To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Assembly Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the National Assembly

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the National Assembly

Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Tuesday, December 9, 1997 - Vol. 35 N° 145

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Président: Mmes et MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.

Alors, avant de débuter la séance, je voudrais communiquer aux membres de l'Assemblée une bonne nouvelle. Il me fait plaisir de vous informer que l'Assemblée nationale sera l'hôte, du 2 au 12 décembre 1999, de l'assemblée annuelle du Council of State Governments. Cette association regroupe des parlementaires des Assemblées des 50 États et des territoires des États-Unis et réunit près de 1 500 délégués. L'Assemblée nationale du Québec est membre de cette association internationale. Cette nouvelle m'a été annoncée en fin de semaine par trois de nos collègues, à savoir M. Robert Kieffer, député de Groulx, M. Norman MacMillan, député de Papineau, et M. Jean-Guy Paré, député de Lotbinière, qui participent actuellement, aux États-Unis, à la réunion du comité de direction de cette organisation interparlementaire qui, incidemment, fut l'un de nos principaux partenaires pour la Conférence parlementaire des Amériques.


Affaires courantes

Alors, aux affaires courantes, déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.


Dépôt de documents

Nous en arrivons, à ce moment-ci, au dépôt de documents. Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Rapport annuel de la Société de télédiffusion du Québec

Mme Beaudoin: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 de la Société de télédiffusion du Québec.

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Rapport annuel sur la procédure d'examen des plaintes de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de la Côte-Nord

M. Rochon: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 sur l'application de la procédure de traitement des plaintes de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de la Côte-Nord.

Le Président: Ce document est également déposé. M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


Rapport annuel du Bureau de révision en immigration

M. Boisclair: Oui, M. le Président. Je dépose le rapport annuel 1996-1997 du Bureau de révision en immigration.


Rapport annuel du Protecteur du citoyen

Le Président: Ce document est déposé. Pour ma part, je dépose d'abord, conformément à l'article 29 de la Loi sur le Protecteur du citoyen, le rapport annuel du Protecteur du citoyen pour la période du 1er avril 1996 au 31 mars 1997.


Rapport de mission de la 22e assemblée générale annuelle de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada

Je dépose également le rapport de mission concernant la 22e assemblée générale annuelle de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada tenue à Saint-Jean, Terre-Neuve, les 20 et 21 juin dernier. Cette mission était sous la responsabilité de M. le député de Saint-Hyacinthe qui était accompagné de Mme la députée de Chapleau.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commission, M. le président de la commission de l'administration publique et député de Westmount–Saint-Louis.


Vérification des engagements financiers de différents ministères

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la commission de l'administration publique qui a vérifié près de 8 000 engagements financiers sur les 12 500 dont elle a hérité au début de son mandat, au début d'avril. La commission a effectivement siégé le 28 octobre 1997, les 4, 12, 13, 18, 19, 20, 25 et 26 novembre 1997 afin de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère du Revenu, du ministère des Affaires municipales, du ministère des Finances, du ministère de l'Environnement et de la Faune pour les mois de janvier 1996 à mars 1997, du ministère des Relations avec les citoyens pour les mois de janvier 1995 à mars 1997, du ministère des Ressources naturelles, secteur énergie pour les mois de janvier 1995 à mars 1997 et secteur administration et forêts pour les mois de janvier à décembre 1995, du ministère des Transports pour les mois de décembre 1996 à janvier 1997, du ministère de la Sécurité publique pour les mois de novembre 1995 à mars 1997, du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie pour les mois de mars 1996 à mars 1997 et du ministère de la Culture et des Communications pour les mois de janvier à mars 1997.

M. le Président, il reste 4 700 engagements financiers, et je souligne aux deux leaders que ces engagements financiers pourront être étudiés après les Fêtes s'il y a reconduction du mandat de la commission après le 21 décembre. Merci.

Le Président: Très bien. Alors, ce rapport de commission est déposé. M. le président de la commission des finances publiques et député d'Arthabaska. M. le vice-président, M. le député de l'Acadie.


Étude détaillée du projet de loi n° 178

M. Bordeleau: Oui, au nom du président, étant donné l'absence du président, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé le 4 décembre 1997 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 178, Loi sur l'abolition de certains organismes. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

(10 h 10)

Le Président: Alors, ce rapport est également déposé.

Il n'y a pas, aujourd'hui, de dépôt de pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise à ce moment-ci qu'après la période des questions et des réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion sans préavis de Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité et ministre responsable de la Condition féminine.


Questions et réponses orales

Ça nous amène immédiatement à la période des questions et des réponses orales. Mme la députée de Bourassa, en principale.


Rôle des organismes communautaires dans la réforme de la santé et des services sociaux

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, le Regroupement des organismes communautaires de Québec lançait un cri d'alarme à l'intention du ministre de la Santé. Les cris de désespoir se lisaient comme suit, et je cite: Trop, c'est trop! On est à bout! Le ministre parle de cas isolés; ce n'est pas vrai, c'est partout pareil. Le communautaire n'est pas la poubelle du réseau de la santé. Le virage est un échec. C'est un dérapage, pas un virage.

M. le Président, le ministre est-il conscient – et c'est ce qui est le plus troublant – qu'avec sa fameuse réforme soi-disant prévue et planifiée dans les moindres détails, des bénévoles, pour des raisons humanitaires, sont contraints de poser des actes qui sont du ressort exclusif des professionnels de la santé? Le ministre est-il conscient des torts que cela peut causer aux personnes malades?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Oui, M. le Président. Les groupes communautaires jouent, depuis plusieurs années, depuis au moins 15 ans et un peu plus, un rôle important et un rôle grandissant dans le réseau de la santé et des services sociaux. C'est un des trois partenaires essentiels de ce qu'on s'entend pour désigner comme les services de première ligne. Il y a les établissements publics, les CLSC, les soins de longue durée, il y a les médecins dans leur cabinet et les groupes communautaires.

Bien sûr, les demandes sont grandes, sont grandissantes, et il y aura besoin de continuer à donner plus de moyens d'action, plus de ressources, plus d'argent aux groupes communautaires. Maintenant, il faut quand même remarquer que, malgré des difficultés qui peuvent exister présentement, au cours des trois dernières années, malgré les compressions importantes qui ont dû être faites dans tout le réseau, un des rares secteurs où on a réinvesti, ça a été tout le secteur de la première ligne, y compris les groupes communautaires, qui ont vu leur budget augmenter de l'ordre de 40 % au cours des trois dernières années.

Pour certains des groupes communautaires, par exemple tout le réseau des centres d'hébergement pour des femmes victimes de violence, ça a été une priorité. Et la première année de réallocation d'argent a permis de compléter ce réseau-là et de le consolider. Alors, il y a encore de la place, là comme ailleurs, pour de l'amélioration, mais il y a un grand bout de chemin de fait.

Et, à ce que je sache – il faut faire attention, là – je ne connais pas de situation où les CLSC, qui ont vu aussi une augmentation de leur budget de l'ordre de 15 % à 20 %, sont obligés de se décharger auprès des organismes communautaires pour des services qui doivent être rendus par des professionnels. S'il y a des situations comme ça qu'ont notées des groupes communautaires, je pense qu'ils savent très bien à qui s'adresser, au CLSC, à la régie régionale ou au ministère, pour s'assurer que ça ne devienne pas une habitude. Quand il y a de la collaboration des partenaires, parfois un ou l'autre peut aider l'autre partenaire à faire face à une urgence, ça, c'est possible. Mais, à ma connaissance, il n'y a pas de glissement et, si c'était le cas, je demande aux groupes communautaires de les signifier à qui de droit et on va s'occuper de corriger la situation, je vous l'assure, M. le Président.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, Jean-Robert Sansfaçon, éditorialiste au...

Le Président: Est-ce que vous êtes en principale, Mme la députée? Très bien.


Exigences du virage ambulatoire et du maintien à domicile pour les familles, et plus spécialement les femmes

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, Jean-Robert Sansfaçon, éditorialiste au Devoir , dans un article qu'il signait le 24 avril 1995 sur le virage ambulatoire, écrivait, et je cite: «Qu'on ne s'y méprenne pas, les femmes ne vont pas accepter de reprendre leur rôle traditionnel d'infirmière et de servante à temps plein au service des malades et des personnes âgées.» Fin de la citation.

Or, des recherches récentes, notamment celles de la professeure Nancy Guberman, de l'Université du Québec à Montréal, de Sylvie Lauzon, professeure à l'Université de Montréal, ainsi que celle de l'Association canadienne pour l'avancement de la science, confirment que ce sont bel et bien des femmes, dans une proportion pouvant aller de 70 % à 80 %, qui font les frais du virage ambulatoire en sacrifiant leur vie personnelle, leur vie sociale et leur vie familiale, ce qui les confine dans une détresse psychologique extrêmement importante.

Question, M. le Président: M. le ministre de la Santé est-il conscient du fardeau qu'il impose aux femmes du Québec?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, effectivement, dès le début de la consolidation des services de première ligne, de l'augmentation des ressources au niveau des communautés locales, d'un apport et d'un support plus grands de nos familles pour que les gens qui ont des problèmes de santé puissent être le plus possible dans leur milieu naturel, dès le début de toute cette transformation, on a souligné qu'il fallait faire très attention, que la répartition traditionnelle et historique des rôles entre l'homme et la femme dans une famille pourrait risquer d'entraîner une charge que les femmes seraient seules à assumer.

Je pense qu'il faut bien reconnaître là-dedans qu'il y a d'abord à réconcilier la volonté de vouloir garder les gens dans leur milieu, la volonté d'aider les familles à jouer pleinement leur rôle auprès des membres de la famille et auprès des proches et d'apporter un soutien adéquat, et la participation que les membres de la famille, selon le cas, acceptent et peuvent faire dans de telles situations, et s'assurer que la répartition se fait correctement entre les membres d'une famille.

Tout ça, c'est un processus de changement et d'évolution. Le risque que nos vieilles façons d'agir traditionnelles reprennent le dessus et désavantagent les femmes est réel, nous en sommes très conscients. Et je peux vous assurer, M. le Président, que tout est fait pour s'assurer qu'à mesure qu'on avance les réajustements nécessaires sont faits, et que les femmes ne soient pas pénalisées, et, au contraire, comme elles sont très importantes dans le réseau de la santé et des services sociaux, qu'elles occupent la majorité de la plupart des postes, que ce virage-là puisse devenir plutôt à leur avantage qu'à leur désavantage.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, en complémentaire.

M. Johnson: Oui. Est-ce que le ministre se rend compte qu'il est passé à côté de la question de fond, qui n'est pas de savoir quels sont les soutiens que le ministère, les technocrates et les bureaucrates du ministère peuvent donner à des femmes qui sont employées, embauchées soit dans les hôpitaux soit dans les CLSC? Ce qu'on est en train de soulever, c'est le report sur les épaules des femmes à la maison, au foyer, dans leur famille des obligations qui autrefois incombaient à la mission même de l'État qui était de soutenir les gens qui ont besoin de soins, de soutenir les gens qui ont besoin de services et non pas de se décharger de sa responsabilité sur les femmes du Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Je ne pense pas être passé à côté de la question, M. le Président; j'ai donné un peu plus d'informations. Mais, si les oeillères empêchent de voir en dehors de la stricte question posée, ça, c'est un autre problème. Je dis que, d'une part, la transformation du réseau va bénéficier à ses employés et que les femmes en sont une partie importante. L'aide à la famille et le soutien à la famille sont excessivement importants. On est très conscient qu'il y a là un risque et que, peut-être, dans certains cas, il y a des femmes qui ont dû assumer des responsabilités accrues.

Le risque est là, mais c'est beaucoup relié parce que, dans notre société, on veut en même temps que les familles gardent plus les gens, que les gens soient plus dans leur milieu, soient plus dans le milieu familial et qu'on soutienne les familles; ça, c'est une chose qu'on veut. C'est sûr que ça a un certain impact dans l'ajustement d'une famille qui, pour un moment donné, doit aider à s'occuper de quelqu'un qui est malade. Ou bien on envoie les gens dans un établissement, ou bien on les aide dans leur milieu naturel. Si on les aide dans leur milieu naturel, on aide la famille, et la famille s'implique. Et, socialement, on n'a pas toujours bien réparti les rôles. Et il y a une évolution importante là-dedans.

Ce que je dis, M. le Président, c'est qu'on est conscient des difficultés et des risques. Les études qui peuvent être faites viennent apporter un éclairage là-dessus, et il nous faut... Ce n'est pas parce qu'il y a des risques qu'il faut refuser d'avancer. On a connu ça pendant assez d'années, la peur d'avoir peur, qu'on n'a pas bougé. Là on avance. Alors, on avance, on identifie les risques, on identifie les problèmes et on les règle à mesure qu'on avance. Et celui-là en est un important qu'on a bien à l'oeil, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, le ministre vient de récidiver, il vient de redire que ce sont les femmes qu'on retrouve dans le secteur public qui sont en première ligne. Deuxièmement, il évoque: On veut – un «on» indéfini – que les gens soient davantage pris en charge par leur famille. Qui veut ça, à part le ministre pour des raisons d'économie, sur le dos des femmes du Québec? C'est ça.

(10 h 20)

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Là je pense que la track dérape de l'autre côté. Il y a un consensus, à ma connaissance, dans notre société, pour dire que le plus possible les gens vivent dans leur milieu, dans leur famille, dans leur communauté et qu'au lieu d'amener des gens dans des établissements pour de longues périodes de temps le plus possible on apporte du support à la famille. Et ça, c'est ajusté selon les familles. Il y a des familles qui peuvent, qui veulent, qui sont organisées pour le faire, d'autres qui sont dans des circonstances trop difficiles et qui ne peuvent pas faire ça. Il n'y a pas de mur-à-mur dans ce cas-là. Et, quand une famille souhaite garder quelqu'un ou que quelqu'un retourne dans son foyer, tous les efforts sont faits avec le maintien à domicile pour que des professionnels, infirmières ou autres professionnels, soient là pour les aider et donnent les soins professionnels. Il y a un développement important qui se fait du côté des services domestiques, entre autres, par l'économie sociale. Il faudra se rappeler que, lors du Sommet sur l'économie et l'emploi, il y a eu 80 000 000 $ d'investis pour développer de nouvelles entreprises d'économie sociale qui vont travailler avec les CLSC pour apporter de l'aide domestique. Il y a un développement très important qui se fait.

Alors, encore une fois, je ne passe pas à côté de la question. Je sais que le risque existe, que, si les services ne suivent pas, la famille peut devoir en prendre trop grand. Mais il n'y a pas de mur-à-mur qui est fait. Et les transferts de ressources, malgré des périodes de compressions, ont été très importants, de l'ordre de 20 %, sur l'ensemble de la première ligne. Alors, il y a de l'amélioration qui se fait là, et je pense qu'on répond à ce que les gens demandent fondamentalement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Frontenac.


Enquêtes de la Sûreté du Québec et de la Commission d'accès à l'information sur la divulgation de renseignements personnels

M. Lefebvre: En principale, M. le Président. M. le Président, dans l'affaire de la violation des renseignements personnels, on apprend ce matin que deux ex-fonctionnaires, un fonctionnaire d'Hydro-Québec et un fonctionnaire du ministère du Revenu, sont poursuivis, suite au travail de la Sûreté du Québec, pour abus de confiance envers le gouvernement, crime prévu, M. le Président, au Code criminel et passible de cinq ans d'emprisonnement. Alors, ce n'est pas des poursuites à la loi d'accès à l'information ni des poursuites en vertu de la loi du ministère du Revenu. La Sûreté du Québec, en faisant son enquête, a interrogé, questionné, a perquisitionné et a conclu qu'il devait y avoir poursuite, et il y a poursuite au Code criminel, M. le Président.

La Commission d'accès à l'information, entre- temps, a reçu un mandat. C'est quoi, le mandat de la Commission d'accès, M. le Président? C'est de faire enquête relativement à l'ensemble des mesures de sécurité concernant les renseignements personnels, de faire une évaluation de l'état et de l'efficacité des systèmes et, finalement, de faire rapport dans les meilleurs délais. M. le Président, entre-temps, les présumés criminels, pour des infractions semblables, les présumés criminels que l'on retrouve dans l'entourage du premier ministre, n'auront...

Le Président: M. le député de Frontenac, là, vraiment, il faut faire attention. D'abord, les dispositions de l'article 35.3° sont claires sur les paroles interdites: «Le député qui a la parole ne peut parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un organisme quasi judiciaire, ou qui fait l'objet d'une enquête, si les paroles prononcées peuvent porter préjudice à qui que ce soit.»

Je pense que, depuis le temps qu'on aborde ce dossier-là à l'Assemblée nationale, il y a deux éléments: il y a le dossier qui concerne les fonctionnaires dans différents ministères, suite aux enquêtes de la Sûreté du Québec et qui ont été initiées, comme tout le monde le sait, dans les circonstances que l'on connaît, et il y a également cette autre affaire qui a été transférée à la Commission d'accès à l'information.

En l'occurrence, dans ce cas-ci, il n'y a pas d'accusations et on ne peut pas donc indiquer qu'il y a des présumés criminels. À ce moment-ci, tous les gens qui ont à témoigner devant la Commission ont à le faire en toute liberté et sans préjudice, de quelque façon que ce soit, qui pourrait être porté par des membres de l'Assemblée nationale. Alors, je vous demande de reformuler votre question correctement, en respectant les dispositions de l'article 35 et en faisant très attention de ne pas porter préjudice à qui que ce soit, en l'occurrence des gens qui peuvent être appelés à témoigner devant la Commission d'accès à l'information.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, vous avez commencé en disant que c'étaient des paroles interdites. Donc, en conséquence, le député devrait non seulement reformuler, mais retirer complètement les accusations.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président, sauf tout le respect qui est dû à la présidence, c'est la première fois qu'un président de l'Assemblée nationale interprète l'article 35.3° comme vous venez de le faire. Habituellement, quand il est question d'éléments criminels, la présidence est beaucoup plus sévère sur l'application de 35.3° que lorsqu'il s'agit d'enquêtes administratives. Au moment où nous nous parlons, le député de Frontenac a été très prudent sur les accusations criminelles dont il est question, il a tenté d'ouvrir sur l'autre aspect, et c'est à ce moment-là que vous l'avez interrompu, laissant les fonctionnaires et les autres membres qui sont au criminel à l'abri de 35.3°, mais en protégeant davantage le bureau du premier ministre comme vous venez de le faire pour la deuxième fois.

Le Président: Je pense, M. le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition officielle, que vous m'avez très mal compris et je vais être assez clair pour que vous me compreniez cette fois-ci. Ce que j'ai indiqué, c'est que, quand le député de Frontenac, faisant allusion à l'enquête qui a été confiée à la Commission d'accès à l'information, parle de gens comme des présumés criminels, j'indique qu'il enfreint l'article 35.3°. C'est ce que j'ai indiqué, et je n'ai pas du tout indiqué qu'il ne pouvait pas utiliser ces termes-là par rapport à des gens qui, actuellement, ont été l'objet d'une enquête de la Sûreté du Québec et qui, maintenant, devront comparaître devant les tribunaux. Cependant, ces gens-là ont droit aussi à la présomption d'innocence, et le sub judice, à ce moment-là, s'applique intégralement selon nos règles de procédure en ce qui les concerne parce que, en matière criminelle, nos règles ont fait... Et c'est nous qui nous sommes imposés cette restriction à notre immunité parlementaire, et, quand quelqu'un est accusé au criminel, nous nous interdisons de faire quelque commentaire que ce soit. Alors, en l'occurrence, j'ai indiqué au député de Frontenac que je voulais qu'il reformule sa question.

M. le leader du gouvernement, je pense que, dans les commentaires, j'ai été assez clair pour indiquer que je n'approuvais pas ces propos, que non seulement je ne les approuvais pas, mais que je lui demandais de reformuler la question de telle sorte que ces propos ne puissent être à nouveau répétés à l'Assemblée nationale.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, je crois que notre principe de justice indique que, au départ, toute personne est présumée innocente. La façon dont il a formulé sa question est contraire à nos règles, et je demande qu'il retire ses paroles.

Le Président: M. le leader du gouvernement, vous savez très bien que la présidence a plusieurs façons pour faire retirer ou reformuler les questions. Ce qui est clair, c'est que, en l'occurrence, le souhait que vous venez de formuler, la présidence, avant que vous interveniez, avait clairement indiqué que ce sont des propos qui ne sont pas acceptables à l'Assemblée et que ce sont des propos qui, dans le contexte de l'enquête qui a été confiée à la Commission d'accès à l'information, ne peuvent être tenus non seulement à l'égard de l'article 35, mais à l'égard du fait qu'il n'y a aucune accusation contre qui que ce soit qui n'a été portée. Alors, on ne peut certainement pas, à l'Assemblée nationale, parler de présumés criminels, en l'occurrence dans l'entourage du premier ministre. Ça, je pense que ça doit être clair.

Et, M. le leader de l'opposition officielle, il ne s'agit pas de la protection de la présidence pour le premier ministre, il s'agit de faire appliquer le règlement. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, je disais que la Commission d'accès à l'information, elle, va faire rapport dans les meilleurs délais, puis que, entre-temps, il y a deux ex-fonctionnaires poursuivis pour des infractions au Code criminel. Et, entre-temps, ceux et celles qui ont commis des infractions, selon le procureur même de la Commission d'accès à l'information, n'auront pas été interrogés par la Sûreté du Québec, n'auront pas été questionnés par la Sûreté du Québec, n'auront pas été perquisitionnés par la Sûreté du Québec.

Est-ce que le premier ministre, M. le Président, ne réalise pas plus que jamais, ce matin, que c'est plus vrai, de plus en plus vrai, pour tous les Québécois qui surveillent ce débat-là, qu'il y a deux systèmes d'enquête, deux systèmes de justice, un pour les simples citoyens, deux ex-fonctionnaires qui sont poursuivis pour des infractions au Code criminel, et un autre système pour les protégés du premier ministre, au «bunker», un autre système pour ces gens-là, l'entourage du premier ministre?

Ma question s'adresse au premier ministre du Québec: C'est quoi, la différence entre deux ex-fonctionnaires poursuivis au Code criminel pour des infractions présumées et son entourage, à lui, qui sera questionné strictement par la Commission d'accès à l'information, qui n'aura comme seul pouvoir que de faire rapport? Pourquoi une telle différence dans l'application des règles fondamentales, en démocratie, de notre système de justice?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

(10 h 30)

M. Bélanger: M. le Président, dans un premier temps, vous me permettrez de déplorer, venant d'un ancien ministre de la Justice, qu'il prenne pour acquis qu'une personne contre qui des accusations sont portées est présumée coupable et non pas présumée innocente, comme notre Code criminel le prévoit. Je crois qu'il faut le déplorer.

Deuxième chose, M. le Président, oui, il y a des nuances qu'il faut faire, et je m'attendrais normalement à ce que le député de Frontenac les fassent. Relativement à la déclaration de M. White, il y avait des allégations de corruption de fonctionnaires, de vente de renseignements moyennant rétribution, contribution. Il y avait aussi allégation de réseau, M. le Président. Toutes ces choses-là faisaient en sorte qu'il y avait matière à enquête criminelle, ce qui est totalement absent des allégués relativement à l'affaire qui touche le cabinet du premier ministre, complètement absent. Donc, les deux distinctions sont à faire, et je m'attendrais à ce que le député de Frontenac les fasse.

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, comment se fait-il que le ministre de la Sécurité publique fasse une distinction entre les moyens d'enquête, une enquête par la Sûreté du Québec s'il y a eu vente, s'il y a eu corruption présumée, vente, et, s'il n'y a pas eu de vente présumée, c'est la Commission d'accès à l'information? Est-ce qu'il se souvient, en 1984, du moment où l'agence de La Presse canadienne , avec un journaliste qui travaille encore aujourd'hui à La Presse , M. Norman Delisle, s'était retrouvée avec des renseignements du même ministère du Revenu, mais de toute évidence il n'y avait pas eu rémunération? Comment se fait-il qu'à cette époque-là c'est la Sûreté du Québec qui avait fait enquête, c'est la Sûreté du Québec qui avait perquisitionné, pas la Commission d'accès à l'information? Est-ce qu'il s'en souvient, de ça, le ministre de la Sécurité publique? Pourquoi les règles sont différentes aujourd'hui?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, j'ai déjà mentionné que le fait que la Commission d'accès à l'information fasse enquête n'empêche pas... Suite au rapport que la Commission d'accès à l'information rendra, suite à ce rapport, il y a toujours des possibilités de poursuites criminelles si on trouve qu'il y a lieu, qu'il y a matière à poursuites criminelles; l'un n'exclut pas l'autre. Et j'ai toujours de la difficulté à comprendre ou à décoder le message de l'opposition, qui demande que ça soit public, qu'il y ait des caméras, que tout le monde voie ça puis qui, en même temps, demande une enquête policière. Il faudrait, à un moment donné, être un peu cohérent, M. le Président, dans le discours, dans ce qu'on demande.

Moi, je crois que la Commission d'accès à l'information est tout à fait appropriée pour faire l'enquête, à ce moment-ci. Et une enquête policière est toujours possible, mais, cependant, suite au rapport de la Commission d'accès à l'information. Attendons le rapport, attendons ce que la Commission d'accès à l'information trouvera, M. le Président.

Le Président: En principale? M. le député de Chomedey?

M. Mulcair: En complémentaire. Est-ce que le ministre de la Sécurité publique peut aider l'opposition à décoder la distinction ou la nuance qu'il vient de faire? En vertu de quel principe de droit est-ce que le ministre de la Sécurité publique se fonde pour dire qu'il y a une différence de traitement, en vertu de la loi, lorsqu'il y a allégation de vente d'informations, ou lorsque l'information personnelle, confidentielle des contribuables, on fait circuler et donner pour les fins de la cause? Où est-ce qu'il trouve, en droit, une distinction entre ces deux choses-là? Et pourquoi est-ce qu'il continue à prétendre en cette Chambre que cette distinction existe, alors qu'elle n'existe nulle part?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, le député de Chomedey me demande une opinion juridique que je ne lui donnerai pas. Tout à fait. Il me demande une opinion juridique. Il me demande, en vertu du Code criminel, moi, comme avocat, qu'est-ce que je pense relativement à l'interprétation. Moi, ce que je dis, c'est, comme ministre de la Sécurité publique... un membre de la Commission d'accès à l'information faisait allégation de vente de renseignements moyennant contribution, de corruption de fonctionnaires – corruption de fonctionnaires – et l'allégation de corruption de fonctionnaires n'est absolument pas présente, M. le Président, dans toute l'affaire relativement au cabinet du premier ministre, c'est totalement absent. Il y avait allégation de corruption de fonctionnaires, allégation de réseau, M. le Président, et je crois que ça justifiait à ce moment-là une enquête policière. Et, à ce moment-ci, M. le Président, la Commission d'accès à l'information possède tous les pouvoirs nécessaires pour faire une enquête, pour contraindre à témoigner, pour recevoir des témoignages. Et c'est même beaucoup plus approprié, quant à moi, pour faire une enquête aussi élaborée, M. le Président, au niveau de l'ensemble des fichiers du gouvernement, qu'une enquête policière. Je pense que le député de Chomedey peut comprendre ça.

Le Président: M. le député.

M. Mulcair: Où est-ce que le ministre de la Sécurité publique trouve la source juridique pour la distinction qu'il ne cesse de faire, qui a été faite à plusieurs reprises? On l'a retrouvée en filigrane, tantôt dans le communiqué de presse d'Hydro-Québec où on a parlé de contre-rémunération, on l'a retrouvée dans les interventions de la ministre déléguée au Revenu qui a avoué un congédiement, puis après huit, puis après, ce n'est plus huit, c'est un plus sept. Où est-ce que le gouvernement a trouvé cette fameuse distinction? Ce n'est pas à l'article 122 du Code criminel. C'est nulle part dans la jurisprudence. C'est qui qui l'a inventée? C'est qui qui veut justement «canner» l'enquête de la Commission d'accès et la limiter à ça et ne rien laisser transparaître d'autre?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, j'ai déjà répondu au député de Frontenac à l'effet que, suite à l'enquête de la Commission d'accès à l'information qui rendra un rapport, qui fera probablement des recommandations... on ne peut présumer de rien. Suite à ça, c'est toujours possible, une enquête policière. Pourquoi à ce moment-ci, alors que la Commission d'accès à l'information va faire une enquête, tout de suite aller à une enquête policière? Moi, je crois que ce n'est absolument pas approprié, M. le Président. Et je pense que la Commission d'accès à l'information est l'organisme le plus compétent à ce moment-ci pour faire l'enquête qui lui est demandée.

Le Président: M. le député de Frontenac, toujours en complémentaire.

M. Lefebvre: Est-ce que le premier ministre pourrait me dire pourquoi, quand on veut vérifier, perquisitionner un journaliste, c'est la Sûreté du Québec et, quand c'est son entourage à lui, ce n'est pas la Sûreté du Québec, c'est la Commission d'accès à l'information? Est-ce que ce n'est pas parce que, M. le Président, il y a une différence fondamentale entre René Lévesque puis le député de Jonquière?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je voudrais inviter le député de Frontenac à se rappeler les valeurs et les notions qu'il a dû appliquer à l'époque où il était ministre de la Justice. Il savait très bien, comme ministre de la Justice, qu'il y a une distinction, qui est celle qui a été évoquée par le Procureur général concernant le type d'allégations qui ont été faites.

Deuxièmement, il doit savoir – il fait semblant de l'ignorer, mais il doit savoir – que la Commission d'accès à l'information a infiniment plus de pouvoirs pour aller au fond des choses que la Sûreté du Québec qui, elle, ne peut contraindre un témoin à comparaître, ne peut forcer un témoin à répondre, n'a pas le pouvoir de le mettre sous serment, alors que le rapport de police n'est jamais rendu public. Tandis que cette Commission va fonctionner – elle l'a dit – dans des audiences publiques, elle va interroger et assigner tous les témoins qu'elle veut interroger, et, pour le moment, nous n'avons que des confirmations. Ce qu'on en sait est qu'aucun témoin ne conteste sa juridiction et qu'en conséquence le public sera saisi d'un rapport qui va faire le point sur ce genre d'allégations. Et la Commission, comme l'a mentionné le Procureur général, dans son rapport fera les recommandations que lui inspireront les faits qu'elle aura mis à jour, qu'elle aura vérifiés et, selon les conclusions qui apparaîtront dans ce rapport public, à ce moment-là il pourra y avoir d'autres enquêtes, si c'était nécessaire. On verra si c'est nécessaire, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de D'Arcy-McGee.


Erreurs des lecteurs optiques dans les magasins au détriment des consommateurs

M. Bergman: M. le Président, dans l'affaire des lecteurs optiques, vendredi on apprenait que le ministre responsable de la Protection du consommateur savait depuis un an que les consommateurs se faisaient rouler par les grands magasins. Vendredi, le ministre avouait que c'était illégal. Vendredi, il disait qu'il avait rencontré en privé, à quelques reprises, ses partenaires, les représentants des grandes chaînes. Pendant ce temps-là, il maintenait expressément les consommateurs dans l'ignorance.

M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration: Est-ce que le ministre ne reconnaît pas que ses vrais partenaires devraient être les consommateurs? Et pourquoi est-ce qu'il n'a pas informé les consommateurs d'une situation qu'il connaissait depuis un an?

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

(10 h 40)

M. Boisclair: M. le Président, le ministre a tenu à informer les consommateurs en finançant une étude qui a fait la manchette de tous les journaux et qu'on retrouve dans une revue qui est distribuée partout à la grandeur du Québec. Ce qu'il faut comprendre, c'est que la situation actuelle, avant l'utilisation systémique des caisses électroniques, faisait en sorte que le taux d'erreur était encore plus élevé. Les caisses mécaniques où l'employé rentre à la main le prix du bien, parfois, dans certains cas, menaient à des erreurs jusqu'à 10 %. Une étude d'Industrie Canada faite l'an dernier nous indiquait que les consommateurs n'étaient pas davantage pénalisés. Les taux d'erreur étaient de 3,1 % en faveur des commerçants et de 3,6 % en faveur des consommateurs. Donc, à cet égard-là, il n'y avait pas lieu d'alerter, de sonner l'alarme, puisque c'était une amélioration par rapport à la situation qui prévalait.

Là où il y a difficulté, ce que l'étude a mis en évidence, c'est lorsque les prix sont soldés. Je vous indique que, dans l'échantillon retenu par Option Consommateurs, on a privilégié des interventions faites auprès de produits qui sont soldés. Là on a remarqué une marge d'erreur plus importante. Et c'est pourquoi, sans tarder, dès que nous avons reçu les études d'Option Consommateurs, j'ai demandé à l'Office de la protection du consommateur de rencontrer l'ensemble des intervenants. Et je rappelle qu'à court terme je préfère miser sur la bonne foi des commerçants, mais, s'il y a lieu, nous utiliserons l'outil réglementaire ou législatif, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Est-ce que la ministre déléguée au Revenu a l'intention, en toute honnêteté, de rembourser aux consommateurs les 25 000 000 $ de TVQ perçus en trop au cours de la dernière année?

M. Boisclair: M. le Président, ce que...

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, il n'y a aucun article qui vous donne le droit de parole, à ce moment-ci. M. le ministre.

M. Boisclair: M. le Président, d'abord, les consommateurs québécois ne perdent pas 375 000 000 $, comme se plaît à le répéter l'opposition officielle. L'enquête d'Option Consommateurs portait uniquement sur 375 produits, dont 60 % étaient en solde, ce qui n'est pas typique de l'ensemble des produits qui sont vendus dans les commerces. Donc, avant d'arriver à ces conclusions, je pense qu'il faut retourner d'abord à la méthodologie de l'enquête qui nous a permis de constater qu'il y avait un problème, mais qui ne nous permet pas de faire des affirmations générales comme celle que l'opposition vient de faire, M. le Président.

Le Président: M. le député de Nelligan.

M. Williams: En l'absence d'une réponse de la ministre déléguée au Revenu, je pose la question au premier ministre: Est-ce que, lui, il a l'intention de rembourser les consommateurs, le 25 000 000 $? Parce que c'est le vrai chiffre, 25 000 000 $ de TVQ perçus en trop l'année passée. Est-ce que vous avez l'intention de rembourser, M. le premier ministre, en l'absence d'une réponse de la ministre déléguée?

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: Alors, M. le Président, ma première explication n'a pas suffi, j'en rajoute une deuxième. Je répète que l'enquête n'a porté que sur 375 produits. Et je rajoute pour deuxième élément de preuve, qui nous empêche de faire des affirmations générales comme celle que le député de Nelligan vient de faire, que tous les produits vendus en magasin d'alimentation ont été exclus de l'enquête d'Option Consommateurs et qu'à cet égard je répète que nous ne pouvons pas faire l'affirmation que les consommateurs ont perdu 375 000 000 $, comme le prétend l'opposition.

Revenons aux choses, regardons les faits et rappelons-nous une chose, c'est que, s'il y a des taux d'erreur qui continuent d'exister, ils sont toutefois nettement plus bas que ce qui prévalait auparavant parce que, au moment où uniquement il y avait une caissière ou un caissier qui rentrait le prix sur la machine, il y avait des taux d'erreur de jusqu'à 10 %. Donc, les nouvelles technologies nous ont permis d'améliorer les choses. Il y a toutefois encore des marges d'erreur qui sont trop élevées. Le gouvernement veut régler la situation, mise sur la bonne foi des commerçants. Et, s'il le faut, nous utiliserons soit l'outil législatif ou réglementaire, M. le Président.

Le Président: M. le député Westmount–Saint-Louis, en principale.


Mesures à prendre pour protéger les consommateurs contre les erreurs des lecteurs optiques

M. Chagnon: M. le Président, le ministre et le gouvernement savent depuis six mois, suite à une étude d'Option Consommateurs, que les consommateurs se font rouler de 2,5 % de leurs achats dans les grands magasins. Le ministre vient nous dire aujourd'hui, d'abord, que les consommateurs auraient dû le savoir, qu'il aurait dû lui-même, prétend-il... qu'on aurait dû penser que le ministre aurait dû lui-même faire en sorte de s'assurer, dans son rôle, d'avertir les consommateurs qu'ils risquaient de se faire rouler suite aux travaux des lecteurs optiques.

M. le Président, si le ministre ne veut pas croire l'étude d'Option Consommateurs qui nous dit que les consommateurs perdent 2,5 % de leurs produits en consommation, quelle étude, lui, a-t-il pour démontrer le contraire?

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: M. le Président, je suis toujours étonné de voir que, dans cette Assemblée, parfois, lorsqu'il y a des choses simples, on tente d'en faire des choses compliquées. Je rappelle d'abord et avant tout une chose: c'est que les études faites par Industrie Canada nous indiquaient en novembre 1996 que le taux d'erreur, lorsque des gens rentrent le prix à la caisse, était parfois jusqu'à 10 %. Les lecteurs optiques ont corrigé, d'une certaine façon, la situation, et nous nous sommes aperçus qu'il n'y avait pas de fraude systématique, et que, parfois, il y avait des erreurs, mais que c'étaient des erreurs qui avaient été faites de bonne foi. Je rappelle que ces erreurs n'avantageaient pas davantage ni le commerçant ni la personne qui achetait des biens. Donc, devant cette situation, bien des mises en garde ont été faites. Et je pourrais référer le député à des études qui ont été publiées dans Protégez-vous , bien avant celle d'Option Consommateurs, où on invite les gens à la prudence. Ce qu'il faut faire maintenant, c'est redoubler de vigilance lorsque des produits sont soldés.

J'invite les commerçants à s'asseoir avec l'Office de la protection du consommateur dans un contexte où nous sommes à revoir la réglementation sur l'étiquetage unitaire des prix. Nous pourrions, par exemple, penser à un engagement volontaire des grandes chaînes pour faire en sorte que, si des erreurs sont constatées par le client, celui-ci puisse exiger soit le remboursement de la différence ou puisse obtenir le bien gratuitement. C'est le genre de choses que nous voulons regarder avec les commerçants. D'abord et avant tout, misons sur la bonne foi, et, comme nous le rappelle l'étude d'Option Consommateurs, ces erreurs ne sont pas faites de façon frauduleuse, ce sont des erreurs qui sont faites de bonne foi. Nous voulons régler cette situation, et je rappelle à nouveau que, avant d'utiliser l'outil réglementaire ou législatif, je préfère, d'abord et avant tout, miser sur la bonne foi des commerçants, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Saint-Laurent.

M. Cherry: M. le Président, comment, de façon claire et simple de la part du ministre, il peut expliquer que, vendredi, il nous a admis, dans un premier temps, être au courant de la situation, il a renchéri en disant: On sait que c'est illégal, nous sommes en consultation avec nos partenaires, les marchands, pendant qu'il dit que la vraie façon de protéger les consommateurs, c'est de les informer?

Et la preuve, M. le Président, ceux d'entre nous qui sont allés se mettre en ligne dans les chaînes de magasins en fin de semaine, les gens se promenaient dans les allées avec des calculatrices, les files étaient plus longues aux caisses, et, quand on s'informait, les caissières disaient: Depuis qu'on a appris qu'on se fait – permettez-moi le mot – voler, on checke notre affaire de plus près. Quand le ministre nous dit en Chambre: On le savait, on ne parle qu'aux magasins, pas aux consommateurs... Expliquez-nous ça de façon simple, M. le ministre.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: Tout de même, M. le Président, c'est une belle illustration de ce qu'on appelle un procès d'intention. Je pourrais... M. le Président, est-ce que j'ai besoin de rappeler à tous les membres de cette Assemblée que, à l'évidence, le ministre rencontre régulièrement les associations de consommateurs? Est-ce que je peux rappeler que le gouvernement du Québec finance Option Consommateurs qui a fait ces études? Et ne vous interrogez pas à savoir pourquoi cette étude a été publiée à la veille du temps des fêtes. Donc, bien sûr, nos partenaires incluent les associations de consommateurs, nous les rencontrons régulièrement, mais je veux régler un problème particulier, et la présidente de l'Office de la protection du consommateur a récemment écrit à Bureau En Gros, à Canadian Tire, à Eaton, La Baie, Sears Canada, Wal-Mart, Zellers, le Conseil québécois du commerce au détail, le Conseil canadien du commerce au détail, et nous allons faire le point avec ces gens.

Et je rappelle aussi que, bien sûr, nous allons continuer le travail de très grande qualité que nous faisons avec Option Consommateurs et j'espère qu'on sera capable de tous en arriver à une solution, puisqu'il est clair que, avant d'utiliser l'outil législatif ou l'outil réglementaire, on va s'asseoir avec les gens. La bonne foi, dans notre société, ça se présume.

Le Président: M. le député de Nelligan, en complémentaire.

(10 h 50)

M. Williams: Oui. Est-ce que je dois comprendre, avec le nombre de réponses de la ministre déléguée au Revenu, que, comme dans la justice, il y a deux systèmes: un pour les contribuables où, quand il y a une erreur, ils doivent payer les amendes, les intérêts, toujours rétroactifs, mais que, quand le fisc a perçu 25 000 000 $ de trop sur les ventes gonflées, on peut tout oublier? Est-ce que la ministre déléguée au Revenu est en train de dire qu'il y a deux systèmes d'impôts: un pour le fisc et un pour les contribuables?

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

M. Boisclair: M. le Président, là, écoutez, je me permets à nouveau de rappeler à tout le monde, ici, dans cette Assemblée, que d'affirmer que les consommateurs se sont fait léser pour 375 000 000 $, c'est une affirmation que nous ne pouvons pas faire. Je rappelle que l'étude d'Option Consommateurs a porté sur 375 produits, dont 60 % étaient en solde. Industrie Canada a fait, elle, une étude sur 15 000 produits, dont 4 375 au Québec, une étude beaucoup plus large, avec un échantillon beaucoup plus grand. Leur conclusion: 3,2 % des cas, le prix était trop élevé, 3 %, le prix était trop bas. Donc, est-ce qu'on peut d'abord regarder les faits tels qu'ils sont? Et, avant de faire des allégations et des demandes comme celles de l'opposition, qu'on regarde les faits. Et les faits ne nous permettent pas de faire des affirmations comme celles du député de Nelligan, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, en principale.


Renouvellement du mandat du Protecteur du citoyen

M. Johnson: M. le Président, on nous a distribué, tout à l'heure, le 27e rapport annuel du Protecteur du citoyen. Est-ce que je peux demander au premier ministre s'il compte renouveler le mandat de M. Jacoby?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, c'est une décision qui relève de l'Assemblée nationale. J'ai déjà entamé des discussions avec le chef de l'opposition, dont il se souviendra, en lui proposant un nom d'une personne. Il est revenu, récemment, en nous disant qu'il ne souhaitait pas procéder au remplacement de l'ombudsman actuel, et nous savons qu'il faut travailler ensemble. Alors, en l'absence d'une entente, le mandat se poursuit, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le premier ministre est au courant que les conversations que nous avons eues plus récemment tournaient autour du fait que les interventions intempestives du bureau du premier ministre auprès du Protecteur du citoyen actuel, M. Jacoby, dans des restaurants de la capitale, ont eu un effet sur la crédibilité du gouvernement à l'égard du Protecteur du citoyen?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je souhaiterais que la définition du mandat et l'identification de son détenteur, dans une responsabilité aussi importante que celle de l'ombudsman, ne relèvent pas des ragots de restaurants.

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


Impasse dans les négociations entre la Société des traversiers et la CSN

M. Béchard: M. le Président, les relations entre la Société des traversiers du Québec et le syndicat CSN sont au point mort. La convention collective est échue depuis le 30 juin 1995, soit plus de 31 mois. Après avoir débrayé à trois reprises depuis le début de l'année, on indique qu'aucune rencontre n'a eu lieu depuis le 5 novembre dernier. Le syndicat prévoit d'ailleurs débrayer de nouveau, et les arrêts de service seront de plus en plus longs et auront un impact néfaste sur le développement économique des régions concernées, soit Sorel– Saint-Ignace, Québec–Lévis et Matane–Baie-Comeau– Godbout, soit dans le comté et dans la région du ministre du Travail.

M. le Président, est-ce que le ministre du Travail peut nous indiquer s'il a l'intention d'intervenir concrètement dans ce dossier, afin d'éviter de nouveaux débrayages qui, en plus de compromettre des emplois en région, isolent la population et viennent nuire au développement économique des régions concernées? Lui qui disait la semaine dernière, notre jovialiste ministre, que les relations de travail allaient bien, peut-il arrêter de parler de chiffres et s'occuper du monde et de ce conflit qui traîne depuis 31 mois et qui touche, entre autres, des gens de sa région?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: M. le Président, je dois d'abord indiquer qu'il y a un médiateur qui a été désigné dans ce dossier, qui a fait son travail – je pense qu'on ne peut lui adresser aucun reproche, le médiateur a fait son travail – mais il faut aussi reconnaître que, dans ces négociations, actuellement c'est l'impasse parce que le syndicat CSN... Et je signale, en passant, que la Société des traversiers a conclu et signé deux ententes, deux conventions, deux modifications de convention avec deux autres syndicats, le Syndicat des officiers de marine et le Syndicat des marins, qui ont accepté d'inclure ou d'intégrer dans leur convention collective des assouplissements pour permettre à la Société des traversiers d'avoir une meilleure performance financière. Parce qu'il faut savoir que l'autofinancement à la Société des traversiers n'est que d'environ 28 %; le reste, évidemment, est comblé par des subventions du gouvernement.

Vous savez aussi que la Société des traversiers, avec mon accord – je pense que c'était une bonne décision – a interrompu la traverse de nuit entre Québec et Lévis. Et il y a aussi une douzaine de travailleurs qui ont bénéficié du programme de mise à la retraite et qui ont actuellement pris leur retraite. Et là le syndicat CSN réclame, exige le retour à la traverse de nuit, d'une part, et il exige que la Société embauche 12 personnes pour remplacer les 12 qui ont pris leur retraite, s'appuyant sur une disposition ou sur une lettre d'entente annexée à la convention collective qui stipule un plancher d'emploi, ce qu'on appelle un plancher d'emploi. Donc, il est évident que, dans de telles conditions et avec de telles exigences, l'impasse persiste.

Le Président: Pour aujourd'hui, la période de questions et de réponses orales est terminée.


Votes reportés

Nous allons procéder aux votes reportés.


Motion proposant de souligner la journée du 6 décembre commémorant les événements de l'École polytechnique

Tel qu'annoncé précédemment, nous allons procéder au vote sur la motion sans préavis de Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité et ministre responsable de la Condition féminine. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la journée du 6 décembre commémorant les événements de l'École polytechnique et condamne toute violence faite aux femmes.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Brouillet (Chauveau), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), Mme Vaive (Chapleau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

(11 heures)

M. Dumont (Rivière-du-Loup). M. Filion (Montmorency), M. Le Hir (Iberville).

Le Président: Est-ce qu'il y a des députés contre cette motion?

M. Brouillet: M. le Président, je crois tantôt qu'on a oublié de mentionner mon nom, alors que je me suis levé, alors...

Le Président: Alors, le vote du vice-président est enregistré.

M. Paradis: M. le Président, dans les circonstances, ajoutez le vote des députés de Marquette et de Frontenac, après les avoir vérifiés.

Des voix: ...

Le Président: Il n'y a pas de moment de récréation encore, là!

La Secrétaire adjointe: M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:107

Contre:0

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion de Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité et ministre responsable de la Condition féminine est adoptée.


Motions sans préavis

Nous en arrivons maintenant à l'étape des motions sans préavis. Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Souligner l'importance de la télévision communautaire dans le paysage audiovisuel québécois

Mme Beaudoin: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne l'importance de la télévision communautaire dans le paysage audiovisuel québécois, à l'heure ou le CRTC envisage de soustraire les câblodistributeurs de leur obligation de soutenir et de diffuser cette télévision sur le service de base en câblodistribution, ce qui mettrait en cause leur existence.»


Mise aux voix

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? La motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce.


Hommage aux lauréats des Prix du Québec dans les domaines culturel et scientifique

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour que soit présentée la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec rende hommage aux lauréats et lauréates des Prix du Québec 1997 dans les domaines culturel et scientifique pour leur remarquable contribution à l'essor de notre société.

«Félicitations et reconnaissance à M. Roger A. Blais, prix Armand-Frappier; M. Pierre Bourgault, prix Georges-Émile-Lapalme; Mme France Gagnon Pratte, prix Gérard-Morisset; M. Kreimir Krnjevi, prix Wilder-Penfield; M. Louis Legendre, prix Marie-Victorin; M. Raymond Lévesque, prix Denise-Pelletier; Mme Margaret Lock, prix Léon-Gérin; M. Colin Low, prix Albert-Tessier; M. Gilles Marcotte, prix Athanase-David; et Mme Irene F. Whittome, prix Paul-Émile-Borduas.»

Merci, M. le Président.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Une voix: Sans débat, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Adoption sans débat? Alors, la motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Très bien. Nous allons maintenant aborder l'étape des avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la commission de l'éducation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 180, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'aménagement du territoire procédera aux consultations particulières sur le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 23 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau.


Avis de sanction

Le Président: Très bien. Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous avise, pour ma part, qu'il y aura sanction de plusieurs projets de loi au cabinet de Son Excellence le lieutenant-gouverneur cet après-midi, à 16 heures.


Affaires du jour

Nous allons, à ce moment-ci, aborder maintenant les affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous réfère à l'article 8 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 182


Adoption du principe

Le Président: À l'article 8 du feuilleton, Mme la ministre déléguée aux Mines, aux Terres et aux Forêts propose l'adoption du principe du projet de loi n° 182, Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi sur les terres du domaine public. Mme la ministre déléguée aux Mines, aux Terres et aux Forêts.


Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. En effet, j'ai déposé ici, en cette Chambre, la semaine dernière, le projet de loi n° 182, intitulé Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi sur les terres du domaine public. Il s'agit essentiellement d'un projet de loi qui vise à moderniser le régime minier québécois, qui vise à simplifier les règles d'acquisition et de gestion des titres et à accroître la sécurité du mode de tenure. Les modifications proposées cherchent par ailleurs à éliminer les conflits qui peuvent survenir dans le système actuel d'acquisition des titres d'exploration et qui constituent un frein à l'investissement en exploration minière au Québec.

M. le Président, j'aimerais dans un premier temps rappeler que le but premier de la Loi sur les mines, c'est de favoriser la prospection, la recherche, l'exploration et l'exploitation des substances minérales du domaine public tout en tenant compte des autres possibilités d'utilisation du territoire. Je crois important de rappeler que notre régime minier s'appuie sur un principe de base, ce qu'on appelle le «free mining». Ce principe, qui détermine les règles d'attribution des droits miniers et qui est bien connu des gens du secteur minier, signifie d'abord que l'accès à la ressource est ouvert à tous, sans égard aux moyens du demandeur, que le premier arrivé obtient un droit exclusif de rechercher les substances minérales qui font partie du domaine public, que ce premier arrivé a l'assurance d'obtenir le droit d'exploiter la ressource minérale découverte dans la mesure où il s'est acquitté de ses obligations, c'est-à-dire, essentiellement, qu'il ait réalisé des travaux d'exploration.

Les modifications proposées par le projet de loi ne changent rien à ce principe de base, le «free mining». Le «free mining» est en effet maintenu intégralement pour les substances minérales. La révision de la loi vise principalement à réduire les conflits qui résultent de la vulnérabilité du claim jalonné dans les conditions actuelles.

C'est pourquoi, M. le Président, le projet de loi n° 182 propose essentiellement les modifications suivantes, modifications d'ailleurs sur lesquelles je reviendrai un peu plus tard durant mon intervention: d'abord, le remplacement du jalonnement sur le terrain par désignation sur carte selon un découpage prédéterminé du territoire québécois; l'instauration d'un seul titre d'exploration pour toutes les substances minérales du domaine public – présentement, il faut quand même savoir qu'il existe cinq titres comme ça; l'introduction du concept de propriété minière permettant le regroupement de plusieurs claims adjacents en vue d'en simplifier la gestion; l'adoption de nouvelles dispositions permettant d'éviter la perte accidentelle de titres au moment du renouvellement; et, bien sûr, des mesures transitoires permettant l'instauration du nouveau régime minier tout en respectant les droits acquis des titulaires actuels de titres.

L'une des modifications importantes de ce projet de loi est sûrement l'instauration d'un nouveau mode d'acquisition du titre d'exploration. Dans le régime actuel, la personne ou l'entreprise qui désire obtenir un titre d'exploration doit obligatoirement jalonner le terrain qu'elle désire, le plus souvent en recourant aux services d'un jalonneur. Jalonner ce terrain, ça consiste donc à planter des piquets aux quatre coins du terrain désiré, selon des règles techniques qui sont bien précises, et à y apposer des plaques métalliques. Le jalonneur avise ensuite le ministère qui, à partir des données fournies, enregistre le claim au nom de la personne ou de l'entreprise qui désire obtenir le titre d'exploration.

(11 h 10)

Toute erreur de jalonnement peut entraîner une contestation du titre par un tiers. Et même lorsque le jalonnement a été fait selon les règles, il demeure vulnérable. Les piquets peuvent disparaître à la suite d'un phénomène naturel, que ce soit crue des eaux, feu de forêt, ou même par la suite d'interventions humaines.

