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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, December 17, 1997 - Vol. 35 N° 150

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir un moment.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir. Alors, Mmes, MM. les députés, veuillez prendre place.


Affaires courantes


Dépôt du document intitulé Réforme parlementaire – Thème 5: Présence des témoins en commission parlementaire

Pour débuter les affaires courantes, je dépose une proposition, comme je l'avais indiqué la semaine dernière, de modification additionnelle au règlement de l'Assemblée relative à la présence de témoins en commission parlementaire.

La présente proposition a pour but de définir un cadre de fonctionnement permettant de clarifier les droits et obligations des personnes appelées à témoigner devant les commissions parlementaires soit parce qu'elles y ont été invitées soit parce qu'elles ont été assignées.

Elle vise à assurer l'exécution efficace des mandats des commissions dans le respect des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres, tout en garantissant aux citoyens qui y participent qu'ils seront traités avec déférence, équité et impartialité, dans le respect de leurs droits fondamentaux.

La présente proposition s'inspire de diverses recommandations formulées dans deux rapports d'experts, en 1984 et en 1989, de même que dans un projet de règles de fonctionnement préparé en 1993 pour la présidence.

J'annonce également qu'à la suite d'une entente avec les leaders parlementaires la commission de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire les leaders, les whips et les présidents de commissions permanentes, se réunira en séance de travail les 22 et 23 janvier prochain pour étudier les propositions de réforme parlementaire qui ont été déposées depuis la semaine dernière.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Merci. M. le Président, veuillez prendre en considération l'article b.


Projet de loi n° 403

Le Président: Alors, à l'article b du feuilleton, Mme la ministre de la Culture et des Communications présente le projet de loi n° 403, Loi sur la Grande bibliothèque du Québec. Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. Ce projet de loi institue la Grande bibliothèque du Québec.

Il prévoit que la Grande bibliothèque a pour mission d'offrir un accès démocratique à la culture et au savoir et d'agir, à cet égard, comme catalyseur auprès des institutions documentaires québécoises, contribuant ainsi à l'épanouissement des citoyens. Il prévoit également que la Grande bibliothèque poursuit les objectifs suivants: valoriser la lecture et l'enrichissement des connaissances, promouvoir l'édition québécoise, faciliter l'autoformation continue, favoriser l'intégration des nouveaux arrivants, renforcer la coopération et les échanges entre les bibliothèques et stimuler la participation québécoise au développement de la bibliothèque virtuelle. Le projet de loi confère à la Grande bibliothèque les pouvoirs lui permettant de réaliser cette mission.

Ce projet de loi établit, de plus, les règles relatives au fonctionnement de la Grande bibliothèque et à la composition de son conseil d'administration.

En outre, ce projet de loi modifie la Loi sur la Bibliothèque nationale du Québec afin de prévoir l'obligation pour la Bibliothèque nationale de conclure, avec l'approbation du gouvernement, une entente avec la Grande bibliothèque pour lui confier la garde, la mise en valeur et la diffusion du deuxième exemplaire du dépôt légal des documents publiés.

Enfin, ce projet de loi prévoit que les ententes avec la ville de Montréal concernant la collection de sa Bibliothèque centrale et sa contribution aux dépenses de fonctionnement de la Grande bibliothèque sont soumises à l'approbation du gouvernement.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Oui.

Le Président: Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Rapport annuel du ministère des Finances

M. Landry (Verchères): M. le Président, je dépose le rapport annuel du ministère des Finances pour 1996-1997.

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre d'État à la Métropole.


Rapport annuel de la Société du Palais des congrès de Montréal

M. Perreault: Oui, M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 de la Société du Palais des congrès de Montréal.

(10 h 10)

Le Président: Très bien. M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor.


Rapport annuel du Conseil du trésor

M. Léonard: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 du Conseil du trésor.

Le Président: Alors, ce document est déposé, comme le précédent. M. le ministre de la Justice.


Rapports annuels de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec et de l'Ordre des technologues professionnels du Québec

M. Ménard: M. le Président, je dépose les rapports annuels 1996-1997 des ordres professionnels suivants: Ordre des infirmières et infirmiers du Québec et Ordre des technologues professionnels du Québec.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


Rapport annuel de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec

M. Julien: Alors, M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec.

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre du Travail.


Rapport annuel du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre

M. Rioux: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.

Le Président: Ce document est déposé. Mme la ministre déléguée au Revenu.


Rapport annuel du ministère du Revenu

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 du ministère du Revenu.


Entente sur la transmission de renseignements concernant les prestataires admissibles au Programme d'allocation-logement unifiée

Et je dépose l'entente sur la transmission de renseignements concernant les prestataires admissibles au Programme d'allocation-logement unifiée entre la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité et le ministre du Revenu du Québec.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés.


Rapport de mission de l'assemblée annuelle de l'Eastern Regional Conference du Council of State Governments

Pour ma part, je dépose le rapport de la mission réalisée à l'assemblée annuelle de l'Eastern Regional Conference du Council of State Governments tenue à Portland, Maine, du 27 au 30 juillet dernier. Au cours de cette mission, j'étais accompagné par M. le député de Groulx, M. le député de Papineau, M. le député de Lotbinière, Mme la députée de Mille-Îles et M. le député de Frontenac.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, Mme la présidente de la commission de l'aménagement du territoire et députée de Mégantic-Compton.


Étude détaillée du projet de loi n° 183

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 15 décembre 1997 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 183, Loi concernant le budget de la Ville de Montréal. La commission a adopté le projet de loi sans amendement.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.


Étude détaillée du projet de loi n° 179

M. Lachance: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé le 16 décembre 1997 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 179, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. La commission a adopté le projet de loi avec un amendement.

Le Président: Ce rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. M. le député de Châteauguay.


Revenir sur la décision visant à prédéterminer le pourcentage de pourboires reçus par les serveurs

M. Fournier: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 2 990 pétitionnaires, serveuses et serveurs travaillant au Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le gouvernement du Québec et le ministre du Revenu ont pris une décision allant à l'encontre des intérêts de milliers de serveuses et de serveurs travaillant au Québec dans le domaine de l'hôtellerie;

«Considérant que le gouvernement du Québec et le ministre du Revenu veulent déterminer notre revenu imposable sur une base où l'on suppose le montant que nous aurions dû recevoir en pourboires;

«Considérant que le gouvernement du Québec et le ministre du Revenu ont décidé que cette nouvelle taxation entrait en vigueur rétroactivement à janvier 1994;

«Considérant que le gouvernement du Québec et le ministre du Revenu n'ont aucune base pour déterminer le pourcentage de pourboires reçus en fonction de nos ventes et compte tenu qu'aucune loi ne détermine le pourcentage de pourboires à recevoir ni n'oblige un client à le verser;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du gouvernement du Québec et du ministre du Revenu afin qu'ils reviennent sur leur décision d'imposer les revenus de pourboires non reçus des serveuses et des serveurs oeuvrant dans le domaine de l'hôtellerie.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Johnson. Alors, il n'y a pas de pétition. M. le député d'Outremont.

M. Laporte: M. le Président, je sollicite le consentement de l'Assemblée afin de déposer une pétition non conforme.

Le Président: Alors, il y a consentement, M. le député.


Maintenir ouvert le bureau ouest de la Régie du logement pour les résidents de l'Ouest-de-l'Île de Montréal

M. Laporte: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à M. Rémy Trudel, ministre responsable de la Régie du logement, par 369 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du comté d'Outremont et responsables de groupes communautaires du comté d'Outremont.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«La fermeture du bureau ouest de la Régie du logement diminuera l'accès à la justice pour nous, les résidents de l'Ouest-de-l'Île.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«C'est pourquoi, nous, soussignés, demandons à M. Rémy Trudel, ministre responsable de la Régie du logement, de rouvrir le bureau ouest, Côte-des-Neiges, de la Régie du logement en nous redonnant les trois services, c'est-à-dire les services de plaintes, d'information et d'audition.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège. J'indique au député de Richmond que je n'ai pas terminé l'étude de la question de privilège qu'il m'a soumise. Alors, normalement, j'espère être en mesure de rendre la décision peut-être demain.

Je vous avise, par ailleurs, qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion sans préavis du M. le député de Châteauguay.


Questions et réponses orales

Ce qui nous amène maintenant à la période de questions et de réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Mesures de création d'emplois pour les jeunes

M. Johnson: Dans son discours inaugural, le 25 mars 1996, le premier ministre s'est attardé assez longtemps sur les défis économiques qui se posaient au Québec à l'égard de la création d'emplois. Il avait fait porter beaucoup d'insistance sur les programmes qui devaient créer de l'emploi chez les jeunes, notamment. Le premier ministre nous disait qu'il avait, à ce moment-là – je le cite – «le souci de la création d'emplois pour les jeunes et par les jeunes dans toutes les régions du Québec».

Le 29 octobre 1996, lors du discours d'ouverture du Sommet, le premier ministre faisait grand état du fait que, cette fois, autour de la table – je le cite – il y avait des jeunes: «Ils doivent prendre part aux décisions qui vont faire leur Québec de demain et doivent aussi participer à l'effort qui va remettre le Québec sur ses rails.» On a décodé, depuis, que, pour les jeunes, faire l'effort de remettre le Québec sur les rails, c'était de voir ce qui se passerait dans l'éducation et comment la ministre était pour sévir en matière de coupures budgétaires dans le domaine de l'éducation.

Pourtant, même si c'était une priorité du premier ministre dans son discours-fleuve où il y en avait pour tout le monde, où tout le monde était beau et tout le monde était gentil et surtout le gouvernement, les statistiques de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre – ce n'est pas un document d'un service de recherche partisan – sur l'emploi au Québec, les rapports statistiques mensuels, lorsqu'on prend un mois de cette année avec les mois correspondants de l'année dernière, nous montrent une chute de l'emploi chez les jeunes: moins 10 000, en janvier; moins 22 800, en avril; moins 33 000, au mois d'août, par rapport au mois d'août précédent; une moyenne, cette année, de moins 16 000 emplois; un taux de chômage de 20 %; des événements comme, notamment, la baisse de l'emploi chez les 15-24 ans, 37 000 postes à toutes fins pratiques au mois de mai, cette année, par rapport au mois de mai de l'année dernière, entraînant – je cite la SQDM, toujours – un important recul du taux d'emplois de 48 % à 44 %.

Est-ce que le premier ministre, qui nous a, dans ces discours-là, entretenus de sa priorité pour l'emploi, de sa priorité notamment pour l'emploi chez les jeunes, peut finalement reconnaître que ses politiques sont une absence de politique, que c'est un échec, que les statistiques s'en vont dans le sens d'une détérioration chez les jeunes, qu'il n'y a toujours pas de politique économique ciblée sur l'emploi chez les jeunes dans toutes les régions du Québec et que le premier ministre doit s'engager à faire quelque chose plutôt qu'à dire des choses?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement a fait de l'emploi, je dirais, son obsession. Nous avons pris un ensemble de mesures sans précédent pour assainir l'économie, assainir les finances publiques, pour créer un climat au sein duquel l'investissement et la confiance des consommateurs pourraient revenir. Et tout cela est en train de fonctionner, on le voit. Du côté de la confiance des consommateurs, on enregistre des niveaux records depuis plusieurs années. Du côté manufacturier, les livraisons atteignent également des niveaux extrêmement élevés, l'exportation. L'inflation est sous contrôle, bien sûr, et nous voyons, M. le Président, que, dans l'ensemble, depuis un an, nous avons créé au-delà de 80 000 emplois nouveaux au Québec.

(10 h 20)

Ceci étant dit – et, là-dessus, je serai du même avis que le chef de l'opposition – du côté des jeunes, il faut que nous poursuivions nos efforts parce que les emplois qui ont été créés, dans l'ensemble, n'ont pas profité assez aux jeunes. Et nous savons que le taux de chômage général qui est à 11 % est inacceptable, mais est encore moins acceptable du côté des jeunes. Certainement que, s'il y a une préoccupation collective que nous devons avoir au Québec, c'est du côté des jeunes.

Alors, bien sûr, le gouvernement n'a pas été inactif. Nous avons adopté un grand nombre de mesures pour favoriser le redécollage de l'emploi chez les jeunes. Nous avons, dans le dernier budget, annoncé l'investissement de 100 000 000 $ sur trois ans pour appuyer les études et l'emploi chez les jeunes. Nous avons favorisé également l'étude, parce que l'étude, c'est le chemin le plus privilégié pour arriver à l'emploi. Donc, nous avons gelé les frais de scolarité, M. le Président. Nous avons également prévu 30 000 000 $ pour adapter les compétences des jeunes diplômés aux besoins spécifiques des nouvelles technologies. Nous avons également favorisé des emplois de qualité pour les jeunes par notre appui aux centres de développement de l'information, 21 000 000 $. Nous avons, par les mesures de départ volontaire qui ont été mises en oeuvre, permis des emplois nouveaux pour 9 000 jeunes dans l'éducation, M. le Président. C'est des choses importantes. On sait qu'on est en train de renouveler le secteur de l'éducation en termes du personnel qui y oeuvre. Nous avons élargi la clientèle du crédit d'impôt pour stages en entreprise, 14 000 000 $. Et il y a un nombre de mesures important, comme par exemple la création de 75 carrefours jeunesse-emploi, M. le Président.

Donc, le gouvernement fait tout ce qu'il peut et certainement pas encore assez. On va en faire plus. Nous sommes en train de travailler sur un programme général pour les jeunes. Mais, M. le Président, je peux vous dire que la base a été reconstituée, nous avons prévu que la génération qui viendra pourra profiter d'un régime des rentes et qui lui donne une bonification identique à celle de la génération que nous sommes, en termes de revenus éventuellement, par une hausse des cotisations. Ce que vous avez devant vous, M. le Président, c'est un gouvernement qui est bien conscient de la situation, qui fait des efforts extrêmement considérables, qui a enregistré des gains et qui va continuer de le faire.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre veut nous expliquer comment on réalise des gains lorsque ça chute de 19 000 emplois, l'emploi chez les jeunes? Est-ce que le premier ministre veut nous dire pourquoi il est d'accord avec nous, soi-disant parce qu'on dit qu'il devrait poursuivre ses efforts, alors qu'on prétend qu'il n'a même pas commencé à s'occuper des jeunes? Est-ce que le premier ministre pourrait au moins, je dirais, donner suite à ses engagements, comme celui que je citais tout à l'heure, de dire que les jeunes était à la table pour décider de leur avenir et que c'était important qu'ils participent également à la définition de leur avenir dans toutes les régions du Québec, alors que son ministre responsable du développement régional, encore hier, en commission parlementaire, a refusé que les jeunes siègent dans les CLD, dans la nouvelle politique de développement régional? Est-ce que le premier ministre, au lieu de faire des discours, pourrait nous dire quand il va commencer à faire des choses, au lieu de poursuivre ses discours?

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Je pense que, pour tout ce qui touche une question aussi grave que l'emploi des jeunes, le discours doit être modéré, et le nôtre l'est. Le premier ministre vient d'exposer une série de politiques extrêmement substantielles, et même quand tous les résultats auront été recueillis, s'il reste encore un segment important de notre jeunesse en chômage, ça ne laissera place à aucun discours triomphaliste, même si c'est tentant, parce que ceux qui nous ont précédés, en cinq ans, ont créé zéro emploi, ni jeunes ni vieux – ni jeunes ni vieux.

Vendredi qui vient, 2 500 nouveaux emplois seront annoncés à Montréal, dans des secteurs de pointe, de haute technologie, destinés directement aux jeunes, et ce n'est que la suite de ce qui a déjà été commencé avec Ubi Soft, avec Discreet Logic, avec les CDTI, les centres de développement technologique. Il y en a un ici, à Québec, dans l'ancien édifice du Soleil , le faubourg des Récollets à Montréal, 45 entreprises intéressées. Donc, ça, c'est bien au-delà du discours. Comme le dit Jean-Philippe Décarie ce matin, «Montréal est en relance, cela se voit, cela se sent, cela se parle». Il y a juste l'opposition officielle qui ne sent rien, ne voit rien et ne parle de rien qu'elle connaît.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre va convenir que ce qui se sent et ce qui se voit, c'est l'inaction du gouvernement à l'endroit des jeunes? Ce qui se voit, ce qui se sent et ce qui se passe, c'est une méthode de calcul du ministre des Finances lorsqu'il se vante que 25 000 emplois auraient été créés depuis que le premier ministre est en poste. En réalité, en vertu de la même, même règle de calcul, c'est 435 000 qui auraient été créés au Canada. Donc, on aurait le privilège douteux d'avoir créé 6 % des emplois canadiens, alors qu'on est distancé constamment, y compris dans l'emploi chez les jeunes. Qu'on regarde le Canada, qu'on regarde nos voisins de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick ou d'ailleurs; on n'est pas là.

Est-ce que le premier ministre va arrêter de faire des discours ou de faire faire des discours par le ministre des Finances et prendre des décisions pour que les jeunes participent vraiment à leur avenir, aient une voix au chapitre et commencent à récolter les fruits de ce qui est une soi-disant relance économique extraordinaire, qui n'est pas là, qui est fragile, les chômeurs le savent?

Le Président: Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.

Mme Harel: Alors, M. le Président, le chômage chez les jeunes est trop élevé, tout le monde le sait. Mais peut-on constater qu'il l'est moins en 1997 qu'il ne l'était en 1993 lorsque le chef de l'opposition était premier ministre? Chez les 15 à 29 ans, en 1993, le taux de chômage était de 17 %; pour les neuf premiers mois de 1997, il était à 16,8 %.

M. le Président, ça ne nous réjouit pas, mais ça nous indique que le problème n'est pas récent. Ce que ça nous indique aussi sur une plus longue période, soit des 11 premiers mois de 1993 aux 11 premiers de 1997, c'est qu'au Québec l'emploi des jeunes a reculé, effectivement, de 12 000 postes, mais qu'au Canada il a reculé de 35 200 postes. Il y a un problème à l'égard de l'emploi des jeunes dans les sociétés industrialisées. L'OCDE vient de tenir un très important sommet sur cette question-là. Demain, les partenaires du marché du travail – associations patronales, syndicales et communautaires – se réunissent au Québec justement pour faire des propositions très concrètes et s'engager elles-mêmes à l'égard de cette question.

Alors, M. le Président, ai-je besoin, également, en concluant, de vous dire que les 80 carrefours jeunesse-emploi mis en place par le gouvernement depuis deux ans dans l'ensemble des circonscriptions représentées ici, à l'Assemblée nationale, à l'initiative des députés, seront les bateaux amiraux de l'action que le gouvernement entend mener à l'égard de l'emploi-jeunesse?

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que la ministre responsable des promesses inconsidérées du gouvernement qui ont créé des espoirs qui sont déçus de créer le plein-emploi avec des politiques du Parti québécois, est-ce que la ministre, dont la réforme de l'aide sociale pénalise les jeunes, les envoient sur une trajectoire qui les pénalise au titre de l'intégration en emploi, qui va les faire basculer dans la misère, est-ce que la ministre, qui vient de dire qu'effectivement le chômage chez les jeunes a monté, va elle aussi cesser de faire des discours? Est-ce que le premier ministre est satisfait des discours de ses ministres et de son inaction à lui dans tout ça.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.

Mme Harel: D'abord, M. le Président, constatons que le taux d'emplois, en particulier chez les 15-19 ans, a reculé parce qu'il y a un plus haut niveau de fréquentation scolaire. Et constatons également que, chez les 20-24 ans, le taux d'emplois n'a pas régressé, comme le prétend le chef de l'opposition. Mais, cependant, une réalité s'impose, incontournable, c'est que les jeunes qui n'ont pas un niveau de qualification suffisant sont mal pris, dans la vie, maintenant, notamment sur le marché du travail. C'est donc à ce problème-là qu'on s'est attaqué en premier.

Et je vous rappelle que nous avons adopté ici, à l'Assemblée nationale, notamment la loi sur l'apprentissage qui permet, après le secondaire III, à contrat de travail, d'aller chercher un diplôme. Et nous entendons bien intensifier les efforts au niveau de l'éducation et de la main-d'oeuvre pour que les jeunes puissent en bénéficier sur l'ensemble du territoire du Québec.

(10 h 30)

Le Président: En principale, M. le député de Marquette.


Réaménagement des programmes d'études professionnelles au secondaire

M. Ouimet: Parlant de qualification après le secondaire III, M. le Président, ce que vous allez entendre concernant des contradictions en formation professionnelle de la part de la ministre de l'Éducation et de la ministre de l'Emploi risque de vous choquer; ça dépasse l'entendement. Pour éviter le décrochage scolaire, la ministre prétend vouloir multiplier par quatre le nombre de diplômés en permettant aux élèves d'accéder à la formation professionnelle après le troisième secondaire.

Les faits, maintenant. Il y a 10 jours, la ministre a aboli cinq programmes d'études professionnelles au secondaire et elle en abolira 11 autres d'ici quelques jours. Permettez-moi de nommer quelques-uns de ces programmes: exploitation du matériel informatique, secrétariat bureautisé, infographie, dessin de bâtiment, technique d'usinage à contrôle numérique, usinage de machines-outils, électrotechnique et même électromécanique de systèmes automatisés. La moitié des jeunes qui s'inscrivent à ces programmes au secondaire sont des décrocheurs du cégep, et plus de 70 % obtenaient leurs diplômes, et à peu près tous les diplômés trouvaient un emploi dans ces secteurs-là.

Ma question à la ministre de l'Éducation: Pourquoi la ministre de l'Éducation abolit-elle 16 programmes qui donnent à nos jeunes un diplôme et un emploi?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation et ministre de la Famille et de l'Enfance.

Mme Marois: Alors, c'est l'habitude, M. le Président, d'apporter toujours un exemple pointu faisant oublier la forêt. Alors, si nous retirons certains programmes, c'est essentiellement pour pouvoir les redéfinir d'une façon plus moderne, répondant davantage et mieux...

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, nous mettons suffisamment d'énergie, de temps et d'efforts, tant au niveau de la formation professionnelle qu'au niveau de la formation technique, pour que je n'accepte d'aucune espèce façon qu'on nous dise que nous ne sommes ni préoccupés des besoins du marché du travail ni préoccupés de la possibilité qu'ont des jeunes de se trouver des emplois lorsqu'ils s'inscrivent dans des filières professionnelles ou techniques.

Cependant, j'ai la responsabilité, comme ministre de l'Éducation, de m'assurer que la formation qui est donnée, qui est accessible aux jeunes, soit adéquate, conforme aux exigences du marché du travail. Nous devons donc moderniser l'ensemble de nos programmes, et c'est ce que nous faisons, M. le Président. Nous le faisons dans les secteurs mentionnés par le député de Marquette et nous le ferons dans tous les secteurs de formation professionnelle et de formation technique.

Pourquoi? Parce que nous ne voulons pas seulement, comme dit le député de Marquette, permettre d'ouvrir, après le troisième secondaire, l'accès à la formation professionnelle. Nous voulons permettre à des jeunes de quatrième, de cinquième secondaire d'aller vers des métiers spécialisés, d'aller vers l'informatique, d'aller vers les technologies du bâtiment, d'aller vers les technologies de l'environnement. Nous voulons aussi bâtir des passerelles entre le secondaire professionnel et le technique, de telle sorte qu'un jeune ne voie jamais son avenir bouché parce qu'il aura choisi de se former à un métier.

Nous n'avons pas de leçons à recevoir de ce parti, qui nous a laissé un véritable dégât au niveau de la formation professionnelle. Il y avait 16 000 inscrits en formation professionnelle chez les jeunes lorsque nous sommes arrivés au pouvoir. Nous avons augmenté ce nombre de 24 % en deux ans à peine.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: M. le Président, la question était: Pourquoi la ministre veut-elle abolir et pourquoi a-t-elle aboli ces programmes de formation professionnelle au secondaire, qui débouchaient sur des diplômes et sur des emplois?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Parce que, M. le Président, si le député de l'opposition se donnait la peine d'analyser l'ensemble des actions qui sont menées à la formation professionnelle, il constaterait que ce n'est probablement pas cinq, six ou 10 programmes que nous allons renouveler, mais c'est l'ensemble des programmes que nous allons renouveler, pour les mettre à jour, pour que ces programmes correspondent mieux aux besoins du marché du travail. Et, s'il confond abolition avec redéfinition, avec redesign des programmes, c'est parce qu'il ne connaît pas ses dossiers.

Alors, je l'invite, M. le Président, à venir rencontrer les gens de la formation professionnelle, à prendre connaissance des documents qui sont faits sur la relance au collégial et la relance à la formation professionnelle, pour constater que le taux de satisfaction des entreprises à l'égard de nos jeunes qui sortent de la formation professionnelle et qui sortent de la formation technique est de l'ordre de 80 %, 85 %, ce qui veut dire que nos programmes doivent être adaptés, doivent être conformes aux besoins, mais, en même temps, ne jamais perdre de vue que nous avons une responsabilité de formation générale chez nos jeunes pour qu'ils restent toujours capables de revenir en formation, compte tenu que, durant leur vie active et leur vie professionnelle, ils auront probablement à changer de métier ou de profession à cinq, six ou sept reprises.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: M. le Président, la ministre est-elle consciente que, dans le réseau scolaire, on dit, et les sept commissions scolaires m'ont mandaté pour le lui dire, qu'elle ne sait pas ce qui se passe dans son ministère? Il y a un décalage entre son discours et les faits. Y a-t-il consentement, M. le Président, pour déposer la lettre qui annonçait l'abolition de programmes et la décision prise pour abolir des programmes?

Des voix: Consentement.


Document déposé

Le Président: Il y a consentement.

M. Ouimet: Par ailleurs, M. le Président, pourquoi la ministre de l'Éducation veut-elle forcer ces jeunes à s'inscrire au cégep dans des programmes équivalents, alors que la plupart n'auront même pas les préalables pour entrer au cégep et que le taux d'échec au cégep, dans ces programmes-là, il est de 80 % dans certains programmes, M. le Président?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, forcer des gens à faire des choses qu'ils ne veulent pas, c'est rare qu'on réussisse, à l'éducation. Ce serait tellement plus simple, d'ailleurs, parce que notre taux de décrochage serait pas mal plus bas que celui qu'on a.

Alors, ce que nous faisons, M. le Président... Au moment où le Parti libéral était au pouvoir, ça leur prenait quatre ou cinq ans à réviser les programmes de formation professionnelle et technique. Et, s'il y a une des plaintes qu'on nous fait d'une façon systématique, quand on rencontre les employeurs, c'est qu'ils souhaitent qu'on réduise ce temps-là. Nous en sommes actuellement à 24 mois et c'est encore trop long. Je l'affirme, ici, parce que je crois qu'il faut encore le ramener à plus court. Ce que nous faisons... Et c'est important parce qu'on parle de l'avenir des jeunes et de l'avenir de gens que, si on ne leur donne pas les bons outils pour ensuite accéder au marché du travail, on voue au chômage et on les voue à la «jobine». Je m'excuse d'utiliser cette expression, mais c'est ça.

Effectivement, dans le secteur informatique, ce qui nous est dit, c'est que la formation au secondaire, elle est actuellement désuète. Elle doit absolument être revue pour correspondre au marché du travail, parce que ce n'est pas ce type de personnes dont on a besoin ni ce type de formation. Alors, ou je me ferme les yeux puis je me dis: Je continue à former des jeunes qui ont peut-être des emplois maintenant mais qui, dans six mois, dans un an, n'en auront pas, ou j'agis en personne responsable et, à ce moment-là, je me préoccupe de faire un peu de planification et même d'en faire suffisamment pour être capable de répondre à court terme, à moyen terme, à long terme aux besoins du travail, mais, surtout, surtout, faire en sorte que les jeunes sortent outillés de nos écoles, que ce soit au niveau professionnel ou au niveau technique ou au niveau universitaire.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Si c'est vrai, ce que dit la ministre, ça veut dire quoi, ce qu'on lit dans son Prendre le virage du succès ? Plutôt le dérapage vers l'échec! «Le ministère fera en sorte que les élèves puissent accéder plus tôt aux programmes conduisant au D.E.P., soit après le troisième secondaire.» Ça veut dire quoi, dans ce cas-là?

Une voix: C'est écrit noir sur blanc.

(10 h 40)

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, j'invite le député à lire le reste du cahier, M. le Président, puisqu'on y retrouve l'ensemble de la stratégie qui concerne la formation professionnelle et qu'à cet égard il y a plusieurs volets qui mènent soit à la formation de métiers, à un diplôme d'études professionnelles ou à une attestation de spécialisation professionnelle qui, elle, d'ailleurs, s'obtient après le secondaire IV ou après le secondaire V. Il y a donc plusieurs voies de diversification qui ont été développées et qui sont offertes aux jeunes du Québec. Ma collègue de l'Emploi et de la Solidarité parlait du régime d'apprentissage. Cela est une autre voie, M. le Président. Le régime alternance études-travail, cela est une autre perspective. Il n'y a pas qu'une seule solution, parce que les problèmes sont multiples, sont différenciés et qu'à cet égard nous devons offrir autant de solutions différenciées.

Il y a une chose à laquelle je tiens, cependant, M. le Président, c'est que jamais pour un jeune l'avenir ne soit bloqué et ne soit fermé. Il faut toujours, lorsqu'ils sortent de l'école, qu'ils soient capables, parce qu'ils ont été formés à un métier, de continuer dans une technique au cégep, de continuer à l'université, à l'École de technologie supérieure. Pourquoi pas, M. le Président? C'est ça qui va revaloriser la formation professionnelle et donner le goût à des jeunes de s'y inscrire.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, en principale.


Grève illégale des employés de l'hôpital Notre-Dame à Montréal

M. Paradis: Oui, M. le Président. Les employés de l'hôpital Notre-Dame ont déclenché une grève illégale illimitée hier soir à minuit suite, entre autres, à l'annonce de fermetures additionnelles de lits. Le ministre de la Santé peut-il nous indiquer quels sont les effets de ce débrayage illégal sur les patients actuellement hospitalisés ou en attente de chirurgie ou d'hospitalisation?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, d'abord il n'y a pas du tout d'implication, d'insatisfaction quant au nombre de lits qui est reliée à la grève illégale. Il y a quelques jours d'ailleurs le syndicat se disait satisfait de la décision qui avait été prise par la régie régionale et l'hôpital pour maintenir au niveau de 1 200, je pense, ou 1 250 le nombre de lits, ce qui est complètement en ligne avec le protocole qui a été signé entre l'Université de Montréal, le CHUM et le ministère lors de la création du CHUM. Il n'est pas question de nombre de lits là-dedans.

Ce pour quoi le syndicat fait son débrayage, c'est sur la question de la dissidence au sujet du nombre de postes qui sont affichés. Présentement, au moment où on se parle, ce dont il est vraiment question, c'est d'une trentaine de postes d'infirmières auxiliaires. Dans les dernières semaines, l'hôpital avait déjà affiché plus d'une centaine de postes, et c'est à peu près 800 qui vont être affichés après la réunion du conseil d'administration d'hier. C'est au-dessus de 900, 925 postes qui sont affichés. Il en reste effectivement une trentaine. J'ai parlé aux personnes impliquées, encore hier soir, pour avoir le portrait très clair, M. le Président. Il reste une trentaine de postes, et le conseil d'administration voudrait attendre après sa prochaine réunion du 20 janvier pour décider d'afficher ces postes-là parce qu'il y a d'autres décisions à prendre. C'est le seul bât qui blesse encore.

Je pense que ça ne justifie pas, M. le Président, une grève illégale. Ça ne justifie pas du tout, dans le contexte actuel, de mettre en péril quoi que ce soit. Toutes les mesures sont prises actuellement pour que les patients qui sont hospitalisés au pavillon Notre-Dame... et, si d'autres pavillons suivent du CHUM, tout est mis en place pour que les services soient assurés. J'espère qu'on ne dépassera pas la mesure, parce que la grève, elle est illégale puis elle n'est pas justifiée par rapport au problème auquel on fait face.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, tout le monde s'entend pour dire que la grève est illégale. À ce moment-ci, comment le ministre peut-il entendre régler le problème s'il ne s'adresse pas à une des parties concernées qui dit, elle – et ça, c'est la partie syndicale – qu'il y a un lien entre le débrayage illégal amorcé hier soir à minuit et la fermeture de lits; qui, elle, ne parle pas simplement de 30 postes mais parle de l'abolition de 427 postes au Centre hospitalier de l'Université de Montréal? Comment le ministre peut-il entendre régler le problème s'il ne s'intéresse même pas aux causes du problème, dans un premier temps?

Dans un deuxième temps, le ministre peut-il nous indiquer quels sont les effets sur les malades de cette grève illégale, autant ceux et celles qui sont hospitalisés, ceux et celles qui sont en attente de chirurgie ou ceux et celles qui attendent d'être hospitalisés?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je le répète, ce n'est pas le nombre de lits qui est en cause; ça a déjà été une discussion là-dessus et ça ne l'est plus, aucun argument n'a été invoqué de ce côté-là. Quant au nombre de postes qui vont être abolis, c'est sûr qu'il va y avoir des postes qui vont être abolis. Ce qui a été signé, le syndicat le sait. Le syndicat a signé avec le gouvernement une entente, en mars dernier, où on concluait qu'il y aurait une diminution du coût de la main-d'oeuvre de 6 % et qu'en partie ça correspondrait à un certain nombre de postes qui seraient abolis. Alors, ça n'est pas nouveau, c'est prévu, et ça va se faire dans l'ordre et correctement dans la réorganisation, dans les gains d'efficacité de la réorganisation des trois pavillons qui forment maintenant le CHU. Alors, il n'y a pas de problèmes de ce côté-là.

Le point de discussion où il y a eu désaccord, ça a été de s'assurer qu'on suit bien la convention collective. On a dit qu'on va respecter ce qu'on a signé. Les postes ont été affichés; ceux qui restent vont l'être dans les plus brefs délais. C'est ça qu'il reste encore.

Quant aux patients, l'hôpital s'en occupe. On me dit que ce matin, à la fin de la matinée, les représentants du CHUM vont informer la population. C'est eux qui sont responsables de gérer ça sur place. On suit la situation de très, très près avec l'hôpital, avec la régie régionale et avec les représentants de la CSN aussi. Et je peux assurer la population que tout va être fait pour que les gens soient en sécurité et qu'ils aient les services. Mais il va falloir qu'on ait le minimum de collaboration et de sens de responsabilité aussi du syndicat, dans cette affaire-là.

Je le répète, la grève, elle est illégale. Et les points qui sont en discussion, il y a un médiateur qui est dans le dossier, nommé par les services essentiels, il n'y a rien qui empêche que ça se règle correctement entre des parties qui doivent savoir comment travailler ensemble, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Paradis: Dans le contexte où il y a grève illégale illimitée à Notre-Dame, où il y a menace de débrayage illégal à l'hôpital Hôtel-Dieu dès 13 heures cet après-midi, dans le contexte où le Conseil des ministres se réunit aujourd'hui, quels sont les gestes que propose le premier ministre pour régler ce conflit?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, nous suivons la situation, je dirais, d'instant en instant. Nous sommes très informés de ce qui se passe. Cette grève est illégale, elle est inacceptable. Elle est condamnée certainement par l'opinion publique. Elle va à l'encontre des obligations fondamentales des travailleurs de la santé. Et je pense que l'Assemblée nationale, qui se fait entendre aujourd'hui sur la question – je présume que l'opposition est d'accord avec nous – doit être perçue aujourd'hui comme lançant un appel à ces travailleurs de la santé qui sont des travailleurs responsables et aux dirigeants syndicaux de réintégrer les lieux du travail et de ne pas déclencher de grève illégale. Je crois que ce message devrait être entendu parce qu'il n'y a pas un gouvernement responsable, il n'y a pas une société responsable qui peut accepter les grèves illégales, notamment dans le domaine de la santé.

Le Président: M. le député.

M. Paradis: Je vais simplement reprendre la question au premier ministre. Il y a réunion du Conseil des ministres aujourd'hui. Qu'est-ce que le premier ministre entend proposer pour que ça ne soit pas les patients qui, à la veille de Noël, autant à l'hôpital Notre-Dame qu'à l'Hôtel-Dieu de Montréal, soient pris en otages?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Le député de Brome-Missisquoi peut continuer à vouloir ajouter de l'huile sur le feu...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Ce n'est sûrement pas avec ce genre de comportement qu'il faut agir dans une situation difficile comme ça, M. le Président. Je pense que c'est important d'être serein. On suit la situation, comme l'a dit le premier ministre, d'instant en instant. Toutes les parties qui doivent se parler se parlent régulièrement. Et les mesures qu'il y aura à prendre seront prises en temps voulu, à mesure qu'on va progresser dans les prochaines heures.

(10 h 50)

Mais, encore une fois, ce qui est important à ce moment-ci, ce n'est pas d'essayer d'animer et d'escalader, c'est de s'assurer que les parties réalisent qu'il y a un grand bout de chemin de fait comparativement à la situation où on était il y a quelques semaines, où il y avait beaucoup de points de désaccord. Il y a pas mal de travail qui a été fait, depuis ce temps-là, et il y a un agenda très clair devant nous. Le conseil d'administration du CHUM se comporte de façon complètement responsable et en possession de ses moyens. Il faut suivre la situation, M. le Président. On la suit, et les services sont assurés. Et tout va être fait pour que les patients hospitalisés aient les services.

Encore une fois, moi aussi, j'en appelle à un comportement responsable de la part du syndicat et j'en appelle à tous les employés pour qu'on pense qu'il faut d'abord s'occuper des patients. Et je veux les assurer qu'on va continuer à tout faire pour que la convention soit respectée et qu'on règle les problèmes dans les meilleurs délais, M. le Président, et on parle vraiment des prochaines semaines et du tout début de 1998, pour que tous les postes qui doivent être affichés... auront été affichés vers la fin du mois de janvier. Il en reste à peu près une trentaine à régler, c'est de ça qu'on parle, là, une trentaine de postes qui restent à afficher. Il y a d'autres points en discussion, mais c'est là-dessus que ça a bloqué hier soir, et je pense que ça ne peut pas justifier une grève, surtout pas une grève illégale.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre se rend compte que ce qu'on reproche à son ministre et à lui-même, c'est de dire qu'ils suivent la situation, qu'ils suivent ci, qu'ils suivent ça? On leur demande de faire quelque chose. Est-ce que le premier ministre ne sait pas qu'il a le pouvoir, cet après-midi, de prendre des décrets sur recommandation du ministre de la Santé en vertu de la loi n° 160 afin de s'assurer que les syndicats qui sont en grève illégale... Ce n'est pas suffisant de leur dire qu'on suit de proche ce qu'ils sont en train de faire. C'est qu'on est préoccupé pour vrai, que le gouvernement a des outils, y compris des décrets, pour pénaliser sévèrement les syndicats qui sont en grève illégale dans le secteur de la santé. C'est ça qu'on demande au premier ministre de faire. Est-ce que le grand négociateur, au lieu de suivre, il pourrait faire, des fois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense que les Québécois savent qu'ils sont en face d'un gouvernement qui sait prendre ses responsabilités, qui les connaît et qui va les prendre. Nous connaissons les pouvoirs que nous avons. Nous connaissons les pouvoirs dont le gouvernement est investi, dont le Conseil des ministres est investi, par décret. Je crois que la partie syndicale les connaît aussi. Nous connaissons également la capacité du monde syndical de comprendre ses devoirs lorsqu'ils lui sont bien décrits. Et je crois que, ce matin, le monde syndical, surtout les dirigeants syndicaux et bien sûr les travailleurs directement concernés savent qu'ils sont interpellés par des valeurs traditionnelles au Québec, interpellés par les impératifs de la loi et qu'il y a à Québec un gouvernement qui assume ses responsabilités, lesquelles seront assumées le cas échéant.

Le Président: En principale, M. le député de Rivière-du-Loup.


Célébration du cinquantenaire du drapeau du Québec

M. Dumont: Merci, M. le Président. Dans ses activités partisanes qui sont toujours un peu tendues, le premier ministre doit faire des promesses à ses militants. Les dernières: suite à l'impopularité de ses décisions dans son propre parti, évidemment, les représentants du Parti québécois se sont engagés à faire une précampagne de publicité pour redorer leur blason. Cette précampagne, on croit comprendre qu'à même les fonds publics dans le domaine de la santé elle est commencée pour essayer de faire voir à la population une réalité rose bonbon dans le système de santé, qui est celle qu'on voit à la TV mais qu'on ne voit pas vraiment sur le terrain. Même chose dans l'éducation. La ministre de l'Éducation, à même les fonds publics, a fait une petite campagne de publicité cet automne. On apprend ce matin que le 50e anniversaire du drapeau va être l'occasion pour le gouvernement dans la prochaine année d'ajouter un peu à sa campagne de publicité, avec encore un peu de fonds publics directement et indirectement investis.

Ma question au premier ministre...

Des voix: ...

M. Dumont: Alors, ma question au premier ministre, elle est bien simple: Est-ce qu'au moment où il va financer une précampagne à même les fonds publics il peut expliquer à la population qu'il n'y aurait aucune utilisation meilleure de ces fonds-là pour d'autres besoins de la population?

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

M. Boisclair: M. le Président, le gouvernement du Québec entend souligner avec modestie et bon goût le 50e anniversaire du drapeau. Je pense que nous sommes tous fiers de ce symbole qui réunit le peuple québécois.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: M. le Président, il y a plus de 50 ans que, de part et d'autre, dans cette Assemblée, les parlementaires soulignent cet événement. Il est, je pense, nécessaire et convenable que le gouvernement du Québec, pour le cinquantième, prenne des gestes appropriés. Je répète que nous le soulignerons dans la modestie et avec bon goût. Et une chose est certaine, nous ne tomberons pas dans les excès du gouvernement fédéral. Je peux assurer la population et le député qu'il y aura autant de drapeaux qui flotteront au Québec que de Québécois et de Québécoises qui voudront s'en procurer et les payer.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Est-ce que le premier ministre, qui est présentement en train d'augmenter de 1 % la taxe de vente, après avoir coupé directement dans les services à la population dans les écoles, dans les hôpitaux, pour les familles, peut répondre à la question précise que je vais poser: Est-ce qu'il peut expliquer à la population qu'il n'y avait pas une meilleure utilisation des fonds publics que de créer, dans son gouvernement, un pendant de Sheila Copps à Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, pensez bien que je n'oserais jamais me comparer à Mme Copps. Dans son préambule, le député de Rivière-du-Loup, qui était pressé, a oublié de dire que nous allons également réduire les impôts de 15 % pour les revenus des ménages de moins de 50 000 $, à compter du 1er janvier.

Pour revenir à la question de la célébration du cinquantenaire du drapeau québécois, l'objectif du gouvernement, M. le Président, c'est que nous puissions souligner cet événement important dans la vie de notre peuple de façon non partisane. Le but que poursuit le gouvernement...

Des voix: ...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Dans toute société et dans toute société démocratique, il devrait être possible de considérer qu'il y ait, quelque part, au-dessus des chicanes de partis, au-dessus des allégeances partisanes, des symboles d'unité, des symboles de ralliement, des symboles de fierté; il se trouve que le drapeau du Québec en est un. Sur un fascicule du Parti libéral, récemment, j'ai vu utilisé au moins 16 fois le drapeau du Québec. C'est très bien, c'est très bien.

(11 heures)

M. le Président, nous n'avons pas oublié que c'est un gouvernement de l'Union nationale qui, il y a maintenant près de 50 ans, a adopté le drapeau officiel, l'a fait hisser sur le parlement. Moi, je n'ai pas oublié que, étant étudiant à l'Université Laval, un jour, dans les années 1963, 1962, j'étais au Pavillon Pollack et M. Jean Lesage, qui était premier ministre du Québec à ce moment-là, était venu visiter les étudiants de l'Université Laval. J'étais là, je l'ai vu arriver avec la limousine du gouvernement, avec le drapeau du Québec qui flottait fièrement. M. Lesage, qui représentait très dignement... J'étais fier de mon peuple. J'étais fier de mon gouvernement. J'étais fier de mon drapeau et du premier ministre.

M. le Président, je n'aurai certainement pas à rappeler au chef de l'opposition que, il y a eu 30 ans le 21 octobre, c'est le gouvernement que dirigeait son père qui a adopté un décret qui prévoyait que le drapeau du Québec serait utilisé sur les édifices publics du Québec.

Donc, faisons en sorte qu'il y ait au Québec un point de fierté qui ne soit pas contesté. Donnons-nous la main ensemble pour que nous puissions souligner le grand événement du cinquantenaire sans que ça tombe dans la partisanerie. Que ce soit sobre. Que ce soit digne. Que ça ressemble au Québec et que ça coûte très peu aux fonds publics.

Le Président: Dernière, rapide, complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Est-ce que le premier ministre peut reconnaître que ce qui est en cause ici, ce n'est pas le drapeau du Québec comme symbole de ralliement? Que ce qui est en cause, c'est des campagnes...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dumont: Ce qui est en cause, M. le Président, ce n'est pas le drapeau du Québec comme symbole de ralliement. Ce qui est en cause, c'est des campagnes de publicité sur la santé, sur l'éducation, sur le drapeau, oui, pensées et préparées par les stratèges du PQ pour les fins de leur campagne électorale et opérées et financées à même nos taxes et nos impôts.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je rappellerai avec satisfaction que le député de Rivière-du-Loup vient de changer l'axe de sa question. Maintenant, ce n'est plus le drapeau, ce sont d'autres choses. Alors...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, s'il a changé l'axe de la question, c'est peut-être qu'il vient de se rappeler que le sigle de son parti comporte un lys modifié, un peu stylisé. C'est inspiré du drapeau. Tout le monde s'inspire du drapeau, au Québec, tous les partis, y compris le chef de l'opposition qui, au lendemain de l'échec de Meech et de la déconvenue qu'il en a éprouvé, comme bien du monde au Québec, déclarait: Nous avons parcouru la ville de Québec le lendemain de l'échec de Meech pour chercher le plus gros drapeau du Québec possible et l'installer sur mon balcon à Québec jusqu'à la fête du Travail.

Le Président: M. le député de Sainte-Marie– Saint-Jacques. M. le premier ministre, en terminant, s'il vous plaît.

M. Bouchard: M. le Président, il n'y a aucun reproche dans le rappel que je viens de faire. J'y vois la confirmation que nous avons tous la même fierté pour le Québec et que cette fierté s'est exprimée de façon très générale. J'ai éprouvé le même sentiment que lui au lendemain de l'échec de Meech. Moi aussi, si j'avais trouvé le plus gros drapeau, je l'aurais mis sur mon balcon. Je suis sûr que vous l'avez payé de votre poche, j'en suis convaincu. Ce n'est pas une question de fonds publics, c'est une question de nous rappeler que, au fond de nous tous, les Québécois et les Québécoises, il y a le même sentiment d'appartenance à ce que nous sommes, à la fierté que symbolise le drapeau, et je compte sur l'appui de tous pour que nous le soulignions correctement.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, sur une question de règlement.

M. Johnson: Sur un fait personnel, en vertu de l'article 69, M. le Président, pour indiquer que je n'ai pas besoin de référendum pour dire qui je suis, je n'ai pas besoin de fonds publics. C'est comme ça qu'on s'affiche, et tout le monde peut le faire. On n'a pas besoin de campagne de publicité avec nos impôts.

Des voix: Bravo!

Le Président: Très bien. C'est la fin de la période des questions et des réponses orales. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, à ce moment-ci, me serait-il permis de solliciter le consentement du leader?

Le Président: Mme la députée de Matapédia. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, je sais que vous avez annoncé la fin de la période des questions. Me serait-il permis de solliciter le consentement du leader du gouvernement? Il y a des personnes handicapées qui se sont déplacées aujourd'hui pour assister à la période des questions dans nos galeries. On n'a pas eu le temps de poser...

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement, M. le leader du gouvernement? Il n'y a pas consentement. M. le leader de l'opposition officielle. Alors, à ce moment-ci, M. le leader, la chose est claire: la période des questions et des réponses est terminée, vous avez demandé un consentement pour une question additionnelle, et il n'y a pas consentement.


Votes reportés


Motion proposant de saluer les efforts de l'Assemblée nationale, de la Chambre des communes et du Sénat qui ont conduit à l'adoption de la modification constitutionnelle permettant la mise en place de commissions scolaires linguistiques

Alors, à ce moment-ci, nous allons passer au vote reporté sur la motion de M. le député de Châteauguay. Alors, la motion de M. le député de Châteauguay sur laquelle nous sommes appelés à nous prononcer se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale du Québec salue les efforts conjugués de l'Assemblée nationale du Québec salue les efforts conjugués de l'Assemblée nationale, de la Chambre des communes et du Sénat canadien, qui ont conduit à l'adoption de la résolution de modification constitutionnelle permettant la mise en place de commissions scolaires linguistiques.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa).

(11 h 10)

M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Brouillet (Chauveau), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Garon (Lévis), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

M. Dumont (Rivière-du-Loup). M. Filion (Montmorency), M. Le Hir (Iberville).

Le Président: Est-ce qu'il y a des députés qui s'opposent à la motion? Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:116

Contre:0

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion de M. le député de Châteauguay est adoptée.

Nous allons passer maintenant aux motions sans préavis. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, je solliciterais le consentement de l'Assemblée nationale afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec demande au ministre de la Santé et des Services sociaux de reporter au 1er avril 1998 la mise en vigueur du nouveau système chèques emploi-services pour les services de maintien au domicile pour les personnes handicapées dans les régions de Québec, de l'Outaouais et du Bas-du-Fleuve.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Alors, il n'y a pas consentement. Est-ce qu'il y d'autres motions sans préavis? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Strictement, moi, j'avais compris du ministre de la Santé qu'il était d'accord et que le leader était en désaccord. Est-ce qu'on peut suspendre quelques minutes avec mes collègues, M. le Président?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, nous avons toujours l'accoutumance de nous en parler. Alors, si le leader de l'opposition veut nous en parler, on regardera ça en temps et lieu.

Le Président: Puisqu'il n'y a pas de consentement, s'il n'y a pas d'autres motions sans préavis, nous allons aller aux avis touchant... M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale, en vertu de la Charte de la langue française qu'elle a adoptée, a prévu l'obligation d'accorder la nette prépondérance au texte français lorsqu'on utilise aussi une autre langue, et que des actions récentes de la part des bureaucrates démontrent que, même quand cette règle est clairement respectée, ceux-ci se mettent au-dessus de la loi et imposent leurs propres règles.

«En conséquence, cette Assemblée réaffirme son autorité et exige que la bureaucratie linguistique obtempère aux règles édictées par les élus et cesse d'inventer ses propres interprétations qui sont méprisantes pour le peuple, pour la démocratie et pour l'image du Québec et des Québécois de toute origine et de toute langue.

«That the National Assembly adopted the Charter of the French language which provides the obligation to grant marked predominance to the French version when another language is usedand whereas recent actions on the part of bureaucrats show that even when this rule is clearly respected, they put themselves above the law and impose their own rules, therefore this Assembly reaffirms its authority and demands that the language bureaucracy obey the rules as set out by the elected representatives and stop inventing its own interpretations that are demeaning for all people of Québec, for democracy and for the image of Québec and Quebeckers of every origin and of every language.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, la même réponse que la précédente, c'est-à-dire qu'on aime ça en parler puis on détermine ensuite. Alors, à ce moment-ci, c'est non.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint.

