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(Quatorze heures douze minutes)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir. Affaires courantes.
Déclarations ministérielles. M. le ministre de
l'Éducation.
Équipe de conciliateurs dans les
négociations entre le gouvernement
et les enseignants
M. Camille Laurin
M. Laurin: M. le Président, le gouvernement convoquait, la
semaine dernière, la commission permanente de l'éducation afin
d'informer cette dernière et la population en général des
enjeux de la négociation avec les enseignants. Durant les quatre jours
où elle a siégé, la commission a entendu les
représentants du ministère de l'Éducation, des
Fédérations de commissions scolaires, de la
Fédération des collèges, des divers administrateurs
scolaires, catholiques et protestants, des centrales syndicales, des parents et
des étudiants.
Notre principale conclusion - et en cela nous rejoignons tous les
intervenants - est qu'il faut favoriser la poursuite du dialogue avec la partie
syndicale et tenter un effort ultime pour en arriver à un
règlement. C'est dans cet esprit, et sans renoncer a nos objectifs de
base, que nous annonçons aujourd'hui, avec l'accord de nos partenaires,
l'intervention d'une tierce partie dans les négociations.
Cette tierce partie, agréée par la Centrale de
l'enseignement du Québec, prendra la forme d'une équipe de
conciliateurs composée de M. Jean-Claude Lebel, président de la
Société générale de financement, dont
l'expérience antérieure, comme sous-ministre adjoint au
préscolaire, primaire et secondaire au ministère de
l'Éducation et comme secrétaire du Conseil du trésor, le
qualifie d'emblée pour une telle tâche; M. Louis-Marie Savard,
enseignant à la polyvalente de La Baie, qui, à titre
d'ex-président d'un syndicat d'enseignants et comme ex-trésorier
de la CEQ, a acquis une expérience et une crédibilité
incontestée; enfin, M. Raymond Désilets, directeur
général des relations du travail au ministère du Travail,
et, à ce titre, particulièrement averti dans le domaine de la
conciliation.
Pour ce qui est du secteur préscolaire, primaire et secondaire,
les conciliateurs rencontreront les parties dès aujourd'hui. Quant au
secteur collégial, ils se tiendront à la disposition des
parties.
Après entente avec la CEQ, les conciliateurs ont pour mandat
d'assister les parties dans la poursuite des négociations, de tenter un
rapprochement des parties par tous les moyens jugés utiles, d'exercer
leur conciliation à l'intérieur d'un délai très
court. Dans l'esprit du gouvernement, ce délai ne devrait guère
excéder deux semaines.
Compte tenu du mandat qui leur est confié, les parties ont
convenu que les conciliateurs ne produiront pas de rapport au terme de leur
intervention. Cette exigence marque la distinction qui existe entre la
conciliation et la médiation.
Pour le secteur préscolaire, primaire et secondaire, les sujets
abordés seront la tâche, la sécurité d'emploi,
l'éducation des adultes, le processus d'affectation et de mutation, les
élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, la
distribution des fonctions et responsabilités.
Du côté patronal, les représentants seront M.
Jacques Girard, sous-ministre de l'Éducation, M. Lucien Bouchard,
coordonna-teur des négociations des secteurs public et parapublic, M.
Roger Carette, représentant de la Fédération des
commissions scolaires catholiques, M. Peter Krause, représentant de la
Fédération des commissions scolaires protestantes, et M. Michel
Crête, directeur général des ressources humaines au
ministère de l'Éducation. Pour le secteur collégial,
à la demande de l'une ou l'autre des parties, les sujets abordés
seront la tâche, la sécurité d'emploi, l'éducation
des adultes, le département.
Du côté patronal, les représentants seront: Mme
Michèle Fortin, sous-ministre adjointe à l'enseignement
supérieur, M. André Blais, représentant de la
Fédération des collèges, M. Jacques Lanoue, coordonnateur
des négociations à l'enseignement collégial, et M.
Jean-Louis Longtin, directeur général adjoint à
l'enseignement collégial, au ministère de l'Éducation.
La qualité et l'expérience des personnes impliquées
dans cette conciliation constituent une assurance additionnelle que tout est
mis en oeuvre pour en arriver à une solution négociée.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Claude Ryan
M. Ryan: Le gouvernement, pour une fois, a bien retenu, je pense,
la conclusion
majeure qui se dégageait des consultations faites au cours des
derniers jours, à l'occasion des travaux de la commission parlementaire
sur l'éducation. Au cours de ces trois jours, de très nombreux
organismes, avec un empressement, une compétence et une pertinence
remarquables, se sont présentés devant la commission pour nous
faire part de leurs impressions et de leurs projections quant aux
répercussions éventuelles de la politique suivie jusqu'à
ce jour par le gouvernement. Je pense qu'on peut dire en toute loyauté
que les trois conclusions suivantes se dégageaient des interventions
entendues. (14 h 20)
Certains organismes favorisaient plutôt la thèse patronale,
d'autres favorisaient plutôt la thèse syndicale - c'est un
phénomène normal - avec des nuances différentes selon les
cas. Il fallait bien, en fin de compte, les rattacher d'un côté ou
de l'autre. Il y en a qui essayaient d'être juste au milieu mais, comme
on le sait tous, quand on essaie de trouver la ligne mitoyenne parfaite, on
s'aperçoit souvent qu'elle n'existe pas. Ce que nous avons
constaté, c'est qu'à peu près personne n'est venu appuyer
la ligne de conduite unilatérale et autoritaire suivie par le
gouvernement; surtout, personne, à ma connaissance, n'est venu se
solidariser avec les mesures extrêmes contenues, en particulier, dans la
loi 111. À peu près tout le monde reconnaissait les graves
inconvénients qui menaçaient de découler de la teneur des
décrets s'ils avaient été appliqués tels quels. On
a souvent invoqué en cours de route les améliorations
qu'apportait aux décrets le cadre de règlement du 10
février. On a souligné également que, d'un point de vue
légal, les documents qui doivent s'appliquer en date d'aujourd'hui
seraient les décrets dans leur teneur adoptée en décembre
dernier par cette Chambre et à peu près tout le monde, parmi les
témoins entendus, convenait que ces décrets, dans leur forme
actuelle, sont inapplicables ou seraient appliqués au prix de
très graves conséquences pour la qualité de
l'éducation. Enfin, tout le monde convenait qu'il faudrait reprendre le
dialogue par un moyen ou l'autre. Je pense que la très grande
majorité des témoins favorisait, sous une forme ou l'autre,
l'intervention d'une tierce partie.
La formation de l'équipe de conciliation que vient de mentionner
le ministre de l'Éducation répond à cette attente
exprimée par les témoins qui se sont présentés
devant la commission parlementaire et par les membres de la commission
elle-même. Je pense que la composition de l'équipe de conciliation
est tout à fait acceptable. Elle résulte de consultations qui ont
eu lieu entre les deux parties. Je crois comprendre que M. Lebel
représentera plutôt la tendance patronale, sans vouloir
médire de lui ni le diffamer en aucune manière. Je pense que
c'est une qualité très honorable. Je crois comprendre que M.
Savard émane plutôt des milieux syndicaux. M. Désilets
devient dans cette équipe, si je comprends bien, le troisième
homme. Je pense qu'on a fait un très bon choix. Tous ceux qui ont
l'expérience des relations du travail au Québec connaissent le
travail exceptionnel qu'accomplit M. Désilets depuis des années
à titre de conciliateur et maintenant de chef, je crois, de
l'équipe des relations du travail au ministère du Travail. Je
pense qu'on a trouvé un excellent troisième homme pour cette
équipe et je souhaite à toute l'équipe tout le
succès qu'elle mérite. Ce n'est pas facile d'accepter un mandat
comme celui-là.
Je pense que la qualité des trois personnes choisies permet
d'augurer des résultats intéressants. Je constate que le mandat
est large. Le ministre a donné une liste de sujets qui pourront faire
l'objet du travail des conciliateurs. Je pense que la liste est assez
complète. Je souhaite seulement qu'elle ne soit pas
nécessairement définitive et exclusive et que si, à la
relecture du compte rendu de toutes les délibérations que nous
avons eues, d'autres sujets apparentés allaient se dégager, on
saurait les relier à ceux-ci de manière à ne pas
être rivé par la lettre des choses.
J'ai remarqué un passage dans la déclaration du ministre.
Le ministre dit -attendez un peu - à la page précédente:
"C'est dans cet esprit et sans renoncer à nos objectifs de base que nous
annonçons aujourd'hui la formation d'une équipe de conciliation.
" Si le gouvernement veut dire par là que les grands objectifs de base,
comme l'assouplissement des conventions collectives, la recherche d'une
compétitivité plus grande - pourvu que cela repose sur des bases
solides de comparaison avec les autres sociétés, en particulier
l'Ontario - la recherche d'une plus grande rationalité dans la gestion
des fonds publics et une productivité accrue dans le secteur de
l'éducation; si le ministre veut nous dire que ces grands objectifs
demeurent, nous sommes parfaitement d'accord. Mais s'il voulait dire par
là qu'au chapitre des moyens il n'aura pas la souplesse
nécessaire, je pense qu'à ce moment-là, on s'engagerait
dans un cul-de-sac, et il faudrait le déplorer profondément. Je
pense qu'il faut faire appel à la souplesse des deux parties. La partie
syndicale devra faire montre de flexibilité aussi, mais le gouvernement,
je pense, devrait donner l'exemple, étant donné tout ce qu'il
représente.
Quant au délai qui a été prévu - quinze
jours - je pense que c'est raisonnable. Il faudra peut-être l'allonger si
les choses vont bien, mais un délai de quinze jours pour commencer est
d'autant plus important
qu'encore hier soir, à la commission parlementaire, plusieurs
témoins sont venus nous dire les échéances multiples
auxquelles font face les administrateurs scolaires en vue de la prochaine
année scolaire qui doit commencer en septembre. De très
nombreuses décisions devront être prises à compter de la
fin de mars et du début d'avril. C'est pour cette raison qu'il importe
si grandement que le travail de conciliation se fasse rapidement.
Je me permets de signaler, M. le Président, que d'après la
lettre de nos lois du travail, de notre Code du travail, en particulier,
à toute étape des négociations, l'une ou l'autre des
parties peut demander la conciliation. À toute étape des
négociations, le ministre du Travail peut également
décider qu'un conciliateur interviendra dans un conflit. Je voudrais
signaler à ce moment-ci qu'il eut été infiniment
préférable qu'on se souvienne de ces deux articles de notre Code
du travail avant de recourir aux mesures exceptionnelles qu'on a obligé
l'Assemblée nationale à adopter. Je crois que si le gouvernement
avait donné l'exemple d'un comportement patronal absolument
irréprochable de ce côté, il serait encore mieux
placé pour aborder l'étape qui vient. Ceci étant dit,
j'espère qu'on s'en souviendra pour l'avenir. Ces mécanismes sont
dans nos lois du travail pour être utilisés quand c'est le temps
et non seulement à la toute dernière extrémité,
après que des dégâts considérables ont
été encourus.
Je souligne en terminant que la décision qu'on annonce
aujourd'hui ouvre une étape qui nous remplit d'optimisme, mais c'est
également une étape très difficile et chargée
d'embûches. J'ose souhaiter que les deux parties, la partie patronale,
dirigée par le gouvernement, mais avec l'aide de partenaires très
importants également, et la partie syndicale feront montre de
l'ouverture et du souci du bien général qui devraient les amener
à trouver ensemble un règlement pacifique, un règlement
acceptable, un règlement qui soit surtout bon pour assurer la
qualité de l'éducation au cours des prochaines années.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Camille Laurin
M. Laurin: M. le Président, je suis heureux de constater
que l'Opposition libérale, malgré les quelques réserves
qu'elle émet, est fondamentalement d'accord pour la formule de
conciliation qui a été retenue, pour la forme également
des interventions qui seront faites, pour le mandat qui est donné
à cette équipe de négociateurs, pour le temps qui lui est
imparti afin d'atteindre l'objectif qui lui a été
fixé.
Je pense que c'est là un bon départ qu'il est important
pour les deux parties en cause de reconnaître et qui leur donne une
responsabilité encore plus grande. Il est vrai que nous avons choisi
trois conciliateurs, alors qu'au début, il était plutôt
question de deux. Mais je dois ajouter ici que nous avons ajouté un
troisième conciliateur à la demande de la Centrale de
l'enseignement du Québec et que c'est à sa demande
également que nous avons accepté le nom de M. Désilets,
représentant du ministère du Travail. Nous avons consenti
à cette demande parce que nous en reconnaissions le bien-fondé et
la pertinence, ainsi que l'expérience et les connaissances de M.
Désilets dans le domaine de la conciliation.
Évidemment, le député d'Argenteuil fait la lecture
qu'il veut des travaux de la commission parlementaire. Je pense, contrairement
à ce qu'il vient de dire, que les appuis à la position
gouvernementale ont été beaucoup plus nombreux que les appuis
à la position syndicale, mais de toute façon, on ne se chicanera
pas longtemps là-dessus, puisqu'il est plutôt...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Laurin:... important de regarder en face de nous que
derrière nous. J'accepte aussi difficilement la conclusion qu'il tire
que les décrets étaient inapplicables ou invivables, du
témoignage des gens qui ont passé, qui ont défilé
devant la commission. Je voudrais aussi lui rappeler à ce moment que la
loi 105, qui tient lieu de convention collective, a été
uniquement due à l'absence de négociation qui a marqué les
mois de septembre, d'octobre et de novembre. Si la partie syndicale avait
consenti à une véritable négociation, il est bien certain
que, d'abord, il n'y aurait pas eu de décret et, deuxièmement,
même s'il y avait eu décret, il n'aurait pas été
dans la forme que nous avons connue puisqu'il aurait été
alimenté par les suggestions de la partie syndicale et les concessions
que le gouvernement aurait faites. (14 h 30)
C'est précisément en raison de l'absence de cette
négociation que la loi no 105 a pris la forme que l'on connaît. Et
même par la suite, c'est le gouvernement lui-même qui a revu le
décret et qui a consenti à des aménagements qui en
rendaient l'application plus facile. Ce qui, encore une fois, aurait dû
être obtenu par la négociation l'a été en vertu de
la seule réflexion du gouvernement.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre!
M. le ministre.
M. Laurin: Je pense que le cadre de règlement du 10
février, du témoignage même des participants à la
commission parlementaire, a révélé que les décrets
devenaient parfaitement applicables, d'une part, sans une
détérioration, une dégradation de la qualité de
l'enseignement et d'autre part que, par ailleurs, ils amèneraient une
amélioration marquée de la qualité de l'enseignement et,
en particulier, de la relation éducative entre enseignants et
enseignés. Mais, encore une fois, je ne veux pas chicaner le
député d'Argenteuil pour ses interprétations. Il a droit
aux siennes. Je veux simplement regarder avec lui l'avenir et espérer,
comme il l'a fait, que cette formule que nous avons retenue, que la
conciliation qui commencera dès ce soir, se déroulera dans cet
esprit d'ouverture qui doit caractériser une discussion qui, de l'avis
des deux parties, doit aboutir, dans les plus brefs délais, à un
règlement négocié. C'est cet espoir que je laisse aux
enfants, aux parents et à la population.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Dépôt de
documents.
Avis de la Commission de la fonction publique au
Conseil du trésor
J'aimerais, conformément aux dispositions de l'article 30 de la
Loi sur la fonction publique, déposer copie des avis que la Commission
de la fonction publique a transmis au Conseil du trésor sur les sept
règlements suivants.
M. le ministre des Communautés culturelles et de
l'Immigration.
Rapport annuel de l'Office de la langue
française
M. Godin: M. le Président, je vous remets copie du rapport
annuel d'activités de l'Office de la langue française pour
l'année 1981-1982.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
Dépôt de rapports de commissions élues. M. le
député de Duplessis.
À l'ordre! M. le député de Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. Qu'il me soit
permis...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît! M. le député de Duplessis.
Auditions sur l'ensemble de la situation de
SchefferviUe
M. Perron: Qu'il me soit permis, conformément aux
dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la
commission élue permanente de la présidence du conseil et de la
constitution qui a siégé les 10 et 11 février 1983
à Schefferville aux fins d'entendre des personnes et des organismes afin
d'étudier l'ensemble de la situation de Schefferville et
d'évaluer les actions qui pourraient être prises en vue d'aider
à la solution des problèmes de cette municipalité.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé. Mme la député de Dorion.
Auditions sur le plan d'action
du gouvernement proposant de nouvelles avenues pour le
taxi
Mme Lachapelle: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dispositions de notre règlement, de
déposer le rapport de la commission élue permanente des
transports qui a siégé les 22, 23 et 24 février 1983 aux
fins d'entendre des personnes ou organismes en regard du plan d'action
gouvernemental proposé dans le document intitulé: "De nouvelles
avenues pour le taxi. " Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé. M. le député de Rousseau.
Auditions sur le projet de loi no 109
M. Blouin: Merci, M. le Président. Qu'il me soit permis
à mon tour, conformément aux dispositions de notre
règlement, de déposer le rapport de la commission élue
permanente des affaires culturelles qui a siégé les 22, 23, 24 et
25 février 1983 aux fins d'entendre les personnes et les organismes en
regard du projet de loi no 109, Loi sur le cinéma et la
vidéo.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé. M. le député de Fabre.
Auditions sur les causes du conflit dans le secteur
scolaire
M. Leduc: M. le Président, qu'il me soit permis de
déposer le rapport de la commission élue permanente de
l'éducation qui a siégé les 2, 3, 4 et 7 mars 1983 aux
fins d'entendre les organismes directement impliqués dans
l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la
qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité
d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle au
Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement. M. le
leader.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler le projet de loi inscrit au nom du ministre de l'Agriculture, le
projet de loi no 112.
Projet de loi no 112 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose la
première lecture du projet de loi no 112, Loi modifiant la Loi
favorisant l'amélioration des fermes. M. le ministre.
Un instant, M. le ministre.
M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: Je pense que le leader du gouvernement a eu un
lapsus. Il ne s'est pas rendu compte que ce projet de loi est en appendice
aujourd'hui et qu'il faut le consentement de la Chambre pour le déposer
en première lecture.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: C'est exact. Me rendant compte de ce lapsus, c'est
pour cela que je m'étais relevé pour demander au leader de
l'Opposition s'il acceptait qu'effectivement -contrairement à
l'habitude, à la tradition que nous devons respecter - nous puissions
appeler en première lecture aujourd'hui le projet de loi qui est inscrit
au feuilleton.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: M. le Président, étant donné le
menu assez succinct qu'on retrouve au feuilleton et étant donné
aussi qu'il s'agit d'un projet de loi - il y en a un autre d'ailleurs au nom du
même ministre - que nous réclamons depuis longtemps, nous allons
non seulement consentir qu'il soit lu en première lecture aujourd'hui,
étant entendu que la deuxième lecture aura lieu demain, mais nous
allons même proposer au gouvernement de procéder, si le ministre
le veut bien, à la deuxième lecture des deux projets de loi et
aussi à l'étude article par article en comité
plénier et à la troisième lecture, lors de la même
séance demain, de façon qu'on puisse enfin donner aux
agriculteurs ce que nous demandons, nous du Parti libéral, pour eux.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Évidemment que nous acceptons et que le
ministre de l'Agriculture est le premier à s'en réjouir, mais les
derniers propos du député de Marguerite-Bourgeoys
entraîneront probablement une certaine forme de réprimande de la
part du ministre de l'Agriculture demain. On verra.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, si l'Opposition me le
permettait, je dirais que j'ai eu l'occasion, au cours des dernières
assemblées, de dire que c'était comme quand le Parti
libéral...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre!
M. le ministre, les notes explicatives, s'il vous plaît!
M. Garon: Le projet de loi no 112 a principalement pour objet de
porter de 100 000 $ à 200 000 $ le montant maximum du prêt qui
peut être consenti à un emprunteur en vertu de la Loi favorisant
l'amélioration des fermes. Il vise en outre à permettre à
un emprunteur d'utiliser un tel prêt pour rembourser un emprunt
temporaire qu'il a dû contracter d'urgence pour pouvoir profiter d'achats
d'une nature déjà reconnue par la Loi favorisant
l'amélioration des fermes, savoir: l'achat d'animaux reproducteurs, de
quotas, de machinerie agricole et même de terre additionnelle.
Une voix: Très bien! Des voix: Bravol Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): La première lecture
de ce projet de loi est-elle adoptée?
Des voix: Non, non, non.
Des voix: Encore! Encore!
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture
prochaine séance ou séance subséquente.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Ne reculant devant rien, le ministre de
l'Agriculture voudrait maintenant qu'on adopte en première lecture le
projet de loi no 113.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Sur le même
consentement justement.
Projet de loi no 113 Première lecture
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation propose la première lecture du projet de loi no 113, Loi
modifiant la Loi favorisant le crédit à la production
agricole.
M. le ministre.
M. Jean Garon
M. Garon: Ce projet de loi no 113, Loi modifiant la Loi
favorisant le crédit à la production agricole, a principalement
pour objet de porter de 100 000 $ à 500 000 $ le montant maximum du
prêt ou de l'ouverture de crédit que peut obtenir un producteur de
céréales ou de bovins d'engraissement. (14 h 40)
Ce maximum s'appliquera au producteur de céréales ou de
bovins d'engraissement même s'il s'adonne en outre à un autre
genre de production, à la condition cependant que le montant
emprunté aux fins de cette autre production n'excède pas 100 000
$.
Ce projet de loi prévoit en outre que dans le cas où
l'octroi d'un prêt est sujet à l'autorisation préalable de
l'Office du crédit agricole du Québec, celui-ci pourra prescrire
les conditions que devra remplir l'emprunteur avant que le prêt ne soit
consenti ou déboursé.
Il précise enfin que lorsque le montant du prêt ou de
l'ouverture de crédit doit être utilisé en tout ou en
partie à des fins reliées à la production de
céréales ou de bovins d'engraissement, l'emprunteur devra
satisfaire à des conditions particulières prévues par
règlements du gouvernement.
Une voix: Très bien! Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première
lecture est-elle...
M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: M. le Président, très
brièvement afin de s'assurer que nous puissions amorcer l'étude
en deuxième lecture des deux projets de loi, demain, est-ce que le
ministre pourrait nous assurer et nous indiquer si le caucus du PQ a vu et
accepté le projet de loi?
Des voix: Ah!
M. Garon: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette
première lecture est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Deuxième lecture, prochaine séance ou séance
subséquente.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Questions orales des députés.
M. le député de Vaudreuil-Soulanges.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS La taxe
ascenseur sur l'essence
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, ma
question s'adresse au ministre des impôts, qui n'est pas ici en ce
moment.
Des voix: II s'en vient.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le voilà.
Une voix: Le voilà.
Une voix: Quand il sent l'argent, il arrive.
Une voix: Quand il est en retard, ce sont des
intérêts.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le 1er janvier dernier, nous
avons connu, au Québec, comme dans le reste du Canada, une baisse des
prix. C'était manifeste dans la région de Montréal. Le
ministère, à ce moment-là, a pris cinq semaines pour
rajuster à la baisse la taxe ascenseur de 40% avec laquelle se distingue
le ministre des Finances. Le 1er mars, nous avons connu une hausse des prix de
l'essence et on nous annonce aujourd'hui, au bureau du ministre, qu'il ne
suffira apparemment que de trois semaines environ pour rajuster, à la
hausse cette fois-ci, la taxe ascenseur du ministre des Finances.
