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(Dix heures treize minutes)
Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!
Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes. Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
M. le ministre des Affaires intergouvernementales.
DÉPÔT DE DOCUMENTS
Rapport annuel du ministère des Affaires
intergouvernementales
M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, il me
fait plaisir de déposer le rapport annuel du ministère des
Affaires intergouvernementales pour l'année 1978-1979.
Rapport des activités de la
bibliothèque
de l'Assemblée nationale et rapport
du Vérificateur général,
1978-1979
Le Président: Merci. Rapport déposé. J'ai
maintenant l'honneur de déposer le rapport des activités de la
bibliothèque de l'Assemblée nationale pour l'année 1979,
ainsi que le rapport annuel du Vérificateur général pour
l'année 1978-1979.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Questions orales des députés.
M. le chef de l'Opposition officielle.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS Elections
partielles
M. Ryan: M. le Président, il y a maintenant quatre
vacances à l'Assemblée nationale. Le député de
Johnson a démissionné de son siège en décembre
dernier. Il y eut ensuite, au début de janvier, la démission du
député de Mégantic-Compton et la démission du
député de Brome-Missisquoi. Nous avons reçu, hier, la
démission du député d'Outremont. Le premier ministre,
à plusieurs reprises, a été interrogé sur les
intentions du gouvernement à ce sujet. Il avait déclaré
notamment, dans un communiqué de presse émis par son bureau le 14
février, que la date des élections partielles serait
annoncée une fois que la date du référendum aurait
été fixée, ce qui nous avait tous induits à
comprendre que nous serions informés de la date des élections
complémentaires dès que la date de la tenue du
référendum aurait été fixée. Evidemment,
tous les événements reliés au référendum se
sont déroulés sans que nous entendions parler du premier ministre
à ce sujet.
Ensuite, le 3 mars, interrogé par mon collègue, le
député de Bonaventure, en cette Chambre, le premier ministre
répondait: Je l'ai dit et je le répète, "ces
élections partielles auront lieu le plus vite possible aussitôt
après le référendum."
Récemment, le premier ministre a été
interrogé encore à ce sujet et je pense que sa déclaration
la plus récente est à peu près celle-ci, qu'il donnait
dans une conférence de presse tenue la semaine dernière: Je puis
m'engager à ce qu'au plus tard et cela très fermement
avant une prochaine session du Parlement, ces comtés seront
représentés à l'Assemblée nationale.
Evidemment, de fois en fois, on recule et les délais s'allongent.
Je voudrais qu'on sache clairement, ce matin, de la part du premier ministre,
les intentions du gouvernement à ce sujet. Est-ce que le gouvernement
entend convoquer ces élections complémentaires,
conformément à la promesse qui avait été faite,
aussitôt après le référendum? Je rappelle au premier
ministre que le référendum a déjà eu lieu il y a
dix jours.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): II y a une chose que je dois dire
au chef de l'Opposition et je pense que la plupart de nos concitoyens seront
d'accord, c'est que, premièrement, il serait impossible, de toute
façon, puisqu'on doit proroger la session du Parlement le 20 ou le 21
juin ou il aurait été impossible, même si j'avais voulu
déclencher des élections partielles tout de suite après le
référendum, que ces comtés, y compris, bien entendu, celui
d'Outremont, qui est vacant depuis hier, puissent être
représentés pendant cette session. Il est peut-être
opportun aussi de rappeler que, au moment où a été
fixée la date du référendum là, je ne
remonte pas à toutes les autres déclarations on sortait
littéralement de deux élections fédérales
générales qui ont impliqué les Québécois
comme les autres Canadiens à l'intérieur de douze mois et qu'on
vient d'ajouter les 35 jours officiels d'un référendum. Alors, il
nous paraît ou il me paraît, quant à moi, tout à fait
absurde de penser qu'on pourrait faire des élections dans ces quatre
comtés avant le plein coeur de l'été. Je pense que les
citoyens nous considéreraient un peu comme des gens qui sont
tombés sur la tête.
Ce dont j'ai parlé il y a quelques jours et ce à quoi je
peux m'engager très simplement c'est ceci, c'est ce que j'ai dit, c'est
qu'avant toute nouvelle
session du Parlement, alors qu'il serait opportun et même plus
qu'opportun, mais démocratiquement indiqué que ces quatre
comtés soient représentés, ils seront
représentés. C'est tout ce que je peux dire pour l'instant.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: D'abord, je voudrais rappeler au premier ministre que le
rôle d'un député ne consiste pas seulement à venir
siéger à l'Assemblée nationale, qu'il doit consacrer
encore beaucoup plus de temps à s'occuper des problèmes de son
comté, sur les lieux. Par conséquent, le critère majeur
pour déterminer la date d'élections complémentaires ne
devrait pas être le moment où la Chambre siège. Si un
député était élu, par exemple, au cours de
l'été, c'est évident qu'il peut s'occuper de beaucoup de
choses avant que l'Assemblée nationale reprenne ses travaux. Par
conséquent, ça fait plusieurs fois que j'entends cet argument et
je tiens à souligner la partie qui vient le compléter.
Maintenant, le premier ministre est sans doute au courant des
problèmes très difficiles que cela pose au point de vue de
l'organisation des partis et au point de vue humain également. Il y a
des personnes qui se demandent si elles vont se porter candidates; elles ont
des occupations professionnelles qu'elles devront ajuster en
conséquence. Là, elles sont suspendues dans l'incertitude la plus
totale et, dans le cas de Johnson, si je comprends ce que vous avez dit, il n'y
aura pas d'élection complémentaire à tout le moins avant
la fin de l'été. Cela veut dire que ce comté aura
été sans représentation pendant dix mois alors qu'on se
gaussait du grand principe de six mois, il y a à peine quelques mois,
quand on discutait de la réforme de la Loi électorale. (10 h
20)
Cela pose un autre problème, celui de la carte électorale.
Je ne sais pas si le premier ministre peut nous donner des assurances fermes
que ces élections auront lieu, disons, avant la fin de
l'été, avant la fin du mois d'août, avant la fin de
septembre pour qu'on sache, nous autres, ce que nous devrons faire dans les
comtés afin d'assurer que les choses se feront de la manière la
plus active, la plus dynamique possible. Là, on reste dans l'incertitude
et on a de l'à-peu-près comme on en a eu depuis six mois.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je dois
faire remarquer au chef de l'Opposition que même si on arrivait à
la fin de l'été, ce ne serait pas dix mois, même pour le
comté de Johnson le plus anciennement vacant, mais ce serait à
peu près huit ou neuf mois. Je trouve, en effet, que c'est long.
Deuxièmement, pour ce qui est de la carte électorale et pour ce
qui est des préparations, cela affecte tout le monde. La nouvelle carte
électorale affecte tout le monde. Je pense que tous les partis qui
veulent sérieusement travailler en fonction des prochaines
élections, à quelque moment que ce soit, y compris les
partielles, doivent commencer à s'ajuster à ces nouveaux
comtés, 122, ce qui affecte à peu près tous les
comtés ou, enfin, une très grande partie des comtés du
Québec. Pour ce qui est de donner des précisions absolues au chef
de l'Opposition, je regrette, mais je ne pourrai pas lui en donner plus que ce
que je lui ai donné tout à l'heure, c'est-à-dire que,
très nettement, ce ne sera pas avant la fin de l'été et,
deuxièmement, que cela va être avant l'ouverture d'une autre
session. Je sais bien que ce n'est pas le seul facteur. Un député
a son utilité, Dieu sait, et souvent jour après jour en dehors du
Parlement, mais le critère qu'on s'est fixé et qui me permet de
dire qu'au moins il y aura cette équité parlementaire
vis-à-vis des quatre comtés, c'est qu'avant qu'une autre session
soit ouverte il y aura des députés dans ces comtés.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Une question additionnelle très brève.
Quand le premier ministre dit: II n'y aura pas d'élections
complémentaires avant la fin de l'été, est-ce qu'il veut
dire mathématiquement qu'il n'y aura pas d'élections
complémentaires avant le 21 septembre?
M. Lévesque (Taillon): Pas nécessairement. Je dis
simplement avant la fin de l'été d'une façon
générale.
M. Ryan: Vous aimez les choses générales.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question
additionnelle.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Simplement une précision.
Est-ce que le premier ministre peut nous dire si les élections
partielles se tiendront en vertu de la carte électorale actuelle ou de
la future carte électorale?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Sauf erreur, cela va être la
nouvelle, parce qu'elle est en vigueur.
Le Président: A l'ordre!
M. Lévesque (Taillon): Juste un instant, avant que le
député parte sur le sentier de la guerre. Je vais demander
si le député de Bonaventure n'a pas d'objection
peut-être qu'ensuite il pourra réagir au ministre d'Etat de
la Réforme électorale de préciser un peu l'état
dans lequel on se trouve vis-à-vis de ces élections partielles et
de la nouvelle carte.
Le Président: M. le ministre d'Etat à la
Réforme électorale.
M. Bédard: Pour être sûr de donner la bonne
réponse, je préférerais prendre avis. Je donnerai demain
toutes les réponses nécessaires.
M. Lavoie: La loi 9, s'il vous plaît, ou la loi 10.
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, quant à nous, il est
clair que les élections partielles, si elles devaient avoir lieu avant
une élection générale, devront nécessairement et
légalement être tenues à partir des anciens comtés.
Mais ce qui m'intéresse... On sait que, si des élections
générales devaient être déclenchées avant la
date prévue pour le recensement annuel, c'est-à-dire le
début d'octobre, ce serait l'ancienne carte électorale qui serait
utilisée pour la tenue des élections générales. Je
voudrais savoir du premier ministre si, ce matin, il est prêt à
nous donner l'assurance que ce sera effectivement la nouvelle carte
électorale qui sera utilisée et, donc, qu'il n'est pas question
d'élections générales avant octobre, c'est-à-dire
avant la date prévue pour le recensement annuel.
Une Voix: Le 4 octobre.
Le Président: M. le député de...
M. Lévesque (Taillon): Tenant compte de précisions
que je commence à me rappeler, je ne peux pas donner cette assurance,
parce que je suis obligé d'enchaîner sur ce qu'a dit le chef de
l'Opposition. Le chef de l'Opposition vient de se lamenter à deux
reprises sur le fait que, dans le cas de Johnson, par exemple, même
à la fin de l'été, cela ferait huit ou neuf mois. Il n'est
pas impossible qu'il y ait des élections, comme je l'ai dit, autour de
la fin de l'été et si, à ce moment, cela implique que ce
soit sur la base des anciens comtés, tant pis. Cela voudra dire qu'au
moment des élections générales, forcément, il y
aura des rajustements à faire.
M. Gratton: M. le Président, on n'a pas compris ma
question.
Le Président: M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Ou, si on l'a compris, on ne veut pas y
répondre.
Voici ce que je veux savoir du premier ministre: Est-ce que,
aujourd'hui, il peut nous dire que les élections générales
n'auront effectivement lieu qu'après la date prévue pour le
recensement annuel, c'est-à-dire le 4 octobre, et, donc, à partir
de la nouvelle carte, ou s'il y a encore possibilité que cette
élection générale soit tenue avant le 4 octobre et, donc,
à partir de l'ancienne carte?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je croyais que je venais de
répondre au député; je vais répondre de nouveau.
Oui, il y a possibilité que ce soit avant la nouvelle carte et le mois
d'octobre, et que ce soit autour de la fin de l'été, comme l'a
demandé tout à l'heure le chef de l'Opposition.
M. Gratton: Les élections générales, pas les
partielles.
M. Lévesque (Taillon): Les élections
générales, c'est sûr, ne pourront avoir lieu soit en 1980,
soit en 1981, comme je l'ai dit à maintes reprises sinon, ce
serait vraiment caricatural qu'après que la carte, la nouvelle
Loi électorale et le recensement auront été mis en
place.
M. Gratton: Est-ce que le premier ministre en fait un
engagement?
M. Lévesque (Taillon): Oui.
Le Président: Le député de
Saint-Laurent.
M. Gratton: J'ai de la misère à le savoirl
Identité des personnes qui ont causé des dommages aux
panneaux de Pro-Canada
M. Forget: Ma question s'adresse au ministre de la Justice. Vers
le 10 mars dernier, le premier ministre a fait la déclaration
remarquable et remarquée suivante: "Cela nous donne envie de prendre un
fusil et de tirer dessus". Il se référait bien sûr
M. le Président, rassurez-vous non pas à ses adversaires
durant la campagne référendaire, mais aux panneaux publicitaires
de Pro-Canada. Dans les 15 jours qui ont suivi, les voeux du premier ministre
ont été exaucés et même avec un certain enthousiasme
du côté de l'efficacité quand un premier panneau a
explosé le 28 mars et un deuxième le 30 mars.
Dans les 15 jours qui ont suivi ces événements...
Une Voix: Vous les connaissez mieux que nous autres!
M. Forget: ... il y a eu un certain nombre d'arrestations.
J'aimerais savoir du ministre de la Justice, alors qu'il s'agissait d'un crime
de nature publique et non pas d'un larcin privé ou d'un fait impliquant
des personnes de droit privé, en quelque sorte, comment se fait-il qu'on
ait pris soin de dissimuler l'identité des personnes qui faisaient
l'objet de soupçons au point d'être arrêtées ce
jour-là?
J'aimerais, en supplément, que le ministre de la Justice nous
indique non seulement l'identité des personnes qui ont été
prévenues à cette occasion-là, mais également
savoir si le ministère de la Justice, ou la Sûreté du
Québec, ou les forces policières en général avaient
raison de connaître déjà ces personnes-là.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je passerai pardessus
les insinuations malveillantes de l'introduction de mon collègue...
Des Voix: Habituelles!
M. Bédard: Oui, les insinuations malveillantes
habituelles... pour répondre à la question très
simplement. Ce serait sûrement une nouvelle méthode d'administrer
la justice pour un ministre de la Justice de faire connaître d'avance les
personnes sur qui portent des soupçons avant que des accusations ne
soient portées. Des personnes peuvent être détenues pour
interrogatoire; entre être détenues pour interrogatoire et
être soupçonnées et que des accusations soient
portées, c'est tout une différence. Alors, l'enquête
concernant ces dossiers est faite concernant les panneaux-réclame et
menée conjointement par la GRC, le service de police de la
Communauté urbaine de Montréal et la Sûreté du
Québec, les trois corps policiers. Une fois cette enquête
terminée, à partir du moment où des accusations seront
nécessaires, si les enquêtes mènent à porter des
accusations, ces accusations seront portées, normalement.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Le ministre nous informe indirectement que, même
si ces personnes ont été arrêtées et même si,
ordinairement, le nom des personnes arrêtées dans des
circonstances comme celles-là est considéré comme un
secret d'Etat et c'est considéré comme un secret d'Etat
dans ce cas-ci aucune accusation n'a encore été
portée et que ces personnes ne sont plus détenues; elles ont
été libérées immédiatement.
J'aimerais, face à ces informations, que le ministre de la
Justice nous indique si oui ou non les personnes impliquées
étaient connues déjà des autorités judiciaires.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je m'étonne de
la question et surtout de la manière dont le député semble
croire que s'administre la justice. Il y a, à l'heure actuelle, une
enquête qui est menée par trois corps de police, la GRC, le
service de police de la Communauté urbaine de Montréal et la
Sûreté du Québec. Ces enquêtes ne sont pas
terminées, de telle façon que des accusations, à ma
connaissance, ne sont pas encore portées. Dès que les
enquêtes seront terminées, comme cela se fait normalement, et que
les preuves seront suffisantes pour que des accusations soient portées,
ces accusations le seront. (10 h 30)
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, le ministre refuse de
répondre à ma question à l'effet qu'il s'agit
effectivement de personnes connues des autorités judiciaires et
même, dans le cas de deux d'entre elles, de personnes qui ont
déjà purgé des peines pour participation à des
activités terroristes.
Comment le ministre explique-t-il que, dans de telles circonstances, ces
personnes aient été libérées, étant
donné qu'il s'agit de personnes évidemment dangereuses
puisqu'elles ont un passé qui en fait foi? Comment se fait-il que ces
gens-là ont été libérés et qu'après
six semaines le ministre de la Justice considère qu'il n'est pas
d'intérêt public d'informer la Chambre de leur identité et
des actions qui sont entreprises par son ministère?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, s'il fallait
administrer la justice comme le propose le député, j'ai
l'impression que c'en serait fini des libertés du Québec et
également de la protection des droits et libertés individuels
dont se gargarisent continuellement mon collègue de l'Opposition et le
chef de l'Opposition. Ce n'est pas parce que des personnes ont des dossiers
judiciaires et je le dis d'une façon générale sans
même faire allusion à un dossier en particulier que, sur
des accusations précises, on doive les condamner d'avance par rapport
à des actes ou des gestes qui ont pu être posés.
L'administration de la justice se fait à partir d'enquêtes qui
sont menées par les corps de police et c'est ce que font à
l'heure actuelle les trois corps de police que j'ai mentionnés tout
à l'heure. Quand cette enquête sera terminée, les
recommandations seront faites normalement aux procureurs de la couronne
concernés qui évalueront les dossiers et qui verront s'il y a
lieu de porter des accusations à partir des preuves accumulées.
C'est un travail qui se fait strictement au niveau policier et aucune
intervention de l'administration ou du ministre de la Justice ne se fait dans
des enquêtes de cette nature. Quand les enquêtes seront
terminées, ce qui se fait normalement, c'est que les policiers
présentent un rapport aux procureurs de la couronne du district
judiciaire concerné. Ces derniers évaluent la preuve et à
ce moment-là prennent la décision de porter des plaintes ou
pas.
M. Forget: Une dernière question, M. le
Président.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Le ministre nie-t-il ou affirme-t-il que les personnes
impliquées ont effectivement des dossiers judiciaires relativement
à leur participation antérieure à des activités de
caractère terroriste?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je n'ai pas nié
cela et je n'ai pas à le nier ou à le confirmer. Ce n'est pas
comme cela que se fait l'administration de la justice. Que des personnes aient
des dossiers judiciaires, qu'elles aient été condamnées
aupara-
vant ou pas, une enquête se fait à partir de gestes
très précis posés, ceux auxquels fait allusion le
député qui me pose la question. Cette enquête est
indépendante des dossiers que peuvent avoir des individus. Elle se fait
sur la base et strictement... Sinon, l'administration de la justice serait
impossible. Cela se ferait à coups de soupçons et on pourrait se
permettre, parce que quelqu'un a déjà été
condamné ou à un dossier, de le condamner d'avance pour d'autres
actes. Je pense bien que ce n'est pas là où veut en arriver le
député.
Une Voix: C'est cela.
M. Bédard: M. le Président...
M. Forget: Question de privilège! Question de
privilège, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Au lieu de répondre à mes questions, le
ministre de la Justice m'impute des motifs.
M. Bédard: Vous le faites régulièrement.
M. Forget: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: S'il vous plaît!
Une Voix: Un peu de respect, soyez gentils.
M. Forget: J'ai posé au ministre de la Justice des
questions de fait portant sur des matières d'intérêt
public. Qu'il consulte son règlement et il verra qu'il est tout à
fait dans l'ordre de demander au ministre de la Justice si oui ou non des
personnes ont été arrêtées relativement à un
méfait de caractère public et si les personnes impliquées,
dont l'identité devrait être publique de toute façon, sont
oui ou non des gens qui ont été impliqués dans d'autres
causes sur lesquelles des tribunaux se sont déjà
prononcés. Il n'y a rien de secret dans les matières qui ont fait
l'objet de mes questions, M. le Président, et c'est injuste de m'imputer
des motifs. Il s'agit là de faits publics.
M. Bédard: Si c'est injuste d'imputer des motifs, je me
demande comment le député de Saint-Laurent explique son habitude
d'en imputer constamment à tout le monde, à tort et à
travers.
M. Forget: S'il se sent...
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le chef
de l'Union Nationale.
Une Voix: Respectez donc les parlementaires.
Pourquoi l'attitude attentiste du gouvernement face
à la réforme constitutionnelle?
M. Le Moignan: M. le Président, ma question s'adresse au
premier ministre. Le premier ministre a mentionné hier, en
réponse à nos questions, qu'il appartient à M. Trudeau
d'indiquer les paramètres de la discussion et que la réaction de
son gouvernement viendrait par la suite. M. le Président, je pense que
le premier ministre n'a pas compris le sens véritable du
référendum. Les Québécois majoritairement ont
rejeté le mandat de négocier la souveraineté-association;
mais jamais, par exemple, ni les 60% qui ont opté pour le non, ni les
40% qui ont voté pour le oui, n'ont indiqué à leur
gouvernement d'adopter l'attitude attentiste qu'il pratique actuellement et
qu'il semble vouloir même bouder les résultats du
référendum. Après la stratégie de
l'étapisme, nous venons de voir naître une nouvelle
stratégie: l'attentisme. Avec cela, le gouvernement innove dans la
continuité historique. Pour la première fois de notre histoire,
notre gouvernement, le gouvernement de tous les Québécois et
depuis toujours, comme je l'indiquais hier, le leader dans toutes les
conférences fédérales-provinciales, le leader dans le
processus de la réforme constitutionnelle, est en train de nous dire:
Attendons et nous réagirons par la suite. Ce qui m'étonne
là-dedans, c'est qu'un gouvernement qui se dit nationaliste, qui
proclame bien haut la fierté et la dignité du peuple
québécois, ne semble pas, pour une première fois, vouloir
se tenir debout dans tout ce processus de la réforme constitutionnelle.
Alors, dans un premier temps, M. le Président, ce n'est pas cela que les
Québécois demandent à leur gouvernement.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
M. Le Moignan: J'ai ma première question, M. le
Président.
Le Président: Puis-je vous demander de formuler votre
question?
M. Le Moignan: Le gouvernement n'est-il pas en train d'abdiquer
le principe même de ses responsabilités comme porte-parole du
Québec, foyer principal de la nation canadienne-française?
Une Voix: Ah! Il y en a une nation. Des Voix: Ah!
M. Le Moignan: A mon avis, un gouvernement... Cela remonte bien
loin... relisez Daniel Johnson. Il a parlé de la nation canadienne, de
la nation au sens sociologique du mot.
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le chef
de l'Union Nationale, puis-je vous demander de formuler votre question?
M. Le Moignan: Je reviens donc pour demander si le gouvernement
n'est pas en train d'abdiquer ses responsabilités à un moment
aussi important de notre histoire.
Voici ma deuxième question: Pourquoi est-il nécessaire
d'attendre après le 9 juin pour connaître le contenu des
propositions du gouvernement du Québec dans le processus
engagé?
Les Québécois ont le droit, il me semble, de savoir, avant
le 9 juin, l'essentiel de la plate-forme constitutionnelle qu'entend proposer
le gouvernement du Parti québécois. N'est-il pas dans l'existence
même de ce gouvernement de faire preuve de leadership encore une fois, et
de ne pas être à la remorque des propositions que nous fera le
gouvernement fédéral?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, ça
me donne l'occasion, pour la deuxième fois en deux jours hier,
c'était le député d'Argenteuil; aujourd'hui, c'est le
député de Gaspé de résister à la
tentation de commencer en disant: Je remercie le conférencier.
Franchement, c'est la même chose qui revient sans arrêt;
pour ce qui est d'abdiquer, ça, c'est un mot dangereux de la part du
député de Gaspé et de certains de nos amis d'en face. Le
sens du référendum, quant à moi, il est très
simple. La population nous a refusé, majoritairement, le mandat que nous
demandions par la question référendaire. Nous demeurons donc avec
le mandat que nous avionsdepuis 1976, c'est-à-dire, fondamentalement,
celui que tous les gouvernements provinciaux du Québec, ont eu, je
dirais, depuis toujours, c'est-à-dire de défendre tout l'acquis
qui peut s'appeler l'autonomie existante du Québec et de promouvoir,
autant que possible, son extension dans quelque contexte que ce soit de
fédéralisme à renouveler, de fédéralisme
à amender, à maquiller ou peu importe. (10 h 40)
Sur ce point, qui est de défendre et de promouvoir l'autonomie du
Québec, je veux résister à toute provocation. Mais je dois
dire que si on veut parler d'abdication, il y a moins de chances, y compris
avec l'option qu'on défend depuis des années, que le gouvernement
actuel et ce qu'il représente aille à quelque abdication que ce
soit des intérêts du Québec que ceux qui nous font face
ici. Je pense que les faits sont assez connus pour qu'il n'y ait pas beaucoup
de discussion dans la population, en tout cas.
Pour ce qui est d'attendre, je l'ai dit hier et je le
répète. Quand le premier ministre fédéral du Canada
vient intervenir au point de littéralement tasser dans le coin avec sa
machine et, ensuite, lui-même, ceux qui, officiellement, sont
censés être le camp du non au référendum et que,
profitant de la dernière occasion qui se présente, au moment de
la campagne, il dit littéralement; Non seulement je mets mon
siège, mais nous mettons nos sièges en jeu, nous, les
représentants du Québec à Ottawa, pour obtenir aux
Québécois c'est aux Québécois qu'il parlait
le renouvellement du fédéralisme dans un sens qui serait
positif pour le Québec, ou alors on n'a rien compris, mais il nous
semble normal de commencer par écouter ce qu'il aura à di re, et
ça, ça commencera le 9 juin. On n'a eu aucune indication
concrète sur quoi que ce soit. Jusqu'ici, il y a eu des indications
quelque peu inquiétantes, mais qui n'étaient pas
concrètement reliées aux pourparlers qui doivent s'engager.
A partir de là, le Québec aura un rôle non pas
passif, mais actif, aussitôt que l'on pourra voir quels sont les
paramètres dans lesquels M. Trudeau prétend travailler.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
M. Le Moignan: Je remercie à mon tour le
conférencier, M. le Président. Mais le premier ministre a
déclaré, il n'y a pas tellement longtemps: Soyez sans crainte, on
va tout vous dire sur les négociations. On lui demande quelles positions
il veut défendre et il ne semble pas, à ce moment-ci, en
avoir.
Il a déclaré hier qu'il y a des dossiers constitutionnels
qui sont prêts et que d'autres sont en préparation.
Peut-être qu'il pourrait nous dire à ce moment-ci quels sont ceux
qui sont prêts et quels sont ceux qui sont en préparation.
J'imagine que ce sont des dossiers que vous allez présenter à
Ottawa au cours des prochains jours.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vais me
contenter de répéter ce que j'ai dit hier. Tout ce qui de
près ou de loin affectera, à l'intérieur des pourparlers
qui vont s'engager, les intérêts du Québec et la
façon dont cela va se dérouler et le contenu de ces pourparlers,
nous nous sommes engagés et c'est un engagement qu'on va tenir
à le rendre public, de façon que non seulement
l'Assemblée nationale, mais les citoyens ne soient pas en danger de se
faire passer des sapins ou que tout soit noyé dans le provincialisme, le
régionalisme, etc. Il s'agit pour nous d'aller défendre et
promouvoir les intérêts du Québec et d'être bien
sûr que tous les citoyens, sans exception, puissent être au courant
et puissent suivre ce qui se passe.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
M. Le Moignan: M. le Président, aujourd'hui même, le
premier ministre du Canada rencontre les chefs des divers partis de
l'Opposition à la Chambre des communes. Est-ce que le premier ministre,
avant de se rendre à Ottawa, a l'intention aussi de rencontrer les
membres des différents partis de l'Opposition et d'avoir une petite
discussion, de les renseigner un peu ou de demander leurs avis pour l'aider
dans le voyage qu'il doit entreprendre?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je ne crois pas. sauf le
débat que le chef de l'Opposition nous a proposé hier et qui,
finalement, va se tenir à l'intérieur des heures qui sont
réservées encore au débat sur le discours du budget, que
le temps nous permette je le dis à regret, évidemment
d'obtenir des lumières préliminaires de nos
collègues des Oppositions. Une chose est certaine, c'est que dès
après le 9 juin commencera à se dérouler la suite
des pourparlers et dès après le 9 juin cela prendra la
forme d'un rapport aussi circonstancié que possible de ce qui s'est
passé à l'opinion publique comme aux parlementaires.
M. Le Moignan: Dernière question additionnelle.
Le Président: Dernière question, M. le chef de
l'Union Nationale.
M. Le Moignan: Je crois que, la veille de la rencontre du 9 juin,
il y a une rencontre prévue entre les divers premiers ministres de
toutes les provinces. Je ne sais pas si tous ont accepté. Le
Québec, doit-il être présent à ce moment-là
et est-ce que le Québec a envisagé de discuter de choses qui sont
communes entre les provinces avant d'aborder le gouvernement central?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, j'ai
reçu cette suggestion de M. Peckford, parce que c'est venu de M.
Peckford de Terre-Neuve, vers la fin de la semaine dernière.
Déjà, il y a une couple de provinces qui ont dit qu'elles ne
pourraient pas assister; je pense que c'est la Nouvelle-Ecosse et l'Ontario.
Pour ce qui est de notre cas je ne peux pas parler pour les autres
j'ai répondu à M. Peckford que, s'il y avait confirmation,
on serait présent, c'est-à-dire le 8 juin au soir, probablement
à Ottawa. Maintenant j'attends qu'il y ait confirmation; l'initiative
venait de lui.
Le Président: M. le député de Gouin.
Administration de la Caisse de dépôt et
placement
M. Tremblay: M. le Président, j'aimerais poser une
question au premier ministre concernant la Caisse de dépôt et
placement. La caisse est la plus grosse institution financière au
Québec à plus d'un titre par sa grosseur et par l'importance,
évidemment, qu'elle occupe pour les rentes des citoyens. Or, depuis
quelques mois, il y a eu des événements troublants qui se sont
passés. Il y en a au moins trois que je souligne en passant. Le premier
a trait à la démission quasi secrète du président,
Marcel Cazavan, lequel a été remplacé par un sous-ministre
des Finances et dont nous apprenions la nomination récemment, au
même salaire qu'il recevait lorsqu'il était directeur
général, comme conseiller spécial pendant cinq ans et non
pas pendant la période de trois ans qui lui restait à courir dans
son mandat, au montant de $72 000.
D'autre part, dans le budget, nous avons appris que la caisse avait
été sollicitée pour acheter la moitié des dettes du
gouvernement, découlant du déficit de $2 300 000 000 pour
l'année en cours. Troisièmement, au début de mai, il y a
eu la démission de l'économiste Eric Kierans du conseil
d'administration de la caisse, prétextant une ingérence indue,
contrairement à l'esprit de la loi, dans le fonctionnement de la Caisse
de dépôt et placement.
Ces choses sont importantes et, à mon avis, troublantes, compte
tenu de l'importance de l'institution. Je demande au premier ministre quand et
comment il entend faire la lumière et répondre aux questions
concernant l'autonomie administrative de la Caisse de dépôt et
placement.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je pense
que l'essentiel de la question est surtout ce qui concerne le fond. Je vais
demander au ministre des Finances et je crois que le
député de Gouin comprendra de donner des réponses
préliminaires il n'est pas question de cacher quoi que ce soit
qui sont les plus factuelles possible.
Pour ce qui est de la démission d'Eric Kierans pendant la
campagne référendaire, plusieurs semaines après les
décisions qui prétendaient motiver sa démission, j'aime
autant ne pas ajouter plus de commentaires que ceux que j'ai eu l'occasion de
faire à ce moment-là. Cela demeure quelque chose qui, à
mon humble avis, est quelque peu inqualifiable.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, je voudrais répondre
aux questions posées par le député de Gouin en choisissant
mes mots cependant, plutôt que lui ne l'a fait, parce qu'on met en cause
ici des tiers et des personnes et que, comme on le sait, un quotidien de
Montréal, par la voie d'un de ses éditorialistes, a eu un certain
nombre de commentaires à la limite de la bienséance à ce
sujet.
Des Voix: Ils ne savent pas ce que c'est de l'autre
côté, ils ne connaissent pas cela.
M. Parizeau: Cela existe, M. le Président. J'entends des
commentaires de l'autre côté de la salle. La bienséance
existe et les bonnes manières aussi.
M. le député de Gouin disait, comme d'autres l'ont dit
d'ailleurs depuis quelque temps: Le nouveau président-directeur de la
Caisse de dépôt a été sous-ministre adjoint au
ministère des Finances. Si on veut y voir là une sorte
d'ingérence du ministère des Finances dans le fonctionnement de
la Caisse de dépôt, puis-je rappeler que M. Cazavan n'a pas
été sous-ministre adjoint au ministère des Finances? Il en
a été sous-ministre en titre. Donc, s'il y a ingérence du
ministère des Finances par la nomination de ses hauts fonctionnaires
à la direction de la Caisse de dépôt, c'est une
ingérence qui dure depuis fort longtemps.
Deuxièmement, on me dit: M. Cazavan a été
nommé conseiller spécial au salaire qu'il avait. En effet, M. le
Président. M. Cazavan a consacré le plus clair des vingt
dernières années au service public; il a joué au
ministère des Finances ici et à la Caisse de dépôt
un rôle de premier ordre. Une
des raisons pour lesquelles l'Etat peut obtenir à la fois la
loyauté, la persistance et l'intégrité de ses hauts
fonctionnaires, une de ces raisons-là, c'est qu'on ne tripote pas avec
les droits à la pension à quelques années de la retraite
de ces fonctionnaires.
M. Cazavan est effectivement à quelques années de sa
retraite. J'avais plusieurs possibilités; je pouvais, par exemple, le
nommer conseiller spécial au ministère des Finances, à ce
salaire-là; j'aurais pu le laisser et c'est ce que j'ai
décidé de faire, finalement à la Caisse de
dépôt et placement où il peut rendre des services
appréciables; ou il y a une autre chose que j'aurais pu faire, c'est
d'augmenter son salaire au niveau de ce que ça valait. Je rappelle que
plusieurs de ces hauts fonctionnaires ont des salaires qui, pour ce niveau de
responsabilités, sont très en dessous de ce que le secteur
privé paie.
Qu'on me trouve, par exemple, un administrateur d'un fonds de $10 000
000 000 qui ait en même temps le plus gros portefeuille d'actions au
Canada et qu'on paie $72 000; qu'on m'en trouve un! En fait, ce que nous
faisons dans beaucoup de ces sociétés d'Etat, c'est à des
salaires très inférieurs à ceux du secteur privé,
encore une fois, pour ce niveau de responsabilités de nommer des gens
qui sont dans le service public pendant très longtemps. On ne joue pas
avec les droits à la pension au cours de leurs dernières
années. Je vous rappelle que, dans le secteur public, le niveau de la
pension est déterminé par les cinq meilleures années, ce
qui veut dire, à l'heure actuelle, dans le climat d'inflation que nous
connaissons, les cinq dernières. J'aurais trouvé
déshonorant de réduire le salaire de M. Cazavan pour ces
dernières années avant sa retraite.
Il reste maintenant le dernier aspect de la question du
député de Gouin, c'est-à-dire celui en vertu duquel
et il a eu l'occasion de le souligner à quelques reprises
effectivement, la Caisse de dépôt et placement finance le
gouvernement du Québec jusqu'à concurrence d'à peu
près la moitié des sommes dont elle dispose pour des placements
à long terme et cela, bon an mal an; c'est toujours à peu
près la même proportion, parfois un peu en hausse, parfois un peu
en baisse.
Puis-je rappeler que le Québec est la seule province au Canada
où le Régime de rentes n'est pas totalement versé au
gouvernement des provinces? C'est la seule province au Canada. Partout, dans
toutes les autres provinces, tout ce qui est ramassé par la Régie
des rentes est prêté aux gouvernements provinciaux à un
taux d'intérêt qui est le taux d'intérêt de la dette
fédérale à long terme plus 1/4%. Le Québec est la
seule province où cet argent est envoyé dans une caisse de
dépôt et où une partie seulement sert à financer le
gouvernement, le reste allant aux hôpitaux, en prêts aux
hôpitaux, aux universités, aux municipalités, en
prêts aux entreprises, en achat d'actions d'entreprises, en prêts
hypothécaires.
Dans la plupart des autres provinces, on a considéré que
ce qui avait été fait au Québec, c'est-à-dire
créer une caisse de dépôt polyvalente qui, non seulement
finance le gouvernement, mais finance aussi les autres corps publics et
l'économie privée, était une trouvaille, quelque chose
qu'il fallait maintenir, quelque chose d'extrêmement original et
d'extrêmement utile pour l'économie. Que maintenant on vienne
s'étonner qu'une partie des fonds de la caisse finance effectivement les
déficits du gouvernement de Québec, eh bien, c'était pour
ça que la caisse a été faite, c'est sa grande
originalité. Dans toutes les autres provinces, ça ne serait pas
une partie, ça serait la totalité.
Le Président: M. le député de Gouin.
M. Tremblay: La longueur de la réponse du ministre des
Finances indique que c'est une question importante et complexe et je n'ai pas
l'intention de lancer un débat en quelques minutes à la
période des questions; je souhaiterais qu'il y ait un débat sur
la Caisse de dépôt et placement; c'est l'institution la plus
importante que nous ayons au Québec. Ma question portait surtout sur
l'autonomie administrative de la Caisse de dépôt et placement et,
comme c'est une société publique et non pas une
société secrète, je demanderais au premier ministre s'il
serait opposé à ce que la nouvelle direction, de même que
l'ancienne direction, viennent témoigner devant la commission des
finances et des comptes publics, devant les députés, pour que la
population puisse apprendre de la bouche de ses administrateurs s'il
conçoivent leur rôle tel que le prévoit la loi ou s'il y a
eu des changements dans les relations, tel que la population est en droit de le
croire, à la suite des démissions qui se sont
succédé depuis quelques mois, entre le gouvernement et la Caisse
de dépôt. La population peut croire, à partir de ces
démissions, que la Caisse de dépôt et placement a
été mise en tutelle par le ministre des Finances et que ceci est
très dangereux pour l'avenir des pensionnés du Québec.