En fait, toute personne intéressée peut formuler une requête en révocation de claim. Ces requêtes se produisent le plus souvent lorsqu'une découverte a été faite sur un territoire. 95 % des conflits que le Québec a connus depuis 1988 suivaient l'annonce d'une découverte. Autrement dit, dans le système actuel de jalonnement, celui qui fait une découverte intéressante risque de se retrouver avec un conflit dans 95 % des cas. C'est une situation très grave qui inquiète beaucoup l'ensemble des intervenants miniers. Il semble tout à fait normal que les personnes ou les entreprises qui investissent de l'argent dans la recherche de nouveaux gisements obtiennent ou puissent au moins obtenir l'assurance de pouvoir exploiter leur nouvelle découverte.

La vulnérabilité du claim jalonné a des effets négatifs sur l'exploration au Québec. La durée moyenne de règlement d'un conflit est d'environ deux ans et, pendant cette période, il ne se fait aucun travail sur un terrain en litige. Tant que les conflits ne sont pas réglés, les entreprises retardent leurs investissements en exploration quand elles ne décident pas carrément d'aller investir ailleurs. Nous avons eu un bel exemple, l'an dernier, avec la ruée au jalonnement qui a suivi l'annonce de la découverte d'un indice intéressant au lac Volant, au nord de Sept-Îles. Le ministre doit résoudre près de 60 conflits sur ce seul territoire.

Après avoir étudié cette question sous tous ses angles avec les différents intervenants du secteur minier, nous en sommes arrivés à la conclusion qu'il n'était pas possible de rendre le claim jalonné incontestable en toute circonstance. La seule solution était de changer le mode d'acquisition et de passer à la désignation sur carte, comme le propose le présent projet de loi.

Le modèle de désignation sur carte que nous proposons offre le grand avantage de régler la majorité de ces problèmes, puisque les titres sont accordés selon un prédécoupage du territoire et selon des coordonnées géographiques permanentes. Pour obtenir un titre, le demandeur n'aura qu'à indiquer au ministère le territoire ou encore la portion de territoire qu'il désire. Si ce territoire est disponible, le ministère lui attribuera la ou les parcelles correspondantes. Le titre sera délivré au client dès qu'il aura acquitté les droits requis, et celui-ci pourra commencer immédiatement ses travaux de prospection et d'exploration.

Avec le jalonnement sur terrain, le client devait attendre au moins 45 jours avant qu'on lui délivre officiellement un titre qui demeurait, malgré tout, précaire. Outre le fait de simplifier la procédure d'acquisition, ce changement permettra à l'industrie minière d'économiser annuellement quelque 3 000 000 $ en frais de jalonnement. Tout cet argent pourra dorénavant être consacré aux travaux d'exploration et servira, bien sûr, à augmenter notre connaissance du territoire.

Par ailleurs, nous sommes bien conscients du fait que ce changement affectera à des degrés divers un certain nombre de jalonneurs. Il faut être clair, le remplacement du jalonnement ne signifie pas l'élimination de la prospection, bien au contraire. Il ne faut pas oublier que la désignation sur carte est déjà une réalité au Québec. Tout le Sud du Québec, c'est-à-dire les régions de l'Estrie et ma région, la région Chaudière-Appalaches... Je vois mon vis-à-vis au secteur mines de l'opposition, qui vient aussi de la même région. Donc, la région de l'Estrie, Chaudière-Appalaches jusqu'à la hauteur de Kamouraska, est passée au régime de la désignation sur carte en 1982. Après 15 ans de désignation, on retrouve dans cette région autant, sinon plus, de prospecteurs qu'auparavant. Un système semblable est également en vigueur depuis une vingtaine d'années pour les territoires au nord du 52e parallèle.

Je dois aussi dire que les permis de recherche de substances de surface sont attribués par désignation, depuis 1988, à la grandeur du Québec et qu'aucun conflit n'a été rapporté jusqu'à ce jour. Par ailleurs, les registres officiels du ministère nous fournissent un portrait assez juste de la situation pour l'ensemble du Québec. Nous savons qu'il y a en moyenne, annuellement, moins de 500 personnes qui jalonnent un ou plusieurs claims au Québec. Nos registres indiquent également que, depuis 1988, il n'y a eu en moyenne que 37 personnes qui ont jalonné plus de 100 claims par année. Donc, les emplois dont il est question, quand on parle de jalonneurs, sont, pour une bonne part, des emplois à temps partiel ou encore un revenu d'appoint.

De plus, il y aura encore du travail pour les jalonneurs, car les entreprises vont continuer à les employer pour faire les coupes de ligne, pour soutenir les équipes d'exploration sur le terrain. Certains jalonneurs ont déjà commencé à élargir la gamme des services pour offrir, par exemple, des services spécialisés dans l'établissement d'un camp d'exploration. Plusieurs entreprises ont déjà annoncé leur intention de consacrer à la prospection des économies qu'elles réaliseront grâce à la désignation sur carte.

Certains craignent que la désignation sur carte permette à des compagnies d'acquérir rapidement de très vastes territoires. Le projet de loi contient donc des dispositions qui viennent tempérer, si je peux m'exprimer ainsi, l'appétit des demandeurs de titres. Tout d'abord, il y a une obligation qui est faite à l'acquéreur de titres de réaliser des travaux d'exploration en proportion de la superficie acquise, à défaut de quoi le titulaire ne pourra pas renouveler ses titres. Il y a aussi une disposition qui veut que, lorsqu'un territoire devient très convoité, par exemple au lendemain de l'annonce d'une découverte importante, le ministère pourra procéder par tirage au sort parmi les intéressés. Cette façon de faire favorisera le morcellement du territoire et augmentera la compétition. Enfin, le projet de loi accorde au ministre le pouvoir d'exiger, dans certaines circonstances, une garantie financière pour s'assurer que les travaux d'exploration pourront être réalisés.

Bien entendu, M. le Président, le projet de loi dont nous voulons voir approuver le principe contient plusieurs dispositions afin d'assurer une transition harmonieuse entre le régime du jalonnement et celui de la désignation sur carte. Il faut, en effet, tenir compte des droits qui sont actuellement détenus par les titulaires. Il faut tenir compte aussi du fait que les claims jalonnés ne sont pas toujours localisés avec une précision suffisante sur les cartes actuelles du ministère, puisque cette localisation est faite à partir des données fournies par le jalonneur.

Aussi, la conversion des claims jalonnés en nouveaux claims désignés se fera progressivement sur demande des titulaires. De plus, dès la promulgation de la nouvelle loi, des parcs de jalonnement seront mis en place dans tous les territoires qui contiennent des claims jalonnés. Ces parcs de jalonnement comprendront les claims actuels ainsi que les portions de territoire qui constitueront des espaces tampons garantissant, compte tenu de l'imprécision des cartes actuelles, qu'aucun nouveau claim désigné n'entrera en conflit avec un claim existant. La superficie des parcs de jalonnement sera réduite à mesure que les claims jalonnés expireront ou seront remplacés par des claims désignés. Ainsi, les parcs de jalonnement seront réduits à la fois de l'intérieur et de l'extérieur de façon à converger à terme vers un unique régime d'acquisition du claim par désignation sur carte. Dans les faits, il y a donc un certain nombre de jalonneurs qui vont pouvoir continuer pendant quelque temps à jalonner comme ils l'ont toujours fait. Les dispositions de la loi actuelle continueront de s'appliquer à l'intérieur des parcs de jalonnement avec leurs avantages et leurs inconvénients, dont celui, bien sûr, auquel je faisais référence, la vulnérabilité du titre.

M. le Président, un autre aspect important de ce projet de loi consiste en une simplification générale du régime minier québécois. Ainsi, il existe actuellement cinq titres miniers qui confèrent à leur titulaire le droit exclusif d'explorer le sous-sol selon la substance recherchée et la situation géographique du titre. Ces titres sont le claim jalonné, le claim désigné, le permis d'exploration minière, le permis de recherche de substances minérales de surface et le permis de recherche dans les fonds marins. Le projet de loi remplace ces cinq titres d'exploration par un seul titre valable pour toutes les substances minérales du domaine public, ce qu'on va appeler le claim désigné. En plus de simplifier le régime, l'instauration de ce nouveau titre universel éliminera les conflits qui survenaient parfois lorsqu'il y avait sur un même territoire un titre délivré pour les substances de surface et un autre pour les substances métalliques souterraines.

(11 h 20)

Autre simplification proposée, la propriété minière. Actuellement, la plupart des projets d'exploration couvrent en moyenne 80 claims. Dans le but de simplifier la gestion des titres miniers à la fois pour l'industrie et pour le ministère, ce projet de loi introduit le concept de la propriété minière. En vertu de ce concept, des claims contigus d'une superficie inférieure à 50 km² pourront être considérés comme une propriété minière et être gérés comme un seul titre. Ils verront donc leur date de renouvellement harmonisée et bénéficieront de règles particulières quant aux travaux d'exploration qui sont obligatoires. Ce changement simplifiera de beaucoup la gestion des titres, particulièrement pour ceux qui en détiennent plusieurs. Par exemple, une entreprise qui détient 4 000 titres renouvelables à différentes dates pourrait n'avoir plus que 50 titres à gérer. Donc, ça facilite beaucoup les choses pour l'industrie aussi.

M. le Président, le projet de loi contient également diverses dispositions qui visent à alléger la gestion administrative des sites miniers, à réduire, si on veut, la paperasse, comme on dit. Je tiens à en mentionner quelques-unes: l'introduction de nouvelles règles permettant d'éviter la perte accidentelle d'un titre au moment de son renouvellement; des assouplissements à plusieurs exigences relatives au dépôt et à l'acceptation des rapports de travaux d'exploration qui sont exigés; une procédure allégée de perception des redevances que les exploitants miniers devront dorénavant verser au moment où ils produisent leur déclaration trimestrielle. Bref, des éléments qui visent à alléger la procédure.

Par ailleurs, le projet de loi n° 182 introduit des changements aux articles de la Loi sur les mines relatifs aux hydrocarbures. Là aussi, les changements apportés visent à alléger et à simplifier le cadre législatif d'octroi de gestion des titres. À cet égard, il introduit un permis unique autorisant la recherche de pétrole, de gaz naturel et de réservoirs souterrains qui remplace les deux permis actuels. Il prévoit également que le permis de recherche sera délivré par appel d'offres dans le cas d'une zone désignée en milieu marin. Cette dernière mesure s'explique par le fait que l'exploration et l'exploitation en milieu marin se font dans des conditions particulières. Il faut que les entreprises soient en mesure de respecter toutes les normes de sécurité et de protection de l'environnement qui sont nécessairement plus exigeantes dans ces zones. Notons que, en dehors de ces zones, c'est-à-dire en milieu terrestre et dans les zones en milieu marin non délimitées, les permis de recherche continueront d'être délivrés comme actuellement, selon le principe du «free mining».

M. le Président, nous avons aussi voulu profiter de cette révision de la loi pour apporter certaines modifications concernant la gestion des droits fonciers sur le territoire des concessions minières et sur les sites des villes et des villages miniers. Ces changements visent essentiellement à simplifier et à harmoniser le cadre législatif actuel pour ce qui est des utilisations du territoire autres que minières.

Actuellement, un concessionnaire minier a, sur le terrain qui fait l'objet de la concession, le droit d'utiliser en priorité la surface pour ses activités minières. C'est même lui qui accorde, avec l'autorisation du ministre, les droits fonciers. Il s'ensuit un fardeau administratif inutilement lourd pour l'exploitant minier. Si les modifications que nous proposons sont acceptées, c'est dorénavant le ministre qui se chargera de la gestion des autres usages sur les concessions minières conformément aux règles prévues à la Loi sur les terres du domaine public. Je tiens à préciser que le détenteur actuel d'un titre minier conservera toutes les prérogatives qui lui sont attribuées pour ses activités minières.

Par ailleurs, malgré la disparition du régime des villes et villages miniers, il y a encore des sites qui sont désignés comme tels. Nous voulons corriger cette situation et assujettir ces territoires à la Loi sur les terres du domaine public. À cet objectif d'harmonisation s'ajoute un objectif de simplification. En effet, le ministère a consenti par le passé des baux emphytéotiques qui peuvent être convertis en lettres patentes à la demande du requérant. Il s'agit d'une procédure qui est lourde, qui est coûteuse, qui n'apporte aucune valeur ajoutée. Aussi, nous proposons de convertir ces baux emphytéotiques en ventes pures et simples par l'effet de la loi. Le régime foncier existe depuis de nombreuses années. C'est compliqué quant aux titres qui ont pu être émis. C'est pourquoi nous devons introduire des mesures afin de ratifier et corriger certains titres qui seraient annulables pour le non-respect de la loi ou parce qu'ils comptent des erreurs.

Je crois important aussi de souligner aux membres de cette Assemblée que les modifications proposées dans ce projet de loi ont reçu l'appui des milieux concernés. Elles répondent notamment aux attentes de la majorité des intervenants du secteur minier. Le projet de loi a été élaboré dans la transparence, et les principaux intéressés ont été consultés à plusieurs reprises. Tout d'abord, le projet de révision est issu d'un groupe de travail dont faisaient partie plusieurs représentants de l'industrie. Il a ensuite été soumis à la consultation de tous lors d'une tournée qui a été tenue l'automne dernier, à l'automne 1996. Il y a eu 23 rencontres, M. le Président, de consultation dans 10 villes différentes. De plus, un sondage mené au printemps 1997 a permis de confirmer que la grande majorité des personnes concernées appuyaient le projet de réforme.

Je me permets d'insister sur ce sondage qui a été réalisé par une firme reconnue et qui a permis d'obtenir l'opinion de 766 intervenants du secteur minier, soit 181 compagnies et 585 prospecteurs. Les résultats sont vraiment éloquents. Par les réponses obtenues, nous savons que 70 % sont favorables à la désignation sur carte, 90 % des répondants approuvent l'adoption d'un seul titre d'exploration, 80 % sont d'accord avec le nouveau concept de propriété minière.

Des consultations distinctes ont aussi été faites pour ce qui est des modifications aux dispositions relatives aux hydrocarbures et au volet foncier des concessions minières. Là aussi, on a pu constater que les personnes et entreprises concernées adhéraient fortement au projet.

M. le Président, le gouvernement s'est engagé à appuyer de différentes manières l'exploration au Québec. C'est une étape cruciale, on le sait, pour le maintien et le développement de notre industrie minière. Le projet de loi n° 182 est l'un des moyens que nous mettons en oeuvre. Il devrait permettre au Québec d'offrir un contexte d'affaires susceptible de favoriser davantage d'investissements et de soutenir la concurrence étrangère en éliminant notamment les sources de conflits.

Non seulement ce projet de loi va-t-il se traduire dans l'immédiat par une simplification des procédures administratives et une amélioration notable de la qualité des services gouvernementaux en matière de gestion des ressources minérales et des droits fonciers, mais il ouvre aussi la porte à des améliorations plus grandes. Il sera en effet plus facile à l'avenir de recourir aux nouvelles technologies garantes d'un accès plus large et d'un traitement encore plus rapide des demandes.

C'est pourquoi, M. le Président, je demande aujourd'hui aux membres de cette Assemblée, et à l'opposition officielle, bien sûr, d'approuver le principe de ce projet de loi. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre déléguée aux Mines, aux Terres et aux Forêts. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Frontenac. M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le Président, ce que Mme la ministre propose ce matin – d'ailleurs, ça a été sa conclusion – c'est d'adopter le principe, principe qui sous-tend le contenu du projet de loi n° 182. On sait que, lorsqu'on a à se prononcer sur le principe, l'opposition, tout comme les députés ministériels évidemment, mais surtout l'opposition, a à évaluer les grandes lignes de la suggestion ou du projet de loi. Alors, je dis tout de suite à Mme la ministre que, au niveau effectivement des grandes lignes, du contenu global du projet de loi n° 182, l'opposition va collaborer avec le gouvernement, pour des raisons évidentes que je vais expliquer rapidement, qui vont, jusqu'à un certain point, reprendre les propos de Mme la ministre sur certains éléments essentiels, mais, également, je vais indiquer à la ministre quelles sont les inquiétudes du côté de l'opposition qui reflètent aussi, évidemment, les inquiétudes du milieu.

(11 h 30)

Le jalonnage, M. le Président, ça existe depuis 1909. On sait, et la ministre l'a expliqué, que c'est l'installation physique de bornes sur le terrain, ce qui permet, puis c'est encore comme ça aujourd'hui, à des prospecteurs d'acquérir un titre d'exploration sur le terrain qui a été borné ou jalonné. Que l'on veuille moderniser cette opération-là, on ne peut du côté de l'opposition que souscrire à cette intention-là du gouvernement. Ça suit le reste, évidemment, M. le Président: Internet, la haute technologie qui, à tous les jours, nous accompagne dans tous les gestes de notre vie, dans certaines circonstances, et, M. le Président, on vit présentement un débat extrêmement préoccupant. Si on n'est pas, comme société, extrêmement prudents dans toutes ces opérations de haute technologie quant aux renseignements et renseignements personnels, comme là on parle évidemment de renseignements qui touchent une activité économique, une activité minière... Et encore là c'est la haute technologie qui vient au secours de l'industrie. Sans évidemment vouloir faire de parallèle avec le débat qu'on a en Chambre depuis quelques semaines sur la violation du renseignement personnel, M. le Président, ça démontre où on en est rendu en 1997. Mais, dans une opération ou dans l'activité minière, l'activité professionnelle, l'activité économique, M. le Président, évidemment, vouloir moderniser les opérations, éliminer le jalonnement sur terrain par la désignation sur carte avec toutes les techniques appropriées, je pense qu'on ne peut pas, du côté de l'opposition, questionner l'essentiel de la démarche qui est quoi, M. le Président? C'est de mettre au service de l'activité minière la haute technologie qui existe aujourd'hui.

Vous savez, je l'ai vérifié, puis c'est public, là. À partir du moment, M. le Président, où l'Association des prospecteurs du Québec est d'accord avec la suggestion contenue dans le projet de loi n° 182, ce serait assez embêtant, du côté de l'opposition, d'aller bloquer le processus législatif. L'opposition, comme Mme la ministre aussi, j'en suis convaincu, et son gouvernement, chaque fois qu'on veut modifier l'activité minière par de la législation, que ce soit au niveau de la prospection ou au niveau de l'exploitation, de façon générale, je pense qu'on va vérifier de quel côté c'est reçu au niveau de ceux et celles qui vivent de l'activité minière. C'est ce que la ministre a fait, puis elle l'a, je pense, de façon correcte bien vérifié en se promenant un petit peu partout au Québec, et elle a reçu des opinions qui, je pense, essentiellement, nous permettent de conclure qu'il y a consensus.

Ce qui nous préoccupe un petit peu, un petit peu pas mal, est-ce que – puis ça, bien, c'est aux articles 27 et 41, M. le Président, du projet de loi – on ne va pas profiter du projet de loi n° 182 pour augmenter les tarifs? Ça, la ministre n'en a pas parlé dans son discours sur le principe, dans son intervention sur le principe. Est-ce qu'il n'y aura pas... Puis ça, bien, du côté de l'opposition, on soupçonne que ça va arriver. Il va y avoir sûrement, en quelque part, des augmentations de tarifs, M. le Président.

Mme la ministre a pris bonne note qu'il y a des jalonneurs qui vont perdre leur emploi. Bon, ce n'est pas, selon ce qu'elle a indiqué tout à l'heure, un nombre effarant, mais il faudra voir de quelle façon le gouvernement peut permettre aux jalonneurs de se recycler dans cette nouvelle technique de la désignation des lots sur carte géographique plutôt que par des bornes physiques installées sur le terrain par les jalonneurs eux-mêmes, M. le Président.

Est-ce que l'industrie forestière a raison de s'inquiéter, puisqu'elle perdrait l'exonération des droits, des droits qu'elle a, l'industrie forestière, pour l'utilisation du sable et du gravier sur les chemins forestiers? On sait, M. le Président, que l'industrie forestière peut utiliser ce sable, ce gravier, gratuitement, en contrepartie... Alors, inquiétude, dans une petite note ici. Est-ce que cette inquiétude de l'industrie forestière qui perdrait l'exonération des droits pour l'utilisation du sable et du gravier pour, évidemment, les chemins forestiers, M. le Président... C'était et c'est encore gratuit. Ils seront, à partir de l'adoption de 182, tarifés en contrepartie d'une baisse des droits de coupe. Ça, M. le Président, c'est une question qu'on vérifiera avec la ministre, en commission parlementaire, d'autant plus qu'il va y avoir de la consultation. C'est évident que l'industrie concernée viendra nous rassurer ou encore indiquer au ministre qu'on souhaite des changements en regard de cette inquiétude-là.

Je n'ai pas entendu la ministre, M. le Président, sauf erreur – peut-être que c'est fait – nous confirmer qu'il y aurait, en mars qui vient, en mars 1998, une consultation ou des consultations particulières qui nous permettront justement, avec les principaux intervenants, qui sont l'industrie minière en général, évidemment, avec en tête de liste l'Association des prospecteurs du Québec... Je ne l'ai pas entendu, peut-être que la ministre l'a indiqué, que cette consultation se tiendra et qu'elle se tiendra, à moins de changement, en mars 1998. Alors, j'apprécierais que la ministre me réponde dans sa réplique, s'il y a lieu, M. le Président.

Alors, c'est les commentaires que nous voulions faire, du côté de l'opposition, c'est l'essentiel de nos remarques. C'est un projet de loi évidemment très technique. En commission parlementaire, en temps et lieu et aussi à l'occasion des consultations particulières, c'est évident que l'opposition s'inspirera des propos et des commentaires qui seront tenus à ce moment-là par les professionnels, tous ceux et celles qui, dans leur vie quotidienne de travailleurs et de travailleuses et de gens d'affaires, sont concernés directement par le contenu du projet de loi n° 182. Mais je dis tout de suite à la ministre, en concluant, que, quant à l'adoption du principe, on est d'accord, du côté de l'opposition. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Frontenac. Il n'y a plus d'autres interventions. Je vais demander à Mme la ministre si elle veut exercer son droit de réplique. Alors, je vous cède la parole, Mme la ministre.


Mme Denise Carrier-Perreault (réplique)

Mme Carrier-Perreault: Alors, écoutez, M. le Président, merci. Brièvement, remercier tout d'abord mon collègue de l'opposition officielle, le porte-parole, qui nous rassure et qui dit qu'il va contribuer. Effectivement, je pense que le député de Frontenac a pu prendre connaissance du projet de loi, faire ses vérifications. Et je pense qu'on a démontré, effectivement, que c'est un projet qui va vers le progrès, qui fait avancer les choses, qui va permettre des travaux, bien sûr, peut-être plus importants au niveau de l'exploration, bref, que c'est un projet de loi qui fait l'unanimité ou presque. Il y a un très large consensus au Québec.

Quelques éléments de réponse, tout simplement pour rassurer mon collègue de l'opposition. Pour ce qui est de la possibilité de consultations en mars, c'est un fait que je ne l'avais pas mentionné lors de mon intervention, tout à l'heure, mais je veux réitérer ici que c'est évident qu'il y aura une consultation en mars. On aura cette consultation où on aura des invités, des groupes qui pourront venir intervenir. Je l'avais mentionné dans le communiqué de presse qu'on a fait paraître lors du dépôt du projet de loi. Ça a toujours été la ligne qu'on a tenue. En tout cas, si on pèche, au ministère, sur ce projet de loi là, ce ne sera sûrement pas par manque de consultation. Effectivement, il y a eu beaucoup de consultations. Et on a l'intention d'écouter les groupes, les intervenants du milieu, suite au dépôt du projet de loi puis par rapport au libellé, s'il y a des inquiétudes, et tout ça.

Autre élément qui inquiète mon collègue de Frontenac, et je peux donner au moins quelques réponses, le but visé n'est sûrement pas l'augmentation des tarifs, M. le Président. Alors, s'il y a des doutes de ce côté-là, on peut penser peut-être au niveau des frais administratifs. Mais, écoutez, il n'y a rien de plus, ce n'est pas le but que l'on vise par le dépôt de ce projet de loi là, c'est très clair. Puis on pourra sûrement recommencer à échanger ou continuer les échanges en commission.

Pour ce qui est de son intervention par rapport au secteur forestier, je veux aussi vous assurer, M. le Président, et rassurer les intervenants du milieu forestier qu'il n'est pas question non plus, à ce moment-ci, de ne plus les exempter des redevances sur le sable et le gravier.

Alors, disons que c'est certains éléments qui, je pense, pourront rassurer les gens de l'opposition officielle et les intervenants du milieu qui pourraient s'interroger à ce moment-ci. Ils seront sûrement complètement rassurés lorsqu'ils pourront prendre connaissance du projet de loi ou quand on pourra aussi discuter et échanger en commission parlementaire.

(11 h 40)

Alors, tout simplement, M. le Président, je veux vous dire que j'ai bien hâte qu'on puisse continuer, poursuivre les échanges sur ce projet de loi sur le secteur minier. Vous savez, c'est un sujet que j'aimerais bien aborder plus souvent, si j'en avais l'occasion, sauf qu'en Chambre, ici, c'est très rare qu'on ait l'occasion d'échanger sur le secteur minier.

Je voudrais aussi remercier une équipe, l'équipe de mes collègues. J'ai une équipe de collègues qui travaillent avec moi, qui ont travaillé de très près à ce projet de loi. Donc, je voudrais les remercier de leur collaboration et, bien sûr, se dire: Au printemps, pour la poursuite des échanges sur ce dossier. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Le principe du projet de loi n° 182, Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi sur les terres du domaine public, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Boulerice: Oui. Je fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vous réfère à l'article 28 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 149


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 28, Mme la ministre de la Sécurité du revenu propose l'adoption du projet de loi n° 149, Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives. Mme la ministre, je vous cède la parole.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président...

M. Lefebvre: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Un instant, Mme la ministre. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Alors, je veux m'excuser auprès de Mme la ministre, M. le Président. Est-ce qu'on pourrait suspendre quelques minutes, de sorte que je puisse permettre au porte-parole de l'opposition officielle de venir nous rejoindre pour, à tout le moins, écouter Mme la ministre et éventuellement lui répondre?

M. Boulerice: M. le Président, on m'avait dit qu'il arriverait dans quelques secondes, mais je n'ai vraiment aucun inconvénient à attendre notre collègue de l'opposition officielle. Nous pouvons suspendre quelques secondes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Nous allons suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 42)

(Reprise à 11 h 46)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Nous reprenons nos travaux. Je cède à nouveau la parole à Mme la ministre de la Sécurité du revenu.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. C'est également à titre de ministre responsable de la Régie des rentes du Québec que j'ai le plaisir d'intervenir à l'occasion de la clôture de ces travaux entrepris il y a maintenant un peu plus d'un an et demi portant réforme du Régime de rentes du Québec. Alors donc, nous sommes arrivés au terme d'un long processus de modification à la Loi sur le régime de rentes du Québec.

Le gouvernement a pris les moyens nécessaires pour garantir aux Québécoises et aux Québécois qu'ils pourront continuer de profiter d'un régime qui assurera leur protection au cours des prochaines décennies. Pourquoi devions-nous modifier la Loi sur le régime de rentes du Québec? Rappelons, M. le Président, qu'au cours des années soixante le Québec se distinguait des autres provinces canadiennes en adoptant son propre Régime de rentes. Il se dotait alors d'un régime qui offre la pleine transférabilité des droits acquis, peu importent les changements d'emploi, qui offre une couverture universelle à l'ensemble des travailleuses et travailleurs du Québec et qui offre une base sur laquelle les Québécoises et les Québécois bâtissent leur retraite.

La Loi sur le régime de rentes du Québec entrait en vigueur le 1er janvier 1966 et allait devenir un volet très important du régime de protection des travailleuses et des travailleurs québécois non seulement à la retraite, mais aussi en cas d'invalidité ou de décès. En 1996, la Régie des rentes a versé près de 5 000 000 000 $ à 1 075 000 bénéficiaires de la rente de retraite, de la rente d'invalidité ou de la rente de conjoint survivant, d'orphelin ou d'enfant de cotisant invalide ainsi qu'aux bénéficiaires de la prestation de décès. Je répète, M. le Président, 1 075 000 bénéficiaires l'an dernier qui se sont vu verser 5 000 000 000 $ de prestations.

La Loi sur le régime de rentes du Québec s'applique déjà depuis plus de 30 ans et le gouvernement se devait de prendre les moyens nécessaires pour répartir équitablement le fardeau financier entre la génération actuelle et les générations futures et pour assurer que ces dernières pourront profiter d'un régime public de protection. Les consultations que nous avons tenues sur le livre vert intitulé Pour vous et vos enfants : garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec et les négociations entreprises avec le gouvernement fédéral qui administre le Régime de pensions du Canada nous auront permis de présenter le 5 juin dernier le projet de loi n° 149 intitulé Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives. C'est, comme vous pouvez le constater, M. le Président, un projet de loi qui est le fruit d'une très vaste consultation publique, de négociations intergouvernementales, mais aussi, je tiens à le souligner, du travail considérable des membres de la commission de l'économie et du travail.

Le mot «réforme» dans le projet de loi prend tout son sens lorsqu'on examine chacune des mesures qui ont été retenues pour sauvegarder le régime. Prenons d'abord l'accélération du rythme d'augmentation du taux de cotisation. Si le gouvernement n'avait pas proposé des mesures adéquates, le taux de cotisation qui est de 6 % cette année aurait atteint 13 % en l'an 2023, ce qui aurait été particulièrement injuste pour les nouvelles générations qui auraient ainsi assumé un coût beaucoup plus élevé que leurs parents ou que leurs grands-parents pour des rentes comparables.

(11 h 50)

Pour pallier à ce problème, nous avons résolu d'augmenter plus rapidement le taux de cotisation pendant que la génération issue du baby-boom est encore sur le marché du travail. Ce taux, qui est de 6 % cette année, sera augmenté graduellement d'ici les six prochaines années pour plafonner à 9,9 % en l'an 2003. Je souligne que ce calendrier d'augmentation est le même que celui proposé par le Régime de pensions du Canada. L'un des effets bénéfiques de cette augmentation sera de créer une réserve qui, en produisant des revenus de placements, permettra de faire face à l'arrivée massive à la retraite des baby-booms dans une dizaine d'années.

Cependant, l'augmentation du taux de cotisation à elle seule n'était pas suffisante pour permettre un plafonnement du taux de cotisation à ce niveau jugé raisonnable de 9,9 %. Aussi, pour atteindre ce but, le projet de loi n° 149 propose diverses autres mesures, par exemple, le gel de l'exemption générale actuellement égale à 10 % du maximum des gains admissibles. Les gains admissibles étant, en 1997, de 33 500 $, l'exemption générale qui correspond à 10 % de ce maximum de gains admissibles est de 3 500 $. Le maximum des gains admissibles, dans le fond, c'est le plancher en-decà duquel les employeurs et travailleurs cotisent et au-delà duquel il n'y plus de cotisation versée, mais c'est, M. le Président, évidemment le maximum des gains admissibles qui est utilisé pour calculer le remplacement de revenus qui est à 25 %.

Alors, chaque travailleur ne cotise que sur le revenu compris entre 3 500 $ et le maximum qui est de 35 800 $ pour l'année 1997. À partir de 1998, l'exemption sera maintenue à son montant de 1997, alors que le maximum des gains admissibles sera porté à 36 900 $. Le gel de l'exemption générale aura pour effet de réduire progressivement l'exemption en termes réels qui ne représentera plus, par exemple, que 5 % du maximum des gains admissibles vers l'an 2015 et non plus 10 % comme c'est le cas cette année.

Grâce à cette mesure, un plus grand nombre de travailleuses et de travailleurs à faibles revenus seront couverts par le Régime des rentes du Québec. Nous reconnaissons ainsi que l'État se doit d'assurer une protection minimale à ses travailleurs et travailleuses par le biais du régime public. De plus, pour l'ensemble des cotisants, cette réduction graduelle de l'exemption générale aura pour effet de rapprocher les revenus sur lesquels ils cotisent des revenus leur donnant droit à une rente.

Une deuxième mesure concerne l'ajustement actuariel de la rente de retraite du bénéficiaire de la rente d'invalidité qui atteint 65 ans. Contrairement au Régime de pensions du Canada qui a restreint les conditions d'admissibilité à la rente d'invalidité, nous avons choisi de maintenir les conditions d'admissibilité actuelle, plus généreuses que celles du régime canadien, ainsi que de maintenir le niveau des bénéfices accordés. L'unique modification introduite s'applique au bénéficiaire d'une rente d'invalidité du Régime de rentes qui atteint 65 ans et qui voit cette rente remplacée par une rente de retraite. Ce bénéficiaire aura droit à une rente de retraite qui dorénavant sera sujette au même ajustement actuariel que celui qui est appliqué au bénéficiaire de la rente de retraite anticipée. Le traitement sera donc le suivant, M. le Président: à 65 ans, le bénéficiaire d'une rente d'invalidité aura une rente qui sera calculée au même titre que s'il avait utilisé sa rente de retraite anticipée à 60 ans.

Une autre modification transforme la prestation de décès en un versement uniforme de 2 500 $. La prestation de décès est actuellement égale au moindre des montants suivants: six fois le montant de la rente de retraite payable au bénéficiaire ou 10 % du maximum des gains admissibles pour l'année au cours de laquelle le cotisant est décédé. À compter de 1998, tous les cotisants donneront droit à la même prestation de décès qui sera de 2 500 $. Nous avons privilégié cette voie plutôt que celle du gouvernement fédéral qui propose de fixer la prestation de décès à six fois la rente de retraite à laquelle le cotisant avait droit, mais avec un maximum de 2 500 $. En versant un montant uniforme, nous avons choisi d'avantager les familles de travailleurs et travailleuses à faibles revenus.

J'aborde maintenant une mesure que je qualifie de technique, mais qui est néanmoins nécessaire pour atteindre la cotisation d'équilibre à 9,9 % en l'an 2003, qui est l'objectif recherché. Actuellement, l'une des étapes du calcul d'une rente consiste à ajuster les gains d'un cotisant en fonction de la moyenne du maximum des gains admissibles pour les trois dernières années, incluant celle du début du paiement de la rente. Désormais, nous utiliserons cinq années, comme dans la plupart des régimes privés de retraite. Pareille mesure a été introduite à la suite des négociations avec le gouvernement fédéral sur la réforme du Régime de pensions du Canada. Initialement, le gouvernement fédéral proposait d'indexer partiellement les prestations, ce à quoi le Québec s'est toujours opposé parce qu'une telle mesure aurait signifié une réduction graduelle de la rente. Il est à noter également que cette mesure aurait particulièrement défavorisé les femmes dont la longévité, n'est-ce pas, est beaucoup plus grande.

Alors, ce nouveau calcul, en fait, qui repose sur les cinq dernières années plutôt que les trois dernières années, ne touchera pas les bénéficiaires actuels du Régime de rentes du Québec ni les cotisants qui auront atteint 65 ans au 1er janvier 1998, mais s'appliquera par la suite. D'autre part, le requérant d'une rente de retraite âgé entre 60 et 65 ans doit avoir cessé de travailler au sens du Régime de rentes du Québec, c'est-à-dire gagner moins de 8 841 $ en 1997 ou au moment où il présente sa demande. Certaines de ces personnes recommencent à travailler mais, selon les dispositions de la loi, sont exemptées de cotiser au Régime parce qu'elles sont bénéficiaires d'une rente de retraite. D'un autre côté, le cotisant âgé de 65 ans ou plus n'a pas besoin d'avoir cessé de travailler pour continuer à toucher sa rente de retraite ou pour pouvoir la toucher, sa rente de retraite. Il peut cumuler à la fois sa rente et son salaire sans que ni lui ni son employeur ne soit tenu de cotiser. Dorénavant, M. le Président, les bénéficiaires d'une rente de retraite qui travaillent pourront voir leur rente revalorisée en fonction des nouvelles cotisations qu'ils seront dorénavant tenus de verser au Régime de rentes.

Outre les mesures que je viens de vous exposer, qui visent à atteindre les objectifs de pérennité du Régime de rentes, d'autres mesures viendront mieux l'adapter aux réalités sociales. L'une de ces mesures vise à permettre au travailleur qui est âgé entre 60 et 65 ans de toucher sa rente de retraite s'il a connu une réduction de sa rémunération d'au moins 20 % en raison de la réduction de son temps de travail résultant d'une entente de retraite progressive conclue avec son employeur. Il sera donc dorénavant possible, entre 60 et 65 ans, de continuer à travailler tout en réduisant son temps de travail, si la réduction de la rémunération est d'au moins 20 %, et d'avoir droit à sa rente de retraite.

Également, une autre mesure accorde le droit à une rétroactivité pouvant aller jusqu'à cinq ans pour la rente de retraite versée après 65 ans. Aucune rétroactivité n'est actuellement accordée à un travailleur âgé de moins de 70 ans. Le cotisant âgé de 70 ans et plus ne bénéficie que de 12 mois de rétroactivité. Cette nouvelle rétroactivité avantagera, entre autres, les travailleuses et les travailleurs qui négligent, souvent par ignorance, de demander leur rente. Il est, en fait, certainement de notre devoir, d'ailleurs, suite à des représentations nombreuses qui ont été faites par des parlementaires de cette Assemblée, de nous assurer que tous bénéficient pleinement de leur droit. Alors, dorénavant, même s'il y a eu omission de le faire, les retraités auront droit à une rétroactivité pouvant aller jusqu'à cinq ans.

(12 heures)

De plus, le délai d'annulation d'une rente de retraite pour le requérant d'une rente d'invalidité sera prolongé. Ce délai est actuellement de six mois seulement et, en vertu des nouvelles dispositions, ce délai passera de six à 18 mois s'il est prouvé que l'invalidité a débuté durant les six premiers mois du versement de la rente de retraite. Cette modification vient aussi répondre aux besoins des bénéficiaires de la rente de retraite qui ont mal évalué ou mal jugé leur état au moment de faire leur demande de rente ou encore qui estiment avoir été mal informés. Il y a eu également de nombreuses représentations des parlementaires dans cette Chambre dans ce dossier.

Une autre mesure, M. le Président, vise à favoriser l'admissibilité aux prestations. Actuellement, les mois au cours desquels un cotisant a reçu des prestations familiales pour un enfant âgé de moins de sept ans peuvent être exclus de sa période cotisable si ses gains sont inférieurs à l'exemption générale. Seules les années où le cotisant a reçu des prestations familiales pendant 12 mois peuvent être entièrement exclues de la période cotisable, laissant ainsi l'année de la naissance de l'enfant ou du septième anniversaire de l'enfant partiellement incluse seulement dans sa période cotisable. La modification proposée permettra de calculer l'admissibilité en mois plutôt qu'en années pour favoriser une plus grande accessibilité aux rentes de conjoint survivant ou d'invalidité.

Je fais une parenthèse pour vous dire, M. le Président, que c'est parce qu'on a un régime de rentes public que l'on peut se permettre ces dispositions qui sont accessoires à la rente mais qui viennent favoriser notamment le conjoint qui a la garde des enfants et qui reçoit les cotisations familiales, puisque cette période où le conjoint – qui est habituellement la mère, n'est-ce pas, en pratique, là – reçoit des allocations familiales pendant que l'enfant est âgé de moins de sept ans, bien, cette période-là peut être exclue de la période cotisable. Au moment, si vous voulez, où la personne va prendre sa rente de retraite, elle ne sera pas défavorisée par un calcul de ces années où il a pu y avoir des gains faibles. Alors, c'est donc là une mesure accessoire mais qui socialement tient compte de la garde des enfants, qui est souvent confiée à un seul des conjoints, qui en l'occurrence est souvent la maman.

Également parce qu'on a un régime de rentes public, il est aussi possible, M. le Président, lorsqu'on fait le calcul de la période cotisable, de déduire 15 % des années de gains faibles. Ça, ça facilite beaucoup la prise en considération pour des jeunes qui, lors de leur arrivée sur le marché du travail, n'ont pas des revenus de travail qui sont des revenus, si vous voulez, importants. Alors donc, cette déduction, cette soustraction de 15 % des années de gains faibles, c'est aussi une autre façon de valoriser la rente de retraite en prenant en considération que la plupart du temps on n'arrive pas sur le marché du travail en commençant à travailler à un plein salaire.

D'autre part, des modifications viennent accorder aux conjoints de fait des droits qui sont reconnus aux conjoints mariés en ce qui concerne le partage des gains et le partage de la rente de retraite. Le partage des gains consiste à répartir en parts égales entre deux ex-conjoints la somme des gains admissibles qu'ils ont accumulés dans le Régime de rentes pendant leur période de vie commune. Le partage de la rente de retraite consiste à répartir entre les conjoints qui continuent à cohabiter la rente de chacun en tenant compte de la durée de leur vie commune. Actuellement, le partage des gains n'est possible qu'entre deux conjoints dont le mariage a été dissous par divorce ou déclaré nul ou n'est possible qu'entre deux conjoints mariés et séparés de corps – sauf si ceux-ci y renoncent – alors que le partage de la rente de retraite du Régime de rentes du Québec est permis depuis le 1er janvier 1994 mais uniquement entre conjoints mariés et non judiciairement séparés de corps. Les conjoints de fait, depuis 1966, ont droit à la rente de conjoint survivant, mais encore faut-il qu'il y ait eu décès. Aucun autre droit ne leur est conféré ni en cas de rupture de l'union de fait, comme un partage des gains, ni pendant la vie commune, comme un partage de la rente.

Alors, le gouvernement profite donc de cette réforme pour adapter les dispositions du Régime de rentes du Québec à la réalité sociale que représente le nombre croissant de couples qui choisissent l'union de fait plutôt que le mariage et pour établir une certaine équivalence entre les droits consentis aux conjoints mariés et aux conjoints de fait. Il est à noter que ces nouvelles mesures ont une incidence bénéfique sur le revenu des femmes, qui est encore souvent inférieur à celui des hommes, puisque le partage est généralement à leur avantage. Ce sont là aussi des modifications qui permettent une plus grande concordance des dispositions du Régime de rentes du Québec avec celles du Régime de pensions du Canada qui confèrent déjà tant aux conjoints mariés qu'aux conjoints de fait le droit au partage des gains et le droit au partage de la rente.

Les modalités générales suivantes s'appliquent au partage des gains et au partage de la rente entre conjoints de fait. Le droit au partage est accordé aux conjoints qui ne sont pas mariés à une autre personne, de façon à ne pas déroger aux règles du Code civil relatives au patrimoine familial. D'autre part, la durée minimum de vie maritale pour reconnaître les conjoints de fait est la même que celle prévue pour le droit à la rente de conjoint survivant, soit trois ans ou un an si un enfant est né de cette union. La demande de partage doit être faite par les deux conjoints, à moins qu'ils n'aient convenu par écrit que la demande pourra être faite par l'un d'eux seulement. Il faut qu'il y ait consentement mutuel entre conjoints de fait pour qu'il y ait partage soit parce qu'il y a dissolution de l'union ou soit parce qu'il y a partage de la rente de retraite lors de la cohabitation à la retraite. Alors, en définitive les conjoints de fait devraient tirer avantage de ces nouvelles dispositions.

En plus, le projet de loi comprend des dispositions diverses et transitoires nécessaires à l'harmonisation des régimes de droit anciens et nouveaux. Je profite de l'occasion d'ailleurs pour rassurer, je dirai, les membres de cette Assemblée mais en particulier le porte-parole de l'opposition officielle, le député de Verdun, quant à la validité du rapport actuariel de 1994. Il sait mieux que quiconque, M. le Président, que les projections de la Régie des rentes s'étendent sur plusieurs décennies, de sorte que les résultats moins favorables pour certaines variables sont compensés par des résultats plus favorables dans d'autres variables. Je vous rappelle d'ailleurs que les taux de rendement de la Caisse de dépôt et de placement des dernières années ont permis à la réserve du Régime de rentes d'atteindre 15 600 000 000 $ cette année comparativement à du 14 000 000 000 $ qui avait été projeté dans l'analyse actuarielle de 1994. C'est donc 1 600 000 000 $ de plus que ce qui était prévu.

D'autre part, les hypothèses de l'analyse actuarielle de 1994 tenaient déjà compte des grandes tendances démographiques concernant, par exemple, le taux de fécondité, le solde migratoire et l'espérance de vie. Il n'y a rien qui à ce moment-ci nous indique que ces grandes tendances ont substantiellement changé. Cependant, suite aux représentations qui ont été faites par le porte-parole de l'opposition lors des travaux en commission parlementaire, j'ai pris la précaution de proposer dans le projet de loi n° 149 qu'il y ait dorénavant une analyse actuarielle du Régime de rentes à tous les trois ans plutôt qu'à tous les cinq ans, comme c'était le cas jusqu'à maintenant. De plus, M. le Président, j'ai proposé qu'au plus tard à tous les six ans, au plus tard, une consultation publique soit tenue afin de permettre à la population de se prononcer sur toute modification à apporter au régime. J'ai aussi consenti à ce que la prochaine analyse actuarielle ait lieu en date du 31 décembre 1997. À partir d'aujourd'hui, par l'adoption du projet de loi n° 149, les retraités actuels et les plus jeunes savent que le Régime de rentes peut leur rendre ce pour quoi ils ont cotisé durant toute leur vie de travail.

(12 h 10)

C'est d'autant plus important, M. le Président, que, si nous avions eu cette obligation d'une consultation publique sur le Régime de rentes, il est bien évident qu'il n'y aurait pas eu cette négligence durant les deux mandats du précédent gouvernement, qui nous amène aujourd'hui à devoir accélérer les cotisations versées pour être capables de faire face à nos obligations. Je vous rappelle que depuis 1992 la Caisse se décaisse et que, sans cet effort accru – que nous avons déjà commencé cette année avec la hausse de 1997 – sans cet effort accru durant les six prochaines années, bien c'est une caisse dégarnie que nous laisserions à la génération qui nous suit.

Alors, il était pressant de prévoir un taux de cotisation non seulement applicable pour l'année 1998, mais pour les années subséquentes. Pour 1998, je vous rappelle que le taux de cotisation au régime sera porté à 6,4 %. Il est aussi pressant que l'exemption générale soit gelée à 3 500 $ et que le versement de cotisation par le retraité qui travaille soit prévu et débute. C'est au 1er janvier que les retraités qui travaillent débuteront finalement à nouveau à cotiser au Régime de rentes.

Ces deux mesures, le gel de l'exemption générale, le versement des cotisations par les retraités qui travaillent, ont une incidence directe sur les cotisations à verser. Les règlements du ministère du Revenu relatifs à la perception de la cotisation qui établissent les tables de retenues à la source pourront donc être publiés à temps, et les salariés et leur employeur ainsi que les travailleurs autonomes pourront obtenir rapidement la confirmation des modalités du paiement de leur cotisation au Régime de rentes pour l'année 1998.

Chacune des mesures incluses dans le projet de loi n° 149 l'a été après en avoir soupesé les avantages et parfois les inconvénients, avec en tête l'objectif de conserver les quatre principaux acquis du Régime de rentes du Québec. Je l'avais promis lorsque le livre vert a été rendu public, il y a de cela 18 mois. Ces acquis qui demeurent sont les suivants: taux de remplacement du revenu à la retraite de 25 %, âge de la retraite à 65 ans, indexation complète des prestations et maintien du 15 % du retranchement des années de gains faibles ou nuls.

Lors de l'étude article par article du projet de loi, mes collègues députés ont constaté que le domaine de la retraite regorge de notions auxquelles il faut apporter une attention particulière. C'est souvent un monde de spécialistes. Nous-mêmes, législateurs à l'Assemblée nationale, avons à traiter divers dossiers à caractère technique et souvent très spécialisés. Nous avons eu la chance d'avoir à notre disposition des équipes compétentes qui nous ont expliqué les impacts des lois que nous votons et qui nous ont permis de bien comprendre et de voter les législations qui répondent aux besoins de la population. Je veux d'ailleurs remercier, M. le Président, toute l'équipe de la Régie des rentes du Québec, qui a vraiment fourni une assistance technique autant au gouvernement, je dirai, qu'à l'opposition, en fait, qui a mis sa compétence, son expertise au service des parlementaires.

M. le Président, ce qui m'a rassurée durant l'étude article par article justement, c'est que, même si nous l'avons fait avec diligence, nous avons procédé avec rigueur. Et je dois vous dire que la présence du député de Verdun est vraiment une garantie pour tous les parlementaires réunis en commission parlementaire que l'article dont nous disposons, à chaque étape, a fait l'objet, je dirais, d'une étude approfondie, jusqu'à épuisement parfois, pour en assurer la compréhension pleine et entière. Cela ne signifie pas que nous sommes toujours d'accord, mais, chose certaine, nous savons ce que nous votons à chaque étape de nos travaux.

C'est important parce que ces notions de retraite ont un impact direct sur la vie de 4 000 000 de personnes au Québec, soit 3 000 000 de cotisants et 1 000 000 de bénéficiaires d'une rente de la Régie des rentes du Québec. En fait, c'est actuellement 4 000 000 de personnes qui seront concernées par l'adoption de ce projet de loi. Ce sont des personnes qui ont des droits, des obligations, des niveaux de connaissance différents, qui parfois ont même de la difficulté à lire les informations qui leur sont transmises, et ce n'est pas fréquent pour plusieurs de nos concitoyens d'avoir l'expertise pour, en fait, bien comprendre toutes les particularités des régimes des rentes. Mais je voudrais rassurer mes collègues. La Régie des rentes va prendre tous les moyens à sa disposition pour bien expliquer la réforme du Régime de rentes à ses 4 000 000 de cotisants et bénéficiaires, de manière à ce qu'ils puissent bien comprendre leurs droits et obligations et profiter pleinement de la rente publique.

Je rappelle que la rente publique, c'est un taux de remplacement de revenu à la retraite, un taux de remplacement de 25 %, à partir d'un plafond qui est de 35 800 $. Donc, c'est 25 % de 35 800 $, le maximum du remplacement de revenu de la rente publique. Ça signifie, autant pour nous dans cette Assemblée que pour ceux et celles qui nous écoutent et ceux et celles qui doivent savoir, que ce remplacement de 25 % du revenu est insuffisant pour s'assurer un maintien de revenu satisfaisant à la retraite. Mais c'est comme, d'une certaine façon, les fondations d'une épargne-retraite. Ce ne sont cependant que des fondations, M. le Président, et il est nécessaire que nous répétions qu'il faille ajouter à ces fondations de l'épargne-retraite.

La Régie a mis en place des mécanismes et services en vue de répondre aux besoins de l'ensemble des cotisants et des bénéficiaires. Au cours des dernières années, elle a multiplié les initiatives afin d'améliorer son offre de services à la population. En 1996, la Régie des rentes a adopté une charte des services à la clientèle qui vient confirmer cette priorité de services au public. Elle a mené une consultation auprès de 4 000 de ses clients et elle s'est engagée, par cette charte, à offrir des services fiables, à faciliter les démarches, à offrir des services courtois, à donner une information complète, la plus simple possible cependant, sur les droits et responsabilités des cotisants et des bénéficiaires et à fournir l'aide d'une équipe compétente à tous les niveaux de manière à ce que cela soit accessible à tous et toutes, partout au Québec.

La Régie a aussi initié un forum d'échanges sur les services à la clientèle avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec, la Société de l'assurance automobile du Québec, la Commission de la santé et de la sécurité du travail, la Commission des normes du travail. La Régie des rentes organise périodiquement des rencontres entre ces différents organismes qui ont comme mission un service à la clientèle, des rencontres permettant d'échanger sur des pratiques innovatrices en matière de services à la population. Je tiens d'ailleurs à féliciter la Régie des rentes ainsi que les organismes que j'ai mentionnés de leur initiative qui, en fait, témoigne d'un respect pour les Québécois et les Québécoises.

Alors, pour le bénéfice de mes collègues, je voudrais dire deux mots d'un plan directeur qui a été adopté récemment sur les services à la clientèle. Alors, M. le Président, il s'agit d'accentuer davantage l'effort d'humanisation des services; d'aider les personnes dans l'exercice de leurs droits; de profiter du réseau d'entreprises et d'institutions en contact avec les clients québécois, cotisants et bénéficiaires, pour mieux les informer de leurs droits et obligations; et de recourir aux nouvelles technologies de communication. Alors, la Régie des rentes entend mener une campagne d'information et s'est engagée dans sa charte des services à la clientèle de manière à produire des documents dans un langage simple et facile à comprendre.

Les députés de la commission ont pu, M. le Président, avoir accès à un vidéo qui explique les tenants et aboutissants de la réforme. D'ailleurs, ce vidéo est disponible et pourrait être mis à la disposition à la fois des parlementaires, mais aussi, au sein de Communication-Québec, des groupes qui pourraient y être intéressés.

