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(Dix heures six minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Nous allons nous recueillir quelques instants.
Le recueillement s'effectue dans le silence.
Veuillez vous asseoir.
Aux affaires courantes, il n'y a pas de déclaration
ministérielle.
À la présentation de projets de loi. M. le leader du
gouvernement, il y a des projets de loi.
M. Bédard: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler l'article c) du feuilleton.
Le Président: L'article e) ensuite? M. Bédard:
Au nom du...
Le Président: L'article c) et l'article e).
M. Bédard: C'est cela, M. le Président.
Projet de loi 95
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales
présente le projet de loi 95, Loi sur les budgets de recherche et de
secrétariat des partis politiques municipaux à Montréal,
Québec et Laval.
M. le ministre des Affaires municipales.
M. Alain Marcoux
M. Marcoux: M. le Président, ce projet de
loi prévoit que les villes de Montréal, Québec et Laval
doivent, chaque année, prévoir à leur budget un
crédit destiné au versement de sommes aux partis politiques
municipaux et aux conseillers indépendants en vue de leur rembourser
leurs dépenses de recherche et de secrétariat. Le projet de loi
fixe le minimum de ce crédit et détermine les conditions et les
règles de partage des sommes entre les différents partis et les
conseillers indépendants. Il prévoit également que cette
disposition ne s'applique que s'il existe dans la ville un parti
autorisé à la date de l'adoption du budget. Une disposition
transitoire fait en sorte que le droit au remboursement des dépenses de
recherche et de secrétariat prendra naissance dès le 1er juillet
1984.
Le Président: L'Assemblée accepte-t- elle de se
saisir de ce projet de loi?
M. Gratton: Adopté.
Des voix: Adopté.
Le Président: 11 en est ainsi décidé.
Projet de loi 93
M. le ministre des Affaires culturelles présente le projet de loi
93, Loi modifiant la Loi sur les musées nationaux.
M. le leader du gouvernement, en l'absence de M. le ministre des
Affaires culturelles.
M. Marc-André Bédard
M. Bédard: M. le Président, au nom du ministre des
Affaires culturelles, je présente effectivement le projet de loi 93, Loi
modifiant la Loi sur les musées nationaux. Ce projet de loi a pour objet
d'instituer le Musée de la Civilisation. Le Musée de la
Civilisation aura pour fonctions de faire connaître l'histoire et les
diverses composantes de notre civilisation, d'assurer la conservation et la
mise en valeur de la collection ethnographique et des autres collections
représentatives de notre civilisation et d'assurer une présence
du Québec dans le réseau international des manifestations
muséologiques par des acquisitions, des expositions et d'autres
activités d'animation.
Le Musée de la Civilisation est régi par la Loi sur les
musées nationaux. Cependant, son premier directeur général
est nommé par le gouvernement.
Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se
saisir du projet de loi 93?
M. Gratton: Oui, M. le Président.
Le Président: Au dépôt de documents, M. le
ministre de l'Éducation.
Rapport annuel de l'Ordre des pharmaciens
M. Bérubé: M. le Président, j'aimerais
déposer le rapport annuel 1983-1984 de l'Ordre des pharmaciens du
Québec.
Rapport annuel de la Corporation professionnelle des
physiothérapeutes
Je voudrais également déposer le rapport annuel de la
Corporation profession-
nelle des physiothérapeutes du Québec pour 1983-1984.
Rapport annuel de la Corporation professionnelle des
technologistes médicaux
Je voudrais déposer le rapport annuel de la Corporation
professionnelle des technologistes médicaux, toujours pour
1983-1984.
Rapport annuel de l'Ordre des technologues des
sciences appliquées
Toujours pour la même année, je voudrais déposer le
rapport de l'Ordre des technologues des sciences appliquées du
Québec.
Rapport annuel de l'Ordre des opticiens
d'ordonnance
Je voudrais déposer également le rapport annuel 1981-1982
de l'Ordre des opticiens d'ordonnance du Québec. J'ai bien lu, M. le
Président; mes lunettes sont en bon état, c'est pour
1981-1982.
Rapport annuel de la CPIIAQ
Je voudrais déposer également pour 1983-1984 le rapport
annuel de la Corporation professionnelle des infirmières et infirmiers
auxiliaires du Québec.
Rapport annuel de l'Ordre des architectes
Enfin, je voudrais déposer le rapport annuel de l'Ordre des
architectes du Québec, toujours pour 1983-1984.
Le Président: Rapports déposés. M. le leader
du gouvernement, au nom du ministre de l'Énergie et des Ressources.
Rapport annuel de SOQUIP
M. Bédard: M. ,1e Président, je voudrais
déposer le rapport annuel 1983-1984 de SOQUIP.
Le Président: Rapport déposé. Il y en a un
autre.
Rapport annuel de SOQUEM
M. Bédard: M. le Président, au nom du ministre de
l'Énergie et des Ressources, je voudrais déposer le rapport
annuel 1983-1984 de SOQUEM.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
des Transports.
Rapport annuel de la Commission des transports
M. Léonard: M. le Président, j'ai l'honneur de vous
transmettre le rapport annuel 1983-1984 de la Commission des transports du
Québec.
Le Président: Rapport déposé. Rapports de
commissions, M. le président de la commission du budget et de
l'administration.
Étude détaillée du projet de loi
75
M. Lachance: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé les 12 et 14 juin 1984 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 75, Loi modifiant la
Loi sur les assurances et d'autres dispositions législatives. Le projet
de loi a été adopté avec amendement.
Le Président: M. le vice-président de la commission
de la culture. Je m'excuse, c'est la commission des institutions.
M. le député de Jean-Talon.
M. Brouillet: De la culture, non? Excusez.
Le Président: Quand les députés sont
à l'heure... Mme la présidente de la commission de
l'économie et du travail.
Étude détaillée des projets de
loi 85 et 59
Mme Harel: J'ai l'honneur de déposer le rapport de la
commission de l'économie et du travail qui a siégé le 14
juin 1984 afin de procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 85, Loi modifiant la Loi sur les
coopératives. Le projet de loi a été adopté avec
amendements. Je dépose aussi le rapport détaillé de
l'étude du projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux. Le projet de loi a
également été adopté avec amendements.
Le Président: Finalement, M. le vice-président de
la commission de la culture.
Vérification d'engagements financiers
M. Brouillet: Merci. J'ai l'honneur de déposer le rapport
de la commission de la culture qui s'est réunie le 12 juin 1984 afin de
procéder à la vérification des engagements financiers des
ministères des Affaires culturelles, des Communautés culturelles
et de l'Immigration et des Communications pour les mois de février et
mars 1984.
Le Président: Rapports déposés. Il
restera le rapport de la commission des institutions sur le projet de
loi 83, si on peut nous faire l'honneur de le déposer, selon le bon
vouloir...
Ce qui nous mène à la période des questions des
députés. M. le chef de l'Opposition.
Questions et réponses orales
L'élection des trois candidats libéraux
aux élections partielles du 18 juin
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, vous devinez
sans doute l'objet de ma question. Si vous ne devinez pas, je m'imagine que la
réaction d'en face me laisse croire qu'on a deviné un peu le sens
des propos qui seront dans ma question. Hier, il y avait élections
partielles au Québec dans Marguerite-Bourgeoys pour remplacer M. Fernand
Lalonde, notre ancien leader, également, dans Sauvé pour
remplacer l'ex-vice-premier ministre et dans Marie-Victorin pour remplacer
l'ancien ministre, M. Marois. Évidemment, tout le monde est au courant
des résultats, d'après ce que je peux voir. J'en profite
immédiatement, M. le Président, vous le comprendrez, pour
féliciter les nouveaux élus et remercier la population de la
confiance qu'elle porte au Parti libéral du Québec.
Les pourcentages accordés au Parti libéral du
Québec et à nos candidats sont assez percutants, lorsque l'on
regarde, dans Marie-Victorin, le nez à nez, 60% pour le Parti
libéral du Québec, dans Sauvé, 75%, et encore là,
en chiffres ronds, 85% dans Marguerite-Bourgeoys. M. le Président, cela
fait un total de 21 victoires dans les élections partielles. On avait
coutume de parler de victoire morale, j'attends, évidemment, la
réponse officielle, M. le Président, et, en l'absence du premier
ministre, en l'absence du vice-premier ministre, j'adresserai ma question au
leader parlementaire du gouvernement en lui demandant s'il n'est pas d'accord
que ces résultats constituent un désaveu formel et non
équivoque vis-à-vis du gouvernement qui est présentement
à la direction des affaires de l'État.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bédard: M. le Président, comme l'a fait le chef
de l'Opposition, je voudrais profiter de l'occasion, également, au nom
du gouvernement et du parti que je représente, pour remercier les
candidats qui ont porté les couleurs du Parti québécois
à l'occasion de ces élections partielles, de très bons
candidats qui, avec des équipes de militants aguerris, ont essayé
d'obtenir les meilleurs résultats possible.
Je vais également, en contrepartie au chef de l'Opposition,
étant donné le résultat des élections partielles
que nous connaissons, formuler le voeu que le gouvernement retrouve la
confiance de la population dans les délais qui restent d'ici le
déclenchement d'une élection générale. Ce n'est pas
la première fois que nous perdons une élection partielle. Je ne
veux pas en minimiser l'importance, M. le Président, mais je crois que,
tant de ce côté-ci que de l'autre côté de la Chambre,
on ne peut quand même pas déduire du résultat de partielles
le résultat d'élections générales puisque,
effectivement, au cours du premier mandat, nous en avions perdu pas moins d'une
dizaine. Malheureusement, nous n'avons sûrement pas la méthode
pour gagner des élections partielles; espérons que nous garderons
la méthode pour gagner des élections générales.
Indépendamment de cela, M. le Président, c'est évident que
je serais porté à dire au chef de l'Opposition qu'à la
suite de ce résultat, nous nous portons partiellement bien, parce qu'il
est évident que c'est un résultat assez significatif. M. le
Président, je formule effectivement des remerciements à nos
candidats. Ce n'est définitivement pas une victoire morale ni une
défaite morale. Je crois qu'en politique il n'existe que deux choses:
perdre ou gagner. Effectivement, nous avons perdu ces trois élections et
j'espère que ce résultat - j'en suis convaincu - sera de nature
à nous inciter, comme c'était le cas auparavant, à non
seulement redoubler nos efforts mais à tripler et quadrupler nos efforts
s'il le faut pour essayer de retrouver la confiance de l'ensemble de la
population. Je ne crois pas que cela ait été une très
grande surprise, étant donné les résultats des sondages
que nous connaissions, tous publiés il y a déjà une
semaine.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, les porte-parole du Parti
québécois indiquaient ce matin, notamment le député
de Vachon, à l'émission Canada AM, que le gouvernement devait
retenir un message de la part des populations des trois comtés où
il y a eu élection partielle hier. Pourrais-je demander au leader du
gouvernement, quel est le message qu'il retient, que le gouvernement retient de
ces résultats sans équivoque? Par exemple, est-ce que, à
une semaine du congrès du Parti québécois qui a
entériné une résolution visant à faire de la
question nationale l'enjeu presque exclusif l'indépendance - de la
prochaine élection générale, est-ce que le gouvernement
reçoit un message que peut-être la population du Québec a
déjà tranché? Est-ce que le leader du gouvernement peut
nous indiquer les
conclusions auxquelles il en vient à la suite des
résultats des élections d'hier? (10 h 20)
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bédard: Personnellement, M. le Président, je ne
crois pas que la résolution à laquelle réfère le
leader de l'Opposition, résolution adoptée lors du dernier
congrès, ait eu quelque influence que ce soit sur le résultat des
élections partielles. Je crois qu'il s'agissait plutôt d'une
campagne axée sur des enjeux locaux; c'est tout au moins ce sur quoi
nous avons, de ce côté-ci de la Chambre, axé l'ensemble de
la campagne électorale à l'occasion de ces élections
partielles. M. le Président, je crois plutôt qu'il nous faudra, au
niveau du gouvernement, retrouver cette sensibilité politique qui a
toujours été notre force dans le passé, essayer de
vraiment trouver quelles sont les solutions qui peuvent corriger d'une
façon immédiate les besoins et les inquiétudes qui se
manifestent au niveau de l'ensemble de la population.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Je n'avais pas l'intention de revenir
avec une question additionnelle, je pense que tout le monde a bien compris,
mais il y a une chose, dans les propos du leader parlementaire du gouvernement,
sur laquelle je veux revenir. Lorsque le leader du gouvernement parle
d'élections touchant les problèmes locaux, se
réfère-t-il à l'implication du premier ministre qui est
allé particulièrement dans le comté voisin du sien, dans
Marie-Victorin, y amenant évidemment tout le poids de la fonction qu'il
occupe et entraînant en même temps avec lui les résultats
qui touchent non seulement les questions locales, mais la vie même du
gouvernement, en un sens? N'arrive-t-il pas à la conclusion que c'est ce
gouvernement-là qui doit être changé le plus tôt
possible, selon les voeux de la population?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bédard: M. le Président, je me souviens
très bien que, durant le premier mandat du gouvernement, à la
suite de chaque élection partielle, on avait des réjouissances -
ce qui est normal - de l'autre côté de la Chambre et on
s'empressait de parler de la diminution de la confiance envers le gouvernement
et même de réclamer des élections générales.
Si nous avions à ce moment-là obtempéré ou
donné suite aux demandes faites par l'Opposition, nous n'aurions
effectivement pas, comme cela a été le cas, retrouvé plus
fort que jamais la confiance de la population à l'occasion des
élections générales de 1981.
Alors, je dis au chef de l'Opposition que nous sommes très
réalistes de ce côté-ci de la Chambre. Il est clair que
l'Opposition a toutes les raisons de se réjouir du résultat et
que ceci amène le gouvernement à faire les réflexions en
profondeur pour essayer de retrouver cette confiance qu'il a toujours eue de la
part de la population. C'est ce que nous nous acharnerons à faire au
cours des prochains mois.
M. le Président, il est clair - je parle du point de vue
gouvernemental - que les résultats sont quand même très
significatifs et difficiles à expliquer, je dois le dire parce que, du
point de vue économique, on le sait, le gouvernement a eu, même
durant une crise, des performances qui se comparent avantageusement à
celles de toutes les autres provinces du Canada et même à celles
du gouvernement fédéral. Malgré ces performances,
malgré ce travail acharné pour essayer d'en arriver à une
relance économique, à la création d'emplois, ceci ne nous
a pas donné la solution jusqu'à maintenant...
Le Président: En conclusion, M. le leader.
M. Bédard: ...pour obtenir la confiance de la population.
Nous allons travailler, nous parlions de redoubler nos efforts, nous allons les
tripler, les quadrupler au niveau de l'ensemble des militants du parti. Ne vous
réjouissez pas trop vite! Le Parti québécois sera
peut-être plus fort que vous ne le croyez lorsque viendra la prochaine
élection.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: Mme la députée de Chomedey,
question principale.
M. Brouillet: M. le Président.
Le Président: Mme la députée de
Chomedey.
M. Brouillet: Mme la députée de Chomedey, bien.
Le rejet des eaux usées de la CUM dans le
fleuve Saint-Laurent
Mme Bacon: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre de l'Environnement relativement au dossier du rejet sans traitement
des eaux usées de la CUM dans le fleuve Saint-Laurent. Depuis quelque
temps, le problème du choix de l'organisme chargé de surveiller
le rejet des eaux usées - qui a d'ailleurs commencé hier le 18
juin - de la Communauté urbaine de Montréal a pris une ampleur
telle que le
ministre a omis de nous expliquer le véritable problème,
soit la construction de l'usine d'épuration régionale. De plus,
le 25 mai, le ministre de l'Environnement publiait un communiqué dans
lequel il soulignait - et je cite un telbec du 25 mai dernier: "Bien qu'aucune
des données techniques recueillies jusqu'à ce jour ne
démontre aucun danger véritable, le ministre est d'avis qu'une
surveillance des rejets s'impose." Ma question au ministre porte sur
l'essentiel du problème. Je lui demande de me dire les raisons du retard
de la fin de construction de l'usine d'épuration régionale dont
le quatrième addenda fut signé le 20 août 1980, lequel
prévoyait la fin des travaux à la fin de la présente
année.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Ouellette: Oui, M. le Président. Le retard est
très facilement explicable et il remonte d'ailleurs au gouvernement
Bourassa pour votre information. Figurez-vous que, dès 1974, une entente
intervenait entre le gouvernement du Québec et la Communauté
urbaine de Montréal. Cette entente visait la mise en place d'un
intercepteur, côté nord de l'île de Montréal, mais ne
prévoyait aucunement le traitement des eaux usées. Ce n'est qu'en
1978, sous le gouvernement du Parti québécois qu'une telle
entente devait intervenir. Il y a donc eu quatre ans de délai entre le
début de l'interception et la prise de décision d'effectuer le
traitement des eaux usées. Ces quatre années ont
été diminuées à deux, ce qui fait qu'aujourd'hui,
la communauté est prête à déverser les eaux
usées, mais il faudra attendre encore deux ans avant que l'usine de
traitement ne soit complétée.
Le Président: Mme la députée de
Chomedey.
Mme Bacon: Je suis tentée de croire que le ministre a
envie de rejeter aussi la responsabilité sur le dos de la CUM. Dans une
question additionnelle, je demande au ministre d'être très prudent
avant de répondre; c'est un conseil amical en passant. Est-il en mesure
de réaffirmer le contenu de son communiqué du 25 mai dernier
où il affirmait bien: "Aucune des données techniques recueillies
jusqu'à ce jour ne démontre un danger véritable"? Est-il
exact qu'il ne possédait aucune donnée?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Ouellette: M. le Président, loin de moi l'intention de
rejeter quelque faute que ce soit sur le dos de la CUM. Le gouvernement
Bourassa de l'époque n'avait aucune politique visant le traitement des
eaux usées au Québec. Ce n'est pas la Communauté urbaine
de Montréal qui est responsable de cela, c'est le gouvernement Bourassa
de l'époque.
Deuxièmement, la députée me demande si je suis
prêt à réaffirmer le contenu de mon communiqué
à savoir que les données dont nous disposons ne laissent croire
à aucun danger pour la population de la rive sud. Ces données
nous sont fournies par une étude réalisée par les
Laboratoires hydrauliques Lasalle, qui nous dit très concrètement
que selon les relevés qui ont été faits, selon les
observations qui ont été faites aussi durant le
déversement temporaire de l'automne dernier, il n'apparaît pas que
les bactéries, par exemple, puissent franchir le canal, la voie maritime
pour atteindre les prises d'eau de la rive sud. Cela, je peux le
réaffirmer, c'est contenu dans les études Lasalle.
Le Président: Mme la députée de
Chomedey.
Mme Bacon: Je pense que j'avais raison de dire au ministre
d'être prudent, M. le Président. Est-ce qu'il pourrait
déposer en cette Chambre ou commenter, s'il en a pris connaissance, les
conclusions d'une étude menée à l'automne 1982 par deux
fonctionnaires de son ministère, Francine Richard et Pierre
Lavallée, un document de 180 pages intitulé "Études
d'évaluation des impacts" où l'on signifiait clairement que le
détournement des eaux usées présentait des dangers en ce
qu'il augmentait jusqu'à 1200% le niveau des contaminants et dans lequel
on parle également d'une hausse de la quantité des débris
flottants et de mauvaises odeurs pour les municipalités visées?
Existe-t-il d'autres études pertinentes à propos desquelles le
ministre ne nous aurait pas mis au courant?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement. (10 h
30)
M. Ouellette: M. le Président, j'ai bel et bien pris
connaissance de l'étude à laquelle se réfère Mme la
députée de Chomedey. C'est à la suite de cette
étude que nous avons décidé, avec la Communauté
urbaine de Montréal, de soumettre aux Laboratoires hydrauliques Lasalle
le soin de réaliser une étude plus approfondie. Les
premières observations portaient sur une première
expérience réalisée par le ministère à
partir de débris flottants déversés dans le Saint-Laurent,
non pas injectés ou éjectés par la conduite en provenance
de l'usine, mais simplement déposés pour voir quelle orientation
ces débris flottants prendraient.
C'était une étude très sommaire et qui a
démontré qu'il y avait risque. Certains
débris flottants franchissent même le canal de la voie
maritime du Saint-Laurent ou encore le chenal principal. L'étude
suivante, celle qui a été réalisée à partir
de colorants chimiques, démontre clairement que les débris en
question ne franchissent pas le canal et, de toute façon, les
déversements sont commencés et nous avons confié à
nouveau à une firme spécialisée le soin d'observer les
résultats de ces déversements. Dans le cas où quelque
erreur aurait été commise dans les études
précédentes, je suis autorisé à faire cesser les
déversements dans la mesure où il y a des risques pour la
santé des citoyens ou encore si on devait constater que des
dégâts permanents puissent être causés à
l'environnement à ce niveau du fleuve Saint-Laurent.
Le Président: Mme la ministre. Mme la
députée de Chomedey suivie de M. le député de
Verchères.
Mme Bacon: Est-ce que le ministre accepterait, d'abord, de
déposer ce rapport de l'automne 1982? Quel rôle le
ministère de l'Environnement a joué dans tout ce dossier? Est-ce
que le ministre n'est pas celui qui est responsable de la qualité de vie
des citoyens du Québec? Qu'entend faire le ministre -outre de constater
ultérieurement les dégâts, parce qu'il y aura
dégâts, M. le ministre, si vous ne le savez pas encore - pour
assurer un leadership en matière d'assainissement des eaux? En d'autres
termes, quand le ministère arrêtera-t-il d'assumer des
responsabilités et d'agir en pompier?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Ouellette: J'aimerais dire, M. le Président, que si le
ministère, selon l'évaluation de Mme la députée de
Chomedey, est appelé à jouer un rôle de pompier dans ce
dossier, c'est qu'en 1974 le gouvernement Bourassa n'avait rien prévu.
Deuxièmement, le ministère de l'Environnement suit de très
près ce dossier et ce depuis plusieurs mois, parce que nous
étions en mesure de voir venir l'échéance à
laquelle nous sommes arrivés aujourd'hui. Le rôle du
ministère a été d'effectuer toutes les études
possibles, d'en confier une partie aux Laboratoires hydrauliques Lasalle, d'en
confier une nouvelle, tout récemment, dont la mission est justement de
suivre les résultats de ce déversement. On ne peut pas parler de
pompier puisque nous avons pris toutes les précautions qui
s'imposaient.
Je rappellerais que l'opération vise à en venir à
assainir les eaux usées de la ville de Montréal dans l'espoir que
la ville de Laval en fasse autant prochainement. Ce faisant, non seulement nous
dépolluerons le Saint-Laurent à la hauteur de la rive sud,
à la hauteur de l'île de Montréal mais aussi la
rivière des Mille Îles et aussi tout ce qui s'appelle eau autour
de l'archipel de Montréal.
Le Président: M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: M. le Président, il y a quelques jours le
ministre de l'Environnement était à Verchères pour une
rencontre publique. À ce moment-là, on avait indiqué aux
citoyens que le ministère, en l'occurrence le ministre de
l'Environnement, s'apprêtait à signer une entente
particulière avec le président de la communauté urbaine
pour qu'effectivement il ait les pouvoirs de stopper éventuellement...
Est-ce que cette entente a été signée ou est sur le point
d'être signée?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Ouellette: À la suite de la rencontre à laquelle
fait allusion le député de Verchères, j'ai eu quelques
contacts téléphoniques avec le président de la
communauté urbaine. C'est lors d'une rencontre prévue
incessamment que sera prise cette décision d'obtenir une signature de la
communauté autorisant officiellement le ministre. Cependant, j'aimerais
rappeler que la Loi sur la qualité de l'environnement autorise le
ministre de l'Environnement à faire cesser ces déversements si
jamais la santé était menacée ou encore l'environnement
comme tel.
Le Président: M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: M. le Président, une dernière
question additionnelle. Est-ce que le ministre peut nous indiquer si - à
partir du moment où le déversement est commencé -il y a
des tests de prise d'eau potable aux différentes usines, aux
différentes embouchures des municipalités actuellement, et ce,
à quelle fréquence, pour que les citoyens des
municipalités concernées soient rassurés quant à la
qualité de leur eau potable?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Ouellette: Oui, M. le Président. En plus de
l'étude de suivi environnemental qui vient d'être confiée
à une firme privée, les techniciens du ministère de
l'Environnement prennent plusieurs échantillons par jour pour s'assurer
que l'eau qui pénètre dans les prises d'eau des
municipalités de la rive sud ne contient pas d'éléments
polluants en quantité telle que la santé puisse être
menacée. Nous connaissons parfaitement la capacité de
traitement de chacune des usines desservant en eau potable les citoyens de la
rive sud et nous faisons ce suivi à plusieurs reprises chaque jour et
ce, tant et aussi longtemps que dureront les déversements.
Le Président: Question principale, M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. J'aurais voulu poser
une question au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
Étant donné qu'il a deux projets de loi à faire adopter,
est-ce qu'on peut penser qu'il sera en Chambre ce matin et demain?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bédard: Le ministre sera sûrement présent
au cours de la journée; ce matin, il est à un sommet du travail,
ce qui l'empêche d'être présent à la période
des questions.
Le Président: M. le député de Laporte.
Vins saisis dans la région des
Laurentides
M. Bourbeau: M. le Président, en l'absence du ministre,
j'aimerais poser une question au ministre de la Justice. Le ministre de la
Justice a promis, le 15 juin dernier, au député de D'Arcy McGee
et à moi-même de donner des détails additionnels et
d'indiquer d'où provenaient les vins saisis à l'occasion d'une
descente effectuée au début du mois de mars 1984 dans la
région des Laurentides. Nous attendons toujours les réponses du
ministre. Le ministre peut-il nous dire s'il est exact qu'à de
nombreuses reprises, au cours des dernières années, des vins
fabriqués par Les entreprises Verdi Inc. ont été saisis
par les différents corps policiers, tant dans des entrepôts que
chez des particuliers, et que la maison Verdi a été
impliquée fréquemment dans des poursuites en vertu de la Loi sur
les infractions en matière de boissons alcooliques?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Johnson (Anjou): Je peux répondre, M. le
Président, que les affirmations du député sont inexactes.
Il y a eu une série d'enquêtes menées par les services de
police de la Communauté urbaine de Montréal dans ce domaine
auxquelles, en cours de route, se sont joints les gens de la
Sûreté du Québec. Je parlerai brièvement de ces
enquêtes.
Une première a commencé en décembre 1982 et s'est
échelonnée sur plusieurs mois, faisant suite à une plainte
privée; elle a été menée par la Sûreté
du Québec avec la collaboration du SPCUM. Elle a conduit à trois
saisies, le 3 février 1983 et le 14 avril 1983. Dans le cas du 14 avril,
il y a eu deux saisies. Le nombre de caisses saisies: respectivement, 50, 400
et 1100 caisses. Des plaintes contre une dizaine de personnes, en vertu de la
Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques et de la Loi
sur la Société des alcools du Québec, ont alors
été déposées; dix accusés ont
été trouvés coupables et ont reçu leur sentence.
Dans tous les cas, la provenance du vin n'a pu être prouvée
à l'égard d'un manufacturier et, en ce sens, aucun plaidoyer de
culpabilité et aucune citation à procès n'ont eu lieu
à l'égard de quelque compagnie que ce soit.
Une seconde enquête menée par le SPCUM a donné lieu
à des arrestations les 1er et 2 septembre; des accusations ont
été portées contre six personnes. Les faits
reprochés étaient de même nature que ceux que je viens
d'évoquer dans la première enquête. Ces gens ont
été accusés et condamnés par la Cour municipale de
Montréal. Les saisies impliquaient 880 gallons et 600 bouteilles, dans
un autre cas, au mois de septembre 1983. Encore ici, les vins saisis portaient
l'identification d'un fabricant québécois - le même,
d'ailleurs, que dans la première enquête - et sa connaissance du
commerce illégal n'a pas été davantage établie. Il
n'est donc pas opportun de dévoiler ici publiquement le nom de cette
compagnie quelle qu'elle soit. Le député, lui, semble en
connaître le nom.
Une troisième enquête menée par la
Sûreté du Québec à la suite d'une information venant
du SPCUM a donné lieu à la saisie, le 24 février 1984, de
250 caisses auprès d'un individu de la ville des Laurentides. Une
accusation a été portée selon l'article 91 de la Loi sur
les infractions en matière de boissons alcooliques, c'est-à-dire
une accusation de possession illégale. La cause de cet individu n'est
pas terminée; elle est sub judice. Les bouteilles saisies portaient
l'étiquette d'un fabricant québécois, mais l'enquête
n'a pas permis de faire un lien entre le fabricant et l'accusé.
Une quatrième enquête a donné lieu à des
saisies dans certains dépanneurs de produits alimentaires qui, pour
l'essentiel, étaient des vins de type apéritif contenant un fort
pourcentage d'alcool. Ces produits sont d'origine extérieure au
Québec.
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): À toutes fins utiles, M. le
Président, oui, il y a eu des enquêtes et des saisies; non, aucune
entreprise n'a été trouvée coupable ou n'a
fait l'objet d'une démonstration de lien avec ce commerce
illégal impliquant des individus et des entreprises. (10 h 40)
Le Président: M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, le ministre peut-il nier que
des vins fabriqués par la maison Verdi ont été saisis
à de nombreuses reprises au cours des dernières années et
notamment les vins nommés Portneuf et Tourbillon d'automne. Peut-il nier
que des accusations ont été portées contre la maison Verdi
et que cette dernière maison a plaidé coupable à des
infractions en vertu de la Loi sur les infractions en matière de
boissons alcooliques?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, à
l'égard des deux premières enquêtes, je dirai encore une
fois que je pense que le député est bien conscient de la
situation dans laquelle il met celui qui vous parle comme les personnes qui
peuvent être impliquées. Selon le cas, je pourrais vous dire que
oui il s'agit de cette maison ou non il ne s'agit pas de cette maison. De toute
évidence, vous mêlez les trois enquêtes; cela
m'apparaît évident avec ce que vous affirmez. Pour les fins de
protection des personnes impliquées qui dans certains cas ne sont pas
nécessairement celles que vous évoquez dans votre question, je ne
pense pas qu'il y ait avantage ou intérêt en toute justice
à l'égard de personnes qui n'ont pas fait l'objet d'accusation
que leur nom soit mentionné à la période de questions.
Le Président: Question principale, M. le
député de Chauveau.
Les négociations avec Domtar au sujet de la
rivière Jacques-Cartier
M. Brouillet: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Les citoyens et les
citoyennes de la région de Québec connaissent depuis plusieurs
années le projet de la restauration de la Jacques-Cartier en vue d'en
refaire entre autres une rivière à saumon. Cela fait cinq ans que
les gens du milieu sont impliqués dans ce projet et il a suscité
beaucoup d'espoir. Lors du sommet économique tenu en septembre 1983,
l'ensemble des intervenants socio-économiques de la région de
Québec sont tous tombés d'accord pour en faire un projet
prioritaire.
Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche est
impliqué depuis plusieurs années aussi en investissant des sommes
d'argent pour assurer l'ensemencement des saumons dans la rivière. La
subvention du
Fonds de développement régional est venue pour assurer la
permanence au niveau du comité. Il restait un point à
résoudre, celui d'une entente avec la Domtar, la compagnie qui a des
droits sur un barrage qui empêche le saumon, qui va revenir
bientôt, de remonter la rivière.
Le ministère avait consenti l'octroi d'une somme de 200 000 $
pour réaliser une passe migratoire. Depuis huit mois, des
négociations avec la Domtar sont en cours et nous n'avons pas encore de
résultat connu du moins. J'aimerais, dans ma première question,
demander au ministre s'il peut actuellement nous faire connaître
l'état de la situation quant aux négociations avec la Domtar
entreprises depuis une dizaine de mois?
Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche.
M. Chevrette: M. le Président, ces négociations
longues et ardues, je pense, ont échoué complètement. Nous
avons nommé un médiateur qui a fait un boulot remarquable mais
sur quatre points en particulier, c'est une mésentente totale entre la
compagnie et le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche.
Tout d'abord, la compagnie voudrait absolument qu'on enlève la
limite des 200 000 $, qu'on y aille d'une façon illimitée. On a
assez connu cela dans le passé, on sait où cela nous a conduit
sans qu'on embarque d'une façon démesurée au-delà
de cette somme. Je pense qu'on pourrait y aller avec cette somme et on verra en
temps et lieu s'il y a lieu à des dépassements ou pas, ce qui
nous permet de contrôler d'une façon très efficace les
sommes qui sont dépensées. Ceci est un premier point.
Deuxième point d'accrochage majeur: la compagnie refuse que ce
soit le comité de la restauration de la Jacques-Cartier qui soit
responsable de l'évolution des travaux. Elle veut que ce soit
exclusivement le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche;
elle n'accepte pas, comme compagnie, une responsabilité conjointe avec
le ministère si on veut vraiment, à ce moment, enlever la
responsabilité du comité. Elle refuse l'autorité du
comité et elle voudrait que ce soit exclusivement nous qui en
soyons les responsables.
Troisième point d'accrochage: la compagnie voudrait qu'on
règle simultanément l'ensemble des barrages sur la
Jacques-Cartier, entre autres, le barrage Bird. On dit: On fait une entente
pour le barrage précis de Donnacona, on n'est pas pour faire une entente
spécifique pour l'autre. On traversera le pont ou la rivière
lorsqu'on y arrivera. Il n'en est pas question pour elle.
Le dernier point d'accrochage: elle voudrait qu'on abdique sur notre
pouvoir de réglementation. En d'autres mots, elle voudrait que le
ministère dise carrément dans un protocole d'entente: Vous
n'aurez plus le droit de réglementer si on s'entend. J'ai
déjà vu un ministre dans cette Chambre signer un document
semblable dans le cas du mont Sainte-Anne dont je suis responsable et je ne le
ferai pas. Je sais ce qui s'ensuit, c'est un leurre pour la population.
Ce sont les quatre points majeurs d'accrochage. On s'était
entendu, cependant, sur la police d'assurance-responsabilité. C'est le
seul point mineur sur lequel on s'est entendu présentement. Donc, je
verrai à prendre les mesures qui s'imposent.
Le Président: M. le député de Chauveau.
M. Brouillet: Oui, en complémentaire, M. le
Président. M. le ministre, devant cette situation, quelles sont les
avenues possibles en vue d'en arriver éventuellement à une
entente pour que puisse se réaliser cette passe migratoire qui est
absolument indispensable pour le retour du saumon, surtout quand on tient
compte de toutes les sommes qui ont été impliquées dans le
projet à ce jour et les efforts qui ont été fournis par
les gens du milieu? Ce serait vraiment inacceptable qu'une compagnie ait des
exigences à un point tel qu'elle rend impossible...
Le Président: M. le député! M. le
député! Votre question était bien posée dès
le départ et ne nécessitait pas de commentaires additionnels, ce
n'est pas permis aux questions complémentaires. M. le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Chevrette: Bon! Tout d'abord, il y a deux possibilités.
Il s'agit de regarder la validité des ententes de 1912, 1913 et 1916
avec la compagnie Donnacona Paper à l'époque pour voir
jusqu'à quel point on peut, devant les tribunaux, réussir
à lui faire respecter cette entente des années 1912, 1913 et
1916. Il y a également une avenue légale en vertu de la Loi sur
les pêcheries et océans. On verra, parce qu'il y a une obligation,
lorsqu'on fait des barrages, en vertu de cette loi, c'est-à-dire qu'il y
a une obligation pour les compagnies qui utilisent le lit des rivières
d'installer des passes migratoires. Je verrai également de ce
côté-là, mais il m'apparaît important de souligner le
rôle social qu'ont à jouer ces compagnies dans le milieu. Je pense
que les groupes du milieu ont aussi un rôle à jouer auprès
de cette compagnie.
M. Brouillet: M. le Président, une dernière
question additionnelle.
Le Président: M. le député de Chauveau,
suivi du député de Portneuf.
M. Brouillet: Dans l'immédiat - peut-être que ces
solutions ou ces avenues possibles sont à moyen et à long terme -
le saumon revient dans quinze jours ou trois semaines; il va se buter le nez au
barrage et, quand on tient compte des sommes investies - j'y reviens encore -
quelle serait la solution possible dans l'immédiat pour permettre au
saumon de pouvoir atteindre ses frayères?
Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche.
M. Chevrette: De ce côté-là - je m'excuse,
j'ai répondu exclusivement sur les aspects juridiques - du
côté pratique, le saumon sera transporté en haut du
barrage. Nous avons pris toutes les mesures nécessaires pour que cela
s'effectue dès cette année.
Le Président: M. le député de Portneuf, en
complémentaire.
M. Pagé: M. le Président, une très
brève question additionnelle à deux volets au ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche. Premièrement, devons-nous retenir de
l'évolution de ce dossier que le ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche et son sous-ministre ont été
téméraires en annonçant et en indiquant aux membres du
comité de restauration de la Jacques-Cartier que la passe allait
être construite pour la montée du saumon, plaçant ainsi la
compagnie Domtar dans une position de force et dans une position
privilégiée pour être davantage exigeante dans la
négociation? Deuxièmement, devons-nous comprendre des
réponses du ministre ce matin que les négociations entre Domtar,
le comité de restauration de la Jacques-Cartier, le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche et le ministère de
l'Énergie et des Ressources que ces négociations sont rompues et
que le moratoire qui avait été demandé par le
sous-ministre de l'Énergie et des Ressources n'a pas été
respecté ou est terminé?
Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche.
M. Chevrette: Est-ce téméraire, M. le
Président, de répondre à un voeu d'un sommet
économique qui regroupait toutes les instances du développement
économique de la région de Québec? Moi, je ne le crois
pas. Je pense qu'un ministre qui répond à un voeu d'un sommet
économique qui regroupe
l'ensemble des agents de développement économique d'une
région est loin d'être téméraire. Il fait tout
simplement son devoir d'état. C'est mon opinion.
Des voix: Bravo!
M. Chevrette: Deuxièmement, M. le Président, les
négociations sont-elles rompues? Je verrai, en temps et lieu, si je dois
intervenir, mais, à ce moment-ci, il m'apparaît que lorsqu'on
nomme des hommes responsables pour conduire une négociation, le ministre
ne doit pas s'ingérer à tout moment dans le processus. On verra,
en temps et lieu, si les autorités de la Domtar sont assez
sérieuses pour rencontrer les gens du ministère ou me rencontrer
personnellement pour faire la négociation qui s'impose. Nous allons
prendre nos responsabilités à court terme. Le saumon va remonter,
mais il m'apparaît que la compagnie devrait comprendre qu'elle a un
rôle à jouer dans cette société, d'autant plus
qu'elle bénéficie des ressources naturelles depuis de nombreuses
années.
Le Président: Question principale, M. le
député de Westmount.
L'enseignement spécialisé en
médecine dans les hôpitaux du Québec
M. French: M. le Président, en l'absence du ministre des
Affaires sociales, ma question s'adresse au ministre de l'Éducation. Il
s'agit du nombre de postes disponibles aux étudiants pour des
études spécialisées en médecine dans les
hôpitaux enseignants au Québec. En 1983-1984, il y a eu quelque
198 internes et diplômés canadiens de l'extérieur du
Québec qui poursuivaient leurs études spécialisées
en médecine dans les hôpitaux enseignants au Québec. En
contrepartie, il y a eu quelque 232 médecins diplômés des
écoles de médecine québécoises qui
étudiaient ailleurs au Canada. Rien ne présage une diminution de
ce nombre pour l'année en cours. Cependant, ici au Québec, compte
tenu des contingentements annoncés par les ministres des Affaires
sociales et de l'Éducation, pour 1984-1985, le nombre d'internes et de
résidents diplômés canadiens de l'extérieur du
Québec, pour lesquels il y aurait place dans nos hôpitaux cette
année, serait de l'ordre de 18 seulement.
Sur le plan de la réciprocité des États-Unis et du
Québec, la même problématique se dessine. Cette
année, il n'y aurait place que pour 25 diplômés
américains pour venir étudier dans les hôpitaux enseignants
du Québec...
Le Président: La question, M. le député.
M. French: ...alors qu'il y a actuellement, d'après les
chiffres de l'Association des médecins américains, 103
diplômés québécois en poste d'internes et de
résidents aux États-Unis. Qu'est-ce que le ministre entend faire
pour rétablir la réciprocité entre le Québec et le
reste du continent quant à l'éducation spécialisée
en médecine?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Bérubé: M. le Président, le
ministère de l'Éducation ne fait en pratique qu'appliquer une
politique qui vient directement du ministère des Affaires sociales. Je
peux cependant en donner les éléments essentiels. D'une part,
nous avons dû constater qu'un des problèmes au Québec
était un nombre d'étudiants formés à chaque
année qui dépassait de beaucoup les besoins de l'ensemble de la
société québécoise. Même si nous avons des
problèmes de redistribution dans l'ensemble des régions
périphériques, il demeure que le nombre de médecins
formés à chaque année est trop élevé par
rapport à la croissance de notre population. C'est ce qui a amené
le gouvernement à introduire une politique de contingentement de
l'accès aux facultés de médecine au stade du premier
cycle.
Deuxièmement, il existe également une politique du
ministère des Affaires sociales qui vise à rechercher un
équilibre entre le nombre d'omnipraticiens oeuvrant au Québec et
le nombre de spécialistes. Le nombre d'omnipraticiens représente
en gros l'objectif de 60% du nombre total de médecins; les
spécialistes, quant à eux, représentent 40%.
Pour atteindre cet objectif de répartition entre les
omnipraticiens et les spécialistes, le gouvernement a adopté une
politique il y a maintenant plus d'un an. Cette politique repose sur les trois
contraintes suivantes. D'une part, le nombre de postes pour les internes et les
résidents ne doit pas excéder le nombre de 1760 pour
l'année en cours. Donc, il ne doit pas y avoir en stage de- formation
plus de 1760 jeunes médecins, soit comme internes ou soit comme
résidents. C'est la première contrainte.
La deuxième contrainte consiste dans le fait que les nouveaux
arrivants ne doivent pas dépasser le nombre de 300 dans les domaines de
spécialisation. Finalement, on ne doit pas dépasser le nombre de
600 postes de résidents. Il s'avère que les universités,
qui administrent ce programme de façon complètement autonome,
n'ont pas mesuré soigneusement le nombre d'internes qu'elles pouvaient
accepter en spécialisation. Elles ont accepté le maximum permis,
soit 300, avec comme conséquence que, compte tenu des temps de
séjour de l'ensemble de leurs
internes, elles ne peuvent pas respecter le plafond de 1760,
c'est-à-dire qu'elles doivent assumer des frais considérables.
C'est ce règlement que nous sommes en train de négocier avec les
diverses facultés de médecine. Nous devons le régler avant
la fin de juin pour tenter de trouver une solution.
Il demeure que la politique était claire, qu'elle était
limpide. Les universités la connaissaient. Les facultés de
médecine la connaissaient. Il aurait été possible aux
facultés de médecine de répondre à la question
soulevée par le député de Westmount. Toutefois, en
gérant de façon un peu trop large, dirais-je, les règles
qui avaient été adoptées par le gouvernement, les
universités se sont placées dans une position délicate que
nous essayons présentement de régler.
Le Président: M. le député de Westmount.
M. French: Est-ce que le ministre est prêt à
rencontrer les représentants du comité des doyens des
facultés de médecine au Québec cette semaine, afin
d'empêcher une situation où les diplômés des
universités québécoises pourraient se voir refuser leur
visa d'étudiant aux États-Unis parce que le Québec ne
semble pas porter sa partie du fardeau de l'éducation
spécialisée en médecine sur le plan continental?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Bérubé: M. le Président, j'ai
rencontré, d'une part, il y a quelques semaines ou quelques mois, je
dois dire -environ deux mois - les quatre recteurs qui ont, au sein de leurs
universités, des facultés de médecine pour discuter
précisément de ce problème.
J'ai également rencontré l'ensemble des recteurs des
universités du Québec, vendredi dernier, et nous avons, entre
autres, abordé cette question-là. Je sais qu'il y a
présentement des pourparlers avec les différentes
universités pour chercher la solution qui serait la plus acceptable sur
une base temporaire, mais il est clair qu'il faudra que les facultés de
médecine se soumettent à la politique générale qui
vise à établir un certain équilibre entre le nombre
d'omnipraticiens et le nombre de spécialistes au Québec.
Le Président: Question principale, M. le
député de Saint-Henri.
M. Hains: Ma question s'adresse au ministre des Affaires
culturelles. Il était ici il y a quelques minutes.
Le Président: Pour le moment, le ministre des Affaires
culturelles...
La maison de l'Orchestre symphonique de
Montréal
M. Hains: Comme vous le savez, M. le Président, le Parti
libéral du Québec ne s'est jamais opposé au principe
même de la construction de la maison de l'Orchestre symphonique de
Montréal. Publiquement, en janvier dernier, je m'étais quand
même posé de nombreuses questions quant à la
réalisation de ce projet. Ces questions-là, je me disais que,
certainement, le gouvernement avait du se les poser lui-même. J'aurais
voulu, plus précisément, savoir du gouvernement sur quelles
études il s'était basé pour arriver à la conclusion
que la Place des Arts ne suffisait plus aux besoins culturels de
Montréal.
Voici ma question: J'aimerais savoir du ministre ce qui a motivé
son gouvernement à s'impliquer aussi loin dans ce projet, sans pour
autant nous dire ce qu'il adviendra de la Place des Arts et surtout, donc, sur
quelles études il s'est basé pour conclure que la Place des Arts
ne répond pas actuellement aux besoins culturels de Montréal.
Le Président: M. le ministre des Affaires culturelles.
M. Richard: M. le Président, je salue cette question,
avant la fin de la session, de mon collègue, le député de
Saint-Henri.
Des voix: Oh!
M. Richard: M. le Président...
Une voix: Merci.
M. Richard: M. le Président...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
Des voix: ...de l'autre côté.
M. Richard: Qu'est-ce qu'il y a?
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre! Laissons
M. le ministre répondre.
Une voix: Voyons!
Une voix: Le député de Louis-Hébert perd le
contrôle, M. le Président.
M. Richard: M. le Président, on s'est basé
essentiellement sur deux choses pour accepter que l'Orchestre symphonique de
Montréal quitte la Place des Arts: d'abord, des consultations
auprès des plus hautes
autorités de la Place des Arts et, deuxièmement,
l'évidence. Nous avons consulté - je l'avais fait moi-même
- les hautes autorités de la Place des Arts pour connaître
l'impact que causerait le départ, de la Place des Arts, de l'Orchestre
symphonique de Montréal. Or, il s'est avéré qu'aussi
prestigieux que soit ce client pour la Place des Arts il arrive parfois que ce
soit un client un peu encombrant, puisque l'Orchestre symphonique de
Montréal se trouve à occuper de façon
régulière, presque à chaque semaine, la salle
Wilfrid-Pelletier, ce qui nous empêche d'obtenir des spectacles qui
souhaiteraient occuper cette même salle pour une plus longue
période.
Donc, il y a beaucoup de spectacles qui ne sont pas
présentés à la Place des Arts à cause des exigences
de ce client que constitue, en quelque sorte, l'Orchestre symphonique de
Montréal. Par exemple, nous prévoyons, au ministère des
Affaires culturelles, avoir un programme de comédies musicales. Une
comédie musicale à Montréal exige une trentaine de
soirées consécutives. En raison de l'occupation que fait de la
salle Wilfrid-Pelletier l'Orchestre symphonique de Montréal, ce n'est
pas possible. C'est donc après des consultations avec les
autorités de la Place des Arts que la décision a
été prise d'offrir à Cadillac-Fairview une somme de 30 000
000 $ pour construire une nouvelle salle pour l'Orchestre symphonique de
Montréal dont personne ne conteste la nécessité, M. le
Président.
Le Président: La période de questions est
terminée.
Je m'excuse, M. le député, mais vos
prédécesseurs bavardent de part et d'autre et vous privent d'une
question complémentaire. Nous pourrions revenir provisoirement au
dépôt des rapports de commissions et recevoir le rapport de la
commission des institutions sur le projet de loi 83.
M. le président de la commission des institutions. (11
heures)
Étude détaillée du projet de loi
83
M. Vaugeois: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission des institutions qui a
siégé le 13 juin 1984 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 83, Loi modifiant le
Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives.
Le projet de loi a été adopté avec amendements.
Le Président: Rapport déposé. Aux motions
sans préavis. Il n'y en a pas.
Aux avis touchant les travaux des commissions. Il n'y en a pas.
Quant à moi, j'ai deux avis à donner. Après la
période des affaires courantes, à la salle 91, la commission des
institutions tiendra une séance de travail et, à la salle 80,
également après la période des affaires courantes, la
commission des affaires sociales tiendra une séance de travail.
Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Ce qui nous
mène aux affaires du jour et à l'adoption du principe du projet
de loi 80, Loi sur l'Ordre national du Québec. Voulez-vous que nous
passions à un autre projet de loi? Non? Cela va?
M. Bédard: M. le Président.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bédard: Nous sommes effectivement prêts à
procéder sur le projet de loi que vous venez de mentionner.
Projet de loi 80 Adoption du principe
Le Président: Donc, le débat sur l'adoption du
principe du projet de loi 80,
Loi sur l'Ordre national du Québec. La parole est au ministre de
la Justice.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson (Anjou): M. le Président, on m'envoie le mot du
secrétariat pour vous dire que l'honorable lieutenant-gouverneur a pris
connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude par
l'Assemblée.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, le projet de loi
créant l'Ordre national a été déposé le 15
mai dernier à l'Assemblée nationale. Il prend ses assises dans le
temps. C'est au cours des années soixante que l'idée d'un ordre
national fait surface. Elle est ensuite reprise par une motion à cette
Assemblée, présentée à l'époque par M.
Maurice Bellemare, le 3 octobre 1978. Pour sa part, le premier ministre du
Québec, dans son message inaugural de la sixième session, le 15
mars 1980, en évoquait déjà l'établissement
éventuel.
Ce projet de loi, pour l'essentiel, contient deux principes et un
certain nombre de modalités. Le premier est la création de cet
Ordre national du Québec et le deuxième, c'est celui
d'établir, pour les récipiendaires, ce qui sera leur seul
privilège d'être déterminés dans l'ordre de
préséance établi au protocole au Québec. Comme
toutes les sociétés modernes du monde occidental, le
Québec se caractérise par la pluralité, par le changement.
Les groupes sociaux, linguistiques, ethniques, religieux,
intellectuels, qui vivent au Québec témoignent de cette
réalité québécoise. La richesse de cette
pluralité est remarquable et elle peut être reconnue.
Au plan collectif, le territoire du Québec n'est pas seulement de
la géographie.
Il constitue un ensemble de valeurs et de réalisations qui
définissent et donnent une signification à notre
développement et ce, bien au-delà des conjonctures. Ici, au
Québec, nous pouvons organiser notre vie collective et rendre hommage
aux Québécoises et aux Québécois qui sont
éminents. L'histoire n'est pas que connaissance elle est aussi
reconnaissance. L'histoire sans l'homme n'existe pas. Nous avons
développé nos institutions sur ce territoire. Nous voulons les
maintenir, nous voulons en assurer le rayonnement et ce, avec
fierté.
L'appartenance et le sentiment d'appartenance à une
communauté nationale est un phénomène vivant. C'est un
phénomène de participation aux grands ensembles. Cette notion n'a
rien de chauvin ou de "folklorique", comme certains auraient pu le
prétendre.
L'histoire du Québec est la synthèse de faits qui ont
conduit inévitablement à des options politiques et sociales
divergentes ou différentes, qui ont déclenché des
mouvements de revendication et de réforme et qui inspirent des gens
d'action. Cela constitue la preuve vivante que nous appartenons au temps que
nos prédécesseurs ont vécu, au présent qui nous
entraîne, à l'avenir que nous voudrons bien bâtir
plutôt que de subir.
L'évolution historique du Québec démontre que nous
aurons vu juste comme société quant aux particularités de
cette société à laquelle nous nous identifions.
Que de chemin parcouru! De l'humiliation des ancêtres
colonisés, nous avons appris à réagir, à nous
reconnaître. Une collectivité existe dès qu'un groupe
d'hommes et de femmes vivent sur un même territoire, ont acquis
l'habitude d'avoir entre elles et entre eux des échanges et qu'une
collectivité choisit d'institutionnaliser ces échanges. Le
Québec a eu sa part d'hommes et de femmes éminents qui ont
créé des institutions politiques, des institutions
économiques, des institutions juridiques et sociales qui
répondaient à leurs besoins ou à ce que cette
collectivité percevait comme étant ses besoins. Lorsque la
collectivité entre en relation avec d'autres sociétés,
elle est donc amenée à préciser sa pensée, à
ressentir ses différences, à assumer son identité et
à partager ce qu'elle est.
Chaque expérience collective nouvelle augmente la
cohésion, que ce soit la résistance à la menace
extérieure, l'oeuvre réalisée en commun ou l'action
éminente d'un membre de cette collectivité. Tous les
Québécois ont conscience d'avoir en commun un héritage qui
les distingue des autres groupes sur ce continent. Toutes les
Québécoises et les Québécois savent qu'ils
continuent, à cet égard, une très longue tradition.
À cet égard, pour citer un homme qui est parfois ironique,
à l'occasion, cynique, mais toujours incisif, Albert Brie, "l'Ordre
national constitue, à cet égard, un rappel de nos oublis". Car
les faits ne parlent que rarement d'eux-mêmes, les hommes sont
indissociables de leurs faits, des expressions de leur pensée, de leurs
connaissances scientifiques, de leurs oeuvres. C'est le visage de ces citoyens,
de ces citoyennes éminents qu'il nous faut reconnaître.
Depuis 1922, l'année de la création des concours
littéraires du Québec, un certain nombre de distinctions
officielles sont nées à l'initiative des gouvernements successifs
du Québec en vue de reconnaître la contribution de diverses
personnes à l'essor de notre vie collective dans des domaines
particuliers, cependant.
Les Prix du Québec, le Mérite agricole, le Mérite
forestier, la récompense pour des actes de civisme sont de ce nombre.
Cependant, il n'existe aucune distinction générale propre
à souligner l'apport d'une personne au développement de la
société en général. (11 h 10)
L'Ordre national du Québec sera donc la plus haute distinction
qui puisse être décernée sur notre territoire. Cette
décoration rendra hommage à ceux et à celles qui ont
contribué ou qui contribuent à l'enrichissement de la vie de
leurs contemporains. L'Ordre national du Québec couvre donc tous les
secteurs de la société. À cet égard, M. le
Président, le choix des récipiendaires et des personnes à
qui seront remises ces distinctions fera l'objet, comme le prévoit le
projet de loi, d'une décision du Conseil exécutif. Cependant,
celui-ci prendra avis du Conseil de l'ordre. Ce Conseil de l'ordre sera
formé de neuf membres qui, eux-mêmes ou elles-mêmes, seront
élus par l'ensemble des membres de l'ordre.
Cependant, il faut évidemment commencer quelque part et
dès que le projet de loi sera adopté, il faudra s'assurer que le
Conseil exécutif, par le premier ministre, puisse prendre avis d'un
groupe afin de procéder à la nomination des premiers
récipiendaires ou personnes décorées à qui on aura
remis ces distinctions. C'est pourquoi, M. le Président, je
présenterai, lors de l'étude détaillée, des
amendements au projet de loi à la suite, notamment, des discussions que
nous avons eues avec les parlementaires de l'Opposition. Ces amendements
prévoiront notamment que dans un premier temps un groupe provisoire,
consultatif, précédera à la nomination des premiers
membres de l'ordre qui, eux-mêmes par la suite, éliront leur
conseil. Ce groupe provisoire serait composé du secrétaire
général du Conseil exécutif, du sous-ministre de la
Justice à titre de responsable et garde des sceaux à la Justice,
du président du Conseil de la magistrature du Québec, du
secrétaire général de la Conférence des
évêques du Québec, du président de
l'Université du Québec, de la présidente du Conseil du
statut de la femme du Québec, de l'Ombudsman et de deux autres personnes
nommées par le gouvernement, notamment, aux fins que soient
représentés sur ce groupe le milieu culturel et le milieu des
communautés minoritaires chez nous.
Dans le cas des premières nominations, comme dans le cas des
autres, nous prévoirons également un mécanisme qui
permettra que soit rendu public, probablement par annexe au décret,
l'avis du conseil à l'égard de la nomination d'une personne.
L'Ordre national du Québec sera donc composé des personnes
nommées à l'un des grades ou des titres suivants: grand officier
de l'Ordre national du Québec, officier de l'Ordre national du
Québec, récipiendaire de la médaille du mérite de
l'Ordre national du Québec.
N'avons-nous pas tous bénéficié, M. le
Président, des oeuvres de Lionel Groulx ou de Édouard Montpetit,
de Jean-Charles Bonenfant, de Gabrielle Roy, de Penfield, de Bethune et des
autres? Et, il y a celles et ceux qui sont parmi nous qui construisent et qui
construiront dans notre société le présent comme
l'avenir.
M. le Président, certaines personnes diront que la
création de l'Ordre national est faite d'audace. À
ceux-là, il faut répondre que cette création d'un ordre
national est d'abord mémoire et reconnaissance. Cet Ordre national, M.
le Président, c'est celui de la fidélité et du respect.
Fidélité et respect pour les hommes et les femmes d'ici qui, par
leur action éminente, ont contribué à nous
reconnaître et à reconnaître notre visage dans les
expressions de la pensée ou de l'humanité: que ce soit dans les
connaissances scientifiques, dans la réalisation d'oeuvres techniques,
que ce soit dans l'art sous toutes ses formes, que ce soit aussi dans
l'édification d'oeuvres à portée sociale pour ici ou pour
ailleurs, que ce soit dans la réalisation de gestes qui sont source
d'admiration. L'Ordre national du Québec, comme le drapeau du
Québec, comme la fête nationale du Québec, appartient
à tous et à toutes. Il permettra que ce soit la
collectivité et son humanité qui se révèlent par
celles et ceux qui seront ainsi désignés et qui inspirent cette
fidélité et ce respect.
L'Ordre national du Québec, M. le Président, c'est aussi
signature de notre vie comme peuple et reconnaissance à l'égard
de ceux et celles qui ont rendu et qui rendent notre quotidien extraordinaire.
Voilà en quoi l'Ordre national du Québec sera celui de la
reconnaissance.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: M. le Président, j'ai écouté,
comme les autres collègues, avec beaucoup d'attention l'intervention du
ministre à l'occasion de l'étude de ce projet de loi sur l'Ordre
national du Québec. Je pense que dans cette Chambre et, sans doute,
s'inscrivant dans une tradition assez longue des différents
gouvernements du Québec toute mesure susceptible d'encadrer ou de donner
à la société québécoise sa
personnalité, de renforcer sa personnalité, de lui permettre de
s'exprimer par ses institutions est bienvenue.
