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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Tuesday, May 13, 1997 - Vol. 35 N° 100

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Alors, je vous souhaite la bienvenue à cette ouverture des travaux de la Chambre. Nous allons débuter par les affaires du jour. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: En vous souhaitant une bonne journée, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci.


Affaires du jour

M. Bélanger: Alors, je vous demanderais de prendre en considération l'article 6 de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 97


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 6 de notre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 8 mai dernier sur l'adoption du principe du projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec. Le dernier intervenant dans ce débat, le 8 mai, a été la députée de La Pinière qui avait, à ce moment-là, terminé son intervention. Y a-t-il d'autres interventions? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. On me fait part que le député d'Argenteuil désirait s'exprimer sur le projet de loi, et il est présentement retenu à d'autres activités parlementaires. Je vous demanderais peut-être une suspension de quelques minutes seulement afin que le député d'Argenteuil puisse intervenir.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à la demande du leader du gouvernement, nous allons suspendre quelques minutes, le temps que le député d'Argenteuil veuille bien venir se joindre à nous. Alors, suspension.

(Suspension de la séance à 10 h 6)

(Reprise à 10 h 12)

Le Vice-Président (M. Pinard): Veuillez vous asseoir, ceux qui se sont levés.

Alors, nous reprenons le débat qui a été ajourné le 8 mai dernier sur l'adoption du principe du projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec.

La dernière intervention, comme je le mentionnais tout à l'heure, a été la députée de La Pinière qui avait terminé, à ce moment-là, son discours. Donc, maintenant, y a-t-il d'autres intervenants?

Alors, M. le député d'Argenteuil, nous vous cédons la parole.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci, M. le Président. C'est avec un vif intérêt que j'ai demandé à intervenir sur ce projet de loi n° 97. Il y a quelques jours, en commission parlementaire, à l'étude des crédits, j'avais fait appel au président du CRIQ pour lui demander l'orientation et la mission qu'il comptait donner éventuellement au CRIQ. On peut envisager, dans le projet qui nous est soumis aujourd'hui par la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce, qu'elle envisage un changement dans le rôle à moyen et à long terme du CRIQ.

Le rôle actuel du CRIQ, M. le Président, c'est un rôle de support, un rôle d'aide pour favoriser le développement technologique au Québec. Mais le développement technologique au Québec passe par les PME. Le cheval de bataille du Québec, ce sont les PME qui, avec l'aide de plusieurs intervenants, plusieurs organismes gouvernementaux finissent par créer leur place dans ce grand monde d'affaires où la compétition est féroce et où le développement de nouveaux produits, de nouveaux équipements est souvent difficile à cause des ressources limitées qu'ont les PME.

Pour ceux qui passent le long de l'autoroute métropolitain à Montréal, ils réalisent l'emplacement du CRIQ, avec son bel édifice énorme où logent des centaines d'ingénieurs, de chercheurs qui ont comme but et comme mission d'aider les petites et les moyennes entreprises à développer de nouveaux créneaux... Je peux en parler, M. le Président, sur une base personnelle, ayant déjà fait affaire avec le CRIQ, mais aussi sur une base de député, parce que, dans mon comté, j'ai des entreprises qui font affaire avec le CRIQ et le résultat, parfois heureux, n'est pas l'apanage régulier de l'aboutissement auquel ces gens-là devraient s'attendre.

Effectivement, M. le Président, dans la mission qui est donnée au CRIQ d'aider, de supporter, d'aider à développer, s'ajoute un élément qui m'apparaît essentiel pour le CRIQ, c'est-à-dire la fabrication. Alors, vous allez comprendre, M. le Président, que, lorsqu'on est dans un milieu de recherche en équipement et en technologie, lorsqu'un concepteur d'une PME vient partager avec les membres de votre club de recherche ses besoins, bien, vous devez faire des devis puis arriver à un protocole qui va vous donner un prototype éventuel. Alors, pour arriver à un prototype, il est évident, en tout cas, il m'apparaît évident, à mes yeux, que le CRIQ doit fabriquer lui-même, sur place, l'appareil ou l'équipement qui lui est demandé.

Bon. Ceci ne donne en rien au CRIQ le droit, l'étalage, la possibilité de recréer ou de répéter à de multiples exemplaires ce prototype qui a été créé de toutes pièces, parce que, d'abord, il y a une propriété intellectuelle qui, souvent, a été partagée avec les gens de la PME. Parce que le CRIQ ne part pas de rien, il part avec les informations qui lui sont données par les gens de l'entreprise qui va lui transmettre le problème qu'ils ont. Mais, quand on discute ouvertement d'un problème avec des ingénieurs, avec des personnes compétentes, il va sans dire qu'on transmet nos idées et on dit: Bien, écoute, si tu mettais une glissade comme ci, un barrage là, une ouverture ici, peut-être que ça aiderait. C'est un va-et-vient d'échanges entre les deux, c'est-à-dire l'entreprise et le concepteur final. Mais, le concepteur, il n'est pas isolé dans cette démarche-là. Dans les échanges qui se poursuivent entre l'entrepreneur, l'entreprise, son milieu de recherche, lui ou ses ingénieurs et ceux du CRIQ, il y a un partage d'idées, il y a un partage de concepts, il y a un partage d'aboutissement qui va faire qu'un prototype va aboutir. Ce prototype, c'est l'élément essentiel que la PME recherchait. Cette PME a négocié un mandat avec le CRIQ pour arriver à ce prototype. Qui en est le propriétaire? Je pense que ce n'est pas facile à déterminer qui est le propriétaire de ce concept-là. Est-ce que c'est le CRIQ ou c'est la PME? Bon. Le CRIQ, n'étant pas une entreprise privée en soi, dont le but est de développer et d'initier de nouveaux équipements et de nouvelles technologies, ne pourrait pas, à mon avis, être le seul propriétaire de ce développement. Il y a un partage de propriété qui va entre l'entrepreneur qui a donné le mandat et le CRIQ.

Pourquoi je dis ça, M. le Président? Parce que c'est comme dans l'entreprise privée. Si vous avez un chercheur, dans l'entreprise pharmaceutique, qui développe une nouvelle molécule à l'intérieur de l'entreprise dans laquelle il travaille, il y a un mixte de propriété. Lui, il a l'intelligence, mais les moyens lui ont été donnés par l'entreprise. Alors, c'est l'entreprise qui est propriétaire de cette nouvelle molécule là. Évidemment, le chercheur en bénéficie, mais c'est l'entreprise qui va chercher le gros des bénéfices ou des retombées suite à la mise en marché de cette nouvelle molécule, éventuellement, parce que c'est elle qui a les moyens financiers d'en faire toute l'investigation, l'évaluation, les essais cliniques et, finalement, la relâche dans le public.

(10 h 20)

C'est un peu la même chose au niveau du CRIQ, où l'entrepreneur, qui, par contrat, est lié avec le CRIQ, lui a donné l'idée de produire un prototype tout en sachant très bien que, une fois qu'il a transmis ses besoins et ses idées – parce qu'il n'y a pas juste les gens du CRIQ qui fournissent les idées dans un projet – l'individu partage ses connaissances. Mais il en a aussi une certaine propriété intellectuelle, et la propriété intellectuelle du CRIQ, en tout cas, il me semble, avec l'aboutissement actuel de certaines manoeuvres du CRIQ, il se l'approprie à 100 %. Et là j'accroche. Je trouve ça inacceptable que le CRIQ s'approprie à 100 % la propriété du développement d'un prototype.

La mission que le CRIQ a toujours eue, c'était celle d'aider et de supporter, mais, maintenant, elle est devenue un élément de compétition. Dans le projet de loi n° 97, on veut permettre au CRIQ de s'autofinancer. Évidemment, l'autofinancement, M. le Président, ça ne va pas sans une certaine inquiétude, ça ne va pas sans rechercher certains éléments qui pourraient favoriser l'entreprise comme telle. Dans les projets de recherche qui lui sont soumis, si le CRIQ pouvait s'autofinancer juste par les projets de recherche et les échanges avec les entrepreneurs et les PME, ce serait fantastique.

Et l'évolution, je pense, à long terme – et la ministre pourra nous spécifier là-dessus – va éventuellement amener le CRIQ à une privatisation totale. Cette privatisation va faire que le CRIQ va devenir un compétiteur en ligne directe avec les PME, et je m'explique. Si je suis une entreprise de fabrication d'équipement technologique et qu'une PME a fait développer, avec le CRIQ, ou a développé avec le CRIQ un équipement particulier pour l'enrobage de boulons par du plastique, un exemple banal, l'entreprise qui fabrique ce genre d'instruments, elle existe déjà au Québec, elle est déjà fonctionnelle. Par ailleurs, elle n'a pas la capacité en ingénierie, en recherche, en cerveaux, pour être capable de développer toutes les machines. Alors, l'entrepreneur fait appel au CRIQ qui, lui, développe l'appareil avec l'entrepreneur, et ce dernier devra aller voir l'entreprise qui fabrique ce genre d'équipement puis lui dire: Voici ce que je veux, et j'en veux 10 exemplaires ou trois exemplaires ou quatre.

Actuellement, M. le Président, ce qui se passe, c'est que le CRIQ, après avoir fait son prototype et livré sa marchandise, peut, au lieu de référer de nouveaux clients pour le même équipement ou des besoins similaires, au lieu de les référer à l'entreprise qui fait ce genre d'équipement et vendre la propriété intellectuelle de l'équipement à l'entrepreneur ou à la PME qui lui a donné le mandat – les deux participent à la propriété intellectuelle – au lieu de la vendre à l'entreprise qui peut le fabriquer, le CRIQ fabrique lui-même ce genre d'équipement.

Je ne pense pas, à moins que j'erre complètement, que dans la pensée initiale, lors de la fondation du CRIQ, de la mise sur pied du CRIQ, c'était l'idée fondamentale d'en faire un compétiteur de l'entreprise privée. L'idée fondamentale, c'était d'aider l'entreprise privée, à cause des moyens limités qu'elle a de se payer ce genre de chercheurs et de qualité d'intérêt dont elle n'a pas les moyens... Mais, maintenant, M. le Président, c'est devenu à la fois ce genre d'entreprise, c'est-à-dire une propriété intellectuelle des chercheurs, mais c'est aussi devenu un fabricant. «Fabricant», c'est un bien grand mot, parce que souvent, quand on parle de fabriquer, on pense à des choses qui vont se faire à de multiples exemplaires puis à des centaines et des centaines d'exemplaires. Mais il faut comprendre le milieu dans lequel oeuvrent souvent ces PME pour savoir que parfois c'est à deux ou trois exemplaires dans toute la province ou dans tout le pays qu'on va avoir ce genre d'équipement. Alors, il est difficile d'accepter que le CRIQ va devenir, avec les deniers publics, un compétiteur d'une entreprise privée. Ce n'est pas l'orientation qu'on cherche à donner, mais c'est l'orientation qui va se prendre avec le projet de loi n° 97, parce que la ministre oblige le CRIQ à s'autofinancer, et c'est correct qu'il s'autofinance. Alors, qu'il réduise ses capacités, qu'il réduise le grand luxe dans lequel il fonctionne, qu'il réduise les espaces dans lesquels il fonctionne et peut-être qu'il va être capable d'arriver.

Je me souviens – et la ministre l'a sûrement connu – d'un grand ingénieur montréalais, qui a été président de SNC pendant plusieurs années, qui me disait à un moment donné où on voulait bâtir un édifice pour BioChem Pharma: Tu comprends, plus on va mettre des chercheurs dans du luxe, dans de beaux espaces, moins ils vont produire. Mme la ministre semble ne pas être d'accord avec cette notion, mais les grandes idées, les grandes productions sont souvent sorties des endroits les plus démunis. Et, quand on regarde la technologie, si je peux faire une parenthèse, à un moment donné, dans les années cinquante, il y avait un ingénieur, dans son garage, M. le Président, qui a pensé que des gens avaient besoin d'une petite stimulation électrique pour accélérer leur coeur. Puis il a dit: Si j'avais une petite batterie qui fonctionnait à tant la minute, ça pourrait peut-être marcher. Il a développé ça dans son garage, puis ce n'était même pas un garage double, c'était un garage simple, à Minneapolis. Aujourd'hui, c'est devenu une compagnie multimillionnaire qui a un chiffre d'affaires d'au-delà du 1 000 000 000 $, et il est parti de son garage. S'il avait été dans des espaces luxueux comme on leur fournit au CRIQ, peut-être qu'il n'aurait jamais pensé qu'une petite stimulation électrique aurait accéléré le coeur à un bon rythme. Ce n'est pas moi qui dis ça, c'est un grand ingénieur montréalais qui disait: Ce n'est pas en leur fournissant des espaces très confortables qu'on va accélérer la production intellectuelle chez nos ingénieurs.

Alors, ce que je veux transmettre à la ministre aujourd'hui, M. le Président, c'est que, dans son projet de loi n° 97, avec lequel, par principe, je suis d'accord d'orienter la privatisation du CRIQ et de favoriser la privatisation du CRIQ, ce que je lui demande, c'est de mettre des balises, des balises certaines par lesquelles le CRIQ ne deviendra pas un compétiteur à l'entreprise privée, à des PME qui sont des fabricants, des gens de chez nous qui ont cette capacité de faire. Lorsque le CRIQ se fait demander s'il peut fournir un appareil et qu'il copie l'appareil qu'il a participé à élaborer puis que lui-même fait la production, je pense que l'on dévie de son mandat.

Et la ministre, je sais qu'elle est consciente de cette situation, parce que j'ai déjà partagé avec elle le problème d'un entrepreneur de mon comté qui a vécu des difficultés du genre que je décris. Donc, j'en suis très au fait. Cet entrepreneur développe des appareils du genre, puis, à l'occasion, s'il a un problème difficile à résoudre, il fait appel au CRIQ. Et il y va de ses propres deniers, parce qu'il investit là-dedans, et il partage avec le CRIQ... il devrait, en tout cas, partager la propriété intellectuelle avec le CRIQ. Puis, à un moment donné, lui, comme il est fabricant de ce genre d'équipement, il se retourne de bord et il voit que celui qui voulait un équipement du genre, au lieu de venir le voir, il va au CRIQ puis on lui donne son équipement. Alors, je me dis, moi, que c'est une compétition directe avec l'entreprise privée. On ne peut pas accepter que ce genre d'entreprise qui est fondée, supportée, financée par le gouvernement devienne en compétition directe avec l'entreprise privée.

(10 h 30)

Ce que je demande à la ministre aujourd'hui, M. le Président, ce n'est pas compliqué: qu'elle s'assure que par la privatisation qu'elle est en train d'enclencher pour le CRIQ, si le CRIQ est pour devenir un compétiteur des multiples PME au Québec, on ne peut pas accepter sa démarche. Par ailleurs, si le CRIQ maintient la vocation qui lui a été donnée et qu'il garde la piste de sa mission qui lui a été confiée d'aider les entreprises, de les supporter dans leur démarche de développement d'équipement, bien, on ne peut pas être contre, en autant que les balises sont telles que le CRIQ ne deviendra jamais en compétition avec l'entreprise privée dans la fabrication des équipements. Et, si la ministre peut m'assurer aujourd'hui, dans cette Chambre, qu'elle va s'assurer que, par les balises qu'elle va mettre dans son projet de loi... Et elle va devoir accepter certains amendements, M. le Président. Si elle accepte les amendements ou qu'elle les propose elle-même, les amendements qui vont faire en sorte que le CRIQ ne sera pas un compétiteur de l'entreprise privée, on va embarquer.

Mais, dans l'état actuel du projet de loi, tel qu'il est conçu, tel qu'il est énoncé, on ne peut pas s'embarquer là-dedans parce qu'elle n'a mis aucune sécurité pour les entrepreneurs, pour les multiples investisseurs des PME au Québec. Elle n'a mis aucune sécurité les assurant que le CRIQ ne deviendra pas, à plus ou moins long terme, une grosse usine de fabrication d'équipements technologiques, lesquels équipements technologiques sont actuellement le fait de quelques entreprises au Québec qui peuvent les fabriquer, qui créent des emplois au Québec, qui paient des taxes au Québec, qui assurent le renom du Québec à l'extérieur par la qualité de leurs produits et par la qualité du développement qu'elles ont pu apporter dans les équipements qu'on peut exporter. Alors, non seulement c'est au Québec, ce genre d'entreprises, M. le Président, mais c'est dans le monde entier que le Québec peut rayonner.

Mais j'aimerais que la ministre nous assure que les PME qui oeuvrent dans ce secteur seront protégées de la compétition directe et de la fabrication en masse par le CRIQ. Tout ce que nous recherchons, c'est de protéger, par cette démarche, les entreprises qui oeuvrent déjà dans ce secteur d'activité où le CRIQ n'a pas sa place parce qu'il est subventionné et que ça n'a jamais été dans la mission initiale qu'on lui a confiée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Argenteuil. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi? Alors, Mme la ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique?

Mme Dionne-Marsolais: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre.


Mme Rita Dionne-Marsolais (réplique)

Mme Dionne-Marsolais: D'abord, je suis heureuse de pouvoir répondre à certaines préoccupations des députés de l'opposition et je pense que je vais faire, peut-être, un bref rappel au niveau de certaines réactions des députés de l'opposition, notamment le député d'Orford, la députée de La Pinière et le député d'Argenteuil.

D'abord, le député d'Orford a bien établi, je crois, que le CRIQ était une institution importante au Québec et il a reconnu son rôle dans l'histoire du Québec. Donc, je pense que l'opposition convient avec nous – et le député d'Argenteuil en a parlé aussi – qu'au fil de sa vie, à date, il y a eu 100 000 interventions du Centre de recherche industrielle auprès d'entreprises québécoises. Donc, le CRIQ répond à un besoin. Mais il faut se rendre compte que ce besoin a changé, et l'objectif du projet de loi n° 97, c'est justement de s'adapter aux nouvelles conditions du marché.

Pour avoir personnellement été administrateur du Centre de recherche industrielle du Québec dans les années quatre-vingt, je pense que je dois partager la constatation qui est faite de la part du CRIQ au niveau du développement scientifique et technologique et donc industriel des PME du Québec, mais le gros défi auquel il faut répondre comme gouvernement, c'est comment nous allons appuyer le Centre de recherche industrielle dans sa transformation pour répondre aux nouveaux défis qui se posent aux PME manufacturières du Québec.

Alors, je pense que ce projet de loi n° 97 sur le Centre de recherche industrielle du Québec démontre que le gouvernement du Québec a confiance aux capacités de réussir des hommes et des femmes qui oeuvrent dans les PME québécoises. Les efforts et les interventions que nous proposons dans ce projet de loi visent justement à établir un climat de confiance et à susciter un intérêt envers la réussite, parce qu'on sait que la réussite du Québec commence par la réussite des PME et que le défi de l'emploi, c'est le défi des employeurs. Donc, nous, comme gouvernement, il faut appuyer entièrement tous les intervenants des milieux du développement comme le Centre de recherche industrielle qui est essentiellement, jusqu'à ce jour, un centre de recherche à part entière du gouvernement.

Le projet de loi n° 97, il vise à moderniser le CRIQ, à en assouplir les façons de faire, à lui donner la flexibilité dont il a besoin pour qu'il continue d'appuyer la réussite des PME et, ultimement, la réussite du Québec moderne. Or, contrairement aux propos des députés d'Argenteuil, d'Orford et de La Pinière, il ne s'agit pas de changer la mission du Centre de recherche industrielle du Québec, mais il s'agit d'adapter et de changer ses façons de faire pour qu'il puisse, dans le contexte d'une concurrence internationale plus forte pour nos PME, travailler en partenariat avec celles-ci et réaliser les objectifs de sa mission.

Or, ce qu'on vise avec ce projet de loi là, c'est à moderniser la loi du CRIQ de sorte que cela lui permettra de réaliser sa mission en lui donnant tous les moyens requis. La mission du CRIQ, je le rappelle, elle consiste à concentrer ses activités dans la recherche et le développement en mettant au point des technologies à valeur ajoutée qui répondent aux besoins industriels du Québec. Et la loi permettra aussi au Centre d'exploiter ces technologies de façon à assurer le financement de son développement et la réalisation de sa mission.

Quand j'écoutais les propos, en particulier, du député d'Orford, je dois faire la remarque qu'il y a loin de la parole aux gestes pour ce qui est du député d'Orford. Dans ses commentaires, il a fait état des défis de demain, mais je pense que, s'il s'était réveillé un peu plus tôt, au moment où il était adjoint parlementaire du ministre de l'Industrie et du Commerce de l'époque, M. Gérald Tremblay, peut-être que ses commentaires auraient été plus crédibles. Aujourd'hui, M. le Président, on ne peut pas dire qu'ils sont crédibles parce que, quand il avait le pouvoir d'influencer et de changer, il ne l'a pas fait. On peut se demander pourquoi. Alors, notre responsabilité, à nous, dans la modernisation de ce Québec, c'est d'agir et c'est ce que nous faisons.

Le député a aussi parlé du désengagement de l'État et il questionne les décisions du gouvernement au niveau des subventions aux entreprises. Là, franchement, je ne comprends plus le raisonnement du député d'Orford parce que le désengagement de l'État, c'est exactement ce que disait le fameux rapport Fortier dont il parlait. C'est exactement, je dirais, les valeurs et la pensée, pour ne pas dire la philosophie libérale que prône l'opposition, c'est-à-dire la baisse des subventions et de l'intervention gouvernementale. Peut-être qu'il s'est trompé de regroupement politique, je ne sais pas, là. Ce n'est pas clair, son affaire.

Dans son discours, je pense qu'il fait état – et c'est malheureux – d'un double langage, parce que, vraiment, il parle de la privatisation du CRIQ et il dit: Oui, il faudrait l'envisager. Et il le dit bien explicitement. Il dit même dans son texte: Quand les gouvernements se mettent le nez dans les affaires, ça reste rarement petit. C'est rendu très gros. Alors, nous, on dit: Oui, c'est parfait. On va changer les façons de faire, on va s'orienter vers une privatisation cohérente. Et là il dit: Non, par exemple, ça, ce n'est pas possible pour le CRIQ. Je ne comprends pas son raisonnement par rapport à la façon d'alléger ou même de privatiser.

Quand on parle aussi des comparaisons, je répète que la mission du CRIQ ne change pas. Ce que nous faisons, c'est adapter ses stratégies pour les rapprocher des entreprises et pour que le CRIQ devienne vraiment un partenaire. Et, quand il me parle de se rapprocher, il nous fait des suggestions fort intéressantes sur la façon de vendre des actions du CRIQ. Mais justement le projet de loi nous permet d'envisager un financement plus grand venant de l'extérieur du CRIQ. Mais, de là à parler de ratios prix-profit à 20-30, là, je le trouve pas mal ambitieux.

Ceci dit, on en reparlera en temps opportun, de ces ratios, et je suis certaine que, si le projet de loi suit son cours, nous allons être capables de discuter sérieusement sur la valeur d'actions potentielles, le cas échéant. Notre gouvernement indique – et c'est dans le mémoire que nous avons déposé au Conseil des ministres – notre intention d'envisager, de regarder la privatisation, mais il faut le faire de manière harmonieuse et de concert avec l'évolution de l'ensemble du marché et surtout des besoins de nos PME.

Il nous parle aussi, dans ses propos, qu'il est très inquiet parce qu'il trouve que ça coûte cher. Ça coûte cher, mais on ne peut rien changer, il ne faudrait pas bouger. Alors, nous, on dit: Oui, ça coûte cher, mais on va bouger et on va rapprocher le CRIQ des donneurs d'ordres, c'est-à-dire des PME qui en ont besoin et qui le reconnaissent.

(10 h 40)

Ensuite, il nous suggère de nous comparer au reste du monde. Je veux bien, moi, qu'on se compare au reste du monde, mais, quand il nous dit de nous comparer au reste du monde, sa façon de nous comparer est assez étonnante parce que le reste du monde justement fait exactement ce que nous faisons, c'est-à-dire augmente l'autofinancement de ses centres de recherche publics pour qu'il y ait un rapprochement avec les entreprises. Donc, c'est exactement ce que nous faisons. Je veux bien qu'on se compare au reste du monde, mais il faut également s'inspirer de ce qu'il fait, et c'est ce que nous faisons avec ce projet de loi là.

Ensuite, il y a une perle dans ses propos, M. le Président. Il nous parle de la vision globale des gens soi-disant d'affaires qui nous ont précédés au gouvernement où on avait une vision des affaires du gouvernement. Mais la vision des affaires du gouvernement qui nous a précédés, c'est les affaires des membres du Parti libéral. Parce que, si vous me donnez comme exemple de privatisation le Mont-Sainte-Anne, comme vous l'avez fait avec éloquence, j'ai eu, Dieu est bon, la responsabilité de ce dossier dans la première responsabilité ministérielle que j'ai eue. J'ai fait mon petit calcul. On sait que je suis davantage une femme de chiffres qu'autre chose. Ça a coûté aux Québécois 5 $ par tête pour soi-disant vendre le Mont-Sainte-Anne à des étrangers. Ce n'était même pas des Québécois.

Là-dessus, sur la leçon de privatiser des installations, je serais prête à discuter avec le député longuement. Et, sur la notion des gens d'affaires du Parti libéral et de l'opposition, on repassera, M. le Président! Parce qu'il n'y avait d'affaires, dans la façon de faire de la privatisation du Parti libéral, que pour les membres du Parti libéral. Alors, là-dessus, je suis prête à en discuter quand vous voudrez; on n'a pas de leçons à recevoir du Parti libéral là-dessus, certain. Certain!

Maintenant, M. le Président, on parle de l'orientation claire du gouvernement. Et je pense que, même dans ses propos, si je regarde les galées, il a très bien compris: il est de notre intention de préparer la privatisation du Centre de recherche industrielle. C'est justement pourquoi nous proposons ce projet de loi là, pour que nous puissions le faire en harmonie avec les besoins des entreprises, en harmonie avec une gestion saine et intelligente, et dans un processus de changement cohérent. Alors, je pense que, dans ce contexte-là, il y a une bonne compréhension de la part du député.

Je crois que, si je regarde le détail des propositions qu'il nous a faites pour regarder le projet de loi – il nous a fait quatre propositions, là, pour regarder le projet de loi – il a dit: On pourrait commencer par recentrer la mission du CRIQ. Donc, on convient que sa mission est bonne, et c'est effectivement ce que nous disons. On le dit bien clairement, ici, que le CRIQ garde et conserve sa mission. On lui donne des moyens concrets pour le faire. Il nous propose aussi de nous inspirer de ce qui se fait ailleurs et de regarder la possibilité d'en faire un grand centre de référence. M. le Président, avec le statu quo de la mission, c'est exactement ce qu'on propose de faire, mais un centre de référence au niveau du développement et de la recherche également pour les PME manufacturières qui, on le sait, n'ont pas les capacités de s'installer des centres de recherche.

Il nous propose aussi de regarder la privatisation, mais il ne s'entend pas sur la façon dont on le fait. Ça, c'est correct. On peut en discuter longuement et, comme je l'ai dit tout à l'heure, ce n'est pas moi qui vais me désister d'une argumentation à ce niveau-là, parce que j'ai eu le plaisir de lire le rapport annuel de la SEPAQ, qui est très exhaustif quant au coût de la privatisation ou aux soi-disant retombées, je dois préciser, négatives de cette privatisation.

Là, il y a une petite perle dans les propos autant du député d'Argenteuil que du député d'Orford. On m'a fait une grande démonstration sur les installations des chercheurs, le processus de recherche. Bien, là, M. le Président, s'il y en a une qui a fait le tour des centres de recherche du Québec, des États-Unis, de l'Europe, c'est bien moi. Les centres de recherche – je parle de centres de recherche – sont toujours dans des environnements près des universités, dans des environnements harmonieux et souvent luxueux, mais ce que l'on constate, c'est que les objets de recherche, souvent, débloquent sur des découvertes complémentaires, et je m'explique.

Dans le processus de recherche, il y a un objectif de découvrir une nouvelle application, un nouveau procédé ou une nouvelle solution à un problème et, souvent, dans le processus de réflexion, on arrive à une autre application dans le cours de la recherche de la solution initiale. Et j'en veux pour preuve le fameux principe d'Archimède. Tous ceux qui ont fait l'école secondaire, je pense, connaissent le principe d'Archimède. Archimède avait découvert son fameux principe dans le bain. Il ne cherchait pas ça, mais c'est là qu'il l'a trouvé.

Alors, quand on a parlé des découvertes du CRIQ, que ce soit la technologie du traitement des résidus de lisier de porc ou d'autres, il peut arriver et il arrive très souvent que les chercheurs... Parce que les chercheurs, ce sont des hommes et des femmes qui cherchent à améliorer le sort de la société par rapport à un problème qu'ils ont diagnostiqué. Bien, ces hommes et ces femmes-là, souvent, arrivent à trouver un nouveau produit, une nouvelle idée et là il faut qu'ils la mettent sur le marché. C'est là que tout l'enjeu, au niveau du partenariat que souhaite développer le Centre de recherche – et c'est écrit dans le projet de loi – arrive en importance.

Le CRIQ ne sera jamais un organisme qui fabriquera ou qui produira des technologies ou des machines en série. Mais, dans le processus de la recherche et de la mise au point d'un nouveau procédé ou d'une nouvelle technologie, il y a une étape qui s'appelle le développement du prototype de recherche; ensuite, le développement du prototype de fabrication; et, après – ça peut être le deuxième ou troisième – le prototype de commercialisation. Et ça, c'est une dynamique très complète. Il y a des livres qui ont été écrits là-dessus. Tous les gens qui oeuvrent dans la valorisation de la recherche scientifique comprennent ce processus. C'est pour ça que le CRIQ va devoir fabriquer des prototypes. C'est clair. Et, dépendant de la complexité de la technologie, dépendant de la dynamique de l'application de cette technologie-là, il en fera un, il en fera deux, il en fera trois, peut-être quatre, mais il ne fera jamais de fabrication en série, M. le Président.

En terminant, je pense que, sur le plan de l'orientation du CRIQ, on est tous conscients qu'il faut que les entreprises québécoises poursuivent leur recherche et améliorent leur performance; on est tous conscients aussi que le Centre de recherche a un rôle à jouer, un rôle non négligeable, et que nous devons l'appuyer comme gouvernement. Ce que je demande à l'opposition aujourd'hui, c'est d'adopter ce projet de loi parce qu'il est dans l'intérêt des Québécois et des Québécoises que le CRIQ puisse bien jouer son rôle; qu'il est dans l'intérêt du développement des employeurs – et, je le répète, le défi de l'emploi, c'est un défi des employeurs – d'avoir un partenaire visionnaire qui assure une accréditation de certains de leurs produits pour les marchés étrangers, qui assure une association dans l'accès à des fonds de recherche et de développement, qui assure une crédibilité et une expertise scientifique et technologique. C'est ce que je propose avec le projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec, que j'invite l'opposition à appuyer avec nous ce matin, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je regrette, M. le député d'Orford. Vous connaissez très bien notre règlement.

M. Benoit: Une question...


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Non, vous ne pouvez point, malheureusement. Le débat sur l'adoption du principe étant maintenant expiré par la réplique de la ministre, est-ce que le principe du projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division? Sur division. Alors, M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article 13 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 110


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à la rubrique 13 de notre feuilleton, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce, au nom de M. le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, propose l'adoption du principe du projet de loi n° 110, Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives.

Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 110? Alors, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Bien, je vous remercie, M. le Président, parce que, comme beaucoup de gens le savent, ce projet de loi là me tient à coeur, comme il tient à coeur à beaucoup de gens de l'industrie. Et ce projet de loi, le projet de loi n° 110, qui modifie la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives, il a pour but d'autoriser les détenteurs d'un permis industriel de brasseur à vendre sur les lieux de leur fabrication les boissons alcooliques qu'ils fabriquent, soit pour consommation sur place, soit pour consommation à l'extérieur de leur lieu de fabrication.

(10 h 50)

Depuis le début de la décennie, notre industrie brassicole est marquée par le développement des microbrasseries et des bières de spécialité. Et on a vu d'ailleurs, au dernier Festival de la bière, à Strasbourg, que les cinq entreprises qui faisaient la fierté du Canada étaient cinq entreprises québécoises. On a bien vite fait de récupérer ça au niveau canadien, alors que c'étaient cinq entreprises québécoises, et on nous a bien mis à notre place pour ne pas se réjouir comme Québécois de cette performance. Mais, tous ici, nous savons que les cinq entreprises présentes et primées étaient des entreprises québécoises.

Des voix: Bravo!

Mme Dionne-Marsolais: C'est une industrie dont nous sommes fiers parce qu'elle représente la créativité des Québécois dans des secteurs qui, jusqu'à tout récemment, étaient encore très peu connus et très peu mis en valeur. Mais, en 1989 et en 1990, sept permis de brasseur ont été attribués à des microbrasseurs que l'on peut qualifier de première génération. En 1995 et en 1996, neuf autres permis ont été attribués à des microbrasseurs que l'on qualifie de seconde génération. On évalue que nos microbrasseurs se sont accaparés de 2 % à 2,5 % de tout le marché québécois. Leur capacité de production totale est de l'ordre de 300 000 hl, alors que leur production est de l'ordre de 125 000. Donc, 300 000 de capacité, 125 000 de production, pour des ventes de l'ordre de 50 000 000 $. Il y a de la place, dans la capacité, pour augmenter la production.

Nos microbrasseurs sont des employeurs importants; ils emploient environ 250 personnes sur un total de 4 000 dans toute l'industrie brassicole. Ce n'est pas négligeable. Bien sûr, l'industrie brassicole québécoise, elle est concentrée dans la région de Montréal. Mais on se rend compte de plus en plus que les microbrasseurs de seconde génération, eux, s'implantent davantage en région et s'inscrivent de plus en plus dans les circuits touristiques. Ils deviennent source d'intérêt pour les touristes partout.