Dorénavant, en vertu du projet de loi n° 149, à l'article 69, la Régie pourra transmettre aux cotisants l'état de leur participation au régime par l'entremise de leur employeur. Lorsque l'employeur demandera à la Régie une demande pour ses employés, la Régie communiquera aussi l'état de participation à chacun des cotisants à son adresse personnelle ou à l'adresse de son employeur, sous pli confidentiel. C'est là une information hautement personnelle et la Régie entend bien la transmettre tout en en préservant le caractère confidentiel. La Régie pourra rejoindre plus facilement et à un meilleur coût 500 000 cotisants à chaque année par le biais de leur poste de travail, en collaborant avec les employeurs, et ainsi leur remettre leur relevé de participation au Régime de rentes.

(12 h 20)

Afin d'informer les cotisants et les bénéficiaires des enjeux et modifications qui sont issus de la réforme, de rétablir aussi la confiance dans le régime public de retraite – c'est une confiance qui a été ébranlée par la négligence du gouvernement précédent – la Régie a prévu le déploiement d'un vaste plan de communication. Une campagne publicitaire va rejoindre, au printemps qui vient, les cotisants, les bénéficiaires. Il y aura également une tournée en région pour rejoindre les médias et évidemment aussi il y aura une participation à des salons, des expositions, des événements spéciaux. La Régie des rentes rencontrera aussi chacun de mes collègues députés dans son bureau de comté de manière à ce qu'ils puissent être mis au fait, par des présentoirs s'ils le souhaitent, de tous les renseignements pertinents sur la réforme du régime et offrir ainsi une qualité d'information à leurs concitoyens.

Alors, en conclusion je tiens à remercier sincèrement les membres de la commission des affaires sociales qui ont reçu, à l'automne 1996, plus d'une quarantaine de groupes lors de la consultation sur le livre vert; je remercie aussi les membres de la commission de l'économie et du travail qui ont réalisé un boulot considérable en étudiant article par article le projet de loi. Je réitère mes remerciements au porte-parole de l'opposition officielle, et, bien que le député de Verdun n'ait pas réussi, M. le Président, à obtenir tout ce qu'il souhaitait, je crois que ses interventions auront eu cependant une influence certaine dans les décisions que nous avons annoncées.

Alors, en conclusion le projet de loi n° 149 modifie la Loi sur le régime de rentes du Québec de manière à s'assurer que les générations futures pourront continuer à profiter du Régime de rentes. Il prévoit certaines mesures touchant les cotisants et les bénéficiaires. J'en propose, M. le Président, avec fierté, l'adoption. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais, dans les temps qui me sont impartis, essayer d'expliquer les points de divergence qu'il y a actuellement entre la position ministérielle et la mienne quant au projet de loi n° 149. Il y a une raison pédagogique derrière cela, et je vais essayer de le faire le plus facilement possible.

Je vais commencer néanmoins par rassurer l'ensemble de la population. Il est de la volonté des partis – et je dis bien «des partis», c'est-à-dire de chacun des côtés de la Chambre, quel que soit le moment où ils sont au pouvoir – d'assurer que les bénéfices du Régime de rentes soient maintenus pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. J'ai des doutes que ce qu'on fait actuellement soit suffisant – je vais essayer d'expliquer pourquoi – et je vais intervenir disons de la manière la plus simple possible.

M. le Président, le Régime de rentes du Québec est un régime où essentiellement on ne capitalise pas nos cotisations, mais où ce sont les cotisations payées par les personnes qui travaillent qui aident en grande partie – et c'est ça, la grande partie – à payer les rentes que reçoivent les personnes qui bénéficient de rentes, que ce soit les rentes d'invalidité, les rentes de conjoint survivant ou les rentes de retraite. Maintenant, on a fait, dans toute analyse actuarielle, des projections. Alors, il faut bien comprendre ce que ça veut dire, une analyse actuarielle: on essaie de projeter ce qui va se passer en 2010, 2020, 2030. Et la manière pour essayer de mesurer: on projette ce que vont être les obligations du régime puis on mesure aussi ce que va être l'ensemble des argents qui sont des salaires ou qui sont la masse salariale soumise à cotisation pour se donner une idée des obligations du régime par rapport à l'ensemble de la masse salariale. Alors, là, on le projette.

Essentiellement, toute la technique de la science actuarielle, c'est de tenir compte de trois variables, et vous allez évidemment, bien sûr, les comprendre, M. le Président. Puisqu'on touche à des personnes, il y a des variables d'ordre démographique. Ça veut dire: Comment évolue la population du Québec? Il y a des variables économiques. Une fois qu'on a parlé des variables démographiques, il y a des variables économiques, c'est-à-dire: Les gens qui constituent la population du Québec, est-ce qu'ils gagnent beaucoup ou est-ce qu'ils ne gagnent pas beaucoup? Est-ce que l'activité économique fait qu'ils ont beaucoup de salaire ou pas beaucoup de salaire? C'est important évidemment pour connaître ce qu'ils vont cotiser à l'intérieur du Régime de rentes. Et, troisième variable, c'est ce que vous avez capitalisé, autrement dit, ce que vous avez déjà mis de l'avant et que vous avez placé dans une caisse qui s'appelle la Caisse de dépôt: Combien rapporte-t-il? Quel est son taux de rendement? C'est essentiellement les trois variables économiques.

Année après année, M. le Président, on commence par mesurer les obligations du régime, et on mesure les obligations du régime par une dimension simple. On mesure les obligations du régime par le rapport qui existe entre les sorties de fonds estimées et la masse salariale soumise à cotisation. Cela veut dire qu'on projette combien, par exemple, en 2010 ou en 2020, l'ensemble des obligations du régime vont demander en sortie de fonds et combien il y aura de masse salariale, c'est-à-dire combien les gens vont gagner, la masse salariale soumise à cotisation. Et le rapport des deux fait combien il faudrait prendre sur la masse salariale soumise à cotisation pour satisfaire les obligations du régime.

M. le Président, il y a un point sur lequel je suis en désaccord avec la ministre, c'est qu'elle dise que ça ne varie pas beaucoup d'année en année. J'ai devant moi, si vous me permettez, pour l'horizon 2030, qui est un horizon important, comment les différentes analyses actuarielles de 1982, 1986, 1988, 1992 et 1994 ont fait fluctuer cette espèce de rapport qui mesure, en quelque sorte, les obligations du régime. En 1982, on l'estimait à 12,6 %. Ça voulait dire que, s'il n'y avait eu aucune capitalisation, un taux de cotisation de 12,6 % aurait satisfait les obligations du régime en 2030. On est toujours sur l'horizon 2030. En 1986, parce que entre 1982 et 1986 on a connu une situation qui était économiquement mauvaise, donc les projections s'en sont ressenti, on s'est retrouvé à ce moment-là à remonter le taux à 14 %. En 1988, parce que entre 1986 et 1988 il y avait eu une amélioration, le taux était passé à 13,36 %; en 1992, à 13,51 %. Il a remonté, en 1994, à 14,3 %. Et les obligations du régime, d'après moi, projetables en 1997 vont encore être un peu plus élevées. C'est ça, tout le débat que nous avons ici entre la ministre et moi, c'est que nous faisons actuellement toute la réforme du Régime de rentes basée essentiellement sur les chiffres de l'évaluation actuarielle de 1994 et non pas sur l'évaluation actuarielle de 1997 qui risque d'être différente.

Alors, il y a des gens ici qui vont me dire: Oui, mais, écoutez, là, vous parlez de 1 % ou de 0,1 %. Je veux simplement vous dire, M. le Président, que, quand on parle du Régime de rentes, on parle de sommes d'argent considérables. La masse salariale soumise à cotisation pour 2030 est à 300 000 000 000 $. Ça veut dire qu'une variation de 1 % sur les obligations du régime correspond en une année à 30 000 000 000 $ – je ne parle pas de millions – 30 000 000 000 $ projetés sur l'année 2030, ce qui correspond à peu près aux trois quarts de l'ensemble du budget du gouvernement du Québec actuellement.

(12 h 30)

Alors, M. le Président, comprenez bien que quelques variations de pourcentages projetées sur l'année 2030 ont des effets extrêmement importants, et on ne peut pas ne pas en tenir compte. Alors, le grand regret de tout le débat que nous avons eu – je vais revenir après, pourquoi les inquiétudes que j'ai – le grand regret de cette réforme du Régime de rentes, c'est qu'on la fait, on l'analyse basé sur l'évaluation actuarielle de 1994 et non pas sur l'analyse actuarielle de 1997.

Alors, dans sa présentation, la ministre a dit: Oui, il y a probablement 10 ans, enfin, les gouvernements... je comprends qu'elle essaie de politiser un peu le débat, mais «il y avait une incurie du gouvernement précédent». Je rappellerais que le gouvernement précédent a été exactement dans la même situation où elle va nous situer avec le projet de loi qu'on va voter aujourd'hui. Parce qu'un des grands principes qui sous-tend les deux régimes de rentes, c'est-à-dire le Régime de pensions du Canada et le Régime de rentes du Québec, c'est qu'il y ait une forme d'harmonisation des taux de cotisation. Pourquoi? Parce qu'il y a quand même un mouvement de population. Il est souhaitable qu'on ait la possibilité de passer d'un régime à l'autre sans grande difficulté.

Or, qu'est-ce qui s'est passé entre 1986 et 1996? C'est qu'il y avait un accord entre le RPC et le RRQ où on a monté progressivement le taux de cotisation de 3,6 %, où il était en 1986, pour arriver à 5,6 % en 1996. C'est-à-dire qu'on a monté progressivement le taux de cotisation par une entente qu'il y avait entre les deux niveaux de gouvernement.

L'article sur lequel je m'oppose fondamentalement, c'est qu'on se replace aujourd'hui dans un même carcan à long terme. L'article 11 prévoit les taux de cotisation jusqu'à l'année 2003. Autrement dit, ce que nous votons actuellement prévoit des taux de cotisation par entente avec le gouvernement fédéral, c'est-à-dire avec les gens qui administrent le Régime de pensions du Canada, les taux de cotisation jusqu'à 2003 – ça, pour ceux que ça intéresse, c'est l'article 11 du projet de loi – qui vont nous lier, parce qu'il est clair qu'aucun des deux partenaires va vouloir changer le taux de cotisation entre le Régime de pensions du Canada et le Régie des rentes du Québec, vont nous lier jusqu'en 2003 et même plus tard, parce qu'on dit qu'après 2003 il va être stable à 9,9 %, alors que l'on ne connaît pas actuellement quelle est exactement la situation actuarielle du Régime de rentes du Québec, pas plus d'ailleurs qu'on connaît la situation actuarielle du Régime de pensions du Canada.

Je vais me permettre de vous expliquer, M. le Président, quelles sont les différences et qu'est-ce qui aurait justifié des taux de cotisation qui auraient pu être considérés comme différents. Nous avons essayé de convaincre le gouvernement... Bien sûr, pour 1998, il n'est pas question de vouloir, alors qu'on est au mois de décembre 1997, ne pas fixer le taux de cotisation. Mais donnons-le temps, faisons une évaluation actuarielle de 1997, voyons les résultats de l'évaluation actuarielle de 1997 et, lorsqu'on aura en main les évaluations actuarielles de 1997, on aurait pu voir quel était le taux de cotisation qui nous aurait permis réellement de voir ce qui en est.

Pourquoi j'ai cette inquiétude? M. le Président, je vais vous le préciser en quelques éléments. Alors, vous comprenez bien de quoi on parle quand on parle de 1994 et qu'on projette sur ce qui va se passer en 2005 et 2010, mais, si on regarde l'analyse actuarielle de 1994, on peut savoir ce qui s'est passé en 1995, en 1996 et en 1997, parce que ce n'est plus des éléments de projection, c'est des éléments de réalisation. Donc, on peut voir la différence qu'il y a entre ce qu'on avait projeté en 1994 et ce qu'on a réalisé en 1995, 1996, 1997.

Alors, si vous pouvez regarder une chose, les variables démographiques – on va en parler ensemble – c'est ce qui va toucher l'évolution de la population du Québec. Les variables démographiques, il y en a essentiellement trois qui sont des variables démographiques importantes, il n'y en a que trois. Il y a: Combien il y a de nouveaux petits bébés; il y a combien de nouveaux immigrants qui restent ici; et il y a combien de gens qui meurent. C'est à peu près les trois variables démographiques qui vont dire combien, comment, qui mesurent, qui conditionnent en quelque sorte comment évolue la population du Québec et, ensuite, ceux qui sont susceptibles de travailler pour contribuer au Régime de rentes et ceux qui sont susceptibles de rester en vie pour bénéficier du Régime de rentes.

Alors, vous regardez à la fois le nombre de jeunes enfants qui naissent, c'est mesuré par un indice qu'on appelle l'indice synthétique de fécondité. L'indice synthétique de fécondité, c'est un indice qui évalue combien, en moyenne, une femme va pouvoir avoir d'enfants dans sa période où elle est en potentialité d'avoir des enfants. Alors, on a observé, si vous vous rappelez, M. le Président, une croissance... Excusez-moi. L'analyse actuarielle de 1994 présupposait que l'indice synthétique de fécondité continuait à croître pour atteindre une situation plafond en 1999 de 1,8, de la situation où il était, à 1,46. Alors, la réalité que l'on a vue en 1995, 1996, 1997 – et je vous suggère d'aller consulter les chiffres au Bureau de la statistique du Québec – c'est qu'on voit un fléchissement actuellement de l'indice synthétique de fécondité, c'est-à-dire qu'on n'a pas eu la croissance qu'on estimait, on voit, au contraire, un certain fléchissement. C'est-à-dire que les mesures natalistes qui avaient été prévues par le gouvernement précédent dans son dernier mandat ont eu pour effet d'accélérer les naissances mais n'ont pas maintenu un taux d'augmentation des naissances soutenu. Donc, là, déjà, dans l'analyse actuarielle, on a une variable qui va agir d'une manière un peu négative sur l'analyse actuarielle.

Deuxième élément, M. le Président, ce qu'on appelle les flots migratoires ou les flux migratoires, c'est-à-dire, essentiellement, c'est l'évolution de ce qui se passe entre les immigrants qui rentrent au Québec et les gens qui sortent du Québec pour aller s'établir ailleurs. Le solde migratoire a été prévu, à l'intérieur de l'analyse actuarielle, sur un solde migratoire de 20 000 par année. La réalité depuis les trois dernières années, c'est que, au contraire, le pouvoir de rétention, actuellement, des immigrants a diminué et que le solde migratoire a été beaucoup plus faible que ce qui était prévu dans l'analyse actuarielle. Ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'on a conservé moins d'immigrants que ce que... On a eu une balance, si vous voulez, un solde migratoire entre les deux qui a été beaucoup plus faible que ce qu'on avait prévu à l'intérieur de l'analyse actuarielle. Je sais, à l'heure actuelle, qu'il y a des politiques qui sont mises de l'avant par le gouvernement pour augmenter le taux de rétention des immigrants, mais on n'en a pas encore vu l'effet dans l'analyse actuarielle ici, et ça aussi a un effet inquiétant parce que le nombre maximal de personnes qu'ils veulent admettre est en dessous de la barre du 20 000, si j'ai bien lu leur document.

Le troisième élément qu'on doit considérer dans une analyse par rapport aux variables démographiques, c'est ce qui touche l'évolution de la mortalité. Or, on remarque, si vous me permettez, que l'évolution de la mortalité a été... C'est-à-dire qu'on mesure ça par quelque chose qu'on appelle l'espérance de vie à 65 ans. Or, l'espérance de vie à 65 ans croît plus vite que ce qui était prévu dans l'analyse actuarielle de 1994. Ça veut dire quoi? Ça veut dire que les gens vont rester en vie un peu plus longtemps. Comprenons-nous bien, que, si des bénéficiaires du Régime restent en vie un peu plus longtemps, leur poids sur le régime de retraite va être un peu plus élevé que ce qu'on avait prévu en 1994, M. le Président. Alors, ces variables démographiques sont toutes dans le même sens, elles pénalisent, c'est-à-dire qu'elles augmentent actuellement la situation dans laquelle se trouve le Régime.

(12 h 40)

Le deuxième élément sur lequel on doit projeter à l'heure actuelle, c'est les variables économiques, c'est-à-dire de se dire quel va être le taux d'emploi, c'est-à-dire, parmi la population qui est en âge de travailler, combien vont travailler, c'est-à-dire, en travaillant, combien vont contribuer au Régime de rentes du Québec. Et le deuxième élément dans ces variables économiques, c'est: Quelles sont les rémunérations qu'ils vont obtenir, de manière à avoir une idée plus claire pour bien mesurer quelles vont être les rentrées possibles à l'intérieur du Régime de rentes du Québec.

Alors, ces variables économiques et dans le taux d'occupation et dans le taux de l'évolution du salaire moyen ont un effet de pénaliser, en quelque sorte, continuer à pénaliser le Régime. Il est important de bien comprendre, M. le Président, que, dans l'analyse actuarielle de 1994, on avait fait aussi ce qu'on appelait des analyses de sensibilité. C'est-à-dire, on s'était dit: Si les variables démographiques se comportaient mal, si les variables économiques se comportaient mal – et, à l'heure actuelle, il faut bien comprendre que et les variables démographiques et les variables économiques se sont comportées mal – le taux, c'est-à-dire le rapport entre les besoins du Régime et la masse salariale soumise à cotisation, passerait, si on prenait la situation la pire, si on projetait la situation la pire, de 14,3 % à 18,2 % en 2030, c'est-à-dire une variation qui va être presque de 4 %. Alors, je vous rappellerai que 1 %, c'est à peu près 30 000 000 000 $ sur l'horizon de 2030, c'est-à-dire, 4 %, ça ferait 120 000 000 000 $ – 120 000 000 000 $, hein, comprenez-moi bien, 120 000 000 000 $ – sur l'horizon de 2030. Voici la difficulté, M. le Président, que l'on a lorsqu'on travaille avec des analyses actuarielles qui sont des analyses actuarielles qui ne sont plus à date.

M. le Président, il faut dire, et là une fois que j'ai parlé des deux éléments qui ont une action plutôt négative sur le Régime, il faut comprendre qu'il y a aussi des situations qui varient dans le sens pour alléger la situation du Régime, et c'est le taux de rendement de la Caisse de dépôt, le taux de rendement de la Caisse de dépôt projeté sur l'élément à long terme. Alors qu'il était évalué à 8 % dans l'analyse actuarielle de 1994, je crois qu'on peut décemment actuellement arriver à projeter sur le taux de rendement à long terme aux alentours de 10 %; sur le long terme, ça serait quelque chose de tout à fait réaliste. Donc, vous comprenez, M. le Président, que, dans ce cadre-là, on fonctionne dans le brouillard.

Et j'aime ça, quelqu'un qui me dit: Bien, vous savez, ça va se compenser grosso modo. Je m'excuse de vous dire: On n'est pas en train de vouloir compenser grosso modo, parce qu'on joue sur des variations de 1 % qui correspondent à des variations de 30 000 000 000 $. Comprenez-moi bien. Et je suis parfaitement conscient qu'il y a eu deux facteurs qui sont des facteurs pénalisants et un facteur qui est un facteur qui joue au bénéfice du Régime de rentes, qui vont changer éventuellement l'analyse actuarielle du Régime de rentes.

Mais ce n'est pas toutes les objections que j'ai envers le projet de loi n° 149. Donc, les premières objections, c'est de dire: Le taux de cotisation que vous mettez là est un lien qui est un peu gênant compte tenu qu'on ne connaît pas exactement ce qu'on a à corriger dans le Régime de rentes. Vous allez me dire: Oui, mais c'est le même taux de cotisation que donne le Régime de pensions du Canada. Je dis: Oui, c'est le même taux que le taux du Régime de pensions du Canada, mais la situation sur le reste du Canada n'est pas la même que celle que nous avons vécue au Québec.

Autrement dit, trois éléments qui sont différents parce que les trois variables sont différentes. En particulier en ce qui touche les flots migratoires, les variables démographiques ont évolué différemment dans le reste du Canada qu'elles ont évolué au Québec. C'est-à-dire, souvent le taux de rétention des immigrants sur l'ensemble canadien est un taux de rétention qui est beaucoup plus fort que le taux de rétention que l'on a actuellement au Québec et souvent les sorties, les personnes qui quittent le Québec pour s'installer ailleurs vont s'installer dans d'autres provinces canadiennes. Premier élément.

Deuxième élément, l'évolution des variables économiques. Particulièrement le taux d'emploi et l'évolution du salaire moyen se comportent en moyenne, dans le reste canadien, à cause du poids de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, beaucoup mieux que la situation du Québec, ce qui fait que l'analyse, les besoins du Régime de rentes du Québec sont différents de ceux du RPC.

Troisième élément qui encore là va jouer d'une manière bien différente: alors que, nous, nous avons capitalisé depuis très longtemps à l'intérieur de la Caisse de dépôt les éléments qui étaient les épargnes du Régime de rentes, il n'y a pas eu la même capitalisation à l'intérieur du RPC, ce qui fait que les effets bénéfiques provenant d'une capitalisation, ils ne peuvent pas les escompter.

Alors, M. le Président, à cause des structures internes des deux régimes de pensions, il y aurait eu lieu d'avoir une négociation beaucoup plus solide et beaucoup plus sérieuse quant à l'évolution des taux de cotisation, parce que je vais le faire avec vous, M. le Président, dans les minutes qui me restent à partir de maintenant, vous exposer ce que nous proposons actuellement et ce que nous allons voter à l'intérieur du projet de loi n° 149. D'emblée, je dis que tout ce qui est des améliorations au Régime de rentes du Québec qui sont des améliorations qui étaient nécessaires pour faciliter la vie du Régime de rentes, nous y avons souscrit sans aucune difficulté, que ça touche les questions de conjoint de fait, que ça soit la facilité pour retarder les dates pour les personnes qui n'avaient pas soumis leur demande en temps, etc.

Ce que je débats avec vous, M. le Président, c'est les variables de fond. Alors, essentiellement, pour corriger, pour faire en sorte que le taux de cotisation au RRQ reste en dessous de la barre des 10 %, il y a un certain nombre de mesures qui ont été prises par le projet de loi n° 149 qui est devant nous.

Une première mesure que je trouve qui peut être pénalisante en cas... Alors, il faut bien comprendre les mesures. Une première mesure, celle qui va toucher le fait que le calcul de la rente sera non pas sur la base des trois dernières années, mais sur une base de cinq ans. Ça, ça va avoir un effet sur le Régime de rentes si on se trouve en situation fortement inflationniste. En situation très faiblement inflationniste, parce qu'il y a une corrélation, bien sûr, entre l'évolution du salaire moyen et l'évolution de l'inflation, ça aura beaucoup moins d'effets.

Le premier élément qu'on a choisi, c'était l'accélération du rythme d'augmentation des cotisations, et on l'a fait de manière à avoir un taux d'équilibre en dessous de la barre du 9,9 %. Je prétends – je prétends, M. le Président, je prétends – que, compte tenu du taux de rendement actuellement de la Caisse de dépôt, une légère variation de l'accélération du taux de rendement, du rythme d'augmentation des cotisations aurait pu – parce que, comprenez-nous bien, nous n'avons pas les mêmes problèmes que le RPC en termes de capitalisation – nous permettre de ne pas avoir ce que je discutais un peu plus tôt, c'est-à-dire des compressions de 0,2 % sur les personnes handicapées.

Donc, on n'a pas cherché, d'après moi, et je n'ai nulle part eu, dans les rapports actuariels, d'analyse de sensibilité sur des taux, des rythmes – faites attention – d'analyse de sensibilité sur les rythmes d'augmentation des cotisations qui auraient pu être différents et qui, compte tenu du fait que les taux de rendement à la Caisse sont supérieurs à ce qui était prévu en 1994, auraient pu avoir des effets importants sur le taux d'équilibre.

(12 h 50)

La deuxième mesure qui est faite, c'est le gel de l'exemption annuelle de base. Alors, pour ceux qui ne sont pas nécessairement familiers avec le langage – je sais que vous l'êtes, M. le Président – mais, enfin, il y a deux variables, deux mots qui sont importants, ce qu'on appelle l'exemption annuelle de base et le maximum des gains admissibles. C'est-à-dire, dans votre salaire, par exemple, M. le Président, qui, comme président de l'Assemblée nationale, dépasserait les 35 600 $ actuellement, vous avez donc la partie de votre salaire sur laquelle vous cotisez au Régime de rentes du Québec qui est limitée par ce 35 600 $ qu'on appelle le maximum des gains admissibles, mais ce n'est pas sur toute cette partie qui va de zéro à 35 600 $, ça va de ce qu'on appelle l'exemption annuelle de base, qui a été fixée à 10 % du maximum des gains admissibles jusqu'à un certain temps mais qui maintenant va être gelée et va être gelée à 3 500 $... Alors, comprenez-moi bien, M. le Président: donc, vous cotisez actuellement sur la partie qui va des gains qui s'équivaut, de 3 500 $, au maximum des gains admissibles, puisque le projet de loi gèle actuellement l'exemption annuelle de base.

Ceci a quoi pour effet? Ça a, si le maximum des gains admissibles continue à croître, si le maximum des gains admissibles continue à croître, parce qu'il croît avec l'évolution du salaire industriel moyen au Canada, la partie de votre salaire qui est soumise à la cotisation va être donc plus importante. Donc, il y aura plus de rentrées de fonds à l'intérieur du Régime. C'est une manière progressive choisie par les deux niveaux de gouvernement pour, disons, atteindre, faire en sorte que la partie de votre salaire sur laquelle vous cotisez corresponde mieux à la partie de votre salaire sur laquelle on va calculer vos prestations de rentes.

Sauf, M. le Président, que pour mesurer l'effet de cette mesure, pour bien comprendre l'effet de cette mesure, il faut que le maximum des gains admissibles soit en croissance. Parce que, si on se plaçait dans une situation où, sur cinq ans, le maximum des gains admissibles ne croisse pas parce que la situation économique fait en sorte que le maximum des gains admissibles ne croisse pas – et là je pourrais rentrer avec vous, M. le Président, sur tout le débat structurel qu'on a actuellement sur le marché du travail, mais ça, c'est un autre débat, débat où la part des salariés devient moins importante que celle de la part des travailleurs autonomes, donc la tendance à la croissance du salaire industriel moyen est relativement plus faible qu'elle l'était dans le passé – si le maximum des gains admissibles ne croît pas, vous n'aurez pas une augmentation de cette partie de la partie du salaire soumis à cotisation, et les bénéfices que vous voulez obtenir de ça pour faire en sorte que votre taux de cotisation soit en dessous de 9,9 % risquent d'en être perdus. Alors, il faut bien comprendre, entre vous et moi, que cette mesure en ce qui touche le gel de l'exemption annuelle de base n'a réellement une portée, une possibilité, que dans la mesure où le maximum des gains admissibles va réellement croître.

Alors, comprenez-moi bien, M. le Président, on a mesuré l'effet de cette mesure sur la projection qu'on faisait, dans l'analyse actuarielle de 1994, de l'évolution du maximum des gains admissibles. Alors, la projection que l'on faisait du maximum des gains admissibles était de 34 900 $ en 1994, 35 500 $ en 1995, 36 200 $ en 1997, 37 000 $ en 1998, 38 800 $, 39 000 $. Vous voyez, à l'heure actuelle, que la réalité de l'augmentation du maximum des gains admissibles n'a pas suivi ce que l'on avait projeté dans l'analyse actuarielle de 1994. Ceci veut dire que le rapport qui essayait de mesurer l'effet de la portée de la loi n° 149 sur le Régime de rentes est sous-estimé à l'heure actuelle dans ce document de juin 1997, parce que – et vous le comprenez facilement – si le maximum des gains admissibles a un taux de croissance plus faible que ce qu'on avait estimé, l'effet de cette mesure sur la correction du taux de cotisation va être plus faible, M. le Président.

Alors, il est important de bien comprendre ici la position de l'opposition. Et, de part et d'autre, nous avions deux objectifs qui étaient celui d'assurer les principaux avantages qui étaient prévus à l'intérieur du Régime de rentes, d'une part, d'autre part, de faire en sorte que ce qu'on appelle le taux de cotisation d'équilibre soit un taux de cotisation qui reste en dessous de la barre des 10 %.

Je crains que ce que nous votons aujourd'hui ne nous permette pas d'atteindre ces objectifs et que nous soyons obligés de revenir ultérieurement sur d'autres mesures. On aurait été tellement plus à l'aise, M. le Président, si, de part et d'autre, on avait ce que la ministre – et je dois reconnaître qu'elle a accepté... Si purement et simplement on s'était entendu sur les choses suivantes: Premièrement, bien sûr, réglons les problèmes à court terme; les problèmes à court terme, on était prêt, de notre côté, à les faire, c'est-à-dire déterminons quel doit être le taux de cotisation pour l'année 1998. Il est évident qu'il faut le faire, il n'y a pas personne ici qui va dire qu'il ne faut pas le faire, ce serait complètement idiot. Deuxièmement, entendons-nous sur un certain nombre de mesures; si on doit aller dans une tendance du gel de l'exemption annuelle de base, entendons-nous sur le gel de l'exemption annuelle de base, quoique, moi, je pense que cette mesure-là, comme je viens de vous le démontrer, M. le Président, n'aura pas l'effet escompté.

J'aurais beaucoup plus préféré que l'on obtienne une croissance... au lieu de prendre la croissance prévue suite à l'évolution du salaire canadien moyen, on aurait pu, nous, à l'intérieur du Régime, prévoir une augmentation de la borne de cotisation en rajoutant, année après année, une fraction de l'exemption annuelle de base de manière à arriver, sur un horizon de cinq ans ou six ans, à faire coïncider la partie du salaire sur lequel vous-même, M. le Président, cotisez avec la partie du salaire sur lequel vous avez retiré des bénéfices du Régime de rentes. Ce n'est pas la voie qui a été choisie par le gouvernement, mais ça aurait été, je pense, une voie qui aurait ouvert la porte à beaucoup... du moins, plus d'assurance.

Mais ce qui m'inquiète énormément, c'est le fait suivant. On est aujourd'hui, une fois qu'on va avoir voté la loi 149, on est lié par rapport à l'augmentation des taux de cotisation, et les taux de cotisation vont être liés, actuellement, au moins jusqu'en 2003, puisqu'on aura eu l'accord et qu'on a donné notre accord au gouvernement fédéral, avec les problèmes suivants et qu'il est important de bien comprendre.

C'est que, si l'analyse actuarielle de 1997 révèle que les besoins du Régime ne sont plus satisfaits par ce taux de cotisation, on va se retrouver exactement dans le même carcan où nous nous trouvions entre 1986 et 1996 où, sur un horizon de 10 ans, on avait eu une entente quant à l'évolution du taux de cotisation. J'aurais aimé pouvoir avoir en ma possession un certain nombre d'éléments qui toucheraient les questions touchant les analyses de sensibilité quant au rythme de croissance des taux de cotisation. C'est bien important de comprendre ça, M. le Président, parce que la situation ici, d'après moi, aurait permis, avec une légère variation sur le rythme de croissance des taux de cotisation... Vous me signalez qu'il me reste une minute? Il est une minute avant l'ajournement de 13 heures, c'est bien cela?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Avant de suspendre à 13 heures. Maintenant, il vous restera une vingtaine de minutes, si vous voulez poursuivre après.

M. Gautrin: Avant de suspendre, alors, écoutez, je vais essayer au moins de terminer mon envolée oratoire, si vous me permettez. De bien comprendre que, à cause de la situation de la Caisse de dépôt et à cause, actuellement, de la situation où les taux de rendement sont nettement supérieurs à ce qu'on prévoyait dans le rapport actuariel, une légère variation du rythme de croissance du taux de cotisation accélérerait la capitalisation. En accélérant la capitalisation, vous augmentez ipso facto les revenus qui sont les revenus de capitalisation.

Je comprends, M. le Président, que je reviendrai à 15 heures, c'est bien cela?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Il reste quelques minutes, quelques secondes, c'est-à-dire.

M. Gautrin: Bon, bien, écoutez, je vais vous laisser... On va suspendre, si vous voulez.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, effectivement, on est aussi bien de suspendre. Vous avez encore 21 à 22 minutes; on vous indiquera le temps précis à la reprise. Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.

L'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du projet de loi n° 149, Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives.

Lors de la suspension des débats, ce matin, M. le député de Verdun avait la parole. Je vous avise qu'il vous reste 23 minutes, M. le député. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Vingt-trois minutes, bon! Alors, M. le Président, c'est avec plaisir que je vais utiliser ces 23 minutes pour synthétiser, en quelques mots, ce qu'est la base des raisons pour lesquelles nous nous opposons actuellement au projet de loi n° 149. Les raisons, et je l'ai exprimé ce matin assez clairement, c'est que l'article 11 du projet de loi fixe les cotisations... Et je pourrais vous reciter, parce que c'était votre collègue qui était sur le trône, ce matin... Il est bon que vous en soyez convaincu, vous aussi.

L'article 11, M. le Président, fixe les taux de cotisation pour 2003 et les années suivantes. C'est-à-dire que le Régime de rentes du Québec va se trouver dans le même carcan dans lequel il se trouvait entre 1986 et 1996 en ce qui touche ses taux de cotisation et qu'il ne pourra pas faire les modifications qui pourraient s'avérer nécessaires après l'évaluation actuarielle de 1997.

La position que nous avons défendue est la suivante: qu'il était nécessaire, avant de faire une réforme en profondeur du Régime de rentes du Québec... Et je vois à quel point la députée de Terrebonne est intéressée par le sujet, bien qu'elle soit encore très jeune. Elle n'est pas encore proche de l'âge auquel elle prendra sa retraite. Je pense, M. le Président, qu'elle est intéressée à savoir ce qui se passe à l'heure actuelle dans le Régime des rentes.

Or, ce qui se passe, M. le Président, c'est la chose suivante: c'est que les chiffres sur lesquels nous faisons les modifications et les corrections au Régime de rentes sont les chiffres qui sont présents dans l'analyse actuarielle de 1994 et non pas ceux que nous allons avoir suite à l'analyse actuarielle de fin 1997, qui va être disponible en 1998.

Alors, le grand problème sur lequel on se pose, c'est que nous modifions actuellement le Régime de rentes. On propose des améliorations, on propose des modifications quant aux bénéfices qu'on va pouvoir tirer du Régime de rentes, mais on ne sait pas bien, actuellement, quels effets cela va pouvoir avoir, parce qu'on est en train de faire toutes nos hypothèses et nos calculs sur des bases qui sont un peu âgées.

Je m'étais permis, M. le Président, de dire ce matin – et me permets de le répéter ici, de vous le répéter – que 1982, 1986, 1992 et 1994 ont été des années d'évaluation actuarielle et que les besoins du régime, toujours pour la même année, qui est 2030, ont varié entre 12,6 %, 14,14 %, 13,34 %, 13,51 % et 14,30 % pour l'année 2030. Alors, ça veut dire, ça, qu'il y a, dans les besoins du régime en 2030, suivant les périodes où on fait l'évaluation actuarielle, des variations qui dépassent les 30 000 000 000 $ ou 35 000 000 000 $, et ça, c'est en fonction bien sûr des projections démographiques, des projections économiques et des projections sur les taux de rendement actuellement de la Caisse de dépôt.

La position que nous avons défendue et que nous aurions voulu voir à l'intérieur du projet de loi était la suivante: voici, il est important qu'on fixe le taux de cotisation pour l'année 1998. Fixons le taux de cotisation pour l'année 1998, mais, pour ce qui est des années subséquentes, attendons d'avoir une évaluation claire de la situation actuelle du Régime de rentes du Québec et qui aurait été une base pour une négociation appropriée avec le gouvernement fédéral. Ça s'adonne malheureusement que tout l'exercice que l'on fait ou que l'on a fait en commission a un caractère un peu futile, et je vais vous expliquer. Le jour où le ministre des Finances, en février, a décidé qu'il donnait son accord au taux de cotisation et aux réformes majeures pour le Régime de pensions du Canada... Quel que soit ce que nous décidons aujourd'hui par voie législative, nos choix sont bien limités et nous avons – parce que nous croyons à l'importance de maintenir l'homogénéité entre les deux régimes – peu de choix.

Le ministre des Finances aurait pu, s'il avait consulté d'ailleurs plus sa collègue de Hochelaga-Maisonneuve, avoir une position différente. Les modifications au Régime de pensions du Canada, pour être mises de l'avant, nécessitaient l'accord de trois des provinces. Le Québec avait une position clé là-dedans. Il aurait pu avoir une position de négociation pour faire mieux adapter ses positions en fonction de sa situation réelle tant sur le plan économique que sur le plan démographique.

Malheureusement, les négociations, vous ne les avez pas menées. Vous avez accepté purement et simplement ce que vous a demandé le Régime de pensions du Canada. Et, comme je vous l'ai répété ce matin, M. le Président, les situations tant sur les flots migratoires que pour les questions de démographie, que pour les questions de taux d'emplois, que pour les questions de croissance des salaires sont différentes dans le reste du Canada qu'elles le sont au Québec. Donc, elles varient différemment en ce qui touche les paramètres actuariels pour le reste du Canada que pour le Québec.

Alors, ceci explique principalement ce lien, ce carcan que l'on a, pourquoi ce projet de loi va être adopté sur division. Parce que nous pensions qu'il était trop tôt à l'heure actuelle, compte tenu de l'information que l'on a, pour aller aussi loin, se commettre sur une période de temps qui va dépasser les 10 ans, et, à mon sens, on aurait été bien mieux de se commettre une fois que nous étions en connaissance de cause et qu'on avait l'ensemble des chiffres disponibles.

Pour ce qui reste des autres mesures du projet de loi, il y a une autre mesure qui était particulièrement irritante, c'est celle où, compte tenu qu'il fallait ramener le taux de cotisation en dessous de 10 %, on a été amené à considérer que les personnes invalides étaient considérées comme des personnes retraitées dès qu'elles... en prenant une retraite anticipée lorsqu'elles arrivaient à l'âge de 60 ans, c'est-à-dire qu'on convertissait la rente d'invalidité en rente de retraite mais évidemment avec la pénalité actuarielle qui allait donc avec la conversion de la rente de personne invalide à la rente de retraite dès qu'on arrivait à 60 ans.

Ça a permis d'avoir une baisse de cotisation de 0,2 %. Je me permets de vous dire qu'il y a un côté assez malheureux sur les personnes qui sont probablement les personnes les plus vulnérables, où on a été chercher la baisse de cotisation pour amener le taux de cotisation en dessous de la barre symbolique du 10 %.

(15 h 10)

Si nous avions eu en main la totalité des évaluations actuarielles et qu'on avait eu réellement la possibilité de savoir qu'elle était la situation réelle du régime, on aurait été mieux à même de pouvoir évaluer qu'elles étaient les mesures sur lesquelles on aurait pu agir et on aurait pu faire réellement ce qu'on appellerait des études de... simuler ce qui pourrait arriver si on faisait bouger un ou deux paramètres ou si on faisait des choix. Malheureusement, on n'a pas pu le faire parce que nos chiffres sont beaucoup trop archaïques, enfin archaïques dans la mesure... si tant est que, datant de quatre ans, ce soient des chiffres qui sont archaïques.

Je voudrais conclure aussi en remerciant, d'une part... À part ce débat, ce point de divergence – et je tiens réellement à bien l'expliciter, le point de divergence que l'on a – quant à utiliser des évaluations actuarielles qui dataient, entre la position gouvernementale et la mienne, dans l'étude article par article de l'ensemble du projet de loi, qui comporte quand même de nombreux articles, il y a eu une collaboration entre la partie ministérielle et l'opposition et on a pu arriver à un certain nombre de modifications quant au fonctionnement du Régime de rentes. Il y a deux choses différentes dans ce projet de loi: il y a des modifications quant au fonctionnement du Régime de rentes et il y a des modifications quant aux taux de cotisation et ce qu'on fait pour équilibrer actuellement le régime.

Quant au fonctionnement, je dois remercier la ministre pour sa collaboration et la manière dont, je crois, on arrive à un projet de loi qui va faciliter la vie à nombreux de nos concitoyens qui sont bénéficiaires actuellement du Régime de rentes. Je voudrais profiter aussi de la fin de mon intervention, M. le Président, pour remercier le personnel de la Régie des rentes. Ce n'était pas nécessairement facile pour eux de travailler avec des personnes comme nous. C'était parfois un peu difficile de se trouver entre l'arbre et l'écorce, entre le gouvernement et l'opposition, d'être pris à partie entre les uns et les autres. Je dois dire qu'ils ont fait un travail qui mérite d'être signalé ici, en cette Chambre, et je devrais aussi, moi aussi, les remercier pour le travail qu'ils ont fait quant à l'élaboration de ce projet de loi.

Alors, M. le Président, soyons bien clairs, on va adopter ce projet de loi sur division. La raison de notre désaccord est basée sur la chose suivante – et je voudrais encore le préciser très clairement – c'est que l'absence de l'évaluation actuarielle à date, c'est-à-dire basée sur celle de 1997, nous amène à nous poser des questions sur l'efficacité réelle des mesures proposées par la loi n° 149 et quant au fait que est-ce que ces mesures que nous proposons vont réellement corriger la situation à corriger à l'intérieur du Régime de rentes.

Soyez assuré, M. le Président, que de part et d'autre... Et j'aimerais terminer aussi en rassurant nos concitoyens. Il y avait une volonté et il y a une volonté, et il faut bien éviter, parce qu'il y a... Lorsqu'on parle de Régime de rentes, comme c'est quelque chose qui est relativement complexe, il peut y avoir toutes sortes d'utilisations démagogiques par les uns et par les autres de la question. Soyez assuré de la volonté de maintenir les acquis du Régime de rentes et d'essayer de maintenir toujours le taux de cotisation en dessous de ce qui est pour nous une barre symbolique, qui est la barre du 10 %.

Je dois dire que je ne suis pas sûr, et c'est la raison pour laquelle je vais voter contre le projet de loi en division, que les mesures du projet de loi n° 149 permettent d'atteindre cet objectif-là, mais ça ne veut pas dire qu'il faut tomber absolument dans l'autre côté et dans la pure démagogie et dire: Le Régime de rentes est en danger et il n'est pas sûr qu'on aura nos pensions ou quoi que ce soit. Les modifications mineures peuvent être adoptées pour être en mesure d'avoir une vision qui serait probablement meilleure que ce qu'on a là-dedans. Je reste inquiet et je suis inquiet sur ce qui est inclus dans ce projet de loi. Lorsqu'on aura l'évaluation actuarielle, et ça va être à la session qui va commencer en mars, évidemment on aura à tirer: Avais-je raison ou aviez-vous raison? Ça sera l'un des deux qui aura raison, bien sûr. Mais, dans le cadre actuel, je crois sérieusement que je suis celui qui a raison et qu'il faudra être en mesure de faire quelques modifications à ce projet de loi, car, de part et d'autre...

Et soyez assuré de la collaboration de l'opposition parce qu'il y a la volonté de maintenir les bénéfices du Régime de rentes pour l'ensemble des Québécois et Québécoises et il n'y a pas – de notre part, du moins, et je ne pense pas de la part du gouvernement – une volonté de créer une panique ou d'utiliser ça... Ce n'est aucunement ce but-là, premièrement. Deuxièmement, l'objectif de maintenir un taux de cotisation en dessous de 10 %, je ne suis pas sûr qu'on l'atteint actuellement avec le projet de loi n° 149, mais j'attends avec beaucoup d'anxiété ou d'impatience l'analyse actuarielle qui tranchera entre ma position et la position ministérielle. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun et critique officiel de l'opposition. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 149? Alors, comme il n'y a pas d'autres intervenants, le projet de loi n° 149, Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives, est-il adopté?

M. Gautrin: Sur division, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, je demande un vote par appel nominal, M. le Président. Et, en vertu de l'article 223 de notre règlement, je vous demanderais de reporter ce vote à demain, aux affaires courantes.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Pinard): Conformément à l'article 223 de notre règlement, le vote est donc reporté au mercredi 10 décembre, lors des affaires courantes. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. Alors, M. le Président, je vous demanderais de vous référer à l'article 30 du feuilleton. C'est bien ça, article 30, oui.


Projet de loi n° 163


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. À l'article 30 de votre feuilleton, M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration propose l'adoption du projet de loi n° 163, Loi modifiant la Loi sur le curateur public et d'autres dispositions législatives relativement aux biens soumis à l'administration provisoire du curateur public. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 163? M. le ministre.

M. Gautrin: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Est-ce qu'on pourrait suspendre quelques minutes de manière que le critique de l'opposition puisse être présent? Je pense qu'il devrait arriver d'une minute à l'autre.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, on a préservé le temps d'intervention du porte-parole de l'opposition. Que notre collègue de Verdun – et je comprends le bien-fondé de son intervention – soit rassuré par mes paroles.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, soyez assuré, M. le député de Verdun, que le temps de parole sera préservé. À ce stade-ci, nous allons maintenant céder la parole au ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. M. le ministre.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, je constate comme vous qu'il y a eu des difficultés d'aiguillage, mais me voici prêt à intervenir sur le projet de loi n° 163.

Des voix: Bravo!

M. Boisclair: M. le Président, d'entrée de jeu, je voudrais vous dire que c'est avec fierté que les membres ministériels ont soumis ce projet de loi à l'Assemblée nationale, essentiellement un projet de loi qui nous permet de renforcer la protection des citoyens de façon toute particulière pour les biens qui sont non réclamés et qui sont propriété de citoyens québécois et québécoises.

Je voudrais dire que nous sommes d'autant plus fiers d'avoir présenté ce projet de loi à l'Assemblée nationale et de l'avoir débattu en commission parlementaire, puisque nous avons réussi, comme je l'avais annoncé à l'occasion de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale, à convaincre l'opposition des mérites et des bien-fondés de ce projet de loi. Je tiens à rappeler aux membres de cette Assemblée, aux parlementaires qui n'étaient pas présents au moment de la commission que l'ensemble des dispositions, l'ensemble des articles du projet de loi n° 163 ont été adoptés à l'unanimité par les membres de la commission des institutions qui, de façon très studieuse, ont étudié les différentes dispositions du projet de loi.

Je ferai une courte intervention, M. le Président, puisqu'il est, je pense, opportun de faire un peu la genèse des choses et de rappeler que c'est d'abord en mai 1986 que le gouvernement du Québec annonçait, dans le cadre du discours du ministre des Finances, son intention d'implanter un régime uniforme qui serait applicable à l'ensemble des biens non réclamés pour le Québec. Les éléments de la réforme que nous adopterons bientôt, de façon finale, à l'Assemblée nationale sont clairs, ils sont aussi porteurs. Ils sont porteurs, puisque dorénavant tout détenteur d'un bien délaissé sera tenu de le remettre à l'État à la date de présomption de son délaissement établie par la loi. C'est porteur aussi, puisque dorénavant c'est l'État, c'est le gouvernement du Québec qui administrera les biens délaissés qui lui appartiendront.

(15 h 20)

Je rappelle aussi qu'en tout temps – et ça a été un point fort de la conversation que j'ai eue avec les membres de la commission parlementaire – toute personne qui est propriétaire d'un bien qui se retrouve comme étant un bien délaissé au sens de la loi pourra en tout temps exiger la remise de ce bien sans que d'aucune façon quelconque prescription ne lui soit opposable. C'est un élément clé de la réforme proposée: même si l'État devient propriétaire du bien, en tout temps les gens pourront réclamer que ces biens leur soient remis.

Et ce qui est, je pense, intéressant dans cette réforme, c'est que dorénavant la gestion de l'information relative aux biens délaissés remis à l'État sera effectuée par le Curateur public, lequel assumera dorénavant le traitement des réclamations des personnes demandant la remise de leur bien ou bien sûr de leur valeur. L'administration provisoire des biens délaissés exercée présentement par le Curateur public sera abolie, sauf pour la période nécessaire pour permettre leur liquidation.

Il y avait donc, M. le Président, un certain nombre de limites au régime actuel. Par exemple, le Curateur public n'était responsable que d'une partie des biens non réclamés par des citoyens québécois. Par ailleurs, la loi actuelle, avant les modifications proposées, comporte certaines lacunes qui ont pour effet de réduire la capacité du Curateur public de récupérer les biens non réclamés qui sont détenus par des institutions privées. Aussi, M. le Président, vous aurez noté que dans le régime actuel beaucoup de biens non réclamés restent ainsi entre les mains de leurs détenteurs – je fais de façon particulière référence ici aux banques, aux fiducies, aux maisons de courtage et aux compagnies d'assurance. D'ailleurs, les lois québécoises n'étaient pas, à ce jour, toutes harmonisées et contenaient parfois des dispositions différentes quant au traitement réservé pour les biens non réclamés.

Il était aussi apparu évident au fil des ans que la décentralisation des biens non réclamés rendait difficile leur récupération par leur propriétaire ou, bien sûr, par les ayants droit de ces propriétaires. Souvent, ces personnes étaient mal informées de l'existence des biens qui pouvaient leur appartenir. Ces personnes ignoraient parfois, aussi, souvent où se trouvaient ces biens et aussi se posaient la question simple: Comment puis-je faire pour récupérer ces biens? De façon concrète, les gens devaient s'adresser à plusieurs endroits pour vérifier si certains biens pouvaient leur appartenir.

Donc, le projet de loi, qui a été débattu ici précédemment, en commission parlementaire, est certainement une mesure générale qui vise à accroître, comme je le disais tout à l'heure, la cohérence et aussi, je dirais, l'efficacité de l'intervention gouvernementale en matière de biens délaissés. Concrètement – je le disais d'entrée de jeu, M. le Président – nous visons à mieux protéger les droits des citoyens et des citoyennes en matière de biens non réclamés. Nous voulons aussi faciliter la récupération des biens non réclamés par des citoyens qui en sont propriétaires ou, bien sûr, encore là, par leurs ayants droit. Nous voulons aussi que les biens qui sont non réclamés profitent à l'ensemble de la population québécoise et non pas uniquement aux personnes qui détiennent ces biens.

Concrètement, les avantages de ce projet de loi sont nombreux. D'abord, nous notons la création d'un guichet unique, en l'occurrence le Curateur public, qui simplifie la tâche des personnes qui ont des droits sur des biens non réclamés. Deuxièmement, le droit de récupération des biens non réclamés ne sera plus soumis à des prescriptions de durées qui variaient, à l'époque, selon les différentes lois applicables. Nous croyons aussi qu'un des avantages réside dans le fait que le taux de remise des biens aux personnes ou à leurs ayants droit devrait aussi s'accroître. Quatrièmement, ce projet de loi va exiger des institutions détentrices de biens non réclamés de faire des recherches sérieuses pour aviser les propriétaires ou leurs ayants droit. Finalement, des frais exigibles par les détenteurs sur les biens non réclamés seront réglementés. Et la remise des biens non réclamés au ministère des Finances permet de faire en sorte que ces biens soient utilisés au service du développement du Québec et permet aussi d'en faire profiter l'ensemble de la population québécoise, et ce, sans faire perdre de droits aux propriétaires ou ayants droit de ces biens quant à une éventuelle action pour les récupérer.

Je voudrais aussi vous dire que, du point de vue du ministre chargé notamment de veiller à la protection des personnes qui ne peuvent exercer pleinement leurs droits civils – c'est là la mission que m'a confiée la loi adoptée à l'Assemblée nationale – il y a lieu d'insister sur quelques autres éléments: d'abord, la compétence du Curateur public est dorénavant élargie et cette compétence lui permettra de récupérer la plupart des biens qui sont non réclamés; l'obligation aussi qui sera faite dorénavant aux débiteurs et aux détenteurs de biens non réclamés d'aviser les propriétaires ou ayants droit de la remise de leurs biens au Curateur public. Nous allons aussi limiter les frais exigibles par les détenteurs pour l'administration des biens non réclamés. Les frais d'administration devront dorénavant être expressément stipulés dans l'acte constitutif.

Et nous notons tous, bien sûr, la création d'un guichet unique auquel les gens pourront s'adresser pour récupérer un bien non réclamé, qui permettra à la fois d'uniformiser les délais au cours desquels un bien est récupérable et qui permettra finalement, aussi, le fait de simplifier les démarches, puisque les gens n'auront qu'à s'adresser à un seul endroit, au Curateur public. Je rappelle aussi que l'État, lorsqu'un bien sera réclamé, remettra la valeur du bien et remettra aussi les intérêts qui ont couru pendant la période où l'État a détenu ce bien.

Donc, M. le Président, simplification de la vie des citoyens, administration davantage efficace et efficiente, puisque nous mettons sur pied un guichet unique. Nous allons faire profiter l'ensemble des Québécois et des Québécoises de ces biens non réclamés. Donc, je pense que c'est là une illustration claire de la volonté du gouvernement du Québec de renforcer la protection des droits des citoyennes et des citoyens, de leur simplifier la vie dans les rapports qu'ils peuvent avoir avec l'État, et aussi – je conclurais là-dessus, M. le Président – c'est une illustration concrète, de la part du gouvernement du Québec, d'articuler davantage un esprit, un sens de justice sociale en faisant en sorte que les biens qui ne sont pas réclamés par des personnes ou par leurs ayants droit profitent dorénavant à l'ensemble de la population québécoise.