Le Président: M. le ministre des Finances. M. le premier
ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je sais bien que le
député de Gouin m'a adressé la question, mais il vient
encore de parler de choses concernant, par exemple, l'autonomie de la caisse,
concernant l'administration qui relève directement du ministre des
Finances; d'ailleurs, on est en période de crédits, il y aura
peut-être une occasion parce qu'il n'y a pas de cachette
là-dedans pour que tout puisse être éclairci
à la satisfaction et du député de Gouin et de l'opinion
publique, si cela paraît nécessaire, ou des autres oppositions. Le
ministre des Finances pourrait peut-être ajouter des précisions
là-dessus, je ne sais pas.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, j'avouerai ne pas comprendre
la question du député de Gouin. Nous
sommes, à l'heure actuelle, en phase comme on le sait
d'examen des crédits en commission parlementaire. A la commission
parlementaire des finances, la Caisse de dépôt, puisqu'elle
relève de par la loi du ministre des Finances, est toujours
représentée. La direction de la Caisse de dépôt va
se trouver là comme d'habitude, c'est-à-dire, je pense, le 9
juin.
M. Tremblay: M. Cazavan?
M. Parizeau: M. Cazavan ne sera pas là puisqu'il ne dirige
pas la caisse.
Une Voix: II a démissionné.
M. Parizeau: Mais la direction de la caisse sera là et
pourra être interrogée, comme cela a été le cas les
années antérieures.
M. Tremblay: M. le Président, quand même! Un
président...
Le Président: Très brève question, M. le
député de Gouin.
M. Tremblay: ... d'une société d'Etat
démissionne et la population ne sait pas pourquoi. Est-ce que les
députés pourraient demander à ce président, qui
continue à recevoir un salaire pendant cinq années à un
poste quasi tabletté, est-ce que la population pourrait savoir de la
bouche de ce président, si la Caisse de dépôt n'est pas une
société secrète, pourquoi il a
démissionné!
M. Parizeau: M. le Président, ce serait tout à fait
inédit. En somme, un homme a le droit de démissionner, j'imagine,
encore, dans notre société, d'expliquer pourquoi, dans ses
termes, ce qu'il a fait, sans ensuite être, j'allais dire,
littéralement grillé par un certain nombre de
députés qui trouvent cela un peu croustillant. M. Cazavan a
démissionné, a expliqué pourquoi. Nous aurons, à la
commission des finances, la nouvelle direction de la caisse; les
députés pourront poser toutes questions utiles. Je ne vois
vraiment pas pourquoi on tourne autour de cela.
On me souffle derrière moi, M. le Président, qu'un
député a démissionné hier; est-ce qu'on veut une
commission parlementaire pour entrer dans les motifs?
Le Président: M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président... Une Voix: On va le
reprendre, lui.
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!... A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. le député de Montmagny-L'Islet, vous avez du temps pour
une brève question.
La Régie des marchés agricoles
refuserait l'enquête promise
M. Giasson: M. le Président, ma question devrait
s'adresser au ministre de l'Agriculture mais, en son absence, je l'adresserai
au premier ministre.
A la fin de 1978, 1286 producteurs laitiers ont déposé une
requête devant la Régie des marchés agricoles du
Québec. Dans cette requête, il y avait un bon nombre de faits
allégués et on réclamait une audience de la Régie
des marchés agricoles pour établir la lumière sur
l'attribution et le partage tant des quotas globaux que des quotas individuels
dans le secteur du lait industriel et du lait nature.
A la fin de mars, la régie a tenu une audience et, là, a
convenu, devant l'examen des faits soumis, qu'elle devait d'abord tenir une
préenquête par ses propres enquêteurs. Ce fut accepté
par les parties impliquées.
En novembre, une nouvelle audience de la Régie des marchés
a déterminé que les faits connus de la régie
nécessitaient la tenue d'une enquête publique et, dans la
décision que la régie a rendue, elle a convenu de tenir une
première audience publique en janvier 1980.
Or, depuis ce moment, il est révélé que la
Régie des marchés agricoles recule sur la décision qu'elle
a prise de la tenue d'une enquête publique et tente de vouloir tout
simplement noyer le poisson présentement devant les 1286 producteurs qui
ont déposé cette requête.
Ce que je veux du premier ministre, c'est qu'il fasse des recherches
soit auprès du ministre de l'Agriculture ou de la Régie des
marchés agricoles du Québec pour que le public sache les motifs
pour lesquels la régie recule sur sa décision de tenir une
enquête publique et qu'elle veut limiter cette enquête uniquement
sur le partage global des quotas ou des contingentements et ne veut plus
regarder du côté de l'attribution et du partage individuel de ces
contingentements.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Giasson: Qui la régie veut-elle protéger
là-dedans et de qui a-t-elle eu des ordres depuis le mois de
décembre dernier?
Le Président: M. le premier ministre. (11 heures)
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je pense
qu'on comprendra, avec la complexité du dossier que vient
d'évoquer le député et sans du tout endosser certaines de
ses conclusions et de ses allusions, que je prenne avis de cette question, avis
de tout le dossier, et que d'ici sûrement la fin de semaine parce
qu'on est ici jusqu'à vendredi inclusivement il pourra y avoir
les réponses appropriées.
M. Giasson: M. le Président...
Le Président: M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: ... je ne prends pas position. Je m'en tiens à
des décisions rendues par la Régie des marchés agricoles
du Québec qui elle, après ses recherches ou les recherches
menées par ses propres enquêteurs, en est arrivée à
la conclusion de tenir une enquête publique. Ce n'est pas moi qui ai
décidé cela. Ce sont les régisseurs de la Régie des
marchés agricoles.
Le Président: Fin de la période des questions.
Nous en sommes aux motions non annoncées, à
l'enregistrement des noms sur les votes en suspens et aux avis à la
Chambre.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
Avis à la Chambre
M. Charron: M. le Président, je voudrais donner avis que
ce soir, la Chambre ne travaillera pas en séance plénière,
mais c'est plutôt par trois commissions parlementaires qu'elle poursuivra
l'étude des crédits de différents ministères. Au
salon rouge, ce sera la commission de l'éducation. A la salle 81-A, de
20 heures à 24 heures, la commission des consommateurs, et à la
salle 91-A, la commission des affaires municipales.
J'indique tout de suite le menu jusqu'à 18 heures ce soir,
c'est-à-dire de ce matin et de cet après-midi, aux heures
prévues au règlement de juin. L'Assemblée terminera les
deux projets de loi qui restent au feuilleton au nom du ministre du Revenu, le
projet de loi 102 et le projet de loi 103. Ensuite, elle entamera la discussion
sur le projet de loi sur le fonds forestier au nom du ministre de l'Energie et
des Ressources, le projet de loi modifiant la Loi sur la municipalisation de
l'électricité et la Loi de l'electrification rurale. S'il reste
du temps encore jusqu'à 18 heures, l'Assemblée, à la suite
de cette loi sur l'électricité, se transformera en commission
plénière pour procéder à l'étude article par
article de ce projet de loi avant son ajournement à 18 heures
jusqu'à demain matin 10 heures.
Je fais motion, M. le Président, pour que pendant que la Chambre
étudiera ces différents projets de loi, ce matin jusqu'à
13 heures et cet après-midi de 15 heures à 18 heures, puissent se
réunir au salon rouge la commission de l'éducation à la
salle 81-A, la commission du revenu pour étudier... Il faudra attendre
que le projet de loi 102 et le projet de loi 103... Il faut donc prévoir
que ce sera plutôt à 15 heures cet après-midi. Pardon?
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je pense que
le leader parlementaire du gouvernement m'avait indiqué que
l'étude en commission des projets de loi du revenu pourrait commencer la
semaine prochaine.
M. Charron: Effectivement, M. le Président, je vais me
rendre tout de suite à la demande qui est un rappel, en fait, de ce que
j'avais dit au leader de l'Opposition. Je soustrais donc la réunion de
cette commission. L'étude des crédits du ministère du
Loisir, je crois, s'est achevée d'une manière plus rapide que
prévue ce qui est très agréable à savoir
ce qui fait qu'un trou existant, on s'apprêtait tout de suite
à le combler par l'étude de ces projets de loi, mais je retarde
plutôt à la semaine prochaine l'étude article par article
de ce projet de loi du fait que le ministre est en Chambre pour d'autres
projets de loi.
Je fais donc motion, M. le Président, pour que cet
après-midi non pas ce matin de 15 heures à 18
heures, la commission de l'éducation puisse se réunir. Je fais
exception de ce matin puisqu'il doit y avoir une réunion du Conseil des
ministres dans quelques minutes.
Une Voix: ...
M. Charron: Au salon rouge.
Le Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Une Voix: Adopté. Le Président:
Adopté.
M. Charron: Je donne avis... En fait, ce n'est pas un avis, c'est
une correction à un avis, M. le Président. On avait
indiqué, je crois, dans le feuilleton, que le 5 juin demain donc
devait se réunir la commission des engagements financiers
à compter de 9 h 30. Il est évident, du fait que nous nous
réunissons à 10 heures pour la période des questions que
ce sera plutôt à 11 heures. Je fais donc une modification à
cet avis.
Une Voix: Adopté.
M. Charron: M. le Président, je vous prierais d'appeler
l'article 38 du feuilleton d'aujourd'hui.
Le Président: J'appelle maintenant la deuxième
lecture...
M. Fontaine: M. le Président...
Le Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: J'ai une question à poser en vertu de
l'article 34, s'il vous plaît.
Le Président: Oui, M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, on nous a annoncé sur
la feuille de route que la commission des corporations professionnelles devrait
siéger normalement vendredi soir pour l'étude des crédits,
et hier, on nous apprenait qu'il y a des possibilités que ce soit
plutôt demain soir.
On sait que l'étude des crédits portera principalement sur
un rapport qui a été remis hier par l'Office des professions au
ministre de l'Education concernant le problème qui existe entre les CA
et les CGA. Le leader du gouvernement pourrait-il nous dire ou prendre
l'engagement que l'Opposition et les corporations professionnelles pourront
obtenir ce rapport dès aujourd'hui pour en prendre connaissance avant de
l'étudier en commission?
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Charron: M. le Président, j'ai un préjugé
favorable à la demande que fait le député de
Nicolet-Yamaska, sauf que j'aimerais en discuter avec le député
de Richmond, par exemple, puisque demain nous aurons une réunion des
leaders parlementaires afin d'organiser le reste des travaux. Si le leader de
l'Union Nationale apporte cette demande à la réunion, demain
après la période des questions, je crois que nous pourrons
l'accueillir d'une manière favorable.
M. Shaw: En vertu de l'article 34.
Le Président: M. le député de Pointe-Claire,
en vertu de l'article 34.
M. Shaw: Could the leader, please, tell us when the final report
of the new electoral boundaries will be deposited?
M. Charron: II n'a pas à être déposé
en Chambre, M. le Président. C'est dans la Gazette officielle, selon la
loi, que les nouvelles frontières des circonscriptions
électorales ont été comme la loi l'obligeait
à le faire le 30 avril annoncées dans l'édition du
30 avril. Il n'y a pas de dépôt à faire en Chambre
après cette parution dans la Gazette officielle.
Le Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Nous avons à notre programme pour adoption
d'ici la fin de la présente session, le projet de loi no 87 qui concerne
la révision du Code civil. Le leader du gouvernement voudrait-il nous
dire s'il a l'intention de faire adopter ce projet de loi fort
considérable en deuxième lecture ou tout simplement de convoquer
une commission parlementaire pour l'étudier avant l'étude en
deuxième lecture? Est-ce qu'il a l'intention de faire adopter ce projet
de loi avant...
M. Charron: Je m'excuse. De quel projet de loi s'agit-il?
M. Fontaine: Le projet de loi no 87, la révision du Code
civil, c'est très important.
M. Charron: Le projet de loi no 84.
M. Fontaine: Je m'excuse, j'avais le no 87.
M. Charron: Oui, c'est un des sujets dont je veux discuter avec
mes brillants collègues lors de la réunion demain.
Projet de loi no 102 Deuxième lecture
Le Président: J'appelle maintenant la deuxième
lecture du projet de loi no 102, Loi modifiant la Loi sur les impôts et
certaines dispositions législatives.
M. le ministre du Revenu, vous avez maintenant la parole.
M. Michel Clair
M. Clair: M. le Président, le projet de loi no 102 dont
nous commençons l'étude en deuxième lecture apporte de
très nombreux amendements à la Loi sur les impôts et
à quelques autres lois connexes. Des 124 articles que contient ce projet
de loi, nous ne parlerons pour le moment que des principaux. J'entrerai
plutôt dans les détails des modifications lors de l'étude
article par article en commission parlementaire.
Ce qu'il est important de savoir, c'est que ce projet de loi a pour
principal objectif d'abord de donner suite à la déclaration
ministérielle du ministre des Finances du 21 décembre 1979, de
même qu'au discours sur le budget de mon collègue, le ministre des
Finances, de mars dernier. Parmi les modifications les plus importantes
apportées par le budget, certaines méritent d'attirer notre
attention. Ce sont d'abord les réductions générales
d'impôt. En effet, à partir du 1er janvier 1980, les exemptions
personnelles, c'est-à-dire l'exemption de base pour tous, l'exemption
pour personnes mariées, pour personnes à charge, de même
que les exemptions pour raison d'âge, ont été
indexées à un taux de 12,5%. Le 1er janvier 1981, elles seront
indexées à nouveau de 7,5%. C'est donc de 20%, Mme la
Présidente, que les exemptions personnelles ont été
augmentées, indexées, entre 1979 et 1981. On nous reproche,
depuis plusieurs années, de ne pas avoir indexé les tables
d'impôt comme l'a fait le gouvernement fédéral il y a
quelques années.
Mon collègue des Finances a toujours répondu à cela
que cette technique du gouvernement fédéral n'était ni la
seule, ni nécessairement la meilleure, ni la plus sûre pour
réduire équitablement le fardeau fiscal des contribuables. Il
semble bien, Mme la Présidente, que le gouvernement
fédéral s'apprête à donner raison au ministre des
Finances du Québec. En effet, le gouvernement fédéral
étudie actuellement la possibilité d'éliminer l'indexation
des tables d'impôt si l'on se fie aux récents commentaires sur
cette question du ministre des Finances, M. Allan MacEachen, et du ministre
d'Etat, M. Bussières. (11 h 10)
II m'apparaît évident, maintenant, que l'approche du
gouvernement du Québec d'intervenir par le biais des exemptions
personnelles se révèle être une solution beaucoup plus
équitable et surtout beaucoup plus sûre pour le contribuable. Il
m'apparaissait important de souligner ce point au moment où le
gouvernement fédéral s'apprête à remettre en cause
l'indexation des tables d'impôt.
J'aimerais simplement, au niveau des exemptions, Mme la
Présidente, rappeler quelques exemples concrets de l'indexation des
exemptions. Par exemple, en 1977, avant la réforme, l'exemption
personnelle de base était de $3600; elle est maintenant, ou au 1er
janvie 1981, de $4350, soit une augmentation de plus de $700 de l'exemption de
base.
En ce qui concerne l'exemption de personne mariée, elle est
passée, de 1977 à 1981, de $1900 à $3270, presque 75%
d'augmentation.
En ce qui concerne, par ailleurs, le niveau maximum du revenu du
conjoint, qui ne réduit pas l'exemption de personne mariée, ce
niveau maximum de revenu d'un conjoint, en 1977, avant la réforme et
pour les années antérieures, était de $500; il sera, au
1er janvier 1981, de $1180, soit une augmentation de plus du double de
l'exemption qui existait en 1977.
Il y a également une exemption additionnelle pour les personnes
âgées, qui est passée, elle, de $1000, en 1977, à
$1810, avec l'indexation de 7,5% qui entrera en vigueur au 1er janvier
1981.
Je passe rapidement, Mme la Présidente. Comme conséquence,
en ce qui concerne le contribuable célibataire, si on regarde seulement
l'exemption d'impôt, l'indexation des exemptions personnelles donnera,
par exemple, comparativement à 1979-1980, à un niveau de revenu
de $10 000 par année, pour un célibataire, une réduction
d'impôt de $140, à un niveau de revenu de $10 000, et de $177 pour
un revenu de $15 000.
En ce qui concerne le contribuable marié, les indexations
d'exemptions entraîneront des réductions encore plus importantes.
Par exemple, de 1979 à 1981, pour un revenu de $10 000, ce sera $207 de
moins d'impôt que paiera le contribuable marié qui a un niveau de
$10 000, tandis qu'à un niveau de $15 000 la réduction
d'impôt, de 1979 à 1981, sera de $276.
Mais ce n'est pas la seule façon par laquelle le ministre des
Finances a décidé de s'attaquer à la réduction des
impôts, puisqu'on a également retenu, dans le discours sur le
budget, une réduction générale des impôts. A partir
du 1er juillet 1980, en effet, tous les taux d'impôt seront
réduits, au Québec, de 3%. Cela signifie qu'un particulier pourra
déduire de son impôt autrement payable pour l'année un
montant égal à 1,5% de cet impôt, pour l'année
d'imposition 1980, puisque l'entrée en vigueur de cette réduction
générale d'impôt se fera le 1er juillet, et ce sera
l'équivalent d'une réduction générale de 3% sur les
années d'imposition subséquentes. Pour la seule année
financière 1980-1981, cette mesure coûtera $122 000 000 au
trésor québécois et signifiera des réductions
d'impôt du même ordre pour les contribuables
québécois.
A ces mesures d'application générale qui se retrouvent
dans le projet de loi no 102 s'ajoutent des mesures plus spécifiques,
mais d'une grande importance également. D'abord, une baisse
d'impôt substantielle touchant le particulier dont le conjoint est le
collaborateur. En effet, dans une foule de petites entreprises qui ne sont pas
incorporées, des fermes, des commerces, des petites et moyennes
entreprises, il arrive fréquemment qu'un conjoint travaille pour
l'autre. Cependant, en vertu des lois actuelles, les revenus qu'il
reçoit ou devrait recevoir comme salarié ne pouvaient être
déduits du revenu d'entreprise. Je vous rappelle que, par cette mesure,
le gouvernement du Québec répond à une demande
légitime de plusieurs groupes intéressés à la
promotion de la condition féminine dans notre société et
particulièrement l'AFEAS, qui a fait un immense travail de
sensibilisation sur cette question.
Je vous souligne également que, concernant la déduction en
cause, même si beaucoup de gouvernements en ont parlé à
travers le Canada, ce sera le Québec qui, pour une première fois,
posera des gestes concrets, qui implantera concrètement cette mesure
fiscale. Je pense que cela méritait d'être souligné et cela
se retrouve dans le projet de loi no 102 à l'étude
actuellement.
D'autre part, le ministre des Finances a déjà fait savoir
que cette mesure n'allait pas être une mesure isolée pour
l'éternité; mais au contraire, dès son discours sur le
budget, le ministre des Finances a fait savoir que d'autres possibilités
en matière fiscale et d'allocations de disponibilité sont
actuellement à l'étude au ministère des Finances. Puisque
depuis le 26 mars dernier, donc, le conjoint collaborateur est
considéré comme tout autre employé, nous avons dû
modifier cela était normal, Mme la Présidente la
Loi du régime de rentes, afin que le travail d'une personne pour son
conjoint puisse donner droit à une contribution à la Régie
des rentes du Québec et ainsi à une rente, éventuellement,
de la Régie des rentes du Québec.
Quant aux corporations dont il est également question dans le
projet de loi no 102, le discours sur le budget a amené quelques
changements assez majeurs. L'impôt sur le revenu des
sociétés est porté de 12% à 13% dans tous les cas,
sauf en ce qui concerne les corporations qui bénéficient
les petites entreprises de la déduction accordée aux
termes de la loi fédérale aux petites entreprises qui, elles,
demeureront à 12%. Il est normal que les grandes entreprises paient plus
que les petites et c'est ce que souligne ce projet de loi, Mme la
Présidente.
En Ontario, si on compare au niveau de ce taux d'impôt par rapport
à la grande entreprise, il est de 13% pour la petite et de 14% pour la
grande entreprise selon le type justement. Au Manitoba et en
Colombie-Britannique, il est, comparativement à 13% au Québec,
à 15%. En Saskatchewan et à Terre-Neuve, il est à 14%.
II me semble donc évident, Mme la Présidente, à la
lumière de ces quelques données, que certains organismes de
représentation, que l'Opposition dans ses déclarations à
l'emporte pièce exagère un tout petit peu au moins l'attitude du
gouvernement du Québec en cette matière, puisque dans un domaine
précis comme celui-là, on demeure l'une des provinces qui a le
plus bas niveau d'impôt sur les profits des sociétés et ce,
sans tenir compte de la Loi sur les stimulants fiscaux qui est prolongée
pour un an et qui permet à certaines entreprises qui font certains
investissements de pouvoir réduire jusqu'à 50% leur impôt
à payer...
D'autre part, Mme la Présidente, deux autres mesures. Une
première qui concerne les corporations d'assurances, puisque la taxe
payée par celles-ci sur les primes pour dommages matériels
passera de 2% à 3% comme plusieurs provinces l'ont déjà
fait, soit Terre-Neuve, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick. D'autre part, la
taxe spéciale prélevée à l'égard d'une
corporation faisant le raffinage de pétrole au Québec qui
était de un tiers pour cent passe aujourd'hui à 2%. Les
corporations visées, cependant, pourront, je le précise,
réduire l'impact de cette augmentation en procédant à des
travaux d'exploration pétrolière ou gazière au
Québec. Chaque dollar dépensé de cette manière
réduira cette taxe supplémentaire. Peut-être aurons-nous
trouvé, par là, le moyen d'encourager ces grandes compagnies
à entreprendre des travaux d'exploration au Québec. En tout cas,
nous aurons, à tout le moins, un moyen de s'assurer que ces grandes
raffineries paieront une juste contribution au trésor
québécois et ne seront pas considérées comme des
organismes sans but lucratif par l'Etat québécois.
Voilà pour les modifications découlant du discours sur le
budget du ministre des Finances. D'autre part, le projet de loi que nous
étudions présentement a également cela fera plaisir
à mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce pour objet
d'harmoniser sur plusieurs points les lois fiscales québécoises
avec celles d'Ottawa. En effet, dans le contexte constitutionnel actuel
où les Québécois paient de l'impôt à deux
palliers de gouvernements, il est important d'éviter au maximum que le
domaine de la fiscalité pour le contribuable devienne une
véritable jungle juridique et technique dans laquelle il risquerait de
s'empêtrer davantage chaque fois que l'un ou l'autre niveau de
gouvernement déciderait d'apporter des changements. En ce sens, le
gouvernement du Québec tient compte, dans la mesure du possible, des
changements apportés aux lois fiscales fédérales et ajuste
ses propres lois en conséquence. (11 h 20)
Ce projet de loi vient de ce fait insérer un certain nombre de
modifications techniques apportées par l'adoption à la Chambre
des communes du projet de loi C-17, en 1978.
Je désire, avant de terminer, Mme la Présidente, indiquer,
au sujet de certains amendements qui n'avaient pas encore été
annoncés, mais qui sont le résultat de problèmes nous
ayant été soumis au cours des récents mois, que nous avons
décidé de régler ces problèmes en profitant de ce
projet de loi à l'étude. Par exemple, il porte notamment sur les
dispositions relatives au régime d'épargne-actions dans le cas de
fractionnement d'actions et sur la définition du capital versé
d'une corporation faisant le commerce de valeurs mobilières.
D'autre part, un petit amendement que j'ai l'intention d'apporter en
commission permettrait de régler un problème relié au
congédiement ou à la suspension d'un travailleur, lorsque ce
travailleur reçoit, après un jugement, un montant
équivalant à plusieurs années de salaire. Il est
aujourd'hui imposé sur la totalité de l'année où il
reçoit l'argent avec, bien sûr, l'application de la disposition de
la moyenne générale, mais le traitement actuel nous paraissait
plutôt inapproprié. A partir des amendements que j'ai l'intention
de suggérer, le contribuable pourrait, comme cela est prévu dans
certains autres cas, bénéficier d'une rente d'étalement et
ainsi réduire son taux d'imposition.
Enfin, ce projet de loi contient des dispositions qui cherchent à
préciser certaines règles, en élargir d'autres et, en
général, à faciliter pour le ministère comme pour
le contribuable, l'application de la Loi sur les impôts.
J'aurai, encore une fois, j'en préviens mes collègues,
certains amendements assez techniques à proposer en commission
parlementaire, mais déjà je recommande l'adoption en
deuxième lecture du projet de loi no 102.
Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Mme la Présidente, ce projet de loi est surtout
d'ordre technique. Je pense que le gros du travail sera fait en commission
parlementaire. Mais, parce que c'est une loi omnibus et parce que le ministre
même a profité de l'occasion de justifier devant vous
quelques-unes des mesures proposées dans le budget, qui sont maintenant
encadrées dans cette loi, je vais prendre une ou deux minutes seulement
pour faire les commentaires que je veux faire, surtout sur la question de
l'indexation, dans un contexte plus global.
Je pense qu'il est essentiel que le peuple québécois
comprenne aujourd'hui que nous sommes devant une crise financière au
sein du gouvernement du Québec. Le ministre du Revenu vient d'essayer de
justifier le système d'indexation partielle que le gouvernement a
adopté cette année.
Mme la Présidente, jusqu'ici nous avons critiqué le
gouvernement de ne pas avoir accepté d'indexer les impôts comme le
fédéral. Nous ne pouvons plus le faire, parce que nous savons
comme lui que nous sommes dans une situation financière, ici au
Québec, où il n'est pas possible de le faire. On est d'accord, il
est peut-être même allé trop loin cette année. On ne
peut pas justifier
des baisses d'impôt ici au Québec, à cause de notre
situation. Si nous ne faisons, pendant le mois de juin, que persuader la
population du Québec de la nature grave de la crise financière
devant laquelle nous sommes aujourd'hui, nous aurons fait notre devoir. Le
mythe de bon gouvernement du Parti québécois pendant quatre ans
est vraiment découvert, ce mythe, dans les chiffres du budget
proposé pour l'année 1980-1981. Nous sommes devant un
déficit prévu par le ministre de $2 300 000 000, il sait
déjà que ce sera dépassé au moins de $100 000 000.
Je dis, entre parenthèses, que le ministre des Finances n'a jamais,
depuis son arrivée au pouvoir, réalisé ses
prévisions budgétaires, pas une seule année. Chaque
année cela a été pire que prévu. Ce sera encore
pire cette année. Nous sommes devant un déficit qui sera
probablement de $3 000 000 000, cette année. Pourquoi? Tout simplement
parce que, pendant quatre ans, depuis l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois, les dépenses du gouvernement ont
augmenté de 50% en quatre ans, de $10 000 000 000 à $15 000 000
000 à peu près, et pendant cette même période, les
recettes des contribuables québécois ont augmenté
d'à peu près 35%.
Pourquoi n'ont-elles pas augmenté autant que les dépenses?
Premièrement, parce que le gouvernement a élargi le champ
d'action de plusieurs ministères; en partie à cause du programme
référendaire, le budget du Conseil exécutif a
doublé pendant ces quatre ans et il y en a d'autres qui ont
augmenté de 60% et de 70%. Les recettes n'ont pas augmenté tout
simplement parce que, avec la politique d'instabilité et
d'hostilité du gouvernement envers les personnes et les compagnies qui
paient des impôts, c'était sûr qu'il n'y aurait pas
d'augmentation, pas de croissance économique aussi au Québec.
Alors, s'il n'y a pas de croissance économique, vous n'avez pas de
croissance des revenus.
Des Voix: C'est faux.
M. Scowen: Vous êtes devant ce système. Je ne veux
pas exagérer; il y a certainement eu une croissance, une croissance
beaucoup plus faible que celle qu'on pouvait prévoir et beaucoup plus
faible que dans le reste du Canada pendant ces quatre ans. Aujourd'hui, nous
nous retrouvons, après quatre ans, avec une augmentation des
dépenses de 50%, une augmentation des recettes de 35% et un
déficit de $3 000 000 000. La dette du Québec a augmenté,
pendant ces quatre ans, de $6 000 000 000 à $8 000 000 000.
Une Voix: C'est faux!
M. Scowen: Ce sont des chiffres que vous pouvez vérifier
dans ce document. Je pense essentiel que, chaque fois que le premier ministre
ou un ministre du gouvernement parle du bon gouvernement du Québec, la
population soit consciente de la crise dans laquelle il nous a mis pendant ces
quatre années.
En ce qui concerne l'indexation, le ministre a parlé
spécifiquement de deux points seulement; le premier a été
la question de l'indexation. On dit que le système d'indexation ici
n'est pas aussi généreux que celui du fédéral. Je
pense qu'il n'y a rien qu'on puisse faire, on ira dans les détails en
commission parlementaire.
En ce qui concerne l'impôt sur le revenu des compagnies, on peut
simplement dire qu'on est maintenant rendu à peu près au
même niveau que les autres provinces; je pense qu'il était
essentiel que cela se fasse. Je veux vous dire simplement que l'impôt sur
les revenus d'une compagnie n'est qu'un parmi des centaines de facteurs dont
les compagnies tiennent compte quand elles décident d'augmenter leurs
investissements au Québec ou de faire des choses nouvelles ici. Je dis
simplement qu'en groupant le total de tous les éléments dans une
politique industrielle vous êtes encore devant une grande
hostilité de la part du gouvernement en ce qui concerne l'investissement
privé fait ici par les PME, par les moyennes et les grandes entreprises
du Québec. De toute façon, nous irons beaucoup plus en
détail dans ce projet de loi lors de l'étude article par article
et, pour le moment, c'est tout. Merci.
La Vice-Présidente: M. le député de
Bellechasse.
M. Bertrand Goulet
M. Goulet: Merci, Mme la Présidente, Bien sûr, on a
déjà pris connaissance du contenu de ce projet de loi lors de la
déclaration ministérielle du ministre des Finances, d'une part,
et également lors du discours sur le budget, d'autre part. Donc, dans
l'ensemble, les mesures annoncées par ce projet de loi ne nous sont pas
inconnues et ont déjà fait l'objet de critiques de la part des
partis d'Opposition. Loin de moi l'idée de reprendre tous les arguments
évoqués par l'Opposition lors de cette réplique au
discours du budget, réplique à l'endroit des mesures
annoncées. Je pense qu'il y a certains points sur lesquels il serait bon
de revenir. Il est vrai qu'une bonne partie des quelque 120 ou 130 articles de
ce projet de loi servent à apporter des modifications à la Loi
sur l'impôt dans le but, bien sûr, d'harmoniser les régimes
d'imposition tant au niveau fédéral que provincial, ainsi que des
modifications dans le but de corriger certaines situations anormales à
l'égard des contribuables et en même temps pour faciliter en
général l'application de la Loi sur les impôts.
En fait, une bonne partie de ce projet de loi apporte des changements
purement techniques et qui ne portent pas atteinte à de grands
principes. D'un autre côté, il y a certains changements issus du
discours sur le budget de mardi dernier, changements qui, pour ma part, ne me
satisfont guère, comme je l'avais d'ailleurs souligné dans mon
intervention à ce moment, lors du discours prononcé par le
ministre des Finances. (11 h 30)
Ce n'est pas que je sois contre une réduction d'impôt de 3%
à payer par les particuliers. Au contraire, je trouve que ce n'est pas
assez et il faut se rappeler que le Parti québécois, lorsqu'il
était dans l'Opposition, réclamait à grands cris on
se le rappelle une indexation complète de l'impôt des
particuliers.
Il est quand même surprenant de voir la faible réduction
d'impôt qu'on nous a annoncée cette année. En effet,
j'avais même dit que le ministre des Finances augmentait de façon
cachée les taxes des contribuables et la preuve était qu'en
n'indexant pas complètement l'impôt sur le revenu des
contribuables québécois le ministre des Finances allait chercher,
selon nos chiffres, plus de 13,5% de plus que l'an dernier dans les poches des
contribuables québécois.
En effet, des $4 700 000 000 que ces contribuables ont payés l'an
passé, ils devront ajouter cette année $648 000 000, ce qui veut
dire en réalité, par personne qui paie des impôts,
près de $275 en moyenne. Ce n'est pas ce que j'appelle une
réduction de taxes et j'aimerais qu'on nous explique encore davantage
où est cette véritable réduction de taxes en chiffres
nets, en chiffres absolus.
De plus, bien sûr, le ministre tout à l'heure a
comparé la petite et la moyenne entreprise québécoise aux
autres, à l'imposition que peuvent avoir leurs concurrentes au niveau
des autres provinces. Mais on peut passer sous silence le fait qu'encore une
fois, cette année, la petite et la moyenne entreprise
québécoise reste plus taxée que sa concurrente
immédiate de l'Ontario, parce qu'elle sera taxée de 12%
comparativement à l'autre, 10%.
Par contre, il est certain que ce projet de loi contient des changements
dignes de mention, tels que la modification que l'on apporte à la Loi
sur le Régime de rentes du Québec pour ne plus exclure le travail
d'une personne au service de son conjoint; tels que la reconnaissance du
travail de la femme dans l'entreprise familiale, ainsi de suite. Le ministre
s'est chargé et se chargera encore de nous faire part de ces changements
qui sont vraiment acceptables.
Ce sont des mesures qui auraient dû être prises, bien
sûr, il y a longtemps, surtout que cela fait près de quatre ans
maintenant que ce gouvernement est en place. Maintenant, il faut admettre que
mieux vaut tard que jamais et c'est ce qui arrive, Mme la Présidente.
Peut-être également que la venue du ministère d'Etat
à la Condition féminine y est pour quelque chose, mais pourtant,
encore là, le titulaire de ce poste fait partie de ce gouvernement
depuis plus de trois ans et demi.
En résumé, bien sûr, il est inutile de passer en
revue toutes les modifications et tous les changements que le projet de loi
veut apporter, car, pour une bonne partie, ce sont des changements purement
techniques, comme je le disais au début de mon intervention. Pour ce qui
est des autres mesures, le gouvernement et la population savent ce que nous
pensons nous avons discouru près d'une heure là-dessus
de ces changements, étant donné que nous avons
apporté ces commen- taires lors du début de la réplique au
discours du budget.
Dans ce projet de loi, il y a certaines bonnes mesures, je l'ai dit,
mais il y a beaucoup de mesures qui ne me satisfont pas et c'est pourquoi je
recommanderai à mes collègues unionistes de voter contre ce
projet de loi en deuxième lecture. Les principales raisons qui
m'incitent à agir ainsi, c'est d'abord parce que ce projet de loi aura
un effet direct sur l'augmentation du taux d'inflation. Pourquoi? C'est facile
à comprendre. Parce que les dépenses du gouvernement vont
augmenter plus rapidement que ses revenus. Cette année, ce budget et
surtout les répercussions directes du projet de loi que nous
étudions présentement, auront pour effet que les dépenses
vont augmenter de près de 15% 14,6% comparativement aux
revenus qui augmenteront de 10%. C'est pour cela que c'est incroyable, c'est
même inexplicable de voir que le gouvernement est complice de
l'augmentation du taux de l'inflation.
Il y a d'autres répercussions également directes de ce
projet de loi. Ce qui est encore plus grave, c'est de constater que
l'implication directe, les effets de ce projet de loi feront en sorte que le
déficit du Québec augmentera encore davantage. Cette augmentation
cette année tenez-vous bien, Mme la Présidente sera
de 58,6%, soit $1 400 000 000 de plus que l'an dernier. Le déficit
prévu par le ministre des Finances cette année sera de $2 300 000
000. Quand on sait que le déficit prévu aux Etats-Unis, dont le
budget n'est pas tout à fait de la même grosseur que celui du
Québec, sera de l'ordre de $15 000 000 000, nous nous prévoyons
un déficit de $2 300 000 000. Si on prévoit un déficit de
$2 300 000 000 dites-vous bien, Mme la Présidente, que rendu à la
fin de l'exercice, il sera de $2 500 000 000 ou $2 600 000 000 parce que chaque
année et cela, depuis quatre ans le ministre des Finances
a été obligé de réviser à la hausse son
déficit et ce devrait être la même chose cette année.
$2 300 000 000, cela veut dire que ce gouvernement, depuis qu'il est en place,
a dû augmenter le déficit du Québec de près de $6
000 000 000, six mille millions, et les répercussions directes du projet
de loi que nous étudions présentement feront en sorte qu'on
l'augmentera encore cette année.
Mme la Présidente, lorsque ce gouvernement est arrivé au
pouvoir, la dette du Québec était de l'ordre de $3 000 000 000. A
la fin de cet exercice financier, et lorsque ce projet de loi sera voté
probablement, et qu'on aura connu ses effets directs, le déficit du
Québec sera tout près de $9 000 000 000. Cela veut dire qu'en
trois ans et demi on aura triplé le déficit du Québec.
Vous comprenez, Mme la Présidente, que cette seule raison justifie notre
opposition à ce projet de loi et c'est une des raisons majeures pour
laquelle j'insisterai auprès de mes collègues pour qu'ils
puissent voter contre ce projet de loi en deuxième lecture.