L'an dernier, le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie a tenu une consultation auprès des principaux intervenants de l'industrie des boissons alcooliques. Vous vous souviendrez d'ailleurs que nous avions permis, lors du budget de l'an passé, l'ouverture de la vente de vins sur les sites des vignobles et sur les tables champêtres pour permettre justement l'inscription de ces vins sur nos tables spécialisées. Dans cette consultation que le ministère a faite, certaines propositions recueillies ont été retenues dans le discours du budget 1996-1997 et elles furent l'objet de modifications en juin 1996, ce dont j'ai parlé tout à l'heure.

L'autorisation pour les brasseurs de vendre sur les lieux de fabrication a suivi un cheminement un peu semblable. Quand on a vu l'impact de la disponibilité des vins produits dans les vignobles québécois sur la demande, le développement régional et le développement touristique, on s'est rendu compte qu'il y avait tout un secteur, celui des microbrasseries, qui avait le même potentiel et qui avait un potentiel de développement régional et d'emploi extrêmement grand dont il fallait profiter ou faire profiter les Québécois. Et c'est pour ça que nous avons suivi le même cheminement.

Présentement, les brasseurs ont accès au marché québécois, soit en vendant directement aux divers détenteurs de permis de détaillant, c'est-à-dire les épiceries, les bars, les restaurants, soit en vendant leurs produits via la Société des alcools du Québec. En autorisant les détenteurs d'un permis industriel de brasseur à vendre sur les lieux de fabrication, ceux-ci vont bénéficier d'un nouvel accès au marché, et ça, à très peu de frais. Mais il est bien entendu qu'ils ne pourront vendre, sur les lieux de leur établissement brassicole, que les boissons alcooliques qu'ils y fabriquent en vertu, bien sûr, du permis qu'ils détiennent. De plus, les bières vendues sur les lieux de fabrication seront soumises à la même taxation que celle qui est vendue dans des établissements pour consommation sur place ou dans des épiceries.

En général, les consommateurs ont un intérêt et un attachement particuliers envers les catégories et les marques de bière qu'ils consomment et, en ce sens, les établissements brassicoles sont particulièrement propices à la tenue de visites industrielles. L'autorisation de vendre de la bière sur les lieux de fabrication va permettre aux brasseurs de rentabiliser ces visites industrielles dans leur établissement. Ainsi, c'est particulièrement important en région, nous pensons qu'il est permis d'escompter que cette mesure aura comme effet d'enrichir le produit touristique régional, et ce, à travers toutes les régions qui ont la chance ou l'avantage d'avoir des microbrasseries.

De nombreuses modifications de concordance sont nécessaires, bien sûr, essentiellement pour assujettir la vente de la bière sur les lieux de fabrication aux mêmes conditions que celles auxquelles la vente de ces produits est soumise lorsqu'elle est effectuée, selon le cas, dans un établissement pour consommation sur place ou dans une épicerie. Les conditions auxquelles je fais référence ici sont – je vous en donne quelques exemples parce que ça peut être pratique pour mes collègues de la députation de l'Assemblée nationale – d'abord, l'interdiction de vendre de la bière aux mineurs; ensuite, le nombre maximal de personnes qui vont être autorisées à être présentes dans le lieu où sont servies des boissons alcooliques; ensuite, le respect de l'intérêt et de la tranquillité publics; ensuite, les exigences en matière de sécurité, d'hygiène, de salubrité des lieux où sont servies, bien sûr, ces boissons alcooliques; et les heures de la journée durant lesquelles les bières pourront être vendues.

En conclusion, M. le Président, le projet de loi n° 110 permettant aux détenteurs d'un permis industriel de brasseur de vendre leurs produits sur les lieux de fabrication se veut une forme de support au développement de nos brasseurs, particulièrement celui de nos microbrasseurs. Par leur dynamisme, ceux-ci ont montré qu'il était possible d'apporter une contribution économique significative dans le cadre d'une industrie qui a atteint le stade de maturité. En conséquence, M. le Président, je propose à cette Assemblée l'adoption du principe du projet de loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres modifications législatives, et je suis persuadée que les députés de la région de l'Estrie seront favorables à ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce. Nous cédons maintenant la parole au député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, M. le Président. C'est presque le bonheur parfait, le bonheur total. J'ai fini, la semaine dernière, avec la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce, et je commence cette nouvelle semaine avec la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce. Imaginez-vous, je suis même payé! En plus, M. le Président, je suis même payé pour passer la fin du jeudi avec la ministre et le début du mardi avec la ministre. C'est le bonheur total. Franchement, là, je n'ai jamais pensé être heureux comme ça en politique un seul instant.

D'emblée, je dois avouer tout de suite à la ministre, pour ne pas qu'elle ait un début de semaine trop compliqué – on sait que c'est probablement compliqué d'être ministre de l'Industrie et du Commerce au Québec – qu'on va être d'accord avec elle sur ce projet de loi. L'autre de jeudi... Elle a peut-être trouvé son hamburger un peu plus bien cuit jeudi soir; mais, celui-là, ça va être un projet de loi plus facile à se comprendre, elle et moi. Je pense que les principes qui sous-tendent le projet de loi et les objectifs sont nobles. Bien sûr, ils avantagent légèrement les Cantons-de-l'Est, et ça aide toujours à la noblesse quand on aide les Cantons-de-l'Est, M. le Président.

Mais, ceci dit, je pense que c'est dans la bonne direction. C'est une libéralisation des marchés. Les deux objectifs finalement: d'autoriser un détenteur de permis de brasseur à vendre, sur les lieux de leur fabrication, les boissons alcooliques pour consommation sur place ou pour consommation dans un autre endroit... Et il y aura toutes les conditions alentour de ça. Alors, on va être d'accord avec le projet de loi.

D'autre part – et j'aimerais qu'elle puisse me répondre tantôt, Mme la ministre, M. le Président – au moment des crédits, j'ai posé la question à la ministre: De qui relève la Société des alcools du Québec? Ce n'est, malheureusement, pas inscrit dans nos galées; je lui ai posé la question avant qu'on commence les crédits. Et la réponse que j'ai eue, qui est non inscrite dans les galées, elle m'a dit: C'est le ministre de l'Industrie et du Commerce de qui relève la Société des alcools.

(11 heures)

Alors, je vois que le projet de loi a été effectivement déposé par le ministre. Au moment des crédits, ni mon confrère, qui est M. le député de Laporte, ni moi n'avons parlé de la Société des alcools, étant sûrs que lui en parlerait au ministre. Alors, là, on s'aperçoit qu'il y a un vide. Et là surprise! C'est elle en plus.

D'ailleurs, dans le rapport annuel du ministère de l'Industrie et du Commerce, quand on voit, à la dernière page, les responsabilités de chacun, du ministre et du ministre délégué, on s'aperçoit là-dedans que la Société des alcools, effectivement, n'est pas déléguée, elle n'est que la responsabilité du ministre. À moins que j'aie mal compris le rapport annuel à la dernière page, où on donne, par exemple, la Société d'Investissement Jeunesse, là, la ministre déléguée est responsable; d'autres sociétés, ils les partagent. Mais, dans le cas de la Société des alcools du Québec, il ne semblait pas que c'était une responsabilité partagée entre les deux. En tout cas, c'est ma compréhension du rapport annuel. C'est ce que le ministre m'a dit. Et, encore une fois, ce n'est pas dans les galées, c'était avant qu'on commence les crédits. Moi, j'étais nouveau là, je voulais savoir si effectivement...

Alors, là, j'ai un peu de misère à suivre là-dedans. J'aimerais ça que la ministre m'éclaire un peu sur si, effectivement, la Société des alcools du Québec, c'est elle ou c'est le ministre. On n'a pas de problème avec l'un ou l'autre des scénarios, mais on aimerait savoir lequel des scénarios est le bon. Un.

Deux, projet de loi, pas de problème.

Trois, la ministre, tantôt, a essayé de quitter son texte un instant, écrit par ses attachés politiques, pour parler de privatisation. On voit, comme son gouvernement, qu'elle ne sait pas de quoi elle parle quand elle parle de privatisation. Ce gouvernement, M. le Président, a essayé d'en faire une en 1984, qui est d'ailleurs celle de la Société des alcools du Québec, où on a essayé de privatiser la vente des magasins. Ça a été un fiasco total de A à Z. On paie en cour au moment où on se parle. En cour, ce n'est pas encore réglé. C'était en 1984, on est rendu en 1997.

Par la suite, le gouvernement libéral fera plus de 40 privatisations. Et je la mets en garde, parce qu'elle a juste dépassé la ligne un peu, si elle veut avoir un règne de ministre déléguée agréable avec moi, elle est bien mieux de faire bien attention à ça. Elle est bien mieux de faire bien attention quand elle va parler de patronage parce qu'on va lui parler de Yves Michaud, on va lui parler de plein de monde, en ce moment, où ça ne sent pas très bon. Si elle veut parler de patronage, elle est mieux de mettre des noms, des heures et des adresses, parce que le rapport où ils se sont essayés sur les petits barrages, où ils ont sali tout le monde et son père, le juge a été obligé de leur dire: Attention! Vous avez erré, vous avez sali des réputations, puis ça va être 4 000 000 $ plus tard que le peuple devra payer pour vos accusations.

Alors, tantôt, elle a juste dépassé la ligne un peu. Je lui donne une première chance. Si elle décide de redépasser cette ligne-là, on va avoir tout un débat et son règne de ministre déléguée va être compliqué. Les Yves Michaud de ce monde qui reçoivent des subventions, alors qu'on ne veut pas défendre les petits actionnaires qui actionnent le gouvernement dans la recherche et développement... On va aider Yves Michaud qui s'en prend à la Banque Royale ou Dieu sait qui. Un instant, là, ça ne marche pas, cette affaire-là. Alors, qu'ils viennent.

On avait l'impression qu'ils avaient eu une bonne leçon avec le rapport Doyon. On fait une enquête à partir d'un bout de papier qu'un attaché politique a donné à un ministre; on fait une enquête qui va coûter 4 000 000 $, à part de tout le reste, et le juge est obligé de leur dire: Ça n'a pas d'allure, ce que vous avez fait là. Il n'y avait rien là! Et le bon ministre, notre très noble député de Joliette dira: Ah! ce n'était pas illégal, c'était immoral. Ça, c'est fort. On s'abrie, par-dessus une autre couverte, là.

Alors, je ne veux pas revenir sur la vente du Mont-Sainte-Anne. Je pourrais lui faire un leçon des choses. On a fait 40 privatisations, au Québec, de plein d'affaires avec lesquelles la société perdait de l'argent, qui n'étaient pas dans la mission de l'État québécois. Il n'y a pas un instant un seul citoyen du Québec qui va me démontrer que c'était la responsabilité du Québec, en 1997, de vendre des tickets de ski et de s'occuper d'enneigement d'une montagne. Ce n'est pas vrai, alors qu'on ferme les écoles, alors qu'on ferme les hôpitaux. Ce n'était pas notre mission. C'est ça qui fut fait. Et, quand elle dit que ça a coûté si cher, M. le Président, un centre de ski qui perdait 2 000 000 $, 3 000 000 $ ou 4 000 000 $ par année, M. le Président, je termine là-dessus...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, je pense, M. le député, qu'il faudrait peut-être revenir à la rubrique 13, parce que, en ce qui me concerne, moi, pour l'autre projet de loi, l'adoption du principe a été faite, dûment faite. Et là nous sommes actuellement au niveau des microbrasseries. À moins que vous soyez capable de rattacher le Mont-Sainte-Anne avec une microbrasserie, je vais vous laisser aller, mais sinon, j'aimerais ça que vous reveniez exactement à l'adoption du principe du projet de loi n° 110, pour qu'on ait un petit peu plus de cohésion. M. le député.

M. Benoit: Merci, M. le Président. On apprécie toujours quand vous faites votre job. Je voulais juste remettre ça au point, là, parce que la ministre avait erré. Je voulais juste mettre les choses au...

Dans le projet de loi n° 110, je disais à la ministre tantôt que je ne croyais pas qu'il y avait de problème. D'autre part, il y a un groupe, je pense, qu'il nous faudrait entendre. On pourrait s'entendre rapidement, de part et d'autre, avec le leader pour au moins entendre leur point de vue. Peut-être que la ministre l'a entendu. Nous, on sait qu'ils sont allés public à cet égard-là. C'est l'Association des détaillants en alimentation. Je comprends que, pour eux, il y a quelque chose là.

Je ne pense pas qu'il soit pour nous question de renier l'engagement, on dit à la ministre: Oui, votre projet est dans la bonne direction, mais ces gens-là, je pense qu'on devrait les entendre. Au début de la commission parlementaire, ça ne serait pas trop, trop long, qu'on leur donne 20 minutes ou une demi-heure, qu'on les entende et qu'on les questionne un petit peu. Ça enlèverait ces nuages. Ça ne veut pas dire qu'il va pleuvoir parce qu'il y a des nuages, M. le Président, mais on ne sait jamais. Pour éviter les éclairs éventuellement, je pense qu'on devrait écouter ce groupe-là.

Au total, le projet de loi est valable. Je crois comprendre que ça n'augmentera pas la réglementation. Ça aussi, on devra vérifier ça avec la ministre au moment de l'article par article du projet de loi.

Nous étions ce matin, notre chef et un bon nombre de gens, avec un groupe d'industriels. Nous avons déjeuné de l'autre bord de la rue ce matin. Le discours de notre chef portait sur la réglementation. On ne peut pas répéter assez comment les gouvernements sociaux-démocrates – et ça s'applique à ce projet de loi, au cas où vous auriez tendance à vous relever, ça s'applique à ce projet de loi d'une façon particulière... Il faut faire attention. Ce gouvernement-là n'a aucune crédibilité en réglementation.

Je vous rappellerai qu'entre 1976 et 1984 ils ont imprimé – vous avez bien compris – 12 000 pages de règlements par année. C'est absolument extraordinaire. Ça n'a pas d'allure. À chaque fois qu'on parle d'un projet de loi, on va questionner, parce que les gens d'affaires nous disent: Attention, ça n'a plus d'allure, ce que ça nous coûte en frais d'avocats et en frais de papier ici, à Québec. On va questionner la ministre. Ce n'est pas évident, dans mon livre à moi, qu'il n'y a pas une augmentation.

Vous savez, il n'y a pas vraiment de volonté de la part de ce gouvernement de baisser la réglementation. M. Johnson avait créé le Secrétariat à la déréglementation au moment où il a été premier ministre. Quand M. Parizeau est arrivé – on comprend maintenant, dans son livre, qu'il avait d'autres priorités que celle de la déréglementation; les jobs, quand on parle de référendum, ce n'est peut-être pas la priorité numéro un de ce gouvernement-là – M. Parizeau avait pris le département de la déréglementation et il avait envoyé ça dans le troisième sous-sol, en bas, et ça ne relevait plus du premier ministre. M. Bouchard, suite au Sommet socioéconomique, où les gens d'affaires ont dit au premier ministre: Écoutez donc, il me semble que le premier ministre avant vous avait créé un bon Secrétariat à la déréglementation, qu'en avez-vous fait, mon cher M. le premier ministre? Il a été obligé d'avouer que c'était rendu dans le troisième sous-sol et qu'il ne savait plus trop, trop de qui ça relevait. Alors, ils viennent de remonter ça dans l'ascenseur en haut.

Mais, ceci dit, on n'est pas convaincus, de notre côté, qu'il y a une volonté – c'est d'ailleurs ce que les gens d'affaires nous disaient ce matin – de déréglementer plein d'aspects. D'ailleurs, on l'a vu avec le projet de loi sur la construction et combien d'autres affaires. On va poser des questions à la ministre sur l'aspect de la réglementation du projet de loi.

Nous sommes convaincus qu'il y a des retombées dans les régions aussi. La ministre en a fait état. C'est tout à fait valable et ça va compenser pour les fermetures de petits hôpitaux dont on entend parler dans nos régions respectives, le ministère des Transports qui est après fermer nos sous-stations du ministère des Transports, alors tous ces exodes de services gouvernementaux un peu partout en région. Si l'entreprise privée pouvait aider avec les minibrasseries sur le terrain un peu partout en région, ça aiderait à l'emploi.

(11 h 10)

Alors, tout ça ensemble fait qu'on va aller dans le sens de la demande de la ministre et du projet de loi, mais, encore une fois, nous aimerions, de notre côté, entendre l'Association des détaillants en alimentation, de façon à ce que nous puissions entendre... Nous connaissons le point de vue des gens qui sont pour. Il semble y avoir un groupe qui est contre. Je pense qu'il nous faudrait l'entendre et, après ça, on pourrait passer avec le projet de loi et les choses pourraient aller relativement vite. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Orford. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 110? Mme la ministre, est-ce que vous exercez votre droit de réplique?


Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 110, Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. De consentement, nous allons maintenant débattre du rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation déposé le 8 mai dernier.

Alors, d'un commun accord entre l'opposition et le gouvernement le débat se poursuivra jusqu'à environ midi. On avait prévu finir à 11 heures, donc on peut peut-être prévoir 12 h 10, M. le Président; on avait prévu environ une heure. Le temps sera partagé également, en réservant cinq minutes aux députés indépendants qui souhaiteraient intervenir.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 96 du règlement qui stipule que l'affaire faisant l'objet du débat doit être inscrite au feuilleton? Consentement?

Une voix: Consentement.


Débats sur les rapports de commissions


Prise en considération du rapport de la commission qui a tenu des consultations particulières sur la Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole

Le Vice-Président (M. Pinard): L'Assemblée entreprend donc maintenant un débat sur le rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui, dans le cadre du mandat qui lui a été confié par l'Assemblée, a tenu des consultations particulières les 8, 9, 10, 15 et 16 avril 1997 et a siégé en séances de travail les 1er, 6 et 7 mai 1997 sur la Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole .

Comme le leader vous l'a mentionné tout à l'heure, conformément à l'entente intervenue entre les leaders et la présidence, le débat se poursuivra jusqu'à 12 h 12. Le temps sera partagé également entre les deux groupes parlementaires et cinq minutes seront allouées à chacun des députés indépendants qui souhaiterait intervenir dans ce débat.

Alors, nous cédons maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe. Alors, M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que j'aborde la question qui nous occupe ce matin concernant le rapport qui a été déposé par la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation sur la réglementation relative à la mise en vigueur de la loi communément appelée la loi sur le droit produire, la loi n° 23.

Même si j'ai relativement peu de temps pour le faire, je désire, M. le Président, faire le tour, un tour rapide de toute la question qui nous occupe ce matin afin de bien camper les interventions, les recommandations ou plutôt les avis donnés par la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation sur cette question relative à la pollution, d'une part, mais aussi et surtout relative aux inconvénients qui résultent de la production agricole.

On sait, M. le Président, l'importance qu'occupe la production agricole dans notre milieu. On sait à quel point c'est un facteur économique important: environ 10 % de notre produit intérieur brut vient de l'agriculture, M. le Président. Et évidemment, dans l'agriculture, il y a l'élevage, et il y a entre autres l'élevage du porc. Et c'est un élément important de création d'emplois, c'est un des rares secteurs de l'économie actuellement au Québec où on entrevoit la possibilité de création d'un grand nombre d'emplois. C'est pour ça que c'est une chose très importante.

Mais la production agricole, et en particulier l'élevage, l'élevage du porc, ça créé aussi des inconvénients, comme toute activité humaine, par exemple, la question des odeurs et la question aussi de la pollution de l'eau, de la pollution du sol. M. le Président, ce gouvernement avait promis de s'attaquer à cette question et de la régler, de trouver une solution qui permette aux producteurs de produire en paix et permette aussi aux autres ruraux de bénéficier calmement de leur droit de propriété dans le milieu rural.

Alors donc, pour y arriver, il fallait trouver un moyen de faire en sorte que tous les ruraux se mettent ensemble pour enrayer les problèmes, régler les problèmes, mais aussi les régler de façon à pouvoir vivre d'une manière harmonieuse. Donc, la loi n° 23 visait les objectifs suivants. Elle visait premièrement à enrayer la pollution, enrayer la pollution de l'eau par les déjections animales. Elle visait aussi à faire en sorte d'accorder aux producteurs agricoles la priorité sur le territoire agricole. Enfin, elle visait à gérer les inconvénients de façon à ce qu'ils soient acceptables pour les autres résidents à la compagne et qu'ils leur permettent de jouir de leurs droits.

L'approche qui a été adoptée par la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et le gouvernement dans l'écriture de la loi n° 23, ça a été une approche consensuelle. On a voulu faire en sorte que les gens les plus aptes à régler ces problèmes soient mis en demeure de les régler, c'est-à-dire les producteurs, les gens qui vivent dans le milieu rural. C'est pour ça qu'on a mis en place une mécanique prévoyant des systèmes d'arbitrage et un comité consultatif au niveau des MRC qui permettra de donner des avis sur la façon d'administrer la Loi sur la protection du territoire agricole et la loi sur la protection du droit de produire.

Donc, dans ce contexte, la CAPA, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, avait demandé au gouvernement de lui soumettre les règlements d'application de cette loi, de façon à s'assurer que les règlements seraient écrits dans le respect de la lettre sans doute, mais surtout dans le respect de l'esprit dans lequel on a travaillé pour écrire la loi.

Évidemment, nous avons été entendus parce que non seulement le gouvernement nous a soumis plus que ce qu'on demandait, il nous a demandé de proposer nous-mêmes, c'est-à-dire qu'il a demandé à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation une chose rare, de proposer elle-même le contenu des règlements qui devraient être adoptés par le gouvernement pour appliquer la loi. Donc, je pense que c'est un geste de confiance mais aussi de compréhension du rôle des députés dans la législation, c'est-à-dire de faire en sorte qu'ils s'impliquent non seulement dans les grands principes généraux, mais, dans toute la mesure du nécessaire, aussi dans les mesures pratiques pour l'application de la loi.

Dans ce contexte-là, nous avons travaillé, à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation... Et je voudrais ici, M. le Président, souligner le travail extraordinaire fait par les députés des deux côtés de la Chambre, qui ont travaillé main dans la main, laissant de côté les questions partisanes, laissant de côté les crocs-en-jambe plus ou moins mesquins que l'on entend parfois dans certaines circonstances quand il s'agit de discuter en commission ou à l'Assemblée nationale. Nous nous sommes concentrés sur l'intérêt des ruraux, l'intérêt évidemment de toute la société. Dans ce sens, nous avons fait en sorte que, du côté des ruraux, autant les producteurs que les autres résidents de la campagne soient servis par une disposition législative qui favorise l'harmonie dans le milieu. Et, pour ce qui est de la loyauté envers la société, nous avons voulu nous assurer que nous nous engagions de façon définitive et résolue vers la disparition de toute pollution d'origine agricole.

Alors, dans ce contexte-là, voici les principes qui ont été adoptés. Premièrement, la question de la pollution de l'eau et du sol relèvera, selon l'avis donné par la commission, du ministère de l'Environnement et de la Faune, alors que la question des inconvénients résultant de la production agricole sera gérée par le ministère de l'Agriculture. Donc, c'est un principe fondamental qui, en départageant les responsabilités, va favoriser l'harmonie dans la résolution des problèmes.

Deuxièmement, M. le Président, comment ça va fonctionner? Eh bien, évidemment il y a une mécanique de base qui va être mise en place et qui est déjà commencée, qui est l'exigence pour tout producteur agricole d'avoir un plan de fertilisation de ses sols. Chaque producteur sera responsable de produire par lui-même ou par un agronome ou par un technologue un plan de fertilisation dont il sera responsable et qu'il déposera au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Par la suite, le ministère de l'Environnement sera habilité à vérifier en aval, c'est-à-dire en prenant des prélèvements d'eau et de sol, si, de ces plans de fertilisation, il résulte de la pollution. Et, s'il résulte de la pollution, le ministère de l'Environnement sera habilité à intervenir.

Donc, pour s'assurer que ce couplage entre le plan de fertilisation, d'une part, et la possibilité de pollution, d'autre part, se fasse correctement et d'une façon scientifique, eh bien, on demandera à une instance scientifique reconnue, la Faculté d'agronomie de l'Université Laval et des autres universités du Québec, de mettre en place un protocole qui permettra de suivre l'évolution des plants de fertilisation par rapport à l'effet possiblement polluant de la fertilisation des lisiers. Donc, M. le Président, je pense qu'en mettant cette mécanique en place tout le monde sera rassuré que l'épandage des lisiers servira à faire produire les sols, à fertiliser les sols et non à les polluer.

(11 h 20)

Alors, le deuxième point qui était très important, c'était celui des inconvénients. La question des inconvénients, donc, résulte entièrement du ministère de l'Agriculture, et l'objectif qu'on a, c'est, tout en faisant en sorte que, dans toute la mesure du possible, tout le territoire agricole puisse être fertilisé par des lisiers, eh bien, faire en sorte aussi qu'il soit possible de vivre d'une façon raisonnable, calme et de bénéficier de son droit de propriété dans le milieu rural, en toute paix et en toute tranquillité. Pour cela, il fallait s'assurer que les inconvénients, et en particulier l'inconvénient majeur, celui des odeurs, soient limités le plus possible.

Il y a toutes sortes de façons de faire ça. Il y a d'abord dans la façon d'entreposer les lisiers. Il y a des méthodes d'entreposage qui produisent beaucoup d'effets, d'odeurs nauséabondes et il y en a d'autres, méthodes d'entreposage, qui font tout le contraire, qui limitent au maximum les odeurs nauséabondes. Donc, nous avons prévu, dans les mécaniques d'application, des distances séparatrices, nous avons prévu des méthodes pour faire en sorte que les producteurs soient encouragés à utiliser les méthodes d'entreposage les moins polluantes possible, c'est-à-dire les moins désagréables possible, qui produisent le moins d'odeurs possible.

Vous savez, pour donner un exemple, M. le Président, quand, dans les réservoirs de lisiers, on n'introduit pas d'air du tout, les lisiers se décomposent avec des bactéries qui n'exigent pas d'oxygène pour vivre. Qu'est-ce qui se passe? C'est que ce qui résulte de cette décomposition produit des odeurs très fortes et très nauséabondes. C'est celles que l'on respire et que l'on sent quand on se promène dans les champs après avoir épandu le lisier qui a été conservé dans des fosses où on n'a pas introduit d'air.

Par contre, si on a introduit de l'oxygène, M. le Président – c'est un petit peu technique, ce que j'explique là, mais c'est important parce que ça nous donne une idée de toutes les techniques qui peuvent être employées pour limiter des odeurs – dans les fosses, ce sont d'autres sortes de bactéries qui transforment les lisiers, qui font en sorte que les lisiers qui résultent de cette décomposition sont très peu nauséabonds, ne sentent presque pas et ne sont pas des inconvénients notables.

Donc, les spécialistes que nous avons entendus, parce que nous avons consulté les gens du milieu, nous ont démontré qu'il y avait toutes sortes de méthodes technologiques modernes pour limiter l'effet nauséabond de la production de lisiers et de l'épandage de lisiers.

Donc, deux mécaniques ont été mises en place pour limiter ces inconvénients-là. La première, M. le Président, c'est celle des distances séparatrices entre les lieux de production, donc d'entreposage des lisiers, et les résidences voisines n'appartenant pas aux producteurs. Donc, certaines distances ont été établies et suggérées au gouvernement, qui sont très semblables à celles qui existent déjà.

Par contre, pour ce qui est de l'épandage de lisiers, eh bien, là, actuellement il n'y a aucune distance qui existe pour exiger qu'on épande des lisiers à une certaine distance des résidences voisines appartenant à des non-producteurs. Bien, il y en aura dorénavant. Nous avons suggéré qu'il y ait certaines distances qui soient établies. Je n'entrerai pas dans les détails. Mais en même temps nous avons fait en sorte de mettre en place une table de calcul qui fasse que, quand on épand des lisiers qui ne dégagent pratiquement pas d'odeurs, eh bien, on puisse épandre beaucoup plus près des résidences voisines. C'est donc une façon d'encourager les producteurs, de stimuler les producteurs à utiliser les méthodes technologiques les plus modernes et qui causent le moins de désagréments aux résidents à la campagne.

Je pense, M. le Président, que nous avons réussi à suggérer au gouvernement une méthode, une façon d'aborder le problème, qui favorisera l'harmonie dans le milieu, qui favorisera l'utilisation prioritaire du territoire agricole à des fins d'agriculture, qui mettra un terme à la pollution et qui fera en sorte que, par la responsabilisation de tous les intervenants, les producteurs et les autres résidents à la campagne, eh bien, on pourra assurer le progrès de notre économie agricole et l'harmonie et la joie de vivre en milieu rural. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Nous cédons maintenant la parole au député de Richmond. Alors, M. le député.


M. Yvon Vallières

M. Vallières: Merci, M. le Président. Je voudrais, si vous me le permettez, d'entrée de jeu, situer l'action de la commission dont l'aboutissement est le rapport que nous prenons en considération cet avant-midi.

L'implication de la commission dans le dossier de la protection des activités agricoles en zone verte remonte en août 1995, où la commission a procédé à des consultations sur l'avant-projet de loi favorisant la protection et le développement durable des activités agricoles. Durant trois jours, à l'été et à l'automne de 1995, interrompue par le référendum, faut-il le rappeler, la commission a entendu 23 témoignages d'organismes et de personnes sur ce que devrait contenir une loi pour favoriser la protection des activités agricoles et ainsi permettre une cohabitation harmonieuse entre les agriculteurs et les autres résidents de la zone verte.

Par la suite, le ministre, député de Trois-Rivières, nouvellement arrivé à l'époque, a déposé, en mai 1996, le projet de loi n° 23. La commission a procédé à l'étude détaillée du projet de loi pendant cinq jours, en juin 1996, n'y apportant pas moins de 48 amendements sur 87 articles que comportait le projet de loi. C'est au cours de l'étude détaillée du projet de loi que le ministre de l'Environnement et de la Faune a déposé un premier projet de proposition d'orientations gouvernementales relatives à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole.

À cette occasion, les membres de la commission ont unanimement demandé au ministre une rencontre à l'automne afin de faire le point sur le cheminement des dossiers concernant l'élaboration des orientations gouvernementales et de la réglementation devant accompagner la loi, une fois adoptée. Le ministre de l'Environnement s'était alors montré, et je reprends ses mots, «disposé à recevoir de bon gré une invitation de la part de la commission». Réunis en séance de travail, le 20 août 1996, les membres de la commission ont résolu, comme suite à l'ouverture manifestée par le ministre de l'Environnement et de la Faune et également, par la suite, par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, de convenir d'une rencontre pour le 10 octobre en y ajoutant le ministre des Affaires municipales comme étant un partenaire concerné directement.

Toutefois, malgré l'intention unanime des membres de notre commission et l'ouverture des ministres à venir expliquer leur proposition en commission, nous apprenions alors, par le biais d'une conférence de presse donnée conjointement par les ministres concernés, le 3 octobre 1996, premièrement, qu'ils avaient annulé la séance du 10 octobre et, deuxièmement, que le mandat de la commission parlementaire était modifié pour que les ministres ne soient plus entendus, mais uniquement les différents organismes agricoles.

En tant que président de la commission, M. le Président, je ne peux que déplorer l'ingérence des ministres qui se sont arrogé le privilège de modifier une décision prise unanimement par une commission parlementaire. Dans notre système parlementaire, l'ingérence de l'exécutif sur le Parlement est formellement proscrite à cause de l'indispensable séparation des pouvoirs. J'ai donc été surpris de cette attitude, que je me permets de qualifier de cavalière, du gouvernement à l'endroit du Parlement, car c'est de cela qu'il s'agit. Un geste qui, à mon humble avis, contrevient non seulement à nos règles, mais à nos droits de parlementaires d'initier des travaux par le biais d'une commission permanente. Enfin, espérons qu'une fois n'est pas coutume et que les quatre ministres concernés ont agi par ignorance de nos règles plutôt que par intention de modifier d'autorité le mandat que s'était donné la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation.

Nous nous retrouvons ainsi le 20 mars dernier, alors que le gouvernement dépose enfin, par l'intermédiaire du ministre de l'Environnement et de la Faune, sa deuxième Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole . L'Assemblée nationale mandate alors la commission de tenir des auditions publiques et d'inviter à cet effet 25 organismes à lui faire part de leur appréciation du document devant guider les municipalités dans l'élaboration des règlements de distances séparatrices.

(11 h 30)

Sans que soit concrétisé le voeu unanime de la commission de rencontrer les ministres avant d'entreprendre les consultations, la commission a tenu cinq séances où 23 organismes ont daigné faire part de leurs commentaires. À la suite de ces consultations, la commission s'est réunie à trois reprises en séances de travail pour convenir, toujours à l'unanimité, M. le Président, du rapport que j'ai déposé en cette Chambre, jeudi dernier. Il faut préciser ici qu'il est assez inhabituel, pour une commission ayant reçu un mandat de consultation de l'Assemblée, de produire un rapport contenant des observations et des conclusions aussi précises. Dans la plupart des cas, la commission se contente, dans de telles circonstances, de déposer le procès-verbal de ses séances. La réponse de la commission à cette intervention qui sort de l'ordinaire se trouve essentiellement dans le rapport. Ce qui a motivé principalement la commission dans l'élaboration de son rapport, ce sont les trois motifs suivants: premièrement, l'urgence d'agir; deuxièmement, la difficulté d'arrimage entre les ministères impliqués; et, troisièmement, l'insatisfaction quant à la proposition gouvernementale de principes généraux soumise à la consultation.

Parlons d'abord, M. le Président, de l'urgence d'agir. Nous savons que le dossier du droit de produire est un engagement gouvernemental qui remonte à 1994. Les délais qui ont entouré les discussions sur l'avant-projet de loi, sur le projet de loi n° 23 comme tel et sur les règlements ont créé, dans bien des régions du Québec, un climat malsain de conflits entre les divers utilisateurs et occupants du territoire agricole. Aussi, la commission est d'avis que le gouvernement doit statuer rapidement pour ne pas que se répètent, à l'aube d'une nouvelle saison agricole, les incidents malheureux qui ont nui à la réputation de la classe agricole. La commission ne s'en cache pas dans son rapport, elle privilégie l'activité agricole sous toutes ses formes en zone verte.

