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Version finale

34th Legislature, 1st Session
(November 28, 1989 au March 18, 1992)

Wednesday, March 11, 1992 - Vol. 31 N° 182

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures trois minutes)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonjour. Si vous voulez prendre place. Merci.

Affaires inscrites par les députés de l'Opposition

Motion proposant que l'Assemblée nationale rejette le rapport du comité Beaudoin-Dobbie

Alors, nous sommes aux affaires du jour, aux affaires inscrites par les députés de l'Opposition. À l'article 36, M. le whip de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean présente la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale rejette le rapport du comité Beaudoin-Dobbie déposé à la Chambre des communes le 28 février 1992.»

Avant que le débat sur cette motion ne s'engage, je vous informe, suite à une rencontre avec les leaders, de la répartition du temps de parole établie pour la discussion de cette motion. Mise à part une réplique de 10 minutes accordée à l'auteur de la motion et les 10 minutes allouées à l'ensemble des députés indépendants, les deux groupes parlementaires se partageront également la période consacrée à ce débat. Dans ce cadre, les interventions sont limitées à une durée de 30 minutes chacune et ce débat aura lieu seulement le mercredi. Est-ce qu'on peut en avoir un ordre de la Chambre? Consentement?

M. Pagé: Consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement à ce qu'il y ait un ordre de la Chambre. Je suis prêt maintenant à entendre le premier intervenant, M. le whip de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean. M. le député.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, M. le Président. M. le Président, au Québec, les fédéralistes ont cru pendant longtemps, et ça les réconfortait d'y croire, d'ailleurs, que l'alternative traditionnelle qui s'offrait aux Québécois était la suivante: ou le Québec s'engageait sur la voie de la souveraineté, ce qui est, vous le savez, notre option, ou alors le Québec procédait, avec le Canada et le gouvernement fédéral, à une révision en profondeur du régime fédéral. C'est une expression qui revenait souvent, d'ailleurs, dans la bouche du ministre des Affaires canadiennes, «révision en profondeur du régime fédéral».

Depuis l'échec de l'accord du lac Meech, on doit dire et il faut reconnaître que cette alternative a volé en éclats. Elle a été complètement réduite en miettes. C'est évidemment la réalité, la réalité brute, mais aussi les événements, les circonstances qui, finalement, ont fait la démonstration que cette révision en profondeur souhaitée par les fédéralistes québécois n'était pas faisable tout simplement, que le régime fédéral, tout compte fait, était irréformable. Et c'était ça, la réalité. Et c'est ça, la réalité qu'il faut bien finalement reconnaître, ce que le rapport de la commission Bélanger-Campeau a appelé, à juste titre, «le choc des visions des identités et des aspirations nationales». Il y a deux nations pour un seul pays. Là est le problème. Il y a deux nations, donc, il y a deux visions. Et deux visions opposées, irréconciliables, incompatibles. Alors, on peut bien essayer, pendant un certain temps, d'occulter cette réalité, de la masquer, cette réalité, en procédant, par exemple, comme l'a fait le ministre Clark, de Halifax à Vancouver, à ces espèces de cérémonies liturgiques qu'il a présidées, ces conférences qui ont eu lieu dans plusieurs villes du Québec et du Canada, et où on s'est en quelque sorte amusé à faire semblant que le Québec était aimé, que le Québec était compris et qu'on était prêts à satisfaire ses revendications et ses aspirations.

Alors, on peut, pendant un certain temps, occulter la réalité, la masquer, mais on ne peut pas l'escamoter tout le temps, on ne peut pas l'escamoter pendant longtemps, la refouler en coulisse. Elle reprend très vite sa place, cette réalité-là. C'est ce que les psychanalistes appellent «le retour du refoulé». On peut bien refouler dans le subconscient bien des choses, mais à un moment donné ça surgit en pleine lumière et c'est ce qui se produit présentement. On a essayé d'escamoter cette réalité-là, on en a été finalement incapables. Elle a fait irruption de façon brutale sur la scène politique, vous vous rappellerez, il y a quelque temps, par le biais du fameux sondage Gallup où on interrogeait les Canadiens sur la place du Québec. On leur demandait: Pour garder le Québec dans le Canada, êtes-vous prêts à consentir des pouvoirs spécifiques au Québec? La réponse a été négative: Non, à 92 %. Ce n'est pas rien: 92 % des répondants au Canada anglais ont dit non à quelque forme que ce soit de statut particulier pour le Québec. Même, on leur posait la question: êtes-vous d'accord pour reconnaître le Québec comme société distincte mais sans pouvoirs spéciaux, juste une simple reconnaissance symbolique? Eh bien, ça a été non à 66 %. Imaginez! C'est ça, cette réalité. Cette réalité, c'est deux nations, c'est deux visions incompatibles: la vision du Canada anglais qui est toute centrée sur un gouvernement central fort, leur gouvernement national, et fondée également sur le principe de l'égalité des provinces entre elles, puis la vision du Québec qui, elle, est

toute centrée sur un État québécois ayant des pouvoirs accrus, des pouvoirs additionnels pour lui permettre de protéger, de promouvoir son identité propre.

Eh bien! cette réalité, M. le Président, incontournable, inévitable, on s'est rendu compte qu'elle a pesé de tout son poids sur les travaux de la commission Beaudoin-Dobbie, et c'est cette réalité-là qui a aussi provoqué les pirouettes partisanes des trois partis fédéraux, qui a également provoqué leurs dissidences multiples, ce qui fait que l'unanimité dont on parle est tout à fait factice et artificielle. C'est cette réalité-là également qui a généré les marchandages de marché aux puces qu'on a connus, qu'on a vus en fin de parcours des travaux de la commission. C'est cette réalité-là de deux nations, de deux visions irréconciliables, qui explique également l'impuissance, l'incapacité du comité Beaudoin-Dobbie à donner suite de façon sérieuse et efficace aux aspirations et aux revendications historiques du Québec.

Le résultat, bien, on l'a, M. le Président, avec le rapport du comité Beaudoin-Dobbie; le résultat, c'est du rafistolage, du rapiéçage, du bricolage, et, avec ce bricolage et ce rafistolage, on est évidemment à des années-lumière des revendications traditionnelles du Québec, des attentes du Québec. Voyons d'un peu plus près ces recommandations du rapport Beaudoin-Dobbie.

D'abord, je dirais et, d'ailleurs, le chef de l'Opposition, en réaction au rapport, a résumé, d'une certaine façon, notre position et je pense que ça rejoignait l'opinion d'une large majorité de Québécois... C'est que ce rapport, c'est moins que Meech, c'est beaucoup moins que Meech et, à bien des égards, c'est pire, c'est pas mal plus dangereux. Puis, en matière de partage des pouvoirs, si on le compare au rapport Allaire qui est vraiment le projet le plus décentralisateur piloté par des fédéralistes québécois, eh bien! c'est: rapport Allaire, 22 pouvoirs, Beaudoin-Dobbie, 0; un blanchissage éhonté! C'est moins et c'est pire que Meech.

Prenons-les, les cinq conditions, et rappelons en même temps, en guise d'introduction, je dirais, rappelons que Meech, ça a été les demandes les plus modestes que le Québec ait jamais formulées. Minimum. Ça a été le minimum qu'on n'ait jamais demandé. Et ça, ce n'est pas nous qui le disons, c'est le premier ministre lui-même qui l'a admis: Le Québec n'a jamais formulé des demandes aussi modestes.

Eh bien, voyons Meech! Dans Meech, il y avait la clause de la société distincte. Par rapport à ce qu'on retrouve dans Beaudoin-Dobbie, c'est clair qu'on recule. D'abord, la portée, qui était déjà très limitée dans Meech, mais dans Beaudoin-Dobbie, la portée de la clause de la société distincte, elle est encore davantage réduite puisqu'elle ne porte que sur la Charte des droits et non pas sur l'ensemble de la Constitution.

Deuxièmement, on a encore davantage réduit sa portée en la définissant par trois éléments seulement: la langue, la culture et le Code civil. Là-dessus, je vois sourire le ministre et ça me rappelle, évidemment, les travaux d'une commission parlementaire qui portaient sur l'accord du lac Meech, à l'époque, où il avait fait une défense extraordinairement convaincante relativement à l'absence de définition de la société distincte, où il disait: II ne faut surtout pas définir parce que la portée est pas mal plus grande si on ne définit pas. Eh bien, là, on définit! Puis, la règle de la dualité linguistique qu'on introduit dans la clause de la société distincte va, évidemment, encore une fois, affaiblir considérablement sa portée déjà limitée par l'obligation qu'on fait désormais au Québec de contribuer au développement et à l'épanouissement de la minorité anglophone. Il y a plusieurs observateurs, dont Léon Dion, en particulier, qui n'est pas le moindre, qui ont fait remarquer à juste titre, avec raison, que cette disposition pourrait avoir pour effet de porter atteinte, une atteinte directe à la loi 101 et à plusieurs des chapitres de la loi 101, en particulier celui comportant la francisation des entreprises.

Deuxièmement, le droit de veto. Ah! Le droit de veto, on en était tellement fiers dans l'accord du lac Meech. Le gouvernement était tellement fier d'avoir obtenu un droit de veto sur les institutions fédérales. Bien, dans les propositions de l'automne dernier, ça n'y était pas. Là, dans le rapport Beaudoin-Dobbie, il n'y a aucune recommandation formelle, je vous le signale, M. le Président, d'un droit de veto, sauf qu'on se contente de reconnaître le principe et d'évoquer, de mettre sur la table cinq formules possibles où le Québec pourrait avoir un droit de veto. Mais je vous signale tout de suite, M. le Président, qu'il s'agit là d'un exercice purement théorique, purement intellectuel parce que tout le monde sait, désormais, 24 heures après le dépôt du rapport, tout le monde savait que le droit de veto, c'était fini, il était déjà rejeté dans la poubelle, parce qu'il faut l'unanimité pour l'obtenir et que l'unanimité n'existe pas. Il y a déjà au moins trois sinon quatre provinces qui ont annoncé que, pour elles, le droit de veto pour le Québec, ça ne marche pas, il n'en est pas question, elles vont s'y opposer; donc, l'unanimité requise ne sera jamais atteinte. Quand on parle du droit de veto finalement, c'est une discussion purement théorique.

Troisième élément de Meech: le pouvoir de dépenser. Dans Meech, je vous signale, M. le Président, que le pouvoir de dépenser était, quant à nous, mal balisé, d'une part, et que, d'autre part, il y avait là une reconnaissance - et les juristes sont venus nous le dire -dans Meech, que le gouvernement fédéral avait désormais le droit constitutionnel de s'ingérer dans les compétences exclusives des provinces.

Dans Beaudoin-Dobbie, il y a toujours cette

reconnaissance, mais, là, on pose des conditions encore plus restrictives par rapport à son exercice, par rapport à l'exercice possible du droit de retrait du Québec d'un programme qui serait cofinancé dans un secteur de compétence exclusive des provinces. Dans Meech, on disait: «L'objectif du programme québécois pour obtenir la compensation devra être compatible avec les normes du programme fédéral.» Dans la proposition de septembre du gouvernement fédéral, on disait: «Les programmes québécois, pour avoir droit à la compensation, devront atteindre les objectifs du programme fédéral.» Dans Beaudoin-Dobbie, là, on resserre encore davantage: «Les programmes québécois devront réaliser les objectifs fédéraux.» Alors, c'est un véritable carcan et, en même temps, surtout, on se trouve à reconnaître constitutionnellement le droit pour le gouvernement fédéral de s'ingérer dans des domaines de compétence exclusive des provinces et donc du Québec. Il y a là un recul majeur par rapport à Meech. Surtout - ce qu'on ne retrouve pas dans Meech - c'est l'absence également de cette disposition qui aurait permis une compensation financière à une province qui refuserait le transfert de compétences législatives provinciales vers le Parlement fédéral. Dans Meech, le droit de veto était associé à cette disposition-là, une compensation financière, non seulement dans le domaine de la culture et de l'éducation, comme c'est le cas présentement, mais dans tous les domaines. Eh bien ça, ce n'est plus là, c'est absent. Donc, il y a là aussi un net recul.

Quant à l'immigration, il y a dans Beau-doin-Dobbie l'absence de la garantie conférée au Québec par Meech d'obtenir 25 % de l'ensemble des immigrants reçus annuellement par le Canada, avec possibilité de 5 % additionnels pour des raisons démographiques. Ce n'est plus là, les 5 % sont disparus. Et, enfin, il y a les trois juges du Québec à la Cour suprême. Là, Beaudoin-Dobbie propose deux formules dont une seule assurerait vraiment la participation du Québec à la nomination de trois juges à la Cour suprême.

La conclusion est très nette et même, finalement, M. le premier ministre du Québec, de façon à peine voilée, l'admettait: le rapport Beaudoin-Dobbie, si on le mesure à l'étalon de Meech, c'est moins. Et c'est nettement moins! Et c'est moins que même les propositions de septembre, toujours par rapport à Meech.

Ça me faisait sourire hier d'entendre l'ineffable Jean-Pierre Blackburn, qu'un «morning man» de ma région appelle «le capitaine Canada», dire à la télévision: Écoutez, on a quand même pris les 28 propositions de septembre et on les a améliorées. On les a bonifiées. Eh bien! Pour ce qui est des dispositions qu'on retrouvait dans Meech, ce n'est pas vrai. C'est faux. Il y a eu recul. Il y avait recul en septembre, il y a recul en février. (10 h 20)

Et puis, maintenant, quant au partage des compétences. Ah! là, vraiment c'est du joli! Là, je vous signale, M. le Président, que le jugement que je porte, ce n'est pas en fonction de la souveraineté, c'est en fonction de projets fédéralistes dont, en particulier, le projet du rapport Allaire. Voilà un projet fédéraliste de décentralisation très accentuée de pouvoirs du fédéral vers le Québec. Une liste, vous le savez, de 22 pouvoirs, de 22 compétences. Je le répète, M. Parizeau le disait également, et l'image est forte: rapport Allaire, 22; rapport Beaudoin-Dobbie, 0, pas un seul! Le rapport Allaire réclamait une compétence exclusive du Québec dans 22 secteurs. Le rapport Beaudoin-Dobbie n'accorde aucun, aucun transfert de compétence exclusive au Québec afin de préserver un gouvernement central fort, ce que souhaite le Canada anglais. Il mise plutôt sur des formules alambiquées, compliquées, tortueuses, difficiles à cerner. Délégation de pouvoirs législatifs, mais pour cinq ans. C'est temporaire et ça va exiger l'accord par résolution des Parlements concernés; donc, du Parlement fédéral et du Sénat. Imaginez, ça va être joli! Ou encore des arrangements administratifs. Des arrangements administratifs, ce n'est pas une voie très, très agréable. D'ailleurs, le ministre lui-même, à Whistler, à l'autre bout du Canada, est allé dire au Barreau canadien, et je le cite, ça vaut la peine, je lui rafraîchis la mémoire en même temps: «II nous apparaît nécessaire que le renouvellement des partages des compétences soit de nature constitutionnelle.» Voilà! «De simples arrangements administratifs, dit-il, peuvent, dans certains domaines de compétence partagée, être utiles, mais on sait que de telles ententes demeurent à la merci de la législation fédérale. Elles ne sont pas suffisantes. On ne rendrait service à aucun ordre de gouvernement en privilégiant le recours systématique aux ententes administratives.» Fin de la citation. Je citais le ministre responsable du dossier constitutionnel du Québec.

Or, le rapport Beaudoin-Dobbie encourage, multiplie, recommande la multiplication d'arrangements administratifs, puis les pouvoirs concurrents, mais avec prépondérance fédérale. On est bien gentil, mais il faut que le grand frère veille au grain constamment. Le résultat, c'est le cafouillage et le désordre institutionnalisé, une vraie tour de Babel. Déjà, le régime fédéral, comme le signalait souvent M. Lévesque, le président fondateur du parti, est une maison de fou. Une chatte n'y retrouve pas ses petits. C'est déjà le cas. Mais là, s! vous appliquez Beaudoin-Dobbie, ça va être encore empiré. Les chevauchements, non seulement seront limités, ne seront pas réduits, mais on va les multiplier et ça va devenir la négociation permanente. Les gouvernements vont être en négociation permanente. Il y a Léon Trotski, vous vous rappelez, M. le Président, qui avait inventé le concept de la révolution permanente; Beaudoin-

Dobbie a pondu le concept de la négociation permanente. Allons-y gaiement!

En matière de culture, le rapport Beaudoin-Dobbie recommande une compétence exclusive pour le Québec de légiférer en matière de culture. Ça, c'est l'entourioupette par excellence, le mensonge le plus flagrant. Là, c'est une menterie, ça, en plus. On ment au Québec, on les trompe sciemment, parce qu'on dit, d'une part: Vous aurez la compétence exclusive en matière de culture, mais, en même temps, je vous signale que les grandes institutions culturelles du gouvernement fédéral, Radio-Canada, Conseil des arts, Téléfilm, Office national du film, CRTC, ça va demeurer de juridiction fédérale, ces institutions vont continuer de faire des dépenses au Québec sans le moindre contrôle de la part du Québec. Je vous signale que c'est de l'ordre de plus de 500 000 000 $. Quand on sait que le budget du ministère des Affaires culturelles est de 210 000 000 $, c'est presque deux fois et demie. Les dépenses fédérales en matière de culture au Québec, c'est presque deux fois et demie ce que le ministère des Affaires culturelles dépense. Imaginez! En plus, on maintient le pouvoir fédéral de légiférer en matière de droit d'auteur et de radiodiffusion, on maintient la capacité d'Ottawa de subventionner directement les artistes et les organismes culturels. Bref, on consacre le statu quo en matière de culture et on a le culot, l'effronterie de venir nous dire qu'on est prêt à transférer la compétence exclusive au Québec en matière de culture. Il faut le faire! Là, vraiment, c'est nous prendre pour des caves. On prend les Québécois pour des caves de prétendre ça, de s'imaginer qu'on va tomber dans le panneau, un panneau ou un piège aussi gros.

Formation professionnelle: recul par rapport aux propositions de septembre. Jean-Pierre Blackburn a oublié de les améliorer. Recul. Il n'a pas eu le temps probablement. C'était trop dur, il les a oubliées. Recul par rapport aux propositions de septembre. En septembre, on conférait en exclusivité cette compétence aux provinces. Mais, là, il va falloir encore négocier et c'est le principe de la négociation permanente. Pour affirmer une compétence accrue en matière de formation professionnelle, Québec devra négocier avec Ottawa le montant de la compensation financière, d'abord, et puis devra aussi respecter les normes fédérales. Alors, Ottawa va également conserver son pouvoir de légiférer en matière d'assurance-chômage. Alors, l'exclusivité en matière de formation professionnelle, n'y pensez plus. Ce n'est plus dans Beaudoin-Dobbie.

Et puis la réforme du Sénat, M. le Président, dernier point. À la réforme du Sénat, c'est du joli. On propose un Sénat élu plus équitable pour les provinces de l'Ouest et pour les Maritimes. J'ai déjà dit et j'ai déjà répété, avant même de connaître ce qu'il y avait dans Beaudoin-Dobbie, que, de toute façon, quel que soit le projet de réforme du Sénat qu'on avancera ou qu'on mettra sur la table, le Québec sera perdant. C'est inévitable, il va être perdant. Il va être perdant parce qu'il aura moins de sénateurs, quel que soit le projet. Si c'est l'égalité, évidemment... Mais, même en essayant d'être plus équitable, c'est clair qu'on va avoir moins de sénateurs. Donc, le poids politique du Québec sera diminué, c'est clair, c'est inévitable, c'est ça qui arrive dans le projet Beaudoin-Dobbie, et puis on va les élire aussi. Ça, je vous le dis, M. le Président, ça va provoquer des changements majeurs, parce qu'un sénateur élu par 200 000 électeurs au Québec, je vous le dis et je le dis au ministre, il va vous regarder de haut, M. le ministre. Il va vous regarder de haut. Il va même regarder le premier ministre de haut parce qu'il va se considérer comme ayant une légitimité plus importante encore que n'importe quel député dans cette Assemblée et n'importe quel ministre de ce gouvernement.

Accroissement de la légitimité du Sénat en élisant les sénateurs, donc, accroissement aussi de la légitimité des institutions centrales. C'est inévitable. La proposition de réforme du Sénat, c'est à rejeter, et puis on ne peut pas la rejeter parce que ça passe à 7-50. 7 provinces représentant 50 % de la population peuvent faire passer ce projet de réforme du Sénat, même si on est contre, parce que le droit de veto sur les institutions fédérales - je vois le ministre qui opine du bonnet - vous ne l'aurez pas à temps. La réforme du Sénat va passer avant à 7-50. Vous ne l'avez pas, le droit de veto. Meech, ça avait un avantage. Au moins, je suis prêt à reconnaître que Meech avait un avantage en matière de réforme du Sénat. C'est que le droit de veto sur les institutions fédérales, dans Meech, il était accordé au Québec avant qu'on passe à la réforme du Sénat. Alors, là, le Québec pouvait l'exercer. Mais, là, c'est le contraire. On inverse le processus. La réforme du Sénat se fait, on ne peut rien y faire, c'est à 7-50. Puis, après ça, on va nous donner... On ne nous donnera pas... On va penser nous donner un droit de veto, mais, premièrement, on ne l'aura pas parce que l'unanimité ne sera pas atteinte. Même si on l'avait, il ne servirait plus à rien; il serait devenu complètement inutile et futile.

M. le Président, je conclurai en disant que l'Assemblée nationale doit indiquer, par cette motion très simple - vous avez remarqué qu'elle est très simple, une courte phrase, pas de fioritures - que le Québec rejette le paquet indigeste et la mixture immangeable et inacceptable qu'est le rapport Beaudoin-Dobbie parce que c'est incompatible - et, là, je prends mes étalons de mesure chez les fédéralistes; je ne les prends pas chez les souverainistes - avec la souveraineté, ça, c'est évident, ça tombe sous le sens, mais c'est incompatible avec les revendications traditionnelles et historiques du Québec, particulièrement en matière de partage des

pouvoirs. C'est incompatible avec la position du Parti libéral du Québec qui a adopté le rapport Allaire et c'est incompatible avec les cinq conditions minimales, les demandes les plus modestes formulées par le Québec, qu'on retrouve dans le défunt accord du lac Meech.

Alors, le Québec, M. le Président, doit clairement indiquer, à la veille d'une conférence qui regroupe les premiers ministres des provinces, avec deux observateurs québécois, qui seront peut-être remplacés bientôt par un ministre et un premier ministre - il y a un danger, attention, c'est le doigt dans l'engrenage - mais à la veille de la conférence des premiers ministres des provinces et du fédéral, on doit indiquer qu'on ne négociera pas, que le gouvernement du Québec ne négociera pas sur la base du rapport Beaudoin-Dobbie. Le parti ministériel, le Parti libéral, s'il veut vraiment, comme il le proclame et comme il le claironne à tout bout de champ, protéger les intérêts supérieurs du Québec, doit appuyer cette motion, sans réserve, sinon il s'engage, à mon avis, à cautionner une réforme constitutionnelle qui imposera aux Québécois un fédéralisme dominateur. C'est un des gros mots utilisés par le premier ministre dans ses remarques sur Beaudoin-Dobbie. Dans sa bouche, c'est quasiment une grossièreté, un «fédéralisme dominateur» au Québec.

Au moment où Marcel Masse, ministre fédéral, considère que ce rapport est inacceptable, qu'il doit être mis de côté - ce n'est pas rien - eh bien, je pense que l'Assemblée nationale se doit, de façon quasiment unanime - je sais qu'il y a quelques indépendants qui ne seront sûrement pas d'accord - qu'au moins les deux grandes formations politiques tombent d'accord, soient unanimes pour condamner, rejeter le rapport Beaudoin-Dobbie.

J'espère, M. le Président, qu'on ne tombera pas, tout à l'heure, dans les chinoiseries d'amendements et de sous-amendements à une motion très simple, très claire. On s'est refusé, justement, à ajouter toutes sortes de fioritures et d'ornementations à notre motion. On l'a mise très simple. J'espère qu'on ne tombera pas dans des chinoiseries semblables et que le message provenant de l'Assemblée nationale sera clair, limpide et non équivoque. Merci, M. le Président. (10 h 30)

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vous remercie, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de l'Opposition officielle. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous étudions la motion du député de Lac-Saint-Jean qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale rejette le rapport du comité Beaudoin-Dobbie déposé à la Chambre des communes le 28 février 1992.»

Je suis prêt à reconnaître maintenant M. le ministre de la Justice et ministre délégué aux

Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Je vous remercie, M. le Président. J'ai eu l'occasion, hier, d'intervenir en cette Chambre et de répondre aux questions du député de Lac-Saint-Jean sur le droit de veto. Le député de Lac-Saint-Jean s'inquiétait qu'on pourrait abandonner le droit de veto, et je lui ai répondu que pour le gouvernement du Québec c'était une nécessité, un absolu, pour reprendre les termes du premier ministre, que de pouvoir récupérer ce droit de veto perdu en 1981. Et j'ai cité, M. le Président, le rapport Beaudoin-Dobbie que je me permets de lire ici en cette Chambre, à la page 90. Se référant donc au droit de veto, on lit ceci: «Cette question devrait figurer parmi les priorités absolues de la présente série de négociations constitutionnelles, afin de trouver une procédure de modification qui réponde aux besoins du Québec». m. le président, c'est là un aspect positif du rapport beaudoin-dobbie et pas le moindre, puisqu'on sait à quel point il est important pour le québec de récupérer ce droit de veto, ce droit de consentir un amendement constitutionnel qui pourrait affecter ses droits, ses privilèges, ses pouvoirs, ses juridictions. et, m. le président, dans le rapport beaudoin-dobbie, contrairement aux propositions déposées l'automne dernier par le gouvernement fédéral, nous avons cette position qui est claire, il n'y a pas de dissidence, où on dit que ce droit de veto est uns nécessité absolue.

M. le Président, c'est là un point positif de ce rapport Beaudoin-Dobbie. Il y en a d'autres aussi, M. le Président, en particulier en ce qui regarde toute la section économique. On se souvient que dans les propositions du gouvernement fédéral de l'automne dernier, on abordait l'union économique qu'on veut développer au sein du Canada par un conseil de la Fédération. On créait un nouvel organisme, on créait un nouveau pouvoir déclaratoire pour le gouvernement fédéral qui, à toutes fins pratiques, venait annuler les compétences des provinces dans tous les secteurs économiques et même au niveau social et à tous les niveaux culturels. C'est disparu. On a quand même pris en considération les remarques que nous avons faites à plusieurs reprises, que le premier ministre a faites dans sa conférence de presse à la suite du dépôt, au Parlement canadien, de ses propositions de l'automne dernier.

Il y a donc, M. le Président, des aspects positifs. Il y a aussi le fait que nous sommes plus près, avec ce rapport Beaudoin-Dobbie, de l'entente du lac Meech que nous ne l'étions avec les propositions de l'automne dernier. Ce n'est pas Meech, absolument pas, mais nous sommes plus près. Je viens de parler du droit de veto, M. le Président, c'est un aspect important. Nous

pouvons aussi parier de l'immigration, qui, à toutes fins pratiques, se rapproche de l'entente du lac Meech, cette garantie démographique que nous devons avoir pour le Québec. La Cour suprême où on garantit que le Québec pourrait avoir trois juges et qu'il y aurait garantie constitutionnelle que ces trois juges, qui existent présentement, mais sans garantie constitutionnelle... Comme nous l'avions dans Meech, ces trois juges, par la Constitution, devraient venir du Québec. Aussi, on peut penser au pouvoir de dépenser, ce pouvoir de dépenser dont on discute depuis de nombreuses années, qu'on veut encadrer. Nous avions réussi, dans Meech, à nous entendre sur un texte pour encadrer ce pouvoir du gouvernement fédéral de dépenser dans des sphères de juridiction provinciale. Nous avons un texte qui n'est pas celui de Meech mais qui, quand même, se rapproche plus de l'entente du lac Meech que ce texte que nous avions à l'automne dernier. Évidemment, nous aimerions avoir un libellé plus précis en ce qui regarde le pouvoir de dépenser. On parie maintenant de l'obligation que les programmes conjoints, où le fédéral et les provinces agissent en même temps, que ces programmes puissent faire l'objet d'un droit de retrait pour les provinces - et c'est un principe que nous mettrions dans la Constitution - et qu'il y aurait compensation financière dans les cas où la province aurait un programme semblable qui réaliserait les objectifs du programme fédéral. C'est plus restreint que l'entente du lac Meech qui pariait de mesures ou de programmes mis en place par la province qui pourraient être compatibles avec les objectifs nationaux. Donc, il y a un libellé, M. le Président, il y a une discussion qui doit avoir lieu mais, quand même, c'est plus proche de Meech que les propositions fédérales ne pouvaient l'être.

Et, société distincte. On a beaucoup parlé, pendant toutes nos discussions concernant l'entente du lac Meech, de ce concept de société distincte. Nous insistons parce que nous voulons que le Québec puisse être reconnu comme un partenaire à part entière dans la Fédération canadienne en reconnaissant ce qu'il y a de spécifique de par sa culture, de par ses institutions et reconnaissant aussi de plein droit son appartenance à l'ensemble canadien. Ce critère de société distincte, on le sait, M. le Président, a fait l'objet de démagogie pendant toutes nos négociations à la suite de l'entente du lac Meech, ce qui a mené en très grande partie à l'échec de l'entente du lac Meech.

Certains nous disaient: II ne faut plus le reconnaître dans la Constitution. Il faut que ce soit quelque chose qu'on retrouve un peu comme un bibelot dans le préambule de la Constitution. Dans les propositions de l'automne dernier, c'était bien mentionné que c'était dans la Constitution qu'on devrait retrouver la société distincte. Et dans ce que nous avons dans le rapport Beaudoin-Dobbie, là encore, on retrouve la société distincte. La responsabilité de l'Assemblée nationale, du gouvernement du Québec de protéger et de promouvoir cette société distincte, on le retrouve dans le texte constitutionnel et dans une clause Canada qui pourrait s'appliquer à l'ensemble de la Constitution et à l'intérieur de la charte. (10 h 40)

M. le Président, nous sommes à compléter nos études juridiques sur la réelle signification de ce concept de société distincte tel qu'on peut le retrouver dans le rapport Beaudoin-Dobbie. Il y a des questions qu'on peut se poser, plusieurs questions qu'on peut se poser. Entre autres, on ajoute un concept de dualité avec des éléments nouveaux qui nous amène à certaines interrogations. Il faut s'interroger aussi sur la réelle signification qu'on pourrait donner à cette clause Canada qui comprendrait non seulement la reconnaissance de cette responsabilité du Québec d'agir pour la protection et la promotion de la société distincte, mais comprendrait aussi certaines autres caractéristiques canadiennes. Nous sommes donc à compléter ces études, mais nous pouvons voir immédiatement que ce n'est pas ce qu'il y avait dans l'entente du lac Meech, manifestement. Si on nous disait, M. le Président, «dans Meech, il y avait un beau principe, mais ce principe n'avait pas de substance, dans le sens qu'il n'y avait pas de partage des compétences qui l'accompagnait» et si on nous disait que «maintenant, dans le rapport Beaudoin-Dobbie, peut-être que ce principe est moins évident dans tous ces aspects, mais qu'il y a une substance qui est plus claire parce qu'on a un partage des compétences qui vient définir, soutenir ce principe de société distincte», à ce moment-là, si c'était le cas, on pourrait, bien sûr, s'interroger et dire: D'abord, regardons, on peut avoir un très beau principe, très bien, mais ne pas avoir d'application pratique à ce principe, alors que, d'un côté, on peut avoir un principe qui peut avoir plus de questions qui se posent, mais qu'il y a une application dont nous sommes assurés qu'elle sera plus significative.

M. le Président, nous devons conclure que ce n'est pas le cas. Comme le premier ministre l'a mentionné lors de sa conférence de presse, en ce qui regarde, d'une façon toute particulière, le partage des compétences législatives, qui est un morceau extrêmement important lorsqu'on parie de la réforme d'une Constitution en matière de fédéralisme, ce partage est nettement insuffisant; c'est même décevant. M. le Président, lorsqu'on parie d'un fédéralisme renouvelé, lorsqu'on parie de refaire le partage des compétences législatives entre les deux niveaux de gouvernement, on parie du coeur même de ce qu'est un État fédérai, un État qui permet à tous ses membres de pouvoir travailler ensemble pour atteindre un but commun, un mieux-être de tous les citoyens et citoyennes qui vivent sur le territoire de la fédération et qui permet aussi à chacune des

parties, à chacune des provinces d'exprimer ce qu'elle est, de conserver cette autonomie qui lui est essentielle.

M. le Président, il y a une règle de base qui existe pour faire ce partage des compétences législatives entre le gouvernement central et les provinces. Cette règle, c'est de dire: Lorsqu'un gouvernement est près d'un problème, lorsque c'est lui qui a affaire, tous les jours, avec une situation qui lui est près parce que c'est sa juridiction, on devrait lui donner une responsabilité complète pour qu'il puisse travailler d'une façon efficace parce que c'est l'objectif premier qu'on doit rechercher. Pour le mieux-être de tous les citoyens, il faut rechercher l'efficacité et, par conséquent, qu'on puisse en arriver à ce que ce soit l'ordre de gouvernement qui a les moyens pour résoudre les problèmes qui ait cette juridiction la plus complète possible avec le moins d'interférence de l'autre ordre de gouvernement pour venir brouiller les cartes, compliquer les choses, créer des dépenses d'argent, de temps, d'énergie qui, finalement, nous amènent à des dédoublements qu'on doit éviter.

M. le Président, tant en ce qui regarde les demandes légitimes du Québec pour avoir ces compétences législatives qui lui permettraient d'exprimer ce qu'il est, tant aussi en ce qui regarde un partage de compétences législatives qui nous permettrait d'éviter le dédoublement, qui nous permettrait d'être efficaces, qui nous permettrait de travailler ensemble, tous les partenaires fédéraux avec les provinces, avec le gouvernement fédéral, travailler ensemble au mieux-être de l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes, on ne retrouve pas dans le rapport Beaudoin-Dobbie ce partage des compétences législatives. À toutes fins pratiques, M. le Président, nous avons dans ce rapport quatre compétences législatives, qu'on peut qualifier de nouvelles sur certains points, sur certains aspects, et qu'on sera prêt à donner à la juridiction des provinces.

Tout d'abord, les pêches intérieures, qu'on puisse permettre d'avoir la pêche à l'intérieur du territoire d'une province, que ça relève de la compétence de la province, mais avec une prépondérance fédérale. Ce que ça veut dire, M. le Président, c'est que s'il y a un conflit entre un règlement ou une loi provinciale et un règlement ou une loi fédérale sur le même sujet, c'est la loi fédérale qui l'emporte sur la loi provinciale, qui devient inopérante. C'est ça que ça veut dire, donc, les pêches intérieures.

On nous parte aussi de tout le secteur de la faillite personnelle, non pas la faillite des entreprises, des corporations, mais les faillites personnelles, et toujours avec une prépondérance fédérale. En cas de conflit entre les deux législations, c'est le fédéral qui - l'emporte sur la province. Deux aspects nouveaux.

Et, M. le Président, un sujet qui est important pour le Québec, mon collègue, le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu l'a mentionné à plusieurs reprises, il a réussi à faire un front commun de tous les intervenants au Québec pour réclamer que la main-d'oeuvre, que la formation de la main-d'?uvre soit de juridiction du Québec, qu'on puisse former nos jeunes, qu'on puisse former nos travailleurs aux défis économiques que nous avons à relever. M. le Président, ce qu'on nous offre serait une compétence en matière de formation de la main-d'oeuvre à la condition qu'on puisse faire une entente avec le gouvernement fédéral respectant des normes au niveau national.

Et, finalement, au niveau culturel, M. le Président, on nous dit: Ah! là, vous avez un gros morceau, vous avez un gros morceau parce qu'on vous donne l'exclusivité en matière culturelle; quand on parlera de culture, on parlera maintenant d'une exclusivité provinciale. Il faut y voir de plus près un peu, M. le Président, pour voir que ce n'est pas tout à fait la situation. Il faut se rendre compte que ce qu'on nous dit, c'est que toutes les grandes institutions et organismes au niveau fédéral, que ce soit Radio-Canada, que ce soit l'Office national du film, le Conseil des arts, enfin tous ces grands organismes qui ont fait un travail, il faut le reconnaître, pour exprimer la culture québécoise, qui l'ont fait d'une façon, je pourrais dire même, extrêmement intéressante sous plusieurs aspects... Mais on confirme que ces organismes seraient de juridiction fédérale, demeureraient de juridiction fédérale. On ne parle pas de la possibilité que, sur les conseils d'administration de ces organismes, il y ait des représentants québécois, on ignore complètement cet aspect. Et qui plus est, M. le Président, on précise bien dans ce rapport Beaudoin-Dobbie que, oui, vous avez l'exclusivité en matière culturelle, mais que le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral demeurera intact. Donc, le gouvernement fédéral pourra à tout moment, comme il le fait présentement, venir dépenser dans tous les secteurs reliés à l'aspect culturel. M. le Président, à toutes fins pratiques, ce que ça signifie, c'est qu'on ne change rien à la situation actuelle, absolument rien. Alors qu'on ne nous dise pas qu'on nous donne l'exclusivité en matière culturelle; au contraire, on confirme le statu quo. Qu'on parle de statu quo.

M. le Président, on ne parle pas de communications non plus. On évoque brièvement l'aspect de la radiodiffusion quelque part dans le rapport, sans trop insister, à la page 73, alors que mon collègue des Communications a manifesté à plusieurs reprises que le Québec a besoin de cet outil, et c'est une revendication historique du Québec, comme en matière culturelle, ma collègue, la ministre des Affaires culturelles...

Alors, M. le Président, au niveau du partage des compétences législatives, c'est bien mince,

c'est peu de chose et ça confirme beaucoup plus le statu quo que ça apporte des éléments nouveaux de compétence exclusive. (10 h 50)

On nous parie aussi, M. le Président, de la possibilité de confirmer ce qui est déjà une compétence exclusive pour le Québec comme pour les autres provinces dans bien des secteurs d'activité. On mentionne le tourisme, la foresterie, les mines, les loisirs, le logement, les affaires municipales. On nous propose d'ajouter à cette liste le développement économique régional, la politique familiale, et même l'énergie. M. le Président, ce qu'il faut bien comprendre, c'est que ces domaines de compétences législatives sont déjà de la juridiction exclusive des provinces. Ce qu'on nous offre, c'est la possibilité de confirmer cette exclusivité par une entente qu'on ferait avec le gouvernement fédéral pour, si je peux me permettre cette expression, «encadrer son pouvoir de dépenser dans ces secteurs-là». Lorsqu'on parie du pouvoir de dépenser, M. le Président, il y a tous les programmes conjoints dont j'ai parié tout à l'heure, et nous avons une disposition qui regarde ces programmes conjoints. On l'avait dans Meech et, dans le rapport Beaudoin-Dobbie, on revient sur quelque chose de semblable, j'en ai parié tout à l'heure. Mais il s'agit maintenant de ce pouvoir de dépenser utilisé par Ottawa dans un domaine sectoriel, ponctuel, que ce soit dans le domaine de la culture dont je pariais tout à l'heure ou dans le domaine du tourisme, de la foresterie, des mines, des loisirs, de tous ces sujets, parce que le gouvernement fédéral peut agir dans toutes les compétences exclusives du Québec comme de toutes les autres provinces, par son pouvoir de dépenser.

On nous offre donc la possibilité de faire des ententes pour limiter ou encadrer cette action du gouvernement fédéral dans ces domaines. Ce n'est pas rejeté du revers de la main, M. le Président, parce que ça peut éviter les dédoublements et, si on peut en arriver à une entente à ce sujet-là, ce serait une bonne chose. On a déjà un précédent timide, mais on a un précédent, c'est celui de toutes les ententes de développement économique régional où nous avons ce que nous appelons les ententes de l'EDER depuis 1984, et ces ententes de l'EDER, que nous sommes à renégocier et à compléter dans une deuxième phase, sont des ententes qui nous permettent d'agir avec plus de coordination, plus de coopération entre les deux niveaux de gouvernement. Alors, c'est là un exemple qu'il faudrait compléter, bonifier, améliorer, mais si c'est la piste qu'on nous offre, ce n'est pas à rejeter du revers de la main; ça permettrait d'éviter les dédoublements, mais, attention, qu'on ne vienne pas nous dire qu'on nous donne de nouveaux pouvoirs, de nouvelles juridictions, de nouvelles compétences! On confirme ce qui existe déjà dans la Constitution canadienne, mais on apporte un élément nouveau qui peut être intéressant et significatif pour éviter des dédoublements.

M. le Président, on nous parie de délégations administratives. J'ai déjà eu l'occasion de le dire et je le répète. Les délégations administratives, c'est la possibilité qu'un ordre de gouvernement confie à l'autre ordre de gouvernement l'administration d'une loi ou d'un règlement. Il ne lui confie pas la responsabilité de décider; il lui donne la possibilité simplement d'administrer des normes, des critères qui sont décidés ailleurs, par un autre ordre de gouvernement. Ça peut être utile; à certains égards, ça peut être utile. On en a, on en applique; à plusieurs reprises, on a fait des ententes administratives et on continue d'en faire, mais il faut bien comprendre que ces ententes administratives ont l'existence qu'on veut bien leur donner et elles peuvent être retirées quand l'ordre de gouvernement qui a fait cette délégation administrative décide de retirer cette délégation administrative. On ne peut pas se référer simplement à des délégations administratives pour établir un partage de compétences législatives. C'est donc limité. Là encore, il ne faut pas rejeter de la main cette possibilité; ça peut aider, mais ce n'est pas la grande solution que nous recherchons.