Le ministre rappelait par exemple - il s'agit ici de l'Assemblée
nationale du Québec - les efforts qui avaient été faits
dans le passé pour affirmer l'identité de la
société québécoise à l'intérieur du
régime fédéral canadien. Cette mesure s'inscrit dans cette
voie, celle de reconnaître les mérites exceptionnels de nos
concitoyens. Sur ce plan, je pense que tous les parlementaires et, sans doute,
par-delà les parlementaires tous les citoyens et toutes les citoyennes
du Québec vont accepter avec énormément d'enthousiasme que
notre société reconnaisse les mérites exceptionnels de nos
concitoyens et de nos concitoyennes.
M. le Président, il y a bien sûr, dans nos lois et dans nos
pratiques administratives, toute une série de mesures que l'on peut
penser comme étant assez proches d'un ordre national. Il y a la loi sur
le civisme. Encore la semaine dernière, le ministre de la Justice
remettait une décoration à des citoyens québécois
qui avaient fait un acte de bravoure. Il y a, bien sûr, celles qui sont
connues également dans le domaine forestier, dans le domaine agricole.
Il y a dans le domaine de la science, des arts et des lettres les prix du
ministère des Affaires culturelles. Toutes ces décorations, ces
marques de reconnaissance et d'estime à l'adresse d'un certain nombre de
nos concitoyens vont continuer. M. le Président, il y a au niveau de
l'Assemblée nationale également la médaille de
l'Assemblée nationale qui est remise non seulement à des
parlementaires, mais à des gens qui s'illustrent dans d'autres
sphères d'activité.
Toutes ces marques d'estime et de reconnaissance pour nos concitoyens
vont demeurer, mais ce qu'il faut bien comprendre dans ce projet de loi c'est
qu'il y a, par rapport à ces lois que je viens de mentionner, une
différence de nature puisque
l'Ordre national du Québec est un geste de l'État, un
geste qui va bien au-delà d'un concours ou de l'expression d'un jugement
sur une oeuvre en particulier. Comme le ministre l'a indiqué, il s'agit,
dans l'esprit du gouvernement et de l'Assemblée nationale, de
reconnaître les mérites de carrière, à tout le moins
pour la plupart, sauf quelques cas exceptionnels, d'un certain nombre de gens.
Cela devient donc une décoration d'État qui exprime,
derrière l'État, la reconnaissance et l'estime également
de l'ensemble de la société.
Bien sûr - j'ai déjà eu l'occasion d'en discuter
avec le ministre - une des craintes ou des réserves que nous avons,
c'est qu'il existe un Ordre du Canada. Il y aura un Ordre national du
Québec - je le signale en toute simplicité au ministre - mais il
ne faudrait pas qu'il y ait concurrence entre les deux ordres. Pour des raisons
politiques évidentes, nous ne l'apprécierions pas, mais
également dans l'intérêt même des
récipiendaires. Compte tenu du projet de loi que le ministre a
présenté et des intentions qu'il vient d'exprimer sur le
caractère, le maintien et la sauvegarde du caractère
complètement apolitique d'une telle décoration, je suis sûr
que ce sont les intentions absolument véritables du ministre à
cet égard. Je pense qu'il y a moyen d'obvier à cette
difficulté qui pouvait nous venir à l'esprit à un moment
ou l'autre. (11 h 20)
M. le Président, le ministre a exprimé brièvement
qu'il y aura dès le départ des premières personnes qui
auront à explorer l'ensemble de la société
québécoise pour identifier les premiers récipiendaires de
l'ordre; je suis très heureux que le ministre vienne de nous indiquer
que cette tâche ne sera pas confiée à des personnes, mais
plutôt à des gens qui occupent des fonctions. C'est un pas qui
bonifie le projet de loi et qui lui apporte, encore une fois, une valeur
objective beaucoup plus grande. Sans doute qu'au moment de l'étude
article par article, nous aurons l'occasion d'en discuter plus à
fond.
Bien sûr, s'agissant d'une décoration d'État -
j'aurai l'occasion d'en discuter lors de l'étude en commission - il y
avait le problème du lieutenant-gouverneur, c'est-à-dire du
régime constitutionnel actuel. J'indique immédiatement au
ministre notre intention, au moment de l'étude article par article,
d'affirmer le rôle du lieutenant-gouverneur à cet égard,
parce que, bien sûr, face à l'institution même du
lieutenant-gouverneur, on peut avoir toutes sortes d'opinions, mais s'agissant
d'une décoration d'État, le lieutenant-gouverneur est une
institution qui existe. Les lois sont sanctionnées par le
lieutenant-gouverneur et à tout le moins au niveau de la convenance et
de la courtoisie, il eût peut-être été
préférable qu'on ne l'oublie pas dans le projet de loi sur la
création de l'Ordre national du Québec.
Mais l'essentiel de nos préoccupations était beaucoup plus
axé sur le haut niveau d'impartialité que le ministre vient de
nous indiquer. À certains égards, à la première
lecture du projet de loi, nous nous sommes inquiétés du
rôle du premier ministre - il nommait les récipiendaires et il va
encore en nommer, c'est une question de fait - à savoir s'il devait
prendre avis du conseil ou des gens qui vont lui suggérer,
n'étant néanmoins pas obligé de suivre l'avis. Notre
première réaction est une certaine de réserve face
à cela, mais nous comprenons très bien que le chef de
l'Exécutif doit conserver dans une institution comme celle-là ses
prérogatives et que dans la mesure où on choisit le premier
ministre au lieu du lieutenant-gouverneur, qu'il puisse les avoir. Pour les
non-résidents, nous avons très bien compris que le premier
ministre ne devra pas consulter le conseil nécessairement, puisque ce
sont des gens qui résident à l'extérieur du Québec,
mais que dans la nature des rapports du Québec avec l'extérieur,
c'est tout à fait acceptable de reconnaître au premier ministre la
marge de manoeuvre à cet égard.
M. le Président, compte tenu des amendements ou enfin des
nouvelles propositions que le ministre de la Justice vient d'indiquer en cette
Chambre et compte tenu surtout de l'importance objective d'une institution qui
reconnaisse la plénitude des mérites et de la contribution
exceptionnelle de nos concitoyens, je ne veux pas prolonger indûment le
débat, mais seulement signifier au gouvernement et lui
réitérer ce qui est peut-être le facteur le plus important.
Je pense que ce sont ses intentions. Encore une fois, je ne voudrais pas
prêter de mauvaises intentions au gouvernement. Le sérieux d'une
institution comme celle-ci repose essentiellement dans la reconnaissance
objective des mérites de nos concitoyens. Le ministre a signalé
dans son intervention un certain nombre de noms et de personnes pour bien
signifier à quel niveau le gouvernement entendait placer l'Ordre du
Québec. Sur ce plan, on peut absolument concourir à cette
façon de voir les choses.
M. le Président, c'est dans cet esprit que nous allons au cours
des prochaines étapes des travaux de ce projet de loi examiner les
dispositions particulières et faire valoir, à l'occasion, notre
point de vue sur certaines modalités de ce projet de loi. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Mille-Îles.
M. Jean-Paul Champagne M. Champagne: Merci, M. le
Président.
C'est avec beaucoup de plaisir que j'interviens, en deuxième
lecture, sur le projet de loi 80, la loi qui créera l'Ordre national du
Québec, qui deviendra la plus haute distinction attribuée au
Québec.
Ma satisfaction, M. le Président, est d'autant plus grande que le
présent débat est l'aboutissement d'un désir souventefois
exprimé dans le passé. Aujourd'hui, le Québec se retrouve
dans une situation inexplicable considérant le manque de
détermination à vouloir souligner le mérite de
Québécois et de Québécoises qui se sont
signalés d'une façon particulière dans les domaines
économique, artistique, politique ou autre.
M. le Président, je crois sincèrement comme toutes les
nations que le Québec devrait un culte envers ceux qui ont donné
l'exemple du dévouement, de la persévérance, de
l'ingéniosité ou du dépassement de soi.
M. le Président, l'histoire nous prouve que tout peuple a besoin
de s'accrocher à des héros, à des vedettes. La
création de l'Ordre national se veut d'une certaine façon le
moyen de souligner le mérite de ceux qui se sont distingués ou
qui se distinguent d'une manière particulièrement
exceptionnelle.
M. le Président, nos bâtisseurs, nos scientifiques, nos
penseurs, nos créateurs, nos héros, autant de personnages qui
seront des modèles à imiter, des exemples à suivre, pour
nous et pour les générations futures.
Cet Ordre national, M. le Président, se veut avant tout une
reconnaissance des vivants mais aussi à l'occasion la reconnaissance du
mérite de personnes décédées. Les Henri Bourassa,
Lionel Groulx, Alphonse Desjardins, Wilfrid Pelletier, Armand Bombardier, les
Mgr Félix-Antoine Savard et pourquoi pas les Étienne Desmarteaux
et les Louis Cyr sont autant de personnages qui se sont dépassés
et qui ont été reconnus par leurs contemporains mais,
hélas! souvent vite oubliés. Pour réparer cet oubli dans
le passé, la création de l'Ordre national du Québec sera
un moyen de corriger cette absence de reconnaissance. Aujourd'hui, certains
contemporains québécois pourront être honorés au
Québec dans tous les domaines de notre vie quotidienne.
C'est sans partisanerie, c'est sans distinction de langue, de religion
ou de culture que devront être attribués les futures
décorations de l'ordre, et je ne peux qu'espérer que, dans cette
enceinte de l'Assemblée nationale, le projet de loi 80 fasse
l'entière unanimité.
Dans le domaine privé, M. le Président, nous avons
plusieurs institutions qui reconnaissent un mérite particulier. Que ce
soit la chambre de commerce, la Fédération des caisses populaires
Desjardins, la Fédération des unions de familles, la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, la ville de
Montréal, que ce soit les compagnies Esso,
Molson, La Presse, Air Canada, le Journal de Montréal, toutes ces
institutions reconnaissent par l'attribution de leur prix le mérite sous
l'aspect culturel, le mérite sous l'aspect social ou le mérite
sous l'aspect économique des individus honorés.
Dans le secteur public, M. le Président, toutes les nations ont
une tradition souvent séculaire dans le domaine des ordres et des
décorations. Tous les pays du monde reconnaissent le mérite des
concitoyens. Pourquoi le Québec ne reconnaîtrait-il pas le
mérite des siens dans ce qui devrait être la plus haute
distinction de mérite de son territoire?
M. le Président, poser la question, c'est y répondre. L'an
dernier, je présidais un comité qui a fait une étude
exhaustive sur la politique nationale du mérite. Quelle ne fut pas ma
surprise de constater le peu d'intérêt que le Québec
portait à la reconnaissance du mérite soit pour les vivants, soit
pour les morts. Un observateur étranger, qui constatait le manque
d'institutions de mérite comme les ordres ou les temples de la
renommée au Québec, a eu cette réflexion: "Les Canadiens
français se glorifient à l'idée de se voir accéder
au Panthéon ou au Temple des quarante immortels à Paris."
Pourtant, dans la seule ville de New York, il y a 27 temples de la
renommée. Los Angeles en compte 43; la province de l'Ontario, 17, et le
Québec, aucun. Il y a sûrement une lacune à ce sujet. (11 h
30)
Pourquoi le mérite d'un Armand Bombardier, pourquoi le
mérite d'un Alphonse Desjardins sont-ils soulignés dans la tour
du Canadien National à Toronto? Pourquoi un Maurice Richard est-il aussi
honoré à Toronto, et non ici? Le Québec devrait rapatrier
ses héros. Aussi faudrait-il, après avoir adopté la Loi
sur l'Ordre national du Québec, étudier la possibilité
qu'éventuellement le Québec, avec l'aide du secteur privé,
puisse ériger un temple de la renommée pour honorer les
Québécois et les Québécoises qui méritent
notre considération et notre attachement.
Je voudrais donner quelques exemples de nos contemporains qui pourraient
mériter de la nation. Je veux donner des exemples pratiques, sans
vouloir faire ombrage à personne. J'ai connu ici en cette Chambre -je
l'ai vu à la télévision - l'ancien député de
Johnson, M. Maurice Bellemare, qui sera reçu éventuellement de
l'Ordre national du Canada. Je m'en réjouis, mais M. Bellemare est quand
même un homme qui a travaillé ici, au Québec, pendant plus
de 30 ans dans cette Chambre, dans son comté de Johnson et dans la
région de Trois-Rivières, pour faire en sorte que les
Québécois puissent avoir à leur disposition tous les
moyens nécessaires pour faire en sorte qu'on puisse être bien ici
au Québec. M. Maurice
Bellemare s'est dépensé sans aucune mesure. Je pense qu'il
serait normal que l'Ordre national, éventuellement, sans vouloir entrer
dans le conseil des membres qui feront le choix de ces personnes, honore M.
Bellemare.
Également, dans cette Chambre, M. René Jalbert, un sergent
d'armes qui nous a fourni un apport héroïque dernièrement,
lors des événements malheureux que nous avons connus. Je pense
que c'est ici, au Québec, que nos héros devraient être
honorés. Je pense entre autres, dans le domaine des sports, à un
Gaétan Boucher qui a fait l'honneur des Québécois. Ce
serait tout normal que l'Ordre national du Québec puisse
éventuellement honorer ces héros.
Pour terminer, M. le Président, je ne peux espérer qu'une
chose, c'est qu'ici, il y ait unanimité autour de ce projet de loi 80
pour qu'enfin des bâtisseurs du Québec soient des
récipiendaires de l'Ordre national du Québec et que ces
récipiendaires, ces héros deviennent des modèles à
suivre et à imiter pour permettre à tous les
Québécois et toutes les Québécoises d'aller de
l'avant pour construire le Québec de demain. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: Merci, M., le Président. Le gouvernement nous
apporte le projet de loi 80 sur l'Ordre national du Québec. J'ai
noté avec beaucoup de plaisir la sobriété avec laquelle le
ministre de la Justice avait exposé son projet de loi. J'ai pris note
aussi des amendements très importants que le ministre apportera pour
donner des garanties formelles que ces décorations qui seront
données le seront à des gens qui auront oeuvré pour le
Québec, bien sûr, et que le processus décisionnel sera
protégé pour s'assurer que les décisions quant aux
décorations qui seront données ne seront pas prises dans un
climat partisan, mais plutôt en reconnaissance des mérites des
individus qui auront bien servi le Québec.
Ce que le ministre ne nous a pas dit, c'est pour quelle raison ce projet
de loi, que nous de l'Opposition, devons discuter maintenant puisqu'il a
été amené par le gouvernement, est prioritaire maintenant.
Le ministre nous a dit qu'en 1980, semble-t-il, le premier ministre du
Québec avait évoqué la possibilité de créer
un Ordre national du Québec. Mais pourquoi amener ce projet de loi
maintenant? Pourquoi est-ce prioritaire? Vous comprendrez qu'étant
vice-président de la commission de l'économie et du travail,
étant le porte-parole de l'Opposition en matière de
développement économique, je me suis posé la question
suivante: Pourquoi ce projet de loi maintenant et non pas d'autres projets de
loi qui auraient dû venir en Chambre et auraient pu y venir si le
gouvernement avait voulu régler plusieurs problèmes
économiques auxquels nous sommes confrontés? C'est une question
de priorité, j'imagine, pour le gouvernement.
M. le Président, durant cette session qui s'achève et qui
finira, je ne sais pas, demain ou après demain au plus tard, alors que
ce fut une fin de session où n'avons pas été très
occupés - de mémoire d'homme, du moins, durant ma courte vie
politique de trois ans et demi ou quatre ans, cette fin de session est la moins
bruyante, la moins occupée, la moins remplie que j'aie vécue -on
peut se poser la question suivante: Pourquoi d'autres projets de loi
attendent-ils alors que le gouvernement nous amène ce projet de loi, en
particulier? Le gouvernement aurait bien pu donner suite à
l'étude de la réglementation faite par nos collègues
Vaugeois et French, qui nous recommandaient, justement, une loi. Il aurait pu
s'assurer qu'à l'avenir la réglementation qui touche très
souvent le secteur privé et qui brime son développement
économique... Une loi aurait permis d'étudier l'impact
économique de toute nouvelle réglementation et de s'assurer un
cadre juridique permettant justement de minimiser l'impact négatif que
certaines réglementations nécessaires peuvent avoir sur la
gouverne de certaines sociétés à caractère
économique.
Le gouvernement aurait pu, bien sûr, demander aux commissions
parlementaires d'étudier le cas de plusieurs sociétés
d'État qui ont été créées dans le
passé. Bien souvent, on se pose des questions à savoir si
l'orientation qu'elles poursuivent maintenant coïncide avec la
réalité du moment. Nous avons eu l'occasion, la semaine
dernière en particulier, d'étudier le projet de loi 66, portant
sur la société d'État REXFOR, où j'ai justement
évoqué cette inconscience du gouvernement qui nous demandait
d'appuyer un projet de loi augmentant le capital-actions de REXFOR de 65 000
000 $, alors que l'orientation même de la société
d'État n'est pas connue, alors que la direction de REXFOR a
proposé un plan de développement et que ce plan de
développement n'a pas été approuvé depuis
déjà deux ans. Le gouvernement aurait pu nous demander
d'étudier le cas de différentes sociétés, de
différentes régies de toutes sortes qui ont été
créées en très grand nombre depuis 1976. Le gouvernement
aurait justement pu déposer le livre blanc sur la fiscalité qui,
une fois de plus, est retardé jusqu'à l'automne, alors qu'on nous
l'avait promis depuis déjà dix mois ou un an.
Toutes ces mesures, M. le Président, que je viens
d'évoquer auraient pu assurer un meilleur développement
économique au Québec, alors que nous avons du chômage, que
nous sommes en plus grande concurrence
avec le monde extérieur. On peut se poser la question: Pourquoi
pas des projets de loi à caractère économique et pourquoi
ce projet de loi 80 sur l'Ordre national du Québec?
M. ,1e Président, mon collègue de Jean-Talon a très
bien évoqué nos craintes et nos recommandations. Dans une
très grande mesure, je crois que le ministre, qui était
déjà au courant de ces craintes et de ces questions que nous
avions en tête, a su y répondre en évoquant qu'il apportera
des amendements très importants pour assurer que l'Ordre national du
Québec remplisse toutes les conditions en vue d'assurer
l'impartialité du processus décisionnel des titulaires qui,
éventuellement, seront décorés de cet ordre.
M. le Président, vous comprendrez notre hésitation puisque
nous avons cru, pendant un très bon moment, que le système
était biaisé. D'ailleurs, déjà, le titre nous fait
tiquer - excusez l'expression - car on lit: Ordre national du Québec.
Quand on sait que ce gouvernement, lors du dernier congrès du Parti
québécois, a réitéré sa volonté de
faire l'indépendance du Québec, vous comprendrez les
hésitations de plusieurs de nos collègues qui se posaient des
questions à savoir si ce gouvernement ne voulait pas encore une fois
poser un jalon qui, j'imagine, pourrait être extrêmement important
dans l'optique de l'indépendance du Québec. (11 h 40)
Néanmoins, M. le Président, nous croyons que, oui, il est
important de reconnaître les services de ceux qui ont bien servi la
nation, de ceux qui ont bien servi le Québec. Il est important que le
Québec reconnaisse l'oeuvre de ceux qui l'ont bien servi dans le
passé. Nous connaissons, bien sûr, notre histoire.
Personnellement, en tant que Québécois et en tant que Canadien
français, c'est avec plaisir que j'évoque les faits d'oeuvre qui
ont été accomplis par nos prédécesseurs, nos
Québécois il y a 100 ans, il y a 200 ans, il y a 50 ans. Trop
souvent ces faits ont été accomplis d'une façon
méconnue du public et méconnue des Québécois qui
peuvent vivre au Québec dans une démocratie, qui peuvent vivre au
Québec dans un climat qui fait l'honneur de tous ceux qui vivent
ici.
M. le Président, je crois que tous les Québécois
ont beaucoup de fierté à reconnaître les services de ceux
qui travaillent pour la nation, ont beaucoup de conviction à faire en
sorte que, même à l'intérieur d'un Canada, des
Québécois qui servent bien la province et qui ont bien servi les
concitoyens soient récompensés par un honneur qui leur sera
décerné éventuellement. Avec ces appréhensions qui
ont été atténuées par le discours du ministre de la
Justice, nous allons entreprendre cette discussion en commission parlementaire
avec beaucoup de largeur d'esprit., Nous espérons, qu'avec les
amendements que nous apporterons, les recommandations que nous ferons pour
assurer davantage que cet Ordre national du Québec donne toutes les
garanties formelles d'un ordre qui ne sera pas partisan, il sera possible
éventuellement que ce projet de loi qui est devant nous aujourd'hui
reçoive l'approbation d'une majorité des parlementaires. Je crois
qu'il serait néfaste qu'un projet de loi comme celui-là, qui est
créé pour reconnaître les services de ceux qui nous ont
bien servis dans le passé ou qui nous serviront bien dans l'avenir... Il
serait important que cet ordre puisse recevoir, si ce n'est pas à
l'unanimité, l'appui du plus grand nombre de parlementaires.
Nous avons encore quelques hésitations. Le ministre a
apporté des amendements qui nous permettent de croire que le
gouvernement a décidé de mettre la pédale douce sur
l'orientation partisane ou politique qu'il aurait pu donner à cet Ordre
national du Québec. En particulier, le titre évoque une
orientation que nous déplorons. Avec ces quelques commentaires, M. le
Président, je dis qu'il est important que nous reconnaissions ceux qui
assurent l'avenir du Québec, ceux qui l'ont fait dans le passé.
Le Parti libéral du Québec a toujours évoqué et
assuré l'épanouissement des Québécois, de la
culture québécoise, assuré l'identité du
Québec. Avec ces idées en tête, nous allons entreprendre
l'étude de ce projet de loi en commission parlementaire avec la plus
grande largeur de vues possible. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Lac-Saint-Jean et whip du gouvernement.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Quelques mots et quelques remarques au sujet de ce
projet de loi 80 créant l'Ordre national du Québec. On en atracé l'historique; on sait que cette idée n'est pas
nouvelle, elle est même ancienne. On la voit surgir dans les
années soixante. On a mentionné que M. Bellemare dans les
années soixante-dix avait présenté une motion en cette
Chambre visant à créer un ordre national du mérite. Le
premier ministre actuel du Québec - je pense que c'est dans le message
inaugural de 1980 -s'était engagé et avait engagé le
gouvernement à créer un ordre national du mérite visant
à reconnaître les actions et les réalisations de citoyens
et citoyennes du Québec. Nous voilà au printemps 1984 avec un
projet de loi qui, lorsqu'il sera adopté et sanctionné,
créera l'Ordre national du Québec.
M. le Président, il faut dire - je pense d'ailleurs que le
député de Mille-Îles l'a mentionné à juste
titre - que ce n'est pas
une idée très originale que de créer un Ordre
national du Québec. On peut même dire que la société
québécoise était originale parce qu'elle n'avait pas
d'Ordre national du Québec parce que quand on examine et... Le
député de Mille-Îles d'ailleurs a fait un travail
remarquable à ce sujet dans une étude qu'il a publiée, je
pense que c'est l'année dernière. Celui-ci, dans son
étude, énumère un certain nombre de pays, occidentaux pour
la plupart, où l'on retrouve des ordres ou des décorations avec
sensiblement le même objectif, c'est-à-dire de reconnaître
le mérite exceptionnel de contemporains.
On peut évoquer le plus célèbre de ces ordres,
c'est l'Ordre de la Légion d'honneur, en France, la plus prestigieuse
aussi, sans doute, qui a été créé, comme on le
sait, par l'empereur Napoléon en 1802, mais il y en a également
en Angleterre, par exemple l'Ordre national du bain, il y en a également
aux États-Unis, il y a la Médaille du Président, qui est
une décoration très recherchée, très prestigieuse
aussi. Et on pourrait allonger la liste. Dans presque tous les pays du monde,
dans toutes les sociétés normales du monde, on retrouve des
ordres du mérite et on retrouve des décorations visant à
honorer de façon particulière et exemplaire des citoyens et des
citoyennes qui ont accompli des oeuvres et des actions remarquables.
Au Canada même, depuis 1967, comme on l'a signalé
tantôt, il y a l'Ordre du Canada. Il a été
créé en 1967, avec une hiérarchie comme on le retrouve
dans presque tous les ordres connus. Je signale en passant que, quand on a
créé l'Ordre du Canada, en 1967, personne n'a trouvé cela
drôle, personne n'a trouvé cela comique. Parce que j'y reviendrai
tantôt, il y a certains journalistes, commentateurs ou chroniqueurs qui
ont trouvé cela amusant, drôle, comique, la création d'un
Ordre national du Québec.
Donc, M. le Président, c'est évident que nous allons voter
avec beaucoup d'enthousiasme ce projet de loi 80 qui crée l'Ordre
national du Québec. Je pense qu'à la base, le ministre l'a
signalé dans des termes remarquables, dans la création d'un tel
ordre, il y a, je pense, la reconnaissance au Québec d'une
société distincte. C'est l'expression la plus courante, qui
crée le moins de controverse, expression de société
distincte. Nous, on pense que le terme de peuple et de nation même
convient, c'est pour cela qu'on retrouve l'expression "national" dans le nom de
l'ordre, l'Ordre national du Québec. Nous pensons que les
Québécois constituent un peuple, constituent une nation avec tous
les attributs qu'on reconnaît normalement à un peuple et à
une nation. Cette nation a des valeurs communes, elle a une histoire
également, elle a une culture commune, elle a des façons de
penser et, ce qu'on appelle aussi, un vouloir vivre collectif. Nous constituons
donc une société distincte au Québec. Nous constituons,
nous, c'est ce que nous pensons, une nation avec tous les attributs qu'on
retrouve dans cette définition, ce terme, cette expression.
Il arrive que des citoyens et des citoyennes, de façon
exceptionnelle, accomplissent des actions exemplaires qui ont pour effet
d'ailleurs de mieux enraciner les valeurs communes de cette
société, de la société québécoise,
qui ont aussi pour effet d'accentuer le développement,
l'épanouissement de notre culture commune, et je pense qu'il est normal,
qu'il est légitime de reconnaître les mérites de ceux et de
celles qui, par leurs actions, par leurs oeuvres, par leurs
réalisations, ont contribué à l'enrichissement de la vie
de leurs contemporains. Il est normal de reconnaître les
réalisations remarquables de citoyens et de citoyennes du Québec
et de les proposer aux générations actuelles et futures, de les
proposer, en quelque sorte, comme des exemples éclatants d'imagination,
de persévérance, de courage, de ténacité et de
travail. (11 h 50)
On s'inquiétait tout à l'heure - je pense que c'est le
député d'Outremont - qu'on puisse introduire une certaine forme
de partisanerie soit dans la mise en place de l'ordre soit dans les nominations
qui viendraient par la suite. Je ne vois pas comment un gouvernement pourrait,
sans être réprouvé, sans connaître une
réprobation générale, faire de la partisanerie avec une
pareille chose. D'ailleurs, il y aura un Conseil de l'ordre qui fera des
recommandations au gouvernement et je verrais très mal qu'un
gouvernement puisse passer outre aux recommandations du Conseil de l'ordre,
puisse nommer à l'Ordre national des personnes qui ne seraient pas
recommandées par le Conseil de l'ordre. Je ne pense pas qu'on puisse
craindre que de la partisanerie s'introduise dans la mise en place de l'Ordre
national du Québec. Il y aura d'ailleurs des amendements - le ministre
l'a annoncé - qui feront l'affaire, m'a-t-on dit, de l'Opposition et qui
permettraient d'obtenir le consensus de tous les membres de cette
Assemblée, ce qui ferait en sorte que le projet de loi 80 serait
adopté de façon unanime par cette Chambre. Je pense que c'est
normal de rechercher l'unanimité pour la création d'une pareille
institution.
Je terminerai, M. le Président, en évoquant certains
commentaires qui ont été diffusés et écrits sur la
création d'une institution semblable. Je me souviens, en particulier,
d'un commentaire ou d'une chronique de Mme Lysiane Gagnon et tout
récemment d'un billet de M. Gilles Lesage du Devoir où on se
moquait carrément de la
création d'une institution semblable au Québec. On faisait
de l'ironie facile sur la hiérarchie qu'on retrouverait à
l'intérieur d'un ordre semblable. On trouvait cela comique. On trouvait
cela drôle. J'ai l'impression qu'on est carrément en face d'un
réflexe de colonisé. On semble être assuré ou
convaincu que le Québec, à l'encontre de toutes les
sociétés du monde, ne peut pas faire preuve de reconnaissance, ne
peut pas honorer ses citoyens et ses citoyennes émérites. C'est
comme si la société québécoise n'était pas
une société normale. C'est normal qu'au Canada il y ait l'Ordre
national du Canada, c'est normal qu'il y ait la Légion d'honneur en
France et c'est normal que dans presque toutes les sociétés ou
États du monde, il y ait des ordres du mérite, mais pour le
Québec c'est anormal! C'est drôle. C'est comique. Je regrette ces
commentaires. Je les attribue à une sorte de réflexe de
colonisé.
M. le Président, je pense qu'il était temps... M. le
député d'Outremont a énuméré tout à
l'heure une série de projets de loi qu'on aurait dû adopter avant
celui-là. Je pense que celui-là en est un qu'il faut adopter de
toute urgence aussi. On a trop tardé à l'adopter, d'ailleurs.
C'était dans le message inaugural de 1980. Imaginez! On est en i984 et
on n'a pas encore adopté ce projet de loi. C'est plus que le temps de
l'adopter. Je pense que nous allons obtenir l'unanimité de cette Chambre
- ce qui est souhaitable, en tout cas - pour adopter et mettre en place le plus
rapidement possible l'Ordre national du Québec. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, ce n'est pas avec un
enthousiasme particulier que j'aborde ce sujet parce qu'il ne me paraît
pas parmi les plus importants dont on pourrait être appelé
à discuter dans une Assemblée comme celle-ci. J'ai beaucoup de
respect pour les pays qui ont institué des décorations
nationales. J'en connais aussi un grand nombre qui n'en ont point. J'en connais
un grand nombre qui considèrent ce geste comme tellement délicat
qu'ils ne confèrent des décorations nationales que pour des
actions très précises dans des domaines qui mettent en jeu
l'existence même du pays en général.
Ces décorations ont pris naissance dans le domaine militaire. On
voulait consacrer des hauts faits militaires de gens qui s'étaient
illustrés pour la patrie. On leur donnait ces décorations.
Ensuite, il est arrivé très souvent que des gouvernements,
beaucoup plus soucieux de prestige que d'autre chose, ont voulu annexer des
décorations civiles à ces décorations qui avaient d'abord
pris naissance dans le domaine militaire. À ce moment-là, le
danger de confusion entre la politique et les intérêts
supérieurs de la nation est toujours présent. Il faut l'aborder
avec une grande circonspection.
J'entendais le leader adjoint du gouvernement s'étonner des
réactions un peu sceptiques qui ont accueilli le projet du gouvernement.
Il ne devrait pas s'en étonner parce qu'il y a eu tellement d'abus dans
le passé sur la question nationale, tellement d'abus des valeurs
nationales qu'il n'est pas étonnant que les gens se demandent si on n'en
aura pas un de plus. Moi-même, j'ai connu personnellement la
manière dont la Société Saint-Jean-Baptiste attribuait ses
prix dans le domaine du journalisme. Je n'ai jamais eu beaucoup de respect pour
la société nationale, pour la façon dont elle
procédait là-dedans. Très souvent, le jugement
était beaucoup plus politique que professionnel. Il me semble qu'un
professionnel qui se respecte n'est point intéressé, surtout dans
le journalisme, à recevoir un prix de mérite politique. S'il doit
recevoir un prix de mérite professionnel, il veut bien que ce soit
conféré par des pairs, par des personnes au moins dont il
respecterait l'intégrité. Mais il y a eu tellement d'abus
là-dedans que le gouvernement ne devrait pas s'étonner de la
prudence que manifeste l'Opposition.
Je vous donne un autre exemple: les fêtes de la Saint-Jean. Que
d'abus on a faits au cours des dernières années des fêtes
de la Saint-Jean, au nom de l'idée nationale, au nom de la
réalité nationale. C'était devenu la patente de certains.
Dans certains cas, il faut bien le dire, même si c'est un peu
inélégant de le rappeler maintenant, c'étaient des petits
"patroneux" de deuxième classe qui s'étaient fait des petites
niches. Il a fallu des enquêtes spéciales dont on n'a jamais connu
le dénouement d'une manière vraiment claire, d'ailleurs.
Que l'on regarde cela avec un petit peu de scepticisme, dans certains
milieux journalistiques en particulier, je l'apprécie hautement parce
que je pense que j'aurais eu une réaction semblable, si j'avais
été dans cette profession encore aujourd'hui. Il faut
procéder, par conséquent, avec infiniment de doigté. Je
pense que le contexte actuel n'est pas trop bon. Au Québec, nous avons
un problème particulier. Ce n'est ni la faute du gouvernement, ni la
faute de l'Opposition, mais les opinions en matière d'idéal
national sont très partagées.
Vous parliez de l'Ordre du Canada tantôt. Je peux vous en parler
en connaissance de cause parce que j'ai fait partie du premier groupe de
Canadiens qui avaient été invités à en faire
partie. Je leur
avais répondu que je ne pouvais pas accepter parce que je ne
savais pas comment mes opinions évolueraient dans l'avenir. Je voulais
garder toute ma liberté de pensée. Je ne voulais pas me sentir
obligé en quelque manière envers qui que ce soit. La plupart du
temps, quand me sont arrivées des invitations de ce genre, cela a
touujours été ma réaction. Les seules que j'ai
acceptées étaient celles qui étaient vraiment
professionnelles. Les autres, je les abordais toujours avec des gants blancs et
avec infiniment de crainte, pour être franc.
Je trouve que s'il y a une idée qu'on doit traiter avec un
respect profond, c'est l'idée de la nation. Il faut la traiter avec un
respect tel qu'on soit capable de la hausser au niveau des divergences
politiques particulières. Je suis de ceux qui croient dans cette Chambre
que le Québec forme une nation à bien des points de vue, une
nation qui doit être fière d'elle-même. C'est pourquoi on
s'appelle l'Assemblée nationale; si ce n'était pas
l'Assemblée d'une nation, je pense que le mot "nationale" serait une
usurpation pure et simple. À ma connaissance, cela a été
adopté à l'unanimité dans le temps. Par conséquent,
je ne me fais pas de problème avec cela, mais je veux qu'on
élève le concept de nation à un niveau assez
élevé de respect, qu'il ne soit pas utilisé pour des fins
partisanes par quelque groupe que ce soit. (12 heures)
J'aurais préféré personnellement, autant au niveau
fédéral qu'au niveau québécois, qu'on attende
encore que l'histoire ait fait son chemin, qu'on se soit rapproché d'un
consensus plus grand entre les concitoyens qui partagent avec nous
l'expérience du Québec et du Canada pour en venir à des
décorations comme celle-là. Je crains qu'il y aura toujours une
certaine compétition. Les décorations de l'Ordre du Canada,
à ma connaissance, il n'y a pas eu beaucoup de souverainistes qui en ont
reçu. Je pense qu'ils ont toutes les précautions. Ils ont des
comités et tout, comme on va en avoir, et je pense que c'est le minimum
de prudence qu'on doive prendre. Il n'y a pas eu beaucoup de ces gens-là
là-bas et je ne pense pas que le gouvernement serait enclin à
proposer comme premier récipiendaire de l'Ordre national du
Québec celui qui vient de servir pendant quinze ans comme premier
ministre du Canada, M. Pierre Elliott Trudeau, parce que vous l'avez
traité d'ennemi du Québec, vous l'avez traité de
traître à la nation à combien de reprises! Pour nous
autres, qu'il soit reçu dans l'Ordre national du Québec, je ne
pense pas que cela créerait un problème spécial.
J'ai eu des divergences de vues profondes avec cet homme-là et
j'en ai encore, mais cela ne m'empêcherait pas de considérer qu'il
a bien servi son pays et le
Québec autant que moi, avec des moyens et des convictions
différents. Je me dis, tant qu'on n'est pas arrivé à un
certain consensus dans ces choses-là, ce sont des valeurs qu'il faut
mener avec extrêmement de prudence. Je pense que le gouvernement en
amenant cette affaire-ci, à la fin d'une session, je dirais même
à la fin d'un règne, n'agit pas dans le meilleur des contextes
circonstanciels possible. Il me semble que des initiatives comme
celle-là doivent être des initiatives qu'on prend dans des
périodes de large et profond consensus. J'estime que nous avons fait du
progrès ensemble ces dernières années. Je pense que le
climat de la Chambre est bien meilleur aujourd'hui qu'il ne l'était
quand j'ai fait mon entrée dans la Chambre il y a quelques
années. Je ne m'en attribue aucunement le mérite, mais je pense
qu'on peut parler de ces choses-là sur un ton beaucoup plus raisonnable
qu'on ne le faisait il y a cinq ou six ans à peine. Mais nous sommes
loin d'avoir fait le cheminement que nous devrions avoir fait ensemble pour
aborder ces choses-là avec un peu d'assurance.
Cela dit, M. le Président, le député de Jean-Talon
a malheureusement dit, avant que je commence à parler, que nous
voterions pour le projet de loi sur l'essentiel. Je l'appuie volontiers et je
pense que ce que disait tantôt le député de Lac-Saint-Jean,
à savoir que ce projet devrait être adopté à
l'unanimité, c'est un minimum. Je pourrais rendre hommage au ministre de
la Justice, je pense que c'est ce qu'il recherche depuis qu'il s'est rendu
compte que son projet soulevait des difficultés dans l'esprit de
l'Opposition et j'espère que le gouvernement va maintenir cette attitude
jusqu'à la fin. Mieux vaut que ce projet ne soit pas adopté
plutôt que d'être adopté dans un climat de division et
d'acrimonie. J'ai malheureusement raté une partie de son exposé,
ce matin. Je pensais qu'il allait faire un exposé d'une heure. J'ai
pensé pouvoir me dispenser des cinq premières minutes et je
m'aperçois qu'il a dit dans cinq ou dix minutes à peu près
tout ce qu'il avait trouvé à dire là-dessus, et je l'en
félicite. Très bien. Mais il a fait des ouvertures. Je pense
qu'il a garanti en particulier... Il faut des garanties absolues en
matière d'impartialité des nominations. Dans le projet de loi tel
qu'il était présenté, nous n'avions pas ces garanties et
j'aurais voté contre dans la forme qu'il avait sans aucune
hésitation. Mais si le gouvernement est prêt à nous donner
des garanties satisfaisantes...
Le ministre a parlé, si j'ai bien compris, de proposer que soit
prévu dans le projet de loi un conseil consultatif qui serait
chargé de faire le tamisage des nominations et de faire les propositions
au gouvernement, un conseil qui serait composé de personnes dont la
fonction est garante à la fois de leur intégrité, de leur
capacité de voir les
mérites des citoyens et aussi de leur capacité
d'être en contact avec les citoyens, en contact avec les manifestations
de la vie. Je pense que si on nous donne des garanties comme celles-là
et que ce conseil-là... J'ai cru comprendre que ce serait un conseil
transitoire dans l'esprit du ministre. Cela ne fait pas trop mon affaire
personnellement. J'émets une opinion qui est hautement discutable,
évidemment. Je crois que, pour ce qui regarde l'Ordre du Canada, le
conseil consultatif annexé à l'Ordre du Canada est une
institution permanente. C'est un conseil qui comprend, si mes souvenirs sont
bons, le juge en chef du Canada, le greffier général du
gouvernement, le président du Conseil des Arts du Canada, le
sous-secrétaire d'État, le président de la
Société royale du Canada, le président de l'Association
des universités et collèges du Canada. C'est très facile
de trouver pour le Québec un aréopage comparable à
celui-là. Je pense que nous avons les structures qui nous permettraient
de former un conseil consultatif à même des présidents ou
responsables d'organismes oeuvrant dans des domaines reliés au but du
projet de loi 80.
Je crois comprendre que, dans l'esprit du ministre, ce serait un
organisme transitoire, qu'une fois les membres nommés au Conseil de
l'ordre du Québec, cela deviendrait ce qu'on appelle en anglais un
"self-perpetuating body", un corps qui se reproduirait lui-même. J'ai des
hésitations à propos de cette idée pour une raison que je
vais vous exposer bien simplement. Ces membres ne seront pas très
nombreux, je l'espère. Il ne faut pas déprécier la bonne
monnaie. Si on en met trop en circulation, elle perd de sa valeur. C'est
là un principe élémentaire, surtout dans le domaine des
décorations. Il y a danger qu'ils vieillissent. Vous ne leur enlevez pas
leur qualité de membre de l'ordre à l'âge de 70, 75 ou 80
ans. Il y a danger que cela devienne un aréopage qui se distingue par
l'âge, surtout quand on veut donner des décorations de
caractère général.
Je voudrais faire une recommandation au gouvernement, ne la donnez pas
trop jeune. Il pourrait arriver, par exemple, qu'un conseil à tendance
un peu politique propose une médaille pour le ministre de la Justice en
raison de ses convictions politiques. Tout à coup, ses vraies
convictions politiques changeraient au cours des années. On pourrait
être embarrassé de l'avoir honoré de cette manière.
Je trouve qu'il y a un danger dans cette idée. Je mets fin à
cette digression qui était inutile, j'en conviens volontiers.
Une voix: ...
M. Ryan: Je suis moins sûr de cela. Inutile pour les fins
du débat, mais peut-être pertinente à d'autres points de
vue. L'avenir nous le révélera. Je suggère au ministre de
la Justice de garder un certain climat de suspense autour de l'évolution
de ses opinions politiques, c'est excellent pour la santé du
débat politique à bien des points de vue.
Je ferme la parenthèse, M. le Président. Je crois qu'un
corps qui serait appelé à se perpétuer de lui-même,
cela ne serait pas la structure idéale, étant donné le
genre de société que nous sommes. Je ne sais pas comment la
Légion d'honneur, fonctionne en France. Je n'ai jamais eu
d'intérêt à la recevoir personnellement. La France est une
société beaucoup plus large que le Québec, c'est une
société de 60 000 000 d'habitants. Peut-être a-t-on assez
de membres de cet organisme pour être capable de... Même la
Légion d'honneur serait surprise que ce soit un corps qui se
perpétue lui-même.
Il semble que l'idée même d'un corps qui se perpétue
lui-même a quelque chose de discutable, quelque chose qui mérite
d'être examiné de très près. C'est pourquoi je
serais enclin à suggérer au ministre que ce conseil consultatif
dont la composition pourrait être discutée au stade de
l'étude en commission soit un élément permanent dans la
structure qui sera définie par le projet de loi que nous discutons
actuellement. S'il y avait cette garantie, je pense que, pour moi, en ma
qualité de député et en ma qualité de vieil
observateur de ces choses - j'en ai vu passer de toutes les couleurs au cours
des années - ce serait une garantie d'impartialité et
d'objectivité plus grande que si c'était seulement
transitoire.
Je ne vois pas non plus à quel titre on confierait cela seulement
à quelques personnes qui seraient figées dans le temps, qui
seraient toujours les mêmes. Il peut arriver qu'une ou des personnes
reçoivent une décoration et que leur façon
d'apprécier les choses évolue en cours de route. On a
mentionné l'exemple de Gaétan Boucher. M. Boucher est un bon
athlète. Est-ce que cela lui donne une compétence pour juger des
mérites de personnes qui pourraient être admises à l'Ordre
national du Québec? On peut en douter fortement. Il peut arriver que sa
carrière prenne une tout autre évolution. On est
généralement brillant dans le domaine athlétique pendant
une période limitée de sa vie. Ensuite, il faut faire face aux
tâches politiques, sociales et professionnelles. C'est loin d'être
sûr que ce soit la meilleure garantie d'objectivité que de
demander cela à ces personnes. (12 h 10)
II pourrait arriver que d'autres se soient illustrées dans la
politique, qu'elles aient des biais également, qu'elles aient
été excellentes en ce qui touche leur propre mérite mais
que leur capacité de juger objectivement de l'aptitude d'autres
personnes à faire partie de cette société soit
discutable à un point de vue ou à l'autre. Quand on accordera les
décorations, on ne pensera pas de former d'abord un aréopage
équilibré pour choisir d'autres candidats. Il pourra arriver
qu'on les choisisse plus dans un champ d'activité que dans un autre,
dans un catégorie culturelle que dans une autre. À un moment
donné, on pourra se trouver en face d'un aréopage - ce groupe des
membres permanents - qui sera passablement coupé de la
réalité véritable, qui évoluera dans ses certitudes
à lui, dans ses mérites à lui, dans son ordre d'excellence
à lui, mais qui ne sera pas des mieux placés pour percevoir de
nouvelles manifestations de la vie qui se produit ici ou là. Je veux le
maximum d'ouverture de ce côté et je pense que si on avait cet
aréopage formé, par exemple, du juge en chef de la Cour
provinciale du Québec, on a parlé du protecteur du citoyen, je
pense que ce serait très bien, la présidente du Conseil du statut
de la femme, le président du Conseil supérieur de
l'éducation, on peut en nommer plusieurs autres, évidemment.
Il y a une garantie de mobilité et de flexibilité ici
parce que ce sont toutes des personnes qui vont changer. Ce sont des fonctions
qui vont changer de titulaires en cours de route. On aura toujours des
personnes qui par leurs fonctions mêmes sont davantage placées en
contact avec les différents champs d'activité d'où
émaneront les candidatures en vue de l'admission au sein de l'Ordre
national du Québec. C'est une première considération que
je voulais soumettre avec le plus de conviction possible, le plus d'ouverture
également.
Il y a un deuxième point qui est extrêmement important. J'y
ai fait allusion tantôt, par voie d'exemple, et je voudrais m'y
arrêter quelque peu: c'est le principe de l'accès à
l'appartenance, qui doit être des plus larges, des plus
généreux, qui doit même être franchement universel.
Si, par exemple, dans l'idée du gouvernement, à ce moment-ci, et
je reprends mon exemple de tantôt, il devait être exclu qu'une
personnalité ayant évolué sur la scène
fédérale soit admissible à cet Ordre national du
Québec, je pense qu'il y aurait quelque chose de profondément
dévié à l'origine même.
Je ne veux pas dire que ma première proposition serait de
suggérer qu'une personne ayant oeuvré sur la scène
fédérale soit admise au sein de l'Ordre du Canada. Mais si le
climat dans lequel baigne toute cette affaire devait être un climat qui,
à toutes fins utiles, excluait des personnes sous prétexte
qu'elles auraient oeuvré à un niveau qui n'est pas accepté
de certains membres de cette Chambre, ou encore qu'elles auraient
défendu des positions politiques considérées comme
hérétiques par un côté ou l'autre de cette
Assemblée nationale, je pense qu'il y aurait danger. Et c'est pour cela
que le ministre pourra me corriger là-dessus. J'ai fait une lecture
attentive du projet de loi, mais il pourrait arriver qu'un passage m'ait
échappé. J'ai remarqué dans les règlements qui
concernent l'Ordre du Canada qu'il y a un article où on dit que toute
personne peut soumettre le nom d'un citoyen qu'il voudrait voir admis au titre
de membre de l'Ordre du Canada. Je n'ai pas trouvé de disposition
semblable dans le projet de loi 80. J'aimerais qu'il y ait eu une disposition
clairement inscrite dans le projet de loi prescrivant que tout citoyen du
Québec aura le droit de faire des propositions à l'organisme
jugé compétent pour se prononcer sur ces choses de manière
que ce soit clair, que ce ne soit pas la clique du parti au pouvoir, la clique
de l'Opposition, le groupe de la Saint-Jean-Baptiste, le groupe des syndicats,
le groupe des chambres de commerce, mais n'importe quel citoyen du
Québec qui puisse faire des propositions en ayant la certitude garantie
par la loi que ces propositions seront examinées avec toute
l'impartialité et l'objectivité possible par un groupe de
concitoyens dont la fonction même garantisse à la fois la
compétence et l'impartialité. C'est un point que je soumets
à l'attention du ministre de la Justice avec beaucoup de fermeté.
Ce point me semble important pour le succès de l'entreprise.
Le troisième point que je voudrais signaler a trait à la
nécessité de garder le pouvoir exécutif à distance.
Je pense qu'il va de soi, dans une chose comme celle-là, que le pouvoir
exécutif ne doit pas avoir le nez trop collé sur la mise en
application. Il faut prévoir des mécanismes médiateurs qui
permettront d'assurer que, tout en se faisant sous la responsabilité
générale du gouvernement, le fonctionnement ne se fera pas avec
la bénédiction, sous la surveillance ou sous le contrôle du
gouvernement et qu'elle ne sera utilisée en aucune manière pour
promouvoir les intérêts politiques du parti qui a l'avantage du
pouvoir pendant une période qui sera toujours limitée -
souhaitons-le -quel que soit le parti au pouvoir.
En somme, dans le projet de loi que nous a présenté le
ministre, il y a beaucoup de lacunes à ce point de vue. Il y a beaucoup
de passages qui sont absolument inacceptables. J'espère qu'on les
corrigera dans la version finale. Si, sur ces trois points, j'obtiens
satisfaction de la part du ministre au stade de l'étude en
comité, je me ferai un devoir civique de voter en faveur de la mesure et
de souhaiter qu'elle puisse être instaurée dans les conditions
d'impartialité, d'élévation et de service commun de notre
communauté nationale, les plus élevées et les plus dignes
possible du respect de tous les citoyens. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Gilles Baril
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): M. le
Président, il me fait extrêmement plaisir d'intervenir à ce
stade du débat sur le projet de loi 80 qui propose la création de
l'Ordre national du Québec.
Pour le bienfait de tout le monde qui prend part à ce
débat et pour, bien sûr, les gens qui nous écoutent,
j'aimerais rappeler, à partir des notes explicatives, l'essentiel du
projet de loi qui est soumis à cette Assemblée, aujourd'hui: "II
y est prévu que l'Ordre sera composé des personnes à qui
le gouvernement aura conféré le titre de grand officier ou
d'officier de l'Ordre national du Québec ou de récipiendaire de
la médaille de l'Ordre national du Québec en témoignage de
la fierté qu'inspire au peuple québécois le mérite
exceptionnel de leur action. "Ce projet de loi prévoit également
la création d'un Conseil de l'ordre qui aura pour fonction de conseiller
le premier ministre sur les nominations qu'il se propose de recommander au
gouvernement. On y établit les règles de nomination du
président du conseil, la périodicité et le lieu des
séances de ce conseil ainsi que la possibilité pour les membres
du conseil de recevoir une allocation de présence et un remboursement
des frais engagés dans l'exercice de leur fonction. "Le conseil pourra
se doter d'un règlement de régie interne et son
secrétariat sera assuré par le ministère du Conseil
exécutif. "Enfin, ce projet de loi accorde au gouvernement un pouvoir
réglementaire relatif, notamment, à la détermination des
insignes de l'ordre, à leur forme et à la procédure de
leur attribution; ces insignes demeureront la propriété du
gouvernement. "Naturellement, le premier ministre sera chargé de
l'application de la loi."
M. le Président, à titre de député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, je pense que ce projet de loi vient,
aujourd'hui, répondre à une longue attente de la population du
Québec. En soutenant ce projet de loi, le Parlement ne fait que
démontrer sa volonté à souscrire au courage et à la
fierté des hommes et des femmes, jeunes ou vieux, qui habitent ce
merveilleux territoire qu'on appelle le Québec.
M. le Président, je voudrais relever certains dires du
député d'Argenteuil qui m'ont jeté un certain froid en
tant que jeune parlementaire et jeune homme, aussi, qui habite cette formidable
région agricole qu'est l'Abitibi-Témiscamingue et où
l'histoire de cette région aussi fabuleuse n'est pas
nécessairement caractérisée par cette beauté
géographique parsemée de lacs, de rivières, de mines et de
grands prés, mais qui a surtout été
caractérisée par l'intelligence, la force de travail et la
persévérance des hommes et des femmes qui ont bâti
d'arrache-pied, avec presque rien, une aussi belle région qu'on appelle
aujourd'hui l'Abitibi-Témiscamingue. Ces gens-là, M. le
Président, qui ont bâti, qui ont civilisé nos forêts,
qui ont dompté nos terres agricoles, qui ont fait passer des trains
à travers le roc; c'est pour eux qu'il y a nécessité
d'adopter le projet de loi 80 qui répond à une volonté de
la population du Québec. (12 h 20)
Pour reprendre l'essentiel du débat, je pense qu'il y a à
peu près nos propres savants, notre propre élite intellectuelle,
pour alimenter des doutes sur notre capacité de devenir l'objet d'une
admiration des autres peuples dans l'étape critique dans laquelle le
Québec actuellement est plongé. Je pense que nous avons tout ce
qu'il faut; nous avons la science; nous avons la technologie; nous avons cette
intelligence et cette volonté collective et, bien sûr, les
ressources naturelles, l'imagination, la créativité, bref, on a
ce qu'il faut, cette force et cette beauté pour faire de ce pays, le
Québec, un lieu de progrès et d'espoir, une place où la
liberté régnera, une place où il fera bon vivre.
Je pense que le projet de loi devant nous aujourd'hui nous pousse
davantage à nous efforcer, comme parlementaires, d'être à
la hauteur de cette grande qualité d'âme, de cette intelligence et
de cet optimisme du peuple que nous sommes censés servir. En
contrepartie, je dis que ce peuple n'est pas si peureux que cela quand on
réclame de lui des gestes héroïques, quand on lui demande
son appui pour une cause honorable ou quand on réclame des têtes
et des bras pour garantir un meilleur avenir aux enfants.
Je pense que le défi qu'ont les parlementaires est d'amener leur
réflexion à fabriquer un miroir qui reflète le
véritable visage, la véritable nature de notre peuple, celui du
Québec. Cette véritable image est celle de pionniers, de
bâtisseurs, d'aventuriers, de missionnaires à l'étranger,
de bâtisseurs d'églises et de grands barrages, champions dans le
domaine sportif et conquérants dans le domaine artistique. Je pense que,
comme élus en politique, nous nous devons de projeter ce miroir qui
démontre la grandeur, l'intelligence de ces hommes et de ces femmes qui
habitent et qui font le Québec, le pays réel, à tous les
jours.
Pour revenir à ce que disait le député d'Argenteuil
au début de son allocution, il faisait allusion - par le fait même
il amenait certains doutes et certaines hésitations vis-à-vis du
projet de loi - à certains pays du monde qui donnaient des distinctions
d'ordre national mais dans des scénarios qui
s'approchent de certains régimes militaires. Je pense que les
citoyens et les citoyennes qui nous écoutent savent très bien que
le peuple du Québec est à l'opposé, justement, de ces
scénarios qui frisent les régimes militaires où on serait
tenté de donner certaines distinctions qui s'approchent justement de
tels régimes. Le peuple québécois est un peuple pacifique.
Les gens de l'Abitibi-Témiscamingue n'ont rien d'hommes et de femmes qui
s'apparentent à des individus du Québec, qui s'approchent
justement de voies plus militaires ou conflictuelles. Je pense que le projet de
loi qui est déposé devant nous aujourd'hui n'a rien à voir
avec ce type d'appréhension.
Naturellement - et c'est très malheureux - certains intervenants
ont eu la tentation de ne pas résister à la partisanerie
politique. Je pense que les gens qui ont sauvé ces hommes dans cette
catastrophe minière qu'il y a eu à Belmoral, à Val-d'Or,
il y a près de quatre ans, n'ont pas regardé, dans ce mouvement
de persévérance et dans ce geste héroïque, d'abord et
avant tout pour quel parti politique ou pour quel député ils
allaient voter à la prochaine élection. Je pense que les gestes
héroïques qui doivent être récompensés par une
institution comme la nôtre - et par le fait même par l'ensemble du
Québec - n'ont absolument rien à voir avec la partisanerie
politique. D'ailleurs, je ferai voir à cette Chambre que la plupart des
gens qui ont reçu des décorations à ce niveau, je pense
qu'on ne les retrouverait pas, justement, dans les milieux politiques. Je pense
qu'à ce niveau ceci doit faire réfléchir les gens,
à savoir qu'il faut éviter, justement, il faut résister
à cette tentation de vouloir essayer de déformer ou de rapetisser
ce projet de loi en ayant la tentation justement de soulever des points de
partisanerie politique qui auraient pour conséquence de reléguer
le projet de loi aux oubliettes, parce que je pense qu'il est important d'avoir
l'unanimité dans ce projet de loi.
Par ailleurs, M. le Président, il y a une chose qui est
extrêmement importante, en tout cas, pour un jeune parlementaire, pour un
jeune Québécois, citoyen de la terre qui a grandi dans la
région de l'Abitibi-Témiscamingue. Je pense qu'il faut faire
appel à cette notion d'État national distinct. On n'a absolument
pas à avoir honte de se donner, au Québec, une récompense
ou un ordre national du mérite québécois. Que ce soit pour
un agriculteur, que ce soit pour un mineur, que ce soit pour une
ménagère, que ce soit pour un patineur de vitesse, je pense que
le Québec doit se donner - et le Parlement du Québec est
là pour en témoigner - ses propres institutions qui
répondent de façon distincte à nos affaires, à nos
problèmes, à nos joies et à nos peines. Je pense que les
Québécois sont justement une nation différente qui se
rassemble sur bien des points. Je parlais du pacifisme tantôt, mais je
pense qu'effectivement nous devons, comme parlementaires, avoir cette
responsabilité de légiférer et de donner aujourd'hui, par
ce projet de loi 80, une action, un projet de loi qui caractérise, en
fin de compte, les gestes héroïques d'hommes ou de femmes, de
jeunes ou de vieux au Québec. On le fait en créant cet Ordre
national du Québec.
L'autre chose qui est extrêmement importante - et je reviens
là-dessus - M. le député d'Argenteuil disait tantôt
qu'un patineur de vitesse n'avait peut-être pas la compétence
justement pour siéger à un tel Ordre national du Québec,
à ce Conseil de l'ordre. Qui peut avoir la compétence, sinon
celui qui est le reflet véritable et profond du véritable visage
des Québécois et des Québécoises? Cela peut
être aussi bien un agriculteur qu'une ménagère, qu'un
patineur de vitesse, qu'un professeur d'université ou un simple
chômeur. Je pense qu'on n'a pas à tomber dans des dédales
ou dans des débats qui sont simplement l'objet ou qui réunissent
de savantes élites qui vont peut-être dire, justement, qu'il n'y a
pas d'autres gens que ceux qui ont des doctorats ou qui n'ont peut-être
pas cette qualification dite publique au Québec pour juger et pour dire
qui sera véritablement candidat ou candidate à ce mérite
de l'Ordre national du Québec.
Je pense précisément qu'il faut pousser davantage la
création de ce Conseil de l'ordre qui aura pour fonction de conseiller
le premier ministre. J'espère que ce conseil sera, non pas le reflet
d'une minorité ou d'une poignée d'intellectuels, mais beaucoup
plus le reflet fidèle de l'ensemble de la société
québécoise. J'espère que, au-delà de certaines
différences politiques, nous saurons être à la hauteur de
ce projet de loi et être capables de faire appel à ces hommes et
à ces femmes qui, dans cette diversité de l'action au
Québec, témoignent et sont le reflet fidèle de notre
société distincte et pluraliste.
