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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Thursday, May 8, 1997 - Vol. 35 N° 99

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir. Alors, nous entreprenons nos affaires du jour et j'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer l'item au menu.


Affaires du jour

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je demanderais le consentement de cette Chambre pour que nous puissions procéder, dans l'ordre, à la présentation, à l'étude et à l'adoption du projet de loi n° 127, Loi modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement pour déroger à l'article 232 du règlement prévoyant qu'un préavis au feuilleton doit être donné au plus tard la veille de la présentation d'un projet de loi? Consentement?

M. Paradis: Oui. Compte tenu des...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: ...circonstances particulières qui entourent ce projet de loi et compte tenu que c'est un projet de loi qui vise à garantir de meilleurs services à la population de comtés de députés qui n'occupent plus leurs fonctions, il y a consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a donc consentement. Alors, j'inviterais M. le ministre délégué à la Réforme électorale et parlementaire et leader parlementaire du gouvernement à nous faire la présentation du projet de loi.


Projet de loi n° 127


Présentation


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur l'Assemblée nationale afin de permettre au Bureau de l'Assemblée nationale de prendre un règlement pour accorder certaines allocations et rembourser certaines dépenses et autres frais pour une période fixée par ce règlement entre le jour de la vacance du siège d'un député et le 15e jour ou, dans certains cas, le 30e jour suivant le jour du scrutin qui comble cette vacance.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

M. Bélanger: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. Alors, M. le Président, je vous demanderais que nous procédions à l'adoption du principe du projet de loi.


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre délégué à la Réforme électorale et parlementaire et leader parlementaire du gouvernement propose l'adoption du principe du projet de loi n° 127, Loi modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale.

Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 230 du règlement prévoyant que chaque étape doit avoir lieu à une séance distincte? Il y a consentement. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 236 du règlement prévoyant que le débat sur l'adoption du principe est inscrit aux affaires du jour de la séance suivant sa présentation? Il y a consentement. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 237 du règlement prévoyant un délai d'une semaine entre la présentation et l'adoption du principe d'un projet de loi? Il y a consentement.

Y a-t-il maintenant des interventions sur le projet de loi? M. le leader du gouvernement, je vous cède la parole.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je vais faire une courte intervention sur le principe et, après, je ferai motion pour que l'Assemblée se transforme en plénière. À ce moment-là, nous pourrons, en particulier les whips du gouvernement et de l'opposition, parler exactement de la réglementation qui va suivre ce projet de loi, car ce projet de loi, comme tel, donne le pouvoir au Bureau de l'Assemblée nationale de faire une réglementation.

Alors, M. le Président, comme le leader de l'opposition en a fait mention, on a constaté que, quand il y avait soit démission, soit décès, comme c'est arrivé malheureusement récemment – nous avons eu le décès de deux députés qui étaient en fonction à cette Assemblée nationale, le député de Beauce-Sud et le député de Duplessis – on a constaté, donc, M. le Président, que, quand un comté devenait vacant, à ce moment-là, du jour au lendemain – en tout cas, à quelques jours; il y a des délais de quelques jours qui existent en vertu de notre présent règlement – la population se retrouvait privée de tout service entre la période du décès, finalement, ou de la démission, de la vacance du comté jusqu'à l'élection du nouveau ou de la nouvelle députée. Et c'est dans cet esprit, M. le Président, que nous présentons cette législation, pour faire en sorte que, pendant cette période, il y ait toujours un service à la population, qu'il y ait du personnel politique qui soit toujours présent pour servir la population et faire le lien entre le comté et le gouvernement. Et je dois dire, M. le Président, que c'est moi qui présente le projet de loi, mais on pourrait dire que l'instigateur de ce projet de loi, que la personne qui a eu l'idée et qui a poussé ceci, c'est le whip en chef de l'opposition officielle...

Une voix: ...du gouvernement.

M. Bélanger: Le whip en chef du gouvernement, pardon.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger: Le député de Laviolette. C'est le whip en chef du gouvernement, le député de Laviolette, qui, à un moment donné, a parlé au whip en chef de l'opposition officielle, son complice, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger: Ha, ha, ha! Alors, qui a parlé au whip de l'opposition officielle, et, à ce moment-là, ils se sont dit: Écoutez...

Une voix: Son bon ami.

M. Bélanger: Son bon ami, le whip en chef de l'opposition officielle. Et, à ce moment-là, ils se sont dit: Écoutez, on doit faire quelque chose pour faire en sorte que la population ne soit pas préjudiciée par des événements qui font en sorte que, à un moment donné, pendant une Législature, un comté devient vacant. Et il existe un législation similaire à la Chambre des communes à Ottawa. On a prévu cette chose-là. Et il faut regarder ça d'un oeil, vraiment, qui doit porter, je pense... En tout cas, il faut vraiment s'attarder sur le fait principal qui est le service à la population. C'est dans cette optique-là. Ce n'est pas de donner un avantage à quiconque. S'il y a un avantage à donner, c'est un avantage à la population de ces comtés.

Et ce peut-être pourquoi aussi, maintenant, nous nous retrouvons avec ce projet de loi, c'est qu'on a réalisé en particulier que, dans des circonscriptions éloignées, c'était encore plus dramatique. On pense à la fois à Beauce-Sud. On pense à la fois à Duplessis. C'est encore plus dramatique à ce moment-là, le fait qu'une population se retrouve privée de tout service, et c'est difficile à ce moment-là pour les collègues autour de suppléer et de faire en sorte de gérer deux comtés en même temps. Alors donc, je crois que ça va dans un sens qui va être bien accepté par la population, que ça va aller dans le sens, donc, de servir la population, et c'est pourquoi je suis fier de présenter ce projet de loi, M. le Président. Et je m'étonne un peu que, d'un côté comme de l'autre, on n'y ait peut-être pas pensé avant, de faire une telle démarche.

(10 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader du gouvernement. Je vais maintenant céder la parole à M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Il s'agit d'un projet de loi qui s'inscrit dans le cadre de la réforme parlementaire. Après avoir modifié le calendrier des horaires de session des membres de l'Assemblée nationale, après avoir procédé à la création de deux nouvelles commissions parlementaires, après avoir fait en sorte que certaines commissions parlementaires pourront être télédiffusées, nous en arrivons à une autre étape, qui est celle d'assurer en continuité le service à la population dans tous les comtés du Québec.

Comme l'a souligné le leader du gouvernement, les événements récents survenus dans la circonscription électorale de Beauce-Sud, à la suite du décès de notre ex-collègue Paul-Eugène Quirion, de même que les événements récents survenus dans la circonscription électorale de Duplessis, suite au décès de notre ex-collègue Denis Perron, ont fait en sorte que, plus que jamais, on a ressenti avec acuité ce besoin d'assurer en permanence des services politiques à la population du Québec, quels que soient les partis politiques concernés.

Comme nous le verrons tantôt, à l'occasion de la plénière, les whips seront chargés d'appliquer comme telle la réglementation qui découlera de ce projet de loi. Dans le cas d'une circonscription électorale qui sera laissée vacante par la formation politique ministérielle, ce sera le whip du parti ministériel; dans le cas d'une circonscription électorale qui est vacante du côté de l'opposition officielle, ce sera le whip de l'opposition officielle; et dans le cas où ce serait un député indépendant, de façon à ce que le service soit offert à l'ensemble de la population, ce sera la présidence de l'Assemblée nationale qui assurera la continuité des services auxquels ces populations ont droit.

Je tiens à remercier le leader du gouvernement de la célérité avec laquelle il a procédé à donner suite à cette entente de principe qui était convenue entre nos deux formations politiques. Nous collaborerons au maximum à l'adoption la plus rapide de ce projet de loi.

On sait qu'actuellement les gens de la Côte-Nord, dans la circonscription de Duplessis, attendent l'adoption de ce projet de loi. On sait également que, compte tenu des circonstances particulières dans la circonscription de Bertrand, les gens sont privés d'un service comme tel à la députation. À l'avenir, toute vacance pourra, sur le plan politique, être comblée rapidement grâce à l'adoption de ce projet de loi.

M. le Président, nous souscrivons d'emblée à l'adoption du principe du projet de loi.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le leader de l'opposition. Je crois qu'il n'y a pas d'autres interventions. Le principe du projet de loi n° 127, Loi modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée? Adopté. Alors, en conséquence, je suspends les travaux quelques instants, le temps de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 127, Loi modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale.

(Suspension de la séance à 10 h 13)

(Reprise à 10 h 15)


Commission plénière

M. Brouillet (président de la commission plénière): Nous allons maintenant faire l'étude détaillée article par article du projet de loi n° 127, Loi modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale. À moins qu'il n'y ait des intentions contraires, je prends pour acquis que les remarques préliminaires ont été formulées lors du débat sur l'adoption du principe. M. le député de Laviolette n'a pas eu l'occasion tantôt, alors, je vous cède la parole pour quelques remarques préliminaires.


Remarques préliminaires


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. En fait, ce n'est pas nécessairement des remarques préliminaires plus que le fait que, dans le projet de loi, on va le voir, c'est le Bureau de l'Assemblée nationale qui aura à prendre des décisions quant aux règlements qui vont surgir de la loi qui est présentée. D'autant plus que c'est avec grand plaisir que j'ai aujourd'hui l'honneur de participer à ce débat-là puisque, comme le disait le leader du gouvernement, l'initiative est venue de notre côté, mais je pense que ça aurait pu venir de n'importe qui. Je ne veux pas en prendre le crédit plus qu'il ne le faut, mais je pense qu'on aurait peut-être dû y penser avant. Dans le cadre de la réforme parlementaire, on s'aperçoit très bien... et les comtés éloignés nous ont permis de saisir un peu l'acuité de ces difficultés-là et de voir de quelle façon on pourrait répondre à l'ensemble de la population par un service minimal. Les discussions ont donc été amorcées entre les deux whips des deux formations. Nous avons rencontré de part et d'autre nos responsables, qui sont les leaders, nous avons rencontré le président. Nous en avons discuté ensuite au Conseil des ministres pour finalement arriver avec un projet qui donne un service à la population.

J'aimerais expliquer un peu, M. le Président, ce qui est visé. C'est-à-dire que, dans un contexte d'un service à la population, il faut éviter certaines affaires lorsque les élections sont déclenchées. Parce que, vous le savez très bien, en vertu de la loi, il s'écoule un maximum de six mois avant que des élections soient déclenchées, s'il n'y a pas d'élection générale, donc des élections dites partielles. Et, dans ce contexte-là, il y a six mois, et pendant ce temps-là la population n'a pas tous les services auxquels elle est en droit de s'attendre. On a vu dernièrement le Parti libéral faire un geste qui était dans la continuité, en fait, précédant un peu ce qu'on va faire aujourd'hui, donner un service à la population dans le comté de Beauce-Sud.

Lors de certaines discussions que nous avons eues ensuite, des rencontres qu'on a eues au décès de M. Denis Perron, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il était peut-être bon de penser à une formule qui permet à ce moment-là de maintenir, pour la population dans le comté et à Québec, un service minimum. C'est dans ce sens-là que les règlements qui seront pris par le Bureau détermineront dans quelles conditions ça sera fait.

Jusqu'à l'émission des brefs, qu'ils soient d'une élection générale ou d'une élection complémentaire partielle, le bureau sera ouvert avec les conditions qu'on y déterminera. De plus, à l'émission des brefs, les individus, selon la loi actuelle, ont 15 jours pour, comme on dit, vider le bureau. Ils auront 15 jours de préservés au niveau salarial, mais on donnera un laps de temps pour fermer le bureau et remettre à qui de droit, par les décisions qu'on prendra au Bureau, les clés du bureau pour qu'elles ne servent à personne pendant le temps électoral.

Cependant, afin d'éviter des coûts à l'Assemblée nationale pour fermer le bureau, le rouvrir, si jamais la personne qui est élue veut le ravoir, les lignes téléphoniques, le fax, les ordinateurs, enfin tout l'ensemble, nous prévoyons dans les règlements de faire en sorte que ceci soit préservé jusqu'à 15 jours après le scrutin.

Donc, il y a trois choses qu'il faut remarquer. Premièrement, le bureau ferme dès le moment où les brefs électoraux sont pris, on donne un laps de temps d'une semaine pour vider les contenus personnels. Deuxièmement, les clés sont transmises à qui de droit dans la semaine qui suit les brefs électoraux. Personne, au moment des brefs électoraux, ne peut utiliser le bureau à des fins électorales, de telle sorte que les individus sont protégés comme employés. Le bureau est fermé comme lieu électoral, c'est ailleurs que ça doit se faire. Et finalement, pour préserver les coûts à l'Assemblée nationale, le bureau lui-même, au niveau des baux, au niveau des lignes téléphoniques et autres, est préservé jusqu'à 15 jours après le scrutin.

Il est évident que les gens pourraient se poser une question: Est-ce que ça coûte de l'argent? Est-ce que ce projet-là coûte de l'argent? On pourrait dire que, s'il n'y avait pas eu de départ ou de mortalité ou des choses semblables, le bureau aurait fonctionné convenablement, correctement. Donc, dans ce contexte-là, les argents sont prévus au budget de l'Assemblée nationale. Dans ce contexte où actuellement ça se produisait, dans les 15 jours qui suivaient le départ ou le décès, c'était fermé. Là, l'Assemblée ne déboursait plus rien. Mais c'est juste, simplement, qu'au lieu de transférer l'argent dans le budget de l'Assemblée nationale pour qu'il serve à d'autre chose on le préserve pour donner un service à la population. Donc, ça ne coûte pas plus cher à l'Assemblée nationale, ce que l'on propose, que ce que l'on aurait eu.

Alors, c'est un peu les remarques que je voulais faire au départ, M. le Président.

(10 h 20)

Le Président (M. Brouillet): Merci beaucoup, M. le député de Laviolette. M. le député de Jeanne-Mance, je vous cède la parole.


M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, le député de Laviolette a très bien résumé le contenu des projets de règlement qui ont été transmis aux deux formations politiques et au député de Rivière-du-Loup, qui est membre du Bureau. Il est évident que les citoyens dans chacun de leur comté ont droit à des services à l'année longue, sauf en période électorale. Lorsqu'il s'agit de comtés dans des régions éloignées, c'est encore plus difficile. Parce que, quand c'est dans un comté comme dans la région de Québec ou dans la région de Montréal, il peut être facile à un citoyen d'aller dans un comté voisin, aller voir le député, mais, lorsqu'on est en région éloignée, c'est plus difficile. Notre formation politique, suite au départ du député de Beauce-Sud, nous avons fait du bureau pour donner le même service. Des députés de notre formation ont été dans le comté pour offrir à la population... Parce que, lorsque quelqu'un a un problème avec le supplément du revenu, il veut voir un député, puis il a droit à un service. Alors, je pense que ce projet de loi là va donner une équité à tous les citoyens dans leurs comtés respectifs. Ce n'est pas leur faute à eux autres s'ils ont une vacance.

Alors, c'est avec plaisir que nous acceptons ce projet de loi, c'est un plus pour les citoyens de chacun des comtés du Québec.

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jeanne-Mance. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup, vous aimeriez intervenir, je vous cède la parole.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Certainement que je souhaite intervenir sur ce projet de loi, parce que, la première fois où l'idée de revoir la façon dont on traite les vacances a été abordée, c'est moi qui ai soumis la problématique au comité consultatif sur la réforme électorale. Je suis heureux de voir qu'aujourd'hui on donne suite à cette idée-là.

Pas pour prendre un mérite indu, mais pourquoi on est arrivé avec ça? C'est que j'arrivais dans un comté qui avait, comme cinq autres, vécu probablement, dans l'histoire récente, un temps record sans député, c'est-à-dire qu'on avait un député qui avait démissionné, il y avait eu un bout d'élection partielle, quelques semaines d'élection partielle, ensuite l'élection générale a cancellé le bout de partielle qui avait été pris. Donc, si on fait l'addition de toutes les périodes qui étaient toutes légalement correctes, c'est presque huit mois et demi où il n'y avait pas de député.

Dans les deux premières semaines, ce qu'on entendait au bureau continuellement, les gens disaient: Tel dossier, je n'en ai pas de nouvelles depuis tant de mois, on n'a pas de député; tel autre dossier, je n'en ai pas de nouvelles. C'est ce qui m'a amené à cette réflexion sur la nécessité d'offrir un service pour permettre aux gens d'avoir l'information sur les programmes gouvernementaux, de faire au moins cette jonction qui est nécessaire entre l'appareil étatique, qui est parfois un peu compliqué, et les besoins des citoyens.

C'est donc, à mon avis, une excellente mesure qui est mise de l'avant aujourd'hui pour que des citoyens, pour des raisons diverses allant de divergences politiques jusqu'à la mortalité elle-même, se trouvant, pendant une période, privés d'un service, comme l'a dit le député de Jeanne-Mance, qui est, particulièrement en région, fondamental, parce que parfois le bureau de comté le plus proche est à 100, 150 km... Donc, dans ce temps-là, c'est un service qui est nettement moins accessible.

Donc, c'est avec énormément de satisfaction qu'on va appuyer certainement ce projet de loi.

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Il y aurait M. le député d'Orford qui aimerait intervenir. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, je veux souligner juste l'importance, M. le Président, de ce projet de loi n° 127. J'ai été à même, lors des derniers mois, dans le comté de la Beauce, d'être interpellé et d'avoir l'honneur de servir les citoyens de la Beauce au moment où le bureau de comté était fermé suite au décès et j'ai réalisé, en arrivant là tôt, un lundi matin, la quantité de gens qui avaient des problèmes, qui n'avaient personne à qui parler et qui avaient besoin d'un intermédiaire. Or, j'ai eu l'occasion, avec des confrères et consoeurs libéraux, d'aller les lundis et les vendredis tenir un bureau ouvert dans le comté de Saint-Georges de Beauce et j'ai même maintenant encore des appels. Pas plus tard que la semaine passée, un citoyen à qui nous avions réglé un problème – une histoire absolument extraordinaire – nous rappelait à mon bureau pour nous dire comment il avait apprécié le fait que nous avions réglé son problème et qu'il nous en remerciait. Alors, je pense que ça illustre l'importance que les vrais citoyens continuent à avoir des services de l'État chacun dans leur coin de pays, même au moment où, pour toutes sortes de raisons, un député démissionne, ou décède, ou peu importent les raisons. J'ai été à même de le vivre, je le souligne et je voterai, bien sûr, pour ce projet de loi là et je pense qu'il est important qu'on procède le plus rapidement possible.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le député d'Orford. M. le député de Laviolette, quelques minutes avant d'aborder le premier article.

M. Jolivet: Oui, un petit mot, M. le Président, simplement pour dire ceci: C'est que je suis bien content de l'idée qui a été lancée. Puis je ne veux pas en prendre le crédit. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je pense que tout le monde s'était aperçu qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas. Mais je rappellerais simplement dans l'histoire que, à l'époque, il n'y avait pas de date pour les élections lorsqu'il y avait une vacance et que c'était le premier ministre qui décidait, et que c'est le Parti québécois qui a commencé à mettre dans la loi six mois comme étant le maximum pour décréter une élection partielle dans un territoire vacant. Alors, dans ce contexte-là, on ajoute aujourd'hui, avec les connaissances qu'on a de choses additionnelles, et j'en suis très fier, sous la responsabilité, on l'a bien dit, du whip de la formation dont provient l'individu ou du bureau du président lorsque c'est un indépendant.


Étude détaillée

Le Président (M. Brouillet): C'est très bien. Merci. Alors, ceci met fin aux remarques préliminaires, et je vais immédiatement mettre en discussion l'article 1. Permettez peut-être que je lise rapidement l'article pour les fins de l'auditoire, et, s'il y a quelques remarques ou précisions à apporter, vous pourrez le faire. L'article 1:

L'article 204 de la Loi sur l'Assemblée nationale (L.R.Q., chapitre A-23.1) est modifié par le remplacement du deuxième alinéa par le suivant: «Le Bureau peut, par règlement, dans les cas, aux conditions et dans la mesure qu'il détermine, accorder des allocations ou le remboursement des dépenses et autres frais prévus par le présent article pour une période fixée par le règlement entre le jour de la vacance du siège d'un député ou de la dissolution de l'Assemblée et le 15e jour ou le 30e jour, à l'égard des personnes visées dans le premier alinéa de l'article 124.1, suivant le jour du scrutin qui comble cette vacance ou suit cette dissolution.» M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, juste pour s'assurer du texte, vous avez dit: «accorder des allocations», c'est: «accorder les allocations». Je pense que, pour le texte lui-même, ça veut tout dire. Simplement corriger.