M. Boulerice: M. le Président... Je sais mais j'attends le silence.

Le Président: Alors, vous allez attendre assis, M. le député. Alors, que les députés qui doivent travailler à l'extérieur de l'enceinte du salon bleu quittent rapidement, s'il vous plaît, pour permettre au leader adjoint de présenter ses avis. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Le silence étant revenu grâce à votre magistrale et énergique intervention, j'aviserai cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants: le projet de loi n° 256, Loi concernant la Ville de Blainville, le projet de loi n° 261, Loi concernant la Ville de Shawinigan, le projet de loi n° 226, Loi concernant la Ville de Varennes, et le projet de loi n° 260, Loi concernant la Ville d'Otterburn Park, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

J'avise également cette Assemblée que la commission des institutions entendra, quant à elle, les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 224, Loi concernant l'adoption de Rémi Julien, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; que la commission de l'éducation entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 248, Loi modifiant la Loi concernant la Fédération des commissions scolaires du Québec, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine; que la commission des finances publiques, quant à elle, entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 259, Loi concernant la Fondation du Centre hospitalier de l'Université de Montréal, aujourd'hui, de 15 heures à 17 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

J'avise également cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire procédera à l'étude détaillée des projets de loi publics suivants: projet de loi n° 198, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine, projet de loi n° 197, Loi sur l'Agence de développement du Centre de villégiature de Mont-Tremblant, à la salle Louis-Joseph-Papineau, aujourd'hui, entre 15 heures et 18 heures et, si nécessaire, entre 20 heures et minuit; que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 171, c'est-à-dire la Loi sur le ministère des Régions, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif.

(11 h 20)

Le Président: Merci, M. le leader adjoint du gouvernement.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous allons passer maintenant aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

M. Fournier: Oui, M. le Président. J'ai la mauvaise habitude, je dois le dire, de revenir avec une question, toujours, de solliciter un peu d'accompagnement de la part de la partie ministérielle. Nous sommes aujourd'hui le 17 décembre 1997. Au feuilleton, il y a une question inscrite le 17 décembre 1996 qui fait référence à une réponse suite à une question du 16 mai 1996. Il y a un mois à peu près, le leader adjoint s'était engagé à faire des représentations auprès du ministre des Transports à l'égard de cette question de manière à ce qu'une réponse soit obtenue avant Noël. Je suis bien conscient qu'on pourrait me répondre de l'autre côté qu'il reste encore deux journées. Je me lève aujourd'hui, M. le Président, à cette période, pour mentionner au leader qui est ici ce matin de faire en sorte que, dans ces deux prochaines journées, le ministre des Transports puisse profiter de la séance pour déposer la réponse à cette question.

Ce ne sont pas d'habitude des questions banales lorsqu'on les porte au feuilleton, ce sont des questions, comme le dit le règlement, qui sont d'une étendue beaucoup plus large, qui sont d'intérêt pour des gens, M. le Président, qui paient leurs taxes et qui supportent les coupures et ils ont le droit d'avoir des réponses à leurs questions. Je demande donc, M. le Président, au leader de faire en sorte que, dans les deux prochaines séances, on puisse s'assurer d'avoir des réponses à des questions qui auront bientôt deux ans de vie, pendant que tout ce temps-là on paie les taxes, on subit les coupures et le gouvernement ne répond pas.

Le Président: M. le leader.

M. Jolivet: M. le Président, d'abord je dirai que je suis à un rythme à peu près équivalent à celui de l'ancien gouvernement. Mais, malgré tout cela, je suis d'accord avec le député, et j'ai moi-même, suite à la question qui avait été posée à l'époque, et le leader adjoint avait répondu à cette question, j'ai fait moi-même, par l'intermédiaire de mon bureau, des appels incessants pour qu'on nous donne la réponse. Et je vais continuer à le faire, M. le Président, en espérant que, d'ici la fin de la session, vous aurez réponse à vos questions.

Le Président: Très bien. M. le député d'Arthabaska.

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, j'aimerais connaître les intentions du ministre, les suites qu'il entend donner au dépôt de la loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers? Quelles suites il entend donner?

M. Jolivet: M. le Président, nous avions dit qu'il y aurait des consultations. Nous allons tenir promesse à ce niveau-là. Donc, je crois que le député peut être informé, et je veux informer tous les gens qui nous posent des questions à ce moment-ci, qu'au mois de février il y aura commission parlementaire avec auditions particulières. On s'entendra avec les gens de l'opposition quant à la liste des gens qui viendront. Et, entre-temps, le ministre, auprès de qui je me suis enquis – parce que, moi aussi, je me posais des questions parce que, comme responsable des travaux de cette Assemblée, je dois m'y intéresser à ce niveau-là... le ministre m'a dit qu'il continue quand même ses discussions avec les groupes intéressés. Donc, première étape, il continue ses discussions avec les groupes intéressés, le ministre des Finances, tout en sachant qu'il y aura des auditions particulières au mois de février.

Le Président: M. le député de Viger.

M. Maciocia: Toujours sur le même sujet, M. le Président. Dois-je comprendre qu'il ne sera pas appelé, le projet de loi, à l'étape de l'adoption de principe avant la fin de cette session? Deuxièmement, quand est-ce qu'on doit donner le nom des organismes qui veulent être entendus en commission parlementaire, de la part de l'opposition officielle?

M. Jolivet: Oui, M. le Président, le député a raison, il ne sera pas appelé en étude de principe, nous allons faire des auditions particulières avant l'adoption du principe et, dans ce cadre-là, le député peut déjà, à ce moment-ci, par l'intermédiaire du bureau de son leader, communiquer avec les gens de mon bureau pour qu'on puisse s'entendre sur la liste qui sera celle... qu'on entendra entre nous pour le mois de février prochain.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Le premier ministre a pris un engagement formel au dernier colloque sur l'eau à Montréal concernant un moratoire sur le captage de l'eau embouteillée. Ça nécessite, selon tous les experts, une législation dans ce domaine. Est-ce qu'il est de l'intention du leader du gouvernement de saisir l'Assemblée nationale d'une législation dans ce domaine de façon à donner suite à l'engagement formel du premier ministre du Québec?

M. Jolivet: M. le Président, les intentions du gouvernement seront suivies avec beaucoup d'intérêt de la part de l'opposition, et le premier ministre a des discussions à ce moment-ci au niveau du Conseil des ministres. Donc, je peux assurer le député que le premier ministre et le ministre responsable, de Faune et Environnement, auront à proposer quelque chose à l'Assemblée, comme on s'y est entendus.

Le Président: Très bien. Alors, cela complète l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

Nous allons passer maintenant aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous invite à considérer – je vous demande plutôt, et non pas «vous invite» – l'article 24 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 175


Adoption

Le Président: Très bien. À l'article 24 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du projet de loi n° 175, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. M. le ministre des Affaires municipales.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, nous sommes donc arrivés à la dernière étape de l'adoption de ce projet de loi, le projet de loi n° 175, qui modifie une vingtaine de lois qui interviennent dans le monde municipal. Nous avons eu l'occasion, à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a étudié ce projet de loi article par article, de revenir sur les principales dimensions de ce projet de loi qui, non seulement touche des questions d'aménagement et d'urbanisme pour permettre maintenant aux municipalités d'en arriver à réviser globalement leur plan d'urbanisme et les règlements afférents au bout d'une période de cinq ans... cette opération pourra se dérouler en bloc. Et, M. le Président, on fera appel également à l'application des mécanismes pour que les personnes habiles à voter dans la municipalité concernée puissent en arriver à se prononcer sur l'ensemble du plan ou encore en retirer une dimension particulière pour une consultation sur un des éléments de changement du plan d'urbanisme.

Nous avons également, M. le Président, étudié attentivement des modifications qui vont maintenant permettre de donner suite aux engagements que nous avions pris, par l'ensemble des intervenants au dernier Sommet, sur la mise en valeur de la forêt privée pour permettre aux municipalités d'intervenir en matière de protection, d'abattage et de protection du couvert forestier dans les territoires qui sont sous la responsabilité d'intervenants privés. La municipalité et la MRC pourront intervenir. Également, nous avons étudié des dispositions législatives qui maintenant vont permettre aux MRC qui ont des contrats d'aménagement et d'approvisionnement à l'intérieur des ententes spécifiques avec le gouvernement du Québec pour la mise en valeur de blocs de lots intramunicipaux de ne plus avoir l'obligation de payer les redevances, les droits relatifs à ces contrats d'aménagement et d'approvisionnement forestier, et ainsi laisser plus d'argent dans le milieu pour permettre davantage de mise en valeur pour d'autres fonctions de ces forêts.

J'aimerais aussi, M. le Président, souligner quelques autres dimensions qui m'apparaissent bien importantes et qui vont faire l'objet certainement d'informations intensives au cours des prochains jours et des prochaines semaines. Il s'agit d'un changement dans l'ensemble des règles de prise de décision à la MRC. Le tout sera simplifié, mais également ça permet de maintenir l'équilibre au sein des municipalités régionales de comté au Québec, c'est-à-dire, M. le Président, que maintenant toutes les décisions à la MRC devront être prises à la double majorité. La première des majorités, c'est la majorité de la population représentée autour de la table de la MRC et, pour que la décision puisse être applicable et puisse être rendue, il faudra qu'une deuxième majorité s'ajoute, c'est-à-dire la majorité des voix des membres autour de cette table. C'est une réclamation traditionnelle des unions municipales. Suite à la réunion des préfets des MRC sous la responsabilité de l'UMRCQ, il y a une dizaine de jours maintenant, nous en sommes arrivés donc à une formule qui répond au désir tant des grandes municipalités de forte taille qui représentent souvent plus de 50 % – c'est le cas de 23 MRC au Québec – qui représentent plus de 50 % de la population du territoire de la MRC concernée, qui vont retrouver ainsi un poids démocratique qui se rapproche de leur poids démographique à l'intérieur de ces MRC, et, par ailleurs, les municipalités de petite taille vont pouvoir continuer à composer, à rechercher davantage de consensus avec ces grandes municipalités suivant le principe de l'occupation harmonieuse du territoire incluse dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, puisque la deuxième majorité requise sera la majorité du nombre de voix des membres représentés autour de la table, ce qui va répondre aux besoins tant de l'UMQ que de l'UMRCQ.

(11 h 30)

M. le Président, je voudrais également souligner que nous avons ajouté une dimension assez importante, en termes de transparence et de connaissance par les citoyens de l'administration municipale, puisque, à compter de l'an prochain, à l'occasion du discours du maire, avant le nouveau budget de l'année subséquente, on devra déposer la liste des contrats qui ont été attribués pendant l'année par la municipalité, avec des seuils qui vont permettre de tenir compte du volume que cela implique.

Par exemple, pour Montréal, tous les contrats au-delà de 10 000 $ qui ont été accordés sur invitation ou en deçà de 10 000 $ qui ont été accordés par le conseil municipal, la liste de ces contrats devra être déposée en même temps que le discours du maire sur l'état des finances de la municipalité. Il en sera ainsi pour les autres catégories de municipalité, aller jusqu'aux contrats de 1 000 $ et plus pour les municipalités de petite taille. Donc, sans ajouter à la bureaucratie, davantage d'informations, parce que les citoyens sont appelés actuellement à parcourir l'état des comptes payables du conseil municipal à chaque mois, donc 12 fois par année au minimum, pour tenter d'y voir clair lorsqu'il y a des objets de surveillance. On va donc ajouter cet élément de transparence à l'administration municipale.

M. le Président, nous allons également demander aux municipalités de collaborer avec nous pour la lutte au travail au noir. Jusqu'à maintenant, les municipalités avaient été appelées à transférer des informations à la Régie du bâtiment en ce qui concerne tout permis de construction obtenu pour un projet de réalisation d'un édifice à caractère résidentiel.

Maintenant, les municipalités devront nous transmettre les informations à l'égard de tout permis de construction, peu importe le secteur, le caractère, la grandeur, l'importance du contrat à réaliser, en vertu d'un règlement qui est à venir et qui sera pris par le gouvernement en vertu de la Loi sur les règlements, pour en arriver à ce que nous soyons mieux situés pour faire en sorte que chacun paie sa part, sa juste part et uniquement sa part pour l'ensemble des charges sociales au Québec et que les citoyens et citoyennes, comme vous et moi et comme l'ensemble des membres de cette Assemblée, qui paient leur part, leur juste part et toute leur part, n'aient qu'une juste part à payer parce que tout le monde aura payé ce qu'il doit payer, en termes de charges sociales.

On le sait, M. le Président, ce n'est plus une révélation, ce n'est plus une cachette pour personne, ce n'est plus un phénomène inconnu, il y a beaucoup de travail au noir dans certains secteurs de notre activité au Québec. Et le travail entrepris par le gouvernement du Québec, et en particulier les deux derniers ministres responsables du Revenu, ça a donné des fruits assez exceptionnels. Nous continuons ce travail-là dans le respect de la vie privée des citoyens. Et le règlement afférent pour demander aux municipalités de transmettre ces informations à la Régie du bâtiment sera adopté au cours des prochains mois. Il fera l'objet d'une prépublication de 45 jours, de façon à ce que les inquiétudes, par exemple, de l'opposition, qui ont été manifestées en commission parlementaire et à l'occasion de l'étude du rapport, puissent être prises en compte à l'effet de la raison pour laquelle les municipalités devraient demander le numéro d'assurance sociale du demandeur d'un permis de construction. Tout cela pourra être analysé.

M. le Président, d'autres éléments de ce projet de loi sont extrêmement importants pour gérer l'effort que nous avons demandé aux municipalités dans le cadre de l'atteinte de l'objectif du déficit zéro pour le gouvernement du Québec. Nous allons donner davantage de pouvoirs aux régies intermunicipales de façon à ce qu'elles puissent en arriver à réaliser des ententes entre elles... ainsi que des régies avec d'autres municipalités qui ne sont pas concernées par le contrat initial, pour en arriver à réaliser davantage d'économies et à conserver, en même temps, l'imputabilité au niveau des citoyens et du conseil municipal.

M. le Président, il est également un autre article qui a été adopté, suite à la présentation d'un amendement en commission parlementaire, et qui vise à confirmer – c'est là une excellente nouvelle, je pense, pour tout le monde – le rôle que la ville de Québec joue à l'intérieur de la Communauté urbaine de Québec. Puisque, jusqu'à maintenant, la ville de Québec détenait un droit de veto sur les décisions qui étaient prises à la Communauté urbaine de Québec, tout comme ce droit-là était également existant de par la mécanique qui a été instituée pour les villes de plus petite taille parmi les 13 de la Communauté urbaine de Québec et également pour les municipalités de taille moyenne qui possédaient ce droit en vertu de l'application des statistiques.

Le phénomène a voulu que le nouveau recensement du nombre de citoyens, à la ville de Québec, l'amène à un seuil qui aurait pu faire en sorte que la ville de Québec perde son droit de veto. Nous avons donc introduit un amendement pour faire en sorte que la situation puisse se maintenir telle qu'elle était auparavant et avait été décidée par les intervenants de la région de Québec, de la Communauté urbaine de Québec, pour confirmer le droit de veto à la Communauté urbaine de Québec de la ville de Québec, avec le poids de 33 % de la population de la Communauté urbaine de Québec moins quelques dixièmes de pourcentage, et c'est ce qui causait problème. Maintenant, tout cela sera régularisé par le projet de loi qui a été déposé.

M. le Président, je n'allongerai pas beaucoup la présentation, à cette étape ultime de l'adoption du projet de loi n° 175, pour noter seulement que nous avons également apporté des précisions pour davantage de simplicité et d'efficacité en matière d'annexion de territoires d'une municipalité à une autre et également lorsque l'on procède à des regroupements de municipalités au Québec. Puisque vous savez que 416 municipalités de moins de 10 000 habitants ont été invitées à réaliser des études devant peut-être les conduire à des regroupements et qu'à cet égard-là c'est le Conseil des ministres, en vertu des dispositions de la loi, qui, par décret, adopte la décision de la demande commune de constitution ou la demande commune de regroupement de deux municipalités.

Nous y ajouterons un certain nombre d'informations, comme cet après-midi, par exemple, au Conseil des ministres, pour permettre à 10 autres municipalités du Québec de joindre leurs forces et de vivre dans une seule et même communauté municipale, comme ça a été le cas pour un grand nombre de municipalités au cours des derniers mois.

Évidemment, on comprend, M. le Président, que nous avons été invités à accélérer de beaucoup les réponses des demandes aux municipalités pour faire en sorte qu'on débute l'année 1998 avec une seule et même unité budgétaire et qu'on prépare les budgets en conséquence, donc, pour tenir compte des situations. Si bien que l'on pourra voir, au cours des prochaines heures et des prochains jours, qu'un très grand nombre de municipalités de petite taille – essentiellement villages, paroisses – se sont regroupées. Et les nouvelles dispositions qui seront adoptées ici vont faciliter la tâche pour les nouvelles municipalités qui vont s'implanter.

M. le Président, deux dernières dimensions, je pense, qu'il vaut la peine de bien rappeler. Le projet de loi va faire en sorte que le gouvernement du Québec va pouvoir maintenant déléguer soit à une localité nordique de la communauté inuit ou encore à l'Administration régionale Kativik les pouvoirs et les possibilités d'administrer différents régimes. Et c'est l'intention du gouvernement, en matière d'administration du régime de la sécurité du revenu, que cela puisse se faire par une administration régionale dans la partie la plus septentrionale du Québec, le territoire inuit, alors, que l'une ou l'autre des 14 localités puisse disposer de ce pouvoir, que ce pouvoir puisse être lui-même délégué à l'Administration régionale Kativik, ou encore, l'inverse, que l'Administration régionale Kativik en demande et que nous acceptions de transférer cette responsabilité et que, pour certains cas particuliers, elle puisse par ailleurs confier l'administration de certaines de ses politiques du côté des localités nordiques, des 14 localités nordiques inuit qui sont sous la responsabilité du ministère des Affaires municipales.

M. le Président, aussi, une disposition habilitante à l'égard des offices municipaux d'habitation. À titre de ministre de l'Habitation, j'ai donc demandé et discuté en commission parlementaire, article par article, la possibilité – et c'est ce qui est présent au projet de loi – de fusion des offices municipaux d'habitation. Ne serait-ce qu'en vertu de l'application de la politique de consolidation des communautés locales il peut y avoir, donc, des offices municipaux d'habitation qui soient appelés à se fusionner, mais surtout, à la demande de certains offices municipaux d'habitation, la possibilité qu'ils aient de se regrouper en protégeant, bien sûr, les droits et obligations envers soit les locataires soit les personnes qui bénéficient d'aide particulière au niveau du logement social.

(11 h 40)

Et, M. le Président, c'est une disposition habilitante extrêmement importante, puisque, avec les coopératives d'habitation, avec les groupes sans but lucratif qui actuellement interviennent dans le logement social au Québec, avec la Société d'habitation du Québec et les Unions municipales, nous aurons l'occasion d'ouvrir une table, après la période des fêtes, pour discuter de toute cette problématique. On l'aura noté, depuis 1996, le gouvernement fédéral a fait une offre – insuffisante, à notre avis – de transfert de ses responsabilités en matière de logement social totalement au Québec. Et, dès lors que cela sera réalisé, bien nous entendons réaliser totalement cette compétence québécoise exclusivement au Québec, en partenariat avec nos groupes, nos coopératives et nos organismes dans le milieu.

Alors, M. le Président, c'est d'autant plus important que nous avons fait savoir hier au gouvernement fédéral et à son ministre responsable, M. Gagliano, l'impossibilité pour le Québec d'accepter un simple transfert de pouvoir de gérance des obligations, des mandats obligataires ou des obligations du gouvernement fédéral en pareille matière. Puisque le gouvernement fédéral, malgré le fait que 29 % des familles décrites comme étant démunies en matière de logement au Canada soient résidentes au Québec et que le Québec représente 24 % de la population canadienne, nous a offert de solder le tout, d'effectuer une vente de feu, une liquidation, ce qui nous amènerait à recevoir 17,5 % de l'enveloppe fédérale en matière de logement social. Et, pour le Québec évidemment et surtout pour les familles démunies en besoin de logement, qui se chiffrent encore à tout près de 200 000 familles, pour que nous puissions continuer non seulement de les aider, mais de développer davantage de logements sociaux au Québec et de les assister au niveau de cette lourde composante du revenu familial, pour pouvoir les aider, eh bien, M. le Président, il faut que le Québec soit traité avec équité et justice, puisque déjà nous finançons à même trois points d'impôt fédéral les questions du logement social qui est une responsabilité très clairement québécoise.

À cet égard, nous demandons donc – et j'en profite aujourd'hui, M. le Président, pour réitérer officiellement la position du gouvernement du Québec à cet égard – que le gouvernement fédéral accepte le plus simplement du monde, suivant les besoins du Québec et suivant les indications que nous avons en termes de besoins pour le logement social, de rapatrier trois points d'impôt que, actuellement, les Québécois envoient à Ottawa et que ce soit retourné au Québec, qu'avec ces 440 000 000 $ nous puissions nous acquitter des tâches actuelles et, avec les 85 000 logements sociaux que nous avons au Québec, que nous puissions prendre charge des 37 000 autres logements qui sont à la charge exclusivement du gouvernement fédéral et que nous puissions prendre la totalité des responsabilités en matière de logement social au Québec.

Et nous sommes prêts à occuper ce champ qui est très clairement de compétence du Québec, de la compétence des provinces. Et, à cet égard, M. le Président, nous ne saurions accepter la vente de feu, le solde qui nous est présenté, la liquidation des obligations fédérales avec une somme de 289 000 000 $ et un petit cadeau de 56 000 000 $ pour la première année de façon à prévoir les difficultés, les réparations, les rénovations et les variations de taux d'intérêt pour les 35 prochaines années, ce qui est absolument inacceptable pour le Québec.

Dans ce contexte-là, M. le Président, nous imaginons très bien que nous pourrons en arriver à une entente avec le gouvernement fédéral sur une base qui soit plus sérieuse. Qu'on nous fasse une offre, par exemple, qui soit ressemblante à celle de l'Ontario. C'est-à-dire, puisque l'Ontario possède 33 % des familles canadiennes décrites comme étant démunies et en besoin au niveau du logement social et qu'on leur paie 40 % de l'enveloppe fédérale en matière de logements sociaux, eh bien, qu'on nous fasse une offre sur la même base et on verra bien que le Québec va accepter, bien sûr, d'occuper totalement ses responsabilités. En collaboration avec les offices municipaux d'habitation, les organismes sans but lucratif et les coopératives, nous serons en mesure, bien sûr, de relever le défi.

En conclusion, M. le Président, il est complètement inacceptable qu'une famille démunie au Québec, ça vaille 1 063 $ pour le gouvernement fédéral et qu'une famille démunie en besoin de logement social pour l'Ontario, la Colombie-Britannique et l'Alberta, ça vaille 1 916 $. Donc, quand on est démuni en termes d'habitation, ça vaut deux fois moins cher au Québec que ça vaut pour d'autres provinces canadiennes.

C'est ça qui a été jugé inacceptable en prévision de la réalisation de ce mandat et de cette compétence de laquelle le gouvernement fédéral s'est retiré en termes de développement en 1993. Même l'ex-ministre des Affaires municipales responsable de l'Habitation, M. Ryan, député d'Argenteuil, avait dénoncé cette situation avec véhémence. Il avait bien raison, c'était un très juste point de vue qu'il avait exprimé et qu'il a répété à maintes reprises: C'est une compétence québécoise, et le fédéral doit nous donner notre juste part du butin pour que nous puissions répondre aux besoins des familles québécoises en pareille matière.

M. le Président, je conclurai également ce projet de loi n° 175 en indiquant le plus simplement du monde que nous avons également ajusté les responsabilités de la MRC de Nicolet-Yamaska en matière de rôle d'évaluation pour permettre la réorganisation du nombre de municipalités qui font l'objet d'évaluation à chaque année, compte tenu des regroupements et compte tenu de la situation de la mise en commun des services dans cette MRC.

Le projet de loi n° 175 ajuste un très grand nombre de dimensions eu égard à la vie municipale dans les villes ou dans les municipalités de petite taille. Tout le projet de loi, lorsqu'il sera adopté, fera l'objet d'une campagne d'information à travers les mécanismes réguliers déjà prévus aux affaires municipales, la publication de bulletins spécifiques qui vont informer les municipalités de ces nouvelles possibilités. Également, avec les organisations de professionnels dans le domaine municipal, nous allons faire en sorte que la formation au sujet des nouvelles dispositions puisse être connue et appliquée dans les municipalités le plus rapidement possible.

Voilà pourquoi, M. le Président, je pense que nous devrions aujourd'hui adopter ces instruments facilitants pour les municipalités du Québec à la veille d'une année bien spécifique qui a demandé beaucoup de travail en termes de préparation de budget, l'année 1998. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Affaires municipales. Nous allons maintenant céder la parole à la critique officielle de l'opposition en cette matière, Mme la députée de Jean-Talon.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. J'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 175, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. Nous sommes rendus à la dernière étape avant le vote final.

M. le Président, il s'agit ici d'un projet de loi qui contient 195 articles. Plusieurs articles sont des articles de concordance. Ce projet de loi là également modifie 22 lois. Je ne reprendrai pas l'ensemble des articles, qu'il me suffise par contre de vous entretenir quelques minutes sur certains articles, certaines dispositions qui, à mon sens, ne sont pas de concordance et qui viennent changer quand même certaines façons de faire au niveau municipal.

Alors, un des éléments majeurs de ce projet de loi là, et avec lequel l'opposition est en accord, c'est de revoir toute la mécanique de prise de position lors des discussions et des décisions qui sont prises autour de la table de la MRC. On se rappellera que les élus qui composent la table des maires devaient prendre leurs décisions à la majorité simple. Or, il s'avère qu'il y avait certains problèmes à ce niveau-là, entre autres ce qu'on appelle, nous, dans notre vocabulaire municipal, le déficit démocratique, et ça causait préjudice à certaines municipalités.

Donc, il y a eu introduction d'une disposition pour éliminer la décision à la majorité simple et l'introduction de nouveaux articles qui, à notre sens, vont permettre aux municipalités non seulement de se parler... Je présume qu'elles se parlaient avant, je ne veux pas laisser entendre qu'elles ne le faisaient pas. Par contre, ça va exiger de la part des municipalités davantage de concertation et davantage de consensus autour de la table. Je m'explique.

Dorénavant, les décisions qui seront prises à la table des maires devront être prises à la double majorité. Donc, majorité des voix et majorité de la population. Ça explique donc pourquoi une plus grande municipalité devra peut-être s'allier à une plus petite ou des plus petites à une plus grande, dépendamment des dossiers qui sont sur la table.

(11 h 50)

Mais ça a fait l'objet d'une très saine discussion avec les collègues de la commission parlementaire, avec les représentants de l'Union des municipalités du Québec, avec l'Union des municipalités régionales de comté. Ça fait suite également à des discussions qui ont cours depuis plusieurs années. Et on arrivait difficilement, les élus, à trouver un terrain d'entente qui soit le plus juste, le plus équitable et qui fasse l'affaire de tout le monde. Parce qu'on sait que les municipalités et les MRC vont devoir accepter davantage de charges. Et, quand on parle de décentralisation... En tout cas, nous, M. le Président, on est d'accord avec la décentralisation et on pense que c'est important que, s'il y a une structure, que ce soit la MRC, qui accueille à certains égards différentes responsabilités, bien que ça puisse se faire dans des règles qui sont hautement démocratiques, mais surtout aussi, parce que démocratiques, c'est très important, équitables pour tout le monde.

Le projet de loi avait lié, et c'est important de le mentionner ici, à ce changement de prise de décision au sein de la MRC toute la question du droit de retrait. M. le Président, vous savez sans doute mieux que quiconque de quoi je parle quand je parle du droit de retrait. Encore là, ça avait fait l'objet, toute cette question du droit de retrait, de nombreux débats et de nombreux échanges au sein des MRC, au sein des deux Unions qui représentent le monde municipal, au sein de notre commission depuis trois ans, par le biais du ministre, qui était à l'époque le député de Joliette, le ministre des Affaires municipales, l'actuel ministre des Affaires municipales aussi pour tenter de trouver une solution au droit de retrait.

Il existe, dans les MRC, 12 façons de se retirer ou pas à l'intérieur des MRC. Certains prétendaient qu'il fallait retirer complètement cette mécanique et enlever aux municipalités qui siègent aux MRC le droit de retrait. On y a tous songé, tout le monde, tous partis confondus. On a regardé finalement de quelle façon ça pouvait se faire et on est vite revenu à la réalité suivante, c'est qu'il fallait protéger l'autonomie locale.

Il fallait que le maire qui s'assoit au conseil des maires puisse, lui ou elle, le maire ou la mairesse, pouvoir revenir devant son conseil municipal – parce qu'en fait les élus municipaux qui siègent à la MRC relèvent et sont imputables de leur population locale – avec cette certitude que leur autonomie locale, leur autonomie de décision, ils ne l'avaient pas perdue. Donc, on a décidé avec le ministre de ne pas changer la mécanique ou la procédure en ce qui regarde le droit de retrait. Donc, les municipalités pourront, dépendamment des compétences qui incombent à la MRC, se retirer ou pas, mais en vertu de la mécanique qui existe ou des dispositions qui existent actuellement.

Pour ce qui est du nombre de voix qui est accordé au maire dans sa municipalité, on se rappellera qu'il y a des règlements à l'intérieur des MRC, il y a des lettres patentes qui font en sorte que la municipalité X a droit à tant de voix, la municipalité Y a droit à tant de voix, donc ça, ça n'a pas été touché. Je tiens à rassurer les élus municipaux que les lettres patentes ne sont pas ouvertes, les règlements qui décrètent le nombre de voix auquel ils et elles ont droit, ça n'a pas été touché.

La seule chose qui a été touchée, ça a été la majorité simple qui passe à la majorité double, puis je pense que tout le monde est d'accord avec ça, et ça va permettre de plus larges consensus. Certains diront que c'est peut-être un peu plus contraignant, mais, étant donné que les gouvernements ont davantage tendance à se décharger de certaines responsabilités, je pense que c'est important qu'on puisse s'assurer d'une solide base au niveau de l'expression du vote démocratique. Alors, on a donné notre accord au nouvel article 45 et à l'abrogation des articles 2 à 9.

On retrouve, dans ce projet de loi là, M. le Président, l'occasion ou l'opportunité pour les municipalités qui le souhaiteront – il n'y a pas d'obligation – de revoir le plan d'urbanisme aux cinq ans. On appelle ça la révision quinquennale du plan d'urbanisme. Ce sont de nouvelles dispositions qui viennent, encore une fois, changer en l'espace de deux ans les façons de faire en ce qui a trait aux amendements qui sont apportés au plan d'urbanisme.

Au risque de me répéter, vous vous rappellerez, M. le Président, que, il y a à peine un an et demi, lors de l'adoption du projet de loi n° 22, le ministre des Affaires municipales avait choisi de revoir au complet toute la mécanique touchant les amendements au règlement de zonage et la possibilité pour les citoyens de s'exprimer à l'intérieur de ces amendements-là.

Il y a quelques années, les municipalités n'avaient pas le droit de présenter des bills omnibus ou des amendements omnibus, elles devaient présenter des amendements un par un, sauf pour la révision du schéma. Ça, c'était différent. Les citoyens pouvaient s'exprimer par la voie des registres en se prévalant de la disposition suivante: ils pouvaient aller signer un registre qui signifiait qu'ils s'opposaient la plupart du temps au projet. S'il y avait suffisamment de signatures, alors le conseil pouvait revoir son projet ou le retirer.

Le projet de loi n° 22 a fait en sorte que le gouvernement a donné l'autorisation aux municipalités de présenter des règlements fourre-tout, omnibus, permettant, par contre – ça, je dois le dire – au citoyen, s'il est assez futé et s'il comprend comment ça marche, de faire une demande pour retirer un amendement qui le toucherait personnellement, ou qui le léserait, ou, en tout cas, qui toucherait sa zone concernée. Mais on a alourdi le processus plutôt que de l'alléger. Nous avons dénoncé cette façon de faire, à l'époque, parce qu'on trouvait que le citoyen y perdait dans l'expression de son droit de vote ou dans l'expression, finalement, de sa volonté à l'égard du zonage dans sa zone concernée.

On est revenu avec des amendements – «on» étant le gouvernement – six mois plus tard, pour corriger certains amendements dans ce projet de loi là. Et on nous revient, à cette session-ci – donc ça fait trois fois en trois sessions... C'est la troisième fois en trois sessions qu'on nous revient avec de nouvelles dispositions pour, nous dit-on, alléger la procédure. Je veux bien qu'on nous dise qu'on allège la procédure, mais on l'allège pour qui? Est-ce qu'on l'allège pour les municipalités, qui trouvent ça trop compliqué, ou on l'allège pour le citoyen?

Ma réponse, c'est qu'on ne l'allège pas pour le citoyen. Moi, je suis élue par les citoyens, alors je me sens obligée de vous dire aujourd'hui qu'encore une fois le citoyen y perd dans cette décision d'introduire cette mécanique où, lorsqu'il y aura révision quinquennale du plan d'urbanisme, la municipalité va le faire dans son ensemble et le citoyen ne pourra pas, comme ce qui a été introduit dans 22, retirer un amendement qui le concerne ou qui concerne sa zone. Donc, vous comprendrez que je ne peux pas avoir deux discours.

Alors, pour les raisons que j'ai évoquées dans le projet de loi n° 22, dans le projet de loi n° 83, dans le projet de loi n° 175, qui est celui-ci, je dois donc voter contre et nous allons voter contre cet article-là parce que, à mon point de vue, le citoyen y perd encore. Et c'est petit à petit qu'on s'aperçoit que, sous le couvert d'allégements de procédures – là, je ne parle pas de contrôles ministériels, je parle de procédures – on allège peut-être la mécanique pour les élus, mais je ne suis pas sûre qu'on allège la mécanique pour le citoyen. Donc, M. le Président, je ne suis pas d'accord avec ça.

(12 heures)

Nous avons aussi l'article 28, dans le projet de loi, des mesures qui viennent, moi, je vais appeler ça compliquer le formulaire lorsqu'il y aura demande de permis de construction dans une municipalité. On avait, il y a deux ans ou l'an dernier, je crois, par une disposition qui avait été introduite dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, permis la situation suivante. Sous prétexte, à l'époque, que ça nous permettait d'aller chercher les gens qui fraudaient, on nous a convaincus qu'il était important, lorsqu'il y aurait émission de permis de construction au résidentiel, d'introduire un formulaire qui contenait et qui contient toujours des renseignements de l'ordre suivant: votre nom, votre adresse et évidemment le type de construction qui est demandé. Mais on nous avait dit, dans cet article-là, que le formulaire contiendrait des renseignements et que ce serait prescrit par règlement. Évidemment, nous, on n'a pas vu le règlement. Le règlement a été adopté après.

Alors, quelle ne fut pas notre surprise de retrouver dans le projet de loi n° 175 une nouvelle disposition qui, cette fois-ci, va appliquer ces renseignements personnels au formulaire, mais pour tout type de construction, alors, que ce soit résidentiel, commercial, industriel, de la rénovation, de la restauration. Autant le propriétaire qui va aller demander le permis au nom souvent de l'entrepreneur que l'entrepreneur qui demande, lui, le permis, on va devoir, entre autres, y inscrire le numéro d'assurance sociale.

M. le Président, vous savez qu'il y a eu un débat en cours ici depuis quelques semaines sur toute la question des renseignements personnels. Là, on trouve que ça commence à être exagéré. Si on veut vraiment lutter contre le travail au noir – et je m'inscris en faveur de la lutte contre le travail au noir – bien qu'on le fasse à l'égard de ceux qui fraudent puis de ceux qui ne demandent pas les permis. Là, ceux qui vont aller demander les permis sont ceux, en fait, qui vont avoir tous les renseignements sur le formulaire et ceux qui ne les demandent pas, bien, ces renseignements-là, on les retrouve nulle part. Alors, peut-être qu'on devrait trouver une mécanique où c'est vraiment ceux qui fraudent et non pas ceux qui sont honnêtes qui se retrouvent avec cette problématique-là. Donc, nous, on pense que cet article-là va chercher des informations personnelles qu'on ne doit pas nécessairement retrouver sur un permis de construction.

On retrouve également dans le projet de loi des dispositions qui permettront à une régie et à une municipalité de conclure des ententes. On retrouvera également, à l'article 59, une disposition qui permettra des ententes entre une municipalité et une commission scolaire pour un besoin spécifique, par contre. Alors, on dit ici: «La municipalité peut conclure, seule ou avec une autre municipalité, des ententes avec toute commission scolaire ou tout établissement d'enseignement pour établir et maintenir en commun des bibliothèques publiques sur le territoire de la municipalité ou sur celui qui y est contigu.» Moi, je n'ai pas de problème avec ça, je trouve que ça a bien de l'allure, sauf que je pense que ce qu'il devrait être important de retenir, c'est qu'il ne faudrait pas que le gouvernement se décharge de sa responsabilité au niveau de la culture.

Et j'ouvre une parenthèse là-dessus. J'espère que la ministre de la Culture est au courant de cet article-là. Dans la mesure où on sait qu'il y a des municipalités qui ont des bibliothèques municipales, on sait qu'il y a des commissions scolaires qui en ont une aussi, mais on sait très bien que les exigences pour le contenu, pour les livres dans une bibliothèque scolaire ne sont pas nécessairement les mêmes que pour la bibliothèque municipale. Alors, il ne faudrait pas qu'on ait ouvert une porte qui ferait en sorte que nos bibliothèques dans nos régions soient des bibliothèques plus scolaires que municipales ou peut-être plus municipales que scolaires, dépendamment de la clientèle qui les utilise, parce qu'il faut avoir fait les deux pour savoir qu'elles sont très différentes. Donc, c'est une mise en garde. On n'a rien contre cette disposition qui permet des ententes, mais on pense que c'est important d'allumer une petite lumière.

M. le Président, il y a également une disposition qui va permettre à la Communauté urbaine de créer son fonds de roulement jusqu'à hauteur de 12 500 000 $. Ça fait déjà un bout de temps que la Communauté urbaine souhaitait créer son fonds de roulement à partir des surplus. Les municipalités l'avaient déjà. Alors, on avait un peu de difficulté à comprendre pourquoi le ministère tardait à autoriser la Communauté urbaine à le faire, mais je pense qu'on a donné suite à cette demande-là, à ce plaidoyer-là en faveur de la création du fonds de roulement. Donc, je suis bien heureuse de le voir dans le projet de loi.

Puisqu'on parle de la Communauté urbaine – le ministre y a fait référence tout à l'heure – il y a une disposition qui a été introduite aussi pour permettre de maintenir l'équilibre au niveau du droit de veto à la Communauté urbaine de Québec. On se rappellera qu'il y a trois groupes qui ont un droit de veto à la Communauté urbaine de Québec à cause de la population, entre autres. Alors, la ville de Québec en avait un. Les trois villes qu'on qualifie de moyennes, dans la région de Québec, donc Beauport, Charlesbourg et Sainte-Foy, avaient, par le biais de la population totale de ces trois municipalités-là, un droit de veto sur la population. Et les neuf villes avaient le leur, dans la mesure où... pas par la population, parce qu'elles n'étaient pas assez populeuses pour renverser une décision, soit celle de la ville de Québec ou celle des trois autres villes, mais elles l'avaient dans la perspective suivante: pour qu'une décision soit battue ou qu'une décision passe, à la Communauté urbaine, ça prenait la majorité de la population, mais ça prenait cinq villes aussi. Donc, Québec et les trois autres villes ne pouvaient pas imposer à l'ensemble des neuf municipalités une décision qu'elles ne voulaient pas assumer.

Or, on a appris tout récemment que la ville de Québec a perdu quelques centièmes de pourcentage au niveau de la population, ce qui lui aurait enlevé son droit de veto. C'était totalement inéquitable et inacceptable. Il y a donc une disposition qui fait en sorte que Québec puisse, malgré cette légère décroissance au niveau de la démographie, maintenir son droit de veto.

Il y a également, à l'article 142, les amendements qui sont apportés à la Loi sur la Société d'habitation du Québec, qui permettent aux offices municipaux de se regrouper. Je pense que ça fait partie des façons de faire d'aujourd'hui. Étant donné qu'on a déjà des programmes incitatifs au regroupement des collectivités, étant donné que c'est à la mode d'essayer de faire de la mise en commun, il est parfaitement normal, je pense, qu'on puisse autoriser les offices municipaux à se regrouper.

Encore là, une mise en garde à l'égard des déficits. On sait que les municipalités paient 10 % du déficit d'opération des offices municipaux. Donc, il faudrait s'assurer que, dans ce regroupement ou cette fusion de deux ou trois offices municipaux, il n'y ait pas une municipalité qui soit lésée par un déficit qui serait plus élevé par rapport à d'autres villes. Alors, je pense que c'est important, ça. Je sais que ça a été prévu, on a questionné là-dessus.

Il y a la question des listes d'attente aussi qui me faisait problème. Nous, du côté du Parti libéral, ce qu'on souhaitait, c'était de s'assurer que les gens qui sont sur les listes d'attente – on sait que les critères sont bien encadrés et que ce sont les mêmes pour tout le monde – mais s'assurer qu'il n'y ait personne qui était – je ne sais pas, moi – vingtième sur la liste et qui se retrouve soixante-douzième. Alors, je pense que c'est important de s'assurer que toutes les mesures auront été prises pour s'assurer d'un traitement équitable à l'intérieur des nouvelles règles.

M. le Président, il y a également l'article 143, qui amende la Loi sur le traitement des élus municipaux. Il y a des minima dans la loi, on les retrouve à cet article-là. Je ne vous les énumérerai pas. Par contre, le ministre souhaitait introduire une disposition qui ferait en sorte que les élus municipaux devront, par règlement, déterminer leur salaire, et ça, ce n'est pas qu'une petite affaire. On sait que, dans nos municipalités, dès qu'on parle de salaire, c'est comme si on avait la peste, une maladie grave. Les élus ont horreur de parler de leur salaire – par contre, ça ne devrait pas être le cas – et les citoyens n'aiment pas en parler, ils ont toujours l'impression que les élus municipaux sont trop bien payés.

(12 h 10)

Bien, moi, j'ai des petites nouvelles pour vous autres. Je n'ai aucun problème à vous dire que je pense que tout le monde aura le courage de s'asseoir avec les élus, citoyens et élus, pour déterminer correctement et équitablement le salaire qui doit être payé au maire et aux conseillers ou conseillères. Ce n'est pas facile parce qu'on n'a pas une culture où on aime parler de salaire. Mais cette disposition-là, je pense, vise la transparence, c'est comme ça qu'on l'a vue, et fait en sorte que, si les conseils municipaux ne veulent pas utiliser les minima – parce que c'est très minimum, en effet – les citoyens puissent reconnaître, par le biais du salaire, le travail qui est fait et la lourde charge qui incombe aux élus municipaux.

Il faut avoir été un élu, il faut avoir circulé en région pour voir combien ces gens-là sont peu payés dans les petites municipalités, alors que la charge s'alourdit d'année en année et qu'ils n'ont pas nécessairement, ces élus-là, le personnel d'appoint pour les aider à mener à bon port tous ces dossiers-là. Donc, ils doivent le faire eux-mêmes, et c'est des heures et des heures, c'est beaucoup de bénévolat, puis je ne suis pas sûre qu'à quelque part on ne doive pas reconnaître ce travail-là par le biais d'une rémunération qui soit juste et équitable. En tout cas, vous pourrez toujours compter sur moi pour défendre ce principe-là. Je pense que c'est important.

Alors, les minima, à mon point de vue, ne sont pas assez élevés. Mais, encore là, j'y verrai le jour où je changerai de bord de la Chambre, M. le Président.

Une voix: Ça s'en vient plus vite que...

Mme Delisle: Ça s'en vient plus vite que les gens pensent.

M. le Président, ça fait le tour de l'ensemble des éléments que je voulais soulever avec vous. Il y en a d'autres, mais il y en a plusieurs qui sont des éléments de concordance. Donc, je terminerai en vous disant que, étant donné qu'il y avait deux éléments avec lesquels on n'était pas d'accord, nous allons voter contre ce projet de loi là. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du projet de loi n° 175? Alors, s'il n'y a pas d'autres interventions, M. le ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique?


M. Rémy Trudel (réplique)

M. Trudel: M. le Président, 30 secondes pour indiquer à la députée de Jean-Talon, qui a soulevé cette dimension dans ses remarques terminales, qu'à l'égard des informations que nous allons demander aux municipalités de transmettre à la Régie du bâtiment il n'est pas, dans le projet de loi, indiqué que le numéro d'assurance sociale des détenteurs de permis sera exigé. Ça fera l'objet d'un règlement qui sera prépublié dans la Gazette officielle et, s'il y a des observations à faire à cet égard-là, le gouvernement pourra en tenir compte, M. le Président.

Mme Delisle: M. le Président, en vertu du règlement, est-ce que je peux poser une question au ministre? Est-ce qu'il accepterait de répondre?

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que, M. le ministre, vous désirez recevoir la question en vertu de l'article 213?

Mme Delisle: L'article 213, effectivement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Je voudrais demander au ministre si le règlement qui, aujourd'hui, a effet en ce qui a trait à l'émission des permis pour le résidentiel, on peut croire que c'est le même règlement qui sera édicté pour l'ensemble des permis que l'on retrouve dans ce projet de loi. Et, si oui, puisqu'on y retrouve le numéro d'assurance sociale dans le premier, peut-on penser qu'il se retrouvera dans le deuxième?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Trudel: Bien, M. le Président, on peut y penser, mais ce ne sera pas nécessairement cela qui va s'appliquer puisque ce sera un nouveau règlement qui va être défini. Dans la préparation du règlement, M. le Président, je me suis engagé, et je répète l'engagement vis-à-vis de l'opposition, à tenir compte des observations qui ont été faites en commission parlementaire et ici et qui étaient, à bien des égards, soutenables en termes d'argumentation. Et je le soumettrai au ministre responsable de la Régie du bâtiment, au ministre du Travail, pour qu'il puisse évaluer la pertinence de demander de telles informations dans le futur règlement à être adopté, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre.

À ce stade-ci, le projet de loi n° 175, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, est-il adopté?

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Le vote nominal est demandé.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.


Vote reporté

M. Boulerice: En vertu de notre règlement, je vous demanderais de bien vouloir reporter le vote à demain, après la période des affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le vote aura donc lieu demain, aux affaires courantes.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je souhaiterais que vous preniez en considération l'article 20 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 160


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 20 de votre feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du projet de loi n° 160, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les sports et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 160? M. le ministre des Affaires municipales.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, à la dernière étape de l'adoption de ce projet de loi n° 160, il est certainement d'occasion de rappeler quelques informations, très rapidement, à l'égard de la préoccupation du projet de loi, de son objet fondamental et de ses effets.

M. le Président, nous allons, à compter du 1er avril 1998, en vertu des dispositions habilitantes à la loi, abolir la Régie de la sécurité dans les sports, qui physiquement est logée actuellement à Trois-Rivières, qui est administrée par, donc, des régisseurs et qui a à son emploi une vingtaine de professionnels et d'intervenants qui font en sorte que la Loi sur la sécurité dans les sports est appliquée par cet organisme.

Le projet de loi, M. le Président, il faut le rappeler au grand public, fait en sorte que maintenant c'est le ministre des Affaires municipales, responsable du sport, du loisir et du plein air, qui va être chargé de l'application de la loi. Le gouvernement ne se déleste pas de la responsabilité de la pratique sécuritaire dans les sports et les loisirs. La nouvelle formule qui sera employée, elle va faire appel aux partenaires organisés et aux partenaires qui sont regroupés dans un certain nombre d'organismes puisque nous allons reconnaître des organismes, leur donner des capacités réglementaires, des capacités normatives et des capacités également d'intervention et d'application des pénalités en termes de dénonciations qui sont possibles à l'intérieur de la Loi sur la sécurité dans les sports.

M. le Président, c'est un travail énorme qui nous attend puisque, d'une part, nous devrons assumer directement maintenant, au ministère des Affaires municipales, par une direction responsable de la sécurité dans les sports et les loisirs, la Loi sur la sécurité dans les sports. J'ai déjà annoncé, et je le confirme aujourd'hui, que nous allons garder une très grande partie de la compétence des professionnels qui sont à notre emploi actuellement à travers la Régie de la sécurité dans les sports et que les bureaux de ce service seront toujours logés dans la région de Trois-Rivières. Nous allons même confier d'autres tâches à ces personnes de façon à enrichir leur travail en matière de sports et de loisirs.

Je l'ai fait à l'occasion de la prise en considération du rapport, M. le Président, mais je tiens à remercier tout le personnel, tous les professionnels qui ont oeuvré à la Régie depuis 1979, tous les présidents qui ont dirigé les destinées de cet organisme qui a produit beaucoup, qui a produit avec efficacité. Nous sommes dans une période où il nous faut modifier nos pratiques administratives et cette modification n'a aucune relation, en termes de cause à effet, avec le travail fait par les personnels. Et je tiens non seulement à remercier tous ces gens qui nous ont donné des contributions absolument exceptionnelles, mais également à pouvoir compter sur cette compétence au cours des prochaines années. J'ai toujours demandé que la transition, le 1er avril prochain, s'effectue dans le respect non seulement des responsabilités que nous avons en matière de sécurité dans les sports, mais également du respect des personnes, des hommes et des femmes qui oeuvrent en particulier dans la région de Trois-Rivières et qui vont continuer à travailler, pour une bonne partie, pour l'État québécois en matière de sports et de loisirs, de sécurité. Nous comptons sur leur collaboration.

Quelques personnes, M. le Président, vont nous quitter puisqu'elles vont se joindre à la Régie des loteries et courses en matière d'administration des permis, surveillance des sports de combat pour la boxe et le kick-boxing. Nous allons faire en sorte que ces personnes puissent retrouver effectivement toutes les possibilités pour continuer le travail qui avait été amorcé à la Régie et qui fait en sorte qu'au Québec nous avons cette réputation de bien surveiller les événements, en particulier les sports de combat, et que l'on puisse continuer cette surveillance et que les promoteurs de tels événements sentent qu'il n'y a pas de relâchement en matière de sécurité, et pour les pratiquants de ce sport également.

M. le Président, je termine vraiment en remerciant aussi l'opposition de sa collaboration tout au cours de l'étude de ce projet de loi. Un certain nombre de rappels nous ont été faits, de mises en garde également. Nous gardons précieusement les observations du député de Papineau qui est lui-même un adepte, un pratiquant, un passionné de sports, et en particulier de hockey sur glace, et qui s'y connaît en pareille matière. C'est avec beaucoup de pertinence que certaines dimensions... et aussi, faut-il le dire, un certain nombre d'inquiétudes qu'il nous a véhiculées et qui doivent faire partie de notre préoccupation pour s'assurer d'une application de la loi qui fasse en sorte que le Québec continue de conserver les excellents records qu'il a obtenus jusqu'à maintenant en matière de pratique sécuritaire dans les sports et les loisirs, M. le Président.

(12 h 20)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Affaires municipales. Nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition en cette matière, le député de Papineau. M. le député.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. J'aimerais moi aussi me joindre au ministre des Affaires municipales pour remercier les gens qui, depuis 1980, ont su garder et protéger les participants et les participantes aux sports et loisirs, mais surtout dans le sport, au point de vue de la sécurité. Je pense que ces gens-là ont amené au Québec, aux Québécois et Québécoises, une certaine confiance, une certaine protection qu'on doit conserver en matière de sports et de loisirs.

Comme M. le ministre vient de le mentionner, tout au long du projet de loi n° 160, nous avons eu certaines... pas réticences, mais nous avons demandé de s'assurer qu'au moins on continue de mettre les mêmes efforts dans la sécurité des sports qui sont peut-être les plus violents qui existent au Québec par l'entremise des Affaires municipales. Je pense que les gens qui étaient là, qui vont être transférés aux Affaires municipales... tant mieux, on garde les mêmes compétences, les mêmes personnes qui vont être capables sûrement de continuer la bonne garde, si vous voulez, de tous les participants en sports et en loisirs au Québec.

J'aimerais en profiter, M. le Président, pour remercier, au nom de ma formation politique, ces gens-là et leur souhaiter de joyeuses Fêtes et remercier surtout tous nos bénévoles dans notre belle province qui travaillent à supporter que ce soit le hockey, que ce soit le base-ball, la balle lente, tous les sports imaginables, les loisirs aussi, remercier tous ces bénévoles-là. Si on n'avait pas les bénévoles, il n'y aurait pas eu le cadre d'intervention qui a été mis sur la table l'an passé après avoir rencontré 700 groupes; c'est grâce à tous ces bénévoles-là.

