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Version finale

31st Legislature, 3rd Session
(February 21, 1978 au February 20, 1979)

Tuesday, February 13, 1979 - Vol. 20 N° 102

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures onze minutes)

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes. Déclarations ministérielles. Dépôt de documents. Dépôt de rapports de commissions élues. Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période des questions orales. M. le chef de l'Opposition officielle.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce que le leader parlementaire du gouvernement pourrait nous indiquer la raison pour laquelle il manque au moins quinze ministres présentement?

M. Charron: Avec plaisir, M. le Président. Tout le monde sait que la visite officielle du premier ministre de France se poursuit aujourd'hui pour la dernière journée à Montréal. La Chambre de commerce de Montréal avait organisé un déjeuner où M. Barre était le conférencier invité et où tous les ministres de ministères à vocation économique avaient également été convoqués auprès du premier ministre. C'est ce qui explique l'absence du ministre des Finances, du ministre de l'Industrie et du Commerce, du ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières. Le ministre des Terres et Forêts accompagnait M. Barre, ce matin, à la visite de l'IREQ à Varennes et le ministre d'Etat au développement économique, le ministre de l'aménagement, le ministre de l'Agriculture, tous les ministres qui sont membres du comité permanent du développement économique...

Une Voix: Le ministre de la Justice?

M. Charron: Je dois vous dire que mon collègue de la Justice ne m'a pas indiqué que c'était pour la même raison qu'il s'absentait, mais tous les autres m'ont fait parvenir leur avis. C'est parfaitement compréhensible, je crois, dans les circonstances.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Présient. J'aurais presque envie de...

M. Charron: Est-ce que c'était la première question de l'Opposition officielle?

M. Pagé: Non.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Si vous interprétez cela comme étant la première question, on pourrait peut-être présenter une motion pour reporter la période des questions à 20 heures; les ministres seraient là.

M. Charron: On n'en est pas encore aux motions non annoncées.

M. Pagé: Mais, encore là, M. le Président, probablement qu'ils auraient trop fêté.

M. le Président, j'ai une question qui s'adresse au ministre du Travail.

Une Voix: C'était hier.

M. Pagé: C'était hier que vous avez trop fêté? Vous êtes fatigués ce matin?

Le Président: M. le député de Portneuf, s'il vous plaît.

Conflit de travail à Murdochville

M. Pagé: Oui, je reviens à ma question, M. le Président, mais vous comprenez qu'on m'invite, de l'autre côté. M. le Président, la semaine dernière, je demandais à cette Chambre et je vous demandais d'accepter un débat d'urgence entre autres sur le conflit qui affecte des milliers de travailleurs à Murdochville dans le dossier de la Gaspé Copper Mines. Vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, que cette entreprise est en grève depuis le 17 octobre dernier, que cela a beaucoup d'implication dans l'économie réginale là-bas. Vous n'êtes pas sans savoir non plus, M. le Président, que c'est près de $8 millions de revenus ordinairement payés en salaires ou en traitements qui n'ont pas été effectivement payés. Vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, que plusieurs commerces sont gravement affectés, qu'une trentaine ou une quarantaine de familles ont déjà quitté cette région du Québec pour aller s'implanter ailleurs, ce qui affecte dangereusement non seulement la ville de Murdochville, mais toute la région, tout le Bas-du-Fleuve et toute la Gaspésie dans une très large mesure.

M. Charron: M. le Président.

M. Pagé: M. le Président, ma première question sera au ministre du Travail. Je conviens qu'il y a eu des périodes de conciliation, que les conciliateurs sont au dossier, jusqu'à une certaine mesure qu'on peut douter du succès de la conciliation jusqu'à maintenant. J'aimerais que le ministre du Travail nous dise ce que lui, en tant que ministre du Travail, membre du gouvernement du Parti québécois, il a fait dans le dossier et quelles sont les démarches et les efforts qu'il a déployés jusqu'à maintenant pour en venir à un règlement

dans ce dossier qui a non seulement duré, mais qui a perduré, M. le Président, et qui affecte toute cette région de la Gaspésie.

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, je m'attendais un peu à cette question du député libéral, étant donné qu'une série d'articles dans les journaux, puisque c'est en général sa première source d'inspiration, ont fait état de ce conflit qui perdure effectivement à Murdochville. Je reconnais avec lui — et il n'y a rien de très original là-dedans — que cette grève en ce moment...

M. Pagé: Je soulève une question de privilège, à ce moment-ci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, le ministre du Travail m'impute actuellement des motifs en voulant laisser croire que ma référence à ma question était dans les journaux. Je me limiterai à vous dire, dans ma question de privilège, que j'aurais pu poser plusieurs questions sur la grève de la CTCUQ ici à Québec...

Une Voix: Ce n'est pas une question de privilège, cela.

Le Président: M. le député de Portneuf, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, il ne s'agit pas d'imputer des intentions, je faisais remarquer que la question du député de Portneuf n'était pas très originale. M. le Président, effectivement...

M. Pagé: ... cela va bien.

M. Gratton: On va voir si cela va susciter une réponse originale.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson: Dans le cas de la mine Gaspé, ce gouvernement prend peut-être plus au sérieux ce conflit de travail que le député de Portneuf ne se l'imagine, d'autant plus qu'au mois de décembre, lors d'une séance d'ironie — puisque c'est le sport auquel il s'adonne, en général, en commission parlementaire — je lui avais peut-être offert d'être nommé médiateur dans le conflit. Je l'inviterais peut-être à le faire immédiatement s'il pense qu'il peut apporter une contribution solide.

M. Pagé: La démission du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, il y a eu effectivement une demi-douzaine de séances de conciliation; la dernière étape d'interventions du minis- tère a été de nommer un second conciliateur au dossier, M. Des Trois Maisons, qui assiste M. Courchesne, pour s'assurer de la plus grande disponibilité des parties. A 13 h 45 cet après-midi, M. Raymond Desilets, chef du service de conciliation, me confirmait que M. Courchesne a tenté sans succès d'obtenir que la partie patronale bouge de ses positions et, jusqu'à maintenant, il semble que la partie patronale ne veuille pas bouger sur ses positions. On sait que le problème central pour les travailleurs de Murdochville, c'est celui de l'existence d'une différence de $1.44 entre ce qui est payé à Murdochville par la Noranda et ailleurs dans d'autres usines de Noranda. Le ministère demeure toujours à la disposition des parties, mais il n'est pas vrai que ce ministère se substituera aux parties, qui ont comme devoir de librement, et de façon diligente, négocier avec bonne foi.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Le ministre du Travail du gouvernement du Parti québécois vient de reconnaître son échec, M. le Président, en offrant à l'Opposition d'y aller comme médiateur. Ne soyez pas inquiets, avant longtemps, on aura cette responsabilité.

Le Président: M. le député de Portneuf, s'il vous plaît, je vous demande de ne pas abuser.

M. Gratton: Demandez cela à ceux qui sont de l'autre côté.

M. Pagé: M. le Président, le ministre du Travail m'a offert d'être médiateur, je me limite à lui dire qu'avant longtemps on aura cette responsabilité parce que vous serez battus aux prochaines élections.

M. le Président, c'est évident que j'aurais pu parler d'autres conflits, pour reprendre ce que le ministre m'a répondu suite à ma question; j'aurais pu parler de la CTCUQ, on aurait pu parler de la Donohue et de tout cela. On en est aujourd'hui à la question de Murdochville. Je vous ai demandé ce que vous aviez fait personnellement; le ministre du Travail s'est limité à faire état des services de conciliation.

Des Voix: A l'ordre! A l'ordre!

M. Pagé: Ma question additionnelle est la suivante: Comment le ministre peut-il expliquer qu'il ne serait pas justifié d'intervenir personnellement dans le conflit alors qu'au mois de septembre ou octobre dernier il intervenait personnellement dans le conflit à la Commonwealth Plywood? C'était un conflit qui avait des répercussions importantes, il s'agissait de 150 travailleurs. (14 h 20)

Quant à moi, bien humblement, je vous souligne, M. le Président, que cela n'affectait pas

autant une région que cela peut être le cas actuellement dans le dossier de Murdochville. A ce moment, M. le Président, le ministre est intervenu personnellement. C'est aujourd'hui une suggestion que je lui formule et je le fais sous forme de question. Pourquoi n'intervenez-vous pas vous-même personnellement comme vous l'avez fait, soit comme ministre ou encore par le biais d'une commission parlementaire?

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: Parce que ce type d'attitude, M. le Président, a démontré que cela relevait de la pure fantaisie et qu'en général, cela ne fait pas avancer les choses. Il peut y avoir des exceptions dans l'exercice du métier qu'on fait comme ministre et je pense que le député de Portneuf aurait peut-être avantage à consulter certains des anciens collègues ou certains de ses collègues actuels...

M. Pagé: Ne soyez pas inquiet là-dessus.

M. Johnson: ... qui ont déjà occupé les banquettes ministérielles. Il peut y avoir des exceptions au comportement administratif ou de gestion d'un ministre. Je prétends et je demeure convaincu que l'intervention personnelle du ministre du Travail est une chose qui ne doit se faire qu'exceptionnellement et qu'il ne faut pas s'imaginer que l'intervention personnelle, fût-elle personnalisée avec le culte, le culte que certains ont pu faire de cette personnalisation des conflits au Québec avant novembre 1976... Il faudrait peut-être se rendre compte, dis-je, que ce n'est pas cela qui va remplacer une différence de $1.44 à Murdochville.

M. Pagé: M. le Président, une dernière question additionnelle.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Le ministre du Travail nous a défini son intervention, à savoir que c'était dans des cas exceptionnels seulement. J'aimerais lui demander une définition de cette exception. Est-ce que le ministre du Travail considère que 1200 personnes en grève et toute une région affectée d'une façon aussi grave que celle-là, ce n'est pas important, ce n'est pas exceptionnel? Est-ce que vous attendez que cela soit fermé ou encore que cela fasse six mois et un an pour prendre vos responsabilités?

Le Président: Le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, je considère que ce conflit qui affecte, effectivement, toute une région est tellement important qu'il exige que ce ministère que je dirige mette à la disposition de ceux qui doivent faire un minimum d'efforts, des deux côtés, un minimum de discrétion et qu'on n'en traite pas légèrement, comme le député de Portneuf le fait habituellement.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable ministre des Affaires sociales.

Le Président: Je m'excuse, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, je croyais qu'il s'agissait d'une question additionnelle. Il y a une autre question principale pour l'Opposition... Je regrette, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, ils n'ont pas eu deux questions aujourd'hui.

Mme le député de L'Acadie.

Supplément de revenu aux personnes en centre d'accueil

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Hier, à la suite d'une question supplémentaire que je lui posais touchant le revenu, le supplément de revenu aux personnes en centre d'accueil, sa réponse a semblé créer de la confusion, puisqu'on peut lire aujourd'hui un reportage de la Presse canadienne disant que les $20 iront aux personnes âgées.

Je voudrais poser deux questions très précises au ministre des Affaires sociales dans l'espoir aussi de réponses précises. Quel est le montant global que représentent les $20 de supplément de revenu qui doivent être versés par le fédéral aux personnes âgées en centre d'accueil? Deuxième question: le ministre nous a expliqué qu'il faisait une répartition différente de ces $20; peut-il nous dire quel est le montant global que représenteront les $5 supplémentaires qu'il versera d'une part aux personnes âgées en centre d'accueil et les $5 qu'il versera aux personnes qui ne sont pas des personnes âgées mais qui sont dans des centres de soins prolongés? D'une part, le montant global qui vient d'Ottawa et, d'autre part, le montant global qui est redonné soit aux personnnes âgées en centre d'accueil ou aux personnes en centre de soins prolongés?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, je suis content que le député de L'Acadie soulève cette question parce qu'effectivement, il y a eu confusion aujourd'hui, dans une dépêche de la Presse canadienne en particulier. J'ai dit hier que le gouvernement avait autorisé les responsables des centres d'accueil à verser $5 additionnels d'argent de poche aux personnes âgées, ce qui monte leur allocation mensuelle d'argent de poche de $63 à $68.

Deuxièmement, j'ai aussi dit que nous avions, à la même occasion, décidé d'augmenter aussi l'allocation de poche pour les personnes de moins

de 60 ans qui vivent en hôpitaux de soins prolongés pour que ces personnes aient le même montant d'allocation, soit $68.

Tout cela coûte un peu plus de $3 500 000 par année. J'ai dit que le solde, puisqu'il s'agit d'un montant total d'un peu plus de $5 millions — si vous le permettez, je vais finir mon explication — les $20 en question qui vont aux institutions de soins prolongés et aux centres d'accueil pour personnes âgées représentent donc un peu plus de $5 millions; un peu plus de $3 500 000 pour monter l'allocation, l'argent de poche des personnes âgées et des personnes qui ont moins de 60 ans. Le reste va, M. le Président, à la mise en marche de nouveaux programmes pour personnes âgées.

On m'a demandé hier: Est-ce que tout cet argent va aller aux personnes âgées? J'ai répondu oui, cela va aller aux personnes âgées. Je vous mets au défi de relever le journal des Débats. J'ai dit que toute cette somme allait aux personnes âgées. Le solde des $5 millions va effectivement pour défrayer le coût des services ambulanciers aux personnes âgées qui, depuis le 1er janvier, sont gratuits à travers tout le Québec.

Le Président: Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je crois comprendre, même si je suis d'accord avec la mesure du paiement des services ambulanciers, que ces services seront payés par l'effort supplémentaire que le fédéral fait pour verser un supplément de revenu aux personnes en centre d'accueil. Alors, ce n'est pas le provincial.

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, je trouve déplorable cet esprit tout à fait colonisé qui interprète comme étant des cadeaux d'Ottawa des sommes d'argent qui sont fournies au moins à 24% par nos contribuables du Québec. Les personnes âgées, aussi bien que le gouvernement du Québec ou le gouvernement de toutes les autres provinces, ne reçoivent aucun cadeau du gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral a un pouvoir d'impôt considérable, si on tient compte du peu de responsabilités administratives que ce gouvernement a. Ce n'est pas le gouvernement fédéral qui doit faire vivre, si vous voulez, ou payer le coût quotidien de tous les hôpitaux du Québec, de tous les centres d'accueil du Québec, qu'ils soient pour enfants ou pour personnes âgées, et des CLSC.

Pour revenir à la question du député de L'Acadie, on sait que cette pension coûte environ $700 par mois pour chaque personne âgée en centre d'accueil. Nous, au gouvernement du Québec, nous pensons qu'allouer ou remettre à chaque personne âgée une somme mensuelle de $68, soit environ 10% du coût, c'est une mesure tout à fait raisonnable. Je vous mets au défi...

M. Blank: Ne dites pas le mot "remettre', c'est leur argent.

M. Lazure: ... de nous démontrer ce que le gouvernement antérieur, le Parti libéral, a fait durant les trois années, de 1973 à 1976, pour les personnes âgées quant aux subventions, quant à l'argent de poche, aux allocations mensuelles.

M. Raynauld: Question additionnelle.

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton, question additionnelle.

M. Grenier: Comme question additionnelle, le ministre, justement à la toute fin de sa réponse, nous parlait d'un exemple qui pourrait être donné face à ce que l'ancien gouvernement a fait sur ce rabais qui venait du fédéral.

Ces $5 donnés aux personnes âgées, il a répondu hier, quand je lui ai parlé, que ce n'était même pas l'augmentation du coût de la vie, qu'elles étaient nourries, qu'elles avaient tous les médicaments. Il faut quand même savoir qu'avec $68 ces personnes-là doivent s'habiller, payer leurs voyages, etc... Ce sont $5 seulement... Mais cette proportion de $5 sur $20, je me demande si le ministre peut nous dire si elle peut se comparer aux sommes données antérieurement à ces personnes âgées. Si elle est un peu supplémentaire ou si elle n'est pas plutôt égale à ce qu'elles recevaient avant.

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, encore une fois, il faut que la population se rappelle que moins de 5% des personnes âgées, au Québec, vivent en centre d'accueil ou en hôpitaux de soins prolongés. Donc, il faut reconnaître que la grande majorité des personnes âgées conserve les $20 additionnels qu'elles reçoivent actuellement comme supplément de revenu. (14 h 30)

Ceci étant dit, les gouvernements antérieurs versaient, toutes proportions gardées, moins d'argent pour les allocations personnelles que nous en versons actuellement dans les centres d'accueil pour personnes âgées, et le député de Mégantic-Compton est placé pour le savoir.

Nous avons augmenté de $49 à $63, l'an passé, l'allocation de poche pour les personnes âgées. Les mesures que ce gouvernement-ci a prises depuis deux ans pour les personnes âgées, je pense qu'elles sont reconnues d'emblée par les personnes âgées, qu'il s'agisse de soins à domicile, qu'il s'agisse de construction de centres d'accueil, de médicaments...

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales!

M. Lazure: ... des ambulances, on en parlait tantôt, mais des médicaments gratuits pour les personnes âgées.

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales, s'il vous plaît!

M. Lazure: Mais si, une fois pour toutes, M. le Président, les membres de l'Opposition voulaient faire front commun avec ce gouvernement pour réclamer de Mme Bégin et du gouvernement fédéral qu'on cesse d'intervenir dans un domaine qui est strictement de compétence provinciale, c'est-à-dire toute la sécurité sociale.

Le Président: Dernière question sur le sujet, M. le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Ma question additionnelle a deux volets. Premièrement, est-ce que le ministre des Affaires sociales, qui vient de prétendre que le montant versé par le gouvernement fédéral rendrait un peu colonisés ceux qui le reçoivent...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): ... est-il d'accord que les versements par le gouvernement fédéral de $T,5 milliard par année au titre de la péréquation rend le Québec colonisé?

Le deuxième aspect de ma question, c'est simplement une précision que je demande au ministre des Affaires sociales. Ai-je raison de penser que les récipiendaires de ces chèques, les personnes qui sont en centre d'accueil recevaient, jusqu'au 1er janvier, un certain montant, et le gouvernement fédéral a ajouté à ce chèque une somme de $20 par mois? Ces personnes recevaient directement, à leur adresse, ces chèques. Le gouvernement du Québec a décidé que, lui, il prendrait $15, à même ces $20 qui leur étaient versés par le gouvernement fédéral. Ma question est précise, le ministre dit: Nous allons donner $5 de plus aux bénéficiaires en centre d'accueil. N'est-il pas plus exact de dire: Nous allons puiser $15 de plus chez les personnes en centre d'accueil ne leur laissant que $5?

M. Charron: Sur une question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: J'ai écouté attentivement la question du chef de l'Opposition; vous admettrez avec moi que la première de ses sous-questions additionnelles n'avait aucun rapport avec le sujet que nous sommes à discuter. J'inviterais plutôt mon collègue à répondre à la deuxième seulement.

M. Levesque (Bonaventure): Un moment, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): C'est le ministre lui-même qui a utilisé le mot "colonisé" dans sa réponse, et j'avais le droit de revenir sur ce terme utilisé par le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je suis...

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales, puis-je vous demander d'être bref puisqu'il y a pas mal de temps qui est écoulé?

M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, les questions sont assez longues et je pense qu'il est justifié que les réponses prennent au moins autant de temps que les questions.

J'ai utilisé le terme "colonisé" dans le sens suivant: II s'agit d'une attitude, d'une approche, d'une mentalité qu'on retrouve surtout chez les membres de l'Opposition officielle; attitude par laquelle chaque fois qu'Ottawa remet, comme il est normal, une partie des sommes qu'il vient chercher ici, nos amis de l'Opposition voient cela comme un cadeau.

M. le Président, les personnes âgées en centre d'accueil, au moment où nous sommes arrivés au pouvoir, recevaient $49 d'argent de poche par mois. Je pense que c'est cela qu'il faut se rappeler; nous avons haussé cette allocation à $63 par mois, $68 avec le dernier geste qui vient d'être posé il y a une semaine. Mais, M. le Président, dans les centres d'accueil, les personnes âgées non seulement sont nourries et logées gratuitement, mais ont aussi toute une série de privilèges que nous trouvons normaux, mais qui sont quand même des privilèges par rapport aux personnes âgées qui habitent dans leur maison ou dans leur logement.

Je pense qu'il faut, une fois pour toutes, arrêter d'induire la population en erreur; nous ne pénalisons pas les personnes âgées en hébergement. Je pense que, à la fois la mesure qui a amené la gratuité des médicaments, la mesure qui a amené la gratuité des transports ambulanciers démontrent l'intérêt...

Le Président: M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Lazure: ... que porte ce gouvernement aux personnes âgées.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Lavoie: Est-ce que vous avez oublié de parler des $20?

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

Services essentiels dans les centres hospitaliers

M. Bellemare: Je vais attendre que le calme revienne. Maintenant que le calme est revenu, je demanderais à l'honorable ministre s'il se souvient que l'an passé, en 1978, on a voté un bill, qui s'appelle le bill 59, pour assurer deux choses: les services essentiels pendant les négociations et un centre des données, particulièrement à la suite du rapport Martin-Bouchard. Cette loi a été sanctionnée ici par le Parlement. On a eu depuis ce temps-là la formation des services essentiels, mais le pré-

sident de la FAS, M. Donatien Corriveau, prétend qu'il y a seulement 68 établissements sur 400 qui auraient signé des ententes sur les services essentiels. Ma première question est: Est-ce que c'est vrai qu'il y a seulement les centres d'accueil où cela a bien fonctionné, contrairement à leur pendant, les hôpitaux, où il n'y a presque rien de fait? Deuxièmement, au sujet du centre des données, M. Parizeau disait: Maintenant vous allez avoir accès à tous nos livres, tous nos livres sont ouverts. Or, il n'y a rien de fait de ce côté-là. Qu'est-ce qu'on attend? Je comprends que le ministre du Travail peut peut-être me donner des solutions qui vont être temporaires, mais qui ne vont pas réellement dans le sens des négociations qui devraient être aujourd'hui plus avancées qu'elles ne le sont, puisqu'il y a 75 000 employés qui appartiennent à la Fédération des affaires sociales.

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, je pense que, si on retourne en 1972 et 1976, jamais le gouvernement n'aura été aussi ponctuel pour respecter ses engagements en ce qui concerne les négociations. Nous accusons un léger retard, autant du côté syndical que du côté patronal, dans les négociations, mais jamais autant d'efforts n'ont été consacrés à ce que les négociations ne tournent pas en rond et ne soient pas retardées. Pour ce qui est des services essentiels, les négociations sont déjà commencées depuis plusieurs mois dans les centres d'accueil et dans les hôpitaux. Il est vrai que dans les hôpitaux c'est moins avancé que dans les centres d'accueil. Justement, dans plusieurs hôpitaux, autant la partie patronale que la partie syndicale attendaient la réunion de la fin de semaine dernière de la Fédération des affaires sociales. Cette réunion ayant eu lieu, nous sommes en mesure, quant à nous, du côté patronal, ministère et hôpitaux, de procéder aux négociations des services essentiels localité par localité, hôpital par hôpital. J'ajouterai qu'il n'est pas exact de dire, comme le député de Johnson l'a dit tantôt, que les ententes se sont faites seulement dans les centres d'accueil. Il y a un bon nombre d'hôpitaux de la ville de Québec où les infirmières ont conclu des ententes sur les services essentiels. Je demanderais à mon collègue du Travail de compléter la réponse.

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, puisque le député de Johnson a invoqué la question de l'échange de données, il faut bien dire que ce à quoi s'était engagé le gouvernement c'était qu'effectivement, avant la période de négociation proprement dite, les représentants syndicaux auraient accès à des données gouvernementales. Or, il y a trois sortes de données. Ce processus a été mis en branle dans les délais et il est encore en train de s'effectuer dans certains cas à la demande même de certains syndicats. Premièrement, le ministre des Finances et président du Conseil du trésor a rencontré les coordonnateurs syndicaux pour leur expliquer, aux mois de novembre et décembre, quelles étaient les prévisions de rentrées fiscales de ce gouvernement pour les deux ou trois prochaines années, quel était le processus budgétaire et quel est finalement l'ensemble des données qui permettent de savoir comment se bâtit une politique salariale à l'intérieur d'un Etat. Je pense que c'est assez exceptionnel que cela ait été fait: à ma connaissance, ceux d'en face ne l'ont jamais fait. (14 h 40)

Deuxièmement, le gouvernement a procédé à un échange de données ou à la remise de certaines données sur les évaluations des postes, les échelles, les comparaisons avec le secteur privé qui, on le sait, font l'objet de certaines contestations ou d'opinions de la part du monde syndical, mais qui ont quand même été remises effectivement aux syndicats.

Troisièmement, un troisième type de données a eu cours — cela a été un peu plus long dans le secteur de l'éducation, comme c'est normal puisque c'est un réseau décentralisé, où il y a quand même beaucoup de commissions scolaires, contrairement au cas des hôpitaux où c'est un réseau plus centralisé — sur les effectifs où les syndicats ont pu obtenir du gouvernement, encore une fois, l'ensemble des données disponibles dans le secteur quant au nombre de postes ouverts ou qu'on prévoyait voir ouverts dans les mois qui précédaient ou dans l'année à venir.

Je pense que cet ensemble de données est remarquable, que cela n'a jamais été fait dans le passé et, en plus de cela — je terminerai là-dessus — je pense que les syndicats ont trouvé, de façon générale, que cela valait la peine au point où ils continuent à faire des demandes spécifiques auprès du bureau des statistiques du Conseil du trésor.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: M. le Président, ce qui est passé est passé; le verre de lait renversé, vous ne pourrez pas le remettre dans la pinte, c'est sûr. Les libéraux ont payé pour cela, ils sont dans l'Opposition. Il y a eu les prisonniers d'Etat pour lesquels l'ancien parti a payé quand il a envoyé en prison les trois chefs syndicaux. On ne voudrait pas que cela se répète dans la province.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale...

M. Bellemare: On voudrait que les négociations soient plus fructueuses et, comme dit le ministre...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, pourriez-vous formuler votre question, s'il vous plaît?

M. Bellemare: Oui, Est-ce que cela fait mal à quelqu'un?

Le Président: Nous n'en sommes pas à la période de débats.

M. Bellemare: Laissez-moi donc me soulager un peu. Eux prennent tout le temps pour répondre, ils font des détours...

Le Président: S'il vous plaît, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Demandez donc cela de temps en temps à ceux qui répondent.

M. le Président, je dis que ce qu'ils ont fait dans le passé a été puni et vous avez vous-mêmes tracé un plan de sélection pour...

Le Président: M. le leader parlementaire...

M. Bellemare: ... n'ont pas été faites, ne sont pas et ne seront pas faites en temps.

M. Johnson: M. le Président, je présume que...

M. Fontaine: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, j'ai vu le député de Johnson et leader parlementaire de l'Union Nationale poser une question alors que vous étiez debout. Est-ce que vous pourriez lui permettre de la répéter afin qu'elle puisse passer à l'écran de télévision?

M. Bellemare: Pour répéter ma petite scène, qui est bien coutumière, mais bien sincère, je demande au ministre pourquoi les services essentiels ne fonctionnent pas plus et pourquoi le service d'information n'a pas, tel que prescrit par la loi 59, fonctionné. Il m'enveloppera sa réponse dans une sorte de prétexte, mais je ne le croirai pas.

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, je n'ai pas l'intention d'envelopper ou d'enfirouâper le député de Johnson. Sur la question des services essentiels, je pense que le ministre des Affaires sociales a fourni une réponse qui aurait normalement dû satisfaire le député de Johnson. Le ministre des Affaires sociales a dit bien clairement que les négociations sur les services essentiels se poursuivaient de façon diligente.

D'autre part, il est vrai qu'au moment où nous nous parlons, le comité d'information sur la négociation, et non pas sur les services essentiels — celui-là est formé et c'est M. Picard qui le préside — n'est pas formé. Je dois, cet après-midi même, rencontrer ou, enfin, communiquer avec le juge en chef du Tribunal du travail, M. Geoffroy qui, jusqu'à maintenant, a déployé des efforts — je peux vous en assurer — considérables et même extraordinaires, compte tenu du mandat qui lui a été donné par la loi. Il a, jusqu'à maintenant, concentré ses efforts dans le secteur journalistique, où il a tenté d'obtenir un homme qui, d'une part, aurait une crédibilité et, deuxièmement, serait intéressé à faire ce boulot qui n'est pas facile. Or, il n'a pas réussi jusqu'à maintenant à obtenir que des hommes et des femmes d'une compétence reconnue acceptent, finalement, pour une période de peut-être trois mois, six mois, neuf mois, un an, d'abandonner leur métier, ne serait-ce que temporairement, pour remplir une fonction comme celle-là. Je pense que c'est leur droit, c'est leur privilège, comme gens de métier.

Il est clair que dans le milieu journalistique, il n'est pas facile de trouver quelqu'un qui accepterait un travail comme celui-là. Je présume donc que le juge en chef, en plus de continuer à faire des recherches dans le secteur journalistique, cherchera peut-être dans d'autres secteurs aussi, pour se trouver un président du comité d'information.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: C'est ma dernière question. Vous voyez que la réponse du ministre confirme nos inquiétudes. C'est clair. Deuxième chose, si le ministre des Affaires sociales nous a répondu que ce n'est pas vrai qu'il y a eu 60 ententes sur 400, je pense qu'il se trompe véritablement. Je pense que sur les 400, il y aurait eu 68...

M. Lazure: Correction, je n'ai pas...

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: ... dit que c'était faux qu'il y avait seulement 60 ententes sur 400. J'ai dit que c'était faux d'affirmer, comme le député de Johnson l'a fait, que les ententes avaient eu lieu seulement dans les centres d'accueil. J'ai ajouté qu'il y a eu entente dans des hôpitaux de la ville de Québec. M. le Président, si l'Opposition veut vraiment, de façon sérieuse, connaître les données, je serai en mesure de déposer dans quelques jours un document qui donnera la liste très précise de tous les hôpitaux et centres d'accueil où il y a eu, jusqu'ici, entente en matière de services essentiels. Je rappelle encore une fois, que jamais un gouvernement n'a été aussi prévoyant, ne s'est préparé aussi longtemps à l'avance vis-à-vis possiblement de certains conflits qui pourraient arriver. Mais M. le Président, le minnistre du Travail tantôt a répondu au député de Johnson, quant à la formation du Conseil des services essentiels. Ce conseil veille actuellement à ce que les négociations se fassent de façon très diligente partout au Québec.

M. Bellemare: M. Corrivault...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: C'est M. Corrivault qui l'a affirmé, qu'il y en avait eu 68 sur 400 et qui a dit, à part cela, que le ministre doit très prochainement, ces jours prochains, déposer le rapport complet. Nous attendrons donc ce rapport complet et nous remercierons le ministre si c'est vrai qu'il le fait.

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

Conflit de travail à Saint-Hyacinthe

M. Cordeau: M. le Président, ma question s'adresse au ministre du Travail. Déjà, depuis plusieurs mois, deux conflits de travail perdurent dans la ville de Saint-Hyacinthe et affectent plusieurs familles, Cela crée un état assez dangereux. Il s'agit des entreprises Lucien Larivée et la compagnie Omega. Est-ce que le ministre peut nous faire connaître l'état actuel de chacun de ces dossiers? Deuxièmement, quelles sont les mesures que vous entendez prendre afin d'obtenir le règlement de ces conflits?

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: M. le Président, la semaine dernière, j'ai eu l'occasion d'obtenir du service de conciliation des détails très précis dans le cas de Lucien Larivée Ltée qui, si je me souviens bien, est une compagnie d'embouteillage d'eaux gazeuses, à Saint-Hyacinthe. Les parties ne semblaient pas tellement intéressées à voir le ministère dans le décor.

Encore une fois, cela permet peut-être de mettre certaines choses en perspective quant au rôle du ministère. On peut effectivement considérer que cela peut représenter un poids économique pour les travailleurs et leur famille et également une contrainte économique pour l'employeur, dans certains cas évidemment. Il demeure quand même que ces parties, contrairement au cas de la Commonwealth Plywood qu'on s'amuse à caricaturer de façon un peu ridicule, s'inscrivent finalement tout à fait dans des mécanismes normaux prévus au Code du travail. Jusqu'à maintenant, les parties n'ont pas cru bon d'utiliser de façon plus ponctuelle, plus sérieuse et plus déterminée les services de notre ministère. Je présume, comme je dois présumer dans tous les conflits, y compris ceux qui affectent jusqu'à 1200 travailleurs comme à Murdochville, que les travailleurs qui ont décidé de faire une grève l'ont décidé volontairement en sachant ce qu'ils faisaient.

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe, une question supplémentaire.

M. Cordeau: M. le ministre, je vous avais aussi posé les mêmes questions concernant la compagnie Omega; est-ce que vous pouvez répondre? (14 h 50)

M. Johnson: Pour la compagnie Omega Machinery, je regrette, je pourrai peut-être donner des détails un peu plus tard au député. Effectivement, il y a eu, je pense, une demande de conciliation si je ne me trompe pas relativement à un autre conflit, mais je voudrais seulement être sûr que je donne les détails d'une façon précise. Je pense que le député de Saint-Hyacinthe comprendra que, comme je n'avais pas de préavis, je n'ai pas nécessairement les détails aujourd'hui. Merci.

M. Cordeau: Demain?

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Construction de logements

M. Scowen: M. le Président, j'ai une question à poser au ministre des Affaires municipales qui est, en effet, une suggestion qui peut peut-être aider la population à mieux comprendre ce qui se passe dans son ministère; c'est en fait, dans un sens, je l'espère, positif. On a eu beaucoup de difficulté cette année à savoir combien de logements pour les personnes à revenus moyens, pour les personnes âgées, etc., ont été construits. On avait reçu un chiffre de 1000 jusqu'à la fin d'octobre, du ministre lui-même. La semaine passée, le président de la Société d'habitation a dit que cette dernière avait construit 4000 logements en 1978. Le premier ministre a parlé de 8000 à 10 000. On sait que selon les promesses électorales du Parti québécois, on devait en compléter 7000 par année. Malheureusement, c'est difficile à savoir combien ont été faits.

M. Charron: Question, M. le Président.

M. Scowen: II y a souvent des communiqués de presse pour les mises en chantier, d'autres communiqués de presse pour le début de la construction...

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: La suggestion que je veux faire au ministre, M. le Président, je vais la faire sous la forme d'une question. Est-ce que le ministre accepte de nous faire sur une base mensuelle un rapport, de la part de son ministère ou de la part de la Société d'habitation du Québec, indiquant clairement le nombre de HLM qui seront mises en chantier pour la prochaine année et le nombre qui seront complétées.

Comme cela, toute la population peut savoir ce qui est réalisé, quelle est la situation actuelle et nous ne serons plus dans cette situation de confusion totale sur les réalisations actuelles.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Tardif: M. le Président, évidemment, comme on l'a dit, c'est une période de questions et non de suggestions, mais je prends de bonne part

la suggestion du député de Notre-Dame-de-Grâce. Je voudrais simplement préciser que, lorsqu'il fait état de la difficulté d'obtenir des chiffres et qu'il y mêle encore une étude quant à la projection sur les besoins en logements au Québec, qui avait été établis en 1976, à partir d'une étude démographique, des résultats du recensement fédéral de Statistique Canada de 1976, sur une prévision de besoins annuels en logements de 67 000 unités de logements, d'une part, et d'autre part, sur un constat de réalité qu'au cours des dix dernières années, la production moyenne au Québec avait été de l'ordre de 55 000 unités de logement... On avait dit que, si on démolissait moins, on pourrait considérer que, finalement, ce sont à peu près 7000 logements qu'il faudrait produire pour répondre à cette demande. Tout ceci était une projection des besoins en logements et non pas des besoins en logements sociaux.

Ceci était fondé sur deux réalités que j'ai évoquées devant cette Chambre, à savoir la progression de la demande des logements qui provenait de ce qu'on appelle les ménages non familiaux, c'est-à-dire, par exemple, les jeunes étudiants du niveau collégial ou universitaire qui, auparavant, pouvaient vivre avec leurs parents et qui, maintenant, décidaient de fonder d'abord un ménage, de maintenir un ménage; également, à l'autre extrémité de l'échelle, des personnes âgées qui, auparavant, partageaient le foyer des enfants et qui, maintenant, requéraient ou demandaient d'avoir des logements bien à elles.

M. le Président, il y a eu une baisse dans cette demande pour les ménages non familiaux, et, encore une fois, la confusion qu'entretient le député de Notre-Dame-de-Grâce quant à ce besoin en logements et les réalisations de la société du Québec sont deux choses. Quant à sa demande... Cela fait plusieurs fois que le député de Notre-Dame-de-Grâce revient avec cette question. J'essaie à chaque fois de le lui expliquer, et ce qui est clair pour tout le monde ne semble pas l'être pour lui. Pour ce qui est des statistiques de la Société d'habitation du Québec, régulièrement, je fais état de mises en chantier. J'ai devant moi tous les appels d'offres qui ont été faits au cours du mois de janvier 1979. J'en ai la liste. Elle comprend exactement 21 projets. Je peux les énumérer ici pour le bénéfice du député de Notre-Dame-de-Grâce, si cela l'intéresse. Je peux également lui dire qu'au 31 janvier 1979, dernier mois pour lequel j'ai des données, nous avions un grand total de 342 projets d'habitation en marche, pour un total de 14 398 logements; je dis des projets en marche. Si le député de Notre-Dame-de-Grâce, par une question additionnelle, veut savoir combien de projets en étaient aux étapes de la construction, des plans et devis et des terrains, je lui donnerai le renseignement.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce!

M. Scowen: M. le Président, je vais répéter la question! Est-ce que le ministre, pour nous aider à savoir sur une base régulière les réalisations, serait prêt à publier une seule liste mensuelle sur laquelle il indiquerait à la population du Québec la totalité des mises en chantier et des compilations? Ainsi, nous pourrions avoir un seul chiffre et tout le monde sera sur la même longueur d'onde. Est-il prêt à faire cette liste sur une base mensuelle et à ne pas cacher la réalité?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Tardif: M. le Président, si le député de Notre-Dame-de-Grâce veut savoir combien, au 31 décembre 1978, il y avait de logements en construction, je peux lui donner globalement et individuellement, je les ai ici.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Gatineau, sur une question de règlement.

M. Gratton: C'est pour demander au ministre de déposer le document dont il parle; de cette façon, on se comprendra peut-être une fois pour toutes.

M. Scowen: M. le Président...

M. Gratton: C'est, d'ailleurs, le règlement qui le prévoit. Le ministre a cité des extraits du document. Je lui demande de le déposer.

Des Voix: Non.

M. Gratton: Bien quoi! Qu'est-ce que vous cachez alors! Déposez-le donc!

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! C'est la fin de la période des questions.

M. Lavoie: Une question de règlement. Vous n'avez pas tranché sur la demande du député de Gatineau. Le ministre a référé à une liste officielle de 21 projets...

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: A la question de règlement soulevée par le député de Gatineau, je puis dire que le député de Crémazie, ministre des Affaires municipales, déposera, avant la prorogation de cette session, un document donnant l'information souhaitée. Mais pas celui que nous avons actuellement.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Ma demande ne vise pas à obtenir un document que le ministre pourra emberlificoter

à sa manière et nous préparer pour faire dire aux chiffres ce qu'il veut bien dire. Je demande qu'il dépose le document qu'il a devant lui. C'est simple.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Tardif: M. le Président, je n'accepte pas que l'on m'accuse de présenter un document qui aurait pu être manipulé. Je me fais tenir au courant mensuellement de l'état d'avancement des projets. J'ai dit que, si le député de Notre-Dame-de-Grâce voulait me poser une question précise quant au nombre de logements en chantier, par comté, par endroit et par ville au Québec, je pourrais lui donner une réponse immédiatement. Si le député de Gatineau veut savoir dans le comté de Gatineau quel est l'état d'avancement des projets, je pourrai en faire état. C'est un document interne pour mon renseignement.

M. Scowen: Question de privilège.

Le Président: Très bien!

M. Gratton: Ce ne sera pas bien long.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Gratton:... logis retardés pendant deux ans à Maniwaki, rien d'autre.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Le ministre a suggéré que j'ai posé une question que je n'ai pas posée. Les réalisations jusqu'à la fin de décembre, c'est intéressant, mais ce n'est pas la question. Est-ce qu'il peut sortir, pour nous tous, une liste régulière à chaque mois d'ici à la fin de l'année 1979 et encore plus loin pour que tout le monde sache, sur une base régulière, le développement? C'est cela qu'on demande. (15 heures)

Le Président: Très bien. M. le député de Gatineau, je prends en délibéré votre demande.

M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle, vous connaissez bien le règlement. On dit, dans le règlement, qu'il faut citer le document et je veux savoir, au journal des Débats, si le document a été effectivement cité. Je pense, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle, qu'il s'agit là d'une mesure de prudence élémentaire.

M. Gratton: M. le Président, question de règlement.

Le Président: M. le député de Gatineau. Des Voix: Ah, ah, ah, ah!

M. Gratton: Si cela vous achale, cela ne m'empêchera pas de faire mon travail, imaginez-vous donc!

M. Charron: ... allez-y.

M. Gratton: M. le Président, pour vous éclairer...

Le Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton:... au moment où vous délibérerez, j'aimerais qu'on fasse lecture ensemble de l'article 177 du règlement...

Des Voix: A l'ordre, à l'ordre!

M. Gratton: ... qui dit: "Quand un ministre... ' Bien, ce n'est plus dans l'ordre de citer notre propre règlement en cette Chambre, maintenant! Il y a toujours bien une limite, soyez logique!

