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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, December 3, 1997 - Vol. 35 N° 142

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Table des matières

Présence de représentants de l'Office des personnes handicapées du Québec accompagnés d'une délégation de personnes handicapées

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures deux minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Présence de représentants de l'Office des personnes handicapées du Québec accompagnés d'une délégation de personnes handicapées

Alors, avant de débuter les affaires courantes, dans le cadre de la Semaine québécoise des handicapés, j'ai le grand plaisir de souligner la présence dans les tribunes de représentants de l'Office des personnes handicapées du Québec, présidé par un ancien collègue de l'Assemblée nationale, et accompagnés d'une délégation de personnes handicapées.


Affaires courantes

Alors, affaires courantes.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Veuillez prendre en considération un projet de loi d'intérêt privé à l'article a.


Projet de loi n° 258

Le Président: À l'article a du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 258, Loi concernant la Ville de Brossard. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.


Mise aux voix

Mme la députée de La Pinière présente le projet de loi d'intérêt privé n° 258, Loi concernant la Ville de Brossard. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Oui.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Cette motion est adoptée? Adopté.

Il n'y a pas de dépôt de documents ni de rapports de commissions aujourd'hui.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, Mme la députée de Vanier.


Négocier une entente avec l'Association des centres hospitaliers et des centres d'accueil privés du Québec

Mme Barbeau: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition à l'Assemblée nationale par 709 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant le litige impliquant l'Association des centres hospitaliers et des centres d'accueil privés et le ministère de la Santé et des Services sociaux;

«Considérant que l'acceptation des exigences du ministère de la Santé et des Services sociaux conduit à brève échéance à la disparition des établissements privés conventionnés;

«Considérant que, nous, les usagers et les familles des usagers, témoignons de notre satisfaction à l'égard du centre hospitalier Saint-François inc.;

«Considérant que nous, les usagers et les familles des usagers, témoignons à l'effet que le milieu de vie y est agréable, que nous sommes traités avec respect et que nous tenons à la qualité des relations humaines toujours présentes;

«Considérant que les établissements sont contractuels avec le gouvernement depuis 30 ans et que la formule de financement oblige les établissements à assumer les déficits et assure à la population que les argents publics investis dans les services directs ne peuvent être utilisés à d'autres fins en plus de permettre des économies de l'ordre de 30 000 000 $ annuellement, et ceci basé selon une étude récente validée par l'économiste Pierre Fortin;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés et soussignées, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre Jean Rochon, ministre de la Santé et des Services sociaux, afin qu'il négocie une entente avec l'Association des centres hospitaliers et centres d'accueil privés qui ne met pas en péril la survie de cette catégorie d'établissements.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: J'aimerais juste vous faire remarquer qu'enfin une est conforme.

Le Président: M. le député de Rousseau.

M. Brien: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre afin de pouvoir déposer une pétition non conforme à nos règlements.

Le Président: Il y a consentement? Allez-y, M. le député de Rousseau.


Cesser les coupures en éducation et maintenir les subventions pour la surveillance du midi

M. Brien: Je dépose l'extrait d'une pétition signée par 4 194 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du comté de Rousseau.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que nous sommes des parents d'enfants qui fréquentent la commission scolaire Des Cascades-l'Achigan;

«Considérant qu'après avoir défrayé les coûts des articles obligatoires pour la rentrée scolaire, M. Laferrière, secrétaire général de la commission scolaire Des Cascades-l'Achigan, nous informe que le montant à payer pour la surveillance de nos enfants à l'école à l'heure du midi va augmenter de 30 $ à 100 $, une augmentation de près de 230 %;

«Considérant qu'à cause des nombreuses restrictions budgétaires de notre gouvernement nous sommes maintenant obligés d'assumer complètement la totalité des frais de surveillance;

«Considérant qu'avec l'inévitable hausse des taxes scolaires pour l'année 1997-1998 et la possibilité des coûts pour le transport scolaires il nous en coûtera encore beaucoup trop;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons que cessent les coupures dans le domaine de l'éducation et que des subventions soient accordées pour les surveillances du midi afin de maintenir un service équitable, accessible à tous et peu coûteux.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions aujourd'hui portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise à ce moment-ci qu'après la période de questions et réponses orales M. le ministre d'État des Ressources naturelles répondra à une question posée le 28 novembre dernier concernant les modalités de perception des comptes en souffrance par Hydro-Québec.

Je vous avise également qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion sans préavis présentée par Mme la ministre de la Culture et des Communications et ministre responsable de la Charte de la langue française.


Questions et réponses orales

Ce qui nous amène à ce moment-ci immédiatement à la période de questions et de réponses orales. M. le député de Chomedey, en principale.


Mandat d'enquête confié à la Commission d'accès à l'information concernant la communication de renseignements personnels au cabinet du premier ministre

M. Mulcair: Merci, M. le Président. M. le Président, depuis quelques semaines, l'ensemble de la population s'inquiète des révélations successives concernant le défaut de la part du gouvernement de garder secrètes les informations personnelles que l'on exige aux citoyens de fournir à l'État. L'élément le plus alarmant est le coulage d'informations fiscales au bureau du premier ministre. La réponse du premier ministre a été de refuser une enquête policière et de refiler le dossier à la Commission d'accès à l'information plutôt qu'à une commission parlementaire où on aurait pu faire toute la lumière sur cette affaire.

(10 h 10)

Mardi dernier, lors du débat d'urgence tenu sur l'affaire du coulage d'informations fiscales au bureau du premier ministre, celui-ci a informé cette Chambre, et je le cite textuellement: «Alors, j'ai décidé ce matin de confier un mandat particulier à la Commission d'accès à l'information, un mandat d'enquête sur cette question pour qu'elle puisse nous dire ce qu'il en est.» Et, un peu plus tard, le premier ministre a dit: «Alors, puisqu'il y a maintenant une enquête qui va être déclenchée...»

On est mardi dernier, M. le Président. Vendredi dernier, le premier ministre ajoutait, et je le cite encore, que «la Commission d'accès à l'information est une instance qui a été investie de pouvoirs tout à fait spéciaux. C'est pour ça que nous l'avons nommée.» Par ailleurs, il a aussi déclaré ceci, et ce qui va au coeur de notre questionnement: «Il n'est du ressort de personne ni même cette Assemblée d'aller à l'encontre de ces dispositions de nos lois, c'est fondamental».

Est-ce que le premier ministre peut nous dire en vertu de quel article de quelle loi un ministre, même le premier ministre, est autorisé, et je le cite, à «confier un mandat particulier à la Commission d'accès à l'information»?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: La lettre que nous avons expédiée à la Commission invite la Commission à tenir une enquête. Le décret qui a été adopté par le Conseil des ministres pour confier à la Commission un mandat très large de vérifier l'état d'efficacité de nos contrôles sur la protection des renseignements personnels propose à la Commission de tenir une enquête, et la Commission a accepté cette invitation et cette proposition, M. le Président, de sorte que la Commission, ayant accepté de se saisir du mandat qu'on l'a invitée à accepter, procède maintenant à son exécution en vertu des pouvoirs qui lui sont confiés. Et je répète ce que le ministre de la Justice a déjà dit ici, que la Commission d'accès à l'information est celle qui a le plus de pouvoirs, en l'occurrence, pour faire la lumière sur ces allégations. Et j'inviterai le député à faire attention avant d'affirmer des choses qui ne sont pas prouvées.

Le Président: M. le député.

M. Mulcair: M. le Président, est-ce que le premier ministre peut prendre acte de ses propres paroles? Ce n'est pas Mme Malo qui a dit ça, ce n'est pas la ministre déléguée, ce n'est pas l'opposition, c'est lui. Et ce n'est pas une invitation vague que l'autre est libre d'accepter ou de ne pas accepter. Je relis ses propres paroles, textuellement, mardi dernier: «Alors, j'ai décidé ce matin de confier un mandat particulier à la Commission d'accès à l'information, un mandat d'enquête sur cette question pour qu'elle puisse nous dire ce qu'il en est.» Et il a ajouté, quelques lignes plus loin: «Alors, puisqu'il y a maintenant une enquête qui va être déclenchée...» C'était la veille de la conférence de presse de M. Comeau, le président de la Commission d'accès à l'information.

Comment le premier ministre peut continuer à prétendre que c'était une simple invitation, alors que c'est clair que c'était une ingérence et une demande expresse? C'est de ça qu'il s'agit, M. le Président, et c'est pour ça qu'on n'ira jamais au fond de l'affaire. C'est arrangé avec le gars des vues, cette affaire-là.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, c'est peut-être de bonne guerre pour un député en mal de publicité de salir des élus, mais il devrait au moins respecter la Commission d'accès à l'information...

Le Président: M. le premier ministre, je vous inviterais un peu à la prudence.

M. Bouchard: Merci, M. le Président. La Commission d'accès à l'information, d'après tous ceux qui en ont parlé jusqu'ici du côté de l'opposition, a été reconnue comme étant un organisme présidé par une personne d'une probité au-dessus de toute attaque, avec de longs états de service, d'intégrité pour l'État. Je pense, M. le Président, que, si on veut conserver la confiance de la population envers les institutions, il faudrait écarter toute espèce de blâme qu'on pourrait, avant même que l'enquête soit terminée, lancer contre la Commission, qui est un organisme impartial, qui répond à l'Assemblée nationale, qui a des pouvoirs qui lui sont confiés par une loi spéciale.

Et, M. le Président, je voudrais simplement référer à l'instrument par lequel la communication a été établie avec la Commission, c'est-à-dire par la lettre que je lui ai envoyée – je crois que je l'ai déposée ici, si je me rappelle bien, sinon je la déposerai dans quelques minutes – où la Commission est invitée et par le décret où on lui propose de faire une enquête. La Commission fait l'enquête; laissons donc l'enquête se poursuivre, et, quand on aura les résultats, on les connaîtra, M. le Président.

M. Mulcair: En principale.

Le Président: En principale, M. le député de Chomedey.


Pouvoir d'enquête de la Commission d'accès à l'information

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Depuis le début, le premier ministre prétend qu'il veut faire toute la lumière sur toute cette affaire. À cette fin, il nous cite en particulier l'article 123 de la loi sur l'accès qui n'accorde à la Commission que le pouvoir de surveiller l'application de sa propre loi.

Est-ce que le premier ministre peut nous dire en vertu de quel article de quelle loi la Commission d'accès aurait, selon lui, compétence pour enquêter sur l'application d'une autre loi, notamment sur la Loi sur le ministère du Revenu?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, la loi qui gouverne la Commission, qui régit la Commission d'accès à l'information est une loi qui pose le principe du secret des renseignements personnels. Le renseignement fiscal est un renseignement personnel, de sorte que la Commission a tous les pouvoirs d'enquêter la façon dont le gouvernement s'acquitte de la protection de tous les renseignements personnels, y compris, bien sûr, les renseignements fiscaux. La Cour d'appel a déjà mentionné que même la Loi sur le ministère du Revenu ne fait pas obstacle à ce que la Commission d'accès à l'information aille vérifier la façon dont la protection est assurée.

Dans ces conditions, M. le Président, je pense que toute cette discussion relève d'arguties qui n'ont rien à voir avec le droit et qui n'altèrent en aucune façon l'intégrité et le fonctionnement de la Commission d'accès à l'information. L'enquête est présentement en cours, M. le Président. Qu'est-ce qu'on veut de plus?

Le Président: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, vendredi dernier et encore aujourd'hui, le premier ministre... En principale, M. le Président.

Le Président: En principale.


Avis juridique de M. Yves Ouellette concernant le pouvoir d'enquête de la Commission d'accès à l'information

M. Mulcair: Oui. Pardon. Vendredi dernier et encore aujourd'hui, le premier ministre s'est allégrement moqué des divers avis d'experts qui ont été cités par les journalistes dans cette affaire et a opposé – il vient de le refaire – notamment, une décision de la Cour d'appel de 1990, dans l'affaire Constantinescu. Je demande la permission à cette Chambre de déposer l'avis juridique sur l'ensemble de ces questions préparé par Me Yves Ouellette, sommité québécoise et auteur reconnu en matière de droit administratif, et ancien doyen de la Faculté de droit de l'Université de Montréal.

Le Président: Il y a consentement pour le dépôt? M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'avis juridique pour le compte de qui?

Une voix: Pour le compte de la vérité.

Le Président: Alors, il doit y avoir consentement unanime. M. le leader du gouvernement a posé une condition. Est-ce que, M. le député de Chomedey... Alors, il n'y a pas de consentement pour le dépôt du document. M. le député de Chomedey, votre question, à ce moment-ci.

M. Mulcair: M. le Président, on voit qu'encore une fois on veut cacher la vérité.

M. Jolivet: M. le Président, vous avez compris comme moi.

Le Président: M. le député de...

M. Jolivet: M. le Président, j'ai demandé une condition, elle n'a pas été remplie. À ce moment-ci, le député a dit qu'on cachait la vérité, et je demande qu'il retire ses paroles. Et il y aura autant d'arguments d'avocat que d'avocats, M. le Président.

Le Président: Le problème, M. le leader du gouvernement, c'est que, encore une fois, l'écoute de la présidence est perturbée par des bruits de fond qui font en sorte que c'est difficile d'entendre exactement ce qui se dit au fauteuil. À ce moment-ci, ce que je me contenterai de faire, c'est de demander au député d'aller directement à sa question, sans commentaire.

(10 h 20)

M. Jolivet: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement, je comprends votre demande. Le problème, c'est que je n'ai pas clairement entendu les propos que vous prêtez au député. Peut-être que d'autres ont entendu. Le problème, c'est que la présidence, quand il y a des bruits de fond, il y a assez de gens dans les tribunes pour voir comment ces bruits de fond existent, et ce n'est pas une invention de la présidence, mais, quand il y a ce genre de bruits de fond, c'est difficile, au fauteuil, de faire le travail correctement, d'entendre les propos et de faire respecter le règlement correctement à ce moment-là.

M. Jolivet: M. le Président, je vous rappellerai que l'individu, le député était debout, la caméra était ouverte, il a dit ces mots. Peut-être que vous ne les avez pas entendus. Je les ai entendus et je demande qu'il retire ces mots.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, strictement pour rappeler aux membres de cette Assemblée, M. le Président, les dispositions du deuxième alinéa de l'article 41: «La décision du président ou de l'Assemblée ne peut être discutée.» Que l'on procède avec la période de questions.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, vous avez le moyen de vérifier. Vous pouvez arrêter la période de questions si vous voulez, mais allez vérifier.

Le Président: M. le leader du gouvernement, je regrette, mais, à ce moment-ci, si la présidence commence à introduire dans la gestion de la période de questions l'utilisation, finalement, des reprises et que, chaque fois, je vais être obligé d'interrompre la période de questions pour aller visionner, on n'en finira plus. Je pense que les règles du jeu... Nos règles du jeu prévoient que les uns et les autres, et ça arrive régulièrement en fonction des points de vue, doivent accepter et, à quelque part, parfois subir les décisions de la présidence.

Encore une fois, j'ai déjà indiqué dans cette Chambre que la présidence n'est pas infaillible, sauf qu'elle fait son travail comme elle pense qu'elle doit le faire, avec les moyens qu'elle a à sa disposition, et, en l'occurrence, je ne pense pas que ce serait utile pour l'Assemblée et pour l'efficacité de nos travaux, M. le leader du gouvernement, que, chaque fois, je commence à interrompre la période de questions pour aller vérifier des propos. En l'occurrence, dans ce cas-ci, la décision de la présidence est en fonction de ce qu'elle a entendu.

Et je demanderais au député de Chomedey de poser sa question sans commentaire et, son préambule étant terminé, directement.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'accepte votre décision, je dis simplement que, si, le député est assez gentilhomme, s'il est d'honneur, il va réfuter ses paroles.

Le Président: J'apprécie, M. le leader du gouvernement, votre attitude. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Je reprends en question principale parce que ça a été perdu...

Le Président: M. le député de Chomedey, vous étiez en principale, vous avez fait un préambule, la décision que j'ai rendue... Et c'est un bon exemple d'une décision qui, à un moment donné, peut convenir à un côté et, à l'autre moment donné, peut ne pas convenir à l'autre. Je vous ai indiqué que, à ce moment-ci, je vous demandais de poser votre question, le préambule étant fait.

M. Mulcair: Est-ce que le premier ministre désire savoir le contenu de l'avis juridique de l'expert Ouellette? Et, si oui, je suis prêt à lui fournir une copie.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je suis bien convaincu que je pourrai le lire dans les journaux demain. J'aurai donc le loisir d'en prendre connaissance.

M. le Président, il ne s'agit pas de porter des jugements de valeur sur la qualité et l'autorité professionnelle de chaque juriste qui s'exprime sur une question. Nous savons que la richesse du droit résulte de la diversité des contributions des différents juristes – pour employer un mot gentil – qui participent à cette démarche.

M. le Président, nous, comme gouvernement, nous prenons comme position juridique, à la lecture des textes et des vérifications que nous avons faites, que cette Commission a tous les pouvoirs d'enquête. Deuxièmement, nous allons coopérer pleinement à cette enquête. Et, troisièmement, on jugera de cette enquête à son efficacité. Je suis informé que le procureur de la Commission, Me Bergeron, je crois, va tenir une conférence de presse vers 11 heures pour décrire le fonctionnement de l'enquête. Les gens qui sont au gouvernement vont répondre aux assignations à répondre aux questions, et je ne vois pas en quoi on pourrait s'inquiéter de l'efficacité de l'enquête à partir du moment où nous sommes tous d'accord pour y participer et que, en plus, la Commission a tous les pouvoirs de la conduire.

Alors, que le député de Chomedey réserve ses accusations ou les jugements qu'il portera sur les résultats de l'enquête lorsqu'il les connaîtra.

Le Président: M. le député.


Commission parlementaire mandatée pour enquêter sur la divulgation de renseignements personnels

M. Mulcair: En principale, M. le Président. L'avis de l'expert Yves Ouellette confirme en tous points les autres avis d'experts évoqués par les journalistes et infirme l'ensemble des prétentions et arguments du premier ministre et de son gouvernement. Me Ouellette dit notamment, à la page 9 de son avis, en parlant de la même décision de la Cour d'appel que le premier ministre a tenté d'utiliser tout de suite pour se justifier...

M. Jolivet: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement?

M. Jolivet: M. le Président, je pourrais vous demander de lire pour le profit du député l'article 77 sur la question des opinions.

Le Président: M. le leader du gouvernement, à ce moment-ci, deux choses. Les questions ne peuvent comporter ni expression d'opinion ni argumentation. J'ai déjà eu... M. le député de Joliette. J'ai déjà eu l'occasion de dire, dans cette Chambre, que, s'il fallait que la présidence l'applique d'une façon stricte, il n'y aurait aucune question de posée à l'Assemblée nationale. D'autre part, à ce moment-ci, on cite un document, un avis d'expert, et on demande au gouvernement... finalement, on le confronte avec cet avis d'expert. Je ne vois pas en quoi il s'agit d'une expression d'opinion ou d'une argumentation. Il s'agit d'une question qui est, à mon avis, fort régulière.

M. Jolivet: M. le Président, j'aimerais quand même vous lire que les questions ne peuvent viser à obtenir, en vertu de l'article 77.3°, un avis professionnel ou personnel sur une argumentation venant d'un autre avocat.

Le Président: Écoutez, M. le leader du gouvernement, on conviendra que c'est arrivé à plusieurs reprises que, dans l'Assemblée, des questions soient fondées sur des textes, des opinions d'autres dans la société et qu'on demande au gouvernement, finalement, pourquoi il adopte telle attitude par rapport à telle autre opinion. C'est au gouvernement, par la suite, de répondre comme il le souhaitera. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, l'avis de Me Ouellette confirme les autres avis d'experts et infirme les prétentions du gouvernement. Me Ouellette, notamment à la page 9 de son avis, en parlant de la même décision de la Cour d'appel que le premier ministre vient d'invoquer, dit ceci: «Mais cet arrêt – le même – ne concerne pas la compétence de la Commission pour enquêter aux termes de l'article 123, et il ne vise que la compétence de la Commission dans l'exercice de sa mission principale de révision des décisions en cas de refus d'accès à la demande d'un contribuable. Or, l'article 123 n'autorise pas la Commission à enquêter sur des allégations d'écarts de conduite d'agents publics dans l'administration de la Loi sur le ministère du Revenu.»

À la page 10, M. le Président, il dit ceci...

Le Président: M. le député de Chomedey, à ce moment-ci, le temps pour le préambule est largement complété. Votre question.

(10 h 30)

M. Mulcair: M. le Président, en terminant, l'avis fait aussi référence au fait que ça enlève la juridiction à la Commission...

Le Président: Je pense, M. le député, que ce serait plus simple si vous constatiez... C'est simplement pour vous rappeler, M. le député de Chomedey, que vous ne jouissez pas des mêmes privilèges que le chef de l'opposition officielle et qu'en l'occurrence le temps pour le préambule et la question est complété. Alors, je vous invite à poser votre question à ce moment-ci.

M. Mulcair: M. le Président, à la lumière du fait que l'avis infirme la compétence de la Commission et le droit du gouvernement de demander à la Commission de faire enquête, est-ce que le premier ministre peut nous dire si son gouvernement va accepter de convoquer une commission parlementaire, pas pour dévoiler le secret fiscal, mais pour enfin dévoiler le secret gouvernemental dans toute cette affaire?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'ai pas mal plus confiance dans la rigueur de la Commission d'accès à l'information que dans celle du député de Chomedey pour traiter des questions de droit dans cette affaire, pas mal plus.

M. le Président, si vous me permettez, on nous cite des extraits d'une opinion d'un juriste dont je respecte la crédibilité, comme celle de tous les milliers de juristes qui existent au Québec. Tous les jours, les avocats les plus éminents du Québec s'affrontent devant les tribunaux et échangent des théories diverses sur des questions de droit et, la plupart du temps, je dirais tout le temps, M. le Président – bien sûr, je présume comme tout le monde que ce sont toujours d'excellents avocats, d'excellents juristes et que les démonstrations qu'ils font devant le tribunal sont très brillantes et très intéressantes, très subtiles – mais, à la fin, c'est la cour qui décide, il y a toujours au moins un avocat qui a tort. Il y en a au moins la moitié qui ont tort en partant, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre se rend compte qu'il essaie de se donner un rôle insignifiant alors qu'il est premier ministre du Québec, après avoir prétendu qu'il n'était que le messager...

M. Jolivet: M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Jolivet: M. le Président, vous avez constaté comme moi que, par la bande, il fait indirectement ce que le règlement lui défend directement. Il n'a pas le droit de prêter quelque intention que ce soit à qui que ce soit, M. le Président.

Le Président: À ce moment-ci, M. le leader du gouvernement, je pense que ce n'est pas le premier ministre qui a été traité de cette façon, c'est le rôle. Je pense qu'il y a une différence... On peut considérer qu'un rôle peut être plus ou moins important, ou on peut utiliser des qualificatifs différents sans nécessairement affecter l'individu.

M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte que, dans la pièce qui est en train de se monter, là, du côté du gouvernement, le rôle qu'il se donne est un rôle insignifiant, après avoir prétendu qu'il n'était que le messager de Mme Malo? Moi, j'ai entendu ça ici, là: Le premier ministre est juste un messager, un page, une estafette, ou quoi que ce soit. Ça, là, c'est le premier ministre du Québec qui parle, il n'a pas de rôle important à jouer là-dedans. Deuxièmement...

M. Jolivet: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Jolivet: M. le Président, vous venez de voir comme moi ce qui s'est passé: à la demande de quelqu'un du Parti libéral, on est venu me porter un dictionnaire, ici, devant moi.

Le Président: Alors, sur la question de règlement que vous aviez invoquée, M. le leader du gouvernement.

Un instant. À partir du moment où on invoque des questions de règlement, et que ça a la conséquence que ça vient d'avoir, et que, par la suite, on dit qu'il n'y a pas de question de règlement, je voudrais vous mettre en garde. Il faut faire attention.

M. le député de Joliette, s'il vous plaît.

Une voix: C'est du chantage!

Le Président: Je vous rappelle à l'ordre une première fois et je sais très bien que vous aimeriez que je vous sorte.

Une voix: Oui.

Le Président: Ce n'est pas mon jeu, M. le député de Joliette. Sauf que, ici, il y a un président.

M. le chef de l'opposition officielle, sur votre question, s'il vous plaît.

M. Johnson: En constatant que le gouvernement ne recule devant rien pour créer des manoeuvres de diversion, dans ça comme dans d'autres choses, est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte...

Le Président: Question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'aime bien avoir des reproches quand j'ai le droit d'avoir des reproches. Il s'est passé quelque chose ici et vous étiez conscient, comme tout le monde, de ce qui s'est passé. Il y a une personne, de l'autre côté, en arrière de vous, qui a fait parvenir un dictionnaire ici. C'est moi qui suis blâmé, à ce moment-ci, dans un contexte où, de l'autre côté, on fait ce qu'on vient de dédire. Vous avez compris comme moi, ce n'était pas en dehors des micros. Et ça, ce n'est pas réglementaire, M. le Président. Vous allez demander de le retirer, comme vous le demandez aux gens de mon côté. Ça va faire!

Le Président: M. le leader du gouvernement, vous conviendrez que la présidence, en l'occurrence, ne vous a pas envoyé de dictionnaire, d'une part, et que, deuxièmement, quand les pages envoient aux députés des documents, ils ne viennent pas demander au président qu'est-ce qu'ils envoient puis demander l'autorisation. Alors, moi, ce que j'ai vu, c'est qu'un page allait vous porter le dictionnaire. Qui vous l'a envoyé? Pour quelle raison? Je n'en ai aucune idée.

En l'occurrence, je demanderais à M. le chef de l'opposition... Pour que nous en revenions au fond des choses, je vous demanderais, M. le chef de l'opposition, d'éviter des propos qui risqueraient de provoquer inutilement.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur votre question de règlement.

M. Jolivet: M. le Président, le chef de l'opposition a accusé, dans sa question, le gouvernement d'utiliser des manoeuvres de diversion, et je dois dire que ce n'est pas parlementaire. Il me prête des intentions que je n'ai pas.

(10 h 40)

Le Président: J'apprécierais être en mesure d'entendre la question de règlement du leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, il n'a pas le droit de me prêter quelque intention que ce soit, ni au gouvernement, puisque je fais partie du gouvernement comme tout le monde, ici, autour de moi, et, en conséquence, il m'insulte moi-même, comme il insulte mes collègues. Il n'a pas le droit de nous prêter quelque intention que ce soit, et je demande que vous lui demandiez de retirer ses paroles.

Le Président: Vous avez sans doute remarqué, M. le leader du gouvernement, que j'ai demandé au chef de l'opposition d'aller à sa question directement sans utiliser des propos provocateurs. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, j'ai dit tout à l'heure que, dans toute la mise en scène à laquelle on a droit, le premier ministre tente à répétition de se donner un rôle insignifiant. Il s'est décrit lui-même comme un messager. Pas besoin d'un dictionnaire pour comprendre ça, M. le député de Laviolette. Ce que je dis à ce moment-ci et ce qu'on prétend de ce côté-ci, c'est que le premier ministre n'est pas un messager ordinaire, qu'il est le chef du gouvernement et que ses invitations ne sont pas des invitations, ce sont des indications – c'est le moins qu'on puisse dire – si ce ne sont pas carrément des prescriptions la plupart du temps.

Et ce qu'on dit de ce côté-ci et ce qu'on demande au premier ministre, en opposition à ce que nous prétendons, c'est: En vertu de quelle disposition de quelle loi? «C'est-u» clair? On demande au premier ministre sur quelle base juridique il agit. A-t-il confié... De quelque façon qu'il a utilisé le vocabulaire, pourquoi a-t-il décidé et comment a-t-il décidé, sur la foi de quelle loi a-t-il décidé de confier ce mandat à la Commission d'accès à l'information? Je reviendrai tout à l'heure sur le mandat de la Commission, mais, lui, le premier ministre, est-ce qu'il pourrait nous répondre au lieu de déchirer ses vêtements, puis dire qu'il est un messager, puis dire que c'est juste une invitation, puis que, dans le fond, il avait le choix de faire ce qu'il voulait? On se souvient que, de son siège, il a dit de façon solennelle qu'il y en aurait, une enquête, que la CAI serait saisie de ça, qu'il leur avait écrit puis qu'il ferait rapport, que M. Comeau aurait une conférence de presse. J'étais là, moi aussi, puis tout le monde était là. En vertu de quoi le premier ministre considère-t-il qu'il avait juridiction, qu'il avait le droit de faire ça?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il entrait nettement dans les fonctions de quiconque et dans les droits de quiconque de demander à la Commission d'accès à l'information, de lui suggérer, de l'inviter à faire une enquête sur un sujet qui était déterminé. La Commission ayant accepté cette enquête, elle la fait. On me dit: Quelle base juridique? La Commission a une loi spéciale. Elle a été créée par l'Assemblée nationale. C'est une instance dont nous sommes tous fiers, ça fait partie du patrimoine démocratique et de l'efficacité de protection des renseignements personnels de l'État du Québec. Quand il arrive une allégation qui est liée à un reproche allégué relativement à un comportement concernant les renseignements personnels, c'est la Commission qui est la plus idoine, c'est elle qui a le plus de pouvoirs pour le faire. Il y a son article 123, il y a l'article 141 auquel réfère la Cour d'appel, d'ailleurs, dans l'affaire Constantinescu, où la Cour d'appel voit même des pouvoirs inhérents dans l'article 141. Ce sont des pouvoirs très larges. Et nous disons en plus que nous allons coopérer. Mais qu'est-ce qu'on veut de plus? La Commission fait son enquête, nous allons coopérer, nous saurons quelles sont les conclusions qu'elle tire des témoignages qu'elle recueillera. Qu'est-ce qu'on veut de plus, M. le Président? On aura la vérité, c'est tout.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre se rend compte que la façon dont il est intervenu, c'est ce qui ressemble le plus à l'ingérence qui est dénoncée par les juristes...

Une voix: ...

M. Johnson: Mais non! Qui ressemble le plus à l'ingérence dénoncée par les juristes qui s'appuient sur la cause de Duplessis contre Roncarelli, que c'est ça, le précédent dont s'inspire le premier ministre?

Et, deuxièmement, quant à la compétence de la Commission, est-ce que le premier ministre se rend compte qu'il est en train de citer des jugements de la Cour d'appel qui donnent justement raison au député de Chomedey, qui donnent raison aux analystes, qui donnent raison au fait que, en matière de protection des renseignements, à l'égard de l'accès aux renseignements, à l'égard d'un contribuable qui veut avoir accès à ses propres renseignements, c'est sûr que la CAI a juridiction puis que c'est ça que la Cour d'appel a dit? On n'est pas en train de se demander si Charles Chevrette a parlé à je ne sais pas qui. Ce n'est pas ça, le mandat.

Est-ce que le premier ministre se rend compte que, quand on veut émettre un permis de camionnage, on ne demande pas à la Régie des permis et loteries de s'occuper de ça, que, quand c'est une question municipale, on ne demande pas à la Commission des transports de s'occuper de ça, et que, quand il s'agit de regarder ce qui est arrivé dans des cabinets politiques en matière de transmission de renseignements confidentiels sur des citoyens, ce n'est pas la CAI qui a juridiction, c'est une commission parlementaire qui a juridiction?

Le Président: M. le premier ministre.


Document déposé

M. Bouchard: M. le Président, je pense que l'opposition est dans les bas-fonds de la démagogie en comparant la démarche gouvernementale à celle du premier ministre Duplessis dans l'affaire Roncarelli. C'est absolument incroyable, M. le Président. Je dépose la lettre que j'ai envoyée le 25 novembre...

Une voix: ...

M. Bouchard: Si quelqu'un a le courage de répéter ce qu'il a dit...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Dans la lettre que j'ai envoyée le 25 novembre au président de la Commission, j'invite la Commission à faire une enquête sur les allégations en question. On nous dit: Oui, mais, deuxièmement, sur la juridiction de la Commission, la Commission, ça ne traite que d'accès. N'oublions pas que dans le nom même de la Commission il y a «protection des renseignements», M. le Président. Donc, c'est elle qui est le chien de garde de la protection des renseignements confidentiels. Et, dans la mesure où quelqu'un prétend qu'il y a eu une divulgation de renseignements confidentiels illégale ou incorrecte, c'est l'organisme qui doit enquêter.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Pourquoi le premier ministre s'entête-t-il à ne pas nous indiquer en vertu de quoi il s'imagine que la Commission d'accès à l'information a juridiction dans les matières précises qui ont été l'objet d'allégations: que dans son cabinet à lui il y a des gens qui ont eu connaissance de renseignements privilégiés; qu'au cabinet du ministre délégué au Revenu il y a des gens qui ont eu accès à ces renseignements-là; que ces renseignements-là ont été communiqués à des gens à l'extérieur même de la fonction publique, à l'extérieur des cabinets, ont été transmis à des gens au cabinet de l'opposition à Ottawa? C'est ça qui est en cause. Et est-ce que le premier ministre pourrait nous dire en vertu de quoi, dans quel mandat, de quel article la Commission d'accès à l'information peut juger ces choses-là, s'en saisir, assigner les gens et faire fi de l'article 69? Et le premier ministre prétend qu'il n'y a pas de problème avec ça. Son ministre de la Justice trouve qu'il y a un problème avec ça. Pourquoi est-ce que le premier ministre est tout seul à avoir l'opinion qu'il a? Pourquoi le premier ministre s'entête-t-il à ne pas vouloir faire la lumière? Et pourquoi le premier ministre s'imagine-t-il qu'en disant «que voulez-vous de plus?» il est en train de régler le problème? Ce qu'on veut de plus, c'est la transparence puis la vérité. C'est ça qu'on veut.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, voici une commission qui, en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés, a celui de faire enquête de façon expresse, qui a même des pouvoirs inhérents en vertu d'un article qui élargit de façon très considérable et substantielle ses pouvoirs, qui, en plus, a le rôle de protéger le contrôle des renseignements personnels. Elle a accepté de faire une enquête à mon invitation. Elle fait l'enquête, elle a les pouvoirs d'assignation, de contrainte de témoins. Attendons le résultat de l'enquête. Il y a une enquête en cours. Attendons.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, est-ce que le premier ministre va enfin comprendre ce que toute la population du Québec et les spécialistes ont déjà compris, que sa solution est illégale et constitue un «cover-up»?

Le Président: M. le député de Chomedey, il s'agit manifestement à ce moment-ci de prêter des intentions qui ne sont pas permises en vertu du règlement. Je vous demanderais, dans ce cas particulier, de retirer vos propos.

M. Mulcair: Je les retire, M. le Président, et je pose la question: Quand est-ce que le premier ministre va se rendre compte, comme toute la population, comme tous les experts, que la solution qu'il préconise n'en est pas une? Ça n'aide qu'à garder une seule chose secrète: les agissements de son cabinet. Pourquoi continue-t-il à s'entêter à faire ça de cette manière-là plutôt que de laisser une commission parlementaire faire toute la lumière sur toute cette affaire? Qu'est-ce qu'il a à cacher, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

(10 h 50)

M. Bouchard: M. le Président, nous n'avons rien à cacher, nous allons comparaître sous serment devant la commission instituée pour faire des enquêtes. Et la Commission invitée à faire enquête a accepté le mandat et entend le mener à terme. Laissez une commission fonctionner. Elle agit en vertu de sa loi. Elle a été créée par l'Assemblée nationale. Et je pense que tous ces propos sont de nature à discréditer des gens honnêtes qui méritent infiniment mieux en termes de respect de leur réputation, M. le Président.

Le Président: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: En complémentaire, M. le Président. Est-ce que le premier ministre est capable de comprendre que, si la juridiction, l'indépendance et l'autorité de la Commission d'accès à l'information ont été sérieusement entachées dans la présente affaire, ce n'est pas à cause de l'opposition, mais c'est plutôt en conséquence d'une ingérence politique éhontée de sa part dans le travail d'une institution qui méritait mieux? Et, si on la respectait, il l'aurait traitée mieux que ça.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, afin de vous aider à prendre une décision, pour éviter que...

Le Président: Je m'excuse, M. le leader du gouvernement. Écoutez...

M. Jolivet: M. le Président, vous avez entendu comme moi qu'on a prêté au premier ministre des intentions d'ingérence éhontée et qu'en même temps, en vertu de l'article 35.5°, on attaque la conduite d'un député. On sait de quelle façon on doit le faire. M. le Président, est-ce que vous croyez que c'est parlementaire, la façon dont la question a été posée?

Le Président: Je crois qu'à cet égard, M. le leader du gouvernement, votre intervention est justifiée. M. le député de Chomedey, je vous demanderais de reformuler votre question en retirant les propos. Et je vous indique que, ce matin, on a un bon exemple de ce qui... à chaque fois qu'on frôle les coups en bas de la ceinture, que parfois on descend, puis parfois on est juste au-dessus, alors on se retrouve avec des problèmes. Je pense que la meilleure façon, c'est de poser les questions sans inutilement utiliser des propos qui, inévitablement, sont blessants, sont contre notre règlement et font en sorte qu'on se retrouve à consacrer plus de temps à régler l'ordre et le décorum qu'à aller au fond des choses.

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Dans la même ligne, M. le Président, est-ce que vous n'êtes pas également d'accord qu'on a assisté à un exemple d'obstruction de la part d'un gouvernement qui tente de cacher des choses à la population?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'ai essayé de faire mon travail comme leader du gouvernement dans la mesure où j'ai cru que le député dépassait librement le règlement. Mais vous venez d'entendre ce qu'a dit le leader de l'opposition à ce moment-ci, ce n'est pas mieux non plus.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Comment le leader du gouvernement peut-il prétendre de telles choses, alors que c'est le premier ministre qui, à chaque fois, lui a demandé de se lever pour faire de l'obstruction?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, ça dépasse les bornes. Le député leader de l'opposition peut penser tout ce qu'il veut, nous prenons nos décisions quand nous voulons et, à ce moment-là, le premier ministre est prêt à répondre à la question, s'il y en a une.

Le Président: Alors, en retirant vos propos, question sans commentaire.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Je retire mes propos et je reformule ma question, conformément à votre demande. Si le premier ministre n'a rien à cacher, pourquoi choisit-il un moyen qui ne pourra jamais permettre de faire toute la lumière et pourquoi est-ce qu'il se refuse à une enquête dans une commission parlementaire tenue par ses pairs, où on pourrait faire toute la lumière, s'il n'a rien à cacher?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il est faux de prétendre que la Commission n'a pas les moyens de faire toute la lumière. Elle a tous les moyens de faire toute la lumière, dans le respect de la protection des renseignements personnels. Et je fais infiniment plus confiance à l'expertise de la Commission, dans cette affaire, qu'à toute forme de spectacle que pourrait vouloir tenir...

Le Président: Alors, nous allons suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 56)

(Reprise à 11 heures)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.

Très bien, veuillez vous asseoir. Alors, je crois, M. le premier ministre, que vous aviez terminé... Aviez-vous terminé?

Alors, M. le premier ministre.

M. Bouchard: Alors, M. le Président, il s'agit d'un cas d'allégation concernant la protection de renseignements personnels. Il existe une instance créée par cette Assemblée nationale pour s'occuper de façon spécifique de la protection des renseignements personnels, qui a un pouvoir d'enquête pour s'acquitter de cette fonction, qui a des pouvoirs d'assignation contraignants, qui a accepté de conduire une enquête, qui est en train d'y procéder, et je crois que nous avons posé les gestes qui étaient appropriés en l'occurrence.

Le Président: Alors, cette réponse met fin à la période des questions et des réponses orales pour aujourd'hui, mais il y a une réponse différée, comme je l'avais indiqué précédemment.


Réponses différées

À ce moment-ci, M. le ministre d'État des Ressources naturelles va répondre à une question posée le 28 novembre dernier concernant les modalités de perception des comptes en souffrance par Hydro-Québec. M. le ministre.


Modalités de perception des comptes en souffrance par Hydro-Québec

M. Chevrette: M. le Président, je n'ai pas l'intention d'entrer dans le détail, j'ai prévenu, même, le député de Saint-Laurent, mais je dirai ceci: le couple en question a accumulé au fil des ans des arrérages de quelques milliers de dollars auprès d'Hydro-Québec, et ce, à un certain nombre d'adresses. En un mot, ils sont, pour ainsi dire, partis sans laisser d'adresse à quelques reprises. Devant l'impossibilité de percevoir les arrérages et comme le prévoit la procédure de recouvrement d'Hydro-Québec, eh bien, l'interruption des services a eu lieu à la fin de septembre pour une durée de six semaines. Le 5 novembre, il y a eu une proposition qui a été adressée, et on a procédé au rebranchement, et les clients proposaient de verser 100 $ en date du 5 novembre et 146 $ par mois par la suite, à compter du 1er décembre. On a même révisé à la baisse ce 146 $ pour le descendre à 110 $ et on a prolongé la remise sur 48 mois.