Alors, au nom de ma formation politique, j'aimerais en profiter pour leur souhaiter de joyeuses Fêtes, leur souhaiter aussi notre collaboration de ce côté-ci de cette Chambre et leur souhaiter de continuer, dans les années à venir, de nous donner la chance de les avoir, tous ces bénévoles-là, pour que nos jeunes enfants ou participants et participantes puissent avoir la chance de pratiquer leurs sports à leur choix. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Papineau. Comme il n'y a pas d'autres intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 160, le projet de loi n° 160, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les sports et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, de façon à pouvoir prendre en considération l'article 18, donc permettre à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux de quitter le Conseil des ministres et se joindre à nous, je vais vous demander une suspension de quelques minutes.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, votre demande est adoptée, et nous allons donc suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 24)

(Reprise à 12 h 32)

Le Vice-Président (M. Pinard): MM. les députés, veuillez vous asseoir. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, tantôt j'avais indiqué que nous considérerions l'article 18. Je vais par contre inverser, et nous allons plutôt procéder par l'article 19.


Projet de loi n° 39


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 19 de votre feuilleton, M. le ministre de la Santé et des services sociaux propose l'adoption du projet de loi n° 39, Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui. Y a-t-il des interventions? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, je serai très bref. On en arrive à la toute dernière étape, et je pense que tout a été dit, vraiment, en ce qui regarde le projet de loi. Qu'on se rappelle que ce projet de loi vise deux objectifs. D'abord, amender, modifier la législation du Québec qui existe depuis le début des années soixante-dix, depuis 1972, pour la protection du malade mental, c'est la loi actuelle.

Sur la base de l'expérience, de beaucoup de consultations qui ont été faites au cours des dernières années par le ministère avec tous les groupes, les professionnels des établissements qui sont impliqués dans le traitement de personnes qui ont un problème de santé mentale ou de gens qui, à cause d'une période momentanée, peuvent vivre une perturbation de leur état mental, pour que ces gens-là puissent recevoir les meilleurs soins et les meilleurs traitements, il y a une longue expérience qui s'est accumulée au Québec à cet égard, et on a voulu faire le point et améliorer la loi sur la base de cette expérience-là. La première raison.

La deuxième est que notre Code civil, qui a été changé en 1994, a introduit des modifications importantes en ce qui regarde la protection des droits d'une personne qui doit être gardée sous garde, qui doit être littéralement internée, une personne qu'on doit priver de sa liberté d'action contre sa volonté, pour son bien à elle, pour la protéger contre son propre comportement ou pour protéger son environnement. C'est donc une mesure assez spéciale. On est une société qui valorise beaucoup la liberté. Donc, quand on doit intervenir par une loi d'exception pour enlever momentanément la liberté d'une personne, il faut être sûr qu'il y a des balises légales très solides. Et le Code civil, là-dessus, a resserré beaucoup toute notre pratique dans le domaine. Alors, il fallait harmoniser, de toute façon, la loi que nous avions pour la protection du malade mental avec le Code civil en plus de profiter de l'expérience qu'on avait quant à d'autres aspects de notre loi pour, là aussi, apporter des améliorations.

Je vais rappeler trois des grands éléments qui sont nouveaux dans cette loi et qui tiennent compte beaucoup de la consultation qu'on a faite. Non seulement le ministère avait travaillé en consultation, mais la commission des affaires sociales a rencontré tous les groupes aussi qui voulaient se prononcer là-dessus, des groupes de professionnels qui sont venus devant la commission, des établissements.

En ce qui regarde la protection et la décision judicieuse d'en arriver à la conclusion de retenir une personne dans un établissement, la première amélioration de notre loi, c'est qu'on a mieux précisé le concept de dangerosité. Tout repose vraiment sur le fait qu'une personne est momentanément dans un état où elle représente un danger, et on a qualifié le danger pas seulement d'imminent, comme on l'avait qualifié au début, mais on parle maintenant – je n'ai pas la formulation devant moi – d'un danger grave et immédiat. Bon, voilà, c'est comme ça que la loi le dit: «grave et immédiat», de sorte que ça soit vraiment quand il n'y a pas moyen de faire autrement qu'on en arrive à cette décision-là. Donc, une notion de dangerosité plus précise, plus exigeante.

Un deuxième élément très important, c'est d'en arriver à la décision. Auparavant, on avait une loi qui laissait la décision essentiellement aux médecins et, après deux examens psychiatriques, on pouvait, les médecins pouvaient décider de garder une personne en garde. Maintenant, le Code civil a emmené une modification en stipulant que cette décision est désormais prise par un tribunal. On avait fait une harmonisation en disant qu'il y aura donc un examen psychiatrique au lieu de deux, et la décision du tribunal. Sur la base des représentations qui m'ont été faites, on a plutôt décidé de maintenir le système qu'on a pour avoir deux examens, deux évaluations psychiatriques qui comprennent l'examen et d'autres mesures au besoin, si c'est nécessaire, plus la décision du tribunal.

Alors, on pense qu'on a vraiment, autant qu'on peut le faire, un système plus sûr et vraiment hors de tout conflit d'intérêts possible qui pourrait intervenir pour qu'une décision d'une telle importance, c'est-à-dire de priver momentanément quelqu'un de sa liberté, puisse être prise. Dans toute l'économie de cette loi maintenant, il est bien indiqué que la durée de garde doit être précisée et qu'il y ait évaluation après chaque étape qui a été prévue par le tribunal. Et, même à l'intérieur d'une étape qui a été prévue avant qu'on repasse à une évaluation, si le suivi du patient amène les médecins à conclure qu'il n'y a plus de raison de maintenir quelqu'un en garde, alors la personne est libérée immédiatement.

Donc, dangerosité, concept plus clair, plus exigeant; une décision qui est beaucoup plus encadrée; et, finalement, je pense que ce qui marque beaucoup cette loi, c'est qu'on s'assure, dans la loi, que l'information est complètement disponible, d'abord l'information que la personne impliquée reçoit. Dès l'intervention d'un agent de la paix, d'un professionnel de la santé, de qui que ce soit qui en arrive à la conclusion que la personne présente ce degré de dangerosité qui amènerait à une évaluation psychiatrique pour décider si, oui ou non, il faut garder la personne en garde, dès le premier moment, la personne doit en être informée, le pourquoi on l'amène à l'hôpital ou au CLSC, qu'est-ce qui va se passer et quel est le type de décision, vers quoi on s'achemine, compte tenu de l'évaluation psychiatrique. Si la personne est gardée dans un établissement, l'établissement doit renouveler toutes ces informations-là. À chaque étape, la personne a le droit de savoir ce qui lui arrive et les gens ont l'obligation d'informer la personne.

(12 h 40)

De plus, en termes de communication et d'information, une personne qui est sous garde peut en tout temps communiquer avec ses proches, sa famille, son avocat, avec son tuteur et les personnes qui légalement, selon notre Code civil, sont celles qui prennent les intérêts et qui représentent une personne.

Alors, voilà, je pense, ce qui rappelle l'essentiel et peut-être les trois modifications ou améliorations les plus importantes. Il y a beaucoup d'autres éléments dans la loi dont on a parlé au cours des dernières étapes, en s'acheminant vers l'étape finale où on en est aujourd'hui.

Je rappellerai en concluant, M. le Président, que, un, je pense qu'il y a là une amélioration effectivement importante et qu'elle est reconnue par l'ensemble des gens. C'est sûr que c'est un domaine où les opinions sont reliées beaucoup à des valeurs qu'on a, des valeurs sociales, des valeurs spirituelles, au concept qu'on a du fonctionnement d'une société et qui a beaucoup d'opinions différentes. Alors, tout le monde n'est pas absolument d'accord sur tous les éléments. Mais je pense que les gens nous ont dit en commission que, sur la base de la consultation qui a été faite, il y a là une assise de consensus assez importante pour qu'on marque le pas et qu'on accuse, on enregistre, si vous voulez, on solidifie ce progrès-là et qu'on puisse continuer à travailler pour améliorer encore, dans toute la mesure du possible, au cours des prochaines années, nos interventions auprès de gens qui ont des difficultés de comportement à un moment donné.

La deuxième conclusion qui m'apparaît importante, c'est qu'un projet de loi, malgré toute l'importance qu'il peut avoir, ne peut pas régler tout, il ne peut pas viser tout. Il faut voir ce projet de loi, qui, j'espère, deviendra une loi bientôt, dans le cadre de l'ensemble des actions qui sont faites par le réseau de la santé et des services sociaux et dans le cadre des orientations ministérielles qui sont présentement en application, où on veut vraiment s'assurer que la désinstitutionnalisation qui avait été faite... commencée à la fin des années quatre-vingt, début des années quatre-vingt-dix, soit complétée, pas en désinstitutionnalisant plus, c'est essentiellement fait, ça, mais en s'assurant de développer, par exemple, beaucoup plus les ressources dans la communauté, le soutien aux familles et l'aide et l'assistance aux personnes qui retournent dans leur communauté.

Je pense que personne ne souhaite vivre interné dans un établissement, personne ne souhaite passer sa vie dans un hôpital, mais encore faut-il – et on est entièrement d'accord là-dessus – quand une personne retourne dans sa communauté, dans sa famille, qu'elle soit vraiment aidée, soutenue et que, s'il y a des complications, on puisse intervenir, en situation de crise, de façon rapide, de façon immédiate et avec toute l'intensité qu'il faut pour aider quelqu'un à continuer à fonctionner, ramener quelqu'un, si c'est nécessaire, à l'hôpital pour des soins plus encadrés. Mais on est confiant que, avec tout ce qu'on veut faire au cours des prochains mois et des prochaines années, cette loi-là va être complétée par l'application d'une politique qui va faire que, même en ayant un problème de santé mentale, même en ayant des problèmes de comportement, les gens vont pouvoir, dans les meilleures conditions, réaliser, rejoindre la santé et ce concept de la santé qui dit que c'est essentiellement de pouvoir être dans un état de fonctionnement, où tout le potentiel d'une personne peut être développé et où une personne peut être un acteur utile, estimé, bien intégré dans une société, dans sa communauté et dans sa famille. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de Bourassa. Mme la députée.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. M. le Président, nous sommes maintenant rendus à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 39, Loi sur la protection des personnes atteintes de maladie mentale et modifiant diverses dispositions législatives, qui va s'intituler à l'avenir Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui.

L'amendement au titre est important. Il est indicatif quant aux éléments clés de ce projet de loi, à savoir l'état mental de la personne et, deux, la dangerosité. Alors, c'est une nuance fort importante et un amendement qui a permis de mieux cibler les éléments clés de ce projet de loi.

Comme je le mentionnais à l'occasion de mon discours de prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales, le projet de loi n° 39 vient remplacer la Loi sur la protection du malade mental et il se veut un complément aux nouvelles dispositions prévues au Code civil. En quelque sorte, il s'agit d'harmoniser ce projet de loi avec les dispositions du Code civil du Québec.

Le projet de loi vient donc préciser les paramètres qui entourent l'examen psychiatrique. Il vient énoncer les conditions applicables à la garde en établissement, qu'elle soit préventive, provisoire ou encore autorisée par un tribunal en vertu de l'article 30 du Code civil du Québec. Il détermine également les diverses règles de procédure afin d'assurer à la personne et à ses proches le droit à l'information.

De plus, ce projet de loi vient introduire et encadrer, dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux, l'utilisation de mesures de protection. Et, pour utiliser le mot à mot de l'ancien article, nous faisons ici référence à l'utilisation de la force, de l'isolement, des moyens mécaniques ou encore de substances chimiques pour empêcher une personne atteinte de maladie mentale, qu'elle soit sous garde ou non, de s'infliger ou d'infliger à autrui des lésions.

Nous reviendrons plus loin à cet article-là qui avait pour l'opposition une importance capitale en raison de l'impact que ça peut représenter pour toutes les personnes visées. Parce que maintenant... il a été heureux qu'on le retire du projet de loi n° 39 pour le mettre sous la Loi sur les services de santé et les services sociaux, le rendant ainsi applicable à toutes les clientèles qui passent à travers le réseau de la santé, autant en courte durée qu'en longue durée. Alors, vous nous permettrez de revenir plus amplement sur ces mesures de protection.

Donc, le projet de loi prévoit des dispositions extrêmement importantes. J'aimerais profiter de l'occasion qui m'est offerte pour réitérer de nouveau aux membres de cette Assemblée l'importance du projet de loi n° 39 régissant les conditions de la garde en établissement, puisqu'il constitue une loi d'exception représentant un fondement légal permettant de mettre sous garde une personne et de la priver ainsi de sa liberté. Et cette personne-là, vous le comprendrez, n'a pas commis de crime. Alors, on la prive de sa liberté; il était donc important que le texte de loi balise de façon particulièrement précise les différentes mesures applicables.

On ne peut discuter de ce projet de loi sans rappeler le droit le plus fondamental visé par ce projet de loi là, un droit qui a été reconnu par notre société, un droit qui a été consacré dans la Charte des droits et libertés de la personne et dans le Code civil du Québec, à savoir le droit à l'intégrité de la personne.

Permettez-moi, M. le Président, de rappeler que le ministre de la Santé et des Services sociaux a déposé, lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 39, tout près de 50 amendements, et ce, afin de donner suite aux diverses recommandations des nombreux groupes qui ont été entendus lors de la consultation en commission parlementaire. Ces amendements sont venus corriger, bonifier, préciser des lacunes qui avaient été dénoncées et qui étaient contenues dans le projet de loi n° 39. Par ces amendements, on vient apaiser certaines des craintes, certaines des inquiétudes que les groupes avaient, à ce moment-là, fait valoir lors de ladite consultation.

Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais aborder les principaux articles contenus dans le projet de loi n° 39. Lors de la consultation, de nombreux commentaires ont été faits concernant le nombre d'examens à être effectués, précisément dans les cas de mise sous garde en établissement. Il y a eu un amendement qui a été déposé, à savoir l'article 29.5 du projet de loi n° 39, et qui vient lui-même modifier l'article 28 du Code civil du Québec, qui est venu confirmer la nécessité de deux examens psychiatriques. De nombreux groupes avaient fait valoir l'importance de revenir à deux examens. Et d'y revenir, pourquoi? Précisément dans l'intérêt des personnes visées par ce projet de loi.

(12 h 50)

J'aimerais, à cet égard, M. le Président, reprendre deux des commentaires qui ont été formulés par l'Association des hôpitaux du Québec et par un autre groupe lors des auditions en commission parlementaire. L'Association des hôpitaux du Québec disait: «De plus, ce mécanisme de deux examens peut permettre d'éviter souvent le recours à une garde, puisque le 48 heures de délai entre les deux examens va souvent permettre une stabilisation de l'état de crise ou une amélioration suffisante pour que la garde ne soit plus nécessaire.» Donc, on va, par ce fait, éviter des mises sous garde. Et vous savez, M. le Président, à quel point cet amendement vient donc rejoindre une inquiétude qui a été dénoncée, comme je le dis, notamment par l'Association des hôpitaux. Et l'objectif poursuivi, c'est d'éviter une mise sous garde, dans la mesure où ça peut effectivement être fait.

J'aimerais aussi, si vous me le permettez, évoquer une observation qui a été faite par la Commission des droits et libertés. Je réfère spécifiquement à la page 12 du Journal des débats du 18 février. On observe alors: «Ça me permet peut-être, M. le député, de vous souligner, quand on parle d'une extension de délai de 48 à 96 heures, on va probablement régler la plupart des problèmes, parce qu'on a dit, souvent...» Nous avons fait une recherche pour voir, sur le nombre total de mises sous garde qui avaient été faites, lesquelles étaient au demeurant ou en bout de ligne nécessaires ou lesquelles auraient pu être évitées. Et on s'est aperçu que, par cette extension de délai là, encore une fois, on vient éviter la répétition d'un problème qui avait été souvent dénoncé et qui mettait le réseau ou le législateur en garde contre une possibilité de répéter de façon inutile des mises sous garde.

J'aimerais également, M. le Président, attirer votre attention sur les articles 6 et 7 du projet de loi n° 39. On fait référence ici au chapitre II du projet de loi. De la même façon, ces articles sont importants, puisque l'article 6 désigne, outre les centres hospitaliers, les CLSC comme centres de crise de première ligne. De plus, l'article 7 vient définir les pouvoirs et les règles permettant à tout médecin d'un tel établissement de mettre sous garde une personne de façon préventive ou provisoire sans l'obtention de son consentement, sans l'autorisation du tribunal et sans qu'un examen psychiatrique soit alors effectué. Vous pouvez comprendre qu'il s'agit de mesures extrêmement importantes. La personne ne donne pas son consentement, il n'y a pas d'autorisation du tribunal, et c'est une mesure préventive ou provisoire.

Comme je le mentionnais hier au ministre dans cette Chambre, ces articles nous ont posé problème, et nous aurions voulu que le ministre de la Santé y apporte des amendements afin de mieux encadrer et de mieux cibler les modalités de ces deux articles. Permettez-moi de m'expliquer.

L'article 6 se lit comme suit: «Seuls les établissements exploitant un centre local de services communautaires disposant des aménagements nécessaires ou un centre hospitalier peuvent être requis de recevoir une personne sous garde, afin de lui faire subir un examen psychiatrique.»

Comme vous l'observez, M. le Président, l'article 6 réfère, quant au centre local de services communautaires, à ceux disposant des aménagements nécessaires pour recevoir une personne sous garde. Tenant compte des réalités dans le réseau de la santé, le ministre de la Santé sait très bien que très peu de CLSC disposent des ressources nécessaires – on peut parler ici de ressources financières ou encore des ressources humaines, donc des ressources qualifiées – et des aménagements convenables pour assurer la demande, à savoir recevoir une personne sous garde. On la reçoit pour quelque chose de spécifique ici, c'est «sous garde», afin de lui faire subir un examen psychiatrique. Les personnes qui passent à travers le réseau de la santé, et j'en sais quelque chose parce que, pendant plus de 10 ans, j'ai reçu des doléances provenant de la clientèle, donc de personnes qui passent à travers le réseau, des personnes qui vivent des difficultés au niveau de l'accessibilité ou de la disponibilité des services, ces personnes-là ont en de nombreuses occasions dénoncé soit l'absence, la précarité ou l'insuffisance des ressources, et c'est elles qui vivent ça.

Actuellement, peu de CLSC sont accessibles 24 heures sur 24 ou encore sept jours par semaine. Très peu de CLSC sont prêts à assurer des mesures de protection ou de contention dans la mesure où ça serait requis d'appliquer de telles mesures, donc dans la mesure où l'état de la personne ferait en sorte qu'on doive utiliser ces mesures-là pour protéger la personne elle-même ou encore pour protéger les gens qui l'entourent.

À cet égard, j'aimerais, si vous me le permettez, évoquer quelques passages tirés de la Politique de santé mentale , publication du gouvernement du Québec, du ministère de la Santé et des Services sociaux, et je réfère ici notamment à la page 47, dans un premier temps. Le ministre disait tout à l'heure que le projet de loi venait s'harmoniser, ce avec quoi on est tout à fait d'accord, à certaines des dispositions du Code civil. Ce que nous disons eu égard à l'article 6, c'est que, de la même façon, le projet de loi, plus spécifiquement l'article 6, doit tenir compte des réalités du réseau de la santé. Ça veut donc dire que, pour être en mesure d'offrir un service, les CLSC doivent être outillés.

Quand on utilise l'expression «aménagements nécessaires», on doit y aller un petit peu par interprétation et lire avec l'article 25. Parce qu'il n'y a pas de définition précise de ce qu'on entend par «aménagements nécessaires», sauf que, à l'article 25, on réfère à un «établissement qui, en raison de son organisation ou de ses ressources»... On peut donc penser que l'utilisation «aménagements nécessaires» veut dire un établissement dont l'organisation ou dont les ressources permettent de dispenser les services ou d'accomplir les responsabilités qu'on lui donne. Donc, il faut qu'ils aient les moyens.

Dans la Politique de santé mentale , on dit, on cible ici, et vous le comprendrez, l'allocation des ressources, et on cible aussi: Pour chacune des régions du Québec, la disponibilité d'une gamme essentielle de services suppose, d'une part, que le financement soit équitable entre toutes les régions et, d'autre part, que les ressources humaines nécessaires soient adéquatement réparties. En santé mentale, les caractéristiques de la population à desservir, ses besoins spécifiques et l'intensité des problèmes doivent être introduits comme critères d'allocation des ressources. Et pourquoi? C'est pour s'assurer que ce sont les besoins qui vont conditionner l'allocation des ressources.

Donc, on va mettre à la disposition des personnes ou des établissements – ça revient au même – l'argent qui est nécessaire pour permettre aux établissements de faire face à des responsabilités additionnelles. Les CLSC ont une mission importante de première ligne. Ils se sont vu confier des responsabilités additionnelles dans le cadre du virage ambulatoire, le virage milieu. Ils avaient des responsabilités avec le virage désinstitutionnalisation, et là, spécifiquement à l'égard du projet de loi n° 39, ils vont avoir de nouvelles responsabilités.

Déjà, on dénonçait l'insuffisance des ressources. Les sommes promises à de nombreuses reprises n'ont pas été données. Alors, que va-t-il arriver maintenant qu'ils vont avoir encore plus de responsabilités, sinon pas plus, dans les faits, de ressources, à tout le moins financières? Quand on parle de ressources humaines, on peut parler des infirmières qualifiées, donc qui ont une expérience ou une expertise en santé mentale, on peut parler de travailleurs sociaux, de psychologues. Je ne pense pas que tous les CLSC disposent d'équipes complètes à ces égards.

(13 heures)

Le document Politique de santé mentale ajoute toujours, à l'égard de la répartition, cette fois-ci, des ressources financières: «Le ministre de la Santé et des Services sociaux estime qu'il y a lieu de revoir, dans une optique d'équité, les modes de financement actuels ainsi que la dynamique qui doit animer l'allocation des ressources à l'échelon central et la réallocation sur une base régionale.» Encore une fois, le faire pourquoi? En tenant compte des besoins des personnes et de façon à y répondre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la députée de Bourassa, je dois vous interrompre à ce moment-ci, étant donné qu'il est 13 heures. Il vous reste encore au-delà de 40 minutes. Vous pourrez toujours reprendre à la prochaine occasion, dès qu'on reprendra le débat sur la question. Alors, je vous remercie bien.

Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 1)

(Reprise à 15 h 3)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous allons reprendre nos travaux aux affaires du jour. Nous étions à débattre sur l'adoption du projet de loi n° 39, Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui, et c'est Mme la députée de Bourassa qui avait la parole. Alors, je vais lui céder la parole. Il vous reste encore un temps de 44 minutes. Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: Pardonnez-moi, M. le Président, j'attends le lutrin. Merci. Brièvement, pour rappeler que, avant l'ajournement, nous abordions l'article 6 du projet de loi n° 39, et cet article parle des établissements et réfère plus spécifiquement au centre local de services communautaires disposant des aménagements nécessaires qui peuvent être requis de recevoir une personne sous garde. Tout en ne voulant pas insister davantage, peut-être rappeler encore une fois que tous les CLSC ne sont pas accessibles 24 heures par jour, sept jours par semaine, et que tous les CLSC ne disposent pas des ressources financières et des ressources humaines leur permettant... Parce qu'ils ont la volonté, évidemment, de prendre les responsabilités qu'on leur confie, sauf qu'ils sont en train de parler d'une capacité réelle, dans les faits, de le faire. Ce qui nous permettait de relancer deux items importants, l'allocation des ressources et la répartition des ressources financières, qui sont intimement liés à la capacité, dans les faits, des CLSC de pouvoir assumer les responsabilités additionnelles qu'on leur confie et que le projet de loi n° 39 viendra leur confier en addition encore une fois. Pour clore sur cet aspect, j'aimerais, encore une fois me référant à la politique de santé mentale, à la répartition des ressources humaines... De la même façon, en santé mentale, il faut comprendre que la répartition équitable des ressources humaines doit aussi accompagner une volonté de donner des services.

Il aurait été certes plus rassurant que le ministre de la Santé apporte des modifications afin de préciser qu'uniquement les CLSC dûment désignés par les régies régionales pouvaient recevoir une personne sous garde afin de lui faire subir un examen psychiatrique. Nous avons donc voté contre cet article qui nous apparaissait ne pas tenir compte des réalités du terrain. Et, si vous me permettez, j'aimerais mentionner, dans le mémoire de la Fédération des CLSC, un commentaire qui rejoint l'observation que nous formulions, à savoir, la Fédération des CLSC, à la page 16, disait que l'article 6 devrait être plus précis en faisant plutôt référence aux établissements exploitant un centre local de services communautaires désigné par la régie régionale. Encore une fois, il faudrait que la régie désigne ceux qui ont les aménagements nécessaires et qu'on s'assure que, pour chacun des territoires ou des régions administratives, il y ait un CLSC en mesure de faire face à ces nouvelles responsabilités.

L'article 6 nous posait également problème en raison de l'augmentation de la période sous garde, qui passait de 48 à 72 heures. Mon collègue le député de Nelligan a fait valoir nos principales observations sous cet item. De plus, nous aurions été rassurés si l'article 7 avait indiqué clairement que le médecin – parce que c'est un généraliste et non pas un psychiatre – qui procède à la mise sous garde doit en aviser par écrit le directeur des services professionnels ou bien le spécifier dans une note au dossier. En effet, M. le Président, l'article 7 du projet de loi n° 39 dit bien que le médecin qui procède à l'admission de cette personne doit immédiatement en aviser le directeur, mais sans mentionner «en aviser par écrit» ou encore «par le biais d'une note au dossier de la personne».

Également, M. le Président, les pouvoirs accordés aux agents de la paix prévus à l'article 8 du projet de loi n° 39 ont suscité de nombreux commentaires négatifs de la part de la majorité des groupes, à savoir que les agents de la paix n'avaient ni la formation ni les qualifications requises pour jouer un rôle impliquant un jugement clinique. Le ministre de la Santé a remplacé l'article 8 en déposant un amendement qui est venu baliser les pouvoirs des agents de la paix. On implique maintenant un intervenant qualifié d'un service d'aide en situation de crise. Donc, ça va permettre une intervention rapide et adéquate, compte tenu de la circonstance à laquelle nous faisons face.

Si vous me permettez, j'aimerais faire lecture de l'article 8 tel qu'amendé, et on dit bien spécifiquement: «Un agent de la paix peut, sans l'autorisation du tribunal, amener contre son gré une personne auprès d'un établissement [...] à la demande d'un intervenant d'un service d'aide en situation de crise qui estime que l'état mental de cette personne présente un danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui.» Donc, il n'agit pas en première ligne proprio motu, c'est-à-dire spontanément, mais maintenant il va agir à la demande d'un intervenant d'un service d'aide, et il y aura une estimation à l'effet que l'état mental de la personne présente un danger grave et immédiat.

Le deuxième alinéa de l'article 8, tel qu'amendé, vient préciser de plus que, si aucun intervenant d'un service d'aide en situation de crise n'est disponible en temps utile, à ce moment-là l'agent de la paix devra avoir des motifs sérieux de croire que l'état mental de la personne concernée présente un danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui. On est donc venu baliser ici: il faut que l'agent ait des motifs sérieux de croire que l'état mental de la personne présente un danger grave et immédiat pour elle-même et pour autrui. Ce sont donc des précisions importantes.

(15 h 10)

D'autre part, l'un des articles les plus controversés, qui a été le plus souvent évoqué, à la fois par les groupes et par les usagers – un terme que je n'aime pas beaucoup; on réfère aux personnes à qui sont destinés les services – c'était l'article 12 du projet de loi et, M. le Président, cet article-là traitait des gardes à distance ou encore des absences temporaires. On reconnaissait dans cet article-là la possibilité pour une personne sous garde de se retrouver à l'extérieur. Alors, les groupes ont fait valoir qu'il y avait une incohérence, un illogisme ou une ambiguïté dans le texte. Ces commentaires-là ont également été reçus, parce que le ministre de la Santé a déposé un amendement qui est venu supprimer cet article du projet de loi, parce qu'encore une fois il présentait à sa face même une contradiction évidente qui a été reprise notamment par l'Association des groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale du Québec et par la Commission des droits de la personne.

Si vous me permettez d'évoquer plus particulièrement l'observation formulée par l'Association des groupes d'intervention, et je fais ici référence à la page 34 des commissions parlementaires du mois de février, je cite: «L'absence temporaire ou la liberté surveillée. L'absence a elle aussi suscité de vives critiques de la part des usagers et usagères consultés. Elle est d'abord et avant tout vue comme un outil de contrôle et de chantage plaçant l'usager ou l'usagère dans une situation stressante de yo-yo.

«Souvent victimes de représailles quand ils revendiquent leurs droits, les usagers et usagères estiment que l'instauration de mesures temporaires constitue pour l'établissement un moyen supplémentaire d'obtenir une conduite dite adéquate. Ceux-ci se sont d'abord interrogés sur la logique d'une telle mesure: Comment peut-on être à l'extérieur des murs si on est encore dangereux?» Donc, M. le Président, c'est manifeste qu'il y avait une contradiction dans le texte, et elle est bien résumée ici: comment est-ce qu'on peut être à l'extérieur de l'établissement toujours sous garde si on est encore considéré comme étant dangereux?

La Commission des droits de la personne, quant à elle, disait, et je cite: «Pourtant, on comprend mal la cohérence d'une mesure qui permettrait la mise en liberté d'une personne dont, par ailleurs, l'état mental est tel qu'elle doit être placée sous garde quand on vient de rappeler que l'objectif de la loi n'est pas de traiter ou de faire traiter toute personne souffrant de problèmes de santé mentale, mais plutôt de retenir en institution une personne parce qu'elle est dangereuse pour autrui ou pour elle-même.» Donc, le ministre de la Santé a reçu toutes les observations et il a retiré du projet de loi n° 39 l'article 12 dont je viens de parler.

Ceci nous amène, M. le Président, au chapitre III du projet de loi n° 39, lequel concerne les droits et les recours des personnes visées par ledit projet de loi. J'aimerais plus particulièrement attirer l'attention des membres sur l'article 15. Bon, l'article 15 est relatif au droit à l'information: L'agent de la paix qui agit en vertu de l'article 8 ou la personne qui, conformément à une ordonnance du tribunal, amène une personne auprès d'un établissement pour qu'elle soit gardée afin de subir un examen psychiatrique devra immédiatement informer cette personne de ce fait. Donc, elle est amenée dans un établissement pour y subir un examen psychiatrique. Il va lui dire où elle sera amenée. Et également on reconnaît que la personne aura le droit d'être informée de son droit de communiquer immédiatement avec ses proches et ses avocats. Il s'agit donc d'un amendement qui a été fait à l'article 15 encore une fois pour tenir compte des observations formulées par différents groupes ou associations.

L'article 18 est également important; il a subi un amendement. On reconnaît, toujours au chapitre des droits et des recours, que toute communication est permise en toute confidentialité entre la personne sous garde et les personnes de son choix. M. le ministre, à l'occasion de différentes sessions de travail, on est venu préciser que l'utilisation de l'expression «personne de son choix» permettra à des conseillers en défense des droits d'aller rencontrer des personnes afin de les renseigner sur leurs différents droits et leurs recours.

L'article 18 modifié reconnaît également que l'interdiction ou la restriction de communication ne peut être que temporaire. Elle doit donc être formulée par écrit, motivée et remise à la personne sous garde et versée à son dossier. Il s'agit aussi ici d'amendements importants. On vient reconnaître que la personne aura le pouvoir de communiquer à moins que le médecin traitant n'en décide autrement dans son meilleur intérêt; si jamais il le faisait, cette interdiction ne pourrait être que temporaire, elle devrait être formulée par écrit, être motivée, remise à la personne sous garde et versée à son dossier. Alors, il s'agit d'amendements importants qui ont été apportés, encore une fois qui viennent bonifier l'article 18.

En terminant, M. le Président, j'aimerais informer cette Chambre que le chapitre IV du projet de loi visant les mesures de protection a été supprimé du projet de loi n° 39 et introduit à l'article 118.1 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Les groupes ont fait valoir que c'était malheureux d'associer, dans le cadre du projet de loi n° 39, des mesures de protection par rapport à une clientèle de personnes souffrant de maladies mentales. Ça créait donc une association malheureuse: personnes atteintes de maladies mentales, dangerosité et mesures de protection. Encore une fois, M. le ministre a reçu les commentaires qui ont été formulés; il a retiré du projet de loi n° 39 l'ancien article qui portait sur les mesures de protection. À l'avenir, il y aura donc, dans le cadre de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, un article 118.1 qui va traiter des mesures de protection.

On s'est rendu compte, lorsque nous avons travaillé lors de l'étude article par article, que parler de contention, c'est un petit peu nébuleux, ce n'est pas facile de bien comprendre de quelle mesure on parle exactement. Alors, si vous me permettez, le Protecteur du citoyen, dans un rapport portant sur le Curateur public et les droits de la personne – et j'évoque ici le rapport du 21 novembre 1997 – vient expliquer de quoi on parle quand on parle de contention. La contention, on pourrait la définir comme étant toute mesure, tout procédé ou tout appareil immobilisant momentanément une ou des parties du corps d'un bénéficiaire.

Les procédés sont extrêmement variés: casque protecteur, contraintes aux poignets, contrainte aux pieds, courroie de taille, orthèse d'immobilisation articulaire, bande abdominale, veste Posey, bracelet de coton capitonné pour poignet et cheville, Contention argentino, veste de sécurité, courroie de chevilles, côtés de lits, moulage de sécurité, bande de velcro, chaise gériatrique, ceinture à clé, chevillères, menottes, ceinture de cuir. Bref, ça comporte un éventail très large de mesures, de procédés ou d'appareils. Nous avions donc le souci que cet article soit balisé le plus possible afin d'éviter des imprécisions importantes. Vous comprendrez que l'article 118.1 s'adresse à toutes les clientèles, autant en courte durée que les personnes âgées dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée.

J'aimerais aussi évoquer des recommandations formulées par le Collège des médecins et qui concernent les modalités applicables dans les cas de contention et d'isolement. Les gens se demandent toujours: Est-ce que ça doit être prescrit par un médecin? Ça «doit-u» être balisé dans le temps? «C'est-u» révisable? Est-ce que la personne est sous surveillance? Donc, vous voyez que ça soulève des interrogations sérieuses.

(15 h 20)

Le Collège, à cet égard-là, disait: «L'utilisation de la contention ou de l'isolement devrait se limiter au malade présentant une ou des affections dont les manifestations sont susceptibles de mettre en danger sa santé ou sa sécurité ou encore celle d'autrui. Sauf urgence, toute contention ou tout isolement devrait nécessiter une ordonnance écrite du médecin, à moins qu'une telle ordonnance fasse partie d'un protocole de soins. Dans les cas d'urgence, il importe d'obtenir d'un médecin la confirmation d'une telle ordonnance dans les plus brefs délais. Une telle ordonnance doit indiquer la durée applicable de la mesure prescrite et les indications d'arrêt et de reprise nécessaires, le tout selon un protocole de soins dûment établi.»

À cet égard, M. le Président, nous avons déposé des sous-amendements à l'amendement proposé par le ministre de la Santé afin de bien spécifier que ces mesures de protection – contention, isolement, application de la force, recours à des substances chimiques – ne doivent jamais, au grand jamais, être utilisées à des fins punitives, ou à des fins de représailles, ou encore pour pallier à une absence, une précarité ou une insuffisance de ressources tant financières qu'humaines dans le réseau de la santé. Au contraire, elles doivent être utilisées uniquement dans le but d'empêcher la personne de s'infliger à elle-même ou encore d'infliger à autrui des lésions.

Certains vont venir dire que, par l'inclusion de l'article 118.1 sous la loi traitant des services de santé et des services sociaux, on vient en quelque sorte sacraliser ou officialiser une pratique répandue. Je pense, M. le Président, sans sous-estimer ce commentaire qui pourrait ou qui va probablement être formulé, que le souci de l'opposition a toujours été, dans le meilleur intérêt des clientèles à protéger, de s'assurer d'une utilisation minimale ou minimaliste de mesures de protection, surtout dans des périodes où il y a des coupures importantes au niveau du réseau de la santé.

De plus, M. le Président, afin de s'assurer que le protocole d'application de ces mesures de protection, protocole qui va être adopté par tout établissement, un protocole qui sera le plus uniforme et le plus sécuritaire possible... nous avons formulé un sous-amendement et celui-ci a été adopté. Il vient maintenant stipuler que des protocoles devraient tenir compte spécifiquement des orientations ministérielles qui vont être déterminées à l'article 431.9 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Donc, encore une fois, il s'agit d'un amendement important. Il y aura des orientations ministérielles qui vont venir baliser encore davantage l'utilisation de ces mesures de protection.

À cet égard, le Protecteur du citoyen et le Curateur public avaient formulé une observation ou une recommandation à l'intention du ministre de la Santé, voulant qu'il mette sur pied un comité de travail. Je pense que ça serait peut-être l'occasion, avant que des orientations ministérielles soient précisées, que le ministre mette sur pied un comité de travail dans le but de baliser le terrain le mieux possible avant d'arrêter ou d'asseoir définitivement des orientations ministérielles à ce sujet.

Donc, ces sous-amendements ont été accueillis favorablement par le ministre, ce qui permet d'escompter un niveau d'utilisation restreint des mesures de protection. Encore une fois, on parle de l'usage de la force, de l'isolement, de contention ou de recours à des substances chimiques.

Et, M. le Président, j'aimerais vous préciser que c'est extrêmement important. En de nombreuses occasions, alors que j'étais avec le Comité provincial des malades, des membres de familles ont dénoncé... Ils me disaient: Je suis allé voir ma mère, et elle était tellement «médiquée» quand je suis allé la voir qu'elle ne me reconnaissait pas. Elle était tout à fait incapable de parler, de me reconnaître, de bouger. D'autres personnes me disaient: Ma mère, on n'a pas le temps de la faire marcher, il n'y a pas de personnel. Elle est toujours dans un fauteuil gériatrique. D'autres personnes étaient contentionnées dans un lit. Il y a même une infirmière qui avait dénoncé qu'on avait utilisé une jaquette pour une résidente... une première fois pour la contentionner à l'aide d'une jaquette d'hôpital. On sait qu'une jaquette d'hôpital, ce n'est pas fait pour contentionner une personne. Et, comme si ce n'était pas suffisant, on l'avait emmaillotée, par-dessus ça, avec une couverture. Alors, vous comprendrez que l'opposition a abordé cette section-là avec un souci évident de formuler des remarques constructives dans le meilleur intérêt des clientèles à protéger.

Comme je le faisais valoir lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 39, il fallait s'assurer que l'utilisation de ces mesures de contention ne viennent pas pallier au manque de ressources financières et humaines du réseau de la santé. J'aimerais rappeler qu'on avait dénoncé une inquiétude au ministre de la Santé: alors qu'on coupe, qu'on coupe, qu'on coupe, on assiste à une recrudescence au niveau de l'utilisation de ces mesures. Et effectivement l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec ainsi que la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec ont dénoncé, à l'occasion d'une conférence de presse qui a été tenue le 2 décembre dernier, la détérioration des soins de santé au Québec, et plus particulièrement dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, ce qu'on appelle les CHSLD.

L'Ordre et la Fédération ont dénoncé le fait que, aujourd'hui, il est jugé normal que plus de 30 % des besoins en soins infirmiers des personnes âgées ne soient pas comblés. Ils ont rajouté que le déficit en soins infirmiers n'est pas sans conséquence pour la clientèle et commençait à se traduire par une augmentation des contentions physiques et chimiques, une augmentation des chutes et une augmentation des plaies de lit. Il était donc, vous le comprendrez, M. le Président, primordial de baliser au maximum et de restreindre au minimum l'utilisation des mesures de protection dans les établissements du réseau de la santé.

À l'égard de la mise en vigueur du projet de loi n° 39, nous avons fait valoir une observation voulant que, au moment où on mettra le projet de loi en vigueur, on s'assure de la disponibilité des ressources pour permettre une prise en charge adéquate répondant aux besoins des clientèles.

En conclusion, M. le Président, il s'agit d'un projet de loi d'exception. Vous comprendrez que c'est un projet de loi d'exception pour les conséquences que ça représente pour les personnes visées. On parle, ici, de priver une personne de sa liberté et de la mettre sous garde en raison de son état mental et en raison d'une dangerosité qui a été précisée, banalisée par le projet de loi n° 39. Il y avait 45 articles, près de 50 amendements ont été déposés. Le ministre de la Santé a donc bonifié ce projet de loi n° 39; il a pris en considération les diverses observations, recommandations qui ont été formulées par les principaux groupes qui ont été entendus à l'occasion des commissions parlementaires. Bien sûr, le projet de loi n° 39 est perfectible, comme le sera aussi probablement l'article 118.1. Mais il me fait plaisir de vous rappeler que l'opposition s'est approchée de l'étude article par article avec un souci premier de formuler des commentaires constructifs dans le meilleur intérêt des personnes visées par le projet de loi n° 39. Donc, on a toujours été habité par ce souci constant de formuler des commentaires dans le respect des droits des personnes visées par le projet de loi n° 39.

À différents égards, M. le ministre de la Santé a parlé de désinstitutionnalisation. La désinstitutionnalisation, c'est fermer des lits dans des établissements à vocation psychiatrique, donc de contrer l'habitude asilaire qu'on a connue au niveau de la santé mentale. J'aimerais rappeler que, comme le dira à l'avenir le nouveau titre du projet de loi, le projet de loi n° 39 s'intéresse à la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes et pour autrui. C'est bien évident que ça doit être vu dans une perspective globale, mais a priori c'est une loi d'exception qui parle des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui, donc des personnes qui vont être placées sous garde dans un établissement, alors que la désinstitutionnalisation, elle, c'est pour éviter une habitude qu'on a dite asilaire, pour contrer des habitudes d'hospitalocentrisme et pour mettre dans la communauté, plus près du milieu de vie, des services dispensés à des clientèles et faire intervenir des membres de la famille.

(15 h 30)

Donc, en résumé, considérant les articles 6 et 7 du projet de loi – ils ont été votés sur division – nous avons rappelé les inquiétudes, lesquelles veulent être en fonction des réalités du réseau de la santé. Nous serons heureux de voter pour l'adoption du projet de loi n° 39. Tel que dit précédemment, le projet de loi a été bonifié dans le meilleur intérêt des personnes et il semble donner suite aux attentes des principaux groupes et des organismes qui ont été entendus. Encore une fois, il est perfectible, mais, à tout le moins, M. le Président, tel que je vous le disais, l'opposition n'a eu pour souci, lors de l'étude article par article, que de formuler des commentaires constructifs dans le meilleur intérêt des personnes visées par ledit projet de loi n° 39.

En terminant, M. le Président, j'aimerais remercier mes collègues; j'aimerais les remercier de la précieuse collaboration qu'ils m'ont prêtée lors de l'étude article par article, donc une étude détaillée, une étude pointue, particulière, se rapportant à un projet de loi d'exception. J'aimerais remercier plus particulièrement mon collègue de Nelligan, lequel est intervenu hier en Chambre sur l'adoption du rapport ou encore sur la prise en considération dudit rapport de la commission. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bourassa. Il n'y a plus d'autres intervenants?


Mise aux voix

Alors, le projet de loi n° 39, Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Veuillez prendre en considération l'article 18, qui parle d'une prise en considération de rapport, M. le Président.


Projet de loi n° 176


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est bien ça. L'article 18. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Y a-t-il des intervenants? Ça, c'est le projet de loi n° 176. M. le député de l'Acadie, je vous cède la parole.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, si je tenais à intervenir à cette étape-ci de l'étude du projet de loi n° 176, c'est essentiellement compte tenu de l'importance de ce projet de loi, qui paraît, en apparence, mineur, sur la vie de tous nos concitoyens.

Je veux juste, M. le Président, rappeler que le projet de loi modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux afin que le ministre puisse, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application. Il y a également certaines modifications à la loi de l'assurance-maladie du Québec.

Vous me permettrez, M. le Président, d'intervenir seulement sur le premier aspect, c'est-à-dire sur les responsabilités du ministre comme titulaire du ministère de la Santé et des Services sociaux. Il faut se rappeler l'importance des responsabilités qui sont confiées à un ministre de la Santé et des Services sociaux au Québec. Je ne vous ferai pas la lecture de toute la nomenclature des responsabilités du ministre, mais on va mentionner, par exemple, dans la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, qu'il doit assurer la protection sociale des individus, des familles et des autres groupes, qu'il doit prendre des mesures requises pour assurer la protection de la santé publique, qu'il doit établir des normes applicables en matière de services, d'équipement, de finances et de personnel dans l'utilisation des subventions accordées par le gouvernement dans le domaine de la santé et des services sociaux et en surveiller l'utilisation. J'énumère, M. le Président, juste ces quelques éléments pour souligner l'importance des responsabilités qui sont confiées, dans un domaine aussi crucial que celui de la santé, au ministre qui est responsable de l'application de cette loi.

Ce qu'on a dans le projet de loi n° 176, c'est une demande du gouvernement, une demande du ministre qui lui permet, par entente, de déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application. Il n'y a aucune balise actuellement qui limite l'étendue des pouvoirs ou des devoirs que le ministre peut déléguer. Aucune balise. Il n'y a également aucune balise au niveau des intervenants possibles à qui le ministre peut déléguer. Alors, ça veut dire, au fond, essentiellement que le ministre peut déléguer n'importe quoi à n'importe qui dans le domaine de la santé, tel que le projet de loi a été écrit. Et on cherchera, M. le Président, à identifier qui est imputable, qui est responsable de quelle décision, qui doit rendre compte à l'Assemblée nationale, ici, des responsabilités que la loi a confiées au ministère de la Santé et des Services sociaux.

Malheureusement, depuis un certain temps, on a eu l'occasion à de trop nombreuses reprises de constater que le ministre a une tendance assez facile, quand on le questionne sur les problèmes qui surgissent dans le milieu de la santé, à reporter la responsabilité sur les régies, sur les établissements, et, à son niveau, tout va bien. Et c'est ce ministre qui cherche à se laver les mains carrément de ses responsabilités qui vient nous demander de lui donner plus de pouvoirs que la loi lui en donne actuellement pour pouvoir déléguer à d'autres ses responsabilités. Je pense que c'est quand même une demande qui est très sérieuse et, compte tenu de l'historique récent des comportements du ministre, je pense qu'on a lieu d'être inquiet, M. le Président.

Je voudrais tout simplement faire ressortir certains éléments problématiques qu'on retrouve, suite à la délégation des pouvoirs du ministre. Je vais faire référence, M. le Président, tout simplement à quelques éléments du rapport du Protecteur du citoyen pour l'année 1996-1997. Le rapport du Protecteur du citoyen nous fait référence, par exemple, aux problèmes qu'a rencontrés une corporation qui fournit des services de médecine à domicile. Dans le rapport, le Protecteur du citoyen nous dit: «Au cours des dernières années, il avait été convenu que la Régie, sur délégation du ministre de la Santé et des Services sociaux, devrait conclure une entente avec la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec pour permettre à la corporation de recruter des médecins. Or, l'enquête du Protecteur du citoyen a montré que la Régie n'a pas réussi à conclure cette entente. Le recrutement des médecins était donc virtuellement impossible pour la corporation. L'impact était clair: sans médecin, impossible d'offrir quelque service que ce soit [...]. Selon le Protecteur du citoyen – un peu plus loin dans le rapport – à partir du moment où la Loi sur les services de santé et les services sociaux confère au ministre la responsabilité de conclure quelque entente que ce soit avec les fédérations de médecins, il devient alors impossible à la corporation de procéder elle-même. Or, pareille entente s'avère cruciale aux activités de cette dernière; on ne peut offrir des visites de médecins à domicile si le recrutement de médecins est bloqué faute d'entente entre le ministre et la Fédération.»

On a un exemple, ici, récent de problèmes concrets que les citoyens ont été obligés d'assumer au niveau des soins à domicile, tout simplement, à ce niveau-ci, avec relativement un problème de délégation, de responsabilités partagées entre la Régie et le ministre. Mais ceux qui paient pour ça, ce sont les citoyens.

On a également un autre exemple qui nous est souligné dans le rapport du Protecteur du citoyen concernant certaines demandes que le Protecteur a faites au ministère. Je vais lire un extrait de ce rapport: «Le Protecteur du citoyen est intervenu à trois reprises auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux afin que soient corrigées toutes ces lacunes.» Il fait référence ici à un certain nombre de lacunes qu'il énumère antérieurement dans son rapport. «Certaines mesures palliatives et temporaires ont été retenues par le ministre. Toutefois, le Protecteur du citoyen déplore l'insensibilité de l'administration qui, à ce jour, s'est limitée à établir l'étalement mensuel. Pour le reste, l'objectif d'assurer à l'ensemble de la population du Québec un accès raisonnable et équitable aux médicaments requis par l'état de santé des personnes que l'on retrouve dans cette nouvelle loi risque de n'être que des mots pour les citoyens qui doivent subir ces préjudices au vu et au su des décideurs.»

Alors, ici, c'étaient des problèmes dans le domaine de l'assurance-médicaments, et encore là on demande au ministre de rendre des comptes. Le Protecteur du citoyen lui-même nous dit: Le ministre n'a pas daigné répondre de façon satisfaisante pour assurer à l'ensemble des citoyens un traitement équitable au niveau de l'assurance-médicaments.

Alors, c'est ce ministre, M. le Président, qui n'est pas capable de répondre actuellement aux revendications qui sont présentées par le Protecteur du citoyen, qui agit dans l'intérêt des citoyens du Québec, qui vient nous demander de lui donner plus de pouvoirs pour déléguer les responsabilités sur n'importe quoi à n'importe qui. Et, quand on viendra ici lui demander de nous rendre des comptes comme il le fait régulièrement quand on lui pose des questions sur ce qui se passe quotidiennement dans les hôpitaux, bien, il nous référera à la Régie, il nous référera aux établissements, mais lui ne sera jamais responsable de rien. Alors, vous comprendrez, M. le Président, qu'on a des réserves à ce niveau-là.

(15 h 40)

En plus des commentaires du Protecteur du citoyen, on peut faire référence aussi au rapport du Vérificateur général pour l'année 1996-1997, dans le tome II. Le Vérificateur général, dans une section consacrée à la responsabilisation des trois paliers du réseau – je fais référence ici au palier du ministre, du ministère, au palier des régies et au palier des établissements – nous dit: «La réforme de la santé et des services sociaux a réorienté en profondeur le système de santé en modifiant, entre autres, les rôles et les responsabilités de chacun des paliers du réseau [...]. Une telle structure – nous dit le Vérificateur un peu plus loin – dans un contexte de rationalisation, exige que chacun des niveaux rende des comptes au palier supérieur. En effet, cette démarche est essentielle pour que, en dernier ressort, le ministère puisse s'assurer que les objectifs de la politique de santé et du bien-être et ceux de la transformation du réseau sont atteints et qu'il en rende compte à l'Assemblée nationale.» Alors, ça, c'est la responsabilité du ministre, M. le Président, de s'assurer que c'est fait et d'être capable de répondre à l'Assemblée nationale de la réalisation de ce plan.

Alors, le Vérificateur général nous dit: On a partagé les responsabilités, on a délégué des responsabilités à d'autres niveaux. Et il poursuit par la suite en disant: «Bien que conscient de la nécessité de l'établir, le ministère n'a pas encore procédé à l'implantation d'un cadre de responsabilisation qui engloberait les trois paliers du réseau.» Alors, essentiellement, M. le Président – vous me dites que mon temps achève – ce que le Vérificateur général nous dit, c'est qu'on a délégué des responsabilités à gauche et à droite, mais on n'a jamais mis en place des moyens, des indicateurs qui permettraient de s'assurer de l'atteinte des objectifs.