Donc, je suis heureux d'en rediscuter devant vous, M. le Président, à l'Assemblée nationale, et je suis convaincu que le consensus que nous avons su tisser en commission parlementaire saura s'exprimer à nouveau dans le salon bleu et que rapidement cette loi pourra être sanctionnée pour que nous puissions mettre en oeuvre rapidement les dispositions prévues au projet de loi, pour que rapidement les citoyennes et citoyens du Québec puissent être les premiers bénéficiaires, les premiers gagnants de cette réforme proposée par le gouvernement du Québec, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre responsable des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Alors, nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition et député de Hull. M. le député.


M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir à cette étape de l'adoption du projet de loi n° 163. Je n'ai pas l'intention, M. le Président, de reprendre les propos du ministre, à savoir l'objet du projet de loi n° 163. Les qualités auxquelles a fait allusion le ministre dans ce projet de loi, l'opposition y concourt. D'ailleurs, il l'a mentionné également, ce projet de loi a été adopté à l'unanimité en commission parlementaire.

Nous avions un certain questionnement à faire à propos de ce projet de loi. Le questionnement a été fait par moi-même et plusieurs de mes collègues en commission parlementaire. Je tiens à vous signaler, M. le Président, que les réponses du ministre ont satisfait l'opposition et que les réponses également de la curatrice et des personnes de son personnel ont satisfait le questionnement de l'opposition officielle. Vous avez une preuve devant vous, M. le Président, que, lorsqu'un projet de loi est présenté pour faire en sorte qu'on améliore le sort des Québécois et des Québécoises, l'opposition y concourt, et ce n'est pas une question de politicaillerie. Ce que nous sommes ici, M. le Président, ce que nous faisons ici, c'est de voir à ce que les projets de loi qui sont déposés à cette Assemblée rencontrent les normes auxquelles les citoyens s'attendent et rencontrent également les aspirations des citoyens et des citoyennes du Québec.

(15 h 30)

Alors, dans ce sens-là, M. le Président, nous avons décidé de concourir avec le ministre responsable de ce projet de loi, et nous allons voter pour ce projet de loi.

Cependant, j'aimerais vous signaler que ce n'est pas parce que nous bonifions le fonctionnement de la curatrice publique que tout va baigner dans l'huile. Je tiens à souligner au ministre... D'ailleurs, il l'a mentionné en commission parlementaire, qu'il avait augmenté les budgets. Il avait obtenu des crédits supplémentaires, il a augmenté le personnel. Alors, s'il l'a fait, c'est parce qu'il y a des choses qui ne fonctionnaient pas bien. Je n'ai pas l'intention, ici, de sortir des dossiers et des cas de comté, ce n'est pas la place pour le faire, je ne le crois pas; en tout cas, pas avec ce projet de loi là. J'aimerais tout simplement signaler au ministre que nous serons très vigilants sur le fonctionnement de cet organisme public qui gère des fonds. Il les gère généralement bien. Le ministre ne l'a peut-être pas mentionné, mais il y a un rendement sur les fonds qui sont déposés à la curatrice publique. Certaines banques pourraient même être jalouses, M. le Président. Il y a un très bon rendement. C'est bien géré, sauf qu'il y a certaines petites failles, et je tiens à souligner au ministre que nous serons vigilants sur ces petites failles là et que nous allons l'interpeller à chaque fois qu'il y aura quelque chose qui ne fonctionnera pas.

M. le Président, sur ce, je vous dis tout simplement que nous allons voter pour ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Hull. Y a-t-il d'autres interventions? Pas d'autres interventions. M. le ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique? M. le ministre.


M. André Boisclair (réplique)

M. Boisclair: Très, très rapidement, M. le Président, pour remercier d'abord tous les membres de la commission parlementaire qui ont travaillé à l'étude de ce projet de loi, mes collègues et, bien sûr, le député de Hull que je remercie pour son appui. Je note que nos arguments ont réussi à le convaincre, puisque je vous rappelle qu'au moment de l'adoption du principe le député se montrait davantage sceptique. Je comprends que les choses vont vite et que l'opposition n'a pas toujours le temps de lire attentivement tous les projets de loi qui sont déposés à l'Assemblée nationale et je comprends qu'il n'ait sans doute pas eu tout le temps pour étudier dans le détail le projet de loi, mais une étude détaillée lui a bien fait comprendre qu'il y avait là de bonnes mesures.

Je note aussi la satisfaction du député de Hull de voir que j'ai réussi à obtenir une augmentation de 14 % des effectifs au Curateur public. Nous réglons là une situation qui perdurait depuis trop longtemps, et je comprends le député de ne pas trop vouloir en parler à cette Assemblée, puisque, si nous devions en parler, je suis convaincu que rapidement il rougirait, puisque je serais dans l'obligation de rappeler le piètre bilan de l'opposition officielle, alors au gouvernement, dans l'appui qu'elle a donné au Curateur public. J'ai moi-même une longue liste devant moi de litanies qu'il me ferait plaisir de rappeler au député si un jour il s'avisait de me poser des questions à l'Assemblée nationale. Sans doute que ses accointances avec l'ancienne curatrice publique, maintenant présidente de l'Office de la protection du consommateur, pourraient aussi faire en sorte de le maintenir avec intérêt davantage dans le silence que l'inviter à prendre la parole haut et fort sur ces questions.

Ceci étant dit, M. le Président, je suis heureux de voir que nous arrivons à tisser des consensus lorsque les propositions se font dans l'intérêt des Québécois et des Québécoises, et je suis surtout heureux de voir jusqu'à quel point les membres de cette Assemblée, lorsque vient le temps de discuter de droits fondamentaux, de protection des personnes inaptes, lorsque vient le temps d'aller plus loin dans la construction d'un édifice qui nous assure une justice sociale et une protection des droits des personnes... Je suis heureux de voir qu'ici comme ailleurs dans d'autres commissions, dans d'autres lieux nous sommes capables d'en arriver à des consensus. Je pense que c'est là une illustration du fait que nous vivons dans une société solidaire, une société solide et, je dirais, une société soucieuse du respect et de la protection des droits des Québécois et des Québécoises. C'est là un signe de maturité qui m'inspire confiance pour l'avenir. Je vous remercie.

Une voix: Bravo!


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Le débat étant expiré, le projet de loi n° 163, Loi modifiant la Loi sur le curateur public et d'autres dispositions législatives relativement aux biens soumis à l'administration provisoire du curateur public, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Pardon?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Ha, ha, ha! M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. Ha, ha, ha! M. le Président, cette fois-ci, c'est un projet de loi expiré. Je vous demanderais de considérer l'article 32 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 177


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 32 de votre feuilleton, M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 177? Alors, M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. Alors, nous en sommes à l'étape de l'adoption de ce projet de loi. Lors de l'adoption du principe et de l'étude article par article que nous avons faite en commission plénière, j'ai pu échanger avec le député de Frontenac relativement au pourquoi de ce projet de loi.

Il faut rappeler qu'en vertu de la Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, en vertu des articles 14 et 15, ces articles prévoient que, quand le ministre ou le coroner chef veut à ce moment-là réprimander un coroner, le coroner en chef peut réprimander un coroner, et que le gouvernement veut destituer ou réprimander ou suspendre un coroner adjoint ou un coroner, à ce moment-là on prévoit un mécanisme spécial, aux articles 14 et 15. On prévoit à ce moment-là que la condition préalable à l'exercice du recours par le gouvernement, c'est le fait qu'il y ait une enquête menée par le juge en chef ou la juge en chef de la Cour du Québec.

Alors, ce qui ressort de la pratique, c'est le fait que depuis déjà plusieurs années la charge du juge en chef a évolué considérablement; le juge en chef ayant maintenant l'attribution d'énormément de fonctions administratives, à ce moment-là son horaire est de plus en plus difficile à gérer quand on lui demande une tâche telle qu'une enquête de l'ampleur de celle demandée en vertu des articles 14 et 15.

Il faut comprendre que ces articles 14 et 15 sont très rarement utilisés et que nous avons eu récemment un jugement qui justement nous a rappelé, qui a balisé d'une façon précise, le 28 octobre dernier, un jugement de la Cour supérieure qui nous rappelait quelles étaient les exigences maintenant de cette enquête: le droit d'être entendu, les règles de justice naturelle doivent s'appliquer lors de l'institution de cette enquête. Donc, on peut comprendre que ça prendrait une grande disponibilité de la part du juge en chef qui aurait à mener une telle enquête si la loi n'est pas modifiée.

Ce que nous avons voulu faire, ce que nous voulons faire par cette loi, c'est de donner la possibilité au juge en chef, s'il le juge à propos, de désigner un juge qui fera cette enquête à sa place. Il faut comprendre que c'est une possibilité qui est donnée au juge et non pas une obligation; le juge en chef peut en tout temps déterminer qu'il fera lui-même cette enquête, mais nous croyons qu'il était important de lui donner cette possibilité.

Nous avons échangé, le député de Frontenac et moi-même, sur ce sujet. Le député de Frontenac aurait voulu peut-être que, dans le cas où justement c'est le gouvernement qui veut suspendre ou destituer un coroner chef, à ce moment-là peut-être de faire en sorte de laisser l'article 15 comme ça, mais je crois qu'on ne doit pas faire de distinction entre 14 et 15 quant au traitement à suivre au niveau de l'enquête menée par le juge en chef. Nous croyons qu'il faut à ce moment-là finalement modifier ces deux articles et non pas laisser un article comme il est présentement et modifier l'autre, car c'est très important. C'est rare, comme je l'ai mentionné, que le gouvernement ou encore que le coroner chef, en vertu de l'article 14, utilise de telles dispositions, et à ce moment-là il ne faut pas prévoir, je crois, de traitement particulier pour 14 ou pour 15. Si on fait la modification, il faut la faire d'une façon harmonisée.

Alors, je voudrais remercier le député de Frontenac, de l'opposition, pour sa collaboration dans l'étude article par article de ce projet de loi et dans l'adoption du principe. Je crois que c'est une modification à la loi qui était attendue depuis quand même plusieurs années, on s'en parlait depuis plusieurs années, et je crois que ça va dans le sens, tout simplement, d'une meilleure administration et d'une meilleure gestion de nos cours de justice et en même temps au niveau de notre Loi sur les coroners, M. le Président. Je vous remercie.

(15 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre de la Sécurité publique et député d'Anjou. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vais faire motion pour ajourner ce débat de façon à, comme je le disais tantôt, permettre la réplique du porte-parole de l'opposition officielle.

Une voix: Ils ne sont pas là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Pourrais-je vous proposer qu'on suspende très légèrement les travaux de l'Assemblée?

Une voix: Oui, j'accepte, ... quelques instants.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, quelques instants, nous suspendons nos travaux.

(Suspension de la séance à 15 h 41)

(Reprise à 15 h 54)

Le Vice-Président (M. Pinard): J'inviterais les députés qui sont debout à bien vouloir s'asseoir. Merci. Alors, nous avions ajourné le débat dans l'attente d'un député. Alors, à ce stade-ci, nous allons maintenir l'ajournement du débat en question, et je cède la parole au leader adjoint du gouvernement. M. le leader.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, ce n'était pas Godot que nous attendions mais plutôt M. le député de Verdun. Je suis heureux de le voir ici. M. le Président, je vais vous référer à l'article 27 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 165


Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. À l'article 27 de notre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 4 décembre 1997 sur la prise en considération du rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 165, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires et la Loi sur le régime de rentes du Québec. Le dernier intervenant à prendre la parole sur la prise en considération du rapport a été le député de Verdun, à qui il restait un temps de parole de neuf minutes. Alors, M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin (suite)

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Comme je l'ai dit dans ma première minute d'intervention l'autre soir, vers 23 h 59, je voudrais strictement intervenir ici en particulier sur l'article 10 du projet de loi, qui modifie l'article 66 de la Loi sur le régime de rentes du Québec, article qui porte essentiellement sur les pouvoirs de perception du ministre du Revenu – parce qu'il s'agit bien du ministre du Revenu, même si c'est une loi du Régime de rentes – et ce qui peut arriver en cas de non-perception.

L'article 66, tel qu'il se lit actuellement, dit:

«Le ministre peut déterminer tout montant payable par un employeur, y compris l'intérêt et les pénalités exigibles. Il peut également déterminer de nouveau ce montant et faire une nouvelle imposition ou établir une imposition supplémentaire.

«Après chaque imposition, le ministre en donne avis à l'employeur. Dès lors, l'imposition est valide et exécutoire sous réserve de modification ou d'annulation sur opposition ou pourvoi en revision, et l'employeur est tenu d'en payer sans délai le montant au ministre.

«Toutefois, aucune imposition ne peut être faite par le ministre à l'égard d'un employeur plus de quatre ans après la date à laquelle le montant devait être remis, à moins que l'employeur n'ait fait une fausse déclaration ou commis quelque fraude en fournissant les renseignements requis ou qu'une renonciation n'ait été transmise au ministre au moyen du formulaire prescrit.»

Ça, c'est la situation telle qu'elle existe. Autrement dit, le principe, c'est que, dans la Loi sur le régime de rentes, il n'y a pas possibilité de remonter plus que quatre ans auprès d'un employeur. L'amendement qui est devant nous est beaucoup plus grave, parce qu'on ajoute, après «à moins»: la limite de quatre ans ne n'appliquait pas si la personne avait fait une fausse déclaration ou commis quelque fraude en fournissant les renseignements. Donc, en cas de fraude ou de fausse déclaration, la limite de quatre ans ne s'appliquait pas.

Ce que fait le projet de loi, il est beaucoup plus restrictif. Il dit: Si vous avez oublié de faire une déclaration dans le délai de quatre ans, à ce moment-là on assimile le fait que vous n'avez pas fait de déclaration à une fraude ou à une fausse déclaration. Autrement dit, on assimile l'absence – faites attention sur le point juridique, il y a quelque chose de très grave dans cet amendement et c'est pour ça que je me lève – de déclaration à la fausse déclaration. C'est ce que vous faites, parce que vous ajoutez, dans l'article 10, les mots «à moins que», «n'ait fourni aucune déclaration», et après on continue «n'ait fait une fausse déclaration ou commis quelque fraude».

C'est-à-dire que l'article de ce projet de loi, si on l'adopte, va avoir pour effet de dire que quelqu'un qui a omis de faire une déclaration à un moment ou à un autre... Et souvent ce qui arrive – faites attention – souvent ça portera, et vous en aurez tous dans vos bureaux de comté... C'est des gens qui ont des très petites corporations, des très petites compagnies qui peut-être, lorsque les gens qu'ils paient sont tous en dessous de l'exemption annuelle de base, par exemple, n'ont pas à recevoir du Régime de rentes... On peut retourner maintenant contre eux malgré le délai de quatre ans. Je pense que le délai de quatre ans était de rigueur. Il était important qu'on maintienne quand même que, si quelqu'un ne fait pas de déclaration pendant quatre ans, le ministère du Revenu puisse revenir.

Si on passe le projet de loi tel qu'il est, il n'y a plus du tout de délai, et 25 ans après ou 20 ans après, si parfois vous avez oublié de faire une déclaration lorsque vous avez parti une corporation, le ministre du Revenu, au nom de la Régie des rentes, pourra demander et avoir tous les éléments qui se présentent et qui se soulèvent dans ce cas-là. Je pense qu'il y a une extension de pouvoir, à ce moment-là, de la part du ministre du Revenu. C'est sûr qu'à l'extrême limite on pourrait dire: Rien ne peut être prescrit. On pourrait dire: Le Revenu, quelle que soit la date, rien ne peut être prescrit. Ce qui n'est pas le cas, parce que, quand même, les gens ne conservent pas leurs documents pendant des éternités. Comprenez-moi bien, M. le Président, on est en train de parler ici très souvent de toute petites entreprises qui auront fait soit faillite... Pensez à toutes les entreprises dans vos comtés qui ont été démarrées par ce qu'on appelle le plan Paillé et qui après n'ont pas fonctionné. Alors, on pourra se retourner après plus que quatre ans... Souvent, les gens auront perdu, même, trace des papiers qu'ils auraient pu avoir.

(16 heures)

Voter la loi et l'amendement tel qu'il est, je m'excuse de vous le dire, vous allez créer beaucoup plus de troubles à l'ensemble du monde que les argents que vous allez être en mesure de récupérer. L'expérience qu'il y a, d'après moi, au Régime de rentes, c'est que, s'il y a absence de déclaration... D'abord, c'est souvent dans des très, très petites corporations. Parce que les gens reçoivent quand même un avis, les employés. Les employés, dans un délai de quatre ans, disent: Tiens, j'ai travaillé là; je n'ai rien eu. Donc, ils sont en mesure de réagir dans le délai de quatre ans. Les cas qui ne réagiraient pas, dans ma tête, si j'essaie de visionner à qui ça pourrait s'adresser, c'est souvent la petite entreprise communautaire qui peut-être a engagé deux, trois personnes, les a payées à la limite de l'exemption annuelle de base, n'a peut-être pas fait de déclaration parce que les gens ont dit: Bien, n'importe comment, je ne gagne pas assez pour pouvoir avoir droit au Régime de rentes du Québec. On va pouvoir, si on passe cet amendement, retourner contre ces gens-là quelle que soit la limite de temps.

La majeure partie du temps, ces personnes auront perdu les documents pertinents, parce que très souvent ce n'est pas non plus... Comprenez-moi, ce n'est pas l'Alcan, ça, ce n'est pas la corporation avec un service de personnel qui est géré, etc.; ce qu'on touche ici, c'est les toutes, toutes, toutes petites entreprises ou les tout petits employeurs, parce que c'est vraiment le mot «employeur». C'est plus l'organisme à but non lucratif qui, dans votre comté, M. le Président, ou dans le comté de la députée de Terrebonne, sert des soupes populaires qui peut-être a donné un salaire pendant un mois ou deux ou quelque chose comme ça qui, au bout d'un certain temps, a perdu les documents.

Alors, M. le Président, moi, je trouve grave cette espèce de tentation qu'a le ministère du Revenu d'abolir la période de prescription. Qu'il n'y ait pas de prescription lorsque sciemment quelqu'un a fait une fraude, ça, pour moi, je trouve ça correct tel que c'est dans la loi. Autrement dit, si vous avez fait une déclaration frauduleuse ou si vous avez fait une déclaration qui était fausse, qu'il n'y ait pas de prescription, ça, c'est tout à fait clair au point de vue légal. Mais, si vous avez omis de faire une déclaration de bonne foi, pour toutes sortes de raisons, actuellement vous allez être traité exactement comme si vous aviez fait une déclaration frauduleuse.

Et dans ce sens-là je regrette cette tendance qu'a le ministère du Revenu – la ministre du Revenu n'est pas là actuellement pour répondre à mes interrogations – de vouloir poursuivre en dehors du délai de quatre ans, souvent, les organismes qui sont des organismes absolument très, très petits. Et, comme je vous le répète depuis le début, ça va être très souvent les organismes communautaires qui engagent très peu de personnes qui risquent d'être touchés par cet article et sur lesquels vous allez créer beaucoup de problèmes, beaucoup plus que les argents que vous allez récupérer.

Alors, je trouve que cet article est tout à fait inapproprié dans le projet de loi et ne mériterait pas d'être là. Malheureusement, la ministre n'est pas là pour pouvoir réagir, alors j'ai un peu de difficulté à ne pas avoir plaidé une dernière fois contre cet article. Merci, M. le Président.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Y-a-t-il d'autres interventions sur la prise en considération du rapport? Le rapport de la commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 165, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires ainsi que la Loi sur le régime de rentes du Québec, est-il adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Il est adopté sur division. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Adopté, oui, effectivement.

Une voix: Sur division.

M. Boulerice: Bien, sur division, si vous voulez. M. le Président, de façon à permettre aux intervenants de quitter les commissions parlementaires et de venir en Chambre, je vous demanderais une courte suspension.

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous suspendons quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 5)

(Reprise à 16 h 9)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vous demanderais de vous référer à l'article 31... de notre feuilleton, évidemment.


Projet de loi n° 164


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. À l'article 31 de votre feuilleton, Mme la ministre déléguée au Revenu propose l'adoption du projet de loi n° 164, Loi modifiant la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 164? Sûrement Mme la ministre? Mme la ministre déléguée au Revenu.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, j'ai le plaisir de soumettre à l'Assemblée, cet après-midi, le projet de loi n° 165, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires et la Loi sur le régime de rentes du Québec. Le projet de loi n° 165 a été présenté aux membres de cette Assemblée le 4 novembre 1997, et le principe en a été adopté le 13 novembre dernier. La commission des finances publiques en a fait l'étude détaillée les 18 et 25 novembre 1997 et a adopté l'ensemble des dispositions qu'il propose. Aucun amendement... Le projet de loi n° 165 ou 164?

(16 h 10)

Des voix: Le 164.

Mme Dionne-Marsolais: Oh! je m'excuse, M. le Président. Je m'excuse, j'ai fait une erreur et je vais donc reprendre. Je soumets à cette Assemblée pour son adoption le projet de loi n° 164. Mais il m'avait distraite parce qu'il disait qu'il avait quelque chose à commenter sur le projet n° 165. Nous l'étudierons plus tard. Alors, je reprends donc. Je propose l'adoption du projet de loi n° 164, qui est intitulé Loi modifiant la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires.

Ce projet de loi a fait beaucoup de chemin. Il a été présenté le 4 novembre, son principe a été adopté le 13 novembre. La commission des finances publiques en a fait l'étude détaillée le 18 novembre et en a adopté les cinq articles. Le rapport a été déposé le 20 novembre et il a été pris en considération le 4 décembre dernier. Ce projet de loi contient cinq articles et modifie une seule loi, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Les modifications législatives qui sont effectuées à cette loi ont pour objet d'améliorer le système de perception automatique des pensions alimentaires que l'on y retrouve. À cet égard, M. le Président, le Québec, les Québécois et les Québécoises ont beaucoup à gagner en adoptant le projet de loi n° 164.

Ces changements à la loi font suite à des recommandations du Protecteur du citoyen, qui ont été formulées dans son rapport portant sur l'application de cette loi. Ce rapport a été rendu public au mois d'août dernier. Nous avons pris en considération les recommandations du rapport du Protecteur du citoyen. Il en parle d'ailleurs abondamment dans son rapport annuel qu'il nous a déposé aujourd'hui. Ce projet de loi, essentiellement, consiste à octroyer au tribunal la possibilité de permettre au débiteur alimentaire de payer directement le montant de la pension alimentaire à son créancier jusqu'à ce que le ministre du Revenu prenne en charge le dossier.

Comme je l'ai déjà souligné au moment de l'adoption du principe de ce projet de loi, le ministère du Revenu, après avoir pris toutes les dispositions nécessaires, a diminué le délai de traitement des dossiers et prévoit que, d'ici la fin de l'année en cours, c'est-à-dire d'ici quelques semaines, le délai moyen de traitement sera de 30 jours. Nous y sommes presque d'ailleurs, M. le Président, et je peux préciser aujourd'hui que le nombre de dossiers qui ne sont pas assignés à un agent est en constante diminution depuis le mois de janvier 1997. Déjà, au mois d'août, il était de 7 403 dossiers non assignés et, à la fin novembre, il n'était plus que de 2 969.

Les efforts des fonctionnaires du ministère du Revenu du Québec et les correctifs qui ont été apportés à la gestion du régime à la suite, entre autres, du rapport du Protecteur du citoyen donnent déjà des résultats plus que satisfaisants. M. le Président, j'aimerais aussi mentionner que les problèmes liés à l'implantation d'un régime de cette envergure sont inévitables et que la période de rodage qui l'accompagne est aussi stratégique, mais elle est maintenant derrière nous, et le ministère du Revenu entend bien prendre son rythme de croisière d'ici la fin de la présente année.

Dans cette foulée, ce projet de loi va modifier aussi la sûreté qui doit être fournie au ministre par le débiteur alimentaire lors d'une demande conjointe d'exemption à la loi. Cette sûreté devra garantir dorénavant le paiement de la pension pendant un mois au lieu de trois mois comme c'est le cas actuellement. C'était une demande importante du rapport du Protecteur du citoyen. Quant au délai fixé pour verser cette sûreté au ministre, il passe de 10 jours qu'il est actuellement, à partir de la date du prononcé du jugement, à 30 jours à partir du prononcé du jugement qui octroie la pension alimentaire.

Je pense aussi qu'il est important de rappeler que ce projet de loi n'altère en rien les objectifs généraux et particuliers de la loi et ne remet pas en cause son caractère universel. En effet, M. le Président, un des objectifs particuliers de cette loi, c'est de respecter l'autonomie des parties en autorisant les exemptions à la loi. Néanmoins, il est pertinent de noter que, si le débiteur qui bénéficie d'une exemption ne payait pas la pension selon les modalités prévues au jugement ou s'il ne fournissait pas la sûreté dans le délai requis par la loi que nous allons, je l'espère, adopter aujourd'hui, le créancier n'a qu'à transmettre un avis au ministère du Revenu pour lui notifier le défaut de paiement de la pension alimentaire. Après cet avis, le ministère du Revenu prendra en charge la perception de la pension alimentaire et réalisera la sûreté pour effectuer les paiements de la pension alimentaire pendant le premier mois. Par la suite, la perception se fera par le biais de l'un des deux modes prévus par la loi, soit l'avis de retenue ou l'ordre de paiement.

Comme il y a eu défaut, à ce moment-là les parties ne pourront plus réclamer du tribunal d'être exemptées de l'application de la loi. En conséquence, M. le Président, le projet de loi rencontre les objectifs établis lors de la création du régime, en ce sens qu'il stabilise et qu'il régularise les paiements de la pension, le tout dans le but auquel le gouvernement s'est engagé, soit celui de réduire la pauvreté des femmes et des enfants du Québec.

En dernier lieu, j'aimerais souligner à cette Assemblée que l'universalité de la loi, vue par certains comme une sorte d'ingérence dans leur vie privée, ne représente que 8 % des plaintes qui ont été reçues par le Protecteur du citoyen. À cet égard, je rappellerai que le même Protecteur ne remet pas en cause le principe de l'universalité, lequel doit demeurer afin que le gouvernement puisse poursuivre le plus efficacement possible sa mission sociale et permettre à notre gouvernement d'atteindre ses objectifs généraux et particuliers qu'il poursuit par le régime de perception automatique des pensions alimentaires.

En conclusion, M. le Président, avant de proposer l'adoption du projet de loi n° 164, j'aimerais, si vous me le permettez, remercier tous les parlementaires qui ont participé à l'étude de ce projet de loi en commission parlementaire, et en particulier la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne qui a représenté son parti lors de la discussion. En terminant, je voudrais, M. le Président, demander à cette Assemblée d'adopter le projet de loi n° 164.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre déléguée au Revenu. Nous cédons maintenant la parole à la critique officielle de l'opposition, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Mme la députée.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président.

Des voix: ...

Mme Loiselle: Il y a des jaloux. Nous sommes maintenant rendus à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 164. Ce projet de loi, M. le Président, vient donc modifier la loi 60, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Je vous rappelle que cette loi a été adoptée le 11 mai 1995 et instituait un régime universel de perception automatique des pensions alimentaires; universel, M. le Président, parce qu'il incluait les bons comme les mauvais payeurs. Toutefois, il est important de rappeler que ce nouveau régime prévoyait des exemptions qui permettaient aux parties de se soustraire, à certaines conditions, de la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Cette demande d'exemption devait se faire conjointement devant le tribunal une fois que le tribunal était convaincu que cela était fait de façon libre et éclairée. Le débiteur devait donc déposer, dans les 10 jours suivant le prononcé du jugement, en un seul versement, une garantie, une sûreté équivalant à trois mois de pension alimentaire.

(16 h 20)

M. le Président, si on se retrouve aujourd'hui à l'étape d'adoption de la loi n° 164, c'est que, malheureusement, les objectifs de la loi 60, la Loi facilitant la perception des pensions alimentaires, n'ont pas été atteints et que, dans plusieurs cas, la situation s'est détériorée pour de nombreux femmes et enfants en attente de versement de pension alimentaire. J'aimerais rappeler à la ministre déléguée au Revenu, malgré le fait qu'elle déteste se le faire rappeler, que, depuis l'entrée en vigueur de la loi 60, de nombreux femmes et enfants ont subi des délais indus au niveau de la perception de leur pension alimentaire, des femmes et des enfants qui normalement n'avaient aucune difficulté à percevoir leur pension alimentaire ne la recevaient plus. De plus, permettez-moi de vous rappeler, M. le Président, que les difficultés pour la créancière d'obtenir des renseignements sur le cheminement de son dossier ont été accentuées depuis l'entrée en vigueur de cette loi.

M. le Président, malgré la mise en garde formelle du Protecteur du citoyen, malgré les inquiétudes et les recommandations de nombreux groupes, notamment le Conseil du statut de la femme, à l'effet que ce nouveau système devait être planifié soigneusement afin de ne pas bâcler une réforme aussi importante et d'une telle envergure, malheureusement le gouvernement n'a nullement pris en considération ces recommandations fort pertinentes.

Après de nombreuses plaintes qui ont été acheminées au Protecteur du citoyen, la ministre déléguée au Revenu a enfin décidé de déposer le projet de loi n° 164. Ce projet de loi vient donc apporter des bonifications à la loi, particulièrement sur les deux points suivants.

Premièrement, il vient assouplir les conditions qui permettent aux parties de se soustraire de l'application de la loi afin d'éviter l'intervention du ministère du Revenu pour le versement de la pension alimentaire. Comme nous l'avions prévu, nous de l'opposition, lors de l'adoption de la loi 60, le dépôt d'une sûreté équivalant à trois mois de pension alimentaire dans un délai de 10 jours avec un seul versement était des conditions presque impossibles à rencontrer, particulièrement chez les débiteurs à faibles et à moyens revenus. Alors, l'article 1 du projet de loi n° 164 vient donc réduire le montant de la sûreté que doit déposer le débiteur afin de bénéficier de l'exemption de la loi, et cette période est de trois mois de pension alimentaire à un mois de pension.

De plus, l'article 4 vient allonger le délai concernant le dépôt de la sûreté. Le débiteur n'aura donc plus 10 jours pour déposer sa sûreté, mais bien 30 jours à partir du prononcé du jugement. Ces modifications permettront sûrement aux bons payeurs qui veulent être exemptés de l'application de la loi de verser directement la pension alimentaire à la créancière plutôt qu'au ministère du Revenu afin d'éviter des délais indus. Il est à prévoir également que ces modifications permettront par le fait même de désengorger le système que nous connaissons aujourd'hui et que nous dénonçons depuis plus de deux ans.

Le deuxième point permettra au débiteur alimentaire de verser directement à son créancier le montant de la pension alimentaire en attendant la prise en charge du dossier par le ministère du Revenu, et ce, conformément à la loi. Je rappelle aux membres de cette Assemblée qu'en octobre 1997 il y avait encore près de 3 000 dossiers en attente d'être assignés à un agent de recouvrement au ministère du Revenu. De plus, la ministre nous apprenait en commission parlementaire, lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 164, qu'il y avait 5 899 dossiers qui sont présentement en analyse, ce qui veut dire près de 9 000 dossiers dont les femmes et les enfants attendent toujours leur pension alimentaire, puisque la loi actuellement empêche les débiteurs alimentaires, même ceux qui le désirent, de verser la pension alimentaire directement à la créancière.

Alors, cette modification législative permettra donc aux familles monoparentales qui sont présentement privées de leur pension alimentaire non pas parce que le débiteur est fautif, non pas parce que c'est un mauvais payeur, mais parce que le système actuellement est engorgé au ministère du Revenu et parce que les agents de recouvrement ne fournissent pas au niveau du traitement des dossiers...

M. le Président, j'aimerais rappeler aux membres de cette Assemblée que l'article 2 du projet de loi n° 164, comme le mentionnait le Protecteur du citoyen dans son rapport du mois d'août 1997, vient tout simplement légaliser une procédure que le ministère du Revenu avait mise en oeuvre au mois de mai dernier afin de pouvoir pallier les difficultés d'engorgement en permettant temporairement aux parties qui y consentaient de verser la pension alimentaire directement au créancier sans que le ministère intervienne.

Mais ce qui est décevant dans cette modification législative, c'est le fait que la suspension de prise en charge par le ministère ne pourra excéder quatre mois à partir du prononcé du jugement. Pourquoi la ministre du Revenu a-t-elle choisi d'introduire à nouveau un irritant visant un délai de quatre mois? Comme je le mentionnais lors de l'étude détaillée en commission parlementaire, la ministre peut-elle nous garantir, M. le Président, que la transition entre le moment où c'est le débiteur qui est responsable du versement de la pension alimentaire et le moment où c'est le ministère du Revenu qui en devient responsable s'effectuera sans zone grise? Il faut espérer que la fin du délai de transition de quatre mois ne viendra pas causer un nouveau délai additionnel dans le versement de la pension alimentaire.

En commission, j'ai fait valoir à la ministre que j'aurais préféré que la prise en charge par le ministère du Revenu se fasse au moment précis où ce dernier aurait été prêt à assumer la transition et non pas à la fin nécessairement du délai de quatre mois. Dans les faits, M. le Président, cela veut dire que le ministère devra reprendre la relève quatre mois après le prononcé du jugement, et ce, que le ministère soit prêt ou non. Le ministère devra intervenir, tel que le stipule l'article 2 de la loi n° 164. Malgré le fait que la ministre m'a assurée qu'il n'y aurait aucune difficulté à ce niveau, elle n'a malheureusement pas réussi à atténuer mes inquiétudes.

M. le Président, les modifications contenues au projet de loi n° 164 viendront sûrement assouplir l'application de la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires, et nous espérons qu'elles permettront d'atteindre les objectifs prévus à la loi 60, c'est-à-dire la stabilité et la régularité des paiements de pension alimentaire afin que les femmes et les enfants puissent sortir de la pauvreté.

En terminant, j'aimerais rappeler à la ministre et aux membres de cette Assemblée que l'opposition officielle demeure toujours convaincue que, si le gouvernement du Parti québécois souhaite réellement assurer la stabilité et la régularité dans le paiement des pensions alimentaires, si le gouvernement du Parti québécois souhaite réellement augmenter le taux de perception, si le gouvernement du Parti québécois souhaite réellement respecter les bons payeurs et, finalement, si le gouvernement du Parti québécois souhaite réellement lutter contre l'appauvrissement des familles monoparentales et de leurs enfants, ce gouvernement devrait tout simplement exempter les bons payeurs de l'application de la loi. Il pourrait ainsi concentrer toutes ses énergies et tous ses efforts à combattre et à dépister les mauvais payeurs. Mais, malgré ce fait, comme le projet de loi n° 164 vient assouplir certains irritants contenus dans la Loi facilitant le paiement des paiements alimentaires, la loi 60, assouplissements qui contribueront à lutter, je l'espère, contre la pauvreté des femmes et de leurs enfants, alors le projet de loi ne peut que recevoir l'approbation de l'opposition officielle. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 164? Comme il n'y a pas d'autres intervenants, Mme la ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique?

Mme Dionne-Marsolais: Oui, monsieur.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre.


Mme Rita Dionne-Marsolais (réplique)

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. J'aimerais simplement apporter quelques précisions et rassurer la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne quant au traitement des dossiers. C'est vrai que, quand il n'y a pas de difficultés entre conjoints, cela va bien. J'aimerais rappeler à la députée que, si la chose avait été aussi douce et aussi facile, nous n'aurions pas eu autant de demandes dans le système qui existait. Cette loi-là a permis justement d'aider les femmes qui étaient en attente de leur pension alimentaire.

(16 h 30)

Nous avons à peu près 2 900 dossiers, je l'ai mentionné, qui ne sont pas encore traités; les chiffres se réduisent régulièrement. Je le précise parce que, dans son commentaire, la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne a parlé de dizaines de milliers de dossiers en attente, mais il y en a 2 900 maintenant et le tout se résorbe graduellement. On n'a plus d'engorgement. On a encore un retard de traitement, mais l'objectif est d'avoir un traitement de 30 jours, et nous y sommes presque, M. le Président. La modification que nous apportons avec le projet de loi n° 164 va permettre aux bons payeurs de déposer une sûreté d'un mois, et ce, à l'intérieur d'un mois, et va faciliter la tâche à ceux qui voudront s'en prévaloir. Je crois que c'est un pas en avant au bénéfice des familles qui sont en attente de pension, M. le Président. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre déléguée au Revenu. Le débat étant terminé, le projet de loi n° 164, Loi modifiant la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous demande de vous référer à l'article 35.


Projet de loi n° 197


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 35 de votre feuilleton, Mme la députée de Prévost propose l'adoption du principe du projet de loi n° 197, Loi sur l'Agence de développement du Centre de villégiature de Mont-Tremblant. Alors, y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 197? Mme la députée de Prévost, vous avez un temps de parole de 60 minutes.


Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: M. le Président, il me fait plaisir de présenter pour adoption de principe le projet de loi n° 197, Loi sur l'Agence de développement du Centre de villégiature de Mont-Tremblant. Ce projet de loi institue l'Agence de développement du Centre de villégiature de Mont-Tremblant, et les affaires de l'Agence seront administrées par un conseil d'administration composé de cinq membres, dont deux nommés par la municipalité de Mont-Tremblant, deux nommés par Station Mont-Tremblant, société en commandite, et un nommé conjointement par la municipalité et la société.

Ce projet de loi prévoit que l'Agence sera le maître d'oeuvre pour réaliser et financer la construction d'infrastructures municipales et qu'à cette fin elle peut notamment contracter avec toute personne pour la réalisation de ses objets, acquérir des biens meubles et immeubles, aliéner un bien meuble ou immeuble à titre gratuit en faveur de la municipalité de Mont-Tremblant et solliciter et recevoir des dons, legs, subventions et autres contributions.

Enfin, le projet de loi prévoit que l'Agence peut emprunter des sommes pour financer la réalisation des travaux d'infrastructures municipales. Ici, M. le Président, on parle d'infrastructures municipales qui permettront la réalisation de la phase II du projet de développement de la station de ski Mont-Tremblant. Ce projet de développement en trois phases s'échelonne de 1991 à 2010 et totalisera des investissements de 2 000 000 000 $.

Comme on le sait, la phase I de ce projet est presque terminée puisque, sur 457 000 000 $, 330 000 000 $ d'investissements ont déjà été réalisés. La contribution du gouvernement du Québec dans la phase I a été de 34 700 000 $. Les investissements ont eu des retombées extrêmement positives puisque l'achalandage de la station a progressé de 119 %, passant de 365 000 a près de 1 000 000 de visiteurs. Depuis 1991, le gouvernement aurait retiré de l'exploitation de Mont-Tremblant presque 77 000 000 $ en recettes fiscales.

En ce qui a trait à la phase II annoncée par Intrawest, dont les investissements prévus seront de l'ordre de 499 000 000 $, elle permettra notamment de développer les infrastructures municipales et touristiques: l'aménagement de la montagne pour la pratique du ski alpin et de la planche à neige, un développement immobilier qui comprendra notamment la construction de 1 000 unités d'habitation, un nouvel hôtel de 200 chambres, des espaces commerciaux additionnels et un centre équestre. Ce nouvel investissement entraînera la création, M. le Président, de 1 150 emplois permanents directs et indirects et portera à près de 1 000 000 000 $ les investissements prévus d'ici l'an 2002 par la société Intrawest pour le développement de Mont-Tremblant.

Le style de développement préconisé par les dirigeants de la société Intrawest et l'envergure des travaux réalisés au cours des dernières années ont permis à la station Mont-Tremblant de se classer à la tête des stations de villégiature quatre saisons de l'est de l'Amérique du Nord, comparable aux stations touristiques françaises. La réalisation de cette deuxième phase permettra aussi à la station Mont-Tremblant de mettre en place de nouveaux produits adaptés aux basses saisons, notamment en ce qui a trait aux activités récréatives intérieures, ce qui en fera dorénavant une véritable destination quatre saisons.

Il est très important de noter qu'un investissement d'une telle envergure permet au Québec de s'ouvrir sur le tourisme international et d'accroître la visibilité du Québec partout dans le monde. Cette visibilité apporte des retombées importantes au Parc du Mont-Tremblant, un joyau du Québec. Vous permettrez que l'on se souvienne des temps où la station de ski Mont-Tremblant recevait des touristes de partout; par ce projet, Mont-Tremblant redevient ce qu'il était. Mont-Tremblant devient une porte d'entrée de devises étrangères, car, en plus d'une clientèle québécoise et canadienne, Mont-Tremblant est de plus en plus visité par les Japonais, les Britanniques, les Européens et par nos voisins, les Américains.

M. le Président, il y a plusieurs bonnes raisons pour que ce projet de loi soit adopté, mais celle que je retiens le plus, c'est qu'il est créateur d'emplois. Il permettra à nos jeunes de se trouver du travail en région plutôt que de devoir la quitter faute d'emplois, surtout que dans la belle région des Laurentides nous avons une école hôtelière à Sainte-Adèle. Et, comme beaucoup d'emplois à la station Mont-Tremblant se retrouvent en hôtellerie, il y aura une porte toute ouverte tout près pour nos finissants.

M. le Président, la municipalité de Mont-Tremblant veut donc aider la station à réaliser la phase II de son projet de développement sans toutefois mettre à risque la capacité de payer des contribuables et la santé financière de la municipalité, et c'est tout à son crédit. La réalisation de ce projet va vite, va très vite. Les travaux de la phase I seront terminés plus tôt que prévu et, si la municipalité avait à exécuter seule tous ces travaux, sans cette concertation, il lui serait impossible d'aller de l'avant à un tel rythme, surtout que la belle municipalité de Mont-Tremblant n'a que 800 habitants.

Ce projet de loi, donc, créant l'Agence de développement du Centre de villégiature de Mont-Tremblant lui permettra d'aller de l'avant pour développer, construire, financer et coordonner la mise en place d'infrastructures publiques telles que routes, égouts et aqueducs sur le territoire de la municipalité de Mont-Tremblant, tout en créant de l'emploi. C'est pourquoi, M. le Président, j'appuie ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Prévost. Nous allons céder maintenant la parole au député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Tout d'abord, vous me permettrez d'avertir mes collègues qu'avec une gorge un peu irritée par le froid je vais peut-être ne pas trop m'étendre dans le discours. Mais je tenais quand même à intervenir sur ce projet de loi.

Le projet de loi n° 197 est certainement un projet de loi très intéressant en ce qui concerne le développement régional. C'est un projet de loi qui aussi a une importance dans le sens qu'il va vers l'avenir. C'est qu'il permet le mariage ou l'association d'une municipalité avec le secteur privé pour la réalisation d'infrastructures en particulier.

C'est un concept qui se fait actuellement aux États-Unis, en Californie en particulier, et on doit reconnaître que c'est au Québec une nouveauté. C'est peut-être, c'est certainement même la première fois que cela va arriver, et on se doit donc de saluer cette innovation, car on sait qu'actuellement les pouvoirs publics ont un certain nombre de difficultés au niveau financier, particulièrement dans des municipalités, et doivent recourir à de nouvelles façons de faire et de procéder afin de financer leurs infrastructures ou même de les étendre ou de les rénover.

(16 h 40)

Et là on se trouvait devant une situation qui était la suivante: c'est que ou la municipalité et la station Mont-Tremblant réalisaient ces infrastructures ou alors le projet pouvait se faire difficilement. Il se serait fait pareil, mais le laps de temps dans lequel il se serait fait aurait été beaucoup plus long. Alors, M. le Président, lorsqu'on sait que le développement du Mont-Tremblant est quelque chose qui concerne tous les Québécois – je voyais ma collègue la députée Papineau, qui est membre du gouvernement actuel, se féliciter de tout ce développement, de l'ampleur que le centre prend – je ne peux faire autrement qu'elle car, en effet, c'est un projet qui a été commencé sous notre gouvernement. Nous avions en effet à l'époque, M. le Président, donné les autorisations et les premiers financements conjoints avec la station pour le lancer. Car nous croyons, nous aussi, non seulement au développement régional, mais nous croyons que le développement en région passe beaucoup par le tourisme et par le tourisme international, et Mont-Tremblant est certainement un des endroits et un des attraits en Amérique du Nord qui a les qualités et l'envergure pour attirer ces touristes internationaux qui vont venir dépenser leur argent chez nous, au Québec, et profiter bien sûr de la belle nature et de tout ce que nous avons pour que les gens puissent non seulement y faire du sport, mais se récréer en même temps.

M. le Président, il y a un certain nombre de questions, bien sûr, que nous aborderons en ce qui concerne ce projet de loi là, particulièrement en commission parlementaire, car, comme tous les projets de loi, il va être déféré en commission parlementaire et nous aurons l'occasion d'en débattre article par article. Alors, certaines questions vont devoir être précisées pour la bonne marche et le bon intérêt de la population et du Parlement, bien sûr, avant de l'adopter. Nous verrons en particulier à savoir ce qui arrive avec les droits de mutation qui doivent servir entre autres à participer à ce montage financier. On verra si le gouvernement a donné suite à ce qui a été demandé par les municipalités et par la station Mont-Tremblant. À date, rien ne nous indique le contraire; nous verrons à ce moment-là.

M. le Président, aussi, il faut se rappeler que Mont-Tremblant, s'il est très positif pour les Laurentides, pour l'ensemble de la région de Mont-Tremblant, qui est une petite municipalité, une petite ville québécoise de 800 à 900 habitants, peut devenir aussi un pôle important pour le développement plus large des Laurentides. Et pour ce faire, bien sûr, il va falloir que nous prenions tous, et le gouvernement en particulier parce que c'est lui qui est aux affaires actuellement, donc que nous prenions un certain nombre de décisions et que nous fassions en sorte que Mont-Tremblant ne vienne pas ramasser ou écrémer une partie de la clientèle qui allait traditionnellement dans les Laurentides, plus au sud, plus vers Montréal, comme Saint-Sauveur, Sainte-Agathe, enfin, toutes ces régions autour.

M. le Président, il faut être très vigilant. J'ai eu l'occasion cet été, dans une tournée que je faisais dans cette région, de discuter avec des hôteliers, discuter avec des restaurateurs, avec des gens de chambres de commerce et des maires des municipalités aussi qui me faisaient part de craintes qu'ils pouvaient avoir à cet effet là. Moi, je dis, il ne faut pas non plus être contre le développement; il faut regarder le futur, il faut être positif à toute nouvelle chose, à toute nouvelle initiative qui, au Québec, permet de créer de l'emploi, permet de développer notre commerce, permet d'amener des devises, donc permet de faire marcher toute la machine économique. Mais il faut aussi, bien sûr, être attentif à ne pas créer des effets plus négatifs dans d'autres secteurs parce que, à côté, on crée des choses ou on crée des développements importants.

Alors, je souhaiterais, bien sûr, que ma collègue la députée de Papineau – de Prévost, pardon, Mme Papineau est députée de Prévost – se penche là-dessus, elle qui est nouvelle députée dans cette région, et regarde avec les intervenants – certainement les mêmes que j'ai rencontrés – pour voir quelles sont leurs préoccupations, car ils en ont, quelles sont leurs craintes, et ils en ont, et quelles peuvent être les solutions qui peuvent contribuer à calmer ces craintes et ces appréhensions et améliorer tout cet achalandage touristique dans la région des Laurentides qu'elle qualifie de très belle région, je dirais même une des belles régions de la province de Québec et peut-être même parmi les plus belles régions du monde.

Pour les gens qui ont voyagé et qui sont allés dans d'autres pays, on peut quand même reconnaître que cette région des Laurentides, certainement, a un aspect unique, très intéressant et très merveilleux à voir, à toutes les saisons d'ailleurs, que ce soit en été pour la villégiature, que ce soit en automne pour aller voir ce festival merveilleux des arbres et des couleurs, cette nature, ces montagnes qui vont du rouge en passant par le doré, M. le Président, avant, bien sûr, de perdre leurs feuilles et de voir arriver la neige et la blancheur de toutes ces Laurentides en hiver. C'est quelque chose de merveilleux. C'est un atout très important.

Alors, c'est dans ce sens-là que, bien sûr, l'opposition va appuyer ce projet de loi là, non sans, je le disais précédemment, questionner en commission parlementaire sur quelques points, mais dans l'ensemble nous sommes favorables. C'est dans notre philosophie de parti politique, de formation politique de voir des mariages entre le secteur privé et le secteur public. Encore faut-il que ça se fasse dans des conditions, bien sûr, qui ne créeront pas de problème ou de préjudice aux citoyens, aux payeurs de taxes. Il faut s'assurer que cela n'amènera pas d'augmentation de taxes pour les gens de Mont-Tremblant. Parce que, imaginez, on parle de 10 000 000 $ ou presque 12 000 000 $ d'infrastructures pour 900 habitants, bien, il faut être certain que ces gens-là ne se réveilleront pas un beau matin avec une facture de taxes municipales qui serait trop élevée pour ce qu'ils peuvent payer. C'est évident. Alors, ça, c'est le genre de précaution que nous devons prendre.

Nous devons prendre aussi, bien sûr, d'autres précautions, M. le Président, pour faire en sorte que nous soyons assurés que, une fois que les infrastructures auront été payées et que tout aura été fait, eh bien, cela revienne aux citoyens, donc à la municipalité. Il faut faire en sorte aussi de s'assurer, M. le Président, que, s'il y avait changement dans la manière de fonctionner en ce cas particulier, en ce qui concerne les droits de mutation immobiliers, cela ne crée pas ailleurs dans le Québec des demandes qui viendraient, pour d'autres raisons, peut-être changer les règles du jeu au niveau de la taxation municipale ailleurs.

Une fois ces mises en garde dites, M. le Président, et discutées en commission parlementaire, si ça va dans le sens qui nous a été communiqué, avec les premières vérifications que nous avons faites, bien sûr, nous voterons pour, en rappelant qu'il est important à la municipalité d'être, dans ce projet-là, en parfaite harmonie et symbiose avec ses citoyens au niveau de l'information, au niveau des communications, faire en sorte que les citoyens soient bien conscients de ce que la municipalité fait. On me dit que ça a été fait dans les règles. En effet, le conseil municipal l'a adopté en séance publique. Des citoyens se sont informés. Ils ont obtenu les réponses pertinentes, semble-t-il. Bon. Alors, c'est très bien. Nous avons pris acte aussi de cela.

Et, M. le Président, il ne nous reste plus maintenant qu'à souhaiter que le projet soit appelé en commission parlementaire le plus rapidement possible pour faire en sorte que nous puissions sortir de cette session-ci, avec la ville de Mont-Tremblant et, bien sûr, la Corporation Intrawest de Mont-Tremblant, capables d'aller de l'avant avec ce projet qui, comme je le disais précédemment, et je me joins à ma collègue pour le dire, est un projet d'avenir et un projet moteur pour le Nord du Québec, pour les Laurentides, le petit Nord du Québec, l'ensemble de la grande région montréalaise et tout le Québec en entier.

Alors, M. le Président, nous appuyons le projet de loi et, bien sûr, nous avons hâte de l'avoir en commission parlementaire.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je vais donner la parole à Mme la députée de Prévost pour son droit de réplique. Mme la députée.


Mme Lucie Papineau (réplique)

Mme Papineau: M. le Président, je voudrais juste remercier le député de LaFontaine de son appui à ce projet de loi là. Bon. Ce que je comprends, c'est qu'il y a certains questionnements qui, certainement en commission parlementaire lorsque nous étudierons article par article le projet de loi, je pense, pourront s'estomper. Je reviens encore une fois avec la création d'emplois que ce projet apporte. On parle ici d'au-dessus de 1 150 emplois, et surtout pour les jeunes, M. le Président. Alors, je remercie encore une fois le député de LaFontaine.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Prévost. Le principe du projet de loi n° 197, Loi sur l'Agence de développement du Centre de villégiature de Mont-Tremblant, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et que le ministre des Affaires municipales en soit membre durant la durée du mandat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

(16 h 50)

M. Boulerice: M. le Président, je vous réfère à l'article 4 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 154


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 4, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 154, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique. M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais, en effet, présenter les amendements proposés à la Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique qui visent deux matières: la première est celle de l'enseignement de la thanatologie; et la deuxième est celle qui vise l'encadrement des techniques d'assistance médicale à la procréation, et plus particulièrement les centres de conservation de gamètes et d'embryons. Ces deux amendements, je pense, essentiellement techniques s'expliquent par les raisons suivantes. L'enseignement de la thanatologie au Québec est assumé par le collège de Rosemont qui, depuis 1980, est le seul programme québécois qui est reconnu par le ministère de l'Éducation et qui dispense cet enseignement. Grâce à différents arrangements qui ont pu être faits dans le passé avec les salons funéraires, il a toujours été possible pour le collège de Rosemont de pouvoir obtenir des cadavres non réclamés pour que cet enseignement puisse être fait et que les thanatologues soient bien formés selon les normes approuvées par le ministère de l'Éducation et le programme sous la responsabilité du collège de Rosemont.

Pour différentes raisons, il est devenu de plus en plus difficile, dans les arrangements et la collaboration entre le collège de Rosemont et les salons funéraires, d'assurer un approvisionnement régulier et suivant les besoins du programme d'enseignement. Et on a réalisé qu'une des difficultés venait du fait que la loi sur la santé publique, qui stipule les règles et le contrôle des cadavres au Québec, mentionne que le don de cadavres peut se faire à l'université. Bien sûr, à l'époque, le législateur avait à l'esprit l'enseignement de l'anatomie où c'étaient des universités qui étaient les plus importants receveurs de cadavres non réclamés.