Le Président (M. Brouillet): Très bien.

M. Jolivet: Moi, ça va, il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 1 est adopté?

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): L'article 2. «Le premier règlement pris par le Bureau de l'Assemblée nationale le ou après le (ici, on indiquera la date de la sanction de la présente loi) en vertu du deuxième alinéa de l'article 104 de la Loi sur l'Assemblée nationale, tel que remplacé par l'article 1, peut, s'il en dispose ainsi, avoir effet, à l'égard d'une circonscription électorale dont le siège du député est vacant à cette date, à compter de la date de cette vacance.» L'article est adopté?

M. Jolivet: Adopté.

M. Bissonnet: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 3. «La présente loi a effet, à l'égard d'une circonscription électorale dont le siège du député est vacant le (ici, nous indiquerons la date de la sanction de la présente loi) à compter de la date de cette vacance et à l'égard de toute circonscription électorale dont le siège du député devient vacant après le (ici, nous indiquerons la date de la sanction de la présente loi).»

M. Jolivet: Adopté.

M. Bissonnet: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): L'article 3 est adopté. L'article 4. «La présente loi entre en vigueur le (ici, nous indiquerons la date de la sanction de la présente loi).» Est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Jolivet: Adopté.

M. Bissonnet: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Le titre de la présente loi est-il adopté?

M. Jolivet: Adopté.

M. Bissonnet: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, mes chers amis, ceci met fin à nos travaux en commission plénière et je vous remercie tous, tous ceux qui ont participé. Nous allons suspendre nos travaux pour revenir en Assemblée. Alors, merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 10 h 29)

(Reprise à 10 h 31)

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Laviolette, si vous voulez faire rapport du travail de la commission plénière, s'il vous plaît.

M. Jolivet (président de la commission plénière): Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 127, Loi modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale, et qu'elle l'a adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce rapport est-il adopté? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je demanderais le consentement de cette Chambre pour que nous puissions procéder à l'adoption du projet de loi n° 127.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 230 du règlement prévoyant que l'adoption d'un projet de loi doit avoir lieu à une séance distincte de celle de la prise en considération du rapport de commission?

M. Paradis: Consentement.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi? Il n'y a pas d'interventions.


Mise aux voix

Alors, le projet de loi n° 127, Loi modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale, est-il adopté?

M. Paradis: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 6 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 97


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 6, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce propose l'adoption du principe du projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec. Mme la ministre, je vous cède la parole.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir de proposer le projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec. On se rappellera, M. le Président, que le Centre de recherche du Québec, que l'on appelle aussi le CRIQ, a été constitué en 1969 par une loi spécifique. Aujourd'hui, le projet de loi n° 97 vise à apporter des modifications à la loi du Centre de recherche industrielle en vue d'en moderniser les activités.

Essentiellement, M. le Président, ce projet de loi répond à une transformation profonde que subit la structure industrielle du Québec. L'économie québécoise est en grande partie constituée de PME. Avec leur importante contribution, le Québec a bien amorcé son passage d'une économie traditionnelle vers une nouvelle économie, avec tous les défis que cela comporte à la fois pour les entreprises, notamment les PME, comme pour le gouvernement. Et le projet de loi n° 97 vise à relever ces défis.

Parlons un peu, au départ, de la clientèle du Centre de recherche industrielle du Québec, essentiellement les PME. Le Québec compte actuellement quelque 170 000 petites et moyennes entreprises, ce qui représente plus de 99 % de nos entreprises. Ces PME emploient 42 % de la main-d'oeuvre québécoise, dépassant ainsi la moyenne canadienne qui, elle, se situe plutôt à 39 %. Les PME ontariennes sont, quant à elles, responsables de seulement 35 % des emplois chez nos voisins de l'Ontario. Même si nous avons le privilège de compter d'importantes entreprises que l'on décrit comme étant transnationales, l'économie du Québec diffère fondamentalement de celle de l'Ontario: ce n'est pas une économie de filiales; c'est une économie d'entrepreneurs.

Le gouvernement du Québec a mis au coeur de ses priorités la création d'emplois. C'est la raison pour laquelle nous accordons une très grande importance aux PME. Depuis 15 ans, ce sont les PME qui créent la majorité des nouveaux emplois au Québec. À titre d'exemple, de 1979 à 1989, sur une période de 10 ans, les PME ont créé pas moins de 510 000 emplois au Québec, alors que les grandes entreprises en ont éliminé 57 000. Cette tendance va se poursuivre dans la nouvelle économie en raison de la capacité de ces entreprises d'innover, de leur flexibilité et de leur rapidité d'ajustement.

Les PME québécoises jouent un rôle important dans le secteur tertiaire comme dans le secteur manufacturier où 90 % des entreprises sont des PME. Le poids de ces entreprises en termes d'emplois est particulièrement important dans les secteurs du meuble, des produits métalliques, de l'habillement et de l'industrie du bois. Lorsque l'on regarde la structure des PME du secteur manufacturier en fonction du niveau de technicité, on constate que des entreprises qui se trouvent dans les industries de moyenne et de haute intensité technologique ont connu une hausse de 14 % de l'emploi manufacturier, alors que celles de moyenne et de faible niveau technologique ont connu une baisse de 12 % depuis le premier mandat du gouvernement du Parti québécois.

Les indices démontrant que le Québec est en train de réussir son passage vers la nouvelle économie sont de plus en plus nombreux. Certains observateurs, et non les moindres – je pense à Michael Porter ou à Nuala Beck – qualifient le Québec de chef de file à cet égard en territoire canadien. Mais il y a des défis à relever par nos petites et moyennes entreprises autant que par le gouvernement du Québec si l'on veut vraiment réussir la transition vers la nouvelle réalité économique du XXIe siècle. Il y a cinq grands défis, à notre avis, M. le Président. Le premier défi, c'est celui de l'innovation; le second, c'est celui de la qualité; le troisième, le défi de l'exportation; le quatrième, le défi de l'information; et le cinquième, le défi de la capitalisation.

Parlons donc du premier défi, puisque le projet de loi qui concerne le Centre de recherche industrielle du Québec vise justement à appuyer l'innovation de nos entreprises. Un des premiers thèmes qui nous vient à l'esprit lorsqu'on aborde les questions reliées à la nouvelle économie, c'est sans contredit la science et la technologie, et l'innovation que celles-ci rendent possible. Ce n'est pas surprenant, puisque les statistiques révèlent que les entreprises qui affichent les taux de croissance et les taux de créations d'emplois les plus marqués sont les entreprises qui consacrent une part appréciable de leurs ressources à la recherche et au développement, et qui comportent, bien sûr, un niveau de technicité élevé. L'innovation est au coeur de l'évolution des sociétés industrialisées modernes qui sont toutes engagées dans une véritable course au développement technologique. Cela va au-delà de la question de rentabilité. C'est le développement de toute notre société qui est en cause.

Au plan de la recherche et du développement, le Québec constitue l'un des endroits au monde où les conditions sont les plus avantageuses pour les entreprises soucieuses de se tenir à l'avant-garde, et ce, quelle que soit leur taille. Ainsi, malgré une conjoncture économique difficile, le gouvernement réussit à maintenir son appui financier à ce type d'activité à un pourcentage qui dépasse la croissance de la production intérieure brute. En fait, le Québec consacre plus de 1,8 % de sa production intérieure brute à la recherche et au développement, et dépasse ainsi la moyenne canadienne qui est à 1,6 %. Si on additionne les dépenses de recherche et de développement de l'ensemble des provinces en territoire canadien, le Québec en assume à lui seul près de 34 %.

Au chapitre de la recherche industrielle, le nombre d'entreprises qui s'adonnent à la recherche progresse aussi de façon remarquable. Dans les faits, plus de 50 % de la recherche industrielle privée qui est réalisée en territoire canadien est réalisée au Québec. Le ratio de nos dépenses par rapport au produit intérieur brut place le Québec au rang des leaders des pays de l'OCDE, puisque nous ne sommes devancés que par la Suède, la Suisse et le Japon. Depuis 10 ans, le Québec a, en fait, connu l'une des plus fortes augmentations de cet indicateur parmi les pays industrialisés.

Outre les mesures fiscales à la recherche et au développement, nous avons également établi des mesures d'appui pour accentuer le développement technologique dans les PME. Ainsi, nous avons lancé, il y a un peu plus d'un an, le Programme de soutien au transfert de technologie dans les PME. Ce programme a été mis sur pied pour inciter les entreprises à recourir au transfert de technologie pour innover et pour améliorer leur position concurrentielle.

Le Fonds de priorités gouvernementales en science et technologie a aussi facilité la mise en oeuvre de projets synergiques issus de tables de concertation mises sur pied dans le cadre de notre politique industrielle. Le Programme de soutien à l'emploi stratégique, que nous avons bonifié dans le dernier budget, connaît également beaucoup de succès en permettant aux entreprises de renforcer certaines fonctions stratégiques par l'embauche de personnel scientifique et technique. Ce programme a, jusqu'à maintenant, favorisé l'embauche de plus de 7 000 ingénieurs et techniciens, la plupart dans des PME, à travers toutes les régions du Québec.

(10 h 40)

Nous avons aussi trois sociétés du nom d'Innovatech qui ont pour mission d'investir dans des projets innovateurs de la nouvelle économie en partenariat avec des investisseurs privés. À la fin de l'année dernière, ces sociétés avaient injecté plus de 155 000 000 $ dans des projets dépassant 780 000 000 $ d'investissements. Ils ont créé au-delà de 1 800 emplois dans la nouvelle économie. Ce ne sont là que quelques exemples de l'approche québécoise au chapitre de l'innovation.

Le deuxième défi, c'est celui de la qualité. C'est aussi un défi auquel souscrit le Centre de recherche industrielle du Québec. Le Québec est fermement engagé sur la voie de la qualité. De nouveaux partenariats se créent chaque jour entre les entreprises et les employés pour contribuer au renforcement de notre compétitivité. À peine 5 % des entreprises étaient engagées dans une démarche de qualité en 1989 au Québec, alors que plus de 60 % d'entre elles, aujourd'hui, disent avoir implanté un programme d'amélioration continue de la qualité dans leur entreprise. Plus de la moitié de celles qui ne l'ont pas encore fait prévoient lancer un programme de qualité d'ici deux ans. Il s'agit d'une progression remarquable qui mérite d'être soulignée. La qualité, ce n'est pas une question de taille d'entreprise; c'est une question de culture, pour ne pas dire d'attitude d'entreprise.

Par ailleurs, près des trois quarts des entreprises qui se sont dotées d'un programme de qualité structuré ISO ont vu leur chiffre d'affaires augmenter au cours des deux dernières années. Or, le Centre de recherche industrielle du Québec est accrédité pour qualifier les entreprises aux normes ISO. Plus de 700 entreprises québécoises ont à ce jour obtenu leur enregistrement aux normes ISO 9000 et plusieurs autres sont en voie de l'obtenir. En un an, le nombre de firmes québécoises qui ont obtenu leur enregistrement a fait un bond de 131 % par rapport à l'année passée. C'est le plus fort taux en territoire canadien.

Bien que nous nous réjouissions de ces résultats, il faut rester vigilants, car rien n'est jamais acquis en matière de qualité. Nos concurrents travaillent, eux aussi, à s'améliorer et souhaitent, eux aussi, gagner la bataille de la compétitivité. Mais, heureusement, le marché mondial est grand. Toutefois, quand on est petit ou différent, il faut travailler et innover proportionnellement davantage. Beaucoup d'entreprises choisissent de s'allier via une approche en réseau pour accéder à la reconnaissance ISO. Il s'agit, pour elles, de partager leur expertise, mais surtout de diminuer sensiblement les coûts d'implantation qui peuvent paraître très élevés à première vue pour une PME.

Engagé dans le virage qualité, le gouvernement du Québec, en collaboration avec le CRIQ, anime une dizaine de réseaux ISO dans diverses régions du Québec, sans compter notre présence dans une multitude d'expériences reliées à toute la question de la qualité. Un récent sondage, fait pour le compte du ministère de l'Industrie et du Commerce, ISO 9000 Exportation, nous permet de constater l'interrelation qui existe entre le concept de la qualité et la capacité des entreprises à exporter. En effet, 25 entreprises d'un groupe témoin certifié ISO 9000 ont connu une croissance de leur chiffre d'affaires de 40 % en une année. Les exportations augmentaient de 53 % pour la même année, alors que les exportations totales du Québec, elles, n'augmentaient cette année-là que de 19 %.

Voilà qui m'amène à parler du troisième défi des PME: l'exportation. Le Québec est un partenaire important dans les échanges commerciaux continentaux et internationaux. Les résultats obtenus au cours des dernières années en témoignent avec éloquence. Après plusieurs années de déficit, la balance commerciale du Québec a enregistré un surplus de 200 000 000 $ en 1995 et ce redressement, je pense, est attribuable à la croissance marquée des exportations au cours des cinq dernières années, avec une moyenne de près de 20 %. Le Québec est aujourd'hui le sixième partenaire commercial des États-Unis où près de 80 % de nos exportations se dirigent. Notre deuxième partenaire est la France.

Le quatrième défi pour nos PME, c'est l'information. Encore là, le Centre de recherche industrielle du Québec y joue un rôle important. L'importance de l'accès à l'information stratégique pour les entreprises qui souhaitent dépasser les limites géographiques du Québec est cruciale. Avec la collaboration de ses nombreux partenaires, le gouvernement du Québec possède trois réseaux d'information stratégique qui visent à faire connaître aux PME les grandes tendances internationales. Ces réseaux de veille touchent trois volets critiques pour les entreprises: la veille technologique, la veille concurrentielle et la veille commerciale. Jusqu'à maintenant, notre gouvernement a favorisé la mise sur pied de 12 centres de veille technologique.

Dans une économie internationale ouverte, la capacité de conserver une avance technologique permet à une PME de rester en lice au chapitre de la compétitivité. Dans cette nouvelle dynamique concurrentielle, les notions d'économies d'échelle, autrefois traduites par des entreprises de plus grande taille, passent aujourd'hui par des alliances entre différentes entreprises plus ou moins grandes. Pour réussir, les entreprises doivent de plus en plus penser en réseau et établir des liens avec une multitude d'acteurs, voire des concurrents. La taille des entreprises ne signifie plus grand-chose dans ces alliances; ce sont les connaissances des personnes et donc des entreprises qui constituent les nouvelles variables stratégiques, avec leur capacité d'innovation où l'échange de données informatisées est un outil stratégique pour nos PME. Il faut qu'un plus grand nombre de PME l'utilisent.

Le projet de loi concernant le Centre de recherche industrielle du Québec vise à combler les lacunes de l'économie du Québec en matière de virage technologique aujourd'hui. J'ai rappelé, tout à l'heure, que le Centre de recherche industrielle du Québec avait été constitué en 1969 par une loi spécifique. La première décennie des activités du Centre – de 1969 à 1979 – a surtout été consacrée à l'organisation des activités du CRIQ, à son rodage, à l'apprentissage des méthodes de travail élaborées et à la mise sur pied d'un réseau avec sa clientèle privilégiée, c'est-à-dire les PME manufacturières du Québec. Les années quatre-vingt furent une période de croissance à plusieurs égards. Les revenus autonomes sont passés de 2 700 000 $ à 11 500 000 $ et les effectifs passaient de 310 à 454 personnes. Le taux d'autofinancement a même atteint 45 %. Cependant, depuis la fin des années quatre-vingt, le développement et les revenus stagnent, et le taux d'autofinancement ne se situait plus qu'à 36 % en mars 1996. Or, nous avons vu durant l'étude des crédits que ce taux a augmenté évidemment avec un changement de direction, M. le Président.

Les principaux facteurs responsables de cette situation qui ont été identifiés sont essentiellement une augmentation de l'offre de services en recherche et développement dans le marché, le désengagement progressif et continu du gouvernement et les contraintes de fonctionnement auxquelles fait face le CRIQ. Le dernier plan quinquennal de développement élaboré pour la période 1995-2000 reposait sur une contribution gouvernementale rehaussée de façon significative, en particulier pour renouveler le parc d'équipements largement déprécié. Or, depuis deux ans, la contribution gouvernementale a dû décroître, forçant au cours du présent exercice un important virage qui a permis d'amener l'autofinancement aux environs de 53 %. Et c'est important de mentionner le saut de l'autofinancement, qui passait de 36 % en mars 1996 à 53 % aujourd'hui, au 31 mars 1997.

Le virage que nous envisageons avec ces modifications au projet de loi permettra de stabiliser la situation financière du Centre. Des mesures plus importantes aussi seront prises pour mettre en place des initiatives de façon à infléchir la tendance des dernières années et à continuer d'appuyer l'effort de recherche et de développement de nos PME. Le projet de loi n° 97 consiste à revoir fondamentalement le statut et les objets du Centre de recherche industrielle du Québec de façon à le convertir en compagnie à fonds social pour lui permettre d'effectuer des opérations de commercialisation de ses expertises, de dégager les fonds nécessaires à son développement et d'obtenir le degré de flexibilité requis pour ses opérations.

Essentiellement, le Centre de recherche industrielle du Québec aurait encore comme objets le développement d'expertises, le développement d'équipements, le développement de produits et de procédés dans le domaine des technologies de la fabrication, la collection et la diffusion d'informations d'ordre technologique et industriel et la normalisation industrielle. Le Centre va conserver son rôle de conseiller dans ces secteurs.

(10 h 50)

La grande différence entre hier et aujourd'hui provient du fait que le Centre pourrait dorénavant, seul ou en partenariat, procéder à la commercialisation des expertises, des produits et des procédés développés. De plus, le gouvernement pourrait également confier au Centre des mandats connexes à ces objets en lui accordant en parallèle un support financier total ou partiel à cet égard. La participation du gouvernement au financement du Centre serait ainsi ciblée sur des objets spécifiques avec des attentes très précises.

Ce projet de loi, que je vous recommande d'adopter en principe aujourd'hui, a pour objet de permettre au Centre de recherche industrielle du Québec de continuer son existence, mais comme personne morale de droit public dotée d'un fonds social. Le Centre aura principalement pour mission la même mission qu'il avait dans le passé, avec la différence qu'il pourra assurer la commercialisation d'un certain nombre de ses découvertes.

Ce projet de loi modifie un certain nombre de modalités comme la composition du conseil d'administration du Centre, qui sera désormais formé de neuf membres nommés par le gouvernement, dont un président-directeur général. Ce projet de loi contient des règles relatives aux conflits d'intérêts et à la protection des administrateurs en cas de poursuite. Il contient aussi des dispositions financières précisant, notamment, le fonds social autorisé ainsi que les modalités d'exercice des engagements financiers qu'il est autorisé à prendre. Et il comporte, bien sûr, des dispositions de nature transitoire.

Je recommande donc, M. le Président, d'adopter le principe du projet de loi n° 97.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je voulais, tout simplement, vous dire que l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et qu'il en recommande l'étude à l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci. Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Merci, M. le Président. J'ai écouté avec grand intérêt le discours passionné de la ministre de l'Industrie et du Commerce pour nous expliquer le projet de loi n° 97. J'aimerais peut-être, d'abord, rappeler aux gens qui nous écoutent que nous en sommes à la première étape d'un long processus et que nous allons collaborer, bien sûr, avec le gouvernement. C'est l'attitude que je prends toujours dans les projets de loi. Que nous soyons pour ou contre, nous allons collaborer avec le gouvernement pour faire tous les éclairages dans le cas du projet de loi n° 97. Je pense que la ministre a assez bien fait le tour de la situation effectivement en ce qui a trait à l'historique, peut-être un peu moins bien en ce qui a trait au projet de loi. Je lui rends un hommage: elle a effectivement fait un bel historique de ce qu'a été la création du CRIQ, le pourquoi de la création du CRIQ.

Je veux rappeler aux gens qui nous écoutent ici aujourd'hui que c'est une institution importante, le CRIQ, dans l'histoire du Québec. Peu connu, hein? Il n'y a pas de chicane dans le métro ce matin à Montréal parce qu'on change la loi sur le CRIQ. Il y a pas grand monde qui nous ont appelés dans nos bureaux de comté pour nous demander s'ils pouvaient ajouter quelque chose dans le projet sur le CRIQ. Si ce n'est que c'est quelque chose qui intéresse les gens de la recherche, les gens de la PME, même de la grande entreprise, et c'est un projet de loi qui, d'une façon un peu plus précise, a une connotation effectivement économique.