Pour terminer, je dois dire que je suis naturellement extrêmement
heureux d'avoir pris part à ce débat puisque je suis convaincu
que, dans une région comme la mienne, qui représente 2,5% de la
population du Québec - et c'est peut-être le défi que je
lance à cette Chambre et aux gens qui nous écoutent - dans notre
région, les hommes et les femmes n'ont pas peur de se retrousser les
manches pour bâtir l'avenir. Je suis convaincu que nous verrons, au cours
des prochaines années, beaucoup de personnes, de citoyens et de
citoyennes, que ce soit du Témiscamingue, de l'Abitibi ou d'ailleurs...
Nous saurons les trouver dans cette terre nordique, qui a été
défrichée de peine et de misère par nos parents qui nous
ont légué un riche héritage qui fait que, grâce
à eux, je
puis par ma formation, en tout cas, siéger à titre de
représentant de Rouyn-Noranda-Témiscamingue à
l'Assemblée nationale et prendre part précisément à
quelque chose qui viendra sans aucun doute rendre un témoignage
fidèle d'une institution qui est le Parlement, et de la
société par le fait même, et récompenser ces
pionniers, ces gens qui ont bâti d'arrache-pied
l'Abitibi-Témiscamingue, comme le reste du Québec.
C'est pour cela que j'invite l'ensemble des membres de cette Chambre
à voter unanimement pour le projet de loi 80. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Gaspé.
M. Henri Le May
M. Le May: Merci, M. le Président. Je tenais à
prendre quelques minutes dans ce débat pour apporter une opinion de
plus, un appui de plus à ce magnifique projet de loi 80, Loi sur l'Ordre
national du Québec.
Je crois que c'est un projet de loi qui n'est peut-être pas le
plus important, mais qui, à la longue, marquera le plus les
Québécois en développant chez eux et en affirmant un
patriotisme qui n'a jamais été affiché, bien que
vécu.
Je remarquais que, du côté de l'Opposition, on avait
énormément peur du titre du projet de loi et, en particulier, du
mot "national" dans l'Ordre national du Québec. Le mot "national"
signifie une nation. Je ne suis pas du tout gêné de faire partie
de la nation québécoise.
Hier, j'avais le plaisir d'inaugurer les fêtes du 450e
anniversaire de l'arrivée de Jacques Cartier en accompagnant le premier
ministre et le chef de l'Opposition à l'Assemblée nationale, M.
le député de Bonaventure, et les orateurs ne signalaient pas
nécessairement le 450e anniversaire de l'arrivée de Jacques
Cartier. Plusieurs orateurs ont pris le temps d'exprimer ce qu'un peu tout le
monde pensait, à savoir qu'on fêtait 450 ans d'une nation qui
avait su garder pendant tout ce temps son originalité, qui avait su
garder ses us et coutumes, qui avait su garder sa culture. Cette fête qui
a commencé hier à Gaspé, c'est 450 ans de fierté.
C'est la fierté d'une nation. Ce n'est pas nécessairement Jacques
Cartier que l'on fête, ni même son arrivée. Je pense que
c'est tout un cheminement qui a duré 450 ans et qui devrait, d'ailleurs,
être vécu chaque jour dans l'âme et dans le coeur de tous
les participants à cette belle nation.
Cette nation québécoise ne s'est pas formée toute
seule. Bien sûr, Jacques Cartier est arrivé. Bien sûr, c'est
le berceau du christianisme, alors que Mgr de Laval acceptait d'être
évêque du Québec - dans ce temps-là du Canada entier
- quand il a pris possession de son diocèse, à Percé, en
1759. Cela a été un autre moment important dans toute l'histoire
de cette nation. Des dates nous ont marqués, nous ont
façonnés, qui ont eu un côté positif et un
côté négatif. On se rappelle 1763 - ce n'est pas
nécessaire d'en parler très longuement - alors que l'Angleterre
s'emparait de toute l'Amérique du Nord. Elle a apporté sa
civilisation. Elle a apporté une partie de sa culture. En 1776, ce fut
l'indépendance américaine qui a fait que ceux qui
n'étaient pas d'accord et qu'on a appelés les Loyalistes sont
venus chez nous. Une grande partie de ces Loyalistes se sont établis en
Gaspésie, à New-Carlisle. Ils ont participé à
l'élaboration, au façonnement, à la structure qu'on
connaît maintenant au Québec. Ils ont participé, parfois
négativement, parfois positivement, mais seule l'histoire pourra juger
de leur action.
En 1867, ce fut l'acte confédératif, la
Confédération, qui a eu ses bons côtés, qui en a
peut-être encore, espérons-le. C'est tout cela, M. le
Président, qui a façonné la nation qu'on connaît, la
nation québécoise. Il y a des Italiens, il y a des Grecs. On
représente presque tous les continents au Québec. Je pense qu'il
faut être fier de cela. Il ne faut pas avoir peur de s'ouvrir au monde.
Certains esprits aigus verront, dans ce projet de loi, la promotion du Canadien
français pure laine. Le Québec, la nation
québécoise, bien sûr, c'est la majorité, mais ce ne
sont pas uniquement des Canadiens français. Je suis Canadien
français et je suis très fier de l'être, mais je suis
prêt à m'ouvrir à tous ceux qui voudront venir nous aider
à continuer de façonner le Québec, à continuer de
le faire vieillir, de le rendre mature. On est prêt à les
accueillir.
Pendant ces 450 ans, il y a eu des hommes et il y a eu des femmes qui
ont participé plus que d'autres, soit parce qu'ils ont eu la chance,
soit parce qu'ils en ont mis plus de coeur à s'occuper d'une nation
qu'à s'occuper de leurs choses personnelles. Ils ont eu la chance, ces
hommes et ces femmes, de nous donner le Québec d'aujourd'hui. Ce sont
ces hommes et ces femmes que dans ce projet de loi on veut honorer. Parfois, ce
sera à titre posthume, parfois, ce seront des personnages vivants. Il y
en a des Québécois et des Québécoises qui, chaque
jour, façonnent le Québec et qui mériteraient qu'on le
signale, qu'on les honore. C'est exactement là le but de ce projet de
loi. C'est une semence patriotique. Le patriotisme ne s'adresse pas seulement
aux Canadiens français. Cela s'adresse à tous ceux qui habitent
le Québec et qui sont Québécois. Le patriotisme n'est pas
une affaire de tête, c'est une affaire de coeur. Cela ne se raisonne pas.
Aimer son pays, aimer son drapeau, ne se raisonne pas. On acela dans
les tripes. Les gens qui ont vraiment fait de la nation
québécoise ce
qu'elle est aujourd'hui méritent qu'on les honore.
(12 h 40)
Bien sûr, certains députés de l'Opposition ont de
grandes craintes quant à l'impartialité, au choix de ceux qui
feront partie de cet ordre. M. le député d'Argenteuil avait
raison quand il disait que le climat avait grandement changé en Chambre.
C'est vrai. Beaucoup plus impartial, beaucoup moins partisan. Le gouvernement,
depuis qu'il est au pouvoir - c'est facile de le constater par des milliers
d'exemples - a essayé d'enlever le plus possible de partisanerie parce
que nous sommes tous ici pour mener à bien les destinées du
Québec. M. le député d'Argenteuil avait raison quand il
disait que le climat avait grandement changé, et pour le mieux.
Je crois que, comme représentants du peuple, nous sommes
maintenant mûrs pour administrer un pareil projet de loi, pour qu'enfin
on puisse mettre sur un piédestal -ne nous gênons pas pour le dire
- ceux qui ont fait de notre belle nation ce qu'elle est aujourd'hui. Je suis
convaincu que ceux qui sont encore en désaccord actuellement,
après les 63 jours de fêtes que nous connaîtrons, que ce
soit Québec 84 ou Gaspé 84 ou Percé 84, tout le monde sera
convaincu qu'on a des hommes, des femmes, chez nous qui nous façonnent
à tous les jours, qui méritent d'être honorés et
qu'il faut signaler sur la place publique. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la
Justice, votre droit de réplique.
M. Pierre-Marc Johnson (réplique)
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je remercie tous mes
collègues qui ont fait partie de ce débat qui aura
été, en termes de temps, extrêmement raisonnable. Une
première remarque touche ce qui est peut-être plus de l'ordre d'un
détail dans l'argumentation qu'autre chose mais que je ne pouvais pas ne
pas souligner. Je ferai remarquer que, pour l'enssentiel, lors de cette fin de
session, voici la seule pièce législative qui n'est pas d'ordre
économique, c'est vrai. Mais tout n'est pas qu'économie dans la
vie. Il y a, à l'occasion, d'autres choses. S'il est vrai que la
création de l'Ordre national du Québec ne nous fait pas anticiper
une augmentation des statistiques sur le produit intérieur brut ou
à l'égard de la création d'emplois, je pense qu'il n'en
demeure pas moins un objet dont on peut saisir tout à fait normalement
et avec une certaine fierté l'Assemblée nationale du
Québec.
Je retiens de ce débat pour l'essentiel que nos collègues
d'ici comme d'en face, pour l'adoption lors de l'étude du principe du
projet de loi, nous ont signifié leur accord, fût-il
exprimé avec quelque réserve ou quelque appréhension de la
part de l'Opposition, comme j'ai pu le remarquer dans au moins deux des
interventions que nous avons eues de l'Opposition. Le reste relève, pour
l'essentiel, des modalités. Mais, à un moment donné, en
refaisant un projet de loi au niveau des modalités, est-ce qu'on ne
remet pas aussi en cause un certain nombre de principes? Nous avons
tenté, depuis quelques jours - je pense que nos amis d'en face le savent
- d'en arriver à trouver une forme de consensus quant à certaines
garanties que devait contenir ce projet de loi au niveau du processus
nominatif. Sans revenir sur la longue argumentation, notamment, du
député d'Argenteuil, je dirai qu'il y a, dans son argumentation,
un certain nombre d'éléments que je voudrais relever, notamment,
quant au Conseil exécutif et son pouvoir.
Ce projet de loi, M. le Président, comme vous le savez, confie au
pouvoir exécutif dans le contexte, à toutes fins utiles,
l'initiative des nominations. Le conseil, qui est de nature consultative, donne
son avis et nous prévoirons que les avis à l'égard des
personnes nommées et qui seront nommées et qui sont favorables
puissent être rendues publiques d'une façon ou d'une autre
probablement par la technique de l'annexe au décret. Cependant, je dirai
que le pouvoir exécutif, dans la vie du Québec, a quelque chose
d'un peu particulier qu'on ne retrouve peut-être pas dans les autres
provinces. Cela provient précisément du fait que notre
territoire, depuis que les premiers Européens ont mis pied sur ce
continent, a été façonné de façon
administrative ou politique à l'image qu'ils avaient d'eux-mêmes
et de ce qu'ils voulaient devenir. Le territoire du Québec a
porté bien des noms; il s'est appelé Amérique, il s'est
appelé, par la suite, Canada, il s'est appelé Bas-Canada, il
s'est appelé Québec et province de Québec. Ce territoire,
justement, est cet endroit d'une concentration géographique d'une
société distincte, et ce, indépendamment des
régimes constitutionnels à l'intérieur desquels nous avons
vécu. Le dernier, cependant, en date de 1982, nie spécifiquement
cette réalité, à toutes fins utiles, par l'identification
du Québec à une province comme les autres et par l'introduction
des conditions de nivellement législatif qu'implique une Charte des
droits et libertés de la personne applicable d'un bout à l'autre
du Canada.
Cependant, la réalité de 450 ans d'histoire est toujours
là. Les habitants de ce territoire, les citoyens de ce territoire se
sont toujours considérés, à différents
égards, qu'ils aient été fédéralistes ou
pas, unionistes
ou pas, à l'époque de l'Acte d'union, comme faisant partie
d'une société distincte. Cette société distincte a
eu ses malaises plus ou moins fréquents, notamment, des malaises
reliés à des différences culturelles et linguistiques sur
son propre territoire, sans compter ce malaise permanent qui sera là
encore longtemps pour notre peuple: celui d'être une minorité sur
ce continent et de représenter à peine 2% de sa population. Je
reviens donc à l'argument à l'égard du Conseil
exécutif. Dans notre histoire et dans l'histoire de nos institutions, le
rôle de l'Exécutif a toujours été perçu comme
particulier, car, dans le système de droit britannique qui nous gouverne
depuis 1761, la couronne britannique - qui est devenue, par son prolongement,
du gouverneur général et des lieutenants-gouverneurs,
peut-être un peu plus atrophiée sur le plan de son pouvoir
réel a toujours représenté une cible dans l'ensemble des
efforts qui ont été faits sous tous les régimes
constitutionnels d'une plus grande libéralisation du régime et
d'une capacité pour les citoyens de ce territoire d'assumer de plus en
plus de responsabilités, notamment une responsabilité politique.
Je m'en voudrais ici de ne pas mentionner qu'il y a 150 ans, dans les jardins
de McDonnell à Montréal, un groupe d'avocats, d'hommes d'affaires
et de littéraires d'origine écossaise, irlandaise et
canadienne-française, parmi lesquels on retrouvait évidemment
Viger, Duvernay, Lafontaine et quelques autres, qu'un groupe de ces personnes
revendiquait quoi, à toutes fins utiles? Ces gens ne voulaient pas
créer seulement la Société Saint-Jean-Baptiste,
société nationale. Ils revendiquaient ce qu'on appelait à
l'époque le "self-government". C'est là-dessus qu'ils ont fait
leur bataille et, encore une fois, de façon assez remarquable,
au-delà des différences culturelles et linguistiques de ces
citoyens du territoire du Québec ou du Bas-Canada de l'époque. Ce
qu'ils revendiquaient, c'était le "self-government". Il y avait une
très grande disparité, une très grande pluralité
des origines, des points de vue, des visions des choses parmi ces hommes. Ce
combat était celui du pouvoir exécutif responsable par opposition
au pouvoir exécutif soumis à l'arbitraire de la couronne sur le
territoire. (12 h 50)
Cette tradition, M. le Président, a été
perpétuée après l'adhésion du Québec
à la Confédération, en 1867. Cette tradition est dans nos
moeurs. Je vois rarement, avec tout le respect que j'ai pour le pays qui est
l'Angleterre, à moins que nous ne recevions le Haut-Commissaire de
Grande-Bretagne au Canada ou un représentant du gouvernement
britannique, je vois rarement des "Union jacks" flotter sur notre territoire.
Ce combat, cette incarnation d'un combat de ce peuple spécifique,
à travers sa contestation du rôle de la couronne britannique,
s'est inscrit dans l'évolution du rôle du lieutenant-gouverneur,
notamment sur notre territoire. Qu'on pense, par exemple, aux pouvoirs de
réserve et de veto qui ont été, à toutes fins
utiles, annihilés. Qu'on pense, par exemple, au fait que le
Québec pendant des années s'est inspiré du jugement dans
la cause de Maritime Bank versus the King ou the Queen - je ne me souviens pas
- et qui avait établi le principe qu'il y avait au Canada onze couronnes
et non pas une couronne. Ces combats entre l'Exécutif formé des
élus et les représentants du pouvoir impérial depuis 1760,
et même encore de nos jours -évidemment, ces combats ont pris une
nature un peu symbolique, il faut le reconnaître -font partie de
l'essence même de ce qu'on a mis, nous, comme peuple, dans l'importance
du pouvoir exécutif, contrairement à ce qu'on retrouve dans un
certain nombre d'autres provinces où le lieutenant-gouverneur est
perçu à la fois comme le représentant de la couronne,
à la fois comme ce bras un peu particulier dans le système
fédéral canadien d'un pouvoir théorique de l'État
fédéral par le pouvoir de réserve et de veto, mais il est
perçu comme le chef de l'État. Or, chez nous, même si on
reconnaît notre système, indépendamment des personnes qui
ont occupé ce poste et qui ont toutes été remarquables, il
faut le dire, chez nous, dans notre façon de voir les choses depuis un
temps plus que centenaire, nous avons constamment affirmé cette
espèce de moulage que nous considérons comme différent
à l'égard du rôle du lieutenant-gouverneur qui n'est pas
perçu de façon générale comme étant le chef
de l'État. Nous avons dévolu à l'égard du Conseil
exécutif et à l'occasion dans notre histoire, à
l'égard de la personne du premier ministre les attributs protocolaires,
les attributs symboliques, notamment au niveau des relations internationales et
interparlementaires, qui sont normalement dévolus au chef de
l'État; nous les avons dévolus au chef de l'Exécutif.
Il y a des raisons à cela, M. le Président, sur lesquelles
je n'insisterai pas plus longtemps, qui sont fondamentales dans notre
appréciation du rôle de l'Exécutif dans notre
société de façon générale depuis des temps
immémoriaux, mais aussi qu'on revoit dans cette nécessité
de maintenir un pouvoir d'initiative à l'Exécutif en tant que tel
dans ce processus.
Par ailleurs, je suis extrêmement sensible aux propos du
député d'Argenteuil quand il parle du consensus. Il est vrai que
notre société, comme la plupart des autres sociétés
occidentales, ne vit plus dans l'ère des grands consensus. Nous avons
peut-être l'impression d'avoir vécu certaines périodes de
notre histoire à l'ère des grands consensus politiques. Il y a,
je suis convaincu, des
consensus qui ne sont pas ébranlés sûrement pas de
façon fondamentale - dans notre société. S'il est vrai
qu'autour du quotidien, de la conjoncture, de l'actualité politique,
notre société connaît un ébranlement à
l'égard de la formation des consensus, s'il est vrai que même
certains enjeux majeurs quant à l'avenir du Québec ne font pas
l'objet d'un consensus, notamment au niveau des formations politiques, il est
également vrai qu'il y a un certain nombre de valeurs d'humanité,
à la fois dans notre histoire comme dans la projection de l'idée
qu'on s'en fait de part et d'autre, qui, elles, font l'objet d'un miminum de
consensus.
Je pense ici, M. le Président, à cette recherche de
l'excellence, à cette recherche d'une société constamment
tolérante, à cette affirmation de la nécessité de
la liberté des individus autant que de la collectivité que nous
formons sur le plan de ces institutions politiques. Par ailleurs, le fait que
nous formions une société distincte - encore une fois,
indépendamment de la structure juridique et constitutionnelle à
laquelle nous appartenons, à laquelle nous avons souscrit ou pas -
diverse, pluraliste, complexe sur un territoire immense, avec une population
peu nombreuse, néanmoins, cela fait encore partie, je crois, d'un
certain nombre de consensus de base dans cette société. C'est
dans ce contexte qu'il faut voir la création de l'Ordre national. C'est
dans ce contexte qu'il faut accepter, je crois, que cet équilibre, si on
peut en prévoir certains des mécanismes, pour qu'ils soient
respectés à la satisfaction des deux côtés de la
Chambre, sera engendré par la réalité elle-même.
Je vois mal un gouvernement, celui-ci ou celui qui pourrait lui
succéder dans quatre ans, dans cinq ans ou autrement, ne pas
procéder à des nominations qui font, pour l'essentiel, l'objet
d'un consensus car, à ce moment, l'Exécutif lui-même se
mettrait dans une position - je ne dirais pas intenable, mais difficile
à soutenir. Je crois que ce projet de loi, à cause des combats
pour le pouvoir exécutif que nous avons livrés comme
société depuis 150 ans et plus, s'il peut contenir certaines des
garanties que j'évoquais tout à l'heure, pour l'essentiel, doit
accepter que cet équilibre quant à l'information, quant à
la composition et à la permanence d'un certain état d'esprit
inscrit dans cette loi, découlera des attitudes
équilibrées de l'Exécutif. Ce n'est pas parce qu'il y a
une conjoncture et où c'est très clair qu'il y a très peu
de consensus sur des choses d'actualité en ce moment qu'il faut en soi
remettre en question toute cette notion de responsabilité, une
façon d'assumer de façon responsable par le Conseil
exécutif ses responsabilités que nous devons, dis-je, remettre
tout cela en question.
Pour ces raisons, M. le Président, je vous demanderai d'appeler
l'adoption de l'étude du principe du projet de loi et je souhaite que
nos échanges en commission parlementaire nous permettent
d'élucider un certain nombre de choses avec nos collègues. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Le principe du projet de
loi 80, Loi sur l'Ordre national du Québec, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission des institutions
M. Biouin: M. le Président, je propose donc que ce projet
de loi soit maintenant envoyé à la commission des institutions,
qui sera évidemment présidée par un président de
séance. Je précise tout de suite qu'à la suite de
discussions que nous avons eues avec nos vis-à-vis, cette commission
siégera au salon rouge, c'est-à-dire à la salle du Conseil
législatif, à compter de 15 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette double motion
est-elle adoptée ainsi que l'avis?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
M. Blouin: Très bien. M. le Président, je propose
donc que nous suspendions nos travaux jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont
suspendus jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 58)
(Reprise de la séance à 15 h 5)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît! Vous pouvez vous asseoir. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Biouin: M. le Président, nous discutons maintenant de
la Loi sur la Communauté urbaine de Québec. À cet
égard, je vous demande donc d'appeler l'article 8) de notre feuilleton,
s'il vous plaît!
Projet de loi 92 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Jolivet): En effet, c'est l'adoption
du principe du projet
de loi 92, Loi modifiant la Loi sur la
Communauté urbaine de Québec et d'autres dispositions
législatives. La parole est au ministre des Affaires municipales.
M. Alain Marcoux
M. Marcoux: M. le Président, ce projet de loi, qui modifie
la Loi sur la Communauté urbaine de Québec, correspond à
l'esprit général avec lequel j'ai abordé mon mandat au
ministère des Affaires municipales depuis trois mois.
Un des messages que m'ont transmis les élus municipaux est qu'ils
ne souhaitaient pas de grande réforme des lois actuellement,
après avoir vécu la réforme sur la fiscalité
municipale, la Loi sur l'aménagement et la Loi sur la démocratie
municipale, mais qu'ils souhaitaient plutôt des ajustements aux lois
existantes pour les améliorer, pour les perfectionner.
C'est dans cet esprit que j'ai accueilli favorablement les
représentations qui m'ont été faites par des membres de la
Communauté urbaine de Québec pour modifier la Loi sur la
Communauté urbaine de Québec. Une des premières
modifications qui ont été demandées et que ce projet de
loi propose est de faire en sorte que le président de la
Communauté urbaine de Québec puisse être un permanent
à temps plein, élu par les membres du conseil de la
Communauté urbaine de Québec.
Je crois que c'est ainsi reconnaître, en rendant le poste de
président de la Communauté urbaine de Québec permanent,
l'importance de plus en plus grande, l'importance croissante de la
Communauté urbaine de Québec dans la vie démocratique,
dans la vie sociale, dans la vie économique de la région
métropolitaine de Québec. Simplement pour donner une illustration
de l'importance de cette vie, qui justifie amplement le fait d'avoir un
président à temps plein, je voudrais donner quelques exemples de
compétences qui relèvent de la Communauté urbaine de
Québec.
La Communauté urbaine de Québec a notamment
compétence dans les matières suivantes: L'évaluation
foncière, qui touche l'ensemble des citoyens de la communauté
urbaine, au niveau de la confection, de l'émission, du
dépôt et de l'indexation des rôles d'évaluation; au
niveau du recensement, de l'établissement de fonds industriels, de la
promotion industrielle, de la gestion des parcs industriels, de la promotion
touristique, de l'uniformisation et de la réglementation de la
circulation, de la synchronisation des systèmes de contrôle
mécanique de la circulation sur les grandes voies de communication et
les rues intermunicipales, la disposition des ordures, l'assainissement des
eaux sur le territoire de la communauté, l'entretien des égouts
collecteurs des stations de pompage et des usines d'épuration des eaux;
l'établissement de systèmes intermunicipaux d'eau potable; les
loisirs à caractère intermunicipal; la construction de logements
à loyer modique; le transport en commun; l'aménagement du
territoire. J'ai énuméré rapidement, M. le
Président, seize responsabilités qui relèvent de la
Communauté urbaine de Québec. Pour l'illustrer - je pense que le
budget indique bien son importance également - la Communauté
urbaine de Québec a un budget de 42 500 000 $, compte 220
employés permanents réguliers et regroupe treize
municipalités.
C'est ainsi dire que la Communauté urbaine de Québec,
à chaque jour, a des décisions à prendre qui concernent,
dans leur vie quotidienne, l'ensemble des citoyens de la communauté
urbaine et que, compte tenu de l'importance croissante de ses
responsabilités dans la vie des citoyens, il était normal que
nous accédions à cette demande, à savoir que le
président de la Communauté urbaine de Québec devienne
permanent.
Un autre motif qui n'est pas sans intérêt et qui justifiait
l'acceptation de cette revendication de la Communauté urbaine de
Québec d'avoir un président permanent, c'est que le
président permanent, pourra ainsi mieux jouer son rôle, je dirais,
de concertation, peut-être d'arbitre à l'occcasion, de
conciliateur entre les intérêts divergents des
municipalités membres de la Communauté urbaine de
Québec... Cela permettra d'éviter, à l'occasion, que le
maire - parce que la situation actuelle, c'est que quelqu'un est à la
fois maire d'une municipalité ou conseiller d'une municipalité et
président de la Communauté urbaine de Québec - puisse
être en conflit d'intérêts non pas par rapport à
l'intérêt personnel, mais par rapport à
l'intérêt des citoyens de sa ville, de sa
municipalité, et les intérêts d'ensemble de la
Communauté urbaine de Québec. Le président de la
Communauté urbaine de Québec devenant permanent, laissant son
siège de représentant des élus dans une
municipalité, il sera, on pourrait dire, au-dessus de la
mêlée et cela permettra de favoriser certainement une bien
meilleure concertation, une bien meilleure conciliation des
intérêts divergents normaux de chacune des municipalités de
la Communauté urbaine de Québec. C'est la première demande
qui nous a été faite et à laquelle nous
accédons.
À cette occasion également, il nous a été
demandé de modifier la composition de l'exécutif de la
Communauté urbaine de Québec qui, actuellement, est
composé de sept personnes: trois nommées par la ville de
Québec, trois représentants des villes moyennes de la
communauté urbaine, soit Charlesbourg, Beauport et Sainte-Foy, et un
représentant des municipalités de banlieue
mais désigné par le conseil de la communauté. C'est
actuellement la composition de cet exécutif.
J'ai eu des représentations de la part des neuf petites villes de
banlieue de la communauté urbaine disant qu'il serait normal que leur
représentant à l'exécutif soit élu, nommé
par elles, dans le but d'assurer un meilleur équilibre entre la
participation de la ville de Québec, qui aura toujours une importance
primordiale, capitale, à la Communauté urbaine de Québec,
celle, également très importante, des trois villes moyennes:
Sainte-Foy, Charlesbourg et Beauport, et, d'autre part, la participation de ces
neuf petites municipalités de banlieue.
C'est pourquoi, face aux représentations qui m'ont
été faites, j'ai recommandé au gouvernement, qui l'a
accepté, que la composition de l'exécutif de la communauté
soit modifiée à cette occasion pour qu'en plus du
président permanent qui sera élu par l'ensemble du conseil de la
communauté, en plus des trois représentants nommés par la
ville de Québec, son maire plus deux conseillers, et des trois maires
des villes moyennes de la communauté urbaine, Charlesbourg, Sainte-Foy
et Beauport, les huitième et neuvième membres de
l'exécutif soient deux représentants élus par les neuf
maires des petites municipalités de banlieue, ce qui fera que dans
l'exécutif composé de neuf personnes, Québec aura trois
représentants, les trois villes moyennes chacune leur maire et les neuf
municipalités de banlieue auront deux personnes pour les
représenter à cet exécutif. Ceci devrait être de
nature à accroître - j'y reviendrai tantôt - l'information,
la qualité de l'information transmise à ces municipalités
de banlieue, la qualité de leur participation à la vie de la
Communauté urbaine de Québec.
À cette même occasion, et ceci davantage a la suggestion du
ministère des Affaires municipales mais complètement
accepté par la Communauté urbaine de Québec, nous
profitons de ce projet de loi pour transposer à la Communauté
urbaine de Québec ce qui se fait déjà à la
Communauté urbaine de Montréal du point de vue de la
création, de l'existence de commissions permanentes composées de
membres du conseil et spécialisées dans certains secteurs
d'activité. Avec l'adoption du projet de loi 92, on prévoit la
création de trois commissions permanentes: la commission de
l'aménagement et de l'environnement; la commission du transport en
commun; la commission de l'évaluation, des finances et du
développement économique. Ces trois commissions, composées
de membres du conseil de la communauté, de membres élus par le
conseil de la communauté siégeront en public, auront à
répondre aux questions du public concernant les secteurs
d'intérêt, concernant l'aménagement, le transport en
commun, le développement économique de la Communauté
urbaine de Québec. La création de ces trois commissions
permanentes sera de nature à permettre davantage au grand public de la
communauté urbaine de participer à la définition des
orientations de la Communauté urbaine de Québec. Voilà un
autre changement important qui est proposé dans ce projet de loi.
À cette même occasion, à cause de la création
d'un poste permanent comme président de la communauté urbaine,
nous sommes amenés à changer quelque peu la nature, la
composition du Conseil de la communauté urbaine, qui aura encore onze
représentants de la ville de Québec, en tenant compte des
facteurs de population, quatre représentants de la ville de Beauport,
quatre représentants de la ville de Sainte-Foy et quatre
représentants de Charlesbourg également, plus un
représentant de chacune des neuf petites municipalités de
banlieue. On verra s'ajouter le président de la communauté
urbaine qui sera un des membres, le 32e membre de ce conseil de la
Communauté urbaine de Québec.
Avant de revenir sur certains points fondamentaux de ce projet de loi,
je voudrais indiquer que nous avons profité de l'occasion pour
accéder à la demande de la Communauté urbaine de
Québec de permettre le regroupement d'achats des municipalités
membres de la communauté urbaine qui procéderont, selon les
règles habituelles d'appels d'offres publics, mais les
municipalités de la communauté urbaine pourront regrouper leurs
achats, ce qui sera de nature à permettre des économies
d'échelles, d'avoir de meilleurs prix par ce regroupement d'achats. Ce
regroupement d'achats a été depuis longtemps
expérimenté au sein du gouvernement. Depuis longtemps, il est
expérimenté et vécu par les commissions scolaires. Le
monde municipal, de plus en plus, souhaiterait faire des regroupements
d'achats.
La communauté urbaine nous a demandé d'avoir ce pouvoir
avec ses municipalités membres. À l'occasion de l'adoption du
projet de loi, nous accédons à cette demande. Nous en profitons,
en somme, pour modifier La Loi sur la Communauté urbaine de
Québec sur d'autres points plus particuliers afin de permettre que
l'exécutif de la communauté urbaine puisse accepter des contrats
jusqu'à 50 000 $ plutôt que 25 000 $ comme auparavant et d'autres
changements mineurs qui rentrent dans une perspective d'ajustement pour rendre
plus efficace la communauté urbaine et faciliter son travail.
Tantôt, j'ai parlé de l'importance qu'a la
communauté urbaine, en énumérant rapidement ses seize
champs de compétence. C'est donc dire toute l'importance qu'a la
communauté urbaine pour les municipalités qui en sont
membres et pour les citoyens de ces municipalités. C'est la raison pour
laquelle il nous a paru important de profiter de l'acceptation d'un
président permanent de la communauté urbaine pour
rééquilibrer les forces de participation dans la
communauté, particulièrement au sein de l'exécutif, parce
que ces communautés urbaines, en particulier celle de Québec ont
une fonction importante de concertation régionale. Mais pour qu'un
esprit régional se crée dans une communauté urbaine, il
faut qu'un certain nombre de conditions soient réunies afin de contrer
l'individualisme ou l'esprit qui met d'abord en lumière les
intérêts particuliers d'une communauté ou d'une
municipalité ou l'isolement.
Il y des conditions de base qui doivent être remplies pour
faciliter la création de l'esprit de concertation. À notre point
de vue, les conditions de base sont de faire partie d'un environnement urbain
auquel les membres de la communauté se rattachent ou s'identifient. Il
faut que, de plus en plus, les municipalités puissent s'identifier
à la communauté urbaine. En ce sens, les neuf petites
municipalités de banlieue nous ont fait valoir que, n'ayant pas de
représentant élu par elles à l'exécutif et les
séances du conseil de la communauté étant très peu
fréquentes et très brèves, cela n'était pas de
nature à les impliquer concrètement dans l'évolution de la
communauté. En ce sens, il nous a paru qu'en modifiant la composition de
l'exécutif, on réalisait ici une condition de base qui
permettrait aux municipalités de s'identifier de plus en plus à
la communauté urbaine.
Dans ces conditions de base, pour que soit exercée la
concertation régionale, il nous a paru important aussi que soit
représenté aux instances décisionnelles de la
communauté urbaine, en fonction de son importance relative et de ses
caractéristiques particulières, chaque groupe qui compose la
communauté urbaine. Or, cette participation aux instances
décisionnelles est très importante. On sait que, dans la
réalité des choses que lorsqu'un exécutif se réunit
chaque semaine et qu'un conseil d'une communauté se réunit
quelques fois par année, c'est évidemment
l'exécutif qui constitue le lieu de décision très
important, le lieu de décision hebdomadaire sinon quotidien. (15 h
20)
En ce sens, la participation de chacun des groupes ou des sous-groupes
d'une communauté est essentielle au sein même de cet
exécutif. Dans les conditions de base, il nous apparaît important
que tous lés groupes en présence puissent avoir le maximum et la
meilleure information possible sur les activités de la
communauté. Il nous est apparu, pour en avoir discuté avec les
membres de la communauté, qu'on n'avait pas atteint toutes les
étapes qu'on aurait dû franchir jusqu'à maintenant pour
permettre que tous les groupes de la communauté urbaine soient
informés le plus complètement possible des dossiers de la
communauté et du sens des décisions.
Il y a également une autre condition de base pour faciliter cette
concertation régionale, c'est de pouvoir participer à la
définition des orientations de la communauté et à
l'élaboration de ses politiques. Encore là, le conseil de la
communauté est beaucoup plus souvent appelé à
entériner ou à ratifier des orientations proposées par
l'exécutif. Là aussi, il faut voir toute l'importance de
l'exécutif dans la proposition des orientations de la communauté.
Encore là, il y a un argument pour associer davantage tous les groupes
qui composent cette communauté. Evidemment, dans les conditions de base
de cette participation à cette concertation régionale, il faut
que chacun paie sa quote-part. Mais cela, la loi l'assurait déjà
et continuera de l'assurer.
En somme, les changements proposés à la Loi sur la
Communauté urbaine de Québec ont fondamentalement deux objectifs:
le premier, c'est d'assurer, je dirais, une plus grande transparence, une plus
grande participation du grand public de la communauté urbaine aux
orientations de la Communauté urbaine de Québec à travers
la création des trois commissions permanentes composées non
seulement des membres de l'exécutif mais des membres du conseil de la
communauté et l'autre grand objectif est d'élargir la
participation des petites villes de banlieue aux instances
décisionnelles dans le but fondamental de faciliter une
amélioration de la concertation, une amélioration de la
consultation, une amélioration de la participation aux instances
décisionnelles régulières de la communauté. D'autre
part, dans cette perspective de maintenir toute son importance au conseil de la
communauté, nous proposons que le président du conseil de la
communauté soit évidemment un élu et que ce ne soit pas le
président de la communauté urbaine qui, lui, deviendra permanent
après avoir été désigné par l'ensemble du
conseil. C'est dire que nous ne dévalorisons pas du tout le rôle
du conseil de la communauté. Au contraire, nous accroissons son
importance puisque c'est lui qui formera ou composera les trois commissions
permanentes. Ce sont les membres de ce conseil qui siégeront aux
commissions permanentes et qui siégeront en public sur des dossiers
aussi majeurs que le transport en commun, l'aménagement et le
développement économique de Québec. Nous ne diminuons en
rien le rôle du conseil de la communauté. Au contraire, nous
accroissons son rôle. Je pense que nous faisons la preuve qu'il est
possible d'accroître le rôle et
l'importance du conseil de la communauté urbaine tout en
accroissant le rôle et l'importance de l'exécutif de la
communauté urbaine en permettant un meilleur équilibre dans la
participation de tous les éléments de la Communauté
urbaine de Québec à son avenir, compte tenu de l'importance des
dossiers qui lui sont confiés. Que ce soit concernant l'assainissement
des eaux, le transport en commun, l'évaluation, le développement
touristique, le développement économique, la gestion des parcs
industriels, on voit simplement par cette énumération que ce sont
des dossiers majeurs. On ne peut pas imaginer que, de façon
régulière, des parties importantes de cette communauté ne
soient pas associées aux décisions.
Évidemment, je comprends bien que ce seront des changements quand
même importants à vivre pour les membres de la communauté,
mais compte tenu des consultations que j'ai menées avec l'ensemble des
parties en cause, je suis convaincu que pour l'essentiel ces changements
reçoivent et recevront un appui positif. Je dirais que les
modalités de fonctionnement de la Communauté urbaine de
Québec accroîtront à la fois l'aspect démocratique
de cette communauté, sa transparence dans l'étude, l'analyse des
dossiers et dans les décisions, surtout la transparence dans les effets
de ces décisions sur chacune des parties qui composent la
communauté urbaine. En même temps, ces changements permettront
d'atteindre ce que visent, je pense, tous les membres de la communauté -
je l'ai constaté lors de mes rencontres avec eux - à savoir une
meilleure concertation régionale. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laprairie.
M. Jean-Pierre Saintonge
M. Saintonge: Merci, M. le Président. Brièvement,
sur l'adoption du principe du projet de loi 92, Loi modifiant la Loi sur la
Communauté urbaine de Québec et d'autres dispositions
législatives.
Je tiendrais à faire remarquer d'abord que le projet de loi 92
modifie la Loi sur la Communauté urbaine de Québec mais modifie
également la Loi sur la Communauté régionale de
l'Outaouais, la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal de
même que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Le début de mes propos portera essentiellement sur le fait que
nous nous retrouvons aujourd'hui, le 19 juin, si je ne m'abuse, à la
toute fin de la session, et je ferai remarquer au ministre des Affaires
municipales qu'encore une fois, malheureusement - je pense que je ne puis
passer cette remarque sous silence - le fait que nous discutons du projet de
loi 92 qui, de l'aveu même du ministre, a une certaine importance, une
importance relativement remarquable, d'après ce que j'ai pu comprendre,
puisque cela va améliorer sensiblement la situation des membres de la
communauté urbaine...
Mais, encore une fois, le projet de loi a été
présenté le 14 juin dernier. Cela ne fait même pas une
semaine. C'était jeudi de la semaine dernière. C'est un projet de
loi qui contient 54 articles et qui, en soi, a une teneur importante. Il ne
s'agit pas de quelques articles seulement. Nous sommes à discuter
aujourd'hui même de ce projet de loi sans avoir permis à
l'Opposition de l'analyser aussi fondamentalement qu'on l'aurait
souhaité, sans nous permettre de faire les consultations
nécessaires auprès des différentes villes qui sont membres
de la Communauté urbaine de Québec. Celle-ci comprend quatre
villes principales, neuf villes de banlieue et d'autres villes qui s'ajoutent
sur des points particuliers.
Donc, c'est un projet de loi qui peut être important pour
plusieurs municipalités. Mes confrères de l'Opposition et
moi-même aurions aimé pouvoir nous attarder davantage sur
l'étude du projet de loi et tenter d'en discuter d'une façon plus
éclairée après avoir fait les consultations
nécessaires auprès de l'ensemble des membres de la
Communauté urbaine de Québec. Toutefois, considérant
l'urgence de la situation, l'Opposition a accepté que ce projet de loi
soit discuté. Nous avons accepté qu'on puisse même
l'adopter avant la fin de la session.
Je dois dire immédiatement qu'en principe, nous sommes d'accord
avec la ligne générale du projet de loi, après l'analyse
que nous avons pu en faire dans le court laps de temps qui nous a
été accordé et après avoir fait certaines
vérifications mineures auprès des personnes
intéressées par les modifications apportées. On nous
disait que ce projet de loi apportait effectivement des améliorations
à la situation actuelle.
Dans mes propos, je voudrais également discuter de certains
points du projet de loi 92 présentement à l'étude. Le
premier point concerne, évidemment, la question de la présidence:
il y aura un président permanent pour la communauté urbaine. Je
pense que c'est un point important pour la communauté urbaine, lequel a
été souligné par le ministre. C'est un changement majeur.
C'est aussi un changement qui, considérant la tâche à
être assumée par le président et considérant
également la lourdeur de cette tâche, nécessite, pour
permettre au président d'être plus efficace d'une certaine
façon, un détachement de certaines responsabilités qu'il
aurait pu détenir en vertu d'un mandat dans une autre
municipalité. Qu'on le détache de ses fonctions municipales et
qu'il soit affecté exclusivement à sa tâche de
président.
De ce côté, je pense que c'est une
solution acceptable à apporter au poste de président. Je
pense que, dans l'ensemble de la communauté, elle recevrait
l'assentiment de tout le monde. Évidemment, comme le ministre l'a
mentionné, cela pourra assurer, lors des débats qui seront
soulevés, une certaine neutralité de la part de la
présidence. Effectivement, je pense que cela va permettre une discussion
beaucoup plus détendue sur certains sujets puisque le président
ne pourra pas se trouver devant des situations où l'intérêt
de sa propre municipalité pourrait être en jeu par rapport
à celui de la communauté urbaine. Dans ce sens-là, je
pense que, si on veut parler de notoriété, c'est une solution
qui, de ce point de vue, est valable en soi et qui mérite
également notre assentiment. (15 h 30)
Un point, cependant, M. le Président, et c'est peut-être le
seul point un peu négatif, si on peut dire, du projet de loi et il
pourra aussi être discuté lors de l'étude article par
article, c'est toute la question de l'augmentation du nombre des membres du
comité exécutif qui passera de sept à neuf membres.
Actuellement, les villes de banlieue peuvent avoir et ont effectivement un
représentant qui est nommé par l'ensemble des membres de la
communauté. Dans le projet présenté par le ministre, pour
ce qui est de la composition du conseil, la ville de Québec aura
maintenant trois représentants d'office, statutairement, en vertu de la
loi, et certaines autres municipalités, ce qu'on peut appeler les
grandes villes, c'est-à-dire Beauport, Charlesbourg et Sainte-Foy,
auront obligatoirement un représentant. Donc, comme je l'ai
mentionné, la ville de Québec aura trois représentants, un
représentant officiel plus deux autres.
Le problème, la pierre d'achoppement, la discussion majeure qui
nous concerne dans ce projet de loi, porte sur la représentation des
autres municipalités, des villes de banlieue, qui auront droit à
deux représentants au conseil de la communauté, qui participeront
à l'élection de deux représentants, qui verront à
élire les membres qui les représenteront. Là-dessus, j'ai
une réserve importante et je sais que mon collègue, le
député de Louis-Hébert, en fera mention tantôt. Il
reste qu'on veut tenter d'établir un certain équilibre dans le
processus de la représentation au sein du comité exécutif.
Dans ce cadre-ci, il reste quand même que nous devons souligner au
ministre qu'il y a une municipalité qui se retrouve, d'une certaine
façon, en infériorité par rapport à d'autres
municipalités. C'est la ville de Sainte-Foy qui, suivant les
représentations que j'ai reçues, acquitte, finalement, 22% de la
note de la communauté urbaine et ce faisant, elle va se retrouver avec
un seul représentant sur neuf. Donc, elle se trouve, en quelque sorte,
sous- représentée puisque les villes de banlieue que je
mentionnais tantôt, qui auront automatiquement, en vertu du projet de
loi, deux représentants sur neuf au sein du conseil de la
communauté urbaine, acquittent 15% de la facture, 15% de la note de la
communauté urbaine. Il y a donc pour la ville de Sainte-Foy, si on veut
garder un équilibre important dans la représentation au conseil
exécutif, une carence, un manque, si on veut, de
représentativité, puisque comparativement aux petites
municipalités ou aux villes de banlieue qui acquittent 15% de la note de
la communauté urbaine comparativement à 22% par la ville de
Sainte-Foy, celle-ci se retrouve avec un seul représentant. Je ne sais
pas si, au cours des discussions en commission parlementaire, nous pourrons
tenter d'examiner cet aspect plus à fond et, peut-être de voir
s'il n'y a pas lieu d'apporter certaines modifications. Ce sera un sujet de
discussion, mais je pense que, quand on parle d'équilibre, la ville de
Sainte-Foy se trouve en infériorité. Je sais que mon
collègue de Louis-Hébert en discutera tantôt.
Également, concernant la représentation au comité
exécutif, il y a un deuxième point que je veux aborder.
Actuellement, c'est le maire de la ville de Sillery qui est le
représentant des villes de banlieue au sein du comité
exécutif de la communauté. Je me rends compte qu'en vertu du
projet de loi tel que présenté, il y aura deux membres des villes
de banlieue qui pourront être intégrés au conseil de la
communauté. Cependant, le représentant actuel des villes de
banlieue, le maire de la ville de Sillery, n'a aucune garantie, si on veut, que
sa représentativité actuelle soit continuée. Cela
m'étonne et j'avais cru comprendre, selon certaines informations qui
avaient été transmises aux journaux et qui n'émanaient
certainement pas de l'Opposition, selon certaines informations que j'avais lues
dans Le Soleil, la semaine dernière, qu'à tout le moins le poste
du représentant, du maire de la ville de Siilery au sein du
comité exécutif serait protégé pour la durée
de son mandat. Ce n'est pas dans le sens qu'on veut protéger, d'une
certaine façon, le maire de la ville de Sillery, mais c'est important,
à mon point de vue, de s'assurer ici, puisque le maire de la ville de
Sillery, dans le cadre actuel du comité exécutif tel qu'il
existe, dans le mandat actuel des membres du comité exécutif, a
reçu un mandat qui doit se continuer jusqu'à sa prochaine
élection, c'est-à-dire, si je me souviens bien, jusqu'en novembre
1985. Il m'apparaîtrait probablement normal dans les circonstances pour
les gens en poste actuellement, puisqu'ils sont entrés en fonction
à un moment donné pour une période donnée, qu'on
puisse assurer ces gens de remplir le mandat qu'on leur avait confié
originalement et qu'on ne modifie pas la longueur de leur mandat en
cours de route comme cela serait le cas si, par exemple, le maire de
Sillery ne pouvait pas continuer de faire partie du conseil exécutif de
la Communauté urbaine de Québec. Comme je vous le dis, M. le
Président, c'est un point que nous pourrons discuter à nouveau
lors de la commission parlementaire.
Un autre point que je voudrais souligner ici quand même et qui
m'apparaît une façon différente de procéder, c'est
qu'au niveau de la Communauté urbaine de Québec, dans le cadre de
la nomination au comité exécutif, on se rend compte d'une
certaine façon - le projet de loi nous est présenté - que
c'est difficile d'arriver à des amendements ou de faire des discussions
nécessaires avec les gens de la ville de Québec ou des gens des
municipalités qui composent la Communauté urbaine de
Québec, de tenter d'arriver à une suggestion autre concernant les
nominations au comité exécutif.
On sanctionne quand même ici, au niveau de la Communauté
urbaine de Québec, un principe sur lequel je pose certaines
réserves, c'est-à-dire qu'on crée à
l'intérieur de la communauté urbaine deux façons
d'élire les membres qui sont représentants des villes
concernées. Québec élira ses trois représentants;
effectivement, c'est la ville de Québec qui les désignera. Les
villes de banlieue également viendront élire elles-mêmes
leur représentant au comité exécutif. On crée donc,
d'une certaine façon, des espèces de collèges
électoraux à l'intérieur de la Communauté urbaine
de Québec. La réserve que je veux faire là-dessus, c'est
le fait qu'au niveau de l'homogénéité de la
Communauté urbaine de Québec, il y a un certain danger qu'on
perde une certaine homogénéité dans la communauté
urbaine au sens de son fonctionnement puisque, consacrant des collèges
électoraux différents, on consacre presque certaines parties qui
peuvent s'opposer finalement: les villes de banlieue contre la ville de
Québec, contre les autres municipalités.
C'est la réserve que je veux exprimer là-dessus. Je
comprends qu'au niveau de la CUM, la Communauté urbaine de
Montréal, nous n'avons pas les mêmes points en suspens ou en
discussion qu'avec la ville de Québec. Il reste que les membres du
comité exécutif de la Communauté urbaine de
Montréal sont quand même élus par l'ensemble des membres de
la communauté et non par les villes de banlieue, d'une part, ou la ville
de Montréal de son côté, vis-à-vis de certains
représentants nommés. Dans certains cas, on dit, dans la Loi sur
la Communauté urbaine de Montréal que le représentant
devra être un représentant des villes de banlieue. Mais c'est
l'ensemble des membres de la communauté qui vont élire un tel
représentant.
J'aurais peut-être aimé pouvoir examiner plus à fond
cette question précise et peut-être en arriver à certaines
discussions avec les membres de la communauté urbaine,
précisément pour protéger à mon point de vue une
certaine homogénéité qu'il m'apparaît
nécessaire de conserver au sein de tout conseil exécutif d'une
communauté.
Maintenant, M. le Président, le point suivant que je voudrais
relever et qui est apporté par la loi 92 - je pense que c'est un
avancement par rapport à la situation précédente - c'est
la création des trois commissions permanentes. On suit un peu ce qui
s'est fait à la Communauté urbaine de Montréal. Je pense
que c'est une expérience qui s'est révélée un
succès et qui peut répondre à des besoins fondamentaux de
la communauté urbaine. Cela m'apparaît finalement, avec cette loi
qui crée ces commissions et qui permet de tenir des séances
publiques de ces commissions avec la possibilité de poser des questions,
etc., un acquis, pour le fonctionnement de la communauté urbaine,
apporté par la loi 92.
Donc, dans l'ensemble, je vais répéter ici que
l'Opposition, après la brève analyse que nous avons pu faire de
ce projet de loi, nous sommes d'accord avec les dispositions apportées
par le ministre, vu qu'elles constituent une amélioration sur la
situation actuelle. Évidemment, l'Opposition est en accord avec ces
améliorations qui sont apportées. Nous voterons en faveur de ce
projet de loi. (15 h 40)
J'affirme à nouveau, à la fin de mes remarques de
l'analyse du projet de loi, que je souhaiterais finalement que dans tous ces
cas de projets de loi qui viennent modifier d'une façon assez importante
des lois statutaires comme pour la communauté urbaine, des lois
importantes non seulement quant au contenu mais également quant au
nombre d'articles considérés, puisqu'on retrouve 54 articles dans
le projet de loi - on touche également, par ricochet, à certains
articles des lois sur la Communauté urbaine de Montréal et la
Communauté régionale de l'Outaouais, en plus de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme - j'aurais souhaité qu'on puisse
étudier davantage un tel projet de loi pour rendre compte finalement de
notre rôle de législateur de la façon la plus
éclairée possible. C'est un souhait que je laisse au nouveau
ministre des Affaires municipales. Nous souhaitons qu'à la prochaine fin
de session, au mois de décembre, puisque le ministre nous a
déjà annoncé lors des commissions parlementaires des
dernières semaines - depuis trois semaines - lors des bills
privés ou de quelque autre situation à laquelle nous avons eu
à faire face, que certaines améliorations seront apportées
à l'ensemble des lois municipales ou à quelques-unes des lois
municipales, nous
souhaitons, dis-je, que ces amendements seront apportés dans un
délai beaucoup plus long pour permettre une meilleure consultation de
tous les intervenants du monde municipal. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Chauveau.
M. Raymond Brouillet
M. Brouillet: Le projet de loi que nous avons devant nous, projet
de loi qui vient modifier la Loi sur la Communauté urbaine de
Québec, répond à un voeu exprimé par la grande
majorité des élus de la région, qui font partie de la
Communauté urbaine de Québec. C'est à la suite de
multiples consultations, rencontres, échanges et discussions que,
finalement, ce projet de loi a vu le jour dans la teneur que nous connaissons
aujourd'hui. Permettez-moi de revenir sur les éléments qui
m'apparaissent les plus fondamentaux dans ce projet de loi et qui sont de
nature - c'est d'ailleurs le but poursuivi par ces modifications
apportées à la loi - à améliorer l'exercice du
pouvoir au sein de la Communauté urbaine de Québec. Les objectifs
poursuivis par la loi sont tout d'abord de permettre au grand public de
participer plus activement à la vie politique de la communauté
urbaine, de participer plus activement à la définition des
orientations et des politiques qui concernent l'ensemble de la
communauté urbaine.
Pour tâcher d'atteindre cet objectif d'une plus grande
participation du public, le projet de loi prévoit la mise sur pied, la
création de trois commissions permanentes commission permanente qui
seront composées d'un certain nombre de membres du conseil de la
Communauté urbaine de Québec, lesquels seront
désignés par l'ensemble du conseil de la communauté. Quels
seront le rôle et les attributions de ces commissions permanentes? Elles
verront à étudier l'ensemble des affaires de la communauté
urbaine qui relèvent de leurs domaines respectifs. À la suite de
l'étude de ces affaires, les commissions permanentes auront un pouvoir
de recommandation au conseil de la communauté urbaine. Ces commissions
permanentes seront le lieu qui permettra une participation plus grande du
public parce qu'elles devront tenir des séances publiques auxquelles les
citoyens pourront venir se faire entendre, exprimer leur point de vue et aussi
poser des questions aux membres de la commission sur les affaires en cours.
Nous avons là une modification que je juge très importante dans
le mode de fonctionnement de la Communauté urbaine de Québec qui,
à mon point de vue, va assurer une vie démocratique plus saine et
meilleure.
L'autre objectif poursuivi par le projet de loi est d'assurer un
meilleur équilibre dans la répartition du pouvoir entre les
représentants de l'ensemble des villes et des municipalités
composant la Communauté urbaine de Québec. Tantôt, quand
j'expliquerai brièvement les modifications apportées au niveau du
conseil de la communauté, les modifications apportées au niveau
du comité exécutif, vous serez en mesure de juger de cet
équilibre meilleur qui sera, si vous voulez, possible entre les pouvoirs
de l'ensemble des villes faisant partie de la Communauté urbaine de
Québec.
Venons-en, si vous voulez, à la composition du conseil de la
communauté. La situation actuelle est la suivante: Sur le Conseil de la
Communauté, la ville de Québec a onze représentants. Les
villes que nous appelons ici villes intermédiaires, Beauport,
Charlesbourg et Sainte-Foy, ont chacune quatre représentants. Pour ce
qui est de ce que nous appelons les petites villes ou les villes de banlieue,
les neuf municipalités qui font partie de la périphérie de
l'agglomération urbaine, la ville de Saint-Émile, la
municipalité du Lac-Saint-Charles, la ville de Loretteville, la ville de
Vai-Bélair, la ville de l'Ancienne-Lorette, la ville de Vanier, la ville
de Sillery, la paroisse de Saint-Augustin et la ville de Cap-Rouge, l'ensemble
de ces villes a droit à un représentant au conseil de la
communauté.
Qu'est-ce que le projet de loi apporte de nouveau en ce qui concerne le
conseil de la communauté? Au niveau de la composition, à peu
près rien de vraiment nouveau. Ce que je viens de dire de la composition
actuelle va demeurer tel quel à la suite de l'adoption du projet de loi.
Il y aura cependant à ajouter aux membres actuels, tels que je les ai
mentionnés, le président du comité exécutif. Le
nouveau rôle du président du comité exécutif, j'en
parlerai tantôt.
Mais ce qui est important, c'est qu'au niveau de la prise de
décision, il y a des modifications. Jusqu'à aujourd'hui, une
majorité de voix des membres du conseil de la communauté
était suffisante pour donner force à l'adoption de toute
requête, de toute résolution présentée en vue de son
adoption. Le projet de loi va apporter un élément nouveau.
À cette majorité des voix des membres composant le conseil, devra
s'ajouter l'assentiment d'au moins cinq villes faisant partie de la
communauté, ce qui veut dire qu'il devra y avoir au moins une des
petites villes, dans celles que j'ai mentionnées tantôt, une des
villes de banlieue, qui devra donner son assentiment pour l'adoption d'une
résolution ou d'une requête présentée devant le
conseil de la communauté et cela, comme je vous l'ai dit tantôt,
c'est pour assurer un meilleur équilibre dans le partage du pouvoir au
sein
de la communauté, en laissant une place un peu plus grande aux
villes de banlieue.
Venons-en maintenant au comité exécutif. La situation
actuelle est la suivante: Le comité exécutif est composé
de sept membres dont trois représentant la ville de Québec, le
maire et deux délégués choisis par le conseil de la ville
de Québec au sein des membres du conseil de la communauté. Il y a
aussi les maires de chacune des trois villes intermédiaires, plus un
représentant des villes de banlieue désigné par l'ensemble
des membres du conseil de la communauté.
Le projet de loi apporte les modifications suivantes: La ville de
Québec continuera d'avoir ses trois représentants, le maire plus
deux délégués désignés par les membres du
conseil de la ville de Québec; les villes intermédiaires seront
représentées chacune par leur maire, donc trois; et pour ce qui
est des villes de banlieue - c'est là qu'il y a une modification et un
changement - au lieu d'avoir un seul représentant, les neuf villes de
banlieue auront deux représentants au comité exécutif. Une
autre modification, c'est que ces deux représentants, plutôt que
d'être choisis par l'ensemble des maires du conseil de la
communauté, seront choisis exclusivement par les neuf maires des neuf
villes de banlieue.
Pourquoi ces modifications? Je sais que le député de
Laprairie a posé tantôt certaines questions tout à fait
pertinentes quant à ce mode de désignation des
représentants des différentes villes au comité
exécutif. Je n'ai pas l'intention d'entrer ici dans la discussion du
principe à la base de ce mode de désignation, mais il y aura
certainement lieu d'y revenir en troisième lecture, lorsque nous
étudierons le projet de loi article par article. (15 h 50)
Ce qui a amené ici le législateur à proposer ce
mode de désignation, quand on connaît la réalité de
la Communauté urbaine de Québec - M. le député de
Laprairie parlait d'homogénéité qu'il fallait assurer
-c'est que, en réalité, ce qui compose la communauté
urbaine est loin d'être une réalité homogène, elle
est excessivement hétérogène ne fût-ce que par la
densité de population, le nombre de populations, composant chacune des
municipalités faisant partie de la communauté urbaine. C'est ce
qui a amené le législateur à tenir compte de cette
diversité propre à notre région au niveau de la
communauté urbaine et à réserver à l'ensemble des
neuf municipalités de banlieue le droit de désigner leur
représentant. Étant donné la composition du conseil de la
communauté, tel que je l'ai mentionné tantôt, en
réalité les grandes villes avaient de par leur nombre au conseil
de la communauté, la pleine possibilité finalement de
désigner l'homme de leur choix en tant que représentant des
petites villes qui n'avaient à peu près pas de pouvoir politique
de décision au sein du conseil de la communauté pour assurer
l'élection d'un membre de leur choix aux fins de les représenter
au sein du comité exécutif.
