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Version finale

31st Legislature, 1st Session
(December 14, 1976 au December 23, 1976)

Tuesday, December 21, 1976 - Vol. 18 N° 6

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures cinq minutes)

M. Richard (président): A l'ordre, mesdames et messieurs!

Affaires courantes.

La séance est suspendue pour quelques instants.

Dépôt de rapports de commissions élues. Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés. Présentation de motions non annoncées.

Motion de changement d'un membre de commission

M. Lavoie: M. le Président, je voudrais faire motion afin que le nom de M. Blank soit remplacé par le nom de M. Garneau à la commission élue de la justice.

M. Burns: Vote enregistré, M. le Président. M. Marchand: Est-ce que vous êtes cinq?

Le Président: A l'ordre, messieurs! Cette motion est-elle adoptée?

M. Lavoie: II n'y a pas cinq ministres, M. le Président, vous ne pouvez pas demander le vote.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée? M. Lavoie: Vote enregistré, M. le Président.

Le Président: Qu'on appelle les députés! A l'ordre!

Vote sur la motion

Le Président: Que ceux qui sont en faveur de la motion du leader parlementaire de l'Opposition veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lavoie, Mackasey, Forget, Garneau, Mailloux, Goldbloom, Raynauld, Mme Lavoie-Roux, MM. Giasson, Lamontagne, Lalonde, Blank, Caron, O'Gallagher, Picotte, Larivière, Ciaccia, Marchand, Gratton, Pagé, Springate, Biron, Grenier, Russel, Goulet, Fontaine, Le Moignan, Dubois, Cordeau, Lévesque (Taillon), Burns, Mme Cuerrier, MM. Cardinal, Bédard, Laurin, Morin (Louis-Hébert), Parizeau, Marois, Léonard, Couture, O'Neill, de Belleval, Joron, Mme Payette, MM. Lessard, Proulx, Charron, Léger, Tardif, Paquette, Marcoux, Alfred, Fallu, Rancourt, Mme Leblanc, MM. Bertrand, Godin, Desbiens, Johnson, Laplante, Guay, Mercier, Marquis, Lacoste, Ouellette, Perron, Brassard, Clair, Gosselin, Lavigne, Dus-sault, Beauséjour, Jolivet, Baril, Bordeleau, Boucher, Gravel, Levesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon.

Le Président: Que ceux qui sont contre la motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: M. Charbonneau.

Le Président: Que ceux qui s'abstiennent veuillent bien se lever!

Le Secrétaire: Pour: 80 — Contre: 1

Le Président: Motion adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Burns: Normalement, dans les affaires courantes, les déclarations ministérielles se présentent à un endroit précis. Je sais que le ministre de la Justice a une déclaration ministérielle très importante à faire. Après avoir consulté mes collègues d'en face, et justement parce que nous jugeons cette déclaration suffisamment importante, nous avons cru devoir demander un consentement à l'Opposition pour que cette déclaration se fasse cet après-midi, à l'ouverture, à trois heures, au lieu de ce matin, parce qu'il nous a été impossible d'en livrer une copie une heure à l'avance.

Je demanderais que cela devienne un ordre de la Chambre qu'à trois heures cet après-midi — j'en fais la proposition — le ministre de la Justice puisse faire sa déclaration ministérielle.

M. Lavoie: S'il n'y a pas d'objection d'autres membres de cette Assemblée, nous accordons notre consentement, suivant les voeux exprimés par le leader parlementaire du gouvernement, pour que cette déclaration soit faite à trois heures, cet après-midi.

Le Président: Cette motion est adoptée et cela devient un ordre de la Chambre.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Déclarations ministérielles. Dépôt de documents. Questions orales des députés.

QUESTIONS DES DÉPUTÉS

Avenir politique du Québec

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Levesque (Bonaventure): ... j'ai une question à poser à l'honorable premier ministre. Hier, le ministre d'Etat au développement culturel nous a commenté une entrevue qu'il avait donnée au réseau anglais de Radio-Canada où il avait dit que le mot "independence was a catchword" et où il avait développé l'idée d'une association entre le monde francophone et le monde anglophone au Canada.

Ces commentaires ont peut-être pu jeter encore plus d'incertitude, on l'admettra, dans l'esprit de la population et particulièrement de ceux qui s'intéressent à l'avenir du Québec.

Le premier ministre, lui, qui est ici ce matin, pourrait peut-être nous éclairer davantage, parce qu'il semble que les déclarations de l'un et de l'autre ne concordent pas, au moins dans la perception que nous en avons. Comme il s'agit d'une question essentielle et fondamentale, pour l'avenir de notre peuple, je pense, M. le Président, qu'il serait opportun que je pose cette question au premier ministre, ce matin.