La commission est d'avis que l'agriculture doit pouvoir s'exercer sans entraves indues sur le territoire qui lui est réservé. Le rapport propose toutefois des paramètres qui, dans la mesure du possible, font en sorte de diminuer les inconvénients reliés à l'activité agricole. Je dis bien, M. le Président, «de diminuer» et non pas «d'éliminer» parce qu'il m'apparaît difficile et voire impossible, dans certains cas, d'éliminer ces inconvénients qui sont dus à la production agricole. La commission a par ailleurs souligné dans son rapport l'importance économique considérable pour le Québec et ses régions du secteur agricole comme motif de l'urgence d'agir.

Regardons maintenant du côté des difficultés d'arrimage. Le deuxième motif important pour la commission, c'est le constat qu'elle fait, à la page 10 de son rapport, des difficultés d'arrimage entre les différents ministères mandatés pour régler le dossier. Tout au long des travaux de la commission, en commençant par les discussions sur l'avant-projet de loi à l'été 1995, les membres de la commission ont été à même de constater que les représentants des ministères, notamment ceux de l'Environnement et ceux de l'Agriculture, n'étaient pas sur la même longueur d'onde et n'arrivent toujours pas à s'entendre sur ce que devraient être les conditions de cohabitation en zone agricole. C'est dans cette optique, pour faire avancer les choses et forcer un règlement, que la commission dépose son rapport.

Enfin, troisièmement, M. le Président, l'action de la commission a aussi été rendue nécessaire par l'insatisfaction constatée lors des consultations quant au document de principes généraux du gouvernement. Les députés ont jugé, dans leur rapport, le document gouvernemental soumis à la consultation par les quatre ministres impliqués comme étant insatisfaisant pour l'ensemble des milieux concernés. Le document était rédigé dans des termes tellement généraux et imprécis que très peu parmi les 23 organismes consultés l'ont commenté ou même mentionné, à tel point qu'à plusieurs occasions j'ai dû, à titre de président de la commission, rappeler aux intervenants le sujet de la consultation.

En conséquence, la commission a convenu qu'il était opportun de présenter une proposition plus précise que les députés membres considèrent plus représentative de la réalité rurale, du contexte rural. Je ne vous cache pas, par ailleurs, que j'aurais préféré que la commission se limite à proposer au gouvernement de s'inspirer du modèle de la Convention Saint-Valentin accompagné d'autres recommandations et forçant ainsi le gouvernement à faire ses devoirs correctement, à nous proposer un projet de règlement que nous aurions pu ensuite analyser en commission et sur lequel nous aurions pu faire nos recommandations, si la commission l'avait jugé nécessaire et utile, car, faut-il le rappeler, les députés ne disposent pas de l'expertise nécessaire pour rédiger les règlements à la place du gouvernement. Des professionnels sont payés à cet effet pour faire ce travail, ils sont formés pour le faire.

Mais, quand le gouvernement ne fait pas ce qu'il devrait faire, il nous oblige à le faire à sa place, car les membres de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ont comme objectif que ça fonctionne, que ça marche, et c'est la raison pour laquelle ils ont, entre guillemets, pris le risque de soumettre des avis qui ressemblent étrangement à un projet de règlement.

Alors, nous n'avions pas beaucoup le choix si nous voulions que le gouvernement pose des gestes et que cela fonctionne en milieu rural et qu'une certaine harmonie se retrouve dans plusieurs milieux qui vivent des problèmes actuellement très aigus.

Aussi, il m'apparaît normal de dire que les propositions qui sont contenues au rapport sont certainement perfectibles et que cette fois-ci le gouvernement devra faire son travail, à commencer par le ministre de l'Agriculture, qui a joué un rôle bien effacé, il faut se le dire, à ce jour, dans ce dossier. Quant aux détails de la proposition de la commission, je laisserai d'autres de mes collègues intervenants les préciser.

Mais, avant de terminer, M. le Président, je voudrais vous indiquer que dans son rapport la commission demande au gouvernement de lui présenter, avant qu'ils ne soient publiés dans la Gazette officielle , les règlements afférents à la loi n° 23 afin de permettre aux parlementaires membres de la commission de pouvoir juger de leur pertinence au regard des consultations que la commission a tenues en avril dernier et du rapport que nous prenons en considération aujourd'hui. Pour nous, ça, M. le Président, c'est important. Les membres de la commission demandent au gouvernement de voir les règlements. Peu importe le ministère qui les présentera, nous tenons à les voir, tant le règlement eau et sol que les règlements afférents comme tels à la loi n° 23.

Vous me permettrez également, avant de conclure, de rappeler que la loi n° 23 prévoit qu'un producteur agricole qui exerce en zone agricole des activités agricoles ne pourra être empêché d'exercer ces activités à la condition de respecter la Loi sur la qualité de l'environnement et la réglementation en découlant en regard des bruits et des poussières et, dans le cas des odeurs, à la condition de respecter la réglementation municipale.

Et, puisque la commission est d'avis qu'il appartient au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de proposer un registre des normes, des balises et des repères réalistes, ne faudra-t-il pas envisager des modifications à la loi n° 23 elle-même, puisque cette responsabilité est actuellement attribuée, en vertu de cette loi, au ministre de l'Environnement en ce qui concerne les bruits et les poussières et au ministre des Affaires municipales en ce qui regarde les odeurs? La commission fournit un guide, M. le Président, une démarche. Enfin, voyons ce que nous proposera le gouvernement dans une démarche ultérieure.

Je terminerai là-dessus, M. le Président, en remerciant tous les membres de la commission pour leur participation intéressée aux travaux ainsi que les différents groupes qui ont participé à ces travaux. De façon particulière, je voudrais souligner l'apport exceptionnel du député de Saint-Jean, qui a pris sur lui de rédiger un projet de rapport qui a permis à la commission d'avoir une base solide de travail et intéressante, ce qui nous a conduits à déposer le rapport qui est devant la Chambre aujourd'hui.

M. le Président, en toute conclusion cette fois-ci, vous me permettrez d'indiquer que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation continuera son travail à l'intérieur de ce dossier en exerçant un travail de grande vigilance, compte tenu de tout ce que nous avons entendu en commission, compte tenu également de l'attitude du gouvernement, qui, à ce jour, n'a vraiment pas réussi à se donner la cohérence et la cohésion requises pour présenter au monde agricole, au monde municipal, au monde de l'environnement, au monde de la santé un projet de règlement qui réponde véritablement à ce qu'on recherche comme objectif en milieu rural et dans les différentes régions, c'est-à-dire de permettre le développement de l'agriculture en harmonie avec les autres composantes de la société.

Là-dessus, M. le Président, je vous remercie de votre attention et je nous souhaite bon travail dans la suite de notre mandat. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Richmond et président de la commission parlementaire. Nous cédons maintenant la parole au député de Roberval. M. le député.


M. Benoît Laprise

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je crois que la présentation du rapport de cette commission viendra peut-être couronner de succès les discussions nombreuses qu'il y a eu autour de la loi n° 23, du droit de produire. Je comprends, et j'ai compris depuis le début, et je partage cependant l'impatience devant les délais qu'a dû subir ce projet de loi et qui fut accompagné d'attaques directes à la profession d'agriculteur, si noble en soi...

Mais je crois de plus en plus, suite à l'expérience que j'ai vécue au cours de cette commission, qu'il était nécessaire de se donner du temps pour rapprocher les parties, permettre à des gens d'intervenir, permettre à des gens d'exprimer leurs préoccupations globalement, et en particulier pour différentes productions qui sont touchées directement, entre autres les producteurs de bovins qui se sont proposé une autodiscipline et qui ont déposé à la commission un mémoire qui leur permettait d'affirmer eux-mêmes qu'ils étaient prêts à cheminer dans le dossier de l'environnement et à protéger tout ce qui touche la nature quant à la pollution environnementale.

(11 h 40)

La consultation a permis également de nous donner un éclairage supplémentaire, à tous les intervenants et également à ceux qui avaient à prendre la décision finale, pour redonner vraiment aux cultivateurs le droit de produire et le respect de produire dans leur milieu.

Les agriculteurs également ont assumé de façon très vigilante leur présence au coeur de ce grand débat qui remet en cause l'industrie de base la plus importante. Quand on sait très bien que l'industrie agricole est l'industrie la plus décentralisée au Québec, c'est l'industrie qui occupe le territoire, c'est l'industrie qui permet à des paroisses de naître, à des villes et à des villages de naître, c'est l'industrie également qui permet aux familles de vivre honorablement dans un milieu, dans un environnement de qualité, alors ce sont les premiers intéressés à garder cette qualité de vie à l'intérieur de leur milieu. Et je crois que les cultivateurs, les agriculteurs d'aujourd'hui, comme ceux d'hier, ont su, par leur intervention, apporter des éléments très positifs dans la discussion.

Je crois que ça nous a fait découvrir – je ne ferai pas de retour sur le rapport parce que mes collègues l'ont fait – de plus en plus que le devenir des régions, le devenir des villes et des villages est associé très étroitement au développement de l'agriculture et à la présence de l'agriculture et des agriculteurs et de leur famille. C'est l'espoir et le défi de l'agriculture dans le Québec d'aujourd'hui.

On sait très bien qu'à l'approche de l'an 2000 nous vivons une période unique et sans précédent de changements. Nous sommes à un moment vraiment passionnant de notre histoire. Et on sait très bien que l'agriculture y est profondément associée, car on dit de l'industrie agricole que c'est l'industrie qui, avec les années, a profité le plus de la haute technologie et s'est transformée. La production agricole s'est transformée par le dynamisme des agriculteurs, par l'intérêt qu'ils avaient à prendre en main leur développement et à utiliser tous les facteurs techniques pour améliorer leur production, pour améliorer la qualité de leurs produits et pour améliorer également la qualité de leur vie. Nous avançons vers des transformations majeures par les courants de pensée qui circulent de toutes parts aujourd'hui. Mais l'avenir est entre nos mains, et ce sont les agriculteurs qui sont vraiment en mesure de le prendre en main, leur avenir.

Donc, à nous de décider si nous vivons la fin d'une époque ou bien si nous vivons le commencement plein de promesses à l'exemple d'une nouvelle génération d'agriculteurs et d'agricultrices. En agriculture, nous sommes une race qui ne sait pas mourir, et ce n'est pas une loi qui pourrait empêcher l'agriculture de se développer, je ne crois pas, même si ça a provoqué beaucoup d'insécurité, beaucoup d'inconnues. Ça a provoqué également peut-être de l'inquiétude à certains moments donnés.

Et c'est dans ce désir de vivre que, nous, nous trouvons la source de notre avenir, en agriculture. Cette dimension est nécessaire à notre projet de société québécoise. Il serait nécessaire de savoir d'où nous venons, où nous allons, et c'est vrai en agriculture comme dans d'autres domaines. À l'aube de l'an 2000, voilà un défi exaltant pour les agriculteurs d'aujourd'hui, lancé à tous ceux qui s'affairent avec coeur à bâtir la société nouvelle. Et Dieu sait si les jeunes en agriculture sont intéressés à relever le défi. Mais il faut leur donner l'opportunité de le faire. Il faut leur créer un climat de confiance dans leur profession. Et je crois que, les élus, nous avons une part de responsabilité à tous les paliers gouvernementaux.

L'agriculture, de par sa vocation de nourrir l'humanité, est un instrument de paix qu'il faudrait utiliser bien davantage. Ce qui nous manque le plus, au Québec, ce n'est peut-être pas des responsabilités administratives, mais bien des visionnaires, au regard pénétrant, qui déjà à travers le présent perçoivent l'avenir. Et Dieu sait si, en agriculture, on a de ces hommes de gros bon sens qui non seulement ont innové en agriculture, mais ont innové dans les politiques sociales, les politiques de développement de leur milieu! Comme dans le passé, la famille rurale offre à la collectivité de ces hommes et de ces femmes qui ont cette facilité à percevoir les événements. Ils ont cette sensibilité au bout des doigts. À travers l'aube du matin, ils perçoivent déjà la journée qui vient et, au coucher du soleil, ils annoncent déjà le quotidien du lendemain.

C'est ça, la vision des agriculteurs d'hier et d'aujourd'hui. Il faut les écouter et tenir compte de leurs idées dans ce monde en chantier. Je ne vois pas, sur cette planète, d'autres professions plus universelles, plus aptes à proposer aux élites comme aux masses de récapituler le passé et de préparer ainsi l'avenir.

Face à cette situation, nous, les députés, qu'est-ce que nous avons à proposer à partir de la loi n° 23, maintenant que cette reconnaissance du droit de produire est établie? Quelle est notre réaction à la fermeture des unités de production agricole? Est-ce que nos territoires agricoles sont gérés en fonction des besoins humains? Est-ce que l'agriculture serait une force à utiliser pour la dépollution de l'atmosphère dans laquelle nous vivons? Moi, j'en suis persuadé. On a accusé l'agriculture de polluer beaucoup, mais, par contre, l'agriculture a des déchets organiques qui se transforment, qui s'intègrent au sol très rapidement. Peut-être justement que l'agriculture développée en fonction d'assurer une qualité de vie, une qualité d'atmosphère peut vraiment être un élément très positif dans le développement actuel.

Est-ce que nous avons associé les agriculteurs dans l'aménagement de l'ensemble des ressources? On sait très bien que les forces qui ont décidé de l'aménagement du territoire n'ont pas toujours consulté ceux qui étaient directement impliqués dans l'utilisation des sols, ceux qui étaient directement impliqués dans l'occupation des territoires. Est-ce qu'il serait possible de créer des circuits intégrés de producteurs et de consommateurs dans la province de Québec, suite à la relance, au nouveau visage qu'on veut donner à l'agriculture?

Dans notre province, il existe un danger certain pour un bon nombre de bonnes terres de retourner en friche et même d'être replantées. Est-ce normal, alors que beaucoup de jeunes seraient intéressés à devenir producteurs mais n'en ont pas les moyens? Nos zones vertes que nous avons défendues avec acharnement et avec énergie seront-elles en partie reboisées, abandonnées ou reboisées? Nos quotas de lait sont-ils des instruments de développement comme nous l'avions prévu? C'est des questions qu'il faut se poser suite à cette loi qui est déposée aujourd'hui et qui sera en force à partir du mois de juin. Est-ce qu'ils favorisent le transfert des fermes?

Alors, ça veut dire que la commission de l'agriculture aura d'autres dossiers très importants pour assurer l'avenir et le développement de l'agriculture. Quelle serait la formule idéale pour assurer aux jeunes l'opportunité de s'établir en agriculture? Les crédits agricoles répondent-ils aux besoins de l'agriculture d'aujourd'hui? C'est des questions qu'il faut se poser. Est-ce que l'on peut se comparer à l'entreprise industrielle sur ce point? Est-ce qu'on n'hésite pas à dépenser des sommes énormes pour créer un emploi industriel? Des millions de dollars dans certains projets. Et on assure peut-être un petit 20 000 $ à un jeune qui veut s'envoyer en agriculture. Est-ce que c'est équitable? C'est la question qu'il faut se poser.

Nos familles rurales, emblème de la fidélité à nos engagements, le berceau des belles familles québécoises, berceau de plusieurs grands hommes et de grandes femmes qui ont marqué la société et la collectivité actuelle à travers la province de Québec, qui ont fondé nos plus belles institutions coopératives, ces hommes qui ont donné de leur temps, de leur coeur, de leur énergie, eh bien, il faut les reconnaître, il faut leur donner l'opportunité de s'affirmer, de surveiller davantage le développement agricole.

Et cette mentalité, cette situation de vie, l'agriculture, c'est plus qu'une vocation, c'est plus qu'une profession, c'est un état de situation pour une famille, pour un milieu. Et je pense que c'est également un réservoir de valeurs profondes à conserver à la société tant d'aujourd'hui que de demain. Autant de questions que nous devons nous poser ensemble et auxquelles nous devons répondre et trouver les réponses concrètes.

La recherche technologique est-elle à point dans la province de Québec, accessible à l'ensemble des agriculteurs? Nos fermes expérimentales sont-elles en arrière des agriculteurs ou en avant, en termes de recherche, en termes d'idées nouvelles? Est-ce qu'on est 10 ans en avant ou 10 ans en arrière?

Et nous autres du ministère de l'Agriculture, la transformation des programmes que nous avons faite cette année va sûrement donner une lueur d'espoir aux jeunes agriculteurs et à ceux qui veulent continuer dans cette profession. Est-ce qu'on a consulté les intéressés, les premiers intéressés dans l'application de ces programmes, dans la réforme de ces programmes? Est-ce que les agriculteurs peuvent devenir des collaborateurs importants dans les nouvelles orientations de l'agriculture?

(11 h 50)

Soutenir la relève féminine et masculine. Pourquoi ne pas permettre la création de sociétés d'investissement agricole, comme des genres de REER ou pour fournir du capital de risque en agriculture, faire reconnaître la ferme familiale comme entité sociale importante par les deux paliers de gouvernement, favoriser la location de fermes à des producteurs, à des jeunes qui veulent s'établir en agriculture? On reboise des fermes actuellement qui coûtent au-delà de 700 $ l'hectare à reboiser. Est-ce que le gouvernement ne pourrait pas les acquérir et les louer à des prix modiques, pendant une période de cinq ans, à des jeunes qui veulent s'installer, qui veulent peut-être donner à la région, à la province, de nouvelles productions, des productions encore plus spécialisées?

Ce qui reste ou ce qui doit devenir primordial, c'est la motivation des hommes et des femmes qui vivent dans le domaine agricole. Et je crois que la mise en place de ce projet de loi, qui a causé beaucoup d'inquiétudes, va redonner confiance, va redonner une lueur d'espoir à ceux qui voient en l'agriculture un élément de gagner leur vie honorablement dans l'équité également de la qualité de vie des autres professions. Le syndicalisme agricole également se doit de demeurer un interlocuteur valable et de s'adapter aux nouvelles orientations de l'agriculture. Il ne faut pas craindre de heurter des habitudes et de parler vrai en agriculture, comme le gros bon sens de la plupart des gens qui vivent dans ce domaine-là.

Nous espérons que cette loi n° 23 servira à sensibiliser les autorités en place aux problèmes rencontrés par l'agriculture et aussi servira à la promotion de la personne dans son métier d'agriculteur. Il est important pour nous de comprendre cette réalité, et je crois que la discussion qui a été faite autour de la loi n° 23 se devait d'être faite. Et je crois que l'unanimité qui épaule ce rapport qui est déposé aujourd'hui à l'Assemblée nationale va permettre de retrouver une certaine sérénité dans le monde agricole, en collaboration étroite avec les milieux ruraux, avec les autres professions, et permettre à chacun d'y trouver son compte. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Roberval. Nous cédons maintenant la parole au whip en chef de l'opposition et député des Îles-de-la-Madeleine. Alors, M. le whip en chef.


M. Georges Farrah

M. Farrah: Oui. Merci, M. le Président. C'est à mon tour d'intervenir dans le débat sur le dépôt de ce rapport de la commission parlementaire de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation relativement à la réglementation qui doit sous-tendre le projet de loi n° 23. Dans un premier temps, vous me permettrez aussi de remercier l'ensemble des députés de cette commission, des deux côtés de la Chambre. On a démontré, je pense, qu'au-delà de la ligne partisane il y avait moyen, dans notre système parlementaire, d'arriver avec une approche constructive et de faire en sorte que nos clientèles respectives, en l'occurrence le monde agricole, puissent être défendues adéquatement à l'intérieur de cette Assemblée.

M. le Président, c'est quoi exactement qui nous amenés, nous, les députés de cette commission parlementaire, à faire en sorte qu'on présente ce rapport, qu'on le dépose et, par conséquent, qu'on recommande au gouvernement – ultimement, c'est le gouvernement qui tranchera et décidera – ce projet de réglementation au niveau des bruits et des odeurs, au niveau des nuisances? C'est quoi qui a fait en sorte que la commission parlementaire en arrive à cela?

Parce que, en fin de compte, c'est pratiquement une première qu'une commission parlementaire, de façon unanime, soumette une réglementation au gouvernement. À ma connaissance, moi, ça ne fait pas loin de 12 ans que je suis en cette Chambre et je n'ai jamais vu ça. Parce que, normalement, de la façon dont on fonctionne, c'est que le gouvernement, avant sa publication, peut soumettre cette réglementation-là ou ces règlements à la commission qui, elle, va faire en sorte de les analyser en fonction de ce que le gouvernement a l'intention de présenter. Alors, c'est un peu à l'inverse, c'est la commission qui présente des règlements. Parce qu'on ne les connaît pas, évidemment. C'est la raison pour laquelle on le fait.

À mon point de vue, ce qui a amené à déposer un tel rapport et à soumettre ce projet de réglementation au gouvernement, il y a plusieurs raisons qui nous ont motivés. À mon point de vue, d'une part, c'est la faiblesse du ministre actuel, le ministre de l'Agriculture, qui, depuis son accession au cabinet, a démontré de façon très tangible son manque de leadership en ce qui concerne la défense du monde agricole.

Et j'en ai pour preuve La Terre de chez nous d'avril dernier, 10 au 16 avril, qui dit: «Entre les producteurs agricoles et le gouvernement, rien ne va plus.» En éditorial, M. Pellerin dit: «Refus global à l'égard de ce que le gouvernement nous présente.» Et, en conclusion, qu'est-ce qu'il disait, M. Pellerin, dans cet éditorial? Il disait: «Assez, c'est assez. Le refus des producteurs et des productrices agricoles est global, ce refus qui est retentissant, qu'ils vont signifier le 16 avril prochain – donc, la manifestation qu'il y a eu sur la colline parlementaire – un refus qui vient de la terre, qui monte des campagnes, qui balaie les régions et qui interpelle la collectivité pour lui signaler que le temps est venu de dire non, si on veut d'un avenir encore possible pour l'agriculture puis dans un Québec agricole devenu de plus en plus incertain.»

Alors, c'est ça, M. le Président. On a lu des lettres, notamment de la Fédération des producteurs de porc, pas plus tard qu'en avril dernier, où la Fédération disait, M. le Président, lettre ouverte: «On a l'impression que règne au MAPAQ un climat de mépris, d'insouciance à l'égard des producteurs et productrices jamais égalé dans l'histoire de l'agriculture du Québec.» Et en terminant, en conclusion, on disait, au niveau de la Fédération des producteurs de porc: «À partir d'aujourd'hui, nous vous demandons de ne plus parler du dynamisme du secteur porcin dans vos discours économiques – en parlant au ministre – puisque nous ne parlerons plus, dans nos interventions, de l'existence du ministre de l'Agriculture.»

Je pourrais en citer, M. le Président, des dizaines et des dizaines. Alors, par conséquent, on peut voir que, d'une part, il y a eu une perte de confiance du monde agricole à l'égard de ce ministre et à l'égard du gouvernement également. Le gouvernement, pour quelle raison? Bien, vous avez eu des tergiversations, M. le Président, au niveau de l'agriculture, de ce gouvernement qui, en décembre 1994, lors du congrès de l'UPA, ici même, à Québec... Quatre ministres de ce gouvernement, à l'époque, étaient présents pour promettre aux producteurs et productrices agricoles du Québec une loi sur le droit de produire, pas plus tard qu'en juin 1995. Nous sommes rendus au mois de mai 1997 et l'application de cette loi n'est pas encore en cours, M. le Président, parce qu'on n'a pas cette réglementation. Alors, vous comprendrez que, par conséquent, d'avoir suscité autant d'espoir chez ces clientèles et de ne pas avoir livré la marchandise, on peut comprendre le désarroi du monde agricole à l'égard du gouvernement.

Évidemment, le projet de loi n° 23 aussi, qui a été déposé, on a voté, nous, comme opposition officielle, M. le Président, pour son principe mais contre son adoption, pour une raison bien claire et bien simple, parce que nous ne connaissions pas, à l'époque, les règlements et nous ne les connaissons pas non plus encore. Alors, les règlements, c'est l'os et l'ossature de ce projet de loi là. Alors, par conséquent, il m'apparaissait incohérent de voter en faveur du projet de loi n° 23, pour son adoption, sans connaître les conséquences et les répercussions de ce projet de loi là sur le terrain, au niveau du monde agricole. Alors, c'est la raison pour laquelle, M. le Président, le monde agricole n'a pas pu faire confiance à ce gouvernement jusqu'à présent, compte tenu qu'on était dans l'inconnu pur et simple.

Autre raison, M. le Président, qui nous a amenés, comme commission parlementaire, à faire cette proposition, c'est la commission parlementaire. Vingt-trois groupes sont venus en commission, en l'espace d'à peu près deux semaines, et tous demandaient ou signifiaient l'urgence d'agir et aussi demandaient au gouvernement que, avant qu'il publie cesdits règlements, on nous les soumette.

Parce que, en fin de compte, la commission parlementaire s'est déroulée de façon à ce qu'on discute de quelque chose qu'on ne connaissait pas. Alors, ce n'est pas facile de porter un jugement sur quelque chose que vous ne connaissez pas, M. le Président. Alors, encore là, on a vu que de façon unanime tout le monde veut voir les règlements avant leur publication pour justement faire en sorte que, s'il y a quelque chose qui ne va pas, on puisse allumer les lumières et dire au gouvernement: C'est dangereux, ce que vous faites là.

Alors, tout ça, M. le Président, nous a amenés, comme membres de la commission parlementaire, à soumettre une proposition de règlement qui... C'est une première, en quelque sorte, parce que nous n'avons pas, nous, tous les outils nécessaires, tous les conseillers au niveau des différents ministères, pour faire en sorte de nous alimenter adéquatement. Mais, compte tenu que, d'une façon objective, les deux côtés de la Chambre, nous avons voulu travailler pour le bien-être du monde agricole et pour l'avancement de cette industrie qui est fort importante au Québec, alors il nous est apparu très important de justement faire cette proposition au gouvernement.

(12 heures)

Ceci étant dit, et dans le rapport c'est très, très bien mentionné, on dit au gouvernement et on espère que les règlements, avant la publication, vont être soumis à la commission, qu'ils vont nous être présentés pour justement faire en sorte et s'assurer que, en ce qui nous concerne, ces règlements représentent les attentes que la commission a manifestées, compte tenu de la commission parlementaire que nous avons tenue, compte tenu du cheminement de tous et chacun alentour de la table qui sont en contact constant avec le monde agricole.

Cependant, je dois vous admettre, M. le Président, que j'ai une réserve à un certain niveau. Malgré la meilleure intention du monde, je pense que la réglementation qui est soumise ici, dans ce rapport déposé en cette Chambre, représente assez bien un consensus assez large au niveau de la société, notamment au niveau du monde agricole. Mais la réserve que j'ai, c'est que, malgré qu'on pourrait avoir le plus beau règlement du monde, le règlement qui, nous, on pense, pourrait faire en sorte de susciter un large consensus dans le milieu rural au Québec, malgré qu'on aurait ce beau règlement là – si on l'a, parce qu'on ne le connaît pas encore – je ne suis pas convaincu que la loi n° 23 a préséance sur le pouvoir des municipalités.

Alors, nous, on peut envoyer aux municipalités le plus beau règlement disant: Vous appliquez cela, et nous pensons que c'est la solution pour l'avenir agricole et pour le développement durable. Et, si la municipalité nous dit: Non, moi, je ne veux pas ça, parce que le maire est un environnementaliste – il a le droit de l'être – ou qu'il y a une majorité de la population qui malheureusement est contre le développement agricole, effectivement ma crainte – et je soumets respectueusement ça aux membres de cette Chambre – c'est que les municipalités auront préséance pour faire en sorte que la réglementation comme telle, si elles ne veulent pas l'adopter, elles ne l'adopteront pas.

Alors, par conséquent, c'est mon questionnement – et je soumets ça aussi pour réflexion au gouvernement – à l'effet que je me demande si on ne doit pas regarder la loi n° 23 et, le cas échéant, peut-être amener un amendement pour faire en sorte que la réglementation qui sera décidée en temps utiles ait force de loi et ait préséance sur d'autres lois, M. le Président. Parce que, comme je vous dis, ma grosse crainte, c'est celle-là – et je pense qu'elle est fondée: si les municipalités décident de ne pas appliquer le règlement, quand bien même que ce serait le plus beau règlement au monde, bien évidemment c'est le monde agricole qui va en souffrir, et on va revenir dans la même situation que nous connaissons actuellement, c'est-à-dire le bordel le plus total.

Parce que vous avez quatre ministères d'impliqués au niveau de ce dossier-là: Santé et Services Sociaux, Affaires municipales, Environnement et Agriculture. Alors, si la loi n'est pas claire et ne fait pas en sorte d'avoir préséance sur ces autres lois, et c'est la réserve que je vous soumets respectueusement, je vous dis, M. le Président, que c'est un problème majeur qui va survenir. Et j'espère que le gouvernement est allumé à cet effet pour faire en sorte que, si, le cas échéant, on doit amender la loi 23, on le fasse pour le bien-être du monde agricole, et dans ce sens-là on passera du discours aux actes. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le whip en chef de l'opposition et député des Îles-de-la-Madeleine. Nous cédons maintenant la parole au député de Beauce-Nord. Alors, M. le député.


M. Normand Poulin

M. Poulin: Oui, M. le Président. Je prends la parole aujourd'hui concernant le rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, la CAPA, en pensant d'abord et avant tout au monde agricole, aux hommes et aux femmes, aux familles qui cultivent et produisent en Beauce, en Chaudière-Appalaches et à la grandeur du Québec. C'est d'eux autres qu'il s'agit ici. C'est eux autres, les agriculteurs de la Beauce, les agriculteurs de tout le Québec, qui sont concernés par les règlements que ce gouvernement nous promet pour le mois de juin. Au moment où on se parle, c'est rendu qu'on est en train de se demander: Ça va être quoi, le résultat net de la loi n° 23 adoptée par le gouvernement actuel?

Ces gens-là nous disent toutes sortes de choses, mais, dans les faits, on se demande qui prend la défense des agriculteurs du Québec. La commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, la CAPA, dont le mandat est de légiférer dans le domaine agricole, a dû présenter au gouvernement des propositions de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières. Suite aux consultations tenues en avril 1997, ils visent à établir des paramètres pour une cohabitation plus harmonieuse entre les différents utilisateurs et les occupants de la zone agricole.

Le 20 juin prochain, on nous dit que les nouveaux règlements entreront en vigueur, mais, à ce jour, personne ne les connaît. Il n'y a personne dans ce gouvernement qui a pensé que le mois de juin, pour les agriculteurs et les agricultrices au Québec, c'est le mois le plus occupé, où le monde agricole n'a pas le temps d'appliquer la réglementation qui vient de Québec. Personne n'a pensé dans ce gouvernement qu'au mois de juin les agriculteurs sont occupés à s'occuper d'agriculture. Partout dans les comtés du Québec, dans les rangs, dans les villages, les producteurs agricoles travaillent dur, du matin jusqu'au soir, pour nourrir leur terre, ensemencer, labourer, surveiller la qualité de leur production. Pensez-vous deux minutes que les agriculteurs vont avoir le temps de faire venir les nouveaux règlements, de s'asseoir avec leur avocat, leur agronome, leur vétérinaire, leur conjoint et leurs enfants pour essayer de comprendre ce que Québec a décidé pour eux?

M. le Président, c'est pas mal plus grave qu'on pense. Quand on regarde la loi n° 23, tout ce qu'on voit, c'est que personne ne défend les agriculteurs et le monde agricole. Et l'on attend une réglementation qui pourrait mal s'adapter aux activités agricoles.

On nous dit qu'on va créer des comités consultatifs dans toutes les régions du Québec, des comités consultatifs sans aucun pouvoir. Des comités consultatifs pour faire quoi? Pour cultiver la chicane dans toutes les régions du Québec, pour une fois soumettre le monde agricole et les agriculteurs au bon vouloir du monde municipal et des municipalités régionales de comté. Ça, M. le Président, ce n'est pas n'importe où, ce n'est pas pour n'importe quel terrain vague; on va piler sur la fierté et la dignité des agriculteurs du Québec en zone verte, là où on devrait tout faire pour protéger l'agriculture, la renforcer, en faire la promotion, la défendre. On va faire des comités consultatifs sans aucun pouvoir où, de toute façon, le dernier mot n'appartiendra pas aux cultivateurs.

À mon avis, M. le Président, avec les dizaines de pages de nouvelles réglementations, on va cultiver le mythe que l'agriculture, c'est dangereux. À mon avis, ce gouvernement est en train d'emprisonner le cultivateur et d'empoisonner son existence à l'intérieur de son propre territoire, sur sa propre terre, avec des normes et des règles sur les poussières, le bruit et les odeurs, pilotées par les urbanistes de ce monde. Ce gouvernement est en train d'encabaner le producteur agricole dans son droit fondamental et historique de produire et de cultiver, d'exploiter la terre qu'il a acquise et défrichée de génération en génération.

C'est ce que je voulais dire, M. le Président. C'est inconcevable qu'un ministre de l'Agriculture se désengage de l'agriculture et laisse au ministre... le soin de décider des besoins du monde agricole, et que la CAPA doit lui recommander ce qu'il doit faire. Je pense qu'il y a assez de misère au Québec sans faire exprès pour nuire à ceux et celles qui se lèvent à tous les matins pour prendre soin de leur terre, de leur troupeau et qui ne demandent pas mieux, M. le Président, que de cultiver le progrès.

Nous autres, les députés de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, on est tannés que ça traîne. On veut que le ministre s'enlève les mains de devant les yeux. Nous voulons que l'agriculture progresse au Québec. On a fait un bout de chemin. Il est grand temps que ce gouvernement agisse correctement en faveur de l'industrie agroalimentaire et comprenne la réalité du monde agricole. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Beauce-Nord. Le débat sur le rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation étant maintenant terminé et considérant également l'heure tardive, nous allons tout simplement suspendre nos activités jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 8)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes, MM. les députés, nous allons débuter par un moment de recueillement. Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous débutons immédiatement la séance par les affaires courantes.


