Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures trois minutes)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonjour. Si vous voulez
prendre place. Merci.
Affaires inscrites par les députés de
l'Opposition
Motion proposant que l'Assemblée nationale
rejette le rapport du comité Beaudoin-Dobbie
Alors, nous sommes aux affaires du jour, aux affaires inscrites par les
députés de l'Opposition. À l'article 36, M. le whip de
l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean
présente la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale
rejette le rapport du comité Beaudoin-Dobbie déposé
à la Chambre des communes le 28 février 1992.»
Avant que le débat sur cette motion ne s'engage, je vous informe,
suite à une rencontre avec les leaders, de la répartition du
temps de parole établie pour la discussion de cette motion. Mise
à part une réplique de 10 minutes accordée à
l'auteur de la motion et les 10 minutes allouées à l'ensemble des
députés indépendants, les deux groupes parlementaires se
partageront également la période consacrée à ce
débat. Dans ce cadre, les interventions sont limitées à
une durée de 30 minutes chacune et ce débat aura lieu seulement
le mercredi. Est-ce qu'on peut en avoir un ordre de la Chambre?
Consentement?
M. Pagé: Consentement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement à ce
qu'il y ait un ordre de la Chambre. Je suis prêt maintenant à
entendre le premier intervenant, M. le whip de l'Opposition officielle et
député de Lac-Saint-Jean. M. le député.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Merci, M. le Président. M. le
Président, au Québec, les fédéralistes ont cru
pendant longtemps, et ça les réconfortait d'y croire, d'ailleurs,
que l'alternative traditionnelle qui s'offrait aux Québécois
était la suivante: ou le Québec s'engageait sur la voie de la
souveraineté, ce qui est, vous le savez, notre option, ou alors le
Québec procédait, avec le Canada et le gouvernement
fédéral, à une révision en profondeur du
régime fédéral. C'est une expression qui revenait souvent,
d'ailleurs, dans la bouche du ministre des Affaires canadiennes,
«révision en profondeur du régime
fédéral».
Depuis l'échec de l'accord du lac Meech, on doit dire et il faut
reconnaître que cette alternative a volé en éclats. Elle a
été complètement réduite en miettes. C'est
évidemment la réalité, la réalité brute,
mais aussi les événements, les circonstances qui, finalement, ont
fait la démonstration que cette révision en profondeur
souhaitée par les fédéralistes québécois
n'était pas faisable tout simplement, que le régime
fédéral, tout compte fait, était irréformable. Et
c'était ça, la réalité. Et c'est ça, la
réalité qu'il faut bien finalement reconnaître, ce que le
rapport de la commission Bélanger-Campeau a appelé, à
juste titre, «le choc des visions des identités et des aspirations
nationales». Il y a deux nations pour un seul pays. Là est le
problème. Il y a deux nations, donc, il y a deux visions. Et deux
visions opposées, irréconciliables, incompatibles. Alors, on peut
bien essayer, pendant un certain temps, d'occulter cette réalité,
de la masquer, cette réalité, en procédant, par exemple,
comme l'a fait le ministre Clark, de Halifax à Vancouver, à ces
espèces de cérémonies liturgiques qu'il a
présidées, ces conférences qui ont eu lieu dans plusieurs
villes du Québec et du Canada, et où on s'est en quelque sorte
amusé à faire semblant que le Québec était
aimé, que le Québec était compris et qu'on était
prêts à satisfaire ses revendications et ses aspirations.
Alors, on peut, pendant un certain temps, occulter la
réalité, la masquer, mais on ne peut pas l'escamoter tout le
temps, on ne peut pas l'escamoter pendant longtemps, la refouler en coulisse.
Elle reprend très vite sa place, cette réalité-là.
C'est ce que les psychanalistes appellent «le retour du
refoulé». On peut bien refouler dans le subconscient bien des
choses, mais à un moment donné ça surgit en pleine
lumière et c'est ce qui se produit présentement. On a
essayé d'escamoter cette réalité-là, on en a
été finalement incapables. Elle a fait irruption de façon
brutale sur la scène politique, vous vous rappellerez, il y a quelque
temps, par le biais du fameux sondage Gallup où on interrogeait les
Canadiens sur la place du Québec. On leur demandait: Pour garder le
Québec dans le Canada, êtes-vous prêts à consentir
des pouvoirs spécifiques au Québec? La réponse a
été négative: Non, à 92 %. Ce n'est pas rien: 92 %
des répondants au Canada anglais ont dit non à quelque forme que
ce soit de statut particulier pour le Québec. Même, on leur posait
la question: êtes-vous d'accord pour reconnaître le Québec
comme société distincte mais sans pouvoirs spéciaux, juste
une simple reconnaissance symbolique? Eh bien, ça a été
non à 66 %. Imaginez! C'est ça, cette réalité.
Cette réalité, c'est deux nations, c'est deux visions
incompatibles: la vision du Canada anglais qui est toute centrée sur un
gouvernement central fort, leur gouvernement national, et fondée
également sur le principe de l'égalité des provinces entre
elles, puis la vision du Québec qui, elle, est
toute centrée sur un État québécois ayant
des pouvoirs accrus, des pouvoirs additionnels pour lui permettre de
protéger, de promouvoir son identité propre.
Eh bien! cette réalité, M. le Président,
incontournable, inévitable, on s'est rendu compte qu'elle a pesé
de tout son poids sur les travaux de la commission Beaudoin-Dobbie, et c'est
cette réalité-là qui a aussi provoqué les
pirouettes partisanes des trois partis fédéraux, qui a
également provoqué leurs dissidences multiples, ce qui fait que
l'unanimité dont on parle est tout à fait factice et
artificielle. C'est cette réalité-là également qui
a généré les marchandages de marché aux puces qu'on
a connus, qu'on a vus en fin de parcours des travaux de la commission. C'est
cette réalité-là de deux nations, de deux visions
irréconciliables, qui explique également l'impuissance,
l'incapacité du comité Beaudoin-Dobbie à donner suite de
façon sérieuse et efficace aux aspirations et aux revendications
historiques du Québec.
Le résultat, bien, on l'a, M. le Président, avec le
rapport du comité Beaudoin-Dobbie; le résultat, c'est du
rafistolage, du rapiéçage, du bricolage, et, avec ce bricolage et
ce rafistolage, on est évidemment à des
années-lumière des revendications traditionnelles du
Québec, des attentes du Québec. Voyons d'un peu plus près
ces recommandations du rapport Beaudoin-Dobbie.
D'abord, je dirais et, d'ailleurs, le chef de l'Opposition, en
réaction au rapport, a résumé, d'une certaine
façon, notre position et je pense que ça rejoignait l'opinion
d'une large majorité de Québécois... C'est que ce rapport,
c'est moins que Meech, c'est beaucoup moins que Meech et, à bien des
égards, c'est pire, c'est pas mal plus dangereux. Puis, en
matière de partage des pouvoirs, si on le compare au rapport Allaire qui
est vraiment le projet le plus décentralisateur piloté par des
fédéralistes québécois, eh bien! c'est: rapport
Allaire, 22 pouvoirs, Beaudoin-Dobbie, 0; un blanchissage éhonté!
C'est moins et c'est pire que Meech.
Prenons-les, les cinq conditions, et rappelons en même temps, en
guise d'introduction, je dirais, rappelons que Meech, ça a
été les demandes les plus modestes que le Québec ait
jamais formulées. Minimum. Ça a été le minimum
qu'on n'ait jamais demandé. Et ça, ce n'est pas nous qui le
disons, c'est le premier ministre lui-même qui l'a admis: Le
Québec n'a jamais formulé des demandes aussi modestes.
Eh bien, voyons Meech! Dans Meech, il y avait la clause de la
société distincte. Par rapport à ce qu'on retrouve dans
Beaudoin-Dobbie, c'est clair qu'on recule. D'abord, la portée, qui
était déjà très limitée dans Meech, mais
dans Beaudoin-Dobbie, la portée de la clause de la société
distincte, elle est encore davantage réduite puisqu'elle ne porte que
sur la Charte des droits et non pas sur l'ensemble de la Constitution.
Deuxièmement, on a encore davantage réduit sa
portée en la définissant par trois éléments
seulement: la langue, la culture et le Code civil. Là-dessus, je vois
sourire le ministre et ça me rappelle, évidemment, les travaux
d'une commission parlementaire qui portaient sur l'accord du lac Meech,
à l'époque, où il avait fait une défense
extraordinairement convaincante relativement à l'absence de
définition de la société distincte, où il disait:
II ne faut surtout pas définir parce que la portée est pas mal
plus grande si on ne définit pas. Eh bien, là, on définit!
Puis, la règle de la dualité linguistique qu'on introduit dans la
clause de la société distincte va, évidemment, encore une
fois, affaiblir considérablement sa portée déjà
limitée par l'obligation qu'on fait désormais au Québec de
contribuer au développement et à l'épanouissement de la
minorité anglophone. Il y a plusieurs observateurs, dont Léon
Dion, en particulier, qui n'est pas le moindre, qui ont fait remarquer à
juste titre, avec raison, que cette disposition pourrait avoir pour effet de
porter atteinte, une atteinte directe à la loi 101 et à plusieurs
des chapitres de la loi 101, en particulier celui comportant la francisation
des entreprises.
Deuxièmement, le droit de veto. Ah! Le droit de veto, on en
était tellement fiers dans l'accord du lac Meech. Le gouvernement
était tellement fier d'avoir obtenu un droit de veto sur les
institutions fédérales. Bien, dans les propositions de l'automne
dernier, ça n'y était pas. Là, dans le rapport
Beaudoin-Dobbie, il n'y a aucune recommandation formelle, je vous le signale,
M. le Président, d'un droit de veto, sauf qu'on se contente de
reconnaître le principe et d'évoquer, de mettre sur la table cinq
formules possibles où le Québec pourrait avoir un droit de veto.
Mais je vous signale tout de suite, M. le Président, qu'il s'agit
là d'un exercice purement théorique, purement intellectuel parce
que tout le monde sait, désormais, 24 heures après le
dépôt du rapport, tout le monde savait que le droit de veto,
c'était fini, il était déjà rejeté dans la
poubelle, parce qu'il faut l'unanimité pour l'obtenir et que
l'unanimité n'existe pas. Il y a déjà au moins trois sinon
quatre provinces qui ont annoncé que, pour elles, le droit de veto pour
le Québec, ça ne marche pas, il n'en est pas question, elles vont
s'y opposer; donc, l'unanimité requise ne sera jamais atteinte. Quand on
parle du droit de veto finalement, c'est une discussion purement
théorique.
Troisième élément de Meech: le pouvoir de
dépenser. Dans Meech, je vous signale, M. le Président, que le
pouvoir de dépenser était, quant à nous, mal
balisé, d'une part, et que, d'autre part, il y avait là une
reconnaissance - et les juristes sont venus nous le dire -dans Meech, que le
gouvernement fédéral avait désormais le droit
constitutionnel de s'ingérer dans les compétences exclusives des
provinces.
Dans Beaudoin-Dobbie, il y a toujours cette
reconnaissance, mais, là, on pose des conditions encore plus
restrictives par rapport à son exercice, par rapport à l'exercice
possible du droit de retrait du Québec d'un programme qui serait
cofinancé dans un secteur de compétence exclusive des provinces.
Dans Meech, on disait: «L'objectif du programme québécois
pour obtenir la compensation devra être compatible avec les normes du
programme fédéral.» Dans la proposition de septembre du
gouvernement fédéral, on disait: «Les programmes
québécois, pour avoir droit à la compensation, devront
atteindre les objectifs du programme fédéral.» Dans
Beaudoin-Dobbie, là, on resserre encore davantage: «Les programmes
québécois devront réaliser les objectifs
fédéraux.» Alors, c'est un véritable carcan et, en
même temps, surtout, on se trouve à reconnaître
constitutionnellement le droit pour le gouvernement fédéral de
s'ingérer dans des domaines de compétence exclusive des provinces
et donc du Québec. Il y a là un recul majeur par rapport à
Meech. Surtout - ce qu'on ne retrouve pas dans Meech - c'est l'absence
également de cette disposition qui aurait permis une compensation
financière à une province qui refuserait le transfert de
compétences législatives provinciales vers le Parlement
fédéral. Dans Meech, le droit de veto était associé
à cette disposition-là, une compensation financière, non
seulement dans le domaine de la culture et de l'éducation, comme c'est
le cas présentement, mais dans tous les domaines. Eh bien ça, ce
n'est plus là, c'est absent. Donc, il y a là aussi un net
recul.
Quant à l'immigration, il y a dans Beau-doin-Dobbie l'absence de
la garantie conférée au Québec par Meech d'obtenir 25 % de
l'ensemble des immigrants reçus annuellement par le Canada, avec
possibilité de 5 % additionnels pour des raisons démographiques.
Ce n'est plus là, les 5 % sont disparus. Et, enfin, il y a les trois
juges du Québec à la Cour suprême. Là,
Beaudoin-Dobbie propose deux formules dont une seule assurerait vraiment la
participation du Québec à la nomination de trois juges à
la Cour suprême.
La conclusion est très nette et même, finalement, M. le
premier ministre du Québec, de façon à peine
voilée, l'admettait: le rapport Beaudoin-Dobbie, si on le mesure
à l'étalon de Meech, c'est moins. Et c'est nettement moins! Et
c'est moins que même les propositions de septembre, toujours par rapport
à Meech.
Ça me faisait sourire hier d'entendre l'ineffable Jean-Pierre
Blackburn, qu'un «morning man» de ma région appelle
«le capitaine Canada», dire à la télévision:
Écoutez, on a quand même pris les 28 propositions de septembre et
on les a améliorées. On les a bonifiées. Eh bien! Pour ce
qui est des dispositions qu'on retrouvait dans Meech, ce n'est pas vrai. C'est
faux. Il y a eu recul. Il y avait recul en septembre, il y a recul en
février. (10 h 20)
Et puis, maintenant, quant au partage des compétences. Ah!
là, vraiment c'est du joli! Là, je vous signale, M. le
Président, que le jugement que je porte, ce n'est pas en fonction de la
souveraineté, c'est en fonction de projets fédéralistes
dont, en particulier, le projet du rapport Allaire. Voilà un projet
fédéraliste de décentralisation très
accentuée de pouvoirs du fédéral vers le Québec.
Une liste, vous le savez, de 22 pouvoirs, de 22 compétences. Je le
répète, M. Parizeau le disait également, et l'image est
forte: rapport Allaire, 22; rapport Beaudoin-Dobbie, 0, pas un seul! Le rapport
Allaire réclamait une compétence exclusive du Québec dans
22 secteurs. Le rapport Beaudoin-Dobbie n'accorde aucun, aucun transfert de
compétence exclusive au Québec afin de préserver un
gouvernement central fort, ce que souhaite le Canada anglais. Il mise
plutôt sur des formules alambiquées, compliquées,
tortueuses, difficiles à cerner. Délégation de pouvoirs
législatifs, mais pour cinq ans. C'est temporaire et ça va exiger
l'accord par résolution des Parlements concernés; donc, du
Parlement fédéral et du Sénat. Imaginez, ça va
être joli! Ou encore des arrangements administratifs. Des arrangements
administratifs, ce n'est pas une voie très, très agréable.
D'ailleurs, le ministre lui-même, à Whistler, à l'autre
bout du Canada, est allé dire au Barreau canadien, et je le cite,
ça vaut la peine, je lui rafraîchis la mémoire en
même temps: «II nous apparaît nécessaire que le
renouvellement des partages des compétences soit de nature
constitutionnelle.» Voilà! «De simples arrangements
administratifs, dit-il, peuvent, dans certains domaines de compétence
partagée, être utiles, mais on sait que de telles ententes
demeurent à la merci de la législation fédérale.
Elles ne sont pas suffisantes. On ne rendrait service à aucun ordre de
gouvernement en privilégiant le recours systématique aux ententes
administratives.» Fin de la citation. Je citais le ministre responsable
du dossier constitutionnel du Québec.
Or, le rapport Beaudoin-Dobbie encourage, multiplie, recommande la
multiplication d'arrangements administratifs, puis les pouvoirs concurrents,
mais avec prépondérance fédérale. On est bien
gentil, mais il faut que le grand frère veille au grain constamment. Le
résultat, c'est le cafouillage et le désordre
institutionnalisé, une vraie tour de Babel. Déjà, le
régime fédéral, comme le signalait souvent M.
Lévesque, le président fondateur du parti, est une maison de fou.
Une chatte n'y retrouve pas ses petits. C'est déjà le cas. Mais
là, s! vous appliquez Beaudoin-Dobbie, ça va être encore
empiré. Les chevauchements, non seulement seront limités, ne
seront pas réduits, mais on va les multiplier et ça va devenir la
négociation permanente. Les gouvernements vont être en
négociation permanente. Il y a Léon Trotski, vous vous rappelez,
M. le Président, qui avait inventé le concept de la
révolution permanente; Beaudoin-
Dobbie a pondu le concept de la négociation permanente. Allons-y
gaiement!
En matière de culture, le rapport Beaudoin-Dobbie recommande une
compétence exclusive pour le Québec de légiférer en
matière de culture. Ça, c'est l'entourioupette par excellence, le
mensonge le plus flagrant. Là, c'est une menterie, ça, en plus.
On ment au Québec, on les trompe sciemment, parce qu'on dit, d'une part:
Vous aurez la compétence exclusive en matière de culture, mais,
en même temps, je vous signale que les grandes institutions culturelles
du gouvernement fédéral, Radio-Canada, Conseil des arts,
Téléfilm, Office national du film, CRTC, ça va demeurer de
juridiction fédérale, ces institutions vont continuer de faire
des dépenses au Québec sans le moindre contrôle de la part
du Québec. Je vous signale que c'est de l'ordre de plus de 500 000 000
$. Quand on sait que le budget du ministère des Affaires culturelles est
de 210 000 000 $, c'est presque deux fois et demie. Les dépenses
fédérales en matière de culture au Québec, c'est
presque deux fois et demie ce que le ministère des Affaires culturelles
dépense. Imaginez! En plus, on maintient le pouvoir
fédéral de légiférer en matière de droit
d'auteur et de radiodiffusion, on maintient la capacité d'Ottawa de
subventionner directement les artistes et les organismes culturels. Bref, on
consacre le statu quo en matière de culture et on a le culot,
l'effronterie de venir nous dire qu'on est prêt à
transférer la compétence exclusive au Québec en
matière de culture. Il faut le faire! Là, vraiment, c'est nous
prendre pour des caves. On prend les Québécois pour des caves de
prétendre ça, de s'imaginer qu'on va tomber dans le panneau, un
panneau ou un piège aussi gros.
Formation professionnelle: recul par rapport aux propositions de
septembre. Jean-Pierre Blackburn a oublié de les améliorer.
Recul. Il n'a pas eu le temps probablement. C'était trop dur, il les a
oubliées. Recul par rapport aux propositions de septembre. En septembre,
on conférait en exclusivité cette compétence aux
provinces. Mais, là, il va falloir encore négocier et c'est le
principe de la négociation permanente. Pour affirmer une
compétence accrue en matière de formation professionnelle,
Québec devra négocier avec Ottawa le montant de la compensation
financière, d'abord, et puis devra aussi respecter les normes
fédérales. Alors, Ottawa va également conserver son
pouvoir de légiférer en matière d'assurance-chômage.
Alors, l'exclusivité en matière de formation professionnelle, n'y
pensez plus. Ce n'est plus dans Beaudoin-Dobbie.
Et puis la réforme du Sénat, M. le Président,
dernier point. À la réforme du Sénat, c'est du joli. On
propose un Sénat élu plus équitable pour les provinces de
l'Ouest et pour les Maritimes. J'ai déjà dit et j'ai
déjà répété, avant même de
connaître ce qu'il y avait dans Beaudoin-Dobbie, que, de toute
façon, quel que soit le projet de réforme du Sénat qu'on
avancera ou qu'on mettra sur la table, le Québec sera perdant. C'est
inévitable, il va être perdant. Il va être perdant parce
qu'il aura moins de sénateurs, quel que soit le projet. Si c'est
l'égalité, évidemment... Mais, même en essayant
d'être plus équitable, c'est clair qu'on va avoir moins de
sénateurs. Donc, le poids politique du Québec sera
diminué, c'est clair, c'est inévitable, c'est ça qui
arrive dans le projet Beaudoin-Dobbie, et puis on va les élire aussi.
Ça, je vous le dis, M. le Président, ça va provoquer des
changements majeurs, parce qu'un sénateur élu par 200 000
électeurs au Québec, je vous le dis et je le dis au ministre, il
va vous regarder de haut, M. le ministre. Il va vous regarder de haut. Il va
même regarder le premier ministre de haut parce qu'il va se
considérer comme ayant une légitimité plus importante
encore que n'importe quel député dans cette Assemblée et
n'importe quel ministre de ce gouvernement.
Accroissement de la légitimité du Sénat en
élisant les sénateurs, donc, accroissement aussi de la
légitimité des institutions centrales. C'est inévitable.
La proposition de réforme du Sénat, c'est à rejeter, et
puis on ne peut pas la rejeter parce que ça passe à 7-50. 7
provinces représentant 50 % de la population peuvent faire passer ce
projet de réforme du Sénat, même si on est contre, parce
que le droit de veto sur les institutions fédérales - je vois le
ministre qui opine du bonnet - vous ne l'aurez pas à temps. La
réforme du Sénat va passer avant à 7-50. Vous ne l'avez
pas, le droit de veto. Meech, ça avait un avantage. Au moins, je suis
prêt à reconnaître que Meech avait un avantage en
matière de réforme du Sénat. C'est que le droit de veto
sur les institutions fédérales, dans Meech, il était
accordé au Québec avant qu'on passe à la réforme du
Sénat. Alors, là, le Québec pouvait l'exercer. Mais,
là, c'est le contraire. On inverse le processus. La réforme du
Sénat se fait, on ne peut rien y faire, c'est à 7-50. Puis,
après ça, on va nous donner... On ne nous donnera pas... On va
penser nous donner un droit de veto, mais, premièrement, on ne l'aura
pas parce que l'unanimité ne sera pas atteinte. Même si on
l'avait, il ne servirait plus à rien; il serait devenu
complètement inutile et futile.
M. le Président, je conclurai en disant que l'Assemblée
nationale doit indiquer, par cette motion très simple - vous avez
remarqué qu'elle est très simple, une courte phrase, pas de
fioritures - que le Québec rejette le paquet indigeste et la mixture
immangeable et inacceptable qu'est le rapport Beaudoin-Dobbie parce que c'est
incompatible - et, là, je prends mes étalons de mesure chez les
fédéralistes; je ne les prends pas chez les souverainistes - avec
la souveraineté, ça, c'est évident, ça tombe sous
le sens, mais c'est incompatible avec les revendications traditionnelles et
historiques du Québec, particulièrement en matière de
partage des
pouvoirs. C'est incompatible avec la position du Parti libéral du
Québec qui a adopté le rapport Allaire et c'est incompatible avec
les cinq conditions minimales, les demandes les plus modestes formulées
par le Québec, qu'on retrouve dans le défunt accord du lac
Meech.
Alors, le Québec, M. le Président, doit clairement
indiquer, à la veille d'une conférence qui regroupe les premiers
ministres des provinces, avec deux observateurs québécois, qui
seront peut-être remplacés bientôt par un ministre et un
premier ministre - il y a un danger, attention, c'est le doigt dans l'engrenage
- mais à la veille de la conférence des premiers ministres des
provinces et du fédéral, on doit indiquer qu'on ne
négociera pas, que le gouvernement du Québec ne négociera
pas sur la base du rapport Beaudoin-Dobbie. Le parti ministériel, le
Parti libéral, s'il veut vraiment, comme il le proclame et comme il le
claironne à tout bout de champ, protéger les
intérêts supérieurs du Québec, doit appuyer cette
motion, sans réserve, sinon il s'engage, à mon avis, à
cautionner une réforme constitutionnelle qui imposera aux
Québécois un fédéralisme dominateur. C'est un des
gros mots utilisés par le premier ministre dans ses remarques sur
Beaudoin-Dobbie. Dans sa bouche, c'est quasiment une grossièreté,
un «fédéralisme dominateur» au Québec.
Au moment où Marcel Masse, ministre fédéral,
considère que ce rapport est inacceptable, qu'il doit être mis de
côté - ce n'est pas rien - eh bien, je pense que
l'Assemblée nationale se doit, de façon quasiment unanime - je
sais qu'il y a quelques indépendants qui ne seront sûrement pas
d'accord - qu'au moins les deux grandes formations politiques tombent d'accord,
soient unanimes pour condamner, rejeter le rapport Beaudoin-Dobbie.
J'espère, M. le Président, qu'on ne tombera pas, tout
à l'heure, dans les chinoiseries d'amendements et de sous-amendements
à une motion très simple, très claire. On s'est
refusé, justement, à ajouter toutes sortes de fioritures et
d'ornementations à notre motion. On l'a mise très simple.
J'espère qu'on ne tombera pas dans des chinoiseries semblables et que le
message provenant de l'Assemblée nationale sera clair, limpide et non
équivoque. Merci, M. le Président. (10 h 30)
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vous remercie,
M. le député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de l'Opposition
officielle. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous
étudions la motion du député de Lac-Saint-Jean qui se lit
comme suit: «Que l'Assemblée nationale rejette le rapport du
comité Beaudoin-Dobbie déposé à la Chambre des
communes le 28 février 1992.»
Je suis prêt à reconnaître maintenant M. le ministre
de la Justice et ministre délégué aux
Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Je vous remercie, M. le Président.
J'ai eu l'occasion, hier, d'intervenir en cette Chambre et de répondre
aux questions du député de Lac-Saint-Jean sur le droit de veto.
Le député de Lac-Saint-Jean s'inquiétait qu'on pourrait
abandonner le droit de veto, et je lui ai répondu que pour le
gouvernement du Québec c'était une nécessité, un
absolu, pour reprendre les termes du premier ministre, que de pouvoir
récupérer ce droit de veto perdu en 1981. Et j'ai cité, M.
le Président, le rapport Beaudoin-Dobbie que je me permets de lire ici
en cette Chambre, à la page 90. Se référant donc au droit
de veto, on lit ceci: «Cette question devrait figurer parmi les
priorités absolues de la présente série de
négociations constitutionnelles, afin de trouver une procédure de
modification qui réponde aux besoins du Québec». m. le
président, c'est là un aspect positif du rapport beaudoin-dobbie
et pas le moindre, puisqu'on sait à quel point il est important pour le
québec de récupérer ce droit de veto, ce droit de
consentir un amendement constitutionnel qui pourrait affecter ses droits, ses
privilèges, ses pouvoirs, ses juridictions. et, m. le président,
dans le rapport beaudoin-dobbie, contrairement aux propositions
déposées l'automne dernier par le gouvernement
fédéral, nous avons cette position qui est claire, il n'y a pas
de dissidence, où on dit que ce droit de veto est uns
nécessité absolue.
M. le Président, c'est là un point positif de ce rapport
Beaudoin-Dobbie. Il y en a d'autres aussi, M. le Président, en
particulier en ce qui regarde toute la section économique. On se
souvient que dans les propositions du gouvernement fédéral de
l'automne dernier, on abordait l'union économique qu'on veut
développer au sein du Canada par un conseil de la
Fédération. On créait un nouvel organisme, on
créait un nouveau pouvoir déclaratoire pour le gouvernement
fédéral qui, à toutes fins pratiques, venait annuler les
compétences des provinces dans tous les secteurs économiques et
même au niveau social et à tous les niveaux culturels. C'est
disparu. On a quand même pris en considération les remarques que
nous avons faites à plusieurs reprises, que le premier ministre a faites
dans sa conférence de presse à la suite du dépôt, au
Parlement canadien, de ses propositions de l'automne dernier.
Il y a donc, M. le Président, des aspects positifs. Il y a aussi
le fait que nous sommes plus près, avec ce rapport Beaudoin-Dobbie, de
l'entente du lac Meech que nous ne l'étions avec les propositions de
l'automne dernier. Ce n'est pas Meech, absolument pas, mais nous sommes plus
près. Je viens de parler du droit de veto, M. le Président, c'est
un aspect important. Nous
pouvons aussi parier de l'immigration, qui, à toutes
fins pratiques, se rapproche de l'entente du lac Meech, cette garantie
démographique que nous devons avoir pour le Québec. La Cour
suprême où on garantit que le Québec pourrait avoir trois
juges et qu'il y aurait garantie constitutionnelle que ces trois juges, qui
existent présentement, mais sans garantie constitutionnelle... Comme
nous l'avions dans Meech, ces trois juges, par la Constitution, devraient venir
du Québec. Aussi, on peut penser au pouvoir de dépenser, ce
pouvoir de dépenser dont on discute depuis de nombreuses années,
qu'on veut encadrer. Nous avions réussi, dans Meech, à nous
entendre sur un texte pour encadrer ce pouvoir du gouvernement
fédéral de dépenser dans des sphères de juridiction
provinciale. Nous avons un texte qui n'est pas celui de Meech mais qui, quand
même, se rapproche plus de l'entente du lac Meech que ce texte que nous
avions à l'automne dernier. Évidemment, nous aimerions avoir un
libellé plus précis en ce qui regarde le pouvoir de
dépenser. On parie maintenant de l'obligation que les programmes
conjoints, où le fédéral et les provinces agissent en
même temps, que ces programmes puissent faire l'objet d'un droit de
retrait pour les provinces - et c'est un principe que nous mettrions dans la
Constitution - et qu'il y aurait compensation financière dans les cas
où la province aurait un programme semblable qui réaliserait les
objectifs du programme fédéral. C'est plus restreint que
l'entente du lac Meech qui pariait de mesures ou de programmes mis en place par
la province qui pourraient être compatibles avec les objectifs nationaux.
Donc, il y a un libellé, M. le Président, il y a une discussion
qui doit avoir lieu mais, quand même, c'est plus proche de Meech que les
propositions fédérales ne pouvaient l'être.
Et, société distincte. On a beaucoup
parlé, pendant toutes nos discussions concernant l'entente du lac Meech,
de ce concept de société distincte. Nous insistons parce que nous
voulons que le Québec puisse être reconnu comme un partenaire
à part entière dans la Fédération canadienne en
reconnaissant ce qu'il y a de spécifique de par sa culture, de par ses
institutions et reconnaissant aussi de plein droit son appartenance à
l'ensemble canadien. Ce critère de société distincte, on
le sait, M. le Président, a fait l'objet de démagogie pendant
toutes nos négociations à la suite de l'entente du lac Meech, ce
qui a mené en très grande partie à l'échec de
l'entente du lac Meech.
Certains nous disaient: II ne faut plus le
reconnaître dans la Constitution. Il faut que ce soit quelque chose qu'on
retrouve un peu comme un bibelot dans le préambule de la Constitution.
Dans les propositions de l'automne dernier, c'était bien
mentionné que c'était dans la Constitution qu'on devrait
retrouver la société distincte. Et dans ce que nous avons dans le
rapport Beaudoin-Dobbie, là encore, on retrouve la société
distincte. La responsabilité de l'Assemblée nationale, du
gouvernement du Québec de protéger et de promouvoir cette
société distincte, on le retrouve dans le texte constitutionnel
et dans une clause Canada qui pourrait s'appliquer à l'ensemble de la
Constitution et à l'intérieur de la charte. (10 h 40)
M. le Président, nous sommes à
compléter nos études juridiques sur la réelle
signification de ce concept de société distincte tel qu'on peut
le retrouver dans le rapport Beaudoin-Dobbie. Il y a des questions qu'on peut
se poser, plusieurs questions qu'on peut se poser. Entre autres, on ajoute un
concept de dualité avec des éléments nouveaux qui nous
amène à certaines interrogations. Il faut s'interroger aussi sur
la réelle signification qu'on pourrait donner à cette clause
Canada qui comprendrait non seulement la reconnaissance de cette
responsabilité du Québec d'agir pour la protection et la
promotion de la société distincte, mais comprendrait aussi
certaines autres caractéristiques canadiennes. Nous sommes donc à
compléter ces études, mais nous pouvons voir immédiatement
que ce n'est pas ce qu'il y avait dans l'entente du lac Meech, manifestement.
Si on nous disait, M. le Président, «dans Meech, il y avait un
beau principe, mais ce principe n'avait pas de substance, dans le sens qu'il
n'y avait pas de partage des compétences qui l'accompagnait» et si
on nous disait que «maintenant, dans le rapport Beaudoin-Dobbie,
peut-être que ce principe est moins évident dans tous ces aspects,
mais qu'il y a une substance qui est plus claire parce qu'on a un partage des
compétences qui vient définir, soutenir ce principe de
société distincte», à ce moment-là, si
c'était le cas, on pourrait, bien sûr, s'interroger et dire:
D'abord, regardons, on peut avoir un très beau principe, très
bien, mais ne pas avoir d'application pratique à ce principe, alors que,
d'un côté, on peut avoir un principe qui peut avoir plus de
questions qui se posent, mais qu'il y a une application dont nous sommes
assurés qu'elle sera plus significative.
M. le Président, nous devons conclure que ce n'est
pas le cas. Comme le premier ministre l'a mentionné lors de sa
conférence de presse, en ce qui regarde, d'une façon toute
particulière, le partage des compétences législatives, qui
est un morceau extrêmement important lorsqu'on parie de la réforme
d'une Constitution en matière de fédéralisme, ce partage
est nettement insuffisant; c'est même décevant. M. le
Président, lorsqu'on parie d'un fédéralisme
renouvelé, lorsqu'on parie de refaire le partage des compétences
législatives entre les deux niveaux de gouvernement, on parie du coeur
même de ce qu'est un État fédérai, un État
qui permet à tous ses membres de pouvoir travailler ensemble pour
atteindre un but commun, un mieux-être de tous les citoyens et citoyennes
qui vivent sur le territoire de la fédération et qui permet aussi
à chacune des
parties, à chacune des provinces d'exprimer ce qu'elle est, de
conserver cette autonomie qui lui est essentielle.
M. le Président, il y a une règle de base qui existe pour
faire ce partage des compétences législatives entre le
gouvernement central et les provinces. Cette règle, c'est de dire:
Lorsqu'un gouvernement est près d'un problème, lorsque c'est lui
qui a affaire, tous les jours, avec une situation qui lui est près parce
que c'est sa juridiction, on devrait lui donner une responsabilité
complète pour qu'il puisse travailler d'une façon efficace parce
que c'est l'objectif premier qu'on doit rechercher. Pour le mieux-être de
tous les citoyens, il faut rechercher l'efficacité et, par
conséquent, qu'on puisse en arriver à ce que ce soit l'ordre de
gouvernement qui a les moyens pour résoudre les problèmes qui ait
cette juridiction la plus complète possible avec le moins
d'interférence de l'autre ordre de gouvernement pour venir brouiller les
cartes, compliquer les choses, créer des dépenses d'argent, de
temps, d'énergie qui, finalement, nous amènent à des
dédoublements qu'on doit éviter.
M. le Président, tant en ce qui regarde les demandes
légitimes du Québec pour avoir ces compétences
législatives qui lui permettraient d'exprimer ce qu'il est, tant aussi
en ce qui regarde un partage de compétences législatives qui nous
permettrait d'éviter le dédoublement, qui nous permettrait
d'être efficaces, qui nous permettrait de travailler ensemble, tous les
partenaires fédéraux avec les provinces, avec le gouvernement
fédéral, travailler ensemble au mieux-être de l'ensemble
des Canadiens et des Canadiennes, on ne retrouve pas dans le rapport
Beaudoin-Dobbie ce partage des compétences législatives. À
toutes fins pratiques, M. le Président, nous avons dans ce rapport
quatre compétences législatives, qu'on peut qualifier de
nouvelles sur certains points, sur certains aspects, et qu'on sera prêt
à donner à la juridiction des provinces.
Tout d'abord, les pêches intérieures, qu'on puisse
permettre d'avoir la pêche à l'intérieur du territoire
d'une province, que ça relève de la compétence de la
province, mais avec une prépondérance fédérale. Ce
que ça veut dire, M. le Président, c'est que s'il y a un conflit
entre un règlement ou une loi provinciale et un règlement ou une
loi fédérale sur le même sujet, c'est la loi
fédérale qui l'emporte sur la loi provinciale, qui devient
inopérante. C'est ça que ça veut dire, donc, les
pêches intérieures.
On nous parte aussi de tout le secteur de la faillite personnelle, non
pas la faillite des entreprises, des corporations, mais les faillites
personnelles, et toujours avec une prépondérance
fédérale. En cas de conflit entre les deux législations,
c'est le fédéral qui - l'emporte sur la province. Deux aspects
nouveaux.
Et, M. le Président, un sujet qui est important pour le
Québec, mon collègue, le ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu l'a mentionné à plusieurs
reprises, il a réussi à faire un front commun de tous les
intervenants au Québec pour réclamer que la main-d'oeuvre, que la
formation de la main-d'?uvre soit de juridiction du Québec, qu'on
puisse former nos jeunes, qu'on puisse former nos travailleurs aux défis
économiques que nous avons à relever. M. le Président, ce
qu'on nous offre serait une compétence en matière de formation de
la main-d'oeuvre à la condition qu'on puisse faire une entente avec le
gouvernement fédéral respectant des normes au niveau
national.
Et, finalement, au niveau culturel, M. le Président, on nous dit:
Ah! là, vous avez un gros morceau, vous avez un gros morceau parce qu'on
vous donne l'exclusivité en matière culturelle; quand on parlera
de culture, on parlera maintenant d'une exclusivité provinciale. Il faut
y voir de plus près un peu, M. le Président, pour voir que ce
n'est pas tout à fait la situation. Il faut se rendre compte que ce
qu'on nous dit, c'est que toutes les grandes institutions et organismes au
niveau fédéral, que ce soit Radio-Canada, que ce soit l'Office
national du film, le Conseil des arts, enfin tous ces grands organismes qui ont
fait un travail, il faut le reconnaître, pour exprimer la culture
québécoise, qui l'ont fait d'une façon, je pourrais dire
même, extrêmement intéressante sous plusieurs aspects...
Mais on confirme que ces organismes seraient de juridiction
fédérale, demeureraient de juridiction fédérale. On
ne parle pas de la possibilité que, sur les conseils d'administration de
ces organismes, il y ait des représentants québécois, on
ignore complètement cet aspect. Et qui plus est, M. le Président,
on précise bien dans ce rapport Beaudoin-Dobbie que, oui, vous avez
l'exclusivité en matière culturelle, mais que le pouvoir de
dépenser du gouvernement fédéral demeurera intact. Donc,
le gouvernement fédéral pourra à tout moment, comme il le
fait présentement, venir dépenser dans tous les secteurs
reliés à l'aspect culturel. M. le Président, à
toutes fins pratiques, ce que ça signifie, c'est qu'on ne change rien
à la situation actuelle, absolument rien. Alors qu'on ne nous dise pas
qu'on nous donne l'exclusivité en matière culturelle; au
contraire, on confirme le statu quo. Qu'on parle de statu quo.
M. le Président, on ne parle pas de communications non plus. On
évoque brièvement l'aspect de la radiodiffusion quelque part dans
le rapport, sans trop insister, à la page 73, alors que mon
collègue des Communications a manifesté à plusieurs
reprises que le Québec a besoin de cet outil, et c'est une revendication
historique du Québec, comme en matière culturelle, ma
collègue, la ministre des Affaires culturelles...
Alors, M. le Président, au niveau du partage des
compétences législatives, c'est bien mince,
c'est peu de chose et ça confirme beaucoup plus le statu quo que
ça apporte des éléments nouveaux de compétence
exclusive. (10 h 50)
On nous parie aussi, M. le Président, de la possibilité de
confirmer ce qui est déjà une compétence exclusive pour le
Québec comme pour les autres provinces dans bien des secteurs
d'activité. On mentionne le tourisme, la foresterie, les mines, les
loisirs, le logement, les affaires municipales. On nous propose d'ajouter
à cette liste le développement économique régional,
la politique familiale, et même l'énergie. M. le Président,
ce qu'il faut bien comprendre, c'est que ces domaines de compétences
législatives sont déjà de la juridiction exclusive des
provinces. Ce qu'on nous offre, c'est la possibilité de confirmer cette
exclusivité par une entente qu'on ferait avec le gouvernement
fédéral pour, si je peux me permettre cette expression,
«encadrer son pouvoir de dépenser dans ces
secteurs-là». Lorsqu'on parie du pouvoir de dépenser, M. le
Président, il y a tous les programmes conjoints dont j'ai parié
tout à l'heure, et nous avons une disposition qui regarde ces programmes
conjoints. On l'avait dans Meech et, dans le rapport Beaudoin-Dobbie, on
revient sur quelque chose de semblable, j'en ai parié tout à
l'heure. Mais il s'agit maintenant de ce pouvoir de dépenser
utilisé par Ottawa dans un domaine sectoriel, ponctuel, que ce soit dans
le domaine de la culture dont je pariais tout à l'heure ou dans le
domaine du tourisme, de la foresterie, des mines, des loisirs, de tous ces
sujets, parce que le gouvernement fédéral peut agir dans toutes
les compétences exclusives du Québec comme de toutes les autres
provinces, par son pouvoir de dépenser.
On nous offre donc la possibilité de faire des ententes pour
limiter ou encadrer cette action du gouvernement fédéral dans ces
domaines. Ce n'est pas rejeté du revers de la main, M. le
Président, parce que ça peut éviter les
dédoublements et, si on peut en arriver à une entente à ce
sujet-là, ce serait une bonne chose. On a déjà un
précédent timide, mais on a un précédent, c'est
celui de toutes les ententes de développement économique
régional où nous avons ce que nous appelons les ententes de
l'EDER depuis 1984, et ces ententes de l'EDER, que nous sommes à
renégocier et à compléter dans une deuxième phase,
sont des ententes qui nous permettent d'agir avec plus de coordination, plus de
coopération entre les deux niveaux de gouvernement. Alors, c'est
là un exemple qu'il faudrait compléter, bonifier,
améliorer, mais si c'est la piste qu'on nous offre, ce n'est pas
à rejeter du revers de la main; ça permettrait d'éviter
les dédoublements, mais, attention, qu'on ne vienne pas nous dire qu'on
nous donne de nouveaux pouvoirs, de nouvelles juridictions, de nouvelles
compétences! On confirme ce qui existe déjà dans la
Constitution canadienne, mais on apporte un élément nouveau qui
peut être intéressant et significatif pour éviter des
dédoublements.
M. le Président, on nous parie de délégations
administratives. J'ai déjà eu l'occasion de le dire et je le
répète. Les délégations administratives, c'est la
possibilité qu'un ordre de gouvernement confie à l'autre ordre de
gouvernement l'administration d'une loi ou d'un règlement. Il ne lui
confie pas la responsabilité de décider; il lui donne la
possibilité simplement d'administrer des normes, des critères qui
sont décidés ailleurs, par un autre ordre de gouvernement.
Ça peut être utile; à certains égards, ça
peut être utile. On en a, on en applique; à plusieurs reprises, on
a fait des ententes administratives et on continue d'en faire, mais il faut
bien comprendre que ces ententes administratives ont l'existence qu'on veut
bien leur donner et elles peuvent être retirées quand l'ordre de
gouvernement qui a fait cette délégation administrative
décide de retirer cette délégation administrative. On ne
peut pas se référer simplement à des
délégations administratives pour établir un partage de
compétences législatives. C'est donc limité. Là
encore, il ne faut pas rejeter de la main cette possibilité; ça
peut aider, mais ce n'est pas la grande solution que nous recherchons.