Bien sûr, si le ministre a des propositions à nous amener
lorsque nous étudierons ce projet de loi en commission parlementaire,
c'est avec plaisir
que nous pourrons réviser nos positions. Mais, tenant compte du
libellé et des effets directs de ce projet de loi surtout au niveau de
l'augmentation du taux de l'inflation et de l'augmentation énorme du
déficit du Québec... Parce que nous sommes déjà au
Québec je ne dis pas que cela dépend seulement du
gouvernement, cela fait longtemps qu'on est comme cela depuis quatre
ans, les contribuables les plus taxés au pays, si cette augmentation de
budget devait servir à baisser notre dette, à baisser notre
déficit, je serais d'accord, Mme la Présidente, mais, au
contraire, on nous a taxés jusque-là et ensuite on augmente
encore ce déficit de $2 300 000 000 cette année pour un grand
total, depuis que ce gouvernement est en place, de tout près de $6 000
000 000. Vous comprenez, Mme la Présidente, qu'on ne peut pas accepter
le principe d'un tel projet de loi et c'est pourquoi nous le rejetterons.
La Vice-Présidente: M. le député de
Pointe-Claire.
M. William Shaw
M. Shaw: Mme la Présidente, je m'étonne un peu que
l'Opposition officielle ne prenne pas assez de soin pour suivre les projets de
loi du ministère du Revenu dans tous les domaines. C'est évident
que c'est à la base de la gestion de ce gouvernement dans une direction
très négative pour la population du Québec au point de vue
de ses revenus disponibles à dépenser privément, ce qui
est une des clés... On dit: Même si ce gouvernement a une position
constitutionnelle qui n'est pas acceptée par la majorité de la
population de cette province, c'est au moins un gouvernement qui gère
bien notre province, mais tous les faits ne concordent pas avec ce point de
vue. C'est évident que le gouvernement prétend, d'un
côté, que cette année il va faire une réduction de
taxes pour des contribuables québécois, mais, en
vérité, c'est totalement le contraire. Savez-vous, Mme la
Présidente, que cette année les contribuables
québécois vont payer $648 000 000 de plus en impôts que
l'année passée? (11 h 40)
On peut jouer avec des chiffres. On peut dire que nous avons
réduit à 12,5% les déductions d'impôt; c'est vrai.
Mais la vérité et les derniers chiffres: combien de contribuables
québécois vont payer moins d'impôt cette année
qu'ils n'en ont payé l'année passée? C'est évident
que, si c'est ce montant de $648 000 000 de plus d'impôt à payer,
cela veut dire que la grande majorité des Québécois va
payer plus d'impôt à cause du taux d'inflation et d'un manque de
responsabilité du gouvernement envers les contribuables
québécois. C'est vrai aussi que, même avec cette grosse
augmentation du montant d'impôt, notre déficit augmente à
$2 300 000 000 au moins. Nous avons une grosse augmentation de l'impôt
lui-même et, en même temps, nous voyons une grosse augmentation du
déficit budgétaire de ce gouvernement.
On dit, Mme la Présidente, que le choix de ce gouvernement n'est
pas d'indexer les tables d'impôt qu'on paie. C'est un choix
gouvernemental. Le gouvernement fédéral peut choisir quelque
chose, mais nous autres, nous avons choisi pour le mieux-être des
Québécois. Mais l'évidence est là. On paie plus
d'impôt et c'est simplement cela. On paie plus d'impôt et on
accroît gravement le déficit budgétaire de notre
province.
On dit, Mme la Présidente, que nous avons apporté quelques
petits changements techniques à l'avantage des contribuables; c'est
vrai. On laisse maintenant aux épouses de certains ouvriers et de
personnes qui ont des petits commerces un salaire. Cela a du bon sens. Cela
fait partie d'un projet du gouvernement fédéral. En concordance
avec cela, je suis totalement d'accord. Mais à la base du
problème du Québec et du fait que nous soyons dans un pays qui
fait concurrence quant à l'expertise pour développer notre
province, si cette même expertise a besoin de payer plus d'impôt
dans chaque domaine, soit l'impôt personnel, l'impôt des
corporations et l'impôt sur les droits successoraux, dans tous les
domaines, est-ce que nous construisons un fardeau qui bloque
véritablement l'avantage des investisseurs dans notre province?
Mme la Présidente, ce sont des actions comme celles-là qui
nous mettent dans une situation qui développe ces grands déficits
qui ont triplé depuis la prise du pouvoir par ce gouvernement. C'est
incroyable, Mme la Présidente, que cette année chaque
Québécois ait développé une nouvelle dette de $2000
avec cette grosse augmentation de l'impôt personnel et de l'impôt
dans d'autres domaines.
Madam President, I am sorry to see the Opposition attacking so weakly
these basic attitudes of the government, the attitude of how the tax law should
be applied. There are three fundamental things which is weakening the
competitiveness of this province in attracting new investments, in attracting
expertise investments, in developing the economy which is sorely needing this
kind of development.
We see, this year, an actual drop in per capita revenue from taxation,
because of a drop in economic activity, while our neighbour, Ontario, has had a
$790 000 000 increase in its revenues over and above those that were predicted
over last year, while in our whole province, we had a drop of over-predicted
revenues of $280 000 000, because our province is driving out the income
producers rather than attracting them; it is driving them out at a cost which
is being reflected in growing deficits and higher tax level. The government is
suggesting: Look, we are going to increase by 12,5% certain baseline
deductions; imagine, what a great gift we are giving them. But, in truth, Madam
President, if we examine all the figures, the final bottom line is that
Quebeckers will pay, this year, $648 000 000 more in incore tax than they paid
last year.
Now, how the Minister of Revenue can explain to me that this government
has acted to reduce
taxes in this province amazes me. This is where we should be attacking
the so called credibility of this good well-meaning administration. I could
give you a hundred examples, an example such as the one that the Minister of
Finance gave yesterday suggesting that a $500 000 farm, that became involved in
succession duties would only involve $23 000 in taxes, which could be paid over
seven years. And you want to tell me, Madam President, how many farmers can
demonstrate a residual out of their cash flow, over $100 a week, just to meet
that particular area. That is why we have over 1 000 000 acres, in this
province, of undeveloped farm land, because every time this situation happens,
the result is that the farmer sells his farm to pay the succession duties,
takes his capital and moves it out of the province or to Florida. That is the
reality, that is why this economy is going down, this is why this economy is
suffering so severely under this administration that pretends to be at least a
well guided administration.
When your Minister of Revenue says: I had the choice, I could have
indexed the tables like the Federal government, but my choice was to reduce the
sales tax on shoes and furniture.
Madam President, we do not play with figures, the reality is what the
Minister of Finance has never remembered, what the Minister of Revenue has
obviously forgotten is that the size and the stability of your tax base is the
fundamental that is required to deliver the taxes that make this province work
and when you undercut it, when you chop away at it, when you make us less
competitive as a tax economy than the other provinces in this country, then you
are destroying the cow from which the milk comes. This is what this government
has done so effectively and that is why I say again: We should, every single
member of the Opposition, be bringing this case before the people, that to
suggest that we have reduced the tax levels for Quebeckers with this law 102.
Look at this: 12,5% less to pay on your basic deduction, but we do not have to
adjust your tables because we have made that our choice, we are a good
government, we know what is best for you and so, in telling you we are going to
reduce your taxes, we note, when you take your tax return, at the end of the
year, that you will be paying more because we have not indexed your tables. As
the Conference Board of Canada has demonstrated, the people of this province
have never shown a greater reduction in available spending money and its
purchasing power since the great depression. (11 h 50)
Why? Because the government has benefited from inflation and has not
considered the tax payer at all. If, Madam President, this government had shown
restraint in government's spending, perhaps we could say that this kind of tax
increase is justified. If, Madam President, they were injecting new capital
investment into the economy to expand jobs, we would then, perhaps, say that
this is an expansionist budget and such a budget would be just justified. But
that is not what this government is doing, Madam President. It is increasing
the deficit, it is decreasing its investment into the private sector and the
development of new jobs; it is increasing, for example, the creation of its
debt in the area of the pension fund. It is also using that pension fund to
finance its own debt. It is creating, Madam President, a very very dangerous
level of personal debt per tax payer.
No, Madam President, this is not an efficient, considerate, responsible
government. It is one that likes to play with figures and try and propagandize
what they are saying, what they are doing, by saying: we are acting in your
best interest and, Madam President, the truth is, at the end of each year, the
tax payer will understand that while he pays more taxes, while he has less
disposable income and while his per capita debt is increasing because of the
deficits developed by the policies of this government, he has been snowed, he
has been misled, and come the next election, they will speak. Thank you, Madam
President.
La Vice-Présidente: M. le ministre du Revenu, votre
réplique.
M. Michel Clair
M. Clair: Oui, Mme la Présidente. Je remarque qu'à
part la participation de mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, de
mon collègue de Richmond, de ceux de Pointe-Claire et d'Orford, il n'y a
personne du côté de l'Opposition. Cela ne semble pas beaucoup
intéresser ces gens. Ils envoient un représentant venir nous dire
n'importe quoi et, sitôt ces choses inappropriées dites, ils
s'empressent de sortir. Quoi qu'il en soit, je voudrais répondre d'abord
au député de Notre-Dame-de-Grâce, Mme la Présidente,
qui a dit: Dans les circonstances actuelles, on ne peut justifier des baisses
d'impôts. Il se référait à l'attitude du
gouvernement fédéral actuel puisque leurs amis dont ils sont la
succursale parlent actuellement d'augmenter des impôts, d'abolir
l'indexation de la table des impôts à Ottawa. Ils se sentent donc
forcés de défendre des choix politiques d'un gouvernement qui
n'en a plus à cause des déficits accumulés au cours des
dernières années. La raison pour laquelle, fondamentalement, nous
on peut continuer à justifier les réductions d'impôts sur
le plan économique, c'est que depuis quatre ans, ce gouvernement a
assaini les finances publiques et administré avec raison, avec logique
et avec modération. Ce qui fait en sorte qu'actuellement, par exemple,
cette année, malgré le niveau élevé en chiffres
absolus du niveau d'emprunts, les besoins financiers nets par rapport aux
revenus du gouvernement sont de l'ordre de 12%. Autrement dit, le gouvernement
du Québec va emprunter environ 12% à 13% de l'argent qu'il va
dépenser.
Quelle est la situation au niveau du gouvernement fédéral?
Plus du double, Mme la Présidente. Le gouvernement fédéral
est rendu à financer ses dépenses courantes; son budget annuel
est basé sur un niveau d'emprunt qui dépasse 25%. Si, dans des
circonstances comme celle-là, le gou-
vernement fédéral pense à abolir l'indexation de la
table d'impôt, s'il cherche par toute espèce de moyens à
camoufler des augmentations d'impôts, je comprends le
député de Notre-Dame-de-Grâce, pour qui le
fédéral c'est Dieu le père, de venir dire ici qu'on ne
peut pas justifier des réductions d'impôts, parce qu'il pense
qu'on administre comme lui administrerait, puisqu'il prendrait ses
modèles au niveau du gouvernement fédéral pour
administrer. Mme la Présidente, on peut parfaitement les justifier, nos
réductions d'impôts. On peut parfaitement les justifier, et ce
sans nullement compromettre la santé financière de l'Etat
québécois.
Je voudrais rappeler des chiffres au député de
Notre-Dame-de-Grâce. Vous savez, le budget du Québec, on peut en
faire ce qu'on veut comme gouvernement. Ceux qui nous ont
précédés de ce côté-ci de la Chambre ont
décidé, par exemple, une certaine année cela a eu
des impacts, non seulement pour une année, mais pour plusieurs
années de se payer un feu d'artifice à Montréal,
les Jeux olympiques. Le gouvernement de l'époque avait le droit
d'hypothéquer la situation financière du Québec au
bénéfice d'un spectacle. Des gens l'ont fait, ils ont mis le
gouvernement du Québec dans une mauvaise situation financière,
mais il n'y a rien qui nous oblige à adopter la même attitude que
celle des gens qui nous ont précédés.
Qu'est-ce que cela veut dire concrètement, par exemple, au niveau
des emprunts totaux? Ne prenons pas seulement un élément des
emprunts, prenons l'ensemble des emprunts du secteur public: les commissions
scolaires, les municipalités, Hydro-Québec, la Régie des
installations olympiques; prenons tous les emprunts faits par des
créatures ou des organismes du gouvernement du Québec. En 1976,
l'année des Jeux olympiques, l'ensemble des emprunts totaux du secteur
public du Québec représentait 12% de la production nationale du
Québec; en 1977, la première année complète du
gouvernement, on est tombé en bas de 8%; l'année suivante, en
1979, à 7,5%, et cette année, à 7%. Est-ce que le
député de Notre-Dame-de-Grâce comprend pourquoi, vu que le
gouvernement du Québec a décidé d'administrer sainement,
de ne pas se lancer dans des dépenses fofolles, mais plutôt
d'administrer en fonction de réduction d'impôt, avec ces
brèves explications que cela se justifie pleinement sur le plan social,
sur le plan économique, sur le plan politique, sur le plan financier?
Ces réductions d'impôt se justifient pleinement, parce qu'on est
loin de compromettre la situation financière du gouvernement du
Québec et de ses organismes, loin de détériorer la
situation financière du gouvernement et de ses organismes. On a
réduit de 12% à 7% le pourcentage d'emprunt par rapport à
la production nationale du Québec. De 12% à 7%, et on a
même réussi à accorder des réductions d'impôt
très significatives à l'ensemble des contribuables
québécois.
En résumé, je dis deux choses au député de
Notre-Dame-de-Grâce: Premièrement, qu'il n'aille pas, de
grâce, prendre ses modèles d'administra- tion au niveau du
gouvernement fédéral. Ils sont rendus au bout de
l'élastique avec les emprunts à un niveau qui dépasse 25%
des besoins financiers du gouvernement fédéral, alors que nous,
on en est seulement à 12% ou 13%. Donc, qu'il n'aille pas y prendre ses
modèles d'administration. De plus, qu'il ne cherche pas à
confondre la ppulation en citant toute espèce de chiffres. Voilà
pour le député de Notre-Dame-de-Grâce.
D'autre part, le député de Bellechasse nous a parlé
encore de faible réduction d'impôt. Mon collègue, le
ministre des Finances, rappelait hier que comme faible réduction
d'impôt, l'écart entre les contribuables québécois
et les contribuables onta-riens qui était de 20% nous
étions 20% plus taxés que les Ontariens en 1976 au moment de
notre arrivée au pouvoir nous l'avons réduit de
moitié. C'est plus que ne l'a fait n'importe quel gouvernement du
Québec. Et, comme le disait mon collègue des Finances hier, cela
a pris six ans au gouvernement libéral, de 1970 à 1976, pour
mettre le Québec dans la situation où il était et cela
nous a pris quatre ans pour améliorer cette situation en
réduisant de moitié l'écart Ontario-Québec au
niveau des impôts.
Dans d'autres secteurs, pour prendre des exemples plus concrets, parce
que le député de Pointe-Claire, comme le député de
Bellechasse ont dit tous deux: Des réductions d'impôt finalement,
il n'y en a pas eu, ce n'est pas tout à fait vrai ces réductions
d'impôt, cela n'existe pas. D'abord, un artifice du député
de Pointe-Claire, il dit: Oui, mais avec l'augmentation du niveau de revenu des
gens, on se trouve à payer tous plus d'impôts. Soit, c'est tout
à fait vrai. Si moi, je gagne $12 000 une année, que je suis
imposé à 10%, cela fait un certain montant, si j'augmente mon
niveau de revenu de $2000, cela fait un montant plus élevé. C'est
évident, c'est une règle mathématique.
Si le gouvernement du Québec n'avait pas pris les moyens pour
réduire, pour freiner cette augmentation des impôts, il aurait pu
aller chercher au-delà de $1 500 000 000 de plus au cours des trois
dernières années. Cela va pour le général. (12
heures)
Pour des cas particuliers, je vais vous donner quelques exemples de
réductions d'impôt qui ont bénéficié à
l'ensemble des contribuables: la fiscalité municipale. Le
député de Pointe-Claire ne nous a pas parlé des
réductions d'impôt qui ont probablement eu cours dans sa
municipalité comme dans 90% des réductions très sensibles
d'impôt foncier pour les contribuables québécois. Il n'a
pas parlé de ça. Le remboursement d'impôt foncier, c'est un
programme qui s'adressait aussi au monde en vie. Plutôt que de construire
des fables, on préférait amener des réductions
d'impôt. En ce qui concerne le programme de remboursement d'impôt
foncier, j'ai de mon ministère, qui administre le programme, les
dernières statistiques en date du 30 mai. Est-ce que le
député sait, par exemple, qu'à ce jour il y a eu 335 000
Québécois qui ont pu bénéficier d'un remboursement
d'impôt foncier d'une moyenne de $108 chacun grâce à nos
politiques? Il y a eu 335 000 contri-
bubles sur 819 000 demandes; il y a donc actuellement 62% des demandes
qui sont traitées.
Je vais donner un autre exemple au député de
Pointe-Claire: le résultat des réductions d'impôt de
l'année dernière du ministre des Finances. Au niveau des
remboursements d'impôt tout court, est-ce que le député de
Pointe-Claire sait qu'à ce jour, 1 878 000 contribuables oui, il
entend bien soit 77% des 2 417 000 dont le rapport d'impôt a
été analysé à ce jour ont
bénéficié d'un remboursement d'impôt pour une
moyenne par individu de $225 ce sont des réductions d'impôt
réelles, ce ne sont pas des peurs ni des affirmations gratuites comme en
ont faites les députés de l'Opposition tantôt pour
un montant global de remboursement à ce jour, au moment où on se
parle, de $426 000 000! En voilà des réductions d'impôt! Ce
sont des réductions d'impôt qui sont venues grâce à
une administration financière saine du ministre des Finances, Jacques
Parizeau, qui a mis de l'avant des mesures susceptibles de rabaisser les
impôts en même temps que d'assainir la situation financière
du gouvernement du Québec.
Je pourrais prendre d'autres exemples, des exemples plus petits. Un
jeune couple qui prend ménage, comme on dit, qui s'établit: $2000
de meubles; ce n'est pas exagéré de s'acheter $2000 de meubles.
Actuellement, dans les régions, il y a des journaux qui donnent ce qu'on
appelle des billets qui peuvent permettre à un jeune couple d'avoir un
panier de provisions de $25 au moment de ses fiançailles. Le panier de
provisions que le ministre des Finances d.onne dans un cas comme
celui-là, c'est, pour $2000 de meubles achetés, $160 de paniers
de provisions, en quelque sorte, soit une réduction d'impôt
réelle de $160.
Je prends un autre exemple: une personne handicapée qui a le
droit d'attendre de son gouvernement qu'il prenne des mesures pour lui
permettre de pallier un tant soit peu ses handicaps sur le plan des politiques
fiscales. Le prix moyen d'une automobile, on doit s'entendre pour quelque chose
comme $7000 aujourd'hui. $7000, ce n'est pas exagéré pour le prix
moyen d'une automobile. Un contribuable handicapé qui achète un
véhicule automobile et le fait modifier pour être en mesure de le
conduire lui-même ne paie plus de taxe de vente. Il n'y en a plus! 8% de
$7000, ça fait bien $560 pour ce contribuable. Il me semble que,
contrairement à ce que le député de Pointe-Claire
affirmait tantôt, de même que le député de
Bellechasse, $560, ce ne sont pas des insignifiances pour le monde en vie qui
va bénéficier de ces réductions de taxes, de ces
exemptions. L'approche qui a été retenue par ces deux
députés démontrait non seulement qu'ils n'avaient pas pris
connaissance du budget et du projet de loi, mais qu'encore plus, ils ignoraient
les véritables besoins de la population québécoise
à ce chapitre.
Un autre exemple, puisqu'ils ont tant dit que les réductions
d'impôt n'étaient pas vraies. Je vais vous donner la
réduction d'impôt dont va bénéficier un contribuable
si on additionne l'indexation des exemptions personnelles à la
réduction géné- rale d'impôt de 3%. Pour un
contribuable célibataire dont le revenu est de $10 000 par année
en 1979 par rapport à 1981, au 1er janvier, cela va lui donner, entre
1979 et 1981, personnellement, une réduction d'impôt, si on
additionne les deux, de $164; s'il est au niveau de revenu de $15 000 il
y en a beaucoup de gens à ce niveau une réduction
d'impôt de $229; s'il est à $20 000, $286. C'est pour le
contribuable célibataire. Cela ne vient pas des nuages, ce n'est pas une
affirmation gratuite, n'importe qui peut le vérifier et le calculer.
Prenons le cas du contribuable marié maintenant. Même
comparaison: niveau d'impôt payé en 1979 et impôt
payé en 1981, en additionnant les exemptions personnelles plus la
réduction générale d'impôt, sans tenir compte des
insignifiances que sont les réductions d'impôt, l'abolition de la
taxe sur les meubles, les vêtements, ainsi de suite, telles que les
qualifiait le député de l'Opposition tantôt. Sans tenir
compte de cela, un contribuable marié, à $10 000, verra en deux
ans ses impôts réduits de $215; celui qui est à $15 000 les
verra réduits de $308; celui qui est à un niveau de revenu de $20
000 les verra réduits de $379. C'est vérifiable en tout temps,
Mme la Présidente.
Mais l'Opposition dit: Tout cela se fait au détriment de la
petite et de la moyenne entreprise et on est en train de vivre une situation
tout à fait catastrophique à cause de la mauvaise administration
du gouvernement du Québec. Le député de Pointe-Claire
aurait avantage à demeurer dans cette Chambre, cela va peut-être
l'éclairer, cela va peut-être le rassurer sur la santé
économique du Québec. L'an dernier, un record depuis que les
bureaux de statistiques existent, le niveau de création d'emplois, le
niveau d'investissements manufacturiers au Québec. Depuis qu'on tient
des statistiques, jamais la performance du Québec n'a été
meilleure et c'est sous le gouvernement actuel, avec l'Opposition qu'on a en
face, que cela s'est réalisé. Créer 80 000 emplois dans la
même année, obtenir des investissements manufacturiers plus qu'il
n'y en a jamais eu depuis qu'on tient des statistiques au Québec, je
pense que c'est loin du sombre tableau qu'essayait de brosser fort
malhabilement d'ailleurs, à mon avis le député de
Pointe-Claire tout à l'heure.
Au niveau également des petites et moyennes entreprises, ces
députés disent: On augmente le niveau de taxe sur les profits des
sociétés de 12% à 13% au Québec et c'est
catastrophique. Je vous rappelle que, même à 13%, en ce qui
concerne les grandes entreprises, on demeure en bas de la plupart des provinces
canadiennes j'avais les taux tantôt qui sont de 14%
à 15% selon les provinces; seules quelques-unes sont en bas. Je donne
les taux d'imposition: Terre-Neuve, 14% pour la grande entreprise;
Ile-du-Prince-Edouard, 10%; Nouvelle-Ecosse, 12%; Nouveau-Brunswick, 12%;
Ontario, 14%; Manitoba, 15%; Saskatchewan, 14%; Colombie-Britannique, 15%.
Nous, Mme la Présidente, à la suite de l'augmentation, nous nous
retrouvons à 13%, alors que nous sommes en bas de la plupart des autres
provinces.
En ce qui concerne les petites entreprises, le taux sera de 12% sauf que
les deux députés ont, peut-être pas sciemment, mais en tout
cas ignoré la Loi sur les stimulants fiscaux, qui peut permettre de
faire en sorte qu'une entreprise qui se qualifie à la Loi sur les
stimulants fiscaux, au dégrèvement fiscal,
bénéficie d'une réduction de la moitié de ces 12%,
soit l'équivalent de seulement 6%. Que le député de
Pointe-Claire me dise dans quelle autre province un tel taux existe. Qu'il nous
le dise, je n'en connais pas. Qu'il nous dise dans quelle autre province le
régime d'épargne-actions existe; je n'en connais pas. Qu'il nous
dise dans quelle autre province le gouvernement a mis à la disposition
des entreprises des programmes de création d'emplois, des programmes de
développement économique aussi accélérés,
aussi intensifs et aussi articulés qu'au Québec. Je pense que le
député est malvenu le député de Bellechasse
et surtout le député de Pointe-Claire d'essayer de dire
qu'au Québec, sur le plan économique comme le disait le
député de Pointe-Claire dans sa langue: "Economy in Quebec is
going down". Je pense que le député de Pointe-Claire n'a pas
vécu au Québec au cours de la dernière année; il se
serait rendu compte qu'on a eu le record au niveau de la création
d'emplois, au niveau des investissements manufacturiers et à plusieurs
autres niveaux. Même en agriculture, le député
s'avançait sur un terrain qu'il ne connaît visiblement pas. (12 h
10)
J'aimerais que le député d'Arthabaska, s'il était
présent ici ce matin, intervienne pour corriger les affirmations tout
à fait fausses et gratuites qu'a faites le député de
Pointe-Claire. Le député de Kamouraska-Témiscouata
c'est dommage, j'aurais dû l'inviter à le faire avant ma
réplique aura peut-être l'occasion, au prochain projet de
loi que nous allons étudier, d'intervenir, lui aussi, pour
démontrer à quel point c'est farfelu. Jamais, Mme la
Présidente allons voir dans les régions rurales du
Québec les agriculteurs n'ont autant considéré
qu'ils avaient un ministre de l'Agriculture compétent, qui savait saisir
la nature réelle de leurs problèmes, adapter des programmes en
fonction de leurs besoins et ainsi augmenter leur niveau de revenus, leur
sécurité et la stabilité des entreprises agricoles.
Des Voix: Bravo!
M. Clair: Je termine, Mme la Présidente, puisque,
visiblement, mon temps est expiré. Je voudrais simplement, en terminant,
rappeler encore une fois à mon collègue de
Notre-Dame-de-Grâce que ce n'est pas en essayant de déformer la
réalité qu'on va faire avancer le Québec. Bien au
contraire. Je pense qu'en essayant de faire un discours comme celui qu'il a
fait, il a manqué une belle occasion de critiquer, s'il avait
l'intention de la faire, les mesures qui sont proposées
concrètement par ce projet de loi. J'espère qu'on aura l'occasion
d'en discuter en commission parlementaire. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Merci, Mme la Présidente. J'aurais pu
intervenir...
La Vice-Présidente: Sur une question de
règlement?
M. Goulet: Oui, Mme la Présidente. J'aurais pu intervenir,
au moment où le ministre du Revenu parlait, en vertu de l'article 50 et,
si vous me le permettez, je le ferai immédiatement en vertu de l'article
96. Le ministre a donné une mauvaise interprétation aux propos
que j'ai tenus et il a mis en doute les chiffres que j'avais donnés, Mme
la Présidente, par des affirmations gratuites. Ce que j'avais dit, Mme
la Présidente...
La Vice-Présidente: C'est cela. M. le député
de Bellechasse, nous convenons que vous rappelez ce que vous avez dit et
comment le ministre, à votre avis, l'a interprété, sans
plus. C'est bien l'article 96 que vous invoquez.
M. Goulet: Certainement, Mme la Présidente. Très
brièvement, j'avais dit que les besoins financiers du Québec
avaient été de l'ordre de 12,5% et le ministre a dit que
c'était 7%. Mme la Présidente, pour les besoins financiers au
niveau total, en pourcentage des revenus, voici ce que j'ai dit. On va prendre
les trois dernières années de l'autre gouvernement. La moyenne
était de 11,6%, mais rappelez-vous, Mme la Présidente, qu'il y
avait 18% pour l'année des Olympiques. D'accord, Mme la
Présidente, l'autre gouvernement a été battu à
cause de cela, mais il faut se rappeler que, pour les besoins financiers du
gouvernement actuel, depuis ces trois dernières années, la
moyenne a été de 12,7% et non pas de 7% comme l'a dit le ministre
du Revenu.
La Vice-Présidente: M. le député!
M. Clair: Question de privilège, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: M. le ministre.
M. Clair: Je n'ai pas mis en doute l'affirmation du
député selon laquelle les besoins financiers nets du gouvernement
étaient de 12,5%. Ce n'est pas de cela que j'ai parlé. J'ai
parlé des emprunts totaux de l'ensemble du secteur public
québécois par rapport à la production nationale. Je mets
le député au défi de contredire ce que j'affirme. En 1975,
les emprunts totaux du secteur public québécois
représentaient presque 9% de la production nationale. L'année
suivante, celle des Jeux olympiques, on atteint presque 12%. En 1977, on est
légèrement au-dessous de 8%. L'année suivante, en 1978, on
tombe encore un peu, soit à 7,5% et, en 1979, nous glissons au-dessous
de 7%. Il y a une différence, Mme la Présidente, au niveau des
notions entre les besoins financiers nets et les
emprunts totaux qui tiennent compte, eux, de l'ensemble des besoins de
tout ce qui est gouvernemental ou paragouvernemental et, là-dessus, on a
diminué de cinq points, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: A l'ordre, M. le député!
A l'ordre, s'il vous plaît! Cette motion... M. le député de
Bellechasse, s'il vous plaît! M. le ministre! A l'ordre! Cette motion de
M. le ministre du Revenu proposant que soit maintenant lu la deuxième
fois le projet de loi no 102, Loi modifiant la Loi sur les impôts et
certaines dispositions législatives, est-elle adoptée?
Des Voix: Sur division.
La Vice-Présidente: Adopté sur division.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire adjoint du
gouvernement.
Renvoi à la commission permanente du
revenu
M. Bertrand: Mme la Présidente, je ferais maintenant
motion pour que ce projet de loi soit déféré à la
commission parlementaire permanente du revenu.
La Vice-Présidente: Cette motion est-elle
adoptée?
Des Voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
M. Bertrand: Mme la Présidente, comme il est possible que
trois projets de loi n'aient pas suffi au ministre du Revenu pour donner une
leçon de finances publiques à nos collègues de
l'Opposition...
La Vice-Présidente: M. le leader...
M. Bertrand: ... je vous demanderais d'appeler l'article 39).
Projet de loi no 103 Deuxième lecture
La Vice-Présidente: M. le ministre du Revenu propose la
deuxième lecture du projet de loi no 103, Loi modifiant de nouveau la
Loi concernant la taxe sur les carburants et modifiant d'autres dispositions
législatives.
M. le ministre du Revenu.
M. Michel Clair
M. Clair: Mme la Présidente, avant de commencer mon
propos, le vote qui vient de se tenir est particulièrement significatif.
Dans le projet de loi qu'on vient d'adopter, Mme la Présidente, les
réductions générales d'impôt...
M. Goulet: Question de règlement, Mme la
Présidente.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Goulet: M. le Président, j'aimerais que vous...
Le Vice-Président: M. le député de
Bellechasse, sur une question de règlement.
M. Goulet: ... rappeliez au ministre du Revenu que le projet de
loi que nous avons discuté tout à l'heure a été
voté et on ne doit pas revenir sur ce vote. Nous avons voté
contre et nous sommes fiers d'avoir voté contre parce que ce
gouvernement...
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Goulet: ... a apporté un déficit de $6 500 000
000 au Québec depuis trois ans.
M. Clair: M. le Président, c'est encore plus significatif
que je ne le pensais, parce que ce projet de loi qu'on vient...
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Chauveau, M. le
député de Bellechasse, s'il vous plaît!
M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, c'est tellement symbolique. Le
projet de loi qu'on s'apprête à étudier comme le
précédent prévoit des réductions
d'impôt...
Une Voix: Encore.
M. Clair: ... pour les petits contribuables...
Des Voix: Encore.
M. Clair: ... pour les simples particuliers...
Une Voix: Encore des réductions d'impôt.
M. Clair: ... et de rarissimes augmentations en ce qui concerne
un certain nombre de gens mieux nantis. Quand je vois le député
de Notre-Dame-de-Grâce et le député de Bellechasse voter
contre, c'est parfaitement concordant avec l'attitude qu'ils ont toujours
prise, soit celle de favoriser en fait les gros au détriment des
petits.
M. Scowen: C'est cela. C'est exactement cela.
Une Voix: Vous demandez trop et vous ne donnez rien.
M. Clair: Au moins, ils sont francs, M. le Président. Cela
s'en vient.
M. Scowen: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Scowen: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président: Oui.
M. Scowen: II me semble respectueusement que vous devriez avoir
au moins l'intention de nous permettre...
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Une Voix: Vous avez renié votre chef, vous autres.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Bellechasse, M. le député de
Lac-Saint-Jean, M. le député de Chauveau, merci beaucoup. M. le
député de Matane.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Oui.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Scowen: II me semble, M. le Président, que vous devriez
au moins avoir l'intention de nous permettre, à chacun de nous, de
parler, pendant l'étude de ce projet de loi, de n'importe quoi. Vous
devez simplement rappeler à l'ordre le ministre qui a commencé
à parler d'un autre projet de loi. Je n'ai aucune objection à
cela si vous êtes prêt à nous donner, à chacun des
autres députés, les mêmes privilèges et à
nous permettre de parler ensuite.
Le Vice-Président: M. le député, je vous
ferai remarquer que le ministre venait à peine de commencer son
discours. Je vais le laisser aller quelques minutes et je jugerai à ce
moment-là.
M. le ministre.
M. Clair: Je n'ai aucune objection, M. le Président,
à ce que vous permettiez au député de
Notre-Dame-de-Grâce de parler de n'importe quoi. Il est habitué
à cela.
Une Voix: C'est ce qu'il fait habituellement.
M. Clair: Le projet de loi no 103 que nous étudions
aujourd'hui en deuxième lecture modifie quatre lois dans le domaine des
taxes à la consommation. C'est ainsi que l'on veut apporter à la
taxe sur les carburants, à l'impôt sur la vente au détail,
à l'impôt sur le tabac et, enfin, aux droits de licence des
amendements nécessaires à la mise en oeuvre des mesures
annoncées par le ministre des Finances à l'occasion, d'abord, de
la déclaration ministérielle qu'il a faite en cette
Assemblée le 21 décembre 1979, puis au moment du discours sur le
budget du 25 mars 1980.
Les modifications à la Loi concernant l'impôt sur la vente
en détail touchent c'est visible les consommateurs de
très près, dans leur vie de tous les jours. En effet, de
nombreuses exemptions de taxes sont venues s'ajouter et compléter celles
qui existaient déjà. C'est une des approches qu'a prises le
ministre des Finances depuis quelques années d'abolir la taxe de vente
dans des secteurs où, en même temps, des industries
québécoises peuvent en profiter et où les
Québécois peuvent également en profiter largement vu qu'il
s'agit de biens de première nécessité. (12 h 20)
Ainsi, cette année, les meubles, les rideaux et les tentures, le
linge de maison, tout ce qu'on appelle en général le blanc sera
dorénavant exempté en vertu de ce projet de loi no 103. L'an
dernier, nous avions aboli la taxe de vente sur les textiles, les
vêtements, les chaussures. Nous y ajoutons donc, cette année, les
rideaux, les tentures, le linge de maison, les meubles et tout ce qu'on appelle
en général le blanc. Nous avons pensé que cela
favoriserait le développement de ces industries, d'une part, et
permettrait également aux jeunes couples comme aux familles de
bénéficier d'une exemption qui soit susceptible
d'améliorer leur milieu de vie concrètement.
Je rappelle simplement pour exemple, M. le Président, qu'acheter
pour $2000 de meubles, pour une famille, ce n'est pas rare, une famille qui
débute surtout, et que la réduction qui s'applique à ce
moment surtout en matière de meubles, c'est fort important
est donc un remboursement, si on veut, une exemption de $160 que le
gouvernement de Québec remet, en quelque sorte, à ce couple qui
achète pour $2000 de meubles.
Nous avons également pensé à un autre secteur de la
population, les travailleurs. Nous avons voulu élargir l'exemption de
taxe de vente sur les vêtements afin d'y inclure les vêtements de
travail. Les lunettes, les casques protecteurs, les survêtements, les
gants de travail, etc., seront dorénavant exemptés de cette taxe
de vente de 8%. C'est une exemption particulièrement
intéressante. Beaucoup de citoyens et de citoyennes sont allés
rencontrer nos députés dans leur bureau et ont fait cette
remarque, par mon entremise et par l'entremise d'autres, au ministre des
Finances, voulant que ce ne soit pas très acceptable que des
travailleurs paient une taxe de vente sur des gants de travail, sur un casque
protecteur, sur des survêtements, alors que des vêtements beaucoup
moins nécessaires étaient déjà exemptés de
la taxe de vente.
Il y a un autre secteur de la population que le ministre des Finances a
voulu toucher et que concerne le projet de loi no 103, ce sont les personnes
handicapées. Les personnes handicapées
bénéficieront de deux nouvelles exemptions de taxe de vente en ce
qui concerne, premièrement, les élévateurs
mécaniques conçus pour permettre aux invalides d'avoir
accès aux étages d'un immeuble. Cette réduction de taxe de
vente peut également signifier des montants importants puisque ce type
d'élévateur mécanique n'est quand même pas un objet
de peu de valeur.
D'autre part, les lecteurs optiques pour les aveugles seront, eux aussi,
exemptés de la taxe de vente cette année. Ces deux exemptions
s'ajoutent à certaines autres, au niveau des prothèses, qui
avaient été annoncées l'année dernière.
Une troisième mesure concerne les handicapés, en
matière de remboursement cette fois-ci. L'élargissement
annoncé dans le projet de loi no 103 permettra désormais au
contribuable d'obtenir le remboursement de la taxe payée sur un
véhicule automobile, pourvu qu'il le fasse transformer dans les six mois
qui suivent l'achat pour en permettre la conduite par une personne
handicapée ou pour faciliter le transport de ces personnes.