M. Charron: Le président a donné sa décision.

M. Gratton: Je cite, M. le Président. Permettez-vous que je cite, M. le Président?

Le Président: M. le député de Gatineau, j'ai expliqué tout à l'heure que je devais vérifier au journal des Débats. Je connais parfaitement cette disposition dont vous voulez faire état, celle que vous évoquez, qui dit qu'un ministre qui cite un document peut être tenu de le déposer. Ce règlement, M. le député de Gatineau, ne dit pas "un ministre qui se réfère à un document". Il s'agit de voir s'il y a eu une simple référence ou si le document a été cité. Pour cela, j'ai besoin de consulter le journal des Débats, et dès que ce sera fait, je serai en mesure de rendre une décision, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président, et vous allez voir que c'est dans le but d'aider, de contribuer positivement à toute cette question. L'article 177 dit: "Quand un ministre cite, ne serait-ce qu'en partie, un document, il peut être requis sans autre formalité de le déposer immédiatement, à moins qu'il ne déclare qu'il est contraire à l'intérêt public de le faire". Or, M. le Président, si vous deviez délibérer pendant deux jours sur la question et décider qu'effectivement le ministre a cité son document, il pourrait toujours nous répondre qu'il n'est pas d'intérêt public de le déposer. Alors je voudrais savoir du ministre des Affaires municipales si c'est cela qu'il entend invoquer comme raison pour ne pas le déposer.

M. Scowen: Question de règlement, M. le Président.

M. Lamontagne: Question de règlement. Le Président: M. le député de Roberval.

M. Lamontagne: M. le Président, sur le même sujet, je tiens pour acquis votre délibéré mais ceci nous met dans une position un peu spéciale. Il semble y avoir une certaine réticence de certains membres du gouvernement à déposer ce document. Moi, M. le Président, je ne voudrais pas le voir sortir de la Chambre pendant votre délibéré. Je le demande, parce que la confiance ne règne pas envers vous, de ce côté-ci.

M. Charron: C'est bon, c'est bon! Il y en a un autre là.

M. Lamontagne: Je demande que le document soit déposé ici, en avant, pendant que vous allez délibérer. Avez-vous peur de déposer vos propres documents?

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lamontagne: Pensez-vous qu'on va commencer à vous faire confiance?

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Je voudrais simplement vous répéter, M. le Président, que votre jurisprudence à vous-même, le 24 mars 1976, le 1er décembre 1977 et le 7 mars 1978, est à l'effet contraire; le ministre doit, sur votre recommandation et par votre jurisprudence, déposer le document.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... je voudrais simplement vous rappeler un précédent où un vice-président de la Chambre avait retenu le document pendant délibéré. Vous comprendrez que le libellé même de l'article exige un tel exercice, étant donné que le ministre peut être requis de déposer immédiatement. Comment, dans deux jours, pourra-t-il déposer immédiatement?

M. Scowen: M. le Président...

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je suis suffisamment informé. Je vais suspendre pour quelques minutes pour aller vérifier le journal des Débats.

Suspension à 15 h 5

Reprise à 15 h 16

Le Président: A l'ordre! Je suis allé relire la transcription du journal des Débats et entendre aussi la bande magnétoscopique. Je rappelle le rè- glement, l'article 177, qui dit: "Quand un ministre cite, ne serait-ce qu'en partie, un document, il peut être requis sans autre formalité de le déposer immédiatement, à moins qu'il ne déclare qu'il est contraire à l'intérêt public de le faire."

Or, il apparaît très manifestement, à la lecture des notes, qu'aucune citation n'a été faite d'un document. Il y a eu une simple référence à une liste. Je vous réfère à May de même qu'à Campion. May dit que quand un ministre ne fait que résumer un document, il n'est pas tenu de le déposer. Cela apparaît également dans Campion. On autorise même un ministre à résumer un document sans être tenu de le déposer; à plus forte raison quand il ne le résume pas, mais qu'il n'y fait qu'une simple référence. Voilà le sens de la décision.

M. Tardif: M. le Président.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Tardif: Est-ce qu'on me permettra de dire un mot, à savoir que j'accepte la suggestion du député de Notre-Dame-de-Grâce pour voir si ce document de travail, que mes fonctionnaires me remettent mensuellement, peut être mis en forme et à la disposition de l'ensemble des députés? Je peux prendre cet engagement.

Le Président: Nous en sommes maintenant aux motions non annoncées.

M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Avec une toute courte motion, il est bien évident que ce n'est pas l'intention de l'Union Nationale d'entraîner un débat qui pourrait durer comme on l'a vu hier, une partie de l'après-midi.

Une Voix: J'inviterais les libéraux à en faire autant.

M. Grenier: M. le Président, j'ai la conviction que j'aurai l'assentiment du Parti libéral pour faire une courte intervention, puisque c'est une motion qui devrait recevoir l'appui de cette Chambre. Elle se lit comme suit: "Que les membres de cette Assemblée souhaitent bonne chance aux membres de l'équipe québécoise qui participent actuellement aux Jeux d'hiver du Canada qui se tiennent à Brandon au Manitoba. '

M. Charron: M. le Président, le député de Mégantic-Compton...

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la présentation de cette motion?

M. Charron: ... me touche droit au coeur, il n'y a pas consentement.

Des Voix: Ah, ah!

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Je vois que le leader parlementaire du gouvernement a appris sa leçon.

Le Président: Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Demande de débat d'urgence relative aux étudiants contrôleurs aériens

A l'ordre, s'il vous plaît! Avant de procéder aux affaires du jour, je voudrais faire la lecture d'un avis qui m'est parvenu dans les délais requis: "Québec le 13 février 1979. "M. le Président, conformément à l'article 78 du règlement, je désire vous aviser que je proposerai aujourd'hui, avant l'appel des affaires du jour, que soit tenu immédiatement un débat pour discuter une affaire déterminée et importante dont l'étude s'impose d'urgence, à savoir la situation vécue par un groupe d'étudiants contrôleurs aériens, plus particulièrement le congédiement d'un certain nombre d'entre eux, les implications de cet état de fait pour les Québécois francophones tant au plan de leur formation qu'au plan économique, les conséquences graves provoquées par le fait que des droits élémentaires aient été bafoués et que, de surplus, les autorités fédérales concernées, c'est-à-dire le ministre Otto Lang et Transports Canada, n'aient tenu aucun compte des désirs exprimés à l'unanimité par l'Assemblée nationale du Québec. "Bien à vous". C'est signé du député de Sainte-Marie, Guy Bisaillon.

Très brièvement, s'il vous plaît, M. le député de Sainte-Marie. (15 h 20)

M. Bisaillon: M. le Président...

Des Voix: Consentement?

Le Président: Y a-t-il consentement à ce qu'un débat d'urgence ait lieu sur la question?

Des Voix: Oui, oui, oui.

M. Lavoie: Oui, oui.

M. Biron: Consentement, M. le Président.

Une Voix: Le Parti libéral a dit oui.

Des Voix: Ah!

M. Goulet: Oui ou non?

M. Bisaillon: M. le Président, ai-je la parole?

Le Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, pour me conformer...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président... Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): ... voici une motion présentée par un ministériel du Parti québécois. Il a le consentement de tous les partis d'Opposition pour que nous puissions en discuter. Alors, M. le Président, pourquoi retarder la discussion, pourquoi retarder le débat?

Le Président: Parce que, en vertu des dispositions de notre règlement, M. le chef de l'Opposition, ce que vous savez déjà fort bien, il faut le consentement unanime.

M. le député de Sainte-Marie.

M. Levesque (Bonaventure): Qui le refuse?

M. Lavoie: Qui le refuse?

Le Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président...

Une Voix: Un instant!

M. Lavoie: Qui le refuse?

Le Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Si les membres de l'Opposition veulent me laisser parler, je vais expliquer...

M. Biron: Question de règlement, M. le Président.

Des Voix: A l'ordre! A l'ordre! M. Bellemare: M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: ... je ne crois pas qu'il soit dans les termes de notre jurisprudence d'aller plus loin vu que tout le monde, même le gouvernement au pouvoir, est prêt à donner son consentement pour qu'on étudie immédiatement la motion. Je pense qu'on ne peut pas s'opposer et vous non plus, vous n'avez pas besoin d'explications supplémentaires pour accorder votre bienveillance à cette motion puisque toute la Chambre est unanime.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, à moins que j'aie mal vu, je crois savoir qu'il n'y a pas de consentement unanime.

M. le député de Sainte-Marie.

M. Giasson: M. le Président, question de règlement!

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'on peut savoir...

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: J'ai suivi attentivement nos travaux et nos débats depuis quelques minutes. Je

n'ai entendu aucune voix, d'aucun député de cette Chambre, s'opposant. S'il y a un dissident qui s'oppose, qu'il ait au moins le courage de se lever et de le dire ouvertement.

M. Bisaillon: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Si j'ai demandé la parole pour expliquer le dépôt de ma motion de débat d'urgence, c'est que j'avais lu le règlement et qu'à l'article 78.2, j'avais compris que j'avais à vous convaincre de la recevabilité de ma motion, avant même qu'elle soit soumise à l'Assemblée. Par ailleurs, s'il y avait consentement, il est évident que j'en serais fort heureux.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, en vertu de l'article 78.2, il y a — pour que le débat puisse occuper le temps de la Chambre — l'impossibilité prochaine qu'un débat ait lieu sur ce sujet. Je crois qu'il y a possibilité prochaine que le débat ait lieu, en fonction de quoi je crois que lorsque nous nous retrouverons sur...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Question de règlement. A ma connaissance...

M. Charron: M. le Président, je soulève une question de privilège.

M. Lavoie: ... le député de Saint-Jacques n'est pas encore promu président de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas à lui de décider s'il y a un moment prochain pour en discuter. Ce serait à vous, M. le Président.

M. Charron: Je soulève une question de privilège.

M. Lavoie: Je termine ma question de règlement. Est-ce qu'on peut me laisser parler?

M. Charron: Je soulève une question de privilège.

Le Président: Sur votre question de règlement, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Je dis donc, M. le Président, que...

M. Charron: M. le Président, je soulève une question de privilège.

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader parlementaire du gouvernement, je vais vous reconnaître immédiatement après. Je vais laisser terminer le leader parlementaire de l'Opposition officielle sur sa question de règlement.

M. Lavoie: La question de règlement, c'est que le leader parlementaire du gouvernement ne pouvait pas invoquer lui-même et trancher s'il y avait un moment prochain où on pourrait discuter de cette question. Je ne voudrais pas argumenter; même s'il y a une nouvelle session, on ne peut pas présumer de la date de la session, c'est en dehors de la question. Ce serait uniquement à vous, M. le Président, de trancher s'il y a un moment ou d'autres moyens.

Deuxième point. Tout le monde est au courant que si l'Assemblée est unanime, consentement unanime, on peut, l'Assemblée est souveraine sur ces questions de consentement unanime... En somme, consentement unanime, c'est une suspension des règles qui nous permet, lorsque la Chambre est d'accord, de procéder à quelques travaux que ce soient et il semble qu'il y ait consentement unanime. Mon dernier point, je solliciterais de vous, M. le Président, en tant que — je crois, selon la tradition — serviteur de cette Chambre, vous êtes au service de cette Assemblée, de nous indiquer, une fois que l'Union Nationale et l'Opposition officielle, le Parti libéral, a exprimé son consentement, veuillez donc nous éclairer, nous renseigner... Qui s'oppose à ce consentement unanime?

M. Laplante: C'est moi qui m'oppose à cela.

Le Président: II y a un refus de la part de M. le député de Bourassa.

M. Roy: M. le Président...

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: ... sur une question de règlement. Il vient d'être soulevé. L'honorable leader de l'Opposition officielle a dit que le consentement était venu de l'Union Nationale et du Parti libéral. Je voudrais dire à cette Chambre qu'il y avait aussi le consentement du député de Beauce-Sud.

Le Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, je comprends que le député de Bourassa...

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Je dois comprendre, M. le Président, que les motions en vertu de l'article 78 n'ont pas besoin d'un consentement. Il s'agit qu'on présente notre motion, que le président la juge rece-vable. Si elle est jugée recevable, qu'il y ait consentement ou non, cette motion doit être discutée par la suite dans un débat d'urgence. Mon rôle, M. le Président...

Une Voix: Laissez-le finir! M. Lavoie: Très brièvement.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: C'est pour faire gagner le temps de cette Chambre que nous voulons exprimer notre consentement unanime et, s'il y a consentement unanime, le député de Sainte-Marie n'aura même pas à soumettre sa motion. Vous n'aurez pas à trancher.

Le Président: Très juste, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle, sauf que vous savez maintenant qu'il n'y a pas consentement unanime.

M. Lavoie: De la part de qui?

Le Président: Bon! De la part de M. le député de Bourassa, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. le député de Bourassa, vous connaissez les rigueurs du règlement et de la jurisprudence en la matière. On n'explique pas un refus ou un consentement.

M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: M. le Président, même s'il n'y a pas consentement, une fois que ces questions seront réglées, je me fais fort d'essayer de vous démontrer l'importance de la question que j'ai soumise à un débat d'urgence, l'urgence qu'il y a à en traiter à l'Assemblée nationale et le fait que cette question est de la compétence de l'Assemblée nationale.

Dans l'application du règlement 78, en particulier le deuxième paragraphe, M. le Président, je comprends que j'aurai à vous prouver qu'il n'y a pas possibilité qu'elle puisse être discutée à l'Assemblée dans un délai raisonnable et par d'autres moyens.

Tout d'abord, M. le Président, réglons cette question. Nous achevons la session et comme nous avons déjà utilisé d'autres moyens raisonnables pour discuter la question importante dont il s'agit, par le biais d'une motion non annoncée, motion qui avait été refusée par l'Opposition libérale, je suis obligé de constater que je n'aurai pas, avant la fin de la prochaine session, d'autres moyens à ma disposition pour discuter cette question importante. Ceci parce qu'une motion non annoncée, présentée il y a deux jours, a été refusée par l'Opposition libérale.

Quant à l'importance de la question, M. le Président, quant à l'urgence aussi de la traiter, on ne peut discuter de l'importance — je vais le faire brièvement — et de l'urgence de cette question sans rappeler rapidement quelques faits qui se rattachent à ce que j'ai déposé comme motion de débat d'urgence. On se souviendra que seize étudiants francophones étaient formés comme contrôleurs aériens dans une institution de Cornwall.

Le Président: M. le député de Sainte-Marie, je ne voudrais pas que vous abordiez le fond de la question. (15 h 30)

M. Bisaillon: M. le Président, je la situe en trois phrases et je vous certifie que cela me prendra trois phrases pour en faire le tour. Ces étudiants ont contesté, à un moment donné, et on voulu être situés à une autre école que celle de Cornwall pour pouvoir être formés en français. Ceci avait amené un débat à l'Assemblée nationale qui avait émis unanimement un voeu que je voudrais relire. L'Assemblée nationale, en décembre, avait émis le voeu suivant à l'unanimité des partis de cette Chambre: "Que cette Chambre est d'avis que le gouvernement fédéral devrait intervenir sans délai afin de permettre aux seize étudiants aspirants contrôleurs du Québec qui vont actuellement à l'institut de formation de Transports Canada à Cornwall, Ontario, de poursuivre leurs études au Québec". Or, M. le Président, depuis ce temps, malgré l'avis unanime de l'Assemblée nationale du Québec, Transports Canada a congédié deux des seize étudiants impliqués, en faisant suivre... C'est là l'importance de la question. L'importance de la question, c'est que des Québécois francophones reçoivent actuellement non seulement des avis de cessation de formation, mais en plus de cela des avis de congédiement, de cessation d'emploi. Deux de ces étudiants sur les six ont reçu des avis de congédiement.

Le troisième point, M. le Président, c'est l'enquête qui avait été faite par le commissaire aux langues du Canada qui confirme que l'Assemblée nationale du Québec n'a pas été respectée. Le commissaire, au mois de janvier — et c'est là qu'il faut se dépêcher, c'est là l'urgence...

Le Président: M. le député de Sainte-Marie, je pense que vous abordez un peu trop le fond de la question. J'aurais préféré vous entendre sur la juridiction de l'Assemblée nationale sur la question.

M. Bisaillon: Alors, M. le Président, je me conforme à votre désir et je termine rapidement sur l'urgence. Ce que je veux souligner, c'est qu'il y a eu une première décision de deux congédiements; il y a eu, par la suite, six congédiements et il reste encore dix étudiants. Alors, l'urgence c'est de bloquer les dix congédiements éventuels.

La deuxième question, M. le Président, c'est que le commissaire aux langues — j'arrive à la compétence de l'Assemblée nationale — a conclu, dans une étude de janvier 1979, qu' "outre — et je cite les paroles du commissaire aux langues — le fait que le régime linguistique à l'institut de Cornwall est étonnamment insensible à l'égard des étudiants francophones, il n'est pas conforme à l'esprit de la loi". M. le Président, comme Assem-

blée nationale, nous nous sommes prononcés trois fois sur cette question. Nous avons...

Le Président: Très bien.

M. Bisaillon: ... trois fois adressé des demandes au gouvernement fédéral...

Le Président: Très bien, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: ... deux fois avant 1976 et en décembre dernier.

Le Président: Très bien.

M. Bisaillon: II me semble, M. le Président, que l'Assemblée nationale devrait faire ce débat d'urgence pour indiquer au gouvernement fédéral notre volonté de faire respecter les francophones.

Décision du président

Le Président: M. le député de Sainte-Marie, malheureusement, aussi bien le dire tout de suite, il serait extrêmement difficile d'accepter votre motion, de la déclarer recevable et cela, pour plusieurs motifs dont la plupart ont été mentionnés dans les décisions rendues la semaine dernière à l'occasion de la présentation d'une motion d'urgence de M. le député de Portneuf et d'une autre de M. le chef de l'Union Nationale.

Mais à tous ces motifs, dans ce cas particulier, il faut ajouter les deux suivants, M. le député de Sainte-Marie. Premièrement, même si l'affaire évoquée intéresse au plus haut point tous les membres de l'Assemblée nationale, on ne peut pas admettre qu'elle relève de la compétence de cette Assemblée, condition formelle à l'admissibilité d'une motion proposant la tenue d'un débat d'urgence. Je vous réfère à l'article 78, premier alinéa.

Deuxièmement, du consentement unanime de l'Assemblée, le 15 décembre dernier, on a discuté ici d'une motion formulée par le député de Rouyn-Noranda que vous avez pris la peine de lire tout à l'heure. On peut admettre que la motion d'aujourd'hui est quelque peu différente. On peut comprendre que des faits nouveaux ont pu se produire depuis le 15 décembre. Cependant, il faut réaliser que la motion du député de Rouyn-Noranda avait donné ouverture à un débat très large qui a permis de couvrir l'ensemble du sujet. Ce débat du 15 décembre démontre en outre que la crise est loin d'être soudaine. En conséquence, vu les responsabilités administratives du gouvernement en ces derniers jours de session, il me paraît inadmissible que reprenne, du moins en partie ou au complet, un débat qui s'est déjà déroulé au cours de la même session.

Je vous signale, M. le député de Sainte-Marie, un argument additionnel. Il est vrai que la motion du 15 décembre était survenue comme motion non annoncée du consentement unanime de l'Assemblée nationale, ce qui permettait d'exprimer un voeu même si, à proprement parler, l'Assem- blée nationale n'avait pas compétence en la matière. C'est pourquoi je déclare votre motion irrecevable.

M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, je n'ai pas du tout l'intention, évidemment, de contester votre décision. Je voudrais seulement, M. le Président, si vous me le permettez, souligner le paradoxe et l'extrême déchirement que vous avez dû ressentir, vous un ancien défenseur des gens de l'air, d'avoir à refuser ce débat d'urgence.

Le Président: M. le député de Sainte-Marie, dois-je vous souligner que vous aussi vous êtes victime de paradoxe, vous qui avez déjà occupé des bureaux, j'ai appris qu'hier c'était le vôtre qui l'était.

M. Bellemare: M. le Président, en vertu de 34.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

Travaux parlementaires

M. Bellemare: En vertu de 34, M. le Président, est-ce qu'il me serait permis de demander à l'honorable leader du gouvernement s'il n'y aurait pas possibilité, vu que la commission parlementaire ce matin sur le bill 233 était refusée, que les projets de loi 266, 269 et 283 puissent subir présentement le rapport des commissions et aussi les deuxième et troisième lectures, puisqu'il y a unanimité de la part de tous les intervenants et d'après les preuves qu'ils nous ont données, pour hâter véritablement l'adoption en deuxième et troisième lecture de ces projets de loi?

M. Charron: M. le Président, le député fait légèrement erreur. Il n'y a que trois projets de loi sur les quatre qui avaient été déférés à des commissions parlementaires ce matin.

Une Voix: Seulement trois.

M. Charron: Seulement trois sur quatre, d'accord. Effectivement, il n'y en a que trois sur quatre qui ont été acceptés par les commissions ce matin, une ayant été reportée à quelques semaines. Malheureusement, l'heure de la fin des travaux des commissions ce matin n'a pas permis l'impression des rapports pour la séance de 14 heures, ce qui sera fait demain. Je pense que le député sera de bonne guerre demain de proposer effectivement ce qu'il propose aujourd'hui quand le rapport sera déposé, au moment de la période de questions.

M. Bellemare: Est-ce que je dois comprendre qu'il y aura sanction en même temps dans l'après-midi?

M. Charron: Non, M. le Président. J'ai eu l'honneur de parler au lieutenant-gouverneur du

Québec ce matin qui me demandait de s'absenter de la capitale pour la journée de demain. Je lui ai donné la permission. J'espère que l'Assemblée ne m'en fait pas grief. Je lui ai demandé d'être plutôt présent avec nous jeudi pour les sanctions. J'ai assuré les gens qui sont venus témoigner ce matin que sur un projet de loi en particulier, le projet de loi no 269, la sanction aurait effectivement lieu jeudi.

M. Bellemare: Merci, M. le Président. En vertu de 34. Il y a une exception qui est prévue à notre règlement, celle de souhaiter, à l'occasion du trentième anniversaire de naissance de Mme le Président, nos meilleurs voeux de bonne fête à cette occasion.

Mme le Vice-Président: Mme le député.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais, si vous me le permettez, Mme la Présidente, vous associer au député de Roberval, le whip de l'Opposition officielle, qui célèbre également aujourd'hui son anniversaire de naissance.

Mme le Vice-Président: Je vous remercie tout de même de ces petites entorses au règlement. J'imagine qu'il ne faudrait pas souligner les anniversaires des 110 députés de l'Assemblée nationale. Quant au mien, je pense qu'on pourrait commencer à l'oublier. Ce n'est pas 30, M. le député, c'est 53. M. le whip.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Madame, en m'associant bien volontiers, au nom du Parti québécois, aux meilleurs voeux qui puissent vous être exprimés, je voudrais donner les avis à l'Assemblée. Un avis en particulier, la commission des engagements financiers tiendra sa réunion mensuelle le jeudi 1er mars prochain, à la salle 91-A, aux fins d'étudier les engagements financiers des derniers mois. Je ne sais plus exactement à quel mois on est rendu. Décembre, je crois. Décembre, madame.

Je donne un aperçu aussi des travaux de la Chambre pour les prochaines heures. Je n'ose pas dire la prochaine semaine. Nous allons immédiatement reprendre et achever, en cours de séance aujourd'hui, j'espère, la loi 116 qui sera immédiatement déférée à la commission parlementaire pour étude article par article. Par la suite, nous reprendrons le débat laissé un peu en plan sur le projet de loi 128 qui concerne les congés de maternité pour les Québécoises qui vivent sous des décrets qui fixent leurs conditions de travail. Ensuite, le projet de loi no 110 et ensuite, le projet de loi no 84. (15 h 40)

Dépendant de l'allure des travaux d'aujourd'hui — ce ne sont pas des menaces, c'est une réserve que je me garde — il est possible que l'Assemblée ne se réunisse pas demain matin, donc à 15 heures seulement demain après-midi, pour achever le débat sur la motion du député de D'Arcy McGee. Mais tout cela dépend un peu de l'allure des débats aujourd'hui.

Je voudrais que chacun sache que les heures de la séance de la journée de demain ne seront fixées qu'à l'ajournement ce soir.

M. Bellemare: Est-ce que je dois comprendre, puisque c'est le leader qui est responsable de l'horaire, que le projet de loi no 110 ne viendra que demain vu que, ce soir, il n'y aurait pas possibilité de finir le projet de loi no 116, plus le projet de loi no 128 et le projet de loi no 84? Est-ce que je dois comprendre que le projet de loi no 110 ne viendra que jeudi à 15 heures?

M. Charron: Non. D'abord il y a deux choses, Mme le Président. Je crois que j'ai fixé le projet de loi no 110 immédiatement après le projet de loi no 128 et avant le projet de loi no 84, d'une part, première correction. La deuxième, c'est le député qui est mieux placé que moi pour le dire; s'il croit qu'il est impossible de l'atteindre ce soir, nous siégerons demain. Mais moi, je crois encore, Mme le Président, que la plupart des députés désireux et soucieux d'intervenir sur le projet de loi no 116 l'ont déjà fait, qu'il est donc possible, prévisible que ce débat soit terminé ce soir pour 18 heures, et qu'en soirée on puisse étudier et le projet de loi no 128 et le projet de loi no 110. Enfin, on verra.

Mme le Vice-Président: Affaires du jour. M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Je propose que vous appeliez l'article 7) de notre feuilleton d'aujourd'hui.

Mme le Vice-Président: II s'agit donc de la reprise du débat sur la motion de M. le ministre de l'Agriculture proposant que le projet de loi no 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, soit maintenant lu la deuxième fois. C'est M. le député de Saint-Hyacinthe qui avait la parole.

Projet de loi no 116

Deuxième lecture (suite)

M. Fabien Cordeau (suite)

M. Cordeau: Mme la Présidente, hier, lors de mon intervention concernant le projet de loi no 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, j'ai spécifié que je n'avais aucun ressentiment envers l'Union des producteurs agricoles et que les producteurs agricoles avaient droit à leur syndicat.

J'ai également regretté que le gouvernement ne nous ait pas donné l'occasion d'entendre en commission parlementaire ceux qui s'opposent au projet de loi tel que présenté, car l'opposition ne vient pas que des dissidents, mais, de plus en plus, de gros, de moyens et de petits cultivateurs indépendants s'opposent à ce projet de loi.

En terminant, hier soir, j'étais à vous faire connaître l'opinion des dirigeants de la Coopérative agricole de Granby sur le projet de loi, opinion

contenue dans un télégramme signé par le président de cette coopérative, M. Michel Lemire.

Permettez-moi, Mme la Présidente, de vous citer quelques paragraphes de ce télégramme. "La Coopérative agricole de Granby désire vous manifester son plus profond désaccord et sa grande appréhension devant le projet de loi no 116 visant à modifier la Loi sur la mise en marché des produits agricoles tel que proposé à l'Assemblée nationale. Nous ne pouvons accepter ce projet de loi dans sa forme actuelle. La Coopérative agricole de Granby considère que le projet de loi no 116, dans sa formulation actuelle, risque d'entraver de manière directe l'autonomie de l'organisation coopérative de la mise en marché des produits agricoles au Québec et d'entraîner à brève échéance la mort de la coopération en matière agricole. "Le projet de loi no 116 risque de détruire la coopération dans un secteur clé de notre économie, là où elle a toujours fait preuve d'audace et joué un rôle prépondérant en dotant les producteurs québécois des outils nécessaires à leur développement et à la croissance du Québec. A titre d'exemple, l'article 1 du projet de loi constitue une tentative déguisée de vider de son sens l'article 2 de la loi actuelle sur la mise en marché des produits agricoles en en restreignant considérablement la portée et l'application. Cet article risque d'entraîner la paralysie complète et totale de l'activité sociale et économique de la coopération agricole.

Ce projet de loi no 116 confère des pouvoirs exorbitants aux offices de producteurs et risque de couper le lien essentiel du membre avec sa coopérative. Les nombreuses années de labeur consacrées par les coopérants à l'édification d'un véhicule économique valable ferait l'objet d'une expropriation injustifiée, camouflée et contraire aux intérêts des coopérateurs du Québec.

M. Grenier: Mme le Président, je m'excuse d'interrompre mon collègue...

Mme le Vice-Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: ... mais je pense que sur une question aussi vitale que celle que nous sommes en train de débattre actuellement, qui soulève l'intérêt de toute la province, il est pénible de constater que le ministre n'est pas présent et qu'on n'a pas quorum dans cette Chambre.

M. de Belleval: Mme le Président...

M. Grenier: On n'a pas quorum dans cette Chambre, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Sur la question de règlement, M. le ministre.

M. de Belleval: ... je crois que le député va à l'encontre du règlement.

M. Grenier: Mme le Président, je ne vais pas à l'encontre du règlement, on n'a pas quorum et le ministre est absent, à moins que je ne voie pas clair! Habituellement, on le voit.

Mme le Vice-Président: Nous vérifions immédiatement le quorum. Je crois que nous avons quorum. J'ai vu M. le ministre à l'Assemblée il y a quelques instants. Nous vérifions.

Nous avons quorum.

M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Je continue à citer un paragraphe du télégramme envoyé par la Coopérative de Granby au ministre de l'Agriculture.

Des Voix: Quelle date?

M. Cordeau: Le 13 décembre 1978. "Reconnaître au seul office producteur le pouvoir absolu de contrôler intégralement tous les aspects de la production et de la mise en marché des produits agricoles équivaudrait à créer de grands trusts syndicaux agricoles provoquant ainsi la disparition des coopératives".

Une Voix: Est-ce qu'il y avait une réponse?

M. Cordeau: S'ils veulent que je lise un autre article de la Coopérative de Granby qui a paru au mois de janvier, je peux leur en lire un autre. C'est un résumé de l'autre télégramme qu'elle a fait parvenir au ministre de l'Agriculture. Elle a fait paraître un article exprimant sa dissidence au projet de loi no 116. C'était au mois de janvier.

Dans la revue Le coopérateur agricole du mois de janvier, on peut lire ce qui suit: "Or, en prenant connaissance du projet tel que soumis en première lecture, les autorités de la Coopérative fédérée et quelques-unes de ses plus importantes coopératives sociétaires constataient que le projet de loi allait beaucoup plus loin que le mentionnaient les notes explicatives qui le précédaient. Une étude rapide, mais en profondeur, fut faite et communiquée au conseil d'administration de la Fédérée alors en réunion. On avait décelé que, volontairement ou non, les légistes accordaient aux offices de producteurs des pouvoirs extrêmement larges qui risquaient de brimer la liberté des producteurs d'abord et qui mettaient ensuite en péril l'existence même des coopératives agricoles. La Régie des marchés agricoles elle-même pouvait y perdre ses plus belles plumes".

Le ministre clame à tout venant qu'il a déposé à la commission parlementaire de l'agriculture, qui a étudié le projet de loi no 90, des amendements concernant le projet de loi que nous devons étudier présentement. Je ne comprends pas que dans le Soleil du 6 février 1979, dans un article de M. Marc Saint-Pierre, il est dit en gros titre: "M. Garon déposera des amendements au bill 116". Je vous cite une partie de l'article. "Des amendements au projet de loi no 116 réclamés par les coopératives agricoles du Québec seront déposés

en commission parlementaire lors de l'étude de la pièce législative article par article, à l'issue du débat en deuxième lecture. C'est ce qu'a indiqué hier — le journal date du 6, hier, ça devait être le 5 — le ministre de l'Agriculture, M. Jean Garon, au cours d'une conférence de presse".

Pourquoi faire une conférence de presse pour dire que des amendements seront déposés quand le ministre de l'Agriculture dit qu'il les a déposés? Le ministre n'a pas précisé... (15 h 50)

M. Garon: Mme le Président, je vais vous donner l'explication immédiatement...

M. Cordeau: Mme le Président, le ministre aura son droit de réplique...

Mme le Vice-Président: Même si le ministre n'est pas d'accord avec l'intervenant actuellement, il pourra évidemment exercer son droit de réplique.

M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Je demande au ministre pourquoi il ne dépose pas devant cette Chambre les amendements qu'il dit qu'il...

M. Garon: Ce n'est pas une réplique, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Je m'excuse de devoir vous interrompre, M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le ministre de l'Agriculture soulève une question de règlement.

M. le ministre.

M. Garon: Une question de privilège. Quand le député dit que j'ai convoqué une conférence de presse pour faire des déclarations comme celle qu'il vient de mentionner, c'est faux. Simplement, c'est que, le 5 février, je donnais une conférence de presse sur la conjoncture économique agricole et, à ce moment-là, quelqu'un m'a posé une question me demandant s'il y aurait des amendements et j'ai dit oui, qu'il y en aurait.

Une Voix: Ce n'est pas déposé!

M. Cordeau: Cela ne change absolument pas le fond de la question; ce que j'ai dit reste dit et reste la vérité.

Voilà, Mme la Présidente, des témoignages d'organismes agricoles qui ont décelé, à la lecture de ce projet de loi, des failles qui devront être comblées en commission parlementaire lors de son étude article par article et qui prouvent que nous, de l'Union Nationale, avons eu raison de nous opposer, le 21 décembre dernier, à l'adoption de ce projet de loi tel que soumis par le ministre et qu'il voulait nous faire adopter coûte que coûte.

Mme la Présidente, je vous lirai maintenant un autre témoignage, une autre observation parue dans la Presse. Cet écrit est de M. Paul Pouliot, un type qui s'y connaît en agriculture et qui a fait connaître sa pensée. "Le ministre Jean Garon s'est placé dans une situation délicate avec son désormais célèbre projet de loi 116 et se trouve en quelque sorte coincé entre les deux poids-lourds du monde agricole québécois, le syndicalisme et la coopération. D'un côté, il y a l'Union des producteurs agricoles représentant environ 40 000 cultivateurs, qui ne cesse de réclamer des pouvoirs complets sur toutes les productions agricoles et leur commercialisation et, de l'autre, des coopératives agricoles dont le chiffre d'affaires annuel global atteint les $2 milliards et qui représentent plusieurs milliers d'agriculteurs qui se sentent nettement menacés par la nouvelle législation. "A l'examen du texte de ce projet de loi qui, incidemment, a besoin d'être précisé à plusieurs articles, on ne peut s'empêcher de constater que les implications de cette législation sont lourdes de conséquences, non seulement pour les cultivateurs eux-mêmes, mais aussi pour les consommateurs ".

Si le temps me le permet tantôt, je vous ferai connaître quelques opinions de consommateurs. Je continue. "Par ailleurs, malgré les tentatives de rapprochement, il existe un malaise certain entre les coopératives agricoles et l'Union des producteurs agricoles. L'inquiétude a grandi constamment dans le secteur coopératif avec la croissance et la puissance de l'influence de l'UPA".

Mme la Présidente, ce projet de loi apporte des amendements à la Loi de mise en marché des produits agricoles à la suite du jugement de la Cour suprême du Canada qui donne aux seules provinces le droit de percevoir des redevances sur la production et la mise en marché des produits agricoles à l'intérieur de chacune des provinces. Pourquoi le gouvernement veut-il, par ce projet de loi, déléguer au syndicalisme agricole sa juridiction dans ce domaine? Dans un éditorial paru au mois de décembre 1978, de M. Roméo Lalande, ancien sous-ministre, et bougrement plus renseigné en matière agricole que le ministre actuel, on peut lire ce qui suit: "Trop, c'est trop. En vertu de la législation proposée, le gouvernement voudrait conformer sa juridiction dans ce domaine pour ensuite la déléguer en totalité et en exclusivité au syndicalisme agricole".

Plus loin, il ajoutait: La législation soumise à l'adoption de l'Assemblée nationale renferme des implications incompatibles avec le bon sens et la justice. Dans un pays qui se targue de respecter la plus grande liberté jusqu'à aller souvent aux limites de la licence et à traîner devant l'opinion publique ceux qui veulent la limiter, comment concilier la volonté gouvernementale de donner au seul pouvoir discrétionnaire du syndicalisme agricole le droit de déterminer qui sera producteur agricole, quand, où, comment et combien il pourra cultiver son sol ou pratiquer l'élevage afin de favoriser l'augmentation des prix? Et si, par effet d'une plus grande productivité ou d'une meilleure utilisation de la technique moderne, il s'ensuivait une

production excédentaire, l'agriculteur serait passible de saisie, d'amendes et, en plus, de la confiscation de son droit de produire, par conséquent, de son droit au travail. De plus, le producteur agricole se voit exclure l'accès aux cours de justice établies pour se défendre. Son seul recours possible réside devant son office de producteurs qui l'a déjà jugé et condamné. Il n'y a pas un seul clochard, pas un seul criminel d'habitude, pas même le couple Cossette-Trudel à qui un pareil traitement est réservé.

Des Voix: Oh!

M. Cordeau: Quant aux amendes, elles vont grossir le trésor du syndicat.

Voilà à notre avis, Mme la Présidente, le...

Mme le Vice-Président: M. le député, vous aviez terminé...

M. Cordeau: Mais vous savez que j'ai été interrompu pendant quelques minutes par le ministre de l'Agriculture et par d'autres.

Mme le Vice-Président: Ce n'est tout de même pas pour quelques minutes, M. le député. Il vous restait moins de quinze minutes. Vous avez déjà terminé. A moins que nous n'ayons le consentement unanime de cette Assemblée, je me vois dans l'obligation de vous demander d'en terminer là. Continuez, M. le député.

M. Proulx: Trop, c'est trop!

M. Cordeau: N'oublions pas que jamais il ne peut y avoir de transformation ni de production sans consommation. En terminant, je tiens à dire que je voterai en deuxième lecture contre ce projet de loi tel que présenté. Je crois sincèrement qu'en agriculture comme ailleurs, l'initiative privée a encore sa place et que les agriculteurs n'aiment pas à être encagés, encabanés, que cela se fasse par leur organisme syndical ou par tout autre organisme. Je préviens le ministre que, par ses fonctionnaires, il s'est fait embarquer royalement dans une méchante galère...

Mme le Vice-Président: M. le député, malheureusement, nous n'avons pas le consentement que vous terminiez. Malheureusement, tous les membres de cette Assemblée sont soumis aux mêmes règles. Nous n'avons pas le consentement. Je vous ai fait remarquer tantôt que nous avons déjà dépassé de deux minutes. Je ne puis vous l'accorder. Je vais vous faire une suggestion, M. le député de Saint-Hyacinthe. Passez donc votre conclusion à un de vos collègues qui prendra la parole éventuellement et qui, à ce moment-là, tout le monde le saura, vous n'aurez pas dépassé... Je n'ai pas de consentement, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Donnez-moi une minute et j'aurai terminé. En terminant, je tiens à dire que si le gou- vernement n'apporte pas des amendements majeurs à ce projet de loi, ce projet de loi deviendra une épave du Parti québécois.

Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Grenier: Mme le Président — je m'excuse auprès du chef de l'Union Nationale — avant l'intervention du chef de l'Union Nationale, j'aimerais bien tout d'abord qu'on ait quorum. C'est la première chose pour une loi aussi importante et qu'on arrête de se promener, chez les ministériels, à gauche et à droite. Cela n'intéresse personne chez les ministériels, ce projet de loi. Qu'on vienne en Chambre et que le ministre soit présent. (76 heures)

Mme le Vice-Président: Sur la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: Mme la Présidente, sur la question de règlement que vient de soulever le député de Mégantic-Compton qui n'en est pas une à la limite, je voudrais simplement vous dire que nous ne sommes pas dupes et que les gens du côté ministériel ont bien compris le jeu que joue l'Union Nationale. Nous n'allons certainement pas être complices d'une telle action.

M. Brochu: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: M. le député, votre intervention...

M. Bellemare: Je soulève une question de règlement. L'honorable député...

Mme le Vice-Président: Alors, nous allons entendre une nouvelle question de règlement. M. le leader de l'Union Nationale, je vous demanderais, ainsi qu'à tous et à chacun, de ne pas abuser de ces questions de règlement. Ceci est à l'intention des députés qui sont déjà intervenus.

M. le leader de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Ce n'est pas le député pee-wee de Vanier qui va venir nous donner des ordres et nous dire comment procéder en Chambre. Nous avons une discipline et nous allons la suivre. Ce ne sont pas de ses exhortations à la volée, ce n'est pas au forum qu'on va prendre nos leçons.

M. Grenier: C'est cela, très bien.

Mme le Vice-Président: Sur la question de privilège, M. le député.

M. Bertrand: Mme la Présidente, le député de Johnson vient de faire allusion au forum. J'ai bien entendu le député de Johnson.

M. Bellemare: Oui, oui, oui.

M. Bertrand: Mme la Présidente...

M. Bellemare: Otez donc vos mains dans vos poches. Otez donc vos mains dans vos poches.

Mme le Vice-Président: M. le leader, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Commun que vous êtes! Mme le Vice-Président: S'il vous plaît!

M. Bertrand: Mme la Présidente, question de privilège. Je voudrais faire remarquer au député de...

Mme le Vice-Président: Je vous entends, M. le député de Vanier.

M. Grenier: ... parlé du forum.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! Je vous ferai remarquer que M. le député de Vanier se lève sur une question de privilège. S'il vous plaît! M. le député, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît!

Je vais encore être obligée de vous dire que c'est mon anniversaire et que vous n'avez pas le droit de me faire cela aujourd'hui.