Une voix: La taxe Parizeau.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Quelles que soient les raisons pour les différents délais,
il y a un délai encore plus important que ceux-là, M. le
Président, et c'est celui dont nous faisait part le ministre des
Finances, le 17 novembre 1981, alors qu'il annonçait qu'il avait
été décidé d'augmenter les taxes temporairement.
Temporairement se lisait jusqu'au 31 mars qui vient.
J'aimerais donc demander au ministre
des Finances s'il est prêt à s'engager à ne pas
toucher, de quelque façon que ce soit, à la taxe ascenseur d'ici
le 31 mars, date du réexamen de cette taxe et de ce niveau de taxe, afin
de remettre aux Québécois les impôts qu'ils ont
payés en trop en janvier.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: M. le Président, j'ai l'habitude, quand je
réponds ou quand j'ai une discussion quelconque avec le
député de Vaudreuil-Soulanges, de lui donner son titre, en cette
Chambre. Je vous avouerai que je trouve cela un peu ridicule de l'entendre tout
à coup changer les appellations parce que cela peut servir un petit
succès devant les caméras.
Des voix: Oh!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Parizeau: M. le Président, il y a quand même un
certain protocole à maintenir en cette Assemblée nationale...
Des voix: Ah!
M. Parizeau: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Parizeau:... auquel j'essaie de souscrire depuis plusieurs
années que je suis en cette Chambre. Je tenais quand même à
souligner la chose à l'heure actuelle. Nous n'avons aucune espèce
d'intérêt, à l'Assemblée nationale, je pense,
à utiliser ce genre de blague, disons, un peu minable que vient
d'utiliser le député.
Cela dit, j'ai déjà expliqué à
l'Assemblée nationale qu'une des raisons pour lesquelles nous avions eu
un délai de quelques semaines à déterminer, comme nous le
faisons régulièrement, chaque fois que le prix d'essence change,
le prix à Montréal, à l'occasion de la dernière
baisse, venait de ce qu'il y avait une guerre des prix très intense. Il
n'était pas facile de déterminer exactement où ce prix se
situerait. À l'heure actuelle, il est clair que les prix ont
été relevés, qu'il n'y a pas de guerre de prix d'une
pareille intensité à celle qu'il y avait il y a quelque temps.
Nous avons donc procédé à cette enquête sur les prix
au détail à Montréal et nous aurons à relever,
comme la loi l'indique... Ce n'est pas une question de bonne ou de mauvaise
volonté de ma part. La caractéristique de la taxe ascenseur est
justement que les modifications sont prévues par une loi. Dans ces
conditions, si je disais aujourd'hui au député de
Vaudreuil-Soulanges que je m'engage à ne pas appliquer la prochaine
hausse, qu'est-ce que je ferais? Je violerais la loi.
Des voix: Oh!
M. Parizeau: J'entends certains de nos amis d'en face parler de
désobéissance civile. On voit à quel point les remarques
que je faisais tout à l'heure sur un certain décorum dans cette
Assemblée sont peut-être plus judicieuses qu'on ne le pense.
Des voix: Oh!
M. Parizeau: À l'époque où nous
vivons...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Parizeau:... il faut quand même qu'il y ait un certain
ordre dans cette Assemblée.
Des voix: Oh!
M. Parizeau: Ainsi que je l'avais indiqué...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
ministre. S'il vous plaît, de part et d'autre, à l'ordre! M. le
ministre.
M. Parizeau: Ainsi que je l'ai indiqué, nous sommes
à compléter l'enquête sur les prix à
Montréal. L'augmentation de la taxe qui est prévue - parce que le
prix a augmenté - sera faite. J'avais indiqué, lors de mon
dernier discours sur le budget, que ce niveau de la taxe serait
réexaminé avant le 31 mars et les conclusions de ce
réexamen paraîtront là où elles doivent
paraître, c'est-à-dire à l'occasion du discours sur le
budget. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, M. le Président, ma
question additionnelle s'adresse au ministre des Finances. À mon avis,
par les temps qui courent et depuis quelques années, ce sont les
finances qui sont minables et non pas les députés de
l'Opposition.
Le ministre s'appuie sur les délais de révision de sa taxe
ascenseur. Cela peut prendre cinq semaines comme cela peut prendre deux ou
trois semaines, apparemment. La question que j'ai posée au ministre est
la suivante: N'est-il pas possible
de s'assurer que cette fois-ci encore on pourra compter sur un
délai assez long qui permettrait aux consommateurs
québécois la récupération des impôts qu'ils
ont payés en janvier?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Parizeau: Je remercie le député de
Vaudreuil-Soulanges d'être revenu à des termes plus
acceptables.
Des voix: Oh!
M. Parizeau: J'espère que je peux quand même
remercier le député de Vaudreuil-Soulanges, on me laissera au
moins ce privilège. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Parizeau: Je rappelle que chaque fois que le prix...
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, je
m'excuse encore. S'il vous plaît! Plusieurs députés
aujourd'hui, compte tenu que c'est notre première séance, ont
l'intention de poser des questions et je voudrais qu'on le leur permette. Je
suggère qu'on permette au ministre de terminer sa réponse pour
qu'on puisse passer à d'autres questions. M. le ministre.
M. Parizeau: Merci, M. le Président. Ainsi que j'ai eu
l'occasion de le dire à plusieurs reprises - et je le
répète aujourd'hui - chaque fois qu'il y a un changement dans le
prix de l'essence, nous faisons une étude à Montréal, tel
que la loi le prévoit, des prix au détail et nous ajustons
automatiquement la taxe en conséquence. Cela prend parfois peu de
semaines, parfois quelques semaines; il s'agit essentiellement de savoir, de
révision en révision, s'il y a guerre des prix ou situation
stable. C'est cela qui, normalement, détermine les délais. Ce
sera fait, cette fois-ci, comme d'habitude. Merci, M. le Président. (14
h 50)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Papineau.
M. Assad: J'ai une question additionnelle sur le même
sujet, mais au ministre du Revenu. Compte tenu qu'à deux reprises, M. le
ministre, les officiers de votre ministère ont étudié les
revendications des garagistes de l'Outaouais, est-ce que le ministre peut nous
assurer ou assurer les garagistes que l'écart au moins ne grandira pas
à cause de la taxe ascenseur?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du
Revenu.
M. Marcoux: Je ferai remarquer au député de
Papineau que, lors de la première discussion qu'il y a eu avec les
garagistes de la région de l'Outaouais et de l'ensemble des
régions frontalières, nous avons essayé d'ajuster la
situation pour tenir compte de la situation particulière des
régions frontalières. Dernièrement, d'ailleurs, le
ministre des Finances a indiqué en cette Chambre qu'à l'occasion
de la réévaluation de l'ensemble de l'effet de la hausse de taxe
sur l'essence, nous procédions à une réévaluation
et à des ajustements, si nécessaire. C'est dans cette perspective
qu'il y a environ une semaine, j'ai envoyé des représentants du
ministère rencontrer des détaillants d'essence de la
région de l'Outaouais pour, en somme, mettre à jour l'ensemble du
dossier sur cette question et nous ferons également le point sur cette
question dans le cadre des discussions sur la préparation du budget.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Papineau.
M. Assad: M. le ministre, est-ce que vous êtes au courant
que vos officiers, quand ils ont fait la visite de la région, ont
donné l'espoir, c'est-à-dire qu'ils ont quasiment pris un
engagement qu'avant le 31 mars, il y aurait un changement pour réduire
cet écart qui existe dans la région de l'Outaouais?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du
Revenu.
M. Marcoux: Je serais fort étonné que les officiers
de mon ministère aient pris un tel engagement pour lequel ils n'avaient
pas de mandat.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
Les intentions du gouvernement quant à
l'application de la loi 101
M. Gratton: Question principale au ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration en sa qualité de
responsable de l'application de la Charte de la langue française ici,
à l'Assemblée nationale. Les journaux de ce matin nous apprennent
que le ministre proposerait de rendre publiques jeudi, devant l'Association des
conseillers en francisation des entreprises, les intentions du gouvernement
quant aux amendements qu'il entend apporter prochainement à la Charte de
la langue française, la loi 101. J'aimerais fournir, par ma question au
ministre, l'occasion aujourd'hui de faire les choses
telles qu'elles devraient se faire, c'est-à-dire d'informer
d'abord l'Assemblée nationale, qui sera appelée à
étudier ces amendements, de la nature desdits amendements.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration.
M. Godin: II est bien certain que tout changement à la loi
devrait être d'abord annoncé ici. Ce qui se passe, c'est que des
changements aux règlements seront annoncés à cette
occasion ainsi que des changements dans certaines attitudes de certains
organismes chargés de l'application de la loi 101 et d'autres
règlements. Par conséquent, mon intention est que, dès que
ces amendements à la loi elle-même auront été
approuvés par mes collègues du Conseil des ministres, ils seront
soumis ici, mais ce n'est pas le 10 mars, lors de cette conférence, que
ces changements seront annoncés.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Gratton: Le ministre a dit tout récemment qu'il
souhaitait que les anglophones puissent se sentir chez eux au Québec. On
sait qu'il y a environ 106 310 anglophones qui sont partis du Québec
pour d'autres provinces du Canada entre 1976 et 1981. On sait que des
études très sérieuses démontrent que 35% des jeunes
anglophones québécois, sinon la majorité, selon les
professeurs Lambert et Ritchie, une majorité pense devoir quitter,
à la fin de leurs études, le Québec vers d'autres cieux.
Est-ce que le ministre ne considère pas qu'il est urgent pour le
gouvernement d'agir et ne peut-il pas nous dire aujourd'hui à quel
moment précis - vous allez être en vacances encore la semaine
prochaine, semble-t-il - à quel moment le gouvernement va informer ces
Québécois anglophones qu'on dit vouloir se sentir chez eux au
Québec?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Godin: J'aimerais évoquer seulement que 1 000 000 de
Canadiens français ont déjà quitté le Québec
au tournant du siècle parce qu'ils ne se sentaient pas chez eux ici. Par
conséquent, il était prévisible qu'un certain nombre
d'anglophones refusent de reconnaître le fait français au
Québec. C'était prévisible. Ceux qui restent reconnaissent
ce fait. Les gens d'Alliance-Québec reconnaissent ce fait et restent
ici. Mais si la question se pose, est-ce que le Québec doit rester
français et perdre quelques citoyens? La réponse est: Le
Québec doit rester français.
Par ailleurs, il est certain que la situation évoquée par
le député de Gatineau pose un problème. C'est la raison
pour laquelle nous rencontrons - plusieurs ministres de ce côté-ci
de la Chambre - à chaque occasion des groupes anglophones pour essayer
d'obtenir d'eux des suggestions concrètes et précises de
manière que nous puissions assouplir les choses et faire des
accommodements sur celles qui ne remettent pas en question le fond des
affaires, qui est que le Québec doit rester le foyer central du fait
français en Amérique du Nord. Je pense que là-dessus il
n'y aura pas de recul, du moins par nous. Peut-être qu'il y en aura plus
tard, dans 20 ou 30 ans, quand ils seront au pouvoir, mais par nous, il n'y en
aura pas. Donc, il faut trouver - de par le vaste monde des pays anglophones,
il en pleut - des accommodements de manière que ces
Québécois anglophones qui veulent continuer à vivre et
à travailler ici ne soient pas malheureux pour de fausses raisons. C'est
ainsi que nous allons faire des changements. Nous allons faire des
accommodements. Nous allons améliorer le climat. C'est
déjà commencé et ce sera bientôt dit par des
organismes anglophones eux-mêmes. Je me fierai certainement plus à
eux qu'au député de Gatineau, à ce moment-là, mais
sur le fond de la question, je le répète, ces accommodements ne
remettront pas en cause la décision prise par la loi 22 et par la loi
101, à savoir qu'au Québec, on va travailler en
français.
M. Gratton: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Gratton:... je vous avouerai que je souhaite que dans son
rôle de nouveau défenseur du "French power" à Ottawa, le
ministre sera plus convaincant qu'il ne l'est cet après-midi en
défendant la loi 101, son administration et son application.
M. le Président, aujourd'hui même, la Commission de
surveillance de la langue française vient de mettre en demeure le centre
hospitalier de St. Mary's de se conformer aux exigences de la Charte de la
langue française à la suite de l'enquête qu'elle a
menée concernant des allégations qu'une personne serait
"décédée en anglais", il y a quelques années.
Des voix: Ah! Ah!
M. Gratton: Le ministre pense-t-il que cette décision de
la commission sera de nature à conserver les éléments
anglophones ici au Québec et, comme le ministre le souhaite
lui-même, fera en sorte qu'ils se sentent chez eux au Québec?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
ministre.
M. Godin: M. le Président, j'ai ici sous les yeux,
justement, le rapport de l'enquêteur sur l'hôpital St. Mary's. Je
viens de le recevoir. Je ne l'ai pas encore complètement lu, mais ce que
je peux dire au député de Gatineau, c'est que nous serons
toujours du côté des patients dans des cas semblables. Est-ce
clair? Cette dame, qui est décédée à
l'hôpital, était muette à cause d'une opération,
trois semaines avant son décès. Elle avait des soins uniquement
en anglais par 34% des infirmières et elle ne parlait pas un mot
d'anglais, elle ne comprenait pas un mot d'anglais. C'est la raison pour
laquelle nous devons appliquer la loi 101 de manière que les patients
francophones dans les hôpitaux anglophones, subventionnés par les
taxes de l'ensemble des Québécois, puissent être
traités en français. Là-dessus, il n'y aura pas de
changement non plus. Quand j'entends rire des libéraux, à la
suite de la question posée par le député de Gatineau, je
me dis: Où est leur coeur? Appuient-ils toujours les infirmières
anglophones et jamais les patientes francophones qui meurent dans les
hôpitaux? Je pose la question!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Gratton: Démagogue! Une voix:
Démagogie!
M. Gratton: II a dû avoir des coups de bâton cette
nuit.
Des voix: Malade!
Une voix: Démagogue!
M. Gratton: Démagogue! Déposez-le!
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Â
l'ordre! M. le député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, le ministre pourrait
sûrement me dire calmement et sereinement comment cette décision
de la Commission de surveillance de la langue française
améliorera la qualité des services du centre hospitalier St.
Mary's dont le ministère des Affaires sociales a lui-même reconnu
qu'il dispensait les meilleurs services possible. Comment cela aidera-t-il la
cause des patients qu'il dit défendre? (15 heures)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Godin: M. le Président, je reprends mon calme, mais je
vous avoue que cette cause de Mme Larose m'a mis dans tous mes états.
C'est ce qui explique je me suis emporté un peu. Sur cette question
précise que pose le député de Gatineau, je crois que dans
cet hôpital, effectivement - la plaignante le reconnaît
elle-même dans sa plainte - au point de vue technique, les soins sont
parfaits, sauf que la langue qui est parlée peut affecter une patiente
qui est aphone, M. le député, et qui ne peut pas répondre,
qui ne peut pas dire: Je ne comprends pas ce que vous dites. Par
conséquent, il est important que l'hôpital adopte des mesures de
manière qu'une telle situation ne se reproduise plus, tout simplement
parce que les patients dans les hôpitaux sont ceux qui ont les premiers
droits. Si nous n'endossions pas cette perspective, nous ne serions pas
sérieux. Si mon collègue des Affaires sociales veut ajouter
quelque chose sur cet aspect, je l'y invite.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce, sur une question additionnelle.
M. Scowen: Le ministre a dit que son premier souci était
les patients et que les patients francophones dans les hôpitaux
anglophones payés avec les fonds publics doivent être servis dans
leur langue. Est-il d'avis, sur la base du même critère, que les
patients anglophones, dans les hôpitaux francophones, doivent être
servis dans leur propre langue?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Godin: M. le Président, le seul problème pour le
député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est qu'on n'a jamais eu de
plainte d'une patiente anglophone dans un hôpital francophone comme quoi
on ne lui parlait pas sa langue. On n'a jamais eu de plainte, Dois-je en
conclure que cela ne se produit jamais? Peut-être!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Est-ce que je peux comprendre par cette réponse
du ministre que si les hôpitaux reçoivent des plaintes à
cet égard, à savoir que les anglophones ne sont pas capables de
recevoir les services anglophones dans les hôpitaux francophones, il est
prêt à agir pour rectifier cette situation?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Godin: Tout à fait, M. le Président!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député de Mont-Royal.
Interventions du gouvernement
au sujet de la loi fédérale sur les
produits pharmaceutiques
M. Ciaccia: Merci, M. le Président, ma question s'adresse
au ministre des Affaires sociales. L'industrie pharmaceutique
québécoise connaît présentement beaucoup de
difficultés à cause de la Loi canadienne sur les brevets, ce qui
se traduit par des départs d'entreprises et des pertes d'emplois.
L'industrie a besoin de l'appui du gouvernement du Québec pour obtenir
des modifications à la Loi sur les brevets. Le ministre des Affaires
sociales est-il prêt à donner un appui formel à la demande
d'amender la législation fédérale sujette aux conditions
que les compagnies doivent prendre des engagements d'investir dans la recherche
et les conditions suggérées par les compagnies elles-mêmes
d'un système de surveillance des prix?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, effectivement le
ministère des Affaires sociales est extrêmement
intéressé au domaine pharmaceutique un peu par définition,
d'une part parce que les médicaments sont consommés par ceux qui
forment la clientèle du ministère, deuxièmement parce que
nous avons, comme on le sait, des programmes dont l'un implique au-delà
de 100 000 000 $ de déboursés des contribuables au profit des
bénéficiaires de ces programmes, les personnes âgées
et les personnes bénéficiant de l'aide sociale pour les
médicaments.
Quant aux aspects de la nature de la recherche ou de la nature des
retombées industrielles techniques ou scientifiques, nous partageons
cette préoccupation avec le Secrétariat à la science et
à la technologie dirigée par mon collègue, le
député de Rosemont. Je dirai que nous sommes conscients de cette
volonté de l'industrie pharmaceutique québécoise de
pouvoir bénéficier d'une plus grande latitude au niveau des
retombées de sa recherche quant à l'exploitation des brevets.
C'est ce qui a fait d'ailleurs qu'à l'occasion de rencontres
interministérielles, récemment, entre le ministère des
Affaires sociales et celui de la Science et de la Technologie, nous avons
convenu, mon collègue et moi, d'un texte touchant certains aspects des
revendications à l'égard de la loi fédérale venant
de l'industrie pharmaceutique. Je laisserai à mon collègue le
soin d'en parler, puisque cela fait partie d'un échange de
correspondance qu'à la fois, mon collègue, le ministre des
Finances et mon collègue de la Science et de la Technologie ont eu avec
leurs homologues fédéraux.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Paquette: M. le Président, je voudrais répondre
au député de Mont-Royal, d'abord, qu'il y a unanimité, je
le pense bien, au Québec, à la fois des milieux
économiques, politiques et au sein des divers ministères du
gouvernement du Québec pour demander une modification substantielle
à la loi canadienne des brevets. À titre d'exemple, je vous cite
une intervention du Chemical Institute of Canada qui disait ceci:
"D'après nous, ce bill a été en grande partie responsable
de la désintégration presque complète de ce qui a
été un secteur dynamique de la recherche. Il est aussi
responsable de la perte d'un grand nombre d'emplois hautement techniques et
productifs au cours des treize dernières années. "
À ce sujet, M. le Président, j'ai écrit à M.
André Ouellet, ministre de la Consommation et des Corporations, à
Ottawa, le 2 février dernier. Cela fait au-delà d'un mois et la
seule réponse qu'on a eue jusqu'à maintenant, c'est cet article
de samedi, dans le Devoir de Montréal, où M. Ouellet
prétextait des divergences possibles d'opinions entre les
ministères impliqués dans ce dossier au sein du gouvernement du
Québec.
J'espère, M. le Président, que le ministre
fédéral se rendra aux pressions de l'ensemble des intervenants du
Québec, qu'il se rendra également aux pressions de certains des
députés de son propre caucus libéral à Ottawa,
qu'il se rendra également aux pressions de ses collègues du
cabinet fédéral qui sont conscients - parce qu'on a eu des
discussions avec certains d'entre eux de la nécessité de modifier
la loi canadienne des brevets qui fait en sorte que ce n'est plus
intéressant pour les entreprises de faire de la recherche.
Quatre-vingt pour cent de la recherche dans l'industrie pharmaceutique
au Canada est faite au Québec, M. le Président, et cette loi nuit
considérablement à la recherche et au développement de
l'industrie pharmaceutique au Québec. Nous demandons au gouvernement
fédéral - et cela, unanimement de la part des divers
ministères impliqués du gouvernement du Québec - de
modifier cette loi canadienne des brevets le plus rapidement possible.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, si je comprends bien, le
ministre délégué à la Science et à la
Technologie est favorable à une modification de la loi canadienne sur
les
brevets. La réponse que j'ai cru déceler du ministre des
Affaires sociales n'était pas tellement claire. Le ministre des Affaires
sociales semblait plutôt invoquer la question des taxes et des prix des
médicaments. Je vais poser la question directement au premier
ministre.
M. le premier ministre, de ce côté-ci de la Chambre, nous
avons demandé formellement au gouvernement du Canada... Nous sommes
allés voir M. André Ouellet, ministre de la Consommation et des
Conporations et nous lui avons demandé formellement un amendement
à la loi canadienne sur les brevets pour aider l'industrie
pharmaceutique du Québec. Est-ce que le premier ministre appuie cette
démarche? Est-ce que le premier ministre est prêt, au nom du
gouvernement du Québec, à demander formellement au gouvernement
du Canada d'amender la loi sur les brevets pour aider l'industrie
pharmaceutique au Québec et maintenir les emplois dans cette industrie
ici?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le premier
ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, j'ai juste
à répéter, à toutes fins utiles, ce que mes
collègues ont dit. Après une bonne partie de l'industrie
concernée, ceux qui s'y connaissent le mieux parce qu'ils la vivent
-enfin, ils en vivent les difficultés - après mes
collègues qui ont souligné l'unanimité qui règne au
sein du gouvernement, je suis content de voir que le Parti libéral se
joigne à ce consensus. Tout le monde est d'accord, par
conséquent. Pour en donner un exemple additionnel, le ministre des
Finances aurait quelque chose, je crois, de très concret à
ajouter à ce sujet.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: M. le Président, je voudrais simplement
ajouter que j'ai eu l'occasion lors d'une rencontre avec M. Johnston, de lui
signaler l'importance que nous accordions à ce dossier et la
nécessité d'amender la loi. D'autre part, récemment, j'ai
passé aussi ce dossier à M. Marc Lalonde, le ministre
fédéral des Finances, aux mêmes fins. Il faut donc
reconnaître que, de ce côté-ci de la Chambre, auprès
de plusieurs ministres fédéraux, plusieurs de mes
collègues et moi-même avons alerté le gouvernement
fédéral dans le même sens, aux mêmes fins. À
cet égard, je suis content de voir que l'Opposition associe ses efforts
aux nôtres. Merci, M. le Président. (15 h 10)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, question additionnelle.
