégie qui tient beaucoup à défendre les intérêts de sa région, M. le Président, je voudrais insister sur la recommandation 10 qui recommande à Hydro-Québec de favoriser les régions du Québec, tant dans le développement que dans ses opérations. Oui, M. le Président, le plan stratégique doit être assez clair, parce que les populations des régions contribuent au paiement de leurs factures et une part de ces revenus doit leur revenir sous forme de création d'emplois, dans les investissements que fait Hydro-Québec.

Je terminerai là-dessus, M. le Président, faute de temps, mais, encore une fois, je réitère mon souhait pour qu'Hydro-Québec entende raison et suive les recommandations unanimes qui sont dans ce rapport. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière. Ceci met fin au débat restreint de deux heures. Je cède maintenant la parole au leader du gouvernement. M. le leader.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Pour permettre aux députés qui n'ont pas encore eu le temps d'aller à la clinique de sang du président, ici, dans le hall d'entrée de l'Assemblée nationale, je vais vous demander d'ajourner nos travaux à demain matin, le 9 avril, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous ajournons nos travaux au jeudi 9 avril, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 9)


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