M. le député de Vanier, sur votre question de privilège.

M. Bertrand: Mme la Présidente, je vous laisse juge d'évaluer si c'est une question de privilège ou non, mais je pense que vous présidez mieux ces travaux que ne le ferait le député de Johnson s'il était à votre place.

Je voudrais simplement souligner que je me fous éperdument que le député de Johnson veuille se mettre des députés sous la dent et qu'il traite à gauche et à droite les gens de pee-wee ou d'autres expressions du même genre. Mais je voudrais dire une chose, Mme la Présidente, et j'en fais formellement une question de privilège. Je ne l'accepterai pas. Le député de Johnson se rappelle que la dernière fois qu'il a fait une telle allusion, cela lui a été reproché vertement et il a dû, le lendemain, au moment où on soulignait son anniversaire de naissance, faire des excuses.

M. Bellemare: Pas du tout.

M. Bertrand: Vous avez fait des excuses publiquement.

M. Bellemare: Pas sur cela.

M. Bertrand: Je voudrais dire, Mme la Présidente, que personne n'est dupe ici et on sait exactement à quoi le député de Johnson veut faire allusion quand il parle du forum. Je n'accepterai pas que le député de Johnson...

M. Bellemare: Vous avez trahi votre famille, même votre famille.

M. Bertrand: ... qui prétend continuellement ici donner des leçons à tout le monde se serve de cette allusion pour l'envoyer à gauche et à droite, il sait de quoi je parle; le député de Johnson sait de quoi je parle... Je n'accepterai pas, Mme la Présidente, qu'on aille chercher dans le passé d'hommes politiques, que je considère comme avoir été des grands serviteurs de la nation québécoise, des allusions...

M. Bellemare: Que vous avez trahis.

M. Bertrand:... et qu'on les serve ainsi à ceux qui, aujourd'hui, essaient de faire le même travail.

M. Bellemare: Vous avez trahi.

M. Bertrand: Je n'accepterai pas cela du député de Johnson. Jamais.

Pour conclure, Mme la Présidente, je demanderais au député de Johnson qui, la dernière fois, avait reconnu qu'il avait renversé son verre, non pas en mon nom personnel, mais au nom des gens qu'il connaît et qu'il sait affectés par ce genre d'allusion mesquine, d'avoir la gentillesse — au nom de ces gens-là — de retirer ce genre d'allusion perfide.

M. Bellemare: Je vais vous traiter de traître. C'est cela que vous êtes, un traître, à votre famille.

Mme le Vice-Président: A l'ordre! A l'ordre! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Je sais qu'il est difficile parfois, quand les uns et les autres font des allusions à ces choses qui se sont déjà passées... Je vous demanderais que nous ne rappelions, ni les uns, ni les autres, les choses qui se sont passées et qu'on s'efforce de penser surtout à ce qui est positif et non pas à ce qui parfois peut blesser. Je vous demanderais, M. le leader de l'Union Nationale, si vous êtes d'accord avec moi que nous laissions tomber ce genre de choses qui ne sont pas évaluées de la même façon par les uns et les autres.

C'est simplement cela que je faisais remarquer et je pense que, si vous ne vous leviez pas sur cette question maintenant, nous comprendrions ensemble que vous ne voulez plus penser à ce genre d'accusation, en fait, si on peut dire, que vous avez soulevée. Alors, nous considérerions que l'incident est clos, si vous permettez, M. le député de Vanier et M. le leader de l'Union Nationale, et je donnerais la parole à M. le chef de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Des milliers de gens vont le lire.

Mme le Vice-Président: S'il vous plaît!

M. Rodrigue Biron

M. Biron: Mme la Présidente, je ne voudrais pas que ce temps soit pris sur mon temps de

parole. Je voudrais tout simplement, sur le projet de loi no 116, essayer d'élever le débat un petit peu, de faire le tour complet du problème parce qu'on a présenté le problème, du côté ministériel, tout simplement en disant que le projet de loi no 116, c'est pour boucher un trou qui a été causé par un jugement de la Cour suprême. Si ce n'était que cela, le projet de loi no 116 aurait été adopté il y a belle lurette et certainement dans le courant du mois de décembre, tout simplement pour boucher le trou de la Cour suprême.

Mais on a voulu, de la part du gouvernement, faire beaucoup plus que cela en apportant le projet de loi no 116. On a voulu justement intervenir dans une guerre entre géants du monde agricole, le syndicalisme agricole d'un côté et les coopératives agricoles de l'autre. Le gouvernement a voulu intervenir directement dans cette bataille qui se mène à l'heure actuelle, dans cet affrontement d'organismes agricoles qui appartiennent aux producteurs agricoles eux-mêmes, de ces deux organismes qui, aujourd'hui, s'affrontent. Le gouvernement, avec le projet de loi no 116, a voulu prendre carrément position pour un organisme au détriment de l'autre. C'est-à-dire que le projet de loi no 116 veut prendre carrément position en faveur du syndicalisme agricole contre les coopératives agricoles. Si on continue et si on adopte le projet de loi no 116 tel qu'il est présenté aujourd'hui, c'est la destruction à plus ou moins long terme des coopératives agricoles au Québec.

C'est pour cela que l'Union Nationale se bat à l'heure actuelle. Si le ministre de l'Agriculture avait voulu déposer les documents qu'il a reçus des coopératives agricoles et, en particulier, de la Coopérative fédérée de Québec, pour renseigner toute la population du Québec et spécialement la population agricole du Québec, pour renseigner sur ce que pensent les coopératives au Québec du projet de loi no 116, je pense qu'il y aurait beaucoup de gens dans cette Chambre, et même des gens du parti au pouvoir, qui auraient changé d'idée sur le projet de loi no 116.

Mme la Présidente, on a réussi à avoir une copie d'un mémoire, celui de la Coopérative fédérée de Québec, qui a été présenté le 16 décembre dernier au ministre de l'Agriculture. C'est un mémoire de quatorze pages qui, tout au long, fait le procès du projet de loi no 116 et qui dit clairement ceci: "Si la loi 116 n'avait que deux articles, l'article 4 et l'article 7, les coopératives l'accepteraient immédiatement." Ce mémoire dit aussi: "La loi 116 veut détruire les coopératives au Québec si on l'accepte telle quelle." C'est au nom des 16 800 membres usagers constituant ces coopératives que l'Union Nationale, aujourd'hui, se bat pour améliorer ce projet de loi qui va contre les coopératives agricoles au Québec. (16 h 10)

Mme la Présidente, j'aurais aimé que le ministre de l'Agriculture dépose le mémoire qu'il a reçu de la Coopérative fédérée et des coopératives agricoles. Nous aurions pu savoir exactement ce qui se passe, mais le ministre de l'Agriculture n'a pas voulu faire connaître la vérité à la population du

Québec. Il a caché la vérité sur cette guerre entre ces deux géants du monde agricole. Le pire, Mme la Présidente, dans tout cela, c'est qu'on a des coopératives et le syndicat agricole qui s'affrontent. Ces gens engagent des permanents, engagent des fonctionnaires, engagent du personnel, engagent des avocats pour se faire la lutte et qui paie pour cela? Le consommateur québécois, premièrement, paie, mais le producteur agricole paie lui aussi et il est pire parce qu'il paie des deux côtés. Il est obligé de fournir de l'argent à sa coopérative agricole pour faire la guerre à son syndicat agricole et il est obligé de fournir de l'argent, d'autre part, au syndicat agricole pour faire la guerre à la coopérative, avec la bénédiction du ministre de l'Agriculture.

Je pense que c'est le temps, Mme la Présidente, qu'on mette fin à cette guerre et qu'on détermine une fois pour toutes où cela commence les pouvoirs et les droits du syndicalisme agricole au Québec et où cela commence et où cela finit les droits et les pouvoirs des coopératives agricoles au Québec. Qu'on arrête la guerre une fois pour toutes dans le monde agricole. C'est cette guerre aujourd'hui qui existe et c'est cette guerre que le ministre de l'Agriculture veut justement alimenter au Québec en nous présentant son projet de loi no 116. L'Union Nationale veut prendre la défense des petits producteurs agricoles, veut prendre la défense de ceux qui veulent conserver leurs coopératives au Québec à l'heure actuelle. C'est pour cela, Mme la Présidente, que nous intervenons fortement sur ce projet de loi no 116.

Mme la Présidente, le projet de loi no 116, si vous voulez, nous allons en analyser ensemble les grands principes. D'abord, on apporte quelque chose de nouveau à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. On dit: Maintenant, le syndicalisme agricole non seulement va contrôler la mise en marché, mais va contrôler aussi la production. Cela n'existait pas autrefois, le contrôle de la production. Autrefois, le gouvernement ou ses organismes s'arrêtaient au chemin, à la rue, n'entraient pas dans la grange. Maintenant, le gouvernement ou ses organismes et des fonctionnaires de l'Agriculture vont entrer dans la grange du producteur agricole et vont dire: Tu vas faire telle chose. Tu vas faire telle chose. Ils vont aller partout à travers la ferme et sur la propriété même du producteur agricole et ils vont lui dire quoi faire, comment faire et à quel moment le faire. L'Union Nationale ne peut pas accepter ce premier principe. Cela fait 20 ans qu'on a au Québec une Loi sur la mise en marché des produits agricoles, et même un peu plus, et le jugement de la Cour suprême n'a pas parlé de réglementer la production là-dessus. On n'a pas eu de problème de ce côté.

Il y a autre chose qui intervient, un autre principe qu'on voit aussi dans la loi 116 et c'est un principe très grave, Mme la Présidente. C'est qu'on veut dans la loi donner des pouvoirs au syndicalisme agricole aujourd'hui d'être à la fois juge, partie, justicier, bourreau et profiteur des amendes. Mme la Présidente, on ne peut pas accepter

cela, nous de l'Union Nationale, au nom des producteurs agricoles. Il n'y a pas un producteur agricole qui peut accepter cela. On donne tous les pouvoirs d'un bout à l'autre aux offices de producteurs pour mettre à l'amende, pour juger, pour se faire justice eux-mêmes, pour enlever des quotas, pour couper les droits de production; donc, le droit de vie des producteurs agricoles. C'est un droit de vie ou de mort. Ensuite, on ramasse l'argent et on a le droit de le garder. C'est cela qui est dans le projet de loi 116. C'est un principe qu'on ne peut accepter nulle part et c'est pourtant cela qu'on met dans le projet de 116 aujourd'hui. Les producteurs agricoles vont devoir payer et c'est le gouvernement du Parti québécois qui dit aux producteurs agricoles: Payez, vous autres. Vous êtes capables de payer. L'Union Nationale ne peut pas accepter cela. C'est au détriment des producteurs agricoles, Mme la Présidente.

On va même plus loin. Dans le même article, dans le même principe, une fois qu'on met à l'amende, une fois qu'on saisit et une fois qu'on enlève les quotas de production, une fois qu'on fait tout avec cela, on dit: "interdire la production ou la mise en marché (...) prévoir l'annulation, la suspension ou la réduction définitive ou temporaire du contingent d'un producteur en raison de la violation par lui de la présente loi — virgule — d'un plan conjoint, d'une ordonnance, d'un règlement, d'une convention dûment homologuée ou d'une décision arbitrale". Mme la Présidente, on donne le droit à l'office des producteurs de saisir, de couper, de tout faire, si le producteur agricole va de travers sur tout cela.

Mme la Présidente, j'ai voulu en savoir un peu plus et dire: Qu'est-ce qui va arriver avec notre producteur agricole? Dans le domaine des oeufs, Mme la Présidente, c'est cela. Prenons les règlements seulement. Il n'est pas question de convention, il n'est pas question de loi là-dessus encore et il n'est pas question d'ordonnance. Ce sont tout simplement les règlements dans le domaine des oeufs, ce que le producteur agricole est obligé d'apprendre par coeur. C'est cela qu'on veut nous faire faire aujourd'hui.

Le chapitre 36, c'est cela que le producteur agricole devrait apprendre par coeur aussi. Et dans le domaine du lait, on en a encore plus épais que cela; il y a à peu près deux fois plus épais que cela de règlements dans le domaine du lait. Si on adopte le projet de loi no 116 tel qu'il est à l'heure actuelle, moi, je vais donner un bon conseil aux producteurs agricoles, à chacun d'eux: s'il veut rester en agriculture, il devra s'engager un avocat à temps plein pour apprendre la loi, les règlements, les ordonnances et étudier tout cela d'un bout à l'autre, pour le défendre au cas où son syndicat agricole ou un office de producteurs mettrait la main sur quelque chose qui lui appartient en propre. Son droit de produire et son droit de propriété, c'est à lui. Il faudra qu'il apprenne cela par coeur, notre producteur agricole. Il va falloir qu'il le sache, ce sont les règlements dans le domaine des oeufs, et le lait c'est encore pire que cela.

Est-ce que le ministre de l'Agriculture a voulu donner de l'ouvrage aux avocats, une fois que le ministre des Institutions financières leur en eut enlevé, par la Loi sur l'assurance automobile? On a dit: Les avocats n'ont pas assez d'ouvrage, il faut leur donner quelque chose. Et on complique la vie des producteurs agricoles. Je ne suis pas d'accord sur cela. Je crois que le producteur agricole doit avoir le droit de vivre convenablement, puis il n'est pas obligé de s'engager un avocat pour travailler pour lui. La loi dit que s'il passe à côté d'un règlement, d'une ordonnance ou de la loi, on peut le saisir, on peut lui couper son quota de production puis on peut avoir le droit de vie et de mort sur lui. Je ne suis pas seul à dire cela. La Coopérative fédérée de Québec dit exactement la même chose.

Si je lisais la lettre d'un bout à l'autre, vous verriez comment on attaque fortement et sérieusement le projet de loi du ministre de l'Agriculture dans ce sens. Mme la Présidente, je pense qu'il faut être sérieux de ce côté et dire: II ne faut toujours pas nuire à la production agricole et aux producteurs agricoles au Québec. Lorsque les députés du Parti québécois vont voter tout à l'heure sur ce projet de loi, il faudra savoir s'ils veulent voter contre les producteurs agricoles du Québec, et s'ils disent oui, ils vont voter contre le producteur agricole. Ils vont voter pour plusieurs règlements comme cela, que le producteur agricole va s'imposer d'un coup sec. L'Union Nationale ne veut pas accepter cela. Nous voulons accepter justement le droit de vivre pour le producteur agricole chez lui, le droit de conserver son syndicalisme agricole, mais aussi le droit de conserver sa coopérative. On ne veut pas tuer sa coopérative, comme on veut le faire actuellement en acceptant le projet de loi no 116 tel que présenté par le ministre de l'Agriculture.

Ces amendes qu'on veut imposer, ces coupures de quotas de production, il n'y a même pas de droit d'appel devant un tribunal quelconque. C'est l'Office des producteurs qui impose l'amende. Le producteur agricole va se retourner, il ira encore voir l'Office des producteurs et il dira: Je porte appel de ce jugement. Vous m'avez déjà condamné il y a trois semaines, et je porte appel de ce jugement.

C'est marqué exactement ici: "à condition que ce producteur ait eu préalablement l'occasion d'être entendu par l'office, et prévoir les conditions de réattribution d'un contingent." C'est ce qui est dans le projet de loi no 116 à l'heure actuelle. L'Union Nationale doit se battre là-dessus. Cela n'a pas de bon sens. Le quota de production, c'est sacré. Le droit de produire, le droit de travailler, cela appartient au producteur. On n'a pas le droit de lui couper cela. Que le gouvernement du Parti québécois nous dise: Nous allons donner le droit de donner des quotas de production, nous allons donner le droit de les augmenter et tout cela. Nous serons corrects sur cela, nous n'irons pas plus loin, nous allons dire: Nous sommes d'accord. Mais quand on commence à dire: On veut avoir le droit de prévoir

l'annulation, de couper les quotas, de suspendre les quotas, de mettre les producteurs à l'amende, on ne peut pas accepter cela dans un projet de loi. Il n'y a pas un député dans cette Chambre qui peut accepter de donner le droit à un office de couper le droit de travailler et de vivre à un producteur agricole, et l'Union Nationale se bat là-dessus.

C'est facile de dire: C'est seulement l'affaire de la Cour suprême. On devrait peut-être lire un peu plus loin ce que la Coopérative fédérée de Québec dit. Ce serait peut-être bon pour les membres du Parti québécois, ceux qui croient encore aux coopératives, de lire le mémoire présenté par la Coopérative fédérée de Québec qui dit: Nous revenons devant vous aujourd'hui, M. le ministre, pour vous souligner les dangers graves que comportent, pour les sociétés et pour tous les producteurs, membres ou non des coopératives, des dispositions des articles 1, 3 et 5 du projet de loi no 116 et pour vous demander non seulement de retirer ces amendements, mais de rétablir dans la Loi de la mise en marché des produits agricoles les dispositions qui protégeront les associations de producteurs constitués en coopératives, et empêcheront désormais toute intervention dans les relations entre les membres usagers et leur coopérative, par le biais des plans conjoints. C'est la coopérative qui dit cela. (16 h 20)

Un peu plus loin on va voir ce qui est dit au sujet de la coopérative. On parle des amendes qu'on va imposer, des suspensions, des quotas; c'est la Coopérative fédérée qui parle; ce n'est pas n'importe quel dissident, c'est la Coopérative fédérée. "Ces dispositions ont pour effet de placer le producteur à la merci totale de l'office des producteurs et à la merci totale de l'interprétation par cet office, bonne ou mauvaise, erronée ou non, tendancieuse ou non, fallacieuse ou non, de la loi, du plan conjoint, d'un règlement, d'une ordonnance, d'une convention homologuée, d'une sentence arbitrale ou d'une combinaison quelconque des dispositions contenues dans ces divers éléments selon la fantaisie de l'office. "Or, sans son contingent, sans son quota, sans son droit de produire, le producteur ne peut plus produire. C'est donc attribuer à l'office des producteurs un droit de vie ou de mort sur chaque producteur individuellement. Ce sont là, quant à nous, des dispositions qui portent atteinte aux droits de l'homme". Ce sont les coopératives qui disent ,cela. "Ce sont des dispositions qui permettent à un organisme non contrôlé d'intervenir à sa discrétion, directement, dans les droits fondamentaux de tout producteur et de tout agriculteur de pratiquer sa production et de produire chez lui comme il l'entend. Il s'agit du pouvoir d'attribuer la production à qui l'office veut bien et la retirer à qui il veut bien également. Un pouvoir de prohibition n'est pas un pouvoir de réglementation. Il s'agit de pouvoir empêcher un producteur d'exercer sa profession".

La coopérative ajoute ceci: "II va de soi que ces dispositions permettraient de porter un coup de mort aux coopératives agricoles". C'est de la

Coopérative fédérée du Québec, dans un mémoire déposé devant le ministre de l'Agriculture lui-même, le 16 décembre 1978. Lorsque le ministre va répondre tantôt, j'aimerais bien qu'il nous dise pourquoi il n'a pas déposé le mémoire sur la table de l'Assemblée nationale alors que les députés ont été forcés d'essayer d'avoir des mémoires de toutes autres façons. Il aurait été bon de savoir ce que la Coopérative fédérée pense d'un bout à l'autre de ce projet de loi.

Il y a une autre chose qui me chicote aussi, un autre principe. On donne le droit à l'office des producteurs de se porter acquéreur — on ne dit pas comment — en tout ou en partie et de disposer ou affecter en tout ou en partie au paiement des dépenses n'importe quelle production de producteur. On lui donne aussi la permission de la création de réserves, à l'office des producteurs. On dit même: "Le paiement des dépenses et des pertes résultant de la mise en marché d'un produit sera attribué aux producteurs". On veut mettre en marché et on pense déjà à des pertes. Il ne faut pas penser à des pertes, dans ce domaine-là, il faut penser à de la profitabilité, il faut penser à quelque chose qui rapporte aux producteurs agricoles. On commence déjà à dire: Si on fait des pertes, on va aller saisir tes affaires. On commence déjà à lui dire: Nous voulons nous créer des réserves, à l'office des producteurs. La réserve, c'est le producteur agricole, chez lui, qui en a besoin. S'il veut prendre de l'expansion, s'il veut agrandir sa grange, s'il veut acheter de nouveaux animaux ou acheter de la machinerie agricole ou rénover sa maison, c'est le producteur agricole qui a besoin de ces réserves, cela ne doit pas aller dans les mains des offices n'importe comment.

Si l'Union Nationale se bat contre ce projet de loi, c'est justement parce qu'on veut enlever des droits à nos producteurs agricoles et c'est pour ça qu'on va continuer à se battre jusqu'au bout, tant que le ministre de l'Agriculture n'aura pas compris qu'il doit servir les intérêts des producteurs agricoles avant de servir n'importe quelle clique de ses amis quelque part au Québec.

Il y a des problèmes dans le domaine agricole. Le ministre va me dire que c'est compliqué, c'est vrai; c'est vrai qu'il y a des problèmes. D'autres provinces ont donné l'exemple. La Colombie-Britannique en particulier, en avril 1977, a créé une commission permanente de l'agriculture avec pour fonction une étude exhaustive des facteurs qui influencent le prix de la nourriture en Colombie-Britannique et pour ce faire un examen détaillé de tous les aspects des systèmes de production, de transformation et de distribution des produits alimentaires à travers le Québec. C'est une province qui a voulu faire quelque chose.

Mme la Présidente, puisque vous me faites signe que j'achève, je vais terminer en vous lisant ce que disait, dans un mémo à ses membres en janvier 1979, la Coopérative de Granby. "Les coopératives s'opposent encore aux autres articles du projet de loi 116, soit les articles 1, 3, 5 et 6. Par ailleurs, ces autres articles ont pour but et pour effet uniquement d'accroître les pouvoirs

déjà exorbitants des offices de producteurs en voulant leur donner la faculté de retirer à tout producteur le droit fondamental de produire et donc d'exercer sa profession. Ces articles, notamment l'article 1, visent aussi les coopératives et semblent avoir pour but et pour effet de dire que les coopératives et leurs membres seraient réglementés dans leur production et leur mise en marché par le plan conjoint.

Le résultat pratique de cette addition serait d'anéantir de fait tout le sens qu'on peut trouver à l'article 2 actuel du projet de loi sur la mise en marché des produits agricoles qui est décrite comme un moyen supplétif — les plans conjoints — de mise en marché qui ne doit pas être interprété comme moyen de concurrencer l'organisation coopérative de la production et de la mise en marché des produits agricoles.

Mme la Présidente, j'ai questionné le ministre de l'Agriculture la semaine dernière, justement là-dessus, sur une coopérative agricole fantôme qui a été créée par l'Office des producteurs de lait industriel pour concurrencer des coopératives à travers le Québec; sur des subventions qu'on a données et que cette coopérative fantôme a reçues du ministère de l'Agriculture pour concurrencer les coopératives agricoles au Québec. Ceux qui connaissent quelque chose dans les coopératives et dans l'industrie, Mme la Présidente, on dit que cette coopérative fantôme était un autre Tricofil. Ils l'appellent un "Tricolait". Cela va prendre de l'argent partout. Encore hier, les dirigeants de cette coopérative fantôme étaient à Ottawa en train de négocier une subvention du ministère fédéral de l'Agriculture pour les aider, justement, à concurrencer les coopératives au Québec.

La guerre est rendue au bout là-dedans. Les coopératives veulent même se mettre dans l'illégalité à l'heure actuelle en arrêtant le prélevé des plans conjoints. Parce que le ministre a sanctionné un geste illégal, un détournement de fonds de la Fédération des producteurs de lait, les coopératives ont dit: Nous aussi nous allons commettre un geste illégal et le ministre va pouvoir sanctionner cela aussi! Je pense, Mme la Présidente, que c'est le temps de voir clair là-dedans!

Je termine avec un seul article du projet de loi qui me surprend venant du ministre de l'Agriculture. La semaine dernière, le premier ministre du Québec était à Ottawa pour se battre pour les droits des Québécois devant Ottawa, pour rapatrier les droits du Québec au Québec. Pendant ce temps-là, le ministre de l'Agriculture est ici, dans cette Chambre, se battant et voulant qu'on adopte un projet de loi dans lequel il est prêt à céder et à vendre les droits des producteurs du Québec aux autres provinces canadiennes et à Ottawa. C'est un traître pour les producteurs du Québec qui veulent se gouverner eux-mêmes. Cela existe dans le projet de loi. Je pense que le ministre de l'Agriculture devra répondre de cela devant son premier ministre. Pendant que lui se bat pour des pouvoirs aux Québécois, lui, il vend nos pouvoirs à Ottawa. L'Union Nationale ne peut pas accepter autant d'hypocrisie de la part du Parti québécois!

Je pense qu'il va être temps — je termine — que le ministre de l'Agriculture, une fois pour toutes, dise la vérité aux producteurs agricoles. Qu'il arrête de les prendre pour une petite clique et qu'il parle véritablement à tous les producteurs agricoles. Je le mets au défi de déposer sur la table le mémoire qu'il a reçu de la Coopérative fédérée de Québec, le 16 décembre, critiquant d'un bout à l'autre le projet de loi 116 comme étant contre les coopératives, comme étant un projet de loi qui va, à long terme, détruire les coopératives agricoles au Québec.

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Union Nationale.

M. Maurice Bellemare

M. Bellemare: Est-ce que j'ai bien compris que le ministre se levait pour son droit de réplique? Ce n'est pas encore le temps! Il y a encore plusieurs autres intervenants de notre côté qui vont faire certaines remarques concernant ce projet de loi.

Mme la Présidente, il y a eu une requête signée par au-delà de 5000 personnes dans la province de Québec, contre le projet de loi 116. Le ministre a dit, dernièrement, que c'était un pourcentage insignifiant, que c'était un groupe de dissidents qui avaient droit à leur opinion mais qui n'affectaient pas sa ligne de conduite.

Un ministre responsable est obligé d'admettre qu'il y a des contestataires. Au-delà de tout ce qu'on pouvait croire, 5000 personnes, cultivateurs, dans la province de Québec, 5000 familles de cultivateurs dans la province de Québec ont contesté en signant de leur propre nom, avec leur adresse, en disant: On est contre le projet de loi 116.

M. Garon: Votre chef est parti. Il ne reste même pas pour vous écouter!

M. Bellemare: II a une conférence de presse. Comme vous, vous n'y étiez pas tout à l'heure. Il a peut-être la même raison lui aussi de s'absenter, pour aller parler devant des gens qui vont l'entendre, qui vont le comprendre. (16 h 30)

Une Voix: II n'y a pas quorum.

Une Voix: De toute façon, cela ne change rien.

Mme le Vice-Président: A l'ordre! M. le leader de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Mme le Président, je voudrais simplement rappeler au ministre l'histoire qui s'est écrite lors de la passation des projets de loi qui ont créé en 1958 ou en 1959 la Loi des marchés agricoles. En 1974, est-ce que l'honorable ministre a pu lire ce qu'a dit l'honorable député de

Saguenay au sujet de la Loi des marchés agricoles, exactement ce qu'avait répété l'honorable député de Beauce-Sud à la suite des interventions très majeures et très raisonnées qu'il avait faites dans cette Chambre? Il avait d'ailleurs reçu — le député de Beauce-Sud, — une acclamation véritablement méritée pour un geste aussi noble. Mais je voudrais revenir à cette séance qui est relatée dans le journal des Débats à la page 1402, en 1974. Que disait l'honorable député de Saguenay dans le temps? Il était ici, à deux pas, dans l'Opposition. Il parlait des marchés agricoles, de la loi no 12: "On sait, M. le Président, que cette Loi des marchés agricoles a été critiquée à maintes reprises depuis sa création en 1963. Mais les attaques venaient particulièrement d'un secteur de la population, principalement des différents transformateurs et intermédiaires, c'est-à-dire ce qu'on appelle, dans le jargon du métier, le secteur de l'agrico-négoce..." Continuons, M. le Président. Le député de Saguenay PQ disait ceci d'une manière tout à fait spéciale:... "C'est-à-dire que le véritable scandale dans l'alimentation, ce n'est pas au niveau du producteur qu'il se produit, c'est au niveau des transformateurs qui, eux, par simple décision, peuvent augmenter davantage le prix que l'augmentation qu'ils accordent au producteur."

Je voudrais attirer ici particulièrement votre attention sur un autre passage du discours de M. Lessard du 2 juillet 1974. "Comme nous l'avons dit en commission parlementaire, tant et aussi longtemps que les agriculteurs ne percevront pas vraiment au niveau de l'industrie secondaire et même tertiaire, leur contribution et participation aux bénéfices de l'industrie alimentaire ne cesseront de décroître parce que ce n'est pas au niveau du secteur primaire — comme d'ailleurs dans tout autre secteur; on a parlé bien souvent, par exemple, de l'industrie de l'amiante, de nos richesses naturelles — que les gros profits peuvent être réalisés mais plutôt au niveau de la transformation du secteur tertiaire."

Mme le Président, je pense qu'aujourd'hui une démonstration a été faite par notre chef, M. Biron, qui a véritablement atteint le point culminant de la décision, de l'assertion qu'il a fait au sujet des coopératives et particulièrement de la Fédérée. C'est justement cela particulièrement que nos coopératives agricoles ont fait. Or, aujourd'hui, c'est le gouvernement du Parti québécois qui, avec la loi 116, vise à les faire disparaître — je vais loin — vise à les faire disparaître. Le gouvernement ne nous présente pas une loi qui donnera des outils fermes aux agriculteurs, aux coopératives dans le secteur de la transformation, mais plutôt une loi qui, au niveau du secteur primaire, au niveau du secteur production, vise à étouffer nos agriculteurs du Québec.

Mme la Présidente, je sais que vous avez entendu pérorer beaucoup sur cette question. Mais me serait-il permis de vous demander d'écouter cette phrase du 2 juillet 1974, citée par l'honorable député de Saguenay, aujourd'hui ministre du "PQuiou"? "On demande à ce gouver- nement d'arrêter de faire du socialisme pour les capitalistes et de travailler d'abord pour les intérêts du Québec et les intérêts des Québécois." Est-ce qu'aujourd'hui nous ne répétons pas la même chose? Nous ne nous sommes pas entendus aujourd'hui avec le PQ. Le PQ qui était dans l'Opposition le 2 juillet 1974 n'avait-il pas raison de crier: "On demande à ce gouvernement d'arrêter de faire du socialisme pour les capitalistes et de travailler d'abord pour les intérêts du Québec et les intérêts véritables des Québécois?" C'est ce que le député de Saguenay criait, dans l'Opposition; à la face du gouvernement au pouvoir, il criait son indignation.

Une Voix: Devant le Parti libéral.

M. Bellemare: Devant le Parti libéral. "Probablement, disait-il, que dans l'agriculture la situation est encore plus urgente parce que, comme nous l'avons constaté, les agriculteurs québécois sont en train de disparaître".

Une Voix: Ah!

M. Bellemare: Exactement ce que nous employons comme argument aujourd'hui et qui ne reçoit même pas la bienvenue de l'autre côté, même pas la compréhension du ministre qui trouve cela trop fort, qui s'en va se reposer dans le lobby. Mme le Président, je continue à citer son intervention parce qu'elle est nôtre aujourd'hui. Je pense qu'il avait parfaitement raison, mais aujourd'hui il ne pratique pas ce qu'il avait prêché dans le temps.

Une Voix: II a changé.

M. Bellemare: II a changé simplement de côté de la Chambre. "Plus que cela, une véritable loi de mise en marché des produits agricoles devrait aussi comprendre parallèlement une société, comme celle que j'ai proposée et toute autre société semblable à celle-là qui va permettre aux agriculteurs de se regrouper non pas pour vendre leurs produits non transformés, mais pour transformer ensemble leurs produits". C'est encore ce que nous disons aujourd'hui. L'Union Nationale n'a pas changé à ce sujet. Aujourd'hui, elle dit au gouvernement: Vous avez présenté une loi, le projet de loi 116, qui va apporter la perturbation dans les milieux agricoles. Certaines personnes nous ont dit: Oui, mais vous savez, le député de Johnson a dit que les gens de l'UPA avaient trahi. Pas tous, mais il y en a, par exemple, qui ont trahi. Il y en a qui vont trahir. Il y en a qui se sont mis d'accord pour trahir. Je n'aurai pas besoin de vous citer Mme Jeannine Bourque qui est ici dans les galeries depuis le commencement de l'étude du projet de loi 116 et qui va aller se promener dans quelque temps, qui va aller faire un voyage en Europe avec certains membres de l'UPA. Ce sera la récompense que Mme Bourque aura reçue. Il y a un autre membre de l'UPA dans les galeries, M. André Houle. Lui, il ne partage pas ces idées-là.

Cela en est un autre de l'UPA. Vous me demandez de le nommer, vous me demandez de les nommer.

M. Laplante: Cest indécent ce que vous faites là.

M. Bellemare: Oui, prenez votre temps. Je suis parlementaire plus que vous ne l'êtes.

M. Laplante: Vous vous servez du parquet de l'Assemblée nationale.

M. Bellemare: Je suis capable de le répéter en dehors. Je suis capable de le répéter tant que vous le voudrez en dehors.

M. Laplante: C'est indécent.

M. Bellemare: II y en a un autre...

M. Laplante: Indécent.

Mme le Vice-Président: A l'ordre! S'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Est-ce que cela va? Maintenant que nous avons calmé nos esprits, je demanderais à M. le leader de l'Union Nationale qu'il soit bien évident qu'il est pertinent au débat et qu'il ait pu prendre un peu de recul.

M. le leader de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Quand j'ai relu le débat dans lequel avait pris part l'honorable député de Drummond, qui m'avait cité en ce sens que j'avais dit, devant les producteurs de l'UPA et devant les agriculteurs, à la salle des congrès de l'hôtel Hilton, que certains membres de l'UPA les avaient trahis, pour moi cela a été un témoignage extraordinaire, debout. Ce fut le contraire. C'est pour cela que j'ai dit aujourd'hui que je me reprendrais et que j'aurais des noms à citer, si jamais on veut me dire que je n'ai pas raison de traiter certaines gens de l'UPA comme des gens qui se sont laissés acheter. Ils ont trahi la classe agricole.

Mme le Président, je suis sûr et certain que ce voyage payé par le gouvernement, particulièrement par le ministère de l'Agriculture, va récompenser certains membres de l'UPA. Sûrement et vous verrez la délégation. Nous ferons déposer la liste, ici, des membres de l'UPA qui participeront à ce voyage qui est organisé pour très prochainement, pour aller prendre des informations sur l'agriculture. (16 h 40)

Mme le Président, voilà encore une faille qui prouve que le ministère de l'Agriculture n'est pas un ministère qui est attaché véritablement à la base même de ceux qui produisent dans la province de Québec, les petits, les humbles, ceux qui sont des cultivateurs qu'on a sauvés, nous de l'Union Nationale, en 1936. On les a sauvés, oui, s'ils sont en vie aujourd'hui, c'est grâce à l'Union Nationale, c'est nous qui leur avons donné le crédit agricole, c'est nous qui leur avons donné le drainage des terres, c'est nous qui leur avons donné I'électrification rurale. Vous ne pouvez dire le contraire. Nous avons créé la classe agricole et nous l'avons maintenue. S'il y a une perte de vitesse dans ce domaine, ce n'est pas à cause de l'Union Nationale, jamais!

Mme la Présidente, partout dans la province de Québec on entend parler du projet de loi no 116. Rarement on entend des voix qui sont pour, mais on entend presque à tous les jours des gens qui nous appellent, qui nous envoient des lettres, Dieu sait les piles de lettres que j'ai chez moi et je les lis et j'essaye de répondre à ces pauvres gens qui écrivent et qui sont au désarroi. Quand on voit une requête signée par au-delà de 5000 personnes disant que les producteurs sont d'avis que le syndicat possède déjà suffisamment de pouvoirs avec la loi qui existe actuellement et ne veulent pas que le syndicat ait le pouvoir de fixer le temps et le lieu de la production — l'article 3a — de réduire les quotas — l'article 3c — d'annuler les quotas — encore l'article 3 — d'imposer des pénalités basées sur le volume ou la quantité du produit agricole ou sur la superficie cultivable, de saisir le surplus de la production sans rien payer, de classer les producteurs en groupes des bons, des moins bons et des pas bons aux fins d'imposer et de percevoir des contributions — article 5 — de valider, de façon rétroactive, l'imposition de frais et de redevances qui ont été perçus illégalement et qui appartiennent de droit aux producteurs; 5000 personnes ont signé cela.

Le ministre dit: Bah! un groupe de dissidents, cela arrive qu'il y en ait qui se promènent dans les rues avec des pancartes et qui ne font pas fureur. Le ministre dit cela du bout de la main. Mme le Président, je suis donc heureux de pouvoir participer à ce débat, moi qui représente une classe agricole, moi qui étais autrefois le député de Champlain, qui avait 22 paroisses agricoles, je suis aujourd'hui représentant d'un comté rural où il y a 32 paroisses et vous pensez que je me tairais aujourd'hui, devant ce qu'on va imposer aux cultivateurs, devant cette lutte à morte charge qu'on fait contre la Coopérative agricole de Gran-by, dans ma région? La Fédérée est contre, la Coopérative de Granby est contre, mais où sont ceux qui sont en faveur? Est-ce que ce n'est pas véritablement l'argent des petits qui a formé ces grosses entités aujourd'hui qui les défendent? Est-ce qu'ils n'ont pas droit au chapitre afin de donner leur impression?

Comme le disait si bien mon excellent collègue, le député de Saint-Hyacinthe, quand on relit la requête qui a été faite le 13 décembre 1978 à l'honorable ministre: "La Coopérative agricole de Granby désire vous manifester son plus profond désaccord et sa grande appréhension devant le projet de loi no 116 visant à modifier la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. La Coopérative agricole de Granby considère que le projet de loi no 116 dans sa formulation actuelle risque d'entraver d'une manière directe l'autonomie de l'organisation coopérative, de la mise en marché des produits agricoles au Québec et d'entraîner à brève échéance la mort de la coopération en

matière agricole. A titre d'exemple, l'article 1 du projet de loi constitue une tentative déguisée de vider de son sens l'article 2 de la loi actuelle sur la mise en marché des produits agricoles en restreignant considérablement la portée et l'application. Ce projet de loi no 116 confère des pouvoirs exorbitants aux offices de producteurs et risque de couper le lien essentiel du membre avec sa coopérative."

Madame, jamais dans la province de Québec, on aura vu tant de protestations, jamais l'élite des agriculteurs se sera autant mouillée pour défendre une loi qui, à mon sens, va atteindre des buts complètement différents de ceux que recherche peut-être le ministre. Merci, Madame.

Mme le Vice-Président: M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais tout d'abord vous dire, Mme la Présidente, que je trouve absolument déplorable le fait que, pendant une bonne partie de nos discours — nous ne l'avons pas soulevé chaque fois — pendant une bonne partie de nos discours, nous n'avons pas quorum à l'Assemblée nationale.

Une Voix: C'est vrai.

M. Fontaine: Et même si nous l'avons, Mme la Présidente...

Mme le Vice-Président: Un moment, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: ... un député libéral dans cette Chambre et on nous parle de quorum, Mme la Présidente.

Mme le Vice-Président: A l'ordre!

M. Charbonneau: Soyons sérieux un peu, Mme la Présidente.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Nicolet-Yamaska, est-ce que vous me demandez de vérifier si nous avons quorum? Non. Votre intervention.

M. Brochu: Sur la question de règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Sur la question de règlement, M. le député de Richmond.

M. Brochu: Je vous rappellerai justement que le député de Nicolet-Yamaska en était à l'introduction de son discours de deuxième lecture et qu'il soulignait simplement que, si nous devions, chaque fois qu'il n'y a pas quorum, nous lever pour demander quorum, nous serions constamment à retarder les travaux de la Chambre.

Mme le Vice-Président: M. le député de Richmond.

M. Proulx: M. le député induit la Chambre en erreur. Cela fait une demi-heure que nous avons quorum en Chambre avec un seul libéral.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que je puis demander aux membres de cette Assemblée de faire trêve des questions de règlement sur le quorum alors qu'il existe effectivement actuellement?

M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, Mme la Présidente. Tout simplement, Mme la Présidente, je voulais le faire remarquer pour que les gens qui nous écoutent et qui lisent le journal des Débats sachent qu'actuellement, alors que nous sommes en train d'étudier ce projet de loi no 116, tellement important pour tous les producteurs agricoles du Québec, le quorum exigé à l'Assemblée nationale n'est que de 30 députés et que, pendant ce temps, il n'y a aucune autre commission qui siège, il n'y a que cela à l'étude présentement, mais nous avons de la difficulté à obtenir ce nombre minimum de 30 députés pour étudier ce projet de loi.

M. Grégoire: Question de règlement. Nous sommes actuellement 40 en Chambre.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! Est-ce que M. le député... A l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît. M. le député de Beauce-Sud, maintenant. M. le député de Nicolet-Yamaska, est-ce que je pourrais vous demander de parler, maintenant que votre introduction est faite, de parler maintenant sur la motion de deuxième lecture du projet de loi no 116, Loi sur la mise en marché des produits agricoles?

M. Fontaine: D'accord, Mme la Présidente. Je note qu'il est 16 h 50. C'est ici que je commence mon intervention sur le projet de loi.

M. Brochu: Question de règlement, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Brochu: Question de directive, Mme le Président. Lorsque le député de Nicolet-Yamaska vous a souligné qu'il commençait son intervention, vous avez fait signe que non. J'aimerais savoir exactement s'il commence actuellement ou si tout le temps qui a été pris depuis la première parole lui sera enlevé.