Déclarations ministérielles

Alors, aux déclarations ministérielles, M. le premier ministre.


Création du ministère de la Famille et de l'Enfance


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, mon gouvernement a fait connaître lors du Sommet sur l'économie et l'emploi les grandes orientations de sa nouvelle politique familiale. Nous entreprenions alors une réforme majeure du soutien au développement de l'enfance et d'aide à la famille afin de mieux soutenir les parents dans l'exercice de leurs responsabilités tant familiales que professionnelles.

De façon claire, nous avons exprimé un parti pris à l'égard des enfants, de leur développement et de leur réussite. Rappelons les trois objectifs majeurs qui sous-tendent cette politique familiale: l'équité entre les familles par un soutien financier et une aide accrue aux familles à faibles revenus, la conciliation du travail et de la famille, l'égalité des chances et le développement harmonieux des enfants.

En affirmant, en janvier dernier, que les enfants constituent notre plus grande richesse, nous avons rendu publiques les trois grandes mesures découlant de la politique. Il s'agit de la prestation unifiée pour enfant, des services éducatifs et de garde et du régime d'assurance parentale.

Pour que la politique familiale soit horizontale et multisectorielle, cela impliquera des changements importants dans notre façon de planifier les services et de mettre en place les ressources. Cela impliquera également l'action concertée de plusieurs ministères et organismes gouvernementaux.

Compte tenu de l'importance du mandat confié à la ministre responsable du dossier et de la nécessité de lui fournir les outils et les moyens pour mener à terme ces nouvelles dispositions de la politique, je suis heureux d'annoncer, à l'occasion de la Semaine québécoise des familles, qu'au cours des prochains jours, pour débat, l'Assemblée nationale sera saisie d'un projet de loi créant le ministère de la Famille et de l'Enfance.

Nous souhaitons que ce nouveau ministère ait pour mission de favoriser, en concertation avec tous les partenaires familiaux, le plein épanouissement de l'enfant et de la famille en considérant la diversité des modèles familiaux, en accordant une priorité aux besoins des enfants en matière d'équité dans les services et le soutien financier et en assurant une cohérence et une coordination des actions gouvernementales. Il se verrait donc confier le mandat d'implanter la nouvelle politique familiale et regrouperait les mandats et les fonctions actuelles de l'Office des services de garde et du Secrétariat à la famille. La gestion d'un réseau complet de centres de la petite enfance relèverait aussi de ce ministère.

Un tel ministère, M. le Président, nous apparaît être la structure la mieux adaptée aux responsabilités de coordination gouvernementale et de développement des services destinés à l'enfance et à la famille. Ce choix exprime l'importance que mon gouvernement accorde à la famille et à l'enfance. Réclamé par les groupes et organismes de concertation voués à la famille, ce ministère permettrait une meilleure intégration des politiques, des programmes et des plans d'action en matière de famille et de services à la petite enfance. Il faciliterait aussi une meilleure coordination des ministères, des organismes et des partenaires.

En plus de donner à ce ministère tous les outils pour aller plus loin dans la recherche de solutions pour le mieux-être des familles et des enfants, ce nouveau ministère viendrait également concrétiser notre action en leur faveur: mieux épauler les parents dans la tâche exigeante d'éduquer leurs enfants et s'assurer que leurs besoins essentiels soient satisfaits. Le gouvernement assumera ainsi sa responsabilité de faciliter la mise en place des conditions pour assurer la sécurité économique des parents, des mères, des pères et, par conséquent, des enfants. Cette responsabilité devra s'exercer dans le respect du choix des parents d'utiliser ou non les services offerts en support à la conciliation du travail et de la famille. Ce ministère, c'est une action gouvernementale de plus pour que les enfants soient au coeur de nos choix. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le premier ministre. Je cède maintenant la parole à M. le chef de l'opposition officielle.


M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, M. le Président. S'il y a une chose qui nous réunit tous, homme ou femme, riche ou pauvre, qu'on ait eu accès aux études ou pas, qu'on ait un emploi ou qu'on soit chômeur, c'est que nous venons tous et toutes d'une famille et que, pour la plupart des gens, nous aurons ou avons eu l'occasion d'en fonder une.

On doit remarquer néanmoins la morosité et l'inquiétude qui se sont emparées des familles québécoises depuis quelques années, morosité et inquiétude devant le sort réservé aux générations qui nous suivent, devant le rétrécissement du marché de l'emploi, d'une part, mais également devant les bouleversements et les soubresauts qu'a connus la famille québécoise... amènent dans la réalité de la vie de tous les jours les hommes et les femmes qui fondent des familles et les enfants qui en sont issus.

Devant une telle problématique pour un sujet aussi central à l'avenir de notre société, je suis désolé que le gouvernement et le premier ministre nous annoncent une solution de structures par la mise sur pied d'un ministère de la Famille et de l'Enfance, comme si ce geste était équivalent à celui de répondre à un lobby, celui des familles et de l'enfant, comme on répond à celui de Montréal avec un ministère de Montréal, à celui des régions par un ministère des Régions, à celui de la forêt avec le ministère des Forêts, à celui du tourisme avec le ministère du Tourisme. C'est à ses gestes et non aux structures qu'il met sur pied que le gouvernement doit être jugé, et, à l'égard des familles québécoises, on a vu l'enflure verbale, à mon sens, du gouvernement qui prétend avoir procédé à une réforme majeure de la politique familiale, alors que tout ce qui est en cause, c'est de prendre un peu plus de 300 000 000 $ dans divers programmes destinés à maintenir les choix des familles québécoises sur la façon dont elles désirent s'occuper de leurs enfants, sous forme d'allocations – ce soutien qui existait – de crédits, d'exonération au titre des frais de garde, pour transformer ce 300 000 000 $ et quelques en un autre 300 000 000 $ et quelques sous la forme de l'allocation unifiée et de la garderie à modèle unique à 5 $ par jour, idéalement opérée par des syndiqués de la CSN.

(14 h 10)

M. le Président, le premier ministre ne nous dit pas que ce qu'il appelle «sa réforme majeure», en réalité, est à l'avantage de deux groupes de nos concitoyens: les hauts salariés qui ont des enfants et qui pourront désormais les faire garder à 5 $ par jour et, d'autre part, les familles, notamment, monoparentales de la sécurité du revenu, pour qui le système de garde sera gratuit, ayant à l'esprit qu'elles n'auront pas les moyens de se chercher un emploi, aux conditions où un premier emploi ou un emploi d'entrée sur le marché du travail peut être disponible, dans la mesure où le 5 $ par jour sera dorénavant payable par ces familles, à un point tel que c'est un impôt virtuel de 1 000 $ à 2 000 $ par année qui sera donc payé par de telles familles dans ces conditions. Mais qui paie, étant donné que ce sont ces deux groupes qui en bénéficient? Ce sont les familles à revenus moyens. Ce sont notamment les familles à revenus moyens qui ont des enfants en bas âge, dont l'un des conjoints – en général, la mère – décide de rester à la maison. Et ce choix des familles québécoises – et de nombreuses familles québécoises – n'est pas respecté.

On respecte le choix des parents lorsque l'argent qu'on peut leur consentir, les moyens qu'on peut leur donner sont indépendants de la forme de la famille qui est en cause, sont indépendants des choix personnels qu'ont fait souvent maris et femmes quant à savoir: Qui travaillera et qui restera à la maison, pour les familles ou ce choix est possible. Mais ce choix est désormais impossible.

Quoiqu'en dise le premier ministre, qui prétend que sa politique respectera le choix des familles – comme c'est drôlement dit! – d'utiliser ou ne pas utiliser les services mis à leur disposition, bien, cette attitude et cette approche ignorent que le véritable choix existait jusqu'à cette soi-disant réforme majeure, que les familles pouvaient décider comment elles assuraient le meilleur départ possible de leurs enfants, comment elles assuraient qu'elles avaient un choix dans les services de garde qui leur étaient disponibles, comment, en réalité, s'il y avait au moins une politique de développement économique, de création d'emplois, des véritables choix qui sont fondés sur la capacité de dépenser et d'investir, pour ces familles, comme chacun entend le faire et non comme on veut le dicter par un modèle unique, que ces créations d'emplois, que le développement économique est la source des véritables choix que les familles québécoises peuvent exercer.

Il est évident que la fiscalité telle que veulent désormais la pratiquer le premier ministre et son gouvernement ne se colle pas à la réalité des familles québécoises dans toutes leur variété, la diversité des modèles de famille – monoparentale, recomposée – et avec tout ce que ça signifie comme alternatives pour l'ensemble des parents.

M. le Président, à mon sens, le premier ministre aujourd'hui n'a rien annoncé de concret. Ce sont les gestes et les décisions et les ressources qui sont consenties aux familles québécoises qui sont concrets. Il n'y a rien de concret aujourd'hui, et je sais que, malgré cette annonce, les familles québécoises, comme elles le réclament depuis le mois d'octobre dernier, souhaitent enfin qu'on les convoque, qu'elles soient consultées, qu'une commission parlementaire soit tenue afin de jeter un éclairage sur l'ensemble de cette problématique, que l'ensemble des familles québécoises puissent venir s'exprimer et que les choix véritables des familles du Québec soient respectés enfin par le gouvernement.

Le Président: Merci, M. le chef de l'opposition officielle. M. le premier ministre, pour votre droit de réplique.


M. Lucien Bouchard (réplique)

M. Bouchard: M. le Président, nous faisons deux choses, et nous les faisons dans l'ordre correct. Premièrement, il faut redéfinir une politique familiale et, une fois qu'elle est redéfinie et que la voie est tracée, il faut nommer un acteur qui va être responsable au plus haut niveau, c'est-à-dire au niveau du Conseil des ministres. Donc, il fallait qu'il y ait un décideur ministériel qui assume cette grande réforme que nous avons lancée.

Cette réforme, quoi qu'en dise le chef de l'opposition, a été saluée, lorsqu'elle a été annoncée, avec un concert d'éloges quasi unanimes. Bien sûr, nous sommes présentement en train de définir les paramètres précis de sa mise en oeuvre, nous sommes en train de mettre au point les détails. Il y a des angles à arrondir, nous le savons, nous sommes à travailler là-dessus, mais fondamentalement tout le monde au Québec reconnaît que cette politique est saine et qu'elle satisfait, pour une première fois, les besoins essentiels des enfants, alors que ce n'était pas le cas dans la mosaïque des mesures que nous avions auparavant, qu'on introduit une cohérence entre les différentes politiques familiales du gouvernement, qu'on met en place des services éducatifs et des services de garde pour les enfants et qu'on crée une assurance parentale supérieure à celle qui existe présentement, c'est-à-dire de meilleurs bénéfices et avec un éventail de bénéficiaires plus large.

M. le Président, cette politique repose sur une prise de conscience de l'évolution de notre société et du fait que, dans le premier cas, nous découvrons que beaucoup de familles sont monoparentales et qu'on assiste à une évolution – c'est la situation qu'on observe – où, par exemple, 25 % des enfants du Québec vivent dans des familles monoparentales et au-delà de 70 % de ces enfants vivent dans des familles où le revenu est moins de 25 000 $. Il y a donc un très grave problème social là.

C'est la plus grande richesse du Québec. Et un petit enfant, M. le Président, qu'il soit dans une famille pauvre, riche, moyenne, à faibles revenus ou démunie, c'est l'espoir du Québec. L'espoir du Québec est dans chacun de ces petits enfants qui poussent au Québec, peu importent les moyens des parents, peu importent les conditions où ils vivent. Donc, quand il se trouve qu'autant d'enfants du Québec vivent dans les conditions qu'on connaît, l'État doit intervenir. Nous devons, par solidarité, mettre en oeuvre des moyens qui vont nous permettre de former ces jeunes, de leur donner des chances. Égalité des chances pour les enfants, M. le Président, je crois que c'est au coeur de la politique.

Deuxièmement, nous constatons, bien sûr, que de plus en plus de conjointes et de conjoints travaillent tous les deux et que, même dans les familles monoparentales, la mère – c'est en général le cas, c'est une mère qui est monoparentale – est obligée de travailler. Alors, qu'est-ce qu'on fait des enfants? Comment une femme, par exemple, ou comment un conjoint qui veut rester à la maison – c'est assez rare, mais on le voit de plus en plus – peuvent assumer et réconcilier leurs tâches professionnelles et le fait qu'ils ont des enfants? Alors, cette politique vient combler des trous béants qu'il y avait dans ce que nous avions.

Le choix, il est toujours là. Je le sais très bien, nous avons de multiples exemples près de nous et un peu moins près de parents qui décident de rester à la maison pour s'occuper de leurs enfants. Ils ont parfaitement le droit de le faire, c'est parfaitement légitime et l'État doit respecter ce choix. Et ces gens-là ne sont pas pénalisés, sauf que, si quelqu'un, pour des raisons de nécessité ou pour des raisons de choix, doit quitter la famille pour aller gagner la vie des enfants, il faut qu'on s'occupe des enfants, il faut qu'on crée des conditions telles qu'on puisse assurer une garde des enfants, qu'on puisse les éveiller, qu'on puisse, à la maternelle à cinq ans, par exemple, tout de suite faire en sorte qu'ils puissent préparer la scolarisation pour l'année qui vient pour être certains qu'on met toutes les chances de notre côté pour que, dans 10, 15 ans, ces enfants-là ne soient pas des décrocheurs, qu'ils aient eu les chances qu'ils ont le droit d'avoir dans une société qui est compatissante et ouverte pour les enfants. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le premier ministre.


Présentation de projets de loi

Nous passons maintenant à l'étape de la présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article a de notre feuilleton.


Projet de loi n° 122

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le leader du gouvernement, au nom du ministre des Transports, présente le projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives. M. le leader du gouvernement.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec afin de confier à la Société l'application du programme visant l'adaptation de véhicules qui était administré jusqu'à maintenant par l'Office des personnes handicapées du Québec.

De plus, il unifie les deux programmes qui permettent l'accès aux espaces de stationnement réservés aux personnes handicapées et en confie la gestion à la Société.

Enfin, ce projet de loi contient des dispositions de nature transitoire et des modifications de concordance.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article d, M. le Président.


Projet de loi n° 136

Le Président: À l'article d du feuilleton, M. le ministre de la Sécurité publique présente le projet de loi n° 136, Loi modifiant la Loi sur l'organisation policière et la Loi de police en matière de déontologie policière. M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Oui. M. le Président, ce projet de loi modifie les dispositions de la Loi sur l'organisation policière régissant les mécanismes de fonctionnement du système de déontologie policière au Québec.

Ce projet prévoit que le citoyen qui veut porter une plainte en déontologie à l'encontre d'un policier peut le faire auprès de tout corps de police ou au Commissaire à la déontologie policière. La personne qui reçoit la plainte a l'obligation de porter assistance au plaignant, de l'aider à identifier les éléments de preuve qu'il doit apporter à l'appui de sa plainte et de l'informer que la plainte sera soumise à la procédure de conciliation. Le Commissaire à la déontologie policière doit, après avoir procédé à une analyse préliminaire de la plainte, décider s'il s'agit d'un cas qu'il doit réserver à sa juridiction, notamment les plaintes qu'il juge d'intérêt public et celles impliquant la mort ou des blessures graves infligées à une personne, ainsi que les plaintes manifestement frivoles ou futiles. Dans les autres cas, le commissaire désigne un conciliateur. En cas d'échec de la conciliation, la plainte est retournée à la juridiction du commissaire, lequel doit décider du rejet de la plainte ou ordonner la tenue d'une enquête.

(14 h 20)

Ce projet prévoit de plus que lorsqu'une enquête est opportune le commissaire désigne un enquêteur, lequel dispose de trois mois pour la mener à terme. Un enquêteur ne peut être assigné à un dossier impliquant un corps de police auquel il appartient ou a déjà appartenu. À la suite de l'enquête, le commissaire peut décider du rejet de la plainte ou citer le policier visé devant le Comité de déontologie policière.

Ce projet prévoit que le Comité de déontologie policière siège dorénavant... à un membre qui est également avocat. Il prévoit que certains membres à temps partiel du Comité sont membres d'une communauté autochtone pour traiter d'une plainte qui vise un policier autochtone.

Il prévoit aussi qu'une requête peut être faite à la Cour du Québec pour obtenir le rejet sommaire d'un appel abusif ou dilatoire d'une décision du Comité de déontologie policière.

Enfin, le projet de loi contient d'autres modifications d'ordre plus technique ou de concordance ainsi que des dispositions transitoires.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. Claude Corbo a procédé à une étude sur la déontologie policière, aux différents sujets qui sont soulevés dans le projet de loi en question. Le rapport de M. Corbo a été déposé le 13 décembre 1996 et jamais on n'a pu, d'aucune façon, questionner M. Corbo. Est-ce que le ministre nous assure aujourd'hui qu'on pourra entendre M. Corbo, entre autres, à l'étude article par article en commission parlementaire?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, on verra en temps et lieu. Je retiens la suggestion qui est faite par le député de Frontenac, puis on verra.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée, entre-temps, accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, article e de notre feuilleton.


Projet de loi n° 126

Le Président: À l'article e du feuilleton, M. le ministre du Travail présente le projet de loi n° 126, Loi modifiant la Loi sur le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. M. le ministre du Travail.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre afin de prévoir l'ajout au Conseil d'un nouveau membre choisi par les personnes recommandées par les associations de salariés les plus représentatives et d'un nouveau membre choisi parmi les personnes recommandées par les associations d'employeurs les plus représentatives. Le projet de loi fixe également le quorum du Conseil à neuf membres.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article i, M. le Président.


Projet de loi n° 203

Le Président: À l'article i du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 203, Loi concernant Fiducie canadienne-italienne. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce rapport.


Mise aux voix

M. le député de Crémazie présente, en conséquence, le projet de loi n° 203, Loi concernant Fiducie canadienne-italienne. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques et pour que le ministre des Finances en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Cette motion est adoptée? Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article g, M. le Président.


Projet de loi n° 210

Le Président: À l'article g du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 210, Loi concernant la Ville d'Anjou. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.


Mise aux voix

Mme la députée de Pointe-aux-Trembles présente le projet de loi d'intérêt privé n° 210, Loi concernant la Ville d'Anjou. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Bélanger: Oui, M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article j, M. le Président.


Projet de loi n° 216

Le Président: Alors, à l'article j, j'ai reçu également le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 216, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.


Mise aux voix

M. le député de Crémazie présente le projet de loi d'intérêt privé n° 216, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté.

M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: La motion est-elle adoptée? Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article l, M. le Président.


Projet de loi n° 242

Le Président: Alors, finalement, l'article l. J'ai reçu également le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 242, Loi concernant la Municipalité régionale de comté d'Antoine-Labelle, la Régie intermunicipale des déchets de la Rouge et la Régie intermunicipale des déchets de la Lièvre. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.


Mise aux voix

Mme la députée de Blainville présente le projet de loi d'intérêt privé n° 242, Loi concernant la Municipalité régionale de comté d'Antoine-Labelle, la Régie intermunicipale des déchets de la Rouge et la Régie intermunicipale des déchets de la Lièvre. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Bélanger: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Alors, cette motion est-elle adoptée?

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Compte tenu de l'objet du présent projet de loi, est-ce que le ministre de l'Environnement va également s'intéresser à ce projet de loi?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, le ministre de l'Environnement s'intéresse toujours à tous les projets de loi qui touchent l'environnement.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée, M. le...

M. Paradis: Mais est-ce que la motion inclut, comme membre de la commission, le ministre de l'Environnement? On sait que le ministre des Affaires municipales, par la motion qui est présentée, va être membre de ladite commission. Est-ce que le ministre de l'Environnement va également s'intéresser à ce sujet comme membre de la commission?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, on peut toujours en reparler, mais la motion est... La norme, M. le Président, c'est toujours qu'un seul ministre soit membre d'une commission parlementaire. Alors, à ce moment-là, si l'opposition veut absolument que le ministre de l'Environnement... On en reparlera, M. le Président. On en reparlera.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, il y aurait consentement, M. le Président, pour que le ministre de l'Environnement soit membre de ladite commission.

M. Bélanger: M. le Président, on prend bonne note du consentement.


Mise aux voix

Le Président: Sur cette prise de bonne note, est-ce que la motion est adoptée? Elle est adoptée.


Dépôt de documents

Alors, au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le Président, j'ai un message du lieutenant-gouverneur, signé de sa main.

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, veuillez vous lever s'il vous plaît.


Message du lieutenant-gouverneur


Crédits supplémentaires n° 1 pour l'année financière 1997-1998

Alors, l'honorable lieutenant-gouverneur de la province de Québec transmet à l'Assemblée nationale du Québec les crédits supplémentaires n° 1 pour l'année financière se terminant le 31 mars 1998, conformément aux dispositions de l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867, et recommande ces crédits à la considération de l'Assemblée.

Alors, veuillez vous asseoir.

M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le Président, pour donner suite au message de Son Honneur le lieutenant-gouverneur, qu'il me soit permis de déposer les crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1998.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission plénière

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour déférer les crédits supplémentaires 1997-1998 en commission plénière afin que l'Assemblée les étudie et les adopte, conformément à l'article 289 de notre règlement.

Le Président: Cette motion est adoptée? Adopté.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des affaires sociales et député de Charlevoix.


Consultations particulières sur le projet de loi n° 39

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé les 18, 19 et 20 février 1997 et 8 avril, ainsi que le 6 mai 1997 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 39, Loi sur la protection des personnes atteintes de maladie mentale et modifiant diverses dispositions législatives.

Le Président: Alors, merci, M. le président de la commission des affaires sociales. Ce rapport est déposé. M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.


Étude détaillée du projet de loi n° 86

M. Lachance: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé les 1er, 6 et 8 mai 1997 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 86, Loi sur le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

(14 h 30)

Le Président: Alors, ce rapport est également déposé.


Dépôt de pétitions

À l'étape des dépôts de pétitions, M. le député de Masson.


Maintenir la maternelle mi-temps et octroyer les budgets nécessaires pour ce faire

M. Blais: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale et signée par 320 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de la circonscription de Masson.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le Québec est une société démocratique;

«Considérant que les parents sont les premiers responsables de l'éducation de leurs enfants;

«Considérant que le projet de maternelle temps plein cinq ans ne convient pas à tous les enfants et à tous les parents;

«Considérant que, lors des états généraux sur l'éducation, la Fédération des comités de parents du Québec n'a pas demandé la maternelle plein temps, mais a plutôt réclamé la maternelle mi-temps;

«Considérant que la maternelle mi-temps existante répond au choix spécifique de la moitié des parents du Québec, émis lors des sondages des commissions scolaires;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale: de maintenir telle qu'elle existe présentement la maternelle mi-temps, tout en offrant la maternelle temps plein à la demande des parents; de confier aux commissions scolaires et aux milieux-écoles le pouvoir et les budgets nécessaires pour répondre adéquatement à cette requête.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, merci, M. le député de Masson. Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas aujourd'hui d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.


Questions et réponses orales

Ce qui nous amène immédiatement à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Connaissance par le premier ministre des intentions de M. Jacques Parizeau quant à une éventuelle proclamation unilatérale de souveraineté

M. Johnson: Oui. M. le Président, mercredi dernier on a eu droit à tout un spectacle évidemment de la majorité ministérielle et de l'opposition officielle à Ottawa, qu'il s'agisse du premier ministre, qu'il s'agisse de M. Duceppe, député du Bloc québécois, qu'il s'agisse du vice-premier ministre, enfin d'un petit peu tout le monde l'autre côté.

Une voix: Chevrette.

Une voix: Le député de Joliette.

M. Johnson: On dirait qu'il y avait vraiment un concours... Le député de Joliette, oui, c'est vrai. C'était vraiment un concours pour savoir qui se distancerait le plus rapidement possible de Jacques Parizeau. On a sans doute établi des records de vitesse et de distance, l'autre côté.

Le jeudi, le lendemain, là les scribes avaient trouvé des lignes. Les lignes sont sorties presque en même temps de la bouche du vice-premier ministre, d'une part, dans un point de presse à l'occasion du Conseil des ministres, je présume, ou au sortir d'une réunion, et, d'autre part, évidemment de Mme Josée Legault, bien connue des milieux que fréquentent les gens d'en face. C'était presque mot à mot. Ça faisait un vrai beau couple, M. le Président, qui maintenant reconnaissait les mérites infinis, pour ne pas dire illimités, de M. Parizeau, dressait un bilan glorieux de ses 25 années comme membre du PQ.

Lundi, lors du lancement du livre de M. Parizeau et du lancement de quelques flèches, on doit le dire, par l'auteur du livre en question, on a remarqué que le député de Laviolette et whip de son parti avait, à l'évidence, donné des instructions dans le sens qu'il ne voulait pas voir un député péquiste se montrer la face dans cette affaire-là. C'était assez évident, là, que la redistanciation par rapport à Jacques Parizeau avait été remise à l'ordre du jour.

Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire aujourd'hui si, le mardi 13 mai, il considère que M. Parizeau est, comme mercredi dernier, un pestiféré ou s'il est, comme jeudi dernier, un de ses frères siamois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. Parizeau, j'ai... M. Parizeau est...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard: Je ne sais pas pourquoi je mentionne son nom, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: Alors, sur ce début de gaieté, en début de semaine, M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'ai eu l'occasion, la semaine dernière, mercredi et jeudi, en réponse à d'innombrables questions qui m'ont été posées par le chef de l'opposition, de dire tout ce que je pensais par rapport à cette question. Je n'en retire rien, je l'ai reconduit en totalité. Je n'y change rien. Elles sont inscrites dans les procès-verbaux de nos échanges, et je ne tiens pas à revenir là-dessus.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, en se souvenant que le premier ministre a dit tout ce qu'il avait à dire et son contraire à la fois en 24 heures, est-ce que le premier ministre par ailleurs, compte tenu de la récidive de M. Parizeau quant à ce qu'il a toujours envisagé, la récidive de M. Parizeau d'indiquer qu'un résultat en faveur du Oui à la question d'octobre 1995 lui permettait, l'habilitait à déclarer l'indépendance du Québec comme telle, contrairement à ce qu'il a dit pendant toute la campagne référendaire et contrairement à ce que le premier ministre, lui-même, a toujours laissé soupçonner, sauf quand il s'est échappé à deux reprises, est-ce que le premier ministre, compte tenu de ça, a une opinion quant à celle qu'un de nos prédécesseurs peut avoir eue à l'effet que M. Parizeau a démontré dans ce dossier un cynisme qui démontre le manque de respect qu'il a à l'égard de la démocratie, compte tenu de l'enjeu fondamental que représente l'avenir du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, comme d'habitude, j'ai pesé tous mes mots en Chambre mercredi et jeudi en répondant aux questions qui m'étaient posées. J'invite tout le monde à relire ce que j'ai dit. On y constatera une remarquable cohérence entre les deux journées.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard: Tout à fait, tout à fait. J'ai continuellement répété, durant ces deux journées, que la preuve a été administrée de façon éclatante que M. Parizeau avait bel et bien l'intention de respecter les engagements qui avaient été contractés. J'ai porté des jugements de valeur négatifs sur la malhabilité des rédactions qu'on a trouvées dans une partie du texte, notamment celle qui a été publiée dans Le Soleil . Pour le reste, Jacques Parizeau est ce qu'il est, avec son dossier, son histoire, et je suis sûr qu'il ne craint pas que l'histoire le juge sur toute la génération qu'il a occupée dans le paysage politique du Québec. Pour le reste, la page est close pour moi.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le premier ministre rejoint les déclarations ou enfin les confidences de certains de ses collaborateurs à des journalistes, en avril 1995, donc lors de son entrée un peu plus spectaculaire dans la campagne référendaire, dans le sens que les divergences de l'époque tenaient davantage sur l'emballage que sur le produit et que finalement et Jacques Parizeau, avec son discours et ses aspirations et la façon dont il a toujours envisagé comment on précipiterait les Québécois vers la sécession... sont entièrement partagées par le premier ministre qui n'avait que des hésitations sur l'emballage plutôt que sur le produit?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je ne sais pas à quelles déclarations le chef de l'opposition fait allusion. Ce que je sais, c'est qu'il y a eu les épisodes qu'on connaît, au terme desquels M. Parizeau a accepté de faire le virage qu'on connaît, qui s'est consacré par une entente formelle signée entre les chefs de trois partis après que les instances respectives de ces partis furent réunies pour l'autoriser, et que par la suite il y a eu en cette Chambre dépôt d'un projet de loi où la lettre et l'esprit de l'entente se trouvaient reproduits et il y a eu deux votes qui ont confirmé l'engagement de cette Assemblée nationale de respecter le programme qui avait été élaboré, dans son contenu comme dans sa formulation. Pour le reste, c'est les tentatives d'un politicien en mal de publicité de trouver son beurre dans une situation qui bien sûr est embarrassante pour les souverainistes, mais qui n'enlève absolument rien à la crédibilité des personnes en cause.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre, en disant que c'est embarrassant pour les souverainistes, évoque la réponse que M. Parizeau a donnée hier lorsqu'on lui demandait de répondre à certains de ses collaborateurs, qui étaient ses détracteurs mercredi et ses admirateurs jeudi, alors qu'il a dit que les réponses qu'il pourrait apporter, en jetant un nouveau regard sur cette histoire et sur son déroulement, seraient très embarrassantes?

Le Président: M. le premier ministre.

(14 h 40)

M. Bouchard: M. le Président, j'imagine que ce serait embarrassant pour l'opposition surtout. En ce qui me concerne, je n'ai rien à craindre de ce que qui que ce soit pourrait dire.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon, en principale.


Non-participation de certains organismes aux chantiers sur le nouveau pacte municipal

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Le pelletage de 500 000 000 $ de factures de la part du gouvernement dans la cour des municipalités, l'obligation pour les municipalités de réduire la masse salariale de leurs employés de l'ordre de 6 % et la possible prise en charge par les municipalités de nouvelles responsabilités sans nouvelles sources de revenus ont soulevé un tel tollé que le ministre des Affaires municipales a jugé nécessaire de créer trois chantiers de discussion et de déposer en catastrophe sa réformette de la fiscalité municipale. L'opposition et les intervenants du milieu ont qualifié d'improvisation la vingtaine d'éléments que l'on retrouve sur cette feuille 8½ X 14.

On apprend aujourd'hui que l'UMQ ne participera qu'à un seul chantier à la fois, que l'UMRCQ se retirera des chantiers pour un nouveau pacte fiscal tant et aussi longtemps que le ministre des Affaires municipales n'aura pas créé un moratoire sur les fusions scolaires et municipales, que le Syndicat canadien de la fonction publique, regroupant 32 000 employés municipaux, ne participera pas aux chantiers du ministre, que la Fédération des policiers, au moment où on se parle, met en sérieux doute sa participation aux chantiers.

On se rappellera, M. le Président, que le ministre, en cette Chambre, exaspéré par mes nombreuses questions, m'a dit, et je le cite: «Madame, sautez dans le train parce que vous allez rester toute seule sur le quai.»

M. le Président, comment le ministre des Affaires municipales peut-il expliquer aujourd'hui à son premier ministre, à ses collègues ministériels, que non seulement il sera seul dans le train, mais qu'il est incapable de le faire démarrer, puisqu'il a déjà déraillé?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: Alors, M. le Président, nous avons donc présenté, le 25 avril dernier, une proposition au monde municipal et des lieux pour discuter et en arriver à un nouveau pacte municipal pour rencontrer une obligation de résultat de 500 000 000 $ de réduction de dépenses pour le gouvernement et les municipalités. Nous devons convenir de ce pacte au plus tard le 1er septembre prochain parce que les délais qui sont impartis aux municipalités nous amènent à devoir respecter cette date de rigueur.

M. le Président, nous avons eu l'occasion d'avoir une rencontre la semaine dernière avec les intervenants municipaux. Nous devons donc indiquer que l'UMQ veut accélérer les travaux au plan de la main-d'oeuvre pour voir des résultats, puisque nous avons fixé qu'une contribution de 6 %, équivalant à celle qui a été réalisée dans le domaine public et parapublic, devrait être examinée pour les employés au niveau municipal et l'UMQ considère qu'il faut accélérer ce travail.

D'autre part, du côté de l'UMRCQ, on indique qu'on voudrait avoir des précisions à l'égard de l'élément de politique publié la semaine dernière par le ministre d'État au Développement des régions, à savoir la révision des territoires des MRC, et, au cours des prochaines heures, nous serons en mesure d'apporter ces précisions. Quant à l'opération mise en commun, M. le Président, je dois donc indiquer aujourd'hui que c'est déjà parti dans Brome-Missisquoi, que c'est déjà parti du côté de la rive sud, c'est parti à Lévis, c'est parti, également à Pabok, c'est parti également à la Communauté urbaine de Montréal, et, j'en conviens, M. le Président, ce n'est pas parti à Sainte-Foy.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, comment le ministre des Affaires municipales peut-il espérer des résultats d'ici au 1er septembre 1998 alors que lui, le gouvernement, n'est pas l'employeur des 80 000 employés municipaux, que les deux unions municipales ne sont pas les représentantes de la partie patronale que sont les municipalités et que la grande majorité des représentants syndicaux sera absente de ce chantier sur la réduction des coûts de la main-d'oeuvre?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: Voilà pourquoi, M. le Président, nous avons indiqué dès le départ que nous allions respecter les prescriptions au Code du travail qui prévoient que, en matière de relations de travail au Québec, c'est d'abord la bonne foi qui doit présider aux échanges entre les parties, et, à l'intérieur des règles qui sont édictées au Code du travail, entreprendre des pourparlers et des échanges lorsqu'il faut convenir soit d'une nouvelle convention collective, comme c'est le cas pour 536 conventions collectives dans le monde municipal qui sont échues actuellement, et, par ailleurs, avoir un lieu central d'échange sur certaines informations qu'il serait intéressant de partager pour trouver des éléments de réponse pour en arriver à cette contribution équivalente à 6 %, comme on l'a fait dans le secteur public et le secteur parapublic.