Documents déposés

Cette décision s'appuie sur l'article 11. Il y a tout le volet pourquoi on n'a pas toléré que le propriétaire paie. Je vais déposer la note pour permettre au député de voir les deux articles de règlement, mais je vous dirai, M. le Président, en terminant qu'il faut faire attention, ici, de ne pas donner le signal à quelque client que ce soit qu'on peut ne pas payer pour un service reçu.

Je voudrais déposer en même temps un article d'Annie Morin qui compare Hydro-Québec à Hydro Ottawa, qui coupe en tout temps de l'année, alors que, nous, on ne coupe jamais l'hiver. Hydro Ottawa, je dis bien Hydro Ottawa, coupe en tout temps de l'année, a des débranchements du double et du triple du Québec, et on doit être fiers, nous, de la compassion et du système humanitaire qu'on a mis dans les directives qu'on applique. Et, plutôt que de généraliser, s'il y a quelques cas d'exagération, qu'on nous le dise, et on rectifiera.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, pour une question complémentaire.

M. Cherry: Oui, M. le Président. À la suite des trois cas qui avaient été présentés par ma collègue de Marguerite-Bourgeoys et également par mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, le ministre avait terminé sa déclaration en disant: Annuellement, il y a des gestes de compassion précisément pour ces gens-là. On radie, annuellement, 30 000 000 $ de comptes d'électricité.

Ma question, M. le Président: Comme il a référé à ces gens, au 30 000 000 $ qu'il invoque qu'Hydro-Québec radie annuellement, combien sont des radiations pour ces gens-là comparativement à combien pour des entreprises qui ont fait faillite, des gens qui sont décédés? En d'autres mots, du 30 000 000 $, il y en a combien qui ont été radiés véritablement pour les démunis?

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, il me fera plaisir... Dès le 5 décembre prochain, je rencontre Hydro-Québec et je vais essayer de produire par la suite la ventilation, parce que c'est ce qu'on me demande à toutes fins pratiques, du 30 000 000 $. On pourra en profiter pour catégoriser aussi la partie des branchements illégaux pour savoir quelle somme ça représente également et on vous donnera toute la ventilation. Et je vous dirai ensuite que nous créerons un comité avec la Sécurité du revenu pour encore modifier les critères et les rendre encore les plus humains possible.


Votes reportés


Motion proposant de souligner l'importance de maintenir les quotas de chanson francophone à 65 % pour les stations de radio de langue française

Le Président: Très bien. Maintenant, nous allons procéder au vote reporté sur la motion de Mme la ministre de la Culture et des Communications et ministre responsable de la Charte de la langue française. La motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne l'importance de maintenir les quotas de chanson francophone à 65 % pour les stations de radio de langue française, à l'heure où le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes tient des audiences sur la question.»

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier)...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Un instant. Bon. J'apprécierais que le reste du vote, ça se fasse comme ça.

Le Secrétaire adjoint: M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), Mme Papineau (Prévost), M. Désilets (Maskinongé), M. Brien (Rousseau), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Duguay (Duplessis).

M. Filion (Montmorency), M. Le Hir (Iberville).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever!

Des voix: ...

Le Président: Vous êtes pour?

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Mulcair (Chomedey), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever! Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:103

Contre:0

Abstentions:0

(11 h 10)

Le Président: Très bien. Alors, la motion est adoptée.


Motions sans préavis

Nous allons maintenant aborder l'étape des motions sans préavis. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


Soutenir les pêcheurs et travailleurs des pêches affectés par le moratoire de la pêche du poisson de fond

M. Julien: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec offre son soutien aux pêcheurs et travailleurs des pêches du Québec affectés par le moratoire de la pêche du poisson de fond et demande au gouvernement fédéral, en raison de la persistance de la crise, de remplacer la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique par des mesures de même ampleur et offrant de réelles possibilités d'adaptation de l'industrie.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolivet: Sans débat.


Mise aux voix

Le Président: Alors, s'il y a consentement pour présenter cette motion, est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Il y a d'autres motions, mais je vais vous reconnaître, M. le député de... Alors, M. le ministre des Relations internationales.


Souscrire à la Convention sur l'interdiction et la destruction des mines antipersonnel

M. Simard: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec, au nom de toute la population québécoise, s'associe à tous ceux et celles à travers le monde qui veulent que les mines antipersonnel soient interdites et détruites et souscrive aux objectifs humanitaires qui sous-tendent la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, qui sera signée cette semaine à Ottawa;

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec d'examiner les moyens à sa disposition, dans le cadre de sa juridiction, pour appuyer le gouvernement fédéral et contribuer à relever le défi que représente la mise en oeuvre de la Convention, notamment en ce qui a trait au soutien aux victimes et aux réfugiés, et à l'aide à la reconstruction économique des zones affectées par cette terrible tragédie.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolivet: M. le Président, 1-1.

Le Président: Une intervention de chaque côté? Très bien. Alors, M. le ministre des Relations internationales.


M. Sylvain Simard

M. Simard: M. le Président, comme vous le savez, la prolifération des mines terrestres dans le monde est une tragédie qui prend, ces années-ci, une proportion de crise. Plus de 60 000 000 de mines antipersonnel sont actuellement déployées dans quelque 70 pays dont la plupart sont en développement et parmi les plus pauvres, en particulier en Afghanistan, en Angola, au Cambodge – au Cambodge seulement, plus de 35 000 amputés ont été recensés cette année – en Irak, en Bosnie-Herzégovine et au Laos. Plus de 100 000 000 de mines sont encore conservées ou en réserve, près de 1 000 000 de personnes ont été tuées ou estropiées jusqu'ici par les mines antipersonnel, dont la plupart, 90 % en fait, sont des civils innocents, sans défense et très souvent des enfants. À chaque semaine s'ajoutent 500 nouvelles victimes.

La communauté internationale, pendant ce temps, parvient à éliminer 100 000 mines par an, mais ses efforts ne peuvent suivre le déploiement de 2 000 000 à 5 000 000 de nouvelles mines chaque année. Selon les Nations unies, compte tenu des moyens mis en oeuvre actuellement, il faudrait plus de 11 siècles, avec les moyens actuels, pour éliminer les mines existantes. En plus du coût social et humain, les mines antipersonnel entravent le développement et la reconstruction économique, empêchent le rapatriement des réfugiés et des personnes déplacées par les sinistres et les guerres.

M. le Président, le droit à l'intégrité physique constitue un droit fondamental de tout être humain au même titre que tous les autres droits reconnus par la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations unies. La population québécoise est sensible à cette tragédie humaine qui confronte l'ensemble des pays du monde et souscrit aux objectifs humanitaires qui sous-tendent la Convention sur l'interdiction et la destruction des mines antipersonnel. Des actions de sensibilisation ont cours d'ailleurs dans toutes les écoles du Québec.

L'Assemblée nationale s'associe donc aujourd'hui à ceux et celles qui, à travers le monde, veulent que les mines antipersonnel soient interdites et détruites. Il faut se réjouir, en conclusion, M. le Président, que la majorité des pays du monde aient convenu de signer à Ottawa cette semaine et de mettre en oeuvre la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage et de la production ainsi que du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Relations internationales. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, à titre de porte-parole de l'aile parlementaire libérale en matière de relations internationales et de francophonie et au nom de l'opposition officielle, j'appuie la motion du gouvernement pour saluer le travail remarquable de tous les organismes et individus qui ont contribué à paver la voie à la signature de la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction qui a lieu aujourd'hui même à Ottawa.

M. le Président, l'une des valeurs fondamentales à laquelle adhèrent les Québécoises et les Québécois, c'est précisément la paix. Et on peut être fiers, comme Québécois et Canadiens, que cette valeur soit partagée par l'ensemble de nos concitoyens et promue au plan international. Pas étonnant, M. le Président, que le Canada soit reconnu dans le monde comme l'un des pays bâtisseurs de la paix.

«De Maputo à Tokyo, de Vienne à Ashkabad, de Kempton Park à Bonn, de Manille à New Delhi, de Sanaa à Bruxelles, de Sidney à Oslo, les gouvernements et les peuples de la planète ont entrepris une extraordinaire croisade mondiale afin d'interdire les mines terrestres antipersonnel et leurs efforts ont été couronnés de succès.» C'est dans ces termes que le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada, l'honorable Lloyd Axworthy, s'est exprimé hier à l'ouverture du Forum d'action contre les mines qui a réuni à Ottawa une centaine de délégations venues des quatre coins du monde pour signer, en présence de nombreux organismes non gouvernementaux et d'organisations internationales, un traité historique contre les mines antipersonnel.

M. le Président, les mines antipersonnel sont un fléau qui affecte d'abord et avant tout les populations civiles, la plupart du temps des femmes et des enfants, dans des pays victimes de la guerre qui n'ont pas les moyens de déminer leur territoire. On estime à 110 000 000 le nombre de mines antipersonnel qui infestent le sol de 64 pays de par le monde et qui font 26 000 victimes à chaque année.

On peut se réjouir, comme parlementaires, que la communauté internationale se soit mobilisée de façon intensive depuis un an pour mener une campagne tous azimuts contre les mines terrestres à l'échelle mondiale. Fait à signaler, ces efforts ont été consentis par une multitude de personnalités et d'organismes humanitaires qui ont mis leur prestige et leur autorité morale au service de cette cause. Je pense, entre autres, à la militante américaine Jody Williams, à l'UNICEF, à l'organisme Handicap International, au Comité international de la Croix-Rouge, à Landmine Survivors Network et à plusieurs autres organismes, fondations et entreprises privés.

Le plus rassurant, M. le Président, c'est que la Convention sur les mines antipersonnel n'est pas qu'un traité sur papier. Elle sera ratifiée et s'accompagnera d'un plan d'action pour assurer sa mise en oeuvre, car il ne suffit pas de signer une convention; il faut débarrasser les pays dont le sol regorge de mines antipersonnel, un fléau qui frappe ou tue une personne à toutes les 22 minutes dans le monde.

L'entrée en vigueur de ce traité implique le déminage des zones touchées, la destruction de stocks, la réadaptation physique et mentale des victimes innocentes de cette tragédie silencieuse. Il faut également amener les pays non signataires à adhérer à la Convention dans un avenir très rapproché, notamment les États-Unis et la Russie. C'est le défi que se donnent les délégations internationales réunies à Ottawa du 2 au 4 décembre. C'est également le rôle avant-gardiste qu'entend jouer le gouvernement fédéral. En tant que parlementaires à l'Assemblée nationale du Québec, on ne peut que souscrire à cette initiative.

(11 h 20)

J'invite donc le gouvernement du Québec à collaborer en toute bonne foi avec le gouvernement fédéral, dans le respect de nos compétences respectives, pour promouvoir la paix et les valeurs qui sous-tendent la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de La Pinière. Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Un vote par... Veuillez appeler les députés. M. le leader du gouvernement.


Vote reporté

M. Jolivet: Non, M. le Président. Nous allons remettre ça, selon l'article prévu à notre règlement, à demain, aux affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Pinard): Donc, le vote est reporté aux affaires courantes du jeudi 4 décembre.

Alors, toujours à la rubrique Motions sans préavis, M. le député de Robert-Baldwin.


Réaffirmer le droit de tout citoyen de se prononcer librement dans le cadre des débats démocratiques de notre société

M. Marsan: M. le Président, j'aimerais demander à l'Assemblée nationale le consentement pour déposer la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale réaffirme le droit de tout citoyen et citoyenne de se prononcer librement, sans menace, dans le cadre des débats démocratiques de notre société; que cette Assemblée condamne tout appel ou incitation à la violence, toute forme de violence déjà commise; et que cette Assemblée demande au gouvernement du Québec de prendre les moyens appropriés pour garantir aux citoyens ainsi menacés que leurs droits démocratiques seront protégés.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Il y a entente pour que ce soit 2-2.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Robert-Baldwin.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président. Cette motion a pour objectif de protéger le droit de s'exprimer en toute liberté dans le cadre des débats démocratiques de notre société. Dernièrement, au cours de la fin de semaine dernière, il y a eu une résurgence de violence, particulièrement dans un secteur ouest de Montréal, dans Lachine, et je laisserai mon collègue le député de Marquette vous entretenir à ce sujet.

Je voudrais, M. le Président, vous rapporter un cas qui s'est produit dans mon comté, le comté de Robert-Baldwin. C'est un citoyen qui est venu me voir, je dois vous dire, en début de semaine. Eh bien, il était un peu apeuré, voire affolé. Des gens se promenaient devant chez lui, prenaient des photographies de sa résidence, prenaient des photographies de lui-même lorsqu'il quittait, ses allées et venues, et également des photographies de son épouse. C'était et c'est, je pense, des tentatives d'intimidation. Cette personne occupe un rôle important dans le débat que nous vivons actuellement, mais c'est quelqu'un qui a toujours appuyé des moyens pacifiques pour atteindre les objectifs qu'il s'est donnés.

J'aimerais ajouter à cela ce qu'on a retrouvé sur un site Web. C'est la liste des ennemis du Québec, List of enemies of Québec from MLNQ, Mouvement de libération nationale du Québec, et nous avons une douzaine de personnes qui sont identifiées et qualifiées d'ennemies du Québec. M. le Président, je ne pense pas que ce genre d'action apporte des avantages à quiconque a à coeur le développement de la démocratie au Québec.

Plus récemment, M. le Président, j'ai été mis au courant, cette fin de semaine, de propositions qui ont été présentées au Conseil du Parti québécois et dans lesquelles il y a eu condamnation. Deux résolutions, d'abord, qui condamnant les mouvements en raison des actes de violence et une autre qui dénonce un de leurs porte-parole, M. Villeneuve. Mais, à chacune des résolutions, on mentionne toujours: Parce qu'ils jettent du discrédit à la cause indépendantiste, parce que c'est fait au nom de la souveraineté.

M. le Président, la motion que je présente ce matin, je veux qu'elle soit faite au nom du droit fondamental de la liberté d'expression, et c'est pour ça que nous demandons au ministre de la Sécurité publique qu'il puisse y avoir une enquête policière, pour qu'on puisse donner aux gens la paix sociale à laquelle ils ont droit et surtout leur permettre de bien exprimer ce qu'ils pensent, qu'ils puissent annoncer les différents amendements ou arguments politiques que ces gens-là veulent bien exprimer.

Mr Speaker, on behalf of our colleagues, we would like to express our deep concern and condemn the violence that occurs in the democratic debate. We wish that we will have the full support of the Government and we also would like to have a police investigation. We all have to work for the freedom of speech. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Nous allons maintenant céder la parole au ministre de la Sécurité publique. M. le ministre.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui, M. le Président, il me fait plaisir, en tant que député d'Anjou, donc député montréalais, et aussi ministre de la Sécurité publique, de prendre la parole et de me joindre au député de Robert-Baldwin relativement à cette motion sans préavis.

Le député de Robert-Baldwin, évidemment, a mentionné un cas – c'est vrai que tout cas, M. le Président, dans ce genre de situation, est un cas de trop – un cas d'une personne qui, à cause de convictions qui sont légitimes dans une société, des convictions démocratiques, c'est-à-dire des convictions politiques, à ce moment-là, reçoit des menaces ou de l'intimidation. C'est condamnable. On se doit, à toutes les fois qu'on a la possibilité de le faire, de le condamner. Mais c'est vrai qu'il ne faut pas non plus s'arrêter à un cas en particulier. Je crois que tout mouvement politique, tout mouvement, quel qu'il soit, de quelque tendance qu'il soit, qui s'appuie sur des actes de violence ou qui suscite l'intimidation ou la haine, on doit condamner ce mouvement politique et tout mouvement politique qui a une idéologie à laquelle ce mouvement croit. Je crois que ces mouvements-là sont conscients que tout acte de violence jette le discrédit sur justement leur idée démocratique, leur volonté démocratique de faire progresser leurs idées.

Il est vrai qu'en fin de semaine, M. le Président, le Conseil national du Parti québécois a condamné, sans aucune limite et à l'unanimité, le Mouvement de libération nationale québécois, relativement au fait que, par ses actions, ce Mouvement incite à une certaine violence. Et, sans vouloir aller trop dans le détail et qualifier, comme ministre de la Sécurité publique, les gestes, quand il y a une incitation à la haine, quand il y a une incitation à la violence, nous nous devons de le condamner. Et je suis très fier, comme membre du Parti québécois, que nous ayons formellement condamné les actions du Mouvement de libération nationale québécois, et nous l'avons fait, comme je l'ai dit, à l'unanimité, et nous l'avions fait dans le passé.

Je ne pense pas que c'était une critique que le député de Robert-Baldwin nous faisait à l'effet que, bon, c'est parce que ça nuisait à la souveraineté, mais vous comprendrez que ce n'était pas à nous, non plus, de faire une motion pour critiquer d'autres mouvements qui seraient nécessairement nos adversaires politiques au niveau de l'idéologie. Je crois cependant que ça appartient au Parti libéral aussi de le faire, lors de leur prochain Conseil – je pense que, eux autres, c'est un Conseil général – par eux-mêmes. Relativement à leur idéologie, s'ils ont connaissance d'un mouvement ou d'incitation à l'intolérance ou à la haine, ils se doivent aussi, je crois, et ils le feront, comme nous l'avons fait, ils condamneront, eux autres aussi, j'en suis certain, ces actes. Je pense que c'est important.

(11 h 30)

Puis je ne veux pas nommer personne, je pense qu'on est tous conscients en cette Chambre... Des fois, on entend des choses aussi. Parce que la violence, oui, c'est vrai, il y a la violence physique, il y a des bombes ou des menaces de bombe qui peuvent être faites. Moi, j'assimilerais ça à une violence physique, à une violence sur l'intégrité de la personne. Mais je crois aussi qu'il faut être excessivement sensibles, comme parlementaires, à tout propos, à tout discours qui incite à la haine, qui incite à la violence, qui incite à la provocation, et je crois que nous devons être excessivement vigilants là-dessus et ne pas attendre justement que ces actes de provocation amènent, d'une façon concrète, à des actes de violence. Alors, je crois que c'est important. Et nous avons déjà eu dans le passé des occasions d'en signaler ou de dire: M. le Président, il faut faire attention, ce sont des comportements qui, au niveau de notre société démocratique... Car le Québec est un peuple excessivement démocratique, qui croit à la démocratie. Et justement le résultat du dernier référendum, je crois qu'il y a peu de peuples qui auraient pu faire un débat démocratiquement, comme nous l'avons fait lors du dernier référendum, sans qu'il y ait justement, d'une façon...

Évidemment, il peut y avoir des actes isolés qu'on se doit de condamner, mais je crois que ça s'est fait dans l'harmonie, dans le respect démocratique, dans le respect des convictions que chaque option avait, et partageait, et essayait d'une façon démocratique de faire progresser. Alors, je crois qu'on peut être très fiers, comme Québécois, de ce débat que nous sommes capables de faire comme un peuple mature, comme un peuple qui est prêt et qui a le pouvoir de déterminer son destin.

Je n'ai pas voulu m'objecter, M. le Président, quant au libellé de la motion qui demande à l'Assemblée nationale, finalement... «réaffirme le droit», je n'ai pas de problème là-dessus, mais qui demande aussi au gouvernement du Québec de prendre les moyens appropriés pour garantir aux citoyens ainsi menacés que leurs droits démocratiques seront protégés. Je crois que l'Assemblée nationale n'a pas à demander cela au gouvernement, car c'est déjà fait.

Je peux dire, comme ministre de la Sécurité publique, on l'a vu par les déclarations faites par différents représentants de corps policiers, que les corps policiers, sur l'ensemble du territoire du Québec, sont excessivement préoccupés par la situation. Et, à chaque fois qu'un cas leur est signalé, ils font diligence. Je fais évidemment référence au SPCUM, en particulier, sur le territoire de l'île de Montréal qui, à chaque fois qu'un cas lui est rapporté, est excessivement vigilant, fait enquête et prend toute menace ou tout cas qui lui est rapporté excessivement au sérieux. C'est la même chose pour la Sûreté du Québec sur l'ensemble du territoire québécois.

Donc, les policiers font leur travail, sont vigilants. Ça, je tiens à en assurer l'Assemblée nationale et la population du Québec. Comme ministre de la Sécurité publique, vous comprenez que, moi aussi, je suis excessivement préoccupé par ce genre de chose. Le message, à chaque fois que je rencontre les différents dirigeants policiers... À chaque fois que je les rencontre, je leur fais part moi aussi de mes préoccupations. Et je souhaite évidemment une plus grande efficacité policière possible dans ce genre de dossier et dans tous les cas qui leur sont rapportés.

Ce qu'on doit aussi constater, c'est que, sur le terrain, il y a une très grande collaboration des différents corps policiers, quand il y a des enquêtes, relativement à l'échange d'informations pour justement faire en sorte que le peuple québécois puisse continuer de faire des débats de peuple comme nous les faisons présentement, et ce, d'une façon tout à fait démocratique.

M. Lefebvre: En vertu de l'article 213, une question de renseignement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Sécurité publique et député d'Anjou. Le député de Frontenac veut se prévaloir de l'article 213. Est-ce que vous lui donnez l'opportunité de poser une question? Pas d'objection? Alors, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, je voudrais savoir du ministre de la Sécurité publique: Est-ce que le Mouvement de libération nationale du Québec et son président, Raymond Villeneuve, qui ont été condamnés par une résolution du Parti québécois à l'occasion de son Conseil national en fin de semaine, condamnés pour les gestes de violence et pour les appels à la violence, sont, au moment où on se parle, enquêtés par la Sûreté du Québec?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: M. le Président, je vais réitérer ce que j'ai déjà mentionné à l'Assemblée nationale. Quand il y a eu la parution du fameux guide, qui avait été rapportée par certains médias, j'ai demandé à la Sûreté du Québec de faire une enquête relativement à ce guide et de déterminer si le contenu de ce guide constituait une infraction au niveau de notre Code criminel. Alors, cette enquête est toujours, à ma connaissance, en cours. Je n'ai pas eu encore d'information à l'effet que cette enquête était terminée. Il y a eu mention, je crois, du SPCUM qu'une certaine enquête était terminée, mais ce n'était pas celle-là, on ne faisait pas référence à cette enquête-là.

Comme ministre de la Sécurité publique, je pense que le député de Frontenac va comprendre qu'il n'est pas dans l'intérêt, je crois, de l'enquête policière – pour moi, comme ministre – d'infirmer ou de confirmer si effectivement un groupe ou des gens font l'objet d'une surveillance particulière. Je pense que je ne peux pas déclarer ça et je pense que le député de Frontenac le comprend.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Anjou et ministre de la Sécurité publique. Nous allons maintenant céder la parole au député de Marquette. Alors, M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Je joins ma voix à celle du député de Robert-Baldwin et au nom de l'opposition officielle qui a présenté cette motion. Québec est une société démocratique à l'intérieur de laquelle toute personne a une liberté d'expression. Et l'expression d'une opinion politique est un droit fondamental qui est d'ailleurs consacré à la fois dans la Charte québécoise et la Charte canadienne des droits et libertés de la personne, même si, des deux côtés de la Chambre, on peut être en désaccord parfois avec les opinions politiques qui sont émises.

Mais, malgré cela, au cours des deux dernières semaines, dans le comté de Marquette, deux de mes concitoyens et concitoyennes ont reçu des menaces de mort par rapport à l'expression de leur opinion politique sur la question du dossier national et une troisième personne, eh bien, une bombe a été placée devant sa résidence. On comprend fort bien qu'il s'agit d'entraves à leur liberté de s'exprimer par rapport à leur opinion politique, par rapport à leurs convictions politiques. J'entendais le ministre, tantôt, nous indiquer dans son allocution qu'il fallait condamner toutes ces mesures-là, condamner toute incitation à la violence, mais je me demande, M. le Président, si c'est suffisant que de condamner de tels gestes.

I think perhaps, given what has happened in my riding over the past few weeks, that we have to go further than merely condemn some of the acts that have occurred in the riding of Marquette. These people who have political convictions with which we can agree or disagree have chosen to express them in a free and democratic society. And this fundamental freedom cannot be expressed because individuals in our society who don't share their point of view are trying to intimidate these people to prevent them from expressing their opinions. I think they are looking for more than merely condemnation by the part of our politicians; they are looking for measures to secure their right to speak. And I think it is the duty of the Minister for Public Security to make sure that there are sufficient police forces to allow them to exercise their fundamental right.

And, in the riding of Marquette, I have spoken with the person in charge of the police forces, the commandant Brouillette, who has also been following these incidents very closely. But I believe that the police forces that exist in our riding may not be sufficient to secure these people who want to express their freedom of speech, who want to express their political opinions. They don't feel reassured. And some of the advice that was given to them was that they should stop flying their Canadian flag on their property if they want to avoid any potential reprehensible measures against them. And, speaking with one of my fellow citizens on this issue just yesterday, that lady told me: If, in my country, I cannot fly my own flag without being intimidated and without being threatened by violence, then I wonder: Do I still have a place in this province?

Mr. Speaker, it is serious, what is going on, and we know that they are not isolated incidents. They have occurred systematically over the past few months, during various town hall meetings in the city of Lachine, and in the city of LaSalle, and elsewhere where people of certain political convictions confront people who have other political convictions, and there have been acts of violence.

(11 h 40)

I think the National Assembly and the Minister for Public Security must take these incidents seriously and we must go beyond merely condemning these acts. We must make sure that there are sufficient police forces to inquire into who are these people perpetrating these acts and make sure that they are charged before our criminal system, because in the Criminal Code we do not tolerate these acts.

Alors, M. le Président, je vais joindre ma voix à celle du député de Robert-Baldwin, tout en indiquant au ministre de la Sécurité publique que les citoyens dans le comté de Marquette qui partagent, qui ont certaines convictions politiques craignent de les exprimer à ce moment-ci à cause des mesures d'intimidation dont ils ont été victimes. Lorsqu'on parle de menaces de mort et lorsqu'on parle de bombes qui sont placées devant les résidences, ces personnes-là craignent pour leur vie et pour la vie de leurs propres enfants et d'autres membres de leur mouvement politique.

J'espère, M. le Président, et je suis convaincu et confiant que le ministre de la Sécurité publique va accorder toute l'attention et toute l'importance que ce dossier mérite, afin de pouvoir rassurer tous les citoyens et les citoyennes du Québec que ces citoyens et citoyennes pourront continuer d'exprimer leurs convictions politiques. Même si nous sommes en désaccord avec ces convictions politiques là, ils ont néanmoins un droit démocratique fondamental de les exprimer. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette. Nous allons maintenant céder la parole au député de Sainte-Marie–Saint-Jacques et leader adjoint du gouvernement. Alors, M. le leader adjoint.


M. André Boulerice

M. Boulerice: Oui. Je vous remercie, M. le Président. Je tenais à intervenir, à la suite de mon collègue le ministre de la Sécurité publique, sur cette motion qui nous a été présentée par le député de Robert-Baldwin.

Avant d'aller dans le vif du sujet, M. le Président, vous me permettrez de rappeler à M. le député de Marquette que c'est la Communauté urbaine qui vote le budget de la police de la Communauté urbaine et qui fait les affectations nécessaires. Le ministre de la Sécurité publique n'a aucune compétence à ce niveau. Ainsi, nous appartient-il, autant à moi qu'à lui, en tant que députés de la région de Montréal où, semble-t-il, le problème se fait sentir, d'intervenir de façon vigoureuse. J'ai bien l'intention de le faire. S'il veut se joindre à moi, je serai heureux de le voir à mes côtés. Les voyages ne l'effraient pas; il est déjà allé à Ottawa. Donc, nous pourrions aller au quartier général du SPCUM qui, d'ailleurs, vous le savez, M. le député de Marquette, est situé dans ma circonscription. Et je n'ai que les meilleurs rapports avec le directeur de la police de la Communauté urbaine de Montréal, M. Duchesneau, avec qui d'ailleurs je m'entretiens assez régulièrement.

Ceci étant dit, M. le Président, au bénéfice de nos compatriotes de langue anglaise, j'aimerais souligner également que, as a personal friend of the Minister, I can assure this House and the population that he is deeply concerned by this problem. And he was concerned with that even before he entered politics. His previous occupation as a lawyer tells me that he was very active into that. And his intention, and I know quite often because we talk about it, is to continue, as a cabinet minister, to have the same sensibility that he had in his previous occupation.

M. le Président, je déplorerai, moi aussi, ces menaces et ces intimidations qui sont faites. Nous l'avons toujours dit et, surtout, nous nous sommes, il y a quelques années – cinq ans – en 1992, réjouis de célébrer le Bicentenaire de nos institutions parlementaires en disant que nous étions sans aucun doute l'une des plus vieilles sociétés démocratiques à la fois sur ce continent et dans le monde. Après le Parlement de Westminster, je crois bien que c'est le nôtre qui est le plus ancien Parlement du monde. Et nous avons l'avantage d'être le plus ancien Parlement francophone du monde. Nous avons eu notre Parlement avant la France, une seule année me direz-vous, mais il n'est pas mauvais d'avoir doublé qui que ce soit, ne serait-ce que d'une seule année.

Donc, les principes démocratiques qui prévalent au Québec sont des choses qui sont enracinées chez nous. Les Québécois et les Québécoises, quelle que soit leur langue, sont profondément soucieux du respect du droit de parole d'autrui. Et, si malheureusement certaines... et je n'hésiterai pas à employer le terme «cerveaux brûlés». Quelle que soit la cause qu'ils défendent ou la langue qu'ils utilisent, s'il y a quelques cerveaux brûlés qui préconisent ces choses, ils doivent être condamnés, ils doivent apparaître devant la justice; ils ne représentent aucunement l'ensemble de la population québécoise.

La motion que présente M. le député de Robert-Baldwin m'amène aussi à ajouter un autre volet, M. le Président, si vous me le permettez. Le libellé de sa motion parle «dans le cadre des débats démocratiques de notre société». Les débats démocratiques de notre société ne sont pas uniquement des débats de nature constitutionnelle; ils sont également des débats sur des issues – si vous me permettez cette expression, je crois que c'est un anglicisme, mais on ne fera pas de purisme inutilement ce matin ici, à cette Assemblée – à la fois sociales également.

Ainsi, du même type, devons-nous combattre les gens qui font de l'intimidation et de la violence. Je songe notamment à ces groupes pro-vie, dont on voit d'ailleurs les images catastrophiques d'agression, de bombes et je ne sais trop quoi – heureusement, à venir jusqu'à date le Québec, en a été épargné – mais qui s'attaquent à des cliniques d'avortement, alors que notre loi, à nous, ici, le permet. Est-ce une influence pernicieuse qui nous vient du sud du 45e parallèle? J'ose espérer que notre frontière soit plus perméable au niveau de ces idées.

Au même titre aussi devons-nous nous interroger sur des propos que nous entendons sur certaines stations de radio. Elles s'expriment là aussi dans des langues différentes, mais les propos ne sont pas uniquement des auditeurs et des auditrices qui s'y adressent mais malheureusement de certains animateurs qui n'ont d'autres tâches plus agréables que de tenir justement des propos extrêmement provocateurs. Je n'ai pas besoin de vous rappeler la sociologie de ma circonscription, où vous savez tous qu'il existe une partie importante de la communauté gaie et lesbienne qui, comme toute citoyenne ou tout citoyen du Québec, a des droits. Et combien de fois ai-je pu entendre à travers ces lignes – que je n'écoute pas, mais il faut quand même, à l'occasion, aller voir ce qui s'y dit – des propos haineux, des propos qui incitent à la violence.

Résultat: on se retrouve avec – encore une fois j'emploierai de nouveau cette expression – trois, quatre têtes brûlées qui commettent l'irréparable. Je me souviens très bien d'ailleurs en cette Chambre que nous avons dû, il y a quelques années, proposer une motion à la fois de réprobation mais de condoléances envers la famille d'une personne qui avait été assassinée parce qu'on soupçonnait, j'emploie le mot délibérément, une orientation sexuelle différente.

(11 h 50)

Ceci étant dit, M. le Président, je me réjouis que le député de Robert-Baldwin ait produit cette motion ici, en Chambre, aujourd'hui et je crois que, si nous avons à coeur de bien porter ce titre très noble qui nous a été attribué d'être parlementaires – et je suis heureux de le faire aujourd'hui, M. le Président et chers collègues, puisqu'il s'agit de la première journée de ma treizième année – eh bien, voilà, combattons quotidiennement ces excès, réprimons ces excès et surtout, puisque nous sommes sous le feu des projecteurs, donnons l'exemple partout, d'abord et avant tout en cette Chambre. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Le débat étant terminé, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Vu l'importance de la motion, nous allons demander un vote par appel nominal, s'il vous plaît.


Vote reporté

M. Boulerice: M. le Président, en vertu de l'article 223 de notre règlement, je vous demanderais de reporter ce vote à la fin de la période des affaires courantes de demain, jeudi 4 décembre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, tel que demandé par le leader adjoint du gouvernement, le vote sera donc reporté à notre séance, aux affaires courantes, de jeudi 4 décembre. Alors, nous sommes toujours à la rubrique Motions sans préavis. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Souligner la Semaine québécoise des personnes handicapées

M. Rochon: Alors, M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Semaine québécoise des personnes handicapées qui se déroule du 1er au 7 décembre et dont le thème – cette année – est L'accès, c'est l'autonomie

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, selon l'entente 1-1, en félicitant les gens qui sont dans l'assistance d'avoir attendu ce moment précis pour entendre le ministre et le critique de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, encore cette année, à titre de ministre de la Santé et des Services sociaux, je suis très heureux et fier de pouvoir proposer cette motion à l'Assemblée nationale. C'est une motion qui veut souligner la Journée internationale des personnes handicapées, mais aussi la Semaine québécoise des personnes handicapées qui, comme je l'ai dit, débutait cette semaine et se déroulera... Il y aura des activités jusqu'au 9 décembre.

Je veux aussi saluer de nouveau l'imposante délégation de l'Office des personnes handicapées du Québec et des partenaires qui sont actifs dans toutes les actions qui sont conduites pour aider les personnes handicapées au Québec, délégation qui est conduite par le président de l'Office, le Dr Lazure, qui, comme on le sait, a une histoire, un intérêt et un dévouement pour la cause des personnes handicapées qui remonte à très, très longtemps. Il est le père de notre législation dans ce domaine, créateur de l'Office des personnes handicapées du Québec et conduit à cet égard une action très importante.

Alors, M. le Président, cette année le thème est L'accès, c'est l'autonomie , et tout le monde y gagne. Toutes les régions du Québec déjà, présentement, participent à cette Semaine en ayant différentes activités qui, en plus de ce qui sera fait sur le plan de l'ensemble du Québec, seront des activités spécifiques aux intervenants dans les différentes régions du Québec.

On se rappellera que c'est depuis 1992 que l'Organisation des Nations unies a proclamé que le 3 décembre, à chaque année, sera une journée internationale qui sera consacrée aux personnes handicapées, parce que c'est un des groupes importants dans notre société, un des groupes qui a des besoins dont on doit tenir compte et qu'il est important, on le sait, pour des gens dans notre société qui peuvent avoir une situation un peu particulière pour une raison ou pour une autre, qu'on soit vigilants et que collectivement, socialement, on se rappelle, on fasse le point régulièrement sur nos actions, nos comportements et sur nos façons de vivre avec tous nos concitoyens.

C'est conscient de cette responsabilité que, dans la foulée des législations qui ont été adoptées au Québec, de la loi qui assure l'exercice des droits des personnes handicapées, qui a été adoptée il y a une vingtaine d'années maintenant, plusieurs actions ont été menées sur plusieurs fronts. On partait de très loin, parce que je me rappelle que, moi-même ayant été actif dans le domaine de la santé publique au moment où cette législation a été discutée, donc il y a 20 ans, à ce moment-là, au Québec, on connaissait même très peu et très mal qui étaient et où étaient les personnes handicapées. Ce n'était vraiment pas... On vient de loin en peu de temps, et la société du Québec n'est pas unique à cet égard. On a réalisé qu'il y avait des gens dans notre société qui, parce qu'ils avaient une différence, qu'ils présentaient des difficultés de s'intégrer à certains fonctionnements tels qu'ils existaient, souvent vivaient vraiment cachés, ils ne faisaient pas partie de notre vie collective.

Alors, depuis ce temps-là, il faut reconnaître qu'il s'est fait énormément d'efforts, énormément de travail et qu'il faut compter qu'il y a eu des gains, qu'il y a eu des progrès qui ont été faits. Je pense qu'on peut signaler, par exemple – même si dans chacun de ces secteurs il y a encore beaucoup à faire – que, dans le domaine du transport adapté, il y a dans près de 90 % des municipalités du Québec, maintenant, des activités qui rendent disponible le transport adapté.

Reconnaissant, encore une fois, que ce n'est pas parfait, que ce n'est pas complet, qu'il y a des difficultés, mais c'est quelque chose qui n'existait même pas avant. Il y a une beaucoup plus grande sensibilité et des exigences qui sont posées, par exemple, maintenant, pour tous les immeubles. Pour tous les nouveaux immeubles, il faut qu'on s'assure – et c'est souvent des choses relativement simples, mais il faut y penser, il faut que ça fasse partie de notre vie – qu'il y a accessibilité à des gens qui pourraient avoir une incapacité, un handicap quelconque sur le plan physique.

En milieu scolaire, là aussi, il y a une révolution graduelle, une révolution tranquille et lente qui se produit pour que les enfants soient le mieux intégrés possible et qu'au-delà de l'intégration on s'assure que notre système d'enseignement, d'éducation, de formation prenne en compte la situation particulière de certains enfants, les aide à avoir une formation comme tous les autres et à être bien intégrés socialement dès leur jeune âge.

S'il y a eu des succès dans chacun de ces domaines-là, ce n'est pas dû seulement à nos législations et aux actions du gouvernement – il faut ces actions parce qu'elles balisent la voie, elles facilitent les actions – mais c'est parce qu'il y a des citoyens et des citoyennes qui se sont impliqués beaucoup, qui se sont engagés. C'est beaucoup très souvent les parents, les familles, les amis de personnes qui vivent avec un handicap, mais c'est beaucoup d'autres citoyens aussi qui, pour différentes raisons, se sont intéressés à cette cause et ont investi beaucoup de temps, beaucoup d'efforts, beaucoup d'imagination dans les différentes communautés pour faire progresser les choses.

Maintenant, il faut se rattacher, dans nos progrès pour l'avenir, à ce qu'est vraiment la notion de la santé. On sait que l'Organisation mondiale de la santé a défini d'abord la santé avec un concept très vaste, comme étant un état optimal de santé et de bien-être physique et mental. Mais l'OMS travaille aussi, maintenant, l'Organisation mondiale de la santé, de plus en plus avec un concept plus opérationnel, où cet état optimal est défini dans la vie de tous les jours comme la capacité de pouvoir développer tous ses moyens, tout son potentiel afin d'être capable de connaître et de mener une vie qui est à la fois socialement et économiquement bien intégrée et utile dans une société.

Et, s'il y a un moyen le plus important pour cette intégration, au-delà des différents secteurs auxquels j'ai fait référence, c'est, bien sûr, le travail. Le travail dans nos sociétés, dans nos cultures est le moyen le plus efficace, qui donne le plus d'autonomie et qui permet à quelqu'un de jouer son rôle dans une communauté. Et, à cet égard, c'est peut-être là où on a fait le moins de progrès et où il y a le plus à faire pour l'avenir.

Prenons simplement une référence. On sait que le chômage est important et que l'emploi est difficile à développer pour l'ensemble des citoyens au Québec. Le chômage est autour de 11 % depuis quelques années. Mais, pour les personnes handicapées, c'est autour de 50 % même en prenant seulement les 120 000 personnes qui, avec le handicap avec lequel elles doivent vivre, peuvent quand même travailler. Alors, ce n'est pas une situation qui est acceptable. Et une société comme celle du Québec, qui se veut juste, équitable et solidaire, doit mettre plus d'énergie pour intervenir dans ce domaine-là pour qu'il y n'ait non seulement aucune discrimination, mais qu'il y ait aussi des efforts qui soient faits pour rendre disponible le travail.

(12 heures)

Il y a beaucoup de choses qui ont été faites. On a tout un réseau de centres de travail adapté, et je sais que l'Office des personnes handicapées a des projets pour développer beaucoup dans ce secteur-là. Le dernier Sommet sur l'économie et l'emploi a consacré des sommes importantes pour qu'on augmente le nombre d'emplois à travers tout le réseau des centres de travail adapté. Il y a tout un programme de contrats d'insertion et d'intégration au travail qui existe aussi, où il y a eu des progrès très relatifs, mais où il y a une volonté réelle de vouloir aller plus loin dans ce domaine-là, et ça, ça sera sûrement... Et le président de l'Office en a déjà fait un étendard de combat depuis longtemps et avec plus de vigueur récemment. Il s'agira sûrement là d'un secteur d'action prioritaire pour que l'accès au travail, qui est vraiment la clé d'une intégration complète dans une société, soit développé le plus possible.