Autre possibilité qu'on nous offre dans ce rapport, M. le Président, c'est ce qu'on appelle la «délégation législative», c'est-à-dire que contrairement à la délégation administrative qui permet d'administrer des critères et des normes qui sont déterminés par un autre ordre de gouvernement, la délégation législative va beaucoup plus loin: elle permet de déléguer la possibilité d'établir ces normes, d'établir ces critères, de légiférer, de faire des lois dans un domaine qui, au départ, n'était pas de la responsabilité de cet ordre de gouvernement.

C'est un principe qui n'est pas nouveau, M. le Président. Il existait. Dans le livre beige du Parti libéral du Québec, on pariait de cette possibilité; dans le rapport de la commission Pepin-Robarts de 1979, où le sénateur Beaudoin était un des commissaires avec Mme Solange Chaput-Rolland, on pariait aussi de cette possibilité. Et, M. le Président, c'est une possibilité qui peut être intéressante à bien des points de vue. Mais la façon dont on se réfère dans ce rapport Beaudoin-Dobbie à cette possibilité m'apparaît tout à fait illusoire. On nous dit, en effet: II sera possible pour un ordre de gouvernement de faire une entente pour qu'il y ait délégation législative dans tous les champs de compétence appartenant à cet ordre de gouvernement, que ce soit le gouvernement fédéral qui décide que, dans un de ses champs de compétence, c'est le Québec, ou c'est l'Ontario, ou c'est une autre province, avec l'accord de cette province évidemment, à la demande de cette province, qui, dorénavant, légiférera, fera des

lois dans un domaine de compétence qui, selon la Constitution, lui appartient. Donc, ça appartient au gouvernement fédéral, mais, à la demande d'une province, il y a une entente qui est négociée et, finalement, c'est cette province qui légiférera contrairement à ce qui est prévu dans la Constitution. C'est une possibilité, M. le Président.

Cependant, là, ce que nous avons dans ce rapport Beaudoin-Dobbie, c'est qu'on nous dit: Ça va exister pour cinq ans; après cinq ans, il faut renégocier; deuxièmement, on peut dénoncer, révoquer une telle entente avec un délai de deux ans. Alors, imaginons-nous qu'on a, par exemple, en matière de radiodiffusion ou dans, un autre domaine, créé un organisme, qu'on dote de fonctionnaires, qu'on a tout un appareil administratif pour administrer un champ de compétence qu'on a donc négocié avec le gouvernement fédéral et que, tout à coup, on dit: C'est terminé; fini, nous, on retire cette compétence. Là encore, M. le Président, c'est difficile. C'est difficile de voir comment, en pratique, on pourra mettre ça en application. Et, M. le Président, en plus, on veut que ces délégations législatives se fassent à la suite d'une loi, à la suite d'un acte législatif officiel de l'Assemblée législative de la province et du Parlement canadien, en avertissant l'ensemble des provinces pour qu'elles puissent venir donner leur point de vue? M. le Président, ça m'apparaît nettement impraticable.

Donc, M. le Président, en conclusion, comme le premier ministre, M. Bourassa, le disait dans sa conférence de presse, sur le plan du partage des compétences législatives, ça paraît nettement insuffisant. Nettement insuffisant et décevant.

En ce qui regarde la réforme du Sénat, M. le Président, là encore, il y a des dissidences importantes. Il faut tenir compte dans ce rapport des dissidences extrêmement importantes qu'on peut y voir sur des aspects majeurs de ce rapport, entre autres la réforme du Sénat, où vous avez une dissidence du Parti libéral fédéral. On ne s'entend pas sur les pouvoirs qu'on devrait donner au Sénat. Si on ne s'entend pas sur les pouvoirs, M. le Président, c'est bien difficile de se prononcer sur le moyen qu'on devra utiliser pour nommer ou élire les sénateurs et, dans les dernières négociations de l'entente du lac Meech en juin 1990, à Ottawa, on avait convenu, comme gouvernement québécois, de dire: Bon, très bien, on pourrait penser à l'élection de ces sénateurs dans la mesure où on s'entend sur les pouvoirs qu'on veut leur donner. À quoi ça sert de créer une deuxième Chambre qui viendrait faire exactement ce que la première fait? Et le député de Lac-Saint-Jean, qui a semblé tout à coup préoccupé par des éléments de réforme du fédéralisme canadien, soulignait à juste titre qu'il y aurait donc une légitimité au niveau des sénateurs qu'on ne retrouverait pas au niveau de la Chambre des communes. Il y a quelque chose qu'on doit quand même convenir: M. le Président, il semble y avoir une difficulté majeure quant à la réforme du Sénat. Et ça signifie que si nous, comme Québécois, nous considérons ce rapport comme décevant sur ces aspects que je viens de mentionner, je suis convaincu que bien d'autres provinces, entre autres celles qui tiennent à la réforme du Sénat, ne sont certainement pas enthousiastes face à ce rapport. (11 heures)

M. le Président, d'une façon générale, ce que nous pouvons dire, c'est que ce rapport a des aspects, oui, positifs, et j'ai voulu les souligner. Ce rapport est un rapport de commission parlementaire. Il y en a eu beaucoup de rapports de commission parlementaire qui sont utiles, mais ce ne sont pas les offres qu'on doit nous faire. C'est dans le processus qui est enclenché et qui respecte, et je me permets de le souligner, M. le Président, un processus qui respecte l'échéancier déterminé par la loi 150. Au plus tard le 26 octobre, il doit y avoir un référendum au Québec et, manifestement, le gouvernement fédéral respecte cet échéancier déterminé par la loi 150.

M. le Président, on entend différents commentaires partout, au Canada. Les gens nous disent: Ce ne sera pas facile. C'est vrai que ce ne sera pas facile. On nous dit: Le morceau est gros. Oui, c'est vrai que le morceau est gros, M. le Président, mais ce n'est pas nous qui avons voulu cette «round» Canada. À la suite de l'échec de l'entente du lac Meech, on nous a dit: C'était juste pour le Québec. Maintenant, on va faire quelque chose qui va comprendre l'ensemble de toutes les provinces canadiennes. Nous, on a dit: Écoutez, très bien. Mais n'oubliez pas, essentiellement, pour nous, on doit retrouver dans ces offres la substance que nous avions dans Meech plus ce partage des compétences législatives que nous devons revoir d'une façon substantielle.

M. le Président, on semble oublier que, si nous en sommes dans cette situation pour trouver cette réforme du fédéralisme canadien, ça vient tout d'abord du fait qu'en 1981-1982, il y a eu cette injustice faite au Québec. Tout à l'heure, M. le Président, j'entendais le député de Lac-Saint-Jean dire: Meech avait un avantage. Il a réparé l'erreur de 1981 lorsque nous avons perdu le droit de veto. M. le Président, je crois qu'il avait parfaitement raison.

M. le Président, nous avons encore à travailler, mais il demeure que nous sommes toujours dans un processus de discussion qui est en cours. Le Québec va continuer d'agir comme il agit, dans les meilleurs intérêts du Québec, en fonction de cette histoire qui nous guide dans ces revendications légitimes. C'est pourquoi, M. le Président, je présenterais une motion d'amendement à la motion de l'Opposition officielle.

Motion d'amendement

M. le Président, cette motion serait la suivante: Que la motion en discussion soit amendée: 1° en remplaçant, dans la première ligne, le mot «rejette» par le mot «désapprouve»; 2° en ajoutant, dans la deuxième ligne, après les mots «Beaudoin-Dobble», les mots «institué aux fins de répondre aux revendications légitimes du Québec et».

La motion, telle qu'amendée, se lirait ainsi, M. le Président: «Que l'Assemblée nationale désapprouve le rapport du comité Beaudoin-Oobbie institué aux fins de répondre aux revendications légitimes du Québec et déposé à la Chambre des communes le 28 février 1992.»

Voilà, M. le Président, la motion d'amendement que je dépose.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vais prendre cette motion d'amendement. Est-ce qu'on pourrait en faire des photocopies pour remettre aux membres de cette Assemblée? Sur la recevabilité de l'amendement proposé par M. le ministre, je suis prêt à entendre un intervenant de chaque côté.

Débat sur la recevabilité M. Michel Pagé

M. Pagé: Très brièvement. Vous savez, M. le Président, c'est toujours avec une extrême prudence qu'il faut se référer ou formuler une proposition d'amendement à une motion qui est inscrite et dont le débat est initié. Très rapidement, en me référant au règlement de notre Assemblée nationale qui régit nos travaux, on se doit de respecter l'article 197 du règlement. C'est bon, je crois, de se le rappeler. L'article 197 du règlement de l'Assemblée nationale indique ceci: «Les amendements doivent concerner le même sujet que la motion et ne peuvent aller à rencontre de son principe. Ils ne visent qu'à retrancher, à ajouter ou à remplacer des mots.» Essentiellement, ce que le règlement de l'Assemblée nationale prévoit, et je crois que c'est bien ancré dans notre réglementation, c'est bien ancré aussi dans la coutume, dans la jurisprudence qui s'est dégagée au cours des ans. C'est qu'un amendement apporté à une motion qui est débattue à l'Assemblée ne doit pas viser à altérer l'essence même de cette motion.

D'ailleurs, la doctrine indique que le but d'un amendement peut être d'apporter un tel changement dans une question, qu'elle soit acceptée par ceux qui, sans ce changement, devraient voter contre. D'ailleurs, si on se réfère, M. le Président, aux décisions, à la jurisprudence, on constate que la jurisprudence a toujours décidé dans le sens exprimé par la doctrine. Notre recueil de décisions en est rempli. D'ailleurs, je vais vous donner quelques citations, ici, d'exemples. Trois autres décisions se sont inscrites dans ce courant qui est majoritaire dans l'ensemble des institutions du parlementarisme britannique.

Le 22 mars 1990, une décision de vous-même, M. le Président - je suis heureux de m'y référer - «peut avoir pour effet d'apporter des changements même importants qui permettent un débat plus large ou, encore, qui permettent à un plus grand nombre d'y adhérer.» C'est donc dire que vous avez accepté vous-même, le 22 mars 1990, un projet d'amendement qui visait à faire en sorte que, une fois cet amendement reçu, il puisse rallier davantage de parlementaires autour de la motion à être adoptée par la Chambre.

Le 4 avril 1990, M. le vice-président, M. Cannon, au Journal des débats, pages 1597 et 1598: «En résumé, pourvu que l'amendement touche à la même question, on peut apporter, à cette question, toutes les retouches.»

Le 7 novembre 1990, décision de M. le vice-président, M. Lefebvre, page 4919 du Journal des débats: «Alors, l'amendement vise à rallier un plus grand nombre de parlementaires à la motion principale. L'amendement proposé n'écarte pas la motion principale.» Et ça, c'est bien important qu'on ne vienne pas écarter par un amendement ce qui fait l'objet du principal de la motion déposée. Je ne crois pas ici, dans les circonstances, que l'Opposition puisse soulever cette question-là.

Décision de M. le vice-président Lefebvre, le 27 novembre 1991: «Amender, c'est modifier, c'est rendre plus acceptable une proposition sans toutefois altérer le principe ou en changer le sens et la nature.»

Je pourrais aussi me référer à la décision du 26 octobre 1977 de M. Jean-Guy Cardinal, aussi inscrite au Journal des débats de l'époque. La décision: «...le but d'un amendement peut être d'apporter un tel changement dans une question qu'elle soit acceptée par ceux qui, sans ce changement, devraient [ou pourraient] voter contre.»

Enfin, je voudrais vous citer, M. le Président, la décision du 2 mars 1982, aux pages 2154 et 2158, alors que M. le député de Laviolette, M. Jean-Pierre Jolivet, agissait comme vice-président de la Chambre. Est-ce que la motion d'amendement était recevable? «Cette motion d'amendement est recevable, car elle n'écarte pas la question principale et ne fait que modifier la motion de fond pour permettre un débat plus large, tout en demeurant dans le sujet.»

Or, M. le Président, l'amendement déposé par le ministre de la Justice et responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes, le député de Jean-Talon, n'altère donc pas le principal de la motion déposée par le député de Lac-Saint-Jean.

Je me permettrai d'imiter peut-être - ça ne m'arrive pas souvent, que Dieu m'en garde,

parfois - d'imiter le député de Laviolette et de me servir du dictionnaire, ce matin, pour donner la définition du mot «désapprouver». On sait que la motion, le texte original se référait à un rejet, rejeter. «Désapprouver», c'est juger d'une manière défavorable, trouver mauvais, condamner, critiquer, protester, ce qui veut dire... Je suis persuadé que le député, mon honorable collègue, le leader adjoint de l'Opposition va y souscrire. D'ailleurs, le terme «rejeter», on peut se référer à sa définition. C'est renvoyer, c'est relancer, c'est abandonner. Alors, M. le Président, pour tous ces motifs, je plaide et je soutiens que l'amendement est recevable, et nous sommes prêts à poursuivre le débat. Merci. (11 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur la recevabilité, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. D'une façon un peu exceptionnelle, ça risque d'être plus court de ce côté-ci que du côté ministériel parce que, effectivement, nous croyons, selon notre évaluation rapide et sommaire, qu'il s'agit là d'un amendement parfaitement recevable. Remplacer le mot «rejette» par «désapprouve», dans les circonstances, ne dénature pas du tout l'esprit même, mais il me semble que ce qui doit vous guider, c'est plus la tradition parlementaire et, dans le présent cas, c'est important, je pense, de ne pas la modifier. C'est à dessein qu'on a présenté une motion très succincte, mais très claire, très explicite. Je suis complètement d'accord que l'expression «désapprouve» en remplacement de l'expression «rejette» ne détruit pas l'esprit même de la proposition.

Quant à l'autre partie, je n'ai pas de réserve majeure. Cependant, ça ne touche pas le fond de la proposition comme telle. Mais d'alléguer aujourd'hui qu'il s'agit là d'une commission qui a été instituée aux fins de répondre aux aspirations les plus légitimes et les plus fondamentales du Québec, c'est un peu fort sur le plan de la connotation historique. Ce n'est pas ça, c'est parce que le 24, on a dit: «Les propositions n'ont pas d'allure et recommencez le travail.» C'est bien plus parce que le gouvernement fédéral a décidé d'aller un peu plus loin - ce qui n'est pas le cas aujourd'hui dans la résultante de l'exercice - mais c'est mineur, en ce qui me concerne, par rapport à la proposition. Donc, peu importent les motifs pour lesquels on a eu à souffrir la commission Beaudoin-Dobbie, il n'en demeure pas moins que, sur le fond même, on est d'accord et on pense que l'amendement est recevable parce qu'on est complètement d'accord pour désapprouver.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Après vous avoir écoutés de part et d'autre, la prési- dence déclare recevable cet amendement du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

Je reconnais sur la motion et sur l'amendement M. le député de Westmount.

M. Richard B. Hoiden

M. Holden: Merci, M. le Président. Je suis probablement le seul député de la Chambre qui soit d'accord avec le premier ministre Mulroney quand il a dit que c'est les offres les plus généreuses que le Québec n'a jamais reçues depuis la Confédération. Je peux dire que je désapprouve la désapprobation des libéraux et le rejet de l'Opposition officielle, mais je trouve que de demander le rejet, c'est plus honnête que de demander quelque chose de moins que le rejet. Soit qu'on le rejette ou qu'on l'accepte, et on négocie à partir du rapport Beaudoin-Dobbie. Si le gouvernement n'est pas prêt à négocier à partir du rapport Beaudoin-Dobbie, qu'on rejette le rapport Beaudoin-Dobbie et qu'on s'en aille tout de suite au référendum. Qu'on ne gaspille pas quatre, cinq, six mois d'incertitude qu'on a actuellement.

L'amendement que vient de proposer le gouvernement, je le cite: «Afin de répondre aux revendications légitimes du Québec...». Ce n'est pas du tout le but du rapport Beaudoin-Dobbie, tout le monde sait que c'était ia ronde Canada et que la commission Beaudoin-Dobbie a travaillé dans l'optique d'arriver à une solution pan-canadienne. Qu'on arrête de parler de «Meech plus» ou de «Meech minus» ou même de «Meech différent».

Je prétends, M. le Président, que le travail de la commission Beaudoin-Dobbie constitue un progrès remarquable dans la situation pancana-dienne, que le monde dans le reste du Canada a commencé à beaucoup mieux comprendre la position du Québec et que le Québec a vu que le reste du Canada essaie fortement de comprendre ce qui se passe au Québec.

C'est sûr que l'Opposition officielle va condamner tout ce que le gouvernement fédéral essaie de faire dans le sens d'améliorer la Confédération canadienne, mais ça me surprend que le gouvernement du Québec ne commence pas au moins à considérer les négociations à partir du rapport Beaudoin-Dobbie avec une attitude plus positive, parce que, dans le fond, l'élément de Meech est déjà dans le rapport Beaudoin-Dobbie. La définition de la société distincte donnée dans le rapport Beaudoin-Dobbie n'est pas limitative. On dit «culture, Code civil», on dit «notamment» et on donne les éléments qui sont à la base de la société distincte. Mais quand on argumente en droit... On a des exemples que, notamment, il y a des éléments de base dans la société distincte. Ça ne limite pas un argument sur n'importe quel autre aspect de la société distincte à part la culture, la langue et le Code

civil. Alors, la société distincte est là comme c'était dans Meech et comme c'était dans toutes les réclamations du Québec auparavant. L'immigration est là aussi. Les 5 %, on ne les mentionne pas, mais, dans le fond, c'est le même système qui existe depuis l'accord Cullen-Cou-ture. Alors, ça ne change pas grand-chose, mais c'est ce qu'on a négocié avec Meech et le veto est là, comme le signalait le ministre tout à l'heure. La Cour suprême est là. Les limites au pouvoir de dépenser, c'est mitigé un peu mais, essentiellement, c'est la même chose que Meech, et on a ajouté la culture.

Le député de Lac-Saint-Jean dit qu'on ne donne rien quant à la culture. La communauté culturelle est venue ici, devant la commission, il y a quelques mois, et c'était loin d'être certain qu'ils voulaient que le fédéral laisse tomber la culture dans la province de Québec. On a accepté de part et d'autre que l'apport fédéral à la culture québécoise est loin d'être proportionnel à la population du Québec; c'est presque le double qui est dépensé au Québec, quant à la population du Québec, par rapport au reste du Canada. Le pouvoir de dépenser dans le domaine culturel, c'est loin d'être unanime parmi ceux qui sont le plus près de la culture québécoise, dans le sens des affaires culturelles.

On a ajouté le mariage et le divorce. C'a toujours été dans le Code civil mais, là, ça va devenir un pouvoir exclusif. Il y a des éléments très positifs dans le rapport Beaudoin-Dobbie et c'est sûr que l'Opposition officielle va les condamner. Et ce qui nous surprend, c'est que le gouvernement commence les négociations par condamner. Moi, je n'accepte pas que l'amendement où on désapprouve quelque chose, c'est moins grave que de rejeter quelque chose. C'est un synonyme l'un de l'autre. Ah oui, ah oui! Que le ministre de l'Éducation nous sorte son «Petit Robert» pour prouver qu'il y a une différence. Aux yeux d'un profane comme moi, il n'y a pas de différence du tout. Désapprouver ou rejeter, c'est la même chose.

Je trouve que c'est très mal partir les discussions avec le reste du Canada que de commencer à désapprouver ce qui va être à la base de toute offre qui va venir du fédéral, que ce soit au mois d'avril ou au mois de mai. Alors, je trouve que l'Opposition officielle est peut-être plus honnête. Si on n'est pas prêt à négocier à partir de Beaudoin-Dobbie, laissons tomber tout le jeu des négociations. Allons tout de suite à un référendum. Faisons décider le peuple québécois: Est-ce qu'on veut avoir l'indépendance ou est-ce qu'on va négocier avec le fédéral? Arrêtons de jouer le jeu. Le gouvernement ne fait que jouer le jeu de l'Opposition officielle quand il change la motion pour dire: Ah, oui, on ne veut pas rejeter, mais on veut désapprouver.

Moi, j'approuve Beaudoin-Dobbie et j'appuie le gouvernement fédéral. Je suis peut-être le seul. Même mes collègues indépendants ne sont pas sûrs en ce qui concerne Beaudoin-Dobbie. Moi, je dis que peut-être que les offres déjà faites par le fédéral n'ont pas été très généreuses mais, celle-ci, si on peut considérer Beaudoin-Dobbie comme une offre, c'est une offre, du point de vue du reste du Canada, très généreuse envers le Québec. Si on peut bonifier ça avec des négociations, tant mieux. Moi, en fédéraliste que je suis, j'approuve la commission Beaudoin-Dobbie et, en tant que fédéraliste, je voterai contre et la désapprobation et le rejet du rapport Beaudoin-Dobbie. Et je vous remercie, M. le Président. (11 h 20)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Westmount. Je reconnais maintenant M. le chef de l'Opposition officielle sur l'amendement et sur la motion principale.

Reprise du débat sur la motion amendée M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, dans les jours qui ont précédé la présentation du rapport Beaudoin-Dobbie, j'avais été assez intrigué par ce qu'un des vieux routiers des négociations fédérales-provinciales, M. André Ouellet, député libéral à Ottawa, disait et répétait à la télévision: «Ce n'est pas que nous sommes contre, disait-il, certains des aspects importants de Beaudoin-Dobbie, mais nous ne sommes pas d'accord avec l'approche.» C'était intrigant parce qu'on ne comprenait pas très bien ce qu'il voulait dire. Le rapport Beaudoin-Dobbie est sorti; je pense que j'ai mieux compris. C'est d'ailleurs là-dessus que je veux parler, ce matin. C'est là-dessus que je vais parler.

Le commentaire du premier ministre au sujet de Beaudoin-Dobbie, disant que c'est, à bien des égards, sur le plan de la répartition des pouvoirs, l'expression d'une sorte de relent de fédéralisme dominateur, ce n'était pas nécessairement évident, la signification de ce qu'il énonçait à ce moment. Pourtant, pour quelqu'un qui, lui aussi, a été impliqué dans les négociations fédérales-provinciales depuis si longtemps, oui, ça se comprenait.

Ce que M. Marcel Masse, un autre vieux routier des négociations fédérales-provinciales, le ministre de la Défense nationale, nous disait, hier, prenait aussi le même genre de signification en disant: «Ça fait 30 ans que le Québec cherche les pouvoirs législatifs pour se développer, s'épanouir comme nation, or, Beaudoin-Dobbie passe complètement à côté.» À certains égards, dans son intervention, ce que le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes nous disait ce matin, il y a quelques minutes, rejoint cette question. Beaudoin-Dobbie, M. le Président, est un document original: original par rapport à tout ce qui, au Québec, est réclamé par toute espèce de gouvernement depuis 30 ans; original

par rapport à la façon dont les Québécois voient les choses depuis fort longtemps.

En fait, le débat, depuis M. Duplessis, au fond, porte constamment sur la nature des pouvoirs législatifs et constitutionnels que le Québec doit avoir. Ça a commencé avec un M. Duplessis qui nous disait: «Rendez-nous notre butin.» De quoi parlait-il? Il voulait, au fond, que le Québec puisse contrôler aussi bien ses champs de dépenses, ses programmes de dépenses que ses impôts.

Lorsque M. Jean Lesage, premier ministre du Québec en cette Chambre, nous annonce - il y a longtemps, maintenant, en fait 28 ans - que le Québec se retire de 29 programmes conjoints fédéraux-provinciaux et va exiger - et finalement obtiendra - des points d'impôt et des transferts financiers en compensation des actions qu'Ottawa ne mènera plus au Québec, de quoi paiie-t-il? Il parle du partage des pouvoirs; il parle des pouvoirs que le Québec doit avoir pour se développer correctement.

Lorsque M. Daniel Johnson, en cette Chambre - le père, le premier ministre - disait que le Québec voulait récupérer 100 % des trois grands impôts directs, de quoi parlait-il? De la récupération, déjà, de toute une série de programmes de dépenses dans le domaine de la main-d'oeuvre, de l'assurance-chômage, etc.

Meech ne touchait pas à ça. Les propositions du lac Meech étaient destinées, chez ceux qui les ont proposées, à limiter le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral, mais, sur le plan des partages formels, il n'y avait rien dans l'accord du lac Meech spécifiquement à ce sujet. Mais, peu de temps après, on revenait, au Parti libéral du Québec, à cette question de la répartition des pouvoirs. Au fond, la tradition se maintenait. Le rapport Allaire demandait l'exclusivité de 22 champs. Certains, sans doute, trouvaient, parmi les fédéralistes, que c'était trop; d'autres trouvaient que c'était très bien. Le rapport Allaire revenait, au fond, à ce qu'il y a probablement de plus traditionnel dans les demandes du Québec quant aux champs de compétence, quant aux domaines de législation.

Le 24 septembre, le gouvernement fédéral fait un ensemble de propositions. On a maintenant l'habitude de considérer que puisque ces propositions ont été, à toutes fins pratiques, rejetées par le Québec, c'était une sorte d'aberration passagère en attendant d'autres propositions fédérales. Mais enfin, entre nous, quand ça a été présenté le 24 septembre, ce n'était pas considéré par Ottawa comme des propositions passagères ou comme une sorte de tentative à l'aveuglette; ça avait été trop longuement préparé, c'était trop détaillé. Bon, que le gouvernement fédéral ait considéré que ses propositions aient échoué à ce moment-là et qu'il ait créé un comité pour les examiner et, donc, qu'il nous parle de propositions à venir, sans doute. Mais le 24 septembre, un ensemble de propositions sérieuses sont mises sur la table et, elles aussi, ces propositions, cherchent à dégager des champs de compétence qui pourraient être passés aux provinces en général et au Québec en particulier, même si plusieurs de ces champs de compétence, comme le disait le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes tout à l'heure, étaient des domaines qui étaient reconnus depuis longtemps comme des champs de compétence provinciale. Je pense aux Affaires municipales, par exemple. Mais l'approche était la même.

Or, avec Beaudoin-Dobbie, ça change; ça change profondément. Ce que Beaudoin-Dobbie nous propose, au fond, c'est un mode de discussion entre le gouvernement fédéral et une ou plusieurs provinces pour définir plus tard ce que pourrait être un partage ou bien de compétences législatives ou bien d'arrangements, de répartition des dépenses par les deux ordres de gouvernement. C'est un mode d'emploi que Beaudoin-Dobbie présente.

Je vais essayer de l'expliquer tel que, moi aussi, qu'est-ce que vous voulez, vieux routier des négociations fédérales-provinciales, je le vois. D'abord, on introduit - bien qu'il y ait eu des traces dans le passé, comme le disait le ministre tout à l'heure - le principe de la délégation des pouvoirs. Un ordre de gouvernement pourrait déléguer à un autre ordre de gouvernement, un gouvernement pourrait déléguer à l'autre le pouvoir d'intervenir de façon législative dans certains champs. Cette délégation - comprenons-nous bien - doit donner lieu à un accord. Il faut, pour déléguer, que ça se fasse au moins à deux. Il faut qu'Ottawa dise: «Voici ce que je serais prêt à déléguer.» Et il faudrait qu'une province, par exemple, le Québec, dise: «Voici ce que j'accepterais qu'on me délègue ou ce que je demande qu'on me délègue.» (11 h 30) ce n'est pas parce qu'on crée le principe de la délégation que l'entente est faite. on pourrait d'ailleurs fort bien imaginer à cet égard que ça change d'un gouvernement fédéral à l'autre, parce que le système de délégation qui est prévu dans beaudoin-dobbie est une délégation pour cinq ans et, automatiquement, devrait être renouvelée ou modifiée au bout de cinq ans. les gouvernements changent, m. le président. non seulement les gouvernements changent mais les gouvernements ont des idées fort différentes à cet égard. il est clair, par exemple, que m. trudeau et m. mulroney n'ont pas eu exactement le même point de vue sur ce plan; qu'entre - je ne sais pas, moi - michael pearson et pierre trudeau, il y avait des différences majeures. on ne vit pas dans un système de parti unique ici et garanti de rester en place jusqu'à la fin des temps. les points de vue sont très opposés quant à la centralisation ou à la décentralisation. alors, la délégation devient une sorte de délégation à clapet. pendant quelques années on délègue un peu, pendant quelques années on

rattrape toutes les délégations. Plus que ça, on prévoit même, dans Beaudoin-Dobbie, qu'unilatéralement l'une des deux parties dans une délégation peut dénoncer la délégation. Donc, ça peut non seulement changer tous les cinq ans, ça peut changer tous les deux ans.

On prévoit aussi comme mode d'emploi des arrangements, des accords entre un gouvernement et une province. Des accords, dont les échéances, le contenu, les clauses d'abolition seraient déterminés par l'arrangement ou l'accord lui-même dedans. Là, dans le cas des accords, les discussions porteraient même sur la durée de l'accord et sur la façon de l'amender et ça pourrait être différent d'un accord à l'autre. Et alors, ce mode d'emploi ayant été exposé par Beaudoin-Dobbie, là, on donne des exemples de ce qui pourrait se poursuivre.

Je ne reviendrai pas sur ce que le ministre lui-même disait tout à l'heure au sujet des pêcheries et des faillites personnelles. Vraiment, dans le cas des pêcheries, ouvrir une compétence du Québec dans le cas des pêcheries intérieures mais avec prépondérance du gouvernement ou de la législation fédérale, M. le Président, deux gouvernements pour s'occuper de la truite, vraiment! vraiment! Et où on se soucie de savoir à l'égard de la truite quel est le gouvernement prépondérant... Bon! Des propositions qui en sont rendues à des histoires pareilles, n'est-ce pas, reflètent un état d'esprit navrant. Si on est prêts à se chicaner sur la juridiction de la truite, imaginez les chicanes sur le reste des événements!

Je ne reviendrai pas sur la question de la culture. Je pense que c'est tout à fait clair. Il y a eu une sorte de supercherie dans Beaudoin-Dobbie de dire: Pouvoir exclusif, quand on traduit en texte juridique le rapport, d'autre part, pour se rendre compte, à l'intérieur du rapport, que le gouvernement fédéral continue de faire tout ce qu'il fait à l'heure actuelle et comme il l'entend.

Ce qu'il y a de remarquable dans ce rapport Beaudoin-Dobbie, c'est que même les six champs que, dans les propositions du 24 septembre, on reconnaissait comme des champs de compétence exclusive du Québec ou des provinces - je reviens aux affaires municipales, aux mines, aux forêts, etc. - ces six champs que le 24 septembre le gouvernement fédéral reconnaissait comme étant de juridiction exclusive, qu'est-ce qu'on en fait dans Beaudoin-Dobbie, de ces six champs? On en fait l'objet de délégation ou d'accord. On revient même sur l'exclusivité que le gouvernement fédéral semblait prêt à proposer le 24 septembre dernier. Et on donne d'autres exemples: oui, la politique familiale, ça pourrait être l'objet du mode d'emploi dont je viens de parler tout à l'heure; oui, le développement régional pourrait être l'objet d'arrangements ou de délégation de pouvoirs. Mais voit-on où ça amènerait le Québec? Voit-on ce que ça veut dire fondamentalement? La poursuite jusqu'à la fin des temps des discussions constitutionnelles, des batailles entre les gouvernements pour savoir qui contrôle quoi, et des batailles qui n'arrêteront jamais. On ne peut pas faire comme si les 30 dernières années n'existaient pas. On en a, pour utiliser une expression à la mode ces jours-ci, tout le monde en a le ras-le-bol de ces discussions qui n'en finissent plus. Là, on nous promet, comme le disait le député de Lac-Saint-Jean tout à l'heure, la crise constitutionnelle permanente.

Il y a plus sérieux aussi encore que ça, M. le Président. C'est que ce système que nous avons bien connu depuis 30 ans a entraîné des chevauchements, des doubles emplois, des oppositions de politiques que bien des gens sur le terrain ont payés, un gaspillage de ressources publiques considérable. C'est toujours un peu difficile de faire le calcul de ces gaspillages en termes d'argent; d'avoir, comme ça, deux gouvernements qui se concurrencent l'un et l'autre, s'opposent l'un et l'autre. Mais, enfin, tout le monde reconnaît qu'à l'heure actuelle c'est certainement, pour le Québec seulement, un gaspillage de ressources publiques de, quoi, quelques milliards de dollars dans deux champs seulement. Deux champs d'activité. Bélanger-Campeau arrivait à au-delà de 500 000 000 $ de dépenses additionnelles dues aux chevauchements, juste pour deux champs! Il y en a pour quelques milliards.

Qu'est-ce qu'on nous promet avec l'approche Beaudoin-Dobbie? On nous promet que ça va continuer comme ça, qu'il va y en avoir encore davantage et qu'on va se retrouver dans un nombre croissant de champs avec des politiques incompatibles les unes avec les autres, avec du gaspillage, avec des chevauchements, avec des politiques incohérentes, avec un gouvernement qui propose une chose, un gouvernement qui propose le contraire et des années de discussions pendant que les deux s'installent face à face, comme des chiens de faïence, dépensent et se gênent. C'est dans ce sens-là que Beaudoin-Dobbie est un rapport très original. Personne, jusqu'à maintenant, n'avait été aussi loin à souhaiter le désordre, l'incohérence et les possibilités de gaspillage de fonds publics à une époque où les gens en ont quand même assez du fardeau fiscal. Ils trouvent qu'ils sont déjà beaucoup trop taxés. Et, là, on leur promet...

Il faut comprendre, concrètement parlant, ce que ça veut dire, un système comme celui-là. C'est non seulement la consolidation du fardeau fiscal actuel, mais c'est de dire... Et chaque fois que les gouvernements vont s'entraîner encore dans des gaspillages et des rivalités qui coûtent cher aux gens, qui va payer au bout du compte? C'est dans ce sens que le rapport Beaudoin-Dobbie, M. le Président, doit être rejeté, ou que l'Assemblée nationale doit le désapprouver, pour reprendre l'amendement qui a été proposé tout à

l'heure et auquel je souscris. Mais il faut que ce soit clair.

Je pense que cette Assemblée nationale, qui a été le lieu de tant de débats, justement, sur ces questions de partage de pouvoirs, depuis si longtemps, qu'au moment où on nous propose de continuer ça, d'aller plus loin encore dans l'incohérence, le désordre et le gaspillage, l'Assemblée nationale dise: Non, non, non! Enfin, écoutez, nous avons collectivement une expérience suffisante d'une situation pareille pour ne pas en vouloir encore davantage. Je crois que c'est ça, surtout, que l'Assemblée nationale doit exprimer clairement: Pas davantage encore de ce désordre que, des deux côtés de la Chambre, et quels que soient les partis politiques au pouvoir au Québec, on dénonce depuis si longtemps.

Bien sûr, M. le Président, on dira: On ne peut pas attendre autre chose d'un souverainiste. Je comprends, dans le débat qui est engagé sur le pian constitutionnel à l'heure actuelle, que les souverainistes regardent ces propositions diverses qui nous viennent d'Ottawa et manifestent une opposition parfois assez musclée à leur égard. Dans l'analyse de ces propositions, nous avons cherché à être aussi rigoureux que possible, nos prises de position ne surprennent pas nécessairement. Mais ce n'est pas seulement dans cette optique-là que je parle ainsi ce matin. Je parle comme quelqu'un qui a été fédéraliste longtemps, qui a participé à ces conférences fédérales-provinciales, a l'élaboration, à une tentative d'élaboration de politique fédérale-provinciale pendant bien des années de ma vie, qui a cru pendant longtemps que ces choses-là pouvaient s'arranger, qui a vu le système se détériorer d'année en année et qui, à un moment donné, a fait son choix, a dit: Je veux sortir de ce système. (11 h 40)

Mais je pense que ça me justifie aujourd'hui de m'adresser à ceux qui sont encore fédéralistes, qui croient encore possible de sauver le système, qui sont gênés, au fond, par ce que Beaudoin-Dobbie révèle ou propose, et de leur dire, à cet égard, à cet égard du principe fondamental de Beaudoin-Dobbie: II n'y a pas de raison que nous, gardiens autant que nous le pouvons, tous ensemble dans cette Assemblée nationale, des intérêts profonds des Québécois, nous ne puissions pas nous entendre pour être tout à fait clairs à l'égard de ce qui nous est proposé. De la part des souverainistes sans doute, le non n'est pas étonnant pour bien des observateurs. Mais même pour ces fédéralistes qui croient dans le système, qui espèrent pouvoir le sauver, eux aussi, je pense, peuvent désapprouver cette approche de Beaudoin-Dobbie et dire: Non, on ne mangera pas de ce pain-là. Trouvez autre chose. Changez l'approche. Mais ne nous promettez pas que ces désordres du système, que tous les Québécois dénoncent depuis si longtemps, quel que soit leur parti politique, que cette incohérence des politiques économiques, fiscales, de développement régional, de politiques sociales qu'on dénonce depuis si longtemps, tous ensemble, que cette incohérence, ce gaspillage, on va nous en promettre davantage, qu'on nous promette que ce sera comme ça encore pendant des années. Non, non, non!

À cet égard, M. le Président, je suis heureux sans doute, mais aussi, en un certain sens, un peu ému de voir l'attitude que le ministre des affaires intergouvernementales a adoptée tout à l'heure. Il a présenté des amendements à la proposition que nous avons devant nous qui nous paraissent tout à fait acceptables. D'autant plus que dans la mesure où tous, ou à peu près tous, à l'Assemblée nationale, nous pouvons prendre le même genre d'attitude, nous savons très bien quelle force cela est susceptible d'avoir à l'égard des tractations qui se poursuivent avec Ottawa.

Pour les souverainistes, c'est une autre étape. Pour les fédéralistes, c'est, je pense, un message clair qu'ils envoient à Ottawa. Je n'ai pas d'espoir dans l'aptitude de ce système de se corriger. D'autres ont l'espoir de voir le système se corriger. Les uns et les autres, à quelque chose d'aussi potentiellement dommageable pour le Québec que cette approche fondamentale de Beaudoin-Dobbie, nous pouvons dire, je pense, tous ensemble, en gardant nos convictions profondes: Là-dessus, non, pas question! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le chef de l'Opposition officielle. Nous sommes sur la motion du député de Lac-Saint-Jean et sur l'amendement proposé par M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et je reconnais maintenant M. le député de Viger. M. le député.

M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Je pense, M. le Président, que, d'entrée de jeu, il faut faire une distinction entre nous, du Parti libéral, et le Parti québécois. Je pense que sur le rapport Beaudoin-Dobbie, sur certains aspects, on est d'accord. C'est clair qu'il y a des aspects, dans ce rapport, dans ces propositions, qui sont insatisfaisants pour le Québec, mais nous disons, M. le Président, que ce rapport peut être amélioré. C'est ça, la différence entre nous et le Parti québécois. Le Parti québécois, son objectif premier et dernier est l'indépendance du Québec. Nous disons: Regardons avant d'aller jusqu'à l'indépendance du Québec. Essayons de voir vraiment si on peut faire des améliorations à l'intérieur du fédéralisme canadien. Nous disons, M. le Président, comme l'a dit le ministre des affaires intergouvernementales canadiennes, que, dans ce rapport-là, il y a des aspects positifs et il y a des aspects qui sont insatisfaisants.

Les aspects positifs sont ceux où on se rapproche de Meech. On l'a dit et on le répète. Le Parti québécois l'avait dit même lors des propositions du 24 septembre, que c'était un plafond. La démonstration est claire que, les propositions du 24 septembre, ce n'était pas un plafond. Beaudoin-Dobbie vient, d'une certaine manière, améliorer les propositions qui ont été déposées le 24 septembre en ce qui regarde particulièrement l'approche de Meech: la question du droit de veto - je pense que la démonstration a été faite très clairement par le ministre - le choix des trois juges à la Cour suprême, l'immigration.

C'est sûr qu'il faut clarifier. Il faudrait voir vraiment un peu plus en profondeur la question de la société distincte et la question du pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral. M. le Président, c'est dans ce sens-là que nous disons qu'il faut absolument qu'il y ait encore des modifications à ce rapport. Nous le disons parce que nous y croyons. Moi, j'ai eu l'occasion de participer au débat «Droit de parole» avec des membres du gouvernement fédéral et des membres du Parti québécois. C'est à ce moment-là que même des membres du parti au pouvoir, du Parti conservateur à Ottawa, ont dit très clairement que ce n'était pas un plafond, les propositions Beaudoin-Dobbie. C'est sûr que c'est une porte, si on peut dire, entrouverte et nous croyons qu'il faut aller voir au fond de cette porte ce qu'il y a de concret pour le Québec. C'est seulement après ça que nous pourrons décider si, vraiment, le gouvernement fédéral a des intentions sérieuses et concrètes de donner certains pouvoirs au Québec pour sa spécificité, disons, de société distincte.

M. le Président, c'est dans ce sens-là que je considère que la motion du Parti québécois est malhabile. Elle est inopportune. Elle est prématurée parce que nous disons, actuellement, qu'il faut absolument aller au but, à la fin de tout ça. On se rappellera que le Parti québécois, à un certain moment, voulait courir le beau risque, mais je pense, M. le Président, que la preuve est faite depuis longtemps que le Parti québécois aime jouer, mais n'aime pas aller jusqu'à la fin du jeu. On se rappellera, M. le Président, c'est comme un petit garçon en culottes courtes qui regarde les grands joueurs et qui veut participer au jeu. Quand on lui donne la chance de participer, au premier petit coup, on boude, on se retire et on dit: Non, on ne va plus jusqu'au bout.