Ce sont donc ces considérations très pratiques,
très concrètes, de la réalité de la région
de Québec qui a amené le législateur à proposer ce
mode de désignation des représentants des maires des villes de
banlieue.
Maintenant, je vais terminer par la présidence, les modifications
au niveau de la présidence de la communauté urbaine.
Actuellement, comme les gens le savent, le président est élu par
le conseil de la communauté parmi les membres du conseil. Mais le
président élu qui devait être soit un maire ou un
conseiller de municipalité conservait son poste de maire ou de
conseiller. Il n'accédait donc pas à un poste à temps
plein, mais devait partager son temps entre sa fonction de maire ou de
conseiller et sa fonction de président.
Le projet de loi apporte un élément vraiment nouveau ici.
Le président continuera d'être élu par le conseil, parmi
les membres du conseil. Une fois qu'il sera élu, il devra
démissionner de son poste de maire ou de conseiller pour pouvoir se
consacrer à temps plein à sa fonction de président de la
communauté urbaine de Québec. Les raisons, comme le ministre l'a
mentionné tantôt, sont de plus en plus évidentes pour les
gens du milieu. C'était une demande des gens du milieu, des gens de la
communauté urbaine: que les tâches de plus en plus
considérables qui relèvent de la responsabilité de la
Communauté urbaine de Québec demandent, pour une pleine
efficacité, un président à temps plein. L'autre avantage
est que le président à temps plein devant démissionner de
son poste de maire ou de conseiller d'une municipalité
particulière pourra, dans les arbitrages qu'il sera
nécessairement amené à exercer entre les différents
intérêts plus ou moins divergents ou convergents des
municipalités, arbitrer ces divergences d'intérêts et
assurer une meilleure cohésion, une meilleure neutralité,
n'étant plus assujetti à ses responsabilités en tant que
maire d'une des ces municipalités.
En conclusion, M. le Président, ce projet de loi vise à
améliorer la vie démocratique au sein de la Communauté
urbaine de Québec. Tout d'abord en assurant une plus grande
participation du public aux grandes orientations, aux grandes décisions
du conseil de la communauté par la création de commissions
permanentes auprès desquelles le public aura accès pour exprimer
ses points de vue et pour poser des questions aux membres de ces
commissions.
Un autre point: le projet de loi va assurer une plus grande
participation des villes de banlieue au sein tout d'abord du
conseil, en exigeant qu'il y ait au moins une ville de banlieue qui soit
d'accord pour qu'une requête soit adoptée et en assurant aussi, au
niveau du comité exécutif, la représentation de deux
membres des villes de banlieue désignés par les maires des villes
de banlieue. Il y aura aussi - et c'est très important - une
revalorisation du rôle des conseillers. La mise sur pied des commissions
permanentes composées des membres du conseil va permettre aux membres du
conseil d'exercer au sein de la communauté un rôle beaucoup plus
actif en s'impliquant davantage dans les dossiers en ayant un pouvoir de
recommandation auprès de l'ensemble du conseil de la
communauté.
M. le Président, en terminant, je tiens à souligner que ce
projet de loi, j'en suis convaincu, répond en grande partie aux attentes
des élus du milieu, de la région de la Communauté urbaine
de Québec et je suis assuré qu'il permettra à l'ensemble
des élus de jouer un rôle beaucoup plus actif au sein de la
communauté. Ceci va leur permettre d'assumer de façon plus
adéquate leurs responsabilités à l'égard de leurs
commettants. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. Le projet de loi sur la
Communauté urbaine de Québec que nous sommes en train
d'étudier est une loi qui, pour la région de Québec, est
importante. C'est une loi qui vise à établir les règles de
fonctionnement d'un organisme qui joue un rôle de plus en plus
considérable à l'intérieur de notre administration
publique pour ce qui est de la région de Québec, en tout cas. La
Communauté urbaine de Québec est un organisme important. C'est un
organisme qui a des pouvoirs étendus. C'est un organisme qui a aussi les
pouvoirs nécessaires dans plusieurs domaines. Le ministre a eu
l'occasion de les mentionner tout à l'heure. Nul n'est besoin de
répéter ces domaines. Ce sont des domaines qui ont appelé
une intervention au niveau régional, que ce soit au niveau de la
promotion touristique, de la promotion industrielle, de l'évaluation, au
niveau de l'informatique, au niveau du tourisme, etc., au niveau...
Je profite de la présence du ministre ici en Chambre pour
souligner qu'il y a un domaine où la communauté urbaine a des
pouvoirs étendus, des pouvoirs nécessaires, des pouvoirs au
niveau régional. C'est le domaine du ramassage et de la disposition des
ordures ménagères. On sait actuellement qu'il y a à
l'incinérateur de la Communauté urbaine de Québec une
grève qui sévit depuis plusieurs semaines avec comme
conséquence l'impossibilité de facto pour la communauté
urbaine de s'acquitter de ce qui est une tâche, un devoir et une
obligation importante et qui a fait l'objet d'investissements de dizaines et de
dizaines de millions de dollars, il y a déjà plusieurs
années. J'aimerais que le ministre, qui se disait tout à l'heure
préoccupé par l'acquittement par la communauté urbaine de
ses obligations et de ses devoirs, se penche sur ce devoir particulier qui
incombe à la Communauté urbaine de Québec dans le domaine
de la cueillette et de la disposition des ordures ménagères. Nous
avons eu l'occasion, M. le Président - vous le savez - de poser une
question en Chambre récemment au ministre de l'Environnement plus
particulièrement. J'aurais aimé pouvoir m'adresser à ce
moment-là au ministre des Affaires municipales pour lui demander de
donner des assurances à la population de la région de
Québec que cette partie des devoirs et obligations de la
communauté urbaine serait dûment acquittée en fonction de
la loi et pour la protection des citoyens. Dans le moment, on a l'impression,
d'après ce qui nous a été répondu par le ministre
de l'Environnement et par le ministre du Travail, qu'il y a un blocage dans les
négociations, qu'il y a un braquage, tout simplement.
J'entendais le ministre des Affaires municipales tout à l'heure.
Il n'en dit pas un mot. J'aimerais l'entendre tout à l'heure dans sa
réplique là-dessus. Est-ii au courant de la situation? La suit-il
de près? A-t-il l'intention de faire quelque chose? C'est une situation
qui ne peut pas, évidemment, durer d'une façon indéfinie.
Il faut, à un moment donné, que ce problème soit
réglé. Le ministre doit se pencher sur cette situation et y
apporter une solution ou des éléments de solution qui vont
permettre à la communauté urbaine de fonctionner normalement dans
tous les domaines et en particulier dans ce domaine.
Donc, les pouvoirs de la communauté urbaine sont
extrêmement étendus. Ce sont des pouvoirs de nature
régionale pour la plupart d'entre eux et c'est à
l'expérience de l'administration publique dans le domaine municipal
qu'on s'est rendu compte qu'il fallait regrouper les efforts des
municipalités et chapeauter tout cela par un organisme central qui a
été la Communauté urbaine de Québec. (16
heures)
Cette communauté existe depuis de nombreuses années, une
quinzaine d'années maintenant. D'année en année, on
apporte des changements. On rectifie le tir. Par l'expérience que j'ai
vécue comme secrétaire général de la
Communauté urbaine de Québec, je ne vous cacherai pas que
j'ai
l'impression qu'on est en train de repasser dans nos pistes. On refait
et on défait des structures qui ont déjà été
essayées, qui ont donné des résultats qui n'étaient
pas totalement satisfaisants. Là, on revient en arrière avec
d'autres changements que je n'ose pas appeler nécessairement des
améliorations.
Je sais qu'il est difficile pour un organisme comme la communauté
urbaine de trouver la recette parfaite. Cependant, quand on regarde ce qui est
proposé actuellement, il y a lieu de s'interroger à savoir si on
n'est pas en train de proposer des solutions qui ont justement
été essayées et qui n'ont pas donné les
résultats escomptés.
Il y a une lacune de la part de la population en ce qui concerne la
perception qui est faite de la Communauté urbaine de Québec.
Très souvent et à tort - je parle par expérience - on
conçoit ou on perçoit la communauté urbaine comme
étant un mal nécessaire, comme quelque chose dont on pourrait se
défaire ou dont on devrait se défaire si on avait le moyen de
trouver la recette. Or, actuellement, la communauté urbaine remplit des
tâches qui sont inévitables pour une collectivité qui veut
s'administrer et qui doit considérer des problèmes aussi
réels, aussi particuliers, aussi terre à terre que les
problèmes qui sont traités par la Communauté urbaine de
Québec. 11 y a donc de la part de la population, malheureusement, un
défaut dans la perception qui est faite de la Communauté urbaine
de Québec. Cela doit être corrigé. On doit prendre les
moyens - le législateur provincial a des responsabilités à
ce sujet -pour que la communauté urbaine ait une meilleure
réputation, une meilleure image, une image qui colle plus à la
réalité que ce n'est le cas actuellement. La communauté
urbaine n'est pas un mal nécessaire. C'est un organisme dont on ne peut
pas se passer, dont la région de Québec a absolument besoin. Elle
doit s'ajuster aux besoins. Sans cela, chaque fois que les gens
reçoivent leur compte de taxes, ils sont sous la fausse impression que
si la communauté urbaine n'existait pas, on réduirait les taxes
de 25% à 30%. Ce n'est absolument pas le cas puisque, Communauté
urbaine de Québec ou pas, il faudrait s'occuper de la cueillette des
ordures, de leur disposition, de la promotion industrielle, de la promotion
touristique. Il faudrait s'occuper de l'évaluation foncière. Il
faudrait s'occuper du domaine de l'informatique. Quoi d'autre encore? Tout
cela, évidemment, coûterait de l'argent aux municipalités.
Ce qui ferait que l'ensemble des comptes, des factures que devraient payer les
municipalités, augmenterait, que la quote-part de chacune serait plus
élevée qu'elle ne l'est actuellement.
Les changements que l'on propose au sujet de la présidence sont
des changements qui, nous dit-on, sont réclamés par le milieu. On
fait état que le président devra remplir un rôle plus
général, un rôle qui le place au-dessus de la
mêlée et qu'à ce titre le président de la
communauté urbaine doit démissionner de son poste de maire, de
son poste de conseiller d'une ville, pour pouvoir dominer, si vous voulez, les
problèmes locaux et y apporter des solutions qui soient de nature plus
générale et qui tiennent moins compte des intérêts
particuliers.
Je ne suis pas sûr, pour tout vous dire, que ce soit là
vraiment la solution qui permettra d'en arriver à ce résultat.
Est-ce que le fait qu'un président n'est plus maire, n'est plus en
contact régulier, continuel, quotidien avec les problèmes de sa
municipalité en fait un meilleur administrateur au niveau
supramunicipal? Si on voulait vraiment arriver à un président qui
dispose de moyens et de pouvoirs, donc d'un poids politique - parce que tout
est poids politique dans les règlements qu'on apporte - si on voulait
avoir un président qui jouisse du poids politique suffisant pour
apporter des solutions régionales, qui fasse abstraction des
particularismes locaux, est-ce qu'on ne devrait pas, M. le Président,
étudier fondamentalement la question, à savoir si le
président ne devrait pas être élu au suffrage universel par
l'ensemble de la population qu'il administre, compte tenu des budgets de la
communauté? Est-ce qu'on a déjà étudié cette
question? Il serait peut-être intéressant de fouiller ce
problème, ce qu'on ne peut pas faire, évidemment, avec un projet
de loi qui nous est présenté rapidement, à la
dernière minute. On a cela trop rapidement pour pouvoir étudier
toutes les avenues. Tout ce qu'on fait, c'est qu'on essaie des recettes qui ont
été appliquées ailleurs, à Montréal,
à la Communauté régionale de l'Outaouais, etc. On
transpose cela à Québec. Le poids politique du président
ne sera pas changé, n'aura pas évolué. On en fait
quelqu'un qui aura comme seule préoccupation la communauté
urbaine et qui sera élu par ses pairs. Mais est-ce que ce sera
suffisant? C'est une question qu'on n'a pas eu le temps de fouiller
suffisamment, malheureusement. Je souhaiterais qu'à un moment
donné, nous puissions avoir une discussion de fond à ce
sujet.
Faisant abstraction des recettes passées et
éprouvées, des recettes acceptées ou imposées
ailleurs, la composition du comité exécutif est changée
dans le sens qu'on fait passer le nombre des membres de sept à neuf. On
donne aux neuf petites villes - ce qu'il est convenu d'appeler les neuf villes
moins grandes - deux représentants qu'elles vont choisir
elles-mêmes pour siéger au sein du comité exécutif.
On nous apporte comme argument qu'ainsi, les municipalités de cette
taille se sentiront plus impliquées dans
l'administration de la communauté urbaine, qu'elles pourront
s'identifier plus facilement aux intérêts régionaux et
qu'elles pourront participer de plus près à ce qui se fait
à la Communauté urbaine de Québec. Est-ce que c'est
vraiment un résultat qui sera atteint de cette façon-là?
Je ne vois pas en quoi, franchement, M. le Président, le fait, par
hypothèse, d'avoir un représentant de Cap-Rouge au sein du
comité exécutif fera que la population de ville de Vanier se
sentira plus impliquée, plus partie prenante - pour employer une
expression chère au gouvernement - à l'intérieur de la
Communauté urbaine de Québec. Tout ce qu'on réussira
à faire, c'est de diluer, cependant, la représentation des villes
qui paient une quote-part plus importante que la représentation à
laquelle elles ont droit à l'intérieur du comité
exécutif.
Si on prend le cas de la ville de Saint-Foy, avec 22% ou 25% de la
quote-part, elle se retrouvera avec un représentant sur neuf. Le fait de
tenter d'impliquer les villes qu'on a nommées tout à l'heure -
Cap-Rouge, Vanier, Sillery, Ancienne-Lorette, Loret-teville, Saint-Augustin -
en leur donnant deux représentants sur neuf, avec une quote-part de
l'ordre de 15% ou 16%, alors que la ville de Sainte-Foy, avec une quote-part
qui approche les 25% - donc 1 $ sur 4 $ dépensés à la
Communauté urbaine de Québec - va se retrouver avec un
représentant sur neuf... Est-ce qu'en tentant d'impliquer Vanier,
Sillery, Loretteville, Ancienne-Lorette, Cap-Rouge, etc., on n'est pas en train
d'éloigner une autre partie de la population? Le ministre n'en a pas dit
un mot. C'est bien sûr que, si on donnait un représentant pour
chaque petite ville, cela aurait pour effet de diluer le pouvoir au
comité exécutif de villes comme Sainte-Foy, Charlesbourg et
Beauport. Cela aurait pour effet d'impliquer plus directement les villes de
moindre importance, mais le prix à payer pour cela, la rançon
à payer pour cela, ce dont le ministre n'a pas parlé, c'est le
fait qu'on va se retrouver avec des villes qui paient une partie importante des
dépenses de la communauté urbaine mais qui ne seront pas
adéquatement représentées, compte tenu de la quote-part
qu'elles paient et compte tenu de la population qu'elles comptent. On peut
facilement faire accepter que les petites villes, les villes de moindre
importance doivent être plus représentées. Bien sûr,
celles-ci ne peuvent faire autrement que d'être d'accord avec cela. Mais
ce qu'on oublie de dire du côté gouvernemental - j'aimerais qu'on
en discute plus à fond lors de la commission parlementaire qui
siégera là-dessus - c'est que le prix à payer pour cela
repose sur les épaules de la population des villes
intermédiaires, qui sont plus grandes, qui ont plus de population et qui
paient, au niveau de l'assiette fiscale qui est la leur, une quote-part plus
importante. (16 h 10)
On n'a pas insisté sur cet aspect des choses. On n'a pas
insisté non plus en disant qu'en faisant élire par les villes de
moindre importance leurs deux représentants au sein du comité
exécutif, cela avait pour effet pratique de remettre en question le
mandat de quelqu'un qui avait déjà été élu
selon des règles du jeu qui étaient acceptées et connues,
en l'occurrence, le maire de Sillery qui, actuellement, devrait pouvoir
continuer son mandat pour une période de temps qui serait normale et
qui, vu les amendements qui sont insérés dans la loi, pourra
hypothé-tiquement, possiblement, voir son mandat écourté.
Est-ce parce qu'on lui reproche d'avoir mal fait son travail? Si c'est le cas,
M. le Président, que ce soient ses pairs qui demandent des comptes.
Ce n'est pas au gouvernement de changer, alors que les choses sont en
cours, les règles du jeu. Tout cela m'apparaît un petit peu
improvisé. Pour tout vous dire, M. le Président, cela
m'apparaît un peu indécent, un peu arrogant de procéder
comme cela envers des gens qui, selon les règles du jeu, les ont
acceptées, les ont jouées et occupent des postes. N'y aurait-il
pas moyen de considérer en commission parlementaire, alors que nous
discuterons de ces articles qui en traitent, d'une façon de faire les
choses qui serait respectueuse des personnes en place et institutions ainsi que
des règles du jeu qui ont été acceptées et qui
étaient celles qui étaient connues du gouvernement et qui
n'avaient pas changé à ce moment-là?
La composition du conseil ne change pratiquement pas. J'ai
été secrétaire-général de la
communauté urbaine pendant plusieurs années. Je peux vous dire
qu'à toutes fins utiles, les décisions se prennent sur
recommandation du comité exécutif par le conseil mais que les
recommandations sont faites à la suite d'études qui sont
proposées par le comité exécutif. Le fait que le
président de la communauté urbaine qui n'est plus maire
maintenant siégera au conseil, quel rôle le ministre entend-il lui
faire jouer? Par exemple, est-ce que le président du comité
exécutif, donc le président dégagé de toute autre
fonction de la Communauté urbaine de Québec, sera celui qui
répondra, au sein du conseil, aux interrogations des membres du conseil,
aux interrogations de la population qui ira là pour avoir des
renseignements, avoir des éclaircissements supplémentaires ou si
cela continuera d'être les membres du comité exécutif en
général qui, eux, conservent leur position comme maires ou
conseillers des villes ou si, encore, ce sera la président du conseil de
la communauté urbaine? Tout cela est encore très flou. Qui jouera
quel rôle? Qui aura le droit de répondre aux questions? Qui aura
le
devoir de répondre aux questions et en sera comptable
vis-à-vis de la population de même que vis-à-vis de ses
pairs? On ne le sait pas, M. le Président. Est-ce que c'est, encore une
fois, le président du comité exécutif ou si c'est le
président du grand conseil de la communauté urbaine ou si ce sont
les membres du comité exécutif qui, ensemble, proposent les
recommandations? J'aimerais que le ministre se penche sur cette question et,
possiblement, nous donne des renseignements, des éclaircissements.
En terminant, M. le Président, on fait grand état des
commissions permanentes qui sont établies. Il y en aura trois: celle de
l'aménagement et de l'environnement, celle de l'évaluation, des
finances et du développement économique et, finalement, celle du
transport en commun. Je signalerai que, par règlement, la
communauté urbaine, déjà, depuis de nombreuses
années, a le pouvoir de former des commissions semblables. D'ailleurs,
à ma connaissance, la communauté urbaine l'a fait. Il existe des
règlements que le ministre doit connaître - je ne sais pas quels
sont leurs numéros actuellement - de la Communauté urbaine de
Québec qui établissent des commissions du conseil, qui doivent
siéger, qui doivent faire rapport au comité exécutif, qui
doivent faire des recommandations. On fait grand état actuellement que
le fait d'inclure ces commissions permanentes dans la loi va amener une
participation, une intégration, une concertation plus grande. Bien
sûr que ça peut donner ces apparences. Je suis loin d'être
convaincu que le fait de mettre sur papier, de mettre dans une loi ce qui
déjà existe au niveau des règlements va changer quelque
chose dans les faits. Je ne voudrais pas qu'on se leurre là-dessus et
qu'on se donne l'impression qu'on réinvente la roue. Il n'y a rien de
neuf là-dedans. Le ministre des Affaires municipales dit: "Sous
l'instigation de mon ministère, on arrive avec des commissions
permanentes et dorénavant, etc., bla, bla, bla". D'accord. Mais si je
vous disais que cela existe déjà et que vous êtes en train
d'ouvrir des portes ouvertes, il n'y a rien là pour se péter les
bretelles.
Je dois vous dire qu'à ma connaissance, cela n'a pas donné
les résultats escomptés. Ce que je voudrais savoir du ministre,
c'est: est-ce que le ministre va suivre le fonctionnement de cela, va regarder
les résultats pour qu'on puisse avoir l'assurance que les buts
poursuivis sont atteints ou si tout simplement ça va rester des articles
dans la loi?
Je sais que mon temps est déjà terminé. Je veux
tout simplement vous dire que nous allons participer à la discussion,
que nous aurions aimé le faire plus à fond avec un projet de loi
qui nous aurait été présenté en temps plus utile
pour permettre d'aller au fond des choses. Malheureusement, cela ne nous est
pas possible. Nous faisons tout simplement effleurer le sujet. Nous allons
tenter de faire notre travail, nous, du côté de l'Opposition, du
mieux possible lors de la commission parlementaire pour l'étude
détaillée. Cependant, nous allons le faire avec les moyens dont
nous disposons, avec le temps qui nous est alloué par le gouvernement
qui, malheureusement, n'est pas un temps suffisant.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Communications et député de Vanier.
M. Jean-François Bertrand
M. Bertrand: Cette Loi modifiant la Loi sur la Communauté
urbaine de Québec n'est évidemment pas une loi qui va nous
permettre d'avoir un débat existentiel sur la Communauté urbaine
de Québec. Je reconnais, avec le député de
Louis-Hébert, que nous pourrions probablement nous pencher sur plusieurs
aspects de l'existence même de la Communauté urbaine de
Québec, sur son fonctionnement, sur les formules de participation qui
existent dans les municipalités au financement de la Communauté
urbaine de Québec, sur la démocratie telle qu'elle y est
vécue, sur les problèmes de relations du travail qui peuvent y
exister. Je dois dire que lorsque nous avons assumé les
responsabilités de gouvernement en 1976, nous avions tout de même
abordé le dossier de la Communauté urbaine de Québec en en
faisant une de nos priorités comme équipe régionale.
À l'époque, je rappellerai que nous avions convoqué
une commission parlementaire, sous l'initiative du comité
régional, qui correspondait un peu d'ailleurs à ce qu'on appelle
maintenant les mandats d'initiative parlementaire introduits par la nouvelle
réforme, mais qui, je dois dire par ailleurs, était totalement
partisane puisqu'il n'y avait qu'une formation politique qui participait
à cette commission parlementaire. Nous avions entendu les
représentants des municipalités de la région de
Québec qui étaient membres de la Communauté urbaine de
Québec pour qu'ils nous fassent des représentations sur les
améliorations qu'ils voulaient voir apporter à cette loi. Nous
avons d'ailleurs, à la suite de ces représentations, en tenant
compte bien sûr aussi d'autres représentations qui nous avaient
été faites par des organismes qui n'étaient pas
nécessairement des corps municipaux - c'est en 1979, si ma
mémoire est bonne - apporté des modifications, dans certains cas
substantiels et dans d'autres cas plus mineurs, à Loi constituant la
Communauté urbaine de Québec.
Il nous semblait, à ce moment, que nous avions eu l'occasion
d'avoir un débat de
fond, un débat extrêmement intéressant,
extrêmement riche au niveau de la réflexion, aussi très
riche au niveau des propositions d'action et tout cela a donné lieu
à l'adoption, ici même à l'Assemblée nationale,
d'une loi qui, si ma mémoire est bonne, n'avait pas été
contestée à l'époque. Cette fois-ci, il s'agit d'une
pièce de législation qui peut paraître relativement
mineure, mais qui vient tout de même régler un certain nombre de
problèmes réels que connaissaient plus particulièrement
celles qu'on appelle communément - quant à moi, je n'aime pas
beaucoup l'expression - les petites villes de la Communauté urbaine de
Québec. (16 h 20)
II y a évidemment la capitale, Québec, qui se doit
d'assumer une part importante au sein de la Communauté urbaine de
Québec. Je pense qu'on ne peut pas parler d'un développement
dynamique de la région de Québec sans s'assurer que la capitale,
la ville capitale, y joue un rôle de premier plan. Il n'en demeure pas
moins que cette communauté urbaine, qui est constituée de treize
municipalités, a un certain nombre de municipalités qui, au
niveau de leur population et de leur participation au financement de la
Communauté urbaine de Québec, ont une importance relativement
plus grande que certaines autres. Il y a effectivement la ville de
Québec, la ville de Sainte-Foy, la ville de Charlesbourg et la ville de
Beauport qui comptent parmi ces quatre grandes municipalités dont la
présence est, pour le moins qu'on puisse dire, extrêmement
importante au comité exécutif de la Communauté urbaine de
Québec et au conseil de la Communauté urbaine de
Québec.
Il y avait donc un problème réel à résoudre,
qui était celui de la représentation des autres villes qui
siègent au conseil de la Communauté urbaine de Québec et
qu'on appelle les petites municipalités de la Communauté urbaine
de Québec, qui sont au nombre de neuf et qui nous ont fait des
représentations. Je sais qu'elles ont rencontré les
députés de l'Opposition qui représentent des comtés
de la région de Québec. Elles ont rencontré aussi les
représentants ministériels. Je me rappelle, pour ma part, avoir
participé à une rencontre au bureau de Mme la
députée de La Peltrie avec des représentants de ces
municipalités. Je me rappelle avoir participé aussi à une
autre rencontre avec le ministre des Affaires municipales et quelques
collègues ministériels au bureau même du ministre des
Affaires municipales. Nous étions véritablement placés
dans une situation où nous sentions qu'il y avait des antagonismes,
qu'il y avait certains problèmes, certains tiraillements entre, d'une
part, les quatre grandes villes qui siègent à la
Communauté urbaine de Québec et les neuf plus petites
municipalités.
Je dois dire aujourd'hui, M. le Président, qu'autant en ce qui
concerne la constitution du comité exécutif que
l'équilibre qui a été établi entre la place
qu'occuperont dorénavant les plus importantes municipalités en
termes de population et les plus petites, on a finalement réussi
à trouver un terrain d'entente qui fait consensus.
Auparavant, la ville de Québec avait un représentant, son
maire. Deux autres représentants étaient choisis par le conseil
de la Communauté urbaine de Québec mais, à toutes fins
utiles, c'était décidé par la ville de Québec, et
on savait très bien au conseil de la Communauté urbaine de
Québec que ceux qui avaient été sélectionnés
par la ville de Québec étaient ceux qui seraient retenus comme
siégeant au comité exécutif.
Maintenant, dans le projet de loi, on dit: Cela nous paraît normal
que ce soient effectivement les gens de la ville de Québec qui
décident entre eux qui seront leurs représentants au
comité exécutif de la Communauté urbaine de Québec.
Évidemment, cela allait de soi que le maire de Beauport, le maire de
Charlesbourg, le maire de Sainte-Foy soient présents au comité
exécutif de la Communauté urbaine de Québec. Je reconnais
avec le député de Louis-Hébert qu'on pourra toujours, bien
sûr, discuter sur ce qui doit servir de base à la
représentation au sein d'un comité exécutif. Est-ce la
participation au prorata de la population au financement de la
Communauté urbaine de Québec? Est-ce le bassin de population
représenté, comme c'est le cas, à l'heure actuelle, au
niveau de la constitution du conseil de la Communauté urbaine de
Québec? Ce sont, bien sûr, des sujets qu'on peut encore gratter
davantage, mais il y avait des tiraillements, des problèmes et
même, jusqu'à un certain point, un certain climat de confrontation
qui s'était établi au sein de la Communauté urbaine de
Québec qui, à mon point de vue, n'était pas
bénéfique pour le développement de notre région,
n'était pas bénéfique pour l'ensemble de la population
tant il est vrai que tous et chacun, les élus, qui siègent
à ce conseil de la communauté urbaine, qui siègent au
comité exécutif doivent pouvoir sentir qu'ils le font dans ce qui
leur apparaît être une façon respectable de mieux assumer
leurs responsabilités sur le plan démocratique.
Tout en reconnaissant que la proposition finalement retenue par le
gouvernement ne convient pas à 100% aux demandes qui nous ont
été formulées par les neuf petites municipalités de
la Communauté urbaine de Québec, et ne répond pas à
100% non plus aux demandes qui nous ont été transmises par les
quatre plus importantes municipalités de la Communauté urbaine de
Québec, je crois que, finalement, par la proposition soumise par le
ministre des Affaires municipales au Conseil des ministres, et
maintenant soumise à l'attention de l'Assemblée nationale,
nous atteignons un point d'équilibre qui m'apparaît maintenant
régler une bonne partie des problèmes que nous connaissions.
Problème au niveau du comité exécutif: les neuf petites
villes pourront maintenant choisir en leur sein leurs propres
représentants. Problème au niveau du conseil de la
Communauté urbaine de Québec: dorénavant, il faudra qu'au
moins cinq municipalités soient parties d'une majorité à
établir, au-delà de la majorité normale bien sûr, de
toutes les personnes qui sont habilitées à voter au conseil de la
Communauté urbaine de Québec. Amélioration du processus
démocratique: par la constitution de ces commissions qui, semble-t-il -
je retiens là-dessus la parole du député de
Louis-Hébert - existent déjà en théorie, puisqu'un
règlement au niveau de la Communauté urbaine de Québec
permet qu'elles soient créées. C'est une chose qu'il existe des
règlements habilitant des structures à mettre en place un certain
nombre de commissions, c'est une autre chose de faire en sorte qu'elles
existent véritablement, qu'elles fonctionnent et qu'elles puissent mieux
respecter la volonté de la population de sentir que les discussions se
font sur l'ensemble de ces dossiers dans un contexte éminemment
démocratique.
M. le Président, je tiens, quant à moi, a remercier
très sincèrement mon collègue, le ministre des Affaires
municipales, pour la célérité avec laquelle il a
procédé dans ce dossier. Il ne fallait pas remuer mer et monde.
Il y avait un certain nombre de problèmes très précis, de
problèmes très concrets à résoudre au niveau du
comité exécutif, du conseil de la communauté urbaine, des
commissions à faire siéger dans un contexte d'amélioration
de cet organisme supramunicipal qui remplit des fonctions éminemment
importantes pour notre communauté régionale. Dans ce contexte,
non seulement je me réjouis de la célérité avec
laquelle le ministre a procédé et du consensus qu'il a finalement
réussi à dégager pour qu'on en arrive à un meilleur
équilibre; je me réjouis aussi de savoir, malgré les
nombreuses questions qui peuvent demeurer en suspens et malgré cette
volonté que plusieurs parlementaires pourraient avoir d'aller encore
plus loin dans la réflexion sur l'existence de la Communauté
urbaine de Québec, son fonctionnement, son devenir, je me réjouis
de ce projet de loi 92 règle, à ce stade-ci, des problèmes
qui traînaient depuis un certain temps. Je suis content de savoir que
l'Assemblée nationale du Québec sera disposée à
faire l'unanimité autour de ce projet de loi. Je crois que nos
collègues qui travaillent au niveau municipal dans les treize
municipalités de la Communauté urbaine de Québec se
réjouiront de savoir que l'Assemblée nationale a
été capable de disposer rapidement de ces quelques
problèmes qui existaient et dont la solution va faciliter le meilleur
exercice de la démocratie au sein de notre Communauté urbaine de
Québec.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Charlesbourg, whip adjoint de l'Opposition.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté: M. le Président, c'est avec plaisir
que je prends la parole concernant l'adoption de la loi 92, le faisant à
la suite de mon collègue de Laprairie qui est porte-parole officiel de
l'Opposition en matière d'affaires municipales.
La loi 92 qui est devant nous, M. le Président, actualise
certaines choses au niveau de la Communauté urbaine de Québec. Il
s'agit de remonter et de faire l'historique de la CUQ, la Communauté
urbaine de Québec, pour se rendre compte que des ajustements
étaient nécessaires. (16 h 30)
C'est en effet en 1969, sous le gouvernement de l'Union Nationale, que
la Communauté urbaine de Québec était créée.
Si on regarde de près l'évolution de la Communauté urbaine
de Québec de 1969 à 1978, on se rend compte qu'il y a eu de
profondes mutations sur le plan de la géographie des
municipalités et sur le plan des poids relatifs de chacune des
municipalités et des villes. Qu'il suffise de se rappeler la
création de la ville de Charlesbourg pendant cette période, la
création de la ville de Beauport, l'annexion à Québec des
quartiers - des villes, à l'époque - de Duberger et de
Neufchatel. Qu'il suffise de se rappeler aussi l'annexion à Sainte-Foy
de la paroisse de l'Ancienne-Lorette et finalement, de la fusion de Val
Saint-Michel et de Bélair pour devenir la ville de Bélair.
Récemment, la Société Inter-Port de Québec rendait
publics des chiffres très intéressants quant à
l'évolution de la population et aussi toutes sortes de données
très intéressantes pour l'agglomération de Québec
qui compte tout près de 600 000 personnes. Ce document nous permet de
constater l'évolution des différentes municipalités qui
sont aujourd'hui devant nous, regroupées à l'intérieur de
la CUQ.
Si on le prend par ordre alphabétique, la ville de Beauport qui,
en 1971, avait 49 841 habitants en a maintenant 60 447. La ville de Cap-Rouge
qui était à 2974 en a maintenant 8482. La ville de Charlesbourg
que j'ai le plaisir de représenter avait, à l'époque, 52
530 habitants et elle en a maintenant 68 326. Ce sont les chiffres de 1981. Par
contre, la ville de Québec est passée, quant à elle, de
187 833 à 166 474, alors que la ville de Sainte-Foy était
relativement stable passant de 68 385 à 68 883.
Tout cela pour dire, M. le Président, qu'il y a eu effectivement
une mutation dans les populations. Il y a eu aussi au niveau de la ville de
Québec une décroissance, alors que Charlesbourg, Beauport et
Cap-Rouge connaissaient une croissance additionnelle sans tenir compte,
évidemment, des municipalités et des villes de banlieue. En 1969,
il y avait 26 municipalités sur le territoire de la Communauté
urbaine de Québec; en 1978, treize, donc une profonde mutation dans les
structures municipales.
Que fait le projet de loi 92? Il faut dire qu'il a été
déposé récemment, mais il a quand même
nécessité une bonne consultation et une longue
préparation. Cela fait, si mes informations sont bonnes, au-delà
de deux ans que les villes de banlieue et les grandes villes de la
Communauté urbaine de Québec se réunissent pour tenter de
régler certains problèmes qui traînaient en longueur, quant
à la représentativité des villes de banlieue
principalement. J'ai eu le plaisir de rencontrer à deux reprises des
représentants de villes de banlieue pour dialoguer, pour échanger
des informations quant à la Communauté urbaine de Québec
et quant à leur volonté d'avoir certains changements. J'ai eu
aussi le plaisir de discuter avec le maire de Charlesbourg, M. Pierre Bernier,
des changements qui étaient envisagés à l'époque et
qui parlait de différentes solutions. En ce sens, je crois que le projet
de loi 92 est parfait. En cela, je dois dire au ministre des Affaires
municipales qu'il va réussir davantage avec le projet de loi 92 qu'il
n'a réussi avec la loi 43, parce qu'il a pris la précaution de
consulter davantage qu'il ne l'a fait dans le cas de la loi A3 et aussi, de
refléter à l'intérieur du projet de loi 92 certaines
volontés du milieu.
Donc, le premier point que je veux aborder très
brièvement, c'est effectivement la création de trois commissions
permanentes qui, de fait, sont dans la loi et deviennent, sur le plan
juridique, précises et très distinctes à
l'intérieur de la loi autrement que par des règlements qui,
à ce moment-là, étaient laissés à la
volonté des dirigeants de la CUQ. C'est donc pour nous une
amélioration. Quant à savoir, comme le disait mon collègue
de Louis-Hébert tout à l'heure, ce que cela provoquera dans
l'application des mesures, des actions beaucoup mieux concertées et
reflétant davantage ce que la population de l'agglomération de
Québec veut, le point d'interrogation demeure. C'est à l'usage et
à la pratique de ces trois commissions que nous verrons si,
effectivement, les buts visés par cette loi seront applicables.
Le deuxième élément majeur que contient ce projet
de loi est la nomination d'un président permanent. Je ne vais pas
prolonger davantage là-dessus en disant que je suis d'accord sur cette
position prise par le ministre et entérinée par l'Opposition.
Cela vise à améliorer le statut du président et le rendre
permanent de façon que celui-ci ait davantage un rôle à
jouer sur le plan régional, un rôle d'équilibre entre les
banlieues et la ville de Québec, un rôle d'équilibre entre
les municipalités intermédiaires et les petites
municipalités. Je pense que le fait de créer ce poste de
manière permanente permettra à l'individu qui occupera cette
fonction de mieux représenter et d'avoir une vision beaucoup plus
régionale de l'ensemble de l'administration de la CUQ que d'être
toujours forcé à se replier lui-même sur ses commettants et
les commettants qu'il représente.
Enfin, le dernier point concerne le comité exécutif qui
passe de sept à neuf personnes. La principale revendication faite par
les représentants des banlieues, au moment où je les ai
rencontrés, était effectivement dans le sens qu'ils ne se
sentaient pas impliqués ni représentés au comité
exécutif de la communauté urbaine. Par ce fait même, il y
avait un certain désintéressement. De plus, les
municipalités ou les villes de banlieue s'interrogeaient quant à
leur voix au chapitre à l'intérieur de la Communauté
urbaine de Québec.
En passant de sept à neuf personnes, cela permet aux villes de
banlieue de désigner deux personnes qui, dorénavant,
siégeront au comité exécutif de la Communauté
urbaine de Québec. Ce n'est pas ce qui va renverser toutes les
décisions de la Communauté urbaine de Québec mais, au
moins, je pense que l'on consacre dans le projet de loi l'obligation pour les
villes et les municipalités de banlieue d'être directement
impliquées au niveau du comité exécutif et, ainsi, de
tenter, à partir de leur argumentation et de leur vécu,
d'apporter des modifications ou d'apporter leur argumentation quant aux sujets
discutés au sein de l'exécutif. Je pense que c'est un pas en
avant. J'ai souscrit à cela lorsqu'on s'est rencontré. Je pense
que c'était nécessaire et que cela confirme aujourd'hui
effectivement qu'il fallait le faire pour s'assurer que ces villes de banlieue,
parmi les villes de l'Ancienne-Lorette, Cap-Rouge, Saint-
Augustin, Saint-Émile et Val-Bélair, aient un
représentant de ces municipalités qui siège au
comité exécutif de la communauté urbaine.
C'est donc un oui que nous adressons au ministre des Affaires
municipales quant à l'adoption du principe de son projet de loi en
deuxième lecture. En terminant, je voudrais adresser une mise en garde
envers ceux des maires de banlieue, qui sont venus nous rencontrer pour se
plaindre qu'ils n'étaient pas directement ou suffisamment
impliqués
au niveau du comité exécutif de la communauté
urbaine, de ne pas se servir de cette loi pour régler des comptes du
passé. Aujourd'hui, par l'adoption de ce projet de loi, c'est une page
qui se tourne au profit -il faut le dire - des villes de banlieue qui,
désormais, auront une place, un ou deux sièges au sein du
comité exécutif de la communauté urbaine. Il ne faudrait
surtout pas que cela serve de prétexte pour régler des comptes.
Comme le disait fort bien le député de Laprairie, il y aura, du
côté de l'Opposition, un amendement qui sera déposé,
lors de la commission parlementaire à l'étude article par
article, visant à s'assurer qu'il n'y ait pas ce genre de
règlement de compte.
C'est avec plaisir que nous voterons pour la deuxième lecture du
projet de loi 92.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Affaires municipales, votre droit de réplique.
M. Alain Marcoux (réplique)
M. Marcoux: M. le Président, je suis très heureux
que ce projet de loi reçoive l'assentiment unanime des membres de cette
Assemblée nationale. J'accepte volontiers le reproche du
député de Laprairie, à savoir que ce projet de loi a
été déposé tardivement, mais je dis que s'il a
été déposé tardivement, c'est
précisément que nous avions besoin de temps pour établir
le maximum de consensus possible, l'unanimité au sein des membres de la
Communauté urbaine de Québec pour déposer un projet de loi
sur lequel tous les partenaires seraient d'accord. Je crois pouvoir dire en
être arrivé à ce consensus sauf sur un point qui a
été abordé, c'est-à-dire le mode d'élection
à l'exécutif des deux représentants des neuf petites
villes de banlieue. Nous aurons certainement l'occasion, en commission
parlementaire, d'en discuter plus longuement.
Je dois dire que j'avais moi-même invité les
représentants à la fois de l'exécutif de la
Communauté urbaine de Québec et des petites villes de banlieue
à entrer en contact - il y a deux mois - avec l'Opposition pour
l'informer des problèmes qu'ils connaissaient, des solutions, des
modifications qu'ils souhaitaient à cette loi. Je savais très
bien, ayant été nommé ministre des Affaires municipales au
début du mois de mars, que je n'aurais pas le temps de déposer un
projet de loi avant la date statutaire ou réglementaire du 15 mai pour
que ce projet de loi soit adopté en troisième lecture avant la
fin de la présente session de l'Assemblée nationale. Je constate
que cette méthode a porté fruit et que, sur l'essentiel, sur
l'ensemble des points, sauf un, précis, nous sommes arrivés
à un accord de l'ensemble des parties.
Quant aux craintes soulevées par le député de
Laprairie concernant l'espèce de situation où il y aurait
plusieurs collèges électoraux, je dois dire qu'au lieu d'essayer
d'inventer ou de trouver une formule qui soit unique pour les
communautés urbaines, que ce soit la Communauté régionale
de l'Outaouais, la Communauté urbaine de Montréal, la
Communauté urbaine de Québec, j'ai pensé qu'il valait
mieux partir des faits, partir de l'histoire, partir de ce qui était
acquis dans chacun des cas, et trouver la meilleure formule qui convienne aux
circonstances actuelles. Quand on regarde l'historique de la Communauté
urbaine de Québec on constate, depuis quelques années, qu'il y a
une amélioration très claire de l'efficacité de cette
communauté, je dirais du "partnership" de l'ensemble des principales
villes de cette communauté.
Il y a une étape de plus qu'il faut franchir maintenant, et c'est
vraiment d'y associer les petites villes de banlieue. Là-dessus, j'ai
voulu m'assurer que, ni au conseil de la communauté ni à
l'exécutif de la communauté, les neuf petites villes de banlieue
ne puissent empêcher le fonctionnement de l'exécutif ou du conseil
de la communauté. J'ai voulu m'assurer cependant qu'elles puissent
participer à toutes les décisions et y participer au moment
où les enjeux sont importants, à chaque semaine, je dirais, au
moment où s'établit véritablement la concertation, et pas
simplement quelques fois par année pour être informées ou
pour ratifier les décisions de l'exécutif. Dans ce
sens-là, je crois que la formule qui est proposée est une formule
d'équilibre, en ce sens que les petites municipalités de banlieue
auront deux votes sur neuf à l'exécutif. Donc, elles ne pourront
pas bloquer le fonctionnement normal, le bon fonctionnement actuel de
l'exécutif, mais elles pourront y participer pleinement et elles seront
informées à chaque semaine des dossiers majeurs.
Deuxièmement, au conseil de la commmunauté, en plus du
vote à majorité, nous avons ajouté que cinq
municipalités sur treize devront voter pour une résolution pour
que cette dernière soit acceptée, ce qui signifie qu'au moins une
petite municipalité de banlieue aura à voter pour n'importe
quelle résolution ou n'importe quelle décision pour que cette
dernière entre en vigueur. Nous sommes assurés qu'au moins une
municipalité de banlieue votera pour une résolution pour que
cette dernière entre en vigueur, mais nous ne paralyserons pas le
travail de la communauté.
Je me joins au député de Charlesbourg relativement
à l'appel qu'il a lancé, à savoir qu'il ne faudrait pas
que cette nouvelle responsabilité ou cette nouvelle implication des
petites municipalités de banlieue soit le moyen de bloquer le
fonctionnement normal
de la Communauté urbaine de Québec, soit au niveau de
l'exécutif, soit au niveau du conseil de la communauté. Par les
contacts que j'ai eus avec l'ensemble des municipalités, je ne crois pas
que ce soit l'objectif visé. J'ai vraiment cru et je crois encore que
l'objectif visé par les petites villes de banlieue est de participer,
d'être impliquées dans cette concertation régionale et,
à ce moment, de pouvoir mieux expliquer les décisions de cette
communauté urbaine à leurs concitoyens de mieux faire partager
les décisions de la communauté urbaine à leurs concitoyens
plutôt que de simplement avoir à justifier ou à apprendre
par les journaux les décisions de la communauté urbaine. En ce
sens les formules proposées, comme l'ont dit les députés
de l'Opposition, permettent d'atteindre cet équilibre que nous
recherchons.
Voilà, M. le Président, pourquoi je pense qu'il faut
adopter cette loi apportant les modifications à la Loi sur la
Communauté urbaine de Québec.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Le principe du projet de
loi 92, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec
et d'autres dispositions législatives est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Blouin: M. le Président, je présente donc une
motion proposant que la commission de l'aménagement et des
équipements procède à l'étude
détaillée de ce projet de loi et ce, à compter de 20
heures, à la salle 91.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, nous abordons maintenant le
sujet touchant les partis politiques municipaux à Montréal,
Québec et Laval. À ce sujet, je vous demande d'appeler l'article
C) de la page 11 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 95 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous appelons donc
maintenant l'adoption du principe, M. le leader adjoint, du projet de loi 95,
Loi sur les budgets de recherche et de secrétariat des partis politiques
municipaux à Montréal, Québec et Laval. M. le ministre des
Affaires municipales.
M. Alain Marcoux
M. Marcoux: M. le Président, il me fait plaisir de
présenter en deuxième lecture l'adoption du projet de loi 95, Loi
sur les budgets de recherche et de secrétariat des partis politiques
municipaux à Montréal, Québec et Laval.
Encore là, voici un projet de loi qui fournit ou permet un
ajustement à la Loi sur la démocratie municipale, que cette
Assemblée nationale a déjà adoptée il y a
déjà quelques années et qui, c'est normal, demande
à être perfectionnée à l'usage. Peut-être
est-il utile de décrire le fil des événements pour
comprendre pourquoi nous en sommes à l'adoption de cette loi
aujourd'hui.
Il y a environ deux mois, peu de temps après ma nomination comme
ministre des Affaires municipales, les chefs de l'Opposition de
différents partis politiques municipaux dans tout le Québec
demandaient à me rencontrer pour me faire part de leur besoin d'un
budget de secrétariat et de recherche pour mieux accomplir leurs
fonctions dans l'objectif d'atteindre une meilleure démocratie
municipale et de mieux faire valoir les points de vue de l'Opposition dans les
débats très importants que mènent les grandes villes du
Québec pour leurs concitoyens. (16 h 50)
À ce moment, j'ai qualifié de liste d'épicerie les
demandes des partis d'opposition. Ils demandaient que nous précisions
dans la loi un paquet d'éléments: presque la grandeur des locaux,
le type d'instruments de secrétariat qu'ils auraient. En somme, on
demandait des précisions énormes, ce qu'on souhaitait, à
ce moment. J'avais indiqué dès cette première rencontre
que si je partageais leur objectif que les partis politiques municipaux, que ce
soit ceux qui sont au pouvoir ou dans l'opposition, disposent d'instruments de
recherche, d'instruments de secrétariat pour mieux accomplir leurs
fonctions, mais qu'il n'était certainement pas question de
préciser dans les détails, dans une loi adoptée par
l'Assemblée nationale la façon dont ils pourraient
bénéficier de ces instruments et que de toute façon, il
serait normal que je rencontre les maires de ces municipalités pour
connaître leur point de vue.
J'ai rencontré, dans une deuxième étape, les maires
des quatre municipalités du Québec très importantes:
Longueil, Laval, Montréal et Québec, pour connaître leur
point de vue sur la demande des partis
d'opposition, en particulier, des partis d'opposition au niveau
municipal et ces maires m'ont dit leur objection à la
présentation d'un projet de loi qui définirait des montants
d'argent qui devraient être disponibles pour le secrétariat
à la recherche et des modes de répartition de ces montants. Face
aux arguments des deux partis, j'ai poursuivi la consultation auprès de
mes collègues de l'Assemblée nationale et j'en suis venu à
la conclusion qu'il était important, pour chercher à
améliorer les modalités de l'exercice de la démocratie
municipale, que l'ensemble des partis autorisés qui agissent au niveau
des principales municipalités du Québec puissent disposer de
budgets de secrétariat et de recherche. C'est pourquoi, j'ai
déposé, aujourd'hui, à l'Assemblée nationale le
projet de loi 95 dont le principe est de reconnaître que pour les villes
de Québec, Montréal et Laval, les trois grandes villes du
Québec, les partis politiques municipaux autorisés ainsi que les
conseillers indépendants auront droit, à partir du 1er
juillet 1984, à des budgets de recherche et de secrétariat. Le
projet de loi, également, précise le minimum des crédits
qui pourront être alloués pour ces budgets de secrétariat
et de recherche et il indique également le mode de répartition de
ces budgets. Quant au minimum des crédits alloués, en fait ils
sont fort modestes. Pour Montréal ils correspondent à 1/30% du
budget de la ville de Montréal, c'est-à-dire à environ 400
000 $ par année sur un budget de 1 200 000 000 $. Pour Québec et
Laval, ils correspondent à environ 135 000 $ par année sur un
budget d'environ chacun 200 000 000 $ par année. Ce sont des budgets
modestes, mais la demande des partis d'Opposition au niveau municipal
était également dans ce sens.
Quant au mode de répartition, le mode retenu est également
très simple, c'est le suivant. Le parti politique autorisé qui a
le maximum de la majorité des conseillers municipaux obtient 51% du
budget de recherche et de secrétariat. Le deuxième parti qui a le
plus de votes et de conseillers obtient 10% comme minimum. Le troisième,
5%. La différence est répartie au prorata des conseillers de
l'Opposition y compris les conseillers indépendants. Voilà, le
contenu de ce projet de loi qui vise à assurer des crédits
minimums pour les fins de recherche de secrétariat pour tous les partis
politiques autorisés au niveau municipal dans les villes de
Québec, Montréal et Laval.
Il faut être très clair, ces budgets de recherche et de
secrétariat seront disponibles à la fois pour le parti qui a
obtenu la majorité au conseil et pour chacun des partis d'opposition qui
aura obtenu au moins 10% du vote et un conseiller élu. Les conseillers
indépendants auront également droit à une part de ce
budget de recherche.
L'ordre de grandeur des montants impliqués, je l'ai
indiqué au minimum. Évidemment, les municipalités seront
libres d'y ajouter. Au minimum, pour Montréal, c'est environ 400 000 $
sur un budget de 1 200 000 000 $; pour Laval et Québec, c'est environ
135 000 $ pour un budget respectif d'environ 200 000 000 $. Ce projet de loi,
s'il est adopté par cette Assemblée nationale, ce que je
souhaite, d'ici à la fin de cette session, entrera en vigueur le 1er
juillet 1984, ce qui signifie que, pour les six mois de l'année
financière qui restent à courir pour les municipalités,
c'est la moitié de ces sommes qui devra être assumée par
les municipalités, ce qui représente environ 200 000 $ pour
Montréal, 65 000 $ pour Laval et Québec respectivement,
c'est-à-dire environ 330 000 $ au total, alors que les surplus
accumulés de ces municipalités étaient de 106 000 000 $
l'an dernier. Je ne pense pas que 330 000 $ pris à même le fonds
régulier de fonctionnement des municipalités, par rapport
à des surplus accumulés de 106 000 000 $ pour l'ensemble de ces
trois municipalités, occasionnent des problèmes du
côté de la satisfaction de ce besoin financier dès cette
année.
Comment concilier - je pense que c'est la question fondamentale -
l'adoption de ce projet de loi ou la présentation de ce projet de loi
avec l'affirmation répétée du gouvernement actuel de
favoriser l'accroissement de l'autonomie municipale? Certains pourront y voir
un problème. Personnellement, j'ai dû réfléchir
à l'ensemble de cette question. Je me suis convaincu que si, dans
l'ensemble de l'activité municipale, des responsabilités
municipales, le gouvernement doit tout faire pour laisser le maximum de marge
de manoeuvre à chacune des municipalités, parce que les besoins
des municipalités, les services que désirent les citoyens d'une
municipalité à l'autre varient, il reste qu'au niveau des
conditions d'exercice général de la démocratie dans le
milieu municipal, il y a une responsabilité évidente de cette
Assemblée nationale. C'est ce que nous avons fait lorsque nous avons
adopté ensemble la loi 105 il y a quelques années, lorsque nous
avons prévu le financement des partis politiques municipaux, lorsque
nous avons prévu la reconnaissance des partis politiques municipaux qui
peuvent être des partis politiques autorisés au sens de la loi sur
les partis politiques municipaux, lorsque nous avons adopté la loi sur
les salaires pour les conseillers et les maires dans chacune des
municipalités, lorsque, pour la Communauté urbaine de
Montréal, comme nous le ferons d'ici à la fin de la
journée pour la Communauté urbaine de Québec, nous avons
prévu la création de commissions permanentes, afin de permettre
aux citoyens de s'exprimer publiquement sur les dossiers
majeurs de la municipalité, lorsqu'on a eu à
prévoir ensemble des mécanismes minimums pour faciliter
l'exercice de la démocratie municipale, et l'Assemblée nationale
n'a pas craint d'agir.
Je veux être très clair, M. le Président, je ne
voudrais pas indiquer qu'il n'y a pas, actuellement, de démocratie
municipale à Laval, à Montréal, à Québec. Ce
que je veux indiquer et, je pense, ce que veut indiquer ce projet de loi qui,
je le souhaite, sera adopté à l'unanimité de
l'Assemblée nationale, c'est simplement de créer des
modalités d'exercice de cette démocratie qui soient plus
favorables à l'expression de tous les points de vue dans les conseils
municipaux d'aussi grande importance que ceux de Montréal, Québec
et Laval.
En ce qui me concerne, je pense qu'on peut concilier le principe de
l'autonomie municipale avec la décision que je propose qui est
d'indiquer dans la loi des conditions minimales des services qui doivent
être donnés dans chacune de ces municipalités à
chacun des partis politiques municipaux qui y travaillent et qui sont
autorisés. Voilà, M. le Président, pour l'essentiel de ce
projet de loi. (17 heures)
Une autre question à laquelle il est important de répondre
est celle-ci: Pourquoi ce projet de loi s'adresse-t-il à
Montréal, Québec et Laval seulement? Évidemment, plusieurs
motifs nous ont fait choisir d'adopter cette loi pour ces trois villes. D'abord
ce sont les trois grandes villes du Québec. Le budget de Montréal
est de 1 200 000 000 $, celui de la ville de Laval d'environ 200 000 000 $ et
celui de Québec également de 200 000 000 $. Ce sont les trois
villes qui représentent le plus de citoyens au Québec. En ce
sens, c'était là qu'il fallait commencer à agir dans ce
secteur.
Montréal et Québec sont également les deux grandes
villes du Québec où ne s'appliquent pas automatiquement
l'ensemble des lois adoptées par l'Assemblée nationale. Ces deux
villes ont des chartes particulières et, lorsqu'elles le
désirent, c'est à leur demande que nous intégrons des lois
générales pour qu'elles soient mises en vigueur dans ces deux
municipalités. Laval, également, qui est assujettie à la
loi générale, la Loi sur les cités et villes, a plusieurs
clauses particulières dans sa charte qui font que, à
l'évidence même, sans grande justification, il est évident
que ces trois grandes villes constituent, pourrait-on dire, trois cas
particuliers dans la vie urbaine, la vie municipale du Québec. En ce
sens, il est logique, il est justifié pour l'Assemblée nationale
de faire en sorte que les premières expériences, ou l'application
de cette loi se fasse d'abord dans les trois grandes villes du
Québec qui regroupent la plus grande partie de la population et
qui ont les plus grands budgets à administrer. Lorsqu'on compare
à 1 200 000 000 $ les 155 000 $ environ qui seront consacrés
comme budget à un parti d'opposition, le Rassemblement des citoyens de
Montréal, par exemple, ou les 55 000 $ du GAM, le Groupe d'action
municipale de Montréal, on parle de budgets quand même marginaux
et je pense qu'on peut parler de services minimaux de recherche et de
secrétariat. Lorsqu'on parle de 65 000 $, 67 000 $, 63 000 $ environ
à Québec ou à Laval pour les partis d'opposition et
environ le même montant pour le parti politique au pouvoir, on part quand
même de budgets minimaux: 65 000 $ par rapport à 200 000 000 $,
c'est quand même marginal par rapport au budget de l'ensemble de ces
municipalités.
M. le Président, je propose donc à cette Assemblée
nationale d'adopter le projet de loi 95 qui a pour but de doter les partis
politiques municipaux de Québec, de Montréal et de Laval de
budgets annuels minimaux de recherche et de secrétariat et d'indiquer le
mode de répartition de ces budgets qui assure 51% du budget au parti qui
est au pouvoir, le reste étant réparti entre les conseillers
indépendants et le ou les partis d'opposition.
Bien sûr, nous n'en serions probablement pas là si ces
trois villes avaient réussi à s'entendre avec leurs partis
d'opposition. Cela n'a pas été possible dans le cas de la ville
de Montréal malgré l'adoption de la loi en décembre
dernier obligeant la ville de Montréal à consacrer des budgets de
recherche et de secrétariat à chacun des partis politiques
municipaux représentés.
Nous aurions probalement tous préféré nous en tenir
à une loi habilitante ou à une loi qui aurait obligé les
municipalités à consacrer des budgets de recherche et de
secrétariat; mais l'expérience de la ville de Montréal,
entre autres, nous a convaincus qu'il était important de préciser
dans la loi des montants minimaux et un mode de répartition qui, je
pense, ne sont aucunement abusifs, mais, au contraire, vont permettre
l'exercice, vont faciliter l'exercice du débat démocratique dans
l'ensemble de ces municipalités. Il est bien clair que la
démocratie ne commencera pas dans ces municipalités à
partir de l'adoption de ces projets de loi. Je considère qu'il y a
toujours eu un débat démocratique et une vie démocratique
dans chacune de ces municipalités. Il s'agit ici - c'est notre
rôle - de mesurer, entre autres, à l'Assemblée nationale
s'il y a des moyens plus propices à l'exercice de cette
démocratie et les modalités qui permettraient de
l'accroître encore davantage. C'est ce que nous cherchons chaque jour
ici, à l'Assemblée
nationale pour les partis politiques mêmes qui gouvernent
l'ensemble du Québec, et c'est ce que nous souhaitons également
pour l'amélioration de la démocratie municipale dans chacune des
municipalités du Québec, et aujourd'hui plus
particulièrement, pour les trois grandes villes du Québec. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laprairie.
