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(Dix heures treize minutes)
Le Président: À l'ordre, mesdames et messieurs!
Un moment de recueillement.
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
Mme la ministre de la Fonction publique.
Rapport de la Commission
administrative du régime
de retraite
Mme LeBlanc-Bantey: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le rapport annuel de la Commission administrative du
régime de retraite pour l'année 1980.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. M. le ministre de l'Énergie
et des Ressources.
Rapport annuel de la SDBJ
M. Duhaime: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le rapport annuel 1980 de la Société de
développement de la Baie James.
Le Président: Rapport déposé. M. le leader
du gouvernement, au nom du ministre de l'Industrie et du Commerce.
Rapport annuel de la SAQ
M. Charron: Au nom du ministre de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme, je dépose le rapport annuel 1980-1981 de la
Société des alcools du Québec.
Le Président: Rapport déposé.
Dépôt de rapports de commissions élues.
M. le député de Rousseau.
Étude du projet de loi no 4
M. Blouin: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dispositions de notre règlement, de
déposer le rapport de la commission élue permanente des
transports qui a siégé le mardi 16 juin 1981 aux fins
d'étudier article par article le projet de loi no 4 Code de la
sécurité routière et l'a été adopté
avec amendements.
Le Président: Rapport déposé. M. le
député de Rousseau.
Étude du projet de loi no 5
M. Blouin: Également, M. le Président, le rapport
de la commission permanente des transports qui a étudié article
par article le projet de loi no 5, Loi modifiant la Loi sur les transports et
d'autres dispositions législatives et l'a adopté sans
amendement.
Le Président: Rapport déposé. M. le
député de Terrebonne.
Étude du projet de loi no 11 et audition de
témoins
M. Blais: M. le Président, qu'il me soit permis de
déposer le rapport de la commission élue permanente des finances
et des comptes publics qui a siégé les 10, 11 et 16 juin 1981 aux
fins d'étudier article par article le projet de loi no 11, Loi modifiant
certaines dispositions législatives pour donner suite à la
politique budgétaire du gouvernement pour l'exercice 1981-1982 de
même que pour entendre certains organismes concernant des dispositions
des articles 32 et 33 du projet de loi qui a été adopté
avec amendements.
Le Président: Rapport déposé.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de
lois privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
M. le leader du gouvernement.
M. Charron: L'article d) du feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi no 18 Première lecture
Le Président: M. le ministre de la Justice propose la
première lecture du projet de loi no 18, Loi assurant l'application de
la réforme du droit de la famille et modifiant le Code de
procédure civile. M. le ministre.
M. Marc-André Bédard
M. Bédard: M. le Président, ce projet de loi a pour
objet de permettre une application harmonieuse de la Loi instituant un nouveau
Code civil et portant réforme du droit de la famille en instituant au
Code de procédure civile un nouvel ensemble de procédures en
matière familiale, en complétant les dispositions
législatives
relatives à l'adoption, en transposant les principes fondamentaux
du nouveau droit de la famille dans les autres lois du Québec et en
modifiant certaines dispositions transitoires du droit de la famille.
Plus particulièrement, en matière de procédure
civile, ce projet de loi institue la règle qu'en matière
familiale, les audiences des tribunaux de première instance se tiennent
à huis clos, sauf décision contraire du tribunal. La Charte des
droits et libertés de la personne est modifiée en
conséquence.
Il prévoit également que les procédures
introductives d'instance sont faites par déclaration ou par
requête et que, dans l'un et l'autre cas, les parties peuvent s'adresser
au tribunal par une demande conjointe. Il prévoit aussi des
règles spécifiques pour faciliter le déroulement de
l'instance, la conciliation des parties ou l'instruction de la cause et il
introduit le principe du droit de l'enfant à être
représenté par avocat lorsque son intérêt est en jeu
et que cette représentation est nécessaire pour assurer la
sauvegarde de cet intérêt.
En outre, ce projet de loi vient préciser les règles
applicables à certaines demandes relatives au mariage, à la
nullité du mariage, à la séparation judiciaire de biens,
à l'autorité parentale, au changement de nom ou à la
demande du conjoint survivant pour l'établissement d'une prestation
compensatoire, mais surtout, il vient établir le régime
procédural applicable aux demandes conjointes en séparation de
corps ou en divorce sur projet d'accord ainsi que celui qui est applicable en
matière d'adoption, qu'il s'agisse des demandes en restitution de
l'enfant, en déclaration d'adoptabilité, en placement ou en
adoption. II précise enfin que les jugements rendus en matière
d'adoption peuvent faire l'objet d'un appel à la Cour d'appel.
Ce projet de loi vient aussi modifier diverses lois pour y faire
disparaître les distinctions qui y subsistent et qui sont fondées
sur le sexe, la filiation ou les circonstances de la naissance, ainsi qu'on
modifie dans plusieurs lois par rapport aux personnes adoptées la
portée de la définition de personne liée, qu'on
enlève des distinctions basées sur les anciens concepts de
légitimité ou d'illégitimité de l'enfant et que, de
plus, d'autres lois sont modifiées pour y faire disparaître des
distinctions fondées sur le sexe.
Vous me permettrez d'abréger, M. le Président, à
moins que nous soyons obligés de tout lire.
Enfin, ce projet de loi vient modifier certaines des dispositions
transitoires prévues par la loi instituant un nouveau Code civil du
Québec et portant réforme du droit de la famille pour permettre
la mise en vigueur par étapes de certaines dispositions en
matière de séparation de corps ou liées à
l'établissement de la prestation compensatoire en cas de
séparation de corps ou de divorce.
Le Président: Cette motion de première lecture
sera-t-elle adoptée?
M. le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, j'aimerais
poser une question au leader parlementaire du gouvernement, la question
traditionnelle lorsqu'il s'agit d'un projet de loi comme celui-ci. Est-ce qu'il
est de l'intention du gouvernement de suggérer une
déférence à la commission parlementaire de la justice ou
à une autre commission parlementaire jugée appropriée par
le leader parlementaire du gouvernement?
Le Président: M. le leader du gouvernement. (10 h 20)
M. Charron: M. le Président, je vais laisser courir un peu
le projet de loi avant de prendre une décision finale mais, pour le
moment, il nous semble que la consultation exhaustive qui a été
menée pour la rédaction du projet de loi devrait satisfaire ceux
qui y ont participé par leurs conseils. Pour l'instant, je ne
déférerai pas ce projet de loi en commission parlementaire.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, si je
comprends bien, ou si je lis entre les lignes, il s'agit d'un projet de loi
mort-né car, la session se terminant demain, j'imagine que le
gouvernement fera une motion de prorogation de la Chambre, et non
d'ajournement. S'il y avait présentement déférence en
commission parlementaire, on pourrait imaginer que le gouvernement
suggère qu'une commission parlementaire soit saisie, d'ici à la
prochaine session, de l'étude de ce projet de loi. Mais la
réponse que je viens de recevoir du leader parlementaire du gouvernement
m'indique qu'il n'y aura pas de commission parlementaire d'ici à la
prochaine session. C'est donc dire que le gouvernement, une fois qu'il
connaîtra les réactions, devra réinscrire ce projet de loi
au feuilleton pour la prochaine session, s'il le juge à propos et,
à ce moment-là, il décidera s'il y aura ou non commission
parlementaire.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, nous n'aurions pas fait tout
ce cheminement, pour reprendre l'expression du député, pour que
le projet de loi soit mort-né. Dans l'hypothèse très
réelle où la session sera prorogée demain, il est toujours
possible, au début de
la prochaine session, de présenter une motion, que connaît
bien le député de Bonaventure, pour que soient réinscrits
au feuilleton, là où ils étaient lors de la
précédente session, un certain nombre de projets de loi. Si
celui-ci figure à l'appel de deuxième lecture dans notre
feuilleton des affaires du jour, c'est là que je proposerai qu'il se
retrouve.
Pour l'instant, je répète encore une fois qu'il nous
semble important de laisser circuler ce projet de loi dans les milieux les plus
vivement intéressés. À peu près de la même
façon que le projet de loi sur le Code civil, dont celui-ci se trouve
à permettre l'application en plusieurs domaines, dans les milieux
informés, je pense aux milieux qui ont fait des représentations
sur le Code civil pour voir si ceux-ci réclament ou non pareille
décision et, en conséquence, nous agirons.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous disons
substantiellement la même chose, de façon un peu
différente. Mais si je comprends bien, le ministre de la Justice aura
réussi à donner un avis des intentions du ministère pour
la prochaine session.
Le Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
Des voix: Adopté. Le Président:
Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Président: Deuxième lecture, prochaine
séance ou séance subséquente.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Période de questions orales des députés.
M. le chef de l'Opposition.
QUESTION ORALES DES DÉPUTÉS
M. Ryan: M. le Président, je voudrais tout d'abord savoir
si le ministre des Finances doit venir ce matin.
M. Lvesque (Taillon): Je peux m'informer tout de suite.
M. Ryan: Si le premier ministre avait l'obligeance de s'informer,
j'aimerais adresser ma question au ministre des Finances.
M. Charron: On va le faire tout de suite.
Le Président: D'accord.
M. le député de Mont-Royal.
Étude sur la SHQ demeurée
confidentielle
M. Ciaccia: M. le Président, hier, à la suite d'une
question que j'avais adressée au premier ministre, j'ai
été très étonné de voir la colère que
j'ai considérée un peu démesurée du premier
ministre envers M. Latouche. D'ailleurs, je ne suis pas le seul qui a
été étonné de l'attitude du premier ministre.
Ma question s'adresse au ministre de l'Habitation et de la Protection du
consommateur. Cette colère s'expliquerait-elle par le fait que M.
Latouche a dénoncé la mauvaise administration de la SHQ dans une
étude commandée par le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur, étude qui est dans un document confidentiel
et que le ministre n'a pas encore rendu publique. Je cite quelques extraits de
cette étude et je voudrais poser une question au ministre de
l'Habitation et de la Protection du consommateur. Dans cette étude, on
parle des officiers de la Société d'habitation du Québec
et on dit: Ils ont exposé la Société d'habitation du
Québec à l'augmentation des coûts sur certains projets en
faussant le système de soumissions par l'adjudication de contrats
à des soumissionnaires autres que le plus bas soumissionnaire.
Une voix: Scandale!
M. Ciaccia: On donne comme exemple une soumission pour une
chambre additionnelle de 90 pieds carrés à 353,14 $ le pied
carré.
Dans une autre étude, M. le Président, on constate...
Une voix: C'est une étude confidentielle.
M. Ciaccia: Oui, c'est une étude confidentielle. ... au
sujet des activités de la SHQ, et je cite: "On a fait une gymnastique de
chiffres qui pouvaient induire en erreur et tromper le Conseil du
trésor. On réduit le coût réel des modifications
jusqu'à maintenant, ce qui permet d'éliminer la procédure
de présentation du présent document au Conseil du trésor -
on peut retrouver dans les documents les vrais chiffres - et ceci permet de
faire la preuve du comportement de certains officiers de la
Société d'habitation du Québec envers les autorités
gouvernementales."
M. le Président, voici ma question au ministre de l'Habitation:
À la suite des études et recommandations faites par M. Latouche,
qu'il vous a remises, études que vous aviez commandées, quelles
mesures ou gestes concrets le ministre de l'Habitation a-
t-il prises pour remédier aux situations que le ministre
connaît depuis le 6 mars 1980, soit depuis plus de quinze mois?
Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur.
Une voix: Allez chercher M. Cyr.
M. Tardif: M. le Président, je constate que l'Opposition
continue une nouvelle fois avec ses ragots d'égout et qu'à
défaut d'avoir trouvé dans le rapport du Vérificateur
général quelque référence à une forme
quelconque de fraude ou de malversation elle en est réduite à
citer un torchon qui n'a aucune valeur en autant que je suis
concerné.
M. le Président, dans le dossier qui est, selon toute
vraisemblance, utilisé par le député de Mont-Royal, s'il
voulait être honnête, je pense qu'il conviendrait de dire que ce
qu'il cite n'a rien à faire avec le dossier des vices de construction,
mais se rapporte à tout autre chose, soit une poursuite entre un
entrepreneur et la Société d'habitation du Québec; c'est
tout autre chose que le dossier des réparations majeures.
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je n'ai pas fait de... Une voix: C'est vrai ou
c'est faux?
M. Ciaccia: Le ministre n'a pas répondu à ma
question, à savoir les gestes concrets qu'il a posés, à la
suite des recommandations faites dans cette étude, recommandations qui
contiennent des pièces justificatives et de la documentation. Je n'ai
fait aucune représentation quant à savoir sur quels travaux ces
documents portaient, j'ai seulement dit que ça portait sur
l'administration de la SHQ, documents que le ministre connaît depuis le 6
mars 1980. Est-ce que le ministre a transmis une copie du dossier au
président du Conseil du trésor, tel que recommandé dans
l'étude? Et je cite: "Cependant, nous avons espoir que cette
étude circulera et aboutira entre les mains d'hommes qui ont la
responsabilité des budgets de la province, l'honorable ministre Guy
Tardif et son homologue, l'honorable ministre Jacques Parizeau."
Le Président: M. le ministre délégué
à l'Habitation et à la Protection du consommateur.
M. Tardif: M. le Président, je répète ce que
j'ai dit. Il s'agit là de dossiers afférents à un litige
qui oppose un entrepreneur et la Société d'habitation. Qu'on ait
là le point de vue, disons, de cet entrepreneur par personne
interposée et non pas celui de la société, je pense que ce
n'est pas à moi d'évaluer qui, dans ce dossier... Si un
entrepreneur pense qu'il a été lésé, il y a des
tribunaux pour s'occuper de ces questions. M. le Président, dans ce
dossier, je pense que l'Opposition mêle tout, c'est son habitude.
Lorsqu'on fait état...
Des voix: Vous ne répondez pas à la question.
M. Tardif: M. le Président, encore une fois, ce dossier
n'a rien à faire avec les réparations majeures et concerne un
litige entre un entrepreneur et la société, litige qui,
d'ailleurs, pourrait donner lieu à des poursuites. M. le
Président, je refuse de commenter cette partie du dossier.
Quant à savoir ce que j'ai fait, dès que j'ai
été informé qu'il pouvait y avoir, en rapport avec les
vices de construction, un certain nombre de choses, je vais faire état
d'une lettre que j'ai envoyée au président de la
Société d'habitation du Québec, justement, le 4 septembre
1980. Je vais en faire état parce qu'elle a été
déposée en commission parlementaire, que j'ai personnellement
demandé au leader de tenir, et où le député de
Mont-Royal, après avoir lancé de la boue, ne s'est pas
présenté ni le matin, ni l'après-midi, mais uniquement le
soir et il a utilisé tout le temps à des questions de
procédure. Je vais en faire état ici. J'adresse cette lettre au
président de la société en disant: "M. le
président, depuis quelques jours, certains faits relatifs au dossier dit
des réparations majeures - parce que c'est cela qui est en cause... (10
h 30)
Des voix: Ce n'est pas cela.
M. Tardif: Ah! Ce n'est pas cela qui est en cause. C'est ce que
je voulais faire dire au député de Mont-Royal. Merci.
Des voix: Ah!
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: ... ce n'est pas par ce genre de tactique qu'on va
éviter de répondre aux questions. J'aurais pu faire une question
de privilège quand le ministre a dit que ce que j'ai cité
représente le point de vue de l'entrepreneur. C'est absolument faux.
C'est l'étude que vous avez commandée à un des
employés de la SHQ qui vous a fait rapport.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Ciaccia: Répondez donc à la question que je vous
ai posée.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Tardif: M. le Président, le député de
Mont-Royal induit cette Chambre en erreur. Je l'inviterais à relire le
journal des Débats de la commission parlementaire des crédits de
la Société d'habitation du Québec où j'ai
précisément indiqué que je n'ai jamais commandé une
telle étude. Ayant reçu les prétentions d'un entrepreneur
contre la SHQ et ayant eu la version de cette société, j'ai
demandé à un membre de mon cabinet de me recueillir les faits qui
étaient présentés dans ces dossiers. Cette étude
n'a jamais été commandée par moi, elle ne reflète
le point de vue que d'une seule partie et fait fi de la règle
élémentaire de droit qui dit qu'il faut entendre l'autre partie;
l'autre partie, en l'occurrence, c'est la Société d'habitation du
Québec.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je voudrais faire remarquer au ministre que
l'étude a été soumise à M. Jean Foisy, conseiller
spécial du ministre Guy Tardif, à la demande de M. Foisy. C'est
votre conseiller spécial dans votre ministère.
Vu l'attitude du ministre qui refuse de répondre aux questions et
aux allégations spécifiques sur des dossiers spécifiques,
je voudrais revenir avec une question à l'adresse du premier
ministre.
M. le premier ministre, on signale ici plus que des
irrégularités, cela frôle l'illégalité. Quand
on dit qu'on a écarté le système de soumissions, que ce
n'est plus le plus bas soumissionnaire, quand on dit qu'on contourne le Conseil
du trésor, la question que je voudrais poser au premier ministre est
celle-ci: Est-ce qu'il est prêt maintenant, à la suite de ces
études, à la suite de ce qui a été trouvé
dans ces dossiers, à demander une enquête publique sur la
Société d'habitation du Québec?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): La réponse: Le
député de Mont-Royal a pris la relève du
député de Marguerite-Bourgeoys dans cette entreprise de faux
semblants tellement bien décrits par leur collègue le
député de Saint-Louis, c'est-à-dire que ce ne sont pas les
faits qui comptent, ce sont les apparences!...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Saint-Louis, sur une question de
privilège.
M. Blank: C'est la deuxième fois que le premier ministre
cite mes paroles, mais il a oublié que tous ces faits sont venus
après la date de cette déclaration.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Enfin, puisque ce sont les
apparences et non les faits qui comptent, et je regarde le député
de Mont-Royal, je m'excuse, faire un grand détour à
côté de la question qu'il soulève depuis longtemps pour
voir s'il n'y a pas moyen de mêler encore les choses, ma réponse,
c'est non.
M. Tardif: M. le Président...
Le Président: Brièvement, M. le ministre de
l'Habitation.
M. Tardif: Le député de Mont-Royal, en disant que
ce rapport fait état - rapport qu'il a - non seulement
d'irrégularités, mais d'illégalités, se trouve en
quelque sorte à jeter un discrédit sur le rapport du
Vérificateur général, qui, lui, ne fait pas état de
tels faits, M. le Président, ne fait pas état
d'illégalités, M. le Président, ne fait pas état de
fraude ou de malversation, M. le Président. Lorsque le
député de Mont-Royal dit que les procédures du Conseil du
trésor n'ont pas été suivies, il faudrait quand même
l'inviter à prendre connaissance des directives du Conseil du
trésor 3989-78 qui disent ceci: "Un contrat de construction ne peut
être conclu à moins que des soumissions n'aient été
sollicitées, sauf dans les cas de travaux de restauration ou de
rénovation lorsque l'architecte et l'état de l'immeuble ne
permettent pas d'identifier et de décrire les travaux avec
précision."
M. le Président, c'est élémentaire. Dès lors
qu'il s'agit de cas de restauration et de rénovation et que de l'eau
s'infiltre dans un bâtiment, il n'y a pas un entrepreneur, M. le
Président, qui aurait soumissionné pour corriger ces vices
à moins de dire: II faut que je trouve d'abord ce qui est en cause. Il
doit donc, amener sur les lieux son équipement, sa pépine,
creuser tout le tour de l'immeuble, se rendre compte que vos entrepreneurs
à l'époque n'avaient pas mis de drains ou les avaient mis
à l'envers et qu'ils coulaient vers la bâtisse au lieu de couler
vers l'extérieur ou que les drains sont écrasés, M. le
Président. L'entrepreneur doit d'abord se rendre compte de ça et
puis, après cela, il faudrait, pour suivre le raisonnement du
député de Mont-Royal, qu'on arrête, qu'on gèle tout
et qu'on dise: Maintenant, nous allons aller en appel d'offres.
L'équipement est là. Les hommes sont là et il y a des
locataires, des gens qui sont incommodés dans ces immeubles depuis des
années, M. le Président.
Dans le cas des réparations, c'est fatal que, forcément,
on doive d'abord déterminer la nature des travaux, donc faire venir des
entrepreneurs, des gens sur les lieux et, subséquemment, faire faire ces
travaux. M. le Président, encore une fois, rien dans le document du
Vérificateur général ne fait état
d'illégalités. D'accord, la liturgie gouvernementale n'a pas
été suivie à la lettre, mais ce n'est pas un crime, M. le
Président.
Le Président: Question principale, M. le chef de
l'Opposition.
M. Ciaccia: M. le Président, question de
règlement.
Le Président: Question de règlement, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je crois que le ministre a apporté un
supplément de réponse. J'aimerais lui poser une autre question
supplémentaire à la suite de l'intervention qu'il a faite.
Très courte, M. le Président.
Le Président: Voici, j'ai vérifié et, dans
d'autres parlements, il est très rare que celui qui pose la question ait
droit à trois ou quatre questions additionnelles. Question principale,
M. le chef de l'Opposition.
Aide gouvernementale aux caisses d'entraide
économique
M. Ryan: J'aurais aimé adresser ma question au ministre
des Finances, mais je pense qu'étant donné l'urgence du
problème, il conviendrait que je l'adresse au premier ministre.
J'ai eu connaissance qu'il y avait hier soir à Québec une
réunion importante des dirigeants des caisses d'entraide
économique de tout le Québec. Ils se sont réunis,
évidemment, pour étudier les solutions qui peuvent être
apportées au problème de liquidité qui s'est posé
dans les caisses d'entraide au cours des dernières semaines. J'ai cru
constater, en causant avec plusieurs d'entre eux, qu'il y avait des
inquiétudes sérieuses quant à l'attitude que le
gouvernement maintient ou va maintenir dans cette question. Je voudrais
adresser deux questions au premier ministre. D'abord, le premier ministre
est-il en mesure d'assurer cette Chambre que le gouvernement va fournir au
mouvement des caisses d'entraide économique l'aide dont elles ont besoin
pour traverser la période difficile qu'elles subissent depuis quelque
temps et quelle forme cette aide est-elle susceptible de revêtir?
Deuxièmement, le premier ministre peut-il donner l'assurance que
l'aide du gouvernement ne sera pas assortie de conditions qui obligeraient,
à toutes fins utiles, les caisses d'entraide économique à
se fusionner à un autre mouvement ou à une autre institution? Le
premier ministre peut-il donner l'assurance, en somme, que le gouvernement va
travailler de toutes ses forces à obtenir que les caisses d'entraide
économique, qui ont joué un rôle original et unique dans le
développement de l'économie de nos régions, gardent leur
identité propre et puissent passer cette période difficile sans
être obligées de se soumettre à des conditions qui les
obligeraient à renoncer à leur identité.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, la
réunion qu'évoque le chef de l'Opposition, qui a eu lieu hier, je
ne sais pas à quelle heure elle s'est terminée, mais je sais
qu'elle a duré des heures et des heures. Le ministre des Finances
m'avait mis au courant de la façon dont cela se présentait
à la fin de la journée hier, mais je n'ai pas eu de rapport ce
matin. Le ministre des Finances est obligé, peut-être pour des
raisons reliées à ce problème, d'être à
Montréal aujourd'hui et j'aimerais mieux m'en tenir à cela tout
simplement, si le chef de l'Opposition le permet. (10 h 40)
Peut-être que demain, avant l'ajournement, on pourra faire le
point sur l'état des choses de façon plus
détaillée, mais je me contenterais en ce moment de
répondre au chef de l'Opposition qu'il y a des efforts de faits qui
impliquent certaines conditions - cela n'a pas été caché
par le ministre des Finances il y a un certain nombre de jours - et, parfois,
des conditions draconiennes, mais le gouvernement veut apporter toute l'aide
possible pour aider à préserver cet instrument de
développement régional qui a fait ses preuves dans beaucoup de
régions du Québec. Cela continue d'être notre attitude,
d'apporter toute l'aide possible qui, d'abord, a pris la forme, comme on le
sait, du lien qui a été établi au point de vue des
liquidités entre la Société de
l'assurance-dépôts fédérale et la Régie de
l'assurance-dépôts du Québec. Je sais que le ministre des
Finances participe presque quotidiennement, plus que cela, plusieurs fois par
jour, au téléphone ou autrement, à des tractations qui
essaient d'arriver à régler le problème.
C'est sûr qu'il y a des inquiétudes. C'est normal qu'elles
se répercutent dans les journaux, y compris dans les journaux
spécialisés et, dans ce climat un peu beaucoup difficile, on fait
tout ce qu'on peut et l'intention demeure de faire tout ce qui est possible et
imaginable pour empêcher que soit trop écorché, si on veut,
ce mouvement qui a quand même joué un très grand
rôle.
Qu'on ne me demande pas ce matin, à la suite d'une rencontre qui
s'est terminée à je ne sais quelle heure hier et sur laquelle je
n'ai pas eu de rapport final, d'entrer dans quelque détail que ce soit.
Je suis bien placé pour ne pas le faire. Je n'en ai pas.
Une voix: ...
M. Lévesque (Taillon): Oui? On verra plus tard.
La construction du gazoduc
M. Fortier: M. le Président...
Le Président: M. le député d'Outremont,
question principale.
M. Fortier: ... j'avais une question pour le ministre du Travail
et de la Main-d'Oeuvre. J'ai cru le voir tout a l'heure. Est-il en Chambre ce
matin?
M. le Président, la question que j'ai à poser au ministre
du Travail et de la Main-d'Oeuvre est reliée à la construction du
gazoduc. Vous vous souviendrez que le 26 mai dernier, j'avais posé une
question pour souligner l'urgence de ce dossier, compte tenu des
investissements considérables et de la nécessité de la
pénétration du gaz au Québec pour assurer notre avenir
énergétique. Quand on sait que la construction du gazoduc
jusqu'à Trois-Rivières coûtera quelque 540 000 000 $, que
Gaz Métropolitain investira quelque 100 000 000 $ en dix ans et Gaz
Inter-Cité, 540 000 000 $ pour la distribution du gaz, on
s'inquiète à juste titre de la décision qui semble
évidente de la compagnie Trans Québec et Maritimes
d'arrêter les travaux si un accord n'est pas intervenu au cours de la
semaine prochaine.
Les journaux nous ont rapporté que le médiateur avait fait
rapport au ministre le 3 juin dernier. J'aimerais savoir du ministre si,
effectivement, il a reçu ce rapport qui faisait état, m'a-t-on
dit, de trois propositions. Qu'a-t-il fait pour régler ce
problème? Peut-il confirmer les allégations de la presse à
savoir que le projet pourrait être remis à l'an prochain ou remis
indéfiniment si le ministre n'intervenait pas d'autorité dans ce
dossier?
Le Président: M. le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre.
M. Marois: M. le Président, dans la foulée de ce
que j'ai déjà eu l'occasion de dire en réponse à
une question antérieure de la part du député d'Outremont,
effectivement, le dossier présente un caractère d'urgence parce
qu'il y a des échéanciers à respecter. Il y a cet
échéancier qui a été rappelé publiquement,
semble-t-il, en soirée hier par le vice-président de Trans
Québec et Maritimes, M. Archambault, et qui fixe la date du 25 juin
comme une date charnière extrêmement importante, pour en arriver
à une entente négociée dans ce dossier.
Comme je l'ai indiqué dans un premier temps, lors de la
commission parlementaire qui a entendu les parties, en janvier, j'avais
prié instamment les parties, conformément au rapport du
médiateur de l'époque, de retourner à la table de
négociations, de poursuivre leurs discussions pour en arriver à
une entente. C'était en janvier. Depuis ce temps, on connaît
l'état de la situation. J'ai effectivement mandaté M. Leboeuf qui
m'a présenté un rapport d'étapes au début de juin.
Par la suite, compte tenu de la situation, compte tenu des conséquences
extrêmement sérieuses à la fois sur le plan social et sur
le plan économique pour le Québec, compte tenu du fait aussi
qu'il y a comme enjeu le bien-être même de la population du
Québec, j'ai non seulement reconfirmé le mandat du
médiateur, M. Leboeuf, mais élargi son mandat et, à titre
de mesures et d'interventions d'un type absolument extraordinaire et
spécial, j'ai même demandé, en plus, à M.
Désilets, qui est directeur général des relations de
travail du ministère, d'intervenir dans ce dossier. On voit donc
à quel point c'est une mesure d'intervention extraordinaire. J'ai donc
élargi le mandat de ces personnes.
Effectivement, les parties syndicales les premières
intéressées et la partie patronale ont été
convoquées au ministère samedi matin, à 10 heures. Les
discussions, les rencontres de médiation se sont poursuivies tout au
long de la journée et il y a eu, par la suite, des échanges
durant la journée de dimanche. Il a commencé à se
dégager un commencement de consensus et d'accord sur deux des sept
points en litige, mais l'écart demeure encore considérable entre
les parties. Les rencontres se poursuivent aujourd'hui.
En vertu de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction, compte tenu de l'économie même des relations du
travail dans ce secteur, il me paraît extrêmement important, et
c'est possible pour les parties, d'en arriver à une entente, à la
condition que les parties acceptent de poursuivre les rencontres de
médiation sur une base de bonne foi, avec une volonté
arrêtée d'en arriver à une entente, et qui puisse
être fondée sur une entente qui soit à la fois raisonnable
et responsable. Je crois que c'est encore possible. Il est inexact de penser
qu'on puisse régler ce genre de dossier extrêmement complexe,
simplement quand il y a un problème comme celui-là, en mettant
tout cela entre les mains du ministre responsable des relations du travail au
Québec.
II faut que les parties impliquées, patronales et syndicales, se
rendent compte qu'elles ont une lourde responsabilité sur les
épaules et qu'elles peuvent, avec une volonté
arrêtée, convenir d'une entente qui tienne compte aussi des
intérêts de l'ensemble de la population du Québec. Je les
prie instamment de poursuivre dans le cadre des travaux de
médiation.
Le Président: M. le député
d'Outremont.
Question additionnelle.
M. Fortier: M. le Président, il me fait plaisir de
constater, tel que l'a dit le ministre, qu'il a commencé à se
dégager un commencement de consensus, mais il semble qu'on soit bien
loin du compte et que la gravité de la situation soit encore bien plus
grande que le ministre ne l'a dit.
Le 26 mai, lorsque j'ai posé cette question, le ministre a dit
qu'il n'est pas de l'autorité légale du ministre du Travail et de
la Main-d'Oeuvre d'imposer d'autorité une modification au décret.
Cependant, il semblerait bien que la loi lui donne ce pouvoir, si c'est dans le
meilleur intérêt public. Devant la gravité de la situation,
est-ce que le ministre peut nous dire s'il a l'intention d'intervenir
d'autorité d'ici une semaine, avant même que la compagnie
décide d'arrêter les travaux pour de bon?
Le Président: M. le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre.
M. Marois: M. le Président, je pense bien que le
député connaît l'économie générale,
les relations du travail dans le secteur de la construction au Québec;
je pense que le député connaît aussi bien la Loi sur les
relations du travail dans ce secteur.
Une voix: Ce n'est pas sûr.
M. Marois: D'une part, l'économie même des relations
du travail dans le secteur de la construction prévoit qu'il revient,
dans un premier temps, aux parties de négocier une entente. On ne va pas
revenir à la bonne vieille époque précédant les
lois actuelles. On ne va certainement pas revenir à l'époque des
situations décrites par la commission Cliche, c'est pourquoi j'en
appelle à nouveau, instamment, à la volonté des parties.
Je crois qu'il est possible que les parties puissent en arriver à un
règlement raisonnable et responsable en tenant compte de
l'intérêt public.
Dans un deuxième temps, le député sait aussi sans
doute que le ministre peut ultimement intervenir au-delà des moyens
déjà extraordinaires que je viens d'évoquer qui sont les
moyens de cette médiation d'un type tout à fait spécial.
Mais il sait aussi que cela suppose, le cas échéant, la
convocation d'une commission parlementaire, mais une commission parlementaire
qui, à toutes fins utiles, si les parties ne s'entendent pas, en
viendrait à quelle conclusion? À constater un désaccord.
Et constatant un désaccord, à faire en sorte que le ministre
rédige, en quelque sorte, sur le coin de la table, une convention
collective. (10 h 50)
Alors là, si on pense qu'on va revenir à cette vieille
époque où, au-delà des règles établies de
relations de négociation normale, si on remet constamment les
problèmes entre les mains du ministre pour qu'il les règle, ce
n'est pas conforme du tout à l'esprit nouveau qui est établi par
la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. C'est
pourquoi à nouveau j'invite instamment les parties, et je sais que c'est
possible qu'elles puissent en arriver à une entente
négociée.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, très
brièvement, au ministre du Travail. Le ministre du Travail sait
pertinemment que la loi lui permet d'intervenir de son propre chef, de
convoquer une commission parlementaire et ultimement d'en arriver à une
modification au décret.
Le problème soulevé par le député
d'Outremont prévoit et indique que le ministre du Travail doit
intervenir dans les plus brefs délais, quitte à convoquer une
commission parlementaire.
Comment le ministre peut-il être justifié à ce
moment-ci de refuser d'intervenir, de modifier de son propre chef le
décret, alors que lui-même, en janvier dernier, à la suite
du décret librement négocié entre les parties, a, comme
ministre du Travail, proposé plusieurs modifications au décret,
qui n'avaient pas été demandées par les parties qui ont
négocié le décret? Vous l'avez déjà fait
dans le passé et vous le refusez avant le 25 juin, avec les impacts que
cela a. Comment pouvez-vous justifier ça?
Le Président: M. le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre.
M. Marois: M. le Président, il faut distinguer deux choses
bien clairement. Le député de Portneuf sait fort bien que,
lorsque dans la foulée de la convention collective
négociée, il y a eu une première publication du
décret, les parties ont été convoquées à
partir d'une liste établie d'un certain nombre de questions ou de points
de ce décret ou de cette convention qui nous semblaient illégaux.
On a attiré l'attention des parties sur chacun de ces points et on
les a entendues sur ces questions.
En plus, à la fin - le député s'en souviendra -
j'ai prié instamment les parties de retourner à la table de
négociation pour convenir d'une entente sur la question des travaux du
gazoduc. C'est le premier volet.
Il serait extrêmement dangereux pour l'avenir des relations du
travail du secteur de la construction de laisser entendre aux parties, quelles
qu'elles soient, syndicales ou patronales, que peu importe l'état normal
de relations du travail, peu importe la base normale de négociation
d'ententes entre les parties, ce que permet la loi, le député
sait fort bien qu'en tout temps les parties peuvent s'asseoir en cours de
route, convenir d'une entente, la transmettre au ministre qui, par la suite,
l'intègre au décret, il connaît très bien ce
mécanisme; il me paraît extrêmement dangereux, dis-je, de
laisser entendre aux parties ceci: Entendez-vous; si vous ne vous entendez pas,
ça n'a pas de conséquences historiques, le ministre va vous
régler ça sur le bras, par le biais d'une commission
parlementaire.
On voit tout de suite où ça nous mènerait dans le
domaine des relations du travail, dans ce secteur en particulier. Je demeure
convaincu - c'est pourquoi, jusqu'à nouvel ordre, il n'est pas de mon
intention de convoquer une commission parlementaire -que les parties peuvent en
arriver à une entente. Ce n'est pas vrai que deux véhicules
automobiles contenant une douzaine de personnes vont faire la loi sur les
chantiers de construction au Québec, qu'on va revenir à la bonne
vieille époque et qu'on va nous négocier sur le bras des
conditions inacceptables et qui auraient un effet de domino sur l'ensemble des
autres métiers de la construction. Il faut absolument éviter cela
et tout faire pour ne pas revenir à cette époque. Il est possible
pour les parties de convenir d'une entente; on a pris des mesures de
médiation extraordinaires, les rencontres se poursuivent encore
aujourd'hui. Je demande de nouveau aux parties de convenir entre elles d'une
entente, ce qu'elles peuvent faire.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le député d'Outremont.
M. Fortier: Elle s'adresse au ministre de l'Énergie et des
Ressources. Compte tenu du fait que le programme d'Hydro-Québec,
jusqu'à l'an 1990, prévoyait une pénétration du gaz
d'environ 20% en 1995, et que cette pénétration diminuait
considérablement le programme d'Hydro-Québec, le ministre a-t-il
consulté cette dernière pour voir si elle serait en mesure de
faire face à la demande d'électricité additionnelle qui
sera requise si la pénétration du gaz ne se fait pas?
Le Président: M. le député d'Outremont, il
ne s'agit pas d'une question additionnelle...
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Question principale, M. le député de Rosemont.
Des voix: Bravo!
M. Paquette: Merci, M. le Président.
Une voix: II l'a eue.
M. Paquette: Ce n'est pas facile, quand on est de ce
côté-ci de la Chambre, d'obtenir une question, M. le
Président.
Une voix: Va-t'en de l'autre bord! Des voix: Ah!
Une voix: Va-t'en dans l'Opposition! M. Paquette: M. le
Président.
Le Président: M. le député de Rosemont, la
patience est toujours récompensée.
Parachèvement du toit du stade
olympique
M. Paquette: Merci, M. le Président. La population de
Montréal connaît le gâchis olympique dont a
hérité le présent gouvernement du Québec, notamment
en ce qui concerne le parachèvement du toit du stade olympique. Vendredi
dernier, la Société d'énergie de la Baie James soumettait
un rapport préliminaire qui semble démontrer que les faiblesses
connues du mât en ont révélé d'autres, ce qui
amènerait une augmentation du coût de parachèvement du
stade de 58 000 000 $ à 110 000 000 $.
Des voix: Ah!
M. Garon: Trop d'argent dans la caisse électorale...
M. Paquette: Ma question au ministre responsable...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, voici ma question au
ministre responsable des installations olympiques. Est-ce qu'il a l'intention
de redéfinir le mandat de la Société d'énergie de
la Baie James de façon qu'elle étudie d'autres solutions que la
solution Taillibert?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, j'ai eu l'occasion d'exprimer
hier, lors de l'étude des crédits de la Régie des
installations olympiques, que j'endosse entièrement la position que M.
Saulnier et le conseil d'administration de la RIO ont prise à cet
égard et le rapport intérimaire de nos mandataires sur cette
réparation majeure que constitue le renforcement de la base du mât
et la toiture mobile. L'information qui nous a été donnée
et qui a été communiquée sur une base préliminaire,
mais suffisamment importante pour permettre à la régie de prendre
cette décision, c'est que le calendrier de réalisation, si cela
devait se faire, s'étalerait sur 40 mois et qu'à cet
égard, les 40 mois menant jusqu'en 1985, le parachèvement a des
effets de l'ordre d'environ 33 000 000 $ sur les coûts prévus
originellement.
Deuxièmement, il faut absolument renforcer la base du mât,
comme chacun le sait maintenant et - cela est connu même si, de l'autre
côté, on fait semblant de ne pas le savoir - de la façon
que le mât a été coulé en 1976, il y a un
déficit de précontrainte très grave à la base du
mât qui fait que tout poids additionnel qui serait ajouté
risquerait de faire apparaître des fissures. En ce sens, la solution
trouvée par la Société d'énergie de la Baie James,
jusqu'à ce jour, implique aussi des coûts additionnels.
Dans les circonstances, délais beaucoup plus longs que
prévus et coûts additionnels plus élevés que
prévus, la Régie des installations olympiques a
décidé de demander à la Société
d'énergie de la Baie James de lui fournir également d'autres
options avant qu'elle fasse sa recommandation finale, à l'automne, au
gouvernement du Québec. En ce sens-là, il m'apparaît que
c'est une décision très sage.
M. Paquette: Question additionnelle, M. le Président.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, il y a environ un mois, on
apprenait que l'architecte du stade olympique, M. Taillibert, avait
intenté une poursuite de 26 000 000 $ contre la ville de Montréal
et la Régie des installations olympiques.
M. Garon: Le pourcentage à la caisse électorale qui
est trop fort.
M. Paquette: M. le Président.
Le Préaident: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Paquette: On me dit que le pourcentage à la caisse
électorale du Parti libéral a peut-être été
trop élevé.
Une voix: Demandez cela au député de
Châteauguay.
M. Paquette: Dans cette vague de récupération,
entre autres les 750 000 $ que nos amis libéraux doivent toujours aux
fonds publics, est-ce que le ministre croit qu'il est possible d'attribuer une
responsabilité pour ces faiblesses structurales dans la construction du
stade olympique? Est-ce qu'une partie des responsabilités est au niveau
de l'architecte ou au niveau des entrepreneurs? Est-ce qu'une étude a
été entreprise là-dessus ou s'il y en aura une?
Le Président: M. le leader du gouvernement. (11
heures)
M. Charron: Dans un sens, oui, nous possédons un certain
nombre d'informations que nous allons étayer dans le plaidoyer devant
les tribunaux, mais puisqu'il s'agit d'un domaine sub judice actuellement, je
n'oserais pas émettre d'opinion ni sur le personnage ni sur la cause qui
est devant les tribunaux. Je vais simplement indiquer notre opinion et ce
pourquoi nous avons mille fois conseillé à M. Taillibert, s'il
n'était pas satisfait du règlement que nous lui avions offert, de
recourir aux droits qui étaient les siens. Il y a recouru dans les
dernières minutes, dans les derniers jours où cela lui
était permis, cinq ans après la fin de son contrat.
Le gouvernement du Québec, après une analyse
détaillée - nous fonctionnions sans contrat, à la
pièce et sur une oeuvre unique au monde et encore non terminée -
a légitimement cru bon, après plusieurs analyses, d'offrir un
règlement qui nous paraissait convenable à l'architecte en
question. Il a été payé, l'argent a été
versé en 1977 ou 1978, il s'agit de 6 800 000 $. À nos yeux, et
encore aujourd'hui, c'était déjà trop et il n'est
absolument pas question d'y ajouter à moins qu'on fasse la preuve que
l'architecte mérite plus; c'est ce que les tribunaux nous permettront de
savoir. M. Taillibert a intenté une action contre la ville de
Montréal, son employeur, et contre la Régie des installations
olympiques, l'employeur substitué, de l'ordre de 26 000 000 $, mais il
faut la décrire: 10 000 000 $ plutôt que les 6 800 000 $ que nous
lui avons offerts et 16 000 000 $ en intérêts pour l'argent perdu
depuis 1972, début de son entrée dans le dossier et ce qu'il
appelle, dans l'action qu'il nous a intentée, l'érosion
monétaire depuis ce temps.
L'information qu'on m'a donnée et que me transmet le contentieux
de la régie est
que notre cause, à nos yeux, est fort bonne et, en
conséquence, nous laisserons la justice suivre son cours.
Le Président: Question principale, M. le
député de Beauce-Sud.
Indemnités versées pour des pertes non
prévues
M. Mathieu: Merci, M. le Président.
M. Chevrette: Ah! Cela va être une excellente question.
M. Mathieu: Ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation. Nous savons que le
Vérificateur général a remis son rapport annuel pour
l'année 1979-1980 il y a quelques semaines. Or, selon ce rapport, il y a
eu illégalité dans le paiement d'indemnités par la
Régie de l'assurance-récolte. Cela démontre pour le moins
une mauvaise administration et si on se rapporte aux années
concernées, 1979-1980, cela démontre également des faits
troublants en période référendaire et
électorale.
Des voix: Ah!
M. Mathieu: M. le Président, je me permets, pour la bonne
compréhension du problème, de citer quelques lignes du rapport du
Vérificateur général pour étayer ma question.
"Indemnités versées pour des pertes non prévues par les
dispositions de la loi. Les indemnités versées par la
régie en 1978-1979 et 1979-1980 pour des pertes qui, à notre
avis, confirmé par une opinion juridique, n'étaient pas couvertes
par la loi et totalisent 856 000 $."
Des voix: Oh! Oh! M. Marx: Patronage!
M. Mathieu: "Nous trouvons inadmissible que la régie, dans
le cours de ses opérations, outrepasse la loi et les règlements."
Je voudrais demander au ministre s'il a pris connaissance de ce rapport;
j'aimerais savoir à quelle région s'appliquait principalement ce
trop-payé, combien il y a de producteurs impliqués et qu'entend
faire le ministre pour que de telles situations ne se répètent
plus à l'avenir, car on sait que s'il y a un trop-payé, ce sont
les producteurs qui le paient par leurs primes.
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture.
M. Garon: Au cas où on penserait que le président
de la régie est un séparatiste notoire, il a été
nommé dans le temps des libéraux et il était plutôt
reconnu pour ses allégeances libérales. J'aimerais vous dire que
la direction de l'administration de la Régie de
l'assurance-récolte qui était en activité à ce
moment-là avait été nommée par le Parti
libéral.
Des voix: Oh! Oh!
M. Garon: Je vous ferai remarquer qu'à la suite du rapport
du Vérificateur général, la direction...
Une voix: Oh! Oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.
M. Garon: Je voudrais dire, M. le Président, que
relativement à ces gens, étant donné que c'est pour dix
ans, donc quand je suis arrivé en 1976, ils étaient en fonction,
nommés, même, par les libéraux à ce moment, si on
soulève une question d'incompétence, il faudrait peut-être
accuser les nominations faites par votre propre parti. Deuxièmement,
comme vous dites, dans votre rapport, qu'il s'agit d'une opinion juridique du
Vérificateur général, les gens de la Régie de
l'assurance-récolte, à leur décharge, me disent qu'il y a
une question d'interprétation du règlement et qu'eux
considéraient que, dans l'application de ce règlement, ils
pouvaient payer. Maintenant, il semble qu'il y aurait un conflit d'opinions sur
l'interprétation du règlement. Un instant. Il y a plusieurs
régions concernées. Maintenant...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Garon: Voulez-vous attendre?
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre. À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Garon: Pardon? Alors, M. le Président, depuis ce temps,
l'assurance-récolte et l'assurance-stabilisation des revenus ont
été fusionnées et il y a de nouveaux administrateurs
à la Régie des assurances agricoles. Maintenant, je peux vous
dire qu'au point de vue des chiffres, il faudrait que je les vérifie
pour l'ensemble des données sur le montant complet. J'ai donné un
certain nombre d'informations en commission parlementaire hier pour une partie
des régions mais pour avoir le montant complet - il y a une
séance demain - il faudrait relever les données pour voir tous
les producteurs qui sont couverts dans toutes les régions
concernées.
M. Mathieu: Question additionnelle.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Je voudrais savoir, M. le Président, devant
l'affirmation on ne peut plus claire du Vérificateur
général que c'est un montant payé sans droit, je voudrais
savoir si le ministre ou la régie entend réclamer le
trop-payé et si le fonds d'assurance demeure suffisant et
sécuritaire.
Le Président: M. le ministre.
M. Garon: M. le Président, je pense que le
député lui-même, dans sa question, tout à l'heure, a
donné une partie de la réponse. Quand il a dit que le
Vérificateur général disait que selon un avis juridique -
bien oui, vous avez déjà vu ça des avis juridiques
contradictoires; j'imagine que, comme avocat, vous avez déjà vu
ça, comme député de Marguerite-Bourgeoys - la direction de
la Régie des assurances agricoles a préféré donner
le bénéfice du doute aux agriculteurs et payer, dans ces
conditions.
Le Président: Fin de la période des questions. Des
ministres ont des compléments de réponses à donner. Tout
d'abord, le ministre de l'Habitation à une question, je pense, du
député de Mont-Royal à qui je permettrai une courte
question additionnelle, et par la suite, l'adjoint parlementaire au ministre du
Travail, à une question du député de Berthier, je pense.
M. le ministre de l'Habitation.
Copie de lettre au ministre
de la Justice et autres documents relatifs à la
SHQ
M. Tardif: M. le Président, en complément de
réponse, et avec le consentement de cette Assemblée, j'aimerais
déposer une partie des documents demandés par l'Opposition
officielle à la commission parlementaire des crédits, le jeudi 11
juin dernier. Je dépose donc, M. le Président, la lettre que je
faisais parvenir au ministre de la Justice et Procureur qénéral,
le 12 décembre 1980. Deuxièmement, M. le Président, les
documents que m'a transmis ce jour le président de la
Société d'habitation du Québec relativement aux questions
suivantes: 1- Le règlement hors cour des poursuites dans le dossier de
l'Office municipal d'habitation de Montmagny. 2- Le présumé
conflit d'intérêts à Montmagny. 3-Les rapports de M.
Latouche en regard de projets d'entrepreneurs, donc les documents de la
société par rapport à cela. 4- Les noms des personnes qui
ont été payées entre janvier et septembre 1980 dans le
dossier de la Société de logements centre-ville de
Montréal. M. le Président, il y aura des exemplaires ici pour
tous les membres de cette Assemblée ainsi que pour la tribune de la
presse. Merci, M. le Président. (11 h 10)
Le Président: Documents déposés.
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président: Question additionnelle, courte, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: ...le ministre peut-il nous dire s'il a envoyé
une copie du document de l'étude que son ministère et
lui-même avaient demandée au ministre des Finances, tel que
stipulé dans l'étude par celui qui l'a faite? Autrement dit, il y
a une recommandation ici d'envoyer cette étude au ministre des Finances.
L'avez-vous envoyée et, si vous l'avez envoyée, pourriez-vous
déposer copie de la lettre qui indiquait de l'envoyer au ministre des
Finances?
Le Président: M. le ministre.
M. Tardif: Non, M. le Président, cette étude n'a
pas été envoyée. Il s'agit d'un document qui n'a aucune
valeur officielle au sein de la société.
Des voix: Ah!
M. Tardif: C'est une question d'opinion par quelqu'un
complètement étranger, M. le Président, et ce
document...