M. le Président, c'est ça aussi l'attitude du député de Lac-Saint-Jean. On se rappellera que le député de Lac-Saint-Jean a participé, a voulu courir le beau risque. Il y en a d'autres qui ont quitté; lui, il a voulu courir, mais il n'a jamais eu le courage d'aller jusqu'au fond de sa pensée. On se rappellera qu'on a la loi 150. La loi est là pour établir un échéancier dans lequel, je crois, le gouvernement fédéral, actuellement, est disposé à opérer. Nous croyons, M. le Président, qu'il faut aller jusqu'au fond, qu'il faut aller jusqu'au bout de cet échéancier-là parce que, sur la question du partage des pouvoirs, on l'a dit, le premier ministre l'a dit et le ministre des affaires intergouvernementales canadiennes l'a dit: Ce n'est pas clair. Ce n'est pas la partie la plus limpide du rapport et nous voulons absolument que ce rapport soit limpide sur le partage des compétences. Le Québec, en tant que société distincte, a besoin des outils pour promouvoir et développer sa société distincte et c'est dans ce sens-là qu'il faut absolument que le partage des compétences soit éclairci. (11 h 50)

Comme je le disais tantôt, M. le Président, ce n'est pas en rejetant d'un seul coup le rapport Beaudoin-Dobbie qu'on peut progresser, qu'on peut vraiment aller de l'avant parce que, en rejetant le rapport, on rejette même les éléments satisfaisants qui sont à l'intérieur de ce rapport-là et nous croyons profondément, M. le Président, qu'il peut y avoir encore des améliorations. C'est clair, le temps presse. Il faut absolument que le gouvernement fédéral fasse des pas de géant, mette des bouchées doubles pour essayer de nous faire des offres valables pour que le Québec puisse vraiment se reconnaître à l'intérieur de ces propositions et à l'intérieur de cette fédération canadienne.

M. le Président, moi, personnellement, je suis contre la proposition du Parti québécois et en faveur de l'amendement qui a été proposé par le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, parce que nous disons que ce rapport-là ne répond pas aux aspirations légitimes du Québec, aux revendications légitimes du Québec depuis 30 ans. Il y a sûrement un pas en avant dans la bonne direction, mais ce n'est pas suffisant. Voilà, M. le Président, la raison pour laquelle il faut continuer, il faut aller au-delà de la porte qui est entrouverte. Il faut aller voir jusqu'au bout ce que le reste du Canada et le parti fédéral vont nous proposer.

M. le Président, c'est avec cet esprit et cette attitude que nous voulons aller jusqu'au bout. Nous croyons que c'est dans l'intérêt supérieur du Québec, dans l'intérêt des citoyens, de la population du Québec d'aller jusqu'au bout, de suivre ce processus, parce que je crois que, tous ici, on représente la population du Québec, on est ici pour travailler dans l'intérêt des citoyens. Je crois, M. le Président, qu'on ne peut pas entraîner une population dans un tunnel sans lumière, et c'est ce que le Parti québécois veut faire actuellement. Il veut absolument aller vers l'indépendance. La souveraineté, l'indépendance, c'est le plus beau, le meilleur qu'on puisse avoir au lendemain de cette séparation.

M. le Président, c'est très clair, même dans les commissions auxquelles j'ai le plaisir de participer, que la très grande majorité des économistes, la très grande majorité des gens qui sont venus devant ces commissions nous ont dit

très clairement qu'il y aura une période très délicate et très grave au moment où il y aura une séparation du Québec. Et c'est là que nous disons: Avant d'emprunter ce tunnel qui n'a pas de lumière, il faut faire tous les efforts nécessaires pour essayer de trouver des accommodements qui seront dans le désir et les aspirations de la population du Québec. C'est dans ce sens-là, M. le Président, que je dis qu'il faut absolument y aller, et nous y allons. C'est seulement au bout de ce chemin. Ça veut dire que le 26 octobre 1992, c'est seulement à ce moment-là qu'on pourra dire: Oui, on a eu la possibilité de les améliorer. On a eu la possibilité de faire accepter par le reste du Canada les revendications traditionnelles du Québec et si on n'a pas réussi, M. le Président, c'est la population, à ce moment-là, qui va décider du chemin à suivre. Mais cette population doit être au courant de tous les aspects du renouvellement du fédéralisme et aussi des inconvénients et des avantages d'une éventuelle séparation. Nous, nous allons faire notre devoir de représentants de la population, de mettre la population au courant de tout ce qui va se passer dans ce dossier-là de façon que cette population puisse se décider et prendre une décision très éclairée et dans le meilleur intérêt du Québec et de la population du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): merci, m. le député de viger. sur cette même motion et sur l'amendement à la motion principale, m. le député de d'arcy-mcgee.

M. Robert Libman

M. Libman: Merci beaucoup, M. le Président. La rhétorique fausse et un peu facile que j'entends ce matin m'inquiète. What we have heard this morning can give us some insight into what can surely become a serious problem for federalists in Québec if the Premier of Québec holds a referendum strictly on the offers from the Federal Government. We have seen in the past couple of weeks the immediate reaction of the Official Opposition and I think it becomes very clear that if the offers presented to Québec left the Federal Government as nothing but a central bank and a post office that handed out equalization payments to the provinces, the Official Opposition would still reject any proposal on the table. So, I think that the debate, to some extent, has been dishonest. We have to understand that no matter what is on the table, we are going to hear angry denunciations from the Parti Québécois, which does not reflect the majority of opinion of Quebeckers.

But another thing we have to understand is that as long as the focus is placed on an actual offer that is sitting on the table, sovereignists have the opportunity to hack away at it with all the vim and vigor that they are capable of mustering, without having to defend the actual viability of their own alternative, that being sovereignty or the separation of Québec, whose consequences for Québec will be far more devastating than anything imaginable, than any conceivable renovation or renewal of the Federation. And that is something we have to understand, that if the sovereignists are ready to criticize an initiative from the Federal Government, they have to be able to prove to Quebeckers that their alternative is a better alternative and they have not, in 30 years of discussing this matter, come close to even proving that sovereignty is in the best interest of all Quebeckers.

M. le Président, our party cannot support the Beaudoin-Dobbie report as is. We cannot support it as of yet. The distinct society clause, for example: as long as we have a government in place and an official opposition in place that have shown disregard for minority communities, we cannot trust the Government with the distinct society interpretive clause in their hands. And the Premier speaking against the reformulation of the distinct society clause, which adds greater protection to minority communities, has sent a message of intolerance across Canada: That there is no place in Canada to develop minority communities, minority francophone communities outside Québec, and that the development of minority communities in Québec goes against the légitime aspirations of preserving and promoting the distinct society of Québec.

What has to be understood is that a society is stronger and richer if its minority communities are strong and develop. And the Premier must recognize that it is a fundamental aspect, a cornerstone of our country, that all minority communities throughout this land be promoted and developed and should be encouraged to flourish. Even though we cannot support the Beaudoin-Dobbie report at this stage because of the distinct society clause, because of the level of decentralization, this Assembly must not be so nearsighted, so arrogant as to reject the report at this stage. The motion of this morning will send out a very disheartening message to the rest of Canada, an arrogant reflex to a report that goes very far towards satisfying the legitimate aspirations of Québec as enunciated by Québec over the past 30 years. And the reflex of this motion could threaten to unravel the entire negotiation process.

If our Premier is committed to renewal, he must go to Ottawa this week and sit around that table and make it very clear to the rest of Canada, who are not mind readers, what Québec really wants out of this process. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Sur cette même motion et sur cet amendement, Mme la députée

de Saint-Henri. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Il me fait extrêmement plaisir d'intervenir aujourd'hui sur la motion de l'Opposition portant sur le rapport Beaudoin-Dobbie. À titre de membre de la commission parlementaire chargée d'examiner les offres qui permettront de renouveler le fédéralisme canadien, le rapport Beaudoin-Dobbie m'intéresse au plus haut point. C'est un document important, dense et qui mérite d'être examiné avec beaucoup d'attention. Le rapport Beaudoin-Dobbie marque une étape très importante dans le processus de renouvellement de la Constitution.

Le fédéral commence à préciser ses intentions. Nous entrons dans la dernière étape d'un long marathon qui dure depuis 30 ans au Québec. Je suis heureuse, M. le Président, de voir que l'Opposition ait accepté l'amendement du ministre responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes, car la motion de l'Opposition nous indiquait très clairement ce que nos amis d'en face ou d'à côté, en ce qui me concerne, ont l'intention de faire juste à la fin du marathon.

Ce qu'ils vont faire est simple et tout à fait prévisible. Ils vont lâcher, ils vont abandonner, ils vont jeter la serviette. Ils ne veulent pas se rendre jusqu'au bout. Ils manquent de souffle, M. le Président. Dans le dossier constitutionnel, l'attitude de l'Opposition est perceptible à 100 kilomètres et même à 100 milles à la ronde. C'est l'intolérance, l'impatience, l'intransigeance. L'article 1 du programme du Parti québécois, c'est l'atteinte de la souveraineté. Cette fixation est rapidement devenue un dogme et tout ce qui retarde l'atteinte de la souveraineté est à proscrire. Le rapport Beaudoin-Dobbie évidemment ne propose pas la souveraineté. Que fait alors le Parti québécois? Il s'empresse de le jeter à la poubelle. (12 heures)

La motion de l'Opposition est tout à fait conforme à la démarche suivie par le Parti québécois depuis plusieurs mois: II faut abattre l'appareil avant qu'il ne décolle. Il faut tirer sur le canard sur le lac, avant qu'il ne prenne son envol. Ces phrases-chocs de l'Opposition trahissent bien son manque de rigueur dans le dossier constitutionnel. On suit le mot d'ordre, M. le Président. Si ce n'est pas la souveraineté, ce n'est pas bon, ça ne vaut même pas la peine d'en parier. Il n'existe qu'une vérité, la leur. Point final. Point à la ligne! Cette façon de procéder n'est pas très démocratique et c'est pourquoi il fallait s'opposer à la formulation proposée par l'Opposition.

M. le Président, le rapport Beaudoin-Dobbie est loin de répondre à toutes les attentes du Québec, c'est vrai. En conférence de presse, la semaine dernière, le premier ministre a clairement fait ressortir les forces et les faiblesses du document. Le rapport Beaudoin-Dobbie marque une étape qui n'est pas la dernière. Ce n'est pas le dernier mot du Canada anglais. Pour cette raison, il faut poursuivre le processus. Contrairement au Parti québécois, le Parti libéral entend adopter une approche plus pragmatique, plus réfléchie et plus ouverte.

Le rapport Beaudoin-Dobbie n'est pas entièrement satisfaisant, mais on ne peut certainement pas le rejeter globalement. Il faut se servir des éléments positifs du rapport pour améliorer les propositions, aller plus loin dans le sens des aspirations légitimes du Québec et des revendications traditionnelles de notre peuple. J'invite donc l'Opposition à faire preuve d'un peu de respect et de patience. La loi 150 prévoit que le dénouement du dossier constitutionnel doit être connu au plus tard le 26 octobre 1992. Nous sommes, aujourd'hui, M. le Président, le 11 mars 1992. Le processus suit son cours normalement et nous entendons respecter la loi 150.

Le Québec souhaite ardemment régler le dossier constitutionnel une fois pour toutes. Cette volonté n'est pas propre au Québec, les autres provinces et le gouvernement fédéral ont également hâte de consacrer leurs énergies à d'autres questions que la Constitution. Il faut absolument profiter de ce contexte pour arriver à un règlement satisfaisant pour le Québec.

En conclusion, M. le Président, le dépôt du rapport Beaudoin-Dobbie sonne la onzième heure. Quand on participe à un marathon, il faut parcourir 42 kilomètres; on vient de franchir le panneau du 40e kilomètre. J'ai bien l'intention, tout comme mes collègues du Parti libéral, de terminer brillamment la course. Après tant d'efforts, il ne saurait être question d'abandonner aussi près de la ligne d'arrivée. Notre objectif fondamental demeurera toujours le même: obtenir la meilleure part pour le Québec, le bon choix. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Saint-Henri. Je suis prêt à reconnaître maintenant M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle, en lui indiquant qu'il reste 4 minutes à sa formation politique.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président, très rapidement. Ce n'est pas en 4 minutes qu'on va faire ce que j'appelle un exposé de fond, mais c'est quand même trop gros pour laisser passer autant d'hypocrisie. On vient d'entendre deux ou trois ministériels qui laissent voir que la position du Parti québécois serait une position où on serait les seuls à avoir la vérité, une position dogmatique et ces gens-là essaient de laisser croire, pendant quelques minutes, que. dans leur

grande sagesse, eux autres, il fallait qu'ils modifient notre proposition parce que, nous, on est trop radical. Imaginez, on demande de rejeter ce que tout le monde rejette! J'y reviendrai dans une phrase, tantôt. On demande juste de rejeter parce qu'à peu près tout le monde dit: C'est insatisfaisant, ça ne correspond pas du tout au débat qui, malheureusement, a encore trop duré. Dans leur grande finesse, eux autres, ils ont dit: Nous, on ne rejette pas, on désapprouve. Si au moins ils connaissaient le sens des termes! Il est manifeste et partout désapprouvé. C'est inconvenant, c'est mauvais, ça ne correspond pas du tout à la réalité qui est nôtre.

Là, je cite le dictionnaire, le «Petit Robert»: «Désapprouver: juger d'une manière défavorable, trouver mauvais.» Imaginez, ils ne connaissent même pas le sens des mots. Leur proposition serait meilleure parce que, eux autres, ils sont d'accord pour désapprouver le rapport Beau-doin-Dobbie.

Je voudrais juste, encore là, dans les quelques minutes que j'ai... Écoutez, ce n'est pas le Parti québécois qui le rejette uniquement, le rapport Beaudoin-Dobbie, la confusion érigée en principe constitutionnel; ce n'est pas nous autres, c'est les centrales syndicales. À titre d'exemple, le Mouvement national des Québécois rejette le rapport Beaudoin-Dobbie parce que ça ne correspond pas du tout à la réalité historique qui est la nôtre. Ça ne s'inscrit pas du tout dans cette tradition du Québec des 30 dernières années, au moins pour ce qui est des compétences. Alors, nous, on n'a pas de position traditionnelle, on a le mérite d'avoir une position claire, précise. Tout l'argumentaire qui a été développé par notre porte-parole officiel, aujourd'hui, portait beaucoup plus sur la vision même des fédéralistes qui conviennent que le rapport qui a été déposé par le comité est unanime dans les dissidences, M. le Président. C'est la seule unanimité qu'on peut constater. Il y a tellement de dissidences qu'on ne peut pas aller plus loin avec ça. Alors, faire accroire à la population que quelque chose que l'on rejette, quelque chose que l'on dénonce peut constituer une base de négociation, moi, je prétends que c'est de l'hypocrisie et on n'a pas le droit de marcher là-dedans. Il faut dénoncer cette hypocrisie.

Ce n'est pas pour rien qu'on a souscrit à l'amendement proposé; l'amendement proposé est plus fort que le nôtre. Alors, c'est évident qu'on va prendre quelque chose de plus fort qui dit: Ça ne peut pas constituer une base de négociation. Et ce n'est pas au nom de notre grande sagesse, c'est au nom de la logique traditionnelle de ce débat-là au Québec qui fait qu'on a toujours revendiqué des compétences pour les gens qui avaient espoir dans le renouvellement du fédéralisme. Nous, on pense que ça a assez duré, ces folies-là; nous, on pense que le moment est venu de tourner la page. Mais, ce matin, ce n'était pas une discussion sur notre position, c'était une discussion sur une motion qui dit: Comme Assemblée nationale, soyons assez Québécois et Québécoises pour, unanimement, dire: Ce n'est sûrement pas là-dessus qu'on va être capables de faire progresser ce qu'eux appellent le renouvellement du fédéralisme. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Je reconnais maintenant M. le député de Salaberry-Soulanges et lui indique qu'il reste 10 minutes à la formation politique qu'il représente. M. le député.

M. Serge Marcil

M. Marcil: Merci, M. le Président. On vient d'entendre encore un discours démagogique, lorsque le député d'Abitibi-Ouest s'est levé pour dire: C'est de l'hypocrisie encore qu'on dénote par l'intermédiaire des intervenants du parti ministériel. C'est drôle d'entendre ça, surtout de sa bouche, mais là on commence à être habitué de l'entendre. Lorsqu'on parle d'hypocrisie, c'est bien plus de dire que nous sommes pour un Québec indépendant, mais que nous voulons garder notre citoyenneté canadienne, notre passeport canadien, notre monnaie canadienne. Ça, pour moi, c'est une position, c'est un discours hypocrite et c'est un petit peu ça que ces gens-là font depuis le début. On essaie d'enclencher un mouvement auprès de l'ensemble de la population du Québec afin de l'amener à boycotter tout mouvement positif qui pourrait venir de l'ensemble du Canada pour, nécessairement, régler une fois pour toutes le problème de la Constitution canadienne.

M. le Président, c'est simple. Meech, c'était cinq conditions, ça avait été accepté par tout le monde. Excusez le mot, mais ça a foiré à un moment donné et, à partir de ce moment-là... Et on savait que la position du Parti québécois, à l'époque, était contre Meech, que ça ne valait pas une cent et qu'il ne fallait pas que les Québécois acceptent Meech. Après que Meech eut été retiré - vous connaissez un peu les raisons - là, les gens de l'autre parti étaient scandalisés à ce moment-là. On s'est dit: Comment ça, le Canada rejette le Québec parce qu'on n'a pas accepté Meech?

Ça a été la commission Bélanger-Campeau, suite à un discours de notre premier ministre. On a formé une commission, on l'a équipée de 36 bons commissaires. Ils ont fait une consultation publique, ils sont revenus, ils ont déposé deux recommandations. Dans les recommandations, on nous disait quoi? Attendez les offres. Ne faites pas de démarche dans ce sens-là, attendez des offres formelles du gouvernement fédéral ou du Parlement d'Ottawa et mettons sur pied deux commissions parlementaires, une pour étudier les offres liant l'ensemble des provinces et le gouvernement canadien et étudions également

tous les impacts socio-économiques de la souveraineté du Québec. C'était ça. Donc, on joue exactement, on applique exactement les recommandations de la commission Bélanger-Campeau dont les membres du Parti québécois ont fait partie et ils ont signé également. On fait exactement ce que la commission Bélanger-Campeau, la commission publique a recommandé à l'Assemblée nationale et on a même fait une loi pour institutionnaliser tout ça, M. le Président. (12 h 10)

Au fédéral, eux autres, ils ont décidé de faire une autre commission, qui s'appelle Beau-doin-Dobbie. Ils ont fait le tour du Canada, contrairement à ce qu'on avait fait avec Meech. On avait reproché au gouvernement canadien de faire ça en catimini. Là, ça s'est fait de façon publique avec des assemblées générales dans toutes les provinces pour chacun des secteurs. Elle dépose les recommandations non pas à l'Assemblée nationale - c'est pour ça que je me sens un petit peu plus mal à l'aise de rejeter les propositions de la commission Beaudoin-Dobbie - c'est fait à la Chambre des communes. C'est à la Chambre des communes de rejeter ou non ces propositions-là. Donc, on va attendre, nous, de recevoir formellement des propositions, des offres du gouvernement fédéral et, a ce moment-là, on pourra se pencher et prendre une position officielle en tant qu'Assemblée nationale ou gouvernement. En attendant, on n'a pas le droit de rejeter comme ça, du revers de la main, toutes les possibilités qui s'offrent à l'ensemble de la population du Québec, et ce, afin d'avoir une connaissance exacte surtout des impacts du geste que nous allons poser à l'automne 1992, advenant qu'on n'ait pas d'offres qui feraient en sorte que le Québec puisse s'intégrer dignement à la Constitution canadienne.

Lorsqu'on analyse la motion du Parti québécois, on parle de rejeter; nous, on parle de désapprouver. Vous savez, probablement que le député de Lac-Saint-Jean va intervenir pour essayer de faire la différence entre le mot «rejeter» et le mot «désapprouver». Moi, j'ai regardé dans le dictionnaire tantôt et j'ai essayé de trouver certains synonymes, justement, du mot «rejeter». J'ai trouvé des mots comme «abandonner», «refuser», «repousser», «bannir», «chasser», «écarter», «éliminer», «exclure» et «proscrire». Ça n'a pas une connotation positive. Donc, c'est: Ne faites rien, empêchons-nous, rejetons tout ce qui vient de l'extérieur du Québec, notre position est prise. Moi, j'appelle ça une position dogmatique. Quand on entend: Nous autres, notre position, c'est l'indépendance du Québec, c'est leur position et je la respecte. En attendant que les Québécois et les Québécoises se prononcent sur leur avenir à l'automne, il est tout à fait normal de leur permettre de prendre connaissance de toutes les options et de toutes les avenues possibles afin qu'au moment où on aura posé le geste on n'ait pas à le regretter.

Comme parlementaire, M. le Président, c'est sûr que, moi aussi, je ne suis pas nécessairement en accord avec tout ce qu'on retrouve dans les propositions de la commission Beaudoin-Dobbie. Je ne suis pas le seul. Notre premier ministre s'est prononcé. Notre ministre responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes s'est prononcé également. L'ensemble de la deputation dans leur région, la plupart se sont prononcés, pas contre d'une façon définitive. On dit: Ce n'est pas tout à fait ce qu'on veut; il y a des choses qui ne sont pas claires dans ce rapport-là; on veut avoir des propositions plus claires, plus nettes, plus précises afin que le peuple québécois puisse se prononcer.

Donc, je suis dans l'obligation... Bien, on a réglé le problème par l'amendement. Je vais voter naturellement pour cette proposition amendée. Je désapprouve ces propositions-là, mais je maintiens une porte ouverte, et c'est le rapport final qui va nous arriver en avril, c'est celui-là et c'est sur ça qu'on pourra se prononcer de façon officielle, à savoir si on les rejette de façon catégorique et si on enclenche notre processus tel que défini par la loi 150. D'ici à ce temps-là, permettons au moins, et votre chef l'a si bien dit tantôt: Nous autres, on est contre, mais si vous pensez que ça peut amener quelque chose, faites-le. C'est dans ce sens-là qu'on vous passe le message. Allons jusqu'au bout. Ce n'est plus une question d'une année, de deux ans, de trois ans. C'est une question de mois, pour ne pas dire une question de jours. On ne peut pas se fermer de portes et on n'a pas le droit, comme représentants du peuple, peu importe notre option politique, on ne peut pas, comme représentants du peuple, lui fermer des portes à des connaissances, a des informations qui vont l'éclairer davantage et le préparer à poser un geste ultime qui met en cause, ne l'oubliez pas, l'avenir constitutionnel du Québec, l'avenir constitutionnel du Canada également.

Donc, c'est important, ça. On pourra toujours dire et moi, comme parlementaire, je vais toujours être en mesure de dire: J'ai tout fait, je me suis renseigné, je vous ai permis de vous renseigner, je vous ai permis de vous informer également, on est allé jusqu'au bout, on a laissé la chance au coureur jusqu'à la dernière seconde. J'espère toujours, M. le Président, que nous allons arriver à une proposition qui fera en sorte que le Québec puisse s'épanouir à sa façon, puisse avoir son contrôle, le contrôle de son développement, qu'il soit reconnu comme une société distincte, qu'il ait son droit de veto et qu'on puisse quand même demeurer à l'intérieur de ce grand Canada. Je l'espère toujours comme Québécois et comme Canadien. Donc, attendons jusqu'à la fin et, à ce moment-là, on se prononcera de façon officielle. Laissons surtout la population prendre connaissance de tous ces éléments qui sont nécessairement très compliqués pour eux autres par rapport à nous.

Donc, M. le Président, je vais voter pour cette proposition amendée. Je demande également au parti de l'Opposition d'être objectif pour une fois et de permettre à la population de bien s'informer avant de poser le dernier geste. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Salaberry-Soulanges. Maintenant, en vertu de votre droit de réplique, M. le whip en chef de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard (réplique)

M. Brassard: M. le Président, je dirai d'abord que - le chef de l'Opposition l'a mentionné tantôt - nous sommes d'accord avec les amendements apportés par le ministre des affaires intergouvernementales canadiennes, malgré le dernier élément de son amendement qui fait référence, entre autres, au fait que la commission a été instituée aux fins de répondre aux revendications légitimes du Québec. On n'a pas de misère à vivre avec ça, mais ce n'est pas tout à fait exact. Il reste que la commission Beaudoin-Dobbie, son mandat premier était d'examiner et de consulter la population sur les 28 propositions fédérales de septembre dernier et non pas précisément d'examiner les revendications légitimes du Québec. Mais, enfin, c'était ça aussi d'une certaine façon, donc, c'est quand même acceptable. Je ne commencerai pas une querelle sémantique à coups de dictionnaire pour savoir si «rejeter» est plus fort que «désapprouver» ou vice versa. Ce qui m'apparait important, dans les circonstances, c'est que les deux grandes formations politiques à l'Assemblée nationale envoient un message qui ne soit pas trop brouillé, qui soit le plus clair possible au gouvernement fédéral concernant le rapport Beaudoin-Dobbie. C'est ça, mon objectif. J'accepte, quant à moi, les amendements du ministre sans me faire des interrogations métaphysiques, à savoir quel est le verbe qui a plus de force que l'autre. Ça m'apparaîtrait des chinoiseries un peu déplacées dans les circonstances.

Cependant, je terminerai et je conclurai, M. le Président, en disant que le gouvernement risque de s'illusionner en s'imaginant que les offres qui vont venir en avril seront meilleures que ce que contient le rapport Beaudoin-Dobbie et seront meilleures que ce qu'étaient les propositions fédérales de l'automne dernier. Il risque de s'illusionner et j'ai l'impression qu'il espère trop. Encore une fois, tantôt, le député de Salaberry-Soulanges, je pense, disait à peu près la même chose: Attendez, il y a des offres qui s'en viennent. C'est ce qu'on nous a dit l'automne dernier. Je me souviens que l'automne dernier, quand les propositions fédérales ont tombé sur la table, le gouvernement a dit: Attendez. Ça, ce n'est pas bon, mais, attendez, la commission créée par le fédéral, elle, va examiner ça puis elle va améliorer ça. Attendez le rapport. Le rapport de la commission est tombé sur la table. Alors, là, on dit: Ça, ce n'est pas bon, ce n'est pas acceptable, mais attendez les offres formelles d'Ottawa en avril. Ça, ça va être le bon coup. Ça, ça va être bon.

Moi, je vous dis: Je sais bien que le gouvernement va attendre jusque-là. C'est clair qu'il va aller jusqu'au bout puis qu'il va les attendre, les offres formelles. Mais je vous dis: C'est s'illusionner que de s'imaginer que les offres d'avril vont être meilleures ou différentes de ce qu'on retrouve dans le rapport Beaudoin-Dobbie, encore une fois, à cause de ce que j'ai dit dès le départ. Il y a une réalité incontournable au Canada et au Québec qui fait en sorte qu'on ne peut pas vraiment aboutir à une révision en profondeur du régime. Cette réalité, c'est les deux nations qui habitent un seul pays et qui ont des visions différentes et incompatibles. La meilleure preuve, c'est le sénateur Beaudoin qui nous la donnait. En bon jovialiste candide, le sénateur Beaudoin répondait à une question d'un journaliste en disant: Écoutez, si j'avais été tout seul comme sénateur - puis c'est un professeur de droit constitutionnel, le sénateur Beaudoin - dans mon bureau de l'université, écoutez bien, je vous en aurais fait, moi, un beau partage des pouvoirs. Je vous en aurais fignolé une répartition des compétences. Seul, connaissant le droit constitutionnel - il l'a enseigné longtemps - ah! je vous assure que je vous aurais cogité un maudit beau projet de ré-partion des pouvoirs. Mais je ne suis pas tout seul. J'avais trois partis fédéraux autour de la table, j'avais les provinces puis les premiers ministres des provinces qui réclamaient des choses. J'avais le Canada anglais qui a une conception des choses. J'avais le Québec qui, lui, revendiquait un certain nombre de choses. J'avais tout ça. Il fallait que je compose avec ça. Alors, j'ai abouti à ce qu'on retrouve dans le rapport. Si j'avais été tout seul, ça aurait été beau, mais, là... Une constitution, ça ne se fait pas en vase clos dans un bureau de l'université, il faut que ça réponde à des aspirations puis à des attentes de la population concernée. Et là, c'est clair que, comme il y a des visions différentes qui prévalent au Québec et au Canada et qui sont largement incompatibles, on arrive avec une mixture comme celle qu'on retrouve dans Beaudoin-Dobbie.

Deuxièmement, les offres, pensez-vous qu'elles vont être meilleures que ce qu'on retrouve dans le rapport Beaudoin-Dobbie quand le premier ministre du Canada et le ministre responsable, Joe Clark, vous disent depuis une semaine que ce qu'on retrouve dans le rapport, c'est ce qu'il y a de plus généreux qui n'ait jamais été offert au Québec? Bien, écoutez, quand on a une opinion comme celle-là, qu'il s'agit là des offres les plus généreuses jamais

offertes au Québec, je n'ai pas l'impression qu'on va céder à la tentation de les améliorer beaucoup. Si c'est ce qu'il y a de plus généreux, on ne cédera sûrement pas à la tentation d'y apporter des modifications dans le sens d'une amélioration. Ça va être plutôt le contraire qui va se produire.

Et enfin - écoutez, soyons réalistes et pragmatiques - le premier ministre fédéral, M. Mulroney, n'a manifestement pas la force politique pour imposer quoi que ce soit au Canada à l'heure actuelle. Quand ta cote de popularité se situe dans le même créneau que les taux d'escompte de la Banque du Canada, je m'excuse, mais on n'est pas en position pour imposer grand-chose.

Alors, tout ça mis ensemble, je ne veux pas vous désillusionner, mesdames et messieurs, mais ne vous attendez pas à des offres mirobolantes en avril qui soient tellement différentes de ce qu'on retrouve dans le rapport Beaudoin-Dobbie. Ce ne sera pas tellement meilleur.

Également, M. le Président - et je termine là-dessus - je mets en garde le gouvernement contre la tentation très forte, semble-t-il, de tomber dans le piège d'une procédure à deux résolutions où le Québec va inévitablement sortir perdant. Parce que c'est clair que, même si on arrive à ce que le ministre appelle une entente constitutionnelle globale comportant, admettons-le, faisons-en l'hypothèse, un droit de veto, si, pour faire adopter cette entente constitutionnelle globale, vous passez par le biais de deux résolutions, une requérant l'approbation de 7 provinces représentant 50 % de la population, la formule 7-50, et l'autre requérant l'unanimité des Parlements au Canada et au Québec, c'est évident qu'il y a juste une résolution qui a des chances de passer. C'est clair, ça? C'est celle qui s'appuie sur 7-50. L'autre requérant l'unanimité, elle ne passera jamais, d'autant plus que c'est dans celle-là qu'on va retrouver le droit de veto et, déjà, il y a au moins 4 provinces qui ne veulent rien savoir du droit de veto. Elles l'ont annoncé publiquement. Alors, celle-là, elle ne passera pas.

Donc, accepter déjà, et le premier ministre a ouvert la porte... Je ne sais pas s'il a déjà un «deal» avec son homologue fédéral, qu'il lui a dit, dans une conversation téléphonique: II n'y a pas de problème, Brian, tu peux y aller avec deux résolutions, prends ça pour acquis... C'est un danger très grave parce que c'est clair qu'à ce moment-là il y a juste une résolution qui va passer. L'autre requérant l'unanimité ne passera jamais. Faire semblant que ce sera le cas, c'est tromper le monde. C'est une supercherie que de prétendre le contraire. Alors, je mets en garde le gouvernement contre cette tentation qui semble de plus en plus forte actuellement, d'accepter cette double résolution. C'est une procédure, je l'admets, mais c'est une procédure qui n'est pas anodine. Accepter ça, ça a des conséquences très graves sur le fond, parce que ça veut dire que vous prenez une partie des éléments du fond et que vous les mettez de côté de façon irrévocable. Vous les jetez à la poubelle, c'est ça que ça signifie.

Ceci étant dit, M. le Président, même si on n'a pas les mêmes points de vue, je reprends ce que le chef de l'Opposition disait tantôt. C'est clair que nous, on est des souverainistes. Tout le monde le sait. J'entendais des ministériels affirmer qu'on était des souverainistes. Ce n'est pas une grosse nouvelle ça, là. Ça ne fera pas les manchettes demain, ça; c'est évident qu'on est des souverainistes. On ne s'en est jamais caché, puis c'est clair que c'est ça qu'on veut. Mais ce qu'il y a sur la table, quand on porte un jugement sur le rapport Beaudoin-Dobbie, ce n'est pas en fonction de la souveraineté, c'est en fonction des projets fédéralistes que le jugement est le plus sévère. Même en fonction surtout de la position de votre propre parti, le jugement est on ne peut plus sévère sur ce que contient le rapport Beaudoin-Dobbie. On ne le rejettera pas? Bon, très bien, on ne le rejettera pas, on va le désapprouver. Pour moi, la nuance est tellement fine, tellement ténue, que ça ne me dérange pas beaucoup, je vais pouvoir dormir très bien ce soir. Je serai quand même satisfait si les deux grandes formations politiques de l'Assemblée nationale aujourd'hui, au-delà de leur divergence quant aux options, c'est évident, ont pu s'entendre pour envoyer un message le plus limpide possible à qui de droit. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Conformément à l'article 201, je vais mettre d'abord aux voix la motion d'amendement de M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Pagé: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui?

M. Gendron: On va demander un vote enregistré, s'il vous plaît, M. le Président.

M. Pagé: M. le Président, je vous demande...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le vote enregistré est demandé. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: ...tel que c'est prévu au règlement, de reporter le vote après la période de questions cet après-midi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À la demande du leader du gouvernement, le vote sur l'amendement de cette motion et sur la motion telle qu'amendée ou non est reporté à la période des affaires courantes de cet après-midi.

Sur ce, compte tenu de l'heure, je suspends

les travaux de cette Assemblée jusqu'à 14 heures. (Suspension de la séance à 12 h 27)

(Reprise à 14 h 6)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie.

Veuillez vous asseoir.

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi. M. le leader adjoint du gouvernement.

Présentation de projets de loi

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article b du feuilleton.

Projet de loi 415

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux présente le projet de loi 415, Loi sur le Conseil de la santé et du bien-être. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Ce projet de loi institue le Conseil de la santé et du bien-être.

Le projet de loi prévoit que le Conseil se compose de 23 membres, dont 19 ont droit de vote, nommés par le gouvernement sur recommandation du ministre de la Santé et des Services sociaux.

Le Conseil aura pour fonction de conseiller le ministre sur les meilleurs moyens d'améliorer la santé et le bien-être de la population.

Le Conseil de la santé et du bien-être remplace le Conseil des affaires sociales.

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?

Une voix:...

Le Président: Donc, adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Je vous demanderais d'appeler l'article c de notre feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 416

Le Président: L'article c du feuilleton? À l'article c du feuilleton, Mme la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration pré- sente le projet de loi 416, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration. Mme la ministre.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration afin d'accorder au ministre un pouvoir accru en ce qui touche la délivrance d'un certificat de sélection.

Le projet de loi introduit de plus la possibilité pour le ministre de délivrer une attestation d'identité pour des ressortissants étrangers qui se trouvent au Québec.

Par ailleurs, le projet de loi apporte des modifications au pouvoir réglementaire du gouvernement et édicté d'autres dispositions de nature administrative ou de concordance afin de faciliter l'application de la loi.

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?

Une voix:...

Le Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je vous demanderais maintenant d'appeler l'article d du feuilleton.

Projet de loi 417

Le Président: à l'article d du feuilleton, m. le ministre délégué aux transports présente le projet de loi 417, loi modifiant de nouveau la loi sur la publicité le long des routes. m. le ministre délégué aux transports.

M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur la publicité le long des routes en ce qui a trait aux distances prescrites.

Il permet l'installation, à une intersection d'une route avec une autre route qui n'est pas entretenue par le ministre, d'une publicité annonçant une entreprise éloignée de l'intersection et située en bordure de cette route.

Par ailleurs, le projet de loi permet au ministre d'autoriser l'emplacement d'une publicité à une distance moindre lorsque la topographie des lieux empêche le demandeur de se conformer aux exigences de la loi.

Enfin, ce projet de loi modifie les dispositions concernant la hauteur des publicités.

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accep-

te d'être saisie de ce projet de loi? Adopté? Donc, adopté.

Maintenant, dépôt de documents.

Dépôt de documents

Message de Sa Majesté la reine Elizabeth II à l'occasion du jour du Commonwealth

Le lundi 9 mars dernier était le jour du Commonwealth. Pour souligner cet événement, Sa Majesté la reine Elizabeth, chef du Commonwealth, a fait parvenir un message de circonstance que j'ai l'honneur de déposer. Donc, ce document est déposé.

Maintenant, M. le ministre du Tourisme.

Rapport annuel de la Régie des installations olympiques

M. Vallerand: Qu'il me soit permis, M. le Président, de déposer devant cette honorable Assemblée le rapport annuel 1990-1991 de la Régie des installations olympiques.

Le Président: Ce rapport est déposé. Maintenant, M. le leader adjoint du gouvernement.

Réponses à des questions inscrites au feuilleton

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je dépose la réponse à la question 10 du feuilleton de ce jour inscrite par le député de Pointe-aux-Trembles, de même que la réponse à la question 11 du feuilleton de ce jour également inscrite par le député de Pointe-aux-Trembles; troisièmement, la réponse à la question 23 du feuilleton de ce jour inscrite par le député de Lévis, la réponse à la question 26 du feuilleton de ce jour inscrite par le député de Gouin et la réponse à la question 36 du feuilleton de ce jour inscrite par le député de Dubuc.

Le Président: Ces documents sont déposés.

Maintenant, dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

Dépôt de pétitions

Donner aux personnes atteintes du virus d'immuno-déficience humaine un meilleur accès aux médicaments

M. Boulerice: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 351 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec.

Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant que la plupart des personnes atteintes du VIH en arrivent à ne plus être capables d'assumer les frais très élevés de leurs médicaments; «Considérant que la plupart des personnes atteintes du VIH en arrivent à recourir à l'aide sociale pour payer le coût très élevé de leurs médicaments alors qu'elles ont encore la possbi-lité physique de travailler et qu'elles le souhaitent; «Considérant que le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu débourse inutilement des prestations d'aide sociale à des citoyens atteints du VIH qui pourraient et désirent encore travailler; «Considérant que le ministère de la Santé et des Services sociaux assume des coûts hospitaliers qui seraient réduits si les personnes atteintes du VIH avaient un accès aussi facile à leurs médicaments que les personnes atteintes de cancer ou de certaines autres maladies chroniques contrôlables;»

L'intervention réclamée se résume ainsi - étant donné qu'il n'y a rien de fait encore: «Nous demandons que l'Assemblée nationale adopte des mesures concrètes et rapides pour remédier à ces situations, soit en donnant aux personnes atteintes du VIH un meilleur accès aux médicaments coûteux dont elles ont besoin.» Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Votre pétition est déposée. Maintenant, M. le député de Shefford.

Maintenir la gratuité des services optométriques d'examen de la vue

M. Paré: Oui, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 105 pétionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Shefford.

Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant que depuis le début du régime d'assurance-maladie du Québec en 1970, vous avez droit à un examen annuel chez votre optométriste et à des examens de contrôle si l'état de vos yeux et de votre vision l'exige; «Considérant que cela ne représente que 0,05 % des coûts de la santé au Québec; «Considérant que le gouvernement a manifesté l'intention de couper les examens de la vision afin d'équilibrer son budget; «Considérant que ces examens, lorsque rendus régulièrement, sont nécessaires au maintien et à l'amélioration de notre santé et contribuent à notre mieux-être;»

L'intervention réclamée se résume ainsi: «Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du gouvernement afin que les services optométriques d'examen de la vision pour nous et nos enfants ne soient pas coupés.»

Je certifie que cet extrait est conforme aux

règlements et à l'original de la pétition.

Le Président: Votre pétition est déposée. Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Je voudrais vous aviser qu'après la période de questions seront tenus des votes reportés sur la motion de M. le whip de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean présentée aux affaires inscrites par les députés de l'Opposition et sur la motion d'amendement de M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

Nous allons maintenant procéder à la période de questions et réponses orales. Je vais reconnaître, en première question principale, M. le chef de l'Opposition.

Questions et réponses orales

Position du gouvernement sur les

dispositions du rapport Dunkel portant

sur l'aide aux entreprises

M. Parizeau: M. le Président, les négociations du GATT avancent à grands pas sur la base de ce qu'il est convenu d'appeler le projet Dunkel dont une des sections codifie la façon dont les gouvernements peuvent distribuer aux entreprises ou aux régions des subventions, des aides financières, des aides techniques de toutes espèces et, du même coup, réduire considérablement la possibilité pour des gouvernements territoriaux ou régionaux comme les provinces de faire de même. Cela met en cause ou pourrait remettre en cause un certain nombre de politiques économiques du Québec.

C'est ayant cela à l'esprit, en particulier les conséquences possibles sur la SDI, que le ministre des affaires internationales disait, le 5 février: «Nous allons nous battre avec toutes nos forces et toutes les forces à notre disposition pour amender cet aspect du rapport Dunkel.»

Récemment, le ministre de l'Industrie et du Commerce revenait sur cette question, sur les conséquences qu'un accord pareil pourrait avoir sur le fonctionnement de certaines institutions québécoises, dont la SDI, et concluait: «À moins qu'on ne démontre qu'il n'y a pas d'avantage et pas de préjudice, on est coupable.» Ce sont des paroles fortes.