Ce que le ministre de la Santé est le plus disponible à réaliser, c'est de réaliser les commandes du ministre des Finances de couper dans le réseau de la santé, peu importent les conséquences. Et le Vérificateur général nous dit: Il ne s'est même pas préoccupé de s'assurer qu'il y avait des indicateurs qui lui permettraient de faire un suivi et de s'assurer que les gens à qui il avait délégué des responsabilités avaient, oui ou non, atteint les objectifs.

Dans ce contexte ambigu, le ministre vient nous demander de lui confier encore plus de responsabilités pour déléguer des responsabilités à gauche et à droite. Alors, M. le Président, c'est évident que, dans ce contexte, l'opposition a énormément de réserves et que nous allons être en désaccord avec le projet de loi n° 176.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de l'Acadie. Alors, je vais céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.

M. Kelley: Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Intervenez-vous à titre de représentant ou...

M. Kelley: Non. Moi, juste...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non? Dix minutes, donc. Très bien.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Parfait. Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, j'aimerais intervenir dans le cadre du débat sur la prise en considération du rapport sur le projet de loi n° 176, la Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, Bill 176, An Act to amend the Act respecting the Ministère de la Santé et des Services sociaux and the Act respecting the Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Un des éléments clés, M. le Président, dans notre système parlementaire, c'est l'imputabilité de nos ministres; ils ou elles sont responsables de ce qui se passe dans leur ministère, et c'est un pouvoir très sérieux; et, pour moi, c'est la beauté de notre système parlementaire, qu'on puisse à tous les jours questionner nos ministres. On a juste à penser au système américain où le Secretary of Health et les autres n'ont pas ce devoir législatif, n'ont pas le devoir – des fois peut-être difficile, des fois agréable – de venir ici, devant l'Assemblée nationale, et répondre aux questions posées par les élus du peuple.

Alors, je pense qu'il y a ici un principe fondamental, et c'est pourquoi je trouve le projet de loi qui est devant nous fort dangereux. On lit ça, et ça a l'air tout à fait anodin, ce qu'on trouve ici, que «le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application». C'est simple, il n'y a aucune menace dans tout ça. Mais, M. le Président, on a juste à rappeler le dossier des fermetures d'hôpitaux récemment pour voir ce qui arrive quand ce pouvoir devient délégué. Je peux classifier ça comme peut-être le syndrome des bras croisés, comme ça. Parce que ce qui arrive quand quelqu'un cherche la responsabilité, quand quelqu'un cherche à savoir ce qui s'est passé, c'est qu'on est toujours confronté par quelqu'un qui fait comme ça. Alors, quand, au moment où on a fermé les hôpitaux dans la région de Montréal, on a posé des questions ici au ministre de la Santé et des Services sociaux et qu'il a dit: Oh! ce n'est pas moi. Ce n'est pas moi, c'est la régie régionale, c'est décentralisé, c'est le pouvoir qui a été pris par eux autres, ce n'est pas mes affaires...

Alors, on vient questionner la régie régionale, comme les citoyens de la région de Montréal, ils disent: Oh non, ce n'est pas nous autres, c'est le ministre, à Québec, qui a imposé des compressions budgétaires. Moi, je suis simplement mandaté pour exécuter les décisions qui ont été prises par le ministre. Alors, pour le citoyen ou la citoyenne, M. le Président, la personne qui aimerait savoir c'est qui qui a fermé des hôpitaux, qui a pris la décision, on n'a pas quelqu'un qui prend la responsabilité, on n'a pas quelqu'un qui est prêt à répondre aux doléances des citoyens. C'est toujours ça, M. le Président: Non, ce n'est pas moi, c'est lui, c'est l'autre. Ce n'est pas là, il faut frapper à une autre porte, il faut écrire à quelqu'un d'autre, parce que, moi, je ne suis pas responsable.

Et ça va à l'encontre du principe de notre système parlementaire selon lequel, en tout temps, c'est le ministre qui est responsable. Et, derrière le projet de loi n° 176, qu'est-ce qui va arriver si le ministre n'est plus imputable? Il va répondre à nos questions ici, en Chambre: Oh! ce n'est pas moi, c'est une entente que j'ai signée, donc c'est un établissement, c'est une régie, c'est une société, c'est quelque chose qui a pris la décision. Moi, je n'ai rien à faire dans ça. Ce n'est pas ça, notre système parlementaire. Ce n'est pas comme ça qu'on est supposé fonctionner ici. Le ministre est responsable. Le ministre est imputable.

Alors, c'est pourquoi je m'oppose, parce que, comme j'ai dit, on trouve les quelques mots dans le projet de loi, il n'y a rien là, mais, derrière tout ça, dans six mois, dans un an, il y aura des décisions de prises, et, comme représentant des citoyens du comté de Jacques-Cartier ou tous mes autres collègues, ici, dans la Chambre, nous allons essayer de poser les questions, et le ministre va faire comme ça, il va dire: Oh! ce n'est pas moi, c'est quelqu'un d'autre qui a pris la décision, par entente. C'est délégué, ce n'est plus de mes affaires. Il peut peut-être continuer de s'en occuper, de ses politiques de relations publiques, des contrats qu'il veut donner pour revigorer l'image du système de santé, sa propre image comme ministre, mais, au niveau des décisions qui sont prises, à cause de la loi n° 176, ce n'est plus de ses affaires.

Prenez l'exemple des fermetures. On a parlé longuement dans cette Chambre de la fermeture d'un hôpital francophone en Ontario, mais, quand on a soulevé la question de la fermeture du dernier hôpital anglais à Québec ou du dernier hôpital anglais à Sherbrooke: Pas moi. Pas responsable, c'est quelqu'un d'autre. C'est une régie ici, c'est une régie là. Quand on pose la question au ministre: Est-ce qu'on va être capable de continuer à assurer des services de langue anglaise? Il n'est même pas capable d'assurer ça. On essaie de poser quelques affiches en anglais à l'hôpital de Sherbrooke pour remplacer les affiches qui étaient dans l'hôpital, qui étaient de la communauté anglophone, il n'est même pas capable de faire ça.

Alors, c'est ça, M. le Président, c'est la délégation de pouvoirs et la délégation de responsabilités qui va avec que je trouve fort troublantes. Et on a vu ça dans les autres ministères aussi. Et c'est pourquoi c'est troublant, comme parent, comme citoyen, si je me demande qui est responsable pour le fait que pas tous les élèves dans nos écoles ont des livres pour leurs devoirs, à l'école. On est toujours devant le même syndrome. La ministre va répondre: Oh! c'est la responsabilité des commissions scolaires. On va aller questionner la commission scolaire, la commission scolaire va dire: C'est les budgets qui sont fournis par la ministre qui sont insuffisants.

Alors, pour les citoyens, pour les personnes qui veulent voir ce qui se passe à l'intérieur du réseau, comme je dis, c'est toujours ce syndrome, c'est toujours les personnes qui vont dire: Oh! ce n'est pas de mes affaires. Et qu'est-ce qu'on va faire? On va ajouter à la liste des dossiers où les citoyens auront des difficultés à trouver l'heure juste, à cause de la loi n° 176.

Mr. Speaker, the heart of our parliamentary system is the fact that ministers are responsible for the actions taken in their ministries, and it's obvious that, in a large ministry like the Ministry of Health and Social Services, the Minister and the representative for Charlesbourg cannot be aware of everything that goes on. But the heart of our system is that he remains responsible. And what we have here is, as I say, this «pass the buck» syndrome, that we see across this Government, that no one is responsible for anything. Nobody closed the hospitals in Québec, Mr. Speaker. Nobody's responsible for the fact that there are not enough textbooks in our schools. Everyone goes like this, everyone says: Well, it's the school board's fault. It's the school principal's fault. It's the regional health council's fault. It's the local CLSC's fault. Everyone points the finger at someone else, and what we have with Bill 176 will just continue that. The Minister will go around and sign certain delegations of authority, which he's entitled to do, but then, after that, when it comes to questioning the Minister in a question period: Oh! I signed an agreement, it's someone else's job. I'm sorry, don't ask me, I don't know anything about it. It's no longer my responsibility.

(15 h 50)

You can't do it that way, Mr. Speaker. Our system is not designed that way. The system is designed that it is the minister who is responsible. He has to be able to answer. And I just have to point to the whole debate we had over closing hospitals in Québec, where the Minister continued to wash his hands completely and said: I have nothing to do with it, it was local decisions taken by the regional health councils. When citizens went to speak to those regional health councils, the answer was: Well, the Minister forced us to do it because he cut our budget. So everyone, as I say, dodges the bullet, passes the buck. We don't know, ask someone else. Don't come here. Write a letter to somebody else.

That's not the way the system works, Mr. Speaker. There are people who are responsible for decisions, and they are called ministers. And so, to come before us today... And, as I say, it looks all innocent, the bill that is here, but behind the few words, the cryptic passage that is here will be another occasion for the Minister to say: I don't know. Ask somebody else, I don't know. Our parliamentary system doesn't work that way. That's why, on this side of the House, we're going to continue to oppose this bill, because I think it's part of a larger and dangerous tendency by this Government to say it's not responsible, to blame somebody else, to wash its hands of the things that, because of our system of government, are their responsibility.

En conclusion, M. le Président, c'est toujours les ministres qui sont responsables, c'est les ministres qui sont imputables. Moi, je trouve la tendance qui est dans le projet de loi n° 176 dangereuse parce que ça va permettre au ministre, dans la période de questions, devant les médias, devant les citoyens du Québec, de se laver les mains en disant que c'est la faute des autres, que c'est la faute de quelqu'un dans la Chambre, que c'est la faute de quelqu'un dans une régie régionale, que ce n'est plus de ses affaires. Ça ne marche pas comme ça, M. le Président, le ministre est toujours responsable, il doit assumer ses responsabilités. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre pour une intervention d'une durée maximale de cinq minutes. M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Oui, M. le Président. Je vais prendre quelques minutes pour rectifier quand même un certain nombre d'affirmations faites par les deux derniers députés qui ont pris la parole. On réentend le même, même discours, la même cassette depuis toutes les heures qui ont été consacrées pour discuter d'un projet de loi de trois articles, et je dois m'inscrire en faux contre les interprétations qu'on en fait et je peux assurer la population que les vérifications ont été faites auprès des spécialistes en droit administratif pour bien s'assurer que ce que je vais dire est ce dont il est question.

Le ministre, justement, est imputable et demeure imputable, avec l'amendement qu'on fait là. Les fonctions d'un ministre sont écrites – spécialement pour le ministre de la Santé et des Services sociaux – à l'article 2 de la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux. Le ministre a deux types de fonctions: il a une fonction politique, comme tous les ministres, qui est celle de participer à l'élaboration des politiques relatives à la santé et aux services sociaux et de proposer au gouvernement ces politiques; il y a une deuxième série de fonctions qui sont des fonctions de nature exécutive en rapport avec la mise en oeuvre des politiques que le gouvernement a approuvées pour en surveiller l'application et pour coordonner l'exécution de ces fonctions.

Et c'est de ces fonctions dont il s'agit dans le projet de loi qu'on dépose. Pas pour déléguer des fonctions, c'est très clair, on dit «déléguer l'exercice des fonctions». Alors, il n'y a aucun doute que le ministre demeure responsable de s'assurer que, s'il pense que certaines fonctions... Comme il y en a qui sont déjà déléguées, d'ailleurs, sur l'autre loi sur la santé et les services sociaux, à tout le réseau. La fonction publique a des fonctions déléguées, les régies régionales ont des fonctions déléguées – pas n'importe quoi, c'est écrit dans la loi, exactement, quelle est leur responsabilité – les établissements ont des fonctions déléguées et le ministre est là pour faire des politiques, les mettre en application, faire l'évaluation et s'assurer qu'on garde le cap, M. le Président.

L'autre situation, où le ministre reste mêlé dans tout... Et, si c'est ça, le genre de concept de gouvernement qu'a l'opposition et qu'elle a pratiqué... Pour toutes les décisions, tout le détail, ils se mêlent de tout. Ce qui arrive dans une situation comme ça, c'est que le ministre est assez embourbé dans tous les détails que, au lieu de déléguer et de s'assurer que c'est fait comme ça doit être fait et, lui, de faire son travail de ministre, lui, de faire la surveillance, lui, de faire l'évaluation, lui, de faire les corrections et s'assurer que le système fonctionne bien, bien, si le ministre reste occupé à faire tous les détails, des gens qui pourraient le faire mieux parce qu'ils peuvent gérer ça directement sur le terrain peuvent travailler avec ceux qui reçoivent les services et les professionnels qui donnent les services, les rendre responsables, leur donner des moyens, et le ministre, lui, peut garder sa fonction de ministre. Ça fait un système pas mal plus fort qui travaille comme le résultat d'un travail d'équipe, plutôt que d'essayer de tout faire seul.

Il faut s'inscrire en faux contre cette mauvaise interprétation qui est de dire que, si tu délègues l'exercice d'une fonction, tu ne délègues pas ta responsabilité. Le ministre demeure imputable devant le gouvernement, imputable devant l'Assemblée nationale, et, s'il ne se tient pas au courant, il doit réintervenir chaque fois qu'une délégation ne fonctionne pas comme prévu, et c'est exactement comme si c'était son ministère qui le faisait.

Alors, ce qui est proposé, c'est de s'assurer qu'on va avoir un État moderne qui va fonctionner comme un État moderne, c'est de respecter nos objectifs de décentralisation et d'avoir des organismes gouvernementaux, publics qui peuvent assumer des responsabilités et répondre de ces responsabilités en Chambre. Alors, on va probablement réentendre le même discours, réentendre la même cassette, mais je peux assurer la population que ce n'est pas un délestage de responsabilités qui est là.

Et, quand on parle des hôpitaux, pour prendre un exemple de ça, la responsabilité a été prise avec le même genre de délégation et c'est le gouvernement qui a autorisé le ministre à prendre la décision finale de fermer les hôpitaux qui devaient être fermés. Les autres qui ont été impliqués là-dedans, les régies régionales sur le terrain dans les régions, ont fait des recommandations, des études, des analyses d'équilibre de chaque région, des recommandations au ministre, qui a proposé des décisions au gouvernement, et le gouvernement l'a autorisé à procéder. Alors, le système est vraiment surveillé, il y a des «checks and balances», complètement, dans le système, et ça, c'est de faire un État moderne plutôt que de gérer le Québec comme si c'était un dépanneur, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Le projet de loi n° 176, c'est un projet de loi qui, pour la population certainement, invoque au départ un numéro, 176. Mais ça va plus loin que ça, et c'est important peut-être de l'expliquer à nos compatriotes, à nos concitoyens, Québécois et Québécoises, qui nous écoutent. C'est un projet de loi qui est un peu pernicieux, c'est le moins qu'on puisse dire. C'est un projet de loi qui, en trois articles, quoi qu'en dise le ministre de la Santé et des Services sociaux, va lui permettre de se délester, de se désengager d'un certain nombre de ses prérogatives.

À titre d'exemple, qu'en est-il? Prenons l'exemple du CLSC de Pointe-aux-Trembles, où actuellement le conseil d'administration et la direction sont en demande pour une extension de la possibilité de déduire l'exemption de salaire qui est donnée aux médecins qui pratiquent dans la région de Montréal, s'ils ont moins de trois ans d'ancienneté.

Eh bien, nous avons fait une demande, moi-même et ma collègue de Pointe-aux-Trembles, il y a une dizaine de jours maintenant, auprès du ministre afin d'avoir cette exemption pour permettre au CLSC de maintenir son urgence, qui reçoit 30 000 personnes par année, auquel cas, à cause de ce manque de médecins, il devrait cesser ses activités certainement dans le courant du mois de janvier ou, du moins, les restreindre fortement. Alors, on est allés voir le ministre avec cette demande du conseil d'administration. Et que nous arrive-t-il aujourd'hui, une dizaine de jours après, comme réponse? On nous dit: Bien, ce n'est pas le ministre, il a demandé à la Régie de s'en occuper. Il a demandé à la Régie de voir ce qu'il y avait à faire là-dedans.

(16 heures)

M. le Président, qui est responsable de la santé et des services sociaux au Québec, si ce n'est le ministre? C'est ce qu'il vient de nous dire. Bien, on se rend compte que, dans ce cas-là, il se décharge de cette responsabilité qu'il ne veut peut-être pas prendre sur la régie régionale. Et qui va en subir les conséquences? Ce sont les citoyens de Pointe-aux-Trembles, dans l'est de Montréal, une partie dans le comté de LaFontaine, l'autre partie dans le comté de Pointe-aux-Trembles. Alors, lorsqu'on voit que, déjà même sans ce projet de loi là, c'est ainsi qu'il se comporte, eh bien, on se pose la question à savoir, lorsqu'il amène un projet de loi comme le 176 qui dit en toutes lettres que «le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application», ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'il dit: Moi, maintenant, je ne m'en occupe plus, occupez-vous-en, et puis, ma foi, s'il arrivait un problème, ça reviendrait à dire: Bien, peut-être que, à la fin, j'en serai le responsable. Mais, en attendant, M. le Président, c'est se décharger de l'application.

Pourquoi est-ce que les citoyens, les Québécois et les Québécoises, élisent des députés en cette Chambre? Pourquoi élisent-ils un gouvernement? Ils élisent des députés – et majoritairement, dans un parti ou dans un autre, dépendant des périodes – pour qu'ils puissent, s'ils sont majoritaires, former le gouvernement. Et, au sein de ces députés, le premier ministre, le chef du parti va choisir des gens qui vont avoir des responsabilités ministérielles, soit de gérer et d'administrer la vie quotidienne des concitoyens, des Québécois, et de toutes tendances politiques d'ailleurs. Alors, nous sommes donc imputables à la population directement de par le mandat que nous recevons, premièrement, comme gens élus par le peuple et aussi par la nomination qui en découle pour le parti majoritaire. Ce n'est pas les régies qui sont imputables. Ce n'est pas les organismes paragouvernementaux ou les régies, ce sont les élus. Et là le ministre se retire, il dit, maintenant: Bien, moi, comme élu, je regarderai ça un peu de tout haut, un peu comme un président d'un conseil d'administration qui, de temps en temps, fait une réunion avec ses administrateurs puis dit: Bien, voilà, on va prendre telle décision. Vous avez pris telle décision? Ah bien, il faudra peut-être changer la prochaine fois; c'est dommage, il y a eu un dérapage.

M. le Président, ce n'est pas ça que les Québécois et les Québécoises, ils veulent. Ils veulent d'un ministre qui s'occupe quotidiennement et à tous les jours de leur destinée, particulièrement dans la santé, dans l'éducation et dans la justice. Ce sont trois domaines très, très pointus et très délicats pour la vie de nos concitoyens. Ils ne nous ont pas élus pour que nous disions: Nous ne voulons plus nous en occuper, nous allons le déléguer. Alors, ils ne pourront pas accepter ça. Prenons un exemple dans les personnes âgées. Prenons les centres d'accueil. Le ministre va pouvoir, grâce – pas «grâce», le mot ne devrait pas être «grâce» – à cause de ce projet de loi là qu'il nous amène, s'il le veut, se retirer complètement des décisions en ce qui concerne la gestion des centres d'accueil pour les personnes âgées. Ça va être des organismes non élus. Est-ce qu'on veut, au Québec, faire en sorte que notre système soit administré par des non-élus ou on veut que ce soit toujours les gens que nous connaissons, les gens qui sont élus, parce que le peuple leur faire confiance, qui s'occupent de leurs affaires?

Le ministre a été qualifié de ministre technocratique. On a entendu ça assez souvent. Peut-être... Il ne faut pas prendre ça dans le sens négatif du terme. Il est un homme d'administration, de structure, et je ne dis pas ça péjorativement. Tout le monde lui reconnaît cette grande capacité qu'il a de faire des structures, des plans, des rapports, le fameux rapport Rochon entre autres. Mais là il est en train de faire, depuis qu'il est élu... Il n'a pas compris qu'il est maintenant imputable auprès du peuple et non pas auprès de gens qui lui passent des commandes pour faire des rapports, pour faire des structures. Il n'est plus un fonctionnaire, il est un élu de la population de son comté, d'abord, mais ensuite du Québec parce qu'il est maintenant au comité exécutif, au Conseil exécutif. Alors, il faudrait qu'il se comporte comme un homme élu, comme un homme imputable qui fait de la politique et non pas comme un administrateur public. S'il veut faire l'administrateur, qu'il fasse le sous-ministre ou qu'il continue à travailler dans un organisme international de médecine où, là, il y a beaucoup de structures et il y a beaucoup d'administration. Mais ce n'est pas ça, M. le Président.

Alors, nous ne pouvons pas accepter ce projet de loi là, on ne peut pas être d'accord avec ça. Il va essayer de dire qu'il va entendre une cassette. M. le Président, ce n'est pas une cassette, c'est quasiment... L'opposition l'implore de ne pas présenter ce projet de loi là, de conserver ses prérogatives. Ce n'est pas une cassette, c'est quasiment une lamentation constante de la part de l'ensemble des membres de l'opposition. Nous sommes 47, il y en a quarante et quelques qui ont déjà parlé, et je pense qu'il y en a encore un autre 43 ou 44 qui vont parler, M. le Président, parce que, pour nous, c'est important. Il est très important qu'un projet comme celui-là ne soit pas adopté ou, s'il est adopté, qu'il soit modifié suffisamment pour faire en sorte que les citoyens puissent encore savoir qui est responsable de l'administration de la santé au Québec, qui en est le patron, pas quelqu'un qui va être dans une tour, quelque part, dans un bureau, avec des attachés et qui va attendre que la situation se passe ou que les choses évoluent, comme on l'a vu trop souvent dans différents cas qui ont été révélés par notre collègue le député de Brome-Missisquoi, où des hôpitaux laissent les gens dans les couloirs, où on a des gens qui ont de la difficulté au niveau...

Prenons les greffes, M. le Président. On se rappellera le cafouillage qui a eu lieu. Je suis certain que, si le ministre avait suivi de plus près, peut-être, tout ce dossier-là au lieu d'écouter ses technocrates ou les gens à qui il a délégué ça, eh bien, il n'aurait pas laissé faire ce cafouillage, cette ballade entre Québec et Montréal des greffes au Québec. Et tout le monde sait, M. le Président, tout le monde s'en souvient, ça a laissé malheureusement une mauvaise impression en plus d'avoir créé des difficultés à nombre de nos compatriotes.

M. le Président, la santé, c'est une question de confiance. C'est, avec l'éducation et la justice, la mission principale de notre gouvernement. C'est ce en quoi les gens portent leur confiance et ce en quoi les gens finissent par accepter les règles qui gouvernent notre société. Et ça, on ne peut pas accepter que les ministres s'en délèguent. Il ne manquerait plus que le ministre de la Justice délègue lui aussi différentes prérogatives qui sont les siennes, et celui de la Sécurité publique, celle de l'Éducation. Quant à faire, allons-y, déléguons. Mais à quoi servirons-nous? À quoi serviront-ils? M. le Président, nous servirons à quoi? On se pose la question.

Surtout, la question à se poser, c'est: Est-ce que nos compatriotes, nos concitoyens vont être mieux servis, mieux traités, mieux protégés avec ce projet de loi là? La question, c'est non. Et, avant de présenter un projet de loi, la première question qu'on se pose: Est-ce que c'est dans le meilleur intérêt des citoyens, c'est dans le meilleur intérêt des services? Ça «sauve-tu» de l'argent? Ça «fait-u» des économies? Ça «améliore-tu» le fonctionnement du système? C'est ça, les questions, M. le Président. Et, dans ce cas-là, à chacune des questions, c'est: Non, non, non, et encore non. N'en déplaise au ministre qui s'est permis tout à l'heure de dire que notre collègue récitait une cassette, ce n'est pas une cassette, M. le Président, il récite, il dit ce que les Québécois et les Québécoises dans son comté lui disent, et la même chose pour moi, et la même chose pour mes autres collègues. Nous sommes les porte-parole des citoyens, nous sommes les porte-parole des Québécois et des Québécoises, alors que lui est le porte-parole d'une technocratie et d'une bureaucratie. C'est là la différence.

C'est pour ça que nous nous opposons à ce projet de loi là. C'est pour ça que nous allons voter contre. Et c'est pour ça, M. le Président, que jamais nous n'accepterons que l'administration publique, que les élus se mettent au service des technocrates. C'est les technocrates qui sont au service des élus et non le contraire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Le prochain intervenant? Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Oui, M. le Président. Nous avons devant nous l'une des pièces législatives les plus minces – un feuillet, trois petits articles – mince en volume, mais l'un des projets de loi, M. le Président, les plus lourds de conséquences en termes d'impact sur la population, car c'est de la santé publique qu'il s'agit et plus particulièrement de la mission du ministère de la Santé et des Services sociaux et du ministre en particulier.

Alors, de quoi s'agit-il, M. le Président, et pourquoi est-ce très important, ce projet de loi en particulier? Le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, qui est devant nous à cette étape de prise en considération du rapport comporte donc, comme je le disais tantôt, trois articles, trois petits articles qui changent en profondeur et de fond en comble la mission du ministre et du ministère de la Santé et des Services sociaux. Et ce changement-là, M. le Président, a des effets et risque d'avoir des effets désastreux sur la population.

Dans les notes explicatives de ce mince petit projet de loi, on peut lire que ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux afin que le ministre puisse, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application. Le projet de loi modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec afin de permettre à la Régie d'exercer toute fonction qui lui est déléguée aux termes d'une entente conclue avec un ministre.

(16 h 10)

M. le Président, nous sommes face à un débat qui est crucial au niveau de la santé et des services sociaux au Québec. Le ministre nous dit, dans son projet de loi, qu'il veut déléguer à un organisme. Lequel? Quel organisme? Comment ça se fait que ce n'est pas spécifié de façon claire et nette dans le projet de loi? Le ministre délègue sa mission, ses fonctions à un organisme; on ne sait pas lequel, M. le Président. Ça peut être n'importe quel organisme, le projet de loi ne le précise pas.

Le projet de loi ne précise pas non plus quelles sont les fonctions qui sont attribuées au ministre de par la loi et qu'il entend déléguer par une simple entente. Ça, c'est très grave dans notre démocratie. Il est très important pour comprendre l'enjeu de revenir à la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et d'aller plus précisément à l'article 2 et à l'article 3 de cette loi, qui définissent les fonctions du ministre ainsi que ses devoirs. Et, quand on lit le texte de la loi – parce que ce projet de loi n° 176, il modifie les fonctions et les devoirs du ministre tels que libellés dans la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux – à l'article 2 de cette loi, on peut lire: «Le ministre a pour fonctions d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques relatives à la santé et aux services sociaux. Le ministre doit voir à la mise en oeuvre de ces politiques, en surveiller l'application et en coordonner l'exécution.»

Voilà, M. le Président, une mission très large, extrêmement importante, qui touche à la santé publique, qui touche aux services directs à la population, et le ministre de la Santé, qui est passé dans l'art de la technocratie, veut tout simplement se décharger de sa mission et la déléguer à un organisme, n'importe lequel, on ne le sait pas. Et le ministre veut que, nous, on marche avec lui dans ce sentier-là qui est extrêmement dangereux et lourd de conséquences pour les citoyens.

Toujours en regard de la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, à l'article 3, sur les devoirs du ministre, M. le Président, qu'est-ce qu'on peut lire dans la loi que le ministre entend modifier par le projet de loi n° 176 qui est devant nous? À l'article 3, je cite au texte: «Le ministre doit plus particulièrement:

«a) assurer la protection sociale des individus, des familles et des autres groupes;

«b) prendre les mesures requises pour assurer la protection de la santé publique;

«c) voir à l'amélioration de l'état de santé des individus et du niveau de santé de la population;

«d) favoriser l'étude et la recherche scientifique dans le domaine de la santé et des services sociaux;

«e) participer à l'élaboration et à la mise en oeuvre des programmes d'assainissement du milieu physique dans lequel vit la population à laquelle ces programmes sont destinés;

«f) promouvoir la participation des individus et des groupes à la détermination des moyens de satisfaire leurs besoins dans le domaine de la santé et des services sociaux;

«g) consulter les individus et les groupes sur l'établissement des politiques du ministère de la Santé et des Services sociaux;

«h) promouvoir le développement et la mise en oeuvre de programmes et de services en fonction des besoins des individus, des familles et des autres groupes;

«i) établir des normes applicables en matière de services, d'équipement, de finance et de personnel dans l'utilisation des subventions accordées par le gouvernement dans le domaine de la santé et des services sociaux, et en surveiller l'utilisation;

«j) assurer l'organisation et le maintien des établissements dans le domaine de la santé et des services sociaux, lui-même ou par un tiers;

«k) déterminer les possibilités d'adoption des enfants domiciliés hors du Québec en tenant compte des objectifs définis par le ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles en vertu de la Loi sur le ministère des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles et de la Loi sur l'Immigration au Québec;

«l) obtenir des ministères du gouvernement et de tout organisme public ou privé les renseignements disponibles aux fins de la mise en oeuvre de la politique du ministère.»

Voilà, M. le Président, la liste complète des devoirs qui sont conférés par la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux au ministre. Et c'est ça, M. le Président, quand on revient au projet de loi n° 176, c'est tous ces devoirs dont le ministre veut se décharger. Il veut se décharger auprès d'un organisme dont on ne connaît même pas la nature, ni la teneur, ni la responsabilité.

M. le Président, le ministre, dans son intervention, a essayé d'être rassurant, comme d'habitude, parce qu'il pense que, parce qu'on peut apporter des arguments bureaucratiques, cela va rassurer la population. Il a parlé de ce projet de loi comme étant une modification d'ordre technique. Il ne s'agit pas d'une modification d'ordre technique. Si l'opposition officielle s'oppose vigoureusement à ce projet de loi, c'est parce qu'elle a conscience qu'il a des implications directes sur la population, qu'il modifie le mandat d'un ministère qui a une mission parmi les plus importantes au gouvernement et qu'on ne peut pas laisser le ministre s'en aller avec ça.

On comprend, M. le Président, que le ministre actuel de la Santé et des Services sociaux ne comprend pas nécessairement son rôle de la manière qu'il devrait l'assumer, parce que dans notre système l'imputabilité des ministres, la responsabilité des ministres devant le Parlement est essentielle et fondamentale. Or, ce projet de loi vient tout simplement, du revers de la main, balayer la responsabilité du ministre, puisqu'à partir de maintenant le ministre peut déléguer ses pouvoirs, en totalité ou en partie, à des organismes qu'on ne connaît pas, et c'est à eux de répondre devant la population. C'est irresponsable.

Ce gouvernement, M. le Président, s'est fait élire sous le signe d'une autre façon de gouverner. Alors, L'autre façon de gouverner , on en découvre la substance et la nature. C'est de l'irresponsabilité. Ce projet de loi nous propose une délégation des pouvoirs du ministre de la Santé et des Services sociaux. Ce n'est pas une délégation, M. le Président, c'est une démission; et on ne peut pas marcher là-dedans. Je m'oppose farouchement à ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viger. M. le député.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. J'ai eu déjà l'occasion d'intervenir sur ce projet de loi n° 176, projet de loi dont, dans les notes explicatives, on dit quoi? «Ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux afin que le ministre puisse, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une ou l'autre loi dont il est chargé de l'application.» M. le Président, et ça continue: «Le projet de loi modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec afin de permettre à la Régie d'exercer toute fonction qui lui est déléguée aux termes d'une entente conclue avec un ministre.»

M. le Président, l'article 1 de ce projet de loi, le 9.2, ça se lit comme suit: «Le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.»

M. le Président, la question qu'il faut se poser actuellement, et je l'ai dit même l'autre fois, c'est: Pourquoi? Quelles sont les raisons pour lesquelles le ministre veut se décharger des responsabilités que la loi lui donne? M. le Président, je disais l'autre fois... Une des prérogatives du ministre dans la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, c'était justement d'assurer l'organisation et le maintien des établissements dans le domaine de la santé et des services sociaux lui-même ou par un tiers.

(16 h 20)

M. le Président, je me suis posé la question et je me la pose encore aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle j'interviens encore aujourd'hui. Je vais essayer de convaincre le ministre, ou de nous expliquer pourquoi il veut se décharger de cette responsabilité, comme je disais tout à l'heure, la responsabilité du maintien des établissements dans le domaine de la santé et des services sociaux. M. le Président, la question, il faut se la poser, et j'aimerais que le ministre, il me réponde, parce que c'est très important pour nous.

On connaît tous les problèmes qu'on a eus à l'intérieur de la santé depuis un certain temps. On le sait, le ministre, il a fermé des établissements, il a fermé des hôpitaux à Montréal, en région, à Québec et un peu partout sur le territoire québécois. Seulement à Montréal, ce ministre a fermé sept hôpitaux. Il en a fermé à Québec, comme je le disais, et il en a fermé en région. Étant donné qu'il veut se délester, qu'il veut laisser la responsabilité du maintien des établissements de santé et de services sociaux, la question qu'il faut se poser est celle-ci: Est-ce que le ministre ou le gouvernement qu'on a en face est en train probablement de fermer d'autres établissements, d'autres hôpitaux au Québec? La question est valide et il faut se la poser parce que, pour que ce ministre essaie actuellement de se décharger de ses responsabilités, il doit y avoir quelques raisons, il doit y avoir des motifs.

Comme je le disais l'autre fois, M. le Président – puis le ministre, il ne nous a pas répondu – il y a des rumeurs, il y a des ouï-dire, il y a certaines choses qui se passent actuellement dans le sens que probablement, à Québec, l'Hôpital du Saint-Sacrement pourrait être fermé. On n'a pas eu la réponse de la part du ministre, nous dire: Non, ce n'est pas vrai, c'est faux. Il ne l'a pas dit. Ça veut dire qu'il y a quelque chose là-dedans. Ça se peut qu'il y ait quelque chose de véridique là-dedans, que l'Hôpital du Saint-Sacrement de Québec puisse fermer.

M. le Président, je disais aussi au ministre qu'il avait pris un engagement, que le CHUM de Montréal, il devait garder au-delà de 1 450 lits, et je disais au ministre de nous confirmer si c'était vrai ou si c'était faux qu'il y avait au moins 1 450 lits dans le CHUM, à Montréal, qui seraient gardés. On vient d'apprendre ce matin, et par la bouche même du ministre, que ce n'est plus 1 450 lits qui seront au CHUM à Montréal, mais qu'il y en aura seulement 1 200. Ça veut dire encore 250 lits de moins au CHUM de Montréal. La question que je me pose – et je la pose au ministre, il est ici, je pense qu'il m'écoute – c'est: Quelle est la véritable intention de ce ministre, quelle est la véritable intention du gouvernement vis-à-vis de ce projet de loi? Comme je disais tout à l'heure, le CHUM de Montréal, au lieu de 1 450 lits, il en a 1 200.

On sait qu'actuellement il y a des employés des hôpitaux qui sont en grève au pavillon Notre-Dame, à l'hôpital Notre-Dame. M. le Président, vous savez mieux que moi que, quand il y a des gens de la santé, des infirmiers, des gens qui sont rattachés à un hôpital qui sont en grève, même si c'est une grève illégale, qui souffre de ça? Ce sont les malades. Et vous savez très bien que ces personnes qui sont dans un lit dans un hôpital, elles ont besoin de soins. C'est les gens les plus démunis de la société parce que ces gens-là sont à la merci de tout le monde, qu'ils sont à la merci des employés des hôpitaux. Et, quand ces employés ne sont pas là, on fait quoi? Ces gens-là, ils ont toutes sortes de problèmes.

Le ministre, ce matin, il n'a pas eu le courage de prendre ses responsabilités et de dire: Voilà, nous allons remédier à ça, nous allons imposer... La responsabilité du gouvernement, c'est justement d'imposer aux syndicats et aux employés qui sont là de rentrer au travail, parce que, je répète, cette grève est illégale. Le ministre, il a dit seulement: On va suivre ça de très près, on va suivre ça à tous les instants, mais il n'a jamais dit qu'il va prendre la responsabilité de faire rentrer ces gens. Parce qu'il faut y aller, dans les hôpitaux, pour voir réellement ce qui se passe à l'intérieur des hôpitaux.

Je disais: Moi, j'ai l'occasion d'y aller assez souvent parce que j'ai des membres de ma famille qui sont hospitalisés. Mais je vous dis que ce n'est pas un cadeau actuellement. Ce n'est pas un cadeau parce que ces gens-là souffrent. Le manque de personnel, on le voit, on le sent. Sur le même étage où il y avait cinq, six employés qui travaillaient, aujourd'hui ils sont rendus deux ou trois pour faire le même travail.

Et, par dessus tout ça, comme je le disais tout à l'heure, à l'hôpital Notre-Dame, il y a une grève illégale. M. le Président, il y a des centaines de malades qui sont à l'intérieur de cet hôpital. Pourquoi le ministre ne prend-il pas ses responsabilités et n'impose... La loi lui donne la possibilité d'agir. Il ne le fait pas. Est-ce que c'est à cause probablement qu'on a certains, si on peut dire, objectifs par lesquels... Étant donné que le gouvernement du Parti québécois est un peu, si je peux dire, lié avec les centrales syndicales pour atteindre un objectif que tout le monde connaît, celui de la séparation du Québec, est-ce que c'est à cause de ça que ce gouvernement-là ne prend pas ses responsabilités, même au prix que ça puisse coûter des vies à des malades qui sont à l'intérieur des hôpitaux?

M. le Président, je trouve ça complètement irresponsable de la part du gouvernement actuel et de la part du ministre de la Santé. Et voilà, d'après moi, la raison pour laquelle ce gouvernement, ce ministre veut se délester des responsabilités qu'il a par la loi. Pourquoi il veut les déléguer? Pourquoi il veut les déléguer par entente? Parce que demain matin, s'il ferme, par exemple, l'hôpital, comme je le disais, du Saint-Sacrement à Québec, ou s'il ferme d'autres lits dans d'autres hôpitaux, il va dire: Mais ce n'est pas moi, ça a été la régie ou ça a été tel et tel organisme qui les a fermés. Ce n'est pas moi.

Qu'il prenne ses responsabilités, M. le Président. Il est obligé de prendre ses responsabilités. La population l'a élu pour prendre ses responsabilités. S'il ne veut pas les prendre, ces responsabilités-là, on a seulement un choix, c'est celui de démissionner et de dire: Moi, je ne veux plus être ministre de la Santé. Je ne me sens plus capable de défendre les intérêts des malades. Je ne me sens plus capable de défendre les intérêts de la population du Québec. Moi, je dis, M. le Président, que, si le ministre, c'est ça, les intentions qu'il a, eh bien, il sait quoi faire. Moi, je pense que c'est sa responsabilité. Nous ne pourrons pas accepter un projet de loi comme celui-là, le 176, où le ministre essaie de se délester de ses responsabilités et de les donner à d'autres. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viger. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai l'honneur de m'adresser à vous cet après-midi, en cette Chambre, sur le projet de loi n° 176, soit la Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. À première vue, les notes explicatives nous disent, en fait, que le but de ce projet de loi est de permettre au ministère de la Santé et des Services sociaux de déléguer, par entente, à un organisme l'exercice de certaines fonctions qui lui sont assignées en vertu de toute loi sous sa juridiction.

M. le Président, je continue de m'étonner du peu de respect que le gouvernement du PQ témoigne envers la population du Québec, et pourtant, j'en ai eu plusieurs exemples sous les yeux depuis leur arrivée au pouvoir. Est-ce qu'ils ne voient pas que notre système de santé a été complètement chambardé à cause d'eux? Alors que notre système de santé était cité en exemple à travers le monde, maintenant les gens en parlent avec incrédulité. Comment les péquistes peuvent-ils ignorer l'insécurité des usagers face à notre système de santé, surtout parmi nos aînés qui ont peur d'aller à un hôpital du Québec? Comment peuvent-ils encore s'adresser en cette Chambre pour vanter un tel système de santé?

(16 h 30)

M. le Président, est-ce que c'est normal que les citoyens aient peur de fréquenter les hôpitaux du Québec, qu'ils se rendent compte que notre système ne fonctionne pas, qu'ils voient que nos professionnels de la santé sont surchargés de travail, qu'ils sentent que le système est inefficace et qu'ils font face à des listes d'attente interminables dans les urgences et les hôpitaux? Est-ce que ce n'est pas inquiétant que le moral de nos professionnels de la santé soit au plus bas? Qu'on assiste au départ des médecins de toutes les régions du Québec, qui quittent non pas pour avoir plus d'argent, mais parce qu'ils ont des standards d'éthique et de morale plus élevés que ceux du gouvernement du Parti québécois, des députés péquistes et du ministre de la Santé et des Services sociaux?

M. le Président, si vous répondez d'une manière juste et objective, comme votre rôle d'impartialité le demande, vous serez d'accord avec moi que le gouvernement du Parti québécois est en train de détruire notre système de santé et la santé de la population entière du Québec en même temps. Vous devriez avoir honte, vous, du gouvernement péquiste, de continuer à appuyer le ministre de la Santé et des Services sociaux et sa réforme.

Ce n'est pas seulement moi, le député de D'Arcy–McGee, qui condamne la transformation et la détérioration de notre système de santé par le gouvernement du Parti québécois, ce n'est pas seulement mes collègues de l'opposition officielle, mais bien les professionnels de la santé. En effet, dernièrement, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec et la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec se sont unis en conférence de presse pour dénoncer la détérioration des soins de santé au Québec.

J'aimerais vous citer et aborder avec vous les déficiences de notre système telles que décrites au communiqué de presse émis par les deux groupes. Je mets au défi le ministre de répondre, ligne par ligne, mot par mot, aux dénonciations contenues dans le communiqué de presse. Mais, naturellement, le ministre n'a pas l'intégrité professionnelle nécessaire pour le faire, et on sait que lui et ses confrères s'en sortiront en faisant des grands discours démagogiques qui n'ont rien à voir avec les vrais enjeux que sont l'état désastreux de notre système de santé, l'insécurité de la population et les effets catastrophiques sur la population.

M. le Président, laissez-moi vous citer directement à partir du communiqué conjoint de l'Ordre des infirmières du Québec et la Fédération des infirmières du Québec, de telle sorte qu'il n'y ait aucune confusion et que la population soit mise au courant des faits réels. Le communiqué se lit comme suit, et je cite. Début de la citation:

«Des chiffres et des conséquences. Alors que le ministre affirme que la réforme n'affecte pas la qualité des services, l'Ordre et la FIIQ présentent un état de la situation qui démontre plutôt une détérioration importante de la qualité des soins qui risque même de menacer la sécurité des patients ou d'affecter leur dignité: amputation d'environ 325 000 000 $ en soins infirmiers dans les hôpitaux et seulement 5 000 000 $ réinvestis dans les CLSC pour les soins à domicile; ajout, en moyenne, de moins d'une infirmière par CLSC pour répondre aux nouveaux besoins en soins à domicile.

«Conséquences: banalisation des besoins des personnes âgées en perte d'autonomie et impact majeur sur les aidants naturels et sur les familles.

«Dans certains centres d'hébergement et de soins de longue durée, aucune infirmière sur les quarts de soir et de nuit, une infirmière pour 60 patients le jour et une infirmière pour 200 patients la nuit.

«Conséquences: augmentation des contentions physiques et chimiques, des chutes et des plaies de lit.»

M. le Président, le communiqué continue: «Aucune infirmière n'a souscrit à une baisse de la qualité des soins comme conséquence du virage ambulatoire. À cet effet, il faut pouvoir protéger l'immunité de celles qui souhaitent dénoncer les situations d'abus et de mauvais traitements faits aux clientèles. Par ailleurs, l'adhésion des infirmières à ce virage a toujours été conditionnelle à ce que les soins d'infirmières continuent d'être offerts à toute la population et dans le cadre d'un régime public de santé.

«La qualité des soins, où est la transparence? L'Ordre et la FIIQ constatent qu'il y eu 216 000 heures travaillées en moins en soins infirmiers» récemment «ainsi qu'une diminution de 30 % de la durée moyenne de séjour» récemment. «Cela signifie que les patients qui requièrent une hospitalisation sont soignés de plus en plus vite avec de moins en moins de soins. "La baisse de soins et la diminution du pourcentage des infirmières sur le total du personnel affecté aux soins entraînent des conséquences concrètes pour les malades. D'ailleurs, les infirmières ont été à même de constater la hausse des complications pouvant pourtant être évitées et entraînant un retour à l'urgence, voire la réadmission des patients", ont expliqué les présidentes» de ces deux groupes.

«Ces conséquences pour les patients peuvent être évaluées par un indicateur de qualité, par exemple: composition du personnel de soins, composition de l'équipe médicale, taux de réadmissions, taux de décès pouvant être évités, taux d'accident, taux de complications. Toutefois, il semble évident, pour l'Ordre et la FIIQ, que ces données doivent faire l'objet de transparence, ce qui n'est présentement pas le cas.»

M. le Président, je vous rappelle que l'Ordre des infirmières regroupe 67 000 personnes et que la FIIQ réunit 47 500 personnes. Le texte que je viens de vous lire, issu d'un communiqué de presse, parle de lui-même. Et je mets au défi le ministre d'avoir le courage d'y répondre. Vous noterez que, dans le communiqué, il est mentionné que, à cause des délais d'hospitalisation trop courts et de la diminution des soins donnés aux patients qui doivent retourner chez eux alors qu'ils ne sont pas suffisamment rétablis, il en résulte des conséquences majeures. Je sais que je n'ai pas le temps ici pour continuer, mais, moi, je vais me joindre à mes collègues de l'opposition officielle pour voter contre le projet de loi n° 176. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee. Alors, M. le ministre, vous avez le droit d'intervenir pour un cinq minutes. Alors, je vous cède la parole.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Oui. M. le Président, je vais prendre juste quelques minutes pour rectifier certaines des informations qui ont été reprises par le député qui vient tout juste de faire une intervention, le député de D'Arcy-McGee. Il m'a mis au défi, d'ailleurs, de rectifier les données en ce qui regarde les infirmières, ce qu'il me fait plaisir de faire.

À la suite du communiqué et de la conférence de presse des infirmières, vous comprendrez, M. le Président, que j'ai tenu à avoir vraiment un rapport détaillé, par le ministère, sur la situation et la progression de l'effectif d'infirmières et les heures de soins donnés par les infirmières dans les établissements du Québec. Alors, j'ai une analyse très détaillée qui a été faite. Pour toute la période de 1993 à 1997, jusqu'à maintenant, je peux informer la population que, contrairement à ce qui a été dit, il n'y a pas eu de diminution de soins infirmiers ni dans les hôpitaux de courte durée, ni dans les hôpitaux de soins de longue durée, ni dans les CLSC, qu'il y a même eu certains ajouts de ressources à cet égard, M. le Président.

Alors, par exemple, en CLSC, les gens travaillent avec des équivalents temps complet, on connaît bien ça, de nombres d'infirmières. Il y avait, en 1993, 3 363 infirmières en équivalents temps complet. En 1995-1996, il y en avait 3 700. C'est donc un ajout de 340, à peu près, infirmières dans les CLSC.

(16 h 40)

Dans les établissements de soins de longue durée, on a une situation stable, avec même une légère augmentation du nombre d'infirmières, pour les soins de longue durée, de même qu'on a, pour les centres hospitaliers de soins généraux et spécialisés, aussi une légère augmentation du nombre d'infirmières. Or, je ne sais pas où les infirmières ont pris ce chiffre. C'est sûrement un transfert statistique d'un pourcentage. Mais l'information qui m'a été donnée, c'est que les coupures ou les diminutions de budget dans le domaine des soins infirmiers auraient été faites plutôt en ce qui regarde l'administration des soins infirmiers, des aspects de gestion, comme dans l'ensemble du système, mais pas auprès du nombre d'infirmières et d'heures de travail d'infirmières pour le travail clinique auprès des patients.

Par ailleurs, c'est vrai que la durée d'hospitalisation a diminué parce qu'il y a plus d'interventions qui se font en chirurgie d'un jour, par la gestion plus efficace des blocs opératoires et par le fait qu'il y a beaucoup d'investigations qui sont faites avant une opération, par exemple. Elles sont faites sur une base ambulatoire à la consultation externe de l'hôpital, ce qui fait qu'il y a des journées d'hospitalisation avant l'opération qui ont diminué. Mais, comme on a une diminution du nombre de journées d'hospitalisation, encore une fois, soit parce qu'on opère en chirurgie d'un jour, soit parce qu'on a diminué la période d'examens de préparation à la chirurgie pour le faire en ambulatoire, et qu'on a maintenu, voire légèrement augmenté le nombre d'infirmières, alors il en résulte que le nombre de soins infirmiers donnés aux gens qui sont là est plus intensif, est plus important que c'était avant parce qu'il y a plus de personnes qui passent, qui sont là moins longtemps, mais, pour le temps où elles sont là, il y a autant d'infirmières qui donnent des services. Et ce qui correspond exactement à ce à quoi on devait s'attendre, c'est que, en ayant de plus en plus de soins donnés sur une base ambulatoire quand ça peut être fait, ce qui se fait à l'hôpital demande une intervention plus intensive, demande plus de personnel parce que c'est des situations plus compliquées.

Alors, je pensais que c'était important de corriger ça pour la population. Encore une fois, on va voir avec les infirmières sur quelle base de données elles ont travaillé, mais les données que j'ai là ont été préparées par la fonction publique, par le ministère, ont été validées, et je peux assurer la population qu'il se passe ce que les objectifs du virage ambulatoire voulaient faire, et que la diminution des coûts et du nombre d'heures travaillées, de personnel se fait dans tous les services de soutien et administratifs, et qu'on protège les services à la clientèle, et que, finalement, concernant le transfert de ressources vers la première ligne, s'il n'a pas été encore autant qu'on le souhaiterait et qu'il y a encore des besoins de ce côté-là, il reste qu'il y a une nette augmentation d'infirmières dans les CLSC et un maintien dans les soins, une légère augmentation dans les soins de longue durée et à peu près un maintien dans les soins spécialisés dans les hôpitaux. Donc, au total, pour les gens qui doivent être hospitalisés, c'est plus de soins infirmiers qu'on a, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, je vous remercie.

M. Chagnon: M. le Président, en vertu de 213, est-ce que le ministre accepterait...

M. Jolivet: Non...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Donc, M. le ministre, il n'y aura pas de question. Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques et leader adjoint du gouvernement, je vous cède la parole.

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. Depuis que nous avons commencé l'étude du projet de loi...

M. Chagnon: M. le Président.

Une voix: Question de règlement.

M. Chagnon: Question de règlement, M. le Président.

M. Jolivet: L'alternance.

M. Chagnon: Non, non, ça, j'en conviens...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, il a dit non tout à l'heure. Ça a été non. Très bien. Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.


M. André Boulerice

M. Boulerice: Alors, M. le Président, comme j'avais commencé à le dire avant d'être interrompu par mon voisin de circonscription, depuis que nous étudions ce projet de loi, ce qui nous tient lieu d'opposition s'amuse – et je trouve que s'amuser sur un sujet aussi important est passablement odieux – à créer une perception de notre système de santé qui est une vision apocalyptique, très noire des choses. J'en ai entendu, des vertes et des pas mûres, en cette Chambre depuis je ne sais pas combien d'heures que nous passons sur ce projet de loi qui nous est présenté par le ministre, alors que c'est un projet de loi, et vous le savez comme moi, tout simplement qui n'affecte en rien les soins offerts à la population, toutes catégories d'âge ou de sexe confondues, quelle que soit la maladie, etc. C'est une délégation de fonctions.

J'ai eu l'occasion de donner à deux ou trois reprises l'exemple, à savoir une personne qui est dans un foyer d'accueil et qui, forcément, paye une quote-part chaque mois. Est-ce que c'est perçu, comme ça l'est actuellement, par le ministère de la Santé et des Services sociaux ou bien donc le ministère d'État de l'Emploi et de la Solidarité? Eh non. Le ministre dit: Ce serait bien mieux que les ministères administrent, que les ministères se penchent sur les grandes orientations nationales et que l'on confie cela, ce que la loi me permettrait de faire si on l'adoptait, à la Régie de l'assurance-maladie qui est équipée et dont c'est la fonction; elle sait percevoir, elle perçoit, pour chacun d'entre nous, notre quote-part pour le système de santé québécois, qui, soit dit en passant, il s'agit d'avoir voyagé un peu, est un des meilleurs au monde.