Mme le Vice-Président: Vous savez fort bien de quoi il s'agit. Vous savez que M. le député de Nicolet-Yamaska avait déjà commencé son intervention. Voulez-vous me laisser déterminer et dire quand M. le député de Nicolet-Yamaska en aura terminé, s'il vous plaît?

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: D'accord, Mme la Présidente. Je me soumets, Mme la Présidente, à vos directives.

Cependant, je voudrais tout simplement faire une remarque préliminaire avant de commencer véritablement sur le fond du sujet. On discute actuellement — oui, oui, Mme la Présidente — l'Union Nationale parle actuellement sur le projet de loi no 116 tel qu'il a été déposé devant l'Assemblée nationale. (16 h 50)

II nous arrive, de temps à autre, de citer certains passages de la loi. Chaque fois que nous les citons entre autres, tout à l'heure, lorsque le chef de l'Union Nationale a parlé du droit d'appel, nous voyons les députés du parti ministériel sursauter et dire: II ne parle pas sur la loi; ce n'est pas cela, il y a des amendements. Je demande au ministre de l'Agriculture de déposer ses amendements s'il en a, mais nous autres, pour l'instant, nous étudions la loi telle qu'elle a été présentée à l'Assemblée nationale. Je ne pense pas que nous devions faire autrement que cela.

M. Garon: Question de privilège!

M. Fontaine: II n'y a aucun amendement de déposé devant l'Assemblée nationale et nous n'avons d'autre choix que de discuter de ce projet de loi.

M. Garon: Question de privilège!

M. Fontaine: Le jugement qui fait suite à la loi 116...

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, je vous vois debout en même temps que l'intervenant. Vous avez demandé la parole sur...

M. Garon: J'ai une question de privilège.

Mme le Vice-Président: ... une question de privilège.

M. Garon: Dès le mois de décembre, après avoir rencontré le mouvement coopératif et avoir décidé des amendements qui seraient apportés à la loi 116, j'ai distribué aux membres de la commission parlementaire de l'agriculture une copie des amendements, de bonne foi. Evidemment, il n'y a pas de dépôt légal, comme on dit, aux commissions parlementaires. Les membres de la commission voulaient savoir quelle était la teneur des amendements; j'en avais distribué une copie à ce moment. Dès le 18 décembre, j'avais un télégramme de la Coopérative fédérée qui était satisfaite des amendements. L'Union Nationale veut peut-être faire un "show", mais elle connaît les amendements.

Mme le Vice-Président: M. le ministre! S'il vous plaît! Un moment, s'il vous plaît! Quand nous serons calmés, M. le député de Shefford, je vous accorderai la parole sur une question de privilège.

M. Verreault: Merci, Mme le Président. Je voudrais quand même rectifier les faits, parce que la Coopérative de Granby est dans mon comté. J'ai vérifié avec le président par intérim. Le président par intérim m'informait qu'il n'avait reçu aucun...

Mme le Vice-Président: Vous pouvez rectifier des faits, si vous voulez, mais une question de privilège, M. le député de Shefford, vous le savez très bien, est une question de fait personnel. S'il vous plaît! Votre intervention est déjà faite. Si vous aviez à reprendre ou à rétablir ce que vous avez dit dans un discours, je vous dirais... S'il vous plaît! C'est M. le député de Nicolet-Yamaska qui a la parole.

M. le député.

M. Verreault: La commission parlementaire est très importante.

Mme le Vice-Président: Bien sûr, vous interviendrez en commission parlementaire, M. le député de Shefford.

M. Fontaine: Mme le Président, si le ministre avait des amendements à déposer, c'était à lui de les déposer à l'Assemblée nationale. Jusqu'à preuve du contraire, nous étudions le projet de loi qui est déposé devant l'Assemblée nationale. Il n'y a pas d'autre chose à discuter que cela. Même, si j'abordais les amendements, vous pourriez me rappeler à l'ordre pour dire: Monsieur, vous êtes en dehors du sujet!

M. Grenier: C'est cela, un vrai avocat!

M. Garon: C'est avec cela qu'on ne va nulle part!

M. Fontaine: Si on se fiait à toutes les promesses que vous avez faites, vous pouvez être sûr qu'on pourrait se tromper souvent.

M. Garon: Vous avez fait un paquet de promesses que vous n'avez jamais respectées.

M. Fontaine: Mme le Président...

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Fontaine: ... je voudrais ajouter également que nous avons reçu aujourd'hui un appui que nous n'attendions pas et qui fera probablement plaisir au ministre de l'Agriculture.

Une Voix: Ce n'est pas Gilberte Côté.

M. Fontaine: Non, ce n'est pas Gilberte Côté. C'est publié dans la voix de l'Est du 13 février 1979, aujourd'hui. C'est un appui que nous n'attendions pas, celui du Parti québécois du comté de Brome-Missisquoi. Je n'ai pas l'article du journal, mais j'ai une transcription que j'ai pu obtenir. On nous dit ceci: "Le congrès du Parti québécois de Brome-Missisquoi, tenu en fin de semaine à

Cowansville, a permis à cette formation politique de mesurer quelque peu l'impact de deux pièces législatives vivement contestées par une partie de la classe agricole du Québec."

M. Jolivet: Dépôt de document.

M. Fontaine: Je vais le déposer. On nous dit également que, dans un premier temps, le congrès, par une seule voix de majorité, a réclamé ni plus ni moins que l'abolition de la formule des plans conjoints dans tous les secteurs de l'agriculture.

Des Voix: Ils vont bien plus loin.

M. Fontaine: En outre, l'Assemblée plénière a également ratifié une autre proposition tout aussi importante émise par cet atelier, à savoir que les pouvoirs de la loi 64, qui donne à l'Union des producteurs agricoles la seule représentativité syndicale, soient annulés et, par le fait même, qu'on donne le libre choix à l'agriculteur d'adhérer ou non au syndicat de son choix. Les partisans de cette résolution ont surtout insisté sur l'absence totale de démocratie qui régnait dans le monde agricole, lequel n'avait qu'une seule voix pour se faire entendre, ce monopole de l'UPA ne pouvant, selon eux, que contribuer à établir un climat des plus malsains qui méprise la liberté de choix de l'agriculteur.

Une Voix: Ce sont des péquistes? Qui a écrit cela?

M. Fontaine: C'est le Parti québécois de Brome-Missisquoi. Nous, de l'Union Nationale, n'allons pas aussi loin que le Parti québécois de Brome-Missisquoi...

M. Garon: Est-ce que je peux demander le dépôt du document?

M. Fontaine: ... nous, de l'Union Nationale, reconnaissons la nécessité du syndicat qui s'appelle l'UPA.

M. Garon: Question de règlement.

Mme le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! A l'ordre! Si M. le député de Nicolet-Yamaska intervenait par hasard sur le fait qu'on pourrait ne pas ajouter au temps qui lui est imparti pour la discussion, je vous ferai remarquer que les interruptions sont venues de plusieurs côtés de la Chambre, et souvent de sa formation politique comme de l'autre côté.

Des Voix: Oh!

Mme le Vice-Président: J'ai bien dit "comme de l'autre côté", sans vouloir taquiner ni les uns ni les autres. M. le ministre de l'Agriculture, vous vous leviez, disiez-vous, sur une question de règlement?

M. Garon: Oui, Mme le Président. J'aimerais que le député de Yamaska, qui est bien imprudent, dépose le document qu'il cite. Non pas la transcription, mais que le journal lui-même soit déposé à l'Assemblée nationale.

Mme le Vice-Président: M. le ministre, sur votre question de règlement, je vous ferai remarquer qu'un journal est disponible et je ne vois pas pourquoi vous demanderiez à un député de déposer un document.

M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Mme la Présidente, je suis bien prêt à lui prêter $0.25 s'il veut l'acheter. Le ministre, s'il veut lire ce document, pourra le faire car on le retrouve dans la Voix de l'Est d'aujourd'hui. Le Parti québécois de Brome-Missisquoi va beaucoup plus loin que l'Union Nationale dans ses revendications. Nous ne sommes pas contre les offices de producteurs, nous ne sommes pas contre l'UPA, nous ne sommes pas contre les plans conjoints, nous sommes contre les pouvoirs accordés dans la loi 116 en plus de ceux déjà énumérés dans le chapitre 36 de la loi actuelle.

L'UPA de Brome-Missisquoi...

Des Voix: Le PQ.

M. Fontaine: Excusez. Le PQ de Brome-Missisquoi demande l'abolition des plans conjoints au Québec. C'est grave.

Une Voix: C'est le PQ.

M. Fontaine: C'est grave, c'est le PQ qui demande ça. C'est important. Il demande également le rappel de la loi 64; c'est important, cela aussi. Le ministre de l'Agriculture devrait un peu plus prendre en considération les arguments qui lui sont apportés par la base, par les militants du Parti québécois. Il y a également l'opinion de certains dissidents qu'il faudrait retenir. On a vu qu'il y a eu des manifestations. ( 17 heures)

Je ne dis pas que je suis ici pour représenter tous les dissidents. Il y a des dissidents qui sont comme le Parti québécois, qui prônent l'abolition des plans conjoints. Je ne les appuie pas, personnellement. Mais j'appuie, par exemple, les dissidents qui sont contre la loi actuelle. Les dissidents qui sont contre les plans conjoints, qui prônent l'abolition, je ne les appuie pas parce que ce sont des séparatistes. Ils veulent être à part des autres! On ne les appuie pas, ces gens-là!

Mme la Présidente, M. le Président, pardon — il y a eu un changement de sexe à la présidence — le jugement de la Cour suprême est la source du projet de loi 116. Il y a des associations de producteurs qui ont également contesté le pouvoir d'organismes fédéraux de percevoir des redevances pour la production et la mise en marché des produits agricoles. La Cour suprême leur a donné raison. Seules les provinces ont le droit de percevoir des redevances sur la production et la mise en

marché des produits agricoles. Donc, pour une fois, la Cour suprême a penché du côté des provinces. Mais, immédiatement après, la province de Québec, entre autres, qui s'est toujours distinguée de ce côté-là et qui a toujours critiqué le fait que la Cour suprême donne toujours raison au fédéral, quand elle a raison dans une cause, immédiatement elle se tourne de bord, se dépêche d'adopter une loi pour redéléguer à nouveau ces pouvoirs à un organisme fédéral. Je trouve curieuse cette façon de procéder, surtout de la part du Parti québécois, qui est un parti séparatiste!

Une Voix: C'est le monde à l'envers! M. Garon: Souveraineté-association.

M. Fontaine: Sur la loi 116 elle-même, le ministre nous dit: Nous adoptons cette loi uniquement dans le but de combler un vide juridique. C'est la raison qu'il nous donne. Valider des prélevés rétroactivement, déléguer des pouvoirs à un organisme fédéral, mais il veut également boucher tous les trous dans la Loi sur la mise en marché des produits agricoles pour que jamais personne ne puisse plus la contester. Les gens n'auront plus le droit de contester la validité de la loi, même s'ils pensent avoir raison. Il veut également donner tellement de pouvoir aux offices de producteurs que les gens ne seront plus libres d'administrer leur production. On donne à l'office des producteurs le droit de fixer le temps et le lieu de la production, de réduire les quotas et même de les annuler, dans certains cas, ce qui a été jugé ultra vires dans un jugement du juge Deschênes que j'ai ici. On lui permet également d'imposer des pénalités basées sur le volume ou la quantité des produits agricoles et la superficie cultivée, de saisir le surplus de production sans rien payer, de classer les producteurs en groupe aux fins d'imposer et de percevoir des contributions, de valider de façon rétroactive l'imposition de frais et de redevances qui ont été perçus illégalement et qui appartiennent de droit aux producteurs.

C'est le projet de loi 116, ce projet de loi, en apparence anodin, mais qui aura des conséquences graves pour l'économie agricole dans l'avenir.

On parle du projet de loi 116 et il n'y a personne qui ait expliqué la loi de la Régie des marchés agricoles. Je pense qu'il serait important qu'on explique aux gens ce qu'est la loi de la Régie des marchés agricoles qui a son origine en 1958 — je peux faire erreur mais je pense que c'est en 1958 sous l'Union Nationale — en 1956? et qu'on retrouve dans les lois de 1964, les Statuts refondus du Québec, au chapitre 120. Cette loi a été amendée en 1974 sous le gouvernement libéral, c'est le chapitre 36, c'est la loi actuelle de la Régie des marchés agricoles. Je voudrais vous dire entre autres ce qu'est l'article 2 de la loi. L'article 2 dit: La présente loi a pour objet de mettre à la disposition des producteurs et des consommateurs un moyen supplétif de mise en marché ordonnée et juste des produits agricoles et elle ne doit pas être interprétée comme un moyen de concurrencer l'organisation coopérative de la production et de la mise en marché des produits agricoles.

Ce principe doit guider l'application de la présente loi pour ne pas gêner l'action du coopératisme dans les régions et les secteurs où il peut répondre efficacement aux besoins et, enfin, profiter autant que possible du concours des coopératives pour l'établissement et l'administration de plans conjoints dans les secteurs de production et les régions où il est désirable d'en établir.

Une Voix: C'est clair.

M. Fontaine: M. le Président, c'est très clair. C'est un moyen supplétif de mise en marché ordonnée. Il ne faut pas nuire aux coopératives en adoptant cette loi. Ce que le projet de loi 116 fait, c'est exactement le contraire de ce qui est prévu dans la loi et on veut en changer l'un des principes les plus primordiaux.

Il y a également une ordonnance de la Régie des marchés agricoles dont on a fait la découverte la semaine passée ou il y a deux semaines, qui vient exactement à l'encontre de cet article 2 de la loi de la Régie des marchés agricoles. C'est la décision qui concerne la Société coopérative québécoise, qui a été fondée par la Fédération du lait nature. Le jugement dit ceci: "Après examen des témoignages et des documents, la régie croit que l'utilisation de sommes perçues en vertu du règlement imposant une contribution pour fins de publicité, promotion et développement des marchés en vue de rétablissement d'une troisième force, ou de prêts ou subsides à la Société coopérative québécoise pour cette fin n'est justifiée ni sur le plan légal ni sur celui de son opportunité. La régie considère que l'utilisation de la majeure partie de ces contributions n'est pas conforme aux dispositions de la loi ni à celles du plan conjoint que la fédération est chargée d'appliquer ". La régie ajoute que même si ces activités étaient permises par la loi, elle ne peut considérer qu'il s'agit dans le présent cas d'une utilisation des contributions qui soit d'intérêt général pour des producteurs de lait ou l'industrie ni d'une production qu'il appartient à un office de producteurs d'imposer ".

M. le Président...

Le Vice-Président: A l'ordre! Je m'excuse, M. le député. Vraiment, le temps est dépassé, même en tenant compte des interruptions.

M. Fontaine: Voyons, M. le Président! Je n'ai pas commencé!

Le Vice-Président: M. le député, la présidence et le secrétariat tiennent le temps. Même en tenant compte des interruptions sur lesquelles il ne faut pas créer de précédent, vous avez déjà dépassé votre temps et je vous prierais de terminer, s'il vous plaît.

M. Fontaine: M. le Président, je vais me soumettre à votre décision, mais vous pouvez être assuré que je n'en suis pas tellement satisfait.

Des Voix: Oh!

M. Fontaine: M. le Président...

Le Vice-Président: M. le député, sans commentaires sur la présidence.

M. Fontaine: Oui, d'accord. Je respecte votre décision, M. le Président, je m'y soumets.

M. Bérubé: C'est le commencement de la sagesse.

M. Fontaine: M. le Président, on voit que l'Union des producteurs agricoles et les offices de producteurs ont grandement exagéré dans l'application des plans conjoints. On a vu également qu'il y a depuis plusieurs années des coupures de quotas qui se sont faites dans le domaine du lait, par exemple. Les producteurs ont été obligés de racheter des quotas par la suite. On a vu également qu'il y a un certain marché noir qui se fait sur le plan des quotas. Je voudrais, en terminant, demander au ministre de l'Agriculture s'il est prêt à demander à la Régie des marchés agricoles de faire enquête là-dessus et, si possible, également de déposer la liste de tous ceux qui ont obtenu des quotas depuis 1975.

M. le Président, je pense que devant ces faits, nous ne pouvons accepter que les offices de producteurs et, par voie de conséquence, l'UPA, qui chapeaute ces offices, obtiennent plus de pouvoirs qu'ils n'en ont quand on se pose déjà des questions à savoir s'ils n'abusent pas des pouvoirs que la loi leur accorde actuellement.

M. le Président, je demande au ministre de l'Agriculture d'accepter cette demande pour faire la lumière sur ce dossier. (17 h 10)

Avis de mini-débat

Le Vice-Président: D'accord, M. le député de Gaspé, je vais vous reconnaître, mais comme je veux observer le règlement, je désire immédiatement, pour éviter un oubli, vous souligner que j'ai un avis. "M. le Président, à la séance d'aujourd'hui, j'ai posé au ministre des Affaires sociales une question portant sur le sujet suivant: L'utilisation des $20 d'augmentation du supplément de revenu aux personnes âgées en centre d'accueil par le gouvernement fédéral. Puisque je ne suis pas satisfait — ou satisfaite — de la réponse donnée, je désire me prévaloir des dispositions de l'article 174 du règlement." Veuillez agréer, M. le Président, etc.. Ce qui signifie que nous aurons ce soir un mini-débat. C'est signé par Mme Thérèse Lavoie-Roux, député de L'Acadie. L'avis est donné au ministre et à tous.

M. le député de Gaspé.

M. Bellemare: Fédéraliste!

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, je n'ai jamais cru que le mot "fédéra- liste" était un mot antiparlementaire jusqu'à présent.

M. le député de Gaspé.

Projet de loi 116

Deuxième lecture (suite)

M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: Merci, M. le Président. A la fin de ce long marathon, je voudrais vous prévenir que je n'invoquerai pas le quorum, aucun point de règlement, aucune question de privilège. Je n'ai pas l'intention non plus de scruter à la loupe, de dépouiller ou d'analyser tous les extraits des textes des articles de journaux ou des jugements de la cour qui ont été fournis par les intervenants qui m'ont précédé pour convaincre le ministre et surtout pour essayer de lui ouvrir les yeux. Quand je vois aujourd'hui son grand calme, contrairement à la semaine dernière, je suis sûr que, tout à l'heure, dans sa réplique, il saura nous apporter de véritables arguments parce que, grâce à l'Union Nationale, quoi qu'on en dise, nous avons réussi à alerter l'opinion publique. Nous avons réussi à entrer en contact avec les agriculteurs et les producteurs, avec tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin — surtout de près — au projet de loi 116. M. le Président, le ministre voit certainement un véritable test de la démocratie dans tout cela, si le ministre croit encore à la démocratie.

Si ce projet de loi est adopté tel quel, il faudra peut-être sonner le glas d'une partie de nos libertés. Dans certains endroits, les drapeaux seront peut-être en berne, parce qu'il y a un profond malaise à la base. Comme je l'ai dit dans ma dernière intervention, il ne s'agit pas d'apprécier avec des mathématiques le nombre de ceux qui sont d'accord ou non avec le projet de loi 116. Ce n'est pas la quantité qui détermine la valeur d'une loi, mais c'est plutôt son objectivité, ce sont plutôt les points qui sont les plus discutés.

Quand on voit des milliers et des milliers de coopérateurs qui attirent l'attention du gouvernement sur des articles sur lesquels ils ne sont pas d'accord, on peut se demander pourquoi, que ce soit la coopérative de Granby, la Coopérative fédérée et toutes les autres, ces gens-là ne sont pas d'accord. Et si tous ces gens sont d'accord, le ministre tout à l'heure, dans sa réplique, va certainement nous assurer — il aura tout le temps voulu; on va lui laisser du temps jusqu'à 18 heures, ce n'est certainement pas mon intervention qui va l'empêcher de parler. Il reste que quand le député de Maskinongé a suggéré le report à un mois pour permettre à tous les différents groupes de se faire entendre en commission parlementaire, je crois que nous aurions été en mesure de recevoir les réponses que nous n'avons pas en ce moment.

Le ministre nous a dit qu'il y aura une commission parlementaire, que les députés pourront poser toutes les questions. Cette commission commencera je ne sais quand, ce n'est pas à moi à

en décider, mais même à ce moment-là, les députés n'auront certainement pas l'éclairage dont ils ont besoin. Je sais que le ministre est objectif, compétent, qu'il sera entouré d'une batterie d'experts mais là encore, le ministre va répéter ce qui lui semble bon et pas nécessairement l'avis de personnes objectives. C'est ce qui est malheureux.

Quand j'ai parlé d'un test de la démocratie, je ne veux pas faire le procès de l'UPA, ni le procès de tous les autres groupes et coopératives, quels qu'ils soient, je crois que quand on parle d'agriculture, cela concerne tout le monde. Quand on sait que chez certains organismes, les membres font déjà partie de l'UPA ou de leur coopérative, il reste que ces membres se sentent pénalisés parce qu'ils sont obligés de participer à certains plans. Je n'ai absolument rien contre les plans conjoints parce que ce qu'il faut, dans tout cela, ce qui est important, c'est de protéger les cultivateurs, c'est de protéger tous ceux qui sont concernés par le projet de loi no 116. Si le ministre est tellement convaincu de son affaire et comme il nous a parlé souvent de l'autosuffisance, quand il nous a dit que dans un Québec libre indépendant nous n'aurons plus de problème, je me demande où nous allons.

Actuellement, si on prend les oeufs, je crois que notre autosuffisance est d'environ 55%. Si on remonte à quelques années, en 1975, le gouvernement avait imposé, je crois, une réduction de 10%; en juillet 1976, une seconde réduction fut imposée, par le même gouvernement de l'époque, de 6%; si nous revenons au gouvernement actuel, en novembre 1977, c'est un autre 5%. Comment le projet de loi no 116 va-t-il permettre l'autosuffi-sance? Le député de Nicolet-Yamaska, à la fin de son intervention, mentionnait cette question de quota. Quand on sait que cela coûte $12 par poule pondeuse et que, pour vivre, pour une famille, cela prend au moins 20 000 poules, comment un jeune cultivateur qui serait intéressé à acheter le commerce de son père ou un autre pourrait-il trouver les $240 000? Je crois que le crédit agricole ne prête absolument rien dans un tel cas.

Le ministre me répondra tout à l'heure et si je fais des erreurs, il me corrigera; c'est tout ce que je souhaite.

M. Garon: ...

M. Le Moignan: C'est une bagatelle, $250 000, je comprends, ce n'est pas grand-chose. Mais si on veut que les jeunes continuent à assurer la relève, comment vont-ils le faire s'ils ne sentent pas l'appui du gouvernement? Le ministre pourra peut-être me dire tout à l'heure, depuis ces trois ou quatre dernières années, combien de jeunes sont entrés sur le marché agricole, combien de jeunes ont pris la relève? Il serait intéressant de connaître ces chiffres. Le ministre ne les a peut-être pas aujourd'hui mais il pourra peut-être, dans une autre circonstance, soit en commission parlementaire, nous montrer l'intérêt des jeunes pour l'agriculture. Pourtant l'agriculture, on l'a tellement chanté que c'est l'avenir; le premier ministre l'a déclaré dans le message inaugural, en disant que l'agriculture était l'une des deux mamelles du Québec pour la nourriture, avec la pêche. Je pense que le premier ministre l'a cité textuellement à ce moment-là.

Quand on regarde tout cela et quand on regarde le projet de loi no 116, on peut poser des questions au ministre et lui manifester une fois de plus cette inquiétude du mouvement coopératif. Le ministre en est conscient; on vient de lire des articles, même du Parti québécois de Brome-Missisquoi; ce n'est certainement pas le député du comté qui est le président de cet exécutif, à moins d'avis contraire et je ne crois pas non plus qu'il ait sa carte de membre du Parti québécois. (17 h 20)

Quand j'ai écouté aussi l'intervention du député de Shefford, je vois un homme qui est intéressé dans son comté, parce qu'il y a là des coopérateurs et j'ai reconnu le besoin qu'il a de plaider la cause de ses cultivateurs. Je l'en félicite, parce qu'il a tout de même eu ce courage.

M. le Président, j'en aurais encore pour dix bonnes minutes. Je vais simplement répéter. Je vais enfoncer des portes ouvertes. Avec tout ce que le chef, le député de Lotbinière a dit cet après-midi, avec toutes les interventions de mes collègues et ceux des autres partis, je crois que nous en avons dit assez, non pas pour éclairer la lanterne du ministre, parce que c'est impossible. Le ministre a ses idées déjà toutes faites.

On sait ce que le ministre va nous répondre. Il est décidé d'aller en ligne directe ou bien en prenant tous les détours voulus pour imposer sa loi, surtout l'imposer. Ce qui est un peu triste là-dedans, le ministre va le réaliser peut-être dans quelque temps. Il est assis sur une caisse de dynamite. Un jour cela va sauter. Quand il verra le mécontentement dans la classe agricole, à ce moment, le ministre sera obligé de changer de comté. Il ne changera pas seulement de siège en Chambre.

M. le Président, l'explosion ne s'étant pas produite, j'invite le ministre à reprendre son siège et s'il veut nous donner cette réplique que nous attendons avec impatience, nous allons tenter de l'écouter.

Le Vice-Président: Un instant, M. le Président. Assez paradoxalement, vous prenez votre siège pour vous lever, et faire votre réplique. C'est donc la fin du débat.

M. le ministre.

M. Bellemare: Une directive, M. le Président. Est-ce que le droit de réplique dans pareille circonstance est selon l'article 102?

Le Vice-Président: II me semble que oui. C'est cela.

M. le ministre.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, le député de Johnson s'inquiète à savoir si j'ai trop de temps.

C'est évident que dans 20 minutes, je ne pourrai pas répondre à toutes les menteries gui ont été contées par les députés de l'Union Nationale. C'est un des vices, un défaut d'avoir la télévision. Parce que, dans un débat comme celui-là, en deuxième lecture, les députés de l'Opposition peuvent tous prendre la parole et conter toutes les menteries qu'ils veulent. Les gens qui écoutent, qui n'ont pas suivi tous les débats entendent un paquet d'arguments et parfois n'ont pas tous les instruments pour juger de la vérité ou non de ces arguments. D'ailleurs, quand je me suis promené dans les comtés agricoles, M. le Président, je me suis rendu compte à quel point les gens étaient inquiets sur des projets de loi, parce que des mensonges avaient été contés par l'Opposition. Il y a eu la Loi sur la protection du territoire agricole. Il y a des gens qui pensaient qu'ils n'avaient plus le droit de faire leur testament. J'ai dit: Le testament est exclu de la loi. Vous pouvez faire votre testament. Il n'y a aucun problème. Le gars disait: "Bon, je suis bien content de savoir cela, M. Garon". Au sujet de ces projets, j'ai entendu de tout; tout d'abord, que j'avais déposé la loi en pleine nuit, ce qui est impossible à l'Assemblée nationale. On dépose toujours la loi le matin.

J'ai entendu le député de Johnson qui m'a même dit à un moment donné que j'avais fait mon discours de deuxième lecture en pleine nuit, alors qu'après vérification, c'était rendu que c'était 11 heures, le matin. Voici la vérité, M. le Président. Je vais essayer le plus brièvement possible de le dire. J'ai déposé la loi le 28 novembre 1978. Je ne me souviens pas si c'était le matin ou l'après-midi, mais c'était en plein jour. La deuxième lecture a eu lieu et volontairement, il y a eu un délai qui a été accordé le 7 décembre pour permettre à l'Opposition d'étudier la loi, consulter les avocats, parce que c'est évident que nous sommes dans une matière juridique complexe. A ce moment, nous avons laissé un certain délai. Mon discours de deuxième lecture s'est fait le 7 décembre au matin. Immédiatement, l'Opposition libérale, par la voix du député de Montmagny-L'Islet et l'Opposition de l'Union Nationale, je ne me rappelle pas par quelle voix, on dit qu'elles n'étaient pas prêtes à faire leurs discours de deuxième lecture.

M. Lamontagne: Question de privilège.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Roberval.

M. Lamontagne: M. le Président, je pense que le ministre a oublié une chose fort importante. Au cours du mois de décembre, il proposait lui-même la loi 90 en commission parlementaire. Il était radicalement impossible d'être à la fois en commission parlementaire et en deuxième lecture ici. C'est vous qui avez fait le choix, pas l'Opposition!

Le Vice-Président: Un instant! Cela aurait peut-être pu être une question de règlement, mais je vois difficilement que ce soit une question de privilège. M. le ministre.

M. Garon: Vous comprenez qu'alors que le ministre doit faire les projets de loi, l'Opposition n'a qu'à les critiquer. C'est beaucoup plus difficile de faire des projets de loi. Pourtant, tout le temps que je me promenais dans le territoire québécois pour travailler sur la Loi de la protection du territoire agricole, j'avais le temps également de travailler sur la loi de la mise en marché. Après qu'elle a été déposée et qu'il y a eu la deuxième lecture, le mouvement coopératif, à la suite d'années de conflits ou de batailles de pouvoirs — on peut trouver différentes explications au mouvement coopératif et au mouvement syndical, pour savoir quelle place occuperait chacun — s'inquiétait du projet de loi 116. A ce moment, un télégramme m'est parvenu du mouvement coopératif me signalant la chose. Immédiatement, j'ai demandé qu'on ait une rencontre et, pour qu'elle se fasse le plus rapidement possible parce que les dirigeants ne pouvaient pas le faire durant cette semaine, plutôt que d'aller à la semaine suivante, j'ai demandé si on pouvait en avoir une le samedi, parce que j'étais occupé en commission parlementaire par la Loi de la protection du territoire agricole.

La réunion a eu lieu le samedi de 16 heures à 19 heures. Nous avons étudié les projets de loi ensemble. Finalement, sur certains articles, il y a certains mots qui ont été changés parce que le mouvement coopératif pensait que cela pouvait donner une interprétation qui lui serait préjudiciable. Comme les amendements souhaités ne changeaient pas les objectifs du projet de loi, mais permettaient tout simplement une clarification à la satisfaction du mouvement coopératif, j'ai acquiescé. D'ailleurs, dès la semaine suivante — cela se passait le 16 décembre — j'ai déposé, aux membres de la commission parlementaire de l'agriculture qui étaient là, une copie des amendements que j'avais l'intention de présenter lors de l'étude article par article du projet de loi 116.

Evidemment, il y en a qui n'étaient pas là. C'est évident que le député de Nicolet-Yamaska n'était pas là, que le député de Lotbinière n'était pas là, parce qu'ils ne font pas partie de cette commission, mais les gens qui étaient là en ont reçu une copie. A la suite de cela, le mouvement coopératif, par la voix du président de la Coopérative fédérée, me faisait savoir, dès le 18 décembre, qu'il demandait... Le télégramme se lit comme suit: "La Coopérative fédérée de Québec, en son nom et au nom des coopératives agricoles concernées, est d'accord avec le bill 116 tel que soumis à notre attention lundi matin". (Je lui ai envoyé le texte que j'ai déposé en commission parlementaire.) "Coopérative fédérée affirme qu'elle n'a jamais, ni de près ni de loin, adhéré ou donné son appui au mouvement des producteurs dissidents."

Dans le Coopérateur agricole de janvier 1979, volume 8, numéro 1, à la page 30 le rédacteur écrit — l'article est un peu long, je ne veux pas passer tout mon temps sur l'article, mais rapidement — "Effectivement, la rencontre projetée avec le ministre eut lieu à Québec le samedi 16 décembre. M. Garon était accompagné, pour l'occasion, de

son sous-ministre, M. Ferdinand Ouellet, de son secrétaire, M. Maurice Tremblay, ainsi que de Me Marcel Trudeau qui avait contribué à la rédaction du projet discuté. La délégation de la coopération agricole était composée de représentants de la Coopérative fédérée, de la Coopérative agricole de Granby, de la Coopérative agricole du Bas-Saint-Laurent, de la Coopérative laitière du sud de Québec, de la Coopérative agricole de la côte sud, de la Coopérative agricole régionale de Papineau, de l'Association coopérative laitière du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de la Chaîne coopérative du Saguenay et de leur procureur, Me Guy Gagnon. "A toutes fins pratiques, c'est l'ensemble du mouvement coopératif agricole qui était, par ses principales institutions, représenté à mon bureau lors de cette discussion. Cette rencontre d'une durée de trois heures — c'est exact, de 4 à 7 — s'avéra très fructueuse. Après étude et discussion, M. Garon acceptait d'apporter au projet de loi la majorité des modifications suggérées par la délégation coopérative. Le lundi suivant, soit le 18 décembre, après qu'on lui eut soumis le texte révisé du projet de loi, la Coopérative fédérée faisait savoir par télégramme adressé au ministre, avec copie au premier ministre et aux chefs des partis d'Opposition..."

Des Voix: Ah!

M. Garon: "Et aux chefs des partis d'Opposition". Cela veut dire que, pendant des semaines, vous avez trompé les gens alors que vous aviez eu les télégrammes de la Coopérative fédérée...

Des Voix: Ah!

M. Garon: ... disant qu'elle appuyait le projet de loi no 116.

Des Voix: Ah! Ah! Ah!

M. Biron: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: J'ai reçu, depuis ce temps-là, des mémos des coopératives disant qu'elles étaient contre les articles 1, 2, 5 et 6, si je me souviens bien. Je demanderais en même temps au ministre de bien vouloir déposer l'article qu'il lit présentement parce qu'on dit que la Régie des marchés agricoles elle-même...

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! Justement, il faudrait s'entendre sur le sens de document public. Au sens de notre règlement — je rends la directive même si on ne la demande pas — un document public est un document qui circule au sein de ce gouvernement ou du Parlement. Un journal est évidemment un document public, mais dans un autre sens et tout le monde peut en prendre connaissance. La décision est rendue.

M. Garon: Je continue. "De son côté, l'UPA avait également fait savoir qu'elle acceptait les amendements proposés au premier projet. Enfin, le 21 décembre, la Fédérée réitérait, pour une deuxième fois, à M. Garon et au premier ministre son accord avec le projet amendé et exprimait la demande qu'il soit adopté le jour même, ce qui malheureusement ne fut pas le cas. Dans tous ses contrats avec l'Etat, la Coopérative fédérée affirmait et réaffirmait qu'elle n'avait jamais, ni de près ni de loin adhéré ou donné son appui au mouvement d'un groupe de producteurs dissidents qui, en guise de protestation contre le même projet de loi, allèrent chahuter le 18 décembre devant l'édifice principal du Parlement et quittèrent plusieurs assemblées de producteurs dans différentes régions de la province".

Quand un ministre de l'Agriculture présente un projet de loi et qu'il réussit à faire un consensus entre les syndicats agricoles et les représentants autorisés du mouvement coopératif, je pense qu'il a déjà réussi quelque chose de grand. Tous ceux qui ont oeuvré dans le monde agricole savent à quel point c'est chatouilleux entre les deux organismes et avec raison parce que ce sont deux grands organismes qui ont travaillé à bâtir l'agriculture au Québec. Quant à ceux qui pensent qu'on va détruire les coopératives agricoles, c'est bien peu connaître le gouvernement et le ministre de l'Agriculture. Au contraire, j'avais l'habitude de me faire reprocher d'être trop pour les coopératives.

Quand, dans le lait industriel, on parle d'enlever le mouvement coopératif, j'ai l'impression que c'est plutôt l'entreprise privée qui est nerveuse dans le secteur du lait, parce que les coopératives contrôlent 85% du lait industriel et plus de 50% du lait nature est mis en marché par les coopératives. D'ailleurs, ce que nous dit le député de Huntingdon à tout moment — il est absent présentement — c'est qu'il y a un monopole coopératif qu'il faudrait quasiment abolir. Je ne pense pas que c'est de cette façon que nous allons abolir le mouvement coopératif, au contraire.

L'Union Nationale a fait son choix. Ce qui n'est pas acceptable, c'est qu'on dise n'importe quoi. On a parlé de la loi de l'Ontario. Je l'ai, la loi de l'Ontario. Savez-vous qu'en Ontario tous les plans conjoints sont adoptés sans référendum? Savez-vous...

M. Fontaine: Dans les faits, ils le font chaque fois.

M. Garon: ... que l'équivalent de la régie québécoise peut autoriser le "local board", à l'office des producteurs, autoriser un "local board", l'office des producteurs, de fixer, d'allouer aux personnes des quotas pour la mise en marché d'un produit réglementé sur la base que l'office des producteurs juge approprié. Il peut refuser de les fixer et d'allouer à toute personne un quota

pour la mise en marché d'un produit réglementé pour toute raison qu'il juge appropriée; annuler, réduire, refuser d'accroître un quota déterminé ou alloué à toute personne pour la mise en marché d'un produit réglementé, pour toute raison que l'Office des producteurs considère appropriée.

Imaginez-vous. Elle va beaucoup plus loin. Le député de Johnson me citait la loi de l'Ontario en exemple. Elle va beaucoup plus loin que la Loi de la mise en marché du Québec une fois amendée par la loi 116. Je vais vous dire plus que cela. Le député de Johnson a dit qu'en Ontario on était allé vite. C'est vrai, ils sont allés plus vite que nous. Mais j'ai ouï-dire qu'il va falloir que l'Ontario revienne pour ré-amender sa loi qui est l'équivalent de la loi 116 parce qu'ils sont allés trop vite. L'article dont je vous parlais et sur lequel on a passé des mois est un article complexe, sur lequel nous nous sommes réunis à plusieurs reprises pour faire un article qui, justement, maintiendrait tous les pouvoirs au Québec. Dans une perspective de souveraineté-association, quand des pouvoirs nous sont donnés il faut les prendre. Par exemple, dans ce cas-là, les pouvoirs de juridiction nous sont reconnus en matière de production. Alors le Québec occupe le champ de la production et peut, par ailleurs, faire des ententes sur la mise en marché avec les organismes interprovinciaux ou fédéraux. C'est cela, la souveraineté, avoir les pouvoirs, et par ailleurs, se retourner de bord et dire: On va faire des ententes. C'est un exemple de souveraineté-association !

La seule chose que nous voudrions, c'est avoir ces pouvoirs-là dans plus de domaines, ne pas avoir de pouvoirs concurrents dans le domaine agricole, mais avoir tous les pouvoirs et, après cela, faire les ententes qu'on voudra faire.

M. le Président, pendant tout ce débat, on a laissé entendre que ce serait terrible, on a même dit qu'avec cette loi on dirait aux cultivateurs quand semer. Voyons donc! C'est évident qu'on ne dira pas aux cultivateurs quand semer! Mais il y a actuellement, dans certaines productions, des moments où le temps et le lieu de la production sont fixés. Vous savez, dans le domaine du poulet, pour ceux qui connaissent cela — je ne reproche pas aux gens de ne pas connaître cela — on a actuellement, des surplus de production. C'est cela fixer le temps et le lieu de la production, parce que quand vous faites des ententes pour obtenir des prix avec un abattoir de volaille, un abattoir qui a 100 ou 150 employés, l'abattoir de volaille ne peut pas rester deux ou trois jours sans volaille! A ce moment-là, il y a une entente disant: Vous allez nous assurer telle quantité de volaille tous les jours. Cela prend un plan de production pour faire cela. Dans les légumes de conserverie, pensez-vous qu'actuellement il n'y a pas de plan de production? Vous savez que pour mettre des pois en conserve il ne faut pas qu'il y ait plus de quatre heures entre le moment de la récolte des pois et la mise en boîte. Pensez-vous qu'on pourrait faire cela à peu près? Quatre heures seulement, autrement les pois auront commencé à tourner et à être moins bons. C'est évident.

Mais dans ce seul secteur, on n'a pas besoin de ces pouvoirs. C'est évident que, dans ces secteurs, les gens n'auront pas ces pouvoirs. La plupart des pouvoirs dont vous avez parlé ne sont pas dans la loi 116 mais ils existaient déjà avant. Ils n'ont jamais été utilisés parce qu'ils n'étaient pas nécessaires. Prenez, quand vous parlez des permis de production, ce n'est pas dans la loi 116. Cela a été adopté auparavant par les partis d'Opposition, quand ils étaient au pouvoir. Cela n'a pas été utilisé parce que cela n'a pas été considéré comme nécessaire.

La loi 116 est venue essentiellement pour faire une coordination entre les pouvoirs fédéraux et les pouvoirs des provinces, parce qu'il y a eu un jugement de la Cour suprême. A l'occasion, il y a un mot pour clarifier une situation qui n'était pas claire. Ce n'est pas arrivé à la suite d'un procès, la décision de la Cour suprême. La décision de la Cour suprême est survenue pour donner suite à une demande du gouvernement de l'Ontario qui demandait à s'en référer à la Cour suprême, parce qu'il disait: Je suis tanné de voir des débats juridiques dans le monde agricole. (17 h 10)

Ils avaient le même problème qu'au Québec avec des histoires de dissidents et des trous dans la législation. C'est le gouvernement de l'Ontario lui-même qui a fait— référé, c'est ce que cela veut dire — à la Cour suprême une demande. Ils étaient tannés des procès pour les oeufs. Ils étaient tannés des procès pour les autres productions. La Cour suprême a dit: II faudrait trancher cela une fois pour toutes. Poliment, elle ne dit pas qu'elle l'a changée — et c'est cela qui est la réalité — mais elle a changé sa jurisprudence. A ce moment-là, elle dit: Pour que tout cela soit clair, il ne faudra pas qu'on plaide comme des dissidents ont plaidé à un moment donné. Vous n'avez pas de contrôle sur moi parce que je produis pour le marché interprovincial ou je produis pour tel autre marché. Mais, une fois que le produit est parti, cherchez le produit. On ne peut pas mettre des policiers après les produits. Il est tellement compliqué le système qu'à un moment donné j'ai déjà dit qu'une province a déjà pensé de mettre des timbres sur les oeufs pour les suivre, tellement cela n'a quasiment pas de bon sens. Qu'est-ce qu'on a dit? La Cour suprême a dit: Pour clarifier la situation, la province aura juridiction sur toute la production, que la production s'en aille localement, régionalement, provincialement, interprovin-cialement ou internationalement. Toute production, quelle que soit la destination, doit être réglementée par la province. En ce qui concerne le commerce à l'intérieur de la province, juridiction de la province également. Mais, pour le commerce interprovincial et international, c'est de juridiction fédérale. Le député de Lotbinière disait: II faudrait étudier. Pourtant, durant la campagne électorale, il disait: C'est fini, les études! C'est le temps de décider. Nous, on dit: C'est fini!