C'est donc dire qu'une personne handicapée qui a besoin d'acheter
un véhicule automobile et de le faire transformer pour être en
mesure de le conduire, tenant compte de son handicap, pourra obtenir un
remboursement de la taxe de vente du ministère du Revenu. Je rappelle
l'exemple de tantôt; un véhicule automobile de $7000, aujourd'hui,
c'est une valeur assez raisonnable, moyenne si on veut. Alors, 8% de $7000,
ça fait bien $560; c'est le remboursement auquel aura droit la personne
qui se prévaudra de cette exemption qui est prévue dans le projet
de loi no 103.
D'autre part, comme cela avait été annoncé le 21
décembre 1979, la vente de médicaments aux hôpitaux, aux
organismes de santé et aux organismes de services sociaux sera
exemptée de taxe.
Il en est de même pour la location de machinerie avec
opérateur, qui sera dorénavant considérée comme de
la location de services. Nous avons eu, depuis quelques années, de
nombreuses représentations du milieu des entrepreneurs, des locateurs de
machinerie lourde, et le gouvernement a décidé de se rendre
à la logique des intéressés, mettant ainsi fin à
plusieurs années de contentieux avec le gouvernement du Québec et
particulièrement le ministère du Revenu.
Les modifications apportées à la taxe sur les carburants
maintenant sont d'une importance majeure. Comme l'a déjà dit le
ministre des Finances lors de son discours sur le budget: Par la transformation
de cette taxe en nombre de cents par un pourcentage, nous disons en fait au
gouvernement d'Ottawa que, quelle que soit la manière dont il fixera le
prix de l'essence, celui-ci comportera 20% de taxe payables au gouvernement du
Québec, qui rapatriera ainsi une partie des hausses véritables du
prix du pétrole dans les coffres du Québec. En effet, cette taxe
ne sera plus calculée, comme je viens de le dire, en cents par litre de
carburant, mais à un pourcentage, soit 20% de son prix de vente au
détail.
Pour s'assurer, cependant, que tous les Québécois paieront
pour leur carburant, essence ou mazout, la même taxe, quel que soit
l'endroit au Québec où ils l'achèteront, le prix de vente
au détail moyen de chaque carburant visé sera fixé selon
des modalités prévues par la loi, de sorte que le montant de la
taxe payé par le consommateur ne variera pas d'une pompe d'essence
à une autre. Dans un désir évident de prendre soin des
gens des régions excentriques, dans un désir évident
d'équité, nous voulions qu'au Québec, au
Nouveau-Québec, à Montréal, à Québec,
à Gaspé ou en Abitibi la taxe payée par l'acheteur soit
exactement la même et ne constitue pas un facteur qui augmente encore
davantage le prix de l'essence dans les régions
éloignées.
Le prix de vente fixé aujourd'hui est de $0.22 le litre pour
l'essence régulière sans plomb et servira donc à
établir le montant de la taxe payée jusqu'à ce qu'il soit
déterminé à nouveau de la manière prévue par
la loi. Pour le moment, je vous dirai même que, depuis le 25 mars
dernier, les consommateurs font des économies. L'essence
régulière sans plomb taxée le 25 mars à $0.044 le
litre n'est plus taxée, à la suite de l'application de la
règle de 20%, qu'à $0.042 le litre, ce qui est une
réduction de $0.002. D'autre part, ce qui reste dans les deux cas est
nettement inférieur, je tiens à le préciser, à la
taxe ontarienne qui, elle, est actuellement de $0.046 le litre par rapport
à $0.044.
Par ailleurs, des changements au chapitre des exemptions de taxes et des
remboursements permettront de simplifier l'administration de cette loi tant
pour les contribuables et les mandataires chargés de la perception de la
taxe que pour les fonctionnaires du ministère du Revenu. C'est ainsi,
par exemple, que le seul mazout coloré qui demeure taxable est celui qui
sert à alimenter les locomotives sur rails. Tous les autres usages du
mazout coloré, même ceux qui étaient taxés au taux
réduit de $0.07 le litre, par exemple, l'alimentation d'un moteur non
propulsif, d'un engin stationnaire ou d'une pompe à eau utilisée
pour combattre un feu de forêt, seront dorénavant
complètement exempts de taxes.
La Loi concernant l'impôt sur le tabac est, elle aussi,
modifiée. Ces changements portent d'abord sur l'augmentation et la
transformation de la taxe existante en une taxe équivalant à un
pourcentage au prix de vente. La formule utilisée pour déterminer
le montant de la taxe sur les cigarettes est sensiblement la même que
celle qui est prévue pour les carburants. Le prix moyen fixé est
de $6 pour 200 cigarettes et pourra être déterminé et
pondéré pour tenir compte des différents formats sur le
marché. Enfin, nous avons décidé d'introduire par le biais
de ce projet de loi un nouvel article afin d'assujettir à l'impôt
sur le tabac des personnes qui jusqu'à présent pouvaient
consommer au Québec du tabac sans être imposées. Cela se
trouvait encore. Je parle des fabricants qui consomment eux-mêmes leur
tabac ou qui le distribuent à d'autres gracieusement. En effet, des
pratiques de promotion courantes consistent à distribuer massivement des
cigarettes sans qu'aucune taxe ne soit perçue. La loi, en effet, ne
prévoyait jusqu'à présent que la taxation lors de l'achat
du tabac. Il s'agit là d'une faille que nous voulions corriger afin
d'être équitables envers les consommateurs dits ordinaires de
cigarettes qui, eux, sont toujours imposés.
La dernière loi que le projet de loi no 103 amende sur trois
points est la Loi sur les licences. Voilà ces modifications. D'abord,
les droits que doivent payer les gagnants sur les enjeux en vertu
d'un système de pari mutuel lors de courses de chevaux. Ces
amendements permettront que les sommes retournées aux parieurs soient
les mêmes, tant sur les grandes pistes que sur les petites pistes; cela
nous apparaissait être une mesure raisonnable et
d'équité.
Quant à l'aide financière que le gouvernement consent
à l'industrie des chevaux de course, nous augmenterons le montant de
l'aide financière que le gouvernement apporte à cette industrie
au Québec en portant le taux de cette aide de .7% à 1,2%, et
même jusqu'à 1,5% de la valeur de la mise totale pour toutes les
courses tenues au Québec pendant un exercice financier
précédent.
Enfin, les droits payables sur les contenants à remplissage
unique d'un litre ou plus passeront de $0.05 à $0.20. Toutefois, ces
$0.15 d'augmentation seront remboursables chaque fois que les contenants seront
recyclés. Depuis deux ans, le ministère de l'Environnement a
conclu des ententes avec les fabricants de contenants non réutilisables.
Ces ententes ont généralement bien fonctionné, sauf dans
le cas des gros contenants d'un litre qui, eux, ne font toujours pas l'objet
d'une entente valable. Nous essayons donc de régler le problème
de récupération d'une autre manière en augmentant ainsi
les droits payables sur les contenants à remplissage unique d'un litre
ou plus.
Ce sont là, M. le Président, les commentaires que je
voulais faire sur le projet de loi no 103. Cependant, je désire, avant
de terminer, annoncer dès maintenant que j'aurai à apporter en
commission parlementaire des amendements d'ordre technique. Voilà un
projet de loi qui, encore une fois, annonce des exemptions de taxes nombreuses
pour les contribuables québécois. J'ai hâte d'entendre les
raisons du député de Notre-Dame-de-Grâce de s'opposer
à ces réductions d'impôt.
Le Vice-Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: M. le Président, avant de répondre
à la question posée par le ministre, je veux profiter de la
tradition bel et bien établie par le ministre et rappeler un seul point
du dernier projet de loi. Je pense que c'est important parce que j'ai
l'impression qu'il a été mal conseillé par ses propres
conseillers. Quand vous essayez de justifier la santé financière
du Québec, vous avez toutes sortes de moyens de le faire: comparer le
déficit avec les revenus, comparer la dette avec le PNB, comparer les
emprunts avec n'importe quoi. Vous avez choisi, M. le ministre, de comparer les
emprunts avec le PNB. Je pense que vous devez retourner auprès de vos
conseillers, parce que, franchement, ce n'est pas une façon très
justifiée.
Premièrement, nous sommes ici pour parler du gouvernement du
Québec et non pas de SIDBEC et des autres organismes d'Etat. Il faut que
tout le monde comprenne qu'un emprunt fait par SIDBEC pour construire une usine
productive n'est pas du tout la même chose qu'un emprunt fait par le
gouvernement du Québec pour combler un déficit courant. Je ne
veux pas aller plus loin, parce que vous m'avez déjà donné
la permission implicitement de soulever ce point, mais je veux simplement, en
terminant, rappeler au ministre qu'entre son arrivée au pouvoir et ces
jours-ci la dette du gouvernement du Québec, comparée même
avec le PNB du Québec, a augmenté d'à peu près 25%.
C'est très important ce point et c'est une autre preuve que la situation
n'est pas saine.
Pour répondre maintenant à la question du ministre,
à savoir comment je peux démontrer à la population du
Québec que cette loi qu'il vient d'annoncer n'est pas une loi qui va
aider les contribuables, je vais poser des questions. Savez-vous combien valent
les baisses d'impôt prévues dans ce projet de loi, les baisses de
taxe de vente sur les objets qu'il a mentionnés: les textiles, les
chaussures et les autres articles qui sont changés dans ce projet de
loi? Vous ne le savez pas, parce que cela n'a pas été
révélé par le ministre des Finances dans le budget. J'ai
posé la question en commission parlementaire, le lendemain, et le
chiffre c'est $80 000 000 par année.
Savez-vous combien est le total du coût des augmentations de la
taxe de vente sur le pétrole et le tabac qui sont proposées dans
le même projet de loi? Ces chiffres étaient dans le budget. Il est
prévu par le ministre à $70 000 000. En effet, le
bénéfice net prévu par le ministre des Finances
lui-même pour les consommateurs est un montant dérisoire total $10
000 000.
Et ce n'est pas tout, parce que c'est basé sur le prix actuel de
l'essence. Si l'augmentation du coût du pétrole prévue pour
le 1er juillet, qui est de l'ordre, si je me rappelle bien, de $4 le baril, est
mise en vigueur, le montant prévu ne sera pas $40 000 000 d'augmentation
de coût pour les conducteurs de voiture québécois, mais
à peu près $250 000 000. En effet, le système que le
ministre des Finances a mis en marche en cachette, par du camouflage dans ce
projet de loi, c'est d'aller chercher auprès des contribuables d'ici un
an à peu près trois fois plus qu'ils ne donnent.
Il est très probable que d'ici un an, le résultat de ce
projet de loi, que vient de vanter le ministre du Revenu, va coûter
directement chaque année aux contribuables du Québec trois fois
plus cher qu'ils ne paient maintenant. J'espère que vous ne trouvez pas
ce raisonnement très compliqué, M. le Président. Vous avez
été obligé d'écouter une avalanche de chiffres ce
matin et vous serez condamné à en écouter davantage, mais
j'espère que c'est clair. Le projet de loi no 103 présentement en
discussion et que vient de vanter le ministre du Revenu, après la
prochaine augmentation de $4 le baril prévue par le
fédéral, va coûter aux contribuables
québécois en taxe de vente, notamment sur le tabac et les
carburants, à peu près trois fois plus qu'il ne donne dans les
baisses proposées dans le projet de loi. C'est la réponse que je
donne respectueusement au ministre quand il me demande comment je peux dire aux
Québécois que ce projet de loi-ci n'est pas à leur
avantage.
Je veux terminer en soulignant tout simplement un point important
touchant cette nouvelle idée du ministre des Finances de changer le taux
d'imposition en pourcentage plutôt qu'un montant fixe en ce qui concerne
l'essence. Comme vous le savez, il a proposé dans le budget de changer
le système d'imposition à un montant fixe de 20% du prix actuel.
C'est correct, c'est une idée qui n'est pas mauvaise, mais il a
essayé d'induire la population en erreur à deux reprises et mon
collègue de l'Union Nationale a lui-même essayé de corriger
les faits. Il va probablement le refaire aujourd'hui, mais parce que c'est
important, je pense qu'on va le faire à deux.
Dans le budget, le ministre des Finances disait: "Nous nous mettons
simplement en position pour que la hausse inévitable ne soit pas
partagée seulement entre Ottawa et Edmonton, mais que le Québec
participe aussi au partage de l'assiette au beurre. Placé devant la
nécessité d'une hausse du prix de l'essence, le contribuable
québécois n'en voudra sûrement pas à son
gouvernement de rapatrier au Québec une partie de la hausse".
On ne reprend pas une partie de la hausse d'Ottawa et d'Edmonton; on
ajoute ici aux hausses imposées par les producteurs de pétrole
une autre hausse qui est de notre décision à nous. Est-ce clair?
On ne prend pas part à l'augmentation proposée ou mise en vigueur
par les autres, on y ajoute. Les contribuables québécois seront
obligés d'accepter non seulement une augmentation qui est une
décision des provinces pétrolières, qui ont le produit,
mais une autre augmentation indépendante, autonome du ministre des
Finances du Québec. Ne croyez pas que le ministre des Finances va
percevoir une partie de l'augmentation des autres, c'est une addition. Je le
dis parce que le lendemain, dans un autre débat, le ministre, en
réplique à une question, disait: Sur chaque dollar
d'augmentation, nous prenons $0.20. Ce n'est pas vrai. Sur chaque dollar
d'augmentation, nous allons ajouter encore $0.20 et ce sera $1.20. Est-ce
clair? Il est très important que la population du Québec ne soit
pas induite en erreur. Ce n'est pas une partie de l'augmentation des autres
qu'on va gagner; c'est une autre taxe que le ministre des Finances a
décidé d'imposer par-dessus celle que nous avons
déjà. (12 h 40)
En ce qui concerne le tabac, je pense que c'est un problème qui
touche surtout le premier ministre qui, à mon avis, fume à peu
près 15% à 20% de la production du Québec. Il faut qu'il
s'arrange avec le ministre du Revenu. Je pense que ce sont tous les
commentaires que j'ai pour le moment, M. le Président.
Le Vice-Président: M. le député de
Bellechasse.
M. Bertrand Goulet
M. Goulet: Merci, M. le Président. Bien sûr, je
tenterai d'intervenir sur le projet de loi no 103 et cela, en toute
objectivité et sérénité, même après
que le député de Chauveau eût traité le
député de Bellechasse de colonisé. Je lui dirai que 62% de
la population de Bellechasse a appuyé son député; c'est
pas mal préférable à l'appui qu'a reçu le
député de Chauveau.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Projet de loi no 103, M. le député de Bellechasse.
M. Goulet: Oui, M. le Président. Je disais que l'appui que
j'ai reçu est préférable à celui qu'a reçu
le député de Chauveau. En plus d'avoir été
démis de ses fonctions...
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Goulet: En plus d'avoir été démis de ses
fonctions, d'avoir été...
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!... A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Goulet: M. le Président, je dois admettre que le projet
de loi no 103 traduit certaines mesures positives annoncées lors du
discours sur le budget ou encore lors de la déclaration
ministérielle du ministre des Finances, en décembre dernier.
Parmi les bonnes mesures que véhicule ce projet de loi, mentionnons les
exemptions de taxes concernant les lecteurs optiques pour les aveugles
le ministre en a parlé tout à l'heure, c'est bon de le souligner
à nouveau; quand c'est positif, c'est positif les meubles
meublants, les rideaux, tentures, médicaments vendus aux
établissements du réseau des affaires sociales, ainsi de suite.
Enfin, des mesures à tendance sociale ou des mesures qui auront un
impact positif sur enfin, je l'espère certains secteurs de
notre économie.
Il reste, par contre, des mesures qui ne plairont pas à tout le
monde. Je prends un exemple: les droits que doivent payer les brasseurs et les
distributeurs de liqueurs douces pour mettre sur le marché des
contenants à remplissage unique d'un litre ou plus. Sur cette mesure, le
seul reproche je dis bien le seul reproche que je pourrais
formuler au gouvernement, c'est de ne pas avoir prévenu les industries
concernées auparavant pour qu'elles puissent s'ajuster à temps.
Mais, en tout état de cause, c'est un choix que le gouvernement se
devait de faire dans un souci et, je l'espère, premier de
conservation de l'environnement. Je crois que, dans ces circonstances, on ne
peut qu'approuver une mesure de ce genre.
Au début de mon intervention, je disais que ce projet de loi
renfermait l'essentiel de certaines bonnes mesures prises par le gouvernement
et je le maintiens encore, sauf que, comme le gouvernement nous y a souvent
habitués au cours des dernières années, en ce qui a trait
au contenu, on ne peut approuver entièrement ce projet de loi. C'est
pour cela que j'aurais aimé le voir scindé en deux parce qu'il y
a une partie positive et il y a une partie négative.
Cette fois-ci, mon appréhension vient du fait que l'on veut
modifier la taxe sur les carburants. D'une taxe unitaire, on passerait à
une taxe calculée sur le prix de vente au détail, ce qui se
traduira, pour le contribuable québécois, en une augmentation ou
en une taxe de 20% chaque fois qu'il y aura une augmentation du prix de
l'essence.
J'admets avec le ministre qu'à brève
échéance cela entraînera pour certains consommateurs une
diminution du prix de l'essence suivant que ce consommateur utilisera de
l'essence régulière ou non, mais il ne faut pas tenir cela pour
acquis, M. le Président, car tout le monde sait que le pétrole
et, par conséquent, l'essence a plutôt tendance à monter et
que de nouvelles hausses pointent à l'horizon. Donc, pour chaque
augmentation du prix du pétrole, chaque augmentation
décrétée par le gouvernement fédéral, cela
reviendra pour le contribuable québécois à payer 120% de
l'augmentation qu'aura à subir l'ensemble des autres Canadiens.
Chaque fois qu'on va augmenter, par exemple, de $0.10 ou, pour faire un
chiffre rond, de $1, que cela prenne un, deux ou trois ans pour augmenter de
$1, que ce soit pour un ou vingt gallons ou 50 litres, chaque fois qu'on
augmentera de $1, au niveau de l'ensemble canadien, les Québécois
auront une augmentation de $1.20, soit 20% supplémentaires. A quelques
exceptions près, je pense que ce seront seulement les
Québécois qui subiront cette hausse de 20%, seulement les
Québécois à l'intérieur du système canadien.
L'ironie de tout cela, M. le Président, c'est que l'odieux de chaque
augmentation passera sur le dos d'Ottawa bien qu'en réalité une
partie de cette hausse sera attribuable directement à la hausse de
taxation que le Québec aura choisi d'imposer.
Je remarque, en plus, une sorte de changement d'attitude de la part du
gouvernement pé-quiste, du gouvernement québécois envers
le gouvernement fédéral. En effet, le ministre des Finances et le
ministre du Revenu aujourd'hui, avec cette loi, semblent faire confiance
à Ottawa dans la fixation des prix du pétrole car, comme le
ministre des Finances le mentionnait lors d'une question que je lui ai
posée justement au sujet de cette taxe, il m'avait dit, M. le
Président et je cite la réponse qu'il avait
formulée à ce moment-là si M. Crosbie avait su que
des taxes comme celles-là existaient dans le reste du Canada,
vraisemblablement, il n'aurait pas augmenté sa taxe d'accise de $0.18,
mais de $0.15 spécifiquement pour tenir compte de ce que je viens
d'indiquer.
Comme je le disais, contrairement à ce à quoi le
gouvernement péquiste nous a habitués, soit confrontation ou
méfiance envers le fédéral, il semble maintenant faire
confiance au jugement d'Ottawa, du moins dans ce cas-ci, dans le cas de
l'augmentation du prix du pétrole. J'espère, M. le
Président, que cela se traduira dans les faits.
En terminant, si vous me le permettez, j'aimerais apporter certaines
précisions. Dans les faits, je sais que l'augmentation du prix du
pétrole est une façon efficace d'enrayer le gaspillage de
l'énergie et, à ce compte, il est inutile de rappeler que nous
les Canadiens, nous sommes les plus grands consommateurs d'énergie du
monde. Par contre, si je dois me serrer la ceinture dans le but d'une
utilisation plus rationnelle de l'énergie et surtout au niveau de
l'essence, je ne voudrais pas être le seul à payer, mais que mes
voisins en fassent autant.
De plus, j'irais même jusqu'à souscrire à une telle
mesure sur l'essence si j'avais la garantie du gouvernement que cette
augmentation de taxe sur l'essence serait redistribuée à tous les
contribuables québécois sous forme de diminution d'impôt,
d'augmentation de la qualité des services, etc., et non pour effacer,
justement, ce fameux déficit de $2 300 000 000 qu'on connaîtra
encore cette année qui est vraiment issu d'une mauvaise utilisation de
nos ressources, d'une mauvaise gestion des fonds publics.
A ce sujet, j'aimerais rappeler une déclaration du ministre des
Finances qu'il a faite le 21 décembre dernier: Si nous devions, pour
nous égaliser avec le gouvernement fédéral et les autres
provinces, percevoir cette fameuse taxe de $0.18 qui n'existe plus, mais
dont il a parlé au moment où il prononçait son discours
sur le gallon d'essence, nous l'aurions redistribuée sous forme
de baisse d'autres impôts: taxe de vente, taxes foncières,
impôt sur le revenu, etc. Ce que je dis, M. le Président, c'est
que cette modification que l'on apporte à la taxe sur les carburants
n'est pas faite dans le but de nous égaliser avec les autres provinces
parce que, en fait, nous pourrons retrouver, somme toute, une surtaxe de 20%
comparativement aux autres provinces.
Cette seule mesure, dans ce projet de loi, devrait nous inciter à
voter contre ce projet de loi. Mais nous avons quand même tenté
d'avertir le gouvernement de ce danger, de cette surtaxe. Conscient
également, comme je l'ai dit au début de mon intervention, que
dans ce projet de loi il y a de bonnes mesures, je recommanderai à mes
collègues d'appuyer ce projet de loi, mais j'aurais aimé le voir
scindé en deux de façon à séparer la
dernière partie, au niveau de cette fameuse surtaxe de 20% que les
Québécois devront payer sur l'essence. Cette seule raison nous
aurait justifiés de voter contre ce projet de loi. (12 h 50)
Le Vice-Président: Merci.
M. le député de Pointe-Claire.
M. William Shaw
M. Shaw: Thank you, Mr President. Firstly, I would like to say
that Bill 103 has certain very positive aspects because it does take into
consideration tax relief for people who sould have been considered in earlier
budgets and, after having made representation to the government, have been
considered and are now getting the benefit of some tax relief, especially in
the area of sales tax for workers and their working clothing, hard helmets,
etc., for the handicapped who have to buy very expensive equipment and material
so that they can function more successfully in our society.
These new tax reductions, for example, to improve the condition of our
textile industry in the province of Québec, especially in the area of
decorative materials, are positive cuts. As the member for
Notre-Dame-de-Grâce has indicated, the amount of the reduction is
considerable. When we consider that $80 000 000 will be reduced from the
revenues of the province by these cuts, it indicates that these are important
and considerable cuts, important to the people that are involved, important as
a policy of this government.
It is also important to suggest that if this were all of bill 103, it
would, I am sure, receive 100% support by the members of this House. It is in
this kind of direction that the government should be moving, taking into
consideration the pressures that they do receive from their constituents that
make very clear to them that certain types of taxes are unfair and inequitable
and I am pleased to see that the government has reacted positively in this
direction to make these particular adjustments.
Now, we move to the new tax on gasoline. We heard the Minister of
Finance suggest that, over the next period of time in this country, we will see
significant increases in the cost of petroleum energy and that the government
of Québec should have a piece of the pie of the taxes that will be
collected on this growing cost to the people of this country. I would suggest
that, here, we have a paradox, we have a piece of legislation that responds
very positively to the needs of people, but then we have another piece of
legislation that says: This growing income, which is not new petroleum but an
increased cost for petroleum, should give a new advantage to the province of
Québec as a source of revenue. So, they suggested they would add a 20%
tax on the increase or take 20% of the increases generated in tax on the
increases in the cost of this new petroleum energy that will be growing over
the next period of time.
We take, for example, a suggestion that, on the 1st of July, there will
be an increase in the cost of petroleum the figure is not, as yet,
determined, it is suggested, by the Minister of Energy as being approximately
$1. By the past budget that was almost passed by the Conservative government
being $4 this final figure had not been determined, because this final
negotiation between the Federal government and the province of Alberta has not
been finalized. But, nevertheless, Mr President, we still import 100% of our
petroleum energy into the province of Québec and obviously the Federal
government has applied a tax which, in effect, has been used to subsidize the
cost of the non-producing provinces of Canada so that the hard hitting effects
of the rapid growth in the international cost of petroleum would not be felt by
certain regions of Canada when others have the advantage of having petroleum as
part of their natural resources.
The Minister of Finance goes further and he says; You know, if we
introduce this tax, the Federal government will be less ready to increase their
taxes and so we will, in effect, not increase the tax on petroleum, we will
have the Federal government and the provinces reduce their piece of the pound
of flesh that the taxpayer must pay and we will in effect not have any true tax
increase whatsoever and everyone is quite aware that this is baloney. In fact,
this is a surtax that Quebeckers alone will pay in Canada, 20% more tax on
their petroleum products than in other parts of Canada. And so, in effect, the
efforts that are being made by the Federal government to soften the cost
increases being felt by Quebeckers, will be in effect undercut by this attitude
of the Minister of Finance that we also should take a share of the tax
potential revenues that are available on the increase in cost on petroleum
products.
I think that this is unfair because it should not be necessary. If this
government was really practicing the restraint that it claims to be, and
instead of reflecting back on the terrible waste that was involved in the
Olympic deficit, looking directly at its own activities; 70% increase in
spendings since they came to power, 23 new "régie" offices and new
bureaucracy, Mr President, there is the real problem. This is why in spite of
increases in taxation, because this does, as the member for
Notre-Dame-de-Grâce clearly said increase another source of revenue into
the neighbourhood of $250 000 000 or $300 000 000 in spite of the tax it does
reduce by $80 000 000 because it is... Another $300 000 000 that the taxpayers
will have to pay to this province, probably this year, most certainly next
year. And it is having to, in spite of this increase in tax, we will also see a
tremendous increase in deficit, to $2 300 000 000. Where lies the problem?
Perhaps, it is true that if they mismanage the spending, they are going to have
to increase the taxation. And maybe, if this government was acting truly
responsibly, it would begin to bring in the restraint that it pretends to bring
in reality. When we see that every province in this country has made strong
efforts to restrain its spending, when we see the federal government we
have not seen a new budget by our federal government but the past federal
government bringing in a budget which was significantly restrained in
spending, Mr President, then, the kinds of open-door legislation that this 20%
increase on the price of petroleum products will represent would not be
necessary. And, another area of taxation will not be an unnecessary load for
Quebeckers to pay. We are paying more income tax, more sales tax, more
corporate tax. And now, we are going to pay 20% more tax on our petroleum
products and that, Mr President, is because, in reality, this government is not
managing its spending properly and having to increase its revenues and,
therefore, having to load the people of this province with unnecessary
increases that again discriminated against Quebeckers as opposed to other
Canadians.
In spite of that, Mr President, recognizing that because of this lack of
control of spending the government needs these new revenues and in
respect to the reduction that the government is demonstrating in the
areas that it has, I will vote in favor of this piece of legislation. (13
heures)
M. Clair: M. le Président...
Le Vice-Président: Voici, il est 13 heures.
M. Clair: ... si j'avais le consentement de mes collègues,
je prendrais sept, huit minutes.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement pour
quelques minutes? M. le ministre.
M. Clair: Cinq, dix minutes, M. le Président. D'abord,
simplement pour reprendre au tout début le député de
Notre-Dame-de-Grâce qui disait que les besoins totaux d'emprunt
n'étaient pas...
M. Scowen: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président: Oui.
M. Scowen: J'ai un engagement à 13 h 5, 13 h 10. Si le
ministre ne prend vraiment que cinq minutes, c'est d'accord; autrement, je
préfère qu'il attende. S'il veut aller plus loin, ce n'est pas...
C'est d'accord? D'accord.
Le Vice-Président: Consentement pour cinq minutes.
M. Clair: Cinq minutes, M. le Président. Cinq, six
minutes, d'accord?
M. Scowen: ... si le ministre veut prendre vraiment cinq minutes,
d'accord, mais autrement, je préfère qu'il attende s'il veut
aller plus loin.
Le Vice-Président: Consentement pour cinq minutes.
M. Clair: Cinq minutes, M. le Président, cinq ou six
minutes.
Le Vice-Président: M. le ministre. M. Michel
Clair
M. Clair: Le député de Notre-Dame-de-Grâce
nous disait que le critère dont je me suis servi tantôt pour
démontrer l'assainissement de la situation financière du
Québec n'était pas bon parce qu'il tenait compte de l'ensemble
des emprunts de l'Etat québécois et de ses organismes. Si on
prend les besoins financiers nets, je voudrais simplement lui rappeler
qu'à la dernière année du gouvernement libéral
précédent, quant aux besoins financiers nets, il y avait eu un
taux de 14,2% d'emprunt alors que pour le budget actuel c'est 11,9% ou 12% qui
est prévu.
En terminant mon intervention, en réplique sur l'autre projet de
loi, j'avais invité le député de
Notre-Dame-de-Grâce à nous indiquer pourquoi il allait
voter contre puisque cela constitue surtout des réductions
d'impôt. Il nous est d'abord arrivé avec la hausse d'impôt
de la taxe sur le tabac. J'ai peine à comprendre la logique du
député de Notre-Dame-de-Grâce et de l'Opposition
officielle. Le député d'Outremont nous avait dit, au moment du
discours sur le budget, qu'il fallait hausser les impôts.
J'espérais bien que, par la discussion sur les projets de loi actuels,
on saurait du député de Notre-Dame-de-Grâce quels
impôts il était prêt à augmenter puisqu'il a
lui-même reconnu plus tôt ce matin que le temps n'était pas
à la baisse d'impôt et qu'on ne pouvait pas réellement
baisser les impôts.
Après avoir entendu tous les discours du député de
Notre-Dame-de-Grâce, puisqu'il veut hausser les impôts mais qu'il
ne veut pas maintenir les droits successoraux, il ne veut pas maintenir des
niveaux de taxe acceptables au niveau des grandes entreprises, il ne veut pas
augmenter l'impôt sur le tabac, je ne vois pas d'autre alternative pour
le député de Notre-Dame-de-Grâce que d'augmenter
l'impôt sur le revenu tout court. C'est peut-être ce qu'il a retenu
puisque c'est le seul domaine dont il n'a pas parlé.
En ce qui concerne la taxe sur les carburants, qui devient une taxe au
pourcentage plutôt qu'une taxe unitaire, mes deux collègues, le
député de Bellechasse et le député de
Notre-Dame-de-Grâce, ont essayé de faire croire que c'était
là une mauvaise décision pour les meilleurs intérêts
du Québec. Il me semble que s'il y a un sujet en faveur duquel ces deux
députés, qui ont fait campagne pour le non, auraient dû se
prononcer c'est bien celui-là. Ce que va nous permettre cette taxe de
20% au lieu d'une taxe unitaire, c'est d'être sûrs de participer
à la richesse canadienne. Comme le disait le premier ministre Trudeau,
lors de la récente campagne référendaire, on est Canadien
ou bien on ne l'est pas! Nous voulons être Canadiens à 100% et on
veut être sûrs d'avoir notre part dans cette richesse-là, on
veut des garanties on veut être assurés...
Une Voix: Redites ça sans rire.
M. Clair: Je le dis sans rire, certain, M. le Président.
On veut être assurés de deux choses: la première, c'est que
le gouvernement du Canada, quand il établira le coût du gallon de
pétrole, va devoir tenir compte qu'il y a au Québec une taxe de
20%. On va aller chercher 20% de l'augmentation. On n'est pas seul à
avoir compris cela. Nous ne sommes pas la seule province consommatrice de
pétrole à avoir compris que, si cela voulait dire quelque chose,
on est Canadien ou on ne l'est pas, il fallait agir de la sorte. Il y en a deux
autres provinces actuellement qui ont compris, de sorte que nous sommes trois
provinces à vouloir être canadiennes réellement à
part entière, comme ils se sont plu à nous dire pendant tout le
temps de la campagne référendaire, ces trois provinces
étant le Québec, le Manitoba et
l'île-du-Prince-Edouard.
M. le Président, ce qu'on veut, on veut être certain
d'avoir notre part, quand le gouvernement fédéral va augmenter le
prix du pétrole. Cette richesse que va générer
l'augmentation du prix du pétrole, il y a quelqu'un qui va en profiter
quelque part, soit les entreprises, soit le gouvernement de l'Alberta, soit le
gouvernement d'Ottawa. Nous, tout ce qu'on dit: Nous aussi, on veut avoir notre
part là-dedans simplement. Il y a deux autres provinces qui ont compris
cela et c'est ce qui méfait dire ceci sur des gens comme ceux qu'on
vient d'entendre: Si ces personnes voulaient être certaines qu'on
participe pleinement à la richesse de ce pays, c'était une belle
occasion d'appuyer le gouvernement sur cette mesure, plutôt que de voir
là la seule raison pour laquelle ils s'opposent au projet de loi.
Encore une fois, je suis la leçon du 20 mai dernier; on est
Canadien ou bien on ne l'est pas. On veut avoir notre part dans la richesse que
vont générer les augmentations du prix du pétrole.
Un dernier point en terminant, M. le Président, rapidement. Le
député de Bellechasse nous a dit ceci en ce qui concerne la taxe
sur les contenants en vertu de la Loi sur les licences. Les droits passent de
$0.05 à $0.15 sur les bouteilles d'un litre et plus, et en principe il
est d'accord sur cette augmentation de taxes qui pourra être
remboursée si les bouteilles sont recyclées. Sauf qu'il laisse
entendre que les entreprises en cause n'auraient pas été
consultées ni prévenues de quelque manière que ce soit en
rapport avec les augmentations.
Je voudrais dire au député de Bellechasse que, sauf erreur
de ma part, le ministre de l'Environnement, qui a négocié avec
plusieurs secteurs des ententes dans le but d'assurer le recyclage et la
conformité à certaines normes de protection de l'environnement
des bouteilles non réutilisables, j'imagine qu'il n'a pas exclu
volontairement de la consultation les entreprises en cause et qu'au contraire
ces entreprises auraient pu en venir à des ententes avec le
ministère de l'Environnement. Ceci étant dit sous réserve
de précisions de mon collègue, le ministre de
l'Environnement.
En terminant, je voudrais simplement dire que je ne comprends toujours
pas mon collègue, le député de Notre-Dame-de-Grâce.
Il m'apparaît que lui qui voulait des hausses d'impôt puisse
s'opposer à ce projet de loi qui prévoit des réductions et
quelques petites hausses sur des objets non essentiels. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président: La motion de deuxième lecture du
projet de loi no 103 sera-t-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader...
M. Scowen: Sur division.
Le Vice-Président: Sur division.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission permanente du
revenu
M. Bertrand: M. le Président, je ferais maintenant motion
pour que ce projet de loi no 103 soit déféré à la
commission parlementaire permanente du revenu.
Le Vice-Président: Motion adoptée? Des Voix:
Adopté.
M. Bertrand: Et nous suspendons jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président: Là-dessus, les travaux de cette
Assemblée sont suspendus jusqu'à 15 heures cet
après-midi.
Suspension de la séance à 13 h 10
Reprise de la séance à 15 h 11
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Veuillez vous asseoir.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bertrand: Merci, M. le Président. Je voudrais
simplement faire part à nos collègues que nous nous sommes
entendus, les différents porte-parole, sur les deux projets de loi que
nous allons étudier pour qu'à la suite de l'étude en
deuxième lecture des projets de loi nos 86 et 87 nous puissions nous
transformer en commission pléniè-re et étudier ces deux
projets de loi article par article. Nous pourrions donc terminer la
séance de cet après-midi avec ces deux projets de loi.
J'appellerais donc, M. le Président, le projet de loi no 86.
Projet de loi no 86 Deuxième lecture
Le Président: J'appelle maintenant la deuxième
lecture du projet de loi no 86, Loi sur le fonds forestier. M. le ministre de
l'Energie et des Ressources, vous avez maintenant la parole.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: M. le Président, il s'agit d'un
projet de loi qui... Oh! pardon. On me souligne que l'honorable
lieutenant-gouverneur, au nom de la reine, a pris connaissance de ce projet de
loi et qu'il en recommande l'étude à la Chambre.
M. le Président, il s'agit d'un projet de loi qui, en apparence,
est anodin; cependant, il est plein d'implications. Je ne voudrais pas laisser
passer l'occasion sans revenir un peu sur le sens qu'il faut
accorder à ce projet de loi et en voir une
nécessité sur les besoins du Québec. D'une part,
peut-être que le projet de loi apparaît un peu anodin dans la
mesure où le Québécois ne se préoccupe pas toujours
de l'existence de ses forêts et de l'importance que joue la forêt
dans son économie et dans son histoire. Par exemple, lorsqu'on se
replonge dans nos traditions et qu'on relit des textes comme Menaud,
maître draveur ou une bonne partie de notre folklore
québécois, on constate que la forêt a joué un
rôle extrêmement important, qu'un des premiers travaux à
l'extérieur qui s'est offert aux Québécois a
été dans le domaine de l'exploitation forestière. Nous
avons une longue tradition de bûcherons, nous avons une longue tradition
de travailleurs forestiers, une longue tradition des camps forestiers. Il faut
revenir à des légendes comme la chasse-galerie. Il faut revenir
à tout notre passé et à toute notre littérature
pour voir à quel point la forêt a marqué la
société québécoise.