L'Association des manufacturiers du Québec a hautement protesté contre cet aspect de la question, mais le premier ministre, lui, a indiqué qu'il avait une confiance totale en M. Wilson et, le 5 février, du haut de son sommet à Davos, il disait que la proposition Dunkel est préférable à la formule actuelle.

Alors, M. le Président, j'imagine qu'on pourrait conclure, sur la base des déclarations du ministre des affaires internationales et du ministre de l'Industrie et du Commerce, qu'il y a eu de solides protestations à Ottawa. J'imagine que, sur la base de la déclaration du premier ministre, il a dû y avoir l'envoi de félicitations à Ottawa. Puis-je me renseigner pour savoir quelle est, sur cette question économique comme sur bien d'autres, la position exacte du gouvernement? A-t-il écrit à M. Wilson pour le féliciter ou pour lui demander de faire en sorte que cette clause soit retirée? Est-ce que le gouvernement est pour ou s'il est contre?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition me permettra, durant quelques courtes secondes, de saluer la présence des membres québécois de l'équipe olympique canadienne, que je verrai dans quelques minutes.

Des voix: Bravo!

M. Bourassa: Ils méritent certainement tout notre respect et notre plus profonde admiration.

M. le Président, j'avais été étonné de lire les propos du chef de l'Opposition, au début de février. Je crois que c'était le 1er ou le 2 février. D'abord, je suis toujours étonné qu'on commente comme ça, sans la moindre nuance, des déclarations qui peuvent être faites à l'étranger par le chef du gouvernement. Je croyais qu'il y avait une tradition d'une certaine réserve, au moins jusqu'au retour... Mais, je veux dire, bon, ça ne m'empêche pas de dormir, M. le Président.

Je vois le député de Lac-Saint-Jean, c'est le grand spécialiste de ces attaques outre-atlantiques. J'ai dit au chef de l'Opposition que j'étais toujours très, très conscient de l'importance du dossier. J'en ai parlé longuement avec M. Wilson, également avec M. Delors - on sait le rôle de la Communauté économique européenne dans ce dossier-là - et également avec d'autres, le premier ministre britannique, M. John Major. C'est une question majeure pour tous les pays, surtout les pays du monde libre ou de l'Occident.

La position du gouvernement est très claire. Nous considérons qu'il y a des avantages dans le rapport Dunkel qui n'est pas la version définitive, loin de là. C'est un effort de la part de M. Dunkel pour rapprocher les parties. On est encore loin d'une entente.

Par ailleurs, pour ce qui a trait au renforcement de l'article XI, la position du gouvernement du Québec est très claire. Le ministre de l'Agriculture s'est rendu, il y a quelques jours, en Europe pour participer aux rencontres pour défendre le point de vue du Québec. Mais, je veux dire, il y a des aspects dans le rapport Dunkel qui permettent d'avantager la situation. C'est le bras droit du chef de l'Opposition - je termine là-dessus, M. le Président - M. Bernard Landry, qui disait, il y a quelques jours, que s'il fallait que les discussions du GATT se terminent par un échec, quand on sait que le Québec

exporte 40 % de sa production et 20 % à l'extérieur du Canada, que ça serait un drame national. Alors, je pense bien que l'Opposition va être d'accord pour appuyer le gouvernement à faire valoir les intérêts du Québec.

Le Président: En question parlementaire. (14 h 20)

M. Parizeau: M. le Président, pour faire valoir les intérêts du Québec, je rappellerai au premier ministre que M. Landry était avec moi quand nous avons été les premiers à dénoncer certaines de ces dispositions du rapport Dunkel.

Le premier ministre est-il conscient qu'en vertu de l'article 8b de ces dispositions qui portent sur les aides financières, les subventions aux entreprises il y est indiqué que l'aide aux régions défavorisées sur le territoire d'un signataire accordée au titre d'un cadre général de développement régional sont autorisées à condition qu'elles aient un caractère non spécifique? Et en termes du jargon de ce document, cela veut dire ceci. C'est que si le gouvernement fédéral distribue des subventions en Gaspésie aux fins de développement régional, il le peut, mais, dans le cas du Québec, on peut en appeler par des droits compensatoires. C'est ça que ça veut dire. Est-ce que le premier ministre est conscient qu'il y a des éléments dans ce dossier qui, à toutes fins pratiques, ou bien vont interdire au Québec de pratiquer un certain nombre des politiques économiques qu'il pratique depuis longtemps, ou bien, s'il les pratique, vont permettre à des pays étrangers d'invoquer des droits compensatoires à ce sujet? Est-ce que le premier ministre est conscient de ça?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je vois que le chef de l'Opposition a quand même évolué dans ses critiques ou ses interrogations. Au début, il disait que le Fonds de solidarité pouvait être compromis, que les actions de la Caisse de dépôt pouvaient être compromises. Alors, pour moi, c'est une délicieuse surprise de voir qu'il réduit ou qu'il se limite à certains aspects très très limités qui demeurent très importants.

Le ministre de l'Industrie et du Commerce de même que le ministre des Affaires internationales du Québec, tous les deux, ils ont eu l'occasion de commenter l'application de ces programmes. Je dois dire, tout comme je le disais tantôt, que le texte n'est pas définitif et que le Canada n'est pas isolé dans la défense de l'attitude que nous avons mise de l'avant sur les pouvoirs des provinces. L'Allemagne est dans la même situation, les Américains également. On sait jusqu'à quel point les États américains procèdent à toutes sortes de politiques de subsides pour aider les entreprises.

Le Président: En conclusion.

M. Bourassa: Et on sait également - c'est parce que ça pourrait être très long, M. le Président, mais j'essaie d'être concis - que le commerce avec les États-Unis, c'est la grande partie de notre commerce.

Alors, il y a une solidarité. Dans le cas de l'agriculture, la solidarité s'applique avec Israël, avec le Japon. Dans le cas des aides au développement régional, la solidarité se retrouve avec des puissances quand même importantes, comme les États-Unis ou l'Allemagne. Alors, le débat se poursuit. Je demanderais au chef de l'Opposition de vérifier pour ce qui a trait au développement régional - on sait qu'il y a des exemptions - et de vérifier également les programmes qui pourraient être vulnérables. J'admire sa vigilance...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...mais il demeure un peu trop pessimiste, M. le Président.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Parizeau: M. le Président, si vous voulez bien m'accorder une dizaine de supplémentaires, on va reprendre chacune des questions dont parlait le premier ministre. Je garde les mêmes craintes à l'égard de bien d'autres programmes que le développement régional.

Cela étant dit, puis-je demander au premier ministre s'il est d'accord avec son ministre des Affaires internationales qui disait, je le répète: «Nous allons nous battre avec toutes nos forces et toutes les forces à notre disposition pour amender cet aspect du rapport Dunkel.» De quoi s'agissait-il, M. le Président? Est-ce qu'il s'agissait du sexe des anges ou s'il s'agissait des dispositions dont nous venons de parler? Le premier ministre appuie-t-il son ministre quand il veut se battre de toutes ses forces ou bien si, au contraire, il est fondamentalement d'accord avec le gouvernement fédéral qui trouve ces propositions adorables?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, j'avais eu l'occasion de rétablir les faits lorsque le chef de l'Opposition avait interprété hâtivement des propos qui auraient été tenus. Je n'ai pas demandé de rectificatif sur le titre qui avait été utilisé. Je ne partage pas cette habitude avec le chef de l'Opposition qui, régulièrement et en faisant un autre rectificatif sur la question des autochtones, à chaque semaine, brise un nouveau record de rectificatifs dans les informations qui sont véhiculées par les médias. Mais j'ai quand même eu l'occasion, à ce moment-là, de dire que, sur certains aspects, nous trouvons que le rapport comme tel permettrait au Québec de pouvoir faciliter son commerce international et

je ne suis pas le seul à le dire. Il a mis en cause le ministre des relations internationales sur une déclaration qui a été faite par lui. Je demanderais au ministre de compléter ma réponse.

Le Président: Brièvement, M. le ministre des Affaires internationales.

M. Ciaccia: Brièvement, M. le Président. Il y a deux types de subventions auxquelles le rapport Dunkel se réfère: premièrement, les subventions pour le développement régional et les subventions pour la recherche technologique. Ce genre de subventions est permis à tous les niveaux de gouvernement, que ce soit le gouvernement fédéral ou que ce soit le gouvernement du Québec. L'avantage de ça, et c'est ce qu'on trouve avantageux, cet aspect du rapport Dunkel, c'est que pour la première fois il y a une définition de développement régional qui est permise, au Québec, qui va nous aider dans la définition de développement régional pour l'entente du libre-échange.

En conclusion, M. le Président, le deuxième genre de subventions c'est la subvention d'ordre général aux entreprises pour le développement industriel. Ce genre de subventions d'après le rapport Dunkel, n'est permis qu'au gouvernement central présentement. Nous nous battons contre cet aspect du rapport Dunkel. Nous voulons que ce soit changé. Nous avons des appuis: le gouvernement fédéral nous appuie, le gouvernement américain nous appuie. Nous pensons que nous allons réussir à amender le rapport Dunkel pour permettre non seulement au gouvernement fédéral, mais au gouvernement des provinces canadiennes de donner des subventions d'ordre général pour le développement industriel.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Parizeau: ii me fait plaisir, m. le président, de constater qu'on peut avoir avec le ministre une discussion un peu sérieuse de ces questions. donc, oui, il va y avoir un effort du québec, si je le comprends bien, pour essayer de faire en sorte que le droit du québec de rétablir des subventions ou du financement pour ces entreprises soit maintenu. puis-je lui demander alors, au sujet du développement régional, s'il interprète comme moi l'article 8.(ii), en vertu duquel on identifie des subventions ne donnant pas lieu à une action, donc celles qui sont autorisées? on dit: «l'aide aux régions défavorisées sur le territoire d'un signataire, donc d'un état souverain, accordée au titre d'un cadre général de développement régional a un caractère non spécifique, au sens de l'article 2». est-ce que le ministre convient que toute démarche envisagée par un gouvernement territorial comme une province est spécifique, au sens de l'article 2, donc échappe à l'autorisation dont il parlait et que je viens de citer? Est-il conscient de ça? Donc, le ministre peut-il nous confirmer que, sur le plan des politiques de développement régional, même à l'intérieur du Québec, Ottawa sera autorisé, Québec non?

Le Président: M. le ministre des affaires internationales.

(14 h 30)

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais prendre cette occasion pour saluer le consul général du Japon qui est présentement parmi nous. je ne suis pas d'accord avec l'interprétation du chef de l'opposition, il oublie les autres aspects. vous avez cité un des articles du rapport dunkel, mais il y en a d'autres. l'article que vous venez de citer, c'est vrai, il s'applique au gouvernement central. pour faire une subvention, il faut que ce soit généralisé pour différentes régions. mais il y a un autre article dans l'interprétation du rapport dunkel qui donne aux gouvernements territoriaux le droit de donner des subventions pour le développement régional. ça veut dire qu'à l'intérieur du québec le gouvernement du québec peut se prévaloir des aspects du rapport dunkel pour donner des subventions pour le développement régional, mais il ne pourrait pas le faire, d'après le rapport dunkel, si ce n'est pas pour du développement régional, mais que c'est d'ordre général, pour subventionner le développement industriel. mais pour le développement régional, le gouvernement du québec a ses droits d'après le rapport dunkel.

Le Président: Une autre question complémentaire.

M. Parizeau: La période des questions n'en est pas une de débat sur l'interprétation des clauses. Je prends acte de ce que dit le ministre. En soi, c'est déjà suffisamment sérieux.

Puis-je redemander au premier ministre: Est-ce que le gouvernement du Québec a demandé au gouvernement fédéral d'intervenir de quelque façon que ce sort pour faire face au danger sérieux que ces dispositions du rapport Dunkel font courir aux politiques économiques d'un gouvernement qui dit se soucier de l'économie? Le gouvernement du Québec a-t-il levé le petit doigt depuis que le débat est commencé?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, franchement, il faut être stoïque pour rester sérieux avec les questions du chef de l'Opposition. Je lui ai dit, dans ma première réponse, que j'en avais discuté - il demande si on a levé le petit doigt - que j'avais fait des représentations, que j'avais vu M. Wilson. Je comprends qu'il tourne

en dérision le sommet de Davos. Il devrait savoir qu'à Davos il y a les leaders économiques et politiques de tous les pays, les principaux leaders politiques et économiques. Je ne vois pas pourquoi il tourne le sommet de Davos en dérision. Ce serait un bon endroit... Au cours des prochaines années, je n'aurai pas d'objection à ce qu'il puisse m'accompagner comme chef de l'Opposition.

J'ai fait part à M. Wilson de l'intérêt du gouvernement du Québec; plus que de l'intérêt, que c'était pour nous absolument important. D'ailleurs, le ministre des affaires internationales vient de le signaler. C'est clair. J'en ai même parlé à M. Delors, même si M. Delors, comme président de la Communauté économique européenne, n'est pas concerné par cette disposition, mais il a un rôle important à jouer. Et j'ai souligné comment... Parce qu'il s'agirait... Je n'entends pas le leader parlementaire.

Le Président: Alors, en conclusion, M. le premier ministre, s'il vous plaît. S'il vous plaît!

Bon. À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, en conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, il s'agirait de modifier quelques mots dans le texte comme tel. Le ministre responsable a souligné tantôt les différences et c'a semblé éclairer le chef de l'Opposition sans totalement le satisfaire. Il s'agirait de modifier quelques mots pour ce qui a trait au développement régional. Nous avons fait les représentations. Dire qu'on n'a rien fait, qu'on n'a pas du tout fait de représentations, M. le Président, après les réponses qu'on vient de donner, c'est très difficile de prendre le chef de l'Opposition au sérieux. J'ai dit au début toutes les démarches qui avaient été faites à cet égard-là.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je ne vois pas pourquoi il n'exprime pas sa satisfaction plutôt que son scepticisme.

Le Président: Pour une dernière question additionnelle, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, puis-je demander au premier ministre si je résume bien les choses de nos débats aujourd'hui, à savoir que, de ses ministres, aucune intervention ne serait venue à l'égard d'Ottawa pour faire corriger ces choses et, d'autre part, que, du premier ministre lui-même, sa seule intervention est venue à Davos, en réponse au ministre du Commerce extérieur d'Ottawa, M. Wilson, que la nouvelle formule était meilleure pour les provinces canadiennes que l'accord actuel et que le premier ministre du Québec s'est montré absolument d'accord? C'est à tout cela, si je com- prends bien le premier ministre, que se limite l'action du gouvernement du Québec, dans le sens du développement économique actuel.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition ne comprend pas du tout. Il est buté, il ne veut pas comprendre ou ne peut pas comprendre. J'ai été très clair sur cette question-là. Il y a eu une conférence fédérale-provinciale. Le gouvernement fédéral a accepté le point de vue du Québec. Il me semble que ce sont des représentations qui sont quand même claires. C'est vrai que j'ai dit qu'il y avait des améliorations dans l'accord, comme son bras droit l'a dit lui-même, comme M. Landry a dit que le rapport Dunkel comportait beaucoup d'avantages. Est-ce que maintenant on va me reprocher d'être d'accord avec des ténors de l'Opposition, ceux qui sont, entre guillemets, crédibles, sur le plan économique?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourassa: Est-ce qu'on va me reprocher ça, de la part de l'Opposition? J'ai dit qu'il y avait des améliorations, dans le domaine pharmaceutique notamment, qu'il y avait des améliorations importantes pour le développement économique. C'est ce dont parle le chef de l'Opposition. Donc, je ne suis pas d'accord du tout avec lui. Le gouvernement a posé tous les gestes, et même au-delà, qui pouvaient lui paraître non seulement nécessaires, mais utiles pour défendre les intérêts économiques du Québec dans cette question.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, maintenant, M. le député d'Arthabaska.

Position du gouvernement sur les accords du GATT en matière agroalimentaire

M. Baril: M. le Président, depuis plus de deux ans, le gouvernement du Québec et le ministre de l'Agriculture prétendent défendre les quatre piliers de l'agriculture québécoise aux négociations du GATT, soit le renforcement de l'article XI :2c). Pourtant, dans le journal Le Devoir du 28 février dernier, le sous-ministre adjoint aux affaires économiques du ministère de l'Agriculture a déclaré que ce ne serait pas la catastrophe si la gestion de l'offre disparaissait. Il ajoutait, quelques lignes plus loin: Pourtant, trois productions sur quatre seraient lavées, soit le poulet, le dindon et les oeufs, plus de 400 000 000 $ d'activité économique. Dans le même article, le même sous-ministre soulignait qu'il avait averti, au nom du ministère de l'Agriculture, au nom du gouvernement, l'Union des producteurs agricoles et son président,

jacques proulx, que le gouvernement du québec va exprimer son appui au nouvel accord du gatt, même si les quatre piliers ne figurent pas dans cet accord. il faut se rappeler que le sous-ministre est le principal représentant et surveillant des intérêts du québec au gatt.

Ma question, M. le Président, est à savoir: Qui dit vrai? Est-ce que c'est la position du sous-ministre qui s'applique ou si c'est la position que le ministre de l'Agriculture a défendue ou prétend défendre depuis deux ans?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Picotte: M. le Président, je pense que celui qui vous parle, au nom du gouvernement du Québec, a exprimé clairement que la position du Québec et, évidemment, réitérée vis-à-vis de la position canadienne était celle de défendre les quatre piliers agricoles de même que nos offices de commercialisation et la gestion de l'offre. Maintenant, je ferai remarquer à mon collègue, le député d'Arthabaska, que ce n'est pas nécessaire que des gens attendent qu'arrive une réponse quelconque pour travailler sur d'autres scénarios. D'ailleurs, je préfère que mes fonctionnaires regardent d'autres scénarios que de regarder par la fenêtre de leur bureau. Je préfère qu'ils envisagent des possibilités qui peuvent arriver dans certains cas et analysent la possibilité de regarder comment ça peut se produire si vraiment on n'obtient pas ce qu'on veut avoir. Maintenant, je ne sais pas pourquoi le député d'Arthabaska se scandalise parce que c'est un visage qu'il connaît, il s'agit de Bernard Landry.

Des voix:...

M. Picotte: Bien, M. le Président, je suis obligé de dire ça.

Le Président: La seule chose, M. le ministre, dont je veux vous aviser, c'est qu'en période de questions...

Une voix:...

Le Président: ...c'est ça, il n'y a pas d'exposition de documents. Très bien? Alors, je vous invite...

Des voix:...

(14 h 40)

Le Président: S'il vous plaît! Un instant! Un instant! Alors, ça s'applique d'un côté comme de l'autre; à la période des questions, il n'y a pas d'exhibit d'aucun document. Alors, je vous demanderais de conclure rapidement.

M. Picotte: C'est pour être certain, M. le Président...

Le Président: En conclusion.

M. Picotte: ... je ne voulais pas mal informer la Chambre, en tout cas. M. Bernard Landry, qui est venu en Mauricie dimanche dernier, a dit lui-même... «Du côté agricole, M. Landry s'est élevé contre les subventions accordées aux producteurs agricoles tant au Canada qu'aux États-Unis. Il estime que les subventions maintiennent en vie artificiellement des productions qui affectent grandement l'agriculture des pays pauvres tout en endettant dangereusement les payeurs de taxes au Canada.» Et il dit: «Ça ne sera pas la catastrophe nationale.» J'espère que le député d'Arthabaska va cesser d'essayer de blâmer celui qui défend ardemment les piliers agricoles, qui a fait un voyage en Europe pour essayer de défendre...

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: ...puis de convaincre les gens d'adhérer à notre position, puis aller convaincre son collègue Landry qui, soit dit en passant, va complètement à l'encontre de ce que disent les gens du Parti québécois ici même à l'Assemblée nationale. Harmonisez-vous donc, s'il vous plaît!

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Baril: M. le Président, le ministre pourrait-il reconnaître que quand on parle de subventions agricoles, c'est au-delà de 4 000 000 000 $ pour les producteurs de l'Ouest, et nos quatre piliers, ce ne sont pas des subventions que les gouvernements donnent. Pour protéger nos quatre piliers, ça ne coûte pas un cent au gouvernement. Et quand le ministre Bernard Landry...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Baril: ...le futur ministre Bernard Landry s'exprime, c'est en fonction de ça. Et comment le ministre peut-il aujourd'hui essayer d'induire la population en erreur en disant que nos quatre piliers sont des programmes subventionnés? Que le ministre nous l'explique. Qu'est-ce qu'il défend? Quel intérêt a-t-il à défendre les producteurs de l'Ouest? Pourquoi laisse-t-il son sous-ministre dire que ça ne serait pas la catastrophe si les offices de commercialisation étaient abolis? Comment explique-t-il ça? Il dit qu'il nous défend, puis son sous-ministre fait exactement le contraire.

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: M. le Président, c'est très clair. Je pense que nous avons le droit, au ministère de l'Agriculture, d'examiner tous les scénarios.

Ça ne vient pas changer ce que nous défendons, M. le Président, et je pense que ça, c'est facile à comprendre. C'est facile à comprendre qu'on peut examiner toutes sortes d'autres avenues, mais continuer de défendre et d'avoir la position qui est la nôtre et qui est connue. Contrairement à ce que les gens disent, contrairement à ce que M. Landry dit: «Par les accords du GATT, dit M. Landry, on essaie de mettre de l'ordre dans tout ça.» C'est M. Landry qui dit qu'il n'y a pas d'ordre, alors que, nous autres, nous essayons de lui prouver le contraire, M. le Président. Nous essayons de dire que les piliers agricoles, ça se défend bien parce que ça ne vient pas mettre en péril qui que ce soit à travers le monde dans ce qu'on appelle les exportations et les importations, M. le Président. C'est ça qu'on explique. Et, durant ce temps-là, le pèlerin Landry se promène partout pour essayer de dire que le gouvernement du Québec n'a pas raison. Commencez donc par convaincre les gens qui sont près de vous de se fermer la trappe pour éviter de compromettre l'accord du GATT en notre faveur.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Baril: M. le Président, le ministre me permet-il de lui répéter que ce que Bernard Landry défend, c'est quant aux subventions dans l'Ouest?

Le Président: Votre question, s'il vous plaît!

M. Baril: C'est ça, M. le Président. Me permet-il de lui expliquer...

Le Président: Quand même, M. le député, vous savez fort bien qu'à la période des questions les règles sont strictes. Vous devez poser une question. Alors, allez-y avec une question, s'il vous plaît!

Une voix: Consentement.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant, juste une minute. Allez-y.

M. Baril: M. le Président, le ministre me permet-il de dire que Bernard Landry, il condamne les subventions dans l'Ouest...

Le Président: Votre question, M. le député, s'il vous plaît!

Une voix: C'est une question, ça.

M. Baril: Quand...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: II a posé une question.

M. Baril: M. le Président, qu'est-ce que le ministre entend faire des déclarations de son sous-ministre? Est-il prêt à reconnaître, puisque c'est son principal conseiller qui ne croit pas à nos offices de commercialisation puis que c'est lui qui nous représente et qui nous défend au GATT, le ministre ne considère-t-il pas que c'est pareil comme s'il mettait le renard dans le poulailler pour surveiller la basse-cour?

M. Picotte: M. le Président... \ Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: ...je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit deux fois en ce qui concerne mon sous-ministre qui peut travailler sur des scénarios. Je pense qu'une troisième ou une quatrième fois ne rallierait pas l'accord du député d'Ar-thabaska avec celui qui vous parle. Donc, je vous le répète ad nauseam qu'il peut travailler sur autre chose, tout en continuant, moi, comme ministre, à défendre les piliers agricoles; vous le savez d'ailleurs très bien. Mais uniquement pour être bien certain que vous sachiez ce que M. Landry a dit en Mauricie, puis pour être bien sûr de ne pas vous tromper, je vais finir de dire ce qu'il a dit complètement puis ça va mettre le couvercle sur la marmite: Le métier de producteur agricole est le seul qui n'est pas menacé de disparition car la mode de manger n'est pas près de disparaître. Mais ça, ça nous prendra une capacité d'adaptation et il faudra faire du ménage dans les subventions. Alors, ça, si ça ne met pas le couvercle sur la marmite...

Vous devez avoir une rencontre dans les plus brefs délais avec lui pour lui dire de se taire en attendant que ça se signe.

Le Président: Alors, en question principale maintenant, M. le député de Labelle.

Étalement de la mise en application de la taxe provinciale sur les services

M. Léonard: M. le Président, la semaine dernière, à New York, le ministre des Finances s'est vanté de sa décision de s'harmoniser avec la TPS fédérale. Aujourd'hui, le journal La Presse nous apprend que, face au mécontentement de la population, aux pressions de l'Opposition et à celles, maintenant...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Allez-y.

M. Léonard: ...des députés libéraux qui ont pourtant voté la loi, il y a deux mois et .demi, et même une motion de bâillon pour la faire adopter, le gouvernement, maintenant, cherche des moyens de réduire l'impact négatif sur l'économie de l'introduction d'une taxe sur les services, l'habitation ou les spectacles. À l'image

du premier ministre, qui qualifiait hier la défaite de son parti dans Anjou de défaite victorieuse, il semble ici que l'on soit en face, selon son expression aussi, d'une délicieuse taxe néfaste.

Est-il exact, comme le rapporte La Presse, que le gouvernement désire maintenant taxer les services, l'habitation, les spectacles, mais par étapes, en somme une série de gifles pour remplacer une grosse baffe?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, tout en rappelant à l'honorable député le contenu du programme du Parti québécois et sa proposition d'avoir un remplacement de la taxe de vente provinciale par une taxe sur la valeur ajoutée, ceci étant dit - quelquefois, c'est un rappel de prudence, M. le Président, et simplement l'expression d'une certaine amitié, pour ne pas que le député de Labelle oublie le programme de son parti - je voudrais rappeler à l'honorable député de Labelle que je n'ai pas l'intention de commenter tous les articles qui peuvent paraître dans un journal, des articles souvent écrits par des journalistes chevronnés, mais, par contre, ce n'est pas en commentant des articles de journaux que je prépare mon budget.

Le Président: En question complémentaire.

M. Léonard: M. le Président, afin que la population sache vraiment à quoi s'attendre, un an et demi après avoir annoncé l'harmonisation, qui est votre décision, le ministre des Finances pourrait-il maintenant nous indiquer le rendement de la taxe sur les services, telle qu'elle est toujours prévue maintenant? C'est un fait, il peut nous le dire et nous dire aussi la valeur du remboursement de la taxe sur les intrants pour les entreprises. Il l'avait promis à ce moment-là, il n'a toujours rien fait.

Le Président: M. le ministre.

M. Levesque: M. le Président, je pense que le député de Labelle ne fait pas un grand exercice de mémoire. J'ai déjà répondu à cette question alors qu'on a discuté justement du report de six mois qui avait été suggéré fortement par les membres de l'équipe ministérielle. À ce propos, je dois rappeler à l'honorable député que je n'ai vu, dans l'article qu'il évoque, aucune allusion à une pression du parti de l'Opposition. (14 h 50)

Ceci étant dit, je voudrais simplement rappeler à l'honorable député que les chiffres en question seront disponibles. Nous avons toujours l'habitude de répondre bien clairement aux questions. Nous l'avons fait lorsqu'il a été question d'un report parce qu'il s'agissait, à ce moment-là, d'un report qui avait des effets financiers sur la période donnée, c'est-à-dire entre le 1er janvier 1992 et le 1er juillet 1992. La question qu'on me pose est: Qu'est-ce que cette taxe rapporterait et quel serait le coût des intrants pour une période subséquente? Il faudra attendre, à ce moment-là, que le budget réponde à cette question.

Le Président: Toujours en additionnelle.

M. Léonard: M. le Président, le ministre va convenir avec moi qu'il ne donne pas de réponse et, depuis un an et demi que nous nous posons la question, il n'y en a pas de réponse. Mais, maintenant, comment le ministre des Finances, qui a haussé le fardeau fiscal des entreprises d'au moins 500 000 000 $ sur la promesse non encore tenue de rembourser les entreprises qui paient encore des taxes sur des intrants, peut-il affirmer qu'il s'agit d'une taxe qui va améliorer la compétitivité des entreprises, comme il l'a fait à New York?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, on a parlé tout récemment en cette Chambre de cohérence. On a parié du discours qui doit justement avoir ces éléments de cohérence et d'autres éléments semblables, mais les questions du député de Labelle auraient besoin d'être explicitées dans le sens suivant. C'est qu'il recherche à avoir un nouveau report de la taxe sur les services et, en même temps, il s'inquiète du fait que les entreprises auraient été privées, justement à cause de ce report, de certains remboursements sur les intrants. Alors, on ne peut pas tout avoir, vous savez. Vous ne pouvez pas plaider en même temps la cause des entreprises et dire: II faut absolument que vous imposiez cette taxe sur les services afin que les entreprises puissent en bénéficier et, d'autre part, nous reprocher d'avoir ou de vouloir imposer une telle taxe. Qu'on se branche, de l'autre côté, et qu'on fasse preuve un peu de transparence et de cohérence.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale maintenant, M. le député d'Ungava.

Enquête de la Sûreté du Québec sur ie site d'enfouissement de Saint-Amable

M. Claveau: Oui, parions de transparence, M. le Président. La semaine dernière, le ministre de la Sécurité publique déclarait qu'une quinzaine d'enquêteurs étaient affectés au dossier du site d'enfouissement de Saint-Amable. Je présume donc qu'il s'agissait là de plus qu'une vérification puisqu'on met autant d'effectif sur le dossier. Dans ce dossier, des fonctionnaires ont affirmé, et je cite: «Jamais le cabinet du ministre n'a poussé aussi fort pour l'accélération d'un dos-

sier.» Il s'agit de l'octroi d'un permis d'exploitation pour un site d'enfouissement de déchets de toutes sortes, j'imagine, de déchets secs.

Une voix:...

M. Claveau: Non, non. C'est un site d'enfouissement de déchets secs. N'essayez pas de...

Le Président: S'il vous plaît! M. le député. S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député d'Ungava, votre question.

M. Claveau: J'espère que vous savez ce que c'est qu'un dépotoir. C'est donc la bien connue compagnie...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Claveau: M. le Président, c'est la compagnie, j'imagine bien connue, no 2842-7979 Québec inc.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Claveau: Ils vont comprendre plus facilement.

Le Président: Un instant! S'il vous plaît! Je demande la collaboration des collègues. Allez-y avec votre question, M. le député.

M. Claveau: Je voulais voir si la Chambre était attentive, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, M. le député d'Ungava, vous avez la parole. Posez une question s'il vous plaît.

M. Claveau: C'est donc à la bien connue compagnie 2842-7979 Québec inc. que le ministère de l'Environnement a émis, le 16 octobre 1991, un permis d'exploitation pour ce site d'enfouissement. Ladite compagnie est la propriété d'hommes d'affaires du comté de Brome-Missisquoi. C'est des gens bien connus du ministre de l'Environnement et leur porte-parole n'est nul autre que Me Pierre-Yves Méthot, ancien attaché politique du cabinet du premier ministre.

Une voix: C'est moins drôle, là.

M. Claveau: Devant ces faits, M. le Président, est-ce que le ministre de la Sécurité publique peut nous confirmer ici, pas aux journalistes en dehors de la Chambre, ici dans cette Chambre, qu'il y a bel et bien enquête sur le cas du site d'enfouissement de Saint-Amable où des pressions indues auraient été faites de la part du cabinet du ministre de l'Environnement?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ryan: Tout d'abord, M. le Président, quand le député m'attribue des déclarations suivant lesquelles j'aurais affirmé qu'il y avait 15 enquêteurs de la Sûreté du Québec qui étaient au travail sur ce dossier-là, il m'attribue des propos que je n'ai jamais tenus, premièrement. Deuxièmement, je répète, comme je l'ai déjà déclaré, que des allégations ayant été faites au sujet de divers événements survenus ces derniers mois, y compris le site d'enfouissement de Saint-Amable, la Sûreté du Québec ayant été saisie de ces allégations, fait enquête à ce sujet suivant les moyens dont elle dispose et en observant les règles de discrétion qui sont élémentaires en ces choses, et surtout en présumant, tant que des preuves en sens contraire n'ont pas été recueillies, de l'innocence des personnes qui ont pu être nommées en public, souvent pour des motifs politiques bien plus que pour des motifs de recherche de la justice. Je signalerais enfin au député d'Ungava que c'est difficile que des pressions aient été faites dans ce cas-ci par le cabinet du ministre de l'Environnement vu que c'est lui qui prenait la décision, en toute hypothèse.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Claveau: Oui, M. le Président. Le ministre de la Sécurité publique conviendra-t-il que c'est devant cette Chambre qu'il est redevable et qu'il est tout à fait normal qu'il ait à répondre des agissements ou, enfin, des enquêtes qui pourraient être menées sur les agissements des membres des cabinets, qui sont payés avec des fonds publics pour bien gérer les deniers de l'État et non pas pour...

Le Président: Alors, vous conviendrez, M. le' député, que la dernière partie, c'est un préambule, ça peut servir de préambule. Vous êtes en question additionnelle, il n'y a aucun préambule. Posez votre question.

M. Claveau: Le ministre nie-t-il avoir déclaré à La Presse, le 5 mars 1992, qu'il y avait bel et bien enquête faite par l'escouade économique de la Sûreté du Québec et qu'il y aurait, selon l'article, une quinzaine de policiers affectés à cette enquête-là? Le nie-t-il?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ryan: D'abord, j'ai remarqué une chose. Aujourd'hui, comme en certaines autres circonstances, plus le député monte le ton, moins il

a l'air d'être sur de son affaire. des voix: ha, ha, ha!

M. Ryan: Deuxièmement, je reconnais que je suis redevable devant cette Chambre. Je pense que j'en donne le témoignage chaque fois que l'occasion m'en est fournie. Il n'y a pas de débat entre nous là-dessus. Troisièmement, je n'ai jamais dit - et même si ça a paru dans un journal, ce n'est pas une parole d'évangile, je l'ai déjà dit ici - qu'il y avait 15 enquêteurs qui étaient au travail là-dessus. J'ai dit à maintes reprises, je viens de le dire tantôt, que la Sûreté du Québec fait enquête sur certaines allégations. Il n'y a rien de mystérieux là-dedans, ça a été dit clairement, mais ne me demandez pas d'autres détails, ça ne vous regarde pas ici.

Des voix:...

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions. À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, sur une question de privilège, je vous demande... je vous écoute, indiquez le privilège que vous voulez soulever. (15 heures)

M. Claveau: Oui, M. le Président. Est-ce qu'il me regarde, en tant que parlementaire, membre d'une formation politique, de questionner le gouvernement sur l'utilisation des deniers de l'État? Est-ce que ça me regarde?

Le Président: Bon! Écoutez! Des voix: Oui.

Le Président: Évidemment, vous posez une question, là. Je comprends que c'est ui\e interrogation que vous posez, mais ce n'est pas une question de privilège que vous invoquez, à ce moment-ci, quant à moi. Alors, la question est close.

Tel qu'annoncé précédemment, maintenant, nous allons passer aux votes reportés. Alors, nous allons procéder maintenant. À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, tel qu'annoncé précédemment, je mets maintenant au vote... MM. les députés et Mmes les députées, s'il vous plaît! M. le député de LaFontaine.

Tel qu'annoncé précédemment, je vais maintenant mettre aux voix les motions suivantes. D'abord, la motion de M. le whip de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean proposant que l'Assemblée nationale rejette le rapport du comité Beaudoin-Dobbie déposé à la Chambre des communes le 28 février 1992, pour la motion d'amendement de M. le ministre délégué aux Affaires intergouvemementales canadiennes. Conformément à l'article 201, je mets d'abord aux voix la motion d'amendement de M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

Mise aux voix de la motion d'amendement

à la motion de l'Opposition proposant

que l'Assemblée nationale rejette le

rapport Beaudoin-Dobbie

Cette motion se lit comme suit: Que la motion en discussion soit amendée: a) en remplaçant, dans la première ligne, le mot «rejette» par le mot «désapprouve»; et b) en ajoutant, dans la deuxième ligne, après les mots «Beaudoin-Dobbie» les mots «institué aux fins de répondre aux revendications légitimes du Québec et».

La motion ainsi amendée se lirait comme suit: «Que l'Assemblée nationale désapprouve le rapport du comité Beaudoin-Dobbie institué aux fins de répondre aux revendications légitimes du Québec et déposé à la Chambre des communes le 28 février 1992.»

Que les députés qui sont en faveur de cette motion d'amendement... Oui?

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: Alors, il y a un vote qui est appelé, à moins que... Il y a un vote. Nous allons donc voter. Que les députés qui sont en faveur de cette motion d'amendement veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Levesque (Bonaven-ture), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argen-teuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (La-porte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallerand (Cré-mazie), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Rivard (Rosemont), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval)...

Le Président: un instant, s'il vous plaît! alors, je vais demander la collaboration de tous les collègues. c'est un vote, ça se fait en silence. alors, allez-y!

Le Secrétaire adjoint: ...Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Tasche-reau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rous-

seau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Or-ford), M. Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafre-nière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau (Ungava), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victo-rin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Trudel (Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière) et M. Bélanger (Anjou).

Le Président: Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce) et M. Holden (Westmount).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 107 contre: 3

Abstentions: 0

Mise aux voix de la motion amendée

Le Président: Alors, la motion d'amendement est adoptée. Maintenant, je vais mettre aux voix la motion, telle qu'amendée, de M. le whip de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean. Cette motion se lit dorénavant comme suit: «Que l'Assemblée nationale désapprouve le rapport du comité Beaudoin-Dobbie institué aux fins de répondre aux revendications légitimes du Québec et déposé à la Chambre des communes le 28 février 1992.» Que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau (Ungava), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).

M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chome-dey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallerand (Crémazie), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Rémillard (Jean-Talon), M. RK/ard (Rosemont). (15 h 10)

Le Président: Un instant, M. le secrétaire général. J'en appelle à nouveau à la collaboration de tous les collègues. C'est une question de décorum. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques! S'il vous plaît! Alors, allez-y.

Le Secrétaire adjoint: Mme Robic (Bouras-sa), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Iles), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington

(Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Aca-die), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Président: Maintenant, que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce) et M. Holden (Westmount).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 107 contre: 3

Abstentions: 0

Le Président: Alors, la motion, tel qu'amendée, est adoptée.

Au niveau des motions sans préavis, M. le leader du gouvernement.

Motions sans préavis

M. Pagé: M. le Président, une motion d'envoi en commission de l'économie et du travail. Je fais motion, suite à une consultation avec l'Opposition...

Le Président: Un instant, M. le leader. Moi, je suis bien prêt à vous écouter, mais j'ai de la difficulté à vous entendre, et certainement d'autres collègues également. Alors, allez-y.

Motion proposant que la commission

de l'économie et du travail procède à

l'étude d'un décret concernant le Parc

technologique du Québec métropolitain

M. Pagé: M. le Président, vous savez que, pour le leader, celui duquel il doit avoir l'attention la plus constante, c'est vous. Ça me sécurise, je vous remercie et je procède à ma motion.

Ma motion dit: "Que l'Assemblée nationale entérine l'envoi en commission de l'économie et du travail d'un mandat visant l'étude du décret no 37-91 concernant la modification du texte des lettres patentes du Parc technologique du Québec métropolitain, conformément à l'article 12 de la Loi sur le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science.»

Le Président: Y a-t-il consentement à l'adoption de cette motion?

Une voix:...

Le Président: II y a consentement. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Toujours au niveau des motions sans préavis, maintenant, je vais reconnaître Mme la ministre déléguée à la Condition féminine. Mme la ministre.

Motion proposant de souligner la Journée internationale des femmes

Mme Trépanier: M. le Président, je sollicite le consentement, pour la deuxième fois en deux jours consécutifs, des membres de cette Assemblée pour présenter la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale des femmes qui se tient annuellement le 8 mars.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion?

Une voix: Comme nous avions donné notre parole hier, aujourd'hui il y a consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et responsable du dossier de la famille.

Mme Trépanier: Merci, M. le Président. En premier lieu, vous me permettrez de regretter profondément la décision disgracieuse, je dirais, de l'Opposition, hier, de retarder le débat de cette motion.

Des voix: Oh! Oh!

Une voix: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît, à l'ordre!

Une voix: M. le Président, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant, M. le député. Alors, sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, il n'y a pas eu de décision disgracieuse. Il y a eu, conformément et en toute application correcte du règlement, refus de consentement hier pour reporter à aujourd'hui. Nous tenons notre parole. Et si la ministre commence sur une intervention du genre, je pense que c'est bien dévaloriser sa propre motion, alors qu'on veut justement y

concourir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre déléguée à la Condition féminine, si vous voulez poursuivre votre intervention.

Mme Trépanier: Merci, M. le Président. Nous laisserons donc la population juger.

Une voix: À la prochaine élection. Mme Trépanier: Je vous dirai...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, je vous demande votre collaboration pour écouter l'intervention de Mme la ministre déléguée à la Condition féminine.

Mme Violette Trépanier

Mme Trépanier: À l'aube du XXIe siècle, s'il est un droit fondamental pour les femmes, c'est bien celui d'atteindre leur autonomie financière, le droit de disposer librement des ressources financières suffisantes pour satisfaire leurs besoins essentiels. C'est Mme Gisèle Halimi qui disait que c'est dans la dépendance économique que toutes les autres dépendances des femmes prennent leur source. C'est souvent à cause de ces situations de dépendance que les femmes sont aux prises avec des problèmes de santé ou de violence. Les femmes sont en grande majorité économiquement faibles. Quel que soit leur standard de vie familiale, leur plus grand dénominateur commun est sans doute cette pauvreté qui les tient dans la dépendance d'un conjoint, de la famille ou de l'État.