Des Voix: Bravo!

M. Garon: On dit: C'est le temps de décider, en fonction des intérêts des agriculteurs. Je sais que, temporairement, il y a des gens qui se posent des questions, parce que ce sont des lois complexes; c'est sans doute les lois les plus complexes parce qu'elles demandent un ensemble de connaissances.

M. Bellemare: M. le Président, je vous ferai remarquer que...

Le Vice-Président: Oui, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Je pense que l'article 102 des règlements devrait être appliqué immédiatement.

Le Vice-Président: D'accord. Justement, je vais être obligé de... A l'ordre, s'il vous plaît! A moins qu'il y ait un consentement...

M. Jolivet: On va vous mettre en boîte, l'Union Nationale.

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Question de privilège, M. le député de Vanier.

M. Bertrand: M. le Président, tantôt, le député de Gaspé a souligné qu'il était prêt à laisser tout le temps nécessaire au ministre de l'Agriculture pour le renseigner.

M. Bellemare: Question de privilège, M. le Président.

M. Bertrand: M. le Président, mon privilège de député...

M. Bellemare: ... je vous demande de rappeler le député de Vanier à l'ordre. Ce n'est pas une question de privilège. Le député de Gaspé a...

M. Jolivet: La colère est mauvaise conseillère.

Le Vice-Président: J'espère moi aussi que c'est fini.

Une Voix: C'est fini.

Le Vice-Président: M. le député de Vanier, laissez porter la question. Je vous en prie. M. le ministre, je vais être obligé de vous faire entendre le timbre qui sonne la fin de votre discours.

M. Le Moignan: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président: Oui, M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: J'ai bel et bien déclaré tout à l'heure que je laisserais au ministre tout le temps voulu, le temps prévu par le règlement.

Le Vice-Président: Je m'excuse. Je voudrais rappeler à tous que ce sont les articles 101 et 102 qui s'appliquent. Je les applique au ministre comme à tous et je vous demanderais, s'il vous plaît, M. le ministre, de terminer.

M. le ministre, si vous voulez conclure.

M. Garon: M. le Président, je vais terminer là-dessus. Au fond, je sais qu'il va y avoir quelques inquiétudes temporaires parce que c'est un projet de loi complexe qui a besoin d'explications, et l'Opposition a semé tellement de doutes. Les gens vont se rendre compte à l'usage, au fond, que cela fonctionne comme avant. Mais ce que nous ne pouvons appuyer, même si je les ai entendus pendant longtemps... Je pense aux plans conjoints qui ont été votés par 90% des producteurs, par exemple, dans le domaine des oeufs. La démocratie veut que ce soient les gens qui n'ont pas gagné le référendum qui adhèrent au mouvement. Je suis loin de penser que dans l'UPA tout le monde est parfait. C'est comme dans le Barreau, tout le monde n'est pas parfait. Je peux le dire comme avocat, mais quand un avocat est coupable, on n'abolit pas le Barreau; on sort l'avocat du Barreau.

M. le Président, je vais terminer là-dessus, je pense que dans le domaine du syndicalisme agricole, il y a possiblement des fautes de commises; il y a possiblement des syndicats qui ne sont pas représentatifs, sur le grand nombre qui existe. A ce moment-là, c'est aux producteurs d'assister aux assemblées et de changer les dirigeants qu'ils n'aiment pas. Je leur ai dit ceci: quand je suis allé à Saint-Guillaume, dans le comté de Nicolet, assemblée à laquelle le député de Nicolet-Yamaska faisait référence: "Si vous n'aimez pas des dirigeants dans un syndicat, changez-les, allez à l'assemblée annuelle. Si vous n'aimez pas des dirigeants dans une coopérative, changez-les, allez à l'assemblée annuelle et changez-les. Mettez à leur place des gens qui vous représentent". Mais quand les gens se sont exprimés dans une proportion de 75%, 80% ou 90% en faveur de quelque chose, le gouvernement n'a pas le choix, il doit respecter la démocratie.

Le Vice-Président: Quelle question, monsieur? Une question de règlement?

M. Fontaine: Une question en vertu de l'article 96, M. le Président.

Le Vice-Président: Non, un instant. En vertu de l'article 96, mais, écoutez, soyez bref, je vous en prie.

M. Fontaine: Je serai très bref, M. le Président. Le ministre a fait la comparaison avec la loi de l'Ontario. Ici, au Québec, les pouvoirs de l'Office des producteurs sont inscrits dans la loi. Mais ce que le ministre a oublié de dire, c'est qu'en Ontario...

M. Charron: M. le Président, j'invoque le règlement.

Le Vice-Président: D'accord. A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Fontaine: ... M. le Président, c'est le lieutenant-gouverneur en conseil...

M. Charron: J'invoque le règlement, M. le Président.

M. Fontaine: ... qui a ces pouvoirs-là. Il peut les retirer n'importe quand.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du gouvernement, je pense que ce ne sera pas nécessaire.

D'office, je mets aux voix la motion de deuxième lecture du projet de loi 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles.

Des Voix: Adopté.

Le Vice-Président: Après tout ce qui a été dit, cette motion sera-t-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

M. Bellemare: Vote enregistré, M. le Président.

Le Vice-Président: Que l'on appelle les députés.

Suspension à 17 h 47

Reprise à 17 h 54

Mise aux voix de la deuxième lecture

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Que ceux qui sont en faveur que le projet de loi no 116 soit lu une deuxième fois veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Charron, Laurin, O'Neill, Mme Cuerrier, MM. de Belleval, Johnson, Proulx, Léger, Garon, Martel, Paquette, Marcoux, Chevrette, Bertrand, Fallu, Michaud, Rancourt, Laberge, Grégoire, Guay, Lefebvre, Laplante, Bisaillon, de Bellefeuille, Gendron, Mercier, Alfred, Marquis, Gagnon, Ouellette, Perron, Gosselin, Dus-sault, Boucher, Beauséjour, Desbiens, Baril, Bor-deleau, Charbonneau, Gravel, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Jolivet, Levesque (Bonaventure), Lavoie, Vaillancourt (Orford), Mailloux, Goldbloom, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Blank, Scowen, Gratton, Pagé.

Le Vice-Président: Contre?

Le Secrétaire adjoint: MM. Biron, Bellemare, Grenier, Russell, Fontaine, Brochu, Le Moignan, Cordeau, Roy, Verreault.

Le Vice-Président: Abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 54 — Contre: 10 — Abstentions: 0

Le Vice-Président: La motion est adoptée. M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je voudrais... Le Vice-Président: Un instant!

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission de l'agriculture

M. Charron: M. le Président, je fais motion pour déférer ce projet de loi en commission parlementaire de l'agriculture.

Le Vice-Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire, pourrait-on savoir à quel moment?

Travaux parlementaires (suite)

M. Charron: Je fais motion pour que cette commission de l'agriculture se réunisse ce soir de 20 heures à 22 heures et demain, de 10 heures à 13 heures, aux fins d'étudier article par article le projet de loi qui vient de lui être déféré.

Le Vice-Président: A quelle salle? M. Charron: 81-A.

Le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Lévesque (Bonaventure): Je voudrais simplement avoir une précision. Cette motion pour demain matin, de 10 heures à 13 heures, normalement, on aurait eu droit à un avis plus tôt si la Chambre ne siège pas. Et si la Chambre siège, ce sera plutôt, j'imagine, de 11 heures à 13 heures.

M. Charron: C'est exact, M. le Président. Je n'ai pas voulu...

M. Levesque (Bonaventure): C'est vrai que la période des questions n'est que demain après-midi. Mais est-ce qu'on peut avoir une précision là-dessus?

M. Charron: J'ai la même position que j'avais cet après-midi quand j'ai informé l'Assemblée qu'il était possible que la Chambre ne siège pas demain matin dépendant de l'allure des travaux de ce soir. Je puis dire à tous les députés qu'il est probable

maintenant, étant donné que nous avons la deuxième lecture espérée avant 18 heures, que l'Assemblée nationale ne siège pas demain matin ce qui sera annoncé ce soir. D'où la prudence dans le contenu de ma motion.

Le Vice-Président: M. le leader parlementaire, est-ce que je pourrais dire ceci? Vous faites motion pour que la commission élue permanente de l'agriculture se réunisse de 20 heures à 22 heures à la salle 81-A et, en temps et lieu, vous répéterez votre avis.

M. Charron: C'est exact, M. le Président. Je ne voudrais pas que, si jamais la Chambre siégeait demain matin, je ne puisse avoir la séance de la commission de l'agriculture; j'ai mis plus que moins, vous comprenez?

Le Vice-Président: Entièrement d'accord, oui. M. le leader de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Est-ce qu'il y a une raison spéciale de ne pas aller au salon rouge plutôt qu'à 81-A?

M. Charron: 81-A, on me dit, est la seule salle disponible actuellement.

Le Vice-Président: D'accord. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté.

M. Charron: Avant 18 heures, je donne avis, M. le Président, pendant que nos collègues de l'agriculture feront ce soir et demain ce qui vient de leur être confié, ici, je répète le menu de ce soir. Le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre est disponible pour achever la deuxième lecture du projet de loi no 128. Nous procéderons en commission plénière puisqu'il s'agit d'un seul article à cette loi. S'il y a consentement à ce moment, nous achèverons même le projet de loi, sinon nous le reporterons. Par la suite, c'est le débat en troisième lecture sur 110 qui sera appelé. Si jamais, M. le Président, le beau temps continuait à régner sur cette Assemblée, ce serait le projet de loi no 84 qui serait appelé en troisième lecture.

M. Lavoie: M. le Président...

Le Vice-Président: Oui, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle. (18 heures)

M. Lavoie: J'aurais une question à l'adresse du leader parlementaire du gouvernement, a-t-on discuté entre les différentes formations politiques afin que le rapport de la commission qui étudie la loi 116, soit considéré comme si la commission qui avait étudié ce projet de loi était la commission plénière de l'Assemblée?

M. Charron: Non, cela ne l'avait pas été, mais si le député de Laval, mon collègue de l'Opposition, en fait la proposition, je suis plus qu'intéressé à l'appuyer. Je ne sais pas quelle est la réaction de l'Union Nationale.

Le Vice-Président: Est-ce que je peux demander s'il y a consentement?

M. Bellemare: Non.

Le Vice-Président: Je comprends qu'il n'y a pas consentement.

M. Charron: C'est ce que j'avais un peu présumé.

Le Vice-Président: Alors, sur ce, messieurs, constatant qu'il est 18 heures, je vous donne rendez-vous à la reprise de 20 heures au même lieu.

Suspension de la séance à 18 h 1

Reprise de la séance à 20 h 15

Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

Au moment de la suspension du débat cet après-midi, nous étions à zéro en ce sens que nous avions terminé un projet de loi. Je demande donc au leader parlementaire adjoint du gouvernement de m'indiquer quel est l'ordre du soir.

M. Bertrand: Dans la série déjà bien entreprise des blanchissages que nous faisons subir à l'Opposition...

Des Voix: Oh!

M. Bertrand: C'est simplement pour s'inscrire un peu...

M. Lavoie: Nous prenez-vous pour des Russes?

M. Bertrand: C'est ce que j'allais dire. Le député de Laval est exactement sur la même longueur d'onde que moi; c'était pour continuer sur la lancée des matchs de hockey de la dernière fin de semaine. M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 6) qui nous permettra de discuter la motion présentée par le ministre du Travail sur le projet de loi no 128.

Projet de loi no 128 Deuxième lecture (suite)

Le Vice-Président: C'est exact. Merci, M. le leader parlementaire.

Lorsque nous avons ajourné le débat sur le projet de loi no 128, Loi modifiant de nouveau la

Loi du salaire minimum, le député de Saint-Laurent avait la parole. Il avait déjà parlé pendant dix minutes et il lui en reste dix autres. M. le député de Saint-Laurent.

M. Claude Forget (suite)

M. Forget: Merci, M. le Président. Le lendemain du jour où nous avons amorcé ce débat sur la loi 128 a paru dans le Devoir un article qui, non pas par coïncidence, j'en suis sûr, puisque le sujet est d'actualité, rapportait une entrevue avec le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, responsable aussi de la condition féminine. Cette entrevue est une entrevue larmoyante où le ministre responsable des réformes dans ce domaine se juge victime d'une terrible injustice lorsqu'on accuse le gouvernement dont elle fait partie de n'avoir pas délivré la marchandise, de n'avoir pas rencontré les attentes des femmes du Québec, de cette portion, malgré tout, non négligeable de l'électorat québécois, soit quelque 50% de l'électorat et peut-être davantage. Elle invoque l'injustice qu'on lui fait devant une attente déçue, déception dit-elle, qui n'est pas justifiée puisque, malgré tout, bien des choses se sont faites.

On est sur le point de verser des larmes avec le ministre en entendant cet appel à l'injustice, M. le Président, mais on se rassure bientôt, on voit que le ministre, malgré tout, réussit à se consoler et à prendre son mal en patience puisqu'on nous dit que c'est une Lise Payette détendue, encore bronzée par deux semaines de voile dans le sud, qui a donné cette entrevue.

Je me réjouis pour elle de pouvoir prendre en patience les aléas politiques qui font que les promesses qu'elle a faites dans cette Assemblée nationale, l'automne dernier, elle ne peut encore les réaliser. Je porte mon attention immédiatement à une liste des réalisations présumées de ce gouvernement dans le domaine des droits des femmes, dans le domaine de la mise en oeuvre du fameux rapport "Egalité et indépendance" qui se fait attendre, un peu comme l'autre. Cela se fait attendre et c'est un peu pour plus tard. Je suis sûr que même si c'est fait, ce n'est pas un communiqué du ministre, c'est, au contraire, pris au compte même de la journaliste qui a fait le reportage, Mme Rowan. Il reste que ce décompte, ce score, pour employer une expression que ne renierait pas le leader adjoint du gouvernment, ce score dans la joute entreprise par le gouvernement contre les obstacles qui se dressent devant la pleine réalisation, par les femmes, de leur statut de citoyens à part entière, ce n'est pas un score très impressionnant pour le gouvernement. (20 h 30)

En effet, on constate que dans un grand nombre de cas, on en est encore aux recherches et aux études. Ainsi, on pense qu'au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, il n'y a pas de réalisation dont on puisse faire état, le tout est à l'étude. La même chose vaut pour le ministère des Affaires culturelles. Dans le cas du mi- nistère de la Fonction publique où, pourtant, l'accès des femmes à des postes supérieurs, le déblocage des culs-de-sac de carrières féminines est un problème majeur, on est à des recherches prolongées. Le mot n'est pas de moi, M. le Président, il est dans le texte même de ce quasi-communiqué de presse. Dans le cas du ministère de l'Immigration, les recherches sont en cours; là, elles ne sont pas prolongées encore, elles sont en cours pour l'instant. Dans le cas du ministère de l'Education, on n'est même pas rendu aussi loin que cela, on est à des recherches exploratoires, M. le Président. Alors, on a ici une très grande richesse de vocabulaire pour désigner l'état de piétinement et d'attente dans la réalisation d'un certain nombre de choses.

Par ailleurs, on peut citer d'autres références qui sont un peu fausses dans la mesure où elles reflètent des réalisations qui n'ont rien à voir à proprement parler avec la condition féminine même si elles ont des retombées sur la condition féminine, des mesures, par exemple, comme la campagne d'information sur le droit des enfants qui est une mesure qui remonte à plusieurs années et qui, bien sûr, a des retombées sur la condition féminine et qui apparaît comme la première réalisation au ministère de la Justice. Sous la même rubrique, on se donne la peine de citer un colloque sur la violence comme étant une des grandes réalisations pour faire progresser le droit des femmes. Quand on ira au-delà du colloque, nous pourrons applaudir avec le gouvernement, M. le Président. Dans le cas du ministère des Affaires sociales, on parle des cliniques de planification familiale. Voici quelque chose de concret, mais encore une fois quelque chose qui date d'il y a déjà plusieurs mois, sinon plusieurs années, et qui n'est pas du tout une retombée de l'adoption du rapport sur la condition féminine.

Au sujet des Affaires sociales, on fait même une référence qui m'apparaît de mauvais goût. Voulant énumérer la liste des choses qu'on a faites pour les femmes, on parle de l'élaboration d'une politique générale au sujet de l'alcoolisme et de l'abus des médicaments. Il me semble qu'on aurait pu éviter une référence un peu odieuse puisque l'alcoolisme et l'abus des médicaments, je pense bien que cela touche tous les sexes, les hommes autant que les femmes. Je ne vois vraiment pas ce qu'une telle référence vient faire dans une liste des réalisations au titre de la condition féminine.

Du côté des Affaires municipales, on emploie le conditionnel, M. le Président. On dit: On pourra peut-être introduire des recommandations dans la loi instituant la régie du logement et modifiant le Code civil. Cette loi a été déposée l'automne dernier. L'Assemblée nationale ne l'a pas encore débattue et c'est une loi toute fraîche. L'encre est à peine séchée sur le texte et voici que le gouvernement se demande s'il ne pourrait pas y introduire des choses pour donner suite au rapport. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait au moment de la rédaction de cette loi et de son impression qui date d'il y a quelques semaines?

Tout ceci pour dire, M. le Président, que la seule mesure concrète que le gouvernement peut afficher relativement à la condition féminine, c'est cette question des congés de maternité. C'est donc absolument important qu'on fasse ce point puisqu'il semble bien que l'Assemblée nationale, en 1979, n'a pas beaucoup de chances de discuter d'autre chose de concret, comme à la suite du rapport "Egalité et indépendance", que cette mesure visant à donner à la femme le droit au maintien de son revenu de travail pendant la période de maternité et la période qui suit la naissance d'un enfant. Or, de ce côté-là, on se rend compte que nous sommes en face — je le répète encore une fois — d'une mesquinerie systématique de la part du gouvernement.

Cette mesquinerie se révèle de plusieurs façons. Premièrement, on accorde une somme forfaitaire de $240 qui est, semble-t-il, l'équivalent de deux semaines de carence — les deux semaines initiales de carence — période pendant laquelle on ne peut pas recevoir l'assurance-chômage. Or, la période de carence n'est pas de deux semaines, mais elle est de trois semaines. Comme on le disait aujourd'hui dans un article sur le même sujet, comment expliquer ce délai de carence d'une semaine qu'on persiste à vouloir conserver alors qu'on accepte ou on n'accepte pas la notion de maintien du revenu pour la femme qui doit quitter son travail pendant une période de maternité. Le gouvernement semble fort modeste dans ses explications de ce côté-là. Je cite à peu près mot pour mot ce qu'en dit le journaliste, ayant cherché à se faire expliquer par le gouvernement, par les fonctionnaires du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, ce mystère d'un complément à l'assurance-chômage qui ne comble pas complètement la période de carence initiale de trois semaines.

Deuxième caractéristique aussi mesquine, je l'ai indiqué au début de mes remarques la semaine dernière, la sécurité du revenu pour la femme qui quitte temporairement son travail se traduit par une garantie de 60% de ses traitements alors que, dans le cas des autres programmes gouvernementaux qui permettent le maintien du revenu pendant des périodes d'invalidité, temporaire ou permanente — le cas des accidents d'automobile, le cas des accidents du travail — c'est 90% du revenu net après impôt que le gouvernement garantit. Pourquoi, dans ce cas-là, se limiter à 60%? Le ministre dira: A cause du programme fédéral de l'assurance-chômage qui garantit seulement 60%. Qu'à cela ne tienne, M. le Président, il y a des exemples ailleurs de possibilité de supplémenter, de "complementer" le programme d'assurance-chômage pour donner, en sus des primes d'assurance-chômage, un montant additionnel qui pourrait permettre à l'indemnité totale de rejoindre 90%. Le gouvernement du Québec aurait pu faire cela. Il aurait pu le faire dans ce cas-là comme il le fait en vertu des conventions collectives avec les employés du gouvernement, ses employés à lui; il aurait pu en étendre le bénéfice à toute la population féminine.

Une autre mesquinerie M. le Président, c'est que malgré cette loi que nous adoptons aujourd'hui, il reste encore des femmes au travail qui ne seront pas couvertes, qui ne seront pas assurées d'une indemnité de maternité. Ma collègue de L'Acadie l'a indiqué la semaine dernière: il s'agit essentiellement — pas seulement, mais essentiellement — des employés féminins à temps partiel. On veut stimuler et encourager l'occupation d'emplois à temps partiel par les femmes et voici qu'une mesure sociale qui intervient aujourd'hui ne comprend pas les emplois à temps partiel dans le cas des congés de maternité. Pourtant, cela aurait coûté moins cher. Il me semble que ce serait dans la veine dans laquelle on s'est déjà engagé: un emploi à temps partiel va être payé moins cher et cela aurait coûté moins cher au gouvernement d'en assurer la couverture.

Malgré tout, on les omet et on omet également, comme l'a indiqué le député de Mégantic-Compton la semaine dernière, la période qui suit une adoption.

Or, une adoption présente pour une famille à peu près les mêmes problèmes que suscite la présence d'un enfant dans une famille, au moins après la naissance. Il reste qu'il y a les mêmes problèmes d'adaptation et le même besoin affectif pour l'enfant d'avoir sa mère avec lui pendant ses premiers mois.

Il y a donc des difficultés sur le plan de la conception du programme; il y a aussi des difficultés et des mesquineries quant à la manière dont le programme a été introduit. Dans cet article de Renée Rowan dans le Devoir de ce matin, on indiquait que le fameux programme d'information — je termine dans un instant, M. le Président, je vois votre signal — qui devait être instauré dès janvier pour avertir les femmes que ce nouveau programme était en vigueur à partir du 1er janvier, fait face à des difficultés techniques et que, pour cette raison, le gouvernement a par hasard omis d'en parler.

Or, pour qui connaît l'administration publique, on peut facilement s'imaginer quelles sont les difficultés techniques en question. Ce que l'on veut, c'est faire les dépenses de publicité pour le programme de congé de maternité assez tard pour qu'il puisse être imputé aux crédits de l'an prochain. Pendant ce temps, on n'aura pas besoin de dépenser les fameux $1 700 000 qu'on a fait verser aux crédits. Bien sûr, il y en avait $5 800 000 au départ, mais ils sont déjà dépensés pour autre chose. On les a virés à un autre compte budgétaire; on a laissé seulement $1 700 000 et même on s'arrange pour ne pas les dépenser en ne faisant pas de publicité. De toute cette question... M. le Président, on me fait parvenir un message; comme ma collègue, député de L'Acadie, n'a parlé que quinze minutes, on me dit que je pourrais, au nom de l'Opposition officielle, occuper cette tribune pendant une période d'une heure.

M. Johnson: Vous alliez quand même terminer.

Le Vice-Président: C'est possible.

M. Forget: M. le Président, après avoir causé cette émotion sans aucun doute profonde chez nos amis du Parti québécois de l'autre côté, qui nous écoutent d'une oreille attentive, après leur avoir causé ce serrement au coeur qu'ils éprouvent certainement à l'idée que je pourrais occuper cette tribune encore pendant 40 minutes pour dénoncer comme il se doit les mesquineries sans nombre dont s'accompagnent la conception et la présentation de ce projet, je dois dire que le principal avantage que j'en retirerai sera de ralentir un peu mon débit. (20 h 30)

Pour terminer, malgré tout, je veux souligner que cette mesure que le ministre du Travail nous apporte démontre une fois de plus que la loi qu'elle vient d'amender et qui ne fut adoptée que l'an dernier, à la session qui dure encore d'ailleurs, était une loi improvisée, une loi qui a été conçue non pas comme une mesure sociale de première priorité, mais comme une espèce d'aspirine législative, une espèce de calmant qu'on a offert à la population féminine du Québec en disant: Si elles le veulent tant, leur congé de maternité, n'importe quelle espèce de mesure qui a l'air de cela va faire. A ce moment, on ne s'est pas donné la peine de vérifier si oui ou non on couvrait toutes celles qu'on voulait couvrir. On ne peut pas expliquer autrement, M. le Président, le fait qu'une loi qui vient d'être adoptée subisse un amendement et que la seule justification qui nous ait été apportée c'est que, quelque part entre le ministère du Travail et le comité de législation, la préoccupation de couvrir les femmes qui sont régies par un décret, de très nombreuses femmes qui sont régies dans un décret, puisque ces décrets s'appliquent, par exemple, dans l'industrie du textile, l'industrie du vêtement, qui comptent de façon prépondérante une main-d'oeuvre féminine, on ne s'est pas donné la peine de vérifier que, soit d'une façon, soit d'une autre, cette clientèle était couverte.

C'est une démonstration assez claire puisqu'elle vient après une première démonstration qui fut faite l'an dernier, l'été dernier où un projet de règlement a été publié dans la Gazette officielle pour étendre à titre d'ordonnance de la Commission du salaire minimum, le congé de maternité, et de le faire d'une façon qui n'a pas paru acceptable alors. Cela a amené le gouvernement à corriger son tir et à publier finalement un règlement qui était fort différent du projet qu'il avait eu la hardiesse ou la témérité de publier sans une réflexion suffisante. Ou côté législatif, on se rend compte qu'on a la même incurie, la même absence de préoccupation. Je serais curieux de savoir si le ministre...

Le Vice-Président: A l'ordre, M. le député, je m'excuse. Ou bien vous prenez l'heure qui vous est impartie, ou bien vous avez dépassé largement le temps qui vous est accordé. On m'a dit le contraire, il y a quelques minutes. Oui, je m'excu- se. Si vous parlez au nom du parti, vous avez vos 60 minutes.

M. Forget: Je vous remercie, M. le Président. Ceci étant clair, je veux également préciser que je n'en abuserai pas, mais malgré tout, le sujet est important. Il y a des sujets qui occupent le temps de l'Assemblée.

Je dirais qu'il y a 40 000 agriculteurs au Québec; il y a probablement trois millions de femmes. Je pense bien que si l'on ne fait qu'une simple règle de trois, M. le Président, et qu'on divise le nombre de minutes qu'on a consacrées à 40 000 citoyens québécois au cours des derniers jours, à l'occasion de l'étude de la loi 116, on peut probablement utiliser une quarantaine de minutes sans se sentir coupable relativement à ce problème de la situation féminine. Nous n'avons pas eu l'occasion — et cela est assez remarquable, du moins à ma connaissance, on peut me corriger si je suis dans l'erreur — du moins depuis deux ans, depuis que le gouvernement est au pouvoir, d'avoir un seul débat sur un projet de loi sur une mesure quelconque, ne serait-ce que le projet de règlement relatif au congé de maternité, à l'ordonnance relative au congé de maternité publiée l'an dernier pour débattre et entendre les intéressées. Une commission parlementaire sur le sujet ne serait pas nécessairement déplacée.

Il est frappant, M. le Président, que c'est la première fois que nous avons l'occasion de le soulever. C'est avec un grand plaisir que je le fais, plaisir qui serait plus grand, sans aucun doute, si nous avions enfin le fruit des délibérations sans fin du gouvernement au sujet de la suite qu'il va donner au-delà des études, des recherches en cours, des recherches exploratoires et des recherches prolongées qu'il fait sur différents aspects de l'application du mémoire de la Commission du statut de la femme.

Il serait intéressant de savoir comment le ministre responsable du statut de la femme, le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, va se tirer du mauvais pas dans lequel elle s'est placée elle-même en disant qu'elle dévoilerait le nom des coupables parmi ses collègues du Conseil des ministres qui opposent une réticence farouche à la mise en application de ces recommandations. Malgré tout — non pas par ses déclarations à l'Assemblée nationale car il semble que, de ce côté, le courage lui ait manqué de tenir sa parole — par des fuites dans les journaux, on a appris que parmi les coupables, peut-être pas le seul — je ne voudrais pas être injuste envers lui — on retrouve le ministre des Finances.

Or, le ministre des Finances a répondu à une question de mon collègue de Marguerite-Bourgeoys, il y a quelques jours, qu'il n'était même pas disposé — dans le fond, ce qu'il a dit est un peu une périphrase, je ne pourrais le citer mot à mot — et qu'il ne pouvait même pas s'engager à faire des recommandations au Conseil des ministres à la suite de la présentation de ce rapport par le Conseil du statut de la femme. Il a dit qu'il l'étu-

diait et que, bien sûr, il communiquerait au Conseil des ministres le fruit de son étude, mais il ne s'est même pas engagé à faire quelque modification que ce soit.

Il y a une différence très sensible — au cas où cela aurait échappé à l'attention — entre s'engager à faire une étude et à communiquer les conclusions de son étude — une des conclusions possibles est qu'il n'y a absolument rien à faire et qu'il ne faut rien changer, ce serait tout à fait conforme à la déclaration du ministre des Finances — d'une part et, d'autre part, dire: Oui, je m'engage à faire quelque chose, si modeste soit-il, pour améliorer la situation féminine dans notre régime fiscal.

Non, on n'a même pas eu droit à ce très modeste engagement de la part du ministre des Finances. C'est donc dire que le ministre responsable du statut de la femme a fort à faire pour donner suite à son engagement d'une réponse globale au nom du gouvernement à l'ensemble de ses recommandations. Il semble qu'il y aura bien certains éléments, certaines bribes du côté du ministère du Travail; j'en rends d'ailleurs hommage au ministre. Malgré des imperfections, il reste que c'est déjà un effort. C'est déjà quelque chose de concret et c'est peut-être la seule chose concrète que ce gouvernement fera jamais en faveur de la situation féminine, à part faire des colloques, des études, y compris des études sur la drogue, l'abus des médicaments et l'alcoolisme. Cela intéresse particulièrement la situation féminine, du moins à en croire ce quasi-communiqué de presse.

Au-delà de cela, c'est peut-être la seule mesure concrète, ce congé de maternité, que le gouvernement va prendre. Tant mieux et félicitons le ministre au Travail d'une telle audace, mais il est clair qu'à la suite de plusieurs mois, même plusieurs années de travail du Conseil du statut de la femme, un très grand nombre de femmes au Québec se sont posé la question de savoir si enfin on allait sortir des études, si on allait sortir de la période de réflexion, d'analyse et de recherche pour arriver à des conclusions concrètes. Encore une fois, cela ne semble pas pour demain. Il faut, pour l'instant, se mettre sous la dent la question des congés de maternité, même si ce qu'on a à se mettre sous la dent est fort mesquin, fort imparfait. C'est un travail très certainement inachevé qui ne satisfera pas les femmes du Québec, et elles ont raison de ne pas être satisfaites.

Il est inadmissible qu'on considère le congé de maternité sur un plan inférieur aux situations dans lesquelles se trouvent les accidentés d'automobile ou les accidentés du travail. Si on accorde une véritable priorité sociale à cette question du statut de la femme et de la préservation de la période de maternité, de cette protection du revenu pendant cette période, je crois qu'il faut lui donner au moins le même traitement. Si le temps est venu d'agir, le temps est venu d'aller au moins jusqu'au bout, de faire à 100% cette réforme qui n'est pas, malgré tout, une réforme si considérable; c'est une réforme qui reste circonscrite à un secteur qui ne touche pas toutes les femmes, mais seulement celles qui travaillent, même si c'est un problème très réel auquel il est nécessaire d'accorder de l'attention.

Avec toutes ces réserves, nous allons, bien sûr, accorder notre appui à une mesure qui, même si elle est très imparfaite, ne peut souffrir d'être mise de côté ou retardée. C'est un premier pas. J'espère que le ministre dans sa réplique va faire autre chose que dire: Oui, nous, nous agissons. Voici un problème qui traîne depuis longtemps. (20 h 40)

Enfin, nous sommes intervenus et vous nous blâmez de ne pas faire assez bien. C'est de bonne guerre pour le ministre de dire: Oui, voici, nous avons quand même le mérite d'agir, sans aucun doute. Il reste qu'il faudrait que ces belles paroles un peu partisanes, un peu teintées de chaleur et d'émotion partisanes de sa part s'accompagnent d'un autre engagement, d'une autre réflexion pour vraiment persuader les femmes du Québec qu'il s'agit là d'autre chose que de réparties sans conséquence et d'une réplique purement partisane. Il faudrait que le ministre du Travail s'engage à faire un pas de plus, à franchir une étape de plus dans les délais les plus brefs possible. S'il n'a pas pu, pour des raisons budgétaires, à cause de la nature essentiellement conservatrice et prudente de son ministre des Finances, obtenir des crédits supérieurs, peut-être doit-il, en effet, s'en contenter! Il est, malgré tout, prisonnier d'une équipe qui ne partage peut-être pas son point de vue relativement à cette question. Mais au moins doit-il s'engager à faire les efforts nécessaires pour que, dès le prochain budget, il y ait, du côté des congé de maternité, une approche qui soit moins mesquine et moins restritive. Il me semble que, si on prend la bouchée en deux fois, il ne devrait pas être impossible à un gouvernement qui dispose d'un budget de $14 milliards de trouver les $5 millions ou $10 millions qui seraient suffisants pour combler les trous que laisse encore cette mesure, la loi 128. C'est en exprimant ce voeu et en espérant que le ministre va y répondre positivement que je termine, bien en deçà des 60 minutes auxquelles j'ai droit, cette intervention. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Merci, M. le député. M. le député de Richmond.

M. Yvon Brochu

M. Brochu: Très brièvement, j'aimerais simplement vous faire quelques remarques sur ce projet de loi 128 qui vise à modifier à nouveau la Loi du salaire minimum. On sait que c'est essentiellement pour corriger une lacune qui existait dans un autre projet de loi afin de pouvoir chapeauter, par la Loi du salaire minimum, tout un secteur d'activités de nos travailleuses québécoises en ce qui concerne l'ordonnance relative aux congés de maternité. Il y a trois choses qui sont introduites dans ce projet de loi, tel que l'indiquent les notes explicatives: l'employeur d'une telle salariée n'est cependant pas assujetti à l'obligation de tenir un registre, de faire

un rapport mensuel à la commission ou encore de payer le prélèvement fixé par cette dernière. Ce sont les trois choses, ramenées au minimum, qui sont changées dans ce projet de loi. Il ne s'agit donc pas d'une loi qui change toute une façon de voir les lois de ce côté. Il s'agit d'apporter une correction qui avait été omise dans un projet de loi. Je comprends que cela peut, à un moment donné, donner l'accès à une tribune beaucoup plus large pour remettre en cause certaines choses. Certains de mes collègues ont déjà pris la parole sur ce sujet-là. J'aimerais simplement m'en tenir à ces propos pour le moment, en indiquant que, peut-être, il y aurait lieu de penser aussi à la mère de famille au foyer qui, elle, dans l'ensemble de nos lois, n'est pas, pour une grande partie, concernée par nos discussions. En effet, très peu de lois sont votées pour lui apporter une aide quelconque lorsque cette personne-là donne naissance à un enfant. Je profite simplement de cette tribune qui m'est offerte pour souligner le fait au ministre et indiquer qu'il serait peut-être temps qu'on pense à celles qui demeurent au foyer et qui jouent, elles aussi, un rôle social important au même titre que celles qui oeuvrent, par obligation ou par choix, dans le monde du travail. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, il s'agit, en effet, d'un projet de loi qui est technique et c'est comme cela que je l'avais présenté au moment de son dépôt en première lecture. J'avais annoncé, d'ailleurs, au député de Saint-Laurent qui voyageait dans le même véhicule de transport que moi, entre Montréal et Québec, il n'y a pas très longtemps, que je déposerais ce projet de loi, sollicitant, en étant conscient qu'il a la qualité d'être le tuteur de deux de ses collègues d'arrière-ban en matière de relations de travail, finalement, une sorte de consentement de la part d'un "senior" des gens d'en face. Je me suis rendu compte, quelques jours après, que le député de Saint-Laurent, accompagné de son pupille, le député de L'Acadie, tenait une conférence de presse sur toute cette question du congé de maternité, entre autres, pour y affirmer des choses un peu creuses et étonnantes provenant d'un ancien sous-ministre adjoint du ministère des Affaires sociales, de ce même homme qui, tout à l'heure — je veux bien croire que c'était un lapsus, mais est-il significatif? — nous parlait de la commission du statut de la femme. Il ne connaît même pas le nom de l'organisme qui, en 1973, a été créé et qui s'appelle le Conseil du statut de la femme.

Des Voix: Oh!

M. Johnson: Pourtant, il était au gouvernement. On ne peut pas s'étonner que celui qui a également été ministre des Affaires sociales pen- dant quelques années, M. Forget, député de Saint-Laurent, se permette aujourd'hui de venir faire la morale à ce gouvernement, imaginez-vous, d'avoir pris huit mois avant de promulguer une ordonnance. Je demanderais à l'ancien sous-ministre adjoint des Affaires sociales ce qu'il a fait à l'époque où il préparait sa carrière brève au niveau d'un cabinet, et ce qu'il a fait à l'époque où il était ministre des Affaires sociales pour la condition féminine.

M. le Président, sous les aspects purement techniques de ce projet de...

M. Forget: M. le Président, est-ce que le ministre me pose une question à laquelle il souhaite vraiment que je réponde?

Le Président suppléant (M. Jolivet): Au niveau de la...

M. Johnson: Oui. La réponse a déjà été donnée tant de fois.

M. Forget: Je référerais le ministre du Travail aux amendements introduits au régime de rentes du Québec. En deux occasions, il y a eu des amendements, sur lesquels je ne m'étendrai pas ce soir, qui permettent à la femme qui a des enfants de conserver ses bénéfices de rentes sans diminution pendant la période où elle reste au foyer, pendant une période pendant laquelle les enfants ont de zéro à sept ans. Cet amendement, non seulement a été adopté à mon initiative dans le régime de rentes du Québec, mais un amendement identique a été adopté dans l'ensemble du Canada. Cet amendement tenait son origine d'une notion et d'une initiative québécoise de votre humble serviteur. C'est une réponse. Il y en a d'ailleurs une autre, toujours dans le régime des rentes.

Des Voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: C'est également le député de Saint-Laurent qui nous reprochait l'absence de communication et l'absence de clarté sur cette question de la condition féminine. Pourtant, l'amendement qu'il évoque au régime de rentes du Québec, dont je veux bien croire qu'il a été grat-teusement et "papièrement" l'initiateur à l'époque où il était sous-ministre adjoint aux Affaires sociales, cet amendement pourtant, nous n'avons pas fait de fanfare avec cela lors du projet de loi 114 en matière d'accidents de travail. Nous avons modifié la Loi des accidents du travail pour répondre à une série de questions et de demandes du Conseil du statut de la femme quant au régime en matière sociale qui s'applique aux femmes qui subissent des accidents de travail. On n'a pas fait de fanfare avec cela. On n'a pas plus fait de fanfare, d'ailleurs, autour de ce projet qui touche, dans un premier temps, un aspect technique et qui, deuxièmement, soulève un débat qui m'apparaît peut-être important.

L'aspect technique, d'abord. Je dirai qu'il ne m'apparaît pas anormal que, quand un gouvernement, en matière de relations de travail, en l'espace de 18 mois, a fait adopter par un Parlement quatorze lois, on trouve à travers l'une de celles-ci, à l'occasion — parce qu'un contentieux est surmené, parce qu'un contentieux, formé de gens compétents, de gens loyaux et de gens qui ne comptent pas les heures, essaie du meilleur qu'il peut de faire du droit nouveau — qu'on soit obligé de se rendre compte parfois que le test de la réalité nous impose des ajustements. Et je voudrais en profiter ici d'ailleurs pour rendre hommage à ceux qui, dans le contentieux du ministère du Travail, ont travaillé à ces quatorze projets de loi depuis un an et demi.

Deuxièmement, les aspects un peu plus précis qui ont été soulevés par le critique-tuteur ou le critique-pupille sur les $5 800 000 utilisés. Il est vrai que le gouvernement, dans son budget de 1978/79, prévoyait une réserve de $5 800 000 au chapitre de l'indemnisation pour le congé de maternité. Il est vrai que nous utiliserons finalement à peu près un tiers de cette somme, étant donné qu'il n'est pas question de lancer par les fenêtres l'argent des contribuables puisque, effectivement, l'ordonnance et les $240 qu'il faut distinguer d'ailleurs et ce sur quoi je reviendrai, ne s'appliquent qu'à partir du mois de janvier, donc pour la fin de l'exercice financier 1978/79. Je pense qu'il n'y a rien de chinois là-dedans. (20 h 50)

Quant à la question des difficultés techniques, là où le député de Saint-Laurent impute à mon ministère une espèce de sordide projet de camouflage, de récupération de crédits périmés pour le ministre des Finances, la question est beaucoup plus simple, et je vois tout de suite l'aptitude à voir des épouvantails du député de Saint-Laurent, comme d'habitude. Nous avons décidé d'un commun accord, au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre avec la Commission du salaire minimum, de retarder la campagne de publicité. On ne nous accusera pas, j'espère, d'avoir fait des communications partisanes et d'avoir fait de la propagande péquiste. On nous reproche que les femmes sont mal renseignées sur la question. Nous ferons des campagnes de communication dans ce secteur pour les renseigner sur leurs droits et sur ce qu'elles peuvent obtenir en vertu des lois et des décisions administratives. Effectivement, nous avons décidé de retarder ceci même si le montant de $240 entrait en vigueur le 1er janvier pour la bonne et unique raison qu'on ne voulait pas créer un faux espoir pour les 40 000 femmes susceptibles d'être touchées dans le secteur des décrets tant que cette loi n'était pas adoptée par le Parlement et ne pas les mettre dans des situations où elles n'étaient pas couvertes par la loi. C'est la réponse très simple qu'il faut trouver à tout cela.