M. Raquette: M. le Président, si vous permettez-Le
Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Paquette: J'aimerais, à l'intention de mon
collègue, déposer cette lettre que j'écrivais au nom de
l'ensemble de mes collègues du Conseil des ministres dans laquelle vous
trouverez, en date du 2 février 1983, des propositions précises
que nous faisions à M. André Ouellet.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce que la date de cette lettre faisait suite
à une conférence de presse que le Parti libéral a
donnée à Montréal, au cours de laquelle il a
demandé formellement - à la mi-janvier, on l'a demandé
formellement - au gouvernement d'Ottawa d'amender la loi? Est-ce que cette
lettre fait suite à la conférence de presse et aux demandes
formelles que nous avons faites au gouvernement fédéral?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Paquette: Selon son habitude, le député de
Mont-Royal essaie de voler au secours de la victoire puisque la position du
Conseil des ministres a été établie à la fin du
mois de décembre. Il a fait sa conférence en janvier. La lettre
est datée du 2 février.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, question additionnelle.
M. Gratton: Ma question additionnelle s'adresse au ministre
délégué à la Science et à la Technologie. Je
constate avec bonheur qu'il a retrouvé la parole...
Une voix: II ne l'avait pas sur le projet de loi 111.
M. Gratton: Est-ce que lui, qui est si bavard quand il s'agit de
faire des représentations auprès du fédéral, est au
courant qu'au ministère du Revenu du Québec, on fait
l'interprétation de la loi sur la taxe de vente de façon
tellement abusive qu'on crée ci3s problèmes énormes aux
producteurs de médicaments québécois en imposant une
double taxation pour les médicaments gratuits, les échantillons
qu'on distribue gratuitement aux médecins, aux hôpitaux, tant au
Québec qu'à l'extérieur du Québec? Le ministre,
étant sûrement au courant de cela, a-t-il fait les
représentations qui s'imposent à son collègue du cabinet
québécois, le ministre du Revenu, pour que cesse cette pratique
qui a été
dénoncée dans le mémoire de Thorne Riddell la
semaine dernière?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre
délégué à la Science et à la
Technologie.
M. Paquette: Je pense que le député, encore une
fois, essaie de comparer une poutre et une paille. Les effets
dévastateurs de la loi canadienne des brevets sont tellement grands, ont
été dénoncés par tellement d'intervenants, par
l'ensemble de l'industrie pharmaceutique, des milieux scientifiques
québécois, que vous allez comprendre qu'on va commencer par
essayer de régler ce problème avant d'examiner si les
dispositions ou certaines dispositions mineures peuvent affecter
également... Ce n'est pas en jetant du brouillard autour de cette
question qu'on va la régler. C'est par la concertation de l'ensemble des
intervenants québécois demandant au gouvernement
fédéral de modifier sa loi des brevets qu'on pourra commencer
à régler les problèmes de l'industrie pharmaceutique
québécoise.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du
Revenu.
M. Marcoux: J'aimerais indiquer au député de
Gatineau qu'à la suite de la parution dans les journaux du
mémoire de la firme Thorne Riddell, la semaine dernière, j'ai
communiqué avec cette firme et une rencontre est prévue pour le
17 mars prochain. Nous discuterons entre autres de cet aspect qui est
abordé dans le mémoire.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gaspé.
Question additionnelle, M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Le ministre du Revenu peut-il nous confirmer, lui qui
va rencontrer la firme Thorne Riddell, que le signataire du mémoire
lui-même fait déjà partie depuis longtemps du conseil
consultatif du ministère du Revenu?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du
Revenu.
M. Marcoux: En tant que président, M. Birk est un des
membres du conseil consultatif du Revenu. J'ai eu l'occasion de rencontrer M.
Birk vendredi dernier. Je dois indiquer que je n'avais pas encore reçu
l'article paru dans les journaux la semaine dernière. C'est moi qui ai
communiqué avec la firme afin d'obtenir le mémoire. Nous l'avons
reçu par Purolator le 3 mars et, dès le 4 mars, nous prenions
rendez-vous pour une rencontre avec tous les groupes auxquels ils font
référence dans leur mémoire. Cette rencontre aura lieu le
17 mars. Je pense que nous avons fait preuve de célérité
au ministère du Revenu.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gaspé.
Le dossier des Pêcheurs Unis
M. LeMay: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au
ministre responsable des pêcheries au Québec. Actuellement, une
grande inquiétude règne chez les pêcheurs du Québec.
Toutes sortes de rumeurs courent selon lesquelles il se peut que Pêcheurs
Unis du Québec n'ouvre pas ses portes cette année, à cause
de difficultés financières sérieuses. Cette
décision entraînerait un manque à gagner de plusieurs
millions, sans compter les retombées négatives dans le domaine du
tourisme et dans le domaine économique pour tout le Québec.
M. le ministre, pourriez-vous nous dire où en est le dossier des
Pêcheurs Unis, ce qui, je l'espère, rassurera bon nombre de
pêcheurs du Québec?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Garon: M. le Président, il est exact que les
Pêcheurs Unis doivent nous présenter un projet de redressement, de
réorganisation financière, de modernisation, tel que convenu lors
d'une rencontre que j'ai eue avec leurs membres au mois de décembre.
J'ai rencontré il y a quelques jours les personnes
mandatées pour faire ce plan et j'attends le plus rapidement possible -
mais je ne peux pas faire le plan à la place des Pêcheurs Unis -
le plan qui doit nous être présenté.
Dans le domaine des pêches, il n'y a pas qu'au Québec qu'il
y a des entreprises en difficulté. Il y en a également dans les
Maritimes. Je souhaite que les institutions financières qui ont
prêté aux Pêcheurs Unis à un certain moment ne soient
pas trop pressées d'enlever la "plug" puisqu'en Nouvelle-Écosse,
des entreprises beaucoup plus en difficulté qu'au Québec ont eu
le soutien des banques pendant une période intérimaire où
les gens, tant au niveau du gouvernement fédéral que des
gouvernements provinciaux, temporisent pour permettre à des milliers de
personnes qui sont également des dépositaires de ces institutions
financières de travailler pendant cette période
intérimaire.
Au niveau des Pêcheurs Unis, il y a un moment difficile qui peut,
dans une période de restructuration, dans une phase de restructuration,
demander un effort particulier de chacun, et c'est seulement si
cet effort se fait que la période difficile pourra être
traversée.
C'est évident que si, de 24 heures en 24 heures, les gens qui ont
à travailler au projet ne savent jamais s'ils auront un répit
dans les 24 heures qui suivront, ils trouvent la situation un peu difficile.
C'est le cas des Pêcheurs Unis.
Je voudrais dire un mot aussi du cas particulier de Madelipêche,
puisque dans ce cas, les Pêcheurs Unis ont 51% des actions et la
Société de développement industriel 49%. Je pense que dans
ce cas particulier il faudra envisager des solutions particulières -dans
le cas de Madelipêche - et songer à de nouveaux actionnaires qui
seront possiblement des gens qui viennent des îles, en participation avec
le gouvernement du Québec.
Il serait temps que les actionnaires de Madelipêche fassent
connaître leur intention pour que des solutions de rechange puissent
être envisagées dans les plus brefs délais. Je n'ai
cependant pas le pouvoir de sauter sur les compagnies ou les entreprises avant
qu'elles n'aient fait connaître leurs intentions au gouvernement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Nelligan en question additionnelle.
M. Lincoln: Compte tenu de sa stature, le ministre patine
très bien. M. le ministre, n'est-il pas vrai que vous comparez les
Pêcheries Atlantique avec les Pêcheurs Unis du Québec?
N'est-ce pas vrai que c'est à cause de votre mauvaise foi, à
cause de tout le délai que vous avez apporté dans ce dossier que
le cas des Pêcheurs Unis est aussi critique aujourd'hui? N'est-il pas
vrai que tous les intervenants qui devaient financer ladite compagnie, soit la
Banque Canadienne Nationale, les caisses Desjardins, les caisses des
coopératives et le gouvernement fédéral ont tous
accepté de financer et que c'est vous qui avez laissé
traîner ce dossier depuis un an et plus? Vous deviez mettre 750 000 $,
vous avez rencontré les membres des Pêcheurs Unis je ne sais
combien de fois. On vous a questionné là-dessus deux fois en
Chambre, lors de la dernière session, et vous n'avez encore rien fait.
N'est-il pas vrai que c'est à cause de votre sens de confrontation, de
négligence que tous les pêcheurs de la Gaspésie vous
ferment leurs portes aujourd'hui et que vous êtes vous-même le plus
grand coupable dans le cas des Pêcheurs Unis? Pourquoi attendez-vous pour
mettre vos 750 000 $ dans l'affaire et sauver les Pêcheurs Unis du
Québec?
Une voix: Très bien. Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre. (15 h
20)
M. Garon: M. le Président, vous remarquerez que dans le
territoire maritime, on n'aime habituellement pas les solutions qui viennent de
Montréal. Je vous dirai, M. le Président, que c'est dans cette
perspective, dès le 2 juillet 1982, que j'ai fait une offre
écrite à Pêcheurs Unis, dans un cadre de
réorganisation avec un ensemble de conditions, à laquelle je n'ai
jamais eu de réponse, sauf un accusé de réception.
Il faudrait que le député de Nelligan se renseigne avant
de parler. J'ai écrit à nouveau aux Pêcheurs Unis, au mois
de décembre, leur expliquant dans quel cadre nous étions
prêts à revoir toute la réorganisation des Pêcheurs
Unis. Ce sont des lettres qui ont même été publiées
dans le journal Le Soleil parce que quand il y a 22 administrateurs à un
conseil d'administration, il y a des chances que des gens voient des copies des
lettres. Les gens savent exactement dans quel cadre tout cela a
été discuté avec les Pêcheurs Unis. Il y avait une
quarantaine de personnes présentes, au mois de décembre, quand je
les ai rencontrées au Parlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laprairie. M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce que le
ministre responsable des Pêcheries est prêt à dire à
cette Chambre quelle somme il a dans son budget pour répondre aux
besoins des Pêcheurs Unis du Québec quant à une subvention
spéciale?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
Une voix: Cela est précis.
M. Garon: M. le Président, comme je vous l'ai dit tout
à l'heure, à moins que le gouvernement du Parti libéral
investisse de l'argent en blanc sans aucun projet, j'attends un projet de
réorganisation financière, de réorganisation
administrative et de modernisation dans ce cadre.
Une voix: Combien?
M. Garon: Nous sommes prêts à apporter notre
contribution.
Des voix: Combien?
M. Garon: Mais c'est dans ce cadre seulement, en fonction des
décisions qui vont être prises par les Pêcheurs Unis.
Actuellement, les représentants des Pêcheurs Unis sont en train de
décider de ce qu'ils
vont faire et de ce qu'ils ne feront plus. Ils ont décidé,
par exemple, de disposer de leur centre de distribution qui ne rapportait pas
d'argent. Ils ont décidé de concentrer leurs activités
dans certaines usines, au lieu d'exploiter plusieurs usines à 40% ou 50%
de leur capacité de production, pour avoir des coûts de production
moins élevés et des entreprises plus rentables. C'est seulement
quand les représentants des Pêcheurs Unis nous auront
présenté leur dossier qu'on pourra prendre position dans un
dossier concret et non pas sur une feuille en blanc.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le chef de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Simplement une précision.
N'est-il pas vrai qu'il y a déjà un an, le ministre avait
avancé cette offre de 750 000 $ environ pour aider les Pêcheurs
Unis du Québec? N'est-il pas vrai également que les conditions
qui accompagnaient cette offre étaient telles qu'elles ont
été jugées impossibles de la part des Pêcheurs Unis?
N'est-il pas vrai que le ministre, à ce moment-ci, au mois de mars 1983,
devrait être prêt avec un plan d'action précis? Est-ce qu'il
a mis les énergies nécessaires? A-t-il fait preuve d'ouverture
suffisante vis-à-vis des Pêcheurs Unis, les pêcheurs en
général, en Gaspésie et dans les autres régions de
pêche pour préparer la saison de pêche qui commencera
incessamment? Est-ce que le ministre est réellement conscient de
l'importance d'avoir une solution? Comme le député de
Gaspé l'a évoqué tout à l'heure, ce n'est pas par
hasard qu'il s'est levé sur cette question. C'est parce que les
pêcheurs lui demandent et nous demandent ce qui va arriver demain. Est-ce
que le ministre est prêt à répondre?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Garon: M. le Président, le député de
Bonaventure sait bien que le ministre ne peut pas répondre pour les
entreprises. Si je le faisais, d'ailleurs, il m'accuserait d'être un
dictateur, un impérialiste. C'est pour cela que je ne peux pas
répondre pour la compagnie des Pêcheurs Unis qui va décider
ce qu'elle va faire et dans quel cadre elle va le faire.
Je l'ai dit depuis le début et depuis des mois - le
député de Bonaventure sait ce que cela veut dire, une lettre
d'offre signée avec des conditions précises, une offre dans des
conditions précises - c'est cela qui a été envoyé
aux Pêcheurs Unis, au mois de juillet 1982. La compagnie des
Pêcheurs Unis n'a pas jugé bon de se prévaloir de cette
offre sans doute pour plusieurs raisons, mais il y a eu d'autres rencontres par
la suite dans un nouveau cadre de réorganisation. On a dit: Nous avons
l'hiver pour faire cela. La compagnie des Pêcheurs Unis a engagé
des gens pour faire ce travail. C'est ce rapport ou ce projet que nous
attendons. Il doit bientôt y avoir une rencontre entre les Pêcheurs
Unis et les membres de la coopérative. Il est possible aussi qu'elle
veuille d'abord faire le point avec ses coopérateurs avant de voir le
gouvernement pour savoir ce qu'il veut faire exactement comme projet.
Une voix: On va avoir le temps de mourir.
M. Garon: II s'agit, dans ce cas, de réorganisation
coopérative sur une base locale, parce que les pêcheurs demandent
aussi que les coopératives soient dirigées localement,
régionalement plutôt que par des directives venant de
Montréal. C'est dans ce cadre que cette réorganisation est
étudiée par les Pêcheurs Unis. Je ne peux pas prendre de
décision à la place des Pêcheurs Unis. C'est seulement
lorsque les décisions seront prises par eux qu'on pourra juger la
situation en fonction d'un projet concret qu'ils auront
présenté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le chef de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Je voudrais prévenir le
ministre responsable des pêcheries qu'il ne s'en tirera pas comme il
pense s'en tirer aujourd'hui. Nous allons continuer à le talonner.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question additionnelle, M.
le député de Viger.
M. Maciocia: J'ai une question additionnelle à poser au
ministre. Comme le disait le député de Gaspé, étant
donné que cela touche aussi l'industrie touristique dans la
Gaspésie, je voudrais demander au ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation s'il va faire tout le nécessaire,
d'ici au 31 mars, auprès du ministre des Finances pour ramener la taxe
sur l'essence de 40% à 20% justement à cause...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, ce n'est pas une question additionnelle. Comme il ne
reste qu'une seule minute à la période des questions et que le
ministre des Finances aurait un complément de réponse à
donner à une question posée par le député de
Mont-Royal, je laisserai la parole au ministre des Finances.
Interventions du gouvernement au sujet
de la loi fédérale sur les brevets des
produits pharmaceutiques (suite)
M. Parizeau: Le député de Mont-Royal demandait tout
à l'heure si nos premières interventions, au sujet de la loi
fédérale sur les brevets des produits pharmaceutiques,
étaient antérieures ou postérieures à
l'intervention du Parti libéral qu'il plaçait lui-même au
15 janvier. Mon collègue de la Science et de la Technologie lui a
indiqué que c'était le cas. Je viens de faire vérifier mon
agenda et, effectivement, la première réunion que j'ai eue avec
M. Johnston, le ministre fédéral du Développement
économique, a eu lieu, pour traiter de ce dossier et d'un certain nombre
d'autres, le 10 décembre.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Mont-Royal?
M. Ciaccia: Avez-vous eu des rencontres avec le ministre
responsable de ce dossier, M. André Ouellet? Il est responsable de la
consommation et des corporations. Si oui, quand l'avez-vous
rencontré?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Parizeau: Mon collègue de la Science et de la
Technologie a indiqué que M. Ouellet a été rejoint. Moi,
je rejoins les gens avec qui je travaille normalement, c'est-à-dire le
ministre fédéral du Développement économique et le
ministre fédéral des Finances. Dans la mesure où,
effectivement, chacun fait son travail à ce niveau, il y a des chances
que le dossier puisse aboutir.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Fin de la période
des questions.
Motions non annoncées.
Mme Marois: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine.
Motion d'hommage aux Québécoises Mme
Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Vous me permettrez,
à titre de ministre déléguée à la Condition
féminine, de présenter une motion qui, je le souhaite, va obtenir
l'assentiment des membres de cette Assemblée, une motion pour rendre
hommage aux Québécoises en cette journée internationale
des femmes. J'émets le voeu que la coïncidence de cet
événement avec la reprise des travaux de cette Chambre soit de
bon augure pour les femmes du Québec. Il faudrait tous et toutes
ensemble le souhaiter.
En cette journée internationale des femmes, je voudrais inviter
les membres de cette Assemblée à souligner cet
événement qui représente pour les femmes du Québec,
comme pour toutes les femmes du monde, un moment privilégié pour
faire le point sur leur condition de vie, manifester leur solidarité et
exprimer encore plus fort leurs revendications. On ne peut parler de
fêter, bien sûr, trop de batailles restent encore à
gagner.
Entre l'instauration de cette journée, en 1910, et le 8 mars
1983, il faut reconnaître ensemble qu'un long chemin a quand même
été parcouru. Je ne crois pas qu'il faille ni minimiser les
réussites ni non plus minimiser le chemin qu'il reste à
parcourir. Minimiser les réussites, ce serait faire fi du statut
d'égalité que confèrent maintenant aux femmes du
Québec nos lois fondamentales ainsi que les autres réformes qui
ont marqué l'évolution de la condition de vie des femmes au
Québec. Toutefois, malgré des acquis importants, il reste encore
beaucoup à faire pour assurer aux femmes de meilleures conditions de vie
et leur permettre d'assumer leur pleine autonomie dont l'atteinte est
fondamentalement liée à leur indépendance
économique. (15 h 30)
En période de crise comme celle que nous traversons, le
cheminement des femmes vers cette autonomie est d'autant plus menacé en
raison de la place que les femmes occupent dans notre société et
du rattrapage qu'elles ont à y faire. En effet, la pauvreté est
très présente chez elles et plus particulièrement chez les
femmes âgées ou celles qui sont chefs de famille monoparentale.
Par ailleurs, les femmes qui sont sur le marché du travail se retrouvent
majoritairement dans des emplois sans protection et dans des secteurs
économiques touchés très durement en basse conjoncture:
services, textile, commerce et j'en passe.
Comme ministre déléguée à la Condition
féminine, je me suis donné comme priorité de favoriser
l'autonomie financière des femmes et l'amélioration de leurs
conditions de vie. Cependant, ces objectifs ne sauraient être atteints
sans l'appui des femmes elles-mêmes dont plusieurs ont
décidé de se regrouper, à l'occasion du 8 mars 1983, sous
le thème: On en a soupé, il faut changer nos quotidiens.
Les revendications de ces femmes portent, entre autres, sur un meilleur
partage des tâches à l'intérieur du foyer, sur l'assurance
d'une sécurité financière et légale pour toutes les
femmes, sur le plein emploi assorti de meilleures conditions de travail, d'une
plus grande syndicalisation et de programmes d'accès à
l'égalité. De plus, elles dénoncent la violence physique
et
mentale ainsi que la pornographie, autre forme de violence faite aux
femmes. Je fais miennes ces revendications et, même si la voix des femmes
se fait entendre différemment, selon les milieux où elles
évoluent, il demeure que nous menons toutes les mêmes luttes,
celles pouvant nous mener à la pleine reconnaissance et au respect de
notre identité et de notre autonomie.
C'est pourquoi je veux profiter de cette journée internationale
des femmes pour lancer à toutes les Québécoises un appel
à la solidarité car ce n'est, je crois, que par cette seule voix
que nous gagnerons la bataille.
En terminant, j'inviterais les membres de cette Assemblée
à rendre hommage aux femmes du Québec et je les inviterais donc
à adopter cette motion. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Westmount.
M. Richard French
M. French: M. le Président, il me fait plaisir d'associer
ma formation politique à la reconnaissance par l'Assemblée
nationale de cette journée internationale des femmes. C'est une
journée de réflexion et une journée d'action. C'est une
journée de solidarité et une journée de poursuite de
recherche d'autonomie. La journée internationale des femmes nous
rappelle que le mouvement pour l'amélioration du statut de la femme, que
certains trouvent à tort moribond, n'équivaut pas à un
simple groupe de pression politique. C'est un mouvement qui s'alimente autant
par la prise de conscience personnelle que par les victoires
législatives ou politiques. C'est un mouvement qui s'anime autant dans
le coeur des femmes et des hommes qu'au sein d'une grande manifestation.
Cette année, les Québécoises insistent sur
l'inégalité qui pèse toujours sur leur vécu, sur
leurs conditions de vie. On en a soupé, il faut changer notre quotidien,
nous disent-elles. C'est signaler que l'avancement du statut de la femme se
joue dans chaque foyer, chaque bureau, chaque atelier, chaque cuisine, chaque
usine, chaque salle de classe au Québec, tout autant qu'à
l'Assemblée nationale ou à la Chambre des communes. C'est
reconnaître que l'accès à l'égalité se gagne
petit à petit, par la multiplication des actes et paroles partout dans
une société. Nous ne pouvons pas faire abstraction, bien
sûr, des exigences qui nous entourent en ce 8 mars 1983. Il est sûr
que les femmes ne peuvent pas en faire abstraction non plus, elles qui en
subissent les répercussions jour après jour, semaine après
semaine, de mois en mois. Ceux qui, comme le premier ministre du Québec,
par exemple, voient cette crise comme terriblement unisexe ne savent pas lire
les chiffres. Il y a toute une réalité sociale en arrière
des faits suivants: en 1980, parmi les familles en deçà du seuil
de la pauvreté, presque la moitié sont des familles
monoparentales qui ont une femme comme chef de famille. La majorité des
bénéficiaires de l'aide sociale est des femmes. La
majorité des chômeurs est des chômeuses. La majorité
de ceux qui subissent les décrets dans le secteur public est des femmes.
Dans le sillage de la crise économique vient toute une série de
changements d'attitude, notamment une tendance conservatrice. Autant ce
revirement est nécessaire sur le plan économique, autant il est
dangereux sur le plan des relations sociales et culturelles. On ne peut jamais
oublier que ce sont des esprits ouverts et tolérants, à la
recherche de plus de justice et plus de liberté pour tout le monde, qui
ont toujours su le mieux aider la cause des femmes.