M. le Président, les femmes sont les premières touchées par la pauvreté. La précarité croissante de l'emploi et le niveau de chômage élevé ne sont pas étrangers à l'appauvrissement des femmes. Un rapport du Conseil national du bien-être social intitulé «La femme et la pauvreté; dix ans plus tard» nous indique que la proportion de femmes chez les personnes pauvres n'a guère changé au fil des ans. En 1987, comme en 1975, 59 % des adultes vivant dans la pauvreté étaient des femmes. Le risque de se retrouver dans la pauvreté est plus grand pour les femmes que pour les hommes. En 1987, 15 % des femmes âgées de 16 ans et plus étaient pauvres comparativement à 11 % des hommes. Parmi tous les groupes, c'est celui des familles monoparentales dont le chef est une femme qui est le plus touché. 57 % de ces familles vivent sous le seuil de la pauvreté. À ce propos, j'ajouterai que les problèmes auxquels sont confrontées les femmes chefs de famille monoparentale découlent d'un ensemble de causes. Parmi celles-ci, on retrouve l'absence d'aide de . la part du parent absent. Le non-paiement de la pension alimentaire a également des conséquences néfas- tes sur la femme et les enfants et il constitue un facteur important de la féminisation de la pauvreté.

Peut-on imaginer qu'une rupture d'union puisse signifier pour la plupart des femmes et de leurs enfants une baisse catastrophique d'au-delà de 73 % du niveau de vie, alors que celui de l'homme augmente généralement de plus de 40 %? C'est malheureusement la triste réalité. Un autre facteur de pauvreté, c'est l'insuffisance des gains ou l'impossibilité même de travailler, que ce soit en raison de la situation personnelle, de la situation du marché du travail ou encore de la responsabilité des soins des enfants.

M. le Président, de nombreuses femmes doivent quotidiennement se battre pour améliorer leurs conditions de vie et ainsi lutter contre la pauvreté qui les afflige. Elles ne ménagent aucun effort pour concrétiser leur droit à l'égalité et à l'autonomie et pour faire en sorte que s'actualise leur droit au travail. Dans notre système social où la participation au marché du travail est considérée comme un moyen privilégié pour atteindre l'autonomie financière, il faut absolument en garantir le libre accès aux femmes. Il ne fait aucun doute que c'est par le biais de l'accès en emploi et à l'égalité en emploi que nous pourrons véritablement aider les femmes et ainsi rééquilibrer leur situation économique qui marque un retard inacceptable en 1992. (15 h 20)

Les changements démographiques et sociaux, de même que les bouleversements structurels majeurs qui ont ébranlé l'organisation du travail et marqué le processus de modernisation de la société ont transformé la vie des femmes beaucoup plus que celle des hommes. C'est avec difficulté que les mentalités ont tenté de suivre le rythme des mutations. Le monde du travail, tout comme la société, garde encore l'image stéréotypée de femmes qui quittaient le marché du travail pour se marier puis avoir des enfants, oubliant ainsi d'investir dans leur formation, leur carrière et leur sécurité financière. Ce beau cadre a éclaté et seuls quelques nostalgiques pensent encore qu'on peut recoller les morceaux.

Le sombre réalisme de ces données pourrait nous entraîner à entrevoir l'avenir avec pessimisme. Pourtant, ce n'est pas le cas. La volonté des femmes elles-mêmes de transcender ces erreurs historiques et l'évolution de la société, trop lente, bien sûr, mais quand même réelle, nous incitent plutôt à un optimisme réaliste.

La situation des femmes s'est améliorée au cours de la dernière décennie. Elles sont de plus en plus nombreuses à prendre part à l'économie de notre société et à occuper un emploi rémunéré. Présentement, elles forment 43,7 % de la main-d'oeuvre québécoise. De ce nombre, 60 % sont des femmes ayant des enfants d'âge préscolaire. Leur revenu personnel moyen s'est certes accru, de 35 % de 1971 à 1989, mais demeure toutefois inférieur au revenu des

hommes.

Dans les années quatre-vingt, la part des femmes dans les professions les mieux rémunérées a connu une hausse considérable. En agriculture, par exemple, le nombre de femmes collaboratrices a augmenté de 35 %. Du côté du secteur privé, on note que le taux de survie des entreprises après cinq ans est deux fois plus élevé lorsqu'elles sont dirigées par des femmes.

Tous ces efforts pour s'insérer dans le grand courant des activités productives, les femmes ont ainsi contribué aux progrès économiques et sociaux du Québec. Des pas de géant ont été franchis et plusieurs barrières sont maintenant levées dans le domaine de l'emploi pour les femmes. Leur progression dans les secteurs de responsabilité et d'initiative peut laisser croire que l'égalité entre les deux sexes est atteinte. Mais ce bilan doit être très nuancé. Malgré les gains sur lesquels elles peuvent désormais compter, les femmes paient encore un lourd tribut sur le plan professionnel parce qu'elles doivent naviguer entre les exigences du marché du travail et les impératifs de l'univers domestique et familial que les mentalités leur réservent toujours.

À ces éléments, s'ajoutent des interruptions fréquentes de carrière résultant de maternités, de périodes de chômage et de travail à temps partiel qui limitent la progression de l'autonomie économique des femmes. Les inégalités de revenus et de statut entre les hommes et les femmes compromettent de façon significative la sécurité économique d'une partie importante de la population active. Cette situation risque d'imposer à l'État et à la génération montante un très lourd fardeau. avec une main-d'oeuvre féminine qui pourrait atteindre 50 % dans les années 2000, le marché du travail doit s'adapter et les mentalités doivent changer, en commençant par la revalorisation du travail que les femmes exécutent par tradition. bien qu'elles aient réalisé de nombreux gains dans le monde du travail, les femmes continuent d'être cantonnées dans certains secteurs d'activité, notamment le secteur des services, le travail administratif, le domaine des textiles, de la fabrication, des soins de santé. malgré une plus grande diversification des choix professionnels, un niveau accru de scolarisation et une présence plus grande des femmes dans des postes de pouvoir, des phénomènes comme la ségrégation professionnelle et les écarts salariaux entre les hommes et les femmes perdurent.

Les femmes sont conscientes que l'éducation et la formation professionnelle sont des moyens importants pour arriver à leur pleine intégration au marché du travail. Elles savent pertinemment que leur activité professionnelle ainsi que leur stabilité dans l'emploi sont directement liées à leur niveau de qualification. Malgré une tendance à la progression parmi les entrepreneures, les cadres, les professionnelles de niveau supérieur, les femmes occupent massivement des emplois à temps partiel, des emplois de niveau hiérarchique inférieur, moins bien rémunérés et où les possibilités d'avancement et les avantages sociaux sont beaucoup moindres. Le rythme accéléré des changements technologiques et la mondialisation des échanges exigent une main-d'oeuvre pleinement qualifiée pour permettre au Québec de demeurer productif et compétitif. Actuellement, le fait que les femmes soient concentrées dans un nombre restreint d'emplois ne leur permet pas de développer des compétences pouvant les préparer à occuper de nouvelles fonctions. Devant un tel constat, il est aisé de croire que l'accès à la formation professionnelle constitue pour elles un enjeu important qui doit refléter fidèlement les réalités du marché du travail et les préparer à y jouer un rôle.

Notre société est en pleine évolution. Nous sommes à un carrefour, tant sur le plan national qu'international. Le Québec est plus que jamais confronté à des défis de taille. La conjoncture actuelle, les bouleversements du marché de l'emploi, la situation des femmes sur le marché du travail et la diversité de la composition de la main-d'oeuvre active sont autant de facteurs qui justifient une conscientisation et une action concertée axée sur l'atteinte de l'équité en emploi. L'égalité économique entre les hommes et les femmes, le développement des compétences et la croissance économique du Québec sont des intérêts indissociables et convergents. Relever les défis qui s'y rattachent profitera à l'ensemble de notre société.

Au cours des deux dernières décennies, la détermination des femmes et des groupes qui les représentent a poussé les gouvernements à l'action. Lois, politiques et programmes ont permis, dans une certaine mesure, de résorber une partie importante des inégalités dans les droits. L'égalité théorique est atteinte, mais il faut désormais passer de la rhétorique à la pratique. C'est ce que visera la politique de condition féminine que le gouvernement entend adopter et mettre en oeuvre au cours des mois qui viennent.

M. le Président, j'ai la conviction qu'aujourd'hui, comme demain, l'autonomie financière est le fondement du bien-être des femmes et influence largement d'autres aspects de leur vie. De l'autonomie économique des femmes découleront des améliorations sociales importantes. Les moyens à prendre pour arriver à féminiser l'économie doivent être envisagés dans tous les milieux. Le moment est venu de circonscrire les valeurs qui contribuent à notre identité. Il nous faut non seulement repenser la culture de nos entreprises, l'organisation de la main-d'oeuvre et nos institutions qui ont pu avoir une influence sur le degré de pauvreté des femmes, mais il faut aussi se questionner sur les bases mêmes de notre société. Les femmes du Québec attendent de nous cette nouvelle prise de conscience

collective.

M. le Président, replacer les femmes dans le grand courant de l'économie exige détermination et courage de la part des hommes et des femmes qui, à tous les niveaux, élaborent et exécutent les politiques sociales et économiques. Aux femmes d'aujourd'hui et à la relève, je ne peux que me servir de cette occasion de la Journée internationale des femmes, que nous avons célébrée dimanche, pour leur promettre d'orienter toutes mes énergies vers l'objectif d'égalité économique qui constitue la clé de la véritable liberté. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre déléguée à la Condition féminine. Sur cette même motion, je reconnais Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Bélisle: M. le Président, s'il vous plaît... Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Bélisle: ...si vous permettez. Avec le consentement de l'Opposition, j'aimerais donner les avis pour permettre aux commissions de siéger.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour déroger aux motions sans préavis?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Alors, nous allons passer, après ce consentement, à l'item «Avis touchant les travaux des commissions». M. le leader adjoint du gouvernement. (15 h 30)

Avis touchant les travaux des commissions

M. Bélisle: Merci, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 15 h 30 à 18 h 30 et de 20 heures à 22 heures, ainsi que demain, le jeudi 12 mars 1992, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra sa consultation générale dans le cadre de l'étude du projet de loi 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant diverses dispositions législatives.

De plus, M. le Président, de 15 h 30 à 18 h 30 et de 20 heures à 22 heures, ainsi que demain, le jeudi 12 mars 1992, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission des affaires sociales poursuivra sa consultation générale sur le document de consultation intitulé «Partenaires pour un Québec compétent et compétitif» et sur le projet de loi 408, Loi sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

Enfin, M. le Président, de 16 h 30 à 18 h 30 et de 20 heures à 23 heures, ainsi que demain, le jeudi 12 mars 1992, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude de la proposition tarifaire d'Hydro-Québec pour l'année 1992. Je dépose les avis.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint, les avis sont déposés. Je vous avise qu'aujourd'hui 11 mars 1992, après les affaires courantes, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, la Commission d'étude des questions afférentes à l'accession du Québec à la souveraineté se réunira en séance de travail. Demain, 12 mars 1992, de 9 h 30 à 12 h 30, au Club sportif Laurier, à Québec, la Commission d'étude sur toute offre d'un nouveau partenariat de nature constitutionnelle se réunira en séance publique.

Motions sans préavis

Alors, nous reprenons les motions sans préavis. Sur la motion proposée par la ministre déléguée à la Condition féminine, qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale des femmes qui se tient annuellement le 8 mars», je cède la parole à Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Mme la députée.

Reprise de la motion proposant de souligner la Journée internationale des femmes

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président. Effectivement, dimanche dernier, c'était le 8 mars, la Journée internationale des femmes. On sait qu'il y a eu plusieurs activités durant cette journée-là et que les activités se poursuivent aussi durant la semaine. C'est effectivement un moment tout à fait privilégié pour réfléchir à la situation des femmes québécoises. Si c'est un moment qui porte, bien sûr, à la réflexion, il faudrait aussi que cette réflexion soit concrétisée dans l'action. Il faut qu'on continue aussi d'agir dans le bon sens parce que, voyez-vous, malgré les immenses efforts qui ont été déployés depuis une vingtaine d'années et les progrès qui ont été réalisés, force nous est de constater que les mots «pauvreté», «violence», «discrimination» et «harcèlement» font malheureusement encore partie du vécu quotidien de plusieurs femmes au Québec. Comme vous le savez, M. le Président, la Journée internationale des femmes se déroulait cette année sous le thème - particulièrement à propos en cette période de récession économique - «Quand le E n'est plus muet», portant justement sur la situation économique des femmes et invitant à une réflexion dans cette voie. Comme le disait la

présidente du Conseil du statut de la femme, Mme Marie Lavigne, et je la cite: «Tant que les femmes au travail n'obtiendront que 68 % - je fais une parenthèse; on sait que, cette année, on a vu malheureusement que l'écart était de 62 % - du salaire des hommes, tant que de nombreuses femmes chefs de famille vivront sous le seuil de la pauvreté et tant que des femmes n'oseront pas sortir seules, non pas parce que le secteur est dangereux, mais simplement parce qu'elles sont femmes, le 8 mars sera toujours une belle occasion, un moment privilégié pour pousser la réflexion.» seulement, cette journée ne doit pas servir uniquement à pousser la réflexion sur un sujet déterminé ou à regarder le chemin parcouru. elle doit aussi servir de tremplin à des revendications proposées qui aboutiront, en toute logique, à des actions concrètes de la part des différents intervenants et des gouvernements. ces actions, jumelées à une volonté politique d'agir, doivent «prioriser» la pauvreté chez les femmes, de même que la violence faite aux femmes. d'ailleurs, les manchettes de plus en plus nombreuses et criantes des journaux ne trompent pas face à ces deux constantes qui caractérisent le lot de la vie quotidienne de milliers de femmes, ici, au québec.

On sait que la pauvreté se féminise. Son importance chez les familles monoparentales est sans contredit, principalement si elles sont dirigées par une femme seule et quand, en plus, cette femme seule est jeune. Cinq femmes pour un homme au Québec sont chefs de famille. Depuis 1980, il y a eu un accroissement de cette cellule familiale, le Québec venant en tête des provinces canadiennes. Elle concerne 21 % de l'ensemble des familles avec enfants. Quand on regarde l'écart, il est à noter que les familles avec conjoint, conjointe ont augmenté de 8,5 % entre 1976 et 1986, comparativement à 59 % pour les familles monoparentales. La notion même de la famille traditionnelle est remise en question avec l'accroissement des divorces, qui placent encore les femmes dans une situation économique précaire par rapport aux hommes. Eux, dans une telle situation, voient leurs revenus augmenter de 30 %, comparativement à 27 % de baisse pour les femmes vivant la même situation. En 1989, 40 % des familles étaient considérées comme pauvres si le chef de ladite famille était une femme. Cette proportion grimpe à 94,8 % si la mère est âgée de moins de 25 ans, pour passer à 68,2 % si elle est âgée de 25 à 34 ans et, enfin, à 42 % si elle a plus de 35 ans.

Il est évident, de par ces chiffres, que l'égalité économique des femmes est loin d'être acquise. En effet, tant que les femmes se retrouveront dans des emplois peu rémunérés, dont les tâches sont sous-évaluées, ce qui a pour conséquence directe qu'elles sont moins rémunérées que les hommes qui exercent des fonctions jugées équivalentes, tant que ça durera, on les maintiendra dans la pauvreté. Par conséquent, un des moyens concrets pour permettre aux femmes d'atteindre cette autonomie économique est de favoriser et de permettre l'adoption d'une loi proactive en matière d'équité salariale. En effet, l'objectif premier d'une telle loi est de corriger les discriminations salariales entre les deux sexes. C'est d'ailleurs ce que recommande la Commission des droits de la personne dans son rapport déposé tout récemment.

Depuis 1970, M. le Président, qu'on clame «à travail équivalent, salaire égal», il est plus que temps que la ministre déléguée à la Condition féminine abonde et agisse en ce sens. Il est illusoire de penser et même de croire que des programmes d'accès à l'égalité constituent la panacée aux difficultés économiques des femmes. Ce n'est pas parce qu'on favorise l'embauche d'une femme à un poste qu'elle se retrouvera dans la même situation salariale que ses collègues masculins pour un travail équivalent. Il est sûrement souhaitable, M. le Président, d'ouvrir le plus possible aux femmes l'accès à des postes traditionnels, mais il faut aussi se rendre à l'évidence et constater que ces programmes ne permettent pas les résultats escomptés. Ils ne viendront pas, non plus, corriger la sous-évaluation chronique des emplois dits traditionnels. d'autres provinces, tels le manitoba, l'ontario, la nouvelle-ecosse, l'île-du-prince-édouard ainsi que le nouveau-brunswick, ont déjà leur législation sur l'équité salariale. pourtant, le québec a été la première juridiction à reconnaître la légalité du principe de l'équité salariale, et ce, depuis 1976, en enchâssant dans la charte des droits de la personne l'article 19, cet article qui permet à une personne de porter plainte à la commission des droits de la personne si elle se sent lésée et discriminée. cependant, ce recours est très difficile d'accès pour des personnes non soutenues par une organisation syndicale et il est important de souligner que 70 % de la main-d'oeuvre féminine est non syndiquée. il s'agit d'un processus qui est long et qui est coûteux aussi. encore une fois, les femmes se retrouvent avec des droits qu'elles ne peuvent faire valoir. dans le contexte de réflexion récente axée sur une plus grande accessibilité à la justice, ça semble paradoxal et c'est inacceptable, car, encore une fois, les femmes doivent parler haut et fort pour exiger des mesures établissant dans les faits leur égalité de droit.

La progression pour diminuer l'écart salarial entre les femmes et les hommes est trop lente depuis 25 ans pour s'en satisfaire et espérer qu'elle continue pour qu'un jour on arrive à atteindre l'équilibre, et ce, quand c'est sur une base volontaire. Aujourd'hui, en 1992, les femmes ne gagnent encore que les deux tiers du salaire des hommes - on en parlait tout à l'heure, 62 % cette année, d'après les chiffres de 1989 - et ça, c'est pendant leur vie active, lorsqu'elles sont

sur le marché du travail. On parle de salaire ici, M. le Président. Quand on pense que les allocations de remplacement du revenu - on pense ici à l'assurance-chômage, aux régimes de retraite, aux pensions - sont aussi basées sur les salaires des femmes, sur la rémunération, bien, c'est évident, et on doit s'en rendre compte, qu'on les maintient dans la pauvreté tant et aussi longtemps qu'on refuse de se rendre à l'évidence qu'une loi proactive sur l'équité salariale est justifiée, légitime et nécessaire. (15 h 40)

C'est d'ailleurs, comme je le mentionnais, la recommandation aussi de la Commission des droits de la personne qui nous expliquait, en plus, de par des études qui ont été consultées lors de la confection de ce rapport, que la moitié des écarts observés - là on parle des 37,9 % - s'expliquerait par la discrimination salariale, principalement celle qui résulte de la ségrégation professionnelle. Si une partie de cet écart, la moitié, s'explique par toutes sortes de conditions, quand on parle de formation, d'éducation, de taux de syndicalisation, de durée du travail, il est très important de se rappeler que la moitié est aussi due à ce genre de ségrégation professionnelle et de sous-évaluation des emplois féminins.

M. le Président, bien sûr que, tout comme ma collègue, je souscris pleinement à la consécration officielle d'une journée internationale des femmes, mais je vous assure que, parfois, je me prends même à rêver qu'un jour on n'aura plus besoin d'avoir une journée internationale des femmes, car ça signifierait, à toutes fins pratiques, que dans les faits et en droit les femmes auraient atteint leur pleine et entière égalité.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Sur cette même motion, je reconnais maintenant Mme la whip adjoint du gouvernement et députée de Groulx. Mme la députée.

Mme Madeleine Bleau

Mme Bleau: Merci, M. le Président. Suite à la Journée internationale des femmes qui s'est tenue le 8 mars dernier, je suis très heureuse de vous entretenir de l'évolution de la situation des femmes, de leurs acquis et des nouveaux enjeux qui entourent la condition féminine. Je me dois également de profiter de l'occasion pour souligner le chemin parcouru au cours des dernières décennies, ce qui a eu pour effet de modifier la structure de la société, ici, au Québec, mais également ailleurs dans le monde.

M. le Président, de dures batailles ont été livrées pour l'amélioration de la condition féminine. Il est important de souligner que le gouvernement libéral du Québec y a contribué par la mise sur pied de mesures concernant, entre autres, la réintégration à l'emploi, le retour aux études, le soutien aux families et les programmes de crédits d'impôt, mesures qui furent introduites pour tenter de répondre aux attentes légitimes des femmes au Québec. Bien du chemin a été parcouru, et il reste encore de nombreux défis à relever.

Mais, aujourd'hui, à l'aube de l'an 2000, c'est merveilleux de pouvoir constater que la femme joue enfin un rôle clé dans la société. Je pense ici aux femmes, de plus en plus nombreuses, qui sont chefs d'entreprise et qui contribuent à l'amélioration de notre économie; je pense également à toutes celles qui occupent des postes clés sur le marché du travail. Voilà des données concrètes qui démontrent les pas de géant gui ont été franchis.

Egalement, M. le Président, il ne saurait être question de passer sous silence les changements de mentalité qui ont eu lieu au sein de la famille québécoise. Je parle ici de l'éducation des enfants, du partage des tâches, bref, de la structure familiale qui a été amenée à s'adapter aux nouvelles réalités sociales, et ce, pour le bien de tous.

Dans tout cela, on ne peut passer sous silence le rôle de la femme au foyer qui a, lui aussi, grandement évolué. En effet, qui ne se souvient pas des femmes au foyer d'il y a une quarantaine d'années, dont le travail n'était certes pas des plus valorisés? À cette époque, elles vivaient dans des conditions difficiles, tant sur le plan humain et social que sur le plan matériel. Les ressources qui leur ont été données depuis ont contribué à leur faciliter la tâche. Mais le plus important, M. le Président, c'est que le rôle de la femme au sein de la société, qu'elle soit sur le marché du travail ou qu'elle oeuvre au foyer, a été grandement revalorisé, et cela, c'est probablement l'un des acquis les plus importants.

M. le Président, j'aurais aimé pouvoir faire un constat entièrement positif. Malheureusement, il existe encore de sombres réalités auxquelles nous devons faire face. Je parle ici du phénomène de la violence conjugale qui frappe durement de nombreuses familles québécoises; de l'équité salariale qui est difficile à obtenir; des familles monoparentales dont le chef est une femme et qui doivent, encore trop souvent, faire face au phénomène de la pauvreté. Le partage des tâches et des responsabilités, pourtant essentiel à l'épanouissement des femmes, n'est malheureusement pas omniprésent dans tous les foyers québécois. Tout cela, M. le Président, nous rappelle que malgré des améliorations évidentes à la condition féminine, il reste encore du chemin à parcourir. Il est dommage qu'encore aujourd'hui en 1992 nous ayons à faire des constatations de cette sorte. Ce qui est encore plus dommage, c'est qu'un trop grand nombre de femmes doivent faire face à ces dures réalités.

Bien des choses ont changé, et heureuse-

ment! Les luttes acharnées qu'elles doivent mener ne le sont plus clandestinement. Les femmes ne sont plus seules à travailler pour l'amélioration de leurs conditions de vie sociale ou économique. Il est maintenant reconnu qu'améliorer le sort des femmes c'est améliorer la société pour le bien de tous.

Je le disais tout à l'heure, bien du chemin reste à parcourir et c'est à nous, en cette Chambre, qu'il revient de nous impliquer concrètement dans cette lutte à l'égalité, au respect et à la reconnaissance. Je suis quand même optimiste, M. le Président. Nous saurons relever nos manches et participer activement à cette lutte qui nous mènera sur la route où, enfin, les femmes et les hommes vivront dans l'harmonie parfaite, au sein d'une société plus juste et plus égalitaire. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Bleau. Sur cette même motion, je reconnais maintenant Mme la présidente de la commission de l'éducation et députée de Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. J'ai eu le sentiment cette année, à l'occasion du 8 mars, de vivre en quelque sorte le Noël des femmes. Durant toute la journée diverses activités ont eu lieu, et j'avais cette impression que nous avons au moment de la Noël quand on met de côté ses divergences et ses différences et que l'on retrouve un esprit plus ouvert, disposé, si vous voulez, au genre humain, et qu'on retrouve surtout un climat familial. J'avais ce même sentiment. C'est avec étonnement que j'ai retrouvé cette expression, «le Noël des femmes», dans un papier d'un chroniqueur du journal La Presse - pour ne pas nommer M. Foglia - qui, lui aussi, qualifiait le 8 mars de «Noël des femmes».

Mais ce n'est pas Noël toute l'année. C'est peut-être pour ça qu'on s'en fait un une fois par année. C'est ça, finalement, la réalité du 8 mars de 1992 qui s'est célébrée dans mon quartier, dans le bas de la ville de Montréal, sous le thème «De la détresse et de l'enchantement». C'est, finalement, cette ambivalence constante que l'on sent dans le dossier de l'égalité des conditions de vie, de la promotion de la situation des femmes.

La détresse et l'enchantement. La détresse, M. le Président, est-ce qu'il est besoin de rappeler qu'au moment même, à la fin de cette décennie, où les femmes, depuis presque 40 ans de lutte, pensaient avoir obtenu avec l'égalité juridique de bonnes chances de bien se positionner pour l'égalité économique, au moment même où elles pensaient enfin avoir saisi ce qu'il fallait pour diminuer la pauvreté qui se conjugue toujours au féminin... Comme je le disais, M. le Président, le grand ménage des lois sexistes a été complété. On l'a vu notamment et on l'a vraiment finalisé l'automne passé avec la réforme du Code civil, mais c'avait été entrepris bien avant nous, faut-il le rappeler, par des femmes qui ont siégé ici à cette Assemblée depuis maintenant 30 ans. (15 h 50)

Aussi, au moment où les femmes pensaient pouvoir bénéficier de leur scolarisation accrue... C'est vertigineux, finalement, cette ascension des femmes dans l'ensemble de la scolarité, M. le Président, qu'elles soient de niveau secondaire, collégial, ou universitaire, et pourtant bien loin d'être ce qu'on pouvait imaginer, loin de ce que les femmes qui ont combattu avant nous pouvaient imaginer, voir enfin se réaliser leurs rêves d'égalité économique - ça a retourné à l'envers. C'est incroyable de penser que, cette année, à diplôme égal, la comparaison du salaire d'une femme et d'un homme, ça ne s'est pas amélioré, ça s'est aggravé. Pensez que ça a été à 66 %, à peu près, le salaire qu'une femme, à diplôme égal, gagnait, en comparaison avec celui d'un homme. Il faut voir que c'est vraiment très lent, la progression, parce qu'au début du siècle l'écart entre ce qu'une femme gagnait, en comparaison de ce qu'un homme gagnait, était de 55 %. Ça veut donc dire qu'en pas loin de 70 ans, c'est à peu près 11 % d'amélioration. Même à ce rythme-là, l'an passé, j'avais calculé que pour atteindre, à diplôme égal, l'égalité économique, il fallait compter jusqu'à l'an 2272.

Alors, vous comprenez que le désenchantement, cette année, c'est de se rendre compte que, loin de s'améliorer même lentement, la situation s'est détériorée, et ce n'est plus 66 %, mais 62 % du salaire d'un homme qu'une femme gagne, à diplôme égal. Ça, c'est extrêmement inquiétant parce que ça veut donc dire que ça ne s'améliore plus. Comment on fait pour que ça ne s'aggrave pas? C'est ce que j'aurais aimé entendre de Mme la ministre déléguée à la Condition féminine. J'espère qu'elle aura l'occasion, lors de sa réplique, de nous dire les moyens qu'elle entend prendre.

Moi, les deux dossiers dont je m'occupe ici, dans cette Assemblée, pour l'Opposition, c'est le dossier de la justice et le dossier de la main-d'oeuvre, de la sécurité du revenu et de la formation professionnelle. À dire vrai, dans ces deux dossiers-là, le fait est que je n'ai rien vu se passer. Au contraire, ce qui m'a beaucoup inquiétée, c'est de constater que la ministre, dans le fond, n'était pas vraiment écoutée. On s'entend, je pense bien, des deux côtés, pour lui reconnaître de la bonne volonté, mais ce n'est pas évident de la part de ses collègues.

Elle était assise, au Sommet de la justice, à côté du ministre de la Justice. Je sais que l'envie a dû lui prendre de lui donner de grands coups de coude quand il a refusé, entre autres, une demande qui était faite, au Sommet de la justice,

de mettre sur pied un comité de la condition féminine au ministère de la Justice. Il s'est demandé si ce serait efficace. Imaginez-vous qu'il y a des ministères où ça existe depuis maintenant 15 ans. Même le ministère de l'Agriculture a mis sur pied un Bureau de la condition féminine et combien d'autres ministères, parce que c'est une manière de faire avancer la cause des femmes au sein de tous les programmes du ministère, où on peut être tenté de perdre ça de vue, à un certain moment donné. Non seulement le ministre de la Justice, qui aurait pu facilement...

Comme l'a bien rappelé une femme juge de la Cour supérieure qui, elle, réclamait qu'il y ait un redressement quant à la nomination des femmes juges, est-ce que c'est normal qu'au moment où on se parle seulement 9 % des juges soient des femmes? Quand on sait que, devant la Cour supérieure, 80 % du temps des juges est consacré aux questions de désaccords, de crises familiales, lors de séparations ou de divorces. Est-ce que c'est normal qu'il n'y en ait que 9 % qui sont des juges? Et ça, ce n'est pas une fatalité. Chaque nomination de juge, c'est fait par le ministre de la Justice. C'est lui qui en est redevable. Il y a des comités de sélection, je veux bien le croire, mais il nomme les gens qui siègent aux comités de sélection.

Ce que le Conseil du statut de la femme demandait au ministre, c'était simple, ça ne coûtait pas grand-chose. Il aurait été facile... Moi, ça m'a surprise... Cet après-midi-là, il aurait pu facilement sortir de là en étant applaudi, un peu comme un héros. Il s'agissait de mettre sur pied un bureau de la condition féminine dans son ministère de la Justice et d'accepter au moins de toujours nommer une femme sur ces comités de sélection quand il y en avait trois qui siégeaient, comme le Conseil du statut souhaitait qu'il y ait cinq membres pour la sélection des juges, dont deux femmes. Ce n'était pas si compliqué. Ce n'était même pas ce que la femme juge qui représentait la Conférence des juges est venue, elle, demander, c'est-à-dire une nomination par alternance. Puis, elle a dit au ministre que, même en nommant par alternance à la Cour du Québec, où il y a déjà une certaine amélioration, on n'aurait pas d'égalité avant l'an 2010. Alors, vous savez, ça, c'est pour ma fille ou la fille de ma fille. Ce n'est quand même pas pour notre génération. Le ministre, finalement, a dit non. Je pense que notre collègue, la députée de Dorion, ministre déléguée à la Condition féminine, a pas mal de pain sur la planche, avec son collègue de la Justice, et avec son collègue de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

Écoutez, M. le Président, il y a un projet de loi qui est déposé devant l'Assemblée. On est en commission parlementaire. Moi, quand je vais quitter, c'est pour aller entendre des mémoires sur le projet de loi 408. Il y a un projet de loi qui crée la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Il y a un énoncé de politique, n'est-ce pas, qui a été publié au mois de décembre dernier, puis qui lance le grand défi au Québec d'être compétent et compétitif. Il n'y a pas un mot, pas une ligne sur l'équité, sur les problèmes, sur les tendances lourdes. En matière de main-d'oeuvre, ce sont les lois du marché qui jouent. Les tendances lourdes, en matière de main-d'oeuvre, c'est d'éliminer finalement ceux qui ne peuvent pas - je m'excuse de l'expression - «fitter» dans les modèles les plus performants, c'est-à-dire éliminer les jeunes parce qu'ils n'ont pas d'expérience, les gens d'âge moyen parce que c'est moins payant que de leur donner, si vous voulez, une formation technologique, puis les femmes, parce que les femmes, on ne peut pas se fier à ça! Ça part des fois, M. le Président, parce que ça a des bébés. Ça finit, si vous voulez, par prendre des congés de maternité puis des congés parentaux.

Je vais terminer là-dessus parce que je sais que mes collègues en ont beaucoup à dire, mais j'invite Mme la ministre à agir immédiatement sur l'entente qui a été signée entre le Conseil du trésor et le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, le Syndicat des professionnels, notamment. Dans cette entente, qui prend effet le 31 mars, on a prévu, puis c'est heureux, que les personnes qui étaient occasionnelles dans des postes à caractère permanent, puissent acquérir leur permanence. Mais, ce qu'on a oublié dans l'entente, c'est de prendre en considération qu'il y avait des occasionnelles qui avaient pris des congés de maternité, puis des congés parentaux. Alors, dans le calcul du temps nécessaire pour être considérée comme étant admissible, si vous voulez, à la conversion au poste permanent, il y a des femmes qui ont eu comme principal tort, imaginez-vous, d'avoir des enfants, surtout deux. Celles qui en ont eu juste un, elles peuvent, je pense, se glisser là dans les délais. Mais, celles qui en ont eu deux, elles, c'est bien de valeur... Si, le moindrement, elles ont pris un congé parental, alors là elles sont écartées du bénéfice de la conversion.

Il y en a qui m'ont écrit, pour dire vrai, à l'occasion du 8 mars. Elles avaient déjà écrit à leur député qui n'est nul autre que le député de Saint-Laurent, n'est-ce pas, qui est le premier ministre. Elles avaient écrit aussi à leur syndicat, et elles ont reçu des copies de lettres que j'ai envoyées à Mme la ministre à la Condition féminine. Les copies, dans les deux cas, syndicat et député de Saint-Laurent, disent que c'est donc de valeur, mais l'entente est signée. Moi, je suis sûre que Mme la ministre ne peut pas laisser l'employeur, qui est le gouvernement, agir de la sorte.

Alors, comme je vous dis, M. le Président, on a pas mal d'ouvrage à faire, pour améliorer notre représentativité, ici même au sein de l'Assemblée, c'est évident, mais on a pas mal

plus d'ouvrage qu'on imaginait, parce que les choses ne se sont pas améliorées. Cette année, les choses ont empiré pour la majorité des femmes du Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Sur cette même motion, je reconnais maintenant M. le député de Vimont. M. le député.

M. Benoît Fradet

M. Fradet: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, à l'instar de mes collègues, d'intervenir sur la motion présentée par la ministre déléguée à la Condition féminine sur la Journée internationale des femmes. De fait, de souligner une telle journée contribue d'abord, à mon avis, à reconnaître le travail accompli pour atteindre l'égalité tant recherchée entre les hommes et les femmes, puis à indiquer ce qui reste à faire pour progresser dans la voie de l'égalité. C'est, brièvement, ce que je me propose de faire dans les quelques instants qui me sont permis. (16 heures)

M. le Président, si les hommes et les femmes de ma génération profitent aujourd'hui de rapports plus égaux, de rapports davantage marqués du signe de l'égalité, ma génération le doit aux générations d'avant et, en particulier, aux générations de femmes qui ont su mener les combats qui ont permis l'atteinte de cette égalité. C'est grâce à ces femmes, M. le Président, par exemple, que nous avons aujourd'hui, à l'Assemblée nationale, des femmes députées. Et c'est grâce à ces femmes si, aujourd'hui, j'ai l'honneur de les côtoyer dans cette Assemblée.

La politique étant toujours l'expression de changements sociaux, la présence de mes collègues féminines à l'Assemblée illustre aussi que la société a changé et s'est adaptée en partie à cette nouvelle réalité de l'égalité entre les hommes et les femmes. Sans dire que tout a été réalisé, qu'il n'y a plus rien à faire, on peut néanmoins constater qu'au cours des 20 dernières années des pas importants ont été franchis dans la longue marche vers l'égalité des hommes et des femmes. On me permettra, à cet égard, de citer quelques chiffres afin de donner une mesure de cette progression.

M. le Président, disons d'abord qu'il y a aujourd'hui une proportion grandissante de Québécoises qui ont un revenu personnel; de 55,5 % en 1971, cette proportion est passée à 77,7 % en 1986. Il s'agit là d'une progression très significative, et davantage si l'on considère que la proportion d'hommes touchant leur revenu personnel, elle, est demeurée stable à 90 %. Quand on connaît le rôle et l'importance du revenu personnel dans l'autonomie qu'il procure à une personne, on est à même de réaliser l'ampleur de la progression, l'ampleur et l'importance de ces quelque 20 % de progression. Cela montre que notre société a su bouger et faire place aux femmes.

Au chapitre des progrès, on peut aussi citer d'autres chiffres, notamment sur le revenu personnel moyen des femmes. On constate qu'il s'est accru de 35 % de 1971 à 1989. De plus, cette progression a été plus importante que celle observée chez les hommes. Toutefois, il faut déplorer qu'au cours des dernières années elle ait nettement ralenti, et au moins souhaiter qu'elle retrouve ce rythme de croisière.

Vous me permettrez, M. le Président, d'en ajouter un dernier. De 1981 à 1988, la part des femmes dans les professions les mieux rémunérées a connu une hausse remarquable. Ainsi, le nombre de femmes gagnant annuellement plus de 50 000 $ a doublé durant cette période. Et, pour l'avenir, on peut être extrêmement optimiste si l'on considère que les femmes de ma génération ont un accès très large à l'enseignement supérieur. Ce sont là, M. le Président, quelques illustrations chiffrées de la progression des femmes dans leur marche vers l'égalité.

Je voudrais maintenant dire un mot sur la situation actuelle pour indiquer que tout n'est pas acquis et que beaucoup reste à faire, y compris pour les femmes de ma génération, qui sont plus jeunes et qui bénéficient, entre autres, des efforts des femmes du passé. Si, de façon générale, les conditions de vie des femmes se sont, tel que je viens de vous le montrer, améliorées au cours des dernières années, elles ne sont pas aujourd'hui à l'abri de la rareté des ressources matérielles dans laquelle vivent de plus en plus les gens de notre société. Effectivement, M. le Président, les femmes de ma génération sont loin d'être assurées de l'aisance matérielle, y compris de celle dans laquelle elles ont grandi. Car, à la différence de leurs mères, elles sont nées dans l'abondance matérielle de la Révolution tranquille et sont aujourd'hui confrontées à l'exigeant défi de maintenir et d'améliorer leur niveau de vie. À cet égard, elles sont un peu placées dans la même situation que les jeunes de ma génération.

On peut certes voir là un signe d'égalité, mais il y a plus, en particulier si l'on considère le phénomène croissant des familles monoparentales. L'importance du phénomène n'est d'ailleurs pas accessoire puisque, lorsqu'on parle aujourd'hui de gens démunis, on fait souvent allusion aux familles monoparentales dont le chef de famille est une femme, et souvent une jeune femme. Ce phénomène en est un de société qui interpelle le gouvernement et les pouvoirs publics afin que nous soyons en mesure de lui fournir une solution acceptable. Nous devons y faire face dans un contexte inédit où les pouvoirs publics seront, comme ces familles monoparentales, confrontés à la rareté des ressources matérielles. Ce contexte limite les possibilités et exige de nous un plus grand effort d'imagination et de créativité afin de lui trouver une solution

acceptable. La Journée internationale de la femme constitue une occasion privilégiée pour réfléchir aux moyens que nous pourrions prendre pour le régler et, tout au moins, pour lui fournir une solution satisfaisante.

En terminant, M. le Président, au-delà de la conjoncture actuelle qui, par son caractère exigeant, peut obscurcir la situation, il y a lieu d'être optimiste pour la prochaine décennie. Des progrès ont été faits au cours des dernières années et il y a lieu de souhaiter et de croire que d'autres seront faits au cours de la prochaine.

Enfin, on peut donc dire que l'avenir est riche d'espérance en matière d'égalité des rapports entre les hommes et les femmes. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Vimont. Sur cette motion, Mme la présidente de la commission des affaires sociales et députée du comté de...

Mme Marois: Taillon.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Taillon. Mme la députée.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. C'est évidemment avec beaucoup d'intérêt et toujours une certaine impatience, quand même, que je m'associe à la motion de la ministre à la Condition féminine pour souligner ce que vivent les femmes, je dirais les femmes du monde entier, mais les femmes québécoises en particulier. Quelles sont leurs conditions?

Je suis toujours un peu impatiente parce que je trouve que ça fait longtemps qu'on se lève et qu'il y encore pas mal de boulot à faire. Comme mes collègues l'ont rappelé ici et la ministre elle-même, j'aimerais ça que ça s'accélère un peu parce que j'ai l'impression que l'on stagne. J'ai l'impression qu'il y a aussi une espèce de lassitude chez les leaders qui défendent cette cause, que ce soient des leaders femmes ou des leaders hommes. Il y a une certaine lassitude qui s'installe parce que, justement, on a l'impression de faire un peu de sur place.

Alors, j'inciterais tant la ministre que les membres de l'équipe gouvernementale à agir, je dirais, d'une façon plus significative encore à l'égard de cette recherche de la reconnaissance de l'égalité dans les droits, de l'égalité dans les services, de l'égalité dans les revenus, de l'égalité tout court, finalement. J'ai l'habitude de dire: Vous savez, on le sait, nous, qu'on est égales, sauf que ce n'est pas reconnu dans les faits. Ce n'est pas reconnu par nos salaires. Ce n'est reconnu par nos revenus. Ce n'est pas reconnu dans les professions qu'on occupe, etc.