M. Lalonde: C'est-à-dire votre opinion. Ce n'est pas
étranger du tout, c'était votre employé.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Tardif: ...présentement, n'a pas été
transmis.
Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du
Travail.
M. Dean: M. le Président...
M. Ciaccia: Question de privilège, M. le
Président!
Le Président: Question de privilège, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Le ministre vient d'induire la Chambre en erreur en
disant que ce document a été préparé par quelqu'un
complètement étranger, alors que le document est signé:
Préparé par Yvan Latouche, division des réparations
majeures, Société d'habitation du Québec.
Une voix: Un étranger, n'est-ce pas?
Une voix: Ce n'est pas votre employé?
M. Ciaccia: C'est un employé de la Société
d'habitation du Québec qui transmet un document au ministre.
Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du
Travail.
Grève à la traverse de Sorel
M. Dean: M. le Président, il me fait plaisir de fournir
les réponses aux questions posées hier en Chambre par M. le
député de Berthier et le député de
Joliette-Montcalm.
En ce qui regarde le traversier Sorel-Saint-Ignace, effectivement, il y
a grève depuis le 12 juin à 8 h 30 et le ministère du
Travail n'a pas eu d'avis de cette grève. Il y a douze salariés
en grève sur 36, soit les matelots et les huileurs. Aucune demande de
conciliation n'a été acheminée au ministère
jusqu'à maintenant. Aujourd'hui, M. Désilets, le directeur des
relations du travail du ministère, a communiqué avec les parties
afin de leur offrir les services du ministère. Si les parties ne nous
font pas de demande de conciliation, nous nommerons un conciliateur d'office
dans les jours qui suivent. Les deux points majeurs en suspens sont les
salaires et la création d'un bureau d'embauche.
Je réfère le député à la partie de
réponse qui a été fournie hier par le ministre des
Transports sur cette question des deux points en litige.
Le Président: Avez-vous une courte question additionnelle,
M. le député de Berthier? Non?
M. Pagé: Oui, à ce sujet. Comment l'adjoint
parlementaire...
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales, en
complément de réponse.
M. Pagé: M. le Président, j'ai une question
additionnelle très brève sur le sujet, à la suite du
complément de réponse de l'adjoint parlementaire.
Le Président: D'accord.
M. Pagé: L'adjoint parlementaire vient de nous indiquer
que si les parties ne demandaient pas la conciliation, le ministère
lui-même verrait à nommer le conciliateur. Première
question: Dans quel délai? Deuxièmement: Est-ce un nouvel usage
qu'on entend instaurer au ministère, à savoir que si les parties
ne le demandent pas, vous désignerez un conciliateur d'office?
Le Président: M. l'adjoint parlementaire.
M. Dean: Dans quel délai? J'ai dit dans les quelques jours
qui suivent, parce qu'on reconnaît l'urgence de la situation. Il s'agit
d'un service de transport public on ne peut plus essentiel à la
région en question.
Deuxièmement, le Code du travail prévoit, que je sache,
à défaut d'une demande de conciliation par les parties que le
ministre a l'autorité de nommer un conciliateur d'office s'il le juge
à propos. Or, dans ce genre de litige, le ministère le juge
à propos.
Le Président: M. le ministre des
Affaires municipales, en complément de réponse à
une question du député de Maskinongé.
Enquête sur le service de
récréation de Shawinigan
M. Léonard: M. le Président, je voudrais simplement
donner un complément de réponse. D'abord, sur la ville de
Shawinigan, il ne s'agit pas d'une enquête de la Commission municipale du
Québec, mais d'une vérification faite par le ministère des
Affaires municipales. Mon prédécesseur avait autorisé
cette vérification le 18 septembre 1980. Le travail s'est
déroulé à l'automne et à l'hiver et le
vérificateur ou les vérificateurs ont présenté leur
rapport au directeur de la direction générale de l'analyse
financière le 27 avril 1981, pour vous mettre dans les
échéances. Celle-ci a présenté ses avis au
sous-ministre le 14 mai et les services du contentieux du ministère ont
présenté leur avis le 8 juin.
Tous les avis concordent à l'heure actuelle à ce sujet. Il
y a eu des problèmes administratifs, mais qui doivent se régler
dans la ville de Shawinigan par l'administration de Shawinigan. Le rapport ne
justifie pas l'intervention du ministre ou de la Commission municipale du
Québec dans ce dossier. Il s'agit donc de problèmes
administratifs qui doivent se régler à l'interne.
Le Président: Courte question additionnelle, M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, à la suite de ce
rapport, est-ce que le ministre a au moins l'intention de demander à
celui qui l'a rédigé de retourner voir les gens concernés,
la ville de Shawinigan, pour leur dire quelles sont les choses à
corriger et faire rapport pour que les gens le sachent? On garde cela au
ministère et personne ne sait ce qui s'est passé. On ne sait
même pas s'il y a des correctifs à apporter.
Le Président: M. le ministre.
M. Léonard: II y a eu, évidemment, des
personnes interrogées et les problèmes administratifs qui
ont été soulevés l'ont été, je pense bien,
à la connaissance des intéressés. On me rapporte aussi
que, dans la plupart des cas, les correctifs ont déjà
été apportés ou sont en voie de l'être sur le plan
administratif.
Le Président: Motions non annoncées. Enregistrement
des noms sur les votes en suspens.
Avis à la Chambre.
M. le leader du gouvernement.
Avis à la Chambre
M. Charron: M. le Président, j'ai annoncé hier que
ce serait la fin de l'étude des crédits, nous sommes à une
heure près de l'avoir fait. Lors de la commission parlementaire de la
présidence du conseil et de la constitution, hier, ç'a pris un
peu plus de temps que prévu et, finalement, les deux partis politiques
présents ont convenu que la dernière heure, celle devant
être consacrée aux crédits du ministre d'État au
Développement économique, serait, par consentement unanime,
reportée à une troisième séance qui aurait lieu ce
matin, plutôt que d'avancer plus longuement dans la nuit. Je remercie mes
collègues d'avoir conclu cette entente.
Je fais donc motion, sur la base du consentement donné hier, pour
que, tout de suite jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et
de 20 heures à 24 heures les commissions suivantes se réunissent:
à la salle 81-A, celle de la présidence du conseil et de la
constitution pour l'heure prévue pour l'étude des crédits
du ministère d'État au Développement économique. Au
salon rouge, c'est la commission de la justice, pour l'étude du projet
de loi privé no 262, ce qui devrait durer jusque vers midi, puisqu'il y
a un seul projet de loi et, de midi à 13 heures, c'est la commission des
institutions financières qui y siégera pour l'étude des
projets de loi privés nos 224, 266, 202, 254, 213 et 219. Toujours au
salon rouge, mais à compter de 15 heures jusqu'à 18 heures, c'est
celle des affaires municipales, qui siégera pour l'étude des
projets de loi privés nos 210, 212, 245, 255 et 220. De plus, à
la salle 91-A, à partir de tout de suite jusqu'à minuit -
celle-là n'aura pas de substitution -la commission des engagements
financiers siégera afin d'étudier les engagements financiers du
gouvernement pour les mois de février, mars et avril.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Seulement une précision. Si je comprends bien,
la commission des institutions financières n'aura qu'une heure pour
adopter six ou sept projets de loi privés. Il est possible que ça
déborde dans l'après-midi.
M. Charron: Le député fait une bonne remarque, M.
le Président. On devrait plutôt dire et souhaiter que la
commission de la justice commence à 11 h 45 plutôt qu'à
midi, puisqu'il y a un seul projet de loi privé au nom de ce
ministère et un seul article, et j'imagine que la commission, d'ici 11 h
45, pourra en disposer. Si jamais, à 11 h 45, on n'avait pas
terminé, on m'en avisera sur-le-champ, à 13 heures; je ne serai
pas très loin, on pourra s'entendre sur l'organisation des travaux.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Sainte-Anne, en vertu de l'article 34.
M. Polak: En vertu de l'article 34...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant, M. le
député. J'aimerais savoir si la motion requérant le
consentement pour que siègent trois commissions en même temps que
l'Assemblée est adoptée?
M. Levesque (Bonaventure): Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Recours à l'article 34
En vertu de l'article 34, M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, j'aimerais poser une question
au leader du gouvernement concernant certains renseignements. J'ai
demandé aux deux ministres concernés certains renseignements. Il
s'agit d'abord de la ministre de la Fonction publique, à qui j'avais
demandé, il y a plus d'une semaine maintenant, le nombre d'occasionnels
à l'emploi du ministère au 31 mars 1981 comparativement au 30
mars 1980. Ce renseignement est assez important et j'aimerais l'avoir
immédiatement. Je ne sais pas où c'en est rendu. (11 h 20)
Deuxièmement, j'ai demandé des renseignements au ministre
du Travail et de la Main-d'Oeuvre, il s'agit d'un voyage fait par le
président, le vice-président et des hauts fonctionnaires de la
CSST, la Commission de la santé et de la sécurité du
travail, de date récente, en Italie, apparemment par le président
et le vice-président, et d'un autre voyage, tout récemment, au
Yukon. J'ai demandé combien de personnes cela concernait, quels
étaient les frais, quel était le but, etc.
Troisièmement, j'ai demandé au ministre des renseignements
sur l'achat d'un
ordinateur IBM, encore pour la CSST. Est-ce qu'il peut me renseigner
là-dessus, M. le Président?
M. Charron: M. le Président, je n'ai pas interrompu le
député, mettant plutôt au compte de l'inexpérience
ce genre de question. Selon notre règlement - et ses collègues
d'expérience lui indiqueront le chemin pour le faire - c'est le genre de
question idéale pour ce qu'on appelle les questions inscrites au
feuilleton. Je remarque, à moins que je ne me trompe, que l'Opposition
n'en a guère inscrit au cours de cette session, mais le règlement
est toujours ouvert à ce sujet.
Lorsqu'on veut avoir des renseignements sur des effectifs, et les deux
questions que vient de poser le député sont typiques des
questions à adresser au feuilleton, lorsqu'on a des questions sur des
changements d'effectifs dans un ministère ou dans un organisme
gouvernemental ou des questions sur des comptes de dépenses, des frais
de voyage, etc., ce sont habituellement des questions qu'on inscrit au
feuilleton et sur lesquelles une réponse est donnée par le
ministre par la suite.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je pense que vous avez eu au niveau du règlement
ce qui en est. À moins que ce soit vraiment en vertu de l'article 34,
parce qu'en vertu de l'article 34, c'est sur les travaux de l'Assemblée
nationale et des commissions parlementaires, je vous demanderais de retenir vos
questions soit selon la formule proposée par le leader parlementaire du
gouvernement ou encore au niveau des questions en Chambre demain matin.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire
de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Je comprends que M. le leader
parlementaire du gouvernement a suggéré au député
de poser ses questions au feuilleton.
J'ai deux remarques brèves à faire à ce sujet. On
sait fort bien que la session se termine demain et que, quelles que soient les
questions que l'on puisse poser ou placer au feuilleton, elles mourront de leur
belle mort avec le feuilleton et on n'en entendra plus parler.
Deuxième remarque brève que je voulais faire, c'est que,
justement, l'article 34, au paragraphe 1, indique qu'à ce moment-ci un
député peut poser des questions relativement aux travaux de
la
Chambre. J'ai compris - et si je fais erreur, le député
voudra bien me corriger - que les ministres en question s'étaient
engagés à donner des renseignements, et cela à partir
d'une commission parlementaire, à fournir, lors du dépôt de
documents ou autrement, des réponses par écrit aux questions
posées par le député.
Or, M. le Président, il n'y a rien de mieux et de plus
approprié, je vous le soumets respectueusement, que cette disposition de
l'article 34, elle permet justement au député de Sainte-Anne de
poser la question qu'il a posée effectivement au leader parlementaire du
gouvernement. Je demanderais donc au leader parlementaire du gouvernement de se
conformer aux dispositions de notre règlement et de promettre gentiment
au député de Sainte-Anne qu'il verra les collègues en
question et que les réponses parviendront avant la fin de la session,
réponses aux questions légitimes posées par le
député de Sainte-Anne.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire
du gouvernement.
M. Charron: Cela va.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant, au
niveau de la demande faite par le leader parlementaire de l'Opposition. Le
leader sait très bien qu'il a élargi énormément la
teneur de l'article 34, paragraphe 1, en sachant très bien que, dans
plusieurs commissions parlementaires, des demandes de ce genre sont faites et
que les ministres, ordinairement, y répondent dans la majorité
des cas.
Cependant, si c'était dans le but d'accélérer les
réponses, le message est fait.
M. le député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, le 26 mai, je
déposais en cette Chambre une pétition - et cela s'adresse au
leader du gouvernement - concernant le cas de Mme Lowrey, à l'emploi de
la firme E. B. Eddy qui a été congédiée à
cause des restrictions de la Loi de l'Office de la langue française. Le
28 mai j'interrogeais le ministre de l'Éducation dans cette Chambre. Le
ministre, à ce moment-là, m'informait qu'il allait me convoquer
dans les prochaines heures ou, sinon, la prochaine journée. Je lui ai
écrit cette même journée, le 28 mai, M. le
Président, et je n'ai pas eu de réponse depuis. J'aimerais savoir
du leader parlementaire si...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je ne voudrais pas qu'on abuse de l'article 34. Je
comprends très bien le but de votre question mais, en vertu de l'article
34, ce sont des questions qui ont été posées lors de la
période de questions. Vous aurez
l'occasion de la poser à nouveau demain au ministre
concerné. L'article 34 est quand même bien clair, il se rapporte
aux travaux de la Chambre, et les questions sont posées au leader du
gouvernement. J'aimerais, s'il vous plaît, qu'on puisse vraiment utiliser
l'article 34 tel qu'il est prévu par le règlement.
M. le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'on pourrait vous demander de
vérifier si vous, ou un de vos collègues, n'auriez pas
reçu une demande, de la part du ministre de l'Éducation, qui
serait de nature à répondre à la question posée par
le député de Hull, c'est-à-dire si le ministre de
l'Éducation vous a indiqué son intention de donner un
complément de réponse au député de Hull.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous vérifierons.
M. le leader du gouvernement, à moins qu'il n'y ait d'autres questions
en vertu de l'article 34.
M. le député d'Outremont.
M. Fortier: Est-ce que le leader peut nous indiquer si le projet
de loi no 20, qui établit un moratoire pour les propriétés
indivises, va être approuvé d'ici demain après-midi?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Oui, M. le Président, le projet de loi est
à l'ordre du jour, demain matin, après la période de
questions.
M. Fortier: Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Verdun.
M. Garon: Toujours au leader du gouvernement, au sujet du
Placement étudiant. Le ministre du Travail devait me donner une
réponse depuis deux semaines. J'étais absent hier pour m'occuper
des jeunes, alors j'espère que j'aurai une très bonne
réponse.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement a-t-il une réponse.
M. Charron: Non, M. le Président, je n'ai pas de
réponse et le député de Verdun sait très bien
pourquoi je n'ai pas de réponse.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Affaires du jour.
M. le leader du gouvernement.
Projet de loi no 17
Deuxième lecture
M. Claude Charron
M. Charron: M. le Président, je voudrais d'abord
solliciter un consentement, selon ce que permet l'article 119a de notre
règlement, pour déférer en commission parlementaire, sans
débat de deuxième lecture, un projet de loi qui apparaît
actuellement au feuilleton.
Mon collègue de la Justice m'a assuré, avant de se rendre
en commission parlementaire, que son vis-à-vis, critique de l'Opposition
en matière de justice, approuvait cette démarche. Je donne donc
de bonne foi cette information que le projet loi traditionnel, qui modifie
certaines lois relatives à l'administration de la justice, le projet de
loi omnibus de la justice, déposé hier, et qui porte le no 17,
soit considéré par la commission parlementaire de la justice ce
soir. Nous nous fierons au travail de nos collègues en commission pour
savoir si, demain, nous devons mettre fin à ce projet,
c'est-à-dire en adopter la troisième lecture et en faire une loi
de cette Assemblée.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, s'il y a eu
une telle entente, je pense bien que nous devrons y souscrire. Cependant,
j'aimerais que la Chambre soit informée, au moins pour l'information du
public, de ce que ça comporte. J'imagine qu'on l'a fait en lisant les
notes explicatives, mais ça aurait pu nous échapper. Je me
demande si M. le leader parlementaire du gouvernement ne pourrait pas, avant
que le tout soit déféré à la commission
parlementaire, nous rappeler au moins brièvement ce dont il s'agit, afin
qu'on n'ait pas l'air de déférer dans la pénombre des
choses qui intéressent les citoyens.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Charron: M. le Président, je crois que je peux
difficilement avoir une expression plus juste que l'expression "omnibus" en ce
qui concerne cette loi. En effet, si le député de Bonaventure ou
n'importe quel membre de l'Assemblée prend ce texte, il verra que cette
loi se trouve à modifier un article ici, un article là du Code
civil, du Bureau d'enregistrement, de la Loi sur les jurés, de la Loi
sur les loteries et courses - j'espère qu'il n'y a aucun rapport entre
les deux - de la Loi sur les poursuites sommaires, de la Loi sur les tribunaux
judiciaires et sur les permis d'alcool. Enfin,
il s'agit effectivement d'une mise à jour d'un certain nombre de
petites lois et je laisserai absolument la commission libre d'adopter cette loi
en tout ou en partie. Ce que je souhaite, c'est qu'avant la prorogation de la
session, un examen de ce projet de loi ait pu avoir lieu en commission
parlementaire et on se fiera au rapport de la commission pour prendre une
décision finale. (11 h 30)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Gérard-D. Lévesque
M. Lévesque (Bonaventure); M. le Président, nous
allons donner notre consentement pour cette procédure, mais nous allons,
comme l'évoque le leader parlementaire du gouvernement, soigneusement
étudier chacun des articles. Je sais que mon collègue, le
député de D'Arcy McGee qui est en même temps critique
à la justice, va regarder de très près chacun de ces
articles. Il s'agit, à première vue, de correction d'erreurs pour
la plupart qui ont pu se glisser dans des projets de loi peut-être
adoptés à la vapeur, je ne le sais pas.
De toute façon, M. le Président, nous allons accepter
cette procédure, mais nous aurons l'occasion, à la période
du rapport, de revenir sur certains articles, là où il serait
approprié et opportun de revenir, pour en discuter ici même
à l'Assemblée.
Une voix: D'accord.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avec le consentement, M.
le leader du gouvernement, au nom du ministre de la Justice, propose la
deuxième lecture du projet de loi no 17, Loi modifiant certaines lois
relatives à l'administration de la justice. Cette motion est-elle
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de la justice
M. Charron: Je propose que le projet de loi soit
déféré à la commission parlementaire de la
justice.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Charron: Je propose que la commission de la justice se
réunisse à la salle 81-A à 20 heures, ce soir, pour
l'étude article par article de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Charron: Je voudrais indiquer tout de suite à
l'Assemblée qu'il nous reste environ deux heures de débat sur le
discours sur le budget, dont l'heure de réplique du ministre des
Finances. J'ai l'intention de garder à l'horaire d'aujourd'hui la
période de 16 heures à 18 heures pour la fin du débat sur
le discours sur le budget. Il nous reste deux heures cinq minutes, selon les
indications que les officiers de la Chambre m'ont fournies. Donc, où que
nous soyons rendus au menu, nous allons suspendre, et, de 15 h 55 à 18
heures, nous allons terminer le débat sur le discours sur le budget pour
qu'il y ait le vote annoncé depuis hier, à 18 heures, sur la
politique budgétaire du gouvernement.
Ce soir, c'est la période réservée à la
discussion du rapport des crédits, puisque cela sera fait à ce
moment-là. Les cinq heures possibles prévues au règlement
débuteront à 20 heures.
D'ici 16 heures, ou 15 h 55 plus précisément, cet
après-midi, je propose que nous disposions d'un certain nombre de
projets de loi fort avancés déjà au feuilleton, soit
l'étape de la prise en considération de la troisième
lecture, et que nous fassions la deuxième lecture du projet de loi no
15. Mais je pense que mon vis-à-vis...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, le leader
parlementaire du gouvernement vient d'évoquer ce qui doit se passer ce
soir relativement au débat qui est prévu par notre
règlement à la suite du dépôt du rapport
général sur l'étude des crédits. On sait que notre
règlement prévoit une période maximale de cinq heures pour
ce débat. Je tiendrais simplement à indiquer
immédiatement, pour faciliter les travaux de la Chambre, qu'il est de
l'intention de l'Opposition d'utiliser, sinon la totalité, une bonne
partie de cette période. À cette fin, nous allons déposer
des avis entre les mains du secrétaire général au cours de
l'après-midi. J'invite le leader parlementaire du gouvernement à
prévenir le plus tôt possible ses collègues pour qu'ils
soient ici lors de ce débat. Je pense bien que cela pourrait demander
peut-être jusqu'à une dizaine, peut-
être moins, de ses collègues pour pouvoir répondre
aux questions ou aux sujets qui seront entamés par l'Opposition.
M. Charron: M. le Président, c'est le droit le plus strict
de l'Opposition de faire ce que le leader de l'Opposition annonce. Je respecte
ce droit et non seulement je le respecte, mais j'essaierai d'y collaborer dans
la mesure du possible dès que j'aurai la liste des sujets prévus.
D'autant plus que nous serons à la réunion du Conseil des
ministres, il me sera plus facile d'aviser chacun de mes collègues
d'être présent durant la soirée, ici, pour ce
débat.
M. Levesque (Bonaventure): Avant 18 heures, les avis auront
été remis au secrétaire général.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le leader du
gouvernement.
M. Charron: Je vous prierais d'appeler d'abord l'article 9 du
feuilleton, M. le Président.
Prise en considération du rapport
de la commission qui a étudié
le projet de loi no 1
Le Vice-Président (M. Jolivet): Prise en
considération du rapport de la commission permanente de l'habitation et
de la protection du consommateur qui a étudié le projet de loi no
1, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du
Québec.
M. le ministre a-t-il quelque chose à ajouter?
M. Charron: M. le Président, je n'ai été
informé d'aucun amendement qui aurait été
présenté à la suite du dépôt du rapport.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que ce rapport est
adopté?
M. Levesque (Bonaventure): Quel projet de loi?
Le Vice-Président (M. Jolivet): No 1.
M. Levesque (Bonaventure): Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
M. Charron: Article 10, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième
lecture?
M. Charron: Troisième lecture...
M. Levesque (Bonaventure): Prochaine séance ou
séance subséquente.
M. Charron: Je vous le dis tout de suite, ce sera probablement
à la prochaine séance.
M. Levesque (Bonaventure): On ne peut rien vous cacher.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture,
prochaine séance ou séance subséquente.
M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Article 10, M. le Président, s'il vous
plaît.
Prise en considération du rapport de la
commission qui a étudié le projet de loi no 7
Le Vice-Président (M. Jolivet): Prise en
considération du rapport de la commission permanente de l'habitation et
de la protection du consommateur qui a étudié le projet de loi no
7, Loi sur le ministère de l'Habitation et de la Protection du
consommateur. Il n'y a pas eu d'amendement non plus?
M. Tardif: II y en a eu un.
Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a eu un amendement?
Il n'y en a pas, actuellement. Est-ce que ce rapport est adopté?
M. Levesque (Bonaventure): Adopté, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Troisième lecture?
M. Charron: Prochaine séance.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Prochaine séance ou
séance subséquente. M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Article 3 du feuilleton, M. le Président.
Projet de loi no 2 Troisième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture
du projet de loi no 2, Loi sur la Société du Palais des
congrès de Montréal.
M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
M. Levesque (Bonaventure): Adopté, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
M. Charron: Article 4 du feuilleton, M. le Président.
Projet dé loi no 8 Troisième
lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture
du projet de loi no 8, Loi modifiant la Loi sur la qualité de
l'environnement.
M. le ministre de l'Environnement.
Est-ce que cette motion est adoptée?
M. Levesque (Bonaventure): Adopté, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Charron: Article 5 du feuilleton, M. le Président.
Projet de loi no 15 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture du
projet de loi no 15, Loi sur l'abolition de la retraite obligatoire et
modifiant certaines dispositions législatives.
M. le ministre d'État au Développement social.
M. le ministre.
M. Bertrand: Bravo! Bravo!
M. Denis Lazure
M. Lazure: M. le Président, je crois qu'il est important,
avant de commencer l'étude de ce projet de loi no 15 qui abolit
l'âge obligatoire de la retraite, de rappeler que ce que nous allons
étudier aujourd'hui s'inscrit dans une série de mesures, dans un
ensemble beaucoup plus vaste qui va affecter, dans un avenir prochain, les
préretraités et les retraités du Québec. En somme,
il s'agit d'un projet de loi qui est très simple, qui interdit toute
mise à pied, tout congédiement pour la seule raison que la
personne, l'employé a atteint l'âge de 65 ans ou encore a
travaillé le nombre d'années qui, normalement, mènent
à la retraite. C'est un projet de loi qui abolit une discrimination.
Donc, ce projet de loi est la première d'une série de
mesures que le gouvernement du Parti québécois entend prendre,
découlant en partie des engagements électoraux et en partie
aussi, de façon encore plus vaste, du programme du Parti
québécois. À cet effet, je pense qu'il est pertinent de
citer un court extrait du discours inaugural prononcé par notre premier
ministre le 19 mai dernier. "Quant au deuxième engagement auquel nous
voulons donner suite immédiatement, c'est celui d'abolir l'obligation
où se trouvent tant de nos travailleurs d'avoir à prendre leur
retraite même s'ils ont le désir et la capacité de
continuer de travailler. La retraite doit devenir un phénomène
graduel, planifié et essentiellement volontaire. Cela exigera, bien
sûr, une transformation des mentalités et des conditions de
travail et on ne saurait y arriver instantanément, d'un seul coup, mais
la loi qui sera présentée constituera un premier pas significatif
dans cette direction." (11 h 40)
Conformément à cet engagement contenu dans le discours
inaugural il y a à peine un mois, nous entamons aujourd'hui la
discussion en deuxième lecture de ce projet de loi. Depuis qu'il est au
pouvoir, le Parti québécois a démontré à
plusieurs reprises qu'il considérait l'amélioration du sort de
nos aînés comme l'une de ses plus importantes priorités: la
gratuité des médicaments pour l'ensemble des personnes
âgées; la gratuité des services ambulanciers; le programme
d'aide à l'habitation ou Logirente, aide financière à
l'habitation. Il y a aussi les investissements massifs dans les services de
santé et d'hébergement, aussi bien dans la construction de 6000
unités de logement, l'habitation à loyer modique, que dans la
construction massive de centres d'accueil pour personnes âgées.
Une soixantaine de centres d'accueil pour personnes âgées sont,
pour la plupart, au moment où on se parle, déjà
terminés ou en voie d'être terminés.
Mais nous devons reconnaître, M. le Président, qu'il reste
encore beaucoup à faire pour améliorer la qualité de vie
de ceux qui ont bâti le Québec d'aujourd'hui. C'est pourquoi le
Parti québécois s'est formellement engagé à
étendre progressivement le programme Logirente, c'est-à-dire le
programme d'assistance financière, aux personnes âgées
actuellement de 65 ans et plus qui ont un bas revenu; il s'est donc
engagé à étendre cette assistance financière qu'est
Logirente aux personnes de 55 ans et plus dans un avenir prochain, et aussi
à faciliter la transition entre le travail et la retraite en instaurant,
en mettant sur pied un régime de retraite anticipée à
partir de 60 ans qui s'adressera en particulier aux travailleurs et aux
travailleuses qui souffrent d'une incapacité partielle, 25% étant
la limite; ces invalides partiels à 25% pouvant toucher une prestation
de 100% d'invalidité.
M. le Président, aujourd'hui, il s'agit encore une fois d'une
première étape et je viens d'énumérer d'autres
étapes contenues dans l'engagement électoral que nous entendons
tenir. Ces autres étapes seront présentées à cette
Assemblée nationale au cours de la session d'automne. Le projet de loi
que nous avons devant nous, abolissant la retraite obligatoire en fonction de
l'âge ou
en fonction du nombre d'années de service au sein d'une
entreprise, doit donc être considéré comme le premier pas
vers un cheminement très important qui va viser à
améliorer la qualité de vie de nos préretraités et
de nos retraités au Québec. La logique conduisant à un tel
geste, à l'abolition de l'âge obligatoire de la retraite, cette
logique apparaît assez évidente pour l'ensemble de la population.
Pas plus tard qu'il y a une dizaine de jours, à l'occasion d'un colloque
organisé par la Fédération des travailleurs du
Québec, j'y reviendrai tantôt, un travailleur d'une soixantaine
d'années dans son langage très direct, très sain, disait
ceci: II n'y a aucune raison au monde pour que moi ou n'importe qui, homme ou
femme, rendu à l'âge de 65 ans, s'il ou si elle jouit toujours
d'une bonne santé mentale ou physique, soit obligé de cesser de
travailler.
Ce projet de loi, M. le Président, a non seulement, on le verra
tantôt, reçu l'appui depuis un mois de l'ensemble des corps
intermédiaires autant du côté patronal que du
côté syndical, de l'ensemble des éditorialistes dans nos
médias, mais il reçoit aussi, et ça c'est encore plus
important, l'appui du bon sens populaire. On a beau chercher, on ne trouvera
aucune base scientifique, M. le Président, pour justifier qu'à 65
ans, tout à coup, un homme ou une femme cesse d'être apte à
continuer de travailler. Au contraire, plusieurs arguments militent en faveur
de ce libre choix et, essentiellement, encore une fois, ce projet de loi donne
le libre choix de se retirer au moment où on veut, le "free choice", le
libre choix à la retraite. L'Association médicale
américaine, par exemple, va très loin en ce sens. Elle affirme,
et je cite, que: "L'interruption subite de tout travail productif et
rémunérateur est souvent cause de maladies physiques et
psychiques, voire même d'une mort prématurée".
Selon la Fédération de l'âge d'or du Québec,
la FADOQ, la situation d'inactivité qui résulte, en outre de la
perte de l'emploi, a une action néfaste sur le moral et sur la condition
physique de l'individu qui voit s'en aller en pure perte ses énergies,
ses talents, son expérience et, bien souvent, son prestige social, sa
raison d'être à l'intérieur d'une communauté. Dans
une société où la productivité est devenue un des
critères les plus importants - toujours selon la FADOQ, la
Fédération des clubs d'âge d'or du Québec - la
personne âgée perd son statut social au sein de la
communauté qui l'entoure très souvent à l'occasion de
cette retraite obligatoire. La fédération constate qu'un autre
élément qui change considérablement la vie d'une personne
âgée, c'est la baisse constante du revenu. Son revenu annuel ne
sera désormais - du retraité subit et obligatoire -
composé que de pensions, de rentes ou d'intérêts qui, dans
la majorité des cas, diminuent graduellement et de façon
importante le niveau de vie auquel il ou elle a été
habituée. La personne âgée doit donc s'adapter à un
budget limité qui restera, ainsi dans l'état actuel des choses,
jusqu'à la fin de ses jours."
La FADOQ recommandait au gouvernement, en novembre 1980, qu'il y ait
donc plus de souplesse et de flexibilité quant à l'âge de
la mise à la retraite et que le travailleur en pleine possession de ses
moyens et qui le désire puisse continuer à travailler
au-delà de 65 ans. M. le Président, j'ajouterai que dans la toute
dernière édition du journal de la Fédération des
clubs d'âge d'or du Québec, journal qui s'appelle Vie nouvelle,
avec la photo du président de la fédération, M. Tardif, on
voit, comme gros titre, - c'est l'édition du 15 juin - "Le projet de loi
sur la retraite facultative, - notre projet de loi actuellement en discussion -
un pas dans la bonne direction". Le président, M. Patrice Tardif, a fait
un bon accueil au projet de loi no 15 sur la retraite facultative. M. Tardif a
souligné, dans une entrevue accordée à ce journal, que la
fédération avait déjà pris position à
maintes reprises sur cette question. Je cite M. Tardif: "Nous avons
acheminé plusieurs résolutions demandant au gouvernement
d'instituer la retraite facultative pour les travailleurs. Je ne puis
qu'être d'accord avec l'intention du gouvernement."
Un autre organisme, M. le Président, l'Association
québécoise pour la défense des droits des retraités
et des préretraités, l'AQDR, se disait, en décembre 1980,
d'accord avec le principe du libre choix de l'âge de la retraite et
l'abandon de cette limite arbitraire qui met brutalement fin à
l'activité de travail. L'organisme précise qu'il n'est
évidemment pas question d'abandonner le principe du droit à la
retraite qui devrait permettre à chacun de choisir et d'y accéder
sans être pénalisé.
Les organismes syndicaux se sont également prononcés en
octobre 1978, dans un mémoire préparé pour le Sénat
du Canada. Le Conseil confédéral de la CSN,
Confédération des syndicats nationaux, estimait que le
problème le plus frappant était sans doute la faiblesse des
ressources financières des personnes âgées, et je cite la
CSN: "La réalité brutale, c'est que, trop souvent, les gens se
retrouvent à la retraite dans la pauvreté ou, encore, avec une
telle baisse de leurs revenus qu'il ne leur reste plus qu'à regarder
passer le temps, l'espoir de cette retraite heureuse étant souvent
très éphémère. Bien que la CSN considère
qu'il faille d'abord agir sur une foule de facteurs comme, par exemple, la
santé et la sécurité des travailleurs - et c'est ce que
nous avons fait avec notre loi - elle n'en recommande pas moins qu'il n'y ait
aucun âge légal obligatoire de prise de retraite."
(11 h 50)
Pour sa part, la Fédération des travailleurs du
Québec, la FTQ, dans ce colloque dont je parlais tantôt, qui a eu
lieu tout récemment, se disait d'accord avec le principe
énoncé dans le projet de loi. Les participants se sont toutefois
montrés inquiets des répercussions de ce projet de loi sur ce que
les syndicats ont déjà obtenu de haute lutte en matière de
retraite. En outre, les participants ont également estimé que la
retraite devait être facultative dès l'âge de 60 ans.
J'estime que la crainte de voir le projet de loi no 15 mettre en jeu les
acquis syndicaux est non fondée. Il y a eu une bonne part de malentendus
au moment du colloque de la FTQ. Plusieurs syndiqués de bonne foi ont
interprété notre projet de loi comme pouvant être un
obstacle à la retraite anticipée. Plusieurs syndiqués ont
dit: Nous nous battons depuis des années pour nous retirer à 65
ans, 62 ans ou 60 ans, on ne veut pas continuer à travailler
après 65 ans. Nous, au nom du gouvernement, disons aux syndiqués:
Vous avez raison. Ce projet de loi ne fait qu'abolir l'obligation de vous
retirer à 65 ans. Ce projet de loi ne vous empêchera pas de vous
retirer plus tôt si votre convention collective le permet, et surtout
lorsque nous aurons modifié certaines lois, certains règlements
pour permettre, comme je le disais au tout début de mon allocution, la
retraite anticipée à partir de 60 ans, surtout dans les
tâches où le rendement du travailleur est accompagné d'un
côté très pénible, ou d'un travail très
difficile. 95% des cotisants québécois à un régime
de rentes ont droit à la rente normale à l'âge de 65 ans ou
moins. Entre parenthèses, il n'existe aucune loi qui rende obligatoire
la retraite à 65 ans, mais la coutume est devenue tellement forte,
tellement ancrée dans nos moeurs, autant dans les emplois publics et
parapublics que privés, que ça nous prend une loi pour aider
à la changer. Je parle de cette coutume qui a rendu automatique la
retraite à l'âge de 65 ans. L'abolition de l'âge obligatoire
de la retraite ne changera en rien la notion de l'âge normal de la
retraite. 65 ans va continuer d'être non plus un âge obligatoire de
retraite, mais un âge normal de retraite. Tous les cotisants pourront
continuer à avoir droit à une pleine rente à l'âge
de 65 ans.
J'ai dit que le projet de loi mettait fin à une discrimination.
Voilà sans doute une des raisons qui ont incité la Commission des
droits de la personne du Québec, ainsi que la Fondation des droits de
l'homme à se prononcer pour l'abolition de la retraite obligatoire. Les
organismes patronaux aussi se disent en faveur du principe de l'abolition.
C'est le cas, notamment, du Conseil du patronat du Québec, qui me
faisait parvenir son accord de principe par télégramme, il y a
quelques jours. Le Conference Board du Canada, organisme économique
prestigieux, a mené une étude, en 1979, auprès de 200
entreprises du Canada et en a déduit que les répercussions pour
les employeurs canadiens seront marginales. La plupart des employeurs qui ont
répondu au questionnaire du Conference Board ont affirmé...
L'organisme dit: "Ils ne craignent pas que la suppression de la retraite
obligatoire cause de sérieuses difficultés pour la gestion du
personnel. Les employés âgés - poursuit l'organisme
patronal - sont considérés comme étant tout aussi fiables
et tout aussi efficaces que les employés jeunes."
Qui profitera de l'abolition de la retraite obligatoire? En 1978 - ce
sont les derniers chiffres complets que nous avons -sur 2 500 000 travailleurs
au Québec, nous savons que plus de 55% ne participent pas à des
régimes supplémentaires privés, des régimes de
retraite privés: l'entreprise ou il ou elle travaille n'a pas de plan de
retraite privé. Ceux-ci seront donc soumis à la nouvelle loi. Je
dirais même que cette nouvelle loi va toucher la très vaste
majorité de ces 2 500 000 travailleurs, les seuls exclus étant
les travailleurs sous la juridiction du gouvernement fédéral et
les travailleurs qui occupent un banc de juge au Québec, si on peut
employer l'expression "travailleurs". Mais tous les autres seront soumis
à cette nouvelle loi.
Nous prévoyons que ceux et celles qui en profiteront le plus sont
précisément ceux et celles qui travaillent dans des petites
entreprises où il n'y a pas de régime supplémentaire de
retraite et où, au moment de la retraite à 65 ans,
l'employé n'a comme revenu que la pension de vieillesse et le
supplément au revenu et aussi, évidemment, la rente du
Québec, tandis que dans les 45% qui bénéficient d'un
régime supplémentaire de retraite, le plan de retraite
privé vient apporter parfois un supplément intéressant
pour maintenir un revenu décent à la personne
âgée.
Dans le secteur public, c'est la retraite à 60 ans qui
prédomine avec 78% des participants à un régime de
retraite. Dans le secteur privé, toutefois, l'âge de la retraite
obligatoire est de 70 ans chez 60% des cotisants; l'âge de la retraite
est déjà à 70 ans. C'est donc la majorité des
travailleurs québécois qui seront touchés par cette
mesure. Ce projet de loi ne fait qu'adapter le secteur de la retraite aux
besoins changeants de la population.
En effet, la population du Québec vieillit et elle va continuer
de vieillir très rapidement, alors que nous avons un peu plus de 8% de
notre population qui a 65 ans et plus, c'est-à-dire environ 540 000
personnes. Nous savons que dans une vingtaine d'années, ce pourcentage
montera de 2%, dépassera les
10%. Il faut donc s'attendre, à long terme, à une
augmentation équivalente de citoyens âgés de 65 ans et plus
sur le marché du travail.
Je suis persuadé que la mise au rancart de ces travailleurs
constitue une sérieuse perte en capital humain pour notre
économie. Notre système de production ne semble pas profiter
suffisamment de la richesse de l'expérience acquise par nos
aînés. Il nous faudra corriger cette situation d'autant plus que,
le taux de natalité ayant diminué considérablement depuis
une quinzaine d'années, il faut s'attendre que l'arrivée de
main-d'oeuvre jeune sur le marché du travail aille en diminuant dans les
années qui viennent.
Le principe du projet de loi no 15 nous semble obtenir la faveur d'une
grande majorité de Québécoises et de
Québécois et d'un grand nombre d'organismes
intéressés. Nous avons donc voulu qu'il s'applique à tous
les travailleurs et, à cette fin, le projet de loi propose un amendement
à la Loi sur les normes du travail.
De plus, tous les travailleurs régis par les lois du
Québec qui se verront refuser ce droit de travailler en raison de leur
âge pourront exercer un recours devant un commissaire du travail et la
Commission des normes du travail prendra la défense gratuitement de tout
travailleur qui se sentira lésé. Et c'est l'employeur qui devra
faire la preuve que le congédiement n'est pas justifié, dans sa
tête, par l'âge de l'employé, mais pour d'autres
raisons.
Évidemment, un travailleur qui décidera de continuer
à travailler continuera également à cotiser à son
régime supplémentaire de retraite s'il y en a un dans
l'entreprise où il travaille, l'employé cotisera et l'employeur
cotisera. La rente qu'il en retirera au moment où il prendra
effectivement sa retraite, que ce soit à 66 ans ou à 70 ans, aura
été revalorisée par l'ajout des cotisations de
l'employé et de l'employeur durant ces années additionnelles.
D'autre part, tous les travailleurs auront le choix, après 65
ans, ou de retirer les prestations normales du régime de rentes du
Québec sans égard au revenu qu'ils pourront retirer d'un emploi,
ou alors continuer de verser leurs cotisations à la Régie des
rentes et percevoir un montant plus élevé lorsque la retraite
sera prise effectivement quelques années plus tard.
En conclusion, bien qu'il s'agisse d'un projet considéré
comme un projet d'avant-garde par plusieurs éditorialistes, nous ne
sommes pas les premiers à établir cette abolition de la
discrimination selon l'âge. Les États-Unis, en 1978, M. le
Président, ont adopté une loi semblable; la Norvège et la
Suède ont, depuis quelques années, une loi semblable. Nous
pensons que d'autres provinces du Canada nous suivront sûrement dans le
même sillon. Nous pensons que, par ce geste essentiellement humanitaire,
qui consiste à laisser à chaque travailleuse, à chaque
travailleur le libre choix du moment de sa retraite, le gouvernement du Parti
québécois non seulement remplit un engagement électoral
important, mais marque en même temps son grand respect de la
liberté individuelle. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il me fait
plaisir de me lever pour parler sur ce projet de loi qui prévoit
l'abolition de la retraite obligatoire.
J'aimerais simplement rappeler que, sur ce point particulier, le
programme de ma formation politique concordait avec le programme du Parti
québécois. Nous-mêmes -j'aimerais ici le rappeler -
mentionnions dans notre programme que la liberté de choix que
possède la personne âgée était passablement
diminuée au moment de la retraite obligatoire, sans compter qu'elle
contribuait souvent à une plus grande dépendance
économique. Nous disions que des règles arbitraires s'appliquent
uniformément à des individus dans les positions les plus diverses
quant à leur capacité ou leur désir de continuer ou de
cesser leur participation à la vie économique. Nous disions que,
pour nous, cette rigidité n'était à l'avantage ni de la
société, ni des individus dont l'intérêt et les
préférences exigaient parfois un âge plus hâtif et
parfois un âge plus avancé pour la retraite ou encore une retraite
graduelle. Enfin, nous nous engagions à proposer une plus grande
flexibilité dans l'âge de la retraite, que ce soit du
côté d'une retraite anticipée ou d'un âge de retraite
plus tardif à procéder toutefois à une consultation avant
d'adopter un tel projet de loi.
Je réalise qu'avec le gouvernement du Parti
québécois, fondamentalement, nous n'avons pas de divergence
d'opinion là-dessus. Nous avions une approche qui était
peut-être davantage planifiée, mais je vois que les
représentations qui ont été faites, tant par les
représentants syndicaux que par le Conseil du patronat, et auxquelles le
ministre faisait allusion tout à l'heure, vont corriger ce qui nous
apparaissait peut-être une précipitation fondée sur
d'excellents motifs, mais qui mettait de côté l'examen
d'éléments ou d'aspects importants d'une telle loi, si on veut
penser, par exemple, simplement à la question des répercussions
actuarielles qu'un projet de loi comme celui-ci présente. Ceci ne veut
pas dire qu'il faille se laisser arrêter par ce type de
difficulté, mais c'est un projet de loi qui, même si, au premier
abord, il semble rallier un concensus
très large dans la société québécoise
sur son adoption, ne doit pas non plus nous faire mettre de côté
ou nous empêcher d'envisager certaines difficultés
inhérentes qui pourraient parfois rendre plus difficile l'atteinte
d'objectifs que l'on veut poursuivre et qui, en soi, sont des objectifs plus
que légitimes, M. le Président.
Pourquoi s'intéresse-t-on de plus en plus à cette question
de l'âge de la retraite pour les personnes âgées? Je pense
que le ministre a donné partiellement la réponse. Pour le
Québec, il faut rappeler, par exemple, que de 1976 à 1981, le
nombre de personnes dans le groupe de 65 ans et plus -c'est sur une
période de cinq ans - a augmenté de 17%. Quand on regarde
l'ensemble de la population du Québec, cette population de 65 ans et
plus est passée de 7,7% en 1976 à 8,6% en 1981. Elle atteindra
10,3% en 1990 et sera de l'ordre de 12% ou 13% vers l'an 2000.
Évidemment, l'an 2000, comme c'est un autre siècle, cela
nous apparaît toujours très lointain, mais on est
déjà en bonne marche vers l'an 2000. Ceci nécessite donc
que nous nous penchions sur ce problème et je pense que c'est ce que les
gouvernements qui se sont succédé au Québec depuis 1960 -
de plus en plus, ils devront le faire - ont fait au sujet toute cette question
des personnes âgées. D'ailleurs, c'est assez intéressant de
voir que là où on s'est penché sur ce problème,
avant le Canada ou le Québec, ce sont les pays qui sont entrés
dans ce qu'on appelle le club des personnes âgées, avant le Canada
ou avant le Québec. Vous avez, par exemple, la France, l'Angleterre,
l'Allemagne, où on fait des adaptations à tous les régimes
de rentes et où on est beaucoup plus souple à l'égard de
l'âge de la retraite parce que, dans ces pays-là - je ne
l'assurerais pas pour l'Allemagne, il faudrait faire une vérification,
certainement pour la France et l'Angleterre il y a une population
âgée de l'ordre de 13% à 15%, ce qui est encore beaucoup
plus élevé que ce que nous avons.
Je pense que nous sentons, au fur et à mesure que notre
population vieillit, que ces problèmes prennent énormément
d'acuité et qu'il faut s'y arrêter. D'ailleurs, en 1978, il y a eu
un comité sénatorial canadien, qu'on a appelé, je pense,
la Commission d'étude Croll, du nom du sénateur qui la
présidait et qui, en fait, âgé de 79 ans, a fait avec ses
21 collègues sénateurs un excellent travail. Je pense qu'en
grande partie, ceci a servi à la réflexion du gouvernement sur le
projet de loi qui est devant nous. D'ailleurs, c'est un des documents qu'on m'a
remis quand j'ai demandé au gouvernement de déposer les
études qu'il avait en main sur l'abolition de la retraite
obligatoire.
J'ai été quand même étonnée de voir
qu'il n'y avait pas d'études techniques particulièrement
pertinentes pour le Québec dans les documents qu'on m'a remis, à
moins que le gouvernement en ait et ne nous les ait pas remises. J'ai vraiment
eu l'impression, M. le Président, qu'il y avait peut-être une - je
n'oserais pas dire improvisation parce que je pense que ce serait
négatif - certaine précipitation et qu'on n'avait pas d'abord
examiné tous les éléments et les difficultés sur
lesquels je reviendrai dans quelques minutes.
Je pense qu'on s'entend tous, d'un côté de la Chambre comme
de l'autre, pour que soit mise en branle cette démarche de l'abolition
de l'âge de la retraite. D'abord, pour différentes raisons, la
première étant peut-être qu'il faut tenir compte des
différences et des conséquences inégales du vieillissement
chez les individus. II est bien clair qu'on ne vieillit pas tous au même
rythme et de la même façon. Dans cette question de l'âge de
la retraite, il n'y a rien d'absolu. On sait fort bien que chez les
travailleurs qui font des travaux physiques très durs, l'âge de la
retraite peut être vue comme devant être anticipée et,
d'ailleurs, elle l'est par un grand nombre de syndicats. J'étais
heureuse d'entendre le ministre dire que, dans un deuxième temps, on
examinerait aussi la possibilité de la retraite anticipée pour
les travailleurs.
Je pense également que cette abolition de l'âge de la
retraite obligatoire va contribuer à faire disparaître certains
stéréotypes qui affectent l'embauche, la promotion et la
formation des travailleurs âgés, alors que les études
démontrent qu'ils sont un atout très précieux dans une
entreprise, ils sont aussi productifs que les jeunes quand ils occupent des
fonctions ou que l'on crée des fonctions où ils peuvent mettre
à profit leur esprit de travail, leur expérience, leur formation.
L'observation générale, ici et ailleurs, indique que le rendement
est aussi bon. Leur attitude au travail, leur ouverture générale
et leur expérience générale sont des compléments
extrêmement importants dans le sens de leur apport économique au
travail.
Ce projet de loi a pour effet de modifier fondamentalement le sens de la
retraite, c'est-à-dire d'abolir le principe de
ségrégation, de rupture radicale qui a prévalu
jusqu'à maintenant dans la durée humaine, une période
active, basée sur la productivité et la consommation, et une
période passive, qui rendait la personne âgée "hors
circuit". On la mettait un peu à part, beaucoup même, dès
qu'elle n'avait plus cette qualité de producteur ou ce pouvoir
d'achat.
Pour toutes ces raisons, il est extrêmement important d'appuyer ce
projet de loi; même si nous y apportons certaines réticences. Il
faut bien se rappeler que le rôle de l'Opposition est quand même
d'indiquer certaines choses au gouvernement.