Autre possibilité qu'on nous offre dans ce rapport, M. le
Président, c'est ce qu'on appelle la «délégation
législative», c'est-à-dire que contrairement à la
délégation administrative qui permet d'administrer des
critères et des normes qui sont déterminés par un autre
ordre de gouvernement, la délégation législative va
beaucoup plus loin: elle permet de déléguer la possibilité
d'établir ces normes, d'établir ces critères, de
légiférer, de faire des lois dans un domaine qui, au
départ, n'était pas de la responsabilité de cet ordre de
gouvernement.
C'est un principe qui n'est pas nouveau, M. le Président. Il
existait. Dans le livre beige du Parti libéral du Québec, on
pariait de cette possibilité; dans le rapport de la commission
Pepin-Robarts de 1979, où le sénateur Beaudoin était un
des commissaires avec Mme Solange Chaput-Rolland, on pariait aussi de cette
possibilité. Et, M. le Président, c'est une possibilité
qui peut être intéressante à bien des points de vue. Mais
la façon dont on se réfère dans ce rapport Beaudoin-Dobbie
à cette possibilité m'apparaît tout à fait
illusoire. On nous dit, en effet: II sera possible pour un ordre de
gouvernement de faire une entente pour qu'il y ait délégation
législative dans tous les champs de compétence appartenant
à cet ordre de gouvernement, que ce soit le gouvernement
fédéral qui décide que, dans un de ses champs de
compétence, c'est le Québec, ou c'est l'Ontario, ou c'est une
autre province, avec l'accord de cette province évidemment, à la
demande de cette province, qui, dorénavant, légiférera,
fera des
lois dans un domaine de compétence qui, selon la Constitution,
lui appartient. Donc, ça appartient au gouvernement
fédéral, mais, à la demande d'une province, il y a une
entente qui est négociée et, finalement, c'est cette province qui
légiférera contrairement à ce qui est prévu dans la
Constitution. C'est une possibilité, M. le Président.
Cependant, là, ce que nous avons dans ce rapport Beaudoin-Dobbie,
c'est qu'on nous dit: Ça va exister pour cinq ans; après cinq
ans, il faut renégocier; deuxièmement, on peut dénoncer,
révoquer une telle entente avec un délai de deux ans. Alors,
imaginons-nous qu'on a, par exemple, en matière de radiodiffusion ou
dans, un autre domaine, créé un organisme, qu'on dote de
fonctionnaires, qu'on a tout un appareil administratif pour administrer un
champ de compétence qu'on a donc négocié avec le
gouvernement fédéral et que, tout à coup, on dit: C'est
terminé; fini, nous, on retire cette compétence. Là
encore, M. le Président, c'est difficile. C'est difficile de voir
comment, en pratique, on pourra mettre ça en application. Et, M. le
Président, en plus, on veut que ces délégations
législatives se fassent à la suite d'une loi, à la suite
d'un acte législatif officiel de l'Assemblée législative
de la province et du Parlement canadien, en avertissant l'ensemble des
provinces pour qu'elles puissent venir donner leur point de vue? M. le
Président, ça m'apparaît nettement impraticable.
Donc, M. le Président, en conclusion, comme le premier ministre,
M. Bourassa, le disait dans sa conférence de presse, sur le plan du
partage des compétences législatives, ça paraît
nettement insuffisant. Nettement insuffisant et décevant.
En ce qui regarde la réforme du Sénat, M. le
Président, là encore, il y a des dissidences importantes. Il faut
tenir compte dans ce rapport des dissidences extrêmement importantes
qu'on peut y voir sur des aspects majeurs de ce rapport, entre autres la
réforme du Sénat, où vous avez une dissidence du Parti
libéral fédéral. On ne s'entend pas sur les pouvoirs qu'on
devrait donner au Sénat. Si on ne s'entend pas sur les pouvoirs, M. le
Président, c'est bien difficile de se prononcer sur le moyen qu'on devra
utiliser pour nommer ou élire les sénateurs et, dans les
dernières négociations de l'entente du lac Meech en juin 1990,
à Ottawa, on avait convenu, comme gouvernement québécois,
de dire: Bon, très bien, on pourrait penser à l'élection
de ces sénateurs dans la mesure où on s'entend sur les pouvoirs
qu'on veut leur donner. À quoi ça sert de créer une
deuxième Chambre qui viendrait faire exactement ce que la
première fait? Et le député de Lac-Saint-Jean, qui a
semblé tout à coup préoccupé par des
éléments de réforme du fédéralisme canadien,
soulignait à juste titre qu'il y aurait donc une
légitimité au niveau des sénateurs qu'on ne retrouverait
pas au niveau de la Chambre des communes. Il y a quelque chose qu'on doit quand
même convenir: M. le Président, il semble y avoir une
difficulté majeure quant à la réforme du Sénat. Et
ça signifie que si nous, comme Québécois, nous
considérons ce rapport comme décevant sur ces aspects que je
viens de mentionner, je suis convaincu que bien d'autres provinces, entre
autres celles qui tiennent à la réforme du Sénat, ne sont
certainement pas enthousiastes face à ce rapport. (11 heures)
M. le Président, d'une façon générale, ce
que nous pouvons dire, c'est que ce rapport a des aspects, oui, positifs, et
j'ai voulu les souligner. Ce rapport est un rapport de commission
parlementaire. Il y en a eu beaucoup de rapports de commission parlementaire
qui sont utiles, mais ce ne sont pas les offres qu'on doit nous faire. C'est
dans le processus qui est enclenché et qui respecte, et je me permets de
le souligner, M. le Président, un processus qui respecte
l'échéancier déterminé par la loi 150. Au plus tard
le 26 octobre, il doit y avoir un référendum au Québec et,
manifestement, le gouvernement fédéral respecte cet
échéancier déterminé par la loi 150.
M. le Président, on entend différents commentaires
partout, au Canada. Les gens nous disent: Ce ne sera pas facile. C'est vrai que
ce ne sera pas facile. On nous dit: Le morceau est gros. Oui, c'est vrai que le
morceau est gros, M. le Président, mais ce n'est pas nous qui avons
voulu cette «round» Canada. À la suite de l'échec de
l'entente du lac Meech, on nous a dit: C'était juste pour le
Québec. Maintenant, on va faire quelque chose qui va comprendre
l'ensemble de toutes les provinces canadiennes. Nous, on a dit: Écoutez,
très bien. Mais n'oubliez pas, essentiellement, pour nous, on doit
retrouver dans ces offres la substance que nous avions dans Meech plus ce
partage des compétences législatives que nous devons revoir d'une
façon substantielle.
M. le Président, on semble oublier que, si nous en sommes dans
cette situation pour trouver cette réforme du fédéralisme
canadien, ça vient tout d'abord du fait qu'en 1981-1982, il y a eu cette
injustice faite au Québec. Tout à l'heure, M. le
Président, j'entendais le député de Lac-Saint-Jean dire:
Meech avait un avantage. Il a réparé l'erreur de 1981 lorsque
nous avons perdu le droit de veto. M. le Président, je crois qu'il avait
parfaitement raison.
M. le Président, nous avons encore à travailler, mais il
demeure que nous sommes toujours dans un processus de discussion qui est en
cours. Le Québec va continuer d'agir comme il agit, dans les meilleurs
intérêts du Québec, en fonction de cette histoire qui nous
guide dans ces revendications légitimes. C'est pourquoi, M. le
Président, je présenterais une motion d'amendement à la
motion de l'Opposition officielle.
Motion d'amendement
M. le Président, cette motion serait la suivante: Que la motion
en discussion soit amendée: 1° en remplaçant, dans la
première ligne, le mot «rejette» par le mot
«désapprouve»; 2° en ajoutant, dans la deuxième
ligne, après les mots «Beaudoin-Dobble», les mots
«institué aux fins de répondre aux revendications
légitimes du Québec et».
La motion, telle qu'amendée, se lirait ainsi, M. le
Président: «Que l'Assemblée nationale désapprouve le
rapport du comité Beaudoin-Oobbie institué aux fins de
répondre aux revendications légitimes du Québec et
déposé à la Chambre des communes le 28 février
1992.»
Voilà, M. le Président, la motion d'amendement que je
dépose.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vais prendre
cette motion d'amendement. Est-ce qu'on pourrait en faire des photocopies pour
remettre aux membres de cette Assemblée? Sur la recevabilité de
l'amendement proposé par M. le ministre, je suis prêt à
entendre un intervenant de chaque côté.
Débat sur la recevabilité M. Michel
Pagé
M. Pagé: Très brièvement. Vous savez, M. le
Président, c'est toujours avec une extrême prudence qu'il faut se
référer ou formuler une proposition d'amendement à une
motion qui est inscrite et dont le débat est initié. Très
rapidement, en me référant au règlement de notre
Assemblée nationale qui régit nos travaux, on se doit de
respecter l'article 197 du règlement. C'est bon, je crois, de se le
rappeler. L'article 197 du règlement de l'Assemblée nationale
indique ceci: «Les amendements doivent concerner le même sujet que
la motion et ne peuvent aller à rencontre de son principe. Ils ne visent
qu'à retrancher, à ajouter ou à remplacer des mots.»
Essentiellement, ce que le règlement de l'Assemblée nationale
prévoit, et je crois que c'est bien ancré dans notre
réglementation, c'est bien ancré aussi dans la coutume, dans la
jurisprudence qui s'est dégagée au cours des ans. C'est qu'un
amendement apporté à une motion qui est débattue à
l'Assemblée ne doit pas viser à altérer l'essence
même de cette motion.
D'ailleurs, la doctrine indique que le but d'un amendement peut
être d'apporter un tel changement dans une question, qu'elle soit
acceptée par ceux qui, sans ce changement, devraient voter contre.
D'ailleurs, si on se réfère, M. le Président, aux
décisions, à la jurisprudence, on constate que la jurisprudence a
toujours décidé dans le sens exprimé par la doctrine.
Notre recueil de décisions en est rempli. D'ailleurs, je vais vous
donner quelques citations, ici, d'exemples. Trois autres décisions se
sont inscrites dans ce courant qui est majoritaire dans l'ensemble des
institutions du parlementarisme britannique.
Le 22 mars 1990, une décision de vous-même, M. le
Président - je suis heureux de m'y référer - «peut
avoir pour effet d'apporter des changements même importants qui
permettent un débat plus large ou, encore, qui permettent à un
plus grand nombre d'y adhérer.» C'est donc dire que vous avez
accepté vous-même, le 22 mars 1990, un projet d'amendement qui
visait à faire en sorte que, une fois cet amendement reçu, il
puisse rallier davantage de parlementaires autour de la motion à
être adoptée par la Chambre.
Le 4 avril 1990, M. le vice-président, M. Cannon, au Journal
des débats, pages 1597 et 1598: «En résumé,
pourvu que l'amendement touche à la même question, on peut
apporter, à cette question, toutes les retouches.»
Le 7 novembre 1990, décision de M. le vice-président, M.
Lefebvre, page 4919 du Journal des débats: «Alors,
l'amendement vise à rallier un plus grand nombre de parlementaires
à la motion principale. L'amendement proposé n'écarte pas
la motion principale.» Et ça, c'est bien important qu'on ne vienne
pas écarter par un amendement ce qui fait l'objet du principal de la
motion déposée. Je ne crois pas ici, dans les circonstances, que
l'Opposition puisse soulever cette question-là.
Décision de M. le vice-président Lefebvre, le 27 novembre
1991: «Amender, c'est modifier, c'est rendre plus acceptable une
proposition sans toutefois altérer le principe ou en changer le sens et
la nature.»
Je pourrais aussi me référer à la décision
du 26 octobre 1977 de M. Jean-Guy Cardinal, aussi inscrite au Journal des
débats de l'époque. La décision: «...le but d'un
amendement peut être d'apporter un tel changement dans une question
qu'elle soit acceptée par ceux qui, sans ce changement, devraient [ou
pourraient] voter contre.»
Enfin, je voudrais vous citer, M. le Président, la
décision du 2 mars 1982, aux pages 2154 et 2158, alors que M. le
député de Laviolette, M. Jean-Pierre Jolivet, agissait comme
vice-président de la Chambre. Est-ce que la motion d'amendement
était recevable? «Cette motion d'amendement est recevable, car
elle n'écarte pas la question principale et ne fait que modifier la
motion de fond pour permettre un débat plus large, tout en demeurant
dans le sujet.»
Or, M. le Président, l'amendement déposé par le
ministre de la Justice et responsable des Affaires intergouvernementales
canadiennes, le député de Jean-Talon, n'altère donc pas le
principal de la motion déposée par le député de
Lac-Saint-Jean.
Je me permettrai d'imiter peut-être - ça ne m'arrive pas
souvent, que Dieu m'en garde,
parfois - d'imiter le député de Laviolette et de me servir
du dictionnaire, ce matin, pour donner la définition du mot
«désapprouver». On sait que la motion, le texte original se
référait à un rejet, rejeter.
«Désapprouver», c'est juger d'une manière
défavorable, trouver mauvais, condamner, critiquer, protester, ce qui
veut dire... Je suis persuadé que le député, mon honorable
collègue, le leader adjoint de l'Opposition va y souscrire. D'ailleurs,
le terme «rejeter», on peut se référer à sa
définition. C'est renvoyer, c'est relancer, c'est abandonner. Alors, M.
le Président, pour tous ces motifs, je plaide et je soutiens que
l'amendement est recevable, et nous sommes prêts à poursuivre le
débat. Merci. (11 h 10)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur la
recevabilité, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et
député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président. D'une façon un
peu exceptionnelle, ça risque d'être plus court de ce
côté-ci que du côté ministériel parce que,
effectivement, nous croyons, selon notre évaluation rapide et sommaire,
qu'il s'agit là d'un amendement parfaitement recevable. Remplacer le mot
«rejette» par «désapprouve», dans les
circonstances, ne dénature pas du tout l'esprit même, mais il me
semble que ce qui doit vous guider, c'est plus la tradition parlementaire et,
dans le présent cas, c'est important, je pense, de ne pas la modifier.
C'est à dessein qu'on a présenté une motion très
succincte, mais très claire, très explicite. Je suis
complètement d'accord que l'expression «désapprouve»
en remplacement de l'expression «rejette» ne détruit pas
l'esprit même de la proposition.
Quant à l'autre partie, je n'ai pas de réserve majeure.
Cependant, ça ne touche pas le fond de la proposition comme telle. Mais
d'alléguer aujourd'hui qu'il s'agit là d'une commission qui a
été instituée aux fins de répondre aux aspirations
les plus légitimes et les plus fondamentales du Québec, c'est un
peu fort sur le plan de la connotation historique. Ce n'est pas ça,
c'est parce que le 24, on a dit: «Les propositions n'ont pas d'allure et
recommencez le travail.» C'est bien plus parce que le gouvernement
fédéral a décidé d'aller un peu plus loin - ce qui
n'est pas le cas aujourd'hui dans la résultante de l'exercice - mais
c'est mineur, en ce qui me concerne, par rapport à la proposition. Donc,
peu importent les motifs pour lesquels on a eu à souffrir la commission
Beaudoin-Dobbie, il n'en demeure pas moins que, sur le fond même, on est
d'accord et on pense que l'amendement est recevable parce qu'on est
complètement d'accord pour désapprouver.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Après vous avoir
écoutés de part et d'autre, la prési- dence déclare
recevable cet amendement du ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales canadiennes.
Je reconnais sur la motion et sur l'amendement M. le
député de Westmount.
M. Richard B. Hoiden
M. Holden: Merci, M. le Président. Je suis probablement le
seul député de la Chambre qui soit d'accord avec le premier
ministre Mulroney quand il a dit que c'est les offres les plus
généreuses que le Québec n'a jamais reçues depuis
la Confédération. Je peux dire que je désapprouve la
désapprobation des libéraux et le rejet de l'Opposition
officielle, mais je trouve que de demander le rejet, c'est plus honnête
que de demander quelque chose de moins que le rejet. Soit qu'on le rejette ou
qu'on l'accepte, et on négocie à partir du rapport
Beaudoin-Dobbie. Si le gouvernement n'est pas prêt à
négocier à partir du rapport Beaudoin-Dobbie, qu'on rejette le
rapport Beaudoin-Dobbie et qu'on s'en aille tout de suite au
référendum. Qu'on ne gaspille pas quatre, cinq, six mois
d'incertitude qu'on a actuellement.
L'amendement que vient de proposer le gouvernement, je le cite:
«Afin de répondre aux revendications légitimes du
Québec...». Ce n'est pas du tout le but du rapport
Beaudoin-Dobbie, tout le monde sait que c'était ia ronde Canada et que
la commission Beaudoin-Dobbie a travaillé dans l'optique
d'arriver à une solution pan-canadienne. Qu'on arrête de parler de
«Meech plus» ou de «Meech minus» ou même de
«Meech différent».
Je prétends, M. le Président, que le travail de la
commission Beaudoin-Dobbie constitue un progrès remarquable dans la
situation pancana-dienne, que le monde dans le reste du Canada a
commencé à beaucoup mieux comprendre la position du Québec
et que le Québec a vu que le reste du Canada essaie fortement de
comprendre ce qui se passe au Québec.
C'est sûr que l'Opposition officielle va condamner tout ce que le
gouvernement fédéral essaie de faire dans le sens
d'améliorer la Confédération canadienne, mais ça me
surprend que le gouvernement du Québec ne commence pas au moins à
considérer les négociations à partir du rapport
Beaudoin-Dobbie avec une attitude plus positive, parce que, dans le fond,
l'élément de Meech est déjà dans le rapport
Beaudoin-Dobbie. La définition de la société distincte
donnée dans le rapport Beaudoin-Dobbie n'est pas limitative. On dit
«culture, Code civil», on dit «notamment» et on donne
les éléments qui sont à la base de la
société distincte. Mais quand on argumente en droit... On a des
exemples que, notamment, il y a des éléments de base dans la
société distincte. Ça ne limite pas un argument sur
n'importe quel autre aspect de la société distincte à part
la culture, la langue et le Code
civil. Alors, la société distincte est là comme
c'était dans Meech et comme c'était dans toutes les
réclamations du Québec auparavant. L'immigration est là
aussi. Les 5 %, on ne les mentionne pas, mais, dans le fond, c'est le
même système qui existe depuis l'accord Cullen-Cou-ture. Alors,
ça ne change pas grand-chose, mais c'est ce qu'on a
négocié avec Meech et le veto est là, comme le signalait
le ministre tout à l'heure. La Cour suprême est là. Les
limites au pouvoir de dépenser, c'est mitigé un peu mais,
essentiellement, c'est la même chose que Meech, et on a ajouté la
culture.
Le député de Lac-Saint-Jean dit qu'on ne donne rien quant
à la culture. La communauté culturelle est venue ici, devant la
commission, il y a quelques mois, et c'était loin d'être certain
qu'ils voulaient que le fédéral laisse tomber la culture dans la
province de Québec. On a accepté de part et d'autre que l'apport
fédéral à la culture québécoise est loin
d'être proportionnel à la population du Québec; c'est
presque le double qui est dépensé au Québec, quant
à la population du Québec, par rapport au reste du Canada. Le
pouvoir de dépenser dans le domaine culturel, c'est loin d'être
unanime parmi ceux qui sont le plus près de la culture
québécoise, dans le sens des affaires culturelles.
On a ajouté le mariage et le divorce. C'a toujours
été dans le Code civil mais, là, ça va devenir un
pouvoir exclusif. Il y a des éléments très positifs dans
le rapport Beaudoin-Dobbie et c'est sûr que l'Opposition officielle va
les condamner. Et ce qui nous surprend, c'est que le gouvernement commence les
négociations par condamner. Moi, je n'accepte pas que l'amendement
où on désapprouve quelque chose, c'est moins grave que de rejeter
quelque chose. C'est un synonyme l'un de l'autre. Ah oui, ah oui! Que le
ministre de l'Éducation nous sorte son «Petit Robert» pour
prouver qu'il y a une différence. Aux yeux d'un profane comme moi, il
n'y a pas de différence du tout. Désapprouver ou rejeter, c'est
la même chose.
Je trouve que c'est très mal partir les discussions avec le reste
du Canada que de commencer à désapprouver ce qui va être
à la base de toute offre qui va venir du fédéral, que ce
soit au mois d'avril ou au mois de mai. Alors, je trouve que l'Opposition
officielle est peut-être plus honnête. Si on n'est pas prêt
à négocier à partir de Beaudoin-Dobbie, laissons tomber
tout le jeu des négociations. Allons tout de suite à un
référendum. Faisons décider le peuple
québécois: Est-ce qu'on veut avoir l'indépendance ou
est-ce qu'on va négocier avec le fédéral? Arrêtons
de jouer le jeu. Le gouvernement ne fait que jouer le jeu de l'Opposition
officielle quand il change la motion pour dire: Ah, oui, on ne veut pas
rejeter, mais on veut désapprouver.
Moi, j'approuve Beaudoin-Dobbie et j'appuie le gouvernement
fédéral. Je suis peut-être le seul. Même mes
collègues indépendants ne sont pas sûrs en ce qui concerne
Beaudoin-Dobbie. Moi, je dis que peut-être que les offres
déjà faites par le fédéral n'ont pas
été très généreuses mais, celle-ci, si on
peut considérer Beaudoin-Dobbie comme une offre, c'est une offre, du
point de vue du reste du Canada, très généreuse envers le
Québec. Si on peut bonifier ça avec des négociations, tant
mieux. Moi, en fédéraliste que je suis, j'approuve la commission
Beaudoin-Dobbie et, en tant que fédéraliste, je voterai contre et
la désapprobation et le rejet du rapport Beaudoin-Dobbie. Et je vous
remercie, M. le Président. (11 h 20)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Westmount. Je reconnais maintenant M. le chef de
l'Opposition officielle sur l'amendement et sur la motion principale.
Reprise du débat sur la motion amendée
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, dans les jours qui ont
précédé la présentation du rapport Beaudoin-Dobbie,
j'avais été assez intrigué par ce qu'un des vieux routiers
des négociations fédérales-provinciales, M. André
Ouellet, député libéral à Ottawa, disait et
répétait à la télévision: «Ce n'est
pas que nous sommes contre, disait-il, certains des aspects importants de
Beaudoin-Dobbie, mais nous ne sommes pas d'accord avec l'approche.»
C'était intrigant parce qu'on ne comprenait pas très bien ce
qu'il voulait dire. Le rapport Beaudoin-Dobbie est sorti; je pense que j'ai
mieux compris. C'est d'ailleurs là-dessus que je veux parler, ce matin.
C'est là-dessus que je vais parler.
Le commentaire du premier ministre au sujet de Beaudoin-Dobbie, disant
que c'est, à bien des égards, sur le plan de la
répartition des pouvoirs, l'expression d'une sorte de relent de
fédéralisme dominateur, ce n'était pas
nécessairement évident, la signification de ce qu'il
énonçait à ce moment. Pourtant, pour quelqu'un qui, lui
aussi, a été impliqué dans les négociations
fédérales-provinciales depuis si longtemps, oui, ça se
comprenait.
Ce que M. Marcel Masse, un autre vieux routier des négociations
fédérales-provinciales, le ministre de la Défense
nationale, nous disait, hier, prenait aussi le même genre de
signification en disant: «Ça fait 30 ans que le Québec
cherche les pouvoirs législatifs pour se développer,
s'épanouir comme nation, or, Beaudoin-Dobbie passe complètement
à côté.» À certains égards, dans son
intervention, ce que le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes
nous disait ce matin, il y a quelques minutes, rejoint cette question.
Beaudoin-Dobbie, M. le Président, est un document original: original par
rapport à tout ce qui, au Québec, est réclamé par
toute espèce de gouvernement depuis 30 ans; original
par rapport à la façon dont les Québécois
voient les choses depuis fort longtemps.
En fait, le débat, depuis M. Duplessis, au fond, porte
constamment sur la nature des pouvoirs législatifs et constitutionnels
que le Québec doit avoir. Ça a commencé avec un M.
Duplessis qui nous disait: «Rendez-nous notre butin.» De quoi
parlait-il? Il voulait, au fond, que le Québec puisse contrôler
aussi bien ses champs de dépenses, ses programmes de dépenses que
ses impôts.
Lorsque M. Jean Lesage, premier ministre du Québec en cette
Chambre, nous annonce - il y a longtemps, maintenant, en fait 28 ans - que le
Québec se retire de 29 programmes conjoints
fédéraux-provinciaux et va exiger - et finalement obtiendra - des
points d'impôt et des transferts financiers en compensation des actions
qu'Ottawa ne mènera plus au Québec, de quoi paiie-t-il? Il parle
du partage des pouvoirs; il parle des pouvoirs que le Québec doit avoir
pour se développer correctement.
Lorsque M. Daniel Johnson, en cette Chambre - le père, le premier
ministre - disait que le Québec voulait récupérer 100 %
des trois grands impôts directs, de quoi parlait-il? De la
récupération, déjà, de toute une série de
programmes de dépenses dans le domaine de la main-d'oeuvre, de
l'assurance-chômage, etc.
Meech ne touchait pas à ça. Les propositions du lac Meech
étaient destinées, chez ceux qui les ont proposées,
à limiter le pouvoir de dépenser du gouvernement
fédéral, mais, sur le plan des partages formels, il n'y avait
rien dans l'accord du lac Meech spécifiquement à ce sujet. Mais,
peu de temps après, on revenait, au Parti libéral du
Québec, à cette question de la répartition des pouvoirs.
Au fond, la tradition se maintenait. Le rapport Allaire demandait
l'exclusivité de 22 champs. Certains, sans doute, trouvaient, parmi les
fédéralistes, que c'était trop; d'autres trouvaient que
c'était très bien. Le rapport Allaire revenait, au fond, à
ce qu'il y a probablement de plus traditionnel dans les demandes du
Québec quant aux champs de compétence, quant aux domaines de
législation.
Le 24 septembre, le gouvernement fédéral fait un ensemble
de propositions. On a maintenant l'habitude de considérer que puisque
ces propositions ont été, à toutes fins pratiques,
rejetées par le Québec, c'était une sorte d'aberration
passagère en attendant d'autres propositions fédérales.
Mais enfin, entre nous, quand ça a été
présenté le 24 septembre, ce n'était pas
considéré par Ottawa comme des propositions passagères ou
comme une sorte de tentative à l'aveuglette; ça avait
été trop longuement préparé, c'était trop
détaillé. Bon, que le gouvernement fédéral ait
considéré que ses propositions aient échoué
à ce moment-là et qu'il ait créé un comité
pour les examiner et, donc, qu'il nous parle de propositions à venir,
sans doute. Mais le 24 septembre, un ensemble de propositions sérieuses
sont mises sur la table et, elles aussi, ces propositions, cherchent à
dégager des champs de compétence qui pourraient être
passés aux provinces en général et au Québec en
particulier, même si plusieurs de ces champs de compétence, comme
le disait le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes tout
à l'heure, étaient des domaines qui étaient reconnus
depuis longtemps comme des champs de compétence provinciale. Je pense
aux Affaires municipales, par exemple. Mais l'approche était la
même.
Or, avec Beaudoin-Dobbie, ça change; ça change
profondément. Ce que Beaudoin-Dobbie nous propose, au fond, c'est un
mode de discussion entre le gouvernement fédéral et une ou
plusieurs provinces pour définir plus tard ce que pourrait être un
partage ou bien de compétences législatives ou bien
d'arrangements, de répartition des dépenses par les deux ordres
de gouvernement. C'est un mode d'emploi que Beaudoin-Dobbie
présente.
Je vais essayer de l'expliquer tel que, moi aussi, qu'est-ce que vous
voulez, vieux routier des négociations
fédérales-provinciales, je le vois. D'abord, on introduit - bien
qu'il y ait eu des traces dans le passé, comme le disait le ministre
tout à l'heure - le principe de la délégation des
pouvoirs. Un ordre de gouvernement pourrait déléguer à un
autre ordre de gouvernement, un gouvernement pourrait déléguer
à l'autre le pouvoir d'intervenir de façon législative
dans certains champs. Cette délégation - comprenons-nous bien -
doit donner lieu à un accord. Il faut, pour déléguer, que
ça se fasse au moins à deux. Il faut qu'Ottawa dise: «Voici
ce que je serais prêt à déléguer.» Et il
faudrait qu'une province, par exemple, le Québec, dise: «Voici ce
que j'accepterais qu'on me délègue ou ce que je demande qu'on me
délègue.» (11 h 30) ce n'est pas parce qu'on crée le
principe de la délégation que l'entente est faite. on pourrait
d'ailleurs fort bien imaginer à cet égard que ça change
d'un gouvernement fédéral à l'autre, parce que le
système de délégation qui est prévu dans
beaudoin-dobbie est une délégation pour cinq ans et,
automatiquement, devrait être renouvelée ou modifiée au
bout de cinq ans. les gouvernements changent, m. le président. non
seulement les gouvernements changent mais les gouvernements ont des
idées fort différentes à cet égard. il est clair,
par exemple, que m. trudeau et m. mulroney n'ont pas eu exactement le
même point de vue sur ce plan; qu'entre - je ne sais pas, moi - michael
pearson et pierre trudeau, il y avait des différences majeures. on ne
vit pas dans un système de parti unique ici et garanti de rester en
place jusqu'à la fin des temps. les points de vue sont très
opposés quant à la centralisation ou à la
décentralisation. alors, la délégation devient une sorte
de délégation à clapet. pendant quelques années on
délègue un peu, pendant quelques années on
rattrape toutes les délégations. Plus que ça, on
prévoit même, dans Beaudoin-Dobbie, qu'unilatéralement
l'une des deux parties dans une délégation peut dénoncer
la délégation. Donc, ça peut non seulement changer tous
les cinq ans, ça peut changer tous les deux ans.
On prévoit aussi comme mode d'emploi des arrangements, des
accords entre un gouvernement et une province. Des accords, dont les
échéances, le contenu, les clauses d'abolition seraient
déterminés par l'arrangement ou l'accord lui-même dedans.
Là, dans le cas des accords, les discussions porteraient même sur
la durée de l'accord et sur la façon de l'amender et ça
pourrait être différent d'un accord à l'autre. Et alors, ce
mode d'emploi ayant été exposé par Beaudoin-Dobbie,
là, on donne des exemples de ce qui pourrait se poursuivre.
Je ne reviendrai pas sur ce que le ministre lui-même disait tout
à l'heure au sujet des pêcheries et des faillites personnelles.
Vraiment, dans le cas des pêcheries, ouvrir une compétence du
Québec dans le cas des pêcheries intérieures mais avec
prépondérance du gouvernement ou de la législation
fédérale, M. le Président, deux gouvernements pour
s'occuper de la truite, vraiment! vraiment! Et où on se soucie de savoir
à l'égard de la truite quel est le gouvernement
prépondérant... Bon! Des propositions qui en sont rendues
à des histoires pareilles, n'est-ce pas, reflètent un état
d'esprit navrant. Si on est prêts à se chicaner sur la juridiction
de la truite, imaginez les chicanes sur le reste des
événements!
Je ne reviendrai pas sur la question de la culture. Je pense que c'est
tout à fait clair. Il y a eu une sorte de supercherie dans
Beaudoin-Dobbie de dire: Pouvoir exclusif, quand on traduit en texte juridique
le rapport, d'autre part, pour se rendre compte, à l'intérieur du
rapport, que le gouvernement fédéral continue de faire tout ce
qu'il fait à l'heure actuelle et comme il l'entend.
Ce qu'il y a de remarquable dans ce rapport Beaudoin-Dobbie, c'est que
même les six champs que, dans les propositions du 24 septembre, on
reconnaissait comme des champs de compétence exclusive du Québec
ou des provinces - je reviens aux affaires municipales, aux mines, aux
forêts, etc. - ces six champs que le 24 septembre le gouvernement
fédéral reconnaissait comme étant de juridiction
exclusive, qu'est-ce qu'on en fait dans Beaudoin-Dobbie, de ces six champs? On
en fait l'objet de délégation ou d'accord. On revient même
sur l'exclusivité que le gouvernement fédéral semblait
prêt à proposer le 24 septembre dernier. Et on donne d'autres
exemples: oui, la politique familiale, ça pourrait être l'objet du
mode d'emploi dont je viens de parler tout à l'heure; oui, le
développement régional pourrait être l'objet d'arrangements
ou de délégation de pouvoirs. Mais voit-on où ça
amènerait le Québec? Voit-on ce que ça veut dire
fondamentalement? La poursuite jusqu'à la fin des temps des discussions
constitutionnelles, des batailles entre les gouvernements pour savoir qui
contrôle quoi, et des batailles qui n'arrêteront jamais. On ne peut
pas faire comme si les 30 dernières années n'existaient pas. On
en a, pour utiliser une expression à la mode ces jours-ci, tout le monde
en a le ras-le-bol de ces discussions qui n'en finissent plus. Là, on
nous promet, comme le disait le député de Lac-Saint-Jean tout
à l'heure, la crise constitutionnelle permanente.
Il y a plus sérieux aussi encore que ça, M. le
Président. C'est que ce système que nous avons bien connu depuis
30 ans a entraîné des chevauchements, des doubles emplois, des
oppositions de politiques que bien des gens sur le terrain ont payés, un
gaspillage de ressources publiques considérable. C'est toujours un peu
difficile de faire le calcul de ces gaspillages en termes d'argent; d'avoir,
comme ça, deux gouvernements qui se concurrencent l'un et l'autre,
s'opposent l'un et l'autre. Mais, enfin, tout le monde reconnaît
qu'à l'heure actuelle c'est certainement, pour le Québec
seulement, un gaspillage de ressources publiques de, quoi, quelques milliards
de dollars dans deux champs seulement. Deux champs d'activité.
Bélanger-Campeau arrivait à au-delà de 500 000 000 $ de
dépenses additionnelles dues aux chevauchements, juste pour deux champs!
Il y en a pour quelques milliards.
Qu'est-ce qu'on nous promet avec l'approche Beaudoin-Dobbie? On nous
promet que ça va continuer comme ça, qu'il va y en avoir encore
davantage et qu'on va se retrouver dans un nombre croissant de champs avec des
politiques incompatibles les unes avec les autres, avec du gaspillage, avec des
chevauchements, avec des politiques incohérentes, avec un gouvernement
qui propose une chose, un gouvernement qui propose le contraire et des
années de discussions pendant que les deux s'installent face à
face, comme des chiens de faïence, dépensent et se gênent.
C'est dans ce sens-là que Beaudoin-Dobbie est un rapport très
original. Personne, jusqu'à maintenant, n'avait été aussi
loin à souhaiter le désordre, l'incohérence et les
possibilités de gaspillage de fonds publics à une époque
où les gens en ont quand même assez du fardeau fiscal. Ils
trouvent qu'ils sont déjà beaucoup trop taxés. Et,
là, on leur promet...
Il faut comprendre, concrètement parlant, ce que ça veut
dire, un système comme celui-là. C'est non seulement la
consolidation du fardeau fiscal actuel, mais c'est de dire... Et chaque fois
que les gouvernements vont s'entraîner encore dans des gaspillages et des
rivalités qui coûtent cher aux gens, qui va payer au bout du
compte? C'est dans ce sens que le rapport Beaudoin-Dobbie, M. le
Président, doit être rejeté, ou que l'Assemblée
nationale doit le désapprouver, pour reprendre l'amendement qui a
été proposé tout à
l'heure et auquel je souscris. Mais il faut que ce soit clair.
Je pense que cette Assemblée nationale, qui a été
le lieu de tant de débats, justement, sur ces questions de partage de
pouvoirs, depuis si longtemps, qu'au moment où on nous propose de
continuer ça, d'aller plus loin encore dans l'incohérence, le
désordre et le gaspillage, l'Assemblée nationale dise: Non, non,
non! Enfin, écoutez, nous avons collectivement une expérience
suffisante d'une situation pareille pour ne pas en vouloir encore davantage. Je
crois que c'est ça, surtout, que l'Assemblée nationale doit
exprimer clairement: Pas davantage encore de ce désordre que, des deux
côtés de la Chambre, et quels que soient les partis politiques au
pouvoir au Québec, on dénonce depuis si longtemps.
Bien sûr, M. le Président, on dira: On ne peut pas attendre
autre chose d'un souverainiste. Je comprends, dans le débat qui est
engagé sur le pian constitutionnel à l'heure actuelle, que les
souverainistes regardent ces propositions diverses qui nous viennent d'Ottawa
et manifestent une opposition parfois assez musclée à leur
égard. Dans l'analyse de ces propositions, nous avons cherché
à être aussi rigoureux que possible, nos prises de position ne
surprennent pas nécessairement. Mais ce n'est pas seulement dans cette
optique-là que je parle ainsi ce matin. Je parle comme quelqu'un qui a
été fédéraliste longtemps, qui a participé
à ces conférences fédérales-provinciales, a
l'élaboration, à une tentative d'élaboration de politique
fédérale-provinciale pendant bien des années de ma vie,
qui a cru pendant longtemps que ces choses-là pouvaient s'arranger, qui
a vu le système se détériorer d'année en
année et qui, à un moment donné, a fait son choix, a dit:
Je veux sortir de ce système. (11 h 40)
Mais je pense que ça me justifie aujourd'hui de m'adresser
à ceux qui sont encore fédéralistes, qui croient encore
possible de sauver le système, qui sont gênés, au fond, par
ce que Beaudoin-Dobbie révèle ou propose, et de leur dire,
à cet égard, à cet égard du principe fondamental de
Beaudoin-Dobbie: II n'y a pas de raison que nous, gardiens autant que nous le
pouvons, tous ensemble dans cette Assemblée nationale, des
intérêts profonds des Québécois, nous ne puissions
pas nous entendre pour être tout à fait clairs à
l'égard de ce qui nous est proposé. De la part des souverainistes
sans doute, le non n'est pas étonnant pour bien des observateurs. Mais
même pour ces fédéralistes qui croient dans le
système, qui espèrent pouvoir le sauver, eux aussi, je pense,
peuvent désapprouver cette approche de Beaudoin-Dobbie et dire: Non, on
ne mangera pas de ce pain-là. Trouvez autre chose. Changez l'approche.
Mais ne nous promettez pas que ces désordres du système, que tous
les Québécois dénoncent depuis si longtemps, quel que soit
leur parti politique, que cette incohérence des politiques
économiques, fiscales, de développement régional, de
politiques sociales qu'on dénonce depuis si longtemps, tous ensemble,
que cette incohérence, ce gaspillage, on va nous en promettre davantage,
qu'on nous promette que ce sera comme ça encore pendant des
années. Non, non, non!
À cet égard, M. le Président, je suis heureux sans
doute, mais aussi, en un certain sens, un peu ému de voir l'attitude que
le ministre des affaires intergouvernementales a adoptée tout à
l'heure. Il a présenté des amendements à la proposition
que nous avons devant nous qui nous paraissent tout à fait acceptables.
D'autant plus que dans la mesure où tous, ou à peu près
tous, à l'Assemblée nationale, nous pouvons prendre le même
genre d'attitude, nous savons très bien quelle force cela est
susceptible d'avoir à l'égard des tractations qui se poursuivent
avec Ottawa.
Pour les souverainistes, c'est une autre étape. Pour les
fédéralistes, c'est, je pense, un message clair qu'ils envoient
à Ottawa. Je n'ai pas d'espoir dans l'aptitude de ce système de
se corriger. D'autres ont l'espoir de voir le système se corriger. Les
uns et les autres, à quelque chose d'aussi potentiellement dommageable
pour le Québec que cette approche fondamentale de Beaudoin-Dobbie, nous
pouvons dire, je pense, tous ensemble, en gardant nos convictions profondes:
Là-dessus, non, pas question! Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le chef de
l'Opposition officielle. Nous sommes sur la motion du député de
Lac-Saint-Jean et sur l'amendement proposé par M. le ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et
je reconnais maintenant M. le député de Viger. M. le
député.
M. Cosmo Maciocia
M. Maciocia: Merci, M. le Président. Je pense, M. le
Président, que, d'entrée de jeu, il faut faire une distinction
entre nous, du Parti libéral, et le Parti québécois. Je
pense que sur le rapport Beaudoin-Dobbie, sur certains aspects, on est
d'accord. C'est clair qu'il y a des aspects, dans ce rapport, dans ces
propositions, qui sont insatisfaisants pour le Québec, mais nous disons,
M. le Président, que ce rapport peut être amélioré.
C'est ça, la différence entre nous et le Parti
québécois. Le Parti québécois, son objectif premier
et dernier est l'indépendance du Québec. Nous disons: Regardons
avant d'aller jusqu'à l'indépendance du Québec. Essayons
de voir vraiment si on peut faire des améliorations à
l'intérieur du fédéralisme canadien. Nous disons, M. le
Président, comme l'a dit le ministre des affaires intergouvernementales
canadiennes, que, dans ce rapport-là, il y a des aspects positifs et il
y a des aspects qui sont insatisfaisants.
Les aspects positifs sont ceux où on se rapproche de Meech. On
l'a dit et on le répète. Le Parti québécois l'avait
dit même lors des propositions du 24 septembre, que c'était un
plafond. La démonstration est claire que, les propositions du 24
septembre, ce n'était pas un plafond. Beaudoin-Dobbie vient, d'une
certaine manière, améliorer les propositions qui ont
été déposées le 24 septembre en ce qui regarde
particulièrement l'approche de Meech: la question du droit de veto - je
pense que la démonstration a été faite très
clairement par le ministre - le choix des trois juges à la Cour
suprême, l'immigration.
C'est sûr qu'il faut clarifier. Il faudrait voir vraiment un peu
plus en profondeur la question de la société distincte et la
question du pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral.
M. le Président, c'est dans ce sens-là que nous disons qu'il faut
absolument qu'il y ait encore des modifications à ce rapport. Nous le
disons parce que nous y croyons. Moi, j'ai eu l'occasion de participer au
débat «Droit de parole» avec des membres du gouvernement
fédéral et des membres du Parti québécois. C'est
à ce moment-là que même des membres du parti au pouvoir, du
Parti conservateur à Ottawa, ont dit très clairement que ce
n'était pas un plafond, les propositions Beaudoin-Dobbie. C'est
sûr que c'est une porte, si on peut dire, entrouverte et nous croyons
qu'il faut aller voir au fond de cette porte ce qu'il y a de concret pour le
Québec. C'est seulement après ça que nous pourrons
décider si, vraiment, le gouvernement fédéral a des
intentions sérieuses et concrètes de donner certains pouvoirs au
Québec pour sa spécificité, disons, de
société distincte.
M. le Président, c'est dans ce sens-là que je
considère que la motion du Parti québécois est malhabile.
Elle est inopportune. Elle est prématurée parce que nous disons,
actuellement, qu'il faut absolument aller au but, à la fin de tout
ça. On se rappellera que le Parti québécois, à un
certain moment, voulait courir le beau risque, mais je pense, M. le
Président, que la preuve est faite depuis longtemps que le Parti
québécois aime jouer, mais n'aime pas aller jusqu'à la fin
du jeu. On se rappellera, M. le Président, c'est comme un petit
garçon en culottes courtes qui regarde les grands joueurs et qui veut
participer au jeu. Quand on lui donne la chance de participer, au premier petit
coup, on boude, on se retire et on dit: Non, on ne va plus jusqu'au bout.
M. le Président, c'est ça aussi l'attitude du
député de Lac-Saint-Jean. On se rappellera que le
député de Lac-Saint-Jean a participé, a voulu courir le
beau risque. Il y en a d'autres qui ont quitté; lui, il a voulu courir,
mais il n'a jamais eu le courage d'aller jusqu'au fond de sa pensée. On
se rappellera qu'on a la loi 150. La loi est là pour établir un
échéancier dans lequel, je crois, le gouvernement
fédéral, actuellement, est disposé à opérer.