Egalement, la forêt est capitale dans notre économie
puisqu'elle représente près de $3 500 000 000 de notre produit
national brut. C'est certainement notre première industrie au
Québec; elle est donc capitale.
Il faut se dire que même le citadin ne réalise pas que,
chaque fois qu'il sort $1 de sa poche, il y a près de $0.20 sur ce
dollar qui proviennent d'une activité forestière. En d'autres
termes, même l'urbain, même le citadin n'est pas conscient qu'une
bonne partie de l'argent qu'il a en poche vient de l'existence de cette
forêt et de son exploitation à des fins commerciales.
Par contre, si les Québécois s'intéressent
davantage à la forêt, c'est souvent parce qu'ils ont appris
à l'aimer. Ils ont appris, par exemple, par des politiques
d'accessibilité à la forêt publique, par des politiques de
déclubage, à profiter de la nature. Cette préoccupation,
que l'on note chez les Québécois comme d'ailleurs un peu partout
dans le monde, préoccupation pour l'environnement, pour la
qualité de la vie, a comme conséquence que, de plus en plus, on
voit la forêt comme un milieu écologique, comme un univers qu'il
faut respecter et qui est un endroit de récréation, de plaisir,
de qualité de vie. Si le Québécois s'intéresse
à la forêt, c'est souvent davantage pour des raisons
environnementales que pour des raisons commerciales, mais je pense qu'il faut
tenter d'équilibrer les deux.
Or, qu'est-ce qui frappe lorsqu'on examine justement les critiques que
l'on a adressées à la gestion de nos forêts dans les
années passées? D'une part, on a reproché que cette
forêt soit le monopole d'un petit nombre de grandes entreprises
forestières qui en ont contrôlé l'ensemble du territoire.
D'ailleurs, dès 1830, on parlait d'un scandale quant à
l'allocation des forêts puisqu'on constatait que d'immenses
étendues de forêt étaient allouées à un
certain nombre de petites compagnies qui sont devenues très grosses
entretemps et qui, finalement, ont fait fortune grâce à
l'exploitation des richesses.
Or, ce qu'il faut bien constater, c'est que très peu de ces
compagnies ont été québécoises à l'origine;
elles le sont de plus en plus puisqu'il y a des rachats d'entreprises
étrangères. On peut penser à la Consolidated-Bathurst qui
est maintenant une propriété du groupe Desmarais; on peut penser
à Domtar qui, récemment, voyait 22% de ses actions passer entre
les mains de la Caisse de dépôt; on peut penser à la
Donohue, achetée par la Saint-Félicien; on peut penser quand
même à un certain nombre de sociétés qui maintenant
sont devenues proprement contrôlées par des actionnaires
québécois. Mais il faut quand même se reporter dans le
passé et constater qu'il y a une centaine d'années l'ensemble de
nos forêts était contrôlé par une poignée
d'entreprises qui, finalement, en détenant le monopole de nos bois, le
monopole de nos forêts, ont peut-être profité de cette
forêt, de cette richesse naturelle pour assurer leur propre
épanouissement plutôt que l'épanouissement de l'ensemble de
la société et le Québécois a été
obligé de se contenter d'un rôle de bûcheron
essentiellement.
Deuxième critique que l'on peut faire à notre façon
de gérer nos forêts, c'est une critique liée au massacre,
au pillage éhonté de nos forêts. Qui n'a pas
circulé, par exemple, en forêt pour constater un immense parterre
de coupe à blanc et où on voit de la difficulté de
régénération, les arbres repoussent lentement? On doit
constater qu'effectivement on n'a pas, dans le passé, assuré aux
générations qui allaient nous suivre que notre forêt
maintiendrait son potentiel, sa qualité, la quantité de
matière ligneuse qui feraient en sorte que nos enfants pourraient
profiter d'une économie et d'un milieu de vie aussi agréable que
celui que nous ont laissé nos parents. Je pense que c'est le
deuxième commentaire que l'on peut faire quant à notre
façon de gérer nos forêts.
Les gouvernements qui se sont succédé ont certainement
tenté d'y remédier. Par exemple, à l'époque du
gouvernement de M. Johnson, on avait assisté avec M. Gosselin à
un effort pour accroître les travaux de reboisement des forêts
publiques, pour tenter justement de commencer à corriger les
méfaits d'une certaine exploitation qui était souvent dommageable
pour le milieu et qui ne permettait pas à la forêt de se
régénérer correctement.
Cependant, ce qu'on devait constater vers la fin du gouvernement de
l'Union Nationale, c'est que les crédits qui avaient été
alloués pour la création de pépinières et les
plantations en forêt publique se voyaient resserrés sans doute
à cause de contraintes budgétaires quelconques et le
problème de la plantation de petits arbres laissait peut-être
place à des problèmes plus importants à l'époque,
des problèmes d'éducation, des problèmes de santé.
Finalement, on devait constater que ces vastes programmes d'aménagement
forestier avaient pris un coup dur vers la fin des années soixante-huit,
soixante-neuf, soixante-dix. A son arrivée, le gouvernement
libéral, sous la direction, au ministère des Terres et
Forêts, de M. Drummond, a tenté de reprendre le problème
à sa source et de le corriger. On devait assister à deux
grandes politiques: politique de révocation et politique de
reboisement. Politique de révocation qui consistait à retirer aux
grandes compagnies, les unes après les autres, le contrôle de
leurs forêts de manière que de plus petits utilisateurs puissent
en profiter, comme présentement nous faisons place aux
coopératives forestières en forêt publique et, pour le
faire, il nous faut effectivement contrôler la gestion des forêts
publiques, c'est-à-dire qu'il faut, petit à petit, retirer du
contrôle des grandes compagnies des blocs entiers de forêt publique
et utiliser ces grandes forêts pour permettre à de nouveaux
intervenants d'entrer dans ce domaine. C'est ce qui a permis, par exemple, la
naissance d'une industrie du sciage très moderne dans le Nord-Ouest et
dans plusieurs régions du Québec. Donc, cette première
politique de révocation a permis graduellement à l'Etat de
devenir véritablement le gestionnaire de notre forêt publique.
La deuxième politique a été une politique de
reboisement. On s'était donné dans ce livre blanc un objectif de
65 000 000 de plants et on avait donc entrepris d'y allouer les crédits
nécessaires pour rebâtir l'intervention du ministère des
Terres et Forêts au niveau de l'aménagement et des plantations en
forêt publique. En 1976, les plantations avaient atteint une
quantité assez importante de 43 000 000 de plants dans nos
pépinières. Donc, on avait effectivement entrepris
d'accroître les budgets au niveau des plantations, budgets qui avait
chuté au début des années soixante-dix, soixante et onze,
soixante-douze.
Cependant, lorsque nous sommes arrivés en 1976, nous avons
dû constater que le ministère avait brûlé 8 000 000
de plants dans nos pépinières gouvernementales, faute des
crédits nécessaires pour les replanter en forêt. En
d'autres termes, on récoltait les semences, les "cocottes" si on peut
dire, on plantait dans les pépinières, on repiquait même
ces plants à l'intérieur des pépinières et, la
troisième année, au moment où il fallait les mettre dans
les forêts publiques, les reboiser, replanter ces plants, on constatait
que les budgets étaient coupés et, effectivement, en 1975-1976,
des coupures importantes des budgets au ministère des Terres et
Forêts ont entraîné la perte de près de 8 000 000 de
plants.
Nous avons dû, en 1977, mettre sur pied un programme conjoncturel
pour qu'au moins le volume de nos pépinières soit replanté
dans les forêts publiques. C'était une mesure temporaire. A suivi
cette première mesure en 1977 un plan d'aménagement, un plan
quinquennal où il s'agissait cette fois de consacrer près de $150
000 000 sur cinq ans à des travaux d'aménagement forestier
consistant essentiellement en des reboisements à partir de nos
pépinières, de même qu'en ensemencement aérien.
Essentiellement, nous visions une production de 100 000 000 d'arbres, toujours
les mêmes objectifs un peu ambitieux de chaque gouvernement
antérieur, et près de 75 000 000 de ces plants seraient produits
dans nos pépinières gouvernementales.
En fait, l'objectif que nous nous sommes imposé est de reboiser
25% des superficies qui ont été coupées, l'analyse par les
officiers du ministère étant que près de 75% de nos
forêts coupées se régénèrent naturellement
sans qu'il y ait besoin d'aller planter des arbres à la main. Il y a
suffisamment de semences et les conditions sont suffisamment favorables pour
que la forêt repousse par elle-même et cela, dans les années
ou les deux ans qui suivent. Cela est pour !a grande forêt publique. Pour
la forêt privée, c'est un peu moins que ce niveau.
Donc, ce plan quinquennal que nous avons annoncé a comme objectif
de reprendre à nouveau cette discussion de l'aménagement de nos
forêts publiques et de faire en sorte enfin qu'on puisse commencer
à les exploiter d'une façon intensive. Quelles sont les
conséquences pratiques de ces programmes d'aménagement forestier?
Elles sont triples. D'une part, il est bien évident que, si après
coupe, 25% de la superficie ne repoussent pas normalement, soit qu'ils
repoussent en aunes, en trembles, en espèces indésirables ou
encore qu'ils ne repoussent pas du tout, on assiste à des
problèmes d'érosion ou encore à des
phénomènes de marécages qui se produisent et que cette
forêt ne se régénère pas. (15 h 20)
Cela veut dire qu'on a coupé un certain volume de forêt une
année donnée, mais, lorsqu'on reviendra dans 45 ans, on n'aura
que 75% du bois qui était là lors de la première coupe. Si
on recule systématiquement année après année, le
danger existe réellement que nous finissions par épuiser cette
forêt.
Donc, en replantant, en réensemençant 25% de cette
forêt, c'est-à-dire les superficies qui ne se
régénèrent pas naturellement, nous allons pouvoir au moins
maintenir le potentiel forestier, donc garantir aux usines en place qu'elles
auront du bois à long terme. Mais ce n'est pas tout. On augmente
également la productivité des superficies ainsi
aménagées d'abord parce que l'entretien des plantations, dans la
mesure où nos arbres sont plantés moins serrés, ce qui, en
général, amène la régénération
naturelle, a comme conséquence que nos arbres poussent beaucoup plus
vite. La productivité de matière ligneuse à l'acre est
plus élevée et, par conséquent, nous avons plus de bois
à l'acre dans des terrains aménagés que dans une
forêt naturelle.
Donc, la conséquence de ces travaux d'aménagement est
d'accroître la vitesse avec laquelle notre forêt repousse. A ce
moment-là, comme avantage immédiat, sachant que dans 45 ans nous
aurons une forêt à maturité là où il aurait
fallu 75 ans et 100 ans, sachant donc que notre forêt va pousser plus
vite, va donner un volume de bois supérieur, on peut même souvent
hypothéquer des forêts à maturité, existant
maintenant, et augmenter dès maintenant les volumes de bois
coupés sur cette forêt publique. Donc, les travaux
d'aménagement ont souvent comme résultat, à cause de notre
structure de forêt et de l'existence d'une vieille forêt, de nous
permettre aujourd'hui d'accroître les coupes sachant qu'on prévoit
la
relève pour dans 45 ans. C'est l'avantage de plusieurs de nos
programmes de reboisement.
Troisième avantage, troisième objectif, forcément,
en accroissant la productivité de nos forêts, il n'est pas
nécessaire d'aller aussi loin de l'usine pour récolter la
matière ligneuse. Donc, la conséquence est que nous rapprochons
le bois de nos usines et que nous diminuons les coûts de transport.
Voilà donc trois objectifs qu'on peut poursuivre: maintenir la
quantité de matière ligneuse produite par notre forêt,
accroître la quantité de matière ligneuse et
également rapprocher cette forêt de nos usines.
Pour vous donner quelques exemples de l'impact économique de ce
programme quinquennal dans la seule Gaspésie, donc les comtés de
Matapédia, Matane, Bonaventure et Gaspé, nous allons reboiser
9000 acres, ce qui va augmenter le potentiel forestier de près de 200
000 à 300 000 cunits, donc des unités de 100 mètres cubes
de bois.
Qu'est-ce que cela représente comme impact? En pratique, cela a
représenté pour la dernière année le doublement de
toutes les garanties d'approvisionnement des scieries de la Gaspésie.
Nous avons donc multiplié par deux toutes les garanties
d'approvisionnement des usines de la Gaspésie. Soulignons que ceci n'a
été possible que par la révocation des concessions et une
réallocation des bois d'une façon différente.
Si on ajoute, ensemble, le programme de révocation, une
réallocation des bois vers le sciage plutôt qu'à la
pâte à papier, l'utilisation des résidus du bois pour
l'industrie papetière et les programmes d'aménagement, c'est, en
fait, une multiplication par deux des garanties d'approvisionnement.
C'est-à-dire que chaque usine double sa production; c'est
considérable. Non seulement c'est considérable, mais c'est plein
d'implications. Le député de Bonaventure n'est pas ici cet
après-midi, mais je pense qu'il aurait reconnu avec nous qu'à
l'usine qui lui causait énormément de soucis dans son
comté, l'usine de Poite-à-la-Croix, et qu'il n'était pas
possible de moderniser parce qu'elle bénéficiait de garanties
d'approvisionnement trop restreintes, maintenant, en fait, on a entrepris une
modernisation totale, une reconstruction totale de l'usine parce que cette
usine bénéficie d'un approvisionnement qui est deux fois plus
important que précédemment.
On pourrait parler également d'une autre usine du comté de
Bonaventure. Le député de Bonaventure reconnaîtra
qu'à New-Richmond il était très inquiet lorsque la
société Consoli-dated-Bathurst a fermé une scierie
importante à New-Richmond grâce à ce programme
d'aménagement forestier, il nous est possible de reconstruire une
nouvelle usine, qui est maintenant d'ailleurs construite à New-Richmond
même.
Je pourrais parler des problèmes du député de
Matapédia, des problèmes du député de Matane et des
miens puisque nous avons des problèmes semblables à
Sainte-Florence, à Matane, à Price, à Marsoui. Nous avons
des usines incapables de se moderniser parce qu'incapables d'ob- tenir du
ministère des Terres et Forêts des garanties d'approvisionnement,
des quantités de bois qui leur auraient permis de justifier des
investissements nécessaires dans leurs usines. On avait donc des usines
qui vieillissaient, qui n'étaient pas rentables, qui allaient vers la
décrépitude, vers la fermeture graduelle.
Un tel programme a donc comme conséquence de rendre viables de
telles entreprises. En pratique, c'est tout près de 1500 emplois pour la
Gaspésie seule qu'il s'agit de créer. Et lorsque l'on sait que le
nombre de travailleurs en Gaspésie est de l'ordre de 75 000 dans toute
la région 01, du Bas-du-Fleuve et de la Gaspésie, on
s'aperçoit que c'est de près de 20% que l'on peut réduire
le taux de chômage en Gaspésie par un seul programme de ce type.
On se rend compte, donc, de l'impact énorme que peut avoir, sur le plan
économique, un programme d'aménagement intensif de nos
forêts.
Il en va de même pour ce plan quinquennal de modernisation de
l'industrie forestière. En fait, nous avions présenté
à l'industrie un plan d'intervention dans le domaine forestier. Nous
nous attendions à ce que l'industrie fasse un investissement de l'ordre
de $1 000 000 000. C'est près de $2 500 000 000, $2 300 000 000, $2 500
000 000 que l'industrie s'apprête à investir dans nos usines au
Québec. Ce sont 47 usines sur 52 qui participent au plan quinquennal
gouvernemental. C'est considérable à nouveau. Lorsqu'on parle
d'investissements de $2 000 000 000 dans le secteur manufacturier au
Québec, il s'agit là d'investissements sans commune mesure avec
tous les General Motors dont on pourrait parler. C'est gigantesque comme
projets d'investissements au Québec. Cela s'est fait grâce
à une politique gouvernementale et, évidemment, à un
ensemble de conjonctures favorables, mais soulignons que plusieurs de ces
projets vont nécessiter un accroissement des approvisionnements en bois
pour justifier l'accélération de machines, pour justifier
certaines modifications aux procédés de pâtes. Par
conséquent, il nous faut aller puiser dans la forêt publique le
bois nécessaire. Or, qu'est-ce qu'on constate? On constate que nous
sommes au fond du baril. Ce que la forêt pouvait générer
à l'état naturel, nous le coupons. Nous coupons à la
même vitesse que nos arbres poussent au Québec. La seule
façon d'augmenter vraiment la quantité de bois aux usines, c'est
de trouver un moyen de faire pousser les arbres plus vite, donc, de
procéder à de l'aménagement intensif. Soulignons que
plusieurs des projets de modernisation vont devoir reposer sur
l'aménagement intensif de nos forêts. (15 h 30)
On pourrait parler de ce projet papetier. Le député
d'Abitibi-Ouest pourrait certainement souligner son projet dans le Nord-Ouest
d'une usine de papier journal parrainé par le gouvernement du
Québec à la suite d'études qui ont été
entreprises au ministère des Terres et Forêts dès 1977, en
début d'année, et qui, en impliquant la Société
générale de financement et la société
Normick-Perron, vont donner naissance à la plus récente
usine de papier journal au Canada. Ce sera l'usine, effectivement, du
Nord-Ouest. On pourrait souligner une autre usine en Gaspésie pour
laquelle, grâce à nos programmes d'aménagement, nous
pouvons dégager des volumes de matière ligneuse qui nous
permettent une nouvelle implantation industrielle dans le secteur papetier.
Donc, l'impact économique du plan quinquennal
d'aménagement de nos forêts est considérable. Cependant,
peut-on, lors d'une restriction budgétaire ou d'un changement de
gouvernement, voir ces travaux d'aménagement menacés par des
coupures budgétaires? Là est le problème. Jamais dans le
passé les fonctionnaires du ministère des Terres et Forêts
n'ont voulu donner des garanties d'approvisionnement aux industriels qui
reposeraient sur des travaux d'aménagement de la forêt, pour une
raison facile à comprendre. Quelles garanties avait un fonctionnaire du
ministère des Terres et Forêts que les travaux
d'aménagement requis pour accroître le volume de bois disponible
seraient toujours effectués?
De la même façon qu'à l'époque d'un
gouvernement de l'Union Nationale des restrictions budgétaires ont
amené le gouvernement à couper les budgets de reboisement, de la
même façon que, sous le régime de M. Bourassa, des
problèmes semblables, à l'époque où M. Toupin
était ministre des Terres et Forêts, ont amené des
restrictions budgétaires et ont amené, à ce
moment-là, une limitation aux programmes d'aménagement forestier,
rien ne peut prédire que dans l'avenir, dans cinq ans, dans dix ans, on
n'assistera pas à un même phénomène. Dans ces
conditions, ces programmes d'aménagement étant coupés, le
gouvernement, lui, s'étant engagé dans des garanties
d'approvisionnement, ayant permis l'implantation et la construction d'usines,
ayant permis l'agrandissement d'usines, on va donc se retrouver avec des
engagements gouvernementaux dans des investissements industriels, mais sans
aucune forêt pour supporter de tels investissements.
Ceci nous amène au concept d'un fonds forestier. Il faut garantir
à nos enfants qu'ils vont bénéficier d'une forêt
suffisante pour répondre aux engagements que les gouvernements prennent
maintenant. Il faut que dans 40 ans, dans 50 ans, dans 100 ans, il y ait autant
d'arbres qui poussent que ce que nous calculons présentement lorsque
nous donnons nos garanties d'approvisionnement. Il faut donc pouvoir
échapper aux mécanismes d'appropriation budgétaire. Il
faut donc pouvoir garantir qu'il y aura toujours des fonds pour financer nos
travaux d'aménagement.
C'est le sens, le principe même du fonds forestier. Il s'agit, par
un mécanisme légal, de créer un fonds qui peut
s'approvisionner de deux façons. Soit que le gouvernement veuille, comme
c'est le cas présentement, consacrer des sommes à des travaux
d'aménagement forestier. Le gouvernement pourra donc verser dans ce
fonds un certain montant. Si le montant qui y est versé par l'Etat n'est
pas suffisant pour supporter les garanties d'approvisionnement que l'Etat a
consenties, automatiquement il y aura perception d'une taxe auprès des
compagnies forestières qui exploitent la forêt publique de
manière que le fonds ainsi constitué permette de financer les
travaux d'aménagement. Le mécanisme du fonds forestier est de
garantir que l'industrie forestière financera toujours tous les travaux
d'aménagement forestier qui sont nécessaires pour maintenir la
productivité actuelle de la forêt. Ce mécanisme
inséré dans une loi sera donc à l'abri des fluctuations
budgétaires et garantira que, dans l'avenir, ce scandale qu'on a
dénoncé de l'absence d'aménagement de nos forêts, de
l'absence de reboisement de nos forêts, ce scandale qui a
été dénoncé tant et tant, on pourra enfin y mettre
un terme.
Je pense que c'est un bel exemple d'un projet de loi qui, en apparence
anodin, va assurer pour toutes les générations à venir que
nos forêts désormais soient aménagées de
façon intelligente. Merci, M. le président.
Une Voix: Bravo!
Le Vice-Président: Merci. M. le député de
Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le président. Il n'y a aucun doute
qu'on ne peut trop souligner l'importance de l'industrie forestière au
Québec. C'est pour cette raison que nous devons nous assurer que les
mesures que le gouvernement prend sont pour aider à préserver,
à encourager et à rendre encore plus rentable cette
industrie.
Dans le passé, M. le Président, il y a eu
déjà des programmes de reboisement ce que vise ce projet
de loi mais sans cette prise de conscience. Ce n'était pas
seulement ici au Québec, mais c'était dans tout autre endroit
où on avait des richesses renouvelables. On croyait que ces richesses
pourraient durer pour l'éternité, sans qu'on puisse prendre les
mesures de conservation nécessaires. Alors, il y a eu une prise de
conscience, à cause de différents événements qui
sont arrivés dans différentes parties du pays, dans
différentes parties du monde, que, quant à ces richesses, pour
qu'elles puissent être aménagées pour nous et qu'elles
puissent être renouvelées pour les générations
futures, le gouvernement devrait prendre certaines mesures pour aider à
les préserver et à les accroître.
Pour cette raison, nous sommes d'accord avec l'idée de la
création d'un fonds forestier pour l'amélioration de la
production des terres publiques. Nous trouvons que c'est un objectif valable en
soi. Le problème majeur, c'est son financement. A la façon dont
le projet de loi est rédigé, M. le Président, il y a deux
sources pour financer ce fonds; une source va provenir des compagnies
forestières, des bénéficiaires, de ceux qui vont exploiter
les forêts et l'autre source devrait provenir du gouvernement.
Quant à la portion que les compagnies forestières ou les
bénéficiaires de ces droits de coupe et des rentes
forestières ont, le projet de loi
prévoit certaines modalités et fixe certains montants qui
doivent être perçus et payés par ces compagnies. Mais quand
on parle de l'approvisionnement ou des sources du gouvernement, le projet de
loi ne donne aucune garantie, ne donne pas de critères, ne donne pas de
minimums, ne donne pas de contribution; il laisse tout cela à la
discrétion du gouvernement. Le ministre a dit tantôt qu'on ne
pouvait pas laisser ces problèmes à la merci des coupures
budgétaires. D'une certaine façon, on les laisse encore à
la merci de ces coupures budgétaires, parce que le ministre ne
prévoit pas, dans son projet de loi, des contributions minimales, soit
un pourcentage des montants qui seront perçus des compagnies, soit un
montant minimum qui devra être versé par le ministre des Finances
ou par le gouvernement pour les fins de reboisement, pour les fins que ce
projet de loi prévoit. Voilà une recommandation; voilà une
faille que nous voyons dans le projet à savoir, que les fonds pour
reboiser, pour atteindre l'objectif du projet de loi, vont provenir seulement
des compagnies forestières.
Le ministre sait que c'est une industrie qui est très
concurrentielle et les coûts que le gouvernement va imposer à ces
compagnies, naturellement, vont affecter et pourraient affecter le coût
de production pour ces compagnies. C'est pour cette raison, je crois, que le
ministre, le gouvernement devrait s'engager, si vraiment le gouvernement est
sérieux dans son approche, à nous assurer que l'industrie
forestière sera bien aménagée, que le reboisement sera
fait, qu'il y aura toujours un produit disponible de cette industrie pour les
générations à venir. Je crois que le gouvernement,
à ce moment-ci, devrait s'engager à fournir au moins un montant
minimal dans le projet de loi pour les fins du fonds forestier et ne pas
laisser cet article strictement à la discrétion du gouvernement
et l'imposer seulement aux compagnies forestières qui exploitent cette
industrie.
M. le Président, nous allons, dans l'étude du projet de
loi article par article, faire certaines recommandations pour améliorer
le projet de loi, pour s'assurer que les discrétions qui sont
laissées au gouvernement soient les moins nombreuses possible. C'est un
domaine qui est assez technique. Dans certains cas, il faut laisser au
ministère le soin d'appliquer un tel projet de loi, mais il devrait y
avoir certaines garanties minimales pour démontrer la bonne foi,
premièrement, du gouvernement, et pour contribuer au fonds forestier,
pour que ce soient non seulement ceux qui vont exploiter cette industrie qui
paient le coût du reboisement et qui s'assurent qu'il y ait un produit
dans l'avenir, mais aussi qu'il y ait des engagements pris par le gouvernement
parce que, dans le moment, il ne semble pas y en avoir. C'est seulement une
intention de bonne foi. On ne nous dit pas quelle partie elle
représentera dans l'ensemble du fonds, la contribution du
gouvernement.
M. le Président, il est important d'avoir et de prendre les
mesures nécessaires pour s'assurer que cette industrie, qui est une
industrie très importante pour le Québec, continue à
être rentable et qu'elle continue non seulement à accroître
pour le bénéfice de toute l'économie
québécoise... Le ministre parlait d'un programme quinquennal pour
améliorer les conditions dans cette industrie; ce programme, dont la
contribution du gouvernement fédéral est de 60% des fonds qui
sont alloués, contient déjà un certain programme de
reboisement pour effectuer ces travaux. Le projet de loi prévoit qu'il
soit déposé tous les cinq ans, en commençant avec
l'année 1984-1985, par le gouvernement, un rapport sur l'état de
l'industrie forestière au Québec et d'ici à 1984, les
montants qui seront perçus, d'après le projet de loi, iront dans
ce fonds et le gouvernement nous fournira un rapport tous les cinq ans. Une
question qu'on pourrait lui poser, c'est: Est-ce que ce serait possible, au
lieu d'attendre tous les cinq ans pour avoir ce rapport, d'avoir un rapport
annuel afin qu'on puisse le soumettre à l'Assemblée nationale
pour que les membres de cette Chambre puissent l'examiner et apporter une
certaine contribution et certaines suggestions et recommandations au
gouvernement?
Il y a un autre point, dans le projet de loi, M. le Président,
sur lequel nous nous interrogeons, c'est le montant de contribution qui est
exigé des compagnies forestières, des exploitants, des
bénéficiaires des concessions forestières. Il semble y
avoir deux tarifs: un tarif qui dit qu'il ne peut excéder $1 pour chaque
mètre cube de bois de coupe sur une terre publique et un autre tarif qui
ne semble pas avoir de maximum, qui semble être un montant
supplémentaire, sans qu'on sache si c'est un maximum qui pourrait
être strictement à la discrétion du ministre, à
l'égard d'une augmentation d'approvisionnement en matière
ligneuse qui serait accordée en vertu de la loi des terres et
forêts dans une région où le ministre de l'Energie et des
Ressources juge que la possibilité annuelle d'exploitation
forestière est déjà entièrement
octroyée.
Nous voulons savoir du ministre, premièrement, pourquoi il n'y a
pas de maximum imposé dans la loi pour ce tarif et deuxièmement
est-ce que cette clause dans le projet de loi vise à encourager
l'exploitation d'autres régions lointaines plutôt que les
régions qui sont déjà exploitées? Si c'est
strictement pour empêcher ou pour réduire l'exploitation dans une
région donnée, je crois que les instruments sont
déjà dans les mains du ministre par le biais des permis qu'il va
donner à ces compagnies. Il peut limiter le montant qui peut être
exploité dans une région donnée. On se demande pourquoi il
n'y a pas de maximum établi dans le projet de loi pour ce montant qui
peut être exigé par le ministre. Est-ce que cela veut dire que...
supposons qu'une compagnie exploite dans une certaine région. Est-ce
qu'elle va être obligée elle va vouloir continuer à
exploiter dans cette région par le ministre, par le gouvernement
d'aller exploiter plus loin quand elle pourrait continuer dans la même
région? Par l'entremise de cet article du projet de loi, le ministre
pourrait l'empêcher complètement seulement en exigeant
un montant supplémentaire qui ne rendrait pas rentable
l'exploitation de cette compagnie, de ce bénéficiaire.
Nous voulons savoir du ministre pourquoi il ne met pas un maximum pour
ce montant supplémentaire. Deuxièmement, pour quelle raison
exi-ge-t-on ce montant supplémentaire de la part des
bénéficiaires?
En conclusion, nous sommes d'accord sur le principe du projet de loi.
Nous sommes d'accord qu'il faut un moyen, qu'il faut des instruments pour
s'assurer que le produit de nos forêts sera toujours disponible pour les
générations à venir. Il y a eu des erreurs dans le
passé. Parce qu'on croyait qu'on avait des forêts
inépuisables, on ne portait pas attention à ces richesses. Ce
n'est pas seulement dans le domaine des forêts, c'est dans d'autres
domaines. Tout à coup, on commence à réaliser que les
richesses naturelles que nous avons, qu'elles soient renouvelables ou non, sont
limitées et que nous devons prendre les mesures nécessaires pour
nous assurer qu'elles ne sont pas seulement pour notre utilité à
nous, mais qu'elles sont aussi pour l'utilité des
générations à venir. C'est pour cette raison qu'il y a eu
des améliorations l'année dernière dans la façon
d'aménager ces richesses naturelles, dans la façon que le
gouvernement a exigé des compagnies, des bénéficiaires qui
exploitaient ces richesses certaines réglementations pour
protéger l'ensemble de la population. Sur ce principe, nous sommes
entièrement d'accord. Nous mettons en doute certaines modalités
du projet de loi, certaines façons dont le projet de loi est
rédigé, qui peut imposer à la discrétion du
ministre sans aucun critère certaines charges supplémentaires
à ces bénéficiaires. Deuxièmement, nous demandons
pourquoi le gouvernement ne s'engage pas à fournir certains montants
minimaux, soit un pourcentage des montants qui seront payés par les
bénéficiaires, soit des montants minimaux par année pour
vraiment s'assurer que l'objectif du projet de loi sera réalisé
non seulement par les bénéficiaires, mais aussi de la part du
gouvernement qui a la responsabilité principale d'aménager les
forêts et de s'assurer que le produit de cette industrie profitera
à tous les Québécois. Merci.
Le Vioe-Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. Samson: Je voudrais joindre ma voix à ceux qui ont
déjà parlé sur ce projet de loi no 86. Tantôt, j'ai
écouté très attentivement le ministre qui nous a
parlé d'un besoin de maintenir, d'améliorer et d'accroître
la production de matière ligneuse. Je ne suis pas de ceux qui vont
contredire le ministre sur ce point de vue, parce que je considère que
l'industrie forestière au Québec est une industrie dont nous
avons besoin, c'est une industrie qui a déjà fait beaucoup et qui
peut faire encore beaucoup, à la condition que nous puis- sions prendre
les dispositions nécessaires pour garantir à cette industrie un
approvisionnement suffisant.
J'ai également écouté attentivement lorsque le
ministre nous a fait un bref historique de la situation de l'industrie
forestière au Québec. Je pourrais ajouter à cela mon
expérience personnelle. J'ai vu, comme le ministre probablement ou comme
d'autres encore, un temps où nous pouvions voir flotter sur presque
toutes les rivières du Québec du bois de matière ligneuse
qui pouvait se rendre aux différentes usines à papier soit de la
Mauricie, de Québec, de Portneuf ou d'ailleurs dans la province. Dans ma
région, dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue
également, l'été, nous pouvions voir flotter du bois,
lequel se rendait à l'usine à papier de Témiscamingue. Les
temps sont un peu changés.
Je me rappelle, il y a déjà au-delà de trente ans,
que des compagnies forestières avaient, presque sans limite... C'est une
façon de parler parce qu'on appelait ça des "limites
forestières". Les "limites forestières", pour certaines
compagnies forestières, n'avaient pas de limite. C'est ainsi que je me
rappelle avoir entendu, au ministère des Terres et Forêts, des
responsables du ministère, en regardant les cartes géographiques
de la situation forestière, parler du péril jaune. Je suis
certain que ça dit quelque chose au ministre. Le péril jaune,
c'était la Compagnie internationale de papier qu'on nommait, il y a
quelques années, la Canadian International Paper, qui avait presque la
majorité des "limites à bois". En tout cas, quand on regardait la
carte géographique, la couleur qui identifiait cette compagnie
était le jaune et on appelait ça le péril jaune. C'est
dire qu'on avait déjà conscience, il y a plusieurs années,
au ministère des Terres et Forêts, qu'il fallait faire quelque
chose car on ne pouvait continuer dans ce sens.
Je me rappelle être arrivé en Abitibi en très bas
âge, avec mes parents, alors que le gouvernement du temps donnait un lot
de colonisation à tous ceux qui voulaient faire de la colonisation.
L'Abitibi est un pays de colonisation comme la Gaspésie a
été partiellement une région de colonisation; on donnait
des terres de 104 acres exactement et on demandait aux familles de cultiver
cette terre qu'elles devaient d'abord défricher. Pour la
défricher, évidemment, il fallait couper le bois. Comme par
hasard, et par un curieux hasard, je me rappelle fort bien être
arrivé avec mes parents sur une terre où nous avions
été précédés par une compagnie qui
s'appelait la Canadian International Paper. Elle était passée
avant nous, elle avait pris le meilleur du bois et avait laissé ce qui
n'était pas trop payant; comme on dit en jargon de bûcheron, les
talles avaient été coupées et le reste était
laissé là.
M. le ministre nous parlait tantôt de l'industrie
forestière en nous disant que plusieurs personnes avaient pu gagner leur
vie dans l'industrie forestière, que pas mal d'argent en circulation
à travers le Québec présentement provient justement de
l'exploitation de la forêt. C'est sûr et c'est indéniable,
mais il y a eu, dans le passé, des abus
extraordinaires. Ces abus extraordinaires ont amené la situation
qu'on connaît présentement, situation où on a des
industries qui sont de plus en plus et là-dessus, je suis bien
d'accord avec le ministre; on n'est pas d'accord souvent mais, quand on l'est,
c'est bon de le dire où les industries forestières, les
industries papetières deviennent propriétés
québécoises, et j'espère qu'elles le deviendront encore de
plus en plus. Je n'ai rien contre cela, au contraire.
Si, dans le passé, nous n'avions pas grand-chose à dire
dans ce domaine, c'est parce qu'on ne voulait pas s'en occuper. On voulait
laisser aux autres les problèmes de calcul, les problèmes
financiers et nous voulions simplement nous occuper de choses comme être
bûcheron, par exemple, comme faire du transport de bois, des choses comme
cela. Les Canadiens français qui ont vécu de la forêt
je suis un de ceux-là n'ont pas toujours
désiré prendre des responsabilités. Ils n'ont pas toujours
désiré cela. Ils ont vécu de la forêt, ils ont
travaillé fort mais ils ne voulaient pas prendre de
responsabilités.
C'est le jour où on a commencé à vouloir en prendre
nous-mêmes, des responsabilités, que la situation a
commencé à changer. Cette situation qui a changé et qui
va, j'espère, changer encore de plus en plus, va permettre à ceux
qui vont nous suivre, aux générations futures, de continuer
à avoir une industries forestière normale. Quand je dis normale,
M. le Président, cela veut dire que nous devons compter sur nos
capacités de coupe et sur la capacité de remplacement et en
tenant compte des années que le ministre a fixé à 45
cela peut varier un peu, je pense pour les besoins de la
discussion, tenant compte aussi de ces années de repousse pour que l'on
puisse avoir toujours une possibilité de coupe. Parce que l'industrie
forestière, il y a des gens qui ont pensé, dans le passé,
que c'était quelque chose qui était intarissable. Il suffisait
d'avoir l'idée d'aller couper du bois quelque part, il suffisait d'avoir
l'idée d'avoir une papeterie ou encore une scierie, un moulin à
scie, pour que l'on parte en forêt et qu'on ait tout ce qu'il nous
fallait. Mais, ce n'est plus le cas, ce n'est plus vrai. C'est encore moins
vrai que beaucoup de monde vit de la forêt directement, comme
c'était le cas il y a 20 ans passé. Les bûcherons en
forêt, aujourd'hui, n'ont pas le même travail qu'ils avaient dans
ce temps; ils sont moins nombreux parce que là aussi, comme ailleurs, la
machinerie a pris la place de l'homme et, évidemment, en prenant la
place de l'homme, cela ne veut pas dire que la loi du ministre aujourd'hui va
augmenter le nombre des emplois dans la province de Québec. Si on tente
de nous dire cela, on nous ment en pleine face.
Ce projet de loi, dans son principe, qui veut dire maintenir,
améliorer ou accroître la production de la matière
ligneuse, veut bien dire ce que cela veut dire. Cela veut dire: maintenir notre
forêt, l'améliorer et puis, peut-être, accroître notre
production. Mais cela ne veut pas dire des jobs de plus; qu'on n'aille pas
prétendre et qu'on n'aille pas penser que parce qu'on a le projet de loi
no 86 aujourd'hui, c'est une création d'emplois extraordinaire. Ce n'est
pas vrai! C'est simplement une possibilité de maintien de la production.