Quant à lui, il est plein d'enthousiasme. D'ailleurs, on
connaît le ministre d'État au Développement social qui,
parfois, dans ses propos a tendance à - comme on disait dans ma jeunesse
- tourner les coins un peu rond. Mais il reste que cela nous incite fortement,
de toute façon, à appuyer le projet du gouvernement.
Le ministre a indiqué lui-même que ce projet de loi vise
à interdire à un employeur de congédier, de suspendre ou
de mettre à la retraite un salarié pour le seul motif qu'il a
atteint ou dépassé l'âge ou le nombre d'années de
service à compter duquel il prendrait normalement sa retraite. Le projet
de loi prévoit, dans les cas où cela ne serait pas
observé, un recours devant le commissaire du travail et il reviendra
à l'employeur de faire le fardeau de la preuve.
Le gouvernement a décidé d'agir par le truchement de la
Commission des normes du travail. En soi, c'est bon, mais on peut aussi
s'interroger. C'était le sens de la recommandation de la Commission des
droits et libertés de la personne. Pourquoi le gouvernement ne
considère-t-il pas une inclusion ou un amendement à la Charte des
droits et libertés de la personne? Il y a peut-être des raisons
techniques qui l'empêchent, mais ce serait une garantie beaucoup plus
grande que l'inclusion dans la Loi sur les normes minimales du travail. Il faut
bien se rappeler - nous avions l'occasion d'en discuter hier à
l'étude des crédits sur la condition féminine - que la Loi
sur les conditions minimales de travail devait apporter un grand nombre de
correctifs dans les conditions de travail chez les personnes les moins
payées ou les moins rémunérées. Pourtant, on sait
fort bien que quotidiennement on contrevient aux dispositions de cette loi pour
diverses raisons, mais une d'entre elles étant très pratique, il
ne semble pas qu'on ait les outils nécessaires pour exercer le
contrôle qui s'imposerait.
C'est simplement une remarque. Est-ce que dans ce sens-là on
n'aurait pas mieux protégé les personnes âgées en
introduisant une disposition dans la Charte des droits et libertés de la
personne qu'en passant uniquement par le truchement des conditions de la loi
touchant les normes minimales de travail?
J'ai parlé tout à l'heure des raisons qui, sur le plan
humain, nous motivent et motivent non seulement le Québec, mais on a
parlé d'autres pays, de reconsidérer ce problème de la
retraite obligatoire, mais il ne sert à rien non plus de cacher qu'il y
a aussi des éléments d'ordre économique, de nature
socio-économique, qui motivent les gouvernements maintenant à
agir de cette façon. D'abord, l'augmentation du nombre de personnes
âgées, tant en chiffres absolus qu'en valeurs relatives, et le
coût que représente l'entretien d'une population inactive aussi
importante qui engendre des inquiétudes croissantes. Dans le cas de
beaucoup de fonds de retraite, on pourrait se trouver dans l'incapacité,
dans un certain nombre d'années, de payer les prestations pour
lesquelles ont contribué les retraités. C'est le résultat
du vieillissement de la population. Il y a beaucoup de gens retraités et
de moins en moins de personnes pour contribuer au régime. D'ailleurs, un
cri d'alarme était lancé il y a à peu près trois
semaines dans les journaux: Une crise financière menace-t-elle les fonds
de retraite publics? Justement, c'est à cause de ce vieillissement de la
population.
Je pense qu'on a des objectifs humains et qu'il y a des
considérations humaines dans la présentation d'une telle loi. Il
faut dire aussi qu'au plan économique ceci pourrait peut-être
corriger la crise financière à laquelle, selon les actuaires qui
se penchent sur ces problèmes d'une façon très technique,
on serait exposé concernant les fonds de retraite. D'ailleurs, en 1980,
une commission présidentielle aux États-Unis sur la politique des
pensions recommandait l'élévation de l'âge de la retraite
d'un mois par année jusqu'en l'an je ne sais trop, je pense que cela
doit se rendre à l'an 2000, pour rendre la retraite à l'âge
de 68 ans afin de permettre d'alléger le système américain
de sécurité sociale. Je pense qu'il n'y a pas de doute, s'il y a
des considérations humaines, il y a aussi des considérations
d'ordre économique.
M. le Président, certaines difficultés ont
été soulevées par différents porte-parole. J'ai
mentionné, tout à l'heure, que la loi nécessitera des
adaptations et des déboursés dans le domaine des régimes
de retraite où les projections actuarielles sont presque toutes
basées sur une retraite à 65 ans. Ces études, nous ne les
avons pas en main, mais je pense qu'on peut éventuellement les
obtenir.
Il y a un autre problème aussi qui va être soulevé.
Les employeurs ne pourront plus compter sur la mise à la retraite pour
se départir de certains éléments qu'eux, à tort ou
à raison, qualifient d'indésirables. Indésirable, c'est un
mot très péjoratif, mais si on décide qu'ils ne sont plus
compétents pour telle ou telle fonction, peu importent les termes qu'on
utilise, cette abrogation de l'âge de la retraite obligatoire va
créer un problème. L'employeur aura le fardeau de prouver que
l'âge de l'employé le rend inefficace. C'est évident que
ceci pourra constituer un problème au plan des tracasseries ou, enfin,
du type de preuves. Quand un employeur voudra se départir d'un
employé, il ne pourra plus invoquer l'âge obligatoire de la
retraite, mais il devra faire la preuve de l'efficacité ou de
l'inefficacité de son employé. Je pense que les syndicats
ont exprimé certaines craintes là-dessus qui
réapparaissent justifiées.
On a soulevé la question du chômage à plusieurs
reprises. Je pense que la FTQ l'a fait et je vous dirai même que
certaines représentations un peu plus personnelles m'ont
été faites à cet égard. Je suis de l'avis du
ministre, du moins jusqu'à ce qu'on ait des chiffres différents
ou peut-être plus précis.
Selon l'expérience faite aux États-Unis, les observations
de la commission sénatoriale dont je parlais tout à l'heure, on
est arrivé à la conclusion que ceci n'aurait pas d'effet
négatif sur l'embauche des jeunes parce que, très souvent, les
personnes qui continuent de travailler et qui sont âgées de 65 ans
et plus, le type d'activités qu'ils remplissent, le type de fonctions
qu'ils remplissent ne correspond pas généralement au type
d'emploi que recherchent les jeunes et qu'on leur offre sur le marché du
travail. (12 h 20)
On disait dans le rapport de la commission sénatoriale:
"L'augmentation de la main-d'oeuvre active des personnes âgées de
65 ans et plus à la suite de l'abolition de la retraite obligatoire ne
serait que d'environ 2%, selon les prévisions de Statistique-Canada, et
n'entraînerait donc pas une diminution significative des
possibilités d'emploi pour les plus jeunes. Cependant, si l'on
considère que l'actuel taux de chômage devrait subir
vraisemblablement une régression significative une fois l'explosion
démographique d'après-guerre absorbée, soit dans le milieu
des années quatre-vingt, les personnes âgées en mesure de
demeurer sur le marché du travail pourraient constituer une
main-d'oeuvre très appréciable." Enfin, le nombre des personnes
âgées va sans cesse croissant pour atteindre de 11% à 12%
vers l'an 2000, il demeure que le total de la population à charge va
aller en décroissant jusqu'à l'an 2011, vu la diminution
constante du nombre des personnes de 0 à 17 ans. Je pense que,
normalement, nos charges éducatives devraient diminuer, ou du moins on
peut le souhaiter pour les diriger vers d'autres priorités. Et
même si je comprends l'anxiété d'un certain nombre de
personnes, que ce soient les syndicats, que ce soient les parents, que ce
soient des citoyens en général qui disent: Le chômage des
jeunes qui est de 16% ou 17%, - il a été de 17% au Québec
- est suffisamment troublant pour s'interroger au moins à savoir si
cette modification sur l'abolition de l'âge obligatoire de la retraite
aura des répercussions. Il ne semble pas, en tout cas jusqu'à
maintenant, que, dans les données que nous possédons, ceci soit
un facteur important.
M. le Président, il y a un deuxième point que je voudrais
aborder très brièvement. J'ai l'impression que la façon
dont le gouvernement présente cette mesure et le processus qu'il avait
choisi pour son adoption et qui maintenant semble se modifier - parce que je
crois comprendre que nous aurons une commission parlementaire à la fin
de l'été au mois d'août ou de septembre, et je m'en
réjouis - pouvait porter à croire que, pour lui, il s'agissait
simplement d'une technicité. On modifiait la Loi sur les normes
minimales de travail pour y introduire une nouvelle disposition et, finalement,
c'était une opération très simple.
On sait fort bien, dès qu'on plonge et qu'on examine un peu le
problème - et M. le Président, je ne voudrais pas
prétendre ici que je suis une experte dans ce problème, j'ai
quand même essayé de consulter passablement de gens, de me
documenter le mieux possible, nous en avons discuté dans notre groupe de
travail - nous savons fort bien que c'est beaucoup plus complexe que cela
semble paraître au premier abord. Ce n'est pas une simple
technicité, parce que, d'abord, il va falloir envisager des
modifications au régime de retraite privé et public. Il va
falloir aussi - et c'est peut-être d'un autre ordre - penser à
faire évoluer les mentalités chez les employeurs et chez les
employés. La retraite obligatoire avait pour avantage de prévoir
le moment précis où le revenu de la personne subirait une baisse
et d'entraîner une planification en conséquence. Avec la retraite
facultative, l'employé devra aussi planifier ce moment, même si
l'échéance devient plus vague. Dans cette perspective, M. le
Président, les employeurs devront peut-être faciliter la
préparation de la retraite - ils devraient déjà le faire -
par des programmes d'orientation préretraite. Certaines entreprises
devront aussi établir des mécanismes pour évaluer
l'aptitude des personnes à poursuivre leur travail dans les
années qui précèdent 65 ans et dans les années qui
suivent 65 ans afin qu'elles ne puissent subir de préjudice si un
employé décide de demeurer dans un emploi pour lequel il n'a plus
les capacités. C'est ce problème de tracasseries et, parfois, une
nouvelle forme de discrimination qui pourrait survenir, si on ne faisait pas
cette opération avec beaucoup de souci et d'équité.
Il y a également le fait que nous nous retrouvons devant une
inégalité accrue par rapport aux ressources. C'est un autre
problème. Il est à prévoir que ce sont surtout les cols
blancs qui se prévaudront de cette mesure et que les travailleurs qui
ont eu à occuper un travail dur et routinier quittent leur emploi plus
tôt. Il ne faut pas oublier également que l'espérance de
vie au-delà de 35 ans est plus élevée pour les
professionnels et les cadres supérieurs, soit 43,3 années que
chez les employés de bureau, où elle se situe à 37,3 ans
et chez les manoeuvres où elle se situe à 33,5 ans. À
cette constatation, il faut aussi ajouter
que l'effet du vieillissement social, c'est-à-dire la perception
que la société a des travailleurs vieillissants, se fait
davantage sentir chez les classes laborieuses où la vieillesse vient
consacrer la perte des forces physiques, alors que l'individu âgé
exerçant une profession plus libérale ou un emploi plus
bureaucratique se verra souvent confirmer une sagesse et une expérience
plus grandes.
De plus, le rapport COFIRENTES, auquel le gouvernement actuel n'a pas
accordé de suite, rapport qu'il a reçu en 1977 et qui contenait
des recommandations importantes sur tout le régime de rentes et du
supplément au régime de rentes, indiquait que seulement 27,9% des
cols bleus sont couverts par des régimes supplémentaires de
rentes, alors que 88,1% des cadres professionnels et des techniciens le sont.
C'est une situation qui affecte ceux qui sont le plus susceptibles de ne pas
prolonger leur période d'activité au travail.
Une autre motivation qui incite les personnes de 65 ans et plus à
retarder l'âge de leur retraite. Il faut bien se dire que si, dans
certains cas, c'est l'intérêt du travail, le désir de
continuer à être productif, de s'intégrer aux
activités courantes de la société, il est quand même
reconnu dans les statistiques que le plus grand nombre de ceux qui
désirent continuer de travailler, c'est parce que les régimes de
retraite en cours, qu'il s'agisse de régimes privés ou de
régimes publics, et avec le taux d'inflation qu'on connaît, sont
nettement insuffisants pour assurer aux personnes qui prennent leur retraite
des revenus décents.
Peut-être devrais-je rappeler à cet égard un article
du Soleil de 1979 - j'aurai d'autres statistiques, j'ai déjà eu
l'occasion d'en citer - où, dans un éditorial, M. Francoeur
disait: "II est regrettable de dire qu'au Québec, 63% des personnes
âgées de 65 ans et plus vivent sous le seuil de la
pauvreté. Ce chiffre représentait, au début de janvier
1977, 310 000 personnes âgées sur 490 000. Ainsi, la
majorité des personnes âgées d'une des
sociétés les plus riches du monde sont dans l'indigence. La
situation n'est pas meilleure ailleurs et, au Québec, 82% des femmes
retraitées vivent sous le seuil de la pauvreté." Quand on parle
des femmes retraitées, je pense bien qu'on parle des femmes de 65 ans et
plus parce qu'un grand nombre d'entre elles n'ont jamais été sur
le marché du travail. Je devrais dire là-dessus, M. le
Président, que c'est d'ailleurs au Québec que les femmes
âgées sont les plus pauvres dans l'ensemble du Canada.
Je veux, en conclusion, dire au ministre d'État au
Développement social qu'en dépit des difficultés,
surmontables et qu'il faut examiner avec soin, avec un esprit consciencieux
pour éviter des avatars ou des désappointements dans une loi qui,
en soi, poursuit un objectif auquel nous souscrivons sans réserve, nous
sommes prêts à appuyer le gouvernement dans sa démarche,
pour autant qu'il voudra prendre ses précautions. Je dois dire en
passant que le ministre, au sujet de l'article 5 que je voulais soulever, a
apporté une précision qui, je pense, va satisfaire plusieurs
personnes qui s'inquiétaient du fait que si elles continuaient à
travailler après 65 ans, elles n'augmenteraient pas leurs
bénéfices. Il semble être bien clair qu'elles continueront
à contribuer et que leur retraite se trouvera augmentée d'autant
au moment où elles la prendront. Je me réjouis également
de la commission parlementaire qui me semble beaucoup plus sage que la
précipitation avec laquelle on semblait aller. (12 h 30)
Je voudrais également mettre en garde le gouvernement contre le
fait de penser que l'adoption de cette loi va régler les
problèmes des personnes âgées. C'est un problème
important, mais il faut également lui demander à quel moment il
va agir concernant le rapport COFIRENTES auquel je faisais allusion tout
à l'heure et modifier la Loi sur les régimes
supplémentaires de rentes, de telle façon que les revenus
provenant des régimes de retraite soient plus grands. Prenons un seul
exemple, le Régime de rentes du Québec. La remarque que je vais
faire s'applique au régime de rentes du Canada, parce que c'est une
question de partage; quant à nous il s'agit du régime de rentes
du Québec.
Ce Régime de rentes du Québec - le ministre en conviendra
- devait éventuellement permettre l'abolition du supplément de
revenu garanti pour les personnes âgées. Le supplément de
revenu garanti pour les personnes âgées que l'on verse aux
personnes de 65 ans qui n'ont pas de revenu suffisant ne devait être
qu'une mesure transitoire, jusqu'au moment où les régimes de
rentes du Québec ou du Canada aient atteint leur maturité, de
telle sorte que des revenus suffisants auraient été
accordés aux personnes âgées. Mais on voit bien dans la
pratique que ces régimes sont nettement insuffisants. Les actuaires se
demandent même pendant combien de temps on pourra les respecter, compte
tenu de la situation particulière des fonds de retraite. Ce sont des
choses qui devraient être réexaminées. Il y avait des
recommandations très concrètes touchant cette
réévaluation de tous les régimes de rentes publics et
privés et le gouvernement, jusqu'à maintenant, n'a pas agi.
Peut-être que c'est dans ses projets pour l'avenir, mais pas pour le
moment.
Il ne faudrait pas non plus passer ce point sous silence. Au même
moment où on abolit l'âge de la retraite obligatoire à 65
ans, je voudrais rappeler au gouvernement la situation très
pénible - je ne parlerai pas du chômage des jeunes, j'en ai
traité tout à l'heure - du chômage qui affecte les
personnes de 45 ans et plus. Ces dernières ne peuvent
pratiquement plus se replacer sur le marché du travail, parce que, d'une
façon générale, il semble que l'employeur ne
privilégie peut-être pas les plus jeunes qui ont moins de vingt
ans, mais les 25 à 35 ans. On peut dire aux personnes
âgées: On va vous garder plus longtemps sur le marché du
travail, mais il faudrait aussi que le gouvernement s'inquiète des
personnes de 45 à 65 ans qui ont de plus en plus de difficultés
et qui deviennent des personnes improductives à un âge où
personne ne met en question le fait qu'elles sont peut-être au maximum de
leur productivité, mais que notre société les tient dans
une situation d'improductivité.
J'aimerais poser une question au ministre. Est-ce que l'adoption de
cette loi va garantir quand même le maintien des avantages de la
sécurité sociale actuelle? C'est une question importante. Est-ce
que cela va maintenir, par exemple, la pension de vieillesse à 65 ans,
est-ce que cela va maintenir le Régime de rentes du Québec
à 65 ans?
Évidemment, on serait porté à dire non, puisque ces
travailleurs continuent d'être sur le marché du travail, mais
peut-être que - le ministre me donnera la réponse - si on
conservait cette sécurité sociale telle qu'elle existe
présentement, cela permettrait aux personnes qui décident de
prolonger leurs années d'activité d'explorer des formules de
temps partiel où la sécurité sociale viendrait
compléter le salaire qu'elles pourraient retirer.
Enfin, je pose la question et c'est important. Dans le cas où
même ceci voudrait dire un revenu supplémentaire, il reste qu'il
pourrait être utilisé pour grossir, je dirais, le régime ou
enfin, les revenus qui, finalement, seront les leurs quand ils seront
complètement à la retraite. C'est un point important qui, je
sais, soulève des points d'interrogation sérieux chez les
syndicats de travailleurs. Je pense que cela vaudrait la peine d'être
examiné.
Ma dernière recommandation était celle de la commission
Croll, la commission sénatoriale sur l'âge de la retraite, soit de
procéder par étapes. Cela ne veut pas dire un recul, je pense que
j'ai été très clair sur notre approbation et sur la
façon dont nous souscrivons au principe fondamental de la loi, mais la
commission sénatoriale prévoyait ou recommandait d'agir une
année à la fois et sur une période de cinq ans.
Après cinq ans, quand on aura mesuré toutes les
répercussions, que ce soient les répercussions actuarielles, que
ce soient les répercussions sur les modifications ou les nouveaux
modèles que les employeurs devront développer, l'adaptation des
travailleurs aussi à de nouveaux modèles, l'exploration de
travail adapté, de nouvelles formules de travail modulaire, etc.;
après cinq ans, si tout s'avérait positif comme prévu, si
tout était en place, la commission prévoyait finalement soit
l'abolition complète, tel que, je pense, à long terme, on
choisira de le faire. Mais cette nécessité de procéder par
étapes permettra de régler des problèmes concrets et
permettra également cette évolution des mentalités et
cette transformation qui sera nécessaire, jusqu'à un certain
point, des conditions de travail, que ce soit dans l'industrie, le secteur
public ou privé, pour permettre une meilleure mise en place et une mise
en place plus fructueuse que celle qui peut-être pourrait ne pas se
produire si on procédait du jour au lendemain.
Je dois dire que, dans le projet de loi no 15, M. le Président,
on ne prévoit pas de procéder par étapes, puisque
l'article 8 dit: "La présente loi entre en vigueur le jour de sa
sanction."
M. le Président, en terminant, je pense que nous devons nous
réjouir de voir qu'à notre tour, nous faisons comme d'autres ont
fait avant nous, comme dans d'autres provinces canadiennes, là où
une telle loi n'existe pas, mais où, je pense, comme en Colombie
britannique et au Manitoba, les commissions des droits de la personne ont
déjà rendu des décisions dans le sens que la retraite
obligatoire à un âge donné est un objet de discrimination
à l'égard des personnes. Éventuellement elles aussi
introduiront, je pense, dans leur législation une loi beaucoup plus
claire que ce recours à une commission des droits de la personne. Je
crois que l'une et l'autre peuvent se compléter.
Je termine ici mes remarques et je veux assurer le gouvernement de la
collaboration de l'Opposition en vue de l'amélioration de ce projet de
loi et de son adoption dans les plus brefs délais possible, compte tenu
des remarques que j'ai faites.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Fabre.
M. Michel Leduc
M. Leduc: Merci, M. le Président. Certains ont
qualifié cette loi comme étant la pièce législative
la plus importante du gouvernement. Je n'irais pas jusque-là, M. le
Président, tellement le choix est difficile à faire lorsqu'on
veut identifier la pièce législative la plus importante de
l'actuel gouvernement, puisqu'il y a eu quantité de lois importantes
depuis 1976. Mais il reste qu'il s'agit d'une pièce législative
très importante et qui constitue une première au Canada. M. le
ministre a déjà mentionné qu'une loi semblable existait
aux États-Unis depuis trois ans. Je voudrais ajouter qu'il s'agit d'un
engagement électoral
extrêmement important que nous avons pris au cours de la
dernière campagne électorale. C'est une loi qui fera du
Québec une société plus tolérante et plus
respectueuse de la liberté des individus et, de façon
particulière, des individus âgés.
J'ai en mémoire cette femme qui enseignait dans le même
établissement que moi et qui désirait poursuivre son travail
puisqu'elle avait la santé et la capacité nécessaires pour
l'accomplir; je me souviens que les étudiants, dans le temps, avaient
même fait signer une pétition pour qu'elle demeure au
collège, mais il a fallu qu'elle prenne sa retraite. On l'a
obligée à prendre sa retaite. (12 h 40)
Ceci ne l'a pas empêchée de poursuivre
bénévolement ses activités au collège. Je dis qu'on
a été injuste envers elle et envers combien de travailleurs qui
ont été brimés dans leur liberté même. Car
pourquoi fixer arbitrairement à 65 ans l'âge de la retraite? Au
fond, est-ce qu'il n'appartient pas à l'individu lui-même de fixer
le moment de sa retraite? C'est pourquoi la raison la plus importante, quant
à moi, d'abolir la retraite est reliée au respect de la
liberté même de l'individu.
Mais il y a une deuxième raison, M. le Président, qui
s'ajoute à celle qui me paraît fondamentale et elle est d'ordre
économique. En obligeant quelqu'un à prendre sa retraite à
l'âge de 65 ans, on prive, à mon avis, la société
d'un apport important. On prive l'établissement, l'entreprise d'une
précieuse expérience, celle qu'on accumule au fil des ans et qui
demeure irremplaçable. Nous avons malheureusement
développé dans nos sociétés modernes une
mentalité assez curieuse vis-à-vis des personnes qui atteignent
la soixantaine. On se dit: "Elle est sur le bord de la retraite, il est temps
qu'elle aille se reposer pour laisser la place à d'autres plus jeunes",
au lieu de se dire: "Elle a travaillé toute sa vie, elle a
accumulé une expérience de travail qui ne s'acquiert qu'avec le
temps, une expérience et une maturité qui pourraient profiter
à la société, à l'entreprise."
Dans les temps anciens, M. le Président, et encore aujourd'hui
dans certaines sociétés qui sont près de la nature, on
valorise les personnes âgées. On louait la sagesse, la
maturité et l'expérience des personnes, on les consultait, on
leur faisait occuper des postes de responsabilité, alors qu'aujourd'hui,
on est porté beaucoup plus à valoriser la jeunesse et,
quelquefois, au détriment des personnes plus âgées.
Ne peut-on pas songer à une société où les
mentalités concilieraient tous les âges de la
société et dans laquelle chaque catégorie serait
valorisée en fonction de ses qualités propres? Ne peut-on pas
concilier la sagesse, la maturité, l'expérience des personnes
âgées avec le dynamisme, la vitalité, l'esprit d'entreprise
des plus jeunes, surtout à cette époque que nous vivons,
où les jeunes aspirent à travailler tout en poursuivant leurs
études, où les travailleurs retournent aux études pour des
fins de recyclage ou pour des fins culturelles, où les personnes du
troisième âge s'inscrivent à des cours ou s'engagent dans
des activités communautaires, culturelles ou même politiques, et
qui nous démontrent ainsi qu'elles refusent d'être
considérées comme finies, comme devant être mises au
rancart?
Ce sont ces gens, M. le Président, qui sont en train de changer
les mentalités de notre société. Qu'est-ce que la
société attend pour reconnaître leurs efforts et leur
volonté de prendre leur place comme des agents actifs de notre
société? C'est dans ce sens qu'il faut interpréter la
volonté du gouvernement de reconnaître les individus plus
âgés comme des agents actifs de notre société qui
sont libres de décider par eux-mêmes du moment de leur retraite.
Lorsqu'on dit à quelqu'un qu'il doit nécessairement prendre sa
retraite à 65 ans, la société lui signifie qu'il ne peut
plus fonctionner au travail, lui signifie dans un sens qu'il n'est plus bon
à rien non plus, qu'il doit devenir un agent passif de la
société. S'il n'y avait pas eu cette loi, on l'aurait
signifié à de plus en plus de monde car, dans une vingtaine
d'années, comme on l'a déjà souligné, il y aura 10%
de citoyens âgés de 65 ans et plus.
Quand on entend dire que cette loi risque de léser les jeunes qui
sont à la recherche d'un emploi, on accrédite encore une fois
l'idée qu'une personne, à cause de son âge, doit
céder sa place aux autres, alors que l'activité que
démontrent présentement les personnes du troisième
âge tend justement à démentir cette idée qu'il
existe des frontières, une frontière bien délimitée
entre les personnes qui n'ont pas encore atteint l'âge de 65 ans et les
personnes qui ont atteint cet âge qui semble aujourd'hui fatidique.
En fait, n'est-il pas vrai que toute personne, quel que soit son
âge, prend la place d'un jeune à la recherche d'un emploi?
Pourquoi accabler davantage la personne qui a atteint 65 ans? N'est-ce pas en
fonction d'une certaine mentalité révolue?
En terminant, je voudrais rappeler que cette loi constitue le premier
jalon d'une politique qui vise à faciliter la transition entre le
travail et la retraite par l'instauration d'un régime de retraite
facultative à compter de 60 ans car, comme il a été
mentionné dans le discours inaugural, la retraite doit devenir un
phénomène graduel, planifié et essentiellement
volontaire.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Avant de donner la
parole au prochain député, je voudrais quand même rendre
officiel ce qui est officieux pour le moment. Il y aurait le
député de Nelligan, le député de Laurier, la
réplique du ministre, ce qui nous porterait vers 13 h 15 ou 13 h 20; la
reprise des travaux se fera à 16 heures, comme on le dira tout à
l'heure.
M. le député de Nelligan. Oui, M. le ministre.
M. Lazure: Une mise au point, si vous me le permettez. Tout en
respectant la limite d'environ 30 minutes ou 15 minutes additionnelles au
calendrier habituel, je demanderais qu'on réserve quelques minutes,
trois ou quatre minutes, au député de Vachon qui avait
prévu prendre la parole.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela va. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce que vous allez
maintenant avoir trois intervenants?
M. Lazure: En réponse à la question de Mme la
députée de L'Acadie, il va y en avoir un troisième, oui,
le député de Vachon, pour une très brève
intervention.
Mme Lavoie-Roux: Alors, nous allons aller en chercher un
troisième.
M. Lazure: Non, c'est tout. Trois avec moi.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Lazure: Deux députés et le ministre, comme de
votre côté.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Lazure: Les règles du jeu sont respectées.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, cela va.
M. le député de Nelligan.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, je pense que, sur la question
des personnes âgées et des retraités, personne ne veut
faire de politique; du moins, c'est le voeu le plus sincère que je
puisse exprimer ici, c'est-à-dire que cette question déborde de
l'arène politique, que ça devienne une question comme celle de la
protection de la jeunesse, celle des handicapés, celle des personnes
indigentes, qui ne tienne pas de l'arène politique. Je pense que c'est
une question sociale fondamentale et qu'il faudrait faire abstraction de tout
ce qu'un parti ou l'autre a fait de tellement bien pour l'un ou pour l'autre.
Je pense que ça dépasse toute cette question politique, cette
question partisane.
Je voudrais proposer au ministre, en toute sincérité, que
cette fois aussi nous traitions cette question de l'âge flexible de la
retraite de la même façon positive que nous avons traité la
question de la protection de la jeunesse, en regardant la commission
parlementaire qui va être tenue plus tard comme une grande commission
bipartite où tous les intéressés des deux partis
politiques vont se rencontrer avec l'esprit le plus objectif possible, avec
tous les intervenants, pour décider vraiment de ce qui est le mieux pour
les personnes âgées, pour les retraités, pour ceux qui
veulent prendre leur retraite, abstraction faite de toute question
politique.
En fait, nos deux partis sont tout à fait d'accord sur le
principe de la question. Comme l'a souligné la députée de
L'Acadie, notre programme électoral faisait mention de la même
chose que celui du Parti québécois. Cela étant dit, nous
devons vraiment regarder le fond de la question. En principe, nous sommes tous
d'accord que l'âge flexible de la retraite est une mesure
équitable, mesure qui doit se faire. En fait, la députée
de L'Acadie et le ministre ont cité les exemples de divers pays qui vont
dans cette direction. C'est l'évolution tout à fait normale d'une
société et nous sommes tout à fait d'accord avec cela.
Mais, en même temps, il est très sage et je dois féliciter
le ministre d'avoir bien voulu laisser la question en suspens pour un laps de
temps pour que justement une commission parlementaire de la plus grande
envergure se tienne sur cette question fondamentale. Parce qu'on peut
étudier cette question à nos risques. Il faut l'étudier en
toute profondeur, il faut l'étudier en toute objectivité. Nous ne
sommes pas prêts à commencer cette chose parce qu'il y a trop de
questions qui demeurent sans réponse. (12 h 50)
Il y a de gros problèmes dans toute la question de la retraite.
On peut dire que la même chose se passe un peu ici, peut-être que
les chiffres ne sont pas exactement les mêmes, mais il y a beaucoup de
corrélation entre les problèmes qui se voient aux
États-Unis, des problèmes de population, de la population
vieillissante, et les nôtres. En 1950, aux USA, il y avait quelque chose
comme seize contribuables et demi qui aidaient un retraité. Or,
maintenant, quelques années après seulement, 30 ans après,
il y en a seulement 3,2 qui aident un retraité. On dit que, dans encore
20 ans, à la pointe du nouveau siècle, il y aura peut-être
deux contribuables qui vont aider un retraité. C'est un problème
fondamental. Le problème justement de ce nombre de plus en plus
restreint de contribuables qui vont aider une
population vieillissante de plus en plus grandissante.
Le ministre lui-même a cité des chiffres au Canada et au
Québec de notre population qui va vieillir d'un taux de 8%, qui va
passer à 10% dans 20 ans. Après cela, après 20 ans, cela
va aller à un rythme progressif de plus en plus étendu, de plus
en plus rapide. Ce sera la pyramide renversée. Le tout petit nombre de
contribuables qui va aider un nombre de plus en plus grandissant de personnes
âgées. Alors, c'est ça la question critique qu'il faut se
poser. Le ministre a encore apporté le second problème
fondamental, que pour la grosse majorité des gens, que ce soit ici, dans
les autres provinces, ou aux États-Unis, la même chose se passe,
dépendre des fonds publics, des régimes publics pour leur
subsistance après la retraite, parce que les régimes
privés n'existent pas dans certaines entreprises, comme le ministre en a
fait mention, les petites entreprises, ou bien ils existent seulement pour ceux
qui justement travaillent dans le secteur privé.
Ils n'existent pas pour tout le monde. Comme il en a fait mention, 55%
des gens dépendent uniquement des régimes publics, des fonds de
retraite créés par l'État. Aux États-Unis, le
chiffre est encore plus gros. Qu'est-ce qui arrive à ces fonds publics?
La députée de L'Acadie a souligné que ces fonds publics
sont maintenant inadéquats. Tous les calculs actuariels disent que, dans
quelques années, ces fonds seront déficients. Ils commencent
déjà à être déficients. Alors, la question se
pose. On peut poser le principe d'une retraite flexible et tout le monde est
d'accord là-dessus. Mais, en fait, est-ce un choix réel?
Voilà la question primordiale. Si c'est un choix fictif, si c'est un
choix qui dépend essentiellement d'une question pratique, de l'argent
qu'il faudra à chaque retraité pour subvenir à ses besoins
si cet argent n'est pas là, comment dire que c'est un choix vraiment
réel? Je propose que, justement, dans cette commission parlementaire,
nous étudiions en même temps la question fondamentale de trouver
les besoins nécessaires, les besoins financiers, les besoins pratiques
pour subvenir aux problèmes de gens qui voudraient cette retraite
flexible, parce que la retraite flexible, cela va des deux côtés.
C'est une retraite différée ou c'est une retraite
anticipée. Si c'est une retraite anticipée et qu'une personne n'a
pas les moyens suffisants pour subvenir à ses besoins, cela devient un
choix fictif. En d'autres termes, si c'est une retraite différée
et que, comme l'a souligné le ministre, la personne est obligée
de travailler et de différer sa retraite parce qu'elle n'a pas assez de
fonds de retraite à l'âge de 60 ou 65 ans, cela devient une
retraite différée, non pas un choix libre, mais une retraite
obligatoire. Parce que, si la personne est obligée de continuer à
travailler et si cette loi permet à cette personne de continuer à
travailler, elle le fait tout à fait légalement, mais elle est
obligée, parce qu'elle n'a pas assez de revenus, de continuer à
travailler. À ce moment, ce choix n'est plus réel, n'est plus un
choix objectif, mais un choix fictif, un choix obligatoire. C'est paradoxal de
parler d'un choix obligatoire, mais cela devient presque ça. C'est la
question qu'il faudra se poser.
Excusez-moi, M. le Président, je cherche mes notes. Je reviens
tout de suite.
La question est encore beaucoup plus sérieuse, beaucoup plus
capitale pour ce qui a trait aux femmes, parce que les femmes, elles, par la
nature même de la société qui a évolué comme
elle a évolué, touchent beaucoup moins que les hommes dans leur
vie, même si elles sont dotées d'un régime privé
dans leur travail. Du fait même qu'elles ont touché bien moins
dans la vie, elles finissent, à l'âge de la retraite, que ce soit
à 55 ans, 60 ans ou 65 ans, le problème reste le même, avec
une retraite inadéquate, même si elles ont un régime
privé de retraite. Pendant la période électorale, j'ai
parlé à des gens, à des femmes surtout qui me disaient: On
est obligé de continuer de travailler pour un salaire minimum parce que,
justement, les fonds de retraite publics ne sont pas adéquats pour
assurer notre subsistance. On dit que la grande majorité de notre
population - et la députée de L'Acadie l'a souligné - vit
sous le seuil de la pauvreté, est indigente. C'est ça le
problème fondamental. Il me semble que, si on dit: II faut qu'on ait une
retraite flexible, facultative, il faut pouvoir assurer les fonds qui
permettront ce choix à toutes les personnes, surtout aux femmes.
Nous avons proposé, durant la période électorale -
et peut-être le ministre pourrait-il s'arrêter sur cette question -
de donner aux veuves dont les époux étaient couverts par des
régimes privés un minimum de 50% du régime privé du
mari afin de s'assurer que cette personne ne devienne pas d'un jour à
l'autre indigente, malgré que son mari ait contribué toute sa vie
à un régime de retraite. Je pense que le problème des
femmes se pose avec encore beaucoup plus d'acuité que celui des
hommes.
Un autre problème se pose. Ceux qui, surtout, voudront profiter
de la retraite différée, ce seront les cols blancs, les gens des
grandes villes, les types qui seront au pouvoir, ceux qui, vraiment, touchent
de l'argent. On fera en un sens que les riches continuent d'être riches.
Pendant ce temps, on va peut-être faire cesser l'évolution normale
des affaires, qui veut que les plus jeunes prennent leur place, se recyclent.
C'est un autre problème sur lequel il faudra se pencher, celui des gens
qui voudront
s'accrocher, malgré peut-être des capacités
diminuées, malgré peut-être la sénilité,
à un travail où ils vont déplacer des jeunes. Par contre,
ceux qui voudront prendre leur retraite seront en majorité des cols
bleus qui, eux, n'auront pas les moyens de le faire. C'est ça le grand
problème.
Je voudrais laisser au ministre à penser que le point capital de
notre intervention, c'est vraiment que nous examinions à fond toute la
question de la retraite, la question actuarielle des fonds de retraite, la
possibilité d'inclure dans les régimes privés certains
critères minimaux qui vont donner la possibilité aux gens de
faire un choix réel et objectif. C'est ça la clé de toute
notre intervention, faire un choix non pas fictif, mais un vrai choix.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Vachon.
M. David Payne
M. Payne: II me fait grand plaisir, M. le Président, de
m'adresser à l'Assemblée à ce sujet aujourd'hui, parce que
ça touche les gens qui sont autour de l'âge de 65 ans ceux qu'on a
l'habitude d'appeler "les personnes âgées". Cela me fait plaisir,
parce que je conteste vigoureusement une telle appellation sociale. (13
heures)
Au Québec, nous avons des personnes de toutes souches, de toutes
cultures, de tous âges. Je me réjouis que le ministre actuel, le
ministre d'État au Développement social, présente un tel
projet de loi qui nous met à l'avant-garde de la société
civilisée de l'Ouest, des pays comme les États-Unis, comme la
Suède, comme la Norvège. Il s'agit d'un projet de loi qui est
simple. C'est simple parce que cela fait appel à la dignité de
l'homme. Cela fait appel - la formation ministérielle, le Parti
québécois au pouvoir, encore une fois le gouvernement - à
nos instincts les plus fondamentaux de briser une fois pour toutes avec cela,
et avec chaque mesure fondamentale qu'on adopte ici dans cette Assemblée
nationale, cela fait appel à notre détermination d'adopter un
projet de loi qui aurait comme effet et objet le bien-être des
individus.
Ainsi, nous avons, au cours des trois ou quatre dernières
années, aidé un peu les personnes au-delà de 65 ans, par
exemple, par la gratuité des soins médicaux et des ordonnances,
la gratuité du transport ambulancier et le programme de Logirente qui
aide ceux qui paient plus que 30% de leur revenu pour le logement. C'est bien
comme cela qu'il faut faire au Québec. Nous sommes très fiers,
comme Québécois, et de ce cûté-ci de la Chambre, de
proposer aujourd'hui ce projet de loi. Moi aussi, comme député de
Vachon, je peux dire que nous avons beaucoup de personnes qu'on appelle
âgées. Mais, comme je le disais tout à l'heure, on conteste
le fait que nous sommes âgées, les personnes au-delà de 65
ans. Nous sommes actifs dans la société, dans la ville de
Saint-Hubert. Nous travaillons fort, mais nous nous amusons très fort,
très bien. Nous avons des sports pour les handicapés, pour les
personnes âgées. Nous contestons, dans Vachon aussi, la
catégorisation institutionnelle que nous faisons d'habitude entre les
études, c'est-à-dire à l'école jusqu'à
l'âge de 18 ans, et, par la suite, on est obligé de travailler
pendant une période de temps et, ensuite, c'est la retraite.
Je préfère une philosophie sociale qui fait appel
plutôt à la dignité de l'individu, où je peux me
dire: Je veux réapprendre quelque chose ou remettre en question ce que
j'ai appris il y a quinze ans; ou je veux également avoir le droit de
prendre ma retraite, idéalement, quand je le voudrai, quand je serai
fatigué, quand j'aurai fait ma part dans la société. Mais,
ne me dites pas que qui que ce soit peut me dire que j'en ai fait assez, que je
suis trop vieux, parce que nous voyons, chez les personnes qu'on appelle "les
vieux", les plus jeunes de notre société et, chez les jeunes, les
plus sages et les plus adultes de notre société.
It gives me a tremendous pleasure, Mr. Chairman, to address myself to
this bill because it is an extremely progressive law which is being proposed by
the present Minister of State for Social Development. Typical of him and of our
government, I think it puts us in the forefront of social measures of this
kind, with respect, for example, to the US, Norway, if I am not mistaken, and
also Sweden.
In abolishing the obligatory retirement, we give an opportunity for any
individual to choose himself when he feels he has contributed enough to his
family, to his work, to society and, here in Québec, to our own
homeland.
It is very important, in this basic law, to underline the fact that it
is a fundamental right and that there is nothing extravagant about it, there is
nothing radical about it, but it is necessary. Any progressive society like
Québec must have a law like this. We must break down the categories that
divide the school up to the age of 18, the school from the work place and the
work place from the period of retirement.
I think that our government has the opportunity, in the next few years,
to continue what it has begun over the last few years, to really help people to
put into question the fact that these categories separate us. We find young
among the old, we find old people with young ideas. That is the sort of measure
that we have to bring in, in this government. It is an individual
right and it gives this government an opportunity to answer to the
principle of dignity, the dignity which has characterized the program of the
Parti québécois.
Finally, in the last minute, I would like to recommend that the
government continue in the best possible way to exercise every bit of
imagination possible to bring in progressive programs such as progressive
retirement, such as extended leaves for people of the age of 30, 40 or 50, to
make it easier to bring more people into the work force, to have a more
diversified society.
In conclusion, diversification of this nature, Mr. Chairman, cannot but
be for the betterment of Québec. I am happy for this bill, I support it
without reservation and I am proud to be a member of the ministerial team that
has proposed it. Thank you.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laurier.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais
aussi, à mon tour, parler sur ce projet de loi qui vise à abolir
la retraite obligatoire à 65 ans. Effectivement, je pense que cela a
été mentionné par les autres orateurs tout à
l'heure, on a plusieurs études, sinon la quasi-totalité des
études, qui démontrent que le moment d'arrivée de la
retraite est souvent un choc assez sérieux pour les personnes qui,
jusqu'à ce moment-là, étaient des membres productifs de la
société et qui participaient à sa vie économique et
quotidienne. Tout à coup, ils se sentent un peu, enfin, ils sont
effectivement mis en veilleuse, mais une veilleuse qui dure beaucoup plus
longtemps que deux mois.
Ces gens-là n'ont pas le loisir de se prévaloir de cette
possibilité de continuer à travailler, même s'ils en ont la
capacité, ils sont obligés d'arrêter de travailler et, tout
à coup, tomber dans une autre phase de leur vie qui est la retraite.
Souvent, on voit - le service social en particulier, dans le domaine
médical également - que beaucoup de gens qui n'étaient pas
préparés à la retraite se trouvent tout à coup avec
un immense nombre d'heures disponibles sur le moment et ils ne savent plus quoi
faire. Ils vivent de vrais problèmes. Dans ce sens-là, c'est un
bon projet de loi, si on peut le qualifier ainsi, qui permettra aux gens qui se
sentent la capacité de continuer à travailler, qui ont la
possibilité de continuer à travailler, physiquement et
mentalement, de le faire.
Je crains pourtant certaines choses avec ce projet de loi et l'une des
choses que j'aimerais aborder a été soulignée tout
à l'heure par le ministre et par le député de Vachon. On
parlait de libre choix. Si on est très réaliste, il ne peut pas y
avoir de libre choix sans qu'on ait des options. Quand on sait d'avance que la
majorité des gens qui arrivent à l'âge de la retraite, qui
pour le moment est fixé à 65 ans, n'ont pas les moyens de
maintenir un niveau de vie avec dignité, comme disait le
député de Vachon, quand on sait, comme le ministre nous le
disait, que 55% des personnes âgées n'ont pas de régime
enregistré de retraite, donc ils dépendent uniquement du
régime de retraite de l'État, on voit qu'il n'y a pas de choix.
On se trouve comme sur un chemin, dans le processus de la vie, si vous voulez,
on continue à travailler pour gagner sa vie, on arrive à un
moment dans la vie qui, pour l'instant, est démarqué à 65
ans et là, on ouvre une porte, mais on n'a pas ouvert deux portes pour
que la personne puisse vraiment choisir laquelle elle veut prendre. Elle a
effectivement deux choix: soit d'arrêter et de vivre au-dessous du seuil
de la pauvreté ou de continuer à travailler pour maintenir un
niveau de vie un peu plus acceptable. Dans ce sens, cette loi va permettre aux
gens de continuer à travailler. Je crois aussi que les gens qui vont se
prévaloir de ce droit seront de deux catégories: soit des gens
qui sont dans le besoin économique et vont continuer à
travailler, soit des gens qui, effectivement, ont ou ont eu une vie et un
travail qui leur permettent d'avoir le loisir de rester à leur travail
parce qu'ils aiment ça, parce qu'ils font quelque chose qu'ils trouvent
valorisant.
On sait aussi, selon plusieurs études faites dans le service
social, en psychologie, etc., qu'effectivement, quand la personne se sent
valorisée dans son travail, quand elle retrouve une certaine
identité avec son travail, et qu'elle aime ça, les chances sont
qu'elle voudra continuer à travailler. Ce point a été
touché tout à l'heure par le député de
Nelligan.
Arriver en dernier, c'est toujours difficile, parce que beaucoup de
choses ont été couvertes, mais je vais essayer simplement
d'être bref. Effectivement, chez les gens qui travaillent dans des
métiers routiers, à la chaîne, dans des emplois lourds,
etc., on constate, dans d'autres pays, d'autres provinces, que la tendance
serait beaucoup plus vers une retraite anticipée. J'espère que ce
que le ministre a dit tout à l'heure, qu'il y aura à la session
d'automne d'autres volets à ce supposé ensemble de projets qui
visent à améliorer la condition des personnes âgées,
comprendra la possibilité pour ces personnes de s'orienter aussi vers
une retraite anticipée. Encore une fois, on ne peut pas avoir de libre
choix, si on n'a pas d'option. Pour la grande majorité des personnes
âgées, à l'heure actuelle, il n'y a pas d'option. (13 h
10)
II y a deux derniers points que j'aimerais soulever. Une manière
serait
d'avoir une option qui faciliterait la préparation à la
retraite pour les gens qui veulent la prendre à 65 ans. Il y a plusieurs
projets qui ont été mis sur pied, des cours de préparation
à la retraite, etc., qui pourraient la faciliter et permettre à
des personnes qui voudraient se prévaloir de leur droit à 65 ans
d'utiliser leur temps d'une manière qui serait valorisante pour eux
pendant cette phase de leur vie. Pourtant, il y a un lien, je pense. On a
constaté, dans le budget, qu'il y a une coupure quasi totale dans les
cours d'enseignement aux adultes. Ce serait un moyen intéressant
d'atteindre les gens par rapport aux cours de préparation à la
retraite.
I would like also to add a few words, if I may, in English. Basically,
you know, it was interesting hearing the deputy of Vachon speak in terms of the
dignity of the individual, the progressive measures of the Government and his
hope that more and more of this would happen and also his reference to certain
Scandivanian countries such as Sweden and Norway. I do not have the figures of
such but I really wonder if countries that can afford that kind of, I would not
say luxury, but can move in that direction more rapidly than we can over here
are in the same position as we are. Is it the same, for instance, in Sweden
where the 55% of the population does not have access to private pension plans?
It has to depend almost entirely on pension money from the state which, as we
all know, is a very difficult way to make ends meet, and we find a large
majority, I would say, of people over 65 who live uniquely on their pensions,
finding it extremely difficult to make ends meet, and specially at a moment of
time we are watching inflation at a rate of about 10% or 12%, interests rate of
20%. These of the people are having an enormous amount of difficulty.
I do not think that the kind of message is being vehiculed or put
across, if you like, in terms of progressive measures and in terms of measures
that give, give, give, is very much in accord with what we have been witnessing
this whole month up to now. I think that, if we look at this particular bill, I
find it an excellent bill in terms of abolishing the discrimination that exists
because of age. I do not think that we can pretend that this bill in itself
really goes a long way to correct the many social injustices that exist in
terms of the needs of senior citizens specially at a time that we are
witnessing some massive cuts in the budget of the Social Affairs Department.
The thing I wondered in my mind is like the candy or the sugar to make the pill
go down easier... Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, le droit
de réplique.
M. Denis Lazure (réplique)
M. Lazure: M. le Président, je veux d'abord remercier mes
collègues de l'Assemblée de leur appui à commencer par mes
collègues de Vachon et de Fabre et aussi les collègues de
l'Opposition.
Je me réjouis de l'atmosphère très positive,
très constructive dans laquelle ce projet de loi est abordé:
concordance des partis vers un même objectif, à savoir, abolir une
mesure discriminatoire.
Je vais essayer de répondre en cinq ou six minutes aux trois ou
quatre questions les plus importantes qui ont été
soulevées. La première, c'est une suggestion de la
députée de L'Acadie: Pourquoi ne pas procéder par
étapes? Quand il s'agit d'abolir une discrimination sociale, il n'est
jamais trop tôt pour le faire. Moi aussi, je vais dire mes quelques mots
en anglais, en citant le journaliste Don McGillivray de la Gazette, journal
auquel nos amis de l'Opposition accordent beaucoup de crédit, beaucoup
de fiabilité. M. McGillivray, après avoir fait l'éloge du
projet de loi, l'éloge du gouvernement actuel, - c'est assez rare, M. le
Président, dans le journal la Gazette, il faut le noter - conclut en
disant: "Si Abraham Lincoln avait écouté tous ceux qui disaient:
L'esclavage, il faut faire disparaître cela graduellement, par
étapes, - c'est M. McGillivray qui le dit - on aurait encore de
l'esclavage partiel aux États-Unis". Mais la toute dernière
phrase de l'article de M. McGillivray, que je vous engage à lire, si
vous ne l'avez pas fait, mes amis d'en face conclut en disant: "In fact,
conditions have never been better for ending mandatory retirement." De fait,
dit-il, jamais les conditions n'ont été aussi propices pour
abolir, une fois pour toutes, la retraite obligatoire.