Or, peut-être pour ajouter ma brique à la construction de ce mur dont la ministre vient de nous parler, l'histoire de cette entreprise, oui, il y a eu plus de 100 000 interventions au CRIQ depuis sa fondation en 1969 et Dieu sait que, dans un centre de recherche de ce genre, ça prend toujours un bout de temps avant que les choses se mettent en place; 100 000 interventions sur une période de 20 ans. Je pense qu'on doit reconnaître que, comme disent les jeunes, ce n'est pas rien; c'est quelque chose d'important, et on doit reconnaître qu'il y a eu beaucoup et de la très bonne ouvrage de faite là.

C'est aussi un centre de recherche de grande réputation, de grande qualité. Et je lisais, dans la littérature que nous avons reçue, les associations stratégiques qui sont après écrire, signer soit en Hollande, avec les grands de ce monde, ou en Californie. Là aussi, je pense qu'on a à lever notre chapeau et à dire aux gens du CRIQ: Bravo! Vous avez fait pour le Québec quelque chose d'extraordinaire, vous l'avez fait à une époque où on parlait peu de recherche, de science, de développement, et vous étiez là. Heureux ceux qui vous ont mis en place et heureux ceux qui ont bénéficié de vos services. Heureux aussi les 500 000 000 $ de travaux qui furent exécutés dans cette partie de l'histoire du CRIQ; 500 000 000 $, c'est aussi des chiffres importants dans ce secteur-là!

C'est 85 % – et la ministre a été très claire à cet égard-là – la différence entre l'Ontario, qui est finalement, souvent, des succursales de multinationales, versus le Québec où nous sommes, souvent, des créateurs de petites PME. Chacun, dans nos comtés respectifs, je pense que nous avons quotidiennement à jaser avec des représentants. D'ailleurs, des gens de mon comté rencontreront la ministre dans quelques jours. Une petite PME, 80 employés qui ont des problèmes, qui se questionnent; alors, ils vont rencontrer la ministre et ils vont rencontrer aussi le chef de l'opposition. C'est le vécu quotidien d'un député de collaborer avec ces PME là qui m'impressionnent à chaque fois. J'en ai visité une, pas plus tard que lundi, dans mon comté, qui est dans les fenêtres, les portes et châssis, qui fait de la recherche et qui est en pleine expansion dans un marché international très compétitif. Et comment on et impressionné devant ces petites PME là qui font un ouvrage tout à fait extraordinaire!

Il faut comprendre que le CRIQ a été créé, M. le Président, au début de la Révolution tranquille et que c'était à l'époque où on disait: Le Québec est capable de se donner des moyens. Et le CRIQ a été capable de donner aux Québécois ces moyens de performer dans des secteurs où probablement nous aurions eu un peu de difficulté. Les universités, à l'époque, étaient moins organisées; l'entreprise privée, à ce que je peux voir, était à peu près inexistante encore dans ces secteurs-là. Et ça viendra un peu plus tard. Je vais y revenir d'ailleurs plus tard dans ma présentation.

Or, le CRIQ a été important, demeure important, et j'espère qu'on va lui donner les moyens d'être un outil de développement, une continuité du développement industriel et scientifique du Québec. C'est une entreprise extraordinaire, plus de 325 membres de personnel. Mme la ministre disait un peu plus tôt effectivement qu'il y a eu au-dessus de 400 membres de personnel. On sait qu'il y a eu une saignée, dans la dernière année, d'une soixantaine de personnes de leur personnel. Et, là aussi, je veux souligner leur grande expertise. Je regardais, dans les documents, les titres de tous ces gens ou leurs études, devrais-je dire, et c'est très impressionnant de voir des docteurs en à peu près tout et la quantité d'expertise qu'on peut retrouver dans un centre comme celui-là.

Et je dois dire que les cotisations de tout ce beau monde là coûtent un peu cher: 58 000 $ l'an passé pour être membre de tous ces organismes et associations. Mais il faut reconnaître la quantité d'ingénieurs, de chimistes et de gens qui font partie de mouvements sur la qualité: l'Institut canadien des brevets, Stratégie de leadership, l'Ordre des ingénieurs, Société des manufacturiers, chambre de commerce, bien sûr. Alors, il y a là des grands noms qui sont associés à d'autres organismes de grand nom et il y a une mise en commun de savoir. Je pense qu'il faut, après 20 ans, reconnaître le travail qui a été fait par les gens qui l'ont créé, les gens qui ont été là, les gens même qui ont quitté et espérer que cette mission du CRIQ continue. Il y a différentes façons de le faire; on va y revenir dans le projet de loi, et j'expliquerai le point de vue de l'opposition à la ministre. Ça, c'est les points forts, M. le Président.

Les points faibles du CRIQ. Eux-mêmes, dans une consultation qu'ils ont faite – ils nous ont fait parvenir ces documents-là en commission parlementaire – admettent qu'ils ont été une très grosse institution. Quand les gouvernements se mettent le nez dans les affaires, ça reste rarement petit. On exige de ces gens-là toutes sortes de critères, de normes, de programmes et ça s'«inflationne» dans le temps. Or, c'est ce qui est arrivé au CRIQ et c'est devenu une très grosse organisation. C'est devenu une organisation qui était dispendieuse.

La ministre nous a dit tantôt: Oui, mais, écoutez, leur autofinancement était de l'ordre de 46 %; c'est rendu à 53 %. Bravo! Je reconnais qu'il y a eu une nette amélioration dans les derniers mois et les dernières années. D'autre part, quand on se compare au réseau européen, l'autofinancement est de l'ordre de 75 %, M. le Président. Et, si nous nous comparions aux Américains, probablement que l'autofinancement serait encore plus élevé. Donc, on peut se gargariser, mais attention, attention si on se compare à d'autres. Et c'est toujours ce que je fais avec tous les sujets que j'ai à regarder.

(11 heures)

Oui à la société distincte, je suis capable de vivre avec ça, mais, d'autre part, nous ne sommes plus à Saint-Pie de Bagot à nous comparer avec les gens de Saint-Hyacinthe. Nous ne sommes plus à Sainte-Anne-de-la-Pocatière à nous comparer avec les gens du lac Trois Saumons. Nous sommes dans une province qui doit se comparer, s'évaluer constamment avec l'ensemble de l'univers.

Et, dans le cas du CRIQ, ils doivent aussi se comparer avec l'ensemble de l'univers. Ils doivent se comparer avec les Américains, avec les Hollandais, avec les Chinois, avec les meilleurs de ce monde. Alors, quand on nous dit que le taux de financement est à 50 %, il ne semble pas, il ne semble plus que ça soit la norme nord-américaine ou ailleurs sur d'autres continents. Et, dans les moins bons points du CRIQ, je l'ai dit: sa grosseur, ses coûts d'opération et l'inefficacité.

Et combien de gens nous ont dit, dans les PME: Oui, nous avons fait affaire avec le CRIQ, oui, ils sont venus nous voir; mais franchement, là, franchement, ça a pris bien du temps, franchement, je dois vous avouer que ça n'a peut-être pas été si efficace que ça. Espérons que, les derniers mois, à cet égard-là il y a eu une amélioration, mais ça ne transcende pas dans le discours encore des gens d'affaires, M. le Président.

Alors, je voudrais lire à la ministre, pour continuer un peu sur le CRIQ... Je ne sais pas si elle a eu l'occasion de lire la dernière revue Prisme qui nous vient du CRIQ. Alors, là, on s'aperçoit que le CRIQ – et la ministre le réalise, même si elle a parlé très rapidement du projet de loi, beaucoup plus de l'historique et tout – avait un problème. Et le titre de cet éditorial de la revue du CRIQ, signé par Lucie Borne, se lit comme suit: Quand le temps se chagrine . Je ne lirai pas tout l'éditorial parce qu'il est un peu long, M. le Président. Mais ça va expliquer très, très bien ce que les gens du CRIQ ressentent, ce qu'ils ont permis à la ministre de ressentir et ce que probablement l'ensemble des Québécois qui regardent cette situation-là ressentent aussi, et où on doit aller maintenant.

Alors, dans l'éditorial, cette dame nous dit: «Et nos coffres sont pratiquement à sec». Et toujours elle parle de quand le temps se chagrine. Elle dit, à un moment donné: «Arrivé au port, l'équipage se scinda en deux. Les uns restèrent sur le quai et les autres embarquèrent pour poursuivre leur mission. Mais le bateau se mit à tanguer et les voiles à faseyer indûment. Qu'était-il advenu de l'habileté légendaire de nos fiers navigateurs? Craignant la mutinerie, le capitaine – alors je ne sais pas si c'est la ministre ou le président, là – réunit donc à nouveau son équipage et prêta une oreille attentive à leurs complaintes. Il entendit parler de nostalgie, de frustration et même de colère face au changement, de peur de l'avenir et d'insécurité. Chacun des marins en avait gros sur le coeur – M. le Président, c'est les gens du CRIQ qui parlent à la ministre. Le capitaine comprit alors que son personnel souffrait d'un syndrome de survivance. Le navire n'avait pas fait naufrage, mais c'était tout comme. Il prit note de toutes les revendications, informa, réfuta, rassura. Et à l'ultime question: Que ferons-nous si le vent vient à manquer? On lui répondit: Eh bien, nous ramerons.»

Alors, M. le Président, c'est l'histoire du CRIQ, Quand le temps se chagrine . Eh bien, oui, nous ramerons. Et c'est là que nous sommes, ici, ce matin, à essayer de ramer dans le projet de loi n° 97 et comprendre un peu les intentions gouvernementales, essayer de représenter les intérêts de la société québécoise, du personnel, du président, essayer de faire un tour de piste de tout ça.

Alors, c'est là qu'on en est aujourd'hui avec le projet de loi n° 97. Ce que nous devons voir ensemble avec la ministre, avec nos confrères députés ici présents, c'est: Est-ce que nous ramons dans la bonne direction, Mme la ministre? Je dois avouer tout de suite que le nouveau président, M. Guérin, que je connais peu, mais sa réputation est grande... Je dois le saluer comme étant un homme dynamique qui a du leadership, qui a de l'expertise et qui me semble faire une bonne job, savoir où il s'en va. Et je dois vous dire que ce n'est pas la première fois que, si je n'étais pas d'accord avec un président d'une société d'État, je le dirais carrément. Je pense qu'ici on a affaire à un gars correct. Il en aura à faire la démonstration. Le temps n'a pas encore été très long pour lui. Mais je pense qu'au total il fait ce qu'on doit s'attendre de lui et il fait bien la part des choses. Alors, ça aussi, ça doit être mis clair dès le début du projet de loi.

Mais le problème qu'a la ministre, un des problèmes qu'a la ministre, dans son ministère, en ce moment, c'est qu'il n'y a pas de stratégie globale de développement industriel. Vous savez, M. le Président, qu'une stratégie globale devait être déposée au moment du budget par la ministre de l'Industrie et du Commerce. On a été avisé – la population dans son ensemble – que ce programme serait déposé quelque part au mois de juin. Et là nous avons été avisés de nouveau, il y a quelques jours, que cette vision globale, au-delà des réunions, des sommets socioéconomiques, des grandes réunions et beaucoup de «parling»... Et les résultats, on les attend toujours. On pourra revenir là-dessus dans un autre projet de loi.

Ici, on s'attend à une stratégie globale de développement industriel et on ne l'a toujours pas. Et là on apprend que ça pourrait être à l'automne. Et je vous dirais même que, quand nous avons posé la question à la ministre déléguée: Quand ce projet de développement global de l'industrie au Québec va-t-il être déposé? – et le CRIQ est partie prenante intégrale à ça – on nous a dit qu'on ne le savait pas. Ça a été la réponse de la ministre déléguée de l'Industrie.

Alors, ça m'inquiète qu'il n'y ait pas de vision globale, alors qu'on a du chômage, dans le comté du premier ministre, entre autres, chez les jeunes, de plus de 20 %; 14 000 jeunes ont quitté le Québec dans la dernière année, 15 000 jeunes ont moins d'ouvrage aujourd'hui qu'il y a un an, et on n'a pas de stratégie globale d'attaque au niveau de l'industrie et du commerce.

Je rappellerai à la ministre que le parti qui l'a précédée, avec des gens d'affaires, ces gens-là avaient une vision totale et globale de l'économie. M. Bourassa a fait que le libre-échange a passé dans ce pays. Alors que l'Ontario était contre, Robert Bourassa a voté pour et a obligé le gouvernement canadien à aller dans la direction du libre-échange. Et Dieu sait, aujourd'hui, quand le gouvernement se gargarise de cette ouverture que nous avons sur le monde, particulièrement sur nos voisins américains, comment Robert Bourassa et le gouvernement libéral qui a précédé ont été importants, et, quand on visite nos PME, comment elles nous disent que les 30 %, les 40 %, les 50 % de leurs chiffres d'affaires, maintenant, qui sont faits chez nos voisins, leurs augmentations annuelles, c'est parce qu'il y a eu une politique globale industrielle pour le Québec, celle du libre-échange.

Les grappes industrielles, je me souviendrai toujours, toujours, je ne vivrai pas assez longtemps pour oublier le ridicule que l'opposition de l'époque a essayé de mettre au ministre de l'Industrie et du Commerce de l'époque sur ses grappes industrielles, qui étaient une vision globale. Je relisais hier ce livre: 400, 500 pages, industrie par industrie, les gens qui étaient impliqués là-dedans. Gérald Tremblay avait fait un ouvrage extraordinaire.

Je me souviens des discours du député de Joliette, maintenant responsable du développement régional, de ce que ce bonhomme a pu dire – et je n'emploierai aucun qualificatif – sur les grappes industrielles, en ridiculisant les raisins qui tombaient, etc. Il y avait pourtant – Dieu sait – une vision globale. Et maintenant on se gargarise, de l'autre côté, d'avoir la grappe de l'environnement. D'ailleurs, le CRIQ en fait un de ses drapeaux importants, fanions importants sur le devant du bateau, M. le Président. On avait une politique industrielle.

Les stages en entreprise. Et là vous venez de vous réveiller, vous venez de mettre ça dans votre dernier budget. Vous n'avez rien inventé. Les stages en entreprise, ça fait longtemps que ça existe dans mon propre comté, l'Université de Sherbrooke. Et comment les engagements que nous avions pris, et que nous avons tenus à cet égard-là...

Non seulement il n'y a pas de politique de développement industriel, mais il y a ce nouveau comité qu'on vient de mettre en place, le comité Facal, avec d'autres députés. Et là on va même questionner le CRIQ. Hier, je suis allé voir ce député, je lui ai dit: Écoutez, dans votre comité, avec des députés de bonne réputation qui vont être là – c'est correct – allez-vous questionner? Je sais que vous allez questionner le Grand Théâtre de Québec, vous l'avez dit, vous allez questionner plein d'autres organismes, mais est-ce que le CRIQ est dans votre ligne de questionnement? Et la réponse, ça a été oui. Et c'est le président lui-même, hier, qui me le disait: Oui, nous allons questionner, bien sûr, l'obligation du CRIQ et comment il fonctionne et ses relations avec le gouvernement.

(11 h 10)

Alors, non seulement on n'a pas de politique globale industrielle de développement, mais on va questionner, dans les prochaines semaines. Et là comment voulez-vous qu'on dise à ces gens: Allez de l'avant, alors qu'au même moment un comité va peut-être leur dire de mettre la pédale douce? Ce n'est pas évident.

La ministre nous a rappelé comment son ministère et le CRIQ, ça allait bien, et ils mettaient de l'argent. Bien, je veux lui rappeler la vraie réalité des choses, M. le Président. Au ministère, cette année, il y aura 64 000 000 $ de moins qui vont servir au développement économique du Québec. Le budget du ministère passera de 380 000 000 $ en 1996 à 315 000 000 $. C'est une baisse de tout près de 17 %, 16,9 % pour aider l'entreprise un peu partout sur le territoire du Québec. Juste au CRIQ, il y a des coupures de 5 500 000 $ dans la prochaine année, M. le Président.

Alors, on va demander au CRIQ de se financer à plus de 50 %, j'en ai parlé plus tôt. Or, dans la vraie vie, ce n'est pas une aide qu'on apporte au CRIQ; on baisse la subvention au CRIQ, on baisse la subvention du gouvernement dans le ministère. Vous savez, ce ministère-là, il est presque devenu moribond, hein; c'est moins de 0,5 % de la globalité du budget du Québec, ce ministère-là, M. le Président. Alors, on n'a plus ce ministère qui était le bateau en avant qui ouvrait et qui disait aux entrepreneurs: Venez nous voir et on va essayer de vous aider. Ce n'est plus ça.

Les commissaires industriels, M. le Président. On questionnait la ministre pendant les crédits: Que va-t-il arriver à nos commissaires industriels? La réponse, ça a été de dire: J'ai coupé 2 000 000 $ et puis le ministre des Affaires municipales a ramassé ça par la bande en attendant pour la prochaine année, je ne peux pas leur dire plus loin que ça. Imaginez-vous, si vous êtes commissaire industriel, vous ne savez pas, dans un an jour pour jour, comment vous allez être financé. Et là elle nous dit: Bien, le ministère des Affaires municipales... Et, au même moment où elle nous disait: Le ministère des Affaires municipales, ils vont en payer 2 000 000 $, le ministre des Affaires municipales, lui, nous disait qu'il pense envoyer 500 000 000 $ de responsabilités aux municipalités.

Si j'étais commissaire industriel au Québec, je commencerais à poser des questions à la ministre. Vous savez, cette question dans la chanson: «How much is the dog in the window?», je pense qu'il faudrait commencer à la poser, la question, à la ministre, parce que ce n'est pas évident où s'en vont les commissaires industriels. Eux, je sais où ils s'en vont, je sais où ils veulent aller. Eux, ils veulent participer au devenir économique du Québec, ils veulent faire quelque chose de bien dans leurs communautés respectives. Mais il semble que là on coupe, on coupe, et la ministre envoie ça aux Affaires municipales, qui eux, éventuellement, vont probablement couper ça aussi.

Alors, qu'elle ne nous parle pas d'augmentation de budget. Dans la vraie vie, ce n'est pas ça. C'est une coupure au ministère et c'est une coupure au CRIQ, M. le Président. C'est un désengagement du gouvernement au CRIQ, et, en résumé, c'est ça, l'essence du projet de loi. On pourra chanter des chansons jusqu'à demain matin, on pourra faire tous les grands discours qu'on veut, l'essence du projet de loi n° 97, c'est le début de la fin d'un désengagement de l'État, désengagement qui se fait mal, projet de loi qui est mal ficelé. Ça aussi, on va y revenir tantôt.

M. le Président, jamais la ministre, dans son très éloquent discours, enthousiaste discours, n'a dit qu'elle voulait privatiser le CRIQ. Bien non, parce qu'il y a ce double discours. On l'a vu hier, d'ailleurs, dans cette Chambre, on l'a vu à la période de questions hier, ce double discours, en ce qu'on disait aux citoyens, la veille d'un référendum, ce qu'on était pour faire le lendemain. Alors, ici, on a ce double discours, M. le Président. Dans les documents qu'on a déposés au Conseil des ministres, qui sont publics, dont une partie est publique – imaginez-vous le bout qui n'est pas public – là on parle de privatisation, carré. On le dit, on ne se cache pas pour le dire, c'est une façon d'amener le CRIQ à être privé, une entreprise privée. Alors, dans le discours, on n'en a pas parlé. C'est une façon indéniable de se désengager et de privatiser.

D'ailleurs, là comme ailleurs, le gouvernement péquiste a un peu de misère quand il parle de privatisation, et je ne suis pas sûr qu'il prenne les bonnes directions. Je vais juste donner un point de vue là-dessus. Si on veut privatiser, les sommes d'argent qu'on mettra au CRIQ dans les cinq prochaines années, M. le Président, ce sera 67 000 000 $, soit 24 000 000 $ sous forme de capital-actions et 42 000 000 $ sous forme de subsides; le tout, 67 000 000 $. Tout ça va dégager, pour les gens qui nous écoutent, sur cinq ans, un profit de 2 400 000 $. Si la ministre a l'intention de privatiser dans cinq ans, avec des profits de 2 400 000 $ sur cinq ans, prenez un multiple de 10 fois ou de 20 fois les profits – la ministre sait exactement de quoi je parle – elle pourrait vendre ça à 10 fois, elle pourrait vendre ça à 20 fois, elle pourrait vendre ça à 40 000 000 $, mettez-le à 30 fois, 60 000 000 $. Mais, M. le Président, ils auront mis plus que ça dans les cinq dernières années.