Alors, l'amendement vise tout simplement à modifier dans la loi le mot «université» par les mots «institution d'enseignement», ce qui permettrait de couvrir évidemment à la fois les universités et les autres institutions d'enseignement, dont le collège de Rosemont. Il est bien entendu que s'il y avait... La probabilité est à peu près nulle que l'enseignement de la thanatologie doive se dispenser ailleurs au Québec. Le nombre de personnes qui suivent cette formation ne le justifierait pas. Mais il est bien entendu que, de toute façon, pour qu'un collège donne cette formation, il doit avoir un permis d'enseignement à cet effet du ministère de l'Éducation, lequel ministère donne ces permis après consultation avec le ministère de la Santé et des Services sociaux.

Alors, je pense que les moyens de contrôle qui sont ceux qu'on a présentement et qui se sont avérés tout à fait satisfaisants sont toujours là. Il s'agirait de donner cette souplesse pour que non seulement les universités, de façon tout à fait légale, si vous voulez, quant au texte de la loi, mais aussi un collège reconnu à cet effet puissent recevoir des dons d'organes. Alors, voilà pour la première modification, M. le Président.

La deuxième touche un sujet plus important quant à l'ensemble des implications qui est celui, vraiment, des techniques d'assistance médicale à la procréation. C'est un domaine qui est en développement de façon très importante, surtout au cours de la dernière décennie. Dans ce domaine-là comme dans beaucoup d'autres, la technologie s'est développée parfois à un rythme plus rapide que les mécanismes de contrôle social et légal que pouvaient avoir des sociétés.

On se rappellera qu'il y a eu une commission d'enquête qui a travaillé à travers tout le Canada il y a quelques années, la commission Baird, qui a étudié l'ensemble de cette question. Cet examen a fait ressortir qu'au Québec on avait une situation particulièrement intéressante et avantageuse à cet égard comparativement à ailleurs au Canada parce que notre Code civil, tel qu'il a été refait, a prévu un assez bon encadrement pour les différentes situations et les différentes étapes de techniques d'assistance médicale à la reproduction. Mais il reste un élément pour compléter, si vous voulez, notre tableau dans ce domaine.

Alors, je pense que ça vaut la peine de prendre quelques minutes pour se rappeler ce qui a été fait dans les étapes précédentes pour qu'on voie bien que la mesure qu'on veut suggérer aujourd'hui vient vraiment compléter toute une chaîne d'étapes qui assurent une protection aux personnes, une protection aux enfants qui éventuellement peuvent naître à la suite de recours à des techniques d'assistance médicale à la procréation et une qualité de services en même temps qu'une protection des droits des gens.

Bon, il y a d'abord des mesures qui ont été prises pour assurer, dans le cadre de notre droit civil, l'affiliation des enfants – je ne rentrerai pas dans les détails. Il y a des mesures qui ont été prises aussi dans le cadre de l'article 542 du Code civil en ce qui regarde la protection des antécédents biologiques, c'est-à-dire que le principe général de l'anonymat est consacré dans notre Code civil, et l'identification des personnes ne peut être faite que si un tribunal décide qu'un enfant ou un de ses descendants pourraient subir des préjudices graves par la protection complète des antécédents biologiques.

Il s'est posé aussi des questions en ce qui regarde les ententes de procréation pour autrui. On sait – ce qu'on appelé communément «les mères porteuses» – qu'il y a eu aux États-Unis, par exemple, littéralement des commerces qui se sont développés. Il y a des problèmes sociaux, éthiques et légaux importants qui se sont posés. Alors, nous, ici, le Code civil, à l'article 541, prévoit l'interdiction de conventions de procuration de gestation pour autrui, lesquelles sont considérées selon notre droit comme nulles et de nullité absolue.

Une autre question importante a été celle de l'interdiction de la commercialisation du corps humain ou de ses éléments, soit les gamètes et les embryons. Et la commercialisation est maintenant aussi encadrée dans le Code civil par un article, l'article 25, qui stipule que l'aliénation que fait une personne d'une partie ou de produits de son corps doit être gratuite pour éviter, là aussi, que se développe un commerce qui pourrait amener, on peut l'imaginer, à toutes sortes d'abus très facilement.

Finalement, on prévoit aussi, par l'intermédiaire de normes de pratiques professionnelles qui relèvent du Collège des médecins, tout ce qui regarde l'encadrement des pratiques concernant l'insémination artificielle avec donneur de même que la conservation du sperme.

Alors, on a donc un encadrement assez complet. Mais, dans les dernières années, alors que la situation était que tout ce développement se faisait dans des établissements publics, dans des centres hospitaliers universitaires, dans des centres de recherche universitaires, maintenant que différentes techniques de procréation ont été développées, ont commencé à se développer certains centres privés qui peuvent rendre disponibles des gamètes et des embryons. Et on s'est aperçu qu'il n'y avait absolument rien dans nos lois qui donnait la possibilité d'encadrer cette pratique afin d'assurer que l'émergence de différents centres en dehors des établissements du réseau de la santé et des services sociaux, donc des cliniques privées, soit sous un minimum de contrôle qui assure la qualité, la plus haute qualité possible des produits et aussi une protection des gens.

Alors, ce que l'amendement proposé vise, c'est de modifier dans la loi ce qui s'appelait des «banques d'organes et de tissus» pour ajouter les mots «centres de conservation de gamètes et d'embryons», ce qui permettra au ministre de la Santé d'avoir les pouvoirs d'agréer les centres par l'émission de permis, d'avoir des pouvoirs de réglementation pour imposer des normes qui devront être suivies et, aussi, d'avoir des pouvoirs d'inspection pour s'assurer que les normes imposées sont appliquées et que les personnes peuvent être assurées d'une complète protection et de la qualité des services qui leur sont donnés.

Alors, il ne s'est pas présenté – et je veux être bien clair là-dessus – de situations, de problèmes qu'on a à corriger présentement. Je pense qu'il existe seulement deux centres privés qui opèrent dans ce domaine-là présentement. Comme l'espèce de vide juridique pour pouvoir intervenir et demander, exiger les mêmes standards de cliniques privées que ceux qui sont exigés du réseau privé est apparu, on veut agir de façon préventive et s'assurer qu'il n'y aura pas de problème dans l'avenir. Alors, tous ceux qui peuvent être impliqués dans ce domaine ont été consultés, les milieux concernés sont en accord, et je pense qu'il s'agit, comme je le disais dans ma présentation, essentiellement de modifications d'ordre surtout technique qui viennent ajuster nos lois à ce qui a été une évolution au cours des dernières années dans le domaine de la technologie. Alors, merci, M. le Président.

(17 heures)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. En effet, nous sommes d'accord avec l'esprit du projet de loi. Je ne dis pas «sur la lettre du projet de loi», mais «sur l'esprit du projet de loi», en ce qui touche la loi qui modifie la Loi sur la protection de la santé publique.

D'une part – et je vais recommencer dans l'ordre inverse, si je puis dire – c'est vrai qu'il est urgent de pouvoir se mettre à date et d'inclure dans la loi ce qui touche les centres de conservation de gamètes et d'embryons, et, dans ce cadre-là, je ne pense pas que ceci devrait poser problème, puisque clairement c'est encadré par un permis du ministre. Je suis bien conscient aussi que le deuxième élément de la loi, M. le Président, va permettre la disposition des cadavres pour d'autres établissements d'enseignement que les universités. Je dois dire néanmoins que, tel que la loi est rédigée – et on aura la chance, lorsqu'on l'étudiera article par article... – le terme «établissement d'enseignement» m'a l'air un terme beaucoup trop général parce qu'il couvrirait à peu près tout. Puisqu'il n'est pas défini dans la loi, donc il pourrait tout couvrir. Et, sans paraître ridicule, il pourrait tout couvrir depuis l'école primaire jusqu'à l'université.

Il est clair qu'au sens de la loi «établissement d'enseignement» veut dire soit une université, soit un collège d'enseignement général et professionnel, et j'aimerais, M. le Président, lorsqu'on étudiera article par article, qu'on puisse introduire dans les définitions, puisque cette loi est structurée, ayant un article 1 qui est un article de définitions, qu'«établissement d'enseignement» veuille bien dire un collège d'enseignement général et professionnel ou une université, pour éviter des possibles abus qu'il pourrait y avoir dans un cas ou dans un autre. Alors, lorsqu'on viendra article par article, j'aurai un amendement à soumettre à ce moment-là pour mieux préciser le sens d'«établissement d'enseignement».

J'ai terminé, M. le Président. J'avais une heure, mais, vous savez, ce coup-ci, j'ai été bref.

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est très, très bien. Ha, ha, ha! C'est tout à fait bien, je n'ai pas...

M. Gautrin: Je pourrais continuer et reprendre le temps, si vous voulez que je parle du Régime de rentes!


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je suis tout à fait satisfait de votre intervention. Ha, ha, ha! Alors, il n'y a plus d'autres intervenants? Le principe du projet de loi n° 154, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, tout en exprimant également la satisfaction du gouvernement à l'égard du député de Verdun, je vais faire motion pour que le projet de... Il va de soi que Mme la whip en chef du gouvernement également vous en remercie. Donc, je vous ferai motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Je vous fais donc motion, M. le Président, pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, pour que nous puissions nous constituer en commission plénière, nous allons suspendre nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 4)

(Reprise à 17 h 33)


Commission plénière

M. Brouillet (président de la commission plénière): Alors, mesdames, messieurs, conformément à la motion que nous venons d'adopter il y a déjà quelques minutes, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 154, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique.

Nous allons entreprendre nos travaux. Habituellement, il y a des remarques préliminaires, mais je ne sais pas si vous en sentez le besoin. Nous pouvons commencer immédiatement article par article, si vous êtes d'accord avec ça.

Une voix: Oui, je suis d'accord.


Étude détaillée

Le Président (M. Brouillet): Alors, si vous voulez, je vais lire rapidement l'article en question, et puis M. le ministre sera appelé à faire ses commentaires et M. le député de Verdun à intervenir. Alors, à l'article 1: L'article 1 de la Loi sur la protection de la santé publique est modifié par l'insertion, après le paragraphe m du premier alinéa, du suivant:

«m.1) "centre de conservation de gamètes ou d'embryons" signifie un lieu aménagé hors d'une installation maintenue par un établissement qui exploite un centre hospitalier pour recueillir, conserver ou distribuer des gamètes ou des embryons humains en vue de l'utilisation de ces gamètes ou embryons à des fins médicales ou scientifiques.»

M. le ministre, vous avez des commentaires?

M. Gautrin: Moi, est-ce que je peux intervenir?

Le Président (M. Brouillet): On va laisser à M. le ministre tout d'abord la possibilité d'intervenir.

M. Rochon: Alors, M. le Président, je présume que je n'ai pas à reprendre tout l'argumentaire, mais juste rappeler qu'essentiellement il s'agit de rajouter, dans l'article 1 de la Loi sur la protection de la santé publique, qui est l'article des définitions, la modification proposée pour reconnaître dans cette loi une entité qui n'existait pas jusqu'à tout récemment, c'est-à-dire un centre de conservation de gamètes ou d'embryons, de sorte que toute technique de procréation médicalement assistée qui est parfaitement bien couverte présentement par la loi... C'est parce que ça se faisait essentiellement dans des établissements publics, essentiellement des centres hospitaliers et surtout des centres hospitaliers universitaires. Mais, les technologies évoluant rapidement, c'est maintenant possible, et c'est le fait à deux endroits au Québec, que des centres privés, des cliniques médicales privées exercent certaines techniques de procréation médicalement assistées et, à cet effet, conservent des gamètes et des embryons. Alors, pour que les règlements, les normes, les standards qui sont adoptés au Québec puissent s'appliquer aussi à ces centres-là, il s'agit de créer, de reconnaître dans notre loi l'existence maintenant de centres de conservation de gamètes ou d'embryons tels que définis présentement.

Le Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le ministre. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, évidemment la définition qu'on a devant nous est copiée sur celle des banques d'organes et de tissus qui était dans l'article m devant nous, avec deux choses, l'ajout de deux verbes nouveaux, le verbe «recueillir» et le verbe «distribuer». Les banques d'organes avaient seulement comme principe de conserver.

Dans «banque d'organes», elles n'avaient pas comme objectif de recueillir les organes, si je comprends bien, c'étaient d'autres qui les recueillaient puis qui les conservaient. Mais le mot «distribuer», qu'on n'avait pas senti utile dans «banque d'organes», pourquoi vous le sentez utile, ici? Il essaie de couvrir quelle réalité? Je comprends pour «recueillir», hein? Ça va, je n'ai pas besoin de me le faire expliquer. Mais, pour «distribuer», quelle est la réalité que vous couvrez ici, en plus, que vous n'avez pas incluse dans «banque d'organes»?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, les banques d'organes ont vraiment une fonction de banque, c'est-à-dire qu'elles reçoivent des organes ou des tissus. Quand c'est un organe, c'est pour un temps très, très court parce que, en général, c'est une question d'heures avant qu'une transplantation doive être faite. Dans le cas de tissus, ça peut, selon les méthodes de conservation, être sur une période plus longue. Mais la cueillette et la distribution sont assumées par d'autres organismes qui sont, en général, des organismes reconnus.

En fait, il y en a un au Québec pour les organes. Pour les tissus, à ma connaissance, il n'y en a pas vraiment, présentement. Il y a des établissements de santé – parce que c'est tout à fait récent, ça aussi, la transplantation de tissus – qui jouent un peu ce rôle, mais on aura à agir dans ce domaine pour régulariser la situation. Alors, on a deux intervenants, si vous voulez. Il y a Québec-Transplant dans le cas des organes qui, lui, recueille et assume la distribution et la banque ne fait qu'une fonction de banque.

Dans le cas des gamètes et des embryons, toutes les opérations se passent à la même place, dans un sens. Alors, la source d'approvisionnement de la gamète et de l'embryon, la conservation et éventuellement la distribution, tout se fait par le même organisme qu'on désigne sous le nom de centre de conservation.

M. Gautrin: C'est bien, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, c'est bien. L'article 1 est adopté?

M. Gautrin: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Adopté.

M. Rochon: M. le Président, on va le faire... C'est à la fin? Bon. O.K.

Le Président (M. Brouillet): Celui que j'ai entre les mains, c'est après l'article 9.

M. Rochon: Ça va. On le fera après.

Le Président (M. Brouillet): Très bien.

M. Rochon: D'accord.

Le Président (M. Brouillet): L'article 2: L'article 31 de cette loi est modifié par l'insertion, dans la première ligne du premier alinéa et après le mot «tissus», des mots «ou un centre de conservation de gamètes ou d'embryons». M. le ministre, il y a quelques commentaires à faire sur cet article?

M. Gautrin: C'est ce qui touche les permis.

M. Rochon: Je pense que c'est une pure concordance pour que, dans l'article qui prévoit l'émission de permis, on rajoute aux laboratoires, aux banques d'organes et de tissus le centre de conservation de gamètes et d'embryons.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, l'article 2 est adopté?

M. Gautrin: Pas de problème, parce que, comme il dit, ça serait bizarre qu'on ait un centre qui ne soit pas titulaire d'un permis, M. le Président. L'article 2 est adopté.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, l'article 2 est adopté. L'article 3: L'article 58 de cette loi est modifié par le remplacement, dans la dernière ligne du premier alinéa, du mot «université» par les mots «institutions d'enseignement». M. le ministre.

(17 h 40)

M. Rochon: Là aussi, on veut adapter la loi à la réalité nouvelle. Quand la loi de la santé publique a été adoptée, il n'y avait essentiellement que les universités qui utilisaient des cadavres non réclamés pour les fins de l'enseignement de l'anatomie. Par la suite, l'enseignement de la thanatologie a été assumé par un collège – c'est un seul endroit où ça se fait au Québec, qui est le collège de Rosemont – mais grâce à des ententes à l'amiable, vu qu'il s'agissait d'un très petit nombre de cadavres, il a toujours été possible pour le collège d'avoir à sa disposition les quelques cadavres nécessaires par des arrangements qui étaient faits avec les salons funéraires.

À un moment, la question a été soulevée, et on a craint que cette situation, qui peut-être n'était pas nécessairement prévue par la loi, puisse créer des situations où il pourrait y avoir un manque de contrôle. Alors, on veut corriger la situation parce que présentement on est dans une situation soit illégale en laissant le collège de Rosemont continuer à faire son enseignement et obtenant des permis n'étant pas reconnus par la loi pour ce faire... ou en corrigeant la situation et reconnaissant que le collège peut le faire.

Maintenant, on ne sait pas dans l'avenir comment ça peut évoluer. Il serait possible que ça puisse être un autre collège. On ne peut pas donc identifier un collège nommément. Identifier le niveau collégial, on peut y penser aussi. Je pense qu'il y avait une préoccupation de cerner le plus possible la réalité, mais je ne pense pas qu'on puisse exclure que, éventuellement, comme tout développement de techniques devient de plus en plus simple, ça puisse être au niveau du secondaire ou à la fin du secondaire où on aurait une option ou un programme qui donnerait la formation ou certaines parties de formation en thanatologie. Alors, l'intention était d'élargir, de ne pas prévoir seulement les universités, mais qu'une institution d'enseignement qui aurait un programme à cet effet pourrait utiliser un cadavre non réclamé et que la loi nous permette, avec les développements qui se feraient à l'avenir, qu'on ne soit pas obligés de revenir à chaque fois pour un amendement à la loi.

Il est peut-être important de mentionner tout de suite que le contrôle de la décision d'identification de ce qu'est un cadavre non réclamé, et comment on peut en disposer, et le suivi de ce à quoi a été utilisé le cadavre non réclamé est déjà bien balisé dans une autre partie de la loi de la santé publique. Il y a un médecin responsable pour chacune des régions du Québec qui est identifié dans la loi, et c'est les services de police qui, avec le médecin, assument la responsabilité de veiller même à tenir un registre et à faire rapport à la fin de chaque année sur ce qui a été fait, à qui un cadavre a été donné et comment on en a disposé jusqu'à la toute fin.

Alors, je pense que là ça nous donne la souplesse dont on a besoin, et les contrôles qui visent l'identification et le cheminement du cadavre non réclamé sont déjà dans la loi.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, merci, M. le ministre. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, en effet, au début, j'avais des inquiétudes quant à l'utilisation du terme «institution d'enseignement» que je trouvais relativement large et qui pouvait couvrir un certain nombre d'institutions. Je dois dire qu'après discussion – on a échangé pendant la période de suspension de la séance – l'article 54 vient préciser que ce n'est pas tous les médecins mais seulement les médecins qu'on désigne comme responsables qui sont habilités à pouvoir disposer de cadavres; donc, à ce moment-là on a une personne qui a une autorité transférée par le ministre qui peut en disposer.

Alors, à ce moment-là l'ouverture sans préciser les institutions d'enseignement est moins grave parce que ce n'est pas l'ensemble des médecins qui peuvent disposer des cadavres mais un médecin désigné, qu'on appelle «médecin responsable», par le ministre. De plus, je crois, ce médecin est censé faire rapport annuellement sur le registre des cadavres qu'il a été amené à donner à des institutions d'enseignement. Dans ces conditions-là, M. le Président, je n'ai pas l'intention de faire l'amendement que j'avais annoncé lorsqu'on avait débattu en deuxième lecture et je serais prêt à adopter l'article 3 tel qu'il est rédigé.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Merci. Alors, l'article 3 est adopté?

M. Gautrin: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 4: L'article 59 de cette loi est modifié:

1° par le remplacement, dans la première ligne du premier alinéa, du mot «université» par les mots «institution d'enseignement»;

2° par le remplacement, dans la première ligne du troisième alinéa, du mot «université» par les mots «institution d'enseignement».

M. Rochon: Concordance.

Le Président (M. Brouillet): Je crois que c'est une simple question de concordance.

M. Gautrin: Concordance, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Donc, l'article 4 est adopté? Adopté. L'article 5: L'article 60 de cette loi est modifié par le remplacement, dans la première ligne du premier alinéa, du mot «université» par les mots «institution d'enseignement». Concordance encore.

M. Gautrin: Excusez-moi.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: L'article 60 me pose un problème, je m'excuse de vous le dire, tel que vous le rédigez, parce que vous prenez la négation, et que, comme vous avez élargi beaucoup, vous dites «les cadavres qu'aucune université». Comme vous dites «les cadavres qu'aucune institution d'enseignement n'accepte de recevoir», alors tel que vous le rédigez actuellement, parce que vous avez élargi énormément au niveau des institutions d'enseignement, vous voyez que, quand vous prenez la négation dans la rédaction, vous êtes en train de prendre... Plus vous mettez d'institutions d'enseignement susceptibles de recevoir un cadavre, moins les cadavres qu'aucune institution d'enseignement ne peut recevoir... Ça devient de plus en plus difficile à vérifier. Vous comprenez, M. le Président?

Parce que vous n'avez pas la loi actuellement, je comprends. Je vais vous lire le texte de loi tel qu'il est actuellement. Il dit: «Les cadavres qu'aucune université n'accepte de recevoir et les cadavres non réclamés qui, d'après les instructions du médecin responsable, doivent être inhumés ou incinérés, doivent l'être dans les plus brefs délais.» Là, vous vous trouvez... Alors, quand je disais «les cadavres qu'aucune université», comme le nombre d'universités est relativement faible, c'était quelque chose de facile à établir. Quand je dis «les cadavres qu'aucune institution d'enseignement n'accepte de recevoir», c'est en soi beaucoup plus large, vous voyez? Alors, je me demande s'il n'y aurait pas lieu de baliser cette loi-là parce que, là, vous prenez la négation.

Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire là-dedans? Parce que vérifier qu'aucune institution d'enseignement n'accepte de recevoir, ça peut être assez long, puisqu'on a laissé les cas très ouverts dans la définition, dans l'article 59.

M. Rochon: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Rochon: Je ne suis pas sûr, là, que... Comme on dit – ha, ha, ha! – je pense que je comprends la question, mais je ne vois pas le problème. C'est parce qu'il faut voir le contexte.

M. Gautrin: C'est strictement logique, vous comprenez? À partir du moment... Vous dites: «Les cadavres qu'aucune université...» Ça voulait dire, en termes logiques, les cadavres que... Et là vous avez un certain nombre d'universités. Il y en a quatre, je crois, qui ont des facultés de médecine susceptibles de recevoir des cadavres. Alors, c'était facile de vérifier. Mais, avec «les cadavres qu'aucune institution d'enseignement», là vous ouvrez beaucoup. C'est plus long à vérifier que personne n'en veut.

M. Rochon: Je ne le sais pas, M. le Président. Je peux me permettre de voir la logique. Je pense qu'il faut voir dans le contexte l'ensemble des articles. C'est un cheminement que les articles définissent. L'article précédent, 59, dit: «Lorsqu'un cadavre doit être offert à une université...» Maintenant, on dit: «Lorsqu'un cadavre doit être offert à une institution d'enseignement...»

On a vu, dans l'article précédent, 58, qu'il était déterminé que c'est le médecin responsable, lui-même défini, comme le disait le député, à l'article 54, qui donne les instructions périodiquement quant à la disposition des cadavres non réclamés. Donc, on a un cheminement où il y a un contrôle de quels cadavres sont jugés non réclamés. Le médecin responsable détermine les conditions selon lesquelles on peut en disposer. L'article 59 prévoit comment les cadavres sont offerts aux universités. On arrive à 60 et on dit, pour les cadavres qui n'ont pas été acceptés, non réclamés, offerts, non acceptés par aucune institution d'enseignement, comment il faut procéder par voie d'inhumation ou d'insinération.

M. Gautrin: Mais, M. le Président, vous comprenez mon problème. Mon problème, c'est que c'est facile de savoir qu'un cadavre est offert, est accepté et pas accepté. Mais là, à 60, vous dites: «Les cadavres qu'aucune université n'accepte.» Ça présuppose que vous avez fait les appels à l'université A, l'université B, l'université C et l'université D, parce qu'il faut qu'aucune ne l'accepte. Alors, là, maintenant, ça ne va pas seulement être «qu'aucune université n'accepte», c'est «qu'aucune institution d'enseignement n'accepte». Ça présuppose que vous ayez fait...

M. Rochon: Je sais ce que vous voulez dire. O.K.

M. Gautrin: Alors, je suggère, moi, que vous... Parce que vous comprenez ce que ça veut dire? Ça veut dire que vous avez appelé non pas seulement les quatre universités qui ont une faculté de médecine, mais aussi tous les cours de thanatologie plus les...

M. Rochon: Alors, juste pour essayer pour voir si on se rejoint.

M. Gautrin: Oui, allons-y.

M. Rochon: Peut-être qu'il faudra prendre quelques minutes pour travailler plus précisément sur la formulation, mais là je pense que je comprends. Il faudrait dire, à 60 quelque chose, comme «les cadavres qui n'ont pas été acceptés par une institution d'enseignement», et là on continue.

M. Gautrin: On continue. «Les cadavres qui n'ont pas été acceptés.» Parce que c'est le «aucune» qui était très...

M. Rochon: C'est ça. Non, non, le point est bon. Alors, je ne sais pas si c'est ça qui serait finalement la bonne rédaction?

M. Gautrin: Disons qu'on peut suspendre ici, on fait les autres, et on reviendra après, lorsque vos légistes auront rédigé ce point de vue là.

(17 h 50)

Le Président (M. Brouillet): Oui. Alors, on peut poursuivre à l'article 6 et apporter cette modification.

M. Rochon: O.K. Non, je pense que c'est un très bon point.

M. Gautrin: O.K. Ça marche.

Le Président (M. Brouillet): L'article 6: L'article 62 de cette loi est modifié par le remplacement, dans la deuxième ligne, du mot «université» par les mots «institution d'enseignement».

M. Gautrin: Concordance, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Cet article adopté?

M. Gautrin: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 7: L'article 63 de cette loi, modifié par l'article 784 du chapitre 2 des lois de 1996, est de nouveau modifié par le remplacement, dans l'avant-dernière ligne, du mot «universités» par les mots «institutions d'enseignement». Alors, cet article est adopté?

M. Gautrin: Adopté. C'est concordance, purement et simplement.

Le Président (M. Brouillet): Concordance. Adopté. L'article 8: L'article 69 de cette loi est modifié par l'insertion, dans la deuxième ligne du paragraphe b du premier alinéa et après le mot «tissus», de ce qui suit: «de centre de conservation de gamètes ou d'embryons,».

M. Gautrin: Moi, j'ai une question à poser. Je vais vous dire, ce n'est pas tellement sur l'amendement, mais c'est sur la loi.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun, peut-être une petite minute. M. le ministre est occupé, je crois, à regarder l'amendement.

M. Rochon: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Oui, c'est bien. Alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Alors, ma question, je vais vous l'expliquer. Je lis la loi et il y a quelque chose que je ne comprends pas. Ça commence: «Déterminer les normes d'équipement, de fonctionnement et d'inspection des opérations des titulaires de permis de banque d'organes et de tissus.» Après, on va dire «de centre de conservation de gamètes et d'embryons». Et, après, on ajoute «de colonie de vacances». J'ai un peu l'impression... Ha, ha, ha! Je m'excuse, là, mais je ne comprends pas le lien entre les banques d'organes et de tissus, les centres de transplantation et les colonies de vacances, à moins qu'il n'y ait un lien entre les deux que je ne vois pas.

Le Président (M. Brouillet): Alors, moi, je n'ai pas le texte original. Je laisserai le ministre regarder ça.

M. Gautrin: Non, mais je vous le signale honnêtement, là, qu'est-ce que les colonies de vacances viennent faire là-dedans?

M. Rochon: Bon, écoutez. M. le Président, on ne finira jamais d'améliorer nos lois. Si on le lit au complet, ça peut paraître encore plus spécial, parce qu'on dit...

M. Gautrin: Après, c'est les sortes de crémation.

M. Rochon: C'est ça. Un permis... Puis là c'est vraiment une liste...

M. Gautrin: De crémation, d'embaumeur et de directeur de funérailles.

M. Rochon: C'est ça. Une liste de tous les types de permis qui doivent être donnés. Je ne sais pas, là... Je suis d'accord que, si c'était un texte autre qu'un texte de loi, ça serait peut-être...

Le Président (M. Brouillet): Sous le thème de la santé publique.

M. Gautrin: Mais vous comprenez que de faire le lien entre les colonies de vacances et les centres de – comment elle s'appelle votre affaire? – conservation de gamètes et d'embryons...

M. Rochon: J'accepterais volontiers qu'on aurait pu faire un autre alinéa spécifique aux colonies de vacances et...

M. Gautrin: Ça aurait été un peu plus...

M. Rochon: Ça aurait été peut-être plus élégant, mais...

M. Gautrin: Mais enfin. Alors, l'article 8, tel que rédigé...

Le Président (M. Brouillet): De toute façon, l'article 8 est adopté.

M. Gautrin: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): L'article 8 est adopté. L'article 9: L'article 3 de la Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique (1990, chapitre 55) est modifié par l'insertion, dans la première ligne du premier alinéa de l'article 31 qu'il modifie et après le mot «tissus», des mots «ou un centre de conservation de gamètes ou d'embryons». Concordance encore?

M. Gautrin: Attendez un instant. Je ne comprends pas.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: L'article 3 dans la Loi sur la protection de la santé publique, il est abrogé. Moi, j'ai la Loi sur la protection de la santé publique; l'article 3 de la Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique est abrogé. Attendez, je voudrais savoir c'est lequel article 3 parce que le mien est abrogé. On ne peut pas le modifier s'il est abrogé.

(Consultation)

M. Rochon: Attendez, là. On me donne une explication.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre. Pour donner une explication.

M. Rochon: Sinon je demanderai à un conseiller juridique d'expliquer directement. Ce qu'on m'explique, c'est que, à l'article 9, quand on mentionne la Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique, ce n'est pas la Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique qu'on étudie présentement. C'est une autre loi qui a modifié la Loi sur la protection de la santé publique qui a été adoptée en 1990, laquelle loi n'a pas été intégrée encore à la Loi sur la protection de la santé publique parce qu'il y a des articles qui sont encore non appliqués parce que les règlements qui prévoient leur application n'ont pas encore été faits. Et, de grâce, M. le Président, demandez-moi pas pourquoi les règlements n'ont pas été faits parce que ça, je ne saurais pas vous le dire, il faudrait que je vérifie. Mais prévoyant qu'éventuellement les règlements pourraient être faits et que ça pourrait être appliqué, là on corrigerait l'article par concordance pour être sûr qu'à ce moment-là on pourrait procéder sans problème.

M. Gautrin: C'est très efficace.

Le Président (M. Brouillet): Alors, il faut tout prévoir. C'est bien. L'article 9 est adopté.

M. Gautrin: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Et là nous allons à l'amendement qui a été proposé, l'article...

M. Gautrin: Qui a lui aussi trouvé une loi quelque part sur la justice administrative, si j'ai bien compris.

Le Président (M. Brouillet): Amendement inséré après l'article 9, on insère l'article suivant:

9.1. L'article 24 de la Loi sur la justice administrative est modifié par l'insertion, dans la neuvième ligne et après les mots «d'organes», des mots «de centres de conservation de gamètes ou d'embryons».

Alors, est-ce que cet amendement fait problème?

M. Gautrin: Un instant, M. le Président. Je vais vous lire l'article 24 pour qu'on le comprenne.

«En matière de services de santé et de services sociaux, la section des affaires sociales – donc, c'est celle du tribunal administratif – est chargée de statuer sur les recours visés à l'article 3 de l'annexe I, portant notamment sur des décisions relatives à l'accès aux documents ou renseignements concernant un bénéficiaire, à l'admissibilité d'une personne à un programme d'assurance-maladie, à l'identification d'une personne handicapée, à l'évacuation et au relogement de certaines personnes, aux permis d'établissements de santé et de services sociaux, de banques d'organes et de – alors, là, on dira de – centres de conservation de gamètes et d'embryons.» Autrement dit, ce qu'on dit, c'est que la section affaires sociales de la justice administrative, c'est elle qui peut se prononcer si jamais le ministre refuse un permis à quelqu'un. C'est à peu près ça. C'est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Donc, l'amendement 9.1 est adopté. Nous revenons, si vous voulez, à l'article 5. Je ne sais pas s'il y a un amendement.

M. Rochon: L'article?

Le Président (M. Brouillet): L'article 5. Celui que nous avons laissé de côté tantôt.

M. Rochon: Ah oui! L'article qu'on avait suspendu. Oui, oui. Ça va être de la nature d'un papillon

(Consultation)

M. Rochon: Alors, on est prêt.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Vous pouvez peut-être m'apporter l'amendement, si vous voulez.

M. Rochon: Oui, c'est correct.

Le Président (M. Brouillet): C'est un amendement qui se lirait comme suit: Remplacer l'article 5 par le suivant:

5. L'article 60 de cette loi est modifié par le remplacement, dans la première ligne du premier alinéa, des mots «qu'aucune université n'accepte de recevoir» par les mots «qui n'ont pas été acceptés par une institution d'enseignement».

M. Gautrin: Ça donne plus de latitude que le «aucune» qui était très restrictif.

M. Rochon: C'est un bon point.

M. Gautrin: Ça améliore, M. le Président. L'amendement est adopté.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, l'amendement est adopté. Maintenant, l'article 10...

M. Gautrin: L'article 5 tel qu'adopté. Je pense que l'article 5...

Le Président (M. Brouillet): L'article 5, tel qu'amendé, est adopté?

M. Gautrin: C'est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Maintenant, l'article 10. Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par le gouvernement. Cet article est adopté?

(18 heures)

M. Gautrin: Mais pourquoi pas à la date de la... Pourquoi mettre ça à la date fixée par le gouvernement et pas à la date de la promulgation? Parce que, non, mais je vous dis ça, c'est parce qu'il y a un certain nombre de fois que...

M. Rochon: Ha, ha, ha! Non, non, c'est une bonne question.

M. Gautrin: Non, c'est parce qu'il y a des articles qu'on passe puis que quelquefois on ne fait pas entrer en vigueur parce que vous oubliez le décret pour le mettre en vigueur. Enfin, vous, je veux dire l'Exécutif, d'une manière générale.

M. Rochon: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Rochon: Comme il est question que des permis soient émis, on me dit que c'est préférable de s'assurer que les permis seront disponibles dès que la loi sera en vigueur. Alors, je vous avoue que je souhaiterais qu'on ne se retrouve pas dans quelques années comme dans le cas auquel on a fait référence tout à l'heure, alors qu'il y a une loi qui n'a jamais été en vigueur parce que les permis ne sont jamais devenus disponibles. Mais il semble que, techniquement, là, on ne peut pas... C'est parce que, si la loi est adoptée lors de sa promulgation, si les permis ne sont pas disponibles et que la procédure pour les émettre n'est pas disponible, on aura des gens qui seront dans une situation d'illégalité à cause de ça. C'est la seule raison.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 10 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Le titre du projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, ceci met fin à nos travaux, et je remercie celles et ceux qui y ont participé. Et, pour permettre à la commission de revenir en Assemblée, j'inviterais les personnes qui ont à quitter les lieux à le faire le plus rapidement possible, s'il vous plaît. Alors, nous suspendons pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

(Reprise à 18 h 3)

Le Vice-Président (M. Brouillet): J'invite le député de Verdun à présenter le rapport de la commission plénière.

M. Gautrin (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 154, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique, et qu'elle l'a adopté avec des amendements.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je demanderais le consentement de cette Assemblée pour déroger à l'article 230 de notre règlement de façon à procéder à l'adoption finale du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement?

Des voix: Consentement.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons maintenant aborder l'adoption du projet de loi. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du projet de loi n° 154, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique.


Mise aux voix

Ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Étant donné l'heure, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

(Reprise à 20 h 4)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

M. le ministre.

M. Boisclair: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 5 du feuilleton.


Projet de loi n° 176


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. Alors, à l'article 5 de votre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 3 décembre 1997 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Le dernier intervenant, qui avait d'ailleurs terminé son allocution, a été le député de Brome-Missisquoi et critique officiel de l'opposition. Alors, à cette période-ci, est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi? Alors, nous cédons maintenant la parole au député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: M. le Président, je vous remercie de me laisser la parole. Je voudrais intervenir sur le projet de loi n° 176, mais je voudrais signifier tout de suite une difficulté majeure avec le projet de loi. Dans les notes explicatives, on nous dit que le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées. J'ai de la misère à comprendre son projet de loi quand je regarde l'autre projet de loi qu'il nous a fait passer sous le bâillon au début du règne péquiste, le projet de loi 83, qui était celui qui autorisait le ministre, qui donnait tous les pouvoirs au ministre de fermer à peu près n'importe quel établissement de santé, de diminuer ou d'arrêter complètement les services dans les établissements de santé. Et je vous fais une courte lecture du projet de loi qu'on nous a fait accepter sous le bâillon.

«Ce projet de loi prévoit que le ministre peut limiter à certains établissements le droit d'offrir certains services. Il confère également au ministre le pouvoir de modifier, outre la capacité indiquée au permis d'un établissement public ou privé conventionné, la mission – il peut donc changer la mission – la classe et le type apparaissant au permis.

«Enfin, le projet de loi introduit des dispositions afin de permettre au ministre de retirer le permis d'un établissement public ou privé conventionné et d'obliger ce dernier à cesser ses activités. S'il s'agit d'un établissement public, le projet de loi prévoit également les règles applicables à la liquidation des affaires de cet établissement, à la dévolution de ses biens et à l'annulation de son acte constitutif.» Alors, ça, c'était le projet de loi que le ministre de la Santé du gouvernement du Parti québécois a insisté dès son arrivée au pouvoir pour faire adopter.

M. le Président, aujourd'hui, le même ministre, après avoir eu tous ces pouvoirs-là, il nous dit: Bien, là, je vais vous présenter un projet de loi qui va déléguer par entente. Où est-ce qu'il est, le fil conducteur là-dedans? Alors, pour essayer de comprendre, je me suis permis de relire la loi sur les services de santé et services sociaux et les fonctions du ministre de la Santé.

Si on regarde la définition des différentes fonctions, d'abord l'article 1: Le ministre de la Santé et des services sociaux, désigné par la présente loi, dans la loi, «ministre», il est chargé de la direction et de l'administration du ministère de la Santé. Il est également chargé de l'application des lois et des règlements relatifs à la santé et aux services sociaux. Mais, l'article 1, M. le Président, déjà notre ministre nous demande de le modifier. Lui, il veut déléguer ça par entente. Je ne sais pas quelles sont les raisons profondes pourquoi il ne veut pas assumer ses responsabilités, ses fonctions.

Je poursuis, M. le Président, avec l'article 2 de la loi qui identifie la responsabilité d'un ministre de la santé: «Le ministre a pour fonctions d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques relatives à la santé et aux services sociaux.» La question qu'on est en droit de se poser: À qui veut-il déléguer des fonctions? Pourquoi un projet de loi de trois articles dont le premier donne l'autorité au ministre de déléguer par entente? Alors, lui qui a la responsabilité d'élaborer et de proposer au gouvernement les politiques relatives à la santé, il peut donner ça à quelqu'un d'autre, à un fonctionnaire, à un technocrate, à une régie, à un ami. On ne sait plus ou on ne peut comprendre quel est vraiment l'enjeu, qu'est-ce que le ministre veut avec son projet de loi.

Je poursuis dans les fonctions du ministre de la Santé. «Le ministre doit voir à la mise en oeuvre de ces politiques, en surveiller l'application et en coordonner l'exécution.» Pourquoi vouloir déléguer ses fonctions de ministre de la Santé? Et, si on est capable de répondre pourquoi il veut les déléguer, à qui va-t-il les déléguer? Alors, là encore, on est dans les ténèbres les plus profondes. M. le Président, c'est pour les fonctions.

(20 h 10)

Les devoirs du ministre, maintenant. «Le ministre doit plus particulièrement assurer la protection sociale des individus, des familles et des autres groupes.» Mais, avec le projet de loi qu'il nous demande d'approuver aujourd'hui, en faveur de qui veut-il assurer cette protection sociale? Qui va vraiment assurer, au nom de l'Assemblée nationale, la protection des individus, des familles et des différents groupes?

Un autre devoir, M. le Président: «Le ministre doit prendre les mesures requises pour assurer la protection de la santé publique.» Si le ministre avait l'intention de nous signifier qu'il a le projet de créer un institut public, qu'il a l'intention de retirer les départements de santé publique des régies régionales pour créer un institut de santé publique, je pense qu'on pourrait regarder les alternatives. Mais on n'a aucune indication, dans son projet de loi de trois articles, quelles sortes d'ententes vont être signifiées, alors qu'il a des devoirs très, très clairement établis dans la loi.

Je poursuis, M. le Président, les devoirs du ministre en vertu de la loi: Le ministre doit particulièrement voir à l'amélioration de l'état de santé des individus et du niveau de santé de la population. C'est son devoir. Pourquoi avoir un article de loi, un nouveau projet de loi qui va lui permettre de déléguer ce devoir? Et je poursuis: Le ministre doit plus particulièrement favoriser l'étude de la recherche scientifique dans le domaine de la santé et des services sociaux. Bien, là, on n'avait pas besoin du projet de loi pour écouter ce qui s'est dit hier en conférence de presse. On était prêt à même empêcher nos chercheurs... s'ils osaient avoir des fonds du gouvernement du Canada, on était prêt à leur couper les fonds via le gouvernement du Québec. J'entends des gens de l'autre côté qui disent bravo; je vous assure que c'est bon pour la recherche, que c'est bon pour les chercheurs d'entendre ça! J'espère que plusieurs d'entre eux vont écouter ce que les gens du gouvernement ont à dire là-dessus.

Je voudrais poursuivre, toujours dans les devoirs du ministre: Le ministre doit plus particulièrement participer à l'élaboration et à la mise en oeuvre des programmes d'assainissement des milieux physiques dans lesquels vit la population et à laquelle ces programmes sont destinés. Alors, pourquoi vouloir déléguer, encore une fois, ces pouvoirs? M. le Président, notre ministre ne nous a pas habitués à visiter les patients, à visiter les hôpitaux; il nous a habitués à visiter les technocrates, les directeurs des régies régionales. Mais là où les gens sont les plus démunis, dans les salles d'urgence, eh bien, malheureusement, le ministre n'a pas suffisamment rencontré ses patients. Et aujourd'hui il est en train de nous dire: Non seulement je ne les ai pas vus souvent, mais je vais déléguer ça à d'autres, en plus de ça.

M. le Président, autre devoir d'un ministre de la Santé: consulter les individus et les groupes sur l'établissement de politiques du ministère de la Santé et des Services sociaux. Eh bien, là, le ministre va tout simplement, par entente, pouvoir faire cette consultation-là. Vous vous souvenez, toujours lorsqu'il y a eu ce fameux projet de loi, cette loi, maintenant la loi n° 83, nous avions accusé, avec raison, le gouvernement d'avoir fait des consultations bidon, particulièrement des les régies de Montréal et de Québec. À l'époque, nous avions, en cette Chambre, déposé des pétitions, des centaines de milliers de pétitions. Je me souviens, mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce avait déposé une pétition qui dépassait les 100 000 signataires. Il y en a eu d'autres qui ont été déposées, particulièrement par rapport aux fermetures des hôpitaux: Christ-Roi, Chauveau, dans la région de Québec, Jeffery Hale. Par rapport aux hôpitaux Reddy Memorial, Reine Élizabeth, L'Hôpital général de Lachine, l'hôpital de Saint-Laurent. Pourquoi est-ce qu'on déposait ces pétitions, M. le Président? Bien, simplement parce que le ministre avait mandaté les régies pour faire des consultations, et ces consultations étaient arrangées d'avance parce que le ministre avait déjà décidé de fermer ces hôpitaux.

Alors, maintenant, il va pouvoir, simplement par entente, demander à qui que ce soit qui le voudra bien de faire des consultations. Je vous rappelle toujours que le projet de loi n° 83 – il a demandé à cette Chambre d'avoir les pouvoirs extraordinaires de fermer les hôpitaux, de diminuer les permis – eh bien, ce projet de loi, M. le Président, donnait tous ces pouvoirs-là au ministre sans qu'il y ait aucun critère. Bien, aujourd'hui, après avoir tout centralisé ces pouvoirs, le ministre nous dit, dans un petit projet de trois articles qui a l'air innocent, mais la portée de l'article 1, M. le Président, c'est qu'il peut déléguer tous ces pouvoirs qu'il a acquis dans le projet de loi n° 83 par une simple entente avec quelqu'un. Qui? On ne sait pas. Quel sujet? On ne le sait pas. C'est pour ça que je fais l'énumération des devoirs d'un ministre de la Santé, M. le Président, et je poursuis.

Le ministre doit plus particulièrement promouvoir le développement et la mise en oeuvre de programmes et de services en fonction des besoins des individus, des familles et des autres groupes. Alors, la question que j'aimerais poser au ministre, c'est: Qui va-t-il déléguer pour s'occuper d'un autre de ses devoirs importants? M. le Président, on commence à avoir des sérieux doutes dans les motivations profondes du ministre de la Santé. Pourquoi passer un projet de loi en fin de session, ce projet nous demandant qu'un ministre puisse déléguer à un organisme par une simple entente? Je pense que ça aurait été important, dans un projet de loi comme celui-là, de préciser dans quel cadre il avait l'intention de déléguer par entente. La loi 120, qui a un contenu très élaboré, eh bien, est-ce qu'à travers l'ensemble des articles de la loi 120 il n'y avait pas des articles qui permettaient tout simplement à un ministre de faire des ententes en vertu des lois déjà existantes? Moi, ça m'inquiète qu'un ministre se présente à l'Assemblée nationale pour demander un projet de loi qui dit: Bien, par entente, je peux déléguer tous mes pouvoirs. Je ne sais pas s'il n'y a pas un accroc aussi dans toute l'institution qui est le Parlement. Est-ce qu'on a le droit de faire ça? Peut-être que ça serait intéressant d'entendre la présidence là-dessus, si vous daigniez vous prononcer.

M. le Président, je voudrais continuer avec les devoirs du ministre, et un autre devoir extrêmement important, c'est d'assurer l'organisation et le maintien des établissements dans le domaine de la santé et des services sociaux. Eh bien, là aussi, pourquoi le ministre veut-il déléguer ses pouvoirs pour que quelqu'un d'autre assure l'organisation et le maintien des établissements dans le domaine de la santé et des services sociaux? On peut se demander comment se fait-il que le ministre à ce moment-ci, après plus de trois ans de mandat d'un gouvernement péquiste, décide tout simplement de se laver les mains et dire: Maintenant que j'ai eu tous les pouvoirs, je vais les donner à qui je veux sans même consulter le Parlement, sans même avoir de commission parlementaire, sans même avoir de critères bien établis pour lesquels on pourrait savoir dans quelles circonstances un ministre peut, par entente, déléguer tous ces pouvoirs-là.

M. le Président, je me permettrais de poursuivre en soulignant jusqu'à quel point la santé est malade au Québec. Et ce n'est pas seulement les gens de l'opposition qui le disent. Je pense que les faits les plus récents, ça a été le porte-à-porte qui a été fait dans les élections partielles. Il y avait quatre élections, vous le savez, M. le Président, et, lorsqu'on demandait aux gens... Vous savez, quand on fait du porte-à-porte, je n'ai pas à l'enseigner à personne ici sûrement, habituellement on demandait: Est-ce que vous êtes d'allégeance libérale ou péquiste? On voulait savoir quelles étaient les intentions de vote. Aujourd'hui, pour savoir pour qui les gens votent, on demande: Qu'est-ce que vous pensez du ministre de la Santé? Et on sait tout de suite pour qui ils vont voter; le résultat, on l'a vu dans les partielles.

D'autres personnes ne cessent, de jour en jour, à chaque fois qu'on ouvre le journal... Ça doit être démotivant pour un ministre de la Santé. Que ce soient des éditorialistes, que ce soient des journalistes, des chroniqueurs, eh bien, on s'aperçoit qu'il y a un sérieux malaise dans le domaine de la santé. On s'aperçoit qu'il y a un malaise, M. le Président, à chaque fois qu'un patient hausse la voix pour faire entendre au ministre qu'il a une difficulté. Quand je dis: La santé est malade au Québec, ce n'est pas seulement les gens de l'opposition, c'est vraiment les patients qui envoient des cris du coeur. Les gens veulent être soignés.

(20 h 20)

On avait promis, dans le cadre du virage ambulatoire, de faire des investissements dans des ressources alternatives. Bien, M. le Président, les investissements n'ont pas été faits, avec les résultats qu'on connaît: les gens quittent trop rapidement les établissements de santé, n'ont pas le support de soins à domicile nécessaire, donc ils ont des difficultés et ils doivent revenir trop souvent, plus souvent qu'autrement soit par le biais des salles d'urgence ou par les consultations externes.

M. le Président, je voudrais simplement rappeler un article dans le journal La Presse du 18 octobre 1997, M. Yves Séguin: Québec a été trop loin: «Il croit que le gouvernement québécois est allé trop loin en coupant la santé. "Il faut revenir au gros bon sens. Y avait-il du gras à couper, des abus?"» Sa réponse à lui, c'est non. Je pourrais commenter, si vous me permettez. Il y avait des efforts qui avaient été faits depuis plusieurs années dans le milieu de la santé pour assainir les finances publiques, et avec un résultat certain. Il y avait également des efforts, sous l'ancien gouvernement, qui avaient été faits pour diminuer les listes d'attente, des investissements dans des secteurs très précis: en chirurgie cardiaque, dans le domaine du cancer, en hémodialyse. Ces efforts-là commençaient à donner des résultats importants, jusqu'à temps que ce ministre et ce gouvernement arrivent en poste.

Je poursuis avec les commentaires de M. Séguin: «L'économie que le gouvernement a faite dans la santé a tout simplement été dépensée ailleurs. Plutôt que de réduire ses dépenses, il a pigé davantage dans les poches des contribuables. C'est une solution de facilité pour un gouvernement de couper la santé et l'éducation plutôt que de» regarder l'ensemble des dépenses. Et vous savez comme moi qu'on a énuméré un certain nombre de dépenses qui étaient à tout le moins de très grandes maladresses, M. le Président. On sait les investissements qui ont été faits à l'hippodrome dans la région de Montréal. Est-ce qu'on a vraiment besoin de ça? On parle du béton qu'on veut bâtir avec la bibliothèque nationale, alors qu'on sait qu'il y a un réseau d'universités, d'écoles, de bibliothèques municipales qui fonctionne très bien.

Le coût de la santé per capita est plus bas ici que dans les autres pays. Trop d'infirmières? Nous avons en moyenne un peu plus de 11 infirmières par 1 000 personnes, alors que, comparativement, on peut en retrouver près de 12 en Ontario et un peu plus de 13 au Canada dans son ensemble. Il n'y a donc pas de dérive de ce côté-là. Trop de médecins? On en a une centaine de plus, comparé au reste du Canada. Trop de lits? Nous sommes beaucoup plus bas que la moyenne. Notre durée d'hospitalisation est une des plus basses, avec 7,8 jours en moyenne. Où il est, le problème? Quand vous fermez des lits par économie, ça se répercute sur les listes d'attente, disait M. Séguin dans son article.

M. le Président, je pourrais longuement citer des chroniqueurs, et preuves à l'appui, que le gouvernement du Parti québécois, que le ministre de la Santé a fait fausse route. Ça n'a pas fonctionné, son virage ambulatoire. Ça n'a pas fonctionné, ses fermetures d'hôpitaux. Parce qu'on a fermé des hôpitaux, on a trop d'urgences engorgées et les listes d'attente sont plus longues. Le virage ambulatoire n'était pas prêt parce que les investissements dans le domaine des soins à domicile n'ont pas été faits.

M. le Président, je voudrais, en terminant – vous me faites signe – rappeler qu'il y a une alternative qui se dessine. L'alternative, c'est celle du Parti libéral qui, dans son programme, donne une priorité au patient. C'est le patient qui va revenir au centre des décisions, et ce n'est pas la structure, ce ne sont pas les régies régionales, les technocrates, les fonctionnaires qui vont prendre le contrôle sur le patient, mais bien le patient qui va être au centre de toutes les décisions d'un prochain gouvernement libéral.

Rapidement, M. le Président, je mentionne aussi ce qu'on est en train de faire du côté de la désinstitutionnalisation, ou le prétexte de la désinstitutionnalisation en santé mentale: on est en train de fermer un centre hospitalier extrêmement important, qui a rendu de fiers services aux Québécoises et aux Québécois pendant plusieurs décennies, et c'est l'hôpital qui était appelé Saint-Ferdinand-d'Halifax, l'hôpital Saint-Julien. Eh bien, nous allons retrouver très bientôt, à cause des décisions du ministre, des patients qui vont aller remplir les rangs de l'itinérance.

En terminant, et c'est la conclusion, M. le Président, je rappelle que, dans un projet de loi, le projet de loi n° 83, le ministre s'est arrogé tous les pouvoirs: pouvoirs de fermer les hôpitaux, de diminuer le nombre de lits. Et, de l'autre côté, aujourd'hui, dans un projet de loi de trois articles, il nous dit simplement: Bien, écoutez, maintenant que j'ai tous les pouvoirs, je vais les donner à mes chums, mes amis, puis, eux autres, il vont gérer le système de santé. Il est temps que ça change, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, est-ce que l'honorable député de Robert-Baldwin accepterait une brève question de ma part en vertu de l'article 213?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader, veuillez poser votre question.