Il y a un excellent document, d'ailleurs - et je voudrais le souligner devant les membres de cette Assemblée - qui a été produit à l'occasion de cette journée internationale. Comme on le fait chaque année, il y a des réflexions qui sont faites dans les organismes, dans les institutions. Il y a un excellent document qui a été préparé par le Conseil du statut de la femme et qui fait état des réalisations, d'une part. On a dit: D'un côté, il y a les acquis; de l'autre côté, il y a les limites.

Alors, je ne répéterai pas d'une façon exhaustive tout ce qui a été dit jusqu'à maintenant et tout ce qui est dans ce document et qui concerne la situation des femmes. Mais, évidemment, ce qui ressort, ce qui saute aux yeux, c'est toujours cette situation de pauvreté. Et on dit: La pauvreté - le titre est très significatif - le féminin singulier l'emporte. On est pauvre à 20 ans comme on est pauvre à 60 ans, à 70 ans. 60 % des adultes qui vivent dans la pauvreté sont des femmes. 55 % des bénéficiaires de la sécurité du revenu, de l'aide sociale sont des femmes. Quand on est chef de famille, c'est à 85 % des femmes qui sont chef de famille monoparentale. 60 % d'entre elles vivent des situations de pauvreté. Bon. Ça apparaît inacceptable aux yeux de n'importe quelle société développée, comme celle dans laquelle on vit maintenant.

Alors, quand je parcours ce document, je me rends compte qu'on parle du revenu personnel, qu'on parle de niveau de vie, de la répartition des femmes en emploi, des conditions de travail. Et apparaît la conciliation des responsabilités professionnelles et familiales. Je pense que c'est le quatrième ou cinquième élément de la liste. On parle des femmes entrepreneures.

Moi, j'en suis venue à la conclusion, après une certaine expérience, d'une part à l'égard de ce dossier-là, après une certaine expérience de la vie tout court, comme femme, comme femme impliquée politiquement, comme femme aussi mère de famille, j'en suis arrivée à la conclusion que la véritable égalité entre les hommes et les femmes va vraiment s'acquérir si, devant les enfants, l'un et l'autre, homme et femme, nous nous sentons tout aussi responsables. Cela, évidemment, peut se faire par des changements profonds de mentalité, par des mesures aussi, des mesures reliées aux congés parentaux - on en parlait - par des mesures reliées aux services de garde, par des mesures qui reconnaissent cette responsabilité et qui reconnaissent ce rôle, ce rôle social majeur dans la société qui est la perpétuité, qui est la continuité de ce que nous sommes. Je reste convaincue de cela. (16 h 10)

Pourquoi? Parce que, peu importe comment on envisage cette réalité, peu importe l'angle sous lequel on la regarde, on va constater que parce que les femmes ont assumé - assument toujours, évidemment - la responsabilité des en-

fants, de la mise au monde des enfants, ça va de soi, c'est physiquement que cette responsabilité, si on veut, nous revient. Cette réalité nous revient mais, à cause de cela, et parce que nous avons occupé une place très large à l'égard de la famille et de la prise en charge des enfants, une place de services, on s'est retrouvé ensuite dans des métiers qui étaient, qui relevaient traditionnellement des rôles qu'on avait occupés dans l'histoire. Donc, on est devenu infirmière, on est devenu enseignante. On a occupé des fonctions qui, dans nos sociétés, sont généralement, même s'il y a eu du rattrapage de fait, encore des fonctions - secrétariat, secteur des services - moins bien rémunérées. Ce qui fait qu'on a incité les femmes, par exemple, actuellement, à s'orienter vers les métiers non traditionnels: mécaniciens, électriciens, secteur de la construction.

Je ne pense pas que c'est la solution, moi. Je pense que la solution, elle est plutôt de revaloriser les métiers occupés par les femmes, les professions occupées par les femmes qui valent tout autant que les métiers ou les professions occupés par les hommes. Mais je reviens à mon évaluation première, c'est le fait que nous ayons été, dans l'histoire et par rapport à notre culture et à notre évolution, responsables des enfants. Nous avons ensuite occupé des fonctions qui ont été en lien, je dirais, et en ligne avec ce qui nous avait été attribué comme responsabilités devant les enfants. Ces fonctions-là, comme ça allait de soi, on n'avait pas besoin de les rémunérer aussi bien que d'autres types de fonctions ou de professions qui demandaient de la force physique, par exemple, ce qui fait qu'on s'est retrouvé dans des emplois qui étaient moins bien rémunérés.

Quand on nous dit que les femmes occupent moins des postes de responsabilités... Quand on donne naissance à des enfants, on prend des congés, c'est un peu normal. Sauf que ça, ce n'est pas compté dans les années d'expérience. Donc, quand on arrive pour obtenir un poste de cadre dans une organisation, ces années-là n'étant pas comptées, ça prend plus de temps pour accéder à ce type de fonction. Puis, parce qu'on continue de s'occuper des enfants, généralement, quand on occupe ces mêmes fonctions de responsabilités de cadre, on trouve anormal dans les milieux de travail qu'une personne doive quitter à 17 heures parce qu'elle a charge d'enfants.

Je m'amusais parfois avec mes collègues femmes du Conseil des ministres lorsque j'y ai siégé en disant: Vous savez, si la moitié du Conseil des ministres était formé de femmes et qu'à 17 heures on se levait en se disant: On s'excuse, mais il faut aller chercher nos petits à la garderie - il faut s'en occuper - bien, le Conseil des ministres arrêterait de siéger. Il n'y aurait pas assez de ministres pour continuer à discuter des dossiers.

Dans les faits et parce que, justement, on a continué d'être les seules responsables devant les enfants, on n'y a pas accédé à ces fonctions-là, et on n'est pas suffisamment en nombre pour avoir une influence significative qui fasse que la société se préoccupe de cette réalité-là dans l'ensemble de nos sphères d'activité. Alors, si c'est vrai à l'égard des postes de responsabilités, si c'est vrai à l'égard des rémunérations, c'est vrai évidemment à l'égard des situations de pauvreté dans lesquelles on se retrouve. Les femmes continuant d'être responsables des enfants, elles sont chefs de famille monoparentale, le conjoint n'assumant pas sa part à l'égard du versement, par exemple, de la pension alimentaire ou autrement, la contribution aux responsabilités familiales, encore une fois, c'est la femme qui continue à payer le prix de cette inégalité.

Alors, je pense que c'est, un peu comme Benoîte Groult le disait, que c'est devant le fourneau et le biberon que commence l'égalité entre les hommes et les femmes. C'est dans le partage des responsabilités et c'est dans le fait d'assumer qu'on soit, devant les enfants, responsables de l'éducation de ces derniers, du fait qu'on soit à leurs côtés pour les voir grandir, pour leur permettre à leur tour de devenir de bons citoyens et de bonnes citoyennes. Mais si on ne règle pas dès, je dirais, le début de la vie ces réalités-là, c'est bien sûr que par la suite on va se retrouver avec des situations comme celles que l'on connaît maintenant et qui ne doivent pas être perpétuées.

À cet égard, je crois que le gouvernement a un rôle à jouer. Oui, en matière d'éducation, mais aussi en matière de mesures, que ce soit de l'ordre des congés parentaux, que ce soit de l'ordre des services de garderie ou que ce soit aussi de l'ordre de l'équité salariale, qui permettrait justement de venir corriger cette inégalité séculaire que l'on subit maintenant et qui est due au fait qu'on a moins rémunéré les fonctions assumées par les femmes. On a d'ailleurs l'habitude de dire que, lorsqu'une profession se dévalorise ou se dévalue aux yeux d'un certain nombre, les femmes se mettent à l'occuper.

Dans ce sens-là, je pense que ce n'est pas avoir beaucoup de fierté, comme société, que d'accepter des phénomènes comme ceux-là. Alors, dans ce sens-là, j'inciterais, tant la ministre que ses collègues, à plus de vigilance et à une action encore plus vigoureuse. Je crois que, malheureusement, à certains égards, le Québec a pris du retard alors qu'il était en avance pendant un bon moment, particulièrement du côté justement de l'équité en emploi et de l'équité salariale, si on se retourne du côté de nos voisins, entre autres Ontariens. En ce sens, j'incite la ministre à continuer de faire des pressions - sûrement qu'elle en fait - auprès de ses collègues et j'incite surtout ses collègues à agir d'une façon plus déterminée qu'on ne l'a fait jusqu'à main-

tenant. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Taillon. Sur cette même motion, je reconnais maintenant Mme la vice-présidente de la commission de l'éducation et députée de Matane. Mme la députée.

Mme Claire-Hélène Hovington

Mme Hovington: Merci, M. le Président. Alors, moi aussi, il me fait plaisir de joindre ma voix à celle de mes collègues pour souligner la Journée internationale des femmes car, à mon avis, cette journée est une occasion particulière. Elle offre la possibilité d'un temps d'arrêt, d'un temps de réflexion pour constater, M. le Président, l'évolution des progrès de la condition des femmes dans notre société.

Il est possible d'examiner cette situation sous plusieurs angles. L'an dernier, on s'en souviendra, c'est sous le thème de la démographie et des questions soulevées en regard des aspirations et des revendications des Québécoises que s'est tenue la Journée internationale des femmes. Cette année, il m'apparaît tout indiqué de faire porter l'examen sur les conditions économiques des femmes.

En effet, le contexte économique actuel extrêmement exigeant donne tout son à-propos à une réflexion sommaire sur les conditions matérielles dans lesquelles évoluent les femmes de notre société. Si, de façon générale, les conditions de vie matérielles des femmes se sont améliorées au cours des dernières décennies, elles ne sont pas aujourd'hui étrangères par le phénomène de rareté des ressources matérielles qui confronte de plus en plus des gens de notre société. La prospérité des femmes est fragile, M. le Président, tel que le montre le phénomène de la pauvreté qui continue à caractériser la situation des femmes.

Pour vous donner une mesure de cette fragilité, M. le Président, il n'est pas inutile de rappeler quelques chiffres cités plus tôt par ma collègue, la ministre déléguée à la Condition féminine. Signalons d'abord que la proportion des femmes chez les personnes pauvres n'a guère évolué au cours des 10 dernières années et on peut même penser qu'elle a augmenté au cours des deux dernières. Elle se situe à environ 56 % des personnes pauvres. C'est beaucoup et c'est beaucoup trop, M. le Président. Ça dépasse largement le seuil de ce qu'une société comme la nôtre peut souhaiter. De plus, soulignons que le risque de se retrouver dans la pauvreté est plus grand pour les femmes que pour les hommes. On estimait ce risque, en 1987, à 4 %, autrement dit, 15 % des femmes âgées de 16 ans et plus étaient pauvres, comparativement à 11 % chez les hommes. C'est là un autre indicateur de l'étendue du phénomène de la rareté des ressources financières chez les femmes.

Il en est un troisième, M. le Président, qu'on se doit absolument de souligner, c'est celui des familles monoparentales dont le chef est une femme. Ces familles sont durement touchées par le phénomène de la pauvreté puisque 57 % d'entre elles vivent sous le seuil acceptable de niveau de vie. C'est considérable! Le phénomène est tellement important que, quand on parle aujourd'hui de gens démunis, on fait toujours allusion aux familles monoparentales dont le chef est une femme. Cette situation n'est pas attri-buable qu'à la récession et aux transformations du marché au travail liées aux pressions croissantes en faveur de la compétitivité de l'économie québécoise. Non. Elle est aussi et surtout liée aux transformations de la structure familiale et, en particulier, au phénomène de précarisation de la vie maritale qui a caractérisé les dernières décennies. (16 h 20)

M. le Président, dans un monde où la famille dite «normale» se compose de deux pourvoyeurs de fonds, lorsqu'il n'y en a qu'un, la famille est confrontée avec plus d'acuité à des difficultés de niveau de vie. Le problème est davantage aigu si l'on considère le cas des femmes chefs de famille. En général, elles occupent des emplois beaucoup moins rémunérés que ceux des hommes. Ce faisant, elles sont davantage confrontées à l'insuffisance des ressources matérielles.

M. le Président, s'il est un phénomène aujourd'hui qui interpelle les pouvoirs publics, c'est bien celui-là. Il interpelle les hommes et les femmes publics que nous sommes afin de lui fournir une solution satisfaisante. Une journée comme celle de la Journée internationale des femmes est bien l'occasion de le rappeler. C'est pourquoi j'ai tenu à le souligner au cours de ma brève intervention. Vous n'ignorez pas, M. le Président, que la marche conduisant les femmes vers l'égalité d'accès à la richesse est longue et, comme je viens de le montrer, plusieurs étapes restent à franchir, mais il n'en demeure pas moins que certaines l'ont été. Ces progrès, réalisés au cours des deux dernières décennies à plusieurs niveaux, nous permettent d'être optimistes pour l'avenir. Ils sont, à bien des égards, porteurs d'espoir et l'espoir est, faut-il le rappeler, l'un des plus grands moteurs des changements de notre société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): merci, mme la députée. sur cette même motion, je reconnais maintenant mme la députée de marie-victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Merci, M. le Président. Moi aussi, je me joins aux voix de mes collègues en cette journée de la fête des femmes, le 8 mars.

M. le Président, dans l'histoire, vous savez, ce n'est pas la première fois qu'on remet en question le rôle, l'efficacité des femmes dans nos sociétés. Dans l'antiquité, on se demandait si les femmes avaient une âme. Peu de temps après, on pesait même le cerveau des femmes en disant qu'il était plus petit que celui des hommes et que, par conséquent, il y avait certaines choses qui ne pouvaient pas faire l'objet de compréhension de la part des femmes puisque leur cerveau était plus petit. À partir de ça, on a dit que les femmes ne pouvaient pas tolérer les mathématiques parce que c'était trop compliqué pour l'absorption du cerveau des femmes. Je vois qu'un certain collègue de l'autre côté, masculin, bien sûr, évidemment, sourit à de tels propos, mais, M. le Président, c'en est une réalité et ça a existé. Ça a réellement existé.

On se pose des questions maintenant à savoir pourquoi, à l'heure actuelle, c'est si complique, si difficile pour les femmes d'accéder à des postes d'autorité et qu'elles puissent avoir aussi accès à un travail très bien rémunéré. Pourquoi les femmes ne vont-elles pas dans les sciences? Pourquoi elles sont toujours demeurées dans des aspects beaucoup plus de services, beaucoup plus vers des valeurs plus traditionnelles, féminines, comme on dit? Eh bien, c'est pour un paquet de facteurs, bien sûr, et, notamment, à cause de telles mentalités.

Lorsqu'on parle de l'évolution des femmes et qu'on veut qu'elles prennent une place dans la société, nous devons aussi nous attarder à des changements de comportement et d'attitude. Des changements de comportement et d'attitude, d'une part, des hommes vis-à-vis de la compréhension des femmes, je crois. Bien sûr que la femme demeurera toujours cet éternel féminin, avec toutes les qualités féminines qu'on lui connaît et les attributs féminins qu'on lui connaît. Aussi - c'est inévitable et incontournable - la maternité appartiendra toujours aux femmes. Bien sûr. C'est un fait, c'est une évidence.

Mais à partir de cette évidence, M. le Président, il y a toute une organisation de société qui est importante à repenser en fonction, justement, de cette capacité de la femme à jouer son rôle pleinement, à part entière, dans nos sociétés à l'heure actuelle. C'est là que ce n'est pas évident parce qu'il y a un partage de pouvoirs et quand on parle de partage de pouvoirs, ce n'est pas toujours facile d'arriver à s'entendre là-dessus, à savoir lequel des deux devrait faire des concessions.

Nous sommes arrivés à un constat dans notre société moderne, où maintenant, parce que de plus en plus, effectivement, les luttes des femmes ont fait en sorte que cette reconnaissance, cette capacité de la femme ne fait plus l'ombre d'un doute, nous devons négocier la place que nous voulons occuper dans cette société et que nous sommes capables d'occuper dans cette société. Ce n'est pas facile et ce n'est pas évident non plus. Nous devons, malheureusement, nous confronter constamment à des fins de non-recevoir, plus souvent qu'autrement, parce qu'on nous a habituées à ne pas travailler dans un esprit de solidarité, mais bien plus à nous isoler les unes des autres dans nos maisons. Il est très difficile pour nous, en fait, de faire dans cet esprit de solidarité cette lutte qui est si importante dans le changement des comportements vis-à-vis de nos confrères et vis-à-vis des hommes en général dans la société. il est bien sûr, m. le président, qu'il y a eu des gains. le droit de vote, entre autres, a favorisé, bien sûr, la place des femmes dans le monde politique. et le fait que les femmes aient pu accéder à ce lieu de pouvoir a eu un effet significatif sur les tendances, les orientations des gouvernements face aux places que pouvaient occuper les femmes dans nos sociétés. mais, malheureusement, le nombre n'est pas suffisant pour que cette tendance vis-à-vis des différents changements de comportement soit aussi évidente qu'on voudrait bien qu'elle le soit à l'heure actuelle, et pour que les progrès puissent s'accélérer d'une façon un petit peu plus rapide que présentement.

Nous avons vu, avec la loi 146, le partage économique des biens des conjoints, à quel point, encore une fois, on soumet toujours la femme dans un état de dépendance parce qu'on considère que le mariage pourrait être une garantie ou qu'un bon contrat de mariage pourrait être une garantie pour une femme et que c'est une façon pour elle de s'en sortir dans notre société. Moi, je considère que non, ce n'est pas vrai, il n'y en a pas, de garantie. Il n'y a pas de contrat qui puisse assurer une sécurité à quelque femme que ce soit.

Il faut que la femme apprenne à se responsabiliser et à développer sa propre autonomie et sa propre estime d'elle-même. Et c'est là-dessus que nous devons collectivement travailler, la favoriser dans son développement personnel pour qu'enfin elle ne doute plus de ses capacités et du pouvoir qu'elle possède, qui lui est propre, bien à elle, et qui est tout à fait féminin. Qu'on arrête de dire que, parce qu'on est femme, on ne peut accéder à des postes de pouvoir, à des postes décisionnels, qu'il faut se comporter d'une façon masculine pour accéder à ces lieux de pouvoir. Qu'on lui reconnaisse ses qualités féminines. Qu'on accepte que les règles du jeu soient aussi teintées de la couleur féminine. Elles ne doivent pas uniquement être de la couleur des règles du jeu qu'on a bien voulu, en fait, nous imposer, et qui ont une couleur et une saveur tout à fait masculines.

Je pense que nous avons le droit, nous aussi, d'imposer nos valeurs, et aussi d'imposer cette organisation sociale qui correspond à nos préoccupations et qui garde bien en évidence ces valeurs et ces attributs féminins qui font que,

oui, nous serons toujours des femmes. Nous aurons besoin de vivre et de prendre en considération cette capacité d'enfanter qui fait toute la différence du monde entre les hommes et les femmes. Bien sûr, nous devons - en tout cas, si nous voulons accéder à ces lieux de pouvoir -effectivement prendre en considération cette notion qui est fondamentale, à mon avis.

Bien sûr, M. le Président, il y aussi tous les différents aspects. Les femmes ont besoin de se solidariser. Même ici, dans les lieux politiques, dans les lieux de pouvoir, et même au niveau du gouvernement, quelquefois, malheureusement les lignes de parti font en sorte qu'il est difficile pour nous de nous entendre pour favoriser certains projets de loi qui pourraient permettre à des femmes de compter sur celles qu'elles ont élues et qui les représentent à l'Assemblée nationale. Peut-être qu'il faudrait qu'on repense aussi les règles du jeu à ce niveau et qu'on permette, justement, là où il y a nécessité, que cette solidarité puisse se créer, puisse prendre forme, et développer des acquis plus considérables pour les femmes, à un rythme plus convenable aussi.

Je regarde aussi le nombre de femmes immigrantes qui, de plus en plus, partagent nos préoccupations en tant que Québécoises, dans notre société, à l'heure actuelle. Elles sont, elles aussi, confrontées à des changements majeurs. Malgré tout ce que je viens de dire, effectivement, ici au Québec, nous sommes peut-être en avance par rapport à l'Europe et même par rapport aux États-Unis par rapport au rôle de la femme dans notre société. Oui, nous avons fait des gains considérables, mais ce n'est pas parce que nous avons fait des gains considérables que la lutte est pour autant terminée. Bien sûr, il y a des femmes qui sont arrivées à un point d'excellence et elles sont des modèles aussi pour un bon nombre de femmes, mais on ne peut pas dire que toutes les femmes ont eu cette chance. Il y en a plusieurs encore qui en rêvent et plusieurs aussi qui se débattent régulièrement, quotidiennement, pour essayer d'avoir cette reconnaissance à quelque niveau que ce soit. Entre autres, je pense aux jeunes femmes professionnelles, je pense à ces femmes qui ont opté pour des métiers non traditionnels. (16 h 30)

Ce n'est pas évident non plus, pour toutes ces femmes qui ont décidé de sortir des sentiers battus, de se faire reconnaître pour ce qu'elles sont, avec leur valeurs respectives et aussi avec ce petit goût de prendre des responsabilités dans notre société. Ce n'est pas évident, effectivement, et elles doivent faire face très souvent aux préjugés. Elles doivent faire face aussi à des problèmes d'ordre syndical. Elles doivent faire face à des problèmes aussi d'ordre, d'organisation et d'horaire. Très souvent, malheureusement, on ne leur donne pas nécessairement la chance de promotion parce qu'on arrive toujours à cet élément fondamental: la maternité.

Donc, M. le Président, je pense qu'il reste encore beaucoup de choses à faire. Il y a beaucoup de choses à mettre en commun et, surtout, il y a un discours à développer entre les hommes et les femmes pour permettre cette compréhension, pour favoriser ces changements d'attitude et de comportement, si nous voulons un équilibre dans notre société, parce que ce n'est pas tolerable, dans une société moderne, que le mariage se termine par des divorces. Il y a une instabilité et ça crée d'autres problèmes a d'autres niveaux et c'est nous tous qui, socialement, payons le coût.

Je pense qu'il est urgent, M. le Président, à ce moment-ci dans notre développement social, qu'on arrive à cette capacité d'échange entre les hommes et les femmes pour ces changements de comportements et ces changements d'attitudes qui favorisent aussi la place des femmes, une place d'excellence pour les femmes à l'intérieur de la société québécoise. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. Alors, je dois informer la Chambre qu'à la suite de la période de questions la présidence a reçu une demande du député d'Arthabaska, lorsqu'il a posé une question au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, concernant une question sur le GATT. Il y a une demande de débat de fin de séance et, conformément au règlement, ce débat aura lieu demain, le jeudi 12 mars, à 18 h 30. Oui, monsieur...

M. Bélisle: J'aimerais vous informer, à cet effet, que je pense qu'il y a entente avec l'Opposition pour que le débat de fin de séance entre le ministre de l'Agriculture et le député d'Arthabaska soit reporté au mardi 17, après la période de questions.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est-à-dire oui. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, effectivement, M. le Président. Je pense que c'est exact. Vous devez rappeler, comme président, ce que vous venez de faire. Le leader adjoint vient rappeler, avec raison, qu'il y a eu entente pour accommoder, comme c'est normal de le faire des fois, l'horaire du ministre qui ne peut pas être ici jeudi soir. On a convenu que ce débat de fin de séance aurait lieu mardi, après la période de questions. C'est dans ce sens-là qu'on souhaiterait que ça devienne un ordre de la Chambre au sens de la convenance entre les deux partis.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Après la période de questions?

M. Gendron: Oui, reporté à mardi après la période de questions. Sur consentement mutuel.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je prends connaissance de votre consentement et c'est un ordre de la Chambre que ce débat de fin de séance là aura lieu mardi, après la période de questions. Ce débat sera tenu sous réserve des articles 311 et 312.

Alors, nous sommes toujours à la motion de Mme la ministre déléguée à la Condition féminine qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale des femmes qui se tient annuellement le 8 mars.»

Je reconnais Mme la députée de Saint-Henri.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Le fait de souligner la Journée internationale des femmes nous laisse une large place à plusieurs interprétations. On peut, en effet, aborder cet événement comme étant l'apogée des droits historiques des femmes au Québec, comme ailleurs dans le monde. On peut également l'aborder sous l'angle des acquis que les femmes ont réussi à s'approprier au gré des luttes tant collectives qu'individuelles dans les sociétés modernes. On peut enfin l'aborder sous l'angle de réalisations concrètes qui marquent l'évolution d'une société aussi moderne que la nôtre, mais un fait demeure, M. le Président, les dossiers reliés à la condition féminine, dans notre société, sont tout aussi lourds de conséquences que ceux d'hier. Plusieurs luttes ont été gagnées dignement par les femmes du Québec, mais nous en sommes rendues à une étape où l'objectif à atteindre n'est rien de moins qu'une amélioration de notre qualité de vie.

Donc, que ce soit à titre collectif ou individuel, les femmes ont d'énormes pas à franchir en vue d'atteindre cette qualité de vie. Le rôle de l'État ne saurait donc s'arrêter maintenant. Les besoins reliés à la condition féminine sont tout aussi urgents qu'auparavant. Les problèmes ont non seulement augmenté, mais se sont diversifiés avec le temps, au gré de notre évolution.

En matière de santé et de services sociaux, les problèmes sont particulièrement criants dans notre société. Toutes les études, toutes les analyses convergent dans le même sens, à savoir que, sur le plan socio-économique, nombre de femmes sont désavantagées par rapport au reste de la société. Une étude réalisée dans ma circonscription par le CLSC Saint-Henri Petite-Bourgogne révèle que 38 % des femmes de ce quartier n'ont pas atteint la neuvième année, contre 31 % chez les hommes. Les efforts du gouvernement au niveau de la formation et de l'éducation doivent s'intensifier. Que l'on se situe sur le plan des revenus par famille, sur le plan de la condition générale des femmes sur le marché du travail ou dans la société, le rôle de l'État québécois doit pouvoir orienter ses actions en vue d'atteindre cet objectif de la qualité de vie tant souhaitée par toutes les Québécoises. Cette amélioration de la situation des femmes requiert également qu'elles participent activement à l'élaboration et à la mise en oeuvre des mesures en matière de santé et de services sociaux.

D'autre part, on convient que les femmes d'aujourd'hui sont mieux informées qu'elles ne l'étaient hier parce qu'elles ont cherché à faire respecter leur intégrité, autant physique que mentale. Le rôle des gouvernements n'est pas étranger à une amélioration de la qualité de vie des femmes. Il est bien qu'il en soit ainsi puisque notre réseau de santé et de services sociaux regorge de ressources qui doivent être mises à la disposition de ceux et celles qui en éprouvent le besoin. Or, l'histoire nous enseigne que la clientèle féminine semble être une des plus vulnérables qui requiert des soins de santé et de services sociaux à cause de différentes réalités reliées au mode de vie et aux attitudes de notre société. Qu'on pense, par exemple, M. le Président, que, dans le quartier Saint-Henri, cette même étude du CLSC à laquelle je faisais allusion tout à l'heure et qui recense des chiffres de 1990 indique que, chez les femmes de Saint-Henri, on enregistre un taux de mortalité de 1,3 à 1,8 fois plus élevé que celui de la région de Montréal. À l'aube de l'an 2000, on convient aisément que les politiques, les programmes, les interventions des pouvoirs reflètent une certaine évolution dans la prise en compte des besoins des femmes en ce qui a trait aux soins de santé et de services sociaux. Par ailleurs, on souligne également que la question de la santé est directement reliée à l'environnement socio-économique. Une enquête Santé Québec souligne l'état de pauvreté plus important chez les femmes par rapport à celui des hommes et son impact sur leur santé. Pour le comté de Saint-Henri, un chiffre suffit à comprendre cette douloureuse réalité, mais croyez bien que les efforts du gouvernement québécois pour venir en aide aux 12 % des mères de Saint-Henri qui ont moins de 20 ans sont accueillis favorablement.

M. le Président, qu'il s'agisse de mentionner l'impact de la violence sur la santé des femmes et les pistes d'actions envisagées pour vite s'apercevoir qu'il faut intensifier et qu'il faut développer des orientations qui puissent bannir cette sorte de réalité au Québec. D'autre part, le gouvernement a annoncé son intention d'aller de l'avant dans le cadre de la réforme de l'ensemble des services sociaux au Québec. Il me semble que c'est là une chance unique pour les femmes du Québec de participer pleinement à cette évolution au niveau des services devant être offerts aux différentes clientèles féminines. Les femmes doivent, à mon avis, s'impliquer de plus en plus à l'intérieur des balises dessinées dans le cadre de cette réforme pour faire entendre leurs revendications auprès des autorités médicales et

gouvernementales tout au long de ce processus.

Qu'il s'agisse de santé mentale, de santé physique ou de toute autre réalité vécue sur le terrain, les femmes peuvent et doivent s'impliquer de plus en plus pour atteindre cet objectif de l'amélioration de leur qualité de vie. De façon générale, je tiens à le préciser, nous avons la chance de vivre dans une société ouverte. Quoique nous ayons noté des attitudes et des mentalités qui transgressent cette notion d'ouverture, par rapport à d'autres pays, nous sommes très enviables, mais un énorme travail reste à accomplir pour faire face à des réalités parfois brutales de notre société. Par exemple, nous parlons de plus en plus d'humanisation des soins de santé au Québec. Cette idée ne doit pas être traitée en termes de généralité, mais plutôt en termes d'action, laquelle devrait se refléter dans tous les mécanismes de services rendus à la population. Les femmes plus jeunes sont également impliquées dans cet objectif d'amélioration de leur qualité de vie. Là encore, des études démontrent des réalités parfois plus dures, à savoir, par exemple, que des femmes chefs de famille monoparentale vivent une situation plus que précaire. (16 h 40)

M. le Président, on parle ici de précarité de revenus, précarité d'emplois, précarité de situations familiales, marquées au coin de l'instabilité et d'un avenir incertain. Dans mon comté, on doit savoir que l'importance des familles monoparentales est supérieure, malheureusement, à la moyenne montréalaise. En effet, le quart des ménages du sud-ouest de Montréal est monoparental, contre un cinquième dans l'ensemble de cette région. De ces familles monoparentales de ma circonscription, 87 % d'entre elles sont dirigées par des femmes. Ce sont là des signes qu'une société moderne doit, malheureusement, aborder avec tout ce qu'elle véhicule au niveau des valeurs, des attitudes, tant collectives qu'individuelles.

Jusqu'à maintenant, M. le Président, le gouvernement libéral n'est pas demeuré sourd aux représentations reliées à la condition féminine. Plusieurs améliorations ont été apportées dans le cadre des politiques et des programmes gouvernementaux. M. le Président, une chose est certaine, le travail accompli par l'État québécois ne fait que commencer pour parvenir à atteindre cet objectif d'une meilleure qualité de vie pour les femmes. Parallèlement, le niveau de conscien-tisation des besoins exprimés par ces femmes du Québec doit être maintenu.

En terminant, M. le Président, pour ce qui est de la région que je représente à l'Assemblée nationale, je tiens à souligner que l'esprit d'entraide et de solidarité est admirable. Le sud-ouest de Montréal regorge de ressources et de talents pour franchir les difficultés de la vie. Le soutien et l'aide des gouvernements sont vus dans une perspective d'une volonté de s'en sortir dans la fierté et dans la dignité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Saint-Henri. Sur cette même motion, je reconnais maintenant le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. François Gendron

M. Gendron: D'entrée de jeu, je pense qu'il est clair et manifeste depuis qu'on en débat que l'Opposition officielle et moi, comme leader adjoint de cette formation politique, souscrivons à la motion présentée par la ministre à la Condition féminine pour, effectivement, souligner la Journée internationale des femmes qui se tenait le 8 mars, comme à chaque année. Règle générale, annuellement, ça se tient à cette date-là.

Dans mes fonctions, avant de parler de la motion que nous débattons, je ne peux pas ne pas revenir sur ce qui m'apparaissait et ce qui m'est apparu une mesquinerie de la part de la ministre de la Condition féminine de laisser croire à la population - et je ne suis pas inquiet, la population jugera, je ne suis pas inquiet... Je ne peux pas ne pas revenir là-dessus parce que c'est vraiment être mesquin de laisser croire que nous, on a voulu faire de la politique sur le dos des femmes avec une question prévue au règlement, M. le Président.

Je tiens à vous signaler et je tiens à dire à la population qui nous écoute que de tout temps, M. le Président, toutes les motions en cette Chambre à l'item «motions sans préavis» ont toujours exigé la consentement de l'un et l'autre des partis en cette Chambre. Hier, l'Opposition a décidé - elle a le droit de le faire, surtout quand elle le fait s'appuyant sur un règlement de la Chambre - de faire ce que nous avons fait et c'était connu. Nous avons pensé - pour des motifs qui ont été couverts et sur lesquels je ne veux pas revenir - que c'était inapproprié et inopportun de le faire hier pour des motifs clairement connus, clairement expliqués.

Ce n'est pas pour rien qu'aujourd'hui, d'ailleurs - et ça prouve qu'on avait raison - la ministre elle-même dans sa motion parle de souligner la Journée internationale des femmes qui se tenait annuellement le 8 mars. Or, M. le Président, le souligner par une motion, je pense que le drame aurait été de ne pas le faire.

Soulever une motion pour souligner l'extraordinaire travail et les luttes - et j'y reviendrai dans une phrase - que les femmes ont

menées depuis plusieurs années, le faire le 10 ou le faire le 11 mars, il n'y a aucune espèce d'inconvénient. Là où il y avait un inconvénient, c'était de ne pas le faire. Il me semble que, comme parlementaires, nous aurions été passablement irresponsables et inconvenants de ne pas le faire pour cette cause, qui est une cause sociale, une cause d'une société moderne, juste, équilibrée, sachant qu'il y a encore beaucoup beaucoup à faire dans la cause de l'avancement des femmes. Je tenais à faire ce point d'une façon très claire et très précise que d'aucune façon, en ce qui nous concerne, il n'a été question de ne pas souscrire à une telle motion pour souligner ce qu'on fait présentement depuis la fin de la période des questions et qu'on va continuer à faire pendant quelques minutes.

Sur le fond de la question, maintenant, M. le Président, c'est évident que je trouve que la ministre fait bien et elle a raison que l'Assemblée nationale, par une motion, souligne la Journée internationale des femmes puisque dans notre société québécoise, depuis plusieurs années, c'est une cause où les femmes ont dû constamment ce qu'on appelle remettre sur le chantier toute la problématique, tout le questionnement concernant l'évolution de cette cause juste, mais qui, malheureusement, ne progresse pas au rythme de leur composition numérique dans la société qu'on connaît tous. À partir du moment où il y a au moins et un peu plus de la moitié des femmes qui composent la société québécoise, ça serait normal de parler beaucoup plus d'acquis observables.

Je ne crois pas, M. le Président, que le moment est venu, lors d'une motion comme celle-là, de faire de longs laïus sur le cheminement qu'on a fait. Heureusement qu'on en a fait un. Moi, ce qui m'apparaît le plus important dans une motion comme celle-là - et c'est là que je trouve que nos propos deviennent significatifs, pertinents, intelligibles - c'est la nécessité de se sensibiliser et de se conscientiser, qui que nous soyons, comme parlementaires et comme membres de cette société, sur tout le travail qu'il reste à faire et d'en convenir mutuellement. C'est surtout ça qui est important. Ce n'est pas de venir, je pense, lire à répétition des textes qui vont dire: Voilà des portraits, voyez des situations, c'est de se conscientiser mutuellement et de convenir ensemble de la nécessité de faire beaucoup plus, beaucoup mieux et plus rapidement, à des chapitres où, tout compte fait, l'évolution est trop peu significative.

Je voudrais juste toucher quelques exemples. Quand on regarde n'importe quel tableau de la pauvreté, c'est dramatique pour tout le Québec, mais ça l'est encore davantage pour les femmes. Donc, il y a un problème. Ça ne se peut pas que, comme société, on ne réussisse pas à trouver des mécanismes permanents qui nous permettraient, dans les meilleurs délais, d'être en mesure de parler plus adéquatement de chiffres qui illustreraient que, là aussi, on a fait un petit peu plus de cheminement pour s'assurer que la notion de pauvreté ne soit pas aussi significative quand on regarde le dossier des femmes.

La réalité québécoise, aujourd'hui, c'est que la pauvreté, c'est grave, mais c'est encore beaucoup trop grave et beaucoup trop significatif dans à peu près tous les dossiers des femmes. Donc, il y a quelque chose quelque part qu'on ne fait pas comme il faut, sur le plan des décisions qui se doivent d'être prises pour qu'éventuellement les chiffres que nous avons a présenter puissent illustrer d'une façon plus significative qu'il y a un réel progrès observable. Moi, en ce qui me concerne, ce n'est pas le cas et ce n'est pas assez significatif pour se glorifier. Donc, on est obligé encore de dire aux femmes: Vous allez devoir encore une fois avoir des concertations, avoir des luttes conjointes. Mais il faudrait qu'il y ait plus qu'uniquement les femmes dedans. Tous les décideurs d'une société devraient être conscients de cette réalité.

Deuxième réalité, rapidement, au niveau de la représentation, de la représentation, au sens général. Est-ce qu'on peut être satisfait du cheminement du dossier de la représentativité des femmes dans certains postes clés? À peine, M. le Président. À peine. À titre d'exemple - je pense que c'est aujourd'hui ou hier - dans les journaux, on pouvait observer qu'à la direction de la Sûreté du Québec, peut-être pour la première fois, une femme accédera à un poste de direction. Bien, M. le Président, c'est quand même une situation un peu anormale. Ça fait quand même plusieurs années que les corps policiers, heureusement, permettent - pas permettent, je veux dire - ont constaté qu'on ne peut pas être discriminant et dire que c'est une fonction qui doit être exercée uniquement par la gent masculine. Mais, au niveau des postes de direction, on apprend, alors qu'il y en a à Hydro-Québec, qu'il y en a dans les universités, qu'il y en a dans le monde de réduction, dans le monde des affaires... Ça fait longtemps qu'il y a des femmes, pas assez dans le monde des affaires. Comment se fait-il que, comme société, on n'est pas arrivé à faciliter d'une façon plus significative la représentativité des femmes a des postes clés?

Je pourrais continuer au niveau de l'équité salariale, au niveau des chances égales. Pensez-vous que ça ne demeure pas encore juste un discours de dire qu'aujourd'hui, dans la société québécoise, il y a vraiment chances égales entre les hommes et les femmes, à peu près au niveau de l'ensemble des postes à pourvoir ou, carrément, de la capacité pour elles d'exercer librement, adéquatement et non pas dans des postes précaires, où on est obligé encore là de constater que la précarité est beaucoup plus forte dans l'ensemble des postes qui sont

occupés par la gent féminine? Il me semble que c'est surtout sur ces éléments-là que nous devons convenir qu'il y a énormément de travail à faire. (16 h 50)

Souligner la Journée internationale de la femme, ça a un sens, ça a une signification si, comme parlementaires, comme membres de tables de discussion, de commissions, de comités ou autres, on est plus sévères dans les consensus qu'on doit dégager pour s'assurer qu'il se prenne des décisions qui vont permettre d'accélérer d'une façon très sensible, d'une façon très significative le processus global de présence de fa gent féminine à peu près dans tous les dossiers qu'on peut regarder, dans les documents qu'elles-mêmes nous soumettent.

Je pense que leur dernier feuillet l'illustrait on ne peut mieux: «Économie», quand le «E» n'est plus muet. Et il faisait une réflexion sur la situation économique des femmes. Il faut que le «e» soit de moins en moins muet. Est-ce que c'est la réalité aujourd'hui? Malheureusement, pas encore, et c'est pourquoi c'est toujours requis de le rappeler, mais surtout plus requis, M. le Président, de convenir mutuellement de ce qui reste à faire et de poser les gestes pour que, sur ce qui reste à faire, il y ait au moins quelques changements plus observables. Qu'on cesse de faire uniquement des bilans, qu'on cesse de faire uniquement des papiers sur les acquis des femmes.

Je comprends que, s'il fallait qu'il n'y ait pas des acquis après toutes les luttes qu'elles ont menées, ça serait vraiment un drame social. Mais il y a encore trop d'écart, je pense, M. le Président, entre la gent masculine et la gent féminine pour se réjouir et passer droit, comme si nous avions atteint les objectifs que toute société normale doit se donner. Et dans le domaine de la condition féminine, il est plus qu'urgent de relever la barre, M. le Président. Il faut relever la barre à plusieurs endroits, mais il faut garder un oeil très vigilant sur la barre qu'on s'est fixée pour s'assurer que ce n'est pas une fois par année seulement, lors de l'éternelle motion que je connais depuis 15 ans - qui est requise, en passant - qu'on fasse les mêmes constats. Ça chemine, mais tellement lentement, tellement à petits pas qu'il devient très difficile de voir le jour où, dans des segments de population où les femmes sont dynamiques, actives, où elles ont tout le potentiel pour exercer leur compétence, on pourra observer quantitativement de meilleures données afin que le fameux bilan dont on parle corresponde davantage à la réalité des 50-50. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest, pour votre intervention. Sur cette même motion, la motion de Mme la ministre déléguée de la Condition féminine, je reconnais M. le député de LaFontaine.

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir aujourd'hui de joindre ma voix à tous ceux et à toutes celles en cette Chambre qui ont souligné cette Journée internationale de la femme, même si, malheureusement, c'est hier que j'aurais aimé le faire afin de correspondre à la même journée que l'ensemble du monde. Mais on sait que, pour des raisons un peu de partisane-rie - malheureusement, venant de l'Opposition -on a dû le faire aujourd'hui, et je trouve cela un peu déplorable.