Ce serait dommage, M. le Président, que les pressions d'une
conjoncture difficile nourrissent des fanatismes étroits sous quelque
étiquette que ce soit. Ce n'est pas par là que passe
l'amélioration de la condition féminine. J'ai noté
récemment la suggestion de la présidente du Conseil du statut de
la femme. Elle suggère, en effet, que les partis politiques puissent
conserver 40% de leurs comtés acquis pour les femmes. Évidemment,
cette suggestion présente des difficultés énormes au plan
pratico-pratique, mais le principe de cette proposition, soit d'augmenter de
façon vraiment significative la représentation féminine
à l'Assemblée nationale, me semble au-delà de toute
critique. En effet, la priorité numéro un du mouvement
féministe me semble la prise de pouvoirs organisationnels, plus
particulièrement la prise de pouvoirs politiques. Seules les femmes
peuvent fidèlement refléter la diversité de leurs
aspirations et la solidarité de leurs revendications.
Je regarde autour de moi, à l'Assemblée nationale, ce club
masculin et je vois un miroir qui distorsionne la réalité de la
société québécoise, qui ne reflète qu'une
partie de la richesse de notre société. Je crois que nous en
sommes tous perdants. Si j'avais un souhait à formuler pour cette
journée internationale des femmes, ce serait précisément
que dans le prochain Parlement la représentation féminine soit
radicalement augmentée. Pour la première fois dans notre
histoire, les moeurs sociales et les avenues ouvertes par la faisabilité
d'une meilleure planification familiale nous offre une lueur d'espoir pour la
libération d'un certain nombre de femmes. Il nous reste donc toute une
coutume politique et bien des structures partisanes à refaire pour que
notre Assemblée nationale devienne vraiment représentative. M. le
Président, je ne peux
pas imaginer un défi plus digne de nos énergies.
(15 h 40)
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Affaires sociales.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson (Anjou); M. le Président, cette journée
qui veut marquer non pas un temps, mais un moment de point quant à la
condition féminine dans notre société, comme partout
ailleurs, nous amène sans doute à considérer que le
mouvement dont est issue la revendication autour de la condition de la femme
depuis un certain nombre d'années procède d'une vision, d'un
dynamisme, d'un engagement et d'un attachement à une cause qui ne sont
pas sans analogie avec ce qu'on peut retrouver dans les causes dites
politiques. À cet égard, ce mouvement et les revendications qu'il
a mises de l'avant depuis un certain nombre d'années chez nous comme
partout ailleurs, et particulièrement chez nos voisins du Sud, contient
des ingrédients qui ont été fort bien décrits par
ma collègue de la Condition féminine tout à l'heure, de
solidarité et de conscience à partager et d'une
détermination acharnée à ne pas considérer que les
choses sont acquises parce que les choses progressent.
Il reste qu'au-delà de l'ensemble de ces considérations
évoquées par ma collègue et le député
responsable de l'Opposition, il y a aussi très concrètement, dans
des choses qui semblent parfois terre à terre, mais qui doivent
être faites, des gestes à poser au niveau de l'administration
publique. Étant conscient que je ne parle là que d'un tout petit
coin de l'activité gouvernementale à l'égard de la
condition féminine, je parlerai de cette préoccupation qui a
été centrale lors de la période des négociations
dans le secteur public, au niveau des mandats notamment dans le secteur des
affaires sociales, comme dans ceux de la fonction publique et de
l'éducation, de cette préoccupation à l'égard de la
condition féminine, et, je dois le dire, notamment à cause de
l'intervention très systématique, très persistante
à la fois de la ministre responsable et de la ministre de la Fonction
publique qui était plus directement impliquée dans cette
négociation.
C'est ainsi que dès la confection des mandats de
négociation, donc dès l'automne dernier, nous avions prévu
que des efforts particuliers seraient faits dans le domaine des affaires
sociales, notamment à cause du fait qu'une très forte proportion,
et dans certains cas, une majorité - si on parle des hôpitaux - de
la main-d'oeuvre est féminine.
C'est ainsi que nous avons, dans le cadre de l'entente convenue avec la
direction de la Fédération des affaires sociales et de la CSN,
convenu des dispositions suivantes, dispositions qui ramenaient l'ensemble des
avantages sociaux, par exemple, des employés à temps partiel au
prorata des heures et des périodes travaillées, ce qui est
très important, parce que cela touche et cela améliore les
conditions matérielles, techniques et financières des
travailleurs à temps partiel, mais surtout parce que l'immense
majorité de ce bassin de personnes qui travaillent à temps
partiel dans le réseau des affaires sociales est féminin et que,
de plus, ce bassin féminin, cet ensemble de personnel, ce
réservoir de ressources humaines qui est de sexe féminin a
également 52% de ses effectifs qui travaillent à temps
partiel.
Nous avons également convenu avec les syndicats
d'infirmières, notamment le Regroupement des infirmières et
infirmiers du Québec et le SPIIQ, de transformer dans la mesure du
possible, avec une entente qui a fait progresser considérablement les
choses dans ce domaine, des postes à temps partiel en postes à
temps plein, ce qui, on le sait, est une revendication du mouvement
féminin dans ce domaine.
Troisièmement, nous avons introduit dans l'ensemble de ces
ententes, ou de ces presque ententes, dans le cas de la FAS, des dispositions
touchant les congés sans solde, sans aucune perte des droits de retour
au poste pour des raisons relevant des responsabilités familiales, au
choix de la personne qui est visée. Cela peut toucher à
l'occasion des hommes, mais il s'agit essentiellement - encore une fois
à cause du fait que, dans les hôpitaux, l'immense majorité
de la main-d'oeuvre soit féminine -d'une préoccupation
féminine.
Finalement, nous avons convenu lors de ces échanges avec la
Fédération des affaires sociales de la CSN, d'augmenter les
ressources des garderies de telle sorte que non seulement en termes
d'accès les conditions soient améliorées mais
qu'également, dans la mesure du possible, une partie de ces ressources
puisse servir à l'amélioration des conditions de travail de ceux
qui y travaillent. On sait que là, encore une fois, il y a beaucoup de
femmes qui ont des fonctions très précises dans notre
système ou dans notre réseau - bien qu'il ne soit pas public - de
garderies au Québec.
Cela, M. le Président, ainsi que d'autres éléments
sur lesquels beaucoup de ministères travaillent de ce temps-ci, fait
partie, encore une fois, des préoccupations très quotidiennes que
nous devons avoir. Je me permettrai, tout en soulevant et tout en soulignant
les respects que j'envoie à toutes les femmes du Québec, de
souligner combien le travail assidu, acharné et constant de la ministre
responsable de la Condition féminine permet quotidiennement, dans des
dizaines de dossiers, d'introduire cette préoccupation qui, pour moi,
est un des éléments essentiels du
progrès des revendications de ce mouvement.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Madame la députée de L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président.
C'est peut-être un signe des temps, mais c'est surtout un signe
d'espoir. Depuis 1976, c'est la première fois que, lors de la
Journée internationale de la femme, deux de nos collègues
masculins se lèvent en Chambre.
Madame la ministre déléguée à la Condition
féminine a beaucoup parlé de la pauvreté des femmes. Je
pense que c'est un constat sur lequel tout le monde est d'accord. Je voudrais
quand même porter à son attention - je sais qu'elle est
probablement au courant - mais peut-être davantage à l'attention
du gouvernement que, quand on examine de plus près ces statistiques sur
la pauvreté des femmes, on constate, par exemple, que dans le cas des
femmes seules et âgées, qui constituent un bon groupe de ces
femmes très pauvres; quand on examine aussi les familles monoparentales
dont la majorité ont comme chef une femme, ces deux catégories de
personnes ont les revenus les plus bas de tout le Canada. C'est-à-dire
que, pour elles, l'écart entre le seuil de la pauvreté et leur
revenu réel est plus grand au Québec que dans toute autre
province du Canada, M. le Président. Je mentionnerai que c'est selon des
statistiques de 1979 dans l'étude intitulée "La femme et la
pauvreté". Il y a un dernier rapport qui vient de paraître, il y a
quelques jours, dont je n'ai pas eu le temps de prendre connaissance, je serais
fort étonnée qu'il y ait des changements pour le mieux.
Ce que je veux signaler, c'est que le gouvernement, qui est
présentement à établir ses priorités - on a
longtemps entendu le discours sur cette redistribution de la richesse dans un
contexte de pauvreté, dans un contexte où il est important de
rendre justice le plus possible à chacun - se rappelle de ces
groupes-là et, particulièrement, des groupes de femmes entre 60
et 65 ans qui, soit parce qu'elles n'ont pas été mariées
ou encore que leur conjoint est disparu avant d'atteindre 65 ans, se trouvent
dans une situation très défavorisée par rapport aux autres
femmes quant à leurs revenus. Ces autres femmes, si leur conjoint avait
reçu la pension de vieillesse, elles y avaient également
accès et cette pension se continuait même si elles n'avaient pas
atteint 65 ans avant le décès de leur mari. (15 h 50)
D'ailleurs, cette mesure pourrait s'appliquer dans les cas des 60
à 65 ans non seulement aux femmes mais, également, aux hommes qui
sont seuls. Nous avions fait, au moment de la dernière campagne
électorale, le calcul des coûts qu'impliquerait de mettre sur un
même pied tous les gens de 60 à 65 ans qui sont seuls et ces
coûts étaient, je dois le dire, relativement minimes.
Évidemment on parle de millions. À ce moment-là on parlait
d'environ 13 000 000 $ ou 14 000 000 $, et il faudrait les reconsidérer
dans le contexte d'aujourd'hui.
Le ministre des Affaires sociales a parlé de l'action du
gouvernement dans les dernières négociations en ce qui touche les
conditions faites aux femmes. Il a beaucoup insisté sur la
réalisation du temps partiel, c'est-à-dire de la non
récupération d'argent chez les travailleurs à temps
partiel et comme ceci touchait davantage les femmes, il l'a invoqué
comme un geste positif. J'aimerais vous dire, M. le Président, sans
vouloir enlever au gouvernement quelque mérite que ce soit, que je pense
que cette mesure fut prise grâce à la persistance que l'Opposition
a montrée dans ce dossier et qui a pincé des cordes sensibles, il
faut bien l'admettre, du côté du gouvernement, puisqu'on l'a
repris. Ce qui est important, c'est le résultat final; mais je pense
qu'en toute bonne foi les gens du côté du gouvernement
admettraient cette affirmation.
Il est vrai qu'on a parlé d'une ouverture de 6000 places
supplémentaires en garderie, mais ce qu'il ne faut pas perdre de vue,
c'est qu'il ne s'agit pas uniquement de créer des places de garderie, il
faut permettre aux familles d'y avoir accès. L'on sait que de plus en
plus, cet accès est rendu difficile pour les gens qui se situent
au-dessus du seuil de la pauvreté ou qui, encore, tombent dans des
revenus élevés. Entre les deux, vous avez tout un éventail
de familles pour qui l'accès aux garderies est devenu de plus en plus
difficile, sinon impossible.
Un dernier point sur lequel je voudrais, en cette occasion, attirer
l'attention du gouvernement - le ministre des Affaires sociales vient de
s'absenter - c'est toute la question des problèmes reliés
à la santé mentale et physique des femmes. On a fait beaucoup
d'études là-dessus, on en parle souvent, mais il y a très
peu de progrès. On sait, par exemple, que les femmes sont en plus grand
nombre que les hommes dans les institutions psychiatriques, qu'elles sont
l'objet de certaines formes de traitements psychiatriques qui sont souvent
remis en question - électrochocs ou autre forme de traitements - et que,
malheureusement, il semble y avoir peu de variation dans la façon dont
les femmes sont traitées ou le type de traitements dont elles sont
l'objet. J'aimerais attirer l'attention du ministre là-dessus.
Un dernier point, puisque le ministre
des Affaires sociales a pris la parole. C'est le fameux projet de la
maison des naissances de l'hôpital Sainte-Jeanne-d'Arc. Il faut bien
réaliser que ce mouvement, qui est devenu très
considérable de la part des femmes, d'obtenir une maison des naissances
et non pas uniquement des chambres de naissance, projet qui avait d'ailleurs
été endossé par la ministre déléguée
à la Condition féminine, mais qui, je suppose, devant les
contraintes du Conseil exécutif ou du cabinet, a dû retraiter,
cette maison des naissances, dis-je, bien que le ministre des Affaires sociales
n'ait pas rendu sa décision tout à fait définitive, en
tout cas il reste un certain flottement là-dessus... Je voudrais lui
demander aujourd'hui, à l'occasion de la journée internationale
de la femme, qu'il réexamine ce projet d'une façon
particulière. Ce besoin est senti par les femmes. Il a été
suscité et encouragé par des actions du gouvernement qui est en
face de nous et au moment où on pourrait voir sa réalisation, je
pense que les femmes, à bon droit, se sentent trompées et
délaissées quand, tout à coup, le projet qui pourrait se
réaliser devient irréalisable aux yeux du gouvernement.
M. le Président, un dernier souhait -c'est vraiment le dernier -
je voudrais, en cette journée internationale de la femme et au nom de
toutes les femmes du Québec, quoique j'hésite toujours à
parler au nom de toutes les femmes du Québec; je vais rectifier: au nom
des nombreuses femmes qui ont fait des représentations à cet
égard, je voudrais demander au premier ministre qu'il réexamine
la décision qu'il a prise d'éloigner du Comité des
priorités du gouvernement Mme la ministre déléguée
à la Condition féminine. Je sais qu'elle fait de nombreux efforts
à la mesure de ses moyens ou des moyens que le gouvernement veut bien
mettre à sa disposition pour faire avancer la cause des femmes, mais je
pense que ce désir énoncé, à plusieurs reprises,
par un grand nombre de femmes devrait rendre le premier ministre attentif.
Peut-être est-ce aujourd'hui une bonne occasion pour lui de
réfléchir de nouveau à cette décision qu'il a prise
à la fin de l'été.
À toutes les femmes du Québec, de tous les âges, les
plus âgées, les mères de famille, les jeunes qui sont
à l'école, je dis: C'est toutes ensemble, dans une
atmosphère de sérénité et de solidarité,
sans rancune, sans vengeance, mais vraiment dans un esprit constructif pour
l'avancement de toute la société québécoise, que
nous devons mettre nos efforts pour réaliser des objectifs qui
profiteront non seulement aux femmes, mais bien à l'ensemble de notre
société. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, Mme la
députée m'a posé une question spécifique. Est-ce
qu'elle désire que je réponde?
Des voix: Non.
M. Johnson (Anjou): Elle a posé une question
spécifique au sujet de la maison des femmes. Est-ce qu'elle
désire que je revienne un peu plus tard? Cela m'est égal.
Des voix: Pas trop de temps.
M. Johnson (Anjou): J'allais annoncer certaines choses, mais on
reviendra une autre fois.
Le Vice-Président (M. Rancourt): À une autre
occasion, M. le ministre, vous pourriez peut-être répondre.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Remarquez que ce serait intéressant d'avoir les
propos sur la maison des naissances.
Mme Lavoie-Roux: Moi aussi.
Mme Harel: Est-ce que Mme la députée de L'Acadie
serait d'accord?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Vice-Président (M. Rancourt): II y a consentement. M.
le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, très
brièvement. Quant au fait, il est exact que l'idée d'une maison
des naissances a surgi autour d'un groupe de femmes, notamment certaines femmes
obstétriciennes à l'hôpital Sainte-Jeanne-d'Arc. Cependant,
ce projet devait coïncider dans le temps d'une façon, finalement,
malheureuse pour cette idée, avec un plan de rationalisation sur lequel,
depuis de nombreux mois, beaucoup de personnes s'affairaient pour rationaliser
les services d'obstétrique à Montréal.
La réponse à cette préoccupation est double. D'une
part, bien que je reconnaisse sans aucune difficulté que les chambres de
naissance, compte tenu de leur ampleur et de tout ce que cela implique quant
à l'approche à la future mère dans le cadre d'un
accouchement, ne sont pas de la même nature qu'une maison des naissances
pour laquelle il n'y a aucun précédent ici, qui n'existe pas, il
faut quand même considérer qu'il faut progresser dans le sens des
chambres de naissance, quoiqu'il advienne sur l'ensemble du territoire du
Québec, et c'est ce qui s'est fait à un rythme extrêmement
important au cours de l'année.
D'autre part, à l'égard de ce projet spécifique,
j'énumérerai très rapidement quelles sont certaines des
contraintes. D'abord, la notion des actes délégués qui est
fondamentale dans la mesure où on voudrait que participent dans ce
concept des personnes qui ne sont pas membres de la Corporation des
médecins, ce qui, en soi, n'est pas une idée aberrante, bien au
contraire, puisque des précédents, ici comme ailleurs dans le
monde, existent actuellement où des personnes qui ne sont pas des
médecins peuvent participer, à toutes fins utiles, d'une
façon définitive, à un accouchement. Mais il y a là
quand même une contrainte sur le plan juridique qui est importante et qui
présuppose que cette réflexion progresse et qu'elle progresse
à la fois à l'échelle des corporations professionnelles
impliquées comme des groupes qui revendiquent un tel projet.
La deuxième contrainte, je pense qu'il faut voir quelle est
très concrètement l'expérience vécue. C'est pour
cela que, récemment, je permettais qu'un fonctionnaire responsable de
dossiers de santé au ministère puisse procéder,
malgré le contexte dans lequel nous vivons, mais parce que je
considère que cela est prioritaire pour l'avancement du dossier,
à une visite d'installations de cette nature qui existent, notamment, en
Europe. Je pense qu'à partir de cette expérience, du débat
qui se fait tant chez les médecins, chez les groupes de femmes
concernées que chez les infirmières obstétriciennes, qui
ont une expérience en obstétrique, et avec la participation des
fonctionnaires et des professionnels du ministère qui seront
sensibilisés à cela, je crois que c'est un dossier qui
progressera, j'en suis sûr. Je ne peux pas donner de date fixe, mais
c'est très clair que la perspective est ouverte. Il s'agit maintenant de
mettre certaines choses en forme, de faire des choix et de s'assurer que nous
avons les instruments qu'il faut pour y arriver. (16 heures)
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: J'aimerais m'associer à cette motion et
souhaiter particulièrement aux femmes qui sont réunies en ce
moment même dans le comté de Maisonneuve, sous la bannière
des femmes de l'Est, une très bonne journée et leur dire que
j'aurai l'occasion de les retrouver samedi prochain, particulièrement
samedi soir, pour célébrer notre solidarité.
Rapidement, parce que je n'avais pas l'intention d'en parler, je
voudrais ouvrir une parenthèse sur le dossier de la maison des
naissances. Je voudrais insister sur le fait que des organismes nombreux, des
groupes de femmes de la région de Montréal, et
particulièrement du centre-ville, posent comme exigence à
l'existence de cette maison des naissances qu'elle soit dans un hôpital
qui n'ait pas un caractère très spécialisé comme le
sont la majorité des hôpitaux universitaires. Ce qui faisait
peut-être la caractéristique de l'hôpital
Sainte-Jeanne-d'Arc, où j'ai justement eu l'occasion d'aller il y a deux
semaines pour rencontrer une amie qui venait d'accoucher, c'est justement le
fait que c'est un hôpital général où les grossesses
ordinaires ne sont pas considérées comme inintéressantes.
Il faut quand même avouer que très souvent les hôpitaux
universitaires sont amenés à considérer comme
intéressantes seulement les grossesses difficiles. On sait très
bien que ce que les femmes revendiquent, c'est la réappropriation de
leur droit à la grossesse et à l'accouchement dans des conditions
naturelles puisque la majorité de ces accouchements se font et se sont
toujours faits dans des conditions naturelles.
Je pense que le 8 mars est une occasion de faire un bilan. J'imagine
qu'il va se faire dans tous les milieux, qu'ils soient patronaux ou syndicaux,
que ce soit dans les milieux d'affaires, je l'espère bien, autant que
dans le milieu du journalisme. En ce qui concerne la représentation des
femmes à l'Assemblée nationale, j'avais l'intention, cet
après-midi, très rapidement, d'en faire un bilan. On sait - il en
a été question lors des interventions qui ont
précédé la mienne -l'insoutenable disproportion entre le
nombre des femmes dans la société et leur participation
concrète et réelle à la vie politique. Quand on pense que
52% de l'électorat est constitué de femmes... Habituellement,
quand on dit cela, les gens disent: Oui, 50%; 52%, non. S'il y a 52% des
électeurs qui sont de sexe féminin, c'est parce qu'il y a 48% des
électeurs qui sont de sexe masculin.
Quelle est la réalité qu'on retrouve ici même,
à l'Assemblée nationale? Dans une étude récente, on
pouvait retrouver les chiffres suivants. Depuis l'obtention du droit de vote
par les Québécoises, c'est-à-dire depuis 1940, en se
rappelant que le gouvernement d'Adélard Godbout, à
l'époque, avait besoin, en grande partie, du travail des femmes dans les
usines... Vous vous rappellerez que cela a coïncidé avec le
déclenchement de la guerre. Comment peut-on à la fois vouloir le
travail des femmes à l'extérieur du foyer sans leur accorder les
droits civils que, il faut bien le dire, elles réclamaient depuis treize
ans? Des groupes de femmes, pendant treize années consécutives,
se sont présentés ici même, à l'Assemblée
nationale, pour obtenir le droit de vote.
Donc, depuis 43 ans, au total, il y a eu 1114 sièges qui ont
été occupés dans cette
enceinte. Savez-vous combien de femmes ont siégé sur ces
1114 personnes? Exactement 19, c'est-à-dire 1, 7%. Imaginez l'inverse
non pas sur le plan du sexe, mais sur le plan de l'origine ethnique ou sur le
plan de l'appartenance raciale. Imaginez un pays qui contiendrait un grand
nombre de groupes ethniques d'égale importance numérique avec une
sous-représentation de cette nature ou, tout simplement, pensez à
l'inverse. Pensez à 19 hommes qui auraient occupé les
sièges dans cette Assemblée sur un total de 1114 personnes et
vous conviendrez avec moi qu'immédiatement le ridicule de la situation
sauterait aux yeux.
Pourquoi cet état de fait? Souvent, on nous dit: C'est la
population qui ne veut pas élire de femmes. Alors, les partis politiques
se retranchent très souvent derrière cette justification en
disant: C'est la population qui n'est pas intéressée à
élire de femmes.
À ce moment, il faut constater que sur les 4077 candidatures, un
peu plus de 4000, soumises par tous les partis politiques à la
population depuis ces 43 ans, au total, les candidatures féminines ont
été de 5%. Comment voulez-vous reprocher à la population
de ne pas avoir élu de femmes quand les partis politiques n'ont pas
présenté de femmes comme candidates?
D'autre part, il faut également se rendre compte que lorsque les
partis ont présenté des femmes, on se rend compte qu'ils l'ont
fait dans des circonscriptions où ils avaient le moins de chances de
faire élire leur candidat ou leur candidate. Là où il y
avait le moins de chances de faire élire un candidat ou une candidate du
parti, c'était le plus souvent la circonscription qui était
choisie pour présenter une femme. À ce sujet, on disait dans le
Soleil d'avril 1981: "Même pour les deux grands partis, la plupart des
candidates le sont dans des circonscriptions difficiles, pour ne pas dire
impossibles à prendre, à moins d'une vague qui balaie tout. Comme
elles en ont l'habitude, les femmes se sacrifient pour la cause. " L'analyse
fondée sur les faits récents démontrait que le nombre de
candidates ayant certaines chances d'être élues n'a jamais
dépassé 10% de toutes les candidatures féminines.