M. Boulerice: La question que je veux simplement lui poser: Étant donné le pathos négatif qu'il apporte aux mots, est-ce que le député, lorsqu'il était directeur général d'un centre hospitalier, s'estimait fonctionnaire ou technocrate?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Je pense que, à ce stade-ci, je ne vous permettrai même pas de répondre, considérant que c'est loin d'être pertinent au débat que nous animons présentement. Voyez-vous, M. le député de Robert-Baldwin, comme les débats aujourd'hui ont été, je pense... Je suis persuadé que vous feriez un commentaire très sensé. Ça, je vous le donne. Alors, si vous le permettez, on va essayer de maintenir le débat au niveau où il se trouve actuellement et on va s'organiser pour ne pas que ça dérape.

M. le député de Marguerite-D'Youville, vous avez un temps de parole de 20 minutes.


M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. D'abord, avant d'intervenir sur le projet de loi n° 176, étant donné que nous recommençons ce soir le débat après l'avoir ajourné la semaine dernière, j'aimerais rappeler à ceux qui nous écoutent en quoi consiste cette loi.

Traditionnellement, la Loi sur les services de santé et les services sociaux prévoit qu'un adulte hébergé dans une installation maintenue par un établissement public ou privé conventionné doit contribuer à son hébergement. Lorsqu'un adulte hébergé ne dispose pas de ressources suffisantes équivalentes à cette allocation de dépenses, c'est la loi de la sécurité du revenu qui s'applique et permet le versement d'une prestation pour tenir lieu d'allocation de dépenses. Traditionnellement, c'était le ministère de la Sécurité du revenu qui administrait ce programme. La loi qui est maintenant sous étude vise, d'une part, à transférer au ministère de la Santé et des Services sociaux cette responsabilité et permet, d'autre part, au ministre de la Santé de déléguer à un organisme, en l'occurrence la Régie de l'assurance-maladie du Québec, l'administration de ce programme.

Il y a donc ici un volet de réorganisation administrative et également un volet de délégation des responsabilités du ministre de la Santé, non pas que le ministre de la Santé veuille se départir ou abdiquer de ses responsabilités ou de ses obligations, comme l'ont prétendu certains collègues de l'opposition, mais l'objectif de cette loi vise, au contraire, à optimiser la gestion administrative du système en confiant à un organisme compétent, qui est la Régie de l'assurance-maladie du Québec, la possibilité de gérer ce programme au lieu du ministre lui-même.

Vous conviendrez, M. le Président, que le réseau de la santé est un réseau énorme, un réseau qui accapare 35 % du budget du gouvernement du Québec, la part la plus importante du budget du gouvernement du Québec, avec des milliers de personnes qui y oeuvrent en une capacité ou une autre. Il est tout à fait normal que le ministre de la Santé, pour que le programme de soutien aux personnes hébergées soit efficace, en délègue la responsabilité à un organisme dont ce sera la vocation spécifique et particulière d'administrer ce programme pour le bien-être des personnes qui en sont récipiendaires.

Le projet de loi vise également à faciliter l'accès à la clientèle par la création d'une sorte de guichet unique pour les adultes hébergés. Et je ne puis que féliciter le ministre d'avoir introduit cette disposition dans le projet de loi, parce que nous savons tous, comme députés, nous connaissons tous les problèmes auxquels font face nos commettants lorsqu'il s'agit d'avoir accès à un service. Bien souvent, les personnes elles-mêmes ne connaissent même pas les services auxquels elles ont droit, et c'est souvent aux bureaux des députés de les aiguiller dans une direction ou dans une autre.

(20 h 30)

Avec ce projet de loi, il y aura en quelque sorte la création d'un guichet unique pour les adultes hébergés de manière à ce que les députés, comme d'ailleurs les autres intervenants socioéconomiques, puissent diriger les personnes récipiendaires et éligibles à ces programmes aux endroits qui leur conviennent sans que ces personnes aient à tourner en rond, à faire 56 000 téléphones avec des retours d'appels bien souvent qui se font attendre.

L'autre élément, l'autre objectif du projet de loi vise à respecter les missions de chacun des ministères. Comme je l'ai dit tout à l'heure, traditionnellement, c'était le ministère de la Sécurité du revenu qui administrait ce programme. Les choses ne sont pas coulées dans le béton, et, bien au contraire, je pense qu'il est tout à fait sage pour un gouvernement de réexaminer l'organisation de la fonction publique, de réexaminer l'organisation de la distribution des services de manière à la rendre plus efficiente et plus percutante et surtout plus accessible à la personne qui en a besoin.

Lorsque j'entendais les collègues de l'opposition, la semaine dernière et cette semaine, invoquer le fait que le ministre abdiquait de ses responsabilités et qu'en déléguant cette responsabilité à la Régie de l'assurance-maladie il abandonnait à toutes fins pratiques ses pouvoirs entre les mains de personnes non imputables et que cette disposition pouvait avoir des sérieuses répercussions sur le contrôle qu'avait le ministre de ce programme en particulier, après avoir lu attentivement le projet de loi et en avoir discuté avec le ministre, je dois avouer que j'en arrive à la conclusion inverse.

J'en arrive à la conclusion inverse parce que, même si le ministre délègue à la Régie de l'assurance-maladie ses responsabilités pour l'administration de ce programme, il ne faut pas oublier que l'Assemblée nationale, et en particulier les commissions de l'Assemblée nationale, demeurent tout à fait souveraines en ce qui concerne les mandats de surveillance et les mandats d'initiative. Et la Régie de l'assurance-maladie du Québec, comme d'ailleurs n'importe quelle autre agence du gouvernement du Québec, peut être appelée à comparaître devant une commission de l'Assemblée nationale, devant la commission de l'Assemblée nationale pertinente pour rendre des comptes de son administration. C'est souvent l'occasion pour les parlementaires du gouvernement comme ceux de l'opposition de poser des questions aux responsables, aux administrateurs de ces agences d'État et parfois même de soulever des cas spécifiques qui nous paraissent anormaux.

Alors, je ne crains pas ce que mes collègues avançaient dans leurs interventions parce que les mécanismes que nous avons à l'Assemblée nationale et surtout les rôles d'initiateurs qu'ont pris de plus en plus nos commissions parlementaires en regard des mandats d'initiative et des mandats de surveillance d'organismes nous permettent de revenir vers la Régie de l'assurance-maladie du Québec et de lui poser des questions pertinentes.

Ça me rappelle un peu, si vous me permettez, M. le Président, l'analogie que je ferai avec le mandat de surveillance d'organismes que s'est donné ma propre commission, de faire comparaître éventuellement, au printemps prochain, la Commission de la construction du Québec, Commission à l'endroit de laquelle, comme députés, nous avons souvent reçu des plaintes, et nous aurons l'occasion d'interroger le président de la Commission de la construction du Québec sur des cas pointus, des anomalies qui ont été portés à notre attention. Alors, je fais cette analogie parce que, nous, comme parlementaires, on aura exactement les mêmes possibilités à l'endroit de la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Et, advenant que l'administration du programme, comme le préconise le ministre dans le projet de loi n° 176, dévie de son objectif premier et que des cas patents d'injustice se dessinent à travers le système, bien, nous pourrons revenir sur ces cas-là et interroger le président de la Régie de l'assurance-maladie du Québec sur ces anomalies. Donc, à ce niveau-là, moi, comme député, je n'ai pas de crainte que, en déléguant ces responsabilités administratives à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, le ministre abdique de ses responsabilités et que nous, comme parlementaires, perdions un certain droit de regard sur les activités de la Régie de l'assurance-maladie, en regard particulièrement de l'administration du programme qui jadis était sous l'administration du ministère de la Sécurité du revenu et qui maintenant passera sous l'égide du ministère de la Santé et des Services sociaux.

J'aimerais également revenir sur une autre dimension et sur d'autres commentaires que j'ai entendus de la part des collègues de l'opposition au cours de leurs interventions à l'effet que le ministre est peu disponible pour se déplacer, pour aller voir sur place comment se passent les choses, pour aller consulter les gens, pour aller discuter avec la population des problèmes de santé, des problèmes qu'ils vivent par rapport à l'ajustement de tout le virage ambulatoire. Je sais et je conviens avec mes collègues de l'opposition que tout n'est pas parfait dans le système, que, bien sûr, il y a des cas tristes, il y a des cas pathétiques, il y a des gens qui traînent dans les urgences des hôpitaux, il y a des interventions médicales qui tournent mal en raison bien souvent de fautes professionnelles qui n'ont strictement rien à voir avec le virage ambulatoire ou la compétence du ministre pour diriger et gérer ce virage ambulatoire, mais j'aimerais ici, M. le Président, apporter un témoignage un peu différent de ceux qui ont été apportés jusqu'ici et qui confirmera non seulement la disponibilité du ministre, mais également sa propension à se rendre sur place voir des groupes, examiner leurs problèmes et discuter ouvertement et franchement avec eux. J'en parle d'autant plus aisément que, le 22 novembre dernier, le ministre de la Santé était chez moi, dans mon comté, dans ma ville, à Boucherville, pour clôturer la saison des Aînés en forme de Boucherville, qui est un groupe de personnes retraitées et préretraitées qui se préoccupent de santé physique et de prévention. Et j'aimerais ici vous lire une lettre qui a été signée par 350 personnes qui assistaient à cette rencontre et qui témoignent au ministre leur reconnaissance. Alors, ça se lit comme suit:

«M. le ministre, permettez-nous de vous remercier de vous être déplacé pour venir nous rencontrer, nous les Aînés en forme de Boucherville

«Nous tenons à vous faire savoir que nous nous comptons privilégiés de pouvoir pratiquer une série d'activités physiques et sportives graduées et conçues pour notre âge par et avec des gérontologues compétents, vigilants, dynamiques et soucieux de notre santé et de notre bien-être physique et mental.

«Tous les mouvements, exercices et jeux proposés concourent à: 1° améliorer le tonus cardiaque; 2° assurer une protection contre le stress; 3° aider à normaliser la pression artérielle; 4° renforcer la musculature; 5° protéger contre les déchirements musculaires et les mauvaises chutes.

«De plus, notre entraînement se déroule dans une ambiance de joie, d'entrain, voire d'amitié, où il fait bon revenir nous retrouver pour bouger. Notre mot d'ordre est "Souris, le sourire est contagieux, créons une épidémie..." et notre devise Grouille ou bien rouille. Nous faisons de l'activité notre priorité.

«En outre, chaque séance se termine par une bienfaisante relaxation avec la lecture d'une bonne pensée sur l'art de bien vieillir, d'accepter cette étape de vie à vivre.

«Nous souhaitons enfin que d'autres aînés ailleurs puissent bénéficier d'un programme de ce genre pour répandre à travers le Québec une bouffée d'air de santé et de joie de vivre!»

M. le Président, cette lettre a été signée par 350 personnes qui ont apprécié que le ministre passe deux heures à échanger avec elles non seulement sur la prévention, mais également sur l'ensemble de la problématique qu'elles vivent au chapitre du virage ambulatoire.

Alors, M. le Président, vous comprendrez que, quand j'entends mes collègues de l'opposition soulever des cas individuels qui, j'en conviens, sont tristes et ne devraient pas exister dans un système bien conçu, il ne faut pas quand même donner exclusivement l'impression que notre virage ambulatoire est un fiasco et que c'est plein de personnes qui échappent au bien-fondé de ce virage. Je vous en ai donné un exemple et je pourrai vous en donner d'autres à mesure que des initiatives comme celle que le ministre a prise seront portées à notre connaissance. Et je suis sûr que d'autres collègues pourraient avoir des exemples et des témoignages de ce genre à apporter ici en cette Chambre.

(20 h 40)

M. le Président, le projet de loi n° 176 est un projet très court. Ce n'est pas un projet catastrophique ni compliqué à comprendre: il a à peine trois articles. Et je comprends mal l'opposition que font certains collègues aux dispositions de ce projet de loi. Et je le dis bien sincèrement, je ne fais pas cette intervention dans un contexte partisan. Je le fais parce que, à la lecture du projet de loi, je ne partage pas les craintes en matière d'abdication des responsabilités du ministre. Et même, je dirai que l'efficience administrative qui est visée par ce projet de loi mérite qu'on lui donne une chance, mérite qu'on fasse en sorte que le ministère de la Santé et des Services sociaux prenne à charge un programme qui vise à héberger des personnes adultes qui relèvent de certains programmes. Je ne vois pas pourquoi on ferait une guerre de religion du fait que cette responsabilité échappe au ministère de la Sécurité du revenu et passe au ministère de la Santé et des Services sociaux, comme si, lorsque ce programme était administré par le ministère de la Sécurité du revenu, c'était le ou la ministre elle-même qui en gérait le quotidien. On sait tous que ce n'est pas comme ça que ça se passe.

Alors, je ne vois pas pourquoi on perdrait trop de temps à essayer de bloquer un projet, somme toute, qui vise l'efficience administrative, qui vise à faciliter la tâche aux personnes hébergées en les dirigeant vers un guichet unique et qui, surtout, ne nous enlève rien, à nous, comme parlementaires, dans nos responsabilités d'imputabilité, puisque nous aurons toujours le loisir de convoquer devant nos commissions pertinentes la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marguerite-D'Youville. Nous cédons maintenant la parole au député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, merci, M. le Président. J'ai écouté avec grand intérêt, comme je le fais à toutes les fois quand mes confrères et consoeurs prennent la parole dans cette Chambre, j'ai écouté le député de Marie-Victorin nous lire cette magnifique lettre de 350 personnes, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, Mme la députée...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, madame, nous allons, bien entendu, attendre que vous rejoigniez votre banquette.

Mme Vermette: C'est tout simplement pour rappeler au député qui prend la parole que la députée de Marie-Victorin, c'est moi. Donc, en l'occurrence, celui qui vient de prendre la parole, c'était le député de Marguerite-D'Youville. Alors, je voudrais juste faire la correction.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je pense que la correction va être enregistrée par le député d'Orford. Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. Alors, M. le député d'Orford, si vous voulez bien poursuivre.

M. Benoit: Oui, je m'excuse auprès de la députée de Marie-Victorin. Ce que j'étais après dire, M. le Président, c'est que j'écoute toujours avec grand intérêt nos confrères du gouvernement. Et là le député de Marguerite-D'Youville nous a lu une lettre à nous faire pleurer, de 350 personnes, d'abord, qui n'ont pas signé la lettre, hein, c'est le directeur général qui a signé la lettre... Moi, je voudrais dire au ministre ici...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député d'Orford. Oui, M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Je pense que le député d'Orford prête ici des mauvaises intentions. Cette lettre-là n'a pas été signée par le directeur général de je ne sais pas trop quoi, voici les signataires, ici. Je peux même lui en faire des photocopies, s'il le veut.


Document déposé

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, voulez-vous déposer votre lettre, M. le député de Marguerite-D'Youville? Alors, nous allons aller quérir la lettre. Nous en ferons des photocopies que nous remettrons également au député d'Orford. Alors, M. le député, je vous inviterais à poursuivre votre allocution.

M. Benoit: Alors qu'on m'a interrompu à deux occasions, M. le Président, on va continuer, j'en suis convaincu. Quand nous parlons, vous savez, et qu'on dit la vérité, c'est toujours un petit peu bâdrant de l'autre côté, alors on essaie de nous interrompre, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je crois que le député d'Orford devrait interrompre son discours et relire le code de procédure de l'Assemblée nationale. Il y lirait, comme vous le savez bien, M. le Président, à l'article 35, 10 articles dont au moins trois s'adressent à lui: s'adresser directement à un autre député; imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole; se servir d'un langage injurieux ou blessant à l'adresse de qui que ce soit, ça inclut les directeurs généraux d'hôpitaux.

Alors, je pense qu'après ces remarques que vous ferez au député soit qu'il soit plus prudent dans son expression ou qu'il s'interrompe volontairement pour l'étude du code de procédure. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Alors, Mme la députée de Jean-Talon, sur un point de règlement.

Mme Delisle: M. le Président, pourriez-vous demander aux députés ministériels de reprendre leur banquette, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, effectivement, je suis en mesure de constater que nous avons des députés dans cette Chambre qui n'occupent pas leur banquette. Alors, M. le député de Vachon, s'il vous plaît! Je tiens à préciser que tout ce temps-là actuellement est pris sur le temps de parole du député d'Orford, malheureusement. Alors, pour la suite, M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui, ce que j'étais après dire avant, que le député de Marguerite-D'Youville nous dise qu'il avait une lettre, une grande opération d'encensement, n'est-ce pas... Nous aussi, on en a, M. le Président. Ce ne sont pas des lettres qu'on a, ce sont des pétitions. Ce sont des centaines, des milliers de noms, pas 350. La dernière que j'ai date d'il y a quelques jours; elle vient de Stanstead. Je vais en parler au ministre tout de suite parce que l'autre a eu le droit de lire une lettre d'encensement.

Je vais lui parler de la pétition qui était non conforme. Elle était écrite à la main par plus de 400 personnes, et à cause de ça elle n'a pas été conforme, M. le Président. Mais je me souviens des premières paroles. C'était écrit: «We, the people of Stanstead are scared that our hospital will close.» Nous, les gens de Stanstead, avons peur que notre hôpital de Magog ferme. Et, de mémoire, on continuait en disant au ministre: Vous nous aviez dit qu'à Sherbrooke vous ne fermeriez pas l'hôpital anglophone de Sherbrooke, vous l'avez fermé; alors là vous nous dites que vous ne fermerez pas Magog, permettez-nous, nous les 450 signataires... N'ayant pas pu déposer à l'Assemblée nationale auprès de vous, M. le Président, cette pétition n'étant pas conforme, je l'ai fait parvenir au ministre il y a quelques jours. Il l'a en sa possession maintenant.

Les gens de notre région sont très préoccupés. Je viens tout juste – avant de descendre ici, M. le Président – à 18 heures ce soir, de parler aux ouvriers de l'hôpital de Magog. La dernière rumeur, en date d'aujourd'hui – parce qu'il y en a une par jour, et elles se confirment à peu près toutes à chaque fois – c'est qu'il y a encore un autre 10 lits qui seraient fermés plus un autre lit à l'urgence. Et la dernière des rumeurs – et celle-là, elle est après se confirmer – c'est que le bloc opératoire est après se fermer, à l'hôpital de Magog. La chapelle est déjà fermée, je l'ai visitée. Je suis allé manger à l'hôpital de Magog il y a quelques jours...

Ils trouvent ça comique, eux autres, M. le Président, ils trouvent ça comique! On est après fermer le bloc opératoire, on est après fermer la chapelle qui a été donnée par une communauté religieuse, et ça, ils trouvent ça comique! Les gens âgés qui sont à côté, qui n'ont plus accès à leurs services fondamentaux, il n'y a plus de médecin à Stanstead. Le ministre nous a dit à la période des questions: Je vais regarder ça. Bien, qu'il continue à regarder, parce que ce soir il n'y a toujours pas de médecin à Stanstead. Pendant ce temps-là, le député de Marguerite-D'Youville vient encenser le ministre avec des bobards, des histoires qui ne se tiennent pas debout, M. le Président.

Le projet de loi, je vais y arriver maintenant, M. le Président. Alors que le système de santé est tout à l'envers à la grandeur du Québec, pas à peu près, M. le Président, le ministre, il y a quelque temps, nous demandait, dans le projet de loi n° 83 – parce qu'on va d'abord parler du 83 avant de parler du 176 – tous les pouvoirs possibles et impossibles. Je vais vous en lire, M. le Président: Le projet de loi introduit une disposition afin de permettre au ministre de retirer le permis d'un établissement public ou privé conventionné, d'obliger ce dernier à cesser ses activités. Il y avait tous les pouvoirs là-dedans. Eh bien, voilà que, moins d'un an après, le ministre nous arrive avec le 176, trois articles.

Ça, ça ne règle pas ma chapelle à l'hôpital, ça ne règle pas ma salle d'urgence, ça ne règle pas mon bloc opératoire, ça n'ouvrira pas le Sherbrooke Hospital, ça ne réglera pas le problème linguistique. Parce que, aux anglophones, on leur avait dit: Ne vous inquiétez pas, on va vous fermer votre Sherbrooke Hospital, au CHU, vous allez avoir tous les services; ne vous inquiétez pas. Moi, je vais à toutes ces réunions-là, le mardi, le mercredi, le jeudi quand on ne siège pas, je ne suis pas assis dans mon salon, je vais à toutes ces réunions-là pour écouter ce qu'il dit, le monde. Alors, ce qu'on leur disait: Ne vous inquiétez pas, on ne le fermera pas, le Sherbrooke Hospital. Non seulement on l'a fermé, mais essayez, ce soir, en anglais, d'aller vous faire traiter au CHU à Sherbrooke. Essayez, ce soir.

(20 h 50)

À Magog, alors qu'on est en construction, 30 % de la clientèle est ou bien touristique ou bien anglophone, et dans les deux cas anglophone. Donc, 30 % des gens qui rentrent à l'hôpital de Magog ce soir sont probablement des anglophones. Ils ont voulu mettre une petite pancarte pendant la construction: «Urgence-Emergency». Moi, je suis passé devant l'hôpital avec ma femme, mes enfants. J'ai dit: Bien, ça a bien de l'allure. Coudon, il y en a 30 %, on est en affaires. Le Mont-Sainte-Anne a le droit de mettre les pancartes dans les deux langues dans la loi, les centres de ski ont le droit de mettre leurs pancartes dans les deux langues. On avait dit: C'est de la sécurité, ça. Ah! je trouvais bien normal qu'un hôpital puisse mettre dans les deux langues «Emergency-Urgence». Et puis là, parce que tout l'hôpital est en construction, en déconstruction, en reconstruction, il y a de la poussière, il y a du bruit, vous n'êtes plus capable de passer de la réception à la salle d'opération, vous n'êtes plus capable de passer de la salle d'opération à l'urgence. C'était normal qu'il y ait quelques pancartes pour se diriger là-dedans. Même nous autres qui comprenons le français, on ne se comprend pas là-dedans. Imaginez-vous la personne qui ne parle pas notre langue! Bien, M. le Président, non seulement ils ont fermé le Sherbrooke Hospital, non seulement ils ont enlevé les pancartes anglaises, là, à Magog, des petites fichues de pancartes qui ne faisaient mal à personne... C'est parce qu'il y a eu une plainte. Il y a un citoyen honnête, sûrement très réfléchi, lui aussi, qui s'est plaint. Il y en a 40 000, 50 000, 60 000 qui étaient pour ces pancartes-là.

Le ministre, il en «parle-tu», dans son projet de loi n° 176, de ce programme-là? Non. La chapelle qui a été donnée par la communauté, qui a été payée par la communauté, qu'on est après fermer à l'hôpital de Magog, est-ce qu'il en parle dans le projet de loi n° 176? La réponse, c'est non. La rumeur qui circule depuis ce matin à Magog, qu'on va fermer 10 lits plus un autre lit, est-ce qu'il en parle dans le projet de loi? La réponse, c'est non. C'est non!

Alors, là, il veut déléguer. Bien, je ne comprends pas ce qu'il veut déléguer, parce que, quand vous lisez les pouvoirs que ce ministre-là a... Et je l'invite à regarder, ainsi que la députée qui a parlé avant moi, les articles 3, 4, 7 et 10. Il n'y a pas un ministre, en démocratie, qui a autant de pouvoirs que le ministre de la Santé au Québec. Il peut faire ce qu'il veut, quand il veut, avec qui il veut, à l'heure qu'il veut, M. le Président, puis il n'a besoin de demander à personne la permission. Je vais juste vous en lire des passages: «Le ministre de la Santé et des Services sociaux, désigné dans la présente», etc. «Il est également chargé de l'application des lois et des règlements relatifs à la santé et aux services sociaux.» Ça va de soi. Bon. Là, il y a une série d'affaires qu'il a le droit de faire, il y en a une pleine page ici, j'y reviendrai tantôt.

L'article 4. «Sous la direction du ministre, le sous-ministre [...] – j'en passe un autre grand bout – exerce les autres pouvoirs qui lui sont assignés par le gouvernement.» C'est comme pas mal large, ça, M. le Président. Le sous-ministre a tous les pouvoirs qui lui sont assignés par le gouvernement. En quel honneur on a besoin du projet de loi? Tous les pouvoirs qui lui sont assignés par le gouvernement, pas besoin de passer un autre projet de loi pour ça.

Je m'en vais à l'article 7, M. le Président, puis je ne suis pas un technicien de ces affaires-là, je n'ai pas étudié comme avocat puis je ne viens pas du monde de la santé. Je vous garantis que, si je connaissais ça un peu mieux, j'en trouverais bien d'autres, pouvoirs là-dedans que le ministre a. L'article 7. «Les devoirs respectifs des fonctionnaires et employés du ministère, non expressément définis par la loi ou par le gouvernement, sont déterminés par le ministre.» Est-ce que ça peut être plus large que ça? «Sont déterminés par le ministre», je n'ai jamais vu, dans toutes les huit années depuis que je suis ici, un ministre qui a autant de pouvoirs. Ensuite, il nous a fait passer le projet de loi 83 où on lui en a encore donné plus, des pouvoirs. Il pouvait les ouvrir, les fermer, il n'avait besoin de demander la permission à personne.

À soir, il vient nous voir puis il dit: Là, vous allez m'enlever des pouvoirs. Là, vous allez me déléguer des pouvoirs. On ne comprend plus rien, hein? On ne comprend plus rien. Je vais vous en lire un autre bout où il a des pouvoirs, notre ministre, puis j'ai l'impression qu'il n'a pas besoin de ces trois articles-là: «Le ministre peut, conformément à la loi, conclure des ententes avec tout gouvernement, l'un de ses ministères – c'est exactement ce qu'il essaie de nous faire dans l'article 176 – une organisation internationale ou un organisme de ce gouvernement ou de cette organisation pour l'application de la présente loi ou d'une autre loi relevant de la compétence du ministre.» C'est très large, ça, M. le Président. En quoi le ministre a-t-il besoin de déléguer ces pouvoirs-là? Il les a tous dans la loi. Je ne comprends pas. Je ne comprends pas, vraiment pas.

Que veut-il déléguer? C'est peut-être ça, la question qu'il faut se poser. Bien, là, on va prendre les choses dont il est responsable. «C'est-u» ça qu'il veut déléguer? Il ne veut plus être ministre? On peut aussi lui organiser ça, M. le Président. Il y a bien du monde qui voudrait qu'il ne soit plus ministre. Qu'on délègue aussi le ministre, finalement, pas juste certaines de ses autorisations; ça va assez mal dans la santé! Et si jamais le ministre peut me donner un autre 20 minutes, un autre soir, sur un autre projet de loi qui aura plus que trois articles...

Je lui avais dit à un moment donné que j'étais suivi pour une opération dans un oeil puis que j'allais à Maisonneuve-Rosemont régulièrement. J'aimerais ça faire le point avec le ministre ici publiquement sur la situation à Maisonneuve-Rosemont en ophtalmologie. M. le Président, il y a 200 personnes qui s'inscrivent là le matin. Il y a trois guichets d'inscription: pour le jour, pour le soir, pour la nuit. Ceux qui viennent se faire opérer, ils sont tous là avec leurs chaussettes à 7 heures le matin. Je n'ai jamais vu un capharnaüm comme ça. C'est incroyable, incroyable, M. le Président. Et quand j'ai été opéré, vous auriez dû voir ça. Vous auriez dû voir ça!

On est 10, un vendredi matin, avec nos pantoufles dans les mains. On a laissé nos culottes en bas et puis, là, M. le Président, on est assis dans une chaise. On est 10, on va être opéré: un, pour une main; l'autre, pour l'oeil... C'est complètement, complètement... Ça n'a pas d'allure, ce qui se passe là. On a l'impression que c'est de la médecine de guerre.

Là, la dame à côté de moi, elle tient son dossier comme ça, elle est bien énervée. Puis, à un moment donné, elle me regarde puis elle dit: Moi, le docteur m'avait dit qu'il ne m'endormirait pas. Comment ça se fait qu'il va m'endormir? Elle a le dossier dans les mains. Là, elle est prise de panique. On fait venir le personnel. Il n'y a pas de personnel là. Finalement, c'est une bénévole qui va essayer de calmer toutes les affaires dans le système de santé du Québec. En passant, je lui ai demandé comment son groupe à elle – ce groupe de bénévoles là – se finançait. Elle m'a répondu – j'ai trouvé ça tellement extraordinaire – elle m'a dit: On vend des tartes aux pommes. Ça a été plus fort que moi, j'ai dit: Le système de santé fonctionne aux tartes aux pommes maintenant!

Ceci dit, M. le Président, vous auriez dû voir la situation. Quand l'opération a commencé, une engueulade, et je donnerai au ministre l'heure, le jour, la médecin et la responsable des salles d'opération, où la médecin, qui a gradué des grandes universités américaines, veut un pansement de qualité, j'imagine, pour l'opération – je ne connais pas ça – et la responsable des salles d'opération lui répondant: On coupe les dépenses, on ne peut pas te donner ce genre de pansement là, tu ne peux pas l'avoir. Or, j'ai eu l'impression, pour un instant, qu'il n'y aurait pas d'opération ce matin-là. Elles se sont poignées aux cheveux pas à peu près! Finalement, la médecin a eu son pansement, l'opération a eu lieu, puis, comme vous voyez, je vous vois très bien ici ce soir. Donc, je suis bien heureux de ça.

Ceci dit, j'ai expérimenté ce que c'était, le virage ambulatoire, et je dois retourner pour un suivi, quotidiennement, finalement, à toutes les deux, trois semaines, et je peux voir ces centaines de gens âgés, M. le Président, dans les corridors, qui attendent...

Le ministre trouve ça comique, hein? J'aimerais ça, le voir dans les corridors. J'aimerais ça, le voir dans le corridor, en ophtalmologie, à Maisonneuve-Rosemont, alors que les gens arrivent là à 7 heures le matin et, dans certains cas, M. le Président, ils ont passé à 7 heures le soir. Et notre bon fonctionnaire ministre, qu'il vérifie les heures d'entrée et les heures de sortie des gens qui vont en ophtalmologie.

Mais le projet de loi n° 176 n'apporte rien à ces problèmes-là, M. le Président. Il n'apporte rien. Il n'apporte rien, non plus...

Le Vice-Président (M. Pinard): Mon Dieu, que ça devient calme tout d'un coup! M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Boulerice: M. le Président, j'ai été député de l'opposition et j'ai vraiment débattu avec grande vigueur dans ce Parlement, mais jamais au point d'atteindre un degré de décibels comme le député vient de le faire. Je suis en train de me demander, d'ailleurs – ce serait peut-être une question de directive – si se servir d'un langage violent ne peut pas être interprété, justement, comme, malheureusement...

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que je peux répondre à votre première interrogation? Alors, je crois qu'utiliser un langage violent n'a rien à voir avec le degré de décibels.

Alors, votre deuxième interrogation, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Eh bien, le règlement a des lacunes, M. le Président, et j'ose espérer que la réforme y pourvoira.

La deuxième: je crois qu'il était inapproprié de la part du député... Et j'ose espérer que c'était une incartade. Ce n'est habituellement pas son habitude d'interpeller le ministre de la façon dont il vient de le faire.

Alors, j'ose espérer que, pour la poursuite, là, ce sera beaucoup plus «smooth».

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Fournier: Il y a à peu près cinq minutes, le leader adjoint s'est levé sur une fausse question de règlement, maintenant sur deux fausses questions de règlement. Est-ce qu'on peut entendre les collègues présenter leur point de vue? C'est un droit que nous avons. On aimerait ça que la partie ministérielle nous respecte là-dessus.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition, vous allez comprendre que, tant et aussi longtemps que je n'ai pas entendu le point de règlement qui est soulevé, je ne peux pas déceler si effectivement on...

Alors, à ce stade-ci, M. le député d'Orford, je vous inviterais à poursuivre. Il vous reste exactement 2 min 30 s.

(21 heures)

M. Benoit: M. le Président, je terminerai en disant qu'autant... Et, si ça blesse, les décibels, quelques fâcheuses oreilles, de l'autre bord, ce n'est qu'un gars dans le comté d'Orford qui est convaincu qu'il y a un problème, qui essaie de le défendre avec vigueur. Et, si ça gêne les gens de l'autre bord, je m'en excuse, mais je vais continuer à défendre avec vigueur les gens du comté d'Orford, soyez-en assuré.

Je veux finir en disant au ministre: Oui, on peut peut-être parler un peu fort à notre ministre de la Santé. Je ne voudrais pas sa job non plus, je lui dis tout de suite, ce n'est pas évident, être ministre de la Santé. D'autre part, je dois reconnaître que d'une approche très bureaucratique, très technocratique que le ministère a, il y a des gens, dans ces hôpitaux-là, qui travaillent avec beaucoup de savoir, beaucoup d'intentions, beaucoup de dévotion, M. le Président. Et je suis allé manger à l'hôpital de Magog pas plus tard que vendredi dernier. J'ai pu saluer autant les infirmières que les gens qui travaillent, les cols bleus, les gens dans les garages, les gens dans la salle d'urgence, partout. Ces gens-là, avec tout ce qu'on leur a demandé, j'étais encore surpris, j'étais impressionné de voir l'amabilité avec laquelle ils recevaient les patients, l'amabilité. Il y avait du bruit, il y avait de la poussière, c'était vraiment désorganisé dans l'hôpital et ces gens-là font un effort. Ils se plaignent, ils ont raison de le faire, ils vont continuer à le faire, M. le Président, mais, même au-delà de tout ça, ils se sentent obligés de rendre un très bon service à la population et ils le font.

Ce soir, au-delà du projet de loi n° 176, vous aurez compris qu'on ne votera pas pour ce projet de loi là, je veux rendre un hommage à tout le personnel du réseau hospitalier qui fait, au-delà de toutes les coupures, des efforts extraordinaires pour donner la plus grande satisfaction aux clients, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Orford. Nous cédons maintenant la parole à la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Je vous remercie, M. le Président. J'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 176 qui est la Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Avant de procéder à l'analyse du projet de loi, j'aimerais, M. le Président, vous rappeler les pouvoirs que le ministre de la Santé a en vertu de la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux. Si je vous lis l'article 1, on dit: «Le ministre de la Santé et des Services sociaux, désigné dans la présente loi sous le nom de "ministre", est chargé de la direction et de l'administration du ministère de la Santé et des Services sociaux. Il est chargé de l'application des lois et des règlements relatifs à la santé et aux services sociaux.»

L'article 2 nous dit: «Le ministre a pour fonctions d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques relatives à la santé et aux services sociaux. Il doit voir à la mise en oeuvre de ces politiques, en surveiller l'application et en coordonner l'exécution.»

En vertu de cette loi-là, M. le Président, il a également des devoirs. Il «doit plus particulièrement assurer la protection sociale des individus, des familles et des autres groupes; prendre les mesures requises pour assurer la protection de la santé publique; voir à l'amélioration de l'état de santé des individus et du niveau de santé de la population; favoriser l'étude et la recherche scientifique dans le domaine de la santé et des services sociaux; participer à l'élaboration et à la mise en oeuvre des programmes d'assainissement du milieu physique dans lequel vit la population à laquelle ces programmes sont destinés; promouvoir la participation des individus et des groupes à la détermination des moyens de satisfaire leurs besoins dans le domaine de la santé et des services sociaux; consulter les individus et les groupes sur l'établissement des politiques du ministère de la Santé et des Services sociaux; promouvoir le développement et la mise en oeuvre de programmes et de services en fonction des besoins des individus [...]; établir des normes applicables en matière de services, d'équipement, de finance et de personnel dans l'utilisation de subventions accordées par le gouvernement dans le domaine de la santé et des services sociaux, et en surveiller l'utilisation; assurer l'organisation et le maintien des établissements dans le domaine de la santé et des services sociaux [...]; déterminer les possibilités d'adoption d'enfants domiciliés hors du Québec» et autres responsabilités dont je vous ferai grâce, M. le Président.

On se retrouve ce soir à discuter du projet de loi n° 176 qui, lui, autorise le ministre à déléguer, par entente, à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application. M. le Président, mon collègue le député d'Orford, il y a quelques minutes à peine, faisait référence, dans son exposé, au fait que, en vertu du projet de loi 83, le ministre de la Santé s'était fait donner le pouvoir d'ouvrir et de fermer des hôpitaux. D'ailleurs, on se rappellera que ça a passé dans le bâillon, ça, on n'a pas eu... Si je me souviens bien, il y a trois ans, il y a deux ans, on n'avait même pas pu discuter un seul article de ce projet de loi tellement le gouvernement avait réussi à passer ce projet de loi là en catastrophe.

Aujourd'hui, le ministre de la Santé nous demande de pouvoir déléguer certains de ses pouvoirs en vertu d'ententes. Ententes avec qui? Ententes pour faire quoi? Déléguer à un organisme. Le député de Marguerite-D'Youville tout à l'heure nous disait que c'était parfaitement normal que le projet de loi n° 176 se retrouve devant les parlementaires, puisqu'il s'agissait de réorganiser les services, les rendre plus accessibles. Bien, vous me permettrez, M. le Président, de douter des raisons invoquées par le député de Marguerite-D'Youville. Je concède qu'effectivement il était de bonne foi lorsqu'il a tenté de convaincre les membres de l'opposition qu'il fallait voter en faveur de ce projet de loi là et qu'il avait évidemment cherché à nous faire comprendre pourquoi il ne fallait pas s'y opposer. Mais, quand on parle de la réorganisation des services de santé, ça m'effraie un peu de penser qu'on va confier au ministre, maintenant, le pouvoir de déléguer à d'autres la responsabilité ou une partie de ses responsabilités.

On a de nombreux exemples dans nos comtés, dans nos régions de ce qui ne va pas bien. S'il y a certains éléments dont le ministre peut être fier, moi, je n'en compte pas beaucoup sur les cinq doigts de ma main gauche ni de ma main droite. Et je pense qu'il faut avoir été malade, il faut avoir eu besoin des services, actuellement, de santé pour être meilleur juge de ce qui se passe puis de ce qui ne se passe pas. Il est certain que, si on n'a pas eu à passer par l'hôpital, si on n'a pas eu à attendre dans une salle d'urgence, on n'a pas de problème avec les services de santé. Ça, c'est certain. Mais, si on a un membre de notre famille, si on a un ami, si on a un enfant qui a dû passer par le système actuellement, bien laissez-moi vous dire que, quand on parle de la réorganisation des services, moi, ça m'effraie tellement que je ne voudrais même pas être malade. Mais j'en ai, des membres de ma famille, qui l'ont été, puis j'en ai, des membres de famille, qui ont dû quitter la salle d'urgence parce qu'il n'y avait plus de place. On en a, des exemples, mais, moi, je ne suis malheureusement pas ministre dans le cabinet et je ne peux pas appeler un médecin pour dire: Bien, ma mère doit être hospitalisée. Peux-tu lui trouver une place parce que, moi, je m'en vais à Paris demain avec le premier ministre. Ça, ce n'est pas des choses que je peux faire puis ce n'est pas des choses que M. et Mme Tout-le-Monde peuvent faire, mais il y a des gens qui peuvent faire ça.

M. le Président, quand on se retrouve aujourd'hui avec un projet de loi comme celui-là et qu'on pense au cafouillage et au fiasco du transfert de toute l'organisation de la transplantation et de la greffe des poumons, on peut s'inquiéter de la décision du ministre de vouloir déléguer à un organisme, par biais d'une entente, ses pouvoirs. Moi, ça m'inquiète. Si ça a été fait de bonne foi, tout ce fiasco-là, je pense qu'il y en a qui vont en porter le fardeau, mais on sait que ça a été fait de façon improvisée, on sait qu'il y a des gens qui ont été en attente d'une greffe. Et il ne faut pas avoir beaucoup d'empathie et de compassion... Quand on connaît toute l'insécurité que peut nous occasionner le fait d'être sur une liste d'attente, que ce soit en attente d'une opération, en attente d'un examen médical, de la minute qu'on vous diagnostique une maladie ou qu'on vous diagnostique quelque chose, bien vous êtes inquiet et vous voulez être certain que le service fonctionne, vous voulez être certain de pouvoir avoir affaire à un système de santé qui fonctionne bien.

(21 h 10)

Alors, quand on veut prétendre aujourd'hui que ça va bien, moi, j'ai plutôt l'impression que les gens se sentent un petit peu floués. Moi, j'ai assisté à des réunions, comme l'a fait mon collègue d'Orford – puis je suis persuadée qu'il y en a d'autres qui l'ont fait ici – à des réunions dans ma région de la régie régionale. J'ai le plus grand respect pour les élus qui siègent à la régie régionale, mais je n'ai pas beaucoup de respect pour tous ceux et celles qui leur ont transféré cette lourde charge. Je n'ai pas beaucoup de respect pour ceux et celles qui pensent qu'ils vont réussir à leur faire accepter n'importe quoi sous prétexte qu'on s'est retrouvé, en juin dernier, dans la région de Québec, avec des budgets déficitaires. Je n'ai pas beaucoup de respect pour ceux et celles qui ont tenté de faire croire aux dirigeants de la Régie régionale de la région de Québec qu'il n'y avait pas de problème avec les budgets, puis ça, ça avait tout été décidé en 1995 alors qu'on avait procédé à toute la réorganisation du service de santé dans la région de Québec, sauf que ces gens-là se sont retrouvés, les fois où je suis allée à ces rencontres-là, dans une impasse, dans une situation où ils ont dû voter sur des décisions pour lesquelles ils n'avaient pas beaucoup d'information. C'est terrible, ça. On parle de la santé, là. On ne parle pas d'aller acheter un livre à la librairie ou d'une livre de steak haché chez Métro, on parle de la santé des gens, de la réorganisation des services.

M. le Président, quand on pense que, dans la région de Québec – je vais parler du pavillon Saint-Sacrement – le ministre nous dit qu'il n'y aura plus de fermeture, qu'on consolide... Ça, c'est le nouveau mot. Saviez-vous ça, que le synonyme de «coupures», maintenant, ça s'appelle «consolidation»? Alors, on consolide le réseau. On peut vider l'hôpital par l'intérieur, on peut déménager des départements, on peut déménager des services, on peut réorganiser l'intérieur pour que l'apparence physique demeure la même, il y a encore une porte d'entrée, il y a une porte pour une salle d'urgence, il y a encore des ascenseurs dans le bâtiment, mais on n'a plus les services, par exemple, auxquels on était habitués. Ah! mais on n'a pas fermé l'hôpital. C'est vrai, ça ne s'appelle plus un hôpital, ça s'appelle un pavillon. J'ai oublié. Ça aussi, ça fait partie de la réorganisation des services et du nouveau lexique, du nouveau vocabulaire en santé et services sociaux.

Alors, quand on prétend que ce projet de loi là, le projet de loi n° 176, n'est qu'une suite logique à la réorganisation des services de santé et des services sociaux sur le territoire, quand on parle de la création d'un guichet unique, je remercie le député de Marguerite-D'Youville de nous avoir donné ces informations-là, mais j'avoue que, moi, je n'ai pas entendu parler de la création d'un guichet unique. Est-ce qu'il y a eu consultation sur le sujet? Qui a été consulté? Qui a demandé à ce que soit mis en place ce guichet unique?

Et, lorsqu'il nous dit qu'il n'est pas question, dans son esprit et dans l'esprit du projet de loi, de faire en sorte que le ministre abdique ses pouvoirs et ses responsabilités, bien, j'aimerais relire ici ce qu'on dit à l'article 1 de ce projet de loi n° 176: «Le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.» Le deuxième article dit: «La Régie exerce également toute fonction qui lui est déléguée aux termes d'une entente conclue avec un ministre.» Donc, il y a délégation de pouvoirs, et, quand il y a délégation de pouvoirs, l'imputabilité évidemment descend. Alors, quand on fait ça, ça signifie qu'il y a des gens qui seront sans doute moins imputables que le ministre, mais qui vont prendre des décisions, et ces décisions-là vont avoir des conséquences, souhaitons-le, qui seraient correctes, là, mais elles auront des conséquences, si on se fie à ce qui s'est passé dans le réseau depuis trois ans, comme celles avec lesquelles on a à vivre aujourd'hui dans le réseau de la santé et des services sociaux.

Alors, pour toutes ces raisons-là, M. le Président, on ne peut pas être d'accord avec le projet de loi n° 176, puisqu'il ne garantit absolument pas qu'il y aura amélioration du service de santé et des services sociaux dans la région. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Nous allons maintenant céder la parole au député de Châteauguay. M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Alors, j'interviens, moi aussi, sur le projet de loi n° 176 et, si vous le permettez, je vais débuter ma présentation – un peu comme l'a fait ma collègue de Jean-Talon – en m'accrochant ou me raccrochant aux propos de notre collègue de Marguerite-D'Youville que j'ai écouté un peu plus tôt. On me dit que le discours du ministre, un peu plus tôt, était de la même teneur. En fait, essentiellement, ce que j'ai compris du message du député de Marguerite-D'Youville, c'était de nous dire – et puis en tout respect, là, il a bien précisé, lorsqu'il a fait sa présentation, qu'il le faisait sans partisanerie: Moi, je ne comprends pas que les collègues de l'opposition ne comprennent pas ce projet de loi somme toute assez simple – trois articles, effectivement ce n'est pas le projet de loi le plus volumineux – qui, dit-il, est pourtant très clair.

J'avais le projet de loi devant moi et je l'écoutais, et il s'est lancé dans une présentation sur les liens entres la sécurité du revenu et la santé dans des cas bien précis, concernant les personnes âgées notamment. Je dois vous avouer, M. le Président, qu'à ce moment-là je me suis dit: Mais de quoi me parle-t-il? Si le projet de loi de trois articles, si simple, couvre ces matières-là, et ces matières-là uniquement, pourquoi est-ce que je ne les retrouve pas dans mon projet de loi? Honnêtement, M. le Président, je me suis dit: Est-ce que j'ai le bon projet de loi dans les mains? Parce qu'il n'y a rien de plus simple que de lire ce qui est devant nous, puis là de se dire: Mais est-ce qu'on parle du même projet de loi, là?

Moi, je vais vous lire les notes explicatives. Je ne vous lirai pas les trois articles, je vais aller à ce que le gouvernement nous dit: Voici à quoi ça sert ce projet de loi, je vous explique – notes explicatives – le but de ce projet de loi. Je vais vous le lire rapidement. «Ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux – ça va jusque là – afin que le ministre puisse, par entente, déléguer à un organisme...» Là, on ne nomme pas l'organisme, n'importe quel organisme peut-être de n'importe quelle juridiction; jusqu'à un certain point, est-ce qu'il est question ici d'organisme d'ordre provincial, canadien, international? on ne le sait pas. Donc, «déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application».

J'arrête à ce paragraphe-là. Je pourrais embarquer sur l'autre sur la RAMQ, sur la Régie de l'assurance-maladie. Simplement sur ce premier paragraphe-là. Je ne sais pas de quel organisme on parle. En fait, on ne l'identifie pas. On en parle au singulier. Donc, on envisage l'ensemble des organismes. Et par ailleurs on ne me dit pas quelles fonctions, de façon précise, on envisage dans ce projet de loi. Comme législateurs, notre fonction... Peu importe de quel côté – je vais suivre ce que mon collègue de Marguerite-D'Youville disait, au-delà de la partisanerie – nous sommes de la Chambre, il faut bien lire ce qu'on lit, il faut bien lire les mots qui sont là. Et, si ce qu'on est en train de nous dire, c'est «l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application», s'il n'y a aucune restriction de ce qui peut être délégué, si c'est l'ensemble des pouvoirs qui sont conférés, attribués au ministre en vertu de la loi, est-ce qu'on n'est pas en face d'une clause beaucoup plus large que celle dont parlait le député de Marguerite-D'Youville? Est-ce qu'on n'est pas en face d'une clause que j'appellerais une clause omnibus, de délestage de responsabilités?

Et, sans autre explication dans le projet de loi, la question qui nous est posée comme législateurs: Est-ce qu'on est pour ou contre une telle clause qui n'a aucune limite, aucune contrainte, qui envisage simplement que le ministre peut déléguer par entente avec un organisme indéfini, l'ensemble des organismes qui peuvent exister, déléguer l'ensemble des compétences du ministre? On se demande: Est-ce que, nous, comme parlementaires, dans notre système parlementaire, on peut être d'accord avec ça?

(21 h 20)

Moi, je vous avoue, M. le Président, que la réponse à cette question, c'est non, et non sans partisanerie. Non parce qu'on vit en démocratie, et des deux côtés de la Chambre on vit en démocratie, et on vit dans un système de responsabilités ministérielles, un système où il doit y avoir toujours place à l'application de la règle d'imputabilité. Et, si on va de l'avant avec un tel projet de loi, on va passer à côté de cette capacité que nous avons, nous, comme parlementaires, mais que l'ensemble des citoyens aussi ont par les mécanismes connus, soit via leur processus à eux-mêmes, via les associations qui peuvent regrouper les intérêts des concitoyens, par les médias, la possibilité d'interpeller le responsable ministériel. Évidemment, s'il s'est délesté de l'ensemble de ses responsabilités, il sera impossible d'aller chercher le responsable. Or, notre système n'est pas bâti comme cela. Les gens qui nous écoutent peuvent se dire: Ouais, mais c'est bien théorique, tout ça; dans le concret, qu'est-ce que ça veut dire? C'est rare qu'on a cette occasion, M. le Président, d'aborder en concomitance, je dirais, un projet de loi et un cas de comté. C'est ça, notre travail, hein, d'amener nos cas de comté, les amener comme cas types, comme exemples, pour expliquer comment on comprend le projet de loi et comment il peut nous effrayer un peu.

Alors, moi, je vais vous parler d'un cas de comté dont le ministre, j'espère, est bien au courant. On parlait tantôt des personnes âgées. Je vais vous parler des lits de soins de longue durée. Il y a eu un programme – je fais une histoire courte – le programme PAPA, qui a été lancé au début du mandat. Nous, dans le comté, moi, ce que j'ai fait comme député, j'ai demandé à l'ensemble des intervenants de présenter des projets de manière à ce qu'on s'assure qu'on ait nos lits, parce qu'on est en déficit, à cet égard, dans le comté de Châteauguay. Alors, on présente donc des projets, différentes propositions sont faites; le ministre retient un des projets et une annonce est faite, octobre 1995, à l'automne 1995. Alors, on fait l'annonce comme quoi il y aura une quarantaine de lits de plus au foyer de Châteauguay. Ça fait deux ans que cette annonce a été faite, et comme les démarches, l'avancement des travaux, je dirais et de la suite, des autorisations qui doivent être données tardent à venir, après deux ans, vous savez comme moi ce que ça provoque: de l'inquiétude. Et l'inquiétude, ça amène des questionnements.

Alors, la population commence à poser des questions et elle se dit: Oui, mais là il y a eu une annonce, mais on ne voit pas de suites, de conséquences. Il n'y a pas de réalisation, il n'y a pas de travaux, comment ça se fait? Alors, on commence à se demander: Est-ce que c'est parce que le travail peut vraiment se faire? Est-ce qu'il est possible d'agrandir cet endroit? Est-ce que ça va être sécuritaire pour les bénéficiaires? Est-ce que les fonds publics sont bien dépensés si on les dépense à cet endroit-là? Autrement dit, il y a un certain nombre de questions qui se soulèvent parce qu'il y a un délai de deux ans, là, qui s'est écoulé et puis on n'a pas de nouvelles. Par chance, il y a des gens, des intervenants du milieu qui prennent ça au sérieux, qui répondent aux questions qu'on leur demande, notamment les gens qui travaillent très fort – mes collègues en parlaient tantôt – ceux qu'on trouve dans les hôpitaux, les centres de soins de longue durée, un peu partout dans le réseau de la santé, des gens dévoués au possible qui ont une préoccupation de tous les instants, celle des bénéficiaires, puis qui sont avec eux tous les jours.

Ces gens-là, notamment au Foyer de Châteauguay, ont répondu aux inquiétudes des gens sur la capacité portante de l'immeuble à un agrandissement, sur la façon dont on va traiter les bénéficiaires lors de cet agrandissement. Mais le ministre a, depuis quelque temps, du courrier, et on se demande bien s'il va finir par y répondre. Du courrier où on lui demande de préciser les comparaisons de coûts.

Alors, ma question, c'est la suivante: Puisque le ministre est responsable – et je reviens donc au projet de loi – nous pouvons, moi, comme député, les autres intervenants de la population, nous pouvons questionner le ministre, nous pouvons chercher sa responsabilité, invoquer son imputabilité, parce que c'est lui, le ministre, qui est responsable, c'est lui qui fait l'annonce. Et il n'a pas délégué une de ses fonctions, dans ce cadre-là, à un organisme indéfini. C'est lui qui est responsable. C'est facile pour nous, parce que c'est clair: voilà la personne à qui on peut poser les questions; voilà la personne qui doit rendre compte; voilà la personne de qui on attend des réponses, notamment dans un cas précis, là, je le donne, un cas très, très précis, un cas de comté on ne peut plus clair. Pourquoi le ministre qui est responsable, actuellement, ne donne pas suite rapidement aux questions qui sont posées, pour apaiser les inquiétudes et rester, je dirais, cohérent avec l'annonce qu'il a faite il y a deux ans, parce que les besoins sont là?