Parce qu'il faut bien toujours se rappeler que la notion de handicap ne relève pas et ne dépend pas seulement de la personne qui vit avec une incapacité, ou une infirmité, ou une déficience.

La notion du handicap, c'est une notion sociale, et, avec une incapacité d'une nature ou d'une autre, on est plus ou moins un handicapé selon l'état de notre environnement physique et social. Et, quand l'environnement permet, favorise l'intégration avec des incapacités qui peuvent être importantes vues isolément, on peut quand même avoir une possibilité de mener une vie, d'avoir un travail et de rejoindre ce concept de santé de l'Organisation mondiale de la santé: c'est de pouvoir développer tout le potentiel que l'on a de sorte qu'on mène une vie qui est socialement et économiquement bien intégrée dans une communauté et qui est très utile.

Alors, M. le Président, cette Semaine sera importante à travers plusieurs activités pour sensibiliser, prendre conscience, discuter de façon un peu plus intense de nos actions, de nos projets et de notre efficacité et pour rappeler à tous nos concitoyennes et concitoyens qui doivent vivre avec un handicap que, oui, on veut aller plus loin dans ce secteur-là, qu'on va aller au-delà de la parole, qu'on va continuer à agir et que ce thème de l'autonomie, qui est important pour des personnes, qui est important pour un peuple... Mais pour qu'un peuple ait l'autonomie, il faut d'abord que les gens l'aient eux-mêmes, c'est ce qui mène finalement tout le monde à s'enrichir, à enrichir sa communauté et à enrichir la société et à la rendre encore plus juste et plus équitable parce qu'on a plus de moyens à se partager.

Alors, à tous ceux qui collaborent à cette semaine, je les remercie pour les efforts qui sont faits. À tous ceux qui collaborent et qui vont collaborer dans des activités qu'on va faire de façon plus intensive au-delà de cette semaine, je les remercie aussi beaucoup et je les assure que du côté du gouvernement tout ce qu'on peut faire de plus on va le faire et avec la plus grande diligence et efficacité possible. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Nous cédons maintenant la parole sur la motion au député de Notre-Dame-de-Grâce et critique officiel de l'opposition. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. J'aimerais joindre ma voix à celle du ministre de la Santé et des Services sociaux, responsable de l'Office des personnes handicapées du Québec, pour souligner la Semaine québécoise des personnes handicapées.

M. le Président, cette remarque, je la fais très aimablement au ministre de la Santé, je sais qu'il a énormément de fonctions qui lui imposent des responsabilités très importantes, mais j'ai cru comprendre que la Semaine québécoise se déroule du 3 au 9 décembre, selon le magazine Intégration de l'Office des personnes handicapées du Québec, et non pas du 1er au 7 décembre. On peut ajuster nos dates peut-être, qui sont légèrement décalées l'une de l'autre, mais c'est la moindre des choses.

M. le Président, j'aimerais également féliciter les organisations qui ont travaillé à développer la Semaine québécoise des personnes handicapées et qui sont des partenaires, des commanditaires de cette Semaine cette année. Entre autres, évidemment l'OPHQ, l'Office des personnes handicapées, son président-directeur général, M. Denis Lazure; la Confédération des organismes des personnes handicapées du Québec, la COPHAN, son président, M. Richard Lavigne; l'Alliance québécoise des regroupements régionaux pour l'intégration des personnes handicapées, mieux connue par l'acronyme l'AQRIPH; et l'Association du Québec pour l'intégration sociale; essentiellement, trois grandes confédérations-alliances qui représentent énormément de groupes populaires, des groupes communautaires qui sont soit à la promotion des personnes handicapées ou à la défense des droits des personnes handicapées au Québec.

Également, les deux coprésidents d'honneur, M. Marius Jacques, qui était présent, qui était peut-être un fondateur, une âme dirigeante des mouvements de l'Association des coopératives en économie familiale, les ACEF, et les centres de travail adapté plus récemment, et Mme Chantale Petitclerc, animatrice reconnue sur les ondes télévisées et athlète également chevronnée des Jeux paralympiques.

M. le Président, l'objectif d'une semaine qui est reconnue par l'Assemblée nationale, qui est organisée par une société du gouvernement du Québec, un organisme ou un ministère, est, surtout et avant tout, de sensibiliser le public. Je pense que c'est un rôle important dans la société. C'est vrai que les personnes handicapées ont beaucoup progressé depuis 20 ans au Québec, au Canada et dans le monde occidental, mais on peut toujours en faire plus. Une semaine pleine d'activités avec une certaine promotion dans la société est une bonne chose pour sensibiliser le public aux difficultés que subissent les personnes handicapées, non pas, comme le ministre l'a bien dit, en fonction de leur handicap, mais en fonction de l'organisation de la société autour d'elles.

Je me rappelle, M. le Président, le témoignage assez éloquent, devant une commission parlementaire, de Richard Lavigne, qui est, lui, aveugle, qui a dit: Moi, je n'ai pas de handicap nécessairement; le problème que j'ai, c'est que le gouvernement du Québec et d'autres intervenants persistent à m'écrire par lettres. C'est la nature de son handicap. Si le gouvernement du Québec ou d'autres organismes, des entreprises, pouvaient lui écrire en braille, il n'y aurait pas de problème. Alors, je pense que ça démontre de façon claire à quel point le handicap est beaucoup plus en fonction de comment, comme société, nous sommes organisés qu'en fonction d'incapacité personnelle.

Mais une petite mise en garde, M. le Président. Il ne faut pas que cette semaine, comme d'autres semaines, devienne un pur exercice en relations publiques non plus. Il faut, je pense, utiliser la semaine pour faire, oui, de la sensibilisation dans le public, la société «at large», je dirais. Mais vous me permettrez aussi, M. le Président, de prendre cette occasion pour faire un petit bilan des gestes qui ont été posés, des actions gouvernementales en matière de personnes handicapées.

Il est vrai, M. le Président, qu'on a beaucoup progressé. Le ministre responsable de l'Office a présenté certains développements, certaines mesures d'un bon oeil; ça, je comprends ça. Mais nous, de ce côté de la Chambre, et moi personnellement, c'est dans mes devoirs de jeter un regard un peu plus critique sur la situation. Je me suis inspiré beaucoup des paroles du président de la commission des affaires sociales d'alors, le député de La Prairie, nul autre que M. Denis Lazure, qui a dit que, lorsqu'il faisait l'étude des crédits, comment le gouvernement dépense son argent, s'il avait des propos durs à l'égard du gouvernement, il les faisait au nom des personnes handicapées pour avancer leur cause. Il a fallu interpréter ses propos comme ça, M. le Président. Et j'espère que et le ministre de la Santé responsable de l'OPHQ et le président-directeur général de l'OPHQ vont interpréter mes propos dans le même sens, M. le Président.

Le thème de l'accès, M. le Président, est important, c'est très clair. Moi, je ne veux pas parler de l'autonomie du peuple, mais plutôt de l'autonomie des personnes handicapées. Et il y a plusieurs volets qui touchent la question de l'accès et de l'autonomie. Je vais les aborder rapidement, M. le Président.

(12 h 10)

La question de l'éducation qui est essentielle. Deux mises en garde, M. le Président, ou trois mises en garde. Dans un avis du Conseil supérieur de l'éducation à la ministre de l'Éducation, au mois d'août 1996, il y a à peu près un an – ça, c'est un organisme gouvernemental consultatif qui donne des avis à la ministre de l'Éducation sur diverses choses – ils indiquent, à la page 53, que le financement pour l'adaptation scolaire paraît insuffisant, d'abord. Je cite: «Tous les milieux scolaires disent manquer d'argent pour toutes sortes de choses, mais en particulier pour répondre aux besoins des élèves handicapés et en difficulté, et cette situation n'est pas près de s'améliorer puisque l'entrée en vigueur des nouvelles règles va entraîner une diminution d'environ 3,4 % des postes alloués en adaptation scolaire.» Et un peu plus tard, dans le même avis, M. le Président: «Le Conseil croit, d'abord, puisque les besoins augmentent, qu'il faut de toute urgence cesser de diminuer le financement de ces services.» Il connaît trop le contexte actuel pour recommander de l'augmenter, mais il y a déjà de nombreux besoins légitimes qui ne sont pas satisfaits. Il estime cependant que les diminutions annoncées et qui prendront effet dès cette année risquent de compromettre, et pour longtemps, le changement des mentalités qui s'opérait, tant bien que mal depuis une quinzaine d'années dans l'enseignement obligatoire. Ça, c'est l'avis du Conseil supérieur de l'éducation, M. le Président, quant à l'impact des compressions que vit présentement notre système scolaire.

Et, peut-être dans un langage un peu plus dur, la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec, dans un mémoire soumis sur la réforme de l'éducation, Garantir l'actualisation de la mission éducative dans le respect de l'égalité des chances et de l'équité pour tous les élèves , mémoire déposé devant la commission de l'éducation, dit, à la page 16: «Les compressions budgétaires frappent durement les services en adaptation scolaire, compromettant dramatiquement l'accès adéquat aux ressources pour les élèves ayant des besoins spéciaux et affectant aussi l'égalité de leurs chances en éducation.» C'est des propos très durs, M. le Président, «affectant aussi l'égalité de leurs chances en éducation». Mise en garde pour le gouvernement.

Dernier mot sur l'éducation. Devant cette Chambre, on a le projet de loi n° 180 qui est maintenant en étude détaillée. Le projet de loi n° 180, la réforme de notre système scolaire; et toute la question de l'intégration scolaire est un élément important dans cette réforme. Moi, je vais plaider, M. le Président, à un moment donné que les garanties contenues dans la loi n° 180 quant à l'intégration scolaire ne sont pas suffisantes et qu'on devrait renforcer les garanties que tout élève handicapé devrait avoir pour l'intégration scolaire. On devrait les renforcer dans le projet de loi n° 180.

L'accès au marché du travail, M. le Président, le ministre en a fait part. Le taux de chômage chez les personnes handicapées qui dépasse 50 %, un taux complètement inacceptable. Regardons, dans le secteur privé, les gestes qui pourraient être posés. L'Office, comme vous le savez, a mis de côté il y a à peu près un an toute la notion des plans d'embauche dans le secteur privé essentiellement parce que ça ne fonctionnait pas. Il y avait un aveu assez clair de l'Office que ce système de plans d'embauche ne fonctionnait pas, ne donnait pas les résultats escomptés. On connaît les propositions récentes de l'Office des personnes handicapées quant à d'autres mesures qui devraient être amenées pour améliorer la situation de l'emploi chez les personnes handicapées. Il serait, je pense, opportun, à un moment donné, que le gouvernement nous indique ses propres orientations à cet égard. On a un document de consultation, on a des propositions de l'OPHQ. Le ministre de la Santé et des Services sociaux, responsable de l'OPHQ, est resté un peu muet à ce sujet, et je pense que ça serait opportun, à un moment donné, qu'il nous donne, lui, au nom de son gouvernement, ses orientations à l'égard de l'embauche des personnes handicapées dans le secteur privé.

M. le Président, financement des centres de travail adapté, contrats d'intégration au travail, le ministre en fait mention. Plus tôt cette année, en assez grande pompe, le gouvernement a annoncé la création de 1 050 nouveaux postes en centres de travail adapté sur trois ans et 900 nouveaux postes en contrats d'intégration au travail pour ce volet de l'embauche des personnes handicapées également sur trois ans. On aimerait savoir les résultats de ces deux nouveaux programmes à date. Les contrats d'intégration au travail, on ne sait pas trop où on est rendu; 300, en principe, qui devraient être créés cette année fiscale. Côté des CTA, des centres de travail adapté, il y a un petit problème. Je l'ai déjà signalé, je le resignale, on espérait créer 350 postes nouveaux en cette année fiscale, mais on part l'année, à cause des restrictions budgétaires, avec 106 postes de moins. Déjà, les CTA, les centres de travail adapté étaient obligés, à partir du 1er avril de cette année, de couper 106 postes dans le réseau à cause de manque de financement. Alors, même si on en ajoute 350 à la fin de l'année, ce n'est pas vraiment 350, c'est plutôt 244. Déjà, un petit écart qu'il faudrait regarder.

Et le «si» de mon collègue le député de Saint-Laurent est très pertinent parce que, en date du 1er novembre, selon mes chiffres, nous avons réussi à créer, dans le réseau des CTA, 143 nouveaux postes sur les 350. Alors, le réseau des CTA, l'Office et le gouvernement ont du travail à faire pour créer les 200 autres postes d'ici la fin de l'année pour rencontrer l'objectif visé au début de l'année.

M. le Président, également, je devrais dire que, selon les informations du Conseil québécois des entreprises adaptées, les centres Travail-Québec sont quasiment sous un état de siège. La subvention par travailleur de l'OPHQ diminue année après année depuis 1996. Il y a un graphique fourni par le Conseil québécois des entreprises adaptées qui démontre que la subvention par travailleur du gouvernement du Québec diminue année après année et qui projette jusqu'en 1999 une diminution assez importante. La question de surplus dans les CTA fait beaucoup vibrer le réseau, M. le Président. Les CTA sont sous pression d'utiliser leur surplus pour créer de nouveaux postes au lieu d'être financés par le gouvernement du Québec.

M. le Président, la question de l'emploi des personnes handicapées dans le secteur public. Selon un article qui a paru dans Le Soleil , le pourcentage des personnes handicapées à l'intérieur de la fonction publique québécoise est plus bas qu'il n'a jamais été depuis 1992. Ça veut dire que, selon l'article du Soleil , on a assisté à une dégringolade des emplois dans le secteur public au Québec, et c'est très grave. M. le Président, la question du transport pourrait nous occuper aussi. La question des sports et des loisirs. Il y a des difficultés avec les transferts de programmes pour l'accompagnement loisirs.

Je terminerais, M. le Président, avec le rôle des organismes de promotion et de défense des droits des personnes handicapées. Ces organismes ont pris une ampleur très importante dans les années récentes à cause d'un désengagement de l'État suite aux compressions budgétaires qu'on connaît. M. le Président, ce sont des organismes qui sont menés par des bénévoles et quelques permanents. Ils ont besoin du support nécessaire et d'un financement nécessaire, ce qui n'est pas le cas présentement. Il y a un an, on a discuté de ça à la Semaine québécoise des personnes handicapées et rien ne va plus dans le financement de ces organismes, soit avec la table de travail ou le Secrétariat à l'action communautaire autonome.

Alors, M. le Président, je joins ma voix à celle du ministre de la Santé responsable de l'OPHQ pour nous associer, de ce côté de la table, à la Semaine québécoise des personnes handicapées. Mais, avec toutes les mises en garde que j'ai déjà faites, on va surveiller de très près les actions gouvernementales en matière de personnes handicapées pour l'année qui s'en vient. Merci, M. le Président.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Le débat sur cette motion étant terminé, est-ce que la motion est adoptée? M. leader de l'opposition.

M. Paradis: Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Même réplique que pour la précédente, M. le Président.

(12 h 20)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, conformément à notre règlement, le vote est reporté aux affaires courantes du jeudi 4 décembre. M. le leader adjoint du gouvernement.


Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 171

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire procède à des consultations particulières sur le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions, les 9, 10 et 12 décembre 1997 et, à cette fin, entende les organismes suivants:

«Le mardi 9 décembre 1997: après les affaires courantes jusqu'à 12 heures, remarques préliminaires; de 12 heures à 13 heures, l'Association des manufacturiers et exportateurs du Québec; de 15 heures à 16 heures, la Chambre de commerce du Québec; de 16 heures à 17 heures, Solidarité rurale; de 17 heures à 18 heures, le Conseil permanent de la jeunesse conjointement avec l'Association des services d'aide aux jeunes entrepreneurs du Québec; de 20 heures à 21 heures, l'Union des municipalités du Québec; de 21 heures à 22 heures, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec; de 22 heures à 23 heures, la Conférence des maires de la banlieue de Montréal; de 23 heures à minuit, la Fédération des cégeps;

«Le mercredi 10 décembre 1997: de 11 h 30 à 13 heures, le Conseil québécois du regroupement des coopératives de développement régional conjointement avec l'Association des coopératives féminines du Québec ainsi que Mme Nancy Neamtan et l'Institut de formation en développement économique communautaire; de 15 heures à 16 heures, la Confédération des syndicats nationaux; de 16 heures à 17 heures, la Fédération des travailleuses et des travailleurs du Québec; de 17 heures à 18 heures, l'Union des producteurs agricoles;

«Le vendredi 12 décembre 1997: de 11 h 30 à 12 h 15, l'Association des corporations de développement économique; de 12 h 15 à 13 heures, l'Association des professionnels en développement économique du Québec; et, finalement, de 15 heures à 17 heures, l'Association des régions du Québec.»

Je fais également motion pour que le ministre d'État des Ressources naturelles, ministre responsable du Développement des régions, soit membre de ladite commission durant la durée du mandat.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Je présume qu'il y avait consentement pour la présentation de cette motion. Merci. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous réfère à l'article 10 de notre feuilleton.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le leader adjoint du gouvernement, est-ce que vous pourriez nous donner lecture...

M. Boulerice: Je m'excuse, il y en a deux autres, effectivement.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...des travaux des commissions?

M. Boulerice: Oui, effectivement, il y en a deux autres... affaires des commissions, effectivement. C'est-à-dire, mercredi, aujourd'hui, la commission de l'éducation avec le projet de loi n° 166, loi sur les cégeps, au salon rouge, de 15 heures à 18 heures; et toujours aujourd'hui, mercredi, mais en soirée, la commission de l'aménagement du territoire, avec le projet de loi n° 175, loi sur le domaine municipal, à la salle Papineau, de 20 heures à minuit; et la commission des finances publiques avec le projet de loi n° 161, loi des impôts, à la salle LaFontaine, de 20 heures à minuit. Je vous remercie, M. le Président, de m'avoir rappelé ces trois importantes annonces.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Je voudrais quand même corriger peut-être un fait avec vous. Est-ce qu'il n'y aurait pas eu inversion de locaux concernant... La loi sur les impôts, ne serait-ce pas à la salle Papineau, et le projet de loi n° 175, aménagement du territoire, à la salle LaFontaine?

M. Boulerice: M. le Président, je vous demanderais quelques secondes, je crois qu'il y a eu une petite inversion.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du...

M. Paradis: Pour venir en aide au leader adjoint du gouvernement, il pourrait regarder sur sa feuille bleue, sur son pupitre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je comprends qu'elle n'est pas rouge.

M. Boulerice: Effectivement, le leader de l'opposition a bien compris que je préférais les feuilles roses aux feuilles bleues, et je le remercie de sa bonne sollicitude, entre parenthèses. Alors, M. le Président, effectivement, il y a eu... bon, j'ai eu un daltonisme parlementaire temporaire.

Alors, effectivement, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des finances publiques va poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, et effectivement c'est aujourd'hui, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine. Quant à la commission de l'aménagement du territoire, elle va poursuivre effectivement l'étude détaillée du projet de loi n° 175, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, et c'est, comme je vous le disais, M. le Président, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau. Et la commission de l'éducation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif. Les actions de notre gouvernement, monsieur, me font voir la vie en rose, donc tout est compréhensible.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement, en souhaitant de tout coeur que cette maladie ne devienne pas permanente.

Alors, nous terminons les affaires courantes et nous allons, dès ce moment, procéder aux affaires du jour. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, vous appelez?


Affaires du jour

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je n'appellerai pas, puisque c'est un anglicisme que nous a fait remarquer M. le député de Taschereau. Donc, je vous demanderai de prendre en considération ou j'attirerai votre attention.

Mais, avant d'attirer votre attention sur un article en particulier, est-ce que je pourrais, M. le Président, vous présenter, au nom de mes collègues, une requête? Il fait très froid en cette pièce; plusieurs de nos collègues parlementaires se plaignent. Je ne sais pas dans quelle mesure vous avez une influence sur la climatisation de la salle, mais j'invoque des raisons... Vous savez, après le daltonisme, il ne faudrait quand même pas qu'on sombre dans la grippe.

Ceci vous ayant été souligné, M. le Président, je vais vous demander de prendre en considération l'article 10 de notre feuilleton.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce que j'ai compris de la part du leader adjoint du gouvernement qu'il soulevait soit une question de privilège, soit une question de fait personnel?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, je tiens à vous mentionner que c'est tout à fait normal, je crois, après la période des questions que nous avons vécue ce matin, que la température ait baissé sensiblement en cette enceinte. Mais soyez sûr que nous allons faire en sorte de procéder immédiatement pour que le tout se rétablisse le plus rapidement possible et surtout à la satisfaction de notre leader adjoint du gouvernement.


Projet de loi n° 176


Adoption du principe

Alors, à l'article 10 de votre feuilleton, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Alors, y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 176? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Oui. Alors, M. le Président, j'aimerais présenter ce projet de loi qui modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, le projet de loi n° 176, brièvement, parce que je pense qu'il s'agit d'une modification essentiellement d'ordre technique, M. le Président. Et je voudrais le contexter en rappelant quelle est la petite histoire de cette situation qui nous amène à ce projet de loi, rappeler les objectifs qui sont poursuivis et, finalement, présenter plus précisément la modification comme telle.

L'historique est le suivant. La loi sur les services de santé et les services sociaux prévoit qu'un adulte hébergé dans un établissement au Québec, un établissement public ou privé, qu'il soit financé sur une base purement privée ou qu'il soit conventionné en vertu de nos programmes, cet adulte contribue à son hébergement. Par ailleurs, pour tenir compte de la situation financière, de la richesse ou pauvreté relative de différentes personnes, le ministre de la Santé peut exonérer une personne de paiement, en tout ou en partie, de façon à s'assurer que chaque adulte puisse conserver un montant minimum, qui est appelé une allocation de dépenses d'une personne hébergée. Une fois qu'elle a contribué, selon ses revenus, à son hébergement, au gîte et au couvert – pour l'hébergement, les soins sont toujours assurés par nos programmes – il lui reste quand même assez d'argent pour pouvoir tenir compte de ses dépenses personnelles.

On prévoit même dans nos législations, et là c'est la Loi sur la sécurité du revenu qui s'applique, que, si une personne n'a pas de ressources suffisantes pour fournir même l'allocation, pour se garder même une allocation de dépenses, à ce moment-là, en vertu de la Loi sur la sécurité du revenu, il y a une prestation qui est versée à la personne, de sorte que toute personne hébergée contribuant selon ses moyens au gîte et au couvert pour l'hébergement conserve une allocation de dépenses, de ses avoirs, ou elle la reçoit sous forme de prestation.

(12 h 30)

Alors, à l'origine, on remonte donc à peu près vers 1975, les deux volets, le volet contribution avec ou sans exonération et le volet prestation, pour ceux qui n'avaient pas de revenus suffisants, étaient administrés par une direction de l'aide sociale, au ministère Affaires sociales à l'époque, en 1975.

En 1981, cette direction du ministère a été détachée et transférée à un nouveau ministère qui était, à l'époque le ministère du Travail, de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu. Alors, l'administration du programme a continué de se faire par ce ministère et a été transférée ou a suivi quand le ministère du Travail, de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu est devenu le ministère de la Sécurité du revenu. Ce transfert de responsabilités là a été confirmé par décret.

Ça nous amène en 1998, à la toute fin de 1998, où les deux ministères, Santé et Services sociaux et le ministère de l'Emploi et de la Solidarité maintenant...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président, je m'excuse d'interrompre à ce moment-ci le ministre de la Santé, mais simplement une précision. J'essaie de suivre comme les gens qui nous écoutent, et comme vous, M. le Président, quand le ministre parle que ça nous amène à la fin de 1998, je le trouve...

M. Rochon: Excusez, 1988.

M. Paradis: ...un petit peu futuriste...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, 1988.

M. Rochon: Merci, je vous remercie d'avoir soulevé le lapsus. Non, je voulais bien dire la fin de 1988, excusez. Donc, on a commencé en 1975, transfert du ministère de la Santé au Revenu, et au Travail en 1981, et c'est bien à la fin de décembre 1988, donc il y a à peu près une dizaine d'années, que les deux ministères ont dû convenir d'une entente administrative pour s'assurer qu'il y ait une bonne cohérence dans la gestion entre, d'une part, toujours cette contribution avec ou sans exonération et la prestation qui pouvait être nécessaire pour des gens qui n'avaient pas de revenus suffisants.

Alors, présentement, on se trouve donc dans une situation où les deux ministères voudraient améliorer la situation quant à la gestion de ce projet et demandant à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, qui gère présentement la partie pour le ministère de la Santé et des Services sociaux, qui gère la contribution aux adultes hébergés – c'est dans le cadre de ce genre d'activités administratives que fait la Régie – idéalement, il serait utile que la Régie puisse gérer l'ensemble du programme, et l'aide financière pour les gens qui ont besoin d'une prestation et le programme de contributions aux adultes hébergés...

Voilà un peu ce qui nous rappelle... Je m'excuse, c'est un petit peu administratif et tatillon, mais je pense qu'il faut comprendre qu'on arrive à ce projet de loi là parce qu'il y a eu une évolution, des changements administratifs au sein du gouvernement, qu'il y avait deux façons d'aider des gens qui sont dans le besoin, qui venaient d'abord d'un seul ministère. L'évolution a amené ça à deux ministères qui se sont partagé les responsabilités, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et le ministère de la Santé et des Services sociaux, entente administrative entre les deux ministères pour essayer d'avoir une meilleure jonction possible et que les citoyens ne se retrouvent pas avec deux systèmes qui risquent de ne pas se parler et être en difficulté.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux voit maintenant l'utilité de faire administrer ce genre de programme là par la Régie, qui est beaucoup plus équipée comme appareil administratif que le ministère lui-même soit pour payer des comptes des professionnels, soit gérer des contributions; il y a toute une capacité administrative, là, qui existe à la Régie mais pas au ministère.

Alors, ça nous amène un projet de loi qui a été conçu avec trois objectifs, essentiellement. D'abord, on voudrait améliorer les services à la clientèle en créant ou en reconstituant ce qu'on avait en 1975, un guichet unique, de sorte que les personnes, leurs répondants, les établissements d'hébergement, le Curateur public qui peut être impliqué dans ce cas-là, que tout le monde fasse affaire avec un seul guichet qui gère les deux programmes et qui s'assure de réconcilier quoi que ce soit qui puisse se présenter en cours de route.

Deuxièmement, en confiant la gestion de ces programmes à un organisme qui a été créé pour gérer ce genre de programme, la Régie de l'assurance-maladie du Québec, on a un meilleur respect des fonctions ministérielles des deux ministères qui peuvent vraiment s'occuper beaucoup plus et investir le temps de leur personnel dans l'évaluation de ces programmes, les mesures d'impact du résultat de ces programmes, s'assurer d'une évolution de ces programmes selon les besoins de la population sans être obligé d'investir du temps, de demander à du personnel de se consacrer à la gestion du programme.

Enfin, le troisième objectif, comme j'y faisais allusion tout à l'heure, vu la compétence gestionnaire et administrative, vu l'expérience acquise par la Régie, on est convaincu que c'est une organisation qui est mieux conçue, qui est mieux placée pour gérer efficacement ces programmes.

Or, on constate que présentement il n'y a pas de disposition législative qui habilite le ministre de la Santé et des Services sociaux ni le gouvernement – donc aussi la ministre de l'Emploi et de la Solidarité – à confier ce type de fonction à un organisme autre que le ministère comme tel, même si c'est un organisme de tutelle qui répond au ministère et au gouvernement. Et, par ailleurs, en regardant bien les programmes qui sont, avec habilitation législative, sous la responsabilité de gestion de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, soit l'assurance-maladie comme telle, l'assurance-médicaments, même en faisant toute l'extension possible de l'interprétation de la couverture de ces programmes, ils ne peuvent pas vraiment couvrir le programme de contribution aux adultes hébergés, qui est d'une nature tout à fait différente.

Alors, ça nous amène à proposer un petit amendement à deux lois pour faire une concordance, et je vais terminer là-dessus, M. le Président. Le premier amendement est donc proposé pour la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, et il dit tout simplement que le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi – donc, la gestion des programmes dont on vient de parler – ou par une autre loi pour tenir compte de la Loi sur la sécurité du revenu, qui est administrée par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité et dont il est chargé de l'application. Donc, une première modification à la loi du ministère pour habiliter à déléguer.

Et, pour faire la concordance, il nous faut un petit amendement à l'article 2 de la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec qui, lui, dit que la Régie exerce également toute fonction qui lui est déléguée aux termes d'une entente conclue avec un ministre. Donc, ça pourrait être d'autres programmes de ce genre-là aussi qui pourraient être confiés à la Régie. Alors, voilà, M. le Président. Je pense que c'est un amendement qui veut tout simplement permettre de gérer de façon plus efficace, de façon plus optimale, de donner un meilleur service aux citoyens en confiant à un de nos organismes publics plutôt qu'aux appareils administratifs des ministères la gestion de programmes qui consistent essentiellement à recueillir des contributions et à effectuer certains paiements. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Nous cédons maintenant la parole au leader de l'opposition, député de Brome-Missisquoi et critique officiel de l'opposition en matière de santé et de services sociaux. Alors, M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Tout comme vous, j'ai écouté attentivement le ministre de la Santé, et il y a une expression qui m'est venue à l'esprit, là, tout naturellement en prenant connaissance de son discours, en tentant de le marier au libellé du projet de loi qui est devant nous, c'est l'expression suivante: Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? C'est encore une fois une approche très technocratique qui peut nous mener, M. le Président, je vous le souligne très respectueusement, très loin dans l'abdication des pouvoirs par un ministre de la Santé.

(12 h 40)

Je vais demander aux parlementaires qui sont ici de faire abstraction du titulaire actuel. Il est député de Charlesbourg, mais il peut y avoir quelqu'un dans l'avenir qui vienne d'un autre comté et qui accepte, lui, d'assumer ses responsabilités de ministre de la Santé. Le ministre arrive en cette Chambre et il nous dit: Écoutez, c'est une histoire bien compliquée d'arrangement entre deux ministères qui date d'il y a bien des années, puis ce que je veux faire, là, je veux essayer de simplifier ça, puis l'objectif, il est correct puis il est noble, les personnes âgées qui, dans votre comté, M. le Président, qui, dans nos comtés, sont hébergées, on veut s'assurer que, une fois qu'ils ont couvert ce qu'on appelle le gîte et le repas, il leur reste un petit peu d'argent, puis pas trop, pour vivre. Et là on retrouve un texte de loi qui ne mentionne jamais ça nulle part, dans aucun de ses articles et, au contraire, un texte de loi qui permet au ministre de la Santé d'abdiquer toutes ses responsabilités, tous ses pouvoirs et tous ses devoirs en fonction de quelque organisme que ce soit au Québec.

C'est ça que vous avez applaudi, de l'autre côté, il y a cinq minutes, au cas où vous n'auriez pas pris connaissance du texte du projet de loi. Et ça, c'est très dangereux, M. le Président, surtout avec le ministre actuel qui, à chaque période de questions, nous répond: Ce n'est pas de ma faute. C'est la faute des infirmières, c'est la faute des médecins, c'est la faute de l'hôpital, c'est la faute du centre d'accueil, c'est la faute de la régie régionale, mais ce n'est pas de ma faute. Moi, je n'ai rien à faire dans ce système-là.

Aujourd'hui, il nous présente un projet de loi. On va lire les notes explicatives qu'il nous a fournies avant de nous faire son discours, M. le Président, puis on va essayer de réconcilier les deux. S'il y a quelqu'un de l'autre côté qui a écouté le discours puis qui est capable de réconcilier le discours du ministre avec les notes explicatives de son projet de loi, il pourra se lever avec le consentement.

Notes explicatives soumises par le ministre: «Ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux afin que le ministre puisse, par entente, déléguer à un organisme l'exercice des fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.»

Tous les pouvoirs, tous les devoirs. Sa fonction totale et complète peut être déléguée, M. le Président.

«Le projet de loi modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec afin de permettre à la Régie d'exercer toute fonction qui lui est déléguée aux termes d'une entente conclue avec un ministre.»

À quelle place dans ces notes explicatives est-il question du problème que le ministre nous a soumis ce matin? À quelle place est-il question de personnes âgées en hébergement à qui on veut préserver un petit pécule après qu'elles aient couvert, sur le plan financier, leurs besoins en matière de logement et de nourriture? Nulle part, M. le Président. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?

C'est d'autant plus inquiétant, M. le Président, ce libellé de ce projet de loi, que, jusqu'à l'adoption de ce projet de loi – si jamais elle a lieu – le ministre de la Santé a encore, dans notre société, des fonctions, des pouvoirs et des devoirs qui sont drôlement importants et qui affectent tous ceux et toutes celles qui vivent des problèmes de santé ou qui s'inquiètent maintenant de vivre des problèmes de santé.

L'article 2 de la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, je ne sais pas si le ministre l'a déjà lu, mais il définit les fonctions du ministre: «Le ministre a pour fonctions d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques relatives à la santé et aux services sociaux.» À qui veut-il déléguer? À quel organisme veut-il déléguer le pouvoir qui est le sien, la fonction, aujourd'hui, d'élaborer et de proposer des politiques relatives à la santé et aux services sociaux? C'est sa première responsabilité de ministre de la Santé et des Services sociaux. Il ne veut pas continuer à l'assumer, M. le Président!

«Le ministre doit voir à la mise en oeuvre de ses politiques, en surveiller l'application et en coordonner l'exécution.» Quand il nous répond à l'Assemblée nationale, à la période de questions, que ça ne le regarde pas, il contrevient directement, M. le Président, au deuxième paragraphe de l'article 2 de la loi qui définit ses fonctions.

Le ministre a également des devoirs, M. le Président. En faveur de qui veut-il abdiquer les devoirs qui sont les siens comme ministre de la Santé? L'article 3 de la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux est très clair: «Le ministre doit plus particulièrement:

«a) assurer la protection sociale des individus, des familles et des autres groupes.» En faveur de qui veut-il abdiquer cette responsabilité qui est la sienne dans notre système parlementaire? Les régies régionales? De quel autre organisme, M. le Président?

«b) prendre les mesures requises pour assurer la protection de la santé publique.» En faveur de qui veut-il abdiquer cette responsabilité? Les départements de santé communautaire? Lui ne sera plus responsable devant cette Chambre?

«c) voir à l'amélioration de l'état de santé des individus et du niveau de santé de la population.» Mais en faveur de qui veut-il se décharger de cette responsabilité, de ce devoir qui est le sien en vertu de la loi?

«d) favoriser l'étude et la recherche scientifique dans le domaine de la santé et des services sociaux.» M. le Président, pourquoi le ministre nous présente-t-il un amendement à cette loi qui lui permettrait de se décharger de cette responsabilité, d'abdiquer face à des responsabilités qui sont les siennes?

«e) participer à l'élaboration et à la mise en oeuvre des programmes d'assainissement du milieu physique dans lequel vit la population à laquelle ces programmes sont destinés.» M. le Président, jusqu'à ce jour, tant que cette modification ne sera pas adoptée, c'est la responsabilité du ministre. Est-ce qu'il veut confier ça au ministère des Affaires municipales, responsable du loisir, parce que lui n'est pas capable d'assumer cette responsabilité-là, M. le Président?

«f) promouvoir la participation des individus et des groupes à la détermination des moyens de satisfaire leurs besoins dans le domaine de la santé et des services sociaux.» Si le ministre de la Santé n'est pas responsable de ça au Québec, à qui on va confier cette importante mission? Qui va s'acquitter de ce devoir, M. le Président?

«g) consulter les individus et les groupes sur l'établissement des politiques du ministère de la Santé et des Services sociaux.» Mais c'est qui, si ce n'est pas le ministre, qui va consulter les individus et les groupes sur l'établissement des politiques du ministère de la Santé et des Services sociaux? On n'est pas surpris, M. le Président, que, dans le cadre de l'étude de ce projet de loi, le ministre n'ait pas voulu entendre personne, qu'il ait refusé d'entendre les régies régionales et les divers intéressés. Il n'est pas question qu'il entende... Comme disaient les infirmières hier: De toute façon, ça donne quoi? Il a réponse à tout.

h) À qui le ministre veut-il déléguer la responsabilité de «promouvoir le développement et la mise en oeuvre de programmes et de services en fonction des besoins des individus, des familles et des autres groupes»? À qui il veut déléguer ça? Parce que c'est ça qu'il nous demande de faire comme parlementaires, de lui donner cette possibilité de se déresponsabiliser. Il veut devenir un ministre de la Santé irresponsable, M. le Président.

«i) établir des normes applicables en matière de services, d'équipement, de finance et de personnel dans l'utilisation des subventions accordées par le gouvernement dans le domaine de la santé et des services sociaux, et en surveiller l'utilisation». M. le Président, il ne veut même plus être responsable de ses coupures budgétaires dans le domaine de la santé. Il ne veut plus être responsable de l'endettement de nos institutions. Il ne veut plus être responsable des listes d'attente. Il ne veut plus, M. le Président, être responsable, s'il souhaite le déléguer à un autre organisme, de ce qu'il y a de plus fondamental et qui est au coeur même du fonctionnement du ministère de la Santé et des Services sociaux.

«j) assurer l'organisation et le maintien des établissements dans le domaine de la santé et des services sociaux, lui-même ou par un tiers». Je ne sais pas pourquoi il nous arrive avec un amendement là, M. le Président. Il pouvait déjà le faire faire par un tiers, cet élément-là. Je ne sais pas s'il ne le savait pas ou pourquoi il a inclus j dans l'ensemble des fonctions et devoirs dont il veut se départir en faveur d'un autre organisme.

«k) déterminer les possibilités d'adoption des enfants domiciliés hors du Québec en tenant compte des objectifs définis par le ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles en vertu de la Loi sur le ministère des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles et de la Loi sur l'immigration au Québec». Ça, ça veut dire, M. le Président, que dans cette question d'adoption internationale, puis on l'a vu encore dans les médias cette semaine, à laquelle se réfèrent des parents qui souhaitent adopter des enfants, la responsabilité était jusqu'à ce jour ministérielle. Et c'est de ministre à ministre qu'on se parlait au niveau des affaires intergouvernementales. À qui l'actuel ministre de la Santé veut-il déléguer cette responsabilité? À qui le ministre des Affaires internationales va-t-il s'abaisser – je pense que dans ce cas-là l'exemple est criant, M. le Président – à parler dans la société concernant ces sujets-là? Il a déjà de la difficulté à s'abaisser à parler à ses collègues ministres!

«l) Obtenir des ministères du gouvernement et de tout organisme public ou privé des renseignements disponibles aux fins de la mise en oeuvre de la politique du ministère.» Mais à qui le ministre de la Santé veut-il déléguer cette fonction et cette responsabilité qui est la sienne de par le libellé même de la loi sur la santé et les services sociaux?

Par la suite, M. le Président, vous avez, dans la loi que vous connaissez bien, les devoirs et pouvoirs du sous-ministre. Et on dit jusqu'à maintenant que le sous-ministre – puis imaginez-vous dans quelle situation loufoque il va placer son ministère – agit sous la direction du ministre; c'est normal parce que le ministre a tous ses pouvoirs puis c'est tous ses devoirs. Mais, lorsqu'il aura délégué à d'autres organismes ses pouvoirs et ses devoirs, est-ce que le sous-ministre va prendre ses ordres des régies régionales, des conseils d'administration de centres locaux de services communautaires ou de centres hospitaliers de longue durée? Est-ce que c'est le ministre qui a préparé ce projet de loi?

M. le Président, je pense que je n'en ai jamais vu un, ou à peu près, jamais vu un aussi court. Ce n'est pas difficile à comprendre. Tous les pouvoirs qu'on vient d'énumérer ici, le ministre nous demande d'adopter l'article suivant: «Le ministre peut, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi ou une autre loi dont il est chargé de l'application.» Tous les devoirs, tous les pouvoirs, toutes les fonctions qu'on vient d'énumérer, si on adopte ensemble sans demander au ministre d'aller refaire ses devoirs, ça va lui permettre de se décharger complètement de ses responsabilités ministérielles et ça va jeter un fouillis dans l'administration de ce qu'on appelle le ministère de la Santé qui est sans précédent, M. le Président.

(12 h 50)

J'ai demandé à mon bureau d'effectuer une recherche: Dans le système de droit parlementaire britannique, y a-t-il un autre ministre qui ait demandé à un Parlement – et, moi, en 17 ans de vie parlementaire, je n'en ai jamais vu – la permission de ne plus être responsable pour sa job de ministre de la Santé et des Services sociaux ou pour tout autre ministère? Jamais un autre ministre n'a présenté dans un Parlement de type britannique un projet de loi qui demandait à l'Assemblée législative ou à l'Assemblée nationale la permission de pouvoir se débarrasser de toutes ses responsabilités au cas où il souhaite ne plus les assumer.