Même si tous les partis ensemble n'ont présenté que 5% des
4000 candidatures, sur ces 5%, encore là, il n'y en avait que 10% qui
avaient vraiment des chances de se faire élire.
C'est le bilan, je pense, de la sous-représentation des femmes
à l'Assemblée nationale. Je pense que le bilan va rester le
même l'an prochain et dans deux ans. Mais je pense que cela peut
suggérer à nos partis politiques respectifs des mesures de
redressement parce que je le répète encore, je pense que tout le
monde va convenir que s'il y avait dans cette Chambre 114 femmes et 8 hommes,
la situation serait peut-être intéressante pour les 8 hommes,
selon le député de Hull, mais la situation paraîtrait
certainement sujette à des redressements immédiats de la part de
la population.
Ceci dit, peut-être faut-il, par ailleurs également,
aborder la question des femmes et du pouvoir au sens où est-ce seulement
la responsabilité ou la faute des partis politiques ou si ce n'est pas
celle de la population à qui on n'a pas offert la possibilité
d'élire des femmes, et est-ce que c'est une responsabilité
partagée ou pas?
Je pense que la période actuelle est importante concernant la
réflexion qui se poursuit chez les femmes. Vous savez que le mouvement
des femmes atteint une vitesse de croisière depuis les années
soixante-quinze, depuis l'Année internationale des femmes. On sait
très bien l'ensemble des organisations qui se sont
développées depuis les huit dernières années. Bon
nombre de femmes présentement... Si, par exemple, vous parcourez les
revues éditées par des femmes ou si vous avez l'occasion de
prendre connaissance d'analyses, de textes qui sont écrits par des
femmes, on sent très bien une certaine distance des femmes par rapport
au pouvoir et par rapport à la politique. Moi, j'aimerais leur dire,
parce que souvent les femmes sont hésitantes à se faire
embrigader... Le pouvoir étant considéré et ayant
été l'apanage très souvent du pouvoir masculin, les femmes
hésitent en se disant: Est-ce que je vais être prise à
jouer un rôle que je ne voudrais pas jouer ou qui ne me convient pas? (16
h 10)
Évidemment, c'est une réflexion qui se poursuit et qui
n'est pas facile parce que beaucoup de femmes acceptent de participer à
des comités dans nos partis politiques respectifs. Elles vont
jusqu'à une certaine démarche et acceptent un certain rôle
politique, mais se tiennent loin du pouvoir, parce que, d'une certaine
façon, elles se rendent compte que le pouvoir, c'est un rapport de
forces, qu'on n'a pas nécessairement raison parce que l'on gagne, qu'on
n'a pas nécessairement tort parce que l'on perd puisqu'en politique, on
peut avoir tort et gagner, et on peut avoir raison et perdre. Ce langage est
très peu familier, en fait, à la culture et à la
socialisation des femmes qui, dès leur petite enfance, n'ont pas
nécessairement été mises dans les conditions de bagarre
qu'on retrouve souvent dans la petite enfance des hommes qui deviennent assez
rapidement des bagarreurs. Souvent, donc, les femmes se sentent peu
familières avec ce pouvoir qui a une connotation masculine.
Je voulais leur dire aujourd'hui que le pouvoir - si elles me permettent
la comparaison - est un peu comme éduquer des enfants. Ce que je veux
dire par là, c'est qu'il y a bien des façons de faire.
L'objectif
peut être le même. L'objectif reste de réussir
l'éducation des enfants, mais on sait très bien que certains
utilisent des moyens coercitifs pour tenter, en fait, la même
réussite. D'autres vont penser que les moyens punitifs sont
préférables. D'autres considèrent que des moyens
permissifs vont beaucoup mieux faire l'affaire. Je pense qu'il en est de
même pour la gouverne des choses publiques et je souhaiterais à ce
niveau qu'il y ait beaucoup plus de femmes présentes à
l'Assemblée nationale. Je pense, non pas par vertu, non pas par nature
mais, en fait, à cause de la culture qui nous est plus
spécifique, qu'il arriverait que les femmes pourraient introduire sans
doute un renforcement du pouvoir avec des gens, plutôt que cette notion
de pouvoir sur des gens.
C'était là, en fait, l'objet de quelques
réflexions, en cette journée du 8 mars, qui se veulent surtout
une incitation aux femmes du Québec à s'engager dans un processus
de réflexion sur les moyens à prendre pour redresser leur
représentation à l'Assemblée nationale.
Je voudrais terminer rapidement, M. le Président, par quelques
dossiers, si le temps m'est encore disponible, qui me semblent devoir attirer
l'attention de l'Assemblée durant la présente année. Cela
va vous sembler des dossiers qui n'ont pas de liens directs entre eux et
pourtant, je pense que dans un cas comme dans l'autre, il s'agit souvent de
dossiers qui nous viennent des conséquences de la morale que la
société impose à la population, et je vais m'expliquer
là-dessus. Je pense qu'on conviendra tous que dans toute
société il y a une morale dominante. Évidemment, elle
évolue. On va le voir, d'ailleurs, dans les dossiers qui
m'intéressent, soit ceux concernant la recherche des parents biologiques
et des enfants adoptés et le dossier dont j'aimerais vous parler
également qui est celui de la pornographie.
Cela va vous étonner, M. le Président, mais dans les deux
cas, la société avait voulu, il y a 30 ou 40 ans, imposer sa
morale en offrant le refuge du silence et, souvent, en faisant pression sur les
mères pour qu'elles abandonnent - des pressions qui étaient
autant sociales qu'économiques ou religieuses - leur enfant en leur
offrant le refuge du silence. Mais pour ces personnes, souvent le refuge s'est
révélé un piège. On a vu que durant les toutes
dernières années -je dirais même tout récemment - il
y a un mouvement qui a pris beaucoup d'ampleur et qui n'avait pas eu l'occasion
de faire entendre son point de vue aux commissions parlementaires qui ont
étudié la réforme du Code civil. Ce mouvement est, en
fait, très intimement stimulé par le désir de
connaître ses origines. On sait que je fais ici allusion à la
Commission des droits de la personne qui disait qu'en quelques années ce
désir était devenu de plus en plus important et de plus en plus
généralisé. Ce que je souhaite, c'est qu'il puisse y avoir
une commission parlementaire spéciale qui puisse permettre aux
intéressés de présenter leur point de vue, ce que les
organisations n'avaient pas eu l'occasion de faire, puisque ces associations
représentatives n'étaient pas encore organisées en 1979 et
en 1980, lors de l'étude du projet de loi no 89 qui réformait le
Code civil.
Vous savez, la morale est peut-être passée d'une morale
coercitive à une morale permissive, mais je pense que dans le dossier de
la pornographie, en l'occurrence, la morale permissive qu'impose la
société a comme conséquence un refuge qui est la
pornographie, parce qu'il faut voir que la pornographie est un refuge, mais qui
se referme aussi comme un piège. Vous savez qu'il y a bon nombre
d'organisations qui considèrent présentement que l'étalage
qui est fait chez les dépanneurs - quand on pense qu'il n'y a pas encore
dans l'ensemble des écoles du Québec une formation
adéquate au niveau de la sexualité, quand on pense qu'il n'y a
pas encore acceptation généralisée dans le système
d'enseignement d'une éducation sexuelle - ou chez les épiceries
sert à peu près souvent, en fait, de premier contact ou de
première formation sur le plan sexuel, il y a de quoi penser qu'il y a
une aberration ou, tout au moins, une étonnante contradiction.
La Fédération des femmes du Québec, qui a tenu un
colloque intitulé "Volonté politique et pornographie",
écrivait à ce propos: "Or, il est impossible à un enfant
qui veut acheter du pain, du lait ou une tablette de chocolat -
malencontreusement, j'en ai fait l'expérience avec ma fille de sept ans
-de ne pas voir cette littérature abondamment illustrée et
toujours facilement accessible et bien en vue, tandis que les bandes
dessinées et la littérature pour enfants sont souvent à
l'abri sur les derniers rayons. Les Playboy d'il y a cinq ans sont devenus
presque de la littérature rose à côté des revues
spécialisées en sodomie, flagellation, bestialité,
sadomasochisme, nécrophilie, qui ont littéralement inondé
le marché dernièrement. Il faut s'opposer à ce qu'en ce
domaine, et surtout pour l'enfant, le quotidien ne devienne l'anormal et
l'anormal la norme. "
M. le Président, je pense qu'on peut vraiment souhaiter que
durant l'année, et le plus rapidement possible, il y ait clairement
affirmée une volonté de mettre fin à cet étalage
qui, à mon point de vue, est scandaleux. Je n'en fais pas une question
de morale. Je pense qu'on peut certainement demander que l'affichage ou la
vente soit faite, soit dans les établissements spécialisés
ou encore puisse être faite dans des
établissements commerciaux où les mineurs ont
accès, mais qu'il y ait interdiction de l'étalage ou enfin un
étalage spécial qui ne puisse pas être accessible aux
enfants.
M. le Président, il s'agit, parmi bien d'autres
évidemment, de dossiers sur lesquels je pense qu'il y aurait lieu qu'il
y ait une intervention, soit au niveau du gouvernement ou soit par
l'Assemblée nationale au moyen d'une commission parlementaire
spéciale.
Je terminerais très rapidement en faisant référence
à un dossier qui concerne les grands-mamans argentines à la
recherche de leurs petits-enfants disparus. Vous savez, quand on parle du 8
mars et qu'on parle de la journée internationale des femmes, il y a
évidemment cette solidarité des femmes québécoises,
mais on peut souhaiter aussi cette solidarité des femmes à
travers le monde. Moi, comme mes collègues de l'Opposition, avons eu
l'occasion de rencontrer des grands-mamans argentines qui sont venues ici au
Québec, qui sont venues également au Canada et qui sont
allées aux Nations-Unies pour demander un appui dans la recherche de
leurs petits-enfants disparus. On a du mal à concevoir, ne fût-ce
que par la pensée, que parmi les milliers de disparus - on parle de 30
000 personnes disparues -se trouvent des centaines et des centaines d'enfants
et de tout petits bébés. Mais telle est la réalité.
M. le Président, ces grands-mamans sollicitent l'appui public, national
et international pour que soient retournés à leur famille les
enfants qui sont portés disparus en Argentine depuis 1976. Elles ont
témoigné devant le groupe de travail des Nations-Unies qui
s'occupe des disparus du continent sud-américain. (16 h 20)
Je veux simplement que les femmes du Québec sachent que des
femmes luttent actuellement pour le maintien de leurs droits
élémentaires et de leurs libertés fondamentales. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Chomedey.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: M. le Président, je serai très
brève dans mes remarques, ne serait-ce que pour dire qu'un long chemin a
été parcouru, mais que la route devant nous est encore bien
longue. J'aimerais faire remarquer à Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine que les
remarques qu'elles nous a faites, au tout début de ce que nous avons
commencé tantôt en parlant des femmes, ont été
tellement à point que je souhaite que le premier ministre l'ait entendue
d'une oreille fort sympathique. Ces éléments de politique sont de
plus en plus importants, à nos yeux en tout cas et aux yeux des femmes
de la province de Québec. Ce serait vraiment aussi des
éléments fort valables pour de nouvelles politiques au
comité des priorités de ce gouvernement.
M. le Président, quand je dis que le chemin parcouru est un long
chemin, on peut parler par expérience des nombreuses années
où nous avons été associés de très
près à la chose politique au Québec. J'ai fait partie d'un
gouvernement qui a mis sur pied ce service aux femmes qui est le service
à la condition féminine. J'ai fait partie de ce gouvernement qui
a connu les premiers balbutiements des garderies. J'ai fait partie aussi d'un
gouvernement où, avec plaisir, comme ministre responsable, j'ai fait en
sorte que les femmes, pour appartenir ou adhérer à un syndicat,
n'aient plus besoin de la signature de leur mari. Ce sont des choses qu'on
oublie souvent en cours de route parce qu'on a marqué des étapes
ici au Québec. On a encore beaucoup à faire et ceux et celles qui
ont parlé avant moi ont vraiment été dans tous les
détails des revendications des femmes du Québec.
Je ne veux pas non plus oublier les femmes à travers le monde.
Puisque c'est une journée internationale, nous ne devons pas, je pense,
nous cantonner dans nos propres problèmes quand on regarde ce que les
femmes ont à vivre. Avec beaucoup de justesse, le Conseil du statut de
la femme a mentionné les femmes du Liban, les femmes de la Chine, les
femmes d'Afrique, de l'Inde, qui ont à vivre des misères qui sont
inacceptables à nos yeux, des misères quand même faites
d'une violence de tous les jours. Cela doit nous faire réagir nous,
comme Québécois et comme Canadiens.
M. le Président, je dis que la route est encore longue à
franchir. Dans les années qui viennent, je souhaite que beaucoup de
jeunes femmes québécoises s'intéressent à la chose
politique. Nous ne sommes pas différentes parce que nous avons
été élues, M. le Président. Nous sommes des femmes
comme les autres. Mais il y a si peu de femmes élues que les
Québécoises qui nous regardent ont l'impression que nous sommes
des êtres à part, des êtres différents des autres. Je
voudrais, c'est le seul message que je veux tout simplement leur lancer
aujourd'hui, leur dire que la politique est faite pour tout le monde. Non
seulement pour ceux et celles qui ont été élus
déjà - mais surtout celles qui ont été
élues, puisque nous parlons des femmes - mais pour celles qui voudront
bien l'être. Je pense qu'elles devront accepter les règles du jeu.
Elles devront se joindre à une équipe. Elles devront surtout
participer avec cette équipe, participation qui n'est pas toujours
facile, participation où on sent souvent qu'il y a des failles, non
seulement dans l'équipe, mais aussi dans la contribution des femmes
à cette équipe. Je pense que tant et aussi longtemps que des
Québécoises
voudront se joindre aux partis politiques, se joindre aussi à
cette équipe qui se fera élire, accepter de subir les affres
d'une élection et d'une campagne électorale parce que ce n'est
pas facile; que tant et aussi longtemps que des jeunes voudront accéder
à ces postes, nous serons des femmes comme les autres. Nous sommes des
femmes concernées par les problèmes mais avec les hommes, parce
que c'est ensemble que nous le faisons, quel que soit le féminisme que
nous pratiquons. Je pense qu'une société de femmes n'est pas plus
acceptable qu'une société d'hommes, et c'est ensemble que nous
pourrons trouver des solutions aux problèmes, que nous pourrons
continuer cette marche qui est déjà bien commencée mais
qui devra se continuer dans les années qui viennent. C'est ensemble que
nous le ferons.
C'est le voeu que je veux émettre aujourd'hui lors de cette
journée internationale, en demandant aux Québécoises cette
tolérance face au système politique dans lequel nous vivons,
cette tolérance aussi face à cette violence qui leur est faite de
toutes les façons possibles, mais aussi ce regard ouvert vers
l'extérieur du Québec, vers d'autres femmes qui ont besoin de
notre appui et qui ont besoin qu'ensemble, en se serrant les coudes, nous
trouvions les meilleures solutions possible, encore une fois, avec les hommes.
Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Dorion.
Mme Huguette Lachapelle
Mme Lachapelle: M. le Président, en cette journée
du 8 mars, journée internationale des femmes, j'aimerais parler de la
situation difficile qui touche principalement les femmes du Québec et
celles de mon comté.
Il y a au Québec 1 800 000 non syndiqués dont une
majorité de femmes qui est aussi, dans une bonne mesure, des
immigrantes. Ces travailleuses sont souvent sans voix malgré leur
très grand nombre et l'importance de leur travail pour l'économie
du Québec.
Des problèmes qu'elles rencontrent, permettez-moi d'en
énumérer quelques-uns: Le manque d'information sur leurs droits;
le peu de moyens pour contrer l'isolement, la répression individuelle;
le peu de moyens pour se battre contre des pratiques illégales et la
discrimination à l'emploi, comme les congédiements pour raison de
grossesse, salaire inférieur au salaire minimum, harcèlement
sexuel.
L'ensemble des travailleuses, mais particulièrement les
travailleuses non syndiquées et non regroupées, font les frais de
la crise économique de façon souvent dramatique. Il s'agit de
nous rappeler la multiplication du travail au noir, travail à domicile
dans de très nombreux secteurs économiques mais
particulièrement le vêtement, les mises à pied, le travail
temporaire, occasionnel, dans des secteurs fragiles de l'économie, le
chômage, l'augmentation inquiétante et en constante progression du
travail à temps partiel où les femmes détiennent 75% des
emplois, la menace de perte d'emploi et de déclassification introduite
par des changements technologiques et la réorganisation du travail cela
particulièrement pour les employées de bureau, les travailleuses
de services, commerces, le confinement dans des ghettos d'emploi, ce qui
réduit les possibilités de mobilité professionnelle,
d'adaptation aux changements.
Soulignons aussi, M. le Président, la pauvreté des femmes,
particulièrement celle des chefs de famille monoparentale. Le
gouvernement continue de s'intéresser au problème des femmes et,
aussi, devrait continuer à travailler, à trouver des solutions
qui devraient faciliter très bientôt l'accès à la
syndicalisation. Aussi, les études se poursuivent quant au travail fait
par les femmes à domicile; l'adoption du projet de loi no 86 modifiant
la Charte des droits et libertés de la personne et permettant
l'instauration de programmes d'accès à l'égalité;
la vigilance quant à l'impact des changements technologiques sur les
conditions de vie et de travail; adoption de mesures favorisant l'accès
des femmes à la formation et au recyclage. (16 h 30)
J'aimerais faire part aux femmes du Québec que les femmes
élues, sensibles à leurs difficultés, continueront de voir
à trouver des solutions, à faire pression sur qui de droit pour
que, finalement, des choses avancent davantage et à trouver des
solutions à leurs problèmes.
M. le Président, je souhaite fortement aujourd'hui, en cette
journée de fête, que les femmes s'impliquent davantage afin de
jouer pleinement leur rôle dans la société dont elles font
partie. Je demande à l'Opposition d'adopter cette motion. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: M. le Président, en cette journée, je
veux m'unir, au nom de plusieurs autres collègues, à l'hommage
qui est rendu à toutes ces femmes du Québec et du Canada qui ont
participé très activement à l'évolution de notre
société.
Je veux souligner ici tout particulièrement le rôle qu'un
gouvernement,
quel qu'il soit, a à jouer dans cette évolution. Ce
rôle a été reconnu à plusieurs reprises. Il est
affirmé dans les mots, mais, très souvent, nous nous voyons dans
l'obligation - c'est ce que je veux faire ici, au nom des femmes qui ont eu
l'occasion de me faire valoir leurs inquiétudes - d'exprimer leur refus
d'accepter une situation semblable concernant la place qui leur est faite au
sein des postes supérieurs de la fonction publique du
Québec...
Le gouvernement du Parti québécois a eu l'occasion de
faire part à la population, à plusieurs reprises, de son
intention de rétablir un semblant d'équilibre à un niveau
supérieur, à l'intérieur de la fonction publique. On sait
que les femmes, hélas, sont confinées à des
échelons subalternes de notre fonction publique. Dans les faits, c'est
ce qui se passe. D'ailleurs, cela a été signalé tout
à l'heure par Mme la ministre déléguée à la
Condition féminine, les tristes lois que nous avons eu l'occasion
d'adopter, à cette Assemblée nationale, malgré notre
opposition, les lois nos 70, 105 et 111, ont frappé plus durement une
certaine catégorie de citoyens et ce sont les femmes. À telle
enseigne que, dans les faits, nous devons reconnaître que les postes
supérieurs leur sont, à toutes fins utiles, interdits.
On nous fait valoir que des efforts sont faits à ce sujet et je
pense qu'il est de la responsabilité d'un gouvernement que ces efforts,
pour pouvoir porter fruit, soient examinés de très près et
scrutés sans complaisance en exigeant toujours plus.
Mme la députée de Maisonneuve a fait valoir, tout à
l'heure, l'absence, en cette Chambre, de représentantes féminines
en nombre suffisant. Dans les circonstances, M. le Président, je pense
qu'en toute honnêteté, en toute justice, il nous appartient, les
représentants masculins, de faire les pressions qui s'imposent, parce
que ce serait se leurrer que d'espérer que de telles pressions puissent
éventuellement suffire si elles venaient des représentantes
féminines à l'Assemblée nationale. C'est dans ce sens que
j'attire l'attention de Mme la ministre de la Fonction publique sur
l'incongruité qu'il y a de se trouver avec une fonction publique qui,
majoritairement, est composée de femmes, mais dans des postes qui sont
des postes inférieurs. On doit faire plus que cela. On doit faciliter
cela par des gestes positifs. Les statistiques doivent être là
pour prouver qu'il y a des succès et des résultats à ces
gestes. Dans le moment, force m'est de constater que ce n'est pas le cas.
Je sais qu'on invoquera toutes sortes de raisons, mais je pense qu'une
raison qu'on ne peut pas invoquer, c'est le manque de compétence chez
les femmes. Cette raison-là est inexistante. Une autre raison qu'on ne
peut pas invoquer, c'est le manque de volonté des femmes
d'accéder à des postes supérieurs. Je pense que c'est une
raison qu'on ne peut pas invoquer. À partir de là, devant le
manque de résultats, je pense qu'on doit se poser de très
sérieuses questions, à savoir si les personnes qui ont en main
les leviers nécessaires pour permettre aux femmes d'accéder
à des postes qui leur reviennent ont mis en action tous ces leviers.
Où sont les résultats? Il n'y en a pas.
Si on reconnaît - et je pense qu'on doit le reconnaître -
que les femmes ont maintenant acquis une compétence de plus en plus
grande - nous sommes en mesure, nous les hommes, de le constater
régulièrement -très souvent, c'est notre paresse d'hommes
qui est mise en cause. Très souvent, les femmes nous poussent par leur
compétence, par leur désir de travailler, par leur volonté
de réussir; elles nous poussent à des limites que nous ne serions
pas capables ou que nous ne voudrions tout simplement pas atteindre par paresse
si elles n'étaient pas là. Elles sont très souvent
capables de faire beaucoup mieux que nous. Si, nous, de la
société québécoise, ne puisons pas dans ce
réservoir de capacités, dans ce réservoir de
compétences, c'est parce qu'il y a quelqu'un, quelque part, qui ne pose
pas les gestes nécessaires pour que nous en tirions tout le profit.
Le seul but de mon intervention est d'inviter le gouvernement à
poser des gestes encore plus concrets, des gestes qui vont, dans des
délais rapides, nous amener des résultats satisfaisants. Je
voudrais pouvoir, dans un an d'ici, quand nous ferons de nouveau de semblables
discours, de semblables interventions, entendre la ou le ministre de la
Fonction publique quelle qu'elle soit ou quel qu'il soit, nous parler
d'améliorations sensibles et concrètes qui feront que nos
discours auront été autre chose que des coups
d'épée dans l'eau.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci, M. le Président. Comme la
députée de Chomedey le disait, moi aussi, je vais tenter
d'être brève parce que ce n'est pas la quantité de paroles
qui sont dites mais bien la qualité du coeur de ceux et celles qui les
disent qui est important. Je voudrais donner mon appui à toutes les
femmes du Québec. Mais je suis sûre que vous me pardonnerez quand
je vous dirai que je veux le donner surtout aux mères de famille
à la maison. J'ai été vingt ans à la maison; c'est
facile pour moi de vous parler de ce que j'ai vécu et, partant de
là, de ce que toutes les femmes à la maison au Québec
peuvent vivre avec leurs enfants.