M. Jean-Pierre Saintonge
M. Saintonge: Je vous remercie, M. le Président. Donc, il
s'agit de l'adoption du principe du projet de loi sur les budgets de recherche
et de secrétariat des partis politiques municipaux à
Montréal, Québec et Laval.
C'est le deuxième projet de loi cet après-midi dans le
domaine des affaires municipales. Je peux commencer un peu de la même
façon que lors du premier projet de loi. Le ministre a lui-même
mentionné qu'il avait déposé le projet de loi
officiellement ce matin, avec un avis au feuilleton vendredi dernier, et nous
devons l'adopter avant la fin de la session dans les deux prochaines
journées. C'est assez rapide, évidemment. C'est rapide. On a
parlé d'efficacité, mais je peux en douter. Ce que je veux
soulever au niveau du projet de loi...
Il reste quand même qu'une cloche avait été
sonnée vis-à-vis de ce que le ministre avait mentionné au
point de vue de la démocratie municipale, à savoir d'assurer aux
conseillers municipaux de l'opposition de pouvoir agir d'une façon plus
efficace. J'en suis, mais une cloche avait été sonnée au
mois de décembre dernier lors de la discussion des amendements à
la charte de la ville de Montréal. À ce moment-là, un
projet de loi ou des amendements à la charte de la ville de
Montréal, afin de couvrir exactement ce que le présent projet de
loi allait couvrir, avaient été demandés par les partis
d'opposition au conseil municipal de la ville de Montréal.
Malheureusement, à ce moment-là... Je dis "malheureusement"... Ce
qu'il faut dire, ce qui est arrivé à ce moment-là, c'est
la reconnaissance du principe que les conseils, les conseillers municipaux et
les partis d'opposition, et également les conseillers municipaux... Le
point de vue qu'il faut débattre, ce n'est pas simplement au niveau des
partis d'opposition... C'est au niveau des conseillers municipaux
eux-mêmes, membres dans certains cas de partis politiques et dans
d'autres cas indépendants: que ces conseillers municipaux puissent
éventuellement avoir accès à un certain fonds pour faire
leur travail de façon plus efficace... Donc, on avait discuté du
principe de la chose en décembre, au niveau des représentants de
la ville de Montréal, au niveau de la mairie, au niveau des partis
d'Opposition. Le gouvernement, par la voix du ministre et même
l'Opposition reconnaissaient qu'il était souhaitable, que les
conseillers municipaux puissent effectivement avoir droit à certains
montants d'argent aux fins de services de recherche ou de secrétariat
pour faciliter leur travail.
Pourquoi cette chose-là? Je crois que cela peut facilement
s'expliquer au niveau de la démocratie municipale et finalement, au
niveau des conseils municipaux eux-mêmes. On sait qu'il y a un
intérêt de plus en plus grand pour la politique municipale. Cet
intérêt, je pense, au cours des dernières années, a
augmenté sensiblement, non seulement à Montréal, mais dans
l'ensemble des municipalités du Québec. On peut regarder plus
spécifiquement au niveau du projet de loi les grandes villes comme
Montréal, Québec et Laval puisque ce sont, à toutes fins
utiles, les trois plus grandes villes du Québec tant au point de vue de
la population qu'au point de vue des budgets à gérer par les
administrateurs municipaux.
Si on dit que l'intérêt pour la politique municipale a
augmenté, cela suppose qu'on demande évidemment, à ce
moment-là, aux oppositions qu'elle présentent, si on veut, des
politiques plus articulées, des alternatives valables à ce que le
parti au pouvoir peut présenter, qu'elles critiquent de façon
constructive ce qui se passe au niveau de l'administration municipale. Dans ce
sens, il est évident que si on demande aux élus municipaux une
plus grande participation au débat, une participation plus efficace, une
participation beaucoup plus éclairée, il va de soi que nous
devons donner certains outils nécessaires pour permettre de remplir
adéquatement le mandat qu'on veut confier aux élus municipaux.
Dans ce sens, si on peut en arriver à donner aux conseillers municipaux
les outils nécessaires pour remplir plus efficacement leur mandat, je
pense que c'est une amélioration qui va s'ensuivre dans le processus
démocratique municipal. (17 h 10)
Aussi, dans les grandes villes comme Montréal, Québec et
Laval, il va de soi que les affaires sont de plus en plus complexes et
nombreuses. Nous connaissons la prolifération des lois municipales, de
la réglementation qui s'applique dans le domaine municipal, des points
où les membres des conseils municipaux doivent se tenir de plus en plus
à l'affût de toute nouvelle dans ces domaines. C'est donc
nécessaire dans les circonstances de faire en sorte que ces
gens-là puissent remplir efficacement leur mandat. C'est pourquoi
finalement, dans les grandes municipalités du Québec comme dans
l'ensemble du monde municipal, on reconnaît le principe de faire en sorte
que les conseillers municipaux puissent remplir leur mandat de façon
plus efficace en leur
permettant d'avoir les moyens de le faire.
Cependant, il faut se rendre compte d'une chose. Le principe est
là mais la façon d'arriver à cela pour fixer le montant...
De quelle façon allons-nous déterminer le montant applicable aux
services dont les conseillers peuvent avoir besoin, soit au point de vue de la
recherche ou du secrétariat? De quelle façon, ces montants, une
fois déterminés, seront-ils distribués aux
différents partis municipaux de même qu'aux différents
conseillers municipaux? C'est le problème qui demeure entier. En
décembre, quand j'ai mentionné que la cloche avait sonné,
puisqu'au niveau du principe, on reconnaissait à Montréal la
nécessité d'offrir des services de recherche et de
secrétariat aux conseillers, il restait que, sur le point de vue de la
répartition du montant, il n'y avait pas d'entente entre les partis.
C'est à ce moment-là que le gouvernement doit trancher la
question, même si c'est clair quant au principe. Quant aux
modalités, nous devrons être saisi d'un projet de loi qui viendra
fixer ces modalités d'application dans le cadre de la fixation des
montants pour les budgets de recherche. Évidemment, nous sommes en face
de situations où les partis qui sont au pouvoir dans les trois
municipalités concernées, Montréal, Laval et
Québec, ont une certaine conception, une certaine façon de
régler le problème alors que les partis d'opposition en ont une
autre. Je pense que c'est le rôle du législateur de trancher la
question. Nous avons donc devant nous le projet de loi qui fait en sorte que le
ministre propose effectivement de fixer par une loi le montant alloué,
aux partis politiques ainsi qu'aux conseillers municipaux, pour les budgets de
recherche et de secrétariat, avec une modalité de
répartition.
Je vous dirai, concernant le projet de loi présenté, que
si des montants sont fixés, dans le cas de Montréal, c'est 1/30%
du budget global de la municipalité; dans les cas de Laval et de
Québec, cela représente 1/15% du budget; il reste en soi que ces
montants sont quand même relativement importants: 408 000 $ pour la ville
de Montréal et 131 000 $ à 133 000 $ pour les villes de Laval et
de Québec. Ce ne sont pas des montants dérisoires. Ces montants
ne sont pas des montants qu'on donne impunément aux partis d'opposition
pour s'en servir comme bon leur semble. Ce sont des montants qui pourront
être utilisés en partie par les conseillers du parti qui est au
pouvoir dans chacun des cas et une autre portion pour les conseillers
d'opposition à être séparée entre les gens qui
seront membres des partis d'opposition officielle ainsi que les conseillers
indépendants. Mais ces montants devront cependant être
réclamés, selon le texte même de la loi, et seront
remboursés sur présentation d'état de compte.
Donc, les conseillers municipaux ou les partis municipaux qui viendront
réclamer un certain montant seront soumis à produire des comptes
qui pourront démontrer réellement que les dépenses
encourues, tant au plan du secrétariat que de la recherche, couvriront
bien des dépenses encourues dans le cadre de leur mandat. Je pense qu'il
est important de souligner ce point puisque le rôle d'un conseiller
municipal, dans l'exercice de son mandat, c'est de vérifier
l'administration de la chose publique, l'administration municipale, et cela
demeure dans un cadre spécifique. Il ne faudrait pas, à ce
moment-ci - c'est peut-être le danger qui est craint par les partis qui
exercent le pouvoir dans les municipalités - en arriver à ce que
ces montants d'argent soient utilisés à des fins de partisanerie
politique pour discussion de grands principes et ne pas prévoir ces
montants pour la surveillance du mandat même qu'on confie aux
conseillers, la surveillance des budgets municipaux, l'administration
municipale courante.
Dans ce sens-là, considérant l'intérêt qu'on
porte de plus en plus à la chose municipale, considérant ce que
l'ensemble de la population exige des conseillers municipaux dans le cadre de
leurs fonctions, considérant que, dans les grandes villes du
Québec, les problèmes sont complexes et que les affaires sont
aussi nombreuses, considérant que les citoyens désirent que les
conseillers jouent leur rôle efficacement, positivement à
l'égard de l'ensemble de la société, relativement aux
critiques que les conseillers municipaux sont appelés à subir -
on requiert qu'ils soient au courant de la situation relatée dans les
journaux; c'est facilement compréhensible; les gens de la presse suivent
les débats des conseils municipaux et rendent compte des discussions qui
y ont lieu - ils vont pouvoir examiner et juger les critiques que l'opposition
apporte. Si on veut que l'opposition apporte des critiques constructives eu
égard à l'ensemble de leurs fonctions, il m'apparaît
essentiel, au niveau du principe, de faire en sorte qu'on puisse leur accorder
un montant pour faire face à cette situation.
Évidemment, M. le Président, on peut mentionner en
contrepartie que les conseillers municipaux ont un salaire qui peut varier. Par
exemple, à Québec, c'est 15 000 $; à Montréal,
c'est environ 21 000 $. Est-ce que ces salaires sont suffisants pour remplir
l'ensemble de la fonction qu'on veut décrire? Dans le cas
présent, du point de vue de l'Opposition, nous considérons que si
nous voulons protéger l'accessibilité aux charges municipales et
conserver l'intérêt des gens à participer aux
activités municipales, pour le travail qu'ils peuvent accomplir, il y
ait une certaine rémunération qui s'ensuive, mais que cette
rémunération ne doit pas servir uniquement à payer
certains frais qu'ils devront encourir dans le cadre de leurs fonctions,
c'est-à-dire des frais de recherche et également des frais de
secrétariat. La rétribution du conseiller municipal vaut pour le
travail qu'il a à accomplir, pour certains déplacements et
certaines dépenses qu'il a à faire dans le cadre de ses
fonctions. Il m'apparaît essentiel, pour garantir à ces
conseillers municipaux un soutien efficace, de voter un certain montant
précisément pour leur permettre d'arriver à leurs fins, de
faire un travail fort efficace.
C'est dans ce sens-là que l'Opposition appuiera le projet de loi
95 proposé par le ministre des Affaires municipales. Donc, le principe
est reconnu, mais quant à fixer le montant et le mode de
répartition, le législateur devant intervenir, devant prendre ses
responsabilités, nous sommes d'accord avec son attitude dans ce cas
présent pour les trois grandes villes mentionnées:
Montréal, Laval et Québec.
Quant aux autres municipalités, le ministre en a parlé
tantôt. Je vous dirai, M. le Président, que nous aurions
été fort suspects de vouloir introduire beaucoup plus de
municipalités - surtout les municipalités ayant un conseil
exécutif - d'une façon globale, puisqu'il m'apparaît plus
conséquent d'examiner le cheminement de ce projet de loi pour les trois
grandes villes du Québec. Pour les autres municipalités du
Québec, du point de vue de l'Opposition, nous ne croyons pas qu'il soit
nécessaire d'y pousser, au niveau des partis municipaux, des rôles
d'opposition dans le sens de partis qui se font face au niveau municipal,
même pour celles qui ont un comité exécutif par charte ou
qui se sont dotées d'un comité exécutif en vertu des
dispositions applicables de la Loi sur les cités et villes. Dans ce
sens-là, nous sommes heureux que le ministre s'en soit tenu aux trois
principales villes concernées. (17 h 20)
Je dois dire ici, M. le Président, qu'il faut faire attention
à l'ensemble des municipalités du Québec, et c'est un peu
le cas pour ces trois villes. Généralement, quand on fonctionne
par parti politique comme tel, si des partis politiques sont clairement
identifiés dans l'ensemble des municipalités du Québec, il
y a plusieurs municipalités où on retrouve un minimum de deux
partis politiques. On arrive malheureusement à créer dans
certains cas -c'est ce qu'on entend dans le monde municipal, ce qui peut se
vérifier - trois classes de conseillers, surtout dans les villes avec
exécutif, c'est-à-dire les conseillers qui seront membres de
l'exécutif, les conseillers qui seront membres du parti au pouvoir et,
finalement, les conseillers qui seront de l'opposition puisque ces trois
catégories de conseillers n'auront pas accès de la même
façon aux mêmes services au point de vue de la municipalité
par rapport à l'ensemble des fonctionnaires municipaux, par rapport
à l'ensemble des services que la municipalité gère
elle-même. Il va de soi qu'au niveau du comité exécutif
c'est plus restreint comme groupe. On a plus facilement accès à
certains services de l'hôtel de ville, on a accès à des
études plus familières dans des points particuliers que le
conseil municipal veut faire opérer. On a donc une décision
à prendre au niveau de l'exécutif et cela crée une
certaine catégorie de conseillers à ce niveau.
Maintenant, les conseillers qui sont au pouvoir et non membres de
l'exécutif ont des fonctions peut-être moins importantes. On
semble attacher moins d'importance aux fonctions de ces conseillers puisqu'ils
ne participent pas directement aux prises de décision, aux
comités décisionnels pour amener les décisions du conseil
municipal mais ils participent lors de discussions au conseil dans certains cas
ou lors de l'adoption d'un projet de règlement. Il reste quand
même qu'ils ne suivront généralement pas tout le processus
de décision.
Quant aux conseillers de l'opposition, dans ces cas, on sait fort bien
qu'entre l'opposition, le parti au pouvoir et les autres conseillers, il se
crée quand même un certain affrontement qui fait en sorte que -
c'est vérifié dans plusieurs municipalités - dans
certaines situations, cela a amené certains conflits ou certaines
récriminations de conseillers de l'opposition quant aux services dont
ils pouvaient bénéficier, par rapport aux demandes de
renseignements, par rapport aux informations qu'ils voulaient solliciter des
officiers de la ville ou même des membres de l'exécutif.
Je crois qu'à ce moment-ci, nous devons reconnaître cette
situation et permettre aux grandes villes du Québec, aux conseillers de
l'opposition, d'avoir un certain budget alloué à la recherche, au
secrétariat, qui leur permettra de pallier certaines
difficultés.
En conséquence, M. le Président, je répète
que l'Opposition donne son accord au projet de loi 95 pour les motifs que j'ai
énoncés précédemment. En terminant, je
répéterai ici que ce projet de loi est malheureusement
arrivé en fin de session. Nous sommes un peu bousculés par le
temps. Le projet de loi a été finalement déposé ce
matin lors de l'ouverture de l'Assemblée et nous avons finalement le
texte de loi dans les mains.
De mon côté, j'aurais fort bien aimé -c'est la
même chose pour mes confrères de l'Opposition - entendre les
représentations sur les conséquences d'un tel projet de loi, de
tous ceux qui sont concernés, c'est-à-dire des membres des partis
qui détiennent le
pouvoir dans les villes de Montréal, Laval et Québec.
J'aurais fort apprécié, dans un tel cas, qu'on puisse entendre en
commission parlementaire l'opinion des représentants des partis
municipaux au pouvoir dans ces trois villes.
J'aurais également aimé qu'on puisse entendre publiquement
les représentations d'autres instances au niveau des partis de
l'opposition dans les villes puisque, j'en suis, généralement les
partis d'opposition seront fort heureux de ce projet de loi. Nous savons, par
exemple, qu'à Montréal il y a certaines représentations
des partis d'opposition. Il y a le GAM, il y a aussi le RCM. Mais il y a
certains points qui étaient flottants dans le cas de certains partis sur
lesquels on n'était pas tout à fait fixé sur des
modalités intégrées au projet de loi.
Il aurait été intéressant d'entendre les
représentations de ces personnes. Malheureusement, le temps nous
pressant, nous devons arriver plus rapidement à l'adoption d'un tel
principe du projet de loi mais tout en déplorant cependant cette
situation, tout en demandant au ministre, comme je l'ai noté
tantôt, au projet de loi précédent, qu'à
l'avenir on puisse avoir un délai suffisant pour examiner la situation.
Dans le cas présent, depuis décembre dernier, on savait que la
chose pouvait être possible. Le ministre aurait dû préparer
le terrain pour ne pas arriver en juin avec un tel projet de loi, aurait
dû tenter de pousser une situation, d'amener une situation, de proposer
des modalités d'entente aux conseils municipaux, de proposer son projet
de loi dans un délai suffisant pour permettre la consultation de toutes
les personnes concernées. Ce n'est pas le cas. Nous ne pouvons que le
déplorer.
Nous répétons ici que pour la démocratie
municipale, dans le sens d'assurer une plus grande efficacité de
réalisation du mandat des conseillers municipaux, nous voterons pour le
projet de loi 95. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Mes collègues savent combien je souhaitais une
telle loi, combien je la considère légitime. Je pense que par ce
projet de loi 95, Loi sur les budgets de recherche et de secrétariat des
partis politiques municipaux de Montréal, Québec et Laval, nous
venons, en quelque sorte, parachever un certain nombre de mesures qui ont
permis une relative démocratisation de la vie politique municipale au
Québec. Je pense que c'est tout à l'honneur de l'actuel ministre
des Affaires municipales, comme cela a été le cas pour ses
prédécesseurs. Je vais faire mention rapidement de l'ensemble de
ces mesures qui ont amené cette démocratisation. C'est tout
à son honneur d'avoir réussi en un laps de temps relativement
court à présenter ce projet de loi devant l'Assemblée
nationale.
Vous savez, c'est en février 1976 qu'un groupe de travail sur
l'urbanisation présidé par M. Claude Castonguay, qui a
siégé ici même à l'Assemblée, remettait son
rapport, qui concluait à la nécessité des partis
politiques municipaux et à la nécessité d'assurer à
ces partis politiques les moyens appropriés pour exercer des droits
qu'on entendait dorénavant leur reconnaître. À cet
égard, le groupe de travail écrivait: "Parmi les moyens qui
doivent être mis en place pour stimuler la création, faciliter
l'existence des partis politiques, nous croyons que la question du financement
est primordiale. À ce sujet, des modes de financement publics
s'inspirant de ceux développés aux deux autres paliers de
gouvernements doivent être mis en place. Les montants requis seront
largement compensés par les avantages et les meilleurs contrôles
qui résulteront de l'existence de partis politiques municipaux
dynamiques." C'était dans le rapport du groupe de travail publié
en février 1976.
Depuis cette date, nous savons que les prédécesseurs de
l'actuel ministre des Affaires municipales ont fait adopter par cette
Assemblée de très nombreuses mesures, notamment: la
reconnaissance des partis politiques municipaux eux-mêmes,
l'assujettissement à la Loi sur le financement des partis politiques
dans le cadre des élections municipales, le remboursement partiel des
dépenses électorales, la reconnaissance du principe d'un
conseiller par district - ce qui assure une présence plus
adéquate d'un conseiller, contrairement à ce qui était le
cas auparavant où on retrouvait trois conseillers pour couvrir un
district d'une très grande étendue - la tenue d'élections
complémentaires lorsqu'il y a des sièges vacants - justement,
Montréal, dernièrement, a vu l'élection du
président du principal parti d'opposition à Montréal lors
d'une telle élection complémentaire - la fixation de la
rémunération minimum des élus. Dans ce cas,
l'Assemblée nationale aurait pu laisser à l'initiative des
municipalités de fixer la rémunération des conseillers
municipaux ou des élus. Je pense que c'était la
responsabilité de l'Assemblée nationale de fixer cette
rémunération qu'on retrouve maintenant dans la Loi sur les
cités et villes. Il faudrait ajouter à cela les commissions
permanentes publiques dans les communautés urbaines. Il faudrait ajouter
à cela les programmes triennaux d'immobilisations qui permettent
maintenant de voir venir les investissements qui se font dans les
municipalités.
L'ensemble de ces mesures ont notamment reconnu l'existence
légale de
partis politiques municipaux dans les grandes villes et assuré
une rémunération des conseillers, des conseillères, des
maires, etc., qui sont de plus en plus nombreux. On sait que cette
rémunération maintenant est réévaluée et
statutairement indexée. Maintenant, les partis ont donc droit à
un remboursement partiel de leurs dépenses électorales.
Cependant, entre les élections, il faut bien reconnaître que la
situation était toute autre puisque entre les élections, les
élus municipaux ne jouissaient d'aucune mesure leur permettant d'exercer
adéquatement les droits qui leur avaient été
conférés par toutes ces réformes dans le domaine de la
démocratisation municipale. (17 h 30)
Il faut reconnaître que le présent projet de loi est sans
doute un de ceux qui ont le plus fait l'unanimité avant même son
dépôt, particulièrement dans les médias. Je relevais
l'ensemble des éditoraux qui ont été écrits sur
cette question, celui de Claude Masson du Soleil, justement dans Le Soleil du
21 avril 1982, celui de Guy Pinard de la Presse du 17 novembre 1982, celui de
Jean-Louis Roy du Devoir du 17 novembre 1982, ceux de la Gazette du 2
février 1983, du 23 janvier 1984, celui de Michel Roy,
éditorialiste à la Presse, du 23 janvier 1984 qui notamment
écrivait ceci: "II s'agit de savoir en somme si les conseillers,
à quelque parti qu'ils appartiennent, seront équitablement
soutenus par les fonds publics dans l'exécution de leur mandat qui, de
plus en plus, s'apparente à celui des députés, puisqu'il a
lui-même, en 1960, créé le régime des partis..." M.
Michel Roy de la Presse invitait le maire de Montréal à souscrire
en bonne logique et à faire un accueil favorable à une loi en
matière de financement de services aux conseillers municipaux. C'est
donc dire, M. ,1e Président, que les éditoraux se sont
additionnés sur cette question, souhaitant tous voir rapidement le jeu
électoral soumis, une fois l'élection terminée, à
un exercice plus démocratique, parce que assuré des garanties
d'un financement adéquat permettant des ressources qui sont
indispensables maintenant, compte tenu de la complexité des
problèmes et des dossiers auxquels ont à faire face les
conseillers municipaux.
On pourrait citer aussi d'autres éditoraux, notamment
l'éditorial de Marcel Adam qui, à de nombreuses occasions, a
répété dans la Presse la nécessité d'assurer
une attitude généreuse à l'égard des partis
municipaux et de leurs représentants et, notamment, des
représentants des partis d'opposition. Vincent Cliche, pour terminer sur
cette revue d'éditoriaux, M. le Président, écrivait
très récemment, en avril 1984: "Les réformes
amorcées demandent à être complétées.. La
réforme de la démocratie municipale doit aller plus loin." Il
invitait rapidement le législateur à saisir l'Assemblée
nationale de dispositions qui permettaient et qui vont permettre
dorénavant des budgets de recherche et de secrétariat
adéquats pour les partis politiques des villes de Montréal,
Québec et Laval.
Vous savez, M. le Président, cela existe ailleurs. Je lisais
dernièrement l'ensemble des services disponibles pour les membres du
Conseil municipal de Toronto. On sait qu'en Ontario, les partis politiques ne
sont pas reconnus juridiquement, mais les conseillers, à titre
individuel, reçoivent de très nombreux services. Par exemple,
dans la ville de Toronto, il y a 22 conseillers municipaux et chacun des
conseillers a son propre bureau qui est situé dans l'hôtel de
ville même; chaque conseiller a à sa disposition un personnel de
secrétariat, de recherchistes. Il peut bénéficier de tout
le soutien nécessaire qui est fourni par la ville en termes de
photocopie, de service postal, de service d'impression. Il y a également
un service de voitures qui est mis à la disposition des conseillers de
façon à leur permettre de se déplacer pour rencontrer
leurs électeurs et ils ont accès à des banques de
données dans l'ordinateur central de la ville de Toronto. Ils ont
même un équipement que nous n'avons pas encore à
l'Assemblée nationale, c'est-à-dire des écrans cathodiques
dans leur bureau, et ils peuvent ainsi disposer d'informations, d'un
accès direct à des dossiers, ce qui doit certainement contribuer
à rendre leur travail plus efficace.
M. le Président, je pense que ce projet de loi s'impose d'autant
plus lorsqu'une ville se donne un comité exécutif, comme c'est le
cas à Québec, Montréal et Laval. J'espère que cette
loi aura un effet d'entraînement pour des municipalités de plus
petite taille, mais qui ont elles-mêmes des conseils exécutifs,
parce qu'il faut reconnaître qu'à partir du moment où des
conseillers municipaux deviennent membres de conseils exécutifs,
d'abord, ils jouissent d'une rémunération supplémentaire
intéressante, mais ils ont aussi accès à du personnel
politique, que l'on pense à des recherchistes, à du personnel de
presse, à du personnel de secrétariat. Leur fonction comme membre
d'un conseil exécutif leur donne accès à de l'information,
à des ressources que les autres conseillers n'ont pas. À partir
du moment où on introduit un conseil exécutif, d'une certaine
façon on introduit une forme de parlementarisme. On se retrouve avec un
exécutif et avec un législatif qui a à examiner des
propositions et qui doit pouvoir le faire en connaissance de cause. Maintenant,
la population s'attend que l'opposition présente des critiques
constructives, que l'opposition propose des alternatives. Cela suppose - c'est
maintenant légitime - d'assurer à toute opposition la
capacité de répondre adéquatement à ces
attentes de la population.
M. le Président, je pense que le présent projet de loi -
je crois comprendre qu'il y aura unanimité de la Chambre en sa faveur
-transcende dans une large mesure l'appartenance partisane dans le sens
où il s'agit là de droits fondamentaux et il s'agit surtout de
leur exercice. C'est à l'unanimité, je crois entendre, que nous
aurons la possibilité d'adopter le présent projet de loi. Je
souhaite qu'on puisse, dans une éventuelle réforme de la Loi sur
les cités et villes, peut-être pas établir un mode de
partage pour l'ensemble des municipalités du Québec cela
deviendrait certainement difficile d'application - mais habilitera les villes
à pouvoir mettre à la disposition des conseillers municipaux des
services de recherche, des services de documentation, en espérant que le
présent projet de loi aura un effet d'entraînement dans l'ensemble
des municipalités du Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: M. le Président. The purpose of Bill 95 is to
oblige the municipal Governments of Montreal, Laval and Quebec City to provide
funds for research facilities for the members of its own party and for members
of the opposition party.
I would like to say right at the beginning that the Opposition here in
the National Assembly is in favor of this Bill. It is meant in no way as an
effort to favor one political party at the expenses of another. This is a Bill
whose purpose is to favor the parliamentary process, to favour the work of each
individual councilor in a job which is becoming more and more difficult with
every passing year.
Just to give you an idea of the size of the budget of Montreal, for
instance, if you take the city of Montréal and the other cities in the
Metropolitain Community, and the community itself, you have a budget well over
2 000 000 000 $ a year which is a budget that is about the same size as the
budgets of Manitoba, New-Brunswick, Newfoundland, Nova Scotia and even
Saskatchewan. In fact, there are probably only four provinces in Canada that
today have a larger expenses budget than the area of greater Montréal
and I am not even including Laval.
You have items in the Montreal budget like such cleaning the streets or
administration which amount to over a 100 000 000 $ a year. At the present
time, the City councilors, apart from the members of the Government itself are
totally unequipped to study the projects which are brought forward by the
Government, examine them and evaluate them and make a sensible reasoned
criticism. To give you only one example, imagine the situation that existed a
few weeks ago when the Cadillac Fairview project was presented in Montreal. The
project which could radically change the face of Montreal, which had been
carefully prepared by the municipal administration over many weeks, even
months, and which was submitted to the people of Montreal for their
consideration with a very short timespan for approval. Without the necessary
people looking into the architectural problems, the zoning problems, who owns
the land, who were the interested parties in the debate, what are going to be
the effects on traffic, without facilities to looking to ail of those
questions, it is impossible for the city councilors to understand and to make a
constructive criticism. (17 h 40)
You might ask, Mr. President, why it is that the National Assembly of
Québec is in a position where it is having to pass a law today to oblige
the cities of Montreal, Laval and Quebec to provide these facilities. For the
answer, we must go back into history. In fact, I believe it was in Montreal
back in the sixties that the present mayor of Montreal first established a
party system for municipal government and, since then, this idea of political
parties at the municipal level has become something that has been accepted in
Montreal, in Quebec City and in Laval and is becoming accepted more widely in
the other communities of Québec. The Government of Québec, whose
charters define the responsibilities of the various municipalities of
Québec, has responded to this over the years by adding to the
legislation certain aspects, certain rules which, essentially, make sure that
the party system will work. There are, for instance, rules that specify that
there will be byelections. There are rules for the financing of political
parties at the municipal level. There are rules that define the salaries of the
councilors.
You would have thought perhaps that the parties in power, through
negotiations with the other parties, would have established the rules to
provide staff both for their own councillors and for the councilors in
opposition. But politics being what it is, the nature of the opposition being
what it is, it has not been possible, despite efforts which were made by the
City of Montreal, to come to an agreement with which all parties could be
satisfied. So, today, the Government of Québec is changing the charters
of these three largest cities in Québec to make sure that they will
provide budgets, not only to their own councilors but, in the case of Montreal,
to the MCM and to GAM to make sure that those two
parties as well can do the job for the citizens of Montreal that they
should be doing in opposition.
The amounts involved are relatively small. The law states that a minimum
of 1/15% of the total budget must be provided for research and a large part of
this, roughly half, will go to the members of the parties that are in power.
But it means that next year, practically speaking in terms of Montreal, the MCM
will have a budget of about 150 000 $ for research and the GAM will have a
budget of about 50 000 $. It is a start and it will give them the tools to
begin to do the kind of job that the Liberal Opposition has been doing here in
the National Assembly, criticizing constructively the Bills, the gestures and
the mistakes of the present government. I think you can agree with me, Mr.
President, that the work that this Opposition here has been doing over the last
few years has been an effective job. I think the population of Québec,
as revealed by all the polls that we are seeing today, understand that we are
doing a good job, not only in the question period but in the various Bills that
are debated here every day in the National Assembly. So, we are going to enable
the municipal parties who are dealing with budgets - I repeat - which are
bigger in the case of Montreal than in most of the provinces of Canada, to have
the kind of research staff based on the type that we have here in the National
Assembly that will enable them to look closely into the measures proposed by
the municipal administration, make criticism of their proposals where
necessary, make suggestions where they think that the legislation that is
proposed or the programmes that are proposed can be improved and, in general,
give people a better government at the municipal level. And if, in the course
of a year, this kind of research can cut 2/15% off the cost of municipal
administration, it will have paid for itself twice over. We are fully in favor
of it and I understand it will be unanimous. Thank you very much.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Communications.
M. Jean-François Bertrand
M. Bertrand: Je serai très bref puisque je
considère que les propos tenus dans sa présentation par le
ministre des Affaires municipales, et les principes défendus par nos
collègues de l'Opposition, le député de Laprairie et le
député de Notre-Dame-de-Grâce, et qui seront probablement
aussi défendus par le député de Charlesbourg dans son
intervention tout à l'heure, me paraissent tellement aller de soi qu'il
n'y a pas lieu d'en discuter beaucoup plus. Sauf que je voudrais vous dire
à quel point, comme député d'un comté qui recouvre
la ville de Québec pour une très large part, puisque 85% des
électeurs et électrices du comté de Vanier habitent la
ville de Québec dans des quartiers comme Limoilou, comme Duberger, Les
Saules et Charlesbourg-ouest, je voudrais dire, comme citoyen appartenant
à ce comté et vivant avec les gens qui s'intéressent de
plus en plus à la politique municipale, comme le soulignait tantôt
un député, à quel point ce projet de loi est un
investissement assez extraordinaire dans l'amélioration de la
démocratie au niveau municipal.
Tantôt je parlais sur un projet de loi où on parlait des
grandes municipalités de la Communauté urbaine de Québec
et des petites municipalités. Je vis dans un comté où il y
a deux municipalités: la ville de Québec - la capitale du
Québec - et une plus petite municipalité, mais tout aussi
importante dans mon coeur, la municipalité de Vanier. Donc, je me sens
très touché par ce projet de loi.
Dans le cas du projet de loi sur la possibilité d'avoir des fonds
qui serviront à des services de recherche et de secrétariat, je
dois dire que mon comté est assez curieusement constitué aussi,
puisque la ville de Vanier se trouve tout à fait au centre et qu'on
retrouve, à une extrémité, le quartier de Limoilou qui est
représenté par trois conseillers municipaux qui font partie d'une
équipe, celle du Progrès civique, et à l'autre
extrémité du comté, trois conseillers municipaux qui
représentent une autre formation politique, celle du Rassemblement
populaire.
Il y a donc six conseillers municipaux qui oeuvrent à la ville de
Québec, dans le comté de Vanier, dans les limites territoriales
du comté de Vanier. Trois sont du côté du parti qui assume
les responsabilités en ce moment de l'administration municipale de la
ville de Québec; trois autres représentent ce qu'on pourrait
appeler le parti de l'opposition. Donc, je me sens dans une situation comme
celle que décrivaient tantôt certains collègues, à
savoir qu'il ne s'agit absolument pas d'une décision de
l'Assemblée nationale qui ait quoi que ce soit à voir avec les
lignes partisanes ou avec les formations politiques qui peuvent exister sur le
plan municipal.
Je dois dire que jusqu'à un certain point que - je le dis dans un
esprit positif -je trouve un peu regrettable que ce soit l'Assemblée
nationale qui ait à statuer sur ce genre de question. Il aurait
été tellement plus normal que la dynamique de
l'amélioration de la démocratie municipale se fasse au sein
même des municipalités et que ce soit par cette dynamique interne
que nous soyons parvenus progressivement à introduire de tels modes de
financement de services de
recherche et de secrétariat pour mieux aider l'ensemble des
conseillers municipaux à s'acquitter de leurs responsabilités, de
la même façon qu'ici même, à l'Assemblée
nationale du Québec, nous n'avons pas eu besoin de législation ni
même de réglementation pour introduire des services de recherche
qui aident les députés à mieux assumer leurs
responsabilités.
Je crois d'ailleurs que c'est le député de Charlesbourg
qui, fort à propos, avait publiquement émis ce commentaire et
disait: Par analogie, étant donné qu'il existe des comités
exécutifs dans les villes de Montréal, Québec et Laval, et
que le conseil municipal, par analogie, peut en quelque sorte ressembler
à une Assemblée nationale ou, enfin, à un forum
parlementaire distinct du comité exécutif, pourquoi
précisément ne pas faire en sorte que les conseillers municipaux,
de quelque côté qu'ils soient, aient des ressources humaines,
matérielles et financières qui leur permettent de mieux
s'acquitter de leurs responsabilités?
J'aurais souhaité - je le dis comme je le pense, M. le
Président - que tout cela se fasse très simplement au sein
même des municipalités. L'unanimité était tellement
grande chez tous les chroniqueurs qui, de près ou de loin, se sont
intéressés à la chose municipale pour inviter les
municipalités à se doter de tels services de recherche et de
secrétariat que, ma foi, je suis un peu surpris aujourd'hui - je ne
dirai pas un peu abasourdi, mais, enfin, puisque cela fait partie de nos
responsabilités, aussi bien les prendre puisque les municipalités
ne les ont pas prises comme elles auraient dû le faire -que ce soit nous
qui devions dire aux municipalités quels sont les instruments, les
outils et les moyens dont elles doivent se doter pour que les conseillers
municipaux puissent mieux s'acquitter de leurs responsabilités. (17 h
50)
De toute façon, je me réjouis de savoir que nous sommes
parvenus, des deux côtés de la Chambre, à faire
l'unanimité sur cette question. Je suis maintenant convaincu que la
volonté politique s'étant exprimée ici, à
l'Assemblée nationale, les municipalités touchées par le
projet de loi vont probablement non seulement utiliser les paramètres
définis à l'intérieur de ce projet de loi, mais, je
l'espère, aller au-delà de ces paramètres et, dans un
esprit très positif, au nom de l'amélioration du processus
démocratique, enrichir le projet de loi que nous soumettons aujourd'hui
à l'attention de l'Assemblée nationale.
Pour ce qui est des autres municipalités du Québec, j'ose
espérer qu'un jour, par des dispositions d'ordre plus
général habilitant les municipalités à utiliser
plus ou moins le modèle que nous tentons aujourd'hui d'instituer pour
trois grandes municipalités du
Québec, elles sauront, elles aussi, doter les conseils municipaux
et les conseillers municipaux des ressources qui leur sont utiles pour
améliorer le processus démocratique.
M. le Président, je voulais me réjouir de ce projet de
loi, mais, en même temps, je vous dis très sincèrement que
j'aurais souhaité que nous n'ayons pas à l'adopter à
l'Assemblée nationale si les municipalités s'étaient
elles-mêmes acquittées de leurs responsabilités.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Charlesbourg.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté: M. le Président, même si je
n'ai que quelques minutes à ma disposition avant la suspension de 18
heures, je tenais absolument à enregistrer ma voix et à
répéter ce que j'avais dit antérieurement à des
journalistes, ce qui a été publié dans les journaux,
concernant ce projet de loi 95 déposé devant l'Assemblée
nationale pour adoption parce que, finalement, au niveau des villes, les partis
ne se sont pas entendus.
Ce que j'avais dit à l'époque, c'est vrai en
démocratie, il y a le pouvoir et il y a l'opposition et il y a la
nécessité et l'obligation pour chacun des partis d'être
très bien équipé et d'avoir les ressources
financières pour être capable de remplir ses obligations.
Je me dis que si, à l'Assemblée nationale, l'Opposition a
à sa disposition des budgets de recherche, des bureaux, des montants
d'argent à sa disposition pour faire son travail sur le plan
législatif, pour faire son travail de recherche quant aux projets mis de
l'avant par le gouvernement, précisément pour jouer notre
rôle de l'Opposition, il serait complètement absurde de nier ce
principe et ce droit aux partis d'opposition des grandes villes du
Québec.
M. le Président, je tenais absolument à me lever dans la
région de Québec pour dire: Effectivement, je souscris au
principe du projet de loi 95 même si, à l'instar du
député de Vanier, j'aurais préféré que les
municipalités ou les villes puissent s'entendre elles-mêmes. Si
nous en sommes rendus là aujourd'hui, c'est qu'il n'y a pas eu entente.
Nécessairement, il ne faudra jamais oublier, pour ceux qui aujourd'hui
sont au pouvoir, qu'ils peuvent demain se retrouver dans l'Opposition, que
c'est une protection pour eux que d'avoir ces dispositions à
l'intérieur d'un projet de loi parce que, effectivement, eux aussi
auront éventuellement des besoins financiers pour être capables de
faire la recherche nécessaire à la bonne critique des projets de
loi déposés, soit par le gouvernement ou par les villes.
Finalement, je n'en ai pas plus à dire. Je pense que tous et
chacun d'entre nous
sommes fort conscients que la démocratie a ses exigences et cela
en est une. Le constat, partout à travers la presse, était un
constat que c'était une obligation et une nécessité. Si
nous le faisons aujourd'hui, c'est en prenant nos responsabilités de
parlementaires vis-à-vis de la démocratie municipale au
Québec. Je souscris volontiers au projet de loi 95.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Affaires municipales, votre droit de réplique.
M. Alain
Marcoux (réplique)
M. Marcoux: M. le Président, je suis très heureux
que l'Assemblée nationale veuille adopter ce projet de loi 95 à
l'unanimité pour fournir des services minimums véritablement de
recherche et de secrétariat aux différents partis politiques
municipaux impliqués dans la vie démocratique de Montréal,
Québec et Laval.
Je voudrais simplement ajouter un commentaire et dire que je partage
aussi le sentiment du député de Laprairie sur le fait que ce
projet de loi a été déposé seulement aujourd'hui.
Encore là, disons que je dois indiquer que je n'ai rencontré les
chefs des différents partis politiques municipaux d'opposition
qu'à la mi-avril, lors du congrès de l'Union des
municipalités du Québec, et que cela a pris un mois environ avant
que je puisse rencontrer les maires des municipalités impliquées
pour avoir leur point de vue. Par la suite, il m'a fallu poursuivre des
consultations, avoir les opinions de mes collègues et arriver à
présenter au Conseil des ministres un projet de loi que j'ai pu
déposer seulement aujourd'hui. Je pense qu'il a été
préférable de mener ces larges consultations préalables -
au lieu que ce projet de loi soit simplement déposé et
adopté dans trois ou quatre mois seulement -et que nous ayons tenu des
consultations réciproques auprès de l'ensemble du milieu pour
arriver à proposer un projet de loi qui soit adopté à
l'unanimité.
Dans ce cas, comme dans celui de la Communauté urbaine de
Québec, j'avais moi-même invité les partis d'opposition
à contacter l'Opposition officielle pour lui faire part de leurs
revendications, de leurs points de vue, pour que si l'Assemblée
nationale était appelée à étudier un projet de loi,
nous soyons tous déjà au fait de la problématique et que
nous puissions nous décider, à ce moment, le plus rapidement
possible. Je pense que le temps que nous avons gagné dans la
consultation, de votre côté comme du nôtre, est un temps qui
nous permet d'adopter ce projet de loi en toute bonne foi et en toute
connaissance de cause. J'espère que nous adopterons aujourd'hui ce
projet de loi en première et deuxième lecture, et possiblement en
troisième lecture dès demain pour qu'il puisse être en
vigueur dès le 1er juillet 1984.
M. le Président, je veux remercier tous les membres de
l'Assemblée nationale qui concourent à l'adoption unanime de ce
projet de loi et, particulièrement, remercier mes collègues avec
lesquels je poursuis l'ensemble de cette réflexion depuis un mois en
particulier pour aboutir à son dépôt. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que le principe du
projet de loi 95, Loi sur les budgets de recherche et de secrétariat des
partis politiques municipaux à Montréal, Québec et Laval
est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Blouin: Je présente donc une motion pour que ce projet
de loi soit envoyé à la commission de l'aménagement et des
équipements présidée par un président de
séance qui procédera à son étude
détaillée à la salle 91, et ce à compter de 20
heures, ce soir. Je propose également que le rapport de cette commission
étudiant les projets de loi 92 et 95 soit fait ce soir comme s'il
s'agissait d'une commission plénière, c'est-à-dire
verbalement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je vous demande maintenant
d'appeler l'article e) de notre feuilleton, tout en vous précisant qu'il
y a une entente pour que procédions à l'adoption du principe de
ce projet de loi.
Projet de loi 93
Adoption du principe et du rapport de l'étude
détaillée
Le Vice-Président (M. Jolivet): Pourrais-je avoir un
feuilleton?
Le projet de loi 93, Loi modifiant la Loi sur les musées
nationaux est-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je propose donc maintenant que
les écritures soient faites comme si s'était tenue la commission
plénière procédant à l'étude
détaillée de ce projet de loi, et que ces écritures
précisant que nous...
Une voix: ...
M. Blouin: Je vais recommencer, ce sera plus simple.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Allez-y.
M. Blouin: Je propose donc que les écritures soient faites
comme si s'était tenue la commission plénière
procédant à l'étude détaillée de ce projet
de loi, et que ces écritures précisant que nous adoptons le
rapport pour que nous procédions à la prise en
considération du rapport soient également faites.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Ces motions sont-elles
adoptées?
Une voix: Ah oui!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
M. Blouin: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la
troisième lecture a lieu en même temps? C'est la dernière,
l'adoption.
M. Blouin: Non, demain matin, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Non. D'accord.
M. Blouin: Après, ces technicités un peu
compliquées, je propose donc que nous suspendions nos travaux
jusqu'à 20 heures. ,À ce moment-là, nous
procéderons à l'étude des crédits. Nous
étudierons d'abord les crédits du ministère de
l'Habitation et de la Protection du consommateur pendant une heure et, ensuite,
ceux du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pendant
une heure, c'est-à-dire qu'entre 20 heures et 22 heures, nous
procéderons donc au débat sur l'étude des
crédits.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de suspension
de nos travaux est-elle adoptée?
Une voix: Bien sûr.
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. (Suspension
de la séance à 18 heures)
(Reprise de la séance à 20 h 4)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît! Veuillez prendre place. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, ce soir en première
partie, nous allons poursuivre le débat sur les crédits
budgétaires supplémentaires. Je vous demande donc à cet
égard d'appeler l'article 39) de notre feuilleton s'il vous
plaît!
Étude des crédits budgétaires
supplémentaires
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous irons de nouveau en
commission plénière concernant les crédits
budgétaires supplémentaires et pour l'étude des
crédits déposés par le ministre des Finances. M. le leader
adjoint.
M. Blouin: M. le Président, comme vous venez très
justement de le dire, je propose donc que vous quittiez votre fauteuil et que
nous nous transformions en commission plénière. J'indique, pour
l'information des membres de l'Assemblée et de ceux et celles qui
suivent nos débats, qu'au cours de la première heure, nous allons
discuter des crédits budgétaires du ministère de
l'Habitation et de la Protection du consommateur; au cours de la seconde heure,
nous allons discuter des crédits budgétaires du ministère
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Commission plénière
M. Rancourt (président de la commission
plénière): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous
allons discuter de l'étude des crédits du ministère de
l'Habitation et de la Protection du consommateur. Tel qu'il a été
dit il y a quelques minutes, l'entente prise entre les deux leaders du
gouvernement et de l'Opposition, c'est que l'étude des crédits de
l'Habitation et de la Protection du consommateur se poursuit pendant 60
minutes. Nous commençons dès maintenant. Je donne la parole
à M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur. M.
le ministre.
Habitation et Protection du consommateur
M. Tardif: M. le Président, je crois comprendre que
l'Opposition était particulièrement intéressée par
l'un des volets du discours sur le budget ayant trait à l'extension du
programme Logirente d'allocation-logement pour les personnes ou le groupe de
personnes ayant entre 60 et 64 ans inclusivement. On sait que le programme
Logirente est un programme entièrement
financé par le gouvernement québécois et introduit
en 1980 s'adressait depuis son lancement aux seules personnes
âgées de plus de 65 ans. Nous avons donc décidé
d'étendre ce programme au groupe des 60-64 ans et ce, à compter
de la prochaine période d'inscription annuelle au programme qui a lieu
vers le mois de septembre étant donné que ce programme fonctionne
du 1er octobre de chaque année jusqu'au 30 septembre. C'est donc dire
que toutes les personnes entre 60 et 64 ans recevront du ministère du
Revenu qui gère ce programme et qui en fait la livraison pour mon
ministère, si elles ont rempli un rapport d'impôt pour
l'année courante ou l'année précédente, selon le
cas, un formulaire de préinscription déjà partiellement
rempli, contenant possiblement des renseignements quant à la partie
revenus lorsque ces derniers sont disponibles. Ces personnes devront remplir la
partie du formulaire afférente à leur loyer et à leurs
dépenses de logement. Ce n'est pas uniquement le loyer mais des montants
forfaitaires sont prévus pour le chauffage, pour l'entretien et le
coût des intérêts pour rembourser les hypothèques,
non pas la partie capital mais la partie intérêts. Un forfaitaire
est également inclus pour l'électricité et pour le
coût des taxes de services.
Voilà, M. le Président, un des aspects qui était
demandé depuis un certain temps par différents groupements et qui
est inclus dans le discours sur le budget. Évidemment, ce discours sur
le budget comprenait également une annonce de prolongation du programme
Corvée-habitation qui devait prendre fin le 15 juillet prochain,
c'est-à-dire au moment où les vacances de la construction
commencent et qui a été prolongé jusqu'au 31
décembre 1984, et ce même si, déjà, on peut
prévoir que l'excédent du coût de cette prolongation sera
totalement assumé par le gouvernement, étant donné que les
sommes disponibles dans le fonds permettront de faire face aux engagements
à ce jour pour toutes les personnes à qui nous avons garanti un
taux d'intérêt de 9,5% pour trois ans et pour une partie de celles
qui viendront, mais pour le reste, le gouvernement québécois va
assumer la totalité des coûts. Cette extension de
Corvée-habitation jusqu'au 31 décembre prochain vise à
continuer de soutenir l'industrie de la construction, qui manifeste certains
signes d'essoufflement, non pas en raison de sa capacité de production,
qui reste excellente, mais en raison de ce qui semble avoir été
au cours des dernières semaines une remontée des taux
d'intérêt. C'est ce qui fait d'ailleurs que le maintien de ce
programme chez nous nous a permis -j'ai ici les chiffres pour les cinq premiers
mois de l'année 1984 - de continuer d'afficher dans les mises en
chantier, une augmentation qui est près de 6% - 5,7%. Ce n'est pas,
certes, celle que nous avions connue dans les mois précédents et
surtout à la fin de 1983, mais c'est une augmentation quand même,
alors que pour l'ensemble du Canada il y a une diminution - non pas une
augmentation, mais une diminution - de 28% dans les mises en chantier pour les
cinq premiers mois de 1984 comparativement aux cinq premiers mois de 1983.
C'est dire que partout au Canada... Je donne la moyenne canadienne, mais je
pourrais donner les chiffres de l'Ontario qui sont du même ordre de
grandeur, 27,9% de diminution. Donc, c'est presque 28% également, alors
qu'ici nous continuons à progresser avec 5,7%, presque 6%.
C'est donc dire, M. le Président, que nous avons tenté de
maintenir cette industrie très active. Pour ce faire, nous y avons
ajouté un autre volet qui est celui de la continuation de la mesure
relative aux régimes d'épargne-logement. On sait que pour toute
personne qui avait un régime d'épargne-logement au 31
décembre 1982, nous avons, dans le but de permettre de sortir ce bas de
laine, permis aux personnes qui se portaient acquéreurs d'une maison
neuve, non seulement de sortir les montants qu'elles avaient investis dans un
REEL, dans un régime enregistré d'épargne-logement, en
date du 31 décembre 1982, avec les intérêts
accumulés, mais également de déduire de leurs revenus tout
ce qu'il fallait pour atteindre le montant de 10 000 $, qui était le
montant maximal qu'il était possible d'accumuler dans un régime
enregistré d'épargne-logement.
Or, cette mesure de bonification des REEL, comme on l'appelle, qui
devait durer jusqu'au 31 décembre 1984, a été
prolongée jusqu'au 31 décembre 1985. Évidemment, je ne
peux ici qu'inviter tous ces détenteurs de régime
enregistré d'épargne-logement à faire usage non seulement
des sommes qu'ils ont déjà accumulées mais de la
bonification qui peut leur être accordée et qui, d'ailleurs, joue
aussi bien à Québec qu'à Ottawa, Ottawa ayant
décidé à cet égard, à la suite de ce que
nous avions fait ici au Québec, d'accorder une bonification en ce qui
concerne les régimes enregistrés d'épargne-logement.
Dernière remarque avant de passer peut-être aux questions
de l'Opposition, en ce qui a trait au programme Corvée-habitation. Nous
avons maintenu pour le programme Corvée-habitation les avantages
particuliers que nous avions incorporés dans ce programme pour les
coopératives d'habitation d'une part et pour les travailleurs de la
construction d'autre part. En effet, dans le cadre du programme
Corvée-habitation, les coopératives d'habitation s'étaient
vu accorder, dès la dernière phase, c'est-à-dire celle qui
a présentement cours et qui se termine le 15
juillet, un montant de 3000 $ comptant en plus du taux
préférentiel de 9,5% garanti sur trois ans.
Dans la phase V du programme Corvée-habitation, qui
s'étend du 15 juillet au 31 décembre 1984 et qui ne comportera
pour l'ensemble des citoyens du Québec qu'un taux garanti assuré
de 9,5% sur trois ans, nous avons maintenu pour les organismes sans but
lucratif et pour les coopératives d'habitation la subvention de capital
de 3000 $ par logement. De la même manière, même si ce
n'était pas indiqué dans le discours sur le budget, le
règlement qui est en préparation prévoira que les
avantages particuliers qui avaient été consentis aux travailleurs
de la construction qui contribuent dans le fonds Corvée-habitation un
montant, comme on le sait, de 0,125 $ l'heure pendant quatre ans... Nous avons
maintenu à leur égard cette subvention de 1000 $ comptant qui,
dans leur cas, vient s'ajouter aux 9,5% pour trois ans, et qui, de plus, dans
leur cas à eux seulement, permet également l'auto-construction
puisque cela fait partie de la marque de commerce d'un vrai travailleur de la
construction, généralement, de bâtir lui-même sa
maison.
Voilà brièvement, M. le Président, ce qu'il
réapparaissait devoir être dit à ce moment-ci sur certaines
modalités du discours sur le budget qui touchent
précisément le secteur de l'habitation. Donc, il y a des mesures
pour les propriétaires individuels. Il y a des mesures pour les cas de
propriété collective sans but lucratif, OSBL ou COOP. Il y a des
mesures pour les travailleurs de la construction qui désirent se
bâtir eux-mêmes. Finalement, il y a des mesures destinées
aux locataires ou aux propriétaires, voire aux chambreurs, en ce qui
concerne la location de logements.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Pontiac.
Le programme Logirente
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Est-ce que je peux
conclure des propos du ministre que les 3 000 000 $, c'est totalement pour
Logirente, parce qu'on extensionne le programme aux personnes de 60 ans
à 64 ans? Les 3 000 000 $, c'est totalement pour cela.
M. Tardif: Oui. Les 3 000 000 $...
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: ...de crédits supplémentaires ne
touchent que le programme Logirente étant donné que la
bonification des régimes enregistrés d'épargne-logement,
par exemple, c'est quelque chose qui est de nature fiscale, donc qui implique
des entrées de fonds de moins dans l'impôt comme tel, mais qui
n'est pas une dépense budgétaire. C'est une dépense
fiscale, si l'on veut.
D'autre part, concernant le financement du programme
Corvée-habitation, on va attendre d'avoir utilisé les sommes du
fonds et, si le besoin est tel, de prévoir d'autres sommes. Les 3 000
000 $ vont uniquement pour les fins d'extension de Logirente aux personnes de
60-64 ans et couvrent une période de six mois seulement. Comme je l'ai
mentionné tantôt, si le député de Pontiac a suivi
mon exposé, la période du programme allant du 1er octobre au 30
septembre, les gens vont s'inscrire durant les mois d'août et septembre,
vont commencer à bénéficier du programme le 1er
octobre et cela couvre donc une demi-année financière du
gouvernement, c'est-à-dire octobre, novembre, décembre, janvier,
février, mars. Ce sont des crédits budgétaires pour une
période de six mois qui sont là, qui sont totalement
utilisés pour les fins d'extension de Logirente.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: Oui. Est-ce que le ministre peut me dire le nombre
de demandes qui ont été acceptées dans les années
1981, 1982, 1983 dans le programme Logirente?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, je m'excuse, ce n'est pas le
bon rapport. Dans le cadre du programme Logirente, la première
année d'application, c'est-à-dire du 1er octobre 1980 au 30
septembre 1981, 26 747 demandes; l'année 2, l'année
commençant le 1er octobre 1981, 19 326 demandes; l'année 3, du
1er octobre 1982 au 30 septembre 1983, 19 060 demandes; l'année 4, du
1er octobre 1983 au 30 septembre 1984, 18 535 demandes. On constate donc, que,
hormis la première année, il y a une relative stabilité au
cours des trois dernières années, 19 000, 19 000, 18 500
demandes. (20 h 20)
Je vais peut-être prévenir immédiatement la question
du député. Pourquoi y a-t-il eu un nombre plus
élevé la première année? Tout simplement pour la
très bonne raison qu'il y a des gens qui ont
bénéficié de Logirente la première année et
qui, techniquement, n'y avaient pas droit. Par exemple, deux personnes
indépendantes, habitant un même logement mais ne payant qu'un seul
loyer, ont formulé chacune une demande. Ou encore, il a pu arriver que
deux personnes habitant un même logement et ne payant qu'un seul loyer
n'ont déclaré qu'un seul
revenu et non pas les deux.
Au cours de cette première année, nous avons
évidemment resserré très rapidement les normes. Je dois
dire immédiatement à l'intention de cette Chambre que nous
n'avons pas procédé à des réclamations après
coup auprès des gens. C'était la première année,
c'était le rodage du programme. Peut-être que la définition
dans le règlement n'était pas à ce point limpide; on ne
pouvait présumer de mauvaise foi de la part des gens qui s'en
étaient prévalu.
M. Middlemiss: D'accord.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: Durant ces mêmes années, est-ce que
le ministre a le nombre de demandes qui ont été
refusées?
M. Tardif: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: La première année, encore là, il
y a eu plus de personnes qui en ont bénéficié, qui, comme
je le disais, techniquement y avaient droit, mais il y a eu aussi beaucoup de
refus parce que beaucoup de gens s'imaginaient, encore une fois, n'ayant pas lu
toute la documentation, que dès qu'ils avaient plus de 65 ans ils
étaient admissibles et ils n'avaient pas pris en compte leurs revenus.
La première année, 25 410 demandes ont été
refusées, soit qu'elles entraînaient un revenu trop
élevé ou encore en raison du moment de l'année où
on atteignait 65 ans. Pour des raisons purement techniques. Mais encore
là ça s'est résorbé très vite et, la
deuxième année, cela a été 9000. La
troisième année, 7400. La quatrième année, 8000. De
sorte qu'encore là la première année,
véritablement, au niveau des refus, ne doit pas être prise comme
une année repère, mais bien les trois années suivantes
où il y a une certaine stabilisation entre 7000 et 8000 refus.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: Oui. Combien de demandes prévoit-on pour
l'année 1984-1985? Peut-être qu'on peut le diviser en deux. Le
changement qu'on vient de faire va nous donner combien de plus que ce qu'on
prévoit?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: Ce que le député doit prendre en compte
dans l'établissement du volume de demandes, ce que tout le monde doit
prendre en compte, c'est la progression plus ou moins rapide du revenu des
ménages, d'accord? Je peux vous dire une chose. Tantôt, quand j'ai
dit qu'entre la première et la deuxième année on passe de
26 700 à 19 300 bénéficiaires, j'ai dit au
député qu'il y avait un certain nombre de personnes qui, de bonne
foi, ont fait des demandes et que ces demandes ont été
acceptées alors qu'elles n'y avaient pas techniquement droit, ce n'est
pas toute la vérité. Il y a une partie de la vérité
aussi qui provient du fait qu'un bon nombre de ménages qui ont eu droit
à Logirente la première année n'y ont pas eu droit la
deuxième parce que leur revenu avait augmenté passablement la
deuxième année. On se souviendra que c'est le moment où,
au mois de juillet 1981, le gouvernement fédéral a
décidé d'augmenter les pensions de vieillesse de 35 $ au 1er
juillet 1981, si bien que vous comprendrez que Logirente procurant...