Finalement, ce gouvernement — j'aimerais le rappeler — a, au mois de juin ou juillet, présenté son projet d'ordonnance. Il a écouté et il a eu l'occasion de recevoir, au niveau de la Commission du salaire minimum, où les commissaires ont fait un travail remarquable, les mémoires des groupements intéressés et même de certains individus. Pendant deux mois, et une extension pour permettre à ceux qui avaient un mémoire à présenter de le faire, nous avons étudié ces mémoires pour, finalement, adopter l'ordonnance non pas le 1er janvier, mais le 15 novembre dernier, et l'ordonnance est entrée en vigueur.

Il faut peut-être expliquer finalement que cette mesure qui, c'est vrai, est mince, qui, c'est vrai, n'est qu'un premier pas fait partie de trois mesures distinctes et je me rends compte que ni le critique tuteur ni le critique pupille n'ont fait leur devoir. Il faut bien distinguer les trois aspects de ce congé de maternité comme on l'appelle en face.

Il y a d'abord la protection de l'emploi de la femme au travail qui se prévaut des dispositions de la Commission du salaire minimum. Cela n'existait pas et cela n'existait pas d'ailleurs après six ans de gouvernement libéral. Mais, après, par exemple, deux mois de gouvernement du Parti québécois, cela existait. Deuxièmement, l'ordonnance sur le congé de maternité, qui, elle, a été promulguée au mois de novembre et qui entrait en vigueur au moment de sa publication, prévoit les dispositions qu'on connaît qui permettent à une femme qui travaille à l'extérieur de la maison de se prévaloir d'une période pendant laquelle elle peut s'absenter en obtenant non seulement des garanties d'emploi à son retour, mais également des conditions qui pourraient lui permettre, par exemple, de bénéficier d'un congé prolongé selon certaines circonstances en ce qui a trait à sa santé ou à celle de l'enfant à naître dans certains cas. Troisièmement, les dispositions et ces fameux $240 dont on parle. Il s'agit là d'une mesure strictement administrative qui prévoit que le gouvernement verse, dans un premier temps, et comme amorce — ce, encore une fois, à l'intérieur de huit mois de la publication, du premier geste dans ce secteur-là et non pas après six ans... C'est l'amorce enfin de la reconnaissance que la maternité et le travail ne sont pas nécessairement incompatibles. C'est plus, ce que ce gouvernement a fait, en l'espace de deux ans, que le précédent en six ans dans ce domaine. Ces $240, on dira que c'est mesquin tant qu'on voudra; on pourra faire des gorges chaudes pour constater finalement qu'on n'a rien fait en face de nous pendant six ans dans ce secteur-là, mais il demeure quand même que cela se prend bien et que c'est un début. C'est comme cela qu'il faut le voir.

Les Chinois ont un proverbe que je ne citerai ici qu'en français. Les Chinois ont un proverbe que peut-être les députés d'en face auraient avantage à comprendre ou à connaître. On dit: Le premier pas d'un voyage, c'est déjà la moitié du chemin. Je pense que la moitié du chemin a été franchie par ce gouvernement en matière de congé de maternité.

Le Président: Est-ce que cette motion de deuxième lecture du projet de loi 128, Loi modifiant de nouveau la Loi du salaire minimum, sera adoptée?

Des Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

M. Bertrand: Adopté.

Le Président: M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.

Commission plénière

M. Bertrand: Oui, conformément à l'article 122, je fais maintenant motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adotée?

Des Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Le Président (M. Cardinal): Messieurs, à l'ordre! J'appelle l'article 1 du projet de loi no 128, à moins que M. le ministre ait quelque chose à ajouter. Article 1, adopté?

M. Johnson: Adopté.

Le Président (M. Cardinal): Adopté. Article 2, adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Cardinal): Adopté.

M. Johnson: Cela va?

M. Forget: Pas trop trop vite là, s'il vous plaît!

Le Président (M. Cardinal): Article 2.

M. Johnson: En fait, essentiellement, l'article 2 prévoit qu'il s'agit de faire en sorte, dans le secteur des décrets, qu'il y ait application de l'ordonnance sans cependant imposer à l'employeur l'ensemble des obligations qui relèvent du reste de la Commission du salaire minimum, c'est-à-dire le prélèvement, la tenue de livres, etc.

M. Forget: D'accord.

M. Johnson: En d'autres termes, ce que dit cet article ou ce que dit l'ensemble de ce projet de loi, ces cinq articles, c'est que cela s'applique dans le secteur des décrets, mais cela ne veut pas dire que le reste de la Loi du salaire minimum s'y applique.

M. Forget: Par implication...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ... toutes les autres dispositions de la Loi du salaire minimum s'appliquent évidemment à la question des congés de maternité.

M. Johnson: C'est cela. Ce sont les articles, si on veut, substantifs de la Loi du salaire minimum qui s'y appliquent, donc la protection de l'emploi, l'ordonnance qui découle de l'article de la Loi du salaire minimum et, deuxièmement, les articles qui prévoient la protection de l'emploi et les recours. Cependant, toutes les techniques qui sont imposées, tous les aspects administratifs qui sont imposés aux entreprises qui sont couvertes par la Loi du salaire minimum ne le sont pas dans le secteur des décrets parce qu'ils sont déjà couverts par une loi qui est celle des décrets.

M. Forget: Les règlements — ou les ordonnances — qui ont été adoptés en vertu de la Loi du salaire minimum, antérieurement à cet amendement, sont-ils réputés s'appliquer avec le même effet aux congés de maternité ou est-ce qu'il faudra nécessairement les modifier pour tenir compte de cet amendement-ci?

M. Johnson: Non, en fait, les dispositions de la loi qui a été adoptée au mois de juin dernier s'appliquent; deuxièmement, ce qui s'applique comme ordonnance, et la seule qui est pertinente dans le secteur des décrets, c'est celle du congé de maternité. C'est l'article 4 qui en dispose effectivement en le rendant à toutes fins pratiques rétroactif dans la mesure où quelqu'un s'est prévalu de l'ordonnance.

M. Forget: L'exigence en vertu de laquelle, par exemple, pour se prévaloir du congé de maternité, une femme doit avoir été à l'emploi du même employeur pendant une période qui est de six mois, je crois, c'est en vertu du règlement actuel de la Loi du salaire minimum?

M. Johnson: C'est cela.

M. Forget: Et cela va s'appliquer tel quel au congé de maternité?

M. Johnson: C'est cela.

M. Forget: Sans modification.

M. Johnson: Exactement.

Le Président (M. Cardinal): Article 2, adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Cardinal): Adopté. Article 3.

M. Forget: Est-ce que cet article est vraiment nécessaire, puisque l'article 2 de l'ordonnance no 17 de 1978 édicte: "La présente ordonnance s'applique à toutes les salariées visées par la Loi du salaire minimum et à leurs employeurs". Le paragraphe c) du premier alinéa de l'article 2 de la Loi

du salaire minimum, tel que modifié par l'article 1 qu'on vient d'adopter, couvre exactement la réalité qu'on veut couvrir. Autrement dit, est-ce que cet article 3 n'est pas une répétition de l'article 1?

Le Président (M. Cardinal): M. le ministre.

M. Johnson: II ne l'est pas. Je sais que cela a donné lieu à des échanges assez longs entre l'ensemble des légistes, et ceux du comité de législation et ceux du ministère. Effectivement, même si, d'une façon apparente, il semble qu'il y ait là une redondance, en fait, pour les fins de la clarté du texte, on préférait que les articles 1 et 3 soient rédigés tels quels.

M. Forget: Bon. (21 heures)

Le Président (M. Cardinal): Article 3 adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Cardinal): Adopté. Article 4?

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Mme le député, pas de Lavoie-Roux, mais de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais demander au ministre quelle date veut-il insérer dans la parenthèse. Celle de l'adoption du projet de loi no 128, j'imagine, ce qui pourrait vouloir dire, disons, le 15 février ou est-ce que vous considérez la possibilité d'insérer la date où l'ordonnance a été adoptée?

M. Johnson: Une fois que nous l'aurons adopté, si nous obtenons l'approbation en troisième lecture ce soir de ce projet et qu'il est sanctionné ce soir, l'article 4 se lirait comme suit: "Une salariée régie par un décret adopté en vertu de la Loi des décrets de convention collective, qui, le 13 février, était absente de son travail en raison d'une grossesse ou de ses suites, après s'être conformée à l'ordonnance no 17... est réputée être en congé de maternité au sens de ladite ordonnance." En d'autres termes, la plupart des femmes, y compris les femmes dans le secteur des décrets, non pas à cause de la publicité parce qu'il n'y en a pas eu à proprement dit, mais à cause des journaux, en fait, qui ont évoqué cette ordonnance, ont probablement de bonne foi considéré qu'elles étaient assujetties à ces nouvelles dispositions.

Il se pourrait que dans le secteur des décrets, en un nombre à peu près impossible à déterminer, mais qui peut être n'importe où autour de 10 ou d'une soixantaine de personnes, impliquant peut-être 2 ou peut-être 30 entreprises, des femmes effectivement aient envoyé l'avis tel que le prévoyait l'ordonnance du 15 novembre et aient exercé un congé de maternité pensant de bonne foi, comme d'ailleurs l'employeur, qu'elles pou- vaient se prévaloir de l'ordonnance no 17. En d'autres termes, ce qu'on dit, c'est que, si une femme a fait cela n'importe où entre le 15 novembre dernier, qui était la mise en vigueur de l'ordonnance et le 13 février 1979, on présume qu'effectivement elle respectait les dispositions de la loi et qu'elle était en congé de maternité comme n'importe quelle autre.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, Mme le député.

Mme Lavoie-Roux: ... je remercie le ministre de son explication, mais est-ce que vous n'avez pas à ce moment, je dirais, deux catégories de femmes qui auront donné naissance à des enfants ou qui auront pu s'absenter de toute façon pour des congés de maternité, les premières ayant été mises au courant de quelque façon que ce soit de l'ordonnance du congé de maternité et les secondes ne l'ayant pas été à cause — et le ministre l'admet lui-même — du manque de publicité faite au sujet de ce projet de loi ou de cette ordonnance? Il s'agirait qu'une personne ait été suffisamment avertie ou alerte ou que les circonstances lui aient permis de savoir qu'elle pouvait se prévaloir de ce congé de maternité pour que, selon ce que vous avez laissé entendre, on puisse la reconnaître au sens de l'ordonnance, mais les autres dont ce ne serait pas la faute, mais qui, à cause d'un concours de circonstances, n'en auraient pas été au courant, ne pourront pas s'en prévaloir. Vous allez vous retrouver avec deux catégories de femmes en congé de maternité, parce que, proba-bablement, les deux auront pris un congé de maternité à tout événement.

Le Président (M. Cardinal): M. le ministre.

M. Johnson: Effectivement, c'est une situation qui théoriquement aurait pu se produire. Ce qu'on essaie de faire par les dispositions de nature rétroactive de l'article 4, c'est d'en couvrir le plus possible. Cependant, avant le 15 novembre dernier, le problème était le même d'une certaine façon pour ces femmes, parce qu'avant qu'il y ait une ordonnance no 17 elles ne bénéficiaient d'aucune protection, d'aucune ordonnance, d'aucun droit dans ce secteur. Il est peut-être arrivé, entre le 15 novembre et le 13 février, que certaines femmes ont quitté leur travail en respectant les dispositions de l'ordonnance et on légalise cette situation et celles qui ne l'auraient pas fait ne s'en sont pas prévalues. Il reste à savoir, à l'intérieur de celles-là, maintenant dans quelle mesure il y en a qui peuvent s'en prévaloir à partir du 13 février, ce qui ne pose aucun problème.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aimerais demander ceci au ministre, compte tenu du fait que de toute façon, au plan budgétaire, il y avait quand même eu $5 800 000 qui avaient été prévus pour ces congés de maternité. Je ne vous deman-

de pas de les couvrir avant l'ordonnance. On ne reviendra pas sur la discussion des délais, mais l'ordonnance a quand même été adoptée le 15 novembre. Pourquoi toutes les femmes ne pourraient-elles pas s'en prévaloir, je dirais toutes les femmes qui, du 15 novembre au 13 février et les jours à venir, s'absenteront pour un congé de maternité?

M. Johnson: Si vous parlez des $240, comme je l'ai expliqué tout à l'heure au moment du débat de deuxième lecture, ces $240 ne sont absolument pas liés à cette ordonnance; ils interviennent, dans le temps, à peu près à la même époque. Ils touchent à peu près le même sujet, ils visent les mêmes personnes, mais ce sont deux décisions qui, sur le plan administratif, sont totalement différentes. L'ordonnance est de permettre à une femme d'obtenir X semaines de congé si elle a rempli telles conditions et, deuxièmement, de bénéficier de X quantités de droits, privilèges, possibilités, si elle est enceinte. C'est un bloc. C'est de cette loi qu'on parle, et l'ordonnance no 17 et cette loi qui a pour effet de faire en sorte que dans le secteur, entre autres, du vêtement, cela puisse s'appliquer.

La décision des $240 est une décision purement administrative, non pas de la Commission du salaire minimum mais du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, administrée par les bureaux des Centres de main-d'oeuvre du Québec, et les qualifications pour les fins de toucher les $240 sont exactement les mêmes qualifications qu'en vertu de la loi fédérale. En d'autres termes, toute femme qui, au Québec, remplit les conditions d'application de la loi fédérale d'assurance-chômage pour les fins d'un congé de maternité peut obtenir du gouvernement du Québec, en se rendant dans un Centre de main-d'oeuvre du Québec, $240 équivalant plus ou moins au délai de carence pour l'immense majorité de ces femmes. Cela, à partir du 1er janvier 1979 et non pas du 15 novembre.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je vois très bien la distinction que le ministre fait. Je pense que cela prouve que, d'un côté, on a accordé des congés de maternité davantage pour protéger la sécurité d'emploi et le retour au travail que comme moyen de compensation financière pour les pertes encourues pour les femmes, puisque ceci fait l'objet d'une autre directive administrative qui ne peut pas s'appliquer, d'après les explications que vous nous donnez, aux femmes qui ont eu un congé de maternité. Mais est-ce que toutes les femmes qui, entre le 15 novembre et la date d'aujourd'hui, se seraient prévalues des allocations de l'assurance-chômage que le fédéral verse dans le cas des congés de maternité ne pourraient pas être automatiquement reconnues comme étant des femmes qui ont dû éprouver deux semaines de carence quelque part?

M. Johnson: Encore une fois, comme ce sont deux mesures distinctes et que les $240 s'appliquent à partir du 1er janvier 1979, on pourrait dire le 15 novembre parce qu'il y a eu l'ordonnance et que cela touche les mêmes femmes et que cela a trait au même sujet. Alors on pourrait dire: Pourquoi n'est-ce pas rétroactif à il y a six ans? Il faut que cela commence quelque part dans le temps. Ce qu'on dit, c'est que toute femme, qu'elle ait respecté ou non les dispositions de l'ordonnance 17 du 15 novembre mais qui était "qualifiable" au sens de la loi fédérale, peut obtenir du gouvernement du Québec $240 additionnels à ce qu'elle reçoit du fédéral.

Mme Lavoie-Roux: Pour celles qui s'en sont prévalu à partir du 1er janvier.

M. Johnson: A partir du 1er janvier 1979, dans la mesure où elles se sont qualifiées non pas sous l'ordonnance québécoise, mais carrément en vertu du régime fédéral et de la réglementation qui découle de la loi fédérale.

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député.

M. Forget: Ma question au ministre porte non pas sur les $240 mais sur le jeu des délais relativement au calcul des semaines pendant lesquelles l'ordonnance peut s'appliquer. En effet, l'ordonnance sur le congé de maternité prévoit un nombre maximum de semaines pour le congé de maternité. Or, dans le cas des femmes qui sont régies par un décret et qui ont eu une grossesse entre le 15 novembre et le 13 février et qui n'ont pas commencé, à partir de ce moment, un congé de maternité mais qui, à partir du 14 février — en présumant une promulgation et une sanction de la loi ce soir — voudraient commencer un congé de maternité, mais subséquemment, une, deux, trois, quatre, cinq, dix ou même douze semaines de leur grossesse, en voyant tout à coup la possibilité de bénéficier de l'ordonnance, est-ce que le calcul du nombre de semaines maximum auxquelles cette loi leur donne droit à titre de congé de maternité se fera à partir du 14 février 1979 ou à partir de la date de leur grossesse, à supposer que ladite grossesse se situe entre le 15 novembre et le 13 février? (21 h 10)

Le Président (M. Cardinal): M. le ministre.

M. Johnson: L'ordonnance prévoit — c'est un beau problème, finalement, de théorie des ensembles que vous posez, ce sont les recoupements des délais entre le 15 novembre et le 13 février — essentiellement un congé de 18 semaines. L'ordonnance prévoit cependant qu'il y a une période de 6 semaines qui peuvent suivre cette grossesse, c'est-à-dire qu'on ne peut exiger d'une femme qu'elle retourne au travail dans les 6 semaines qui suivent son accouchement et non pas sa grossesse.

Mme Lavoie-Roux: Ne vous trompez pas.

M. Johnson: Je m'excuse, c'est parce qu'on parle du projet de loi no 126 en même temps, projet qui est pour étude à la prochaine session, au mois de mars. Si une femme, au moment où on se parle ou le 14 février, c'est-à-dire demain, après la sanction de la loi, est enceinte et si elle veut bénéficier du congé de maternité en vertu de l'ordonnance no 17, elle n'a qu'à remplir ces conditions. Le délai dont elle n'aurait pu bénéficier, dont aucune autre femme au Québec n'aurait pu bénéficier de toute façon avant le 15 novembre dernier, à cause de ce qu'on a dit tout à l'heure, aura cours à partir du moment où elle le demandera. D'autre part, il pourra s'étendre au-delà de son accouchement pour autant de semaines, jusqu'au total de 18 semaines.

M. Forget: Oui, cela va bien si...

M. Johnson: En pratique il s'agit d'un certain nombre de femmes, encore une fois, dans un univers restreint qui s'appelle le secteur du textile, en pratique surtout; dans les décrets, on parle surtout du secteur du textile. A l'intérieur de cela il s'agit de femmes qui effectivement sont enceintes et qui l'étaient au mois de décembre et au mois de janvier. Il faut aussi le regarder comme cela. En pratique, la population visée est sans doute fort restreinte. D'autre part, à l'intérieur de cette population, toutes celles qui auraient décidé de se prévaloir de l'ordonnance no 17 alors qu'elle ne s'appliquait pas sont maintenant protégées par la loi. Il reste peut-être certains cas comme celui qu'a souligné le député de Saint-Laurent, ce qui n'empêche aucune de ces femmes, à partir de ce soir à minuit, si on obtient la sanction, de faire en sorte qu'elles puissent effectivement obtenir leur congé de maternité pour une période de 18 semaines.

M. Forget: Oui, mais ce n'est pas tout à fait la question que je posais. Je crois que cela tient compte adéquatement de la situation où une femme est enceinte ce soir. L'accouchement n'a pas encore eu lieu à minuit ce soir. Elle a droit au congé de maternité en vertu de la loi, tout va bien. Prenons une femme dont l'accouchement a eu lieu entre le 15 novembre et le 13 février; on parle quand même de 40 000 ou 50 000 femmes, donc, cela doit s'adresser à plus d'une dizaine, il y a peut-être quelque centaines de femmes qui se posent la question. Si elle a accouché le 15 décembre ou le 15 janvier ou le 30 janvier, si elle n'a pas pris un congé de maternité parce qu'elle était couverte par un décret, donc non admissible au congé de maternité en vertu de l'ordonnance du salaire minimum du mois de novembre dernier, maintenant que la loi est adoptée, même si l'accouchement a eu lieu il y a 15 jours, un mois ou un mois et demi, est-ce qu'elle a droit aux 18 semaines auxquelles elle aurait eu droit si elle les avait demandées avant l'accouchement? Est-ce qu'elle a droit au solde des 18 semaines si on commence à compter les 18 semaines à partir de la date de l'accouchement qui peut être le 15 décembre?

M. Johnson: Si elle a accouché avant le 13 février et qu'elle a donné un avis en vertu de l'ordonnance no 17, quelle que soit l'époque où elle a accouché entre le 15 novembre et aujourd'hui, si elle a donné un avis, en vertu de l'ordonnance no 17, à son employeur qu'effectivement elle se prévalait d'un congé de maternité, elle est couverte et elle pourra prendre 18 semaines. Si elle a accouché il y a trois jours, elle a 18 semaines devant elle dont elle peut bénéficier.

M. Forget: Elle peut donner cet avis demain matin ou cette semaine.

M. Johnson: Cependant, si elle n'a pas donné un avis au moment où on se parle, elle ne peut en bénéficier.

M. Forget: Comment aurait-elle pu donner un avis relativement à l'application d'une loi qui ne s'appliquait pas à elle?

M. Johnson: Encore une fois, si on a ce projet de loi, c'est qu'on présume que l'immense majorité des femmes au Québec, saisies par les journaux, la télévision et ce dont on parlait, de bonne foi pensaient sans doute que ces dispositions s'appliquaient à elles. Je ne pense pas que dans le secteur du textile, à moins qu'il y ait eu une campagne particulièrement précise de la part des syndicats ou des employeurs, on les ait informées du fait qu'elles avaient droit ou non au congé de maternité.

Je présume que l'immense majorité des employeurs et des salariées du secteur du textile pensaient sans doute que l'ordonnance no 17 s'appliquait à eux et à elles.

Le Président (M. Cardinal): Madame, messieurs. Je voudrais quand même, comme président, suivant de très près l'étude de ce projet de loi et de cet article, souligner que le 13 février est pour le moins une hypothèse. Rien ne me dit que la loi sera sanctionnée aujourd'hui!

Mme Lavoie-Roux: On s'entend là-dessus.

M. Forget: II est bien sûr que je considère que c'est une hypothèse. Mais comme, malheureusement, il faut parler d'hypothèse pour avoir une date précise à l'esprit, j'étais content de prendre l'hypo-thèse du ministre selon laquelle nous consentirions à adopter la troisième lecture dès ce soir. Ce n'est qu'une hypothèse aussi. Mais je pense que c'est une hypothèse intéressante et je retournerais au ministre ma question. Est-il raisonnable, encore une fois, de dire comme réponse à ces femmes qui ont pu effectivement prendre un congé de maternité ou ne pas en prendre, mais qui, de toute façon, n'étaient pas couvertes par l'ordonnance: Si vous avez pensé à donner avis en vertu d'une loi qui ne vous était pas

applicable, vous allez bénéficier de 18 semaines de congé de maternité garanties, avec le droit de retour au travail dans votre emploi, etc. ,et si vous n'avez pas pensé à donner un avis en vertu d'une loi qui ne s'appliquait pas à vous de toute façon, c'est bien dommage, mais vous avez perdu votre loi. Alors que, dans cette loi-ci, on se donne la peine de rendre rétroactives un certain nombre de choses, il me semble que, tant qu'à être rétroactif, on...

M. Johnson: Le problème est qu'on ne peut pas rendre... On le sait, le député de Saint-Laurent nousa d'ailleursdéjà entretenu longuement en commission parlementaire sur l'odieux de la rétroactivité. C'est d'ailleurs l'un des spécialistes de l'odieux de la rétroactivité et de l'aspect épouvantable de la réglementation. Compte tenu de ces réserves qu'il connaît bien, il y avait des limites et, finalement, je ne peux pas prendre rétroactivement un trimestre de grossesse. Ce n'est pas possible. Parce que c'est de cela qu'on parle; on parle d'un trimestre de grossesse, à toutes fins utiles. On pense que, de bonne foi, des salariées du secteur des décrets pensaient sans doute que cela pouvait s'appliquer à elles et, sans doute, d'ailleurs, les employeurs, à moins que, spécifiquement, l'employeur de tel endroit ait demandée ses spécialistes ou à ses avocats si, oui ou non, ces dispositions s'appliquaient à lui, mais on présume que l'immense majorité des gens, entre autres dans le secteur du textile, devaient tenir pour acquis que cela s'appliquait à eux également puisqu'on avait dit que c'était un régime universel. Toute personne qui se serait prévalue de ces dispositions, finalement, on respecte cela. S'ils ne s'en sont pas prévalus, on présume qu'ils ne voulaient pas s'en prévaloir, d'une certaine façon, parce que c'est rétroactif. C'est làqu'on arrête la limite de la rétroactivité.

M. Forget: M. le ministre, votre argumentation est valable dans la mesure où vous avez autre chose qu'une présomption à l'esprit pour nous dire que vous croyez que la plupart des femmes couvertes par le décret se sont prévalues de ce droit en pensant, de bonne foi, que cela s'appliquait à elles. Si vous avez des indications, nous vous serions reconnaissants de nous les communiquer. Je comprends que vous vous basez sur une présomption, là, mais est-ce qu'il y a des éléments de preuve — comme disent les avocats — pour nous amener à croire que cette présomption est bien fondée?

M. Johnson: On n'a pas d'éléments de preuve, mais, encore une fois, cela a l'air impressionnant de dire que cela couvre 40 000 femmes. D'abord, le député de Saint-Laurent sait comme moi, ou devrait le savoir, puisqu'il a été au ministère des Affaires sociales pendant quelques années, qu'il y a environ 20 000 femmes, par année, qui accouchent — je parle de femmes qui travaillent à l'extérieur de la maison — sur un total d'à peu près 100 000 accouchements par année. Pour une main-d'oeuvre qui correspond à environ 40% de la population active, c'est-à-dire 2 millions de personnes, on a 20 000 accouchements. Si vous faites un calcul en gros, même en présumant qu'il y a une forte densité de femmes dans le secteur des décrets, vous avez 40 000 personnes. Vore possibilité de femmes qui sont enceintes pendant ce trimestre-là, parce qu'on parle de trois mois, est quand même assez limitée. C'est une affaire de calcul des probabilités.

M. Forget: C'est un argument à double tranchant, M. le ministre.

M. Johnson: D'ailleurs, il y en a 12 000 là-dedans dont les conventions collectives prévoient des dispositions en matière de congé de maternité.

M. Forget: Eussiez-vous raison, c'est un argument à double tranchant. S'il y a 35 femmes qui sont couvertes par cela, pourquoi ne pas leur permettre de bénéficier d'un congé de maternité pour le solde, au moins, de la période de 18 semaines qui va s'écouler entre le 14 février et la fin de ces 18 semaines, si on le faisait compter à partir de leur accouchement, à supposer que, bien sûr, l'accouchement soit postérieur au 15 novembre?

M. Johnson: Comme le dit le député de Saint-Laurent, c'est un argument à double tranchant. (21 h 20)

M. Forget: Oui, peut-être.

M. Johnson: II vient d'évoquer un tranchant. J'en évoque un autre.

M. Forget: Vous coupez la poire en deux, si je comprends bien.

M. Johnson: II faut le faire parfois.

M. Forget: Ou même pas. Vous mangez la poire en totalité.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie.

Mme La voie-Roux: M. le Président, cette longue discussion nous a peut-être distraits de la compensation qui peut être versée aux femmes pour les deux semaines de carence. J'ai bien compris tout à l'heure que vous aviez dit que, si des femmes s'étaient prévalues du congé de maternité ou des allocations d'assurance-chômage durant ce trimestre, elles pourraient se prévaloir des deux semaines de carence. C'est ce que j'ai cru comprendre tout à l'heure.

M. Johnson: Pas avant le 1er janvier 1979. Cela n'a rien à voir avec ce projet de loi, mais le programme des $240 est entré en vigueur le 1er janvier. Cela n'a rien à voir avec l'ordonnance du 15 novembre.

Le Président (M. Cardinal): Justement. J'ai laissé porter jusqu'à présent, mais ce qu'on appelle les $240 n'a rien à voir avec le projet de loi 128.

Mme Lavoie-Roux: Non. Ecoutez, M. le Président, je vous remercie de votre opinion. Vous avez sans doute raison, mais il reste qu'il y a un

problème qui est réel. Il y a des femmes qui, pour les raisons techniques qu'on a expliquées longuement depuis une semaine et ce n'est pas leur faute... Il y a quand même des montants que le gouvernement a votés. Il les a déjà votés aux Affaires sociales; ils sont devenus périmés, on le sait. Il les a votés de nouveau en montant moindre au moment de l'étude des crédits supplémentaires. Cela me semble au moins un minimum que les femmes qui durant cette période pouvaient se prévaloir d'un congé d'après la Loi de l'assurance-chômage puissent aussi rétroactivement obtenir cet argent qui comble les deux semaines de carence entre les allocations versées par le fédéral et le début du congé de maternité.

Le Président (M. Cardinal): J'ai permis d'en parler parce que nous étudions un projet de loi article par article.

M. Johnson: Très bien, M. le Président. Je voudrais simplement rassurer le député de L'Acadie pour lui dire que je serai prêt à répondre à ses questions à l'occasion de la période des questions demain, si elle le veut.

Le Président (M. Cardinal): Ou de la troisième lecture.

Mme Lavoie-Roux: Ecoutez, est-ce que...

M. Johnson: Non, mais c'est parce que le président semble insister pour qu'on passe à autre chose.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

M. Johnson: Je suis habitué à respecter les décisions de la présidence. Je comprends que ce n'est pas...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, c'est que tout à l'heure... Je veux simplement...

M. Forget: Si vous y consentez, il n'y a pas de problème. Je suis sûr que, de consentement, le président pourrait tolérer une discussion à ce sujet.

Mme Lavoie-Roux: D'autant plus que, tout à l'heure, j'ai cru comprendre que c'est ce que le ministre avait dit, que les deux semaines de carence, il pourrait les verser à ces femmes qui se seraient prévalues de l'assurance-chômage selon la loi fédérale.

M. Johnson: A toute femme qui se prévaut des dispositions de la loi fédérale à partir du 1er janvier 1979. Il faut que ce soit bien clair.

Mme Lavoie-Roux: Elles pourraient l'avoir rétroactivement.

M. Johnson: Non. Ce n'est pas rétroactif. C'est à partir du 1er janvier 1979. Point.

Mme Lavoie-Roux: Par rapport au...

M. Johnson: Ce programme-là, on aurait pu l'adopter en 1974, à l'époque où le député de Saint-Laurent était ministre des Affaires sociales. Il aurait pu dire: A partir du 1er janvier 1975, cela s'applique aux femmes qui travaillent à l'extérieur du foyer et qui se prévalent des dispositions de la loi fédérale. Il ne l'a pas fait, d'ailleurs.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si les deux semaines...

M. Forget: C'est pour cela que vous l'indexez à l'aide sociale. Vous n'avez pas l'argent pour faire cela.

Le Président (M. Cardinal): J'en permets déjà beaucoup. Nous sommes loin de l'article 4 du projet de loi 128. Un à la fois, s'il vous plaît. Madame, je vous le permets.

Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec le ministre, M. le Président, qu'il s'agit du 1er janvier. On ne se chicanera pas là-dessus. Mais s'il y en a, par exemple, qui ont commencé à recevoir leurs allocations du fédéral à partir du 21 janvier parce qu'il y avait eu les trois semaines de carence du 1er au 21 janvier, est-ce qu'elles peuvent réclamer les trois semaines de carence du 1er au 21 janvier? C'est ma question précise.

M. Johnson: Oui.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Johnson: En vertu du programme. Oui, il n'y a pas de problème. Si elles se sont prévalues des dispositions de la loi fédérale après le 1er janvier 1979, elles peuvent bénéficier du programme d'allocations du Québec...

Mme Lavoie-Roux: Parfait.

M. Johnson: ... dans les centres de main-d'oeuvre du Québec qui sont au nombre de 65 et qui fournissent un excellent service...

Mme Lavoie-Roux: D'accord. C'est simple. M. Johnson: ... en général.

Le Président (M. Cardinal): L'article 4 est-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Cardinal): Adopté.

M. Johnson: L'article 5, M. le Président, il s'agit de la mise en vigueur. On pourrait faire un bon débat là-dessus, mais...

Mme Lavoie-Roux: Non. On ne le retardera pas...

Le Président (M. Cardinal): Je vous remercie.

Mme Lavoie-Roux: ... davantage, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Mme la Présidente, je fais rapport que la commission plénière a étudié le projet de loi 128 et l'a adopté sans amendement.

Mme le Vice-Président: Le rapport sera-t-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Mme le Vice-Président: Adopté.

M. Johnson: Mme le Président, est-ce que je pourrais solliciter le consentement de l'Opposition pour la prise en considération et l'adoption en troisième lecture sans débat, en ce qui me concerne?

Mme le Vice-Président: Y aura-t-il consentement à ce que nous passions à la troisième lecture immédiatement?

M. Forget: Oui.

M. Bellemare: D'accord.

Troisième lecture

Mme le Vice-Président: Oui. Cette motion, du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, de troisième lecture du projet de loi 128...

M. Bellemare: Je pense que nous devrions remettre, si le leader parlementaire voulait acquiescer à cette demande, la troisième lecture à demain, à la période prévue par notre règlement...

Mme le Vice-Président: Alors, il n'y a pas consentement.

M. Johnson: Donc, il n'y a pas consentement. Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente...

M. Bellemare: Pour la troisième lecture, oui. Mais le vote sera pris demain après-midi.

M. Johnson: Bon! d'accord.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, avant de...

Mme le Vice-Président: Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Avant d'accorder notre consentement — d'ailleurs, je suis prête à l'accorder — le ministre m'avait dit qu'il me donnerait, au moment de l'étude du projet de loi article par article, quelques précisions sur les mesures qui avaient été prises par la Commission du salaire minimum pour assurer la mise en application véritable du projet de loi. Non seulement celui-là, mais sans...

M. Johnson: Mme le Président, vous permettrez qu'en lieu et place d'un débat de troisième lecture je fournisse simplement ces renseignements aux membres de l'Opposition. D'une part, la Commission du salaire minimum, en vertu de la loi 126 que nous allons étudier incessamment et que je devrais — il me semble — présumer voir adopter avant le mois de juin, sera dotée d'un arsenal plus intéressant dans la mesure où les sanctions prévues par la Loi du salaire minimum seront passablement sévères. Un des problèmes d'application de la Loi du salaire minimum, c'est cela: c'est l'aspect absolument dérisoire et ridicule, finalement, des sanctions prévues dans la loi. Un employeur pouvait théoriquement enfreindre des dispositions importantes de la Loi du salaire minimum et avoir un énorme montant de $15 d'amende à payer. Dans bien des cas, l'infraction lui permettait d'économiser plus que l'amende qu'il était obligé de payer. On va changer cela. Donc, cela devrait être une incitation considérable au règlement.

Deuxièmement, la Commission du salaire minimum présentera bientôt, devant le Conseil du trésor, comme elle l'a déjà fait en partie, des demandes d'effectifs additionnels. Le gouvernement envisagera cette possibilité.

Finalement, il est question d'un rajustement du prélèvement au niveau de la Commission du salaire minimum pour les fins budgétaires.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je voudrais simplement bien comprendre le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. C'est que ce problème, je le lui avais posé en mai dernier, au moment de l'adoption du premier projet de loi 143, je pense, sur les congés de maternité. Si je comprends bien, à l'heure actuelle, il est exactement au même stade qu'il était en octobre où il m'a dit: Le Conseil du trésor est à étudier une réallocation de ressources humaines à l'intérieur de la Commission du salaire minimum. Vous êtes encore au stade des études. C'est ce que je dois comprendre.

M. Johnson: Non, il y a déjà une partie de ces opérations qui ont fait l'objet de décisions du Conseil du trésor et une autre partie qui devra tenir compte évidemment de la nouvelle loi. Vous comprendrez que, compte tenu du fait qu'on est en train non seulement de refaire la Loi du salaire minimum à l'occasion de l'étude du projet de loi 126, qui viendra devant le Parlement au mois de mars et qui normalement devrait être adopté avant le mois de juin, et qu'en plus de cela on refait la structure de la Commission du salaire minimum, on ne peut pas prendre toutes ces décisions avec une patte en l'air. Je dis, encore une fois, que le mécanisme le plus important qui est prévu, ce sont essentiellement les amendes qui vont faire, je

pense, qu'en pratique, les employeurs largement se plieront aux exigences de la loi et des ordonnances.

Mme Lavoie-Roux: A ce moment-ci, Mme le Président, je dois comprendre du ministre qu'il n'y a pas eu d'effectifs d'ajoutés à la Commission du salaire minimum pourvoir à une meilleure application non seulement de cette loi, mais d'autres lois relevant de la Commission du salaire minimum.

M. Johnson: Non.

Mme Lavoie-Roux: Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Union Nationale. (21 h 30)

M. Bellemare: J'ai donc le plaisir de demander le vote sur la troisième lecture. Comme, en vertu de l'article 106, on peut le reporter à la séance prochaine, je demande qu'on puisse le reporter.

M. Bertrand: Mme la Présidente...

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Union Nationale, il faut qu'il y ait cinq personnes qui me demandent de reporter le vote enregistré, comme vous le savez évidemment. Maintenant, je ne sais pas, le leader du gouvernement est debout, il aura sans doute quelque chose à ajouter sur cette question.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: C'est simplement pour faire appliquer le règlement, Mme le Présidente. C'est effectivement le droit des députés de demander qu'il y ait un vote sur ce projet de loi en troisième lecture; c'est le privilège du leader parlementaire du gouvernement de demander que ce vote soit reporté à plus tard. Alors, s'il y a une demande de vote, on verra, Mme la Présidente.

Une Voix: II n'y en a pas cinq. M. Bertrand: II n'y en a pas cinq? Mme le Vice-Président: Alors... M. Bertrand: Alors, adopté.

Mme le Vice-Président: ... il y a eu consentement pour que nous passions à la troisième lecture. Cette motion de troisième lecture...

M. Bellemare: Mme le Président, pour passer à la troisième lecture, il faut avoir le consentement.

Mme le Vice-Président: Oui.

M. Bellemare: Et vous ne l'aurez pas, vous ne l'aurez pas.

M. Bertrand: II a été donné, c'est fait.

M. Bellemare: Non, monsieur.

M. Johnson: Bien oui.

M. Bellemare: Non, monsieur.

M. Johnson: Bien oui. Mme le Président, si vous permettez...

M. Bellemare: II a été donné si vous reportez le vote de la troisième lecture à demain.

M. Bertrand: Mme la Présidente, je vous fais valoir...

Mme le Vice-Président: M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.

M. Bertrand:... très humblement que le député d'Anjou et ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre s'est levé tout à l'heure et a demandé s'il pouvait avoir le consentement pour que nous fassions le débat en troisième lecture. Le consentement lui a été donné et le débat s'est tenu en troisième lecture à moins, Mme la Présidente, que ce qui vient de se dire au cours des dernières minutes soit quelque chose qui s'est déroulé en dehors de tout contexte réglementaire. A partir de ce moment, il m'apparaît normal maintenant que nous demandions que le vote soit pris sur le projet de loi en troisième lecture.

M. Bellemare: Mme la Présidente, comme la tradition parlementaire veut que jamais un vote ne soit pris dans la même séance lorsque la commission plénière a siégé, je dis non, puisqu'on ne veut pas reporter le vote à demain, pour la troisième lecture de ce soir.

M. Bertrand: C'est fait.

Mme le Vice-Président: M. le whip de l'Opposition officielle.

M. Lamontagne: Mme la Présidente, je me rallie au leader adjoint quand il dit que la troisième lecture a eu lieu. Cependant, compte tenu qu'il y a une commission parlementaire et qu'il y a de nos collègues de l'Union Nationale qui sont là, qui semblent vouloir un vote là-dessus, il y a une troisième lecture et comme bon député de l'Opposition appuyant mes collègues de l'Opposition, c'est une tradition, je vais appuyer cette demande de reporter le vote. Mais c'est le leader du gouvernement qui doit demander de reporter le vote et non nous.

M. Bertrand: C'est cela.

Mme le Vice-Président: II va falloir clarifier. Si vous me demandez un vote enregistré et que vous êtes cinq à le demander, à ce moment-là, d'ac-

cord, j'appellerai le vote. J'appellerai le vote à ce moment-là. Mais vous ne pouvez pas me demander de reporter le vote à demain.

M. Bellemare: D'un autre côté, on ne peut pas procéder selon les règlements de notre procédure, aller à la troisième lecture le même soir s'il n'y a pas l'unanimité. Il ne l'a pas.

M. Bertrand: Mme la Présidente, je crois...

Mme le Vice-Président: Je pense que nous avions...