Nous croyons, M. le Président, qu'il faut aller jusqu'au fond, qu'il
faut aller jusqu'au bout de cet échéancier-là parce que,
sur la question du partage des pouvoirs, on l'a dit, le premier ministre l'a
dit et le ministre des affaires intergouvernementales canadiennes l'a dit: Ce
n'est pas clair. Ce n'est pas la partie la plus limpide du rapport et nous
voulons absolument que ce rapport soit limpide sur le partage des
compétences. Le Québec, en tant que société
distincte, a besoin des outils pour promouvoir et développer sa
société distincte et c'est dans ce sens-là qu'il faut
absolument que le partage des compétences soit éclairci. (11 h
50)
Comme je le disais tantôt, M. le Président, ce n'est pas en
rejetant d'un seul coup le rapport Beaudoin-Dobbie qu'on peut progresser, qu'on
peut vraiment aller de l'avant parce que, en rejetant le rapport, on rejette
même les éléments satisfaisants qui sont à
l'intérieur de ce rapport-là et nous croyons profondément,
M. le Président, qu'il peut y avoir encore des améliorations.
C'est clair, le temps presse. Il faut absolument que le gouvernement
fédéral fasse des pas de géant, mette des bouchées
doubles pour essayer de nous faire des offres valables pour que le
Québec puisse vraiment se reconnaître à l'intérieur
de ces propositions et à l'intérieur de cette
fédération canadienne.
M. le Président, moi, personnellement, je suis contre la
proposition du Parti québécois et en faveur de l'amendement qui a
été proposé par le ministre délégué
aux Affaires intergouvernementales canadiennes, parce que nous disons que ce
rapport-là ne répond pas aux aspirations légitimes du
Québec, aux revendications légitimes du Québec depuis 30
ans. Il y a sûrement un pas en avant dans la bonne direction, mais ce
n'est pas suffisant. Voilà, M. le Président, la raison pour
laquelle il faut continuer, il faut aller au-delà de la porte qui est
entrouverte. Il faut aller voir jusqu'au bout ce que le reste du Canada et le
parti fédéral vont nous proposer.
M. le Président, c'est avec cet esprit et cette attitude que nous
voulons aller jusqu'au bout. Nous croyons que c'est dans l'intérêt
supérieur du Québec, dans l'intérêt des citoyens, de
la population du Québec d'aller jusqu'au bout, de suivre ce processus,
parce que je crois que, tous ici, on représente la population du
Québec, on est ici pour travailler dans l'intérêt des
citoyens. Je crois, M. le Président, qu'on ne peut pas entraîner
une population dans un tunnel sans lumière, et c'est ce que le Parti
québécois veut faire actuellement. Il veut absolument aller vers
l'indépendance. La souveraineté, l'indépendance, c'est le
plus beau, le meilleur qu'on puisse avoir au lendemain de cette
séparation.
M. le Président, c'est très clair, même dans les
commissions auxquelles j'ai le plaisir de participer, que la très grande
majorité des économistes, la très grande majorité
des gens qui sont venus devant ces commissions nous ont dit
très clairement qu'il y aura une période très
délicate et très grave au moment où il y aura une
séparation du Québec. Et c'est là que nous disons: Avant
d'emprunter ce tunnel qui n'a pas de lumière, il faut faire tous les
efforts nécessaires pour essayer de trouver des accommodements qui
seront dans le désir et les aspirations de la population du
Québec. C'est dans ce sens-là, M. le Président, que je dis
qu'il faut absolument y aller, et nous y allons. C'est seulement au bout de ce
chemin. Ça veut dire que le 26 octobre 1992, c'est seulement à ce
moment-là qu'on pourra dire: Oui, on a eu la possibilité de les
améliorer. On a eu la possibilité de faire accepter par le reste
du Canada les revendications traditionnelles du Québec et si on n'a pas
réussi, M. le Président, c'est la population, à ce
moment-là, qui va décider du chemin à suivre. Mais cette
population doit être au courant de tous les aspects du renouvellement du
fédéralisme et aussi des inconvénients et des avantages
d'une éventuelle séparation. Nous, nous allons faire notre devoir
de représentants de la population, de mettre la population au courant de
tout ce qui va se passer dans ce dossier-là de façon que cette
population puisse se décider et prendre une décision très
éclairée et dans le meilleur intérêt du
Québec et de la population du Québec. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): merci, m. le
député de viger. sur cette même motion et sur l'amendement
à la motion principale, m. le député de d'arcy-mcgee.
M. Robert Libman
M. Libman: Merci beaucoup, M. le Président. La
rhétorique fausse et un peu facile que j'entends ce matin
m'inquiète. What we have heard this morning can give us some insight
into what can surely become a serious problem for federalists in Québec
if the Premier of Québec holds a referendum strictly on the offers from
the Federal Government. We have seen in the past couple of weeks the immediate
reaction of the Official Opposition and I think it becomes very clear that if
the offers presented to Québec left the Federal Government as nothing
but a central bank and a post office that handed out equalization payments to
the provinces, the Official Opposition would still reject any proposal on the
table. So, I think that the debate, to some extent, has been dishonest. We have
to understand that no matter what is on the table, we are going to hear angry
denunciations from the Parti Québécois, which does not reflect
the majority of opinion of Quebeckers.
But another thing we have to understand is that as long as the focus is
placed on an actual offer that is sitting on the table, sovereignists have the
opportunity to hack away at it with all the vim and vigor that they are capable
of mustering, without having to defend the actual viability of their own
alternative, that being sovereignty or the separation of Québec, whose
consequences for Québec will be far more devastating than anything
imaginable, than any conceivable renovation or renewal of the Federation. And
that is something we have to understand, that if the sovereignists are ready to
criticize an initiative from the Federal Government, they have to be able to
prove to Quebeckers that their alternative is a better alternative and they
have not, in 30 years of discussing this matter, come close to even proving
that sovereignty is in the best interest of all Quebeckers.
M. le Président, our party cannot support the Beaudoin-Dobbie
report as is. We cannot support it as of yet. The distinct society clause, for
example: as long as we have a government in place and an official opposition in
place that have shown disregard for minority communities, we cannot trust the
Government with the distinct society interpretive clause in their hands. And
the Premier speaking against the reformulation of the distinct society clause,
which adds greater protection to minority communities, has sent a message of
intolerance across Canada: That there is no place in Canada to develop minority
communities, minority francophone communities outside Québec, and that
the development of minority communities in Québec goes against the
légitime aspirations of preserving and promoting the distinct society of
Québec.
What has to be understood is that a society is stronger and richer if
its minority communities are strong and develop. And the Premier must recognize
that it is a fundamental aspect, a cornerstone of our country, that all
minority communities throughout this land be promoted and developed and should
be encouraged to flourish. Even though we cannot support the Beaudoin-Dobbie
report at this stage because of the distinct society clause, because of the
level of decentralization, this Assembly must not be so nearsighted, so
arrogant as to reject the report at this stage. The motion of this morning will
send out a very disheartening message to the rest of Canada, an arrogant reflex
to a report that goes very far towards satisfying the legitimate aspirations of
Québec as enunciated by Québec over the past 30 years. And the
reflex of this motion could threaten to unravel the entire negotiation
process.
If our Premier is committed to renewal, he must go to Ottawa this week
and sit around that table and make it very clear to the rest of Canada, who are
not mind readers, what Québec really wants out of this process. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de D'Arcy-McGee. Sur cette même motion et sur cet
amendement, Mme la députée
de Saint-Henri. Mme la députée, la parole est à
vous.
Mme Nicole Loiselle
Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Il me fait
extrêmement plaisir d'intervenir aujourd'hui sur la motion de
l'Opposition portant sur le rapport Beaudoin-Dobbie. À titre de membre
de la commission parlementaire chargée d'examiner les offres qui
permettront de renouveler le fédéralisme canadien, le rapport
Beaudoin-Dobbie m'intéresse au plus haut point. C'est un document
important, dense et qui mérite d'être examiné avec beaucoup
d'attention. Le rapport Beaudoin-Dobbie marque une étape très
importante dans le processus de renouvellement de la Constitution.
Le fédéral commence à préciser ses
intentions. Nous entrons dans la dernière étape d'un long
marathon qui dure depuis 30 ans au Québec. Je suis heureuse, M. le
Président, de voir que l'Opposition ait accepté l'amendement du
ministre responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes, car la
motion de l'Opposition nous indiquait très clairement ce que nos amis
d'en face ou d'à côté, en ce qui me concerne, ont
l'intention de faire juste à la fin du marathon.
Ce qu'ils vont faire est simple et tout à fait prévisible.
Ils vont lâcher, ils vont abandonner, ils vont jeter la serviette. Ils ne
veulent pas se rendre jusqu'au bout. Ils manquent de souffle, M. le
Président. Dans le dossier constitutionnel, l'attitude de l'Opposition
est perceptible à 100 kilomètres et même à 100
milles à la ronde. C'est l'intolérance, l'impatience,
l'intransigeance. L'article 1 du programme du Parti québécois,
c'est l'atteinte de la souveraineté. Cette fixation est rapidement
devenue un dogme et tout ce qui retarde l'atteinte de la souveraineté
est à proscrire. Le rapport Beaudoin-Dobbie évidemment ne propose
pas la souveraineté. Que fait alors le Parti québécois? Il
s'empresse de le jeter à la poubelle. (12 heures)
La motion de l'Opposition est tout à fait conforme à la
démarche suivie par le Parti québécois depuis plusieurs
mois: II faut abattre l'appareil avant qu'il ne décolle. Il faut tirer
sur le canard sur le lac, avant qu'il ne prenne son envol. Ces phrases-chocs de
l'Opposition trahissent bien son manque de rigueur dans le dossier
constitutionnel. On suit le mot d'ordre, M. le Président. Si ce n'est
pas la souveraineté, ce n'est pas bon, ça ne vaut même pas
la peine d'en parier. Il n'existe qu'une vérité, la leur. Point
final. Point à la ligne! Cette façon de procéder n'est pas
très démocratique et c'est pourquoi il fallait s'opposer à
la formulation proposée par l'Opposition.
M. le Président, le rapport Beaudoin-Dobbie est loin de
répondre à toutes les attentes du Québec, c'est vrai. En
conférence de presse, la semaine dernière, le premier ministre a
clairement fait ressortir les forces et les faiblesses du document. Le rapport
Beaudoin-Dobbie marque une étape qui n'est pas la dernière. Ce
n'est pas le dernier mot du Canada anglais. Pour cette raison, il faut
poursuivre le processus. Contrairement au Parti québécois, le
Parti libéral entend adopter une approche plus pragmatique, plus
réfléchie et plus ouverte.
Le rapport Beaudoin-Dobbie n'est pas entièrement satisfaisant,
mais on ne peut certainement pas le rejeter globalement. Il faut se servir des
éléments positifs du rapport pour améliorer les
propositions, aller plus loin dans le sens des aspirations légitimes du
Québec et des revendications traditionnelles de notre peuple. J'invite
donc l'Opposition à faire preuve d'un peu de respect et de patience. La
loi 150 prévoit que le dénouement du dossier constitutionnel doit
être connu au plus tard le 26 octobre 1992. Nous sommes, aujourd'hui, M.
le Président, le 11 mars 1992. Le processus suit son cours normalement
et nous entendons respecter la loi 150.
Le Québec souhaite ardemment régler le dossier
constitutionnel une fois pour toutes. Cette volonté n'est pas propre au
Québec, les autres provinces et le gouvernement fédéral
ont également hâte de consacrer leurs énergies à
d'autres questions que la Constitution. Il faut absolument profiter de ce
contexte pour arriver à un règlement satisfaisant pour le
Québec.
En conclusion, M. le Président, le dépôt du rapport
Beaudoin-Dobbie sonne la onzième heure. Quand on participe à un
marathon, il faut parcourir 42 kilomètres; on vient de franchir le
panneau du 40e kilomètre. J'ai bien l'intention, tout comme mes
collègues du Parti libéral, de terminer brillamment la course.
Après tant d'efforts, il ne saurait être question d'abandonner
aussi près de la ligne d'arrivée. Notre objectif fondamental
demeurera toujours le même: obtenir la meilleure part pour le
Québec, le bon choix. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Saint-Henri. Je suis prêt à
reconnaître maintenant M. le député d'Abitibi-Ouest et
leader adjoint de l'Opposition officielle, en lui indiquant qu'il reste 4
minutes à sa formation politique.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président, très
rapidement. Ce n'est pas en 4 minutes qu'on va faire ce que j'appelle un
exposé de fond, mais c'est quand même trop gros pour laisser
passer autant d'hypocrisie. On vient d'entendre deux ou trois
ministériels qui laissent voir que la position du Parti
québécois serait une position où on serait les seuls
à avoir la vérité, une position dogmatique et ces
gens-là essaient de laisser croire, pendant quelques minutes, que. dans
leur
grande sagesse, eux autres, il fallait qu'ils modifient notre
proposition parce que, nous, on est trop radical. Imaginez, on demande de
rejeter ce que tout le monde rejette! J'y reviendrai dans une phrase,
tantôt. On demande juste de rejeter parce qu'à peu près
tout le monde dit: C'est insatisfaisant, ça ne correspond pas du tout au
débat qui, malheureusement, a encore trop duré. Dans leur grande
finesse, eux autres, ils ont dit: Nous, on ne rejette pas, on
désapprouve. Si au moins ils connaissaient le sens des termes! Il est
manifeste et partout désapprouvé. C'est inconvenant, c'est
mauvais, ça ne correspond pas du tout à la réalité
qui est nôtre.
Là, je cite le dictionnaire, le «Petit Robert»:
«Désapprouver: juger d'une manière défavorable,
trouver mauvais.» Imaginez, ils ne connaissent même pas le sens des
mots. Leur proposition serait meilleure parce que, eux autres, ils sont
d'accord pour désapprouver le rapport Beau-doin-Dobbie.
Je voudrais juste, encore là, dans les quelques minutes que
j'ai... Écoutez, ce n'est pas le Parti québécois qui le
rejette uniquement, le rapport Beaudoin-Dobbie, la confusion
érigée en principe constitutionnel; ce n'est pas nous autres,
c'est les centrales syndicales. À titre d'exemple, le Mouvement national
des Québécois rejette le rapport Beaudoin-Dobbie parce que
ça ne correspond pas du tout à la réalité
historique qui est la nôtre. Ça ne s'inscrit pas du tout dans
cette tradition du Québec des 30 dernières années, au
moins pour ce qui est des compétences. Alors, nous, on n'a pas de
position traditionnelle, on a le mérite d'avoir une position claire,
précise. Tout l'argumentaire qui a été
développé par notre porte-parole officiel, aujourd'hui, portait
beaucoup plus sur la vision même des fédéralistes qui
conviennent que le rapport qui a été déposé par le
comité est unanime dans les dissidences, M. le Président. C'est
la seule unanimité qu'on peut constater. Il y a tellement de dissidences
qu'on ne peut pas aller plus loin avec ça. Alors, faire accroire
à la population que quelque chose que l'on rejette, quelque chose que
l'on dénonce peut constituer une base de négociation, moi, je
prétends que c'est de l'hypocrisie et on n'a pas le droit de marcher
là-dedans. Il faut dénoncer cette hypocrisie.
Ce n'est pas pour rien qu'on a souscrit à l'amendement
proposé; l'amendement proposé est plus fort que le nôtre.
Alors, c'est évident qu'on va prendre quelque chose de plus fort qui
dit: Ça ne peut pas constituer une base de négociation. Et ce
n'est pas au nom de notre grande sagesse, c'est au nom de la logique
traditionnelle de ce débat-là au Québec qui fait qu'on a
toujours revendiqué des compétences pour les gens qui avaient
espoir dans le renouvellement du fédéralisme. Nous, on pense que
ça a assez duré, ces folies-là; nous, on pense que le
moment est venu de tourner la page. Mais, ce matin, ce n'était pas une
discussion sur notre position, c'était une discussion sur une motion qui
dit: Comme Assemblée nationale, soyons assez Québécois et
Québécoises pour, unanimement, dire: Ce n'est sûrement pas
là-dessus qu'on va être capables de faire progresser ce qu'eux
appellent le renouvellement du fédéralisme. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Je reconnais maintenant M. le
député de Salaberry-Soulanges et lui indique qu'il reste 10
minutes à la formation politique qu'il représente. M. le
député.
M. Serge Marcil
M. Marcil: Merci, M. le Président. On vient d'entendre
encore un discours démagogique, lorsque le député
d'Abitibi-Ouest s'est levé pour dire: C'est de l'hypocrisie encore qu'on
dénote par l'intermédiaire des intervenants du parti
ministériel. C'est drôle d'entendre ça, surtout de sa
bouche, mais là on commence à être habitué de
l'entendre. Lorsqu'on parle d'hypocrisie, c'est bien plus de dire que nous
sommes pour un Québec indépendant, mais que nous voulons garder
notre citoyenneté canadienne, notre passeport canadien, notre monnaie
canadienne. Ça, pour moi, c'est une position, c'est un discours
hypocrite et c'est un petit peu ça que ces gens-là font depuis le
début. On essaie d'enclencher un mouvement auprès de l'ensemble
de la population du Québec afin de l'amener à boycotter tout
mouvement positif qui pourrait venir de l'ensemble du Canada pour,
nécessairement, régler une fois pour toutes le problème de
la Constitution canadienne.
M. le Président, c'est simple. Meech, c'était cinq
conditions, ça avait été accepté par tout le monde.
Excusez le mot, mais ça a foiré à un moment donné
et, à partir de ce moment-là... Et on savait que la position du
Parti québécois, à l'époque, était contre
Meech, que ça ne valait pas une cent et qu'il ne fallait pas que les
Québécois acceptent Meech. Après que Meech eut
été retiré - vous connaissez un peu les raisons -
là, les gens de l'autre parti étaient scandalisés à
ce moment-là. On s'est dit: Comment ça, le Canada rejette le
Québec parce qu'on n'a pas accepté Meech?
Ça a été la commission Bélanger-Campeau,
suite à un discours de notre premier ministre. On a formé une
commission, on l'a équipée de 36 bons commissaires. Ils ont fait
une consultation publique, ils sont revenus, ils ont déposé deux
recommandations. Dans les recommandations, on nous disait quoi? Attendez les
offres. Ne faites pas de démarche dans ce sens-là, attendez des
offres formelles du gouvernement fédéral ou du Parlement d'Ottawa
et mettons sur pied deux commissions parlementaires, une pour étudier
les offres liant l'ensemble des provinces et le gouvernement canadien et
étudions également
tous les impacts socio-économiques de la souveraineté du
Québec. C'était ça. Donc, on joue exactement, on applique
exactement les recommandations de la commission Bélanger-Campeau dont
les membres du Parti québécois ont fait partie et ils ont
signé également. On fait exactement ce que la commission
Bélanger-Campeau, la commission publique a recommandé à
l'Assemblée nationale et on a même fait une loi pour
institutionnaliser tout ça, M. le Président. (12 h 10)
Au fédéral, eux autres, ils ont décidé de
faire une autre commission, qui s'appelle Beau-doin-Dobbie. Ils ont fait le
tour du Canada, contrairement à ce qu'on avait fait avec Meech. On avait
reproché au gouvernement canadien de faire ça en catimini.
Là, ça s'est fait de façon publique avec des
assemblées générales dans toutes les provinces pour chacun
des secteurs. Elle dépose les recommandations non pas à
l'Assemblée nationale - c'est pour ça que je me sens un petit peu
plus mal à l'aise de rejeter les propositions de la commission
Beaudoin-Dobbie - c'est fait à la Chambre des communes. C'est à
la Chambre des communes de rejeter ou non ces propositions-là. Donc, on
va attendre, nous, de recevoir formellement des propositions, des offres du
gouvernement fédéral et, a ce moment-là, on pourra se
pencher et prendre une position officielle en tant qu'Assemblée
nationale ou gouvernement. En attendant, on n'a pas le droit de rejeter comme
ça, du revers de la main, toutes les possibilités qui s'offrent
à l'ensemble de la population du Québec, et ce, afin d'avoir une
connaissance exacte surtout des impacts du geste que nous allons poser à
l'automne 1992, advenant qu'on n'ait pas d'offres qui feraient en sorte que le
Québec puisse s'intégrer dignement à la Constitution
canadienne.
Lorsqu'on analyse la motion du Parti québécois, on parle
de rejeter; nous, on parle de désapprouver. Vous savez, probablement que
le député de Lac-Saint-Jean va intervenir pour essayer de faire
la différence entre le mot «rejeter» et le mot
«désapprouver». Moi, j'ai regardé dans le
dictionnaire tantôt et j'ai essayé de trouver certains synonymes,
justement, du mot «rejeter». J'ai trouvé des mots comme
«abandonner», «refuser», «repousser»,
«bannir», «chasser», «écarter»,
«éliminer», «exclure» et
«proscrire». Ça n'a pas une connotation positive. Donc,
c'est: Ne faites rien, empêchons-nous, rejetons tout ce qui vient de
l'extérieur du Québec, notre position est prise. Moi, j'appelle
ça une position dogmatique. Quand on entend: Nous autres, notre
position, c'est l'indépendance du Québec, c'est leur position et
je la respecte. En attendant que les Québécois et les
Québécoises se prononcent sur leur avenir à l'automne, il
est tout à fait normal de leur permettre de prendre connaissance de
toutes les options et de toutes les avenues possibles afin qu'au moment
où on aura posé le geste on n'ait pas à le regretter.
Comme parlementaire, M. le Président, c'est sûr que, moi
aussi, je ne suis pas nécessairement en accord avec tout ce qu'on
retrouve dans les propositions de la commission Beaudoin-Dobbie. Je ne suis pas
le seul. Notre premier ministre s'est prononcé. Notre ministre
responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes s'est
prononcé également. L'ensemble de la deputation dans leur
région, la plupart se sont prononcés, pas contre d'une
façon définitive. On dit: Ce n'est pas tout à fait ce
qu'on veut; il y a des choses qui ne sont pas claires dans ce
rapport-là; on veut avoir des propositions plus claires, plus nettes,
plus précises afin que le peuple québécois puisse se
prononcer.
Donc, je suis dans l'obligation... Bien, on a réglé le
problème par l'amendement. Je vais voter naturellement pour cette
proposition amendée. Je désapprouve ces propositions-là,
mais je maintiens une porte ouverte, et c'est le rapport final qui va nous
arriver en avril, c'est celui-là et c'est sur ça qu'on pourra se
prononcer de façon officielle, à savoir si on les rejette de
façon catégorique et si on enclenche notre processus tel que
défini par la loi 150. D'ici à ce temps-là, permettons au
moins, et votre chef l'a si bien dit tantôt: Nous autres, on est contre,
mais si vous pensez que ça peut amener quelque chose, faites-le. C'est
dans ce sens-là qu'on vous passe le message. Allons jusqu'au bout. Ce
n'est plus une question d'une année, de deux ans, de trois ans. C'est
une question de mois, pour ne pas dire une question de jours. On ne peut pas se
fermer de portes et on n'a pas le droit, comme représentants du peuple,
peu importe notre option politique, on ne peut pas, comme représentants
du peuple, lui fermer des portes à des connaissances, a des informations
qui vont l'éclairer davantage et le préparer à poser un
geste ultime qui met en cause, ne l'oubliez pas, l'avenir constitutionnel du
Québec, l'avenir constitutionnel du Canada également.
Donc, c'est important, ça. On pourra toujours dire et moi, comme
parlementaire, je vais toujours être en mesure de dire: J'ai tout fait,
je me suis renseigné, je vous ai permis de vous renseigner, je vous ai
permis de vous informer également, on est allé jusqu'au bout, on
a laissé la chance au coureur jusqu'à la dernière seconde.
J'espère toujours, M. le Président, que nous allons arriver
à une proposition qui fera en sorte que le Québec puisse
s'épanouir à sa façon, puisse avoir son contrôle, le
contrôle de son développement, qu'il soit reconnu comme une
société distincte, qu'il ait son droit de veto et qu'on puisse
quand même demeurer à l'intérieur de ce grand Canada. Je
l'espère toujours comme Québécois et comme Canadien. Donc,
attendons jusqu'à la fin et, à ce moment-là, on se
prononcera de façon officielle. Laissons surtout la population prendre
connaissance de tous ces éléments qui sont nécessairement
très compliqués pour eux autres par rapport à nous.
Donc, M. le Président, je vais voter pour cette proposition
amendée. Je demande également au parti de l'Opposition
d'être objectif pour une fois et de permettre à la population de
bien s'informer avant de poser le dernier geste. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Salaberry-Soulanges. Maintenant, en vertu de votre
droit de réplique, M. le whip en chef de l'Opposition officielle et
député de Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard (réplique)
M. Brassard: M. le Président, je dirai d'abord que - le
chef de l'Opposition l'a mentionné tantôt - nous sommes d'accord
avec les amendements apportés par le ministre des affaires
intergouvernementales canadiennes, malgré le dernier
élément de son amendement qui fait référence, entre
autres, au fait que la commission a été instituée aux fins
de répondre aux revendications légitimes du Québec. On n'a
pas de misère à vivre avec ça, mais ce n'est pas tout
à fait exact. Il reste que la commission Beaudoin-Dobbie, son mandat
premier était d'examiner et de consulter la population sur les 28
propositions fédérales de septembre dernier et non pas
précisément d'examiner les revendications légitimes du
Québec. Mais, enfin, c'était ça aussi d'une certaine
façon, donc, c'est quand même acceptable. Je ne commencerai pas
une querelle sémantique à coups de dictionnaire pour savoir si
«rejeter» est plus fort que «désapprouver» ou
vice versa. Ce qui m'apparait important, dans les circonstances, c'est que les
deux grandes formations politiques à l'Assemblée nationale
envoient un message qui ne soit pas trop brouillé, qui soit le plus
clair possible au gouvernement fédéral concernant le rapport
Beaudoin-Dobbie. C'est ça, mon objectif. J'accepte, quant à moi,
les amendements du ministre sans me faire des interrogations
métaphysiques, à savoir quel est le verbe qui a plus de force que
l'autre. Ça m'apparaîtrait des chinoiseries un peu
déplacées dans les circonstances.
Cependant, je terminerai et je conclurai, M. le Président, en
disant que le gouvernement risque de s'illusionner en s'imaginant que les
offres qui vont venir en avril seront meilleures que ce que contient le rapport
Beaudoin-Dobbie et seront meilleures que ce qu'étaient les propositions
fédérales de l'automne dernier. Il risque de s'illusionner et
j'ai l'impression qu'il espère trop. Encore une fois, tantôt, le
député de Salaberry-Soulanges, je pense, disait à peu
près la même chose: Attendez, il y a des offres qui s'en viennent.
C'est ce qu'on nous a dit l'automne dernier. Je me souviens que l'automne
dernier, quand les propositions fédérales ont tombé sur la
table, le gouvernement a dit: Attendez. Ça, ce n'est pas bon, mais,
attendez, la commission créée par le fédéral, elle,
va examiner ça puis elle va améliorer ça. Attendez le
rapport. Le rapport de la commission est tombé sur la table. Alors,
là, on dit: Ça, ce n'est pas bon, ce n'est pas acceptable, mais
attendez les offres formelles d'Ottawa en avril. Ça, ça va
être le bon coup. Ça, ça va être bon.
Moi, je vous dis: Je sais bien que le gouvernement va attendre
jusque-là. C'est clair qu'il va aller jusqu'au bout puis qu'il va les
attendre, les offres formelles. Mais je vous dis: C'est s'illusionner que de
s'imaginer que les offres d'avril vont être meilleures ou
différentes de ce qu'on retrouve dans le rapport Beaudoin-Dobbie, encore
une fois, à cause de ce que j'ai dit dès le départ. Il y a
une réalité incontournable au Canada et au Québec qui fait
en sorte qu'on ne peut pas vraiment aboutir à une révision en
profondeur du régime. Cette réalité, c'est les deux
nations qui habitent un seul pays et qui ont des visions différentes et
incompatibles. La meilleure preuve, c'est le sénateur Beaudoin qui nous
la donnait. En bon jovialiste candide, le sénateur Beaudoin
répondait à une question d'un journaliste en disant:
Écoutez, si j'avais été tout seul comme sénateur -
puis c'est un professeur de droit constitutionnel, le sénateur Beaudoin
- dans mon bureau de l'université, écoutez bien, je vous en
aurais fait, moi, un beau partage des pouvoirs. Je vous en aurais
fignolé une répartition des compétences. Seul, connaissant
le droit constitutionnel - il l'a enseigné longtemps - ah! je vous
assure que je vous aurais cogité un maudit beau projet de
ré-partion des pouvoirs. Mais je ne suis pas tout seul. J'avais trois
partis fédéraux autour de la table, j'avais les provinces puis
les premiers ministres des provinces qui réclamaient des choses. J'avais
le Canada anglais qui a une conception des choses. J'avais le Québec
qui, lui, revendiquait un certain nombre de choses. J'avais tout ça. Il
fallait que je compose avec ça. Alors, j'ai abouti à ce qu'on
retrouve dans le rapport. Si j'avais été tout seul, ça
aurait été beau, mais, là... Une constitution, ça
ne se fait pas en vase clos dans un bureau de l'université, il faut que
ça réponde à des aspirations puis à des attentes de
la population concernée. Et là, c'est clair que, comme il y a des
visions différentes qui prévalent au Québec et au Canada
et qui sont largement incompatibles, on arrive avec une mixture comme celle
qu'on retrouve dans Beaudoin-Dobbie.
Deuxièmement, les offres, pensez-vous qu'elles vont être
meilleures que ce qu'on retrouve dans le rapport Beaudoin-Dobbie quand le
premier ministre du Canada et le ministre responsable, Joe Clark, vous disent
depuis une semaine que ce qu'on retrouve dans le rapport, c'est ce qu'il y a de
plus généreux qui n'ait jamais été offert au
Québec? Bien, écoutez, quand on a une opinion comme
celle-là, qu'il s'agit là des offres les plus
généreuses jamais
offertes au Québec, je n'ai pas l'impression qu'on va
céder à la tentation de les améliorer beaucoup. Si c'est
ce qu'il y a de plus généreux, on ne cédera sûrement
pas à la tentation d'y apporter des modifications dans le sens d'une
amélioration. Ça va être plutôt le contraire qui va
se produire.
Et enfin - écoutez, soyons réalistes et pragmatiques - le
premier ministre fédéral, M. Mulroney, n'a manifestement pas la
force politique pour imposer quoi que ce soit au Canada à l'heure
actuelle. Quand ta cote de popularité se situe dans le même
créneau que les taux d'escompte de la Banque du Canada, je m'excuse,
mais on n'est pas en position pour imposer grand-chose.
Alors, tout ça mis ensemble, je ne veux pas vous
désillusionner, mesdames et messieurs, mais ne vous attendez pas
à des offres mirobolantes en avril qui soient tellement
différentes de ce qu'on retrouve dans le rapport Beaudoin-Dobbie. Ce ne
sera pas tellement meilleur.
Également, M. le Président - et je termine
là-dessus - je mets en garde le gouvernement contre la tentation
très forte, semble-t-il, de tomber dans le piège d'une
procédure à deux résolutions où le Québec va
inévitablement sortir perdant. Parce que c'est clair que, même si
on arrive à ce que le ministre appelle une entente constitutionnelle
globale comportant, admettons-le, faisons-en l'hypothèse, un droit de
veto, si, pour faire adopter cette entente constitutionnelle globale, vous
passez par le biais de deux résolutions, une requérant
l'approbation de 7 provinces représentant 50 % de la population, la
formule 7-50, et l'autre requérant l'unanimité des Parlements au
Canada et au Québec, c'est évident qu'il y a juste une
résolution qui a des chances de passer. C'est clair, ça? C'est
celle qui s'appuie sur 7-50. L'autre requérant l'unanimité, elle
ne passera jamais, d'autant plus que c'est dans celle-là qu'on va
retrouver le droit de veto et, déjà, il y a au moins 4 provinces
qui ne veulent rien savoir du droit de veto. Elles l'ont annoncé
publiquement. Alors, celle-là, elle ne passera pas.
Donc, accepter déjà, et le premier ministre a ouvert la
porte... Je ne sais pas s'il a déjà un «deal» avec
son homologue fédéral, qu'il lui a dit, dans une conversation
téléphonique: II n'y a pas de problème, Brian, tu peux y
aller avec deux résolutions, prends ça pour acquis... C'est un
danger très grave parce que c'est clair qu'à ce moment-là
il y a juste une résolution qui va passer. L'autre requérant
l'unanimité ne passera jamais. Faire semblant que ce sera le cas, c'est
tromper le monde. C'est une supercherie que de prétendre le contraire.
Alors, je mets en garde le gouvernement contre cette tentation qui semble de
plus en plus forte actuellement, d'accepter cette double résolution.
C'est une procédure, je l'admets, mais c'est une procédure qui
n'est pas anodine. Accepter ça, ça a des conséquences
très graves sur le fond, parce que ça veut dire que vous prenez
une partie des éléments du fond et que vous les mettez de
côté de façon irrévocable. Vous les jetez à
la poubelle, c'est ça que ça signifie.
Ceci étant dit, M. le Président, même si on n'a pas
les mêmes points de vue, je reprends ce que le chef de l'Opposition
disait tantôt. C'est clair que nous, on est des souverainistes. Tout le
monde le sait. J'entendais des ministériels affirmer qu'on était
des souverainistes. Ce n'est pas une grosse nouvelle ça, là.
Ça ne fera pas les manchettes demain, ça; c'est évident
qu'on est des souverainistes. On ne s'en est jamais caché, puis c'est
clair que c'est ça qu'on veut. Mais ce qu'il y a sur la table, quand on
porte un jugement sur le rapport Beaudoin-Dobbie, ce n'est pas en fonction de
la souveraineté, c'est en fonction des projets
fédéralistes que le jugement est le plus sévère.
Même en fonction surtout de la position de votre propre parti, le
jugement est on ne peut plus sévère sur ce que contient le
rapport Beaudoin-Dobbie. On ne le rejettera pas? Bon, très bien, on ne
le rejettera pas, on va le désapprouver. Pour moi, la nuance est
tellement fine, tellement ténue, que ça ne me dérange pas
beaucoup, je vais pouvoir dormir très bien ce soir. Je serai quand
même satisfait si les deux grandes formations politiques de
l'Assemblée nationale aujourd'hui, au-delà de leur divergence
quant aux options, c'est évident, ont pu s'entendre pour envoyer un
message le plus limpide possible à qui de droit. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Conformément à l'article
201, je vais mettre d'abord aux voix la motion d'amendement de M. le ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes.
M. Pagé: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui?
M. Gendron: On va demander un vote enregistré, s'il vous
plaît, M. le Président.
M. Pagé: M. le Président, je vous demande...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le vote
enregistré est demandé. M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: ...tel que c'est prévu au
règlement, de reporter le vote après la période de
questions cet après-midi.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À la demande du
leader du gouvernement, le vote sur l'amendement de cette motion et sur la
motion telle qu'amendée ou non est reporté à la
période des affaires courantes de cet après-midi.
Sur ce, compte tenu de l'heure, je suspends
les travaux de cette Assemblée jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 27)
(Reprise à 14 h 6)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir
quelques instants. Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir.
Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Présentation de projets de loi
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article b du feuilleton.
Projet de loi 415
Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le
ministre de la Santé et des Services sociaux présente le projet
de loi 415, Loi sur le Conseil de la santé et du bien-être. M. le
ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Ce projet de loi institue le Conseil de la santé et du
bien-être.
Le projet de loi prévoit que le Conseil se compose de 23 membres,
dont 19 ont droit de vote, nommés par le gouvernement sur recommandation
du ministre de la Santé et des Services sociaux.
Le Conseil aura pour fonction de conseiller le ministre sur les
meilleurs moyens d'améliorer la santé et le bien-être de la
population.
Le Conseil de la santé et du bien-être remplace le Conseil
des affaires sociales.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte
d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?
Une voix:...
Le Président: Donc, adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Je vous demanderais d'appeler l'article c de notre
feuilleton, M. le Président.
Projet de loi 416
Le Président: L'article c du feuilleton? À
l'article c du feuilleton, Mme la ministre des Communautés culturelles
et de l'Immigration pré- sente le projet de loi 416, Loi modifiant la
Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de
l'Immigration. Mme la ministre.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, ce projet de loi
modifie la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de
l'Immigration afin d'accorder au ministre un pouvoir accru en ce qui touche la
délivrance d'un certificat de sélection.
Le projet de loi introduit de plus la possibilité pour le
ministre de délivrer une attestation d'identité pour des
ressortissants étrangers qui se trouvent au Québec.
Par ailleurs, le projet de loi apporte des modifications au pouvoir
réglementaire du gouvernement et édicté d'autres
dispositions de nature administrative ou de concordance afin de faciliter
l'application de la loi.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte
d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?
Une voix:...
Le Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Oui, M. le Président. Je vous demanderais
maintenant d'appeler l'article d du feuilleton.
Projet de loi 417
Le Président: à l'article d du feuilleton, m. le
ministre délégué aux transports présente le projet
de loi 417, loi modifiant de nouveau la loi sur la publicité le long des
routes. m. le ministre délégué aux transports.
M. Robert Middlemiss
M. Middlemiss: M. le Président, ce projet de loi a pour
objet de modifier la Loi sur la publicité le long des routes en ce qui a
trait aux distances prescrites.
Il permet l'installation, à une intersection d'une route avec une
autre route qui n'est pas entretenue par le ministre, d'une publicité
annonçant une entreprise éloignée de l'intersection et
située en bordure de cette route.
Par ailleurs, le projet de loi permet au ministre d'autoriser
l'emplacement d'une publicité à une distance moindre lorsque la
topographie des lieux empêche le demandeur de se conformer aux exigences
de la loi.
Enfin, ce projet de loi modifie les dispositions concernant la hauteur
des publicités.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accep-
te d'être saisie de ce projet de loi? Adopté? Donc,
adopté.
Maintenant, dépôt de documents.
Dépôt de documents
Message de Sa Majesté la reine Elizabeth II
à l'occasion du jour du Commonwealth
Le lundi 9 mars dernier était le jour du Commonwealth. Pour
souligner cet événement, Sa Majesté la reine Elizabeth,
chef du Commonwealth, a fait parvenir un message de circonstance que j'ai
l'honneur de déposer. Donc, ce document est déposé.
Maintenant, M. le ministre du Tourisme.
Rapport annuel de la Régie des installations
olympiques
M. Vallerand: Qu'il me soit permis, M. le Président, de
déposer devant cette honorable Assemblée le rapport annuel
1990-1991 de la Régie des installations olympiques.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Maintenant, M. le leader adjoint du gouvernement.
Réponses à des questions inscrites au
feuilleton
M. Johnson: Oui, M. le Président. Je dépose la
réponse à la question 10 du feuilleton de ce jour inscrite par le
député de Pointe-aux-Trembles, de même que la
réponse à la question 11 du feuilleton de ce jour
également inscrite par le député de Pointe-aux-Trembles;
troisièmement, la réponse à la question 23 du feuilleton
de ce jour inscrite par le député de Lévis, la
réponse à la question 26 du feuilleton de ce jour inscrite par le
député de Gouin et la réponse à la question 36 du
feuilleton de ce jour inscrite par le député de Dubuc.
Le Président: Ces documents sont
déposés.
Maintenant, dépôt de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions. M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
Dépôt de pétitions
Donner aux personnes atteintes du virus
d'immuno-déficience humaine un meilleur accès aux
médicaments
M. Boulerice: M. le Président, je dépose l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par
351 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec.
Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant
que la plupart des personnes atteintes du VIH en arrivent à ne plus
être capables d'assumer les frais très élevés de
leurs médicaments; «Considérant que la plupart des
personnes atteintes du VIH en arrivent à recourir à l'aide
sociale pour payer le coût très élevé de leurs
médicaments alors qu'elles ont encore la possbi-lité physique de
travailler et qu'elles le souhaitent; «Considérant que le ministre
de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu débourse
inutilement des prestations d'aide sociale à des citoyens atteints du
VIH qui pourraient et désirent encore travailler;
«Considérant que le ministère de la Santé et des
Services sociaux assume des coûts hospitaliers qui seraient
réduits si les personnes atteintes du VIH avaient un accès aussi
facile à leurs médicaments que les personnes atteintes de cancer
ou de certaines autres maladies chroniques contrôlables;»
L'intervention réclamée se résume ainsi -
étant donné qu'il n'y a rien de fait encore: «Nous
demandons que l'Assemblée nationale adopte des mesures concrètes
et rapides pour remédier à ces situations, soit en donnant aux
personnes atteintes du VIH un meilleur accès aux médicaments
coûteux dont elles ont besoin.» Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président: Votre pétition est
déposée. Maintenant, M. le député de Shefford.
Maintenir la gratuité des services
optométriques d'examen de la vue
M. Paré: Oui, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale par 105 pétionnaires, citoyens et citoyennes du comté
de Shefford.
Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant
que depuis le début du régime d'assurance-maladie du
Québec en 1970, vous avez droit à un examen annuel chez votre
optométriste et à des examens de contrôle si l'état
de vos yeux et de votre vision l'exige; «Considérant que cela ne
représente que 0,05 % des coûts de la santé au
Québec; «Considérant que le gouvernement a manifesté
l'intention de couper les examens de la vision afin d'équilibrer son
budget; «Considérant que ces examens, lorsque rendus
régulièrement, sont nécessaires au maintien et à
l'amélioration de notre santé et contribuent à notre
mieux-être;»
L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale
d'intervenir auprès du gouvernement afin que les services
optométriques d'examen de la vision pour nous et nos enfants ne soient
pas coupés.»
Je certifie que cet extrait est conforme aux
règlements et à l'original de la pétition.
Le Président: Votre pétition est
déposée. Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation
de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.
Je voudrais vous aviser qu'après la période de questions
seront tenus des votes reportés sur la motion de M. le whip de
l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean
présentée aux affaires inscrites par les députés de
l'Opposition et sur la motion d'amendement de M. le ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes.
Nous allons maintenant procéder à la période de
questions et réponses orales. Je vais reconnaître, en
première question principale, M. le chef de l'Opposition.
Questions et réponses orales
Position du gouvernement sur les
dispositions du rapport Dunkel portant
sur l'aide aux entreprises
M. Parizeau: M. le Président, les négociations du
GATT avancent à grands pas sur la base de ce qu'il est convenu d'appeler
le projet Dunkel dont une des sections codifie la façon dont les
gouvernements peuvent distribuer aux entreprises ou aux régions des
subventions, des aides financières, des aides techniques de toutes
espèces et, du même coup, réduire considérablement
la possibilité pour des gouvernements territoriaux ou régionaux
comme les provinces de faire de même. Cela met en cause ou pourrait
remettre en cause un certain nombre de politiques économiques du
Québec.
C'est ayant cela à l'esprit, en particulier les
conséquences possibles sur la SDI, que le ministre des affaires
internationales disait, le 5 février: «Nous allons nous battre
avec toutes nos forces et toutes les forces à notre disposition pour
amender cet aspect du rapport Dunkel.»
Récemment, le ministre de l'Industrie et du Commerce revenait sur
cette question, sur les conséquences qu'un accord pareil pourrait avoir
sur le fonctionnement de certaines institutions québécoises, dont
la SDI, et concluait: «À moins qu'on ne démontre qu'il n'y
a pas d'avantage et pas de préjudice, on est coupable.» Ce sont
des paroles fortes.
L'Association des manufacturiers du Québec a hautement
protesté contre cet aspect de la question, mais le premier ministre,
lui, a indiqué qu'il avait une confiance totale en M. Wilson et, le 5
février, du haut de son sommet à Davos, il disait que la
proposition Dunkel est préférable à la formule
actuelle.
Alors, M. le Président, j'imagine qu'on pourrait conclure, sur la
base des déclarations du ministre des affaires internationales et du
ministre de l'Industrie et du Commerce, qu'il y a eu de solides protestations
à Ottawa. J'imagine que, sur la base de la déclaration du premier
ministre, il a dû y avoir l'envoi de félicitations à
Ottawa. Puis-je me renseigner pour savoir quelle est, sur cette question
économique comme sur bien d'autres, la position exacte du gouvernement?