M. le Président, sérieusement, nous avons envisagé
cette possibilité de procéder par étapes. Je sais que le
comité du sénateur Croll avait fait cette recommandation. Par
ailleurs, la ministre Monique Bégin de la Santé nationale et du
Bien-Etre social, dans une entrevue qu'elle accordait récemment à
la Presse Canadienne se disait favorable à l'abolition immédiate
de la retraite obligatoire.
Dernier aspect de la question, un sondage Gallup qui a été
fait à travers tout le Canada il y a un an et demi ou deux ans,
démontre que 62%, - un tel pourcentage est rare lors des sondages Gallup
- s'entendent pour l'abolition immédiate de la retraite obligatoire.
Deuxième remarque. Il est sûr qu'à partir du moment
où un employeur ne peut plus congédier un employé ou une
employée sous prétexte de l'âge, tout le processus
d'évaluation du personnel, cette évaluation que tout bon
employeur doit faire
régulièrement, au moins une fois par année, devra
être beaucoup plus stricte, beaucoup plus raffinée. C'est clair
que cette abolition de l'âge obligatoire de la retraite va imposer un
certain surcroît de travail aux employeurs de manière que leur
évaluation du rendement de l'employé soit vraiment plus au
point.
COFIRENTES. La députée de L'Acadie a, à bon droit,
posé la question: À quand la mise en application des
recommandations de COFIRENTES? Nous avons maintenant en main à peu
près tous les rapports semblables à COFIRENTES qui ont
été faits dans d'autres provinces, ainsi que par le gouvernement
fédéral. C'était une des raisons de notre attente, si vous
voulez. Il y a des options fondamentales qui devront être
discutées dans les prochains mois par le gouvernement et par cette
Assemblée nationale. Par exemple, dans le domaine des régimes de
rentes publics, le régime de rentes du Canada ou le régime de
rentes du Québec qui sont équivalents, à toutes fins
utiles, est-ce que ce régime public doit être bonifié,
amélioré le plus tôt possible pour l'ensemble des citoyens
du Québec? C'est un peu la position de la Saskatchewan qui a
annoncé il y a un mois que, indépendamment de la volonté
du gouvernement fédéral, elle, la province de la Saskatchewan,
allait bonifier son régime public de rentes, le RPC, l'équivalent
du régime de rentes du Canada.
L'Ontario, à l'extrême opposé, si vous voulez, a
l'intention d'imposer des régimes supplémentaires de rentes
à toutes les entreprises. C'est une option. Déjà,
l'Ontario avait un projet de loi il y a plusieurs années, qui n'a jamais
été sanctionné, pour rendre obligatoire le régime
supplémentaire de rentes dans toute entreprise. On nous dit, aux
dernières nouvelles, que l'Ontario veut revenir avec cette loi. Notre
choix est loin d'être fait, il s'agit de choix fondamentaux. Je peux
simplement dire aux membres de l'Opposition, ainsi qu'à mes
collègues - je le répète encore une fois - que nous avons
l'intention, à la prochaine session, de compléter par d'autres
projets de loi cet ensemble de mesures visant à améliorer de
façon notable le sort des retraités et des
préretraités. (13 h 20)
Une dernière réponse à une question: le maintien
des avantages sociaux. Il est bien sûr que la pension, par exemple,
émise par le gouvernement fédéral continuera d'être
touchée, elle sera touchée par la personne de 65 ans qui continue
de travailler. Bien sûr que cette personne recevra la pension du
fédéral. Quant à la pension du Régime de rentes du
Québec, si la personne continue de travailler au-delà de 65 ans,
elle aura le choix, elle pourra, ou bien tout de suite toucher sa pension de la
Régie des rentes ou bien continuer d'investir et la toucher lorsqu'elle
prendra sa retraite quelques années plus tard.
Je rappelle en passant que dès 1977 le gouvernement du Parti
québécois a modifié la Loi sur la Régie des rentes
pour permettre justement aux personnes de 65 ans et plus de toucher leurs
rentes au complet, tout en touchant un salaire, s'il ou si elle choisissait de
continuer de travailler, ce qui n'était pas possible avant, sous
l'ancien gouvernement.
M. le Président, en conclusion, je suis très heureux de
voir que non seulement il y a unanimité à toutes fins utiles en
dehors de cette Chambre, dans le public, dans les corps
intéressés, chez les individus, dans les médias et qu'ici
aussi, dans cette Assemblée, les deux partis politiques s'entendent pour
procéder. Nous avons décidé, étant donné la
complexité de la question, de procéder un peu plus lentement que
prévu, mais nous espérons être en mesure de continuer
l'étude de cette loi au cours de l'été et d'en arriver
à une adoption finale, lors de la session d'automne. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Cette motion de
deuxième lecture du projet de loi no 15, Loi sur l'abolition de la
retraite obligatoire et modifiant certaines dispositions législatives
est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission des affaires
sociales
M. Charron: M. le Président, je propose la
déférence de ce projet de loi à la commission
parlementaire des affaires sociales.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, je propose la suspension des
travaux jusqu'à 15 h 45 cet après-midi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Suspension
des travaux jusqu'à 15 h 45.
(Suspension de la séance à 13 h 23)
(Reprise de la séance à 15 h 55)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaîtl
Veuillez vous asseoir.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, je voudrais d'abord faire
rapport à la Chambre du travail de plus de 150 heures au total, en
commission parlementaire, impliquant tous les membres de l'Assemblée,
j'en suis convaincu.
Dépôt du rapport de
l'étude des crédits pour
l'année 1981-1982
Conformément à l'article 130 du règlement de
l'Assemblée nationale, j'ai l'honneur, au nom du ministre des Finances,
de déposer le rapport regroupant les différents rapports des
commissions permanentes élues qui ont procédé à
l'étude des crédits du buget de l'année financière
1981-1982, pour chacun des ministères du gouvernement du
Québec.
Ces commissions ont tenu 31 séances, pour un total de 134 heures
et 54 minutes. Je dépose ce document.
Sur le même sujet, M. le Président, à la suite d'une
entente avec l'Opposition, nous allons procéder à la discussion
de ce rapport ce soir. Je rappelle les dispositions de l'article 128 du
règlement qui dit que tout député qui veut intervenir sur
ce sujet, lors de la discussion de ce rapport, contrairement à tous les
autres débats qu'il y a dans cette Assemblée à n'importe
quel autre moment, doit donner un avis préalable qu'il a l'intention
d'intervenir, et seuls les députés qui ont donné un avis
écrit au secrétaire général de l'Assemblée,
au cours de la séance de cet après-midi, auront ce soir le
privilège d'intervenir et d'obtenir un échange avec le ministre
qu'ils choisiront d'impliquer dans la discussion. J'ai, pour ma part,
demandé à chacun des ministres, au Conseil des ministres qui est
d'ailleurs encore en réunion, d'être disponible en soirée,
selon l'appel qui viendra de ceux qui s'inscriront auprès du
secrétaire général.
Jusqu'à 18 heures, il nous reste deux heures de débat sur
le discours sur le budget et nous voterons à 18 heures. Je vous prie
donc d'appeler l'article 2 du feuilleton, M. le Président.
M. Picotte: Je dois vous dire, au nom de l'Opposition, qu'au
cours de la séance, cet après-midi, vous serez avisé du
nom des gens qui désireront intervenir et il y aura possibilité
d'aviser les ministres en conséquence.
M. Charron: Merci.
Reprise du débat sur le discours sur le
budget
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Reprise du débat sur la motion de M. Parizeau proposant que
l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement. M.
le député de Richmond.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: M. le Président, j'aimerais
aujourd'hui profiter de l'occasion qui m'est donnée de faire part
à cette Chambre, et à mes électeurs en particulier, de
quelques dangers qui, à mon avis, guettent le Québec et le
comté de Richmond.
J'ai eu l'occasion, au cours de l'étude des crédits du
ministère des Transports, de discuter avec le ministre les
problèmes avec lesquels les électeurs du comté de Richmond
sont confrontés dans le domaine de la voirie. Je dois vous dire
qu'après avoir pris connaissance des crédits du ministère
des Transports, je ne suis guère rassuré sur l'avenir qui nous
attend. Il m'apparaît, en effet, paradoxal d'entendre le ministre nous
dire, par le truchement des journaux, qu'il accordera la priorité
à la voirie régionale plutôt qu'aux autoroutes, alors que
le budget semble bien vouloir dire exactement le contraire.
En effet, le budget de construction d'autoroutes demeure à 139
000 000 $ comme l'année dernière. Par ailleurs, la construction
des routes principales passe d'un budget de 110 000 000 $ à 93 000 000
$, la construction de routes régionales passe de 59 000 000 $ à
51 000 000 $ et la construction d'autres routes de 122 000 000 $ à 119
000 000 $. Le budget de construction de routes diminue donc de 26 000 000 $ et
la coupure n'est pas affectée aux autoroutes, mais bien à la
construction des autres routes à caractère régional et
local.
Alors, comment ne pas être alarmé quand,
déjà, le budget précédent qui était de 26
000 000 $ plus élevé ne permettait pas de répondre aux
besoins, en particulier ceux du milieu rural?
Est-ce de cette façon que le gouvernement compte valoriser la
classe agricole? Car, ne l'oublions pas, ses représentants seront les
premiers pénalisés. Les agriculteurs qui sont maintenant de
véritables investisseurs et qui exploitent de véritables
entreprises sont en droit de s'attendre à plus d'attention et de
considération.
Le ministre m'indiquait en commission parlementaire qu'il était
impossible de paver plus de 33 000 kilomètres de routes qui ne le sont
pas présentement. Évidemment, M. le ministre exagère. Il
sait très bien que les électeurs ruraux du Québec ne sont
pas si exigeants. Je l'ai informé qu'à mon avis, il est
prioritaire qu'à tout le moins les municipalités de campagne
soient reliées les unes aux autres par une voie pavée. Il n'y a
pas là de commune mesure avec les 33 000 kilomètres dont nous a
parlé le ministre. (16 heures)
Comment accepter une diminution de budget de voirie alors que, dans le
comté de Richmond, nous sommes négligés depuis maintenant
cinq ans par le gouvernement actuel? Je veux rappeler au ministre qu'il existe
encore dans le comté de Richmond et sûrement dans bien d'autres
comtés au Québec des municipalités qui ne sont
reliées ni d'un côté ni de l'autre par une route
pavée. Je songe à Saint-Fortunat, à Ham-Sud, à
Sainte-Hélène-de-Chester. Il existe dans le comté de
Richmond des routes qui ferment chaque printemps parce qu'elles deviennent tout
simplement inutilisables. Le Parti québécois voudrait que nous
nous réjouissions de son budget rapetissé de voirie. Non, M. le
Président, cette situation est, pour moi, inacceptable.
Le ministre des Transports a également fait allusion, en
commission parlementaire, au fait que l'échéancier de
construction de la route 116, entre Richmond et Kingsey-Falls, pourrait
être retardé s'il fallait que les priorités du
député soient différentes. Je vais raconter une courte
histoire au nouveau ministre, une histoire que son prédécesseur a
permis d'écrire. Dois-je lui rappeler que la construction de l'autoroute
55, devant relier Richmond à Saint-Albert, a été
stoppée, a été mise en veilleuse pour être ensuite
mise à mort par le Parti québécois?
C'est d'ailleurs à la suite de cette décision très
discutable que le premier ministre est venu nous annoncer, après que son
ministre des Transports de l'époque l'eut lui-même fait, que la
route 116 allait être reconstruite au complet et remplacerait l'autoroute
55 dont on venait de sonner le glas. Il aura fallu à peu près
quatre ans avant qu'on puisse bénéficier d'un premier contrat sur
une longueur de moins de deux milles. Alors, je comprends mal que le ministre
veuille maintenant marchander la route 116 pour d'autres routes comme la route
216, la route 249 ou la route 255. Comment pourrait-il, d'ailleurs, contredire
son premier ministre qui est venu promettre cette route aux électeurs du
comté de Richmond chaque fois qu'il y a mis les pieds?
Si M. le ministre prenait la décision de mettre fin à ce
projet pour donner suite à d'autres demandes, il devrait lui-même
venir s'expliquer dans le comté de Richmond. Je n'ai personnellement pas
l'intention de négliger l'un ou l'autre des territoires du comté
de Richmond et j'espère que le ministre se rendra compte que le
comté de Richmond a peut-être plus besoin que d'autres
comtés de voir son réseau routier amélioré. Il
reconnaîtra d'emblée que, par exemple, le comté de Richmond
est confronté avec des besoins supérieurs à ceux de son
propre comté qui a pu bénéficier, dans le passé,
d'une manne quasi providentielle. Le ministre admettra que la voie lui a
été bien pavée dans Drummond et qu'il se doit de songer
à ceux qui ont trop souvent été
négligés.
Donc, je souhaite que le nouveau ministre des Transports
réussisse le tour de force d'accentuer la construction de routes
à caractère régional et local tout en acceptant une
diminution importante de son budget, surtout si on tient compte que
l'inflation, à elle seule, gruge près de 50 000 000 $ de son
budget de voirie. M. le Président, je veux assurer le ministre de ma
sympathie en même temps que de ma collaboration, car je sais qu'il n'aura
pas une mince tâche et qu'il devra dans plusieurs circonstances compter
sur notre compréhension. Je veux l'assurer que cette
compréhension sera proportionnelle à la volonté qu'il aura
d'aider les électeurs de mon comté. Mais, M. le Président,
quand on songe que certaines gens attendent depuis 25, 30, voire 40 ans la
reconstruction d'une route, vous serez d'accord avec moi pour dire qu'ils ont
bien raison d'être quelque peu impatients, d'autant plus qu'avec la
nouvelle politique du ministère des Transports, un grand nombre de
citoyens donnent leurs terrains afin de permettre l'exécution de travaux
de voirie.
Ce que ces gens revendiquent, c'est un minimum décent. Ils ne
demandent pas des autoroutes. Je faisais mention au ministre qu'il suffirait
par exemple de construire des routes en se servant de normes un peu plus
restreintes, un peu plus réduites. Des routes à 66 pieds
d'emprise sont nettement acceptables pour la majorité des cas des routes
à caractère local. Le ministre devrait largement s'inspirer de
cette proposition pour remédier aux coupures budgétaires
auxquelles il a à faire face dans son ministère. Donc, en milieu
rural, il économiserait doublement en construisant des routes à
standard un peu plus restreint et en éliminant les expropriations. Ces
deux mesures seront certes plus efficaces qu'un ticket modérateur et ne
pénaliseront personne, M. le Président.
Je voudrais à ce moment-ci m'attarder sur un autre sujet qui me
tient énormément à coeur, celui de l'amiante. En ayant
déjà parlé antérieurement en réponse au
discours inaugural, je me limiterai à quelques points primordiaux pour
le comté que je représente.
Je faisais part en commission parlementaire au ministre de
l'Énergie et des Ressources de mes inquiétudes en ce qui a trait
à la tendance actuelle de la Société nationale de
l'amiante de localiser à Thetford-Mines les projets d'exploitation des
résidus d'amiante. Le ministre n'a pas tardé à faire
connaître ses intentions et il m'a informé, à mon grand
regret, qu'il allait certainement privilégier Thetford-Mines puisque, si
le gouvernement nationalise l'Asbestos
Corporation, il sera propriétaire de résidus d'amiante et
que, par conséquent, il n'allait pas acheter des résidus
situés ailleurs. Il n'y a pas là de quoi rassurer les 400 jeunes
chômeurs d'Asbestos qui ont été mis à pied par la
Johns-Manville Canada, faute de production.
Il n'y a pas là de quoi rassurer non plus les travailleurs
actuels qui font face à des congés temporaires, faute de
production. II n'y aura pas là de quoi non plus rassurer la ville
d'Asbestos, qui a demandé qu'une personne de cette région puisse
être nommée au conseil d'administration de la
Société nationale de l'amiante. Dans ce cas précis, je
crois que la décision de l'ancien ministre, M. Bérubé, de
refuser de donner suite à cette demande ne pouvait être
justifiée que par le fait que la région d'Asbestos ne figurait
pas du tout dans ses plans. Je comprends mieux maintenant que le ministre
actuel nous confirme qu'il ne considérera pas Asbestos comme site de
traitement des résidus d'amiante. Je suis heureux de la franchise du
ministre actuel, mais il comprendra que sa position est inacceptable pour les
électeurs du comté de Richmond et je veux, en leur nom,
manifester mon mécontentement. Est-ce trop demander, M. le
Président, que de vouloir que la Société nationale de
l'amiante soit au service de toutes les villes amiantifères et non pas
seulement d'une ville où le gouvernement se prépare d'ailleurs
à investir des montants fabuleux pour se porter acquéreur de la
mine Asbestos Corporation? Vous comprendrez mon inquiétude, M. le
Président et je veux profiter de cette tribune pour alerter la
population de toute la région d'Asbestos, face à ce qui pourrait
devenir le coup de force du ministre de l'Énergie et des Ressources.
Dans ce domaine comme dans celui de la voirie, je désire rappeler
à cette Chambre que les électeurs de Richmond sont payeurs
d'impôts et de taxes au même titre que ceux des comtés
représentés par les députés ministériels. Il
ne faudrait pas oublier que si le ministre des Finances a pu préparer et
présenter un budget, c'est qu'il y a un autre ministère qui
perçoit les impôts des électeurs, le ministère du
Revenu. Que je sache, les citoyens du comté de Richmond paient bien
leurs impôts et ils sont en droit d'attendre de recevoir des services
équivalents à ceux que reçoivent les électeurs
d'autres comtés au Québec.
M. le Président, on ne peut se réjouir des nombreuses
coupures qui ont été annoncées dans les divers
ministères, entre autres, au ministère de l'Éducation. Des
compressions budgétaires dans certains cas, vont amener une diminution
de services. Le député de Brome-Missisquoi nous parlait hier des
institutions privées d'enseignement. Il est bien évident que pour
des raisons idéologiques, sous le couvert de motifs budgétaires,
le gouvernement actuel va sonner le glas de nombreuses institutions qui
bénéficient d'une excellente réputation. Mais il n'y a pas
que les institutions privées puisque, même dans le secteur public,
nous assisterons à des fermetures d'écoles. C'est ainsi que dans
le comté de Richmond, l'école du Mont-Saint-Patrice, dans la
ville de Richmond, fermera peut-être et probablement ses portes,
malgré l'opposition des parents et des professeurs concernés.
J'ai d'ailleurs placé une demande officielle au ministre de
l'Éducation afin qu'il intervienne personnellement dans ce dossier pour
éviter la fermeture de cette école à laquelle les gens de
la ville de Richmond sont profondément attachés.
Donc, M. le Président, déficit record, coupures record.
Comment être d'accord avec pareille performance? Ajoutez à cela le
fait qu'on veuille piger à même les profits d'Hydro-Québec
pour ensuite augmenter les tarifs aux consommateurs; c'est un impôt
déguisé, M. le Président. (16 h 10)
II ne faudrait pas non plus oublier l'apparition du ticket
modérateur dont le ministre des Finances fera bientôt usage;
même le ministre de l'Agriculture envisage de s'en servir. On n'a pas
assez de couper dans certains programmes aux agriculteurs, il nous a
parlé en commission parlementaire d'un ticket modérateur pour
ceux qui font usage de l'insémination artificielle, et qu'il faudra
envisager que seules les régions éloignées pourraient
bénéficier de l'aide gouvernementale. C'est à croire que
le ticket modérateur va bientôt s'appliquer jusque dans nos
chambres à coucher.
M. le Président, des années de vache maigre, voilà
l'essentiel de ce que nous annonce le ministre des Finances dans son budget.
Dommage que ce gouvernement n'ait pas eu le courage de le dire pendant la
campagne électorale, mais ce n'est pas là la seule chose qui fut
cachée aux électeurs. Ce qui me paraît encore plus honteux,
c'est que le Parti québécois ait volontairement caché,
camouflé, enrobé son option fondamentale, la
souveraineté-association.
Je voudrais dire aux ministériels, en cette Chambre, que le
peuple les a crus quand ils lui ont dit qu'ils mettaient en veilleuse la
souveraineté-association. II vous
a cru et il vous a donné le mandat de négocier avec le
gouvernement fédéral un nouveau pacte constitutionnel. Il s'agit
là de l'une des principales causes de votre réélection en
tant que gouvernement. Si vous vous permettez de l'oublier et de fausser le
mandat que le peuple vous a confié, le jugement qui s'ensuivra ne pourra
qu'être d'une grande sévérité, et pour cause.
Comment réussir le tour de force de promouvoir la
souveraineté du Québec et négocier en même temps la
place qui lui revient dans un fédéralisme renouvelé,
option qui, rappelons-le, constitue le choix de la majorité des
Québécois? J'espère que les gens de l'équipe
ministérielle se rendront compte de l'importance des enjeux qui vont se
présenter au cours des prochains jours, des prochaines semaines et
qu'ils s'acquitteront du mandat que la population leur a donné, soit
celui de négocier une nouvelle fédération canadienne, et
non pas de littéralement les amener dans un débat qui pourrait
plutôt conduire le Parti québécois vers la défense
de la souveraineté tout court.
M. le Président, voilà mes quelques commentaires
concernant le discours sur le budget. J'espère que l'occasion nous sera
donnée, au cours des prochains jours, de nous manifester sur les
défis de taille qui attendent le Québec dans les mois à
venir. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Maurice Dupré
M. Dupré: M. le Président, permettez-moi tout
d'abord de profiter de cette première occasion qui m'est donnée
d'adresser la parole devant cette Assemblée pour remercier les citoyens
de mon comté, certainement le plus francophone de notre pays, de la
confiance qu'ils m'ont témoignée le 13 avril dernier. La
population de mon comté a déjà, par le passé,
envoyé dans cette Chambre des représentants tels que Henri
Bourassa et Honoré Mercier et j'éprouve des sentiments de
fierté d'être un de leurs successeurs dans cette enceinte.
Étant natif de Saint-Hyacinthe, je connais très bien la
population qui est composée de travailleurs et de cultivateurs pour une
grande partie. La région de Saint-Hyacinthe est reconnue comme
étant l'une des plus prospères et des plus dynamiques du
Québec, l'industrie locale, en particulier, et l'industrie du textile et
de l'agro-alimentaire ayant pris, depuis quelques années, un essor
spectaculaire.
À cause de sa situation géographique particulière,
la ville de Saint-Hyacinthe a développé, au cours de son histoire
et, comme je le disais tantôt, encore davantage au cours des
dernières années, un caractère de capitale
régionale. Ce caractère a fait de cette ville un important centre
de services régionaux. Choisie depuis fort longtemps par de nombreuses
communautés religieuses pour y installer leur maison mère, ces
communautés furent un élément déterminant dans
notre développement culturel et social et dans le cheminement de notre
région, demeurant encore aujourd'hui un apport enrichissant pour notre
comté et pour la province toute entière.
J'aimerais ajouter l'importance de la région au point de vue de
l'éducation, puisqu'elle possède l'unique école de
médecine vétérinaire de niveau universitaire et l'une des
deux écoles d'agriculture de niveau collégial du Québec,
un cégep et une polyvalente pour compléter le décor.
Saint-Hyacinthe, appelée à juste titre Saint-Hyacinthe la
jolie, compte parmi sa population un très grand nombre de citoyens
hautement scolarisés, lesquels sont au service de la population du
comté et qui complètent, avec nos commerçants et hommes
d'affaires, les éléments du tableau que je viens d'esquisser
devant cette Assemblée.
Le comté de Saint-Hyacinthe est toujours demeuré au coeur
même des pages les plus actives de la politique du Québec, du
réputé Petit Séminaire de Saint-Hyacinthe, où de
nombreux meneurs de notre peuple furent formés, à la
rébellion de 1837-1838, à la réélection du parti
des Québécois comme gouvernement le 13 avril dernier.
M. le Président, ce sont des médecins et des ouvriers, des
avocats et des cultivateurs, des notaires et des personnes âgées,
des communautées religieuses et des jeunes qui m'ont
délégué dans cette Chambre à titre de premier
député péquiste de notre histoire. Comme le disait si bien
le premier ministre, le soir de la victoire, cela n'avait rien d'un accident de
parcours, car, à Saint-Hyacinthe, on est conscient, on est prudent.
Le mandat est impressionnant et l'honneur qui m'échoit n'est
dépassé que par l'ampleur des responsabilités qui s'y
rattachent. La population, après seulement quelques semaines
d'activité, m'a démontré ce qu'elle attend d'un
député fort, d'un député actif et
présent.
Soyez sans crainte, je serai fidèle a mes engagements et je suis
conscient que ce n'est pas pour mes talents d'orateur que la population m'a
élu, mais bien plutôt parce qu'elle était convaincue de ma
loyauté et de l'énergie que je pouvais déployer pour la
bien représenter.
Dans un autre ordre d'idées, M. le Président, j'ai
été choisi à certaines commissions parlementaires
auxquelles je tenais beaucoup, entre autres l'habitation et la protection du
consommateur, la protection de l'environnement, l'agriculture, les
pêcheries et l'alimentation ainsi que les
affaires culturelles.
Au niveau de l'habitation, mes expériences antérieures me
permettront, j'en suis persuadé, d'apporter un concours positif dans ce
domaine. L'accès à la propriété
résidentielle pour les familles québécoises et les
amendements à la loi 107 sont déjà sur le plateau.
Quant à l'agriculture, les pêcheries et l'alimentation, le
comté de Saint-Hyacinthe étant appelé à devenir la
vraie capitale de l'aqro-alimentaire et de l'agriculture, cela allait de soi,
considérant que notre comté comprend une bonne partie du jardin
québécois. J'attends avec impatience la loi pour favoriser la
relève agricole.
Quant à l'environnement, ce fut plus difficile de me trouver une
place, mais j'y suis. Impliqué au plus haut point, ma région
étant de ce côté l'une des plus touchées du
Québec, tant chimiquement que biologiquement, le comté de
Saint-Hyacinthe connaît depuis longtemps des problèmes majeurs
pour son approvisionnement en eau potable; l'état lamentable de la
rivière Yamaska est connu de tous et les raisons de cette situation ne
sont pas toutes imputables à la pollution agricole; les industries y ont
aussi leur part de responsabilité.
Les interventions du ministère de l'Environnement pour apporter
les correctifs voulus ont été nombreuses, mais il reste que les
entreprises du comté de Saint-Hyacinthe sont prisonnières des
déchets qu'elles produisent.
M. le Président, depuis longtemps les industriels attendaient que
s'implante au Québec une entreprise spécialisée dans le
traitement des déchets industriels. En autorisant l'implantation de la
compagnie Stablex, le gouvernement du Québec a fait une fois de plus la
preuve de son sens des responsabilités et de son souci constant
d'améliorer la qualité de vie des Québécois et des
Québécoises.
Les citoyens de Saint-Hyacinthe ont actuellement les yeux fixés
sur les débats qui se déroulent en cette Chambre; eux qui
connaissent les affres d'un manque d'eau potable sont assez lucides pour porter
un jugement sur l'attitude actuelle de l'Opposition libérale face
à l'implantation de Stablex. Le débat politique que l'Opposition
mène systématiquement pour tenter d'empêcher l'implantation
de Stablex démontre clairement que les députés d'en face
visent non seulement à empêcher Stablex de s'installer à
Blainville, mais également n'importe où au Québec. Leur
opportunisme politique passe bien avant le bien-être de la population,
mais cela n'est pas nouveau. M. le Président, les gens de mon
comté ne sont pas dupes de cette turpitude. Je veux vous assurer que le
jugement qu'ils portent sur l'Opposition est extrêmement
sévère.
(16 h 20)
Lorsque j'entends le député du comté de Nelligan
décrier par des propos erronés et souvent malicieux le projet
Stablex alors qu'il devrait s'en réjouir... Il a le sourire facile, le
député de Nelligan, lorsqu'il parle de Stablex et de
dépollution. Il vient faire son petit tour de piste, histoire de faire
rigoler le chef de l'Opposition. C'est vrai que depuis le 13 avril, il n'a pas
souvent l'occasion de rire. Pourtant, il n'y a rien de drôle
là-dedans. S'il demeurait dans notre comté, s'il transportait ses
cruches d'eau depuis trois ou quatre ans, il trouverait peut-être cela
moins drôle.
Si, de 1970 à 1976, on avait compté un ou deux Marcel
Léger dans vos rangs et si on avait construit une ou deux Stablex
à Saint-Hyacinthe, on boirait peut-être de l'eau propre et de
l'eau pure aujourd'hui.
On aimait mieux, M. le Président, de l'autre côté,
nourrir le gouffre des Olympiques. Quand on sait que le gouffre a toujours
soif, on sait ce qui arrive. C'était peut-être plus payant aussi,
parfois, un petit 750 000 $ par ci, par là. Cela ne rapportait pas grand
intérêt, par exemple. On l'a vu le 15 novembre et on l'a vu le 13
avril, que les intérêts étaient minimes.
M. le Président, il faudrait nous reconnaître une
responsabilité individuelle et une sensibilité collective. Trop
d'entre nous avons tendance à croire généralement qu'il
n'appartient qu'au gouvernement de résoudre ces problèmes. Nous
avons malheureusement tort. Dans notre société que l'on dit
avancée, personne ne peut se passer d'un réfrigérateur,
d'un ou deux téléviseurs, d'une automobile. Très peu de
gens, en fait, M. le Président. Pourtant, les industries qui produisent
la plupart de ces biens, considérés par tous comme essentiels,
sont singulièrement et directement responsables des incidents
écologiques aux conséquences souvent graves pour ne pas dire
désastreuses.
On n'a qu'à regarder autour de soi pour constater la
présence de biens de consommation aux procédés de
fabrication polluants, souvent difficiles à récupérer ou
même à éliminer. Leur nature, leur diversité et leur
concentration en font souvent des produits hautement toxigues qui, lorsque
répandus dans l'environnement, pénalisent toute la
société.
L'industrie québécoise de pointe, respectueuse de
l'environnement, dépense beaucoup en mesures d'assainissement pendant
que d'autres industries ignorent totalement leurs devoirs envers
l'environnement. Il faut s'éveiller à nos nouvelles
responsabilités, sinon nous et nos enfants en paieront la note et elle
sera monstrueuse. Déjà, l'actuel gouvernement a fait plus. Le
gouvernement actuel a fait, dans ce domaine, de vastes projets très
coûteux dont 1 600 000 000 $ sont déjà
engagés, dont 101 000 000 $ pour la dépollution de la
rivière Yamaska, appelée sporadiquement par les Mascoutains la
rivière rouge. Les travaux, chez nous, sont déjà
commencés.
M. le Président, je ne demande pas, mais j'implore cette
Assemblée d'apporter une attention toute particulière dans ce
domaine. Malgré nos actions présentes, toutes nos rivières
et tous nos lacs ne seront, dans dix ans tout au plus, que pollution et
pollution et ce, par la faute des pluies acides de nos voisins du Sud et de
l'Ouest sur lesquels nous avons peu ou pas de contrôle. Ottawa n'est pas
bavard de ce côté. M. le Président, s'il est vrai que j'ai
le goût du Québec, je préférerais un Québec
propre où il fait bon vivre et j'entends bien y travailler avec mes
collègues pour l'obtenir.
Je voudrais ici féliciter tout particulièrement mes
collègues, mesdames les ministres, de leur nomination et les assurer de
mon appui absolu dans l'exercice de leurs fonctions et dans la poursuite de nos
priorités. Entre autres, de permettre aux femmes une véritable
égalité de fait sur tous les plans et dans tous les domaines et,
je l'espère, avec l'appui de tous les membres de cette
Assemblée.
M. le Président, bien que je sois physiguement très
éloigné de vous, n'allez surtout pas croire que cette situation
soit à l'image de ma position réelle en cette Chambre. J'entends
bien être au coeur même de toutes les activités de cette
Assemblée. Attendu que je ne considère pas le pouvoir comme une
fin en soi, mais comme un outil, un moyen pour améliorer le sort de ceux
qui en sont dépourvus, soyez assuré que je m'efforcerai de tout
mon être à contribuer au deuxième mandat de ce gouvernement
compétent, dynamique, libre, fier et entièrement
dévoué aux véritables intérêts des
Québécoises et des Québécois. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président encore
une fois, le discours sur le budget fournit une occasion
privilégiée comme on a pu le voir récemment dans cette
Chambre, de parler de l'ensemble des problèmes du Québec. On a pu
voir déjà, avec l'orateur qui m'a précédé,
qu'on pouvait parler de pollution, qu'on pouvait se livrer à une
défense, assez faible, je dois le dire, des actions du ministre de
l'Environnement et, en même temps, hier, par exemple, on a eu droit
à des discours sur l'étalement urbain et sur les droits
d'auteur.
J'essaierai, M. le Président, de faire preuve
d'originalité en parlant du budget qui nous a été soumis
au mois de mars dernier. Pour le bénéfice de nos
électeurs, il faudrait constater la somme extraordinaire d'information,
de chiffres, de connaissances que le ministre des Finances livre à notre
attention et à notre étude, qui se complètent - on n'en
voit là qu'une infime partie qui se rapporte à un seul
ministère - par l'étude que nous faisons tous ici des
crédits des différents ministères en commission
parlementaire.
Finalement, le discours sur le budget et toute la documentation qui s'y
rapporte ne sont, en réalité, qu'un bilan de l'activité
économique, de l'activité financière du gouvernement dans
l'année qui s'est écoulée. Il fait également valoir
les éléments que le gouvernement entend faire jouer afin de
dicter les voies de l'avenir, les voies de notre développement
économique, les voies de notre développement social et surtout la
façon dont l'appareil public sera géré pendant
l'année qui se terminera en mars prochain.
C'est donc, en un sens, un bulletin de santé qui comporte, d'une
part, comme je le disais, le bilan des activités de l'année
passée et les ordonnances ou prescriptions que, dans sa sagesse, le
ministre des Finances et ses collègues du cabinet proposent à
notre étude, étude qui doit finalement se limiter aux deux
côtés d'une même médaille, c'est-à-dire voir
jusqu'à quel point les revenus, sur lesquels compte l'État du
Québec, les revenus qui viennent des impôts que le ministre des
Finances détermine et désire percevoir pourront nous rendre
service. Le gouvernement est ici pour nous rendre service. Le gouvernement est
ici non pas pour nous dicter ce que nous devons faire, mais s'assurer que les
services auxquels la population a droit lui seront rendus de façon
efficace, de façon complète.
Qu'en est-il du budget que le ministre des Finances nous a soumis? On
doit constater qu'encore une fois - je le rappelle pour certains de nos amis
d'en face - le ministre des Finances a fait quelques grossières erreurs
et ce n'est pas la première fois. Lorsqu'on regarde - j'inviterais,
entre autres, le député de Roberval, qui en a parlé hier
soir, à s'y référer - les discours sur le budget des trois
dernières années, à titre d'exemple, on peut constater que
le ministre des Finances, au chapitre des revenus, d'une part, a constamment
fait des sous-évaluations et s'est trompé, il n'a jamais eu les
revenus que ceux sur lesquels il comptait. (16 h 30)
D'autre part, au chapitre des dépenses, c'est exactement
l'inverse qui s'est produit. Les dépenses de l'État du
Québec, de la province, ont été beaucoup plus grandes que
ce que le ministre des Finances, chaque année, voulait prévoir et
annonçait à la Chambre. Le bilan, à ce moment-ci, si
on
regarde le déficit devant lequel nous sommes, démontre que
ce déficit est de plus de 1 000 000 000 $ plus élevé, en
trois ans, qu'il ne l'aurait été en se fiant aux discours du
ministre des Finances. En effet, pour l'an dernier, on voit une
différence, une erreur de 675 000 000 $ dans les calculs du ministre des
Finances, qui suit allègrement des erreurs beaucoup moindres - ce qui ne
nous permet pas de croire que le ministre des Finances s'améliore avec
le temps - de 140 000 000 $ et de 300 000 000 $ dans les deux années
précédentes. Le résultat net, évidemment, c'est que
nous avons devant nous un déficit sans précédent et ce,
pour la deuxième année consécutive. Ces deux années
sont sans précédent dans l'histoire du Québec et il faut
voir, avec ce résultat, comment le prix que les Québécois
auront à payer en sera affecté.
Le ministre, devant cette situation a pris deux engagements, si on veut.
Premièrement, on peut voir dans son discours sur le budget qu'il
comptait - et je cite -"prendre des mesures inédites de contrôle
des dépenses". Après avoir affirmé, toujours dans les
budgets des années précédentes, que des mesures de
contrôle des dépenses étaient en place, contrairement
d'ailleurs à ce que faisait valoir un de nos amis d'en face hier, qui
évoquait un héritage qu'il aurait reçu en 1976, c'est
simplement à cause du laxisme dans l'application des mesures de
contrôle des dépenses que le ministre actuel des Finances aurait
instaurées, qu'encore une fois nous regardons une augmentation du
déficit en pleine face.
On parle de mesures inédites de contrôle. Inédites,
cela veut dire sans précédent; inédites, cela veut dire
qu'on n'a jamais vues et, effectivement, M. le Président, on n'a jamais
vu des mesures aussi arbitraires, aussi inacceptables comme en font foi
d'ailleurs les manifestations que nous avons connues ici, dans cette Chambre,
la semaine dernière; comme en font foi les interventions de mes
collègues; comme en font foi nos électeurs qui viennent nous voir
dans nos bureaux de comté - pas simplement les bureaux de comté
péquistes, mais aussi les bureaux de comté des
députés de l'Opposition - pour nous faire valoir les
difficultés immenses auxquelles ont à faire face, dans tous les
secteurs de la société, les Québécois à la
suite des coupures budgétaires.
À travers toute cette documentation, malgré des mesures de
contrôle inédites, que voyons-nous? On voit simplement que les
salaires continuent à augmenter dans l'appareil gouvernemental et que,
par ailleurs, aucune coupure véritable, aucune coupure sensée
n'est faite de façon constructive, c'est-à-dire de façon
à répondre aux objectifs que les différents secteurs de
notre économie ou de notre vie sociale peuvent se donner. C'est de
façon tout à fait arbitraire que le ministre des Finances imposej
au niveau des dépenses, ces mesures à tous les organismes qui ont
charge de l'administration des différents secteurs d'activité.
S'il ne s'agissait que d'un contrôle des dépenses, mais il faut
voir qu'en plus, de façon indirecte cette fois-ci, les
Québécois seront plus taxés qu'ils ne l'étaient.
Afin de réduire le déficit qui, malgré tout, croît
à une vitesse inquiétante, le ministre des Finances disait, qu'il
voulait "modifier la structure des revenus du gouvernement pour qu'elle
rapporte davantage".
Dans un même souffle, donc, on parle de réduction
d'impôt depuis des années. "Modifier une structure de revenus pour
qu'elle rapporte davantage", c'est plus d'impôt, c'est aussi simple que
ça. Comment le ministre des Finances s'y est-il pris? S'y est-il pris de
façon ouverte, c'est-à-dire en touchant chaque citoyen dans sa
poche de façon évidente, lorsqu'il fait son rapport
d'impôt, lorsqu'il produit son rapport d'impôt? Pas du tout: C'est
plutôt de façon indirecte, de façon cachée que le
ministre des Finances a décidé d'aller puiser dans la poche des
Québécois. Je n'en donnerai que deux exemples.
Le premier exemple, on en a déjà fait état, c'est
la façon dont le ministre a décidé de taxer les
entreprises, et ce, non pas de façon logique. Il aurait
été logique de taxer davantage celles qui font plus de profits,
mais il taxe toutes les entreprises, et particulièrement celles qui ont
beaucoup d'employés et qui paient mieux leurs employés. C'est
exactement l'effet de l'augmentation de la contribution aux services de
santé et c'est exactement ce genre d'impôt qui se répercute
dans la poche des consommateurs parce qu'on a augmenté les coûts
de production et on a frappé tous les citoyens qui achètent
directement ou indirectement des denrées qui sont produites par des
entreprises qui ont beaucoup d'employés. Le ministre des Finances a eu
beau jeu de dire: "Comment voulez-vous vous opposer à une taxe qui
encourage la productivité", c'est-à-dire une taxe qui, en somme,
encouragerait les entreprises à se mécaniser, à
s'automatiser, à remplacer les hommes et les femmes par des machines?
C'est un non-sens, M. le Président, à ce moment-ci de notre
activité économique, compte tenu de l'état de notre
économie, de remplacer les gens au travail par des machines, de mettre
sur pied une structure fiscale, une imposition, l'impôt sur les
sociétés et sur les entreprises, qui les encourage à
changer les gens, les hommes et les femmes qui travaillent pour des machines.
C'est un non-sens, M. le Président.
La deuxième façon tout aussi
inéquitable dont le ministre tente de rejoindre la poche des
Québécois, on en a vu une autre illustration lors du
dépôt de la Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec.
Déjà dans son discours sur le budget, le ministre des Finances en
parlait. Il s'agira maintenant de modifier la loi qui régit le
fonctionnement et l'administration d'Hydro-Québec de telle sorte qu'on
ira, à toutes fins utiles, lui chercher tous ses profits, ce qu'il faut
savoir, c'est que nous sommes tous fiers d'Hydro-Québec. Nous
connaissons tous au moins ici, chacun de nous dans cette Chambre, au moins une
personne qui travaille à Hydro-Québec, il y a assez de gens pour
cela à Hydro-Québec; tous ces gens que nous connaissons et qui y
travaillent en sont fiers, parce qu'ils ont fait un succès de leur
affaire, parce qu'on leur a laissé le mandat de réaliser les
grands projets dont nous avions besoin pour développer nos richesses
naturelles. Or, on décide de leur enlever justement ce sentiment
d'appartenance et de fierté qui fait qu'Hydro-Québec est un des
plus beaus joyaux de notre développement économique. Avec quel
effet, M. le Président? Avec l'effet que les taux qui seront
éventuellement chargés à tous les consommateurs par
Hydro-Québec ne seront plus limités par la loi que nous
connaissons aujourd'hui à des taux qui sont, je me réfère
à la loi actuelle, "les plus bas possible que permet une saine
administration financière".
Un des articles du projet de loi qui a été
déposé hier abroge tout simplement ce mandat
d'Hydro-Québec de nous fournir à nous, Québécois,
l'électricité au plus bas taux possible dans la mesure où
le permet une saine administration financière. De la même
façon, Hydro-Québec avait le mandat de conserver des
réserves financières pour renouveler son réseau. Dans un
premier temps, le ministre des Finances, avec la complicité du ministre
de l'Énergie et des Ressources, enlève ce mandat à
Hydro-Québec tout en expropriant purement et simplement les
réserves qui se sont accumulées depuis des années pour le
renouvellement du réseau et pour payer les actions dont le ministre des
Finances sera l'heureux détenteur, si jamais cette loi était
adoptée. De la même façon, Hydro-Québec avait le
mandat - c'est dans la loi actuelle - de facturer, de tarifier, si on veut, les
utilisateurs, qu'il s'agisse des citoyens dans leur domicile, des industries ou
des commerces, à un coût qui était relié au
coût de production. Encore une fois, d'un trait de plume tout simplement,
le ministre des Finances et ses collègues décident qu'Hydro ne
devrait pas tarifier les gens compte tenu des coûts de production.
C'est de cette façon, M. le Président, qu'on leur
enlève leurs gages de succès, parce qu'on enlève leur
fierté à ceux qui travaillent à Hydro-Québec et
c'est de cette façon qu'on rejoint également dans leurs poches,
quels que soient leurs moyens, tous les citoyens du Québec, lorsqu'ils
recevront leur facture d'électricité à l'avenir. C'est
cela, exactement. On n'augmente pas les impôts. On augmente le prix de
l'électricité que tous doivent payer, les assistés
sociaux, les démunis, les hôpitaux, les écoles, tout le
monde. Ce sont là des exemples, M. le Président, de la
façon absolument inédite dont le gouvernement actuel entend
gérer l'appareil et l'administration québécois du
côté des revenus en les augmentant au détriment,
finalement, de façon extrêmement régressive et injuste, de
toutes les couches de la société. (16 h 40)
Du côté des dépenses, on a vu sa façon d'agir
absolument arbitraire. Il y a eu des reculs récents dans certaines
matières, au chapitre de l'éducation, par exemple, mais il reste
des injustices absolument flagrantes que le gouvernement ne tente pas de
corriger, malgré nos représentations et les
représentations de la population.
Mais ce qu'il faut retenir, à travers tout cela, comme
illustration de la façon dont le gouvernement gère notre appareil
gouvernemental, c'est la brutalité pure et simple des changements qu'il
fait subir à nos organismes. C'est une façon brutale pour des
raisons extrêmement simples: depuis cinq ans, le gouvernement a perdu le
contrôle de l'appareil de l'État, le contrôle des
dépenses. Le ministre des Finances a récemment fait état
d'une révélation qui lui est apparue, je présume. Il a
dit: Peut-être qu'à l'avenir les budgets devraient s'inscrire sur
un horizon de trois ans, comme ça, on saurait où on s'en va. Il
est cinq ans trop tard, M. le Président, il me semble qu'effectivement,
si on veut en arriver à un contrôle des dépenses, on ne le
fait pas de façon brutale, on le fait avec le temps, on se fixe un
horizon avec lequel les gens peuvent vivre, on le fait d'une façon qui
respecte les capacités d'adaptation des différents secteurs de la
société qui sont durement affectés par la façon de
procéder du gouvernement actuel.
C'est ce gradualisme qui manque, ce gradualisme que je qualifierais
d'étapisme, extrêmement populaire de l'autre côté de
la Chambre dans certaines autres matières. Mais lorsque vient le moment
de gérer adéquatement et de façon saine nos finances
publiques, l'étapisme, évidemment, n'est pas de mise, ni la mise
en veilleuse, je présume.
Motion de blâme
À ce moment-là, devant une perte de contrôle de
l'administration financière de l'État, devant des mesures qui,
finalement, encouragent les entreprises à remplacer les gens par des
machines, alors que nous vivons
un moment extrêmement difficile où le chômage est
très élevé, il est de la responsabilité de
l'Opposition de soumettre la proposition suivante: "Que cette Assemblée
blâme sévèrement le gouvernement du Parti
québécois d'avoir présenté un budget qui comporte
un déficit budgétaire d'au moins 3 000 000 000 $ pour la seconde
année consécutive, qui compromet davantage la santé des
finances publiques québécoises et notre économie,
particulièrement en ce qui a trait à la création
d'emplois, et qui introduit des mesures de compression budgétaire aussi
arbitraires qu'inacceptables, notamment au chapitre de l'éducation et
des affaires sociales."
Je vous remercie, M. le Président.
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Chambly.
M. Luc Tremblay
M. Tremblay: Merci, M. le Président. Je voudrais, puisque
c'est ma première intervention à l'Assemblée nationale,
profiter d'une des traditions de cette Assemblée, tout en étant
respectueux du règlement qui régit les
délibérations de cette Chambre et avec votre permission, pour
remercier tout d'abord les électeurs du comté de Chambly qui ont
fait confiance, le 13 avril dernier, à un des leurs en votant
majoritairement pour le Parti québécois et, par le fait
même, en n'investissant de la lourde responsabilité de les
représenter à l'Assemblée nationale.
J'ai l'honneur d'être le 17e député
représentant cette historique circonscription électorale depuis
Jean-Baptiste Jodoin qui en a été le premier en 1867. Je me
permettrai, M. le Président, de relever quelques notes biographiques
concernant mes prédécesseurs qui, je l'espère, sauront
intéresser pour les membres de l'Assemblée nationale ainsi que
mes concitoyens du comté de Chambly.
Je soulignerai tout d'abord que, dans toute l'histoire du comté
de Chambly, seulement trois de ses représentants étaient natifs
de ce qui est aujourd'hui la ville de Chambly. Il s'agit de
Gédéon Larocque, né à Chambly, six ans avant la
rébellion de 1837, il a d'ailleurs terminé sa carrière
à l'Assemblée nationale appelée à l'époque
l'Assemblée législative comme sergent d'armes après avoir
été député de Chambly de 1871 à 1875.
Le deuxième député de cette circonscription
né à Chambly, Antoine Rocheleau, un cultivateur qui est né
en 1836 et député durant la période de 1896 à 1900.
Ce qui fait de votre humble serviteur le premier citoyen natif de cette
très belle et historique ville qu'est Chambly, et fort probablement le
seul du XX siècle. C'est donc avec beaucoup de fierté, largement
partagée par mes concitoyens de Chambly que j'occupe ce fauteuil dans
cette illustre Chambre. Ce n'est pas non plus sans une certaine fierté
qui me paraît bien légitime qu'à l'occasion de cette
première intervention je me permets de souligner la carrière de
certains de mes prédécesseurs qui se sont particulièrement
illustrés durant leur carrière politique, bien sûr, mais
aussi durant leur carrière professionnelle.
De ceux-là, je soulignerais le nom de Raymond Préfontaine,
qui a été élu en 1875, à l'âge de 25 ans et
qui, par la suite, est devenu maire de Montréal. Mes recherches des
notes biographiques des députés de Chambly m'ont permis de
constater que d'une part, Préfontaine avait été directeur
de la société Saint-Jean-Baptiste et d'autre part, qu'il
était le seul de tous mes prédécesseurs à avoir
participé à cette illustre société.