M. le Président, moi, je mets en garde les députés des deux côtés de cette Chambre. Si le ministre est sincère lorsqu'il nous dit que l'objet de son projet de loi, ce n'est pas ce qui est écrit dans les notes explicatives, ce n'est pas ce qu'on retrouve dans le libellé de la loi comme tel, mais c'est ce qu'il nous a dit en Chambre ce matin, simplement permettre aux personnes âgées qui sont en hébergement, après avoir payé pour leur gîte puis pour leur nourriture, d'avoir un petit pécule à leur disposition – puis ce n'est pas des gâteries qu'ils se paient avec ça, c'est l'essentiel – à ce moment-là, qu'on fasse des notes explicatives en conséquence, qu'on rédige un article de loi en conséquence, puis là on fera certaines mises en garde au ministre de la Santé non pas quant à ce qu'il prétend nous avoir proposé, mais on prend sa parole que ce qu'il nous a dit en Chambre ce matin, c'était vrai. Et là on lui posera des questions qui auront trait à la réforme de l'aide sociale.

Le ministre n'est sans doute pas sans savoir que sa collègue de l'Emploi et de la Concertation est en train de préparer un projet de réforme de l'aide sociale. Un des éléments contestés de cette réforme, M. le Président, et vous en êtes témoin – il y a même des députés de l'autre côté, quand je parle d'éléments contestés de la réforme, qui ont déposé des pétitions et qui eux-mêmes ont des réserves – on veut prendre à peu près 25 % du nombre des personnes qui sont sur la sécurité du revenu, qu'on appelle les gens inaptes au travail, et les envoyer à la Régie des rentes du Québec avec la même argumentation que le ministre nous présente: Ça va être plus facile à administrer, ça va être un guichet unique, on va prendre 25 % des bénéficiaires de l'aide sociale, ceux qui sont inaptes au travail, et on va les envoyer à la Régie des rentes du Québec.

Là, ce que le ministre nous dit aujourd'hui, c'est: Ça va être un guichet unique. On va en prendre un autre pourcentage qui est actuellement administré par entente, qui découle des juridictions du ministère de l'Emploi et de la Concertation, et on va envoyer ça à la Régie de l'assurance-maladie. Moi, je suis prêt à faire le débat là-dessus. Peut-être que le ministre a raison, peut-être que le ministre a tort, M. le Président. Je veux simplement prendre le temps, parce qu'on se retrouve dans le milieu d'un projet qui touche la sécurité du revenu, des gens qui n'ont rien pour vivre, on touche à ces gens-là. Est-ce que c'est mieux pour ces gens-là qu'ils soient administrés par la Régie de l'assurance-maladie ou qu'ils soient administrés comme présentement? Nous, on va voter dans le sens de l'intérêt de ces personnes-là, et je pense que, de l'autre côté, il y a des députés, s'il y a un vote libre là-dessus, qui vont voter dans ce sens-là aussi.

Mais ce n'est pas de ça qu'on est saisis, M. le Président, ici ce matin. Ce n'est pas là-dessus que le débat porte. À moins que le ministre – et ça, là-dessus, j'aimerais qu'il me réponde tantôt – n'ait mélangé ses notes, qu'il y a un autre projet de loi qu'il va nous présenter qui touche ce dont il nous a parlé ce matin et qu'il ne nous a pas parlé du projet de loi dont on est saisis et dont les notes explicatives sont claires, sont limpides, et dont le texte est également très clair et très limpide. Mais, devant cette contradiction – c'est peut-être ma nature de parlementaire, et ce n'est pas à cause de la présence du ministre en face de nous aujourd'hui – moi, j'ai tendance à être prudent, M. le Président, tendance à être très prudent. J'ai tendance à me fier aux notes explicatives et aux textes de loi qui nous sont soumis par le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Si j'en crois le texte de loi, ça va également dans le sens des réponses qu'on obtient à la période des questions: Je ne suis pas responsable. Ce n'est pas à moi à corriger ça. Les régies régionales s'occupent de ça. Tout va bien dans le système. Les gens se plaignent pour rien. Les malades sont satisfaits. Les docteurs chialent pour rien. L'opposition fait de la démagogie. J'ai des sondages qui m'indiquent que tout va bien dans la santé.

M. le Président, j'ai également tendance à être méfiant, parce que le ministre a eu tendance, par le passé, à se décharger de ses responsabilités avant même d'introduire en cette Chambre le projet de loi qui est devant nous. Puis c'est la deuxième fois que j'ai l'occasion de le rappeler au ministre, parce que je n'ai jamais eu de suite au premier appel que je lui ai fait au moment où, sans ce projet de loi là, il a tenté de se décharger de ses responsabilités.

Au mois d'avril 1997 – et j'ai l'autorisation de citer le nom de la personne – Claude Lamontagne écrivait au ministre de la Santé la lettre qui suit: «Mon père, Joseph-Alyre Lamontagne, a été hospitalisé – 2 avril 1997 – le 23 janvier 1997 à l'Hôpital de L'Enfant-Jésus de Québec pour subir, le lendemain, l'ablation du poumon gauche suite à un cancer qui commençait à se développer exclusivement sur ce poumon. L'opération a bien réussi. Il est sorti de l'unité des soins intensifs le 30 janvier et il a quitté l'hôpital le 1er février, vers midi. À la maison, nous avons constaté qu'il faisait de la température, 100° F. Vers 17 heures, nous avons appelé l'ambulance. Mon père avait de la difficulté à respirer et était très faible. À l'hôpital, mon père a été placé à l'urgence puis à l'unité des soins intensifs jusqu'à sa mort. Mon père est mort le 8 février à la suite d'une complication rénale.

«Monsieur, je ne comprends pas que mon père ne soit resté que deux jours dans sa chambre pour lui permettre de récupérer après une opération aussi importante pour une personne de son âge. De plus, la veille de son départ, il était encore raccordé au système d'alimentation d'oxygène et il faisait de la température. De plus, à cet hôpital, j'ai constaté à quelques reprises que des fenêtres étaient ouvertes par un froid sibérien», etc.

«Monsieur, je ne comprends pas quelle économie le milieu hospitalier peut réaliser à faire sortir les patients trop tôt après leur opération s'ils doivent revenir à l'hôpital, à l'urgence puis aux soins intensifs parce qu'ils sont trop faibles et trop souffrants pour vivre à la maison. N'y aurait-il pas lieu de se demander si mon père a été débranché prématurément à cause de la politique du virage ambulatoire? Selon le personnel de cet hôpital, il est fréquent que les patients reviennent après une opération.» Et c'est signé Claude Lamontagne.

Ça, c'est la lettre adressée au ministre, M. le Président. Quand je disais, tantôt, qu'il se déchargeait de ses responsabilités, vous savez quelle réponse il a obtenue du ministre de la Santé? Lui, il intervenait sur un ton très correct pour dire au ministre: Il y a un problème. Pouvez-vous y voir? Le ministre lui a répondu, le 8 avril dernier, excusez, son attachée politique, Chantal Ouellet: «Nous joignons à la présente un dépliant qui vous indiquera comment obtenir satisfaction lorsque vous utilisez des services du réseau de la santé et des services sociaux.» Et on a joint le dépliant. Ça, c'est une façon, je ne dirai pas bête et méchante parce que je n'aurais pas le droit de qualifier ça, M. le Président, de cette façon, de se déresponsabiliser comme ministre de la Santé.

Aujourd'hui, devant cette Assemblée, il nous demande, à nous tous et à nous toutes, les députés des deux côtés de la Chambre, de lui permettre, par entente, de déléguer à un organisme l'exercice des fonctions qui lui sont attribuées par la présente loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.

C'est un texte, moi, M. le Président, je vous le soumets, si jamais il en arrive là, qui peut très bien s'incorporer à une lettre de démission qu'un ministre de la Santé fait parvenir à son premier ministre, mais ce n'est pas un texte sur lequel on se doit de voter sans obtenir des réponses claires, nettes et précises. Et là, M. le Président, je reviens, parce que, dans le système parlementaire, j'ai également été habitué – peut-être que le ministre n'avait pas pris le temps de lire sa loi, il a beaucoup d'occupations – de revenir à son discours et de lui réoffrir, à ce stade-ci, nous sommes à l'étude du principe du projet de loi, de corriger sa loi si vraiment l'intention qu'il a, c'est de faire ce qu'il nous a dit qu'il nous demandait de faire dans le discours qu'il a prononcé ici, à l'Assemblée nationale.

(13 heures)

S'il peut baliser ça dans un texte de loi qui est clair, qui nous assure, M. le Président, que c'est vraiment son intention et qu'il n'a pas d'intention cachée dans l'étude ou dans le dépôt de ce projet de loi, avec les réserves que j'ai exprimées tantôt, le soumettre aux groupes des assistés sociaux, le soumettre à ma collègue qui est responsable de ce dossier à l'Assemblée nationale, le soumettre à l'analyse et à l'expertise des gens qui pourront nous dire si les personnes âgées seront mieux servies par un guichet unique à cet endroit-là que par un guichet unique ailleurs, il aura toute la collaboration de l'opposition et de son porte-parole. Mais, à ce moment-ci, nous ne sommes pas en mesure d'exprimer notre vote parce que nous avons le choix entre prendre la parole du ministre ou croire le texte qui est devant nous. On veut donner le temps au ministre d'éclaircir les choses. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader de l'opposition. Alors, considérant l'heure – actuellement il est 13 heures – nous suspendons nos activités à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer l'item à l'ordre du jour.


Motion d'ajournement du débat

M. Boulerice: Oui, M. le Président. En vertu de l'article 5 de notre règlement, je vais proposer une suspension pour ce qui est de l'article 10 auquel nous étions précédemment et je vais vous demander de considérer l'article 1.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je crois que c'est l'ajournement du débat que vous voulez me demander, hein?

M. Boulerice: Oui, oui, effectivement.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est parce que vous avez parlé de suspension, alors, je m'excuse. C'est ça. Alors, cette motion d'ajournement du débat sur le projet de loi n° 176 dont nous discutions ce matin, elle est adoptée? Cette motion est adoptée? Adopté.


Débats sur les rapports de commissions


Prise en considération du rapport de la commission qui a entendu divers sous-ministres et dirigeants d'organismes publics conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics

Maintenant, je vais appeler l'article 1 tel que vous me l'avez indiqué. À l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'administration publique qui, lors de séances tenues en septembre, octobre et novembre 1997, a procédé à l'audition du président de la Commission des services juridiques, du président de la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec, du Secrétaire associé aux services gouvernementaux, du directeur général des services aériens et postaux, du sous-ministre de la Sécurité publique, du sous-ministre de la Justice, du sous-ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, du président de la Société de développement industriel, du sous-ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et du Secrétaire du Conseil du trésor en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

Ce rapport contient des recommandations. Je vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, cette prise en considération donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable. J'ai tenu une réunion avec les leaders et je vous informe de la répartition du temps de parole établie pour la durée de ce débat restreint. Cinq minutes sont allouées à chacun des députés indépendants; les deux groupes parlementaires se partageront également le reste de la période consacrée à ce débat. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes ou par les députés indépendants pourra être redistribué, et les interventions ne seront soumises à aucune limite. Alors, je suis prêt maintenant à céder la parole au premier intervenant. M. le député de Westmount–Saint-Louis, je vous cède la parole.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, il me fait plaisir cet après-midi de discuter sur le rapport, les conclusions et les recommandations à la suite de l'audition des sous-ministres sur les sujets que vous avez mentionnés. Le nombre de sujets que vous avez mentionnés révèle effectivement, je dirais la qualité, mais surtout la profondeur du travail que nous avons fait.

Chaque année, le Vérificateur général – et je le dis pour le bénéfice de nos auditeurs – nous amène ici, aux membres de l'Assemblée nationale, deux tomes de son rapport annuel. Notre commission a pris comme décision de fonctionnement – puisque d'abord il faut mentionner que c'est une nouvelle commission – elle a pris comme mesure de fonctionnement de faire en sorte d'étudier chacun des rapports du Vérificateur général, ce qui n'avait jamais été fait dans le passé, et de faire en sorte de s'assurer que le premier tome du rapport du Vérificateur général, que nous recevons ici au début du mois de juin, soit étudié et aussi que nous puissions établir et faire écrire un rapport des conclusions et écrire des recommandations, soumettre des recommandations à l'Assemblée nationale sur nos conclusions du rapport du Vérificateur général, et cela, avant la présentation du deuxième tome du Vérificateur général. En deux mots, le Vérificateur général publie son premier tome au mois de juin, nous étudions son rapport et nous déposons à l'Assemblée nationale les recommandations sur le rapport du Vérificateur général avant qu'il dépose son deuxième tome.

Son deuxième tome, j'en ai ici une copie, vous l'avez reçu, mes collègues de l'Assemblée, depuis maintenant une semaine. La semaine dernière, le Vérificateur général nous a soumis son deuxième tome, ce qui implique que les membres de notre commission – j'en vois plusieurs ici parmi nous – vont faire en sorte d'étudier le rapport du Vérificateur général pour nous permettre, nous, parlementaires, d'avoir des recommandations de notre commission parlementaire avant le prochain dépôt du rapport du Vérificateur général.

(15 h 10)

M. le Président, c'est la première fois qu'une commission parlementaire comme la nôtre fonctionne. C'est une décision qui a été prise dans le cadre des modifications à notre processus parlementaire, et je dois signaler que c'est aussi la première fois qu'un rapport du Vérificateur général est vu d'un bout à l'autre et étudié de façon plus marquée, plus profonde, puis est approfondi, je dirais, par l'étude d'une commission parlementaire comme nous l'avons fait. Nous l'avons fait au niveau de plusieurs sujets. Maintenant, si je me fie déjà à ce que dit le Vérificateur général dans son rapport qu'il nous a donné la semaine dernière, eh bien, concernant la vérification et la reddition de comptes à l'Assemblée nationale, lorsqu'on lit aux pages 220 à 225 du rapport du Vérificateur, on s'aperçoit que le Vérificateur estime que la reddition de comptes, évidemment, se porte mieux, à l'Assemblée, depuis que la nouvelle commission de l'administration publique a pour fonctions de vérifier les engagements financiers des ministères et de certains organismes publics, d'entendre chaque année le Vérificateur général sur son rapport annuel et d'entendre aussi, en vertu de la loi sur l'imputabilité des sous-ministres, au moins une fois par année les ministres et, si ceux-ci le jugent opportun, les sous-ministres ou les dirigeants d'organismes publics, comme nous l'avons fait.

«Cette commission parlementaire devrait nous permettre d'intensifier notre collaboration avec l'Assemblée nationale – ça, c'est le Vérificateur général qui parle – et d'augmenter ainsi notre contribution au rôle parlementaire.» Je pense qu'il faut signaler que la présence du Vérificateur général depuis les six derniers mois a plus que doublé au profit des parlementaires qui ont participé, avec le Vérificateur, à l'analyse des dossiers dont je vais vous faire part.

D'abord, M. le Président, nous avons choisi, parmi les principaux dossiers soumis par le Vérificateur général et aussi par la Commission de la fonction publique, des dossiers d'ordre administratif, mais qui ont une importance réelle dans la vie courante de l'ensemble de nos concitoyens. Je vous mentionne, M. le Président, que nous avons étudié d'abord les services d'aide juridique, ensuite la gestion des ressources humaines à la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec, les services aériens et postaux, l'administration des sentences et la réinsertion sociale des délinquants, le Programme d'investissement en démarrage d'entreprises – soit le plan Paillé – les services-conseils à la clientèle agricole, la fonction de vérification interne au gouvernement du Québec. Déjà, ça a été la somme d'une étude de plusieurs semaines, plusieurs heures de travail de cette commission qui a été une des commissions qui s'est réunie le plus régulièrement cette année. Et, en cela, j'en profite, à ce stade-ci, pour remercier les membres de la commission, que je nommerai un peu plus tard.

M. le Président, commençons par les services d'aide juridique. Le 10 septembre 1997, la commission parlementaire a entendu le président de la Commission des services juridiques, M. Pierre Lorrain, au sujet de la gestion des services d'aide juridique au Québec. On s'est aperçu, on a observé quelques lacunes, entre autres, que, grâce à un appariement des fichiers de l'aide juridique avec ceux de la sécurité du revenu et de l'impôt – ça, c'est le Vérificateur général qui avait déjà trouvé ça – le Vérificateur général a estimé à 44 000 000 $ la valeur des services rendus à des individus qui se sont déclarés faussement bénéficiaires de l'aide sociale ou qui avaient des revenus supérieurs au barème d'admissibilité. La vérification a montré, en outre, que la majorité des 11 centres juridiques communautaires régionaux ne font pas d'efforts suffisants de recouvrement des coûts lorsque les personnes cessent, en cours de route, d'être admissibles à l'aide juridique et qu'ils exercent une supervision insuffisante sur le travail des avocats salariés.

L'enquête du Vérificateur général a aussi révélé un important problème de structure au sein du réseau de l'aide juridique qui a non seulement nui à son propre travail, mais qui empêche, à toutes fins utiles, la Commission des services juridiques de rendre des comptes quant à l'utilisation des fonds publics par les centres régionaux. Le Vérificateur général s'est heurté, dans son enquête, à un refus concerté des centres régionaux de permettre l'accès aux dossiers de l'aide juridique pour le motif que les renseignements qu'ils contiennent sont protégés par le secret professionnel. Le Vérificateur général, comme vous le savez, M. le Président, a une obligation à la confidentialité et, malgré les offres qu'il a faites pour trouver une solution de compromis, il n'a pas eu la possibilité de faire cette étude. La limitation imposée au Vérificateur général l'a empêché d'émettre une opinion sur l'efficience du travail des avocats et de se prononcer sur cette question.

Le président de la Commission des services juridiques a été convoqué par notre commission parlementaire, et il a reconnu la pertinence des observations et des recommandations du Vérificateur général. Il a indiqué que les correctifs appropriés avaient déjà été mis en place ou étaient sur le point de l'être. Parmi les développements récents dans ce dossier, quelques jours après la séance de la commission parlementaire, le rapport du comité de réflexion sur la structure de l'aide juridique reconnaissait que les obligations de reddition de comptes sont insuffisantes dans tout ce réseau. Ses pouvoirs sont même insuffisants, au moment où on se parle, pour assurer un contrôle budgétaire efficace.

C'est pour ces motifs que la commission parlementaire de l'administration publique a recommandé et recommande à l'Assemblée nationale d'abord d'appuyer le Vérificateur général pour que tout ministère, tout organisme du gouvernement, tout organisme ou toute entreprise bénéficiant de subventions gouvernementales collabore avec lui et fournisse toute l'information qu'il juge nécessaire à l'exécution de son mandat, conformément à la Loi sur le vérificateur général.

Deuxièmement, la commission parlementaire recommande au gouvernement que des modifications soient apportées à la loi pour que la Commission des services juridiques dispose d'un pouvoir de directive ou de réglementation sur les centres communautaires juridiques régionaux pour assurer une véritable reddition de comptes, complète et exacte, de l'utilisation des fonds publics.

Troisièmement, la commission de l'administration publique recommande à la Commission des services juridiques d'établir les critères, de préciser les objectifs à atteindre par les centres régionaux et de s'assurer d'une gestion plus uniforme en ce qui a trait à l'évaluation de l'efficience des avocats et aux mesures de recouvrement des coûts.

Nous avons ensuite étudié la gestion des ressources humaines à la Régie des alcools, des courses et des jeux. Le 30 septembre 1997, nous avons entendu le président-directeur général de la Régie des alcools, M. Ghislain K.-Laflamme, sur la gestion des ressources humaines de son organisme.

La Commission de la fonction publique avait déjà étudié cette question. Elle avait notamment fait les constatations suivantes: d'abord, à la Régie des alcools, des courses et des jeux, il y avait absence de plans d'organisation administrative supérieure et inférieure plus de quatre ans après la fusion de trois organismes ayant donné lieu à la création de la Régie actuelle; l'absence généralisée de description et d'évaluation du niveau des emplois; un classement inadéquat pour les deux tiers des personnes rencontrées; des irrégularités dans le maintien d'une situation d'anomalie de classement et de versement d'une prime aux employés à la suite d'une entente de règlement de grief; une confusion et une absence de contrôle dans la gestion de l'entente; une gestion déficiente de la mise en disponibilité des personnes, des emplois occasionnels et aussi des dossiers des personnes; une insatisfaction généralisée des employés quant à l'information nécessaire à l'exercice de leurs fonctions et sur l'organisation; une autre constatation avait été des perceptions chez les employés quant à la présence de clans, d'inégalité de traitement envers les employés ainsi qu'un faible sentiment d'appartenance à l'organisation.

La Régie avait reçu de la part de la Commission de la fonction publique neuf recommandations, et, parmi elles, trois étaient qualifiées d'urgentes, M. le Président: c'était d'abord d'élaborer et de faire approuver ses plans d'organisation par le Conseil du trésor; d'écrire et d'évaluer le niveau des emplois; de régulariser le classement des titulaires des emplois en fonction des tâches exercées. Le vice-président de la Commission, avant la tenue du début de ce débat, m'a indiqué qu'il voulait davantage discuter de cette question. Alors, je lui laisserai le soin de pouvoir avoir plus de temps pour discuter plus en profondeur de la question de la Régie des alcools, des courses et des jeux.

La commission parlementaire, M. le Président, a pris acte des mesures prises par la Régie pour apporter des correctifs aux anomalies soulevées par la Commission de la fonction publique et a demandé au président-directeur général de la Régie de lui faire parvenir un état de la situation et de la gestion des ressources humaines pour le mois de décembre 1997, ce mois-ci. Afin d'assurer un suivi de ce dossier, la commission parlementaire demande à la Régie des alcools, des courses et des jeux, d'abord, de faire en sorte que la Commission de la fonction publique examine le rapport sur la situation de la gestion des ressources humaines que la Régie doit déposer en décembre et de faire part de ses commentaires à l'organisme et à la commission parlementaire.

(15 h 20)

Donc, en deux mots, les problèmes que je viens de soulever, qui ont d'ailleurs été soulevés préalablement par le Vérificateur général et aussi par la Commission de la fonction publique, doivent faire l'objet de modifications. La Régie nous dit qu'elle l'a fait, qu'il y a eu modifications. Nous avons demandé à la Commission de la fonction publique d'examiner la situation nouvelle de la Régie et de nous faire rapport sur cette situation. La commission parlementaire recommande à la Commission de la fonction publique aussi d'effectuer un suivi sur ces recommandations en s'assurant que les correctifs annoncés par la Régie seront effectivement apportés.

Les services aériens et postaux. Les services aériens et postaux, M. le Président, font partie de ce qu'on appelle «les unités autonomes de services». Depuis quelques années, depuis cinq ans, au gouvernement, quelques divisions de ministères, quelques organisations ont été séparées, je dirais, des ministères auxquels elles appartenaient pour devenir des organisations appelées «unités autonomes de services» qui évidemment sont sous la tutelle d'un ministère et dont l'imputabilité relève du sous-ministre, mais aussi de ces dirigeants d'unités autonomes de services. Nous avons, cette année, décidé de prendre une unité autonome de services, les services aériens et postaux, et d'en faire l'analyse sur le plan administratif et sur le plan de la qualité du service qui était offert.

Le Vérificateur général avait relevé des lacunes, en 1993-1994, du côté du service aérien quant à la gestion des opérations et à l'utilisation des avions du gouvernement. L'entente de gestion convenue, en 1995, entre l'unité autonome de services et le secrétaire associé aux Services gouvernementaux du Conseil du trésor précise les objectifs et les résultats poursuivis par l'organisation tout en définissant un cadre de gestion qui procure la marge de manoeuvre nécessaire pour les atteindre. Au plan de la performance financière, M. le Président, le rapport annuel de gestion indique que le volet du service aérien enregistre un excédent et que le volet du service du courrier est toujours déficitaire, quoique l'on observe une amélioration à ce chapitre depuis deux ans, depuis 1995-1996.

L'objectif d'autofinancement est atteint pour les services d'évacuation aéromédicale et de combat des incendies de forêt, un service qui enregistre même des surplus importants. Mais on observe des déficits en matière de surveillance aérienne du territoire, de transport des personnes et des marchandises et de courrier gouvernemental. Ces déficits sont parfois liés à un plafonnement ou à une fluctuation à la baisse de la clientèle. Toutefois, M. le Président, la commission parlementaire suggère à la Direction générale des services aériens et postaux de développer ses mesures de jalonnement, mieux connues sous le terme de «benchmarking», qui lui permettront de comparer sa performance avec celle d'entreprises similaires du secteur privé. La commission parlementaire recommande aussi au gouvernement d'approuver le projet de constituer un fonds d'assurance à la Direction générale des services aériens et postaux basé sur le produit de ses exportations afin d'assurer une protection adéquate en cas de perte d'aéronefs.

Nous avons aussi étudié l'administration des sentences et la réinsertion sociale des délinquants, un autre pan du rapport du Vérificateur général. Le 2 octobre 1997, nous avons entendu le sous-ministre de la Sécurité publique, M. Florent Gagné, M. Michel Bouchard, sous-ministre de la Justice, ainsi que Mme Isabelle Demers, présidente de la Commission québécoise des libérations conditionnelles. Les lacunes observées par le Vérificateur général étaient assez importantes.

Le Vérificateur général soulignait des déficiences dans la gestion des absences temporaires en milieu carcéral et des libérations conditionnelles, dans les surveillances des délinquants en milieu ouvert, dans la réinsertion sociale des délinquants et aussi dans la perception des amendes. En effet, selon le Vérificateur général, les établissements de détention accordent des sorties aux détenus de plus en plus hâtivement sous forme d'absences temporaires prématurées. On observe un accroissement considérable du recours aux motifs humanitaires pour autoriser les absences temporaires. Alors que la directive du ministère est précise à cet égard, le Vérificateur général observe que la surpopulation carcérale incite les établissements à relâcher les détenus pour motifs humanitaires et même si la Commission québécoise leur a refusé une libération conditionnelle.

Cette même Commission ne s'assure pas que les critères de décision sont appliqués uniformément d'une région à l'autre quant au nombre et à la nature des conditions de libération. Elle ne s'assure pas non plus que les commissaires disposent de toute l'information nécessaire à leur fonction et ne surveille pas la qualité de leurs décisions. Nous avons donc rencontré les interpellés; le sous-ministre a reconnu la pertinence des observations du Vérificateur général et a déposé en séance un plan d'action prévoyant des mesures précises à chacune des 13 recommandations contenues dans le rapport du Vérificateur.

M. le Président, la présidente de la Commission des libérations conditionnelles et le sous-ministre de la Sécurité publique ont enfin tenté d'expliquer qu'il n'y a pas nécessairement de contradiction entre le refus d'octroyer une libération conditionnelle et l'autorisation subséquente d'une absence temporaire, cette dernière pouvant être autorisée en tout temps selon des critères particuliers.

Finalement, M. le Président, la commission parlementaire de l'administration publique recommande au ministère de la Sécurité publique de clarifier la notion «d'un motif humanitaire pour fins d'absence temporaire». Elle demande au ministère de la Justice d'accélérer la révision de ses procédures et de ses outils de perception des amendes. Elle recommande à la Commission québécoise des libérations conditionnelles de revoir et d'uniformiser l'ensemble de l'information à fournir aux commissaires, telle que la copie des jugements et les rapports de police. La commission parlementaire recommande à la Commission québécoise des libérations conditionnelles de s'assurer que chaque décision de refuser une libération conditionnelle soit documentée.

M. le Président, le Programme d'investissement en démarrage d'entreprises, mieux connu sous l'appellation de plan Paillé, a aussi fait l'objet d'une étude particulière de notre commission suite à ce que le Vérificateur général avait soulevé dans son rapport. Le 8 octobre 1997, la commission a entendu le sous-ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Jacques Brind'Amour, ainsi que le P.D.G. de la Société de développement industriel, M. Michel Roquet. Le Programme d'investissement en démarrage d'entreprises, c'était un programme de 300 000 000 $, lancé en novembre 1994 et qui visait à favoriser la création d'emplois grâce à la garantie de prêts destinés à soutenir le démarrage d'entreprises. L'aide gouvernementale prenait la forme d'une garantie de remboursement de 90 % de la perte nette pouvant résulter d'un prêt ne dépassant pas 50 000 $ et d'une prise en charge des intérêts, la première année. Le volet 2 abolissait la prise en charge des intérêts et abaissait la garantie gouvernementale de 90 % à 80 %. Le sous-ministre nous a précisé que c'était là un programme qui était une mesure conjoncturelle visant une création rapide de nouveaux emplois dans toutes les régions du Québec, ce qui explique qu'aucun secteur n'ait été exclu.

Les conclusions de la commission. La commission a pris acte des explications fournies par les représentants du ministère et de la SDI. La commission est inquiète de constater que le taux d'échec qui nous a été démontré soit si élevé, alors que les entreprises n'ont pas encore commencé à effectuer leur remboursement. Elle considère également qu'il y a eu des faiblesses importantes dans l'encadrement des institutions financières et dans le parrainage des nouveaux entrepreneurs lors du démarrage du programme, ce qui a entraîné un manque de rigueur dans la confection et l'évaluation des plans d'affaires et dans la démonstration qui devait être faite de la perspective raisonnable de rentabilité.

La commission considère également qu'il y aurait lieu de mieux encadrer le risque financier lorsque l'État investit des fonds publics. Malgré les lacunes observées, la commission reconnaît que le programme a constitué une occasion unique pour favoriser le lancement en affaires de nouveaux investisseurs dans un contexte économique difficile.

Pour ces motifs, la commission parlementaire recommande que tout nouveau programme de démarrage d'entreprises et de création d'emplois prévoie, dès l'origine, une méthodologie et un mécanisme de mesure de l'atteinte des objectifs. On parlait des objectifs de création d'emplois dans ce sens-là. La commission parlementaire recommande aussi que les mesures précises d'encadrement et de soutien des bénéficiaires ainsi que l'établissement de relations continues avec les institutions financières fassent partie de tout nouveau programme.

(15 h 30)

Un nouveau chapitre, M. le Président, du rapport du Vérificateur général nous amène sur les services-conseils à la clientèle agricole. Le 15 octobre 1997, notre commission a entendu le sous-ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. André Vézina, concernant les services-conseils à la clientèle agricole.

Le rapport du Vérificateur général soulève les lacunes suivantes dans la gestion des services-conseils: «Le MAPAQ n'a pas à réviser son rôle, malgré l'émergence de nouvelles sources de services-conseils, ni à identifier ses secteurs d'activité prioritaires et, en conséquence, il continue d'allouer des ressources et des besoins largement comblés par le milieu. Le MAPAQ ne dispose pas – le MAPAQ, c'est le ministère de l'Agriculture – d'une information de gestion suffisante sur la clientèle et les activités en région, ce qui l'empêche de s'assurer que les activités confiées aux régions sont menées à bien.

«Le ministère de l'Agriculture s'interroge depuis plusieurs années sur son rôle en matière de services agricoles, mais il continue de tout offrir dans tous les domaines sans revoir ses façons de faire. Son intervention est ponctuelle et la clientèle n'est pas assistée sur une base continue. La réduction des ressources, le dispersement de celles-ci entre les régions et la désuétude de ses instruments de travail remettent en cause l'efficacité de ses activités. Le contenu du rapport annuel du ministère ne permet pas d'évaluer la complémentarité et l'incidence des activités du ministère en regard des autres dispensateurs de services et est muet sur les activités en région.»

La commission a pris acte des explications du sous-ministre et des actions entreprises pour redéfinir le rôle du ministère en matière de services-conseils à la clientèle agricole. Elle entend assurer un suivi de l'élaboration et de la mise en oeuvre du plan triennal annoncé. La commission est aussi d'avis que le ministère de l'Agriculture devrait faire des efforts supplémentaires pour appliquer sa politique de tarification des services-conseils d'une façon plus cohérente et plus équitable.

Pour ces motifs, la commission de l'administration publique recommande d'abord d'appuyer la recommandation du Vérificateur général visant à ce que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation révise sa politique de tarification et de recouvrement des coûts des produits et services tarifés afin d'assurer la cohérence, l'équité et l'uniformité dans le financement de ses activités et de celles des organismes relevant du ministère. La commission parlementaire suggère aussi au ministère de l'Agriculture de s'inspirer davantage des critères établis par le ministère des Finances pour la tarification des produits et des services.

M. le Président, depuis plusieurs années, dans différents rapports du Vérificateur général, on remettait en question tout le dossier de la fonction de vérification interne au gouvernement du Québec. Les 12 et 19 novembre, la commission a entendu, d'abord, les groupes responsables de la vérification interne du gouvernement, le Contrôleur des finances, le groupe des responsables en analyse et évaluation de programmes, et finalement, le 19 novembre, la commission a entendu le secrétaire du Conseil du trésor, M. Pierre Roy.

La situation décrite par le Vérificateur général est à peu près celle-ci: une impression répandue chez les gestionnaires de chevauchement entre les différents organismes de vérification, la vérification interne faisant les frais de chacune des interventions de vérificateurs externes, soit le Contrôleur des finances, le Vérificateur général, le Protecteur du citoyen, la Commission de la fonction publique, la Commission d'accès à l'information. Ces vérificateurs externes, M. le Président, donnent l'impression à la vérification interne de créer un chevauchement qui, malheureusement, dans certains cas, se vérifie; la difficulté de démontrer la valeur ajoutée et les économies potentielles apportées par la vérification interne; la difficulté d'attirer des ressources compétentes à cause d'une certaine précarité de la fonction; et finalement une dépendance à l'égard de la volonté du dirigeant – on parle du directeur général ou du sous-ministre, dans ce cas-ci, de l'entité – et l'absence de membres extérieurs à la gestion de l'entité au sein du comité de vérification interne responsable de l'approbation des plans des services de vérification interne.

Nous avons aussi traité des différences et des ressemblances avec l'évaluation de programmes. Plusieurs facteurs nuisent au développement de la fonction d'évaluation de programmes, je vous en souligne trois au passage: d'abord, des objectifs imprécis des programmes mis en place, des programmes que nous connaissons, des programmes gouvernementaux, ne comportent pas d'objectifs précis, ce qui les rend très difficiles à évaluer, comme on a pu le constater en commission, l'absence d'un cadre d'évaluation pour chaque programme et une reddition de comptes non exigée sur le rendement des programmes.

M. le Président, l'audition du secrétaire du Conseil du trésor nous a permis d'apprendre, entre autres, que nous avons un retard technologique avec les programmes informatiques SYGBEC et SAGIP, informations sur le personnel. Mais ces systèmes sont en voie de révision. Et même si les systèmes sont désuets, il est quand même possible d'obtenir des renseignements demandés. Le lien entre ce retard informatique et la publication tardive des comptes publics... est-elle évoquée, et elle demeure importante, compte tenu du fait que le Québec est la province qui publie le plus tardivement ses comptes publics, soit au mois de décembre pour la fin de l'année financière précédente, de toutes les provinces canadiennes.

M. le Président, la commission, après avoir entendu tous ces groupes concernant la vérification interne, articule ses recommandations et ses demandes autour de trois axes: d'abord, l'harmonisation des fonctions et des acteurs; deuxièmement, la reddition de comptes et ses outils; troisièmement, la transparence de l'administration qui est publique et non pas privée. Après discussions, la commission parlementaire de l'administration publique recommande que chaque ministère et organisme du gouvernement dispose d'une masse critique d'au moins quelques personnes qualifiées de façon à institutionnaliser la fonction de vérification interne et que le Conseil du trésor s'en assure selon le partage des responsabilités qui sera établi, que le Secrétariat du Conseil du trésor ou le Contrôleur des finances s'assure des capacités et de la qualité professionnelle des vérificateurs internes, que le Secrétariat du Conseil du trésor situe la vérification interne dans le cadre d'un système de reddition de comptes précis.

La commission parlementaire suggère que le Secrétariat du Conseil du trésor ou le Contrôleur des finances envisage la possibilité d'établir une équipe centrale volante de vérificateurs internes qui offrent des services tarifés aux ministères et organismes qui n'auraient pas de capacités suffisantes dans le domaine ou qui préféreraient cette option. La commission parlementaire de l'administration publique recommande au ministère des Finances de proposer une modification à l'article 54 de la Loi sur l'administration financière de façon à transférer la responsabilité de la certification de la conformité des paiements du Contrôleur des finances aux sous-ministres et présidents d'organisme, donnant ainsi à ces derniers plus de moyens pour mieux utiliser la vérification interne et réduire les chevauchements.

La commission parlementaire suggère au gouvernement et aux organismes centraux d'explorer en profondeur la possibilité et l'opportunité d'intégrer le mandat de contrôle des finances au Conseil du trésor selon une formule renouvelée de contrôle général décentralisé dans laquelle le Conseil du trésor définirait des normes mais laisserait la responsabilité des fonctions aux ministères et organismes qui devraient rendre des comptes.

La commission parlementaire prend aussi acte des travaux du groupe de travail du Contrôleur des finances sur ses responsabilités en matière de contrôle et aussi du groupe de travail sur les fonctions de contrôle et de vérification créé par le Conseil du trésor. Ce dernier groupe de travail devrait remettre un rapport final en juin 1998. La commission décide d'attendre de prendre connaissance de leurs conclusions avant de se prononcer sur la nature et la structure de la fonction de contrôle au gouvernement. La commission parlementaire recommande que, entre-temps, le Secrétariat du Conseil du trésor prenne la mesure des chevauchements entre, d'une part, les fonctions de vérification interne et de contrôle des finances et, d'autre part, entre la vérification interne et l'évaluation de programmes au moyen d'un questionnaire ou d'une enquête auprès des sous-ministres et dirigeants d'organismes, et enfin que la commission de l'administration publique soit informée des résultats.

La commission parlementaire de l'administration publique demande au groupe de travail sur les fonctions de contrôle et de vérification de tenir périodiquement la commission au courant de l'évaluation de ses travaux et de lui faire un rapport d'étape, possiblement en mars 1998.

(15 h 40)

La commission parlementaire recommande au groupe de travail sur les fonctions de contrôle et de vérification, dont le rapport préliminaire comprend la responsabilité envers le Parlement, de s'enquérir des besoins et des attentes des parlementaires par l'intermédiaire de la commission de l'administration publique.

La commission parlementaire souhaite que le Secrétariat du Conseil du trésor se hâte de mettre à exécution son projet de guide qui pourrait remplacer la directive sur l'analyse de programmes et l'évaluation interne et que, dans cette tâche, le Secrétariat fasse la distinction entre indicateurs d'activités, de résultats et d'impacts, que ce guide fournisse un cadre pour la préparation des rapports des ministères et des organismes à propos de leurs priorités, objectifs et résultats, en termes quantitatifs lorsque possible, et que ce cadre soit suffisamment harmonisé pour qu'il soit possible de faire de l'analyse comparative entre ministères et organismes.

La commission parlementaire recommande au gouvernement et aux organismes centraux, en particulier au Conseil du trésor, que les systèmes centraux SYGBEC – gestion budgétaire et comptable – et SAGIP – informations sur le personnel – soient révisés dans les plus brefs délais dans l'optique d'une nouvelle politique de contrôle et de vérification, en tenant compte des orientations de gestion par résultats, d'imputabilité et de reddition de comptes de façon à ce que le gouvernement puisse publier les comptes publics le plus rapidement possible après la fin de l'année financière.

M. le Président, la commission parlementaire tient à signaler que c'est la première fois depuis l'adoption de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics, en 1993, que la presque totalité des gestionnaires et des entités mis en cause dans le rapport du Vérificateur général ont été entendus, et, pour cela, ce fut un travail de moine. J'aimerais d'abord remercier les membres de la commission parlementaire qui m'ont assisté, qui ont assisté la présidence et aussi la vice-présidence, M. le député de La Peltrie. Je voudrais signaler le concours des députés de Verdun, de Roberval, de Rousseau, de Lévis, de Montmorency, d'Ungava et de Robert-Baldwin. Alors, encore une fois, je voudrais remercier le vice-président de la commission, M. le député de La Peltrie.

Merci beaucoup, M. le Président. Je sais bien que ce n'est pas avec ce genre de discours qu'on va faire avancer les cotes d'écoute de l'Assemblée nationale, mais sachez que le travail qui a été fait est un travail sérieux et un travail qui va permettre une amélioration de notre administration en général. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de La Peltrie. M. le député.


M. Michel Côté

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, le rapport que cette Assemblée prend maintenant en considération est déjà le deuxième de la toute nouvelle commission sur l'administration publique. Créée à l'occasion d'une modification qui a été apportée au règlement de cette Assemblée le 10 avril dernier, la commission a pour mandat de vérifier les engagements financiers de tous les ministères et organismes publics dont les crédits sont adoptés par l'Assemblée nationale. Cette même commission s'est vu également confier le mandat d'entendre chaque année le Vérificateur général sur son rapport annuel ainsi que les sous-ministres et les dirigeants d'organismes publics afin de discuter de leur gestion administrative.