A-t-il écrit à M. Wilson pour le féliciter ou pour lui
demander de faire en sorte que cette clause soit retirée? Est-ce que le
gouvernement est pour ou s'il est contre?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition me
permettra, durant quelques courtes secondes, de saluer la présence des
membres québécois de l'équipe olympique canadienne, que je
verrai dans quelques minutes.
Des voix: Bravo!
M. Bourassa: Ils méritent certainement tout notre respect
et notre plus profonde admiration.
M. le Président, j'avais été étonné
de lire les propos du chef de l'Opposition, au début de février.
Je crois que c'était le 1er ou le 2 février. D'abord, je suis
toujours étonné qu'on commente comme ça, sans la moindre
nuance, des déclarations qui peuvent être faites à
l'étranger par le chef du gouvernement. Je croyais qu'il y avait une
tradition d'une certaine réserve, au moins jusqu'au retour... Mais, je
veux dire, bon, ça ne m'empêche pas de dormir, M. le
Président.
Je vois le député de Lac-Saint-Jean, c'est le grand
spécialiste de ces attaques outre-atlantiques. J'ai dit au chef de
l'Opposition que j'étais toujours très, très conscient de
l'importance du dossier. J'en ai parlé longuement avec M. Wilson,
également avec M. Delors - on sait le rôle de la Communauté
économique européenne dans ce dossier-là - et
également avec d'autres, le premier ministre britannique, M. John Major.
C'est une question majeure pour tous les pays, surtout les pays du monde libre
ou de l'Occident.
La position du gouvernement est très claire. Nous
considérons qu'il y a des avantages dans le rapport Dunkel qui n'est pas
la version définitive, loin de là. C'est un effort de la part de
M. Dunkel pour rapprocher les parties. On est encore loin d'une entente.
Par ailleurs, pour ce qui a trait au renforcement de l'article XI, la
position du gouvernement du Québec est très claire. Le ministre
de l'Agriculture s'est rendu, il y a quelques jours, en Europe pour participer
aux rencontres pour défendre le point de vue du Québec. Mais, je
veux dire, il y a des aspects dans le rapport Dunkel qui permettent d'avantager
la situation. C'est le bras droit du chef de l'Opposition - je termine
là-dessus, M. le Président - M. Bernard Landry, qui disait, il y
a quelques jours, que s'il fallait que les discussions du GATT se terminent par
un échec, quand on sait que le Québec
exporte 40 % de sa production et 20 % à l'extérieur du
Canada, que ça serait un drame national. Alors, je pense bien que
l'Opposition va être d'accord pour appuyer le gouvernement à faire
valoir les intérêts du Québec.
Le Président: En question parlementaire. (14 h 20)
M. Parizeau: M. le Président, pour faire valoir les
intérêts du Québec, je rappellerai au premier ministre que
M. Landry était avec moi quand nous avons été les premiers
à dénoncer certaines de ces dispositions du rapport Dunkel.
Le premier ministre est-il conscient qu'en vertu de l'article 8b de ces
dispositions qui portent sur les aides financières, les subventions aux
entreprises il y est indiqué que l'aide aux régions
défavorisées sur le territoire d'un signataire accordée au
titre d'un cadre général de développement régional
sont autorisées à condition qu'elles aient un caractère
non spécifique? Et en termes du jargon de ce document, cela veut dire
ceci. C'est que si le gouvernement fédéral distribue des
subventions en Gaspésie aux fins de développement
régional, il le peut, mais, dans le cas du Québec, on peut en
appeler par des droits compensatoires. C'est ça que ça veut dire.
Est-ce que le premier ministre est conscient qu'il y a des
éléments dans ce dossier qui, à toutes fins pratiques, ou
bien vont interdire au Québec de pratiquer un certain nombre des
politiques économiques qu'il pratique depuis longtemps, ou bien, s'il
les pratique, vont permettre à des pays étrangers d'invoquer des
droits compensatoires à ce sujet? Est-ce que le premier ministre est
conscient de ça?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je vois que le chef de l'Opposition a quand
même évolué dans ses critiques ou ses interrogations. Au
début, il disait que le Fonds de solidarité pouvait être
compromis, que les actions de la Caisse de dépôt pouvaient
être compromises. Alors, pour moi, c'est une délicieuse surprise
de voir qu'il réduit ou qu'il se limite à certains aspects
très très limités qui demeurent très
importants.
Le ministre de l'Industrie et du Commerce de même que le ministre
des Affaires internationales du Québec, tous les deux, ils ont eu
l'occasion de commenter l'application de ces programmes. Je dois dire, tout
comme je le disais tantôt, que le texte n'est pas définitif et que
le Canada n'est pas isolé dans la défense de l'attitude que nous
avons mise de l'avant sur les pouvoirs des provinces. L'Allemagne est dans la
même situation, les Américains également. On sait
jusqu'à quel point les États américains procèdent
à toutes sortes de politiques de subsides pour aider les
entreprises.
Le Président: En conclusion.
M. Bourassa: Et on sait également - c'est parce que
ça pourrait être très long, M. le Président, mais
j'essaie d'être concis - que le commerce avec les États-Unis,
c'est la grande partie de notre commerce.
Alors, il y a une solidarité. Dans le cas de l'agriculture, la
solidarité s'applique avec Israël, avec le Japon. Dans le cas des
aides au développement régional, la solidarité se retrouve
avec des puissances quand même importantes, comme les États-Unis
ou l'Allemagne. Alors, le débat se poursuit. Je demanderais au chef de
l'Opposition de vérifier pour ce qui a trait au développement
régional - on sait qu'il y a des exemptions - et de vérifier
également les programmes qui pourraient être vulnérables.
J'admire sa vigilance...
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: ...mais il demeure un peu trop pessimiste, M. le
Président.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Parizeau: M. le Président, si vous voulez bien
m'accorder une dizaine de supplémentaires, on va reprendre chacune des
questions dont parlait le premier ministre. Je garde les mêmes craintes
à l'égard de bien d'autres programmes que le développement
régional.
Cela étant dit, puis-je demander au premier ministre s'il est
d'accord avec son ministre des Affaires internationales qui disait, je le
répète: «Nous allons nous battre avec toutes nos forces et
toutes les forces à notre disposition pour amender cet aspect du rapport
Dunkel.» De quoi s'agissait-il, M. le Président? Est-ce qu'il
s'agissait du sexe des anges ou s'il s'agissait des dispositions dont nous
venons de parler? Le premier ministre appuie-t-il son ministre quand il veut se
battre de toutes ses forces ou bien si, au contraire, il est fondamentalement
d'accord avec le gouvernement fédéral qui trouve ces propositions
adorables?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, j'avais eu l'occasion de
rétablir les faits lorsque le chef de l'Opposition avait
interprété hâtivement des propos qui auraient
été tenus. Je n'ai pas demandé de rectificatif sur le
titre qui avait été utilisé. Je ne partage pas cette
habitude avec le chef de l'Opposition qui, régulièrement et en
faisant un autre rectificatif sur la question des autochtones, à chaque
semaine, brise un nouveau record de rectificatifs dans les informations qui
sont véhiculées par les médias. Mais j'ai quand même
eu l'occasion, à ce moment-là, de dire que, sur certains aspects,
nous trouvons que le rapport comme tel permettrait au Québec de pouvoir
faciliter son commerce international et
je ne suis pas le seul à le dire. Il a mis en cause le ministre
des relations internationales sur une déclaration qui a
été faite par lui. Je demanderais au ministre de compléter
ma réponse.
Le Président: Brièvement, M. le ministre des
Affaires internationales.
M. Ciaccia: Brièvement, M. le Président. Il y a
deux types de subventions auxquelles le rapport Dunkel se réfère:
premièrement, les subventions pour le développement
régional et les subventions pour la recherche technologique. Ce genre de
subventions est permis à tous les niveaux de gouvernement, que ce soit
le gouvernement fédéral ou que ce soit le gouvernement du
Québec. L'avantage de ça, et c'est ce qu'on trouve avantageux,
cet aspect du rapport Dunkel, c'est que pour la première fois il y a une
définition de développement régional qui est permise, au
Québec, qui va nous aider dans la définition de
développement régional pour l'entente du
libre-échange.
En conclusion, M. le Président, le deuxième genre de
subventions c'est la subvention d'ordre général aux entreprises
pour le développement industriel. Ce genre de subventions d'après
le rapport Dunkel, n'est permis qu'au gouvernement central présentement.
Nous nous battons contre cet aspect du rapport Dunkel. Nous voulons que ce soit
changé. Nous avons des appuis: le gouvernement fédéral
nous appuie, le gouvernement américain nous appuie. Nous pensons que
nous allons réussir à amender le rapport Dunkel pour permettre
non seulement au gouvernement fédéral, mais au gouvernement des
provinces canadiennes de donner des subventions d'ordre général
pour le développement industriel.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Parizeau: ii me fait plaisir, m. le président, de
constater qu'on peut avoir avec le ministre une discussion un peu
sérieuse de ces questions. donc, oui, il va y avoir un effort du
québec, si je le comprends bien, pour essayer de faire en sorte que le
droit du québec de rétablir des subventions ou du financement
pour ces entreprises soit maintenu. puis-je lui demander alors, au sujet du
développement régional, s'il interprète comme moi
l'article 8.(ii), en vertu duquel on identifie des subventions ne donnant pas
lieu à une action, donc celles qui sont autorisées? on dit:
«l'aide aux régions défavorisées sur le territoire
d'un signataire, donc d'un état souverain, accordée au titre d'un
cadre général de développement régional a un
caractère non spécifique, au sens de l'article 2». est-ce
que le ministre convient que toute démarche envisagée par un
gouvernement territorial comme une province est spécifique, au sens de
l'article 2, donc échappe à l'autorisation dont il parlait et que
je viens de citer? Est-il conscient de ça? Donc, le ministre peut-il
nous confirmer que, sur le plan des politiques de développement
régional, même à l'intérieur du Québec,
Ottawa sera autorisé, Québec non?
Le Président: M. le ministre des affaires internationales.
(14 h 30)
M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais prendre cette
occasion pour saluer le consul général du Japon qui est
présentement parmi nous. je ne suis pas d'accord avec
l'interprétation du chef de l'opposition, il oublie les autres aspects.
vous avez cité un des articles du rapport dunkel, mais il y en a
d'autres. l'article que vous venez de citer, c'est vrai, il s'applique au
gouvernement central. pour faire une subvention, il faut que ce soit
généralisé pour différentes régions. mais il
y a un autre article dans l'interprétation du rapport dunkel qui donne
aux gouvernements territoriaux le droit de donner des subventions pour le
développement régional. ça veut dire qu'à
l'intérieur du québec le gouvernement du québec peut se
prévaloir des aspects du rapport dunkel pour donner des subventions pour
le développement régional, mais il ne pourrait pas le faire,
d'après le rapport dunkel, si ce n'est pas pour du développement
régional, mais que c'est d'ordre général, pour
subventionner le développement industriel. mais pour le
développement régional, le gouvernement du québec a ses
droits d'après le rapport dunkel.
Le Président: Une autre question
complémentaire.
M. Parizeau: La période des questions n'en est pas une de
débat sur l'interprétation des clauses. Je prends acte de ce que
dit le ministre. En soi, c'est déjà suffisamment
sérieux.
Puis-je redemander au premier ministre: Est-ce que le gouvernement du
Québec a demandé au gouvernement fédéral
d'intervenir de quelque façon que ce sort pour faire face au danger
sérieux que ces dispositions du rapport Dunkel font courir aux
politiques économiques d'un gouvernement qui dit se soucier de
l'économie? Le gouvernement du Québec a-t-il levé le petit
doigt depuis que le débat est commencé?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, franchement, il faut
être stoïque pour rester sérieux avec les questions du chef
de l'Opposition. Je lui ai dit, dans ma première réponse, que
j'en avais discuté - il demande si on a levé le petit doigt - que
j'avais fait des représentations, que j'avais vu M. Wilson. Je comprends
qu'il tourne
en dérision le sommet de Davos. Il devrait savoir qu'à
Davos il y a les leaders économiques et politiques de tous les pays, les
principaux leaders politiques et économiques. Je ne vois pas pourquoi il
tourne le sommet de Davos en dérision. Ce serait un bon endroit... Au
cours des prochaines années, je n'aurai pas d'objection à ce
qu'il puisse m'accompagner comme chef de l'Opposition.
J'ai fait part à M. Wilson de l'intérêt du
gouvernement du Québec; plus que de l'intérêt, que
c'était pour nous absolument important. D'ailleurs, le ministre des
affaires internationales vient de le signaler. C'est clair. J'en ai même
parlé à M. Delors, même si M. Delors, comme
président de la Communauté économique européenne,
n'est pas concerné par cette disposition, mais il a un rôle
important à jouer. Et j'ai souligné comment... Parce qu'il
s'agirait... Je n'entends pas le leader parlementaire.
Le Président: Alors, en conclusion, M. le premier
ministre, s'il vous plaît. S'il vous plaît!
Bon. À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, en conclusion, M.
le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, il s'agirait de modifier
quelques mots dans le texte comme tel. Le ministre responsable a
souligné tantôt les différences et c'a semblé
éclairer le chef de l'Opposition sans totalement le satisfaire. Il
s'agirait de modifier quelques mots pour ce qui a trait au développement
régional. Nous avons fait les représentations. Dire qu'on n'a
rien fait, qu'on n'a pas du tout fait de représentations, M. le
Président, après les réponses qu'on vient de donner, c'est
très difficile de prendre le chef de l'Opposition au sérieux.
J'ai dit au début toutes les démarches qui avaient
été faites à cet égard-là.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je ne vois pas pourquoi il n'exprime pas sa
satisfaction plutôt que son scepticisme.
Le Président: Pour une dernière question
additionnelle, M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, puis-je demander au premier
ministre si je résume bien les choses de nos débats aujourd'hui,
à savoir que, de ses ministres, aucune intervention ne serait venue
à l'égard d'Ottawa pour faire corriger ces choses et, d'autre
part, que, du premier ministre lui-même, sa seule intervention est venue
à Davos, en réponse au ministre du Commerce extérieur
d'Ottawa, M. Wilson, que la nouvelle formule était meilleure pour les
provinces canadiennes que l'accord actuel et que le premier ministre du
Québec s'est montré absolument d'accord? C'est à tout
cela, si je com- prends bien le premier ministre, que se limite l'action du
gouvernement du Québec, dans le sens du développement
économique actuel.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Le chef de l'Opposition ne comprend pas du tout. Il
est buté, il ne veut pas comprendre ou ne peut pas comprendre. J'ai
été très clair sur cette question-là. Il y a eu une
conférence fédérale-provinciale. Le gouvernement
fédéral a accepté le point de vue du Québec. Il me
semble que ce sont des représentations qui sont quand même
claires. C'est vrai que j'ai dit qu'il y avait des améliorations dans
l'accord, comme son bras droit l'a dit lui-même, comme M. Landry a dit
que le rapport Dunkel comportait beaucoup d'avantages. Est-ce que maintenant on
va me reprocher d'être d'accord avec des ténors de l'Opposition,
ceux qui sont, entre guillemets, crédibles, sur le plan
économique?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourassa: Est-ce qu'on va me reprocher ça, de la part
de l'Opposition? J'ai dit qu'il y avait des améliorations, dans le
domaine pharmaceutique notamment, qu'il y avait des améliorations
importantes pour le développement économique. C'est ce dont parle
le chef de l'Opposition. Donc, je ne suis pas d'accord du tout avec lui. Le
gouvernement a posé tous les gestes, et même au-delà, qui
pouvaient lui paraître non seulement nécessaires, mais utiles pour
défendre les intérêts économiques du Québec
dans cette question.
Des voix: Bravo!
Le Président: En question principale, maintenant, M. le
député d'Arthabaska.
Position du gouvernement sur les accords du GATT en
matière agroalimentaire
M. Baril: M. le Président, depuis plus de deux ans, le
gouvernement du Québec et le ministre de l'Agriculture prétendent
défendre les quatre piliers de l'agriculture québécoise
aux négociations du GATT, soit le renforcement de l'article XI :2c).
Pourtant, dans le journal Le Devoir du 28 février dernier, le
sous-ministre adjoint aux affaires économiques du ministère de
l'Agriculture a déclaré que ce ne serait pas la catastrophe si la
gestion de l'offre disparaissait. Il ajoutait, quelques lignes plus loin:
Pourtant, trois productions sur quatre seraient lavées, soit le poulet,
le dindon et les oeufs, plus de 400 000 000 $ d'activité
économique. Dans le même article, le même sous-ministre
soulignait qu'il avait averti, au nom du ministère de l'Agriculture, au
nom du gouvernement, l'Union des producteurs agricoles et son
président,
jacques proulx, que le gouvernement du québec va exprimer son
appui au nouvel accord du gatt, même si les quatre piliers ne figurent
pas dans cet accord. il faut se rappeler que le sous-ministre est le principal
représentant et surveillant des intérêts du québec
au gatt.
Ma question, M. le Président, est à savoir: Qui dit vrai?
Est-ce que c'est la position du sous-ministre qui s'applique ou si c'est la
position que le ministre de l'Agriculture a défendue ou prétend
défendre depuis deux ans?
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Picotte: M. le Président, je pense que celui qui vous
parle, au nom du gouvernement du Québec, a exprimé clairement que
la position du Québec et, évidemment,
réitérée vis-à-vis de la position canadienne
était celle de défendre les quatre piliers agricoles de
même que nos offices de commercialisation et la gestion de l'offre.
Maintenant, je ferai remarquer à mon collègue, le
député d'Arthabaska, que ce n'est pas nécessaire que des
gens attendent qu'arrive une réponse quelconque pour travailler sur
d'autres scénarios. D'ailleurs, je préfère que mes
fonctionnaires regardent d'autres scénarios que de regarder par la
fenêtre de leur bureau. Je préfère qu'ils envisagent des
possibilités qui peuvent arriver dans certains cas et analysent la
possibilité de regarder comment ça peut se produire si vraiment
on n'obtient pas ce qu'on veut avoir. Maintenant, je ne sais pas pourquoi le
député d'Arthabaska se scandalise parce que c'est un visage qu'il
connaît, il s'agit de Bernard Landry.
Des voix:...
M. Picotte: Bien, M. le Président, je suis obligé
de dire ça.
Le Président: La seule chose, M. le ministre, dont je veux
vous aviser, c'est qu'en période de questions...
Une voix:...
Le Président: ...c'est ça, il n'y a pas
d'exposition de documents. Très bien? Alors, je vous invite...
Des voix:...
(14 h 40)
Le Président: S'il vous plaît! Un instant! Un
instant! Alors, ça s'applique d'un côté comme de l'autre;
à la période des questions, il n'y a pas d'exhibit d'aucun
document. Alors, je vous demanderais de conclure rapidement.
M. Picotte: C'est pour être certain, M. le
Président...
Le Président: En conclusion.
M. Picotte: ... je ne voulais pas mal informer la Chambre, en
tout cas. M. Bernard Landry, qui est venu en Mauricie dimanche dernier, a dit
lui-même... «Du côté agricole, M. Landry s'est
élevé contre les subventions accordées aux producteurs
agricoles tant au Canada qu'aux États-Unis. Il estime que les
subventions maintiennent en vie artificiellement des productions qui affectent
grandement l'agriculture des pays pauvres tout en endettant dangereusement les
payeurs de taxes au Canada.» Et il dit: «Ça ne sera pas la
catastrophe nationale.» J'espère que le député
d'Arthabaska va cesser d'essayer de blâmer celui qui défend
ardemment les piliers agricoles, qui a fait un voyage en Europe pour essayer de
défendre...
Le Président: M. le ministre.
M. Picotte: ...puis de convaincre les gens d'adhérer
à notre position, puis aller convaincre son collègue Landry qui,
soit dit en passant, va complètement à l'encontre de ce que
disent les gens du Parti québécois ici même à
l'Assemblée nationale. Harmonisez-vous donc, s'il vous plaît!
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Baril: M. le Président, le ministre pourrait-il
reconnaître que quand on parle de subventions agricoles, c'est
au-delà de 4 000 000 000 $ pour les producteurs de l'Ouest, et nos
quatre piliers, ce ne sont pas des subventions que les gouvernements donnent.
Pour protéger nos quatre piliers, ça ne coûte pas un cent
au gouvernement. Et quand le ministre Bernard Landry...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Baril: ...le futur ministre Bernard Landry s'exprime, c'est en
fonction de ça. Et comment le ministre peut-il aujourd'hui essayer
d'induire la population en erreur en disant que nos quatre piliers sont des
programmes subventionnés? Que le ministre nous l'explique. Qu'est-ce
qu'il défend? Quel intérêt a-t-il à défendre
les producteurs de l'Ouest? Pourquoi laisse-t-il son sous-ministre dire que
ça ne serait pas la catastrophe si les offices de commercialisation
étaient abolis? Comment explique-t-il ça? Il dit qu'il nous
défend, puis son sous-ministre fait exactement le contraire.
Le Président: M. le ministre.
M. Picotte: M. le Président, c'est très clair. Je
pense que nous avons le droit, au ministère de l'Agriculture, d'examiner
tous les scénarios.
Ça ne vient pas changer ce que nous défendons, M. le
Président, et je pense que ça, c'est facile à comprendre.
C'est facile à comprendre qu'on peut examiner toutes sortes d'autres
avenues, mais continuer de défendre et d'avoir la position qui est la
nôtre et qui est connue. Contrairement à ce que les gens disent,
contrairement à ce que M. Landry dit: «Par les accords du GATT,
dit M. Landry, on essaie de mettre de l'ordre dans tout ça.» C'est
M. Landry qui dit qu'il n'y a pas d'ordre, alors que, nous autres, nous
essayons de lui prouver le contraire, M. le Président. Nous essayons de
dire que les piliers agricoles, ça se défend bien parce que
ça ne vient pas mettre en péril qui que ce soit à travers
le monde dans ce qu'on appelle les exportations et les importations, M. le
Président. C'est ça qu'on explique. Et, durant ce
temps-là, le pèlerin Landry se promène partout pour
essayer de dire que le gouvernement du Québec n'a pas raison. Commencez
donc par convaincre les gens qui sont près de vous de se fermer la
trappe pour éviter de compromettre l'accord du GATT en notre faveur.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Baril: M. le Président, le ministre me permet-il de lui
répéter que ce que Bernard Landry défend, c'est quant aux
subventions dans l'Ouest?
Le Président: Votre question, s'il vous plaît!
M. Baril: C'est ça, M. le Président. Me permet-il
de lui expliquer...
Le Président: Quand même, M. le
député, vous savez fort bien qu'à la période des
questions les règles sont strictes. Vous devez poser une question.
Alors, allez-y avec une question, s'il vous plaît!
Une voix: Consentement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un
instant, juste une minute. Allez-y.
M. Baril: M. le Président, le ministre me permet-il de
dire que Bernard Landry, il condamne les subventions dans l'Ouest...
Le Président: Votre question, M. le député,
s'il vous plaît!
Une voix: C'est une question, ça.
M. Baril: Quand...
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: II a posé une question.
M. Baril: M. le Président, qu'est-ce que le ministre
entend faire des déclarations de son sous-ministre? Est-il prêt
à reconnaître, puisque c'est son principal conseiller qui ne croit
pas à nos offices de commercialisation puis que c'est lui qui nous
représente et qui nous défend au GATT, le ministre ne
considère-t-il pas que c'est pareil comme s'il mettait le renard dans le
poulailler pour surveiller la basse-cour?
M. Picotte: M. le Président... \ Le Président:
M. le ministre.
M. Picotte: ...je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit deux fois
en ce qui concerne mon sous-ministre qui peut travailler sur des
scénarios. Je pense qu'une troisième ou une quatrième fois
ne rallierait pas l'accord du député d'Ar-thabaska avec celui qui
vous parle. Donc, je vous le répète ad nauseam qu'il peut
travailler sur autre chose, tout en continuant, moi, comme ministre, à
défendre les piliers agricoles; vous le savez d'ailleurs très
bien. Mais uniquement pour être bien certain que vous sachiez ce que M.
Landry a dit en Mauricie, puis pour être bien sûr de ne pas vous
tromper, je vais finir de dire ce qu'il a dit complètement puis
ça va mettre le couvercle sur la marmite: Le métier de producteur
agricole est le seul qui n'est pas menacé de disparition car la mode de
manger n'est pas près de disparaître. Mais ça, ça
nous prendra une capacité d'adaptation et il faudra faire du
ménage dans les subventions. Alors, ça, si ça ne met pas
le couvercle sur la marmite...
Vous devez avoir une rencontre dans les plus brefs délais avec
lui pour lui dire de se taire en attendant que ça se signe.
Le Président: Alors, en question principale maintenant, M.
le député de Labelle.
Étalement de la mise en application de la taxe
provinciale sur les services
M. Léonard: M. le Président, la semaine
dernière, à New York, le ministre des Finances s'est vanté
de sa décision de s'harmoniser avec la TPS fédérale.
Aujourd'hui, le journal La Presse nous apprend que, face au
mécontentement de la population, aux pressions de l'Opposition et
à celles, maintenant...
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Allez-y.
M. Léonard: ...des députés libéraux
qui ont pourtant voté la loi, il y a deux mois et .demi, et même
une motion de bâillon pour la faire adopter, le gouvernement, maintenant,
cherche des moyens de réduire l'impact négatif sur
l'économie de l'introduction d'une taxe sur les services, l'habitation
ou les spectacles. À l'image
du premier ministre, qui qualifiait hier la défaite de son parti
dans Anjou de défaite victorieuse, il semble ici que l'on soit en face,
selon son expression aussi, d'une délicieuse taxe néfaste.
Est-il exact, comme le rapporte La Presse, que le gouvernement
désire maintenant taxer les services, l'habitation, les spectacles, mais
par étapes, en somme une série de gifles pour remplacer une
grosse baffe?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Levesque: M. le Président, tout en rappelant à
l'honorable député le contenu du programme du Parti
québécois et sa proposition d'avoir un remplacement de la taxe de
vente provinciale par une taxe sur la valeur ajoutée, ceci étant
dit - quelquefois, c'est un rappel de prudence, M. le Président, et
simplement l'expression d'une certaine amitié, pour ne pas que le
député de Labelle oublie le programme de son parti - je voudrais
rappeler à l'honorable député de Labelle que je n'ai pas
l'intention de commenter tous les articles qui peuvent paraître dans un
journal, des articles souvent écrits par des journalistes
chevronnés, mais, par contre, ce n'est pas en commentant des articles de
journaux que je prépare mon budget.
Le Président: En question complémentaire.
M. Léonard: M. le Président, afin que la population
sache vraiment à quoi s'attendre, un an et demi après avoir
annoncé l'harmonisation, qui est votre décision, le ministre des
Finances pourrait-il maintenant nous indiquer le rendement de la taxe sur les
services, telle qu'elle est toujours prévue maintenant? C'est un fait,
il peut nous le dire et nous dire aussi la valeur du remboursement de la taxe
sur les intrants pour les entreprises. Il l'avait promis à ce
moment-là, il n'a toujours rien fait.
Le Président: M. le ministre.
M. Levesque: M. le Président, je pense que le
député de Labelle ne fait pas un grand exercice de
mémoire. J'ai déjà répondu à cette question
alors qu'on a discuté justement du report de six mois qui avait
été suggéré fortement par les membres de
l'équipe ministérielle. À ce propos, je dois rappeler
à l'honorable député que je n'ai vu, dans l'article qu'il
évoque, aucune allusion à une pression du parti de l'Opposition.
(14 h 50)
Ceci étant dit, je voudrais simplement rappeler à
l'honorable député que les chiffres en question seront
disponibles. Nous avons toujours l'habitude de répondre bien clairement
aux questions. Nous l'avons fait lorsqu'il a été question d'un
report parce qu'il s'agissait, à ce moment-là, d'un report qui
avait des effets financiers sur la période donnée,
c'est-à-dire entre le 1er janvier 1992 et le 1er juillet 1992. La
question qu'on me pose est: Qu'est-ce que cette taxe rapporterait et quel
serait le coût des intrants pour une période subséquente?
Il faudra attendre, à ce moment-là, que le budget réponde
à cette question.
Le Président: Toujours en additionnelle.
M. Léonard: M. le Président, le ministre va
convenir avec moi qu'il ne donne pas de réponse et, depuis un an et demi
que nous nous posons la question, il n'y en a pas de réponse. Mais,
maintenant, comment le ministre des Finances, qui a haussé le fardeau
fiscal des entreprises d'au moins 500 000 000 $ sur la promesse non encore
tenue de rembourser les entreprises qui paient encore des taxes sur des
intrants, peut-il affirmer qu'il s'agit d'une taxe qui va améliorer la
compétitivité des entreprises, comme il l'a fait à New
York?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Levesque: M. le Président, on a parlé tout
récemment en cette Chambre de cohérence. On a parié du
discours qui doit justement avoir ces éléments de
cohérence et d'autres éléments semblables, mais les
questions du député de Labelle auraient besoin d'être
explicitées dans le sens suivant. C'est qu'il recherche à avoir
un nouveau report de la taxe sur les services et, en même temps, il
s'inquiète du fait que les entreprises auraient été
privées, justement à cause de ce report, de certains
remboursements sur les intrants. Alors, on ne peut pas tout avoir, vous savez.
Vous ne pouvez pas plaider en même temps la cause des entreprises et
dire: II faut absolument que vous imposiez cette taxe sur les services afin que
les entreprises puissent en bénéficier et, d'autre part, nous
reprocher d'avoir ou de vouloir imposer une telle taxe. Qu'on se branche, de
l'autre côté, et qu'on fasse preuve un peu de transparence et de
cohérence.
Des voix: Bravo!
Le Président: En question principale maintenant, M. le
député d'Ungava.
Enquête de la Sûreté du
Québec sur ie site d'enfouissement de Saint-Amable
M. Claveau: Oui, parions de transparence, M. le Président.
La semaine dernière, le ministre de la Sécurité publique
déclarait qu'une quinzaine d'enquêteurs étaient
affectés au dossier du site d'enfouissement de Saint-Amable. Je
présume donc qu'il s'agissait là de plus qu'une
vérification puisqu'on met autant d'effectif sur le dossier. Dans ce
dossier, des fonctionnaires ont affirmé, et je cite: «Jamais le
cabinet du ministre n'a poussé aussi fort pour
l'accélération d'un dos-
sier.» Il s'agit de l'octroi d'un permis d'exploitation pour un
site d'enfouissement de déchets de toutes sortes, j'imagine, de
déchets secs.
Une voix:...
M. Claveau: Non, non. C'est un site d'enfouissement de
déchets secs. N'essayez pas de...
Le Président: S'il vous plaît! M. le
député. S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député d'Ungava, votre question.
M. Claveau: J'espère que vous savez ce que c'est qu'un
dépotoir. C'est donc la bien connue compagnie...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Claveau: M. le Président, c'est la compagnie, j'imagine
bien connue, no 2842-7979 Québec inc.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: Ils vont comprendre plus facilement.
Le Président: Un instant! S'il vous plaît! Je
demande la collaboration des collègues. Allez-y avec votre question, M.
le député.
M. Claveau: Je voulais voir si la Chambre était attentive,
M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, M. le député d'Ungava,
vous avez la parole. Posez une question s'il vous plaît.
M. Claveau: C'est donc à la bien connue compagnie
2842-7979 Québec inc. que le ministère de l'Environnement a
émis, le 16 octobre 1991, un permis d'exploitation pour ce site
d'enfouissement. Ladite compagnie est la propriété d'hommes
d'affaires du comté de Brome-Missisquoi. C'est des gens bien connus du
ministre de l'Environnement et leur porte-parole n'est nul autre que Me
Pierre-Yves Méthot, ancien attaché politique du cabinet du
premier ministre.
Une voix: C'est moins drôle, là.
M. Claveau: Devant ces faits, M. le Président, est-ce que
le ministre de la Sécurité publique peut nous confirmer ici, pas
aux journalistes en dehors de la Chambre, ici dans cette Chambre, qu'il y a bel
et bien enquête sur le cas du site d'enfouissement de Saint-Amable
où des pressions indues auraient été faites de la part du
cabinet du ministre de l'Environnement?
Le Président: Alors, M. le ministre de la
Sécurité publique.
M. Ryan: Tout d'abord, M. le Président, quand le
député m'attribue des déclarations suivant lesquelles
j'aurais affirmé qu'il y avait 15 enquêteurs de la
Sûreté du Québec qui étaient au travail sur ce
dossier-là, il m'attribue des propos que je n'ai jamais tenus,
premièrement. Deuxièmement, je répète, comme je
l'ai déjà déclaré, que des allégations ayant
été faites au sujet de divers événements survenus
ces derniers mois, y compris le site d'enfouissement de Saint-Amable, la
Sûreté du Québec ayant été saisie de ces
allégations, fait enquête à ce sujet suivant les moyens
dont elle dispose et en observant les règles de discrétion qui
sont élémentaires en ces choses, et surtout en présumant,
tant que des preuves en sens contraire n'ont pas été recueillies,
de l'innocence des personnes qui ont pu être nommées en public,
souvent pour des motifs politiques bien plus que pour des motifs de recherche
de la justice. Je signalerais enfin au député d'Ungava que c'est
difficile que des pressions aient été faites dans ce cas-ci par
le cabinet du ministre de l'Environnement vu que c'est lui qui prenait la
décision, en toute hypothèse.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Le ministre de la
Sécurité publique conviendra-t-il que c'est devant cette Chambre
qu'il est redevable et qu'il est tout à fait normal qu'il ait à
répondre des agissements ou, enfin, des enquêtes qui pourraient
être menées sur les agissements des membres des cabinets, qui sont
payés avec des fonds publics pour bien gérer les deniers de
l'État et non pas pour...
Le Président: Alors, vous conviendrez, M. le'
député, que la dernière partie, c'est un préambule,
ça peut servir de préambule. Vous êtes en question
additionnelle, il n'y a aucun préambule. Posez votre question.
M. Claveau: Le ministre nie-t-il avoir déclaré
à La Presse, le 5 mars 1992, qu'il y avait bel et bien
enquête faite par l'escouade économique de la Sûreté
du Québec et qu'il y aurait, selon l'article, une quinzaine de policiers
affectés à cette enquête-là? Le nie-t-il?
Le Président: Alors, M. le ministre de la
Sécurité publique.
M. Ryan: D'abord, j'ai remarqué une chose. Aujourd'hui,
comme en certaines autres circonstances, plus le député monte le
ton, moins il
a l'air d'être sur de son affaire. des voix: ha, ha,
ha!
M. Ryan: Deuxièmement, je reconnais que je suis redevable
devant cette Chambre. Je pense que j'en donne le témoignage chaque fois
que l'occasion m'en est fournie. Il n'y a pas de débat entre nous
là-dessus. Troisièmement, je n'ai jamais dit - et même si
ça a paru dans un journal, ce n'est pas une parole d'évangile, je
l'ai déjà dit ici - qu'il y avait 15 enquêteurs qui
étaient au travail là-dessus. J'ai dit à maintes reprises,
je viens de le dire tantôt, que la Sûreté du Québec
fait enquête sur certaines allégations. Il n'y a rien de
mystérieux là-dedans, ça a été dit
clairement, mais ne me demandez pas d'autres détails, ça ne vous
regarde pas ici.
Des voix:...
Le Président: Alors, c'est la fin de la période de
questions. À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît!
Alors, sur une question de privilège, je vous demande... je vous
écoute, indiquez le privilège que vous voulez soulever. (15
heures)
M. Claveau: Oui, M. le Président. Est-ce qu'il me regarde,
en tant que parlementaire, membre d'une formation politique, de questionner le
gouvernement sur l'utilisation des deniers de l'État? Est-ce que
ça me regarde?
Le Président: Bon! Écoutez! Des voix:
Oui.
Le Président: Évidemment, vous posez une question,
là. Je comprends que c'est ui\e interrogation que vous posez, mais ce
n'est pas une question de privilège que vous invoquez, à ce
moment-ci, quant à moi. Alors, la question est close.
Tel qu'annoncé précédemment, maintenant, nous
allons passer aux votes reportés. Alors, nous allons procéder
maintenant. À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, tel
qu'annoncé précédemment, je mets maintenant au vote... MM.
les députés et Mmes les députées, s'il vous
plaît! M. le député de LaFontaine.
Tel qu'annoncé précédemment, je vais maintenant
mettre aux voix les motions suivantes. D'abord, la motion de M. le whip de
l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean proposant que
l'Assemblée nationale rejette le rapport du comité
Beaudoin-Dobbie déposé à la Chambre des communes le 28
février 1992, pour la motion d'amendement de M. le ministre
délégué aux Affaires intergouvemementales canadiennes.
Conformément à l'article 201, je mets d'abord aux voix la motion
d'amendement de M. le ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales canadiennes.
Mise aux voix de la motion d'amendement
à la motion de l'Opposition proposant
que l'Assemblée nationale rejette le
rapport Beaudoin-Dobbie
Cette motion se lit comme suit: Que la motion en discussion soit
amendée: a) en remplaçant, dans la première ligne, le mot
«rejette» par le mot «désapprouve»; et b) en
ajoutant, dans la deuxième ligne, après les mots
«Beaudoin-Dobbie» les mots «institué aux fins de
répondre aux revendications légitimes du Québec
et».
La motion ainsi amendée se lirait comme suit: «Que
l'Assemblée nationale désapprouve le rapport du comité
Beaudoin-Dobbie institué aux fins de répondre aux revendications
légitimes du Québec et déposé à la Chambre
des communes le 28 février 1992.»
Que les députés qui sont en faveur de cette motion
d'amendement... Oui?
M. Chevrette: M. le Président...
Le Président: Alors, il y a un vote qui est appelé,
à moins que... Il y a un vote. Nous allons donc voter. Que les
députés qui sont en faveur de cette motion d'amendement veuillent
bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme
Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M.
Levesque (Bonaven-ture), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argen-teuil), M.
Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (La-porte), M. Dutil
(Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros
(Laurier), M. Vallerand (Cré-mazie), M. Elkas (Robert-Baldwin), M.
Rémillard (Jean-Talon), M. Rivard (Rosemont), Mme Robic (Bourassa), M.
Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M.
Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson
(Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard
(Chambly), M. Blackburn (Roberval)...
Le Président: un instant, s'il vous plaît! alors, je
vais demander la collaboration de tous les collègues. c'est un vote,
ça se fait en silence. alors, allez-y!
Le Secrétaire adjoint: ...Mme Bleau (Groulx), M. Houde
(Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie
(Abitibi-Est), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M.
Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon
(Saint-Louis), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel
(Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis
(Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice),
M. Leclerc (Tasche-reau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rous-
seau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Or-ford), M. Williams
(Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Farrah
(Îles-de-la-Madeleine), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe),
M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin
(Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin
(Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun),
M. Forget (Prévost), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine),
Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron
(Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet
(Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette
(Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle
(Saint-Henri), M. Lafre-nière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M.
MacMillan (Papineau).
M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn
(Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis),
Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril
(Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau (Ungava), M. Dufour
(Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M.
Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette
(Marie-Victo-rin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice
(Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme
Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Trudel
(Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme
Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière) et M. Bélanger
(Anjou).
Le Président: Que les députés qui sont
contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: M. Libman (D'Arcy-McGee), M.
Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce) et M. Holden (Westmount).
Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?
Le Secrétaire: pour: 107 contre: 3
Abstentions: 0
Mise aux voix de la motion amendée
Le Président: Alors, la motion d'amendement est
adoptée. Maintenant, je vais mettre aux voix la motion, telle
qu'amendée, de M. le whip de l'Opposition officielle et
député de Lac-Saint-Jean. Cette motion se lit dorénavant
comme suit: «Que l'Assemblée nationale désapprouve le
rapport du comité Beaudoin-Dobbie institué aux fins de
répondre aux revendications légitimes du Québec et
déposé à la Chambre des communes le 28 février
1992.» Que les députés qui sont en faveur de cette motion
veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M.
Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois
(Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M.
Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau
(Ungava), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron
(Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme
Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice
(Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme
Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Trudel
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme
Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger
(Anjou).
M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François),
M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Levesque (Bonaventure), Mme Bacon
(Chome-dey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M.
Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté
(Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallerand (Crémazie),
M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Rémillard (Jean-Talon), M. RK/ard
(Rosemont). (15 h 10)
Le Président: Un instant, M. le secrétaire
général. J'en appelle à nouveau à la collaboration
de tous les collègues. C'est une question de décorum. M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques! S'il vous plaît!
Alors, allez-y.
Le Secrétaire adjoint: Mme Robic (Bouras-sa), M.
Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M.
Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Iles), M. Johnson (Vaudreuil),
M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M.
Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maciocia
(Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépanier
(Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M.
Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon
(Louis-Hébert), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M.
Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc
(Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay
(Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette),
M. Kehoe (Chapleau), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Fradet
(Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M.
Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger
(Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail
(Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M.
Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington
(Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron
(Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Aca-die), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet
(Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette
(Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle
(Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M.
MacMillan (Papineau).
Le Président: Maintenant, que les députés
qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous
plaît.
Le Secrétaire adjoint: M. Libman (D'Arcy-McGee), M.
Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce) et M. Holden (Westmount).
Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?
Le Secrétaire: pour: 107 contre: 3
Abstentions: 0
Le Président: Alors, la motion, tel qu'amendée, est
adoptée.
Au niveau des motions sans préavis, M. le leader du
gouvernement.
Motions sans préavis
M. Pagé: M. le Président, une motion d'envoi en
commission de l'économie et du travail. Je fais motion, suite à
une consultation avec l'Opposition...
Le Président: Un instant, M. le leader. Moi, je suis bien
prêt à vous écouter, mais j'ai de la difficulté
à vous entendre, et certainement d'autres collègues
également. Alors, allez-y.
Motion proposant que la commission
de l'économie et du travail procède
à
l'étude d'un décret concernant le
Parc
technologique du Québec
métropolitain
M. Pagé: M. le Président, vous savez que, pour le
leader, celui duquel il doit avoir l'attention la plus constante, c'est vous.
Ça me sécurise, je vous remercie et je procède à ma
motion.
Ma motion dit: "Que l'Assemblée nationale entérine l'envoi
en commission de l'économie et du travail d'un mandat visant
l'étude du décret no 37-91 concernant la modification du texte
des lettres patentes du Parc technologique du Québec
métropolitain, conformément à l'article 12 de la Loi sur
le ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science.»
Le Président: Y a-t-il consentement à l'adoption de
cette motion?
Une voix:...
Le Président: II y a consentement. Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
Toujours au niveau des motions sans préavis, maintenant, je vais
reconnaître Mme la ministre déléguée à la
Condition féminine. Mme la ministre.
Motion proposant de souligner la Journée
internationale des femmes
Mme Trépanier: M. le Président, je sollicite le
consentement, pour la deuxième fois en deux jours consécutifs,
des membres de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:
«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la
Journée internationale des femmes qui se tient annuellement le 8
mars.»
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement pour débattre cette motion?
Une voix: Comme nous avions donné notre parole hier,
aujourd'hui il y a consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Mme la
ministre déléguée à la Condition féminine et
responsable du dossier de la famille.
Mme Trépanier: Merci, M. le Président. En premier
lieu, vous me permettrez de regretter profondément la décision
disgracieuse, je dirais, de l'Opposition, hier, de retarder le débat de
cette motion.
Des voix: Oh! Oh!
Une voix: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît, à l'ordre!
Une voix: M. le Président, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant, M. le
député. Alors, sur une question de règlement, M. le leader
de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: M. le Président, il n'y a pas eu de
décision disgracieuse. Il y a eu, conformément et en toute
application correcte du règlement, refus de consentement hier pour
reporter à aujourd'hui. Nous tenons notre parole. Et si la ministre
commence sur une intervention du genre, je pense que c'est bien
dévaloriser sa propre motion, alors qu'on veut justement y
concourir.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine, si vous
voulez poursuivre votre intervention.