Le travail et le dévouement de la femme à la maison est
toujours gratuit. On ne calcule ni les heures, ni ce que cela peut nous
coûter, ni ce qui peut nous revenir. Par ce don de soi que nous faisons
pour les nôtres et pour tous ceux qui nous entourent, je crois être
en mesure de vous affirmer que notre contribution est énorme à la
qualité de vie de notre famille, à la qualité aussi de vie
de notre milieu et à la qualité de vie de la
société tout entière. Nous, les femmes dites au foyer,
consacrons notre temps et nos énergies à la participation dans
des groupes de femmes, dans des comités de parents à
l'école, dans des groupes sociaux, à la pastorale à
l'église et à combien d'autres activités sans compter ni
les heures, ni l'argent, ni ce que cela peut nous rapporter. Nous sommes
toujours là pour rendre service en temps et lieu.
Cette tâche énorme, et je dirais presque toujours accomplie
gratuitement, dans des conditions difficiles - manque de personnel, manque de
fonds - est remplie avec ce qu'on a, avec ce qu'on peut. Il est urgent, je
dirais même qu'il est très important que l'on reconnaisse la
valeur sociale et économique de ces travailleuses au foyer afin que ces
femmes au foyer cessent de se retrouver parmi les plus touchées, parmi
les plus pauvres. Exemples: les femmes seules et, comme le disait la
députée de L'Acadie, les femmes âgées, les veuves,
les femmes chefs de famille. Je crois que c'est très difficile, qu'elles
soient jeunes ou plus âgées, parce qu'elles ne sont pas
habituées de conduire la barque. C'est difficile pour elles, elles ne
sont pas habituées et elles ne sont pas habilitées à
comprendre comment mener la barque toutes seules. (16 h 40)
À ce moment-ci, je voudrais bien souligner le travail de
sensibilisation que les cercles de l'AFEAS font dans le moment pour aider les
femmes en général. J'ai assisté, d'ailleurs, dans mon
comté, à une réunion la semaine dernière et je
trouve cela fort intéressant. Il y a des groupes comme ceux de l'AFEAS
qui se prennent en main pour aider leurs semblables. Dans le comté de
Johnson, nous avons aussi beaucoup de femmes collaboratrices sur nos fermes
agricoles. Vous savez, des fois, je fais le tour de mon comté, cela
arrive souvent. Bien souvent, je trouve les femmes à la maison en train
de faire la popote et souvent, aussi, je les trouve assises sur le tracteur en
train d'aider leur mari. Elles collaborent avec lui. Bien souvent, des
agriculteurs m'ont dit: Mon meilleur homme, c'est ma femme. Je vous assure que
c'est un beau compliment.
Il y a des femmes collaboratrices aussi dans les PME. Elles jouent bien
souvent le rôle de teneur de livres, d'agent qui reçoit les
vendeurs; en fin de compte, elles font un peu de tout et à quel prix?
Pas un sou. Tout simplement par amour. Tout simplement pour aider la famille
à s'en sortir. Quand est-ce qu'on va reconnaître le travail de ces
femmes? Aujourd'hui, en tout cas, on a la possibilité de souligner
l'important travail que ces femmes font auprès de leur famille et
auprès de la société.
Toutes ces femmes désirent, je dirais même souhaitent
ardemment que leur participation soit reconnue légalement et
économiquement. Toutes les femmes du comté de Johnson en
particulier mais toutes les femmes du Québec en général
peuvent trouver en moi et en mes collègues ici à
l'Assemblée nationale - j'étais pour dire mes collègues
femmes, mais quand j'ai vu mes collègues hommes intervenir pour les
femmes je dirais bien que c'est l'ensemble de mes collègues qui va
travailler fortement à faire reconnaître l'apport des femmes dans
la société. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Mme Joan Dougherty
Mme Dougherty: M. le Président, j'aimerais m'associer
à la motion de la ministre déléguée à la
Condition féminine. Mon collègue, le député de
Westmount, a déjà souligné que les femmes sont les plus
touchées par la crise économique et qu'elles sont
particulièrement touchées par les coupures budgétaires du
gouvernement ainsi que par les décrets de la loi 105 et par les
sanctions abusives de la loi 111.
On parle beaucoup du virage technologique comme étant le
défi primordial qu'on doit franchir pour sortir de la crise
économique. It is well recognized that one of the critical ways in which
we are going to be able to recover our economy is through investment in
technological research and development. The irony is that this very
technological development is going to create another crisis and this other
crisis is particularly going to hit women because the kinds of jobs that are
performed in our society in majority by women are the very jobs that are going
to be hit first by the technical revolution. As a matter of fact, it is already
upon us and it is becoming almost too late to do something.
The developments that have been made around the world in the
microelectronic industry are giving us or providing us with the possibility of
greater and greater productivity and of course, this is the key to being
competitive which is the key to solving some of our economic problems. So, I
think it is urgent for Québec to do something in order to avoid another
crisis because the demands of the postindustrial society that we read so much
about - it is already really here - are going to affect women massively.
The crisis is that a huge part of our work force - 40% of the women in
Canada are in the work force - are going to be obsolete. The crisis is one of
the obsolescence of our work force. I would urge that the Government of
Québec immediately put into place a comprehensive program for women of
all ages. They must be helped to develop the attitudes and the skills so that
they can fill their role in their fullest potential in the decades to come.
The schools, our cégeps, our offices, our factories, all of our
work places must be involved. We must exploit all of the funds that are
available to us. I think that a particular look has to be taken at the National
Training Act, the accord which has been signed between Ministers Marois and
Axworthy in Ottawa. I have heard already from Ottawa that Québec is
behind in its application for those funds as compared to other provinces. It
will not be good enough to complain that we do not get any money from Ottawa,
let us see that we use it productively and constructively and get everything
out of it that we can.
The program of developing the attitudes and the skills of women and
raising their sights about the kinds of jobs that they can do is going to cost
money, but I do not think we can afford not to do it because the cost in terms
of dollars and wasted human resources, if we do not do it, is going to be far
greater than the cost of investing in our human capital rather than enlarging
our welfare programs. So I would challenge the Government of Québec to
give some leadership to this problem, to awaken the women of Québec to
their possibilities in the technical revolution. What we need now is not any
more words, let us have some action.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la ministre de la
Fonction publique.
Mme Denise LeBlanc-Bantey
Mme LeBlanc-Bantey: Merci, M. le Président. D'habitude,
j'aborde la journée de la femme avec tristesse et même de
l'agressivité parce que, comme je l'ai déjà dit dans cette
Chambre, à la limite, le jour où nous n'aurons plus besoin de
journée de la femme, cela voudra dire que dans les faits, et non
seulement dans les droits, nous aurons réellement avancé.
Par ailleurs, je vous avoue qu'aujourd'hui les précédents
qui ont été créés m'ont plutôt
détendue. D'une part, nous avons vu trois collègues masculins se
lever pour défendre la cause des femmes et je le pense, dans tous les
cas, avec sincérité. Il y en a eu aussi qui ont trouvé que
le débat durait longtemps mais, je vous le promets, je ne les nommerai
pas. Par ailleurs, cela fait, je pense, une heure et demie qu'on discute de la
cause des femmes dans cette Assemblée nationale. Je formule le voeu
maintenant que ce ne soit pas la dernière heure et demie de
l'année avant le 8 mars 1984.
Ceci étant dit, j'interviens surtout pour répondre au
député de Louis-Hébert qui formulait le voeu - et j'ai
été enchantée de voir la ferveur avec laquelle il passait
ses messages - que dorénavant, dans la fonction publique
québécoise, les femmes aient de plus en plus accès non
seulement à des postes de subalterne, mais à des postes de
direction. J'aimerais lui dire que, dans la négociation qui vient de se
terminer, il me semble que nous avons fait un autre pas dans cette
direction.
J'aurai l'occasion, dans les prochaines semaines, de faire le bilan de
l'année qui vient de se terminer sur les politiques
d'égalité en emploi dans la fonction publique. J'aime autant vous
dire tout de suite que je ne crois pas avoir d'annonces mirobolantes à
faire. Je crois que ce que j'aurai à vous dire, c'est que la
réalité est, finalement, plutôt encourageante, que les
femmes n'ont pas régressé, même en période de crise
où le recrutement devient de plus en plus rare et que, tranquillement,
dans la fonction publique comme ailleurs, les mentalités s'ajustent et
s'ajustent à un point tel que maintenant, ce sont des hommes qui
viennent nous dire ici à l'Assemblée nationale qu'ils ne voient
pas de raisons pour lesquelles les femmes n'accéderaient pas à
des postes supérieurs parce que la preuve est faite qu'elles sont
certainement aussi compétentes. (16 h 50)
Du côté de la négociation - je reviens à ce
point - nous avons non seulement à faire plaisir aux syndicats, mais
d'abord et avant tout, pour faire progresser les programmes
d'égalité en emploi, à accepter que, dorénavant,
les programmes d'égalité en emploi, qui étaient une
politique gouvernementale, soient à l'avenir en partie
négociés avec les syndicats. Nous avons accédé
à cette demande - évidemment, on n'essaiera pas de se cacher la
réalité - parce qu'il m'apparaissait que cette
responsabilité, cette vigilance ne devait pas seulement revenir et
à la ministre de la Condition féminine et à la ministre de
la Fonction publique mais à toutes les femmes qui, dans chacun des
ministères, s'occupent des politiques d'égalité en emploi,
et aux hommes, mais je pense que tout le monde conviendra que la
majorité des préoccupations, c'est encore le lot des femmes
à ce niveau. Les femmes, à l'intérieur du syndicat,
doivent être, elles aussi, de plus en plus vigilantes et forcer aussi
leurs structures syndicales à être de plus en plus revendicatrices
par rapport à la condition féminine.
Par ailleurs, il m'apparaît aussi, M. le Président, si vous
me permettez de dire ceci, qu'il ne faut pas minimiser les gains que les femmes
ont obtenus durant cette négociation. Si, je l'admets, tout n'est pas
rose, je pense que tout n'est pas noir non plus. Au contraire, je pense que les
femmes ont obtenu, entre autres dans la fonction publique - mon collègue
des Affaires sociales a noté quelques gains qu'il y avait eu aux
Affaires sociales - des gains significatifs, entre autres par le
règlement d'un dossier qui traînait depuis dix ans et autour
duquel on avait beaucoup parlé et beaucoup écrit, qui
était le dossier - j'ai la conviction que beaucoup des membres de cette
Assemblée ne connaissent pas la définition - du classement
moquette. La députée de L'Acadie est très familière
avec ce terme, qui est le problème de la secrétaire qui avait une
classification en fonction du statut de son patron et non en fonction de ses
compétences.
Nous avons l'intention de régler ce dossier dans les prochains
mois et d'ouvrir à la secrétaire, aux agents de bureau,
féminins comme masculins, des perspectives de carrière beaucoup
plus intéressantes dans la fonction publique.
Je ne reviendrai pas sur le dossier des garderies et des droits
parentaux. Ma collègue à la Condition féminine a eu
l'occasion d'en parler. Le seul message que je voudrais livrer en terminant,
c'est justement, je le répète, que plus les femmes vont se
convaincre de l'importance qu'elles ont et de leur pouvoir de pression - je
pense que la discussion ici aujourd'hui et les attitudes en sont la
signification - plus les femmes ont des chances finalement d'arriver à
atteindre de plus en plus les objectifs qu'elles se sont fixés dans leur
égalité non seulement de droit, mais dans les faits, comme le
soulignait, semble-t-il, dans une entrevue cette semaine, Mme Veil.
Je termine en espérant que l'année prochaine, à la
prochaine journée internationale de la femme, la solidarité
masculine que nous avons vue se dessiner tranquillement dans cette Chambre
aujourd'hui soit tellement plus forte et tellement évidente que les
femmes de l'Assemblée nationale ne se sentiront plus obligées
elles-mêmes de porter le flambeau de la condition féminine dans
cette Assemblée. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine.
Mme Pauline Marois (réplique)
Mme Marois: Merci, M. le Président. Vous me permettrez
quelques réflexions pour terminer le débat sur cette motion. Je
dois dire que je suis très heureuse du ton qu'on a eu lors de ce
débat, si on veut, ou sur la motion, du ton qui, je pense, est à
la hauteur des défis qui nous attendent en ce qui concerne ce dossier,
qui m'attendent comme ministre mais, je pense, qui nous attendent, chacun et
chacune d'entre nous. Il était remarquable de le constater. Je pense
qu'on peut souligner qu'à l'occasion de la journée internationale
de la femme, on a eu ce ton. Il faut en remercier chacun et chacune d'entre
nous.
J'aimerais revenir sur un certain nombre de points soulevés - ma
collègue de la Fonction publique en a repris - par les
députés qui sont intervenus jusqu'à ce moment-ci dans le
débat. Le député de Westmount a particulièrement
souligné l'importance d'une réflexion pour les partis politiques,
sur le fait qu'on arrive à réserver des comtés aux femmes.
Je pense qu'il faut la faire, cette réflexion. Les moyens pour y arriver
ne sont pas nécessairement trouvés. Il n'y a pas de miracle, mais
je pense qu'il y a un certain nombre de moyens qu'on peut utiliser. Je pense
à l'effort qu'ont fait certaines femmes, dans mon parti politique entre
autres, pour essayer de sensibiliser d'autres femmes aux règles du jeu
de la politique, aux règles du jeu d'une élection. D'ailleurs Mme
la députée de Chomedey le disait tellement bien, j'étais
tellement contente qu'elle le dise aussi. Pour les femmes, entre autres, il y a
une certaine forme d'insécurité et de crainte vis-à-vis de
ce monde politique dans lequel se retrouvent chacun et chacune d'entre nous qui
siégeons ici aujourd'hui. Il faudrait peut-être démystifier
un peu tout cela, puisque dans notre quotidien, nous sommes des personnes comme
toutes les autres qui vivons peut-être un peu plus sur la place publique,
mais, fondamentalement, nous poursuivons et débattons ici des objectifs,
nous avons des convictions et nous tentons de les faire valoir. Et je pense que
les femmes sont particulièrement capables d'être porteuses de
convictions et de les faire valoir dans des lieux de pouvoir et de
décision comme ceux dans lesquels on se retrouve ici, à
l'Assemblée nationale.
Mme la députée de L'Acadie l'a repris, je l'avais
moi-même souligné dans mon texte principal, c'est vrai qu'il y a
des femmes qui sont particulièrement mal prises dans nos
sociétés et ce sont les femmes seules et âgées, qui
pour toutes sortes de raisons, se retrouvent solitaires, comme les femmes chefs
de famille monoparentale, qui forment encore, malheureusement, 80% des chefs de
famille monoparentale.
Je pourrais peut-être lui dire que j'ai cette préoccupation
qu'elle a à leur endroit, à savoir qu'il faut apporter des
correctifs et à très court terme. On ne peut plus accepter une
telle situation de pauvreté. Dans ce sens, je pense que les membres de
cette
Assemblée savent que nous sommes à travailler à la
bonification du régime de rentes et, particulièrement, à
des mesures qui vont concerner les femmes seules, comme les hommes aussi, parce
que je pense que la situation des hommes est la même, enfin, les
personnes qui se retrouvent seules, entre 55 et 65 ans. Et nous avons vraiment
un objectif de correction des inégalités qui existent
actuellement, comme il se fait aussi un travail important avec le ministre de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu quant à la
réintégration ou à l'intégration des femmes chefs
de famille monoparentale sur le marché du travail ou dans des programmes
de recyclage ou de formation, de telle sorte qu'on leur donne les moyens de
leur autonomie. On sait que si on les incite à revenir sur le
marché du travail dans des conditions qui sont souvent absolument
aberrantes dans les systèmes de services de garde ou, parce qu'elles
n'ont pas de formation proprement dite, elles se retrouvent dans des emplois
sous-rémunérés, je pense qu'on ne règle pas le
problème. Dans ce sens, il y a un effort énorme qui est fait.
De la même façon, Mme la députée de
Jacques-Cartier soulignait l'importance des changements technologiques et le
fait qu'on ait à prendre un certain leadership dans ce domaine. On sait
que les changements technologiques viendront, entre autres, faire
disparaître un grand nombre d'emplois occupés par des femmes.
Encore là, nous avons en chantier un certain nombre de projets, mais
surtout, il y a un groupe de travail, formé du ministre
délégué à la Science et à la Technologie, du
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et
moi-même, qui veut définir les règles du jeu dans
lesquelles on voudra peut-être arriver à participer à des
projets comme ceux qu'elle mentionnait qui pouvaient venir du gouvernement
fédéral, pour lesquels on n'a pas nécessairement
d'objection en soi. Mais encore faut-il que notre orientation soit très
claire dans ce domaine et que nos partenaires soient aussi associés
à ces orientations.
On se rappellera peut-être l'offre qu'avait faite le premier
ministre au moment des rencontres avec les chefs de centrales, en janvier,
entre autres sur le fait qu'on crée un comité de travail. Et je
pense que cette ouverture sur l'impact des changements technologiques dans
l'ensemble du public et du parapublic est toujours là.
Un dernier mot. Évidemment, je l'ai gardé pour la fin,
pour le dessert. C'est un dossier qui me tient beaucoup à coeur. J'en
suis aussi la responsable. C'est le dossier des services de garde au
Québec. Mme la députée de L'Acadie avait, là
encore, raison - je pense qu'on s'entend sur beaucoup de choses très
souvent - à savoir qu'il faut permettre d'améliorer les
conditions de travail des personnes qui oeuvrent dans les garderies et ces
personnes sont en grande majorité des femmes. Mais aussi, il faut
permettre qu'en plus de développer des places, ce qui est essentiel et
important, évidemment, les familles y aient accès. Or, on sait
que la formule d'exonération à laquelle peuvent participer les
familles ne répond pas actuellement aux besoins puisque ces personnes ne
peuvent pas se prévaloir de cette formule, car elle est trop basse, elle
couvre des revenus trop bas. (17 heures)
Je peux vous dire que c'est ma stricte et très large
priorité. J'espère arriver très bientôt avec des
résultats concrets à ce sujet, comme déjà un
certain nombre d'améliorations, sur lesquelles je ne reviendrai pas, ont
été apportées au niveau des services de garde.
Je termine ici mon intervention. Plusieurs d'entre vous, hommes et
femmes -c'est remarquable qu'on soit justement intervenus hommes et femmes sur
cette question - ont fait état de l'importance que nous accédions
à l'égalité. Je pense qu'on partage tous ces objectifs
ensemble. Je pense que les hommes gagneront à l'autonomie des femmes,
mais je pense que la société gagnera aussi à la
différence des femmes et à son actualisation dans les grands
projets collectifs. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): La motion est-elle
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Enregistrement des noms
sur les votes en suspens.
Avis à la Chambre.
M. Ciaccia: En vertu de l'article 34, M. le Président.
Recours à l'article 34
Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 34,
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Au mois de novembre dernier la commission
parlementaire de l'industrie et du commerce a eu lieu pour discuter de la
situation de SIDBEC. À la suite de certaines motions que nous avions
faites, le gouvernement s'est engagé à faire certaines
renégociations et à nous faire part de la décision qu'il
devait prendre en ce qui concerne SIDBEC.
Le leader peut-il nous dire aujourd'hui si le gouvernement a l'intention
de reconvoquer la commission parlementaire de l'industrie et du commerce pour
nous faire part des décisions du gouvernement et afin
de discuter ces décisions en ce qui concerne SIDBEC et
spécialement SIDBEC-Normines?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je m'engage à en
discuter dès demain matin au Conseil des ministres, à 10 h 30,
avec mon collègue de l'Industrie et du Commerce et à donner une
réponse demain après-midi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Vaudreuil-Soulanges en vertu de l'article 34.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Une question à l'endroit
du leader du gouvernement. On sait qu'à la fin de l'année
dernière ou au début de cette année des difficultés
financières ont assailli certaines sociétés de fiducie
ontariennes qui ont des établissements au Québec. On sait que les
épargnants, dans la mesure où leur dépôt
était assuré par la Régie de
l'assurance-dépôts du Canada, ont bénéficié,
depuis le 17 janvier, d'une couverture, d'une assurance qui est de 60 000 $
plutôt que de 20 000 $.
On sait que du côté du gouvernement du Québec, la
même annonce a été faite -c'est-à-dire qu'il y
aurait alignement sur la politique des autres provinces essentiellement de
couvrir, jusqu'à concurrence de 60 000 $, les épargnes de ces
gens-là.
Je me demandais si le leader du gouvernement compte introduire, d'une
façon ou d'une autre, certaines formes de législation, des
amendements à la Loi sur l'assurance-dépôts, par exemple,
pour donner effet aux décisions du ministre des Finances, auquel cas, de
toute façon, je l'assure à l'avance de la coopération de
l'Opposition.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Même réponse qu'au député
de Mont-Royal, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, nous aurons, à la fin
du mois, une commission parlementaire sur l'énergie qui fait suite
d'ailleurs à une promesse qu'avait faite le ministre de l'Énergie
et des Ressources en mars 1981, donc ce sera deux ans plus tard. À cause
de ce retard plusieurs intervenants et plusieurs agents économiques
veulent présenter des mémoires, au point que nous en sommes au
mémoire no 50 et que nous n'avons pas encore reçu celui
d'Hydro-Québec et d'autres compagnies qui sont intéressées
par le dossier.
J'aimerais demander au leader du gouvernement de considérer
très sérieusement d'augmenter le nombre de jours puisque, de
toute évidence, les quatre jours qui ont été prévus
pour la commission parlementaire ne seront pas suffisants pour entendre tous
les mémoires et tous ceux qui sont intéressés à
débattre de la question énergétique et du
développement économique du Québec.
Comme on le sait, il y a une récession présentement et je
crois que le gouvernement serait bien venu et bien influencé s'il
décidait d'accorder plus de temps pour qu'on puisse faire un travail en
profondeur à ce sujet.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Nous allons prendre en très sérieuse
considération cette demande, sachant qu'il y a déjà quatre
journées, les 24, 25, 29 et 30 mars, qui seront consacrées
à l'étude de ce très important dossier.
M. Fortier: Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à la fin de
novembre, la commission spéciale sur la protection de la jeunesse, qui a
révisé la loi no 24, a déposé son rapport. On sait
que ce rapport était longuement attendu, que même le gouvernement
nous avait fixé des échéances plus courtes compte tenu de
certaines pressions qui se faisaient, soit dans le monde policier ou dans la
communauté en général, afin que le gouvernement modifie la
loi ou présente un nouveau projet de loi, selon ce qu'il
désirera.