Mais je les ai entendus, comme je vous le disais, M. le Président, dresser un portrait apocalyptique de la chose et, comme tout homme honnête, c'est-à-dire comme tout péquiste, je me suis interrogé. Je me suis interrogé, en disant: Mais auraient-ils vu des choses que, moi, je n'aurais pas vues? Et, comme les députés péquistes ne sont pas élus dans des comtés qui portent la même couleur que les boîtes à lettres, ce sont des hommes et des femmes qui sont portés à aller vers leurs concitoyens. Nous, on est partout, dans les clubs jeunesse, dans les âges d'or, que chez nous, dans Saint-Marie – d'ailleurs, on les appelle les «jeunesses prolongées», c'est plus joli qu'âge d'or. On est un peu partout au devant des gens, puisque la population, c'est notre préoccupation.

Alors, je me suis dit: Bien, comme c'est la fin de semaine qui précède la grande fin de semaine qui va nous amener à Noël, que j'ai des invitations à ne plus savoir quoi en faire – mais c'est tellement sympathique parce qu'ils nous invitent d'abord et avant tout par affection et non pas par lien politique – je me suis dit: voilà la belle occasion d'aller au devant des gens, et peut-être que spontanément ils vont me confier des choses que je n'ai pas vues. Puis, si spontanément ils ne me confient pas des choses, bien, je pourrai moi-même les questionner.

Alors, j'ai commencé, à 17 h 30 pile, par aller au souper aux jeunesses prolongées à Sacré-Coeur; Gisèle Gagné, comme à chaque année, la présidente, m'avait invité. Je suis arrivé, le curé de la paroisse Sacré-Coeur, Roger Dufresne, était là, son vicaire était là aussi, il y avait Sammy Forcillo, le conseiller municipal, Martin Lemay aussi, un autre bon conseiller municipal qui est dans mon quartier. Puis, moi, je suis assis à côté de Gisèle, qui est la présidente; à un moment donné, je dis: Gisèle, André, qu'est-ce qui se passe, avec deux bonbonnes puis un masque? Ah!, elle dit: Il a été bien malade. Je dis: Ah oui? Oui, oui, elle dit, il a été bien malade; il sort de Notre-Dame. Ah bon! Je dis: Il «a-tu» été bien traité à Notre-Dame? Ah! elle dit, oui, ah oui, il a été très bien traité à Notre-Dame. Elle dit: D'ailleurs, moi, je peux t'en parler, André – parce que, chez nous, ce n'est pas M. le député, M. le leader adjoint, c'est une famille, le centre-sud; ils m'appellent André, et j'aime ça – elle dit: André, moi aussi, je m'en souviens, quand maman – d'ailleurs, malheureusement, sa mère est décédée – a été à Notre-Dame, elle a été traitée d'une façon incroyable. Ça ne fait pas 100 ans, là, ça ne fait pas 100 ans. Bon, bien, j'ai dit: O.K.

Quand j'ai vu ça, moi, je suis parti puis j'ai dit: Je vais aller le voir. Je lui ai dit: André, qu'est-ce qui t'arrive? Ce n'est pas drôle. Premièrement, boursouflé, M. le Président, à cause des injections de cortisone, c'est qu'il a des problèmes pulmonaires, je lui dis: Gisèle m'a dit que tu étais à l'hôpital Notre-Dame. Il dit: Oui, j'étais à l'hôpital Notre-Dame. Bien, je lui dis: André, comment ça s'est passé? Comment ça a été à l'hôpital Notre-Dame? Ah! Il dit: Je n'ai jamais été aussi bien traité de ma vie; j'ai un excellent pneumologue, les infirmières et les infirmiers, parfaits, nourriture A1, comme on dit en langage courant. Je dis: Comme ça, il n'y a pas eu de difficultés? As-tu attendu? Il me dit: Non, je n'ai pas attendu. Bien, je lui dis: André, pourquoi tu ne dis pas à ta gang d'arrêter de dire des âneries à l'Assemblée nationale? Parce que, André, il s'appelle André Bélanger puis c'est un organisateur du Parti libéral dans mon comté.

Remarquez que j'en prends soin, là, c'est une espèce en voie de disparition, les libéraux dans mon comté! Mais, André Bélanger, je l'aime bien, c'est un gars qui est correct. Bon, il ne vote pas pour moi, il organise la campagne de l'autre, ça foire à chaque fois. Je lui dis: André, tu n'es pas découragé de perdre? Mais c'est un bon gars et j'aime bien, André Bélanger. C'est un gars correct. Il en a profité, d'ailleurs – je ne raconterai pas ça ici, en Chambre – pour me faire un petit cadeau en souvenir de quelqu'un qu'on connaissait bien dans le comté, avec lequel on était ami.

(16 h 50)

Mais André Bélanger, organisateur du Parti libéral dans le comté de Sainte-Marie–Saint-Jacques, est scandalisé d'entendre les propos que vous tenez à propos du système de santé. Et ça s'est poursuivi un petit peu plus tard, parce que, avec Martin Lemay, on est parti puis on est allé au club Optimistes de Sainte-Marie. Il y avait une grande fête, c'était justement pour ramasser des fonds pour le club Optimistes. Ça se faisait au centre Jean-Claude-Malépart, qui, entre parenthèses, lui aussi, Jean-Claude, a été hospitalisé à Notre-Dame. Là aussi, on me fait part de commentaires élogieux. Bien, je me suis dit: Coudon, là, il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans, c'est quoi?

Dimanche, M. le Président, comme vous, comme la majorité de mes collègues, un dimanche rempli d'invitations et d'activités dans le quartier, alors je décide de commencer par la fête des enfants au Comité social Centre-Sud, sur la rue Robin. On distribuait des cadeaux aux enfants, il y avait un père Noël. C'était merveilleux de voir ces enfants. Puis ce qui était aussi très merveilleux – je m'en voudrais de ne pas en parler – c'est qu'on voit dans les enfants la diversité ethnoculturelle du quartier. On voit que mon quartier a changé. C'est merveilleux de voir ça à travers la figure de ces petites bonnes femmes qui sont mignonnes comme dix puis des petits bonhommes. Puis ils s'amusaient avec les jouets, ce n'est pas possible.

Alors, j'entre, M. le Président, Raymond est là. Ne me demandez pas son nom de famille, ça fait 15 ans que je le connais, je l'ai toujours appelé Raymond, il m'a toujours appelé André. Je lui dis: Puis, comment ça va? Bien, il me dit: Je m'en remets. Bien, je lui dis: Tu te remets de quoi, mon cher Raymond? Il me dit: Bien, j'ai été hospitalisé. Je dis: Ah oui? Ah bon! Je dis: Où est-ce que tu étais? Il dit: À Saint-Luc. Je dis: Comment ça c'est passé? Il dit: Ah! Impeccable, numéro un. J'ai été bien traité, c'est formidable. Il y a juste une affaire, par exemple, qui me tannait, ils voulaient me garder plus longtemps, puis, moi, je leur ai dit: Non, je suis capable de m'en aller à la maison, puis, d'ailleurs, le lit que j'occupe, c'est peut-être le lit dont quelqu'un a besoin. Je veux m'en aller chez nous, je suis capable. Je suis bien, je suis parfait. Puis il dit: Bien, ils m'ont laissé aller. Ah, mais il dit: Ils ne m'ont pas laissé aller n'importe comment, André, là, ils m'ont envoyé une infirmière. Le CLSC m'a envoyé une infirmière pour s'occuper de moi à la maison. J'ai dit: Ah! bien, comme ça, tu ne te plains pas? Il dit: Pas du tout, très bons soins. Mais il dit: Je sais qu'il y en a qui chialent, par exemple, puis c'est une bande de chiâleux.

Écoutez, Raymond a beaucoup d'expérience de vie, mais, au moment où je lui dis ça – je le jure sur la tête de mon défunt père – Lionel Patry arrive avec sa femme Mariette puis il dit: Qu'est-ce que c'est que vous discutez tous les deux? Bien, je lui dis: Raymond sort de l'hôpital, il sort de Saint-Luc. Il dit: Ah oui? Moi aussi, j'étais à Saint-Luc. Puis je lui dis: À Saint-Luc, là – Raymond, ne parle pas, toi, là – comment ça s'est passé? Il dit: À Saint-Luc, André... Puis ce n'est pas Lionel Patry qui va me mentir. Entre parenthèses, c'est presque mon deuxième père, il était tellement copain avec le mien. Je lui dis: Puis, Lionel, comment ça s'est passé à Saint-Luc? Il dit: Ah! j'ai été bien traité, d'excellents médecins, le personnel est extraordinaire. Je n'ai pas à me plaindre, au contraire, j'ai été très bien traité puis bien soigné aussi. En plus, évidemment, regarde comment je suis en forme.

Ça fait que qu'est-ce qui se passe, là? Je pense qu'on ne prend pas les mêmes autobus, tous les deux. On ne se promène pas sur les mêmes rues. Quand je vois le député de D'Arcy-McGee avec un texte dactylographié – à double interligne probablement, c'est sans doute la voix de son maître – moi, je me dis: Qui dit la vérité? Alors, s'ils veulent poursuivre dans ce débat, M. le Président, bien, moi, je les invite à venir dans la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques, je les amènerai aux endroits, je resterai en retrait, discret, n'influant en rien, n'ayez pas peur, et là ils recevront les commentaires des gens sur la qualité des soins que l'on reçoit, sur la gentillesse et le professionnalisme des gens, et là ils se rendront compte qu'ils sont en train de faire du terrorisme psychologique, qu'ils sont en train de ruiner la réputation à la fois de notre système de santé et des gens qui le composent, et ça, c'est honteux. Quand on crache en l'air, ça nous retombe sur le nez.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je veux me prévaloir de l'article 100 pour ajourner le débat en cours pour passer à un autre débat aussi intéressant, j'en suis assuré, pour les membres de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui. M. le Président, nous allons passer à l'étape de la prise en considération de l'article 4.

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 4 de votre feuilleton... À l'article 4 du feuilleton?

M. Jolivet: Oui.


Projet de loi n° 185


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre délégué à la Réforme électorale et parlementaire propose l'adoption du principe du projet de loi n° 185, Loi sur l'élection des premiers commissaires des commissions scolaires nouvelles et modifiant diverses dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 185? Alors, M. le ministre.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je voudrais d'abord vous dire que l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et qu'il en recommande l'étude à l'Assemblée.

M. le Président, le printemps dernier, l'Assemblée nationale du Québec adoptait à l'unanimité le projet de loi n° 109, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur les élections scolaires. L'objectif premier de cette loi est d'assurer la mise en place au Québec des commissions scolaires francophones et des commissions scolaires anglophones. On se souviendra que le projet de loi avait fait l'objet de discussions en commission parlementaire et que des modifications y avaient alors été apportées, notamment en ce qui concerne certaines dispositions sur la tenue des élections pour les premiers commissaires.

Jusqu'à maintenant, un bon nombre de dispositions de cette loi ont été mises en application. Les conseils provisoires des commissions scolaires nouvelles sont à l'oeuvre partout au Québec. Cependant, certaines dispositions ne le sont pas encore, dont celles relatives à l'organisation des élections des premiers commissaires des commissions scolaires nouvelles. Le projet de loi n° 109 prescrit que le scrutin en vue de l'élection des commissaires des commissions scolaires linguistiques doit se tenir à la date déterminée par le gouvernement. Ce scrutin doit avoir lieu avant le 1er juillet 1998 parce que c'est à cette date que les premiers commissaires entreront en fonction. Entre-temps, il appartient aux conseils provisoires de préparer cette élection. Pour ce faire, ils doivent diviser le territoire des commissions scolaires linguistiques en circonscriptions électorales, dresser et réviser la liste électorale à partir de la liste permanente fournie par le Directeur général des élections et organiser le scrutin.

Le projet de loi n° 109 prévoit également que la division du territoire des commissions scolaires en circonscriptions électorales doit se faire sur une période de deux mois, soit entre le 1er janvier et le 1er mars 1998. Enfin, et c'est là une des modifications apportées lors des travaux de la commission parlementaire, le projet de loi n° 109 confiait au comité consultatif créé par la Loi électorale et au Directeur général des élections le mandat d'étudier les modalités d'établissement de la première liste électorale des commissions scolaires francophones et anglophones, de même que les modalités de diffusion de l'information au public.

(17 heures)

Le comité consultatif, dont les membres représentent chacune des formations politiques de l'Assemblée nationale, s'est réuni à quelques reprises au cours de l'automne pour donner suite à ce mandat. Le comité consultatif s'est donné comme objectif de proposer des modalités d'établissement de la liste électorale devant servir aux premières élections des commissions scolaires linguistiques qui garantissent à celles-ci la plus grande crédibilité possible, puisqu'elles constituent le pivot du processus électoral.

Un second objectif recherché est celui de simplifier la compréhension des nouvelles règles électorales, notamment au regard du choix offert à certaines électrices et à certains électeurs de voter à une commission scolaire anglophone, et de faciliter l'exercice de leur droit de vote. C'est donc à la lumière de ces objectifs que les membres du comité consultatif ont pu dégager des consensus sur les modalités d'établissement et de révision de la liste électorale et sur les moyens à mettre en oeuvre pour informer adéquatement les électrices et les électeurs. Les dispositions du projet de loi n° 185 traduisent ce consensus, et je peux dire que tous les membres de la commission parlementaire qui a étudié cette question sont assurés qu'effectivement, concernant la liste électorale, le consensus, il est parfait.

Mais, avant de vous présenter le projet de loi n° 185, vous allez me permettre, M. le Président, de rappeler brièvement les dispositions de la Loi sur les élections scolaires qui encadrent l'organisation des élections depuis 1989 et de revenir sur certains éléments qui requièrent des améliorations.

La Loi sur les élections scolaires ne comporte aucune norme objective applicable à l'établissement de circonscriptions électorales. Si historiquement les circonscriptions ont été généralement définies en prenant en référence les territoires de desserte des écoles, ce ne fut pas nécessairement le cas partout. Dans le cadre du processus particulier de l'élection des premiers commissaires des commissions scolaires nouvelles et en raison du court laps de temps accordé – qui, je le rappelle, est de deux mois – il est à craindre que cette opération ne puisse être réalisée partout dans le délai prescrit.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté, en 1995, le projet de loi 40 relatif à l'établissement de la liste électorale permanente. Cette loi s'applique aux élections scolaires. Les modifications qui y sont apportées, combinées, comme je le mentionnais plus tôt, à la volonté exprimée par l'Assemblée nationale de revoir les modalités d'établissement de la première liste électorale des commissions scolaires francophones et anglophones, nécessitent de procéder à un réaménagement des dispositions concernant l'établissement et la révision des listes électorales. Enfin, nous savons tous et toutes que, en vertu de la loi actuelle sur les élections scolaires, c'est la directrice générale ou le directeur général de la commission scolaire qui agit comme présidente ou comme président d'élection.

En cette année de mise en place des commissions scolaires linguistiques et d'organisation de la première année scolaire, de nombreuses responsabilités doivent être assumées par les directrices et les directeurs généraux des commissions scolaires nouvelles. Et, aux dires de ma collègue et même des directeurs généraux qui sont venus en commission parlementaire cette semaine, la tâche est déjà très lourde pour l'organisation de l'ensemble scolaire. L'organisation des élections scolaires risque d'en être affectée, et ce, malgré toute la compétence et toute la bonne volonté de ces directeurs et de ces directrices de commissions scolaires.

Il y a donc lieu, M. le Président, de réévaluer leur participation au processus électoral pour la prochaine élection. Je vous dirai que, puisque nous avons eu la chance d'avoir une commission où nous avons rencontré les commissions scolaires représentant la partie catholique, comme on les connaît actuellement, et protestante, d'autre part – mais qu'on appelle désormais francophones ou anglophones, on le verra avec le temps – mais aussi les directions générales des commissions scolaires, on a vu qu'effectivement ils ne mettaient pas en doute la mise en place du processus électoral au niveau de la direction générale des élections.

Donc, pour toutes ces considérations, M. le Président, il est primordial que les règles relatives à l'organisation des élections des premiers commissaires des commissions scolaires francophones et anglophones soient changées ou modifiées. Il s'agit d'une ère nouvelle pour toute notre structure scolaire québécoise, et je crois que nous devons démarrer du bon pied.

Retournons maintenant, M. le Président, au projet lui-même, le projet de loi n° 185. Comme son nom l'indique, ce projet porte essentiellement sur l'élection des premiers commissaires des commissions scolaires nouvelles. Il abroge les dispositions prescrites à ce sujet dans la Loi sur l'instruction publique et dans le projet de loi n° 109.

Le projet de loi n° 185 modifie substantiellement le processus d'établissement des circonscriptions électorales, édicte de nouvelles règles quant à la nomination du président d'élection et à la confection des listes électorales et définit le mandat qui sera confié au Directeur général des élections en matière de diffusion de l'information au public.

Comme je viens de le mentionner, le processus d'établissement des circonscriptions électorales sera modifié. Ainsi, le conseil provisoire aura jusqu'au 31 janvier 1998 pour adopter, par un vote unanime des commissaires présents lors de la prise du vote, la division du territoire en circonscriptions électorales. Le nombre de circonscriptions sera celui établi selon le barème de l'article 6 de la Loi sur les élections scolaires et, le cas échéant, le nombre sera fixé à trois dans le cas d'une commission scolaire dissidente.

Je tiens à dire, à ce moment-ci, compte tenu de la commission parlementaire que nous avons eue cette semaine, que nous allons faire un changement à la loi telle qu'elle est présentée à ce moment-ci pour permettre l'application de l'article 7 avec les modifications qui seront apportées et pour permettre l'élection des premiers commissaires. Il ne sera pas possible de réduire le nombre de circonscriptions, mais il sera possible de demander d'en augmenter le nombre suivant l'application du barème établi à l'article 6 de la loi actuelle.

Au plus tard le 3 février, chaque conseil provisoire devra avoir transmis au Directeur général des élections la description des circonscriptions électorales accompagnée de la résolution adoptée. La description devra être faite conformément aux paramètres déterminés par le Directeur général des élections. Et, à ce titre-là, M. le Président, j'ai fait remettre les amendements qui seront apportés au projet de loi lorsque nous arriverons à l'étude article par article pour permettre les conformités aux discussions que nous avons eues en commission parlementaire.

À défaut par un conseil provisoire de remplir ses obligations, dont l'adoption de la résolution par un vote unanime, c'est la Commission de la représentation, instituée par l'article 524 de la Loi électorale, qui procédera à la division du territoire de la commission scolaire nouvelle en circonscriptions électorales. Le projet de loi prévoit certaines balises dont la Commission de la représentation devra tenir compte dans la mesure du possible: il s'agit du respect du principe de la représentation effective des électrices et des électeurs et du respect de la délimitation des circonscriptions électorales des commissions scolaires existantes.

Le président d'élection sera nommé par le Directeur général des élections. C'est également ce dernier qui établira l'ensemble des règles applicables à l'établissement et à la révision de la liste électorale de même que l'ensemble des règles concernant les bureaux de vote et le matériel nécessaire au vote.

En ce qui concerne la liste électorale, il y aura une commission de révision unique pour chaque commission scolaire francophone, laquelle commission aura également compétence sur la partie du territoire de toute commission scolaire qui recoupe celui de la commission scolaire francophone. Cette commission sera composée de trois membres: une personne désignée par le président d'élection de la commission scolaire francophone, une personne désignée par le président d'élection de la commission scolaire anglophone, alors que le président de la commission de révision sera nommé par entente entre les deux présidents d'élection ou, à défaut, par le Directeur général des élections.

Les changements apportés à la liste électorale au cours de la révision de même que l'indication du choix que fait une électrice ou un électeur de voter à une commission scolaire anglophone ou, le cas échéant, à une commission scolaire dissidente seront intégrés par la suite à la liste électorale permanente. Par ailleurs, l'article 127 de la loi actuelle sur les élections scolaires, qui permet à une électrice ou à un électeur dont le nom ne figure pas sur la liste électorale de voter sous certaines conditions, ne s'appliquera pas à l'élection des premiers commissaires des commissions scolaires nouvelles.

Le Directeur général des élections sera aussi chargé d'informer les électrices et les électeurs des modalités d'exercice de leur droit de vote. Il expédiera notamment à chaque adresse un avis à cet effet. Cet avis contiendra tous les renseignements nécessaires de même que l'information sur les modalités d'exercice du droit qu'auront certaines personnes de choisir de voter à une commission scolaire anglophone ou, le cas échéant, à une commission scolaire dissidente. De plus, cet avis sera conçu de façon à leur permettre d'exercer ce choix, par exemple, suivant une formule de coupon-réponse.

(17 h 10)

Afin que le Directeur général des élections puisse renseigner correctement chaque électrice et chaque électeur, le projet de loi prévoit que les conseils provisoires devront lui faire parvenir de l'information concernant l'identité des parents des enfants admis aux commissions scolaires nouvelles. Il s'agit de renseignements de même nature que ceux utilisés pour l'établissement de la liste électorale permanente.

Enfin, tant et aussi longtemps que le sceau royal ne sera pas installé sur la décision du Sénat, tout comme le projet de loi n° 109, le projet de loi n° 185 prévoit que les dispositions visant spécifiquement les commissions scolaires dissidentes seront abrogées si, avant le 1er janvier 1998, les paragraphes 1 à 4 de l'article 93 de la Loi constitutionnelle de 1867 cessent de s'appliquer au Québec. Voilà, en substance, ce que contient le projet de loi n° 185, M. le Président.

Je tiens à faire remarquer que, dans les amendements qui ont été apportés, permettant de répondre à des demandes des gens qui sont venus nous rencontrer ou à des propositions venant de l'opposition, nous avons procédé à l'envoi de ces amendements-là nous permettant de faire les corrections nécessaires sur les paramètres qui étaient ceux de l'article 7 de la loi actuelle, M. le Président, avec ce que j'ai indiqué, aux fins d'augmenter le nombre de circonscriptions, mais pas d'en diminuer.

J'ai aussi fait mention, au niveau du projet de loi lui-même, d'un article, de faire un ajout à l'article 12 disant que nous aurons... Et je lis: En outre, le Directeur général des élections et la Commission de la représentation peuvent requérir les services du personnel des commissions scolaires existantes après consultation de ces dernières. Ce qui nous permettra de répondre à la demande des gens des commissions scolaires.

Ensuite, pour éviter qu'il y ait quelque problème que ce soit à la jonction de la liste, le couplage de la liste, nous avons un amendement. J'ai fait les vérifications nécessaires, et on m'indique que les membres du parti d'opposition sont d'accord avec cet amendement-là pour permettre à la Régie de transmettre les adresses permettant la confection des listes.

Et, enfin, un autre qui a trait à l'article 20 où il y avait eu, lors de la commission parlementaire, certains problèmes, M. le Président, quant aux sommes requises pour l'application de la présente loi. Nous avons un amendement qui va permettre de donner, je l'espère, satisfaction à l'ensemble des gens touchés par cet article-là.

Donc, en conséquence, M. le Président, ce projet vise essentiellement à assurer une plus grande transparence et plus de rigueur lors du processus qui permettra d'élire nos premiers commissaires de nos futures commissions scolaires francophones et anglophones, qualités essentielles à une saine démocratie. Je suis certain que ces objectifs sont partagés par tous les membres de cette Assemblée et qu'il nous sera possible d'adopter ce projet de loi dans le même esprit d'ouverture et de consensus qui a prévalu au sein du comité consultatif, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre délégué à la Réforme parlementaire et électorale. Je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, critique officiel de l'opposition. Alors, M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: M. le Président, je ne sais pas comment réagir au discours du ministre, parce que j'ai un sentiment d'une révolte très profonde par rapport à ce que le ministre vient de dire et suite aux amendements qu'il a adoptés. Parce que j'ai devant moi un ministre qui ne tient pas parole. J'ai devant moi un ministre qui ne sait pas c'est quoi, donner sa parole, puis la tenir. J'ai devant moi un ministre qui n'a pas de parole, M. le Président.

Des voix: ...

M. Sirros: Je répète. J'ai devant moi un ministre qui n'a pas de parole, M. le Président. Je vais m'expliquer, M. le Président.

M. Boulerice: M. le Président, question de règlement. Vous avez, comme moi, entendu les propos malheureux, répétés trois fois comme sur le Golgotha, de la part du député de Laurier-Dorion.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement... Effectivement, je pense que, connaissant très bien votre règlement, M. le député de Laurier-Dorion, vous savez que vous n'avez pas le droit d'imputer des motifs ou encore que vous n'avez pas le droit d'attaquer de la sorte, comme vous l'avez fait, quiconque en cette Chambre. Alors, je vous demanderais de bien vouloir poursuivre votre allocution, tout en vous maintenant dans les balises de notre règlement qui régit si bien nos débats. Alors, M. le député.

M. Boulerice: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Boulerice: Ce que vous avez dit est très juste, mais, par contre, faudrait-il que le député de Laurier-Dorion, et nous savons qu'il y a encore un gentleman derrière le politicien, retire ses paroles.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Laurier-Dorion, est-ce que vous seriez prêt à aller jusqu'à ce point? Et, si oui, bien, à ce moment-là, je pense qu'on pourra poursuivre immédiatement nos débats sans faire une querelle de règlement ou d'interprétation de règlement.

M. Sirros: M. le Président, non seulement je ne suis pas prêt à retirer ça, mais je vais vous expliquer pourquoi je dis ça, parce que ça vaut la peine.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Laurier-Dorion, si vous permettez...

M. Sirros: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Bien, justement, si on parle d'une question de règlement...

Je pense que, si véritablement on veut commencer à travailler avec notre règlement, l'article 35 nous donne une liste qui fait en sorte qu'il y a des paroles qui sont interdites et des propos qui sont tout à fait non parlementaires en cette Chambre, par exemple: attaquer la conduite d'un député; 6° imputer des motifs indignes à un député; 7° se servir d'un langage violent, injurieux, surtout blessant; 8° employer un langage grossier ou irrespectueux. Alors, je pense qu'à ce stade-ci il y a quelques éléments de notre article 35 qui font en sorte que je vais vous demander de ne pas utiliser ces mots-là, de les retirer et de faire votre allocution comme critique officiel de l'opposition sur le projet de loi qui est déposé par le ministre délégué à la Réforme électorale et parlementaire au gouvernement. Alors, M. le député.

M. Ouimet: Question de directive, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: La semaine passée, j'ai tenu en cette Chambre les mêmes propos que le député de Laurier-Dorion face au premier ministre, et le président qui occupait votre fauteuil a déclaré ces propos-là tout à fait recevables. Il y avait des objections du leader du gouvernement, et le président a rendu une décision. Il a dit que c'étaient des propos tout à fait acceptables et recevables parce que effectivement le premier ministre avait manqué à sa parole.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Marquette, comme je le mentionnais la semaine dernière... Parce que, vous savez, lorsqu'on préside les débats de l'Assemblée, on est de part et d'autre assailli soit par les membres du gouvernement ou soit par les membres de l'opposition officielle lorsque nous avons à rendre une décision. Or, la semaine dernière, lors d'une de mes décisions, j'ai mentionné que chaque cas est un cas d'espèce et qu'il fallait qu'on juge ce qui nous est demandé, au niveau de la présidence, selon les écrits ou selon les paroles qui sont dites.

Moi, ce soir, je juge, selon les propos qui sont dits en cette Chambre, que ces propos-là vont tout à fait à l'encontre de l'article 35 de notre règlement et, à partir de ce moment-là, je pense que, pour éviter qu'on poursuive, et que la guerre des mots s'intensifie, et qu'effectivement nos débats ne dégénèrent... À ce moment-là, connaissant très bien le député de Laurier-Dorion, je suis persuadé qu'il peut très bien arriver exactement aux fins ou à l'objectif qu'il désire atteindre tout en y allant d'une façon tout à fait correcte, tout en utilisant des termes, des mots qui vont porter face au public qui nous écoute actuellement et tout en respectant, bien entendu, notre règlement, ce sur quoi je vais insister de part et d'autre d'ici la fin de nos débats.

M. le député de Laurier-Dorion, s'il vous plaît.

M. Sirros: M. le Président, sur la question de règlement, vous avez raison de dire que ce n'est pas mon habitude d'agir comme ça, mais je vous demande à ce moment-là de me décrire comment je peux décrire le fait que le ministre me donne sa parole sur quelque chose et qu'il la renie par la suite. Si ce n'est pas ça, ne pas tenir... Parce qu'il m'a donné sa parole et qu'il a renié sa parole, et c'est la réalité que je décris en disant qu'il ne tient pas parole. Quand on ne tient pas parole, il n'y a pas de parole. Comment je peux le dire autrement? Dites-le-moi, je vais le faire. Mais c'est la réalité que je veux décrire.

M. Boulerice: Question de directive, M. le Président. Vous me permettrez de poser une question...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

(17 h 20)

M. Boulerice: Je vous remercie. M. le Président, c'est bien l'article 42 de notre règlement qui dit que, après deux rappels à l'ordre que vous adressez à un député, s'il ne s'exécute pas, vous pouvez lui suspendre son droit de parole. S'il persiste...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, vous avez tout à fait raison, mais, pour ce faire, il faut tout d'abord que le Président donne un premier avertissement. Alors, pour l'instant, je ne considère absolument pas que j'ai donné un avertissement au député de Laurier-Dorion en fonction de l'article 42 de notre règlement. Ce que j'ai demandé au député de Laurier-Dorion... Et il a très bien compris le sens de mon intervention, et je suis persuadé qu'il va continuer son débat tout en respectant notre règlement. Alors, M. le député de Laurier-Dorion, s'il vous plaît.

M. Sirros: M. le Président, je ne veux pas tenir des propos qui créent une situation inacceptable, mais je ne veux pas non plus éviter de dire que j'ai été trompé par le ministre. Et pas dans le sens qu'on parle ailleurs, mais dans le sens de quelqu'un qui donne sa parole et qui ne la tient pas, et c'est ça que je voulais dire. Peut-être, juste pour expliquer, je vais prendre le temps qu'il faut à ce moment-ci. Et peut-être que je vais revenir plus précisément sur cette question, mais je voulais juste vous indiquer que, suite au discours du ministre, et plus particulièrement par rapport aux amendements qu'il dépose, c'est les sentiments qui ont surgi en moi. Alors, je prendrai le temps et je reviendrai tantôt.

Mais retournons deux secondes sur la question de la loi n° 185 que nous avons devant nous et essayons de nous rappeler de quoi elle découle, cette loi-là, M. le Président. Elle découle, cette loi, de l'adoption par cette Chambre, au printemps passé, de la loi n° 109 qui visait à mettre sur pied des commissions scolaires linguistiques plutôt que religieuses ici, au Québec, et, ce faisant, il fallait identifier à un moment donné qui faisait partie de ceux qui pourraient voter pour les commissions scolaires anglophones et qui pourrait voter pour les commissions scolaires francophones. À l'époque, vous vous rappellerez, le gouvernement, dans sa façon d'agir, avait décidé qu'il allait décréter l'appartenance à la communauté linguistique anglophone en disant que les seuls qui vont pouvoir voter pour les commissaires anglophones seraient ceux qui ont des enfants à l'école anglaise, point à la ligne. Ça a créé un tollé de protestations qui, effectivement, ont fait en sorte que le gouvernement a dû se rendre compte qu'on ne peut pas décréter l'élimination des droits fondamentaux que les citoyens ont. Et, quand il y a une loi électorale au Québec qui établit qu'il y a un droit que les citoyens ont, c'est-à-dire de voter aux élections scolaires au Québec, et qu'il y a deux types de commissions scolaires, ça ne serait que normal que les gens puissent exercer leur choix quant à où ils sentent le désir d'exercer ce vote: commission scolaire anglophone ou francophone.

Suite à tous les manquements de parole que le gouvernement a dû reconnaître encore une fois à cette époque-là suite à l'entente qui avait été signée avec l'opposition sur cette question de la création des commissions scolaires linguistiques, le gouvernement, après beaucoup de pressions et d'explications de la part de ceux qui étaient concernés devant des audiences, a dû reconnaître qu'il s'était trompé et que, effectivement, il fallait trouver une façon de permettre l'exercice du choix de l'électeur quant à l'objet de son vote: commission scolaire linguistique anglophone ou francophone.

À ce moment-là, la ministre de l'Éducation – il faut donner à César ce qui est dû à César – avait reculé et avait dit: Oui, je me suis trompée initialement, j'accepte qu'il y ait maintenant un choix, parce qu'elle avait entendu des groupes, et tout le monde avait établi un consensus autour de la question qu'il fallait avoir un choix offert à l'électeur. Et la ministre de l'Éducation avait dit: J'accepte ce consensus et je veux présenter des amendements pour refléter le consensus établi. Et la ministre de l'Éducation, collègue du ministre qui pilote ce projet de loi, qui n'a pas tenu sa parole en ce qui concerne ce projet de loi, a tenu parole, elle. Elle a amendé la loi qu'elle avait présentée et elle a fait en sorte que l'article...

Il y avait un article qui permettait l'exercice d'un choix et pour qu'on détermine comment ce choix allait être exercé. La loi n° 109 avait dit, à l'article 56, suite aux audiences et suite au consensus qui avait été établi sur cette question-là, que l'électeur qui n'a pas d'enfant admis aux services éducatifs dans les écoles de l'une ou l'autre commission scolaire qui a compétence sur le territoire où est situé son domicile peut voter à l'élection des commissaires de la commission scolaire francophone à moins qu'il n'ait choisi de voter à l'élection des commissaires de la commission scolaire anglophone qui a compétence sur le territoire où est situé son domicile. Cet article donnait effet au consensus qui avait été établi.

Et elle avait ajouté un autre article dans la loi n° 109 qui donnait un mandat au comité consultatif auprès du Directeur général des élections d'examiner les modalités de l'exercice de ce choix, de recommander au Directeur général des élections un consensus autour de cette question-là, si possible, et que le D.G.E. recommande par la suite les modifications législatives nécessaires pour donner effet. Et l'article 70 de la loi n° 109 donnait ce mandat de cette façon-ci: «Le comité consultatif institué par l'article 514 de la loi électorale est chargé, en collaboration avec le Directeur général des élections, d'étudier les modalités d'établissement de la première liste électorale des commissions scolaires anglophones et francophones, dont l'information au public.»

Alors, le comité consultatif est composé de représentants des trois formations politiques qui sont représentées en cette Chambre. J'y siège à titre de représentant de l'opposition officielle, le ministre de la Réforme électorale, le député de Joliette, y siège, le ministre délégué à la Réforme électorale y siège également et d'autres représentants de nos formations politiques, pour un total de neuf personnes parmi les trois partis. Vous remarquerez qu'il y a une égalité de représentation indépendamment de la répartition des sièges en cette Chambre et que c'est un comité consultatif qui doit aviser le Directeur général des élections sur la façon de faire.

Nous nous sommes rencontrés à deux ou trois reprises. Le Directeur général des élections nous avait donné des scénarios différents sur comment on allait traduire la volonté du législateur qui avait été exprimée dans la loi n° 109 en mécanique concrète, comment les gens allaient exercer leur choix, comment ils allaient se retrouver sur une liste pour la commission scolaire anglophone ou francophone.

Et le Directeur général des élections, suite aux discussions avec le comité consultatif, a suggéré ni plus ni moins que ça pourrait se faire essentiellement par deux instruments: une campagne publicitaire qui indiquerait aux personnes, à la population en général du Québec que nous sommes en train de faire la transition entre des commissions scolaires religieuses à des commissions scolaires linguistiques, qu'il y a maintenant un choix que les électeurs doivent exercer, de clairement identifier qui peut exercer ce choix, parce que la loi prévoit que ceux qui ont des enfants qui fréquentent les commissions scolaires francophones vont devoir voter dans ces commissions scolaires, que ceux qui ont des enfants dans les commissions scolaires anglophones vont devoir voter dans les commissions scolaires anglophones et ceux qui n'ont pas d'enfant qui fréquente l'école ont un choix, et il faut qu'ils disent: Moi, je veux voter à une commission scolaire francophone ou, moi, je veux voter pour les commissaires d'une commission scolaire anglophone.

(17 h 30)

Le Directeur général a suggéré différents scénarios de publicité, dont nous avons discuté, qui donneraient l'information aux électeurs du Québec, a détaillé les mesures qu'il prendrait, dont nous avons discuté et sur lesquelles nous étions d'accord. En plus, un deuxième instrument qu'il a proposé, suite aux discussions que nous avons eues, c'est d'envoyer à chaque domicile au Québec l'information sur un carton quant à qui se trouve ou ne se trouve pas sur la liste électorale – untel à l'adresse suivante – et d'offrir à l'électeur, par le même carton, un coupon-réponse qui lui permettrait d'afficher son choix, en retournant à la commission scolaire anglophone, parce qu'il ne s'agirait que de ceux qui veulent voter aux commissions scolaires anglophones qui auront l'obligation de retourner le carton de – parce que, si on ne fait rien, on est automatiquement inscrit sur les commissions scolaires francophones – pour que l'électeur s'exprimant ainsi puisse retrouver son nom enlevé de la liste des écoles scolaires francophones pour se retrouver sur la liste scolaire anglophone.

Essentiellement, c'était le mandat que le comité consultatif avait reçu de la loi n° 109, comment on allait établir le mécanisme pour exercer le choix. C'était l'essentiel, et sur ça, M. le Président, pas de problème. On a travaillé comme on doit travailler en matière de lois électorales. On a examiné ça pour le plus grand bien de la démocratie, pour l'exercice le plus correct du droit de vote des citoyens, et dans la transparence et en s'assurant que tout le monde puisse avoir au maximum ses droits protégés.

Puis, on a convenu que ce serait comme ça que ça devrait fonctionner puis on s'est donné la main. N'eût été ça, M. le Président, je ne me serais pas choqué tantôt, je n'aurais pas tenu les paroles que j'ai tenues et je n'aurais pas tenu à tenir les paroles que je vais tenir, parce que, quand on a vu le résultat en loi de ce qui avait été transmis à l'Assemblée nationale par le Directeur général des élections, bien, il y avait comme une dissonance. Le consensus qu'on avait établi était là, mais il y avait d'autres éléments qui n'avaient jamais fait l'objet de discussions réelles au sein du comité consultatif et qui, en fin de compte, changent ou risquent de changer aussi le sens du consensus.

Ça vaut la peine peut-être, M. le Président, de brièvement vous énumérer les questions qui ont soulevé tout de suite les inquiétudes de l'opposition quand on a vu le projet de loi. Le projet de loi qu'on a vu, c'est le projet de loi que nous avons dans sa forme actuelle, le projet de loi que nous sommes en train de discuter ici en deuxième lecture. C'est le projet de loi n° 185. Ce que nous avons constaté, c'est que le gouvernement a profité des échanges qu'il aurait pu avoir, lui, avec des sympathisants de son parti. Parce que certaines de ces choses-là sont arrivées après un certain conseil national du parti au pouvoir pour ajouter des éléments qui n'ont jamais fait l'objet d'un examen sérieux, approfondi, calme, avec dignité, dans la perspective de s'assurer que l'exercice de la démocratie au Québec se fasse comme elle a toujours été faite depuis les 20 dernières années, à une exception malheureuse, avec un consensus politique et social en matière de changement de nos moeurs et de nos lois électorales.

Le gouvernement a profité du fait qu'il faut prévoir les changements nécessaires pour la mise en place de la liste... Pour tenir les élections scolaires au mois de juin, comme c'est la seule session législative que nous aurons à temps, il faut amener devant le Parlement les changements nécessaires à la loi électorale scolaire pour prévoir la tenue des élections scolaires.

Je répète, n'eût été le fait que le gouvernement a décidé d'aller bien au-delà du consensus établi, et si le gouvernement avait su se comporter correctement, avec intégrité par rapport aux discussions puis aux mandats qu'on avait reçus, il n'y aurait pas de problème à ce moment-ci, M. le Président. Mais le gouvernement, que ce soit, semble-t-il, par la voix de son ministre à la Réforme électorale ou que ce soit par celui qui le remplace ici temporairement – et, j'ai l'impression, juste de voix, semble-t-il... Le ministre délégué à la Réforme électorale agit de la même façon, avec arrogance par rapport à l'exercice parlementaire, avec mépris, je disais, par rapport à l'opposition et avec une attitude qui nous laisse complètement perplexes quant à la volonté réelle que ce gouvernement dit avoir de respecter, si ce n'est pas sa parole, au moins la démocratie. Et la démocratie, elle se fonde sur le fait qu'il y a certaines moeurs et traditions qu'on établit qu'on doit protéger très, très, très précieusement.

Si, depuis 20 ans, on a su évoluer, au Québec, dans des changements en cette matière, en cherchant toujours le consensus social qui nous permet de fonder les changements législatifs sur des fondations solides pour l'avenir et non pas juste pour quelque chose qui, à un moment donné, semble déranger nos alliés politiques ou nos amis politiques qu'on rencontre dans des organisations politiques, partisanes... C'est ça qu'on a essayé de faire depuis 20 ans, de bâtir sur du solide en fonction du moyen et du long terme, non pas le court terme.

Ici, nous sommes pris avec une situation où, effectivement, on va faire des changements rapidement. C'est pour ça que le comité consultatif avait été mis à contribution, pour qu'on établisse un consensus, fasse les changements par rapport à ce consensus et que le tout passe correctement. Mais, encore une fois, le gouvernement a décidé que, pour lui, le Parlement n'est, comme le disait le ministre de la Réforme électorale, qu'une des phases qu'on doit subir et que c'est un mal, que voulez-vous, et trahit ainsi le peu de respect qu'ils ont pour le processus parlementaire.

Alors, quand on a vu le projet de loi et qu'on l'a comparé au consensus qu'on avait établi, on s'est dit: Bien, ça, c'est différent. On n'a jamais parlé de la délimitation des territoires des commissions scolaires avec une nouvelle façon de faire. On n'a jamais parlé du fait qu'on allait suspendre la possibilité d'ajuster le nombre de commissions scolaires, etc. J'ai tout de suite... Si on l'avait discuté, M. le Président, on l'avait discuté... Pour être tout à fait juste, c'est le ministre de la Réforme électorale qui l'avait soulevé en marge, à la fin d'une réunion, suite à une réunion du Conseil du national du Parti québécois, si ma mémoire est bonne, à l'effet de dire que peut-être il y avait un problème.

J'avais dit: Oui, peut-être qu'il y a un problème, mais vous n'allez sûrement pas procéder de façon bousculée, en fin de session, à introduire des changements qui vont au-delà de ce que nous prévoyons faire comme comité consultatif. Si, effectivement, il faut examiner un certain nombre de choses pour remettre la Loi sur les élections scolaires, par exemple, dans son ensemble, dans une perspective de modernisation, suite surtout à l'adoption de l'amendement constitutionnel, il faudrait le faire correctement. Il faudrait le faire par des consultations publiques, dans le temps nécessaire pour examiner attentivement, pour l'opposition aussi et les autres membres, pouvoir consulter le monde, donner le temps aux personnes concernées par la tenue d'élections scolaires plus particulièrement de venir nous dire comment elles voient ça, etc.

Il y avait deux situations, essentiellement, la question de la délimitation des circonscriptions dans les commissions scolaires et la question de si, oui ou non, ça devrait être le Directeur général des élections qui gère les élections scolaires. Essentiellement, c'étaient ces deux points qui avaient été soulevés de façon ad hoc et tout à fait improvisée par le ministre de la Réforme électorale, auquel j'avais répondu: Peut-être qu'il y a de quoi à examiner, et je ne serai pas réfractaire à ce qu'on l'examine, mais on devrait le faire dans le cadre d'un processus où on peut garantir, en tout cas, un examen sérieux et avec dignité, comme je le disais tantôt, respectueux du processus démocratique.

(17 h 40)

Alors, notre surprise a été de trouver, après la fin de nos travaux et après réception du rapport du Directeur général des élections qui parlait du consensus établi au comité consultatif, des changements qui n'ont pas fait l'objet de consensus. Alors, ça, c'était l'empereur qui, semble-t-il, parlait: L'État, c'est nous. Nous sommes la majorité. Nous faisons ce que nous voulons. Et, même en matière électorale, on n'a pas besoin de vraiment être attentif à la règle qui existe depuis 20 ans à l'effet qu'on établit un consensus et qu'on légifère par la suite, on peut aller au-delà de ça. On peut décider que c'est comme ça que ça doit être. Afficher notre volonté, disait le ministre de la Réforme électorale. Nous sommes un gouvernement, nous allons gouverner. Bien beau! Mais, ici, il ne s'agit pas de choix que le gouvernement exerce en fonction des orientations qu'il veut donner à la société, il s'agit de règles qu'on établit pour que les élus exercent leur choix par voie démocratique. Donc, il s'agit de l'établissement des règles de base.

Alors, même dans l'établissement de ces règles de base, le gouvernement décide, lui, qu'il fait ce qu'il veut. Et, effectivement, il n'a pas tenu compte du consensus qu'on avait établi. Alors, on a tout de suite dit au gouvernement: Écoutez, c'est un peu malhabile de procéder de cette façon-là, mais nous voulons quand même essayer de faire le plus qu'on peut faire, parce que, effectivement, il y a un changement important qui vient d'être opéré, qui est l'institution des commissions scolaires linguistiques.

Et, ça, c'était jeudi passé, M. le Président, quand le projet de loi a été déposé pour la première fois. Jeudi passé. On est aujourd'hui mardi...

Une voix: Mercredi.

M. Sirros: Oui, voilà, mercredi, effectivement, et la session se termine vendredi au plus tard, selon notre règlement, M. le Président, dans deux jours, et on a dit: Vous n'êtes pas pour commencer à faire ça tout de suite, comme ça, à l'aveuglette, sans rien. Minimalement, même rapidement, il faudrait faire venir des personnes, des gens parce que ça se peut qu'il y en ait qui soient concernés par les changements que vous apportez, qu'on n'a jamais discutés de façon sérieuse au Comité consultatif. Et, finalement, le ministre délégué à la Réforme électorale a dit: Oui, oui, M. le député, vous avez raison. Correct, on va faire ça, on va entendre les groupes. Bien, tant mieux, j'ai dit. Tant mieux. Peut-être qu'il y a une façon, encore, de sauver l'affaire, d'agir correctement et de se retrouver encore une fois avec un consensus qui ferait en sorte que nos lois électorales feraient l'objet d'une entente entre tous les partis ici et qu'on ne serait pas en train de se chicaner sur les lois électorales. Qu'on puisse se chicaner et diverger d'opinion virilement, si vous voulez, sur toutes sortes de choix que nous avons devant nous, c'est ce que nous devons faire ici, en cette Assemblée, mais il me semble que, quant aux règles du jeu qui vont gérer ce processus de décision démocratique, il faudrait qu'on soit d'accord.

Et si ça s'applique à nous, pourquoi ça ne s'applique pas aux autres paliers gouvernementaux? D'ailleurs, certains des changements qui sont ici concernent un autre palier, le municipal. Pourquoi ne pas prendre le temps de faire ça correctement? Mais, en dépit de ça, on a dit au ministre: Au moins, faites venir les acteurs principaux. Les acteurs principaux étant qui? La Fédération des commissions scolaires du Québec, l'Association québécoise des commissions scolaires, les directeurs généraux des commissions scolaires catholiques, qui sont ceux qui oeuvrent quotidiennement – chaque fois qu'il y a une élection scolaire, ils agissent à titre de présidents d'élection – qui sont concernés par les changements. Le ministre a dit: Correct, on va faire ça, et, effectivement, on a tenu des audiences avant-hier, lundi, où on avait fait venir des groupes. En faisant venir des groupes, j'avais senti une certaine – comment je peux dire – sécurité, parce que j'avais effectivement parlé avec le ministre, puis il semblait démontrer une certaine volonté de tenir compte des représentations et qu'on puisse identifier, même sur les sujets qui n'ont pas fait l'objet de discussions au Comité consultatif, un consensus social auprès des personnes qu'on allait consulter.

On les a fait venir, on a consulté trois groupes, comme je le mentionnais tantôt, et on a passé en revue... Effectivement, les seuls points qui faisaient l'objet de problèmes pour ces gens-là étaient précisément les points qui étaient en dehors du consensus qu'on avait établi au Comité consultatif. La preuve que, quand on prend le temps de bien travailler, on peut effectivement aplanir toutes les différences, parce que, sur les éléments du projet de loi qui étaient la constitution de la liste avec les mécanismes que je vous mentionnais tantôt, M. le Président, il y avait eu consensus, et ça correspondait à ce que les gens sur le terrain souhaitaient. Tout le monde a dit: Ça, c'est excellent. Bravo! c'est du bon travail, c'est la façon de faire. Mais, sur les autres points que le gouvernement avait décidé lui-même d'introduire – parce que l'État, c'est nous, quoi! Ça nous appartient, cette affaire-là, on peut faire ce qu'on veut... Avec cette mentalité, le gouvernement avait introduit des changements dans la loi électorale scolaire qui en ont fait sursauter plusieurs dans le milieu.

Alors, on a dit: Ah! Effectivement, M. le ministre, si vous voulez qu'on marche, nous, ce qu'on veut, c'est de protéger l'institution, la crédibilité de l'institution, qui est quoi? qui est le processus électoral, et écoutons donc attentivement ces trois groupes qui sont les plus concernés puis ajustons la loi en conséquence. D'accord? D'accord. On entend les groupes. Les trois groupes soulèvent à peu près les mêmes points. Et, d'ailleurs, le ministre a fait certains amendements qui découlent de ces consultations. Il réintroduit, par exemple, l'article qu'il avait supprimé, sans consensus, qui permettait un ajustement quant à la taille des différentes commissions scolaires en tenant compte de l'étendue du territoire qu'elles doivent desservir, etc. Donc, il réintroduit la flexibilité qui existait d'adapter la réalité politique à la réalité géographique dans certaines situations. C'est quelque chose que tous les intervenants ont réclamé.

Les intervenants ont aussi parlé sur la décision qu'avait prise le gouvernement de dorénavant déléguer le déroulement des élections scolaires au Directeur général des élections, question de donner ça à une institution qui est nommée par l'Assemblée nationale, etc. Et ça avait laissé les intervenants ni chauds ni froids, M. le Président; personne n'avait vraiment trouvé la raison pour laquelle il fallait faire ça. Il y avait des craintes que certains ont soulevées quant à l'administration plus lourde que ça pourrait vouloir dire pour des élections où il y a 10 % de la population qui jusqu'à maintenant participe; on souhaite que ce soit augmenté. Il y en a qui ont exprimé des craintes quant aux coûts supplémentaires que ça pourrait engendrer. Mais personne n'a vraiment dit: Ça, c'est une fin de non-recevoir, il ne faut pas faire ça, ça nous pose problème.

Alors, sur ce point-là, nous avons estimé que le milieu concerné accepterait d'aller avec ça, et nous avons aujourd'hui cet amendement que nous acceptons, même si ça n'a pas fait l'objet du consensus que je décrivais tantôt, parce que justement ça correspond à ce que le milieu accepte. Même chose avec l'article 7, le milieu le réclamait, le ministre l'avait introduit. Correct! Même chose avec l'autre amendement que le ministre adopte, ou apporte sur les balises quant aux dépenses qui doivent être imputées et qui peuvent être imputées aux commissions scolaires pour la tenue des élections scolaires, M. le Président. Et il restait un point sur lequel tous les groupes, mais de façon unanime, étaient unanimement contre, et de façon profonde, et avec raison, quand on commence à comprendre pourquoi.