Alors, le net net, c'est que l'argent qu'on met, il faut se poser des questions là-dessus: Est-ce qu'il y aura un retour sur le capital investi là-dedans et sur les subventions? L'homme d'affaires, la femme d'affaires qui investit dans une entreprise, sa première question, c'est de savoir: Quand est-ce que je vais remettre la main sur l'argent? Et combien d'argent je vais pouvoir avoir éventuellement? À ces questions-là, je pense... Quand on regarde les chiffres qui furent déposés au Conseil des ministres, M. le Président, c'est loin d'être probant, et on écoutera en commission parlementaire, peut-être qu'il y a d'autres documents sur lesquels nous n'avons pas pu mettre la main.

Dans le mémoire que la ministre dépose au Conseil des ministres... Et je lui lis exactement textuellement ce qu'elle dit dans le mémoire: «Cette solution ouvrirait la voie à une éventuelle privatisation totale ou partielle sur un horizon de cinq ans.» M. le Président, ce n'est pas le député d'Orford qui dit ça. Ce n'est pas le porte-parole de l'opposition en matière d'industrie, commerce, c'est la ministre qui dit ça au Conseil des ministres, signé, co-signé d'ailleurs par le ministre de l'Industrie... le ministre des Finances et la ministre déléguée. «Cette solution ouvrirait la voie à une éventuelle privatisation totale ou partielle sur un horizon de cinq ans.» C'est précis, c'est clair, dans ce cas-là.

Mais, dans son discours, je ne sais pas qui a écrit son discours, mais il a oublié le mot «privatisation». C'est là que la direction des rameurs dans le journal et du capitaine se complique, M. le Président. Parce que je ne suis pas sûr que tout le monde tient le même discours quand ils ont tous leurs rames dans le bateau, comme j'ai lu tantôt, je ne suis pas sûr que tout le monde rame du même bord, dans le même sens, dépendant de si vous êtes au CRIQ ou si vous êtes au ministère.

M. le Président, quand des sociaux-démocrates me parlent de privatisation, ça m'inquiète. Je rappellerai à ce gouvernement que le Parti libéral a fait 40 privatisations entre 1985 et 1994. Elles ont toutes été, ces privatisations, réussies. Il y a différentes façons de privatiser des choses, il y a différentes façons de les faire, mais le PQ, pour toutes sortes de raisons, ils en ont fait une en 1984 – juste avant leur défaite électorale – celle de la Société des alcools du Québec, M. le Président, et vous savez, on est encore en cour au sujet de cette privatisation-là. Oui, M. le Président, ils en ont fait une, celle de la Société des alcools du Québec, et on est encore en cour – je ne sais plus à quel niveau, je ne suis pas un juriste de formation – et ça se tiraille et ça coûte bien cher. Ils ont essayé une privatisation, ils ne l'ont pas réussie, M. le Président.

Le parti avant en avait fait une quarantaine. Il y a eu un rapport, le rapport Fortier. M. Fortier, qui a été le député d'Outremont, si vous vous souvenez, qui était un gars du monde des affaires, avait été même faire un tour en Europe pour écrire ce rapport-là, avant que nous prenions le pouvoir en 1985, et nous avions compris à ce moment-là qu'il y avait différentes façons de privatiser des choses au Québec et ailleurs à travers le monde, qu'il n'y avait rien qui ne pouvait pas être privatisé. Il y avait une série d'exemples. Et j'aurais aimé, si on est pour parler de privatisation, qu'on le dise franchement, qu'on regarde le rapport Fortier, qu'on essaie de trouver des pistes de privatisation, M. le Président. Mais ce n'est pas ce que le gouvernement a décidé de faire.

Je parle de privatisation, mais ils ne sont pas meilleurs dans l'étatisation, M. le Président. Ils ont étatisé l'amiante, et là on s'aperçoit que c'est épouvantable. Ça date de 20 ans. Ça aussi, c'est rendu en cour. Alors, qu'on privatise ou qu'on étatise, ça a l'air que ce gouvernement-là, M. le Président... Ça me donne des boutons quand je les vois toucher à ces affaires-là parce qu'ils n'ont pas l'air de savoir trop, trop comment gérer ces affaires-là.

Et, dans le cas des privatisations, le Parti libéral a fait un grand ménage. Si aujourd'hui on est capable au Québec d'avoir de plus en plus des budgets balancés, balancés, c'est en grande partie, M. le Président, à cause d'un grand nombre de nettoyages qui furent faits dans un certain nombre de sociétés qui, pour toutes sortes de raisons, avaient été acquises par le peuple québécois.

(11 h 20)

Je vous donne des exemples: le centre de ski Mont-Sainte-Anne, ça a été ridiculisé, cette privatisation-là, de l'autre côté. On a perdu en moyenne entre 1 000 000 $, 2 000 000 $, 3 000 000 $ et 4 000 000 $ par année pendant deux générations, M. le Président. Il n'y a pas un centre de ski au monde qui a perdu tant d'argent et qui l'année après arrivait encore à opérer et dans lequel le gouvernement arrivait encore à investir. Dieu sait qu'on a privatisé, on a privatisé! Avez-vous un seul citoyen qui est venu vous dire cet hiver qu'il n'a pas pu skier à Sainte-Anne? Qu'il n'est pas heureux du développement là-bas, etc.? Non, M. le Président, les choses vont très bien à Sainte-Anne.

Il y a même des compagnies qu'ils ont privatisées récemment, les chantiers maritimes, où là on a dû payer. Oui, M. le Président, on a dû payer les gens pour qu'ils les prennent, on a payé pour qu'ils achètent notre bien, parce que c'est ça que ça valait. La situation des privatisations à travers le monde, il y a des coûts quand les sociétés veulent se désembarquer de situations dans lesquelles elles n'auraient jamais dû s'embarquer en premier. Et je pense que nous pourrions aider le PQ, si jamais c'était la direction qu'ils voulaient prendre. Mais, encore une fois, je pense que la privatisation, la façon dont ils veulent la faire, ce n'est pas la bonne façon, M. le Président.

Or, il y avait trois ou quatre façons de regarder le projet de loi du CRIQ. La première façon que ce gouvernement aurait dû choisir... Et, en parlant du rapport Fortier, oui, il faut peut-être que je finisse là-dessus. Le rapport Fortier avait regardé tout ce qui pouvait être privatisé au Québec, ou à peu près. Quand j'ai étudié le projet de loi, il y a quelques jours, avec mon chef, M. Johnson, et d'autres collaborateurs, des gens en entreprise privée, des gens universitaires, quelqu'un a dit: Allez donc chercher le rapport Fortier pour voir si on parle du CRIQ dans le rapport Fortier.

Alors, je rappellerais à la ministre que, alors qu'on a regardé tout ce qui pouvait être privatisé au Québec, jamais le Parti libéral du Québec, jamais le gouvernement en place n'a, à aucun instant, pensé privatiser le CRIQ, parce qu'on était convaincu que le CRIQ avait une mission que le gouvernement devait supporter, pas baisser 5 000 000 $ comme on est après faire, mais supporter le CRIQ, M. le Président. Alors, ça, c'était le rapport Fortier. Je comprends que c'était en 1984 et qu'on est rendu en 1997, ils auraient le droit de changer d'idée. Mais ce que je veux rappeler, c'est que le rapport Fortier, qui a été une oeuvre bien faite, n'a jamais, mais jamais parlé de privatisation du CRIQ.

Il y avait quatre façons de regarder ce projet de loi n° 97. La première, c'était de recentrer la mission du CRIQ. Ou bien l'État y croit, à la recherche et au développement, ou bien l'État pense que les PME au Québec, c'est ça qu'il faut faire, et là, à ce moment-là, on recentre la mission du CRIQ. On fait le grand ménage là-dedans. Il y a du ménage à faire, on s'entend de part et d'autre de la Chambre, et on continue à subventionner le CRIQ. Et ça, on aurait aidé la ministre à le faire. Je vous le dis tout de suite, si on avait voulu recentrer la mission du CRIQ sur sa mission originale, principale, la plus efficace, le Parti libéral aurait aidé le gouvernement 100 milles à l'heure.

Deuxième possibilité pour le CRIQ, et c'est ce que d'autres institutions font à travers le monde en ce moment... J'avais, entre autres, ici – il faudrait que je fouille dans mes papiers – d'autres organismes de ce genre au monde qui, eux, finalement, sont devenus de très grands centres de référence. Alors, tu as une PME à Sainte-Anne-de-la-Pérade et tu te demandes si les boulons en fibre de verre que tu fabriques ne seraient pas plus résistants en leur mettant un chapeau en métal, bien tu appelles au CRIQ. En ce moment, ce qui va se passer, c'est que le CRIQ va faire la recherche.

Mais, dans la vraie vie, M. le Président, si le CRIQ était devenu et devenait un grand centre de référence, il dirait: Regardez, mon cher monsieur de Sainte-Anne-de-la-Pérade ou ma chère madame de Sainte-Anne-de-la-Pérade, il y a des spécialistes dans le secteur du plastique, il y a des cégeps, des universités, il y a des entreprises privées qui ont des laboratoires là-dessus. Regardez, on va vous présenter ces gens-là, nous, on a des contacts là-bas. Mieux que ça, plutôt qu'on finance le CRIQ, on va vous financer votre projet auprès de cette entreprise privée là, ou de cette université-là, ou de ce centre de recherche là. La mission du CRIQ continuerait, elle serait plus efficace et probablement moins dispendieuse.

Et c'est ce que d'autres pays ont décidé de faire, M. le Président, des grands centres de référence. Ce qu'on dit à l'individu de Sainte-Anne-de-la-Pérade: Fais faire ta recherche à tel endroit, on va même les superviser, et apporte-nous tes factures. On va subventionner un certain nombre de centres, de PME, plutôt que de subventionner un autre organisme gouvernemental.

Par exemple, un individu vous appelle puis vous dit qu'il y a des problèmes de production porcine au Québec – on en a souvent parlé dans cette Chambre, ça a l'air que ça va se régler au mois de juin, on a bien hâte de voir ça. Le CRIQ est impliqué là-dedans, le CRIQ a fait de la recherche. Mais probablement que ça aurait fort bien pu être fait, cette recherche-là, à Lennoxville, par exemple, par la ferme expérimentale qui se spécialise dans la production porcine, peut-être que ça aurait pu être fait par Saint-Hyacinthe, à l'ITA, peut-être que ça aurait pu être fait par Sainte-Anne-de-la-Pocatière, là-bas. Pourquoi pas? Non, on a décidé que, nous, on voulait que ça soit fait au CRIQ.

Alors, je ne dis pas à la ministre que c'est ça qu'il fallait faire, mais c'est une des avenues, je pense, que son ministère aurait fort bien dû regarder. Alors, non seulement on coordonnerait la recherche au Québec, plutôt qu'avoir 300 recherchistes et quelques, mais on la subventionnerait, on la distribuerait dans les régions – politique de développement régional – et on irait vers l'expertise.

Je vais vous donner des exemples. On sait qu'en chimie, en ce moment, l'Université de Sherbrooke a probablement, après l'industrie des médicaments, ce qui se fait de mieux. Il y a même des gens de l'Université de Sherbrooke qu'on parle de nommer prix Nobel en chimie, et des choses comme ça. Peut-être que, plutôt que de faire de la recherche au CRIQ, bien on dit: Écoute, va-t-en à l'Université de Sherbrooke puis on va te subventionner, puis on va aider, puis on va superviser ça.

Vous savez, maintenant, les firmes d'ingénieurs ont développé une expertise dans toutes sortes de secteurs. Que ce soit la firme de Roger Nicolet dans les stades olympiques et les toiles de stade olympique ou que ce soit une firme de l'Estrie dans les toiles qui vont dans le fond des bassins de sites d'épuration, M. le Président, les firmes d'ingénieurs ont développé une expertise mondiale dans à peu près – j'illustre avec mes toiles – tous les secteurs. Or, on pourrait se servir de ces gens-là.

Ce même bonhomme de Sainte-Anne-de-la-Pérade qui appelle la ministre et qui lui dit: Écoutez, moi, j'ai un problème avec mes fusibles, bien, Hydro-Québec, à l'IREQ, a un centre de recherche absolument extraordinaire. Est-ce qu'on est après faire en duplicata ici? Or, c'est une des avenues que j'aurais aimé que la ministre regarde. Je pense que ça aurait été plus efficace dans une politique de développement régional, très efficace, nous en sommes convaincus, et possiblement moins dispendieux. Ce n'est pas le choix qu'elle a fait, M. le Président. C'est son choix, elle est au gouvernement. Ce que je lui dis, c'est que c'est un des choix que nous aurions supporté.

Troisième avenue, celle de privatiser. Alors, là, encore une fois, ces gens-là, je ne suis pas sûr qu'ils savent comment privatiser les choses, mais on additionne les actifs, on additionne – et passez-moi le mot anglais – le «goodwill», la réputation, l'intrinsèque finalement, on additionne les clients, on additionne les équipements et on dit: Il y a un prix à ça. On l'a fait dans Sidbec-Dosco. On l'a fait dans le Mont-Sainte-Anne. On l'a fait dans le chantier maritime. Dans des cas, je le disais tantôt, on a dû payer pour que des gens achètent notre bien. Dans d'autres cas, ils nous ont dit: Vous n'aurez pas une cent. Dans d'autres cas, on a dit: Bien, on va intéresser les actionnaires, les employés dans la firme. Dans d'autres cas, on a fait des ventes d'actifs. Dans d'autres cas, on a fait des ventes d'actions. Il y a différentes approches à prendre dans le cas d'une privatisation.

Certaines provinces sont rendues très loin et certains pays sont rendus très, très loin là-dedans. Vous savez qu'on va demeurer une des seules provinces sur le continent nord-américain, société distincte oblige, à avoir l'électricité fabriquée et livrée dans nos maisons par une société d'État. Ailleurs en Amérique, ou bien on a vendu les sociétés d'État et on l'a mis dans les mains de l'entreprise privée... Nous, on a fait un choix que je respecte, mais je dis à la ministre: Il faut regarder ce qui se passe ailleurs.

En France, les réseaux d'eau dans les municipalités sont en grande partie privatisés. Les élus municipaux ont depuis longtemps compris que leur mission première, ce n'était peut-être pas de faire passer l'eau dans les tuyaux jusque dans les maisons. On pouvait contrôler ça, comme on contrôle les tarifs de Bell Canada, comme on contrôle les tarifs d'Hydro-Québec. On contrôle dans des pays les tarifs de l'eau, et ça fonctionne. On va me parler d'un cas où il y a eu un scandale. Bien oui, on en a eu, des scandales, à Hydro-Québec, nous aussi.

Le gouvernement de l'Irlande était poigné, parce qu'eux autres aussi s'étaient embarqués dans toutes sortes de patentes, M. le Président, avec une usine de moteurs. Ils ont payé Bombardier pour que Bombardier l'achète. Ils ont dit à Bombardier: Si vous la prenez, on va vous payer pour que vous la preniez. En Angleterre, on est après privatiser les prisons, M. le Président, et je pourrais continuer. On regarde au gouvernement canadien la possibilité de privatiser les postes, et ça me surprend parce que je n'ai jamais pensé qu'on pouvait privatiser les postes. C'est le temps qu'ils le fassent parce que le courrier dans l'entreprise privée est après les dépasser. Ils ont été assez longtemps aveugles de ce qui se passait dans ce marché-là que là, c'est là qu'on est rendu. Alors, M. le Président, il y a toutes sortes de façons de faire des privatisations, et je ne pense pas que la ministre le fasse de la bonne façon, si c'est ça qu'elle veut faire.

(11 h 30)

Dans le cas du CRIQ, bien sûr, il ne fallait pas – je le dis et je le répéterai en commission parlementaire – faire une vente de feu. Il y a là de l'équipement. Il y a là un génie industriel qu'il faut préserver. Il y a là des marchés, des connaissances acquises sur une période d'une génération. Il ne fallait pas faire une vente de feu. D'autre part, il nous fallait préserver, dans cette vente-là, dans cette privatisation-là, M. le Président, le personnel et la mission. Et ça aussi, ça se fait, dans des privatisations. La mission du CRIQ devait être préservée, advenant la privatisation, et le personnel devait être préservé. On n'a pas d'assurance de ça dans le projet de loi n° 97.

Alors, le président nous dit... Et je le lis textuellement parce que c'est très agréable. J'aime bien ce président, il est illustré quand il parle. On comprend bien son propos. Le président nous dit: On avait regardé le scénario conventionnel de vente des éléments d'actif et des propriétés. Mais, dans un centre de recherche, l'actif prend l'ascenseur le soir et va dormir dans la banlieue. Comment voulez-vous privatiser ça? Il a raison. C'est vrai que le personnel, le soir, prend l'ascenseur puis va coucher dans les banlieues.

En parlant des banlieues, juste une parenthèse à la ministre. Je suis un peu surpris quand je regarde ici que le siège social du CRIQ est à Québec, dans la ville de Québec, et ça, c'est une autre enfarge quand les gouvernements sont dans ces affaires-là. Alors que 60 % du chiffre d'affaires du CRIQ est dans la région Montérégie-Montréal-Laval-Lanaudière-Laurentides, donc la grande région de Montréal, 60 % du chiffre d'affaires, on s'aperçoit qu'il y a seulement 130 employés dans la région de Montréal, alors qu'il y en a 215 dans la région de Québec, où on fait 20 % du chiffre d'affaires. Il n'y a pas une entreprise privée, M. le Président, qui accepterait une affaire comme ça. L'entreprise privée, le personnel serait où sont les clients. C'est la règle de base. Alors, nous aussi, qu'est-ce que vous voulez, parce que le gouvernement avait le nez là-dedans puis parce qu'on veut faire une capitale puis un pays, puis envoie donc par là, bien, on a dit: C'est tout là que vous allez mettre votre personnel. Mais les clients, ils ne sont pas là.

Puis d'ailleurs ça m'amène à questionner pour la prochaine opération des crédits. Il y a peu de députés qui disent à la ministre: Dans un an, on va vous questionner sur les crédits du CRIQ. Je dis tout de suite à la ministre: Une des questions, c'est les frais de transport de tout le personnel du CRIQ. Parce que, quand j'ai découvert ça, la nuit dernière, en lisant le rapport annuel, je me suis dit: Il y a du monde qui doit voyager pas à peu près. Si 60 % des clients sont à Montréal et 60 % du personnel est à Québec, il doit y avoir des comptes de dépenses absolument extraordinaires de transport. Je ferme la parenthèse.

Le président, ce qu'il nous dit, c'est: Qu'est-ce que vous voulez, je ne suis pas capable de privatiser ça, le personnel prend l'ascenseur, s'en va dans les banlieues, puis on n'est pas capable de privatiser ça. Bien, M. le Président, je ne suis pas d'accord avec ce président-là, moi, je ne suis pas d'accord du tout, parce que le personnel, en descendant dans l'ascenseur, si j'étais le président de cette entreprise-là...

Je vais vous situer rapidement, vous allez bien me comprendre. Il y a un scénario, et la ministre aurait dû le regarder, c'est les trois F. Tu dis à ce personnel-là: Écoutez, on est les meilleurs, on est très bons, on a 20 ans d'existence, alors on va mettre en place la règle des trois F: la foi, le fun et le foin. La foi: Vous y croyez, dans cette entreprise-là, vous travaillez là depuis 20 ans, c'est une bonne entreprise? Bien, si vous y croyez, on va l'acheter. Le fun: Vous travaillez ici depuis 20 ans, vous vous aimez les uns et les autres? On va avoir du plaisir à relever le défi. Puis le foin: Vous et moi, vous, les employés, vous, les recherchistes, vous, les techniciens, on va se faire de l'argent avec cette entreprise-là. On va offrir au gouvernement de garder la mission, on va offrir au gouvernement de continuer à nous subventionner pour un nombre d'années – on ne ferait pas une vente de feu – on va suggérer au gouvernement de garder le personnel, on va avoir notre propre conseil d'administration, le gouvernement sera en phase décroissante. On va faire du foin, on va avoir du fun puis on va avoir la foi dans l'entreprise. Les trois F.