(16 heures)
Or, la production peut se maintenir, et de plus en plus par des machines
qui remplacent les travailleurs. Quand la machine remplace le travailleur, cela
peut maintenir la production, mais cela ne maintient pas les jobs. Ce n'est pas
avec cela que le gouvernement ce n'est pas la trouvaille du
siècle va nous faire croire qu'il va créer des emplois. Ce
n'est pas vrai, mais j'espère que c'est un moyen pour maintenir une
production qui, elle, peut maintenir un certain niveau de vie, pas un niveau
d'emploi, un niveau de vie, c'est-à-dire que cette production permet
d'avoir des sommes d'argent en circulation.
Le niveau de vie se maintient directement par les emplois qui sont
là, mais indirectement par les mesures sociales qui, elles, sont
payées par des taxes qui proviennent de l'industrie ou du travailleur
par des impôts particuliers, des impôts directs ou indirects. Tout
cela pour dire que le niveau de vie peut être maintenu et peut être
même amélioré grâce à un projet de loi ou
à plusieurs projets de loi, parce que ce n'est pas le seul qu'il faille
compter. Grâce à cela, le niveau de vie peut être maintenu.
Il faut faire une différence et c'est là où je ne
suis pas d'accord avec le ministre entre la possibilité de
maintenir la productivité et le niveau de vie et la possibilité
qui a été mentionnée de création d'emplois. Cela ne
créera pas d'emplois. Qu'on ne tente pas de me faire croire cela. Il y a
de moins en moins de personnes au travail et il y en aura encore de moins en
moins parce que, de plus en plus, la technologie moderne va permettre de faire
la même production ou encore plus de production avec moins de gens.
Ceci dit, M. le Président, cette partie n'est pas celle qui
m'épate le plus. Ce qui m'intéresse dans ce projet de loi, c'est
la possibilité qu'on puisse envisager d'avoir sur une base permanente,
et dépendre le moins possible des hauts et des bas ou encore des
caprices d'un gouvernement ou d'un autre gouvernement, un programme de
reboisement pour maintenir nos forêts et pour que ce soit le plus
permanent possible. C'est ce qui est visé, je pense, par le ministre et
jusque là, je suis d'accord avec lui.
Il y a, cependant je suis certain que le ministre l'a
oublié aussi une autre possibilité. Il a parlé des
industries. Le ministre a parlé des industries papetières, des
industries de sciage de sa région, de ma région et d'autres
régions. Je suis certain que s'il ne l'a pas mentionné, il y
pense. Mais il y a une chose qui a été mentionnée, qui a
déjà été faite dans les faits, mais qui n'a jamais
été dans les lois, en tout cas, pas à ma connaissance. Ce
sont des réserves de bois, ce qu'on appellerait des forêts
municipales dans des régions rurales où, habituellement, et
toujours dans les faits, les citoyens avaient l'habitude de couper du bois
à proximité de leurs fermes pour faire scier ce bois et ainsi
construire des bâtiments de ferme. Dans certains cas, c'est encore
possible, mais dans
d'autres, ce l'est moins et cela le devient moins parce qu'on constate
que pour donner des garanties à des industries forestières, le
ministère ne peut garantir des approvisionnements à des
municipalités, c'est-à-dire aux résidents des
municipalités. Il n'y a pas de politique d'approvisionnement
présentement au point de vue forêts municipales. J'espère
qu'on pourra cela pourra nous aider à amener une politique
penser à ces gens.
Le ministre a parlé tantôt des coopératives. Il a
pensé aux coopératives. Je suis bien heureux qu'il ait
pensé aux coopératives parce que je me rappelle, il y a plusieurs
années passées, avoir été obligé de me
battre avec le ministère des Terres et Forêts pour tenter de
permettre l'émission d'un permis de coupe à des
coopératives. On va être obligé de se battre avec ce
gouvernement aussi pour des coopératives. Je pense que le ministre est
mieux de ne pas aller trop loin là-dedans parce qu'on aurait
peut-être certains petits dossiers dont on pourrait parler. De toute
façon, ce n'est pas l'essentiel. Ce sont des détails et je ne
voudrais pas passer à côté de l'essentiel. L'essentiel,
c'est de tenter d'améliorer nos forêts, de tenter de les maintenir
et d'assurer l'approvisionnement.
Maintenant, quand le ministre nous dit qu'il ne faut pas relever
uniquement du gouvernement pour ce faire, je suis bien d'accord avec lui. Mais,
dans ce projet de loi, il y a quelque chose qui accroche. On ne procède
pas présentement à l'étude article par article, mais, sur
le plan du principe, il y a quelque chose qui accroche. On dit qu'il y a deux
modes de financement: un mode où c'est l'industrie qui va payer et
l'autre mode où c'est le gouvernement. Par contre, comme dans presque
toutes les lois qu'on voit depuis un certain temps, il y a la
délégation de pouvoirs. Alors, aujourd'hui, on va adopter le
projet de loi no 86; c'est un cadre qu'on va voter. Mais il y a une
délégation de pouvoirs, c'est-à-dire que le gouvernement
peut adopter par règlement, etc. Autrement dit, l'Assemblée
nationale va adopter une loi qui va permettre au gouvernement de faire des
règlements. Ce qu'on adopte aujourd'hui, on le sait, mais les
règlements qu'il va faire, on ne les connait pas. Cela se retrouve dans
plusieurs lois et c'est malheureux parce que les élus du peuple sont
ceux qui doivent adopter les lois et, quand on arrive pour adopter une loi, on
nous demande de voter en même temps une délégation de
pouvoirs. Aujourd'hui, on a le droit de s'exprimer sur la loi, mais, sur le
règlement qui viendra peut-être je ne sais pas quand, on n'aura
pas à s'exprimer là-dessus. Les élus du peuple ne
reviennent pas là-dessus. Les règlements viennent des
fonctionnaires, passent au Conseil des ministres et, pour être officiels,
il faut qu'ils paraissent dans la Gazette officielle. C'est de cette
façon que c'est dit dans toutes les lois. La Gazette officielle, je
voudrais bien demander à la population qui nous écoute combien il
y en a parmi elle qui la lisent tous les jours, la Gazette officielle du
Québec. De qui est-ce le livre de chevet, la Gazette officielle du
Québec? Presque personne n'a connaissance de cela, sauf les per- sonnes
intéressées directement. Parmi ceux qui sont
intéressés directement, ils ont tellement autre chose à
faire que la Gazette officielle qui nous arrive, qui est assez épaisse
et qui n'est pas strictement écrite dans un vocabulaire populaire, elle
n'est pas lue. Savez-vous quand elle est lue, M. le Président? Elle est
lue quand les règlements font mal et quand cela dérange.
Là, par exemple, les gens cherchent la Gazette officielle et ils
découvrent pourquoi cela leur fait mal. C'est cela qui va encore
arriver.
Dans une partie de ce projet de loi, on dit qu'on va financer en
percevant $1 de l'entreprise par mètre cube de bois et l'autre partie,
on ne sait pas combien on va retirer. La partie gouvernementale, c'est encore
au bon plaisir du gouvernement. Dans la partie où on parle de
délégation de pouvoirs, où on parle de règlements,
on dit que le gouvernement aura le pouvoir de fixer les montants payables. Je
me demande ce que cela nous donne aujourd'hui de voter là-dessus. Je me
demande ce que cela nous donne de parler de $1 le mètre cube quand, dans
l'article suivant, on dit que le gouvernement va avoir le pouvoir de changer
cela n'importe quand.
Une Voix: Maximum.
M. Samson: Maximum. Vous allez avoir le pouvoir de fixer le
montant payable en vertu du premier alinéa de l'article 6. Il me semble
que cela est clair. Vous allez avoir le pouvoir de faire un règlement
pour changer cela. Vous allez avoir le pouvoir de faire un règlement
pour changer le deuxième alinéa de l'article 6.
M. Bérubé: Changez vos lunettes.
M. Samson: Non, n'essayez pas de nous passer des vessies pour des
lanternes même si vous êtes ingénieur; on en a vu d'autres.
En matière d'exploitation forestière, je pense que j'ai
peut-être été dans le bois plus souvent que vous, mais
seulement que j'en suis sorti du bois, moi.
Une Voix: Vous ne me dites pas. M. Samson: M. le
Président.
Le Vice-Président: En concluant, M. le
député de Rouyn-Noranda.
M. Samson: En concluant.
M. Lavigne: Comme cela, vous ne vous faites pas passer de
sapin.
M. Samson: Je peux vous dire une chose: je ne me ferai pas passer
une épinette pour un sapin comme les Français, vos amis, en 1975,
quand le premier ministre du Québec leur a envoyé un arbre de
Noël. Il leur a envoyé une épinette et ils ont pensé
que c'était un sapin. (16 h 10)
De toute façon, M. le Président, je termine
là-dessus en disant que je suis d'accord sur le principe du projet de
loi, principe qui est valable, celui de maintenir nos forêts, celui de
les améliorer, celui de garantir des approvisionnements pour nos
industries. Mais sur les moyens qu'on prend pour y arriver, là, je suis
pas mal moins d'accord, parce que, avec les moyens qu'on prend pour y arriver,
il n'y a rien de garanti. Qu'on ne tente pas de nous faire croire qu'on
garantit quelque chose, il n'y a rien de garanti là-dedans. Si le
ministre veut être réellement sincère, qu'il nous permette,
à l'Assemblée nationale, à nous, les élus du
peuple, de voter sur des prix fixés et qu'il enlève l'article 7
qui lui permet de faire toutes sortes de règlements sans revenir devant
l'Assemblée nationale; s'il fait ça, je vais être d'accord
100% avec lui.
Le Vice-Président: Merci. M. le député de
Pointe-Claire.
M. William Shaw
M. Shaw: Merci, M. le Président. Premièrement, il
faut reconnaître l'industrie forestière du Québec et son
rôle dans l'économie du Québec; c'est maintenant devenu le
principal secteur de notre économie, malgré le déclin de
notre industrie touristique.
C'est encore cette industrie qui a développé le
Québec. J'ai été un peu étonné d'entendre le
ministre dire que les Québécois n'ont pas développé
l'industrie forestière du Québec. Franchement, c'étaient
des Québécois, des hommes comme Price, des compagnies comme
Canadian International Paper, comme Bathurst, comme Consolidated Paper, des
compagnies qui sont dirigées par des Québécois de souche,
qui n'ont pas seulement développé l'industrie forestière
du Québec, mais développé plusieurs régions de
notre province. La région de Rouyn-Noranda a été
développée premièrement par l'industrie forestière;
la Manicouagan, la Côte-Nord l'a été totalement, la
région de l'Abitibi aussi. Je suis fier de dire que c'étaient des
Québécois de vieille souche, qui étaient anglophones, qui
ont développé cette industrie.
C'est aussi vrai qu'au début, nous avons cru que notre ressource
forestière était une ressource qui n'avait pas à
être surveillée; les vastes étendues de forêts qui
sont disponibles au Québec étaient quelque chose que nous
pouvions laisser aller. Nous avons vu, en Europe, que chaque morceau de terrain
forestier était surveillé comme une ferme, cultivé
véritablement. Nous l'avons vu en Allemagne, en France, en Suède;
après la Deuxième Guerre mondiale, nous avons accepté
aussi que cette surveillance du développement de notre ressource
forestière soit aussi effectuée au Canada. Ce n'est pas le
gouvernement qui l'a réalisée en premier, ce fut l'industrie
forestière elle-même; c'est l'industrie forestière qui a
commencé la Canadian Pulp and Paper Institute, située dans mon
propre comté; c'est l'industrie forestière qui a
développé des fermes expérimentales pour des programmes de
reboisement; ce sont les compagnies forestières qui, avant le
gouvernement, ont essayé d'expliquer la valeur de la protection de nos
forêts. Pour les feux de forêt, ce sont les pressions de
l'industrie forestière qui ont poussé le gouvernement vers un
programme de protection de nos forêts. Le gouvernement
précédent nous a aidés en nous dotant d'un système
de contrôle des feux de forêt qui est un des meilleurs au
monde.
Maintenant, nous avons devant nous un projet de loi qui dit que nous
avons besoin d'un fonds pour développer le reboisement, et nous avons
besoin de demander aux compagnies qui exploitent nos ressources naturelles de
payer ce fonds. Cela a du bon sens. Le gouvernement avec les taxes qu'il
reçoit de cette grosse industrie de notre province va contribuer
à ce fonds aussi pour donner des fonds dont elles ont besoin pour
garantir que les coupes qu'on fait chaque année dans notre province vont
être remplacées par un montant adéquat pour que cette
industrie demeure rentable et viable dans notre province. Mais il y a d'autres
problèmes, M. le Président. Franchement, il y a deux
façons de procéder. Je crois qu'aux Etats-Unis on le voit plus
souvent qu'au Canada, on donne la responsabilité à ceux qui sont
les gestionnaires de ces forêts de garantir le reboisement.
En donnant un permis, on exige que les compagnies puissent faire leur
programme de reboisement comme il faut. Encore, on peut procéder comme
fait le gouvernement, en acceptant la responsabilité directe du
reboisement des forêts par le ministère des Terres et
Forêts. C'est une des raisons pour lesquelles cette contrainte, cette
intervention du gouvernement a de plus en plus un effet restrictif sur le
développement même de notre industrie forestière au
Québec. On sait fort bien, cette année, que toutes les compagnies
qui font du "pulp and paper" au Québec ont vendu leur produit au complet
et n'ont pas même eu l'avantage de remplir toutes les commandes qui sont
disponibles parce que la demande pour la papeterie était forte. Mais,
nous n'avons pas vu tellement d'expansion, même nous avons vu le gros
fiasco du ITT, à Port-Cartier. Un exemple, M. le Président, que
trop d'intervention du gouvernement n'est pas utile, parce que là vous
avez deux raisons: Les contraintes de la disponibilité de produit font
une restriction, puis la compagnie devient non rentable. Elle a fait des
promesses, mais les promesses n'ont pu être réalisées.
Avec cette expérience des autres compagnies, on a pris le temps
d'examiner ce qui se passe au Québec au point de vue de la politique du
gou-verment envers les compagnies privées. Avec ce gouvernement en
place, il y a beaucoup de restrictions. Mr President, this law on paper looks
very reasonable but the Government of Québec will establish a forest
refund, but it will collect a dollar, a maximum of $1 per cubic meter to supply
dollars for this fund. It will make annual contributions from the Treasury to
maintain this fund and the fund, the purpose of which will be to
garantee the annual reforestation programs. That will be required to
replace the resources used by our industry. Why then is there such reticence in
the industry itself to expand in Québec? Could it be this very reason,
that instead of using a positive approach in going to the industries themselves
who are as concerned about reforestation, and about the resources? Oh, yes, in
the eighteen fifties and sixties, they would move a plant in, they would cut
the forest until it was bare and they would move the plant some place else.
Those days are gone forever.
It is not the Government of Québec that built the Pulp and Paper
Institute in Pointe-Claire. It is not the Government of Québec that
built the reforestation experimental station in the county of Argenteuil. It is
the industry itself. It is aware of its need to maintain the guarantee of
supply. But as long as the government intervenes in the access to the supply
source itself or challenges the guarantee of that supply, every company will be
reticent to expand and this is the problem that this government must accept. On
that basis, if the minister accepts his responsibility to understand that
government intervention and control without consultation with the industry,
without recognizing its need to feel the security of its own product, the
expansion of this industry may move it back to second, third, or fourth
again.
Mr President, on the basis that the fundamental of this law is to
guarantee the reforestation of our forests, I have to suggest that it is
necessary to support it. But, at he same time, I hope that the minister is
aware that the industry itself is concerned, prepared to expand, prepared to
increase its activity in the province of Quebec, but it must feel that the
government is on its side and not increasing the number of problems and
stumbling blocks for it to expand. Thank you.
Le Vice-Président: M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Julien Giasson
M. Giasson: M. le Président, quelques commentaires en
marge de la loi qui est soumise à notre attention pour approbation. Je
signalerai d'abord que, depuis de nombreuses années, ici au
Québec, nous avons eu une contribution du ministère des Terres et
Forêts dans l'opération d'une politique de reboisement en ce qui
avait trait aux forêts privées. Effectivement, depuis fort
longtemps, les pépinières propriétés du
ministère des Terres et Forêts ont produit des arbres qui
étaient mis à la disposition des propriétaires de
forêts privées en vue de régénérer cette
forêt à la suite d'opérations de coupe et même pour
retourner à la forêt souvent des terrains qu'on avait
consacrés à l'agriculture, mais qui, effectivement, n'avaient pas
de réelle vocation agricole, c'est-à-dire beaucoup de terres au
Québec où on aurait dû maintenir la vocation
forestière. Or, la création d'un fonds forestier qui
s'appliquerait au reboisement ou au réaménagement des
forêts publiques chez nous constitue un élément nouveau
à côté de la politique qui dure en ce qui a trait au
programme qu'on appliquait aux forêts privées.
Cependant, il faut reconnaître que ce n'était pas là
la seule possibilité d'obliger les utilisateurs de la ressource à
assumer ce que j'appellerais leurs responsabilités, c'est-à-dire
de participer eux-mêmes au réaménagement de la forêt,
puisque nous savons fort bien que dans d'autres pays les utilisateurs de la
forêt publique parce qu'il y a également des forêts
publiques dans d'autres pays, ce n'est pas une particularité que nous
avons au Québec font face à des obligations de devoir
procéder soit à des systèmes de coupe qui sont
différents de ceux qu'on impose aux utilisateurs de la forêt
publique ou encore, dans certains pays, on exige non pas une contribution
financière de l'industrie, mais les programmes d'attribution ou
d'allocation des bois prévoient des obligations formelles de
procéder à des travaux de sylviculture, d'aménagement, de
reboisement. C'est une des conditions premières qui est posée
à l'industrie pour être admissible à des allocations de la
ressource ou de la matière ligneuse. Mais le gouvernement du
Québec a préféré la voie qui nous est
proposée aujourd'hui. C'est bon. Je ne dis pas que c'est mauvais, c'est
un choix parmi d'autres auxquels on aurait pu procéder.
Je vais vous citer un exemple. Nous avons des utilisateurs de
matière ligneuse au Québec qui s'alimentent dans la forêt
du Maine, pas loin de chez nous. Or, au moment de l'attribution des droits de
coupe ou des permis de coupe, on pose immédiatement comme condition
première que l'utilisateur ne doit couper aucune bille de moins de tel
diamètre. Les opérateurs sont suivis de très près
par les inspecteurs du gouvernement du Maine, comme par les inspecteurs des
propriétaires des "tondres" ou du boisé qu'il y a là-bas.
Cela nous prouve qu'il est possible de protéger la forêt,
d'appliquer des pratiques ou de la technique d'opération en forêt,
de coupe en forêt qui font qu'on protège beaucoup mieux la
forêt qu'on ne le fait traditionnellement au Québec dans ce qu'on
appelle les concessions publiques qui avaient été
accordées aux grands utilisateurs. On a déjà des
conditions au départ. Même si ces conditions sont posées,
nous savons fort bien que le prix payé à l'unité de mesure
est nettement supérieur pour les approvisionnements que nos industries
de sciage doivent prendre dans l'Etat du Maine, à celui que le
gouvernement du Québec exige pour les forêts publiques, pour la
matière qui part des forêts publiques du Québec. Cela nous
indique qu'il y a possibilité.
Nous savons également que dans d'autres pays,
particulièrement en Europe, il y a des lois très
sévères qui obligent tout utilisateur non seulement de la
forêt publique, mais également les utilisateurs qui sont
propriétaires de leur propre domaine forestier à procéder
à leurs frais, entièrement à leurs frais, à des
travaux sylvicoles et surtout à des travaux de reboisement. Je pense
à la Suisse, par exemple, où la législation est telle-
ment formelle qu'elle oblige chacun des utilisateurs de la forêt,
que ce soit sur son domaine à lui, essentiellement privé, ou par
des opérations qu'il mènerait dans de la forêt publique,
formellement à replanter coûte que coûte tout arbre qu'il a
exploité.
La Suède a également des lois qui ne sont peut-être
pas aussi poussées ou aussi exigeantes que celles de la Suisse parce que
les pénalités, les amendes de la Suisse prévues dans la
loi sont de l'ordre de $200 l'arbre que le citoyen a coupé pour de
l'exploitation et qu'il n'aurait pas remplacé par une plantation
nouvelle. C'est sous surveillance extrêmement suivie et respectée.
Je le tiens pour avoir discuté avec des propriétaires de
forêts et de boisés en Suisse qui me faisaient état de la
dureté de la législation adoptée dans ce pays.
Il y a également les pays Scandinaves, tels la Suède et la
Finlande, la Norvège aussi, qui ont de la législation assez
avancée qui va nettement plus loin encore que celle qui nous est
proposée aujourd'hui. Evidemment, le taux peut paraître assez
élevé. Nous savons que les coûts de fonctionnement pour les
utilisateurs de la matière ligneuse se sont accrus
considérablement depuis quelques années. La loi vient nous
indiquer qu'un maximum de $100 le cunit exploité dans la forêt
publique pourraient être exigés. On ne nous dit pas que c'est
formel. Le montant de $100 le cunit serait le maximum que prévoirait la
loi avec la capacité, par le jeu de la réglementation,
d'établir des charges ou des coûts qui pourraient être
inférieurs à $100 le cunit.
Lorsque le ministre nous a indiqué tout à l'heure que ce
projet de loi va permettre une augmentation considérable, voire
même doubler le potentiel d'approvisionnement des usines du
côté de la Gaspésie, je pense qu'il a vraiment mis le
paquet. Nous savons que dans plusieurs régions du Québec, si les
permis de coupe se sont accrus au cours des toutes récentes
années, c'est tout simplement pour faire face à une situation
nouvelle chez nous, soit l'épidémie de la tordeuse de bourgeon de
l'épinette qui crée un problème. Si le ministère
des Terres et Forêts ne procède pas à l'augmentation des
droits de coupe ou des permis de coupe dans plusieurs secteurs, il va quand
même constater la perte de cette forêt parce que, si elle n'est pas
exploitée au cours des années immédiates, il est sûr
qu'il s'agit d'une matière qui sera tout à fait perdue.
Donc, il y a une réalité dans certaines régions du
Québec qui veut que le ministère des Terres et Forêts, pour
quelques années, accorde des permis de coupe qui dépassent la
capacité naturelle de reproduction de ces zones forestières
à cause de l'existence de cette épidémie chez nous qui
fait que, si on ne récolte pas la matière ligneuse qui est
là en train de périr, elle va tout simplement disparaître,
elle va périr et n'aura profité à personne. (16 h 30)
Je prends comme preuve les droits de coupe qui ont été
accordés dans la forêt domaniale des Appalaches au cours des
dernières années. Il s'agit de droits de coupe qui sont
supérieurs au potentiel naturel; même si on fait des travaux
sylvicoles ou des travaux de reboisement, les volumes octroyés par le
ministère des Terres et Forêts dans la forêt domaniale des
Appalaches sont supérieurs, au dire même des fonctionnaires et des
techniciens du ministère des Terres et Forêts, à la
régénération naturelle. Cela, on le comprend et on
l'accepte.
Il faut aller récolter une matière première qui va
se perdre de toute manière. Il vaut mieux dépasser des
capacités de reproduction et récupérer des essences qui
sont vouées à la disparition pour un certain nombre
d'années, mais il faudra certainement que, dans cinq ans ou dix ans au
plus tard, le ministre réduise les permis de coupe dans cette
forêt domaniale puisque, si ces permis n'étaient pas
réduits, nous aurions utilisé la pleine capacité de
production de cette forêt dans une période de 20 ans; il faudrait,
après cela, attendre 40 ans avant de recommencer à faire des
exploitations.
Lorsque le ministre nous indique que des charges seront faites aux
utilisateurs, j'aimerais qu'il me précise si ces charges vont
s'appliquer à tous les utilisateurs sans exception. Je comprends qu'il
élimine l'utilisation pour ce qu'on appelle des fins domestiques,
c'est-à-dire les permis qu'on va donner à des citoyens du
Québec d'aller faire des coupes de bois pour ce qu'on appelle du bois de
chauffage. Je comprends qu'on ne doit pas faire de charges. Mais ce que je veux
savoir du ministre, c'est: Est-ce qu'il va y avoir des exemptions à
l'endroit de certains utilisateurs, comme cela se produit présentement
vis-à-vis des paiements des droits de coupe?
Le ministre sait très bien qu'au moment où on se parle
nous avons des utilisateurs au Québec qui font de l'exploitation dans la
forêt publique et qui sont libérés en totalité des
droits de coupe que doivent payer la plupart des utilisateurs. Je prends
à témoin la société REXFOR. On va me dire que c'est
une société d'Etat, mais, présentement, REXFOR fait de
l'exploitation depuis au-delà de cinq ans dans la forêt publique
de ma région et, jusqu'à maintenant, à ce que je sache,
elle a toujours été libérée du paiement des droits
de coupe. Est-ce qu'il faut croire que, dans l'application de cette loi, encore
une fois, sous prétexte qu'il s'agit d'une société d'Etat,
on va l'exempter du paiement de la prime qui sera décidée par
réglementation ou du maximum de $100 le cunit à être
payé pour sa participation au financement et au développement de
l'accumulation d'un fonds forestier?
Est-ce que les coopératives forestières, qui ont
été également libérées, exemptées du
paiement des droits de coupe dans le passé, vont continuer à
être exemptées du paiement des charges qui sont prévues au
projet de loi no 86? Ce sont là des questions auxquelles j'aimerais que
le ministre me réponde lors de sa réplique ou lors du
débat que nous aurons bientôt article par article.
M. le Président, nous allons évidemment donner notre
accord à ce projet de loi parce qu'il représente un autre maillon
de cette longue chaî-
ne à laquelle nous assistons depuis des années,
chaîne qui veut que, graduellement, le gouvernement, année
après année, gouvernement après gouvernement, apporte au
Québec des améliorations réelles en vue de maintenir et
même de développer le potentiel forestier de nos forêts,
qu'il s'agisse de forêts privées ou de forêts publiques. Ce
n'est pas le dernier projet de loi, sans doute, que nous aurons dans le secteur
forestier; il s'agit d'un domaine qui a évolué passablement vite
depuis environ 20 ans, quand on pense au développement de la technique,
de la technologie de ce côté.
C'est sans réserve que nous donnerons, du côté du
Parti libéral et je crois que c'est le sens des propos des autres
députés qui sont intervenus notre appui à cette
loi. Nous espérons que la totalité des sommes que le ministre des
Finances va gérer, à la suite de la perception que le ministre de
l'Energie va en faire, va vraiment servir à du
réaménagement forestier et à du reboisement et que
l'industrie ne sera pas taxée au maximum que prévoit la loi. Je
crois qu'il y aura possibilité d'appliquer des tarifs dans la
réglementation qui seraient inférieurs aux $100 le cunit qui sont
prévus comme maximum dans la loi.
Il y a un autre élément que j'aimerais connaître et
le ministre pourra me donner sa réponse lors de la réplique. Quel
est le volume de cunits qui, cette année ou l'an dernier, a
été exploité dans la forêt publique du
Québec? Ce serait intéressant. Cela nous donnerait
déjà un ordre de grandeur par rapport au maximum de $100 le cunit
qui est prévu dans la loi. Merci.
Le Vice-Président: M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je voudrais savoir, M. le Président
parce que j'ai dû m'absenter de la Chambre, mais c'est une question
d'information s'il y a un représentant de la formation de l'Union
Nationale qui est intervenu dans le présent débat.
Le Vice-Président: Non, M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. le député de Rimouski.
M. Alain Marcoux
M. Marcoux: M. le Président, je n'interviendrai pas
longtemps sur ce projet de loi, mais je sens utile de le faire parce que,
déjà depuis trois ans, j'attends avec impatience la
présentation de ce projet de loi, car, à travers des
événements que j'ai vécus dans mon propre comté,
dans le comté de Rimouski, à l'automne 1977, c'est là qu'a
pris naissance l'idée de créer un fonds forestier pour assurer de
façon permanente les travaux de sylviculture et de
régénération de la forêt.
En fait, à l'automne 1977, dans le comté de Rimouski,
à Esprit-Saint, vous aviez une population qui voulait transformer le
bois de sa municipalité ou des régions environnantes dans sa
muni- cipalité pour créer des emplois permanents. Or, ce qu'on
répondait à ce moment-là au ministère des Terres et
Forêts, c'est qu'il n'était pas possible de donner des garanties
d'approvisionnement à la scierie d'Esprit-Saint qui avait
été construite même sans permis parce qu'il n'y avait pas
assez de bois dans la forêt du Grand Portage.
C'est à ce moment-là que les fonctionnaires du
ministère des Terres et Forêts, pour essayer de trouver une
solution au problème que vivait la population d'Esprit-Saint, avaient
indiqué au ministre des Terres et Forêts, M. Bérubé,
que, s'il y avait moyen de garantir par quelque façon qu'à
l'avenir des travaux de sylviculture pourraient être faits de
façon permanente dans le Bas-Saint-Laurent, dans la forêt du Grand
Portage, à ce moment-là, il serait possible de hausser les
garanties d'approvisionnement des usines existantes et possiblement d'arriver
à donner des garanties à de nouvelles usines. Dans un effort pour
régler le problème que vivait la population d'Esprit-Saint,
problème de chômage chronique, à ce moment-là, le
ministre des Terres et Forêts avait fait accepter par le Conseil des
ministres un arrêté en conseil qui garantissait des
investissements de $2 000 000 par année durant les cinq prochaines
années à partir de 1977, cela se termine en 1982 en
sylviculture dans la forêt du Grand Portage. La même chose a
été faite l'automne dernier pour toute la forêt du
Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie pour permettre de doubler, comme l'a
indiqué tantôt le ministre, les garanties d'approvisionnement des
scieries du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie.
Evidemment, comme c'étaient des arrêtés en conseil
dont la durée était de trois ans ou de cinq ans, cela n'assurait
pas la sylviculture de façon permanente, mais jusqu'à ce que la
loi créant le fonds forestier puisse permettre d'assurer des travaux
sylvicoles de façon permanente, ceci a permis, dans ce cas
précis, à Esprit-Saint, de donner des garanties
d'approvisionnement permettant de créer une usine de bardeaux de sciage
et une scierie donnant environ une trentaine d'emplois dans une
municipalité d'environ 600 âmes. Mais 30 emplois dans une
municipalité de 600 âmes, je vous assure que c'est très
important et c'est pour cette raison que, malgré la grippe, j'ai senti
nécessaire et utile de vous dire, Mme la Présidente, combien je
trouvais important ce projet de loi et l'adoption de ce projet de loi par les
membres de l'Assemblée nationale.
C'est d'autant plus important que je pense que cela fait partie d'un
ensemble que le gouvernement actuel, depuis trois ans, a voulu créer en
encourageant le développement des ressources agricoles, des ressources
touristiques et des ressources forestières dans l'ensemble des
municipalités rurales du Québec et spécialement dans les
municipalités rurales des régions périphériques. Je
vous dis que cela fait changement dans notre région quand on se souvient
du temps, entre 1970 et 1976, où on parlait de fermeture des paroisses,
où on parlait du vidage des paroisses, du déménagement. On
faisait tout pour amener les gens des
paroisses rurales vers la ville et on ne songeait pas, à ce
moment-là, à aider la population à développer son
propre milieu ambiant. Je vous assure que par des mesures comme celle-ci, on
veut encourager le développement de la sylviculture pour garantir
davantage d'emplois. (16 h 40)
M. le ministre l'a indiqué tantôt, seulement le plan de
revalorisation de l'industrie du bois de sciage de la région du
Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, c'est 1500 emplois, environ 850
comme travailleurs forestiers et 650 dans les usines. Seulement ce plan de
renouvellement, en somme, ou de modernisation des industries du bois de sciage
de la région du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, c'est
sûrement le plus grand projet créateur d'emplois qu'il y ait
jamais eu dans la région du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie,
parce que cela implique une ressource qui est là, mais qui était
sous-exploitée avant parce qu'elle était soit sous concession
forestière ou soit qu'on ne faisait pas suffisamment de sylviculture
pour cultiver la forêt comme on est capable de cultiver un jardin.
Ce projet de loi créant un fonds forestier qui va permettre
d'augmenter la sylviculture au Québec, qui va permettre, par voie de
conséquence, de maintenir ou d'augmenter les garanties
d'approvisionnement des usines de pâtes et papiers, des usines de bois de
sciage, sera un facteur important de création d'emplois pour l'ensemble
du Québec. Je pense que ce projet de loi à caractère
économique est particulièrement bienvenu. En fait, il aurait
dû être adopté depuis plusieurs années quand on sait
ce qui a été fait avec nos forêts depuis 20 ou 30 ans. Je
pense qu'il était maintenant temps cela avait déjà
commencé sous l'ancien gouvernement qu'on prenne l'ensemble de
nos responsabilités, qu'on se décide à administrer
nous-mêmes nos forêts pour qu'elles soient utilisées au
maximum afin que les citoyens domiciliés dans des régions
forestières puissent avoir accès à cette ressource qui
leur a souvent été interdite et qui était
contrôlée par d'autres. Il était temps que ce soient nos
concitoyens qui contrôlent cette ressource et qui en
bénéficient au maximum.
Je peux dire, en tout cas, que pour un comté comme celui de
Rimouski, que ce soit par l'augmentation des garanties d'approvisionnement
à la scierie de Luceville, que ce soit par les garanties
d'approvisionnement données à une usine de Lac-des-Aigles ou que
ce soit par le fait de donner des garanties d'approvisionnement à la
scierie d'Esprit-Saint, cette réforme par laquelle en faisant de la
sylviculture on peut augmenter notre possibilité forestière est
très bienvenue. Elle a permis de garantir des emplois, de créer
de nouveaux emplois et elle a permis, en somme, d'assurer une partie du
développement économique de plusieurs municipalités
rurales. Je suis convaincu que plusieurs autres députés de
comtés ruraux penseront la même chose que moi. Je vous remercie,
Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le député de Richmond
et leader de l'Union Nationale.
M. Yvon Brochu
M. Brochu: Merci, Mme la Présidente. A l'invitation
très aimable de mon collègue de Joliette-Montcalm, je m'en
voudrais de passer sous silence un projet de loi qui, au point de
départ, peut, comme l'a souligné le ministre, être tout
à fait anodin, mais représenter des intérêts
importants dans un domaine où plusieurs emplois trouvent leur lieu
d'intérêt, qui est générateur au niveau de
l'économie de façon assez importante, comme l'a indiqué le
ministre tout à l'heure, puisqu'il semble qu'il y a environ 20%
ce sont les chiffres que le ministre a soulignés dans son intervention
du $1, tel qu'on le connaît actuellement, qui sont tributaires de
l'industrie forestière. Il ne s'agit donc pas d'une quantité
négligeable lorsqu'on parle de l'économie du Québec.
Un projet de loi comme celui-là, comme je le disais tout à
l'heure, peut sembler mineur au point de départ mais, comme l'a
également indiqué le ministre, c'est un peu, en quelque sorte,
une pierre d'assise d'une industrie. C'est un petit tour de force en même
temps que de réussir à installer un fonds forestier qui va
être une entité administrative en soi avec ses propres sources de
financement. Dans ce sens-là, je pense qu'on ne peut que rendre hommage
au ministre qui a su mettre en place les formules nécessaires pour
arriver à pondre cette loi qui va faire figure de proue, si vous voulez,
dans le domaine forestier au Québec. Une loi comme celle que nous avons
maintenant devant nous était quand même attendue et
espérée par l'industrie depuis fort longtempsé même
si, au point de départ, la participation financière qu'on
espère de ces entreprises est quand même passablement
élevée et sera assez exigeante de ce
côté-là.
Nous discutons donc aujourd'hui un projet de loi qui a été
déposé en Chambre en décembre dernier. On sait
également qu'avant le déclenchement de la campagne
référendaire le gouvernement avait mis le projet de loi no 86 sur
sa liste de priorités, faisant suite en cela à un travail assez
considérable effectué par le ministère concerné. Le
gouvernement a donc mis ce projet de loi en priorité sur sa liste,
probablement aussi, parce que, comme l'avait mentionné un fonctionnaire
du ministère de l'Energie et des Ressources: Même si rien ne
presse, le climat s'y prête bien actuellement. Je ne sais trop de quel
climat politique le fonctionnaire en question voulait parler, et je ne sais pas
si, actuellement, le climat est de nature différente, mais, quoiqu'il en
soit, les voeux de ce haut fonctionnaire sont exaucés puisque maintenant
le projet de loi se trouve en discussion devant l'Assemblée nationale en
deuxième lecture.
On sait que le fonds forestier qui sera créé ne servira,
à toutes fins pratiques, que dans cinq ans puisqu'il s'agit d'un long
cheminement et que le ministre sera responsable de faire rapport devant la
Chambre également par tranches de cinq ans. Comme le mentionnait mon
collègue de Rouyn-Noranda, tout à l'heure, le ministre prend
quand même soin de se réserver, à l'intérieur de
cette loi, une marge de manoeuvre assez considérable. En
effet, nos amis d'en face n'en parlent pas beaucoup, mais, pour les cinq
prochaines années, le gouvernement dispose de toutes les sommes
nécessaires pour appliquer sa politique de restauration de la
forêt, en vertu d'une entente de cinq ans signée l'an dernier avec
Ottawa. Je mentionne ce fait, Mme la Présidente, parce que parfois, et
malheureusement, je pense, trop souvent, nos amis d'en face oublient de
mentionner cette situation qu'on doit reconnaître puisqu'il ne s'agit pas
d'une question d'opinion, mais tout d'abord d'une question de fait, de
réalité; c'est que la participation du gouvernement
fédéral, au niveau de ces ententes qui donnent lieu à des
projets de loi comme on en a actuellement, est quand même assez
considérable.