C'est pourquoi, M. le Président, la Fédération indépendante des syndicats autonomes, la FISA, et ses 80 syndicats, voilà pourquoi la CSD, voilà pourquoi la CSN et voilà pourquoi aussi les représentants d'un certain nombre de travailleurs regroupés au sein du Syndicat canadien de la fonction publique ont indiqué qu'ils désiraient que ces pourparlers se réalisent et qu'on laisse courir la libre négociation dans chaque municipalité. Nous avons l'intention de respecter la loi, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, le ministre des Affaires municipales pourrait-il répondre à la question? Comment entend-il respecter sa date butoir du 1er septembre 1997 alors que l'UMQ lui dit: Je ne discuterai qu'à un seul chantier à la fois? Il y a deux autres chantiers qui doivent aussi remettre des conclusions d'ici le 1er septembre, et je lui rappelle celui sur la table nationale de discussion pour un nouveau pacte fiscal... pacte municipal, à la page 8 de son discours, et le troisième qui est l'opération de mise en commun des ressources. Comment entend-il respecter cette date butoir, s'il lui manque la moitié des gens assis dans ces comités?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, nous y arriverons en travaillant.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, est-ce que le ministre des Affaires municipales est en train de nous dire qu'il préfère discuter tout seul et laisser de côté les gens qui devraient être là pour discuter avec lui?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: Alors, M. le Président, il est bien évident que nous avons des interlocuteurs, que nous sommes au début d'un processus d'échanges avec des regroupements de travailleurs, avec des municipalités de différentes tailles. Oui, il y a un certain nombre de chantiers, il y a un grand nombre de chantiers de mise en commun qui sont actuellement à l'oeuvre. Et, si on y met toute l'énergie nécessaire, si on y va avec la bonne foi, avec ouverture, eh bien, on sera capables de réaliser et de répondre à notre engagement solennel d'octobre 1996 au Sommet sur l'économie et l'emploi. Tout le monde devra contribuer à ce mouvement d'assainissement des finances publiques pour retrouver des conditions favorables aux créations d'emplois au Québec.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, le ministre des Affaires municipales se rappelle-t-il qu'au congrès de l'UMQ il a demandé aux membres de l'Union des municipalités du Québec de s'attabler dès le lendemain parce que, évidemment, l'échéancier était très court? Pourrait-il aussi nous dire qui compose les trois chantiers et depuis quand et à quelle date les chantiers ont commencé à discuter?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, nous avons donc indiqué les avenues que nous allions utiliser pour en arriver au résultat escompté: trois chantiers de travail en particulier. Nous avons eu nos premières rencontres formelles la semaine dernière. Oui, il y a des échanges qui se poursuivent, et c'est normal en pareil cas, avec les Unions municipales parce qu'il peut arriver que les personnes représentant les autres parties autour de la table, eh bien, que ces parties veuillent discuter davantage sur la quantité ou le nombre de personnes qui se retrouvent autour de la table. Nos échanges se poursuivent, et nous allons continuer de travailler de jour en jour pour en arriver au résultat escompté.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Est-ce que le ministre de la Métropole, responsable de la région de Montréal, réalise ce que cette discussion veut dire, c'est-à-dire de rouvrir la convention collective que la ville de Montréal a signée avec ses 4 000 cols bleus, entre autres, convention qui a pris quatre ans à être signée, à force de grèves et de discussions, convention qui a été signée sous la pression, je dirais, positive des médiateurs? Est-ce qu'il est d'accord avec cette méthode, M. le Président?

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.

M. Ménard: Ça ne veut pas nécessairement dire ça. Je pense que l'attitude du ministre des Affaires municipales est excellente puis je pense que, dans les critiques qui avaient été faites aux gouvernants au cours de la dernière année, c'est ce genre d'attitude que les municipalités préféraient, c'est-à-dire qu'on leur fixe des objectifs – et c'est ce que le ministre des Affaires municipales a bien expliqué, l'objectif global est de 500 000 000 $ – et que nous négociions avec elles sur la façon de mieux les remplir, de mieux les atteindre.

(14 h 50)

Actuellement, je comprends que la première réaction, lorsqu'un objectif de cette ampleur est imposé, c'est de dire: Non, non, non, nous gérons bien. La deuxième réaction, qui est celle que nous souhaitions, c'est de dire: Pourrions-nous mieux gérer et, ainsi, les contribuables paieraient moins?

L'objectif est fixé. Ce n'est pas la seule façon de l'atteindre que de réviser les conventions collectives. Ce n'est pas non plus en réduisant les avantages qu'on y a gagnés. Il peut y avoir d'autres solutions qui vont être trouvées. C'est par la négociation que nous le ferons. Et je pense que la CUM nous donne déjà, ainsi que la ville de Montréal, des signes qu'elles sont prêtes à se mettre à la table pour trouver cette solution et atteindre ces objectifs qui sont absolument incontournables. Ce ne sont pas des objectifs que fixe le gouvernement; ce sont des objectifs qui nous sont imposés par la situation qui nous a été léguée.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, en principale.


Recommandations du coroner Delâge concernant la sécurité dans les résidences pour personnes âgées

M. Paradis: Oui, M. le Président. Il y a un peu plus d'un an, le coroner Cyrille Delâge remettait au gouvernement son rapport d'enquête suite au décès de neuf personnes dans des locaux d'habitation pour personnes âgées. Le coroner Delâge adresse au gouvernement, dans cedit rapport, une vingtaine de recommandations et conclut en ces termes, je cite le coroner Delâge: «C'est un choix que notre société est appelée à faire. Peut-on tolérer encore bien longtemps que nos aînés puissent finir leurs jours dans des locaux d'habitation qui souvent ne rencontrent pas tous les critères de sécurité auxquels ils ont droit?»

Est-ce que le ministre de la Santé peut informer l'Assemblée nationale des suites qu'il a données à ces recommandations précises du coroner Delâge?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, le gouvernement a fait une de ses priorités du développement des ressources suffisantes pour les personnes âgées qui ont besoin d'établissements. On sait qu'il y a eu plus de 1 000 places nouvelles qui ont été développées dans des endroits où il en manquait de façon importante, au cours de la dernière année, et qu'il y a un autre 1 000 places qui seront développées, et impliquant souvent des nouvelles constructions, au cours de la prochaine année.

J'ai reçu, il y a quelques jours, le rapport du coroner. On l'a déposé à mon bureau il y a une semaine ou à peu près. Ce rapport a été examiné, et je peux assurer la Chambre que toutes les recommandations sont regardées de près. Et, comme toujours dans ces situations, M. le Président, le ministère va s'empresser de suivre les recommandations et de prendre les mesures nécessaires dans les meilleurs délais.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Comment le ministre de la Santé peut-il expliquer que ce rapport a été déposé à son bureau il y a quelques jours quand le rapport est signé du 4 décembre 1995 par Cyrille Delâge et qu'il a été remis au début de l'année 1996, il y a plus de 12 mois, par le coroner comme tel? Comment le ministre explique-t-il son inaction dans ce dossier?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je m'excuse, j'ai fait erreur. J'ai reçu, il y a à peu près une semaine ou deux, un document à mon bureau qui donne des informations sur les mesures qui ont été prises et sur les mesures qu'on devra continuer à prendre dans le cas, de façon générale, des centres d'hébergement et référant aussi au rapport du commissaire. Je m'excuse, j'ai fait erreur en pensant au dernier rapport que j'ai reçu, qui était le rapport du coroner pour des événements qui étaient arrivés sur la Côte-Nord dans le cas de la violence. J'ai vraiment mêlé les deux rapports.

Maintenant, pour informer plus en détail la Chambre, de façon précise, sur les suites de ce rapport, je devrai vérifier et revenir avec l'information plus détaillée, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, qu'est-ce que le ministre du Travail, qui est responsable de la sécurité dans les bâtiments publics, a fait suite au dépôt de ce rapport du coroner où 12 des recommandations s'adressaient à lui?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, il me fait plaisir d'informer la Chambre qu'on a rencontré, que le ministère du Travail a rencontré le ministère de la Santé et des Services sociaux. On a formé un comité de travail qui va regrouper le ministère du Travail, le ministère de la Santé et des Services sociaux, nous aurons également sur cette table les régies régionales de la santé et il y aura également l'Office des personnes handicapées du Québec. Nous nous mettons au travail dès la semaine prochaine pour formuler des recommandations à nos organismes respectifs.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Qu'est-ce que le ministre du Travail a fait, M. le Président, pour donner suite à cette recommandation du coroner Delâge? Ainsi, certains édifices n'ont jamais été visités soit par les inspecteurs de la Régie du bâtiment ou par un responsable de la prévention des incendies avant qu'un sinistre n'ait lieu à cet endroit. D'autre part, de telles visites remontaient à très longtemps. Qu'est-ce que le ministre a fait à part de mettre à pied 72 personnes dans la division des inspections à la Régie du bâtiment?

Le Président: M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, la Régie du bâtiment du Québec a demandé à toutes ses directions régionales – je dis bien à toutes ses directions régionales – de transmettre toute l'information reliée à la sécurité dans les édifices publics, y compris les hôpitaux du Québec et y compris les édifices du réseau de la santé. On va compléter toutes ces informations. Et, lorsque je les aurai en main, ça nous fera plaisir de les rendre publiques et de les transmettre aux personnes concernées. Mais je voudrais dire que tout ça sera fait d'ici quelques semaines et je peux assurer le député que nous allons alors agir dans le dossier comme nous avons fait dans tous les dossiers jusqu'à maintenant: rapidement.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Qu'est-ce que le ministre responsable de la sécurité dans les édifices qui abritent les gens qui sont malades a fait pour donner suite au rapport de la Régie du bâtiment qui stipulait ce qui suit: «L'effort budgétaire affecte particulièrement les crédits de traitement et, par voie de conséquence, la capacité de la Régie de remplacer les nombreux inspecteurs qui ont adhéré ou adhéreront aux programmes gouvernementaux de départ volontaire. L'impact est majeur sur l'exécution des mandats reliés à la sécurité du public»? Est-ce que le ministre a donné suite à cette note de la Régie du bâtiment, oui ou non?

Le Président: M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, lorsqu'on a été saisi de sa question de la sécurité dans les édifices publics, surtout dans le domaine de la santé, qu'est-ce qu'on a fait exactement à la Régie du bâtiment? On a fait en sorte de tout revoir les normes, les critères et les façons de travailler, tant et si bien qu'au moment où l'on se parle, en plus d'avoir le groupe de travail qui est formé avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, on a un autre groupe qui travaille à revoir toutes nos méthodes et garantir la sécurité dans les édifices publics. Et je dois vous dire qu'on a le nombre d'inspecteurs qu'il faut puis on est équipé pour faire notre travail.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Est-ce que le premier ministre est d'accord avec son ministre de la Santé et son ministre du Travail qui, suivant les réponses qu'ils ont fournies à cette Assemblée, ont tout simplement, il y a 15 mois, décidé de tabletter le rapport du coroner suite au décès de neuf personnes âgées dans des résidences au Québec?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, là, je ne pense vraiment pas qu'on puisse tirer ce type de conclusion à la suite de l'échange qui vient d'avoir lieu. Comme je vous le dis, je ne peux pas, là, avoir l'information à la mémoire présentement. Mais du côté du ministère de la Santé et des Services sociaux, je vais regarder en détail où on en est rendu dans cette situation. On va être en lien avec les collègues qui sont du côté du ministère du Travail, et toute l'information sera donnée à cette Chambre sur: quelle est la situation, ce qui a été fait et quels sont les plans pour ce qui n'aurait pas encore été fait et qui doit être complété, si c'est le cas, M. le Président. Et je vais faire ça dans les meilleurs délais.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon.


Qualité de l'eau potable au Québec

Mme Delisle: Merci, M. le Président. La semaine dernière, le ministre de l'Environnement dévoilait son bilan sur la qualité de l'eau potable au Québec. On retrouve dans ce document des informations pour le moins inquiétantes: des bactéries potentiellement pathogènes, des substances chimiques, du plomb et des pesticides se retrouvent dans certains réseaux. Quatre-vingt-trois municipalités ont des concentrations de plomb supérieures à la norme québécoise. Le ministre de l'Environnement, M. le Président, a refusé de divulguer la liste des 83 municipalités sous prétexte que les municipalités avaient été informées du problème et souhaitaient éviter évidemment un sentiment de panique dans la population.

Ma question, M. le Président, au ministre des Affaires municipales: A-t-il pris connaissance de cette liste-là et peut-il, s'il vous plaît, la déposer aujourd'hui afin de rassurer la population en ce qui regarde la qualité de l'eau potable?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: M. le Président, cette question relève du ministère de l'Environnement. Le ministre est entièrement responsable de ces questions. Et la gestion, toute la question de l'eau potable dans les collectivités locales, c'est géré par le ministre de l'Environnement.

(15 heures)

Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Oui, M. le Président, à Mme la députée, je veux dire que j'ai rendu public ce rapport la semaine dernière. Ce rapport démontrait de façon claire qu'il y a amélioration de la qualité de l'eau potable au Québec. Ce rapport démontrait exactement que les municipalités où il y avait des problèmes avaient été informées et que le ministère de l'Environnement et de la Faune et les municipalités, où il y avait des problèmes, ont pris les mesures nécessaires pour s'assurer que la santé publique ne soit pas remise en question au Québec. Toutes les mesures nécessaires ont été prises pour assurer les Québécois et les Québécoises que l'eau potable qu'ils boivent, ils peuvent la boire en toute sécurité.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, le ministre de l'Environnement réalise-t-il qu'il y a plus de 1 000 000 de cas de gastroentérite chaque année à ce temps-ci de l'année et très souvent dus, évidemment, à l'eau potable? Et pourrait-il, s'il vous plaît, même s'il a remis l'information aux municipalités, rassurer les populations des 83 municipalités, déposer la liste? Et les citoyens prendront les mesures qui s'imposent s'ils souhaitent ne pas être malades, M. le Président.

Le Président: M. le ministre.

M. Cliche: Il y a, si ma mémoire est bonne, pratiquement 800 avis de faire bouillir l'eau qui sont émis par les municipalités annuellement, spécialement dans des saisons comme celle-ci, et c'est normal que les gens soient avertis. Ce que nous avons amélioré dans les dernières années notamment, c'est la rapidité avec laquelle les municipalités sont saisies des problèmes qu'il peut y avoir et la rapidité avec laquelle les municipalités informent les citoyens. Toutes les municipalités, également, qui pouvaient avoir des problèmes résiduels en matière de plomb sont informées, ont pris les mesures nécessaires. Les dernières municipalités qui ont des travaux à faire pourraient se servir du programme d'infrastructures qui, maintenant, inclut les programmes d'amélioration des équipements au traitement de l'eau potable pour faire les derniers travaux nécessaires. Mais toutes les mesures sont prises. Là-dessus, les départements de santé communautaire, les municipalités et les spécialistes du ministère, du moment qu'il y a un problème, on s'assure que les mesures sont prises pour que la population soit fasse bouillir l'eau ou que les mesures soient prises pour qu'elle puisse boire son eau potable en toute sécurité.

Le Président: M. le député d'Iberville, en principale.


Respect des droits et des choix de la communauté anglophone québécoise

M. Le Hir: M. le Président, il y a environ six semaines, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité une motion dont le premier paragraphe se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale, dans un souci de réaffirmer les principes de la Charte des droits de la personne et de favoriser la bonne entente entre tous les citoyens du Québec quelles que soient leurs origines, condamne le nationalisme ethnique sous toutes ses formes et l'utilisation par qui que ce soit de ses thèmes, de ses stratégies et de son langage pour favoriser et entretenir la discorde entre les Québécois dans quelque intérêt que ce soit.»

À l'unanimité, cette résolution a été adoptée, M. le Président. Hier, l'ex-premier ministre du Québec, M. Jacques Parizeau, à l'occasion du lancement de son livre intitulé Pour un Québec souverain , accordait une entrevue au réseau RDI dans laquelle il réitérait sa thèse selon laquelle les anglophones du Québec étaient responsables de l'échec des forces souverainistes, au dernier référendum, et qu'il fallait désormais que le mouvement souverainiste compte exclusivement sur le soutien des francophones et ne perde pas son temps ni ses énergies à chercher à convaincre les anglophones, confirmant implicitement que, pour lui, il y a au moins deux catégories de Québécois et que les anglophones ne sont pas aussi Québécois que les francophones.

Ma question au premier ministre, M. le Président: Aujourd'hui, le premier ministre est-il prêt à constater que les propos tenus par M. Parizeau hier et depuis le soir du référendum constituent des propos qui effectivement favorisent et entretiennent la discorde entre les Québécois et à condamner le message ethnique qu'ils véhiculent, en conformité avec l'obligation que crée la résolution adoptée unanimement par cette Chambre le 26 mars dernier?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je remercie l'honorable collègue de sa question. Je pense que les gens qui observent les activités politiques au Québec savent très bien qu'on a eu un congrès important, au Parti québécois, l'automne dernier et qu'à ce congrès un débat très important, un débat fondamental a porté sur la question des garanties des droits des anglophones au Québec. On constatera que, dans le programme du Parti québécois, il y a maintenant, avec clarté et de façon définitive, et catégoriquement affirmé, l'engagement de garantir les droits de cette communauté.

M. le Président, je ne pense pas que la question souffre quelque doute que ce soit. Tout est clair, tout a été discuté de façon transparente en public, adopté de façon formelle par un congrès du Parti québécois. En ce qui nous concerne, les choses sont claires.

Le Président: M. le député.

M. Le Hir: M. le Président, l'histoire devra-t-elle retenir de la réponse du premier ministre qu'il aura refusé de donner suite à une résolution unanime de l'Assemblée nationale, en plus de se défiler devant ses responsabilités sur une question de principe aussi fondamentale?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'aurais souhaité que le député attende de connaître ma réponse avant d'écrire sa question complémentaire, parce que ce que j'ai affirmé, c'est la volonté et l'engagement fondamental du Parti québécois et du gouvernement de respecter les engagements de garantie des droits des anglophones au Québec, et je voudrais dire que nous en sommes très fiers.

Nous sommes très fiers du dossier québécois en cette matière. Quand on pense que, dans certaines provinces anglophones, on a débattu longtemps de la question de savoir si on avait le droit de s'exprimer en français dans les assemblées législatives, on a combattu l'utilisation du français dans les écoles, on a combattu le droit d'avoir des écoles et de les contrôler, alors qu'au Québec, nous, M. le Président, nous sommes en train de discuter d'un élargissement du pouvoir de nos concitoyens anglophones de contrôler leurs écoles, présentement, qu'au moment où, en Ontario, les francophones se battent pour sauver leur dernier hôpital, nous, au Québec, on discute de l'augmentation des points de services en anglais, nous n'avons rien, M. le Président, à nous reprocher. Et je dois dire, M. le Président...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Je dis, M. le Président, que le Québec n'a rien à se reprocher, au contraire, de ses comportements en ce domaine, que c'est un exemple que nous donnons à l'ensemble des provinces anglophones du Canada, qu'en ce qui nous concerne il n'est pas question de réciprocité, qu'au contraire nous maintenons les garanties qui ont été données, nous allons les enchâsser dans la constitution d'un Québec souverain, et que nous pourrons, à ce moment-là, donner un levier à nos collègues francophones des autres provinces qui souffrent des persécutions dont ils sont victimes, M. le Président, qui pourront s'autoriser de l'exemple magnifique que nous donnons.

Le Président: M. le député.

M. Le Hir: M. le Président, le premier ministre pourrait-il répondre clairement et simplement à la question qui a été posée?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je ne vois pas comment je pourrais être plus clair que je l'ai été. Je ne vois pas où veut en venir le député. J'aimerais qu'il pose sa question précisément, parce que je me demande ce qu'il a en tête, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, en complémentaire.

M. Johnson: Oui, M. le Président, au premier ministre qui, lorsqu'il était à la Chambre des communes, a refusé son consentement afin de faciliter l'instauration du bilinguisme au Nouveau-Brunswick – il ne s'en souvient pas: Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire s'il conçoit encore, comme il l'a fait la semaine dernière, contrairement à ce qu'il vient de laisser croire, que la communauté anglophone au Québec, au titre du droit de se mêler des institutions scolaires, doit être réduite et limitée aux seuls anglophones dont les enfants auraient le droit d'aller à l'école anglaise en vertu de la loi 101? Sans aucunement toucher la loi 101, – parce qu'il y a un consensus en cette Chambre autour de la loi 101 – est-ce que le premier ministre pourrait nous dire... Est-ce qu'il persiste...

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Au premier ministre, en l'avisant de ne pas tenter de faire croire que la loi 101 est en cause ici, c'est la loi n° 109 qui est en cause: Est-ce que le premier ministre persiste, à l'égard de la communauté anglophone, à limiter l'appartenance à la communauté anglophone du Québec aux seules personnes dont les enfants ont le droit d'aller à l'école anglaise? C'est ça que je demande au premier ministre. Est-ce que ce n'est pas, s'il persiste dans la voie de sa ministre et de ses réponses de la semaine dernière, en train de limiter la définition de «communauté anglophone», contrairement à une motion votée ici à l'unanimité, à l'Assemblée nationale?

(15 h 10)

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: D'abord, je voudrais rectifier une affirmation que le chef de l'opposition vient de faire sans aucune vérification préalable: je n'ai absolument pas voté contre l'instauration du bilinguisme au Nouveau-Brunswick; au contraire, j'ai voté pour, M. le Président. J'ai voté pour. J'ai été très fier de me lever, à la tête du Bloc québécois, pour voter pour cette question. Le chef de l'opposition est confus parce que... Là, il est confus. Je sais pourquoi, parce qu'il y a eu une confusion de procédure qui a fait que, dans les semaines qui ont précédé, un député du Bloc qui était à la Chambre a refusé un consentement pour une autre motion qui faisait en sorte...

Des voix: ...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je tiens à rectifier les faits qui contredisent ce ragot qui circule sous le manteau dans les milieux fédéralistes. Le Bloc a voté pour l'instauration du bilinguisme au Nouveau-Brunswick. J'explique ce qui est arrivé, pourquoi les gens sont confondus. C'est que, dans les semaines qui ont précédé l'ajournement de Noël, un député du Bloc qui était à la Chambre, une journée, a refusé un consentement sur une procédure autre qui avait pour conséquence perverse que, le lendemain, on ne pourrait pas introduire d'autres motions, ce qui a fait en sorte qu'elle a été introduite deux semaines plus tard. Nous étions tous là, nous avons tous voté pour.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Chomedey, en principale.


Démission de M. Guy Pepin à titre de membre du Conseil de la magistrature

M. Mulcair: Oui. Merci, M. le Président. L'automne dernier, quand le Barreau du Québec a reproché au ministre de la Justice – et je cite – ses propos démagogiques et indélicats qui jetaient du discrédit sur nos institutions, le premier ministre s'est levé en cette Chambre pour exprimer sa confiance illimitée envers son ministre de la Justice. La semaine dernière, on apprenait que Me Guy Pepin, le doyen du Conseil de la magistrature du Québec, s'est senti obligé de démissionner afin de, lui aussi, dénoncer – et je cite à nouveau – la démagogie, l'hypocrisie et la malhonnêteté du ministre de la Justice du Québec.

M. Bélanger: M. le Président.

Le Président: M. le député de Chomedey, vous êtes ici depuis suffisamment longtemps maintenant pour savoir que, même indirectement, en utilisant les propos d'autres, on ne peut utiliser des termes qui qualifient de telle façon les membres de l'Assemblée. Alors, je vous demande de ne pas utiliser cette citation dans le sens où vous le faites actuellement.

M. Mulcair: M. le Président, à défaut de pouvoir citer le doyen du Conseil de la magistrature du Québec, est-ce qu'on peut demander le consentement pour déposer sa lettre de démission dans laquelle ces termes sont contenus? Est-ce qu'on peut au moins la déposer, de consentement?

Le Président: C'est un document...

Des voix: Oui.

Le Président: Alors, il y a consentement. Alors, votre question, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: À la lumière de ces propos du doyen du Conseil de la magistrature, est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il a toujours une confiance aveugle dans son ministre de la Justice ou est-ce qu'il commence à voir, comme tous ceux et celles qui s'y connaissent dans le domaine de la justice, qu'il y a de graves problèmes dans son gouvernement, notamment au ministère de la Justice?

Le Président: Est-ce que... Auparavant, je voudrais être certain, parce que ça prend un consentement clair pour le dépôt de la lettre... C'est parce que...

Des voix: Non.


Document déposé

Le Président: Alors, il n'y a pas de consentement pour le dépôt de la... Alors, le leader du gouvernement m'indique qu'il y a consentement. À ce moment-ci, M. le ministre de la Justice, ou M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, la confiance que j'éprouve pour le ministre de la Justice s'illustre de différentes façons, notamment dans le fait que je lui laisse prendre la question.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais dire que j'ai, et j'ai toujours eu et j'aurai toujours une grande confiance dans la magistrature québécoise, qu'elle soit de nomination provinciale ou fédérale. Je l'ai manifesté en rétablissant le comité tripartite qui avait été aboli par leur côté pour avoir des relations, justement, avec la magistrature.

Deuxièmement, au cours de la dernière année, j'ai doté l'ensemble de la magistrature québécoise d'ordinateurs, ce qui avait été refusé depuis toujours de leur côté, M. le Président. C'est une dépense de 2 000 000 $. Il s'agit d'un instrument remarquable pour le travail de la magistrature.

Troisièmement, M. Pepin fait plusieurs affirmations qu'il aurait eu besoin de vérifier avant. Entre autres choses, il impute au ministre de la Justice la décision qui a été prise par l'Assemblée nationale de ne plus donner les textes de lois, tant à la magistrature qu'au ministère de la Justice et autres organismes. C'est une décision qui a été prise par cette Assemblée nationale, que je respecte, mais que je n'ai pas prise moi-même. Il me l'impute en disant que c'est une très mauvaise décision. Alors, peut-être que les parlementaires devraient-ils prendre ces critiques pour eux-mêmes.

Deuxièmement, M. le Président, compte tenu de l'état des finances publiques dans lequel les gens d'en face nous ont laissé la situation, le gouvernement a dû prendre des mesures relativement à une réduction des dépenses. Nous avons demandé à la magistrature, comme à tous les autres Québécois, que ce soient les ministres, que ce soient les députés, que ce soient les médecins, à tout le monde, en fait, de faire un effort pour assainir les finances publiques, qu'ils nous avaient laissées dans un très mauvais état, M. le Président.

Dès lors, on a demandé qu'il y ait un partage de ces dépenses, et le projet de loi n° 104 a été adopté. J'ai participé à la décision, M. le Président, mais je pense que c'est une décision également de cette Assemblée. Quand on dit que c'est une très mauvaise décision, je pense que M. Pepin dit que cette Assemblée a adopté une très mauvaise loi.

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Bégin: Troisièmement, et je pense que c'est le plus important, dans le cadre, justement, de ces diminutions de dépenses, il y a des discussions qui ont été engagées avec la magistrature depuis le mois de septembre. Celles-ci vont très bien, mais, M. le Président, je ne voudrais surtout pas gâter ces bonnes relations en répondant aux questions de M. le député de Chomedey.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, le temps imparti pour la période des questions et des réponses orales est complété. Il n'y a pas aujourd'hui de réponses différées ni de votes reportés.


Motions sans préavis

Nous en arrivons immédiatement aux motions sans préavis. Mme la ministre de l'Éducation.


Souligner la Semaine québécoise des familles

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je voudrais déposer la motion suivante, soit:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine québécoise des familles, qui se déroule cette année du 12 au 18 mai sous le thème Les familles font tourner l'économie: une force à soutenir , et rende hommage aux centaines d'organismes et de personnes qui, tout au long de cette semaine, organisent à travers toutes les régions du Québec des manifestations pour mettre en lumière la force économique des familles.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Bélanger: Vous avez le consentement de part et d'autre, M. le Président.

Le Président: Alors, pour une intervention de chaque côté, Mme la ministre de l'Éducation. Mais, auparavant, je demanderais aux membres de l'Assemblée qui doivent travailler à l'extérieur de l'enceinte du salon bleu de le faire rapidement, s'il vous plaît, de quitter l'Assemblée. Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Et responsable de la Famille, si vous le permettez.

(15 h 20)

Le Président: Bien sûr, madame. Je ferai comme tout le monde, je m'habituerai au changement.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je tiens à le souligner, en fait, M. le Président, pas pour faire remarquer qu'on avait oublié de le mentionner, mais parce que je sais toute la satisfaction qu'ont eue les organismes familiaux lorsqu'ils ont vu réapparaître dans une dénomination ministérielle le titre de ministre responsable de la Famille. Et j'imagine qu'aujourd'hui ces organismes qui l'avaient souhaité, ces associations, ces institutions qui l'avait souhaité sont particulièrement satisfaits de l'annonce qu'a faite le premier ministre quant à sa volonté de constituer un ministère de la Famille et de l'Enfance.

Je crois que cette annonce, qui constitue une réponse, bien sûr, aux demandes maintes fois répétées des différentes intervenantes et des différents intervenants du milieu familial, répond surtout à la volonté que nous avons comme gouvernement de rendre encore davantage cohérentes les politiques qui s'adressent aux familles, qui concernent les familles, mais aussi de s'assurer d'une mise en oeuvre ordonnée des nouvelles mesures qui concernent la politique familiale, et qui sont des mesures évidemment qui exigent un effort gigantesque de la part du gouvernement, de la part de plusieurs ministères ou organismes concernés par une telle politique.

Donc, la mise en place d'un nouveau ministère qui intégrera, évidemment, l'Office des services de garde, qui intégrera aussi le Secrétariat à la famille, qui ne crée donc pas une nouvelle organisation mais intègre une organisation existante, rend témoignage, cependant, de la nécessité, donc, d'ordonner la mise en oeuvre de cette politique qui est un effort considérable et de faire en sorte que, par l'existence d'un ministère, on puisse en assurer la gestion au quotidien. Parce que le rôle d'un Office des services de garde, d'un office qui aurait pu devenir l'Office de la famille et de la petite enfance mais qui est actuellement l'Office des services de garde, est évidemment davantage un organisme de contrôle et de régulation, alors qu'un ministère permet de rendre opérationnels des services, de s'assurer de la livraison de services.

Revenons maintenant à cette Semaine québécoise des familles et aux nombreuses activités qui sont organisées à travers tout le Québec pour célébrer cet événement. Je pense que ça nous offre des moments privilégiés pour réaffirmer collectivement notre attachement aux valeurs familiales. La création prévue de ce nouveau ministère en reflète bien, d'ailleurs, l'importance à cet égard pour notre gouvernement.

Je voudrais d'abord souligner, M. le Président, l'apport fondamental des importants partenaires que sont les organismes familiaux. D'une part, leur expertise, d'autre part, leur engagement dans de nombreux champs d'activité doivent être facilités. Ce sont des milliers de bénévoles qui, à travers le Québec, consacrent du temps, de l'énergie, du talent à la vie des familles québécoises. Ils apportent, à mon point de vue, une contribution essentielle au développement et au mieux-être de ces familles. C'est donc ensemble que nous devons nous adapter aux changements de cette fin de siècle et à la nouvelle réalité et, aussi, nous devons le dire, à la nouvelle définition de la famille pour faire en sorte que nos enfants entrent gagnants dans le troisième millénaire.

Je voudrais le réitérer ici, M. le Président, nous l'avons fait à maintes reprises, mais cela reste les fondements de la politique sur laquelle s'appuie la politique familiale: les parents restent et resteront les premiers responsables de l'éducation et du soutien affectif, moral, matériel de leurs enfants. Je ne crois pas que l'État doive se substituer à eux, mais l'État doit plutôt créer les conditions propices, assurer les conditions propices à l'exercice des responsabilités parentales. C'est pourquoi, d'ailleurs, nous avons proposé, lors du dépôt du livre blanc, des mesures inspirées par des valeurs collectives et des responsabilités qui tiennent compte de la nouvelle réalité de la très grande majorité des familles québécoises.

La mise en place de ces mesures, cette nouvelle allocation familiale ou allocation unifiée, le développement de services éducatifs et de garde à la petite enfance qui seront diversifiés, malgré ce qu'en croient certains, qui permettront le choix aux parents de pouvoir garder les enfants à la maison – le crédit d'impôt de base reconnu par le ministre des Finances est, à cet égard, particulièrement intéressant dès l'année 1998 – la possibilité d'avoir une gardienne, où on pourra continuer d'utiliser un crédit d'impôt remboursable, la possibilité d'utiliser un service de garde à but lucratif, parce que justement cette possibilité d'accès à un crédit existe toujours, et, enfin, la possibilité de s'inscrire dans un centre à la petite enfance qui, évidemment, sera un centre multifonctionnel offrant des services éducatifs de garde, mais éventuellement toute une gamme d'accompagnement des parents, d'aide et de support aux parents, de liens avec le réseau de la santé et des services sociaux – les centres locaux de services communautaires, entre autres, qui sont des institutions et des organismes de première ligne avec lesquels nous pourrons établir des collaborations utiles et nécessaires pour les familles, parce que c'est cela dont il s'agit lorsque nous parlons des mesures de la nouvelle politique à la petite enfance et aux familles – et qui comporte évidemment un troisième volet, soit l'instauration d'un régime d'assurance parentale.