Je voudrais aussi rappeler à mes collègues de cette Chambre l'approche un peu particulière que la commission de l'administration publique s'est vu attribuer. Traditionnellement, par le passé, les commissions parlementaires scrutaient les engagements financiers des seuls ministères sectoriels que la commission avait pour mandat de considérer. Dans le cas de la commission de l'administration publique, l'approche est maintenant différente, ce sont les engagements financiers de l'ensemble des ministères et des organismes qui peuvent faire l'objet de la vérification. C'est là la mission de notre commission parlementaire. Quand on sait qu'il y avait encore quelque 15 700 engagements financiers à vérifier au 30 septembre dernier, on comprend mieux l'ampleur de la tâche et le pourquoi d'une mission de vérification pour une commission. Mais nous allons y arriver, M. le Président.

Quand je vois avec quelle ardeur les membres de notre commission ont décidé d'assumer ce mandat et le contenu des deux rapports jusqu'ici déposés, je pense que nous pourrons assurer la population que les fonds publics sont dépensés d'une façon optimale et avec grande prudence et que les citoyens et citoyennes obtiennent des services de qualité à un coût raisonnable.

Au niveau de son fonctionnement, notre commission a choisi d'orienter son mandat et d'articuler à partir des observations contenues dans le rapport du Vérificateur général. C'est ce que nous avons fait à l'occasion du rapport précédent, c'est-à-dire le tome I déposé en juin dernier, et c'est ce que nous avons continué de faire pour la préparation du présent rapport.

Depuis le mois de juin, nos travaux ont consisté à nous interroger sur certains dossiers qui ont été pointés par le Vérificateur général à l'occasion de son rapport pour l'année financière 1996-1997, tome I, et à demander des explications aux sous-ministres et dirigeants des organismes ainsi concernés et surtout à connaître les actions qu'ils envisagent de mettre en oeuvre pour corriger les lacunes de leur système de gestion. C'est ce que nous avons fait au cours des derniers mois.

Je voudrais tout particulièrement vous entretenir, au cours des prochaines minutes, de trois cas assez probants en ce qui concerne les lacunes qui ont été constatées par le passé, et prometteurs de ce qui a trait aux mesures prises pour y remédier. En premier lieu, je voudrais faire état de la gestion des ressources humaines à la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec. Le président de la commission et député de Westmount– Saint-Louis a déjà un peu abordé le sujet, mais je vais vous révéler quand même certaines parties du contenu du rapport.

Le 30 septembre 1997, la commission parlementaire a entendu le président-directeur général de la Régie des alcools, des courses et des jeux, M. Ghislain K.-Laflamme, sur la gestion des ressources humaines de son organisme. Le président de la commission nous a tout à l'heure énuméré les observations de la Commission de la fonction publique qui avait fait enquête à la Régie des alcools, des courses et des jeux suite à des plaintes qui avaient été formulées par un nombre important d'employés de la Régie.

Devant notre commission et au cours de la séance publique, le directeur général de la Régie a expliqué que le contexte de la fusion, en 1993, de la Commission des courses, de la Régie des loteries et de la Régie des alcools faisait en sorte que la révision de la structure organisationnelle n'était pas la priorité du moment, en donnant comme raison, vous vous souvenez, M. le Président, à ce moment-là, qu'il y avait des rapports accablants et des jugements récents des tribunaux qui avaient révélé des situations inquiétantes dans les secteurs des courses et des loteries ainsi qu'une infiltration alarmante du crime organisé dans tous les domaines du jeu, qui réclamaient une intervention urgente.

Ensuite, la fusion du personnel des trois organismes a créé un climat de tension. De plus, il était difficile d'harmoniser les emplois issus de trois organismes ayant des modes de gestion différents. Alors, le processus de promotion sans concours a suscité l'irritation des employés, tandis que les compressions budgétaires ont soulevé des inquiétudes chez plusieurs. De l'aveu du président-directeur général, le rapport d'enquête a jeté de l'inquiétude dans le milieu de la Régie. Selon lui, l'essentiel du rapport identifie des irrégularités techniques, cependant, tout en reconnaissant que les lacunes qui étaient relevées dans le rapport demeurent à corriger.

(15 h 50)

Alors, pour assainir le climat de la Régie, il ont développé une stratégie de communication qui a été élaborée pour expliquer les changements, tandis que le personnel a été associé à une démarche de révision des processus. Invité au cours de la séance à formuler des suggestions pour éviter que des problèmes semblables se reproduisent lors d'autres fusions, le président-directeur général a émis l'idée qu'une structure parallèle temporaire bénéficiant du support technique du Secrétariat du Conseil du trésor devrait avoir pour mission de revoir la structure organisationnelle dès la mise en oeuvre de la fusion. Alors, comme ça va sûrement arriver dans les prochains mois ou la prochaine année – des fusions – donc, je pense qu'on devrait prendre en considération cette recommandation.

Les conclusions et les recommandations. On en a mentionné deux tout à l'heure. Alors, le député de Westmount–Saint-Louis a mentionné que, parmi les deux recommandations, une entre autres demande à la Commission de la fonction publique d'examiner le rapport sur la situation de la gestion des ressources humaines, que la Régie doit déposer en décembre 1997, et de faire part de ses commentaires à l'organisme et à la commission parlementaire. Alors, dès ce midi, justement, nous avons reçu, tel que promis par le président-directeur général de la Régie, un rapport qui nous fait part de ce qui a été mis en oeuvre au niveau de l'organisme, tel que promis pour décembre 1997, et dont nous devrons prendre connaissance dans les prochains jours.

Alors, soyez assuré, M. le Président, que, suite à ces recommandations, la commission aura un oeil vigilant pour s'assurer que la situation est bien rétablie.

Le deuxième cas que je veux vous relater concerne la situation de l'unité autonome de services aériens et postaux gouvernementaux. Là encore, mon collègue le président de la commission en a parlé un peu tout à l'heure. On se souvient que le Vérificateur général avait relevé des lacunes en 1993-1994 du côté du service aérien quant à la gestion des opérations et à l'utilisation des avions du gouvernement. Le rapport faisait référence au manque de suivi de gestion et d'évaluation des programmes en regard des différents volets de la mission de l'organisation. De plus, le rapport du Vérificateur général s'interrogeait sur l'organisation du travail, sur la productivité et sur la tarification en vigueur.

Alors, du côté du secteur courrier et messagerie, un déficit de 2 500 000 $ avait été accumulé depuis 1992, et la clientèle était généralement insatisfaite. Un sondage réalisé en 1993 sur la performance de la direction fait état d'une organisation sclérosée par l'inefficacité de ses opérations, la mauvaise qualité de ses services, sa rigidité et son manque d'écoute. L'entente de gestion convenue en 1995 entre l'unité autonome de services et le secrétaire associé aux services gouvernementaux du Conseil du trésor précise les objectifs et les résultats poursuivis par l'organisation, tout en définissant un cadre de gestion qui procure la marge de manoeuvre nécessaire pour les atteindre, ces objectifs.

Alors, les objectifs généraux de cette entente prévoient assurer l'autofinancement de chacun des six secteurs d'activité de l'unité, accroître sa productivité dans la livraison de services et maintenir, sinon accroître, une qualité de services qui assure la satisfaction de sa clientèle.

Alors, lors de l'audition à la séance publique qui a permis aux dirigeants de l'unité autonome de services d'exposer le cadre de gestion de l'organisation, d'expliquer les écarts observés entre les cibles qui étaient poursuivies et les résultats obtenus et de faire part aux parlementaires des efforts faits pour que chaque service soit rentable, les dirigeants ont reconnu que tous les résultats escomptés ne sont pas encore atteints mais que la formule de l'unité autonome de services avait permis d'identifier, de quantifier des mesures concrètes d'économie, notamment au plan du personnel d'encadrement, de la rationalisation des coûts de loyer et de la diminution des frais d'opération.

La révision des processus et l'implication du personnel se sont traduits par des gains de productivité et une plus grande efficience. Alors, lorsqu'on fait prendre part au personnel lors des changements dans une organisation, c'est toujours efficace, parce que tout ce qui se passe dans une organisation, ça passe par les personnes qui la composent. Donc, si on leur fait confiance, si on leur donne des responsabilités et s'ils ont des objectifs, généralement, il y a des résultats qui correspondent à ces objectifs qu'on se donne.

Alors, les membres de la commission se sont montrés très intéressés par la formule et satisfaits de la qualité de la présentation des dirigeants de l'unité autonome de services. Ces derniers ont démontré une volonté évidente d'atteindre leurs objectifs de rentabilité et de qualité de services. L'approche à l'égard de l'implication du personnel se démarque également de ce qu'on observe ailleurs. Alors, les recommandations de la commission suggèrent à la Direction générale des services aériens et postaux de développer des mesures qui lui permettront de comparer sa performance avec celle d'entreprises similaires du secteur privé.

Il y a une autre recommandation aussi à l'effet d'approuver le projet où on constituerait un fonds d'assurance à la Direction générale des services aériens et postaux basé sur le produit des exportations – parce qu'on sait qu'au niveau du service aérien il y a des services qui s'exportent – afin d'assurer une protection adéquate en cas de perte d'aéronef, alors qu'actuellement il n'y a aucune assurance qui couvre. Donc, ce genre de fonds permettrait, s'il arrive une tragédie, bien, qu'on puisse justement atténuer les pertes.

Finalement, je voudrais aborder très sommairement le cas du programme de démarrage d'entreprise, qui a fait beaucoup parler de lui. Par contre, malgré tout ce qui a été dit sur ce programme, il reste quand même qu'il y a des côtés positifs à retenir de ce programme. Lors de l'audition des dirigeants, le sous-ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie a d'abord rappelé le contexte. Je pense qu'il faut tenir compte dans quel contexte économique le lancement du programme a été fait, parce qu'à ce moment-là on était en récession, il y avait un haut taux de chômage et la diminution de la création, aussi, de nouvelles entreprises. Donc, il fallait donner un nouvel élan, que ce soit pour la création d'emplois ou encore la création de nouvelles entreprises.

Le sous-ministre a précisé que le programme était une mesure conjoncturelle visant une création rapide de nouveaux emplois dans toutes les régions du Québec, ce qui explique qu'aucun secteur n'a été exclu. Quant à la mesure de création d'emplois, le sous-ministre a indiqué que le moment opportun pour procéder à une telle évaluation se situe habituellement trois ans après la création de nouvelles entreprises ayant bénéficié d'un tel programme. Donc, il y a une étude du Bureau de la statistique, qui a été effectuée en avril 1997, qui indique néanmoins que le programme a suscité 35 000 emplois.

(16 heures)

Alors, au total, le programme a occasionné, depuis sa création, plus de 1 000 000 000 $ d'investissements. Chaque 1 $ provenant du programme a entraîné 1,42 $ d'investissement, dont la majeure partie provenait de prêteurs privés et de mises de fonds personnelles. Le coût total du programme s'élève actuellement à 159 000 000 $, soit une dépense de 15 101 $ pour créer une entreprise, ou 4 286 $ pour chacun des emplois recensés par le Bureau de la statistique en avril 1997. Donc, 4 286 $ pour chaque emploi, ce n'est pas énorme comme coût.

Au cours de la discussion, le sous-ministre a exprimé l'avis qu'il était normal de constater plus de faillites dans les premières années du démarrage d'une entreprise, car c'est à ce moment que l'entreprise est confrontée à l'existence et à la viabilité du marché qu'elle convoite. Donc, comme les départs de ces entreprises-là se sont faits dans un court temps, qu'il y en ait beaucoup qui partent en même temps, c'est un peu normal. Donc, ça ne s'est pas échelonné dans le temps comme tel.

M. le Président, ce qu'on doit retenir, c'est que le président de la SDI a tenu à souligner qu'une étude démontrait que la grande majorité des entrepreneurs n'aurait jamais eu accès à un financement s'il n'y avait pas eu ce programme. C'est d'ailleurs dans les conjonctures bien particulières où le crédit est restreint qu'un tel type de programme est rentable pour le gouvernement. Alors, comme vous pourrez le constater, notre commission s'est employée à cerner davantage les lacunes qui ont été identifiées par le Vérificateur général et à exiger des sous-ministres et des dirigeants d'organismes qui sont concernés des explications valables et des correctifs appropriés.

Je voudrais ici, avant de terminer, profiter de l'occasion pour remercier mes collègues membres de la commission de l'administration publique, les ministres et les sous-ministres ainsi que les dirigeants d'organismes pour leur excellente collaboration dans le déroulement de nos travaux. Je pense que c'est un bel exemple d'application de la règle de l'imputabilité de nos dirigeants publics. Cette règle nous assurera à moyen et long terme une gestion administrative de l'État efficace, à meilleurs coûts et centrée sur les besoins des Québécoises et des Québécois. L'intérêt collectif n'en sera que mieux servi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de La Peltrie. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Roberval. M. le député.


M. Benoît Laprise

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je crois qu'après l'exposé de mes deux collègues je n'aurai pas à revenir textuellement sur le rapport; je vais être plutôt bref dans la transmission des recommandations qui ont été déjà faites, qui ont été déjà bien identifiées.

Mais, comme on souligne, cette semaine, une fête un peu spéciale, un anniversaire un peu spécial au Parlement, ça m'a fait regarder dans le Journal des débats ce qui s'était passé dans ces années-là, et vous savez, comme l'histoire se répète, on peut constater que, dans ce temps-là aussi, on avait des gouvernements qui s'étaient appliqués à administrer et à bien gérer les choses de l'État. On disait qu'avant 1897 le budget était dépassé à chaque année d'un montant assez important, et on était rendu à 984 000 $ de déficit accumulé, en 1897. En 1907, 10 ans après, suite à un changement de gouvernement qui avait vraiment pris les choses en main, on était rendu à des surplus. Ça faisait 10 ans qu'on faisait des surplus accumulés. Alors, on était rendu, sur un budget de 5 000 000 $, à faire 107 000 $ de surplus.

Ça reflète un peu ce qui se passe ici, au Québec, présentement, depuis 1994, quand on regarde la toile de fond de l'économie du Québec qui a été bien identifiée, je pense, la semaine dernière par notre collègue de Crémazie, en termes de situation économique, de situation financière du Québec. On sait très bien que le gouvernement a vraiment pris en main cette situation pour mettre à jour l'état des finances publiques et éliminer totalement le déficit qui était quand même rendu à 5 700 000 000 $. On ne pouvait plus se permettre, je pense, au Québec, de continuer à dépasser année après année les revenus, ce qui mettait le Québec dans une situation très vulnérable sur le plan économique.

Alors, suite à la décision du gouvernement, vous savez qu'on a d'abord posé des gestes qui semblaient, à plusieurs personnes, très drastiques, pour couper les dépenses du gouvernement, et on a garanti également que, dans l'avenir, on ne pourrait plus faire des dépassements de cette envergure. En décembre 1996, on adoptait une loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire. Mais même si on coupe les dépenses, même si on veut que le déficit soit résorbé, il faut prendre les moyens pour contrôler, année après année, cette situation qui nécessite des dépassements de coûts qui ont plus ou moins de bon sens avec le temps.

Alors, c'est pourquoi le gouvernement a créé la commission des finances publiques qui remettrait en question l'imputabilité à la fois des hommes politiques face à leur concitoyens, mais aussi de l'ensemble de l'appareil administratif du gouvernement. C'est ça, je pense, l'importance de la commission; c'est d'interpeller les personnes responsables en gestion gouvernementale sur leurs responsabilités face aux décisions qu'elles prennent quotidiennement. Je peux vous dire que, lors des rencontres que nous avons eues avec les différents ministères, on sentait, au départ, une certaine nervosité de la part du personnel. Mais ils se sont aperçus, je pense, dès le départ que la commission des finances publiques n'était pas là pour juger des personnes, n'était pas là non plus pour chercher des coupables mais pour analyser des situations financières avec eux et aller chercher leur collaboration, parce qu'on sait très bien que les hommes politiques, sans l'appareil gouvernemental administratif, sans cet éveil-là, sans ce sens des responsabilités là, ne pourraient pas atteindre les objectifs qu'ils poursuivent, entre autres de rétablir l'équilibre des finances publiques.

Alors, c'est important de transmettre à l'ensemble du personnel cette motivation du gouvernement, cette volonté, je dirais même cette détermination du gouvernement à reprendre en main, vraiment, l'administration publique et à corriger les lacunes, le laisser-aller qui peut s'installer, l'habitude qui peut s'installer avec les années dans des administrations publiques, à laisser passer différentes choses qui ne paraissent pas tellement, tellement graves mais qui, avec le temps, s'accumulent, laissent s'accumuler des habitudes et des initiatives qui sont plus ou moins logiques dans une administration publique qui doit répondre aux citoyens de l'argent qu'il va chercher dans leurs poches.

Alors, je crois que la commission a bien joué son rôle. De plus, la coordination de la commission s'est faite différente des autres commissions, parce que les députés étaient côte à côte, tant de l'opposition que du parti ministériel, et on interpellait les gens en face de nous sur la gestion de chacun des ministères.

Vous avez l'aide juridique à laquelle... Le président en a parlé tout à l'heure... Je peux vous dire que, dès l'audition du ministère qui s'occupe de l'aide juridique, le président même a admis que le rapport du Vérificateur reflétait une certaine réalité et qu'il fallait faire urgence pour le corriger. De plus, la Commission s'est engagée, dès le départ, à ce que les rapports annuels du Vérificateur ne tombent pas dans l'oubli un mois après, ne s'accumulent pas sur les tablettes pour des années, mais qu'ils soient analysés, soient étudiés et que les recommandations du Vérificateur – peut-être transformées un peu avec l'analyse de la situation en collaboration avec la commission – soient très précises pour chacun de ces départements-là et exigent des corrections dans les mois qui suivent cette rencontre avec les représentants de cette commission-là.

Je pense que la reddition des comptes, c'est non seulement un peu, mais beaucoup de développer le sens de l'imputabilité à chacun des fonctionnaires qui en font l'administration.

(16 h 10)

Vous avez également les recommandations qui étaient faites au niveau du service juridique; M. le président vous en a fait part tout à l'heure. C'est sûr qu'avec l'appui du Vérificateur général, en impliquant davantage le Vérificateur général, en collaboration étroite avec la commission, ça nous permet de faire des recommandations précises et d'exiger également des correctifs à apporter en cours de route.

Vous avez également l'administration des sentences et la réinsertion sociale des délinquants. C'est bien évident qu'avec la loi qui vient de se renforcer au niveau des transports, au niveau de la sécurité automobile sur nos routes, ça va certainement amener plus de monde dans le circuit, qui auront à payer des amendes et à subir des contretemps et même à subir des emprisonnements pour des amendes non payées qui s'accumulent année après année. Mais je pense que la commission s'est engagée avec le ministère concerné à apporter des solutions, à analyser en profondeur cette dimension des pénalités et apporter des correctifs qui nous permettraient peut-être d'éliminer un certain nombre d'emprisonnements et de les remplacer par des pénalités différentes. Et je crois qu'il y a un comité même qui a été formé à cet effet qui va permettre certainement de faire des recommandations très précises.

D'ailleurs, le sous-ministre s'est engagé, dès la première rencontre, à la mise sur pied d'un comité chargé d'identifier, pour le début de 1998, les carences dans le contrôle des recettes et de proposer des correctifs appropriés: la reconduction d'efforts massifs de traitement de constats d'infraction, la mise sur pied d'un comité interministériel pour trouver des moyens légaux plus efficaces de perception, la création d'une unité autonome de services pour la perception des amendes et la mise en oeuvre d'autres moyens pour faciliter la perception des amendes tels que la suspension des permis de conduire, l'utilisation de systèmes de communication électroniques pour rejoindre les infractaires.

Alors, c'est pour vous dire, M. le Président, que les recommandations, qui ont été soulignées d'ailleurs par le président de la commission tout à l'heure, il y en a seulement trois, mais elles veulent dire vraiment quelque chose, elles vont permettre certainement d'apporter des correctifs importants à ce ministère et au niveau du service juridique. Au niveau du démarrage d'entreprise, je pense que mon collègue, M. Côté, en a parlé tout à l'heure.

Maintenant, au niveau des services-conseils agricoles, je pense qu'il y a eu beaucoup d'évolution là-dedans. Il y a eu les syndicats de gestion agricole qui sont arrivés dans le décor et il y a eu également différents organismes privés, des entreprises privées qui font affaire avec les agriculteurs et qui donnent également des services. C'est nouveau, ça fait quand même quelques années, mais on sait très bien que le ministère de l'Agriculture depuis plusieurs années est présent auprès des agriculteurs, et je pense qu'il a joué un rôle très actif dans le développement technologique de l'agriculture et la prise de conscience de l'importance également de cette entreprise, de cette industrie qu'est l'agriculture.

Le MAPAQ quand même a été surpris des critiques vraiment profondes du Vérificateur général parce que déjà la démarche était engagée. Mais vous savez que le MAPAQ couvre tout le territoire rural du Québec. C'est un territoire immense et c'est aussi un nombre d'agriculteurs très important qui ne travaillent pas en groupe, qui ne travaillent pas dans une entreprise à toit couvert, mais qui travaillent dans une entreprise à ciel ouvert. Alors, il faut les rejoindre, et je crois que le ministère, à venir jusqu'à aujourd'hui, a joué vraiment un rôle important dans le développement de l'agriculture.

Et je crois qu'il est appelé à continuer à le jouer parce qu'on ne veut pas que les agriculteurs soient dépendants uniquement des entreprises qui à la fois donnent des services et aussi vendent des équipements, vendent des approvisionnements à l'agriculteur. Parce que, à ce moment-là, vous savez, si le gars fait analyser son sol par des vendeurs d'engrais chimiques, il risque fort que les recommandations soient généreuses pour la vente d'engrais chimiques. Alors, il y a quand même une protection à apporter à l'agriculteur qui se sert de ces analyses-là, mais elles doivent lui être données de façon très objective afin qu'il puisse contrôler l'application d'engrais chimiques et se conformer également aux exigences de l'environnement.

Le ministère de l'Agriculture a passé quand même de 900 employés à 350. Alors, on peut dire que c'est un ministère qui a vraiment fait une purge très importante au niveau de l'administration comme telle. Alors, le MAPAQ a passé d'une époque de services qui étaient offerts gratuitement à une époque de services à coûts partagés. C'est un service qui était quand même près de l'agriculteur, c'est un service qui était pratiquement quotidien et, je pense, qui était réparti dans tous les comtés de la province de Québec et qui s'est regroupé au niveau de certains bureaux régionaux, de certains laboratoires régionaux pour donner des services beaucoup plus techniques. Et je crois qu'avec l'arrivée de l'entreprise privée, le ministère a pu diminuer ce genre de services là et s'en tenir uniquement aux services techniques de haute performance en agriculture. Je crois que l'agriculture va être la première à en bénéficier.

La vérification interne. On s'est aperçu, avec les témoignages que nous avons eus, que la vérification interne se doublait un peu avec le Contrôleur des finances et également l'analyse des programmes et le vérificateur. Alors, ce qu'on demande à ce ministère-là, à chacun des ministères d'ailleurs, c'est que la vérification interne travaille en étroite collaboration avec le Contrôleur des finances, avec l'analyse des programmes pour donner non seulement une image économique du ministère, mais donner aussi une image d'efficacité des programmes que nous avons à administrer.

Chacun des ministères doit être en mesure d'évaluer l'efficacité des programmes qu'il a mis en place auprès de sa clientèle. Est-ce que ce sont des programmes qui donnent vraiment des bons services à la clientèle? Est-ce que c'est bénéfique à la clientèle? Et je pense que, suite à ça, bien il sera en mesure d'éliminer les programmes qui ne sont pas productifs auprès de la clientèle et de se concentrer peut-être sur moins de programmes, mais des programmes beaucoup plus efficaces, beaucoup plus proches de la réalité de la clientèle, de ce dont la clientèle a vraiment besoin. D'ailleurs, dans le domaine de l'agriculture, il y avait avant 130 programmes; ça a été diminué à entre 30 et 50 programmes. Je ne pourrais pas vous le dire exactement, mais c'est en bas de 100 programmes que le ministère de l'Agriculture a actuellement à gérer.

Alors, M. le Président, j'ai été très heureux de travailler dans cette commission, surtout dans le climat dans lequel on travaillait, un climat de confiance, un climat de respect de la part de toutes les parties concernées, un climat aussi motivant pour les gens qui étaient en face de nous, parce qu'ils étaient conscients que c'est ensemble qu'on va corriger vraiment la situation. Et l'harmonisation des fonctions va permettre un meilleur climat dans chacun des ministères, aussi une plus grande motivation à atteindre l'objectif qu'on poursuit d'une plus saine administration. La reddition des comptes, également, va être un outil de gestion important pour chacun des ministères. La transparence de l'administration publique va être vraiment plus réelle auprès des élus, également auprès de chacun des citoyens qui observent de très près, qui interpellent de très près l'administration publique, je pense, dans la situation actuelle qu'on connaît.

Alors, la liste des recommandations. Vous savez, au niveau du rapport, il y a 25 grandes recommandations qui ont été faites. D'ailleurs, je ne les répéterai pas, parce qu'il y a beaucoup de personnes qui ont travaillé dessus. Il y a également la liste des membres de la commission, on était au nombre de 10; et la liste des personnes entendues par la commission, c'étaient 35, qui représentaient sept grandes activités gouvernementales et qui vont continuer après les Fêtes à interpeller les ministères qui ne l'ont pas été encore été et qui vont permettre, je pense, d'atteindre nos objectifs non seulement d'assainissement des finances publiques, mais de continuer à bien gérer les affaires de l'État de façon à utiliser l'argent du public au maximum et qu'il retourne auprès du citoyen en des services de qualité, des services également productifs.

Alors, je tiens quand même à souligner également le mérite de mes collègues, à les remercier de leur étroite collaboration, des deux côtés de la Chambre. Et je suis persuadé que c'est une commission qui va apporter beaucoup de transparence à l'administration publique actuelle. Comme je le disais au début de mon exposé, sûrement que le gouvernement, dans sa prise de position et son attitude face aux finances publiques, aura la même confiance de la population que celle qu'il a eue en 1907, et il sera sûrement là pour une dizaine d'années, parce qu'il aura conquis la confiance du public dans l'efficacité de sa gérance des affaires publiques. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Roberval. Alors, s'il n'y a plus d'autres intervenants, ceci met fin au débat restreint sur la prise en considération du rapport de la commission de l'administration publique. Dès que nous aurons notre leader avec nous, il pourra nous indiquer la suite. Je m'en vais suspendre pour quelques minutes pour qu'on puisse se détendre une seconde, et nous reviendrons.

(Suspension de la séance à 16 h 20)

(Reprise à 16 h 28)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Nous reprenons nos travaux et je vous inviterais à vous asseoir, s'il vous plaît.

M. le leader adjoint du gouvernement, pour la suite des choses.

M. Boulerice: Pour la suite des choses, effectivement, M. le Président, je vais vous demander de prendre en considération l'article 28 du feuilleton et, pour la suite des choses, après, nous irons à l'article 11, histoire de donner une suite plus longue aux choses.


Projet de loi n° 162


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci. À l'article 28, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 162, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite. Y a-t-il des interventions sur ce rapport?


Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission des finances publiques est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement, c'est l'article 11, maintenant?

M. Boulerice: Oui. C'est ça. Comme je vous l'ai indiqué, l'article 11, s'il vous plaît.


Projet de loi n° 177


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci bien. À l'article 11, M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du principe du projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Il y a des interventions? Alors, M. le ministre de la Sécurité publique, je vous cède la parole.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. M. le Président, le 13 novembre, je présentais devant cette Assemblée le projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Aujourd'hui, nous entreprenons l'étude du principe de ce projet qui propose la modification des articles 14 et 15 de la loi précitée. Ces articles, M. le Président, se lisent comme suit:

(16 h 30)

«14. Le coroner en chef peut, pour cause, réprimander un coroner. Le gouvernement peut suspendre avec ou sans traitement ou destituer un coroner permanent sur un rapport du juge en chef de la Cour du Québec fait à la suite d'une enquête demandée par le ministre de la Sécurité publique.

«15. Le gouvernement peut destituer, suspendre avec ou sans traitement ou réprimander le coroner en chef ou un coroner en chef adjoint sur un rapport du juge en chef de la Cour du Québec fait à la suite d'une enquête demandée par le ministre de la Sécurité publique.»

M. le Président, j'attire votre attention sur le fait que l'enquête demandée par le ministre de la Sécurité publique, en vertu de ces dispositions, doit nécessairement être faite par le juge en chef de la Cour du Québec. Or, M. le Président, je crois opportun de rappeler que la Loi sur la recherche des causes et les circonstances des décès a été adoptée en 1983. À cette époque, le juge en chef qui était visé par les articles 14 et 15 précités était le juge en chef de la Cour provinciale. Cette cour se composait alors de 155 juges et ses compétences s'exerçaient essentiellement en matière civile et accessoirement en matières criminelle et pénale.

La Loi sur les tribunaux judiciaires alors en vigueur prévoyait que le juge en chef était soutenu dans l'exercice de ses fonctions par un juge en chef associé, un juge en chef adjoint et sept juges coordonnateurs. Le rapport entre le nombre de juges exerçant des fonctions administratives et le nombre total de juges était d'environ un pour 16. Le juge en chef de la Cour provinciale était responsable en matière judiciaire des politiques générales de la cour. Plus particulièrement, il était chargé de la coordination et de la répartition du travail des juges. Il déterminait les divisions selon lesquelles la cour siégerait et le nombre de salles d'audiences requises. Il désignait un juge pour présider les séances et fixait les causes à entendre.

Toutefois, je vous rappelle, M. le Président, que cette Assemblée a adopté, en 1988, la Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et d'autres dispositions législatives en vu d'instituer la Cour du Québec. Cette nouvelle cour venait remplacer la Cour des sessions de la paix, le Tribunal de la jeunesse et la Cour provinciale. Cette cour est aujourd'hui composée de 290 juges, dont le juge en chef, un juge en chef associé et trois juges en chef adjoints. Elle peut également comporter 10 juges coordonnateurs. Le rapport entre le nombre de juges exerçant des fonctions administratives et le nombre total de juges est donc passé environ à un pour un. La Cour du Québec a maintenant compétence en matières civile, criminelle et pénale, ainsi que dans les matières relatives à la jeunesse. Elle siège également en matière administrative ou en appel dans les cas prévus par la loi.

Conséquemment, M. le Président, les responsabilités assumées par le juge en chef de la Cour du Québec, en 1997, sont très lourdes. Qu'il suffise ici d'en relever quelques-unes.

Le juge en chef de la Cour du Québec est chargé de la direction de cette Cour. Il doit voir au respect en matière judiciaire des politiques générales de la Cour. Il doit coordonner, répartir et surveiller le travail des juges, voir à leur affectation à une chambre et à leur formation complémentaire. Il doit veiller au respect de la déontologie policière. En collaboration avec les juges coordonnateurs, il a également pour fonctions de voir à la distribution des causes et à la fixation des séances de la Cour. Il détermine également les assignations d'un juge appelé à exercer sa compétence dans une matière qui n'est pas du ressort de la chambre à laquelle il est affecté.

En outre, M. le Président, il est opportun de souligner que le juge en chef est, en vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires, président du Conseil de la magistrature. Cet organisme, composé de 14 membres dont la majorité est issue de la magistrature, a pour fonctions d'organiser des programmes de perfectionnement des juges, d'adopter un code de déontologie de la magistrature, de recevoir et d'examiner toute plainte formulée contre un juge, de favoriser l'efficacité et l'uniformisation de la procédure devant les tribunaux, de recevoir les suggestions, recommandations et demandes qui lui sont faites relativement à l'administration de la justice, de les étudier et de faire au ministre de la Justice les recommandations appropriées. Il doit également coopérer, suivant la loi, avec tout organisme qui, à l'extérieur du Québec, poursuit des fins similaires. Il est également opportun de souligner que le juge en chef participe à diverses activités – conférences, regroupements de juges et de juges en autorité, telle l'Association des juges de nomination provinciale – et qu'il est aussi le représentant de la magistrature au sein du Comité magistrature-Justice-Barreau.

Par ailleurs, M. le Président, l'honorable juge Jean Lemelin, de la Cour supérieure, rendait, le 28 octobre, un jugement mettant en cause la procédure qui doit être suivie dans le cadre d'une enquête effectuée à la demande du ministre de la Sécurité publique conformément à l'article 14 de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Il ressort de ce jugement que le coroner visé par l'enquête a le droit d'y assister, de contre-interroger les témoins et de faire une preuve. Voilà qui peut nécessiter une grande disponibilité de la part de la personne qui en est chargée, ce que le juge en chef de la Cour du Québec ne peut certes avoir en tout temps, vous en conviendrez avec moi.

Compte tenu de ce qui précède, il m'apparaît tout à fait opportun que le mécanisme de désignation de la personne qui pourrait être chargée de faire enquête et de produire un rapport par application des articles 14 et 15 de la Loi sur les recherche des causes et des circonstances des décès soit assoupli et que le juge en chef puisse confier cette responsabilité à un autre juge de la Cour du Québec. Je tiens cependant à préciser, M. le Président, qu'il appartient toujours au juge en chef ou à la juge en chef de pouvoir décider, à ce moment-là, de faire lui-même ou elle-même cette enquête. C'est donc uniquement une possibilité qui est octroyée au juge en chef.

M. le Président, je propose donc que le principe du projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, soit adopté. Je vous en remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Sécurité publique. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière de sécurité publique et député de Frontenac. Alors, M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. On ne peut pas évaluer la pertinence du projet de loi n° 177, présenté par le ministre de la Sécurité publique, sans nécessairement devoir faire référence à un autre projet de loi qui est présentement en étude. Sauf erreur, je pense que le projet de loi en question – puis je parle du projet de loi n° 151 – il est encore pendant devant la commission des institutions. Il y a une partie du débat qui est faite mais pas complétée, M. le Président. J'ai eu l'occasion d'ailleurs, la semaine passée, de participer à l'étude détaillée article par article du très court projet de loi n° 151 – et le ministre de la Sécurité publique a déjà compris de quoi je parle – Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires.

Alors, on ne peut pas évaluer la pertinence, je me répète, de 177 sans parler du projet de loi n° 151. Et M. le ministre de la Sécurité publique, qui parraine le projet de loi présentement en étude, n° 177 – parce que le projet de loi n° 177 vise à modifier la Loi sur les coroners – qui s'appelle Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès... Parce que normalement, c'est un projet de loi... Puisque ça touche directement les responsabilités du juge en chef, on pourrait s'attendre à première vue à ce que ce projet de loi là soit sous la responsabilité du ministre de la Justice. Moi, je n'en fait pas de problème et je ne vais pas plus loin dans mes remarques sur cet aspect-là, mais ça démontre qu'il faut nécessairement, pour évaluer la portée de 177, parler de 151.

Puis le ministre de la Sécurité publique a fait référence tout à l'heure au fait que la Cour du Québec compte 290 juges. Évidemment, c'est sans compter ce qui arrivera si 151 est adopté, parce qu' essentiellement il n'y a pas rien d'autre là-dedans. Le projet de loi n° 151, M. le Président, vise à modifier le nombre de juges à la baisse, malheureusement pour l'opposition, pour les justiciables, pour tous ceux et celles qui sont impliqués dans notre système judiciaire. Je pense évidemment aux juges eux-mêmes, au Barreau du Québec, l'Association des avocats – que ce soient les avocats de défense – Association des procureurs de la couronne...

Je suis convaincu – je ne suis pas certain qu'ils vont l'exprimer haut et fort, publiquement – que tout ceux et celles qui sont concernés directement par la volonté du gouvernement, malheureusement, de diminuer le nombre de juges de 290 à 270, je suis convaincu que ces gens-là sont en désaccord avec cette volonté du gouvernement. Pourquoi? Parce que, même à 290 juges... Il ne faut pas, M. le Président, avoir évalué bien, bien longtemps ce qui se passe dans notre système judiciaire pour comprendre qu'à 290 juges la tâche, elle est encore très, très lourde. Et là on décide, strictement pour des raisons d'ordre budgétaire... Il n'y a pas autre chose qui sous-tend la volonté du gouvernement, exprimée dans le projet de loi n° 151, que des raisons d'ordre budgétaire.

(16 h 40)

Et je disais en commission parlementaire au ministre de la Justice: Bien, vous faites croire aux Québécois et Québécoises que les juges participent à l'effort budgétaire, vous tentez de faire croire aux Québécois que les juges verront leur rémunération diminuer de 6 %, alors que c'est faux. La rémunération globale pour l'ensemble des juges, également ne sera pas modifiée. Sauf qu'en procédant par attrition il y aura d'ici quelques années 20 juges de moins. Alors, ça va diminuer nécessairement la masse salariale globale mise à la disposition de l'ensemble des juges de la Cour du Québec, mais chaque juge va continuer à recevoir la même rémunération.

Je ne suis pas en train de dire qu'on devrait diminuer la rémunération des juges de la Cour du Québec; c'est peut-être même le contraire qu'il faudrait faire. À tout le moins, faudrait l'évaluer. Si on fait un parallèle avec ce qui se passe ailleurs dans d'autres provinces, si on fait un parallèle également avec leurs collègues les juges de la Cour supérieure, de la Cour d'appel, est-ce que les juges de la Cour du Québec sont rémunérés de façon correcte? Il n'y a pas de réponse, et ce n'est sûrement pas le ministre de la Justice actuel, avec le projet de loi n° 151 qui, je le répète, vise essentiellement à diminuer de 290 à 270 juges... Ce n'est sûrement pas en discutant avec le ministre de la Justice qu'on saura, lui, ce qu'il pense de la rémunération des juges de la Cour du Québec, M. le Président.

Compte tenu de cette décision de diminuer les juges d'une vingtaine – 290 à 270 – est-ce que le projet de loi n° 177, dont le ministre de la Sécurité publique vient de nous tracer les grandes lignes, est pertinent? Essentiellement, ce que le ministre dit, c'est que la responsabilité que les articles 14 et 15 donnent au juge en chef, M. le Président, les articles 14 et 15 de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, la loi des coroners... Le ministre l'a résumé tout à l'heure. Lorsqu'on a à évaluer la conduite d'un coroner, essentiellement, il n'y a pas d'autre juge que le juge en chef, en vertu de la loi telle qu'elle est écrite actuellement, qui peut le faire, qui a juridiction.

Je suis d'accord avec l'essentiel des commentaires du ministre lorsque, rapidement mais de façon assez juste, il nous faisait part des responsabilités qu'a le juge en chef. C'est essentiellement une fonction de gestionnaire, d'administrateur. C'est très occasionnellement qu'un juge en chef va siéger. À l'occasion, pour remplacer un de ses collègues qui pourrait être incapable, pour toutes sortes de raisons, M. le Président, d'entendre une cause, dans certaines urgences, ça peut arriver que le juge en chef monte sur le banc, mais c'est exceptionnel. C'est essentiellement, oui, une fonction d'administrateur, de gestionnaire, avec d'autres responsabilités, comme, entre autres, de présider le Conseil de la magistrature.

C'est évident – puis ça, j'en conviens – le juge en chef n'a pas nécessairement le temps, physiquement parlant, de remplir la fonction qui lui est dévolue par les articles 14 et 15 de la Loi sur les coroners. Dans ce sens-là, j'indique au ministre que, même s'il y a une contradiction dans ce qu'on nous soumet là – le projet de loi n° 177, permettre au juge en chef de, s'il le veut, déléguer cette responsabilité-là, de vérifier la conduite d'un coroner, d'enquêter la conduite d'un coroner – le juge en chef, si l'amendement proposé, ou les deux amendements, et à 14 et à 15, de la loi des coroners sont acceptés, sont votés, pourra désigner, s'il le veut, un de ses juges. Je n'ai pas d'objection à ça, sauf qu'il y a une contradiction.

Le ministre de la Sécurité publique est très, très, très concerné. Vous savez, le ministre de la Sécurité publique puis le ministre de la Justice et Procureur général, M. le Président, ce sont des jumeaux, ça, lorsqu'on pense à la justice en général, lorsqu'on pense à la protection des citoyens. Je dis souvent, moi, que le ministre de la Sécurité publique, avec sa police, il est en même temps en aval puis en amont du système judiciaire. Il est en aval pour monter la preuve, pour recueillir la preuve, en plus évidemment de protéger les citoyens. Je parle des forces policières dont le ministre de la Sécurité publique a la responsabilité, que ces forces policières là soient la Sûreté du Québec, où la responsabilité du ministre, elle est... Le pouvoir du ministre en regard de la Sûreté du Québec, il est plus évident, plus direct qu'avec nos corps de police municipaux, mais ce n'est pas moins vrai que le ministre de la Sécurité publique a la responsabilité, globalement, de surveiller l'ensemble des forces policières du Québec.