Comment fonctionne Logirente? C'est qu'il paie aux personnes
âgées de plus de 65 ans, et maintenant ce sera à celles de
60 ans, 75% de la part de leur loyer qui est supérieur à 30% de
leur revenu. Je m'explique: une personne qui, théoriquement, aurait au
bas mot mettons 500 $ par mois de revenu, aurait une pension de vieillesse avec
le supplément de revenu d'environ 520 $, mettons 500 $ pour faire un
compte rond; au moment où cela a été lancé,
c'était plus près de 400 $. 30% de 400 $, cela veut dire 120 $.
Une personne qui paierait plus de 120 $ par mois pour son loyer aurait droit
à Logirente, mais il y avait un loyer plafond qui était, à
l'époque - et qui varie d'année en année - au moment du
lancement du programme de 180 $. De sorte qu'une personne qui, à
l'époque, n'avait que sa pension de vieillesse - plus ou moins 400 $
-qui payait plus que 120 $ par mois - 30% de 400 $ - pouvait donc recevoir 75%
de cet excédent jusqu'à concurrence du loyer plafond de 180 $. La
différence entre 120 $ et 180 $, c'est 60 $ et, évidemment, 75%
de 60 $ représentent environ 45 $ par mois d'aide.
Ces montants ont été révisés d'année
en année. Par exemple: pour les personnes seules non chambreurs - c'est
le cas pour les chambreurs également - le loyer plafond était de
180 $ par mois la première année, 195 $ la deuxième et 215
$ la troisième; pour l'année actuelle, il est de 235 $ et il sera
indexé l'an prochain pour la période commençant le 1er
octobre. Il y a une indexation annuelle. Pour les chambreurs, c'était
120 $ la première année; c'est demeuré à 120 $ pour
la deuxième, j'expliquerai pourquoi tantôt parce que dans le cas
des chambreurs, au tout début, une partie de la pension des repas comme
telle avait été partiellement incluse. Il est resté
stable la deuxième année; il a augmenté à
145 $ la troisième année et, cette année, il est à
170 $. Le loyer plafond des chambreurs est parti de 120 $ à 170 $. Pour
les couples, les loyers plafonds ont été de 200 $ la
première année, 210 $, 230 $ et il est actuellement de 250 $.
Vous me demandez de faire une prévision pour l'année qui
vient. Je vous dis que nous allons, d'une part, évidemment devoir tenir
compte de l'augmentation prévisible du coût-logement comme tel;
d'autre part, faire une prévision des augmentations de revenus. On sait
- cela a été annoncé notamment par Ottawa - qu'il y aura
deux ajustements dans les pensions de vieillesse: une de 25 $ le 1er juillet et
une autre de 25 $ au mois de novembre. Cela a été calculé
pour tenir compte de certaines échéances électorales. Deux
augmentations sont donc prévues. Un premier paramètre va bouger:
les loyers; un deuxième paramètre qui va bouger: les revenus des
gens. Compte tenu de tout cela, le troisième paramètre qui va
bouger également - toujours au niveau des revenus - nous avons
augmenté, pour les pertes, la rente au conjoint survivant,
c'est-à-dire les veuves dont le mari retirait déjà une
rente de la Régie des rentes du Québec ou qui est
décédé et qui aurait eu droit à cela, nous avons
augmenté, à compter du 1er janvier 1984, la rente au conjoint
survivant d'environ 72 $ par mois. Bon nombre de ces ménages, femmes
seules âgées entre 60 et 64 ans, vont donc avoir en 1984 des
revenus un peu supérieurs. En tenant compte de tout cela et d'autres
facteurs, on évalue entre 10 000 et 12 000 familles ou ménages
additionnels qui auront droit à Logirente l'an prochain. C'est une
évaluation qui tient compte de ces prévisions, de ces
projections, en supposant que les gens se prévalent du programme et
fassent les démarches voulues pour s'y inscrire.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Pontiac. (20 h 30)
M. Middlemiss: De 10 000 à 12 000 de plus en
révisant...
M. Tardif: 18 000 actuels. Je présume... Tantôt,
j'ai dit au député que Logirente, depuis trois ans, s'est
stabilisé autour de 18 000, 19 000, 20 000 bénéficiaires
par année de plus de 65 ans. J'en ajoute un bloc de cinq ans,
c'est-à-dire ceux entre 60 et 64 ans inclusivement; ce bloc doit
représenter environ 10 000 bénéficiaires qui vont venir
s'ajouter aux 28 000. Dans bon nombre de cas, il s'agit de femmes seules et
vraiment mal prises, dont les revenus sont très faibles; elles n'ont pas
de rente parce qu'elles n'ont pas atteint 65 ans; elles n'ont pas de
régime privé de rentes. C'est celles dont la situation est
peut-être la plus pénible.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Une des
recommandations qui avaient été faites par le front commun
Logirente était de baisser l'âge de 65 ans à 60 ans; une
autre qui vous était demandée était relative à
l'allocation de logement, au lieu d'être à 30% on demandait
qu'elle soit de 25%. En assumant qu'un jour ce serait politiquement rentable de
le faire vous décidiez de diminuer à 25%, combien cela
représenterait-il d'argent de plus ou de moins? Est-ce qu'il y a un
certain avantage à tenter de garder des gens dans leur maison au lieu de
les faire déménager dans des HLM? Quelle serait la facture ou la
réduction de coût, les économies pour la province dans un
tel cas?
M. Tardif: M. le Président, je dois dire tout de suite au
député de Pontiac que si j'avais 3 000 000 $ ou 4 000 000 $ de
plus, je ne les utiliserais pas pour diminuer le ratio loyer-revenu de 30%
à 25%; je les utiliserais pour diminuer l'âge des
bénéficiaires de 60 à 55 ans. En d'autres termes,
j'essaierais d'aider plus de monde, plutôt que d'aider plus ceux qui en
reçoivent déjà. Est-ce que vous me comprenez? Je pense que
la priorité est là actuellement, surtout dans le cas, encore une
fois, des femmes seules, des familles monoparentales. Les enfants sont partis.
Elles se retrouvent toutes seules. Si j'avais ce genre de disponibilité,
je l'utiliserais plutôt pour cela.
Quant au deuxième élément, M. le Président,
le député dit: Ne devrait-on pas étendre Logirente, parce
que finalement, cela coûte moins que les HLM. Il a raison, sauf que les
HLM - et je l'invite peut-être à visiter les gens qui ont fait des
demandes ou qui les habitent - répondent à un autre besoin qu'un
besoin strictement financier. Les personnes âgées qui les
habitent, généralement, le font pour briser la solitude, pour
avoir de la sécurité. Le mari est décédé. La
femme se retrouve seule dans un logement relativement grand. Remarquez que 70%
des clients de nos HLM pour personnes âgées sont des femmes
seules. Bon! Elles ont tenté de maintenir maison pendant trois ou quatre
ans. Elles ne sont plus capables de pelleter la neige, de changer les
fenêtres doubles ou de tondre le gazon. Ces personnes veulent se
retrouver entre elles, si bien que les HLM pour personnes âgées
répondent à un autre besoin qu'un besoin strictement financier.
Pour ces personnes, c'est très souvent un besoin de briser la solitude,
se retrouver entre elles et d'avoir de la compagnie. C'est un
élément tellement humain que même si on mettait au point le
plus beau programme d'allocation logement,
je pense qu'on ne répondrait pas totalement à ce
besoin.
Ceci dit, c'est vrai que cela coûte en moyenne quelque 40 $ par
mois à l'État., Si on ajoute les 15 $ que représente le
RIF qui viennent s'ajouter à cela - c'est le remboursement d'impôt
foncier - cela peut représenter 52 $, 54 $ ou 55 $ par mois,
comparativement au coût du HLM moderne qu'on bâtit aujourd'hui qui,
lui, coûte, par exemple, 600 $ par mois. La personne paie en moyenne 160
$ par mois de loyer dans un HLM. L'écart entre les deux, c'est 440 $
qu'on se partage, Ottawa et nous. Cela fait une différence, 50 $ ou
à peu près pour cela, ici, et l'autre, qui est de 440 $. Encore
une fois, l'autre correspond à des besoins qui vont plus loin que des
besoins strictement financiers. Évidemment, si on mettait les centres
d'accueil, cela coûte 2000 $ par mois à l'État comme
tel.
Donc, Logirente, ce n'est pas une panacée. Ce n'est pas une
formule qui s'applique dans tous les cas indistinctement. C'est une formule
parmi d'autres. Remarquez que le Québec a été la
deuxième province à avoir un tel programme après la
Colombie britannique qui a le programme SAFER. SAFER, c'est
l'abréviation en anglais pour "Shelter Aid for Elderly Residents". Le
Nouveau-Brunswick a créé le programme RATE et maintenant, il y a
le Manitoba qui en a un également. Il y a quatre provinces sur dix qui
en ont. Il y en a six qui n'en ont pas et pas parmi les plus pauvres; l'Alberta
et l'Ontario n'en ont pas. C'est un moyen parmi d'autres pour rejoindre les
gens du troisième âge, les gens qui ont plus de 60 ans. Donc,
à partir du moment où les disponibilités seraient
là au plan financier, comme je l'ai mentionné au
député, je les utiliserai, je les canaliserai pour essayer de
rejoindre le plus grand nombre possible de personnes et pas
nécessairement pour améliorer encore la situation de celles qui
sont là. Le vieux ratio de 25% du revenu pour les jeunes ménages
avec des enfants peut très bien s'appliquer dans le cas des personnes de
65 ans et plus, parce que nos mères nous disaient toujours: Il ne faut
pas consacrer plus de 25% de son revenu pour se loger. Mais c'était il y
a 25 ou 30 ans. En tout cas, quand je cherchais un logement il y a 25 ans de
cela à peu près... - je ne répliquerai pas au
député d'Outremont -c'était la règle qui
était donnée de ne pas utiliser plus d'une paie par mois pour
payer son loyer, ce qui représentait le quart. Mais, en
réalité, il y a 4,3 semaines dans un mois, tout le monde le
sait.
Deuxièmement, c'était à une époque où
il n'y avait aucun avantage social. Il fallait payer le toubib si on
était malade. Il fallait payer l'hospitalisation. On avait un tas
d'autres charges. Aujourd'hui, les frais médicaux sont
défrayés. Il y a l'assurance- maladie. Dans le cas des personnes
âgées, également, les médicaments sont payés.
Si bien que de garder la règle des 25% indistinctement pour tous les
ménages, je pense que ce soient une erreur méthodologique et
économique. Il serait plutôt concevable d'avoir des seuils
flexibles. Dans le cas des ménages avec enfants, effectivement, un
pourcentage de 25% paraît raisonnable. Dans le cas des personnes
âgées, je vous dirai que l'Ontario juge raisonnable un taux
d'effort de l'ordre de 35% et que le gouvernement fédéral, dans
certaines études statistiques qu'il nous a été
donné de constater, évalue à peu près
jusqu'à 33% la partie du revenu consacrée au loyer et pouvant
permettre de satisfaire aussi les autres besoins essentiels. Logirente
prévoit 30%. C'est la même chose que SAFER d'ailleurs, à
cet égard.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: Est-ce que le ministre a des statistiques qui
démontreraient que Logirente pourrait être plus avantageux en
permettant à des gens qui veulent demeurer dans leur maison de le faire
et que ce soit plus facile pour elles du côté économique ou
financier tout en coûtant moins cher à l'État? C'est plus
alléchant pour elles que de les inviter à déménager
dans un HLM. Si les gens sont en bonne santé, ils
préféreraient peut-être demeurer là. C'est le
fardeau financier qui les force à déménager dans un HLM.
Est-ce que des statistiques peuvent donner le nombre de personnes qui
pourraient rester chez elles?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre. (20 h 40)
M. Tardif: J'espère avoir, avant la reprise de la session
à l'automne, les résultats d'un sondage qui vont nous indiquer ce
que les gens souhaitent au point de vue logement, précisément,
selon qu'ils sont actuellement propriétaires ou locataires, familles
monoparentales, familles biparentales avec enfants, sans enfants, couples
âgés. Les premières données semblent nous indiquer
qu'il y a une demande relativement forte pour l'habitation dite à loyer
modique. Parce que, effectivement, nulle part ailleurs on ne peut trouver un
logement de cette qualité à ce prix, hormis le fait, comme je
l'ai mentionné, que pour les personnes âgées le HLM
répond à d'autres besoins, notamment de société.
J'ai été étonné de constater que même des
gens qui ont des revenus se présentent à nous, se
présentent à mon bureau de comté, sachant que je suis le
ministre de l'Habitation, et viennent me voir avec l'étole de vison pour
me demander s'ils ne pourraient pas avoir une place au HLM,
au coin des rues d'Auteuil et Henri-Bourassa, dans le nord de
Montréal. Évidemment, je leur demande pourquoi. Je sais un petit
peu, par leur condition, qu'ils n'ont pas besoin de cela et ils me disent:
C'est vrai que je n'ai pas vraiment besoin de cela, mais c'est la seule place
que je connaisse où je pourrais avoir la compagnie de gens de mon
âge, etc. Évidemment, ce sont des caractéristiques
démographiques d'une circonscription donnée, mais il est assez
étonnant de voir cela.
Je vous parlerai d'une autre donnée et j'arrêterai ensuite.
Je ne veux pas être trop long. On pense à un petit village de 1000
habitants, une fois qu'on a construit un petit édifice à
dîx, douze ou quinze logements pour personnes âgées. Il y a
environ 25 noms sur la liste d'attente. Si on bâtit quinze logements, on
va baisser la liste à dix. Pas du tout., Le lendemain de l'ouverture,
elle est rendue à 50. C'est que les autres viennent voir cela et disent:
C'est beau ce logement-là et cela ne coûte pas cher. On a
généré une demande. On génère de la demande.
C'est un fait qu'on constate. Plus on en fait, plus les gens en demandent.
Le Président (M. Rancourt): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Sur le même sujet, M. le Président. Le
ministre vient d'évoquer un problème qui m'est très
familier. Dans mon comté, même si on pense que dans le
comté d'Outremont il y a uniquement des gens très riches, il y a
des gens à revenus moyens, la petite bourgeoisie que j'appelle., Le
ministre vient d'évoquer le problème de certaines personnes qui
voudraient avoir accès à ce qu'ils appellent un loyer
raisonnable., La loi prévoit des logements à loyer modique pour
lesquels il faut se qualifier. Quand les revenus de certaines personnes
âgées en particulier deviennent fixes et qu'ils dépassent
un certain niveau, elles n'ont pas accès à ce qu'on appelle les
logements à loyer modique. Elles voudraient avoir une formule qui serait
ce qu'elles appellent - pas des loyers modiques, parce qu'elles en sont exclues
- des loyers raisonnables. D'après l'expérience que j'ai, la
seule formule qui leur est ouverte dans le moment, ce serait de former une
coopérative, de chercher à avoir des subventions du gouvernement
fédéral.
Je me demande si le ministre s'est penché sur ce problème,
parce que je crois que c'est le problème de la petite bourgeoisie
québécoise. Ce sont eux qui paient le plus de taxes au
Québec. Les gouvernements les taxent d'une façon
démesurée, je crois. D'une part, ils sont exclus des logements
à loyer modique et, d'autre part, on les considère comme des gens
bien nantis, mais ils sont pris dans le milieu. Je me demandais si le ministre
avait fait des études là-dessus, parce que cela représente
quand même une partie appréciable de la population. Je crois
qu'ils ne demandent pas nécessairement toute l'aide qui serait requise
comme dans le cas de ceux qui ont accès à un logement à
loyer modique, mais ils voudraient avoir une certaine aide, une certaine
formule et même, dans certains cas, cela pourrait être certains
conseils. On peut leur dire: Formez une coopérative et on va vous aider
en finançant les premières étapes de la formation d'une
coopérative. Je ne crois pas que ce soit suffisant. Je me demandais si
le ministre avait pensé à aider ces gens-là, soit par des
conseils, soit par une aide particulière. Est-ce que,
présentement, il y a des fonds fédéraux et provinciaux
disponibles même pour ceux qui voudraient s'organiser en
coopérative?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, oui, on y a pensé. Oui,
il y a des choses qui se font. Oui, il y a des choses qui peuvent être
faites. D'abord, le député a raison quand il dit que la formule
des coopératives d'habitation, si elle peut être utilisée
par les personnes âgées, ne l'est pas avec autant d'enthousiasme
que dans le cas des jeunes familles. La formule des coopératives a ceci
de particulier: elle exige beaucoup de participation, de discussion. Et on peut
penser, certains en tout cas, un bon nombre de gens semblent penser qu'ils ont
passé l'âge de se réunir cinq soirs par semaine pour
discuter ensemble de différentes questions reliées aux
coopératives. Il y en a qui le font, mais il semble que cela n'a pas la
faveur des personnes âgées. C'est la raison pour laquelle,
récemment, j'ai amendé le programme LOGIPOP de
coopératives d'habitation pour l'étendre aux organismes sans but
lucratif autres que les coopératives. C'est fait, c'est disponible
présentement.
Le député a dit: Est-ce qu'il y a des fonds
québécois ou fédéraux? La réponse, c'est:
Oui, il y a des fonds fédéraux. En vertu de l'article 56.1, le
fédéral alloue à peu près annuellement...
M. Fortier: Quelle formule? Une coopérative ou...?
M. Tardif: Pardon? Non, non, non. Non, non. J'explique, si vous
me permettez.
M. Fortier: D'accord. Cela va. Allez-y.
M. Tardif: Bon an, mal an, le fédéral alloue au
Québec, prévoit un budget n'importe où entre 4500 et 5000
logements dits sociaux, financés en vertu de l'article 56.1 de la Loi
nationale de l'habitation qui
permet de rabattre les intérêts à 1% ou 2% selon le
cas. Tout provient de là: Les HLM, les coops ou les OSBL. Je m'excuse du
jargon, mais OSBL veut dire organisme sans but lucratif. Donc, les coops ou les
OSBL publics, les coops ou les OSBL privés et le supplément au
loyer qui est différent de l'allocation au logement.
Or, cette année, par exemple, l'enveloppe du Québec pour
le secteur public a été d'environ 2700; le fédéral
s'est gardé à peu près 2500 pour lui. Qu'est-ce que cela
veut dire "s'est gardé pour lui"? Cela veut dire qu'il distribue
lui-même, la SCHL distribue elle-même auprès d'organismes
sans but lucratif, qu'ils soient coopératifs ou, autres formes
d'organismes sans but lucratif, des logements. Et il nous dit: Vous aurez, pour
le secteur public, à peu près 2700, 3000 logements.
De ce nombre, la quasi-totalité va en HLM mais je peux en donner
à des villes ou à des organismes pour faire du sans but lucratif
public. Exemple: À la ville de Montréal, l'année
dernière - cela fait deux ans - j'ai remis une enveloppe de 600
logements que sa société SOMHAM, Société municipale
d'habitation de Montréal et la SODEMON, ont réalisé donc
des immeubles qui s'adressent aux clientèles que vous mentionnez. Quelle
est la différence avec les HLM? C'est que les gens qui sont là
paient un loyer qui permet de joindre les deux bouts. Ils ne font pas de
profits quoi! Mais ce n'est pas du HLM. Là-dedans, je peux aller avec le
programme de supplément au loyer et l'appliquer pour 10%, 15%, 20%,
jusqu'à 25%, le cas échéant, des logements. En d'autres
termes, je peux dire: Dans telle coop ou dans tel immeuble régi par un
organisme sans but lucratif, je loue 25% des logements. Imaginons qu'il s'agit
d'une tour de 100 logements pour personnes âgées et que j'en loue
25. Donc, les 75 premiers sont des logements loués pour joindre les deux
bouts et pour les 25 autres la règle des HLM s'appliquera. Cette formule
est donc disponible également.
Or, présentement, ce volume qui était le nôtre
après 3000 par année du côté du secteur public, plus
ou moins 2500 que la SCHL faisait, nos organismes sans but lucratif
québécois pouvaient en faire plus de même que les coops et
les autres. C'est la raison pour laquelle récemment j'ai amendé
le programme LOGIPOP pour permettre, à côté du programme
fédéral 56.1, par le cumul de nos programmes de subventions
à nous, Corvée-habitation, Loginove s'il s'agit d'un cas de
recyclage d'une vieille école en logements et ces choses, en permettant
le cumul de nos programmes et en y ajoutant un petit montant additionnel
d'avoir, en parallèle, à la fois le programme
fédéral qui fonctionne, à la fois le nôtre et de
venir ainsi accroître le bassin possible de réalisation.
Mais on peut créer le programme, on peut le mettre à la
disposition des groupes mais on ne peut se substituer aux groupes pour le
faire.
Le Président (M. Rancourt): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Quel est le niveau des loyers qui... Combien
coûtera un loyer qui serait mis sur pied par un organisme sans but
lucratif, public j'imagine? 11 faut que ce soit la ville qui mette sur pied cet
organisme?
M. Tardif: Généralement. Public, oui, si c'est une
municipalité.
M. Fortier: Et quel serait le niveau des loyers
approximativement?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: C'est basé sur une notion que le
fédéral appelle le bas loyer du quartier. Avec les taux
d'intérêt actuels, cela peut fluctuer, pour un logement d'une
chambre à coucher, autour de 350 $, 380 $, 400 $, pour deux chambres
à coucher et le reste est à l'avenant.
M. Fortier: Et où les revenus des individus...
M. Tardif: ...n'est pas pris en compte.
M. Fortier: ...n'est pas limitatif.
M. Tardif: N'est pas pris en compte.
M. Fortier: Alors, si on s'adresse à votre
ministère pour avoir des informations sur ce genre de programme,
à qui s'adresse-t-on? Y a-t-il un service en particulier?
M. Tardif: À la Société d'habitation du
Québec pour la partie qui est gérée par nous.
M. Fortier: Oui, oui.
M. Tardif: Je n'ai aucun contrôle sur les 2500 logements
que la SCHL réalise de cette façon. (20 h 50)
M. Fortier: Le ministre a bien expliqué le problème
tout à l'heure. Les gens d'un certain âge sont moins
intéressés peut-être que les plus jeunes, les familles
monoparentales, à susciter une coopérative à se
réunir très souvent. Je crois que ce qui manque c'est une
information qui serait présentée de telle façon que ce
soit plus facile de prendre des initiatives eux-mêmes
ou de suggérer aux autorités municipales un programme
d'action qui permettrait de répondre aux besoins. Je me demandais si le
ministre ou la Société d'habitation du Québec avaient
pensé à capsuler le genre d'information qu'il vient de nous
donner pour faciliter la tâche de ceux qui voudraient répondre aux
besoins de ces gens parce que le ministre est au courant que dans Outremont, on
a ce genre de problème.
Je vais certainement faire les contacts nécessaires pour susciter
ce genre d'initiative.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: Les clubs d'âge d'or,
généralement, servent de véhicule et s'offrent. Chaque
année, par exemple, lorsque nous sortons les paramètres nouveaux
de Logirente, nous écrivons à tous les clubs de l'âge d'or,
la FADOQ, la Fédération de l'âge d'or du Québec,
l'AQDR, l'Association etc. Tous les organismes nous ont donné leurs
listes d'envois et nous leur envoyons l'ensemble de la documentation en les
priant de la diffuser auprès de leurs membres. J'ai également
offert à tous ces groupes d'envoyer des gens rencontrer les clubs de
l'âge d'or pour leur expliquer cela dans leurs réunions de sorte
que je pense que s'il y avait une demande d'un club de l'âge d'or dans le
comté d'Outremont, on pourrait faire le nécessaire pour la partie
qui relève de nous. J'imagine qu'il pourrait faire la même chose
auprès de la SCHL qui aura expliqué aux gens comment se
prévaloir de 56.1 au fédéral.
M. Fortier: Je vous remercie.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Saint-Louis.
L'immeuble du Bon-Pasteur
M. Blank: J'ai une question sur un autre sujet. Dans mon
comté, sur la rue Sherbrooke, près de de Bullion et
Saint-Dominique, il y a le monastère des soeurs du Bon-Pasteur qui est
dans les mains du ministre ou de la Société d'habitation du
Québec depuis des années. Je me souviens de la grande fanfare
quand on a acheté cette bâtisse. On va faire ça et
ça. Des conférences de presse, la télévision, tout.
Après trois ou quatre ans, on trouve un appel d'offre dans les journaux
pour vendre la bâtisse. Qu'est-il arrivé de ces appels d'offres et
quelle est l'intention du ministre concernant cette bâtisse, nonobstant
toute cette publicité qu'il a faite, il y a six ou sept ans.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: Je voudrais tout simplement dire au
député de Saint-Louis que la publicité n'était pas
fausse, elle était vraie. On l'a achetée. On l'a curetée
et on a dénudé complètement les murs. On a défait
les cellules des religieuses, n'est-ce pas, pour se rendre compte...
M. Blank: Les cellules pour les jeunes filles aussi,
c'était une prison pour les femmes.
M. Tardif: Les cellules des...
M. Blank: C'était une prison pour les jeunes filles.
M. Tardif: Oui, d'accord. On a défait les cellules, en
tout cas, les petites chambres, les chambrettes, c'était vraiment
minuscule pour se rendre compte qu'il y avait des problèmes structuraux
importants comme tels. Effectivement, nous nous serions retrouvés avec
un coût de logement qui aurait dépassé les 92 000 $ par
unité. Pourquoi 92 000 $? Parce que l'immeuble est classé
monument historique à l'extérieur de même que la chapelle
à l'intérieur. Donc, c'est un volume considérable, comme
vous le savez, une chapelle, et on ne peut pas y toucher. On s'est dit: Cela
n'a pas d'allure de faire du logement public là-dedans. On va aller en
appel d'offres. Il y a des gens qui nous ont fait des offres mais finalement le
céder en vertu de ces appels d'offres, aurait été le
céder, à toutes fins utiles, à vil prix.
Au même moment, la ville de Montréal s'est montrée
intéressée à aménager ce secteur situé sur
la rue Sherbrooke et possiblement incluant et le Bon-Pasteur et le
Mont-Saint-Louis.
M. Blank: Ma prochaine question.
M. Tardif: Je vois le député. Devant
l'intérêt de la ville de Montréal pour l'aménagement
de ce site, j'ai soumis un rapport au Conseil des ministres recommandant de
céder le terrain ou l'immeuble du Bon-Pasteur à la ville de
Montréal pour une valeur symbolique étant donné que
ça doit rester dans le patrimoine public. La ville a déjà
cette première partie, mais elle voudrait que l'ensemble de la rue
Sherbrooke soit aménagé. L'autre problème c'est que
l'autre immeuble, le Mont-Saint-Louis, n'est pas la propriété du
ministère de l'Éducation comme tel mais de la Corporation du
cégep du Vieux-Montréal qui pense toujours pouvoir l'utiliser un
jour. C'est tout ce que je sais pour l'instant.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Saint-Louis.
M. Blank: Combien le gouvernement a-t-il dépensé
pour le monastère du Bon-Pasteur?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Blank: Le coût plus l'entretien.
M. Tardif: Pour le coût d'achat, le curetage, le
gardiennage, je pourrai donner le chiffre au député mais, M. le
Président, on a préservé...
M. Blank: De 5 000 000 $ à 10 000 000 $.
M. Tardif: ...un joyau important de notre histoire, de notre
patrimoine culturel. Que voulez-vous que je dise au député? C'est
le genre de situation où, très souvent, ce n'est qu'après
avoir fait un certain curetage... Je ferai remarquer au député
que, dans son comté, si ma mémoire est bonne, il y a sur la rue
Saint-Urbain, en face de l'hôpital Sainte-Jeanne-D'Arc, d'anciennes
demeures qui avaient passé au feu, qui étaient l'objet de
vandalisme et que différents groupes ont occupées comme squatters
pendant un bon moment, que j'ai sauvées des pics de la démolition
en les achetant pour ensuite les céder à la ville de
Montréal. Aujourd'hui, elles font partie des plus beaux immeubles de son
comté. On a eu un rôle, j'allais dire...
M. Blank: C'est après les pressions de tous les groupes
voisins.
M. Tardif: M. le Président...
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Blank: Les groupes de femmes voisins.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! M. le ministre, vous pouvez terminer.
M. Tardif: Dans ce cas, on a fait le relais jusqu'à ce
qu'un groupe se manifeste pour en faire quelque chose de bien. Je ne le
reproche pas au député. Il conviendra avec moi qu'il s'agit de
très beaux immeubles. À l'époque, si le
député s'en souvient bien, si on n'était pas intervenu,
ils seraient démolis aujourd'hui.
M. Fortier: M. le Président.
Le Président (M. Rancourt): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Je réalise que le ministre s'est aperçu
dans le cas du monastère du Bon-Pasteur qu'il aurait dû engager
des ingénieurs en structure avant de commencer; pas seulement des
architectes, des ingénieurs aussi.
La réglementation
J'aimerais changer de sujet. On parle de programmes, on parle de lois,
on parle de nouveaux budgets, mais des décisions sont prises par le
gouvernement qui affectent également l'habitation. J'ai
déjà parlé de ce sujet au ministre. Il s'agit d'un
changement dans la réglementation. Dans mon comté, il y a bien
sûr des propriétaires. Il y en a qui cherchent des loyers
raisonnables et d'autres sont en maison d'appartements. Dernièrement, en
avril-mai, des propriétaires se sont prévalus d'une nouvelle
réglementation qui a été mise en vigueur vers le mois de
juin 1983, qui change la définition d'un loyer de faveur. On dit en
particulier que lorsqu'il s'agit d'un règlement de succession, si les
nouveaux propriétaires peuvent démontrer qu'il y avait un loyer
de faveur, c'est-à-dire un loyer à un prix plus bas qu'à
l'accoutumée, si on définit cela comme étant un montant
attribuable à une gestion inadéquate de la part de la personne
décédée... Bien sûr cela soulève toute une
question d'interprétation parce que la personne
décédée étant décédée, si
cette personne se satisfaisait de 300 $, le nouveau propriétaire dit:
C'était mal administré parce que, quant à moi, je
demanderais 550 $. Mais la personne décédée n'est pas
là pour dire qu'elle administrait bien et qu'elle était
satisfaite de 300 $ ou 350 $.
Dans le cas qui me préoccupe, le nouveau propriétaire ou
la succession dit: Écoutez, envoyez une lettre à tous les
locataires il y a une vingtaine de logements - pour dire: Nouvelle succession.
C'était mal administré. Votre loyer est augmenté de 100%.
Les gens acceptent sujet à contestation devant la Régie du
logement. Quinze jours plus tard, on leur amène un autre article de loi
qui permet à un propriétaire de faire une rénovation
complète des logements à la condition qu'ils les quittent pendant
trois mois, avec tous les désagréments que ceci peut
susciter.
J'évoque cela parce qu'il s'agit d'un changement de
réglementation qui n'a pas été publicisé et dont
les députés, en particulier, apprennent la teneur lorsque les
gens ont des problèmes avec l'interprétation, avec les
décisions ou avec les contestations qui arrivent devant la Régie
du logement à la suite d'actions qui viennent des propriétaires
comme tels.
Dans ce cas, il y a une question que j'aimerais poser au ministre sur le
changement de la définition du loyer de faveur. Pour quel motif ont
été faits ces
changements au mois de juin 1983? Y a-t-il eu plusieurs demandes
à savoir qu'il était important de changer la définition du
loyer de faveur? Est-ce que plusieurs propriétaires se sont plaints du
fait qu'à la suite d'un règlement de succession ils se trouvaient
aux prises avec des loyers beaucoup trop bas? (21 heures)
Bien sûr, le ministre admettra avec moi que ceci permet, à
chaque fois qu'il y a règlement d'une succession, de demander à
la Régie du logement des augmentations importantes. Je crois qu'il est
assez facile de suggérer, alors que l'ancien propriétaire se
contentait de 300 $ ou 350 $, que le nouveau propriétaire, normalement
plus jeune par définition, s'il s'agit d'un règlement de
succession, aimerait bien avoir un rendement de 600 $ ou 700 $ par logement.
Pour quelles raisons le ministre a-t-il favorisé cet
élargissement de la définition de loyer de faveur qui semble
apporter certains problèmes à plusieurs locataires de mon
comté? J'imagine que c'est la même chose dans d'autres
comtés de la province.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, le député dit
qu'il présume que c'est la même chose dans beaucoup d'autres
comtés, mais je pense qu'il est le premier à soulever la
question. On m'avait dit qu'il était question ce soir -sans vouloir nier
l'intérêt de la question soulevée par le
député - des crédits supplémentaires reliés,
notamment, à Logirente. Si bien que je n'ai avec moi que les gens de la
Société d'habitation du Québec et non pas ceux de la
Régie du logement.
Néanmoins, je dois donner le contexte général,
quitte à ce que je vérifie précisément ce qui est
survenu dans ce cas-là. Je dois dire que la règle
générale à la Régie du logement est que celle-ci
n'a de pouvoir que pour vérifier l'augmentation d'une année
à l'autre et non pas de réviser le prix de base. Par exemple, un
propriétaire peut très bien dire qu'un loyer de faveur
était consenti par l'ancien propriétaire, ou bien parce qu'il
gérait mal ou bien parce qu'au contraire il gérait très
bien. Il s'était établi entre le propriétaire et le
locataire des relations amicales qui n'étaient pas, d'abord, des
relations d'affaires et il a laissé le loyer au niveau où il
était. Pendant que le propriétaire allait à son chalet,
l'été, le locataire surveillait le logement et il a pu lui
consentir un loyer de faveur. Il peut se présenter d'autres cas que ceux
qu'invoque le député pour que des gens décident
délibérément de maintenir un niveau de loyer plus bas.
À l'inverse, il peut se produire que des locataires demandent que soit
révisé le prix de base parce qu'ils ont signé un bail
à un prix trop élevé.
Je me souviens que, lors de la commission parlementaire sur le projet de
loi 107, les propriétaires demandaient que soit inclus dans la loi le
pouvoir de réviser le loyer de base; les locataires le demandaient
aussi, mais aucun ne voulait que ce soit un droit appartenant aux deux groupes.
Les locataires disaient qu'ils devraient être les seuls à pouvoir
demander une révision du prix de base à la baisse et les
propriétaires disaient qu'ils devraient être les seuls à
pouvoir demander une révision du prix de base à la hausse. Face
à l'impossibilité d'obtenir que les deux groupes consentent
à ce qu'il y ait dans la loi la révision du prix de base d'une
façon globale, la commission - je pense que c'était à peu
près unanime, c'était le député de
Notre-Dame-de-Grâce qui suivait le projet de loi - a laissé
à peine quelques exceptions, notamment pour celle-là.
M. le Président, j'administre la loi; j'en réponds devant
la Chambre, mais je ne réponds pas des décisions judiciaires. La
Régie du logement est un tribunal et, si les décisions qu'elle
peut rendre ne plaisent pas aux parties, il y a un droit d'appel prévu.
Le député a raison de dire: La réglementation, oui. Je lui
dis que je vais voir quelle est la nature des causes qui ont amené le
besoin de présenter semblable règlement, mais je ne peux - il le
comprendra - m'ériger en instance d'appel des décisions qui ont
pu être rendues par la régie. Je vais lui donner les
renseignements sur ce qui avait motivé, à l'époque, cet
amendement au règlement.
Le Président (M. Jolivet): Une dernière question,
M. le député...
M. Fortier: M. le Président, je vais laisser la parole
à mon collègue. Si le ministre peut me donner les raisons qui ont
motivé le changement, j'aimerais savoir s'il y a eu plusieurs causes qui
sont allées devant la Régie du logement. Quel en a
été le déroulement? Je laisse la parole à un de mes
collègues.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Charlesbourg, une dernière question avant qu'on suspende les travaux
de...
M. Côté: M. le Président, je suis heureux de
pouvoir profiter de l'occasion pour poser une question au ministre. Ce n'est
pas dans le but de l'embarrasser mais, comme il est déjà venu
faire un petit tour dans Charlesbourg il n'y a pas tellement longtemps pour
remettre la première subvention dans le cadre du programme
Équerre, j'ai pensé lui soumettre un autre cas du comté de
Charlesbourg, que j'ai reçu lundi matin et que j'ai appris en même
temps aussi. Je veux rassurer le ministre. Ce n'est pas dans le but de lancer
une pierre et d'essayer de vous donner un cas - disons-le -
pour tenter de vous passer quelque chose, mais cela m'a grandement
étonné. Un citoyen de Charlesbourg est venu me rencontrer lundi
dans le cadre de Corvée-habitation. Sa demande ou son achat se situait
entre le 5 et le 11 mai 1983.
M. Tardif: Vous n'avez pas d'affaire à aller plus loin, je
connais l'histoire.
M. Côté: Bon!
M. Tardif: Vous voulez une réponse?
M. Côté: Oui.
M. Tardif: Bon! M. Lalonde, dans son discours sur le budget du
mois d'avril 1983, avait annoncé que la subvention de 3000 $ du
gouvernement fédéral qui devait se terminer le 30 avril, allait
être prolongée d'un mois, jusqu'au 30 mai. On se comprend? Sauf
qu'il a annoncé cela à la fin d'avril et dès les premiers
jours de mai - les 1er, 2, 3 et 4 mai - les entrepreneurs
québécois qui voulaient vendre des maisons, notamment, aux
citoyens - sans doute de Charlesbourg, que représente le
député - se sont adressés à la SCHL pour faire
inscrire leurs maisons dans le programme. Ils se sont fait dire tout de suite:
On regrette, il n'y a plus d'argent. Les entrepreneurs ont posé la
question: Pourquoi? Et là, ils ont dit: En réalité, il y a
eu une prolongation d'un mois par le ministre des Finances
fédéral, mais c'était pour couvrir les sommes trop
considérables déjà engagées antérieurement.
Nous avons eu, au Québec, notre propre discours sur le budget le 10 mai
et dès le 10 mai au soir, le ministre des Finances, sur ma
recommandation, a décidé que le Québec allait offrir les
3000 $ à compter du 10 mai. Il y a donc des citoyens qui se trouvent
dans une zone, oui, un "no man's land", entre le 5 et le 10 mai.
M. le Président, je soumets respectueusement qu'il appartient au
gouvernement fédéral d'honorer son engagement. En principe, quand
un ministre des Finances se lève le soir du discours sur le budget et
dit: À compter de minuit ce soir, la taxe s'appliquera ou est abolie,
cela s'applique. Lui, il avait dit "jusqu'au 30 mai", mais ceci dit, on a eu
des tractations avec les entrepreneurs. Vous imaginez bien que l'APCHQ,
l'Association provinciale des constructeurs d'habitation du Québec, la
FCQ, tout le monde est venu nous voir en disant: Aïe, ils n'ont plus
d'argent. Vous, vous en avez un peu dans Corvée-habitation. Faites donc
quelque chose. C'est un fait qu'on a décidé de couvrir ces
cas-là. Cela va prendre un peu plus de temps. Il a fallu faire amender
rétroactivement notre propre réglementation, convaincre nos
partenaires autour de la table - parce qu'on n'est pas tout seuls, dans ce
fonds-là, Corvée-habitation... Les syndicats sont
là-dedans, le patronat. Mais oui, il a fallu convaincre nos partenaires
autour de la table de nous substituer au gouvernement fédéral
pour cette période de cinq jours. Combien va nous coûter cette
période de cinq jours, M. Beaulieu, vice-président de la
Société d'habitation du Québec?
Une voix: 1 000 000 $.
M. Tardif: Cela va nous coûter 1 000 000 $ pour
réparer les pots cassés du gouvernement fédéral. Je
suis heureux de le faire, pas pour le député, mais pour le
citoyen de Charlesbourg en question, mais vous admettrez avec moi, sans vouloir
non plus lancer un pavé dans la mare, que ce n'était pas
très kasher, comme façon de procéder du gouvernement
fédéral, en l'occurrence. On est en train de le corriger. Tout ce
que je dis, je demande à ces citoyens pris dans cette zone grise
d'être un peu patients.
M. Côté: Juste...
Le Président (M. Jolivet): Oui, mais c'est parce que je
dois conclure, moi aussi.
M. Côté: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Côté: ...je comprends qu'on mange du temps sur
mon heure à moi avec le Loisir, la Chasse et la Pêche. Vous me
permettrez...
Le Président (M. Jolivet): Vous avez le loisir.
M. Côté: ...le loisir, c'est cela, une seule
question additionnelle. Quelles sont les démarches que doivent faire ces
individus? Je comprends le ministre. D'ailleurs, je lui rends hommage parce
qu'il récupère des personnes qui sont aux prises avec un
problème, non seulement les 3000 $, mais aussi les 9,5%
d'intérêt. Avec les taux qui augmentent, cela crée des
problèmes majeurs aux individus qui, de bonne foi, ont fait confiance
aux entrepreneurs et à tout le monde. Le ministre pourrait-il...
M. Tardif: Les personnes n'ont pas déjà
formulé une demande, parce qu'elles se trouvaient dans une... Elles ne
savaient pas si elles étaient couvertes ou non ou si elles en ont fait
une et aimeraient savoir où cela est rendu, si elles habitent la
région de Québec, le numéro de téléphone est
643-7676; pour tous les autres citoyens habitant ailleurs au Québec, ils
peuvent téléphoner
sans frais à 1-800-463-4315.
M. Côté: Je répondrai au ministre que c'est
pour l'ensemble des autres cas...
M. Tardif: Ce n'est pas ce que vous vouliez savoir.
M. Côté: ...mais on voit cela sur les autobus de la
Communauté urbaine de Québec: 643-7676. Les gens ont
déjà appelé ce numéro de téléphone et
la réponse est qu'on attend un amendement à un règlement
ou à une loi.
M. Tardif: Mais il est fait. Il est adopté. Je l'ai
défendu au Conseil du trésor. Je l'ai défendu au Conseil
des ministres. Il va être publié à la Gazette officielle
demain. Qu'est-ce que vous voulez de plus?
M. Côté: C'est ce qui manquait. C'est parfait. Cela
va.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce que le programme
2 sur la Société d'habitation du Québec est adopté?
Adopté. Nous allons suspendre quelques instants, le temps de permettre
au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche de s'installer.
(Suspension de la séance à 21 h 11)
(Reprise de la séance à 21 h 13)
Loisir, Chasse et Pêche
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît! Nous allons commencer le programme 3 pour le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche. La parole est à M. le
ministre.
Parcs et réserves fauniques
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais d'abord
expliquer que, lors du discours sur le budget, nous avons obtenu un montant
additionnel de 10 000 000 $ aux crédits réguliers. Ce montant se
répartit comme suit: 5 000 000 $ pour les parcs nationaux, les
immobilisations dans les parcs nationaux; 3 000 000 $ pour nos réserves
fauniques; 2 000 000 $ pour nos parcs régionaux. Il est bien
évident que je m'attends à être interrogé sur
d'autres sujets puisque les crédits sont l'occasion, bien souvent,
d'obtenir des réponses supplémentaires aux crédits qui ont
déjà été étudiés en commission
parlementaire. Je n'ai pas l'intention de faire un long préambule pour
permettre le plus grand nombre de questions possible. En plus de
répondre aux questions de l'Opposition, c'est bien évident que,
par le fait même, on puisse renseigner la population en
général du Québec. Je vais m'arrêter ici et
répondre aux questions.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Charlesbourg.
M. Côté: M. le Président, avant même
d'aborder ce pourquoi nous sommes réunis, soit des crédits
supplémentaires de 10 000 000 $, vendredi dernier, lors de
l'étude du projet de loi 34 et de certains amendements que le SAGMAI
avait suggérés au ministère du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche et que ce dernier a fait siens par la suite - cela posait quand
même certaines questions - j'avais convenu avec le ministre qu'on
pourrait en discuter aujourd'hui. À la lecture des amendements qui ont
été déposés vendredi, ma première question
concernait le piégeage et le trappage. C'est un peu dans ce
sens-là que j'aimerais que le ministre nous fasse part de l'état
d'avancement de l'application de la politique du trappage qu'il nous avait
annoncée il y a un an, si je ne m'abuse, et qui, normalement, devrait
être en vigueur à l'automne, compte tenu qu'il y avait deux
régions qui s'opposaient à la politique et que le reste des
trappeurs avec 20% du territoire, c'est quand même la très grande
majorité des trappeurs confinés à un territoire plus
restreint.
M. Chevrette: Exactement, la politique sur le trappage a
été adoptée par le Conseil des ministres de mercredi
dernier. Donc, elle sera en vigueur en septembre prochain. Cependant, les
territoires seront réduits dans plusieurs régions puisqu'on
augmente le nombre de territoires enregistrés de piégeage
d'environ 1200 à 1500. Il y a des territoires qu'il faut modifier
précisément parce qu'ils ne sont pas accessibles ou le sont
difficilement, mais ce sera au moins 1200 territoires enregistrés de
plus.
Les amendements qui ont été déposés dans le
projet de loi omnibus ou le projet de loi ramasse-tout de fin de session, ce
sont des amendements pour éviter toute confusion au niveau de la
réglementation. Des gens nous disaient qu'il pouvait y avoir des
poursuites judiciaires et que les textes existants n'étaient pas clairs.
Donc, il s'agissait purement et simplement d'apporter une clarification plus
précise pour éviter les poursuites judiciaires inutiles. Ceci
n'empêche pas les réflexions à l'interne au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche afin de
préparer, éventuellement, un redécoupage de certains
territoires permettant ainsi une plus grande accessibilité à la
ressource puisqu'au niveau du trappage on exploite, à toutes fins
utiles, 45% du potentiel québécois annuellement. Nous connaissons
des retombées économiques de l'ordre de 25 000 000 $. On pourrait
facilement doubler ces retombées économiques
annuellement par de simples mesures incitatrices additionnelles ou par
l'ajout de territoires non exploités présentement et qui font
partie de bandes protégées.
M. Côté: Quelles sont les prochaines étapes,
quant à la publication de la politique elle-même?
M. Chevrette: Présentement, je peux vous dire que
l'ensemble des associations de trappeurs connaît la politique. Je peux
même vous dire que les fonctionnaires ont déjà
commencé à procéder au choix des territoires de trappe
enregistrés au niveau des trappeurs eux-mêmes. Pour votre
information, la seule modification qu'on a apportée, c'est dans la
réserve des Laurentides, ici, où on a permis... Je crois qu'il
s'agit de trois terrains de trappe enregistrés aux autochtones du groupe
de M. Max Gros-Louis, le groupe des Hurons. Mais, normalement, tout devrait
être terminé à temps pour qu'en septembre on puisse avoir
ces nouveaux trappeurs qui vont venir grossir le nombre existant. J'ose
espérer que dans les années futures on pourra développer
notre propre marché chez nous. Vous savez pertinemment que nos trappeurs
sont obligés, bien souvent, d'aller vendre leurs fourrures à
l'extérieur du Québec. Nous pensons qu'avec la
réorganisation nous pourrons inciter les groupes à se prendre en
main et faire en sorte qu'on puisse développer chez nous notre propre
marché de la fourrure.
M. Côté: Cela va pour les trappeurs, M. le
Président. Avant d'aborder le thème principal de notre rencontre,
j'aimerais peut-être... Je sais que le ministre s'est rendu en
Gaspésie la semaine dernière. Ce n'est pas que je le suive
à la trace, mais semble-t-il que certains individus ont voulu le prendre
dans une trappe concernant la pêche commerciale. Cela fait suite de
façon certaine à la déclaration ministérielle
concernant le saumon. Il faut le dire, je pense qu'il y a plusieurs
représentations et on en avait discuté tant lors de la
déclaration ministérielle qu'à l'étude des
crédits du ministère.
À ce moment, on avait insisté sur le fait que le ministre
devait avoir un programme de rachat. Je pense que c'était la
volonté du ministre, mais il y a une marge entre le dire et agir,
entamer des procédures afin qu'il y ait effectivement un rachat des
pêcheurs commerciaux. On a l'impression, actuellement, que cela
traîne et que les pêcheurs commerciaux ont peut-être raison,
à ce moment-ci, d'être un peu fâchés. J'aimerais
connaître l'état du dossier, ce que le ministre a pu offrir aux
pêcheurs commerciaux et ce qu'eux exigent en retour.
M. Chevrette: Tout d'abord, pour bien préciser, il y a 49
permis de pêche commerciale en Gaspésie et 23 sur la
Haute-Côte-Nord et le Saguenay. En tout, il y a 72 pêcheurs
commerciaux qui se voient privés cette année de leur droit
d'exercice de leur profession, si on peut s'entendre sur ce langage. Qu'est-ce
qu'on a fait concrètement? J'ai rencontré à deux reprises
les pêcheurs commerciaux leur demandant, dans un premier temps, de me
produire des projets pour qu'on puisse les subventionner. Par exemple, il y a
le reconditionnement de géniteurs, la garde en captivité de
certains saumons pour fins de cueillette des oeufs pour ensuite les
déposer sur des frayères, etc. (21 h 20)
Les gens n'aiment pas trop ces projets. La liste qui leur fut
déposée a été refusée, me dit-on, à
100%. Au moment où je les ai rencontrés la semaine
dernière, on pensait que je reviendrais sur ma décision de leur
permettre de pêcher le saumon cette année. Je voudrais tout
simplement rappeler que dans nos négociations avec M. De Bané du
fédéral, cela a été une des conditions de repousser
l'ouverture de la pêche au saumon à Terre-Neuve, c'est qu'on fasse
cesser la pêche commerciale en Gaspésie parce que l'état
des stocks est beaucoup plus dramatique en Gaspésie et sur la
Haute-Côte-Nord-Saguenay qu'elle ne l'est, par exemple, sur la
Basse-Côte-Nord où biologiquement on n'a pas de
problème.
À partir de là, les pêcheurs disaient que
c'était unilatéralement que Québec avait
décidé cela. Non, je pense qu'on a négocié de bonne
foi. On est arrivé à une entente, je pense, pour le
mieux-être de l'espèce saumon. Placé devant le fait
où les pêcheurs commerciaux refusent des projets concrets je n'ai
pas d'autre choix que d'avancer d'autres projets puisqu'ils ne veulent pas de
ces projets qu'on leur a présentés. Par contre, cela me surprend
un peu parce qu'ils m'ont toujours dit que c'était eux les principaux
agents de conservation du saumon en Gaspésie. Ils nous disaient que la
pêche commerciale était, à toutes fins utiles, un gage de
la sauvegarde de l'espèce parce qu'ils se font les gardiens, à
toutes fins utiles, en se promenant sur les eaux. À partir de là,
j'ai conçu avec nos fonctionnaires, cet après-midi, une
proposition. Je devais les rencontrer le 23 à Percé, mais
l'horaire étant trop chargé, nous avons décidé de
les rencontrer le jeudi après-midi qui viendra, jeudi prochain,
où nous avons une proposition concrète en trois volets à
leur faire afin de leur offrir la possibilité de gains. Je n'ai pas
oublié, dans un de ces trois volets, le volet rachat. Je pense qu'il
faut procéder et même plus que cela, je pense qu'il faut donner
priorité dans l'achat aux 72 touchés cette année par
les
mesures.
M. Côté: Lorsque vous parlez de rachat, vous vous
basez sur quoi? parce qu'il y a eu des investissements en termes
d'équipement et, finalement, ce n'est pas une première. Dans le
passé, il y a déjà eu un premier ban qui avait
été imposé. Il y avait, à ce moment, des bases sur
lesquelles les négociations s'étaient faites et il y avait eu des
ententes. Forcément, parce qu'il y avait eu plusieurs pêcheurs
commerciaux dans toute la Gaspésie qui avaient
bénéficié et largement de ce ban.
M. Chevrette: Les critères, pensez bien que je ne les
dévoilerai pas ce soir parce que j'ai à négocier avec eux
jeudi prochain, mais je peux vous dire, en toute candeur, que je ne peux pas
aller en bas de 72, du ban de 1972.
M. Côté: Lorsque vous parlez de jeudi prochain.
M. Chevrette: C'est jeudi qui vient, cela veut dire dans deux
jours.
M. Côté: On va faire confiance au ministre sachant
qu'il s'en est quand même tiré de brillante manière,
contrairement à son prédécesseur qui lui avait eu un
traitement beaucoup plus difficile avec les Indiens. Je pense que s'il y a
bonne foi des deux côtés, normalement on devrait finir par en
arriver à une entente pour le meilleur avantage de tout le monde. Je
pense que chacun a fait un bon bout de chemin pour la préservation du
saumon.
M. Chevrette: La difficulté, si vous me permettez, avec
certains pêcheurs commerciaux, c'est que ce n'est pas
nécessairement leur première occupation pour certains. Je prends
un exemple d'un cultivateur qui a un permis de pêche au saumon. Il est
difficile de concevoir un projet qui vient en complémentarité
avec l'agriculture, quand on parle de conservation de la faune. Celui qui
pêche les autres espèces, qui se voit privé de pêcher
le saumon, il n'y a rien qui l'empêche, à toutes fins utiles,
entre vous et moi, c'est vrai que c'est une minorité, mais c'est quand
même un nombre sur les 72 qui pourraient accroître leur cueillette
dans d'autres secteurs. Je pense que de part et d'autre, comme vous le dites,
et je suis heureux que vous le mentionniez, c'est de part et d'autre qu'on va
arriver à trouver des solutions. Ceux qui ne peuvent pas accéder
à des programmes de création d'emplois sur un projet
précis, parce qu'ils ont une occupation principale, dans tous les corps
de métier au Québec c'est la même chose. Qu'on prenne -je
ne sais pas, vous savez très bien qu'on a déjà
chiâlé beaucoup dans le secteur de la construction. Je me rappelle
dans les années 1974, 1975, on disait: Écoutez, à toutes
fins utiles, durant les vacances d'été, ce sont des professeurs
qui sont sur les chantiers de construction. Introduisez donc une règle
pour les empêcher... On dit: Les pompiers, à Montréal,
à cause de leur convention collective, peuvent aller chercher des heures
dans la construction, essayez donc de les arrêter. Si on demande cela aux
autres corps de métier, il faut comprendre qu'on doit traiter au moins
avec une certaine norme équitable l'ensemble des groupes. C'est
là-dessus qu'il faudra amener nos pêcheurs commerciaux à un
certain réalisme. Je suis prêt à faire un tas de
propositions, à soumettre d'autres projets et à soumettre
même des projets qui vont être reliés concrètement
à la conservation de la faune. Je peux vous dire qu'il y a tellement de
quais à Gaspé, il y a tellement d'endroits -vous le savez comme
moi parce que vous y venez - où on peut facilement échapper aux
yeux des agents de la faune qu'on peut multiplier des yeux.
M. Côté: Cela va, M. le Président. On
pourrait aborder maintenant l'objet de notre rencontre, soit les crédits
supplémentaires de 10 000 000 $. Il y aurait évidemment beaucoup
d'autres questions à poser au ministre. Je voudrais quand même
qu'on aborde la ventilation des 10 000 000 $ additionnels qui sont
affectés. Je voyais dans les informations qu'il y avait 5 000 000 $ qui
devaient être destinés aux parcs nationaux avec priorité
pour Orford, Frontenac, Gaspésie, Saguenay, Jacques-Cartier et
Mont-Tremblant. On voyait 3 000 000 $ pour les réserves fauniques et 2
000 000 $ pour les parcs régionaux. Ce qui m'étonne c'est qu'il
n'y avait pas de crédits supplémentaires pour les jardins
zoologiques compte tenu du fait que le ministre était passé d'un
montant assez substantiel d'immobilisations pour le Jardin zoologique de
Charlesbourg à... L'histoire nous dit qu'à l'étude des
crédits, on nous avait dit 100 000 $ alors qu'effectivement
c'était bien 20 000 $ qui étaient prévus. Il y avait
déjà une première hausse, à moins que mes
informations ne soient mauvaises... M. le ministre, avant même d'entamer
l'étude pour les parcs, vous pourriez certainement faire plaisir aux
gens du Jardin zoologique de Charlesbourg... Je suis convaincu qu'à
l'intérieur même des 10 000 000 $, il y a certainement des sommes
additionnelles qui peuvent y être dépensées.
M. Chevrette: Je ferai plaisir non seulement aux travailleurs de
Charlesbourg, mais peut-être au député lui-même qui
m'avait interrogé assez longuement lors de l'étude des
crédits. Je peux vous dire qu'aux
100 000 $ prévus, on ajoute 150 000 $ effectivement. Il y aura
donc 250 000 $ de dépensés en immobilisations pour le zoo de
Charlesbourg. Les 150 000 $ porteront principalement sur la construction de
deux exhibits en particulier pour la loutre et les ratons laveurs. Mais ce sera
150 000 $ additionnels aux 100 000 $ de sorte qu'il y aura 250 000 $ de
dépensés.
Il faudrait rappeler également que, annuellement, vous posez des
questions relatives aux différences qui peuvent exister entre les
subventions, par exemple de Saint-Félicien, Granby et le Jardin
zoologique de Québec, il n'y a aucune commune mesure. Si vous avez
reçu les chiffres, vous avez vu que l'an dernier, en immobilisations, il
y avait au-delà de 1 000 000 $; cette année, c'est 250 000 $. Il
ne faut jamais oublier le budget de fonctionnement du Jardin zoologique de
Québec qui, cette année, se chiffrera à environ 1 700 000
$. Ce sont de gros sous. On pourra continuer et, dès que les revenus se
feront plus grands, on immobilisera davantage. À cette période,
il nous faut penser à consolider d'abord les équipements qu'on a
avant de connaître du développement additionnel. On a beaucoup de
choses à réparer. Vous avez remarqué dans la liste qu'on
vous a envoyée qu'il y avait beaucoup de petits projets. Cela vise
précisément à consolider le type d'équipement qu'on
a. On va continuer dans ce sens.
M. Côté: J'apprécie grandement j'imagine que
les gens du jardin aussi - on dit Jardin de Charlesbourg, je pense que le
ministre s'est mis à l'heure de l'année 1984 parce que,
règle générale, on dit le Jardin de Québec. C'est
effectivement le Jardin de Charlesbourg. Il y avait un autre projet dont on
faisait mention et que les gens du jardin voulaient implanter, soit le Grand
Prix équestre Rothman. On m'avait dit, à l'époque, que
c'était un projet qui nécessitait des investissements de 75 000
$. C'était un événement annuel qui cadrait très
bien avec la vocation du jardin alors que le Grand Prix Rothman se cherche des
places. J'entendais encore ce matin à la radio que le ministre des
Travaux publics avait catégoriquement refusé l'accès au
Bois de Coulonge pour le Grand Prix Rothman, qui devrait ainsi se retrouver
à l'hippodrome de Québec. Les gens du jardin, au moment où
je les ai contactés, étaient très heureux quant à
eux de pouvoir accueillir le Grand Prix Rothman mais cela nécessitait
des investissements de 75 000 $ pour l'infrastructure de travaux à
faire. (21 h 30)
M. Chevrette: On n'est pas encore convaincu de la
compatibilité du projet avec la vocation même d'un jardin
zoologique; c'est un premier point. Deuxièmement, je vous
répète ce que je vous ai dit tantôt: Avec l'argent dont
nous disposons, nous préférons présentement travailler
à la consolidation des équipements avant de penser à des
projets qui peuvent être fort attirants. Un projet du genre peut
être très intéressant mais, au moment où on se
parle, avec les restrictions budgétaires qu'on a connues, il est
difficile d'injecter des sommes d'argent sans connaître la
longévité d'un tel projet. Quand on regarde les investissements
requis, il m'apparaît qu'on peut quand même réaliser un
événement de cette envergure dans d'autres équipements
déjà existants sans immobilisations additionnelles.