N'empêche que cette Journée internationale de la femme, M. le Président, souligne un certain nombre de choses très importantes. Elle rappelle à l'attention du monde que la moitié de notre monde est faite de femmes et que, trop souvent, la condition dans laquelle ces femmes vivent, trop souvent, les épreuves et les contraintes auxquelles elles sont soumises ou qu'elles ont à vivre font en sorte que notre société a beaucoup de chemin à faire afin de continuer à leur donner une place et les droits que toute personne a dans une société comme celle du Québec, et dans le Canada, bien entendu.

Et on revient de loin, M. le Président, parce que rappelons-nous que c'est en 1929 - il n'y a pas si longtemps que ça, 1929 - qu'au Canada les femmes sont devenues des personnes juridiques. Car, en vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, le terme «personne» n'incluait pas une femme; c'était un homme, à l'époque. C'est des femmes qui ont fait appel au Conseil privé de Londres et c'est en 1929 que l'appellation «personne» est entrée en vigueur pour définir aussi une femme et non seulement un homme.

Il y a aussi 1940, M. le Président, une année très importante pour toutes les femmes québécoises et canadiennes, car c'est en cette année-là, 1940, que les femmes ont obtenu le droit de vote. Auparavant, dans le Québec et dans le Canada, les femmes ne pouvaient pas voter dans une élection provinciale, fédérale ou scolaire. Et c'était là exclure du processus de décision la moitié de la population, et pas n'importe quelle moitié, M. le Président: la moitié de la population qui fait en sorte que les familles soient élevées et qui fait en sorte que les enfants soient formés, qui fait en sorte qu'une société ait sa cohésion, car on sait que c'est les femmes qui assurent la cohésion dans la société. C'est les mères de famille, M. le Président, qui font en sorte d'élever les enfants, de faire leur éducation, de transmettre les valeurs de la société, autant morales qu'historiques et culturelles à leurs enfants. Il semble qu'il ait fallu attendre 1940 pour reconnaître que ces mêmes femmes, qui sont les ouvrières, qui sont la base de notre société et de son évolution, puissent avoir le droit de vote.

Bien sûr, en 1964, M. le Président - une

grande année - avec le gouvernement de M. Jean Lesage, la première femme avait été élue, Mme Kirkland, avec la loi 16, qui a été votée à ce moment-là - le gouvernement libéral, il faut le rappeler - ce qui faisait en sorte de mettre fin à l'incapacité juridique des femmes. On se rappelle que, dans ce temps-là encore, même si elles avaient le droit de vote, en 1964, les femmes avaient encore besoin de la signature de leur mari pour faire des affaires et pour ouvrir un compte de banque et des choses comme ça.

C'est là, M. le Président, l'expression encore d'une vision pas seulement d'avenir, à l'époque, mais d'une vision sociale de la tradition libérale que d'amener une loi comme celle-là. On sait, lorsqu'on consulte les archives, que ça avait soulevé un certain nombre de cris et le holà par certaines personnes qui trouvaient que, peut-être, on allait trop loin à cette époque-là. Alors, il faut le souligner, M. le Président, encore une fois, le Parti libéral du Québec, dans ce qu'il est gouvernement, était à l'avant-garde de l'évolution et à l'avant-garde du droit et de la progression des femmes.

M. le Président, c'est là seulement quelques exemples. On pourrait en donner constamment parce qu'on sait toutes les lois qui ont été amenées par notre gouvernement. Rappelons-nous l'aide juridique, la loi sur les femmes battues, toutes ces lois, M. le Président, qui ont été amenées par un gouvernement libéral. Je me souviens, à l'époque, lorsque le ministre de la Justice, Jérôme Choquette, avait amené ces lois-là, certaines personnes s'étaient récriées un peu. Mais on se rappellera que c'était là des lois qui étaient parmi les plus progressives du monde et de notre société. Même les Français, M. le Président, n'avaient pas, à cette époque-là, des lois aussi progressives en ce qui concerne le statut et le respect des femmes que nous avons maintenant au Québec.

Bien sûr, les lois conditionnent les comportements et les comportements, M. le Président, c'est dans la société qu'on retrouve à tous les jours. On le voit... Au Québec, 51 % des femmes sont dans la main-d'oeuvre. Lorsqu'on va dans les vieux pays, comme on dit un peu, ou dans les pays européens, on se rend compte très rapidement qu'il y a encore un fossé, que nous sommes encore à l'avant-garde de cette évolution et que le statut de la femme, dans le Québec, est beaucoup plus important que le statut de la femme en France ou en Belgique ou dans d'autres sociétés; je nommerais même l'Italie. Et pourquoi, M. le Président? Parce que, justement, ces lois amenées par le gouvernement libéral, au temps de Jean Lesage, au temps du gouvernement de Robert Bourassa dans les années soixante-dix, ont permis de façonner ces mentalités et de faire en sorte que la société reconnaisse les femmes comme étant des personnes égales, mais non pas seulement égales, mais comme étant la base de notre évolution et la base de notre société et ce, tant au niveau familial qu'au niveau culturel.

M. le Président, c'est très important aujourd'hui de faire valoir qu'une grande partie des femmes sont des mères de famille et dirigent des familles monoparentales. Encore là, c'est les femmes qui ont la responsabilité de toute une génération. C'est elles qui vont faire en sorte que les enfants dont les pères sont partis vont être élevés, vont faire des citoyens normaux, des citoyens qui vont avoir les mêmes droits et les mêmes chances.

M. le Président, il faut, rapidement, ne pas oublier toutes les mesures sociales qui aident ces femmes, chefs de famille monoparentale. Les taxations... On se rappellera que le budget de M. Gérard D. Levesque, l'an dernier et les années précédentes, a coupé la taxation pour les gens qui gagnent 25 000 $ et moins. Lorsqu'on sait qu'une jeune femme qui travaille et qui gagne 24 000 $, 25 000 $ - il y en a beaucoup - ne paie plus d'impôt alors qu'avant elle en payait sous l'ancien gouvernement, on se dort de se féliciter et voir là encore un pas dans une bonne direction pour venir en aide à toutes ces femmes, chefs de famille monoparentale, qui représentent une grande partie de notre société.

Je ne saurais terminer, M. le Président, sans dire aussi, bien sûr, que ces quelques mesures - il y en a plusieurs - sont bonnes, mais il en faut d'autres. Il faut continuer. Il va falloir faire en sorte qu'il y ait plus de garderies pour aider ces femmes-là. C'est bien facile de donner à la femme le droit au travail ou l'accès au travail, c'est facile aussi de lui laisser la responsabilité de la famille, à l'élever, mais il faut aussi l'aider. La manière de l'aider, M. le Président, c'est probablement en ouvrant des garderies, en faisant en sorte que le réseau de garderies soit abordable, soit efficace et pratique pour que les jeunes femmes, qui sont des chefs de famille monoparentale, puissent amener leurs enfants dans des garderies, et en faisant en sorte qu'elles puissent occuper un emploi sans avoir le stress ou la pression de quitter leur emploi de bonne heure pour ne pas arriver en retard parce que la garderie ferme à 17 heures et le métro ne marche pas bien et l'autobus est en retard. Ce n'est pas une vie, M. le Président, pour ces jeunes femmes là. Je crois qu'il faut donc leur venir en aide dans ce domaine-là. (17 heures)

En terminant, M. le Président, j'aimerais rendre un hommage particulier à celle d'entre nous qui occupe la fonction et le poste de ministre déléguée à la Condition féminine, la députée de Dorion, une députée de l'est de Montréal, une députée, M. le Président, qui connaît les problèmes des femmes chefs de famille monoparentale car la grande majorité de ces familles se trouvent dans l'est de Montréal. Quand on connaît le côté social de la députée de Dorion, quand on connaît, M. le Président, son implication envers les plus démunis, lorsqu'on

connaît son sens de l'humanité, je crois, qu'en cette journée on doit lui rendre un hommage particulier et souhaiter qu'elle puisse encore occuper ce poste longtemps car c'est pour le bien-être et pour le meilleur intérêt de toutes les femmes du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de LaFontaine, de votre intervention. Sur cette même motion, je reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée.

Mme Jeanne L Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de me joindre à la ministre déléguée à la Condition féminine pour souligner la Journée internationale des femmes, le 8 mars. À entendre le député de LaFontaine, on est amené à penser qu'on dirait n'importe quoi lorsqu'il dit: II aurait fallu adopter cette motion-là hier puisqu'on l'aurait fait en même temps que toute la planète. Je voudrais juste lui rappeler que la Journée internationale des femmes, c'est le 8 mars et non pas le 10.

Je vais rappeler les raisons qui ont amené l'Opposition, y compris les femmes de l'Opposition, à penser qu'on pouvait adopter cette motion aujourd'hui plutôt qu'hier. Aujourd'hui plutôt qu'hier parce qu'il nous apparaissait d'une importance extrême, tant pour le développement des Québécoises que des Québécois, que les travaux de l'Assemblée nationale s'ouvrent sur un plan de relance économique. L'absence de vision de ce gouvernement en matière de développement économique pénalise lourdement les Québécois. Vous le savez tous et vous le savez toutes. On perd des dizaines de milliers d'emplois. Dans mon comté et dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, on estime que c'est 5000 emplois au cours des six derniers mois. Pour une petite région comme la nôtre, c'est énorme. Alors, que l'Assemblée nationale ouvre ses travaux sans qu'on ait un plan de relance en matière de développement économique, qui viendrait apporter des solutions ou proposer des solutions concrètes aux difficultés qu'éprouvent autant les femmes que les hommes, et plus les femmes que les hommes, ça nous apparaissait plus important et plus urgent que d'adopter une motion pour souligner la Journée internationale des femmes.

Je suis d'accord avec la motion. Je l'ai dit et je vais le répéter. Cependant, ce qui me préoccupe, c'est que c'est l'effet d'une journée. Une journée dans l'année! Je suis certaine, à part ça, que la ministre va partager mon avis. Si elle pouvait obtenir quotidiennement, 365 jours par année, les mêmes appuis qu'elle a aujourd'hui pour la galerie, il y a beaucoup de chance que les problèmes qui ont été évoqués ici, aujourd'hui, auraient déjà trouvé, en partie, leur solution. C'est parce qu'on a réussi à faire du 8 mars l'équivalent du 25 décembre. Vous savez qu'au Québec il y a une pratique: on va à la messe le 25 décembre. Il y a peut-être 40 % de la population qui y va qu'une fois par année, c'est le 25 décembre. On a l'impression qu'on a l'équivalent de nos catholiques du 8 mars. Ils parlent le 8 mars, mais, à part ça, on ne les entend pas beaucoup. On ne les entend pas beaucoup. Alors, à ceux et celles qui se sont offensés qu'on n'accepte pas, qu'on ne donne pas notre consentement pour adopter cette motion-là en Chambre, hier, je leur dis que je souhaiterais qu'ils aient la même vigueur lorsqu'on va réclamer des modifications et des améliorations à la condition féminine.

M. le Président, l'absence de plan de relance économique pénalise lourdement les Québécois et les Québécoises. Ça a été dit amplement, je n'élaborerai pas là-dessus. Simplement pour rappeler qu'encore aujourd'hui, alors qu'on pensait faire un peu de gains, l'écart salarial entre les hommes et les femmes est de quelque 38 % pour des tâches comparables, une formation équivalente. C'est scandaleux! Ce n'est pas acceptable! Si on n'en parlait pas juste une fois par année, on serait peut-être en train de le changer. On serait peut-être en train de le changer.

M. le Président, être solidaire une journée par année, ce n'est pas trop fatigant. Ce n'est pas trop fatigant! On fait un beau discours. Les députés envoient ça dans leur comté et disent: On pense aux femmes aussi. Tout le monde est content. Ensuite, la ministre se retrouve quasiment toute seule à défendre ses dossiers.

M. le Président, les femmes sont solidaires entre elles. Elles sont solidaires, je dirais... J'aimerais féliciter celles qui travaillent sur ces dossiers. Elles le sont, mais elles le sont sur des dossiers ponctuels, dans des situations précises, pour régler des problèmes concrets reliés au développement d'un groupe plus faible de la communauté, reliés au soutien aux personnes âgées, aux enfants en difficulté, aux handicapés, pour parler de chômage, de sous-scolarisation, d'alphabétisation. Malheureusement, je dois dire qu'on ne les entend pas se solidariser pour réclamer ensemble et collectivement un projet de société. Aussi longtemps qu'on va se contenter de travailler sur des choses ponctuelles, on aura peu de chances d'influencer les politiques générales qui, elles, finiraient par mieux cerner les problèmes des femmes en particulier et des groupes dont elles soulagent les difficultés.

M. le Président, les femmes, actuellement, sont présentes dans à peu près tous les dossiers. Dans ma région, j'ai eu l'occasion, le dimanche 8 mars, de rencontrer la plupart, la très grande majorité des groupes de femmes qui oeuvrent dans le comté et dans une bonne partie de la région. Ces femmes, on les retrouve proches de toutes les situations où il y a des problèmes. Elles sont particulièrement perspicaces quand il s'agit d'identifier les besoins et elles sont

particulièrement efficaces quand il s'agit de trouver les solutions ponctuelles à des besoins. Cependant, elles n'arrivent pas à se solidariser pour essayer d'examiner ce que pourraient être des solutions à plus long terme à l'ensemble des problèmes de la collectivité.

M. le Président, l'absence des femmes dans le débat constitutionnel actuel a de quoi nous inquiéter. Je ne sais pas si la ministre y a déjà réfléchi. On entend parler les politiciens et les politiciennes, c'est normal, les spécialistes, les constitutionnalistes, les juristes, les autochtones, les Anglo-canadiennes ont parlé beaucoup à l'occasion de l'échec de Meech, mais on n'a pas beaucoup entendu parier les Québécoises. Je dirais que je suis heureuse de constater que cette lacune est comblée par la création, ou l'initiation, ou l'initiative de la Fédération des femmes du Québec qui réunit quelque 1300 groupes de femmes et qui organise l'équivalent d'un sommet ou d'un forum national des femmes, qui devrait se tenir les 29, 30 et 31 mai prochain, forum des femmes appelé «Un Québec féminin pluriel» et qui va réfléchir à ce que serait un véritable projet de société. Je suis heureuse de voir cette initiative parce que, comme le dit si bien la Fédération des femmes du Québec, le Québec est en train de se redessiner et que le débat constitutionnel nous mène à deux voies: ou une réforme en profondeur du fédéralisme canadien, ce en quoi je ne crois pas beaucoup, compte tenu des objections du Canada anglais, ou encore la souveraineté, et c'est une occasion tout à fait unique dans l'histoire d'un peuple ou extrêmement privilégiée pour redéfinir son projet de société. Jusqu'à maintenant, les femmes étaient par trop absentes de ce projet de société. Si elles ne s'impliquent pas immédiatement dans cette réflexion, c'est qu'on va reconstruire le Québec, on va redéfinir le Québec sans leur participation.

Évidemment, les attentes qu'elles ont, les besoins qu'elles voudraient voir traduits dans des politiques, la lutte à la pauvreté, à la sous-scolarisation, au développement des régions, le soutien aux familles, toutes ces questions-là qui leur tiennent tant à coeur, sur lequelles on les voit travailler, ne pourront pas être traduites dans le projet de société qui naîtra de ce Québec en devenir.

M. le Président, je suis heureuse de voir que l'initiative de la Fédération des femmes du Québec permettra enfin de voir les femmes indiquer fermement et clairement au gouvernement du Québec, mais quel que soit le parti qui prendra la direction du Québec dans 2, 3, 4, 5 ou 10 ans, dire clairement leurs attentes quant au Québec de demain. Elles doivent nous aider à dessiner ce Québec.

M. le Président, un journaliste m'interrogeait en me disant: Mais comment pouvez-vous associer les problèmes de femmes et les problèmes de société, les problèmes constitutionnels?

Encore une fois, je retrouvais cette espèce de difficulté qu'on a ici, comme dans la société, à bien intégrer les problèmes de femmes comme étant des problèmes de société. Encore aujourd'hui, des problèmes de femmes, ce n'est pas des problèmes de société. Si c'étaient vraiment des problèmes de société et qu'on les sentait tels quels, on les solutionnerait. Ce n'est pas vrai, les femmes s'appauvrissent, les femmes élèvent des enfants dans la pauvreté, pour ne pas dire dans l'indigence. Ces enfants-là, ce ne sont pas juste des femmes; qu'ils soient filles ou garçons, c'est la société de demain. Si on était vraiment conscients que ces problèmes de violence, de chômage, de précarité de l'emploi, d'écart salarial et d'appauvrissement des femmes et des enfants, c'étaient vraiment là les problèmes les plus cruciaux et des problèmes de société, on serait en train d'y apporter des solutions, M. le Président. (17 h 10)

M. le Président, je voudrais, à cette occasion, inviter à la solidarité à l'endroit de ces femmes qui, encore une fois, sont les plus pénalisées par la crise économique. On connaît le système: les dernières arrivées, les premières sorties. Les dernières arrivées sur le marché du travail, les plus rapidement mises à la porte. Ça, c'est vrai en éducation, c'est vrai dans les universités. Ce n'est pas juste vrai dans les entreprises, dans les petites usines. Quand elles entrent dans les petites usines, c'est parce que, généralement, elles génèrent un salaire moins élevé que le garçon qu'on vient de mettre dehors, mais c'est les seules occasions où elles peuvent entrer plus rapidement que les jeunes ou que les hommes. Alors, elles sont lourdement pénalisées. Je voudrais qu'on puisse inviter à la solidarité pour exiger l'équité salariale, à la solidarité pour trouver des moyens de lutter contre le chômage chronique chez les femmes, à la solidarité également pour s'assurer que les femmes aient des conditions de travail qui soient saines.

Je voyais un cas à la CSST, ce qu'on a appelé les chaises à Provigo où les caissières de Provigo ont obtenu, par le biais d'un jugement de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles, le droit d'avoir des sièges, parce qu'elles ont des problèmes de dos. Provigo en a appelé de la décision devant la Cour supérieure. La Cour supérieure a confirmé le jugement de la Commission et, là, Provigo est en Cour d'appel. Alors, je me dis que c'est anormal. C'est anormal qu'ici, en cette Chambre, à la fois la ministre et le ministre du Travail n'aient pas exigé ou n'aient pas fait de pressions additionnelles auprès de Provigo pour qu'elle puisse commencer à concevoir des sièges qui permettraient aux caissières d'avoir des positions un peu plus confortables qui affecteraient moins leur santé. Je n'ai rien entendu ici. On en a parlé à quelques reprises, mais je n'ai pas entendu de

pressions qui aient été faites soit par le ministre du Travail, soit par la ministre à la Condition féminine ou par ses collègues pour mettre fin à cette situation qui est totalement inacceptable. On continue de considérer les caissières comme étant généralement des femmes qui travaillent quand elles ont le loisir, parce que ça leur fait plaisir, pour compléter les revenus du mari et qui, généralement, ne font pas ça toute leur vie. Mais ça ne correspond plus à la réalité. Les femmes, lorsqu'elles entrent sur le marché du travail, elles entrent pour la vie, à présent. Alors, évidemment, les conditions de travail, lorsqu'elles ne sont pas suffisamment confortables, lorsqu'elles imposent des stations trop longues debout ou dans des positions toujours répétitives, créent des problèmes de santé qu'elles ne pourront pas corriger parce qu'elles rentrent chez elles une fois qu'elles ont travaillé les 4, 5 ou 6 ans qu'elles travaillaient, je ne sais pas, il y a seulement 15 ou 20 ans de ça.

Alors, ce sont des situations où on devrait faire preuve de solidarité. On ne devrait pas laisser une entreprise, fut-elle privée, alors qu'on sait que Provigo a été largement subventionnée par les deniers publics, continuer de faire perdurer une situation qui, tant qu'elle ne sera pas réglée, ne pourra pas être imposée dans d'autres lieux de travail, ne pourra pas être imposée dans d'autres grands marchés d'alimentation.

M. le Président, aujourd'hui, je souhaiterais, à l'occasion de cette motion, inviter les femmes à la solidarité, les membres de l'Assemblée nationale également, pas seulement une journée par année, mais 365 jours par année. Je dirais 366, cette année, c'est une année bisextile. Et pourquoi pas 366 jours par année? Si on réussissait à développer cette attitude, il y a gros à parier que la condition des femmes serait améliorée de façon considérable. Ça ne prendrait pas une année. J'espère que ce 8 mars ne sera pas comme le 25 décembre, c'est-à-dire qu'on en parie une journée et, ensuite, on oublie les femmes pour le reste de l'année. Je voudrais assurer la ministre de notre plus entier appui dans les efforts qu'elle fait sans doute, je n'en doute pas, pour essayer d'améliorer la condition féminine. Là-dessus, elle peut avoir l'appui entier et complet de l'Opposition. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Sur cette même motion, Mme la députée de...

Mme Juneau: Johnson.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, M. le Président. M. le Président, bien sûr que je m'associe à la motion de la ministre, mais je voudrais m'y associer moi aussi 365 jours par année parce que, encore aujourd'hui, je pense qu'on en est tous témoins qu'il y a des gens, surtout des femmes, qui sont très pauvres. Les statistiques le disent.

Je regardais dans un document qui a été justement produit pour la fête des femmes, le 8 mars. On disait que près de 60 % des adultes vivant dans la pauvreté sont des femmes. Je trouvais ça tellement odieux de lire qu'à un certain moment donné, quand on a institué l'aide sociale en 1969... Avant ça, il existait la loi sur les mères nécessiteuses, puis on exigeait à ce moment-là de la femme pauvre qui était dans le besoin de prouver qu'elle était une bonne mère pour avoir droit à certaines prestations. Je trouve ça tellement odieux! Heureusement qu'aujourd'hui on a dépassé ce stade-là et que les prestations d'aide sociale viennent en aide aux femmes qui sont dans le besoin sans qu'elles soient obligées de prouver qu'elles sont des bonnes mères, parce que je pense qu'il va de soi que, quand tu as des enfants et tu es par surcroît indigente, ce n'est pas très drôle d'être obligée d'aller chercher de l'aide à l'extérieur sans avoir cette fierté de pouvoir quotidiennement aller chercher le fruit de ton travail, c'est-à-dire un salaire à la fin de la semaine.

M. le Président, il y a une autre chose que j'ai de la difficulté à vivre, c'est les personnes âgées. Plus on vieillit, plus on est pauvre, parce que c'est de la féminisation quand... Vous savez, encore là, les statistiques nous disent clairement que les femmes vivent sept ans ou huit ans de plus que les hommes. Donc, à ce stade-là et surtout aujourd'hui... Je ne vous dis pas que, dans les années à venir, ça sera la même chose parce que, dans les années à venir, la plupart des femmes auront été sur le marché du travail et la formation aura été différente aussi de celle qu'on connaît présentement.

Celle qu'on connaît présentement, ce sont des femmes qui n'ont pas eu la chance d'avoir une formation adéquate et ça va de soi que, lorsqu'elles étaient en mesure d'aller sur le marché du travail, elles avaient une nombreuse famille et ce n'était pas la mode. La femme était là, elle, à la maison pour l'éducation des enfants. Elle avait 7, 8, 9, 10 enfants et, des fois, 15 à 20 enfants dans la maison. Donc, elle travaillait et, malheureusement, on associe le salaire à la fin de la semaine à la qualité du travail et au travail même.

Ce n'est pas rare, M. le Président, qu'on entende dire à quelqu'un, à une personne, à une femme: Travailles-tu, toi? Travailles-tu? Quand on dit qu'elle se lève à la barre du jour, comme mon père disait, et qu'elle se couche quand tout le monde a eu ce dont il avait besoin et quand la maison est propre. Travailles-tu, toi? Ça, ça voulait dire: Est-ce que tu travailles avec un salaire à la fin de la semaine? Il y en a encore

aujourd'hui qui sont organisées comme ça. Il y en a qui choisissent aussi de rester à la maison. Moi, j'aimerais tellement ça qu'un gouvernement puisse trouver le moyen d'aider les femmes qui souhaitent rester à la maison, qui souhaitent demeurer et éduquer les enfants à la maison. Je trouverais que, là, on aurait beaucoup plus d'égalité envers celles qui font ce choix.

La ministre parlait de l'autonomie financière des femmes. Je vous assure, M. le Président, qu'on n'est pas au bout de nos peines parce qu'à qualité égale, à formation égale, à critères égaux, pour un même emploi, c'est clair que la femme est payée en deçà du salaire de l'homme. Je pense qu'on a beaucoup de travail à faire et on n'a pas le droit de s'asseoir, surtout pas nous, les femmes, à l'Assemblée nationale, pas plus que les hommes d'ailleurs, parce que si le Bon Dieu a créé l'homme et la femme égaux, c'est parce que ça devrait être égal dans tout ce qu'on a à faire ici, que ce soit à l'Assemblée nationale ou dans d'autres situations, M. le Président. (17 h 20)

Je voudrais aussi vous parler du bienfait que les centres de femmes font à travers tout le Québec. Moi, je connais celui qui existe dans notre MRC et je suis persuadée qu'au Québec les centres de femmes font un travail aussi formidable que celui de Val Saint-François. J'étais avec eux dimanche dernier, comme, bien sûr, j'imagine, toutes les collègues qui étaient dans leurs circonscriptions. Une fois de plus, j'ai été témoin de femmes qui donnaient un témoignage sur la qualité des services qu'elles avaient reçus au niveau des centres de femmes. Encore là, le problème, c'est le financement.

À la fin de l'année financière, l'année budgétaire, il faut qu'elles étirent les services pour se rendre au 1er avril (le budget du gouvernement). Bien sûr, le chèque n'arrive pas le 2 avril. Ça retarde et, de ce temps-là, les femmes ont beaucoup de difficultés à joindre les deux bouts. En faveur de ces centres de femmes, je voudrais ajouter, M. le Président, que c'est non seulement un endroit où les femmes qui sont maltraitées se réfugient. Ce n'est pas seulement ça. Ça l'est aussi ça, mais pas seulement ça. C'est un endroit où on leur donne de la formation, où on leur donne de l'information, où on leur donne aussi une sensibilisation en ce sens qu'elles ne sont plus seules pour faire face à un changement de carrière, à un besoin d'en connaître davantage sur ce qu'elle a décidé de prendre.

Il y a eu, d'ailleurs, au centre de femmes de Val Saint-François, de nombreux cours qui ont été offerts à la population féminine de notre MRC. Il y a eu beaucoup de thèmes, à la demande générale des femmes qui le fréquentent. Il y a souvent, aussi, un genre de sondage qu'elles font dans le petit journal hebdomadaire qui est distribué dans tous les foyers. Elles demandent quels seraient les sujets ou les thèmes qui pourraient être les plus populaires et les plus en demande au niveau des femmes.

À ce moment-là, on définit pour l'année qui s'en vient les thèmes qui devront être étudiés et donnés. On retrouve d'ailleurs la minceur à quel prix, la médecine douce, le changement dans ta carrière, la santé mentale, vaincre ses peurs, l'autonomie affective, l'estime de soi et la confiance en soi, aimer au quotidien, les problèmes de la dépression, s'autoguérir. Comme vous voyez, M. le Président, ce n'est pas seulement un endroit, les centres de femmes, de refuge où les femmes retrouvent un toit, une protection contre la violence. C'est aussi de la formation.

Il serait tout à fait adéquat qu'on regarde le financement de ces centres de femmes parce que, vous savez, lorsque tu rends ces services-là, tu empêches une femme, une santé mentale ou physique de se détériorer. À ce moment-là, c'est une économie pour toute la province de leur donner cet appui qu'elles demandent, et on ne les retrouve pas dans les hôpitaux plus tard. Donc, moi, je parle beaucoup en faveur des centres de femmes. Je trouve que c'est une façon très bien décrite pour aider les femmes à se retrouver et à trouver une nouvelle orientation, une nouvelle vision de leur vie.

Vous savez, M. le Président, on entend souvent dire: On devrait avoir une femme dans cette assemblée-là parce que, s'il y avait une femme, ça marcherait encore mieux. C'est vrai qu'on entend ça souvent parce qu'une femme va au bout des choses. Elle va prendre en considération ce qu'on lui donne comme information et elle va la transmettre. Elle va se faire un devoir de la transmettre et d'accomplir la tâche pour laquelle elle a été assignée.

Je trouve important aussi de faire toujours attention, d'avoir une place à l'intérieur de toutes les associations. Dimanche, quand j'ai fait une intervention, je leur disais que même si elles croyaient qu'elles ne le pourraient pas, qu'elles ne se sentaient pas en mesure d'occuper un poste, quel qu'il soit, que ce soit à la commission scolaire, que ce soit au niveau de la municipalité, que ce soit dans une association, que ce soit à la pastorale, n'importe où, mais qu'elles donnent leur savoir, leurs connaissances, leur besoin de transmettre à d'autres leurs valeurs à elles. C'est ça qui est important. Ce n'est pas de se demander si je vais être la meilleure ou si je suis capable, l'un ou l'autre, c'est de transmettre ce qu'on a à l'intérieur de nous, nos valeurs, nos capacités, nos idées. À ce moment-là, si on avait la chance que les femmes prennent confiance en elles et aillent vis-à-vis de la société en général, des associations, je pense que ça s'améliorerait. Donc, ce n'est vraiment pas le temps qu'on s'assoie sur nos lauriers parce qu'on n'est pas rendus au bout de nos peines, ce n'est pas l'égalité partout, ni au niveau des finances, ni au niveau de quoi que ce soit, en termes d'autorité.

Je pense que ce n'est pas le temps qu'on s'assoie, c'est le temps qu'on continue de travailler, et c'est ensemble qu'on va le faire. J'approuve tout à fait ma collègue de Chicoutimi qui disait qu'il fallait se serrer les coudes pour enfin obtenir ce qu'on veut avoir pour les femmes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Johnson. N'ayant pas d'autres interventions, je reconnais Mme la ministre déléguée à la Condition féminine, pour son droit de réplique, avec un maximum de 20 minutes.

Mme Violette Trépanier (réplique)

Mme Trépanier: M. le Président, j'ai écouté très attentivement toutes les interventions et je pense qu'on peut dégager certains consensus. D'abord, tous les intervenants, d'un côté comme de l'autre de la Chambre, ont reconnu que les femmes québécoises avaient fait des gains appréciables au cours des dernières années. On a cependant reconnu unanimement, et j'ai été la première à le faire, avec la présentation de cette motion, qu'il y a des inégalités flagrantes et inacceptables dans notre société, qu'il fallait résorber ces inégalités-là et qu'elles ne se résorbaient pas assez rapidement. Je dois cependant vous dire que, tout en reconnaissant tous que l'autonomie financière, que l'indépendance économique des femmes était la première indépendance à obtenir, et qu'elles obtiendraient le reste avec cette autonomie financière, nous sommes d'accord aussi là-dessus, mais nous divergeons d'opinion sur les moyens pour y parvenir.

Plusieurs d'entre vous avez incité le gouvernement, à plusieurs reprises, aujourd'hui et antérieurement, et plus spécifiquement la critique de l'Opposition en matière de condition féminine, à l'adoption d'une loi proactive en équité salariale. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes d'opinion contraire. La Commission des droits de la personne a proposé une loi proactive en équité salariale et la députée des Chutes-de-la-Chaudière en a parlé. La Commission des droits dit, dans sa présentation, qu'une loi proactive viendrait améliorer, viendrait faire avancer le droit à de meilleurs salaires. Mais, dit-elle aussi, il ne faut pas perdre de vue des mesures complémentaires essentielles comme des programmes d'accès à l'égalité, comme l'obligation contractuelle. On dit qu'on en a obligatoirement besoin. Moi, j'ai toujours préconisé qu'il serait dangereux de mettre tous nos oeufs dans le même panier, en fait, que la société québécoise se donne bonne conscience en adoptant une loi proactive et en négligeant tout le reste des secteurs. Je suis persuadée qu'on réussira à résorber les inégalités en s'attaquant à la fois à l'éducation, à la formation des filles au marché du travail et également à la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale.

Je dois, ici, peut-être, mettre à jour les statistiques. Nous avons parlé beaucoup des gains d'emploi des femmes; quatre intervenants en ont parlé, du côté de l'Opposition. On nous mentionnait toujours les statistiques de 1989. Est-ce que je peux vous rappeler, M. le Président, que les statistiques de 1990, venant de Statistique Canada, nous disent que, cette année, il y a eu une amélioration de six points dans le salaire des hommes et des femmes, quand il s'agit de résorber les écarts salariaux entre les hommes et les femmes, pour les femmes qui travaillent à temps plein, et de cinq points quand nous considérons toutes les femmes. (17 h 30)

En Ontario, pendant ce temps, une province que nous prenons souvent comme exemple, qui a adopté une loi proactive il y a quelques années, il y a eu une augmentation de l'écart de 1,4 %. Ça vient confirmer le fait qu'une loi proactive n'est peut-être pas la panacée à nos problèmes. Nous ne l'écartons pas mais nous disons: Faisons attention de ne pas privilégier un outil unique. Et dans cette affirmation, je dois dire que je m'appuie sur une consultation importante, très large, au niveau de l'équité en emploi, que j'ai menée à l'automne dernier. Et, tous les intervenants, que ce soit le patronat, les syndicats, les groupes de femmes, tout le monde est unanime à dire que nous devons nous orienter dans une démarche globale comprenant autant l'éducation, la formation et le monde du travail que la conciliation, et que les écarts salariaux ne pourraient être résorbés que si nous mettions tous ces outils-là à la fois.

M. le Président, je présenterai très prochainement une politique de la condition féminine dans laquelle le volet «Équité en emploi» tiendra une place extrêmement importante. Je peux vous dire d'ores et déjà que j'ai l'intention de suggérer au gouvernement de continuer et même d'améliorer, d'intensifier les programmes d'accès à l'égalité - l'obligation contractuelle que nous avons depuis quelques années - de, surtout, augmenter et continuer nos efforts en ce qui concerne la formation, l'éducation des filles, et la conciliation de la vie professionnelle qui passe par les services de garde, qui passe par une amélioration des horaires de travail. Toute cette question est si importante que tout le monde l'a mentionnée aujourd'hui dans des termes différents. Et l'équité salariale serait un des éléments de cette grande démarche mais ne serait pas l'unique élément; il ne serait peut-être pas l'élément prioritaire. Cette politique, elle sera large, elle comprendra la violence; on parlera de l'apport des femmes dans la société québécoise et, également, nous essaierons de donner une vision de société.

En conclusion, parce que je sais que le temps nous presse, je dirai que nous pouvons compter sur les gens de cette Assemblée; et vous

pouvez compter sur la ministre à la Condition féminine et sur sa vigilance, parce que c'est vrai qu'on ne peut pas dormir sur nos lauriers et - Mme la députée l'a mentionné très clairement il y a quelques minutes - nous devons aussi compter sur la détermination, sur la solidarité. Mais nous ne pouvons pas le faire seules. Ça nous prend l'appui des hommes et des femmes de bonne volonté de cette Assemblée et de la population pour qu'ensemble on offre aux Québécoises d'aujourd'hui, mais surtout à la génération qui nous suit, à nos enfants, cette égalité que nous voulons tous, que nous avons dans nos lois, que nous avons dans nos droits mais qui ne se reflète pas dans la réalité.

Et je souhaite très ardemment, comme la plupart des intervenantes aujourd'hui, que dans quelques années - je pense que ce sera malheureusement dans plusieurs années - nous n'aurons plus besoin de journée de la femme, que nous n'aurons plus besoin de ministre à la Condition féminine et que nous en arriverons à vivre dans une société égalitaire où le soleil brillera également pour tout le monde. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre déléguée à la Condition féminine. Ceci met fin au débat sur cette motion présentée par la ministre déléguée à la Condition féminine, qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale des femmes qui se tient annuellement le 8 mars.» Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Bélisle: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Oui, M. le Président. M. le Président, pour nous permettre et nous faciliter, en fin de compte, de procéder à la motion sans préavis ayant pour objet de féliciter les gagnants aux Jeux olympiques d'Albertville, où nous avons plusieurs intervenants de part et d'autre en cette Chambre, nous vous suggérons, de consentement avec l'Opposition, de procéder immédiatement à l'appel de l'article 32, qui est l'adoption du principe et l'adoption du projet de loi d'intérêt privé 267 concernant la ville de Gatineau, ce qui ne va prendre que quelques instants avec le ministre des Affaires municipales et le député de Jonquière.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour que l'Assemblée passe aux affaires du jour puis revienne aux affaires courantes à l'item «motions sans préavis»?

M. Gendron: Oui, M. le Président, si le leader adjoint m'informe de quel temps on va disposer. Il y a consentement si c'est quelques minutes. C'a été vérifié qu'il ne s'agira que de quelques minutes seulement?

M. Bélisle: C'est exact, M. le leader. M. Gendron: II y a consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement pour que nous passions immédiatement à la période des affaires du jour pour étudier l'article 32 et que nous revenions à la suite aux affaires courantes à la rubrique «motions sans préavis».

Projet de loi 267 Adoption du principe

Alors, à l'article 32, M. le député de Chapleau propose l'adoption du principe du projet de loi 267, Loi concernant la ville de Gatineau. M. le ministre des Affaires municipales.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, les villes de Montréal, Québec, Laval, Longueuil, Hull, Sainte-Foy et Charlesbourg sont déjà dotées d'un comité exécutif. En raison de la complexité des affaires que doit gérer aujourd'hui une grande ville, il a été jugé opportun de permettre à ces villes de se doter d'un comité exécutif à l'intérieur du conseil municipal élu par l'ensemble des électeurs de leurs territoires respectifs. Nous voulons étendre cette faculté à la ville de Gatineau, qui en a fait une demande formelle depuis déjà près de deux ans.

La ville de Gatineau compte maintenant environ 75 000 citoyens. C'est devenu une très grande ville. Elle compte 12 conseillers municipaux en plus du maire et si elle avait la faculté de se doter d'un comité exécutif, ses élus, appuyés par le député du comté, le député de Chapleau, nous ont fait valoir, en commission parlementaire, des avantages qu'il y aurait. En commission parlementaire, le gouvernement a donné son acquiescement et il le donne de nouveau. Nous souhaitons que cette faculté puisse être donnée à la ville de Gatineau dans les meilleurs délais, vu la longue attente qu'elle a dû accepter jusqu'à maintenant.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des Affaires municipales. Sur ce sujet, M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Juste quelques mots pour renchérir, en fait, sur un sujet qui, de plus en plus, nous est présenté sous forme de bill privé pour doter les municipalités d'un comité exécutif.

Ma prétention est à l'effet que les comités exécutifs ne donnent pas nécessairement plus de transparence dans le domaine municipal, ni pour les électeurs, ni pour les conseillers puisque ça a pour effet d'éloigner les conseillers de la décision. La décision, c'est aussi l'information, et l'exécutif a pour effet d'éloigner les conseillers municipaux de l'information.

Tout de même, il faut admettre qu'il semble, en tout cas dans ce cas-ci, que les conseillers étaient unanimes et ont demandé de se doter d'un comité exécutif, lequel comité exécutif, en fait, est nommé selon le bon vouloir du maire. Encore là, je trouve qu'il y a certaines anomalies. J'ai soulevé, lors de l'étude du projet de loi, au ministre des Affaires municipales, la nécessité possiblement, lors d'une nouvelle législation qui intéresserait l'ensemble des municipalités, qu'on puisse regarder ce dossier-là, le dossier des conseils exécutifs ou des comités exécutifs de municipalités importantes pour les doter de systèmes comparables, des systèmes aussi où on pourrait s'entendre sur une certaine forme de fonctionnement, qui serait de nature à satisfaire plus de citoyens.

Voilà en gros. Même si j'étais réticent quelque peu, on a donné notre accord à ce bill privé qui, je l'admets, peut desservir une municipalité, peut permettre un meilleur fonctionnement pour une municipalité. Mais sous le couvert d'un meilleur fonctionnement, il ne faut pas non plus oublier les principes démocratiques, a savoir, qu'un conseil municipal doit participer aux décisions dans son ensemble, autant dans l'étude que dans la prise de décision et il est bon aussi que la municipalité et que les citoyens soient bien informés de ce qui se passe et, en même temps, il ne faut pas passer à côté de ce système-là. En fait, actuellement, dans le système qu'on connaît, les comités exécutifs sont très près des décisions du maire, qui peut nommer selon son bon vouloir, et ça, ça représente certaines difficultés. Néanmoins, on est heureux de concourir à l'adoption de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Jonquière. Votre réplique, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Claude Ryan (réplique)

M. Ryan: Oui, juste un petit mot en complément. Le député de Jonquière a fait valoir qu'il serait mieux de régler ces problèmes par l'entremise d'une loi générale plutôt que par des lois particulières dans chaque cas. Je suis tout à fait de son avis. Dans ce cas-ci, vu que la ville de Gatineau attendait depuis une couple d'années, je pense que c'est justice et équité que de faire droit à sa requête maintenant. (17 h 40)

II me fait plaisir d'informer le député de

Jonquière que, dans un document remis aux représentants des deux unions de municipalités, lors de la dernière réunion de la Table Québec-municipalités tenue jeudi dernier, c'est un document qui poursuit l'oeuvre de réforme de la législation municipale fondamentale. Et dans ce document qui traite de l'organisation des municipalités, il y a toute une section qui est consacrée à la formation de comités exécutifs et qui définira des normes devant être les mêmes pour l'ensemble des municipalités à compter du moment où ces réformes auront été faites. Ça prendra peut-être un an ou un an et demi, peut-être un peu moins, pour aboutir à l'adoption de cette législation mais, déjà, elle sera soumise pour consultation à des milieux très larges. Il me fera plaisir d'en faire parvenir un exemplaire au député de Jonquière dès cette semaine. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Ceci met fin au débat. Est-ce que la motion du député de Chapleau, proposant l'adoption du principe du projet de loi 267, est adoptée?