Les policiers, M. le Président, protègent les citoyens quotidiennement et aussi interviennent lorsqu'il y a crime et interviennent également pour que les crimes soient sanctionnés. Et, à six, les substituts du Procureur général, pour arriver à faire condamner, s'il y a lieu, ceux qui auraient commis des crimes soit à l'encontre des dispositions du Code criminel ou de lois strictement québécoises. Et, subséquemment, s'il y a eu condamnation, les policiers sont encore au travail, ne serait-ce que pour accompagner au centre de détention ceux qui auraient été condamnés. Alors, on voit que la force policière, elle est toujours présente dans notre système judiciaire

Et c'est pour ça que je dis que le ministre de la Sécurité publique et le Procureur général... Le Procureur général plus que le ministre de la Justice... Il y a une distinction: le Procureur général et le ministre de la Justice, c'est le même personnage. Ça ne fait pas tellement, tellement longtemps que le ministre de la Justice et Procureur général était en même temps ministre de la Sécurité publique. On a réalisé que ça pouvait placer le ministre dans des situations extrêmement délicates. Et il y a plein de gens qui évaluent également la situation extrêmement délicate dans laquelle le ministre est parfois placé, ayant en même temps la responsabilité de Procureur général et de ministre de la Justice. Il y a même des opinions qui vont dans le sens suivant: le Procureur général pourrait devoir souvent s'abstenir de siéger au Conseil des ministres, pour différentes raisons que le ministre de la Sécurité publique comprend.

M. le Président, je demande au ministre de la Sécurité publique, je lui dis tout de suite: On va collaborer au projet de loi n° 177, ça a du sens, mais – je me répète – ça vient contredire le projet de loi n° 151, ou c'est 151 qui contredit 177. Je demande au ministre de la Sécurité publique de surveiller le ministre de la Justice, de surveiller son collègue le Procureur général et aussi, nécessairement, de surveiller – ça, je ne suis pas sûr qu'il va m'écouter, là... Il va m'entendre, mais il ne m'écoutera pas, parce que je lui ai déjà demandé de faire la même chose dans ses dossiers à lui, spécifiquement – le président du Conseil du trésor, de résister au président du Conseil du trésor, de résister au ministre des Finances.

Et je demande au ministre de la Sécurité publique de venir en aide à son collègue ministre de la Justice puis de lui faire comprendre que ce n'est pas certain qu'on a raison de diminuer de 290 à 270 l'ensemble des juges que l'on retrouve à la Cour du Québec. On va, nous, du côté de l'opposition, continuer à talonner le ministre de la Justice et en commission parlementaire et aussi lorsque le projet de loi n° 151 reviendra pour sa dernière étape ici, à l'Assemblée nationale, mais je ne suis pas certain qu'on va réussir à convaincre le ministre de la Justice de notre point de vue. Je ne suis pas certain que je vais, avec mes collègues, réussir à le convaincre qu'on a raison de lui rappeler qu'on fait fausse route – 290 juges à la Cour du Québec – d'autant plus que, là, voyez-vous, avec les dispositions du projet de loi n° 177, bien, éventuellement, tu as un juge qui n'est pas juge en chef, qui aura des responsabilités additionnelles.

(16 h 50)

M. le Président, je m'arrête là-dessus. J'ai quelques précisions à demander au ministre de la Sécurité publique, parrain du projet de loi n° 177. Je ne sais pas si on le fera en commission plénière ou en commission parlementaire, mais j'indique tout d'abord au ministre qu'on est – et je me répète parce que je veux que ça soit bien écrit, que le ministre le comprenne – même si on est en désaccord avec 151, même si 151 contredit 177, pour des raisons très précises, très spécifiques et isolées, des raisons très isolées... ça a du sens qu'on puisse permettre au juge en chef de déléguer, essentiellement, à un de ses juges le pouvoir d'enquêter, s'il y a lieu, un coroner, M. le Président. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac. Comme il n'y pas d'autres intervenants, M. le ministre, est-ce que vous voulez vous prévaloir de votre droit de réplique? Alors, le principe du projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée, il va de soi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. Je fais motion pour que cette assemblée se transforme en commission plénière, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je suspends donc les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès.

(Suspension de la séance à 16 h 52)

(Reprise à 17 h 5)


Commission plénière

M. Pinard (président de la commission plénière): Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes maintenant réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès.

Alors, nous allons donc entreprendre nos travaux par les remarques préliminaires. Alors, M. le ministre, est-ce que vous avez des remarques préliminaires sur le projet de loi n° 177?

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Puisque nous venons de procéder à l'adoption du principe et que j'ai pu lors de l'adoption du principe faire des remarques que je crois assez complètes relativement à ce projet de loi, alors je ne ferai pas de remarques préliminaires, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le critique officiel de l'opposition et député de Frontenac, est-ce que vous avez des remarques préliminaires?

M. Lefebvre: M. le Président, pas de remarques préliminaires comme telles. Au fur et à mesure de nos courts débats sur l'adoption des deux projets de loi, j'aurai à poser au ministre des questions assez précises qui essentiellement vont nous permettre à l'un comme à l'autre de répéter un petit peu nos interventions sur le principe, et d'aller peut-être un peu plus dans le détail, à tout le moins pour certains points.


Étude détaillée

Le Président (M. Pinard): Donc, il n'y a pas de motions préliminaires. Y a-t-il des interventions sur l'article 1 du projet de loi? Alors, M. le ministre.

M. Bélanger: Est-ce qu'on pourrait peut-être lire l'article 1, M. le Président?

Le Président (M. Pinard): L'article 1 se lit comme suit: L'article 14 de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès (L.R.Q., chapitre R-0.2) est modifié par l'insertion, après le mot «Québec», de ce qui suit: «,ou d'un juge de cette cour désigné par lui,».

M. Bélanger: Oui. Alors, M. le Président, la modification vise à assouplir le mécanisme de désignation de la personne qui pourrait être chargée de faire enquête et de produire un rapport par application de cet article 14 et à permettre que le juge en chef puisse confier cette responsabilité à un autre juge de la Cour du Québec.

Alors, je tiens à préciser, comme je l'ai dit tout à l'heure lors de l'adoption du principe, que c'est une possibilité qui est donnée au juge en chef. Donc, le juge en chef conserve toujours cette possibilité de la faire lui-même, cette enquête, mais pour les raisons mentionnées précédemment, c'est-à-dire vu la charge quand même considérable d'administrateur du juge en chef, tâche qui a évolué au fil des ans, indépendamment de l'adoption de 151 ou pas, je crois qu'il est important de pouvoir donner cette possibilité au juge en chef de déléguer. Parce que, quand même, dans le genre d'enquête qui est demandée en vertu de l'article 14, en général il y a une certaine célérité, on pourrait dire, qui est demandée à ce moment-là au juge en chef, vu quand même les enjeux qui sont importants, soit la destitution d'un coroner.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, sans aller dans tous les détails, j'aimerais que le ministre nous explique pour quelle raison le juge en chef lui a suggéré... Parce que j'imagine que le juge en chef a fait des recommandations pour que le ministre de la Sécurité publique arrive à la conclusion qu'il fallait modifier 14 et 15. Ce que je veux savoir surtout du ministre: Quelles sont les difficultés qu'un juge en chef rencontre, a à vivre lorsqu'il a à présider une enquête comme celle que la loi actuelle prévoit? Parce que le ministre a dit tout à l'heure que, règle générale, ce sont des enquêtes qui demandent une intervention rapide. Ça veut dire que le juge en chef, si on oublie pour 30 secondes... dans la loi actuelle, telle que la loi est écrite, le juge en chef doit se saisir du dossier dans les plus brefs délais et en principe devrait, toute autre affaire cessante, présider à l'enquête pour arriver dans les plus brefs délais à des conclusions. Il doit dans les plus brefs délais – je me répète – se saisir du dossier puis procéder à l'enquête. Alors, est-ce que c'est la charge administrative du juge, est-ce que ce sont les responsabilités, qui sont essentiellement – on l'a dit tout à l'heure – des responsabilités de gestionnaire, des responsabilités administratives, qui empêchent le juge en chef, un, de se saisir rapidement du dossier puis, deux, de procéder à l'enquête, comme le juge en chef lui-même, probablement, a indiqué qu'il souhaiterait le faire? Je voudrais entendre le ministre là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

(17 h 10)

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Là-dessus, je pourrais dire tout de suite que je n'ai pas parlé personnellement au juge en chef; il y a eu des contacts entre le cabinet et le juge en chef. Mais il faut comprendre aussi que ce projet-là, on en parle depuis longtemps. Ça fait plusieurs années qu'on parle de cette possibilité-là, justement, de pouvoir donner un certain coup de main ou une possibilité, en tout cas, au juge en chef de se décharger d'une certaine obligation.

Mais aussi ce qui est venu modifier, c'est que maintenant on a plus d'idées: la cour nous a donné des balises relativement à la façon dont doit être menée maintenant une enquête présidée par un juge ou un juge en chef dans l'état actuel du droit. Là, on comprend maintenant qu'une telle enquête est considérable, peut être considérable, dépendamment de quelle façon, finalement, elle se déroule. On ne sait jamais, une enquête, exactement combien de temps ça peut prendre.

Donc, pour ces motifs, juste en considérant les échanges qu'il y a eus entre l'ordre du jour puis l'agenda du juge en chef, on a considéré qu'il est important de donner cette possibilité-là au juge en chef afin de pouvoir prendre la décision, oui ou non, de déléguer la charge à un juge qu'il désignera. Donc, ce n'est pas nouveau. Mais, évidemment, le dernier jugement est venu baliser simplement d'une façon plus précise, exactement, de quelle façon une telle enquête doit maintenant se faire.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Parce que le texte lui-même l'indique: le juge pourra le faire s'il le souhaite. Il pourra, à titre de juge en chef, à titre de juge, point, lui-même procéder à l'enquête. Est-ce que le ministre considère que le juge en chef devrait appointer un certain nombre de juges à l'avance, compte tenu de leur expérience, compte tenu de leur expérience judiciaire et juridique passée? Est-ce que le ministre considère que le juge en chef devra désigner, je ne sais pas, moi, une banque d'une dizaine de juges qui seraient habilités ou qui auraient des compétences très précises pour procéder à l'enquête dont on parle aux articles 14 et 15?

Évidemment, est-ce qu'on peut imaginer que ce soit un juge spécialiste en matière civile ou plutôt l'inverse, en matière de droit criminel, ou si ce sera dans la pratique n'importe quel des 270 juges qui pourrait – dans la pratique, je dis bien, parce que ça n'a rien à voir avec le texte de loi – procéder à l'enquête, si le juge en chef décide de céder le dossier à un de ces juges plutôt que de le garder lui-même, comme la disposition le lui permettra si elle est adoptée, les amendements proposés à 14 et 15? Le ministre l'a indiqué – puis je suis d'accord, sinon on se serait opposés – le juge en chef pourra toujours décider de procéder lui-même à l'enquête. Sinon, est-ce que ce sera un certain nombre de juges très précis ou si ça pourrait être n'importe lequel des 270 ou des 290 juges?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, je crois que la distinction qui est faite par le député de Frontenac est fondamentale, c'est-à-dire que le juge en chef conserve la possibilité de faire cette enquête lui-même. Ça, je crois que c'est fondamental. D'aucune façon on ne veut intervenir ou forcer le juge; c'est uniquement une possibilité qui est offerte au juge.

Maintenant, je parlais avec Me Allaire, du contentieux du ministère de la Sécurité publique, qui m'accompagne, et on cherchait, voir les précédents relativement à une enquête faite en vertu de l'article 14 de la loi. C'est excessivement rare. En tout cas, on a essayé de se souvenir, de courte mémoire, d'un récent passé, on n'a pas mémoire d'une enquête faite en vertu de l'article 14. Donc, c'est quand même assez exceptionnel, ce type d'enquête, outre celle évidemment dont il est fait mention dans le jugement que j'ai mentionné tout à l'heure. Donc, c'est assez exceptionnel.

Comment le juge va finalement... Il est responsable de l'administration de sa cour, donc on peut prévoir évidemment que le juge, dans sa décision, si jamais il décide de déléguer la charge, va prendre en considération l'expertise des juges qui sont à sa disposition. Alors, est-ce qu'il va créer, finalement, ou composer un groupe de juges dans lequel il pigera systématiquement quand une telle enquête lui sera demandée? C'est possible, mais je pense que ça appartient...

Vous comprenez, comme ministre de la Sécurité publique, c'est pour moi impossible et très mal considéré de lui faire quelque recommandation relativement à ça. Mais, d'un autre côté, j'espère que ni moi-même ni ceux qui vont me succéder n'aurons à se servir trop souvent de l'article 14. C'est un article auquel on espère ne pas avoir recours trop souvent. C'est quand même un recours assez peu usuel. Évidemment, je suis certain que le juge, dans son appréciation, va regarder l'expérience et l'expertise des juges qui composent son équipe avant de faire un choix.

Le Président (M. Pinard): Merci. Est-ce que ça vous convient, M. le...

M. Lefebvre: L'article 14, ça va, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, l'article 1 est adopté?

M. Lefebvre: L'article 1 modifiant 14, ça va.

Le Président (M. Pinard): L'article 2. L'article 15 de cette loi est modifié par l'insertion, après le mot «Québec», de ce qui suit: «, ou d'un juge de cette cour désigné par lui». M. le ministre.

M. Bélanger: Encore là, M. le Président, la modification proposée ici poursuit le même objectif que celle proposée à l'article précédent. Dans le premier cas, c'est le coroner en chef qui peut, pour cause, réprimander un coroner, et le gouvernement peut suspendre un coroner permanent. Dans le deuxième cas, en vertu de l'article 15, le gouvernement peut destituer, suspendre avec ou sans traitement le coroner en chef ou un coroner en chef adjoint. Donc, c'est la même disposition finalement qui est proposée pour les deux types d'enquête, en vertu de 14 et en vertu de 15.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, sans vouloir amener le ministre à donner une opinion – je suis d'accord avec lui, là – sur la responsabilité exclusive qu'a le juge en chef de gérer sa cour, de gérer l'ensemble de ses magistrats, et, dans ce sens-là, le ministre non plus... Mais ça serait évidemment beaucoup moins dommageable si c'était un député de l'opposition. On n'a pas le pouvoir politique à indiquer au judiciaire de quelle façon procéder. Mais est-ce que le ministre considère – ceci étant dit et à titre d'opinion; je considère, moi, qu'il n'y a pas de problème à ce qu'il me donne cet avis-là – qu'il ne voit pas une distinction entre 14 et 15, à savoir que, lorsqu'on parle du coroner en chef... Il m'apparaît que, dans ce cas-là, le juge devrait considérer qu'il y a lieu de se prévaloir de la disposition qui n'aura pas été modifiée ou du pouvoir qui n'aura pas été modifié, de garder pour lui cette enquête-là.

Est-ce que le ministre ne voit pas une distinction entre 14 et 15? À tout le moins dans la pratique, le juge en chef devrait avoir le réflexe de décider de garder pour lui-même cette enquête-là, s'il y a lieu, en espérant que ça ne se produira jamais. Je suis d'accord avec le ministre là-dessus.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Lefebvre: Là, on parle du coroner en chef et non pas d'un coroner permanent ou à temps partiel. On parle du coroner en chef. Il me semble que le juge en chef devrait, à ce moment-là... Pourquoi ne pas faire légalement cette distinction-là entre 14 et 15? Je le demande au ministre: Est-ce que le ministre n'a pas évalué de laisser 15 tel qu'il est écrit, compte tenu du fait qu'on parle du coroner en chef et non pas d'un simple coroner?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, vous savez, c'est excessivement délicat, toute cette question des coroners, parce que l'institution du coroner, c'est très spécial. Finalement, la grosse différence ou, pour ainsi dire, une des seules différences entre le coroner-chef et un coroner, ce sont les fonctions administratives ou les responsabilités administratives qui sont dévolues au coroner-chef. Donc, il n'y a pas comme de degré... Dans l'opinion publique, évidemment, il y en a une. Quand on parle du coroner-chef, il y a quand même toute, je pourrais dire, une aura qui est attribuée au coroner-chef dans l'opinion publique.

Mais, au niveau strictement légal, quant à moi, ça pourrait être dangereux de faire cette distinction-là, c'est-à-dire de ne pas donner cette possibilité-là dans le cas du coroner-chef, mais de la donner dans le cas du simple coroner. Ça serait un peu comme reconnaître au niveau légal – je ne dis pas au niveau populaire, au niveau de la compréhension de tout le monde – qu'il y a une distinction ou un ordre de coroner, chose qui n'est pas réellement faite dans la Loi sur les coroners, parce que vraiment la seule différence qu'on fait entre coroner-chef et coroner, c'est au niveau des fonctions administratives. Donc, je crois que, comme législateur, apporter cette nuance-là ou dire que pour un cas c'est nécessaire et dans l'autre cas c'est nécessaire, ça serait un peu comme jouer dans cette nuance-là. Quant à moi, je crois que ce ne serait pas adéquat de le faire législativement.

(17 h 20)

Maintenant, pour ce qui est du juge qui aura à prendre cette décision-là, c'est évidemment l'entière discrétion du juge, tel qu'on le mentionne, et je fais bien attention à tous mes mots. Mais, s'il est exceptionnel de demander une enquête sur le coroner, il est évident que c'est encore plus exceptionnel d'en demander une, je crois, relativement au coroner en chef. Je suis certain que cette appréciation sera prise en considération par le juge avant de se prévaloir de cette possibilité qui va lui être maintenant offerte par la loi, si la loi est adoptée. Alors, je pense que le juge va prendre cet élément-là en considération, car on peut s'attendre à ce que... Ça va être suivi par tout le monde, ce genre de type d'enquête quand c'est le coroner en chef qui est visé. De toute façon, même quand c'est un coroner qui est visé, puisque la procédure est quand même peu coutumière, je crois que ça attire pas mal l'attention de tout le monde.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, le ministre dit que ça serait délicat que de faire une distinction entre le coroner en chef et le coroner, un simple coroner. Bien, ça ne serait pas plus délicat que ça l'était à date de faire une distinction entre le juge en chef puis un simple juge, hein. Parce que, dans l'état actuel de la loi, c'est le juge en chef, et le juge en chef seulement. Puis je ne crois pas que ça ait vexé, puis je ne crois pas que ça constitue une entorse à la conception de la justice que d'avoir laissé, à date, l'enquête d'un coroner, qu'il soit simple coroner ou coroner en chef, au juge en chef de la Cour du Québec. Alors, voyez-vous, moi, ce que je propose au ministre, c'est d'inverser exactement ce qui se passe actuellement. Que le coroner en chef... On laisserait 15 tel qu'il est écrit, M. le Président: le coroner en chef, le juge en chef, pour des raisons...

Je comprends la remarque du ministre: un juge, c'est un juge, puis un coroner, c'est un coroner. Mais ce n'est pas ça que la loi dit. Il y a une distinction: le juge en chef juge, puis le coroner en chef «coronère». Pourquoi ne pas laisser au juge en chef l'enquête éventuelle du coroner en chef? Il me semble que c'est une distinction qui ne serait pas – au contraire, il me semble – une agression, entre guillemets, très modeste, évidemment, à l'ensemble de la magistrature puis également à l'ensemble des coroners.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Lefebvre: Ça serait, M. le Président, indiquer à la population que le législateur, comme on le lit très régulièrement... Il y a un juge en chef puis on l'écrit dans la loi. Le juge en chef, le juge qui a la responsabilité de gérer l'ensemble de la magistrature, on l'appelle juge en chef, puis pas rien que dans la plomberie de tous les jours puis dans des démarches strictement administratives. Dans le texte même de nos lois, le juge en chef s'appelle juge en chef. C'est pour que ça soit compris puis pour établir la distinction. Alors, pourquoi ne pas – je me répète – garder la prérogative législative au juge en chef de la Cour du Québec d'enquêter sur le coroner en chef, s'il y a lieu?

M. Bélanger: M. le Président, je crois qu'il faut toujours garder à l'esprit que le motif de cette modification est avant tout le fait de la charge quand même importante de travail pour le juge en chef. Donc, cette charge de travail, elle reste identique, que ce soit une enquête qui lui est demandée en vertu de 14 ou une enquête faite en vertu de 15. Donc, je crois qu'il faut garder ça à l'esprit. Et je crois que tout le monde a intérêt aussi, à ce moment-là, à ce que ces enquêtes puissent procéder avec une certaine diligence. Alors, à ce moment-là, le fait que, dans un certain cas, l'enquête, des fois, puisse être beaucoup plus longue parce que, justement, le juge en chef, évidemment, se retrouverait avec une charge de travail, quand même, ou avec un agenda, vraiment, qu'il ne peut pas déplacer, ça pourrait, d'un côté comme de l'autre, vous savez, faire un traitement qui ne serait pas le même et qui, je crois, serait difficile à justifier.

Mais encore là, je le dis, le juge en chef a toujours la possibilité de la faire lui-même. Et, pour tous les motifs que j'ai dits, je crois qu'évidemment il va prendre en considération le fait que, quand c'est un coroner en chef plutôt qu'un coroner qui fait l'objet d'une enquête, il va y avoir une appréciation qui va être faite par le juge. Ça va être au juge de la faire, mais il y a quand même plusieurs éléments qui, quant à moi, vont jouer dans sa décision. Mais, moi, je préfère laisser ce choix-là, cette décision-là au juge en chef. Je crois que c'est plus sage, M. le Président.

M. Lefebvre: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): L'article 3: «La présente loi entre en vigueur le...» C'est la date de la sanction de la présente loi. C'est un article technique. Alors, est-ce que l'article 3 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): En conséquence, la commission plénière va mettre fin à ses travaux. Je remercie ceux qui ont participé. Et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques instants. Je prie les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement.

(Suspension de la séance à 17 h 27)

(Reprise à 17 h 28)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la députée de Vanier.

Mme Barbeau (présidente de la commission plénière): Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès et qu'elle l'a adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous demanderais de considérer l'article 38 de notre feuilleton en vous demandant une très, très brève suspension de façon à permettre aux intervenants concernés d'entrer en Chambre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Ça va, M. le député de Frontenac?

M. Lefebvre: ...M. le Président, à mon collègue de Sainte-Marie–Saint-Jacques que ça va nous permettre en même temps de compléter les troupes, là. On aura quorum. On va suspendre pour le quorum.

Le Vice-Président (M. Pinard): Veuillez appeler les députés, s'il vous plaît, et nous suspendons.

(Suspension de la séance à 17 h 29)

(Reprise à 17 h 31)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mesdames et messieurs les députés qui sont debout, veuillez vous asseoir. M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, comme je vous l'ai indiqué précédemment, je vous demanderais de bien vouloir considérer l'article 38 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 198


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 38 de votre feuilleton, M. le député de Roberval propose l'adoption du principe du projet de loi n° 198, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 198? M. le député de Roberval.


M. Benoît Laprise

M. Laprise: Merci beaucoup. À quoi servirait, M. le Président, la décentralisation si on ne permettait pas à des gouvernements locaux, que sont les municipalités et les MRC, de poser des gestes qui sortent un peu de l'ordinaire, soit des crédits de taxes ou encore des subventions à des entreprises qui apportent au milieu vraiment un signe de développement très important? C'est bien le cas de la MRC Maria-Chapdelaine. Ce projet de loi donne le pouvoir à la municipalité régionale de comté Maria-Chapdelaine d'accorder un crédit de taxes réparti sur trois ans à la compagnie Ressources Orléans. Et voici les attendus.

«Attendu que la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine agit à titre de municipalité locale sur son territoire non organisé;

«Que la municipalité régionale de comté ne peut adopter de plan d'urbanisme à l'égard de ce territoire et conséquemment ne peut accorder de subventions dans le cadre d'un programme particulier d'urbanisme – c'est sûr, quand c'est un territoire municipalisé, la MRC ou la municipalité peut faire un projet, un plan d'urbanisme, un projet de développement et, à partir de ce projet-là, y intégrer une participation financière en crédit de taxes ou autre;

«Qu'en outre, dans les circonstances, un programme de revitalisation ne peut être adopté – c'est bien évident, dû au fait que c'est dans un territoire non organisé;

«Qu'il y a lieu de permettre à la municipalité régionale de comté d'appliquer un régime fiscal particulier à certains immeubles sis sur ce territoire;

«Le Parlement du Québec décrète ce qui suit:

«1. Malgré la Loi sur l'interdiction de subventions municipales, la Municipalité régionale de comté Maria-Chapdelaine peut accorder un crédit de taxes à Ressources Orléans inc. relativement à des immeubles situés sur le territoire non organisé relevant de sa compétence et décrits en annexe. Ce crédit de taxes ne peut excéder:

«1° pour l'exercice financier suivant celui au cours duquel les travaux de construction de l'usine effectués par l'entreprise ont été complétés – la première année – 100 % des taxes foncières», la deuxième année, 75 %, et la troisième année, 50 % des taxes foncières.

Comme vous voyez, c'est un projet des plus intéressants. C'est un projet de développement industriel au niveau de la mine wollastonite sur le territoire non organisé de la municipalité Maria-Chapdelaine, de la MRC, et près de la municipalité de Saint-Ludger-de-Milot, qui fait partie du comté Lac-Saint-Jean. Alors, ce projet-là couvre en réalité, en termes de développement économique, un immense territoire que sont la MRC de Maria-Chapdelaine et la MRC du Lac-Saint-Jean. C'est un projet qui actuellement a une construction d'au-delà 30 000 000 $. C'est un développement sur plusieurs années. Il y a beaucoup de potentiel dans cette mine-là, les marchés sont très bons actuellement, la demande est très bonne. Actuellement, il y a 50 emplois à l'usine, et la moyenne d'âge, à l'usine, des employés, c'est 23 ans. Alors, ça reflète une volonté de la compagnie qui est impliquée dans le milieu, et ça reflète la participation de la MRC qui vient établir un partenariat dans le développement économique de cette municipalité-là ainsi que dans la MRC de Maria-Chapdelaine au complet, et on peut dire dans les deux comtés, Roberval et le comté du Lac-Saint-Jean.

Alors, je demande au gouvernement d'appuyer ce projet de loi n° 198 qui permettra à la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine d'accorder un crédit de taxes à l'entreprise wollastonite, le développement de l'entreprise Orléans qui exploite une mine importante dans le comté de Roberval, dans la MRC de Maria-Chapdelaine et également en partie avec la municipalité de Saint-Ludger-de-Milot, qui est dans le comté Lac-Saint-Jean, de mon collègue, le ministre Jacques Brassard. C'est tout, M. le Président. J'espère avoir l'appui unanime du Parlement.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Roberval. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 198? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, tout en félicitant avec beaucoup d'émotion mon collègue le député de Roberval, je vous demanderais de bien vouloir, en mon nom et forcément au nom de l'opposition, ajourner nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures, où nous ferons une reprise de ce débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous suspendons les travaux à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 36)

(Reprise à 20 h 6)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Nous allons poursuivre le débat qui est en cours sur l'adoption d'un principe. L'article 38.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Alors, à l'article 38 de votre feuilleton, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 198, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine.

À la fin de nos débats, cet après-midi, le député de Roberval a pris la parole et avait terminé son intervention. Alors, je serais en mesure, à ce stade-ci, de reconnaître Mme la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, j'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 198, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine et qui donne le pouvoir à la Municipalité régionale de comté d'accorder un crédit de taxes réparti sur trois ans à la compagnie Ressources Orléans inc.

M. le Président, ce projet de loi a été déposé le 19 novembre dernier par le leader du gouvernement au nom du député de Roberval, M. Benoît Laprise. Il vise à donner le pouvoir à la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine d'accorder un crédit de taxes réparti sur trois ans à la compagnie Ressources Orléans inc. Cette compagnie est une société inscrite à la Bourse de Montréal, qui oeuvre dans l'extraction minérale du – j'espère que j'ai le bon terme – wollastonite. La construction de l'usine, qui fait l'objet du crédit de taxes, a coûté 25 000 000 $, procure de l'emploi à 52 personnes auxquelles, nous dit-on, s'ajouteront 15 autres personnes en février 1998.

Je tiens à vous souligner, M. le Président, que ce site est le deuxième plus important au Canada et le cinquième au monde. Ce minerai est utilisé dans plusieurs matériaux, qu'on pense entre autres au plastique et au béton, afin d'en augmenter la résistance.

Les administrateurs de Ressources Orléans inc. ont demandé au Conseil de la MRC de Maria-Chapdelaine d'obtenir une exemption de taxes à l'entreprise pour les prochaines années. Cette demande doit être analysée, d'ailleurs, dans le cadre de la législation actuelle. La Loi sur l'interdiction de subventions municipales établit le principe général par lequel les municipalités ne peuvent pas soutenir financièrement un établissement industriel ou commercial.

L'article 1 de cette loi est très spécifique, et je le cite: «Aucune municipalité ne peut, ni directement, ni indirectement, venir en aide à un établissement industriel ou commercial autrement que de la façon prévue à la Loi sur les immeubles industriels municipaux, et notamment, sans restreindre en rien la généralité des termes précédents, elle ne peut venir en aide en aucune des manières suivantes, savoir:

«1° En prenant et souscrivant des actions d'une compagnie formée pour cet objet;

«2° En donnant ou prêtant de l'argent ou autre valeur ou en donnant la jouissance ou la propriété d'un immeuble;

«3° En garantissant, par endossement ou autrement, une somme d'argent empruntée;

«4° En accordant une exemption de taxes à un établissement industriel ou commercial.»

Ce principe, M. le Président, énoncé dans la Loi sur l'interdiction de subventions municipales, s'applique sous réserve des dispositions expresses à l'effet contraire contenues dans d'autres lois qui sont actuellement en vigueur.

(20 h 10)

Les articles 1008 et 1111 du Code criminel sont des dispositions d'exception à la Loi sur l'interdiction de subventions municipales. Je voudrais référer ici à l'article 1008 du Code municipal qui permet au conseil, par contre, d'adopter un programme de revitalisation à l'égard d'un secteur qui est délimité, dans lequel la majorité des bâtiments ont été construits depuis au moins 20 ans et dont la superficie est composée pour moins de 25 % de terrains non bâtis. Ce programme pourrait permettre un crédit de taxes comme le recherche justement cette entreprise. Malheureusement, on ne peut utiliser cette exception au principe de l'interdiction à des subventions municipales pour accorder le crédit de taxes pour différentes raisons, notamment parce qu'il s'agit d'un territoire non organisé au sens de la Loi sur l'organisation territoriale.

Une deuxième exception au principe établi par la Loi sur l'interdiction de subventions municipales se retrouve à l'article 1111 du Code municipal. Cet article permet au conseil d'adopter un programme de revitalisation pour une partie de son territoire en vertu d'un programme particulier d'urbanisme. Ce programme permet donc à la municipalité d'accorder des subventions. Malheureusement, la MRC de Maria-Chapdeleine ne peut utiliser cette exception au principe de l'interdiction à des subventions municipales parce que la portion du territoire qui fait l'objet d'un crédit de taxes se retrouve dans un territoire non organisé au sens de la Loi sur l'organisation territoriale.

On se retrouve donc dans la situation suivante: la MRC de Maria-Chapdeleine a un intérêt, vraiment un intérêt à accorder un crédit de taxes à Ressources Orléans inc. Toutefois, la Loi sur l'interdiction de subventions municipales l'empêche de le faire.

Par ailleurs, les exemptions au principe de cette loi ne peuvent s'appliquer à la situation actuelle. On doit donc procéder, par un projet de loi public, à l'application restreinte afin d'accorder le pouvoir à la MRC d'accorder un crédit de taxes réparti sur trois ans à la compagnie Ressources Orléans inc. Cette solution, M. le Président, elle est exceptionnelle. Elle permet – et c'est important, ça – au milieu d'accorder son appui à une entreprise qui va fournir 70 emplois directs dans une MRC qui a un taux de chômage s'élevant à près de 18 %, ce qui n'est pas négligeable. Nous avons eu la certitude qu'il n'y avait pas de concurrence entre deux municipalités pour le site de l'usine. De plus, cette contribution va permettre à la compagnie d'investir un montant supérieur en recherche et développement, ce qui est susceptible – et on le lui souhaite, évidemment – de créer des emplois supplémentaires. Il y a donc lieu d'être favorable à ce projet de loi.

M. le Président, vous me permettrez un commentaire. Vous avez constaté comme moi comme il est souvent difficile de se retrouver dans l'ensemble des lois municipales. Le législateur a énoncé un principe, soit l'interdiction des subventions municipales, dans ce cas-ci, dont les crédits de taxes, mais a adopté de nombreuses exemptions à ce principe, et c'est cela qui crée des contraintes aux administrations municipales. Nous avons, au Parti libéral du Québec, adopté, à l'occasion de notre congrès général en septembre dernier, une résolution soumise – d'ailleurs, je le dis – par mon association de comté qui vise à élaborer une politique qui comprendrait une redéfinition moderne et plus efficace des compétences des municipalités et des modalités d'exercice de ces dernières.

M. le Président, ça me fait plaisir de vous dire que nous allons donner notre appui à la demande de la MRC de Maria-Chapdelaine, et il nous fera plaisir, lorsque le temps viendra, de travailler à ce projet de loi article par article. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 198?


Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 198, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée et que le ministre des Affaires municipales en soit membre pour la durée du mandat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Nous allons poursuivre un très bon débat, l'adoption d'un principe sur une loi modifiant l'aide financière aux étudiants. Je vous demanderais de prendre en considération l'article 9.


Projet de loi n° 170


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 9 de votre feuilleton, l'Assemblée reprendra le débat ajourné le 2 décembre 1997 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 170, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants.

Lorsque nous avons terminé nos débats, le 2 décembre 1997, le dernier intervenant a été le député d'Outremont. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 170? Mme la députée de La Pinière.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, permettez-moi d'intervenir à ce stade-ci de l'adoption de principe sur le projet de loi n° 170, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants.

Je voudrais, M. le Président, d'entrée de jeu dire à cette Assemblée que je reçois dans mon bureau de comté de nombreux étudiants qui sont aux prises avec le problème du financement, le problème des prêts et bourses. J'ai accepté moi-même de traiter certains cas pour le simple fait que je voulais vivre l'expérience que les étudiants vivaient dans les dédales de l'administration du ministère de l'Éducation quand ils s'adressent à la bureaucratie pour faire valoir leurs droits, pour faire valoir la possibilité pour eux d'avoir accès à des prêts et bourses. Et je peux vous assurer, M. le Président, que ce n'est pas une mince affaire. Il faut se réveiller de bonne heure pour pouvoir répondre à tous les critères et surtout à toutes les procédures bureaucratiques que les prêts et bourses engendrent.

De plus, j'ai eu l'occasion, le 12 novembre dernier, de rencontrer les représentants de l'Association étudiante de l'Université du Québec à Montréal. J'ai eu l'occasion, M. le Président, d'enseigner dans cette auguste université, alors j'étais de retour pratiquement chez moi, et j'ai pris le temps de discuter pendant deux heures avec les représentants de l'Association étudiante de l'Université du Québec à Montréal, et la question des prêts et bourses et de l'aide financière aux étudiants en général était centrale à la rencontre que j'ai eue avec eux. Cette rencontre, d'ailleurs, s'inscrivait dans le cadre d'une tournée qui était organisée par les députés libéraux avec la collaboration de la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec qui a eu l'initiative de suggérer cette tournée aux députés afin qu'ils aillent sur le terrain et qu'ils aillent prendre contact avec la réalité du milieu, avec les gens et comprendre les problèmes qu'ils vivent concrètement au quotidien.

Donc, lors de cette rencontre que j'ai eue avec les représentants de l'Association des étudiants de l'Université du Québec à Montréal, on m'a sensibilisée aux difficultés. On m'a même dit que les problèmes étaient tellement graves que l'Association était obligée d'ouvrir une sorte de bureau de plaintes auquel sont acheminés les problèmes qui sont vécus par les étudiants uniquement au chapitre des prêts et bourses, des problèmes que les étudiants, au lieu de concentrer leurs efforts sur leurs études, ont à vivre avec la bureaucratie du ministère de l'Éducation.

(20 h 20)

Toujours lors de cette rencontre, le moins que je puisse dire, c'est que les étudiants de l'Université du Québec à Montréal n'allaient pas par quatre chemins pour dénoncer la ministre de l'Éducation dont les politiques, selon eux, contredisaient les engagements de son parti, le Parti québécois. Et ça, M. le Président, la preuve n'est pas difficile à faire car, lors de la campagne électorale de 1994, le Parti québécois avait promis une réforme du régime de prêts et bourses, une réforme en profondeur; c'est ce que le Parti québécois avait promis aux étudiants du Québec. Mais on parlait à ce moment-là, dans le cadre de cette réforme, d'imposer un mécanisme d'impôt universitaire pour répondre aux besoins des étudiants. On parlait aussi d'alléger substantiellement les mécanismes de remboursement de la dette. Ça, c'était l'engagement du Parti québécois lors de la campagne électorale en 1994.

La réalité, M. le Président, c'est qu'après plus de trois ans au pouvoir les étudiants du Québec attendent toujours que le gouvernement honore son engagement, celui qu'il a pris avant les élections. La ministre de l'Éducation aurait pu le faire dans cette Assemblée en déposant un projet de loi-cadre qui traduirait toutes les promesses du Parti québécois et qui répondrait aux attentes véritables des étudiantes et des étudiants du Québec. Elle aurait pu le faire.

Au lieu de cela, elle a déposé le projet de loi n° 170, projet de loi, d'ailleurs, dont les effets ne se feront sentir qu'en 1999. On sent très bien, M. le Président, de quel bois se chauffe ce gouvernement. Pourtant, ce n'est pas les recommandations et les études qui manquent. Le régime d'aide financière aux étudiants a largement été documenté, notamment par la commission MacDonald, qui s'est constituée sous l'ancien ministre de l'Éducation, le député de Lévis, laquelle commission s'est penchée sur le dossier en long et en large et a produit un volumineux rapport. Encore un rapport d'étude. Puis il y a eu le comité Montmarquette, lui-même issu de la commission MacDonald, qui a également produit un autre rapport avec de nombreuses recommandations.

La ministre de l'Éducation, dans sa présentation du projet de loi n° 170, hier, s'est appuyée beaucoup sur le comité Montmarquette et sur le caractère unanime de ses recommandations. Mais ce qu'elle a oublié de dire, M. le Président, c'est que, si le rapport Montmarquette est assez large, elle, elle a choisi de lui donner une suite plutôt mince, plutôt sélective, puisqu'elle a laissé en plan les recommandations touchant le régime de prêts et bourses, l'endettement des étudiants et le statut des étudiants autonomes, qui sont des points cruciaux quand on discute du régime de prêts et bourses.

Sur le point des étudiants autonomes, en particulier, lorsque j'ai rencontré les étudiants à l'UQAM, il y a trois semaines, ils ont vertement dénoncé les mesures prises par ce gouvernement et qui entravent dans les faits l'accès à l'université pour le plus grand nombre de nos étudiants. C'est ça, la réalité.

En effet, au chapitre du statut des étudiants autonomes, ce que le gouvernement du PQ a fait, c'est qu'il a aboli le critère d'autonomie dans l'attribution des prêts et bourses pour les étudiants qui avaient accumulé 90 crédits. En effet, jusqu'à l'année dernière, un étudiant qui avait réussi ses 90 crédits était considéré autonome, c'est-à-dire qu'on ne tenait pas compte de la contribution des parents ou du conjoint dans la détermination du barème de prêts et bourses qui lui est appliqué. Autrement dit, cet étudiant était considéré comme autonome dans la mesure où il n'était plus à la charge de ses parents. C'est la logique même, M. le Président.

Or, le gouvernement du Parti québécois a décidé de modifier cette disposition de façon à ce que le statut «autonome» ne soit plus attribué en fonction de l'accumulation des 90 crédits mais en fonction de l'obtention du premier diplôme universitaire. Qu'est-ce que cela a comme effet? Cela a pour effet de priver tous les étudiants dont la formation conduisant à un premier degré universitaire dépasse les 90 crédits des ressources financières dans la dernière année de leurs études de baccalauréat, cela s'entend, parce qu'ils auront été considérés comme des étudiants dépendants, dont on tient compte des revenus des parents et des conjoints. Voilà, M. le Président, par un déplacement technique, on exclut un certain nombre d'étudiants qui n'ont plus accès dans la dernière année de leurs études au financement des études.

Ainsi, M. le Président, par une mesure tout à fait insidieuse, des milliers d'étudiants se retrouvent avec moins de ressources pour compléter leur premier diplôme universitaire, précisément qui est très important pour aller sur le marché du travail. On parle ici des étudiants, notamment les étudiants en médecine, les étudiants en génie, les étudiants dans toutes les autres disciplines qui exigent plus de 90 crédits pour l'obtention du bac. On le sait, on est passé par le milieu universitaire; ce n'est pas homogène. Dans certaines disciplines, ça prend 90 crédits pour avoir le bac; dans d'autres, ça prend plus que 90 crédits. Et tous ceux dont la discipline exige plus que 90 crédits se trouvent pénalisés par les mesures de ce gouvernement.