M. Côté: Je ne veux pas prendre le temps qui nous
est donné pour discuter uniquement des problèmes du comté
de Charlesbourg.
M. Chevrette: Je pourrais ajouter que, dès l'automne,
j'espère pouvoir commencer à faire connaître, sinon un
projet, au moins un avant-projet de politique sur les jardins zoologiques. Cela
nous permettra peut-être de faire une discussion beaucoup plus ouverte,
soit un débat du vendredi où on pourra s'interroger, de part et
d'autre, sur l'importance d'une telle politique. J'y songe.
M. Côté: II y aura intérêt à le
faire, d'autant plus que j'ai pris connaissance de feu le projet SOQUETOUR qui
est devenu SOQUAPARC. En 1986, le jardin zoologique serait
transféré à la société. À l'automne,
on se donne rendez-vous relativement au jardin zoologique de Charlesbourg.
M. Chevrette: Je suis convaincu que ce qui vous intéresse
c'est que le jardin zoologique connaisse de l'expansion. Si on vous
démontre que le meilleur moyen pour connaître de l'expansion est
de l'intégrer à une société qui peut fonctionner
sur une base commerciale, sans toutes les mesures administratives, avec
beaucoup plus de souplesse, je suis persuadé que vous allez vous en
réjouir.
M. Côté: Je préviens le ministre que ce sera
probablement un débat qui sera très animé lorsqu'il
présentera le projet de loi en Chambre. On fera le débat à
ce moment-là.
Le Président (M. Jolivet): Avant de passer à un
autre sujet, je pense que le député d'Abitibi-Est aurait une
question à poser.
M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Dans la ventilation
des crédits additionnels pour les parcs nationaux dont parlait le
député de Charlesbourg, 30 000 $ étaient prévus
pour Aiguebelle dans la région 08. Je
voudrais savoir du ministre si ces 30 000 $ tiennent toujours
étant donné les problèmes pour tenir des audiences
publiques avec Aiguebelle; si on peut réaliser, le projet en quoi
consistent les dépenses de 30 000 $?
M. Chevrette: En particulier, c'était pour la
signalisation puisque les 90 000 $ étaient surtout pour
l'amélioration du réseau routier. Je vous avoue très
honnêtement que l'expérience un peu malheureuse qu'on a
vécue à Aiguebelle parce qu'un bureau d'avocats s'est permis
à la dernière minute, à 19 h 2, alors que les audiences
devaient commencer à 19 heures, de nous remettre un jugement du juge
Barbès de l'Abitibi... L'avocat Bourassa était dans la salle et
se bidonnait de voir que les audiences étaient arrêtées. Le
gouvernement a dû dépenser 11 000 $ inutilement. Je ne sais pas ce
qui arrivera pour les investissements cette année parce que cela peut
retarder la reconnaissance juridique du parc. Les projets de
développement ne sont pas aussi urgents quand un parc n'est pas reconnu
juridiquement. Les gens nous reprochent d'ailleurs très souvent
d'investir avant même de reconnaître juridiquement un parc. Il y a
sûrement d'autres endroits qui pourront recevoir ces sommes-là. Je
n'ai pas pris de décision à ce moment-ci pour savoir si on le
fera quand même.
Je peux vous dire qu'aujourd'hui même, sur le coup de 16 heures,
je recevais deux autres injonctions: une demande d'injonction interlocutoire
qui sera plaidée jeudi pour empêcher les audiences publiques et
une demande d'injonction permanente pour éviter que tous les claims
miniers fassent l'objet d'expropriation. Donc, le fait de dérober au
territoire abitibien 0,5% afin de conserver un élément naturel du
milieu, soit le parc Aiguebelle, et faire en sorte que l'économie
régionale ne contribue pas à en faire une ville monoindustrielle,
mais qu'on pense aussi au développement touristique de la région,
je pense que c'est dommage d'agir de la sorte. En temps et lieu,
j'émettrai plus de commentaires au moment où les procès
seront terminés.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Charlesbourg.
M. Côté: On avait été informé,
M. le Président, des difficultés qu'éprouvait le ministre
à entendre les citoyens. Puisqu'on est dans cette veine...
M. Chevrette: ...
M. Côté: Oui, concernant le parc Aiguebelle, parce
qu'il y a eu des injonctions, mais il y a un autre parc où il n'y a pas
eu d'injonction et pour lequel le ministre a tenu des audiences publiques:
celui du mont Saint-Bruno. J'ai eu la chance, dans les documents que j'ai
retrouvés sur la rue Saint-Jean, d'en avoir un autre en date de
décembre 1983 et qui est de M. Chevrette, ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche, dont l'objet était: "Plan de
développement des parcs nationaux, régionaux et urbains de
même que des réserves fauniques, décembre 1983". C'est un
mémoire au Conseil des ministres. Il y avait toutes sortes de choses
fort intéressantes là-dedans. Je suis convaincu que le ministre
est au courant. D'ailleurs, c'est signé de sa main.
À l'annexe I, lorsqu'on parlait de la classification des parcs,
il y avait donc, dans un premier temps, les parcs créés où
il y avait Gaspésie Jardins - on y faisait mention de conservation -
Jacques-Cartier en 1981, Saguenay en 1983, le parc de récréation
du mont Orford en 1981 de même que le mont Tremblant et le Yamaska en
1983. Et, là, il y avait "territoires envisagés". Il y en avait
toute une série dont Aiguebelle, Bic, Pointe-Taillon, île
Bonaventure, Miguasha, toutes des choses dont on a discuté au moment des
crédits. Dans les parcs de récréation, ce qui est assez
étonnant, c'est qu'on retrouve Frontenac, îles de Boucherville,
avec un astérisque, "les audiences publiques ont été
tenues en décembre 1982", mont Sainte-Anne, mont Saint-Bruno, un autre
astérisque pour les audiences tenues en décembre 1982. Cela
apparaît dans la colonne des parcs de récréation.
Bon! J'imagine que le ministre est peut-être décidé
aujourd'hui. Il pourrait nous dire ce qu'il adviendra du parc du mont
Saint-Bruno, s'il va le classer "parc de récréation" ou s'il va
le classer selon le voeu des audiences, parce que je pense qu'on doit avoir de
bonnes raisons. Va-t-il le classer comme un parc de conservation?
M. Chevrette: Tout d'abord, effectivement, aux audiences
publiques du mont Saint-Bruno, je dirais que peut-être 90% et même
plus des mémoires ont porté exclusivement sur la classification.
Les mémoires, fort bien orchestrés, d'ailleurs, par un chef
d'orchestre, allaient tous dans le même sens pour dire: Demandez un parc
de conservation. Mais à chaque mémoire qui était
déposé - et j'aimerais que le député réponde
à la question... Si on avait le droit d'échanger, il y aurait
lieu de se poser des questions. Si, à chaque mémoire...
M. Côté: ...à l'automne.
M. Chevrette: Non, mais on est plus fort dans les
générales que dans les partielles. Vous ferez attention.
J'échangerais n'importe quel temps, si j'étais à votre
place, 21 partielles pour une générale, mais je
n'échangerais pas une générale pour 21 partielles.
M. Côté: Ne vous inquiétez pas, M. le
ministre.
M. Chevrette: Ceci dit, à chaque personne ou à
chaque groupe qui déposait un mémoire, on demandait: Les
équipements du parc sont-ils adéquats? Est-ce bien, ce qu'on vous
démontre comme projet d'aménagement, comme zones de
récréation et comme zones de conservation? Ils nous
répondaient tous oui. La différence fondamentale, c'est que dans
un parc de conservation il n'y a pas d'équipement lourd
récréatif. À Saint-Bruno, il y a même un
monte-pente. Il y a un projet de piscine. Tout le monde était d'accord
avec la piscine. Tout le monde était d'accord avec les tables de
pique-nique. Tout le monde était d'accord avec l'ensemble des
éléments récréatifs dont on leur faisait part, mais
ils se battaient pour la notion de parc de conservation, alors qu'un parc de
conservation, dans l'esprit même de la loi, c'est un parc qui devient,
à toutes fins utiles, une pouponnière pour sauvegarder, par
exemple, l'élément faunique. C'est un parc où on veut
tellement conserver tel type de flore, tel type d'arbre ou encore tel type de
paysage pittoresque qu'on en réduit sensiblement l'accès. On sait
très bien que le parc du mont Saint-Bruno est à proximité
de Montréal et qu'il y a des dimanches où il y a 50 000 personnes
qui font du ski de fond. Que voulez-vous que je vous dise? C'est un parc de
récréation de par sa naturel (21 h 40)
Quand j'ai vu cela, si j'ai mis un astérisque à
côté, c'est fort simple, c'est parce que, premièrement, les
décisions ne sont pas prises. Deuxièmement, j'ai
décidé de passer outre l'aspect conventionnel et de proposer au
Conseil des ministres très prochainement un amendement à la loi
qui nous permettra de faire des audiences publiques, non pas sur une
épithète, mais vraiment sur des propositions d'aménagement
des limites d'un territoire. C'est dans ce sens que j'ai présenté
ce mémoire au Conseil des ministres. Le mémoire que vous avez
concerne la reconnaissance des parcs. Cette année, on aura le parc
Miguasha et le parc Bonaventure. Fort probablement que l'an prochain, on aura
le parc Frontenac, peut-être un autre, par exemple le parc
Pointe-Taillon.
M. Côté: ...à la rivière Malbaie et le
parc du mont Sainte-Anne à l'automne, tel qu'il était
prévu dans le plan. Mais je veux revenir spécifiquement au parc
du mont Saint-Bruno. Si le ministre était prêt à
recommander au Conseil des ministres que l'on puisse tenir des audiences, non
seulement sur des épithètes, mais sur des projets très
précis, est-ce que le ministre peut nous dire d'abord si sa
décision est arrêtée ou pas? Qu'est-ce que vous faites?
Je pense que tout le monde attend votre décision. Vous allez
devoir...
M. Chevrette: Franchement, j'ai pris la décision au niveau
de mon ministère, avec mes fonctionnaires, de ne pas reconnaître
le parc du mont Saint-Bruno tant et aussi longtemps que la Loi sur les parcs ne
sera pas amendée. Mais j'ai l'intention d'écrire dès
demain, par contre, pour lever le moratoire que j'avais imposé sur les
îles de Boucherville et le faire reconnaître dans les meilleurs
délais.
En ce qui concerne Saint-Bruno, je ne veux pas alimenter de chicanes
dans le milieu sur une épithète alors que tout le monde nous a
dit qu'il était d'accord sur le type d'équipement qu'on avait
là et sur le type d'aménagement. Ce qui importe aux gens de
Saint-Bruno, c'est qu'ils ne veulent pas qu'on ajoute des infrastructures
additionnelles qui permettraient peut-être plus de visiteurs
annuellement. On nous dit que cela leur crée des problèmes de
circulation à l'intérieur, etc. Je suis prêt à en
discuter très correctement. Mais de là à ajouter une
épithète pour faire plaisir à quelques-uns qui s'agitent
sans pour autant changer la nature même du parc, je pense que ce serait
un faux débat. Je ne veux pas faire de faux débat parce que je
pense que la population de Saint-Bruno est entièrement d'accord sur tous
les types d'équipement qu'on a construits dans le parc comme tel. Par
contre, je comprends que la population se dise: II ne faudrait quand même
pas que vous ajoutiez à l'achalandage actuel parce qu'on pourrait
même détériorer les zones de conservation que vous avez
établies, lors des audiences publiques. Il y a sans doute quelque chose
de sérieux là-dedans.
D'autre part, il faut bien se dire que le mont Saint-Bruno a
été aménagé avec l'argent de l'ensemble de la
population québécoise et qu'un Montréalais a le droit d'y
aller tout autant qu'un type de Saint-Bruno. Il y en quelques-uns qui avaient
témoigné qu'ils voulaient, à toutes fins utiles, en faire
un parc régional ou local. À ce moment-là, un parc local
est payé par les municipalités locales, par les taxes des
citoyens de la localité et non pas par l'ensemble des taxes des citoyens
du Québec.
M. Côté: Je comprends bien le ministre. En ce qui
concerne spécifiquement le mont Saint-Bruno, il n'y a rien qui se
passera ou qui sera décidé tant et aussi longtemps qu'à
l'automne, une loi amendant la Loi sur les parcs n'aura pas été
déposée et adoptée par cette Chambre. Ce qui veut dire
qu'on risque de ne pas avoir de décision prise avant l'hiver 1985,
concernant le mont Saint-Bruno.
M. Chevrette: C'est possible.
M. Côté: Ces décisions vont être
connues et transmises au public très bientôt parce que tout le
monde attend les décisions pour le 1er juillet.
M. Chevrette: Je pense qu'on peut leur annoncer dès ce
soir qu'il n'y aura pas de décision pour le 1er juillet concernant le
parc du mont Saint-Bruno. Cette décision sera prise à l'automne
ou au début de l'année 1985, après les amendements de la
Loi sur les parcs.
M. Côté: À partir du moment où il y
aura eu les amendements à la Loi sur les parcs, est-ce que, dans ce cas
précis, il y aura des nouvelles audiences publiques?
M. Chevrette: II n'y aurait pas d'audience publique parce que
c'est tout simplement la classification qui sauterait
éventuellement.
M. Côté: On verra à l'automne ce qui se
passera là-dessus. Je pense qu'on va avoir un automne très chaud
concernant le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Mon collègue de Sauvé, élu hier soir, ne sera pas de trop
dans ce dossier pour mener la bagarre.
M. Chevrette: Vous parlez des parcs.
M. Côté: Les parcs, les loisirs en
général, etc.
M. Chevrette: Cela me fera plaisir d'y répondre.
M. Côté: M. le ministre, si on revenait à nos
5 000 000 $ et si on commençait par savoir ce qui va se produire au parc
du Mont-Tremblant en sachant fort bien que vous devez être informé
qu'il y a là des problèmes majeurs. Selon mes informations, il
n'y aurait absolument rien qui se passerait cet été ou il y
aurait des fermetures.
M. Chevrette: Vous voulez avoir le détail du parc du
Mont-Tremblant...
M. Côté: Oui.
M. Chevrette: Dans le budget de base...
M. Côté: La situation globale du parc du
Mont-Temblant, parce que, que je sache, des décisions ont
été prises récemment ou annoncées la semaine
dernière, qui ne proviennent pas nécessairement du
ministère, selon lesquelles le parc du Mont-Tremblant serait
fermé à l'été. J'apprends des choses...
M. Chevrette: Donnez-moi deux secondes.
M. Côté: Oui. J'apprends des choses au ministre.
M. Chevrette: Cela me fait penser à la rumeur qui
circulait qu'on devait amputer toutes les réserves fauniques au
Québec pour en faire je ne sais pas quoi. Il n'y a absolument rien de
fondé. Je ne l'ai jamais entendue. C'est la première fois et mon
sous-ministre adjoint me dit que c'est absolument farfelu comme rumeur.
M. Côté: Farfelu, je pense que c'est peut-être
un peu fort. Je vois le sous-ministre qui n'est pas complètement
convaincu que la rumeur est farfelue.
M. Chevrette: Pardon? En quoi devrais-je fermer le parc du
Mont-Tremblant alors que c'est un parc qui a même connu un achalandage
additionnel, qui est fréquenté parce qu'il y a une bonne
pêche, où il y a de plus en plus de visiteurs, de chasseurs
d'images et de gens qui font des marches, qui occupent les sentiers
pédestres, qui font le tour en ski de fond? Je ne peux pas voir
pourquoi. Au contraire, on s'attend à immobiliser, cette année...
Il y avait 1 000 000 $ de prévus et grâce aux 5 000 000 $
additionnels, il y aura 2 105 000 $ de dépensés au parc du
Mont-Tremblant.
M. Blouin: Bravo!
M. Chevrette: Le député de Rousseau nous dit:
Bravo! Donc, c'est clair que c'est une somme...
Une voix: Impressionnante.
M. Chevrette: ...très impressionnante.
M. Côté: On sait que l'hôtel qui avait
été acheté par les caisses d'entraide a été,
par la suite, si je ne m'abuse, racheté par des individus avec une
participation gouvernementale. Je ne me souviens pas si c'est le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ou plutôt
le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, mais comme les
liens sont très bons entre le ministère de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme et le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, j'ai l'impression que cela a quand même un impact majeur sur
le parc du Mont-Tremblant et que de 200 à 300 personnes risquent de se
retrouver sur le pavé à l'été.
M. Chevrette: Cela n'a pas de lien direct avec le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche puisque le bail
et le protocole, nous les avons signés en bonne et due forme. Tout est
réglé, puisque, dans le bail, on prévoit même les
investissements,
les immobilisations pour une durée de dix ans. Il y a un bail de
50 ans signé avec le groupe PROMODEV. Concernant les difficultés
financières, si vous faites référence à cela, je ne
peux pas vous en parler parce que ces dossiers ne sont pas
déposés au ministère. Nous ne sommes pas les
récipiendaires des demandes de financement de cette nature, mais le
groupe en question, en tout cas, ne l'a pas porté à mon
attention. Est-ce que cela aurait été fait auprès de mes
attachés politiques? Je n'en ai pas eu d'écho à ce
stade-ci. Je peux ajouter qu'ils rencontreraient nos fonctionnaires. Ce n'est
pas venu à mes oreilles.
M. Côté: Concernant le parc de la Gaspésie,
on se souviendra qu'il y a quelques années, un de vos
prédécesseurs, le député de Saint-Maurice,
était allé en Gaspésie annoncer, avec
l'hélicoptère et grands flaflas, des investissements de l'ordre
de 5 000 000 $. Dans les documents que le ministre m'a transmis à la
suite de la commission parlementaire qui a étudié les
crédits du ministère, il y avait environ 4 000 000 $ de
dépensés. Le ministre pourrait-il nous dire ce qui sera
affecté précisément dans le cas du parc de la
Gaspésie?
M. Chevrette: Pour le parc de la Gaspésie, il y avait 717
000 $ dans le budget de base et on ajoute 403 000 $, pour la somme de 1 120 000
$.
M. Côté: À quoi cela servirait-il
principalement? (21 h 50)
M. Chevrette: Cela servirait, entre autres, à des
passerelles, à la route du Lac des Îles, à
l'aménagement paysager de stationnements, à la réfection
de la route du lac Cascapédia, au traitement de l'eau potable. Pour le
secteur gîte Mont-Albert, il y aura distribution électrique et
éclairage, phase I, pour 35 000 $; il y aura également
l'aménagement du poste d'interprétation de la nature, la
terminaison des travaux à ce niveau; pour le camping, on mettra 75 000
$; ensuite, secteur nord, un atelier-entrepôt, 34 000 $; il y aura un
poste d'accueil là, pour 175 000 $; les sentiers-refuges, 200 000 $.
M. Côté: On aurait pu passer chacun des parcs, mais
il ne reste pas beaucoup de temps. Sachant qu'au mont Orford on avait
parlé de neige artificielle à un certain moment, j'imagine que le
député d'Orford serait très intéressé de
savoir si, effectivement, cela va se faire.
M. Chevrette: Le député d'Orford a même
assisté à la conférence de presse que nous avons
donnée la semaine dernière. Nous avons dit que nous avons conclu
une entente en bonne et due forme, signée avec le groupe de M. Magnan,
pour 3 500 000 $. Ce n'est pas relié aux dépenses que nous allons
faire en plus dans le parc comme tel. Dans le parc du mont Orford, cette
année, nous allons ajouter 1 876 000 $ en dépenses. C'est en plus
des 3 500 000 $ qui ont été consentis, dans le cadre de la
pratique du ski, pour l'enneigement artificiel et l'aménagement de
pistes.
M. Côté: II serait peut-être
intéressant de savoir du ministre si, concernant les 3 000 000 $ pour
les réserves fauniques, il y aurait possibilité d'avoir certains
détails supplémentaires quant à l'utilisation de ces 3 000
000 $.
M. Chevrette: Pour les réserves, je peux toujours vous
donner le détail. Dans le budget de base, nous avions 1 777 000 $ et
dans le budget supplémentaire, 3 000 000 $. Donc, nous allons investir
dans nos réserves fauniques 4 777 000 $. Je pourrais vous les donner par
région administrative. La région 01, 425 000 $; 02, 70 000 $; 03,
645 000 $; 04, 566 000 $; 05, 40 000 $; 06, 450 000 $; 07, 1 110 000 $; 09, 256
000 $; à Anticosti, 815 000 $ parce qu'on la considère comme une
région pour les fins du budget. Le montant pour les équipements
récréatifs dans tout cela sera de 400 000 $. En plus, vous avez
vos 150 000 $.
M. Côté: Montant qui est compris là-dedans.
Vous êtes bien généreux, M. le ministre.
M. Chevrette: On pourrait ajouter une treizième
région, celle de Charlesbourg.
M. Côté: Celle de Charlesbourg. Très bien. Je
vous incite à poursuivre dans cette bonne veine.
Il y aurait finalement, parce que j'ai mon collègue de Saguenay
à côté de moi qui a des intérêts particuliers,
le parc du Saguenay. J'ai l'impression que toute la population là-bas
aussi serait intéressée de savoir quelles sont les sommes qui
seront affectées au parc du Saguenay?
M. Chevrette: Dans le parc du Saguenay, il y avait 510 000 $ dans
le budget de base. Nous ajoutons 490 000 $ pour faire 1 000 000 $, tel qu'on en
avait pris l'engagement au sommet économique, je pense.
M. Côté: D'accord. M. le Président,
délaissant cet aspect, j'aimerais terminer avec une question qui est
d'intérêt pour tout le Québec, d'intérêt
public, qui a déjà fait l'objet d'une question conjointe de
l'Opposition, du député de Maskinongé, du
député de
Chomedey et du député de Charlesbourg, concernant le lac
Saint-Pierre.
Toujours dans la serviette que j'ai retrouvée sur la rue
Saint-Jean, il y avait un procès-verbal du Conseil des ministres du 4
avril 1984. Ce qui était intéressant, c'est qu'il y avait une
décision, évidemment, à la suite d'un mémoire qui
avait été déposé le 24 janvier 1984
présenté par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche. Il y avait trois points dans la décision. Le premier, de
retenir le scénario 2 plutôt que le scénario 3 - le
ministre va sûrement se souvenir de tout cela; deuxièmement,
d'autoriser l'octroi au ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche de crédits additionnels de 1 523 500 $, ainsi qu'un montant
équivalant à 3,25 $ pour tout certificat de chasseur vendu en
sus... On a compris un peu plus tard pourquoi! Oui?
M. Chevrette: Pour bien me situer, vous parlez du lac
Saint-Pierre?
M. Côté: Un instant, M. le ministre, il ne faut
surtout pas tenter de me devancer. J'arrive au troisième point et c'est
cela qui a amené ma question sur le lac Saint-Pierre; il s'agit de
donner un accord de principe à la réalisation, à
concurrence des crédits octroyés, des projets de
développement proposés par le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche sous réserve de l'approbation
ultérieure du plan directeur du lac Saint-Pierre par le Conseil des
ministres. C'était signé Louis Bernard et il y avait un sceau du
11 avril 1984; donc, l'authenticité, normalement ne devrait pas poser de
problème. On a posé des questions au ministre, qui nous a fort
bien répondu, comparativement à ses deux collègues qui
tentaient de se sauver un peu concernant le lac Saint-Pierre. Si on parle de
plan directeur du lac Saint-Pierre, c'est que, normalement, cela devrait
être discuté au Conseil des ministres et je pense que c'est un
projet d'intérêt public. Le ministre l'a défendu et a
justifié sa présence au niveau du lac Saint-Pierre, et dans ce
cas précisément aussi, il y a l'accord et l'appui du
fédéral. Cela n'arrive pas souvent. C'est curieux, c'est
là un ministre qui réussit à s'entendre avec le
gouvernement fédéral.
Je pense qu'on en est au moment où il faut qu'il se prenne des
décisions et j'aimerais savoir certaines choses de la part du ministre.
Je ne vise pas à encenser le ministre, on verra à l'automne qu'il
y a des choses qui ne sont pas correctes et le ministre va le savoir. Dans le
cas précis du lac Saint-Pierre, je me souviens fort bien qu'à la
question que je vous posais en Chambre, vous aviez clairement indiqué
à ce moment que c'était 8 000 000 $ de revenus que
générait l'activité de chasse et de pêche au lac
Saint-Pierre, alors que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation on avait eu de la difficulté à lui faire dire 1
000 000 $: il prétendait que c'était peut-être 500 000 $
au-delà de la vérité. C'est le problème du lac
Saint-Pierre, un problème qu'il faut régler, je pense, dans les
plus brefs délais compte tenu de l'appui massif que le ministre a de la
population et des intervenants. J'aimerais savoir de la part du ministre si,
effectivement, ce dossier a été transmis au Conseil des ministres
et quand on peut s'attendre à avoir une décision relativement au
lac Saint-Pierre.
M. Chevrette: Tout d'abord, le dossier a progressé
énormément, parce qu'il y a eu des rencontres entre les trois
ministères impliqués. Sur la rive nord, il y a une entente
totale. Dans plusieurs sections sur la rive sud, ce n'est même plus
contentieux. Il s'agit, cependant, de rédiger une entente entre les
trois ministres pour la rendre publique incessamment. Effectivement, le dossier
est allé au Conseil des ministres. Je peux vous dire qu'au moment
où on se parle, moi, j'ai bonne confiance que, d'ici une quinzaine de
jours, il devrait y avoir une décision finale. Il faut bien comprendre
qu'on ne peut pas dans cela y aller d'une façon radicale et sans faire
des expériences préalables, que ce soit au niveau de la flore ou
que ce soit au niveau de la faune, sans risquer beaucoup. En effet, quand on
aura détruit la flore et la faune - ça vaut pour l'Environnement
comme pour le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui
est responsable de la conservation des espèces -il ne sera plus temps de
réparer les pots cassés.
Je pense que, en me référant à notre
collègue de l'Agriculture, au moment où on se parle, nous avons
une entente de principe au niveau des trois ministres et cette entente devrait
être rédigée dans les prochains jours. Nous pourrons la
rendre publique au moment où le Conseil des ministres aura donné
sa sanction royale. Je pense bien, en tout cas, que si ce n'est pas mercredi,
pas de cette semaine, mais de l'autre, ce sera au plus tard dans une quinzaine
de jours, parce que vraiment, on peut dire qu'il y a maintenant consensus sur
les sites qui étaient litigieux sur la rive sud.
M. Côté: Je suis heureux que le ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche ait réussi, au moins une fois,
à mettre au pas le glouton ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, principalement dans un dossier qui est de
portée nationale et qui, finalement, a fait l'unanimité des
chasseurs et des pêcheurs dans tout le Québec. J'ai hâte de
voir la décision qui sera prise et rendue publique
éventuellement.
Je pense qu'à ce moment-ci on doit
mettre fin à nos travaux, notre heure étant
déjà terminée. Je regrette, évidemment, qu'on n'ait
pas plus de temps pour discuter avec le ministre de tous les problèmes
et pour pouvoir, finalement, sortir ce qu'on a encore dans notre valise de la
rue Saint-Jean. Le ministre sait pertinemment qu'à l'automne on pourra
reparler de tout cela.
M. Chevrette: Pardon? C'est fort intéressant que vous ayez
une valise du genre. Cela nous permet de clarifier certains points, cela vous
permet de voir ce qui se passe noir sur blanc. Automatiquement, cela permet de
prouver qu'on travaille fort. Si votre valise épaissit d'ici l'automne,
ce sera parce qu'on aura travaillé tout l'été.
Je voudrais faire seulement une petite correction. Quand vous parlez de
8 000 000 $ pour la chasse et la pêche, il faut ajouter la dimension
tourisme. Il y a beaucoup de rampes de mise à l'eau et
d'aménagement d'accueil touristique. C'est simplement une clarification.
Les gens pourraient penser que ce sont les 50 pêcheurs commerciaux, par
exemple, et que la pêche sportive et la chasse à la faune
ailée. Il faut regarder la dimension touristique. C'est une
évaluation qu'on fait de l'ensemble de l'industrie touristique et aussi
de la chasse et de la pêche dans tout le lac Saint-Pierre.
Pour ce qui est de mon collègue, je peux vous dire qu'il s'est
montré extrêmement compréhensif. On n'a pas l'impression
qu'il y en a un qui est gagnant dans cela, mais que les trois ministres
sortiront gagnants.
M. Côté: Je comprends que le ministre veuille faire
un petit tour de parade pour sauvegarder à la fois le
député de Beauce-Nord et le député de Lévis,
mais une chose est certaine, M. le Président, je veux rassurer le
ministre en lui disant que je n'ai pas sorti les éléments les
plus contentieux de ma valise, je les garde pour l'automne. Je remercie le
ministre. On va certainement continuer d'alimenter la filière de la rue
Saint-Jean.
Le Président (M. Jolivet): Le programme 3 du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche est-il
adopté?
M. Chevrette: M. le Président... Le Président
(M. Jolivet): Oui.
M. Chevrette: ...vous me permettrez, à moi aussi, de
remercier l'Opposition pour ses questions. On aura contribué à
clarifier certains points obscurs et permis à la population en
général d'être mieux renseignée, tout en rendant
heureux les gens de Charlesbourg et leur député.
Le Président (M. Jolivet): J'aurais une autre question
à poser: Les crédits supplémentaires du budget 1984-1985
sont-ils adoptés?
M. Chevrette: Sans se lancer des fleurs mutuellement, M. le
Président, c'est adopté.
Le Président (M. Jolivet): Adopté. Nous allons donc
suspendre quelques instants pour permettre aux gens de quitter.
(Suspension de la séance à 22 h 2)
(Reprise de la séance à 22 h 3)
Rapport au président
M. Jolivet (président de la commission
plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de vous
faire rapport que la commission plénière a terminé
l'étude et a adopté les crédits supplémentaires
pour l'année 1984-1985.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Ce rapport est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 91 Adoption
M. Blouin: M. le Président, je vous demande donc de
procéder à l'adoption du projet de loi 91, tel que le
prévoit l'article 283 de notre règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Le ministre des Finances
propose que l'Assemblée se saisisse du projet de loi 91. Cette motion
est-elle adoptée?
M. Gratton: Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur division, M. le
leader de l'Opposition?
M. Gratton: Oui.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté sur
division.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, toutes les étapes
étant maintenant franchies, ce projet de loi étant adopté,
nous allons maintenant procéder à une série de prises en
considération et d'adoptions, s'il n'y a pas d'objection, à la
suite d'ententes que nous avons conclues au cours de la journée.
D'abord, j'appelle la prise en considération du rapport de la
commission qui a étudié le projet de loi 69, Loi modifiant la Loi
sur les impôts et la Loi concernant l'application de la Loi sur les
impôts.
Projet de loi 69
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
Le Vice-Président (M. Rancourt): Prise en
considération du rapport de la commission concernant le projet de loi
69, Loi modifiant la Loi sur les impôts et la Loi concernant
l'application de la Loi sur les impôts. Est-ce que cette prise en
considération est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Adoption
M. Blouin: M. le Président, je propose maintenant
l'adoption de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que ce projet de
loi est adopté?
M. Gratton: Avec le consentement, M. le Président,
adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Avec le consentement.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 75
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: M. le Président, j'appelle maintenant la prise
en considération du rapport de la commission qui a étudié
le projet de loi 75, Loi modifiant la Loi sur les assurances et d'autres
dispositions législatives.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que le rapport de
la commission qui a étudié le projet de loi 75, Loi modifiant la
Loi sur les assurances et d'autres dispositions législatives, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
Projet de loi 70
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: Maintenant, M. le Président, la prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 70, Loi sur la location de forces hydrauliques de la
rivière Péribonca à Aluminium du Canada
Limitée.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 70, Loi sur la location de forces hydrauliques de la
rivière Péribonca à Aluminium du Canada Limitée,
est adoptée?
M. Gratton: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, la prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 66.
M. Gratton: M. le leader...
M. Blouin: Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: ...vous allez y revenir?
M. Blouin: Très bien. Nous pouvons donc procéder
à l'adoption du projet de loi 70.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous voulez dire la
troisième lecture? Avec le consentement, bien sûr.
M. Blouin: C'est cela, l'étape de l'adoption, avec le
consentement, bien sûr.
Adoption
Le Vice-Président (M. Rancourt):
D'accord. Cette troisième lecture est-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté avec le consentement. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Projet de loi 66
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: Maintenant, la prise en considération du
rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 66, Loi
modifiant la Loi sur la Société de récupération,
d'exploitation et de dévelop-
pement forestiers du Québec.
Le Vice-Président (M. Rancourt): La prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié la
loi 66, Loi modifiant la Loi sur la Société de
récupération, d'exploitation et de développement
forestiers du Québec, est-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Une autre prise en considération.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement, demandez-vous aussi l'adoption en troisième lecture?
M. Blouin: Non, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Non? Parfait! Merci.
Projet de loi 83
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: Maintenant, la prise en considération du
rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 83, Loi
modifiant le Code de procédure civile et d'autres dispositions
législatives.
Le Vice-Président (M. Rancourt): La prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 83, Loi modifiant le Code de procédure civile et d'autres
dispositions législatives, est-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
Adoption
M. Blouin: M. le Président, avec le consentement de
l'Opposition, je propose maintenant l'adoption du projet de loi 83.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Avec le consentement de
l'Opposition, cette troisième lecture peut-elle être
adoptée?
Une voix: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 76
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: M. le Président, j'appelle donc maintenant la
prise en considération du rapport de la commission qui a
étudié le projet de loi 76, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant les transports.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Le rapport de la
commission qui a étudié le projet de loi 76, Loi modifiant
diverses dispositions législatives concernant les transports, est-il
adopté?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division.
Adoption
M. Blouin: Sur division. Maintenant, M. le Président, avec
le consentement, je propose l'adoption de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Ce projet de loi est-il
adopté?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division. M. le leader adjoint.
Projet de loi 86
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: J'appelle maintenant, M. le Président, la prise
en considération du rapport de la commission qui a étudié
le projet de loi 86, Loi modifiant la Loi sur la qualité de
l'environnement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): La prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 86, Loi modifiant la Loi sur la qualité de
l'environnement, est-elle adoptée?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division.
Adoption
M. Blouin: À la suite du consentement que nous avons
obtenu, M. le Président, j'appelle maintenant l'adoption du projet de
loi 86.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Ce projet de loi est-il
adopté?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 87
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: Merci, M. le Président.
J'appelle donc maintenant la prise en considération du rapport de
la commission qui a étudié le projet de loi 87, Loi sur les
permis de distribution de bière et de boissons gazeuses.
Le Vice-Président (M. Rancourt): La prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 87, Loi sur les permis de distribution de bière et de
boissons gazeuses, est-elle adoptée?
Une voix: Sur division, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division.
Adoption
M. Blouin: Tel que convenu, M. le Président, j'appelle
maintenant l'adoption du projet de loi 87.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Ce projet de loi est-il
adopté?
M. Gratton: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Gratton: ...si le leader adjoint du gouvernement me le permet,
à la réunion de cet après-midi, c'est à la demande
du gouvernement qu'on avait prévu de procéder demain à la
troisième lecture du projet de loi 87. Quant à nous, nous sommes
prêts à procéder immédiatement et à donner le
consentement, mais je laisse au leader adjoint du gouvernement le soin d'en
décider.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: Je crois, M. le Président, que, si le leader de
l'Opposition est d'accord, nous pourrions procéder à son adoption
dès à présent.
M. Gratton: Je n'ai pas d'objection.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, j'appelle la
troisième lecture du projet de loi 87. Cette troisième lecture
est-elle adoptée?
M. Blouin: Adopté, M. le Président. Une voix:
Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division.
Projet de loi 59
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: Donc, M. le Président, j'appelle maintenant la
prise en considération du rapport de la commission qui a
étudié le projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux.
Le Vice-Président (M. Rancourt): La prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux, est-elle adoptée?
Une voix: Sur division, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Maintenant, M. le Président, à la suite
du consentement que nous avons obtenu, nous procéderons à
l'étape de l'adoption de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté sur
division. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Maintenant, à la suite du consentement que nous
avons obtenu, nous procéderons à l'étape de l'adoption de
ce projet de loi. Je vous signale qu'il y aura maintenant des intervenants.
Le Vice-Président (M. Rancourt): J'ai entendu le leader
adjoint du gouvernement me dire qu'il y aurait des intervenants sur l'adoption
du projet de loi 59.
Une voix: Demain ou ce soir, plus tard.
M. Blouin: Si cela convient au leader de l'Opposition, nous
pourrions reporter cette adoption un peu plus tard dans la soirée.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Gratton: Si le leader adjoint du
gouvernement me le permet, nous pourrions y procéder ce soir
effectivement, mais dans quelques minutes, au moment où notre
porte-parole sera ici.
M. Blouin: Un peu plus tard.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, ce sera
reporté à quelques minutes. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Projet de loi 85
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: M. le Président, nous avions donc prévu
procéder à ce débat. Je propose donc maintenant la prise
en considération du rapport de la commission qui a étudié
le projet de loi 85, Loi modifiant la Loi sur les coopératives.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 85, Loi modifiant la Loi sur les coopératives, est
adopté?
M. Gratton: Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, si vous le permettez, nous
pourrions maintenant procéder à la présentation verbale du
rapport de la commission qui a étudié les projets de loi 92 et
95. Cette commission a siégé depuis 20 heures, ce soir.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Groulx.
Projet de loi 92
Dépôt du rapport de la commission qui en
a fait l'étude détaillée
M. Fallu: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport
à cette Assemblée que la commission de l'aménagement et
des équipements a siégé tout à l'heure, le 19 juin
1984, pour procéder à l'étude détaillée du
projet de loi 92, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de
Québec et d'autres dispositions législatives. Le projet de loi a
été adopté avec amendements.
Projet de loi 95
Dépôt du rapport de la commission qui en
a fait l'étude détaillée
J'aimerais également faire rapport à l'Assemblée
nationale que notre commission a siégé de nouveau aujourd'hui
pour procéder à l'étude détaillée du projet
de loi 95, Loi sur les budgets de recherche et de secrétariat des partis
politiques municipaux à Montréal, Québec et Laval. Le
projet de loi a été adopté avec amendements.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Rapports déposés. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je propose donc maintenant que
nous procédions à la prise en considération de ces
rapports.
Prise en considération des rapports
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette prise en
considération des rapports de la commission qui a étudié
ces deux projets de loi est adoptée?
M. Gratton: Adopté. Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté.
M. Blouin: M. le Président, je propose maintenant que nous
procédions à l'adoption de ces deux projets de loi.
Adoption des projets de loi
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que ces deux
projets de loi sont adoptés, avec consentement, bien sûr?
M. Gratton: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 73
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: M. le Président, je propose maintenant que nous
prenions en considération le rapport de la commission qui a
étudié le projet de loi 73, Loi modifiant la Loi sur
l'assurance-récolte et diverses dispositions législatives.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que vous pouvez
m'indiquer quel numéro, M. le leader adjoint?
M. Blouin: Il s'agit du numéro 13 de notre feuilleton.
C'est à la première page du document dont vous disposez
maintenant.
M. Gratton: Deuxième section.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Effectivement, je viens de le retrouver. Est-ce que la prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 73, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-récolte et
diverses dispositions législatives, est adoptée?
M. Gratton: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Je propose maintenant l'adoption du projet de loi
73.
Adoption
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que ce projet de
loi est adopté?
M. Gratton: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 74
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
M. Blouin: Je propose maintenant que nous prenions en
considération le rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 74, Loi sur le crédit aquacole.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 74, Loi sur le crédit aquacole, est adoptée?
M. Gratton: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
Adoption
M. Blouin: Je propose maintenant que nous procédions
à l'étape de l'adoption de ce projet de loi en vous signalant
qu'il y a un amendement. L'amendement consiste à remplacer, à
l'article 20, le mot "par" par le mot "pour".
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cet amendement
est adopté?
M. Gratton: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
L'amendement est adopté. Est-ce que ce projet de loi est
adopté?
M. Gratton: Adopté, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je proposerais que vous
reconnaissiez le député de Mille-Îles, qui va
procéder à la présentation du rapport concernant le projet
de loi 80.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mille-Îles.
Projet de loi 80
Dépôt du rapport de la commission qui en
a fait l'étude détaillée
M. Champagne: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de
faire rapport à cette Assemblée que la commission des
institutions a siégé le 19 juin 1984 afin de procéder
à l'étude détaillée du projet de loi 80, Loi sur
l'Ordre national du Québec. Le projet de loi a été
adopté avec amendements.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Rapport
déposé.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je propose, si cela est
nécessaire - je ne suis pas trop certain - que nous procédions
maintenant à la prise en considération de ce rapport.
Le Vice-Président (M. Rancourt): C'est exact.
Une voix: II y a consentement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Avec consentement.
M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, on m'informe qu'il y aura
possiblement des amendements au rapport. Donc, on devra stopper ici notre
course vertigineuse quant au projet de loi 80.
M. Blouin: Très bien.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Parfait.
M. Blouin: Nous procéderons donc à cette prise en
considération du rapport demain, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je propose que nous
procédions maintenant à l'adoption du projet de loi 82, Loi sur
la commercialisation des produits marins.
Une voix: Qu'on sonne le ministre.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous en sommes à
l'adoption du projet de loi 82, Loi sur la commercialisation des produits
marins. Est-ce qu'il y a des intervenants, M. le leader adjoint du
gouvernement?
M. Blouin: Oui, M. le Président. Il y aura deux
intervenants, le ministre et un intervenant de l'Opposition. Nous pourrions
suspendre nos travaux quelques instants. Le ministre a dû s'absenter
pendant quelques instants.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous suspendons nos
travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 22 h 18)
(Reprise de la séance à 22 h 20)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît! M. le leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 59 Adoption
M. Blouin: M. le Président, avant que nous ne
procédions au débat sur le projet de loi 82 sur la
commercialisation des produits marins, puisque nous avons maintenant
adopté la prise en considération du rapport de la commission, je
propose que nous adoptions le projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur les
heures d'affaires des établissements commerciaux.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que nous adoptons
le projet de loi 59, M. le leader de l'Opposition?
M. Gratton: Sur division, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, adopté sur
division. M. le leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 85
M. Blouin: M. le Président, je propose que nous prenions
en considération le rapport de la commission qui a étudié
le projet de loi 85, Loi modifiant la Loi sur les coopératives.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 85 est adoptée?
M. Gratton: Sur division, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.
Adoption
M. Blouin: Je propose maintenant, M. le Président,
l'adoption du projet de loi 85.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que ce projet de
loi 85 est adopté?
M. Gratton: Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Nous revenons maintenant au débat sur
l'adoption du projet de loi 82, Loi sur la commercialisation des produits
marins. Je vous demande donc de reconnaître le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation.
Projet de loi 82 Adoption
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, nous allons
procéder à l'étude du projet de loi 82, Loi sur la
commercialisation des produits marins. M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, vous avez la parole.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, c'est avec plaisir que je
prends la parole en troisième lecture sur le projet de loi 82, Loi sur
la commercialisation des produits marins. Pour mieux me préparer pour
cette intervention, je suis allé, samedi et dimanche, dans le territoire
gaspésien des pêches parce que, depuis quelques semaines,
l'Opposition fait toutes sortes d'affirmations. À un moment
donné, je me suis dit: Est-ce qu'il y aurait un soupçon de vrai
dans ce qu'ils disent?
Je suis allé visiter les comtés de Matane, Gaspé,
Bonaventure, Matapédia mais, principalement pour les fins des
pêches, Matane, Gaspé et Bonaventure. Je suis allé sur les
quais, dans des bateaux de pêcheurs, dans des usines pour rencontrer les
gens à différents endroits, pour constater qu'il n'y a pas dans
la population du territoire maritime les mêmes sentiments qu'il y a chez
les gens
du Parti libéral. Je pense bien que tout ce qu'il y a de commun
entre le Parti libéral et les pêches, c'est qu'il y a du poisson
rouge. À part cela, sur le plan de la pensée, sur le plan du
développement, sur le plan des bateaux, etc., il n'y a rien de commun
entre le Parti libéral et les pêches.
Je suis même allé au quai de Sainte-Thérèse,
qui m'apparaît le symbole de l'aberration dans le secteur des
pêches maritimes. Dans un village extraordinaire où il y a un
grand nombre de bateaux de pêche et de pêcheurs qui les dirigent,
d'aides-pêcheurs, trois usines, il y a un havre de pêche qui est
à peine plus grand qu'une piscine avec un canal pour aller vers la mer.
M. le Président, on se penserait dans un cours d'eau.
J'ai rencontré des gens sur les quais et je leur ai
demandé: Trouvez-vous cela normal, vous, qui allez parfois livrer du
poisson à Shippegan et à Lamèque au Nouveau-Brunswick, que
le gouvernement fédéral fasse à
Sainte-Thérèse un havre de pêche qui est humiliant pour une
population dont le crabe vient de remporter le prix, la médaille d'or du
crabe dans le monde? L'usine de Gagnon et Frères, à
Sainte-Thérèse, vient de remporter un prix comme quoi son crabe
est excellent.
Pourtant, ce havre de pêche est à peine reconnu par le
gouvernement fédéral. Tous ceux qui nous entendent, tous ceux qui
connaissent le secteur des pêches, je leur demande d'aller faire un tour
à Sainte-Thérèse, d'aller voir le havre de pêche et,
ensuite, se demander si c'est normal que dans le territoire du Québec on
trouve d'aussi piètres installations bâties par le gouvernement
fédéral. Je me suis dit: À quoi sert d'avoir un ministre
régional s'il n'y a pas de retombées économiques? À
quoi sert d'avoir un ministre des Pêches et des Océans dans le
territoire de la Gaspésie si cela ne rapporte rien? Depuis 1980, nous
avons tenté par tous les moyens de faire en sorte que dans le territoire
maritime on trouve des havres de pêche aussi beaux que ceux que
Roméo Le Blanc a bâtis, lui, lorsqu'il était ministre des
Pêches à Shippegan et à Lamèque. Il n'a rien
ménagé. Ce n'est pas loin, Shippegan ou Lamèque, je ne
vous conte pas d'histoire, je vous dis où aller voir. Allons à
Shippegan, allons à Lamèque, regardons ce que Roméo Le
Blanc a fait, lui, pour les gens du Nouveau-Brunswick. Vous verrez que ce ne
sont pas des quais pour pêcher l'éperlan. Ce sont des havres
sécuritaires, grands, où il y a de la place, où les
bateaux peuvent se réfugier en toute sécurité, où
il y a les installations, où il y a des poutres de fer, où le
dessus est recouvert en asphalte. Tout est à l'ordre.
Nous, des pieux, de misérables cabanes, des enrochements, mais
pas d'installations pareilles à celles qu'on trouve au Nouveau-
Brunswick. Les pêcheurs du Québec méritent mieux que
cela. Ils investissent pour avoir de bons bateaux des centaines de milliers de
dollars, ils investissent pour des agrès plusieurs milliers de dollars.
Ils investissent pour avoir de la glace à bord de leurs bateaux pour
avoir un produit de qualité. Malgré ces installations
financées à 100% par le gouvernement du Québec, ils
doivent entrer dans des havres de pêche misérables. Un
pêcheur me disait: Sur le quai, vous savez, M. Garon, s'il y a
moindrement un vent, mon bateau peut aller se frapper contre les roches et
avoir des dommages considérables. Ce n'est pas normal qu'avec le genre
d'équipement qu'il y a maintenant dans le domaine des pêches on ne
trouve pas de meilleures installations.
Le Parti libéral, lui, s'en satisfait puisque jamais il n'a
ouvert la bouche pour dire à la population que lui aussi estimait que,
dans le secteur des pêches, les installations qu'on trouve devraient
être de meilleure qualité, de meilleur gabarit et qu'on devrait
consulter la population avant de les faire. Lorsque, au cours de l'année
dernière, j'ai signé des contrats avec des bureaux
d'ingénieurs pour faire les plans avant les travaux à
Cap-aux-Meules, à Newport, à Blanc-Sablon et, aujourd'hui,
à Rivière-au-Tonnerre puisque je viens d'acheminer un papier pour
le Conseil du trésor, près de 600 000 $ pour faire un centre de
service à Rivière-au-Tonnerre, nous avons toujours exigé
des bureaux d'ingénieurs qu'il y ait une consultation avec le milieu,
consultation avec les pêcheurs, consultation pour qu'il y ait entente sur
la façon de faire ces installations.
J'ai inscrit dans le contrat que, si les recommandations des bureaux
d'ingénieurs en termes de plans préliminaires avant de faire les
plans définitifs ne faisaient pas l'unanimité dans le milieu, le
dossier devrait revenir sur mon bureau pour être tranché. Je peux
vous dire que dans chacun de ces dossiers il y a eu l'unanimité de la
population locale et c'est seulement après avoir obtenu cette
unanimité que nous avons procédé pour faire ces centres
d'hivernement, ces centres de service aux pêcheurs. Nous avons
procédé de la même façon pour les règlements
sur la qualité. Nous avons procédé de la même
façon avec la consultation des gens du milieu pour la commercialisation.
Mais quelle est cette problématique? Puisque nous terminons ce
débat, l'Opposition étant fatiguée, elle veut aller en
vacances le plus rapidement possible. Nous les voyons heureux... (22 h 30)
Une voix: ...peureux.
M. Garon: ...heureux. Le député de Saguenay pourra
retrouver ses "sex bars". Mais nous, du parti gouvernemental,
continuerons à faire le travail dans le secteur des pêches.
Nous continuerons, dans le secteur des pêches, à bâtir dans
un Québec moderne.
Les pêcheurs du Québec, M. le Président, capturent
annuellement quelque 80 000 tonnes de poisson, de mollusques et de
crustacés. 95% de ces captures sont achetées par 55 entreprises
de transformation qui les vendent sous forme de produits frais,
congelés, fumés et séchés. Trois grandes
catégories de produits marins dominent la production
québécoise comme le montrent les statistiques. Ces produits
représentent 90% de la valeur des expéditions effectuées
par les usines de transformation de produits marins du Québec. 70% du
volume des produits marins sont transformés au Québec et vendus
à l'extérieur du Québec. Les principaux pays acheteurs
sont, par ordre d'importance, les États-Unis, le Royaume-Uni, la France,
le Portugal, l'Allemagne de l'Ouest, la Suède et l'Italie. Le commerce
extérieur a représenté, en 1982, 90 000 000 $, soit plus
de 85% de la valeur des expéditions québécoises de
produits marins.
Quant à eux, les Québécois consomment annuellement
l'équivalent de 145 000 tonnes métriques de produits marins, de
poisson, de mollusques et de crustacés. Cela revient à dire que
si tous les produits marins capturés par les pêcheurs du
Québec étaient expédiés sur le marché
québécois, nous ne satisferions que 55% de la demande
intérieure. Mais notre degré d'autosuffisance est très
inférieur à cela. D'une part, les Québécois
consomment plusieurs produits marins qui ne sont pas pêchés au
Québec tels que les langoustines, les crevettes du Mexique, l'aiglefin,
les huîtres, etc., ce qui accentue davantage le
déséquilibre entre la production et la consommation. D'autre
part, les produits marins du Québec sont exportés dans une
très large mesure, de sorte que les produits consommés au
Québec proviennent d'ailleurs dans une proportion de plus de 82%.
Au Québec, comme dans les provinces de l'Atlantique, ce sont les
entreprises de transformation qui, généralement, assurent la mise
en marché de leurs produits. Il n'y a pas d'organisme de
commercialisation ni de véritable regroupement constitué aux fins
de vendre la production de plusieurs entreprises. Cependant, puisque certaines
entreprises traitent d'importants volumes de produits marins, elles jouent un
rôle plus important que les autres au chapitre de la commercialisation.
C'est ainsi que onze entreprises du Québec mettent en marché plus
de 80% du volume des produits marins québécois. Le reste de la
production est vendu par environ 45 petites entreprises de transformation et
quelques courtiers indépendants.
Au cours des trois dernières années, les grandes
entreprises de transformation de poisson de l'Est du Canada ont traversé
une grave crise financière qui les a conduites à un état
de faillite. Le gouvernement fédéral, à la suite du
dépôt du rapport du groupe d'étude présidé
par M. Michael Kirby, a pris le contrôle des cinq plus grandes
entreprises de pêche et de transformation de Terre-Neuve. Bien que
plusieurs facteurs soient responsables des difficultés
financières de ces entreprises, les problèmes de
commercialisation des produits marins ont contribué à
précipiter la chute des principales entreprises de transformation de
poisson de l'Est du Canada.
En effet, depuis que le gouvernement canadien a étendu sa
juridiction jusqu'à 200 milles des côtes, en 1977, les captures
canadiennes de poisson, de mollusques et de crustacés ont doublé,
c'est-à-dire qu'elles ont augmenté en volume brut d'environ 1 000
000 000 de livres. Cette augmentation de la production a été
expédiée vers les marchés traditionnels, en particulier
vers le marché américain, créant ainsi une augmentation
substantielle de l'offre. Pendant la même période, le gouvernement
des États-Unis a exercé, lui aussi, sa juridiction exclusive sur
la zone économique des 200 milles, ce qui a contribué à
l'accroissement des captures de poisson, de mollusques et de crustacés
par les pêcheurs américains et réduit quelque peu la
dépendance du marché américain à l'égard des
importations de produits marins.
D'autre part, la dévaluation des devises européennes par
rapport au dollar américain et canadien a compliqué les efforts
de pénétration des produits de la pêche du Canada sur les
marchés européens, tout en favorisant par ailleurs la vente des
produits européens sur le marché américain. Les
entreprises canadiennes ont donc subi une très forte concurrence des
produits européens sur leur marché traditionnel. Ajoutons
à cela que la qualité des produits marins de l'Est du Canada est
généralement inférieure à celle des pays
concurrents, ce qui aggrave les problèmes de commercialisation.
Enfin, les difficultés financières auxquelles furent
confrontées les grandes entreprises de transformation les ont
contraintes à effectuer des ventes sous pression, ce qui a
perturbé considérablement le marché. En tenant compte des
volumes considérables des produits marins exportés par les
entreprises canadiennes, de la concurrence très vive que livrent les
pays européens et des problèmes de qualité de la
production canadienne dont le service d'inspection n'a aucune valeur, la
situation des marchés des produits marins de l'Est du Canada ne devrait
pas s'améliorer significativement au cours des cinq prochaines
années.
Si les entreprises québécoises ne veulent pas être
entraînées dans le même sillon que les grandes compagnies de
l'Est du Canada, elles ont avantage à adopter une stratégie
différente de mise en marché. Or, contrairement aux provinces
maritimes, le Québec, lui, possède un important marché
intérieur. Les entreprises québécoises n'ont pas,
contrairement aux provinces de l'Atlantique, l'obligation d'exporter leur
production. Même si elles acheminaient sur le marché du
Québec toutes les captures réalisées par les
pêcheurs québécois, elles satisferaient à peine
à la moitié de la demande domestique. Pourquoi refouler les
produits québécois sur les marchés extérieurs qui
sont déjà saturés alors que les consommateurs
québécois se nourissent de produits importés?
La commercialisation des produits de la mer a été
jusqu'ici la responsabilité des entreprises de transformation. Sur la
Basse-Côte-Nord du Saint-Laurent, une corporation de la couronne,
l'Office canadien du poisson salé, assure la mise en marché de
toute la production de morue salée produite dans cette région.
L'office canadien agit sur la Basse-Côte-Nord depuis 1970 à la
suite d'une entente intervenue avec le gouvernement du Québec. L'entente
a été renouvelée à tous les deux ans et le
gouvernement du Québec peut y mettre fin en donnant un avis
préalable d'un an à l'Office canadien du poisson salé.
Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, sans intervenir aussi directement dans la mise en marché
des produits de la pêche, a, néanmoins, contribué à
la révision de certaines attitudes en matière de
commercialisation et à la préparation de mesures concrètes
visant à favoriser une mise en marché plus ordonnée et
plus profitable. C'est ainsi qu'en 1980-1981 le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a garanti des marges de
crédit supplémentaires aux entreprises de transformation du crabe
afin de leur permettre de poursuivre leur exploitation en attendant que le
marché se raffermisse. En octroyant cette aide financière, le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du
Québec a fortement incité les entreprises à mener des
campagnes de promotion du crabe sur le marché du Québec. Cette
promotion a connu un grand succès et des quantités de plus en
plus grandes de crabe des neiges sont maintenant vendues sur le marché
québécois.
En mars 1982, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation a organisé une conférence
socio-économique sur la commercialisation des produits de la
pêche. Les représentants de l'industrie de la pêche, de la
transformation, de la commercialisation, de la distribution et des associations
de consommateurs ont identifié les problèmes de la mise en
marché des produits marins au Québec et ont reconnu la
nécessité de structurer cette mise en marché et d'accorder
beaucoup plus d'importance au marché québécois. Une
étude très importante faisait le point sur le secteur des
pêches; ce fut le document de base étudié au moment de
cette conférence socio-économique sur la commercialisation des
produits de la pêche au Québec. (22 h 40)
Enfin, en 1983, le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation a accordé une garantie de
prêt au consortium d'exportation Gaspé Cured afin de mener une
première expérience de mise en marché organisée,
ordonnée. Le consortium regroupe les quatorze entreprises de production
de morue salée et séchée de la Gaspésie qui ont
accepté, en 1983, de vendre toute leur production sous une seule marque
de commerce et par l'intermédiaire d'un organisme unique de mise en
marché. La garantie bancaire offerte par le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec a
permis au consortium d'exportation Gaspé Cured d'assurer la
cohésion du groupe d'entreprises productrices de morue salée et
séchée, de régulariser les ventes de ce produit en
fonction de la demande et de rentabiliser davantage ce type de production. Le
consortium poursuit ses activités en 1984.
Si on regarde les pays Scandinaves, au cours des quatre dernières
années, les représentants du ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation ont étudié les
mécanismes et les structures de commercialisation des produits marins
dans divers pays. À l'occasion de certains voyages d'étude, nous
avons pu comprendre le fonctionnement de ces organismes et en apprécier
l'efficacité. En effet, c'est dans les pays Scandinaves que l'on
retrouve des organismes de commercialisation qui présentent le plus
d'intérêt pour le Québec. Les pêcheurs Scandinaves
exploitent les mêmes espèces que les nôtres, les
transforment de façon comparable et les vendent sur les mêmes
marchés que les produits marins de l'Est du Canada. En outre, les
organismes de mise en marché des pays Scandinaves ont été
mis sur pied dans les années quarante. Ils sont bien structurés.