Donc, la mise en place de ces mesures se fera d'une manière graduelle de façon à donner à toutes et à tous le temps de vivre harmonieusement les changements qu'implique une telle réforme et d'apporter les ajustements nécessaires. Ces nouvelles dispositions de la politique familiale contribuent largement, bien sûr, au thème qui a été retenu cette année pour la Semaine québécoise des familles, Les familles font tourner l'économie: une force à soutenir . Et l'illustration graphique de même que concrète de ce thème est un joli vire-vent, que je n'avais pas le droit d'amener à l'Assemblée nationale, M. le Président, mais dont je me permets de parler parce que des organismes familiaux m'ont souligné comment celui-ci était très joli, qui est un symbole dans le sens de faire virer l'économie, de faire travailler les gens, mais qui est aussi un symbole du fait que des enfants ont accès à des services, à des outils, à des jouets, tout compte fait, qui leur permettent de s'amuser et aussi de se développer à travers le jeu.

Donc, oui, les familles font tourner l'économie québécoise, oui, c'est une force à soutenir, et je veux remercier ceux et celles qui prennent le temps d'investir d'abord dans leur propre famille, d'investir d'abord au plan humain dans leur propre famille, auprès de leurs enfants, peu importe les modèles de famille dans lesquels on vit, M. le Président, mais remercier aussi ceux et celles qui, au sein d'organismes, d'associations, d'institutions, consacrent du temps aux familles québécoises. Je vous remercie.

Le Président: Merci, Mme la ministre de l'Éducation et ministre responsable de la Famille. M. le député de Jacques-Cartier.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'appuyer la motion de la ministre responsable de la Famille en reconnaissant la Semaine québécoise de la famille et l'engagement des organismes et des personnes impliqués dans l'organisation de cette Semaine sous le thème Les familles font tourner l'économie .

Malgré les transformations et les mutations des dernières années, les Québécois et les Québécoises demeurent profondément engagés et attachés à leurs liens familiaux. Familles recomposées, familles monoparentales ou familles définies autrement, il y a toujours une diversité dans la composition de nos familles. Pourtant, le modèle traditionnel de la famille se comporte assez bien dans notre société. Plus de sept familles sur 10 sont composées des deux parents et de leurs enfants. Malgré l'insécurité économique et les défis de concilier les obligations du couple de parents et de travailleurs, la plupart de nos familles bénéficient de la stabilité nécessaire pour la protection et l'épanouissement de nos jeunes.

L'État a un rôle important de soutien vis-à-vis de nos familles. Il doit assurer un appui aux divers choix faits par nos familles. Le rôle d'accompagnement commence dès la petite enfance et continue jusqu'aux soins apportés aux personnes âgées de nos familles. Plutôt que d'imposer son choix, le gouvernement doit en tout temps écouter et respecter les voeux de nos familles. En certaines circonstances, l'État doit cibler certaines clientèles à risque et bonifier les ressources déployées pour venir en aide à nos familles.

(15 h 30)

Il y a deux ans, ma communauté a été profondément blessée par le meurtre du révérend Frank Toope et de son épouse, Jocelyn. Trois jeunes de l'Ouest-de-l'Île ont été condamnés pour cet horrible acte de violence.

Au cours des deux dernières années, mes collègues de Nelligan, Robert-Baldwin et moi-même avons présidé un comité communautaire afin d'examiner le phénomène de la violence chez nos jeunes. En réunissant les élus municipaux, les commissions scolaires, la sécurité publique, les services sociaux, les organismes communautaires et le clergé, nous avons organisé des rencontres communautaires, renforcé les liens entre les intervenants qui travaillent auprès de nos jeunes et visité nos écoles secondaires. En discutant des problèmes de taxage, du phénomène des gangs et de harcèlement, le même constat revient souvent: l'importance du soutien vis-à-vis de nos jeunes parents afin d'assurer une intervention précoce et ciblée pour nos enfants qui éprouvent des difficultés.

Les études montréalaises présidées par le Dr Richard Tremblay ont démontré les bénéfices d'interventions auprès des jeunes en bas âge. Il faut aider et encourager les jeunes parents, les enseignants du niveau primaire et les éducatrices en garderie afin d'identifier et d'aider les jeunes enfants qui démontrent un comportement difficile ou qui sont à risque. Mais l'élément essentiel, c'est d'encourager l'implication des parents dans la vie de leurs enfants. L'État ne peut se substituer aux obligations et aux responsabilités des parents.

La société doit aussi reconnaître la contribution faite par nos familles afin de prendre la relève de nos hôpitaux. Sans vouloir refaire le débat sur le virage ambulatoire, il faut admettre que, dû à la pénurie de ressources disponibles pour les programmes de maintien et de soins à domicile, c'est très souvent l'époux ou l'épouse, le parent ou l'enfant qui prennent charge du patient qui retourne chez lui après une chirurgie d'un jour. Si nous avons réussi à réduire la durée des visites à l'hôpital, c'est grâce, en partie, au dévouement de nos familles envers leurs proches.

Mais, pour soutenir ce rôle, l'État doit bonifier des programmes de soutien à la famille. Les familles devraient pouvoir davantage bénéficier des programmes de maintien à domicile et des programmes journaliers pour donner un peu de répit aux familles qui prennent soin d'un des leurs. La situation tragique de certaines familles qui sont épuisées par les obligations envers un enfant handicapé ou un parent âgé doit être corrigée afin d'alléger le fardeau de ces familles. Également, le monde du travail doit s'adapter à ces réalités. Les compagnies et les dirigeants devront être plus sensibles aux parents qui doivent s'absenter pour amener leurs enfants chez le médecin ou leurs parents à l'hôpital.

Il y a une autre question qui préoccupe nos parents: la pénurie d'information concernant la réforme de la politique familiale. Vendredi dernier, j'ai rencontré une quarantaine de parents à Saint-Bruno afin de répondre à leurs questions concernant la nouvelle politique familiale. Les parents ont préparé une longue liste de questions quant à l'impact de la réforme sur leur famille. L'économiste Ruth Rose, de l'Université du Québec à Montréal, a présenté une série de tableaux qui démontrent à quel point la réforme est confuse et les effets pervers de la nouvelle politique. Selon Mme Rose, une femme monoparentale qui travaille au salaire minimum paiera presque 2 000 $ de plus pour les services de garde. Une femme à revenus élevés fera des économies importantes si les enfants sont inscrits dans une garderie. Quelle cohérence dans cette réforme, M. le Président!

En plus, ces parents ont demandé si l'État reconnaissait la contribution faite par les parents qui ont choisi de demeurer à la maison avec leurs enfants. Plusieurs d'entre eux ont des familles de trois ou quatre enfants et ils ont décidé de dédier leur temps à leurs enfants et de faire des sacrifices monétaires. Par ailleurs, ils s'attendent à une certaine équité avec les autres familles et à une reconnaissance de la valeur importante de leur décision. Ils ne trouvent ni l'une ni l'autre dans la nouvelle politique familiale. Ils réclament, en bref, une vraie politique familiale. Par contre, ces parents n'ont jamais mentionné le besoin de créer une autre structure gouvernementale.

Pour cette raison, j'ai pris l'engagement de réitérer à nouveau la tenue d'une commission parlementaire pour étudier l'ensemble des réformes et l'arrimage entre elles, par exemple les barèmes de la nouvelle allocation familiale unifiée avec les tarifs de frais de garde dans le nouveau système. Les parents souhaitent la tenue d'un forum pour questionner le gouvernement sur la réforme de la politique familiale.

En terminant, je veux revenir sur les familles qui prennent soin d'un proche. Récemment, une commettante de Dorval m'a informé d'une triste nouvelle qui a frappé son cercle d'amis. Ils sont quatre couples de 60 ans, 70 ans qui s'amusent ensemble, soupent ensemble, jouent aux cartes ensemble le vendredi soir. Un d'entre eux est maintenant atteint par la maladie d'Alzheimer. Les sept autres ont donc assisté inévitablement à la transformation d'un proche en un inconnu. Le fardeau pour son épouse est très lourd à porter, mais les trois autres couples aident et prennent la relève afin de lui donner un peu de répit. Pour toutes ces familles prises dans des situations semblables, à l'occasion de cette Semaine des familles, nous voulons vous dire: Courage. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Est-ce que la motion de Mme la ministre de l'Éducation et responsable de la Famille est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Alors, aux motions sans préavis également, M. le whip en chef du gouvernement.


Remplacer le député de Champlain par la députée de Prévost à la commission des institutions

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Conformément à l'article 129 du règlement de l'Assemblée nationale, je vous informe que la députée de Prévost, Mme Lucie Papineau, remplacera le député de Champlain, M. Yves Beaumier, à la commission permanente des institutions.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que la motion de M. le whip en chef du gouvernement est adoptée? Adopté. Aux avis touchant les travaux des commissions. M. le député de Papineau.

M. MacMillan: Motions sans préavis, M. le Président. «Que l'Assemblée nationale dénonce les propos de M. Jacques Parizeau de lundi passé qui préconisent l'exclusion à l'endroit des anglophones et des communautés culturelles, propos s'inscrivant la semaine dernière dans sa déclaration du 30 octobre 1995.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Bélanger: Il n'y a pas consentement, M. le Président.

Le Président: Alors, il n'y a pas consentement.


Avis touchant les travaux des commissions

Aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 40, Loi modifiant la Charte de la langue française, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 17 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 79, Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que demain, le mercredi 14 mai 1997, de 9 heures à midi, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Très bien. Pour ma part, je vous avise que la commission de la culture se réunira en séance de travail demain, le mercredi 14 mai 1997, de 9 heures à midi, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de compléter le rapport final sur les enjeux du développement de l'inforoute québécoise.

Je vous avise également que la commission de l'administration publique se réunira demain, le mercredi 14 mai, de neuf heures à midi, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est d'entendre le sous-ministre des Affaires municipales au sujet du programme Travaux d'infrastructures Canada-Québec et de l'activité Infrastructures Québec conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Alors, je vous informe, en ce qui me concerne, que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par Mme la députée de Jean-Talon. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le pelletage par le gouvernement péquiste de 500 000 000 $ de factures dans la cour des municipalités.»


Affaires du jour

Alors, nous en arrivons aux affaires du jour. À l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné par M. le leader du gouvernement le 1er mai dernier. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, je vous demande de prendre en considération l'article 14 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 111


Adoption du principe

Le Président: Ah! ce n'est pas ce qu'on m'avait indiqué. Alors, à l'article 14, bien sûr, M. le ministre des Ressources naturelles propose l'adoption du principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur les forêts. Alors, M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 111 propose un certain nombre de modifications à la Loi sur les forêts. Ces modifications sont relatives aux modalités de paiement des redevances forestières au Fonds forestier, à la mesure de réduction des volumes de bois, à la vente de bois dans les réserves forestières et à la contribution des titulaires d'un permis de transformation du bois aux agences de mise en valeur des forêts privées.

(15 h 40)

Toutes ces modifications sont justifiées par notre souci d'assurer la mise en valeur de la ressource forestière le plus efficacement et avec la plus grande équité possible.

Je crois important, M. le Président, d'évoquer brièvement l'objectif poursuivi par chacune des modifications proposées à la Loi sur les forêts et de rappeler le contexte qui les a entraînées. Tout d'abord, parlons des redevances forestières. La forêt publique étant la propriété collective des Québécois et des Québécoises, je crois qu'il est juste que les utilisateurs de cette ressource acquittent une redevance basée sur les prix du bois sur pied et sur ceux des produits finis. Celle-ci n'est pas une taxe, ce n'est pas un impôt non plus mais bien une compensation pour l'utilisation d'une ressource collective grandement convoitée. Il est donc tout à fait normal que ces redevances montent quand il y a des hausses de prix sur lesquelles elles sont basées, comme il serait normal qu'elles baissent dans le cas contraire. En d'autres mots, M. le Président, quand les prix sont bons, les droits de coupe augmentent; quand les prix ne sont pas bons, les droits de coupe baissent.

À l'heure actuelle, le processus est le suivant: les bénéficiaires de CAAF, ou contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier, procèdent à la récolte et au mesurage du bois récolté. Il transcrivent ensuite ces données sur des formulaires qui leur sont fournis par le ministère des Ressources naturelles. Le ministère se fonde sur ces renseignements pour déterminer les redevances qui lui sont dues par les bénéficiaires de ces contrats d'approvisionnement et d'aménagement et prépare les factures mensuelles en conséquence.

Souvent, plusieurs mois s'écoulent entre le moment où le bois est récolté et celui où le gouvernement récupère les redevances. C'est long, lourd et peu efficace. C'est pourquoi le ministère des Ressources naturelles a entrepris de réviser et de moderniser le processus de mesurage et de facturation, ce qui est d'ailleurs tout à fait cohérent avec l'approche globale, initiée par le gouvernement, d'allégement de la paperasserie. Nous voulons mettre en place un système informatisé, déconcentré dans chaque unité de gestion forestière, beaucoup plus efficace et beaucoup plus fonctionnel. À l'intérieur de ce système, le paiement des redevances pourrait se faire par versements mensuels préétablis, avec un ajustement annuel.

La modification que nous demandons à la Loi sur les forêts a donc pour objet de permettre au ministre des Ressources naturelles d'établir de façon prospective les droits payables pour chacun des bénéficiaires de ces contrats d'aménagement forestier. Les droits seraient établis sur la base des données contenues dans les plans annuels d'intervention soumis par les bénéficiaires. Ils seraient ajustés en tenant compte des activités d'aménagement forestier que ces bénéficiaires ont réalisées au cours des années précédentes.

Le projet de loi précise les modalités selon lesquelles seront ajustées les sommes facturées et les sommes réellement dues, compte tenu, bien sûr, du volume de bois effectivement coupé et des travaux admissibles qui auront été réalisés. Le projet de loi prévoit aussi des dispositions relatives au paiement des intérêts sur les soldes impayés, tout comme sur les montants encaissés en trop. En d'autres mots, si quelqu'un nous doit de l'argent et qu'on lui charge un intérêt, il sera en mesure de réclamer un intérêt si, nous, nous lui en devons et que nous ne le payons pas.

Le Fonds forestier, quant à lui, eh bien, c'est surtout à des fins d'élimination de la paperasserie inutile que nous proposons des modifications au Fonds forestier, un fonds mixte qui fut créé l'an dernier pour assurer le financement conjoint, par le gouvernement et l'industrie forestière, d'activités essentielles pour le maintien d'un régime forestier viable. Il nous semble important de pouvoir recourir à ce fonds pour simplifier le financement d'activités de protection de la forêt. Nous voulons, par ailleurs, lui assurer un meilleur approvisionnement.

Comme vous le savez sûrement, les activités de protection des forêts contre les insectes et les maladies et contre les feux sont actuellement placées sous la responsabilité de deux organismes sans but lucratif. Il y en a un qu'on appelle la SOPFIM, la Société de protection des forêts contre les insectes et les maladies, et l'autre, la SOPFEU, qui est la Société de protection des forêts contre le feu. Pour ce qui est de la forêt publique, le financement de ces activités est assumé à parts égales par les détenteurs des contrats d'approvisionnement et d'aménagement et par le ministère des Ressources naturelles.

Depuis 1995, les détenteurs de CAAF, ou de contrats d'aménagement et d'approvisionnement, acquittent la part du ministère; mais, en retour, ils se voient reconnaître un crédit équivalent sur le montant des redevancesforestières qu'ils doivent acquitter. C'est comme si le ministère disait aux entreprises: Paie ma part, je soustrairez cela de ce que vous me devez en redevances.

Cette formule, qui présente l'avantage de permettre au ministère de ne pas gonfler inutilement ses crédits de transfert, présente, par ailleurs, le désavantage d'être lourde et de susciter beaucoup de paperasse. Pour simplifier tout cela sans changer le fait que les redevances forestières servent au financement des activités de protection des forêts, eh bien, nous proposons qu'une partie des redevances forestières soit versée dans le Fonds forestier et que le ministère puisse utiliser ce fonds pour acquitter sa part de dépenses de protection des forêts. Cette nouvelle façon de faire permettrait d'alléger très considérablement la procédure. Les sociétés n'auraient plus besoin d'envoyer une facture à chaque bénéficiaire pour la part du gouvernement et le ministère n'aurait plus à gérer la question des crédits et des redevances. Quant aux entreprises, elles n'auraient plus à acquitter que la part qui leur revient dans le financement des activités de protection. Voilà un autre effort additionnel de simplification.

Par ailleurs, nous voulons aussi améliorer le financement du Fonds forestier afin de gagner une flexibilité. Actuellement, la Loi sur les forêts ne permet pas au ministre des Ressources naturelles, à titre de gestionnaire du Fonds forestier, d'emprunter au Fonds de financement pour ses immobilisations, alors qu'il peut le faire dans le cas des autres fonds spéciaux institués par le gouvernement en vertu de la Loi sur l'administration financière. Nous proposons donc d'inclure des dispositions dans la loi pour qu'il soit dorénavant possible de verser au Fonds forestier des sommes provenant du Fonds de financement.

D'autre part, eh bien, depuis la mise en opération du Fonds forestier, nous avons pu constater, M. le Président, que certaines dispositions législatives nécessaires à sa gestion n'avaient pas été prévues. À titre d'exemple, il n'est pas possible, pour l'instant, d'y retourner les revenus qu'on pourrait tirer de la vente de biens et de services produits lors d'activités financées par le fonds. Actuellement, ces revenus sont versés au fonds consolidé.

Vous comprendrez alors qu'une fois corrigée cette situation aura d'intéressantes retombées sur les activités financées par le Fonds forestier, et des activités qui sont, dois-je le rappeler, des activités essentielles pour le maintien d'un régime forestier viable.

Les copeaux. Eh bien, le projet de loi comporte des dispositions permettant d'améliorer, encore une fois, la gestion des copeaux et des divers surplus de bois. La modification apportée l'an dernier prévoyait que le ministre des Ressources naturelles pouvait intervenir deux fois par année plutôt qu'une fois l'an comme auparavant pour réduire le permis d'intervention en forêt publique. Il s'agit d'une réduction égale pour tous les utilisateurs. Et, à l'usage, bien, il nous est apparu que cette modification ne permettait pas de pallier correctement le problème.

Par les modifications que nous proposons cette fois-ci, eh bien, cette année nous souhaitons être en mesure de mieux cibler la réduction, de tenir compte des besoins réels et de la performance des usines. Ainsi, la réduction pourra s'appliquer à une ou plusieurs des sept catégories identifiées. À titre d'exemple, elle pourrait toucher la pâtes et papiers, ou les panneaux, le sciage, ou plusieurs de ces catégories en même temps. Nous voulons ainsi aussi éviter de pénaliser indûment les entreprises performantes. Il sera dorénavant possible, lorsque le projet de loi aura été adopté, de moduler la réduction selon la performance des bénéficiaires. Pour appliquer la réduction à une usine donnée, il sera désormais possible de tenir compte de son rendement en sciage.

Ici, j'ouvre une parenthèse, M. le Président, pour expliquer qu'il y a des scieries qui produisent, par exemple, x tonnes de copeaux par 1 000 pi de bois scié. D'autres vont produire à peine une tonne de copeaux. Mais, quand on décrète une coupure généralisée de 5 % ou de 10 % dans la coupe du bois, eh bien, tout le monde est pénalisé alors qu'il y a des scieries qui performent par rapport à d'autres. L'amendement que nous proposons, c'est de tenir compte de la performance, ce qui forcera nos scieries à être très performantes. Et c'est accepté par l'industrie forestière.

Accessoirement, il est aussi prévu que la diminution imposée une année ne pourrait être compensée au cours d'une année ultérieure. De la même manière, il ne sera pas possible aux bénéficiaires de contrats d'aménagement et d'approvisionnement forestier d'utiliser les surplus accumulés au cours des années précédentes pour compenser la diminution. Il s'agit d'éviter de reporter le problème des surplus d'une année à une autre.

(15 h 50)

Maintenant, la vente de bois sur pied. Par ailleurs, le projet de loi vient introduire une nouvelle disposition dans la Loi sur les forêts afin de permettre la vente des bois sur pied dans les réserves forestières par enchères publiques. Il est important, M. le Président, de retenir qu'une réserve forestière correspond à une unité d'aménagement sur laquelle peut s'appliquer une convention d'aménagement forestier – ce qu'on appelait une CAF est en un seul mot, en fait, a un seul A, aménagement seul, ou approvisionnement seul.

À l'heure actuelle, il est possible de vendre aussi du bois récolté dans des réserves forestières, c'est-à-dire de vendre aux enchères du bois déjà coupé et empilé sur le bord des chemins forestiers. La plupart du temps, c'est REXFOR qui se charge de faire récolter le bois, d'entretenir les chemins et les ponts en forêt et d'y installer des ponceaux nécessaires. Bien entendu, la vente par enchères du bois coupé est un bon indice de la valeur que le marché attribue au bois que nous récoltons dans les forêts publiques du Québec. Mais combien est-il prêt à payer pour du bois sur pied, c'est-à-dire dans des conditions où l'acheteur doit prendre à sa charge tous les frais associés à la récolte, quand il doit procéder aux aménagements correspondant aux devis d'exploitation sur lesquels il aura soumissionné? C'est pourtant ce prix, M. le Président, qu'il faudrait prendre en considération pour établir les redevances de façon beaucoup plus équitable.

Il nous faut donc introduire des dispositions qui autorisent la vente par enchères publiques de bois sur pied dans les réserves forestières. Avec ces modifications, la vente aux enchères de bois sur pied deviendrait possible. Elle se ferait par appels d'offres publics afin de permettre aux acheteurs éventuels de faire la meilleure offre possible. La vente aux enchères de bois sur pied est déjà appliquée pour une partie des bois privés ou de la forêt privée. C'est un mode de marché pratiqué pour la vente des bois provenant des forêts publiques, autant aux États-Unis que dans la plupart des pays d'Europe, d'autre part.

Quant à la contribution au financement des agences de mise en valeur, nous voulons introduire une disposition permettant de faire varier d'une agence de mise en valeur de la forêt privée à une autre agence le taux de contribution des titulaires de permis d'exploitation d'usine de transformation du bois. Ne s'agit-il pas là d'une disposition des plus logiques? Quand on se promène à la grandeur du Québec, il est bien évident que la forêt présente des caractéristiques très variables. On n'y trouve pas les mêmes essences partout et celles-ci n'ont pas toutes la même valeur, et la qualité du bois peut donc aussi varier. Il est tout à fait normal, donc, que la contribution exigée des titulaires de permis d'usine de transformation puisse être modulée pour tenir compte, même à l'intérieur d'un territoire d'une agence de mise en valeur, des différentes conditions que l'on peut y observer. Le taux doit pouvoir varier en fonction des essences, des groupes d'essences et de la qualité du bois. C'est ce que nous voulons rendre possible par la modification que nous proposons.

Maintenant, obtenir le meilleur projet de loi. Eh bien, comme vous avez pu le constater, ces modifications proposées visent à simplifier les choses, à éliminer la paperasse inutile, à nous adapter le mieux possible à la réalité du terrain. Elles contribueront, j'en suis sûr, à assurer la gestion et la mise en valeur de la ressource forestière avec ou dans la plus grande efficacité et le maximum d'équité pour l'ensemble des populations du Québec.

M. le Président, j'incite donc les parlementaires des deux côtés de la Chambre à voter en faveur du principe de cette législation qui vise, bien sûr, à redynamiser notre industrie, à la maintenir très compétitive, et dans l'espoir que ce projet de loi passe à l'unanimité et dans les plus brefs délais, pour le plus grand bien du développement de cette ressource qui est fort importante au niveau du développement économique non seulement du Québec en général, mais de chacune de nos régions où nous retrouvons cette ressource foncière, cette ressource naturelle que nous possédons collectivement. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État des Ressources naturelles. Il n'y a plus d'intervenants? Mme la leader adjointe du gouvernement, je vous cède la parole.

Mme Caron: Oui, M. le Président. En vertu de l'article 100 de notre règlement, je voudrais faire motion pour ajourner le débat, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 15 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 112


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 15, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du principe du projet de loi n° 112, Loi modifiant la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités. M. le ministre des Affaires municipales, je vous cède la parole.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, c'est avec plaisir, donc, que je présente, à cette étape-ci, le projet de loi n° 112 modifiant la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités. Il est presque de tradition maintenant, depuis trois ans au-delà, à chacune de nos sessions, de présenter différents projets de loi à l'égard d'allégements à nos lois municipales, que ce soit au Code municipal, à la Loi sur les cités et villes, à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, aux lois des communautés urbaines ou à toute loi afférente à l'administration des communautés locales, des municipalités au Québec, et le projet de loi n° 112 s'inscrit dans ce continuum au niveau de l'allégement que nous souhaitons adopter pour les municipalités, en l'occurrence, à l'intérieur du projet de loi n° 112, toute la question des élections et des référendums dans les municipalités.

Ainsi, dans la poursuite de cette opération d'allégement, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités est modifiée et sera modifiée, donc, afin d'alléger certaines procédures inutilement contraignantes pour les municipalités. De nouveaux pouvoirs sont également octroyés afin d'assouplir ou de faciliter divers processus. Ces modifications concernent plus particulièrement certains éléments de la division du territoire en districts électoraux et quelques aspects de la procédure électorale et référendaire.

Par ailleurs, dans un souci d'harmonisation avec la procédure instaurée au niveau national, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités est modifiée et sera modifiée de façon à faciliter la révision de la liste électorale ou référendaire et de réduire les coûts occasionnés par une telle opération dans nos municipalités au Québec.

Le projet de loi témoigne donc de notre souci d'améliorer la législation municipale de façon à répondre, à cet égard, aux demandes légitimes des administrations municipales, puisque les modifications qui sont présentées aujourd'hui font suite à des travaux qui se sont déroulés au cours des derniers mois en particulier avec les représentants de nos Unions municipales, l'UMRCQ et l'UMQ. Je vous soumets donc plus en détail, M. le Président, à l'intérieur de ce projet de loi, les modifications qui sont proposées. Ces modifications concernent la façon dont nous allons faire le découpage des districts électoraux, la procédure électorale et référendaire, de même que les mesures d'harmonisation à la Loi électorale.

Actuellement, d'abord en ce qui concerne la division en quartiers électoraux et quartiers dans nos municipalités, toute municipalité qui n'a pas l'obligation de diviser son territoire en districts électoraux peut s'assujettir volontairement à cette obligation par un règlement de son conseil. Une copie de ce règlement doit être transmise au ministre des Affaires municipales et à la Commission de la représentation électorale. Il est cependant peu utile pour le ministre de savoir qu'un conseil a décidé d'assujettir son territoire ou le territoire de sa municipalité aux exigences de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités concernant la division en districts électoraux. C'est pourquoi le projet de loi n° 112 supprime l'obligation de transmettre au ministre des Affaires municipales une copie certifiée du règlement par lequel la municipalité s'assujettit volontairement à l'obligation de diviser son territoire en districts électoraux. Un allégement, M. le Président.

Une municipalité de moins de 20 000 habitants n'est pas tenue de diviser son territoire, donc, en districts électoraux. Cependant, tel qu'on l'a vu, le conseil de cette municipalité peut, par un règlement qui ne requiert aucune approbation aux instances supérieures, s'assujettir aux obligations de la loi en cette matière. Par contre, si le même conseil décide de se soustraire à ces exigences, il doit obtenir l'autorisation du ministre des Affaires municipales. Le présent projet de loi prévoit donc autoriser une municipalité de moins de 20 000 habitants qui s'est volontairement assujettie à l'obligation de diviser son territoire en districts électoraux à se soustraire à cette obligation sans devoir demander une dispense au ministre des Affaires municipales. Si on a la capacité de s'assujettir, M. le Président, nous pourrions dire qu'il faut également donner le pouvoir de se désassujettir, si le verbe peut s'employer, au niveau de la division en districts électoraux dans la municipalité.

(16 heures)

La loi actuelle prévoit que le ministre des Affaires municipales peut, sur demande, autoriser une municipalité à diviser son territoire en un nombre de districts électoraux inférieur au nombre minimum ou supérieur au nombre maximum prévu dans la loi. Un avis de cette autorisation doit être publié par le ministre dans la Gazette officielle du Québec et une copie doit être transmise à la Commission de la représentation électorale. Un avis de cette autorisation doit être publié dans la Gazette officielle , comme je le disais il y a quelques moments, et, avec le présent projet de loi que je présente aujourd'hui, nous allons supprimer l'obligation qui est faite au ministre des Affaires municipales de publier dans la Gazette officielle un avis d'autorisation permettant à la municipalité de diviser son territoire en un nombre de districts électoraux inférieur au nombre minimum ou encore supérieur au nombre maximum prévu à la loi.

Par ailleurs, une municipalité qui entreprend une division de son territoire en districts électoraux doit transmettre à la Commission de la représentation une copie de son projet de règlement effectuant cette division ainsi qu'une copie de l'avis public indiquant la tenue d'une assemblée publique, M. le Président. Cette municipalité doit également transmettre à la Commission une copie du règlement de celui-ci une fois adopté. Or, la Commission de représentation n'approuve pas le règlement de division en districts électoraux; elle n'est pas appelée non plus à intervenir lorsqu'un nombre suffisant d'électeurs manifestent une opposition au règlement à la suite de l'assemblée publique qu'a dû tenir le conseil sur son projet de règlement.

Les dispositions du projet de loi n° 112 restreignent l'obligation pour la municipalité de transmettre à la Commission de représentation une copie certifiée conforme du projet de règlement et du règlement effectuant la division de son territoire en districts électoraux aux seuls cas où le conseil est obligé de tenir une assemblée publique sur le projet de règlement.

Les dispositions actuelles de la loi prévoient également que les avis concernant le projet de règlement, le règlement lui-même ou la décision de la Commission de la représentation sur la division en districts électoraux doivent, entre autres, contenir une description des districts électoraux proposés. Dans le cas d'une municipalité de 20 000 habitants et plus, les avis doivent également contenir une carte ou un croquis de ces districts. Pourtant, il nous semble qu'il n'y a pas de motif particulier – à l'examen, en tout cas jusqu'ici – pour justifier cette obligation supplémentaire pour les municipalités de 20 000 habitants et plus. Le projet de loi n° 112 vise donc à uniformiser le contenu de certains avis publics en supprimant cette exigence qui s'applique uniquement aux municipalités de 20 000 habitants ou plus et en permettant d'inclure dans l'avis soit une description des limites des districts électoraux proposés, soit une carte ou un croquis des districts électoraux, soit les deux. Il y aura donc un choix qui sera proposé.

M. le Président, d'autres allégements sont présentés dans ce projet de loi qui visent à faire en sorte que nous allons supprimer un très grand nombre de dispositifs qui obligent le conseil municipal à transmettre des copies soit à la Commission de la représentation électorale, soit au ministre des Affaires municipales. Aujourd'hui, compte tenu de la capacité au niveau de l'autonomie locale des municipalités, il nous semble être un peu redondant, un peu superfétatoire d'exiger autant de copies qui doivent être envoyées à autant d'organismes dans les cas de division des districts électoraux. Comme la municipalité a l'obligation de conserver, évidemment en vertu d'autres dispositions dans d'autres lois, ces documents, nous pensons, M. le Président, que nous pouvons supprimer un certain nombre de ces obligations pour en arriver maintenant à ce que, si nous en avons besoin au niveau supérieur, eh bien, on ira chercher les documents là où ils sont, dans la municipalité.

Finalement, M. le Président, en juin 1995, au moment de l'adoption de la Loi sur l'établissement de la liste électorale permanente, les élus et les officiers municipaux ont montré un intérêt marqué pour la modification de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités selon le modèle proposé dans la Loi électorale. Le projet de loi n° 112 vise donc à harmoniser les dispositions relatives au processus de révision de la liste électorale telles que prévues dans la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités avec celles – les dispositions, donc – prévues à la Loi électorale. Cette harmonisation, cette simplification entraîne de nombreux changements, dont le plus important consiste en l'abolition des bureaux de dépôt, ce qui fait en sorte notamment que les demandes d'inscription, de correction ou de radiation seront désormais présentées directement devant la Commission de révision.

De plus, des modifications seront apportées afin de bonifier la liste électorale permanente. Ainsi, les membres de la commission de révision municipale auront, entre autres, à vérifier certains renseignements transmis par le Directeur général des élections et à exiger, avant de procéder à l'inscription sur la liste d'une personne domiciliée, la présentation des documents déterminés ou identifiés.

Tous ces changements apportés au chapitre de la révision de la liste électorale auront pour effet de faciliter le processus de révision et par conséquent, M. le Président, de réduire les coûts occasionnés par une telle opération.

M. le Président, c'est un projet de loi d'apparence bien mécanique à prime abord, puisqu'il s'agit d'enlever ou de supprimer un certain nombre d'obligations aux municipalités à l'égard de la tenue des élections et des référendums dans les municipalités. De nombreux échanges avec les représentants du monde municipal nous indiquent que c'est maintenant l'heure de procéder et également, donc, d'harmoniser le fonctionnement dans les municipalités en termes d'élection et de référendum aux termes prévus à la Loi électorale, que nous avons modifiée en 1995.

Ces détails importants, évidemment, M. le Président, ces allégements seront discutés amplement en commission parlementaire. Et nous allons faire en sorte que le résultat, ce soit davantage d'efficacité, davantage de simplicité également, et pour les municipalités et pour les citoyens et les citoyennes qui doivent y retrouver les meilleures conditions possibles pour exercer leur droit de vote au moment des référendums et des élections, dans les municipalités, mais finalement aussi un résultat d'allégement au plan des coûts pour les municipalités en préservant les droits des citoyens.

Et, là-dessus, M. le Président, je souhaite que nous puissions compter sur la collaboration de l'opposition pour que l'exercice démocratique du droit de vote à l'occasion de référendums et d'élections dans les municipalités puisse se réaliser avec un maximum d'efficacité et un maximum de protection des droits des personnes, citoyens et citoyennes, contribuables dans nos municipalités du Québec.

Voilà l'objet du projet de loi n° 112, M. le Président, que nous aurons le plaisir de discuter en commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, à titre de porte-parole pour l'opposition officielle des affaires municipales, il me fait plaisir cet après-midi de parler sur le projet de loi n° 112, Loi modifiant la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités.