M. le Président, ce n'est pas ce qu'on nous offre, ici, aujourd'hui. Et ça, je vous le dis tout de suite, on y aurait probablement souscrit avec intérêt, force, on aurait travaillé avec la ministre. Ce qu'on nous offre aujourd'hui, c'est une patente hybride, ni chair ni poisson, ni voile ni moteur, ni blanc ni noir.

Alors, on a questionné les experts. Je le disais tantôt, on a appelé un certain nombre d'experts. Eux, ils nous disent, les experts qui transigent ou pas avec le CRIQ: La mission va être oubliée; c'est un délestage de l'État. La main haute du conseil d'administration gouvernemental, hein, on va passer de 15 à neuf, mais les neuf sont nommés par le gouvernement, les petits amis du parti, les Yves Michaud de ce monde. J'espère qu'ils ne seront pas sur ce conseil d'administration là. Alors, on ne nomme pas souvent dans les affaires gouvernementales, ou totalement, des gens pour leurs compétences. À l'occasion, j'en ai vu, c'est arrivé que des gens ont été nommés parce qu'ils avaient fait du porte-à-porte lors d'une élection. Alors, il faut faire attention à ça, M. le Président. Ici, le gouvernement aura la main haute sur cette affaire-là. On va baisser l'aide gouvernementale – c'est ce que nous disent les gens – on va compétitionner contre l'entreprise privée. J'espère avoir du temps pour revenir sur cet angle-là, sinon faites-vous-en pas, on va y revenir en commission parlementaire.

Qu'est-ce qui va arriver – la ministre n'en a pas parlé dans son discours – du 20 000 000 $ pour le plan quinquennal pour moderniser les installations du CRIQ? Parce qu'on nous dit, au CRIQ: Écoutez, on est amanché un peu boiteusement, en ce moment. Il n'y a pas de plan d'intéressement pour les employés. Avec des gens de cette qualité-là, M. le Président, si vous ne les intéressez pas dans le capital, dans les revenus de l'entreprise éventuellement, un compétiteur va venir vous les chercher. Alors, il n'y a pas de plan d'intéressement, et ça, il aurait fallu regarder ça de très près.

M. le Président, nous, finalement, c'est un peu les extrêmes qu'on dit. D'un côté, on aurait pu refocusser la mission et, de l'autre côté, on dit: Oui, bien, peut-être que, si vous aviez décidé de faire une vraie privatisation, on vous aurait suivis là-dedans. Mais là ce n'est pas avec ça que vous nous arrivez, c'est une patente hybride, une patente bien compliquée à suivre et, dans la vraie vie, qui va probablement plus nuire à l'entreprise privée qu'elle va l'aider. Et, si j'ai le temps, je vais expliquer ma pensée tantôt.

Alors, Serge Guérin, dans Le Soleil du 15 mars, nous dit: «Parmi les "outils" que demande maintenant le CRIQ il faut compter un investissement de plusieurs millions pour moderniser les installations devenues désuètes. Le plan quinquennal 1995-2000 approuvé par le gouvernement prévoyait l'injection de 20 000 000 $ à cet fin.» C'est le président du CRIQ qui parle. «Mais – selon Serge Guérin – le gouvernement avait "adopté un plan de développement dont il n'avait pas les moyens" et les millions promis n'ont jamais été versés. C'est pourquoi le plan a dû être abandonné après moins de deux ans et le nouveau président a dû concevoir un nouveau plan pour éviter la fermeture.» Ça me pose question, ça, M. le Président, des phrases comme celles-là, mais je ne suis pas sûr que vous êtes après faire la bonne structure de la bonne façon dans la bonne direction.

Et, je l'ai dit tantôt, vous avez un comité, de votre côté, qui va regarder toutes ces histoires-là. Pourquoi, M. le Président, ne pas attendre que le rapport Facal soit déposé et qu'on regarde? Tout à coup que le rapport Facal dit: Tout ce qui est société parallèle au gouvernement, on veut se délester de ça. Tout à coup que c'est ça que le rapport Facal dit. Alors, là, ce qu'on est après faire, ce qu'on est après dire au président puis à son équipe: Écoutez, vous allez aller de l'avant, mais n'allez donc pas trop de l'avant tout de suite parce que là le rapport Facal va regarder ça pendant un bout de temps. Moi, si j'étais président, ça me poserait problème. Je «pèse-tu» sur le gaz ou si je pèse sur le brake ou si je parque mon autobus sur le bord de la route puis j'attends que la ministre se fasse un chapeau? C'est ça, le président, dans la vraie vie, M. le Président, qui se passe. Alors, est-ce qu'ils vont peser sur le gaz ou sur le frein ou est-ce qu'on attend sur le bord de l'autoroute avant d'aller plus loin? Et la ministre à ça ne donne pas de réponse.

M. le Président, une de mes consoeurs de la Montérégie va vous adresser la parole dans quelques minutes, et je voudrais qu'elle puisse le faire avant l'heure du dîner. Alors, je vais essayer de me résumer un peu.

M. le Président, parce qu'on s'en va avec une patente hybride, je pense qu'on va aller jouer dans les talles des PME. Et je vais lire à la ministre des extraits de gens qui ont communiqué avec nous puis qui nous ont dit: Écoutez, voilà qu'on va avoir un nouveau compétiteur. Ce que je dis souvent à la ministre, ce que j'ai dit à son ministre: Écoutez, si vous ne pouvez pas aider les PME, au moins nuisez-leur pas, n'ajoutez pas des règlements puis des lois puis toutes sortes d'enfarges. Bien, là, on a l'impression, quand on parle avec les gens d'affaires, que c'est ça, ce qu'ils sont après nous dire. Ce qu'ils nous disent... Et je vous lis quelques extraits de lettres ou d'articles qui nous ont été envoyés. Je vais garder les noms des gens secrets et je pourrai les remettre à la ministre avec grand plaisir.

Il y a un individu qui nous écrit, puis il nous dit: «À ma grande surprise, le CRIQ se comporte plutôt comme un de mes concurrents», déclare M. Untel, qui a racheté G.E. Leblanc, devenu depuis 1989 le leader canadien de la machine de coupe de porc à haute vitesse. L'entreprise a 70 employés, exporte 90 % de sa production aux États-Unis et est membre du Conseil des viandes qui a financé le CRIQ.

Un autre monsieur nous dit: «Je n'en démords pas, le CRIQ profite de notre expertise pour monter son centre privé. Il a sollicité nos clients, sous notre nez, devant témoins. Certains n'en croyaient pas leurs oreilles.» Bon, j'en ai comme ça, des témoignages, M. le Président, de gens. On ne peut pas faire des enquêtes sur tout ce beau monde là, vous comprendrez, qui nous écrit ou qui écrit dans les médias.

(11 h 40)

Un autre ici. Et il me dit: Plusieurs ingénieurs, des consultants en recherche industrielle, se plaignent de la trop forte concurrence exercée par cet organisme de l'État envers les entreprises du secteur privé. Par esprit de nationalisme économique, le CRIQ a débordé de son mandat initial et aurait dû se limiter à la recherche et au développement. Celui-ci déplore le fait que l'organisme gouvernemental se retrouve à présenter des soumissions et à concurrencer le secteur privé avec des fonds publics dans les secteurs qui dépassent le champ habituel d'un laboratoire d'État. Ce dernier cite deux cas survenus il y a quelques années où il fut en compétition avec le CRIQ. Dans un cas, ça a été la compagnie GTE Sylvania et, dans l'autre, l'entreprise Cheminées Sécurité. J'en ai, M. le Président, mais, comme je veux laisser...

Alors, je finirai en disant à la ministre: On va contribuer à son projet de loi. Au moment où on se parle sur le principe, nous allons voter, pour toutes les raisons que j'ai données depuis une heure, contre le principe du projet de loi. D'autre part, avec la ministre, en commission parlementaire, avec le président du CRIQ, si elle veut recentrer la mission du CRIQ d'un côté ou privatiser de la façon dont on lui a parlé, en gardant la mission et le personnel, nous sommes prêts à travailler avec elle, nous sommes prêts à l'aider dans les amendements. Nous sommes prêts à faire que le CRIQ demeure ce grand organisme que nous avons convenu, mais non pas une patente ratatinée, à coup de 5 000 000 $ de moins par année. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Orford. Je vais céder la parole, maintenant, à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. J'aimerais intervenir sur le projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec, le CRIQ, qui a été déposé devant cette Assemblée par la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce le 9 mars dernier. Il s'agit d'un projet de loi qui vise essentiellement à modifier le statut, le mandat et le mode de fonctionnement du CRIQ.

On se rappellera, M. le Président, que le CRIQ a été créé en 1969 par une loi qui en fait une corporation au sens du Code civil et dont les objectifs ont été définis comme suit. Le CRIQ a pour mandat d'effectuer des recherches en sciences appliquées, effectuées soit dans ses propres laboratoires soit dans ceux d'autres centres de recherches. Le CRIQ a également comme mandat la mise au point de produits, procédés et appareils industriels et scientifiques. Il est également chargé de la collection, de la diffusion d'informations et de renseignements d'ordre technologique et industriel. Et il a également pour mandat d'effectuer des activités de normalisation industrielle.

Voilà ce qu'était le mandat du CRIQ avant le dépôt de ce projet de loi. C'était un mandat assez circonscrit dans le domaine de la recherche appliquée pour aider les entreprises québécoises essentiellement. Le CRIQ, donc, de par son mandat, visait à soutenir le développement économique du Québec, et plus spécifiquement celui des petites et moyennes entreprises, dont le nombre se situe autour de 170 000, qui emploient 42 % de la main-d'oeuvre québécoise. Donc, le mandat du CRIQ était axé sur la recherche appliquée pour supporter les efforts des PME manufacturières du Québec, les supporter afin qu'elles puissent relever le défi du virage technologique, et soutenir ainsi leurs activités dans le cadre de la concurrence internationale.

Il va sans dire que le CRIQ a connu ses années de gloire et a réussi à établir sa crédibilité non seulement dans le monde de la recherche scientifique, mais également dans le monde économique, essentiellement parce qu'il pouvait compter sur une dotation financière du gouvernement qui lui permettait de planifier ses activités à long terme.

Or, depuis le retour du Parti québécois au pouvoir, et avec lui le spectre des coupures drastiques dans les services à la population, notamment dans les domaines de la santé, des services sociaux et de l'éducation, il n'est pas étonnant, pour des raisons purement budgétaires et froidement comptables, de voir ce projet de loi qui n'est rien d'autre que le prélude à la privatisation d'une de nos institutions que l'on peut qualifier d'acquis collectif majeur.

En effet, M. le Président, lorsqu'on réfère à un mémoire du Conseil des ministres daté du 12 février 1997, on peut lire que, au nombre des solutions qui sont proposées, la ministre de l'Industrie et du Commerce et le vice-premier ministre, ministre d'État de l'Économie et des Finances ont retenu deux solutions possibles. Je cite le mémoire au Conseil des ministres: «Premièrement, au-delà de la fermeture du Centre – on parle ici du CRIQ – qui paraît inacceptable, deux scénarios s'imposent. En premier lieu, le statu quo entraînerait une décroissance graduelle des ressources et des actifs du Centre et, par conséquent, de ses activités, ce qui, à terme, pourrait signifier sa disparition.» Donc, ça, c'est une première hypothèse, et on le constate déjà au niveau du constat qui est fait par le gouvernement, que l'on s'en allait vers une disparition du CRIQ, dans la mesure où les ressources gouvernementales ne suivaient pas les objectifs de ce Centre.

L'autre solution qui a été préconisée, et c'est celle-là qui a été retenue, consiste à revoir fondamentalement son statut et ses objectifs de façon à convertir le CRIQ en compagnie à fonds social pour lui permettre d'effectuer aussi des opérations de commercialisation de ses expertises, de dégager les fonds nécessaires à son développement et d'obtenir le degré de flexibilité requis pour ses opérations.

Également, au niveau des objectifs, toujours dans le mémoire au Conseil des ministres, on retient ceci: «Essentiellement, le Centre aurait encore comme objet le développement d'expertises, d'équipements, des produits et des procédés dans le domaine des technologies de la fabrication, la collection et la diffusion d'informations d'ordre technologique et industriel et la normalisation industrielle. Le Centre conserverait son rôle de conseiller dans tous ces secteurs.

«La grande différence – et c'est ça qui est l'enjeu de ce projet de loi – proviendrait du fait que le Centre pourrait dorénavant, seul ou en partenariat, procéder à la commercialisation des expertises, produits et procédés développés. De plus, le gouvernement pourrait également confier au Centre des mandats connexes à ces objets en lui accordant, en parallèle, un support financier total ou partiel à cet égard. La participation du gouvernement au financement du Centre serait ainsi ciblée sur des objets spécifiques, avec des attentes très précises.»

M. le Président, il va sans dire que le gouvernement n'a pas hésité à sabrer dans le budget du CRIQ, essentiellement parce que le CRIQ fait partie de ces fleurons d'un secteur scientifique et technique où la clientèle, surtout la clientèle visée, n'a pas l'habitude d'organiser des grosses manifestations à la porte du parlement. Ce n'est pas des gros lobbies qui vont venir chialer et dénoncer ces coupures-là. Or, M. le Président, le secteur scientifique est un secteur porteur d'avenir, et le gouvernement a une responsabilité première de soutenir les secteurs de la recherche, et le CRIQ en est un exemple qu'il faudrait soutenir. Parce que, si le projet de loi est adopté, il y a fort à parier que des dommages seront causés au CRIQ par ce projet de loi, et ces dommages-là se feraient sentir même à brève échéance.

(11 h 50)

En effet, en modifiant fondamentalement le statut et les objectifs du CRIQ et en le transformant en une compagnie à fonds social, le gouvernement pense régler le problème de son financement, mais il crée du même souffle de nouveaux problèmes qui auront des conséquences dramatiques, surtout pour les PME québécoises et ultimement pour l'emploi au Québec. Déjà, de nombreux dirigeants d'entreprises ont fait entendre leurs voix et ont signifié leurs inquiétudes, dans la mesure où ils voient désormais le CRIQ non pas comme un partenaire, ce qu'il devrait être, mais comme un concurrent.

Je citerai à titre d'exemple un article qui est paru dans La Presse du 1er septembre 1994, intitulé Des ingénieurs s'en prennent au CRIQ: selon eux, l'organisme devrait se limiter à la recherche et au développement . On peut y lire, et je cite: «En dépit de sa noble mission de stimuler le développement économique, le Centre de recherche industrielle du Québec, le CRIQ, attire de nombreuses critiques. Plusieurs ingénieurs – et ça, c'est le noyau central concernant les travaux de recherche appliquée dans le domaine industriel – des consultants en recherche industrielle se plaignent de la trop forte concurrence exercée par cet organisme de l'État envers les entreprises du secteur privé.»

«"Par esprit de nationalisme économique, le CRIQ a débordé de son mandat initial et il aurait dû se limiter à la recherche et au développement", a déclaré Jean-Hugues Simard, un ingénieur-consultant de Montréal-Nord. Celui-ci déplore le fait que l'organisme gouvernemental se retrouve à présenter des soumissions et à concurrencer le secteur privé avec des fonds publics dans des secteurs qui dépassent le champ habituel d'un laboratoire d'État. Sur un budget total de 35 500 000 $, le CRIQ a plus de 13 000 000 $ en revenus propres, ce qui donne un taux d'autofinancement de 39 %, un niveau qui semble satisfaire le président du Centre – le président du Centre d'alors – M. Pierre Coulombe.»

Dans l'entrevue à La Presse , le dirigeant affirmait, et je le cite: «Nous pourrions augmenter notre taux d'autofinancement en obtenant plus de contrats, mais il faudrait alors réduire les risques.» Et on le voit, M. le Président, même le président du CRIQ d'alors reconnaissait qu'il y avait des risques dans sa démarche. «Nous serions perçus, disait-il, comme des compétiteurs par le secteur privé. Nous préférons de loin le partenariat avec l'entreprise.» Ça, c'était avant que le gouvernement présente un nouveau projet de loi.

«Au début, le CRIQ fut une bonne affaire, mais là il a envahi d'autres missions», affirme, de son côté, M. Donald Gauthier, un expert-conseil de Longueuil. «Favoriser l'innovation technologique est une chose, mais faire de la gestion de projets industriels en est une autre», dit cet ingénieur. Ce dernier cite deux cas – on parle ici de cas concrets – survenus il y a quelques années, où il fut en compétition avec le CRIQ. Dans un cas, ce fut la compagnie GTE Sylvania et, dans l'autre, l'entreprise Cheminées Sécurité qui souhaitait aménager son usine de façon à installer le procédé de production Juste à temps. Dans ces deux dossiers, M. Gauthier a perdu le contrat au profit du Centre de recherche, et je le cite: «Je me suis retiré complètement de ce domaine, mais je crois qu'ils n'ont pas d'affaire là. On est loin de la recherche. Ils ont même des agents qui se promènent dans des entreprises pour trouver des contrats.»

Un autre industriel, qui préfère garder l'anonymat, selon l'article de La Presse , a expliqué qu'il a dépensé beaucoup d'énergie dans un litige contre le CRIQ, allant jusqu'à obtenir une entrevue avec le ministre Gérald Tremblay d'alors. Cet entrepreneur de la rive nord fabrique de la machinerie hautement spécialisée. «Plutôt que de s'associer avec nous, disait-il, le CRIQ a accordé un contrat de sous-traitance à une firme de l'Ontario pour développer un équipement semblable au nôtre.» C'est loin de favoriser les entreprises du Québec. Celui-ci a préféré fermer sa division plutôt que de se retrouver en concurrence avec le Centre. Son entreprise emploie 20 personnes et il a plusieurs contrats internationaux. «J'exige, disait-il, aujourd'hui de mes clients qu'ils ne dévoilent rien au CRIQ; s'ils refusent, je préfère me retirer.»

Alors, on le constate, M. le Président, le climat qui est en train de s'instaurer entre le CRIQ et ses principaux partenaires privilégiés en est un de manque de confiance, en est un de concurrence, et cela est très inquiétant pour l'avenir du partenariat entre le CRIQ et l'entreprise privée.

Donc, M. le Président, la mission du CRIQ, comme centre de recherche appliquée, est essentielle. Certes, il faut la renforcer, certes il faut la consolider, mais il ne faut pas la changer complètement de façon à modifier le mandat et le fonctionnement du CRIQ, surtout quand les enjeux derrière tout ça sont essentiellement des enjeux budgétaires et comptables. Et ceci est extrêmement important dans le contexte actuel de la mondialisation, où les petites et moyennes entreprises s'orientent de plus en plus vers l'exportation comme un créneau porteur. Elles ont besoin, ces entreprises, de soutien et de support technique et scientifique, et le CRIQ devrait être le lieu privilégié où ce soutien devrait se développer et être partagé.

Alors, en se désengageant, M. le Président, le gouvernement met en péril la mission du CRIQ, car, il faut aussi le dire, ce qui se cache derrière ce projet de loi, c'est également des coupures. On a coupé les vivres au CRIQ dans la mesure où les crédits de 16 700 000 $ prévus pour 1997 seraient diminués à hauteur de 11 000 000 $ pour l'an 2000. Et ça, M. le Président, c'est dramatique, parce que ça dénote et ça envoie un message que ce gouvernement ne tient pas et ne soutient pas la recherche, la recherche fondamentale, la recherche scientifique, pour aider le milieu économique québécois à prospérer et à se développer.

Cette décision arrive à un moment où on vit des changements fondamentaux dans le marché du travail, où l'entreprise passe une partie de son temps, de ses ressources dans la gestion des changements. Donc, la mission du CRIQ devient encore essentielle et le facteur technologique déterminant dans le contexte de la mondialisation actuel.

Alors, à ce moment précis, M. le Président, le gouvernement envoie en mauvais signal. Un mauvais signal pour les petites et moyennes entreprises, un mauvais signal pour les jeunes en particulier qui ont besoin du soutien d'un organisme comme le CRIQ. Car il ne faut pas oublier, M. le Président, que le CRIQ est d'abord et avant tout un laboratoire de recherche au service de tous les Québécois, au service des jeunes ingénieurs qui ont besoin aussi de se référer à une ressource comme celle-là et de pouvoir se ressourcer et en même temps bénéficier de l'expertise du CRIQ. C'est également, M. le Président, un laboratoire pour les jeunes ingénieurs, pour les jeunes scientifiques qui veulent bénéficier d'une expertise comme celle du CRIQ.