Le premier ministre peut-il nous dire, exactement, vers quoi il entend mener le Québec, et tâcher de dissiper, une autre fois, cette nouvelle ambiguïté et cette incertitude qui se répète sous divers aspects, incertitude créée par la déclaration de mon bon ami, le député de Bourget, ministre responsable de notre développement culturel, à savoir où se situe le Parti québécois? Est-ce l'indépendance, la séparation indépendante? Est-ce la souveraineté, souveraineté-association? Est-ce une nouvelle forme de contrat entre les deux nations fondatrices, les deux peuples fondateurs, qu'est-ce que c'est?

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vais essayer de répondre d'une façon très simple et aussi précise que possible, en essayant d'éviter de s'enfarger dans les mots. Je suis sûr que mon collègue, ministre d'Etat au développement culturel, n'a pas voulu créer une telle confusion dans l'esprit du chef de l'Opposition. Mais enfin, vu qu'il a pris un ton presque émouvant pour dire à quel point cela l'avait jeté encore une fois dans l'incertitude, on va essayer tranquillement, mais très vite, de rétablir l'essentiel de ce qu'a dit le ministre d'Etat au développement culturel, mais qui est aussi l'essentiel de ce que nous croyons depuis la fondation du Parti québécois.

D'abord le mot "séparation" et son corollaire, extrêmement populaire chez nos amis d'en face, le mot "séparatisme", n'est pas précisément celui que nous aimons. J'ai remarqué dans les comptes rendus d'un journal, ce matin en tout cas, que ce mot intervenait dans le sens d'un rejet par le ministre d'Etat au développement culturel. On a toujours rejeté ce vocabulaire qu'affectionne en particulier le Parti libéral depuis trois élections, et qu'on affectionne aussi chez tous les adversaires de la souveraineté politique du Québec.

C'est évident qu'il y a une part de séparation qui est impliquée au point de vue politique. Quand on parle de souveraineté, cela veut dire forcément que le Québec sera en charge de ses impôts, de ses taxes, de son budget, budget de l'An X, de tous ses pouvoirs — la monnaie, cela demeure une question à discuter, mais cela fait partie d'autres choses — tout l'essentiel de la souveraineté politique, l'indépendance si l'on veut. Ce sont des mots qui se rejoignent et on ne se chicanera pas là-dessus.

C'est ce que vise à obtenir pour le Québec, si les citoyens sont d'accord, le Parti québécois de- puis sa fondation. Il nous semble que cela a toujours été clair.

On vise en même temps à une association qui est commandée par la géographie, qui est commandée jusqu'à un certain point par la tradition, par l'économie aussi. Cela se développe de plus en plus dans le monde. On ne voit pas pourquoi on ne s'insérerait pas dans ce courant. A la fois un Québec souverain, indépendant politiquement, donc, au point de vue des institutions politiques séparé, on le sait, mais on refuse, nous, de mettre toujours l'accent sur seulement l'aspect négatif. S'il y en a qui préfèrent toujours parler négativement, c'est leur droit. Mais nous, nous avons le droit de nous exprimer comme nous l'entendons. Par ailleurs, en même temps que c'est indépendant— sous cette souveraineté — on vise, pour les raisons que j'ai données: géographiques, économiques etc., à ce qu'il y ait une association avec le Canada entre — si on veut— les deux peuples fondateurs ou les deux pays que nous formerons éventuellement. Cette association serait contractuelle. Les modèles ne manquent pas, il y en a en Europe. S'ils ont été capables, entre neuf pays qui avaient toutes sortes d'animosités historiques, de créer un marché commun, on ne voit pas pourquoi nous ne serions pas capables, éventuellement — et beaucoup de gens en discutent sérieusement, surtout depuis le 15 novembre — d'employer une formule qui serait adaptée à nos besoins, mais qui a déjà fait ses preuves ailleurs, pour empêcher qu'on s'éloigne trop.

Je ne vois nulle part, dans les propos qui ont été rapportés de la part du ministre d'Etat au développement culturel, quoi que ce soit qui aille contre cela.

Le Président: M. le député d'Outremont.

Situation économique du Canada

M. Raynauld: Je voudrais adresser une question au ministre des Finances. Dans les journaux, ce matin, nous avons le rapport du Conference Board du Canada qui prévoit, pour l'année 1977, une période relativement difficile avec un taux de croissance de 3%, pour l'ensemble du Canada, un taux de chômage de 7,9%, si ma mémoire est bonne, pour l'ensemble du Canada.

Je voudrais donc lui demander quelles sont ses perspectives à lui, pour la province de Québec, pour 1977 et notamment en ce qui concerne le chômage, puisque l'on sait que, si le chômage dans l'ensemble du pays est de 8%, il sera d'un minimum de deux points supérieur, sinon plus, au Québec.

En second lieu, je voudrais lui demander quelles sont les priorités qu'il va se donner en ce qui concerne la politique économique. Va-t-il donner une priorité très nette, sinon absolue à la création d'emplois? Va-t-il, au contraire, essayer de répartir les revenus de façon plus égale, comme le gouvernement a semblé vouloir le faire récemment avec sa décision sur le salaire minimum, ou donnera-t-il priorité à l'indépendance?