Une autre de ces personnalités qui au long de l'histoire de la
circonscription a fait la fierté de nos ancêtres, c'est
Louis-Olivier Taillon qui eut une longue expérience politique durant
laquelle il fut successivement élu comme député entre
1875, 1878 et 1881, Orateur de la Chambre de 1882 à 1884.
Réélu en 1884 sans opposition et Procureur général
dans le cabinet Ross, de 1884 à 1887. Défait dans sa
circonscription de Montréal-Est en 1886, élu dans Montcalm
à l'occasion d'une élection partielle la même année.
Une première fois premier ministre durant quatre jours, soit du 25 au 29
janvier 1887 et chef de l'Opposition de 1887 à 1890. Défait dans
Jacques-Cartier en 1890. Assermenté ministre sans portefeuille dans le
cabinet Boucher de Boucherville en 1891. Élu dans Chambly aux
élections de 1892. Premier ministre de 1891 à 1896. Finalement,
il résigna ses fonctions pour être candidat dans la
circonscription fédérale de Chambly-Verchères-Bagot,
où il fut battu en 1896 et en 1900.
Plus près de nous, il y eut Hortensius Béïque,
député et maire de Chambly et organisateur général
de l'Union Nationale. Quant à John Redmond Roche, il eut une triple
carrière. Tout d'abord comme militaire jusqu'à la fin de la
guerre où il fut entre autres commandant du régiment de
Maisonneuve et député de Chambly de 1948 à 1956, et enfin,
comme troisième carrière, il fut juge à la Cour des
sessions de la paix à Montréal.
En 1961, à l'occasion d'une élection partielle,
était élu, pour un premier mandat, le journaliste Pierre Laporte.
Il fut réélu en 1962, 1966 et 1970. Il a été leader
parlementaire du gouvernement de la révolution tranquille, de 1964
à 1966, et il continua à jouer ce rôle auprès de
l'Opposition après la défaite libérale de 1966.
Candidat défait au congrès de la direction du Parti
libéral, en 1970, il fut enlevé par le Front de libération
du Québec, le 9 octobre 1970.
Guy Saint-Pierre, lui, fut élu en 1970, dans la circonscription
de Verchères qui, à l'époque, comprenait la presque
totalité du présent comté de Chambly. Il a
été réélu dans le comté de Chambly en 1973,
ministre de l'Éducation de 1970 à 1972, ministre du Tourisme, de
la Chasse et de la Pêche en 1972 et ministre de l'Industrie et du
Commerce de 1972 à 1976.
En terminant ce bref retour en arrière, je voudrais dire que je
suis très heureux de succéder à Denis Lazure, qui fut le
premier député du Parti québécois a être
élu dans le comté de Chambly. Comme vous le savez, à la
suite du redécoupage de la carte électorale, considérant
que le comté était devenu trop populeux, la Commission de la
représentation électorale a dû pratiquement scinder en deux
ce qui était alors le comté de Chambly, en lui conservant les
villes de Saint-Bruno-de-Montarville, Saint-Basile-le-Grand, Carignan, Chambly,
Richelieu, Saint-Mathias et Notre-Dame-de-Bon-Secours.
M. le Président, je suis heureux de dire maintenant au
député de Bertrand que les citoyens du comté, qu'ils
soient d'une option politique ou de l'autre, ont grandement
apprécié son honnêteté, son sens du
dévouement et sa présence dans le comté et ceci,
même s'il cumulait efficacement ses rôles de député
et de ministre des Affairs sociales. Dans ce sens, la réélection
du Parti québécois est un hommage pour lui, puisqu'il en est,
dans une large mesure, responsable.
Personnellement, j'ai l'intention de poursuivre ce que mon
prédécesseur avait amorcé et de mettre en marche les
engagements pris durant la campagne électorale, en utilisant ses vastes
connaissances ainsi que son expérience de la machine gouvernementale. Ce
travail, je le poursuivrai aussi avec l'appui, j'en suis certain, des centaines
de militantes et militants qui ont rendu cette victoire possible et ceci,
malgré des perspectives peu encourageantes avant la campagne
électorale et même durant la campagne électorale.
Il faut se souvenir, M. le Président, que les journaux en
général prévoyaient la perte du comté pour notre
parti. À ceci, je donnerai comme exemple l'éditorial de M.
Normand Girard, du Journal de Montréal; c'est là une source que
l'on dit normalement bien informée et qui considérait le
comté de Chambly comme assuré au Parti libéral. Mais c'est
finalement par une très honorable majorité de près de 1700
votes que les militantes et militants du comté de Chambly ont
conservé le comté au Parti québécois. Ce travail
constant était motivé par la perspective, d'une part, de reporter
au pouvoir un gouvernement qui avait tenu ses engagements et, d'autre part, que
c'était là une étape importante de notre démarche
vers la réalisation de la souveraineté du Québec.
M. le Président, c'est avec la conviction d'un militant que j'ai
accepté de servir aux côtés de mes camarades dont la
réputation de compétence, d'intégrité, de
générosité et d'efficacité n'est plus à
faire au niveau du parti et de la population en général. Si j'ai
accepté l'appel des militantes et militants du Parti
québécois de Chambly, au risque de mettre en danger une
entreprise que j'ai créée et contruite, c'est que je voulais
m'engager plus avant. J'ai voulu être au coeur de l'action politique,
parce que tout d'abord je suis un souverainiste de la première heure, un
souverainiste conscient que chaque événement dans la vie du Parti
québécois est un pas dans la bonne direction.
M. le Président, ce n'est pas nous qui avons dit que nous
mettions notre option en veilleuse. Ce sont nos adversaires qui refusaient de
réaliser que nous étions plus déterminés que jamais
à respecter, bien sûr, la décision démocratiquement
rendue par les citoyens du Québec le 20 mai, mais plus
déterminés que jamais à réaliser notre objectif
fondamental par la voie démocratique. Nous l'avons dit, M. le
Président, à peine 24 jours après le
référendum, lors du Conseil national du 14 juin 1980, par une
résolution votée à l'unanimité. Cette
résolution se lit comme suit: "Le Conseil national tient à
réaffirmer sa volonté ferme d'oeuvrer à réaliser la
souveraineté du Québec par les voies démocratiques et
à proposer au Canada une association économique mutuellement
avantageuse respectant le principe de l'égalité absolue entre ces
deux peuples. Le Conseil national demeure convaincu que seule la
souveraineté-association pourra apporter une solution aux
problèmes politiques, économiques, culturels et sociaux du
Québec et invite la population à travailler avec lui à la
réalisation de cet objectif."
Mais, malgré cela, les gens d'en face continuèrent de
faire croire à la population que nous avions mis notre option en
veilleuse. C'était pourtant bien clair, M. le Président, que l'on
respectait simplement la démocratie.
Ce qu'on a dit au Conseil national élarqi du mois d'octobre
dernier et qu'on a largement publié par la suite, c'est qu'il n'y aurait
pas de référendum durant notre prochain mandat. Mais, encore une
fois, les gens d'en face ont refusé de voir la réalité.
Ils ont poursuivi leur stratégie visant à faire croire aux plus
pressés des partisans de la souveraineté que nous avions mis nos
convictions de côté. Cette stratéqie n'a pas marché,
parce que les partisans de la souveraineté ont trop bien vu la tactique.
Ils ont plutôt fait confiance à ceux qui, de 6% en 1966, ont
convaincu plus de 40% de nos
concitoyens du bien-fondé de la souveraineté.
Les vieux militants savaient qu'en poursuivant l'information
auprès de ceux qui ont voté non, on finirait bien par faire un
consensus sur notre avenir collectif. On ne pouvait faire confiance à
ceux qui venaient de se faire littéralement rouler comme des mangeurs de
hot dogs par leur boss qui est à Ottawa quand ils ont accepté sa
parole sans demander de garanties. Quand le boss disait, durant la campagne
référendaire: "Un oui veut dire un non, un non veut dire un oui",
les citoyens ont bien compris l'incapacité des qens d'en face de
défendre les intérêts du Québec.
Maintenant, le Parti libéral a réalisé que les
Québécois ne donneront jamais leur appui à un gouvernement
qui n'aurait pas la défense du Québec comme priorité.
Maintenant qu'il leur apparaît plus opportun de se montrer
nationalistes, ils ont adopté une stratégie visant à faire
croire qu'ils sont Québécois d'abord. En effet, plusieurs d'entre
eux ont troqué le drapeau du Canada pour celui du Québec sur leur
revers de veston. Nous, on est bien heureux de les accueillir, à bord,
mais cela va prendre beaucoup plus que des promesses du bout des lèvres.
Il faudra qu'ils cessent de défendre le gouvernement
fédéral en cette Chambre. Il faudra qu'ils appuient le
gouvernement du Québec contre les attaques constantes pour nous enlever
nos droits. Il faudra qu'ils appuient le gouvernement du Québec si le
gouvernement fédéral tente de faire payer son déficit qui
provient, en grande partie, d'une mauvaise gestion dans le dossier
énergétique par les provinces. Il faudra qu'ils appuient le
gouvernement du Québec dans ses revendications minimales que sont nos
demandes traditionnelles. Il faudra, enfin, qu'ils admettent avec nous que le
Québec doit être aussi français que l'Ontario est
anglais.
Comment, M. le Président, ne pas être attaché
à son pays lorsque l'on est né sur les rives de la rivière
Richelieu? Ce que l'on appelait à l'époque le jardin du
Québec, cette rivière, je me suis engagé, lors de
l'élection, à travailler durant ce mandat à promouvoir sa
dépollution. C'est là non seulement pour moi une affaire de
coeur, c'est une affaire d'honneur, mais, en plus, un bon outil de
développement économique. (17 heurres)
Comment ne pas être attaché à son pays lorsqu'on est
né à l'ombre du mont Saint-Bruno? Là aussi, je me suis
engagé à poursuivre l'aménagement global du parc du mont
Saint-Bruno en lui conservant sa vocation récréative, mais aussi
en protégeant les richesses écologiques que constitue ce
véritable patrimoine naturel situé à quelques milles de la
métropole qu'est Montréal.
En terminant, je voudrais assurer tous mes concitoyens et concitoyennes,
et plus particulièrement ceux et celles du comté de Chambly qui
ont, depuis 1968, à un moment ou à un autre, cheminé
côte à côte avec moi, tous ceux-là, je veux les
assurer de mon engagement total envers le Québec. Je veux les assurer
qu'ici, comme lorsque je travaille dans le comté, je demeure avec
fierté un militant. Merci, M. le Président.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je peux parler?
M. Parizeau: M. le Président, c'est normalement l'heure de
la réplique.
Le Président: Normalement, c'est la réplique et M.
le ministre des Finances a droit à une heure en vertu du
règlement.
M. Parizeau: Nous devons prendre le vote, si je comprends bien,
vers 17 h 45, est-ce que la députée de L'Acadie peut me laisser
une demi-heure?
Mme Lavoie-Roux: Davantage! M. Parizeau: Parfait,
volontiers.
Le Président: Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Je remercie le ministre des Finances qui, comme
d'habitude, sait toujours faire des compromis qui satisfont les qens d'un
côté ou de l'autre de la Chambre et je l'apprécie.
M. le Président, je vais être très brève.
Évidemment, on a beaucoup discuté dans cette Chambre des coupures
qui ont été faites tant dans le domaine des affaires sociales que
dans l'éducation. Je ne veux pas revenir en détail sur chacune de
ces choses. Je voudrais simplement signaler une dernière fois, parce que
je pense que c'est la dernière fois que nous aurons l'occasion de nous
prononcer sur ce fameux budget, que je ne sais pas dans quelle mesure le
ministre des Finances se rend compte que dans les coupures qu'il a
imposées à la fois au domaine de l'éducation et au domaine
des affaires sociales, dans bien des cas, c'est la même population qui
est touchée.
Je veux vous donner comme exemple les coupures de l'ordre de 14 000 000
$ qui, apparemment, sont maintenant complétées dans les centres
de services sociaux et auxquels viennent s'ajouter 4 000 000 $, coupures qui,
selon l'avis de l'Association des centres de services sociaux, sont dues au
non-respect ou à une mésentente entre le ministère des
Finances et les centres de services sociaux quant au respect des conventions
collectives. Je suis sûre que le ministre des Finances, à qui j'ai
posé la
question à plusieurs reprises sur le respect des conventions
collectives, je pense, de bonne foi, m'a toujours assurée que tout ce
qui touchait ou était le résultat des conventions collectives
serait respecté.
Par contre, tout ce que je l'invite à faire, c'est qu'on se
rassoie une fois de plus pour essayer d'établir si vraiment, en plus des
14 000 000 $, tel que le disent les centres de services sociaux, viennent
s'ajouter des coupures de 4 000 000 $ dues au non-respect ou à une
mésentente quant aux obligations qui découlent des conventions
collectives. Les centres de services sociaux, M. le Président, vous le
savez, répondent aux besoins d'une clientèle dont 60% et
même 65% vivent en dessous du seuil de la pauvreté. Ils
répondent aux besoins de familles qui ont des problèmes
familiaux, des problèmes d'enfant handicapé, d'individus qui ont
des problèmes d'alcoolisme, des problèmes de dépendance de
tous ordres. Ils s'occupent des cas de la protection de la jeunesse, des
personnes âgées, et ce sont des mandats qui leur ont
été confiés à un moment ou à un autre par
les différents gouvernements.
Sur ce chapitre des personnes âgées, on retrouvait une
coupure de 3 000 000 % quand nous avons fait l'étude des crédits
rubrique par rubrique, si je peux dire, ou programme par programme. Le ministre
des Affaires sociales nous a dit à ce moment-là: Non, c'est une
question de réaménagement. En fait ce n'est pas là que ce
sera touché. Cela va être touché finalement dans les
services sociaux, dans les services scolaires.
Vous comprenez que ce n'est pas à nous à
démêler, mais le résultat net, c'est qu'il y a une coupure
brutale de 10% plus ces 4 000 000 $ dont je viens de vous parler. Si on examine
maintenant le domaine de l'éducation non pas en détail, mais
d'une façon globale, là où on a coupé, c'est dans
l'éducation des adultes qui, à bien des éqards se
préoccupe de travail de prévention, dans les milieux
défavorisés qui là aussi viennent recouper la
clientèle desservie par les centres de services sociaux. Tout le
problème de l'intégration de l'enfance en difficulté,
là aussi on a des coupures budgétaires et de cette même
façon, dans les centres de services sociaux, souvent, il y a une
coordination entre ce qui se fait dans les écoles et les services
qu'offrent les centres de services sociaux.
En résumé, pour tenir ma promesse à l'égard
du ministre des Finances, ce que je veux indiquer, c'est que quand on a
coupé à la fois dans les centres de services sociaux et dans ces
domaines particuliers reliés à l'éducation, c'est que
c'est sous un double front qu'on attaque - c'est peut-être un terme un
peu fort, mais je vais l'utiliser parce qu'il n'y en pas d'autres qui me
viennent à l'esprit - les mêmes clientèles qui vraiment
n'ont pas d'autre recours que ces services. On sait fort bien que quelqu'un qui
a des moyens plus élevés pourra toujours avoir recours au
psychologue, au conseiller matrimonial, à des ressources
médicales que ces personnes n'ont pas à leur disposition.
M. le Président, du côté des hôpitaux.
À l'étude des crédits, on nous a répondu en noir
sur blanc que même s'il y a une indexation au chapitre des hôpitaux
et des centres d'hébergement, cette indexation sera utilisée en
totalité pour le respect des conventions collectives, si bien qu'il n'y
aura pas de marge de manoeuvre. Évidemment inutile de parler de
développement, ce n'est pas à ça que j'en ai, mais
même pas au maintien de ce qui existe présentement.
Si c'était la première année, si c'était la
deuxième année, on pourrait l'accepter. Mais il s'agit d'une
opération répétée depuis plusieurs années,
si bien que ce n'est pas uniguement le cri des professionnels de la
santé, c'est aussi à la demande de l'Association des
hôpitaux du Québec qui dit: Les déficits vont en
s'accumulant. On ne peut plus resserrer. On peut resserrer dans les fournitures
pendant un bout de temps, mais eux aussi connaissent l'inflation. On met les
centres de santé ou les centres hospitaliers ou les centres
d'hébergement dans des difficultés importantes.
Durant la campagne électorale, j'ai visité un centre
d'accueil où on m'a dit: Écoutez, nous faisons des compressions
budgétaires depuis trois ans, quatre ans. Cette année, nous nous
trouvons devant l'éventualité de fermer notre centre de jour.
Pourtant le gouvernement va nous annoncer, dans des communiqués de
presse, et on a entendu les gens de l'autre côté de la Chambre
à répétition, qu'avec chaque nouveau centre d'accueil, il
y a un nouveau centre de jour de créé. M. le Président,
avec les coupures qu'on a présentement, ce sont les centres d'accueil
actuellement en fonctionnement qu'on expose à une fermeture de
services.
Là je me dis, pour reprendre une expression du ministre des
Finances, je n'ai jamais su ce qu'était le gras, la viande et les os,
mais j'ai l'impression que cela commence à être extrêmement
douloureux. Peut-être est-il trop tard cette année pour
réviser certaines choses, mais je voudrais attirer l'attention du
ministre des Finances sur la façon dont le gouvernement établit
ses priorités dans les dépenses.
On a droit, à chaque année, à des tournées
ministérielles ou à des tournées soi-disant de
consultation. J'admettrai qu'il y a une part de consultation, mais vous devrez
admettre avec moi, M. le Président, qu'il y a aussi une part
d'électoralisme dans ce genre de tournée. Le meilleur exemple,
c'est le fameux livre vert sur l'éducation. Déjà
après six mois du début de cette
consultation, on admettait que sans compter les dépenses qui
pouvaient être attribuées aux fonctionnaires du ministère,
la tournée, la publicité, etc., étaient rendus à
700 000 $. Je n'exagère rien en disant que toute la tournée,
toute la consultation, les sondages, etc., ont dépassé
certainement les 2 000" 000 $. Je le demanderai de toute façon dans une
question au feuilleton à l'automne, parce que ce serait
intéressant de savoir, compte tenu des résultats maintenant
cahin-caha de toute cette consultation, si vraiment l'argent a
été dépensé à bon escient. (17 h 10)
M. le Président, on pourrait parler aussi de la publicité.
J'ai eu l'occasion de le dire en Chambre, sur une période de deux ans,
de 1977 à 1979, les dépenses pour la publicité ont
augmenté de 10 000 000 $. Je ne voudrais pas revenir sur ce qui a
été dépensé à l'automne dans la campagne
publicitaire du gouvernement touchant la fameuse question constitutionnelle
parce que là, on parle d'un montant d'au-delà de 3 000 000 $. M.
le Président, on pourrait également parler des dépenses
reliées au ministère des Affaires intergouvernementales. J'admets
qu'on ait une maison en France, qu'elle ait un statut privilégié.
Ce n'est pas du tout ce que je veux remettre en question, mais je me laisse
dire - et on pourra me corriger - que le nombre d'employés à
l'intérieur de cette maison est aussi important que celui à
l'intérieur de l'ambassade canadienne, et l'ambassade canadienne en a
sûrement trop, elle aussi. Quand je vois la multiplication des maisons du
Québec! On est un peu partout aux États-Unis, quand on sait qu'on
est dans un monde de communications extrêmement faciles et que ce sont
des endroits quand même rapprochés. Je veux bien admettre qu'il y
en ait une à New York et une à Washington, mais là, on est
rendu qu'on en a dans je ne sais pas combien de villes.
Je sais que le gouvernement actuel n'est pas le seul responsable. Il a
seulement, comme le dirait le ministre des Finances, un peu engraissé ou
pris de l'embonpoint, mais, encore une fois, des services directs à la
population, cela peut représenter parfois, dans une institution
particulière, dans une école ou dans un établissement, des
sommes qui peuvent varier entre 10 000 $ et 50 000 $ et servir à
vraiment améliorer la qualité des services. Et tout à
coup, on voit des millions de dollars dépensés à droite et
à gauche. On se dit, à ce moment-là: Est-ce que les
priorités sont bien établies?
M. le Président, j'ai reçu la semaine dernière
à mon bureau, une boîte du ministre des Communications. Je pense
que ce sont des drapeaux, de petits drapeaux, des grands, des moins grands, en
tout cas, toute la série qu'on reçoit annuellement. Le ministre
croit bon de s'excuser de ce qu'on m'a envoyé de drapeaux, de petites
épinqles et de plaques pour mettre sur les voitures des gens, il y en a
pour 266 $. En multipliant par 122 comtés - c'est dans la lettre du
ministre - on fait face à une dépense totale de 32 450 $. Il
indiquait au début du paragaphe: "Cependant, les restrictions
budgétaires imposées par le gouvernement du Québec nous
posent certains problèmes de distribution pour l'année
1981-1982." Vous allez me dire: Ne faites pas un plat avec 32 000 $, mais vous
savez, M. le Président, que par les années
précédentes, cela a été davantage que 32 000 $.
Chacun a son budget. Si on en veut, des drapeaux, qu'on se les procure. Si au
moins vous me disiez: On envoie cela aux gens qui ne peuvent pas les payer. Je
serais curieuse de savoir où sont rendus tous ces drapeaux et qui les
utilise! C'est un exemple.
Je pourrais citer un grand dépliant que j'ai reçu du
ministère du Travail, un poster, une affiche, en français. C'est
impressionnant! C'est haut comme cela. J'ai reçu cela la semaine
dernière chez nous. J'ai ouvert cela. C'est en couleur sur papier
glacé, etc. Il y avait un gros 50 et c'était marqué:
Ministère du Travail, 1931 à 1981. Cela fait bien 50 ans. C'est
tout ce qu'il y avait, M. le ministre. Seulement la poste pour envoyer cela,
coûtait 1 $. Multipliez cela à des centaines, pour ne pas dire des
milliers, d'exemplaires et vous pouvez vous demander: Est-ce la meilleure
façon de dépenser l'argent quand on a des restrictions
budgétaires aussi importantes?
M. le Président, en terminant, je veux simplement dire que c'est
vrai que le ministre des Finances doit faire face à des contraintes
budgétaires importantes du point de vue des engagements, par exemple, au
niveau des conventions collectives, au niveau de l'inflation dans le
fonctionnement des établissements, des institutions. Ce sont des
contraintes avec lesquelles il doit vivre. Là-dessus, je sympathise avec
le ministre, parce que je sais qu'elles sont considérables. Tout ce que
je demande au gouvernement, par l'entremise du ministre des Finances, c'est
que, vraiment, on soit plus soucieux de la façon dont on dépense
l'argent des contribuables. J'aurais pu ajouter de multiples exemples, si
j'avais voulu ajouter tous les voyages des fonctionnaires à
l'étranger à l'intérieur des différents
ministères. Est-ce qu'ils sont tous nécessaires?
Je pense qu'on pourrait arriver non pas à enlever toutes les
compressions budgétaires, mais, au moins, à essayer de corriger
les compressions budgétaires où, finalement, on paiera juste un
peu plus tard les conséquences de ces compressions budgétaires
qui n'ont pas été faites à bon escient dans des services
que nous, de l'Opposition, considérons essentiels quand ils
s'adressent directement à la population, quand ce sont des
services directs à la population, en particulier aux gens qui en ont le
plus besoin et qui ont le moins de ressources financières,
matérielles, pour faire face aux difficultés quotidiennes de la
vie. Merci, M. le Président.
Le Président: M. le député de Vanier.
M. Bertrand: M. le Président, une très brève
question de privilège. Mme la députée de L'Acadie a fait
référence tout à l'heure à une lettre que j'ai
envoyée aux 122 députés de l'Assemblée nationale.
J'espère qu'elle aura noté que le ministre des Communications a
voulu donner toute l'information sur les sommes que coûte justement ce
matériel de promotion québécoise ainsi que le total. J'ai
voulu indiquer de plus, dans un paragraphe que j'aurais aimé vous citer
en entier, à quel point justement je considérais que, dans le
contexte des compressions budgétaires, il fallait que les
députés sachent que c'est le maximum auquel ils pouvaient
s'attendre cette année, et que c'était fini l'époque
où on allait sortir de tous les ministères du matériel que
tous les députés nous demandent.
Je voudrais que Mme la députée le sache, il y a des
collègues de votre côté, et il y en a beaucoup de ce
côté-ci aussi, qui, tous les jours, me demandent: Est-ce que je
pourrais avoir un paquet de ci, un paquet de ça? Je voudrais que Mme la
députée sache que je suis tout à fait d'accord avec elle
et que c'est justement pour vous indiquer combien ça coûte et quel
est le contexte des compressions budgétaires que je vous ai
informés dans cette lettre que c'était le dernier envoi auquel
vous pouviez vous attendre du ministère des Communications pour
l'année.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Jacques Parizeau (réplique)
M. Parizeau: M. le Président, nous terminons un
débat sur le discours sur le budget qui n'aura pas duré quinze
heures, mais qui s'étend, au contraire, sur plusieurs mois. Je ne me
souviens pas qu'un budget ait donné lieu à une discussion aussi
longue et marquée d'autant de rebondissements. En fait, pendant toute la
campagne électorale, on a assisté à des discussions,
à un certain moment fort intéressantes, sur les
conséquences de ce budget aussi bien sur le plan fiscal que sur celui
des dépenses. Lorsque la campagne électorale s'est
terminée et que, soit dit en passant, les électeurs avaient l'air
de ne pas avoir trouvé le budget si mal que ça, compte tenu des
résultats de l'élection, nous avons repris le débat
beaucoup plus officiellement dans cette Chambre et, en parallèle, en
commission pour l'examen des crédits.
Je voudrais essayer de remettre peut-être dans un contexte un peu
plus large certaines de nos discussions depuis quelques semaines. On me
permettra de compléter le discours sur le budget dans cette
espèce de perspective un peu générale. Parfois, il faut se
reculer un peu, cesser de regarder chaque arbre et essayer de voir de quoi la
forêt a l'air. Or, nous nous trouvons dans une situation
économique, un peu partout dans le monde occidental, qui est à
bien des égards très préoccupante. L'expansion de
l'économie, qui a été tellement caractéristique des
20 dernières années, tout à coup s'estompe. La croissance
économique fléchit. Certains pays, pour la première fois
depuis bien des années, voient même un recul s'effectuer dans leur
production. (17 h 20)
Tous les gouvernements un peu responsables, dans un contexte comme
celui-là, se sentent évidemment forcés d'assumer des
responsabilités aussi vastes que possible et d'exercer une action aussi
efficace que possible, pour essayer d'accélérer ce
développement économique qui reste, après tout, une des
fonctions majeures, essentielles de n'importe quel gouvernement.
À cet égard, le nôtre n'est pas différent des
autres. Le gouvernement de Québec ne peut pas démissionner de ce
rôle majeur qui consiste à essayer d'accélérer la
croissance économique, lorsque l'environnement économique est
à ce point fragile. Les gouvernements des autres provinces cherchent
dans la même voie. Le gouvernement fédéral aussi. Dire que
la coordination de toutes ces mesures est bonne à l'heure actuelle,
serait très exagéré. Je pense que derrière un
problème, commun à tant de pays, de développement
économique, il y a chez nous aussi, un problème d'orqanisation
des gouvernements les uns par rapport aux autres pour éviter au moins
qu'ils aillent dans la même direction.
À bien des égards, ce n'est pas la seule raison. La
situation des déficits que nous avons encourus au Canada n'aide pas. Le
gouvernement fédéral, ayant accumulé un déficit
énorme, considérable, depuis plusieurs années, au moment
où il devrait être en mesure de mettre le pied sur
l'accélérateur de façon à être capable de
faire redémarrer l'économie, est évidemment très
préoccupé par son déficit, et cherche par toutes
espèces de moyens à le déplacer vers d'autres
gouvernements, les gouvernements de provinces en particulier. L'espèce
de facilité qu'un gouvernement devrait avoir, quand la situation
économique ne va pas très bien, pour essayer de faire
démarrer l'économie, manifestement, n'existe pas à Ottawa,
à
l'heure actuelle.
Chez nous, elle n'est pas non plus très grande, cette marge. On a
fait état bien souvent des déficits du gouvernement de
Québec. Jaurais souhaité que, de temps à autre, on nous
parle un peu davantage du déficit du gouvernement fédéral,
parce qu'en termes de poids relatif, il n'y a pas de comparaison, celui du
fédéral est bien plus lourd. Mais nous, comme gouvernement de
province, nous ne sommes pas à l'heure actuelle dans une situation qui
nous permettrait de faire tout ce que nous voulons.
D'autre part, les politiques énergétiques suivies par le
gouvernement fédéral ont eu un effet massif sur les
investissements au Canada en amenant une sorte de décroissance dans ce
domaine. Et même certaines des régions qui avaient un taux de
croissance spectaculaire, il y a deux ans, très important il y a un an,
subissent à l'heure actuelle l'impact d'une politique
énergétique fédérale qui, directement dans
certaines provinces, indirectement, à travers tout le Canada, affecte la
croissance de l'économie.
Et comme si cela ne suffisait pas, nous sommes en face d'une politique
monétaire, apparue aux États-Unis, mais qui, évidemment,
déborde chez nous, extrêmement restrictive et
caractérisée par des taux d'intérêt comme on n'en
avait jamais vus avant. Des taux d'intérêt, remarquons-le bien,
qui, à ce niveau et avec une politique restrictive de cet ordre,
semblent avoir aux États-Unis un effet sur l'inflation. Je peux
comprendre, à la rigueur, que les Américains, regardant la
situation chez eux depuis dix mois ou un an, se disent: Cela vaut
peut-être la peine d'avoir des taux d'intérêt aussi
élevés et une politique monétaire restrictive si,
effectivement, cela a cet impact sur l'inflation, si cela réduit le taux
d'inflation. Pour nous, qui subissons à peu près automatiquement
l'effet de cette politique monétaire américaine, la situation se
présente très différemment. Après deux
poussées des taux d'intérêt, encore une fois, tout à
fait inédites en l'espace d'un an et demi où est la
réduction du taux d'inflation chez nous? Nulle part. L'inflation
continue, non pas se maintient au même rythme, mais
s'accélère. Nous avons devant nous, pour les années
à venir, les hausses du prix du pétrole. Les Américains
ont eu au moins la sagesse d'absorber l'augmentation du prix du pétrole
et, pour eux, c'est derrière eux maintenant. Donc, au moins certaines
politiques monétaires qu'ils pratiquent ont un certain effet sur le
rythme d'inflation. Nous avons le pire de tous les mondes, l'effet de la
politique monétaire des États-Unis et toutes les augmentations du
prix de l'énergie qui sont à venir, à cause des
augmentations du prix du pétrole dans les deux ou trois ans qui
viennent. C'est-à-dire, pas beaucoup d'espoir d'une réduction du
rythme ou du taux d'inflation; ce n'est pas un environnement facile.
Un gouvernement ne peut pas renoncer, encore une fois, à ses
responsabilités fondamentales à l'égard du
développement économique, mais, d'un autre côté,
dans un tel environnement, on comprend que les gouvernements sont amenés
à poser des gestes qui ne sont pas nécessairement populaires dans
tous les milieux, qui peuvent être considérés à
certains moments comme des virages d'une certaine brutalité, mais qui
permettent cependant au gouvernement d'être en mesure de continuer
à assumer des fonctions que, seul, finalement, il peut assumer.
Nous avons, dans le budget de cette année, le reflet de deux
orientations fondamentales. L'une qui a trait au revenu du gouvernement et,
l'autre, les dépenses.
Pour ce qui a trait à nos politiques fiscales, nos politiques
d'impôt, nous avons continué, une année de plus, une
tendance qu'on peut apprécier diversement, à satisfaire
l'objectif suivant: faire en sorte que l'impôt sur le revenu et les taxes
de vente soient réduits chaque fois qu'on le peut. Par rapport à
quoi? Par rapport à ce qu'étaient ces taxes lorsque nous sommes
arrivés au pouvoir pour la première fois. C'est une sorte
d'objectif tenace pour nous, à l'intérieur, encore une fois, de
marges qui très souvent sont étroites, mais on ne pourra pas
reprocher à ce gouvernement, M. le Président, de ne pas avoir eu
une certaine persistance à cet égard au cours des trois
dernières années.
On nous dit parfois: Oui, mais le fardeau fiscal des
Québécois reste supérieur à celui des provinces
voisines. Évidemment, bien sûr, on le sait, on ne s'est jamais
imaginé qu'on était capable de rétablir une situation
comme celle-là en l'espace de quelques années. L'accumulation
d'un fardeau fiscal extraordinairement élevé au Québec,
ça ne se corrigera pas en deux ou trois ans, mais au moins on peut se
dire que, pendant trois ans successivement, on a franchi une partie du terrain
qu'on avait à franchir. Quand je vois, cette année, le
gouvernement de l'Ontario annoncer, sur deux ans, une augmentation de 10% de
son impôt sur le revenu, je me dis que l'écart indéniable
qui existe entre le fardeau fiscal des deux provinces continue de s'amenuiser,
en partie à cause de notre propre mérite et en partie à
cause de ce qui se passe ailleurs.
Ces réductions d'impôt ont évidemment un effet sur
les ressources qui sont à notre disposition, cela a un effet sur le
déficit et cela a un effet sur les rentrées fiscales chaque
année. On pourrait considérer qu'une tendance comme
celle-là est dans l'ordre normal des choses et pourtant, là
encore, un
danger important nous guette. On nous a assez dit, pendant le
débat référendaire, que plus du quart de tous les revenus
du Québec proviennent de transferts fédéraux. C'est vrai,
à cause, encore une fois, de la structure de la
péréquation, des programmes établis, des ententes entre
les gouvernements. Au total, c'est vrai, plus du quart des ressources de
l'État du Québec nous proviennent de transferts du gouvernement
fédéral. (17 h 30)
II y a quelques années, le montant de ces transferts augmentait
de 18% ou 19% par année, donc approvisionnait notre caisse au moins
autant que l'impôt sur le revenu avant qu'on commence à en
réduire certaines des caractéristiques ou une partie de son
fardeau réel. Là, les transferts fédéraux ont
commencé à augmenter de plus en plus lentement. Nous en sommes
arrivés au point où ces transferts fédéraux ne
représentent plus 18%, 15% ou 12% d'augmentation par année, mais
un taux d'augmentation qui est à peine le tiers du taux de l'inflation
au Canada. Si on fait cette année, 5%, d'augmentation dans les
transferts fédéraux, ce sera très beau. Il y a donc une
partie des ressources du gouvernement qui augmente lentement, de plus en plus
lentement, et dont on nous annonce maintenant à Ottawa qu'elle pourrait
être réduite, mais alors là, en valeur absolue, par une
coupure qui pourrait atteindre, pour l'ensemble des provinces canadiennes, 1
500 000 000 $ en deux ans.
C'est extrêmement préoccupant. Tout se passe comme si, sur
le plan constitutionnel comme sur le plan financier, on en était
à chercher à coincer le Québec. Dans le débat
constitutionnel, il est évident que cette Assemblée dans laquelle
nous siégeons... Si le projet du premier ministre du Canada est
accepté à Londres et nous revient, une chose est parfaitement
évidente: c'est que le peuple québécois et
l'Assemblée nationale de ses élus n'auront plus jamais les
pouvoirs qu'ils ont eus pendant non pas seulement un siècle, mais plus
d'un siècle. En même temps qu'on menace les pouvoirs du peuple
québécois et de ses représentants, sur le plan financier,
on utilise le fait qu'une partie importante des revenus du gouvernement de
Québec provient d'Ottawa pour menacer l'équilibre
général de nos finances publiques. Ne nous faisons pas
d'illusion, M. le Président, on sent de plus en plus que l'automne
prochain ne sera pas facile parce que la crise constitutionnelle va bien finir
par aboutir et on saura ce que cela donne. Les positions du gouvernement
fédéral à l'égard des transferts aux provinces,
c'est l'automne prochain qu'on va le savoir. Nous nous en allons possiblement
vers une crise à la fois politique et financière d'une ampleur
bien plus grande, je pense, que, jusqu'à maintenant, on s'est plu
à le souliqner.
Sur le plan des dépenses, on a beaucoup parlé, bien
sûr, des coupures. J'ai bien l'impression, M. le Président, qu'on
en a tant parlé qu'on a fini par perdre un peu la perspective de
l'augmentation des dépenses cette année. Entendons-nous bien, les
dépenses, les crédits que nous sommes à voter, ces
crédits augmentent par rapport à l'année
précédente d'un peu plus de 13,5%. Lorsque les dépenses
augmentent à ce rythme, parler de coupures est un peu fort. Mais
pourquoi, même si ça augmente de 13,5% en un an, cette image de
coupures et de compressions est-elle à ce point tenace? Il y a des
raisons et ce sont des raisons non pas seulement de gestion, mais ce sont
aussi, jusqu'à un certain point, des raisons qui tiennent à une
sorte de phénomène de société.
Nous vivons très naturellement et, pour une bonne partie de la
population, assez agréablement dans une société qui a
vécu longtemps ou qui s'est développée longtemps dans une
atmosphère d'expansion à peu près sans limite. Je vous
rappelle qu'avant que nous arrivions au pouvoir, les dépenses du
gouvernement de Québec avaient, au cours des trois années
précédentes, augmenté de 21% par an; cela veut dire,
à ce rythme, que les dépenses doublent tous les quatre ans. C'est
prodiqieux comme rythme d'expansion. Tous les robinets étaient
ouverts.
C'est très difficile, quand on a créé de telles
attentes dans la population, et pas seulement à cause de ces trois
années, mais sur une période de vingt ans, dans un certain sens,
lorsque de telles attentes sont apparues, se sont manifestées, il est
très difficile de parler le langage, de réaliser graduellement
les choses, de ne pas faire de développement cette année dans tel
secteur, mais de le reporter dans deux ans, cela n'est jamais facile de
répondre à des attentes par un échéancier.
Il est clair que, dans une société où on voudrait,
autant que possible, presque tout, tout ou presque, du gouvernement, un
échancier choque, que des réalisations graduelles troublent ou
dérangent. C'est une première raison, et je pense qu'elle est
fondamentale. Elle n'est pas propre à la société
québécoise, bien sûr, mais il y a quelque chose de
profondément ancré ici et peut-être accentué, en un
certain sens, par le fait que nous vivons aussi dans une société
où on attend terriblement de l'État. Il y a aussi un
phénomène de civilisation où, tout naturellement, tout
problème doit être réglé par l'État et
où tout besoin s'exprime par une demande de subvention à
l'État. Ce sont de très vieilles habitudes, chez nous. Là
encore, nous ne sommes pas les seuls, mais c'est assez caractéristique.
S'il y a un petit
péché mignon, il est peut-être de ce
côté.
Quand je vois, de temps à autre, des associations
professionnelles composées de gens qui gagnent très bien leur vie
venir demander une subvention de 5000 $ ou 10 000 $ pour organiser un
congrès, je suis toujours un peu gêné. Cela se fait plus
souvent qu'on pense. Tout se passe comme si beaucoup de choses et de plus en
plus de choses dans notre société ne pouvaient pas se
réaliser sans subvention, à peu près quel que soit le
niveau de revenu ou de fonds dont disposent soit les individus soit les
institutions. On s'est habitué à cela.
Bien sûr, dans le genre de contexte que je viens de
décrire, il va falloir petit à petit se déshabituer, pas
complètement, car il restera toujours des subventions, il y aura
toujours énormément d'organismes de causes que l'État
devra appuyer. Il y a clairement, sur le plan des mentalités, un virage
à prendre. Je disais que ce n'était pas la seule raison. Non,
bien sûr, parce que évidemment aussi, les conventions collectives
que nous signons représentent un coût, une augmentation annuelle
des dépenses de salaires qui représentent plus de la
moitié du budget du gouvernement du Québec. Plus de la
moitié de notre budget est consacré à des salaires, soit
dans la fonction publique, soit par le truchement de subventions aux
hôpitaux, aux réseaux de santé, à l'enseignement,
etc. Mais plus de la moitié du budget du gouvernement de Québec
est consacrée à des salaires. Et dans la mesure où ces
salaires ont un taux d'augmentation prévu par les conventions
collectives, forcément, cela se reflète dans une augmentation
mécanique de nos dépenses.
Il y a aussi des habitudes, dans la gestion des affaires publiques, et
ça à toutes espèces de niveaux, des habitudes qui ne sont
pas faciles à défaire. Pendant très lonqtemps, on s'est
imaginé qu'on pouvait augmenter le personnel dans les services publics
à peu près indéfiniment. Il faut dire que, partant d'aussi
loin qu'on partait, avant les années soixante, on comprend qu'une
impression comme celle-là se soit créée. Après
tout, le développement de l'enseignement secondaire, c'est en
très peu de temps, en guelques années, dans les années
soixante, qu'on a vu une augmentation, une flambée du nombre des
enseignants. Il fallait le faire. Cela a développé des habitudes.
Normalement, les effectifs doivent augmenter dans l'enseignement et s'ils
n'augmentent pas, il y a quelgue chose d'anormal. L'augmentation du personnel
dans les services de santé, là encore, depuis le début des
années soixante, est quelque chose d'absolument spectaculaire! Et on a
pris tout naturellement l'habitude de considérer que si les effectifs
dans les services de santé ne continuent pas d'augmenter
régulièrement, il y a quelque chose d'anormal.
Ne parlons pas de la fonction publique où, gouvernement
après gouvernement, programme après programme, création de
nouveaux ministères après les ministères existants, on a
fonctionné sur le principe de la sédimentation. Tout ce qui
était fait était bien fait et on en ajoutait chaque année
à l'occasion de l'adoption d'une nouvelle loi, de la création de
nouveaux programmes et de la création d'un nouveau ministère.
Cela allait de soi que les effectifs de la fonction publique devaient
croître indéfiniment. C'est tout ça que nous cherchons
à changer à l'heure actuelle. C'est là encore, sur le plan
des gestionnaires dont on ne peut pas se passer, des gestionnaires dans les
ministères, des gestionnaires dans les services de santé, des
gestionnaires dans l'enseignement, où il faut, tout cela ensemble,
prendre l'habitude, oui, c'est possible, de faire fonctionner efficacement des
services sans avoir chaque année une augmentation
régulière du personnel, tous faire en sorte qu'on
réexamine l'affectation du personnel. (17 h 40)
On se pose régulièrement la question à savoir si le
personnel placé dans le service A ne devrait pas, pour une part,
être déplacé ailleurs et s'il y serait plus efficace de
cette façon. Nous avons tous à faire cet exercice. Il est
commencé depuis deux ans. Il se manifeste, évidemment, de
façon assez serrée cette année dans les compressions
budgétaires. Il y a donc un certain nombre d'explications. Il y a un
certain nombre de causes sous-jacentes à l'évolution des
dépenses et ce qu'on a appelé des compressions. C'est
inévitable. Nous ne pourrons pas continuer à laisser un taux
exubérant aux dépenses publiques, d'autant plus que
derrière tout cela se profile le coût pour l'État des taux
d'intérêt dont je parlais tout à l'heure. Ces taux
d'intérêt touchent tous les particuliers, tous les
commerçants et tous les industriels - c'est vrai - mais ils touchent
aussi le gouvernement. Le service de la dette, les intérêts que
nous avons à payer chaque année augmentent à une vitesse
vertigineuse. On dira, bien sûr: Cela reflète les besoins
d'emprunt du gouvernement. C'est vrai,' mais cela reflète aussi de
façon pas banale l'augmentation saisissante des taux
d'intérêt qu'on a connus sur le marché. Si on ne veut pas
laisser les déficits prendre n'importe quelle dimension, lorsque le
service de la dette coûte beaucoup plus cher, il faut bien. On ne peut
pas l'éviter, celui-là. Il est absolument incompressible. Je ne
peux pas décréter une compression des intérêts
à payer sur nos emprunts. Cet élément étant
totalement incompressible, il est évident que cela va avoir des
conséquences sur le rythme de dépenses des autres postes au
gouvernement.
Tout cela, M. le Président, pour dire
ceci: L'avenir est assez périlleux. Nous nous rendons compte que
ces négociations fiscales que nous allons aborder dans les mois qui
viennent peuvent faire courir aux ressources de l'Ftat québécois
des risques considérables. L'avenir est périlleux aussi parce
qu'il faut tout de même assurer une reprise systématique de
l'économie du Québec et que, dans l'environnement, dans nos
rapports avec le gouvernement fédéral, ce n'est pas si facile que
cela. Notre performance, on en est fier: trois ans de croissance
économique plus rapide qu'en Ontario, il n'y a pas de quoi s'en
désoler au Québec, mais on est loin du compte sur le genre de
développement qu'on souhaiterait avoir. Pourtant, reconnaissons que tous
les outils ne sont pas là et que les contraintes budgétaires dont
je parlais tout à l'heure affectent l'usage des outils que nous avons.
Un avenir périlleux aussi, parce que la politique monétaire
pratiquée aux États-Unis, comme je le disais au début, ne
veut pas nécessairement dire chez nous une réduction du taux
d'inflation. C'est en raison de cette décision déplorable,
fondamentalement politique - pas dans le grand sens du terme - que nous avons
été les seuls, au Canada, de tous les pays occidentaux, à
vouloir reporter l'échéance des hausses du prix du pétrole
toujours un peu plus loin.
Dans cet avenir périlleux, M. le Président, le
gouvernement du Québec a conscience d'avoir relevé le
défi, d'avoir, avant même le déclenchement d'une campagne
électorale, pris le risque de dire à la population: Voici comment
ça se présente et voici quelles conséquences ça
aura. C'est peut-être une preuve d'une assez extraordinaire
maturité politique chez les Québécois que, ayant compris
ce message, ayant compris toutes les contraintes que ça
entraînerait, ayant compris que le gouvernement assumait ses
responsabilités, et les assumait efficacement, ce peuple
québécois ait remis le gouvernement actuel au pouvoir.
Merci, M. le Président.
Le Président: J'appelle maintenant au vote la motion de
censure présentée par le député de
Vaudreuil-Soulanges, qui se lit comme suit: "Que cette Assemblée
blâme sévèrement le gouvernement du Parti
québécois d'avoir présenté un budget qui comporte
un déficit budgétaire d'au moins 3 000 000 000 $ pour la seconde
année consécutive, qui compromet davantage la santé des
finances publiques québécoises et de notre économie,
particulièrement en ce qui a trait à la création
d'emplois, et qui introduit des mesures de compression budgétaire aussi
arbitraires qu'inacceptables, notamment au chapitre de l'éducation et
des affaires sociales.
Qu'on appelle les députés.
(Suspension de la séance à 17 h 46) (Reprise de la
séance à 17 h 58)
Mise aux voix de la motion de censure
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît! ...À l'ordre, s'il vous plaît:...
Afin que chacun sache ce sur quoi nous allons voter, je vais
répéter la motion de blâme du député de
Vaudreuil-Soulanges. "Que cette Assemblée blâme
sévèrement le gouvernement du Parti québécois
d'avoir présenté un budqet qui comporte un déficit
budgétaire d'au moins 3 000 000 000 $ pour la seconde année
consécutive, qui compromet davantage la santé des finances
publigues guébécoises et de notre économie,
particulièrement en ce qui a trait à la création d'emplois
et qui introduit des mesures de compressions budgétaires aussi
arbitraires qu'inacceptables, notamment au chapitre de l'éducation et
des affaires sociales."
Que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever, s'il vous
plaît! (18 heures)
Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, O'Gallagher, Ciaccia, Mme
Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Marx,
Bélanger, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières,
Lincoln, Paradis, Picotte, Pagé, Gratton, Fortier, Rocheleau, Polak,
Maciocia, Dauphin, Cusano, Hains, Sirros, Saintonge, Johnson
(Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Laurin,
Bérubé, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Godin,
Rancourt, Léger, Clair, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Marois,
Tardif, Léonard, Fréchette, Martel, Ouellette, Dussault, Gagnon,
Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Paquette, Proulx, de Bellefeuille, Guay, Baril
(Arthabaska), Dean, Mme Juneau, MM. Leduc, Marquis, Boucher, Lavigne,
Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gauthier,
Blais, Desbiens, Perron, Bordeleau, Gravel, Brassard, Laplante, Charbonneau,
Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Blouin, Rochefort, Brouillet,
Champagne, Rodrigue, Payne, Tremblay, Beaumier, LeBlanc, Lachance, Paré,
Dupré.
Le Secrétaire: Pour: 36
Contre: 64
Abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion rejetée.
Le second vote porte sur la motion du ministre des Finances, qui propose
que l'Assemblée nationale approuve la politique budgétaire du
gouvernement.
Que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever!
Le Secrétaire adjoint: Même vote
renversé.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Même vote
renversé?
M. Charron: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Charron: Comme il s'agit d'un vote majeur, il serait plus
prudent de le répéter.
Mise aux voix de la motion proposant l'approbation de
la politique budgétaire du gouvernement
Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord. Donc, que ceux
et celles qui sont pour veuillent bien se lever!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Laurin,
Bérubé, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Godin,
Rancourt, Léger, Clair, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Marois,
Tardif, Léonard, Fréchette, Martel, Ouellette, Dussault, Gagnon,
Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Paquette, Proulx, de Bellefeuille, Guay, Baril
(Arthabaska), Dean, Mme Juneau, MM. Leduc, Marquis, Boucher, Lavigne,
Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gauthier,
Blais, Desbiens, Perron, Bordeleau, Gravel, Brassard, Laplante, Charbonneau,
Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Blouin, Rochefort, Brouillet,
Champagne, Rodrigue, Payne, Tremblay, Beaumier, LeBlanc, Lachance, Paré,
Dupré.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure),
O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Vaillancourt
(Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Bourbeau, Blank, Caron,
Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Picotte, Pagé,
Gratton, Fortier, Rocheleau, Polak, Maciocia, Dauphin, Cusano, Hains, Sirros,
Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kheoe,
Houde, Middlemiss.