Alors, c'est quoi, ce point-là? Le ministre a décidé qu'il allait introduire dans le projet de loi une disposition à l'effet que la délimitation des circonscriptions électorales à l'intérieur des commissions scolaires n'allait plus se faire par les commissions scolaires – ou, dans ce cas-ci, par les conseils provisoires – mais que dorénavant ces gens-là devraient de façon unanime – unanime! – tous ceux présents à la réunion devaient unanimement dire qu'ils sont d'accord avec la délimitation des territoires.

Alors, là, M. le Président, on passe d'une situation où, jusqu'à maintenant, c'était la majorité simple, principe sacro-saint pour ce gouvernement... Même quand il s'agit de briser un pays puis de le séparer, le gouvernement dit: Si c'est la majorité simple, ça passe. 50 % plus un, c'est ça, la majorité. Ici, tout d'un coup, c'est l'unanimité, la démocratie. Si on veut que ce soit valable, il faut que ce soit unanime. Tous les membres – disons une vingtaine de membres autour de la table d'un conseil provisoire – alors les 20, s'ils sont présents, doivent exprimer leur accord, tous et chacun, avant que ça marche, la délimitation.

Bien, on n'était pas surpris quand les gens ont dit: Ça n'a pas de bon sens! Ça n'a pas de bon sens d'imposer une règle d'unanimité. Pour l'ensemble du territoire québécois, M. le Président, les 73 commissions scolaires, multipliez ça par 20 commissaires ou 20 sièges, vous avez quelque chose comme 1 000, 1 400 personnes, dans 73 circonscriptions ou commissions scolaires, qui doivent toutes être d'accord pour que la carte soit acceptée. Et, s'il y en a un dans chaque commission scolaire qui n'est pas d'accord, qu'est-ce qui arrive? Le gouvernement décide que dorénavant ça va être le comité de représentation créé par la Loi électorale qui devra décider de la délimitation des territoires des commissions scolaires.

(17 h 50)

Alors, ça vaut la peine de voir rapidement c'est quoi, le comité de représentation, la Commission de la représentation, M. le Président. La Commission de la représentation, c'est un instrument que nous avons pour les élections provinciales, pour la délimitation des territoires de nos circonscriptions électorales, qui gère les changements en suivant la démographie, en appliquant certains paramètres, en tenant des consultations publiques chaque fois qu'on change un territoire, etc., en encadrant le débat autour de la question. La Commission est composée de trois personnes nommément. Dans tout le Québec, il y en a un, comité, c'est trois personnes: le Directeur général des élections et deux autres personnes qui sont aussi entérinées par l'Assemblée nationale. Elles ne peuvent pas déléguer leurs pouvoirs à une multitude d'autres petites commissions de représentation.

Il s'agit de trois personnes, et, parce que le gouvernement décide que, lui, il veut expédier l'affaire, j'imagine, pour certains alliés politiques et donc de jouer un jeu partisan même avec un processus électoral, elles risquent de recevoir, ces trois personnes, des demandes d'établissement des circonscriptions électorales dans au maximum 1 400 cas, et elles vont devoir statuer sur ces cas entre le 3 février et le 28 février, le 1er mars. Elles auront un maximum de 25 jours pour statuer sur ce qui va probablement être une inondation de demandes d'établissement des circonscriptions électorales, ce qui va mettre en cause la crédibilité du processus parce qu'il est impossible de le faire, ce travail, correctement si les estimations que nous avons reçues de la part de gens sur le terrain à l'effet qu'un bon 75 % à 80 % de cas ne pourront pas recevoir l'unanimité dans les conseils provisoires, qui seront référés à la Commission de la représentation... Il est impossible de faire le travail correctement sans le faire par l'application mécanique de règles, sans tenir compte de la réalité locale que les gens vont vivre. Prenez les mathématiques et faites le calcul, c'est impossible de le faire correctement. Ça va être possible d'arriver, mais on va le faire aux dépens de la qualité de la carte électorale dans les circonscriptions des commissions scolaires, M. le Président, et ce, par entêtement du ministre à ce moment-ci.

Mais qu'est-ce qui est arrivé à la commission parlementaire qui m'a fait être si choqué tantôt, M. le Président? Quand on a entendu les trois groupes qui sont venus nous exprimer leurs craintes et leurs inquiétudes, ils ont tous été unanimes sur ça. Je peux vous lire – et je vais le faire après le souper, M. le Président – les déclarations de chacun, et il était clair à tout le monde qu'il y avait un consensus autour d'une chose, que, si la majorité simple semblait être trop facile, tout le monde était prêt à accepter les deux tiers. Ça a été suggéré, même, par les intervenants. Alors, moi, j'ai dit au ministre, à la fin de nos travaux: Écoutez, M. le ministre, on vient d'entendre tout ça. Moi, je vous affiche tout de suite que, quant à nous, il n'y aura pas de problème si c'est les deux tiers. Le ministre hoche la tête, il dit: Effectivement, vous avez raison. On va le corriger pour que ça soit deux tiers. On va enlever l'unanimité. Effectivement, ça va être deux tiers.

Vous comprendrez ma surprise quand je vois les amendements qui sont ici, M. le Président, qui font en sorte que je suis obligé de conclure que la parole que le ministre m'a donnée... Et il me l'a bel et bien donnée. S'il ne me l'a pas donnée, qu'il se lève, qu'il dise de son siège qu'il ne me l'a pas donnée, parce qu'il y avait des gens autour de nous quand il me l'a donnée. Alors, qu'il dise de son siège qu'il ne me l'a pas donnée. Il me l'a donnée. Alors, ma surprise, c'est de trouver ici qu'il a renié sa parole, qu'on revienne à l'unanimité.

Regardez bien, moi, je n'ai personne à défendre dans ce dossier, si ce n'est que le processus. Je n'ai pas d'amis qui m'ont demandé de faire ça. J'ai écouté trois groupes qui représentent l'ensemble des commissions scolaires de tout le Québec, qui ont tous été unanimes à dénoncer cette façon de faire. Je constate que le ministre introduit ce changement en faisant fi du consensus qu'on avait établi. Je constate également qu'il le fait suite à des échanges qu'il a eus avec des membres de son parti. Je constate également que son collègue le ministre de la Réforme électorale décide qu'il va prendre le chemin de la consultation pour sensibiliser la population sur d'autres changements à la Loi électorale et je conclus que ce gouvernement n'a pas de parole quand il s'agit de donner sa parole pour le changement comme tel, utilise même les lois électorales pour des fins partisanes, ne respecte pas le processus démocratique. Et je ne sais plus, M. le Président, sur quoi on pourra se baser si, quand entre nous on se donne une parole, on ne la tient pas.

Le ministre n'était pas obligé de me dire que, oui, il va le changer – effectivement, il va le changer à l'unanimité puis il va revenir aux deux tiers, comme les gens le proposaient – il n'était pas obligé de me dire ça. Il aurait pu me dire: Oh! ça va, je ne sais pas, je vais voir, etc. Alors, moi, j'ai quitté notre réunion avec l'accord du ministre, j'ai informé mon caucus qu'effectivement on avait aplani nos problèmes, on avait convenu que ça serait deux tiers et non pas l'unanimité qui reflétait le consensus que tout le monde avait amené à la table, on accepterait que ça serait le Directeur général des élections parce que les gens qu'on avait consultés l'avaient accepté et qu'il n'y avait pas de problème; on pourrait donc bâtir sur du solide.

Alors, vous comprendrez que j'étais un petit peu choqué de voir le ministre, sans aucune référence à cet échange, dire: Tiens, voici quelques amendements. Je me suis senti, M. le Président, comme quelqu'un, comme je vous le disais, qui s'est fait tromper. Et, si ça ne dérange pas le ministre, moi, ça me dérange. Parce que, depuis 17 ans que je siège ici, jamais je n'ai donné ma parole à quelqu'un clairement pour dire par la suite: Je m'en fous, c'est juste une parole! Ça suffit déjà que la population nous trouve passablement sur le «borderline» par rapport à la façon dont on traite la vérité, disent plusieurs. Et, moi, j'ai toujours appris que, quand on ne veut pas dire quelque chose, on ne le dit pas. On est assez adulte pour l'être, surtout quand on occupe un poste de ministre. Mais, quand on le dit, bien, là, on le tient, puis quand on le dit clairement, on le tient clairement.

Et il arrive des moments dans la vie où même à nos amis – et je parle aux députés de l'autre côté, qui sont influencés, j'en suis certain, dans la recherche de ce qu'ils font, par des amis – il faut qu'on dise: Je ne jouerai pas, moi, avec le processus démocratique pour faciliter, si tel est le cas, la vie de quelqu'un. On va le faire correctement, et tant pis s'il y a des choses qui pourraient s'avérer correctes à plus long terme qui doivent être faites. On ne prendra pas le risque de bousculer l'Assemblée nationale deux jours avant la fin de la session devant un manque de consensus total de la part des intervenants, en trompant l'opposition, en mentant même à l'opposition. On ne fera pas ça pour vous. C'est ce qu'on devrait normalement dire à ceux qui nous auraient demandé des choses comme ça si on avait le courage d'agir en hommes politiques intègres et respectueux de la démocratie, par rapport aux changements qu'on doit apporter aux lois électorales.

Malheureusement, M. le Président, vous allez me dire dans 10 secondes qu'on doit suspendre. On reviendra à 20 heures pour la conclusion. Mais je peux déjà vous dire que je trouve que, dorénavant, quand le ministre me donnera sa parole, moi, je n'aurai plus confiance en sa parole.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, effectivement, M. le député de Laurier-Dorion, considérant l'heure, nous suspendons les débats, qui reprendront ce soir à 20 heures. Et je vous avise immédiatement que vous avez écoulé 45 minutes de votre temps de parole qui est d'un maximum de 60 minutes. Alors, je suspends les travaux à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 1)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Lorsque nous avons suspendu nos travaux, à 18 heures, nous étions en train d'étudier l'adoption du principe du projet de loi n° 185 qui est la Loi sur l'élection des premiers commissaires des commissions scolaires nouvelles et modifiant diverses dispositions législatives. À ce moment-là, le député de Laurier-Dorion et critique officiel de l'opposition en la matière avait un temps de parole de 60 minutes, duquel s'étaient déjà écoulées 45 minutes. M. le député de Laurier-Dorion, si vous voulez bien poursuivre, il vous reste un temps de parole de 15 minutes. M. le député.

M. Sirros: Merci, M. le Président, et merci à mon collègue de Verdun qui suivait attentivement nos délibérations de son bureau, tantôt. Il se sentait inspiré à venir se joindre à nous ici parce qu'il trouvait effectivement que ce que le ministre faisait, tel que je le décrivais, n'avait pas de bon sens.

J'étais en train, avant qu'on se quitte pour le souper, M. le Président, de dénoncer la façon triste, je dirais, pour utiliser un mot que sûrement vous ne me demanderez pas de retirer... Je vois le député de Rivière-du-Loup également qui est ici et je l'accueille. J'avais résumé ça en disant que le ministre n'avait pas tenu la parole qu'il m'avait donnée face à face quand il m'avait, suite aux audiences qu'on a faites, assuré que ce que les gens réclamaient serait fait et qu'effectivement, au lieu d'imposer une règle d'unanimité, la règle du deux tiers serait instaurée dans le projet de loi, établissant comme ça un consensus qui à la fois tienne compte du fait que nous sommes dans une période de transition et tienne compte aussi du consensus un peu bousculé, là, qu'on a dû essayer de développer avec les représentants des commissions scolaires et les directeurs généraux. Alors, je vous expliquais ma surprise de voir que, suite à cet échange en commission parlementaire, suite à cette parole donnée, on s'est retrouvé avec un projet de loi qui ne respectait en rien cette parole-là.

Peut-être juste pour reprendre les raisons, au-delà du fait que le ministre procède d'une façon complètement contraire à ce qui normalement doit caractériser les changements dans ce genre de domaine et au-delà du fait qu'il n'a pas tenu la parole qu'il m'avait donnée, examinons d'un peu plus près ce pour quoi les gens réagissent en disant: Ça n'a pas de bon sens.

Nous n'avons pu qu'entendre trois groupes durant les audiences publiques bousculées en cette fin de session. Les trois groupes, c'était, comme je le disais, la Fédération des commissions scolaires du Québec, qui disait très clairement, par rapport à l'article 3 du projet de loi qui était celui qui imposait cette règle d'unanimité qui n'a jamais véritablement fait l'objet de discussions en comité consultatif, qui disait que cette exigence, si elle est maintenue, aura pour effet de rendre virtuellement impossible une décision locale sur un sujet qui concerne essentiellement les citoyens du milieu. Nos suggestions, et il parlait de la suggestion de maintenir la règle telle qu'elle existe maintenant, la majorité simple – une règle que le gouvernement chérit d'ailleurs dans toutes sortes d'autres dossiers et qui est effectivement la règle que généralement on utilise, à quelques exceptions près, pour décider des choses démocratiquement – il disait que nos suggestions, en particulier celle concernant la division du territoire de la commission scolaire en circonscriptions électorales, auront pour effet d'éviter de compromettre le fonctionnement éventuel des futures commissions scolaires linguistiques.

Ce n'est pas une mince affaire. Ça, c'est la Fédération des commissions scolaires qui dit: Si vous maintenez votre règle d'unanimité pour ce qui est de la division des circonscriptions électorales à l'intérieur des commissions scolaires, vous allez forcer une situation où toutes ces divisions, ou la très grande majorité, vont se retrouver référées à la Commission de représentation, qui est composée de trois personnes, le Directeur général des élections et deux autres, qui aura à statuer sur quelque chose comme 1400 circonscriptions pour l'ensemble du territoire québécois dans un délai de trois semaines, trois semaines et demie, et qui sera nécessairement, à ce moment-là, obligée d'appliquer un genre de règle mécanique qui ne tiendra pas compte des conditions réelles dans le milieu, et que finalement c'est les citoyens qui seront mal représentés, M. le Président.

Et tout ça pour probablement faire plaisir à quelques amis du parti au pouvoir en utilisant quand même une loi qui est fondamentale, ici, M. le Président. Le Parti québécois ne semble pas se gêner pour faire une utilisation partisane du pouvoir, qu'il utilise dans le cas des lois électorales. Alors, ça, c'était la Fédération des commissions scolaires du Québec, M. le Président.

L'Association québécoise des commissions scolaires disait, quant à la disposition 3, que «cette disposition ne respecte pas la règle du vote majoritaire qui s'applique généralement au sein du conseil provisoire. À la limite, nous pourrions accepter un vote des deux tiers des membres sur cette question, mais l'exigence d'unanimité est clairement impraticable. Si cette disposition est maintenue, nous prévoyons que la Commission de la représentation instituée par la Loi électorale serait obligée de trancher dans un grand nombre de cas où les conseils provisoires seraient incapables de s'entendre à l'unanimité.

«Et le travail de diviser – elle continuait – le territoire de la commission scolaire nouvelle en circonscriptions électorales revient de droit aux conseils provisoires. L'intervention de la Commission de représentation devrait donc se limiter à des cas très exceptionnels. C'est pourquoi nous réitérons notre demande d'exclure du projet de loi cette exigence d'un vote unanime.»

M. le Président, ça serait peut-être intéressant de regarder ce que le Directeur général des élections nous disait par rapport à cette question dans son rapport qu'il a soumis à l'attention de la présidence ici, à l'Assemblée nationale. Il nous disait, quand il expliquait les modalités d'établissement et de l'information dont j'avais discuté tantôt, que le Directeur général des élections doit établir les paramètres devant servir à la description des circonscriptions électorales qui doivent être délimitées par les commissions scolaires. Pas de problème. Effectivement, on avait convenu que le Directeur général des élections propose les paramètres généraux pour que les commissaires des conseils provisoires utilisent ces paramètres pour délimiter leur territoire.

Et il poursuivait, le Directeur général des élections, pour que ça soit clair, il disait: Il faut ici distinguer entre la délimitation des circonscriptions électorales, qui est du ressort des commissions scolaires, et le contenu des circonscriptions, qui doit se faire selon les paramètres fixés par le DGE. Effectivement, il y a des gens qui sont élus. Il y a une pratique très, très longue qui veut à l'heure actuelle que c'est les commissions scolaires qui établissaient ça par majorité simple.

Ici, nous sommes dans une phase de transition. Le Directeur général des élections, personne ne s'en offusquera, établira les paramètres en disant, par exemple: Un paramètre pourrait être les frontières naturelles géographiques, un autre l'appartenance des différentes communautés locales, essayer de tenir des circonscriptions qui tiennent compte de ces réalités, un peu comme on fait au provincial. Mais nous trouvons ça outrancier de la part du gouvernement d'essayer, à l'intérieur d'un laps de temps impossible durant cette fin de session, d'aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l'élection, contre et contraire à tout ce que tout le monde sur le terrain nous a exprimé, pour faire plaisir probablement à quelques amis qu'ils ont dans leur parti, qui oeuvrent sur une scène, qui ont une vision des choses qui concorderait tout de suite, immédiatement à ça.

(20 h 10)

Je répète que ça serait utile d'envisager des consultations publiques sur cette question, sur d'autres questions à l'intérieur de la Loi électorale pour qu'on s'adresse aux véritables problèmes que nous avons avec la participation de la population, par exemple, aux élections scolaires, qu'on regarde également toutes les questions afférentes qui touchent aussi les municipalités, qui peuvent aussi être préoccupées et concernées par le même genre d'approche au niveau de l'implication du Directeur général des élections dans les élections scolaires à d'autres niveaux.

Mais ce qui m'inquiète – et j'aimerais le faire ressortir dans les quatre ou cinq minutes qu'il me reste, M. le Président – c'est que nous avons ici un autre exemple de la façon cavalière dont ce gouvernement et ses ministres, je dois dire, maintenant... Parce que j'avais toujours l'espoir que le nouveau ministre délégué à la Réforme électorale prendrait un peu ses propres responsabilités et n'agirait pas strictement en exécutant de celui qui est le titulaire propre du ministère, et c'est pour ça que j'étais, au début, convaincu qu'on aurait pu avoir un échange un peu plus civilisé que celui qu'on est habitué d'avoir avec le ministre responsable de la Réforme électorale et député de Joliette, M. le Président, qui – et c'est là où le bât blesse – avec tout ça, annonçait très clairement à qui voulait l'entendre, suite au Conseil national du Parti québécois, que la Loi électorale faisait partie de la stratégie de sensibilisation de la population aux besoins de la cause, qu'il allait partir avec le ministre délégué en grande tournée nationale et que les inquiétudes de Sirros, Mulcair et compagnie, bien, c'était, pour utiliser ses mots, quétaine. C'étaient ses mots.

Ça lui a valu, M. le Président, par quelqu'un qui n'est pas très quétaine, Gilles Lesage, dans Le Devoir , un éditorial qui lui disait, finalement, ni plus ni moins: M. le ministre, prenez un peu votre job au sérieux. Si vous êtes incapable d'agir sérieusement dans d'autres domaines, faites-le minimalement pour ce qui est de la réforme électorale. Et je vais me permettre de citer, dans les cinq minutes qu'il me reste, un court extrait de cet éditorial qui rappelait le ministre à l'ordre. Et c'est la même dynamique qui est mise sur le plancher ici, M. le Président, le non-respect du processus consensuel avec lequel nous devrons travailler dans des situations où la justification de brimer ce genre de consensus n'a pas été faite.

Gilles Lesage disait – il décrivait ce que le ministre Chevrette, si je peux utiliser son nom, s'apprêtait à faire – «Après en avoir délibéré avec les militants péquistes, M. Chevrette a en effet annoncé que, à la réception du rapport de M. Côté, qu'il a nommé à la mi-janvier, lui et son collègue de la réforme électorale, M. Jean-Pierre Jolivet, feront une tournée dite ministérielle de la mi-février à la mi-mars de sorte qu'alors, à la reprise des travaux sessionnels de l'Assemblée nationale, le gouvernement pourra sans délai proposer ses choix, ses solutions, son projet de loi sans se soucier de ce que l'opposition parlementaire en pense, mais en se drapant commodément dans le précieux tissu de l'héritage de René Lévesque.»

Parce que, effectivement, M. le Président, chaque fois qu'on parle de ça, le ministre de la Réforme électorale sort le mémoire de René Lévesque, se drape dans ça et dit: Là, c'était un démocrate, et nous allons protéger l'héritage. Mais il semble oublier que c'est un héritage qui appartient à tout le monde et que c'est un héritage qui nous a légué une façon consensuelle de procéder et que les agissements relèvent plus de l'ère duplessiste que de l'ère de René Lévesque.

Et Gilles Lesage, il continuait et il disait: «Au lieu de jouer avec ses billes dans sa cour, laissant les libéraux, les adéquistes et tous les tiers partis en faire autant dans leur enclos, le gouvernement devrait s'employer dès maintenant à la seule démarche qui s'impose, respectueuse de la tradition québécoise. Sur réception du rapport de Côté ou, dans le cas qui nous préoccupe, sur réception des délibérations de la commission parlementaire – le rapport de la commission parlementaire qui établissait le consensus, comme je le disais, contre la façon de faire de ce gouvernement – les ministres devraient sensibiliser et ameuter tous les Québécois qui se préoccupent du jugement ensemble ici...» Il disait... Je m'excuse, j'ai perdu un bout, mais il disait essentiellement: «La consultation – et je finis ma citation – que M. Chevrette veut faire devrait être faite sous l'égide de la commission parlementaire des institutions, ainsi que le député libéral de Laurier-Dorion, Christos Sirros, l'a suggéré au ministre, et, au lieu de s'en moquer comme il le fait, M. Chevrette devrait saisir cette perche et innover, parce que – il concluait – le précieux legs de M. Lévesque dont il se réclame à bon droit n'est pas l'apanage exclusif des péquistes, il fait consensus au-delà des tranchées partisanes.»

Mais on constate que le gouvernement – et le ministre délégué se met également dans cette foulée-là – n'est pas capable de ne pas être partisan avec les lois électorales. Il continue la tradition de son collègue responsable de la réforme électorale, il a trahi sa propre parole à quelqu'un dans le premier dossier qu'il avait à traiter de cette façon-là, et ça n'augure pas très bien, M. le Président, parce que, normalement, si on ne peut pas, quand on se regarde entre les deux yeux, se dire la vérité et si, quand on se dit quelque chose, on n'est pas capable de le respecter, bien, là, je ne pense pas qu'on soit capable non plus de mener des dossiers tels que ceux que le ministre essaie de mener, au niveau des responsabilités qu'il a, que ce soit comme leader, que ce soit comme ministre délégué à la Réforme électorale.

J'implore le gouvernement, durant la session que nous aurons, au niveau de la commission parlementaire et de l'étude article par article, de revenir, de tenir la parole qu'il a donnée au député de Laurier-Dorion et aux membres qui sont venus indirectement, donc par mon biais, nous expliquer leurs réticences avec la façon de faire et de se conformer à la volonté réelle dans le milieu pour qu'on puisse effectivement ne pas se trouver devant un bâillon avec une loi électorale. Même si ça ne concerne que les élections scolaires, c'est un palier gouvernemental qui mérite d'être traité avec respect, M. le Président, comme tous les parlementaires méritent d'être respectés. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Nous cédons maintenant la parole au député de Rivière-du-Loup. M. le député, vous avez un temps de parole de 20 minutes.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. On est devant le projet de loi n° 185 qui vient finalement modifier des choses qu'on vient tout juste de voter, la loi n° 109, il y a quelques mois à peine, ce qui est bien peu de temps dans notre processus parlementaire, et où le gouvernement semble sous des pressions qui sont difficiles à identifier, sous des impulsions qui, du point de vue démocratique, du point de vue des besoins réels de notre population, de nos régions, sont difficiles à identifier, et vient modifier un certain nombre de règles qui avaient été mises de l'avant. Et la plus surprenante, surtout de la part de ce gouvernement-là, mais la plus surprenante en général et sur laquelle je tiens particulièrement à intervenir ce soir, c'est la règle de l'unanimité, donc l'article 3 qui prévoit que, «au plus tard le 31 janvier 1998, le conseil provisoire divise le territoire de la commission scolaire nouvelle en circonscriptions électorales par le vote unanime de tous ses membres ayant le droit de vote et qui sont présents lors de la prise du vote».

Cette unanimité, M. le Président, a deux, trois caractéristiques qui nous amènent à nous poser des questions. D'abord, le gouvernement du Parti québécois parle énormément dans ses discours de décentralisation, de responsabilisation des gens sur le territoire dans les processus de prise de décision. Dans la pratique, on s'aperçoit que c'est passablement différent des discours. Quand un gouvernement supérieur impose à des instances sur le terrain des règles aussi strictes, des règles aussi fermées que l'unanimité pour la prise de décision, sinon ça va remonter en haut, c'est la présomption que le groupe n'est pas capable de prendre des décisions et qu'il faut que tout le monde se mette d'accord, qu'il n'y ait plus de place pour la discussion, la divergence, c'est-à-dire que les gens qui sont sur le terrain ne sont pas en mesure de respecter un processus démocratique normal, mais qu'il faut l'unanimité et que, s'il y a un dissident en région, immédiatement les décisions doivent remonter en haut.

C'est une attitude, M. le Président, absolument paternaliste de la part du gouvernement, qui, je le répète, est difficile à comprendre du point de vue de sa source. D'où on est arrivé à une conclusion semblable que, en bas de l'unanimité, des décisions concernant la division d'un territoire ne pouvaient pas être prises? Alors qu'il y a des gens en région qui s'entendraient, par contre, aux trois-quarts, dans un conseil provisoire, pour prendre une décision, leur décision ne devrait pas être jugée valable, leur décision devrait remonter à une instance supérieure, à une instance centrale. Alors, c'est sûrement contraire au discours de ce gouvernement-là sur la décentralisation, c'est contraire aux attitudes de toute personne qui voudrait prôner une responsabilisation des gens en région.

(20 h 20)

C'est particulièrement surprenant que ce gouvernement-là exige, pour des choses qui pourraient se décider sur le terrain, sur le territoire, l'unanimité, alors que le même gouvernement, pour la première fois à peu près dans l'histoire moderne du Québec, qui part en réforme électorale puis qui n'a plus besoin de l'unanimité, qui n'a plus besoin du Parlement, là, c'est une couple de ministres qui partent sur le terrain et qui disent: La réforme électorale, là, pas besoin de tous les partis pour ça, on est un parti, on sait ce qui est bon pour la démocratie; puis toute la recherche d'unanimité et de consensus dont les réformes électorales ont toujours été l'objet, nous, on passe par-dessus ça, on n'a plus besoin de l'unanimité, on sait ce qui est bon...

Comment un gouvernement qui veut modifier seul, par exemple, la Loi électorale puis partir... Ils vont subir le Parlement, ils ne vont pas travailler avec les parlementaires, ils vont subir le Parlement. Ils veulent faire cavalier seul dans quelque chose d'aussi fondamental que la réforme de l'ensemble de nos lois électorales, sur des principes de base. Pour du découpage territorial en région qui pourrait se décider entre les gens des régions, là ils sont beaucoup plus exigeants, ils requièrent l'unanimité. Alors, c'est une différence, une divergence d'attitude. Et sans parler des positions des différents groupes, sans parler de ce qu'ont dit les gens sur le terrain, sans parler des consultations, seulement au niveau de l'évaluation de l'attitude, c'est une divergence entre l'action dans un domaine et l'action dans un autre, c'est une divergence entre le discours et l'action qui est absolument surprenante.

Ce qui serait encore plus surprenant – M. le député de Laurier-Dorion en a parlé tout à l'heure – c'est que le gouvernement aille jusqu'à l'utilisation du bâillon, qui – je tiens à le souligner, M. le Président – est devenu dans notre système beaucoup trop une forme de banalité. Et là, si on parle du gouvernement, et je me souviens très bien des engagements du gouvernement avant même la première session parlementaire qui a suivi son élection en 1994, ce gouvernement-là nous a dit: Nous, on n'utilisera plus le bâillon. On va débattre les projets de loi à fond.

Là il y a des gens qui commencent à craindre – probablement que ce n'est pas l'intention, peut-être que le leader du gouvernement va vouloir nous rassurer – qu'on pourrait aller jusqu'à utiliser le bâillon, donc l'interruption des débats normaux de l'Assemblée nationale, pour un projet de loi présenté en retard dans la session, pour un projet de loi qui ne fait pas du tout l'unanimité en Chambre, pour un projet de loi qui n'a pas un caractère sûrement si évident que ça, ou si dramatique que ça, parce que, il y a à peine quelques mois, on adoptait la loi n° 109 qui allait, sur certaines dispositions, dans un autre sens, alors qu'on plaiderait l'urgence pour faire passer dans la gorge des citoyens et des citoyennes du Québec un projet de loi basé sur une attitude paternaliste, sur une attitude de gouvernement central qui sait ce qui est bon pour le bon peuple partout en région...

Ça serait déplorable, M. le Président, et j'ose espérer que ce n'est pas l'intention du gouvernement. J'ose espérer que le gouvernement a un peu plus de respect pour les gens qui, en région, ont décidé de faire partie des conseils provisoires, qu'il a un peu plus de respect pour ces gens-là qui ont à coeur l'éducation de leurs enfants, qui ne veulent rien de plus qu'un système scolaire qui va fonctionner le mieux possible et qui, de bonne foi, ont décidé de participer et qui vont continuer à participer à ce processus-là, des conseils provisoires où il y a des gens de bonne foi mais où il est possible qu'il existe une divergence sans que, pour autant, on remonte à un organisme comme la Commission de représentation électorale pour venir modifier des décisions ou venir chapeauter du haut. Comme si le gouvernement central, lui, avait la vérité absolue, venait s'immiscer dans ces décisions-là qui auraient pu se prendre autrement par les gens qui sont sur le terrain.

C'est le point de vue que je voulais exprimer, M. le Président. J'ose espérer que, dans un sain débat sur le projet de loi, dans un débat qui va se tenir d'une façon constructive, on va prendre le temps d'évaluer chacun des articles, de reprendre en considération tout ce qui a été dit par les gens qui s'intéressent à ces questions-là. J'ose espérer qu'on pourra amener les modifications qui s'imposent.

On l'a vu plusieurs fois, on l'a vu dans le cas de l'assurance-médicaments, on l'a vu dans plusieurs cas, c'est toujours le risque, quand on veut bousculer des projets de loi en fin de session, de commettre des erreurs puis de s'apercevoir, au lendemain de ça, qu'il est trop tard pour les réparer et qu'on les a commises sur le coup de l'empressement, qu'on les a commises par refus de regarder à fond toutes les questions.

Je me permets d'espérer, M. le Président, que ce n'est pas ce que va faire le gouvernement, que le gouvernement va prendre le temps nécessaire d'analyser toutes les implications d'un projet de loi comme celui-là et en arriver, si c'est possible, à des dispositions qui soient plus respectueuses des gens sur le terrain, des dispositions qui soient moins paternalistes, des dispositions qui soient moins centralisatrices, en d'autres termes, des dispositions qui soient plus conformes, des actions qui soient plus conformes, enfin, au genre de discours que nous tient le gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. M. le leader du gouvernement.


Motion d'ajournement du débat

M. Jolivet: M. le Président, en vertu de l'article 100, je vous demanderais l'ajournement, et je fais motion pour ajourner ce débat et passer à un autre débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Sirros: Non, M. le Président. Si je comprends bien, la motion est débattable.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Et, avant qu'on la débatte, est-ce que le ministre peut nous expliquer les raisons qui l'amènent, après deux interventions, à ajourner ce projet de loi? Il ne nous reste que deux jours!

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Laurier-Dorion, motion d'ajournement. Alors, si vous regardez à votre règlement, l'article 101: «Temps de parole. L'auteur de la motion et un représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un temps de parole de 10 minutes.» Et l'auteur de la motion a également un droit de réplique de cinq minutes. Alors, à ce stade-ci, je demanderais à l'auteur de la motion, M. le ministre délégué à la Réforme électorale et parlementaire... M. le ministre.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, nous avons entendu de part et d'autre, avec le député de Rivière-du-Loup, des informations nous permettant de faire l'étude de ce qui a été demandé de part et d'autre, et, dans ce contexte-là, je me propose de regarder tout cela. En conséquence, j'ai proposé l'ajournement du débat. Ça ne veut pas dire qu'on ajourne l'ensemble du débat. On verra, à ce moment-là, au courant des jours qui viennent. Il y a une chose qui est certaine, c'est que nous avons l'intention de reprendre le débat que nous avions laissé, à l'heure du souper, sur le 176. Voilà les raisons pour lesquelles nous demandons l'ajournement de ce débat.

Une voix: ...


M. Christos Sirros

M. Sirros: J'entends une voix quelque part qui dit: J'espère que c'est quelque chose qui va concorder avec ce qu'on va voir dans la réalité. J'entends le ministre me dire qu'il veut ajourner ce débat parce qu'il a entendu les arguments que tant moi-même que le député de Rivière-du-Loup lui avons donnés. Pourtant, c'est les mêmes arguments que tout le monde lui avait donnés la semaine passée. Peut-être que je suis en train de me faire dire que j'étais plus convaincant que l'ont été les groupes qui l'ont rencontré et les discussions qu'on a eues entre nous. Si c'est le cas, ce serait très facile, M. le Président: qu'il se lève, qu'il nous dise tout simplement: Effectivement, vous avez raison, puis on va revenir et tenir la parole qu'on avait donnée sur la question des deux tiers plutôt que l'unanimité. Et là on pourrait comprendre qu'on ne pourrait vouloir, à ce moment-là, ajourner le débat, avec la parole, devant tous les parlementaires, du ministre, devant les caméras et enregistrée, qu'il va effectivement faire les changements qu'il avait déjà promis de faire et lesquels il a reniés. Alors, j'aimerais bien pouvoir avoir la certitude que ce n'est pas simplement une astuce et une stratégie que le gouvernement utilise à ce moment-ci pour gérer son menu législatif en cette fin de session en prévision, j'imagine, d'un bâillon qui doit être en train d'être préparé quelque part par ce gouvernement.

(20 h 30)

C'est un peu insultant, dans ce sens-là, de se retrouver devant une situation où on a agi en convoquant les groupes de façon rapide, sans leur donner... On a fait ça vendredi puis on leur a dit de venir ici lundi. Il venait leur dire exactement, le gouvernement, ce qu'on a répété ici en leur nom. Et là le ministre se lève et il dit: J'ajourne le débat parce que je vais considérer ce qui a été dit ici, comme si c'était nouveau. Ce n'était pas nouveau. Il avait tout le temps voulu pour considérer ça, pour penser à des amendements qui avaient été suggérés.

Alors, moi, j'ai la crainte très profonde que ce ne soit qu'une tactique que le leader du gouvernement utilise à ce moment-ci pour faire semblant qu'il y a quelque chose qui mijote dans sa tête, qu'il va aller dans le sens de ce qu'on dit et qu'il va effectivement corriger ce qu'il aurait dû déjà corriger, et on va se retrouver avec un temps, maintenant, où effectivement on discutera de toutes sortes d'autres choses, et que ce projet de loi n° 185 va se trouver à être mis de côté. D'autres collègues n'auront pas l'occasion de convaincre le ministre et de lui expliquer l'à-propos pour qu'il se lève concrètement en cette Chambre – c'est lui, le ministre qui pilote le dossier – pour nous dire: Oui, j'accepte ce que vous avez dit. Je m'engage à effectivement enlever cette règle de l'unanimité, à introduire une règle des deux tiers et ainsi rencontrer le consensus qu'on avait établi. C'est tout ce qu'il a à dire.

S'il veut le dire de son siège, au lieu de me le dire à côté, dans le corridor, comme il l'a déjà fait, moi, M. le Président, pas de problème, on ajournera le débat à ce moment-là puis on reviendra avec les amendements qu'il va nous proposer et qui concorderont avec ce qu'il aurait dit ici. Le projet de loi n° 185 serait adopté dans la tranquillité et facilement, tout de suite demain. Mais, M. le Président, je n'ai pas cette certitude. Quand on s'est déjà fait rouler une fois, bien on fait attention la deuxième fois, parce qu'il ne faut pas être naïf – ça, c'est un mot que le ministre a utilisé, à un moment donné, lundi passé.

Donc, la confiance, elle est difficile, à ce moment-ci, à être accordée de la part de l'opposition sur cette motion d'ajournement parce que nous préférerions continuer notre débat jusqu'au point où le ministre, au lieu de dire: Je vais réfléchir, comme le roi va se retirer dans sa cour pour prendre ça en réflexion, comme s'il n'avait pas déjà eu l'occasion de réfléchir à tout ça... Je suis en train de me dire qu'il a changé d'idée, qu'effectivement il a essayé de faire quelque chose qu'il n'aurait pas dû faire, mais qu'il comprend qu'il faut qu'il revienne à ce que le consensus lui dit. Là, je comprendrais, je n'aurais pas de raison de m'opposer à cette motion d'ajournement, M. le Président. Mais, dans la situation où nous sommes, nous avons, après trois interventions, un ministre qui se lève, qui dit: J'ajourne le débat. Sans explications. Quand on lui demande pourquoi, il dit: C'est pour avoir le loisir de réfléchir.

Moi, je lui suggère de réfléchir pendant que nos collègues parlent, d'écouter aussi les autres arguments que les gens vont lui apporter. Et, quand il aura fini sa réflexion, qu'il vienne ici ce soir... Parce que je ne peux pas comprendre combien de temps ça va lui prendre pour réfléchir si, oui ou non, il doit tenir la parole qu'il a donnée, si, oui ou non, il doit se conformer au consensus que tout le monde lui a mis sous les yeux, si, oui ou non, il doit agir en respect du processus parlementaire. C'est facile de réfléchir à ces choses-là. Il n'a pas besoin de prendre la soirée, à moins qu'il veuille aller demander la permission à quelqu'un, mais j'ai cru comprendre que, comme ministre, il présentait ce projet de loi et que ça lui revenait de prendre les décisions.

Dans ce sens-là, c'est avec lui que les gens se sont exprimés lundi, lors de nos audiences, et il pourra effectivement continuer, poursuivre sa réflexion en écoutant les discours, en écoutant les collègues qui veulent le ramener à la raison. Quand il aura fini sa réflexion, avant minuit ce soir, il pourra venir ici tout simplement, puis nous dire: Correct, j'ai compris, je vais faire les changements nécessaires. Je m'engage à le faire pour demain. Demain, ce projet de loi serait adopté très facilement parce que le point, c'est un point d'honneur, si vous voulez, mais aussi un point qui mérite d'être mis en relief au niveau du respect du processus démocratique qu'on doit utiliser par rapport à l'adoption des projets de loi de cette nature-là.

M. le Président, c'est un peu cavalier d'agir comme si on était des marionnettes. On disait une chose puis on faisait le contraire. On commençait à discourir sur un projet de loi qui supposément est important, et c'est important au niveau de la préparation de la liste électorale, la première liste électorale pour les premières élections des commissions scolaires linguistiques... Si c'est important, agissons de façon sérieuse, agissons de façon responsable.

Comme nous ne sommes pas très loin en ce qui concerne cette question-là et que tout ce qui nous sépare, c'est la notion de respect qu'on doit donner et à la parole et au processus, et ça, il y a juste une personne qui peut traverser le vide qui nous sépare, et c'est le ministre qui a fait un premier pas timide en disant: Je vais réfléchir. Déjà, c'est quelque chose. Déjà, il le dit ouvertement, qu'il va réfléchir. On peut supposer qu'il ne dit pas qu'il va réfléchir pour revenir pour dire qu'il a réfléchi puis qu'il ne changera rien parce que ça ne serait pas très sérieux. Alors, si on s'engage à réfléchir, c'est parce qu'on se prépare à changer quelque chose. Et, comme il s'agit d'un point qui a fait l'objet de discussions nombreuses, qui a fait l'objet de consultations lundi et que c'est le dernier point qui reste, moi, je vous suggère, M. le Président, que le ministre pourrait très bien réfléchir pendant que le débat continue et nous annoncer qu'il acceptera de mettre fin aux débats parce qu'il a décidé de traverser le vide qui nous sépare et qu'il s'engagera à faire les changements qu'il s'est engagé à faire, que le monde et les groupes lui ont demandés. Et, si c'était ça, nous serions très, très à l'aise avec sa motion d'ajournement.

Alors, je l'invite, dans le droit de réplique qu'il a, à me dire que, effectivement, il s'engage à agir ainsi, et là on pourrait tous adopter sa motion d'ajournement s'il le fait comme ça. S'il ne le fait pas comme ça, bien, il va falloir qu'on s'exprime, qu'on s'oppose à sa motion d'ajournement parce qu'on ne verrait dans cette motion qu'une stratégie, une tactique, une astuce pour gagner du temps, pour faire croire, pour faire semblant, et ce n'est pas cette façon-là qu'on devrait utiliser. Moi, je souhaite qu'on puisse retrouver la collaboration qu'on avait et j'invite le ministre à faire le pas nécessaire pour qu'on la retrouve. Et le pas, c'est d'avoir le courage de prendre la décision, lui, comme ministre responsable de ce projet de loi, de dire: Effectivement, c'est ce que j'engage à faire. S'il le fait, il aura toute notre collaboration, M. le Président, parce que ça pourrait rétablir la situation honorable que nous devons avoir entre nous.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Je m'excuse auprès de mon collègue le leader du gouvernement. Juste pour nous assurer, M. le Président, que nous sommes toujours sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Actuellement, nous discutons sur la motion, et le député de Laurier-Dorion, du côté de l'opposition, s'est prévalu du 10 minutes. Maintenant, avant votre droit de réplique, il peut y avoir quelqu'un du côté ministériel qui peut prendre la parole pour 10 minutes. Alors, je serais prêt à recevoir... Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, là. Ou bien nous sommes sur la question de règlement, et le député de Laurier-Dorion a fait valoir le point de vue de l'opposition officielle sur la question de règlement, et, à ce moment-là, vous reconnaissez le leader du gouvernement en fonction de la règle de l'alternance pour prendre votre décision... Maintenant, si nous sommes effectivement, comme vous semblez le prétendre à ce moment-ci – et je ne veux pas présumer de votre décision, M. le Président – au moment des interventions sur la question comme telle d'ajournement, c'est régi par les dispositions de l'article 101, et, à ce moment-là, le leader du gouvernement n'a qu'un temps de cinq minutes à sa disposition.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, c'est ça, exactement. Alors, là, on était rendu... Le côté ministériel s'est prévalu d'un premier 10 minutes – l'auteur – l'opposition, un autre 10 minutes. J'inviterais quelqu'un du côté ministériel pour un autre 10 minutes. S'il n'y a pas personne, alors je vous inviterais à compléter votre droit de réplique. Vous avez un droit de parole, en vertu de l'article 101, de cinq minutes. Alors, M. le ministre.


M. Jean-Pierre Jolivet (réplique)

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Ce n'est pas la première fois que nous utilisons en cette Chambre les articles qui permettent l'ajournement d'un débat. Dans la mesure où nous sommes en fin de session, nous avons des projets de loi qui doivent suivre des étapes et nous avons fait la même chose en cours d'après-midi pour ajourner le débat sur le projet de loi n° 176. Nous sommes arrivés sur le projet de loi n° 185, nous avons fait valoir jusqu'à maintenant une position de chacune des parties dans cette Assemblée, alors, à partir de ce moment-là, comme nous voulons avancer sur un projet de loi qui est le projet de loi n° 176, la motion d'ajournement que nous avons présentée a tout simplement ce but-là pour le moment, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. Alors, à ce stade-ci, est-ce que la motion qui a été déposée est acceptée?

M. Gautrin: Rejeté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, vote par appel nominal. Veuillez appeler les députés, s'il vous plaît. Nous suspendons.

(Suspension de la séance à 20 h 40)

(Reprise à 20 h 49)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous mettons maintenant aux voix la motion d'ajournement du débat concernant l'adoption du principe du projet de loi n° 185, Loi sur l'élection des premiers commissaires des commissions scolaires nouvelles et modifiant diverses dispositions législatives.

Alors, que les députés qui sont en faveur de la motion d'ajournement du débat veuillent bien se lever.

(20 h 50)

La Secrétaire adjointe: M. Jolivet (Laviolette), M. Chevrette (Joliette), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), Mme Caron (Terrebonne), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Garon (Lévis), M. Côté (La Peltrie), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Chalifoux (Bertrand), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des députés qui s'abstiennent? Alors, résultat.

Le Secrétaire adjoint: Pour:48

Contre:27

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous déclarons la motion adoptée. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Nous allons revenir...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le leader. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Les dispositions de l'article 102 du règlement prévoient que, «si la motion est adoptée – et vous venez d'annoncer que la motion est adoptée – son auteur est entendu le premier à la reprise du débat. Il peut choisir de reporter son intervention», etc. Pouvez-vous nous indiquer, à ce moment-ci, compte tenu que l'auteur de la motion est le leader du gouvernement, s'il va être reconnu? Et quel est son temps de parole?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, moi, tout ce que j'ai à vous demander, vu que nous avons ajourné ce débat, c'est de reprendre un autre débat, et le débat que nous allons reprendre – et quelqu'un d'autre de l'autre côté aura certainement le plaisir de prendre la parole – c'est l'article 18.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.


Demande de directive


Régularité de la motion d'ajournement du débat


M. Pierre Paradis

M. Paradis: J'adresserais à la présidence à ce moment-ci une question de directive qui est très simple et qui découle des dispositions de l'article 102 du règlement de l'Assemblée nationale. «Si la motion est adoptée – vous avez annoncé que la motion était adoptée – son auteur est entendu le premier à la reprise du débat.» Son auteur, en l'occurrence, c'est le leader du gouvernement. «Il peut choisir de reporter son intervention si elle n'était pas commencée au moment de l'ajournement. Dans le cas contraire, il doit la poursuivre dès la reprise...»

Des voix: ...

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Le débat qu'on vient de faire, c'est une motion d'ajournement. Nous ne reprenons pas le débat sur le 188, donc on y reviendra plus tard. Pour le moment, nous demandons la prise en considération du rapport du projet de loi n° 176, l'article 18.

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, je considère que vous avez eu une réponse de la part du leader du... Oui, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. J'ai eu une réponse de la part du leader du gouvernement, mais je ne peux la considérer comme une réponse à la question que je vous ai adressée, qui constitue, à ce moment-ci, non pas une question de règlement, mais une question de directive et d'information.

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, moi, l'interprétation que je fais, c'est que le leader du gouvernement a eu son droit de parole et que, lors de la reprise du débat, son droit de parole est expiré parce que c'est un ajournement de débat. Alors, on ne reprend pas le débat, et, de ce fait, le député de Laurier-Dorion, qui a eu un droit de parole de 60 minutes et qui l'a utilisé, ne peut pas reprendre. C'est un ajournement du débat, et, lorsque nous allons reprendre le débat, soit demain ou lors de... à ce moment-là nous allons poursuivre le débat avec les intervenants qui n'ont pas eu leur droit de parole. Leur temps de parole sera de 20 minutes. Par exemple, le député de Rivière-du-Loup a utilisé son temps de parole, il a utilisé 10 minutes sur une possibilité de 20. Alors, son allocution est complétée, et nous allons poursuivre dans l'ordre des députés qui seront en ces lieux lors de la reprise du débat. Monsieur...

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je pense que vous avez compris l'essentiel de mon intervention. Si vous nous indiquez, comme vous venez de le faire suite à la question de directive que je vous ai adressée, que le leader du gouvernement n'a plus de temps de parole parce que son temps de parole était épuisé, comment pouvons-nous considérer, dans ces circonstances, une application de l'article 102 du règlement? Et, s'il n'a plus de droit de parole, comment pouvait-il présenter une motion d'ajournement?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, si vous permettez, M. le leader, je voudrais tout simplement répondre, mais très brièvement, à savoir que l'irrecevabilité aurait dû être soulevée avant qu'on mette la motion aux voix. Alors, le vote a été pris sur la motion, et à ce stade-ci nous allons tout simplement nous fier au fait que le vote a été pris sur la motion en bonne et due forme. Je regrette de vous mentionner qu'on aurait dû soulever cette irrecevabilité-là avant qu'on puisse procéder au vote. Alors...

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce que je peux vous suggérer, là, qu'il n'y a aucun précédent à ce que vous venez d'évoquer. La présidence est la gardienne du règlement de l'Assemblée nationale du Québec, et, s'il y a violation du règlement, il est de l'obligation de la présidence de le souligner à celui ou celle qui commet une infraction au règlement de l'Assemblée nationale.

Dans le cas qui nous préoccupe, M. le Président, je vous demanderais à ce moment-ci de prendre le temps nécessaire, parce qu'il n'y a pas de jurisprudence où un président ne s'est pas levé, que la table ne l'a pas conseillé pour dire: Vous prenez la parole et vous n'avez pas le droit de prendre la parole, M. le député. C'est probablement ce qui aurait dû être fait. Nous sommes dans un processus qui a été enclenché de façon viciée et illégale.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis: M. le Président...

Des voix: Bravo!

M. Paradis: M. le Président, à ce moment-ci la décision de la présidence doit tenir compte de l'application de l'article 102. Vous avez déjà indiqué à cette Chambre que l'article 102 devient inapplicable et caduc si on applique ce qui a été fait par le leader du gouvernement.

À ce moment-ci, M. le Président, comme votre décision va faire jurisprudence, va constituer un précédent, je vous demanderais de prendre le temps nécessaire – nous nous soumettrons à votre décision – pour vous assurer que cette décision-là est fondée, qu'elle correspond à l'application du règlement, et, si la présidence – je n'accuse pas la présidence de partialité, M. le Président – a laissé passer quelque chose d'irrégulier, il appartient à la présidence de corriger l'irrégularité et non pas de la blâmer sur le dos de l'opposition.

Des voix: Bravo!

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement, je vous écoute.

M. Jolivet: Oui, une motion...

(21 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi. Est-ce que je pourrais, là... Messieurs dames, là! Je pense qu'on a un problème majeur qui est soulevé par l'opposition, alors j'aimerais entendre le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, s'il vous plaît...

Le Vice-Président (M. Pinard): Je veux l'écouter.

M. Jolivet: S'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je voudrais l'écouter.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, le leader de l'opposition fait une très belle tentative pour perdre du temps à ce moment-ci.

La motion d'ajournement, en vertu de l'article 100, c'est: «L'ajournement du débat peut être proposé à tout moment de la séance. Il ne peut l'être qu'une seule fois, sauf par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement. Une telle motion ne requiert pas de préavis et ne peut être amendée.» Et là on a les temps de parole.

Pourquoi avons-nous, M. le Président, l'article 102, la question de reprise du débat? Il arrive souvent qu'un député, pendant son intervention, décide, à la demande de son leader, de proposer une motion d'ajournement du débat pour la faire voter. Et, si elle est votée, adoptée en conséquence – parce que c'est lui qui l'a présentée puis elle est adoptée selon la demande présentée – il a le droit de reprendre là où il était rendu, à moins qu'il décide de laisser tomber, de laisser les autres commencer leur intervention.

À ce moment-ci, le débat étant voté comme étant ajourné, nous passons dans l'ordre du jour, à la demande du leader, comme ça a toujours été, à une autre étape du feuilleton. Et ce n'est pas difficile à prendre comme décision. Vous n'avez pas besoin d'ajourner ou de suspendre le débat pour aller voir. Actuellement, nous avons une motion qui a été dûment adoptée. Cette motion, elle est prise en vertu du droit du leader d'ajourner le débat au moment où il le juge opportun, comme ça a toujours été fait. Et, dans ce contexte-là, nous allons reprendre un débat qui, lui, a été ajourné avant le souper et qui est l'article 18, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 3)

(Reprise à 22 h 6)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Décision du président

Je vais maintenant rendre ma décision concernant la question de directive soulevée par le leader de l'opposition officielle eu égard à la régularité de la motion et, par conséquent, du vote sur la motion d'ajournement du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 185 présentée par le leader du gouvernement.