Mme Trépanier: Merci, M. le Président. Nous
laisserons donc la population juger.
Une voix: À la prochaine élection. Mme
Trépanier: Je vous dirai...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, je vous demande votre
collaboration pour écouter l'intervention de Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine.
Mme Violette Trépanier
Mme Trépanier: À l'aube du XXIe siècle, s'il
est un droit fondamental pour les femmes, c'est bien celui d'atteindre leur
autonomie financière, le droit de disposer librement des ressources
financières suffisantes pour satisfaire leurs besoins essentiels. C'est
Mme Gisèle Halimi qui disait que c'est dans la dépendance
économique que toutes les autres dépendances des femmes prennent
leur source. C'est souvent à cause de ces situations de
dépendance que les femmes sont aux prises avec des problèmes de
santé ou de violence. Les femmes sont en grande majorité
économiquement faibles. Quel que soit leur standard de vie familiale,
leur plus grand dénominateur commun est sans doute cette pauvreté
qui les tient dans la dépendance d'un conjoint, de la famille ou de
l'État.
M. le Président, les femmes sont les premières
touchées par la pauvreté. La précarité croissante
de l'emploi et le niveau de chômage élevé ne sont pas
étrangers à l'appauvrissement des femmes. Un rapport du Conseil
national du bien-être social intitulé «La femme et la
pauvreté; dix ans plus tard» nous indique que la proportion de
femmes chez les personnes pauvres n'a guère changé au fil des
ans. En 1987, comme en 1975, 59 % des adultes vivant dans la pauvreté
étaient des femmes. Le risque de se retrouver dans la pauvreté
est plus grand pour les femmes que pour les hommes. En 1987, 15 % des femmes
âgées de 16 ans et plus étaient pauvres comparativement
à 11 % des hommes. Parmi tous les groupes, c'est celui des familles
monoparentales dont le chef est une femme qui est le plus touché. 57 %
de ces familles vivent sous le seuil de la pauvreté. À ce propos,
j'ajouterai que les problèmes auxquels sont confrontées les
femmes chefs de famille monoparentale découlent d'un ensemble de causes.
Parmi celles-ci, on retrouve l'absence d'aide de . la part du parent absent. Le
non-paiement de la pension alimentaire a également des
conséquences néfas- tes sur la femme et les enfants et il
constitue un facteur important de la féminisation de la
pauvreté.
Peut-on imaginer qu'une rupture d'union puisse signifier pour la plupart
des femmes et de leurs enfants une baisse catastrophique d'au-delà de 73
% du niveau de vie, alors que celui de l'homme augmente
généralement de plus de 40 %? C'est malheureusement la triste
réalité. Un autre facteur de pauvreté, c'est
l'insuffisance des gains ou l'impossibilité même de travailler,
que ce soit en raison de la situation personnelle, de la situation du
marché du travail ou encore de la responsabilité des soins des
enfants.
M. le Président, de nombreuses femmes doivent quotidiennement se
battre pour améliorer leurs conditions de vie et ainsi lutter contre la
pauvreté qui les afflige. Elles ne ménagent aucun effort pour
concrétiser leur droit à l'égalité et à
l'autonomie et pour faire en sorte que s'actualise leur droit au travail. Dans
notre système social où la participation au marché du
travail est considérée comme un moyen privilégié
pour atteindre l'autonomie financière, il faut absolument en garantir le
libre accès aux femmes. Il ne fait aucun doute que c'est par le biais de
l'accès en emploi et à l'égalité en emploi que nous
pourrons véritablement aider les femmes et ainsi
rééquilibrer leur situation économique qui marque un
retard inacceptable en 1992. (15 h 20)
Les changements démographiques et sociaux, de même que les
bouleversements structurels majeurs qui ont ébranlé
l'organisation du travail et marqué le processus de modernisation de la
société ont transformé la vie des femmes beaucoup plus que
celle des hommes. C'est avec difficulté que les mentalités ont
tenté de suivre le rythme des mutations. Le monde du travail, tout comme
la société, garde encore l'image stéréotypée
de femmes qui quittaient le marché du travail pour se marier puis avoir
des enfants, oubliant ainsi d'investir dans leur formation, leur
carrière et leur sécurité financière. Ce beau cadre
a éclaté et seuls quelques nostalgiques pensent encore qu'on peut
recoller les morceaux.
Le sombre réalisme de ces données pourrait nous
entraîner à entrevoir l'avenir avec pessimisme. Pourtant, ce n'est
pas le cas. La volonté des femmes elles-mêmes de transcender ces
erreurs historiques et l'évolution de la société, trop
lente, bien sûr, mais quand même réelle, nous incitent
plutôt à un optimisme réaliste.
La situation des femmes s'est améliorée au cours de la
dernière décennie. Elles sont de plus en plus nombreuses à
prendre part à l'économie de notre société et
à occuper un emploi rémunéré. Présentement,
elles forment 43,7 % de la main-d'oeuvre québécoise. De ce
nombre, 60 % sont des femmes ayant des enfants d'âge préscolaire.
Leur revenu personnel moyen s'est certes accru, de 35 % de 1971 à 1989,
mais demeure toutefois inférieur au revenu des
hommes.
Dans les années quatre-vingt, la part des femmes dans les
professions les mieux rémunérées a connu une hausse
considérable. En agriculture, par exemple, le nombre de femmes
collaboratrices a augmenté de 35 %. Du côté du secteur
privé, on note que le taux de survie des entreprises après cinq
ans est deux fois plus élevé lorsqu'elles sont dirigées
par des femmes.
Tous ces efforts pour s'insérer dans le grand courant des
activités productives, les femmes ont ainsi contribué aux
progrès économiques et sociaux du Québec. Des pas de
géant ont été franchis et plusieurs barrières sont
maintenant levées dans le domaine de l'emploi pour les femmes. Leur
progression dans les secteurs de responsabilité et d'initiative peut
laisser croire que l'égalité entre les deux sexes est atteinte.
Mais ce bilan doit être très nuancé. Malgré les
gains sur lesquels elles peuvent désormais compter, les femmes paient
encore un lourd tribut sur le plan professionnel parce qu'elles doivent
naviguer entre les exigences du marché du travail et les
impératifs de l'univers domestique et familial que les mentalités
leur réservent toujours.
À ces éléments, s'ajoutent des interruptions
fréquentes de carrière résultant de maternités, de
périodes de chômage et de travail à temps partiel qui
limitent la progression de l'autonomie économique des femmes. Les
inégalités de revenus et de statut entre les hommes et les femmes
compromettent de façon significative la sécurité
économique d'une partie importante de la population active. Cette
situation risque d'imposer à l'État et à la
génération montante un très lourd fardeau. avec une
main-d'oeuvre féminine qui pourrait atteindre 50 % dans les
années 2000, le marché du travail doit s'adapter et les
mentalités doivent changer, en commençant par la revalorisation
du travail que les femmes exécutent par tradition. bien qu'elles aient
réalisé de nombreux gains dans le monde du travail, les femmes
continuent d'être cantonnées dans certains secteurs
d'activité, notamment le secteur des services, le travail administratif,
le domaine des textiles, de la fabrication, des soins de santé.
malgré une plus grande diversification des choix professionnels, un
niveau accru de scolarisation et une présence plus grande des femmes
dans des postes de pouvoir, des phénomènes comme la
ségrégation professionnelle et les écarts salariaux entre
les hommes et les femmes perdurent.
Les femmes sont conscientes que l'éducation et la formation
professionnelle sont des moyens importants pour arriver à leur pleine
intégration au marché du travail. Elles savent pertinemment que
leur activité professionnelle ainsi que leur stabilité dans
l'emploi sont directement liées à leur niveau de qualification.
Malgré une tendance à la progression parmi les entrepreneures,
les cadres, les professionnelles de niveau supérieur, les femmes
occupent massivement des emplois à temps partiel, des emplois de niveau
hiérarchique inférieur, moins bien rémunérés
et où les possibilités d'avancement et les avantages sociaux sont
beaucoup moindres. Le rythme accéléré des changements
technologiques et la mondialisation des échanges exigent une
main-d'oeuvre pleinement qualifiée pour permettre au Québec de
demeurer productif et compétitif. Actuellement, le fait que les femmes
soient concentrées dans un nombre restreint d'emplois ne leur permet pas
de développer des compétences pouvant les préparer
à occuper de nouvelles fonctions. Devant un tel constat, il est
aisé de croire que l'accès à la formation professionnelle
constitue pour elles un enjeu important qui doit refléter
fidèlement les réalités du marché du travail et les
préparer à y jouer un rôle.
Notre société est en pleine évolution. Nous sommes
à un carrefour, tant sur le plan national qu'international. Le
Québec est plus que jamais confronté à des défis de
taille. La conjoncture actuelle, les bouleversements du marché de
l'emploi, la situation des femmes sur le marché du travail et la
diversité de la composition de la main-d'oeuvre active sont autant de
facteurs qui justifient une conscientisation et une action concertée
axée sur l'atteinte de l'équité en emploi.
L'égalité économique entre les hommes et les femmes, le
développement des compétences et la croissance économique
du Québec sont des intérêts indissociables et convergents.
Relever les défis qui s'y rattachent profitera à l'ensemble de
notre société.
Au cours des deux dernières décennies, la
détermination des femmes et des groupes qui les représentent a
poussé les gouvernements à l'action. Lois, politiques et
programmes ont permis, dans une certaine mesure, de résorber une partie
importante des inégalités dans les droits.
L'égalité théorique est atteinte, mais il faut
désormais passer de la rhétorique à la pratique. C'est ce
que visera la politique de condition féminine que le gouvernement entend
adopter et mettre en oeuvre au cours des mois qui viennent.
M. le Président, j'ai la conviction qu'aujourd'hui, comme demain,
l'autonomie financière est le fondement du bien-être des femmes et
influence largement d'autres aspects de leur vie. De l'autonomie
économique des femmes découleront des améliorations
sociales importantes. Les moyens à prendre pour arriver à
féminiser l'économie doivent être envisagés dans
tous les milieux. Le moment est venu de circonscrire les valeurs qui
contribuent à notre identité. Il nous faut non seulement repenser
la culture de nos entreprises, l'organisation de la main-d'oeuvre et nos
institutions qui ont pu avoir une influence sur le degré de
pauvreté des femmes, mais il faut aussi se questionner sur les bases
mêmes de notre société. Les femmes du Québec
attendent de nous cette nouvelle prise de conscience
collective.
M. le Président, replacer les femmes dans le grand courant de
l'économie exige détermination et courage de la part des hommes
et des femmes qui, à tous les niveaux, élaborent et
exécutent les politiques sociales et économiques. Aux femmes
d'aujourd'hui et à la relève, je ne peux que me servir de cette
occasion de la Journée internationale des femmes, que nous avons
célébrée dimanche, pour leur promettre d'orienter toutes
mes énergies vers l'objectif d'égalité économique
qui constitue la clé de la véritable liberté. Je vous
remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine. Sur cette
même motion, je reconnais Mme la députée des
Chutes-de-la-Chaudière.
M. Bélisle: M. le Président, s'il vous
plaît... Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.
M. Bélisle: ...si vous permettez. Avec le consentement de
l'Opposition, j'aimerais donner les avis pour permettre aux commissions de
siéger.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement pour déroger aux motions sans préavis?
Une voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Alors,
nous allons passer, après ce consentement, à l'item «Avis
touchant les travaux des commissions». M. le leader adjoint du
gouvernement. (15 h 30)
Avis touchant les travaux des commissions
M. Bélisle: Merci, M. le Président. J'avise cette
Assemblée qu'aujourd'hui, de 15 h 30 à 18 h 30 et de 20 heures
à 22 heures, ainsi que demain, le jeudi 12 mars 1992, de 9 h 30 à
12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de
l'aménagement et des équipements poursuivra sa consultation
générale dans le cadre de l'étude du projet de loi 412,
Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant
diverses dispositions législatives.
De plus, M. le Président, de 15 h 30 à 18 h 30 et de 20
heures à 22 heures, ainsi que demain, le jeudi 12 mars 1992, de 9 h 30
à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission
des affaires sociales poursuivra sa consultation générale sur le
document de consultation intitulé «Partenaires pour un
Québec compétent et compétitif» et sur le projet de
loi 408, Loi sur la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre.
Enfin, M. le Président, de 16 h 30 à 18 h 30 et de 20
heures à 23 heures, ainsi que demain, le jeudi 12 mars 1992, de 9 h 30
à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif, la commission
de l'économie et du travail poursuivra l'étude de la proposition
tarifaire d'Hydro-Québec pour l'année 1992. Je dépose les
avis.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint,
les avis sont déposés. Je vous avise qu'aujourd'hui 11 mars 1992,
après les affaires courantes, à la salle 1.38 de l'édifice
Pamphile-Le May, la Commission d'étude des questions afférentes
à l'accession du Québec à la souveraineté se
réunira en séance de travail. Demain, 12 mars 1992, de 9 h 30
à 12 h 30, au Club sportif Laurier, à Québec, la
Commission d'étude sur toute offre d'un nouveau partenariat de nature
constitutionnelle se réunira en séance publique.
Motions sans préavis
Alors, nous reprenons les motions sans préavis. Sur la motion
proposée par la ministre déléguée à la
Condition féminine, qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée
nationale du Québec souligne la Journée internationale des femmes
qui se tient annuellement le 8 mars», je cède la parole à
Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Mme la
députée.
Reprise de la motion proposant de souligner la
Journée internationale des femmes
Mme Denise Carrier-Perreault
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président.
Effectivement, dimanche dernier, c'était le 8 mars, la Journée
internationale des femmes. On sait qu'il y a eu plusieurs activités
durant cette journée-là et que les activités se
poursuivent aussi durant la semaine. C'est effectivement un moment tout
à fait privilégié pour réfléchir à la
situation des femmes québécoises. Si c'est un moment qui porte,
bien sûr, à la réflexion, il faudrait aussi que cette
réflexion soit concrétisée dans l'action. Il faut qu'on
continue aussi d'agir dans le bon sens parce que, voyez-vous, malgré les
immenses efforts qui ont été déployés depuis une
vingtaine d'années et les progrès qui ont été
réalisés, force nous est de constater que les mots
«pauvreté», «violence»,
«discrimination» et «harcèlement» font
malheureusement encore partie du vécu quotidien de plusieurs femmes au
Québec. Comme vous le savez, M. le Président, la Journée
internationale des femmes se déroulait cette année sous le
thème - particulièrement à propos en cette période
de récession économique - «Quand le E n'est plus
muet», portant justement sur la situation économique des femmes et
invitant à une réflexion dans cette voie. Comme le disait la
présidente du Conseil du statut de la femme, Mme Marie Lavigne,
et je la cite: «Tant que les femmes au travail n'obtiendront que 68 % -
je fais une parenthèse; on sait que, cette année, on a vu
malheureusement que l'écart était de 62 % - du salaire des
hommes, tant que de nombreuses femmes chefs de famille vivront sous le seuil de
la pauvreté et tant que des femmes n'oseront pas sortir seules, non pas
parce que le secteur est dangereux, mais simplement parce qu'elles sont femmes,
le 8 mars sera toujours une belle occasion, un moment privilégié
pour pousser la réflexion.» seulement, cette journée ne
doit pas servir uniquement à pousser la réflexion sur un sujet
déterminé ou à regarder le chemin parcouru. elle doit
aussi servir de tremplin à des revendications proposées qui
aboutiront, en toute logique, à des actions concrètes de la part
des différents intervenants et des gouvernements. ces actions,
jumelées à une volonté politique d'agir, doivent
«prioriser» la pauvreté chez les femmes, de même que
la violence faite aux femmes. d'ailleurs, les manchettes de plus en plus
nombreuses et criantes des journaux ne trompent pas face à ces deux
constantes qui caractérisent le lot de la vie quotidienne de milliers de
femmes, ici, au québec.
On sait que la pauvreté se féminise. Son importance chez
les familles monoparentales est sans contredit, principalement si elles sont
dirigées par une femme seule et quand, en plus, cette femme seule est
jeune. Cinq femmes pour un homme au Québec sont chefs de famille. Depuis
1980, il y a eu un accroissement de cette cellule familiale, le Québec
venant en tête des provinces canadiennes. Elle concerne 21 % de
l'ensemble des familles avec enfants. Quand on regarde l'écart, il est
à noter que les familles avec conjoint, conjointe ont augmenté de
8,5 % entre 1976 et 1986, comparativement à 59 % pour les familles
monoparentales. La notion même de la famille traditionnelle est remise en
question avec l'accroissement des divorces, qui placent encore les femmes dans
une situation économique précaire par rapport aux hommes. Eux,
dans une telle situation, voient leurs revenus augmenter de 30 %,
comparativement à 27 % de baisse pour les femmes vivant la même
situation. En 1989, 40 % des familles étaient considérées
comme pauvres si le chef de ladite famille était une femme. Cette
proportion grimpe à 94,8 % si la mère est âgée de
moins de 25 ans, pour passer à 68,2 % si elle est âgée de
25 à 34 ans et, enfin, à 42 % si elle a plus de 35 ans.
Il est évident, de par ces chiffres, que l'égalité
économique des femmes est loin d'être acquise. En effet, tant que
les femmes se retrouveront dans des emplois peu rémunérés,
dont les tâches sont sous-évaluées, ce qui a pour
conséquence directe qu'elles sont moins rémunérées
que les hommes qui exercent des fonctions jugées équivalentes,
tant que ça durera, on les maintiendra dans la pauvreté. Par
conséquent, un des moyens concrets pour permettre aux femmes d'atteindre
cette autonomie économique est de favoriser et de permettre l'adoption
d'une loi proactive en matière d'équité salariale. En
effet, l'objectif premier d'une telle loi est de corriger les discriminations
salariales entre les deux sexes. C'est d'ailleurs ce que recommande la
Commission des droits de la personne dans son rapport déposé tout
récemment.
Depuis 1970, M. le Président, qu'on clame «à travail
équivalent, salaire égal», il est plus que temps que la
ministre déléguée à la Condition féminine
abonde et agisse en ce sens. Il est illusoire de penser et même de croire
que des programmes d'accès à l'égalité constituent
la panacée aux difficultés économiques des femmes. Ce
n'est pas parce qu'on favorise l'embauche d'une femme à un poste qu'elle
se retrouvera dans la même situation salariale que ses collègues
masculins pour un travail équivalent. Il est sûrement souhaitable,
M. le Président, d'ouvrir le plus possible aux femmes l'accès
à des postes traditionnels, mais il faut aussi se rendre à
l'évidence et constater que ces programmes ne permettent pas les
résultats escomptés. Ils ne viendront pas, non plus, corriger la
sous-évaluation chronique des emplois dits traditionnels. d'autres
provinces, tels le manitoba, l'ontario, la nouvelle-ecosse,
l'île-du-prince-édouard ainsi que le nouveau-brunswick, ont
déjà leur législation sur l'équité
salariale. pourtant, le québec a été la première
juridiction à reconnaître la légalité du principe de
l'équité salariale, et ce, depuis 1976, en enchâssant dans
la charte des droits de la personne l'article 19, cet article qui permet
à une personne de porter plainte à la commission des droits de la
personne si elle se sent lésée et discriminée. cependant,
ce recours est très difficile d'accès pour des personnes non
soutenues par une organisation syndicale et il est important de souligner que
70 % de la main-d'oeuvre féminine est non syndiquée. il s'agit
d'un processus qui est long et qui est coûteux aussi. encore une fois,
les femmes se retrouvent avec des droits qu'elles ne peuvent faire valoir. dans
le contexte de réflexion récente axée sur une plus grande
accessibilité à la justice, ça semble paradoxal et c'est
inacceptable, car, encore une fois, les femmes doivent parler haut et fort pour
exiger des mesures établissant dans les faits leur égalité
de droit.
La progression pour diminuer l'écart salarial entre les femmes et
les hommes est trop lente depuis 25 ans pour s'en satisfaire et espérer
qu'elle continue pour qu'un jour on arrive à atteindre
l'équilibre, et ce, quand c'est sur une base volontaire. Aujourd'hui, en
1992, les femmes ne gagnent encore que les deux tiers du salaire des hommes -
on en parlait tout à l'heure, 62 % cette année, d'après
les chiffres de 1989 - et ça, c'est pendant leur vie active,
lorsqu'elles sont
sur le marché du travail. On parle de salaire ici, M. le
Président. Quand on pense que les allocations de remplacement du revenu
- on pense ici à l'assurance-chômage, aux régimes de
retraite, aux pensions - sont aussi basées sur les salaires des femmes,
sur la rémunération, bien, c'est évident, et on doit s'en
rendre compte, qu'on les maintient dans la pauvreté tant et aussi
longtemps qu'on refuse de se rendre à l'évidence qu'une loi
proactive sur l'équité salariale est justifiée,
légitime et nécessaire. (15 h 40)
C'est d'ailleurs, comme je le mentionnais, la recommandation aussi de la
Commission des droits de la personne qui nous expliquait, en plus, de par des
études qui ont été consultées lors de la confection
de ce rapport, que la moitié des écarts observés -
là on parle des 37,9 % - s'expliquerait par la discrimination salariale,
principalement celle qui résulte de la ségrégation
professionnelle. Si une partie de cet écart, la moitié,
s'explique par toutes sortes de conditions, quand on parle de formation,
d'éducation, de taux de syndicalisation, de durée du travail, il
est très important de se rappeler que la moitié est aussi due
à ce genre de ségrégation professionnelle et de
sous-évaluation des emplois féminins.
M. le Président, bien sûr que, tout comme ma
collègue, je souscris pleinement à la consécration
officielle d'une journée internationale des femmes, mais je vous assure
que, parfois, je me prends même à rêver qu'un jour on n'aura
plus besoin d'avoir une journée internationale des femmes, car ça
signifierait, à toutes fins pratiques, que dans les faits et en droit
les femmes auraient atteint leur pleine et entière
égalité.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière. Sur cette même
motion, je reconnais maintenant Mme la whip adjoint du gouvernement et
députée de Groulx. Mme la députée.
Mme Madeleine Bleau
Mme Bleau: Merci, M. le Président. Suite à la
Journée internationale des femmes qui s'est tenue le 8 mars dernier, je
suis très heureuse de vous entretenir de l'évolution de la
situation des femmes, de leurs acquis et des nouveaux enjeux qui entourent la
condition féminine. Je me dois également de profiter de
l'occasion pour souligner le chemin parcouru au cours des dernières
décennies, ce qui a eu pour effet de modifier la structure de la
société, ici, au Québec, mais également ailleurs
dans le monde.
M. le Président, de dures batailles ont été
livrées pour l'amélioration de la condition féminine. Il
est important de souligner que le gouvernement libéral du Québec
y a contribué par la mise sur pied de mesures concernant, entre autres,
la réintégration à l'emploi, le retour aux études,
le soutien aux families et les programmes de crédits d'impôt,
mesures qui furent introduites pour tenter de répondre aux attentes
légitimes des femmes au Québec. Bien du chemin a
été parcouru, et il reste encore de nombreux défis
à relever.
Mais, aujourd'hui, à l'aube de l'an 2000, c'est merveilleux de
pouvoir constater que la femme joue enfin un rôle clé dans la
société. Je pense ici aux femmes, de plus en plus nombreuses, qui
sont chefs d'entreprise et qui contribuent à l'amélioration de
notre économie; je pense également à toutes celles qui
occupent des postes clés sur le marché du travail. Voilà
des données concrètes qui démontrent les pas de
géant gui ont été franchis.
Egalement, M. le Président, il ne saurait être question de
passer sous silence les changements de mentalité qui ont eu lieu au sein
de la famille québécoise. Je parle ici de l'éducation des
enfants, du partage des tâches, bref, de la structure familiale qui a
été amenée à s'adapter aux nouvelles
réalités sociales, et ce, pour le bien de tous.
Dans tout cela, on ne peut passer sous silence le rôle de la femme
au foyer qui a, lui aussi, grandement évolué. En effet, qui ne se
souvient pas des femmes au foyer d'il y a une quarantaine d'années, dont
le travail n'était certes pas des plus valorisés? À cette
époque, elles vivaient dans des conditions difficiles, tant sur le plan
humain et social que sur le plan matériel. Les ressources qui leur ont
été données depuis ont contribué à leur
faciliter la tâche. Mais le plus important, M. le Président, c'est
que le rôle de la femme au sein de la société, qu'elle soit
sur le marché du travail ou qu'elle oeuvre au foyer, a été
grandement revalorisé, et cela, c'est probablement l'un des acquis les
plus importants.
M. le Président, j'aurais aimé pouvoir faire un constat
entièrement positif. Malheureusement, il existe encore de sombres
réalités auxquelles nous devons faire face. Je parle ici du
phénomène de la violence conjugale qui frappe durement de
nombreuses familles québécoises; de l'équité
salariale qui est difficile à obtenir; des familles monoparentales dont
le chef est une femme et qui doivent, encore trop souvent, faire face au
phénomène de la pauvreté. Le partage des tâches et
des responsabilités, pourtant essentiel à l'épanouissement
des femmes, n'est malheureusement pas omniprésent dans tous les foyers
québécois. Tout cela, M. le Président, nous rappelle que
malgré des améliorations évidentes à la condition
féminine, il reste encore du chemin à parcourir. Il est dommage
qu'encore aujourd'hui en 1992 nous ayons à faire des constatations de
cette sorte. Ce qui est encore plus dommage, c'est qu'un trop grand nombre de
femmes doivent faire face à ces dures réalités.
Bien des choses ont changé, et heureuse-
ment! Les luttes acharnées qu'elles doivent mener ne le sont plus
clandestinement. Les femmes ne sont plus seules à travailler pour
l'amélioration de leurs conditions de vie sociale ou économique.
Il est maintenant reconnu qu'améliorer le sort des femmes c'est
améliorer la société pour le bien de tous.
Je le disais tout à l'heure, bien du chemin reste à
parcourir et c'est à nous, en cette Chambre, qu'il revient de nous
impliquer concrètement dans cette lutte à
l'égalité, au respect et à la reconnaissance. Je suis
quand même optimiste, M. le Président. Nous saurons relever nos
manches et participer activement à cette lutte qui nous mènera
sur la route où, enfin, les femmes et les hommes vivront dans l'harmonie
parfaite, au sein d'une société plus juste et plus
égalitaire. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Bleau. Sur cette même motion, je reconnais
maintenant Mme la présidente de la commission de l'éducation et
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Mme la
députée.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. J'ai eu le sentiment
cette année, à l'occasion du 8 mars, de vivre en quelque sorte le
Noël des femmes. Durant toute la journée diverses activités
ont eu lieu, et j'avais cette impression que nous avons au moment de la
Noël quand on met de côté ses divergences et ses
différences et que l'on retrouve un esprit plus ouvert, disposé,
si vous voulez, au genre humain, et qu'on retrouve surtout un climat familial.
J'avais ce même sentiment. C'est avec étonnement que j'ai
retrouvé cette expression, «le Noël des femmes», dans
un papier d'un chroniqueur du journal La Presse - pour ne pas nommer M.
Foglia - qui, lui aussi, qualifiait le 8 mars de «Noël des
femmes».
Mais ce n'est pas Noël toute l'année. C'est peut-être
pour ça qu'on s'en fait un une fois par année. C'est ça,
finalement, la réalité du 8 mars de 1992 qui s'est
célébrée dans mon quartier, dans le bas de la ville de
Montréal, sous le thème «De la détresse et de
l'enchantement». C'est, finalement, cette ambivalence constante que l'on
sent dans le dossier de l'égalité des conditions de vie, de la
promotion de la situation des femmes.
La détresse et l'enchantement. La détresse, M. le
Président, est-ce qu'il est besoin de rappeler qu'au moment même,
à la fin de cette décennie, où les femmes, depuis presque
40 ans de lutte, pensaient avoir obtenu avec l'égalité juridique
de bonnes chances de bien se positionner pour l'égalité
économique, au moment même où elles pensaient enfin avoir
saisi ce qu'il fallait pour diminuer la pauvreté qui se conjugue
toujours au féminin... Comme je le disais, M. le Président, le
grand ménage des lois sexistes a été
complété. On l'a vu notamment et on l'a vraiment finalisé
l'automne passé avec la réforme du Code civil, mais c'avait
été entrepris bien avant nous, faut-il le rappeler, par des
femmes qui ont siégé ici à cette Assemblée depuis
maintenant 30 ans. (15 h 50)
Aussi, au moment où les femmes pensaient pouvoir
bénéficier de leur scolarisation accrue... C'est vertigineux,
finalement, cette ascension des femmes dans l'ensemble de la scolarité,
M. le Président, qu'elles soient de niveau secondaire, collégial,
ou universitaire, et pourtant bien loin d'être ce qu'on pouvait imaginer,
loin de ce que les femmes qui ont combattu avant nous pouvaient imaginer, voir
enfin se réaliser leurs rêves d'égalité
économique - ça a retourné à l'envers. C'est
incroyable de penser que, cette année, à diplôme
égal, la comparaison du salaire d'une femme et d'un homme, ça ne
s'est pas amélioré, ça s'est aggravé. Pensez que
ça a été à 66 %, à peu près, le
salaire qu'une femme, à diplôme égal, gagnait, en
comparaison avec celui d'un homme. Il faut voir que c'est vraiment très
lent, la progression, parce qu'au début du siècle l'écart
entre ce qu'une femme gagnait, en comparaison de ce qu'un homme gagnait,
était de 55 %. Ça veut donc dire qu'en pas loin de 70 ans, c'est
à peu près 11 % d'amélioration. Même à ce
rythme-là, l'an passé, j'avais calculé que pour atteindre,
à diplôme égal, l'égalité économique,
il fallait compter jusqu'à l'an 2272.
Alors, vous comprenez que le désenchantement, cette année,
c'est de se rendre compte que, loin de s'améliorer même lentement,
la situation s'est détériorée, et ce n'est plus 66 %, mais
62 % du salaire d'un homme qu'une femme gagne, à diplôme
égal. Ça, c'est extrêmement inquiétant parce que
ça veut donc dire que ça ne s'améliore plus. Comment on
fait pour que ça ne s'aggrave pas? C'est ce que j'aurais aimé
entendre de Mme la ministre déléguée à la Condition
féminine. J'espère qu'elle aura l'occasion, lors de sa
réplique, de nous dire les moyens qu'elle entend prendre.
Moi, les deux dossiers dont je m'occupe ici, dans cette
Assemblée, pour l'Opposition, c'est le dossier de la justice et le
dossier de la main-d'oeuvre, de la sécurité du revenu et de la
formation professionnelle. À dire vrai, dans ces deux
dossiers-là, le fait est que je n'ai rien vu se passer. Au contraire, ce
qui m'a beaucoup inquiétée, c'est de constater que la ministre,
dans le fond, n'était pas vraiment écoutée. On s'entend,
je pense bien, des deux côtés, pour lui reconnaître de la
bonne volonté, mais ce n'est pas évident de la part de ses
collègues.
Elle était assise, au Sommet de la justice, à
côté du ministre de la Justice. Je sais que l'envie a dû lui
prendre de lui donner de grands coups de coude quand il a refusé, entre
autres, une demande qui était faite, au Sommet de la justice,
de mettre sur pied un comité de la condition féminine au
ministère de la Justice. Il s'est demandé si ce serait efficace.
Imaginez-vous qu'il y a des ministères où ça existe depuis
maintenant 15 ans. Même le ministère de l'Agriculture a mis sur
pied un Bureau de la condition féminine et combien d'autres
ministères, parce que c'est une manière de faire avancer la cause
des femmes au sein de tous les programmes du ministère, où on
peut être tenté de perdre ça de vue, à un certain
moment donné. Non seulement le ministre de la Justice, qui aurait pu
facilement...
Comme l'a bien rappelé une femme juge de la Cour
supérieure qui, elle, réclamait qu'il y ait un redressement quant
à la nomination des femmes juges, est-ce que c'est normal qu'au moment
où on se parle seulement 9 % des juges soient des femmes? Quand on sait
que, devant la Cour supérieure, 80 % du temps des juges est
consacré aux questions de désaccords, de crises familiales, lors
de séparations ou de divorces. Est-ce que c'est normal qu'il n'y en ait
que 9 % qui sont des juges? Et ça, ce n'est pas une fatalité.
Chaque nomination de juge, c'est fait par le ministre de la Justice. C'est lui
qui en est redevable. Il y a des comités de sélection, je veux
bien le croire, mais il nomme les gens qui siègent aux comités de
sélection.
Ce que le Conseil du statut de la femme demandait au ministre,
c'était simple, ça ne coûtait pas grand-chose. Il aurait
été facile... Moi, ça m'a surprise... Cet
après-midi-là, il aurait pu facilement sortir de là en
étant applaudi, un peu comme un héros. Il s'agissait de mettre
sur pied un bureau de la condition féminine dans son ministère de
la Justice et d'accepter au moins de toujours nommer une femme sur ces
comités de sélection quand il y en avait trois qui
siégeaient, comme le Conseil du statut souhaitait qu'il y ait cinq
membres pour la sélection des juges, dont deux femmes. Ce n'était
pas si compliqué. Ce n'était même pas ce que la femme juge
qui représentait la Conférence des juges est venue, elle,
demander, c'est-à-dire une nomination par alternance. Puis, elle a dit
au ministre que, même en nommant par alternance à la Cour du
Québec, où il y a déjà une certaine
amélioration, on n'aurait pas d'égalité avant l'an 2010.
Alors, vous savez, ça, c'est pour ma fille ou la fille de ma fille. Ce
n'est quand même pas pour notre génération. Le ministre,
finalement, a dit non. Je pense que notre collègue, la
députée de Dorion, ministre déléguée
à la Condition féminine, a pas mal de pain sur la planche, avec
son collègue de la Justice, et avec son collègue de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle.
Écoutez, M. le Président, il y a un projet de loi qui est
déposé devant l'Assemblée. On est en commission
parlementaire. Moi, quand je vais quitter, c'est pour aller entendre des
mémoires sur le projet de loi 408. Il y a un projet de loi qui
crée la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre. Il y a un énoncé de
politique, n'est-ce pas, qui a été publié au mois de
décembre dernier, puis qui lance le grand défi au Québec
d'être compétent et compétitif. Il n'y a pas un mot, pas
une ligne sur l'équité, sur les problèmes, sur les
tendances lourdes. En matière de main-d'oeuvre, ce sont les lois du
marché qui jouent. Les tendances lourdes, en matière de
main-d'oeuvre, c'est d'éliminer finalement ceux qui ne peuvent pas - je
m'excuse de l'expression - «fitter» dans les modèles les
plus performants, c'est-à-dire éliminer les jeunes parce qu'ils
n'ont pas d'expérience, les gens d'âge moyen parce que c'est moins
payant que de leur donner, si vous voulez, une formation technologique, puis
les femmes, parce que les femmes, on ne peut pas se fier à ça!
Ça part des fois, M. le Président, parce que ça a des
bébés. Ça finit, si vous voulez, par prendre des
congés de maternité puis des congés parentaux.
Je vais terminer là-dessus parce que je sais que mes
collègues en ont beaucoup à dire, mais j'invite Mme la ministre
à agir immédiatement sur l'entente qui a été
signée entre le Conseil du trésor et le Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec, le Syndicat des professionnels,
notamment. Dans cette entente, qui prend effet le 31 mars, on a prévu,
puis c'est heureux, que les personnes qui étaient occasionnelles dans
des postes à caractère permanent, puissent acquérir leur
permanence. Mais, ce qu'on a oublié dans l'entente, c'est de prendre en
considération qu'il y avait des occasionnelles qui avaient pris des
congés de maternité, puis des congés parentaux. Alors,
dans le calcul du temps nécessaire pour être
considérée comme étant admissible, si vous voulez,
à la conversion au poste permanent, il y a des femmes qui ont eu comme
principal tort, imaginez-vous, d'avoir des enfants, surtout deux. Celles qui en
ont eu juste un, elles peuvent, je pense, se glisser là dans les
délais. Mais, celles qui en ont eu deux, elles, c'est bien de valeur...
Si, le moindrement, elles ont pris un congé parental, alors là
elles sont écartées du bénéfice de la
conversion.
Il y en a qui m'ont écrit, pour dire vrai, à l'occasion du
8 mars. Elles avaient déjà écrit à leur
député qui n'est nul autre que le député de
Saint-Laurent, n'est-ce pas, qui est le premier ministre. Elles avaient
écrit aussi à leur syndicat, et elles ont reçu des copies
de lettres que j'ai envoyées à Mme la ministre à la
Condition féminine. Les copies, dans les deux cas, syndicat et
député de Saint-Laurent, disent que c'est donc de valeur, mais
l'entente est signée. Moi, je suis sûre que Mme la ministre ne
peut pas laisser l'employeur, qui est le gouvernement, agir de la sorte.
Alors, comme je vous dis, M. le Président, on a pas mal d'ouvrage
à faire, pour améliorer notre représentativité, ici
même au sein de l'Assemblée, c'est évident, mais on a pas
mal
plus d'ouvrage qu'on imaginait, parce que les choses ne se sont pas
améliorées. Cette année, les choses ont empiré pour
la majorité des femmes du Québec. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Sur cette même motion, je
reconnais maintenant M. le député de Vimont. M. le
député.
M. Benoît Fradet
M. Fradet: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir,
à l'instar de mes collègues, d'intervenir sur la motion
présentée par la ministre déléguée à
la Condition féminine sur la Journée internationale des femmes.
De fait, de souligner une telle journée contribue d'abord, à mon
avis, à reconnaître le travail accompli pour atteindre
l'égalité tant recherchée entre les hommes et les femmes,
puis à indiquer ce qui reste à faire pour progresser dans la voie
de l'égalité. C'est, brièvement, ce que je me propose de
faire dans les quelques instants qui me sont permis. (16 heures)
M. le Président, si les hommes et les femmes de ma
génération profitent aujourd'hui de rapports plus égaux,
de rapports davantage marqués du signe de l'égalité, ma
génération le doit aux générations d'avant et, en
particulier, aux générations de femmes qui ont su mener les
combats qui ont permis l'atteinte de cette égalité. C'est
grâce à ces femmes, M. le Président, par exemple, que nous
avons aujourd'hui, à l'Assemblée nationale, des femmes
députées. Et c'est grâce à ces femmes si,
aujourd'hui, j'ai l'honneur de les côtoyer dans cette
Assemblée.
La politique étant toujours l'expression de changements sociaux,
la présence de mes collègues féminines à
l'Assemblée illustre aussi que la société a changé
et s'est adaptée en partie à cette nouvelle réalité
de l'égalité entre les hommes et les femmes. Sans dire que tout a
été réalisé, qu'il n'y a plus rien à faire,
on peut néanmoins constater qu'au cours des 20 dernières
années des pas importants ont été franchis dans la longue
marche vers l'égalité des hommes et des femmes. On me permettra,
à cet égard, de citer quelques chiffres afin de donner une mesure
de cette progression.
M. le Président, disons d'abord qu'il y a aujourd'hui une
proportion grandissante de Québécoises qui ont un revenu
personnel; de 55,5 % en 1971, cette proportion est passée à 77,7
% en 1986. Il s'agit là d'une progression très significative, et
davantage si l'on considère que la proportion d'hommes touchant leur
revenu personnel, elle, est demeurée stable à 90 %. Quand on
connaît le rôle et l'importance du revenu personnel dans
l'autonomie qu'il procure à une personne, on est à même de
réaliser l'ampleur de la progression, l'ampleur et l'importance de ces
quelque 20 % de progression. Cela montre que notre société a su
bouger et faire place aux femmes.
Au chapitre des progrès, on peut aussi citer d'autres chiffres,
notamment sur le revenu personnel moyen des femmes. On constate qu'il s'est
accru de 35 % de 1971 à 1989. De plus, cette progression a
été plus importante que celle observée chez les hommes.
Toutefois, il faut déplorer qu'au cours des dernières
années elle ait nettement ralenti, et au moins souhaiter qu'elle
retrouve ce rythme de croisière.
Vous me permettrez, M. le Président, d'en ajouter un dernier. De
1981 à 1988, la part des femmes dans les professions les mieux
rémunérées a connu une hausse remarquable. Ainsi, le
nombre de femmes gagnant annuellement plus de 50 000 $ a doublé durant
cette période. Et, pour l'avenir, on peut être extrêmement
optimiste si l'on considère que les femmes de ma
génération ont un accès très large à
l'enseignement supérieur. Ce sont là, M. le Président,
quelques illustrations chiffrées de la progression des femmes dans leur
marche vers l'égalité.
Je voudrais maintenant dire un mot sur la situation actuelle pour
indiquer que tout n'est pas acquis et que beaucoup reste à faire, y
compris pour les femmes de ma génération, qui sont plus jeunes et
qui bénéficient, entre autres, des efforts des femmes du
passé. Si, de façon générale, les conditions de vie
des femmes se sont, tel que je viens de vous le montrer,
améliorées au cours des dernières années, elles ne
sont pas aujourd'hui à l'abri de la rareté des ressources
matérielles dans laquelle vivent de plus en plus les gens de notre
société. Effectivement, M. le Président, les femmes de ma
génération sont loin d'être assurées de l'aisance
matérielle, y compris de celle dans laquelle elles ont grandi. Car,
à la différence de leurs mères, elles sont nées
dans l'abondance matérielle de la Révolution tranquille et sont
aujourd'hui confrontées à l'exigeant défi de maintenir et
d'améliorer leur niveau de vie. À cet égard, elles sont un
peu placées dans la même situation que les jeunes de ma
génération.
On peut certes voir là un signe d'égalité, mais il
y a plus, en particulier si l'on considère le phénomène
croissant des familles monoparentales. L'importance du phénomène
n'est d'ailleurs pas accessoire puisque, lorsqu'on parle aujourd'hui de gens
démunis, on fait souvent allusion aux familles monoparentales dont le
chef de famille est une femme, et souvent une jeune femme. Ce
phénomène en est un de société qui interpelle le
gouvernement et les pouvoirs publics afin que nous soyons en mesure de lui
fournir une solution acceptable. Nous devons y faire face dans un contexte
inédit où les pouvoirs publics seront, comme ces familles
monoparentales, confrontés à la rareté des ressources
matérielles. Ce contexte limite les possibilités et exige de nous
un plus grand effort d'imagination et de créativité afin de lui
trouver une solution
acceptable. La Journée internationale de la femme constitue une
occasion privilégiée pour réfléchir aux moyens que
nous pourrions prendre pour le régler et, tout au moins, pour lui
fournir une solution satisfaisante.
En terminant, M. le Président, au-delà de la conjoncture
actuelle qui, par son caractère exigeant, peut obscurcir la situation,
il y a lieu d'être optimiste pour la prochaine décennie. Des
progrès ont été faits au cours des dernières
années et il y a lieu de souhaiter et de croire que d'autres seront
faits au cours de la prochaine.
Enfin, on peut donc dire que l'avenir est riche d'espérance en
matière d'égalité des rapports entre les hommes et les
femmes. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Vimont. Sur cette motion, Mme la présidente de
la commission des affaires sociales et députée du comté
de...
Mme Marois: Taillon.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Taillon. Mme la
députée.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. C'est
évidemment avec beaucoup d'intérêt et toujours une certaine
impatience, quand même, que je m'associe à la motion de la
ministre à la Condition féminine pour souligner ce que vivent les
femmes, je dirais les femmes du monde entier, mais les femmes
québécoises en particulier. Quelles sont leurs conditions?
Je suis toujours un peu impatiente parce que je trouve que ça
fait longtemps qu'on se lève et qu'il y encore pas mal de boulot
à faire. Comme mes collègues l'ont rappelé ici et la
ministre elle-même, j'aimerais ça que ça
s'accélère un peu parce que j'ai l'impression que l'on stagne.