J'entendais récemment le ministre nous dire que son virage amenait à fermer des lits de courte durée pour ouvrir des lits de longue durée. Bien, voilà les inquiétudes des gens. Lorsqu'ils entendent ça, ils se disent: Oui, mais, nous, on a une annonce qui tarde depuis deux ans, et les lits, ça n'avance pas. Que fait le ministre? Si le ministre, en vertu de ce projet de loi laisse tomber ses responsabilités, se déleste de ses responsabilités, comment allons-nous pouvoir avoir réponses à ces questions? Dans notre système parlementaire, il n'y a pas lieu à un tel délestage ni à une clause omnibus qui permet ce délestage.

Je pense que ça, c'est fondamental. Si on avait ce projet de loi, à qui est-ce qu'on pourrait s'adresser pour combler les besoins de lits de soins de longue durée à Châteauguay? Si une annonce est faite, comme cela a été le cas en 1995, mais qu'elle tarde à se réaliser, qui va supporter la responsabilité à cet égard si on cherche à avoir le meilleur rendement des fonds publics? M. le Président, je pense que c'est un peu l'essence même de notre mandat. On doit représenter les gens qui nous ont choisis comme représentants en respectant – c'est ça, la confiance qu'ils nous attribuent – leurs intérêts à ce qu'on obtienne le meilleur rendement pour les fonds publics. Alors, ces questions-là sur le meilleur rendement qu'on peut tirer en termes de soins à offrir à la population en fonction des montants que la population paie en taxes, bien c'est le ministre qui peut répondre à ça. S'il délègue ça à un quelconque organisme non défini, on ne pourra pas aller chercher les informations, chercher l'imputabilité.

C'est un cas concret que j'ai soulevé. Le ministre a une lettre sur son bureau qui est prête à être signée, ce sont des informations que j'ai obtenues. La population s'attend à ce que le ministre la signe. Ce projet de loi n'est pas encore passé. Le ministre est encore responsable. Je profite de cette intervention ce soir pour rappeler au ministre ses responsabilités, rappeler au ministre que, dans le comté de Châteauguay, nous attendons des suites à l'annonce faite il y a deux ans et qu'on espère que le ministre va assumer les responsabilités qu'il a.

Ça me ramène à ce projet de loi. Ça me ramène à l'ampleur du projet de loi. Ça me ramène aux propos du député de Marguerite-D'Youville qui disait: Je ne sais pas de quoi l'opposition parle. Or, c'est simple, M. le Président, l'opposition est inquiète. Je vais prendre l'expression de mon collègue de Marguerite-D'Youville, je le dis sans partisanerie. Comment peut-on voir, à l'article 1 qui modifie ou qui insère le nouvel article 9.2, qui dit ceci: «Le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.» C'est où, la restriction quant aux pouvoirs qui pourront faire l'objet d'une délégation? Il n'y en a pas, de restriction. Quel est l'organisme à qui le ministre pourra déléguer ses responsabilités par entente? Il n'y a pas de limite.

Que ce soit dans le cas dont je mentionnais tantôt ou à l'égard du Foyer de Châteauguay, on cherche une réponse de la part du ministre, qu'on espère très prochaine parce que le ministre est responsable. Que ce soit à l'égard de ce dossier-là ou d'un bon nombre d'autres dossiers, M. le Président, il doit, dans notre système, y avoir toujours la possibilité de questionner, la possibilité de s'assurer que les responsabilités sont assumées. Notre système parlementaire, devant une telle clause omnibus de délestage de responsabilité, ne tient pas le coup. Si on commence avec une loi dans le domaine de la santé – on disait tantôt que le domaine de la santé est un des plus gros dossiers, certes – si on commence, donc, avec ce premier gros dossier, est-ce qu'on va nous apporter de projets de loi comme ça pour tous les autres cas?

(21 h 30)

Moi, je pense bien, bien honnêtement, M. le Président, que l'article est mal écrit. Il y a peut-être des cas où il y a lieu d'avoir des ententes. Ça se peut. Qu'on le dise. Que la note explicative me le dise. Qu'on me dise pourquoi. Je n'y retrouve strictement rien. On pourrait présenter un projet de loi comme ça pour chaque ministère sans aucune motivation, sans aucune explication et on va se retrouver ici dans une Chambre vide. Nous allons avoir une Assemblée nationale vide, démunie parce qu'on n'aura plus de responsabilité ministérielle. Moi, je veux bien... Toujours au député de Marguerite-D'Youville que j'écoutais tantôt, qui disait: Oui, mais on pourra toujours faire venir – il y a un article sur la RAMQ – la RAMQ. Je m'excuse, M. le Président. Ça, c'est une chose. Je comprends qu'une des capacités qu'on s'est données, un des moyens qu'on s'est donnés de vérifier comment les organismes se débrouillent...

Mais ce n'est rien à côté... J'espère qu'on s'en rend compte. On a rien qu'à regarder le règlement, là, ici. J'espère qu'on se rend compte, là, qu'il y a d'autres outils, il y a d'autres moyens pour assurer le respect de la règle de responsabilité ministérielle, de l'imputabilité. C'est fondamental, il y a quelqu'un dans notre système qui est responsable. On prend l'expression: On paie assez cher, faites ça comme il faut. C'est ça que les gens se disent, puis ils veulent savoir qui doit faire ça comme il faut.

Ce n'est pas une machine, ce n'est pas le nom d'un organisme, c'est un nom de gouvernement qui a un parti, un certain nombre de personnes dans un conseil exécutif qu'on identifie. Il y a une personne, un point de chute, une personne qui est ministre de la Santé, à qui on va demander de rendre des comptes. Celui-là et le parti gouvernemental vont, à l'occasion, nous raconter leurs bons coups. Nous, du côté de l'opposition, c'est notre travail, nous allons déceler, mettre en relief les lacunes, les mauvais coups. Au total, la population se fait une idée de la façon dont fonctionnent les choses. Du côté de l'opposition, ayant contesté et critiqué, on va apporter des alternatives. On va solliciter l'appui et la confiance de la population lors d'un rendez-vous électoral pour mettre en place ces alternatives.

Je souhaite, M. le Président, que cela arrive le plus tôt possible, mais je souhaite aussi que la population ait la possibilité... Et le parti formant en ce moment la partie ministérielle, qui sera alors l'opposition, aura les moyens de vérifier nos engagements, de s'assurer de l'imputabilité. Je ne voudrais pas enlever des outils au Parti québécois formant l'opposition pour s'assurer qu'on respecte nos engagements, j'y tiens. Je tiens à ce que ces outils restent en possession des parlementaires de l'Assemblée nationale. Je souhaite le respect de la responsabilité ministérielle, de notre système dont, des deux côtés de la Chambre, on se fait fort de dire qu'il est un des meilleurs.

On a eu une conférence des parlementaires des Amériques. On a eu l'occasion de discuter, de partager nos expériences. Je n'ai entendu personne me dire: On a besoin d'un projet de loi qui va évacuer les responsabilités. Personne n'a dit ça. Personne n'a dit: Il va nous falloir avoir des clauses omnibus de délestage de responsabilités. Et je vois des gens de la partie ministérielle qui se disent: Mais de quoi il parle? Il doit exagérer. Mais, si je lis l'article, il n'y a aucune restriction à ce qui peut être délégué et aucune identification des organismes qui peuvent recevoir la délégation. Alors, je vous avoue, M. le Président, comme parlementaire, que je suis plutôt mal à l'aise de voir cette opération-là, surtout parce que je tiens beaucoup au respect des règles qui nous gouvernent.

Alors, puisque je suis mal à l'aise, puisque je suis inquiet, je me dis: Il serait peut-être bon, toujours pour reprendre cette question de non-partisanerie, il serait peut-être temps et important qu'on aille voir à l'extérieur de nos murs, qu'on sorte de l'Assemblée, qu'on écoute ce que les intervenants ont à dire. Peut-être qu'on aura des réponses et peut-être que ces réponses vont nous amener à mieux libeller l'article, à refaire le projet de loi. Peut-être qu'il y a des besoins qui doivent être comblés. On pourra alors les comprendre, les expliquer. C'est dans la transparence qu'apparaît la vérité.

Je plaide donc, M. le Président – il me reste une minute – pour qu'on ait cette occasion, avec les gens qui entourent le ministre, mais avec les intervenants du secteur de la santé, bénéficiaires jusqu'au personnel traitant, d'entendre leur point de vue sur les besoins et sur la façon de libeller le tout. Je plaide donc pour que, avant que nous allions plus loin dans l'étude de ce projet de loi, nous puissions entendre les intervenants.


Motion de report

À cet effet, en respect avec l'article 240 de notre règlement, je fais motion pour que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots «soit maintenant adopté» par les mots «soit adopté dans trois mois».

Le Vice-Président (M. Pinard): Ah, une motion de report.

La motion de report est une motion conforme, à ce stade-ci. Alors, nous allons suspendre les travaux de l'Assemblée et organiser une réunion avec les leaders de chaque groupe parlementaire afin de fixer le temps de parole de chacun des groupes ainsi que des députés indépendants.

(Suspension de la séance à 21 h 35)

(Reprise à 21 h 54)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes, MM. les députés qui sont debout, veuillez vous asseoir.

Alors, la répartition du temps concernant le débat, c'est un débat restreint de deux heures: 10 minutes seront allouées à l'ensemble des députés indépendants; les deux groupes parlementaires se partageront également le reste de la période consacrée au débat; le temps de parole non utilisé par l'un des groupes ou par les députés indépendants pourra être redistribué et les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Je serais prêt maintenant à entendre le ministre de la Santé et des Services sociaux. Alors, M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, j'ai le sentiment, à écouter les discours qui sont faits par les membres de l'opposition, qu'on est dans une espèce de petit imbroglio que je vais essayer de clarifier, là, le plus simplement et le plus clairement possible.

Quand j'ai présenté le projet de loi qui veut amender la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, dans son article 2, qui donne les pouvoirs du ministre... L'amendement se lit comme suit, effectivement: «Le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.» «Le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice...»

Il me semble, là, que les mots «peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions» donnent des balises importantes que j'ai peut-être prises un peu trop, là, comme acquises, comme évidentes en allant dans ma présentation assez rapidement. J'aimerais élaborer sur le type des premiers types d'ententes qui nous semblent nécessaires, qui nous semblent importantes à faire, les types de programmes – je ne reviendrai pas sur les détails, là – qui sont des programmes de gestion de contribution de personnes qui sont hébergées, mais qui sont typiquement le genre de programmes auxquels on peut s'attendre qui peuvent être délégués, afin de bien illustrer comment il est important, à l'époque moderne où nous sommes, que les ministères puissent se consacrer, de plus en plus, sur les fonctions des ministères, c'est-à-dire d'élaborer des politiques, développer des orientations, évaluer l'impact de ces politiques plutôt que de consacrer beaucoup de temps, comme ce fut historiquement, là, à une époque, des ministères qui devaient consacrer beaucoup de temps à la gestion de systèmes administratifs qui sont devenus très, très lourds.

Je peux comprendre, en entendant les discours, que, si on prend la liste des fonctions du ministre de la Santé et des Services sociaux, qui sont données à l'article 2 de la loi, on peut penser que, sans aucune formalité, sans aucune balise, le ministre pourrait déléguer toutes ces fonctions qui sont celles justement qui amènent la nécessité d'avoir la responsabilité qui est donnée à un ministre de la Santé et des Services sociaux et la responsabilité du ministère, qu'on pourrait craindre une telle situation. Mais j'ai revérifié avec les juristes quelle était véritablement l'implication de cet article, et tout ce qu'on me redonne comme explication, M. le Président, est que dans le déroulement normal le législateur confie à un ministre en général un mandat qui est assez large pour la direction de l'administration d'un ministère et qu'il y a beaucoup de discrétion qui est laissée au ministre quant à l'exercice des pouvoirs qui lui sont attribués, au mode d'exécution qu'il pourra choisir pour exécuter ses tâches de même qu'à l'organisation administrative du ministère que le ministre voudra faire.

Il y a de toute façon une première délégation implicite qui est celle que tout ministre a faite et doit faire pour exécuter ses fonctions de ministre, le ministre étant d'abord responsable de la définition, de participer à la définition de la politique générale au sein du gouvernement – c'est là, le rôle politique d'un ministre – et étant aussi responsable de la mise en oeuvre de cette politique à laquelle il a contribué, politique du gouvernement, dans le secteur particulier qui est celui des fonctions qu'on lui a attribuées et des responsabilités qu'on lui a données. C'est le rôle administratif du ministre.

Pour réaliser ce rôle administratif, surtout dans un ministère comme celui de la Santé et des Services sociaux – c'est vrai pour tout ministère, mais plus le ministère implique beaucoup de fonctions, surtout des ministères comme ceux de l'Éducation et de la Santé qui travaillent avec des réseaux, des ministères comme le nouveau ministère de l'Emploi et de la Solidarité qui doit aussi travailler avec un réseau à travers tout le Québec – c'est sûr que ce n'est pas une personne qui peut gérer toute une opération comme ça. Et il y a une première délégation, me dit-on, m'explique-t-on, importante de responsabilités, implicite, qui est celle qui est faite au corps des fonctionnaires, le sous-ministre, les sous-ministres adjoints et les gens qu'ils ont sous leur responsabilité.

(22 heures)

Mais cette délégation implicite de responsabilités ne change en rien la responsabilité et l'imputabilité du ministre qui demeure responsable devant l'Assemblée nationale et devant le gouvernement et qui assume la responsabilité, l'imputabilité finale pour les gestes des gens qui sont sous sa responsabilité. Quand on en arrive à aller plus loin, on m'explique que le fonctionnement normal de notre système fait que, pour avoir une délégation à d'autres que le corps des fonctionnaires, il faut que le ministre soit spécifiquement habilité à cette fin dans une loi et qu'il est important là-dessus qu'on maintienne ce qu'on appelle une sécurité juridique et une cohérence dans nos différentes lois.

Alors, on dit que – encore une fois, je pense que c'est plus un aspect technique que d'autre chose dont il est question – l'habilitation qui est faite à un ministre de faire une délégation, comme celle qui est prévue par l'amendement dont on discute, est vraiment destinée à faire assumer et assurer par un organisme qui en a la compétence l'exécution d'une fonction. Et ça, de toute façon, c'est fait par une entente. Alors, nécessairement, il y a le choix de la fonction dont l'exercice est délégué. L'entente doit baliser comment le ministre veut déléguer la responsabilité de l'exécution. Donc, ce n'est pas un chèque en blanc qui est donné à un organisme qui peut faire tout et n'importe quoi avec ça, c'est dans le cadre d'une entente.

Le ministre demeure responsable, et l'organisme demeure sous la responsabilité du ministre. Le ministre peut intervenir en tout temps sur la façon dont l'organisme assume ses responsabilités, les modalités de gestion qu'il a, le ministre demeure responsable de l'évaluation de la façon dont l'organisme fonctionne et il peut en tout temps réintervenir, modifier l'entente ou reprendre les responsabilités ou ordonner à l'organisme de procéder autrement. Il y a donc un contrôle hiérarchique contractuel qui est prévu dans l'entente, qui revient au ministre, et l'organisme en question agit comme représentant du ministre et doit rendre compte de la façon dont il exécute, comme mandataire. Donc, il exécute le mandat et il doit en rendre compte au ministre.

Bon. Bien sûr, on aurait pu dire – et c'est ce qui semblait être suggéré par les porte-parole de l'opposition – si l'exemple que j'ai donné... On dit: Si c'est ça qui est en cause, faisons l'amendement de façon spécifique. Disons que c'est ces programmes-là qui vont être délégués à la Régie de l'assurance-maladie du Québec. On peut procéder comme ça, mais là ça veut dire que, chaque fois qu'il y aura la nécessité d'une délégation que le ministre devra faire, on devra revenir, refaire un amendement, et la loi va devenir un peu un code de conduite. On n'a plus affaire à une loi, à ce moment-là, c'est même au-delà d'un règlement. On se sert de la loi pour déterminer dans tous les détails comment on va procéder. Mais, encore une fois, il faut des balises dans la loi.

Je soumets, M. le Président, que, quand on dit que le ministre... On ne dit pas qu'il peut déléguer à un organisme des fonctions. On dit qu'il peut déléguer par entente. Donc, comme le ministre demeure imputable, comme il garde la responsabilité, dans l'entente il doit nécessairement donner les conditions de la façon dont la délégation doit se faire, et la délégation porte sur l'exercice de la fonction. Et ce n'est pas la fonction qui est transférée. Donc, le ministre ne se déleste pas d'une fonction.

C'est donc une déconcentration. C'est typiquement une déconcentration administrative qui est faite mais, techniquement, le ministre, pour la faire... Comme on est en droit administratif, on me dit qu'il faut que l'habilitation soit spécifique dans la loi, et si on ne veut pas revenir à chaque fois que l'évolution des choses le demande pour des raisons vraiment d'efficacité, pour rendre un meilleur service à la clientèle, c'est ce qui est visé ici, de rapprocher l'exécution de certaines fonctions qui sont de nature administrative si on ne veut pas à chaque fois revenir amender la loi. On peut choisir cette voie-là aussi, mais là on impose du temps à l'Assemblée législative plutôt que d'avoir une loi qui donne des bonnes balises, qui encadre très bien.

Et il me semblait, quand on a préparé cet amendement, qu'on suivait un peu ce qui était une évolution de notre législation qui était une évolution avec laquelle les ministères – puis, encore là, surtout des ministères qui fonctionnent avec des réseaux – peuvent et veulent fonctionner.

Il n'y a pas longtemps, quand on a adopté la loi qui a créé le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, une loi qui a été adoptée en juin 1997 et donc qui a été sanctionnée à la fin de juin 1997, on retrouve l'article 6 de cette loi – qui était le projet de loi n° 150, à l'époque, la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et instituant la Commission des partenaires du marché du travail – qui dit: «Une entente conclue par le ministre peut prévoir la délégation à un organisme, dans les mesures et aux conditions qui y sont prévues, de l'exercice de fonctions qui sont attribuées au ministre par une loi qui relève de lui.»

Alors, l'intention – et ça je peux en assurer cette Chambre – était vraiment de procéder de la même façon, de prévoir par un mécanisme d'entente, donc en maintenant un lien et un contrôle de la responsabilité par voie contractuelle, de permettre que l'exercice d'une fonction puisse être confié à un organisme qui est mieux habilité que le ministère lui-même à le faire. Si c'est le ministère qui le fait, encore une fois, c'est une délégation implicite sur la façon de gérer des appareils importants comme ceux-là. Si on veut concentrer plus et cibler plus le ministère sur des fonctions d'un ministère, qui sont des fonctions d'élaboration de politiques encore une fois, et que, quand on a affaire à d'autres types de fonctions dont l'exercice est beaucoup plus de nature administrative ou logistique, d'autres organismes, typiquement des organismes... Mais «organisme», ça ne veut pas dire n'importe quoi de ce qui grouille ou ce qui bouge, ça a un sens bien précis; on pense à une régie, un conseil, ou des organismes comme ça au sens de la loi. Alors, déjà là, on a des bonnes balises, il y a une entente, l'exercice d'une fonction et un organisme.

Alors, M. le Président, c'est vraiment sur cette base-là qu'on a fonctionné. Il ne s'agit surtout pas, pour continuer à se développer des services de santé et des services sociaux, et ce n'est sûrement pas l'intention de celui qui vous parle, d'être dans une situation de délester, décentraliser ce qu'on a fait depuis trois ans. Ça n'a pas voulu dire, M. le Président, surtout pas, de délester des responsabilités de n'importe quelle façon, ça a voulu dire d'avoir un système de santé et de services sociaux qui fonctionne de façon plus efficace en responsabilisant, en donnant des moyens à des gens localement, régionalement, et centralement, à certains organismes, comme la Régie de l'assurance-maladie du Québec, d'assumer des fonctions. Dans tous les systèmes qui s'organisent avec des fonctions centrales et des fonctions décentralisées, on a à gérer le niveau de différentes responsabilités et des mécanismes de délégation et d'imputabilité. Dans les termes compliqués, quand la Communauté européenne s'est établie, on a inventé le terme de la subsidiarité, qui est exactement ça, de mettre le plus possible au bon niveau et le plus possible à un niveau de décision et de responsabilité qui est proche de ceux qui peuvent réagir aux décisions des gens, de rétablir... au lieu de tout centraliser des décisions, d'avoir des systèmes très, très lourds et de faire qu'un ministère et un ministre puissent être peut-être pris à gérer le quotidien ou à gérer des systèmes administratifs, encore une fois, que des intentions politiques... Il y a des moyens autrement de faire.

Alors, c'est simplement l'argumentation que je voulais rappeler. Si vraiment ce que nous dit l'opposition est le fait d'une impression que le ministre va avoir là un pouvoir qui est très, très vaste, je suis obligé de rappeler ce qui a été l'évolution de la préparation de ce projet de loi. Les avis techniques et juridiques qui me sont donnés sur ce qu'est une déconcentration, une déconcentration de sites administratifs, sur le maintien de l'imputabilité que le ministre a... Et si on nous dit du côté de l'opposition que les exemples que j'ai donnés, qui sont effectivement les programmes qu'il faudrait présentement confier à la Régie de l'assurance-maladie du Québec – on est d'accord là-dessus – et si on y va sur un amendement qui était spécifique pour pointer ces programmes-là pour les déléguer, bien là, je pense qu'on a des lois qui deviennent presque des codes de conduite où, à chaque fois qu'il y a un geste à faire, plutôt que de le baliser dans une loi puis d'en assurer le contrôle, on vient à chaque fois prendre toutes des décisions au niveau de l'Assemblée nationale, alors que je pense et je soumets respectueusement que le rôle de l'Assemblée nationale est de s'assurer dans une loi de donner des balises correctes, de confier des responsabilités, une imputabilité très bien définie et que la personne qui est responsable, qui a cette imputabilité, puisse à l'intérieur des balises assurer le fonctionnement le plus efficace et le plus correct possible pour les contribuables.

(22 h 10)

Alors, voilà, M. le Président, ce que je souhaitais dire à ce moment-ci, espérant que ça peut nous aider de part et d'autre à recibler puis à recentrer le débat sur ce dont il est vraiment question. Et j'espère, parce qu'il en est vraiment tout simplement question, de s'assurer d'un fonctionnement le plus efficace possible, le plus économique possible, qu'on va pouvoir s'entendre de part et d'autre pour qu'on fasse un amendement qui, comme ç'a été le cas dans la loi du ministère de la Solidarité et de l'Emploi, donne le même genre de pouvoirs pour le même genre de situations. Je ne pense pas que c'est une mauvaise décision qui a été prise en juin dernier et je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas procéder de la même façon dans ce cas-ci, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le leader de l'opposition, je vous cède la parole.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui. M. le Président, quelqu'un, un jour, m'a dit, lorsque j'occupais des fonctions ministérielles, de ne jamais demander à un technocrate d'admettre une erreur, de ne jamais demander à un technocrate de dire qu'il s'était trompé. Il m'a également ajouté qu'un technocrate avait toujours une excuse à vous faire valoir. Nous l'avons entendu ce soir, le ministre de la Santé, en excellent technocrate, s'est éloigné du discours qu'il a tenu la semaine dernière à l'Assemblée nationale du Québec.

Lorsqu'il a présenté ce projet de loi à l'Assemblée nationale du Québec, le technocrate ministre de la Santé nous a indiqué, en nous invitant à appuyer ce projet de loi, non seulement les députés ministériels, mais également ceux et celles qui, de l'autre côté, avaient encore de l'attention à la chose, de l'appuyer. M. le Président, il nous a dit: Votez pour ce projet de loi parce que ce projet de loi va aider les personnes âgées qui sont en difficultés financières. Une fois qu'ils ont payé leur gîte et leur couvert dans nos centres d'accueil, dans nos centres hospitaliers de longue durée, ces gens-là ont un petit pécule qui leur appartient et qui est protégé par la loi. Puis il n'y a personne, ici, qui veut leur enlever cet argent-là qui comble à peine leurs besoins essentiels, pour ne pas dire l'essentiel de leurs besoins.

Et là, moi, je suis embarqué dans le discours du ministre. Je me suis dit: Si l'objectif du projet de loi, c'est de faire en sorte qu'il y ait des ententes administratives entre le ministère de l'Emploi et de la Concertation puis le ministère de la Santé – puis c'est bien de la paperasserie administrative – on va faciliter la tâche au gouvernement en espérant qu'il en reste plus pour les personnes âgées. Ça, c'était le technocrate de la semaine passée qui a tenté de se déguiser en humain en nous disant: Votez pour ça, c'est ce à quoi ça va servir. M. le Président, vous n'occupiez pas, à ce moment-là, le poste que vous occupez présentement, c'était un autre vice-président qui siégeait à votre place. Mais, moi, j'ai saisi de la présidence que, si finalement c'était l'objectif à atteindre, il y avait une bonne collaboration, là, d'un côté comme de l'autre. Si on visait à diminuer les coûts administratifs puis que ça pouvait aider les personnes âgées qui sont dans nos centres d'accueil, de ce côté-ci, là, je vous le dis immédiatement, ce serait pratiquement ce qu'on appelle, en jargon parlementaire, un, deux, trois, ce serait adopté puis ce serait réglé.

Là, le ministre s'est fait dire ça, M. le Président, s'est fait remettre sur le nez son propre discours par le leader du gouvernement, par le leader adjoint du gouvernement, par tous ceux et toutes celles qui se soucient d'une certaine cohérence à l'Assemblée nationale du Québec. Mais là le technocrate... Et c'est là que je me suis souvenu de ce que cette personne m'avait dit: Jamais ces gens-là ne commettent une erreur. Parce que, pour réaliser son objectif, il aurait fallu qu'il modifie son projet de loi et que son projet de loi dise ce qu'il fallait faire, mais il a choisi de défendre la technocratie plutôt que de défendre les personnes âgées qui sont dans des foyers d'accueil, qui sont dans des centres hospitaliers de longue durée. Plutôt que de choisir de défendre les malades, il a encore une fois choisi de défendre la technocratie, et c'est ce qui le marque, M. le Président, tout au long de sa carrière.

D'ailleurs, ce soir, il nous a dit: Il y a eu un imbroglio qui s'est glissé. Ce sont ses propres mots. Moi, s'il y a un imbroglio, on va le tirer au clair tout de suite. Si c'est pour ces personnes-là, modifiez votre projet de loi et dites-le, ça va être adopté facilement. Il a parlé de détail. On va en parler tantôt, de ce que le ministre considère comme un détail. Il a parlé de l'implication des juristes. Moi, j'ai l'impression que le ministre, qui a un cours de droit, parce qu'il a fait son droit avant de faire sa médecine – il n'a pratiqué ni l'un ni l'autre, soit dit en passant...

Des voix: ...

M. Paradis: Bien, je m'excuse, là. On me dit que ce n'est pas vrai. Est-ce qu'il y a un ancien patient qui se lève en cette Chambre? Il n'y en a pas un parce que le ministre enterre ses erreurs, habituellement.

Une voix: Lisez L'actualité .

M. Paradis: J'ai lu L'actualité . D'ailleurs, je vais vous en citer un passage tout à l'heure, M. le ministre. J'ai lu L'actualité , il a prétendu avoir soigné, parfois, distraitement. Mais des vrais docteurs, ce n'est pas ce qu'ils nous disent, de la compassion qu'il faut avoir envers les patients. On est passé...

M. le Président, est-ce que vous auriez l'obligation de rappeler à l'ordre le ministre de l'Industrie et du Commerce qui écrit ses cartes de Noël...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Écoutez, M. le leader de l'opposition, je dois... Non, je dois, M. le leader de l'opposition, quand même vous faire remarquer ceci. C'est que ce n'est pas selon l'esprit de notre règlement d'attaquer les personnes dans cette Chambre. Réfléchissez aux propos des 10 dernières minutes avant d'attaquer les personnes systématiquement. Il s'agit de politique et de contenu, et je crois que ce n'est pas l'esprit du règlement de s'attaquer aux personnes. Alors, je vous inviterais à en tenir compte pour la suite.

M. Paradis: M. le Président, je ne voudrais pas attaquer aucune des personnes qui va recevoir une carte de Noël du ministre de l'Industrie et du Commerce qui occupe son temps, en cette Chambre, à les écrire plutôt qu'à écouter ce qui se passe.

M. Boulerice: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader, très bien. Vous savez très bien, M. le leader de l'opposition, que, s'il fallait qu'on commence systématiquement à indiquer ce que chaque député, dans cette Chambre, fait à son bureau, toutes sortes d'occupations, on n'en sortirait pas, vous comprendrez avec moi. Bon. Alors, faites attention.

M. Paradis: Oui, M. le Président, tout en reconnaissant que vous permettez au ministre de l'Industrie et du Commerce d'écrire ses cartes de Noël pendant qu'on parle de la santé...

Des voix: ...

M. Paradis: Non, non, mais je m'excuse, si ce n'est pas vrai, que quelqu'un me l'indique.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre délégué... pas délégué, le ministre de l'Industrie et du Commerce sait certainement comment organiser son temps de façon efficace, et je crois que c'est le lot de tous ceux qui sont ici dans cette Chambre, et on n'a pas à passer des remarques sur la façon dont chacun décide d'employer son temps. M. le leader.

M. Paradis: Oui, vous avez raison, M. le Président. Nous avons d'ailleurs été des témoins privilégiés au moment où il était président de l'Assemblée nationale.

Le ministre de la Santé est passé d'une attitude d'un ministre qui sollicitait de la part des parlementaires de l'Assemblée nationale plus de responsabilités pour fermer les hôpitaux au Québec... On se rappellera, M. le Président, et vous en êtes un témoin privilégié, des pouvoirs qu'il a commandés à cette Chambre pour pouvoir fermer des centres hospitaliers. Je ne vous rappellerai pas particulièrement celui contre lequel vous vous êtes farouchement opposé, le Centre hospitalier Chauveau, M. le Président. Ça tenait de votre devoir de député de l'Assemblée nationale, de votre devoir de parlementaire de vous y opposer, mais votre fonction de vice-président vous a condamné, malheureusement, à une certaine neutralité. Mais on se souviendra tous d'un ministre de la Santé qui voulait avoir beaucoup de pouvoirs pour pouvoir intervenir de façon à imposer la fermeture de centres hospitaliers autant dans la région de Montréal que dans la région de Québec et dans l'ensemble des autres régions du Québec. Et, aujourd'hui, ce qui nous surprend, M. le Président, c'est que ce même ministre qui sollicitait davantage de responsabilités pour enlever des soins de santé aux Québécois, qui nous disait avoir tout prévu dans le moindre détail, et vous êtes témoin aujourd'hui, M. le Président, comment les propres gens de votre propre circonscription électorale sont moins bien soignés depuis qu'il a mis à exécution, suite aux pouvoirs qu'il a obtenus grâce à la majorité servile ministérielle de l'Assemblée nationale. Vous êtes même un témoin privilégié, vos gens sont moins bien soignés.

(22 h 20)

Aujourd'hui, ce même ministre tente de se déresponsabiliser. Nous sommes dans une espèce de contradiction qui est difficile à suivre. Un ministre qui voulait tous les pouvoirs veut maintenant déléguer ces pouvoirs-là à d'autres personnes. Et on se dit: Est-ce que le ministre a compris, malgré qu'il ait répété à de nombreuses occasions à l'Assemblée nationale qu'il avait tout planifié dans le moindre détail, qu'une façon élégante pour lui de s'en sortir, c'était de dire qu'il était irresponsable des responsabilités qu'il avait demandé à l'Assemblée nationale de lui octroyer? D'un ministre qui, il y a à peine 18 mois, demandait à cette Assemblée tous les pouvoirs, il devient, M. le Président, un ministre qui demande à cette Assemblée de le décharger de tous ses devoirs et de toutes ses obligations. Le ministre nous demande pratiquement d'endosser, comme parlementaires à l'Assemblée nationale du Québec, sa lettre de démission face à ses responsabilités. Quand on considère ce qu'il a fait à Montréal, quand on considère ce qu'il a fait dans l'ensemble des régions du Québec, ce qu'il a fait à Sherbrooke, ce qu'il a fait à Québec et chez vous, M. le Président, dans votre comté, on peut le comprendre de tenter de se déresponsabiliser. Mais est-ce qu'on a le droit, nous, comme parlementaires, qu'on soit péquistes ou qu'on soit libéraux, d'octroyer ces pouvoirs de déresponsabilisation à celui qui est le premier responsable de ce que certains analystes disaient en fin de semaine, qu'il a ramené le système de santé à l'ère de l'avant-Révolution tranquille au Québec?

Vous savez ce que ça veut dire, M. le Président? Je pense que vous le savez. Avant l'assurance-hospitalisation au Québec, les riches avaient un système de santé et les pauvres n'avaient pas de système de santé. Mais, en fin de semaine, il a été accusé, par des observateurs impartiaux, de ça, M. le Président. Aujourd'hui, il nous dit: Je vous demande, à l'Assemblée nationale, de consacrer ce que les analystes ont défini, que je suis un ministre irresponsable de la Santé.

Moi, je sais que, vous, vous allez toujours le tenir responsable de la fermeture de l'hôpital dans votre comté. Je connais beaucoup d'autres députés, des deux côtés de la Chambre, qui vont le tenir responsable de ce qui s'est passé dans leur circonscription électorale. Je pourrais parler, entre autres, du député de Saint-Jean qui l'a tenu responsable de ce qui est arrivé aux malades cardiaques dans son hôpital. Je pourrais citer le cas du député de Roberval qui peut le tenir responsable de ce qui arrive à l'hôpital de Roberval. Je pourrais citer le cas du premier ministre qui, lui, choisit non pas de le tenir responsable de ce qui est arrivé à quelqu'un qui est mort après sept heures d'attente à l'urgence de l'hôpital de Jonquière, mais qui a choisi plutôt de prendre la défense du ministre plutôt que la défense de son concitoyen. Je pourrais citer l'exemple des députés de Laurentides-Lanaudière qui, la semaine passée, savaient qu'à l'hôpital de Saint-Jérôme il y avait 13 patients en attente d'une intervention chirurgicale pour un cancer au poumon. Je pourrais prendre à témoin d'autres députés péquistes qui savaient qu'à l'hôpital Notre-Dame il y avait six patients en attente, M. le Président, d'une intervention pour une tumeur cancéreuse, maligne au cerveau. Je pourrais prendre tous ces gens-là en attente à témoin, M. le Président, de l'irresponsabilité du ministre de la Santé.

Mais vous savez c'est quoi, la réponse du ministre de la Santé à ces gens-là, M. le Président? C'est un ministre péquiste tantôt qui m'a dit: Oui, mais vous n'avez pas lu L'actualité , qui me l'a suggérée, cette réponse. Un ministre péquiste qui est assis à côté du ministre de la Santé présentement, M. le Président, et qui choisit de défendre le ministre plutôt que de défendre les gens de son comté, qui a dit: Vous n'avez pas lu l'article de L'actualité qui disait qui est responsable dans le domaine de la santé. Mais L'actualité , M. le Président – et vous en avez été une des victimes, et je vous prends à témoin, M. le Président – fait état d'un régime de terreur installé par le ministre de la Santé dans le système de santé au Québec.

Une voix: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader.

M. Boulerice: ...M. le Président, le leader de l'opposition parle du ministre en disant qu'il a instauré un régime de terreur dans les hôpitaux. Vous connaissez comme moi la force des mots, et la portée, et la signification des mots. Je pense que ses propos sont nettement exagérés et qu'il devrait, s'il n'est pas capable de les retirer, tout au moins le faire lui-même.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, c'est évident que c'est un mot fort. Alors, je vous inviterais, si vous voulez, à peut-être adoucir les expressions dans la suite de votre exposé.

M. Paradis: Oui, M. le Président, en répondant à votre invitation, je vais tenter d'adoucir, mais je ne porte pas les propos du journaliste de la revue L'actualité , M. le Président, et, si le leader adjoint du gouvernement les avait lus, il m'aurait félicité de les adoucir à l'avance. Donc, répondant à son aimable invitation, je vais les citer au texte, et vous jugerez, M. le Président, si le journaliste de la revue L'actualité a été plus sévère à l'endroit du ministre de la Santé que le critique de l'opposition officielle, ou vous-même, M. le Président, à certaines occasions.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, vous savez très bien que je n'ai pas à juger ici, moi, les propos de celui qui les a prononcés à l'extérieur, hein. C'est les propos qui sont prononcés ici par ceux qui sont ici qui me préoccupent. Alors, même si c'est en deçà de ce que l'autre a écrit, ça ne justifie pas, quand même, d'employer des mots forts, trop forts, hein. Très bien.

M. Paradis: M. le Président, dans les circonstances, ne pouvant vous inviter à être juge, j'inviterai ceux et celles qui nous écoutent à juger des propos tenus par le journaliste, et je le cite, M. le Président, entre guillemets: «On a été démagogique à ce sujet-là», fermer les guillemets, «dit le ministre – ce sont des paroles du ministre, donc ce ne sont sans doute pas des paroles qui sont antiparlementaires, M. le Président – qui refuse de s'expliquer, mais promet de régler ses comptes quand il écrira ses mémoires.» Donc, M. le Président, j'aurai sans doute droit, comme l'ensemble des députés libéraux, des médecins, des infirmiers et des infirmières, des patients qui se sont plaints, au règlement de comptes que le ministre nous promet dans la revue L'actualité . «Des rumeurs ont circulé. Des cadres de Notre-Dame – il s'agit de l'hôpital Notre-Dame, M. le Président – qui veulent conserver l'anonymat – on comprend là quel genre de système prévaut au Québec dans le domaine de la santé quand des cadres de l'hôpital qui se veut le vaisseau amiral du système de santé québécois n'osent plus parler en disant leur nom, ils veulent conserver l'anonymat, M. le Président – affirment que Jean Rochon – excusez-moi, M. le Président, avant que vous interveniez – que le ministre de la Santé a été très agressif, vengeur et rancunier.» Des cadres de l'hôpital Notre-Dame, le vaisseau amiral des institutions de santé au Québec, disent que le ministre de la Santé a été, et je cite, «très agressif, vengeur et rancunier». Je m'excuse, je vais retirer les propos des cadres...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. En vertu de l'article 35, M. le Président, celui qui tient lieu de leader de l'opposition sait fort bien que l'on ne peut faire indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement et il se sert d'un article de journal pour faire, effectivement, indirectement ce qu'il ne peut pas faire directement. Puis-je conclure en disant que, à l'occasion, on apprend beaucoup plus en cinq minutes sur un individu qu'en 12 ans de présence à l'Assemblée nationale? J'ai beaucoup appris ce soir.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vous savez qu'il y a la règle qui dit qu'on ne peut pas même se servir d'un texte d'un autre pour utiliser des propos qui ne sont pas, si vous voulez, parlementaires. Alors, je vous inviterais, s'il vous plaît, à faire valoir, peut-être, des points de vue qui ont été exprimés sans nécessairement reprendre le mot à mot des expressions qui ne sont, effectivement, pas selon l'esprit de notre règlement.

(22 h 30)

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je pense que, à ce moment-ci, je vais avoir besoin de votre sollicitude et possiblement de votre aide. Vous qui avez été témoin d'une fermeture d'hôpital dans votre comté, quand les cadres de l'hôpital Notre-Dame, qui est le vaisseau amiral du système hospitalier québécois, disent que le ministre a été très agressif, vengeur et rancunier, comment puis-je utiliser des termes parlementaires qui traduisent la pensée de ces gens-là?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous ai dit que vous pouviez quand même exposer une opinion qui a pu être exprimée, mais sans insister nécessairement sur des expressions qui, à l'évidence, ne sont pas conformes à l'esprit de notre règlement.

M. Paradis: M. le Président, je vais passer au paragraphe suivant, encore une fois en sollicitant votre sollicitude, vous qui avez vécu dans votre propre comté la fermeture d'un hôpital, suite à l'adoption d'un projet de loi par l'Assemblée nationale, qui est passé au bâillon: «Des membres du Parti québécois auraient tenté d'intimider, de bâillonner les spécialistes de l'hôpital Notre-Dame. Le président du Collège des médecins, Roch Bernier, considéré comme l'homme de main du ministre, aurait menacé de traduire des spécialistes devant le comité de discipline de l'Ordre pour désobéissance au ministre.»

M. le Président, on est dans un régime de santé qui est là pour donner des soins de santé à des individus qui sont parmi les plus fragiles de la société, à des individus qui souffrent intérieurement et extérieurement. Et on nous dit que des membres du Parti québécois auraient tenté d'intimider, de bâillonner les spécialistes de l'hôpital Notre-Dame.

Dans quel genre de système de santé le ministre actuel de la Santé tente-t-il de nous embarquer? Le président du Collège des médecins, et c'est grave, M. le Président, comme accusation parce que ces gens-là... Moi, j'ai l'immunité parlementaire, quand je le dis, mais ces gens-là ne l'ont pas, quand ils le disent et quand ils l'écrivent dans le journal L'actualité : «Le président du Collège des médecins, Roch Bernier, considéré comme l'homme de main du ministre, aurait menacé de traduire des spécialistes – ça veut dire des médecins spécialistes qui traitent nos concitoyens et nos concitoyennes – devant le comité de discipline de l'Ordre pour désobéissance au ministre.»

Ça, ça veut dire que, quand un médecin de l'hôpital Notre-Dame... Et c'est arrivé encore la semaine dernière, M. le Président, j'ai posé une question au ministre de la Santé sur le cas de six personnes qui étaient aux prises avec une tumeur au cerveau, parce qu'un médecin qui ne voulait pas que ces gens-là meurent avait contacté mon bureau. Le ministre de la Santé est au courant. Le médecin a été immédiatement victime de représailles, la journée même. Le ministre feint aujourd'hui de ne pas savoir ce qui s'est passé. Trois heures après la période de questions, le médecin a été victime de représailles parce qu'il s'est porté à la défense de personnes qui étaient en danger de mort, M. le Président.

Est-ce que c'est le genre de système de santé que l'on souhaite au Québec? L'actualité poursuit, M. le Président. Le journal L'actualité a posé carrément la question au ministre de la Santé: «Manifestement embarrassé – comme il l'est quotidiennement à la période de questions, M. le Président...»

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, j'invoquerai cette fois-ci l'article 211: «Tout discours doit porter sur le sujet en discussion.» C'est une motion de report de trois mois du projet de loi qui est devant nous. J'aimerais bien que le leader de l'opposition, s'il en est le moindrement capable, nous donne le bien-fondé du report de cette loi, mais non pas... continue le tissu et le ruban qu'il déroule depuis tantôt et qui n'a rien à voir avec le sujet.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader de l'opposition, c'est évident que le projet de loi qui est devant nous, et il comprend deux articles... On est sur une motion de report. Il faudrait que vous établissiez un lien entre le fait de reporter ce projet de loi et les propos que vous tenez. Alors, je vous inviterais, s'il vous plaît, à établir cette pertinence de votre propos.

M. Paradis: Oui, M. le Président, je comprends la difficulté que vous avez parce que vous n'étiez pas le président qui occupait ce siège au moment où le ministre de la Santé nous a expliqué que le seul objet de ce projet de loi était de permettre à des personnes âgées dans des centres d'accueil et dans des centres hospitaliers de longue durée, après avoir couvert sur le plan financier le prix de leur gîte et de leur nourriture, d'avoir de l'argent disponible. Parce que c'est ça que le ministre nous a expliqué. Et, si vous vérifiez auprès de l'autre vice-président, vous pourrez vérifier la véracité des propos que je vous tiens.

Dans les circonstances, vous dites: C'est quoi, le lien de cause à effet? Vous arrivez ce soir, vous avez entendu le ministre de la Santé qui tient un autre discours. Mais ça, je vous ai prévenu ou j'ai tenté – et peut-être pas que j'aie réussi – M. le Président, de vous prévenir. Le ministre de la Santé a dit d'autres choses ce soir en disant: Il y a un imbroglio.

Et si on demande un report, M. le Président, c'est parce qu'il faut entendre des gens. Moi, j'aimerais ça entendre les gens de l'hôpital Notre-Dame prendre le temps. On a demandé trois mois, M. le Président. Ces gens-là qui nous disent: «Des cadres de l'hôpital Notre-Dame qui veulent conserver l'anonymat affirment que le ministre de la Santé était très agressif, vengeur et rancunier.» Est-ce qu'on veut cacher ça? Est-ce qu'on veut refuser à ces gens-là la possibilité de se faire entendre? Des membres du Parti québécois auraient tenté d'intimider et de bâillonner les spécialistes de l'hôpital Notre-Dame. Écoutez, M. le Président, je suis sûr que ce n'est pas arrivé dans votre comté à vous. Mais peut-être qu'on pourrait voir ce qui est arrivé à l'hôpital Notre-Dame. «Le président du Collège des médecins, Roch Bernier, considéré comme l'homme de main du ministre», est-ce que cet individu-là ne pourrait pas profiter des trois mois pour venir se faire entendre puis dire: Je ne suis pas l'homme de main du ministre, ou: Effectivement, je suis l'homme du ministre et je fais des menaces aux médecins qui se portent à la défense de leurs patients?

M. le Président, si le leader adjoint du gouvernement n'a pas compris ce lien de cause à effet, lui, il n'a pas d'excuse. Vous, vous avez une excuse, M. le Président, vous n'étiez pas là quand le ministre a présenté son projet de loi. Mais, lui, il était là, lui, il a tout entendu et, lui, il fait peut-être partie de ce qu'on appelle... «Des membres du Parti québécois ont tenté d'intimider et de bâillonner les gens de l'hôpital Notre-Dame.» Ce soir, comme membre du Parti québécois, il tente d'intimider et de bâillonner l'opposition officielle, M. le Président; ça fait partie de sa stratégie. Et je suis certain qu'il va intervenir pour vous dire que ce n'est pas vrai, parce que c'est son attitude caractéristique en cette Assemblée. L'actualité , donc, le journal, a posé...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, pour ne pas déplaire à quelqu'un qui me déplaît souverainement, effectivement, j'invoquerai l'article 35.Le député de Brome-Missisquoi est en complète violation avec l'alinéa 6° de l'article 35, il impute des motifs indignes à un député, M. le Président. Je n'ai jamais intimidé qui que ce soit. Et puis-je profiter de l'occasion pour dire que le leader de l'opposition ne m'intimide aucunement?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, je crois que vous avez rectifié les propos. Alors, je vous inviterais à poursuivre, s'il vous plaît, et à éviter de déborder le sujet à l'ordre ici. Si je vois bien, dans le projet de loi que j'ai là, il est question, dans deux articles, de la possibilité de déléguer des fonctions dévolues au ministre par les lois à des organismes. Et c'est ça que nous avons demandé de reporter. Alors, il faudrait que ça puisse tourner autour de ce dont il est question: le report de ce projet de loi où il est question de délégation de fonctions que le ministre réfère, par entente, à des organismes. Essayer de reporter ce projet de loi. Alors, pourquoi reporter ce projet de loi là? Je crois que c'est l'objet même du débat et j'aimerais vous entendre sur ça.

(22 h 40)

M. Paradis: M. le Président, sur la question de règlement, avant de m'entendre sur le fond. Je ne veux pas vous accuser de complaisance envers le leader adjoint du gouvernement qui vous a dit qu'il était interdit d'intimider un député et qui, en même temps, vous dit qu'il n'a pas été intimidé. Est-ce que vous pourriez lui dire que sa question de règlement était complètement dérogatoire au règlement? Et après ça, je recommencerai.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il a parlé de prêter des intentions d'intimidation et il a dit: Moi, je n'ai jamais cherché à intimider. Écoutez, on n'est quand même pas pour... Comme je l'ai dit, finalement, il a essayé de rectifier vos propos. Il n'acceptait pas vos propos. C'est évident qu'il... Je n'ai pas attiré l'attention sur le fait qu'il y avait un point de règlement majeur là. Je ne me souviens plus exactement des propos. Il était question d'intimidation. «Je n'ai pas cherché à intimider qui que ce soit», c'est ce que j'ai compris. Peut-être que ce n'était pas un point de règlement. Mais, moi, je n'y ai pas porté une attention très particulière parce que je ne croyais pas que l'objet en question valait un grand débat. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Je suis complètement d'accord avec vous, M. le Président, ça ne valait même pas une interruption de nos débats. Il s'est levé sur une question de règlement qui faisait appel à l'article du règlement qui prévoyait de l'intimidation et il a conclu en disant qu'il n'avait pas été intimidé. Mais, M. le Président, moi, les seuls... Il acquiesce, M. le Président. Les seuls propos que vous avez adressés l'ont été à l'endroit du leader de l'opposition et vous n'avez jamais rappelé à l'ordre le leader du gouvernement pour avoir invoqué une question de règlement qui n'en était pas une. Accomplissez votre devoir et, à ce moment-là, nous reprendrons le débat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, par mon attitude, j'ai bien manifesté que je ne voyais pas là une question de règlement majeure. Bon, tout simplement, je crois que c'était évident dans mon attitude. Alors, comme le contenu de la question soulevée ne m'a pas apparu, si vous voulez, d'une importance à ce point que je devais faire tout un discours prolongé sur ça, bien, effectivement, par mon attitude, j'ai bien laissé croire que je ne voyais pas une question de règlement majeure là. Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Les téléspectateurs auront pu comprendre avec vous qu'il ne s'agissait pas d'une question de règlement, qu'il s'agissait plutôt d'une tentative de ralentir le débat. Donc, si nous repartions du noeud ou du corps de l'article publié dans L'actualité qui nous explique pourquoi nous aurions avantage à reporter de trois mois pour entendre les principaux intéressés. On va reprendre les témoignages qui ont été rendus par le ministre de la Santé, par des cadres de l'hôpital Notre-Dame, qui est le principal hôpital au Québec, et par le président du Collège des médecins, Roch Bernier, qui a été mis en cause par des gens.

Je reprends donc la citation du journal L'actualité : «"On a été démagogique à ce sujet-là", dit le ministre – c'est habituellement sa réponse typique à toutes les périodes de questions – qui refuse de s'expliquer mais promet de régler ses comptes quand il écrira ses mémoires.» Peut-être en ferez-vous partie, M. le Président, suite à la fermeture de l'hôpital dans votre comté. «Des rumeurs ont circulé. Des cadres de Notre-Dame, qui veulent conserver l'anonymat, affirment que le ministre de la Santé a été "très agressif, vengeur et rancunier".» M. le Président, ce ne sont pas des qualificatifs qui doivent s'appliquer à n'importe quel ministre du gouvernement, et surtout pas à celui qui a la responsabilité et la charge de la santé des Québécois et des Québécoises. «Des membres du Parti québécois – et je cite toujours à partir du journal L'actualité – auraient tenté d'intimider, de bâillonner les spécialistes» de l'hôpital Notre-Dame.

Et je vous ai rappelé, M. le Président, que j'en avais été témoin la semaine passée, suite à une question posée à l'Assemblée nationale au ministre de la Santé. Trois heures après, le spécialiste en question, qui m'avait fourni l'information pour sauver ses six patients atteints de tumeurs au cerveau, a été harcelé par les technocrates du ministre. «Le président du Collège des médecins, Roch Bernier, considéré comme l'homme de main du ministre, aurait menacé de traduire des spécialistes devant le comité de discipline de l'Ordre pour désobéissance ministérielle.» M. le Président, à part des pays soviétiques... Quand on ne suit pas l'ordre du ministre, quand on est un professionnel qui a promis de soigner, qui a prêté le serment de soigner ses patients, est-ce qu'on peut vraiment même penser, à moins d'être animé d'une mentalité toute croche, toute tordue de notre système de santé, à réprimander les gens qui soignent des patients qui sont en danger de mort? De l'autre côté, tantôt, on verra combien il y a de députés péquistes qui vont se porter à la défense de ces médecins puis de ces cadres ou, plutôt, il y aura combien de députés péquistes qui applaudiront leur ministre de la Santé, qui dit: S'il y a quelqu'un qui parle contre mon système et sur qui j'ai autorité, il va y goûter.