Selon le leader de l'opposition officielle, le leader du gouvernement ne pouvait présenter cette motion d'ajournement, puisqu'il avait déjà exercé son droit de parole dans le cadre du débat sur l'adoption du principe. La motion d'ajournement du débat est prévue à l'article 100 du règlement, qui se lit comme suit, et je cite: «L'ajournement du débat peut être proposé à tout moment de la séance. Il ne peut l'être qu'une seule fois, sauf par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement. Une telle motion ne requiert pas de préavis et ne peut être amendée.» Fin de la citation.

Selon une décision rendue par le vice-président Saintonge, le 18 décembre 1987, un député qui a déjà exercé son temps de parole dans le cadre d'un débat ne peut présenter une motion en vue d'ajourner ce débat. Ainsi, le leader de l'opposition officielle a raison lorsqu'il prétend que...

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Je disais donc: Le leader de l'opposition officielle a raison lorsqu'il prétend que le leader du gouvernement ne pouvait pas présenter la motion d'ajournement du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 185.

Par ailleurs, compte tenu que le vote a eu lieu, peut-on encore soulever l'irrégularité de la motion d'ajournement du débat? Selon une décision rendue le 23 avril 1991 par le président Saintonge, confirmée par le vice-président Lefebvre en 1992 et moi-même en 1996, on peut soulever des objections quant à la recevabilité ou la régularité d'une motion en tout temps avant qu'elle ne soit mise aux voix. En conséquence, il n'est plus possible à ce stade-ci de soulever la question de la recevabilité de la motion d'ajournement du débat présentée par le leader du gouvernement. Cela est justifié par le fait que, en vertu de l'article 186 de notre règlement, toute motion adoptée devient soit un ordre soit une résolution de l'Assemblée et que la révocation d'un ordre ou d'une résolution peut se faire uniquement sur motion sans préavis d'un ministre. Article 186, deuxième alinéa.

Je donne raison au leader de l'opposition officielle lorsqu'il mentionne que la présidence a le devoir de soulever une violation de règlement. De fait, l'article 38 du règlement prévoit que le président doit immédiatement signaler toute violation du règlement dont il a connaissance. Toutefois, les membres de l'Assemblée admettront sûrement avec moi que la présidence n'est pas infaillible.

Au surplus, sans vouloir minimiser le rôle de la présidence, je vous rappelle que l'irrégularité de la motion d'ajournement du leader du gouvernement ne découle pas de l'application du règlement, mais plutôt d'une interprétation qui a été donnée en 1987 par le vice-président Saintonge. Enfin, je signale également – et je ne lui en tiens pas rigueur – que le leader de l'opposition officielle, comme tout autre député, aurait pu signaler l'irrecevabilité de la motion d'ajournement du débat présentée par le leader du gouvernement avant sa mise aux voix.

En conséquence, compte tenu que le vote a été tenu sur la motion, il est maintenant impossible de revenir sur cette question. Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Tout en nous soumettant à votre décision, M. le Président, les prescriptions du règlement sont très claires à cet effet, nous ne pouvons ni la contester ni la discuter.

Une voix: Ni la commenter.

M. Paradis: Ni la commenter. Non, non, ni la commenter, M. le Président, je n'ai pas d'objection.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vous prierais de continuer, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Comment allez-vous appliquer l'article 102 du règlement?

(22 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): L'article 102 est fort simple, en ce qui me concerne. Je vous ai déjà mentionné, avant la prise en considération de la question, que le leader du gouvernement n'aura pas le droit de parole lors de la reprise du débat qui sera appelée par le gouvernement. Alors, son temps de parole est complété et terminé.

M. Paradis: M. le Président, vous avez raison, j'avais le transcript de vos commentaires à cet effet, et vous avez effectivement indiqué, avant la suspension des débats, que son droit de parole est expiré. Maintenant, les dispositions de l'article 102 sont très claires: «Si la motion est adoptée – et si on suit la décision et on s'y conforme, que vous avez rendue – son auteur est entendu le premier à la reprise du débat.» Comment allez-vous pouvoir l'entendre s'il n'a plus de temps de parole?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je tiens à vous mentionner que je considère son intervention comme terminée. Alors, c'est terminé, en ce qui me concerne. On ne pourra plus réentendre le leader du gouvernement, son allocution a été prononcée, et ceci met fin, à mon sens, au débat que nous devons avoir ce soir sur cette motion.

M. Paradis: Je m'excuse, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Vous n'avez pas rendu de décision sur 102 comme tel. Je respecte votre décision et la deuxième que vous avez rendue, que vous ne pourrez plus l'entendre au moment où le débat sera rappelé. Sauf que les dispositions de l'article 102 sont impératives: «Si la motion est adoptée – et vous l'avez jugée comme étant adoptée – son auteur est entendu le premier à la reprise du débat.» Et, s'il n'a plus de droit de parole, comment allez-vous pouvoir l'entendre le premier?

Le Vice-Président (M. Pinard): Voyez-vous, c'est qu'il faut également considérer que l'article 102... Lorsqu'on fait une motion d'ajournement, on peut se réserver un droit de parole lors de la reprise du débat. Et, dans le cas présent... Le parlementaire qui fait la motion d'ajournement peut également terminer son intervention, son allocution par une motion d'ajournement de débat. Et, dans le cas qui nous occupe, dans les circonstances, considérant ce que je vous ai mentionné tout à l'heure, à ce stade-ci, dans les galées, il sera mention que le leader du gouvernement a expiré son temps de parole et n'a plus le droit de reprendre un débat de quelque nature que ce soit, en vertu de l'article 102 et en vertu du fait qu'il a expiré son temps de parole.

Alors, je pense que, pour moi, comme... Je pense que c'est très clair, la directive est très claire: c'est que le temps de parole du leader a été utilisé et qu'il n'a plus le droit de prendre la parole sur ce projet de loi. Je pense que c'est très clair.

M. Paradis: M. le Président, je vous demanderais de la prendre en délibéré à ce moment-ci pour que nous puissions continuer nos débats sans retarder les débats de l'Assemblée nationale. Mais les dispositions de l'article 102 demeurent impératives. À partir du moment où vous avez déclaré qu'il n'a plus le droit de parole parce que son temps de parole est expiré, comment allez-vous garantir à cette Assemblée qu'un règlement que nous avons adopté conjointement, tout le monde, unanimement, à l'Assemblée nationale, puisse être respecté? Si la motion est adoptée, son auteur est entendu le premier. S'il n'a pas le droit d'être entendu, comment va-t-il être entendu le premier?

M. le Président, je vous demanderais à ce moment-ci de ne pas suspendre les débats, de la prendre en délibéré et de revenir demain, dès après les affaires courantes, rendre la décision qui s'impose. S'il n'a plus de temps de parole, comment il va pouvoir être entendu?

M. Jolivet: M. le Président, tout simplement pour vous aider.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Quand on dit qu'il est entendu le premier... S'il n'a plus de droit de parole, il aura été entendu, et, en conséquence, c'est l'autre qui suivra, d'un autre parti politique ou de mon parti politique, qui prendra la parole, M. le Président. C'est pour lui préserver son droit de parole à lui, et, s'il n'en a plus, il n'en a plus.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, moi, j'ai... C'est fort simple, en ce qui me concerne, et je pense que la décision est très claire. Moi, en ce qui me concerne, le temps de parole du leader du gouvernement est terminé et il n'a plus le droit de reprendre du tout. Et j'utilise à ce moment-là le fait que l'article 102... C'est que, s'il lui reste un temps de parole, il peut commencer son allocution dans un autre débat. Mais, dans le cas qui nous occupe, c'est que le temps de parole du leader du gouvernement a été pris, et, à ce moment-là, lui redonner la parole lors de la reprise du débat voudrait dire, M. le leader de l'opposition, que M. le leader du gouvernement aurait le droit deux fois de se faire entendre en cette Chambre.

Alors, je pense qu'on va clore le sujet sur ça, à ce stade-ci. Alors, la décision est rendue. Nous avions de la jurisprudence qui nous appuie dans cette façon de voir les choses. Les deux jurisprudences que j'ai soulevées ont été du même excellent président, le président Saintonge, également supporté par le vice-président Roger Lefebvre. Je m'en suis inspiré pour rétablir le bon fonctionnement de nos travaux. Alors, maintenant...

M. Paradis: Tout en respectant votre décision qui est fondée sur la jurisprudence de l'Assemblée nationale du Québec, je ne veux pas ni la commenter ni la discuter. À ce moment-ci, on considère qu'elle peut être appliquée. Mais, au moment... Nous demandons à la présidence et nous donnons un préavis à la présidence. Nous ne demandons pas à la présidence de suspendre les débats pour donner sa réponse immédiatement. Nous demandons simplement à la présidence, lorsque le débat sera rappelé sur cette motion, en vertu de l'article 102, et la décision peut être rendue à ce moment-là par la présidence, pas question de retarder les travaux... «Si la motion est adoptée – c'est notre cas, votre décision la confirme – son auteur est entendu le premier lors de la reprise du débat.» Comment, par décision présidentielle, pouvez-vous effacer les dispositions de cet article, de cet alinéa du règlement? C'est tout, M. le Président. Je ne demande pas de réponse immédiatement. Que la présidence nous réponde en temps et lieu, de façon à ce que l'Assemblée nationale puisse bénéficier de ses sages éclairages.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Il me semblait, M. le Président, que votre décision était rendue. Il me semble que le député essaie de contourner de façon indirecte votre décision. Elle est rendue, passons à l'item suivant, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci, nous avons étudié d'une façon très approfondie le problème qui nous a été soulevé. Je maintiens à ce stade-ci que la décision que nous avons prise semble être la meilleure décision dans les circonstances et je continue également à maintenir, jusqu'à ce que mon opinion soit renversée, que le leader du gouvernement a utilisé son droit de parole et n'a plus de droit de parole. Ça, c'est très clair au niveau de notre règlement, en ce qui me concerne.

Donc, M. le leader, je pense que la question que vous me posez, j'y réponds directement sur le banc en vous disant qu'il a exercé son droit de parole. Donc, à ce stade-ci, s'il y avait reprise du débat demain matin ou s'il y avait reprise du débat au mois de mars lors de la reprise de nos travaux, à ce moment-là jamais le leader du gouvernement ne pourra s'inscrire et nous donner une allocution, conformément à notre règlement, sur le projet de loi qui est actuellement devant nous.

M. Paradis: M. le Président, vous venez d'ajouter, là, à la décision que vous aviez rendue. Nous nous sommes rangés à la décision que vous aviez rendue parce qu'elle est appuyée sur la jurisprudence et que l'article 41 du règlement nous interdit d'en discuter. Là, ce que vous nous dites – et vous ajoutez à cette décision-là, et si c'est le cas, M. le Président, moi, je veux juste que ça fasse jurisprudence, que ça soit inscrit dans nos recueils des décisions – c'est qu'à partir du moment où quelqu'un a proposé une motion d'ajournement, s'il ne lui reste plus de droit de parole – excusez, là – l'article 102 de notre règlement ne s'applique plus. Ça, là, ça ne faisait pas partie de votre première décision, M. le Président. Si ça fait partie de votre deuxième décision, ça va. Je veux juste en prendre note.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, c'est qu'on peut discuter de droit avec ça, puis vous le savez très bien. Parce que l'article 100 s'interprète également avec l'article 102. Et l'article 100 est un article très général. Et l'article 100 doit s'interpréter avec l'article 102 parce que l'article 102 est très restrictif.

Une voix: ...

(22 h 20)

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, oui, oui, exactement. Donc, on ne peut pas travailler seulement avec l'article 100. On se doit de travailler l'article 100 avec l'article 102. Et, à partir de ce moment-là, vous conviendrez qu'on ne peut absolument pas, d'aucune espèce de façon, redonner un droit de parole à un député qui a déjà utilisé son droit de parole, qui a terminé et qui a proposé une motion d'ajournement. Alors, voilà. Et, là-dessus, je conviens avec vous – puis je l'ai mentionné dans mon jugement – que le président, conformément à l'article 38, aurait dû – d'accord? aurait dû – se lever et immédiatement soulever le fait que le leader du gouvernement ne pouvait pas à ce stade-là faire une intervention sur une motion d'ajournement de débat. Je ne l'ai pas fait, je ne l'ai pas vu, puis je suis très honnête avec vous en vous disant que c'est une interprétation de jurisprudence que je connaissais moins.

Toutefois, lorsqu'on a regardé la jurisprudence, il y a une jurisprudence à cet effet qui est très claire, qui dit que quelqu'un qui a déjà pris la parole ne peut reprendre la parole pour une motion d'ajournement. Mais il y a également l'autre jurisprudence que j'ai retenue qui nous permet, si vous voulez bien, de se sortir du problème qui a été soulevé par cet imbroglio.

Alors, moi, en ce qui me concerne, je pense qu'à ce stade-ci on devrait... Ça ne sert à rien d'aller plus loin, on va rediscuter de droit... On peut discuter de droit jusqu'à minuit, mais ça va toujours être 100 versus 102.

M. Paradis: M. le Président, je ne veux pas...

M. Jolivet: M. le Président...

M. Paradis: Ça va.

M. Jolivet: M. le Président, à ce moment-ci, un député pourrait... Et là je vais vous aider peut-être à dire que votre décision est correcte, parce que là ce que je comprends, c'est que le député essaie, par l'intermédiaire de l'article 102, de remettre en discussion la décision qui est rendue. Un député, à la fin de son intervention, pourrait proposer une motion d'ajournement. N'ayant plus de temps, lorsque arrive l'article 102... S'il avait du temps, on lui donnerait la priorité, mais, comme il n'en a plus, de temps, on passe à un autre. Et l'article 102, ce qu'il donne à l'individu, c'est de protéger son droit de parole. Le mien ayant été épuisé, M. le Président, on ne peut pas, en aucune circonstance, en arriver à d'autres conclusions.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Si vous permettez, à ce stade-ci, on va passer à autre chose parce que là, de part et d'autre, vous pouvez commenter, vous pouvez fort bien commenter, on peut passer l'heure et demie qui nous reste avant la fin de nos débats à commenter la décision qui a été rendue. Et, à ce stade-ci, je pense que la décision a été prise après mûre réflexion, après étude approfondie de la jurisprudence, et je pense qu'on rend une décision en tous points conforme à l'évolution de nos travaux parlementaires.

M. Paradis: M. le Président, vous avez rendu deux décisions: une première que vous avez rendue de votre siège, après une délibération, nous n'avons pas le droit de la contester ni de la discuter; je veux juste m'assurer que vous avez rendu une deuxième décision, également du siège que vous occupez, mais sans délibérer, et je n'ai pas le droit non plus, si vous l'avez rendue – je veux juste m'assurer qu'elle est rendue – de la...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vous le confirme. Je vous le confirme, qu'elle est rendue.

M. Paradis: Non, mais je veux qu'on s'entende sur ce que vous confirmez, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Ah! elle est rendue, ma décision, elle est sans appel non plus et elle est enregistrée au niveau de nos écritures, comme on le dit si bien, dans notre Journal des débats . Et soyez-en sûr, que le leader du gouvernement et ministre délégué à la Réforme n'aura absolument aucun droit de parole. Bon.

M. Paradis: M. le Président, ce n'est pas là-dessus. Je m'excuse, M. le Président, ce n'est pas là-dessus. Moi, je veux juste m'assurer que votre deuxième décision que vous avez rendue confirme que l'article 102 ne s'applique plus lorsqu'une décision du type que vous avez rendue, premièrement, sur le banc... que l'article 102 est annulé et ne s'applique plus et que ça va faire jurisprudence à l'Assemblée nationale du Québec, quand ça va servir à l'opposition ou servir aux ministériels, M. le Président. Et, si c'est le cas, je n'ai pas de difficultés avec ça.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, écoutez, je pense qu'on essaie, là...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, effectivement. Mais, dans le cas qui nous occupe, vous conviendrez avec moi que vous aviez tout à fait raison lorsque vous avez mentionné que le leader du gouvernement n'avait pas le droit de présenter cette motion d'ajournement du débat. Alors, ça, c'est réglé, je vous donne tout à fait raison là-dessus. Maintenant, on a une jurisprudence... Parce que tout ça, c'est de la jurisprudence, on se base sur l'interprétation de la jurisprudence. Nous avons également une autre jurisprudence qui dit qu'il faut...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, c'est ça. Alors, une fois... Ça devient un ordre. Donc, à partir de ce moment-là...

M. Chevrette: M. le Président, question de privilège et de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...à partir de ce moment-là...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre, permettez que je termine. Alors, M. le leader de l'opposition, donc, à partir de ce moment-là, c'est réglé.

L'autre point que vous me soulevez, c'est: Est-ce que le leader du gouvernement aura droit de parole? Je vous ai confirmé, j'ai mentionné, et c'est enregistré, que le leader du gouvernement n'aura pas le droit de reparler sur ce projet de loi. C'est réglé. C'est terminé. À partir de ce moment-ci, M. le leader du gouvernement, on continue.

M. Jolivet: M. le Président, je vous demande...

Une voix: ...voyons!

M. Jolivet: S'il vous plaît!

Une voix: Depuis quand un président dialogue avec quelqu'un?

M. Jolivet: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 18.


Projet de loi n° 176


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Si vous vérifiez votre feuilleton, à l'article 18, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Y a-t-il des interventions sur le rapport de la commission des affaires sociales? M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, tout d'abord...

Des voix: Bravo!

M. Chagnon: M. le Président, ne pensez-vous pas qu'on devrait attendre l'arrivée du ministre de la Santé pour continuer?

Des voix: Oui, oui.

M. Jolivet: M. le Président...

M. Chagnon: Mais, M. le Président, c'est une question sérieuse. Ça devrait l'intéresser.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Westmount–Saint-Louis, vous savez fort bien que, lorsqu'un projet ou lorsque le feuilleton est appelé, qu'un article du feuilleton est appelé, c'est le côté ministériel qui régit nos travaux. Alors, si vous avez une intervention à faire, je vous inviterais à débuter.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Oui. Alors, M. le Président, j'aurais aimé pouvoir le faire en présence du ministre, mais, puisque ce n'est pas le cas... Il faut dire que nos travaux sont un peu en zigzag, ce soir. On part avec 185, ensuite on s'en va à 176. En fait, il faut être prêt pour tout, semble-t-il.

Alors, M. le Président, le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux... Au fait, M. le Président, sauvez-vous pas tout de suite. M. le Président, combien de temps ai-je?

Une voix: ...

M. Chagnon: C'est parfait. Alors, M. le Président, la Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie, semble-t-il, pourrait nous apparaître comme étant une loi...

Une voix: ...

M. Chagnon: Dix minutes. Vous voyez, je viens d'en perdre 10 d'un coup. Alors, M. le Président, ça va aller plus vite, puisqu'il y a seulement trois articles dans ce projet de loi là, mais les trois articles sont assez curieux.

Le premier article est un article qui permet au ministre, par entente, de déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par la loi constituante du ministère de la Santé ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.

M. le Président, au moment où on se parle, il y a, entre autres... Et j'entendais le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, d'une façon et d'un ton tout à fait jovialistes, nous dire que tout le monde était heureux dans son comté. Tout le monde, ça allait bien. Tout le monde est heureux. Sauf qu'il ne sait pas que, dans son comté, il y a l'hôpital Notre-Dame, puis l'hôpital Notre-Dame est en grève sauvage depuis hier soir, une grève illégale, sauvage et pour laquelle le ministre de la Santé a pris presque 18 heures avant de la régler. Pendant ce temps-là, des patients de son comté étaient sans...

Une voix: Sont morts.

(22 h 30)

M. Chagnon: On me dit qu'il y en a qui sont morts, semble-t-il. Les gens du gouvernement semblent ou prétendent qu'il y en a qui sont morts. Moi, je n'irais pas jusqu'à dire ça. Je ne peux pas vous nommer de noms de gens qui sont morts. Mais une chose est certaine, il y a des gens qui ont souffert aujourd'hui. Mme la députée de Matapédia prétend qu'il y a des gens qui sont morts. Mais je ne le sais pas. Une chose certaine, c'est dommage que, dans le comté de Sainte-Marie–Saint-Jacques, on ait eu un incident aussi important, aujourd'hui, sans que le député en soit mis au courant.

Il y a aujourd'hui, M. le Président, dans tous nos bureaux de comté, des femmes qui nous appellent puis qui sont vraiment inquiètes. Elles sont vraiment inquiètes parce qu'elles vont accoucher au début de février. Or, les obstétriciens-gynécologues menacent, eux, de tomber en grève au début de février. Et le ministre veut déléguer ses pouvoirs à des organismes, à des sociétés, à je ne sais pas qui, peut-être aux régies régionales. Mais, pendant ce temps-là, qui va régler les problèmes? Le ministre va déléguer quoi à qui? On ne le saura jamais.

Pendant ce temps-là, on est en train, ici, à Québec, par exemple, de vouloir faire en sorte de prendre un endroit où des jeunes enfants psychiatrisés devront vivre dorénavant, semble-t-il, avec des adultes toxicomanes. Et le ministre ne réagit pas. Et le ministre veut déléguer ses pouvoirs. Et le ministre veut être ministre de quoi dans le fond? Il ne sera plus ministre de rien, une fois qu'il aura délégué ses pouvoirs à on ne sait qui, pour on ne sait quelle raison. Alors que, pendant ce temps-là, dans nos hôpitaux, le ministre prétend qu'on a plus d'infirmières qu'on n'en a jamais eu. Il disait ça, ce matin. Il disait ça, tout à l'heure, à des infirmières

Le ministre a refusé de répondre à une question, tout à l'heure. Ce n'était pas compliqué, la question que j'allais lui poser. Il nous a parlé d'ETC, d'employés à temps complet dans le réseau des CLSC, des centres de jour puis des centres d'accueil. Mais, quand on a rencontré les infirmières, M. le Président, pas plus tard que la semaine dernière, la Fédération des infirmières et l'Ordre des infirmières, ensemble, ils ne peuvent pas se tromper, ils nous ont dit qu'ils ont 8 500 000 d'heures de moins d'infirmières en 1997 qu'en 1996; 8 500 000, c'est à peu près l'équivalent de 4 000 ETC de moins, à peu près. À 2 000 heures par infirmière, par année, ça fait à peu près ça, l'équivalent de 4 000 infirmières en moins.

Le ministre, je ne sais pas où il prend ses chiffres, mais ils ne peuvent pas, tout le monde, avoir raison. Les infirmières qui connaissent leur métier puis qui sont dans le milieu des hôpitaux depuis plus longtemps que le ministre est ministre, c'est bien évident qu'elles connaissent le métier puis qu'elles savent ce qui se passe. Et elles le savent tellement bien qu'elles prétendent, non sans raison, et le député de D'Arcy-McGee l'a bien fait valoir tout à l'heure, et les infirmières nous l'ont dit et répété: 8 500 000 d'heures en moins en 1997 par rapport à ce qui s'est fait en 1996. Que le ministre ne vienne pas nous dire qu'il y a plus d'infirmières dans les CLSC, puis qu'il y en a plus à gauche puis plus à droite. Il y a 8 500 000 d'heures de moins de services infirmiers de donnés à la population.

Alors, M. le Président, pendant ce temps-là, on est à étudier un projet de loi dans lequel le ministre veut déléguer ses responsabilités à Pierre, Jean, Jacques, sans savoir exactement à qui il veut les déléguer. Puis ses responsabilités, ce n'est pas rien, M. le Président. La première responsabilité d'un ministre de la Santé, la première responsabilité, la fonction du ministre, l'article 2 de sa loi constitutive: Le ministre doit «élaborer et proposer au gouvernement des politiques relatives à la santé et aux services sociaux».

Ses fonctions et ses devoirs: «Le ministre doit plus particulièrement assurer la protection sociale des individus, des familles et des autres groupes.» Quand et comment pensez-vous, M. le Président, qu'on puisse penser qu'un ministre de la Santé un peu raisonnable pourrait pouvoir vouloir déléguer cette fonction qui est absolument caractéristique et fondamentale du ministre de la Santé? Et le ministre de la Santé qui veut... qui pourrait, à la rigueur, cesser ou déléguer le fait de «prendre les mesures requises pour assurer la protection de la santé publique», à quoi ça nous sert d'avoir un ministre si c'est pour déléguer une responsabilité comme celle-là? À quoi ça nous sert de penser qu'on pourrait avoir un personnage, qui se veut un personnage public, qui ne serait plus imputable devant l'Assemblée nationale de ses faits et gestes les plus importants: «assurer la protection sociale des individus et des familles, prendre les mesures requises pour assurer la protection de la santé publique»? C'est quoi, les fonctions que le ministre veut déléguer? Encore une fois, à qui veut-il les déléguer?

Le ministre doit «voir à l'amélioration de l'état de santé des individus et du niveau de santé de la population». Pourquoi déléguerait-il cette responsabilité et son devoir? M. le Président, le ministre va dépenser 5 000 000 $ pour se faire une campagne de publicité personnelle. Au lieu de faire des projets de loi qui chercheraient à déléguer ses responsabilités à Pierre, Jean, Jacques, il serait bien mieux de prendre l'argent qu'il va mettre à essayer de se faire refaire une beauté publique... il pourrait prendre cet argent-là puis au moins l'investir dans notre réseau de santé qui est en décrépitude, dans un marasme depuis trois ans. Le Protecteur du citoyen lui-même prétend que nos services de santé se sont détériorés de façon extrêmement dangereuse, extrêmement dangereuse. Et, pendant ce temps-là, le ministre cherche à déléguer ses pouvoirs à des tiers qu'on ne connaît pas. C'est une situation, M. le Président, qui est tout à fait incroyable. Au moment où le ministre, il n'y a pas à peine un an, un an et demi, il cherchait à récupérer des pouvoirs pour pouvoir fermer des hôpitaux... Une fois qu'il a fermé des hôpitaux, il veut retourner les pouvoirs qu'il a acquis par législation. Il veut les retourner à qui, ces pouvoirs-là? Aux régies régionales? Aux CLSC? À qui? Rien, dans ce projet de loi là, ne nous indique ce que le ministre veut faire.

Dans les notes explicatives, on nous dit ceci: «Ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux afin que le ministre puisse, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.

«Le projet de loi modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec afin de permettre à la Régie d'exercer toute fonction qui lui est déléguée aux termes d'une entente conclue avec un ministre.»

Rien de plus nébuleux que ces notes explicatives, M. le Président. Et, quand on pense que le ministre peut déléguer des responsabilités qui sont absolument incontournables pour un ministre de la Santé et qui sont inscrites dans sa loi constitutive, on ne peut pas faire autrement que de s'étonner du manque de responsabilité que le ministre et que le gouvernement endossent dans ce dossier.

Le ministre doit, entre autres, parmi ses devoirs, «participer à l'élaboration et à la mise en oeuvre des programmes d'assainissement du milieu physique dans lequel vit la population et à laquelle ces programmes seront destinés». Pourquoi le ministre chercherait-il à se sauver de cette responsabilité? Pourquoi le ministre chercherait-il à déléguer cette responsabilité à un tiers? Il n'y a pas de raison. Adopter un projet de loi permettant autant d'ouvertures, créant autant de possibilités, c'est à peu près comme de décider qu'aujourd'hui le ministère de la Santé risque d'être un zèbre avec une tête de chameau puis une queue d'écureuil avec un corps de cheval. Et ça, M. le Président, c'est absolument inacceptable non seulement pour l'opposition, mais pour la population, la population qui est fatiguée, qui est inquiète de voir ce qui se passe dans le domaine de la santé depuis des mois, des années. Des gens qui sortent de l'hôpital avec des bouteilles de soluté puis qui s'en vont chez eux. Des gens qui attendent qu'on vienne leur enlever des points de suture. Des gens qui devraient avoir normalement droit à des services de santé de qualité supérieure à ceux qu'ils ont de ce temps-ci. Des gens qui avaient des services de santé avant que le ministre décide de passer le couteau là-dedans. Des gens qui craignent les réalités de ce virage ambulatoire qui a été carrément un dérapage sur toute la ligne.

M. le Président, ce projet de loi est pour nous inacceptable, parce qu'il fait en sorte de permettre au ministre de cesser d'exister par lui-même en déléguant toutes ses fonctions à on ne sait qui. M. le Président, nous allons voter contre ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Le prochain intervenant, le député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, Merci, M. le Président. Le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qui est présent parmi nous, j'ai eu le grand plaisir, le grand honneur de l'entendre avant le souper nous expliquer comme ça allait bien au Québec, comme il n'y en avait pas de problèmes de santé, comment, dans les clubs de l'âge d'or, il était accueilli à bras ouverts, les gens l'embrassaient pour lui dire comme ça allait bien. Écoutez, M. le Président, je suis heureux que chez lui ça aille si bien que ça.

(22 h 40)

Il a juste oublié une affaire, c'est que, dans ce comté, il y a un hôpital, en ce moment, qui est en grève, qui est en grève illégale. Et on saura demain matin à 9 heures ce qui va se passer avec cette grève-là. Alors, au même moment où il nous dit que ça va très bien dans son comté, probablement le plus important hôpital du Québec – excusez si je ne suis pas... il y a peut-être d'autres hôpitaux qui sont plus importants mais, en fait, c'est un des plus importants hôpitaux au Québec – est en grève. Les autobus ont été redirigés vers d'autres centres hospitaliers, etc. Et le bon député de Sainte-Marie–Saint-Jacques nous expliquait, à gorge déployée, comme les choses allaient bien dans son comté. Alors, vous comprendrez que je prends avec un peu de doute le reste de cette présentation qu'il nous a faite avant le souper.

M. le Président, dans ce projet de loi là, le ministre veut soudainement déléguer, alors qu'il y a quelques jours nous faisions un projet de loi exactement contraire, et c'est un peu compliqué à suivre, tout comme les discours du ministre, tout comme les nuances du discours du ministre.

Je vous donne un exemple M. le Président. Si vous demandez aujourd'hui à la régie régionale de Sherbrooke s'ils vont couper des lits, à Magog, ils vont vous répondre que non. Si vous appelez le directeur général de l'hôpital et vous lui demandez s'ils vont couper des lits, à l'hôpital de Magog, il va vous répondre que non. Si vous allez à l'hôpital de Magog et que vous comptez les lits, la semaine dernière et cette semaine, vous allez vous apercevoir qu'il en manque cinq. Oups! Qu'est-ce qui s'est passé? Alors, vous rappelez la régie régionale et vous dites: Écoutez, je suis allé les compter, il en manque cinq. Et on va vous répondre: Mon cher monsieur, on n'a pas coupé des lits, on a coupé des civières. Ah! Ce n'était pas pareil, c'était des civières! Excusez! je ne suis peut-être pas assez instruit pour comprendre toutes ces nuances que nous amène le ministre de la Santé. Comme si, une civière, il y avait une grosse différence. Mais je vous dirais que, les gens, quand je suis allé à l'hôpital, ils ne savaient pas, eux, qu'ils étaient sur une civière. Ce qu'ils savaient, c'est qu'ils étaient couchés sur quelque chose qui avait l'air d'un lit. Mais là, quand on parle à des technocrates, soudainement il y a des catégories, il y a des sortes... et là on apprend qu'on n'a pas fermé des lits à Magog, on a fermé des civières, M. le Président. Mais le net net, c'est que ce soir, à l'hôpital de Magog, il y a moins de services qu'il y en avait il y a une semaine quand on a posé la question.

Il y a un citoyen qui entendait le débat. Je lui ai demandé si je pouvais le nommer. Il a dit: Oui, j'aimerais ça que le ministre sache que je l'écoute à la télévision. Il m'a appelé au moment où on m'appelait pour venir parler ici, mais, encore une fois, on a arrêté les travaux. L'homme en question, c'est M. Claude Leblanc, de Rock Forest. Il m'a dit: Écoutez donc, M. Benoit, vous me dites que vous allez aller parler là-dessus, posez donc une question au ministre si vous l'avez devant vous. Demandez-lui donc pourquoi, à Sherbrooke, il y avait un hôpital du côté ouest de la rivière – et c'est là qu'est le grand développement de la population, Rock Forest, Douville, Saint-Élie; c'est là que la population se développe, M. le Président – pourquoi ont-ils fermé l'hôpital, le seul hôpital qu'il y avait du côté ouest de la rivière, et que, là, toute cette population, Magog, les villes frontalières, devra maintenant traverser toute la ville de Sherbrooke pour se rendre de l'autre bord de la rivière, et là tous les hôpitaux sont de l'autre bord de la rivière? Ce bon M. Claude Leblanc, de Rock Forest, qui probablement nous écoute en ce moment, eh bien, lui, il pose la bonne question. Il pose la bonne question, parce que l'hôpital qu'on a fermé, c'était un très bon hôpital, M. le Président, et jamais, jamais je n'ai entendu une plainte sur le Sherbrooke Hospital, jamais je n'ai entendu quelqu'un nous dire: On n'allait pas là.

Mais, pire que ça, M. le Président, on a dit à la communauté anglophone – et ça, je vous promets que le PQ ne l'emportera pas en paradis à la prochaine élection – on a dit à la communauté anglophone, haut et fort, partout, sur toutes les tribunes: Ne vous inquiétez pas! Ne vous inquiétez pas, vous aurez tous les services dans les deux langues; il n'y en aura pas, de problèmes; la signalisation sera évidente. Eh bien oui! Eh bien oui, au petit hôpital de Magog, ils ont voulu mettre une petite pancarte disant: «Urgence, Emergency». Eh bien, M. le Président, on a eu la plainte d'un citoyen, probablement membre en règle du Parti québécois...

Une voix: Certainement.

M. Benoit: Certainement membre en règle du Parti québécois. Il y avait 60 000 citoyens, d'autre part, qui étaient d'accord avec cette mesure-là, d'une petite pancarte, surtout pendant les périodes de construction à l'hôpital où personne ne se retrouve. Eh bien, ni le ministre, ni le Conseil des ministres, ni le premier ministre n'a dit: Vous avez raison, nous allons laisser ces petites pancartes pour aider les citoyens à se retrouver. Dieu sait comment les médecins nous ont rappelé l'importance, dans les premières minutes d'une urgence, que nous trouvions notre chemin dans un hôpital.

M. le Président, je vais terminer en lisant une lettre dont j'ai l'original. Si vous me le permettez, je déposerai copie au ministre ici ce soir. J'ai parlé à la femme de ce monsieur il n'y a pas plus tard que deux heures.

«Cher député, Coaticook, 11 décembre 1997.» Vous me permettrez de ne pas donner son nom; c'est un monsieur âgé, malade; pas plus que le nom du médecin. Mais le ministre aura le nom du médecin et le nom de l'individu, ainsi que son numéro de téléphone.

«Cher député – cette lettre a été signée le 11 décembre – je m'adresse à vous aujourd'hui afin de m'aider à résoudre mon problème. J'ai besoin d'une opération pour une prothèse à la hanche. Je suis bien souffrant. Le médicament me cause des maux d'estomac et j'ai de la misère à marcher avec l'aide d'une canne. En septembre, ma dernière radiographie démontrait que mon cas était urgent. Alors, le docteur – et permettez-moi de passer le nom – a fait mon admission à l'Hôtel-Dieu de Sherbrooke. On me dit que ça va prendre un an avant qu'on m'opère. Mon cher M. Benoit, j'ai espoir que vous pourrez devancer ces longs mois d'attente. Espérant avoir de vos nouvelles sous peu, j'inclus le numéro de téléphone du docteur en question. Moi, j'appelle sa secrétaire et ça ne change rien.» Le docteur, numéro de téléphone. «Sincèrement vôtre», le nom de l'individu qui demeure à Baldwin qui est juste à côté de Coaticook, M. le Président.

Je vais déposer auprès du ministre cette lettre, s'il me le permet, et j'interviens auprès du ministre. C'est les cas qu'on a dans nos bureaux de comté, M. le Président. Des gens qui attendent un an, souffrants, dont les médicaments... Et là, ce qui se passe là, les médecins disent: Nous, on ne peut plus rien faire; allez voir votre député. Alors, dans un comté rural comme le mien, où il y a 60 000 citoyens, alors là on en reçoit. Ça nous appelle. Ça vient nous visiter à la maison. Ça nous envoie des lettres, M. le Président. Ce sont des cas humanitaires. Moi, je ne peux pas rester juste froid devant ça, puis dire: Bien, écoutez, il y a un «line-up»; embarquez dans le «line-up»; ça vous fait mal, ce n'est pas drôle; prenez votre mal en patience.

J'ai parlé à la dame de ce monsieur, pas plus tard qu'il y a quelques heures, et elle m'a dit: Monsieur, ce n'est pas drôle; ce n'est vraiment pas drôle. Eux, ces gens-là, demeurent à quelques heures d'ailleurs de Sherbrooke. Baldwin est certainement à une heure et demie environ de Sherbrooke, pour les traitements, et tout.

Alors, je demande au ministre... Parce que c'est ça que les gens nous demandent. Le ministre, il veut déléguer. Bien, ces gens-là nous délèguent, en ce moment, leurs pouvoirs puis ils nous demandent d'intervenir auprès du ministre. Je le fais.

M. le ministre, pour des raisons purement humanitaires, pouvez-vous intervenir dans le cas des gens de Baldwin et vous assurer que, rapidement, il sera accepté à l'Hôtel-Dieu de Sherbrooke et qu'il sera opéré, et qu'on puisse régler... Quand le ministre nous dit que ça va bien, M. le Président, comment peut-il avoir cette prétention de nous dire que ça va bien? Ce n'est pas le cas.

Ce n'est pas le cas. Je l'invite à lire La Tribune de samedi, à Sherbrooke, M. le Président. Le syndicat CSN, ami historique du PQ, 10 ans partenaire du PQ, pour tous les grands projets du PQ, et là la CSN sort en règle, M. le Président, dans La Tribune . Je suis convaincu que le ministre a lu ça dans son «clipping», où on nous raconte que, la nuit, il y aurait une garde-malade par je ne sais plus combien de lits dans l'hôpital, qu'ils ont perdu le contrôle, finalement.

Alors, je finis ici en vous disant: Pour des raisons humanitaires, intervenons dans le cas de cet individu-là, et probablement que, si le ministre est capable de suivre la filière du cas de ce bon monsieur, il va réaliser que, cas par cas, quand on les prend de façon humaine, oui, il y a des problèmes dans le système de santé et qu'il faut trouver des solutions. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Orford. S'il n'y a plus d'autres intervenants, je passerais... Ah! excusez, M. le député de Verdun, j'oubliais. Alors, je vous cède la parole, M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Voici, on va revenir sur la loi parce que c'est important, bien sûr, de comprendre qu'on débat à l'heure actuelle d'une loi qui a trois articles. Une loi qui a trois articles. Un article qui parle essentiellement d'abord de la date à laquelle on va mettre la loi en pratique – ça, c'est mineur – et l'élément qui dit: «Le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice des fonctions qui lui sont attribuées.»

(22 h 50)

Le ministre a fait en commission, suite au travail du leader de l'opposition et suite au travail du député de Saint-Jean, un premier pas. Il a fait un premier pas, et je dois le reconnaître ici, c'est-à-dire que la loi a été amendée en remplaçant non pas «le ministre peut déléguer», mais «le gouvernement peut déléguer». Sauf qu'en faisant ce premier pas il a créé, à ce moment-là, une situation, une loi qui est bancale parce qu'il n'a pas fait le deuxième pas. Et le deuxième pas aurait été de limiter le champ de délégation uniquement à la Régie de l'assurance-maladie, parce que – je vous le rappellerai et vous le savez parfaitement, M. le Président – ça a uniquement comme soi-disant but de faciliter les paiements pour les personnes âgées entre les sommes qui venaient du ministère de la Santé et des Services sociaux et celles de la Régie de l'assurance-maladie.

Mais on est actuellement, maintenant, à voir la Loi sur la santé et les services sociaux comme une maison que vous avez commencé à repeindre et que vous arrêtez de peindre au milieu. Alors, vous comprenez bien, c'est pire d'avoir une maison à moitié peinte qu'une maison qui ne soit pas peinte du tout. Et là, actuellement, je salue qu'il ait la volonté de vouloir repeindre sa maison. Bravo! Mais il aurait pu finir la peinture. Alors, si vous ne finissez pas la peinture dans la maison que vous êtes en train de faire, vous avez une maison à moitié peinte. Et une maison à moitié peinte, M. le Président, , vous connaissez ça certainement aussi bien que moi. Si vous avez une maison dont la moitié de la peinture n'est pas finie, à ce moment-là, vous vous retrouvez avec quelque chose qui n'est pas joli du tout. Alors, c'est avec ça qu'on va se retrouver avec la loi, actuellement. Et je vais vous expliquer pourquoi.

Écoutez-moi, M. le Président, vous qui êtes un philosophe, vous allez comprendre ça tout de suite. Au lieu de limiter le pouvoir de délégation à la Régie de l'assurance-maladie, donc on aurait eu dans la loi deux pouvoirs de délégation, on aurait eu un pouvoir de délégation au Fonds de recherche en santé du Québec et un pouvoir de délégation à la Régie de l'assurance-maladie. Mais ce n'est pas ça. On donne un pouvoir général de délégation au gouvernement et au ministre de déléguer ses pouvoirs, mais on n'abolit pas, à ce moment-là, le pouvoir de délégation au Fonds de recherche en santé du Québec. C'est-à-dire que vous allez vous retrouver dans une situation où, et vous et toutes les personnes qui sont avocats qui sont ici... Parce que, moi, on m'a enseigné une chose, c'est que le législateur ne doit pas parler pour ne rien dire. Le législateur ne doit pas parler pour ne rien dire.

Des voix: ...

M. Gautrin: C'est ça. Il ne parle pas, il ne doit pas et ne parle pas pour ne rien dire. Je remercie l'ancien ministre de la Justice du secours, parce que c'est un peu lui d'ailleurs, je me rappelle, qui, lorsqu'on a fait la loi sur les tribunaux administratifs, nous avait expliqué cette chose-là. Alors, si on passe le projet de loi tel qu'il est, on va avoir un législateur, c'est-à-dire nous, qui parlons, d'un côté ou de l'autre, pour ne rien dire. Je vous explique pourquoi, M. le Président.

Si on vote le projet de loi, il y aura un pouvoir général de délégation que le gouvernement aura à toutes sortes d'organismes et, dans la même loi, à l'article 11.1, vous avez un pouvoir particulier de délégation – parce qu'il n'a pas été aboli – au Fonds de recherche en santé du Québec. Et là on fait référence, à ce moment-là, à tout ce qui est la responsabilité du ministre de soutenir la recherche. Alors, vous comprenez bien l'espèce de loi un peu bancale que vous allez avoir. D'un côté, vous allez pouvoir avoir un principe général de délégation et, dans la même loi, quelques articulets plus loin, vous allez vous retrouver avec un pouvoir particulier de délégation. Ça, c'est ce qu'on appelle faire de la mauvaise législation, lorsqu'on essaie de faire, un peu, un pas en avant, un pas en arrière.

M. le Président, dans cette fin de session – et on pourra s'exprimer lorsqu'on parlera d'autres lois aussi – ce gouvernement nous présente des cas, des fois, qui sont à nous tirer les cheveux. Enfin, le député de Marquette et moi-même pourrons rappeler quelques énormités qu'on a pu voir dans l'étude des projets de loi, qui, j'espère, vont pouvoir être repris en commission pour être bonifiés, que ce soit la loi n° 170 ou la loi n° 180 qui est actuellement à l'étude et qu'on va pouvoir reprendre, j'en suis sûr, pour en terminer l'étude avec la célérité qui nous caractérise.

M. le Président, c'est important de bien comprendre ici que cette loi, à l'heure actuelle, si nous la votons, va donc se trouver à avoir un article qui va donner un pouvoir global, général de délégation. Et vous allez continuer, vous allez la tourner et, après, vous vous retrouverez avec un pouvoir particulier de délégation à un organisme. Parce qu'on n'a pas supprimé... Si on avait amendé en disant: Le pouvoir général de délégation existe, donc je suppose de supprimer... là, à ce moment-là, on n'aurait pas nécessairement été d'accord, mais, enfin, on aurait eu quelque chose qui se tenait. Mais là, à l'heure actuelle, on a quelque chose qui ne se tient pas parce qu'on a un pouvoir particulier de délégation dans la loi, pouvoir que l'on n'amende pas, et on a un pouvoir général de délégation qu'on donne actuellement dans la loi.

M. le Président, il aurait été tellement plus simple pour ce ministre de suivre la tendance dans laquelle les parlementaires avaient essayé de le faire aller, c'est-à-dire, d'une part, de reconnaître... Et ça, c'était un bon pas dans la bonne direction, et je dois reconnaître qu'il y avait un geste, un pas dans la bonne direction de reconnaître que ce n'était pas lui qui faisait la délégation, mais le gouvernement. Parce que je rappellerai tout ce que ça veut dire, à ce moment-là, quand c'est le gouvernement qui délègue. Ça se fait par décret et c'est publié dans la Gazette officielle . Donc, ça, c'est un élément, une bonification qui est sortie du travail en commission, et je le reconnais.

Mais il aurait été souhaitable que, puisque cette loi est conçue par des pouvoirs particuliers de délégation, puisque cette loi, à l'article 11.1... Et comprenez bien, la loi que nous votons, le projet de loi n° 176, va amender la Loi sur la santé et les services sociaux. Puisque que cette loi amende la Loi sur la santé et les services sociaux et que la Loi sur la santé et les services sociaux avait déjà un pouvoir de délégation des responsabilités en matière de recherche et de soutien à la recherche et au Fonds de recherche en santé du Québec, il aurait été naturel, normal pour l'équilibre de la rédaction de la loi qu'aussi on trouve là une délégation simplement à la Régie de l'assurance-maladie.

L'opposition, par la voix du leader, l'a rappelé: si c'est seulement ça, pour aider les personnes âgées à mieux vivre, il n'y aurait aucun problème de la part de l'opposition de vouloir passer cette loi, un, deux, trois. Il l'a rappelé mille fois. Mais ce n'est pas ça.

On reste encore avec un pouvoir général de délégation, et c'est ça qui nous inquiète, une loi qui a été structurée en disant: Voici, le législateur, étape par étape, peut dire que, bon... Et c'est tout à fait logique de dire que les responsabilités, en matière de recherche, du ministre de la Santé et des Services sociaux sont déléguées au Fonds de la recherche en santé du Québec, et nous avons tous convenu que c'était une bonne chose. Mais, M. le Président, on doit aussi rappeler que, si l'objectif est simplement de régler les petits problèmes, il doit y avoir dans le paiement... Oui, je vois qu'il reste une minute, mais soyez sûr...

Je veux simplement conclure pour vous dire que si l'objectif de cette loi était de permettre de faciliter les paiements aux personnes âgées, simplement de dire: certains pouvoirs qui sont ceux du ministre, nous voulons les transférer, les déléguer à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, nous n'aurions eu aucune objection parce que, de ce côté-ci de la Chambre, nous voulons toujours soutenir et respecter les personnes âgées. Mais ce n'est pas ça. On prend prétexte de cette question de vouloir régler les questions pour les personnes âgées, pour se donner un pouvoir énorme de délégation. Et vous regardez facilement dans la loi, entre ce pouvoir général de délégation qui est donné dans l'article 1 – oui, je termine, M. le Président, vous comprenez – et le pouvoir particulier de 11.1, nous avons une maison peinturée à moitié, une maison qui est laide et un législateur qui parle pour ne rien dire, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais céder la parole à M. le député de Saint-Laurent.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. Le projet de loi qui fait que nous sommes ici, à cette heure, le projet de loi n° 176, trois articles... Et nous avons la présence physique du ministre pour écouter les commentaires qu'on a à faire.

Comme moi, M. le Président, vous vous posez parfois la question: Quelle est la contribution du leader du gouvernement? Et je pense qu'il pourrait davantage améliorer la qualité de nos débats par ses silences que par ses interventions. Alors, il serait...

Une voix: Bravo!

(23 heures)

M. Cherry: Puis d'ailleurs son bulletin d'hier confirme les propos que je tiens ce soir à son égard. M. le Président...

Des voix: ...

M. Cherry: Merci. Merci. Je vois qu'il y a des gens qui suivent mes études avec intérêt. Oui, 142, oui, c'est vrai; vous avez changé ça pour 46, vous êtes en train d'y revenir tranquillement; ça n'a été utile que pour le référendum, «by the way», puis ça n'a pas donné grand job à bien des jeunes. Mais, évidemment, l'objet qui fait qu'on est ici, M. le Président, c'est 176.

Le ministre de la Santé, encore ce matin, se lève et dit: Bon, prenons ça sereinement, ça va bien. Le ministre a dit, hier: Je fais appel au professionnalisme des médecins. Ce matin: Je fais appel à la conscience sociale des travailleurs. Mais, à chaque fois qu'il se lève, entre deux groupes pour qui il espère que ça va revenir à l'ordre, il dit que tout va bien: Non, non, c'est parce qu'on ne comprend pas. Il doit se souvenir à combien de reprises il s'est levé en cette Chambre pour dire: La réforme, le virage, ça va tellement bien, on est en avant dans notre affaire, on a tout planifié dans les moindres détails. Aïe! Combien de fois le ministre nous a dit: On a tout planifié dans les moindres détails! Aïe! Je comprends que vous aimiez mieux être à l'Assemblée nationale que dans vos comtés, ça ne doit pas être drôle d'être obligé de défendre, devant vos commettants, quelqu'un qui s'est occupé et des détails et de l'ensemble des articles. Je ne demande pas à la ministre de nous parler de l'éducation, on va s'occuper de la santé, là, pour ce soir, ça doit être assez.

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! M. le député de Saint-Laurent, une petite chose, là. Pour le climat et la bonne atmosphère, je vous inviterais à vous adresser à moi et non pas directement aux députés. Vous connaissez l'article du règlement.

M. Cherry: Oui. Très bien, très bien. Vous avez raison. D'ailleurs...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vais vous écouter, moi.

M. Cherry: ...vous avez à subir... Je crois qu'il y a un hôpital qui a été fermé dans votre comté. Donc, vous avez raison de me dire de m'adresser à vous et, par ma voix, de rappeler à vos commettants quelle sorte de traitement ce ministre de la Santé a fait subir à vos électeurs. Merci de me le rappeler, M. le Président. Merci beaucoup.

M. le Président, les gens qui nous écoutent, à qui le ministre répète, à chaque fois qu'il en a l'occasion, qu'on devrait prendre sa parole – puis, en Chambre, il faut le faire, le règlement de l'Assemblée nous y oblige – quand le ministre se lève et nous dit: Ça va bien, arrêtez, les médias, d'énerver le monde, arrêtez, l'opposition, de monter en... Ça va bien, faites-moi confiance. Puis, si vous ne me faites pas confiance à moi, faites confiance à ceux à qui je vais déléguer des pouvoirs que j'ai, même si vous ne les connaissez pas. Faites-moi confiance, ça va bien aller.

Mais pourtant, on a entendu, cette semaine, des employés de l'hôpital Notre-Dame de Montréal où, apparemment, ça va tellement bien qu'ils sont sur le trottoir, là. Alors, les gens disaient quoi? Le ministre – puis là je ne peux pas le nommer, ils le nommaient par son nom – nous a dit: Faites-moi confiance, ne vous énervez pas, tout va bien se passer. Mais c'est quoi, les faits, M. le Président? Est-ce que les gens qui vont constater périodiquement la liste en urgence à cette institution hospitalière là peuvent dire que ça va bien? Est-ce que les gens qui y travaillent peuvent dire que ça va bien? Est-ce que les médecins, les infirmières, les infirmières auxiliaires qui y pratiquent leur profession avec dévouement, est-ce qu'ils nous disent que ça va bien?

Comment se fait-il que celui qui gère ça à distance et qui choisit les gens qu'il va rencontrer pour se faire dire ce qu'il veut entendre... Mais ceux qui sont là au quotidien, comment ça se fait qu'eux autres disent que ça ne va pas bien, M. le Président? Quand le ministre nous dit: Le virage ambulatoire, c'est qu'on va consacrer plus de ressources, plus d'énergie, plus d'argent, c'est les CLSC qui vont prendre la relève, comment ça se fait, M. le Président, que le discours est correct mais que ça ne se concrétise pas dans les faits?