J'ai l'impression qu'il y a aussi une espèce de lassitude chez les
leaders qui défendent cette cause, que ce soient des leaders femmes ou
des leaders hommes. Il y a une certaine lassitude qui s'installe parce que,
justement, on a l'impression de faire un peu de sur place.
Alors, j'inciterais tant la ministre que les membres de l'équipe
gouvernementale à agir, je dirais, d'une façon plus significative
encore à l'égard de cette recherche de la reconnaissance de
l'égalité dans les droits, de l'égalité dans les
services, de l'égalité dans les revenus, de
l'égalité tout court, finalement. J'ai l'habitude de dire: Vous
savez, on le sait, nous, qu'on est égales, sauf que ce n'est pas reconnu
dans les faits. Ce n'est pas reconnu par nos salaires. Ce n'est reconnu par nos
revenus. Ce n'est pas reconnu dans les professions qu'on occupe, etc.
Il y a un excellent document, d'ailleurs - et je voudrais le souligner
devant les membres de cette Assemblée - qui a été produit
à l'occasion de cette journée internationale. Comme on le fait
chaque année, il y a des réflexions qui sont faites dans les
organismes, dans les institutions. Il y a un excellent document qui a
été préparé par le Conseil du statut de la femme et
qui fait état des réalisations, d'une part. On a dit: D'un
côté, il y a les acquis; de l'autre côté, il y a les
limites.
Alors, je ne répéterai pas d'une façon exhaustive
tout ce qui a été dit jusqu'à maintenant et tout ce qui
est dans ce document et qui concerne la situation des femmes. Mais,
évidemment, ce qui ressort, ce qui saute aux yeux, c'est toujours cette
situation de pauvreté. Et on dit: La pauvreté - le titre est
très significatif - le féminin singulier l'emporte. On est pauvre
à 20 ans comme on est pauvre à 60 ans, à 70 ans. 60 % des
adultes qui vivent dans la pauvreté sont des femmes. 55 % des
bénéficiaires de la sécurité du revenu, de l'aide
sociale sont des femmes. Quand on est chef de famille, c'est à 85 % des
femmes qui sont chef de famille monoparentale. 60 % d'entre elles vivent des
situations de pauvreté. Bon. Ça apparaît inacceptable aux
yeux de n'importe quelle société développée, comme
celle dans laquelle on vit maintenant.
Alors, quand je parcours ce document, je me rends compte qu'on parle du
revenu personnel, qu'on parle de niveau de vie, de la répartition des
femmes en emploi, des conditions de travail. Et apparaît la conciliation
des responsabilités professionnelles et familiales. Je pense que c'est
le quatrième ou cinquième élément de la liste. On
parle des femmes entrepreneures.
Moi, j'en suis venue à la conclusion, après une certaine
expérience, d'une part à l'égard de ce dossier-là,
après une certaine expérience de la vie tout court, comme femme,
comme femme impliquée politiquement, comme femme aussi mère de
famille, j'en suis arrivée à la conclusion que la
véritable égalité entre les hommes et les femmes va
vraiment s'acquérir si, devant les enfants, l'un et l'autre, homme et
femme, nous nous sentons tout aussi responsables. Cela, évidemment, peut
se faire par des changements profonds de mentalité, par des mesures
aussi, des mesures reliées aux congés parentaux - on en parlait -
par des mesures reliées aux services de garde, par des mesures qui
reconnaissent cette responsabilité et qui reconnaissent ce rôle,
ce rôle social majeur dans la société qui est la
perpétuité, qui est la continuité de ce que nous sommes.
Je reste convaincue de cela. (16 h 10)
Pourquoi? Parce que, peu importe comment on envisage cette
réalité, peu importe l'angle sous lequel on la regarde, on va
constater que parce que les femmes ont assumé - assument toujours,
évidemment - la responsabilité des en-
fants, de la mise au monde des enfants, ça va de soi, c'est
physiquement que cette responsabilité, si on veut, nous revient. Cette
réalité nous revient mais, à cause de cela, et parce que
nous avons occupé une place très large à l'égard de
la famille et de la prise en charge des enfants, une place de services, on
s'est retrouvé ensuite dans des métiers qui étaient, qui
relevaient traditionnellement des rôles qu'on avait occupés dans
l'histoire. Donc, on est devenu infirmière, on est devenu enseignante.
On a occupé des fonctions qui, dans nos sociétés, sont
généralement, même s'il y a eu du rattrapage de fait,
encore des fonctions - secrétariat, secteur des services - moins bien
rémunérées. Ce qui fait qu'on a incité les femmes,
par exemple, actuellement, à s'orienter vers les métiers non
traditionnels: mécaniciens, électriciens, secteur de la
construction.
Je ne pense pas que c'est la solution, moi. Je pense que la solution,
elle est plutôt de revaloriser les métiers occupés par les
femmes, les professions occupées par les femmes qui valent tout autant
que les métiers ou les professions occupés par les hommes. Mais
je reviens à mon évaluation première, c'est le fait que
nous ayons été, dans l'histoire et par rapport à notre
culture et à notre évolution, responsables des enfants. Nous
avons ensuite occupé des fonctions qui ont été en lien, je
dirais, et en ligne avec ce qui nous avait été attribué
comme responsabilités devant les enfants. Ces fonctions-là, comme
ça allait de soi, on n'avait pas besoin de les rémunérer
aussi bien que d'autres types de fonctions ou de professions qui demandaient de
la force physique, par exemple, ce qui fait qu'on s'est retrouvé dans
des emplois qui étaient moins bien rémunérés.
Quand on nous dit que les femmes occupent moins des postes de
responsabilités... Quand on donne naissance à des enfants, on
prend des congés, c'est un peu normal. Sauf que ça, ce n'est pas
compté dans les années d'expérience. Donc, quand on arrive
pour obtenir un poste de cadre dans une organisation, ces
années-là n'étant pas comptées, ça prend
plus de temps pour accéder à ce type de fonction. Puis, parce
qu'on continue de s'occuper des enfants, généralement, quand on
occupe ces mêmes fonctions de responsabilités de cadre, on trouve
anormal dans les milieux de travail qu'une personne doive quitter à 17
heures parce qu'elle a charge d'enfants.
Je m'amusais parfois avec mes collègues femmes du Conseil des
ministres lorsque j'y ai siégé en disant: Vous savez, si la
moitié du Conseil des ministres était formé de femmes et
qu'à 17 heures on se levait en se disant: On s'excuse, mais il faut
aller chercher nos petits à la garderie - il faut s'en occuper - bien,
le Conseil des ministres arrêterait de siéger. Il n'y aurait pas
assez de ministres pour continuer à discuter des dossiers.
Dans les faits et parce que, justement, on a continué
d'être les seules responsables devant les enfants, on n'y a pas
accédé à ces fonctions-là, et on n'est pas
suffisamment en nombre pour avoir une influence significative qui fasse que la
société se préoccupe de cette
réalité-là dans l'ensemble de nos sphères
d'activité. Alors, si c'est vrai à l'égard des postes de
responsabilités, si c'est vrai à l'égard des
rémunérations, c'est vrai évidemment à
l'égard des situations de pauvreté dans lesquelles on se
retrouve. Les femmes continuant d'être responsables des enfants, elles
sont chefs de famille monoparentale, le conjoint n'assumant pas sa part
à l'égard du versement, par exemple, de la pension alimentaire ou
autrement, la contribution aux responsabilités familiales, encore une
fois, c'est la femme qui continue à payer le prix de cette
inégalité.
Alors, je pense que c'est, un peu comme Benoîte Groult le disait,
que c'est devant le fourneau et le biberon que commence l'égalité
entre les hommes et les femmes. C'est dans le partage des
responsabilités et c'est dans le fait d'assumer qu'on soit, devant les
enfants, responsables de l'éducation de ces derniers, du fait qu'on soit
à leurs côtés pour les voir grandir, pour leur permettre
à leur tour de devenir de bons citoyens et de bonnes citoyennes. Mais si
on ne règle pas dès, je dirais, le début de la vie ces
réalités-là, c'est bien sûr que par la suite on va
se retrouver avec des situations comme celles que l'on connaît maintenant
et qui ne doivent pas être perpétuées.
À cet égard, je crois que le gouvernement a un rôle
à jouer. Oui, en matière d'éducation, mais aussi en
matière de mesures, que ce soit de l'ordre des congés parentaux,
que ce soit de l'ordre des services de garderie ou que ce soit aussi de l'ordre
de l'équité salariale, qui permettrait justement de venir
corriger cette inégalité séculaire que l'on subit
maintenant et qui est due au fait qu'on a moins rémunéré
les fonctions assumées par les femmes. On a d'ailleurs l'habitude de
dire que, lorsqu'une profession se dévalorise ou se dévalue aux
yeux d'un certain nombre, les femmes se mettent à l'occuper.
Dans ce sens-là, je pense que ce n'est pas avoir beaucoup de
fierté, comme société, que d'accepter des
phénomènes comme ceux-là. Alors, dans ce sens-là,
j'inciterais, tant la ministre que ses collègues, à plus de
vigilance et à une action encore plus vigoureuse. Je crois que,
malheureusement, à certains égards, le Québec a pris du
retard alors qu'il était en avance pendant un bon moment,
particulièrement du côté justement de
l'équité en emploi et de l'équité salariale, si on
se retourne du côté de nos voisins, entre autres Ontariens. En ce
sens, j'incite la ministre à continuer de faire des pressions -
sûrement qu'elle en fait - auprès de ses collègues et
j'incite surtout ses collègues à agir d'une façon plus
déterminée qu'on ne l'a fait jusqu'à main-
tenant. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Taillon. Sur cette même motion, je reconnais
maintenant Mme la vice-présidente de la commission de l'éducation
et députée de Matane. Mme la députée.
Mme Claire-Hélène Hovington
Mme Hovington: Merci, M. le Président. Alors, moi aussi,
il me fait plaisir de joindre ma voix à celle de mes collègues
pour souligner la Journée internationale des femmes car, à mon
avis, cette journée est une occasion particulière. Elle offre la
possibilité d'un temps d'arrêt, d'un temps de réflexion
pour constater, M. le Président, l'évolution des progrès
de la condition des femmes dans notre société.
Il est possible d'examiner cette situation sous plusieurs angles. L'an
dernier, on s'en souviendra, c'est sous le thème de la
démographie et des questions soulevées en regard des aspirations
et des revendications des Québécoises que s'est tenue la
Journée internationale des femmes. Cette année, il
m'apparaît tout indiqué de faire porter l'examen sur les
conditions économiques des femmes.
En effet, le contexte économique actuel extrêmement
exigeant donne tout son à-propos à une réflexion sommaire
sur les conditions matérielles dans lesquelles évoluent les
femmes de notre société. Si, de façon
générale, les conditions de vie matérielles des femmes se
sont améliorées au cours des dernières décennies,
elles ne sont pas aujourd'hui étrangères par le
phénomène de rareté des ressources matérielles qui
confronte de plus en plus des gens de notre société. La
prospérité des femmes est fragile, M. le Président, tel
que le montre le phénomène de la pauvreté qui continue
à caractériser la situation des femmes.
Pour vous donner une mesure de cette fragilité, M. le
Président, il n'est pas inutile de rappeler quelques chiffres
cités plus tôt par ma collègue, la ministre
déléguée à la Condition féminine. Signalons
d'abord que la proportion des femmes chez les personnes pauvres n'a
guère évolué au cours des 10 dernières
années et on peut même penser qu'elle a augmenté au cours
des deux dernières. Elle se situe à environ 56 % des personnes
pauvres. C'est beaucoup et c'est beaucoup trop, M. le Président.
Ça dépasse largement le seuil de ce qu'une société
comme la nôtre peut souhaiter. De plus, soulignons que le risque de se
retrouver dans la pauvreté est plus grand pour les femmes que pour les
hommes. On estimait ce risque, en 1987, à 4 %, autrement dit, 15 % des
femmes âgées de 16 ans et plus étaient pauvres,
comparativement à 11 % chez les hommes. C'est là un autre
indicateur de l'étendue du phénomène de la rareté
des ressources financières chez les femmes.
Il en est un troisième, M. le Président, qu'on se doit
absolument de souligner, c'est celui des familles monoparentales dont le chef
est une femme. Ces familles sont durement touchées par le
phénomène de la pauvreté puisque 57 % d'entre elles vivent
sous le seuil acceptable de niveau de vie. C'est considérable! Le
phénomène est tellement important que, quand on parle aujourd'hui
de gens démunis, on fait toujours allusion aux familles monoparentales
dont le chef est une femme. Cette situation n'est pas attri-buable qu'à
la récession et aux transformations du marché au travail
liées aux pressions croissantes en faveur de la
compétitivité de l'économie québécoise. Non.
Elle est aussi et surtout liée aux transformations de la structure
familiale et, en particulier, au phénomène de
précarisation de la vie maritale qui a caractérisé les
dernières décennies. (16 h 20)
M. le Président, dans un monde où la famille dite
«normale» se compose de deux pourvoyeurs de fonds, lorsqu'il n'y en
a qu'un, la famille est confrontée avec plus d'acuité à
des difficultés de niveau de vie. Le problème est davantage aigu
si l'on considère le cas des femmes chefs de famille. En
général, elles occupent des emplois beaucoup moins
rémunérés que ceux des hommes. Ce faisant, elles sont
davantage confrontées à l'insuffisance des ressources
matérielles.
M. le Président, s'il est un phénomène aujourd'hui
qui interpelle les pouvoirs publics, c'est bien celui-là. Il interpelle
les hommes et les femmes publics que nous sommes afin de lui fournir une
solution satisfaisante. Une journée comme celle de la Journée
internationale des femmes est bien l'occasion de le rappeler. C'est pourquoi
j'ai tenu à le souligner au cours de ma brève intervention. Vous
n'ignorez pas, M. le Président, que la marche conduisant les femmes vers
l'égalité d'accès à la richesse est longue et,
comme je viens de le montrer, plusieurs étapes restent à
franchir, mais il n'en demeure pas moins que certaines l'ont été.
Ces progrès, réalisés au cours des deux dernières
décennies à plusieurs niveaux, nous permettent d'être
optimistes pour l'avenir. Ils sont, à bien des égards, porteurs
d'espoir et l'espoir est, faut-il le rappeler, l'un des plus grands moteurs des
changements de notre société. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): merci, mme la
députée. sur cette même motion, je reconnais maintenant mme
la députée de marie-victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Merci, M. le Président. Moi aussi, je me
joins aux voix de mes collègues en cette journée de la fête
des femmes, le 8 mars.
M. le Président, dans l'histoire, vous savez, ce n'est pas la
première fois qu'on remet en question le rôle, l'efficacité
des femmes dans nos sociétés. Dans l'antiquité, on se
demandait si les femmes avaient une âme. Peu de temps après, on
pesait même le cerveau des femmes en disant qu'il était plus petit
que celui des hommes et que, par conséquent, il y avait certaines choses
qui ne pouvaient pas faire l'objet de compréhension de la part des
femmes puisque leur cerveau était plus petit. À partir de
ça, on a dit que les femmes ne pouvaient pas tolérer les
mathématiques parce que c'était trop compliqué pour
l'absorption du cerveau des femmes. Je vois qu'un certain collègue de
l'autre côté, masculin, bien sûr, évidemment, sourit
à de tels propos, mais, M. le Président, c'en est une
réalité et ça a existé. Ça a
réellement existé.
On se pose des questions maintenant à savoir pourquoi, à
l'heure actuelle, c'est si complique, si difficile pour les femmes
d'accéder à des postes d'autorité et qu'elles puissent
avoir aussi accès à un travail très bien
rémunéré. Pourquoi les femmes ne vont-elles pas dans les
sciences? Pourquoi elles sont toujours demeurées dans des aspects
beaucoup plus de services, beaucoup plus vers des valeurs plus traditionnelles,
féminines, comme on dit? Eh bien, c'est pour un paquet de facteurs, bien
sûr, et, notamment, à cause de telles mentalités.
Lorsqu'on parle de l'évolution des femmes et qu'on veut qu'elles
prennent une place dans la société, nous devons aussi nous
attarder à des changements de comportement et d'attitude. Des
changements de comportement et d'attitude, d'une part, des hommes
vis-à-vis de la compréhension des femmes, je crois. Bien
sûr que la femme demeurera toujours cet éternel féminin,
avec toutes les qualités féminines qu'on lui connaît et les
attributs féminins qu'on lui connaît. Aussi - c'est
inévitable et incontournable - la maternité appartiendra toujours
aux femmes. Bien sûr. C'est un fait, c'est une évidence.
Mais à partir de cette évidence, M. le Président,
il y a toute une organisation de société qui est importante
à repenser en fonction, justement, de cette capacité de la femme
à jouer son rôle pleinement, à part entière, dans
nos sociétés à l'heure actuelle. C'est là que ce
n'est pas évident parce qu'il y a un partage de pouvoirs et quand on
parle de partage de pouvoirs, ce n'est pas toujours facile d'arriver à
s'entendre là-dessus, à savoir lequel des deux devrait faire des
concessions.
Nous sommes arrivés à un constat dans notre
société moderne, où maintenant, parce que de plus en plus,
effectivement, les luttes des femmes ont fait en sorte que cette
reconnaissance, cette capacité de la femme ne fait plus l'ombre d'un
doute, nous devons négocier la place que nous voulons occuper dans cette
société et que nous sommes capables d'occuper dans cette
société. Ce n'est pas facile et ce n'est pas évident non
plus. Nous devons, malheureusement, nous confronter constamment à des
fins de non-recevoir, plus souvent qu'autrement, parce qu'on nous a
habituées à ne pas travailler dans un esprit de
solidarité, mais bien plus à nous isoler les unes des autres dans
nos maisons. Il est très difficile pour nous, en fait, de faire dans cet
esprit de solidarité cette lutte qui est si importante dans le
changement des comportements vis-à-vis de nos confrères et
vis-à-vis des hommes en général dans la
société. il est bien sûr, m. le président, qu'il y a
eu des gains. le droit de vote, entre autres, a favorisé, bien
sûr, la place des femmes dans le monde politique. et le fait que les
femmes aient pu accéder à ce lieu de pouvoir a eu un effet
significatif sur les tendances, les orientations des gouvernements face aux
places que pouvaient occuper les femmes dans nos sociétés. mais,
malheureusement, le nombre n'est pas suffisant pour que cette tendance
vis-à-vis des différents changements de comportement soit aussi
évidente qu'on voudrait bien qu'elle le soit à l'heure actuelle,
et pour que les progrès puissent s'accélérer d'une
façon un petit peu plus rapide que présentement.
Nous avons vu, avec la loi 146, le partage économique des biens
des conjoints, à quel point, encore une fois, on soumet toujours la
femme dans un état de dépendance parce qu'on considère que
le mariage pourrait être une garantie ou qu'un bon contrat de mariage
pourrait être une garantie pour une femme et que c'est une façon
pour elle de s'en sortir dans notre société. Moi, je
considère que non, ce n'est pas vrai, il n'y en a pas, de garantie. Il
n'y a pas de contrat qui puisse assurer une sécurité à
quelque femme que ce soit.
Il faut que la femme apprenne à se responsabiliser et à
développer sa propre autonomie et sa propre estime d'elle-même. Et
c'est là-dessus que nous devons collectivement travailler, la favoriser
dans son développement personnel pour qu'enfin elle ne doute plus de ses
capacités et du pouvoir qu'elle possède, qui lui est propre, bien
à elle, et qui est tout à fait féminin. Qu'on arrête
de dire que, parce qu'on est femme, on ne peut accéder à des
postes de pouvoir, à des postes décisionnels, qu'il faut se
comporter d'une façon masculine pour accéder à ces lieux
de pouvoir. Qu'on lui reconnaisse ses qualités féminines. Qu'on
accepte que les règles du jeu soient aussi teintées de la couleur
féminine. Elles ne doivent pas uniquement être de la couleur des
règles du jeu qu'on a bien voulu, en fait, nous imposer, et qui ont une
couleur et une saveur tout à fait masculines.
Je pense que nous avons le droit, nous aussi, d'imposer nos valeurs, et
aussi d'imposer cette organisation sociale qui correspond à nos
préoccupations et qui garde bien en évidence ces valeurs et ces
attributs féminins qui font que,
oui, nous serons toujours des femmes. Nous aurons besoin de vivre et de
prendre en considération cette capacité d'enfanter qui fait toute
la différence du monde entre les hommes et les femmes. Bien sûr,
nous devons - en tout cas, si nous voulons accéder à ces lieux de
pouvoir -effectivement prendre en considération cette notion qui est
fondamentale, à mon avis.
Bien sûr, M. le Président, il y aussi tous les
différents aspects. Les femmes ont besoin de se solidariser. Même
ici, dans les lieux politiques, dans les lieux de pouvoir, et même au
niveau du gouvernement, quelquefois, malheureusement les lignes de parti font
en sorte qu'il est difficile pour nous de nous entendre pour favoriser certains
projets de loi qui pourraient permettre à des femmes de compter sur
celles qu'elles ont élues et qui les représentent à
l'Assemblée nationale. Peut-être qu'il faudrait qu'on repense
aussi les règles du jeu à ce niveau et qu'on permette, justement,
là où il y a nécessité, que cette solidarité
puisse se créer, puisse prendre forme, et développer des acquis
plus considérables pour les femmes, à un rythme plus convenable
aussi.
Je regarde aussi le nombre de femmes immigrantes qui, de plus en plus,
partagent nos préoccupations en tant que Québécoises, dans
notre société, à l'heure actuelle. Elles sont, elles
aussi, confrontées à des changements majeurs. Malgré tout
ce que je viens de dire, effectivement, ici au Québec, nous sommes
peut-être en avance par rapport à l'Europe et même par
rapport aux États-Unis par rapport au rôle de la femme dans notre
société. Oui, nous avons fait des gains considérables,
mais ce n'est pas parce que nous avons fait des gains considérables que
la lutte est pour autant terminée. Bien sûr, il y a des femmes qui
sont arrivées à un point d'excellence et elles sont des
modèles aussi pour un bon nombre de femmes, mais on ne peut pas dire que
toutes les femmes ont eu cette chance. Il y en a plusieurs encore qui en
rêvent et plusieurs aussi qui se débattent
régulièrement, quotidiennement, pour essayer d'avoir cette
reconnaissance à quelque niveau que ce soit. Entre autres, je pense aux
jeunes femmes professionnelles, je pense à ces femmes qui ont
opté pour des métiers non traditionnels. (16 h 30)
Ce n'est pas évident non plus, pour toutes ces femmes qui ont
décidé de sortir des sentiers battus, de se faire
reconnaître pour ce qu'elles sont, avec leur valeurs respectives et aussi
avec ce petit goût de prendre des responsabilités dans notre
société. Ce n'est pas évident, effectivement, et elles
doivent faire face très souvent aux préjugés. Elles
doivent faire face aussi à des problèmes d'ordre syndical. Elles
doivent faire face à des problèmes aussi d'ordre, d'organisation
et d'horaire. Très souvent, malheureusement, on ne leur donne pas
nécessairement la chance de promotion parce qu'on arrive toujours
à cet élément fondamental: la maternité.
Donc, M. le Président, je pense qu'il reste encore beaucoup de
choses à faire. Il y a beaucoup de choses à mettre en commun et,
surtout, il y a un discours à développer entre les hommes et les
femmes pour permettre cette compréhension, pour favoriser ces
changements d'attitude et de comportement, si nous voulons un équilibre
dans notre société, parce que ce n'est pas tolerable, dans une
société moderne, que le mariage se termine par des divorces. Il y
a une instabilité et ça crée d'autres problèmes a
d'autres niveaux et c'est nous tous qui, socialement, payons le coût.
Je pense qu'il est urgent, M. le Président, à ce moment-ci
dans notre développement social, qu'on arrive à cette
capacité d'échange entre les hommes et les femmes pour ces
changements de comportements et ces changements d'attitudes qui favorisent
aussi la place des femmes, une place d'excellence pour les femmes à
l'intérieur de la société québécoise. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Marie-Victorin. Alors, je dois informer la Chambre
qu'à la suite de la période de questions la présidence a
reçu une demande du député d'Arthabaska, lorsqu'il a
posé une question au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation, concernant une question sur le GATT. Il y a une demande de
débat de fin de séance et, conformément au
règlement, ce débat aura lieu demain, le jeudi 12 mars, à
18 h 30. Oui, monsieur...
M. Bélisle: J'aimerais vous informer, à cet effet,
que je pense qu'il y a entente avec l'Opposition pour que le débat de
fin de séance entre le ministre de l'Agriculture et le
député d'Arthabaska soit reporté au mardi 17, après
la période de questions.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est-à-dire oui.
M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, effectivement, M. le Président. Je pense
que c'est exact. Vous devez rappeler, comme président, ce que vous venez
de faire. Le leader adjoint vient rappeler, avec raison, qu'il y a eu entente
pour accommoder, comme c'est normal de le faire des fois, l'horaire du ministre
qui ne peut pas être ici jeudi soir. On a convenu que ce débat de
fin de séance aurait lieu mardi, après la période de
questions. C'est dans ce sens-là qu'on souhaiterait que ça
devienne un ordre de la Chambre au sens de la convenance entre les deux
partis.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Après la
période de questions?
M. Gendron: Oui, reporté à mardi après la
période de questions. Sur consentement mutuel.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je prends
connaissance de votre consentement et c'est un ordre de la Chambre que ce
débat de fin de séance là aura lieu mardi, après la
période de questions. Ce débat sera tenu sous réserve des
articles 311 et 312.
Alors, nous sommes toujours à la motion de Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine qui se lit
comme suit: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne
la Journée internationale des femmes qui se tient annuellement le 8
mars.»
Je reconnais Mme la députée de Saint-Henri.
Mme Nicole Loiselle
Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Le fait de souligner
la Journée internationale des femmes nous laisse une large place
à plusieurs interprétations. On peut, en effet, aborder cet
événement comme étant l'apogée des droits
historiques des femmes au Québec, comme ailleurs dans le monde. On peut
également l'aborder sous l'angle des acquis que les femmes ont
réussi à s'approprier au gré des luttes tant collectives
qu'individuelles dans les sociétés modernes. On peut enfin
l'aborder sous l'angle de réalisations concrètes qui marquent
l'évolution d'une société aussi moderne que la
nôtre, mais un fait demeure, M. le Président, les dossiers
reliés à la condition féminine, dans notre
société, sont tout aussi lourds de conséquences que ceux
d'hier. Plusieurs luttes ont été gagnées dignement par les
femmes du Québec, mais nous en sommes rendues à une étape
où l'objectif à atteindre n'est rien de moins qu'une
amélioration de notre qualité de vie.
Donc, que ce soit à titre collectif ou individuel, les femmes ont
d'énormes pas à franchir en vue d'atteindre cette qualité
de vie. Le rôle de l'État ne saurait donc s'arrêter
maintenant. Les besoins reliés à la condition féminine
sont tout aussi urgents qu'auparavant. Les problèmes ont non seulement
augmenté, mais se sont diversifiés avec le temps, au gré
de notre évolution.
En matière de santé et de services sociaux, les
problèmes sont particulièrement criants dans notre
société. Toutes les études, toutes les analyses convergent
dans le même sens, à savoir que, sur le plan
socio-économique, nombre de femmes sont désavantagées par
rapport au reste de la société. Une étude
réalisée dans ma circonscription par le CLSC Saint-Henri
Petite-Bourgogne révèle que 38 % des femmes de ce quartier n'ont
pas atteint la neuvième année, contre 31 % chez les hommes. Les
efforts du gouvernement au niveau de la formation et de l'éducation
doivent s'intensifier. Que l'on se situe sur le plan des revenus par famille,
sur le plan de la condition générale des femmes sur le
marché du travail ou dans la société, le rôle de
l'État québécois doit pouvoir orienter ses actions en vue
d'atteindre cet objectif de la qualité de vie tant souhaitée par
toutes les Québécoises. Cette amélioration de la situation
des femmes requiert également qu'elles participent activement à
l'élaboration et à la mise en oeuvre des mesures en
matière de santé et de services sociaux.
D'autre part, on convient que les femmes d'aujourd'hui sont mieux
informées qu'elles ne l'étaient hier parce qu'elles ont
cherché à faire respecter leur intégrité, autant
physique que mentale. Le rôle des gouvernements n'est pas étranger
à une amélioration de la qualité de vie des femmes. Il est
bien qu'il en soit ainsi puisque notre réseau de santé et de
services sociaux regorge de ressources qui doivent être mises à la
disposition de ceux et celles qui en éprouvent le besoin. Or, l'histoire
nous enseigne que la clientèle féminine semble être une des
plus vulnérables qui requiert des soins de santé et de services
sociaux à cause de différentes réalités
reliées au mode de vie et aux attitudes de notre société.
Qu'on pense, par exemple, M. le Président, que, dans le quartier
Saint-Henri, cette même étude du CLSC à laquelle je faisais
allusion tout à l'heure et qui recense des chiffres de 1990 indique que,
chez les femmes de Saint-Henri, on enregistre un taux de mortalité de
1,3 à 1,8 fois plus élevé que celui de la région de
Montréal. À l'aube de l'an 2000, on convient aisément que
les politiques, les programmes, les interventions des pouvoirs reflètent
une certaine évolution dans la prise en compte des besoins des femmes en
ce qui a trait aux soins de santé et de services sociaux. Par ailleurs,
on souligne également que la question de la santé est directement
reliée à l'environnement socio-économique. Une
enquête Santé Québec souligne l'état de
pauvreté plus important chez les femmes par rapport à celui des
hommes et son impact sur leur santé. Pour le comté de
Saint-Henri, un chiffre suffit à comprendre cette douloureuse
réalité, mais croyez bien que les efforts du gouvernement
québécois pour venir en aide aux 12 % des mères de
Saint-Henri qui ont moins de 20 ans sont accueillis favorablement.
M. le Président, qu'il s'agisse de mentionner l'impact de la
violence sur la santé des femmes et les pistes d'actions
envisagées pour vite s'apercevoir qu'il faut intensifier et qu'il faut
développer des orientations qui puissent bannir cette sorte de
réalité au Québec. D'autre part, le gouvernement a
annoncé son intention d'aller de l'avant dans le cadre de la
réforme de l'ensemble des services sociaux au Québec. Il me
semble que c'est là une chance unique pour les femmes du Québec
de participer pleinement à cette évolution au niveau des services
devant être offerts aux différentes clientèles
féminines. Les femmes doivent, à mon avis, s'impliquer de plus en
plus à l'intérieur des balises dessinées dans le cadre de
cette réforme pour faire entendre leurs revendications auprès des
autorités médicales et
gouvernementales tout au long de ce processus.
Qu'il s'agisse de santé mentale, de santé physique ou de
toute autre réalité vécue sur le terrain, les femmes
peuvent et doivent s'impliquer de plus en plus pour atteindre cet objectif de
l'amélioration de leur qualité de vie. De façon
générale, je tiens à le préciser, nous avons la
chance de vivre dans une société ouverte. Quoique nous ayons
noté des attitudes et des mentalités qui transgressent cette
notion d'ouverture, par rapport à d'autres pays, nous sommes très
enviables, mais un énorme travail reste à accomplir pour faire
face à des réalités parfois brutales de notre
société. Par exemple, nous parlons de plus en plus d'humanisation
des soins de santé au Québec. Cette idée ne doit pas
être traitée en termes de généralité, mais
plutôt en termes d'action, laquelle devrait se refléter dans tous
les mécanismes de services rendus à la population. Les femmes
plus jeunes sont également impliquées dans cet objectif
d'amélioration de leur qualité de vie. Là encore, des
études démontrent des réalités parfois plus dures,
à savoir, par exemple, que des femmes chefs de famille monoparentale
vivent une situation plus que précaire. (16 h 40)
M. le Président, on parle ici de précarité de
revenus, précarité d'emplois, précarité de
situations familiales, marquées au coin de l'instabilité et d'un
avenir incertain. Dans mon comté, on doit savoir que l'importance des
familles monoparentales est supérieure, malheureusement, à la
moyenne montréalaise. En effet, le quart des ménages du sud-ouest
de Montréal est monoparental, contre un cinquième dans l'ensemble
de cette région. De ces familles monoparentales de ma circonscription,
87 % d'entre elles sont dirigées par des femmes. Ce sont là des
signes qu'une société moderne doit, malheureusement, aborder avec
tout ce qu'elle véhicule au niveau des valeurs, des attitudes, tant
collectives qu'individuelles.
Jusqu'à maintenant, M. le Président, le gouvernement
libéral n'est pas demeuré sourd aux représentations
reliées à la condition féminine. Plusieurs
améliorations ont été apportées dans le cadre des
politiques et des programmes gouvernementaux. M. le Président, une chose
est certaine, le travail accompli par l'État québécois ne
fait que commencer pour parvenir à atteindre cet objectif d'une
meilleure qualité de vie pour les femmes. Parallèlement, le
niveau de conscien-tisation des besoins exprimés par ces femmes du
Québec doit être maintenu.
En terminant, M. le Président, pour ce qui est de la
région que je représente à l'Assemblée nationale,
je tiens à souligner que l'esprit d'entraide et de solidarité est
admirable. Le sud-ouest de Montréal regorge de ressources et de talents
pour franchir les difficultés de la vie. Le soutien et l'aide des
gouvernements sont vus dans une perspective d'une volonté de s'en sortir
dans la fierté et dans la dignité. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Saint-Henri. Sur cette même motion, je reconnais
maintenant le leader adjoint de l'Opposition officielle et député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député.
M. François Gendron
M. Gendron: D'entrée de jeu, je pense qu'il est clair et
manifeste depuis qu'on en débat que l'Opposition officielle et moi,
comme leader adjoint de cette formation politique, souscrivons à la
motion présentée par la ministre à la Condition
féminine pour, effectivement, souligner la Journée internationale
des femmes qui se tenait le 8 mars, comme à chaque année.
Règle générale, annuellement, ça se tient à
cette date-là.
Dans mes fonctions, avant de parler de la motion que nous
débattons, je ne peux pas ne pas revenir sur ce qui m'apparaissait et ce
qui m'est apparu une mesquinerie de la part de la ministre de la Condition
féminine de laisser croire à la population - et je ne suis pas
inquiet, la population jugera, je ne suis pas inquiet... Je ne peux pas ne pas
revenir là-dessus parce que c'est vraiment être mesquin de laisser
croire que nous, on a voulu faire de la politique sur le dos des femmes avec
une question prévue au règlement, M. le Président.
Je tiens à vous signaler et je tiens à dire à la
population qui nous écoute que de tout temps, M. le Président,
toutes les motions en cette Chambre à l'item «motions sans
préavis» ont toujours exigé la consentement de l'un et
l'autre des partis en cette Chambre. Hier, l'Opposition a décidé
- elle a le droit de le faire, surtout quand elle le fait s'appuyant sur un
règlement de la Chambre - de faire ce que nous avons fait et
c'était connu. Nous avons pensé - pour des motifs qui ont
été couverts et sur lesquels je ne veux pas revenir - que
c'était inapproprié et inopportun de le faire hier pour des
motifs clairement connus, clairement expliqués.
Ce n'est pas pour rien qu'aujourd'hui, d'ailleurs - et ça prouve
qu'on avait raison - la ministre elle-même dans sa motion parle de
souligner la Journée internationale des femmes qui se tenait
annuellement le 8 mars. Or, M. le Président, le souligner par une
motion, je pense que le drame aurait été de ne pas le faire.
Soulever une motion pour souligner l'extraordinaire travail et les
luttes - et j'y reviendrai dans une phrase - que les femmes ont
menées depuis plusieurs années, le faire le 10 ou le faire
le 11 mars, il n'y a aucune espèce d'inconvénient. Là
où il y avait un inconvénient, c'était de ne pas le faire.
Il me semble que, comme parlementaires, nous aurions été
passablement irresponsables et inconvenants de ne pas le faire pour cette
cause, qui est une cause sociale, une cause d'une société
moderne, juste, équilibrée, sachant qu'il y a encore beaucoup
beaucoup à faire dans la cause de l'avancement des femmes. Je tenais
à faire ce point d'une façon très claire et très
précise que d'aucune façon, en ce qui nous concerne, il n'a
été question de ne pas souscrire à une telle motion pour
souligner ce qu'on fait présentement depuis la fin de la période
des questions et qu'on va continuer à faire pendant quelques
minutes.
Sur le fond de la question, maintenant, M. le Président, c'est
évident que je trouve que la ministre fait bien et elle a raison que
l'Assemblée nationale, par une motion, souligne la Journée
internationale des femmes puisque dans notre société
québécoise, depuis plusieurs années, c'est une cause
où les femmes ont dû constamment ce qu'on appelle remettre sur le
chantier toute la problématique, tout le questionnement concernant
l'évolution de cette cause juste, mais qui, malheureusement, ne
progresse pas au rythme de leur composition numérique dans la
société qu'on connaît tous. À partir du moment
où il y a au moins et un peu plus de la moitié des femmes qui
composent la société québécoise, ça serait
normal de parler beaucoup plus d'acquis observables.
Je ne crois pas, M. le Président, que le moment est venu, lors
d'une motion comme celle-là, de faire de longs laïus sur le
cheminement qu'on a fait. Heureusement qu'on en a fait un. Moi, ce qui
m'apparaît le plus important dans une motion comme celle-là - et
c'est là que je trouve que nos propos deviennent significatifs,
pertinents, intelligibles - c'est la nécessité de se sensibiliser
et de se conscientiser, qui que nous soyons, comme parlementaires et comme
membres de cette société, sur tout le travail qu'il reste
à faire et d'en convenir mutuellement. C'est surtout ça qui est
important. Ce n'est pas de venir, je pense, lire à
répétition des textes qui vont dire: Voilà des portraits,
voyez des situations, c'est de se conscientiser mutuellement et de convenir
ensemble de la nécessité de faire beaucoup plus, beaucoup mieux
et plus rapidement, à des chapitres où, tout compte fait,
l'évolution est trop peu significative.
Je voudrais juste toucher quelques exemples. Quand on regarde n'importe
quel tableau de la pauvreté, c'est dramatique pour tout le
Québec, mais ça l'est encore davantage pour les femmes. Donc, il
y a un problème. Ça ne se peut pas que, comme
société, on ne réussisse pas à trouver des
mécanismes permanents qui nous permettraient, dans les meilleurs
délais, d'être en mesure de parler plus adéquatement de
chiffres qui illustreraient que, là aussi, on a fait un petit peu plus
de cheminement pour s'assurer que la notion de pauvreté ne soit pas
aussi significative quand on regarde le dossier des femmes.
La réalité québécoise, aujourd'hui, c'est
que la pauvreté, c'est grave, mais c'est encore beaucoup trop grave et
beaucoup trop significatif dans à peu près tous les dossiers des
femmes. Donc, il y a quelque chose quelque part qu'on ne fait pas comme il
faut, sur le plan des décisions qui se doivent d'être prises pour
qu'éventuellement les chiffres que nous avons a présenter
puissent illustrer d'une façon plus significative qu'il y a un
réel progrès observable. Moi, en ce qui me concerne, ce n'est pas
le cas et ce n'est pas assez significatif pour se glorifier. Donc, on est
obligé encore de dire aux femmes: Vous allez devoir encore une fois
avoir des concertations, avoir des luttes conjointes. Mais il faudrait qu'il y
ait plus qu'uniquement les femmes dedans. Tous les décideurs d'une
société devraient être conscients de cette
réalité.
Deuxième réalité, rapidement, au niveau de la
représentation, de la représentation, au sens
général. Est-ce qu'on peut être satisfait du cheminement du
dossier de la représentativité des femmes dans certains postes
clés? À peine, M. le Président. À peine. À
titre d'exemple - je pense que c'est aujourd'hui ou hier - dans les journaux,
on pouvait observer qu'à la direction de la Sûreté du
Québec, peut-être pour la première fois, une femme
accédera à un poste de direction. Bien, M. le Président,
c'est quand même une situation un peu anormale. Ça fait quand
même plusieurs années que les corps policiers, heureusement,
permettent - pas permettent, je veux dire - ont constaté qu'on ne peut
pas être discriminant et dire que c'est une fonction qui doit être
exercée uniquement par la gent masculine. Mais, au niveau des postes de
direction, on apprend, alors qu'il y en a à Hydro-Québec, qu'il y
en a dans les universités, qu'il y en a dans le monde de
réduction, dans le monde des affaires... Ça fait longtemps qu'il
y a des femmes, pas assez dans le monde des affaires. Comment se fait-il que,
comme société, on n'est pas arrivé à faciliter
d'une façon plus significative la représentativité des
femmes a des postes clés?
Je pourrais continuer au niveau de l'équité salariale, au
niveau des chances égales. Pensez-vous que ça ne demeure pas
encore juste un discours de dire qu'aujourd'hui, dans la société
québécoise, il y a vraiment chances égales entre les
hommes et les femmes, à peu près au niveau de l'ensemble des
postes à pourvoir ou, carrément, de la capacité pour elles
d'exercer librement, adéquatement et non pas dans des postes
précaires, où on est obligé encore là de constater
que la précarité est beaucoup plus forte dans l'ensemble des
postes qui sont
occupés par la gent féminine? Il me semble que c'est
surtout sur ces éléments-là que nous devons convenir qu'il
y a énormément de travail à faire. (16 h 50)
Souligner la Journée internationale de la femme, ça a un
sens, ça a une signification si, comme parlementaires, comme membres de
tables de discussion, de commissions, de comités ou autres, on est plus
sévères dans les consensus qu'on doit dégager pour
s'assurer qu'il se prenne des décisions qui vont permettre
d'accélérer d'une façon très sensible, d'une
façon très significative le processus global de présence
de fa gent féminine à peu près dans tous les dossiers
qu'on peut regarder, dans les documents qu'elles-mêmes nous
soumettent.
Je pense que leur dernier feuillet l'illustrait on ne peut mieux:
«Économie», quand le «E» n'est plus muet. Et il
faisait une réflexion sur la situation économique des femmes. Il
faut que le «e» soit de moins en moins muet. Est-ce que c'est la
réalité aujourd'hui? Malheureusement, pas encore, et c'est
pourquoi c'est toujours requis de le rappeler, mais surtout plus requis, M. le
Président, de convenir mutuellement de ce qui reste à faire et de
poser les gestes pour que, sur ce qui reste à faire, il y ait au moins
quelques changements plus observables. Qu'on cesse de faire uniquement des
bilans, qu'on cesse de faire uniquement des papiers sur les acquis des
femmes.
Je comprends que, s'il fallait qu'il n'y ait pas des acquis après
toutes les luttes qu'elles ont menées, ça serait vraiment un
drame social. Mais il y a encore trop d'écart, je pense, M. le
Président, entre la gent masculine et la gent féminine pour se
réjouir et passer droit, comme si nous avions atteint les objectifs que
toute société normale doit se donner. Et dans le domaine de la
condition féminine, il est plus qu'urgent de relever la barre, M. le
Président. Il faut relever la barre à plusieurs endroits, mais il
faut garder un oeil très vigilant sur la barre qu'on s'est fixée
pour s'assurer que ce n'est pas une fois par année seulement, lors de
l'éternelle motion que je connais depuis 15 ans - qui est requise, en
passant - qu'on fasse les mêmes constats. Ça chemine, mais
tellement lentement, tellement à petits pas qu'il devient très
difficile de voir le jour où, dans des segments de population où
les femmes sont dynamiques, actives, où elles ont tout le potentiel pour
exercer leur compétence, on pourra observer quantitativement de
meilleures données afin que le fameux bilan dont on parle corresponde
davantage à la réalité des 50-50. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest, pour votre intervention. Sur cette
même motion, la motion de Mme la ministre déléguée
de la Condition féminine, je reconnais M. le député de
LaFontaine.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
aujourd'hui de joindre ma voix à tous ceux et à toutes celles en
cette Chambre qui ont souligné cette Journée internationale de la
femme, même si, malheureusement, c'est hier que j'aurais aimé le
faire afin de correspondre à la même journée que l'ensemble
du monde. Mais on sait que, pour des raisons un peu de partisane-rie -
malheureusement, venant de l'Opposition -on a dû le faire aujourd'hui, et
je trouve cela un peu déplorable.