M. le Président, lorsque j'ai vu ce projet de loi là, la première question qui m'est venue à l'esprit – et je pense que c'est important qu'on se la pose, tous et toutes: Est-ce que les citoyens, les citoyennes, donc les électeurs et les électrices de l'ensemble des municipalités du Québec, perdent des droits quant à l'exercice de leur droit de vote? Alors, je peux rassurer tout le monde, même si je suis dans l'opposition, M. le Président... on m'a assurée – d'ailleurs avec l'analyse qui a été faite par nos recherchistes et par moi-même – que les allégements qui sont apportés à cette loi-là ne briment d'aucune façon l'expression du droit de vote des citoyens et des citoyennes lorsqu'ils s'expriment démocratiquement lors d'une élection municipale au Québec.

Les articles de loi que l'on retrouve dans ce projet de loi là sont demandés par les deux unions municipales que sont l'Union des municipalités du Québec et l'Union des municipalités régionales de comté afin d'alléger les différents contrôles qui s'avéraient et qui s'avèrent superflus, M. le Président. Je dois dire que je suis parfaitement d'accord avec leurs demandes, qui proviennent non seulement des unions, mais aussi des présidents d'élection de l'ensemble des municipalités du Québec.

Alors, c'est le dernier pan, nous dit-on, d'allégements qui avaient été demandés à cet égard-là et que l'on retrouve dans l'ensemble des 48 articles que l'on retrouve dans le projet de loi n° 112. Je ne reprendrai pas l'ensemble des éléments qui ont été soulevés par le ministre des Affaires municipales, puisque, bon, ce serait redondant. On est d'accord avec le projet de loi tel qu'il nous est présenté pour le moment. Si jamais il devait y avoir des amendements, bien, à ce moment-là, on réservera notre droit de regard et de décision à l'égard des amendements.

(16 h 10)

Toutefois, j'aimerais tout simplement, pour qu'on puisse se rappeler que ce projet de loi n° 112 s'inscrit, comme j'ai mentionné tout à l'heure, dans la foulée d'allégements de contrôles et de suppressions de contraintes imposés aux administrations municipales et qui avaient été amorcés – j'aime bien le rappeler, M. le Président – par le gouvernement précédent.

Il a aussi pour but de proposer des mesures d'harmonisation avec la procédure instaurée au niveau provincial – je fais ici référence au projet de loi n° 40 – afin de faciliter la révision de la liste électorale et de réduire, en autant que faire se peut, les coûts qui sont occasionnés par une telle opération. Ainsi, il abolit les bureaux de dépôt et permet de regrouper en une seule étape l'intervention des bureaux de dépôt et des commissions de révision.

Maintenant, M. le Président, lorsqu'on sera en commission parlementaire, j'ai bien l'intention de questionner le ministre pour m'assurer qu'il n'y aura pas augmentation de coûts pour les municipalités lorsqu'il sera question de demander la révision de cette liste électorale là. On apprend, dans le projet de loi, qu'il y a changement de dates, de délais. Je vous donne un exemple. Dans la loi actuelle, s'il y a élection partielle dans un district électoral ou dans un quartier, on pouvait se servir de la liste électorale qui avait servi dans les 12 mois qui avaient précédé.

Le projet de loi fait mention que la liste électorale que les municipalités pourront utiliser ne sera bonne que pour les 90 jours qui suivent la dernière élection générale. Donc, ça signifie que, à l'intérieur de deux ans et demi, trois ans, il faudra, avant la prochaine élection générale, s'il y avait des partielles, réviser la liste électorale. Donc, vous savez comme moi que la révision de cette liste-là ne se fait plus dans les municipalités, mais elle se fait par le biais de la Direction générale des élections. Combien en coûtera-t-il aux municipalités s'il y avait une élection partielle à l'intérieur de ce 12 mois là, suivant l'élection générale? Alors, je pense que c'est important aussi de s'assurer qu'il n'y a pas de nouveaux coûts.

Il y a un élément aussi qui m'apparaît important. Vous savez, M. le Président, parce que vous avez été candidat... Pour pouvoir occuper ce siège-là, il fallait d'abord être candidat et, pour être candidat, on doit être appuyé par un nombre de citoyens qui signent notre formule de mise en candidature. Il en est de même dans le monde municipal. Par contre, le législateur a jugé opportun d'augmenter le nombre de signatures requises pour le maire. Il passera donc de 10 à 25. Moi, je n'ai pas d'objection. Je pense que c'est important qu'il y ait plus de gens qui appuient les candidats et les candidates à la mairie. Mais on ne touche pas, par contre, le nombre de signatures requises pour les conseillers et les conseillères municipales.

Le principal article du projet de loi, c'est l'article 21, qui concerne la révision de la liste électorale et qui introduit de nouveaux articles. Les objectifs visés sont, d'une part, de permettre une harmonisation avec la procédure instaurée au niveau provincial. On souhaite faciliter la révision de la liste électorale et réduire, comme j'ai mentionné tout à l'heure, les coûts occasionnés par une telle opération.

L'analyse effectuée nous permet de conclure que les deux premiers objectifs sont atteints. En ce qui concerne le troisième, les unions municipales et les corporations des secrétaires et greffiers municipaux doivent nous faire connaître, M. le Président, leur dernière position là-dessus, mais, jusqu'à présent, on croit comprendre que ces gens-là sont satisfaits.

Ce qui complique l'analyse concernant la réduction des coûts, c'est que certaines dispositions introduites par l'article 21 – on parle du mot «correction» – ne pourront entrer en vigueur qu'à la même date que l'article 59 du chapitre 23 des lois de 1995... c'est-à-dire réforme de la loi sur les élections. Les articles 1 à 4, 9, 10, 22 et 29 sont des allégements de contrôles imposés aux municipalités. On supprime ainsi certains envois de copies d'avis, de projets de règlement ou de règlements au ministre des Affaires municipales puisque dorénavant c'est à la Direction générale des élections que ces documents-là devront être envoyés.

Par les nouveaux articles 5, 7 et 12, 36 et 40, on permet aux citoyens d'obtenir une meilleure description du territoire dans les avis publics qui sont publiés dans les journaux par l'utilisation d'une carte, d'un croquis ou tout simplement par l'avis descriptif. Alors, les municipalités qui seront... je vais utiliser l'expression «mieux informées» – mais je pense que les citoyens étaient quand même très bien informés avant – pourront choisir soit l'avis public avec l'avis descriptif ou un croquis, ou même, si elles choisissent de les informer à plus que 100 %, elles pourront utiliser les deux éléments.

M. le Président, je crois avoir fait le tour assez rapidement et assez succinctement du projet de loi. Alors, de la même façon que le ministre vous a dit tout à l'heure qu'il avait bien hâte de se retrouver en commission parlementaire, moi aussi. Et, s'il devait y avoir des ajustements ou des amendements, bien, à ce moment-là, on verra, en commission parlementaire, s'il y a des changements à notre acceptation de ce projet de loi là.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, il n'y en a pas.


Mise aux voix

Je vais donc mettre aux voix le principe du projet de loi. Le principe du projet de loi n° 112, Loi modifiant la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, est-il adopté? Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

Mme Caron: Oui, M. le Président. Comme le gouvernement et l'opposition semblent souhaiter pouvoir étudier le plus rapidement possible le projet de loi, je fais donc motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. À mon grand regret, je vais devoir vous demander de faire une suspension de quelques minutes pour nos travaux.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Nous allons suspendre quelques minutes nos travaux pour reprendre bientôt.

(Suspension de la séance à 16 h 17)

(Reprise à 16 h 20)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 34 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 81


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 34, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. Je vais céder la parole à M. le ministre délégué au Revenu. Monsieur, je vous cède la parole.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Merci, M. le Président. Je soumets à l'Assemblée nationale le rapport de la commission sur les finances publiques concernant le projet de loi n° 81 en vue de sa considération. Alors, le projet de loi a été présenté le 18 décembre 1996 et le principe en a été adopté le 18 mars 1997. La commission sur les finances publiques en a fait l'étude détaillée le 8 avril 1997, le 1er mai suivant et le 7 mai 1997 et en a adopté les 376 articles. Des amendements ont été adoptés à un certain nombre d'articles, corrections techniques, légistiques ou de concordance pour la plupart, mais également corrections résultant de facteurs externes ou de précisions ultérieures dans les autres cas, et ce rapport a été déposé il y a quelques jours.

Il s'agit d'un projet de loi qui modifie 19 lois, dont la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu et la Loi sur la taxe de vente du Québec, en vue de faciliter l'application des lois fiscales visant les contribuables québécois. De plus, il abroge la Loi favorisant le développement industriel au moyen d'avantages fiscaux et la Loi sur les stimulants fiscaux au développement industriel, en raison de leur désuétude.

M. le Président, je tiens à remercier les membres de la commission sur les finances publiques pour leur collaboration lors de l'étude du projet de loi, et leur contribution aura été des plus appréciée. J'aurai l'occasion de revenir ultérieurement à l'étape de l'adoption du projet de loi. En conclusion je demande donc à l'assemblée de bien vouloir adopter le rapport de la commission sur les finances publiques sur l'étude détaillée du projet de loi n° 81. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, je voudrais faire quelques commentaires sur le projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, in English, Bill 81, An Act to amend the Taxation Act, the Act respecting the Québec sales tax and other legislative provisions.

Comme le ministre délégué a juste mentionné que nous avons fait une étude article par article, nous avons fini ça la semaine passée. Le projet de loi a été déposé un peu avant Noël, et nous avons procédé à toutes les étapes jusqu'à maintenant pour assurer qu'on mette ce projet de loi en vigueur le plus tôt possible. Parce que, comme les notes explicatives le mentionnent, M. le Président, une grande partie de ce projet de loi met en vigueur les notions de budget de l'année passée. Le projet de loi n° 81 était effectivement là pour mettre législativement en place beaucoup de choses qui sont déjà en place à cause du budget annoncé l'année passée.

L'opposition officielle a questionné le ministre délégué sur plusieurs aspects de cette loi, et nous avons, je pense, aidé à améliorer au moins certains aspects de ce projet de loi. Malgré ça, nous avons voté sur division dans plusieurs articles de ce projet de loi, M. le Président, parce que, comme je l'ai mentionné, le projet de loi n° 81 met en vigueur plusieurs articles, principes et aspects du budget de l'année passée. Nous étions contre ce budget parce que nous avions vu une avalanche de nouvelles taxes et une augmentation du fardeau fiscal sur le dos des contribuables. Je vois qu'il y a plusieurs députés ici qui sont d'accord avec moi sur l'évaluation de ce budget.

Je peux en nommer juste quelques-unes: la taxe sur le capital, une taxe additionnelle sur le capital d'assurance-vie, il y a eu aussi, dans le projet de loi, une réduction progressive des crédits d'impôt en raison de l'âge, pour revenus de retraite ou des personnes vivant seules. Voilà trois exemples, vite, de ce projet de loi qui montrent clairement qu'il y a une augmentation du fardeau fiscal des contribuables. Il y a aussi les changements des crédits d'impôt pour les pertes, changements des crédits d'impôt pour les frais médicaux.

Alors, comme le ministre l'a mentionné, M. le Président, il y a 19 lois québécoises qui sont touchées par ce projet de loi. Nous avons questionné le ministre sur plusieurs aspects de ce projet de loi afin de s'assurer que tout le monde comprend effectivement ce que le ministre est en train de faire. Parce que vous pouvez trouver certains articles de loi qui sont assez intéressants pour les Québécois, comme le congé fiscal accordé aux marins québécois, comme le congé fiscal pour ceux et celles qui travaillent avec les Nations unies ou les organismes rattachés aux Nations unies, et qui ne sont peut-être pas mauvais. Mais on veut savoir pourquoi le gouvernement a choisi de ne pas taxer certains contribuables et de taxer les autres.

Nous avons parlé des projets de recherche et de développement, pour les étrangers qui font la recherche ici, au Québec. On veut avoir la meilleure recherche dans le monde, mais, pour ceux et celles qui viennent d'ailleurs, selon certains articles de ce projet de loi, ils ne sont pas taxés sur tous leurs revenus. C'est intéressant, si on veut, il y a un Québécois sur un pupitre, il y a un autre chercheur qui vient d'un autre pays à part le Canada, il me semble que c'est assez surprenant de voir qu'un est taxé sur certains niveaux et que l'autre n'est pas taxé.

Nous avons questionné le ministre délégué sur plusieurs sujets. J'en nomme un comme exemple, les crédits d'impôt pour les frais de garde d'enfants. Nous sommes en train de changer tous les règlements pour les crédits d'impôt pour les frais de garde. Mais, dans le projet de loi n° 81, nous sommes en train d'installer un programme qui potentiellement, avec les changements qui s'en viennent, est déjà incorrect, mérite déjà un changement. Nous avons vu quelques changements dans le projet de loi pendant l'étude détaillée, à la commission des finances publiques, à cause du budget de cette année, le budget de l'année 1997. Nous avons vu les changements dans le projet de loi n° 81, parce qu'ils ont eu quelques articles de ce projet de loi n° 81 qui... Leur but, leur objectif, c'était de mettre en vigueur les annonces faites dans le budget 1996, mais, à cause du budget 1997, tout est changé. C'est compliqué, M. le Président? Oui, je sais, mais c'est une des plaintes que j'ai déposées aux commissions. On essaie ensemble, et je vais terminer avec mes motions que j'ai proposées; on doit s'assurer que les contribuables comprennent ce que nous sommes en train de faire.

Quand j'ai fait une évaluation de ce projet de loi, M. le Président, finalement j'ai vu que, oui, il y a quelques choses dont on peut dire qu'elles sont plus positives que les autres. Et j'ai voté pour quelques articles du projet de loi. Mais j'ai vu aussi plusieurs articles de ce projet de loi qui sont une augmentation du fardeau fiscal d'une façon complètement inacceptable, incluant les derniers amendements, qui va coûter plus ou moins 517 000 000 $ aux compagnies québécoises.

On peut voir dans le projet de loi la contribution pour la lutte contre la pauvreté. Nous sommes très «supportifs» de toutes les choses qu'on peut faire ensemble, des deux côtés de la Chambre, pour éliminer la pauvreté. Mais nous avons de la misère à croire que la seule façon pour faire la lutte contre la pauvreté est de ne pas d'augmenter les taxes. Le gouvernement doit faire beaucoup plus.

Avec ça, M. le Président, il y a plusieurs articles dans ce projet de loi. On peut faire plusieurs heures encore de débat, mais nous avons eu le débat à la commission des finances publiques, puis il y a 376 articles de ce projet de loi qui touche 19 lois québécoises. Une fois qu'il sera ratifié, dans mon opinion, nous allons voir le fardeau fiscal des contribuables augmenter. Il y a une taxe après l'autre taxe; après, il y a une augmentation, après, il y a d'autres frais ou, encore une fois, la réduction des crédits d'impôt ou un changement des règles de crédits d'impôt.

So, the bottom line, Mr. Speaker, is when Bill 81 is passed, an Act to amend the taxation Act, the act respecting the Québec sales tax, I'm convinced, because of the budget of 1996, the Quebeckers will be more taxed. We have seen tax upon tax by this Government. It is clear that this Government's only way of thinking in terms of trying to get new revenues is to find ways to go deeper and deeper into the pockets of Quebeckers. So, on those articles of law, Mr. Speaker, the opposition voted against. We believe that there are other ways to respond to the issues of Quebeckers.

(16 h 30)

M. le Président, le projet de loi n° 81, comme je l'ai mentionné, a été déposé en décembre passé, décembre 1996. J'ai recommandé à la commission qu'on veut s'assurer que toutes nos lois qui suivent le budget soient déposées, étudiées et ratifiées, approuvées, adoptées avant la fin de la même année de calendrier, avant Noël de la même année. Je voudrais mentionner qu'effectivement le ministre a déposé le projet de loi dans la même année de calendrier, et c'était un effort que je voudrais souligner. Mais je pense que c'est essentiel qu'on fasse tout notre possible ici, à l'Assemblée nationale, pour s'assurer qu'on passe un projet de loi qui suit un budget dans la même année de calendrier.

J'ai vu moi-même un exemple de l'importance de ça, M. le Président, pendant l'étude détaillée à la commission des finances publiques. Il y a plusieurs articles de loi, comme j'ai mentionné, qui ont eu comme objectif de mettre en vigueur le budget de 1996, qui ont été adoptés ou abrogés à cause du budget de 1997. M. le Président, comment on peut expliquer aux contribuables ce qui se passe ici, à l'Assemblée nationale? Les lois fiscales sont déjà assez compliquées. Je ne citerai pas quelques exemples, je voulais juste faire mon point. Je pense que vous savez qu'elles sont pas mal compliquées. Avec ça, j'ai recommandé au ministre délégué qu'on passe une motion pour assurer que la commission des finances publiques dise à l'Assemblée nationale qu'on doit passer les projets de loi qui suivent un budget dans la même année de calendrier. À cause d'une technicalité, ils ne sont techniquement pas recevables. Mais je voudrais juste souligner dans cette Chambre que le ministre délégué – je pense que je ne mets pas les mots dans sa bouche – a accepté au moins l'esprit de cette recommandation et que nous allons faire notre possible, il y a peut-être toujours des exceptions, mais nous allons faire notre possible pour passer les projets de loi qui suivent dans la même année de calendrier. Je pense que c'était la tradition de l'Assemblée jusqu'à maintenant. À cause de certaines circonstances, ils n'ont pas fait ça cette année. Mais, si on peut faire ça pour l'année 1997, je pense que ça va être beaucoup moins compliqué.

Deuxième chose que j'ai recommandée: qu'on recommande au ministère de la Justice une refonte complète de nos lois fiscales. Je ne sais pas, M. le Président, si vous-même avez essayé d'étudier article par article ces projets de loi. C'est tellement compliqué. Et c'est peut-être pour une bonne raison qu'ils sont compliqués, parce que je sais que le gouvernement essaie de s'assurer que chaque trou est fermé, de s'assurer que tout le monde paie tout l'argent possible. Mais je pense que c'est presque impossible de lire un projet de loi, et je ne fais aucun commentaire personnel au ministre délégué sur ça parce qu'ils sont écrits légalement correctement, mais ils sont tellement compliqués que, une fois qu'on peut trouver un article 233 qui fait un amendement à un projet de loi qui est déjà amendé, qui est déjà amendé, qui est déjà amendé... Je pense que peut-être c'est le temps, en 1997, de faire une refonte de nos projets de loi fiscaux pour assurer que les Québécois et Québécoises savent exactement ce que ça veut dire dans nos lois fiscales.

Nous avons aussi un chapitre, dans le cahier des listes de sujets, qui est un chapitre assez important. Il y a huit sujets qui viennent directement du ministère du Revenu. C'est les recommandations du ministère du Revenu au ministre des Finances pour son budget de l'année passée. Nous avons eu une longue discussion sur le sujet qui touche les pénalités pour omissions répétées par un déclarant de revenus, et j'ai accepté... Vous pouvez, si vous le voulez, M. le Président, lire les galées, parce que le ministre, je pense, a compris à 100 % ce que nous avons voulu faire, mais malheureusement nous n'avons pas fait l'amendement tel que nous l'avons demandé. Je vais essayer d'expliquer ça d'une façon la plus simple possible. Les articles du sujet 6 disent que, pour ceux et celles qui ne paient pas leurs taxes, qui ne déclarent pas leurs revenus d'une façon régulière, ils vont avoir un avis au début, après ça ils devront payer une amende, un minimum de 2 000 $, et... Je m'excuse, j'ai pris le mauvais, une pénalité de 10 % de leurs revenus.

M. le Président, le problème de ça, c'est que, souvent et de plus en plus, on voit que le ministère du Revenu a tous les dossiers de trois ans passés. Je peux juste souligner l'important sujet de tous les investisseurs de bonne foi dans le projet de recherche et développement qui sont maintenant recotisés d'une façon complètement inacceptable à cause de cette façon de faire.

Je vais faire mon point. De plus en plus, le ministère du Revenu fait une étude de nos dossiers fiscaux de trois ans passés. Il a le droit. Légalement, il a le droit. J'ai demandé au ministre délégué de fournir à la commission des finances publiques combien de dossiers sont étudiés comme ça, combien de dossiers des contribuables québécois sont étudiés la même année, combien sont étudiés la deuxième année et combien sont étudiés la troisième année. Moi, je ne mets pas en doute le fait que le ministère du Revenu peut aller dans presque n'importe quelle année passée s'il y a une question de fraude ou de choses illégales, mais c'est juste une question d'une étude régulière. Mais, dans des cas comme ça, M. le Président, de bonne foi, si un contribuable a oublié de mettre un revenu et, la deuxième année, il n'a aucune raison de croire que c'est différent, il a oublié ce revenu encore et, la troisième année, encore une fois il a donné son document d'impôts et il a fait la même erreur, de bonne foi – il n'y a personne qui a dit le contraire – bien, malheureusement, à cause de l'article dans ce projet de loi, il peut, avec un avis, avoir le premier avis pour la première année, après ça il peut avoir les deux ans après avec une amende.

Je pense que le député de Crémazie a eu aussi des questions sur cet article de loi, qu'on doit assurer que, un, le fisc a le pouvoir d'assurer que tout le monde déclare le revenu qu'il doit déclarer. Je pense qu'il n'y a personne dans cette Chambre qui a mis ça en doute. Mais on doit aussi respecter que, particulièrement avec mon point d'avant, le point que j'ai essayé de soulever avant, nos lois sont compliquées. Nos lois fiscales sont tellement compliquées, et de temps en temps on ne sait pas exactement ce qu'on doit déclarer et nous n'avons pas tous les moyens d'engager un comptable pour faire les choses pour nous. Avec ça, on peut arriver avec la situation où un contribuable, de bonne foi, dans trois années consécutives, peut oublier de déclarer un revenu avec aucun avis du ministère du Revenu.

Selon l'article de loi qu'on peut trouver dans le projet de loi n° 81, ça donne un pouvoir au ministère de taxer sur trois ans passés, de faire les pénalités, les intérêts et les amendes. Moi, je pense que c'est des pouvoirs exagérés. Je voudrais dire dans cette Chambre aujourd'hui, compte tenu de la discussion... Et je ne veux pas mettre les mots dans la bouche du ministre délégué non plus, mais il a dit que ce n'est pas son intention. Ce n'est pas son intention. Il veut assurer qu'effectivement la personne a un premier avis. Après ça, si elle ne respecte pas l'avis, à ce moment-là elle va avoir des amendes. Mais ce n'est pas ça que la loi dit. Ce n'est pas ça du tout que la loi dit. Mais la raison pour laquelle je répète ça aujourd'hui, c'est qu'il faut assurer que les contribuables ne seront pas nécessairement pénalisés de la façon qu'on peut penser une fois qu'on lit le projet de loi n° 81.

(16 h 40)

That's an important article, Mr. Speaker, that touches some of my fondamental concerns about the way we collect taxes in this province and frankly in a number of other provinces. The whole notion of «autodéclaration» is a fine notion, but more and more it seems that our dossiers are being studied only three years after they have been submitted. Legally, the Ministry has every right to do that, but it puts the taxpayer in a very difficult situation when you see articles like this. Because this article says: If you have omitted declaring revenue and you do that on a repeated basis, we will be able to fine you 10 % of that revenue. But don't worry, you'll get a first notice.

That seems reasonable when you first look at it, except when you know that what happens on a regular basis is that many times the dossiers are stydied three years together. And so, if you are studying, in a few years from now, your tax returns from 1997... Well, we can do 1994, 1995, 1996. You made a legitimate mistake, in 1994, you did not know because our tax laws are quite complicated... to declare certain aspects of your revenue. In 1995, you did the same mistake; nobody told you differently. And in 1996, you continue.

Again, this is not somebody that has deliberately tried to avoid paying taxes. When we review those forms or those tax submissions, the Ministry, the way the law is written, says: There is your first avis, there is your first notice, in 1994, and in 1995, 1996, you have to pay the penalties, the interests and the fine.

We attempted to correct that. The minister said that was not his intention. He intends to make sure people have the notice, and there will only be considered a notice, once, one notice, even if the notice was given over a three-year period. That, to me, Mr. Speaker, was a rather important issue that we had to make sure was clarified. And unfortunately, even though the minister basically agreed with our interpretation, he would not change the projet de loi.

M. le Président, en terminant je voudrais juste mentionner que l'opposition, comme nous avons toujours fait, nous avons procédé à une étude dans un esprit de collaboration, dans un esprit d'améliorer nos projets de loi. Je voudrais féliciter notre recherchiste Jean Séguin, qui a travaillé avec moi sur le dossier, et tous mes collègues qui ont aussi participé à la commission des finances publiques.

Nous allons continuer à questionner le ministre dans tous les projets fiscaux comme ça. Un, pour s'assurer que l'État, le gouvernement du Québec, a les moyens et les outils pour faire le travail nécessaire, mais toujours en respectant les droits, les libertés et la bonne foi de tous les contribuables québécois et québécoises.

Merci beaucoup, M. le Président, pour cette opportunité de faire quelques commentaires sur le projet de loi n° 81. Et j'espère qu'avant Noël prochain nous allons faire le débat sur le projet de loi qui suit le budget de cette année. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Y a-t-il d'autres interventions? M. le ministre...

M. Bertrand (Portneuf): Juste une clarification, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...vous avez droit à une réplique de cinq minutes après chaque discours. Alors, si vous voulez...

M. Bertrand (Portneuf): Je comprends qu'on est à l'étape de l'adoption du rapport...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Du rapport, oui.

M. Bertrand (Portneuf): ...et que j'aurai l'occasion d'intervenir sur le projet de loi lui-même?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui.

M. Bertrand (Portneuf): O.K. merci.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, si, sur le rapport il n'y a plus d'autres intervenants, je mets aux voix le rapport. Le rapport de la commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Profitant du bon esprit de collaboration que le critique de l'opposition nous a mentionné en terminant son discours, je demande le consentement pour déroger à l'article 230 de notre règlement et procéder à l'adoption du projet de loi n° 81.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il consentement?

M. Williams: Un consentement exceptionnel.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Exceptionnel. C'est très bien, M. le député de Nelligan. Merci bien. Maintenant...

Mme Caron: L'article 34, M. le Président, pour l'adoption.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, l'article 34 se lit comme suit: M. le ministre délégué au Revenu propose l'adoption du projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Merci, M. le Président. Alors, à cette étape finale de l'adoption du projet de loi, je rappelle, M. le Président, qu'il a été présenté en décembre dernier, que son principe a été adopté en mars et que la commission des finances publiques en a fait l'étude détaillée tout récemment et en a adopté les 376 articles.

M. le Président, ce projet qui modifie 19 lois donne principalement suite à certaines mesures prévues dans le discours sur le budget du ministre des Finances du 9 mai 1996.

Je traiterai d'abord, M. le Président, des modifications que le projet de loi apporte à la Loi concernant les droits sur les transferts de terrains. Ces modifications ont pour but, d'une part, d'étendre la portée de l'exonération des droits à certains cas de transferts faits entre sociétés appartenant à un même groupe et, d'autre part, de soustraire de son application tout transfert fait après le 9 mai 1996, relatif à un terrain situé au Québec.

Une autre modification apportée par ce projet de loi touche la Loi sur la fiscalité municipale afin de préciser l'assujettissement à la taxe payable à titre de taxe foncière municipale d'une personne qui produit de l'énergie électrique au Québec lorsque cette énergie est fournie à une personne qui exploite un réseau de production, de transmission ou de distribution de ce type d'énergie.

Le projet de loi modifie en outre la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec et la loi constituant Fondaction, le Fonds de développement de la Confédération des syndicats nationaux pour la coopération et l'emploi. Principalement, il abaisse de 60 à 55 ans l'âge à compter duquel un particulier qui se prévaut d'un droit à la retraite ou à la préretraite peut obtenir le rachat d'une partie ou de la totalité de ses actions. M. le Président, je pense que c'est à l'avantage des personnes concernées.

Il modifie, par ailleurs, la Loi sur les impôts, principalement afin d'y modifier et d'y introduire plusieurs mesures fiscales propres au Québec. Certaines règles sont, par exemple, modifiées ou introduites dans le projet de loi concernant la Loi sur les impôts. Donc, l'une d'elles concerne la réduction progressive des montants servant de base au calcul des crédits d'impôt non remboursables accordés aux personnes vivant seules, à celles qui ont atteint l'âge de 65 ans et à celles qui ont certains revenus de retraite.

De même, une autre règle concerne la possibilité de retirer sans imposition des montants accumulés dans un régime enregistré d'épargne-logement s'ils sont utilisés pour réaliser des travaux de rénovation, et la révocation d'un tel régime le 31 décembre 1999. Une autre disposition porte sur l'instauration de deux nouveaux crédits d'impôt remboursables, soit pour la production de titres multimédia et pour la construction navale. Enfin, une autre règle se rapporte à la nouvelle contribution au Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail.

On voit là, M. le Président, qu'il s'agit toutes d'excellentes mesures et non pas de mesures qui se limitent à augmenter le fardeau fiscal. On est dans un contexte où on essaie de balancer la fiscalité de la meilleure façon possible, de façon à avoir justement le plus d'impact possible, notamment en termes de création d'emplois.

Le projet modifie également la Loi sur le ministère du Revenu afin, notamment, d'étendre la responsabilité des administrateurs d'une société aux cotisations à payer en vertu de la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, de permettre également au ministre du Revenu de modifier les modalités de versement d'un montant que doit lui remettre un contribuable qui se retrouve en situation d'insolvabilité et de prévoir une pénalité à l'égard d'une personne qui omet, de façon répétée, de déclarer un revenu.

Ce projet de loi modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec, principalement afin d'y insérer des mesures propres au régime fiscal du Québec. Les modifications visent notamment à hausser le pourcentage du remboursement partiel de la taxe accordé aux administrations hospitalières, à leur avantage, M. le Président, à remplacer le volume de référence aux fins de calculer la taxe à payer lors de la vente d'un véhicule automobile d'occasion et à élargir en faveur des producteurs artisanaux le droit de vente directe aux consommateurs sur les lieux de production. Il s'agit donc, encore ici, M. le Président, vous le comprendrez, d'une excellente mesure à l'avantage des milieux concernés.

Avant de conclure, M. le Président, je reviendrais sur certains commentaires que faisait le porte-parole de l'opposition officielle à l'étape précédente de l'adoption de ce projet de loi. J'ai l'impression que, lorsqu'on parle d'augmentation du fardeau fiscal des Québécois, lequel pourrait augmenter comme conséquence des mesures adoptées, le porte-parole de l'opposition néglige de regarder l'ensemble de la fiscalité, de ces efforts que nous faisons pour justement en arriver à pouvoir réduire globalement le fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises, notamment par un bien meilleur contrôle des dépenses publiques, comme nous l'avons fait maintenant depuis trois ans, et contrairement à la performance du gouvernement libéral qui nous avait précédés pendant 10 ans, M. le Président.

Alors, je pense que, par les mesures que nous mettons en place, nous réussissons à mieux balancer, je dirais, notre fiscalité pour la rendre davantage incitative, notamment en matière de création d'emplois, et nous posons des gestes qui, sur le plan budgétaire, nous permettront à assez brève échéance d'envisager effectivement des réductions d'impôts. Et ça a été le cas au dernier discours du budget, je vous le rappellerai, M. le Président. La diminution de 15 % dont on a parlé abondamment lors du débat sur le budget pour tous les ménages qui ont moins de 50 000 $, c'est un exemple de ce qui est maintenant possible, qui est à notre portée, comme conséquence des efforts qu'on a faits au niveau d'un meilleur contrôle des dépenses publiques.

(16 h 50)

L'opposition officielle se trompe de débat, parce que nous sommes ici à une étape, par ce projet de loi, où on vise à traduire dans des dispositions législatives des décisions qui ont été prises antérieurement et à l'égard desquelles des débats ont été tenus il y a déjà une quinzaine de mois, peut-être, ou plus d'un an. Alors, je pense qu'à ce moment-ci on en est à débattre sur un projet de loi dont l'objectif est de traduire le plus fidèlement possible ces intentions-là dans des dispositions législatives.

En ce qui regarde les suggestions du député de Nelligan à l'effet que toutes les lois de ce genre soient adoptées avant la fin de l'année civile, nous en sommes, M. le Président, et c'est ce que nous avons essayé de faire rigoureusement depuis maintenant quelques années. Il peut arriver cependant que le menu législatif s'engorge en fin de session, au début de l'hiver ou à la fin de l'automne, et fasse en sorte qu'on n'ait pas le temps effectivement de compléter l'exercice. Mais je puis assurer le député de Nelligan que nous allons faire tous les efforts nécessaires pour faire en sorte qu'on puisse effectivement entrer dans ce délai auquel nous souscrivons et avec lequel nous sommes d'accord.

Pour ce qui concerne la refonte complète des lois fiscales, je suis en discussion actuellement, comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer au député de Nelligan, avec mon collègue le ministre de la Justice, de qui relève l'essentiel de cette opération, et je crois pouvoir effectivement aboutir de façon fructueuse dans un bref délai de façon à pouvoir justement traduire dans une refonte des lois toutes ces décisions qui ont été prises depuis maintenant quelques années et qui ont un impact sur, donc, l'ensemble de nos lois fiscales.

Un dernier mot, M. le Président, avant de conclure, en ce qui regarde les pénalités pour omissions répétées de déclarer ses revenus ou pour récidive. Effectivement, j'ai été bien à l'écoute des représentations des membres de la commission, et notamment du député de Nelligan, porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu. La préoccupation était la suivante: Puisqu'une telle mesure doit s'appliquer éventuellement en cas de récidive, pourquoi ne pas le prévoir explicitement dans la loi de façon à éviter qu'éventuellement on applique cette mesure-là de façon, je dirais, trop généreuse à l'encontre des contribuables? J'ai eu l'occasion d'expliquer qu'il me semblait nécessaire de bien camper dans nos textes de lois un principe très simple qui est celui consistant à dire aux gens que l'ensemble des revenus doivent être déclarés. Ça, c'est la règle de base. Tous les revenus que nous encaissons finalement dans une année doivent, dans le rapport d'impôts, être déclarés.