Une autre mesure que ce gouvernement a adoptée et qui limite l'accessibilité aux études supérieures touche les étudiants québécois qui poursuivent des études dans les autres provinces canadiennes ou à l'étranger. Avant, ces étudiants pouvaient compter sans restriction sur le régime de prêts et bourses. Or, le gouvernement du Parti québécois en a réduit l'accès, ce qui décourage les jeunes à poursuivre leurs études hors Québec et limite par conséquent leur mobilité et leur ouverture sur le monde. Il faut croire, M. le Président, qu'il y a des jeunes qui veulent prendre le large, qui veulent aller découvrir d'autres réalités et qui veulent aussi aller apprendre à l'étranger pour cumuler à la fois une compétence professionnelle ou académique avec une expérience de vie très enrichissante. Ça, M. le Président, ces gens-là, leur accès aux prêts et bourses est assez limité par ce gouvernement.

L'autre aspect que les étudiants déplorent, c'est la diminution du nombre de semaines admissibles au régime de prêts et bourses. Qu'est-ce que cela veut dire, M. le Président? Encore une fois, nous sommes face à une situation où, par des mesures techniques, on prive des étudiants de l'aide financière. En effet, bien que le nombre de semaines varie d'un programme à un autre au niveau des études, que ça soit au collégial ou à l'université, ce gouvernement a décidé de diminuer d'un semestre le nombre de semestres admissibles à chacun des niveaux d'étude. Mon collègue le député de Verdun et critique en matière de l'éducation supérieure a qualifié les mesures de ce gouvernement en matière de prêts et bourses de cadeau empoisonné. On ne peut pas dire mieux!

(20 h 30)

De plus, le gouvernement actuel, qui se dit, dans le discours, soucieux des intérêts des Québécois, a aboli le programme de remise des dettes pour les étudiants de deuxième cycle universitaire. Ce programme a été mis en place par l'ancien ministre de l'Éducation, le député de Westmount–Saint-Louis, qui, pour encourager les étudiants de maîtrise et de doctorat à terminer leurs études dans un délai raisonnable – on prévoyait deux ans pour la maîtrise, trois ans pour le doctorat – a mis ce programme sur pied. C'est très intéressant, M. le Président. Les étudiants et les gens qui ont eu la chance de se rendre aux cycles supérieurs au niveau des études universitaires comprendront que c'est une mesure très pertinente, parce que, lorsqu'on est rendu en maîtrise et au doctorat, on est aussi sollicité par la nécessité de travailler, de mettre en pratique les connaissances acquises. Or, cette dualité entre le travail et les études peut parfois rendre élastique la période des études et amener l'étudiant à faire des choix qui sont davantage reliés à la subsistance immédiate qu'à l'acquisition du diplôme. C'était un incitatif pour dire aux étudiants: Prenez le temps d'étudier. Vous travaillerez peut-être parallèlement, vous travaillerez après, mais prenez le temps de faire vos études d'abord.

Et qu'est-ce que ce programme leur permettait de faire, M. le Président? Ce programme était un programme de remise de dette. Il permettait aux étudiants qui faisaient preuve de célérité dans leurs études, au niveau de la maîtrise et du doctorat, d'avoir une réduction de dette de 25 %. Ce gouvernement a aboli ce programme. Il a aboli le Programme de remise de dette pour le remplacer par un autre de moindre portée. Alors, tout ce que ce gouvernement a réussi à faire en trois ans et quelques de pouvoir, c'est d'accoucher de deux rapports de commission sur le régime des prêts et bourses et d'un minuscule projet de loi, le projet de loi n° 170, qui ne règle pas les problèmes vécus quotidiennement par les étudiants, au contraire. Il suffit d'être à l'écoute des étudiants qui sont aux prises avec les vrais problèmes, qui les vivent au quotidien. Ce n'est pas sorcier, on n'a pas besoin d'avoir la tête à Papineau pour comprendre ce type de problèmes, c'est tellement évident, c'est tellement criant et c'est tellement expliqué éloquemment par les étudiants, dans des termes compréhensibles, que tous les parlementaires peuvent comprendre.

Je ne comprends pas pourquoi la ministre de l'Éducation a mis tant de temps à bouger dans ce dossier. Et, pour une fois qu'elle a bougé, M. le Président, elle a présenté un projet de loi qui n'apporte pas de bonnes nouvelles pour les étudiants. Mais les étudiants ne se laisseront pas faire. La ministre sait ça parce que, la dernière fois qu'elle a tenté justement de leur imposer des choses, ils l'ont fait reculer, et ils le savent. La mobilisation des étudiants est à la veille de se faire parce que les étudiants en ont soupé du régime de prêts et bourses qui est en vigueur actuellement. Le projet de loi n° 170 n'apporte donc pas de solution aux problèmes des étudiants, qui sont d'ailleurs en droit de s'attendre de ce gouvernement à ce qu'il apporte des solutions concrètes aux dédales kafkaïens dans lesquels naviguent les étudiants lorsqu'ils décident de s'adresser au ministère de l'Éducation pour des prêts et bourses.

M. le Président, j'inviterais mes collègues les députés de l'autre côté de la Chambre qui douteraient peut-être des propos que je tiens à faire cet exercice, à suivre un étudiant ou une étudiante de leur comté dans les dédales de la bureaucratie du ministère de l'Éducation. D'abord, s'ils peuvent au moins avoir accès à un fonctionnaire pour lui parler directement et non pas tomber constamment sur un répondeur téléphonique, ça va être déjà beau. On pourra déjà expliquer la situation et avoir peut-être des réponses. Ça n'a pas d'allure, il faut que le problème du régime des prêts et bourses trouve une solution et que la ministre de l'Éducation prenne ses responsabilités.

D'ailleurs, à titre d'exemple, M. le Président, l'article 3, entre autres, de ce projet de loi a pour effet de diminuer le prêt des étudiants issus des familles moyennes ou modestes. C'est encore la classe moyenne qui paie; la vache à lait du gouvernement. Même la classe moyenne est en train de s'appauvrir avec ce gouvernement. C'est très déplorable.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de La Pinière. Nous céderons maintenant la parole au député d'Argenteuil. Alors, M. le député.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci, M. le Président. J'aimerais d'entrée de jeu rassurer la députée de Prévost, que l'expression «la tête à Papineau» n'est pas péjorative dans le sens où elle est employée, bien au contraire. C'est un compliment, puisque Papineau était un homme respecté pour avoir un grand jugement et de grandes connaissances. Alors, ce n'est pas utilisé par la députée de La Pinière avec un élément péjoratif, bien au contraire. Et, si j'étais à votre place, je le prendrais comme un compliment, madame.

Ceci dit, M. le Président, on parle de choses à l'occasion qu'il eut mieux valu qu'elles ne soient pas nées. Bien, le projet de loi n° 170, tel qu'il nous est présenté par la ministre de l'Éducation, est un de ceux-là. Il eut mieux valu qu'il ne soit pas né.

On pourrait élaborer longuement sur la valeur de notre jeunesse, de la relève, de l'avenir. Alors, vous comprendrez, M. le Président, quand on veut fonder un pays, et tout ce qu'il a pour mettre la base qui est notre jeunesse et qu'on prend tous les moyens pour la désarmer devant ce qui lui est le plus utile, c'est-à-dire d'aller chercher les outils pour préparer, fonder tout son avenir et mettre en place tout ce qu'elle recherche, qu'on lui enlève tous les moyens pour le faire, bien, il n'y pas de moyen plus simple, plus banal pour s'assurer que l'édifice va s'écrouler. Je pense que je n'ai pas à m'étendre longuement sur l'importance de la relève, l'importance de l'éducation, de la formation, et pourtant il me semble que je devrais parler longuement pour essayer de les convaincre du bien-fondé de l'éducation.

Tout ce que nous retrouvons dans ce projet de loi, M. le Président, en grande partie, ce sont des éléments négatifs. Des éléments négatifs, parce que, à chaque endroit, ou pratiquement, la ministre a coupé. Elle a coupé partout. Et dans la situation dans laquelle on vit aujourd'hui, où 55 % des gens sont des travailleurs autonomes, des gens qui vont se débrouiller par eux-mêmes, qui doivent aller chercher toute leur formation pour s'introduire sur le marché du travail, mais par leurs propres moyens, avec leurs propres outils, tout ce que la ministre a trouvé, c'est de leur enlever, justement, cette capacité d'aller chercher ces outils.

M. le Président, je suis personnellement un exemple vivant du fonctionnement des prêts et bourses. On peut reculer longtemps dans le temps. Si on recule aux années soixante, j'ai heureusement pu bénéficier des prêts et bourses du temps; le Prêt d'honneur, qui avait été mis sur pied par la Société Saint-Jean-Baptiste et qui, heureusement, a été remis sur pied, revigoré récemment. Et on avait aussi les bourses et les prêts du gouvernement. À ma grande surprise, à un moment donné, lorsque j'étais à mes études à l'extérieur du pays, je reçois une lettre du gouvernement me demandant le remboursement de mon prêt, alors que ça prenait tout pour être capable de boucler mon budget et d'arriver à nourrir les enfants que nous avions. Nous avions deux enfants à ce moment-là et j'arrivais à peine à payer le loyer et à nourrir les enfants et mon épouse. J'ai écrit au ministère du Revenu, et j'ai reçu une lettre me disant: Bien, quand vous aurez terminé vos études, que vous serez dans la capacité de nous rembourser, vous le ferez. Je vous parle de ça, dans les années soixante, début soixante-dix, M. le Président.

(20 h 40)

Quel progrès on fait aujourd'hui? La ministre a dit: Non seulement vous ne m'enverrez pas de lettre puis je ne vous répondrai pas, vous allez payer. Mais on n'a même pas pensé à mettre en place la demande la plus importante des étudiants, c'est-à-dire un remboursement proportionnel au revenu. On n'a même pas pensé à ça, M. le Président. On n'a même pas mis en place la recommandation, probablement la recommandation la plus importante dans le rapport Montmarquette, qui était de mettre en place le remboursement proportionnel au revenu.

En fait, M. le Président, je me demande pourquoi deux commissions, ou deux comités, le comité MacDonald, qui était le comité de l'ex-ministre de l'Éducation du temps, le député de Lévis, qui, lui, a remis un rapport, puis finalement la nouvelle ministre de l'Éducation a mis un autre comité, Montmarquette, qui, lui, a accouché d'un autre rapport qui est resté sur les tablettes parce qu'on n'a pas mis en place les recommandations, ou plusieurs des recommandations de ce rapport.

Alors, M. le Président, quand je vois, moi, que, fin soixante, début soixante-dix, déjà je bénéficiais de la compréhension du gouvernement pour le remboursement d'un prêt, puis qu'aujourd'hui, alors que les besoins sont encore plus grands, qu'on devrait avoir encore plus de compréhension pour les jeunes qui veulent étudier parce que c'est notre avenir qu'on met en place et nos assises, nos fondations, puis aucune compréhension de la part de la ministre, M. le Président, c'est inquiétant, c'est très inquiétant.

Lorsqu'on lit le projet de loi, M. le Président, on voit que la ministre a coupé partout. Elle a diminué le nombre de semestres presque à chaque niveau. Je ne peux pas vous dire, M. le Président, ce qui arrive avec tous les enfants. Je peux juste donner en exemple les miens. J'ai deux enfants, j'en ai cinq, mais j'en ai deux en particulier qui ont dû prolonger leurs études. Bon. Pourquoi prolonger les études? Je n'ai pas à répondre pour eux, mais il y a une chose qui m'est apparue évidente, c'est que le choix qu'ils avaient fait, à l'âge qu'ils avaient, n'apparaissait pas, à eux, à la fin de leurs études, après leur bac, être le bon choix. Alors, ils ont continué dans un autre champ d'activité pour essayer d'aller chercher le bac qui leur convenait. Mais, si on se fie à la loi que la ministre veut nous imposer aujourd'hui, veut nous passer aujourd'hui, bien, mes deux enfants n'auraient pas eu accès à des bourses, à des prêts. Heureusement, M. le Président, j'ai été bien pourvu pour être capable de les supporter. Ce n'est pas le cas de la majorité de la population. Et on ne doit pas non plus regarder un petit nombre de la population, on doit regarder l'ensemble de la population, la grande majorité de la population, qui a des besoins importants, et la ministre en fait fi.

Pourquoi les jeunes ont de la difficulté à se décider? Bien des raisons, M. le Président. Une, d'abord, c'est parce qu'on les a obligés, avec toute la modification du programme scolaire, à faire des choix beaucoup plus précocement. C'est une raison. Et l'autre, M. le Président, c'est qu'à un moment donné ils s'en vont dans un champ d'activité puis, en chemin, ils se rendent compte: Mais là je n'ai plus de sortie, il n'y a plus de possibilités de travail. Alors, ils sont obligés de se réorienter ailleurs, mais ils ont déjà commencé. Alors, ils ne sont pas pour dire: Bien, là c'était un bac, ça me prenait trois ans, j'en ai deux de faits, bien, je vais le finir. Puis, quand ils se rendent au bout, bien là ils disent: Bien, là tu as fait ton nombre de semestres pareil, c'est fini, tu n'en auras plus. Et ça, M. le Président, la ministre aurait dû prévoir que c'est l'évolution de la jeunesse d'aujourd'hui. Combien de jeunes aujourd'hui font deux bacs, pour ne pas dire trois, pour certains?

Alors, ça, je pense que c'est un aspect négatif de sa loi, M. le Président. Il y en a d'autres aussi. Le support des étudiants qui vont à l'étranger. Combien de jeunes Québécois remplis d'enthousiasme, remplis de rêves, M. le Président, qui voient l'avenir en toute beauté, se voient devant cette situation démunis parce qu'ils n'ont pas les moyens d'aller étudier à l'extérieur? La ministre, elle, a dit: Bien, là, écoutez, c'est fini, vos affaires, vos rêves. Nous autres, on veut faire un petit pays ici, tout entouré, un petit cocon, puis on va rester chez nous. Puis ne vous inquiétez pas, ne sortez plus, on va tout avoir ici. On n'a pas besoin d'aller ailleurs. On se souvient de pays qui ont été comme ça pendant 75 ans, et on voit ce que ça a donné, M. le Président.

On ne veut pas fermer les frontières; au contraire, il faut les ouvrir, il faut faire éclater les frontières de sorte que nos enfants puissent aller à l'extérieur, aller chercher la richesse qui existe à l'extérieur pour l'amener chez nous et la partager justement avec les plus jeunes et la leur donner. D'ailleurs, c'est ce qui m'avait motivé à revenir quand je suis allé étudier à l'extérieur, de revenir donner à des plus jeunes que moi ce que j'avais reçu de l'extérieur, d'essayer de leur communiquer des connaissances que j'avais pu acquérir ailleurs. Alors, ça, ça m'apparaît important. Puis la ministre, elle, dit: Bien, écoutez, là, débrouillez-vous, arrangez-vous tout seuls, vous êtes des grands garçons puis des grandes filles, arrangez-vous tout seuls. Alors que c'est peut-être ces gens-là qu'on aurait dû le plus aider parce que ce sont ces gens-là qui vont nous faire progresser, M. le Président, en allant chercher des connaissances que nous n'avons pas. Quand on va étudier à l'extérieur, ce n'est pas pour aller chercher quelque chose qu'on a à l'UQAM ou à l'Université de Montréal ou à l'Université Laval ou je ne sais pas où, à Concordia, c'est parce qu'on va chercher quelque chose qu'on n'a pas chez nous.

Alors, comment veut-on s'améliorer si, à chaque fois que quelqu'un fait une démarche pour aller chercher des connaissances à l'extérieur, on fait tout pour lui nuire ou, en tout cas, ne pas l'aider? Ça m'apparaît un élément très négatif dans le projet de loi, et on ne voit rien là-dessus, M. le Président.

La même chose avec ces 90 crédits... auxquels elle a entaché l'autonomie d'un étudiant. Il y a des facultés qui ne terminent pas leurs cours avant 90 crédits. La médecine, c'en est une faculté dans laquelle, lorsque l'on termine, on a plus que 90 crédits. Alors, il y a des étudiants en médecine qui vont se ramasser au bout, bien, ils n'auront même pas terminé leurs études puis on va leur dire: Là, écoutez, c'est fini, il n'y a plus de prêts pour vous, vous avez fait vos 90 crédits, arrangez-vous. Oui, mais j'ai fini en quatrième année de médecine. Ah! Débrouille-toi. On a juste investi 100 000 $, M. le Président – 80 000 $ à 100 000 $ – pour amener un étudiant en quatrième année de médecine, puis on lui dit: Bien, ta cinquième, débrouille-toi, on ne peut plus t'aider.

Il y a un problème majeur qu'on ne peut pas laisser aller. Il faut absolument que la ministre revienne sur ce projet de loi et mette en place des balises qui vont faire que ces gens-là qui sont dans des facultés particulières – je ne peux pas toutes les nommer, mais il y en a plus qu'une – puissent bénéficier jusqu'à la fin de leurs études d'un système de prêts et bourses qui leur permette de terminer leurs études, comme c'était le cas d'ailleurs avant. C'est pour ça que je dis: Son projet, il aurait été mieux de ne pas venir au monde. Ça fonctionnait avant, puis là ça ne marchera plus, M. le Président.

C'est comme la remise du 25 %. Les gens qui s'en vont au deuxième et au troisième cycles, on met des conditions de réussite, si on veut... Je suis bien d'accord avec ça, mais, ça aussi, c'est une autre demande expresse des étudiants. Quand on s'endette longtemps dans les études, au lieu de les pénaliser, qu'on les aide, qu'on les encourage à poursuivre des études au deuxième puis au troisième cycles puis qu'on leur dise: Si tu réussis, on te donnera un remboursement de ta dette de 25 %. Bien, il me semble que c'est encourageant. On dit: Là, je m'endette, je m'endette, je m'endette, mais je vois une lumière au bout du tunnel; je vais travailler fort, je vais réussir, je vais avoir ma diplomation puis, à ce moment-là, le ministère ou le gouvernement va me donner un remboursement de ma dette de 25 %. Quel encouragement pour un jeune qui veut investir du temps, des efforts, de l'énergie dans ses études pour essayer d'aller ajouter à ses connaissances que de se faire dire: On va te donner 25 % de remboursement de ta dette.

Vous savez, la distribution des prix quand on était jeunes, ce n'était rien, on nous donnait un livre, deux livres, mais mon Dieu qu'on voyait venir ça avec joie, la distribution des prix, parce qu'on avait travaillé fort puis on disait: Aie! Je suis le deuxième de la classe, je ne sais pas ce qu'ils vont me donner comme prix; est-ce que je vais avoir une grosse pile, une petite pile? Pourtant, c'étaient juste des livres. Mais, M. le Président, la nature humaine étant ce qu'elle est, on aime ça, avoir des récompenses. Pourquoi la ministre va les punir en leur disant: Ta dette, paie-la toute? Au lieu de lui dire: Bien, écoute, tu as travaillé fort, tu as oeuvré fort, tu as mis beaucoup d'énergies dans ces démarches-là, dans tes études, on va te récompenser.

Je lisais récemment dans un livre: on passe notre temps à punir les gens qui essaient de réussir. Celui qui veut se sortir de l'aide sociale, M. le Président: Ah! Bien, toi, tu t'en sors, là, on te coupe tout. Au lieu de dire: Bien oui, tu t'en sors, là, on va te donner un bout de sorte que tu vas avoir plus que celui qui travaille au salaire minimum garanti, que celui qui reste sur le BS; on va te donner une récompense. Mon Dieu que ça fait plaisir! C'est humain. C'est humain. Il ne faut pas faire des grandes études, il ne faut pas avoir la tête à Papineau, comme on disait tantôt, pour comprendre la psychologie humaine, qu'on aime ça, des récompenses.

(20 h 50)

Ce n'est pas péjoratif, Mme la députée de Prévost, encore une fois, c'est une fleur que je vous lance. C'est totalement humain, M. le Président, ça fait partie de la psychologie. Il ne faut pas avoir fait d'études bien, bien longues en psychologie pour comprendre qu'on aime ça, des récompenses. Tout le monde, on voit tous venir Noël, puis là tout le monde est là: Je ne sais pas ce que je vais avoir comme cadeau à Noël. Ce n'est pas le cadeau de Noël, on est capables de se l'acheter, le cadeau. C'est l'effet de la surprise, le plaisir de voir que quelqu'un a pensé à nous. Bien, que la ministre pense donc aux jeunes puis aux étudiants qui font des efforts pour aller ajouter à leurs connaissances. Qu'elle prenne cinq secondes – pas cinq minutes, peut-être, cinq secondes – puis elle va se rendre compte qu'avec ses enfants elle a agi comme ça. Sans agir avec la carotte puis le bâton, ça fait du bien de temps en temps d'avoir des carottes, M. le Président. Qu'elle en donne à ces étudiants-là puis qu'elle leur donne une remise de leur dette de 25 %.

Ils vont d'abord lui en être reconnaissants. Ça, c'est la première chose qu'ils vont faire. Ils vont lui être reconnaissants de l'avoir fait. Mais, deuxièmement, ces gens-là vont être stimulés à continuer leurs études puis ils vont les faire. Ils vont s'engager à poursuivre des études parce qu'ils savent que, au lieu de n'ajouter que des dettes puis des dettes à chaque année qu'ils font de plus, bien, ils vont dire: Je vais avoir une remise au bout. Mon Dieu, que c'est humain, M. le Président! C'est tellement humain! Tout ce qu'elle a à faire, c'est de leur offrir qu'à la fin de leur deuxième ou de leur troisième cycle ils aient une remise de leur dette de 25 %.

Vous savez, quand on parlait, tantôt, de rendre les jeunes autonomes puis que, là, on retarde cette autonomie de plus en plus pour les étudiants, il ne faut se surprendre. Pourtant, c'est le même parti qui il n'y a pas si longtemps votait, à un de ses congrès, de mettre le vote à 16 ans. On voulait mettre le vote à 16 ans, M. le Président. On essaie de mettre des jeunes autonomes à 16 ans, mais en même temps on dit aux étudiants: Bien, toi, on te repousse, tu vas être autonome beaucoup plus loin. «Faut-u» avoir peu de conséquences! Qu'on fasse une harmonie entre ce qu'on pense, ce qu'on dit puis ce qu'on fait. Alors, si on pense que des étudiants matures deviennent autonomes encore plus vieux parce qu'ils vont avoir des prêts, bien, on devrait peut-être faire la même chose avec le vote. Puis, si on baisse l'âge du vote, bien, peut-être qu'on devrait baisser les exigences pour les étudiants avant de les rendre autonomes, les mettre un peu plus bas, baisser la barre. La barre, la mettre un peu plus basse de sorte que ces étudiants-là vont avoir l'encouragement approprié pour y aller.

Vous savez, on a connu une belle campagne électorale en 1994. On connaît le résultat, mais il y avait eu toutes sortes de promesses de faites à ce moment-là. Et pourtant, une des promesses, c'était la loi-cadre sur le régime de prêts et bourses, sur le financement des études. Bien, M. le Président, on attend après. Où est-elle, la loi-cadre sur les prêts et bourses et le financement des études? Où est-elle? Après deux rapports qui dorment sur les tablettes, après des coupures dans tout ce qu'elle nous propose dans son projet de loi n° 170, où est-elle, cette loi-cadre qui va faire que les étudiants vont avoir un sentiment d'encouragement à poursuivre des études, à poursuivre des études au deuxième et au troisième cycles, à aller chercher des connaissances additionnelles à l'extérieur du pays?

Puis on ne se rapetisse pas en supportant quelqu'un à aller chercher les connaissances à l'extérieur du pays; au contraire, on se grandit, on ajoute à notre patrimoine de connaissances qui va être transmis à nos enfants, parce que ces personnes-là qui reviennent, qui viennent faire de l'enseignement... Je le sais, M. le Président, je peux vous décrire ça dans le détail, je l'ai vécu. Je l'ai fait moi-même, j'ai été chercher des connaissances à l'extérieur que j'ai retransmises à des jeunes étudiants qui venaient avec moi. Je leur montrais comment faire telle opération, je leur montrais comment fonctionner en physiologie. Parce que j'avais acquis ces connaissances à l'extérieur, je pouvais me permettre de les leur redonner, de les leur retransmettre. Ça faisait partie, à ce moment-là, de mon patrimoine de connaissances que j'ai essayé de transmettre à d'autres.

C'est ça qu'on demande à la ministre, de regarder tous ces aspects-là et de modifier son projet de loi de sorte que, au lieu d'accoucher, comme disait le député de Verdun, notre critique en fait d'études universitaires, d'un souriceau... C'est tout petit, un souriceau, hein? Je ne sais pas si vous avez déjà vu ça. C'est une petite souris, M. le Président. Ce n'est pas gros, je vous le dis. C'est de ça qu'elle a accouché, puis à peine. Alors, la ministre, je suis sûr qu'elle est capable de bien plus grandes choses que ça, qu'elle est capable, à la réflexion, avec ce qu'on lui connaît comme capacités intellectuelles, d'améliorer son projet de loi de sorte qu'il va répondre aux exigences et aux demandes – les exigences des étudiants, c'est un peu fort – mais aux demandes des étudiants, et surtout répondre à leurs besoins de sorte qu'on puisse, dans l'avenir, regarder avec eux et avoir bâti avec eux les assises qui feront que le Québec continuera à progresser et à devenir ce que l'on souhaite tous pour notre terre: un pays d'avenir, un pays de grandeur, un pays de connaissances qu'on sera allé chercher ou dans nos universités ou dans les universités étrangères. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Argenteuil. Nous allons maintenant céder la parole au député de Kamouraska-Témiscouata. Alors, M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Suite à mes collègues, j'interviens à mon tour sur le projet de loi n° 170, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants – j'ai bien aimé l'expression de mon collègue d'Argenteuil – qu'on peut surnommer la loi de la petite souris, ou le souriceau.

Vous savez, M. le Président, la question de l'aide financière aux étudiants est une question beaucoup plus complexe et beaucoup plus large que de simplement la ramener à une question de frais de scolarité. Je pense qu'il faut la regarder dans l'ensemble de la problématique de l'éducation et de notre système d'éducation.

Moi, pour arriver à ce projet de loi là, on va commencer par parler un petit peu des coupures qu'on observe présentement dans le réseau de l'éducation et des cégeps. La commande qui est passée, de près de 80 000 000 $, ce que ça implique, ça, M. le Président – puis les gens vont dire: Bon, quelle est la pertinence avec la Loi sur l'aide financière aux étudiants – c'est que, directement, en quelque part, c'est les étudiants qui font aussi les frais de ces coupures-là.

C'est un petit peu dommage. Vous savez, il y a quelques semaines, j'ai déposé une motion sur les jeunes, sur l'absence de politique jeunesse, l'absence de volonté politique de travailler pour les jeunes, de travailler à préparer l'avenir de ces gens qui forment le futur de notre société, et je me retrouve ici aujourd'hui à devoir dénoncer de nouveau, plus que d'en parler, le manque de vision de ce gouvernement-là en ce qui a trait aux jeunes.

Si on regarde les coupures qui sont faites au niveau des cégeps, M. le Président, force est de constater que la marge de manoeuvre n'existe plus. Présentement, je pense, les institutions d'enseignement collégial sont au pied du mur, et la question qu'ils se demandent face aux nouvelles coupures: C'est quoi, notre marge de manoeuvre? Il n'y en a pas, de marge de manoeuvre. On sait qu'elles sont financées à 88 % environ par l'État. On n'a aucune place pour faire quelque amélioration que ce soit. Après avoir, au cours des deux dernières années, réduit les services aux étudiants et fait en sorte que, même si, au niveau collégial, il n'y a pas de frais de scolarité, on a atteint le maximum des frais afférents. Donc, on ne peut pas aller plus loin, puis c'est les étudiants qui paient plus. Bien, présentement, la question que les dirigeants des cégeps se posent, c'est de savoir... Ils ont déjà dit qu'ils ne chauffaient plus les établissements les fins de semaine parce qu'ils n'en ont plus les moyens. Bien, là, on en est à se demander: Est-ce qu'on ne pourrait pas couper le chauffage une journée dans la semaine aussi pour réussir à atteindre ces objectifs-là? Parce qu'il n'y a plus de marge de manoeuvre.

À partir du moment, M. le Président, où on ne développe plus nos institutions d'enseignement collégial, nos institutions d'enseignement universitaire, à partir du moment où on coupe sans arrêt, bien, force est d'avouer et force est d'admettre que c'est le développement même du réseau qui est remis en question. C'est le développement même du réseau qui fait en sorte que, à partir du moment où on n'avance plus, on recule, dans ces matières-là. Et le retard qu'on prend jour après jour, semaine après semaine parce qu'il y a une absence de volonté, une absence de cohésion de ce gouvernement-là, bien, c'est nos concurrents qui en profitent, et l'impact économique que ça a... Il y a le président de la Fédération des cégeps, hier, qui faisait une tournée dans le Bas-Saint-Laurent, et le bilan, c'était carrément que les cégeps de l'Est du Québec n'en peuvent plus. C'est carrément au-delà de 7 000 000 $ qui vont être de nouveau exigés en coupures, et ces gens-là n'ont plus de marge de manoeuvre.

Il faut regarder quelle est la vocation et quel est l'impact d'un cégep en région. L'impact d'un cégep en région, premièrement, au niveau économique... C'est certain que ces maisons d'enseignement là ont un impact direct, M. le Président, sur la vie économique du milieu. Ça permet d'avoir des enseignants, ça permet d'avoir des étudiants qui dépensent, qui ont un impact économique dans la ville où ils sont. Ça permet à des gens de louer des logements, de louer des chambres. Donc, ça permet une certaine vie économique. Et c'est fondamental, l'institution comme telle, dans une région. Il faut qu'elle soit en santé.

(21 heures)

Deuxième élément. Nous savons tous que, dans les nouveaux facteurs qui font en sorte qu'on est capables d'attirer des entreprises en région, c'est, au-delà de répondre aux questions sur la réglementation, sur le climat politique – en passant, sur lequel on n'a pas nécessairement d'avantages comparatifs avec nos voisins – de répondre à des questions sur la langue, sur tout le climat général qui entoure les entreprises, la question fondamentale que se posent les entreprises quand elles viennent s'installer en région, c'est: Est-ce qu'on va pouvoir compter sur une main-d'oeuvre qui est bien formée et qui va être capable de relever les défis qu'on a à lui proposer?

Force est d'admettre, M. le Président, quand on coupe dans les transferts aux cégeps, on enlève de cette marge de manoeuvre là et de cette capacité-là qu'ont les institutions d'enseignement de s'ajuster aux besoins des entreprises. C'est une roue qui tourne. Si les cégeps sont vraiment capables de se développer, bien ils attirent plus d'étudiants et, si on permet aux étudiants d'avoir accès aux études supérieures en ne leur tapant pas trop sur la tête au niveau des prêts et bourses et des politiques d'aide financière, bien ils sont capables d'être là en plus grand nombre, ils participent au développement de la région, et c'est ça qui nous permet d'attirer des nouvelles entreprises. Et, si on est capable de faire tourner la roue, ces entreprises-là participent au développement de l'institution d'enseignement et engagent des jeunes. Donc, c'est une roue qui tourne.

On semble, du côté du gouvernement, présentement vouloir tout faire pour mettre des bâtons dans les roues de ces gens-là. On semble vouloir absolument empêcher cette roue-là de tourner. C'est dommage de voir, M. le Président, que notre réseau collégial est remis en question à ce point à un moment où on a si besoin de ces ressources-là et on a si besoin d'avoir le plus grand nombre de jeunes possible qui sont inscrits et qui participent à des études au niveau collégial.

Vous savez, M. le Président, il y a toujours une question là, je ne sais pas, d'avoir l'institution d'enseignement, mais il faut aussi avoir cette nécessaire accessibilité. Le mot «accessibilité», je pense que c'est le mot qu'on doit tous avoir en tête lorsqu'on parle de l'aide financière aux étudiants. On peut parler de différents niveaux de frais de scolarité, on peut parler de différentes façons de donner des cours, on peut parler de toutes sortes de choses, mais l'élément crucial qu'il faut toujours avoir en tête, c'est l'accessibilité. C'est-à-dire que chaque fois qu'un gouvernement touche que ce soit à l'aide aux étudiants, que ce soit à la présence des cégeps en région, la vitalité de nos universités, la question qu'on doit se poser: Est-ce qu'on permet à plus ou à moins d'étudiants d'avoir accès à ces études-là? Ce n'est pas juste une question d'où est-ce qu'on se situe par rapport à la moyenne canadienne, est-ce qu'on est bien en arrière de Harvard, où est-ce qu'on se... Non. Je pense qu'au Québec, depuis 30 ans, notre système d'éducation a toujours été basé là-dessus. Je pense qu'il faut continuer là-dessus: Est-ce qu'on a un système qui permet l'accessibilité aux études supérieures?

Plusieurs de mes collègues l'ont dit, je vais vous le dire à nouveau, notre parti présentement est en train de faire une tournée des institutions scolaires, une tournée qui nous mène dans tous les coins du Québec, toutes les institutions. Je vous dirais qu'hier je rencontrais une association étudiante et les gens me disaient dans leurs revendications, dans la liste de leurs revendications au niveau collégial: Il faut la gratuité scolaire au niveau des cégeps. Je leur ai dit: Bien, voyons, il me semble que c'est là présentement, la gratuité scolaire est là. Ils disent: Comment peut-on prétendre parler de gratuité scolaire quand nos frais afférents ont triplé, et même plus dans certains cas, depuis trois ans, quand les services d'encadrement au niveau collégial ont été diminués, je dirais, par obligation, quand la tâche des professeurs...

On semble souvent penser que dans un cégep tu as des étudiants puis tu as une direction. Il y a aussi des professeurs, il y a aussi des gens qui sont là pour donner les cours et pour, je dirais, améliorer la formation de nos étudiants. Bien, ces gens-là n'ont plus de marge de manoeuvre parce qu'ils se retrouvent souvent dans une tâche double parfois même dans une tâche triple. Donc, il y a moins de gens à ce niveau-là.

Ils me parlaient aussi: Comment peut-on parler de gratuité scolaire quand le personnel d'encadrement, c'est-à-dire les orienteurs, les aides pédagogiques, il n'y en a presque plus? On est obligé de les couper, parce que, veux veux pas, quand il faut que tu fasses des coupures, après avoir coupé le chauffage puis dégraissé partout là, tu as passé aussi par ces étapes-là... Mais ces gens-là, les étudiants me disent: Ce n'est pas vrai que c'est gratuit parce que, même si on ne paie pas de frais de scolarité, on en a. On paie quand même des frais afférents qui sont élevés, on paie des volumes qui nous coûtent cher et, en plus, on a moins de services. On a de moins en moins de services. Donc, si tu paies la même chose puis si t'as moins de services, c'est l'équivalent d'avoir des frais de scolarité ou de les augmenter, M. le Président, et c'est là que les étudiants en sont dans leurs revendications. Et je vous dirais, en passant, qu'ils me surprennent et me rassurent en ce qui a trait à la responsabilité des revendications.

Je pense que les étudiants sont tous conscients, comme la population du Québec au complet est consciente, qu'on ne peut pas tout avoir gratuitement. Mais les étudiants sont conscients aussi d'une chose, c'est qu'il y a des modèles et des choses à proposer. Ils nous disent souvent: On a l'impression que le gouvernement actuel, le gouvernement péquiste, regarde les choses par compartiments. Il ne fait pas de liens dans l'ensemble de la problématique de l'éducation. On parle du développement des programmes, on parle de toutes sortes de choses, mais il ne semble pas y avoir de vision horizontale de toute cette question-là de l'enseignement, autant au niveau secondaire, autant au niveau collégial, autant au niveau universitaire.

Ils disent: Pourtant, les gens se souviennent, et moi-même, en 1994, on avait participé à ces travaux-là. Le gouvernement libéral de l'époque avait mis en place une table de concertation, au niveau de l'enseignement postsecondaire, qui regroupait des associations étudiantes, qui regroupait les gens des partis politiques. Il y avait des gens du Parti québécois qui siégeaient là-dessus aussi, les jeunes, pour que, à toutes les fois qu'il y avait une question qui touchait l'éducation, on en parle à cette table-là. On demandait l'avis de ces jeunes-là et on regardait un petit peu pour voir si nos politiques correspondaient ou pas aux attentes des étudiants. Ça a marché de janvier à septembre 1994. Malheureusement, on a perdu l'élection. Et il faut se rappeler un petit peu les promesses qu'a faites le Parti québécois lors de la campagne électorale de 1994: une loi-cadre sur l'aide financière aux étudiants et sur les frais de scolarité. M. le Président, si la loi-cadre est ce que j'ai entre les mains aujourd'hui, je vais vous dire une chose: ça ne fait pas un gros, gros portrait. Le cadre n'est pas très gros. C'est un peu mince comme cadre.

On parlait ensuite de l'instauration d'un mécanisme formel de consultations et de discussions publiques avant que le régime puisse être modifié. Je vais vous dire une chose: à entendre les représentants des associations étudiantes, là, le mécanisme formel de consultations, ce n'est pas ce qu'il y a de plus évident à trouver. Je pense qu'il y a en a qui cherchent encore le numéro de téléphone pour consulter, parce que ces gens-là le disent, les jeunes le disent, ils ne sont pas consultés. Ils disent: Pourtant, on est une partie importante de ce réseau-là, autant que les professeurs puis autant que les directions, mais chacun des niveaux, autant les étudiants, les professeurs, les corps professionnels que la direction des établissements, n'est pas consulté. Je pense que la ministre a l'impression de posséder la raison, et de vouloir absolument s'en aller par là avec ça, et de faire en sorte que ce soit sa vision à elle de l'éducation qui prime au détriment de ce que pensent tous les jeunes qui sont impliqués là-dedans et qui sont responsables dans leur implication depuis des années, M. le Président.

Une autre promesse, l'implantation d'un régime de remboursement proportionnel aux revenus. Je vais vous dire une chose, M. le Président: on attend tous après ça. Le Parti libéral du Québec le propose, on veut aller de l'avant. Notre Commission-Jeunesse est d'accord avec ça, les jeunes qu'on rencontre adhèrent à cette idée-là. Il me semble que, si la ministre avait voulu se connecter un petit peu sur ce que les jeunes pensent, sur ce que les jeunes veulent à ce niveau-là... C'est responsable, là. On ne demande pas d'avoir des bourses, puis des prêts épouvantables, puis d'avoir une gratuité totale mur à mur au cégep puis à l'université. Non. Ce qu'ils demandent, c'est un remboursement proportionnel aux revenus, que le Parti québécois avait promis. Il n'y en a pas. Il n'y en a pas!

Au lieu de ça, M. le Président, on recule dans le projet de loi n° 170, on retourne en arrière. Je vais vous en reparler, mais c'est assez déplorable. Puis, malgré tout ça, après l'élection, bon, bien, étant donné qu'on ne pouvait pas remplir nos promesses immédiatement, on s'est dit: Bien, le petit truc de la consultation, ça nous permet toujours d'acheter un six mois, neuf mois, là, puis de garder une certaine marge de manoeuvre, de prendre notre souffle, puis, dans ce temps-là, bien, on paraît bouger un peu. Tu sais, on fait quelques assemblées, quelques shows, puis tout le monde mange des biscuits, boit du café, puis c'est bien le fun.

(21 h 10)

Il y a eu toutes sortes de consultations, mais ça n'a rien donné. Ça n'a rien donné de concret, et je vous dirais même, M. le Président, que, malgré ces engagements-là, malgré ces consultations, on se souvient tous du projet de loi n° 85, en décembre 1996, qui bâillonnait l'opposition officielle et qui amenait des changements, encore une fois, à la pièce, qui restreignait l'admissibilité de l'aide financière, notamment... Juste quelques points qu'on peut ressortir de ce projet de loi là de l'an passé dans l'ensemble de la problématique de l'aide financière aux étudiants. Ce que ça amenait l'an passé, c'est une diminution du nombre de semestres admissibles pour l'étudiant en ce qui a trait à l'aide financière; restriction de l'accessibilité à l'aide financière pour les étudiants québécois désirant poursuivre des études à l'extérieur du Québec; abolition du critère d'autonomie après l'obtention de 90 crédits universitaires dans un même programme, sans clause grand-père; abolition du Programme de remise de dette pour les étudiants de deuxième, troisième cycles, sans clause grand-père; uniformisation des frais admissibles pour matériel didactique; diminution des frais de garde remboursables; abolition des frais de déplacement de certains stages; non-indexation des dépenses admises.

Ça, c'était l'an passé, M. le Président, après avoir consulté. Moi, je ne suis pas sûr que les gens qui ont été consultés, c'est vraiment ça qu'ils leur ont demandé de faire et que c'est vraiment ça qu'ils leur ont dit de faire. Est-ce qu'il y a d'autres consultations qui ont été faites et qu'on ne connaît pas? Peut-être, sauf que, quand on voit ces choses-là, on n'a pas l'impression que l'éducation, au Québec, avance et qu'on est à l'écoute des étudiants, des professeurs, des corps professionnels et des directions.