N'empêche que cette Journée internationale de la femme, M.
le Président, souligne un certain nombre de choses très
importantes. Elle rappelle à l'attention du monde que la moitié
de notre monde est faite de femmes et que, trop souvent, la condition dans
laquelle ces femmes vivent, trop souvent, les épreuves et les
contraintes auxquelles elles sont soumises ou qu'elles ont à vivre font
en sorte que notre société a beaucoup de chemin à faire
afin de continuer à leur donner une place et les droits que toute
personne a dans une société comme celle du Québec, et dans
le Canada, bien entendu.
Et on revient de loin, M. le Président, parce que rappelons-nous
que c'est en 1929 - il n'y a pas si longtemps que ça, 1929 - qu'au
Canada les femmes sont devenues des personnes juridiques. Car, en vertu de
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, le terme
«personne» n'incluait pas une femme; c'était un homme,
à l'époque. C'est des femmes qui ont fait appel au Conseil
privé de Londres et c'est en 1929 que l'appellation
«personne» est entrée en vigueur pour définir aussi
une femme et non seulement un homme.
Il y a aussi 1940, M. le Président, une année très
importante pour toutes les femmes québécoises et canadiennes, car
c'est en cette année-là, 1940, que les femmes ont obtenu le droit
de vote. Auparavant, dans le Québec et dans le Canada, les femmes ne
pouvaient pas voter dans une élection provinciale,
fédérale ou scolaire. Et c'était là exclure du
processus de décision la moitié de la population, et pas
n'importe quelle moitié, M. le Président: la moitié de la
population qui fait en sorte que les familles soient élevées et
qui fait en sorte que les enfants soient formés, qui fait en sorte
qu'une société ait sa cohésion, car on sait que c'est les
femmes qui assurent la cohésion dans la société. C'est les
mères de famille, M. le Président, qui font en sorte
d'élever les enfants, de faire leur éducation, de transmettre les
valeurs de la société, autant morales qu'historiques et
culturelles à leurs enfants. Il semble qu'il ait fallu attendre 1940
pour reconnaître que ces mêmes femmes, qui sont les
ouvrières, qui sont la base de notre société et de son
évolution, puissent avoir le droit de vote.
Bien sûr, en 1964, M. le Président - une
grande année - avec le gouvernement de M. Jean Lesage, la
première femme avait été élue, Mme Kirkland, avec
la loi 16, qui a été votée à ce moment-là -
le gouvernement libéral, il faut le rappeler - ce qui faisait en sorte
de mettre fin à l'incapacité juridique des femmes. On se rappelle
que, dans ce temps-là encore, même si elles avaient le droit de
vote, en 1964, les femmes avaient encore besoin de la signature de leur mari
pour faire des affaires et pour ouvrir un compte de banque et des choses comme
ça.
C'est là, M. le Président, l'expression encore d'une
vision pas seulement d'avenir, à l'époque, mais d'une vision
sociale de la tradition libérale que d'amener une loi comme
celle-là. On sait, lorsqu'on consulte les archives, que ça avait
soulevé un certain nombre de cris et le holà par certaines
personnes qui trouvaient que, peut-être, on allait trop loin à
cette époque-là. Alors, il faut le souligner, M. le
Président, encore une fois, le Parti libéral du Québec,
dans ce qu'il est gouvernement, était à l'avant-garde de
l'évolution et à l'avant-garde du droit et de la progression des
femmes.
M. le Président, c'est là seulement quelques exemples. On
pourrait en donner constamment parce qu'on sait toutes les lois qui ont
été amenées par notre gouvernement. Rappelons-nous l'aide
juridique, la loi sur les femmes battues, toutes ces lois, M. le
Président, qui ont été amenées par un gouvernement
libéral. Je me souviens, à l'époque, lorsque le ministre
de la Justice, Jérôme Choquette, avait amené ces
lois-là, certaines personnes s'étaient récriées un
peu. Mais on se rappellera que c'était là des lois qui
étaient parmi les plus progressives du monde et de notre
société. Même les Français, M. le Président,
n'avaient pas, à cette époque-là, des lois aussi
progressives en ce qui concerne le statut et le respect des femmes que nous
avons maintenant au Québec.
Bien sûr, les lois conditionnent les comportements et les
comportements, M. le Président, c'est dans la société
qu'on retrouve à tous les jours. On le voit... Au Québec, 51 %
des femmes sont dans la main-d'oeuvre. Lorsqu'on va dans les vieux pays, comme
on dit un peu, ou dans les pays européens, on se rend compte très
rapidement qu'il y a encore un fossé, que nous sommes encore à
l'avant-garde de cette évolution et que le statut de la femme, dans le
Québec, est beaucoup plus important que le statut de la femme en France
ou en Belgique ou dans d'autres sociétés; je nommerais même
l'Italie. Et pourquoi, M. le Président? Parce que, justement, ces lois
amenées par le gouvernement libéral, au temps de Jean Lesage, au
temps du gouvernement de Robert Bourassa dans les années soixante-dix,
ont permis de façonner ces mentalités et de faire en sorte que la
société reconnaisse les femmes comme étant des personnes
égales, mais non pas seulement égales, mais comme étant la
base de notre évolution et la base de notre société et ce,
tant au niveau familial qu'au niveau culturel.
M. le Président, c'est très important aujourd'hui de faire
valoir qu'une grande partie des femmes sont des mères de famille et
dirigent des familles monoparentales. Encore là, c'est les femmes qui
ont la responsabilité de toute une génération. C'est elles
qui vont faire en sorte que les enfants dont les pères sont partis vont
être élevés, vont faire des citoyens normaux, des citoyens
qui vont avoir les mêmes droits et les mêmes chances.
M. le Président, il faut, rapidement, ne pas oublier toutes les
mesures sociales qui aident ces femmes, chefs de famille monoparentale. Les
taxations... On se rappellera que le budget de M. Gérard D. Levesque,
l'an dernier et les années précédentes, a coupé la
taxation pour les gens qui gagnent 25 000 $ et moins. Lorsqu'on sait qu'une
jeune femme qui travaille et qui gagne 24 000 $, 25 000 $ - il y en a beaucoup
- ne paie plus d'impôt alors qu'avant elle en payait sous l'ancien
gouvernement, on se dort de se féliciter et voir là encore un pas
dans une bonne direction pour venir en aide à toutes ces femmes, chefs
de famille monoparentale, qui représentent une grande partie de notre
société.
Je ne saurais terminer, M. le Président, sans dire aussi, bien
sûr, que ces quelques mesures - il y en a plusieurs - sont bonnes, mais
il en faut d'autres. Il faut continuer. Il va falloir faire en sorte qu'il y
ait plus de garderies pour aider ces femmes-là. C'est bien facile de
donner à la femme le droit au travail ou l'accès au travail,
c'est facile aussi de lui laisser la responsabilité de la famille,
à l'élever, mais il faut aussi l'aider. La manière de
l'aider, M. le Président, c'est probablement en ouvrant des garderies,
en faisant en sorte que le réseau de garderies soit abordable, soit
efficace et pratique pour que les jeunes femmes, qui sont des chefs de famille
monoparentale, puissent amener leurs enfants dans des garderies, et en faisant
en sorte qu'elles puissent occuper un emploi sans avoir le stress ou la
pression de quitter leur emploi de bonne heure pour ne pas arriver en retard
parce que la garderie ferme à 17 heures et le métro ne marche pas
bien et l'autobus est en retard. Ce n'est pas une vie, M. le Président,
pour ces jeunes femmes là. Je crois qu'il faut donc leur venir en aide
dans ce domaine-là. (17 heures)
En terminant, M. le Président, j'aimerais rendre un hommage
particulier à celle d'entre nous qui occupe la fonction et le poste de
ministre déléguée à la Condition féminine,
la députée de Dorion, une députée de l'est de
Montréal, une députée, M. le Président, qui
connaît les problèmes des femmes chefs de famille monoparentale
car la grande majorité de ces familles se trouvent dans l'est de
Montréal. Quand on connaît le côté social de la
députée de Dorion, quand on connaît, M. le
Président, son implication envers les plus démunis, lorsqu'on
connaît son sens de l'humanité, je crois, qu'en cette
journée on doit lui rendre un hommage particulier et souhaiter qu'elle
puisse encore occuper ce poste longtemps car c'est pour le bien-être et
pour le meilleur intérêt de toutes les femmes du Québec.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de LaFontaine, de votre intervention. Sur cette même
motion, je reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi. Mme
la députée.
Mme Jeanne L Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
de me joindre à la ministre déléguée à la
Condition féminine pour souligner la Journée internationale des
femmes, le 8 mars. À entendre le député de LaFontaine, on
est amené à penser qu'on dirait n'importe quoi lorsqu'il dit: II
aurait fallu adopter cette motion-là hier puisqu'on l'aurait fait en
même temps que toute la planète. Je voudrais juste lui rappeler
que la Journée internationale des femmes, c'est le 8 mars et non pas le
10.
Je vais rappeler les raisons qui ont amené l'Opposition, y
compris les femmes de l'Opposition, à penser qu'on pouvait adopter cette
motion aujourd'hui plutôt qu'hier. Aujourd'hui plutôt qu'hier parce
qu'il nous apparaissait d'une importance extrême, tant pour le
développement des Québécoises que des
Québécois, que les travaux de l'Assemblée nationale
s'ouvrent sur un plan de relance économique. L'absence de vision de ce
gouvernement en matière de développement économique
pénalise lourdement les Québécois. Vous le savez tous et
vous le savez toutes. On perd des dizaines de milliers d'emplois. Dans mon
comté et dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, on estime que
c'est 5000 emplois au cours des six derniers mois. Pour une petite
région comme la nôtre, c'est énorme. Alors, que
l'Assemblée nationale ouvre ses travaux sans qu'on ait un plan de
relance en matière de développement économique, qui
viendrait apporter des solutions ou proposer des solutions concrètes aux
difficultés qu'éprouvent autant les femmes que les hommes, et
plus les femmes que les hommes, ça nous apparaissait plus important et
plus urgent que d'adopter une motion pour souligner la Journée
internationale des femmes.
Je suis d'accord avec la motion. Je l'ai dit et je vais le
répéter. Cependant, ce qui me préoccupe, c'est que c'est
l'effet d'une journée. Une journée dans l'année! Je suis
certaine, à part ça, que la ministre va partager mon avis. Si
elle pouvait obtenir quotidiennement, 365 jours par année, les
mêmes appuis qu'elle a aujourd'hui pour la galerie, il y a beaucoup de
chance que les problèmes qui ont été évoqués
ici, aujourd'hui, auraient déjà trouvé, en partie, leur
solution. C'est parce qu'on a réussi à faire du 8 mars
l'équivalent du 25 décembre. Vous savez qu'au Québec il y
a une pratique: on va à la messe le 25 décembre. Il y a
peut-être 40 % de la population qui y va qu'une fois par année,
c'est le 25 décembre. On a l'impression qu'on a l'équivalent de
nos catholiques du 8 mars. Ils parlent le 8 mars, mais, à part
ça, on ne les entend pas beaucoup. On ne les entend pas beaucoup. Alors,
à ceux et celles qui se sont offensés qu'on n'accepte pas, qu'on
ne donne pas notre consentement pour adopter cette motion-là en Chambre,
hier, je leur dis que je souhaiterais qu'ils aient la même vigueur
lorsqu'on va réclamer des modifications et des améliorations
à la condition féminine.
M. le Président, l'absence de plan de relance économique
pénalise lourdement les Québécois et les
Québécoises. Ça a été dit amplement, je
n'élaborerai pas là-dessus. Simplement pour rappeler qu'encore
aujourd'hui, alors qu'on pensait faire un peu de gains, l'écart salarial
entre les hommes et les femmes est de quelque 38 % pour des tâches
comparables, une formation équivalente. C'est scandaleux! Ce n'est pas
acceptable! Si on n'en parlait pas juste une fois par année, on serait
peut-être en train de le changer. On serait peut-être en train de
le changer.
M. le Président, être solidaire une journée par
année, ce n'est pas trop fatigant. Ce n'est pas trop fatigant! On fait
un beau discours. Les députés envoient ça dans leur
comté et disent: On pense aux femmes aussi. Tout le monde est content.
Ensuite, la ministre se retrouve quasiment toute seule à défendre
ses dossiers.
M. le Président, les femmes sont solidaires entre elles. Elles
sont solidaires, je dirais... J'aimerais féliciter celles qui
travaillent sur ces dossiers. Elles le sont, mais elles le sont sur des
dossiers ponctuels, dans des situations précises, pour régler des
problèmes concrets reliés au développement d'un groupe
plus faible de la communauté, reliés au soutien aux personnes
âgées, aux enfants en difficulté, aux handicapés,
pour parler de chômage, de sous-scolarisation, d'alphabétisation.
Malheureusement, je dois dire qu'on ne les entend pas se solidariser pour
réclamer ensemble et collectivement un projet de société.
Aussi longtemps qu'on va se contenter de travailler sur des choses ponctuelles,
on aura peu de chances d'influencer les politiques générales qui,
elles, finiraient par mieux cerner les problèmes des femmes en
particulier et des groupes dont elles soulagent les difficultés.
M. le Président, les femmes, actuellement, sont présentes
dans à peu près tous les dossiers. Dans ma région, j'ai eu
l'occasion, le dimanche 8 mars, de rencontrer la plupart, la très grande
majorité des groupes de femmes qui oeuvrent dans le comté et dans
une bonne partie de la région. Ces femmes, on les retrouve proches de
toutes les situations où il y a des problèmes. Elles sont
particulièrement perspicaces quand il s'agit d'identifier les besoins et
elles sont
particulièrement efficaces quand il s'agit de trouver les
solutions ponctuelles à des besoins. Cependant, elles n'arrivent pas
à se solidariser pour essayer d'examiner ce que pourraient être
des solutions à plus long terme à l'ensemble des problèmes
de la collectivité.
M. le Président, l'absence des femmes dans le débat
constitutionnel actuel a de quoi nous inquiéter. Je ne sais pas si la
ministre y a déjà réfléchi. On entend parler les
politiciens et les politiciennes, c'est normal, les spécialistes, les
constitutionnalistes, les juristes, les autochtones, les Anglo-canadiennes ont
parlé beaucoup à l'occasion de l'échec de Meech, mais on
n'a pas beaucoup entendu parier les Québécoises. Je dirais que je
suis heureuse de constater que cette lacune est comblée par la
création, ou l'initiation, ou l'initiative de la
Fédération des femmes du Québec qui réunit quelque
1300 groupes de femmes et qui organise l'équivalent d'un sommet ou d'un
forum national des femmes, qui devrait se tenir les 29, 30 et 31 mai prochain,
forum des femmes appelé «Un Québec féminin
pluriel» et qui va réfléchir à ce que serait un
véritable projet de société. Je suis heureuse de voir
cette initiative parce que, comme le dit si bien la Fédération
des femmes du Québec, le Québec est en train de se redessiner et
que le débat constitutionnel nous mène à deux voies: ou
une réforme en profondeur du fédéralisme canadien, ce en
quoi je ne crois pas beaucoup, compte tenu des objections du Canada anglais, ou
encore la souveraineté, et c'est une occasion tout à fait unique
dans l'histoire d'un peuple ou extrêmement privilégiée pour
redéfinir son projet de société. Jusqu'à
maintenant, les femmes étaient par trop absentes de ce projet de
société. Si elles ne s'impliquent pas immédiatement dans
cette réflexion, c'est qu'on va reconstruire le Québec, on va
redéfinir le Québec sans leur participation.
Évidemment, les attentes qu'elles ont, les besoins qu'elles
voudraient voir traduits dans des politiques, la lutte à la
pauvreté, à la sous-scolarisation, au développement des
régions, le soutien aux familles, toutes ces questions-là qui
leur tiennent tant à coeur, sur lequelles on les voit travailler, ne
pourront pas être traduites dans le projet de société qui
naîtra de ce Québec en devenir.
M. le Président, je suis heureuse de voir que l'initiative de la
Fédération des femmes du Québec permettra enfin de voir
les femmes indiquer fermement et clairement au gouvernement du Québec,
mais quel que soit le parti qui prendra la direction du Québec dans 2,
3, 4, 5 ou 10 ans, dire clairement leurs attentes quant au Québec de
demain. Elles doivent nous aider à dessiner ce Québec.
M. le Président, un journaliste m'interrogeait en me disant: Mais
comment pouvez-vous associer les problèmes de femmes et les
problèmes de société, les problèmes
constitutionnels?
Encore une fois, je retrouvais cette espèce de difficulté
qu'on a ici, comme dans la société, à bien intégrer
les problèmes de femmes comme étant des problèmes de
société. Encore aujourd'hui, des problèmes de femmes, ce
n'est pas des problèmes de société. Si c'étaient
vraiment des problèmes de société et qu'on les sentait
tels quels, on les solutionnerait. Ce n'est pas vrai, les femmes
s'appauvrissent, les femmes élèvent des enfants dans la
pauvreté, pour ne pas dire dans l'indigence. Ces enfants-là, ce
ne sont pas juste des femmes; qu'ils soient filles ou garçons, c'est la
société de demain. Si on était vraiment conscients que ces
problèmes de violence, de chômage, de précarité de
l'emploi, d'écart salarial et d'appauvrissement des femmes et des
enfants, c'étaient vraiment là les problèmes les plus
cruciaux et des problèmes de société, on serait en train
d'y apporter des solutions, M. le Président. (17 h 10)
M. le Président, je voudrais, à cette occasion, inviter
à la solidarité à l'endroit de ces femmes qui, encore une
fois, sont les plus pénalisées par la crise économique. On
connaît le système: les dernières arrivées, les
premières sorties. Les dernières arrivées sur le
marché du travail, les plus rapidement mises à la porte.
Ça, c'est vrai en éducation, c'est vrai dans les
universités. Ce n'est pas juste vrai dans les entreprises, dans les
petites usines. Quand elles entrent dans les petites usines, c'est parce que,
généralement, elles génèrent un salaire moins
élevé que le garçon qu'on vient de mettre dehors, mais
c'est les seules occasions où elles peuvent entrer plus rapidement que
les jeunes ou que les hommes. Alors, elles sont lourdement
pénalisées. Je voudrais qu'on puisse inviter à la
solidarité pour exiger l'équité salariale, à la
solidarité pour trouver des moyens de lutter contre le chômage
chronique chez les femmes, à la solidarité également pour
s'assurer que les femmes aient des conditions de travail qui soient saines.
Je voyais un cas à la CSST, ce qu'on a appelé les chaises
à Provigo où les caissières de Provigo ont obtenu, par le
biais d'un jugement de la Commission d'appel en matière de
lésions professionnelles, le droit d'avoir des sièges, parce
qu'elles ont des problèmes de dos. Provigo en a appelé de la
décision devant la Cour supérieure. La Cour supérieure a
confirmé le jugement de la Commission et, là, Provigo est en Cour
d'appel. Alors, je me dis que c'est anormal. C'est anormal qu'ici, en cette
Chambre, à la fois la ministre et le ministre du Travail n'aient pas
exigé ou n'aient pas fait de pressions additionnelles auprès de
Provigo pour qu'elle puisse commencer à concevoir des sièges qui
permettraient aux caissières d'avoir des positions un peu plus
confortables qui affecteraient moins leur santé. Je n'ai rien entendu
ici. On en a parlé à quelques reprises, mais je n'ai pas entendu
de
pressions qui aient été faites soit par le ministre du
Travail, soit par la ministre à la Condition féminine ou par ses
collègues pour mettre fin à cette situation qui est totalement
inacceptable. On continue de considérer les caissières comme
étant généralement des femmes qui travaillent quand elles
ont le loisir, parce que ça leur fait plaisir, pour compléter les
revenus du mari et qui, généralement, ne font pas ça toute
leur vie. Mais ça ne correspond plus à la réalité.
Les femmes, lorsqu'elles entrent sur le marché du travail, elles entrent
pour la vie, à présent. Alors, évidemment, les conditions
de travail, lorsqu'elles ne sont pas suffisamment confortables, lorsqu'elles
imposent des stations trop longues debout ou dans des positions toujours
répétitives, créent des problèmes de santé
qu'elles ne pourront pas corriger parce qu'elles rentrent chez elles une fois
qu'elles ont travaillé les 4, 5 ou 6 ans qu'elles travaillaient, je ne
sais pas, il y a seulement 15 ou 20 ans de ça.
Alors, ce sont des situations où on devrait faire preuve de
solidarité. On ne devrait pas laisser une entreprise, fut-elle
privée, alors qu'on sait que Provigo a été largement
subventionnée par les deniers publics, continuer de faire perdurer une
situation qui, tant qu'elle ne sera pas réglée, ne pourra pas
être imposée dans d'autres lieux de travail, ne pourra pas
être imposée dans d'autres grands marchés
d'alimentation.
M. le Président, aujourd'hui, je souhaiterais, à
l'occasion de cette motion, inviter les femmes à la solidarité,
les membres de l'Assemblée nationale également, pas seulement une
journée par année, mais 365 jours par année. Je dirais
366, cette année, c'est une année bisextile. Et pourquoi pas 366
jours par année? Si on réussissait à développer
cette attitude, il y a gros à parier que la condition des femmes serait
améliorée de façon considérable. Ça ne
prendrait pas une année. J'espère que ce 8 mars ne sera pas comme
le 25 décembre, c'est-à-dire qu'on en parie une journée
et, ensuite, on oublie les femmes pour le reste de l'année. Je voudrais
assurer la ministre de notre plus entier appui dans les efforts qu'elle fait
sans doute, je n'en doute pas, pour essayer d'améliorer la condition
féminine. Là-dessus, elle peut avoir l'appui entier et complet de
l'Opposition. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Sur cette même motion, Mme la
députée de...
Mme Juneau: Johnson.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci, M. le Président. M. le
Président, bien sûr que je m'associe à la motion de la
ministre, mais je voudrais m'y associer moi aussi 365 jours par année
parce que, encore aujourd'hui, je pense qu'on en est tous témoins qu'il
y a des gens, surtout des femmes, qui sont très pauvres. Les
statistiques le disent.
Je regardais dans un document qui a été justement produit
pour la fête des femmes, le 8 mars. On disait que près de 60 % des
adultes vivant dans la pauvreté sont des femmes. Je trouvais ça
tellement odieux de lire qu'à un certain moment donné, quand on a
institué l'aide sociale en 1969... Avant ça, il existait la loi
sur les mères nécessiteuses, puis on exigeait à ce
moment-là de la femme pauvre qui était dans le besoin de prouver
qu'elle était une bonne mère pour avoir droit à certaines
prestations. Je trouve ça tellement odieux! Heureusement qu'aujourd'hui
on a dépassé ce stade-là et que les prestations d'aide
sociale viennent en aide aux femmes qui sont dans le besoin sans qu'elles
soient obligées de prouver qu'elles sont des bonnes mères, parce
que je pense qu'il va de soi que, quand tu as des enfants et tu es par
surcroît indigente, ce n'est pas très drôle d'être
obligée d'aller chercher de l'aide à l'extérieur sans
avoir cette fierté de pouvoir quotidiennement aller chercher le fruit de
ton travail, c'est-à-dire un salaire à la fin de la semaine.
M. le Président, il y a une autre chose que j'ai de la
difficulté à vivre, c'est les personnes âgées. Plus
on vieillit, plus on est pauvre, parce que c'est de la féminisation
quand... Vous savez, encore là, les statistiques nous disent clairement
que les femmes vivent sept ans ou huit ans de plus que les hommes. Donc,
à ce stade-là et surtout aujourd'hui... Je ne vous dis pas que,
dans les années à venir, ça sera la même chose parce
que, dans les années à venir, la plupart des femmes auront
été sur le marché du travail et la formation aura
été différente aussi de celle qu'on connaît
présentement.
Celle qu'on connaît présentement, ce sont des femmes qui
n'ont pas eu la chance d'avoir une formation adéquate et ça va de
soi que, lorsqu'elles étaient en mesure d'aller sur le marché du
travail, elles avaient une nombreuse famille et ce n'était pas la mode.
La femme était là, elle, à la maison pour
l'éducation des enfants. Elle avait 7, 8, 9, 10 enfants et, des fois, 15
à 20 enfants dans la maison. Donc, elle travaillait et, malheureusement,
on associe le salaire à la fin de la semaine à la qualité
du travail et au travail même.
Ce n'est pas rare, M. le Président, qu'on entende dire à
quelqu'un, à une personne, à une femme: Travailles-tu, toi?
Travailles-tu? Quand on dit qu'elle se lève à la barre du jour,
comme mon père disait, et qu'elle se couche quand tout le monde a eu ce
dont il avait besoin et quand la maison est propre. Travailles-tu, toi?
Ça, ça voulait dire: Est-ce que tu travailles avec un salaire
à la fin de la semaine? Il y en a encore
aujourd'hui qui sont organisées comme ça. Il y en a qui
choisissent aussi de rester à la maison. Moi, j'aimerais tellement
ça qu'un gouvernement puisse trouver le moyen d'aider les femmes qui
souhaitent rester à la maison, qui souhaitent demeurer et éduquer
les enfants à la maison. Je trouverais que, là, on aurait
beaucoup plus d'égalité envers celles qui font ce choix.
La ministre parlait de l'autonomie financière des femmes. Je vous
assure, M. le Président, qu'on n'est pas au bout de nos peines parce
qu'à qualité égale, à formation égale,
à critères égaux, pour un même emploi, c'est clair
que la femme est payée en deçà du salaire de l'homme. Je
pense qu'on a beaucoup de travail à faire et on n'a pas le droit de
s'asseoir, surtout pas nous, les femmes, à l'Assemblée nationale,
pas plus que les hommes d'ailleurs, parce que si le Bon Dieu a
créé l'homme et la femme égaux, c'est parce que ça
devrait être égal dans tout ce qu'on a à faire ici, que ce
soit à l'Assemblée nationale ou dans d'autres situations, M. le
Président. (17 h 20)
Je voudrais aussi vous parler du bienfait que les centres de femmes font
à travers tout le Québec. Moi, je connais celui qui existe dans
notre MRC et je suis persuadée qu'au Québec les centres de femmes
font un travail aussi formidable que celui de Val Saint-François.
J'étais avec eux dimanche dernier, comme, bien sûr, j'imagine,
toutes les collègues qui étaient dans leurs circonscriptions. Une
fois de plus, j'ai été témoin de femmes qui donnaient un
témoignage sur la qualité des services qu'elles avaient
reçus au niveau des centres de femmes. Encore là, le
problème, c'est le financement.
À la fin de l'année financière, l'année
budgétaire, il faut qu'elles étirent les services pour se rendre
au 1er avril (le budget du gouvernement). Bien sûr, le chèque
n'arrive pas le 2 avril. Ça retarde et, de ce temps-là, les
femmes ont beaucoup de difficultés à joindre les deux bouts. En
faveur de ces centres de femmes, je voudrais ajouter, M. le Président,
que c'est non seulement un endroit où les femmes qui sont
maltraitées se réfugient. Ce n'est pas seulement ça.
Ça l'est aussi ça, mais pas seulement ça. C'est un endroit
où on leur donne de la formation, où on leur donne de
l'information, où on leur donne aussi une sensibilisation en ce sens
qu'elles ne sont plus seules pour faire face à un changement de
carrière, à un besoin d'en connaître davantage sur ce
qu'elle a décidé de prendre.
Il y a eu, d'ailleurs, au centre de femmes de Val Saint-François,
de nombreux cours qui ont été offerts à la population
féminine de notre MRC. Il y a eu beaucoup de thèmes, à la
demande générale des femmes qui le fréquentent. Il y a
souvent, aussi, un genre de sondage qu'elles font dans le petit journal
hebdomadaire qui est distribué dans tous les foyers. Elles demandent
quels seraient les sujets ou les thèmes qui pourraient être les
plus populaires et les plus en demande au niveau des femmes.
À ce moment-là, on définit pour l'année qui
s'en vient les thèmes qui devront être étudiés et
donnés. On retrouve d'ailleurs la minceur à quel prix, la
médecine douce, le changement dans ta carrière, la santé
mentale, vaincre ses peurs, l'autonomie affective, l'estime de soi et la
confiance en soi, aimer au quotidien, les problèmes de la
dépression, s'autoguérir. Comme vous voyez, M. le
Président, ce n'est pas seulement un endroit, les centres de femmes, de
refuge où les femmes retrouvent un toit, une protection contre la
violence. C'est aussi de la formation.
Il serait tout à fait adéquat qu'on regarde le financement
de ces centres de femmes parce que, vous savez, lorsque tu rends ces
services-là, tu empêches une femme, une santé mentale ou
physique de se détériorer. À ce moment-là, c'est
une économie pour toute la province de leur donner cet appui qu'elles
demandent, et on ne les retrouve pas dans les hôpitaux plus tard. Donc,
moi, je parle beaucoup en faveur des centres de femmes. Je trouve que c'est une
façon très bien décrite pour aider les femmes à se
retrouver et à trouver une nouvelle orientation, une nouvelle vision de
leur vie.
Vous savez, M. le Président, on entend souvent dire: On devrait
avoir une femme dans cette assemblée-là parce que, s'il y avait
une femme, ça marcherait encore mieux. C'est vrai qu'on entend ça
souvent parce qu'une femme va au bout des choses. Elle va prendre en
considération ce qu'on lui donne comme information et elle va la
transmettre. Elle va se faire un devoir de la transmettre et d'accomplir la
tâche pour laquelle elle a été assignée.
Je trouve important aussi de faire toujours attention, d'avoir une place
à l'intérieur de toutes les associations. Dimanche, quand j'ai
fait une intervention, je leur disais que même si elles croyaient
qu'elles ne le pourraient pas, qu'elles ne se sentaient pas en mesure d'occuper
un poste, quel qu'il soit, que ce soit à la commission scolaire, que ce
soit au niveau de la municipalité, que ce soit dans une association, que
ce soit à la pastorale, n'importe où, mais qu'elles donnent leur
savoir, leurs connaissances, leur besoin de transmettre à d'autres leurs
valeurs à elles. C'est ça qui est important. Ce n'est pas de se
demander si je vais être la meilleure ou si je suis capable, l'un ou
l'autre, c'est de transmettre ce qu'on a à l'intérieur de nous,
nos valeurs, nos capacités, nos idées. À ce
moment-là, si on avait la chance que les femmes prennent confiance en
elles et aillent vis-à-vis de la société en
général, des associations, je pense que ça
s'améliorerait. Donc, ce n'est vraiment pas le temps qu'on s'assoie sur
nos lauriers parce qu'on n'est pas rendus au bout de nos peines, ce n'est pas
l'égalité partout, ni au niveau des finances, ni au niveau de
quoi que ce soit, en termes d'autorité.
Je pense que ce n'est pas le temps qu'on s'assoie, c'est le temps qu'on
continue de travailler, et c'est ensemble qu'on va le faire. J'approuve tout
à fait ma collègue de Chicoutimi qui disait qu'il fallait se
serrer les coudes pour enfin obtenir ce qu'on veut avoir pour les femmes.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Johnson. N'ayant pas d'autres interventions, je
reconnais Mme la ministre déléguée à la Condition
féminine, pour son droit de réplique, avec un maximum de 20
minutes.
Mme Violette Trépanier
(réplique)
Mme Trépanier: M. le Président, j'ai
écouté très attentivement toutes les interventions et je
pense qu'on peut dégager certains consensus. D'abord, tous les
intervenants, d'un côté comme de l'autre de la Chambre, ont
reconnu que les femmes québécoises avaient fait des gains
appréciables au cours des dernières années. On a cependant
reconnu unanimement, et j'ai été la première à le
faire, avec la présentation de cette motion, qu'il y a des
inégalités flagrantes et inacceptables dans notre
société, qu'il fallait résorber ces
inégalités-là et qu'elles ne se résorbaient pas
assez rapidement. Je dois cependant vous dire que, tout en reconnaissant tous
que l'autonomie financière, que l'indépendance économique
des femmes était la première indépendance à
obtenir, et qu'elles obtiendraient le reste avec cette autonomie
financière, nous sommes d'accord aussi là-dessus, mais nous
divergeons d'opinion sur les moyens pour y parvenir.
Plusieurs d'entre vous avez incité le gouvernement, à
plusieurs reprises, aujourd'hui et antérieurement, et plus
spécifiquement la critique de l'Opposition en matière de
condition féminine, à l'adoption d'une loi proactive en
équité salariale. Nous, de ce côté-ci de la Chambre,
nous sommes d'opinion contraire. La Commission des droits de la personne a
proposé une loi proactive en équité salariale et la
députée des Chutes-de-la-Chaudière en a parlé. La
Commission des droits dit, dans sa présentation, qu'une loi proactive
viendrait améliorer, viendrait faire avancer le droit à de
meilleurs salaires. Mais, dit-elle aussi, il ne faut pas perdre de vue des
mesures complémentaires essentielles comme des programmes d'accès
à l'égalité, comme l'obligation contractuelle. On dit
qu'on en a obligatoirement besoin. Moi, j'ai toujours préconisé
qu'il serait dangereux de mettre tous nos oeufs dans le même panier, en
fait, que la société québécoise se donne bonne
conscience en adoptant une loi proactive et en négligeant tout le reste
des secteurs. Je suis persuadée qu'on réussira à
résorber les inégalités en s'attaquant à la fois
à l'éducation, à la formation des filles au marché
du travail et également à la conciliation de la vie
professionnelle et de la vie familiale.
Je dois, ici, peut-être, mettre à jour les statistiques.
Nous avons parlé beaucoup des gains d'emploi des femmes; quatre
intervenants en ont parlé, du côté de l'Opposition. On nous
mentionnait toujours les statistiques de 1989. Est-ce que je peux vous
rappeler, M. le Président, que les statistiques de 1990, venant de
Statistique Canada, nous disent que, cette année, il y a eu une
amélioration de six points dans le salaire des hommes et des femmes,
quand il s'agit de résorber les écarts salariaux entre les hommes
et les femmes, pour les femmes qui travaillent à temps plein, et de cinq
points quand nous considérons toutes les femmes. (17 h 30)
En Ontario, pendant ce temps, une province que nous prenons souvent
comme exemple, qui a adopté une loi proactive il y a quelques
années, il y a eu une augmentation de l'écart de 1,4 %. Ça
vient confirmer le fait qu'une loi proactive n'est peut-être pas la
panacée à nos problèmes. Nous ne l'écartons pas
mais nous disons: Faisons attention de ne pas privilégier un outil
unique. Et dans cette affirmation, je dois dire que je m'appuie sur une
consultation importante, très large, au niveau de l'équité
en emploi, que j'ai menée à l'automne dernier. Et, tous les
intervenants, que ce soit le patronat, les syndicats, les groupes de femmes,
tout le monde est unanime à dire que nous devons nous orienter dans une
démarche globale comprenant autant l'éducation, la formation et
le monde du travail que la conciliation, et que les écarts salariaux ne
pourraient être résorbés que si nous mettions tous ces
outils-là à la fois.
M. le Président, je présenterai très prochainement
une politique de la condition féminine dans laquelle le volet
«Équité en emploi» tiendra une place
extrêmement importante. Je peux vous dire d'ores et déjà
que j'ai l'intention de suggérer au gouvernement de continuer et
même d'améliorer, d'intensifier les programmes d'accès
à l'égalité - l'obligation contractuelle que nous avons
depuis quelques années - de, surtout, augmenter et continuer nos efforts
en ce qui concerne la formation, l'éducation des filles, et la
conciliation de la vie professionnelle qui passe par les services de garde, qui
passe par une amélioration des horaires de travail. Toute cette question
est si importante que tout le monde l'a mentionnée aujourd'hui dans des
termes différents. Et l'équité salariale serait un des
éléments de cette grande démarche mais ne serait pas
l'unique élément; il ne serait peut-être pas
l'élément prioritaire. Cette politique, elle sera large, elle
comprendra la violence; on parlera de l'apport des femmes dans la
société québécoise et, également, nous
essaierons de donner une vision de société.
En conclusion, parce que je sais que le temps nous presse, je dirai que
nous pouvons compter sur les gens de cette Assemblée; et vous
pouvez compter sur la ministre à la Condition féminine et
sur sa vigilance, parce que c'est vrai qu'on ne peut pas dormir sur nos
lauriers et - Mme la députée l'a mentionné très
clairement il y a quelques minutes - nous devons aussi compter sur la
détermination, sur la solidarité. Mais nous ne pouvons pas le
faire seules. Ça nous prend l'appui des hommes et des femmes de bonne
volonté de cette Assemblée et de la population pour qu'ensemble
on offre aux Québécoises d'aujourd'hui, mais surtout à la
génération qui nous suit, à nos enfants, cette
égalité que nous voulons tous, que nous avons dans nos lois, que
nous avons dans nos droits mais qui ne se reflète pas dans la
réalité.
Et je souhaite très ardemment, comme la plupart des intervenantes
aujourd'hui, que dans quelques années - je pense que ce sera
malheureusement dans plusieurs années - nous n'aurons plus besoin de
journée de la femme, que nous n'aurons plus besoin de ministre à
la Condition féminine et que nous en arriverons à vivre dans une
société égalitaire où le soleil brillera
également pour tout le monde. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine. Ceci met
fin au débat sur cette motion présentée par la ministre
déléguée à la Condition féminine, qui se lit
comme suit: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne
la Journée internationale des femmes qui se tient annuellement le 8
mars.» Est-ce que cette motion est adoptée?
M. Bélisle: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président. M. le
Président, pour nous permettre et nous faciliter, en fin de compte, de
procéder à la motion sans préavis ayant pour objet de
féliciter les gagnants aux Jeux olympiques d'Albertville, où nous
avons plusieurs intervenants de part et d'autre en cette Chambre, nous vous
suggérons, de consentement avec l'Opposition, de procéder
immédiatement à l'appel de l'article 32, qui est l'adoption du
principe et l'adoption du projet de loi d'intérêt privé 267
concernant la ville de Gatineau, ce qui ne va prendre que quelques instants
avec le ministre des Affaires municipales et le député de
Jonquière.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement pour que l'Assemblée passe aux affaires du jour puis
revienne aux affaires courantes à l'item «motions sans
préavis»?
M. Gendron: Oui, M. le Président, si le leader adjoint
m'informe de quel temps on va disposer. Il y a consentement si c'est quelques
minutes. C'a été vérifié qu'il ne s'agira que de
quelques minutes seulement?
M. Bélisle: C'est exact, M. le leader. M. Gendron:
II y a consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement pour
que nous passions immédiatement à la période des affaires
du jour pour étudier l'article 32 et que nous revenions à la
suite aux affaires courantes à la rubrique «motions sans
préavis».
Projet de loi 267 Adoption du principe
Alors, à l'article 32, M. le député de Chapleau
propose l'adoption du principe du projet de loi 267, Loi concernant la ville de
Gatineau. M. le ministre des Affaires municipales.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, les villes de Montréal,
Québec, Laval, Longueuil, Hull, Sainte-Foy et Charlesbourg sont
déjà dotées d'un comité exécutif. En raison
de la complexité des affaires que doit gérer aujourd'hui une
grande ville, il a été jugé opportun de permettre à
ces villes de se doter d'un comité exécutif à
l'intérieur du conseil municipal élu par l'ensemble des
électeurs de leurs territoires respectifs. Nous voulons étendre
cette faculté à la ville de Gatineau, qui en a fait une demande
formelle depuis déjà près de deux ans.
La ville de Gatineau compte maintenant environ 75 000 citoyens. C'est
devenu une très grande ville. Elle compte 12 conseillers municipaux en
plus du maire et si elle avait la faculté de se doter d'un comité
exécutif, ses élus, appuyés par le député du
comté, le député de Chapleau, nous ont fait valoir, en
commission parlementaire, des avantages qu'il y aurait. En commission
parlementaire, le gouvernement a donné son acquiescement et il le donne
de nouveau. Nous souhaitons que cette faculté puisse être
donnée à la ville de Gatineau dans les meilleurs délais,
vu la longue attente qu'elle a dû accepter jusqu'à maintenant.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Affaires municipales. Sur ce sujet, M. le député de
Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Juste quelques mots pour renchérir, en fait,
sur un sujet qui, de plus en plus, nous est présenté sous forme
de bill privé pour doter les municipalités d'un comité
exécutif.
Ma prétention est à l'effet que les comités
exécutifs ne donnent pas nécessairement plus de transparence dans
le domaine municipal, ni pour les électeurs, ni pour les conseillers
puisque ça a pour effet d'éloigner les conseillers de la
décision. La décision, c'est aussi l'information, et
l'exécutif a pour effet d'éloigner les conseillers municipaux de
l'information.
Tout de même, il faut admettre qu'il semble, en tout cas dans ce
cas-ci, que les conseillers étaient unanimes et ont demandé de se
doter d'un comité exécutif, lequel comité exécutif,
en fait, est nommé selon le bon vouloir du maire. Encore là, je
trouve qu'il y a certaines anomalies. J'ai soulevé, lors de
l'étude du projet de loi, au ministre des Affaires municipales, la
nécessité possiblement, lors d'une nouvelle législation
qui intéresserait l'ensemble des municipalités, qu'on puisse
regarder ce dossier-là, le dossier des conseils exécutifs ou des
comités exécutifs de municipalités importantes pour les
doter de systèmes comparables, des systèmes aussi où on
pourrait s'entendre sur une certaine forme de fonctionnement, qui serait de
nature à satisfaire plus de citoyens.
Voilà en gros. Même si j'étais réticent
quelque peu, on a donné notre accord à ce bill privé qui,
je l'admets, peut desservir une municipalité, peut permettre un meilleur
fonctionnement pour une municipalité. Mais sous le couvert d'un meilleur
fonctionnement, il ne faut pas non plus oublier les principes
démocratiques, a savoir, qu'un conseil municipal doit participer aux
décisions dans son ensemble, autant dans l'étude que dans la
prise de décision et il est bon aussi que la municipalité et que
les citoyens soient bien informés de ce qui se passe et, en même
temps, il ne faut pas passer à côté de ce
système-là. En fait, actuellement, dans le système qu'on
connaît, les comités exécutifs sont très près
des décisions du maire, qui peut nommer selon son bon vouloir, et
ça, ça représente certaines difficultés.
Néanmoins, on est heureux de concourir à l'adoption de ce projet
de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Jonquière. Votre réplique, M. le ministre
des Affaires municipales.
M. Claude Ryan (réplique)
M. Ryan: Oui, juste un petit mot en complément. Le
député de Jonquière a fait valoir qu'il serait mieux de
régler ces problèmes par l'entremise d'une loi
générale plutôt que par des lois particulières dans
chaque cas. Je suis tout à fait de son avis. Dans ce cas-ci, vu que la
ville de Gatineau attendait depuis une couple d'années, je pense que
c'est justice et équité que de faire droit à sa
requête maintenant. (17 h 40)
II me fait plaisir d'informer le député de
Jonquière que, dans un document remis aux représentants
des deux unions de municipalités, lors de la dernière
réunion de la Table Québec-municipalités tenue jeudi
dernier, c'est un document qui poursuit l'oeuvre de réforme de la
législation municipale fondamentale. Et dans ce document qui traite de
l'organisation des municipalités, il y a toute une section qui est
consacrée à la formation de comités exécutifs et
qui définira des normes devant être les mêmes pour
l'ensemble des municipalités à compter du moment où ces
réformes auront été faites. Ça prendra
peut-être un an ou un an et demi, peut-être un peu moins, pour
aboutir à l'adoption de cette législation mais,
déjà, elle sera soumise pour consultation à des milieux
très larges. Il me fera plaisir d'en faire parvenir un exemplaire au
député de Jonquière dès cette semaine. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Ceci met fin au
débat. Est-ce que la motion du député de Chapleau,
proposant l'adoption du principe du projet de loi 267, est adoptée?