Par ailleurs, il semble bien, selon les informations que nous
possédons, qu'avant le dépôt de cette loi tous les
intervenants dans ce secteur ont été consultés, ce qui me
fait dire qu'il s'agit d'un projet de loi qui semble, de façon assez
générale, faire l'unanimité de tous ceux qui sont
concernés de près ou de loin par le domaine de la foresterie, par
le domaine de la production de matière ligneuse.
Donc, c'est un de ces projets de loi qui, même s'il fut
peut-être difficile, en termes de technique législative, de le
conduire jusque devant l'Assemblée nationale, à cause des
implications du ministère des Finances et d'autres organismes
parallèles, répond quand même, dans le champ de son
application, aux voeux, aux besoins et aux désirs de ceux qui ont
à travailler dans ce domaine d'activité économique du
Québec.
Cependant, je me permettrai de poser un certain nombre de questions au
ministre responsable et celui-ci pourra me répondre, soit dans sa
réplique, après la deuxième lecture, après les
autres intervenants qui prendront la parole, ou encore lors de l'étude
article par article de ce projet de loi.
On sait que l'industrie de pâtes et papiers fait face à des
coûts de fonctionnement élevés et que par conséquent
elle doit composer avec une capacité concurrentielle quand même
assez fragile. On sait qu'actuellement une large proportion de l'industrie
papetière peut bénéficier c'est là quand
même une mesure relativement temporaire de la différence de
valeur entre l'argent américain et l'argent canadien; mais c'est quand
même une rentabilité qui est artificielle jusqu'à un
certain point puisque ces valeurs fluctuent et que des modifications dans les
cours monétaires pourront mettre en péril ou avoir des effets
négatifs sur cet aspect qui semble actuellement positif dans le domaine
des pâtes et papiers.
Je demanderais donc au ministre dans quelle mesure la création du
fonds forestier va entraîner une réduction de cette
capacité concurrentielle de l'entreprise et aussi de tenter de chiffrer
quel peut être le coût de la redevance pour l'industrie des
pâtes et papiers. On sait que l'industrie elle-même aura à
s'implanter dans ce processus qui est mis en marche par le projet de loi sur le
fonds forestier, mais j'aimerais que le ministre nous donne un aperçu
plus exact, plus précis des sommes qui devront être versées
par les entreprises qui ont à oeuvrer dans ce secteur et ce que cela
représente au point de vue de coûts de redevance, la participation
de cette industrie. (16 h 50)
En termes de pourcentage, par exemple, quel pourrait être le
pourcentage d'augmentation des coûts d'exploitation pour les entreprises
elles-mêmes là-dedans? J'imagine que pour arriver à la
présentation d'un projet de loi comme celui-là, qui a une
importance relativement grande quand même, le ministère a
sûrement dû procéder à certaines évaluations
qui pourraient peut-être permettre maintenant au ministre, tout au moins
globablement, de nous fournir certaines indications en ce qui concerne ces
questions.
En ce qui concerne l'Union Nationale, Mme la Présidente, donc,
nous concevons aisément l'utilité de la création de ce
fonds forestier. Je crois que c'est une protection pour nos forêts et
aussi une des principales activités économiques du Québec,
comme je l'ai indiqué tout à l'heure. Il s'agit, je pense que
c'est là le rôle de tout gouvernement dans toute pièce de
législation, de prévenir, de prévoir et de savoir
préparer l'avenir dans ce sens. Je pense que non seulement on doit
utiliser au maximum l'industrie forestière, maintenant, mais qu'on doit
avoir cette préoccupation j'ai cru la sentir dans les propos du
ministre, d'ailleurs de prévoir, pour les 20 ou 30 ou 40
prochaines années, dans le domaine de l'approvisionnement, de sorte que
les générations futures puissent avoir accès à
cette richesse naturelle et en tirer plein bénéfice, comme on
peut le faire actuellement.
Evidemment, cela fait partie, comme on l'a indiqué aussi, d'un
plan d'ensemble, d'un plan d'approche plus global où on doit supporter
l'économie d'un pays ou d'une province, avoir une approche plus
intégrée, plus globale de tous les secteurs, soit dans le secteur
agricole, soit dans le secteur touristique, soit dans le secteur minier. Le
secteur forestier, en soi, constituant une tranche importante de toutes les
activités économiques d'une économie comme celle du
Québec, doit donc avoir une part importante, se voir accorder une part
importante de l'intérêt du gouvernement en termes de pièces
de législation et en termes d'investissements également. Je pense
que dans ce sens, le projet de loi qui est devant nous actuellement ne peut
être que positif puisqu'il va générer, si vous voulez, la
possibilité de mettre en oeuvre cette préoccupation que dit avoir
le ministre maintenant en ce qui concerne les générations
futures, en ce qui concerne l'assurance des approvisionnements pour les
entreprises qui auront à évoluer au Québec dans les
années à venir.
M. le Président, en ce qui concerne l'Union Nationale, nous
allons procéder au vote sur ce projet de loi en deuxième lecture.
Nous allons accorder notre appui. Evidemment, nous demandons au ministre s'il
est possible d'avoir quelques précisions sur les points que nous avons
portés à son attention.
La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Energie et des
Ressources.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: Merci, Mme la Présidente. Je dois
dire qu'il s'agit d'un projet de loi, d'après les nombreux discours cet
après-midi, pour lequel le ministre titulaire aura eu moins de
difficultés à l'Assemblée nationale qu'il n'en a eu avec
la fonction publique et l'administration en général. En effet, ce
projet de loi créant le fonds forestier est un vieux projet. C'est un
projet qui, évidemment, a cours à l'intérieur du
ministère, de l'ancien ministère des Terres et Forêts,
depuis des années. Cependant, il faut reconnaître que les
ministres des Terres et Forêts du passé se sont cassé les
dents année après année, d'abord sur le ministre des
Finances, parce que je ne sais pas si on a réalisé qu'à
l'intérieur de ce projet, je suis pratiquement obligé de
détailler un peu le fonctionnement du fonds forestier de manière
à susciter un peu d'intérêt et d'opposition de la part de
l'Opposition. Puisqu'on ne semble pas avoir d'opposition cet après-midi,
je suis obligé de souligner que ce fonds forestier, en fait,
s'approvisionne de façon autonome avec des taxes autonomes, et les
dépenses de ce fonds forestier sont prévues dans la loi. Or,
d'habitude, je dois souligner que l'Assemblée nationale, d'une
façon générale, vote le budget et un ministre des Finances
s'organise normalement pour garder un certain contrôle sur ce budget de
manière à pouvoir quand même négocier un programme
gouvernemental contre un autre programme gouvernemental.
En fait, c'est très rare qu'un ministre des Finances accepte de
réduire son autonomie, et c'est ce que fait le ministre des Finances en
l'occurrence. Il accepte de réduire son autonomie puisque nous
créons un deuxième fonds consolidé, littéralement
parlant, qui s'approvisionnera de façon autonome en revenus et qui,
également, aura des dépenses qui sont prévues dans la loi.
C'est très rare que cela se fasse. En fait, c'est même à ce
point exceptionnel que tous les légistes du comité de
législation ont bel et bien posé la question: Est-ce que c'est
cela que vous voulez vraiment faire parce que cela ne se fait normalement pas?
Je dois dire que nous devons à l'actuel ministre des Finances le
présent projet de loi qui, je pense, de tous les ministres des Finances
du passé est le seul à avoir compris les implications de
l'aménagement forestier à long terme et à avoir compris
qu'il fallait modifier notre façon d'agir concernant le financement de
tels travaux, sans quoi jamais le Québec ne pourrait s'engager dans une
telle réforme. Je pense que c'est à l'actuel ministre des
Finances qui a compris l'importance d'un tel projet de loi que l'on doit
aujourd'hui le dépôt d'un tel projet.
Réponses rapides à certaines questions. On dit: La
contribution gouvernementale n'est pas précisée. Justement, nous
ne pouvons pas anticiper quelle sera la contribution gouvernementale. Parce que
c'est le privilège de l'Assemblée nationale et là
le député de Mont-Royal a oublié ses propres
privilèges une fois par année de voter les budgets du
gouvernement. Ce que le député de Mont-Royal voudrait faire, il
voudrait qu'on retire à l'Assemblée nationale le droit de
décider de verser des sommes d'après un programme
d'aménagement forestier et qu'on le prévoie dans la loi. Je pense
que non. Il faut garder à l'Assemblée nationale le pouvoir de
décider quels seront les impôts des citoyens qui serviront
à l'aménagement forestier, il ne faut pas le fixer dans la loi.
Donc, pour respecter les privilèges de l'Assemblée nationale
même, nous ne prévoyons pas combien l'Assemblée nationale
voudra mettre de contribution à l'intérieur du fonds. Ce sera
décidé annuellement, lors de l'adoption du budget. Voilà
pour le respect des privilèges de l'Assemblée nationale.
Deuxième question, toujours relativement à ce point
soulevé par le député de Mont-Royal. Il dit: Le
gouvernement devrait prévoir les sommes d'argent qu'il doit y mettre.
Alors là, je m'inscris en faux. Est-ce qu'on doit faire payer par le
citoyen de Montréal, de Québec, ou de Matane le coût de
l'aménagement de la forêt, ou doit-on le faire payer par
l'industrie? Le présent projet de loi dit: II faut le faire payer par
l'industrie, parce que c'est un coût de production, et si
l'Assemblée nationale veut, pour des raisons exceptionnelles, et
éventuellement voter les budgets appropriés, elle le fera, mais
année après année. Donc, il y a un principe fondamental
qui est posé ici, il faut choisir: est-ce que c'est au citoyen à
payer de sa poche l'aménagement de nos forêts et payer des mesures
correctives contre le pillage qui a souvent été pratiqué
par les compagnies? Le député de Mont-Royal dit: On devrait aller
prendre cela dans la poche du petit contribuable, dans la poche du "payeur de
taxes", il ne paie pas encore assez d'impôts, il faut aller en chercher
davantage.
Nous, nous prenons une autre attitude, on dit: Non, il faudrait
prévoir que ce soient les compagnies qui paient. C'est une
différence d'approche, c'est une différence de philosophie. Lui,
veut protéger les grosses compagnies et aime mieux que ce soit le petit
contribuable qui paie. Nous, nous préférerions éviter que
le contribuable ait à payer d'une façon systématique, mais
au contraire, nous assurer que ce soient les compagnies qui paient cela. C'est
une différence de philosophie. Mais c'est cela fondamentalement
l'importance des partis politiques. Cela permet de comprendre qu'il y a un
parti politique qui défend davantage le travailleur alors qu'il y a un
parti politique de l'autre bord qui défend les compagnies. C'est normal,
il faut qu'il y ait des distinctions de ce genre.
M. Ciaccia: Mme la Présidente, question de
privilège.
M. Bérubé: On en a une très claire. J'ai
beaucoup apprécié...
La Vice-Présidente: Question de privilège, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Question de privilège. Le ministre me fait
dire des choses que je n'ai pas dites. Je voudrais rétablir les faits.
Je n'ai pas dit et je n'ai même pas suggéré dans l'approche
que j'ai faite en critiquant le projet de loi, que ce soient les petits
contribuables soi-disant que le ministre de l'Energie
et des Ressources vient de m'accuser... Je n'ai aucunement dit que ce
soit la population et les petits contribuables qui devraient payer le fonds
forestier. J'ai suggéré un engagement du gouvernement, et
l'engagement du gouvernement peut se prendre à même les fonds, non
seulement...
La Vice-Présidente: M. le député, je pense
que vous pouvez soulever une question de privilège. Je vous demanderais
de vous restreindre à ce que vous appelez votre question de
privilège et à ne pas élargir le débat. M. le
ministre en est à sa réplique.
M. Ciaccia: Très bien. Très brièvement, j'ai
suggéré qu'il y ait un engagement du gouvernement et cet
engagement du gouvernement peut consister à prélever des sommes
qui sont déjà payées par l'industrie et pas
nécessairement par tous les contribuables. Quand le ministre m'accuse
que je suggère que ce soit le petit contribuable qui paie pour
l'industrie forestière, c'est absolument faux. Je dois rétablir
les faits.
Une Voix: II fait comme d'habitude, il charrie.
La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Energie et des
Ressources.
M. Bérubé: Merci, Mme la Présidente. Je
pense que ce n'est pas la peine de s'embarquer dans un long débat. En
fait, le député de Mont-Royal a proposé que le
gouvernement soit obligé de mettre des fonds à l'intérieur
du fonds forestier. (17 heures)
Or, le gouvernement doit forcément aller chercher ça dans
la poche des contribuables, puisque l'essentiel des revenus, c'est par le biais
de l'impôt. Comme, de toute façon, l'Opposition libérale
nous dit que présentement les riches paient trop d'impôts et
qu'elle nous propose de réduire les impôts sur les riches, on ne
peut pas forcément augmenter les impôts de tout le monde et
réduire les impôts des riches sans, automatiquement, taxer les
pauvres. Je pense qu'il faut, à un moment donné, additionner tout
cela ensemble.
Ce que ça veut dire, c'est que si on acceptait de forcer le
gouvernement à contribuer à ce fonds et qu'en même temps on
suivait les suggestions du Parti libéral, c'est-à-dire de
réduire les impôts des citoyens les plus nantis de la
société, ça voudrait dire que ce sont les pauvres qui
paieraient pour financer le fonds forestier. Là-dessus, il y a une
différence fondamentale d'opinions politiques; moi, je
préfère que ce soient les compagnies qui paient plutôt que
le petit particulier, celui qui gagne le moins cher. Mais, enfin, c'est une
question de point de vue. Je comprends qu'on puisse défendre un autre
point de vue, on a le droit et je pense qu'on a raison d'avoir un Parti
libéral qui défende les compagnies. Je pense que c'est normal, il
faut que dans une société, on sache de quel bord chaque parti est
situé. Nous, nous sommes du côté des travailleurs et des
moins bien nantis et eux sont du côté des compagnies. C'est
correct! Ils ont le droit!
Pourquoi? On dit que l'aménagement forestier est un coût de
production, c'est un coût qui revient d'année en année. On
peut donner des subventions pour inciter des compagnies à investir ou,
à un moment donné, l'industrie passe à travers une
période difficile et à ce moment-là on dit à
nouveau: Essayons de les aider temporairement. Mais sur une base permanente,
dans une loi, dire qu'on va rembourser une partie des coûts de
l'industrie année après année aussi longtemps que la loi
va être là, je ne trouve pas cela acceptable. D'ailleurs, cela ne
se produit jamais. Je ne connais pas de loi où on aurait inclus cela. Je
trouve que la suggestion qui a été faite par le
député de Mont-Royal a peut-être été faite un
peu rapidement; je pense qu'il faut la rejeter carrément.
Le député de Montmagny-L'Islet a demandé: Quel est
le volume de bois qui a été coupé? Je pense que cela va
répondre en même temps à une question du
député de Richmond. Par exemple, pour l'année
dernière, 8 400 000 cunits ont été coupés sur les
forêts publiques, ce qui représenterait à ce
moment-là, comme contribution de l'industrie si l'industrie avait
à tout payer le fonds forestier, environ $25 000 000 basés sur $1
le mètre cube, c'est-à-dire, en gros je simplifie
3/4% du prix de vente des produits forestiers. Donc, cette politique, si elle
était défrayée entièrement par l'industrie
l'année dernière, aurait coûté 3/4% du prix de vente
des produits. Ce n'est donc pas un montant considérable, c'est un
montant tout à fait modeste et je pense qu'il n'écrasera pas les
multinationales et les grandes compagnies forestières que veut
défendre, avec raison d'ailleurs, le député de Mont-Royal.
Je pense que c'est son droit le plus strict de défendre les
multinationales et les compagnies.
Un autre point a été soulevé, je crois, par le
député de Rouyn-Noranda qui s'inquiète...
M. Lavigne: De se faire passer une épinette!
M. Bérubé: ... en fait, oui, de se faire passer une
épinette pour un sapin. En fait, il s'inquiète de ce qu'un des
articles de la loi donne une certaine latitude au gouvernement quant à
l'imposition d'une redevance pour des frais d'aménagement. Je pense
qu'il faut comprendre le sens de la loi. Cette loi s'applique à tous les
intervenants forestiers, mais elle distingue une certaine catégorie
d'intervenants forestiers qui, par exemple, sont aux prises avec une
pénurie de bois, voudraient avoir plus de bois. Le ministère ne
peut pas, en vertu de la loi, leur allouer plus de bois parce que la
possibilité forestière n'existe pas. Dans ces conditions, le
ministère doit refuser, mais le ministère pourrait, après
examen de la situation, conclure que par des travaux d'aménagements on
pourrait augmenter encore la possibilité forestière. A ce
moment-là, cet article de loi nous permet de signer un contrat
d'approvisionnement avec l'industriel, de lui faire payer tous les coûts
de cet aménagement-là puisqu'il est le seul à
bénéficier de l'augmentation de l'approvisionnement. On lui
fait payer les coûts associés à l'augmentation de
l'approvisionnement et ceci nous permettrait, dans certaines régions
particulières du Québec, d'augmenter les approvisionnements de
certaines usines, même si la forêt ne peut pas fournir ce bois
d'une façon naturelle, en forçant la croissance de la
forêt. Cela pourrait devenir possible. A ce moment, si l'industriel est
prêt à payer les frais nécessaires, le gouvernement se
donne la possibilité de le faire.
C'est pour cela qu'il n'y a pas de définition précise du
montant à payer puisque ce sera étudié cas par cas et
l'industriel sera toujours libre d'accepter ou de refuser la proposition qui
lui est faite. Je pense que c'étaient essentiellement les remarques du
député de Rouyn-Noranda. C'est la raison pour laquelle le
gouvernement se garde une certaine latitude dans ces cas. Autrement, je dois
vous avouer que la législation déléguée a
relativement peu d'importance dans le présent projet de loi puisque les
règlements n'ont pour but que de nous permettre d'exiger possiblement
moins que le $1, qui est un maximum prévu dans la loi, si effectivement
l'importance des travaux d'aménagement ne nécessite pas que l'on
exige $1 le mètre cube aux industriels du sciage et des pâtes et
papier.
En d'autres termes, tout ce qui est prévu dans l'administration
de la loi l'est dans la loi; nous laissons très peu de place à la
réglementation dans un tel projet, si ce n'est à la
quantité d'argent que nous aurons à exiger pour balancer le
fonds. Mais, comme de toute façon, il faut que ce fonds s'autofinance,
il faut que les dépenses d'aménagement soient
nécessairement compensées par des revenus. Il faut donc que le
gouvernement soit en mesure de fixer, année après année,
combien il va aller chercher; d'où la nécessité d'avoir
une certaine marge de manoeuvre dans le présent projet de loi. Mais cela
représentera au maximum, tel que rédigé, trois quarts pour
cent du prix de vente actuel du bois et je dois dire que si on compare, par
exemple, le coût moyen du cunit de bois au Québec, qui est de
l'ordre de $70 ou $72 maintenant je n'ai pas le chiffre le plus
récent de l'année financière, mais ce doit être
autour de $75 le cunit... Je visitais les exploitations en Suède et
devais constater qu'il en coûte tout près de $140 le cunit pour du
bois comparable à l'industrie suédoise. En d'autres termes, notre
industrie demeure très concurrentielle par rapport à l'industrie
suédoise; d'autre part, par rapport à nos concurrents
américains, avec l'actuel programme, je pense que notre industrie
forestière sera une des plus rentables.
Je dois souligner, pour terminer, les assertions grossièrement
erronées du député de Pointe-Claire qui affirmait que
l'industrie forestière quittait le Québec, qu'elle était
peu à l'aise à cause des politiques du gouvernement. C'est de la
folie furieuse; je n'ai jamais entendu quelque chose d'aussi mensonger, d'aussi
inacceptable. En fait, 45% des investissements dans le secteur forestier se
feront, d'après l'Institut canadien des pâtes et papier, au
Québec et non pas dans le reste du
Canada. Alors, c'est au Québec où il y a le plus
d'investissements dans le secteur forestier, grâce à nos
politiques. Alors, qu'il cesse donc de charrier!
La Vice-Présidente: Cette motion de M. le ministre de
l'Energie et des Ressources proposant que soit maintenant lu la deuxième
fois le projet de loi no 86, Loi sur le fonds forestier, est-elle
adoptée?
Des Voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire adjoint du
gouvernement.
M. Bertrand: Mme la Présidente, à condition que
nous puissions fonctionner assez rapidement et je pense avoir le
consentement du ministre là-dessus nous pourrions appeler
l'article 32, après quoi nous étudierions les deux projets de loi
en commission plénière.
Projet de loi no 87 Deuxième lecture
La Vice-Présidente: A l'article 32 du feuilleton
d'aujourd'hui, il s'agit du projet de loi no 87, Loi modifiant la Loi sur la
municipalisation de l'électricité et la Loi de
l'électrification rurale.
M. le ministre de l'Energie et des Ressources.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: Alors, Mme la Présidente, je ne
ferai pas un long discours sur ce projet de loi. C'est un projet de loi qui est
attendu de longue date.
En 1962, il y avait la nationalisation c'est-à-dire qu'il
n'y a pas eu nationalisation puisque, finalement, les compagnies se sont toutes
vendues de gré à gré mais il y a eu l'achat, par le
gouvernement du Québec, de toutes les compagnies productrices
d'électricité au Québec. Un des objectifs, sinon
l'objectif, qui avait été annoncé à l'époque
était d'uniformiser les tarifs d'électricité à
travers tout le Québec.
Il y a eu quelques exceptions. En effet, certaines municipalités
ont, pendant des années, maintenu leur propre réseau
hydroélectrique, achetant souvent de l'électricité
d'Hydro-Québec et la revendant aux consommateurs. Il en résulte
que, dans plusieurs municipalités du Québec, une demi-douzaine,
les citoyens sont appelés à payer souvent plus cher leur
électricité que l'ensemble des citoyens du Québec. Cela
nous paraît une situation anormale. La ville de Sherbrooke, Deauville,
Windsor, Chibougamau, Rivière-du-Loup, enfin, je pourrais en nommer un
certain nombre.
Cela nous paraît une situation anormale, car une industrie qui
voudrait s'installer dans cette municipalité serait
désavantagée. Si la municipalité vend de
l'électricité aux villes avoisinantes, comme c'est souvent le
cas, à ce moment-là, elle force les municipalités
avoisinantes à financer la municipalité mère. Cela permet
à la municipalité, finalement, de retirer des revenus alors que,
normalement, les revenus des municipalités viennent des taxes
foncières et non des transactions commerciales. Aussi ce projet de loi
ne vise-t-il pas à retirer aux municipalités la
propriété de leur réseau, il n'a comme objectif unique que
de garantir que tous les citoyens au Québec, quel que soit l'endroit
où ils vivent, ne paieront jamais leur électricité plus
cher que le prix fixé par HydroQuébec. (17 h 10)
C'est donc le sens de ce projet de loi. Il ne faut pas chercher plus
loin et il n'y a donc pas lieu de faire de longs discours sur le principe du
projet de loi. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le député de
Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: La façon dont le ministre a expliqué le
projet de loi, que c'est uniquement avec l'objectif d'uniformiser les taux de
l'électricité pour tous les consommateurs, si c'était
vraiment la seule conséquence du projet de loi, on ne pourrait pas s'y
opposer. Que tous les consommateurs au Québec doivent payer ou devraient
payer les mêmes taux d'électricité, on est d'accord avec
cela. On ne s'y oppose pas et on va appuyer cet aspect du projet de loi, mais
et c'est un "mais" très important l'effet du projet de loi
va plus loin qu'uniformiser seulement les taux d'électricité pour
les municipalités concernées.
Je crois qu'il y a une vingtaine de municipalités et, si on se
réfère à la loi qui a permis à ces
municipalités d'avoir soit un système de distribution, soit un
système de production d'électricité, cela leur a permis,
par l'entremise de leur conseil municipal, avec l'approbation des
contribuables, de faire certaines installations, d'avoir certaines
dépenses et d'en tirer certains revenus. Que fait le projet de loi?
C'est vrai que le projet de loi dit: Dorénavant, aussitôt
que ce projet de loi sera adopté et proclamé, les
municipalités ne pourront pas demander plus cher aux contribuables que
le tarif qu'Hydro-Québec exigerait si c'était Hydro-Québec
qui fournissait l'électricité. Oui, mais que faites-vous des
installations des municipalités? Que faites-vous des profits que les
municipalités reçoivent peut-être aujourd'hui en imposant
un prix différent?
Mme la Présidente, le ministre a mentionné qu'en 1962, il
y a eu le droit à la nationalisation. Ils ont procédé de
gré à gré. Si c'est vraiment l'intention un des
objectifs, en 1962, était d'uniformiser les tarifs pourquoi
on pourrait poser la même question le ministre ne
procèdet-il pas de la même façon? Si l'effet de ce projet
de loi sera de rendre les systèmes d'électricité des
municipalités non rentables, c'est vraiment une façon de leur
enlever cet actif. Elles vont être obligées de prendre ce
système, de le subventionner par les autres taxes de la
municipalité ce qui n'arrivera pas ou bien de prendre le
système et de le donner à Hydro-Québec. L'effet de ce
projet de loi est de s'assurer que ce sera seulement Hydro-Québec qui va
devenir propriétaire. Il n'y aura pas d'autre solution, à moins
qu'il n'y ait, dans le projet de loi, un engagement par HydroQuébec de
fournir de l'électricité à ces municipalités
à des tarifs préférentiels ou à des tarifs qui
permettraient un profit à la municipalité en fournissant de
l'électricité.
Je crois que c'est inexact, et je ne veux pas utiliser le même
genre de langage que celui que le ministre utilise habituellement avec nous,
mais je vais me limiter à dire que c'est inexact que la seule
conséquence de ce projet de loi sera d'uniformiser les taux
d'électricité pour les consommateurs dans les différentes
municipalités. Ce sera une des conséquences. C'est vrai que c'est
l'objectif de ce projet de loi, mais, savez-vous, c'est comme une
demi-vérité. On va à un certain point, censément
pour protéger les consommateurs, mais on oublie les effets que cela aura
sur la vingtaine de municipalités, et il y a, parmi elles, une
coopérative.
Dans le passé, la loi permettait à ces
municipalités et aux coopératives, spécialement dans les
districts ruraux, dans les régions rurales, de fournir de
l'électricité. Elles ont eu des dépenses. Elles ont eu des
investissements. Que fait le ministre avec cela?
Savez-vous ce que le ministre vient de faire? Il vient de socialiser les
systèmes d'électricité de ces municipalités. Il
vient de les rendre... C'est cela qu'il vient de faire, sans compensation, sans
prévoir un mécanisme disant: Ecoutez! Vous avez un système
rentable aujourd'hui. Si on coupe et si on réduit les tarifs, notre
système ne sera plus rentable. Aujourd'hui, les municipalités ont
une activité rentable qui représente un certain actif pour la
municipalité et pour les contribuables. Le ministre arrive avec son
projet de loi et il met fin à cela.
On aurait pu procéder d'une autre façon ; je crois que
cela aurait été plus honnête et plus dans les
intérêts non seulement des contribuables, mais des
municipalités aussi. Si on veut uniformiser, pourquoi n'a-t-il pas
procédé de la même façon qu'en 1962 et dire:
Hydro-Québec, vous allez acquérir tous ces systèmes; vous
allez le faire de gré à gré et on va se baser, pour le
paiement de la compensation, sur le rendement du système, sur le genre
de revenu que la municipalité reçoit. A ce moment-là,
c'est juste et équitable. Les contribuables, dans les différentes
municipalités, sont protégés parce qu'ils vont recevoir
une compensation basée non seulement sur l'équipement, mais sur
la rentabilité du système. La municipalité n'est pas
pénalisée et vous arrivez à votre objectif d'uniformiser
les tarifs.
Mais de la façon que vous le faites, je crois que cela
pénalise non seulement la municipalité... La municipalité,
c'est quoi? La municipalité, c'est la somme de tous les résidents
de cette municipalité. Quand on voit la ville de Sherbrooke qui se
plaint et dit: Ecoutez! Le maire de Sherbrooke a dit: "Un actif qui ne
rapportera pas; il ne sert à rien de le conserver". Aujourd'hui, la
ville a un actif qui rapporte quelque chose; avec votre projet de loi, elle ne
l'a plus. Qu'est-ce qui va arriver? Les conséquences? Est-ce que vous
avez mesuré les conséquences? C'est bien beau de dire: On va
uniformiser, mais s'il y avait un revenu, cela veut dire que ce revenu n'existe
plus. Alors, au lieu de demander plus pour l'électricité, aux
contribuables de cette ville, la ville va être obligée d'augmenter
les taxes municipales parce que le revenu ne tombera pas du ciel, les
dépenses sont là.
Une municipalité, ce n'est pas une corporation à but
lucratif. Ce que la municipalité reçoit, elle le dépense
pour les résidents. Si elle n'a pas ce revenu, il va falloir qu'elle
aille chercher d'autres revenus: augmenter les taxes.
Vous donnez l'impression, messieurs du Parti québécois, de
vouloir uniformiser et de faire bénéficier le consommateur. En
effet, ce n'est pas du tout cela que vous faites: vous le pénalisez
parce que ces revenus, cet argent, il faut que cela vienne de quelque part. De
la façon que vous le faites, vous avantagez Hydro-Québec et vous
pénalisez le petit consommateur. On parlait des multinationales et du
petit consommateur. Voici un exemple concret. Sans changer et sans charrier sur
le principe de ce projet de loi, c'est exactement cela qui va résulter
du projet de loi. Il n'y a pas de protection pour la municipalité. Il
n'y a pas de protection pour le contribuable parce que ce qu'il paie en termes
de taux d'électricité, en taxes additionnelles, en taxes
foncières, en taxes immobilières ou autres taxes de la ville,
c'est le même argent; il va le sortir de sa poche.
Premièrement, je me demande: C'est qui? Comment ce projet de loi
a-t-il été présenté? Est-ce qu'il y a eu des
pressions des citoyens? Est-ce qu'il y a eu des pressions de la Régie de
l'électricité? Est-ce qu'il y a eu des pressions
d'Hydro-Québec pour le rédiger? Je voudrais que le ministre, dans
sa réplique, nous réponde. Comment le projet de loi, tel que
rédigé, incomplet dans sa présente forme, en est-il venu
à être déposé devant cette Assemblée?
On peut aussi se poser une question sur l'inactivité. Voyez-vous,
on pose des questions comme: Quel est le rôle d'Hydro-Québec?
D'après le maire de Sherbrooke, il a fait des représentations
auprès du ministre de l'Energie et des Ressources et également
auprès d'Hydro-Québec. Il leur a demandé un tarif
préférentiel pour sa région afin de lui permettre
d'acheter l'électricité d'Hydro-Québec et de pouvoir la
vendre à un taux plus élevé pour réaliser un
profit, non seulement pour la municipalité, mais un profit pour aider
à payer les dépenses de cette ville. (17 h 20)
Cela a été refusé et j'aimerais savoir du ministre
s'il peut l'infirmer ou le confirmer. Apparemment, lorsque le
député de Mille-Iles était ministre de l'Energie, il
s'était engagé à ce que le gouvernement n'oblige pas les
municipalités à vendre leurs réseaux
d'électricité. Autrement dit, il y a eu un engagement du
gouvernement envers ces municipalités, disant qu'elles pouvaient garder
leurs réseaux d'électricité.
Si, aujourd'hui, on adopte ce projet de loi, on fait indirectement ce
qu'on n'a pas voulu faire directement, parce que, d'après les calculs,
d'après les chiffres, d'après les informations qui nous sont
fournies, les municipalités ne pourront plus donner ce service. Il va
falloir qu'Hydro-Québec en devienne la propriétaire. Alors, vous
allez non seulement obliger les municipalités à se
départir de leur système d'électricité, mais
à quel prix et avec quelle compensation? Si les discussions avaient eu
lieu maintenant, il y aurait un certain montant qui serait payable. Comme dans
toute expropriation, les sommes payables dépendent du rendement du
système, dépendent du rendement de l'entreprise. Si vous rendez
l'entreprise non rentable, Hydro-Québec va pouvoir prendre pour $1 tout
ce système. Est-ce que c'est juste envers les municipalités?
Est-ce que c'est juste envers les contribuables?
On peut se demander pourquoi, pendant qu'on parle d'Hydro-Québec
et des tarifs, le gouvernement n'a pas convoqué la commission
parlementaire de l'énergie et des ressources pour examiner les rapports
d'Hydro-Québec. Cela fait deux ans que cette commission n'a pas
siégé, depuis 1978. On aurait pu, devant une commission
parlementaire, soulever certains de ces problèmes avec les
représentants d'Hydro-Québec, leur demander quelle était
leur position, leur attitude. Etaient-ils en faveur de compenser les
municipalités, deviendraient-ils les propriétaires, quel prix
payeraient-ils? Là, on se trouve devant un fait accompli; on n'a pas eu
la chance d'avoir cette commission parlementaire, on n'a pas pu exiger de
réponses d'Hydro-Québec et là on nous présente un
projet de loi pour nous dire: En toute vertu, on va uniformiser les tarifs;
c'est une demi-vérité. Je suis" persuadé que le
gouvernement n'a pas convoqué la commission sur Hydro-Québec
avant le référendum parce qu'on aurait posé des questions
qui auraient pu être embarrassantes pour le gouvernement, on aurait
exigé certaines réponses. Alors, c'était bien simple, on
n'a pas convoqué la commission.
On parle d'uniformiser les tarifs. Si vraiment on veut protéger
le consommateur, on pourrait on a déjà fait la demande au
gouvernement demander à la Régie de
l'électricité et du gaz de tenir des audiences publiques pour
recommander les tarifs. La régie pourrait examiner, entendre les
représentations de toutes les personnes concernées, incluant les
consommateurs, les gens qui sont intéressés au problème,
incluant les représentations du gouvernement et celles
d'Hydro-Québec, à savoir la raison pour laquelle elle veut
des augmentations de tarifs. Cette régie pourrait faire une
recommandation au gouvernement. La décision finale, naturellement,
resterait entre les mains du gouvernement.
C'est ce qui est fait dans d'autres juridictions. Par exemple, en
Ontario, quand on veut une augmentation de tarifs, on va devant la
régie. Ce sont des auditions publiques, on fait des
représentations et Hydro-Ontario ici, ce serait
HydroQuébec doit être en mesure de justifier publiquement
pourquoi elle veut telle ou telle augmentation de tarif. Ce n'est pas le
système que nous avons ici, ici, Mme la Présidente. En 1978, on a
fait une demande d'augmentation de tarifs pour trois ans. L'augmentation de
tarifs a été, depuis que le gouvernement actuel est au pouvoir,
d'environ 71% et le public n'est pas plus éclairé sur les raisons
de cette augmentation. Est-ce que ce sont des raisons économiques, des
raisons politiques? Pourquoi ces tarifs ont-ils été
augmentés? C'est la même raison ici. Si on voulait vraiment
protéger le consommateur, on pourrait confier ce genre de
décision, de recommandation à une régie qui pourrait faire
des recommandations. Tous les gens auraient l'occasion d'examiner, de faire des
représentations et le gouvernement pourrait prendre ses décisions
sur la base des recommandations de la régie. S'il y a des
décisions politiques à prendre parce qu'ils veulent augmenter les
tarifs pour une raison publique et non seulement économique, alors le
gouvernement aurait tout le droit de le faire, mais au moins la population
saurait pourquoi le gouvernement a augmenté les tarifs de tel et tel
montant.
Il ne faut pas oublier, Mme la Présidente, quand on parle
d'uniformiser les tarifs, que suite à la réforme de la
fiscalité municipale on a imposé une taxe de 3%, et on n'a pas
parlé de cela. Dans son budget, le ministre des Finances a imposé
une taxe de 3% sur la production de l'électricité par
Hydro-Québec. Cela veut dire que cela va augmenter indirectement les
tarifs aux consommateurs. D'une part, on dit: On va réformer, on va
faire une réforme fiscale des municipalités et, de l'autre, on
prend l'argent d'Hydro-Québec, et c'est le même contribuable. La
personne qui paie les taxes à la municipalité, c'est la
même personne qui va payer les tarifs à Hydro-Québec. On
augmente cela de 3%. Je ne vois pas quelle sorte de réforme c'est.
Vraiment, on prend d'une poche et on le met dans l'autre au nom d'une
réforme. Si on veut le faire parce qu'on a besoin de revenus, qu'on le
dise, mais qu'on n'essaie pas de faire passer cela pour un genre de
réforme. De la même façon, aujourd'hui, pour une vingtaine
de municipalités, qu'on n'essaie pas de faire croire que c'est
strictement pour uniformiser les tarifs d'Hydro-Québec qu'on
présente ce projet de loi.
Le projet de loi, en ce qui concerne l'uniformisation, on n'est pas
contre. On est en faveur, mais on trouve que le projet de loi, Mme la
Présidente, ne va pas assez loin, ne répond pas aux
problèmes que cette uniformisation de tarifs va causer aux
différentes municipalités. Quant à la question de
protéger le consommateur et d'uni- formiser les tarifs, il y avait,
à un moment donné, dans le programme du Parti
québécois, un engagement d'enlever la taxe de vente sur
l'électricité. C'est 8% qui sont ajoutés à toutes
les augmentations d'Hydro-Québec. C'est un autre point pour lequel le
gouvernement n'a pas rempli ses engagements et qui augmente le fardeau fiscal
du contribuable.