Maintenant, c'est sûr qu'en termes d'application on doit tenir compte du contexte dans lequel éventuellement un oubli a pu être fait. Alors, c'est à cette réalité-là qu'on s'intéresse quand on parle de récidive et de pénalité éventuellement pour une récidive. Donc, après avoir constaté un premier défaut, après avoir avisé la personne de ne pas recommencer, d'une certaine façon, si la personne effectivement réitère son oubli, bien, là il pourrait y avoir une pénalité. C'est de ça qu'il est question, M. le Président.

La pénalité, donc, pour récidive viserait un contribuable ou visera un contribuable qui a omis de déclarer un revenu alors qu'il avait déjà fait une telle omission au cours d'une des trois années précédentes. Par exemple, lors du traitement de la déclaration de revenus, le ministre peut constater, par conciliation avec les différents relevés émis, que des revenus n'ont pas été déclarés. Alors, il est prévu, donc, d'abord d'avertir le contribuable à même son avis de cotisation qu'une récidive pourrait l'assujettir à une pénalité égale à 10 % du revenu non déclaré. Ça, c'est l'intention déclarée par le ministre du Revenu au moment où on adopte le projet de loi et donc l'article qui faisait référence à cette pénalité pour récidive.

Une autre circonstance d'application de cette pénalité: lors de la vérification a posteriori des déclarations produites ou portant sur la vérification de personnes qui ne produisent pas leurs déclarations. Alors, comme on le sait, ces vérifications peuvent porter sur une période de trois ans. Ainsi, si le ministère constate qu'une personne a fait défaut de déclarer un revenu trois années de suite, il pourra appliquer la pénalité à l'égard de la deuxième et de la troisième année.

Toutefois, cette mesure ne sera appliquée qu'après l'instauration – et ça constitue également un engagement ferme de la part du ministre – d'un programme de communication invitant les gens à déclarer tous leurs revenus et leur faisant part des nouvelles conséquences de leur éventuelle omission. Ainsi, le ministère, comme vous le comprenez, ne vise pas, par ce moyen, à récupérer avant tout des montants additionnels mais bien à inciter la déclaration de tous les revenus.

Encore plus loin, M. le Président, il s'agit d'une mesure qui ne sera pas appliquée si l'omission de déclarer un revenu découle d'un problème d'interprétation. On comprend, dans les circonstances, qu'il y a eu effectivement un problème d'interprétation et qu'on se verrait mal appliquer une pénalité à l'égard du contribuable concerné. Par ailleurs, cette mesure ne sera pas d'application automatique, et le ministère établira, par directive ou autrement, les circonstances propres à son application.

On comprendra, M. le Président, que, dans le contexte actuel du travail au noir, l'État doit se donner les moyens nécessaires pour inciter tout le monde à déclarer tous ses revenus. De plus, si une telle mesure n'était pas appliquée dans les circonstances suggérées, elle ne serait pas applicable à l'égard d'une personne qui a fait défaut plusieurs années de suite de produire sa déclaration de revenus, puisque le ministère n'aura jamais eu l'occasion de l'aviser. Alors, je pense que la mesure en question nous apparaît tout à fait fondée, d'autant plus qu'elle sera appliquée avec tout le doigté et toute la diligence nécessaires dans les circonstances.

M. le Président, en terminant, je tiens à remercier encore une fois les membres de la commission sur les finances publiques pour leur intérêt et leur collaboration, leur patience aussi – parce qu'il s'agit de projets de loi qui sont assez lourds à étudier – lors de l'étude du projet de loi, et leur contribution aura été certainement des plus appréciées. Là-dessus, je propose donc l'adoption du projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Nelligan, pour une intervention.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Quelques brefs commentaires avant le vote sur le projet de loi n° 81, parce que nous avons juste fait le débat sur le dépôt du rapport de la commission des finances publiques sur le même projet de loi.

Sans répéter tous les commentaires que j'ai dits pendant ce débat, je voudrais juste cibler quelques commentaires sur les remarques du ministre. Un sur le calendrier. Quand est-ce qu'on doit passer un projet de loi tel quel, un projet de loi qui met en vigueur législativement les articles, les principes, les taxes d'un budget déposé par le ministre des Finances? Moi, j'insiste encore sur le fait que, pour la transparence, pour l'honnêteté et pour assurer que les Québécois et Québécoises comprennent, on doit passer ce projet de loi avant la fin de la même année de calendrier, avant Noël. On doit déposer, étudier et adopter ce projet de loi.

Là, l'excuse que c'est difficile pendant la session intensive, ce n'est pas assez bon pour moi. C'est une loi fiscale, c'est une loi de revenus, c'est la responsabilité du ministre délégué. Je lui lance le défi d'assurer que son leader parlementaire trouve ça assez important pour appeler ce projet de loi pendant les délais prescrits dans le règlement et d'assurer que ça passe, ce projet.

Je ne blâme pas personnellement le ministre délégué sur ça, parce que c'est effectivement le travail d'un leader parlementaire. Mais j'insiste auprès du ministre délégué pour qu'il s'assure de convaincre pendant le Conseil des ministres ou pendant les caucus que ses projets de loi sont traités d'une façon aussi importante, qu'il ne vont pas être oubliés sur les tablettes pendant la session intensive. Avec ça, une loi fiscale, une loi qui vient d'un budget doit être la priorité que nous allons débattre, et j'offre mes services, comme d'habitude, de collaboration et aussi avec un souci d'améliorer les projets de loi présentés par le ministre délégué.

(17 heures)

Deuxième chose, et c'est un débat que le ministre délégué et moi avons eu à plusieurs occasions – je répète juste quelques commentaires – mon rôle comme parlementaire ici, en commission parlementaire et aussi pendant le débat en dernière lecture ici, ce n'est pas juste d'être un «rubber stamp», comme l'expression qu'on utilise, comme un timbre du projet de loi annoncé par le ministre des Finances. Le ministre délégué souvent dit que ce n'est pas son affaire, que ça vient du ministre des Finances, qu'il est en train de juste mettre en vigueur légalement ce qui est déjà décidé par le Conseil des ministres, par les autres ministres, le ministre des Finances ou les autres ministres attachés dans le dossier, que ce n'est pas son affaire de faire un débat sur le fond de ses projets de loi. Chaque parlementaire, M. le Président, doit prendre ses responsabilités et on doit questionner le gouvernement à chaque étape d'un projet de loi. D'une façon ou d'une autre, si la loi, l'annonce est déjà faite par le ministre des Finances, cela ne m'empêche pas, comme parlementaire, de questionner le gouvernement. Je ne vais jamais abroger mes responsabilités comme parlementaire en commission ou dans cette Chambre, parce qu'il me semble que, pendant une étude détaillée d'un projet de loi comme ça, on doit questionner, on doit savoir si effectivement le ministre délégué est d'accord avec ces mesures, s'il comprend les mesures, si les mesures viennent de ses recommandations ou si elles viennent d'un autre ministère.

Est-ce qu'il est d'accord avec ça? Est-ce qu'il comprend qu'il est en train d'augmenter le fardeau fiscal sur le dos des contribuables? Est-ce qu'il comprend qu'il est en train de fouiller encore dans les poches des Québécois? C'est ça qui est notre responsabilité comme parlementaires, et je vais continuer de faire ça. Je vais continuer de questionner le ministre délégué dans ces affaires-là. Je sais que, peut-être, c'est frustrant pour lui de dire que ce n'est pas son affaire, que ça vient d'un autre ministère. Je ne le blâme pas, ce n'est pas lui qui cause cette augmentation de taxes. Mais je m'excuse, M. le Président, c'est notre responsabilité comme élus, comme parlementaires, de s'assurer qu'on défend les intérêts des Québécois et des Québécoises.

Quand le ministre essaie de dire aussi qu'il y a beaucoup de bonnes mesures, il y a quelques bonnes mesures dans ce projet de loi, j'ai admis ça et j'ai voté pour ça, mais il y a aussi une avalanche de taxes. Je n'en ai nommé juste quelques-unes. Une taxe, c'est une taxe, c'est une taxe. A tax is a tax is a tax, and I think the Minister agrees with me. Obviously, you keep going at the taxpayers. They sooner or later will say: We are taxed up to here, we can't go any farther. Taxe additionnelle sur le capital d'assurance-vie, taxe sur le capital. Un autre point. Moi, je peux, s'il le veut – parce que nous avons beaucoup de temps aujourd'hui – lister toutes les taxes que le ministre est en train d'augmenter.

M. le Président, j'ai seulement voulu souligner, encore une fois, parce que le ministre a mentionné sa fameuse lutte au marché noir, que nous ne sommes pas tous des fraudeurs. La grande, grande, grande majorité des Québécoises et Québécois sont des contribuables de bonne foi, des contribuables honnêtes qui paient leurs taxes. Le ministre essaie toujours de convaincre ou donne l'image qu'il pense que nous sommes tous des fraudeurs. Je n'accepte pas ça, je n'accepte pas ça pantoute, M. le Président.

Je pense qu'on doit s'assurer, comme je l'ai mentionné, dans ce projet de loi, que le ministère du Revenu a les outils pour faire son travail, mais respecte la bonne foi des contribuables, respecte leur capacité de payer, respecte l'honnêteté de tous les Québécois et Québécoises. C'est pourquoi, chaque fois que le ministre essaie de vendre qu'à chaque fois qu'il doit faire quelque chose c'est à cause du marché noir, je n'accepte pas, comme il pense, que tous les Québécois et Québécoises sont des fraudeurs. Je n'accepte pas ça. Et il sait, les Québécois savent que, après le budget de l'année passée et encore dans le budget de cette année, les Québécois et les Québécoises sont plus taxés. Nous sommes les plus taxés dans tout le Canada, les contribuables et les compagnies. J'essaie de mentionner au ministre qu'une taxe, c'est une taxe, c'est une taxe. Le gouvernement essaie de trouver tous les mots pour taxer sans dire le mot «taxe». À la fin de la journée, ce sont les mêmes poches, c'est le même chèque de paie.

Alors, M. le Président, en terminant, comme je l'ai mentionné, il y a quelques gestes dans ce projet de loi qui sont utiles, mais la façon dont nous avons procédé... Et l'évaluation à la fin, c'est que nous sommes plus taxés après ce projet de loi. Juste un bon exemple. Le ministre, à la toute dernière minute, est arrivé avec une série d'amendements, des taxes, taxe spécifique sur l'hébergement, le fameux 2 $ sur lequel nous avons eu tout un débat. Le ministre délégué n'a pas voulu faire un autre débat sur ça, mais le monde questionne ce qui se passe dans ça, le monde questionne le niveau de taxation. Peut-être que le ministre va dire que c'est une bonne affaire. On verra, M. le Président, parce que nous avons eu beaucoup de commentaires contraires.

C'est une raison, dans plusieurs articles... Dans tous les articles, il y en a eu plusieurs qui ont eu une augmentation du fardeau fiscal des contribuables. L'opposition a voté contre. Nous allons continuer de voter contre l'obsession de ce gouvernement de continuer à augmenter le niveau de taxation des contribuables. Je trouve ça intéressant qu'il ait assez d'argent pour son obsession de souveraineté, de séparation, assez d'argent de caché advenant un oui, mais il n'a pas assez d'argent pour répondre aux vrais besoins des Québécois et Québécoises.

Moi, M. le Président, je vais voter contre ce projet de loi. Nous avons essayé notre possible pour clarifier et améliorer ça, mais le fait qu'effectivement c'est un projet de loi qui vient d'un budget de l'année passée, qui, comme je l'ai mentionné, est une avalanche de nouvelles taxes, malheureusement, je pense que le ministre délégué n'a pas compris le message de la population québécoise, et c'est pourquoi l'opposition officielle a pris la position telle que nous avons prise. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre pour son droit de réplique. M. le ministre.


M. Roger Bertrand (réplique)

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Il s'agit d'un projet de loi qui donne suite effectivement à des décisions antérieures, notamment au discours du budget 1996, mais qui m'apparaissent être d'excellentes mesures eu égard à l'économie et à l'emploi et qui m'apparaissent être la conséquence également, si on y rajoute les décisions qui ont été prises au dernier discours du budget, de l'excellente gestion du présent gouvernement qui nous permet maintenant d'envisager un jour pouvoir justement réduire, à assez brève échéance, le fardeau fiscal parce qu'on aura su mieux contrôler nos dépenses publiques.

Alors, j'aimerais qu'on puisse en tenir compte dans les interventions de l'opposition officielle. Je comprends qu'ils auraient l'air, à ce moment-là, un peu de souligner les bons coups du présent gouvernement, mais je pense qu'il y a un minimum de fair-play en Chambre, M. le Président, qui pourrait amener éventuellement les députés de l'opposition à reconnaître quelques-uns de nos bons coups également. Enfin!

Le député de Nelligan nous dit, en tout cas évoque encore cette présumée tendance qu'on aurait, au ministère du Revenu, à considérer les contribuables comme des fraudeurs. Mais absolument pas, M. le Président! Notre conviction, c'est que la très grande majorité sinon la totalité, sauf exception, des contribuables et des mandataires sont des citoyens, corporatifs ou pas, qui ont un comportement tout à fait correct sur le plan fiscal. Mais il faut prévoir justement un certain nombre de dispositions qui nous assurent que ceux qui ne respectent pas les règles du jeu soient incités à les respecter. C'est de ça qu'il était question tout à l'heure dans mon intervention précédente et c'est pour ça qu'on adopte des dispositions qui, effectivement, peuvent être un peu contraignantes au niveau du comportement fiscal, mais qui sont des incitatifs finalement à respecter le pacte fiscal et à faire en sorte qu'il y ait équité dans cette société quant à la contribution des uns et des autres au financement des services publics. C'est de ça qu'il s'agit, M. le Président.

Le député de Nelligan est revenu sur la question du débat: s'agit-il du mauvais débat ou pas? Effectivement, il y a un discours du budget, on discute du fond des choses. À cette étape-ci, ce dont on doit discuter, c'est effectivement: Est-ce que ce qui est proposé dans ce projet de loi rend bien l'idée du ministre des Finances quand il veut faire telle chose ou pas? Ce qui n'exclut pas que sur certaines questions on puisse avoir un débat de fond, par exemple sur les éléments du présent projet de loi qui donne suite à des demandes explicites du ministère du Revenu pour améliorer justement l'administration de la fiscalité. On est bien prêt à en discuter sur le fond des choses, à ce moment-là; on les a même identifiés aux membres de la commission. On leur a dit: Ces articles-là, c'est ceux qu'on a demandés; on est prêt à en discuter, on est prêt à les défendre. Je pense que dans l'ensemble ça a donné lieu à des échanges fort utiles sur le contenu des choses.

Je peux rassurer le député de Nelligan quant à mon intérêt pour tenir avec lui des débats. J'espérais en avoir un vendredi dernier lors de l'interpellation, M. le Président. J'avais devant moi pour quelques minutes le député de Nelligan; malheureusement, il a préféré vaquer à d'autres occupations. Je veux qu'il sache que j'étais disponible et que je serai toujours disponible pour débattre. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué au Revenu. Cela met fin au débat, et nous allons mettre aux voix le projet de loi.

Le projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Adopté sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Comme nous sommes rendus à l'article 1, je vais vous demander une petite suspension compte tenu que les intervenants ne sont pas encore arrivés.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons suspendre en attendant que les intervenants pour le prochain débat nous arrivent.

(Suspension de la séance à 17 h 10)

(Reprise à 17 h 15)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 1 de notre feuilleton.


Débats sur les rapports de commissions


Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui a tenu des consultations particulières dans le cadre d'un mandat d'initiative sur l'administration de la justice en milieu autochtone

Le Vice-Président (M. Brouillet): L'article 1. L'Assemblée reprend le débat ajourné par M. le leader du gouvernement le 1er mai dernier sur la prise en considération du rapport de la commission des institutions qui, les 21 août 1996 et 21 janvier 1997, a tenu des consultations particulières dans le cadre d'un mandat d'initiative sur l'administration de la justice en milieu autochtone. Ce rapport, déposé le 16 avril 1997, contient des recommandations. Je vous signale qu'il reste 31 minutes de débat aux représentants du groupe de l'opposition. Alors, M. le député de Chomedey, je vous cède la parole.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, comme vous venez de le mentionner, on reprend notre débat sur le rapport de la commission des institutions qui a effectivement tenu des consultations dans le cadre d'un mandat d'initiative concernant la justice autochtone. On a notamment eu l'occasion d'entendre le juge Coutu qui est venu expliquer en détail les constatations que lui-même a pu faire lors de très nombreuses années de travail en milieu autochtone, tantôt sur certaines réserves indiennes, tantôt en milieu inuit dans le Nord du Québec.

M. le Président, lorsqu'on regarde l'histoire du Québec et l'histoire du Canada, force nous est de constater que les autochtones, les premiers habitants de ce pays, ont souvent été maltraités. Cela se traduit dans les faits par un très haut taux d'incarcération, notamment, pas seulement au Québec, mais aussi dans les autres provinces du Canada, notamment en Alberta et au Manitoba. C'est pour ça que plusieurs provinces, y compris le Québec, depuis de très nombreuses années maintenant, consacrent des efforts sérieux pour mieux cerner, mieux comprendre le problème de l'application de nos règles de justice en milieu autochtone et essayer de savoir ce qui peut être fait pour les adapter et obtenir un résultat autre que celui que je viens d'évoquer, c'est-à-dire un très haut taux d'incarcération et une proportion de personnes qui sont issues de ces milieux-là qui dépasse largement la proportion du reste de la population qui se retrouve devant les tribunaux et éventuellement dans les prisons.

Je dois dire, M. le Président, que, quand j'ai entendu, le 21 août 1996, le juge Coutu en commission des institutions, j'ai été fort surpris, d'abord surpris d'apprendre le point que ceux et celles qui sont impliqués directement dans le milieu de l'administration de la justice autochtone ont pu, au cours des années, constamment rencontrer des obstacles et des barrières, que leurs recommandations n'étaient jamais suivies et qu'encore une fois un rapport – c'était le rapport du juge Coutu – était en train d'accumuler de la poussière sur les tablettes.

Le juge Coutu est venu en commission des institutions et, sans parti pris, définitivement sans partisanerie, est venu dire que l'actuel gouvernement faisait défaut de respecter ses propres engagements en matière de justice autochtone; mais, là-dessus, il faut être très correct et ouvert et admettre que ce n'est pas le sort d'un seul gouvernement. Ces problèmes-là ne sont pas l'exclusive responsabilité d'un gouvernement ou d'un autre, ce sont des problèmes qui se répètent et qui se perpétuent depuis que les premiers Européens sont arrivés en Amérique du Nord. Et, comme je le mentionnais tantôt, ce n'est pas exclusif au Québec, ça existe dans les autres provinces canadiennes, et ce n'est pas exclusif au Canada, ça existe dans les autres juridictions en Amérique du Nord.

(17 h 20)

La reconnaissance des droits des autochtones n'est pas un phénomène propre à l'Amérique du Nord, justement, M. le Président. Comme vous l'avez sans doute remarqué, au Japon, la semaine dernière, le peuple innu – c'est leur terme à eux; j'ignore s'il y a parenté ou si la similitude du nom avec le peuple qui existe au Labrador est un fait historique ou autre – a été reconnu comme peuple autochtone du Japon. Vous savez, M. le Président, ils rencontraient des difficultés au niveau de l'emploi, il y avait de la discrimination à leur endroit. Ils étaient de plein droit des citoyens du Japon. Ils étaient des autochtones et ils rencontraient la même sorte de problèmes que ceux qu'on a pu constater ici, en Amérique du Nord. Évidemment, il y a des peuples autochtones indigènes en Amérique centrale, en Amérique du Sud, au Groenland, qui est rattaché au Danemark, qui fait partie de l'Europe. Donc, ce n'est pas un phénomène qui est propre au Québec et c'est un défi pour tout État moderne que d'arriver à trouver des solutions qui sont adaptées et respectueuses des différences qui peuvent exister.

Mr. Speaker, as you mentioned at the outset, today we're continuing with a debate that was adjourned on May 1st on the consideration of the report from the Committee on Institutions which held special hearings in August 1996 and January 1997 within the framework of an order of initiative of the administration of justice regarding Native peoples.

The report was tabled on April 16th and contained a certain number of recommendations. What we are seeking to do as members of this Parliament and with as little purely partisan or political debate as possible is to recognize that the report contains a certain number of avenues that we should be exploring if we want to come to solutions in this very difficult file which is the file concerning Native or aboriginal justice.

Mr. Speaker, as you know, all levels of government in Canada and indeed in North America and many other countries in the world have been studying this vexing question for a number of years. The Dussault-Erasmus committee, a royal committee struck at the federal level to study these questions, has just recently tabled its own report. It's an extraordinary document. It represents years of work by very competent people who have travelled throughout Canada, including of course Québec, and have looked at the very specific problems and challenges that face Native people, aboriginal people, throughout this great country of ours. It comes to a certain number of conclusions as well with regards to Native justice.

And to put it in the simplest terms, Mr. Speaker, when we look at problems of aboriginal justice, Native justice, what all the experts, what all the people who are involved in the file have always continued to say is: Be more flexible, be more respectful of differences and you'll see that a law that is adapted to people whose culture and background is different would be easier to understand and easier to respect and will not produce the type of difficult and indeed unacceptable result we have seen in many provinces of Canada where the prison population contains far too many members of aboriginal communities, a proportion that greatly surpasses their population, generally, in the percentage rather than in the general population, and that's the reason why it's so important for the Members of this Assembly to look at the recommendations that are being put forward now and to try to come to an understanding of the profound differences that exist and that must be respected.

Au Québec, il y a certaines expériences qui existent à l'heure actuelle et qui font en sorte qu'on tente d'adapter nos institutions, notre manière de faire à des traditions culturelles chez les autochtones et qui commencent à produire des résultats intéressants. À Sept-Îles, notamment, le juge qui s'occupe de ces questions-là et qui reçoit bon nombre de causes en provenance des réserves indiennes a commencé à utiliser le processus qui consiste à soumettre la question de la sentence aux considérations auprès d'un cercle de personnes issues du milieu autochtone. Plutôt que d'avoir un droit des Blancs, un droit de personnes qui sont externes à ces milieux-là, qui est imposé de force sans tenir compte des différences, on a maintenant ce renvoi, ce recours, cette consultation à l'extérieur.

Bien sûr, notre système de droit n'a pas changé, pour l'instant. Bien sûr, la loi doit continuer à s'appliquer à tous de la même manière. Cependant, le respect pour nos institutions et la compréhension de ce qui est en cause augmentent grandement quand cette facette, cette dimension de l'expérience autochtone, de leur culture rentre en ligne de compte. L'expérience à Sept-Îles, jusqu'à date, s'avère fort intéressante. Le nombre de personnes qui passent par le système judiciaire et carcéral diminue grandement. La compréhension mutuelle augmente, et tout le monde est gagnant. C'est le genre de modèle qui doit être suivi et répété sans pour autant délester le fait qu'il faut, dans une société démocratique, qu'on ait un système où on adopte des lois. Mais il y a aussi une manière d'adapter des lois à des situations particulières. Ça aussi, M. le Président, c'est une marque de civilisation et de capacité de reconnaître que les autochtones sont les premiers habitants du Québec et du reste du Canada et qu'aujourd'hui, en 1997, on se doit de faire preuve de flexibilité et de compréhension en adaptant notre manière de faire. C'est une chose d'adopter les lois ici, à l'Assemblée nationale; encore faut-il pouvoir les appliquer. Et la meilleure manière de les appliquer, c'est de les adapter selon le contexte et la situation.

Mr. Speaker, one of the more interesting aspects of the application of aboriginal justice here, in Québec, is the recent attempt, in Sept-Îles, to use sentencing circles that include, that bring in people from the Native community, from the aboriginal community, to consider the appropriateness of sentencing and to reflect on the case at hand. It's had a very interesting result. It's had a result of increasing understanding amongst those who have traditionally been there to administer justice of the reality of the Native population, the aboriginal population, what there're living, what their culture is and why there are differences that are so profound.

It also has had an interesting side effect because, as I mentioned before, Mr. Speaker, in Canada and in Quebec – we have'nt escaped that – the percentage of Native people in the present population has unfortunately often been greater than the percentage in the general population. Now, one of the ways to change that is being experimented now in Sept-Îles with the judge who's there. What he does is he brings in a group of people from the local community, the Native community from which an accused is issued. And he consults, does'nt change the law, is'nt bound by the final decision. But the very fact of including people from that person's own community in the decision process, in the sentencing process has the double effect of increasing the understanding of those who administer the laws as they now stand and of increasing the appreciation for the importance of following those rules by those who were brought before the appropriate authorities for the administration of justice.

Although I'm able to give the Sept-Îles example as a positive example of what can be done in matters of Native rights in the field of administration of justice, it's unfortunate to note that most of the efforts of this Government, thus far, have been concentrated in the Inuit Community. Now, I would'nt for a second want that to be interpreted in any way as being an indication that I think that too much is being done with regard to the Inuit Community, quite the contrary. Not enough is being done with regard to the Inuit and not enough is being done further South. But it's important to realize that in the Montreal area and in the Lower North Shore, there have been numerous problems over the years, and those problems have not been sufficiently addressed by this Government so far. I think, Mr. Speaker, that that goes a long way towards explaining the deep sense of frustration that the members of the Institutions commission felt when we met judge Coutu when he was presenting his report, in August of last year.

So, we're on the right path, Mr. Speaker. We've got a report now that allows us to look towards the future, but it also has to be applied with good faith. It's not enough to continue to produce reports saying what the problems are and what the different avenues of solutions might be. We have to apply them. And the only way to apply programs that are adopted by Parliament is to make sure that they have sufficient resources available so that they can be applied.

Mr. Speaker, no one gets elected to Parliament, no one goes through that process unless they've got some experience and some desire to serve in a larger community. Whatever side of the House we're on, we have a profound desire to do what is best in our society. There are deep divisions that separate both sides of this House, notably with regard to constitutional matters. But with regard to administration of justice, with regard to respect for Native rights, with regard to the administration of justice in the Native milieux, I believe that there are many more men and women of good will on both sides of this House than people who would take a very restrictive approach.

(17 h 30)

What's needed now, Mr. Speaker, is for us to convince ourselves, on both sides, that the issue is of sufficient importance and gravity that despite the restrictive economic climate we must, as a society, grant sufficient financial resources so that the recommendations of the Institutions Committee can be carried forward, that life can be breathed into them and that they can become a reality. That's what we need, Mr. Speaker.

Ce qu'il faut surtout, M. le Président, c'est de s'assurer que les recommandations dont on parle aujourd'hui, les recommandations qui visent à améliorer la justice en milieu autochtone, deviennent réalité. Il n'y a qu'une seule manière de le faire: c'est de s'assurer que les ressources financières nécessaires sont consacrées à cette fin. C'est pour cette raison qu'on incite le gouvernement, on implore le gouvernement de ne pas laisser ce rapport de la commission des institutions devenir lettre morte. Il ne faut pas que sur la tablette ça commence à accumuler de la poussière.

Je pense qu'il y a un problème profond que l'on vit au Québec depuis les événements d'Oka, et c'est le fait que, dans certains postes de radio – on peut citer notamment les lignes ouvertes – c'était devenu tellement facile de chauffer les gens qui écoutaient en parlant contre la population autochtone que tout gouvernement qui désire faire quelque chose dans ce domaine y pense deux fois, en se disant: Ouais, mais, si on est perçu comme faisant trop de ce côté-là, on risque de se faire critiquer.

M. le Président, avec les centaines d'années d'histoire, de misère, d'oppression, de difficultés, de perte des terres, de perte des traditions, de perte des droits qu'ont subies les peuples autochtones au Québec, dans le reste du Canada, en Amérique du Nord et ailleurs, je ne pense pas que qui que ce soit qui regarde ça objectivement va craindre une critique de cette nature-là. Objectivement, le temps est venu d'utiliser notre expérience, les analyses des personnes expérimentées, comme le juge Coutu, et d'aller de l'avant, de commencer à bâtir quelque chose pour l'avenir qui va permettre d'amoindrir éventuellement, d'enrayer les problèmes chroniques qui existaient par le passé et que l'on se doit de tenter d'enlever pour l'avenir, et ce, non seulement dans l'intérêt des communautés autochtones, mais pour le plus grand bénéfice de l'ensemble de notre société.

Mr. Speaker, any change in this area will always be measured in terms of whether or not, given certain events like Oka, the Government is seen to be giving into or to be giving too much to people, in terms of the Native community. I think that it's important to bear in mind that after hundreds of years of oppression, of loss of property, of loss of rights, of loss of customs and the ability to follow with their traditional way of life, anyone who is thus concerned is severely mistaken. It is only fair to note the simple fact that the aboriginal communities in Québec and in the rest of Canada and elsewhere in the world have already suffered enough. It's not appropriate for us to start measuring with an eyedropper how much we're going to be spending in order to correct these historical imbalances, these historical injustices. It's time for us, on both sides of the National Assembly, to join together and to say: We've got a sober, solid analysis by a person like judge Coutu, by the commission des institutions, we can start moving forward. We can only do that if we apply appropriate financial resources.

I must say that an important first step was taken – again, it was with regard to the Inuit community – but a first legal aid lawyer was affected to Northern Québec to work within the Native communities there. That was an important first step and something that had been requested in the strongest possible terms by judge Coutu in August of 1996, and there was an undertaking by the current Minister of Justice to follow through with that, and he has done so; and, in that respect, it's a good thing for everyone.

But there remain a number of things that have to be done, and one detects a certain reticence on the part of the Government because, in certain milieux, especially certain talk shows, if you wanted to get the population concerned, especially following the events at Oka, all you had to do was give a hint that some government was giving something more to Natives than to other people. One can recall incidents concerning Hydro-Québec, concerning billing practices, one can recall any number of incidents where people can be told that, somehow, Native people in Québec, despite the fact that any objective analysis shows that they are the people who have lost the most over the past centuries that they... So much has been taken away from them, and yet, somehow, it is possible for some analysts, especially talk shows on the radio, to convince the population that indeed the Government is giving more to Native people than he gives to the general population. The thesis is absurd, the idea that, somehow, Natives are getting more does not resist the slightest serious analysis, and yet, it is still out there.

So, I guess all governments are a little leery of that analysis and are always tending to be as chancy as possible whenever looking at these questions. But, Mr. Speaker, we have a serious analysis on the table. We have got the work of Judge Coutu, we have got the other experts who have come on medicine commission, we have got a certain number of concrete recommendations and now the time has come to move forward. So, that is why we extend our hand to the Government and we say we should be working together on this.

The only ones who control the purse strings on this matters are the members of this Government, Mr. Speaker. We don't, not in Opposition, we don't have the money. But we can say to the Government that it's time to move forward, that in a spirit of bipartisanship all members of this Assembly should be working to improve the lot of Native communities in Québec. And one of the areas where the needs have been the most evident is the area of the administration of justice. If we can start there and restore a greater degree of confidence, mutual confidence, then perhaps it will facilitate our work in many other areas where we have got to be working.

We can all salute the creation of a new peace keeping force at Kanesatake where there are now a number of people who are working there to apply the law. It's an interesting step forward and that is one that has to be applauded, and levels of government that have participated in that regard, including of course this Provincial Government, deserve credit. It's a move in the right direction.

But when one looks that how governments sometimes treat this dossier, one realizes that there is still a long way to go. One of the most glaring examples was prior to the referendum when two ministers went to Kanesatake to where a field of marijuana had been found and, for the television cameras, put on a very good show of ripping up the marijuana and doing this and that. We were very leery at the time that there might be more involved because it mates for such good television at the time of the preparation of a referendum. Well, we were able to conclude, indeed, that there were no charges ever laid in that case. So, maybe that was the «quiproquo» that was involved, that someone was allowing them to come in and take these great pictures before a referendum and then, everything was forgotten despite the fact that what was involved was a clear violation of the law.

So, all these things have to be looked at together and we have to realize that we owe a lot to the Native people in Québec and across the country, that not only do we owe them a lot but a lot has to be repaired and the best way to do that is to start now, start respecting the rights of Québec's aboriginal population, start understanding the distinctness, the differences that have to be understood and respected if we are going to increase confidence on both sides and allow our society, as a whole, to benefit. So, that is what we have before us, Mr. Speaker, it is the possibility to move forward, possibility to move forward with a new deal in the field of administration of justice with regard to Native people in Québec.

(17 h 40)

La possibilité existe en ce moment, M. le Président, d'aller de l'avant, de faire un pas correct en avant sans qu'un groupe ou un autre puisse se sentir perdant. Parce que cette analyse à l'effet que, si on donne quelque chose, si on avance d'un côté veut nécessairement dire qu'on retire ou qu'on enlève quelque chose de l'autre, cette analyse est complètement fausse dans le domaine de l'administration de la justice en milieu autochtone. Il faut plutôt reconnaître, M. le Président, que nous sommes face à une situation où il faut corriger des injustices historiques, il faut tendre à ouvrir des portes et ne pas les garder fermées, il faut écouter les experts qui nous ont aidé à l'élaboration du rapport, à la commission des institutions. Et pour toutes ces raisons, on réitère notre ouverture à collaborer avec le gouvernement afin de donner vie à ces propositions-là, afin de s'assurer qu'elles ne restent pas lettre morte justement, que la confiance mutuelle entre peuples autochtones et le reste de la population au Québec va grandir et que notre société en général va sortir gagnante dans toute cette question-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Ceci met fin au débat sur la prise en considération du rapport de la commission des institutions. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au mercredi 14 mai, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée? Adopté. Alors, nous ajournons nos travaux à demain, mercredi, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 41)


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