Une voix: On a gagné!
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Puis-je suggérer que nous
notions l'arrivée du ministre de l'Énergie et des Ressources et
que nous puissions lui permettre d'ajouter son nom à ces deux
motions...
Le Vice-Président (M. Jolivet): De même que le
ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
M. Levesque (Bonaventure): ... de même que le nom du
ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, sachant, M. le
Président, qu'on n'aura pas d'objection à ajouter mon nom sur les
premier et deuxième votes?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, pour les
besoins des nouveaux en cette Chambre, il serait peut-être bon de se
rappeler l'article 108, qui dit que, à moins de consentement de part et
d'autre, les gens qui arrivent en retard ne peuvent être inscrits au
vote.
Des voix: Consentement.
Le Secrétaire: Pour: 66
Contre: 37
Abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion adoptée.
M. le leader du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, avant de proposer la
suspension jusqu'à 20 heures, je voudrais solliciter le consentement de
l'Opposition pour qu'il soit permis, à ce moment-ci, comme j'en avais
prévenu le leader de l'Opposition, au ministre du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu de déposer un
projet de loi en première lecture puisque nous avons, à la suite
d'une consultation, choisi cette méthode plutôt que celle de
greffer un amendement à un projet de loi qui est actuellement en
discussion devant la commission de la justice.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Nous sommes d'accord pour permettre au
gouvernement de déposer ce projet de loi à ce moment-ci. Nous
n'étions pas d'accord qu'il soit en annexe, comme vient de le dire le
leader parlementaire du gouvernement, à un projet de loi omnibus qui n'a
même pas été discuté en deuxième lecture.
Cela ne veut pas dire quelle sera notre attitude sur le projet de loi
lui-même, mais nous n'avons pas d'objection, à ce que le
gouvernement dépose le projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, la motion est
adoptée.
Projet de loi no 13 Première lecture
M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu propose la première lecture du projet
de loi no 13, Loi sur le Comité mixte de la construction. M. le
ministre.
M. Pierre Marois
M. Marois: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le projet de loi no 13. Ce projet de loi a pour effet de
permettre au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu de former un nouveau Comité mixte de la
construction dont la composition, contrairement à celle du comité
existant, tiendra compte des nouveaux degrés de
représentativité du Conseil provincial du Québec des
métiers de la construction (International) et de la
Fédération des travailleurs du Québec, FTQ-Construction,
obtenus par suite du scrutin tenu en vertu de la Loi modifiant la Loi sur les
relations du travail dans l'industrie de la construction et concernant la
représentativité de certaines associations
représentatives.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de
première lecture est-elle adoptée? M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, vu qu'il
s'agit d'un projet de loi que nous ne pourrons pas, s'il est adopté,
étudier dans les jours qui viennent vu que, normalement, la session se
termine demain, pourrions-nous demander, pour l'information du public, au
ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu de nous dire ce qui amène l'étude de ce projet de loi
à ce moment-ci, quelle est l'urgence et, en même temps, quelle est
la nature des modifications suggérées par le ministre?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Marois: Essentiellement, M. le Président, dans la
foulée de l'adoption de la loi no 109 qui a permis de reconnaître
l'existence juridique de la FTQ-Construction, il nous semble de mise, à
ce moment-ci, avant qu'arrive l'automne, alors que le comité mixte a des
travaux à faire, notamment concernant le règlement de placement
de la construction - on l'a évoqué en commission parlementaire -
et concernant aussi toute l'opération de maraudage qui vient è
l'automne, qu'en toute et bonne démocratie, la FTQ-Construction, qui est
maintenant reconnue légalement, comme également le Conseil des
métiers de la construction, puisse siéger au comité mixte,
ce que permettrait le présent projet de loi. C'est donc dans la
foulée de l'adoption de la loi no 109 et avant un certain nombre
d'opérations que je viens d'évoquer.
M. Pagé: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip de
l'Opposition.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Le ministre du Travail vient de nous indiquer que
le comité mixte sera appelé à se pencher sur l'application
du règlement de placement. Pour utiliser un terme que le ministre
utilise fréquemment, n'a-t-il pas cru bon, dans la même
foulée, de prévoir, dans son projet de loi, des indemnités
à verser en dommages en raison des préjudices qui ont
été causés à des milliers et des milliers de
travailleurs du Québec à la suite de l'application du
règlement de placement qui avait été approuvé et
présenté au Conseil des ministres par son
prédécesseur, l'actuel ministre des Affaires sociales, et qui a
été déclaré nul et illégal par une
décision du tribunal de la Cour supérieure cette semaine ce qui
permettrait, selon le jugement rendu par l'honorable juge, un recours collectif
à tous ces travailleurs qui ont été brimés dans
leur droit le plus fondamental d'exercer un travail et qui donnerait un droit
acquis à tout travailleur possédant un certificat de
qualification? ( 18 h 10)
Est-ce que dans le même projet de loi que vous présentez
aujourd'hui vous avez l'intention d'ajouter d'ici la fin de la session des
dispositions permettant d'indemniser les milliers de travailleurs qui ont
été affectés par une situation que vous avez
créée et qui a fait en sorte que pendant près de trois ans
ces travailleurs ont été brimés et ont perdu des emplois,
ils n'ont pas eu le droit de travailler?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du
Travail.
M. Marois: La réponse à la question du
député - ce qu'il vient d'évoquer est prévu dans le
présent projet de loi - est non, et il sait fort bien pourquoi. Parce
que le présent projet de loi n'a pour effet, à la suite de la
reconnaissance juridique de la FTQ-Construction, que de lui permettre, en toute
et bonne démocratie, de pouvoir siéger au comité mixte de
la construction qui a un certain nombre de travaux à faire, notamment,
des travaux qui pourraient concerner le règlement de placement de la
construction.
Cela dit, en ce qui concerne le jugement que vient d'évoquer le
député, j'ai vu cela ce matin dans les journaux, je n'ai pas eu
le temps de prendre connaissance du jugement. J'ai demandé aux
conseillers juridiques du ministère d'examiner le jugement et, le cas
échéant de regarder cela aussi avec mon collègue de la
Justice pour voir s'il n'y a pas lieu de porter un tel jugement en appel. Il
est prématuré pour moi, en toute honnêteté...
Des voix: Oh! Oh!
M. Marois: Le député comprendra que c'est un
jugement de première instance et je ne peux pas me prononcer sur le fond
à ce moment-ci. On ne peut pas improviser une décision comme
celle-là à la suite d'un jugement dont je n'ai même pas eu
le temps de prendre connaissance en détail. Je ne l'ai pas eu sur mon
bureau. Les conseillers juridiques vont se pencher sur le dossier et on verra
s'il y a lieu ou non d'aller en appel sur un tel jugement. S'il y avait lieu
d'aller en appel, ce serait inscrit en appel. S'il n'y avait pas lieu d'aller
en appel, les gens et les citoyens concernés ont des recours reconnus
par la loi. Le député lui-même a rappelé une des
possibilités. Les possibilités sont donc là.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci, M. le leader.
Est-ce que cette motion de première lecture est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader.
M. Charron: M. le Président, je voudrais indiquer que,
conformément au règlement et à l'entente faite à
l'intérieur du règlement entre l'Opposition et le parti
ministériel, ce soir...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader...
M. Charron: Non, je ne le défère pas.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, deuxième
lecture, prochaine séance ou séance subséquente.
M. Charron: C'est ça. M. le Président, ce soir,
quelques députés de l'Opposition se sont inscrits auprès
du secrétaire général afin d'avoir un dernier débat
sur le rapport des différentes commissions qui ont étudié
les crédits. J'ai consulté l'Opposition, on a
privilégié, parmi les neuf députés, l'un d'entre
eux qui profitera du droit à la demi-heure pour avoir un débat
avec un ministre du gouvernement. L'Opposition m'a indiqué qu'il
s'agirait du député de Beauce-Sud qui a inscrit une question
visant le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
qui sera donc présent. Ce sera le tout premier, ce soir, lorsque nous
entreprendrons cette étude à 20 heures. Par la suite, les autres
députés ont, comme le règlement le dit et comme ils le
savent, dix minutes d'intervention avec une réplique du gouvernement de
même durée.
Dans l'ordre, nous entendrons ce soir le député de
Gatineau, la députée de Jacques-Cartier, le député
de Marguerite-Bourgeoys qui, tous les trois, ont inscrit des questions au
ministre de l'Éducation. Ensuite, nous entendrons l'intervention du
député de Mont-Royal qui s'adresse au ministre de l'Habitation.
Ensuite, la question du député de Gatineau qui s'adresse au
ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Ensuite, l'intervention du
député de D'Arcy McGee qui concerne le ministre de la Justice.
L'autre intervention du député de D'Arcy McGee - est-ce qu'un
député peut faire deux interventions? - qui concerne
également le ministre de la Justice. Finalement, l'intervention du
député de Nelligan qui concerne le ministre des Finances. C'est
l'ordre, M. le Président, - je ne veux pas en faire un ordre formel de
la Chambre - que je proposerais en vue d'un agencement de nos travaux qui soit
régulier.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela va? C'est
adopté? M. le leader, pourrait-on, au niveau de la présidence, en
savoir les détails pour qu'on puisse...
M. Charron: Oui, je vais vous remettre tout cela, mais, pour
l'instant, M. le Président, je proposerais la suspension de la
séance jusqu'à 20 heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Suspension
jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 16)
(Reprise de la séance à 20 h 18)
Débat sur le rapport de l'étude des
crédits
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre s'il vous
plaît! Veuillez vous asseoir.
Nous commençons le débat sur le rapport des
crédits. La parole est au leader adjoint du gouvernement.
M. Bertrand: Je pense que nous allons procéder... Je crois
que le député de Beauce-Sud s'était inscrit pour faire la
première intervention.
M. Mathieu: C'est cela.
M. Bertrand: Nous allons écruter religieusement, M. le
Président, le député de Beauce-Sud.
Le Vice-Président (M. Jolivet): La parole est donc au
député de Beauce-Sud, sur les questions qu'il veut soulever en
cette Chambre.
Agriculture, Pêcherie et Alimentation M. Hermann
Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je vais prendre la
parole du ministre des Communications qui dit qu'il va écouter
religieusement.
Les questions que se posent les agriculteurs, de même que ceux qui
aspirent à devenir agriculteurs, nos jeunes, ainsi que ceux qui veulent
transmettre leur propriété à la nouvelle
génération, ce sont les questions suivantes: S'établir,
est-ce possible? Transmettre ma propriété, est-ce possible? Je
tire mon thème d'un mémoire - que j'ai cité à la
commission parlementaire de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation - préparé par le Conseil d'administration de
l'Association des jeunes agriculteurs de la Beauce. Cela prouve que les jeunes
de la Beauce sont fidèles à la tradition et sont en mesure de
perpétuer le miracle beauceron. Le thème de ce sujet, c'est:
S'établir, est-ce possible, évidemment, en agriculture?
M. le Président, je voudrais démontrer, ce soir, à
cette Assemblée, que le budget en cours, en ce qui concerne
l'agriculture - on pourrait dire le budget dans son ensemble, mais
principalement en ce qui concerne l'agriculture - accuse cette année un
net recul. Le budget commence à pointer vers le bas. C'est justement ce
qui est cause d'inquiétude non seulement de la part des jeunes qui
aspirent à s'établir, mais également de la part de ceux
qui possèdent déjà une exploitation agricole et qui
veulent bien la conserver.
Le budget me fait penser à du fromage de gruyère. Vous
savez, une belle brique de fromage, ça se tient, mais la
caractéristique, c'est que c'est bourré de trous. Quand on veut
décortiquer tranche par tranche le budget soumis par le ministre des
Finances, on sort la tranche du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, la tranche du ministère des
Transports, la tranche de plusieurs autres ministères: Affaires
sociales, Éducation, et qu'est-ce qu'on constate? Il y a plus de trous
dans votre tranche qu'il y a de fromage en réalité. Il y a des
trous pour plus de 1 000 000 000 $. Vous avez vu les manchettes, comme moi, ce
ne sont pas des inventions que je vous fais.
Ce qui me consterne le plus, c'est qu'il y a certaines tranches de notre
brique de fromage qui n'ont pas de trou. Heureusement pour ces
ministères, mais malheureusement pour l'ensemble des autres. Comme la
tranche de la propagande, elle, elle n'a pas de trou. Soyez sûr, la
tranche de la publicité n'a pas de trou non plus. La tranche qui va aux
Affaires intergouvernementales n'a pas de trou. Mais quand on arrive
vis-à-vis de la tranche de l'Agriculture, et qu'on veut la tailler en
petites pièces pour la remettre aux agriculteurs de chaque
région, on arrive avec un beau morceau d'un pouce carré, mais
s'il y en a les trois quarts qui sont amputés par un trou, on ne remet
pas grand-chose finalement pour maintenir le dynamisme de l'agriculture.
C'est justement là le drame de la situation. C'est pratiquement
de la fausse représentation, le budget de cette année.
L'agriculture au Québec a connu son essor, a connu son expansion,
a connu son affirmation dans le secteur économique au cours des
années 1970-1976. Je vais vous le démontrer.
Le budget de 1970-1971 était de 82 000 000 $; 1971-1972, 85 000
000 $; 1972-1973, 96 000 000 $ - vous voyez qu'il y a une amélioration -
1973-1974, 112 000 000 $ - cela progresse - 1974-1975, 163 000 000 $, une
hausse de 41,5% en cette seule année, cela ne s'est jamais revu depuis,
1975-1976, 203 000 000 $ et 1976-1977, 212 000 000 $, ce qui fait pendant les
années 1970-1977 sous le gouvernement libéral, une augmentation
de 156% .au budget de l'Agriculture.
Prenons les années, qu'on pourrait appeler "miraculeuses", M, le
Président, alors que l'actuel ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation est arrivé au cabinet, à la
tête du ministère avec sa baguette magique. Je voudrais bien avoir
un petit bout de cette baguette magique au moins, pour pouvoir faire les
mêmes miracles
au moins verbaux, comme le disent certains producteurs parfois, "des
discours aratoires" aussi enflammés que le ministre est capable d'en
faire et je voudrais qu'il me transmette sur son testament un petit bout de sa
baguette magique, j'aimerais ça l'avoir pour faire de la
prestidigitation à mon tour.
En 1977-1978, premier budget péquiste, 225 000 000 $, on passe de
212 000 000 $ à 225 000 000 $; en 1978-1979, 241 000 000 $; 1979-1980,
250 000 000 $; 1980-1981, 345 000 000 $, mais là, les
pêcheries...
Des voix: Ce n'est pas fort:
M. Mathieu: M. le Président, je conviens et je me
réjouis de cette augmentation. Je ne suis pas un de ces esprits
négatifs qui ne voient que la petite bête noire partout, je me
réjouis et je veux rendre hommage aux personnes qui ont contribué
à perpétuer cet élan.
En 1981-1982, 357 000 000 $. On a augmenté, au cours de la
dernière année, de 12 000 000 $, mais n'oublions pas que, depuis
1980-1981, le budget consacré aux pêcheries est inclus dans les
crédits de ce ministère, ce qui fait une progression, pendant le
règne du gouvernement péquiste, de 59%, comparativement à
156% sous le règne antérieur. Quand on voit la situation on se
dit: Le pique-nique serait-il terminé? Le ministre des Finances
aurait-il sifflé la fin de la récréation?
M. le Président, j'ai dit tout à l'heure qu'il y avait 12
000 000 $ d'augmentation au cours de la dernière année. Je crois
que ça ne couvre même pas l'inflation, si on peut s'entendre sur
10% d'inflation, sans exagérer, ça ne couvre pas l'inflation. Si
vous ajoutez à ça les crédits périmés, les
crédits qui ont été votés par cette
Assemblée pour des services, pour le développement de
l'agriculture, des crédits périmés, pour un montant de 13
000 000 $. Vous arrivez avec un budget qui n'est plus positif, mais qui est
négatif. On arrive avec un net recul, M. le Président, et on
pique du nez. Mais il faut tout dire. Nous avons connu cette situation
seulement après les élections, pas avant. Avant les
élections, on n'avait pas une idée de cela. C'est une coincidence
probablement, M. le ministre, je vous le concède, c'est sans doute une
pure coincidence, mais elle est là quand même.
Au titre des crédits périmés, si je prends le
programme de planification, recherche et enseignement, il y a 354 000 000 $.
L'aide à la production, si l'on veut aider l'agriculture, M. le
Président, est-il un programme plus important que l'aide à la
production...
M. Baril (Arthabaska); Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant! M. le
député d'Arthabaska sur une question de privilège.
M. Baril (Arthabaska): Je pense, M. le Président, que
personne en cette Chambre n'a le droit, la permission ou l'autorisation
d'induire cette Chambre en erreur. Le député de Beauce-Sud vient
d'affirmer que le budget avait été déposé
après le déclenchement des élections, après les
élections. Le budget de M. Parizeau a été
déposé en cette Chambre le 10 mars et les élections ont
été déclenchées le 13 mars 1981.
M. Mathieu: Sur la question de privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je
ne voudrais pas qu'on utilise des moyens parce que, d'une façon ou de
l'autre, le ministre a un droit de réplique qu'il pourra utiliser tout
à l'heure. Donc, sur le temps du député de Beauce-Sud,
s'il vous plaît!
M. Mathieu: M. le Président, je n'ai peut-être pas
dit que j'avais connu l'existence des crédits périmés
après les élections. Avant les élections, on ne
connaissait pas l'existence des crédits périmés. Je ne
crois donc pas avoir induit cette Chambre en erreur et, si je l'avais fait,
j'aurais été le premier à m'en excuser, soyez-en certain,
M. le député d'Arthabaska.
L'aide à la production, 3 340 000 $ de crédits
périmés. Mais si on veut aider l'agriculture, le
développement de l'agriculture, c'est à l'aide à la
production, c'est à ce programme. Je souligne seulement les titres qui
méritent d'être mentionnés. Commercialisation des produits
agricoles, crédits périmés, 3 060 000 $. Le ministre nous
a toujours dit qu'avant de travailler à la distribution, il fallait pour
commencer, avoir des réserves. Si les crédits
périmés avaient servi à leurs fins, peut-être qu'on
aurait moins de réserves, mais ça irait peut-être mieux
dans le domaine du sirop d'érable, ça irait peut-être mieux
dans l'industrie du porc, là où on connaît des reculs,
où on connaît des situations pour le moins intenables pour les
producteurs. (20 h 30)
Gestion du territoire, crédits périmés: 1 588 000
$. Le pire de tout est le secteur qui mérite le plus de
considération: le développement des pêches maritimes.
Est-il un secteur qui mérite plus de considération que
celui-là? Crédits périmés - tenez-vous bien - au
montant de 4 175 000 $. J'aurais envie de dire que c'est presque rire des
pêcheurs. C'est pratiquement 20% de leur budget qui s'en va en
crédits périmés. J'espère que cette année,
malgré le recul que nous connaissons en agriculture - je le
dis, nous piquons du nez, c'est un net recul -les crédits que
cette Assemblée a votés serviront aux fins pour lesquelles ils
sont destinés.
On parle de coupures. Les membres du gouvernement n'aiment pas le mot,
on parle plutôt de compressions ou de ralentissement dans la progression
des dépenses publiques. Appelez cela comme vous le voulez, cela fait
moins d'argent dans les poches des cultivateurs et des producteurs.
Il y avait une subvention pour les silos. Le ministre se vantait de ce
programme. C'est un programme qui a rendu service, et je connais plusieurs
producteurs qui s'en sont prévalus, qui étaient bien contents.
Cette année, le programme n'est pas reconduit. Qu'est-ce que nous donne
le ministre comme explication? Cela dépend du fédéral!
Des voix: C'est cela!
M. Mathieu: Si le programme n'a pas été reconduit,
cela dépend du fédéral.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Mathieu: ...puisque le fédéral a refusé
de reconduire la part de subvention qu'il accordait antérieurement. Mais
quand le ministre se gonflait, qu'il venait près de se tirer en l'air,
quand il se gonflait de vantardise pour annoncer son programme de subventions
aux silos, est-ce que le ministre disait qu'il y avait une participation
fédérale?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Bertrand: Question de règlement. Je vous
inviterais...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je tiens à rappeler
à chacun des membres de cette Assemblée que l'article 100 existe
pour le député de Beauce-Sud comme pour tous les autres
députés. En conséquence, si on veut bien écouter
son intervention, le ministre aura l'occasion d'y répondre dans quelques
instants. M. le député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: M. le Président, si mon terme est
antiparlementaire, je le retire volontiers, mais je ne crois pas avoir
offensé qui que ce soit. Je prends au mot le ministre des Communications
qui joue son rôle à la perfection dans les communications, parce
qu'il m'a promis au début qu'il écouterait religieusement.
Coupures au programme de l'emploi. Je n'insiste pas, on l'a fait en
commission parlementaire. Coupures à l'amélioration
foncière des sols, à l'assainissement des eaux, à la
commercialisation des produits agricoles.
J'en arrive à la promesse du Parti québécois lors
de la dernière campagne électorale, promesse qui s'adressait
à la relève agricole, à nos jeunes, à ceux qui ont
écrit le mémoire dont j'ai fait mention tout à l'heure. Je
voudrais faire une mention. Je voudrais vous dire: Y a-t-il quelque chose de
plus beau dans le monde que le projet d'un jeune? Quand arrive un jeune, 18,
20, 25 ans, à votre bureau, un peu timidement, qui vous fait part de son
projet, vous êtes la personne déterminante pour son orientation,
future, selon la manière dont vous allez l'accueillir, l'écouter
et l'encourager. De là dépendra également son orientation
dans bien des cas.
Je trouve que chaque jeune porte un trésor en lui. On ne doit pas
passer l'éteignoir sur la tête des jeunes. On doit chercher
à les stimuler, à leur donner confiance, à les aider
à réaliser leur ambition, leur idéal. Y a-t-il quelque
chose de plus triste qu'un jeune qui n'a pas d'ambition, d'idéal?
J'arrive à votre promesse d'aide à l'établissement: la
relève agricole. Si j'ai bien compris, pendant la campagne, le ministre
de l'Agriculture et les membres du gouvernement - c'était leur droit
tout à fait légitime et je ne le conteste pas; je suis content et
j'ai hâte qu'ils le réalisent - nous disaient ceci: Nous allons
prêter aux jeunes 50 000 $ sans intérêt, pendant cinq ans.
C'est beau. Cela ne manque pas de poli. C'est bien présenté. Mais
ce que je veux demander au ministre...
Le lendemain de l'élection, vous avez eu, messieurs, comme j'en
ai eu moi-même, de nombreux appels téléphoniques qui
disaient: Oui, les 50 000 $ maintenant, est-ce en vigueur? Est-ce prêt?
On retarde notre projet. Ce que je demande au ministre, c'est quand vous allez
mettre cette mesure en application. Quels seront les critères
d'admissibilité? La personne bénéficiaire aura-t-elle
besoin d'un diplôme? Si oui, de quelle institution, de quelle
école d'agriculture? Quel niveau? Requerrez-vous des années
d'expérience? L'aspirant agriculteur sera-t-il admissible à cette
subvention? Vous savez que vous avez maintenant créé une classe
d'aspirants aqriculteurs. Il faut être cinq ans aspirant agriculteur
avant de devenir agriculteur. La promesse s'adresse-t-elle aux agriculteurs ou
si elle sera disponible pour les aspirants agriculteurs? Après cinq ans,
qu'adviendra-t-il du taux de l'intérêt? L'intérêt
sera-t-il payable en entier selon le cours de cette époque par le jeune
ou si l'intérêt continuera d'être subventionné? S'il
y a un décès en cours de route, la succession devra-t-elle
rembourser la partie qui a été subventionnée? Si oui, dans
quels délais? Si la personne qui a bénéficié de
cette aide vend sa terre ou que sa ferme est saisie, faudra-t-il faire un
remboursement? Si oui, de quel ordre? Quel en sera le délai? Quelles
seront les garanties que vous exigerez?
Je prends un cas pratique pour appliquer votre promesse. Il y a quelques
jours, le député d'Arthabaska nous disait que le prix des fermes
dans sa région était d'environ 1 000 000 $. Vous avez dit cela
lors de votre discours. On peut s'entendre là-dessus. Coupons en deux.
Prenons une ferme de 400 000 $. Soyons beaucoup plus modestes. Vous savez,
seulement 400 000 $, c'est plus que la moitié que ce qu'évoquait
votre collègue d'Arthabaska. Supposons que la jeune personne, l'aspirant
ou le jeune agriculteur qui désire faire carrière en agriculture,
arrive à votre bureau de renseignements de l'Office du crédit
agricole. On va lui demander: Quelle somme as-tu à verser comptant? Il a
toujours travaillé avec son père depuis l'âge de quinze ou
seize ans, depuis qu'il a quitté l'école, alors il ne faut pas
s'attendre qu'il ait une somme faramineuse. Supposons qu'il ait 10 000 $. On
ajoute la subvention de 50 000 $, cela fait 60 000 $. Admettons que le
père se saigne à blanc et qu'il dise: Je vais diminuer ma valeur
de 100 000 $, cela fait 160 000 $. Sur notre ferme de 400 000 $, moins 160 000
$, il restera au moins 240 000 $ à financer. D'abord, il faut vous dire
que le père sera obligé de prendre une bonne partie du produit
qui lui restera à la suite de la transaction pour payer ses dettes
antérieures, pour s'acheter une maison, déménager - et on
sait ce que ça coûte -finir d'élever ses enfants, les
établir, tout cela. Le père sera dans la misère par la
suite. (20 h 40)
En ce qui concerne le jeune, est-ce que l'Office du crédit
agricole ou tout autre créancier va accepter de lui prêter 240 000
$? J'en doute assez fortement. S'il accepte, si on fait un petit calcul du
coût de l'intérêt, 240 000 $ à 10%, c'est 24 000 $
d'intérêt. Remarquez bien que vos 50 000 $ de subvention sont
déjà déduits, ne revenez pas pour dire: II faut que tu
enlèves encore 50 000 $, c'est déjà déduit. 24 000
$ d'intérêt, la première année, et je mets
l'intérêt à 10%. Est-ce que vous croyez que c'est
réaliste? Si j'avais un projet un peu plus élaboré, de
l'ordre de celui dont parlait mon collègue d'Arthabaska, un projet de 1
000 000 $, vous voyez qu'il y a une barrière infranchissable, il n'y a
pas un jeune capable de s'installer en agriculture dans ces conditions.
Je voudrais reprendre ici une partie d'un discours du ministre de
l'Agriculture il y a quelques jours. En réplique à un de mes
discours, ou en réponse à une question, il a évoqué
le fait qu'un des grands problèmes serait le taux élevé de
l'intérêt et, encore une fois, que ça dépendait du
fédéral. Avec le ministre de l'Agriculture, on le sait, ça
dépend toujours du fédéral. Il y a seulement cent jours
dans l'année où ça ne gèle pas au Québec,
ça doit dépendre du fédéral aussi. Le ministre a
déclaré que l'intérêt était
élevé, que cela allait semer des inquiétudes dans le monde
agricole. J'ai reçu de nombreux appels téléphoniques
à ce sujet.
Je voudrais que, ce soir, le ministre prenne l'engagement ferme, devant
cette Assemblée, de respecter les prêts en cours,
c'est-à-dire que si un agriculteur a un prêt de 200 000 $ au taux
actuellement subventionné, que cette subvention se continuera
jusqu'à l'échéance de ce prêt. Le ministre a fait en
cette Chambre une déclaration qui a créé de
l'inquiétude dans la classe agricole. J'étais présent et
j'ai reçu beaucoup d'appels téléphoniques. Je veux que le
ministre en prenne l'engagement formel ce soir. Vous savez, M. le
Président, si un individu emprunte 200 000 $ et qu'il paie 8%
d'intérêt actuellement, à cause de la subvention de
l'Office du crédit agricole, s'il a une augmentation de 5% ou de 8%,
ça fait 10 000 $, 12 000 $ ou 15 000 $, et ce n'est pas long. Pour
rassurer la classe agricole, je veux que le ministre prenne l'engagement que
les subventions du taux d'intérêt continueront jusqu'à
échéance pour les prêts actuellement en cours. On se
comprend bien?
En ce qui concerne les futurs prêts, les prêts qui seront
contractés quand votre promesse viendra à échéance,
qu'adviendra-t- il des subventions d'intérêts? Les agriculteurs se
posent la question. Si on a 50 000 $ de prêt sans intérêt
pour cinq ans, mais qu'il n'y a plus de subventions d'intérêts
pour les autres 250 000 $ et qu'au bout de cinq ans c'est 300 000 $
d'intérêts au taux courant il n'y a plus personne qui pourra
tenir. Je veux que le ministre s'engage fermement. On ne doit pas modifier les
règles du jeu en cours de route, comme on l'a fait pour
l'éducation, au cours de la semaine.
Je voudrais dire un mot des chemins à vocation agricole. Le
ministre, hier, en commission parlementaire, au sujet du programme - et j'ai le
programme en main, c'est un programme de chemins à vocation agricole,
programme 3, élément 2, en vigueur du 1er avril 1981 au 31 mars
1982 - le ministre m'a dit: J'aurai une réponse bientôt du
ministère des Transports pour savoir si ce programme est reconduit,
parce que j'ai beaucoup de municipalités et de cultivateurs qui en font
la demande.
À ma grande stupéfaction, j'ai reçu une lettre
aujourd'hui du ministre des Transports me disant ceci - je crois que je ne suis
pas le seul, vous avez dû tous en recevoir, les députés de
comtés ruraux: "Dans le cadre du programme d'aide à
l'amélioration du réseau routier municipal, le ministère
des Transports entend octroyer, au cours de l'exercice financier 1981-1982, des
subventions aux municipalités pour les travaux de voirie sur
des rues et chemins de leur juridiction. Il est à remarquer que
les chemins à vocation agricole seront inclus dans ce programme et
qu'aucune aide gouvernementale n'y sera consacrée." J'espère que
le ministre n'était pas au courant hier de cette solution, parce qu'il
aurait induit la commission en erreur quand il nous a déclaré que
le programme allait être reconduit cette année. Je peux vous dire
que c'est un autre trou dans notre tranche de fromage, un autre trou qui va
être pas mal dur à accepter. J'appelle cela pratiquement de la
fausse représentation.
M. Garon: M. le Président, question de
privilège.
M. Mathieu: Cela va me reposer un peu.
M. Garon: Ce serait facile de vérifier les propos que j'ai
tenus hier en commission parlementaire...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste une minute, M. le
ministre. Comme je suis debout, vos paroles ne sont pas enregistrées.
Vous aurez l'occasion de répondre lors de votre réplique. Vous
allez pouvoir le faire à un autre moment.
M. le député de Beauce-Sud, il vous reste deux
minutes.
M. Mathieu: M. le Président, je voudrais juste dire un mot
des programmes administrés par le ministère et
subventionnés par le gouvernement fédéral: Assistance et
installation de systèmes de drainage à la ferme, 21 000 000 $.
Cela fait bien que le ministre annonce cela. Il ne nous dit pas que 13 500 000
$ viennent du fédéral - il ne veut pas nous le dire - dans
l'installation de systèmes de drainage de ferme. Je prends votre cahier
des crédits.
M. le Président, j'espère que vous tenez compte du temps
qu'ils me font perdre en questions de privilège et en toutes sortes de
choses. Je me fie à vous.
Le Vice-Président (M. Jolivet): D'une façon ou de
l'autre, M. le député, il vous reste une minute.
M. Mathieu: Je voudrais faire état du vieillissement des
emprunteurs à l'Office du crédit agricole. Alors qu'en 1977-1978
il y avait 42% entre 18 et 24 ans, maintenant il y en a 36,9% au dernier
exercice. Alors qu'il y en avait 11,6% qui avaient 35 ans et plus, il y en a
maintenant 17,2%; vous voyez un veillissement.
En ce qui concerne les prêts, il y en avait en 1977-1978, 38,9%,
c'était pour s'acheter des terres; en 1979-1980, 23%. Il y en avait 4,2%
qui empruntaient pour consolider leurs dettes, il y en a maintenant 12,5%;
trois fois plus. Vous voyez la clientèle a vieilli, alors qu'on devrait
s'adresser davantage à la jeunesse agricole.
Je peux vous le mentionner. Ce que je trouve regrettable, c'est que le
Parti québécois exploite les agriculteurs et qu'il exploite les
jeunes. Avant, nous étions un peuple de porteurs d'eau et de scieurs de
bois; avec vous, messieurs, nous devenons un peuple de signataires de
pétitions et de porteurs de pancartes.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Mathieu: En guise de conclusion, il y a eu un jugement
célèbre de rendu aujourd'hui. La semaine dernière j'ai dit
au ministre du Travail, en commission parlementaire: Votre règlement de
placement est immoral et illégitime, même s'il est légal.
Aujourd'hui, la Cour supérieure vient de juger qu'il est illéqal
et j'espère qu'elle va l'abolir, pour aider les jeunes.
Nos copains d'en face, quand ils s'adressent aux jeunes, les jeunes
disent: Comme vous avez une belle image, comme vous avez un beau langage et
eux, en riant dans leur barbe, répondent: C'est pour mieux vous
exploiter. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. le ministre, selon l'entente, vous avez un maximum de 30 minutes.
M. Jean Garon
M. Garon: Merci, M. le Président. Cela me fait toujours
plaisir d'entendre le député de Beauce-Sud, parce que je sais
qu'il est sincère et qu'il exprime ses convictions. On peut diverger
d'opinions avec lui, mais contrairement à son collègue, le
député de Brome-Missisquoi, lui, au moins, on sait qu'il croit
à ce qu'il dit, tandis que le député de Brome-Missisquoi,
quand il parle, on n'est jamais convaincu pour qui il parle. Habituellement, il
est connu pour avoir le coeur du côté de son portefeuille. (20 h
50)
On m'a dit qu'hier il a fait un grand discours pour dire que j'avais un
bon tour de taille. Savez-vous, ça ne prend pas une 500 watts pour
s'apercevoir de ça. Franchement, on n'a pas besoin du
député de Brome-Missisquoi dans cette Chambre pour
réaliser cette réalité. On aura l'occasion de voir, au
cours des années qui viennent, deux députés, le
député de Beauce-Sud, qui va s'initier tranquillement à
son rôle et il va y avoir le député de Brome-Missisquoi qui
va essayer de prendre sa place.
Par exemple, hier, en commission parlementaire, il a pris tout le temps.
Le député de Beauce-Sud n'a pas pu dire un seul mot, ce fut
constamment le député de Brome-Missisquoi qui a pris la
parole.
M. Mathieu: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Monsieur, si c'est,
à ce moment-ci, nonobstant le fait que vous avez déjà
prononcé un discours, une vraie question de privilèqe, M. le
député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: M. le Président, je ne peux pas laisser le
ministre induire cette Chambre en erreur. J'ai participé à la
commission parlementaire. Je suis d'accord et j'admets que le
député de Brome-Missisquoi a parlé plus que moi, mais j'ai
également participé pour pas mal de temps à la commission.
Dire que je n'ai pas dit un mot, c'est absolument faux, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Garon: M. le Président, je pourrais retirer les mots
"il n'a pas dit un mot"; il a peut-être dit quelques mots, mais ces
mots-là lui étaient soufflés par le député
de Brome-Missisquoi.
Des voix: Ah!
M. Garon: C'est pour cela que j'ai peut-être
généralisé en disant qu'il n'avait pas dit un mot.
Une voix: Quelques mots.
M. Garon: Je vais vous décrire le genre de
député qu'est le député de Brome-Missisquoi. Il y
avait des députés de son parti en arrière de la salle,
entre autres le député de Huntington, qui discutait de la
question des producteurs de porcs. Il a fait de grandes sorties pendant deux
heures, deux heures et demie, pour nous dire qu'il y avait eu un gel au mois de
février dans les vergers et qu'il y avait eu d'autres gels de bourgeons
au printemps, au moment de la floraison. Comment se fait-il que le ministre de
l'Agriculture n'avait pas encore fait quelque chose, alors que le gel datait de
février? Je me sentais un peu malheureux, car je me disais: C'est vrai
qu'on ne nous a pas cité de cas, qu'on n'a rien fait encore et qu'il n'y
a pas eu de représentations. C'est drôle, quand il y a des
malheurs comme celui-là, les cultivateurs nous font des
représentations. Je prenais mon biscuit sans trop parler, en me disant:
Cela doit être vrai, ils sont là. Pendant deux heures et demie, le
député de Brome-Missisquoi a dit:
Comment se fait-il que vous n'ayez rien fait contre le gel de
février? Quand la séance s'est terminée vers minuit,
minuit et demi, j'ai parlé avec les producteurs agricoles. Ils m'ont
dit: M. Garon, vous ne pouviez pas être au courant; on n'était pas
au courant nous-mêmes à ce moment-là parce que...
Regardez le genre de demi-vérité. Le député
de Brome-Missisquoi a fait carrière là-dessus. C'est sans doute
l'homme qui a coûté le plus cher aux agriculteurs du
Québec.
M. Bourbeau: Question de privilèqe, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M.
le député de Laporte, j'ai cru comprendre que vous vouliez vous
lever sur une question de privilège.
M. Bourbeau: M. le Président, le ministre devrait avoir la
décence d'attendre que le député de Brome-Missisquoi soit
ici pour l'accuser.
Des voix: À l'ordre!
M. Charron: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: Si, pour parler de quelqu'un ici, il fallait avoir la
décence d'attendre que les 37 députés libéraux qui
ne sont pas ici arrivent ici, on ne pourrait jamais parler en cette
Chambre.
Des voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Garon: Je dirai en toute décence que je réplique
un peu au député de Brome-Missisquoi, qui a parlé hier
soir en mon absence et qui a tenu ces propos. Comme la session sera
peut-être ajournée demain et que je n'aurai pas la chance de lui
répondre, je le fais immédiatement.
Une voix: Très bien.
M. Garon: Alors, les producteurs agricoles sont venus me voir
après et ils m'ont dit: M. Garon, c'est vrai qu'il y a eu un gel en
février, mais on ne pouvait pas voir à ce moment-là quels
étaient les dommages résultant de ce gel. C'est seulement lors de
la floraison au printemps, dans la troisième semaine de mai - je parle
de la région la plus chaude du Québec, dans le bout du
comté de Huntingdon - qu'on a pu se rendre compte que plusieurs pommiers
ne bourgeonnaient pas. À ce moment-là, on s'est
rendu compte qu'il y avait eu des dommages dus au gel, mais vous ne
pouviez pas être au courant, parce qu'on était en train de se
rendre compte de ces problèmes et on aimerait bien avoir votre aide.
J'ai dit: C'est bien évident qu'on va vous envoyer nos gens. Les gens de
l'assurance-récolte savent qu'il y a eu un gel en février.
Maintenant, on sait qu'il y a eu, aussi pour les pommiers qui ont fleuri, un
certain gel de bourgeons au printemps. On va analyser cela et, s'il y a quelque
chose à faire, on va le faire pour vous donner un coup de main. Mais
pourquoi faire perdre le temps du monde en faisant croire qu'on aurait dû
deviner qu'il y avait des dommaqes alors que les producteurs eux-mêmes,
les propriétaires des pommiers, ne pouvaient pas le savoir avant le
printemps? C'est un genre de demi-vérité. C'est vrai qu'il y
avait eu un gel, mais ce n'est pas vrai qu'on pouvait connaître les
dommages. C'est ce sur quoi le député de Brome-Missisquoi a fait
carrière.
Dans la plupart des comtés ruraux aujourd'hui, les
députés du Parti québécois me disaient qu'ils
avaient entendu: Si vous votez libéral, vous avez une chance d'avoir le
député de Brome-Missisquoi comme ministre de l'Agriculture. Vous
avez vu le résultat?
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Garon: Le député de Brome-Missisquoi peut parler
aussi souvent qu'il le voudra en cette Chambre, ce n'est pas moi qui vais
l'arrêter, je vais le laisser parler jusqu'au bout parce que je sais que
chaque fois qu'il ouvre la bouche, il fait perdre des partisans au Parti
libéral.
Il veut nous faire croire qu'il défend la veuve et l'orphelin. Je
l'ai vu, dans mon bureau, alors qu'il me présentait les gens autour de
la table, des gens qu'il représentait. Il disait à M. Untel:
Combien de cochons par année? 90 000. M. Untel, combien de cochons par
année? 60 000. M. Untel, combien de cochons par année? 35 000. M.
Untel, combien? 3000 par semaine. Cela faisait 156 000 par année. Il m'a
dit: M. Garon, c'est ça la production porcine au Québec, c'est
ces gens-là qui la font et c'est de ces gens-là que vous devriez
vous occuper.
Je lui ai dit: Comme ministre de l'Agriculture, ma principale
responsabilité est de m'occuper d'abord de ceux qui ont
spécifiquement besoin d'un ministre de l'Agriculture, les fermes
familiales, les petites entreprises ou ceux qui sont au niveau de la ferme
familiale. Les productions industrielles sont souvent capables de se
défendre par elles-mêmes. Ce n'est pas mon premier rôle de
défendre les productions qui appartiennent à des grandes
sociétés, mais plutôt de défendre les productions
des fermes familiales. Cela, les producteurs agricoles le savent. Au cours des
mois et des années qui viennent, nous aurons l'occasion d'en parler.
Maintenant, le député de Beauce-Sud parle du budget. Le
budget, dit-il, a commencé à pointer vers le bas et il y a des
trous dans le fromage. Je vous dirai une chose. Les trous dans le fromage,
c'était dans le temps du Parti libéral, quand la grande partie du
budget servait à payer des fonctionnaires. Il y avait, en 1976, dans le
budget du Parti libéral, 47,6% seulement qui étaient
distribués aux agriculteurs. Sous le gouvernement du Parti
québécois, en 1980, 61,7% du budget étaient
distribués aux agriculteurs ou aux entreprises agro-alimentaires.
Des voix: Bravo!
M. Garon: II faut savoir lire un budget. Le député
a dit, à un moment donné, qu'à certains endroits il y
avait eu des crédits périmés. C'est évident, il
peut y avoir des crédits périmés sur un budget d'un
certain ordre de grandeur. Il nous dit que c'est terrible d'avoir 13 000 000 $
de crédits périmés sur un budget de 360 000 000 $. Je vous
dirai que le Parti libéral avait 12 800 000 $ de crédits
périmés sur un budget de moins de 200 000 000 $.
Des voix: Ah! Ah! M. Garon: En 1975. Une voix:
C'est honteux.
M. Garon: En 1976, 22 900 000 $ de crédits
périmés, malgré toutes les dépenses faites pendant
le temps des élections. C'était un grand nombre de crédits
périmés. Pourquoi? Sur un budget d'une certaine ampleur, il y a
certains crédits périmés. Mais ce qu'il n'a pas dit, c'est
qu'il y avait eu une entente entre le ministre des Finances et le ministre de
l'Agriculture - il ne pouvait peut-être pas le savoir - qui faisait qu'en
supprimant 13 000 000 $ aux crédits pour certaines fins d'ajustement, on
allait chercher en même temps à peu près le même
montant en budget supplémentaire à l'automne. Ce qui veut dire,
au fond, que le budget a été entièrement
dépensé l'an dernier puisque l'éguivalent des
crédits périmés, on est allé le chercher en
crédits supplémentaires en novembre dernier. Il n'y a pas de
crédits périmés, véritablement.
L'efficacité du ministère, je le disais aussi, s'est
accrue considérablement. De plus en plus de paiements, de transferts
sont faits aux agriculteurs. Je ne veux pas dire que c'est de l'argent mal
dépensé quand on paie des fonctionnaires, mais ce qu'il faut, au
fond, c'est que les frais administratifs diminuent considérablement.
(21 heures)
Un exemple: On parlait de la fusion de l'assurance-récolte et de
l'assurance-stabilisation des revenus. Aujourd'hui, on va abaisser
considérablement le pourcentage les frais administratifs. Les frais
administratifs, qui étaient autour de 27% par rapport au dollar
dépensé, vont baisser à 21% par le résultat de la
fusion. Cela veut dire quoi? Cela veut dire une plus grande efficacité
administrative. Cela veut dire qu'une plus grande partie du budget va aux
agriculteurs plutôt qu'à payer du fonctionnement interne. Quand le
député de Beauce-Sud parle de coupures de l'aide à la
production. C'est évident qu'il y a certaines choses qu'on a
coupées parce que certains programmes ont rempli leur objectif. Quand on
a coupé l'aide à la tubulure, il était le premier à
dire qu'on avait trop développé les tubulures. Est-il
fâché parce qu'on les aurait trop coupées cette
année? Il est évident que si on ne donne pas les mêmes
subventions aux tubulures en 1981-1982, il y a une coupure pour l'aide à
la tubulure. Quand on dit les silos à la ferme, il y a la subvention. On
a négocié une entente avec le gouvernement fédéral,
c'est vrai qu'on a négocié une entente. On le cachait.
Après ça, il nous dit que c'est marqué dans le rapport. Si
c'est dans le rapport, c'est parce qu'on ne le cache pas.
On ne le cache tellement pas que c'est écrit sur les
chèques que chacun des agriculteurs reçoit, parce que le
fédéral le demandait. Mais ce qu'on n'a pas pu écrire,
parce qu'on pensait qu'on serait payé en temps, c'est qu'on ne pensait
pas qu'on serait obligé de financer l'affaire à 20%. Alors, les
33 500 000 $ sont dépensés. Mais on a reçu combien de
paiements jusqu'à maintenant du fédéral? On a
administré le programme, on a payé entièrement
l'administration. On a reçu en 1978, 6 700 000 $, en 1979, 6 700 000 $
et en 1980-1981, 8 500 000 $. On n'a reçu actuellement que 21 900 000 $
sur les 35 000 000 $ et on continue à financer le programme au taux
actuel d'intérêt. Cela veut dire que c'est une bonne partie
maintenant du montant qui vient du gouvernement du Québec pour financer
ce programme. Mais ce qu'il n'a pas dit non plus, c'est que les 33 500 000 $
qu'on a négociés avec le gouvernement d'Ottawa, les
libéraux avaient essayé de les négocier lors de la coupure
de subventions au transport des céréales de l'Ouest canadien vers
le Québec, coupures de 6 700 000 $ sur 10 000 000 $ par le gouvernement
fédéral pour le transport des céréales vers le
Québec.
Le Parti libéral n'avait pas été capable d'aller
chercher l'équivalent de la coupure du gouvernement
fédéral alors que le gouvernement du Parti
québécois est allé chercher l'équivalent de la
coupure pendant cinq ans pour aider l'entreposage des céréales.
Aujourd'hui, le programme a été utilisé
entièrement. Les montants ont été utilisés
entièrement. J'ai eu le mandat du Conseil des ministres du Québec
de renouveler l'entente si le gouvernement fédéral le veut bien.
Nous sommes prêts à renouveler l'entente. On ne peut pas dire
qu'on n'a pas d'agrément, qu'on n'est pas aimable, on est prêt
à resigner encore une entente si on veut. Mais je ne sais pas s'ils vont
vouloir. Nous autres, on veut. On est prêt à signer.
La même chose pour les silos à la ferme. On est prêt
à signer l'entente comme avant. Je suis prêt à signer une
entente aussi avec le gouvernement fédéral, c'est quelque chose,
pour le programme aux chômeurs.
Le Québec paie pour les assistés sociaux, parce que c'est
sa responsabilité, les assistés sociaux. On n'a pas dit
grand-chose non plus quand le gouvernement fédéral rend
l'assurance-chômage plus difficile et nous passe des chômeurs qu'il
ne paie plus et qui doivent être payés par l'assistance sociale au
Québec. 60 000 000 $ qu'il nous a passés de cette façon,
l'an dernier. On dit: Parfait, si vous nous en passez comme ça on ne
peut pas payer pour tout On a seulement 50% des taxes qui viennent à
Québec. À ce moment, on est d'accord pour payer pour l'assurance
chômage, pour le chômage, pour subventionner les agriculteurs qui
engagent les chômeurs, mais le gouvernement fédéral devra
payer parce que c'est lui qui va épargner l'argent à Ottawa avec
l'assurance chômage. De la même façon qu'on est prêt
à payer quand il s'agit d'assistance sociale. Si un cultivateur engage
un assisté social, il y a une subvention pour l'agriculteur payée
entièrement par le gouvernement du Québec. Si le gouvernement
fédéral est prêt à faire une entente avec le
gouvernement du Québec, j'ai le mandat qui date d'aujourd'hui - c'est
une primeur - du Conseil des ministres, cela a été
décidé aujourd'hui, d'aller négocier avec le gouvernement
fédéral si le gouvernement est prêt à payer sa part
pour les chômeurs, c'est à lui que cela revient les
chômeurs, en vertu de la Constitution, et il a fait changer la
Constitution en 1941 pour l'inclure. Je ne me rappelle pas l'article mais il y
a un a) à côté du chiffre. 91-a. Cela a été
changé sous Godbout. Godbout a fait une entente avec le
fédéral et c'est maintenant de juridiction
fédérale. On est prêt à faire une entente par
laquelle le gouvernement fédéral va dire: Pour chaque fois que
vous allez faire engager un chômeur par un agriculteur, vous allez verser
une subvention étant donné que je vais épargner l'argent
à l'assurance- chômage, je vais vous transférer l'argent
pour que vous payiez l'agriculteur. On est d'accord à 100% pour signer
une entente comme celle-là. M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M.
le ministre.