Ils méritent le respect des pays importateurs, en particulier au
chapitre de la qualité des produits marins, des produits offerts. Ces
organismes de mise en marché ont plusieurs caractéristiques
communes: ils regroupent d'abord plusieurs entreprises de production qui
acceptent de confier à l'entreprise de commercialisation la
totalité de leurs produits finis qui sont mis en vente sous une
seule marque de commerce. L'organisme de commercialisation
prélève, en deuxième lieu, une commission sur les ventes
réalisées par son intermédiaire. De plus, l'organisme
contrôle la qualité des produits et rationalise la production. En
Norvège, par exemple, la société Frionor regroupe 120
usines de transformation du poisson. Elle vend 90 000 tonnes métriques
de produits finis par année. Aux îles Féroé, la
coopérative Féroé Sea Food compte 80 membres actifs, tous
propriétaires d'usines de transformation du poisson. Elle met en
marché annuellement 186 000 tonnes métriques de produits finis.
Enfin, en Islande, la compagnie Icelandic Freezing Plant Corporation regroupe
75 membres et vend environ 100 000 tonnes de produits finis par
année.
Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation a toujours favorisé le regroupement des entreprises de
transformation des produits de la pêche aux fins de la commercialisation,
mais les entreprises québécoises n'ont pas encore perçu
comcrètement les avantages de ce regroupement au point d'adhérer
à une seule formule en grand nombre. À cet égard,
l'expérience qu'ont vécue les quatorze producteurs de
Gaspé Cured peut servir de modèle aux entreprises qui
transforment les crustacés, le crabe, le homard, la crevette et le
poisson de fond en produits frais et congelés. II est d'autant plus
opportun d'étendre ce modèle de regroupement aux autres
producteurs que ces entreprises sont responsables de plus de 75% de la
production québécoise et que les produits visés peuvent
avantageusement être expédiés sur le marché
québécois.
Dans les pays Scandinaves, l'État est intervenu pour favoriser la
formation des organismes de commercialisation qui, 40 ans plus tard,
fonctionnent de façon autonome. Il s'agit, néanmoins, d'une
autonomie relative parce que, de façon générale, le
gouvernement émet des directives afin de favoriser ce regroupement.
Au Québec, que devons-nous faire? Jusqu'à maintenant, nous
nous sommes distingués par le fait que nous n'avons jamais mis, à
venir jusqu'à 1983, de structures de commercialisation en commun.
Aujourd'hui, nous avons vécu des expériences. C'est pourquoi il
faut se demander quelles sont les solutions au Québec. Devons-nous
favoriser le statu quo? Devons-nous aider les initiatives ponctuelles sans
aller au-delà de cela? Devons-nous favoriser la formation d'un office
québécois de mise en marché? Devons-nous adopter un cadre
législatif à la commercialisation?
Le statu quo. Le gouvernement du Québec laisse aux entreprises de
transformation le soin de poursuivre leurs activités de
commercialisation. Sans intervention, les entreprises québécoises
vont continuer d'exporter leur production et connaîtront une
rentabilité marginale. Compte tenu de la gravité des
problèmes de commercialisation des produits de la pêche, le statu
quo n'est pas recommandable.
L'aide à des initiatives ponctuelles. Le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation peut continuer de
soutenir des initiatives de promotion, d'offrir des garanties bancaires pour
faire face à une conjoncture particulière et accorder une aide
financière à l'exportation de Gaspé Cured pendant quelques
années encore. Ces interventions sont importantes, mais elles doivent
être complétées, sans quoi elles risquent d'être
décousues, de ne corriger que superficiellement les problèmes de
mise en marché et de ne pas assurer la formation d'organisations de
commercialisation solides et durables qui poursuivront leurs activités
après que le gouvernement du Québec aura cessé d'accorder
son aide financière.
Devons-nous envisager la formation d'un office québécois
de mise en marché? Le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation pourrait favoriser la formation d'un
office de mise en marché et contraindre par différents moyens les
entreprises de transformation de leur poisson à adhérer à
un tel office. Les marchés du poisson salé et séché
sont complètement différents de ceux des produits frais et
congelés. Il n'est donc pas pertinent de constituer un seul organisme de
mise en marché. Malgré ce que les députés de
l'Opposition ont dit, la loi ne recommande pas un seul office de mise en
marché, mais, au contraire, de regrouper dans des secteurs
différents les gens qui font du poisson salé et
séché, les gens qui font du poisson congelé et les gens
qui font du poisson frais. En effet, les marchés du poisson salé
et séché sont complètement différents de ceux des
produits frais et congelés. Il n'est donc pas pertinent de constituer un
seul office de mise en marché.
D'autre part, il est souhaitable que les entreprises adhèrent
librement à un organisme de commercialisation, qu'elles en comprennent
le fonctionnement et en perçoivent concrètement les avantages.
Les actions coercitives ne devraient être exercées que dans la
mesure où l'action d'un petit nombre de transformateurs nuirait
véritablement à l'ensemble de l'industrie, mais la règle
de base demeure l'adhésion volontaire dans des groupes volontaires de
commercialisation qu'on appellerait des offices de commercialisation.
L'adoption d'un cadre législatif à la commercialisation.
Il s'agit d'adopter un projet de loi qui encadrerait la formation et le
fonctionnement d'organismes de commercialisation. Cet outil législatif
donnera aux entreprises de transformation un mécanisme par lequel elles
pourraient
constituer des organismes de commercialisation reconnus par le
gouvernement du Québec. Les entreprises de transformation pourraient
ainsi développer, avec le concours du gouvernement du Québec, des
structures de commercialisation qui soient vraiment adaptées aux besoins
spécifiques de l'industrie québécoise. D'autre part, les
structures mises en place avec le support législatif seraient beaucoup
plus durables et elles pourraient développer des stratégies de
commercialisation à long terme. (22 h 50)
L'absence de cadre législatif affaiblit présentement le
consortium d'exportation Gaspé Cured parce que les membres peuvent
décider, sans trop de contraintes, de quitter l'organisme de
commercialisation et de faire des stratégies de mise en marché du
groupe en effectuant des ventes isolées qui se font toujours à
prix réduits. Les membres du consortium m'ont d'ailleurs demandé
de leur fournir ce cadre législatif afin d'assurer une plus grande
cohésion du groupe. Ce cadre législatif serait, pour les produits
marins, un cadre analogue à celui qui est constitué par la Loi
sur la mise en marché des produits agricoles. Il comprendrait
également un mécanisme pour étendre l'application d'un
accord de mise en marché de certains produits marins à des
entreprises de préparation et de conserve de ces produits marins qui
n'ont pas signé pareil accord. Ce cadre législatif couvrirait les
activités de mise en marché au Québec de catégories
de produits marins préparés par les exploitants d'usines de
préparation ou de conserve de produits marins. Sous certains aspects, il
couvrirait également la qualité de ces produits.
Sous ce régime, le gouvernement pourrait, à la demande de
plusieurs entreprises de préparation et de conserve de produits marins,
déterminer qu'elles sont liées entre elles par un accord de mise
en marché de ces produits et former un office de commercialisation de
ces produits. Dès sa formation, l'office, dont les entreprises
liées par l'accord de mise en marché sont devenues les membres,
serait substitué, pour l'administration et l'application de l'accord de
mise en marché, à la société ou à la
corporation constituée à l'origine par cet accord. Après
la formation d'un office, d'autres entreprises de préparation et de
conserve des produits marins mis en marché par l'office pourraient en
devenir membres. Également, lorsque demande lui serait faite par
plusieurs entreprises liées par un accord de mise en marché de
leurs produits marins déterminés et qu'il considère que
l'intérêt général le commande, le gouvernement
pourrait étendre l'application de l'accord de mise en marché ou
de certaines dispositions de cet accord à toutes les entreprises
engagées au Québec dans la préparation, la mise en
marché ou la mise en conserve de ces produits.
Évidemment, il s'agirait là d'un acte exceptionnel qui
devrait être vraiment perçu en fonction de l'intérêt
public. Pour favoriser l'adhésion à des entreprises de
préparation et de conserve de produits marins à un accord de mise
en marché de ces produits, ainsi que la mise en place, le maintien et le
développement d'un office pour l'administration et l'application d'un
tel accord, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation pourrait offrir en exclusivité l'aide financière
et technique du ministère aux entreprises qui signeraient pareil accord
ou deviendraient membres d'un office.
Également dans ce but le ministre pourrait considérer
comme motif d'intérêt public l'adhésion à un accord
de mise en marché de produits marins déterminés ou
l'appartenance de l'adhésion ou l'adhésion à un office
administrant pareil accord.
M. le Président, je sais que les membres de l'Opposition vont
s'opposer à la formation d'un pareil office. Évidemment, eux qui
combattent les méthodes de mise en marché dans le secteur
agricole ne pourront pas soutenir des méthodes similaires dans le
secteur des pêches. Cependant, tous les pays modernes dans le monde, les
pays nordiques en particulier, qu'il s'agisse de la Norvège, du
Danemark, de la Finlande, de la Suède, des îles
Féroé, de l'Islande, qui sont les pays les plus dynamiques dans
le secteur des pêches, ont adopté des méthodes qui
correspondent à la loi dont nous faisons l'étude en
troisième lecture.
Je sais que ceux qui vont s'opposer à cette loi vont faire croire
que le gouvernement veut adopter des regroupements coercitifs. Cependant, ce
n'est pas là l'intention du gouvernement. L'intention du gouvernement,
c'est de consolider un consortium dans le poisson salé et
séché gaspésien qui a déjà été
constitué librement et dont les membres ont demandé au
gouvernement cet apport législatif. C'est aussi une loi-cadre qui
permettra à ces entreprises qui le demanderont de constituer un office
de commercialisation. Si ces entreprises demandent au gouvernement la
possibilité d'étendre leur office de commercialisation à
d'autres entreprises, le gouvernement pourra accepter de leur donner un
délai pour convaincre ces entreprises et, après le délai
imparti, prendre la décision s'il doit oui ou non décréter
cette extension de juridiction à l'office de commercialisation. Il ne
s'agit pas là de méthodes exceptionnelles puisque nous trouvons
dans la mise en marché d'à peu près tous les produits
agricoles ce genre de mécanisme. Il appartiendra au gouvernement
d'apprécier dans le temps l'importance prépondérante ou
non des intervenants qui vont demander au gouvernement de leur accorder son
appui dans cette voie.
Dans le passé, le secteur des pêches a été
caractérisé par un individualisme profond, par une absence de
solidarité, par des batailles historiques entre villages. Ce que nous
avons essayé de bâtir depuis 1980, c'est une solidarité
entre les différentes institutions québécoises dans le
secteur des pêches. Nous avons travaillé au regroupement des
associations de pêcheurs, si possible, dans une seule association qui
regrouperait les pêcheurs côtiers et ce que nous appelons, avec un
peu d'emphase, les pêcheurs hauturiers, mais qui sont encore des
pêcheurs côtiers puisque tous les bateaux en bas de 65 pieds sont
essentiellement côtiers. Nous avons favorisé également le
regroupement dans une seule association de tous les industriels de la
transformation des produits marins sur le territoire québécois.
De la même façon, nous favorisons le regroupement des industriels
pour des fins de commercialisation. Pourquoi? Parce que, quand le territoire
maritime est éloigné, quand nous avons des centaines et des
centaines de milles de côtes, il est important de regrouper nos forces
pour faire en sorte que le territoire maritime ne soit pas divisé, ne
soit pas subdivisé, ne soit pas redivisé, mais au contraire
unifié pour que les différents secteurs des pêches au
Québec puissent avoir la force de frappe nécessaire pour
pénétrer d'abord les marchés québécois et
ensuite les marchés extérieurs et ne pas se satisfaire des
marchés les moins rémunérateurs.
Si l'entreprise de la pêche vend sur les marchés les moins
payants, elle ne peut pas payer les meilleurs prix aux pêcheurs et
à ses travailleurs.
Historiquement, M. le Président, nous avons vendu notre poisson
sur les marchés les moins exigeants. Ce qu'il faut faire maintenant,
c'est vendre notre poisson sur les marchés de Montréal et de
Québec, dans nos poissonneries de détail. Quand nous pourrons
conquérir le marché québécois, nous pourrons
aspirer à vendre sur les marchés les plus sophistiqués de
l'Amérique du Nord, les plus sophistiqués d'Europe parce qu'iln'y a pas de clients plus exigeants pour les pêches que les
consommateurs québécois. Nous nous sommes contentés de
marchés historiques. Trop souvent, nous produisons le poisson de la
même façon que le produisaient les Basques sur les côtes de
la Basse-Côte-Nord et du Labrador, en salant le poisson comme dans le
temps de Jacques Cartier, en séchant le poisson comme dans le temps des
Vikings ou en l'étendant pour laisser le vent faire son oeuvre.
M. le Président, depuis ce temps, l'électricité a
été découverte, la congélation a été
découverte, de même que le vacuum ou la façon de soutirer
l'air des paquets pour qu'il n'entre pas en contact avec le poisson et le fasse
se gâter tranquillement.
Aujourd'hui, nous avons des méthodes pour faire un produit
d'excellente qualité. (23 heures)
De plus en plus, M. le Président, avec l'action du gouvernement
du Québec, le produit québécois commence à
être reconnu. Si vous aviez dit, M. le Président, qu'en 1983-1984
une entreprise du Québec, à Sainte-Thérèse,
récolterait une médaille d'or pour son poisson, personne ne vous
aurait cru, puisque cela ne faisait pas partie de nos aspirations. On se
comparait au Nouveau-Brunswick, aux villages les plus reculés de
Terre-Neuve, aux endroits les plus misérables. Telle était notre
ambition. Mais, depuis que le gouvernement actuel est au pouvoir, nous avons
dit que, dans le secteur des pêches, nous voulions être les
meilleurs. Nous ne voulons plus nous comparer aux entreprises
rétrogrades qu'on trouve trop souvent au Canada sous le système
d'inspection fédérale où un poisson de troisième
ordre est la marque de commerce. Nous avons voulu produire le meilleur poisson
avec un système de triage qui est en place sur tout le territoire
québécois depuis le 1er avril 1984. On ne peut plus, aujourd'hui,
entrer dans les usines du Québec des poissons qui ne réunissent
pas les qualités nécessaires pour aller à la consommation
humaine.
Une voix: Des poissons rouges?
M. Garon: Ce poisson n'entre plus dans les usines du
Québec, parce que nous avons eu le courage de mettre en place un
système de triage. Nous avons eu le courage également de mettre
en place un système d'inspection. Évidemment, il y aura un peu de
chialage. Vous comprenez, M. le Président, le chialage, avec l'appui du
député de Saguenay, se fera. C'est évident que, la
première fois où notre trieur, dans ses fonctions, dira à
un pêcheur: Ce voyage n'entrera pas dans l'usine parce que vous n'avez
pas pris assez de soin pour votre poisson, il est impropre à la
consommation et il doit aller à la farine ou au vison plutôt
qu'aux êtres humains, cela fera un peu de brouhaha. La deuxième
fois aussi, mais, finalement, qu'est-ce qu'il arrive? Personne, sachant que le
poisson sera refusé, n'aura intérêt à produire du
poisson qui n'a pas la qualité voulu pour entrer dans l'usine. C'est
pourquoi, aujourd'hui, le système que nous avons mis en place permet de
hausser d'une façon considérable la qualité des produits
marins produits au Québec.
Vous savez, en politique, il y a deux genres de gouvernements. Il n'y en
pas trois, il y en a deux: les gouvernements lâches ou les gouvernements
courageux; les gouvernements qui veulent ou les gouvernements qui ont peur; les
gouvernements qui prennent des décisions ou les gouvernements qui
"taponnent". Et, ceux qui se rappellent le
chef du Parti libéral, lorsqu'il était au pouvoir de 1970
à 1976, c'était un chef qui "taponnait". Tout le monde sait cela.
Dans le domaine des pêches, nous avons pris des décisions.
Évidemment, cela va exiger une certaine discipline; évidemment,
cela va changer des habitudes, mais, au bout de la course, quand on parlera du
poisson du Québec, on parlera de la qualité Québec, on
parlera d'un poisson parmi les meilleurs au monde. Je dis: parmi les meilleurs
au monde, parce que, éventuellement, nous dirons le meilleur au monde.
Sur un pied d'égalité avec d'autres, mais, nous dirons le
meilleur. Pourquoi? Parce que nous avons mis en place les instruments.
Vendredi, nous lancerons des bateaux ici, à Québec, des
bateaux nouveaux avec des cales nouvelles. Dans ces cales, on aura toutes les
conditions pour garder un poisson de parfaite qualité. Ces cales seront
aussi sanitaires que nos hôpitaux. Ces cales sont coulées d'une
pièce dans des matériaux qu'on n'utilisait pas dans le temps des
libéraux, en acier inoxydable, en fibre de verre, sans aucun coin,
facilement lavables, réfrigérées, avec des façons
d'entreposer le poisson où l'on n'aura pas six, sept ou huit pieds de
poissons empilés dans un seul tas. Pourquoi? Parce que vous comprenez
que les poissons qui étaient en dessous du tas, se faisant plutôt
écraser, se vidaient. Il y a, aujourd'hui, un système
d'entreposage que nous avons mis au point qui fait en sorte que le poisson
produit au Québec est un poisson de meilleure qualité. Nous
mettons les fonds nécessaires pour que l'entreposage, la
réfrigération et la glace maintiennent un poisson de premier
ordre. Donc, le pêcheur a les instruments voulus pour produire ce
poisson. Quand le poisson arrive à quai, dans des bacs en plastique, pas
trop grands pour ne pas l'effoirer, s'en vient vers les usines, il est
inspecté par un trieur qui dit: Ce poisson est Extra, À ou B. De
plus en plus, les usines du Québec commencent à
différencier leur prix selon que le poisson est Extra, À ou B. M.
le Président, pourriez-vous dire au député de Saguenay,
s'il est malade, d'aller se faire soigner, parce qu'en vertu du
règlement on est censé être dans...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Effectivement, qui que ce
soit à l'intérieur de cette Assemblée doit respecter les
us et les coutumes et, donc permettre à celui qui s'exprime d'avoir
l'opportunité de le faire.
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Garon: M. le Président, c'est évident que cela
fatigue le Parti libéral, parce que, dans le temps qu'il était au
pouvoir, en 1976, il y a eu trois bateaux pour 75 000 $, trois grosses
chaloupes. Les cales étaient démodées, il n'y avait pas de
douches à bord des bateaux, pas un bateau n'avait une douche, pas de
toilettes la plupart du temps, c'était le XIXe siècle. Depuis
1976, nous avons dû mettre les bouchées doubles pour gagner
quasiment un siècle en quelques années. Les pêcheurs le
savent.
J'ai parlé de bateaux et de cales de premier ordre. On verra les
usines. Dans quelques jours, j'irai dans le comté de Matane distribuer
les permis des usines modernisées. À Cap-Chat, une usine moderne
qui a son permis. À Sainte-Anne-des-Monts, Trudele et Curadeau, une
usine modernisée. À Matane, chez Bocart, une usine moderne.
J'irai aussi dans d'autres comtés, dans les secteurs des pêches en
eaux douces: J'irai aussi sur la ferme Saint-Mathieu, dans l'Abitibi, où
il y a un abattoir pour la truite élevée en pisciculture.
Actuellement c'est la modernisation du secteur des pêches au
Québec. Quand la saison de pêche ouvrira en 1985, au 1er avril
prochain, nous trouverons un système des pêches modernisé
dans l'ensemble du Québec.
M. le Président, nous n'avons pas brûlé les
étapes. Nous avons étudié des choses: un programme de
modernisation des bateaux, un programme de modernisation des usines. L'usine de
Newport, dont j'ai la maquette dans mon bureau, je la regarde tous les jours
comme un symbole du modernisme des pêches au Québec. Non seulement
cela, mais quand l'usine de Newport sera bâtie, nous devrions en faire
pendant un mois une place que les gens pourront visiter pour voir ce que c'est
les pêches au Québec et maintenir une vieille usine pour montrer
ce que c'était les pêches dans le temps des libéraux. En le
disant, j'y pense, M. le Président, je crois qu'il faudra maintenir une
vieille usine pour dire: C'était comme cela, les pêches dans le
temps des libéraux. On a des désuétudes; on paie pour
démolir les vieilles usines, mais on pourrait en garder une qu'on
démolira six mois plus tard pour que les gens puissent voir ce que
c'était, les pêches, dans le temps des libéraux. Ils
verront à quel point c'était démodé, désuet.
On ne pouvait pas produire un poisson extraordinaire sans moyens. Mais ils
verront, en même temps, que les pêches sous le gouvernement actuel
sont dynamiques, à tel point que la seule façon pour le
gouvernement fédéral de nous arrêter, c'est de ne plus
émettre les permis.
Actuellement, des travaux sont en train de se terminer pour le radoub
annuel du Kristina Logos et du Lumaaq, nos deux bateaux pour la zone de 200
milles. Ils seront au quai de Matane dans quelques jours. Ils attendront
l'émission des permis de pêche à la crevette du
ministère fédéral des Pêches pour être
traités comme tout le monde, parce qu'ils fonctionnaient en vertu d'un
permis dans les années passées et qu'ils ont droit à ce
permis. Ces deux bateaux
demeureront là, prêts à partir, avec les
pêcheurs et les aides-pêcheurs qui en grande partie restent dans le
comté de Matane, pour pouvoir aller dans la zone de 200 milles. (23 h
10)
C'est la même chose pour Madelipêche. Huit bateaux de haute
mer qui doivent demander leur permis à chaque voyage parce que le
gouvernement fédéral traite nos pêcheurs, nos bateaux et
nos usines de façon discriminatoire, à tel point qu'il nous
faudra sans doute, dans les prochaines semaines, penser à utiliser les
tribunaux, mais pas avant que le débat soit fait.
M. le Président, pendant ce temps, regardons ce qui se passe
ailleurs: alors que nous avons des bateaux à équipage
québécois et canadien, le gouvernement fédéral
n'hésite pas à émettre des permis au Labrador à une
entreprise qui nolise deux bateaux européens avec des équipages
entièrement européens, encaissant 0,50 $ le kilo en
royautés, mettant 400 000 $ dans leurs poches sans aucun travail fourni
au Canada, sans aucun bateau canadien utilisé, sans aucun pêcheur
canadien employé. Le propriétaire, parce qu'il est du bon bord,
parce qu'il doit être libéral, a droit à 0,50 $ le kilo en
royautés qu'il met dans ses poches: 400 000 $ par année.
J'aimerais savoir quelle partie retourne dans la caisse électorale.
Une voix: Tantôt, tantôt.
M. Garon: Pendant que les pêcheurs de Matane voulaient
négocier leurs conditions de travail avec l'entreprise de Matane, Les
Fruits de mer de l'Est, le ministre fédéral des Pêches
permettait aux crevettes russes d'entrer à Matane. Il
préférait voir l'usine de Matane s'approvisionner avec des
crevettes russes plutôt qu'avec des crevettes pêchées par
des bateaux québécois. Il préférait émettre
des permis à des bateaux russes plutôt que de favoriser
l'émission de permis de pêche à des bateaux
québécois qui iraient pêcher non pas dans le banc de
Sept-Îles, dont toutes les prises possibles sont effectuées, mais
dans le banc d'Anticosti ou dans le banc d'Esquiman. Le ministre des
Pêches, lui, disait non, M. le Président.
M. le Président, le projet de loi que nous avons devant nous est
un projet de loi moderne qui permettra aux entreprises
québécoises de se regrouper...
M. Maltais: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Question de règlement, M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Pourrait-on appeler le quorum, s'il vous plaît?
On n'a pas le quorum présentement.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Effectivement, nous n'avons pas quorum. Que l'on appelle les
députés.
À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant, s'il vous
plaît! La télé est revenue. Donc, M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Garon: M. le Président, vous comprendrez que les
députés du Parti québécois
préféraient entendre le débat dans la chambre d'à
côté où il y a la télévision parce qu'ils
peuvent éviter, de cette façon, d'entendre les sarcasmes et les
propos désobligeants du député de Saguenay. Vous voyez
arriver ici dans cette Chambre de nombreux députés. La
télévision ne peut pas faire le tour. J'aimerais que la
télévision puisse faire le tour pour montrer à quel point
les députés du Parti québécois sont nombreux, ce
soir, alors qu'il y a, du côté des libéraux, trois
rouges.
M. Bertrand: Trois? Il y a 48 députés.
M. Garon: Évidemment, leur chef n'est pas là pour
mettre la discipline, leur chef hors les murs n'est pas ici pour parler des
pêches. Il est allé, la semaine dernière ou il y a quinze
jours, aux Îles-de-la-Madeleine pour manger du homard. Il a pris garde
d'aller de jour sachant que les pêcheurs étaient en mer. M. le
Président, dans le secteur des pêches, le Parti libéral ne
s'est jamais vraiment illustré. Que le député de Saguenay
soit devenu son porte-parole maintenant, lui, le spécialiste des
sex-bars, cela n'augure pas bien pour le secteur des pêches. Vous savez,
dans un aquarium un poisson peut se déplacer très rapidement,
mais il ne déplace pas grand-chose dans la pièce. Le poisson
rouge de l'aquarium ne dérange pas la pièce; il se promène
dans l'aquarium.
Les gens du territoire maritime savent actuellement que deux
gouvernements ont véritablement contribué au développement
du secteur des pêches. Sous le gouvernement de l'Union Nationale, dans le
temps où il y avait comme ministre des Pêches M.
Camille-Eugène Pouliot, sous le gouvernement de M. Duplessis - et ce
n'est pas pour rien que nous avons donné à notre principal
patrouilleur le nom de Camille-Eugène Pouliot pour honorer sa
mémoire - les gens savent que dans le secteur des pêches il s'est
fait quelque chose. Ils savent que, depuis 1959 jusqu'à 1976, cela a
été la période morte, le Moyen-Âge dans le secteur
des pêches, puisque les libéraux ne s'intéressaient pas
à ce secteur. Cela ne les intéressait pas, point, à la
ligne, M. le Président.
Nous aurons l'occasion dans les prochaines semaines ou dans les
prochains mois de voir une période dans le secteur des
pêches comme on n'en aura jamais vu antérieurement, depuis
1936, alors que le gouvernement de l'Union Nationale bâtissait des
entrepôts frigorifiques dans un territoire où il n'y avait pas
l'électricité. Dans le temps, c'était une
révolution parce qu'on avait, de tout temps, traité le poisson
comme dans le temps de Vikings ou dans le temps de Jacques Cartier, avec le sel
ou le vent. Les entrepôts frigorifiques sont arrivés,
c'était une modernisation pour le temps.
Depuis cette date, rien, situation morte. Aujourd'hui, nous faisons la
modernisation des bateaux depuis que nous sommes au gouvernement, la
modernisation des usines et nous voulons mettre en place les instruments pour
la commercialisation des produits marins. C'est cela, la réforme qui est
en place, M. le Président, et nous voulons l'effectuer parce que c'est
la seule façon de respecter le secteur des pêches. 1984 et 1985
seront, dans le secteur des pêches, les années records de tout
temps de l'histoire du Québec en termes d'investissements qui se feront
tant sur l'eau que sur la terre.
Nous n'aurons jamais honte aux prochaines élections de dire: Vous
rappelez-vous comment c'était? Voici comment c'est maintenant.
Une voix: Déclenchez-les!
M. Garon: Non, on ne les déclenchera pas tout de suite
parce qu'on veut finir notre oeuvre, pour que, dans le secteur des
pêches, aux prochaines élections on puisse dire aux gens:
Laissez-nous continuer notre oeuvre, parce que nous aurons modernisé le
secteur des pêches et il faudra mettre en place l'industrie de
deuxième et de troisième transformation qui créera des
centaines et des milliers d'emplois dans le territoire maritime. Mais, d'abord,
le début, une matière brute de bonne qualité, un poisson
de bonne qualité avec lequel on puisse travailler, faire des mets, faire
des sauces. Je vois des industries...
Vous savez, M. le Président, depuis quelques semaines, j'ai
rencontré les responsables de deux usines laitières qui m'ont
dit: Le secteur des pêches, cela pourrait nous intéresser. Le
poisson avec la crème ou avec le lait, ou avec des préparations,
cela peut bien aller et c'est cela, la deuxième transformation. Je suis
allé dans différents endroits, j'ai vu des usines où on
mélangeait différents produits pour faire des mets
préparés. Aujourd'hui, dans les foyers, tout le monde sait que
les hommes et les femmes travaillent de plus en plus, les deux travaillent
à l'extérieur. Les femmes ne veulent pas préparer des mets
nécessairement chaque fois, de sorte qu'ils vont au restaurant ou ils
veulent acheter des mets préparés plus souvent qu'autrement.
M. le Président, nous devons nous préparer pour cette
époque, pour cette phase. Déjà, nous avons des projets de
deuxième préparation de produits marins parce que les gens savent
qu'au Québec, maintenant, il y a des lois pour faire en sorte qu'on
puisse produire un produit de qualité. En 1981, avec la loi que nous
avons adoptée, avec la loi 49 du mois de décembre, avec le
règlement de 1982, avec la loi 48 que nous venons d'adopter vendredi
dernier, avec la Loi sur le crédit aquacole, qu'on vient
également d'adopter ce soir, M. le Président, avec la loi 82, que
nous adopterons dans les prochaines heures, jamais il n'y a eu autant de lois
adoptées pour préparer le cadre voulu pour faire le
développement du secteur des pêches que durant l'année
1984. Il y a eu des années... (23 h 20)
Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous voulez conclure, M.
le ministre.
M. Garon: Je conclus, M. le Président. Même le
député de Gatineau, qui pense que notre développement n'a
pas d'effet même dans sa région, tout près de son
comté, sinon dans son comté, il y a une entreprise qui est en
train de travailler pour se moderniser, pour faire en sorte que la
transformation du produit élevé dans la région puisse
être transformé dans la région. Cela a un effet même
à l'intérieur des terres et des centaines de milles à
l'intérieur des terres, M. le Président. Bientôt
l'aquaculture, avec la loi que nous avons votée, deviendra un secteur de
développement considérable avec les eaux douces que nous avons au
Québec.
M. le Président, je sais que je n'ai pas plus de temps.
L'Opposition ne me donnera pas son consentement pour continuer. J'aurai 20
minutes de réplique. Je continuerai le reste de mes discours dans le
territoire maritime pendant tout l'été, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, M. le
député de Saguenay, vous me demandez la parole?
M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Merci, M. le Président. J'ai le plaisir de
représenter les gens du comté de Saguenay sur la Côte-Nord.
Nous avons quand même quelqu'un de célèbre chez nous, qui
s'appelle Gilles Vigneault, un poète nationaliste très reconnu.
Il avait une chanson qui s'intitulait: "Les menteries de par chez nous". Ce
soir, j'ai eu l'occasion d'entendre à nouveau les menteries de par chez
nous. Je ne pensais pas qu'à l'Assemblée nationale,
c'étaient des poètes, que c'étaient des acteurs de
théâtre de trois sous, mais je pensais que c'étaient des
gens sérieux.
M. le Président, je vous rappelle que
c'est moi qui ai la parole. Je vous rappelle, M. le
député, que vous n'avez pas la parole. Quand ce sera votre tour,
on vous écoutera avec toute la dignité que le Parti
libéral sait y mettre.
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Maltais: M. le Président, dans son allocution qui a
duré une heure, où il a lu un document préparé par
ses fonctionnaires soumis en région à son bureau - ils n'ont pas
le droit de faire des déclarations - le ministre nous a tout dit cela
comme un enfant de prématernelle. Lorsqu'il nous disait tout à
l'heure que le député de Saguenay avait besoin de se faire
soigner, soit, il est possible que j'aie de petits problèmes, mais je
n'en ai pas de gros. Pour de gros problèmes, cela prend des psychiatres,
des cardiologues, des gens de conditionnement physique. M. le ministre, vous
avez avantage à consulter votre médecin de famille, parce que,
rapidement, il va vous placer en vacances.
D'ailleurs, M. le Président, vous avez dit tout à l'heure
que l'Opposition était fatiguée. M. le Président, je pense
que le ministre ne s'était certainement pas regardé dans le
miroir avant de dire que l'Opposition était fatiguée. Je le mets
au défi. Il veut parcourir la Gaspésie, on va y aller à
pied, au petit trot, M. le ministre, on va y aller ensemble, et on va voir tous
les pêcheurs. Je vous donne une petite chance, puisque vous partirez
quinze jours avant moi. On se donne rendez-vous à Newport, pour voir
votre "scandale".
M. le Président, le ministre a oublié une chose dans son
discours, qui a duré une heure. Il a oublié de parler du projet
de loi 82. Il a oublié de dire qu'à la première page de
son projet de loi, par décret, ce projet de loi autorise le gouvernement
à étendre l'application de son accord, c'est-à-dire que le
ministre, de par sa mauvaise habitude, impose à des gens de faire partie
d'un office de commercialisation même s'ils n'ont pas donné leur
accord. Je répète les paroles mot à mot du ministre: J'ai
consulté tout le monde, j'ai vu tout le monde et tout le monde est
d'accord.
Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a
toujours la fâcheuse habitude de ne pas dire toute la
vérité. Il a reçu, en date du 12 juin, un
télégramme de l'Association québécoise de
l'industrie de la pêche, laquelle regroupe, entre parenthèses, 95%
des producteurs, qui exportent également 95% du volume des prises et des
débarquements au Québec. J'imagine que M. le ministre va dire que
c'est un télégramme fictif, que ce n'est pas vrai, ou qu'il l'a
reçu à son bureau, qu'il l'a dans ses archives. Il l'a
plutôt jeté tout de suite, il ne l'a pas lu, naturellement, il n'a
pas eu le temps de le lire. Il était trop occupé à
l'agriculture, parce que, pour le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, être ministre des Pêcheries,
c'est un "side-line" pour lui, il l'a dit, il l'a répété
maintes fois; c'est un "side-line" pour lui. C'est un petit budget, je m'en
fous. Or, ces gens-là disent clairement au premier ministre et au
ministre de retarder le projet de loi 82 tout simplement parce qu'il ne les a
pas consultés. Il a consulté les gens de Gaspé Cured, ce
qui est tout à fait normal, ce qui est tout à fait
légitime puisque, eux, avant l'intervention du ministre, se sont
regroupés.
On vous parlera des tavernes tantôt. La dernière fois qu'on
en a parlé ici, si je ne me trompe pas, l'honorable député
de Marie-Victorin a démissionné. Lorsqu'on parlait de sex-bars -
entre parenthèses, M. le ministre, cela me ferait plaisir d'en parler
avec vous puisque vous avez l'habitude de subventionner bien d'autres choses
que les pêcheries, on vous en parlera tantôt - mais, en parlant de
sex-bars, vous savez que votre collègue de Marie-Victorin a dû
quitter la politique parce que le premier ministre lui a passé un
dernier savon sur cela. Je vais vous parler honnêtement des
pêcheurs. On ne parlera pas de sex-bars. On ne parlera pas de
"sex-ports", on va parler des pêcheurs puisque c'est ici qu'il faut
débattre le projet de loi 82. On en parlera tantôt de vos petites
subventions. Savez-vous que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation a 330 000 $ de versés dans ses subventions hors
norme? Je voudrais bien savoir quel montant vous avez dans vos comtés,
vous. C'est normal. C'est normal, c'est le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. Alors que nous avons des petits budgets
de 25 000 $ ou de 30 000 $, lui il a 320 000 $. Lorsqu'on en parlera, à
partir de maintenant, dans cette Chambre on parlera du futur
ex-député de Lévis et ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. M. le Président, s'il y avait des
élections demain matin, je pense qu'on aurait le plaisir d'avoir au
Québec un ministre en vacances. Cela ne serait pas une erreur. C'est la
vérité. Si vous ne me croyez pas, déclenchez des
élections demain matin.
M. le Président, juste pour me référer à
quelques points avant de tomber dans le vif du sujet, parce que le ministre a
déblatéré pendant une heure de temps... Je vous rappelle,
M. le Président, que c'est moi qui ai la parole.
M. Garon: Profitez-en pour dire quelque chose.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Saguenay, je vous écoute. Allez-y.
M. Maltais: Merci, M. le Président. J'espère que
vous êtes le seul à m'écouter parce que parler de douches
de poisson, je ne suis pas intéressé; tout à l'heure, on
nous en a parlé.
M. le Président, le projet de loi 82, dont le ministre a
oublié de parler, si on le prenait article par article, si on le prenait
chapitre par chapitre, on s'apercevrait d'une chose. Le ministre, d'abord et
avant tout, comme l'Association québécoise de l'industrie de la
pêche le déplore, se donne des pouvoirs abusifs, des pouvoirs
discrétionnaires. Je suis heureux que la députée de
Johnson soit ici ce soir, très heureux, parce qu'elle-même
déclarait dans le journal de Sherbrooke, à l'instar de l'esprit
que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
développe dans le domaine des pêcheries qui est un esprit
séparatiste total et complet, qu'elle était tout à fait en
désaccord avec des résolutions qui disaient qu'un vote pour le
Parti québécois est un vote pour l'indépendance. C'est
marqué dans la Tribune de Sherbrooke. M. le Président, aussi
longtemps...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Maltais: ...qu'on n'est pas d'accord à
l'intérieur de nos désaccords, on n'est plus dans le trafic.
Justement, hier soir, une partie de la population de l'île de
Montréal avait à le faire ressentir. Je pense qu'elle l'a
très bien fait.
M. le Président, le ministre disait dans son allocution qu'il y a
des gouvernements de lâches, et je suis d'accord avec lui. Lorsqu'on
gouverne sans consulter la population, on a les résultats qu'on
mérite. Les résultats, hier soir, on les a connus. (23 h 30)
Quand le ministre dit que tout le monde devrait être d'accord avec
lui, particulièrement dans le projet de loi 82 qui nous
intéresse, ceux qui ne sont pas d'accord sont bien mal pris. D'abord,
par décret, ils vont faire partie de ses offices et,
deuxièmement, on connaît la politique du ministre, sa façon
d'agir, sa façon d'appeler les producteurs, de leur dire: Si vous
n'embarquez pas, il y a des moyens politiques qui vont vous faire embarquer. M.
le ministre, c'est tout à votre avantage d'être aussi pur et aussi
antitortionnaire, d'appeler les industriels et de leur dire: Si vous
n'embarquez pas avec nous, si vous vous opposez... On donnera des noms de
propriétaires en temps et lieu, M. le ministre, vous leur tordez le
bras. M. le Président, vous êtes une sangsue qui tord les
propriétaires.
Des voix: ...
M. Maltais: Cela dépend des sortes de sangsues, vous ne
connaissez pas le secteur des pêches.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. Maltais: Lorsque le ministre a fait état de ses
réalisations, il a parlé de Blanc-Sablon; il a oublié de
parler de Natashquan et de bien des choses, particulièrement sur la
Côte-Nord. C'est malheureux que le député de Duplessis ne
soit pas ici ce soir pour constater que le ministre a continué,
malgré les revendications de ces personnes et les revendications des
associations, des regroupements de pêcheurs, à priver des
personnes, qui n'ont d'autre revenu que la pêche, en 1984, de gagner leur
vie décemment.
M. le Président, le projet de loi pour lequel nous sommes en
troisième lecture, bien que le ministre ait reçu des
télégrammes pour lui demander de surseoir à cette loi et
pour demander que ces gens soient consultés, le ministre persiste
à l'amener en troisième lecture ici et on sait qu'avec une
majorité servile un gouvernement peut faire à peu près
n'importe quoi et adopter tous les projets de loi qu'il désire.
Une voix: Ce n'est pas gentil.
M. Maltais: C'est la réalité, quand même. M.
le Président, encore une fois, comme pour le projet de loi 48,
nous avons demandé une commission parlementaire. Au moins, si le
ministre nous donnait la garantie qu'avant l'adoption du projet de loi il y
aurait une rencontre dans des terrains neutres avec les propriétaires
d'usines, afin qu'ils puissent s'exprimer. L'Opposition, si le milieu
désire et veut ce projet de loi 82 créant des offices de
commercialisation, n'aurait d'autre choix que d'acquiescer aux demandes des
gens du milieu.
Malheureusement, ce n'est pas encore le cas parce que ce que les gens
redoutent, ce sont les pouvoirs abusifs du ministre, les pouvoirs de les
incorporer dans des offices qu'ils n'auront pas voulus. Par décret, le
ministre va les incorporer.
Ces gens-là n'auront pas un mot à dire, toujours selon le
décret. Tant et aussi longtemps qu'ils n'auront pas signé la
formule magique du ministre, ils ne pourront se faire entendre. Cependant, ils
assumeront les responsabilités financières du groupe, de
l'office, mais ils n'auront pas un mot à dire.
M. le Président, le Parti libéral a toujours
défendu au cours des années les libertés fondamentales des
individus et continuera de les défendre. Le ministre nous disait tout
à l'heure: Quand le chef du Parti libéral est allé manger
du homard aux Îles-de-la-Madeleine... M. le Président, en
toute
humilité et en toute confiance, sur n'importe quelle place
publique, j'aimerais mesurer le tour de taille du chef du Parti libéral
et celui du député de Lévis, le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. Maltais: On saurait à ce moment lequel mêle les
vaches aux poissons, comme on l'a fait tout à l'heure.
Je ne prendrai pas autant de temps que le ministre en a pris pour
déblatérer et vanter les vertus de ce qu'il a fait, mais je lui
rappellerai quelques articles d'un livre écrit par une de ses
collègues: Je m'ennuie de ceux qui dorment pendant que les autres
travaillent, particulièrement du ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, dont la présence m'était
devenue presque intolérable, tant elle était envahissante.
Dormait-il, il ronflait. Mangeait-il, il en mettait partout. Je fais allusion
à un livre écrit par Mme Lise Payette, ex-ministre du Parti
québécois.
En terminant, M. le Président, comme l'ensemble de la population
du Québec a pu le juger lors des dernières élections
partielles et comme l'ensemble de la population du Québec le jugera lors
de la prochaine élection générale, lorsqu'un ministre
n'est pas cru, il est cuit. C'est pour cela qu'on votera contre le projet de
loi 82. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, votre droit de
réplique.
M. Jean Garon (réplique)
M. Garon: M. le Président, on voit ce que cela donne des
partielles. Je n'ai pas à répondre à beaucoup d'arguments
du député de Saguenay-Des voix: II n'y en avait pas.
M. Garon: ...puisque ceux qui l'ont entendu se sont rendu compte
qu'il s'est intéressé à mon tour de taille, qu'il s'est
intéressé à tout autre chose qu'au projet de loi. Ce qui
confirme, M. le Président, que le Parti libéral ne
s'intéresse pas aux matières de pêche. Normalement, un
parti met comme critique dans une matière son meilleur porte-parole. On
s'est rendu compte que le député de Saguenay n'a rien à
dire. Et, pourtant, semble-t-il que c'est celui qui a le plus à dire de
tout le Parti libéral. Cela indique à peu près à
tous ceux... J'espère qu'il gardera cet enregistrement pour les
prochaines élections afin de montrer aux gens ce que contenaient les
débats, la problématique, et les conceptions du Parti
libéral en matière de pêche. Le député de
Saguenay en a donné un bon exemple, c'est le néant, le vide
total, la pensée inexistante. J'aimerais être méchant. Je
n'ai rien à m'accrocher pour dire quoi que ce soit. Parce que,
normalement, dans un discours de réplique, vous répliquez
à des arguments. Le député de Saguenay n'en avait pas. Il
a parlé de mon tour de taille.
M. le Président, vous savez que ce n'est pas pour rien que le
chef du Parti libéral n'est pas ici. Le chef hors les murs sait bien
qu'il serait malheureux d'entendre un pareil discours. Il sait bien qu'il
serait obligé de le remplacer et, sans doute, de faire la preuve que lui
non plus n'a rien à dire en matière de pêche. Vous savez
que le chef du Parti libéral est déjà allé à
l'Union des producteurs agricoles et il a dit quoi? Il a dit aux producteurs
agricoles: Vous savez, dans mon parti, aucun n'a le droit de parler en
matière agricole. J'ai un seul porte-parole, le député de
Maskinongé, et moi-même. Or, comme il n'est pas ici pour en
parler, il y a un seul député qui peut parler de l'agriculture
dans cette Chambre du côté du Parti libéral, le
député de Maskinongé. Tous les autres n'expriment que des
opinions personnelles qui n'engagent pas le Parti libéral. Cela nous
fait une belle jambe quand il y a des débats qui portent sur
l'agriculture. On ne peut pas répondre grand-chose à des gens
dont l'opinion ne compte pas. Ce n'est pas nous qui disons cela, cela a
été publié dans La Terre de chez nous, cela a
été publié dans Le Richelieu agricole: deux des plus
grands journaux ou revues du monde agricole. Et, pourtant, le chef du Parti
libéral n'est même pas franc. Comment se fait-il qu'il disait
à l'Union des producteurs agricoles, en le visant, personnellement -
c'est à cause de ses déclarations qu'il est allé
rencontré l'Union des producteurs agricoles - "Quand le
député de Brome-Missisquoi parle, cela ne compte pas?" Pourtant,
à La Malbaie, au congrès de l'Association professionnelle des
meuniers, le chef du Parti libéral, contre sa parole,
déléguait pour le représenter le député de
Brome-Missisquoi. C'est quand même quelque chose. (23 h 40)
Nous aimerions, M. le Président, avoir ce chef entre nos murs.
Nous pensions qu'à la faveur des trois élections partielles, il
aurait pu se présenter quelque part, venir nous voir et venir nous
parler en Chambre des pêches, venir nous dire quelles sont ses
conceptions sur ce développement des pêches, venir nous dire
quelles sont ses conceptions sur le développement de l'agriculture. Le
Parti libéral a un chef hors les murs. Il y a eu, dans le Moyen
Âge, des chefs hors les murs. Vous vous rappelez, c'est une expression du
Moyen Âge, les chefs hors les murs. Le Parti libéral a un chef
hors les
murs qui ne veut pas venir rencontrer le Parlement. Pourquoi? Parce que
vous ne pouvez pas, pendant une longue période de temps, camoufler
à la population que vous n'avez pas de pensées sur les
différents sujets.
Si le chef du Parti libéral était dans cette Chambre, il
serait obligé d'intervenir dans les pêches et nous dire ce qu'il
en pense. On s'apercevrait qu'il connaît cela ou qu'il ne connaît
pas cela. Il serait obligé d'intervenir dans l'agriculture. Les gens
pourraient l'écouter et dire qu'il connaît cela ou qu'il ne
connaît pas cela. Il a dit: Courage] Écoutant sa conscience -
comme le disait l'auteur - qui ne lui disait rien, il s'écria: Courage,
fuyons! Le chef du Parti libéral a décidé de ne pas venir
nous affronter, de ne pas venir dire ses pensées à la population.
Je comprends, M. le Président, que c'est triste parce que la population
du Québec a le droit de voir ses chefs à l'Assemblée
nationale. Elle a le droit de voir ses chefs à l'endroit normal pour un
parlementaire élu comme député à l'Assemblée
nationale.
Une voix: II a peur.
M. Garon: Mais non, à tel point qu'on se demande s'il va
se présenter aux prochaines élections. Il pourrait
peut-être y avoir, pour la première fois dans l'histoire du
Québec, un chef qui ne se présentera pas aux élections. On
ne le sait plus. Est-ce qu'il va venir à quelque part? Est-ce qu'il va
se présenter dans un comté rural, dans un comté urbain?
Est-ce qu'il va venir parler de la commercialisation du poisson? Est-ce qu'il
va venir nous parler de la vente de l'électricité alors qu'il
n'en vendait pas et que nous en vendons? Qu'est-ce qu'il va faire, le chef du
Parti libéral?
Je sais que j'enfreins un peu le règlement, mais, tout en le
faisant, je ne le fais pas. Car, comme le député de Saguenay n'a
rien dit, c'est difficile, pour moi, de répliquer à quelqu'un qui
n'a rien dit. Je ne pourrais pas... Le député de Saguenay, comme
argument sur la commercialisation du poisson, a parlé de mon tour de
taille. Je ne peux tout de même pas faire un discours sur ce sujet.
Une voix: Ce serait trop long.
M. Garon: II a lu des articles de journaux sur des
déclarations de la députée de Johnson. Pourquoi? Parce
qu'il n'a rien à dire. Le secteur des pêches, il n'a pas
travaillé cela. Il n'a pas étudié cela. Il a lu un bout
dans le livre de Lise Payette. Pourquoi? Parce qu'il n'a rien à dire.
Tout le monde sait que Lise Payette et moi avons le même problème.
C'est une vérité connue que nous partageons avec beaucoup
d'autres personnes qui souhaiteraient avoir une taille plus mince. Qu'est-ce
que vous voulez que nous fassions?
M. le Président, je suis dans une situation un peu
spéciale à avoir à commenter un discours qui n'a pas eu
lieu, à avoir à commenter un discours de l'Opposition qui n'a
rien dit dans le secteur des pêches. Comme je n'ai pas eu le temps de me
préparer pour chercher à la loupe les mots qui pourraient
concerner le débat, je suis un peu obligé, devant vous, de faire
cet exercice et d'essayer de trouver quelque chose dans le discours du
député de Saguenay.
M. Parizeau: II n'y a pas grand-chose.
M. Garon: M. le Président, les députés sont
ici présents: le député de Lac-Saint-Jean, le
député de Nicolet, le député de Champlain, le
député de Beauharnois, le député de Roberval, le
député de Chauveau, le député de Prévost, le
député de Verchères qui passe, le député
d'Abitibi-Est, le député de Shefford, la députée de
Johnson, le député d'Ungava, qui lui s'intéresse aux
poissons -nous avons parlé ensemble avec les gens du Grand-Nord du
potentiel des lacs remplis d'esturgeons - vous-même, M. le
Président, qui êtes ici avec nous, le député de
Laviolette, celui qui prend la place du leader ce soir, le député
de Rousseau, le député de Groulx, un grand nombre de
députés. Je ne peux pas énumérer ceux qui sont dans
l'antichambre en train de regarder la télévision.
Le Parti libéral, le député de Vaudreuil-Soulanges
et un député d'un comté dont je ne pourrais pas dire le
nom parce que je ne le vois pas assez souvent, M. le député de
Laprairie qu'on me dit. On me dit des Prairies. Deux libéraux, pourquoi?
Parce qu'ils ne s'intéressent pas à ces sujets. Ils ne
s'intéressent pas aux pêches. Je trouve cela triste parce que
c'est un projet auquel plusieurs personnes ont travaillé des mois. Nous
avons travaillé sûrement six mois à ce projet de loi avec
les plus grands cerveaux juridiques du gouvernement. La commercialisation des
produits marins a demandé des études approfondies pour pouvoir
établir les juridictions du Québec sans empiéter sur les
juridictions fédérales dans le cadre constitutionnel qui est le
nôtre.
M. le Président, dans le cadre constitutionnel qui est le
nôtre, notre devoir est d'occuper la place que la constitution nous a
donnée. C'est évident que, comme gouvernement du Parti
québécois, nous aimerions avoir plus de place que nous en avons
actuellement sur le plan juridique, mais au moins nous devons occuper la place
que nous avons dans la constitution actuelle. Comment se fait-il que, dans le
secteur des
pêches, seulement cette année nous avons établi un
crédit sur l'aquaculture, qui n'existait pas auparavant? Pourquoi
sommes-nous le premier gouvernement à établir une juridiction sur
l'aquaculture, sur l'élevage des poissons? Personne ne traitait de cela
dans nos lois auparavant.
Nous avons adopté la loi 48 établissant nos juridictions
sur les fonds marins, sur la commercialisation des produits marins, pouvoirs
qui nous sont donnés par la constitution et que nous n'occupions pas
auparavant. Nous, nous avons fait les efforts, nous avons passé des
heures avec les meilleurs concepteurs au Québec, les meilleurs avocats
du ministère, Me Gagné, Me Brière, Me Samson, Me Cantin,
Me Ducharme, et j'en oublie quelques-uns que je connaissais moins, qui venaient
du ministère de la Justice, qui ont aussi collaboré à ce
projet.
Un grand nombre de personnes ont travaillé pour établir
les juridictions du Québec dans ces secteurs. Je me serais attendu que
le Parti libéral fasse les mêmes études. J'ai à
constater que certains d'entre eux se sont absentés au moment des votes;
alors que l'ensemble du parti votait contre, j'ai constaté que certains,
écoutant leur conscience, ont décidé de se retirer pour ne
pas voter. Mais la masse du Parti libéral s'est opposée à
ces projets de loi parce qu'elle ne veut pas que le Québec occupe ses
juridictions. En fin de semaine, j'étais dans le territoire maritime en
Gaspésie et j'ai dit aux gens: La loi 48 a été
votée vendredi dernier. Partout, j'ai entendu des gens qui disaient
bravo!, bravo! le Québec, enfin, va établir ses juridictions. Je
n'ai pas entendu une seule note discordante dans tout le territoire. Même
des gens sont venus me voir quand j'étais assis à une table de
restaurant, dimanche midi, ils sont venus me dire: Félicitations pour la
loi 48. Nous sommes favorables. Certains ont dit: On a vu que les sondages
étaient défavorables pour vous, qu'est-ce qui nous arriverait,
dans le domaine agricole et dans le domaine des pêches, s'il fallait que
le gouvernement ne soit pas réélu? J'ai dit: C'est bon, commencez
à vous inquiéter tout de suite. Mais, si vous pensez vraiment
à ce que vous dites, commencez donc à travailler
immédiatement pour faire en sorte que le gouvernement actuel continue
son oeuvre dans le secteur agricole, dans le secteur agro-alimentaire, dans le
secteur des pêches.
M. le Président, notre bilan, nous n'en avons pas honte. Nous
avons fait un travail considérable. Pas seuls, je trouve gênant de
voir que le critique officiel en matière de pêche du Parti
libéral n'ait pas un mot à dire. (23 h 50)
Dans le parti ministériel, dans le parti gouvernemental, je peux
vous dire que c'est en groupe que nous avons travaillé: les
différents députés des régions touchées par
le projet de loi, tant dans le territoire maritime que dans le territoire des
eaux douces. Vous ne vous seriez pas attendus, par exemple, que le
député de Champlain fasse un discours; pourtant il a fait un
discours. Pourquoi? Parce qu'il sait qu'il y a des développements dans
les eaux douces qui vont toucher son comté; il y a des gens qui vont
pouvoir gagner leur vie grâce à ce projet de loi. Pourquoi
avez-vous vu différents orateurs, comme le député
d'Arthabaska, parler de ce projet de loi sur les pêches? Pourquoi? Parce
que le député d'Arthabaska sait lui, comme agriculteur, que si,
en plus de faire l'élevage des animaux, il fait l'élevage des
produits marins, des dizaines et des centaines de personnes pourront gagner
leur vie. C'est pourquoi vous avez vu un grand nombre de députés
du Parti québécois s'intéresser à ces projets de
loi.
Vous savez, quand on réussit à adopter, en une
année cinq projets de loi majeurs comme la prévention des
maladies des pommes de terre, la loi 48, la loi 82, la Loi sur le crédit
aquacole, la Loi sur la commercialisation des produits marins, la loi sur les
pêcheries et l'aquaculture commerciales, il faut, à ce moment, que
les députés manifestent qu'ils sont d'accord que le gouvernement
occupe autant de place pour le développement dans le secteur agricole et
des pêches. C'est pourquoi il est possible de présenter tous ces
projets de loi. Il faut aussi que cet accord soit manifesté dans les
caucus du parti, avant les réunions à l'Assemblée
nationale qui sont publiques et il faut que les députés soient
d'accord pour qu'il y ait du temps consacré à ce secteur.
Si vous regardez en termes d'heures de débat, d'heures
consacrées au travail de l'Assemblée nationale pour les lois
touchant le secteur de l'agriculture, des pêches et de l'alimentation,
c'est parce qu'il y a un consensus général parmi les
députés. Lors des débats de deuxième et
troisième lecture ou de prise en considération, vous avez vu
plusieurs députés du Parti québécois intervenir,
mais je ne veux pas tous les nommer. Pourquoi? Parce qu'il y a une conviction
profonde chez eux qu'on peut faire du développement économique
dans ce secteur.
M. le Président, ceux qui ont écouté ce
débat ont pu se rendre compte à quel point il est pitoyable
d'entendre le député de Saguenay. Pourtant, c'est un frappeur de
relève; il a remplacé le député de Nelligan. Le
Parti libéral, qui n'était pas satisfait du député
de Nelligan, a décidé de le remplacer par le député
de Saguenay et on voit le résultat.
Je pense que le meilleur exemple, la meilleure chose qu'on peut demander
au
public qui n'a pas pu entendre ce débat, ou ceux qui ont pu
l'entendre et qui voudront le dire à d'autres, c'est de venir ici
à l'Assemblée nationale et de se faire passer le discours du
député de Saguenay pour entendre ce qu'il avait à dire
dans le secteur des pêches, ses vingt minutes de clôture dans le
secteur des pêches, et constater à quel point cela
n'intéresse pas le Parti libéral. C'est facile, vous savez, de
dire on va critiquer le gouvernement, de dire qu'au gouvernement: Vous avez
tort sur ceci, vous avez tort sur cela. Ce serait intéressant d'entendre
ce que le Parti libéral veut faire et, actuellement, par ce qu'on entend
dire, il ne veut rien faire, il n'a pas de projet, il n'a pas de pensée
dans le secteur.
M. le Président. Je le dis: J'ai rarement parlé de
ces questions en Chambre jusqu'à maintenant mais, de plus en plus, plus
les élections vont approcher, plus la population du Québec devra
se demander quel choix elle a en termes d'équipe, quel choix elle a dans
les différents secteurs pour déterminer ce qu'elle veut
exactement. Dans cet échantillonnage, il y aura un document qui est le
discours du député de Saguenay, ce soir, pour démontrer au
territoire maritime que le Parti libéral n'a pas plus l'intention de
s'occuper des pêches qu'il ne s'en est occupé de 1960 à
1966 et de 1970 à 1976. Cela ne l'intéresse pas, point. Notre
population devra déterminer, dans le territoire maritime, par ceux qui
sont touchés par le secteur de l'agriculture, des pêches et de
l'alimentation, si elle doit élire un gouvernement que ces questions
intéressent, ou un gouvernement ou un parti, comme le Parti
libéral, que ces questions n'intéressent pas.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que le projet de
loi 82, Loi sur la commercialisation des produits marins est adopté?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté sur
division.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Projet de loi 80
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
M. Blouin: M. le Président, je propose que nous
procédions à la prise en considération du rapport de la
commission des institutions qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 80, Loi sur l'Ordre national du
Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a
consentement? Il y a consentement. Est-ce que le rapport est adopté?
M. Blouin: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
M. Blouin: Nous procéderons, demain, au débat sur
l'adoption de ce projet de loi. Sur ce, après cette journée fort
productive sur le plan législatif, je propose que nous ajournions nos
travaux à demain matin, dix heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a ajournement de nos
travaux à demain, dix heures.
(Fin de la séance à 23 h 56)