Donc, même l'an passé, en bâillonnant l'opposition sur ces points-là, on se rend compte que ce parti-là n'a pas respecté l'essentiel de ses engagements. C'est dur à prendre. Et je suis certain qu'il y a de mes collègues du gouvernement qui sont là et qui se disent: On aurait peut-être pu faire mieux. Mais, moi, je vais vous dire une chose: Ça aurait été dur de faire pire, M. le Président, dans ce domaine-là. Parce qu'ils sont complètement passés à côté de la track de tout ce qui est demandé. On se demande sur quoi ils comptent, sur quelle sorte d'experts ils comptent. Est-ce qu'ils vont voir les gens? Est-ce qu'ils descendent sur le terrain pour voir ce qui se passe? On n'a pas l'impression qu'ils le font, mais vraiment pas du tout.

Pourtant, tous se souviennent de l'engagement solennel du premier ministre, encore une fois, la main sur le coeur, presque les larmes aux yeux, qui disait que ce gouvernement-là serait un gouvernement de l'éducation. M. le Président, on peut se demander ce que ça serait s'il n'avait pas dit ça. Ça serait épouvantable! Ça serait épouvantable! Malgré qu'il ait dit ça, on est à ce point tel où c'est l'ensemble de notre réseau, c'est l'ensemble du réseau collégial qui est remis en question, c'est l'accessibilité aux études qui est remise en question. Moi, je dirais qu'au niveau de l'éducation c'est le pire gouvernement des 30 dernières années en ce qui a trait aux questions de l'éducation. Mais, pourtant, tous savent que l'éducation, c'est la base de notre avenir. Tout le monde le sait, ça.

En ce qui a trait, M. le Président... Si on regarde quelques statistiques sur l'aide financière, depuis peu de temps, la dette moyenne a augmenté, les recours au Programme de remboursement différé ont augmenté aussi, le nombre de faillites comprenant des dettes d'études a quadruplé. Donc, qu'on ne vienne pas nous faire accroire que les étudiants sont plus riches et que ça va mieux. Ce n'est pas vrai. Mais, malgré ça, on continue de leur taper sur la tête. On dit: Vous allez en payer encore plus. On parlait de citron, je me souviens, moi, qu'on parlait de citron de l'autre côté, M. le Président. Il vient, à un moment donné, le citron, quand il n'y en a plus, de jus, tu as beau le presser, il n'y a plus rien qui coule.

C'est là qu'on en est présentement. Et, au lieu d'apporter un remède à ça, encore une fois, malgré toutes les consultations qui ont été faites, l'actuel projet de loi vient nous dire que, entre autres, la fameuse période d'exemption de remboursement – six mois après les études, tu as fini tes études, six mois après, tu commençais à rembourser; ça, c'est loin, c'est à des années-lumière du remboursement proportionnel au revenu – bien, M. le Président, vous ne le croirez peut-être pas, mais ils veulent l'abolir avec ça. Aussitôt que tu finis tes études, tu vas commencer à travailler. Que t'aies un emploi, que tu n'en aies pas, ce n'est pas grave, tu vas payer. C'est ça qu'ils disent là-dedans aux jeunes: Peu importe que t'aies une job ou que tu n'en aies pas, tu vas payer.

Programme de remise de dette, même chose. Il n'y a rien là-dedans qui amène quoi que ce soit de nouveau. D'assouplir ça, le remboursement proportionnel au revenu, je pense que tout le monde, le Parti libéral du Québec est d'accord avec ça, les étudiants sont d'accord avec ça. Mais, au lieu de s'en aller par là, on a l'impression que la ministre et que le gouvernement s'en vont carrément de l'autre côté. C'est comme quelqu'un qui voudrait passer par Montréal pour aller en Gaspésie. Le détour est un peu long. Tu as beau vouloir y aller, mais, à un moment donné, ça peut te coûter un peu plus cher de gaz que prévu. Bien, c'est un peu ça que ça fait, présentement.

Et vous me permettrez, M. le Président, un dernier point. Le Programme de remise de dette qui est un incitatif pour les étudiants à terminer leurs études à temps, bien, il a été aboli. Ça, c'est certain, je veux dire, ça, ça a été aboli. Et, présentement, on arrive avec l'idée, peut-être, de programme de remise de dettes. On exclut le troisième cycle. On dit: C'est peut-être 10 %. Puis on dit que c'est par règlement. Donc, on le tasse de la loi, on dit : On verra. Moi, en terminant, le message que je veux lancer là-dessus au gouvernement, c'est: l'éducation, c'est sérieux; l'éducation, c'est primordial. Ça devrait être la priorité numéro un de ce gouvernement-là. Au lieu d'avancer, on recule. Je pense que c'est très inquiétant pour notre avenir; c'est inquiétant pour les jeunes; c'est inquiétant pour l'avenir du Québec; et c'est inquiétant pour notre compétitivité. Je peux vous garantir qu'on va voter contre ce projet de loi là. Je vais me joindre à mes collègues là-dessus pour y faire obstruction et pour dire carrément à la ministre que, si elle n'est pas capable de le régler, le problème, je peux vous garantir que, d'ici peu de temps, il y a des ministres qui sont actuellement dans l'opposition, des ministres potentiels qui veulent le régler, le problème, et qui vont le régler, le problème.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du projet de loi n° 170? Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe. Alors, M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: M. le Président, tout à l'heure, je dois vous dire que j'ai eu comme un cadeau, un cadeau de la part du député d'Argenteuil. Je ne sais pas si vous le regardiez quand, à la fin de son discours, il s'est mis à parler du pays du Québec. Si vous aviez vu la lumière dans ses yeux, c'était vraiment extraordinaire. Alors, je me suis dit: Serait-il donc possible qu'il ait compris?

Une voix: Non.

M. Dion: Mais oui, c'est possible, M. le Président. Il ne faut jamais désespérer. Il ne faut jamais désespérer parce que c'est un homme brillant, et puis c'est un homme attaché au Québec. Et il est possible qu'il ait compris. Imaginez pour le député de Kamouraska-Témiscouata, qui est un jeune homme. Pensez qu'un jour il sera peut-être un ministre dans ce pays du Québec pour que lui et les autres jeunes comme lui puissent vivre fièrement, fiers de leur identité, puissent bâtir leur pays, puissent le contrôler sans avoir à demander de permission à personne. N'est-ce pas un beau défi à relever pour un jeune comme le député de Kamouraska-Témiscouata?

Des voix: Bravo!

M. Dion: M. le Président, j'ai passé par toutes les émotions ce soir, parce que, vous savez, la question des prêts et bourses, des prêts étudiants, c'est une question très délicate, difficile aussi. Pourquoi c'est délicat? Parce que ça touche nos jeunes. Cela touche ceux qui comptent le plus pour nous. Ceux qui prendront le relais très bientôt, comme le député de Kamouraska-Témiscouata tente déjà de le faire. Et c'est tout à son honneur. Et donc, penser à nos jeunes, c'est penser à ce qui est le plus important pour nous, c'est penser à ceux que nous voulons libres et fiers, capables d'agir sans avoir à se préoccuper d'aucun colonialisme mais en toute liberté pour bâtir leur pays, pour bâtir leur avenir.

(21 h 20)

Nous avons eu, ce soir, M. le Président, une petite fête. Je me permettrai de le raconter, parce que je trouve que c'est tellement important ce qui s'est passé. C'est un message qui va droit au coeur que j'ai reçu. Une petite fête intime pour fêter la maîtrise d'une de nos collègues, la députée de Matapédia. Et, à cette occasion-là, j'ai pu entendre un de mes collègues qui disait avec beaucoup d'émotion: C'est important, ce qui se passe ici. C'est important que nous nous rendions compte à quel point il faut faire en sorte que nos jeunes puissent être en mesure de faire les études qu'ils souhaitent faire au niveau universitaire. Et j'ajoute, moi: au niveau professionnel. Qu'ils puissent aller au bout de leurs rêves, réaliser leurs rêves et être des gens actifs et dynamiques dans la société québécoise. C'était vraiment émouvant d'entendre ça de la part d'un collègue député qui a des enfants, qui les a vu grandir, qui les a conduits le plus loin possible et qui maintenant les regarde évoluer dans la vie avec fierté. Alors, pour moi aussi, c'est important. J'ai des enfants qui sont d'âge collégial et universitaire, des enfants qui ont connu ce que c'est que d'étudier au collège, que de travailler un petit peu la fin de semaine pour se faire un peu d'argent, que d'aller à l'université, que d'avoir à payer son logement. Donc, des jeunes qui sont dans la vraie vie, et je suis en mesure de comprendre, je crois, ce que vivent nos jeunes étudiants.

Ce que vise l'actuelle loi sur les prêts étudiants, eh bien, c'est très simple, M. le Président, elle vise deux choses indispensables. Elle vise premièrement: donner à tous nos jeunes l'égalité des chances, l'égalité des chances pour pouvoir poursuivre des études professionnelles, des études collégiales, des études universitaires et d'aller au bout de leurs rêves. C'est le premier objectif, mais il y a aussi un deuxième objectif à cette loi-là, c'est développer, comme doit le faire tout véritable éducateur, tout parent responsable et désireux de voir leurs jeunes progresser dans la vie, l'esprit de responsabilité, le sens des responsabilités face à sa propre vie et face à l'avenir.

J'ai ici quelque chose. On nous accusait tout à l'heure de ne pas avoir réalisé tous nos engagements face aux étudiants. Eh bien, probablement qu'il y a quelque chose de vrai là-dedans. On n'a pas réalisé tous les engagements parce que, imaginez-vous, quand on arrive au pouvoir et qu'on se rend compte que le déficit du Québec est rendu à quelque chose comme 6 000 000 000 $, et que c'est un déficit qui s'accumule d'année en année, qu'en neuf ans de pouvoir le Parti libéral a plus que doublé la dette du Québec la portant jusqu'à 75 000 000 000 $, et qu'on pense – parce qu'il faut y penser, M. le Président – que cette dette-là risque de porter lourdement sur les épaules de nos enfants, de ces jeunes qui sont aujourd'hui à l'université et de ceux qui viendront après, alors il faut marquer un cran d'arrêt à cet endettement progressif, à cet endettement qui n'arrête pas. Il faut arrêter la machine et faire preuve de responsabilité.

Et cette responsabilité dont nous avons fait preuve, elle fait partie du message que nous lançons à nos enfants. C'est vrai qu'on leur demande des sacrifices, mais nous les faisons les premiers. Pourquoi? Parce que nous sommes responsables et que nous voulons non seulement leur donner la possibilité d'avoir une formation universitaire et professionnelle, nous voulons pouvoir leur permettre de développer leurs rêves dans un avenir progressif, dans un avenir prospère, et, pour cela, il est important de ne pas trop leur laisser un endettement trop élevé.

Alors, voilà pourquoi on n'a peut-être pas pu réaliser absolument tous les détails de nos engagements, mais nous avons réalisé la plus grande partie et les plus importants. Or, donc, M. le Président, pour nous, c'est important que les prêts que le ministère de l'Éducation accorde aux étudiants, ça soit des prêts nécessaires et non pas seulement des prêts qui en soi peuvent être utiles à des étudiants qui n'en ont pas besoin, mais n'en ayant pas besoin peuvent les placer à la banque. Comme ces placements-là produisent des intérêts et que le gouvernement rembourse les intérêts de ces placements-là, alors au bout de trois ans, au bout de cinq ans, au bout de six ans, quand vient le temps de rembourser, s'ils n'en ont pas eu besoin, ils remboursent le prêt sans intérêts et ils gardent les intérêts. Ça, ce n'est pas une histoire inventée, c'est un fait réel.

Je lis, ici: «L'examen de la situation a révélé que le gouvernement rendait admissibles à l'aide des étudiants dont les revenus ou ceux des parents leur permettaient de poursuivre leurs études – donc, des étudiants qui n'en avaient pas besoin. C'est souvent au regard de ce critère que le gouvernement, remettant des prêts et des bourses, permettait à des étudiants d'acheter une voiture et de partir en voyage.» Eh bien, je n'ai rien contre le fait qu'un étudiant achète une voiture. Je suis très heureux quand je vois un jeune homme on une jeune fille partir en voyage, je trouve ça magnifique, mais pas aux frais de l'ensemble de la société. Pourquoi? Parce que les prêts étudiants, M. le Président, ils ne viennent pas uniquement des impôts des gens très riches, ils viennent des impôts aussi des petits gagnants, des gens qui ont des salaires relativement modestes et qui paient sur leur salaire strictement, directement, évidemment leurs impôts. Et c'est avec ça qu'on peut permettre à des étudiants de faire des prêts étudiants et de progresser dans leurs études.

Mais, quand les étudiants n'en ont pas besoin, eh bien, je pense que la société n'a pas à faire ce sacrifice-là, n'a pas à avancer ces fonds-là, puisque l'étudiant a les fonds qu'il faut, puisque sa famille a les fonds qu'il faut. Je pense qu'il faut tenir compte de cette situation-là, et c'est ce dont la loi tient compte. D'autres plaçaient cet argent et remboursaient leurs dettes d'études dès qu'ils avaient obtenu leur diplôme. C'est ce que je vous ai expliqué tout à l'heure, M. le Président. Donc, faire preuve de responsabilité, c'est une chose importante. Quand on veut développer la responsabilité chez nos jeunes, il faut nous-mêmes être responsables, M. le Président, et c'est ce que vise, entre autres, ce projet de loi.

Donc, M. le Président, je me souviens, il y a quelques années, l'aîné de mes enfants avait participé à un échange étudiant et j'avais reçu chez nous un jeune d'un pays européen que je ne nommerai pas et qui était très fier de dire que, dans son pays, chez eux, les étudiants n'avaient pas à travailler, qu'ils ne se salissaient pas les mains, que, eux, tout était payé, ou c'était la famille ou c'était l'État qui payait, mais, eux, ils ne se salissaient pas les mains. Alors, je lui avais expliqué bien simplement que, moi, je croyais qu'on n'avait pas à être fier de cela parce que notre objectif au Québec, ce n'est pas de développer une mentalité élitiste selon laquelle une catégorie de la société doit se salir les mains et l'autre ne le doit pas parce qu'elle serait, je ne sais pas, moi, sortie de la cuisse de Jupiter. Non, M. le Président, ce n'est pas notre objectif, ce n'est pas notre mentalité.

Nous croyons que, dans une certaine mesure, le fait que des étudiants travaillent un peu pendant les vacances pour aider à payer leurs études, le fait qu'ils travaillent un petit peu en fin de semaine dans la mesure où leurs études le leur permettent, ce n'est pas une mauvaise chose. Évidemment, tout cela doit être fait avec une mesure parce qu'il ne faut pas que le travail nuise à la tâche principale qui est de poursuivre leurs études et de réussir leurs études de la meilleure façon possible, de se donner les armes pour pouvoir poursuivre leurs projets.

Alors, M. le Président, dans ce contexte-là, je pense qu'il est important d'avoir un système de prêts et bourses qui encourage les étudiants à prendre leurs responsabilités dès maintenant, à ne s'endetter que dans la mesure du strict nécessaire. Et c'est pour ça que nous voulons faire en sorte que le système les rappelle constamment à la réalité concrète de tous les jours.

Alors, M. le Président, dans ce contexte-là, nous voulons aider efficacement nos jeunes, nous voulons qu'ils fassent preuve de responsabilité face à leurs études, face à leur avenir, et c'est pour ça que le projet de loi vise à faire en sorte que nos jeunes puissent à la fois avoir la certitude qu'ils auront de la part de l'État toute l'aide nécessaire pour pouvoir poursuivre leurs études, poursuivre leurs rêves, mais qu'en même temps ils doivent faire preuve de responsabilité parce que l'argent qui leur est avancé, le prêt dont l'État paie les intérêts, cet argent-là, c'est de l'argent qui est souvent durement gagné par des citoyens et qui doit être dépensé avec parcimonie et avec responsabilité.

(21 h 30)

Je voudrais, M. le Président, dire juste un mot sur un autre aspect de ce projet de loi qui consacre le fait qu'il est normal, je crois, que les frais exigés des étudiants qui viennent de l'extérieur du Québec soient différents de ceux qui sont exigés des étudiants qui viennent du Québec. Parce que la population du Québec a une responsabilité d'abord face à ses propres jeunes. La responsabilité des travailleurs du Québec, les hommes et les femmes qui paient des impôts, ils ont une responsabilité d'abord face aux jeunes du Québec. Et je ne dis pas qu'ils n'ont pas une certaine responsabilité face aux personnes qui viennent de l'extérieur. Oui, dans une certaine mesure, parce qu'il est bon que le Québec fasse connaître sa culture. Et, à travers les universités, à travers les jeunes qui viennent ici, nous faisons connaître notre culture et nous établissons des ponts avec les autres peuples, des ponts qui nous seront profitables dans le développement de nos relations extérieures et dans le développement de notre commerce.

Dans une certaine mesure, il est bon que nous ayons des frais de scolarité qui soient avantageux, mais cependant, M. le Président, au Québec, tout le monde sait que les frais de scolarité sont à peu près, en général, à la moitié de ce que ça coûte dans les autres provinces canadiennes. Alors, si on vient d'une autre province où ça coûte plus cher, eh bien, je ne vois pas pourquoi on viendrait au Québec faire des études à des coûts inférieurs et que ça serait les travailleurs du Québec qui paient pour ça. Je ne trouve pas ça normal. Alors, c'est pour ça qu'on demande un petit complément à ceux qui viennent de l'extérieur. C'est une question d'équité, c'est une question de responsabilité, c'est une question de faire en sorte qu'ensemble on puisse bâtir une société égalitaire.

Alors, dans ce contexte-là, je pense que le projet de loi propose un tas d'avantages, un tas de mesures spécifiques qui permettent d'aider davantage les étudiants mais d'une façon plus adéquate, d'aider ceux qui en ont le plus besoin de façon à ce que tous nos jeunes puissent vraiment poursuivre leurs rêves, puissent trouver l'aide dont ils ont besoin, puissent être des jeunes fiers, puissent être des jeunes dynamiques, puissent être des jeunes responsables, puissent être des vrais membres d'une société qui se veut responsable, autonome et souveraine, puissent être de vraies Québécoises et de vrais Québécois, M. le Président. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le député LaFontaine?

M. Gobé: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oh! je m'excuse, je croyais que vous vouliez avoir absolument la parole. Alors, comme il n'y a plus d'intervenants, est-ce que le principe du projet de loi n° 170, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vote nominal. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, afin de permettre aux députés libéraux de se promener dans les collèges et les universités avec un vote nominal enregistré, reportez-le à demain en vertu de l'article 223.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, conformément à l'article 223, le vote sera reporté aux affaires courantes du jeudi 4 décembre. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Veuillez prendre en considération l'article 32 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 172


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 32 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 172, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les normes du travail. Y a-t-il des interventions sur le rapport de la commission?

M. Jolivet: Non.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Pinard): Aucun intervenant? Le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 172, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les normes du travail, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article 29, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): O.K. L'article 29. Suite à la recommandation du lieutenant-gouverneur...

M. Jolivet: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader...

M. Jolivet: Oui, M. le Président. C'est une prise en considération d'un rapport. J'attendais que vous me demandiez cette prise en considération, mais je vais corriger une erreur qui s'est produite: l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et elle en recommande l'étude à l'Assemblée.


Projet de loi n° 163


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 163, Loi modifiant la Loi sur le curateur public et d'autres dispositions législatives relativement aux biens soumis à l'administration provisoire du curateur public, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Ces amendements sont déclarés valables et recevables. Y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur ces amendements? Aucun intervenant?


Mise aux voix des amendements du ministre

Alors, les amendements proposés par M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Pinard): Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 163, Loi modifiant la Loi sur le curateur public et d'autres dispositions législatives relativement aux biens soumis à l'administration provisoire du curateur public, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Nous allons passer à l'adoption d'un projet de loi, l'article 34.


Projet de loi n° 158


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 34 de votre feuilleton, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi n° 158, Loi abrogeant certaines lois permettant la constitution de personnes morales en matière agricole et modifiant diverses dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 158? M. le ministre de l'Agriculture.


M. Guy Julien

M. Julien: J'ai droit à une heure? Alors, M. le Président, le projet de loi n° 158 vise essentiellement à alléger le cadre législatif agricole québécois et à conférer aux sociétés d'agriculture davantage d'autonomie afin de favoriser leur développement. Le projet de loi s'inscrit dans une démarche de partenariat de mon ministère avec les sociétés d'agriculture. Les sociétés sont des éléments dynamiques de la promotion de l'agriculture québécoise et de sensibilisation au monde agricole. Il faut leur donner les outils essentiels à leur épanouissement.

Le projet de loi n° 158 représente un changement significatif et une manifestation de confiance non équivoque à l'égard des sociétés d'agriculture. Le projet de loi permet le remplacement d'un cadre législatif inopérant et non fonctionnel en abrogeant quatre lois. L'abrogation de la Loi sur les sociétés d'agriculture favorisera l'autonomie et la modernisation de ces sociétés, ce qui correspond tout à fait à leurs préoccupations.

Rappelons que la Loi sur les sociétés d'agriculture prévoit la création de sociétés dont le but est d'encourager l'amélioration de l'agriculture, de l'horticulture, de l'acériculture, de la mécanique ainsi que de l'industrie manufacturière et domestique des oeuvres d'art. Avec la création de nombreux organismes agricoles spécialisés, le rôle des sociétés a changé. Ce rôle n'en demeure pas moins indispensable en termes de vulgarisation et de promotion du bioalimentaire. Les 79 sociétés d'agriculture incorporées en vertu de la loi sont, entre autres, responsables de la tenue de 34 expositions agricoles au niveau de l'ensemble du territoire québécois.

En raison de la place importante qu'elles occupent dans le monde agricole, le présent projet de loi prévoit un régime transitoire qui leur permettra de continuer leur existence corporative en vertu de lois mieux adaptées au fonctionnement des personnes morales d'aujourd'hui, en l'occurrence la Loi sur les compagnies.

Il m'apparaît important, M. le Président, de souligner à nouveau que les sociétés d'agriculture ont été étroitement associées à la réforme que propose le présent projet. Leurs représentants siégeaient en effet sur le comité mis en place par le gouvernement en 1992. Les sociétés ont de plus été consultées à deux reprises, 1992 et 1993. Ces consultations ont également mis en lumière certaines attentes des sociétés en regard du nouveau régime concernant les points suivants: la garantie du maintien de l'exemption de taxes foncières, municipales et scolaires prévue dans la Loi sur la fiscalité municipale; deuxièmement, le support technique et financier du ministère dans leur démarche d'incorporation en vertu de la Loi sur les compagnies.

En conséquence, je me suis assuré que le présent projet de loi répond parfaitement à ces deux préoccupations. Les sociétés d'agriculture pourront donc continuer à bénéficier des exemptions fiscales concernant les taxes. Je tiens aussi à rappeler l'engagement de mon ministère d'accorder une aide financière, pouvant aller jusqu'à 1 500 $ par société, pour défrayer les coûts inhérents à l'obtention de lettres patentes et à la continuation de leur existence corporative sous la partie III de la Loi sur les compagnies.

(21 h 40)

Je vous rappelle également qu'une rencontre tenue en avril 1997 avec les représentants de l'Association des expositions agricoles a permis de confirmer les résultats de la consultation en 1993. J'ai aussi demandé à mon sous-ministre d'informer, à l'été 1997, l'ensemble des responsables des sociétés d'agriculture de notre intention de présenter un projet de loi à la présente session et de nous faire part de leurs commentaires, le cas échéant.

Toutes ces démarches démontrent hors de tout doute, M. le Président, le respect que nous portons à ces organismes. Le projet de loi comporte également un certain nombre d'éléments de concordance avec d'autres lois. À titre d'exemple, l'article 30 de la Loi sur la protection sanitaire des animaux fait référence aux sociétés d'agriculture telles que définies dans la Loi sur les sociétés d'agriculture. Cette dernière étant abrogée, il faut donc introduire une définition de «société d'agriculture» à l'intérieur même de la Loi sur la protection sanitaire des animaux afin d'éviter de créer un vide juridique.

Le projet de loi n° 158 propose également l'abrogation de trois lois inopérantes: la Loi sur les cercles agricoles, la Loi sur les syndicats d'élevage, la Loi sur les sociétés de fabrication de beurre et de fromage. Il s'agit de lois désuètes qui sont devenues inopérantes avec les années. Un relevé effectué auprès de l'Inspecteur général des institutions financières en septembre 1997 a permis d'établir qu'aucun organisme n'était enregistré en vertu de ces trois lois.

Enfin, le projet de loi propose d'apporter des corrections mineures à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche. Ces modifications visent à alléger le processus administratif de la Régie des marchés agricoles du Québec. Ainsi, la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche est modifiée afin de permettre au président de la Régie de désigner un régisseur pour le remplacer lorsqu'il prévoit être absent d'une séance. Une autre modification à cette loi permettra à un régisseur d'entendre seul et de décider des demandes concernant le statut de producteur agricole. Présentement, une telle requête exige la présence de trois membres de la Régie. Il s'agit là d'une mesure visant essentiellement à permettre une plus grande flexibilité administrative de la Régie.

L'étude article par article du projet de loi n'a donné lieu à aucune modification. Ce fut cependant l'occasion pour l'opposition d'avancer certaines craintes. Celle-ci appréhende que l'adoption du projet de loi ne conduise à la fin des relations de collaboration et de soutien qu'entretient le ministère avec les sociétés d'agriculture. Dans cette même veine, on m'a demandé si ces dernières seraient toujours éligibles aux programmes du ministère. Eh bien, M. le Président, j'affirme devant cette Chambre qu'il n'est absolument pas dans mon intention de laisser tomber les sociétés d'agriculture. Le secteur bioalimentaire ne peut se priver du travail de promotion et de vulgarisation que mènent ces organismes. J'en prends pour exemple la tenue des expositions agricoles, qui constituent des lieux d'échanges privilégiés entre les productrices et producteurs ainsi qu'une vitrine exceptionnelle du bioalimentaire pour les urbains qui les visitent.

Les membres de la commission ont également réclamé des garanties concernant l'aide financière de 1 500 $ devant servir à défrayer les coûts reliés à l'incorporation des sociétés. J'affirme une fois de plus devant cette Chambre que cette aide sera disponible pour les sociétés d'agriculture. De plus, le programme d'aide aux entreprises agricoles demeurera accessible aux sociétés pour les appuyer dans leurs projets de démonstration et de promotion des bonnes pratiques agricoles.

Enfin, tel que prévu dans le projet de loi, les sociétés bénéficieront d'un délai leur permettant de compléter leur processus d'incorporation en vertu de la Loi sur les compagnies. Il n'est pas question de brusquer les choses. De plus, les sociétés peuvent compter sur l'appui du personnel des directions régionales dans leurs démarches.

En terminant, M. le Président, je tiens à réaffirmer que les mesures prévues au projet de loi n° 158 n'ont d'autre but que de permettre aux sociétés d'agriculture de poursuivre leur mission dans un cadre législatif moderne et qui correspond au dynamisme dont elles ont fait preuve au cours des années. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et également député de Trois-Rivières. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition, député des Îles-de-la-Madeleine et également whip en chef de l'opposition. M. le whip en chef.


M. Georges Farrah

M. Farrah: Merci, M. le Président. Très brièvement, parce que ça a fait l'objet quand même de plusieurs discours soit en deuxième lecture et aussi au niveau de la commission parlementaire. Simplement pour vous signaler qu'au niveau de ce projet de loi là nous convenons qu'il fallait moderniser cette loi qui existe depuis quand même un bon bout de temps. Alors, il s'agissait exactement de pouvoir moderniser la loi pour faire en sorte que, entre autres, au niveau des montants qui étaient en cause, ça soit le reflet de ce qui existe aujourd'hui.

L'inquiétude que nous avons démontrée lors de l'étude en commission parlementaire, l'étude article par article, était à l'effet que ce que, nous, nous disions, c'est que nous nous demandions pour quelle raison le ministère de l'Agriculture et le ministre, entre autres, faisaient en sorte de référer cette loi maintenant au niveau d'autres instances, soit au niveau du ministre des Finances, au niveau de la Loi sur les compagnies. Je pense que, au niveau des sociétés d'agriculture, M. le Président, il y va de notre patrimoine. C'est quand même quelque chose. C'est des organismes qui oeuvrent au niveau des différentes communautés au Québec, ce sont des bénévoles, pour la plupart, qui font du travail exceptionnel. Alors, en ce qui nous concerne, nous, on trouvait important que, oui, on modernise la loi, mais que ça demeure sous la tutelle du ministre de l'Agriculture.

D'ailleurs, entre autres, on faisait état, dans le projet de loi, des sociétés d'horticulture. Il y a une loi des sociétés d'horticulture qui, elle, demeure sous l'autorité du ministre de l'Agriculture, et c'est bien ainsi. Alors, on s'est dit: Pour quelle raison la loi des sociétés d'agriculture ne demeure pas sous la tutelle du ministre de l'Agriculture, alors que la Loi sur les sociétés d'horticulture le demeure, elle? Bon, écoutez, le ministre nous dit que ça ne change pas grand-chose qu'en fin de compte, peut-être pour une meilleure efficacité, ça soit au niveau de la loi des compagnies. Donc, ça relève du ministre responsable des institutions financières. Mais, nous, on considère que c'est important que le ministre ait plein droit de regard au niveau de cette loi-là, compte tenu que ça fait partie de notre patrimoine et compte tenu du travail important que ces sociétés-là font dans nos communautés respectives.

L'autre élément, c'est qu'on se rend compte de plus en plus – et j'en ai fait état au ministre également – au niveau de l'agriculture, d'un délestage du ministère de ses responsabilités envers d'autres ministères, soit au niveau des Affaires municipales, au niveau de l'Environnement, au niveau des Finances, soit par la nouvelle loi qui sera adoptée et qui fera en sorte qu'elles seront régies par le ministère des Finances. On a vu, au niveau des casinos, qu'ils ont été abandonnés et que c'est Loto-Québec qui prend le contrôle de ça. Alors, ça demeure encore le ministère des Finances. On a vu, au niveau des courses de chevaux, que maintenant c'est le ministère des Finances qui s'en occupe.

Alors, on se rend compte, au fil des dernières semaines, au fil des derniers mois, qu'il y a un délestage des responsabilités à d'autres ministères, et ça, ça peut amener à une perte d'influence du ministre de l'Agriculture au sein du cabinet, et ça, pour la clientèle agricole, M. le Président, je pense qu'il y a une lumière rouge qui s'allume. Par conséquent, nous, on trouve que, au niveau de cette loi-là qui est devant nous, la loi n° 158, le ministre aurait pu arriver aux mêmes fins, soit de la moderniser, mais que cette loi-là soit encore régie par le ministère de l'Agriculture du Québec. C'est la raison pour laquelle nous voterons contre l'adoption de cette loi, contre cette loi parce que nous disons qu'elle devrait être régie par le ministère de l'Agriculture.

Certaines sociétés nous ont émis certaines craintes, également, dues au fait que, en modernisant la loi, on a peur que le ministère se retire graduellement des interventions que le ministère faisait normalement. Le ministre nous a dit qu'il ne pensait pas que ça aurait d'effet, que, lui, son intention était à l'effet de conserver les services, de conserver les subventions, si minimes soient-elles, à l'égard de ces sociétés-là. Mais, du fait qu'elles changent de responsabilité au niveau du ministère précis, nous, on a une inquiétude à ce niveau-là. Mon collègue de Pontiac, qu'on va entendre dans quelques instants, pourra faire état des représentations qu'il a eues, lui, au niveau de son comté, de sa société d'agriculture qui, elle, justement, était inquiète en pensant qu'on profite de ces changements-là, au niveau de la loi, pour peut-être faire en sorte de se retirer graduellement puis faire en sorte qu'il y aura peut-être moins de services qui seront offerts à ces sociétés-là.

Alors, M. le Président, oui, le principe de la modernisation de la loi, je pense que c'est une excellente chose. D'autre part, c'est non au fait que ça soit un autre ministère qui en prenne le contrôle. Nous aurions voulu, nous, comme opposition officielle, que cette loi-là soit encore régie par le ministère de l'Agriculture. Je vous remercie.

(21 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Nous allons maintenant céder la parole au député de Pontiac. M. le député, vous avez un temps de parole de 10 minutes.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. La raison pour laquelle je veux intervenir ce soir, c'est que, comme l'indiquait mon collègue le député des Îles-de-la-Madeleine, les gens, la communauté, les régions agricoles sont très inquiets, M. le Président, lorsqu'on voit le ministère de l'Agriculture qui, dans le passé, a cédé les courses de chevaux au ministère... oui, ils les ont cédées au ministère des Finances. Tout est contrôlé par les Finances, Loto-Québec, et ainsi de suite. Et on oublie les personnes, les gens qui sont sur, on peut dire, le plancher des vaches, les gens qui font l'élevage des chevaux.

Mais on parle de nos société d'agriculture du Québec, et je suis choyé, M. le Président, dans mon comté j'en ai trois: la Société d'agriculture Chapeau, la Société d'agriculture de Couillons et la Société d'agriculture du district de Pontiac qui est responsable de l'Exposition régionale de l'Outaouais-Laurentides. C'est une société qui existe depuis 141 ans. Juste pour vous donner une indication, c'est une municipalité de l'ordre de 2 000 de population, et, à la dernière exposition, il y a 33 000 visiteurs qui ont participé.

Pourquoi, M. le Président? Pourquoi? C'est parce que c'est des gens qui se préoccupent de l'agriculture. Et leur préoccupation maintenant, ils ont dit: Avec le MAPAQ, on a toujours eu de l'aide technique, de l'aide financière. Oui, on l'a toujours eue. Des promesses et des paroles, on en a eu dans le passé, et c'est ça, on se méfie de gens qui nous font des bons discours mais qui ne livrent pas nécessairement la marchandise. Et c'est ça, M. le Président, la préoccupation.

En plus de la société d'agriculture, je suis encore plus chanceux. Dans mon comté, il y a ce qu'on appelle l'Agribus. Les agriculteurs ont décidé de monter, pour les citadins, un genre de caravane pour leur montrer d'où viennent les produits. Tu sais, les citadins, le lait, ils ne savent pas d'où ça vient nécessairement. Ils ne savent pas d'où les produits viennent. Donc, on a monté cette chose-là. Ces gens-là aussi travaillent de près, de très près avec le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, de très près, pendant, vous voyez, 141 ans, M. le Président. Ils ont confiance dans le ministère de l'Agriculture, mais ils ont bien moins confiance dans le ministère des Finances.

Mr. Speaker, the reason I'm speaking to you this evening in English is that the majority of the farming community in Pontiac are English-speaking. And they're not people that just arrived, they've been there for over, as I said a while ago, 141 years, that this exhibition has been taken place. So these people are not new arrivals. They are really concerned. And when I tell you that they have been working closely with the population and all the Province of Québec for that time to make sure that agriculture is always number one, I can tell you that, even if they are English-speaking, when they talk to their colleagues of Ontario, they tell them that, even though we have a separatist government in Québec, we still feel that the agricultural policies are better in Québec than they are in Ontario. So that is being basically honest saying really what they believe in.

And, of course, they are really concerned, Mr. Speaker, that the fact that we are changing from the Ministry of Agriculture to the Ministry of Finance, that there's sort of a game, that they will loose that support from the Ministry of Agriculture which has allowed them to operate for 141 years with the exhibition and this Agribus that goes around not only in Pontiac but is available to go across the Province of Québec to show people from the cities where does the milk come from, where do these products come from. And I believe that is very important to guaranty that the agricultural community will continue to exist.

Donc, M. le Président, c'est extrêmement important pour les communautés agricoles d'avoir le support du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, comme elles ont toujours eu dans le passé. Mais, M. le Président, avec ce gouvernement qui a fait énormément de promesses... Et je lisais aujourd'hui un communiqué de l'UMRCQ qui parlait du ministre des Affaires municipales, de la taxe sur le gaz, et ainsi de suite, qu'on avait dit qu'on ne toucherait plus, mais on l'a signé avec l'UMQ, mais on l'impose à tout le monde. Donc, vous pouvez vous imaginer pourquoi un chat échaudé a peur de l'eau froide. Vous le savez, ça. Et donc c'est pour cette raison-là.

Le ministre m'a assuré, au moment de la commission parlementaire, qu'il y avait des articles dans ce projet de loi qui assuraient à la communauté agricole, et pas seulement chez moi, c'est partout à travers le Québec, qu'on était pour continuer avec l'aide financière et l'aide technique pour qu'on continue à avoir les expositions. Et vous le savez, M. le Président, que les expositions, c'est un moment où tous les agriculteurs... C'est là où la compétition les force à améliorer et à performer au maximum possible. Et, si on perd, M. le Président, si on perd les subventions, l'aide technique de la part du ministère de l'Agriculture, j'ai l'impression que c'est toute la société québécoise, parce que je suis convaincu... Le ministre le sait, lui, quel est le montant qu'on a, dans le domaine de l'agriculture, comme exportation et comme consommation ici même au Québec. Et c'est certainement quelque chose qui est fort important.

J'ai eu, moi, M. le Président, le privilège d'être ministre délégué à l'Agriculture pendant un an et donc je connais ça un peu. Mais les gens chez moi, mes agriculteurs connaissent ça encore mieux que moi, et c'est eux, M. le Président, qui demandent au ministre et à ce gouvernement de s'engager à dire: Oui, si c'est vrai que de s'incorporer et de tomber sous la responsabilité du ministère des Finances, ça va vous donner plus de flexibilité, mais, de l'autre côté, ça va vous permettre de bénéficier de l'aide financière, de l'aide technique, oui. Mais ce sera à ces gens-là, M. le Président, au gouvernement, de démontrer que... Leurs gestes devraient démontrer que leur discours, leur beau discours qu'ils font quand c'est le temps de vouloir convaincre les gens qu'ils ont raison, mais il va falloir que les actions parlent plus que les paroles et démontrer à ces gens-là que ce geste, ce changement qu'on fait va être pour améliorer l'agriculture au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Pontiac. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, le projet de loi n° 158, Loi abrogeant certaines lois permettant...

Une voix: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le ministre, vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique? Vous avez un temps de parole de 20 minutes.


M. Guy Julien (réplique)

M. Julien: Vingt minutes. Deux petites choses pour corriger ce que mes collègues de l'opposition ont dit. Lorsque le projet de loi a été déposé en Chambre, je me rappelle que des gens de l'opposition ont déchiré leur chemise. Ils disaient: Ça n'a pas de bon sens, il n'y en aura plus, de sociétés d'agriculture, elles vont disparaître. C'était l'enfer, il n'y a plus rien. On a dit: On va être bon joueur, on va accepter qu'il y ait des consultations. On a retardé la commission pour qu'il y ait des consultations. Je pense que c'était normal, il y avait des craintes. Vous savez combien ils en ont eu? Pas un. Pas un groupe n'est venu à la consultation en commission parlementaire. Pourquoi? Pas un. Pourquoi? Parce que toutes les consultations avaient été faites, parce que les changements qui ont été apportés l'ont été à la demande même des sociétés d'agriculture. Il ne faut pas charrier, là.

(22 heures)

Le deuxième élément, tous les services, tous les programmes, tous les supports du ministère qui existaient dans le temps vont demeurer. On a changé le cadre, mais on a gardé le contenu. Il y a des gens qui ont de la misère à faire la différence entre les deux, ça fait qu'il faut que je le précise. Alors, ça demeure tel que c'est là, sauf qu'à leur demande on a modernisé la loi; comme gouvernement on ne veut pas dédoubler les lois, on a utilisé déjà des lois existantes, mais qui vont conserver les mêmes contenus. Merci, M. le Président.

M. Middlemiss: Est-ce que le ministre me permettrait de lui poser une question?

Le Vice-Président (M. Pinard): En vertu de l'article 213?

M. Middlemiss: Oui, est-ce que le ministre me permettrait de lui poser une question?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre, est-ce... Alors, M. le ministre ne désire pas avoir... Alors, à ce stade-ci, le...

M. Middlemiss: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Pontiac, s'il vous plaît! M. le député de Pontiac, je suis au micro actuellement. Vous avez demandé si le ministre désirait une question en vertu de l'article 213, la réponse a été négative.


Mise aux voix

À partir de ce moment-là, je suis rendu à l'étape suivante: Est-ce que le projet de loi n° 158, Loi abrogeant certaines lois permettant la constitution de personnes morales en matière agricole et modifiant diverses dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, le monde ayant bien travaillé, leur permettant de se préparer pour demain, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au jeudi 4 décembre 1997, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, les travaux sont ajournés au jeudi 4 décembre, à 10 heures.

(Fin de la séance à 22 h 3)


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