Mme la Présidente, en conclusion, en terminant, nous sommes
d'accord pour uniformiser les tarifs d'électricité pour tous les
Québécois, qu'une personne habite à Sherbrooke, à
Mont-Royal ou en Abitibi, et je pense que c'était le mandat
d'Hydro-Québec d'uniformiser les tarifs. Elle a été
créée par un bon gouvernement libéral, Mme la
Présidente; c'était son mandat et on continue de mettre en
pratique cet objectif d'Hydro-Québec. C'est tout à fait juste et
équitable que tous les consommateurs, qu'ils vivent dans une
région ou une autre, paient les mêmes taux
d'électricité. Mais ce qu'on n'a pas fait dans ce projet de loi,
c'est de trouver une solution; on oblige les municipalités à
exiger le même taux qu'Hydro-Québec, mais on n'oblige pas
HydroQuébec, on ne dit pas à quel prix Hydro-Québec va
vendre son électricité aux municipalités. Là on
crée une situation où vraiment on enlève cet actif aux
municipalités et on n'a pas d'instruments dans le projet de loi qui vont
nous dire comment la municipalité va être compensée, de
même que le contribuable qui recevait un profit de cette entreprise. Les
conséquences qu'il va subir, cela va être une augmentation de
taxes. (17 h 30)
Nous allons faire des suggestions en commission plénière,
à l'étude article par article, pour exiger du gouvernement
certains engagements vis-à-vis des municipalités et des
coopératives qui sont concernées. Il y avait une loi où
elles avaient le droit d'installer un tel système; elles se sont
prévalues de cette loi, elles ont certains droits acquis, d'après
les lois qui ont été adoptées par cette Assemblée
nationale, et je crois que c'est injuste aujourd'hui d'arriver et de leur
enlever le bénéfice, le profit et les actifs qu'elles ont par
suite de lois dont elles se sont prévalues de bonne foi. Elles ont fait
des dépenses pour instituer ce système
d'électricité, il y a des équipements. On voudrait savoir
du gouvernement comment il entend se comporter pour s'assurer que justice soit
faite aux municipalités concernées tout en protégeant les
consommateurs et en uniformisant les taux d'électricité dans
toute la province de Québec. Merci, Mme la Présidente.
M. Chevrette: Mme la Présidente...
La Vice-Présidente: M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci. Je suis d'abord très heureux de
constater que le député de Mont-Royal est d'accord sur le
principe de l'uniformisation des
prix, des coûts de l'électricité. Je pense qu'il
était aberrant de constater, par exemple, que les citoyens de Sherbrooke
et des environs payaient plus cher leur électricité que les
citoyens de Montréal ou d'ailleurs. Par contre, j'entre en contradiction
très facilement avec le député de Mont-Royal, parce qu'il
y a des situations qu'il faudrait peut-être lui expliquer. Il y a des
villes qui exigent la même tarification qu'Hydro-Québec de leurs
citoyens, qui, dans les faits, peuvent faire des profits avec les
réseaux d'électricité, mais qui, par contre, devront
investir à court terme des sommes extraordinaires pour pouvoir maintenir
le réseau en bonne et due forme, pour qu'il soit "up to date", comme on
dit si bien en anglais. A ce moment, la marge de profit annuelle peut
être facilement et rapidement engloutie dans de fortes sommes
d'investissements pour l'amélioration du réseau. C'est un premier
point auquel il faut penser quand on administre non pas à court terme,
mais aussi à moyen et long termes.
Il y a un autre aspect que je voudrais souligner. S'il est vrai qu'une
ville fait des profits avec le réseau électrique et qu'elle exige
plus cher que les tarifs d'Hydro-Québec, les citoyens sont
pénalisés, au dire de M. le député de Mont-Royal,
et il se plaint qu'en voulant baisser les taux de l'électricité
au niveau des taux d'Hydro-Québec, cela surtaxera les citoyens. Ces
citoyens sont déjà pénalisés et c'est cela que je
voudrais dire au député de Mont-Royal. Si déjà on
paie plus cher l'électricité, c'est une taxe
déguisée puisqu'on va chercher la marge de profit à
même l'augmentation des tarifs de l'hydroélectricité pour
maintenir un taux de taxation plus bas. Le citoyen qui verra ses taxes
augmenter, mais son électricité baisser ne paiera pas plus cher
et les revenus pour la municipalité seront les mêmes. Je suis
surpris de voir que le député de Mont-Royal ne considère
pas cela.
Il y a aussi une autre chose. Le député de Mont-Royal
parle de taux préférentiels. Là-dessus, je voudrais
attirer son attention, parce qu'il demande d'une façon
déguisée aux citoyens du Québec de payer à
même leurs taxes une certaine contribution au profit d'une ville en
particulier. Oui, Hydro-Québec baissez vos tarifs, allez emprunter sur
le marché étranger pour continuer à grossir, à vous
agrandir, mais arrangez-vous pour que cela ne coûte pas trop cher pour
telle ou telle municipalité. Et, entre-temps, ce sont les citoyens du
Québec qui assument ces taux préférentiels aux
municipalités, alors que, normalement, tous les citoyens du
Québec, si on les protège en termes de coûts, doivent aussi
être des contribuables à part égale en ce qui regarde la
tarification d'Hydro-Québec dans leurs taux eux-mêmes.
Il y a un autre aspect dont je voudrais parler. Déjà, des
cités ont accordé des taux préférentiels à
l'industrie. Ce sont des contribuables d'une municipalité,
présentement, qui font les frais des taux préférentiels
pour telle ou telle industrie. C'est très fréquent là
où il y a des réseaux indépendants
d'électricité. Je pense que le député de Mont-Royal
devrait avoir beaucoup plus que la notion d'uniformisation à part
égale en ce qui regarde toute la tarification à
Hydro-Québec.
Entre vous et moi, s'il est vrai qu'un réseau, qui était
déficitaire avant, n'a plus de force, ne représente plus aucun
"bargaining power" pour la municipalité ou la ville, lorsqu'arrivera le
temps de s'en défaire, quelque chose qui ne rapporte pas à une
municipalité, ordinairement, on ne s'y accroche pas. Cela me fait penser
un peu à la campagne référendaire. A un moment
donné, on nous disait qu'on coûtait tellement cher au Canada qu'on
se demandait pourquoi le gouvernement fédéral investissait autant
pour vouloir nous garder. C'est un peu le raisonnement que suivait le
député de Mont-Royal tantôt. Il nous disait, à
toutes fins utiles: Ecoutez, si on n'accorde pas de taux
préférentiels, ils n'auront plus de profit; donc, quelle force de
négociation auront-ils pour revendre à Hydro-Québec leur
réseau?
Un réseau qui ne vaut plus rien, qui ne présente plus
aucun intérêt, qui occasionne même des déficits
à une cité, elle doit avoir hâte de s'en
débarrasser. D'autre part et c'est là que je
reconnaîtrais la clairvoyance des administrateurs publics si vous
avez un réseau qui rapporte présentement énormément
d'argent ou, en tout cas, passablement d'argent et que vous voyez venir des
investissements à moyen terme, dans quatre ou cinq ans, $1 000 000
d'investissement, par exemple, il est peut-être temps de profiter du
moment précis où le réseau présente encore une
rentabilité pour négocier son transfert, ce qui forcerait
Hydro-Québec, avec ses spécialistes, à assumer ces
réflections qui s'imposent à moyen terme.
Je pense qu'on fait beaucoup de fla-fla avec cette histoire. Dans le
fond, on sait pertinemment que l'ensemble des cités qui ont
présentement des réseaux d'électricité auront des
difficultés à moyen terme à cause des immenses
réparations qu'elles doivent faire à ces réseaux, d'autant
plus que ce sont les employés de ces réseaux indépendants
qui font partie du corps des employés municipaux. Il faudrait
peut-être aller fouiller pour voir jusqu'à quel point tous ces
employés sont comptabilisés explicitement pour le réseau
électrique ou s'il y a des portions de temps consacrées pour du
travail municipal ou du travail spécifiquement sur le réseau et
voir le départage. Pour certains réseaux à partir desquels
on fait miroiter des profits, si on comptabilisait exactement ce que ça
représente, on serait peut-être heureux de pouvoir se faire servir
par une société d'Etat spécifiquement
préparée et qui pourrait peut-être donner un service encore
plus adéquat que celui qu'ont les citoyens. Quand on se soucie du
contribuable, on ne se soucie pas uniquement du contribuable d'une cité
ou d'une ville on se soucie du contribuable québécois en
général et on ne propose pas en amendement de faire porter sur
l'ensemble des Québécois la petite marge de profit qui pourrait
servir à une municipalité quelconque; c'est du véritable
patronage. On reconnaît ceux qui l'ont vécu.
La Vice-Présidente: M. le député de
Saint-François.
M. Réal Rancourt
M. Rancourt: Quelques minutes tout simplement pour vous apprendre
que je suis un député qui représente les citoyens d'une
ville qui possède son réseau, qui a une tarification
spéciale, et d'autres citoyens, comme dans ma municipalité
propre, où, personnellement, je reçois l'énergie
d'Hydro-Québec. Mon cinquième voisin reçoit celle
d'Hy-dro-Sherbrooke dans ce cas particulier et nous avons deux tarifications
différentes. Je pense qu'ici il y aurait des municipalités dans
ma région qui se retrouveraient dans le comté d'Orford; le
député n'est pas là pour les représenter, ni celui
du comté de Johnson pour une autre raison, bien sûr. Ce sont
justement des citoyens de municipalités qui reçoivent de
l'énergie d'un réseau qui appartient à la ville de
Sherbrooke et aux citoyens de la ville de Sherbrooke et ils ont une
tarification différente. Le projet de loi d'aujourd'hui est un projet
d'uniformisation. Là-dessus, je pense que tout le monde est d'accord
pour en arriver à cette uniformisation.
Je vous ai décrit une situation. Je demanderais au ministre et
à Hydro-Québec que, dans les mois qui viennent on termine la
négociation qui est déjà en cours pour établir la
valeur réelle des réseaux qui appartiennent aux
municipalités et que cette valeur réelle soit offerte aux
municipalités pour s'en départir de gré à
gré. Je pense qu'il y a un moyen de s'entendre là-dessus. Mais,
au départ, je pense que le projet de loi est carrément pour
l'uniformisation du tarif pour tous les citoyens du Québec et,
là-dessus, j'acquiesce et j'appuierai ce projet de loi. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Energie et des
Ressources.
M. Bérubé: Tout a été dit, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: J'allais vous demander si vous teniez
à utiliser votre droit de réplique. Alors, cette motion du
ministre de l'Energie et des Ressources proposant que soit maintenant lu la
deuxième fois le projet de loi no 87, Loi modifiant la Loi sur la
municipalisation de l'électricité et la Loi de
l'électrification rurale, sera-t-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire adjoint du
gouvernement.
M. Bertrand: Mme la Présidente, je vous demanderais
maintenant, s'il vous plaît, de quitter votre fauteuil pour que nous
puissions nous transformer en commission plénière et
étudier les deux projets de loi nos 86 et 87.
Commission plénière Projet de loi no
86
La Vice-Présidente: La motion est-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Cette Assemblée s'est
formée en commission plénière pour étudier article
par article le projet de loi no 86, Loi sur le fonds forestier. L'article 1
sera-t-il adopté?
Une Voix: Adopté, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. Article 2,
adopté? Non?
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: A l'article 2, il y a deux sources de fonds. Une des
sources, ce sont les montants que perçoit le ministre de l'Energie et
des Ressources conformément à l'article 6; ce sont des sommes qui
sont perçues directement des bénéficiaires. L'autre
source, ce sont les montants que le ministre des Finances verse à
même les sommes votées annuellement à cette fin par la
Législature.
Durant sa réplique, le ministre m'a accusé de vouloir que
les montants soient payés par les contribuables; ce n'est pas moi. Le
principe que tous les contribuables du Québec puissent contribuer au
fonds forestier, c'est un principe qui a été inséré
dans le projet de loi par le ministre, non par moi.
La seule question que je lui ai posée, c'est que ces deux sources
de fonds: premièrement, vous les établissez à un maximum
de $1 le mètre cube et, deuxièmement, vous ne mettez aucune
indication de contribution de la part du gouvernement. Le premier point que je
veux faire, c'est pour rectifier les accusations que vous avez portées
à mon égard en ce qui concerne le fait que je veux que ce soient
les contribuables. C'est votre projet de loi et le principe c'est vous qui
l'avez inséré dans l'article 2. Deuxièmement, vous ne
mettez aucune indication en ce qui concerne votre contribution. Le projet de
loi devant nous a été, je le présume, rédigé
et rédigé de nouveau. Originalement, aviez-vous inclus ce
deuxième aspect ou bien ce deuxième aspect est-il venu à
la suite de négociations avec le milieu concerné? C'est ma
première question.
Ma deuxième question est la suivante: Mon collègue, le
député de Montmagny-L'Islet, vous a demandé quel serait le
montant perçu à la suite du projet de loi. Vous nous avez
donné un pourcentage, trois quarts de un pour cent. Pourriez-vous nous
donner un chiffre global en dollars de ce que représentait la perception
de cette taxe ou de ce montant?
M. Bérubé: Premièrement, l'article 2
n'interdit pas à la Législature de voter des sommes à
être
versées au fonds forestier. Il s'agit donc pour nous de dire que
la Législature peut contribuer à ce fonds si elle le juge bon et
je n'ai pas pensé qu'on devrait, dans un projet de loi, interdire
à l'Assemblée nationale d'y verser des fonds. Mais la question
qui a été posée, c'est: Est-ce qu'on ne devrait pas
prévoir quelle quantité d'argent la Législature devrait
mettre là-dedans? Je réponds: Non, la Législature
décidera de ce qu'elle veut mettre; ce n'est pas à moi de fixer
dans une loi combien la Législature va devoir mettre l'année
prochaine. J'aurais pu mettre dans la loi que l'année prochaine la
Législature va être obligée de verser $10 000 000 dans le
fonds, mais, finalement, c'est demander à l'Assemblée nationale
de forcer l'Assemblée nationale à prendre des décisions.
L'Assemblée nationale, si vous le voulez bien, les prendra chaque
année. Pour cette raison, on n'a donc pas prévu quelle est la
contribution gouvernementale.
Si vous me posez la question: Quelle sera la contribution
gouvernementale au cours des cinq prochaines années ou, du moins, les
trois années qui restent, je vous dirai: 100%, c'est-à-dire que,
l'ensemble des travaux d'aménagement des forêts publiques est
financé entièrement par le gouvernement dans le cadre d'un
programme quinquennal d'assistance à l'industrie forestière. Dans
cinq ans ou dans trois ans, je ne suis pas capable de le savoir. Posons
l'hypothèse que le Parti libéral sera au pouvoir et qu'il
estimera que ce ne doit pas être les compagnies qui paient pour
l'aménagement de la forêt, mais que ce sera le gouvernement et
qu'il décide à ce moment-là de percevoir des impôts
je ne dirai pas des petits salariés. Comme vous voulez baisser les
impôts des gros salariés, je suppose que ce seront d'autres
salariés qui devront payer cela. Ce ne seront pas ceux qui gagnent cher
et on ne veut pas dire qui ce sera. Alors, je suppose que vous allez percevoir
des impôts quelque part. Ces impôts, vous allez vous en servir,
à ce moment-là, pour financer le fonds forestier. La loi
permettrait au gouvernement, dans trois, quatre, cinq ou dix ans,
peut-être dans 30 ans, au moment où le Parti libéral sera
élu, et dans 175 ans, au moment où l'Union Nationale sera
élue, de décider de percevoir des impôts et de les verser
entièrement dans le fonds forestier. En d'autres termes, je ne
l'interdis pas au gouvernement, mais je pose comme principe que, quelle que
soit la décision que prendra le gouvernement, l'industrie devra combler
la différence.
M. Giasson: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Ce que mon collègue de Mont-Royal recherche,
c'est un certain ordre de grandeur quant aux sommes que le gouvernement a
l'intention d'accumuler dans le fonds forestier. Le ministre a peut-être
répondu à des questions que j'ai posées, dans sa
réplique de deuxième lecture, mais j'étais occupé
à mon bureau; j'avais des visi- teurs. Quel est le volume moyen de
cunits par année qui sont autorisés?
M. Bérubé: Disons qu'il a deux ans, c'était
de l'ordre de 7,5; l'année dernière, c'était de l'ordre de
8,4.
M. Giasson: 8 400 000 cunits.
M. Bérubé: 8 400 000 cunits. Mettez, pour arrondir,
2,5 mètres cubes au cunit, ce qui veut dire, à ce
moment-là, en gros, que cela rapporterait à peu près $25
000 000 si on exigeait le maximum de $1.
M. Giasson: Oui, mais un cunit n'est-il pas 100 mètres
cubes?
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: Bon! Cela veut dire que, quand vous exigez un maximum
de $1 par mètre cube, un cunit vous donne le droit de percevoir...
M. Bérubé: Non. 100 pieds cubes, excusez-moi. On
vient tout mêlé avec les unités anglaises,
françaises. Vous savez à quel point, d'ailleurs, c'est
très mauvais de vouloir maintenir des sytèmes comme
celui-là. Si on est dans le système métrique, il faut
prendre, si je ne m'abuse, 2,5 mètres cubes au cunit, ce qui est 100
pieds cubes.
M. Giasson: 2 mètres cubes au cunit, 2,5 mètres
cubes.
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: En tout cas, laissons faire les calculs
d'équilibre dans ce secteur-là. En définitive, quel est,
grosso modo, le montant que vous prévoyez percevoir, compte tenu du
volume, annuellement?
M. Bérubé: $25 000 000 à peu près.
M. Giasson: $25 000 000 par année. M. Bérubé:
Oui.
M. Giasson: Ces $25 000 000, quand entendez-vous commencer
à les percevoir, à compter de quelle année?
M. Bérubé: Certainement pas avant deux ans. M
Giasson: 1982.
M. Bérubé: Et la troisième année,
l'opération consisterait simplement à commencer à
percevoir pour que l'industrie s'habitue et à bâtir surtout un
fonds de roulement. Il est bien évident que l'on aura des travaux
à faire et que les sommes seront nécessaires. Donc, il sera
essentiel d'accumuler, au sein de ce fonds, un certain fonds de roulement qui
va permettre de fonctionner d'année en année
sans avoir à emprunter ou sans avoir à se financer
autrement. En d'autres termes, il devrait y avoir d'accumulé dans ce
fonds, au moment de son entrée en vigueur, l'équivalent de $25
000 000. (17 h 50)
M. Giasson: $25 000 000 à l'entrée en vigueur.
Présentement, le ministère mène des travaux de reboisement
dans la forêt publique. Dans toutes les sommes investies en
matière de reboisement, est-ce que le ministre pourrait nous donner les
chiffres qui se rapportent au reboisement dans la forêt publique?
Oublions tout le secteur de la forêt privée.
M. Bérubé: De mémoire, non, malheureusement.
Je peux vous dire qu'en régime de croisière, c'est ce que nous
allons dépenser, un montant de l'ordre de $25 000 000. Mais,
présentement, il se produit que nous sommes à bâtir la
capacité de production de nos pépinières, ce qui fait que
la majeure partie de notre budget ne va pas présentement au reboisement,
mais plutôt à la préparation de l'équipement et du
matériel nécessaires pour l'exploitation de nos
pépinières. Donc, j'aurais beaucoup de difficulté à
vous dire présentement le montant exact qui va en reboisement dans les
forêts publiques, mais je pourrais certainement vous obtenir cela sans
difficulté.
M. Giasson: M. le ministre, vous nous avez indiqué, dans
des commentaires, en discours de deuxième lecture, que les
prévisions du ministère seraient de faire du reboisement sur
environ 25% des aires de coupe utilisées annuellement. 25% des aires de
coupe sur la projection d'utilisation de la forêt publique, de
récupération de matière ligneuse dans la forêt
publique, ça représente combien de milles carrés ou
d'hectares?
M. Bérubé: Malheureusement, j'ai oublié mon
calculateur; c'est pour ça que je suis un peu moins rapide, il faut que
je le calcule à la main! Vous permettez?
J'ai une réponse qui n'a pas de bon sens; 10 000 acres, ça
n'a pas de bon sens. J'ai dû faire une erreur quelque part. Alors,
écoutez c'est relativement facile, je vais vous donner les
données: 100 000 000 de plants, 1000 plants à l'acre; calculez le
nombre d'acres! Le premier qui trouve la réponse lève la
main!
M. Giasson: Vous prévoyez produire 100 000 000 de plants
qui seront utilisés uniquement, exclusivement dans la forêt
publique et non pas au-delà de la production qui est prévue pour
les forêts privées?
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: Mais ces 100 000 000 de plants, vous allez être
en mesure d'en disposer en 1984, 1985?
M. Bérubé: Oui, en 1983, si je ne m'abuse,
1983,1984.
M. Giasson: 100 000 000 de plants pour la forêt publique en
1983?
M. Bérubé: Non, ce que j'ai expliqué, c'est
qu'il y a 75 000 000 de plants, comme tels, et les autres par
ensemencement.
M. Giasson: 25 000 000 de plants par ensemencement?
M. Bérubé: Oui.
Une Voix: Cela donne 100 000 acres.
M. Bérubé: 100 000 acres? Je me trompais d'un
zéro.
M. Giasson: 100 000 acres, ce qui serait le quart de la
superficie totale coupée chaque année dans le secteur public,
soit 400 000 acres?
M. Bérubé: C'est ça.
Le Président (M. Boucher): L'article 2 est-il
adopté?
M. Ciaccia: Dans les 25 000 000 que vous avez donnés comme
chiffre global, avez-vous une idée de la somme que. le gouvernement
pourrait fournir?
M. Bérubé: Pour les prochaines années, 100%.
Dans le cadre du plan quinquennal, nous défrayons toutes les
dépenses encourues pour l'aménagement forestier, ce qui veut dire
que l'industrie n'aura rien à payer pendant au moins encore trois
ans.
M. Giasson: Mais lorsque vous prévoyez accumuler dans
votre fonds forestier un montant de $25 000 000 vous avez signalé
cela tout à l'heure il s'agit uniquement de la participation de
l'industrie elle-même ou s'il y a une part gouvernementale?
M. Bérubé: Je suppose, dans ce cas, que le
gouvernement a mis un terme à son engagement dans le domaine de
l'aménagement forestier et que tout est payé par l'industrie.
C'est le maximum que paierait l'industrie.
M. Giasson: Ce serait la contribution de l'industrie seule.
M. Bérubé: C'est cela, ce qui n'est pas
considérable. Trois quarts de un pour cent du prix de vente des produits
forestiers actuellement au Québec, c'est relativement peu.
Le Président (M. Boucher): Article 2, adopté?
Article 3? Adopté. Article 4? Adopté.
Une Voix: Un instant.
M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je présume que les sommes qui seront
versées dans le fonds forestier seront utilisées exclusivement
pour les fins décrites dans ce projet de loi. Alors, ne faudrait-il pas
ajouter le mot "exclusivement" dans l'article 4?
M. Bérubé: J'hésiterais à ajouter un
mot sans d'abord consulter le comité de législation. En effet,
l'accumulation de mots inutiles cause souvent beaucoup de problèmes dans
la rédaction des lois et il y a avantage généralement
à s'en tenir au texte tel que rédigé. Or, si la loi dit
que le fonds forestier et les revenus qu'il produit sont affectés au
financement de travaux en vue de maintenir, d'améliorer la production de
matière ligneuse des terres publiques à vocation
forestière, cela veut dire qu'il faut que cela serve à cela.
M. Ciaccia: Exclusivement.
M. Bérubé: A cause des implications légales
du mot exclusivement comme vous le savez, je ne suis pas un
spécialiste en droit je ne voudrais pas causer plus de
problèmes que les juges n'en ont déjà.
M. Ciaccia: II est malheureux que vous n'ayez pas demandé
à votre légiste d'être présent en commission
plénière. Ce n'est pas un mot inutile. Cela décrit s'il va
être utilisé exclusivement pour cela ou bien utilisé pour
d'autres fins.
M. Bérubé: Bien non. Les fins pour lesquelles les
fonds peuvent servir sont indiquées à l'article 4. C'est assez
clair qu'à ce moment-là, quand le législateur a
indiqué à quelles fins des sommes peuvent servir, l'intention du
législateur était donc d'exclure d'autres fins. C'est pour cette
raison que je ne vois pas d'avantages à mettre le mot "exclusivement".
Et, comme je ne sais pas quelles pourraient être les implications
d'inclure le mot "exclusivement", je préférerais ne pas le
mettre.
M. Giasson: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: ... lorsque dans ses propos tenus cet
après-midi le ministre de l'Energie nous a dit qu'uniquement dans la
région de la Gaspésie, particulièrement dans le
comté de Bonaventure, l'application de cette politique d'un fonds
forestier aurait des conséquences énormes en matière de
création d'emplois il a même parlé de la
création de 1500 emplois est-ce que le ministre n'a pas
été un peu optimiste?
M. Bérubé: Très peu optimiste, au contraire.
Déjà, vous avez deux usines qui seraient fermées,
n'était-ce d'une décision gouvernementale qui a été
prise de fournir les approvisionnements en question. L'usine de
Pointe-à-la-Croix ne serait pas présentement en
réorganisation, de même que l'usine de New-Richmond,
n'était-ce de la volonté gouvernementale de tabler sur des
sources de matière ligneuse qui, elles, reposent essentiellement sur
l'existence de volumes de bois.
M. Giasson: Mais l'usine de New-Richmond a créé
combien d'emplois de plus que ceux que nous avions au moment où
l'ancienne compagnie était sur place?
M. Bérubé: Je pense que vous devez surtout regarder
les emplois que vous n'auriez pas.
M. Giasson: Non, mais combien de plus? Après cela, on fera
l'autre examen.
M. Bérubé: Le calcul a été fait
à partir essentiellement de l'augmentation des garanties
d'approvisionnement et du nombre de travailleurs que cela impliquait soit au
transport, soit pour la coupe en forêt généralement; ou
encore s'il faut un deuxième poste dans une usine, faire fonctionner
l'usine sur deux postes et deux factions plutôt qu'une, et donc nous
avons calculé l'augmentation du nombre d'employés. Il nous fera
plaisir de vous donner le modèle interindustriel du ministère de
l'Industrie et du Commerce qui a permis d'en arriver à ces chiffres.
M. Giasson: Quelle est l'augmentation des volumes que vous avez
garantis à l'usine de Pointe-à-la-Croix?
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet, il est 18 heures, nous devons suspendre. (18 heures)
M. Bertrand: Si les parlementaires étaient d'accord, nous
serions prêts à poursuivre un peu au-delà de six heures,
pas trop tout de même, parce qu'il y a déjà un caucus des
députés du Parti québécois qui est prévu
pour six heures. Mais, si on dépassait de quelques minutes, nous
n'aurions pas d'objection à terminer. On est sur la lancée et je
pense que ce serait peut-être préférable.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a consentement
pour cinq ou dix minutes?
Il y a consentement. M. le député de Montmagny-L'Islet,
vous aviez la parole.
M. Giasson: J'étais à demander au ministre quel est
le volume additionnel d'approvisionnement qui a été garanti ou
donné à l'usine de Pointe... J'ai oublié le nom.
M. Bérubé: Pointe-à-la-Croix. M. Giasson:
Pointe-à-la-Croix.
M. Bérubé: Vous savez, dans le comté de
Bonaventure, on parle de "Cross Point ".
M. Giasson: "Cross Point"? Tout de même, cette usine avait
un volume...
M. Levesque (Bonaventure): Je ferai simplement une petite
précision. Lorsque le ministre parle de New-Richmond, est-ce qu'il se
réfère à la fermeture de la scierie de New-Richmond?
M. Bérubé: Oui.
M. Levesque (Bonaventure): Lorsqu'il parle du remplacement de
cette exploitation par une autre, il parle de l'usine de quel endroit?
M. Bérubé: De Saint-Alphonse, qu'il connaît
bien d'ailleurs.
M. Levesque (Bonaventure): Bon. Oui. Je pense que le ministre
avait fait une petite erreur en parlant de la nouvelle usine de
New-Richmond.
M. Bérubé: Oui, enfin, comme les deux
municipalités ne sont distantes que de quelques kilomètres.
M. Levesque (Bonaventure): D'accord. M. Bérubé:
Adopté.
M. Levesque (Bonaventure): Tout de même, il faudrait, je
pense, par respect pour la vérité malgré que je ne
veux pas, à ce moment-ci, sous-estimer la valeur des gestes posés
bien se rendre compte que, lorsqu'on compare l'emploi, en 1975-1976,
disons, avec l'emploi en 1979-1980 il faudrait tenir compte des
opérations à "Cross Point", à New-Richmond et à
Saint-Alphonse, tenir compte également des emplois qui ont
été dramatiquement diminués dans l'exploitation
forestière elle-même. Je pense que le ministre aurait avantage
à réviser ses chiffres.
M. Bérubé: Je pense que le député de
Bonaventure oublie de tenir compte d'une chose. Lorsqu'il s'agit d'une
projection de création d'emplois, je n'ai pas affirmé qu'ils
seront créés demain. Par exemple, il ne fait aucun doute,
après les études qui sont maintenant terminées concernant
un projet d'implantation papetière en Gaspésie, qu'advenant la
réalisation de ce projet, ce qui me paraît assez certain, il y
aura là création d'emplois. En d'autres termes, actuellement, la
difficulté que nous rencontrons en Gaspésie, c'est un
problème de restructuration de l'industrie. D'une part, l'industrie
papetière n'est pas en mesure d'accepter tous les copeaux produits; il y
a trop de copeaux produits dans toute la Gaspésie pour les besoins de
cette industrie. C'est le premier problème.
Deuxième problème, l'industrie du sciage n'est pas encore
en mesure, parce que souvent elle a vécu pendant des années dans
des conditions assez misérables d'approvisionnement, souvent,
financièrement, même de s'équiper actuellement pour
recevoir les garanties d'approvision- nement que le ministère lui
accorde. Il faudrait donc tabler sur quelques années avant que, d'une
part, les scieries puissent se transformer pour accepter leur approvisionnement
et qu'on ait également augmenté la capacité de l'industrie
papetière sur le territoire, de manière que cette industrie
puisse utiliser 100% de la matière ligneuse sous forme de copeaux. Donc,
c'est lorsque l'ensemble de ces projets aura été
réalisé que l'on estime à 1500 emplois le nombre d'emplois
créés à la suite de l'application d'une telle
politique.
M. Giasson: Quand vous parlez de 1500 emplois nouveaux,
additionnels, vous avez raison de ne pas risquer de chiffres trop
hâtifs.
M. Bérubé: Vous savez très bien que je n'ai
pas l'habitude, contrairement aux gouvernements qui nous ont
précédés, de parler à travers mon chapeau.
M. Levesque (Bonaventure): Cela allait bien!
Le Président (M. Boucher): Alors, article 4,
adopté?
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Article 5, adopté.
Article 6, adopté. Article 7?
M. Ciaccia: Une minute sur l'article 6. Le Président
(M. Boucher): Article 6.
M. Giasson: A l'article 6, la première partie, cela va
bien. Il y a un maximum de prévu antérieurement dans le projet de
loi. Mais quant à la deuxième, quel est l'ordre de grandeur des
charges additionnelles, des montants supplémentaires que le ministre
pourrait appliquer à des utilisateurs qui tiennent à aller se
procurer la ressource dans des secteurs de coupe donnés qui
justifieraient une augmentation?
M. Bérubé: Totalement imprévisible. En
effet, l'augmentation de la possibilité forestière par dollar
investi en aménagement est très variable. Les premiers travaux
d'aménagement nous permettent d'augmenter beaucoup la quantité de
bois disponible, mais les derniers travaux ont un rendement de plus en plus
faible. Ce qui veut dire que, si vous êtes dans une région
où on coupe la possibilité ou légèrement au-dessus,
il en coûtera relativement peu pour forcer le rendement de la
forêt. Si, par contre, vous êtes déjà dans un
territoire, prenons par exemple le Nord-Ouest québécois,
où déjà on coupe plus que la possibilité et
beaucoup plus que la possibilité, il faut des investissements
considérables si on veut essayer de pousser la forêt et même
il y a des fois où c'est totalement impossible; l'investissement serait
infini. Ce qui veut donc dire que cela ne peut pas se décider autrement
que dans le cadre d'une garantie d'approvisionnement négociée
entre l'entreprise, c'est-à-
dire que l'entreprise peut faire une demande au ministère de 25
000 cunits d'approvisionnement supplémentaires. Le ministère doit
répondre, si la possibilité naturelle ne permet pas de les
fournir, non à cette demande de l'industriel.
Mais le présent article de loi permettrait à ce
moment-là au ministre de dire: Si, cependant, vous êtres
prêts à vous engager dans cinq cents acres de plantation par
année, si vous êtes prêts à défrayer ces
plantations, à ce moment-là, nous sommes capables de
dégager tant de cunits supplémentaires que nous sommes
prêts à vous allouer dans votre garantie d'approvisionnement. Si
l'industriel est prêt à signer un contrat sur cette base, à
ce moment-là, il n'y a aucun problème; tant et aussi longtemps
qu'il verse l'argent au ministère et que les travaux se font, il a sa
garantie d'approvisionnement. Je ne peux pas vous dire à l'avance... En
Suède, il peut en coûter autour de $15 le cunit pour des
forêts aménagées de façon intensive. Cela pourrait
donc aller jusqu'à $15 ou $20 le cunit, mais je pense que, si on
dépasse $15 le cunit, il y a peu d'industriels qui vont manifester de
l'intérêt. Mais il y a des cas où des industriels
pourraient dire: A $15 le cunit, je suis acheteur.
M. Giasson: Oui, selon les conditions du marché dans des
époques diverses.
M. Bérubé: C'est cela, exactement. C'est pour cette
raison que je ne peux pas vous répondre: Cela va être inclus dans
la garantie d'approvisionnement ou nous aurons une clause d'aménagement
intensif justifiant l'accroissement de l'approvisionnement.
M. Giasson: A l'autre paragraphe, M. le Président: "Le
présent article ne s'applique pas aux bénéficiaires de
permis de coupe de bois à des fins domestiques." Est-ce que par "des
fins domestiques", il faut comprendre qu'il s'agit de coupes qui sont
accordées à des agriculteurs lorsqu'ils vont chercher du bois
pour des fins de construction domiciliaire ou des besoins de bâtiments de
ferme?
M. Bérubé: Oui, agriculteurs, pêcheurs et
bois de chauffage.
M. Giasson: Cela est inclus. Très bien.
Le Président (M. Boucher): Article 6, adopté.
Article 7, adopté.
M. Giasson: Quant au paiement des redevances qui vont être
exigées, j'imagine que la note, la facture va être exigible au
moment où l'utilisateur paie ses droits de coupe ou si vous
prévoyez faire la perception de ces entrées à une
période autre que celle où vous prélevez des droits de
coupe?
M. Bérubé: Cela pourrait être réparti
en quelques paiements au cours de l'année et, effectivement, la clause
réglementaire ici prévue par législation
déléguée nous permettrait d'ajuster cela en fonction des
circonstances. Cela pourrait, comme vous le dites très bien, être
perçu au moment des droits de coupe.
Le Président (M. Boucher): L'article 7 est adopté.
Article 8 adopté. Article 9 adopté. Le projet de loi no 86 est
adopté sans amendement. Etes-vous d'accord pour qu'on passe au projet de
loi no 87? Y a-t-il consentement de prolonger pour étudier le projet de
loi no 87?
M. Charron: On peut rester en commission plénière
aussi, M. le Président, et arrêter ici pour aujourd'hui, mais je
voudrais qu'on demeure en commission plénière. Ce sera plus
facile à rappeler pour l'autre projet de loi.
Le Président (M. Boucher): La commission
plénière suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
M. Charron: Demain, après le discours du budget. Il faut
faire rapport. (18 h 10)
M. Levesque (Bonaventure): Du moment qu'il fait rapport.
M. Charron: II faut qu'on demeure en commission
plénière.
M. Levesque (Bonaventure): II faudra faire motion pareil pour
retourner en commission plénière.
M. Charron: Cinq minutes. Il y a quatre articles.
M. Bérubé: "La loi entre en vigueur à
..."
Le Président (M. Boucher): M. le Président, j'ai
l'honneur de faire rapport que la commission plénière a
siégé pour faire l'étude article par article du projet de
loi no 86, Loi sur le fonds forestier, et l'a adopté sans amendement. La
commission n'ayant pas terminé ses travaux demande la permission de
siéger à nouveau.
Une Voix: Les deux projets de loi en même temps.
Le Président: Est-ce que l'étude du projet de loi
est terminée?
M. Charron: Le premier projet de loi. Il faudra retourner pour
l'autre.
M. Bertrand: Le projet de loi no 86 est terminé.
Le Président: Le rapport pour le premier projet de loi
sera-t-il adopté?
Des Voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Quand la commission
siégera-t-elle...
M. Charron: Demain, M. le Président.
Le Président: ... pour le second projet de loi? M.
Charron: Demain.
Une Voix: Prochaine séance ou séance
subséquente.
Le Président: Prochaine séance ou séance
subséquente. L'Assemblée ajourne ses travaux à demain
matin, 10 heures.
Fin de la séance à 18 h 12