M. le Président, je pense qu'on ne peut pas, dans une société libre et démocratique... D'ailleurs, vous-même, vous ne l'avez pas accepté, M. le Président, personne n'a pu vous bâillonner, dans le cas de l'hôpital Chauveau parce que vous étiez un parlementaire, parce que vous aviez une conscience, parce que vous aviez des droits et des immunités. Mais ces médecins-là ne bénéficient pas des droits et de l'immunité des parlementaires, ne bénéficient pas de la même protection. Et, moi, je suis certain que, si vous pouviez le dire, M. le Président, vous avez vous aussi été victime, je ne dirai pas de menaces, mais on vous a conseillé de vous taire au Parti québécois. Moi, je suis pas mal certain, M. le Président, qu'on vous a dit: Mêlez-vous pas de ça, ne vous portez pas à la défense de vos gens.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition, vous savez très bien que, comme président, je dois m'abstenir d'intervenir sur les contenus, mais je vous prierais, s'il vous plaît, de ne pas me mettre dans une position où je devrai intervenir. Vous le comprendrez très bien. Alors, je vous cède la parole, mais tenez-en compte.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je vais vous rendre hommage, à ce moment-ci, et vous dire que, dans la limite des fonctions qui étaient les vôtres, vous êtes intervenu au maximum pour la protection des gens que vous représentez comme député à l'Assemblée nationale. Il y en a d'autres députés péquistes qui l'ont fait aussi. Le député de Saint-Jean, demandez-lui s'il a été victime d'intimidation ou de représailles. Le député de Roberval, demandez-lui s'il a été victime... En tout cas, demandez à tous les députés péquistes qui se sont levés en cette Chambre pour défendre les intérêts des gens qui étaient malades dans leur circonscription électorale quel a été le discours du ministre en leur endroit. Et, quand vous allez lire la revue L'actualité , vous allez reconnaître la situation dont vous avez été victime.

Ce n'est pas sain, M. le Président, une telle situation, pour un système de santé. Aujourd'hui, le ministre nous dit: Jadis, je vous ai demandé beaucoup de pouvoirs, aujourd'hui, je veux les déléguer, parce que le fiasco que j'ai causé, les maux que j'ai causés, les morts dans certains cas – puis il y a des rapports du coroner, M. le Président, pour les établir – je ne veux plus en être responsable. Je veux avoir la possibilité de déléguer ça à un organisme.

Tantôt, il tentait de minimiser le texte juridique. M. le Président. Pas besoin d'être un avocat, il s'agit d'être un philosophe pour comprendre exactement ce que le ministre de la Santé veut faire. Ce qu'il nous propose comme parlementaires, c'est d'adopter l'article suivant: «Le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice des fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.» Ça veut dire quoi, M. le Président? Ça veut dire qu'il peut déléguer par entente n'importe quoi à n'importe qui? «C'est-u» assez simple? Puis, s'il y a un juriste de l'autre côté, là, qui n'est pas d'accord, qu'il se lève. Que le ministre de la Justice se lève, que le Solliciteur général se lève, que tous les juristes de l'autre côté se lèvent puis qu'ils disent: Ce n'est pas vrai, ça.

Mais pourquoi le ministre veut faire ça, M. le Président, en fin de session, à la veille de Noël? Parce qu'il a assez honte de son bilan qu'il ne veut pas en être responsable, qu'il veut pouvoir dire: C'est tel organisme qui est responsable de mes erreurs, c'est tel autre organisme qui est responsable de ma mauvaise planification, c'est tel autre organisme qui est responsable des listes d'attente dans tel centre hospitalier, c'est tel autre organisme qui est responsable de l'absence de médecins, c'est tel autre organisme... Puis, pendant ce temps-là, lui, il se paie de la publicité à la TV, qui dit qu'il est fin, puis qu'il est beau, que tout va bien.

Une voix: C'est vrai.

(22 h 50)

Des voix: Bravo!

M. Paradis: Et, M. le Président, de l'autre côté, il y a des députés péquistes, même des députés péquistes de la région de l'hôpital de Saint-Jérôme, l'Hôtel-Dieu, où il y a, encore ce matin, 11 patients qui attendent d'être opérés pour un cancer au poumon, qui applaudissent. M. le Président, il faut le faire, hein! Il y en a d'autres qui n'ont pas applaudi. Moi, j'ai remarqué, de l'autre côté, que c'était divisé. Il y en a qui n'ont pas applaudi. Il y en a que la servilité ministérielle puis la servilité partisane, M. le Président...

Une voix: ...

M. Paradis: M. le Président, il n'est pas animé de servilité, lui. Lui, ce qu'il a à dire, il l'a dit, M. le Président, lorsqu'il avait à le dire. M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader de l'opposition, il vous reste 10 minutes, mais ce n'est pas nécessaire de les prendre parce que quelqu'un d'autre vous dit que c'est le maximum. Vous connaissez le règlement. Alors, vous aviez 55 minutes au total. Je vous inviterais, d'ici à la fin, à vous abstenir de propos blessants et non parlementaires.

M. Paradis: M. le Président, j'ai remarqué que, chaque fois que j'ai évoqué la fermeture de l'hôpital de Chauveau, vous avez eu la gentillesse de ne pas m'interrompre, et je vous en remercie.

M. le Président, les pouvoirs que le ministre veut déléguer à n'importe quel organisme sont inscrits à la loi sur la santé et les services sociaux. Les pouvoirs sont les suivants – et le ministre peut déléguer autant ses fonctions que ses pouvoirs et ses devoirs: «Le ministre a pour fonction d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques relatives à la santé et aux services sociaux.»

Est-ce que je pourrais poser, M. le Président, une question très simple au ministre? Il pourra répondre tantôt. À qui voulez-vous déléguer ça? Au ministre de l'Industrie et du Commerce qui, à l'Assemblée nationale, vous représente régulièrement? Est-ce que c'est devenu une business, la santé, pour vous? Est-ce que ça doit être profitable? Est-ce qu'on doit couper dans le fonctionnement jusqu'à faire mal aux patients qui en ont besoin?

Deuxième alinéa: «Le ministre doit voir à la mise en oeuvre de ces politiques, en surveiller l'application et en coordonner l'exécution.»

À qui voulez-vous déléguer ces pouvoirs? Au ministre du Tourisme pour qu'il aille voir ailleurs si ça se passe mieux? M. le Président, à qui voulez-vous déléguer ces pouvoirs? Est-ce que vous n'avez pas besoin, comme nous tous, d'une petite période où on va entendre les spécialistes en disant: Un ministre de la Santé, ça doit être responsable devant la population qui l'élit?

Les gens de Charlesbourg qui vous ont élu, pensant que vous étiez pour être ministre, n'ont jamais voulu que vous déléguiez vos pouvoirs à d'autres instances. Pourquoi aujourd'hui avez-vous honte des pouvoirs qui vous ont été attribués par le premier ministre lorsqu'il vous a assermenté et que vous demandez aux parlementaires de voter en faveur d'une délégation de ces pouvoirs-là?

Vos devoirs, pourquoi voulez-vous vous soustraire aux devoirs qui vous sont imposés par la loi sur la santé et les services sociaux? «Assurer la protection sociale des individus, des familles et des autres groupes». Pourquoi ne voulez-vous pas assumer ces devoirs? «Prendre les mesures requises pour assurer la protection de la santé publique». On apprenait encore aujourd'hui, M. le Président, que, entre autres, la législation sur le tabac, qui était promise depuis je ne sais combien de temps, ne sera pas déposée. À qui voulez-vous déléguer cette responsabilité parce que vous n'avez pas le courage de l'assumer?

M. le Président, «voir à l'amélioration de l'état de santé des individus et du niveau de santé de la population». Je pourrais poursuivre, je pourrais continuer. Qui vous a fait croire, comme technocrate... M. le Président, qui a fait croire au ministre de la Santé qu'il devait renoncer à assumer ses responsabilités? Moi, je suis conscient que, le bilan de la santé, ça ne fonctionne pas bien. Mais pourquoi vouloir renoncer à ce qui est prévu dans la loi comme étant vos devoirs, vos responsabilités et vos fonctions et demander aux parlementaires des deux côtés de la Chambre la possibilité de les déléguer à quelque organisme que ce soit? Qu'est-ce que vous avez en arrière de la tête?

M. le Président, quand le ministre est venu en cette Chambre et a demandé plus de responsabilités, on lui a dit: C'est dans le but de fermer les hôpitaux. Il nous a dit: Non, non, non, faites-moi confiance, ce n'est pas ça. M. le Président, vous étiez parmi les parlementaires qui lui ont fait confiance. Qu'est-ce qui est arrivé? Les fermetures d'hôpitaux se sont succédées. Et ce n'est pas fini, là. À Montréal, le ministre prétend, après avoir fermé sept hôpitaux, après avoir fermé 1 500 lits, qu'il doit en fermer encore 500 de plus, la semaine prochaine. Qu'il se lève en cette Chambre et qu'il dise que ce n'est pas vrai. Il va en fermer 500 autres, la semaine prochaine, M. le Président. À Québec, après avoir fermé le Jeffery Hale et le centre hospitalier Chauveau, à tous les jours, on lit dans les journaux: «L'affaiblissement de l'Hôpital du Saint-Sacrement», M. le Président. À tous les jours! Le ministre ne dira jamais qu'il veut le fermer. Il va l'affaiblir à un point tel qu'il va se fermer tout seul.

Aujourd'hui, le ministre vient en cette Chambre et nous dit: Déresponsabilisez-moi pour l'avenir. M. le Président, quand on entre en politique, quand on a des convictions politiques, quand on se fait élire député, quand on est assermenté ministre, ce n'est pas pour demander à l'Assemblée nationale de se déresponsabiliser parce qu'on a créé un système qui ne fonctionne plus et qui atteint les Québécois au coeur même de leur existence. Ce n'est pas parce qu'on a fait en sorte, suivant les analystes, que le système de santé retourne à ce qu'il était avant la Révolution tranquille, qu'on a le droit de venir en cette Chambre demander aux parlementaires de nous déresponsabiliser. Notre obligation, M. le Président, c'est d'assumer nos responsabilités.

Je le répète, M. le Président, bien amicalement encore une fois. Si on croit ce qu'il nous a dit au moment du dépôt de son projet de loi, s'il veut simplement faire en sorte que, les personnes âgées dans les centres d'accueil, dans les centres hospitaliers de longue durée, on protège ce qu'il leur reste d'argent disponible pour leurs besoins essentiels, s'il veut que l'Assemblée nationale lui vote ce projet de loi avant les Fêtes, il n'y a aucun problème, de ce côté-ci. Si c'est vraiment ça, M. le Président, qu'on balise le libellé de la loi. Le débat ne sera pas très long. On va s'assurer que c'est au bénéfice de ces personnes âgées, et la loi va être adoptée.

Mais que, sous le couvert d'une telle représentation – et vous relirez, M. le Président, ce que le ministre a dit au moment du dépôt du projet de loi – on tente de déresponsabiliser le grand responsable du marasme dans le système de la santé – moi, je ne sais pas qui, de l'autre côté, là... peut-être que, s'il y en a qui sentent les élections, ils vont dire: On va le déresponsabiliser, ça va nous aider, parce qu'on ne peut pas traîner ça comme boulet dans nos comtés – on tente de déresponsabiliser le grand responsable de ce qui arrive aux gens qui sont sur des listes d'attente, aux gens qui ont été mal soignés, aux gens qui sont décédés, on n'aura pas la lutte facile.

Mais, si on veut aider les personnes âgées, c'est acquis, M. le Président. C'est pourquoi, mon collègue le leader adjoint de l'opposition a présenté une motion en disant au ministre: Vu que vous n'êtes pas clair, vu que, vous-même, vous parlez d'imbroglio, vu que, vous-même, vous parlez d'imprécision, vous qui aviez l'habitude de tout prévoir dans le moindre détail, il y a quelque chose qui vous a échappé ou vous en êtes complice. Prenez trois mois pour réfléchir, pas pour réfléchir en fonction d'appliquer de la technocratie, mais trois mois pour réfléchir à ceux et à celles qui vont être soit les bénéficiaires soit les victimes de la loi qu'on va adopter ce soir. Prenons le temps de les entendre, prenons le temps d'entendre en commission parlementaire leurs représentants puis même certains députés péquistes, quelques-uns, malheureusement, qui prennent la défense de leurs concitoyens, puis, après ça, on aura une image claire, on saura si le ministre nous a dit la vérité dans son premier discours ou dans son deuxième discours.

(23 heures)

Mais ce qui doit nous animer tous et toutes, ce soir, c'est de savoir qui dit vrai, le ministre de la Santé qui s'est levé la semaine passée ou le ministre de la Santé qui s'est levé ce soir. Lequel des deux ministres de la Santé dit vrai? Le ministre de la Santé qui nous dit que tout va bien ou les médecins, les infirmières et les travailleurs de la santé, qui nous disent que tout va mal? Le ministre de la Santé qui nous dit qu'il est un bon gars ou la revue L'actualité qui nous dit: Pensez-y deux fois avant de lui donner le bon Dieu sans confession? Il a fait des menaces. Il a ses hommes en place. Si vous défendez... Je peux reciter au texte, je m'excuse, là. Le leader adjoint du gouvernement m'invite encore une fois à reciter L'actualité au texte, et je vais reciter le journal L'actualité au texte. Il parle un petit peu comme son ministre qui disait: «On a été démagogique à ce sujet-là, dit le ministre, qui refuse de s'expliquer – même situation que le leader adjoint du gouvernement – mais promet de régler ses comptes quand il écrira ses mémoires.» Je présume que c'est la même situation que le leader adjoint du gouvernement. «Des rumeurs ont circulé. Des cadres de l'hôpital Notre-Dame qui veulent conserver l'anonymat – M. le Président, des cadres qui n'osent pas parler publiquement – affirment que le ministre de la Santé a été très agressif, vengeur et rancunier.» Ce sont des accusations graves, ça, de la part de cadres de l'hôpital qui a été qualifié par un premier ministre du Québec comme le vaisseau amiral des hôpitaux de la province. «Des membres du Parti québécois auraient tenté d'intimider, de bâillonner les spécialistes du centre. Le président du Collège des médecins, Roch Bernier, considéré comme l'homme de main du ministre, aurait menacé de traduire des spécialistes devant le comité de discipline de l'Ordre pour désobéissance au ministre.»

M. le Président, les gens qui nous écoutent chez eux disent: Ça n'a pas de bon sens, un régime comme ça. Maintenant, on comprend un petit peu plus pourquoi on a à attendre, pourquoi un petit peu plus... Mais est-ce que, de l'autre côté, il y a des députés qui peuvent se lever puis endosser le ministre? La députée de Rimouski me dit oui. Elle me dit que, elle, elle peut endosser, elle est d'accord avec le ministre qui se propose de faire des menaces, qui se propose de bâillonner, qui se propose d'intimider...

Une voix: Ils sont tous d'accord. Qui ne dit mot consent.

M. Paradis: Non, M. le Président, c'est la seule qui s'est levée. Les autres sont au courant, les autres ont vécu dans leur comté des situations qui témoignent que l'article de L'actualité ... M. le Président, vous en êtes un qui avez vécu dans votre comté une situation qui explique et qui comprend que l'article de L'actualité est bien fondé.

M. le Président, est-ce qu'on peut, à ce moment-ci, demander au ministre – pas en notre nom, pas de l'opposition, il ne nous aime pas, nous autres, puis il ne nous écoute pas – est-ce qu'on peut lui demander, au nom des patients, au nom des gens qui oeuvrent dans le réseau, de prendre trois mois pour réfléchir plutôt que de donner raison à L'actualité ? Moi, j'aimerais ça revenir au printemps et dire: L'actualité s'est trompée, le ministre est un homme ouvert, le ministre est un homme compréhensif, le ministre est un homme sympathique, le ministre est un homme attentionné aux patients du système de la santé. Je serai le premier... Vous me connaissez, M. le Président, lorsque je commets une erreur, je suis le premier à le reconnaître. Je pourrais revenir en cette Chambre et féliciter le ministre d'avoir pris trois mois pour réfléchir

Une voix: Comme médecin.

M. Paradis: Il y a quelqu'un qui me souffle «comme médecin», mais il y a des gens qui me disent que ce n'est pas un vrai docteur. Les vrais docteurs me disent que ce n'est pas un vrai docteur, qu'eux autres touchent aux patients, qu'eux autres soignent les patients, qu'eux autres compatissent avec les patients, qu'eux autres interviennent au nom des patients et ils me disent que quelqu'un qui n'a pas cette sensibilité-là ne peut pas être considéré comme un vrai docteur. Ça, ce sont de vrais docteurs qui me disent ça, M. le Président. Maintenant, moi, je voudrais lui donner la chance d'en être – peut-être que l'intervention était justifiée – un vrai médecin, de prendre trois mois puis de nous revenir... Et, s'il a besoin, entre-temps, du projet de loi pour aider les personnes âgées, ça, là, M. le Président, vous me connaissez, je vous connais, on va travailler ensemble pour que les personnes âgées soient protégées, qu'il y en ait davantage si c'est possible, qu'on puisse épargner sur des frais administratifs et qu'on puisse leur en laisser plus à chaque mois. Mais le ministre, à date, il ne leur en a pas laissé plus, il les a taxées de 300 000 000 $ avec son assurance-médicaments. Il leur en laisse moins. Nous, là, on est prêts à tout, d'ici la fin de la session, pour que ce projet de loi là, s'il vise les objectifs que le ministre nous a dit la semaine dernière, soit adopté.

Maintenant, si on s'en tient à son discours de ce soir, on va être obligé de prendre, malheureusement, tous les moyens pour l'amener à réfléchir. Et seuls, M. le Président, nous sommes convaincus que nous sommes voués à l'échec, on ne pourrait pas réussir, mais, si vous nous aidez, si les députés péquistes de l'autre côté qui connaissent les cas dans leurs comtés nous aident, M. le Président, je pense que tout le monde ensemble, sur le plan parlementaire – et ça serait un des beaux éléments de la réforme parlementaire – on pourrait convaincre le ministre de la Santé de prendre trois mois, d'adopter ce qu'il veut pour les personnes âgées, puis, pour les autres, se déresponsabiliser... Peut-être que les élections vont approcher à un moment donné, puis, s'il veut se déresponsabiliser complètement, et je sais que ce n'est pas votre cas, M. le Président, lui, il pourra choisir de ne pas solliciter un autre mandat ou écrire une lettre de démission au premier ministre. Mais il n'a pas besoin de le traduire dans un projet de loi, il n'a absolument pas besoin de le traduire dans un projet de loi.

Alors, M. le Président, je conclus en invitant le ministre de la Santé à faire preuve d'un petit peu de compassion. Je sais que c'est difficile pour un technocrate, mais à l'impossible nul n'est tenu. Mais, moi, je crois que c'est encore possible dans le cas du ministre de la Santé de se soumettre aux argumentations de l'opposition officielle et de certains de ses collègues, à votre argumentation à vous-même, M. le Président, et à faire en sorte que, dans trois mois, on puisse revenir en Chambre avec une idée exacte de ce que contient le projet de loi et l'adopter au bénéfice de nos concitoyens. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader de l'opposition. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le leader du gouvernement, je vous cède la parole.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, je vis en cette Chambre, aussi étonnant que ça puisse paraître, un paradoxe. Effectivement, comment des propos si petits peuvent m'amener à penser à un grand esprit? Le grand esprit auquel je pense est Talleyrand, prince de Périgord, qui disait: «L'ambition est comme le feu, elle se nourrit des matières les plus nobles comme des plus viles.» Voilà effectivement, M. le Président, le paradoxe que je vis à entendre des propos que je n'hésite pas à qualifier de petits.

Celui qui tient lieu de leader de l'opposition a fait un immense préambule avant d'arriver au fond de la question – s'il y est arrivé, entre parenthèses – dont vous me permettrez quand même de rétablir certains faits. Épris d'une sincérité et d'une compassion tout empruntées, à mon point de vue – le passé étant garant de l'avenir, je doute d'une conversion aussi soudaine; c'est sans doute la foi du charbonnier – il a commencé, M. le Président, par citer un cas à l'hôpital Notre-Dame de Montréal. Il y a l'hôpital Notre-Dame de Montréal, qui est un des pavillons du Centre hospitalier universitaire de Montréal, situé dans ma circonscription, et je pense être bien informé de ce qui se passe dans tous les établissements publics de ma circonscription. J'ai toujours estimé que cela était de mon devoir comme député de m'informer de ce qui existe. Voilà.

(23 h 10)

Alors, il a parlé de cinq patients qui n'avaient pas eu de chirurgie et dont le médecin a fait une longue dénonciation par voie de journaux ou de communiqués – je ne me souviens plus du tout – ce que celui qui tient lieu de leader de l'opposition a dit. Il a oublié de spécifier que ces cinq patients, je crois, cinq... il y en avait trois, je crois, qui étaient à leur résidence, ils n'étaient pas dans des lits le long des couloirs, comme il aime bien citer ces exemples avec beaucoup de pathos. Et le médecin voulait effectivement obtenir l'opération de ces gens, une intervention chirurgicale. Il s'est lancé à travers les journaux, mais il n'avait pas parlé – c'était son oubli, élémentaire, chers collègues, écoutez – il n'avait pas parlé au chef de chirurgie de l'hôpital. Le leader de l'opposition dit: Et ce monsieur s'est fait rabrouer. Et il a employé d'autres termes comme s'il avait été condamné à je ne sais quel camp de travaux forcés après pour une espèce de déviationnisme. Ah non! Mais ses collègues à l'hôpital lui ont tout simplement dit: Mais, quand tu as des cas de chirurgie, parle au chef du département de chirurgie de notre hôpital et non pas à celui qui tient lieu de leader de l'opposition. C'est ça qu'il s'est fait dire à l'hôpital. Et les médecins ont ajouté: Et, par ton intervention, tu ruines l'excellente réputation de l'hôpital Notre-Dame, qui est un centre hospitalier hors pair.

L'ambition, M. le Président, comme disait le prince de Périgord, est comme le feu, elle se nourrit des matières les plus viles comme des matières les plus nobles. Et puis, vous prenant à témoin, de façon régulière, il a parlé des fermetures d'hôpitaux, accusant le ministre de la Santé et des Services sociaux comme étant celui qui allait – et il tentait de projeter cette image – avec un cadenas, fermer tout, etc. Mais la décision de fermer les hôpitaux s'est prise à partir des régies régionales de la santé.

Ah! Qui a instauré ces régies régionales de la santé? Quelqu'un peut-il me répondre? Peut-être que, de l'autre côté de la Chambre, il y en aurait deux qui pourraient me répondre. Qui a instauré les régies régionales de la santé? Eh bien, c'est le gouvernement précédent, le gouvernement du Parti libéral, sous Marc-Yvan Côté qui, par après, par contre, a dit que le ministre faisait un job que lui aurait aimé faire, mais que son gouvernement ne l'appuyait pas, puis qu'on avait accusé des retards. Voilà. Alors, il y a la vérité, le droit à la vérité et l'existence d'une certaine vérité que celui qui tient lieu de leader de l'opposition omet à sa volonté. Le prince de Périgord a toujours raison, l'ambition, c'est comme le feu, ça se nourrit des matières les plus nobles comme des matières les plus viles, M. le Président.

Il a, après, dit que le ministre voulait se décharger de tout. Nous allons le rassurer immédiatement, le ministre n'a pas du tout l'intention de faire comme lui, et surtout au niveau des questions éthiques et morales, surtout au niveau des questions éthiques et morales.

Je vais vous lire une note qui concerne la délégation de l'exercice de fonctions, la nécessité de la délégation. Eh bien, c'est dit: «Généralement, le législateur confie au ministre un mandat assez large de direction et d'administration en laissant à sa discrétion l'exercice des pouvoirs qui lui sont attribués, les modes d'exécution de ses tâches et l'organisation administrative de son ministère.» Bon. «Ces délégations des pouvoirs – je reprends un peu plus loin, M. le Président – ces délégations des pouvoirs du ministre ont un caractère implicite en fonction des responsabilités attribuées à chaque poste de fonctionnaire, sans nul besoin de recourir à un acte formel d'autorisation écrite ou verbale de la part du ministre.» Et nous irons un peu plus loin: «La délégation implicite de pouvoirs s'appuie également sur le principe de la responsabilité ministérielle selon lequel le ministre est imputable devant le Parlement non seulement de ses politiques, mais également de ses actes administratifs dont ceux accomplis par les fonctionnaires relevant de son autorité.»

Une telle provision a été établie dans la loi constituant – le ministre l'a citée, je le répète – la loi créant le ministère d'État de l'Emploi et de la Solidarité. Alors, si on lit bien, dans la loi constitutive du ministère d'État de l'Emploi et de la Solidarité, l'article 6 disait: «...confère au ministre titulaire de ce ministère l'autorité de déléguer, par une entente conclue avec un organisme, l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par une loi qui relève de lui.» Bon. Et, à la lecture des débats de la commission de l'économie et du travail, qui est la commission qui a entendu ce projet de loi, il est clairement implicite que le ministre demeure imputable tant politiquement qu'administrativement.

«Même si la loi confère au ministre la faculté de déléguer l'exercice de fonctions – je lis bien – cette habilitation est d'abord et avant tout destinée à assurer l'exécution de la loi conformément à sa lettre et à son esprit. Il ne saurait donc être question pour le ministre, au moyen d'une entente, de se départir de toute responsabilité à l'égard de tout ou partie d'une loi ou d'un règlement qu'il a charge d'appliquer pour en investir un tiers formellement et définitivement, prérogative qui n'appartient qu'à l'Assemblée nationale vu le principe de la supériorité de la loi sur les actes administratifs.» Et que celui qui tient lieu de leader de l'opposition soit rassuré, il pourra toujours, durant la période des questions, continuer sa démagogie avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, puisqu'il est toujours imputable tant politiquement qu'administrativement.

«L'objectif recherché par la modification législative est de permettre une certaine déconcentration administrative et nullement de créer un pouvoir autonome de décision par un mécanisme de décentralisation. Le ministre demeure toujours le responsable en cette Assemblée, nous pouvons le questionner chaque fois. Le mécanisme de la déconcentration se caractérise par le fait qu'il ne porte pas atteinte à l'unité du pouvoir de décision au principe de la centralisation.»

Voilà. Je pourrais continuer, M. le Président, et vous dire que «l'organisme n'agit donc pas – une fois qu'on a fait cette délégation – de sa propre initiative ou de son propre chef – comme dans le cas d'une décentralisation; là, c'est une déconcentration, nuance – mais demeure subordonné au contrôle hiérarchique contractuel du ministre dont il devient en quelque sorte le représentant et dont il engage la responsabilité ministérielle». Ah! Ah! Nuance. Et là, épris d'une sincérité et d'une compassion que sa voix trahit, dont la population du Québec n'est pas dupe, n'est absolument pas dupe, il dit: «Mais les personnes âgées!» Oui. Bon.

Bien, alors, voilà l'effet de cela, et je suis bien placé pour en parler, je prendrai l'exemple de mon père, M. le ministre, je suis persuadé que cet exemple va vous intéresser. Alors, voici ce que la loi permettrait au ministre de faire. Nous avons tous, si ce n'est pas un père ou une mère, un oncle, une tante, peut-être un cousin, une cousine, un frère ou une soeur, dépendant de l'âge des membres de l'Assemblée nationale, quelqu'un qui est en résidence parce qu'il est en perte d'autonomie ou souffre d'une maladie chronique nécessitant des soins qui, malheureusement, ne peuvent pas être donnés à la maison. Chacune de ces personnes a soit des rentes qui lui sont propres suite au fruit de son travail, ou reçoit une rente de retraite, voilà, comme la majorité d'entre nous l'aurons lorsque nous quitterons.

(23 h 20)

Eh bien, vous savez tous que, quand on est dans un foyer d'hébergement, une résidence privée ou semi-privée pour les personnes âgées, il y a un montant qui est perçu pour l'entretien de cette personne. Tout le monde sait cela. Mais ce que les gens ne savent pas, c'est que la perception de ce montant... Bon, attention, je reprends. On perçoit un montant et, naturellement, il y a l'obligation d'en laisser une partie à la personne de façon à ce qu'elle puisse avoir – employons l'utilisation courante – de l'argent de poche. Donc, il y a la garantie qu'ils n'auront pas... Exemple, si la personne n'a que 1 000 $ par mois de rentes, qu'on charge 1 000 $. Je vais vous donner un chiffre comme ça en exemple: on prendra 800 $, mais il lui restera au moins 200 $ pour subvenir aux petits besoins que ces personnes ont d'acheter un paquet de ci, une petite gâterie, à l'occasion, et un petit cadeau au petit-fils ou à la petite-fille qui vient voir cette grand-maman ou ce grand-papa qui est dans le centre. Eh bien, la perception de ce montant est actuellement faite par deux organismes, c'est-à-dire le ministère de la santé et de la sécurité du revenu et le ministère de l'emploi et de la sécurité sociale. Ils sont deux pour aller collecter ceci. Ah, bon!

Le ministre dit: Avec la délégation de pouvoirs que j'ai, je confierais la perception de ceci à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, qui s'occuperait de percevoir ces montants-là au lieu que le ministère soit, lui, le percepteur, et, comme il le disait si bien, qu'il se concentre et se préoccupe à autre chose que la perception.

Mon père, malheureusement décédé – et j'y reviendrai – a été durant plusieurs mois au centre Bruchési, sur la rue Rachel. Et j'en profite, d'ailleurs, pour saluer le personnel et le remercier pour ce qu'il a fait pour mon père. Il était dans un milieu tout à fait exceptionnel, avec un personnel dévoué comme ce n'est pas possible, un climat et une ambiance... Vraiment, moi, comme enfant unique, eh bien, j'étais sécurisé de savoir que mon père était là, et il était bien traité.

Quelle différence cela pouvait-il faire à mon père que ce soit perçu par la Régie de l'assurance-maladie au lieu que ce soit perçu par le ministère, qui devrait faire autre chose que cela? Ça n'aurait rien enlevé à Paul Boulerice, rien au niveau de la qualité des soins, rien au niveau de la salubrité de l'établissement, rien au niveau des activités qu'on leur programmait, ça n'aurait rien enlevé aux conditions de travail du personnel, ça n'aurait absolument rien enlevé à mon père que la perception soit faite par une régie qui est habituée de traiter des problèmes purement administratifs, alors que le ministère, dégagé de ce temps, pourrait justement se préoccuper d'autres choses qui nous préoccupent. Il pourrait penser plus, peut-être, penser plus longtemps, plus longuement sur des sujets plus profonds. Qu'est-ce que ça change?

Le trémolo dans la voix et la pause des mots, j'essaie de le mimer, mais personne n'est dupe, la caméra grossit les traits, surtout quand les traits deviennent vulgaires. La caméra grossit: on voit bien que c'est emprunté. Emprunté! Ça ne modifie en rien la qualité de vie quotidienne dans ces centres des personnes âgées. Pourquoi tenir un discours comme celui-ci face aux personnes âgées, quand on sait que c'est une clientèle fragilisée? Pourquoi? Je crois que le prince de Périgord, M. de Talleyrand, l'a dit: L'ambition est comme le feu, elle se nourrit des matières les plus nobles comme des matières les plus viles.

Malheureusement, et je ne vais pas le nier, le ministre de la Santé et des Services sociaux le reconnaît lui-même, il arrive encore des ratés. Je ne cherche pas d'excuses. Comme on disait: Que celui qui est sans péché jette la première pierre. Malheureusement, dans tous les pays du monde, ça se produit, et l'évoquer n'est pas une raison pour ne pas rechercher encore des moyens meilleurs pour corriger la situation. Mais il ne cesse, à tout bout de champ, de critiquer et de faire cas par cas des choses qui arrivent, alors que...

J'ai mentionné mon père, tantôt, en disant qu'il était... M. le ministre responsable du Développement des régions et de l'Énergie connaissait bien mon père. Mon père a dû être sorti de Bruchési pour une intervention chirurgicale à l'hôpital Saint-Luc, qui est une des composantes du Centre hospitalier universitaire de Montréal. Et, attention, là! mon père n'est pas décédé il y a 30 ans, mon père est décédé il y a un an. Nous étions dans la phase de restructuration de notre système hospitalier, et j'ai passé très exactement cinq jours à l'hôpital. La députée de Marguerite-Bourgeoys, d'ailleurs, elle, pourrait en témoigner parce qu'elle le sait. D'ailleurs, elle n'est pas là pour tenir ce discours, elle; elle est différente. Différente! Je me réjouis de voir que la députée de Marguerite-Bourgeoys a un ton plus élevé, M. le Président, qui lui méritera d'ailleurs des appuis qu'elle mérite, permettez-moi de le dire.

Écoutez, quand mon père est arrivé, il y avait des gens à l'urgence. C'est un centre-ville. Il y avait des gens à l'urgence, oui, mais le personnel s'occupait d'eux. Il a été dans un couloir, mais, après, l'état s'aggrava de façon telle qu'il est allé dans une unité tout à fait spécialisée. Et j'ai vu du personnel, M. le Président, qui ne ressemble pas du tout à l'image qu'on essaie de nous donner d'eux, de l'autre côté. On essaie de nous faire croire que notre personnel hospitalier passe ses journées à rechigner, à se plaindre, à faire ci, à faire ça. Non, M. le Président. J'ai vu des médecins, j'ai vu des infirmières et des infirmiers, j'ai vu des aides-soignants, j'ai vu du personnel de soutien, à l'hôpital Saint-Luc, chacun vaquait à son occupation, au bien-être des personnes qui étaient là. J'ai même rencontré des infirmières qui, voyant le drame que je vivais de voir mon père mourir tranquillement, m'aidaient à accepter cette issue qui est douloureuse. Quand on est enfant unique, M. le Président, vous le savez, il y a un lien qui s'est tissé avec ses parents qui est vraiment très fort.

Quand une infirmière prend le temps de s'asseoir avec moi pour m'expliquer que, même si je crois qu'il est dans le coma, mon père m'entend, et cette infirmière, à partir de son expérience, me dit: Vous devez lui dire que vous êtes d'accord qu'il s'en aille, dites-lui qu'il a tout fait pour vous, parce qu'il n'attend que votre permission, elle m'a donné une belle leçon, une leçon de vie, en fin de compte, une leçon de vie. Mais quel support moral elle m'a apporté! Et, ça, ça n'existe pas dans les conventions collectives. C'est la qualité du personnel des hôpitaux.

(23 h 30)

Et, avec le discours qu'on entend, de l'autre côté, on est en train de tracer une image, un portrait de notre système hospitalier qui est atroce et épouvantable. C'est indigne d'un parlementaire de tenter de vouloir inculquer dans l'esprit des gens un état de notre système hospitalier qui est tout à fait le contraire de celui qu'ils prétendent. C'est indigne envers le personnel, c'est indigne envers ceux qui l'ont construit, ceux qui veulent le maintenir et ceux qui veulent l'améliorer, mais c'est aussi foncièrement dangereux et dommageable face aux personnes qui commencent à avoir peur d'aller à l'hôpital parce qu'on a invoqué des scénarios d'apocalypse. Le leader adjoint du gouvernement parlait de régime de terreur. Mais vraiment, vraiment! On dit: Tout ce qui est exagéré finit par devenir insignifiant, je pense qu'il a atteint son but de toute façon, M. le Président.

Donc, il va de soi que nous serons contre cette motion de report. Contre cette motion de report. Ce sont des délégations que le ministre a besoin d'avoir de façon à ce que ce qui est administratif, là, terre-à-terre, petite comptabilité, là, ces choses-là se fassent par les plus près, les collectes, etc., et que le ministère revienne effectivement à la vocation qu'un ministère doit toujours avoir, qui est de penser aux grandes orientations, de bien les planifier et de faire en sorte que notre système soit meilleur. Meilleur, M. le Président.

Et ce n'est pas avec les discours que nous entendons, spécialement en provenance du leader de l'opposition, qu'on va arriver à se construire un système qui est déjà tout à fait exceptionnel. Il y a toujours un vieux dicton – M. le Président, je vais conclure là-dessus – qui dit: Quand je me regarde, je me désole, mais, quand je me compare, je me console. J'ai eu la mauvaise fortune, comme tout le monde, à l'occasion, d'être malade à l'étranger puis je vous avoue que je m'ennuyais. Même si j'étais dans des pays supposément très évolués, je m'ennuyais du bon système de santé québécois.

Et ce n'est pas aussi en entendant, comme a fait le député de Robert-Baldwin qui disait: En période électorale, on faisait du porte-à-porte puis on disait, pour savoir l'allégeance des gens, pour savoir comment ils allaient voter... Il dit: On posait la question: Qu'est-ce que vous pensez du ministre de la Santé? Bien, je dis: Écoutez, moi, actuellement, je fais du porte-à-porte, puis, à chaque fois que je frappe à la porte, je dis: Qu'est-ce que vous pensez du Parti libéral? Résultat: Bien, dans les sondages, je me ramasse avec 10 % de plus. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre d'État des Ressources naturelles. C'est bien.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je suis heureux d'intervenir sur cette motion, puisque, depuis quelques semaines, pour ne pas dire quelques mois, je vous avoue très honnêtement que je trouve à peu près inconcevable le type de discussion qui se fait dans le domaine de la santé au Québec. Et c'est parce que j'ai été ministre de la Santé en 1984 et que j'ai personnellement, devant l'état de la situation en 1984... Devant un système qui se dégradait, j'avais décidé, en 1984, de créer une commission parce qu'on savait très bien qu'on s'en allait vers un cul-de-sac si on continuait d'oeuvrer de la façon dont on oeuvrait, et ce, dans les années 1983-1984. J'avais décidé de créer une commission où on est allé chercher des gens qui connaissaient le système, qui connaissaient la gestion, qui connaissaient le système global de santé puis qui étaient capables de nous présenter un rapport avec une vision d'avenir, une vision de redressement du système de la santé.

Et, en juin 1984, je me souviens encore, je créais la commission qui s'est appelée par la suite la commission Rochon, qui a fourni un rapport à Mme Lavoie-Roux, qui a fourni un rapport, bien sûr, qui a été transmis de Mme Lavoie-Roux à Marc-Yvan Côté, un rapport qui leur disait: Écoutez, on ne pourra pas continuer à oeuvrer de la façon dont on oeuvre, on s'en va nulle part. Il y a des lits de soins de courte durée qui sont occupés par des malades chroniques. Ça vous coûte une fortune, c'est 550 $ par jour pour un malade chronique qui pourrait être hébergé avec des soins adéquats dans un lit de soins de longue durée dans un centre d'accueil, et vous pourriez, avec les économies d'échelle, traiter plus de gens avec les mêmes finances. On ne peut plus continuer à garder des lits occupés exclusivement par les caprices d'un médecin. Des quotas de lits par médecin. Il y avait toutes sortes de folies, toutes sortes d'aberrations. Des gens qui passaient trois mois, quatre mois dans un hôpital en attente d'une chirurgie cardiaque à l'Institut de cardiologie, au CHRDL. Ils étaient à l'hôpital. Ils attendaient qu'il y ait une place pour l'opération. Ça s'est fait, ça. Qu'on ne me dise pas que ce n'est pas vrai. C'est de mes amis, à part ça, ces gens-là.

Donc, M. le Président, c'était à la va comme je te pousse. Il est arrivé un rapport, un rapport qui était révolutionnaire en soi parce qu'il disait: Voici les pistes de réorientation, et il y a quelques ministres assez honnêtes qui ont dit: Si mon gouvernement avait voulu, j'aurais appliqué ce rapport-là qui était un tournant, qui était un virage, qui était une réorientation. Et je me souviens à l'époque, parce que j'étais dans l'opposition quand ce rapport a été mis sur la table même si j'avais été à l'origine de la création de la commission Rochon, je me souviens d'être allé écouter les Roger Bertrand, les Jean Rochon, à Saint-Jérôme, à Joliette, à deux ou trois endroits, pour bien absorber ce rapport-là et dire: Oui, le virage s'impose. Il s'impose. On ne pourra pas continuer, sinon on va sombrer dans le ridicule, et la qualité des services va baisser s'il n'y a pas de réorientation, s'il n'y a pas de virage, s'il n'y a pas de tournant. Et Marc-Yvan Côté de dire, quelques mois après s'être retiré de la politique: J'aurais donc dû appliquer, mon gouvernement aurait donc dû me permettre d'appliquer ledit rapport. Ça ne s'est pas fait.

Les figures qui sont demeurées sur les banquettes de l'opposition, ayant perdu à peu près tout ce qu'ils avaient de jus, les Tremblay qui ont quitté, les Côté qui ont quitté, les Lavoie-Roux qui ont quitté, on doit composer avec ce qui reste. C'est trop fort pour eux autres, ça, ce rapport-là. C'est tellement fort pour eux autres qu'ils ont découvert une jalousie maladive. Le ministre a pris un virage. Celui qui a conçu le virage, celui qui a conçu les redressements est devenu ministre de la Santé. Et je me souviens encore que j'ai été autorisé par M. Parizeau à inciter, à motiver et à demander à Jean Rochon à l'époque de se présenter en politique. Parce qu'on avait besoin d'un gars comme lui qui avait conçu le plan de redressement, qui avait la capacité et la compétence pour pouvoir assumer ses responsabilités. Ça a pris quelques rencontres, mais, à un moment donné, Jean Rochon a dit: Je fais le saut. Il s'est retrouvé en politique et il gère le ministère depuis. Il y a peu d'hommes politiques en cette Chambre, même de notre côté – je l'admets très candidement – il y a peu d'hommes politiques qui peuvent avoir subi ce qu'on lui a fait subir sans broncher, en demeurant tout à fait au-dessus de la mêlée, avec une vision globale du système de santé comme pas un homme ou une femme politique n'a été capable de le montrer.

M. le Président, je regarde ces faces. Il arrive quelque chose un matin, ils se lèvent, là. Le très chloroformant leader de l'opposition: M. le Président, Mme Unetelle ce matin est en attente dans une urgence. Bien oui. Puis monsieur X est en attente dans une autre urgence, et madame Y attend une opération à telle place, et monsieur W également a une fronde qui a abouti dans la nuit et il s'est ramassé à l'urgence. Si on prenait des cas individuels... Je n'ai jamais vu quelque chose d'aussi répugnant que d'entendre ces choses-là. Je n'ai jamais vu quelque chose d'aussi répugnant. J'ai failli monter un système pour contrer ça. Et je ne peux pas croire qu'ils vont s'amuser à ça à toutes les périodes des questions. Mais c'est la hauteur qu'ils sont capables d'atteindre. Ne vous demandez pas, ils vont rester là. Mais on pourrait quotidiennement aller chercher des dizaines et des centaines de personnes qui reçoivent des soins de qualité par du monde qui a accepté de vivre le virage, sachant qu'il faut sauver notre système, garder les grands acquis.

(23 h 40)

Mon père est décédé l'été passé. Il a été à Joliette, il a été à Montréal. Il a eu une qualité de soins extraordinaire – puis ce n'est pas parce que j'ai fait pression, je n'étais même pas au Québec quand mon père est décédé. Il y en a qui auraient dit: Ah! c'est parce que c'est le père d'un député. Ce n'est pas vrai. Il a été transféré de Joliette à Montréal, il a eu une très grande qualité de soins, puis le personnel a fait un travail professionnel extraordinaire. Et, s'il n'a pas été traité en urgence, c'est parce qu'il n'était pas urgent. S'il a été traité parce qu'il y avait urgence, c'est parce que son état le commandait. Essayer de faire croire qu'il y a des gens qui ont une urgence puis d'autres qui n'en ont pas, essayer de faire croire que les professionnels de la santé ne sont pas capables de juger de l'état d'urgence d'une personne, c'est vraiment répugnant, M. le Président.

Des cas individuels comme on fait là, c'est vraiment faire insulte à la compétence professionnelle des corps médicaux, des spécialistes, des omnipraticiens, de ceux et celles qui oeuvrent quotidiennement dans le domaine de la santé. Et c'est malheureux, ça. C'est malheureux que ça se fasse dans une Assemblée nationale, un tel débat aussi, comment dirais-je, de basse-cour pratiquement. C'est sérieux, ça, la santé des gens. C'est sérieux, ça, la santé des citoyens. Contribuer à alarmer une population alors que c'est faux, c'est vicieux, ça, comme stratégie, c'est très vicieux, M. le Président.

Il y a des gens qui peuvent être dans l'inquiétude. Prenez les malades qui entendent un cas individualisé de même puis qui voient une opposition irresponsable généraliser le système, qui sont déjà anxieux par leur maladie. Qu'est-ce qu'ils font de l'autre côté? Pensant planter le ministre de la Santé, ils alarment une population. Ça «fait-u» quétaine et irresponsable à votre goût! Pourtant, il y a des gens de l'autre côté qui savent ce que c'est que la santé et qui devraient comprendre que ce genre de chose là ne se fait pas, qui ne devraient surtout pas applaudir au très chloroformant leader qui se permet ça quotidiennement.

Moi, M. le Président, je vous avoue que faire une motion de deux heures à 23 h 40 pour retarder l'adoption d'un projet de loi qui ne fait qu'une chose, qui ne fait que faire ce qu'un ministère a déjà fait, à part de ça – Emploi et Solidarité, si j'ai bien compris – c'est un article permettant de déléguer certaines tâches administratives, de déconcentrer certaines tâches administratives... Aïe! le drame. Le technocrate ministre de la Santé qui centralisait tout a l'idée de tout lâcher maintenant. «Faut-u» être quétaine, «faut-u» être irresponsable, «faut-u» ne rien comprendre ou «faut-u» être incohérent et illogique!

Écoutez, faire gérer les avoirs, les petits avoirs de certains bénéficiaires par un comité mixte, ô, quelle irresponsabilité! Comme si les gens n'étaient pas responsables, comme s'ils n'avaient pas de comptes à rendre, comme si le ministre, demain matin, ne serait plus imputable. Imaginez-vous! Le jour où ils vont trouver qu'un 2 $ est tombé derrière le bureau puis qu'ils ne le trouvent plus, ils vont se lever en Chambre pour dire: Madame X a perdu un 2 $, puis c'est Jean Rochon, le ministre de la Santé, qui est responsable. Voyons! Suivez leur logique depuis le début de la session. Comme si le ministre voulait s'enlever son imputabilité. Ce n'est pas ça.

Il va répondre régulièrement, quotidiennement et de façon très intelligente à des questions qui sont souvent insignifiantes. Je ne sais pas comment il fait d'ailleurs pour garder son sang-froid, c'est un peu pour ça que j'ai de l'admiration pour cet homme, lui disant qu'il ne doit pas, mais jamais, se laisser ébranler, parce que, des fois, dans la fatigue, à force de voir de pareilles insignifiances, on est porté à dire: Je suis aussi bien de lâcher, qu'est-ce que ça me donne de faire ce que je fais là? Je redresse le système, on est en train de gagner les acquis, j'ai une solidarité qui semble évidente de notre côté, comment ça se fait qu'à l'Assemblée nationale du Québec on n'est pas conscients qu'on a un des beaux systèmes à préserver puis à conserver et que c'est par des redressements indispensables qu'on va conserver les grands acquis sociaux?

Écoutez, un député comme celui de Robert-Baldwin, je pense, qui a été à l'hôpital Sacré-Coeur, qui a été administrateur, qui a été critique en santé pendant un an, je n'ai jamais vu autant de conneries sortir de la bouche d'un homme politique, M. le Président, que cet administrateur de centre hospitalier. Ce n'est pas croyable, ça n'a pas de bon sens, c'est irresponsable, c'est incompétent, c'est insignifiant et c'est ignorant du système, de voir complètement ça. Ça n'a pas de bon sens. Je n'ai jamais entendu autant de choses farfelues sortir d'un administrateur d'hôpital, de centre hospitalier. Ce n'est pas croyable. Faut-il être dans l'opposition pour dire... J'espère – en tout cas, j'ai écouté les cassettes, au moment où j'étais de l'autre bord – que je n'ai jamais sombré dans l'innocence du genre. Ça n'a pas de bon sens.

Une voix: ...

M. Chevrette: Bien, je m'excuse! Jamais on n'a sorti de cas individuels, jamais! Je n'ai jamais sorti un cas individuel, M. le Président. Et je peux vous dire une chose, je regarde les recteurs d'université ou les doyens, ou je ne sais pas trop quoi, leur rigueur intellectuelle quand il s'agit de juger d'une réforme en profondeur, d'une réorientation pour sauver notre système, il y en a qui doivent au moins essayer de comprendre ça; je ne dis pas qu'ils comprennent, mais ils doivent tenter, de par leur formation antérieure, essayer de comprendre ces choses. Pour certains, je comprends que c'est impossible, mais, pour d'autres, je suis certain qu'ils ne doivent pas applaudir à ce genre de chose.

Moi, je vous dis, M. le Président, que ce deux heures de débats inutiles enclenchés bien souvent pour se faire plaisir, je dois vous dire que ça ne relève pas du tout la compréhension qu'on peut avoir d'un système de santé. Ça relève encore moins un Parlement, bien sûr. Mais je vous dirai qu'il est heureux que le ministre se donne un outil pour déconcentrer certaines gestions, qui responsabilise les gens du milieu, qui responsabilise des bénévoles, qui fait en sorte que ces gens-là puissent bénéficier d'un guichet unique, eux autres aussi, au niveau de la gestion. Ce n'est pas des gens riches qui mettent de l'argent dans ça, à part ça. C'est des petits avoirs de rien. C'est souvent des pitances qu'on met là-dedans pour pouvoir obtenir des petits accessoires de toilette, ou autre chose du genre. Franchement, quand un Parlement prend deux heures pour s'objecter à ça, c'est parce qu'il ne comprend pas grand-chose. Et c'est peut-être ça qui est le plus alarmant encore, de voir qu'un Parlement ne peut pas comprendre ça.

Moi, je voudrais demander au ministre de la Santé de continuer son travail comme si rien n'était. Il y a une solidarité, de ce côté-ci, sans peur et sans reproche. On va les sauver, les soins de santé puis nos grands acquis, envers et contre tous, et surtout envers le Parti libéral, qui a laissé pourrir la situation pendant neuf ans et demi, qui n'a même jamais eu le courage même de donner à un de ses ministres qui avait l'envie de démarrer le devoir ou le pouvoir de démarrer. Je pense que, M. le Président, le ministre actuel a tout notre appui, a toute notre solidarité. Et je suis persuadé que le jour où on viendra devant l'électorat puis qu'on démontrera que le régime de santé, on en a gardé les grands acquis grâce précisément à un homme qui a eu une vision globale, qui a vu plus loin que son nez...

Et, d'ailleurs, dans toutes ces grandes transformations, où on est obligé de faire vite, en plus, parce qu'ils ont tellement accumulé de retard et qu'ils n'ont rien fait, malgré tout cela, regardez les sondages. Notre ami de Sainte-Marie–Saint-Jacques disait tantôt: Je parlais du Parti libéral... Mais regardez les sondages. Les sondages, malgré toutes ces ponctions rapides qu'on est obligé de faire, ces redressements très importants, difficiles, qui font appel à la solidarité d'une population, malgré tout cela, M. le Président, les gens, le peuple, le GBS, le gros bon sens, là, vous avez remarqué: 46-37, 47-39 en faveur du gouvernement actuel. Pourquoi? C'est assez simple, ça, M. le Président. Quand on en met trop, c'est comme quand on n'en met pas assez. Quand on dépasse les bornes du gros bon sens, on sombre dans le ridicule, on perd de la crédibilité. Quand on veut s'attaquer à une compétence puis qu'on n'en a pas nous-mêmes un minimum, c'est ce qui arrive, on n'est pas pris au sérieux dans nos questions.

(23 h 50)

Moi, je voudrais demander au ministre de la Santé, envers et contre tous, de se fier d'abord à la solidarité ministérielle et de continuer à faire ce qu'on fait sur le terrain. Moi, dimanche passé, j'étais dans une région, dans Chaudière-Appalaches, ici, et j'ai parlé des problèmes de santé, j'ai parlé des plans de redressement en santé qu'on a faits, j'ai parlé de ce qui s'est passé dans le temps du Parti libéral pendant 9 ans et demi, j'ai parlé des déficits, des prévisions budgétaires, des orientations du déficit zéro, j'ai parlé des priorités d'action du gouvernement, et, c'est drôle, M. le Président, quand j'ai prononcé le discours, en particulier sur la santé, et que j'ai dit à peu près ceci: Grâce à Jean Rochon, on va pouvoir sauver les grands acquis en santé... Et c'est très malheureux, c'est très, très malheureux, à part ça, que toute la presse ne comprenne pas cela. C'est très malheureux qu'on donne de l'importance à l'insignifiance de certains propos et de certaines questions et qu'on ne donne pas plus d'emphase à la qualité du travail professionnel qui est fait présentement par le ministre de la Santé. Et je voudrais, M. le Président, solidairement, qu'on continue à l'appuyer. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État des Ressources naturelles. Alors, je vais mettre au voix la motion de report:

«Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots "soit maintenant adopté" par les mots "soit adopté dans trois mois".»

Que les députés qui sont en faveur... Non? Alors, cette motion est adopté?

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote par appel nominal. Alors, que l'on appelle les députés.

(23 h 52 – 23 h 58)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît!

Alors, je vais mettre aux voix la motion de report:

«Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots «soit maintenant adopté» par les mots «soit adopté dans trois mois.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Parent (Sauvé), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa).

(minuit)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Jolivet (Laviolette), M. Chevrette (Joliette), Mme Marois (Taillon), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), M. Boisclair (Gouin), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Bertrand (Charlevoix), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce qu'il y a des abstentions?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, une minute. Oui, monsieur.

Le Secrétaire adjoint: Pour:16

Contre:49

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): La motion est rejetée. Et, s'il vous plaît, je vous inviterais à attendre quelques minutes. Nous allons ajourner nos travaux jusqu'à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 0 h 3)


Document(s) related to the sitting