Est-ce que le leader peut nous dire quelles sont les intentions du
gouvernement à ce sujet, et si on peut espérer qu'avant juin il y
aura une loi nouvelle ou une loi modifiée qui sera adoptée en
Chambre?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, nous aurons un Conseil des
ministres spécial durant le week-end, entre autres choses, pour
préparer tout le menu législatif de la prochaine session et, bien
sûr, établir nos priorités. Je ne doute pas que nous
ferons, entre autres choses, état de ce dossier très important
sur la protection de la jeunesse. On attendra les événements. Il
y a des événements qui peuvent survenir au début de la
session et qui peuvent être l'occasion de certaines annonces à ce
point de vue. Alors, je demanderais à Mme la députée de
L'Acadie de patienter quelque peu. Je dois lui dire qu'effectivement je crois
savoir que c'est un dossier qui chemine bien en ce
moment.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, on y a fait
référence au cours de la période des questions, cet
après-midi. On sait que la firme Thorne Riddell a présenté
la semaine dernière un mémoire préparé à la
demande de sept ou huit associations, notamment, l'Association du bois de
sciage, les Mines de métaux du Québec, les Hebdos du
Québec, etc. C'est un mémoire qui fait état de
difficultés engendrées par des mauvaises interprétations
du ministère du Revenu au sujet de la loi concernant la taxe de vente.
D'autres allaient jusqu'à recommander des amendements à cette
dite loi, qui n'a pas été révisée depuis 1940, dans
le but d'éliminer des impositions tout à fait inacceptables qui
font que, dans la situation de crise où nous sommes
présentement...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je comprends le préambule, mais j'ai
déjà demandé qu'on en arrive le plus rapidement possible
à l'article 34.
M. Gratton: M. le Président, compte tenu qu'on n'obtient
pas de réponses du leader du gouvernement, vous comprendrez que j'essaie
de m'exprimer le plus clairement pour qu'il comprenne le sens de ma
question.
Je disais donc, M. le Président, que ces nombreux contribuables
corporatifs se plaignent de la mauvaise administration de la loi concernant la
taxe de vente. J'aimerais savoir du leader du gouvernement si on entend donner
suite à ces recommandations très précises qui
contribueraient à alléger le fardeau fiscal de certaines
entreprises qui sont déjà en difficulté financière,
compte tenu de la crise économique, et si on les étudiera au
moins au cours des prochains jours que durera cette session.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Pas à cette session-ci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Affaires du jour.
M. le leader du gouvernement.
Motion d'ajournement
M. Bertrand: M. le Président, nous aurions eu la
possibilité d'entreprendre, à ce moment-ci, un débat en
deuxième lecture du projet de loi no 109, Loi sur le cinéma et la
vidéo, mais pour ce faire, nous aurions eu besoin d'un consentement de
l'Opposition puisqu'il y a eu un rapport de déposé aujourd'hui.
Après avoir pris des informations auprès de l'Opposition, il y a
d'autres éléments qui s'ajoutent.
Effectivement, il y a des parlementaires qui ont participé
très étroitement aux travaux de la commission des affaires
culturelles et qui ont aussi été présents à la
commission de l'éducation la semaine dernière et cette semaine.
Ce sont très souvent les mêmes personnes. Comme la commission
parlementaire des affaires culturelles s'est tout de même réunie
assez récemment, il y a environ deux semaines, je comprends les
parlementaires - d'ailleurs, de part et d'autre - de vouloir se donner encore
un certain temps avant d'aborder l'étude de ce projet de loi en
deuxième lecture.
Nous aurions fait ce travail jusqu'à 22 heures, ce soir, et
probablement demain matin, mais je crois qu'on peut comprendre que, de part et
d'autre, on ait encore besoin d'un peu de temps pour se préparer
à l'étude en deuxième lecture de ce projet de loi
très important, qui viendra donc à la prochaine session.
Dans les circonstances, nous pourrions ajourner nos travaux à
demain matin.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition. (17 h 10)
M. Lalonde: M. le Président, je ne suis pas sûr
d'avoir bien entendu. Tout d'abord, j'ai entendu le leader nous demander un
consentement pour étudier la loi sur le cinéma tout en avouant
que son équipe n'est pas prête.
M. Bertrand: On est prêt, M. le Président.
M. Lalonde: Deuxièmement, il vient de dire que, de part et
d'autre, les députés étaient trop occupés ailleurs
pour commencer l'étude de la loi sur le cinéma. On sait qu'un
rapport de la commission parlementaire, qui a entendu des groupes sur ce projet
de loi, vient à peine d'être déposé, il y a quelques
heures. Notre règlement prévoit que les députés qui
reçoivent ce rapport doivent avoir le loisir de l'étudier avant
d'entreprendre la deuxième lecture. Nous n'avons donc pas donné
ce consentement. Nous serons prêts à commencer l'étude de
ce projet de loi demain. Je demande au leader du gouvernement de nous proposer
d'autres lois, des lois à caractère économique, qui vont
aider les Québécois à se sortir de la crise. Est-ce que
vous en avez?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, l'intervention du
député de Marguerite-Bourgeoys est tout à fait de bonne
guerre.
Ai-je le droit de parole, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le leader,
j'ai entendu une question de règlement de la part du leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: J'aimerais bien établir que ce que j'ai fait,
c'est poser une question au ministre et non pas une intervention en vertu du
règlement sur la motion d'ajournement.
M. Bertrand: Vous avez fait une intervention.
M. Lalonde: Pardon?
M. Bertrand: Vous avez fait une intervention.
M. Lalonde: Non, non, c'est une question que j'ai posée,
je n'ai pas fait d'intervention.
M. Bertrand: Le député de Marguerite-Bourgeoys a
indiqué qu'il était surpris de constater que le gouvernement
n'avait pas de projet de loi à caractère économique
à présenter alors que nous en aurons deux, demain matin, dans le
secteur de l'agriculture, un secteur fort important dans le
développement économique du Québec pour peu qu'on croie
à l'agro-alimentaire. De ce côté-ci, on y croit. Ces deux
projets de loi, s'ils sont adoptés demain, seront deux pièces
intéressantes pour le développement de l'agriculture au
Québec: l'amélioration des fermes et l'amélioration du
programme du crédit agricole.
Donc, le consentement veut que nous discutions demain de ces projets de
loi sur l'agriculture, mais nous étions prêts, de ce
côté-ci, à aborder dès cet après-midi
l'étude du projet de loi no 109 en deuxième lecture. C'est
après avoir pris des informations auprès de l'Opposition que nous
avons appris que, premièrement, nous n'aurions pas le consentement pour
que ce projet soit abordé dans sa deuxième lecture aujourd'hui et
que, deuxièmement, des parlementaires qui comptaient intervenir dans le
débat en deuxième lecture ont demandé - ils me l'ont fait
savoir par le leader de l'Opposition -plus de temps pour étudier le
rapport et savoir du ministre des Affaires culturelles quelles pouvaient
être ses intentions au niveau des modifications au projet de loi en
commission parlementaire lors de l'étude article par article. Dans ce
contexte, je me rends tout simplement à une demande de l'Opposition pour
que le projet de loi sur le cinéma et la vidéo soit
discuté dans de meilleures conditions et pour les parlementaires de
l'Opposition et pour ceux du parti ministériel, c'est tout.
Donc, je ne porte pas de jugement quant à votre attitude; n'en
portez pas quant à la nôtre. Comme cette session, qui est
commencée depuis 1981, est déjà la plus longue que nous
ayons connue depuis fort longtemps, comme nous pourrions faire le bilan - et
nous l'avons fait d'ailleurs le 22 décembre dernier - des nombreux
projets de loi qui ont été adoptés durant cette
très longue session, l'Opposition savait très bien...
Des voix: Oh! Ohl Oh!
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Bertrand: M. le Président, essayez donc de ramener la
concorde dans les rangs de l'Opposition! L'Opposition savait très bien
que nous allions, cette semaine, étudier trois projets de loi et l'un de
ces projets de loi ne sera pas étudié parce qu'effectivement, des
deux côtés de la Chambre, on souhaite avoir plus de temps pour s'y
préparer. C'est tout, point, à la ligne.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Le leader du gouvernement avoue n'avoir rien à
nous proposer à caractère économique. Est-ce qu'il propose
une motion d'ajournement? Qu'est-ce qu'il fait?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, la session qui va se
terminer jeudi...
M. Lalonde: Ce n'est pas un discours qu'on vous a
demandé.
M. Bertrand: Je réponds à la question et j'ai le
droit d'y répondre comme je le veux.
Des voix: Oh!
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Bertrand: La session qui se terminera jeudi aura
été l'occasion de l'adoption de nombreux projets de loi à
caractère économique. Si le député de
Marguerite-Bourgeoys veut avoir le bilan, jeudi, je le lui donnerai.
Deuxièmement, je voudrais lui faire savoir que très bientôt
commencera une nouvelle session et qu'il sera en mesure, à ce moment,
d'évaluer, et même avant la session qui s'annonce, les intentions
du gouvernement en matière de relance économique. C'est
déjà commencé depuis un bon bout de temps. Cela va se
continuer et j'attends le député de
Marguerite-Bourgeoys lors du message inaugural.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip de
l'Opposition, question de privilège.
M. Pagé: Je voudrais soulever une question de
privilège à ce moment-ci. Je représente un comté de
la région de Québec qui, comme beaucoup d'autres, est
sévèrement affecté par un taux de chômage qui est
trop élevé, par des milliers de personnes qui doivent
malheureusement vivre de prestations d'aide sociale. Vous n'êtes pas sans
savoir que l'Assemblée nationale n'a pas siégé depuis
bientôt trois mois. On se réunit aujourd'hui.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Je veux juste savoir... Ordinairement, le
président, pour déterminer si c'est une question de
privilège, doit d'abord l'entendre. C'est la première des choses
à faire, je pense. Comme je l'ai dit, en vertu de l'article 34,
j'aimerais que M. le député en arrive à sa question de
privilège le plus rapidement possible. M. le député.
M. Pagé: C'est le privilège d'un
député, c'est même le privilège de
l'Assemblée nationale qui est remis en cause aujourd'hui. La
responsabilité première d'un Parlement, de députés
qui siègent dans un Parlement qui est souverain dans son cadre de
juridiction, c'est de se réunir, c'est de délibérer, c'est
d'étudier et c'est de décider. Le Parlement, l'Assemblée
nationale du Québec s'est ajournée il y a trois mois. Depuis
trois mois, les bénéficiaires de l'aide sociale au Québec
sont plus nombreux. Le chômage est plus élevé et,
aujourd'hui, on nous convoque...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît, à l'ordre! À l'ordre! M. le
député, vous savez qu'une question de privilège n'est pas
nécessairement une question de divergence d'opinions ou de façon
de voir comment les travaux de l'Assemblée nationale sont menés.
Je pense qu'une question de privilège doit essentiellement être
faite de façon à bien faire comprendre à toute personne
qu'on a été lésé dans ses droits. Je pense que
l'argumentation que vous apportez, vous avez le droit de la faire, mais pas en
termes de question de privilège. M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: C'est le droit le plus fondamental pour le peuple
du Québec d'avoir un Parlement qui siège. Or, après un
retour de presque quatorze semaines, ici à l'Assemblée nationale,
mes collègues et moi-même avons visité des régions,
avons rencontré des citoyens et, aujourd'hui...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! J'essaie de voir, puisqu'on veut interpréter ce
qu'est une question de privilège... Il y a eu plusieurs occasions
à l'Assemblée nationale où on a eu à
interpréter la question de privilège. Mais on dit: Une violation
des droits de l'Assemblée ou d'un de ses membres constitue une question
de privilège. Il y a la question qui concerne si un
député, en vertu du règlement... À l'article 49, on
dit: Lorsqu'un député désire soulever une question de
privilège, il doit le faire avant l'appel des affaires du jour, selon la
procédure, dans le cas où la personne doit donner un avis d'une
heure. On dit aussi que la personne qui soulève une question de
privilège doit se borner à protester et à rétablir
les faits, ses paroles ne doivent en aucun cas se rapporter à aucun
sujet qui prête à discussion et nul débat ne peut
s'ensuivre. (17 h 20)
Si on allait, dans la façon stricte, déterminer ce qu'est
une question de privilège, je dois vous dire que souvent ici, en cette
Assemblée, il y aurait des décisions très difficiles
à rendre sur les questions de privilège en tenant compte du fait
que les gens veulent émettre des opinions et différer d'opinion
avec d'autres personnes, que ce soit à la gauche ou à la droite
du président. Une chose est certaine, c'est que la question de
privilège ne doit, en aucune façon, engendrer un débat. Je
dois vous dire qu'actuellement les droits de l'Assemblée ou d'un de ses
membres sont peut-être violés. C'est une question qu'il faudrait
se poser. Je pense que le député a exprimé ce qu'il avait
à exprimer jusqu'à maintenant et j'ai de la difficulté
à comprendre que ce soit une question de privilège, à
moins qu'il m'indique à quel niveau se situe cette question de
privilège.
M. Pagé: M. le Président, la question de
privilège est fondée, selon moi, et je vous le propose bien
respectueusement. Je ne veux pas, par les propos que j'ai amorcés tout
à l'heure, provoquer un débat. Je ne veux que, d'une part,
déplorer la situation malheureuse dans laquelle on se retrouve
actuellement, à savoir que le Parlement, qui n'a pas siégé
depuis trois mois, est dans l'impossibilité de...
M. Bertrand: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre! M. le leader du gouvernement, sur une question de
règlement.
M. Bertrand: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Bertrand: Le député de Portneuf, qui sait
très bien que tout dans la vie politique ne passe pas
nécessairement par la législation - à preuve, certains
gestes que le ministre des Communications a posés dans son comté
récemment - devrait savoir une chose à ce moment-ci. Le
gouvernement était prêt, dès cet après-midi,
à aborder en deuxième lecture un projet de loi à incidence
économique fort importante et l'Opposition...
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre! À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre! À
l'ordre! M. le leader, à l'ordre! Si on voulait essayer de trouver une
solution à ce qui nous confronte...
Une voix: On pourrait compléter...
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est exactement ce que
j'ai l'intention de vous proposer pour régler votre problème.
À l'ordre! À l'ordre! M. le leader du gouvernement avait
l'intention de proposer une motion d'ajournement. Cette motion d'ajournement
étant faite, on pourrait vous proposer un débat - si vous voulez
l'avoir -sur cette question, où un représentant du gouvernement
et un représentant de l'Opposition pourraient prendre dix minutes et,
après, on votera si, oui ou non, nous avons l'intention de l'adopter. Si
vous êtes d'accord avec cette formule, je pense que cela réglerait
notre problème.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Je vous remercie d'avoir confirmé que notre
règlement prévoit un débat sur une motion d'ajournement.
Nous avons l'intention d'y participer pleinement, mais cela n'exclut pas les
questions de privilège qui sont soulevées par mes
collègues.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition, vous avez amplement raison. Une question de privilège peut
être soulevée à tout moment. Le seul problème -en
comprenant la discussion qui est amorcée - c'est de savoir s'il s'agit
vraiment d'une question de privilège. Je pense qu'une question de
privilège qui aurait trait à la question de l'ajournement n'en
serait pas une. C'est sûr et certain. Quant à l'utilisation qu'on
pourrait faire de façon indirecte de la question de privilège
pour faire le débat sur l'ajournement et en même temps utiliser le
temps voulu pour la motion d'ajournement, ce serait une façon indirecte
de faire ce que le règlement ne permet pas de faire. En
conséquence, je conseillerais, pour régler ce problème,
qu'on puisse beaucoup plus facilement y aller avec la motion sur l'ajournement
et faire la discussion sur cette motion, tel que prévu par le
règlement en vertu de l'article 76.
M. Gratton: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, M. le
député de Gatineau et leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: Ma question de privilège portera sur le fait
qu'à titre de député du comté de Gatineau ici,
à l'Assemblée nationale du Québec, je suis payé
à même les fonds publics pour représenter les
électeurs du comté du Gatineau.
M. Bertrand: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement, sur une question de règlement.
M. Bertrand: M. le Président, à moins que j'aie
très mal compris les propos que vous avez tenus, vous avez bien
signifié qu'il n'était pas question qu'il y ait de question de
privilège soulevée à l'occasion d'une motion d'ajournement
que j'ai présentée pour que nous ajournions nos travaux à
demain matin 10 heures pour étudier deux projets de loi de nature
économique dans le secteur agricole. Comme il y a un article du
règlement - c'est vous-même qui l'avez spécifié, M.
le Président - qui indique ce que nous pouvons faire lorsqu'une motion
d'ajournement est présentée, je crois que ce qu'il est plus
correct, plus convenable de faire dans les circonstances, c'est que si
l'Opposition veut prendre dix minutes pour expliquer pourquoi elle s'oppose
à l'ajournement des travaux à ce moment-ci, qu'elle le fasse. Il
me semble que c'est tellement plus simple de le faire comme cela que de
recourir à des questions de privilège qui n'en sont pas.
M. Pagé: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement, M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: Comme le leader de l'Opposition en faisait part
tout à l'heure, il est exact que dans notre règlement, les
dispositions prévoient qu'un débat peut être ajourné
sur proposition d'un membre du gouvernement ou encore du leader du
gouvernement, que cette motion d'ajournement prévoit le droit pour
l'Opposition d'intervenir pendant dix minutes.
Or - toujours sur une question de règlement je veux, par ce
commentaire, vous expliquer la nature du problème qui nous occupe
actuellement. Le leader du gouvernement a laissé voir que la Chambre
ajournerait ses travaux. J'ai soulevé une question de privilège
en vertu de notre règlement, en m'appuyant sur l'argumentation - c'est
là l'essentiel du point de règlement que je soulève - que
le droit le plus fondamental pour un Parlement, et par conséquent, pour
les parlementaires, c'est de siéger, c'est de se réunir, de
délibérer, d'échanger et de travailler sur des sujets
donnés. Or, dans la question de privilège que j'avais
commencé à soulever - je n'ai pas eu malheureusement l'occasion
de compléter -par les commentaires que je faisais, j'ai voulu amorcer
non pas un débat, mais j'ai voulu, comme c'est mon droit le plus
fondamental ici, vous faire part, à vous la présidence, d'un
constat malheureux dans lequel on se retrouve, moi-même et mes
collègues aujourd'hui, à savoir qu'à la reprise de la
session aujourd'hui, 8 mars, après trois mois d'absence, on est
convoqué ici sans aucun projet, aucun menu législatif à
caractère économique. C'est à cause du manque
d'idées du gouvernement ou de l'imprévoyance et
l'incompétence du leader du gouvernement.
M. Bertrand: II y a une limite!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Sur la question de
règlement, M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Déroutante, cette Opposition, et
décevante!
M. le Président, j'ai dit tout à l'heure que nous
pourrions, à 17 h 30 ce soir, commencer - nous aurions pu le faire
à 17 heures - l'étude du projet de loi no 109...
M. Gratton: Question de règlement!
M. Bertrand: C'est cela, je n'ai même pas le droit de
terminer...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le seul problème
que j'ai, M. le leader, c'est que de part et d'autre, on soulève des
questions de règlement. Je vais commencer par en entendre une, et
ensuite, j'entendrai l'autre.
M. le leader.
M. Bertrand: M. le Président, il y a un projet de loi que
nous étions prêts à étudier en deuxième
lecture dès cet après-midi.
M. Gratton: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement, M. le député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, le leader du gouvernement
viole le règlement en répétant pour la nième fois
qu'il était prêt à nous proposer l'étude du projet
de loi no 109 sur le cinéma. Ce n'est pas de cela que l'Opposition
voudrait discuter. Ce sont des mesures concrètes pour enrayer les
problèmes du chômage qu'on connaît présentement.
M. Bertrand:...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordrel De part
et d'autre, vous êtes en train de faire le débat qu'on essayait de
ne pas faire tout à l'heure, au moyen de questions de règlement.
À l'ordre! (17 h 30)
Oui, je sais, mais j'aimerais d'abord que le calme revienne. M. le
leader adjoint.
M. Gratton: M. le Président, la question de
règlement concerne le fait que le leader du gouvernement n'a pas su
planifier, n'a pas su faire en sorte qu'on puisse étudier le projet de
loi no 109, dont il parle, en conformité avec le règlement de
l'Assemblée nationale. Il aurait fallu qu'il demande un consentement. Il
admettait lui-même tantôt que, du côté
ministériel, on n'était pas prêt à en discuter parce
qu'on avait été pris à la commmission de
l'éducation, M. le Président. Je dis donc...
M. Bertrand: M. le Président, question de
privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! M. le
leader du gouvernement, sur une question de privilège.
M. Bertrand: Oui, pour rétablir les faits, M. le
Président, parce que le député de Gatineau dit que de ce
côté-ci, nous n'étions pas prêts. Voulant - je me
rends compte que c'est une attitude ici, à l'Assemblée nationale,
qui ne rapporte pas beaucoup de dividendes - simplement me montrer courtois
à l'endroit de l'ensemble des parlementaires et sachant qu'il y a des
personnes du côté de l'Opposition que je ne nommerai pas - que je
ne nommerai pas -qui m'ont fait savoir qu'elles apprécieraient qu'on
puisse entreprendre l'étude de ce projet de loi plus tard, dans quelques
semaines, au moment de la reprise d'une nouvelle session, dans ces
circonstances, effectivement, nous ne l'aborderons pas aujourd'hui. Je sais que
j'aurais eu besoin du consentement; cela se donne des consentements, on en a
donné un tout à l'heure pour les projets de lois sur
l'agriculture. Donc, cela se donne des consentements. Donc, si
l'Assemblée nationale voulait vraiment débattre le projet de loi
109, elle pourrait le faire par consentement. Or, c'est simplement pour
être
courtois pour certaines personnes qui ont exprimé des
réticences à ce que nous abordions l'étude du projet de
loi aujourd'hui que nous avons accepté d'en remettre l'étude
à plus tard. Dans un tel contexte, franchement, montrez-vous donc -
comment dirais-je - au moins aussi courtois que nous essayons de l'être
et acceptez les choses comme elles sont.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordrel J'essaie
de faire en sorte que, finalement, on puisse en arriver à ce qu'on
appelle une discussion sur la motion d'ajournement. Je sais très bien
qu'il y a des possibilités, comme le disait le député de
Gatineau, que des questions de privilège soient soulevées. Je
pense que personne ici n'a l'intention de dire qu'il n'y a pas de question de
privilège. Je répète que la question de privilège,
normalement, doit porter sur une question personnelle, un droit qui est
brimé. Si j'essaie de ramener le débat sur la motion
d'ajournement - sans vouloir conseiller au leader du gouvernement de se sentir
lui-même brimé comme leader et de soulever lui-même une
question de privilège que, je le sens depuis tout à l'heure, il
essaie d'exprimer - c'est que les affaires du jour sont appelées
après les avis à la Chambre et après les questions en
vertu de l'article 34.
En vertu du règlement, les affaires du jour sont la
responsabilité du leader du gouvernement. Donc, le leader du
gouvernement, ayant cette responsabilité d'appeler, a
décidé aujourd'hui d'appeler une motion d'ajournement. Cette
motion d'ajournement doit maintenant être discutée, à
savoir si oui ou non...
S'il vous plaît! C'est assez difficile de donner... S'il vous
plaît! C'est assez difficile de donner une explication sur le
règlement surtout quand on ne l'écoute pas.
À partir de ce droit que possède le leader du gouvernement
en vertu du règlement, toute autre action qui serait amenée
pourrait l'en empêcher de telle sorte que son droit personnel comme
leader pourrait aussi être brimé. Ce sont les règles qui
nous gouvernent actuellement. Par conséquent, pour essayer de
régler ce problème, je vous ai rappelé l'article 76 du
règlement et je vous ai conseillé de vous prévaloir de cet
article 76 pour qu'on puisse adopter cette motion d'ajournement, si c'est le
désir de l'ensemble de l'Assemblée.