M. Bertrand: ... que tout est très simple. Le consentement a été demandé pour le débat en troisième lecture; le consentement a été donné, le débat a eu lieu en troisième lecture. Le règlement stipule maintenant que, si des gens veulent obtenir un vote enregistré sur cette motion de troisième lecture, il doit y avoir cinq personnes à cette Assemblée nationale qui le demandent. A ce moment-là, Mme la Présidente, je vous fais savoir que, si ce vote enregistré est demandé, je pourrai utiliser mon privilège de faire en sorte qu'il soit reporté à la séance de demain.

Mme le Vice-Président: Le vote enregistré est-il demandé?

M. Bellemare: Oui, pour demain.

Mme le Vice-Président: Alors, je dois avoir cinq personnes qui demandent ce vote enregistré. Je n'ai pas cinq personnes. Cette motion de troisième lecture du projet de loi no 128 est-elle adoptée?

M. Bellemare: Elle ne sera pas adoptée, Mme la Présidente, pas ce soir.

M. Lamontagne: Nous ne le demandons pas mais nous appuyons leur demande. Nous sommes cinq.

Mme le Vice-Président: Voilà, nous avons maintenant une demande qui vient de plus de cinq députés. Vote enregistré. Qu'on appelle...

M. Bertrand: Mme la Présidente...

Mme le Vice-Président: M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement, avant que je n'appelle les députés, je vous écoute.

M. Bertrand: Bien sûr, Mme la Présidente. Alors, puisque maintenant cinq personnes, tel que le stipule le règlement, demandent le vote, conformément au règlement et non pas simplement pour suivre un souhait du député de Johnson, je demande que le vote soit reporté à la séance de demain.

Mme le Vice-Président: Les voix seront enregistrées au moment de l'enregistrement des voix sur les votes en suspens aux affaires courantes de demain.

M. Bertrand: Mme la Présidente...

Mme le Vice-Président: M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.

M. Bertrand:... je vous demanderais d'appeler maintenant l'article 3) qui figure à notre feuilleton d'aujourd'hui.

Projet de loi no 110 Troisième lecture

Mme le Vice-Président: A l'article 3), il s'agit de la motion de M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre proposant que soit maintenant lu la troisième fois le projet de loi no 110, Loi modifiant la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction et d'autres dispositions législatives. C'est M. le leader de l'Union Nationale qui avait la parole sur ce projet de loi no 110.

M. Lamontagne: C'est la troisième lecture, Mme la Présidente.

M. Pagé: Mme la Présidente, on est en troisième lecture. Vous avez un vieux procès-verbal.

Mme le Vice-Président: Voyons! C'est marqué M. Johnson. M. le leader, vous m'excuserez. Je dois me réenligner, comme on dit. C'est marqué M. Johnson, mais M. Johnson c'est le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre; ce n'est pas le député de Johnson qui avait la parole. M. le ministre, la présentation en troisième lecture de votre projet de loi no 110.

M. Lamontagne: Mme la Présidente, seulement un mot pour vous dire que dès à présent nous vous donnons le consentement pour continuer après 22 heures.

M. Bellemare: Aucune objection. Si le ministre veut simplement exercer son droit de réplique, on s'est entendu, le Parti libéral et moi-même, pour faire dans l'espace de quelques minutes chacun notre commentaire, et le ministre pourra faire sa réplique. Cela pourra peut-être dépasser de quelques minutes 22 heures, mais très peu, pour qu'on puisse finir le bill 110 ce soir.

Mme le Vice-Président: Nous avons d'ores et déjà le consentement unanime de l'Assemblée. Il ne faudrait pas oublier que nous avons aussi le mini-débat, n'est-ce pas?

M. Pagé: Je présume, Mme le Président, c'était là le sens de la remarque de mon bon ami, le député de Roberval, qu'il y aura seulement un membre par formation politique qui interviendra pour ne pas prolonger le débat jusqu'à minuit ou 1

heure ce matin; sinon, on préférerait siéger demain matin. C'est bien cela?

M. Johnson: En ce qui me concerne, Mme le Président, j'ai l'intention de conclure. A ma connaissance, aucun de mes collègues n'a manifesté l'intention d'intervenir sur le projet de loi no 110. Je ne veux pas présumer de ceux qui ne sont pas là en ce moment, mais je présume qu'il n'y en a pas puisque je n'en reconnais pas.

Mme le Vice-Président: Les interventions sur le projet de loi no 110.

M. le député de Portneuf.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Mme le Président, c'est presque avec une certaine hésitation, en fait, que j'interviens ce soir au niveau de la troisième lecture sur le projet de loi no 110 parce que c'est à se demander, Mme le Président... Après qu'on a mené une lutte serrée, une lutte assez longue, qu'on eut fait un débat en deuxième lecture, qu'on a eu l'occasion de faire part au gouvernement de nos commentaires, de nos représentations sur un projet de loi, quand par surcroît on a eu aussi l'occasion en commission parlementaire de présenter des amendements et qu'on constate que la seule réponse qu'on reçoit du gouvernement, du ministre du Travail, c'est somme toute des fins de non-recevoir ou presque, vous savez, Mme le Président, ce projet de loi aura réussi à faire une unanimité en ce qui a trait à l'opposition au projet de loi. Vous vous rappelez certainement que les partis de l'Opposition, que ce soit le Parti libéral du Québec ici à l'Assemblée, que ce soient mes collègues de l'Union Nationale, notre collègue, le député de Beauce-Sud et chef du Parti national populaire, tous les partis de l'Opposition ont eu l'occasion de faire part de leur opinion sur le projet de loi et tout le monde était contre le projet, Mme le Président.

Même plus, Mme le Président, des personnes directement affectées, directement touchées par ce projet de loi ont eu l'occasion aussi de faire part de leurs commentaires. Pas ici à l'Assemblée parce qu'on se rappellera que le ministre du Travail s'est refusé à ce qu'il y ait une commission parlementaire qui puisse siéger pour entendre les parties qui, elles, étaient directement concernées par le projet de loi. Que ce soient, Mme le Président, les parties syndicales, que ce soit le Conseil provincial des métiers de la construction, de la Fédération des travailleurs du Québec, que ce soit la CSN Construction, que ce soit la partie patronale avec l'Association des entrepreneurs en construction, que ce soient différents groupes comme le comité mixte ou le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre qui a eu de sérieuses réserves, l'unanimité, Mme le Président, s'est faite à savoir que les groupes directement concernés étaient contre le projet de loi. (21 h 40)

L'entêtement du gouvernement à vouloir le passer envers et contre tous ceux qui étaient concernés et intéressés par le projet de loi aurait peut-être pu être explicable dans certains cas, dans certaines Législatures. C'est ce à quoi on peut s'attendre lorsqu'un gouvernement jouit entre autres, d'une majorité. Je conviens que le gouvernement a une majorité numérique à l'Assemblée, mais vous conviendrez avec moi, M. le Président, que le gouvernement du Parti québécois ne représente que 40% des électeurs et des contribuables du Québec.

M. de Bellefeuille: 41,4%.

M. Pagé: 41,4% pour faire plaisir au député de Deux-Montagnes.

M. Alfred: 46% maintenant.

M. Pagé: Ce sera, au lendemain du prochain scrutin, évidemment, 27%, 28% ou peut-être 30% au maximum, mais cela est une autre chose; on verra.

Cela veut dire, Mme le Président, que 59% de l'électorat, par la voix de l'Opposition, se sont prononcés contre le projet en plus des groupes directement concernés. C'est inquiétant que le ministre du Travail, le député d'Anjou, n'ait voulu céder en rien, absolument rien ou presque. Je conviens que le projet de loi 110 n'a qu'un seul élément positif, ce sont les dispositions qui s'appliquent à la Régie des entreprises de construction. Ces dispositions font en sorte que le consommateur, celui qui aura à faire face à des entreprises, celui qui aura à faire face à des entrepreneurs sera mieux protégé, ce à quoi, d'ailleurs, nous avons souscrit en commission parlementaire.

Il y a cependant, M. le Président, un tout autre volet, un premier volet qui est celui de l'Association des entrepreneurs en construction notamment. Vous vous rappelez, M. le Président, encore il y a quelques jours, on a eu malheureusement à vivre devant l'Assemblée, au début de la session, la semaine dernière, une manifestation assez imposante. Des gens se sont vus dans l'obligation, M. le Président, de venir sensibiliser l'Assemblée en venant avec leurs béliers mécaniques, leurs tracteurs, tout leur équipe-ment lourd, etc., afin de démontrer au gouvernement que les dispositions du projet de loi 110 étaient en résumé la tutelle de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec.

Le ministre du Travail, ce soirou demain, pourra dire sur la place publique à ses députés, à ses électeurs: J'ai tenu mon bout sur le projet de loi 110, j'ai tenu mon bout à l'égard de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec et la loi a été adoptée. M. le Président, on peut présumer qu'on aura des problèmes inhérents à l'application de ce projet de loi. J'ai, d'ailleurs, eu l'occasion de faire part au ministre des réserves que j'avais et de ce à quoi on pouvait s'attendre. On sait que l'Association des entrepreneurs en construction du Québec se voit imposer, par ce projet, une véritable tutelle. L'Association des entrepreneurs en construction, qui est un organisme habilité qui a comme mandat de négocier

pour et au nom de la partie patronale le décret dans le secteur de la construction, avait comme obligation de fournir des règlements au ministre pour ses statuts, ses règlements, etc. En janvier 1978, cela a été fait. Le ministre du Travail avait sur son bureau, depuis le mois de janvier 1978 — cela fait plus d'un an — un projet de règlements; il s'est refusé à interve-nir. Le ministre a consulté les parties. Cela va de soi que les six associations qui sont reconnues dans ce secteur sont intervenues elles aussi; elles ont présenté des projets de règlements, des projets de modifications auxdits règlements. Le ministre a préféré trancher lui-même. Il a préféré en arriver au libellé du projet de loi 110 qui prévoit des dispositions à l'égard de l'AECQ qui font en sorte que le ministre du Travail pourra probablement, d'ici une dizaine de jours ou à peu près, dès que la loi sera adoptée, se substituer aux membres, se substituer à la structure existante et passer un règlement qui s'appliquera.

Cela peut paraître bien facile, mais je ne suis pas convaincu, M. le Président, que le prochain conseil d'administration de l'AECQ, tel qu'il sera formé par les règlements édictés par le ministre, puisse recevoir le mandat de confiance qu'il doit avoir pour négocier la prochaine ronde pour le renouvellement du décret.

De toute façon, le ministre du Travail sera jugé par ses actes. Le ministre du Travail sera jugé aussi par l'effet de ce projet de loi. Je suis convaincu que cela entraînera des perturbations au sein des parties patronales dans un secteur où cela allait bien. On sait que l'AECQ avait négocié un premier décret en 1976. Cela a été moins difficile que dans d'autres négociations précédentes. Cela semblait aller très bien. Il y avait, évidemment, des correctifs à y apporter, mais le ministre a pris le gros couteau, il a tranché tout cela lui-même, il s'est substitué aux parties et il va passer son règlement. Bonne chance avec ce règlement! Je suis convaincu qu'il ne réglera pas grand-chose avec cela.

Ce projet de loi contient évidemment des dispositions à l'égard de l'Office de la construction. C'est encore un autre secteur gouvernemental où il y a eu des échanges ici, à l'Assemblée nationale. Le ministre du Travail a nommé un président-directeur général par intérim, qui a un mandat de deux ou trois mois ou à peu près, qui est son ancien sous-ministre adjoint à la sécurité, si ma mémoire est fidèle. Effectivement, l'ancien sous-ministre adjoint, qui est maintenant président de l'OCQ, aura à fournir un mandat sur ce qu'il pense que devrait être l'Office de la construction du Québec. Encore là, le ministre aurait dû attendre, purement et simplement, le rapport de son sous-ministre avant d'intervenir au sein de l'OCQ. On sait que des représentations lui ont été formulées. Encore une fois, le ministre ne s'est pas tracassé de cela, pas du tout.

Les représentations formulées par les groupes, c'est à se demander si cela le laisse indifférent ou quoi. Quant à la requête qui a été formulée par le comité mixte, on sait, entre autres, que les parties au comité mixte refusent actuellement de siéger au comité tant et aussi longtemps qu'elles n'auront pas eu une rencontre avec le ministre du Travail. On aurait été en droit de s'attendre que celui-ci les rencontre aussitôt après qu'un tel avis lui fut parvenu; pas du tout! J'espérais que ce débat sur le projet de loi no 110 permettrait, en commission parlementaire, au ministre du Travail de montrer ses vraies couleurs sur la possibilité que les parties — les parties qui financent l'Office de la construction du Québec, les parties pour qui toute cette structure est mise sur pied — puissent participer plus étroitement en étant directement impliquées dans l'administration de l'Office de la construction du Québec.

On ne peut pas accepter qu'une entité syndicale ou patronale, qui participe au financement d'un organisme comme celui de l'OCQ — c'est $30 millions ou à peu près par année, c'est plus de $700 millions qui sont accumulés dans les coffres de l'OCQ et placés ailleurs, évidemment; ce sont des sommes importantes formées par la contribution hebdomadaire des employés et des employeurs — on aurait été en droit de s'attendre du gouvernement du Québec qu'une partie, qu'une entité qui participe au financement d'un organisme puisse aussi participer à sa gestion. Le ministre s'est refusé à cette possibilité en invoquant le fait que les parties n'avaient pas suffisamment de maturité et tout. Encore une fois, le ministre du Travail sera pris pour vivre avec son projet de loi. Encore une fois, on peut présumer que dans ces délais quand même assez brefs, probablement lors de la prochaine session, sur la foi du rapport qui lui sera remis par le président par intérim de l'OCQ, le ministre du Travail rouvrira tout ce dossier pour modifier profondément la structure de l'OCQ, même si c'est une nouvelle structure avec un président-directeur général et des adjoints à temps partiel qui, encore là, ne seront même pas nommés par les parties. On aurait pu s'attendre à ce qu'au moins le ministre du Travail accepte que les parties puissent participer à la désignation, à la nomination des commissaires à temps partiel au sein de l'OCQ.

Il y a tout un volet qui est important et qui a été largement débattu, c'est la question des artisans. Je vais prendre les quelques minutes qui me restent sur ce sujet. Il y avait des prévisions particulières dans le projet original concernant le travailleur artisan, projet de loi qui a été amendé, non pas avant le 21 décembre. Vous vous rappellerez que le soir du 21 décembre, c'était un drame ici, à l'Assemblée, de voir que le projet de loi no 110 ne serait pas adopté avant la période des Fêtes. C'était un drame. On a blâmé l'Opposition, et Dieu sait si on n'a pas ménagé les quolibets à notre endroit. (21 h 50)

Or, voici que, dès la reprise des travaux en commission parlementaire, au mois de janvier dernier, à ma grande surprise, à la grande surprise de mon collègue de Johnson, le ministre du Travail présente lui-même, de son propre chef, des amendements au projet de loi. C'est donc dire que, si le projet de loi 110 avait été adopté avant le 21 décembre, le gouvernement se serait vu dans

l'obligation, dès la session du mois de mars, de rouvrir tout le débat en apportant des amendements que celui-ci ne croyait pas opportun d'apporter le 21 décembre.

Qu'est-ce qui arrive dans la question des artisans? Le ministre du Travail vient créer — j'ai eu l'occasion de le dire — une entité complètement à part du milieu des salariés, vient conférer aux travailleurs artisans un statut particulier qui fera en sorte que ce groupe ne sera pas syndiqué, ne sera pas soumis au décret lorsqu'il effectuera des travaux pour une personne physique dans certains cas. Tout cela peut paraître assez intéressant à prime abord. Mais une chose est certaine. Fondamentalement, dans tout ce débat, le gouvernement a reconnu l'échec de son règlement de placement qui a été mis en application le 1er juillet 1978, qui prévoit la classification, qui prévoit l'obligation pour le travailleur de posséder plus de 1000 heures pour pouvoir obtenir un certificat de classification de catégorie A. Le gouvernement a constaté que l'Opposition officielle, notamment, avait raison sur ce chapitre-là. On se retrouve aujourd'hui avec des travailleurs qui possèdent un certificat de classification, qui ont évolué dans un secteur donné de l'industrie de la construction depuis peut-être 15 ou 20 ans, qui, aujourd'hui, ne peuvent plus travailler parce qu'ils n'ont pas effectué 1000 heures l'année dernière.

C'est ainsi que la disposition des artisans permettra à ces travailleurs qui sont actuellement classés B ou C de devenir des travailleurs artisans, de s'enregistrer auprès de la Régie des entreprises en construction, passer un examen et, encore là, ils ne seront même pas soumis à la juridiction de l'Office de la construction du Québec ou encore, s'ils seront soumis à l'OCQ, ce sera sur une base volontaire jusqu'à concurrence de 40 heures seulement pas semaine.

Ce qui est le plus inquiétant, ce n'est pas la question de la structure, c'est la question que le gouvernement reconnaît son échec en matière de placement indirectement et il ne veut pas le dire. Peut-être que le gouvernement ira plus loin la semaine prochaine lors de l'étude de toute la question du placement en commission parlementaire, laquelle est convoquée pour mardi et mercredi. Peut-être que le gouvernement acceptera de bon gré, et malgré toutes ces interventions, de confirmer l'échec de ce règlement de placement qui est, lui aussi, fortement critiqué par toutes les parties en présence.

Ce qui est plus inquiétant — c'est ce que j'allais vous dire, M. le Président — c'est que le libellé de la loi 110 prévoit qu'un travailleur artisan, celui-ci n'étant pas un salarié, pourra effectuer des travaux de construction, comme personne seule, autonome, sans être soumis au décret. Ceci implique que le travailleur pourra vendre ses services vraiment à rabais, selon une libre négociation entre son employeur, c'est-à-dire la personne physique, et lui-même, selon les conditions du marché.

Quand on tient pour acquis, M. le Président, que la construction a baissé sensiblement au Qué- bec — on a un rapport de l'OCQ ici qui indiquait une baisse de 15% de l'activité dans la construction à Montréal et de 9% à Québec au cours des premiers mois de 1978 — on peut s'attendre qu'il y ait du "bargaining"; on peut s'attendre que les travailleurs de la construction dûment qualifiés, parce qu'ils évoluent dans une ville, dans un comté ou une région où il n'y a pas beaucoup de travail, se verront dans l'obligation d'accepter de vendre leurs services, de travailler pour des prix qui ne seront assurément pas du tout comparables à ceux du décret. De toute façon, on a eu l'occasion de sensibiliser le ministre. Le ministre a dit non. Le ministre croit rendre service aux artisans. Ce n'est pas du tout leur rendre service.

Le ministre sait pertinemment que des milliers de travailleurs, si son règlement de placement est maintenu, se verront dans l'obligation de devenir artisans. Ces gens pourront travailler à rabais. Le ministre, d'autant plus, sait pertinemment — probablement qu'il le sait, mais il ne voudra pas le dire encore une fois — que ces gens, d'ici quelques mois, seront eux aussi associés, et c'est normalement tout ce qu'ils auront à faire dans les circonstances. Cela, M. le Président, sans faire état du fait que ce travailleur qui n'est pas un salarié au sens du décret pourra aller travailler pour un employeur professionnel, qu'il deviendra à ce moment-là soumis au décret pour ses conditions de salaire, qu'à ce moment-là, il devra y avoir un contrat entre lui et son employeur, qui sera affiché sur le chantier et qui sera envoyé à l'OCQ.

Une bébelle administrative, M. le Président! Je vous dis que le ministre du Travail, cela ne prendra pas beaucoup de temps qu'il va revenir ici à l'Assemblée et qu'il va modifier tout cela encore une fois. C'est malheureux parce que le ministre aurait pu s'épargner tout cela. Il aurait pu profiter des représentations que lui ont faites mon collègue de Johnson, le député de Beauce-Sud, qui a quand même une bonne expérience à ce chapitre, et des commentaires que je lui formulais pour en arriver à un meilleur libellé de ce projet de loi.

En terminant, M. le Président, vous savez que le ministre du Travail a présenté d'autres amendements encore la semaine dernière au moment du dépôt du rapport. Je ne serais pas surpris que celui-ci, dans son intervention de troisième lecture, dans sa réplique, demande encore une fois le consentement des partis pour présenter des amendements. Entre autres, pour donner des précisions sur l'article 8e b) concernant l'artisan. Je me permets de le lire brièvement et je vais terminer mes propos de ce soir là-dessus. "L'article 17 du projet de loi est à nouveau amendé, de même que l'article 8e par l'addition, après le paragraphe 8e, de l'alinéa suivant: L'artisan qui exécute des travaux de construction aux fins personnelles, autres que commerciales ou industrielles, d'une personne physique n'est pas assujetti à la présente loi sauf aux fins de l'article 32 s). C'est ce que je vous disais tantôt. C'est donc dire qu'une personne qui possède un certificat de qualification et qui est enregistrée auprès de la Régie des entreprises en construction, qui est

considérée comme un artisan, n'est pas soumise au décret et peut travailler à rabais. Cependant, il y a l'autre article, M. le Président. "Quant à l'artisan qui exécute des travaux de construction autrement qu'aux fins personnelles, autres que commerciales ou industrielles, d'une personne physique, sa rémunération est égale à la rémunération à monnaie courante..." Et là, il y a tout le reste du texte, M. le Président, qui n'est pas d'intérêt dans le moment. Je demanderais tout simplement au ministre ce qu'il veut dire et quels sont les genres de travaux que ceui-ci veut prévoir, veut couvrir par le deuxième alinéa de cet article 8e b). Tout simplement, celui-ci pourra profiter de sa réplique.

M. le Président, je termine là-dessus. Je dois quand même vous exprimer non seulement ma surprise, mais aussi ma déception de ce que le ministre du Travail ait mis de côté les représentations qu'on lui a formulées, les bons conseils qu'on lui a donnés, les avis, les opinions, les commentaires émis que ce soit par le comité mixte, que ce soit par le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, que ce soit même, M. le Président, par la Commission des droits de la personne qui a rendu un avis sur la question de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, que ce soit par les groupes syndicaux, que ce soit même par le Parti québécois du comté de Saint-Maurice, comté du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, M. Duhaime, dans un colloque qu'il tenait le 4 février dernier, demandait au ministre du Travail de modifier ses lois de façon que les fonds de retraite soient administrés conjointement par les employés et leurs employeurs en référence aux sommes versées par ces employés et employeurs à l'Office de la construction du Québec. Somme toute, c'était une demande formulée par le comité mixte afin que ce comité puisse avoir des pouvoirs accrus.

Alors, le ministre du Travail se croit en position de force. Celui-ci dit tout simplement à tous et chacun qui sont concernés par le projet de loi: Je mets de côté les représentations que vous nous formulez. J'adopterai le projet de loi comme je l'entends, parce que vous savez que la majorité ministérielle va l'appuyer. Je me limiterai à lui dire que c'est regrettable. On peut présumer face à tout cela que, dans des délais assez brefs, le ministre du Travail se verra dans l'obligation de revenir devant cette Assemblée pour apporter des modifications à la suite de l'application de ce projet de loi, à la suite de la négociation du prochain décret, etc.

C'était là l'essentiel de mes commentaires, M. le Président, et vous aurez vite compris que nous voterons contre le projet de loi 110 en troisième lecture. (22 heures)

M. Bellemare: M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, justement, je vous voyais regarder l'horloge. Je sais qu'un consentement a été donné tout à l'heure pour quelques minutes. Mais pour que vous ne soyez pas interrompu durant votre intervention, je souhaiterais qu'on réitère ce consentement, s'il y a lieu, parce que je rappelle à tout le monde qu'en tant que représentant de votre parti, vous avez droit d'utiliser une heure, ce qui nous ramènerait à 23 heures. Après quoi, il y aura le mini-débat demandé par Mme le député de L'Acadie, plus la réplique de M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Je voudrais que tout le monde soit conscient que nous sommes peut-être partis pour nous rendre jusqu'à 23 h 30 ou minuit.

M. Bellemare: M. le Président, je ne voudrais pas dépasser l'entente que nous avons prise, l'honorable député de Portneuf et moi-même, avant de soumettre ceci au leader du gouvernement, que nous ne devrions pas dépasser quinze minutes ou vingt minutes chacun pour que le ministre puisse donner sa réplique. Je ne suis pas prêt, par exemple, à aller en troisième lecture ce soir, tel qu'il me l'a demandé. Ne me faites pas de grimaces; j'ai fait assez de concessions aujourd'hui. Je dis que, personnellement, je ne suis pas prêt à donner un consentement pour que...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, écoutez, il y a quelque chose que je saisis mal. Si je comprends bien, cela fait longtemps que le débat de troisième lecture est entamé. Nous sommes en plein débat de troisième lecture.

M. Bellemare: C'est que j'exerce au nom de mon parti...

M. Johnson: Est-ce que vous me permettez...

M. Bellemare: ... le droit de parole. Le ministre aura son droit de réplique et, après, par exemple, nous allons demander un vote enregistré pour que cinq personnes puissent reporter le vote à demain après-midi.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président: Je vous rappelle, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, pour qu'il n'y ait pas la moindre confusion, que la demande pour reporter un vote doit émaner du leader du gouvernement exclusivement. Donc, vous seriez dans une position délicate si vous désiriez vous opposer après que vous serez intervenu à l'adoption du projet de loi.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, sur cette question.

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: Je pense que le leader de l'Union Nationale me permettra. En fait, ce dont il était question avec le leader également du Parti libéral et le chef de l'Opposition, je pense, qui y a consenti en principe, c'était que nous puissions,

pour les raisons que j'ai expliquées au député de Johnson, procéder à l'adoption sur division ce soir, après ma réplique, qui sera aussi brève que les arguments du député de Johnson me permettront de l'être, pour les fins d'adoption dans les plus brefs délais des règlements qui sont déjà connus depuis le mois de décembre de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Elle connaît déjà ces règlements depuis maintenant près d'un mois, elle les connaissait le 21 décembre. Il s'agirait d'obtenir la sanction ce soir pour que le conseil des ministres puisse l'approuver demain. Evidemment, on ne peut pas faire approuver les règlements si on n'a pas la sanction de la loi ce soir, et pour la sanction de la loi, cela prend le vote.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: Nous allons commencer bouchée par bouchée, et quand on sera arrivés à ce mets principal dont parle le ministre, nous verrons quelle sorte de bouchée nous devrons prendre.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, je comprends qu'il en va peut-être de votre intérêt d'y aller bouchée par bouchée, mais il en va peut-être de l'intérêt de la présidence de savoir où on s'en va. Je voudrais savoir de l'Assemblée s'il y a consentement pour que vous interveniez, que vous preniez tout le temps auquel vous avez droit... Je comprends, mais il est 22 heures, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale. Je voudrais savoir si, ensuite, il y a consentement pour la réplique du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): ... il ne faudrait pas provoquer notre leader parlementaire de l'Union Nationale. Je pense bien que nous pouvons très bien l'entendre. Je pense qu'il avait indiqué qu'il en avait pour environ quinze ou vingt minutes, et son voisin, M. Grenier, le député de Mégantic-Compton, le whip, est bien d'accord pour restreindre les autres intervenants.

Est-ce qu'on pourrait avoir la collaboration du leader de l'Union Nationale pour procéder immédiatement à ce qu'il voulait dire par bouchée par bouchée, c'est-à-dire que je pense bien qu'il allait donner son consentement un peu plus tard. Il ne faudrait pas provoquer le vieux lion à ce moment-ci. Je pense bien que nous pourrions disposer du projet de loi no 110 ce soir, avec un peu de collaboration. J'inviterais mon collègue à faire une royale volte-face à ce moment-ci et à nous aider à disposer du projet de loi no 110. Puis-je compter sur la collaboration de mon ami?

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Maurice Bellemare

M. Bellemare: M. le Président, devant cette insistance qui est très polie, qui est très humaine et qui m'a un peu dessouflé de mon soubresaut, je dirai que je ferai mon discours de quinze minutes immédiatement. C'est la première fois, M. le Président, dans cette Chambre qu'on voit l'unanimité se faire contre le bill 110, unanimité d'abord de la FTQ, unanimité de la CSN, unanimité de l'AECQ, unanimité des défenseurs des droits de la personne, qui sont contre le projet de loi no 110, même je dirai plus que cela, M. le Président. Un organisme nommé spécialement par le ministre qu'on appelle le comité mixte de l'OCQ a envoyé au ministre une requête demandant de passer par le comité mixte de l'OCQ, à son assemblée du 17 janvier 1979. Le comité mixte de la construction a adopté une résolution dont il désire faire part. En conséquence, nous incluons copie de cette résolution conformément au désir exprimé.

Considérant le peu d'importance que le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et la direction de l'Office de la construction du Québec attachent au comité mixte de la construction, considérant qu'il semble qu'à l'Office de la construction du Québec on peut changer la direction d'une façon partielle ou totale sans que le comité mixte soit consulté ou même informé, considérant qu'il semble qu'un contrat de travail a été négocié et soit intervenu entre l'Office de la construction, le ministre de Belleval et les employés syndiqués de l'Office de la construction du Québec, le comité mixte n'aurait pas été suffisamment informé, considérant qu'à plusieurs reprises les parties au comité mixte ont informé le ministre et les commissaires de leur volonté d'obtenir un pouvoir décisionnel sur l'administration de l'Office de la construction du Québec, considérant que le ministre, par les lois et les règlements qu'il parraine, fait du comité mixte une simple caution de ses interventions dans l'industrie de la construction, en conséquence, M. le Président, sur proposition de M. Gilles Neveu, appuyée par M. Normand Tousi-gnant, adoptée à l'unanimité, il est résolu que le comité mixte suspend toutes ses réunions jusqu'à ce que le ministre rencontre les parties au comité mixte pour discuter des pouvoirs de ce comité dans le cadre des représentations faites jusqu'à maintenant par ces parties. Il est donc résolu de transmettre copie de cette résolution à chacun des membres de l'Assemblée nationale.

M. le Président, cela vient s'ajouter tout dernièrement au flot considérable de protestations qu'on a entendues et qu'on a reçues de la part des organismes que je viens de vous citer. M. le Président, le projet de loi no 110 se situe, je pense, dans un ensemble général de mesures législatives, réglementaires et surtout administratives entreprises il y a maintenant quelques années, depuis surtout l'enquête Cliche, et qui vise à normaliser le climat dans l'industrie de la construction.

M. le Président, on a connu des tutelles, on est venu à bout d'apaiser énormément les gens qui étaient dans ce domaine; on les a mis au pas, et avec raison. On n'a que le 144 dont on n'a pas

encore complètement réussi à surmonter toutes les difficultés, mais il reste aussi qu'on a adopté d'autres lois. On a adopté la loi 52, par exemple. Je pense que le ministre s'en souvient. Surtout pour rétablir un peu l'équilibre, lorsqu'il l'a faite, il a pensé faire une merveille mais, au contraire... Je dis, M. le Président, qu'aujourd'hui, devant l'attitude aussi draconienne que prend le ministre au sujet de l'AECQ et de l'OCQ, il va se faire du mal à lui personnellement, comme ministre, et particulièrement à la classe qu'il veut représenter si dignement dans le domaine de la construction. Je dis que cette emprise du ministre sur l'AECQ et sur l'OCQ sera un double geste discriminatoire vis-à-vis de la population qui attend véritablement le geste que va poser le ministre. (22 h 10)

Je l'ai dit et je l'ai répété en commission parlementaire: Nous avons déployé tous les arguments possibles pour essayer d'amener le ministre à un raisonnement sain, loyal et surtout intéressé dans une classe qu'il connaît peut-être un peu moins que moi, mais il sait aussi l'importance qu'il y a pour lui de légiférer dans un bon sens d'équité. A cause de ce qu'il fait aujourd'hui, M. le Président, vous qui avez une grande connaissance des causes syndicales, parce que vous avez étudié à fond notre Code du travail, vous qui le connaissez d'une manière particulière, vous savez dans quel charabia va s'embarquer demain le ministre. Vous le savez parce que vous avez pratiqué avec toute l'autorité qu'on vous connaît dans un domaine où c'est difficile aujourd'hui, soit les relations de travail.

Ce projet de loi 110, je ne peux m'empêcher d'y trouver de nombreuses lacunes et, surtout, de voir l'unanimité qui s'est faite contre lui. Le ministre me dira: J'ai entendu tout cela, on m'a répété tout cela, mais cela ne m'a pas influencé; j'ai un devoir à accomplir, je le fais, c'est de mettre au pas l'AECQ que je n'aime pas. L'AECQ a déjà voté. Sur votre invitation, elle a eu une rencontre en 1978 pour tâcher de former une grande stratégie, comme le voulait le ministre. Cela n'a pas réussi. Mais l'AECQ existe parce qu'il y a des années que ces gens ont payé bénévolement pour appartenir à des syndicats, pour en former.

Qui a réussi, après l'enquête Cliche, à réunir ces six grandes associations en l'AECQ? Qui a fait cela? Qui a réussi à mettre ensemble 15 000 entrepreneurs? C'était extrêmement plus difficile que de mettre au pas un certain nombre de syndiqués. Là, on faisait affaire avec 15 000 entrepreneurs qui vivaient égoïstement chacun pour soi. Cela était reconnu depuis des années. Il a fallu faire un appel général et multiplier les entrevues pour essayer de former l'AECQ. Elle a été formée.

Les gens qui l'ont formée, ceux que vous projetez d'exécuter publiquement d'ici quelque temps, vous devriez reconnaître le bien immense qu'ils ont fait pour l'oeuvre de la construction particulièrement, réussissant à avoir dans le décret un seul organisme qui est devant vous comme patron. Les centrales syndicales sont représentées après le vote qui s'est fait démocra- tiquement l'automne dernier. Le vote a été en faveur de la FTQ, qui sera secondée.

On dit qu'il y aura des représentants de la CSN quand même à la table. Le gouvernement veut avoir devant lui, pour faire le décret, des hommes à son goût, qui vont marcher selon ses directives. Il y a dans l'AECQ des hommes qui ont beaucoup de puissance et particulièrement de connaissance dans le décret. Pour négocier le décret, qu'est-ce qu'on fait? On commence, sans avertir personne, par le retarder de trois mois. De sa propre autorité, à la demande de personne, on le retarde de trois mois. Il devient échu le 1er avril 1979 et on dit: Non, ce sera le 1er juillet 1979. Avez-vous consulté quelqu'un? Non. Ni la CSN, ni la FTQ ou l'AECQ.

Le ministre est en train de s'attacher, comme le disait si bien l'honorable député de Portneuf, un boulet qu'il va être obligé de traîner pendant son mandat. Il ne sera pas long. C'est un présomptif, comme on dit. Cela ne sera peut-être pas bien long. On dit que c'est un présomptif. Il va vers cela, toujours. Il était loin, autrefois. Là, on l'a rapproché, on joue avec, on le teste. Oui. Il est à peu près comme son père quand il regardait en l'air. On disait: "Watch out", il en a une bonne!

Est-ce que l'AECQ ne mériterait pas plutôt aujourd'hui un vote de reconnaissance pour le bien immense qu'elle a fait dans l'industrie de la construction? N'y a-t-il pas eu une discipline sévère d'établie depuis ce temps-là, depuis qu'on a réussi à former l'AECQ et à établir des structures qui, à 88%, ont été votées par les membres présents lors de l'Assemblée? Oui, je dis présents. Je sais que le ministre va me répondre: Cela représente 2% ou 3% sur 15 000 entrepreneurs. Ceux qui ont suivi les débats de l'AECQ savent de quelle façon cette association a été formée, avec quelle peine et misère on a réussi, des six associations, à en faire seulement une.

Le ministre va me répondre: Le député de Johnson m'a dit que les six étaient d'accord. Il va dire: Non, j'ai des lettres. Nous aussi, nous en avons, des lettres de ces associations qui vous ont écrit pour dire qu'elles consentaient à l'adoption du projet de loi no 110. On en a d'autres qui, après vous avoir écrit, ont dit: Cela n'a pas de bon sens, on n'a pas vu clair dans notre affaire. Je peux vous en citer quelques-unes, je peux vous citer des noms quand vous voudrez. Oui. Je ne voudrais pas faire tort à personne parce que je sais que le ministre est un peu vengeur. Il pourrait exercer sa grande patience à l'envers pour se venger.

Quand on regarde l'OCQ, il administre $700 millions, dont $35 millions par année. On a dit: Le président, c'est un ancien sous-ministre de M. Bellemare, ce n'est plus bon. On l'a quasiment forcé, indirectement, à donner sa démission. Il en reste deux autres que connaît bien le ministre. D'ailleurs, c'est eux qui demandent grâce, qui demandent de ne pas les mitrailler, de ne pas les exécuter sur la place publique. Ils veulent servir et ils ont une grande expérience, ces deux autres membres, et ils ne veulent pas être exécutés par le ministre d'une façon "préremptoire". Est-ce de

cette façon qu'on le dit en termes légaux? Péremptoire!

L'OCQ est encore la proie de la vengeance du ministre. Vous allez voir, d'ici quelque temps, on va mettre des personnes en place, on va prendre des personnes qui sont du goût du ministre. Je ne parle pas de ses amis personnels, mais peut-être des amis proches des autres ministres du parti qui vont peut-être avoir la chance d'avoir une belle fiole.

Je comprends cela. Surtout, administrer $700 millionset avoir un budget de $34 millions par année! Cela commence à être bien des piastres! Il va me répondre, le ministre: L'OCQ voudrait obtenir le droit d'administrer lui-même tous ces fonds. Ce n'est pas cela qu'ils demandent. Ils demandent que leur autonomie soit privilégiée dans leur décision, que ce ne soit pas le ministre qui vienne leur imposer les règlements et particulièrement l'administration de l'OCQ. C'est ce que le ministre se prepare à faire. Il a le sourire facile quand je touche à des points sensibles. Mais vous verrez, il va revenir, comme le disait le député de Portneuf, avant longtemps avec des amendements et des amendements qui ont été amendés pour être ré-amendés.

Inutile de vous dire que le ministre n'est pas conscient de ce qu'il fait ce soir. Il a une responsabilité terrible et connaît peut-être à moitié sa responsabilité. Il verra, lorsqu'il aura vécu un peu plus, que sa performance d'aujourd'hui aurait peut-être été meilleure s'il avait vécu un peu plus. Ce qui se passe actuellement dans les centrales syndicales, particulièrement dans l'AECQ, le ministre n'a pas été au fond quand il a examiné le problème de l'AECQ. Il y est allé superficiellement, par des racontars qu 'on lui a faits. Je pense qu'après avoir exécuté le président, il ne sera pas heureux de sa décision.

Je voudrais terminer — puisque j'ai dit que je ne parlerais que quinze minutes — sur les artisans. Les artisans, c'est un nouveau lexique ajouté à la loi du ministère du Travail et particulièrement au décret de la construction, qui va en faire une personne qui va pouvoirtravaillerpourdes personnes, comme on dit, physiques, autres qu'un entrepreneur. Mais deux artisans peuvent ensemble faire un lien pour construire quelque chose. Personne ne peut être contre cela. Deux artisans peuvent, tous les deux ensemble, décider de bâtir un perron. Qui va empêcher cela? Les deux frères sont deux artisans au lieu d'être placés devant la loi de la qualification professionnelle, c'est-à-dire d'avoir 1500 heures et, pour une annéed'apprentissage 500 heures, pour un apprenti. Demain matin, un gars qui possède déjà une bonne expérience et qui a déjà eu sa carte peut devenir artisan. (22 h 20)

Quel est le ministre qui peut avoir l'assurance que cette nouvelle directive qu'il apporte au Code du travail et particulièrement au décret va être interprétée justement et selon ce qu'il veut actuellement, comme ministre. Quel est l'homme qui va être capable de voir à cela dans tout syndicat, l'application de l'artisan ? Je dis au ministre que le chemin qu'il est en train de paver sera pavé d'épines, de roseaux, et il verra qu'il aura de la peine à rétablir l'ordre. Vous voyez l'attitude que prend la CSN, vous voyez l'attitude qu'a prise la FTQ. Vous savez ce qu'a dit l'AECQ à ce sujet-là. Ils sont tous contre l'application d'une telle politique actuellement. Il y aurait eu moyen de trouver une autre solution.

Le ministre, pendant un débat, était devenu tellement découragé, un jour, qu'il a dit: Suggérez-nous en un plan. Suggérez-nous un modèle comme artisan. Ce n'est pas à nous de le faire. On n'est pas élu pour cela. On va peut-être être élu avant longtemps, mais pas là. Quand on était-là, on faisait tout notre devoir. On ne demandait pas souvent aux autres de nous donner des formules. C'est un problème difficile. Nous l'admettons. Mais le ministre s'est enfargé encore dix fois plus en le mettant tel qu'il l'a décrit dans sa loi. Vous allez voir, M. le Président, les guerres qui vont commencer, particulièrement en reportant le décret à trois mois. Qui a demandé cela, sinon le ministre, pour mieux placer ses gens en face de lui, les mettre à son goût, les placer pour que la discussion soit plus franche et, d'après lui, plus loyale? Il a dit — je ne m'en cache pas pour le répéter — que les négociations seront terribles. Les prochaines négociations seront terribles. Oui, je le pense, surtout au temps qu'il prend. Surtout, il est en train de se mettre contre lui tous les syndicalistes, tous les patrons, le CCTM, le Conseil consultatif du travail. Il a essayé deux fois de leur demander d'avoir un rapport plus encourageant. Le CCTM a dit: Non, on est contre le projet de loi 116. C'est clair. On a dit: Comment verriez-vous cela plutôt sous cet angle ou plutôt sous un autre angle? Le CCTM a dit: Non, je ne regarde pas cela de même. C'est cela et on est contre le projet de loi 116. Aujourd'hui, je viens de vous lire...