Le gouvernement arrive à un moment très difficile pour l'économie du Québec pour encore couper dans une ressource qui est fondamentale pour l'entreprise privée et surtout, M. le Président, pour les régions et les petites et moyennes entreprises dans les régions, qui ont un besoin vital d'un support comme celui du CRIQ. C'est pour cette raison-là que nous allons exiger des consultations avant de pouvoir aller au-delà dans ce projet de loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Alors, étant donné l'heure actuellement, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir d'abord quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous débutons immédiatement les affaires courantes.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article c de notre feuilleton.


Projet de loi n° 120

Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le leader du gouvernement, au nom de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances, présente le projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi sur l'inspecteur général des institutions financières et d'autres dispositions législatives. M. le leader du gouvernement.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Le présent projet de loi a pour objet de remplacer les postes de surintendants auprès de l'Inspecteur général des institutions financières par un poste d'adjoint à l'Inspecteur général et d'étendre le bénéfice d'immunité contre les poursuites à cet adjoint.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article a de notre feuilleton.


Projet de loi n° 119

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre d'État des Ressources naturelles présente le projet de loi n° 119, Loi modifiant la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers et d'autres dispositions législatives. M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Ce projet de loi apporte plusieurs modifications aux dispositions de la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers relativement aux mesures prévues pour assurer la qualité et la sécurité des produits et des équipements pétroliers.

Le projet de loi introduit des modulations dans la teneur des normes imposées à l'égard des équipements pétroliers et la portée des contrôles exercés par le régime de permis afin d'assurer une meilleure correspondance avec le niveau de risque que représentent les divers types d'équipements pétroliers.

C'est ainsi notamment que le projet de loi abroge l'exigence de détenir un certificat d'enregistrement et restreint l'obligation de détenir un permis aux seuls équipements présentant un plus haut niveau de risque.

Par ailleurs, le projet de loi accorde une plus large place et reconnaît la valeur des interventions privées qui permettent d'assurer la protection du public, des biens et de l'environnement, telles des mesures relatives aux vérifications d'équipements pétroliers effectuées par des personnes qualifiées, des mesures permettant de reconnaître la valeur équivalente ou supérieure d'autres normes, des mesures ou méthodes employées autres que celles précisées dans la réglementation et des mesures permettant de reconnaître des programmes originaux de vérification d'équipements pétroliers et de contrôle de qualité.

De plus, le projet de loi prévoit la création d'un comité consultatif dont les membres sont issus de milieux variés, chargé de conseiller le ministre en diverses matières relativement à l'application de la loi et en matière de qualité ou de sécurité des produits et des équipements pétroliers.

En outre, le projet de loi vise à éviter les dédoublements des interventions de l'État, particulièrement en terme de qualifications professionnelles et en terme de réglementation du transport de produits pétroliers.

Enfin, le projet de loi prévoit une augmentation des montants des pénalités qui peuvent être imposées aux contrevenants et il prévoit des mesures pour assurer une transition avec le régime précédent, notamment quant à la délivrance des permis.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article d, M. le Président.


Projet de loi n° 123

Le Président: À l'article d du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique, président du Conseil du trésor, présente le projet de loi n° 123, Loi modifiant diverses dispositions législatives des régimes de retraite des secteurs public et parapublic. M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier les principaux régimes de retraite des secteurs public et parapublic afin d'y apporter certaines précisions découlant notamment des règles fiscales applicables aux régimes de retraite et afin de donner suite à l'entente de principe entre le gouvernement et les principaux syndicats relativement aux mesures temporaires de retraite édictées par la Loi sur la diminution des coûts de la main-d'oeuvre dans le secteur public et donnant suite aux ententes intervenues à cette fin.

Ainsi, le projet de loi modifie la Loi sur le régime de retraite de certains enseignants, la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, la Loi sur le régime de retraite des enseignants et la Loi sur le régime de retraite des fonctionnaires pour prévoir qu'un participant n'est plus visé par son régime de retraite au plus tard le 31 décembre de l'année au cours de laquelle il atteint l'âge de 69 ans. Toutefois, la prestation de la personne qui continue d'occuper une fonction visée par l'un de ces régimes à cette date est payée le jour qui suit celui où elle cesse d'occuper sa fonction.

Le projet de loi modifie également ces lois de même que la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels afin d'y prévoir que l'intérêt de financement du coût de rachat d'une période de congé sans traitement est calculé à compter de la date d'échéance de la proposition de rachat faite par la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances plutôt qu'à compter de la date de réception par la Commission de la demande de rachat.

Le projet de loi modifie aussi la Loi sur le régime de retraite des enseignants et la Loi sur le régime de retraite des fonctionnaires afin de permettre à un participant de l'un de ces régimes de continuer à y participer même s'il occupe, durant une période de congé sans traitement, une fonction visée par le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics.

(14 h 10)

Le projet de loi suspend également jusqu'au 31 décembre 1997 l'application des dispositions relatives au retour au travail d'un pensionné qui avait bénéficié de mesures temporaires de retraite afin d'éviter la perte de certaines bonifications à la pension qui lui avaient été accordées en vertu du régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics ou du régime de retraite des fonctionnaires.

Par ailleurs, le projet de loi apporte certaines précisions aux dispositions des régimes de retraite relatives aux mesures temporaires de retraite qui donnent suite à l'entente de principe entre le gouvernement et les principaux syndicats. À ce sujet, il prévoit d'abord certains assouplissements qui visent à favoriser l'accès à ces mesures aux personnes qui peuvent s'en prévaloir. En outre, il modifie la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics afin d'y prévoir qu'une personne peut obtenir le paiement du crédit de rente auquel elle a droit à une date ultérieure à celle à laquelle elle prend sa retraite, mais sans excéder la date de son soixante-cinquième anniversaire de naissance. Une autre modification consiste à permettre à un employé dont le congé sabbatique à traitement différé est en cours durant la période d'application des mesures temporaires de retraite de prendre sa retraite sans être pénalisé.

Enfin, ce projet de loi comporte d'autres modifications de nature technique ou de concordance afin de faciliter l'administration des principaux régimes de retraite administrés par la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article f, M. le Président.


Projet de loi n° 125

Le Président: Alors, l'article f du feuilleton. M. le ministre de la Sécurité publique présente le projet de loi n° 125, Loi modifiant diverses lois dans le but de prévenir la criminalité et d'assurer la sécurité publique. M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Oui, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la charte de la ville de Montréal et la charte de la ville de Québec afin de permettre au conseil municipal de rendre applicables certaines dispositions de son règlement de construction à des bâtiments déjà existants et d'exiger des correctifs dans un délai imparti dans la mesure où ces bâtiments comportent des éléments de fortification et de protection qui ne sont pas justifiés eu égard aux activités ou usages permis.

Le projet de loi modifie également la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec de manière à permettre au conseil municipal de prendre des mesures à l'égard d'immeubles accessibles au public où des activités ou usages sont exercés de manière à troubler la tranquillité publique ou lorsque l'exercice d'une activité ou d'un usage est susceptible de mettre en danger la vie ou la santé des personnes ou de causer un dommage sérieux ou irréparable aux biens.

Le projet de loi modifie en outre la Loi sur les explosifs et la Loi sur les permis d'alcool de manière à hausser les exigences d'obtention des permis et autorisations accordés en vertu de ces lois. Il modifie également les motifs de suspension ou de révocation de tels permis et autorisations.

Le projet de loi modifie de plus la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques principalement afin de hausser certaines amendes. Ce projet de loi modifie enfin la Loi sur la Régie des alcools, des courses et des jeux pour permettre à la Régie d'intervenir plus rapidement lorsque, à son avis, l'exercice d'activités, dans les matières qui relèvent de sa compétence, est susceptible de mettre en danger la vie ou la santé des personnes ou de causer un dommage sérieux ou irréparable aux biens.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article b, M. le Président.


Projet de loi n° 108

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre délégué au Revenu présente le projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. M. le ministre délégué au Revenu.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, ce projet de loi donne suite principalement aux mesures d'harmonisation prévues dans le Discours sur le budget du ministre des Finances du 9 mai 1995. Il modifie, en premier lieu, la Loi sur la fiscalité municipale afin d'y apporter une modification de concordance découlant des changements apportés dans la Loi sur les impôts à l'égard de la notion d'exercice financier.

Il modifie, en deuxième lieu, la Loi sur les impôts. Ces modifications concernent notamment l'élimination de la possibilité accordée aux particuliers et à certaines entités qui exploitent une entreprise de différer l'imposition du revenu provenant de cette entreprise en choisissant un exercice financier qui ne correspond pas à l'année civile; deuxièmement, l'élimination à compter du 1er janvier 1999 du mécanisme permettant à une fiducie familiale de différer l'application de la règle concernant l'aliénation réputée de ses biens à tous les 21 ans; troisièmement, l'élimination des règles portant sur l'attribution du revenu d'une fiducie à un bénéficiaire privilégié, sauf dans le cas où un tel bénéficiaire est atteint d'une déficience mentale ou physique grave et prolongée.

Il modifie, en troisième lieu, la Loi sur le ministère du Revenu afin notamment d'étendre les règles relatives à la responsabilité solidaire en matière de retenues à la source. Il modifie également d'autres lois afin d'y apporter diverses modifications à caractère technique, de concordance et de terminologie. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article g, M. le Président.


Projet de loi n° 121

Le Président: À l'article g du feuilleton, M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration présente le projet de loi n° 121, Loi modifiant la Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse et d'autres dispositions législatives. M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


M. André Boisclair

M. Boisclair: Oui. M. le Président, vous me permettrez d'abord de saluer, dans les tribunes, la présence du président du Conseil permanent de la jeunesse, M. Michel Philibert.

M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse en ce qui concerne principalement la procédure d'élection des membres du Conseil. Il prévoit à cette fin l'abolition du collège électoral et établit dans la loi un nouveau mode d'élection des membres du Conseil. Ce projet de loi prévoit également l'abolition d'un poste de vice-président au Conseil permanent de la jeunesse.

En outre, ce projet de loi modifie la Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse, la Loi sur le Conseil des aînés et la Loi sur le Conseil des relations interculturelles afin de préciser que ces conseils doivent prendre en compte, dans leur fonction de conseiller auprès du ministre, les questions relatives à la solidarité entre les générations, l'ouverture au pluralisme et le rapprochement interculturel. Il prévoit aussi que l'élection ou la nomination des membres de ces conseils doit refléter la composition de la société québécoise.

Enfin, ce projet de loi comporte une disposition de nature transitoire.

Le Président: L'Assemblée...

M. Boisclair: J'ajouterais, M. le Président, qu'il répond aux revendications de bien des groupes de jeunes et suscite de nombreux appuis.


Mise aux voix

Le Président: À l'ordre, M. le ministre! Ha, ha, ha!

L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Projets de loi d'intérêt privé. Article i, M. le Président.


Projet de loi n° 225

Le Président: Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe présente le projet de loi d'intérêt privé n° 225, Loi concernant la Ville d'Otterburn Park, dans le comté de Borduas.


Mise aux voix

Alors, l'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre. Mais je crois qu'il y a une étape, M. le Président, qui manque au niveau de...

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie...

M. Bélanger: Oui, c'est ça. Ha, ha, ha!

Le Président: Le rapport a été déposé. Alors, l'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? J'ai compris que c'était oui. Merci. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Alors, je relis ma motion, M. le Président.

Le Président: Très bien.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Bélanger: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.


Dépôt de documents

Nous en sommes au dépôt de documents. M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


Correspondance du ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration avec la curatrice publique et le président de la CAI au sujet de la vérification de l'optimisation des ressources du Curateur public

M. Boisclair: Oui, M. le Président. Je dépose aujourd'hui, en premier lieu, l'échange de correspondance intervenue entre la curatrice publique et moi-même au sujet du mandat d'optimisation des ressources réclamé à la curatelle publique par le Vérificateur général et accordé à ce dernier.

J'aimerais également déposer, en second lieu, l'échange de correspondance intervenue entre le président de la Commission d'accès à l'information et moi-même au sujet du mandat d'optimisation des ressources réclamé par le Vérificateur général en regard de la protection des renseignements personnels et accordé à celui-ci.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés.


Lettre de démission du Directeur général des élections

De mon côté, je voudrais déposer une lettre que j'ai reçue aujourd'hui du Directeur général des élections qui m'informe en date d'aujourd'hui qu'il présente sa démission à titre de Directeur général des élections. Cette démission entrera en vigueur le 16 juillet 1997.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et député de Richmond.

Des voix: ...

M. Vallières: Après les bruits, M. le Président.

(14 h 20)

Le Président: M. le député de Richmond.


Consultations particulières sur la proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole

M. Vallières: M. le Président, je désire déposer le rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui a siégé les 8, 9, 10, 15 et 16 avril 1997 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur la proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole dans le cadre de la Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole et d'autres dispositions législatives afin de favoriser la protection des activités agricoles. La commission a également tenu des séances de travail les 1er, 6 et 7 mai 1997. Le rapport a été adopté à l'unanimité.

Le Président: Merci, M. le président de la commission. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Compte tenu de l'importance de ce rapport pour la classe agricole, le milieu environnemental, le milieu municipal, le milieu de la santé et en anticipant sur la réforme parlementaire, M. le Président, est-ce qu'il pourrait y avoir consentement de façon à ce que nous puissions procéder à débattre pendant une heure de ce rapport à l'Assemblée nationale, à la convenance du leader du gouvernement?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Il est vrai que ce rapport contient des recommandations qui sont adressées au gouvernement et non pas à l'Assemblée nationale, donc, en vertu de notre règlement, nous ne sommes pas obligés de faire un débat sur le rapport de la commission. Cependant, je suis prêt à en discuter avec le leader de l'opposition afin de regarder l'éventualité, à ce moment-là, de débattre de ce rapport unanime.

Le Président: Alors, merci, M. le leader du gouvernement.


Questions et réponses orales

Il n'y a pas aujourd'hui de dépôt de pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, ce qui nous amène immédiatement à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Connaissance par le premier ministre des intentions de M. Jacques Parizeau quant à une éventuelle proclamation unilatérale de souveraineté

M. Johnson: Oui, M. le Président. Depuis hier, tout le monde considère avec soi-disant stupéfaction ou surprise, ou sans surprise, comme je l'ai déjà indiqué, pour ceux qui s'étaient donné la peine d'examiner le projet de Jacques Parizeau, de l'annoter, comme nous l'avions fait du côté du camp du Non, et de montrer les trous béants à travers lesquels Jacques Parizeau entendait imposer la façon dont il a toujours envisagé l'accession du Québec à l'indépendance, c'est-à-dire par une déclaration claire, simple, nette, précise, sans histoire de partenariat et de négociation. Mais on sait évidemment que, pour abrier cette approche-là, il avait demandé au député de Jonquière, le premier ministre d'aujourd'hui, chef de l'opposition d'alors, de devenir le nouveau chauffeur d'autobus. On dirait que c'est une habitude de changer de chauffeur d'autobus, du côté des souverainistes et indépendantistes.

L'autobus de la souveraineté, en 1995, était désormais conduit par celui qui est aujourd'hui député de Jonquière, le député de Jonquière dont on connaît les talents pour émouvoir les Québécois comme le font les grands comédiens qui peuvent nous faire rire ou pleurer presque à demande; c'est un des talents reconnus et connus du premier ministre. Le premier ministre a même réussi à feindre, à mon sens, plus que la surprise, la stupéfaction, depuis hier, en voyant comment Jacques Parizeau envisageait l'accession du Québec à son indépendance politique.

Pourtant, M. le Président, en pleine campagne référendaire, à Rivière-du-Loup, le premier ministre d'aujourd'hui avait indiqué que le Québec pourrait devenir souverain avant même d'entreprendre des négociations de partenariat avec le reste du Canada, en cas de victoire du Oui le 30 octobre 1995.

Des voix: Ah! Ah!

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre, maintenant qu'il est sans doute revenu de sa surprise, pourrait nous indiquer ce qui l'avait amené à dire ce que Jacques Parizeau a toujours pensé pendant 25 ans, sinon à confirmer ce que Jacques Parizeau envisageait, sinon qu'aujourd'hui, quoi qu'il dise, en réalité, pendant la campagne référendaire, le jupon dépassait... et maintenant le chat est sorti du sac... et le premier ministre savait pertinemment quelles étaient les stratégies de Jacques Parizeau, et qu'il s'est échappé dans un discours enflammé à Rivière-du-Loup?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense bien que le moteur indignation du chef de l'opposition manque d'essence aujourd'hui, parce qu'il fait référence à un incident qui a duré une heure durant la campagne référendaire. Je me souviens d'avoir fait près d'une centaine de discours durant la campagne référendaire, des dizaines et des dizaines de «scrums», et je me souviens qu'un après-midi, en passant à Rivière-du-Loup, il y avait eu un «scrum» et, en sortant du «scrum», on m'a dit qu'il y avait une phrase qui portait ambiguïté. J'avais dit «mandat de faire la souveraineté et de négocier», et c'était imprécis. Aussitôt après, on a rectifié tout ça, et, le soir même, je me souviens d'avoir fait un discours et j'ai répété tout ce que nous avons toujours dit, ce que j'ai dit durant toute la campagne référendaire.

M. le Président, nous avons d'ailleurs aujourd'hui un élément additionnel de confirmation que M. Parizeau s'apprêtait bel et bien, en démocrate qu'il était et qu'il est, à respecter les engagements qui avaient été contractés par tous, puisque son chef de cabinet de l'époque, M. Royer, a dit en ondes ce matin que, dans les journées qui ont précédé le référendum, il a communiqué à un représentant libéral de haut rang, un proche de M. Bourassa et de M. Johnson, la teneur de la motion qui serait présentée à l'Assemblée nationale. Alors, tous les éléments tombent en place, tout se confirme: M. Parizeau n'avait pas l'intention...

Des voix: ...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Juste une seconde.

Une voix: ...

M. Bouchard: Oui. L'élément de confirmation se précise, M. le Président, puisqu'on me remet à l'instant une déclaration que M. Parizeau vient de mettre sur le fil, où il identifie le représentant libéral qui a été informé de cette motion qui serait présentée. Il s'agit de M. John Parisella, qui était alors un haut dirigeant du comité du Non et l'ancien directeur de M. Bourassa.

M. le Président, je comprends que ces propos qui ont été rapportés dans Le Soleil ont soulevé la controverse et les réactions que nous connaissons, et c'est évident que je suis moi-même consterné à l'idée des interprétations qui sont faites et évidemment qui trouvent un certain fondement dans la rédaction certainement malhabile, à tout le moins, de ce passage du livre de M. Parizeau. Mais il faut se rappeler qui est Jacques Parizeau. C'est quelqu'un qui a été au centre de la vie politique québécoise pendant 30, 35 ans. Il y en a peu d'entre nous ici qui avons eu des états de service aussi longs que les siens, des états de service également qui sont irréprochables au point de vue de l'intégrité personnelle et publique, un homme qui a servi le Québec et l'État.

M. le Président, je sais que la vie politique est dure, je sais que nous sommes tous exigeants par rapport à ce que disent les dirigeants politiques, avec raison, mais peut-être qu'on pourrait donner une petite chance à Jacques Parizeau, qui est maintenant sorti de la vie politique et qui a rendu d'immenses services au Québec.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, après avoir entendu le premier ministre répéter mot à mot ce que Josée Legault a dit à TVA tout à l'heure, on se serait attendu à un petit peu plus d'originalité de la part du premier ministre.

Est-ce que, au-delà de la manoeuvre de diversion que représente cette motion qui aurait été présentée à quelqu'un qui était dans le comité du Non, hein, une autre pièce dans la guerre, la petite guéguerre psychologique du comité du Oui, une autre pièce dans la petite guéguerre de vouloir mêler les gens avec des motions, puis des résolutions, puis des négociations, alors que le fondement même, c'est qu'il y a, dans l'esprit de Jacques Parizeau, chef du Oui à ce moment-là, la volonté arrêtée – il l'avoue maintenant – de considérer une déclaration unilatérale d'indépendance et que le premier ministre s'est échappé, à Rivière-du-Loup, peut-être pendant un «scrum»?