Vous le savez comme moi, M. le Président. Encore hier, on s'est fait répondre en Chambre: Pas de problème, quand il y aura des femmes qui seront victimes de viol et qu'il faudra... les CLSC sont là, on va donner... Écoutez, là, le CLSC, apparemment, il ne savait même pas qu'il était question de lui, ce CLSC là, pour donner l'appui. Le ministre, il nous dit en Chambre: Non, non. Il y a quelqu'un qui m'a dit que le CLSC va s'en occuper. Le CLSC dit: Moi, je ne le sais pas. Mais le ministre dit: Faites-moi confiance. Non, non, mais, tu sais, on peut trouver ça drôle, là, de l'autre côté, M. le Président, mais les gens qui ont besoin de ce service-là, et que les résultats d'un travail bien fait peuvent faire qu'au lieu d'avoir un violeur en liberté on va l'avoir derrière les barreaux, là il n'y a plus grand monde qui rit quand on arrive à des choses comme celle-là.

C'est pour ça, M. le Président, qu'on est obligés, nous, de se lever aujourd'hui encore une fois. Puis on est conscients, on est conscients que le ministre va maintenir son attitude qu'il est le seul qui a le pas dans le régiment, qu'il n'y a que lui qui connaît ça parce qu'il y a un rapport qui porte son nom et qu'en fonction de ça il est le possesseur de la vérité tranquille. Mais on sait que, dans les faits, ce n'est pas ça, M. le Président. On le sait qu'avec le virage ambulatoire, quand on envoie les gens chez eux beaucoup plus rapidement qu'avant, on sait ce que ça a comme conséquences, M. le Président. Bien souvent, avec une prescription, quand ils se présentent à la pharmacie, les montants qui sont impliqués, les gens ne peuvent pas se procurer les médicaments et, bien souvent, ça a comme résultat qu'ils ont un retour beaucoup plus rapidement à l'urgence pour demander d'être réhospitalisés, M. le Président.

Ça, le ministre, il n'en parle pas de ça. On le sait, M. le Président, on n'a qu'à parler aux gens qui dispensent des services dans les centres hospitaliers, qui nous disent: C'est presque comme une porte battante; on donne congé aux gens et ils nous reviennent quelques jours suivants parce que, bon, les pansements n'ont pas été faits comme ils auraient dû ou les gens ont tenté, avec les moyens du bord, de donner suite aux instructions que l'hôpital ou le CLSC leur a données, mais les conséquences, M. le Président, les gens retournent, doivent être réhospitalisés, avec de l'infection dans des plaies. Le ministre dit: Ça va bien, faites-moi confiance. Les gens qui, eux, ont à subir ces choses-là, eux disent que ça ne va pas bien.

Ah! bien sûr, le ministre nous sort un sondage et le premier ministre s'en est servi également. On a dit: On a vérifié et 90 % des gens qui sont hospitalisés sont satisfaits. Ah oui! Une fois que vous êtes hospitalisé, une fois que vous êtes sur votre lit d'hôpital, bien sûr que les gens qui vous dispensent des soins le font de façon professionnelle, avec beaucoup de dévouement. Il n'y a personne qui doute de ça. Il n'y a personne qui doute de ça, M. le Président. Mais combien de temps ça vous a pris avant d'être hospitalisé, M. le Président? Vous me signalez qu'il me reste deux minutes.

Quand on veut pouvoir évaluer de façon objective la qualité des soins qui vous sont dispensés, ce n'est pas vous, comme patient, qui pouvez le faire. Vous pouvez juger si le personnel est dévoué, s'il vous traite bien, si la propreté des locaux y est puis la qualité de la nourriture qu'on vous sert. Mais les gens qui peuvent le mieux poser un jugement sur la qualité des soins que vous recevez, ce sont les gens qui dispensent les soins: les infirmières, les médecins, les professionnels. Qu'est-ce que ces gens-là disent? Contraire au discours qu'a le député de Charlesbourg. C'est pour ça qu'il nous a appris cette semaine, confirmé, qu'il a décidé, pour tenter de contrer la vérité, M. le Président, de contrer ce que les médias d'information et l'opposition font, une campagne de 5 000 000 $ pour faire croire aux gens que ça va bien, quand on sait, et il le sait lui-même, que dans les faits...

Alors, en terminant, M. le Président. Les derniers sondages, il y a à peine deux semaines, faisaient la liste des hommes et des femmes politiques au Québec avec le taux de degré de satisfaction, et il y avait une colonne qui disait: À qui feriez-vous le moins confiance? Parmi la quinzaine de gens qu'il y avait là, celui à qui la population qui avait à s'exprimer faisait le moins confiance, c'était le maire de Montréal, Pierre Bourque, et celui qui arrivait immédiatement après lui, c'est le merveilleux, le suave, celui qui possède toutes les qualités et toute la vérité, le député de Charlesbourg. M. le Président, s'il ne s'agissait pas de la santé, je lui dirais merci parce que, politiquement, il est le joueur le plus utile à notre club. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Saint-Laurent. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Robert-Baldwin.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Mon collègue le député de Saint-Laurent me rappelle des moments assez difficiles dans l'histoire de la santé au Québec, particulièrement lorsqu'il a souligné l'avènement du fameux rapport Rochon, le rapport du ministre. Et je me rappelle très bien, M. le Président, ce que Mme Lysiane Gagnon disait à ce moment-là: Eh bien, c'est 6 000 000 $ qui ont été perdus, c'est 6 000 000 $ qui auraient dû être donnés à des organisations pour les femmes, les femmes violentées particulièrement.

(23 h 10)

Il avait prédit, dans son fameux rapport – et je pense que je vais en apprendre à plusieurs, ici – l'éclatement du système dans les années qui vont suivre ce rapport, l'éclatement du mouvement corporatif. Eh bien, M. le Président, l'éclatement a eu lieu, mais ça ne venait pas du mouvement corporatif, ça venait du ministre lui-même sous le gouvernement péquiste.

Aujourd'hui, on étudie un projet de loi, le projet de loi n° 176, projet de loi de trois articles où le ministre de la Santé demande de déléguer tous ses pouvoirs. Il n'y a pas tellement longtemps, on débattait, en cette Chambre, un autre projet de loi, , le projet de loi n° 83, où le ministre nous demandait d'avoir tous les pouvoirs, et pas n'importe quels pouvoirs. Cette loi prévoyait que le ministre pouvait limiter à certains établissements le droit d'offrir certains services; elle conférait également au ministre le pouvoir de modifier la capacité indiquée aux permis des établissements, la mission, la classe ou le type d'établissement; et, enfin, elle permettait au ministre de fermer un établissement sans aucun critère, sans que l'Assemblée nationale puisse avoir écouté ce que les gens pensaient des décisions du ministre.

M. le Président, j'aimerais rappeler que toutes ces fermetures d'hôpitaux, qui ont été faites sans aucun critère... Et on nous avait promis, à ce moment-là, qu'il y aurait consultations. On en a eu des consultations, des consultations bidon parrainées par le ministre de la Santé via les régies régionales, les serviteurs serviles du ministre. Je voudrais rappeler que ce sont les députés libéraux qui ont déposé, en cette Chambre, des pétitions.

Je rappelle mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui avait déposé une pétition de 100 000 noms au nom de l'hôpital Reine Elizabeth. Jamais ces gens-là n'ont été capables de se faire entendre au niveau des régies et évidemment jamais ces gens-là n'ont été capables de se faire entendre au niveau de l'Assemblée nationale, parce que le ministre a toujours refusé d'avoir des commissions parlementaires. Je me permets de vous rappeler – et vous êtes un témoin de ce temps, M. le Président – des manifestations qu'il y avait eu dans les hôpitaux Christ-Roi et Chauveau: 15 000 dans un cas, 10 000 personnes dans l'autre qui ceinturaient les établissements de santé. Eh bien, tout ça, ça n'a jamais changé d'un iota la pensée du ministre.

Et, en passant, M. le Président, moi, je me souviens d'avoir fait des débats en campagne électorale avec le ministre, et jamais, mais jamais il n'a parlé qu'il avait l'intention de fermer un hôpital, qu'il avait l'intention de fermer un seul lit dans le domaine de la santé. Il n'a jamais parlé de son virage. On parle de son virage. Facile de faire des virages aujourd'hui sans que les ressources alternatives ne soient en place. Avec le résultat qu'on connaît maintenant, des patients se plaignent de plus en plus, des gens ne reçoivent pas les soins dont ils ont besoin. Et, si les députés d'en face voulaient vraiment dire ce qu'ils entendent dans leurs bureaux de comté, je pense qu'ils pourraient témoigner que ce qui se passe est vrai.

Tantôt, nous avons écouté le... Est-ce que je peux continuer, M. le Président? Je vous remercie beaucoup. Nous avons écouté le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques qui nous donnait l'impression qu'un ou deux patients étaient satisfaits de l'hôpital Notre-Dame dans son comté. Il faudrait écouter les nouvelles aujourd'hui. Il faudrait savoir ce qui se passe dans le comté de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Tout va bien, c'est ce qu'il nous disait. Il n'avait pas écouté les nouvelles: il y a une grève illégale à l'hôpital Notre-Dame, il y a des détournements d'ambulances, puis ça c'est très, très grave lorsque les patients qui, habituellement, ont des dossiers médicaux dans un établissement ne peuvent même pas être soignés. Et toujours notre député vedette nous disait: Bien, tout va bien dans mon comté, et il n'y a pas de problème à l'hôpital Notre-Dame. Alors, il faudrait aussi se rappeler, M. le Président, que ce sont des partenaires de ce gouvernement qui font la grève, actuellement, et qui sont associés de très près au fait que les patients ne peuvent pas être soignés, M. le Président.

M. le Président, j'aimerais aussi rappeler le bâillon dans des dossiers comme la santé. Eh bien, aussi bien la loi qui a permis au ministre de la Santé de fermer des hôpitaux que le fameux projet de loi d'assurance-médicaments et possiblement le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui, encore une fois, c'est un projet de loi qui va être passé sous le bâillon. On n'est pas capables, avec ce gouvernement, de parler, de discuter, d'essayer d'écouter ce que les gens ont à nous dire, d'essayer de bien les représenter. C'est toujours sous le bâillon qu'on réussit à passer ces projets de loi.

M. le Président, j'aimerais aussi mentionner les responsabilités d'un ministre de la Santé. Ce qu'il y a d'inquiétant, dans le projet de loi auquel nous sommes confrontés actuellement, c'est cette délégation de pouvoirs. On a eu le projet de loi n° 83, qui donnait tous les pouvoirs au ministre, sans critères, sans consultation. Maintenant, il veut déléguer. Alors, la responsabilité première d'un ministre de la Santé, en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux: «Le ministre de la Santé est chargé de la direction et de l'administration du ministère de la Santé.» À qui veut-il déléguer ses fonctions? Au ministre de la Réforme électorale, peut-être?

M. le Président, on commence à être inquiet de ce genre de délégation. On aurait aimé, dans ce projet de loi, savoir du ministre exactement à qui il veut donner ses pouvoirs, pourquoi il abdique ses responsabilités. On mentionne dans ses fonctions: «Le ministre a pour fonction d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques relatives à la santé et aux services sociaux.» Qui va proposer cette élaboration et proposer au gouvernement des politiques maintenant? Les régies régionales? Les technocrates? Les bureaucrates? Pourquoi le ministre se retire au moment où il a viré le réseau vraiment à l'envers? Maintenant, il abdique ses fonctions. Pourquoi ce n'est pas plus clair dans le projet de loi, ce qu'il a l'intention de faire? Pourquoi cette délégation?

Les devoirs du ministre, il y en a plusieurs. «Assurer la protection sociale des individus, des familles et des autres groupes.» En faveur de qui veut-il déléguer cette fonction? «Prendre les mesures requises pour assurer la protection de la santé.» Et on sait que les régies régionales ont vraiment lamentablement échoué dans tout le processus d'intégration des départements de santé communautaire, dans la création – et nous le souhaitons, et sûrement nous allons l'encourager en temps et lieu – d'une espèce d'institut de santé publique. Pourquoi ce sont les régies qui doivent faire ça? Le ministre sait très bien de quoi je parle. Il sait que c'est une autre de ses erreurs monumentales.

M. le Président, j'aimerais terminer – vous me faites signe qu'il ne me reste pas beaucoup de temps – et rappeler ce que le premier ministre disait au théâtre Centaur. Alors, là, c'était le discours vraiment important: «Je veux être le premier ministre de tous les Québécois.» Aussitôt qu'il a terminé son discours, on a assisté à des fermetures d'hôpitaux qui desservaient la population anglophone, aussi bien à Montréal, à Sherbrooke qu'à Québec. On pense au Jeffrey Hale, on pense à Sherbrooke, l'hôpital...

Des voix: ...

M. Marsan: Je vois les gens d'en face rire, M. le Président. Mais il faudrait qu'ils viennent faire un tour dans notre comté et qu'ils sachent vraiment quelle est l'attitude de nos gens. Et, regardez, ils continuent à part de ça. C'est beau. Vous êtes contents. Fermez-en d'autres hôpitaux. Fermez-en! Vous allez être encore plus contents. C'est beau, M. le Président. Belle gang!

M. le Président, je voudrais terminer en disant qu'il y a d'autres priorités. Aujourd'hui, on a assisté à vraiment un spectacle, un show, à l'Assemblée nationale, quand on a parlé de la fête nationale ou de la fête qu'on va faire autour du drapeau du Québec, de l'argent qu'on va investir dans un hippodrome, à Montréal, dans une bibliothèque nationale, au moment où on ferme des hôpitaux, au moment où on prive les citoyens des services de santé de base. Alors, pour toutes ces raisons nous allons voter contre ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. M. le ministre d'État des Ressources naturelles, je vous cède la parole pour un maximum de 10 minutes.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Vous êtes très gentil, M. le Président, ça va me prendre à peu près ça pour relever les... Non, je ne dirai pas ce que je voulais dire.

Des voix: Ha, ha, ha!

(23 h 20)

M. Chevrette: Je ne voudrais surtout pas insulter notre prédécesseur, qui s'est exprimé, passant de la fête nationale à ce qu'il entend comme téléphones, aux problèmes de la santé. Je vous avoue très honnêtement que, quand on ne sait pas quoi dire, c'est à peu près ça qui arrive. Puis s'en prendre à une bibliothèque. À les entendre... Vous devriez fouiller vos bibliothèques un peu plus et vous auriez de quoi à dire de plus cohérent sûrement.

Donc, M. le Président, on a un projet de loi de trois articles devant nous autres qui, en substance, dit: On va permettre aux gens du milieu de gérer de l'argent. C'est trop dur à comprendre parce qu'ils ne peuvent pas comprendre ça; ils sont contre ça. Moi, je n'en reviens pas. Ils sont acharnés sur le ministre de la Santé. Et le député nous a incités à dire qu'est-ce qu'on entend dans nos milieux. Eh bien, je vais vous dire ce que j'entends, moi.

Comment est-ce qu'il s'appelle le gros député de D'Arcy-McGee ou de je ne sais pas trop, de Jacques-Cartier, de Baldwin, qui dit n'importe quoi à la période de questions? Bien, là, on lui dit le nom. On dit qu'il a travaillé dans un hôpital. «C'est-u» croyable? Il n'a pas l'air d'avoir travaillé dans un hôpital. Il questionne le ministre de la Santé comme s'il ne connaissait pas ça pantoute. Ah, il ne connaît rien pantoute, on le sait. Ce n'est pas pour rien qu'il est rendu ici probablement, qu'il a quitté l'hôpital.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Mais, manifestement, par la forme des questions, on ne comprend pas le régime, on ne comprend pas le système. Moi, je me souviens, en 1984, j'étais ministre de la Santé et je n'avais pas la prétention que je connaissais grand-chose. D'ailleurs, M. Lévesque m'avait dit à l'époque: Pour être ministre de la Santé, ou il faut être docteur ou il faut être malade. J'ai compris que j'étais malade. M. le Président, il m'avait dit: Fais ton possible dans les circonstances – il y avait une démission d'un docteur qui m'avait précédé. Et, devant la complexité du système, qu'est-ce que j'avais fait plutôt que d'essayer de faire le Jos-connaissant, comme certains s'essaient, à citer des cas individuels? Une chance qu'ils ont le journal d'ailleurs, parce que je me demande comment ils pourraient poser des questions. Mais je me suis dit: Il faut aller chercher des compétences.

Qu'est-ce qu'on a fait, M. le Président? On est allé chercher des administrateurs. On est allé chercher un homme de valeur qui s'appelait, à l'époque, Jean Rochon, qui n'était pas ministre et qui était à l'université, qui avait une vision globale du système de santé, et qui a fait l'analyse, et qui a dit: Ça n'a pas de bon sens, c'est vrai, ces grands acquis sociaux là, on va les perdre si on ne prend pas des virages importants. On va perdre notre système de santé, ces grands acquis, si on ne décide pas de poser des gestes très concrets dans tel secteur, dans le domaine social, dans le domaine de la santé mentale, dans le domaine des soins de longue durée, dans le domaine des soins de courte durée.

Et il a écrit un rapport, ce qu'on appelé la commission Rochon. M. le Président, ce rapport-là est tombé dans les mains des libéraux. Aïe! Un rapport de même, ça les dépassait. Ils ne vont pas dans les grandes bibliothèques nationales pour comprendre ça, eux autres. Là, ça les dépassait au point qu'ils ont dit: Qu'est-ce qu'on va faire avec ça? Ils ont remis ça dans les mains de technocrates. Ce n'est pas moi qui le dis, ça doit être Mme Vaive, excusez, Mme la députée de Chapleau, qui a parlé de technocrates. Ils ont dit: Bon, bien, on va remettre ça à quelqu'un pour l'analyser. Ils ont dit: À Mme Lavoie-Roux, qui a lu ce rapport et qui a dit: C'est très, très bon, il faudrait sans doute en appliquer les grandes lignes. Mais là ils ont décidé de la changer de ministère.

Est arrivé le fier-à-bras, celui qui faisait des choix de 600 000 $, les manches retroussées, là, il est tombé ministre de la Santé, Marc-Yvan Côté, Marc-Yvan Côté qui avait quand même du GBS, du gros bon sens. Il a regardé ça, il a dit: Il faut que j'applique ça. Il s'en va au Conseil des ministres où siégeaient des éminents députés comme celui de Brome-Missisquoi, comme le très, très, très brillant ex-ministre des Finances appelé «petit brouillon» par l'éditorialiste de La Presse , et l'ancien ministre du Travail, puis je pourrais nommer tout le groupe. Ils ont dit: Aïe! Es-tu fou, toi, Côté? Tu n'appliqueras pas ça. Aïe! C'est un rapport d'un docteur, avec des gens qui connaissaient ça, et prendre ce virage-là, nous autres, c'est trop vite pour nous autres. Il faut prendre le temps d'étudier ça.

Là, ils se sont mis à étudier ça. Après qu'il ait été retiré, deux ans après, il a dit: J'aurais bien dû faire ça, mais mon Conseil des ministres ne m'a pas appuyé à l'époque. Puis là il est arrivé... Nous autres, on a eu la sagesse – je pense qu'il faut se vanter une fois de temps en temps, on ne se fie surtout pas sur eux autres pour le faire – on a décidé d'aller convaincre celui qui avait cette vision globale là de s'en venir dans notre équipe, et on l'a convaincu.

Il est arrivé, envers et contre tous, après neuf années d'inertie totale, alors que les autres provinces canadiennes, alors que les autres pays alentours bougeaient. Nous autres, on avait un gouvernement qui était supposément des grands, grands, grands comptables qui se trompaient juste de 1 000 000 000 $, 1 500 000 000 $ par année, au niveau du déficit. Mais c'était des grands, grands administrateurs. Des fois, 2 000 000 000 $, oui c'est vrai, 1 700 000 000 $. Même la dernière année, 3 000 000 000 $. Des grands administrateurs, vous savez, des gens qui sont capables de jouer jusqu'à 10, sur la marge d'erreur, en milliards de déficit. Donc, ces gens-là, des grands administrateurs, n'ont pas permis de commencer le début même d'une réforme. On a dû faire plus vite, puis on est allé chercher la personne qui connaissait ça.

Et, de plus en plus, à tous les jours, qu'est-ce qu'on entend dans nos comtés? Aïe! s'il peut donc réussir! S'il peut donc réussir! Parce que, aujourd'hui...

Une voix: ...

M. Chevrette: Oui, s'il peut donc réussir! D'ailleurs, je ne dirai pas ce que j'entends dans le bout de Sacré-Coeur. Ils sont bien fiers que leur député de Robert-Baldwin soit rendu ici. Ils ne l'ont plus à l'hôpital.

Mais, fondamentalement, dans le peuple, celui qui quotidiennement va à l'hôpital, puis qui voit que c'est acheminé au bon endroit, puis que ça coûte moins cher, puis qu'il y a des économies d'échelle, puis qu'on est en train de sauver les meubles, de garder les grands acquis, de traiter les gens correctement, puis de poser des gestes courageux, je peux vous dire oui...

Je me souviens, moi, ces mêmes rouges, ces mêmes libéraux – excusez, il ne faut pas dire «rouges», M. le Président, parce que ça serait leur rendre hommage – ces mêmes libéraux, au moment où ils étaient dans l'opposition, même poste qu'ils occupent présentement, quand Mme Payette, ici, avait passé l'assurance automobile, ils avaient tous déchiré leur chemise. C'était trop beau de les voir: les trémolos dans la voix, les larmes aux yeux, M. le Président. Des sépulcres blanchis, il n'y avait pas de quoi de mieux. La loi a passé et, aujourd'hui, la loi, qui est une des lois qui est la plus aimée au Québec par la population, essayez d'amender la loi de l'assurance automobile contre les citoyens. On l'a vu l'an dernier, 85 % de la population ne veut pas qu'on touche à cette loi. Dans quelques mois, on félicitera le ministre de la Santé, on reconnaîtra le geste courageux que le gouvernement a posé pour sauvegarder les grands acquis dans le domaine de la santé parce qu'on aura eu le courage de prendre les virages importants.

M. le Président, moi, quand j'entends des balivernes, pour ne pas dire autre chose, comme je viens d'entendre du député de Robert-Baldwin, un homme qui a travaillé dans un centre hospitalier, un homme qui a vu quotidiennement des gens alités dans un lit de courte durée et qui auraient dû être dans un lit de soins de longue durée, qui coûtaient 550 $ par jour au lieu de 110 $ par jour pour avoir une même qualité de services, un homme qui... Ce n'est que par partisanerie parce que, s'il est un tantinet intelligent, il sait très bien que le virage qui s'est pris est indispensable, M. le Président...

M. Paradis: M. le Président, M. le Président.

M. Chevrette: ...pour sauvegarder les acquis en santé.

Des voix: Bravo!

M. Paradis: M. le Président, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition, sur une question de règlement.

M. Paradis: Simplement, je me serais attendu à ce que vous vous leviez de votre siège pour rappeler à l'ordre le député de Joliette qui a contrevenu à plusieurs dispositions de l'article 35 du règlement. Je me demande pourquoi vous l'avez laissé aller.

M. Chevrette: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): La question s'adressait à moi.

M. Chevrette: Est-ce qu'il aurait fallu que je dise qu'il ne l'était pas du tout?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, la question s'adressait à moi. Il a mis un conditionnel et puis il venait de le prononcer, «si». Alors, à ce moment-là, avec le conditionnel, que voulez-vous, là?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah bien, si ça ne va pas plus loin que ça, je pense que je vais laisser passer.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ha, ha, ha! Est-ce qu'on fait une entente, M. Paradis... M. le leader de l'opposition?

M. Chevrette: M. le Président, je n'ose pas en ajouter parce que, si «un tantinet» devient quelque chose de désagréable, imaginez-vous si j'avais dit tout ce que je pensais, vous m'auriez déclaré hors d'ordre, et le leader de l'opposition aurait sorti une jurisprudence vieille de 100 ans, comme il se plaît à le dire.

(23 h 30)

Donc, M. le Président, je voudrais conclure, dans le peu de temps qu'on a, pour rendre hommage à un de mes collègues, un collègue que j'ai contribué à aller chercher à la demande de M. Parizeau et qui, aujourd'hui, est en train de doter le Québec d'une politique de la santé qui va nous permettre d'envisager les 10, les 20, les 30 prochaines années sans crainte que notre réseau ne s'effrite. Et ça, c'est beaucoup. Et je suis persuadé, M. le Président, que ceux qui ont le moindrement d'intelligence de l'autre côté, qu'ils s'arrêtent deux minutes puis qu'ils disent: S'il avait fallu que le Dr Rochon ne vienne pas comme ministre de la Santé et que ce parti-là, que le parti, que le parti ici ait continué à faire ce que, nous, on faisait, ils «doivent-u» se réjouir de voir que le ministre de la Santé, M. le Président, a pris ce virage! Et je vous dirai, en deux secondes, que le leader de l'opposition a hâte que j'arrête, parce que je m'en venais. Si j'avais eu deux minutes, c'est sur lui que j'aurais tombé.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il faut dire que votre temps était terminé aussi. Je n'accepte pas le consentement. Ha, ha, ha!

Alors, le prochain intervenant sera M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, j'aimerais, comme le député de Joliette, moi aussi saluer le courage d'un homme et l'honnêteté d'un homme, d'un député du Parti québécois, d'ailleurs, le courage qu'il a démontré en cette Chambre. Il ne s'agit pas du député de Charlesbourg. Il s'agit plutôt du député de Saint-Jean qui, lui, a eu le courage de ses opinions. Et j'aimerais le rappeler parce qu'on comprend très bien, de l'autre côté, M. le Président, qu'il s'agit de leur carrière politique qu'ils tentent de protéger, sachant fort bien qu'ils ont un premier ministre, qu'ils sont en train de leur dire: Si vous osez parler contre le ministre de la Santé et des Services sociaux, vous allez perdre votre siège sous la bannière du Parti québécois.

Voici ce que disait le député de Saint-Jean, député du Parti québécois. La manchette titrait: J'ai pensé aux malades cardiaques puis à l'ex-député Jérôme Proulx . Le député de Saint-Jean a posé un geste courageux. Je me permets de lire de longs extraits, M. le Président, parce que c'est un des leurs qui a osé se lever en cette Chambre, avoir le courage de dire: Ça n'a pas de bon sens, ce qui est en train de se passer dans le système hospitalier au Québec. Et voici ce qu'il a dit, un député du Parti québécois, un seul, un seul qui a eu le courage de se lever lors d'une période des questions et de dire: Assez, c'est assez. On va commencer à dire la vérité dans cette Chambre.

Et voici ce qu'il disait: «Pour la première question adressée au ministre Jean Rochon, au ministre de la Santé, lors de son intervention-surprise à l'Assemblée nationale jeudi dernier, le député de Saint-Jean dit avoir pensé aux cinq malades de l'Hôpital du Haut-Richelieu en attente d'une chirurgie cardiaque. Pour la seconde, c'est à l'ex-député Jérôme Proulx, lui-même en attente d'une chirurgie cardiaque, que les pensées du député ont été dirigées, fier, tient-il à préciser, d'avoir laissé sa conscience – et non pas la règle du Parti, mais sa conscience – le guider même s'il savait fort bien que ces deux petites questions au ministre lui vaudraient les foudres de quelques membres de son parti, y compris le premier ministre du Québec qui n'a pas du tout apprécié le geste.»

On comprend pourquoi les députés d'en face ne se lèvent pas et que le député de Joliette, M. le Président, est passé complètement à côté de la question, a tenté de beurrer tout le monde, mais a tenté de faire oublier ce qui se passe dans le réseau de la santé et des services sociaux. «Je me sentais le besoin d'intervenir, je me devais de soulever les problèmes humains et administratifs dont souffre cet établissement», raconte le député, tout en précisant qu'il n'est pas le député du Québec à Saint-Jean mais bien le député de Saint-Jean à Québec, contrairement aux 70 autres députés du Parti québécois.

Il a eu le courage, M. le Président, député du Parti québécois, député de Saint-Jean, de dire: Moi, ce qui se vit dans mon comté, je l'amène à l'Assemblée nationale, je dénonce le ministre de la Santé et je lui dis: Ça n'a pas de bon sens, ce qui se passe dans mon comté, les gens sont en attente de chirurgie cardiaque, ils ne sont pas soignés, ils risquent de mourir et vous n'intervenez pas. Cet homme-là a eu le courage de le dénoncer.

On raconte que cette intervention lui a valu de subir les foudres de son parti dans les heures qui ont suivi. Ce n'est pas étonnant qu'il n'y ait à peu près pas un député du Parti québécois qui se lève pour dénoncer le ministre de la Santé. Ils sont allés le recruter, ils lui ont fait faire des travaux pour le compte du ministre des Finances, pour le compte du président du Conseil du trésor et le premier ministre, c'est-à-dire aller chercher le maximum d'argent dans le réseau dans la santé et des services sociaux et se foutre carrément de la santé des Québécois et des Québécoises.

M. le Président, l'article disait également ceci: «Craint-il maintenant pour son avenir politique à Québec, contrairement aux autres députés du Parti québécois?» Non. Voilà un homme courageux, il ne craint pour son avenir politique. Il s'est dit: Moi, j'ai été élu à l'Assemblée nationale pour défendre les intérêts de mes commettants, non pas pour défendre les décisions du premier ministre et du ministre de la Santé, dans mon comté. Ce n'est pas pour ça que j'ai été élu. Il a eu le courage de se lever ici, en cette Chambre, pour dénoncer le ministre de la Santé.

«Je ne sais pas, je ne travaille pas pour mon avenir politique, mais plutôt pour servir mes concitoyens.» Voici ce que disait le député du Parti québécois. Écoutez bien ça, M. le Président, parce que c'est touchant: «Chose certaine, mes enfants étaient fiers de moi, lorsque je suis arrivé à la maison, en soirée.» Ses enfants ont dit: Papa tu as dit la vérité à l'Assemblée nationale et on est fiers de toi. Est-ce que les enfants des autres députés du Parti québécois sont fiers d'eux, lorsqu'ils couvrent constamment le ministre de la Santé, qui est train de saccager notre réseau de la santé? Sont-ils fiers, leurs enfants, des gestes posés par les parents, qui tiennent sous silence des situations intolérables? J'entendais le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, avant le souper...

Une voix: ...

M. Ouimet: ... – oui, présent! Présent, mais pas vraiment vigilant, dans son comté – le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qui disait: Moi, j'ai rencontré deux, trois personnes, des commettants qui m'ont dit: Qu'est-ce qu'ils ont à se plaindre, les libéraux? Ça va bien dans le réseau de la santé; dans l'hôpital, ça va bien. Il a dit: C'est de l'exagération de la part des députés libéraux, je n'ai rien vu de ça dans mon comté.

Je vais lui lire quelques manchettes de journaux. Je pourrais lui en lire des centaines, des centaines et des centaines, depuis deux ans et demi: Les malades cardiaques en otages: pas de médecin ou pas d'argent , titrait le Journal de Montréal . Pas d'argent, la retraite pour 29 anesthésistes . Rendez-vous avec la mort ou avec un chirurgien . Les patients sont confrontés à ce choix-là: la mort ou un chirurgien. Ils sont 900 à attendre . Les départs, c'est pas drôle . Cardiaques et abandonnés, les malades souffrent et ne peuvent pas être opérés . Michel Davignon, une victime des compressions du ministre de la Santé . Le coroner est catégorique: opéré, un cardiaque aurait survécu . M. le Président, il y a des gens qui sont morts, il y a des gens qui ont subi des décès à cause des décisions prises par ce gouvernement-là. L'attente en chirurgie demeure intolérable, selon le médecin . Et j'en passe, M. le Président. J'en passe!

Et le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qui continue de dire que ça va bien dans son comté, est-il présent dans son comté? Est-il à l'écoute de ses commettants? Ou ne devrait-il pas plutôt avoir le même courage que le député de Saint-Jean, se lever en cette Chambre, faire comme les députés libéraux et dire: Assez, c'est assez!

On dénonce le mensonge du ministre de la Santé, qui dit constamment que tout va bien dans les hôpitaux. Il faut avoir passé par les services de santé et les services sociaux, au cours des trois dernières années, pour se rendre compte à quel point nous en sommes rendu: un système dont nous étions si fiers jusqu'au 12 septembre 1994, qui a été saccagé depuis trois ans. Et ces gens-là se lèvent à l'unanimité pour applaudir le ministre de la Santé et des Services sociaux, auteur de ce saccage-là.

(23 h 40)

Le député de Saint-Jean, par exemple, député du Parti québécois, lui, il a eu le courage de ses convictions, lui, il a eu le courage de dire: Je me lève en cette Chambre, je défends les intérêts de mes commettants, de mes citoyens, ils me demandent de les représenter à l'Assemblée nationale et de dire au ministre de la Santé et au premier ministre du Québec: Ça n'a pas de bon sens, ce que vous êtes en train de faire. Cet homme-là a eu le courage et, lui, il mérite nos félicitations, nos applaudissements. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Le prochain intervenant, le député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Je profite de l'occasion du débat sur le projet de loi n° 176 puis un peu à la veille de la période des Fêtes pour faire une rétrospective dans le domaine de la santé, mais dans mon comté. Vous vous souviendrez, M. le Président, au printemps, je me suis levé à plusieurs reprises pour questionner le ministre de la Santé sur des problèmes que vivait ma région, et je profite de l'occasion pour lui faire une rétrospective de l'année, ce qui va faire une image assez succincte mais claire des deux ou des trois dernières années du ministre de la Santé actuel.

Donc, M. le Président, vous vous souviendrez, puis surtout les gens de mon comté vont se souvenir des problèmes vécus par la population, découlant des décisions du ministre de la Santé. On se souviendra, M. le Président – et je pense que le meilleur exemple que je puisse prendre, c'est celui que j'ai vécu moi-même – le député de Robert-Baldwin avait posé une ou deux questions, ici, au ministre de la Santé sur des problèmes de salles d'urgence. On sait que, partout au Québec, dans la région de Montréal, dans la région de Québec et aussi chez nous, à Granby, on a vécu des problèmes dans les salles d'urgence.

M. le Président, au mois de mars, un bon matin, ma mère m'appelait. Elle était tombée, le matin, dans la cour. On a dû se rendre à l'hôpital à 9 heures, le matin, au centre hospitalier de Granby. Je suis arrivé à l'hôpital: Par chance, on s'est dit, on devrait passer vite, on est juste cinq ou six, ici. C'est ce qu'on s'est dit, les cinq ou six, pendant une heure, deux heures, trois heures, quatre heures, cinq heures. Pendant 11 heures de temps, M. le Président, on est resté six dans la salle d'urgence, pour avoir des services seulement tard le soir. Donc, d'une chaise à l'autre, d'un moment à l'autre, on attendait toujours de passer, et rien ne se passait.

Quelques jours plus tard, naturellement, je suis intervenu dans le dossier en posant la question au ministre et particulièrement, avant, aux gens de l'hôpital: Qu'est-ce qu'il se passe? Les médecins ont répondu tout simplement que les compressions dans le domaine de la santé ont fait en sorte qu'ils n'avaient plus les moyens d'utiliser le personnel nécessaire pour donner des services que je qualifierais d'essentiels à la population. On est intervenu ici à plusieurs reprises. On est venu à bout de faire ajouter un médecin à la salle d'urgence, à Granby. Sauf que le problème demeure entier. Il arrive souvent, très souvent, je dirais quotidiennement que des gens doivent attendre des heures, des cinq ou des six heures. Donc, M. le Président, lorsqu'on est en région et que les centres hospitaliers sont éloignés les uns des autres, je pense qu'il est primordial de donner des services de santé auxquels les citoyens ont droit.

Quelques semaines plus tard, on s'est retrouvé, à Granby, avec une pénurie d'anesthésistes. Le ministre s'en souvient sûrement, on en a discuté ici, à l'Assemblée nationale, on en a discuté en commission parlementaire. Le ministre se souviendra qu'on en a discuté en arrière du trône, dans une conversation beaucoup moins détendue, je dirais. Mais, par contre, on a eu ce problème-là durant des mois. On a posé des questions au mois de mars, on a posé des questions au mois d'avril, on se faisait répondre toujours: Oui, mais, voyez-vous, on va régler ce problème-là éventuellement, des anesthésistes, on va en avoir l'an prochain, il va en sortir 14 ou 15 de l'université. Sauf que le problème qu'on avait, M. le Président, c'est qu'on en avait besoin, souvent, pour la semaine d'après. Il y a des fins de semaine où on n'avait plus d'anesthésistes dans un centre hospitalier qui dessert environ 100 000 personnes. Donc, M. le Président, je pourrais dire que la panique s'est installée auprès de la population et surtout auprès des médecins, parce que les médecins, même...

D'ailleurs, ici, à l'Assemblée nationale, j'avais posé la question, à savoir quand on était pour avoir des soins d'anesthésistes dans le comté de Shefford. Et, là-dessus, je me référais à des opinions bien arrêtées de médecins dont j'avais repris les propos cités dans le journal La Voix de l'Est , à Granby. Et je vous cite les propos du Dr Roy, à Granby, qui disait clairement que: «Le pire peut arriver, comme des accouchements dans des ambulances, on a frisé la catastrophe.»

Donc, M. le Président, lorsque j'ai dit ça au ministre de la Santé, tout ce qu'il a trouvé à me dire, c'est: M. le député de Shefford, ne faites pas paniquer la population. M. le Président, il est de toute évidence que ce sont les médecins... Je rapportais ici les propos des médecins, les propos aussi des dirigeants d'hôpitaux, du conseil d'administration et les propos de la population.

Donc, M. le Président, il a fallu intervenir à plusieurs reprises. On est intervenu dans un débat du vendredi. Les médecins du centre hospitalier de Granby ont fait signer une pétition à la population. Ils ont fait signer la pétition à 14 000 personnes en l'espace de trois jours. Il a fallu se rendre à la régie régionale pour faire pression sur le ministre. Le ministre nous disait toujours qu'il n'y avait pas de problème. Même la population, les gens se sont regroupés pour intervenir et ont écrit au ministre pour le rencontrer. Le ministre se souviendra qu'au mois d'avril il a reçu, par fax, un communiqué de M. Marcel Maheu, du Club du lundi, qui a regroupé un tas de jeunes de la région. Il disait: «Comme vous devez sûrement le savoir – on se demandait s'il le savait ou pas – notre CHG vit des moments très inquiétants pour la population de Granby et des environs. Cette situation est créée par une pénurie d'anesthésistes et c'est un problème aussi criant qu'extrêmement urgent. Il en va de la santé de nos gens et rien ne devrait être plus prioritaire.» Ainsi de suite dans la lettre, M. le Président, et le ministre n'a toujours pas réagi à ce moment-là. Il a réagi seulement à la dernière minute, lorsque les services d'anesthésistes étaient pour ainsi dire interrompus au centre hospitalier de Granby.

Alors, M. le Président, encore là, le centre hospitalier et les gens en région... Parce qu'on ne le souligne pas assez souvent. On parle souvent des grands centres de Montréal, de Québec, mais on ne parle pas souvent des régions. Lorsque vous êtes en région éloignée... Granby n'est peut-être pas nécessairement une région éloignée au sens où on l'entend, sauf qu'il est plus facile pour un spécialiste, par exemple, de pratiquer dans un grand centre que dans un centre en région, ce qui fait en sorte qu'on puisse avoir des pénuries d'anesthésistes et d'autres spécialistes.

Aussi, dans les mêmes semaines, un autre article du journal La Voix de l'Est citait une infirmière enseignante au cégep de Granby, qui disait: «Pénurie d'infirmières à l'horizon.» Par la même occasion, je crois la même journée, on était en commission parlementaire, et j'en profitais, m'inspirant de l'article du journal La Voix de l'Est et m'inspirant de Mme Juaire, une infirmière qui enseigne au cégep de Granby, qui disait que: «Une pénurie d'infirmières pourrait survenir à moyen terme dans les établissements de santé de la région en raison des compressions récurrentes faites dans le réseau de la santé et d'un désintérêt manifeste pour les programmes de soins infirmiers, comme celui du cégep de Granby ou de Yamaska.» Donc, je me suis présenté à la commission parlementaire pour vérifier les dires de l'infirmière et le ministre, on s'en souviendra, nous a dit: Bien voyons donc! il n'y a pas de problème, au Québec, il y a 10 000 infirmières de trop. Bien, 10 000 infirmières de trop, c'est contraire à ce que disait cette infirmière du cégep de Granby, c'est contraire à ce que disait la présidente des infirmières du Québec.

On va un petit peu plus loin, M. le Président, et je me suis adonné à lire le programme du PQ, en 1994. D'ailleurs, dans une entrevue donnée au même journal, on pouvait constater, à la lecture du programme du PQ qui disait, en 1994... Le ministre actuel était naturellement candidat, en 1994, et on peut lui rappeler son programme qui disait: «Actuellement, la profession d'infirmière est en difficulté», lit-on dans le programme péquiste – ça, c'est écrit dans le journal. «Il y a une pénurie de personnel des soins infirmiers dont les causes sont nombreuses: précarité des conditions de travail, souvent pour des raisons budgétaires, surcharge de travail, mauvaise complémentarité des rôles professionnels.»

Donc, M. le Président, on peut présumer que le ministre actuel avait contribué à la rédaction du programme du Parti québécois, puisque le député de Joliette tantôt nous disait: On le connaissait depuis 10 ans, on est allé le chercher pour appliquer son rapport. Sauf que, M. le Président, on dit, dans leur propre programme en 1994, qu'il y avait pénurie d'infirmières, et lui nous dit qu'il y en a 10 000 de trop. Il semble que... Et, encore dernièrement, on nous disait, à la Corporation des infirmières du Québec, qu'il y a une pénurie d'infirmières. Donc, à qui faut-il se fier? Naturellement, les sondages nous disent que la population nous dit qu'il ne faut pas se fier au ministre de la Santé.

(23 h 50)

Vous me dites, M. le Président, qu'il me reste à peine une minute. J'aurais aimé vous parler des problèmes régionaux, par exemple les problèmes d'un vrai virage ambulatoire, des problèmes auxquels les gens qui sont retournés à la maison sont considérés... ont peu de services.

Vous me dites que c'est terminé. Mais, par contre, M. le Président, j'aimerais vous souligner que les gens dans nos bureaux de comté, contrairement à ce que dit le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, contrairement à ce que nous dit le député de Joliette, les gens sont inquiets et insatisfaits, et on a des appels par dizaines aux bureaux de comté. Je vous laisse là-dessus, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Shefford. Alors, le prochain intervenant, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. J'interviens encore ce soir sur le projet de loi n° 176. Dire qu'un projet de loi de trois articles amène de si longs débats, c'est probablement que, comme je le disais, c'est souvent dans les plus petites choses qu'on cache les plus grands changements. M. le Président, parler sur un projet de loi qui amène le désengagement d'un ministre, je vous dirais que ce n'est pas quelque chose qui est très plaisant. On entend souvent les gens parler de la nécessité de revaloriser le rôle du député, de revaloriser le rôle du ministre. Ce qu'on nous propose là-dedans, c'est exactement le contraire. Puis on nous demande, à nous, députés: Soyez d'accord avec ça. Puis ça a l'air que ça a convaincu une partie de la Chambre, parce qu'une partie de la Chambre, M. le Président, au gouvernement, ne dit pas un mot. On n'entend rien là-dessus. Puis, encore une fois, le train est en train de leur passer dessus.

M. le Président, tantôt, j'écoutais avec intérêt, comme toujours, le député de Joliette, et la question qui m'est passée par la tête, c'était: Combien ça va lui donner à lui, là, le budget de 5 000 000 $ pour faire l'image du ministre? Combien il va en mettre dans ses poches, là-dedans, avec le show qu'il vient de nous donner ici? Il y en a sûrement une bonne partie qui va y aller parce que c'était quand même bon. Pour redorer l'image du ministre puis convaincre ses collègues péquistes qu'ils ont raison, qu'il continue, il a fait vraiment une bonne job là-dessus, puis je pense que le ministre devrait dire un bon mot pour l'aider dans ses démarches au niveau des CLD et les autres, aider son collègue des Ressources naturelles, lui rendre la pareille à ce niveau-là. On parlait d'un show à 600 000 $ les manches roulées. Là, c'est un show à 5 000 000 $ avec des raisins, des raisins verts

M. le Président, je vais vous dire une chose: cette fameuse publicité-là, cette démarche-là, les gens n'en reviennent pas. Ils se disent: Ça n'a pas de bon sens, des choses comme ça. Comment un gouvernement sérieux, qui a une supposée compassion, puis qui pleure quasiment à toutes les fois qu'il répond à une question dans le domaine de la santé, peut autoriser que, d'un côté de la bouche, on ferme des hôpitaux, qu'on coupe, puis ce n'est pas grave, puis il n'y a pas de problèmes, puis que, là, on continue, et puis que, de l'autre, on se tape une publicité de 5 000 000 $ – 5 000 000 $, M. le Président – pour redorer l'image de quelqu'un?

Moi, j'ai écouté tous les débats depuis le début puis j'étais impatient d'entendre le député de Saint-Jean parler là-dessus. Probablement qu'il s'est tellement fait taper sur les doigts la dernière fois quand il a posé une question en Chambre, comme le rappelait mon collègue de Marquette, que non seulement ils lui ont coupé les doigts, mais ils ont coupé le fil de son micro aussi, puis il n'y a plus moyen de poser de questions, de faire quelque intervention que ce soit. Pourtant, il était très pertinent et il démontrait énormément de courage parce qu'il défendait sa population. Et, moi, je vais vous dire une chose. Si ses enfants étaient fiers de lui quand il arrivait le soir puis qu'ils disaient: Papa, tu as dit la vérité, bien, je vais vous dire une chose, je pense que les enfants des députés gouvernementaux actuellement, j'espère qu'ils sont couchés, j'espère qu'ils sont couchés puis qu'ils ne les attendent pas parce qu'ils ne pourront pas dire ça mais qu'ils arrivent. J'espère qu'ils dorment bien parce que ce n'est certainement pas ce soir qu'ils vont leur dire qu'ils ont dit la vérité aujourd'hui, parce que non seulement ils n'ont pas dit la vérité aujourd'hui, mais ils n'ont rien dit en plus. C'est-u assez loin, M. le Président?

On entend, M. le Président, puis j'ai eu l'occasion de l'entendre dans plusieurs débats depuis le début de la session et de mon arrivée à l'Assemblée nationale, l'ineffable et, je dirais, l'impayable et sûrement pas assez payé député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, ah oui! qui s'applaudit lui-même. Il faut être rendu assez au bout du rouleau, s'applaudir lui-même, là. C'est parce qu'il n'y a pas grand applaudissements qui fusent d'ailleurs. Mais en tout cas. M. le Président, cette personne-là a déjà dit, dans un débat sur la loi sur Montréal, que couper les services... il n'est pas intervenu là-dessus, défendre Montréal, ce n'est pas grave, c'est normal, on n'augmente pas les taxes, on coupe les services. On dit au monde: Vous ne payerez pas plus cher de taxes, mais achetez-vous une pelle puis pelletez votre trottoir vous-mêmes.

Mais là aujourd'hui sur l'hôpital Notre-Dame, débrayage, pas un mot! La dernière fois qu'il a parlé sur la santé, c'était pour parler de tires de chars, de flancs blancs puis de limousines. Je comprends que ça fait longtemps qu'il rêve à ça, M. le Président, mais là c'est un débat sur la santé. Il y a toujours bien des limites à parler de ça.

Mais sûrement, toujours dans cette ligne de pensée là, M. le Président, je le comprends de ne pas parler à ce niveau-là, parce qu'à entendre le règlement de comptes qu'a donné en public le député de Joliette, ça doit être beau dans les caucus, puis ça doit être beau, un moment donné, quand vient le temps de former un cabinet ou pas. Et je comprends le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques de ne pas dire un mot là-dessus, de ne pas défendre ses commettants puis les gens de son comté qui sont touchés par le conflit à l'hôpital Notre-Dame. Mais ça démontre qu'il a quand même certaines ambitions: c'est qu'il a l'ambition de monter au cabinet un jour. Mais je vais vous dire une chose: Avant d'avoir l'ambition de monter au cabinet, il devrait avoir l'ambition de servir sa population puis de s'assurer qu'elle le réélise à la prochaine élection, parce que s'il continue de défendre comme ça son gouvernement, puis des politiques comme ça, puis des projets de loi comme ça au lieu de défendre sa population, pas sûr qu'il va être là encore longtemps, pas sûr.

Mais, M. le Président, le projet de loi qu'on a devant nous, trois articles où on nous dit: Ne vous en faites pas, ça ne veut pas dire grand-chose. Ça fait trois ans qu'on entend le même discours au niveau de la santé. On nous disait la même chose au niveau des fermetures d'hôpitaux: c'est l'opposition qui panique, c'est des rumeurs, c'est des faussetés, ce n'est pas vrai, les fermetures d'hôpitaux. Ils peuvent bien applaudir, ils en ont fermés... Le pourcentage d'erreur de l'opposition, en ce qui a trait aux hypothèses de fermeture des hôpitaux, est pas mal plus précis que ce qui a pu être dit de l'autre côté au niveau de la santé, depuis trois ans.

M. le Président, il y a une nécessité de dire, à un moment donné: On va prendre nos responsabilités et on va cesser de dire et de faire n'importe quoi. Le projet de loi qui est devant nous vient dire concrètement, vient démontrer concrètement qu'on a abandonné. Moi, j'ai toujours pensé, et j'en ai toujours la conviction, que ce n'est pas complètement de la faute du ministre de la Santé ce qui arrive, parce que j'ai vraiment la conviction que, s'il a perdu le contrôle de ce domaine-là, ce n'est pas de sa faute, mais c'est de la faute de ses grands argentiers, de ses grands économistes, du ministre des Finances, du président du Conseil du trésor, et que c'est eux, vraiment, qui contrôlent le ministère de la Santé et qui, je dirais, le mot n'est pas trop fort, siphonnent le ministère de la Santé. On doit être à la vielle de créer un fonds là aussi. Peut-être qu'en en parlant en Chambre, ça va leur donner l'idée puis ça éviterait bien des maux de tête. En créant un fonds non seulement il n'y aurait plus de responsabilités, mais il n'y aurait plus d'argent directement non plus. Ça fait que la vie serait belle, et il resterait juste à se faire élire dans Sainte-Marie–Saint-Jacques.

Mais, M. le Président, on a entendu ces gens-là venir nous dire: Il n'y aura plus de coupures. En région, dans les centres hospitaliers – j'ai eu l'occasion d'en visiter, chez nous, dans mon comté – on n'a plus la masse de critique pour garder les chirurgiens, on ferme des lits, on ferme des services, la survie des hôpitaux est remise en question, puis on a le culot de venir annoncer 2 000 000 $ pour faire du ciment dans l'hôpital. Et selon la bonne vieille technique en campagne d'élections partielles, on le fait annoncer par un autre ministre pour être sûr qu'on n'aura pas à répondre là-dessus. Puis le changement comme ça. Puis pouf! c'est ça qui fait qu'après les élections il y a des engagements qui ne tiennent plus puis qu'on se fait dire: Bien, ne vous en faites pas avec ça, de toute façon ils vont pouvoir le réannoncer deux, trois fois encore avant que ça se réalise vraiment. Mais le monde dans l'hôpital quand ils voient ça, ces investissements-là au niveau du ciment, ils disent: Aie, «faut-u» être assez inconséquent. D'un côté on coupe, on veut fermer l'hôpital puis on remet toute la survie en question, puis de l'autre côté on investit dans le ciment, puis envoye! Puis là on continue dans ce domaine-là.

M. le Président, un peu de cohérence. Ce projet de loi signifie que le ministre de la Santé a plié les genoux, a décidé d'abandonner, mais je pense que ça serait le temps que la préoccupation revienne sur les patients, les gens qui travaillent dans les hôpitaux et non pas sur une campagne d'image, une campagne de publicité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Étant donné l'heure, minuit, nous ajournons nos travaux à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à minuit)


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