M. Dufour: Adopté.

Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le député de Chapleau propose l'adoption du projet de loi 267, Loi concernant la ville de Gatineau. Sur le projet de loi, est-ce qu'il y a des interventions? Le projet de loi 267, Loi concernant la ville de Gatineau, est-il adopté?

M. Dufour: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, nous revenons...

M. Bélisle: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Bélisle: ...je vous demanderais d'appeler l'article 13 de notre feuilleton.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que j'ai un consentement?

M. Bélisle: En considération du report. Pour permettre qu'on fasse la motion sur les médaillés immédiatement après.

Mme Juneau: D'accord.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement?

Mme Juneau: Oui. Pour faire la motion sur les médaillés.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II n'y a

pas de consentement?

M. Bélisle: La prise...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II n'y a pas de consentement. Alors, nous revenons aux motions sans préavis, suite au consentement antérieur. Nous en sommes aux motions sans préavis, et je reconnais M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Motions sans préavis

Hommage aux Québécoises et aux Québécois

qui ont participé aux Jeux olympiques

d'hiver d'Albertville et, en particulier,

aux récipiendaires de médailles

M. Blackburn: M. le Président, je demande que cette Assemblée accepte de rendre hommage à toutes les Québécoises et à tous les Québécois, les athlètes, les entraîneurs, les accompagnateurs qui ont participé aux derniers Jeux olympiques d'hiver tenus à Albertville, en France, et plus particulièrement aux médaillés d'or: Mmes Annie Perreault, Nathalie Lambert, Sylvie Daigie, Angela Cutrone et M. Philippe LaRoche; aux médaillés d'argent: MM. Sylvain Gagnon, Frédéric Blackburn, Michel Daigneault, Nicolas Fontaine, Patrick Lebeau, Joé Juneau, Adrien Plavsic et Sam Saint-Laurent, ainsi qu'aux médaillés de bronze: Mmes Myriam Bédard, Isabelle Brasseur et M. Uoyd Eisler.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion?

Mme Juneau: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. M. le ministre, vous pouvez intervenir.

M. Gaston Blackburn

M. Blackburn: M. le Président, merci beaucoup. J'ai rarement eu autant que cet après-midi l'occasion d'avoir ce sentiment de fierté d'assumer une responsabilité comme celle de ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et, par effet de conséquence, ministre responsable du sport amateur au Québec. Nous avons eu le privilège d'accueillir nos athlètes, tant les médaillés que tous ceux qui ont eu l'occasion de participer à ces Jeux olympiques d'Albertville, cet après-midi, à l'Assemblée nationale, bien sûr. Nous les avons reçus au Parlementaire avec le président de l'Assemblée nationale, avec plusieurs de mes collègues qui étaient présents et, tous, nous avons eu l'occasion de leur mentionner combien nous avions été fiers de leur performance, combien nous avions vibré lors de leur éclatante victoire et éclatante compétition dans laquelle ils se sont, bien sûr, fait valoir.

On peut affirmer sans crainte de se tromper que février fut le mois du sport amateur à travers le monde, en raison de la présentation des Jeux olympiques d'hiver à Albertville, en France. On estime à plusieurs millions le nombre de personnes qui, par le truchement de leur petit écran, ont suivi de façon quotidienne les performances de nos athlètes. Composant plus de 30 % du contingent canadien, les athlètes québécois se sont distingués, et ce, de façon exceptionnelle. Des neuf médailles décrochées par le Canada, sept furent remportées par des Québécoises et des Québécois. Cela démontre concrètement la détermination et le courage de nos athlètes, et surtout leur capacité de performer à un niveau où l'excellence mondiale est au rendez-vous.

Parmi les médaillés de ces Jeux, cinq athlètes québécois ont gravi la plus haute marche du podium. Il s'agit de Mmes Annie Perreault, Nathalie Lambert, Sylvie Daigie, Angela Cutrone et de M. Philippe LaRoche. Les Québécois sont aussi revenus d'Albertville avec des médailles d'argent: MM. Sylvain Gagnon, Frédéric Blackburn, Michel Daigneauit, Nicolas Fontaine, Patrick Lebeau, Joé Juneau, Adrien Plavsic et Sam Saint-Laurent ont réussi l'exploit. Enfin, Mmes Myriam Bédard, Isabelle Brasseur et M. Uoyd Eisler n'ont ménagé aucun effort, ce qui leur a valu le bronze.

J'aimerais profiter de l'occasion qui m'est offerte afin de rendre hommage aux autres athlètes québécois qui ont pris part à cette grande compétition. Même s'ils n'ont pas réussi à accrocher de médaille à leur cou, ces jeunes de chez nous doivent savoir que les efforts qu'ils ont investis ne sont pas vains. Leur simple présence à Albertville démontre qu'il font partie de l'élite mondiale. Lors d'une telle compétition, ce sont les athlètes qui occupent toute la place, et avec raison.

Cependant, derrière leurs performances, il y a les entraîneurs qui jouent ce rôle, un rôle prépondérant. Ne ménageant aucun effort afin d'aider à la recherche de l'excellence, ces entraîneurs méritent aussi notre admiration. Je tiens à les féliciter, et surtout à les encourager à continuer dans la même voie. Il en va de même pour les parents qui, par une implication bien souvent caractérisée par l'abnégation, sont à l'origine même de ces réussites. Que de fois ils ont dû se lever tôt; que de fois ils ont dû faire certains sacrifices d'argent, de disponibilité, de générosité pour leurs enfants.

Dans un autre ordre d'idée, le gouvernement du Québec et le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche supportent de manière tangible l'excellence sportive. Par le biais de nos divers programmes de sport, nous travaillons depuis plusieurs années à nous rapprocher du pratiquant et de son entourage. Les résultats, ces résultats que nous avons, semblent confirmer que nous sommes sur la bonne voie. Il y a encore du

travail à faire. Il nous faut continuer, bien sûr.

Enfin, comme député de Roberval et ministre responsable de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, je ne peux passer sous silence la performance de deux athlètes originaires de cette belle région: tout d'abord, Frédéric Blackburn, spécialisé en patinage de vitesse. Ce n'est pas une mais deux médailles d'argent qu'il a remportées au Québec. Je m'en voudrais de ne pas féliciter aussi M. Sylvain Gagnon, récipiendaire d'une médaille d'argent. À ces deux athlètes, à leurs proches, et au nom des gens de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, bravo et chapeau!

M. le Président, je propose que l'Assemblée nationale félicite tous les athlètes québécois, tous les entraîneurs, tous les parents et les accompagnateurs qui, grâce à leur travail, ont fait honneur au Québec. Et je suis convaincu, M. le Président, que cette motion va faire l'unanimité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Sur cette même motion, je reconnais Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, M. le Président. Bien sûr, l'Opposition officielle se joint avec grand plaisir à la motion que le ministre du Loisir vient tout juste de nous présenter. Nous nous y joignons avec grand plaisir parce que notre fierté est égale, je pense, à celle que le ministre vient d'exprimer, mais à celle, aussi, des hommes et des femmes, de ces jeunes hommes et ces jeunes femmes qui se sont présentés pleins d'espoir aux jeux mondiaux, aux Jeux olympiques, pleins d'espoir parce que ça faisait des semaines et des mois, et même des années qu'ils préparaient cette entrée sur cette scène internationale. Ils préparaient ça avec tout le courage qu'on peut retrouver dans une personne qui est destinée à des grandes choses.

Être un athlète olympique, c'est une grande chose, M. le Président. Il faut non seulement signaler le fait qu'ils ont été victorieux, mais s'ils ont été victorieux, je pense qu'il faudrait saluer leur courage, leur détermination, leur volonté. Pendant que d'autres sortaient, allaient danser ou allaient faire toutes sortes de choses, eux, qu'est-ce qu'il faisaient? Ils pratiquaient leur sport. Ils pratiquaient quotidiennement leur sport, et des heures, et des heures, M. le Président, sans compter. C'était leur quotidien et ce qu'ils faisaient, c'était simplement la pratique de leur sport. Pourquoi? Parce qu'ils savaient qu'une journée bien définie ils auraient à aller prouver à la face du monde qu'ils étaient les meilleurs. Quand tu es né champion, tu ne reviens pas, après ça, en arrière pour retomber trop bas ou plus bas. Quand tu es un champion, je pense que tu l'as dans le corps et dans l'âme et que tu fais tout ce qu'il faut pour demeurer champion.

(17 h 50)

On allait, je pense, de surprise en surprise, parce que des milliers de personnes ont suivi ça au petit écran, vous comprendrez. Quand on voyait nos athlètes performer, je pense qu'on était aussi fiers qu'eux. On était tellement heureux de voir à quel point ils avaient fait des efforts et on était fiers, en tant que Québécois et Québécoises, de voir que c'étaient les nôtres, parce qu'il s'est gagné sept médailles en tout au niveau des représentants canadiens, mais là-dessus il y avait cinq Québécois, et là je ne compte pas, M. le Président, les médailles de Philippe LaRoche et de Nicolas Fontaine en ski acrobatique, parce que ce n'était pas une discipline qui était reconnue au niveau des Jeux d'Albertville. Je pense que ça ira aux prochains Jeux. Ça fera partie d'une discipline reconnue mais, cette année, ce n'était pas reconnu. Nous avons deux autres Québécois qui ont gagné des médailles qui ne peuvent pas être comptabilisées dans les sept médailles que le Canada a remportées, dont cinq Québécois, M. le Président. Pensez donc que c'est toute une fierté pour l'ensemble des Québécois! Cinq médailles venaient du Québec, mis à part les deux dont je viens de vous faire part.

On titrait, chez nous, dans La Tribune, qui est notre quotidien, parce que vous savez que sur les patineuses de vitesse à courte distance nous avions deux jeunes femmes de l'Estrie en la personne de Sylvie Daigle et d'Annie Perreault... Vous comprendrez que je ne suis pas peu fière parce que j'en ai une qui vient de mon comté, qui est native de chez nous, à Windsor, et qui demeure à Bromptonville. Sylvie, qui est de la région de l'Estrie, comme tous les autres qui sont de Montréal et d'ailleurs au Québec, on la regardait avec intensité. Lorsqu'ils sont montés sur les marches du podium avec leurs médailles, pensez ce qu'on pouvait vivre, tout le monde.

Connaissant la famille d'Annie, bien sûr, j'ai parlé à ses parents, et je pense qu'ils ont eu autant de stress et autant de difficultés à vivre ça pour l'aider, finalement, avec ce qu'ils pouvaient faire... Mais ils en ont fait beaucoup parce que, comme le ministre le disait tout à l'heure, les parents d'athlètes, surtout ceux qui se rendent jusqu'à ces Jeux qui sont les jeux les plus hauts qu'on puisse produire, je pense qu'il leur a fallu aussi beaucoup de sacrifices, parce que l'aide financière que peuvent recevoir les athlètes lorsqu'ils vont sur un podium aussi important que celui des jeux internationaux, c'est-à-dire des Jeux olympiques, je pense que ça coûte très cher. Vous savez, c'est toujours la course aux commanditaires pour faire en sorte qu'ils aient un peu d'argent pour être capables de payer les dépenses que ça peut coûter. Les programmes gouvernementaux qu'on peut avoir pour l'athlète qui se spécialise comme ça, ce

n'est pas suffisant pour en arriver à faire tout le travail, pour monter finalement sur le podium et être les vrais gagnants.

Je vous disais que La Tribune titrait: «Des filles en or». Bien sûr, parce qu'elles ont eu la médaille d'or. Est-ce que vous avez déjà vu une médaille olympique, M. le Président? J'étais émue, cet après-midi. Il y a une de nos athlètes qui l'avait apportée. Je n'en porterai jamais, bien sûr, mais juste le fait de pouvoir voir à quel point c'est une médaille extraordinaire, non seulement par sa beauté, mais par ce qu'elle représente... Elle représente des jours, et des jours et des années, et de la sueur et tous les sacrifices que ces jeunes-là font, ça fait que c'est une médaille qui brille de tous ses feux et que tu la regardes avec autant de fierté que tu peux regarder l'athlète qui a eu l'honneur de se la mettre dans le cou parce qu'elle l'avait gagnée.

M. le Président, je pense qu'on doit aussi féliciter les entraîneurs, comme le ministre l'a dit lui aussi. Je trouve qu'il n'a oublié personne et ça va de soi qu'il faut féliciter les entraîneurs. Ce sont des gens qui travaillent dans l'ombre. On n'en parle pratiquement jamais; ils sont en arrière et c'est eux qui donnent les conseils, c'est eux qui enseignent comment toujours mieux faire pour arriver le plus haut possible. Je voudrais leur rendre hommage, même si ce n'est pas eux qui portent la médaille, même si, lorsqu'on les a accueillis ici, à l'Assemblée nationale, ils n'ont pas reçu une médaille de l'Assemblée nationale, mais ils ont reçu cette gratification-là de voir que leur pupille s'est rendu au plus haut sommet. Donc, à tous ces entraîneurs qui travaillent dans l'ombre - mais combien est important le travail qu'ils font, M. le Président - je voudrais dire merci de tout ce qu'ils font et leur dire bravo, parce que c'est grâce à eux si les athlètes sont rendus le plus haut possible.

Bien sûr, je vais ajouter cette formule toute faite de bonne chance, parce que, vous savez, les athlètes que nous avions aujourd'hui, il y en a qui sont arrivés du Japon à minuit hier soir, puis ils étaient ici, à l'Assemblée nationale, aujourd'hui, pour se faire fêter par les parlementaires. Donc, ça veut dire qu'eux autres, après une médaille olympique, c'est une autre qui est en préparation. Ça n'arrête pas là, et la durée d'un athlète olympique... Je leur demandais quels sont les âges, à peu près. On me disait que vers l'âge de 25, 26, 27 ans, c'était pas mal le plus haut qu'ils pouvaient aller. Donc, c'est une courte carrière au niveau des Jeux olympiques pour ces athlètes-là, mais c'est une carrière intensive et une carrière dont tous et chacun nous sommes très très fiers.

M. le Président, je voudrais m'associer, au nom de ma formation politique et en mon nom personnel - puisque je suis la responsable du loisir pour l'Opposition officielle - et dire à tous ceux et celles qui nous ont permis d'être aussi fiers: Merci beaucoup d'être ce que vous êtes. Nous sommes très fiers de vous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Johnson, pour cette intervention. Sur cette même motion, je reconnais M. le député de Sherbrooke. M. le député, la parole est à vous.

M. André J. Hamel

M. Hamel: Merci, M. le Président. C'est évidemment avec beaucoup de plaisir et de fierté que je me joins à mes collègues, députés de l'Assemblée nationale, afin de souligner le grand succès obtenu par nos athlètes qui ont participé aux récents Jeux olympiques d'hiver tenus à Albertville. Pour nous qui étions au Québec, nous avons suivi ces jeunes par l'intermédiaire des médias, mais notre esprit et notre coeur étaient avec nos athlètes qui représentaient le Québec et le Canada. Je tiens à le rappeler, M. le Président, ce qui est important, c'est de concevoir cet esprit sportif qui nous anime dans un contexte de compétition, bien sûr, mais de saine compétition entre les athlètes, les pays, les régions représentés lors de ces manifestations.

Mes félicitations s'adressent, bien sûr, à tous les athlètes, tous les entraîneurs, les parents aussi, mais vous comprendrez que j'adresse des félicitations un peu particulières aux athlètes de ma belle et dynamique région de l'Estrie. Je veux mentionner ici Sylvie Daigle et Annie Perreault, médaillées d'or au relais 3000 mètres, Patrick Lebeau, médaillé d'argent au hockey sur glace et Nicolas Fontaine, médaillé d'argent en ski acrobatique de démonstration. Athlètes qui ont été chaleureusement accueillis et honorés à Sherbrooke la semaine dernière, M. le Président.

Certains de mes collègues ont souligné le travail, la discipline, la compétence et la persévérance de tous ces athlètes. J'aimerais aussi rappeler à cette occasion le contexte souvent très exigeant dans lequel doivent évoluer nos athlètes. En effet, on oublie trop souvent que l'évolution personnelle de l'athlète se déroule dans l'effort quotidien, la persévérance, la ténacité, parfois dans la frustration, même, mais toujours dans le courage et la volonté déterminée de réussir dans sa discipline. Malheureusement, l'honneur d'accéder au podium est réservé à quelques athlètes seulement. Les autres ont souvent fait preuve d'autant de rigueur, de travail et de ténacité que les récipiendaires de médailles, mais ils ont été malheureusement victimes de certains facteurs quelquefois incontrôlables mais toujours décevants. C'est pourquoi il est bon de faire ressortir ici le côté humain de ce monde que l'on ne connaît souvent que de façon superficielle. Ce contexte de compétition

sportive a aussi ses exigentes réalités, et ceux et celles qui parviennent au sommet y sont arrivés à force de sacrifices, de renoncement et de cette détermination obstinée, dans une période de leur vie qu'ils ont décidé de consacrer à une discipline sportive. (18 heures)

Le rôle de notre société consiste, à toutes fins utiles, à assurer les conditions nécessaires à leur épanouissement et à leur développement. Pour notre part, nous les encourageons publiquement à poursuivre leur évolution en vue de parvenir aux autres buts qu'ils se sont fixés et à servir d'exemples à ceux et celles qui s'inspireront de leur succès. Notre encouragement d'aujourd'hui peut, à première vue, paraître modeste, mais souhaitons qu'il sera apprécié d'abord et avant tout par l'ensemble des athlètes qui ont représenté le Québec lors de ces Jeux d'Albertville, car l'engagement de l'athlète dans une discipline sportive relève d'abord d'une décision personnelle.

Sans trop en connaître les implications, cet athlète devra franchir plusieurs étapes avant d'en arriver à ce sommet tant convoité. Lorsqu'ils parviennent au succès, c'est toute la société qui s'en réjouit en soulignant le magnifique travail accompli par ces athlètes. À leur tour, ces derniers confieront aisément qu'ils étaient d'abord et avant tout inspirés par le désir de faire honneur au pays ou à la région qu'ils représentent. Dans un cas comme dans l'autre, nous en éprouvons une fierté bien légitime et nous tenons ici à les remercier publiquement pour l'exceptionnel travail accompli tout au long des années qui ont précédé les succès remportés à Albertville. Souhaitons que de nombreux jeunes du Québec soient inspirés par votre exemple et qu'ils décident de relever aussi des défis exigeants. Je suis très fier des succès remportés par nos athlètes du Québec et particulièrement par nos athlètes de l'Estrie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Sherbrooke. Alors, sur cette même motion, je reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée.

Mme Jeanne L Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je veux me joindre à la motion déposée par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour rendre hommage à toutes les Québécoises et à tous les Québécois athlètes, entraîneurs, accompagnateurs qui ont participé aux derniers Jeux olympiques d'hiver tenus à Albertville, en France, et tout particulièrement, évidemment, aux médaillés d'or, d'argent et de bronze.

M. le Président, la victoire de ces jeunes, c'est aussi la victoire des entraîneurs. C'est la victoire des accompagnateurs. C'est aussi la victoire des parents, des amis qui les ont soutenus, mais c'est aussi, comme Québécois et comme Québécoises, je dirais, un peu notre victoire.

Vous allez me permettre évidemment de souligner de façon particulière les médailles qui ont été remportées par deux jeunes du comté de Chicoutimi, Sylvain Gagnon et Frédéric Blackburn. Tant pour ces jeunes que pour tous les autres médaillés, tous ceux qui ont participé à l'équipe olympique, la performance de ces jeunes constitue un modèle, et Dieu sait que, par les temps qui courent, des modèles, nos jeunes en ont besoin. Nos jeunes ont besoin de se dire et de se faire dire qu'il y a encore des créneaux qu'ils peuvent occuper, qu'il y a encore des performances qu'ils peuvent dépasser, qu'il y a encore des lieux où on peut les inviter au dépassement.

Les jeunes, aujourd'hui, ont besoin de modèles, et les modèles de compétition olympique sont des modèles qui sont généralement proches des jeunes; des jeunes que vous pouvez voir, que vous pouvez toucher, que vous pouvez rencontrer, que vous pouvez saluer; des jeunes avec lesquels vous avez eu l'occasion d'aller à l'école, de jouer, de fréquenter les mêmes lieux; des jeunes avec lesquels vous avez eu aussi l'occasion de pratiquer un sport. Ça devient, pour la jeunesse québécoise, les jeunes garçons et les jeunes filles, des modèles.

En fait, ce que nous disent ces jeunes, c'est qu'avec de la détermination, le goût du dépassement, le goût de l'excellence, le goût de relever des défis, on peut atteindre des sommets, et même lorsqu'on n'a pas de médaille, parce que c'est arrivé à tous ceux dont on ne salue pas la performance aujourd'hui, du moment qu'on a participé, on est déjà gagnant.

Je voudrais féliciter ces jeunes, leur rendre hommage. Mais vous allez me permettre de rendre hommage plus particulièrement à leurs parents. Chaque fois que je vois des jeunes qui réussissent à atteindre ces sommets, je m'imagine sans difficulté le nombre de voyages de taxi que les parents ont dû faire, des fois très tôt le matin, pour aller les chercher très tard le soir, les investissements monétaires que les parents ont faits, alors qu'ils n'étaient pas reconnus, pour les amener à participer, à compétitionner à l'extérieur de la région, à l'extérieur du Québec. Chaque fois, ça demande un peu plus de sous aux parents, mais ça demande surtout beaucoup de disponibilité. Beaucoup de disponibilité! Je rends hommage à ces parents parce que, comme parent, je sais ce que ça représente d'efforts soutenus de la part des parents pour que les jeunes puissent percer, puissent performer dans ce secteur.

Les jeunes, ces jeunes qui ont réussi et qui sont devenus les ambassadeurs du Québec, ils disent à nos jeunes: II y a des endroits, il y a des créneaux qui ne sont pas encore occupés et que tu peux occuper si tu as le désir et la

volonté de le faire. Ces jeunes médaillés nous disent: Si tu te fais confiance, si tu y mets le temps, les efforts, la détermination, si tu refuses de te laisser décourager, il y a encore de la place pour toi; pas seulement dans les disciplines sportives, c'est vrai pour toutes les disciplines de la vie. C'est vrai pour les études, c'est vrai pour le travail, c'est vrai pour tous les défis que pose la société. Ces jeunes disent à nos jeunes Québécois, à nos jeunes Québécoises: Toi seul peux prendre cette décision. Quelle que soit la qualité du support que tu reçois de la municipalité, par les équipements sportifs, de ta famille, de tes amis, de tes entraîneurs, de tes accompagnateurs, c'est toi seul qui devras prendre la décision d'y mettre le temps, les efforts, la volonté et la détermination pour réussir.

Je le rappelle, ces jeunes-là sont des exemples et des modèles pour nos jeunes et qu'enfin, ce soient des jeunes de l'entourage immédiat, qu'on peut identifier, qui nous proposent des façons de réussir. C'est plus accessible et plus réaliste que lorsqu'on ne trouve ces modèles qu'à l'extérieur ou qu'on retrouve ces modèles dans des secteurs à ultra-haute performance qui s'appellent le hockey professionnel, par exemple. Beaucoup de jeunes partent en se disant: On va tous devenir des athlètes payés à plusieurs millions de dollars par année, ce qui n'est pas vrai. L'important, c'est de réussir, de réussir dans des choses où c'est accessible, où c'est possible d'être performant. Mais, en même temps, ça rappelle aux jeunes que, dans le secteur des sports amateurs, il y a de la place pour le défi, il y a de la place pour la performance. Mais il y a de la place aussi pour occuper des loisirs, pour rendre plus performant, pour apprendre la discipline personnelle, pour apprendre aussi le partage, pour apprendre le compagnonnage, pour apprendre l'esprit d'équipe.

M. le Président, je voudrais terminer en félicitant tous les athlètes, les jeunes femmes, les jeunes hommes qui ont remporté des médailles, en le faisant de façon plus particulière pour les médaillés - vous le comprendrez - de Chi-coutimi et vous rappeler - on oublie un peu ça, en cette Chambre - à quel point les parents, après autant d'efforts, sont émus et heureux. J'ai eu l'occasion de participer à une cérémonie offerte par la ville de Chicoutimi pour les médaillés de Chicoutimi, cérémonie à laquelle ont assisté le grand-père de Frédéric dont on a beaucoup parlé, Patrick Blackburn, et les parents des deux, Gagnon et Blackburn, qui étaient extrêmement émus. J'ai vu la mère du jeune Sylvain Gagnon et le père qui ne pouvaient retenir leurs larmes. On sentait, dans cette émotion, la foi qu'ils avaient mise dans leur fils, le désir du dépassement qu'ils avaient su lui inculquer, mais, sans doute aussi, les moments où il avait subi le plus de découragement, où il avait eu le goût de lâcher. Il avait eu le goût de lâcher les études, alors qu'il a pu poursuivre à la fois ses pratiques, son entraînement et ses études collégiales bien que, comme certains jeunes, il les ait étalées un peu plus longuement, mais il a réussi à la fois à maintenir et à poursuivre ses deux objectifs qui étaient d'atteindre des sommets dans la discipline, mais également de se préparer et de préparer son avenir comme futur citoyen dans la collectivité québécoise. (18 h 10)

Nous avons beaucoup de ces jeunes qui pourraient, à l'image, à l'exemple de ces jeunes, atteindre des sommets. Je souhaiterais qu'ils puissent trouver tant dans nos villes, dans nos municipalités que de la part des gouvernements et des ministères concernés, l'appui, les services et les soutiens dont ils ont besoin pour atteindre des sommets. Alors, je dis à ces jeunes, je dis à leurs parents, à leurs entraîneurs: Nous sommes très fiers de vous et nous espérons que vous ferez encore mieux à la prochaine.

Je ne peux terminer sans vous dire, sans avouer avoir éprouvé une fierté toute particulière quand j'ai constaté qu'au terme de ces Jeux cinq médailles sur sept médailles canadiennes étaient obtenues par des Québécois et des Québécoises, et si le ski acrobatique avait été déjà reconnu aux Jeux olympiques, c'aurait été sept médailles sur neuf.

M. le Président, c'est plus de 70 % des médailles pour le Québec seulement dans tout le Canada, et je me dis: Si jamais un jour le Québec est souverain, sûrement que ça, ça va constituer un appauvrissement pour le Canada. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mors, merci, Mme la députée, de votre intervention. Sur cette même motion, je reconnais maintenant le whip adjoint du gouvernement et député de Chauveau.

M. Rémy Poulin

M. Poulin: Merci, M. le Président. Je me joins sûrement à l'ensemble des collègues de l'Assemblée nationale pour parler de ces athlètes qui ont participé à Albertville et qui ont tous, je pense, dans l'ensemble québécois et canadien, fait de nous, sur le plan international, une image fort excellente. Mais bien égoïstement, je parlerai de ces athlètes de la grande région de Québec, Myriam Bédard, Philippe LaRoche, Joé Juneau, qui, avec fierté... dont deux de ces athlètes sont de mon comté...

Je voudrais dire combien je suis fier, oui, fier parce que ces gens-là, on les côtoie. On côtoie les entraîneurs, on côtoie les bénévoles, on côtoie les parents, mais aussi on côtoie ces gens qui les encouragent, ces gens qui sont derrière eux, ces associations qui sont derrière eux. Je revois encore ces athlètes, dont Myriam Bédard, Philippe LaRoche et Joé Juneau, qui ont

fait la fierté du Québec, mais aussi de la grande région de Québec.

Mme Bédard, qui a terminé troisième dans l'épreuve des 15 kilomètres, inscrivait ainsi une page dans l'histoire du biathlon féminin qui, soit dit en passant, figurait pour la première fois dans les annales olympiques. Mme Bédard mérite tous les honneurs qu'elle a remportés, tout comme les autres médaillés québécois et québécoises. Des souvenirs, quand je revois Joé Juneau, cet athlète remarquable qui a fini premier pointeur lors des Jeux d'Albertville, où j'ai eu l'occasion, comme entraîneur au hockey, de l'avoir comme adversaire. Ce talent fort exceptionnel, ce talent de batailleur, cet homme qui, sans relâche, «performe» par son vouloir mais aussi son charisme. Joé Juneau, j'en suis très fier parce que, même si un jour il contribue à nous battre lors de compétitions, aujourd'hui, j'en suis fier comme Québécois parce qu'il nous a apporté cette image du grand sport national qu'est le hockey, pour nous prouver que, nous, nous avons de bons athlètes et que ce sport nous appartient réellement.

Il va de soi que je vais parler de Philippe LaRoche, de la ville de Lac-Beauport. Philippe, par ses performances... Philippe est ce créateur, avec sa famille, du ski acrobatique; il nous a démontré, encore une fois, ce caractère fort important, mais un caractère fort défiant aussi parce que le ski acrobatique, pour ceux qui l'ont vu - moi, je l'ai vu sur place, je l'ai vu à Lac-Beauport; je les ai vus ici, sur la Grande-Allée, nous faire des démonstrations de trampoline - ces hommes, ce Philippe LaRoche, sa famille, qui ont cru... Il a donné cette image aujourd'hui, dans les Jeux d'hiver, en souhaitant que cette discipline soit reconnue lors des prochains Jeux d'hiver.

J'ai parlé de Joé Juneau, je voudrais aussi parler de Lucie LaRoche qui, à cause d'une blessure, a dû abandonner les jeux d'Albertville. Cette femme, aussi d'un caractère exceptionnel, je pense - comme son frère - nous a démontré qu'il y a de la grande place pour ces athlètes.

M. le Président, la grande région de Québec en est fière, de ces athlètes. J'écoutais la députée de Chicoutimi, j'écoutais notre ministre, le député de - excusez, j'ai un blanc de mémoire - Roberval. Je pense que tous et chacun, dans des disciplines sportives, on a voulu réaliser ce rêve, ce rêve d'athlète. On n'a pas tous réussi, mais quand on a côtoyé ces gens-là de très près et quand on revoit ces gens-là de très près, nous sommes assurés que cette image va se refléter sur nos jeunes, sur nos jeunes hommes, sur nos jeunes femmes qui, oui, rêveront un jour de se voir dans ces Jeux fort importants. Et je peux vous dire une chose, j'espère sincèrement que la grande région de Québec fera vivre ces moments à nos jeunes Québécois et Québécoises, chez nous, dans la capitale de la grande région de Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Chauveau. Pas d'autres intervenants? Est-ce que la motion du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, rendant hommage à toutes les Québécoises et à tous les Québécois, athlètes, entraîneurs et accompagnateurs, qui ont participé aux derniers Jeux olympiques d'hiver tenus à Albertville, en France, et plus particulièrement aux médaillés d'or, Mmes Annie Perreault, Nathalie Lambert, Sylvie Oaigle, Angela Cutrone et M. Philippe LaRoche; aux médaillés d'argent, MM. Sylvain Gagnon, Frédéric Blackburn, Michel Daigneault, Nicolas Fontaine, Patrick Lebeau, Joé Juneau, Adrien Plavsic et Sam Saint-Laurent, ainsi qu'aux médaillés de bronze, Mmes Myriam Bédard, Isabelle Brasseur et M. LJoyd Eisler, est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Ceci termine les motions sans préavis.

Nous en sommes maintenant à la rubrique «renseignements sur les travaux de l'Assemblée». Ceci termine les affaires courantes.

Nous en sommes maintenant aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: L'article 13, M. le Président.

Projet de loi 407

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 13, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi 407, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Y a-t-il des interventions sur ce rapport? M. le ministre du Revenu.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: Merci, M. le Président. Comme vous le savez, le projet de loi 407, de quelque 200 pages, 249 articles, fut présenté à l'Assemblée nationale le 6 décembre et l'adoption de principe a eu lieu le 16 décembre. La commission parlementaire du budget et de l'administration en a fait l'étude détaillée les 11 et 12 février derniers et l'a adopté avec des amendements. Enfin, le rapport de la commission a été déposé le 10 mars 1992.

Je rappelle que ce projet de loi vise principalement à donner suite au discours sur le budget du ministre des Finances du Québec du 2 mai 1991, à ses déclarations ministérielles de décembre 1990 et d'octobre 1991, au document technique sur la taxe de vente du Québec publié en février 1991 ainsi qu'à divers bulletins

d'information publiés récemment. La plupart des dispositions prévues sont déjà en application depuis le moment où elles ont été publiées. On comprend donc que l'étude d'un tel document législatif s'effectue dans un contexte particulier. (18 h 20)

M. le Président, n'eussent été le travail de synthèse des officiers du ministère du Revenu et de la collaboration des membres de la commission du budget et de l'administration, cette tâche se serait avérée complexe et fastidieuse. Par ailleurs, il n'est pas certain que les objectifs que nous nous fixons en cette Chambre auraient été atteints adéquatement. À cet effet, nous avons développé, depuis un peu plus d'un an, une méthode de travail permettant d'exercer notre rôle de parlementaire de façon éclairée et efficace dans le domaine des lois fiscales. C'est ainsi qu'avec le temps nous en sommes venus à aborder ces pièces législatives inextricables en procédant à des regroupements d'articles par sujet au lieu de les aborder un par un - c'est très difficile - au fur et à mesure qu'ils se présentent dans le texte, ce qui devient, finalement, incompréhensible sans avoir nécessairement un lien l'un avec l'autre.

Ce regroupement sur une base thématique est fragile, car il dépend essentiellement de la bonne volonté des ententes pouvant être conclues à la dernière minute avec les parlementaires. Je crois donc utile que l'Assemblée nationale et ses institutions mènent une réflexion en ce sens afin de trouver une solution plus durable à cette situation. Ainsi, je compte déposer d'une façon formelle une proposition à l'Assemblée nationale pour dire que dans l'avenir, pour les lois fiscales déposées qui font suite à la présentation du budget et à d'autres déclarations, que, effectivement, on puisse les étudier sur une base thématique. Ça nous permet de les étudier d'une façon intelligente, ça permet d'en comprendre le contenu, de faire un suivi et ça va grandement faciliter non seulement la tâche de la commission, mais également les travaux des parlementaires qui doivent par la suite, par exemple, consulter ces documents-là. Ça nous permettra, finalement, de donner un bon éclairage, un éclairage juste et précis, sur les textes qui sont devant nous.

Je regarde les travaux des assemblées et des commissions tels qu'ils ont été faits auparavant, article par article. On se rend aux articles 14, 17, 29, sur 500, 400 ou 300 articles. Finalement, ça ne mène nulle part, la compréhension est très difficile.

En procédant sur une base thématique, on est certains, là, finalement, de voir l'ensemble, le principe, le contenu et la rédaction pour comprendre son système, et je pense que c'est intelligent, que c'est éclairé, et c'est ça qu'on doit faire. Cette motion sera déposée et je compte bien sur l'appui de l'ensemble des parlementaires pour assurer la réalisation de cet objectif.

Pour revenir, M. le Président, au projet de loi 407, grâce à l'entente intervenue, cette façon de faire nous a donc permis de regrouper les 249 articles en 36 sujets portant sur diverses mesures fiscales. Parmi ces mesures, on peut noter celles visant à placer sur un pied d'égalité l'ensemble des régimes d'assurance collective, celles qui comportent un allégement du fardeau fiscal des contribuables et des incitatifs visant à stimuler l'économie, ainsi que d'autres mesures rendant plus efficace l'administration des lois fiscales.

En terminant, M. le Président, je souligne que 11 amendements ont été présentés et adoptés au cours de l'étude détaillée, dont un titre. En remerciant tous ceux qui ont contribué au bon déroulement des travaux portant sur le projet de loi 407, je demande donc à cette Assemblée, M. le Président, de bien vouloir adopter le rapport de la commission du budget et de l'administration sur l'étude du projet de loi 407.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur la même question, M. le député de Montmorency, sur l'adoption du rapport.

M. Jean Filion

M. Filion: Oui, M. le Président. J'écoutais le ministre du Revenu nous dire qu'effectivement, cette fois-ci, on a étudié le projet de loi sujet par sujet. Mais, même si on a fait ça sujet par sujet, je pense qu'on nous a quand même présenté encore une fois un projet de loi supertechnique où, à toutes fins pratiques, si on veut être honnête intellectuellement, on dirait que c'est à peu près pas possible qu'on prenne le temps, ici, à l'Assemblée nationale pour étudier le projet de loi à fond, pour qu'on se fasse une idée en profondeur, même sujet par sujet.

Les articles, M. le Président, et je l'ai dit dans mon premier projet de loi sur la TVQ, 170, les articles sont écrits d'une façon telle qu'on ne peut même pas faire un exercice intéressant en commission pour qu'on puisse comprendre. On lit un article, M. le Président, et dans un article on va se rendre compte qu'on réfère à 20 autres articles. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de faire l'exercice de lire un article; en lisant l'article, vous faites à peu près une demi-page et vous venez d'en citer 23 autres pour comprendre le paragraphe que vous êtes en train de lire. On est rendu à la fin de l'article, M. le Président, et on n'a rien compris.

Je peux vous dire que, même en commission, on a bien ri, parce qu'au fond on demandait à un fonctionnaire de l'équipe ministérielle de nous lire l'article et, une fois qu'il eut fini de lire l'article, personne n'avait compris. On se demandait vraiment qu'est-ce que ça voulait dire.

M. le Président, moi, je dis qu'on va devoir s'efforcer au Québec, pour faire des lois... Je comprends que peut-être, comme le ministre le disait dans le projet de loi 170, on n'écrit pas

pour M. Tout-le-Monde, mais je pense qu'il y a des limites. On va devoir s'efforcer, M. le Président, d'écrire un texte de loi fiscale qui va être d'une meilleure compréhension parce que ça demeure toujours l'instrument de travail qui donne la direction d'une politique fiscale et qui donne la direction du législateur. À un moment donné, s'il y a trop de cacophonie dans la rédaction de nos lois fiscales... Il y a assez que c'est compliqué et qu'on en met, des taxes, mais je pense qu'on va devoir s'efforcer, à cette Assemblée, pour améliorer le texte, la vulgarisation et la compréhension, M. le Président.

Où je suis à la fois étonné et heureux, une agréable surprise, M. le Président, cette fois-ci, on n'a pas mis le bâillon. Je dois féliciter le gouvernement de cette ouverture d'examen dans une démocratie où je pense qu'effectivement on doit réussir à échanger et à faire valoir nos positions. Cette fois-ci, M. le Président, on a senti que le gouvernement était prêt à regarder le projet de loi et à le déterminer sujet par sujet. J'aurais apprécié, effectivement, que le projet de loi 170 ait été présenté sous cette forme-là.

Le projet de loi 170, M. le Président, quand on a étudié la TVQ pour venir taxer les gens et que là, on l'a adopté en vitesse parce qu'il fallait que ce soit adopté avant le 31 décembre, on y a mis le bâillon. On a dit: Vite, vite, vite, il faut l'adopter. Ça presse. Après ça, on l'a reporté jusqu'à... Bien, on l'avait déjà reporté, et là, on se demande si ça va être reporté à nouveau, mais on n'avait pas ce document de travail, M. le Président. Alors, j'aimerais féliciter le gouvernement d'avoir préparé ce document-là qui nous a permis, effectivement, de faire un meilleur travail qui, à toutes fins pratiques, sert la collectivité québécoise.

M. le Président, j'ai étudié le projet de loi. On l'a regardé, le projet de loi 407, mais moi, ce qui me chicote quand je regarde un projet de loi comme celui-là, bien sûr, il y a toute la rédaction du projet, mais il y a aussi des choses que j'aurais aimé voir apparaître. Je vais profiter un peu... un petit aparté, comme on dit, pour dire, M. le Président, qu'il y a des choses qu'on attend dans nos lois fiscales. On parle de la Journée internationale de la femme. Moi, j'aurais aimé vous dire qu'effectivement nos lois fiscales vont devoir prendre en considération la condition féminine au Québec. Il y a des choses importantes, actuellement, qui doivent être regardées et qu'on ne fait pas. On fait la sourde oreille. Moi, je profite de cette journée pour en parler un peu, parce que, effectivement, j'aimerais voir apparaître des mesures fiscales dans ces projets de loi qui tiendraient compte de la condition féminine.

M. le Président, vous le savez, actuellement, nos lois fiscales encouragent la désunion familiale. C'est grave, M. le Président, que nos lois fiscales au Québec - d'ailleurs, même l'archevê- que de Québec faisait une sortie dans ce sens-là. Il disait: Écoutez, faites quelque chose avec les lois fiscales. Les gens sont incités, sur le plan uniquement fiscal, de se désunir sur le plan familial. En tout cas, quand j'ai lu ce projet de loi, c'est évident que ça n'avait pas été prévu par le ministre des Finances. Mais, comme on célèbre la Journée internationale des femmes, je me permets, M. le Président, de citer cet élément-là...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Montmorency, il est 18 h 30. Vous avez utilisé 5 minutes de votre temps. Vous avez droit à une période de 30 minutes sur une motion de forme. À moins qu'il n'y ait consentement, je suis obligé d'ajourner les travaux à demain.

M. Bélisle: S'il en a pour quelques minutes, je suis d'accord pour consentir.

M. Filion: Je continuerai demain l'exposé, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est parfait. Alors, très bien. C'est l'ajournement du débat. Voilà.

M. Bélisle: C'est l'ajournement du débat, M. le Président, à demain matin, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, c'est l'ajournement du débat. Demain, aux affaires du jour, vous demanderez à la présidence d'appeler ce qui est au feuilleton, le projet de rapport 407. C'est l'ajournement du débat, proposé par M. le député de Montmorency.

Compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de cette Assemblée à demain matin, le jeudi 12 mars, à 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 30)

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