Je comprends qu'au New Hampshire ou à Rivière-du-Loup il est fatigué dans les «scrums», puis il dit n'importe quoi puis il est obligé de se corriger six heures plus tard. Le premier ministre, avec les éditorialistes et chroniqueurs de la presse, le 18 ou le 19 octobre – ça n'a pas duré un petit «scrum» de quelques instants – n'a-t-il pas dit qu'avec un oui majoritaire Jacques Parizeau n'aurait d'ailleurs pas le droit de négocier autre chose que la souveraineté? N'était-ce pas là depuis le début exactement ce que Jacques Parizeau envisageait, que d'aucune façon il n'y avait du partenariat, de la négociation ou de la bonne foi? C'est la dernière des choses qui intéressaient le premier ministre. Voyons donc!

(14 h 30)

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. Parizeau... Je comprends que le chef de l'opposition fait semblant de ne pas comprendre le programme du Parti québécois, le programme du Bloc québécois, le sens de la question qui a été posée, les engagements qui ont été contractés par tous. Le programme et la formule, M. le Président, c'est que le gouvernement, dans un référendum qui aura lieu si nous sommes réélus, va proposer à la population une demande de mandat de faire la souveraineté et de la proclamer après avoir négocié, pendant un maximum d'un an et de très bonne foi, un partenariat avec le reste du Canada.

Donc, il y a des étapes qui sont très claires: d'abord, un vote oui à la question référendaire; deuxièmement, une période de négociation de bonne foi pour arriver à la conclusion d'un partenariat. Et, cependant, et c'est le sens de ce que j'avais déjà dit, qu'il y ait ou non éventuellement partenariat, qu'il y ait conclusion heureuse ou non de partenariat, après qu'on aurait négocié de bonne foi pour arriver à la conclusion, peu importe la conclusion, le Québec serait souverain.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Comment le premier ministre peut-il parler de bonne foi, lorsque le chef du Oui s'est employé pendant des mois et des mois à cacher aux Québécois ce qu'il entendait faire, pendant que le chef du Oui, à Paris, accompagné encore des mêmes membres de la bande des quatre, qu'on connaît, notamment MM. Lisée et Thibault, par-dessus le fait que le député de Jonquière était encore là, il était dans le camp du Oui, le vice-premier ministre était également aux toutes premières loges... Il y en a deux en Chambre puis deux cachés en arrière de votre fauteuil, M. le Président, de la bande des quatre. M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Comment se fait-il qu'un projet qui germe, si on en croit l'ex-premier ministre, Jacques Parizeau, lors d'un voyage à Paris, accompagné de membres de son entourage qui font toujours partie de l'entourage du premier ministre actuel, qui ont contribué à rédiger des discours d'où on s'employait à ne pas exclure la déclaration unilatérale d'indépendance, comme le premier ministre sortant, M. Parizeau, l'a dit.

Comment le premier ministre peut-il prétendre, lorsqu'il est ou bien devant les éditorialistes et les chroniqueurs de la presse ou bien à Rivière-du-Loup ou bien en toutes circonstances... Il vient confirmer l'approche que Jacques Parizeau avait, c'est-à-dire que le partenariat, ce n'est pas important, mais que, de toute façon, après un oui, dans l'euphorie de la victoire, on s'en allait directement vers un trou noir, on s'en allait directement vers une déclaration unilatérale de souveraineté afin d'être reconnu par un pays ami. Un projet qui germait depuis neuf mois et dont le premier ministre Parizeau n'avait jamais parlé, mais à l'évidence dont le premier ministre actuel était fort au courant.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition est un homme politique, un dirigeant de parti politique, un protagoniste dans un combat très important, celui du genre d'avenir politique qu'on veut se donner en termes de structure. Je comprends qu'il tente de faire flèche de tout bois avec l'imprudence de langage de M. Parizeau dans le texte qui a été publié hier, mais je voudrais faire appel à l'homme qui est au coeur et en arrière de tout personnage politique. Il connaît M. Parizeau, il connaît les engagements qui ont été contractés, il connaît l'intégrité de tous les gens qui l'entouraient, y compris de M...

Le Président: Je ne voudrais pas être obligé d'identifier des membres de l'Assemblée qui n'ont pas la parole puis qui, par leurs propos actuellement, nous font encore une fois amener dans une situation délicate et dangereuse. Il y a deux intervenants majeurs qui sont actuellement en débat ici, à l'Assemblée. Ce sont les deux seuls qui actuellement sont reconnus par la présidence, et à ce moment-ci la parole est au premier ministre. M. le premier ministre.

M. Bouchard: Il connaît l'intégrité de Jacques Parizeau, ses états de services, très longs, les services qu'il a rendus auprès de toute une séquelle de premiers ministres du Québec, sans que jamais on ne puisse enlever un cheveu de la tête de Jacques Parizeau, son engagement aux côtés de René Lévesque pendant toutes ces années, son combat remarquable, douloureux et constant pour la souveraineté du Québec. Il sait que les hommes et les femmes qui l'entourent dans ce parti sont des gens d'honneur et des démocrates. Il sait que Jacques Parizeau, par deux fois, s'est levé en cette Chambre pour voter des engagements démocratiques quant à la négociation d'un partenariat avant qu'on proclame la souveraineté. Il sait le combat du Bloc québécois et le mien pour introduire la conclusion d'un partenariat au sein même de la question référendaire. Il connaît le député de Rivière-du-Loup, il sait qu'il n'aurait jamais accepté autre chose non plus, lui qui avait été cosignataire de l'entente.

Je dis, M. le Président, que, dans son for intérieur, le chef de l'opposition sait très bien que les engagements auraient été respectés. Et je lui demande s'il se rappelle que l'un de ses proches a reçu, dans les journées avant le référendum, la communication de la teneur de la motion qui allait confirmer les engagements.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, tout le monde sait que Jacques Parizeau, pendant 25 ou 30 ans, a toujours tenu la même ligne. Tout le monde sait que lui n'a pas été membre de cinq partis politiques différents, tout le monde sait ça, contrairement au premier ministre actuel.

En dépit de la manoeuvre de diversion à propos de la résolution ou de la motion quelconque qui aurait été présentée à un membre du camp du Non, la réalité n'est-elle pas que, du point de vue du camp du Oui, tant et aussi longtemps que Jacques Parizeau était chef du Oui, ce qui était envisagé, et on le sait maintenant depuis hier, c'est que, dès un vote pour le Oui, dans l'euphorie de cette victoire, il n'y aurait rien eu pour empêcher une déclaration unilatérale et que notamment – et c'est ça que je demande au premier ministre – il y avait même des provisions de faites à hauteur de 20 000 000 000 $ de l'épargne des Québécois pour contrer les effets d'une telle action de la part de Jacques Parizeau, qui n'aurait pas respecté le verdict référendaire de cette façon-là?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition connaît l'importance de la motion en question en termes de preuve irréfragable de l'intention de Jacques Parizeau de respecter les engagements qu'il avait contractés. On en a vu une preuve hier, un indice très, très évident. C'est qu'hier le chef de l'opposition a cherché à savoir s'il y avait une date qui était accolée à cette motion. Il cherchait à situer dans le temps la motion, sachant très bien que, si la motion a été faite au moment qu'on disait, ça confirmait les intentions de Jacques Parizeau de se comporter en démocrate. Alors, nous lui disons aujourd'hui que non seulement il a une date, mais qu'il a un témoin tout près de lui qui peut-être même l'en a informé à ce moment-là, un témoin qui formellement...

M. le Président, ce n'est pas rien, ce qui est arrivé. Nous allons représenter la situation telle qu'elle était, d'après ce que nous savons des témoins qui s'en expriment aujourd'hui. On est à quelques jours du référendum, peut-être même la journée du référendum. Le référendum, beaucoup de gens croyaient qu'il allait passer. Certainement du côté du Non, ils pensaient aussi qu'il allait passer. Et, dans ces heures critiques pour l'avenir du Québec, dans des heures névralgiques de la mise en exercice de la démocratie du Québec, un représentant du premier ministre, sur instruction du premier ministre, communique avec un représentant du camp du Non et formellement l'informe que le gouvernement, dans les journées qui suivront la victoire du Oui, si les choses se présentent comme cela, déposera à l'Assemblée nationale une motion qui sera votée pour prendre acte du Oui et enclencher le processus de négociation qui doit précéder la proclamation. Communication extrêmement importante, solennelle, qui est en preuve maintenant, qui est confirmée par les représentants du camp du Non. Qu'ils ne viennent pas nier l'importance de ce document, M. le Président!

(14 h 40)

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Une petite guéguerre tactique, manoeuvre de diversion...

Des voix: Ah!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, manoeuvre de diversion, guéguerre et tactique de fin de campagne à laquelle j'ai répondue à la même émission que M. Royer tout à l'heure. Diversion, manoeuvre de diversion pour noyer le poisson. Le poisson, on le connaît, il est sorti du sac hier en même temps que le chat. C'est...

Des voix: ...

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, manoeuvre de diversion grossière encore une fois, alors que – et je pose la question au premier ministre – l'ensemble de la machine au ministère des Finances était au courant qu'il fallait mettre 20 000 000 000 $ de côté sur ordre direct de Jacques Parizeau. L'ensemble ou à peu près des hauts fonctionnaires de la machine diplomatique connaissaient tout ce qui se passait, les tractations avec l'entourage du premier ministre et les milieux politiques français et/ou américains, on n'en sait trop rien.

Est-ce que le premier ministre n'est pas plutôt en train de nous dire, en taxant la crédulité de tout le monde, en étirant l'élastique au maximum de la crédulité d'à peu près tout le monde, qu'il était le seul à ne pas savoir ce qui se passait, que, lui, le nouveau chauffeur d'autobus et le soliste en chef n'avait aucune idée que ça coûterait 20 000 000 000 $, le «scheme» à Parizeau pour déclarer l'indépendance après un Oui, que l'ensemble de la diplomatie québécoise était employée à assurer le soutien d'un gouvernement étranger, le gouvernement français, et que lui n'était au courant de rien, tout ce qu'il faisait, c'était des discours?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, évidemment, ce qui se passe pour le mouvement souverainiste, c'est une épreuve, c'est un moment difficile avec lequel nous devons traiter. Mais il y a quand même un certain beau côté là-dedans, c'est qu'à travers tout ça on n'a jamais entendu chanter les louanges du partenariat autant qu'on l'a entendu par M. Chrétien, par le chef de l'opposition, par tous les fédéralistes. Ils l'auront, leur partenariat, M. le Président, je le leur promets!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Même stratégie avec un nouveau chef du Oui, même stratégie que Jacques Parizeau. Les Québécois n'ont pas l'intention d'attendre le livre que le premier ministre va écrire pour découvrir qu'encore aujourd'hui il est dans la même lignée que Jacques Parizeau.

Est-ce qu'il est capable de nous dire, malgré tous les engagements qu'on avait entendus et dont aujourd'hui on sait, par le chef du Oui, qu'il n'avait aucune intention de les respecter, aucune intention de les respecter, d'où l'effroi et la désolation dans les rangs péquistes hier, est-ce que le premier ministre...

Des voix: ...

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Le premier ministre, qui se disait stupéfait et consterné, hein, doit bien comprendre qu'il y avait matière à sa stupéfaction soi-disant et à sa consternation feinte ou réelle. La réalité, c'est que Jacques Parizeau n'avait aucunement l'intention de respecter la parole qu'il avait donnée aux Québécois par le député de Jonquière interposé.

Est-ce que le premier ministre, à qui j'ai demandé pas sept fois, hier, 12 fois: S'il avait su que l'intention du chef du Oui était de ne pas respecter le verdict populaire dans ce sens-là, est-ce que le chef d'orchestre à ce moment-là, le député de Jonquière, aurait voté oui ou aurait voté non, sachant que Jacques Parizeau n'avait aucune intention de respecter le mandat que prétendument il lui avait donné?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition a évoqué la possibilité d'un livre que j'écrirais. Je veux lui dire que je n'ai pas l'intention d'écrire de livre sur ma carrière politique avant de très nombreuses années.

Le Président: J'invite les députés qui n'ont pas la parole à faire attention au vocabulaire qu'ils utilisent et qui est entendu à l'Assemblée, actuellement. M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition revient encore avec la mise en doute de l'intention du démocrate Jacques Parizeau de respecter ses engagements. Nous avons de multiples preuves maintenant qui établissent de façon formelle, devant qui que ce soit qui veut porter un jugement objectif, que M. Parizeau, premièrement, s'apprêtait à remplir ses obligations, deuxièmement, était entouré de gens qui voulaient faire la même chose et, troisièmement, a posé des gestes qui ont été portés à la connaissance du Parti libéral et qui confirmaient cette intention et même l'annonce d'un déroulement qui prendrait effet dans les journées qui suivraient à l'Assemblée nationale.

Mais je voudrais bien savoir du chef de l'opposition s'il a été informé à l'époque de cette communication extrêmement importante qui a été faite par le premier ministre à son proche, M. Parisella.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Toujours la même manoeuvre de diversion. Toujours des manoeuvres de diversion. Est-ce que le premier...

Des voix: ...

M. Johnson: Ah oui! absolument. Pour la quatorzième fois, hein, pour la quatorzième fois, deux fois plus souvent que le nombre de fois qu'il faut demander une question au premier ministre lorsqu'on se promène en Nouvelle-Angleterre pour enfin avoir la vérité, 14 fois que je demande au premier ministre: S'il avait su l'intention de Jacques Parizeau dénoncée universellement hier dans les rangs mêmes du gouvernement actuel, le premier ministre, devant cet état de fait, cette décision, cette intention de Jacques Parizeau, le sachant avant le 30 octobre, aurait voté oui ou voté non? Seriez-vous embarqué dans ce qui éventuellement va s'appeler probablement «le roman de – si on sait qui l'écrit – l'arnaqueur» avant qu'on n'écrive celui du charmeur? Est-ce que le premier ministre aurait voté oui ou non le 30 octobre?

Le Président: M. le premier ministre.

(14 h 50)

M. Bouchard: M. le Président, combien de fois devrais-je poser ma question moi-même pour savoir si le chef de l'opposition savait ou ne savait pas qu'il a entre les mains la preuve que Jacques Parizeau dit vrai?

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, le premier ministre est trois heures en retard; j'ai répondu à cette question-là à 11 h 55. Est-ce que le premier ministre, lui, pourrait répondre à la question que je lui pose? Est-ce que le premier ministre pourrait, lui, répondre à la question que je lui pose pour la quinzième fois: Sachant les intentions avouées – et on comprend pourquoi aujourd'hui, c'était inavouable à l'époque de tromper les Québécois comme vous vouliez le faire – est-ce que le premier ministre aujourd'hui pourrait nous dire s'il aurait voté oui ou non à la question de Jacques Parizeau le 30 octobre dernier?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je pense que le chef de l'opposition vient de dire «de tromper les Québécois comme vous vouliez le faire». Donc, à ce moment-là, il prête des intentions malhonnêtes, complètement contraires à notre règlement. M. le Président, on accuse le premier ministre d'avoir trompé la population. C'est complètement contraire à notre règlement.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, on aura compris, après vos prescriptions... Non, non, une seconde!

Le Président: À ce moment-ci, je voudrais... Parce que ce que j'avais compris clairement, c'est que la question du chef de l'opposition s'en prenait à l'ancien premier ministre, et je vais laisser au chef de l'opposition officielle préciser le sens de ce qui vient d'être dit avant de faire une intervention. M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, je n'ai pas changé d'avis depuis hier, je respecte votre décision. Je n'ai pas l'intention de me mettre dans une situation où il faut que je retire des paroles d'aucune façon. Ce n'était par un «vous» de majesté, c'était un «vous» collectif.

Le Président: Est-ce qu'il serait possible à ce moment-ci, après le genre de période de questions que nous venons de connaître et le genre d'atmosphère, de laisser le président faire son travail?

Une voix: Il faudrait appliquer le règlement, M. le Président.

Le Président: Puis je ne veux pas de menace de personne. Je n'ai pas besoin de me faire dire par qui que ce soit que j'ai à appliquer le règlement. La responsabilité intrinsèque du président de l'Assemblée nationale, c'est ça, et il n'a pas besoin d'avoir de leçon de qui que ce soit. Ceci étant dit, je demanderais au chef de l'opposition, compte tenu encore une fois de la nature de nos débats, à partir du moment où il vient de préciser que son «vous» collectif était un «vous» qui pouvait et nécessairement s'adressait à l'ensemble des députés de l'autre côté de l'Assemblée, de faire en sorte que ses propos soient retirés pour que...

M. Johnson: On voit l'importance de ne pas utiliser la deuxième personne du singulier ou pluriel dans nos débats, M. le Président. Il est évident que, d'aucune façon – et je le dis carrément – je n'ai l'intention d'imputer des motifs indignes ou quoi que ce soit au premier ministre, et, s'il faut retirer cet élément-là, c'est fait; considérez-le comme étant fait.

Ceci étant dit, M. le Président, pour la quinzième fois, je dois constater que le premier ministre refuse de répondre à la question qui habite les Québécois qui, depuis hier, ont pris conscience, eux aussi, de l'aveu du camp du Oui, du chef du camp du Oui au référendum de 1995, que d'aucune façon Jacques Parizeau n'avait l'intention, et ce, depuis des mois, de reconnaître, dans un oui à une question emberlificotée, assaisonnée de toutes sortes de guéguerres tactiques, de résolutions qu'on a montrées ou pas montrées à l'opposition ou pas à l'opposition, à ses alliés, à pas ses alliés, comme le député de Rivière-du-Loup l'a dit...

Est-ce que, oui ou non, le premier ministre, sachant que Jacques Parizeau est dans l'état d'esprit qu'on voit, qu'il n'avait aucunement l'intention de se lancer dans des négociations de partenariat ou quoi que ce soit, contrairement à ce que le premier ministre disait – sauf qu'il s'est échappé, à Rivière-du-Loup – pourrait nous dire s'il aurait voté oui ou non, sachant ce que Jacques Parizeau aurait fait avec ça, sachant que Jacques Parizeau avait mis 20 000 000 000 $ des épargnes des Québécois de côté pour affronter cette éventualité-là? Est-ce que lui, maintenant premier ministre du Québec, est du même avis que son prédécesseur ou est-ce qu'il aurait par ailleurs voté non à la question de Jacques Parizeau, parce que c'était une tromperie pour les Québécois et qu'un premier ministre n'a pas le droit de tromper les Québécois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, on m'informe que, ce midi, participant à une émission radiophonique, le chef de l'opposition s'est fait demander s'il reconnaissait que M. Parisella avait été informé de l'intention formelle de M. Parizeau de procéder selon les engagements qui avaient été contractés dans les journées qui suivraient le Oui référendaire. Et on m'informe – et on me corrigera si je me trompe, bien sûr – que le chef de l'opposition a répondu: Je ne m'en souviens pas.

Des voix: Ah! Ah!

M. Bouchard: Alors, c'est la raison pour laquelle je pose la question...

Le Président: M. le premier ministre. Vous avez terminé? M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Encore trompé par l'entourage de Jacques Parizeau, par des citations tronquées, toutes croches, toutes croches. Allez donc l'écouter vous-même, vous allez le savoir.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Je suggère au premier ministre... C'est un conseil que je lui donne à chaque fois lorsqu'il reçoit des petits papiers de derrière le trône: Lisez, lisez, lisez attentivement, c'est toujours préférable.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: Pour la seizième fois, est-ce que le premier ministre va enfin... C'est lui, le premier ministre du Québec, c'était lui, le ténor du Oui, pendant le référendum. Est-ce que le premier ministre va, oui ou non, nous dire comment il aurait voté s'il avait su ce que Jacques Parizeau aurait fait avec son vote à lui, le vote du premier ministre du Québec, premier ministre actuel, qui aurait voté oui à la question de Jacques Parizeau? Est-ce que le premier ministre peut nous dire comment il se serait senti, sachant, après le référendum, ce que Jacques Parizeau aurait fait avec son vote? Est-ce qu'il l'aurait regretté ou est-ce qu'il aurait été content de donner un vote comme ça à Jacques Parizeau?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je sais qu'il n'est pas dans mon rôle de poser des questions au chef de l'opposition, aussi me contenterai-je de m'en poser une à moi-même. Je me demande, M. le Président, comment il se fait que le chef de l'opposition a peur de répéter ici, en cette Chambre, sous l'autorité des règles qui gouvernent cette Chambre, ce qu'il a dit ce midi à la radio.

Le Président: En principale, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Merci, M. le Président.

Des voix: ...

(15 heures)

Le Président: Alors, je voudrais simplement rappeler à tous les membres de l'Assemblée – puis ça va peut-être nous donner le temps de nous calmer un peu – les dispositions de l'article 78: il appartient au président de déterminer le nombre de questions complémentaires. Et il y a aussi une responsabilité de la présidence: c'est de faire en sorte que les droits des députés indépendants soient respectés.