Maintenant, concernant la relève. Vous avez remarqué que
le député de Beauce-Sud, - je ne lui en veux pas, je suis
persuadé qu'il s'est laissé entraîner par son
collègue, le député de Brome-Missisquoi - quand il est
arrivé à la relève, a parlé en pourcentage. Il n'a
pas parlé en chiffres absolus. Mais, quand il a parlé du
crédit agricole, avez-vous remarqué qu'il a parlé en
pourcentage? Je vais vous dire pourquoi. Je vais vous donner les chiffres
absolus. En 1976, dans le crédit à long terme, 1439 prêts,
du temps des libéraux. En 1977, 1461. On n'a pas eu le temps de faire
les amendements. C'est resté à peu près pareil, mais
là, on a fait des amendements au cours de l'année 1978 et vous
voyez le résultat tout de suite. En 1978, 2160. En 1979, - nos mesures
commencent à faire effet - 3236...
Des voix: Ah!
M. Garon: ...et en 1980, 3423.
Des voix: Oh!
M. Garon: Cela veut dire quoi? En 1976, 1439; en 1980, 3423, deux
fois et demie plus. Il ne parlera plus en chiffres absolus. Il va parler en
pourcentage, c'est évident. 10% de 1439, cela fait quoi? 143, mais 10%
en 1980, quand la base est 3423, cela fait quoi, 10%? Cela fait 342. Alors, il
a dit: 10%, 10%, cela n'a pas augmenté. C'est faux! Cela a
doublé, quand on dit 10%, c'est resté le même pourcentage.
Pourquoi? C'est pour cela que je parle rarement en pourcentage, parce que je me
rappelle du temps où on disait que les Chinois faisaient de fausses
statistiques. Ils disaient que la production après la révolution
chinoise, avait augmenté de 100% en Chine et qu'elle avait
augmenté de 10% aux États-Unis. Vous voyez comment c'est fort la
Chine. Excepté qu'en Chine, elle avait passé de 100 000 $
à 200 000 $ et aux États-Unis, elle avait peut-être
passé de 8 000 000 $ à 9 000 000 $. Les chiffres, il faut faire
attention à cela. Il ne faut pas faire n'importe quel pourcentage. Cela
peut ne vouloir rien dire, si on ne prend pas la même base, mais, si on
regarde, c'est un changement complet.
En 1977, 1114 jeunes s'établissent.
M. Mathieu: Des jeunes de cinquante ans.
M. Garon: Non, non, la mise en valeur, les primes à
l'établissement. En 1978, 1052; en 1979, 1377; en 1980, 1437.
Voyez-vous? Cela est passé, en 1977, de 1114 à 1437 en 1980, soit
une augmentation de 323 cette année-là, si on compare, 323 de
plus. Si c'était la moyenne qu'on pouvait garder au cours des
années, en disant que la vie d'un agriculteur, c'est environ 30 ou 35
ans, cela veut dire quoi, à ce moment-là? Cela veut dire 10 000
cultivateurs de plus au Québec. Vendredi, je vais donner une
conférence de presse sur un sujet intéressant. Je vais avoir
l'occasion de souligner... J'ai fait comparer des chiffres de 1976, de 1980 et
de 1981 dans différentes régions. Amenez-en des listes de
producteurs agricoles. Il y a des régions où cela passe de 600
à 700, d'autres réqions où cela passe de 800 à 937,
des chiffres comme cela, une augmentation du nombre de producteurs agricoles,
on l'a sur nos listes.
Les productions de producteurs agricoles augmentent au Québec,
parce que des gens s'établissent et les chiffres ne trompent pas. Les
chiffres sont révélateurs, quand on les regarde. À moins
que le monde agricole aime souffrir, s'il avait vraiment pensé que le
gouvernement actuel lui nuisait, il n'aurait pas voté pour. Il a dit: On
aimerait que vous continuiez dans le même sens, mais, dans le sens de la
relève le 50 000 $, le 50 000 $ sans intérêt.
J'espère qu'on va pouvoir présenter ce projet de loi à
l'automne. C'est mon intention de le présenter à l'automne. Cela
va être une mesure vraiment utile. Quand vous dites que vous avez
reçu beaucoup d'appels téléphoniques, c'est parce que
c'est bon.
Des voix: Ah! Ah!
M. Garon: Autrement, vous n'auriez pas reçu d'appels
téléphoniques. Je le sais, les gens du crédit agricole me
disent: On reçoit des appels téléphoniques, vous n'avez
pas d'idée, M. Garon, pour demander quand cela commence. C'est parce que
les gens sont contents. Pourguoi? On s'est posé des questions. Qu'est-ce
qui serait bon pour les agriculteurs? Quand le député des
Bois-Francs dit qu'une ferme aujourd'hui, cela peut aller jusqu'à 1 000
000 $, c'est vrai qu'une ferme laitière peut aller jusqu'à 1 000
000 $ et on a vu des fermes qui se sont vendues. On a vu surtout cela quand
cela s'est vendu à des immigrants européens. Souvent, le prix
était indiqué dans le journal. Les gens savent que cela peut
valoir jusqu'à 1 000 000 $, mais ce n'est pas la ferme moyenne au
Québec, 1 000 000 $. Cela dépend des types de production et un
jeune qui s'établit ne peut pas commencer, ne peut pas espérer
s'établir en agriculture au même niveau que celui où son
père termine sa vie.
II commence. Habituellement, quand vous commencez votre vie, vous n'avez
pas le même revenu que quand vous êtes rendu à 40 ou 45 ans,
quand vous vous êtes établi.
(21 h 10)
Vous avez de nouvelles productions qui
se développent au Québec, et ce sont des jeunes qui
s'établissent. Regardez la production de l'agneau.
Là, on va aider un groupe de jeunes -c'est encore une primeur, je
me dépêche de l'annoncer parce que le président du Conseil
du trésor va l'annoncer; il est content, ce n'est pas une coupure -
à faire venir des brebis de la Nouvelle-Zélande. Il y a une
pénurie de brebis au Canada et ces jeunes sont allés en
Nouvelle-Zélande, avec des experts, pour sélectionner des brebis
de très bonne qualité. S'ils font venir le chargement complet,
ils ont un meilleur prix. On va les aider pour ramener le prix au niveau du
prix canadien ou du prix québécois - c'est à peu
près le même prix - afin de développer la production de
brebis qui vont permettre le remplacement d'autres brebis par des croisements
et avoir un troupeau de base beaucoup plus développé. Ce sera
dans le Bas-Saint-Laurent, dans les Basques ou la Neigette... dans les Basques.
C'est un endroit où il va y avoir une reproduction et on va pouvoir
commencer à s'approvisionner en brebis.
Le député de Beauce-Sud a raison, quand un jeune arrive,
il est enthousiaste, il présente son projet. Je dirais que ce qui est
important, quand on voit un jeune qui veut s'établir, c'est son
dynamisme, sa personnalité; ce n'est pas l'argent, parce que c'est
évident qu'il n'a pas d'argent. Quand on est jeune, on n'a pas d'argent;
souvent, quand on est vieux, on n'en a pas non plus. Quand on est jeune, on n'a
pas d'argent, mais j'ai rencontré souvent des jeunes qui arrivent avec
des projets. Quand ils viennent me voir ou demandent à me rencontrer,
souvent, je suis le dernier, ils disent: M. Garon, si vous dites non, c'est
fini, l'affaire. Je les regarde comme il faut, il y en a, parfois, qui sont
pleins de confiance, pleins d'assurance, prêts à fournir un effort
considérable, je vous dis bien franchement que dans le projet, souvent,
75% de la décision, c'est la détermination des gens qui
présentent leur projet. S'ils sont prêts à travailler et
à faire un effort, c'est ça qui compte beaucoup plus que
l'argent, à la condition que le projet ait du bon sens.
C'est pour cela que les 50 000 $ vont jouer un rôle
considérable. Ils vont commencer dans des productions nouvelles qui
demandent moins de capitalisation. Si un jeune pense à s'établir,
à moins d'avoir travaillé un certain nombre d'années sur
une ferme, c'est difficile de s'établir immédiatement avec un
gros troupeau laitier, ça coûte trop cher. Il y a toutes sortes de
productions dans lesquelles on peut s'établir pour commencer et,
à un moment donné, développer son capital pour pouvoir
agrandir, consolider sa ferme. C'est pour cela que vous voyez les
consolidations augmenter considérablement dans les statistiques. C'est
normal parce que les fermes, aujourd'hui, sont plus grosses qu'auparavant. Au
Québec, les fermes ne sont pas très grandes. Le
député de Beauce-Sud a souvent dit que c'était trop gros.
Par rapport aux fermes de l'Amérique du Nord, le Québec a des
fermes qui sont assez petites, elles ne sont pas grandes comparativement
à ailleurs, pas très grandes comparativement à l'Ontario,
et toute petites comparativement à l'Ouest. C'est évident que ce
n'est pas le même genre d'agriculture. Mais c'est normal, ça fait
partie du progrès parce que aujourd'hui, il y a plus de machinerie et on
peut avoir un meilleur rendement.
Je dirais que le résultat, au fond, des politiques que le
gouvernement a adoptées, on le voit dans les chiffres pour
l'année 1980. En 1966, le taux d'autosuffisance au Québec
était de 65%; il était baissé à 51,5% en 1976,
baisse graduelle sous le Parti libéral; pas seulement sous le Parti
libéral, mais principalement sous le Parti libéral. Quand le
député de Beauce-Sud dit que, de 1970 à 1976, c'a
été le progrès dans l'agriculture, non. Cela
été le marasme dans l'agriculture, c'a été
véritablement l'âge de pierre de l'agriculture. D'ailleurs, je
pense bien que le député de Brome-Missisquoi va rester dans le
Parti libéral parce que c'est le seul parti dont il n'a pas, encore fait
le tour. Au début, il s'est dit péquiste, après, il est
entré dans l'Union Nationale. Je l'avais dit, d'ailleurs, un jour
à l'Union Nationale: L'homme qui va vous nuire le plus, c'est cet homme.
C'est la même chose pour les libéraux. Vous verrez, dans le milieu
agricole, l'homme qui va nuire le plus au Parti libéral, je le dis
d'avance, ce sera son député de Brome-Missisquoi parce qu'il
défend des intérêts contraires à ceux de l'ensemble
des agriculteurs.
Alors le taux d'autosuffisance était baissé sous les
libéraux jusqu'à 51,5% en 1976. Mais en 1980, il était
remonté à 61,5%. Cela veut dire qu'on produisait 61,5% de ce
qu'on mangeait. On prévoit encore l'augmenter au cours des années
quatre-vingt-dix. Le document Nourrir le Québec, qui n'est pas un
document politique, va montrer les chiffres qu'on pense atteindre.
En plus, pour la première fois sans doute de son histoire, en
1980, le revenu net des agriculteurs du Québec a dépassé
celui des producteurs de l'Ontario. Cela veut dire que les agriculteurs ont
fait plus de bénéfices au Québec en 1980 qu'en Ontario.
Malgré que le prix de la consommation n'a pas été plus
élevé au Québec que dans le reste du Canada, au contraire,
c'est au Québec où c'est à peu près le meilleur
marché. On ne peut pas enlever cela de la réalité. Ce ne
sont pas mes statistiques à moi, ce sont les chiffres du
fédéral qui nous disaient en décembre dernier que
l'Ontario avait un revenu net de 585 000 000 $ et le
Québec de 600 000 000 $. Il y avait donc une augmentation.
Je ne peux pas dire qu'il n'y aura pas de problème. Il y a des
difficultés. La production du porc est une difficulté. Mais
actuellement, si on regarde l'ensemble du Canada, c'est une situation difficile
et il y a eu des efforts de faits par le gouvernement du Ouébec. Je ne
dis pas que le gouvernement fédéral n'a rien fait, il a fait
quelque chose. Sa loi l'obligeait. Aussi, quand le député de
Brome-Missisquoi disait hier que faire des programmes complémentaires...
j'ai des petites nouvelles pour lui, c'est ce qu'on a des programmes
complémentaires, parce qu'on n'a pas le choix. Je ne dis pas que c'est
une mauvaise chose, mais on n'a pas le choix, parce qu'il faut déduire
de la stabilisation que le fédéral paie, la stabilisation que le
provincial paie. Si on ne le fait pas, le fédéral ne paiera pas.
C'est cela que l'Ontario vient d'apprendre cette année. Moi, je l'avais
appris en 1977. À ce moment, il n'y avait pas de
précédent, parce qu'il n'y avait pas d'assurance-stabilisation
véritablement; cela commençait. La première province qui a
été pénalisée, c'est le Québec, en 1977.
J'ai agi en conséquence, mais en maintenant qu'il fallait avoir une
assurance-stabilisation, des revenus au Québec. Aujourd'hui, on a des
résultats. La province qui va s'en tirer le mieux - le prix du porc a
augmenté de 8 $ depuis un peu plus de deux semaines - si la
période se rétablit et on calcule qu'elle va se rétablir
au cours du mois de juillet, le prix va devenir encore plus profitable. Je suis
persuadé que parmi toutes les provinces du Canada, celle où les
producteurs s'en seront le mieux tirés sera la province de
Québec. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de difficulté.
Dans le sirop d'érable, il faut développer des
marchés. Nous sommes à travailler au développement des
marchés.
Dans le veau de grain, qu'est-ce que vous voulez, en 1978, il ne s'en
faisait pas de veau de grain au Québec. Les veaux partaient pour
l'Ontario et pour les États-Unis à trois ou quatre jours. Il n'y
en avait pas de politique. Aujourd'hui, on est rendu que l'an dernier on a fait
à peu près 10 000 veaux qui ont été
engraissés au Québec. Cette année, on pense faire entre 30
000 et 40 000 veaux qui vont se rendre à 400, 450 livres au lieu de les
vendre aux Américains à 100, 125 livres.
C'est évident que les structures de mise en marché ne sont
pas en place, il faut les créer, les structures de mise en
marché, à mesure que la production se développe. On ne
peut pas me reprocher de ne pas avoir de structures de mise en marché
quand on ne produisait même pas de veaux dans le temps des
libéraux. Des veaux lourds, ils n'en produisaient pas de veaux lourds.
On est en train de développer cette production, la production de veaux
lourds. On pense atteindre 100 000 veaux lourds, à un moment
donné, au Québec. Il va falloir organiser les structures de mise
en marché.
Quand est arrivé le plan de la pomme, les producteurs me disaient
hier: II va peut-être falloir penser à une agence de vente dans la
pomme. J'aurais aimé que le député de Brome-Missisquoi
soit là quand ils m'ont dit cela. Parce que le plus grand ennemi de
l'agence de vente dans les oeufs a été lui. Ils les a poursuivis
pendant quatre ou cinq ans, sans arrêt, ils les a traînés
devant tous les tribunaux qu'il y avait au Canada, parce qu'ils avaient fait
une agence de vente. Les gars de la pomme pensent faire une agence de vente.
J'aurais aimé devant les producteurs dans le fond de la salle, qu'il
soit là quand ils m'ont dit cela. Ils savent une chose ces producteurs,
quand ils ont des difficultés et quand ils veulent s'organiser pour
pouvoir néqocier leurs prix, ils savent qu'ils vont trouver un ami dans
le gouvernement actuel. Pourquoi? Parce que aujourd'hui, combien y a-t-il
d'acheteurs au Québec? Posez-vous la question, combien il y a
d'acheteurs? Il y a des acheteurs, il y a six ou sept grands magasins à
succursales au Québec, c'est cela les acheteurs au Québec. Quand
vous avez compté Steinberg, Provigo, Métro-Richelieu, la
Fédération des magasins Co-op, les Épiciers-Unis et
guelgues autres, ce sont les acheteurs. Vous voudriez que les cultivateurs
soient 1000, 2000 à se chicaner entre eux pour établir les prix
qu'ils vont vendre. (21 h 20)
Nous, on dit: Non. Les producteurs ont le droit de se regrouper, quoi
que fassent les économistes farfelus d'Ottawa, qui ne connaissent rien
au secteur agricole. Les aqriculteurs ont le droit de se regrouper à
1000 ou 2000 pour dire: On va négocier face aux entreprises à
succursales et on va établir des prix, parce qu'autrement ils vont se
faire manger tout rond, en 1981, alors qu'il y a de grandes entreprises
à succursales en face d'eux. Le gouvernement actuel n'est pas
fâché, au contraire, et les cultivateurs savent que, quand ils se
regroupent pour négocier des prix avec les acheteurs, on aime ça;
oui, on aime que le cultivateur soit sur un pied d'égalité avec
celui qui achète ses produits...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Garon: ... si nos producteurs ne se regroupent pas, ils ne
pourront pas y arriver.
M. le Président, je vais terminer en disant un mot "dans le
poisson", parce que le député de Beauce-Sud m'a dit que je
n'avais pas parlé "dans le poisson".
Dans le poisson - on vient d'avoir des
élections, le député de Duplessis est ici, à
côté de moi, le député de Gaspé est un peu
plus loin, ainsi que la députée des Îles-de-la-Madeleine et
le député d'Ungava, je peux vous dire que ce qu'il y a de mieux
à voir, c'est la confiance du territoire maritime dans le gouvernement
actuel. Cette confiance, on va continuer à la mériter parce qu'on
vient de rétablir à Grande-Rivière un parc industriel qui
a été vide pendant treize ans. En 1968, les libéraux, par
une entente fédérale-provinciale, ont fait un parc industriel
à Grande-Rivière; pas une usine pendant treize ans, le parc est
resté tout seul. D'un coup sec...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Garon: ... on annonce deux constructions et je vais avoir
l'occasion de lever deux pelletées de terre au cours des prochains jours
ou des prochaines semaines, je vais y aller une fois par usine.
Une voix: Deux pelletées d'eau!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, s'il vous
plaît:
M. Garon: Je termine, M. le Président. Maintenant, un
joyau de la flotte québécoise dans le domaine des pêches,
le Christina Logos, vient d'appareiller pour les côtes du Labrador, pour
la Terre de Baffin, pour aller y chercher de la crevette. Jamais auparavant des
pêcheurs québécois n'étaient allés y
pêcher. C'étaient les étrangers, les Russes et les
Japonais, qui péchaient là. On a maintenant deux permis, ils sont
utilisés, et on pêche sur les côtes du Labrador et à
la Terre de Baffin. Si votre amitié avec Roméo Le Blanc à
Ottawa permet qu'on ait plus de permis pour le Québec et qu'on continue
à pêcher sur ces côtes, on va les utiliser pour pêcher
dans l'Atlantique du nord.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. M. Charron:
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant: M. le leader
du gouvernement.
M. Charron: Je m'excuse auprès de Mme la
députée. Je voudrais proposer, puisqu'il y a trois avis
d'intervention s'adressant au même ministre, si c'est possible, que les
trois intervenants puissent enchaîner ce qu'ils ont à dire et que
le ministre leur donne une réponse commune.
Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a deux
interventions.
M. Charron: C'est vrai, puisqu'un député s'est
désisté.
Le Vice-Président (M. Jolivet):
D'accord, ce sera Mme la députée de
Jacques-Cartier ensuite le député de
Gatineau et, finalement M. le ministre. Mme la
députée.
Education Mme Joan Dougherty
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Comme on dit en
anglais, "it is a hard act to follow", celui du ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
J'aimerais franchement vous dire que j'ai assisté à
plusieurs commissions parlementaires et j'ai été un peu
déçue parce que j'ai trouvé que les questions y
étaient abordées d'une manière très superficielle.
L'approche globale et théorique du gouvernement n'a pas réussi
à répondre à des questions réelles avec lesquelles
le milieu local est au prise tous les jours.
Mr. Chairman, I first want to say that I have been disappointed in the
manner in which the government has approached the budget cuts because my
overall conclusion is that the theoretical and global way in which the
government has approached the budget is really almost indifferent to the
reality with which our local institutions, our local school boards and our
local communities are struggling to meet the needs of the students that they
are trying to serve. For many hours on end, I heard long theoretical
discussions about the quality of education, the quality of our teachers, the
need for all students to be accessible to education, the need for improved
second language learning, the importance of a program to "aider les milieux
défavorisés", to reinforce the importance of services to
students, a personalized climate in the schools and so on, all of which I agree
with, all of which anybody in education agrees with. But when it comes to the
problems that the local milieux are facing, either the Minister is naïve
or the government is unaware of the realities of the local milieux, because to
every problem, to every budget cut, the answer is "arrangez-vous", organize
your priorities. You have flexibility and autonomy, get your act together. You
have the wherewithal to serve the community. It is only a matter of local
decisions.
Mr. Chairman, that is not the way it is. I want to talk about three
areas which are of tremendous importance to me, having been involved very much
in school boards and the problems that education has been facing in the local
milieux for a number of
years. I want to talk about three thinqs which were discussed only
superficially in the parliamentary commissions, and when they were discussed,
the real nitty-gritty of the problems was not addressed at all.
The first area concerns the budgetary rules for school boards. Now, the
budgetary rules may not sound as though they are very important but, in fact,
they are absolutely key to the possibilities of school boards to meet the real
needs of their students. The government has introduced a new kind of regime
with respect to the financing of school boards last year, and again this year.
It is a closed budget. It is a budget which, for the first time, allows the
government to know what the expenses of the government will be. That is a step
forward and I think in theory, it is good because the 500 000 000 $ hole that
was discovered last February was not the fault of the school boards. It was
because there was a lag in the realization by the government of amounts of
money that were being spent in education in an open budget system. Now, we have
a closed budget.
From the government's point of view, they know the amount of money that
is going to be spent. But the problem is, as it appears to me, that the
government sees this closed budgetary system as a panacea. They are saying:
"Okay, boards - I am using an analogy to make things clear - in the past, you
have had 1 $ which was compartmentalized according to government rules to be
used for specific purposes, now, you have 0,75 $; do what you want with it."
And the government is sayinq that is decentralization, that is autonomy and
flexibility. I think it is a false concept and the closed budget is no panacea
as far as the people at the local receiving end are concerned. (21 h 30)
First of all, the boards must pay the teachers the salaries that are
agreed to in the provincial agreements. The problem is that there are all kinds
of difficulties for school boards and they vary from school board to school
board. Some of them cannot meet the conditions of the agreements that were
agreed to at the provincial level in order to provide enough teachers to fulfil
the needs of the contract. The indexation, from year to year, the aging factor
that is applied and the changing profile of the school board in relation to how
many primary, how many secondary, how many special education children. These
things change every year so there are a lot of problems with the base. So what
I am saying is that regarding the base amounts that are being provided in those
budgets, there are a lot of questions that need to be asked and a lot of
ajustments that need to be made.
The second problem in the budgetary rules is the commitments that have
been made to the teachers in terms of the security of employment. The
government made commitments in the provincial negotiations for the security of
employment, but because the government has admitted that they cannot afford
those commitments, a large proportion of these are being passed on to the
school boards. School boards are being reguired to use surplus teachers for
substitution. Now, in some school boards, it works, the 70% of the surplus cost
are realistic, but in other school boards, it is not. It depends on the area of
the school board, the distance between schools, the different languages that
are being tauqht and so on.
What I am saying is that theoretically, the theoretical global approach
of the government does not make sense when it comes to the local application of
those reguirements. What does that mean? It means that at the local school
board level, the school boards are left with three choices since they have to
pay the teachers, they have to pay the costs represented in the contract. So,
their first choice, by necessity, is the non-teaching personnel. What can the
school board cut? They can cut pedagogical development, people, people that are
developing programs to respond to the new "régime pédagogique" of
the government; they can cut liaison officers and parent advisers that are
trying to animate and relate to parents, so the parents can be involved
according to bill 71. They can cut psychologists, they can cut quidance people
who are trying to advise teachers so that they can integrate...
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Madam, I am sorry, your time is already finished.
Mme Dougherty: My time is up?
Le Vice-Président (M. Rancourt): Only one minute more,
please.
Mme Dougherty: OK, all right. They can cut the very services that
are the priority of the government. They can raise taxation which is limited,
because of bill 57, and requires a referendum now, which is very difficult to
implement, or they can raise fees to parents, a sort of "ticket
modérateur" in education.
What I am saying is that the theoretical global approach to the budget
cuts in education on the part of the government does not match the reality and,
in fact, undermines the very priorities that the government is promoting in
terms of education.
Mr. Chairman, I understand that I am over my time but what I would like
to
suggest is in relation particularly to the teachers contract which has
been agreed to and which the government itself has touted as the biggest
problem in the cost of education. I would like to suggest to the government
that it consider a cost- benefit study, on the value of the educational dollar
that is being spent in Québec in relation to other provinces, because I
think we are way out of line. If the biggest problem is there and if the
biggest cost is there, I would suggest to the government that we undertake a
cost-benefit study of the value of our educational dollar and see where it is
going. I think it will give us some clues as to where we should go in the
future so that we can get the best value for our dollar in education. Thank
you, Mr. Chairman.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Merci, M. le Président. La semaine
dernière, j'avais guestionné le ministre de l'Éducation au
sujet de certaines nominations au sein du conseil d'administration du
cégep de l'Outaouais. Si je choisis ce soir de discuter de ce sujet,
c'est que la situation que j'ai l'intention de décrire s'est produite
après l'étude des crédits du ministère de
l'Éducation. Compte tenu de la fin des travaux de la session demain, il
sera probablement impossible de guestionner le ministre de l'Éducation
au cours de la période de questions normale. J'aimerais obtenir les
informations que, sans doute, le ministre me fournira ou voudra bien me fournir
immédiatement après mon intervention.
La semaine dernière, le ministre avait allégué les
velléités de ses responsabilités ministérielles
pour expliguer un retard de quatre mois à confirmer la nomination de
trois parents anglophones au sein du conseil d'administration, qui avaient
été élus à une réunion
régulière des parents du cégep de l'Outaouais le 21
janvier dernier. Il avait également reconnu, je pense, que pendant ces
quatre mois où, nous disait-il, il n'avait pas eu connaissance de
l'élection des trois parents anglophones il avait quand même
procédé à la nomination de six représentants de
groupes sociaux et économiques à ce même conseil
d'administration. Or, quoi qu'il en soit, le ministre nous confirmait mercredi
dernier que les trois personnes en question seraient confirmées dans
leurs tâches, l'avaient même été la veille et,
effectivement, ces trois personnes ont siégé et ont pu voter lors
d'une assemblée que le conseil a tenue mercredi dernier.
Or, à cette réunion de mercredi dernier, le conseil
d'administration du cégep a voté une résolution par douze
voix contre quatre pour donner raison, et enfin donner raison, tant aux
étudiants qu'aux parents de ces étudiants anglophones du campus
Heritage, campus anglophone du cégep de l'Outaouais, qui
réclament depuis fort longtemps leur autonomie. En effet, le conseil
d'administration, par un vote de douze contre quatre, confirmait son intention
de voir le campus Heritage relever désormais du collège
régional Champlain. C'était l'essence de la résolution.
Or, les informations qui me sont parvenues hier sont à savoir que le
ministre aurait l'intention, s'il n'en a pas déjà
décidé, de surseoir à l'exécution de cette
résolution jusqu'au 1er janvier 1981. Je dis que ce sont les
informations que j'ai. J'espère que le ministre les niera et me dira
qu'au contraire le transfert de ce campus Heritage du cégep de
l'Outaouais au collège régional Champlain s'effectuera à
temps pour la rentrée, en septembre prochain. (21 h 40)
Étant donné le règlement de l'Assemblée
nationale, M. le Président, si le ministre n'est pas en mesure de nier
cette information, je voudrais qu'il nous explique alors quels sont les motifs
qui auraient pu ou qui pourraient l'inciter à ne pas confirmer, à
ne pas permettre l'exécution de cette résolution. Il
m'apparaît tout à fait dangereux, comme précédent,
que le ministre, à la suite d'un vote de 12 contre 4, à la suite
de représentations de je ne sais trop qui... Mais, me dit-on, il est
possible que certaines des personnes qui auraient contacté le ministre
pour le convaincre de ne pas laisser la résolution être
entérinée dans les faits seraient précisément deux
des membres du conseil d'administration qui ont voté contre la
résolution, mercredi dernier. Je sais également, parce que les
journaux en ont parlé, que la Société nationale des
Québécois de l'Outaouais s'est opposée, avant même
que le vote au conseil d'administration ne soit pris, à ce que le campus
Héritage ne relève plus du cégep de l'Outaouais. Elle
avait même indiqué qu'il serait souhaitable et peut-être
même essentiel à leurs yeux qu'on fasse une étude de
l'impact socioculturel, de l'impact linguistique sur la communauté de
l'Outaouais avant qu'on ne procède à ce transfert du campus
Héritage.
C'est là ma question, M. le Président, demander au
ministre de nier, j'espère, cette information, de nous dire
qu'effectivement la décision prise par le conseil d'administration du
cégep de l'Outaouais, en bonne et due forme, à l'assemblée
de mercredi dernier, sera confirmée par son ministère et sinon,
de tenter de nous expliquer quels sont les motifs profonds qui l'amènent
à ne pas donner suite à cette résolution, et à la
demande de qui, pour quel motif, etc.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
ministre.
M. Camille Laurin
M. Laurin: M. le Président, je veux d'abord remercier les
deux députés de leurs interventions.
Tout en écoutant tout au long le discours de la
députée de Jacques-Cartier, j'ai eu l'impression qu'elle
était préoccupée beaucoup plus par l'aspect administratif
de l'enseignement que par la mission éducative proprement dite.
Lorsqu'elle se réfère à toutes les déclarations que
nous avons faites lors de l'étude des crédits sur la
qualité de l'enseignement - et Dieu sait s'il y a plusieurs
éléments, plusieurs thèmes qualitatifs dont nous avons
parlé et dont il importe de parler comme, par exemple, le
développement de l'enfant, comme par exemple l'environnement
éducatif, comme par exemple les régimes pédagogiques,
comme par exemple l'évaluation, comme par exemple la personnalisation de
l'éducation, le suivi, la récupération des
élèves - j'ai l'impression que ce sont des aspects qualitatifs
qui constituent la mission même de l'enseignement.
Maybe the Member for Jacques-Cartier finds this approach theoretical or
global, but in our opinion, it is at the essence, at the proper essence of the
mission of education in any country.
Son approche est administrative, parce que, comme beaucoup de ses
collèques, elle ne voit dans le problème qu'une question de
personnel ou de dollars. Et même lorsqu'elle parle des coupures, elle a
omis de mentionner le contexte général économique dans
lequel nous sommes, où il s'agit de combler un écart
malheureusement trop grand et qui s'accroît entre le niveau
incompressible des dépenses et le niveau des revenus. C'est à
cause de cette donnée fondamentale que, dans l'éducation comme
dans les autres secteurs, nous sommes obligés d'effectuer un
ralentissement de croissance ou même parfois des coupures, afin que ce
fossé soit comblé et afin que notre société
apprenne à vivre davantage avec les moyens que lui offre la
situation.
Je pense aussi, M. le Président, qu'on ne réglera pas les
problèmes en éducation uniquement par des additions de sommes ou
par des additions de personnel. Je ne pense pas que le progrès ou que le
succès de l'éducation soit un corollaire obligé de
l'abondance des ressources. Je continue à penser, au contraire, que le
progrès de l'éducation sera bien mieux assuré par une
meilleure conception du rôle de l'éducation, de la mission propre
de l'enseignant, de la mission propre de tous les personnels qui gravitent
autour de l'enfant, une meilleure responsabilisation des parents et une
meilleure concertation entre tous les agents de l'éducation. Ensuite, on
viendra demander des dollars. Dans cette évaluation
coûts-bénéfices que demandait la députée de
Jacques-Cartier, il faudra tenir compte de ces facteurs qualitatifs, car nous
sommes justement dans la mission éducative qui est centrée sur le
développement de l'enfant.
La députée de Jacques-Cartier a touché deux sujets,
en particulier, celui des règles budgétaires. Elle affirme que
ces rèqles budgétaires non seulement sont imparfaites, mais
qu'elles sont nocives jusqu'à un certain point. De toute façon,
on pourrait, bien sûr, discuter du bien-fondé de tel ou tel
élément des règles budgétaires. Mais ce que je
sais, en tout cas, c'est que ces rèqles budqétaires nouvelles
sont de loin supérieures a celles que nous avions antérieurement
et qui sont à la racine de cet écart qui a été
signalé à plusieurs reprises dans cette Chambre.
En appliquant ces règles budgétaires nouvelles, nous
n'avons fait que suivre les suggestions du Vérificateur
général du Québec. Il convenait de le faire puisque nous
savons maintenant qu'il n'y aura plus moyen d'inscrire des élèves
à deux ou a trois écoles différentes. Nous savons qu'avec
ces nouvelles règles, nous pourrons maintenant calculer le taux de
vieillissement du personnel, nous saurons où vont les dollars, ce qui va
dans l'enveloppe de base, ce qui va dans les allocations
supplémentaires. Je ne dis pas, encore une fois, que le système
est parfait, mais, de toute façon, il est de loin supérieur
à celui que nous avions antérieurement. Les commissions scolaires
elles-mêmes sont prêtes à l'admettre; dans les consultations
que nous avons avec elles, en tout cas, elles l'admettent. Malgré les
quelques imperfections qui restent, avec les consultations ultérieures,
nous pourrons les raffiner et les améliorer.
Je pense aussi, M. le Président, que quelle que soit la valeur
des rèqles budqétaires, cela n'empêchera jamais la
nécessité d'une coopération, d'une harmonisation au niveau
local et au niveau régional entre les commissions scolaires et les
syndicats, et aussi à l'intérieur de la commission scolaire, au
niveau de l'école, entre les divers éléments qui composent
l'équipe école. C'est sur ces points qu'il convient de mettre de
plus en plus l'accent au cours des prochaines années.
Le second reproche de la députée de Jacques-Cartier, c'est
de faire porter les conséquences des conventions collectives que nous
avons signées au chapitre de la sécurité d'emploi sur les
commissions scolaires. Elle accuse, en somme, le gouvernement de refiler aux
commissions scolaires le poids ou l'impact des conventions collectives qui ont
assuré, depuis 1976, aux enseignants et au personnel non enseignant, une
sécurité d'emploi. Je m'élève en faux contre cette
affirmation. Lorsque la députée de Jacques-
Cartier dit, par exemple, que l'effet de la sécurité
d'emploi est d'amener les commissions scolaires à couper un nombre
exagéré de postes chez le personnel non enseignant, je ne pense
pas que cela soit parfaitement conforme aux faits.
Il importe de répéter, au départ, que 87% du budget
de l'enseignement est affecté aux salaires, que ce soient les salaires
du personnel enseignant, du personnel non enseignant ou du personnel de soutien
qui ont signé les conventions avec le gouvernement. Donc, il reste une
marge de manoeuvre très faible. Il faut d'abord se rappeler cette
contrainte que nous avons. Mais il faut aussi se rappeler que le personnel non
enseignant a lui-même signé ses conventions collectives et qu'un
bon nombre de personnel non enseignant jouit également de la
sécurité d'emploi. Il importe de le rappeler.
Je disais aussi, lors de la commission parlementaire pour l'étude
des crédits, que nous avons déjà rencontré le
président de la Centrale des enseignants, que nous espérons
trouver avec lui des avenues, des voies afin que le personnel mis en
disponibilité, personnel enseignant ou non enseignant, puisse être
affecté à des tâches qui pourront alléger, dans la
plus grande mesure possible, les compressions ou le ralentissement de
croissance que nous connaissons actuellement. J'espère bien en arriver
à un accord avec la Centrale des enseignants du Québec, et il est
entendu que des négociations semblables devront ensuite avoir lieu entre
les commissions scolaires et les niveaux locaux de ces employés. Des
messages devront être envoyés aussi du ministère aux
commissions scolaires et de la Centrale des enseignants du Québec aux
syndicats locaux. (21 h 50)
C'est ce que je veux dire en disant que l'époque que nous vivons
sera de plus en plus, à cause de l'austérité, celle de la
concertation autour d'objectifs communs que nous partageons et que nous inspire
cette passion commune de l'enfant qui devrait être la marque de fabrique
de tous ceux qui travaillent au sein de l'école.
Il est vrai que, dans le passé, une bonne partie du personnel
enseignant affecté par la sécurité d'emploi était
dirigé vers la suppléance, mais la députée de
Jacques-Cartier sait aussi bien que moi que certaines commissions scolaires, au
lieu de recourir au personnel mis en disponibilité, recouraient trop
facilement et trop souvent à d'autre personnel qu'ils allaient engager
sans raison véritablement justifiable. En période
d'austérité, nous devrions faire l'impossible pour que la
suppléance soit assurée au maximum par le personnel mis en
disponibilité.
Dans nos règles budgétaires, nous avons introduit des
mécanismes incitatifs à cet effet. Nous savons, cependant, que la
suppléance, même si elle est exercée surtout par des
enseignants mis en disponibilité, ne réussira pas à
éponger le total de ces enseignants mis en disponibilité. C'est
la raison pour laguelle il nous faut trouver d'autres voies, avenues, pistes
que nous sommes en train d'explorer.
Je pense donc que le tableau, loin d'être aussi sombre que le
décrit la députée de Jacques-Cartier, malgré les
contraintes et peut-être à cause même des contraintes,
contribuera à solliciter, à stimuler dans le monde de
l'enseignement des qualités nouvelles qui, appliguées aux
problèmes, nous permettront - je l'espère, en tout cas - de
trouver des solutions. Il deviendra alors évident que les
problèmes ne se règlent pas toujours par une injection nouvelle
de ressources ou par une injection nouvelle de personnel, mais par une
rationalisation et par une meilleure conscience de ses responsabilités
dans le domaine de l'éducation.
Maintenant, j'en viens à la question sur le campus
Héritage. Effectivement, j'ai rencontré à mes bureaux, au
mois de février, une délégation du cégep de
l'Outaouais qui comprenait des membres du conseil d'administration, du syndicat
des enseignants et du comité d'école ou, du moins, d'une
association de parents concernés. Après la longue conversation
que nous avons tenue ensemble, où ils m'exprimaient que leur
volonté commune, majoritairement commune en tout cas, était
à l'effet d'en arriver à une séparation des deux campus,
je me suis rendu en principe à leur raison, ajoutant cependant qu'ils
devraient, dans un proche avenir, me convaincre davantage de la
nécessité de cette scission en particulier, qu'ils devraient
étudier les implications pédagogigues, culturelles,
linguistiques, financières du changement qu'ils proposaient.
Je leur avais dit aussi qu'étant en principe favorable à
ce changement je prendrais les contacts, je prendrais les mesures
nécessaires pour amorcer le processus. C'est ce que j'ai fait dans une
lettre que j'écrivais aux autorités du collège Champlain,
je leur faisais part de la résolution du cégep de l'Outaouais et
je leur demandais leur réaction. Le conseil d'administration du
cégep Champlain m'a répondu qu'en principe lui aussi était
d'accord pour accepter ce nouveau campus au sein de son collège, tout en
me disant cependant que cette insertion pouvait causer des problèmes qui
s'ajoutaient à ceux que vivait déjà le cégep
Champlain du fait qu'il possède déjà trois campus, un
à Lennoxville, un autre à Québec, dans la ville de
Québec, ici même, et évidemment le plus gros sur la rive
sud.
Plus on ajoute de campus à un cégep, plus on complique
l'administration. Par exemple, quelle sera la représentation des
étudiants à ce conseil d'administration? Quelle sera la
représentation des agents socio-économiques de chacune des
régions où se situe le campus? On pourrait mentionner plusieurs
autres exemples aussi.
Dans sa réponse, le directeur me faisait savoir qu'il
était prêt lui aussi en principe à accepter cette addition,
mais à condition que, par un amendement à la loi ou autrement, on
puisse régler ce problème de représentation en particulier
et les autres problèmes que pouvait causer l'addition d'un autre campus.
En même temps, il me disait que, si nous donnions suite à notre
résolution, il faudrait également augmenter d'une façon
sensible le budget du collège Champlain non seulement en regard du
nombre d'élèves concernés, mais simplement pour que le
nouveau campus jouisse de ressources équivalentes à celles dont
jouissaient déjà les trois autres campus, ce qui n'est pas le cas
à l'heure actuelle.
Donc, la direction du cégep Champlain me posait deux conditions.
Par ailleurs, la condition que je posais moi-même, c'est-à-dire
celle d'une étude plus exhaustive des implications pédagogiques,
financières, linguistiques, culturelles au conseil d'administration du
cégep de l'Outaouais n'a pas encore été remplie.
Cependant, je répète au député de Gatineau,
que je suis encore en principe favorable à cette insertion du campus
Héritage au Collège Champlain, mais je lui dis cependant qu'il
nous faudra trouver des moyens de satisfaire aux deux conditions posées
par le collège régional Champlain et, en période
d'austérité financière, si cette addition implique une
augmentation de budget de quelques centaines de milliers de dollars, il faudra
y penser. Aussi, j'attends que la deuxième condition que j'ai
moi-même posée au conseil d'administration du cégep de
l'Outaouais soit également remplie.
De toute façon, le processus est amorcé. Dès que
les deux conditions dont je viens de parler seront remplies, il me fera plaisir
de mettre le point final à cette question et de procéder, d'une
part, à cette séparation dans la région de Hull et,
d'autre part, à cette addition pour le cégep régional
Champlain.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Gatineau, encore une fois.
Industrie, Commerce, Tourisme M. Michel
Gratton
M. Gratton: Merci, M. le Président, ce ne sera pas sur le
même sujet, ce sera à l'intention du ministre de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme. Je lui dis tout de suite que s'il y a un reproche
à adresser à quelqu'un, ce n'est pas à lui, à titre
de ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, mais bien à son
collègue du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en ce qui a trait
à la renégotiation de l'entente
fédérale-provinciale sur le développement touristique.
Depuis mars 1980, les propriétaires du projet du mont
Saint-Marie, dans le comté de Gatineau, ont saisi les divers
ministères du gouvernement du Québec, aussi bien que ceux qui
sont impliqués au niveau fédéral, d'un projet
d'investissement de 57 000 000 $, qui viserait à venir compléter
des installations et des équipements qui sont déjà en
place au mont Sainte-Marie et qui ont nécessité jusqu'à
maintenant des investissements privés, sans aucune aide
financière de la part d'aucun gouvernement, de plus de 20 000 000 $ et
qui ont créé au moins 250 emplois permanents nouveaux à ce
jour.
Ces investissements proposés de 57 000 000 $ viendraient donc
terminer seulement la première phase de l'ensemble du projet, en venant
ajouter au centre de congrès, à l'hôtel, aux unités
de condominium déjà construites, 2500 autres unités
d'hébergement, des espaces commerciaux, qui viendraient ajouter entre
400 et 450 nouveaux emplois permanents dans une localité de cette
région de la Haute-Gatineau où le taux de chômage atteint,
en hiver, les 50%, M. le Président. C'est donc dire que c'est non
seulement toute la population de la région de la Haute-Gatineau qui est
touchée, mais l'ensemble de l'Outaouais. (22 heures)
Depuis mars 1980, l'Office de planification et de développement
du Québec, l'OPDQ, a donné son accord de principe. Le
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a également
donné son accord de principe. Je vous dirai, entre parenthèses,
M. le Président, que si je m'adresse au ministre de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme ce soir, c'est simplement parce que le règlement
de l'Assemblée nationale exige qu'on soulève les guestions
à partir des éléments et des programmes du budget et c'est
au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qu'on retrouve
cet élément.
Donc, l'OPDQ, le ministère de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme, la Société d'aménagement de l'Outaouais, qui
est, en fait, un des principaux promoteurs de la réalisation du projet,
le conseil de comté et la municipalité de Lac-Sainte-Marie ont
tous donné leur approbation, ont tous promis leur concours, leur
collaboration pour faciliter le plus possible, le parachèvement de ce
projet.
Du côté du fédéral, l'Office canadien du
tourisme et le ministère de l'Expansion économique
régionale ont également donné par écrit leur
approbation à ce projet. D'ailleurs, tous reconnaissent qu'au moment
où on se parle, le projet de 57 000 000 $, d'investissements du
mont Sainte-Marie est le plus important projet touristique de tout le
Québec qui est prêt à démarrer, et qui est
prêt à démarrer depuis mars 1980. Or, M. le
Président, la question qu'on peut se poser, c'est: Pourquoi on ne marche
pas? La raison et la seule raison, M. le Président, c'est que le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche n'a pas encore
trouvé le temps de donner son approbation au projet et d'entreprendre
les négociations avec le ministère de l'Expansion
économique régionale du gouvernement fédéral pour
ajouter à l'entente fédérale-provinciale sur le
développement touristique qui prévoit déjà des
sommes de 76 000 000 $. D'ailleurs, il reste une certaine réserve au
fonds, réserve qui pourrait - le gouvernement fédéral y
consentirait - servir dès maintenant à faire démarrer le
projet. La négociation n'est pas entreprise encore avec le
fédéral, malgré le fait que le fédéral a
déjà indiqué être prêt à consacrer 7
800 000 $ à ajouter à l'entente spécifiquement pour le
développement de ce qu'on appelle les stations touristiques quatre
saisons, c'est-à-dire des endroits comme le Mont-Tremblant, le
Mont-Sainte-Anne et, bien sûr, le mont Sainte-Marie, qui ont un
éventail de services à offrir à la population, de sorte
que ces installations servent douze mois par année. Le
fédéral est prêt à ajouter 7 800 000 $. On sait que
sa contribution à ces programmes est de 60%. Ce sont quelque 13 000 000
$ dont pourrait disposer le gouvernement du Québec pour aider non
seulement les promoteurs du développement au mont Sainte-Marie, mais
d'autres projets de stations touristiques quatre saisons au Québec.
Le but de mon intervention, M. le Président, aurait
été, à la période des questions, de demander au
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pourquoi cela ne
débloque pas. Il y a urgence. Il y a urgence dans le sens que les
actionnaires, les investisseurs de ce projet, ceux qui ont déjà
investi 20 000 000 $, créé 250 emplois permanents à mont
Sainte-Marie, sont des Suisses, des gens de Zurich, qui oeuvrent non seulement
dans tout le Canada, mais un peu partout dans le monde. Ils ont
également un projet dans le sud de l'Ontario qui n'est pas encore
amorcé. Les actionnaires doivent se réunir au mois de juin, au
cours des deux prochaines semaines, pour décider de leurs
investissements des trois prochaines années.
Or, de la part du gouvernement du Québec, malgré les
télégrammes répétés qu'on a fait parvenir au
premier ministre, il n'a même pas daigné en accuser
réception, malgré des rencontres qui, il y a dix jours encore,
avaient lieu avec le chef de cabinet du ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche, malgré que tous reconnaissent, je le
répète, l'OPDQ, le ministère de l'Industrie et du
Commerce, la Société d'aménagement, qu'il s'agit là
du plus important projet de station touristique au Québec qui soit
prêt à démarrer, malgré le fait qu'on ait
raté deux saisons de construction, celle de 1980 et celle de 1981. Ces
gens-là n'ont encore eu aucun témoignage du gouvernement, de
façon officielle, pour les encourager à continuer d'investir chez
nous, au Québec, pour faire travailler les gens de chez nous.
Non seulement on n'encourage pas ces personnes, mais on les
décourage en leur faisant attendre pendant plus d'un an des
décisions, des accords de principe - en tout cas, l'Ontario l'a
clairement démontré - que tout gouvernement responsable devrait
être avide de donner. Je le répète, le but de mon
intervention est de sensibiliser le ministre de l'Industrie et du Commerce et
de lui demander surtout de faire pression auprès de son collègue
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour qu'il respecte l'engagement
que son chef de cabinet a pris jeudi dernier, lors d'une rencontre avec les
autorités municipales aussi bien qu'avec les promoteurs du projet
à savoir qu'il rendrait une décision avant le 19 juin,
c'est-à-dire avant la fin prévue de cette session.
Il est important que cette décision, que la volonté du
gouvernement de contribuer à ce projet, soit exprimée clairement,
dans des textes écrits, de façon que les actionnaires de cette
compagnie soient rassurés et sachent qu'ils pourront compter sur la
collaboration du gouvernement du Québec pour que ces investissements ne
nous échappent pas au profit de l'Ontario. Je le répète,
il s'agit là du plus important projet que le Québec ait
présentement et qui est prêt à démarrer.
J'insiste à nouveau pour que le ministre de l'Industrie et du
Commerce fasse que le gouvernement du Québec soit conséquent avec
la promesse qu'on retrouvait dans le discours inaugural du premier ministre que
le gouvernement axerait son action sur le développement
économique. Voici là une occasion excellente de faire une bonne
affaire, de créer 400 ou 450 nouveaux emplois dans une région qui
en a grandement besoin, de le faire, bien sûr, avec une participation
financière, mais une participation financière dont le
gouvernement fédéral paiera 60%.