M. Dufour: Adopté.
Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
député de Chapleau propose l'adoption du projet de loi 267, Loi
concernant la ville de Gatineau. Sur le projet de loi, est-ce qu'il y a des
interventions? Le projet de loi 267, Loi concernant la ville de Gatineau,
est-il adopté?
M. Dufour: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors,
nous revenons...
M. Bélisle: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.
M. Bélisle: ...je vous demanderais d'appeler l'article 13
de notre feuilleton.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que j'ai un
consentement?
M. Bélisle: En considération du report. Pour
permettre qu'on fasse la motion sur les médaillés
immédiatement après.
Mme Juneau: D'accord.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement?
Mme Juneau: Oui. Pour faire la motion sur les
médaillés.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II n'y a
pas de consentement?
M. Bélisle: La prise...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II n'y a pas de
consentement. Alors, nous revenons aux motions sans préavis, suite au
consentement antérieur. Nous en sommes aux motions sans préavis,
et je reconnais M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche.
Motions sans préavis
Hommage aux Québécoises et aux
Québécois
qui ont participé aux Jeux olympiques
d'hiver d'Albertville et, en particulier,
aux récipiendaires de médailles
M. Blackburn: M. le Président, je demande que cette
Assemblée accepte de rendre hommage à toutes les
Québécoises et à tous les Québécois, les
athlètes, les entraîneurs, les accompagnateurs qui ont
participé aux derniers Jeux olympiques d'hiver tenus à
Albertville, en France, et plus particulièrement aux
médaillés d'or: Mmes Annie Perreault, Nathalie Lambert, Sylvie
Daigie, Angela Cutrone et M. Philippe LaRoche; aux médaillés
d'argent: MM. Sylvain Gagnon, Frédéric Blackburn, Michel
Daigneault, Nicolas Fontaine, Patrick Lebeau, Joé Juneau, Adrien Plavsic
et Sam Saint-Laurent, ainsi qu'aux médaillés de bronze: Mmes
Myriam Bédard, Isabelle Brasseur et M. Uoyd Eisler.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement pour débattre cette motion?
Mme Juneau: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. M. le
ministre, vous pouvez intervenir.
M. Gaston Blackburn
M. Blackburn: M. le Président, merci beaucoup. J'ai
rarement eu autant que cet après-midi l'occasion d'avoir ce sentiment de
fierté d'assumer une responsabilité comme celle de ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche et, par effet de conséquence,
ministre responsable du sport amateur au Québec. Nous avons eu le
privilège d'accueillir nos athlètes, tant les
médaillés que tous ceux qui ont eu l'occasion de participer
à ces Jeux olympiques d'Albertville, cet après-midi, à
l'Assemblée nationale, bien sûr. Nous les avons reçus au
Parlementaire avec le président de l'Assemblée nationale, avec
plusieurs de mes collègues qui étaient présents et, tous,
nous avons eu l'occasion de leur mentionner combien nous avions
été fiers de leur performance, combien nous avions vibré
lors de leur éclatante victoire et éclatante compétition
dans laquelle ils se sont, bien sûr, fait valoir.
On peut affirmer sans crainte de se tromper que février fut le
mois du sport amateur à travers le monde, en raison de la
présentation des Jeux olympiques d'hiver à Albertville, en
France. On estime à plusieurs millions le nombre de personnes qui, par
le truchement de leur petit écran, ont suivi de façon quotidienne
les performances de nos athlètes. Composant plus de 30 % du contingent
canadien, les athlètes québécois se sont
distingués, et ce, de façon exceptionnelle. Des neuf
médailles décrochées par le Canada, sept furent
remportées par des Québécoises et des
Québécois. Cela démontre concrètement la
détermination et le courage de nos athlètes, et surtout leur
capacité de performer à un niveau où l'excellence mondiale
est au rendez-vous.
Parmi les médaillés de ces Jeux, cinq athlètes
québécois ont gravi la plus haute marche du podium. Il s'agit de
Mmes Annie Perreault, Nathalie Lambert, Sylvie Daigie, Angela Cutrone et de M.
Philippe LaRoche. Les Québécois sont aussi revenus d'Albertville
avec des médailles d'argent: MM. Sylvain Gagnon, Frédéric
Blackburn, Michel Daigneauit, Nicolas Fontaine, Patrick Lebeau, Joé
Juneau, Adrien Plavsic et Sam Saint-Laurent ont réussi l'exploit. Enfin,
Mmes Myriam Bédard, Isabelle Brasseur et M. Uoyd Eisler n'ont
ménagé aucun effort, ce qui leur a valu le bronze.
J'aimerais profiter de l'occasion qui m'est offerte afin de rendre
hommage aux autres athlètes québécois qui ont pris part
à cette grande compétition. Même s'ils n'ont pas
réussi à accrocher de médaille à leur cou, ces
jeunes de chez nous doivent savoir que les efforts qu'ils ont investis ne sont
pas vains. Leur simple présence à Albertville démontre
qu'il font partie de l'élite mondiale. Lors d'une telle
compétition, ce sont les athlètes qui occupent toute la place, et
avec raison.
Cependant, derrière leurs performances, il y a les
entraîneurs qui jouent ce rôle, un rôle
prépondérant. Ne ménageant aucun effort afin d'aider
à la recherche de l'excellence, ces entraîneurs méritent
aussi notre admiration. Je tiens à les féliciter, et surtout
à les encourager à continuer dans la même voie. Il en va de
même pour les parents qui, par une implication bien souvent
caractérisée par l'abnégation, sont à l'origine
même de ces réussites. Que de fois ils ont dû se lever
tôt; que de fois ils ont dû faire certains sacrifices d'argent, de
disponibilité, de générosité pour leurs
enfants.
Dans un autre ordre d'idée, le gouvernement du Québec et
le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche supportent de
manière tangible l'excellence sportive. Par le biais de nos divers
programmes de sport, nous travaillons depuis plusieurs années à
nous rapprocher du pratiquant et de son entourage. Les résultats, ces
résultats que nous avons, semblent confirmer que nous sommes sur la
bonne voie. Il y a encore du
travail à faire. Il nous faut continuer, bien sûr.
Enfin, comme député de Roberval et ministre responsable de
la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, je ne peux passer sous silence la
performance de deux athlètes originaires de cette belle région:
tout d'abord, Frédéric Blackburn, spécialisé en
patinage de vitesse. Ce n'est pas une mais deux médailles d'argent qu'il
a remportées au Québec. Je m'en voudrais de ne pas
féliciter aussi M. Sylvain Gagnon, récipiendaire d'une
médaille d'argent. À ces deux athlètes, à leurs
proches, et au nom des gens de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean,
bravo et chapeau!
M. le Président, je propose que l'Assemblée nationale
félicite tous les athlètes québécois, tous les
entraîneurs, tous les parents et les accompagnateurs qui, grâce
à leur travail, ont fait honneur au Québec. Et je suis convaincu,
M. le Président, que cette motion va faire l'unanimité. Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Sur cette même
motion, je reconnais Mme la députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci, M. le Président. Bien sûr,
l'Opposition officielle se joint avec grand plaisir à la motion que le
ministre du Loisir vient tout juste de nous présenter. Nous nous y
joignons avec grand plaisir parce que notre fierté est égale, je
pense, à celle que le ministre vient d'exprimer, mais à celle,
aussi, des hommes et des femmes, de ces jeunes hommes et ces jeunes femmes qui
se sont présentés pleins d'espoir aux jeux mondiaux, aux Jeux
olympiques, pleins d'espoir parce que ça faisait des semaines et des
mois, et même des années qu'ils préparaient cette
entrée sur cette scène internationale. Ils préparaient
ça avec tout le courage qu'on peut retrouver dans une personne qui est
destinée à des grandes choses.
Être un athlète olympique, c'est une grande chose, M. le
Président. Il faut non seulement signaler le fait qu'ils ont
été victorieux, mais s'ils ont été victorieux, je
pense qu'il faudrait saluer leur courage, leur détermination, leur
volonté. Pendant que d'autres sortaient, allaient danser ou allaient
faire toutes sortes de choses, eux, qu'est-ce qu'il faisaient? Ils pratiquaient
leur sport. Ils pratiquaient quotidiennement leur sport, et des heures, et des
heures, M. le Président, sans compter. C'était leur quotidien et
ce qu'ils faisaient, c'était simplement la pratique de leur sport.
Pourquoi? Parce qu'ils savaient qu'une journée bien définie ils
auraient à aller prouver à la face du monde qu'ils étaient
les meilleurs. Quand tu es né champion, tu ne reviens pas, après
ça, en arrière pour retomber trop bas ou plus bas. Quand tu es un
champion, je pense que tu l'as dans le corps et dans l'âme et que tu fais
tout ce qu'il faut pour demeurer champion.
(17 h 50)
On allait, je pense, de surprise en surprise, parce que des milliers de
personnes ont suivi ça au petit écran, vous comprendrez. Quand on
voyait nos athlètes performer, je pense qu'on était aussi fiers
qu'eux. On était tellement heureux de voir à quel point ils
avaient fait des efforts et on était fiers, en tant que
Québécois et Québécoises, de voir que
c'étaient les nôtres, parce qu'il s'est gagné sept
médailles en tout au niveau des représentants canadiens, mais
là-dessus il y avait cinq Québécois, et là je ne
compte pas, M. le Président, les médailles de Philippe LaRoche et
de Nicolas Fontaine en ski acrobatique, parce que ce n'était pas une
discipline qui était reconnue au niveau des Jeux d'Albertville. Je pense
que ça ira aux prochains Jeux. Ça fera partie d'une discipline
reconnue mais, cette année, ce n'était pas reconnu. Nous avons
deux autres Québécois qui ont gagné des médailles
qui ne peuvent pas être comptabilisées dans les sept
médailles que le Canada a remportées, dont cinq
Québécois, M. le Président. Pensez donc que c'est toute
une fierté pour l'ensemble des Québécois! Cinq
médailles venaient du Québec, mis à part les deux dont je
viens de vous faire part.
On titrait, chez nous, dans La Tribune, qui est notre quotidien,
parce que vous savez que sur les patineuses de vitesse à courte distance
nous avions deux jeunes femmes de l'Estrie en la personne de Sylvie Daigle et
d'Annie Perreault... Vous comprendrez que je ne suis pas peu fière parce
que j'en ai une qui vient de mon comté, qui est native de chez nous,
à Windsor, et qui demeure à Bromptonville. Sylvie, qui est de la
région de l'Estrie, comme tous les autres qui sont de Montréal et
d'ailleurs au Québec, on la regardait avec intensité. Lorsqu'ils
sont montés sur les marches du podium avec leurs médailles,
pensez ce qu'on pouvait vivre, tout le monde.
Connaissant la famille d'Annie, bien sûr, j'ai parlé
à ses parents, et je pense qu'ils ont eu autant de stress et autant de
difficultés à vivre ça pour l'aider, finalement, avec ce
qu'ils pouvaient faire... Mais ils en ont fait beaucoup parce que, comme le
ministre le disait tout à l'heure, les parents d'athlètes,
surtout ceux qui se rendent jusqu'à ces Jeux qui sont les jeux les plus
hauts qu'on puisse produire, je pense qu'il leur a fallu aussi beaucoup de
sacrifices, parce que l'aide financière que peuvent recevoir les
athlètes lorsqu'ils vont sur un podium aussi important que celui des
jeux internationaux, c'est-à-dire des Jeux olympiques, je pense que
ça coûte très cher. Vous savez, c'est toujours la course
aux commanditaires pour faire en sorte qu'ils aient un peu d'argent pour
être capables de payer les dépenses que ça peut
coûter. Les programmes gouvernementaux qu'on peut avoir pour
l'athlète qui se spécialise comme ça, ce
n'est pas suffisant pour en arriver à faire tout le travail, pour
monter finalement sur le podium et être les vrais gagnants.
Je vous disais que La Tribune titrait: «Des filles en
or». Bien sûr, parce qu'elles ont eu la médaille d'or.
Est-ce que vous avez déjà vu une médaille olympique, M. le
Président? J'étais émue, cet après-midi. Il y a une
de nos athlètes qui l'avait apportée. Je n'en porterai jamais,
bien sûr, mais juste le fait de pouvoir voir à quel point c'est
une médaille extraordinaire, non seulement par sa beauté, mais
par ce qu'elle représente... Elle représente des jours, et des
jours et des années, et de la sueur et tous les sacrifices que ces
jeunes-là font, ça fait que c'est une médaille qui brille
de tous ses feux et que tu la regardes avec autant de fierté que tu peux
regarder l'athlète qui a eu l'honneur de se la mettre dans le cou parce
qu'elle l'avait gagnée.
M. le Président, je pense qu'on doit aussi féliciter les
entraîneurs, comme le ministre l'a dit lui aussi. Je trouve qu'il n'a
oublié personne et ça va de soi qu'il faut féliciter les
entraîneurs. Ce sont des gens qui travaillent dans l'ombre. On n'en parle
pratiquement jamais; ils sont en arrière et c'est eux qui donnent les
conseils, c'est eux qui enseignent comment toujours mieux faire pour arriver le
plus haut possible. Je voudrais leur rendre hommage, même si ce n'est pas
eux qui portent la médaille, même si, lorsqu'on les a accueillis
ici, à l'Assemblée nationale, ils n'ont pas reçu une
médaille de l'Assemblée nationale, mais ils ont reçu cette
gratification-là de voir que leur pupille s'est rendu au plus haut
sommet. Donc, à tous ces entraîneurs qui travaillent dans l'ombre
- mais combien est important le travail qu'ils font, M. le Président -
je voudrais dire merci de tout ce qu'ils font et leur dire bravo, parce que
c'est grâce à eux si les athlètes sont rendus le plus haut
possible.
Bien sûr, je vais ajouter cette formule toute faite de bonne
chance, parce que, vous savez, les athlètes que nous avions aujourd'hui,
il y en a qui sont arrivés du Japon à minuit hier soir, puis ils
étaient ici, à l'Assemblée nationale, aujourd'hui, pour se
faire fêter par les parlementaires. Donc, ça veut dire qu'eux
autres, après une médaille olympique, c'est une autre qui est en
préparation. Ça n'arrête pas là, et la durée
d'un athlète olympique... Je leur demandais quels sont les âges,
à peu près. On me disait que vers l'âge de 25, 26, 27 ans,
c'était pas mal le plus haut qu'ils pouvaient aller. Donc, c'est une
courte carrière au niveau des Jeux olympiques pour ces
athlètes-là, mais c'est une carrière intensive et une
carrière dont tous et chacun nous sommes très très
fiers.
M. le Président, je voudrais m'associer, au nom de ma formation
politique et en mon nom personnel - puisque je suis la responsable du loisir
pour l'Opposition officielle - et dire à tous ceux et celles qui nous
ont permis d'être aussi fiers: Merci beaucoup d'être ce que vous
êtes. Nous sommes très fiers de vous. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Johnson, pour cette intervention. Sur cette même
motion, je reconnais M. le député de Sherbrooke. M. le
député, la parole est à vous.
M. André J. Hamel
M. Hamel: Merci, M. le Président. C'est évidemment
avec beaucoup de plaisir et de fierté que je me joins à mes
collègues, députés de l'Assemblée nationale, afin
de souligner le grand succès obtenu par nos athlètes qui ont
participé aux récents Jeux olympiques d'hiver tenus à
Albertville. Pour nous qui étions au Québec, nous avons suivi ces
jeunes par l'intermédiaire des médias, mais notre esprit et notre
coeur étaient avec nos athlètes qui représentaient le
Québec et le Canada. Je tiens à le rappeler, M. le
Président, ce qui est important, c'est de concevoir cet esprit sportif
qui nous anime dans un contexte de compétition, bien sûr, mais de
saine compétition entre les athlètes, les pays, les
régions représentés lors de ces manifestations.
Mes félicitations s'adressent, bien sûr, à tous les
athlètes, tous les entraîneurs, les parents aussi, mais vous
comprendrez que j'adresse des félicitations un peu particulières
aux athlètes de ma belle et dynamique région de l'Estrie. Je veux
mentionner ici Sylvie Daigle et Annie Perreault, médaillées d'or
au relais 3000 mètres, Patrick Lebeau, médaillé d'argent
au hockey sur glace et Nicolas Fontaine, médaillé d'argent en ski
acrobatique de démonstration. Athlètes qui ont été
chaleureusement accueillis et honorés à Sherbrooke la semaine
dernière, M. le Président.
Certains de mes collègues ont souligné le travail, la
discipline, la compétence et la persévérance de tous ces
athlètes. J'aimerais aussi rappeler à cette occasion le contexte
souvent très exigeant dans lequel doivent évoluer nos
athlètes. En effet, on oublie trop souvent que l'évolution
personnelle de l'athlète se déroule dans l'effort quotidien, la
persévérance, la ténacité, parfois dans la
frustration, même, mais toujours dans le courage et la volonté
déterminée de réussir dans sa discipline. Malheureusement,
l'honneur d'accéder au podium est réservé à
quelques athlètes seulement. Les autres ont souvent fait preuve d'autant
de rigueur, de travail et de ténacité que les
récipiendaires de médailles, mais ils ont été
malheureusement victimes de certains facteurs quelquefois incontrôlables
mais toujours décevants. C'est pourquoi il est bon de faire ressortir
ici le côté humain de ce monde que l'on ne connaît souvent
que de façon superficielle. Ce contexte de compétition
sportive a aussi ses exigentes réalités, et ceux et celles
qui parviennent au sommet y sont arrivés à force de sacrifices,
de renoncement et de cette détermination obstinée, dans une
période de leur vie qu'ils ont décidé de consacrer
à une discipline sportive. (18 heures)
Le rôle de notre société consiste, à toutes
fins utiles, à assurer les conditions nécessaires à leur
épanouissement et à leur développement. Pour notre part,
nous les encourageons publiquement à poursuivre leur évolution en
vue de parvenir aux autres buts qu'ils se sont fixés et à servir
d'exemples à ceux et celles qui s'inspireront de leur succès.
Notre encouragement d'aujourd'hui peut, à première vue,
paraître modeste, mais souhaitons qu'il sera apprécié
d'abord et avant tout par l'ensemble des athlètes qui ont
représenté le Québec lors de ces Jeux d'Albertville, car
l'engagement de l'athlète dans une discipline sportive relève
d'abord d'une décision personnelle.
Sans trop en connaître les implications, cet athlète devra
franchir plusieurs étapes avant d'en arriver à ce sommet tant
convoité. Lorsqu'ils parviennent au succès, c'est toute la
société qui s'en réjouit en soulignant le magnifique
travail accompli par ces athlètes. À leur tour, ces derniers
confieront aisément qu'ils étaient d'abord et avant tout
inspirés par le désir de faire honneur au pays ou à la
région qu'ils représentent. Dans un cas comme dans l'autre, nous
en éprouvons une fierté bien légitime et nous tenons ici
à les remercier publiquement pour l'exceptionnel travail accompli tout
au long des années qui ont précédé les
succès remportés à Albertville. Souhaitons que de nombreux
jeunes du Québec soient inspirés par votre exemple et qu'ils
décident de relever aussi des défis exigeants. Je suis
très fier des succès remportés par nos athlètes du
Québec et particulièrement par nos athlètes de l'Estrie.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Sherbrooke. Alors, sur cette même motion, je
reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi. Mme la
députée.
Mme Jeanne L Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je veux me joindre
à la motion déposée par le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche pour rendre hommage à toutes les
Québécoises et à tous les Québécois
athlètes, entraîneurs, accompagnateurs qui ont participé
aux derniers Jeux olympiques d'hiver tenus à Albertville, en France, et
tout particulièrement, évidemment, aux médaillés
d'or, d'argent et de bronze.
M. le Président, la victoire de ces jeunes, c'est aussi la
victoire des entraîneurs. C'est la victoire des accompagnateurs. C'est
aussi la victoire des parents, des amis qui les ont soutenus, mais c'est aussi,
comme Québécois et comme Québécoises, je dirais, un
peu notre victoire.
Vous allez me permettre évidemment de souligner de façon
particulière les médailles qui ont été
remportées par deux jeunes du comté de Chicoutimi, Sylvain Gagnon
et Frédéric Blackburn. Tant pour ces jeunes que pour tous les
autres médaillés, tous ceux qui ont participé à
l'équipe olympique, la performance de ces jeunes constitue un
modèle, et Dieu sait que, par les temps qui courent, des modèles,
nos jeunes en ont besoin. Nos jeunes ont besoin de se dire et de se faire dire
qu'il y a encore des créneaux qu'ils peuvent occuper, qu'il y a encore
des performances qu'ils peuvent dépasser, qu'il y a encore des lieux
où on peut les inviter au dépassement.
Les jeunes, aujourd'hui, ont besoin de modèles, et les
modèles de compétition olympique sont des modèles qui sont
généralement proches des jeunes; des jeunes que vous pouvez voir,
que vous pouvez toucher, que vous pouvez rencontrer, que vous pouvez saluer;
des jeunes avec lesquels vous avez eu l'occasion d'aller à
l'école, de jouer, de fréquenter les mêmes lieux; des
jeunes avec lesquels vous avez eu aussi l'occasion de pratiquer un sport.
Ça devient, pour la jeunesse québécoise, les jeunes
garçons et les jeunes filles, des modèles.
En fait, ce que nous disent ces jeunes, c'est qu'avec de la
détermination, le goût du dépassement, le goût de
l'excellence, le goût de relever des défis, on peut atteindre des
sommets, et même lorsqu'on n'a pas de médaille, parce que c'est
arrivé à tous ceux dont on ne salue pas la performance
aujourd'hui, du moment qu'on a participé, on est déjà
gagnant.
Je voudrais féliciter ces jeunes, leur rendre hommage. Mais vous
allez me permettre de rendre hommage plus particulièrement à
leurs parents. Chaque fois que je vois des jeunes qui réussissent
à atteindre ces sommets, je m'imagine sans difficulté le nombre
de voyages de taxi que les parents ont dû faire, des fois très
tôt le matin, pour aller les chercher très tard le soir, les
investissements monétaires que les parents ont faits, alors qu'ils
n'étaient pas reconnus, pour les amener à participer, à
compétitionner à l'extérieur de la région, à
l'extérieur du Québec. Chaque fois, ça demande un peu plus
de sous aux parents, mais ça demande surtout beaucoup de
disponibilité. Beaucoup de disponibilité! Je rends hommage
à ces parents parce que, comme parent, je sais ce que ça
représente d'efforts soutenus de la part des parents pour que les jeunes
puissent percer, puissent performer dans ce secteur.
Les jeunes, ces jeunes qui ont réussi et qui sont devenus les
ambassadeurs du Québec, ils disent à nos jeunes: II y a des
endroits, il y a des créneaux qui ne sont pas encore occupés et
que tu peux occuper si tu as le désir et la
volonté de le faire. Ces jeunes médaillés nous
disent: Si tu te fais confiance, si tu y mets le temps, les efforts, la
détermination, si tu refuses de te laisser décourager, il y a
encore de la place pour toi; pas seulement dans les disciplines sportives,
c'est vrai pour toutes les disciplines de la vie. C'est vrai pour les
études, c'est vrai pour le travail, c'est vrai pour tous les
défis que pose la société. Ces jeunes disent à nos
jeunes Québécois, à nos jeunes Québécoises:
Toi seul peux prendre cette décision. Quelle que soit la qualité
du support que tu reçois de la municipalité, par les
équipements sportifs, de ta famille, de tes amis, de tes
entraîneurs, de tes accompagnateurs, c'est toi seul qui devras prendre la
décision d'y mettre le temps, les efforts, la volonté et la
détermination pour réussir.
Je le rappelle, ces jeunes-là sont des exemples et des
modèles pour nos jeunes et qu'enfin, ce soient des jeunes de l'entourage
immédiat, qu'on peut identifier, qui nous proposent des façons de
réussir. C'est plus accessible et plus réaliste que lorsqu'on ne
trouve ces modèles qu'à l'extérieur ou qu'on retrouve ces
modèles dans des secteurs à ultra-haute performance qui
s'appellent le hockey professionnel, par exemple. Beaucoup de jeunes partent en
se disant: On va tous devenir des athlètes payés à
plusieurs millions de dollars par année, ce qui n'est pas vrai.
L'important, c'est de réussir, de réussir dans des choses
où c'est accessible, où c'est possible d'être performant.
Mais, en même temps, ça rappelle aux jeunes que, dans le secteur
des sports amateurs, il y a de la place pour le défi, il y a de la place
pour la performance. Mais il y a de la place aussi pour occuper des loisirs,
pour rendre plus performant, pour apprendre la discipline personnelle, pour
apprendre aussi le partage, pour apprendre le compagnonnage, pour apprendre
l'esprit d'équipe.
M. le Président, je voudrais terminer en félicitant tous
les athlètes, les jeunes femmes, les jeunes hommes qui ont
remporté des médailles, en le faisant de façon plus
particulière pour les médaillés - vous le comprendrez - de
Chi-coutimi et vous rappeler - on oublie un peu ça, en cette Chambre -
à quel point les parents, après autant d'efforts, sont
émus et heureux. J'ai eu l'occasion de participer à une
cérémonie offerte par la ville de Chicoutimi pour les
médaillés de Chicoutimi, cérémonie à
laquelle ont assisté le grand-père de Frédéric dont
on a beaucoup parlé, Patrick Blackburn, et les parents des deux, Gagnon
et Blackburn, qui étaient extrêmement émus. J'ai vu la
mère du jeune Sylvain Gagnon et le père qui ne pouvaient retenir
leurs larmes. On sentait, dans cette émotion, la foi qu'ils avaient mise
dans leur fils, le désir du dépassement qu'ils avaient su lui
inculquer, mais, sans doute aussi, les moments où il avait subi le plus
de découragement, où il avait eu le goût de lâcher.
Il avait eu le goût de lâcher les études, alors qu'il a pu
poursuivre à la fois ses pratiques, son entraînement et ses
études collégiales bien que, comme certains jeunes, il les ait
étalées un peu plus longuement, mais il a réussi à
la fois à maintenir et à poursuivre ses deux objectifs qui
étaient d'atteindre des sommets dans la discipline, mais
également de se préparer et de préparer son avenir comme
futur citoyen dans la collectivité québécoise. (18 h
10)
Nous avons beaucoup de ces jeunes qui pourraient, à l'image,
à l'exemple de ces jeunes, atteindre des sommets. Je souhaiterais qu'ils
puissent trouver tant dans nos villes, dans nos municipalités que de la
part des gouvernements et des ministères concernés, l'appui, les
services et les soutiens dont ils ont besoin pour atteindre des sommets. Alors,
je dis à ces jeunes, je dis à leurs parents, à leurs
entraîneurs: Nous sommes très fiers de vous et nous
espérons que vous ferez encore mieux à la prochaine.
Je ne peux terminer sans vous dire, sans avouer avoir
éprouvé une fierté toute particulière quand j'ai
constaté qu'au terme de ces Jeux cinq médailles sur sept
médailles canadiennes étaient obtenues par des
Québécois et des Québécoises, et si le ski
acrobatique avait été déjà reconnu aux Jeux
olympiques, c'aurait été sept médailles sur neuf.
M. le Président, c'est plus de 70 % des médailles pour le
Québec seulement dans tout le Canada, et je me dis: Si jamais un jour le
Québec est souverain, sûrement que ça, ça va
constituer un appauvrissement pour le Canada. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mors, merci, Mme la
députée, de votre intervention. Sur cette même motion, je
reconnais maintenant le whip adjoint du gouvernement et député de
Chauveau.
M. Rémy Poulin
M. Poulin: Merci, M. le Président. Je me joins
sûrement à l'ensemble des collègues de l'Assemblée
nationale pour parler de ces athlètes qui ont participé à
Albertville et qui ont tous, je pense, dans l'ensemble québécois
et canadien, fait de nous, sur le plan international, une image fort
excellente. Mais bien égoïstement, je parlerai de ces
athlètes de la grande région de Québec, Myriam
Bédard, Philippe LaRoche, Joé Juneau, qui, avec fierté...
dont deux de ces athlètes sont de mon comté...
Je voudrais dire combien je suis fier, oui, fier parce que ces
gens-là, on les côtoie. On côtoie les entraîneurs, on
côtoie les bénévoles, on côtoie les parents, mais
aussi on côtoie ces gens qui les encouragent, ces gens qui sont
derrière eux, ces associations qui sont derrière eux. Je revois
encore ces athlètes, dont Myriam Bédard, Philippe LaRoche et
Joé Juneau, qui ont
fait la fierté du Québec, mais aussi de la grande
région de Québec.
Mme Bédard, qui a terminé troisième dans
l'épreuve des 15 kilomètres, inscrivait ainsi une page dans
l'histoire du biathlon féminin qui, soit dit en passant, figurait pour
la première fois dans les annales olympiques. Mme Bédard
mérite tous les honneurs qu'elle a remportés, tout comme les
autres médaillés québécois et
québécoises. Des souvenirs, quand je revois Joé Juneau,
cet athlète remarquable qui a fini premier pointeur lors des Jeux
d'Albertville, où j'ai eu l'occasion, comme entraîneur au hockey,
de l'avoir comme adversaire. Ce talent fort exceptionnel, ce talent de
batailleur, cet homme qui, sans relâche, «performe» par son
vouloir mais aussi son charisme. Joé Juneau, j'en suis très fier
parce que, même si un jour il contribue à nous battre lors de
compétitions, aujourd'hui, j'en suis fier comme Québécois
parce qu'il nous a apporté cette image du grand sport national qu'est le
hockey, pour nous prouver que, nous, nous avons de bons athlètes et que
ce sport nous appartient réellement.
Il va de soi que je vais parler de Philippe LaRoche, de la ville de
Lac-Beauport. Philippe, par ses performances... Philippe est ce
créateur, avec sa famille, du ski acrobatique; il nous a
démontré, encore une fois, ce caractère fort important,
mais un caractère fort défiant aussi parce que le ski
acrobatique, pour ceux qui l'ont vu - moi, je l'ai vu sur place, je l'ai vu
à Lac-Beauport; je les ai vus ici, sur la Grande-Allée, nous
faire des démonstrations de trampoline - ces hommes, ce Philippe
LaRoche, sa famille, qui ont cru... Il a donné cette image aujourd'hui,
dans les Jeux d'hiver, en souhaitant que cette discipline soit reconnue lors
des prochains Jeux d'hiver.
J'ai parlé de Joé Juneau, je voudrais aussi parler de
Lucie LaRoche qui, à cause d'une blessure, a dû abandonner les
jeux d'Albertville. Cette femme, aussi d'un caractère exceptionnel, je
pense - comme son frère - nous a démontré qu'il y a de la
grande place pour ces athlètes.
M. le Président, la grande région de Québec en est
fière, de ces athlètes. J'écoutais la
députée de Chicoutimi, j'écoutais notre ministre, le
député de - excusez, j'ai un blanc de mémoire - Roberval.
Je pense que tous et chacun, dans des disciplines sportives, on a voulu
réaliser ce rêve, ce rêve d'athlète. On n'a pas tous
réussi, mais quand on a côtoyé ces gens-là de
très près et quand on revoit ces gens-là de très
près, nous sommes assurés que cette image va se refléter
sur nos jeunes, sur nos jeunes hommes, sur nos jeunes femmes qui, oui,
rêveront un jour de se voir dans ces Jeux fort importants. Et je peux
vous dire une chose, j'espère sincèrement que la grande
région de Québec fera vivre ces moments à nos jeunes
Québécois et Québécoises, chez nous, dans la
capitale de la grande région de Québec. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Chauveau. Pas d'autres intervenants? Est-ce que la
motion du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, rendant
hommage à toutes les Québécoises et à tous les
Québécois, athlètes, entraîneurs et accompagnateurs,
qui ont participé aux derniers Jeux olympiques d'hiver tenus à
Albertville, en France, et plus particulièrement aux
médaillés d'or, Mmes Annie Perreault, Nathalie Lambert, Sylvie
Oaigle, Angela Cutrone et M. Philippe LaRoche; aux médaillés
d'argent, MM. Sylvain Gagnon, Frédéric Blackburn, Michel
Daigneault, Nicolas Fontaine, Patrick Lebeau, Joé Juneau, Adrien Plavsic
et Sam Saint-Laurent, ainsi qu'aux médaillés de bronze, Mmes
Myriam Bédard, Isabelle Brasseur et M. LJoyd Eisler, est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Ceci
termine les motions sans préavis.
Nous en sommes maintenant à la rubrique «renseignements sur
les travaux de l'Assemblée». Ceci termine les affaires
courantes.
Nous en sommes maintenant aux affaires du jour. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bélisle: L'article 13, M. le Président.
Projet de loi 407
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 13,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du
budget et de l'administration sur le projet de loi 407, Loi modifiant de
nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions
législatives d'ordre fiscal. Y a-t-il des interventions sur ce rapport?
M. le ministre du Revenu.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Merci, M. le Président. Comme vous le savez, le
projet de loi 407, de quelque 200 pages, 249 articles, fut
présenté à l'Assemblée nationale le 6
décembre et l'adoption de principe a eu lieu le 16 décembre. La
commission parlementaire du budget et de l'administration en a fait
l'étude détaillée les 11 et 12 février derniers et
l'a adopté avec des amendements. Enfin, le rapport de la commission a
été déposé le 10 mars 1992.
Je rappelle que ce projet de loi vise principalement à donner
suite au discours sur le budget du ministre des Finances du Québec du 2
mai 1991, à ses déclarations ministérielles de
décembre 1990 et d'octobre 1991, au document technique sur la taxe de
vente du Québec publié en février 1991 ainsi qu'à
divers bulletins
d'information publiés récemment. La plupart des
dispositions prévues sont déjà en application depuis le
moment où elles ont été publiées. On comprend donc
que l'étude d'un tel document législatif s'effectue dans un
contexte particulier. (18 h 20)
M. le Président, n'eussent été le travail de
synthèse des officiers du ministère du Revenu et de la
collaboration des membres de la commission du budget et de l'administration,
cette tâche se serait avérée complexe et fastidieuse. Par
ailleurs, il n'est pas certain que les objectifs que nous nous fixons en cette
Chambre auraient été atteints adéquatement. À cet
effet, nous avons développé, depuis un peu plus d'un an, une
méthode de travail permettant d'exercer notre rôle de
parlementaire de façon éclairée et efficace dans le
domaine des lois fiscales. C'est ainsi qu'avec le temps nous en sommes venus
à aborder ces pièces législatives inextricables en
procédant à des regroupements d'articles par sujet au lieu de les
aborder un par un - c'est très difficile - au fur et à mesure
qu'ils se présentent dans le texte, ce qui devient, finalement,
incompréhensible sans avoir nécessairement un lien l'un avec
l'autre.
Ce regroupement sur une base thématique est fragile, car il
dépend essentiellement de la bonne volonté des ententes pouvant
être conclues à la dernière minute avec les parlementaires.
Je crois donc utile que l'Assemblée nationale et ses institutions
mènent une réflexion en ce sens afin de trouver une solution plus
durable à cette situation. Ainsi, je compte déposer d'une
façon formelle une proposition à l'Assemblée nationale
pour dire que dans l'avenir, pour les lois fiscales déposées qui
font suite à la présentation du budget et à d'autres
déclarations, que, effectivement, on puisse les étudier sur une
base thématique. Ça nous permet de les étudier d'une
façon intelligente, ça permet d'en comprendre le contenu, de
faire un suivi et ça va grandement faciliter non seulement la
tâche de la commission, mais également les travaux des
parlementaires qui doivent par la suite, par exemple, consulter ces
documents-là. Ça nous permettra, finalement, de donner un bon
éclairage, un éclairage juste et précis, sur les textes
qui sont devant nous.
Je regarde les travaux des assemblées et des commissions tels
qu'ils ont été faits auparavant, article par article. On se rend
aux articles 14, 17, 29, sur 500, 400 ou 300 articles. Finalement, ça ne
mène nulle part, la compréhension est très difficile.
En procédant sur une base thématique, on est certains,
là, finalement, de voir l'ensemble, le principe, le contenu et la
rédaction pour comprendre son système, et je pense que c'est
intelligent, que c'est éclairé, et c'est ça qu'on doit
faire. Cette motion sera déposée et je compte bien sur l'appui de
l'ensemble des parlementaires pour assurer la réalisation de cet
objectif.
Pour revenir, M. le Président, au projet de loi 407, grâce
à l'entente intervenue, cette façon de faire nous a donc permis
de regrouper les 249 articles en 36 sujets portant sur diverses mesures
fiscales. Parmi ces mesures, on peut noter celles visant à placer sur un
pied d'égalité l'ensemble des régimes d'assurance
collective, celles qui comportent un allégement du fardeau fiscal des
contribuables et des incitatifs visant à stimuler l'économie,
ainsi que d'autres mesures rendant plus efficace l'administration des lois
fiscales.
En terminant, M. le Président, je souligne que 11 amendements ont
été présentés et adoptés au cours de
l'étude détaillée, dont un titre. En remerciant tous ceux
qui ont contribué au bon déroulement des travaux portant sur le
projet de loi 407, je demande donc à cette Assemblée, M. le
Président, de bien vouloir adopter le rapport de la commission du budget
et de l'administration sur l'étude du projet de loi 407.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur la même
question, M. le député de Montmorency, sur l'adoption du
rapport.
M. Jean Filion
M. Filion: Oui, M. le Président. J'écoutais
le ministre du Revenu nous dire qu'effectivement, cette fois-ci, on a
étudié le projet de loi sujet par sujet. Mais, même si on a
fait ça sujet par sujet, je pense qu'on nous a quand même
présenté encore une fois un projet de loi supertechnique
où, à toutes fins pratiques, si on veut être honnête
intellectuellement, on dirait que c'est à peu près pas possible
qu'on prenne le temps, ici, à l'Assemblée nationale pour
étudier le projet de loi à fond, pour qu'on se fasse une
idée en profondeur, même sujet par sujet.
Les articles, M. le Président, et je l'ai dit dans mon premier
projet de loi sur la TVQ, 170, les articles sont écrits d'une
façon telle qu'on ne peut même pas faire un exercice
intéressant en commission pour qu'on puisse comprendre. On lit un
article, M. le Président, et dans un article on va se rendre compte
qu'on réfère à 20 autres articles. Je ne sais pas si vous
avez déjà essayé de faire l'exercice de lire un article;
en lisant l'article, vous faites à peu près une demi-page et vous
venez d'en citer 23 autres pour comprendre le paragraphe que vous êtes en
train de lire. On est rendu à la fin de l'article, M. le
Président, et on n'a rien compris.
Je peux vous dire que, même en commission, on a bien ri, parce
qu'au fond on demandait à un fonctionnaire de l'équipe
ministérielle de nous lire l'article et, une fois qu'il eut fini de lire
l'article, personne n'avait compris. On se demandait vraiment qu'est-ce que
ça voulait dire.
M. le Président, moi, je dis qu'on va devoir s'efforcer au
Québec, pour faire des lois... Je comprends que peut-être, comme
le ministre le disait dans le projet de loi 170, on n'écrit pas
pour M. Tout-le-Monde, mais je pense qu'il y a des limites. On va devoir
s'efforcer, M. le Président, d'écrire un texte de loi fiscale qui
va être d'une meilleure compréhension parce que ça demeure
toujours l'instrument de travail qui donne la direction d'une politique fiscale
et qui donne la direction du législateur. À un moment
donné, s'il y a trop de cacophonie dans la rédaction de nos lois
fiscales... Il y a assez que c'est compliqué et qu'on en met, des taxes,
mais je pense qu'on va devoir s'efforcer, à cette Assemblée, pour
améliorer le texte, la vulgarisation et la compréhension, M. le
Président.
Où je suis à la fois étonné et heureux, une
agréable surprise, M. le Président, cette fois-ci, on n'a pas mis
le bâillon. Je dois féliciter le gouvernement de cette ouverture
d'examen dans une démocratie où je pense qu'effectivement on doit
réussir à échanger et à faire valoir nos positions.
Cette fois-ci, M. le Président, on a senti que le gouvernement
était prêt à regarder le projet de loi et à le
déterminer sujet par sujet. J'aurais apprécié,
effectivement, que le projet de loi 170 ait été
présenté sous cette forme-là.
Le projet de loi 170, M. le Président, quand on a
étudié la TVQ pour venir taxer les gens et que là, on l'a
adopté en vitesse parce qu'il fallait que ce soit adopté avant le
31 décembre, on y a mis le bâillon. On a dit: Vite, vite, vite, il
faut l'adopter. Ça presse. Après ça, on l'a reporté
jusqu'à... Bien, on l'avait déjà reporté, et
là, on se demande si ça va être reporté à
nouveau, mais on n'avait pas ce document de travail, M. le Président.
Alors, j'aimerais féliciter le gouvernement d'avoir
préparé ce document-là qui nous a permis, effectivement,
de faire un meilleur travail qui, à toutes fins pratiques, sert la
collectivité québécoise.
M. le Président, j'ai étudié le projet de loi. On
l'a regardé, le projet de loi 407, mais moi, ce qui me chicote quand je
regarde un projet de loi comme celui-là, bien sûr, il y a toute la
rédaction du projet, mais il y a aussi des choses que j'aurais
aimé voir apparaître. Je vais profiter un peu... un petit
aparté, comme on dit, pour dire, M. le Président, qu'il y a des
choses qu'on attend dans nos lois fiscales. On parle de la Journée
internationale de la femme. Moi, j'aurais aimé vous dire
qu'effectivement nos lois fiscales vont devoir prendre en considération
la condition féminine au Québec. Il y a des choses importantes,
actuellement, qui doivent être regardées et qu'on ne fait pas. On
fait la sourde oreille. Moi, je profite de cette journée pour en parler
un peu, parce que, effectivement, j'aimerais voir apparaître des mesures
fiscales dans ces projets de loi qui tiendraient compte de la condition
féminine.
M. le Président, vous le savez, actuellement, nos lois fiscales
encouragent la désunion familiale. C'est grave, M. le Président,
que nos lois fiscales au Québec - d'ailleurs, même
l'archevê- que de Québec faisait une sortie dans ce
sens-là. Il disait: Écoutez, faites quelque chose avec les lois
fiscales. Les gens sont incités, sur le plan uniquement fiscal, de se
désunir sur le plan familial. En tout cas, quand j'ai lu ce projet de
loi, c'est évident que ça n'avait pas été
prévu par le ministre des Finances. Mais, comme on célèbre
la Journée internationale des femmes, je me permets, M. le
Président, de citer cet élément-là...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Montmorency, il est 18 h 30. Vous avez utilisé 5
minutes de votre temps. Vous avez droit à une période de 30
minutes sur une motion de forme. À moins qu'il n'y ait consentement, je
suis obligé d'ajourner les travaux à demain.
M. Bélisle: S'il en a pour quelques minutes, je suis
d'accord pour consentir.
M. Filion: Je continuerai demain l'exposé, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est parfait. Alors,
très bien. C'est l'ajournement du débat. Voilà.
M. Bélisle: C'est l'ajournement du débat, M. le
Président, à demain matin, 10 heures.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, c'est
l'ajournement du débat. Demain, aux affaires du jour, vous demanderez
à la présidence d'appeler ce qui est au feuilleton, le projet de
rapport 407. C'est l'ajournement du débat, proposé par M. le
député de Montmorency.
Compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de cette Assemblée
à demain matin, le jeudi 12 mars, à 10 heures.
(Fin de la séance à 18 h 30)