À ce moment-ci, on pourrait très bien – et ce n'est pas du tout mon intention – comme ça s'est passé hier, faire en sorte qu'il n'y ait qu'une seule question, et c'est le choix du groupe parlementaire formant l'opposition officielle, qui accapare l'essentiel de la période de questions et, à la limite, toute la période de questions, puisque hier il n'y avait aucun député indépendant qui, selon les règles dont nous avons convenu, avait le droit de poser une question et d'être reconnu par la présidence. Aujourd'hui, la présidence est en droit de reconnaître un député indépendant.

Nos conventions, la règle, c'est que c'est normalement la quatrième question qui est attribuée à un député indépendant, sauf qu'encore une fois, si on se retrouvait comme dans la situation d'hier ou même celle qu'on est en train de vivre, on pourrait se retrouver avec une seule question et indiquer que finalement, parce qu'on n'est pas arrivé à la quatrième, le député indépendant n'aurait pas de droit de parole. Alors, à ce moment-ci, on a fait 40 minutes, à peu près, de la période de questions de 45 minutes, je vais reconnaître le député de Rivière-du-Loup et je pourrai reconnaître à nouveau le chef de l'opposition officielle, s'il le souhaite.

M. Paradis: M. le Président.

Le Président: M. le leader...

M. Paradis: Strictement, là, en notant qu'il vous appartient de déterminer le temps, et ça fait partie de votre responsabilité, mais est-ce que vous pouvez noter également que votre intervention survient au moment où le premier ministre a encore refusé aujourd'hui de...

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, en parlementaire d'expérience, vous savez également que ce n'était pas une question de règlement. M. le député de Rivière-du-Loup.


Rôle des garderies à but lucratif dans la nouvelle politique familiale

M. Dumont: Merci, M. le Président. Lors de l'étude des crédits, la semaine passée, le premier ministre, parlant de la question des garderies privées, nous disait la chose suivante: On va contracter des places en garderie dans les garderies privées qui vont leur permettre de faire des profits et de conserver leurs équipements actuels, leur achalandage et de garder leur place dans le secteur. On travaille sur une formule comme celle-là présentement. Pourtant, quand on regarde la correspondance de la ministre qui est envoyée aux propriétaires de garderies à but lucratif, on voit une intention nettement contraire. On dit: «...seront liées à un engagement de s'inscrire dans un processus de conversion en organismes sans but lucratif ou en centres à la petite enfance.»

Ma question à la ministre est fort simple: Est-ce que le gouvernement a changé d'idée entre le 2 avril, date de la lettre, et le 30 avril, date à laquelle le premier ministre répondait à mes questions? Si oui, si le gouvernement a modifié sa politique pour laisser une place aux garderies à but lucratif dans le secteur de la garderie au Québec, comment se fait-il que les représentants à la table de travail n'en soient pas informés?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, non, M. le Président, nous n'avons pas changé d'avis; au contraire, nous précisons de façon de plus en plus, je dirais, serrée les règles qui vont concerner l'ensemble du réseau des garderies au Québec. D'ailleurs, il y avait encore une rencontre ce matin entre l'Office et les représentants et représentantes des garderies à but lucratif de telle sorte qu'on puisse étudier une proposition quant à la façon dont nous allons utiliser les places en garderie à but lucratif et quelles seront les règles si les garderies à but lucratif veulent se transformer.

Alors, M. le Président, dans l'ensemble des mesures qui concernent les garderies au Québec, de par le fait que nous conservons le crédit d'impôt remboursable pour frais de garde, cela permet aux garderies à but lucratif de continuer à exercer comme garderies à but lucratif. Cependant, nous leur offrons la possibilité, si elles le désirent, selon des règles que nous tentons d'établir avec elles, de se transformer en garderies sans but lucratif et éventuellement en centres à la petite enfance; et, à cette occasion-là, bien sûr, nous procéderons à de la location de places dans ces garderies pendant la période transitoire.

Alors, ce que nous faisons, M. le Président, c'est que nous sommes actuellement à discuter d'une proposition formelle. On me dit que, ce matin, il y avait une rencontre sur cette question et que normalement, d'ici quelques semaines, j'espère le plus tôt possible, tout ça pourra se finaliser.

Le Président: M. le député.

M. Dumont: Est-ce que la ministre est consciente que la politique qu'elle nous annonce va complètement à l'encontre des engagements du premier ministre, la semaine passée, qui disait des garderies sans but lucratif qu'elles ne seraient obligées de charger que 5 $ elles aussi, qu'elles pourront se permettre de continuer à faire des profits et de conserver leurs équipements actuels, et que sa politique, au fond, c'est le maintien de la même politique qu'avant que le premier ministre se prononce, c'est-à-dire la disparition des garderies privées, à terme?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Je vais répéter, M. le Président. Ce n'est pas la disparition des garderies à but lucratif. Au contraire, je le redis, les garderies à but lucratif pourront continuer d'opérer et pourront conserver leur permis, parce que les règles fiscales qui font en sorte que les parents puissent déduire les sommes que cela leur coûte pour envoyer les enfants en garderie... non seulement les déduire, mais puissent avoir un crédit d'impôt remboursable, permettront aux garderies à but lucratif de continuer à offrir ces places-là, de charger la somme qu'elles croient nécessaire de charger pour rencontrer leurs coûts, bien sûr, et leurs frais. Par ailleurs, si celles-ci désirent s'inscrire dans le réseau des garderies sans but lucratif ou des centres à la petite enfance, nous leur offrirons la possibilité de le faire, M. le Président, selon un certain nombre de conditions. Je pense que ça va de soi.

Le Président: M. le député.

M. Dumont: Est-ce que la ministre peut nous dire, dans le cas des crédits d'impôt, s'il s'agit d'une mesure permanente pour permettre de façon permanente le maintien de garderies privées ou s'il s'agit d'une mesure transitoire parce que, cette année, elle n'est pas capable d'exproprier assez vite ces garderies-là?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, j'ai eu l'occasion aussi déjà de répondre à cette question, mais je crois que c'était en commission parlementaire. Ce qui est prévu, c'est que les parents qui utiliseront des places à 5 $ ne pourront évidemment aller chercher le crédit d'impôt remboursable, puisqu'elles ont accès à un service qui est beaucoup plus coûteux que le 5 $, évidemment, qu'elles doivent payer. Donc, dans ce sens-là, effectivement, ces parents qui utiliseront les places à 5 $ ne pourront recourir au remboursement du crédit d'impôt pour frais de garde.

Cependant, lorsque ces parents utiliseront des places à plein tarif dans des garderies à but lucratif, les parents pourront continuer d'utiliser le crédit d'impôt remboursable. Et, à ce moment-ci, selon les règles fiscales et selon le discours du budget, il n'est pas prévu que nous enlevions ce crédit d'impôt remboursable. Cependant, M. le Président, il faut quand même se dire: Dans cinq ans, dans 10 ans, est-ce que les règles pourront être revues? Ça, c'est une autre question. Mais il n'est pas de l'intention du gouvernement de les changer. Donc, oui, nous le maintenons et nous le maintiendrons dans le temps.

Le Président: Alors, cette réponse met fin pour aujourd'hui à la période de questions et de réponses orales.

Il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés.


Motions sans préavis

Nous en arrivons à l'étape des motions sans préavis. M. le député de Saint-Hyacinthe


Souligner le 145e anniversaire du journal Le Courrier de Saint-Hyacinthe

M. Dion: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le 145e anniversaire du Courrier de Saint-Hyacinthe , à titre de doyen des journaux d'expression française en Amérique, et félicite les valeureux artisans qui continuent, encore aujourd'hui, d'assurer à la communauté un service d'information de première qualité, en même temps que le rayonnement de notre culture.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Il y a aurait consentement pour deux intervenants de part et d'autre.

Le Président: Alors, il y a consentement pour deux interventions de chaque côté, M. le député de Saint-Hyacinthe. Auparavant, je demanderais aux collègues qui doivent aller travailler à l'extérieur de l'enceinte du salon bleu de le faire rapidement pour permettre au député de Saint-Hyacinthe de... M. le député de Saint-Hyacinthe.


M. Léandre Dion

M. Dion: M. le Président, j'ai l'honneur de rendre hommage dans cette Assemblée à un instrument exceptionnel d'expression de la culture québécoise. C'est le 24 février 1853 que fut publiée la première édition du Courrier de Saint-Hyacinthe et, depuis ce jour, il y a 145 ans, il poursuit sa mission d'information auprès de la population de la grande région de Saint-Hyacinthe.

(15 h 10)

Cette longue épopée sans interruption fait du Courrier de Saint-Hyacinthe le doyen de la presse hebdomadaire d'expression française en Amérique. La liste des rédacteurs en chef et des journalistes qui, au fil des ans, dirigèrent les destinées du journal inclut plusieurs personnalités liées à l'histoire même du Québec. Pour n'en nommer que quelques-uns, citons les noms de Honoré Mercier, à qui j'ai l'honneur de succéder comme député de Saint-Hyacinthe et qui fut premier ministre du Québec, le célèbre Henri Bourassa et plusieurs autres noms illustres.

Après avoir connu divers propriétaires, dont les autorités religieuses, Le Courrier est, depuis le milieu des années mil neuf cent trente, la propriété de la famille Chartier. M. Chartier, qui fut député à l'Assemblée nationale de 1944 à 1955, occupa d'abord les fonctions d'administrateur avant de se porter acquéreur du journal. Depuis, la succession a été assurée, alors que l'actuel propriétaire, Benoît Chartier, représente la troisième génération de la lignée. Depuis quelques années, il est secondé dans son travail par le directeur, M. Denis Lacasse, gestionnaire d'expérience. D'ailleurs, M. Benoît Chartier et M. Lacasse sont actuellement parmi nous dans les tribunes, et ça me fait plaisir de les saluer.

La longue histoire du Courrier de Saint-Hyacinthe est émaillée d'honneurs de toute sorte. À titre d'exemple, depuis 1970, le journal a été choisi à plus de 10 reprises pour recevoir le titre prestigieux d'Hebdo de l'année, ce qui constitue un record absolu dans sa catégorie. Mais son plus grand titre de gloire est, depuis 1853, de raconter au fil des jours l'histoire des gens de son terroir. Sous la conduite de son rédacteur en chef, M. Jean Vigneault, ses journalistes rapportent les événements, heureux ou malheureux, qui expriment la vitalité de toute la communauté. Le Courrier , ayant contribué depuis 145 ans à faire de Saint-Hyacinthe un des foyers de la culture québécoise, continue maintenant de l'exprimer au jour le jour et d'affirmer avec brio l'identité collective du peuple québécois. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Daniel Johnson

M. Johnson: Je vous remercie, M. le Président. Je serai très bref. Le député de Saint-Hyacinthe a eu l'amabilité, la semaine dernière, de me souligner qu'il y aurait cette motion sans préavis et m'a souligné par le fait même que les gens de la région de Saint-Hyacinthe, les Maskoutains, avec lesquels j'ai frayé fort longtemps... Si on se souvient que mon père, député de Bagot pendant 22 ans, avait étudié à Saint-Hyacinthe, au séminaire, que, tout jeune avocat, il cultivait déjà le sol éventuellement fertile de cette région-là afin de représenter le comté de Bagot à l'Assemblée nationale, l'Assemblée législative, comme on le disait à l'époque, avait tissé, donc, des liens extrêmement étroits avec les gens de la région.

J'ai moi-même eu le bonheur de connaître pratiquement trois générations de Chartier, dont le député de Saint-Hyacinthe évoque aujourd'hui et le souvenir, d'une part, et la participation, évidemment, ces jours-ci, et ce, depuis de nombreuses années. Le Courrier de Saint-Hyacinthe , pour moi – je m'en souviens, dans les années cinquante, j'étais très jeune, quand même! – c'était Harry Bernard. C'était ce directeur-journaliste-chroniqueur intarissable des faits et gestes de sa région. C'était d'autant plus remarquable pour moi – on peut le dire, 40 ans plus tard – que c'était le journal bleu de la place, que son concurrent, Le Clairon , était le journal rouge de la place, auquel était associé un certain Yves Michaud, dont on a quelquefois l'occasion de parler ici, en Chambre, et qui évidemment à l'époque combattait durement le député de Bagot dans les pages du Clairon maskoutain.

Donc, mon meilleur souvenir à moi des journaux de la région, c'est Le Courrier , on comprendra tous ça. Je m'en serais voulu de ne pas souligner, avec le député de Saint-Hyacinthe et deux autres intervenants, le grand mérite que peuvent avoir les propriétaires et artisans, les employés, journalistes, ceux qui ont connu les changements technologiques extraordinaires qu'ont connus nos médias écrits depuis de nombreuses années, le mérite donc qu'ils ont et qui doit être souligné d'avoir ainsi consigné de façon professionnelle, en tout temps, les faits et gestes de la région, d'avoir apporté leur éclairage pour bien informer tous ceux et celles qui les consultent, de faire partie de la vie maskoutaine depuis maintenant près de 145 ans.

Je me suis donc rendu avec plaisir à cette invitation du député de Saint-Hyacinthe qui me transmettait les voeux de certains de ses concitoyens de voir un Johnson, à l'Assemblée nationale, s'exprimer à l'occasion de cet anniversaire. Je le fais avec d'autant plus de plaisir que c'est en présence, évidemment, de la génération actuelle des Chartier propriétaires, accompagnés, comme le député l'a souligné, de M. Denis Lacasse, que j'ai eu le plaisir de fréquenter professionnellement dans une existence antérieure, avant avril 1981, et dont je vois qu'il est toujours intéressé au monde des communications du Québec.

Je m'associe donc à cette motion sans aucune nuance, bien évidemment, M. le Président, et je souhaite encore une fois que nous soulignions les mérites de ces artisans du Courrier de Saint-Hyacinthe , auxquels nous souhaitons une longue vie professionnelle, beaucoup de plaisir continu à traiter de la vie quotidienne à Saint-Hyacinthe et dans les environs et à qui nous souhaitons évidemment une longue vie personnelle et professionnelle.

Le Président: Merci, M. le chef de l'opposition officielle. M. le député d'Orford.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, M. le Président. Permettez-moi de joindre ma voix, comme ex-Maskoutain, à celle de notre chef et à celle du député de Saint-Hyacinthe pour rendre un hommage, moi aussi, à 145 ans de vie dans le milieu journalistique, dans la communauté maskoutaine. Le Courrier de Saint-Hyacinthe , ça a été un témoin et ça a été un acteur dans la vie des Maskoutains, et je tiens à souligner, moi aussi, des noms célèbres qui ont travaillé au journal Le Courrier de Saint-Hyacinthe , et un en particulier qui a été le chef intérimaire de notre formation politique, M. T.-D. Bouchard, qui, au moment du vote des femmes, a été député à cette époque-là mais a été aussi rédacteur en chef du journal Le Courrier de Saint-Hyacinthe et a laissé sa marque non seulement dans l'histoire du Courrier de Saint-Hyacinthe , mais dans l'histoire de la politique, ayant été chef de l'opposition comme notre chef en ce moment.

M. le Président, Le Courrier de Saint-Hyacinthe a marqué, a été témoin de l'histoire des Maskoutains, des Québécois et des Canadiens. Nos pères nous racontent que Saint-Hyacinthe était le pivot. Les gens de Saint-Hyacinthe sont des gens fiers, et nos pères nous racontent que Saint-Hyacinthe était le pivot des débats contradictoires, à cette époque-là, au Québec. Pourquoi Saint-Hyacinthe? Parce que les grands chemins de fer se rencontraient à Saint-Hyacinthe: le CP, le CN et le Grand Tronc. Nos pères nous disent que les gens venaient de partout écouter ces grands politiciens qui débattaient haut en couleur soit au marché au foin ou au parc Dessaulles, et ces incidents ou cette partie de l'histoire ont été très bien rapportés par Le Courrier de Saint-Hyacinthe pendant plus de 145 ans.

Mais Le Courrier de Saint-Hyacinthe , M. le Président, c'est plus que juste un témoin et un rapporteur, c'est aussi des acteurs, et je tiens à saluer la présence parmi nous ici aujourd'hui de ce jeune et dynamique propriétaire du Courrier de Saint-Hyacinthe , Benoit Chartier, jeune homme qui a dû prendre la relève de l'entreprise familiale alors qu'il était très jeune, au moment où son père est décédé, où il commençait tout juste l'université, qui a fait la relève de l'entreprise et qui continue en excellence une tradition tout à fait extraordinaire.

Le Courrier de Saint-Hyacinthe , ça a été un acteur à plusieurs égards: levées de fonds dans le milieu pour des grandes causes humanitaires. Et je me rappelle, tout jeune, les grandes inondations, les grands incendies de Saint-Hyacinthe. Non seulement Le Courrier a été un témoin, mais il a été aussi un acteur important pour aider les gens de cette communauté. Je veux saluer, comme l'a fait mon chef et comme l'a fait le député de Saint-Hyacinthe, tous les cadres, tout le personnel, d'une façon particulière Jean Vigneault, un ancien Sherbrookois, journaliste de carrière, et, bien sûr, je finirai en disant: Continuez, gens du Courrier de Saint-Hyacinthe , avec cette même qualité, cette même objectivité, de rapporter la vie des Maskoutains, peuple qui prend racine dans la terre maskoutaine, qui prend son énergie dans la rivière Yamaska et dont les racines sont profondément ancrées dans la terre montérégienne. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

(15 h 20)

Des voix: Adopté.


Le Président

Le Président: Alors, puisqu'elle est adoptée, vous permettrez au président de l'Assemblée nationale, puisque, comme journaliste et, dans ma première vie de député aussi, député de Verchères qui avait la responsabilité de représenter une partie de population du Québec qui était desservie par Le Courrier de Saint-Hyacinthe , et dont la directrice actuelle de cabinet, Me Louise Cordeau, est la fille du député de Saint-Hyacinthe de 1976 à 1981, qui a donc représenté cette partie du Québec, alors de m'associer, moi aussi, à cette motion de félicitations pour souligner le 150e anniversaire du Courrier de Saint-Hyacinthe .

Effectivement, le Courrier , au fil des années et pendant toutes ces décennies, s'est acquis non seulement ses lettres de noblesse, mais également une réputation d'un journal de qualité qui est devenu un instrument essentiel dans la vie sociale, économique et démocratique de notre région.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, ceci étant fait, on arrive maintenant aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 40, Loi modifiant la Charte de la langue française, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 16 h 30, ainsi que le mardi 13 mai 1997, de 9 heures à midi, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que le mardi 13 mai 1997, de 9 heures à midi, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 79, Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que le mardi 13 mai 1997, de 9 heures à midi, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 86, Loi sur le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May.

Maintenant, M. le Président, je vous avise que je vais faire motion pour ajourner les travaux de la Chambre à mardi prochain, puisqu'il y a quatre commissions qui vont siéger.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Président: Mais, avant que vous ne présentiez cet avis, M. le leader du gouvernement, je vais, aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, faire certains avis.

Alors, je vais vous rappeler que l'interpellation de demain, le vendredi 9 mai, portera sur le sujet suivant: Le réaménagement des centres jeunesse. Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne s'adressera alors à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Je vous avise également que l'interpellation prévue pour le vendredi 16 mai 1997 portera sur le sujet suivant: Les services de santé au Québec. À ce moment-là, M. le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition officielle s'adressera à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Alors, nous en arrivons au...

Une voix: M. le Président...

Le Président: Oui, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, vous avez donné avis de l'interpellation du vendredi 9 mai. Est-ce que Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne peut être assurée que le ministre de la Santé et des Services sociaux sera lui-même présent pour l'interpellation en question?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Bien, M. le Président, le député de Frontenac connaît les règles de l'interprétation. Alors, c'est clair que la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne nous a demandé que le ministre de la Santé soit là. Maintenant, M. le Président, c'est tout simplement ce qui est annoncé. Alors, moi, je n'ai pas d'indication à l'effet que le ministre de la Santé ne serait pas là. Alors, c'est tout simplement ça.

Le Président: Ça va? Alors, aux affaires du jour, maintenant, M. le leader du gouvernement, je pense que le moment est venu de faire la motion.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au mardi 13 mai 1997, à 10 heures.

Le Président: Alors, cette motion est adoptée? Alors, nous ajournons nos travaux à mardi prochain.

(Fin de la séance à 15 h 24)


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