Une Voix: Le projet de loi 110.

M. Bellemare: Le projet de loi 110, non pas le 116.

Une Voix: Question de privilège.

M. Bellemare: Une question de privilège. Je viens de vous lire... Oui, certain. On l'a tellement dans la bouche, le projet de loi 116. Je viens de vous lire un extrait du procès-verbal de l'assemblée du comité mixte de l'OCQ, qui lui aussi proteste avec véhémence. Tout le monde dans la province. Quels sont ceux qui sont pour? Quelques bureaucrates, quelques gars qui n'ont pas connu ce que c'était de travailler avec leurs mains sur la terre avec des outils dans les chantiers. Ceux-là, ces bureaucrates, ils sont pour. C'est de l'étatisme politique. Ce n'est pas une progression pour assurer aux travailleurs un meilleur confort. Vous verrez, M. le Président, la chicane qui va arriver. Ce n'est pas parce que je veux être pessimiste. Ce n'est pas parce que je veux jeter des sorts au ministre. Au contraire. Je voudrais tant qu'il connaisse la gloriole qu'a connue son vénérable père après les luttes aussi ferventes qu'il a faites. Je termine en lui souhaitant bonne chance et surtout bonne humeur.

M. Fabien Roy M. Roy: M. le Président... Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: ... je sais qu'il y a eu des consentements accordés. Il y a eu des négociations qui ont eu lieu entre les différents partis, mais quand on doit représenter son parti dans toutes les commissions parlementaires, M. le Président, et jusqu'à l'Assemblée nationale, il nous arrive parfois de ne pas participer à toutes ces discussions préliminaires. Cependant, je m'en voudrais de ne pas dire quelques mots au sujet de la loi qui est actuellement devant nous, la troisième lecture de ce projet de loi très important. Effectivement, j'ai eu l'occasion comme mes collègues membres de la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre de participer aux travaux de la commission parlementaire et d'examiner ce projet de loi.

M. le Président, je serais bien plus heureux ce soir de dire à l'honorable ministre: Je vous félicite, M. le ministre. Vous avez un projet de loi qui répond aux besoins des gens concernés, un projet de loi qui va corriger ce qui doit être corrigé dans ce secteur, qui rassure les parties, en somme, un bon projet de loi. Je serais heureux de pouvoir dire au ministre: II me fait plaisir d'appuyer votre projet de loi. Cependant, là n'est pas la question malheureusement, et je dis bien malheureusement.

On sait très bien que ce projet met en tutelle l'AECQ, change les règles du jeu. Je me suis informé auprès de cet organisme pour voir si, effectivement, on avait autant raison qu'on semble le prétendre de vouloir changer les structures de l'AECQ, de réaliser la mise en tutelle de l'AECQ, je pense qu'il faut appeler les choses par leur nom. Je me suis informé de ce qui a été fait au niveau de l'AECQ et on m'a fourni les informations suivantes que je communique à mes collègues, aux autres membres de l'Assemblée nationale. Le document date du 13 février 1979; ce n'est pas un vieux document. Il y a eu, du 14 février 1976 à ce jour, 45 assemblées du conseil d'administration, composé de douze membres, avec 445 présences. On ne me dira pas que les gens ne s'en sont pas occupés. Le comité des finances, du 14 février 1976 à ce jour, quatre membres, quatorze assemblées, 46 présences. 46 présences pour 14 assemblées, M. le Président, avec quatre membres, on ne peut pas dire qu'il y avait désintéressement de la part des membres. Le comité d'éthique et de discipline, du 14 février 1976 à ce jour, cinq membres, neuf assemblées, 37 présences. Il n'y a eu que huit absences au cours de neuf assemblées, même pas une moyenne d'une absence par réunion. Donc, ils ont travaillé. Les assemblées annuelles: il y en a eu une en 1977 avec 507 présences; il y en a eu une en 1978 avec 375 présences.

Quant aux assemblées spéciales, le 5 août, il y en a eu deux, une à Montréal et une à Québec: 1672 présences. Je donne des chiffres, je com- prends que c'est peut-être ennuyeux, M. le Président, de donner des chiffres, de toujours donner une multitude de chiffres, mais je veux bien démontrer qu'à ce niveau-là un travail a été fait et que les gens concernés, les gens qui avaient des responsabilités les ont assumées. Effectivement, en janvier et février dans les dix régions du Québec, il y a eu dix assemblées avec 1321 présences. Le 1er février 1979, à Montréal, une seule assemblée avec 661 présences, pour démontrer qu'il n'y avait pas un désintéressement.

Je ne donnerai pas tous les chiffres qui sont dans ce document, malgré que ce sont des chiffres très pertinents, très intéressants pour démontrer la volonté des gens du milieu de prendre leurs responsabilités. Ce qui me fait dire aujourd'hui que cela ne justifie pas le geste qui est posé par le gouvernement, à ce moment-ci, avec l'étude du projet de loi en troisième lecture. On avait même préparé une structure globale qui devait comprendre 192 personnes, dans chacune des régions, avec douze familles de métiers représentées: un représentant des quatre secteurs, ce qui en faisait également seize. On avait même prévu un budget de $400 000.

Pourquoi, aujourd'hui, en venir à présenter une loi de ce genre quand on sait très bien, M. le Président, qu'au niveau de l'AECQ cela ne règle rien? Le député de Johnson a parlé du comité mixte tout à l'heure; d'autres intervenants ont parlé d'autres organismes, soit des organismes syndicaux également. J'ai eu l'occasion de rencontrer les représentants de ces organismes. Ils ne sont pas satisfaits eux non plus de la loi 110. Je n'ai pas rencontré un seul organisme, un seul délégué, un seul représentant de syndicats qui est d'accord avec la loi 110. L'unanimité dans le désaccord, c'est cela qu'il nous faut dire à ce moment-ci. C'est pourquoi j'hésite énormément à aller plus loin dans le dossier pour ne pas envenimer les choses.

Je me limiterai tout simplement à dire ceci: Dans le secteur — et on l'a vu très souvent, trop souvent même — deux fois par année, nous avons été obligés de faire pratiquement des lois spéciales parce que, justement, les lois qu'on avait antérieurement n'avaient absolument rien réglé. On se lance à l'aventure, on fait encore ce qu'on pourrait appeler de l'exploration alors qu'il y en a déjà eu trop dans ce domaine, trop d'expériences tentées pour dire simplement que le projet de loi peut répondre un tant soit peu à l'inquiétude du milieu et aux objectifs que l'Assemblée nationale recherche. Pour toutes ces raisons et à ma grande déception, je dois l'avouer, je devrai voter contre le projet de loi en troisième lecture.

Le Vice-Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre, c'est votre réplique. (22 h 30)

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, je ne voudrais pas abuser de la patience de cette Chambre, compte tenu de l'heure, et surtout pas abuser de

l'aimable consentement unanime pour que nous puissions procéder ce soir. Il y a certaines choses qu'il faut dire, cependant, au sujet de l'univers de la construction au Québec: le fait que c'est un milieu qui représente à peu près 6% de la main-d'oeuvre active; le fait que c'est un milieu qui génère entre 5% et 20% du produit national brut selon les années, les Olympiques aidant; le fait, cependant, que c'est un milieu également où on parle fort et peut-être aussi où on parle trop. C'est un milieu composé d'intérêts divergents par définition puisque c'est une structure soumise à la Loi sur les relations du travail qui est finalement à la base de ce qui peut être un affrontement constant s'il n'y a pas un esprit de collaboration qui règne par la nature même du fonctionnement des mécanismes qui impliquent les parties.

Il y a eu, dans le passé, des affrontements entre syndicats; il y a eu, dans le passé, des affrontements entre associations d'entrepreneurs et il y a eu également des affrontements des syndicats à l'égard des associations d'entrepreneurs. C'est un milieu qui a toujours été marqué par cette espèce de violence des mots, des phrases souvent un peu creuses, des verbiages et surtout une moyenne de deux lois par année dans les dix dernières années. Quand on pense qu'il y a, au Québec, 50 secteurs où il y a des décrets et où il y a des comités paritaires, la construction n'a pas pu s'en satisfaire; il aura fallu une Commission de l'industrie de la construction, il a fallu une commission Cliche, il a fallu la formation d'un OCQ et, en plus de cela, il a fallu leur faire une loi à eux qui les soustrait complètement, employeurs et syndicats, au Code du travail du Québec. Il a fallu cela finalement pour obtenir la "paix industrielle" — entre guillemets — encore qu'elle soit, à l'occasion, assez éphémère même si, je pense, depuis le dernier décret, il y a un calme relatif dans le secteur. Il faut être conscient que certaines mesures que ce gouvernement a adoptées y ont contribué, entre autres la loi permettant un maraudage qui ne soit pas sauvage, l'an dernier. On n'en a pas entendu parler. Ce sont de bonnes nouvelles; donc, on n'en parle pas. Aussi, évidemment, la situation économique avec le taux d'activité dans le domaine de la construction fait que peut-être pour certains c'est moins l'occasion maintenant de causer ou de subir des problèmes.

Il faut être bien conscient que, s'il avait fallu faire la même chose dans les 50 autres secteurs où il y a des décrets au Québec, il faudrait que ce Parlement adopte à chaque année 100 lois, c'est-à-dire, dans l'espace de dix ans, 1000 lois pour rendre le monde content et pour avoir la paix industrielle au Québec. On pourra peut-être s'apercevoir qu'on a affaire avec un milieu qui est un peu plus susceptible que d'autres milieux dans les relations de travail au Québec. Il ne faut surtout pas s'étonner du fait que ce soit un milieu où on parle fort, quand carrément on n'essaie pas de jouer du bras.

Dans les circonstances, je ne m'étonne pas, sans m'en réjouir et je le dis sans vergogne, d'une certaine unanimité des parties à l'égard du projet de loi no 110, mais pour des raisons très différentes qui varient selon les parties. L'AECQ — et il ne faut pas parler des 15 000 entrepreneurs du Québec, il faut parler de la structure qui s'appelle l'AECQ, avec ses dirigeants actuels, au moment où on se parle, le 13, à 22 h 36 — l'AECQ, évidemment, est contre ce projet de loi puisqu'on est entrain de dire à ceux qui sont en place que leur structure n'est pas suffisamment représentative. Appuyés sur le rapport Hébert, c'est-à-dire, un comité d'experts qui a étudié cette question, appuyés aussi de l'unanimité de cinq des six associations traditionnelles patronales, nous avons choisi de faire en sorte que les six associations patronales traditionnelles, dont certaines remontent au siècle dernier, participent effectivement au conseil d'administration de l'AECQ. Il est bien évident qu'on ne peut pas s'attendre, dans les circonstances, que le président actuel de l'AECQ soit en faveur de cela, et on va pouvoir me citer, je suis sûr de cela, 2000 pages de lettres écrites par les gens qui sont dans la structure actuelle de l'AECQ, et cela ne m'étonnera pas. Cela demeure cependant le conseil d'administration des douze personnes dont on parle, et on ne parle pas des cinq associations qui représentent en ce moment 90% des entrepreneurs au Québec. Voilà pour l'AECQ.

M. le Président, je pense que je vais relever ce dernier commentaire du député de Johnson parce que cela fait cinq fois qu'il y fait allusion. Evidemment, l'ancien président de la Commission — M. le Président, si vous permettez...

Le Président suppléant (M. Dussault): Est-ce que je pourrais demander à cette Assemblée de permettre à M. le ministre de terminer son intervention? Vous avez la parole, M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, je comprends que l'ancien président de la Commission des accidents du travail et député de Johnson veuille bien me parler de la nomination des amis dans les organismes gouvernementaux, mais je ne vois pas à quoi il fait allusion. Je ne comprends pas ce qu'il dit. S'il a des choses précises à venir démontrer, que le sous-ministre adjoint, M. Guy Lapointe, à l'inspection au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre depuis dix ans ait été nommé président-directeur général par intérim— car il demeure sous-ministre adjointdu ministère du Travail, il est vraiment par intérim, je voulais simplement le préciser parce que le député de Portneuf a semblé tenir pour acquis qu'il n'était plus au ministère — je ne vois pas là une nomination de copain ou d'ami. Je vois là la nomination d'un homme qui est là pour une période transitoire, jusqu'à ce que les nominations finales soient faites, jusqu'à ce qu'on ait enfin réussi à procéder à un recrutement pas de gens qui sont en conflit d'intérêts constamment mais d'administrateurs publics pour administrer les fonds des travailleurs avec des critères objectifs. Je pense que celui qui est là en ce moment ne peut être taxé d'être un copain de celui qui vous parle. Je pense que le sous-ministre adjoint, que le député de Johnson a d'ailleurs fort bien connu au ministère du Travail, est un homme dont la compétence et l'intégrité ne font de doute pour personne.

Quant à la Régie des entreprises en construction, je pense qu'il faut le rappeler, nous avons, à travers ce projet de loi... On n'en a pas beaucoup parlé étant donné que ceux qui sont touchés n'ont pas eu l'occasion de s'organiser pour venir dans chacun des bureaux des députés de cette Assemblée leur expliquer combien ils étaient heureux de voir enfin le consommateur au Québec mieux protégé quand il fait l'achat d'une maison neuve, de savoir, par exemple, que les entrepreneurs en construction au Québec, ceux qui ont été impliqués dans une faillite, se verront imposer des balises et des limites importantes, le tout pour protéger les consommateurs. Ces consommateurs qui en bénéficieront également n'ont pas eu l'occasion de venir nous dire combien ils devraient normalement être heureux de voir qu'on oblige maintenant les entreprises, dans le secteur de l'habitation, à fournir un cautionnement non seulement contre la fraude possible mais également contre la malfaçon, ce qui fait que, finalement, au bout de la ligne, c'est une loi qui vise essentiellement à protéger le consommateur, eu égard à ces dispositions qui touchent l'AECQ.

Quant à l'OCQ, à part ces commentaires auxquels m'a provoqué ou incité le député de Johnson, je dirai qu'il est vrai que le comité mixte a fait savoir récemment à celui qui vous parle, et je pense, a envoyé une copie de cette lettre à tous les députés de cette Assemblée, qu'il n'entendait pas siéger pour quelque temps. Je pense qu'on réglera ces problèmes avec le temps. Je n'ai pas refusé, en principe, de les rencontrer. Je pense que les parties devraient avoir un forum adéquat pour discuter à fond, entre autres, les amendements que nous apporterons au règlement de placement qui touchent de très près les citoyens dans vos comtés et les députés qui sont ici autour de cette salle. Les amendements qui touchent le règlement de placement et qui touchent évidemment le monde syndical et le monde patronal dans le secteur de la construction mais qui d'abord et avant tout touchent les salariés et les hommes qui sont impliqués dans ces métiers, ces amendements, en vertu des dispositions de la loi que je présente dans le projet de loi 110, devront être soumis au comité mixte.

Si le comité mixte ne veut pas faire son travail, qu'il ne le fasse pas mais je pense qu'il aura abdiqué, et le monde syndical et le monde patronal auront démontré qu'ils ne veulent pas collaborer à une gestion intelligente dans ce secteur. (22 h 40)

D'autre part, en ce qui concerne l'artisan on a fait beaucoup de gorges chaudes. Il est vrai que nous avons apporté des amendements jusqu'à la prise en considération du rapport. Cela signifie qu'on est capable d'être perméable et d'écouter ce qu'on nous dit. Effectivement, en commission parlementaire, nous avons retenu certaines des suggestions, entre autres, une suggestion du député de Johnson au sujet des pouvoirs de l'OCQ. Nous l'avons retenue. Sur l'artisan, nous avons retenu une notion que nous avait, entre autres, apportée l'Opposition libérale sur la ques- tion du consommateur pour restreindre, d'une certaine façon, l'extention ou l'exclusion du décret pour l'artisan au secteur du consommateur. Nous l'avons fait. Evidemment, la solution à laquelle on est arrivé n'est peut-être pas celle que voulait nous proposer l'Opposition mais comme l'a si bien dit le député de Johnson, à ce que je sache, la majorité ministérielle est de ce côté-ci de la Chambre et c'est ici qu'on gouverne, ce n'est pas de l'autre côté. On peut collaborer mais, finalement, les décisions se prennent ici, ce qui n'empêche pas qu'on soit perméable, encore une fois, à ce que nous disent les partis.

Avant que la confusion ne continue, reprenons brièvement ce que dit cette loi sur l'artisan. La situation actuelle fait que n'importe qui, en principe, peut se déclarer artisan au Québec en envoyant une simple lettre à l'OCQ pour dire qu'il l'est. Deuxièmement, ces mêmes personnes peuvent se présenter sur un chantier de construction industriel ou commercial et décider d'exécuter des contrats à forfait. L'exemple qu'on donne dans la construction et que les syndicats, particulièrement celui de la CSN, vont vous donner, c'est ce qu'on appelle ceux qui font du "dry wall", par exemple ces gens qui ont fini, à titre de poseurs de gyproc, tireurs de joints ou peintres, dans des édifices aussi importants que le complexe Desjardins à Montréal.

Qu'est-ce qui faisait que des artisans, en nombre élevé, pouvaient aller finalement sur des chantiers de construction concurrencer des salariés? Ils accordaient des contrats à forfait. En pratique, si on prenait $1000 pour une section d'étage, si on divisait cela par le nombre d'heures passées par ces artisans à faire le travail, on arrivait à un taux horaire inférieur au taux du décret d'un salarié de la construction. Or, la loi que nous présentons donne sa place au soleil à l'artisan. Cependant, sur les chantiers industriels et commerciaux, elle fait en sorte qu'il n'y ait plus une incitation à venir couper la gorge au niveau des salariés dans le cas de ceux qui ont des A ou des B, mais qui, finalement, ont obtenu des conditions de travail par négociation. C'est ce que fait la loi 110, il faut s'en rendre compte.

Quand on voit pour demain matin l'avalanche des artisans, il faut aussi se dire qu'il y aura d'autres contraintes qui seront imposées aux artisans. Ils devront, entre autres, non seulement être qualifiés, mais passer un examen de sécurité, passer un examen d'administration, fournir le cautionnement, bien qu'à mes yeux la licence et le cautionnement — cela dépendra de ce que la régie des entreprises nous suggérera — devraient peut-être être inférieurs. On ne peut comparer celui qui est un salarié, qui est un ancien salarié ou qui devient un entrepreneur individuel sans salariés à une maison de construction qui a plusieurs millions de chiffres d'affaires par année. Il est bien évident qu'il y aura des conditions spéciales pour eux. Quand même, l'ensemble de ces contraintes et le fait qu'une fois rendus sur un chantier industriel et commercial ils ne pourront plus couper les prix comme ils le font en ce

moment vont faire que je ne pense pas qu'on ait une avalanche d'artisans dans le secteur de la construction.

On permettra à ceux qui sont des pères de famille, qui oeuvrent entre autres dans certaines régions éloignées, de faire leur vie. Ils auront droit à leur place au soleil. C'est ce qu'on recherche dans ce projet de loi quant à l'artisan. On pourrait aussi, comme le mentionne l'Opposition libérale — c'est une autre contrainte qui pourrait être "imposée — si jamais cette avalanche nous arrivait, la loi nous le permet, appliquer le règlement de placement aux artisans, ce qui n'empêcherait pas, dans ce contexte, qu'on leur détermine un rang sur les chantiers industriels et commerciaux, derrière ou à tel niveau avec les salariés, en fonction de la région ou de la sous-région. Il ne faut quand même pas prendre les gens pour des buses. Le texte de loi dit ce qu'il dit. Je comprends qu'il est complexe, je comprends que ce n'est pas de la législation et de la technique législative simple. Il demeure quand même que c'est ce que dit le projet de loi. Je pense qu'il faut en prendre conscience et arrêter de faire de la démagogie un peu facile autour des confusions, autour des termes et des mots.

Quant à une confusion autour d'un terme ou d'un mot, je veux simplement préciser un point. Le député de Portneuf a posé une question, je vais y répondre. La notion "autres que commerciales ou industrielles" qu'on emploie dans le cas des artisans veut dire ceci. Dorénavant — et cette loi confirme ce qui est une pratique, ceux qui sont assis dans cette Chambre le savent — celui qui fera venir un charpentier-menuisier chez lui pour faire arranger sa galerie...

D'abord, en général, s'il est consommateur, il ne sait même pas qu'il y a un décret dans la construction. Je comprends que l'industrie de la construction, c'est important, mais je ne pense pas que cela préoccupe 6 millions de Québécois à longueur de journée. D'abord, le citoyen ne sait peut-être même pas qu'il y a un décret. Ce qu'il veut, c'est que son perron soit réparé. Deuxièmement, il n'a pas le goût de faire des rapports à l'Office de la construction du Québec et je ne le blâme pas. Il a autre chose à faire. Finalement, ce qu'on sait, c'est qu'en pratique les perrons au Québec, particulièrement dans les régions éloignées, sont réparés par ceux qu'on appelle aujourd'hui, avant la loi 110, des artisans. On vient confirmer cette pratique en disant que, si un artisan qui a obtenu la licence, etc., tout ce que j'ai décrit tout à l'heure, fait affaires avec un consommateur, qui est une personne physique, pas une compagnie, et que c'est pour ses fins personnelles et non pas pour des fins commerciales ou industrielles, il n'est pas soumis au décret.

En pratique, qu'est-ce qu'on couvre? On couvre une partie du secteur domiciliaire qui n'est pas, par exemple, un épicier. Un épicier ne pourrait pas faire construire son épicerie par des artisans sans être soumis au décret. Il va être exclu du décret si c'est pour des fins personnelles. C'est cela qu'on essaie de couvrir parce que c'est cela la réalité ce matin. Il faut peut-être une fois que, dans un secteur, on essaie d'accorder nos lois à la réalité parce qu'ultimement je suis de ceux qui pensent que les lois sont faites pour les hommes et pas l'inverse.

Finalement, quant à l'extension du décret, les parties n'étaient pas préparées. On le sait; elles ont été obligées de l'avouer. L'extension du décret, en faveur de laquelle d'ailleurs était le député de Johnson en commission parlementaire, garantit aux travailleurs la reconduction de leurs conditions de travail pour trois mois à partir de la fin du mois d'avril, donc jusqu'au mois de juillet. Finalement, cette extension du décret permettra aux syndicats d'avoir en face d'eux un patronat qui est organisé en une table patronale pour savoir qui est leur interlocuteur. Il faut bien dire, cependant, que cet amendement quant à l'extension du décret, que nous avons apporté en commission, vise essentiellement une extension du décret pour les fins de la négociation du décret et non pas pour d'autres fins applicables dans la loi.

Je pense, en concluant, que cette loi — c'est vrai — a soulevé une unanimité des parties les plus impliquées, pas nécessairement de tous ceux qui sont touchés, parce que les tiers sont touchés par ces lois et ceux-là ne sont pas organisés et ne sont pas dans ce parlement ou dans les bureaux de députés. Ils ne sont peut-être pas organisés. Je pense que c'est aussi le rôle d'un gouvernement de s'occuper, dans une société, de ceux qui n'ont pas nécessairement les mêmes instruments de "lobby", de présence ou d'organisation. Je pense que c'est cela avoir à l'esprit l'intérêt public. C'est ce qu'on essaie de faire ici, c'est ce qu'on tente de faire dans cette loi. C'est pour cela que je vous invite à passer à l'adoption de la loi 110. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: Oui, M. le député de Portneuf. Question de règlement?

M. Pagé: Très brièvement et sans vouloir en faire un débat, j'aimerais que le ministre du Travail me donne son consentement afin que je lui pose une question sur le libellé, car il m'apparaît, comme il apparaît à plusieurs, que le texte de loi, tel que rédigé dans les amendements qu'il a déposés, semble avoir une faille quelque part. Il y a beaucoup de gens qui ne comprennent pas l'interprétation ou qui ne peuvent pas en venir à une interprétation sensée et logique d'un amendement qui a été proposé par le ministre. Est-ce que le ministre me permet une très brève question à ce sujet-là?

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Mai n-d'Oeuvre.

M. Johnson: Je n'ai pas d'objection, si c'est pour aider le député de Portneuf.

M. Pagé: C'est pour vous aider que je le fais, pour que vous ne soyez pas obligé de revenir avec un...

M. Johnson: Pour avoir un meilleur texte de loi. C'est bien connu.

M. Pagé: L'artisan qui exécute des travaux de construction aux fins personnelles autres que commerciales ou industrielles, une personne physique, n'est pas assujetti à la présente loi. Le ministre en a dit un mot tout à l'heure. Cela veut donc dire qu'au lendemain de l'adoption de la loi 110, un travailleur artisan qui sera qualifié, membre de la Régie des entreprises et tout cela, qui effectuera des travaux pour une personne physique, par exemple, pour réparer son perron ou sa galerie, ne sera pas soumis au décret. C'est ce que veut dire cet article. Cependant, l'autre paragraphe: "Quant à l'artisan qui exécute des travaux de construction autrement qu'aux fins personnelles de la personne physique, autres que commerciales ou industrielles, une personne physique, sa rémunération est égale... etc." Quels sont les travaux qui sont couverts par ce deuxième paragraphe? Si ce ne sont pas les travaux pour la personne physique, c'est impersonnel, et si ce ne sont pas les travaux pour fins commerciales et industrielles, quel autre type de travaux reste-t-il? Le législateur n'est pas censé parler pour ne rien dire, M. le Président. Vous en savez quelque chose.

(22 h 50)

M. Johnson: Est-ce que vous pourriez répéter seulement la dernière partie de votre intervention?

M. Pagé: Deuxième paragraphe... M. Johnson: Oui.

M. Pagé: ... on convient que le premier paragraphe stipule et prévoit qu'un travailleur artisan qui effectuera des travaux pour une personne physique, des travaux autres que pour des fins commerciales ou industrielles ne sera pas soumis au décret. On en convient?

M. Johnson: Oui.

M. Pagé: C'est l'interprétation à donner au premier paragraphe. Le deuxième paragraphe dit ceci: "Quant à l'artisan qui exécute des travaux de construction autrement qu'aux fins personnelles autres que commerciales ou industrielles d'une personne physique..." Il ne reste plus de travaux. Le législateur n'est pas censé parler pour ne rien dire.

M. Johnson: Continuez la phrase.

M. Pagé: "... sa rémunération est égale à la rémunération en monnaie courante et aux indemnités ou avantages ayant une valeur pécuniaire." Vous le ramenez soumis au décret. Mais M. le Président, je demande au ministre quels sont les travaux qui sont prévus par ce deuxième paragraphe, si ce ne sont pas des travaux pour des fins personnelles et si ce ne sont pas des travaux pour des fins commerciales ou industrielles. Il n'en reste plus, quant à moi. Et le législateur n'est pas censé parler pour rien.

M. Johnson: Effectivement, le législateur n'est pas censé parler pour ne rien dire. On sait que ce n'est pas vrai ici. La notion de "autres que commerciales ou industrielles" est une notion qui vient qualifier, au sens du droit. Je pense que le député de Portneuf le reconnaîtra avec moi. Le mot "personnelles", on dit "pour des fins personnelles", on pourrait lire "qui sont autres que des fins commerciales ou industrielles". On reprend plus loin pour dire que l'artisan qui ne travaille pas pour des fins personnelles, entre parenthèses étant autres que commerciales ou industrielles, fermez la parenthèse, est soumis au décret. Donc, ce n'est pas quand il est dans une relation... Je pense qu'on se comprend là-dessus. Admettons qu'un juge veuille interpréter cela maintenant — on va reprendre les principes d'interprétation du droit que le député de Portneuf connaît; il a déjà fait du droit — il va nécessairement se référer au premier paragraphe et il va se rendre compte que dans le premier paragraphe, l'expression "autres qu'industrielles ou commerciales" vient qualifier le mot "personnelles". Il est évidemment clair que si on n'a pas le premier paragraphe, le deuxième a l'air absurde, mais à la lumière du premier, je pense qu'il ne l'est pas. Je suis d'accord avec le député de Portneuf qu'il y aurait peut-être une autre formulation à trouver qui soit plus limpide. Mais a-t-il une suggestion? J'en aurais peut-être une, moi, si vous y tenez.

M. Pagé: Allez-y!

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, M. le député de Portneuf, je comprends qu'étant tous deux avocats, vous puissiez vous amuser ainsi indéfiniment. M. le député de Portneuf, je ne pense pas qu'on puisse reprendre le débat de troisième lecture.

M. le chef de l'Opposition officielle...

M. Levesque (Bonaventure): Je me demande si le ministre a voulu, à un moment donné, dire qu'il pouvait modifier de nouveau l'amendement.

M. Johnson: Non, quant à moi, le texteditcequ'il dit. Ce n'est pas une langue qui est absolument limpide. D'ailleurs, c'est comme tout le reste de ces lois de la construction, qui sont des espèces de ciment difficile à déterminer, de pensées qui sont souvent assez incohérentes; il y aurait possiblement une autre formulation qui serait peut-être plus claire. Je pense que le deuxième paragraphe, à la lumière du premier, fait que c'est clair. Maintenant, si le député de Portneuf pense que ce n'est tellement pas clair qu'il voudrait une autre suggestion, je pourrais lui suggérer peut-être une formulation et on se comprendrait à ce sujet.

M. Pagé: M. le Président...

M. Levesque (Bonaventure): Allez-y donc!

M. Johnson: Dans le fond, ce que le texte dit, c'est que l'artisan qui exécute des travaux de construction pour fins personnelles autres que commer-

ciales ou industrielles d'une personne physique, vous changez le mot... C'est cela que le texte dit. Je pense que le deuxième paragraphe, à la lumière du premier, est clair. Je pense que ce serait risqué, à 23 h 55, de modifier un texte de loi dans le contexte qu'on connaît.

M. Pagé: M. le Président, je vais... Le Président: Voilà ce que je voulais dire. M. Pagé: M. le Président, brièvement. Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Vous avez dit tout à l'heure — par surcroît, vous êtes avocat, cela m'a un peu surpris — qu'on semblait s'amuser avec les textes. Mon intervention était uniquement due au fait que ces amendements sont venus au moment du dépôt du rapport. Il faut comprendre que ces amendements n'ont pas été discutés en commission parlementaire. C'était une mise en garde que je voulais faire au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Celui-ci semble tenir pour acquis que c'est bel et bien clair. Quant à moi, M. le Président, je suis convancu qu'il y aura des interprétations différentes sur le contenu de ce deuxième paragraphe. De toute façon, cela va avec le reste du projet de loi. Ce projet de loi aura à être rouvert avant longtemps.

M. Johnson: Je vous avais permis une question, pas un commentaire.

M. Pagé: On rouvrira, entre autres, ce deuxième paragraphe parce que, avant longtemps, M. le Président, on va amender ce projet de loi. Le ministre va l'amender.

Le Président: Alors, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix. Est-ce que ce projet de loi...

M. Grenier: Le leader parlementaire de l'Union Nationale avait manifesté...

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier:... le désir d'un vote enregistré. Mais, compte tenu de l'argumentation que le ministre fait valoir ici auprès du leader de l'Union Nationale, je pense qu'on devra accepter un vote sur division.

Le Président: Est-ce que le projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction et d'autres dispositions législatives, sera adopté?

Une Voix: Rejeté sur division. Le Président: Adopté sur division. M. Bertrand: M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.

M.Bertrand: ...je voudrais simplement informer les députés de l'Assemblée nationale que nous ne siégerons pas demain matin à l'Assemblée nationale. Nous siégerons demain après-midi à 15 heures. Par contre, comme le leader parlementaire l'a dit cet après-midi, je répète que demain matin, à 10 heures, la commission parlementaire de l'agriculture continuera ses travaux à la salle 81 -A concernant le projet de loi 116.

M. le Président, je fais maintenant motion pour que nous ajournions nos travaux jusqu'à demain, 15 heures.

Des Voix: Le mini-débat.

Le Président: Un instant.

M. Bertrand: Oui, M. le Président.

Le Président: Un instant.

M. Bertrand: Oui.

Le Président: M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement, je n'ai pas d'objection sauf que je dois me conformer au règlement. Comme il y a un mini-débat qui a été réclamé par Mme le député de L'Acadie, je suggère que vous retardiez votre motion de quelques instants quoi qu'il n'y a pas d'objection...

Une Voix: II peut la faire.

Le Président:... conformément au règlement, à ce que vous fassiez votre motion immédiatement puisqu'on n'a pas besoin de quorum pour le minidébat. Alors, faites votre motion.

Ajournement

M. Bertrand: Mon intuition me disait, M. le Président, que c'était possible de le faire, mais je n'en avais pas la certitude scientifique que vous avez. Alors, je fais motion officiellement pour que nous ajournions nos débats à demain, 15 heures.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Mini-débat relatif au supplément

de revenu versé aux personnes âgées

en centre d'accueil

Le Président: Adopté. Alors, conformément maintenant à l'avis qui a été donné cet après-midi par la présidence, je cède maintenant la parole à Mme le député de L'Acadie. Est-ce que vous souhaiteriez que je relise l'avis, Mme le député de L'Acadie?

Mme Lavoie-Roux: Oui, je pense que cela situerait le débat.

Le Président: Pour situer le débat: "M. le Président, à la séance d'aujourd'hui, j'ai posé au ministre des Affaires sociales une question portant sur le sujet suivant: l'utilisation du $20 d'augmentation du supplément de revenu versé aux personnes âgées en centre d'accueil par le gouvernement fédéral. Puisque je ne suis pas satisfaite de la réponse donnée, je désire me prévaloir des dispositions de l'article 174 du règlement. Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs". Et c'est signé du député de L'Acadie, Thérèse Lavoie-Roux.

Mme le député de L'Acadie, vous connaissez les règles, vous avez cinq minutes exactement. Après cinq minutes, je serai obligé de vous interrompre. Je vous remercie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Si je reprends cette question ce soir, c'est tout simplement pour clarifier une situation qui demeure confuse à cause des réponses incomplètes et ambiguës données par le ministre des Affaires sociales aux questions que nous lui avons posées depuis deux jours. Lorsque, à plusieurs reprises, le ministre des Affaires sociales répète que, de 1976 à aujourd'hui, il a porté de $53 à $63 les allocations versées aux personnes âgées en centre d'accueil pour leurs dépenses personnelles, voulant sans doute comparer la générosité du gouvernement actuel à celle du gouvernement qui l'a précédé, il ne dit pas que, durant la même période, le gouvernement fédéral a régulièrement indexé tant la pension de base accordée à l'ensemble des personnes âgées que le supplément de revenu garanti pour les personnes âgées. Ainsi, alors qu'en janvier 1976 le revenu maximum provenant de la pension de veillesse, le supplément de revenu inclus, pour une personne, est passé de $226 à $304, soit une augmentation de $78, au 30 janvier, le gouvernement du Québec n'avait laissé aux bénéficiaires eux-mêmes que $10 de plus. Le ministre nous a indiqué qu'il verserait $5 supplémentaires aujourd'hui.

Pour la même période, il leur a laissé cette somme modique pour leurs dépenses d'habillement et autres menues dépenses. N'eût été l'indexation accordée par le gouvernement fédéral, on est en droit de se demander si les bénéficiaires auraient même connu cette augmentation. Quand le ministre, hier, se défendait contre les affirmations qui étaient faites, à savoir que le gouvernement du Québec avait soutiré la totalité du montant additionnel versé par les personnes âgées en centre d'accueil, c'est vrai que ce n'est pas la totalité qu'il soutire mais seulement 75%. C'est, en fait, non pas $68 que les personnes âgées en centre d'accueil devraient recevoir, mais $83, soit $20 de plus. Il faudrait peut-être même dire $21.05 puisque le ministre ne parle pas du fait qu'au 1er janvier les pensions ont aussi eu leur indexation régulière, tel que prévu. (23 heures)

Le ministre aura beau accuser le fédéral, vouloir dénigrer l'ancien gouvernement, nous lancer des invectives — on commence, d'ailleurs, à s'y habituer — le fait demeure que les personnes âgées en centre d'accueil et bénéficiaires du supplément de revenu garanti ont reçu un chèque portant une augmentation de $24.24, mais ils ne l'ont que vu. Immédiatement, on l'a retenu. Le ministre nous a dit qu'il verserait une partie de ces montants aux personnes en bas de 65 ans qui sont dans des centres de soins prolongés et qu'également il verserait la différence pour couvrir les frais de sa nouvelle politique de transport gratuit, d'ambulance gratuite pour les personnes âgées. Je pense qu'il convient de rappeler que, n'eût été le montant supplémentaire versé par le gouvernement fédéral aux fins d'augmenter le revenu supplémentaire des personnes âgées en centre d'accueil, on est justifié de se demander si les bénéficiaires des établissements de soins prolongés âgés de moins de 65 ans connaîtraient cette augmentation d'allocation pour leurs besoins personnels et si les services ambulanciers gratuits pour les personnes âgées auraient vu le jour.

Je pense que ce sont là deux mesures avec lesquelles nous sommes d'accord. M. le Président, lorsque le ministre des Affaires sociales accuse le gouvernement fédéral de poursuivre des fins élec-toralistes, je pense que le même compliment peut lui être fait quand, à renfort de publicité, il annonce de nouvelles politiques dont il ne dévoile pas les sources de financement réelles et quand, en plus, il les défraie à même les revenus des personnes âgées les plus démunies de notre société. Je pense que c'est important que ceci soit établi clairement, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président: C'est moi qui vous remercie, madame. M. le ministre, vous avez cinq minutes.

M. Denis Lazure

M. Lazure: M. le Président, je trouve encore une fois déplorable qu'un peu sur le dos des personnes âgées, comme on l'a fait sur le dos des bénéficiaires de l'aide sociale, ce débat ait été provoqué essentiellement par des gestes précipités de la part du gouvernement fédéral. On peut différer d'opinion. Evidemment, c'est de bonne guerre. Mais, quant à nous, ces gestes avaient et ont toujours un but tout à fait électoral. Il est bien sûr que ces $20 ou ces $200 sont bienvenus pour les Québécois, surtout pour les Québécois qui ont des revenus souvent trop bas.

Je pense cependant, M. le Président, qu'il ne faut pas faire de démagogie et essayer d'induire la population en erreur. Premièrement, pour 95% de la population âgée de 65 ans et plus, ces $20 vont intégralement dans la poche de la personne âgée.

Evidemment, pour les 5% de personnes âgées qui vivent en institution, en centre d'accueil ou dans des hôpitaux de soins prolongés, nous faisons ce qui est tout à fait normal. Nous affectons une partie — et c'est la majeure partie — de ces $20 pour les frais de subsistance, c'est-à-dire, le logement, l'alimentation et les autres frais qui vont avec l'hébergement, et nous laissons la personne âgée utiliser 25% de ces $20, c'est-à-dire $5 sur $20, pour ses besoins personnels. C'est la proportion que l'on retrouve dans la population âgée en général. La personne âgée qui vit dans un appartement ou dans sa petite maison ne consacre pas 100% d'un revenu additionnel pour ses dépenses personnelles mais, au contraire, consacre la majeure partie de ce revenu additionnel pour des besoins essentiels tels que la nourriture et le logement.

Or, ces besoins essentiels, M. le Président, sont fournis par le centre d'accueil, en ce qui concerne les personnes âgées, et ils coûtent aux contribuables québécois environ $700 par mois par personne âgée dans les centres d'accueil. Je pense que, M. le Président, on oublie aussi que ce gouvernement, depuis deux ans, a doublé les sommes d'argent consacrées à l'aide à domicile, passant de $22 millions à $41 millions. Ces millions de dollars en aide à domicile vont essentiellement aux personnes âgées. Nous pensons que ces sommes aident les personnes âgées à demeurer à domicile plus longtemps et nous avons l'intention de continuer à consacrer de plus en plus d'argent pour ces services à domicile.

Mme le député de L'Acadie essaie de faire un certain capital politique en provoquant des débats comme celui de ce soir. Je souhaiterais, M. le Président, que Mme le député de L'Acadie soulève une question, lors d'une période des questions, sur le retrait par le gouvernement fédéral d'un projet de loi qui s'appelait Loi sur le financement des services sociaux, et sur lequel toutes les provinces s'étaient entendues. Son homologue — ou si vous voulez, sa grande soeur — le ministre de la Santé au gouvernement fédéral a retiré ce projet de loi, privant le Québec d'une somme de $20 millions durant l'année 1979.

Ce gouvernement-ci, en plus de l'aide à domicile, a rendu gratuits les médicaments aux personnes âgées. Ce gouvernement a rendu gratuits les transports ambulanciers aux personnes âgées tout récemment. Nous n'avons pas de leçon à recevoir du Parti libéral en ce qui concerne le traitement qu'un gouvernement civilisé doit accorder aux personnes âgées.

Je termine là-dessus. Nous avons dit plusieurs fois dans cette Chambre qu'il était grand temps que le gouvernement fédéral suive la recommandation du rapport Pépin-Robarts. En fin de compte, ce sont des copains du député de L'Acadie ou du ministre de la Santé nationale qui ont rédigé ce rapport. Ce rapport recommande que tout ce qui concerne la sécurité sociale et la santé soit remis intégralement au pouvoir des provinces.

Mme Lavoie-Roux: Allez négocier!

M. Lazure: Nous savons, nous connaissons mieux que le gouvernement fédéral quelles sont les priorités pour les personnes âgées.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: Merci. Le mini-débat est très strict. Merci aux deux concurrents. L'ajournement étant déjà fait, nous nous reverrons demain, à 15 heures.

Fin de la séance à 23 h 8

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