Donc, j'aimerais qu'on puisse en terminer au plus tôt avec ce
droit du leader d'appeler une motion d'ajournement, qu'on la discute, en
suggérant qu'il est prévu un droit de parole de dix minutes pour
un membre de l'Opposition et dix minutes pour un membre du gouvernement. Si
cette façon d'agir apparaît normale, à mon avis, je pense
qu'on devrait l'adopter rapidement.
M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: J'en fais une demande de directive à votre
endroit. Voulez-vous dire, par les commentaires que vous venez de formuler,
qu'en vertu du règlement qui nous régit je n'avais pas le droit
de soulever une question de privilège...
Des voix: Non. Non. Non.
M. Pagé:... personnellement, pour et au nom de mes
collègues qui se voient dans l'impossibilité de se réunir,
de siéger et d'étudier des projets de loi à
caractère économique ce soir, compte tenu soit de
l'imprévoyance du leader du gouvernement, soit du manque d'idées,
de la pauvreté des idées, des intentions et des opinions du
gouvernement du Parti québécois? C'est le droit le plus
fondamental, M. le Président, c'est ce que je crois sincèrement
et je vous demande de me le confirmer pour que je puisse formuler ma question
de privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip de
l'Opposition, je dois dire que je ne veux pas discuter du fond pour le moment.
Je veux simplement dire que vous avez effectivement un droit qui est celui de
poser une question de privilège. Je dis aussi que le leader du
gouvernement a aussi un droit en vertu du règlement, c'est celui
d'appeler une motion d'ajournement. Cette motion d'ajournement a
été proposée, il s'agit maintenant de la discuter. Je
comprends très bien que vous voudriez discuter de la motion
d'ajournement, mais qu'avant vous voulez dire que votre droit est brimé
- c'est ce que vous prétendez - parce que le leader a appelé une
motion d'ajournement. Lorsqu'une motion est en discussion, on doit discuter de
la motion. Ce que vous voulez exprimer, d'après ce que j'ai cru
comprendre jusqu'à maintenant, c'est que vous êtes contre la
motion d'ajournement et la façon indirecte que vous l'utilisez pour
l'exprimer, c'est-à-dire la question de privilège.
Si vous voulez avoir une directive pour clore le débat sur ce
point, je dois vous dire qu'on doit...
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! À l'ordre!
Je pense qu'on doit et qu'on devrait passer à la discussion sur
la motion d'ajournement. Par conséquent, je demanderais au leader de
prendre son droit de parole sur la motion d'ajournement et je donnerai un droit
de parole sur la même motion à l'Opposition.
M. Gratton: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Gratton: Très calmement, si on veut me donner seulement
deux minutes, vous verrez dans quel dilemme on se trouve et je ne provoquerai
pas de débat.
Des voix: Non.
M. Gratton: Vous nous dites, selon votre directive, que je n'ai
pas le droit de soulever une question de privilège que j'avais
commencé à formuler tantôt au nom des électeurs du
comté de Gatineau et qu'on devrait plutôt débattre de la
motion d'ajournement proposée par le leader du gouvernement. Justement,
on sait fort bien qu'avec la majorité ministérielle... (17 h
40)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je dois vous interrompre dès maintenant et je vous
dirai pourquoi je vous interromps. Ce me semble être l'économie du
règlement et j'ai eu l'occasion, à maintes reprises, comme vous
d'ailleurs, d'entendre dire par d'autres personnes, à ce siège,
qu'une question de privilège, comme vous l'avez dit, au nom des citoyens
d'un comté...
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je le sais. Mais la
question de privilège, c'est un droit personnel, comme individu, comme
député, et non pas un droit qui appartient à une autre
personne qu'à un membre de l'Assemblée. C'est dans ce
sens-là que je vous disais que votre droit de privilège, si vous
me demandez si je vous le refuse, je ne le refuse aucunement. Ce que je dis,
c'est qu'on est en train de faire, par des moyens qui, à mon avis,
apparaissent détournés, une question de privilège sur une
motion d'ajournement. La motion d'ajournement a été
proposée par le leader du gouvernement. Le leader du gouvernement a
également un privilège prévu par le règlement et on
devrait - c'est ce que je disais - discuter cette motion, l'adopter ou la
refuser, en vertu d'un vote qui serait pris à l'Assemblée. C'est
ce que je voulais vous exprimer. M. le député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, je ne conteste pas votre
décision. Je vous fais simplement remarquer l'incongruité de la
situation. Je voudrais faire part à l'Assemblée des
revendications des électeurs que j'ai rencontrés depuis que nous
avons ajourné les travaux de l'Assemblée, le 18 décembre
dernier...
M. Laplante: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M.
le député, question de règlement.
M. Laplante: Question de règlement, M. le
Président. En même temps, j'ai une directive à vous
demander. En tant que député, en tant que représentant
à l'Assemblée nationale...
Une voix:...
M. Laplante: M. le Président, ne serait-il pas temps
actuellement de mettre un peu d'ordre dans ces questions...
Des voix: Oh!
M. Laplante: J'espère que les gens qui nous regardent
à la télévision entendent le bruit du poulailler. On
dirait, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député.
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Jolivet): J'essaie, depuis tout
à l'heure, de faire comprendre à l'ensemble des membres de cette
Assemblée que le seul moyen de régler le problème, c'est
de discuter la question qui est actuellement mise devant nous, la motion
d'ajournement. Dans ce contexte, je demande au leader du gouvernement de parler
sur la motion d'ajournement. M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, puisqu'il faut donc se
prévaloir de l'article 76, je voudrais simplement vous indiquer que
cette session, à laquelle nous mettrons fin cette semaine, aura
été la plus longue que nous ayons connue. Elle a commencé
en 1981 et elle a permis à l'Assemblée nationale du Québec
d'adopter des lois publiques. Si je les additionne - 16 et 17, 33; 34 et 42,
76, et 24, 100 - nous avons adopté, M. le Président,
jusqu'à maintenant, 100 lois durant la session qui a
commencé...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! M. le
leader.
M. Bertrand:... à l'automne 1981 et qui va se terminer
cette semaine. Je n'inclus pas, bien sûr, les projets de loi
privés parce que, évidemment, là-dessus, l'Opposition me
dirait: Les projets de loi privés, cela n'a aucune importance, ce n'est
pas significatif. Je pense que pour les groupes qui se font entendre en
commission parlementaire pour faire adopter ces projets de loi privés
ils sont aussi très importants. Nous avons adoptés 78 projets de
loi privés.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, je m'excuse.
M. le député de Saint-Louis sur une question de
règlement.
M. Blank: M. le Président, comme vous l'avez dit à
la Chambre, nous sommes devant une motion d'ajournement. Il y a aussi la
règle de la pertinence du débat. J'ai laissé le leader du
gouvernement parler une minute ou deux pour voir pourquoi il demande
l'ajournement de la Chambre. Pourquoi cette motion? Donnez-moi une raison pour
laquelle vous demandez l'ajournement à ce moment-ci. Il nous raconte
l'histoire de tous les projets de loi qui ont été adoptés,
mais il ne nous dit pas combien il y a eu de projets de loi matraques, combien
il y en a eu pour de nouvelles taxes.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant que le leader
continue d'exercer son droit de parole, je dois rappeler que nous devons
prendre un vote avant 18 heures. Sinon, j'ajournerai les débats. Une
chose est certaine, M. le leader, vous n'avez pas, dans le cadre de votre droit
de parole, même si on a utilisé d'autres moyens pour faire
comprendre des choses... La seule chose que je peux vous dire, M. le leader,
c'est que vous avez un droit de réplique. Ce que je veux vous rappeler,
c'est qu'il ne reste que douze minutes. M. le leader.
M. Bertrand: Très bien, M. le Président, je vais en
prendre deux. Je sais que l'Opposition, tout à l'heure, va faire un plat
énorme en disant: C'est épouvantable, on se revoit pour la
première fois depuis l'adoption de la loi 111 et tout ce qu'on a
à nous proposer, c'est trois jours de session et deux projets de loi,
évidemment, d'aucune importance. Bien sûr, c'est le secteur
agricole. Deux projets de loi pour permettre le développement du secteur
agricole: le programme d'amélioration des fermes, l'amélioration
du programme du crédit agricole. Ce n'est pas important? Le gouvernement
libéral, c'est connu, n'a jamais accordé beaucoup d'importance au
développement agricole.
M. Grégoire: Cela, c'est vrai!
M. Bertrand: L'Union Nationale s'est intéressée
à cela et le Parti québécois. Demain matin, deux projets
de loi de nature économique. Cela nous prenait le député
de Gatineau qui, évidemment, n'a certainement pas lu le projet de loi no
109 et qui, probablement, effectivement, n'est pas très au fait des
implications d'un tel projet de loi...
M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.
Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
privilège, M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Non seulement le leader du gouvernement induit la
Chambre en erreur en prétendant que je n'ai pas lu le projet de loi,
mais il ajoute à l'improviste: S'il l'a lu, il n'a pas compris. J'ai
trop bien compris les effets néfastes du projet de loi no 109.
M. Bertrand: C'est le débat en deuxième lecture,
ça.
M. Gratton: Ah, oui!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je pense qu'il s'agissait
de rectifier les faits. S'il vous plaît! Question de privilège, M.
le député de Gatineau.
M. Gratton: Cela ne préoccupe peut-être pas le
député de Vanier, les effets du projet de loi no 109. S'il
était dans une région frontalière comme la mienne,
certaines dispositions du projet de loi no 109 l'inquiéteraient vivement
face à l'industrie cinématographique dans la région de
l'Outaouais en particulier. C'est pour cette raison qu'ici on a refusé
le consentement d'en discuter...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député. M. le député. M. le leader.
M. Bertrand: Devant l'absence de sérieux qui
caractérise l'Opposition, à ce moment-ci, je vais tout simplement
terminer en disant que de toute façon, nous étions prêts
à étudier le projet de loi no 109, important quant à nous.
Comme il n'y a pas de consentement de l'autre côté pour qu'on
l'étudie aujourd'hui, voilà, c'est tout. Je propose que nous
adoptions cette motion d'ajournement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition. (17 h 50)
M. Lalonde: C'est une véritable farce qu'on a devant nous.
Depuis deux mois et demi que ce gouvernement, le gouvernement Lévesque
et son leader commode ont fermé ce Parlement littéralement. Pour
ceux qui ne le savent pas, peut-être même certains
députés ministériels, il est bon de rappeler que seul le
gouvernement, c'est-à-dire le premier ministre, peut convoquer
l'Assemblée à se réunir. Même si l'Opposition le
désirait, le demandait, le réclamait, on ne pourrait pas, vous ne
pourriez pas, M. le Président, siéger, ouvrir la séance et
diriger les débats comme vous le faites aujourd'hui à moins que
le gouvernement décide que le Parlement siège. Or, depuis deux
mois et demi, le Parlement québécois est fermé. Exception,
la loi 111. Là quand il s'agit d'utiliser le
Parlement pour ce gouvernement, quand il s'agit de manipuler le
Parlement à ses propres fins, ah oui, là on le convoque. Tout de
suite, au moment où c'est ouvert, tout de suite, c'est une motion
d'urgence. On limite les débats et on "bulldoze" un projet de loi comme
le projet de loi no 111 qui était un projet de loi de répression,
qui a littéralement déchiré la Charte des droits et
libertés de la personne pour des centaines de milliers de
Québécois.
M. le Président, sur l'économie, depuis deux mois et demi,
qu'est-ce qu'il y a eu? Rien, absolument rien. Le leader du gouvernement nous
dit: Oui, si vous aviez voulu discuter de la loi sur le cinéma! Soyons
quand même honnêtes. La Loi sur le cinéma et la vidéo
était devant une commission parlementaire, il y a quelques jours. Le
rapport vient d'être déposé, il y a quelques heures
à peine, à l'Assemblée nationale et notre règlement
prévoit qu'on ne peut pas forcer les députés à
entamer immédiatement la deuxième lecture. Il faut laisser une
journée pour au moins étudier ce que vous venez de nous
déposer. C'est le minimum. C'était de laisser aux
députés le temps d'étudier ce qu'on nous propose pour en
discuter en connaissance de cause. C'est pour cela, entre autres, que nous
avons dit: Écoutez, demain matin on siège à 10 heures,
appelez la Loi sur le cinéma et la vidéo à 10 heures. Moi
je n'ai rien contre la Loi sur le cinéma. Peut-être
qu'éventuellement, si elle est adoptée, dans deux, trois ou
quatre ans, lorsqu'un autre gouvernement va mettre un peu d'ordre dans les
finances publiques, cela va pouvoir créer quelques emplois, mais cela ne
réglera pas le problème des 500 000 chômeurs et des 600 000
personnes qui reçoivent l'aide sociale actuellement. Ce que nous
demandons à ce gouvernement, c'est de nous proposer des projets de loi,
des mesures concrètes pour régler le problème du
chômage et le problème de tous ces Québécois qui
sont victimes de la crise.
Le leader du gouvernement sait-il qu'il y a une crise? Sait-il que le
chômage, de 1982 à 1983, touche près de 500 000
Québécois? Sait-il que des assistés sociaux, on en
retrouve environ 600 000 au moins et de plus en plus chaque semaine? Il y en a
plus aujourd'hui qu'il n'y en avait il y a deux mois et demi quand on a
ajourné. Sait-il que la situation a empiré? Sait-il que le taux
de chômage chez les jeunes, depuis un an, est passé de 23, 6%, ce
qui était désastreux, au taux de 26, 5%, ce qui est
catastrophique? Sait-il que les pertes d'emplois ici, au Québec, depuis
18 mois ont été de 186 000? Sait-il cela?
Qu'a-t-il fait depuis deux mois et demi? A-t-il demandé au
ministre de l'Industrie et du Commerce: On revient le 8 mars, avez-vous des
projets de loi à proposer à l'Assemblée nationale pour
aider l'entreprise québécoise surtout à protéger et
à créer des emplois? A-t-il fait cela? A-t-il demandé au
ministre des Finances de proposer une loi tout de suite ce matin, cet
après-midi ou ce soir? On est prêt à renoncer à tous
les délais prévus par le règlement si on nous propose des
projets de loi qui vont créer des emplois. C'est ce que nous voulons.
Naturellement, le député de Matane, lui, trouve que la vie est
belle.
M. le Président, pourquoi attendre au mois d'avril? Ils viennent
nous dire: On va ajourner. Demain, on étudiera les projets de loi sur
l'agriculture, deux projets de loi qui ont été
déposés aujourd'hui grâce à quoi? Grâce au
consentement de l'Opposition. Ils vont être étudiés et
adoptés à 13 heures demain après-midi grâce à
quoi? Grâce au consentement et à la collaboration de l'Opposition.
Si on invoquait le règlement, ce ne serait pas adopté avant
plusieurs semaines, mais nous nous préoccupons du sort des agriculteurs
du Québec qui le demandent..
Des voix: Bravo!
M. Lalonde:... et nous tentons, avec les moyens que le
règlement nous donne, de pallier l'imprévoyance et
l'improvisation de ce leader du gouvernement qui ne sait pas comment organiser
les travaux de la Chambre.
M. le Président, cette attitude équivaut à un
mépris du Parlement. Lorsque mes collègues tentaient de soulever
des questions de privilège, c'est cela qui les inspirait. C'est un
véritable mépris du Parlement. On ferme pendant deux mois et
demi, on nous invite à 14 heures aujourd'hui, on est ici, on veut
travailler pour les Québécois et, à 17 heures, on nous
dit: Allez-vous-en chez vous! On n'a absolument rien à vous proposer.
C'est déjà inacceptable, cette improvisation, dans un temps
normal, mais c'est intolérable dans un temps de crise. C'est pourquoi
nous protestons.
M. le Président, le leader et son gouvernement n'ont rien
trouvé en deux mois et demi pour tenter d'aider les
Québécois victimes de la crise, absolument rien. S'ils avaient
trouvé quelque chose, ils auraient le loisir de le proposer. Nous sommes
prêts à travailler ce soir, demain, toute la journée, toute
la semaine, jour et nuit, si vous voulez, pourvu que ce gouvernement nous
propose quelque chose. Rien de caractère économique, absolument
rien!
M. le Président, c'est à croire - je ne veux pas
prêter d'intention - que la création d'emplois ne préoccupe
pas ce gouvernement. Je n'ose pas le croire et je ne le crois pas, pour vous
dire le fond de ma pensée. C'est à croire aussi que le
chômage, les fermetures d'usines, par exemple, cela ne les
intéresse pas. Je n'ose pas le croire et je ne le crois
pas. Ce que je constate, malheureusement, c'est que, si le gouvernement
Lévesque s'intéresse au chômage, à la fermeture
d'usines, il ne sait pas comment s'y prendre pour régler le
problème. C'est ce que je constate.
Nous, du Parti libéral, sommes prêts -je le
répète - à siéger maintenant. Notre
règlement prévoit que, ce soir, nous siégeons de 20 heures
à 22 heures. Si la motion d'ajournement du leader du gouvernement est
adoptée avec la majorité servile, les chiens de poche, comme ils
disaient au conseil national, on ne pourra pas siéger ce soir de 20
heures à 22 heures. On ne pourra pas travailler pour les
Québécois. Nous sommes prêts à travailler maintenant
et ce soir. Nous avons devant nous un gouvernement vidé, sans
imagination, sans volonté politique, divisé contre
lui-même. Si le leader veut qu'on fasse du cinéma, je crains fort
qu'à en juger par le spectacle qu'il nous donne, tout ce que ce
gouvernement pourrait faire comme cinéma, c'est un film d'horreur.
Le leader du gouvernement nous donne un spectacle indigne de notre
Parlement. Nous nous élevons contre l'incompétence, contre
l'improvisation de ce gouvernement, M. le Président. Nous protestons
formellement comme formation politique contre cette manipulation du Parlement,
contre ce mépris de la population et de son Parlement. C'est pour cela
que nous allons voter contre cette motion d'ajournement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion d'ajournement
est-elle adoptée?
Des voix: Vote enregistré.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Vote
enregistré.
Oh! Excusez-moi, vous avez certainement un droit de réplique, M.
le leader.
M. Bertrand: Est-ce qu'il me reste trente secondes, M. le
Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): À peu près
trente secondes.
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais dire au
député de Marguerite-Bourgeoys qu'il ne nous a pas convaincus.
S'il avait été de bonne foi de l'autre côté, M. le
Président, on aurait pu, effectivement, aborder l'étude du projet
de loi no 109. On aurait pu aborder...
M. Lalonde: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
privilège de la part du leader de l'Opposition.
M. Lalonde: Je n'ai pas supposé de mauvaise foi de la part
du leader. Je lui demande de ne pas me prêter de mauvaise foi de mon
côté non plus. Tout ce que j'ai invoqué, c'est son
incompétence et là, je pense que le spectacle est
évident.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Qu'on appelle les
députés! (17 h 59 - 18 h 06)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Le vote porte sur une motion du leader du gouvernement à l'effet
d'ajourner nos travaux jusqu'à demain 10 heures. Je tiens à vous
rappeler qu'il y a une nouvelle façon de voter qui est différente
de celle du passé. Donc, vous vous le rappellerez au moment où on
vous appellera.
Que ceux et celles qui sont pour cette motion d'ajournement veuillent
bien se lever s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: M. René Lévesque
(Taillon), M. Jean-François Bertrand (Vanier), M. Jacques Parizeau
(L'Assomption), M. Pierre-Marc Johnson (Anjou), M. Yves Bérubé
(Matane), M. François Gendron (Abitibi-Ouest), M. Rodrigue Biron
(Lotbinière), Mme Denise LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine), M.
Maurice Martel (Richelieu), M. Guy Tardif (Crémazie), M. Michel Clair
(Drummond), M. Raynald Fréchette (Sherbrooke), M. Jacques Brassard (Lac
Saint-Jean), M. Yves Duhaime (Saint-Maurice), M. Guy Chevrette (Joliette), M.
Réal Rancourt (Saint-François), M. Marcel Léger
(Lafontaine), M. Jérôme Proulx (Saint-Jean), M. Pierre de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Huguette Lachapelle (Dorion), M. Robert Dean
(Prévost), M. Jean-Guy Rodrigue (Vimont), M. Marcel Gagnon (Champlain),
M. Gilles Grégoire (Frontenac), M. Denis Vaugeois
(Trois-Rivières), M. Hubert Desbiens (Dubuc), Mme Carmen Juneau
(Johnson), M. Élie Fallu (Groulx), M. Patrice Laplante (Bourassa), M.
Jacques Baril (Arthabaska), M. Léopold Marquis (Matapédia), M.
Jean-Pierre Charbonneau (Verchères), M. Jules Boucher
(Rivière-du-Loup), Mme Louise Harel (Maisonneuve), M. Jacques
Beauséjour (Iberville), M. Léonard Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Jean-Paul Champagne (Mille-Îles), M.
Denis Perron (Duplessis), M. Yves Blais (Terrebonne), M. René Blouin
(Rousseau), M. Michel Gauthier (Roberval), M. Claude Lachance (Bellechasse), M.
Raymond Gravel (Limoilou), M. Laurent Lavigne (Beauharnois), M. Raymond
Brouillet (Chauveau), M. Henri LeMay (Gaspé), M. David Payne (Vachon),
M. Yves Beaumier (Nicolet), M. Luc Tremblay (Chambly), M. Marcel
Lafrenière (Ungava), M. Roger Paré (Shefford).
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: M. Fernand Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. André Bourbeau (Laporte), M. Reed Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), M. John Ciaccia (Mont-Royal), Mme
Thérèse Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Raymond Mailloux (Charlevoix),
M. Georges Vaillancourt (Orford), Mme Lise Bacon (Chomedey), M. Herbert Marx
(D'Arcy McGee), M. John O'Gallagher (Robert Baldwin), M. Fabien Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Mark Assad (Papineau), M. Herman Mathieu
(Beauce-Sud), M. Harry Blank (Saint-Louis), M. Cosmo Maciocia (Viger), M.
Maximilien Polak (Sainte-Anne), Mme Joan Dougherty (Jacques-Cartier), M. Gilles
Rocheleau (Hull), M. Pierre Fortier (Outremont), M. Michel Gratton (Gatineau),
M. Michel Pagé (Portneuf), M. Daniel Johnson (Vaudreuil-Soulanges), M.
Pierre Paradis (Brome-Missisquoi), M. Clifford Lincoln (Nelligan), M. William
Cusano (Viau), M. Claude Dubois (Huntingdon), M. Christos Sirros (Laurier), M.
Jean-Pierre Saintonge (Laprairie), M. Claude Dauphin (Marquette), M. Richard
French (Westmount), M. John Kehoe (Chapleau), M. Albert Houde (Berthier), M.
Robert Middlemiss (Pontiac), M. Roma Hains (Saint-Henri), M. Germain Leduc
(Saint-Laurent).
Le Secrétaire: Pour 51
Contre 35
Abstentions 0
Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion d'ajournement
adoptée.
J'ajourne donc nos travaux à demain 10 heures.
(Fin de la séance à 18 h 12)