J'indiquerai, à l'intention de ceux qui ne le sauraient pas,
qu'à ce jour ces investissements privés de plus de 20 000 000 $,
qui ont été faits sur place, qui indiquent bien le sérieux
et la bonne volonté de ces promoteurs, tout cela n'a
nécessité que la construction d'une route d'accès au
gouvernement du Québec. C'est d'ailleurs le gouvernement libéral
antérieur qui avait fait confiance à ces gens et qui avait
consenti à y construire une route d'accès au coût de 3 000
000 $. Le
gouvernement, le ministre de l'Industrie et du Commerce et ses
collègues du cabinet, le premier ministre surtout ont là une
occasion rêvée de donner un vrai sens à cette phrase qu'on
retrouvait dans le discours inaugural concernant le développement
économique, surtout dans les régions. J'ose espérer que
cette demande que je formule ce soir, dans l'intérêt et au nom des
citoyens de mon comté, ne recevra pas la réponse qu'on a
malheureusement l'habitude de recevoir, comme celle que j'ai reçue du
ministre de l'Éducation tantôt. J'espère que le ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme s'engagera à tâcher par
tous les moyens à faire en sorte que, d'ici la fin de juin, on ait une
décision favorable dans ce dossier. (22 h 10)
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, je suis heureux de
l'intervention du député de Gatineau et je le remercie d'ailleurs
de s'occuper de ce dossier particulier dans son comté puisque cela me
donne l'occasion de répondre un peu à ses questions. Comme il l'a
si bien noté en fait, le dossier particulier du mont Sainte-Marie
relève de la juridiction de mon collègue, le ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche, mais, quand même, puisque le
député de Gatineau a parlé de l'entente-cadre auxiliaire
fédérale-provinciale sur le tourisme, cela me permet, en lui
répondant, de faire un peu le tour du projet et du dossier, qui nous
intéresse de façon particulière.
Le député de Gatineau sait certainement que, depuis
quelques années, le gouvernement du Québec s'est
intéressé d'une façon toute particulière au
développement de l'économie québécoise, des petites
et des moyennes entreprises et aussi de l'industrie touristique. Pour nous,
l'industrie touristique est une industrie souverainement importante dans le
développement économique, dans la création d'emplois,
puisque avec les sommes d'argent investies, c'est à peu près
là qu'on peut créer le plus d'emplois le plus rapidement possible
pour les hommes et les femmes du Québec. Le dossier que le
député de Gatineau soulève dans son comté est,
à juste raison, il l'a noté lui-même, un des projets
touristiques les plus importants que nous ayons eus au Québec. On nous
parle d'une somme d'argent de 20 000 000 $ déjà investis par des
capitaux privés. Il nous reste encore certainement 80 000 000 $ et
peut-être plus à investir, lorsque tout le projet sera
terminé.
Cela veut dire que, pour l'économie touristique du comté
de Gatineau et de la région de l'Outaouais en particulier, c'est
très important. J'assure le député de Gatineau de toute
mon attention dans ce dossier puisque le mont Sainte-Marie est peut-être
un projet idéal parmi tous les projets qui ont été soumis
jusqu'à maintenant au gouvernement du Québec et il pourrait se
qualifier facilement selon la loi 37 sur le développement touristique
qui a été présentée et adooptée sous mon
prédécesseur, le député de Saint-Maurice,
aujourd'hui ministre de l'Énergie et des Ressources. C'est un important
projet touristique. C'est un important projet de ski. Mais ce qu'il est
intéressant de noter, c'est que ce projet pourra se renouveler à
longueur d'année et procurer de l'emploi aux citoyens de la
région de l'Outaouais pendant douze mois.
Ce n'est pas tout simplement un projet de ski comme on en voit
quelquefois ailleurs au Québec, c'est un projet qui pourra attirer des
congrès, qui pourra attirer des gens pour jouer au golf, prendre
guelgues semaines de vacances, aller à la pêche dans la
région ou, finalement, pendant l'hiver, faire du ski ou même tenir
d'autres congrès. M. le Président, nous nous en occupons
activement et je dois même dire au député de Gatineau que,
déjà, cette semaine, j'ai rencontré personnellement le
ministre d'État aux petites et moyennes entreprises et au tourisme du
gouvernement fédéral, le député
fédéral de Charlevoix, et que nous avons déjà
fixé une rencontre pour les semaines qui viennent afin de faire le tour,
lui et moi, de tous les dossiers qui regardent le développement
touristique. Bien sûr, nous discuterons aussi de ce dossier particulier
du mont Sainte-Marie.
Concernant, M. le Président, l'entente auxiliaire sur le
développement touristique, je dois dire au député de
Gatineau que déjà 72 000 000 $ ont été
engagés par le gouvernement du Québec dans toutes sortes de
projets à l'intérieur des frontières
québécoises, ce qui nous a permis de développer
l'économie touristique chez nous. Mais, jusqu'à maintenant, nous
sommes aussi, puisque nous avons reçu une offre, en négociation
avec le gouvernement fédéral pour étendre cette entente
auxiliaire et faire en sorte que de nouvelles retombées
économigues aident le Québec en particulier. Il est question d'un
montant de 42 800 000 $ dont 24 000 000 $ seront réservés pour le
Palais des congrès de Montréal - nous en avons traité il y
a déjà une quinzaine de jours - et le reste, 18 800 000 $ seront
réservés à la fois pour la rénovation du
Vieux-Montréal et à la fois pour d'autres programmes de
développement de stations de ski international ou autres programmes
suggérés par le ministère de l'Industrie, du Commerce et
du Tourisme. C'est donc dire qu'il nous resterait environ 7 800 000 $ à
dépenser, au point de vue des
infrastructures touristiques, dans tout le Québec. Je voudrais
tout simplement assurer le député de Gatineau de mon ouverture
d'esprit et de ma sympathie à l'égard de ce projet très
intéressant pour lui et très intéressant aussi pour le
gouvernement du Québec. Je discuterai, au cours des prochains jours,
avec mon collègue responsable de ce dossier particulier, le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, et nous essaierons d'apporter les
réponses le plus rapidement possible aux demandes du
député de Gatineau.
Je veux quand même noter en passant que la Société
d'aménagement de l'Outaouais a déjà fait beaucoup dans la
région de l'Outaouais au point de vue des loisirs et nous croyons
qu'elle se doit de continuer dans la même direction. Même si je ne
peux pas donner une réponse plus précise que celle-ci ce soir, je
sais que le député de Gatineau comprend qu'étant
donné que je n'ai pas le dossier complet avec moi ce soir, après
en avoir parlé avec le ministre de Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, nous pourrons, au cours des prochains jours ou des prochaines
semaines, lui faire part de toute la volonté du gouvernement du
Québec de participer au développement de l'industrie touristique
d'une façon toute particulière dans la région de
l'Outaouais et, bien sûr, aussi dans son comté de Gatineau.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mont-Royal.
Habitation et Protection du consommateur
M. John Ciaccia M. Ciaccia: Merci, M. le Président.
Dernièrement, le Vérificateur général a
déposé son rapport à l'Assemblée nationale. Ce
rapport faisait état, entre autres, de la mauvaise administration de la
Société d'habitation du Québec. Je voudrais relever
certains faits pertinents pour situer le débat et aussi pour situer les
questions que je voudrais poser au ministre.
Premièrement, M. le Président, il y a le dossier Luc Cyr
et Transit Construction. Nous savons que M. Cyr a été
imposé au ministre délégué à l'Habitation
par le bureau du premier ministre et qu'il a été mis en charge de
42 dossiers que le ministre décrits comme étant des dossiers
scabreux. Cependant, le gouvernement décide de donner la gérance
des réparations à M. Cyr, sans soumissions. Dans le rapport du
Vérificateur général, il y a beaucoup
d'irréqularités. On soulève le cas d'un conflit
d'intérêts, l'engagement du fils de M. Cyr. Je ne voudrais pas, M.
le Président, parler contre l'esprit paternel, mais il ne faudrait pas
que ce soit aux dépens de l'État.
Il y a plusieurs autres irrégularités dans le
contrôle de la compagnie, dans le contrôle des mesures
administratives de la Société d'habitation du Québec. On
parle, par exemple, d'un manque d'informations quant aux travaux
supplémentaires et quant aux pièces justificatives pour des
coûts additionnels qui ont été payés par la
Société d'habitation du Québec. J'en ai un ici, par
exemple, un avenant à un certain contrat, le contrat Arteco Concept
Construction Inc., sujet: Warwick, contrat de réparations, signé,
d'une part, par M. Cyr où on augmente les travaux supplémentaires
de 15 000 $ sans donner aucun détail. On dit: Palier de balcon et pans
de murs de brique. Considérant que ces travaux supplémentaires
s'inscrivent à l'intérieur d'un ensemble de travaux pour corriger
des déficiences évidentes, la société autorise un
crédit supplémentaire de l'ordre de 15 000 $, portant la valeur
totale du contrat à un plafond de 60 000 $. Il n'y a aucun détail
et c'est sur cette base qu'on paie un montant de 15 000 $. C'est l'argent des
contribuables et comme le Vérificateur général en fait
mention, c'est absolument inadéquat. (22 h 20)
Je demanderais au ministre quelles mesures il a prises dans les
circonstances et quels correctifs il a apportés au fonctionnement de la
Société d'habitation du Québec pour corriger cette lacune
et cette mauvaise administration.
Nous avons aussi ce qui est communément appelé la Grande
Passe, un édifice de Montréal où, comme vous le savez, il
y avait des travaux de rénovation. Une soumission avait
été accordée pour un prix ferme de 604 500 $. Le
gouvernement -la Société d'habitation du Québec - a
décidé de ne pas accorder le contrat au soumissionnaire, mais
elle a accordé le contrat à Transit Construction. Même le
Conseil du trésor, dans ces directives, ne voulait pas que ce soit
Transit parce que, naturellement, il y a un conflit d'intérêts,
c'est la même compagnie qui a la direction de l'administration et des
rénovations, c'est à cette compagnie qu'on accorde un contrat
avec des hypothèques, etc., pour rénover l'édifice. Nous
savons tous ce qui est arrivé, les travaux sont arrêtés, la
compagnie a manqué de fonds additionnels pour compléter les
travaux.
On voit un peu le cheminement de ce qui s'est passé, par une
citation de M. Dorion, une des personnes impliquées, c'est le
président d'une des compagnies impliquées dans la
rénovation. C'est dans un article de la Presse du mois de janvier: "M.
Dorion admet que l'évaluation initiale des coûts qui avait
été faite était mauvaise, qu'elle avait été
préparée rapidement pour que des fonds soient
débloqués au plus tôt avant le
printemps. Elle avait, dit-il, été faite par nous, de
bonne foi, avec l'aide de quelqu'un de LOGIPOP, qui relève de la
Société d'habitation du Québec. Nous voulions faire
quelque chose de plus précis, plus tard, pour que l'enveloppe soit
augmentée."
En d'autres termes, ce que M. Dorion dit, c'est qu'on a
présenté de faux états pour commencer le projet et, plus
tard, on savait qu'on était pour obtenir d'autres fonds, le montant
global qui serait accordé initialement devait être
augmenté, et c'est justement ce genre de procédures qui a
été sévèrement critiqué, dans un rapport
dont certains extraits ont été rendus publics, un rapport qui
avait été commandé par le ministre
délégué à l'Habitation, qui disait qu'on
contournait les directives du Conseil du trésor en faussant certains
chiffres et en adoptant des procédures un peu douteuses.
Comme vous le savez, les travaux ont été
arrêtés à cause du manque de fonds. Les estimations,
d'après les chiffres soumis lors de la commission parlementaire, au lieu
d'être de 600 000 $ initialement, le montant originel que le
soumissionnaire avait fourni, était de 1 000 000 $ ou de 1 200 000 $.
Encore une fois, ce sont des sommes provenant des taxes des contribuables et ce
sont les contribuables qui devront combler le déficit. Je voudrais
demander au ministre à quel stade en est ce projet. D'après les
déclarations qu'il avait faites au mois de décembre dernier, je
crois qu'il devait le mettre en vente. Est-ce qu'il a réussi? Est-ce
qu'il y a une estimation du coût pour compléter les travaux et
sous quelles conditions ce projet sera-t-il terminé? 0e voudrais parler
aussi de certains contrats de gérance. Je vais donner un exemple d'un
contrat qui semble être exact et répondre à certaines
normes. Je prends un exemple à Hauterive. C'est un contrat de
gérance au montant de 10 000 $ pour exécuter des travaux de
réparation qui ne dépassent pas 100 000 $. On voit que ce contrat
semble être conforme aux normes de l'industrie. On paie un certain
montant au gérant, à celui qui doit gérer les travaux,
pour des travaux qui peuvent être, dans ce cas-ci, de l'ordre de 100 000
$.
J'ai un autre contrat ici. C'est un contrat avec Isolation Select Inc.,
pour un projet à Place Bardy. Le contrat de gérance est pour 44
000 $, mais les travaux, d'après le contrat, ne doivent pas
dépasser 44 000 $. Autrement dit, le montant du contrat par la
gérance est le même montant que pour les travaux qui doivent
être gérés. Ce serait la même chose, par exemple, si
pour une maison de 40 000 $, on paie quelqu'un qui va gérer les travaux
de la construction, on lui verse 40 000 $ pour s'assurer que la maison sera
construite pour 40 000 $. Il semble y avoir quelque chose qui n'est pas tout
à fait correct dans ce genre de contrat.
Je pourrais en nommer d'autres, j'en ai d'autres ici, mais je
demanderais une explication au ministre, parce que c'est le genre de contrat
qui a été porté à l'intention du gouvernement par
le Vérificateur général.
Nous avons demandé au premier ministre et au ministre de
l'Habitation et de la Protection du consommateur une enguête publique sur
l'administration de la Société d'habitation du Québec. Je
crois que nous avons apporté tous les jours, en commission
parlementaire, à la Chambre, à la période des guestions,
à l'attention du ministre, à l'attention du premier ministre, des
faits qui peuvent certainement justifier une enquête publique. Cela
serait même à l'avantage et dans l'intérêt du
gouvernement, parce que, tous les jours, le ministre est obligé de
défendre la mauvaise administration de la Société
d'habitation du Québec.
Je demanderais au ministre, en terminant, combien de faits nouveaux nous
devons montrer au ministre pour qu'il comprenne que seule une enguête
publique peut faire la lumière dans ce dossier et redonner à la
Société d'habitation du Québec la
crédibilité qu'un organisme d'État doit avoir. Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre de
l'Habitation et de la Protection du consommateur.
M. Guy Tardif
M. Tardif: M. le Président, au début de cette
intervention, je voudrais d'abord, au nom du personnel de la SHQ, si
c'était possible, faire tout comme, à tout le moins, si je
soulevais une question de privilèqe, en revenant sur le texte qu'a lu ce
matin le député de Mont-Royal. Ce texte disait en parlant des
officiers de la Société d'habitation du Québec: "Ils ont
exposé la SHQ à l'augmentation des coûts sur certains
projets en faussant le système de soumissions par l'adjudication de
contrats à des soumissionnaires autres que le plus bas soumissionnaire".
C'est ce que le député de Mont-Royal disait ce matin.
Je pense qu'il s'aqit là d'une affirmation tout à fait
injuste à l'endroit de la Socité d'habitation du Québec et
de ses fonctionnaires. Replaçons ce texte dans le rapport qui a
été fait à ce sujet. D'abord, ce texte concerne
spécifiquement un projet, celui de Sainte-Foy. Les autorités de
la Société d'habitation du Québec n'ont en aucun temps
dérogé aux normes établies par le Conseil du trésor
quant à l'attribution des contrats au plus bas soumissionnaire. La SHQ a
rejeté une soumission d'un entrepreneur parce qu'elle n'était pas
conforme au programme de construction. Et puisque cette soumission
n'était pas conforme, on dit bien
qu'on doit donner le contrat au plus bas soumissionnaire conforme. Or,
il n'était pas conforme, elle devait donc le rejeter, sinon, elle
s'exposait automatiquement à des poursuites de la part des autres
entrepreneurs qui avaient soumissionné. La SHQ ne pouvait donc retenir
un entrepreneur qui n'avait pas répondu aux devis de la soumission.
Cette histoire avait d'ailleurs fait beaucoup de bruit à
l'époque et la SHQ avait décidé de faire vérifier
sa décision par une tierce personne dont l'expertise est reconnue dans
le domaine, soit Me Cinq-Mars, associé du bureau Martineau et Walker, de
Montréal. Rappelons incidemment que M. Cinq-Mars est
l'ex-bâtonnier du Québec. Or, M. Cinq-Mars, dans l'opinion qu'il
fournissait à la SHQ le 11 mai 1981, confirme la décision de la
société et dit: "À notre avis, cette soumission
était inacceptable, ne rencontrant pas les exigences de la
société, et le soumissionnaire ne peut pas plaider erreur,
même si, à la suite de l'ouverture des soumissions, Saramac Inc.
aurait signalé son intention de modifier sa soumission pour la rendre
conforme aux exigences de la société, celle-ci ne peut être
acceptée puisque alors les règles du jeu des soumissions seraient
complètement faussées et constitueraient une injustice pour le
soumissionnaire qui, lui, a respecté les règles du jeu. Je vous
ai, d'ailleurs, remis - c'est toujours Me Cinq-Mars qui parle - copie d'une
décision de la Cour suprême rendue le 27 janvier 1981 dans
l'affaire Sa Majesté la reine du chef de l'Ontario et The Water
Resources Commission vs Ron Engineering and Construction Eastern Ltd, qui
rappelle les principes devant s'appliquer au système de
soumissions."
M. le Président, je pense que ce cas illustre à souhait la
double tactique de l'Opposition qui, à partir de quelques détails
glanés ça et là, tente de faire paraître une
décision juste, équitable, fondée en droit et en fait,
d'abord comme une décision injustifiée et
irrégulière et, deuxièmement, de passer allègrement
de ces soi-disant irrégularités à des
illégalités, peu importe la vérité, comme le disait
le député de Saint-Louis, puisque "the name of the game" n'est
pas de trouver la vérité, c'est de discréditer; ce ne sont
pas les faits, ce sont les apparences.
Revenons au dossier des réparations majeures. C'est quoi? J'ai
dit déjà que c'est un lourd héritage, en arrivant au
ministère. 42 dossiers, 2000 locataires affectés, 13 000 000 $ de
dégâts à réparer et 6 000 000 $ de poursuites. Le
nouveau président de la Société d'habitation, M. Couture,
m'informe que la société n'est pas équipée pour
effectuer ces réparations elle-même, en même temps que pour
bâtir au-delà de 4000 HLM par année pour reprendre les
retards qu'avait provoqués l'administration
précédente.
Le nom de M. Cyr est suggéré; il n'est pas imposé
et la Société d'habitation le teste d'abord. Elle l'envoie voir
quatre chantiers et elle lui demande une expertise. Elle veut l'embaucher pour
un an et ce, rétroactivement au début de son expertise. À
la main, sur le CT que j'ai déposé en commission, je raie un an,
je mets six mois et je dis à compter de maintenant; l'expertise qu'il a
faite pour montrer sa qualification, on ne le paie pas pour ça.
Or, voilà, M. le Président, que le coordonateur est
engagé, qu'il fait l'ouvrage et, selon le président de la
Société d'habitation à qui j'avais demandé un
rapport, M. Cyr s'est acquitté de son mandat comme il s'était
engagé à le faire. Malgré les allégations de
l'Opposition, fidèle à sa tactique de faire état de
soi-disant irrégularités et, après ça, de parler
d'illégalités, ceci n'a pas été du tout
confirmé par le rapport du Vérificateur général
qui, précisément dans le cours normal de son travail,
contrairement à ce que prétend l'Opposition, confirme les
prétentions du président de la société et les
miennes à l'effet qu'il n'y a pas d'illégalité, il n'y a
pas de fraude, il n'y a pas de malversation dans ces dossiers.
M. le Président, ça me confirme également que j'ai
eu raison de croire qu'il n'y avait aucun motif raisonnable et probable de
prendre action dans ce dossier sur le plan de conduite dérogatoire ou
illégale. M. Cyr, d'accord, a commis des entorses ou des accrocs
à ce que j'appelle, moi, la procédure, les règles de
pratique, il a engagé son fils. M. le Président, ce n'est pas un
crime et le président de la Société d'habitation,
dès qu'il a été mis au courant de ce fait, a envoyé
une lettre à M. Cyr, lui disant de mettre un terme à cette
action.
La conclusion, M. le Président, je serais tenté de dire,
en empruntant le titre d'une pièce de Shakespeare, que c'est
peut-être "Much ado about nothing", beaucoup de bruit pour rien; c'aurait
été ma première réaction. Cependant, après
la publication du rapport Paré - qu'on a tous eu dans cette Chambre,
cette semaine - qui met en lumière à juste titre le droit
à l'information, le droit du citoyen aux documents des organismes
publics et particulièrement, évidemment, des élus, je
pense qu'il convient d'attirer l'attention de l'Opposition sur la
deuxième partie de ce rapport Paré qui souligne aussi
l'importance d'assurer la protection des renseignements personnels. Si
l'Opposition a le droit de demander des renseignements, elle n'a pas le droit
de salir des réputations par déformation, association,
insinuations, sous-entendus. J'invite cependant, malgré cela,
l'Opposition, si elle est en possession de faits concrets, à les
transmettre à l'attention du ministre de la Justice et à
arrêter de
discréditer des serviteurs de l'État.
Je sais, M. le Président, pour avoir lu sur ce qu'on appelle "la
sociologie du scandale" et particulièrement pour avoir analysé
à fond les études ou les travaux de Sorokyn sur le sujet que,
dans nos démocraties, les dirigeants n'étant plus nommés
par la grâce de Dieu, mais élus par le vote populaire, il n'est
plus nécessaire d'être régicide, M. le Président, il
suffit d'être iconoclaste. Mais le procédé, pour moins
barbare qu'il est, n'en est pas moins condamnable. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Nous avons deux
interventions à l'intention du ministre de la Justice par M. le
député de D'Arcy McGee. Compte tenu des deux interventions, il a
accepté de faire une seule et même intervention. Je demanderais au
député de D'Arcy McGee de prendre la parole.
Une voix: Bravo!
Justice M. Herbert Marx
M. Marx: M. le Président, tel que prévu par notre
règlement, nous avons donné avis au ministre de la Justice pour
qu'il ait le temps de se préparer en ce qui concerne le fonctionnement
des tribunaux au Québec et, deuxièmement, en ce qui concerne
l'humanisation des services de détention.
Je reviens sur ces deux sujets, M. le Président, parce que les
réponses qu'on a eues en commission parlementaire étaient
nettement insuffisantes et non satisfaisantes. Souvent, le ministre nous a
donné comme réponse qu'il va faire une étude, qu'il y a
une étude à venir ou que des études étaient faites,
mais n'étaient pas encore évaluées par son
ministère, etc. Il a même refusé carrément de
répondre à certaines questions. Par exemple, je lui ai
demandé s'il est en faveur d'un ticket modérateur en ce qui
concerne les services d'aide juridique et il a bien refusé de
répondre, de dire oui ou non, et je comprends pourquoi. C'est parce que
le ministre des Finances et le premier ministre sont en faveur d'un ticket
modérateur, quoique le Conseil national du Parti québécois
ait voté contre le ticket modérateur il y a quelques jours. Donc,
le ministre de la Justice n'a pas voulu tomber entre deux chaises et il n'a pas
répondu à cette question.
J'en viens maintenant au premier sujet, le fonctionnement des tribunaux.
Il s'agit, bien sûr, de l'accessibilité à la justice. Cela
veut dire que les causes doivent être entendues et décidées
dans des délais raisonnables. Pour qu'il y ait vraiment justice, il faut
qu'il y ait une justice expéditive. En effet, quand il y a des
délais déraisonnables, on ne peut pas parler de justice, les
témoins sont difficiles à rejoindre, la décision vient
quelques années après que l'action a été
intentée. C'est vraiment difficile de parler de justice quand il y a ces
délais déraisonnables.
Le ministre est maintenant en fonction depuis cinq ans. Ce n'est pas
qu'on le presse de faire quoi que ce soit, il est en fonction depuis cinq ans,
il a eu beaucoup de temps pour prendre les mesures nécessaires pour que
les tribunaux fonctionnent bien. En juin 1980, à l'étude des
crédits du ministère, nous avons soulevé cette question en
commission parlementaire. Le ministre a admis, à cette époque,
qu'il y a un problème particulier en ce qui concerne la Cour
supérieure. Comme vous le savez, M. le Président, la Cour
supérieure du Québec est le tribunal de droit commun. C'est le
tribunal le plus important parce que c'est le tribunal qui a le droit de
surveillance des tribunaux inférieurs.
En 1980, à titre d'exemple, à Montréal, à la
Cour supérieure, pour une audience d'un jour, il y avait un délai
de neuf mois; pour une audience de plus d'un jour, le délai était
de soixante mois. Le ministre, l'an dernier, en commission parlementaire, a
promis de prendre les mesures nécessaires pour faire quelque chose en ce
qui concerne ces délais à la Cour supérieure de
Montréal. (22 h 40)
Cette année, M. le Président, nous avons posé la
même question au ministre. Pourquoi? Parce que le problème est
plus aigu cette année qu'il ne l'était l'an dernier. À
Montréal, comme je viens de le dire, en juin 1980, pour une audience
d'un jour, il y avait un délai de 9 mois. En juin 1981, le délai
est de 26 mois; c'est-à-dire que le délai a augmenté de 15
mois. Pour une audience de plus d'un jour, en 1980, le délai
était de 60 mois et, cette année, en 1981, le délai est de
73 mois, donc une augmentation des délais de 13 mois.
Le ministre a admis, en commission parlementaire, que l'encombrement des
rôles constitue finalement une injustice. Le ministre a travaillé
a ce problème toute l'année et aujourd'hui, c'est pire que
ça ne l'était au début de l'année. Peut-être
que ça aurait été mieux si le ministre n'avait pas
travaillé au dossier.
Le ministre nous a dit qu'il allait déposer un plan d'action
à la fin de l'année. Je lui demande plus de détails sur
l'action qu'il entend prendre dans ce dossier. Je n'aimerais pas que l'an
prochain, quand on va poser la même question au ministre, il nous dise
que c'est encore pire. Donc, d'une année a l'autre, ce serait pire. On
aimerait savoir quels sont ses projets pour améliorer cette
situation.
En ce qui concerne la réforme des tribunaux administratifs, nous
avons aussi
posé un certain nombre de questions au ministre et on n'a pas
vraiment eu de réponses satisfaisantes. Quand nous avons demandé
ce que le ministre entendait faire en ce qui concerne la réforme des
tribunaux administratifs, il s'est caché derrière la
constitution. C'est la faute de la constitution, c'est la faute du
fédéral, c'est le cri de ses collègues. Je ne pensais pas
que le ministre allait jouer à cache-cache avec la constitution comme
d'autres de ses collègues, mais on apprend.
Il y a, bien sûr, un problème en ce qui concerne l'article
96 de la constitution, mais ce n'est pas une raison pour ne pas faire la
réforme des tribunaux administratifs au Québec.
Premièrement, le tribunal administratif existe au Québec depuis
au moins 60 ans; la constitution n'a pas empêché
l'établissement de ces tribunaux administratifs et il y a au moins 50 de
ces tribunaux au Québec à l'heure actuelle. Le citoyen se
retrouve souvent devant un tribunal administratif et on veut qu'on apporte
certaines réformes à ces tribunaux.
Il y a des problèmes que nous avons déjà
soulevés au niveau des tribunaux administratifs. Premièrement, il
y a le problème des règles de pratique parce que les
règles de pratique varient d'un tribunal à l'autre et ce serait
une bonne idée d'avoir des règles de pratique uniformes pour tous
les tribunaux administratifs du Québec.
Il y a aussi le problème des pouvoirs octroyés à
ces tribunaux par l'Assemblée nationale. Est-ce que le ministre a une
politique en ce qui concerne les pouvoirs qu'on octroie à ces tribunaux
administratifs? Cela va de soi qu'on ne peut pas donner tous les pouvoirs
à ces tribunaux administratifs; par exemple, on ne va pas créer
un tribunal administratif en ce qui concerne les mariages, on ne s'attend pas
que ces questions soient traitées par un tribunal administratif, on
s'attend que ces questions soient traitées par les cours, la Cour
supérieure surtout.
Aussi, il y a le problème de la mentalité de certains
fonctionnaires qui minimisent ou ignorent les droits des citoyens. Il y aurait
quelque chose à corriger de ce côté.
C'est bien de parler de la Charte des droits et libertés de la
personne; pas le ministre de la Justice, mais le leader du gouvernement nous a
dit lors d'une conférence de presse durant le week-end qu'on va avoir
une commission qui va rouvrir la Charte des droits et libertés de la
personne du Québec. Il y a déjà des journalistes qui ont
dit que ce sera fait dans un but de propagande et non pas dans un but de
vraiment ajouter aux droits et libertés des Québécois. Peu
importe, si le ministre de la Justice est sérieux en ce qui concerne les
libertés et les droits des Québécois, il y a la
réforme des tribunaux administratifs qui eux attendent aussi.
Je peux suggérer certaines réformes. Par exemple, le droit
d'être représenté par un avocat devant un tribunal
administratif. Le droit d'appel d'une décision du tribunal administratif
aux cours de justice. Ce fut refusé. Le droit d'appel en ce qui concerne
le Tribunal de la jeunesse fut refusé cette semaine dans cette Chambre
par un collègue du ministre de la Justice parce que nous avons
demandé que ce soit possible de faire appel aux cours d'une
décision du Tribunal de la jeunesse qui a été
établi en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse. Il y a aussi
une réforme qui attend, comme je l'ai déjà
souligné, l'uniformité des règles de pratique et les
règles de pratique sont très importantes dans un tribunal
administratif comme elles le sont devant les cours de justice parce que la
forme rejoint souvent le fond. La procédure rejoint souvent la substance
et l'uniformisation des règles de pratique pourrait être une bonne
façon de raffermir les droits des Québécois.
Nous demandons donc une réforme globale des tribunaux
administratifs pour qu'il y ait une justice plus distributive au Québec,
pour qu'il y ait une justice plus juste. Nous aimerions avoir des
réponses précises sur ce problème, réponses que
nous n'avons pas eues en commission parlementaire. Je peux ajouter que, si la
volonté politique existe, on peut faire beaucoup de choses, mais la
volonté politique n'existe pas, on ne fait rien. La volonté
politique ne semble pas exister aujourd'hui au ministère de la Justice
pour faire cette réforme en ce qui concerne les tribunaux
administratifs.
Deuxièmement, j'aimerais aborder le problème de
l'humanisation des services de détention. Au Québec, il y a
à peu près 16 000 Québécois qui subissent
l'incarcération chaque année dans les prisons provinciales.
Aussi, le suicide est treize fois plus élevé dans les prisons du
Québec que dans la société en général. Il y
a aussi un surpeuplement dans les prisons. Le ministre, s'il suit ses dossiers,
doit être au courant de ce surpeuplement dans les prisons. J'insiste une
autre fois, M. le Président, le ministre actuel est en fonction depuis
1976, donc il a eu le temps de faire des réformes; ce n'est pas comme
quand on demande à un nouveau ministre de faire des réformes.
J'ai appris par les journaux, il y a quelques jours, qu'à
Montréal on héberge des détenus au YMCA; il y a tellement
de surpeuplement à la prison de Bordeaux qu'on a envoyé des
détenus au YMCA pour purger leur sentence. J'étais bien surpris
d'apprendre que les policiers n'étaient même pas informés
qu'on ait envoyé des prisonniers au YMCA au centre-ville de
Montréal.
J'imagine qu'à l'avenir le ministre va peut-être avoir la
bonne idée d'envoyer des
détenus à l'hôtel Hilton et peut-être qu'on va
voir des gens qui vont briser des fenêtres pour passer quelques jours,
quelques semaines à l'hôtel Hilton. Ce serait amusant d'avoir un
tel genre de choses au Québec, surtout en cette année de coupures
budgétaires. (22 h 50)
C'est évident qu'à cause du surpeuplement des prisons les
Québécois subissent des préjudices, pas seulement dans les
prisons, mais aussi les gens qui sont traduits devant les cours de justice et
je vais vous donner un exemple. À cause du surpeuplement des prisons
à Montréal, l'emprisonnement discontinu est très rare
à Montréal. Qu'est-ce que c'est, l'emprisonnement discontinu? Il
y a des lois où on prévoit que, pour certaines infractions,
l'accusé, la personne trouvée coupable pourrait purger sa
sentence en fin de semaine. Le but est, bien sûr, de protéqer
l'emploi de ces personnes pour empêcher leur famille de tomber sous
l'aide sociale. Donc, c'est l'intérêt de l'État du
Québec qu'il y ait l'emprisonnement discontinu.
À cause de difficultés administratives, M. le
Président, et à cause du surpeuplement à Bordeaux,
à Montréal et ailleurs, c'est rare, comme je vous l'ai dit, qu'il
y ait une sentence d'emprisonnement discontinu. Aujourd'hui, à
Montréal, les procureurs de la couronne, - j'imagine que c'est sur les
ordres du ministre - s'opposent à ces sentences et ils ne les
suggèrent pas parce qu'il y a surpeuplement à Bordeaux. Les juges
ne peuvent pas rendre ces sentences d'emprisonnement discontinu à
Montréal, quoique, ailleurs au Québec, ce soit possible. Donc, il
y a une inégalité pour les Québécois. Les
Québécois à Montréal ne peuvent pas
bénéficier d'une telle sentence, alors que des
Québécois qui se trouvent ailleurs au Québec, disons
à Chicoutimi, pourraient bénéficier de cet emprisonnement
discontinu. Le ministre a admis qu'il y a un problème. Le ministre est
là depuis cinq ans. Dans cinq ans, on peut faire quelque chose, si on a
la volonté de le faire. Quand on n'a pas de volonté, on ne fait
rien.
Dans le même ordre d'idées, - et je termine
là-dessus, M. le Président - il y a eu des journées
d'étude à Orsainville, il y a quelques jours, parce que les
agents de la paix n'ont pas de convention collective et, durant cette
journée d'étude, les détenus ont fait ce qu'on appelle
dans les médias un mini-bingo. Il y a 28 autres centres de
détention au Québec. J'ai demandé au ministre ce qu'il
ferait si on faisait des mini-bingos ou des bingos partout. Il n'a pas
donné de réponse. J'ai demandé au ministre: Que
ferez-vous, s'il y a des bingos partout au Québec? Ce ne sont pas des
bingos où on joue, bien sûr. J'ai demandé au ministre:
Allez-vous faire appel à la Sûreté du Québec pour
qu'il y ait de la sécurité dans les prisons? J'ai demandé
au ministre s'il ferait appel à l'armée canadienne, comme c'est
son droit et même son devoir, si les autorités civiles ne
pouvaient pas garantir la sécurité dans les prisons. Il n'a pas
répondu.
Il y a, pour résumer, des problèmes dans nos prisons:
problème de surpeuplement, problème des services médicaux,
problème des droits des prisonniers. J'ai posé toutes sortes de
questions sur ces problèmes. Je n'ai pas eu de réponse
satisfaisante.
En terminant, j'aimerais demander au ministre de répondre
à nos questions et de ne pas commencer par une attaque contre
l'Opposition, de répondre seulement à ces questions d'une
façon sereine, sans attaquer l'Opposition ou les questions qu'on a
posées. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la
Justice.
M. Marc-André Bédard
M. Bédard: Mes remarques seront brèves, M. le
Président, parce que j'ai l'impression qu'avec l'ensemble de tous les
problèmes ou tous les sujets soulevés par le député
de D'Arcy McGee, ce n'est pas ici, ce soir, que nous allons les régler
tous. Cependant, je suis, en premier lieu, un peu surpris des remarques
plutôt mesquines du député de D'Arcy McGee au sujet de la
décision que nous avons prise comme gouvernement de tenir une commission
parlementaire concernant l'étude de la Charte des droits et
libertés de la personne.
Je pense, au contraire, que le député de D'Arcy McGee
devrait se réjouir, lui qui se prétend un défenseur des
droits et libertés individuelles, que le gouvernement ait
décidé non pas de procéder seulement avec un projet de loi
où nous évoquions la nécessité de mettre en place
des programmes d'action positive, mais qu'il ait décidé
plutôt d'élargir la discussion en permettant une commission
parlementaire sur l'ensemble de la Charte des droits et libertés de la
personne. Enfin, la population, tous les groupes concernés par les
droits et libertés auront l'occasion de venir s'exprimer en commission
parlementaire, de faire état de leurs préoccupations au
gouvernement, aux membres de l'Opposition, de manière que, lorsque nous
légiférerons, nous pourrons le faire à partir non pas
d'une seule préoccupation, mais d'un ensemble de préoccupations
de différents groupes qui existent dans la société.
Effectivement, la Charte des droits et libertés de la personne,
après plus de cinq ans d'existence, mérite une révision
totale, mérite d'être améliorée, d'autres droits
doivent être consentis à l'ensemble des citoyens. Il est tout
à fait normal... Si le député de D'Arcy McGee ne s'en
réjouit pas,
je suis convaincu - et j'en ai déjà des échos - que
de nombreux groupes au Québec se réjouissent déjà
de cette décision du gouvernement de tenir une commission parlementaire
concernant la Charte des droits et libertés de la personne.
Le député de D'Arcy McGee a enchaîné sur la
nécessité d'une réforme des tribunaux administratifs. Il
prétend que nous n'avons pas répondu à ses questions en
commission parlementaire, quoique je m'aperçoive que le
député de D'Arcy McGee a pris la mauvaise habitude de dire qu'on
ne répond pas à ses questions lorsqu'on a le malheur de ne pas
répondre ce qu'il aimerait entendre. Entre vous et moi, autant
l'Opposition est maîtresse de ses questions, autant il reste au moins au
gouvernement la possibilité de donner les réponses qu'il juge
à propos.
Entre autres, concernant les tribunaux administratifs, c'est bien beau,
de la part du député de D'Arcy McGee, de se découvrir de
grandes préoccupations et de parler de réforme globale des
tribunaux administratifs, alors qu'il n'est même pas capable de se rendre
compte que tous ces tribunaux administratifs, que nous avons aussi au
Québec, qui rendent des services incommensurables à l'ensemble
des citoyens, sont en train d'être contestés d'une façon
systématique, du point de vue de leurs assises juridiques. Vous le
savez, il n'y a pas si longtemps, il y a eu un jugement de la Cour
suprême du Canada, concernant le Tribunal des transports, qui nous oblige
à présenter un projet de loi pour apporter certaines corrections.
Nous avons également le Tribunal des professions dont la
légalité a été mise en doute. Nous avons
également eu, dernièrement, un jugement rendu en ce qui a trait
à la régie du logement concernant l'Ontario, mais cela pourrait
avoir des effets très importants pour la Régie
québécoise du logement.
À partir du moment où on se rend compte que la
sécurité juridique de ces tribunaux administratifs, qui sont
pourtant nécessaires pour le Québec, est mise en cause
systématiquement, une des premières préoccupations que
j'ai eue, comme ministre de la Justice, a été de faire en sorte
qu'il y ait des discussions avec le fédéral pour asseoir une fois
pour toutes la sécurité de nos tribunaux administratifs. (23
heures)
Comme ministre de la Justice, durant quatre ans, à toutes les
conférences fédérales-provinciales, ou presque, que nous
avons eues, j'ai toujours évoqué devant les autorités
fédérales la nécessité que le gouvernement
fédéral accepte des modifications à l'article 96 pour que
les citoyens ne soient pas placés dans un état
d'insécurité. Jamais les autorités fédérales
n'ont voulu consentir à ces demandes fondamentales de la part du
Québec, en matière de justice.
Lors des discussions constitutionnelles, huit ou neuf provinces
s'étaient mises d'accord pour demander aux autorités
fédérales de régler, une fois pour toutes, cette
insécurité juridique qui existe au niveau de nos tribunaux
administratifs, en acceptant des amendements au niveau de l'article 96. Or,
nous nous sommes heurtés, encore une fois, à une réponse
négative de la part des autorités fédérales.
Je conviens que nous puissions faire des améliorations au niveau
du fonctionnement des tribunaux administratifs, que ce soit en ce qui a trait
à l'uniformisation de la procédure, ou d'autres
améliorations que nous pourrions avoir à l'esprit. Cette
préoccupation, nous l'avons. Le député de D'Arcy McGee
aurait avantage à regarder un peu plus ce qui se fait du point de vue
gouvernemental, surtout lorsqu'il faisait une suggestion concernant les
tribunaux administratifs en disant qu'il faudrait donner un droit d'appel des
décisions des tribunaux administratifs. S'il avait suivi un peu la
législation gouvernementale, il se serait rendu compte que dans
plusieurs lois, justement, depuis quelques années, nous avons
donné des droits d'appel des décisions rendues par les tribunaux
administratifs, pour permettre au citoyen de mieux faire valoir ses droits.
En ce qui a trait aux tribunaux administratifs, je puis vous assurer que
la volonté politique non seulement du ministre de la Justice, mais du
gouvernement du Québec, c'est de procéder à une
réforme en profondeur de nos tribunaux administratifs, mais de le faire
lorsque nous aurons au moins la certitude que ces tribunaux administratifs ne
seront pas mis en danger par des contestations devant les tribunaux. C'est
élémentaire.
Le député de D'Arcy McGee, en parlant tout à
l'heure du surpeuplement dans les prisons, a donné entre autres comme
exemple le fait que nous ayons acheminé des détenus au YMCA
à Montréal. Je voudrais lui faire remarquer que le YMCA de
Montréal, dont l'expérience dans les services communautaires
particulièrement avec les détenus des pénitenciers
fédéraux est bien connue, constitue une des meilleures maisons de
réhabilitation que nous ayons. Le ministère de la Justice a
conclu une entente avec le YMCA - environ 80 détenus y sont
présentement - afin de suivre un programme de réhabilitation. Ce
programme produit des effets très positifs. Je ne comprends vraiment pas
pourquoi le député de D'Arcy McGee semble avoir quelque chose
à redire par rapport à cette initiative prise par le
ministère de la Justice qui va dans le sens d'une préoccupation
de réinsertion sociale pour les détenus.
Le député de D'Arcy McGee semble placer la
responsabilité sur les épaules du ministre de la Justice, du fait
qu'il y a surpeuplement dans les prisons.
Effectivement, c'est le cas.
Ce n'était cependant pas le cas il y a deux ans. Je pense
qu'aucun ministre de la Justice ne peut prévoir cet état de fait.
Ici au Québec, comme dans tout le reste du Canada, nous avons
assisté à une hausse du taux de la criminalité. Quoi qu'on
en dise, le Québec est une des provinces où la hausse du taux de
criminalité est la moins élevée en comparaison avec les
autres provinces, mais je ne crois pas qu'on doive, je dirais, se consoler du
fait que cette hausse de la criminalité soit moins qrande au
Québec que dans les autres provinces, parce qu'effectivement cette
hausse de criminalité cause un problème majeur, entre autres, le
surpeuplement de nos institutions de détention.
C'est exact que ce surpeuplement au niveau des prisons crée une
situation qui ne permet pas à l'expérience du système des
sentences de fin de semaine de donner tous les résultats que nous
aurions pu en attendre. Peut-être que l'expérience des sentences
de fin de semaine n'a pas connu les résultats escomptés, M. le
Président, premièrement, parce que le système a
été un peu trop généralisé, je crois;
deuxièmement, c'est qu'il peut être difficilement appliqué
lorsqu'il y a un surpeuplement dans les prisons, et il faut en tenir compte.
C'est évident que la manière d'essayer de résoudre le
problème, c'est peut-être de s'attaquer à la racine
même des causes de ce surpeuplement.
M. le Président, je crois qu'une des grandes causes du
surpeuplement dans nos institutions carcérales, c'est que le nombre de
citoyens qui choisissent de faire de la prison plutôt que de payer des
amendes s'est accru considérablement. De plus en plus, nous voyons des
citoyens qui décident de faire de la prison plutôt que de payer
des amendes. D'ailleurs, dans nos prisons, à l'heure actuelle,
au-delà de 30% des individus y sont à cause de cette
décision de faire de la prison plutôt que de payer des amendes. Je
crois que c'est inacceptable et qu'il y a vraiment trop de citoyens qui ne
doivent pas être en prison et qui y sont à l'heure actuelle
étant donné cette situation.
Il va nous falloir trouver des solutions qui vont faire en sorte que le
nombre de citoyens qui choisissent la prison plutôt que de payer des
amendes diminue. Nous avons travaillé au ministère de la Justice
dans ce sens. H y a quelques mois, une étude a été faite
sur ce phénomène. Nous avons référé cette
étude au Conseil consultatif de la justice et, dès le
début de l'automne, le Conseil consultatif de la justice s'est
engagé à nous faire part de ses recommandations. Mais je crois
qu'il y a moyen de contrer ce phénomène par d'autres solutions
qui pourraient être, par exemple, la saisie des biens avant que soit
accepté le fait que quelqu'un aille en prison plutôt que de payer
une amende. D'autres solutions peuvent être trouvées, à
condition que nous approfondissions notre étude. (23 h 10)
M. le Président, je pense que, quand le député de
D'Arcy McGee essaie de faire reposer sur les épaules seules du ministre
le phénomène du surpeuplement de nos institutions de
détention, il exagère grandement.
Cela peut peut-être faire image, mais je crois que c'est minimiser
grandement l'analyse du phénomène lui-même auquel nous
avons à faire face, pas seulement ici au Québec, mais dans toutes
les autres provinces. Je tiens à dire également au
député de D'Arcy McGee que cette situation n'existe pas seulement
a Montréal. Ce phénomène du surpeuplement de nos
institutions existe aussi dans les régions et en dehors de
Montréal, de telle façon que ce n'est pas vrai qu'une injustice
est faite aux citoyens et aux citoyennes de Montréal par rapport au
reste de la province.
Le dernier sujet qu'a abordé mon collègue de D'Arcy McGee
concerne les délais devant nos cours de justice. Effectivement, M. le
Président - je l'ai d'ailleurs dit en commission parlementaire -le
problème des délais a toujours constitué une
préoccupation prioritaire, au ministère de la Justice. Il est
clair que dans certaines juridictions les délais sont trop longs et, en
fin de compte, ils peuvent constituer des dénis de justice pour les
citoyens ou citoyennes qui ont a aller devant les tribunaux. Cependant, je
crois qu'il ne faut pas exagérer non plus. Le député de
D'Arcy McGee sait très bien qu'en ce qui regarde la Cour provinciale, la
Cour des sessions de la paix et le Tribunal de la jeunesse, on peut dire que
les délais sont raisonnables devant ces juridictions. Il y a même
eu, dans certains cas, beaucoup d'améliorations. Effectivement, le
problème se situe au niveau de la Cour supérieure à
Montréal, en particulier, et dans quelques autres districts au
Québec.
Le député de D'Arcy McGee prétend que, comme
gouvernement, nous n'avons rien fait pour essayer de décharger les
rôles de la Cour supérieure de manière à diminuer
les délais. Je pense qu'il est foncièrement injuste en faisant
cette affirmation parce que, depuis trois ou quatre ans, nous avons pris
plusieurs mesures en ce sens. Je pense, par exemple, a l'augmentation de la
juridiction de la Cour provinciale de 3000 $ à 6000 $. Cette loi a
été faite uniquement pour qu'il y ait moins de causes devant la
Cour supérieure et que les délais soient diminués. Vous
avez eu la Loi sur l'assurance
automobile qui, nous l'espérions, pouvait contribuer à
faire disparaître un nombre très impressionnant de causes devant
la Cour supérieure. Nous avons présenté le projet de loi
no 80 aux fins de simplifier les procédures devant les Cours d'appel.
Nous avons tout fait pour encourager également le système de
communication de la preuve qui permet de raccourcir les délais, les
frais et les tracasseries pour l'ensemble de nos concitoyens et
concitoyennes.
Malgré tous ces efforts, M. le Président, il y a encore -
nous sommes à même de le constater - des améliorations
à faire. Nous allons y consacrer tous nos efforts au cours des mois qui
viennent. Mais je crois que le député de D'Arcy McGee devrait
savoir que lorsqu'on parle de délais devant les cours de justice, ceci
ne regarde pas seulement le ministère de la Justice. Le ministère
de la Justice n'est pas le seul intervenant qui puisse améliorer la
situation. Je crois que raccourcir les délais, entre autres, devant les
Cours supérieures représente un travail de collaboration entre le
ministère de la Justice, le barreau, la magistrature. Nous avons
continuellement des rencontres, nous essayons de faire la réflexion la
plus approfondie possible pour trouver d'autres solutions que celles que nous
avons trouvées jusqu'à maintenant.
Je puis assurer non seulement le député de D'Arcy McGee,
mais la population du Québec que nous allons employer tous nos efforts
pour essayer d'améliorer encore une fois la situation et,
peut-être, d'ici l'automne, préparer un plan d'action plus
détaillé dans ce sens.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Pour faire suite au
débat sur le rapport des crédits, est-ce que le rapport des
crédits est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
M. le leader adjoint, au nom du ministre des Finances, propose-t-il les
première, deuxième et troisième lectures?
M. Vaugeois: Prends ton temps, M. le leader adjoint.
Projet de loi no 19
Première, deuxième et troisième
lecture
M. Bertrand: Maintenant que le député de
Trois-Rivières, adjoint parlementaire au ministre
délégué aux Affaires parlementaires, me permet de
reprendre mon siège, je voudrais effectivement procéder à
une motion de première, deuxième et troisième lecture sur
le projet de loi no 19, Loi octroyant à Sa Majesté des deniers
requis pour les dépenses du gouvernement pour l'année
financière se terminant le 31 mars 1982 et pour d'autres fins du service
public.
Je fais motion pour que ce projet de loi soit adopté dans ses
première, deuxième et troisième lectures.
M. Vaugeois: Cela demande réflexion, hein?
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté?
Une voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première, deuxième et
troisième lecture de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.
M. Bertrand: Sur ce, je ferais motion pour que nous ajournions
nos travaux à demain matin, 10 heures.
M. Vaugeois; Vers 10 heures, 10 h 05.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont
ajournés jusqu'à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 23 h 17)