Enfin, troisièmement, quelles sont les politiques qu'il envisage pour essayer de pallier cette faible expansion qui est prévue pour 1977 en ce qui concerne le Québec? Je voudrais surtout, et en particulier, l'entendre nous expliquer s'il entend utiliser la politique fiscale du Québec pour essayer de relancer l'économie plutôt que de relever les impôts comme nous l'avons fait ici depuis le début de cette session.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, effectivement, j'ai vu ces projections du Conference Board. Elles indiquent, pour l'année 1977, un rythme de progression de l'économie canadienne qui, je pense,, est plus faible que celui auquel s'attendaient la plupart des observateurs il y a quelques mois.

Il est évident, cependant, que les révisions sont possibles, compte tenu de ce qui pourrait se produire aux Etats-Unis dans les mois qui viendront. Encore, il faut probablement ici être assez conservateur et tenir compte du fait que 1977 ne sera pas une année de très forte expansion, au moins dans l'état actuel des choses.

Dans la préparation du prochain budget, nous avons à tenir compte de cette donnée ou de ces projections de la même façon que nous devons tenir compte d'un certain nombre d'autres contraintes. Par exemple, le niveau de l'endettement, le niveau des emprunts, est maintenant, singulièrement cette année, très élevé et il serait donc, si c'est le moindrement possible, sage de le réduire un peu.

Deuxièmement, il faudrait à la fois et en même temps chercher à réorienter certaines des dépenses du secteur public vers des types de dépenses, des types de programmes qui, comment dire, ont un contenu d'emplois plus élevé que d'autres, sans, bien sûr, recourir à des armées de gens qui travaillent au pic et à la pelle. Ce n'est pas ce que je veux dire. Il est évident que $1 million placé dans un programme, dans un deuxième, dans un quatrième, dans un cinquième programme, ne donne pas, en termes d'emplois, les mêmes résultats. C'est-à-dire que d'essayer, à l'intérieur du secteur public, d'une part, de réduire le niveau des emprunts, si c'est possible, et, d'autre part, de créer davantage d'emplois, c'est, je ne dirais pas, une quadrature du cercle, mais un exercice qui n'est pas exactement facile.

C'est pourtant à ce genre de chose, je pense, auquel il faut s'attaquer dans le mois, ou le mois et demi, qui nous sépare des dernières étapes finales de la préparation du budget. On comprendra qu'ayant énoncé ces deux lignes générales d'action, essayer de réduire le niveau des emprunts, d'une part, et augmenter l'emploi dans tout le secteur public, d'autre part, je n'ai pas — j'en suis parfaitement conscient — donné quoi que ce soit de définitif. Je pense avoir simplement indiqué une espèce de difficulté devant laquelle on se trouve placé. J'ai bon espoir d'être en mesure de la résoudre dans les semaines qui viennent, ou au moins, d'amorcer une solution.

Cela étant dit, je ne me fais pas cependant trop d'illusions sur le résultat ultime. En ce sens qu'un rythme faible de progression de l'économie dans l'ensemble de l'Amérique du Nord, indépendamment des politiques que nous pouvons suivre, peut difficilement se traduire, même dans la mesure où le gouvernement du Québec est très actif, par un rythme mirobolant d'expansion au Québec proprement dit. Néanmoins, il y en a un certain nombre à l'intérieur des juridictions que nous avons à l'heure actuelle, à l'intérieur du budget dont nous disposons dans le cadre politique actuel, et il est évident que nous allons poursuivre dans le sens des deux tendances, enfin, des deux lignes de force que j'ai expliquées tout à l'heure.

Le Président: Question accessoire, M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Réduire à la fois la dette et réorienter les dépenses publiques n'est pas particulièrement difficile, parce que ces deux choses ne sont pas contradictoires. Ce que j'aimerais plutôt que le ministre des Finances nous dise, c'est que s'il veut réduire la dette, va-t-il le faire en augmentant les impôts ou va-t-il le faire en réduisant les dépenses globales du gouvernement québécois? C'est là que se trouve le choix.

M. Parizeau: II ne s'agit pas, M. le Président, de réduire la dette, mais de réduire les emprunts. Il y a une différence fondamentale. Si je promettais de réduire la dette en cours du Québec, aujourd'hui, on pourrait m'accuser d'être un farceur.

D'autre part, quant à savoir par quel truchement l'opération doit être faite, je comprends que la question intéresse le député d'Outremont, mais il comprendra qu'il est un peu tôt dans l'exercice de préparation du prochain budget pour conclure de façon définitive.

Cela étant dit, cependant, il est clair qu'en raison du niveau extraordinairement élevé du fardeau fiscal des Québécois, à l'heure actuelle, comparativement aux autres provinces — j'imagine que nos amis d'en face voient très bien ce à quoi je fais allusion puisque, en définitive, nous travaillons sur des documents qui sont bien connus d'eux — compte tenu donc de ce niveau très élevé du fardeau fiscal des Québécois à l'heure actuelle, s'il y a moyen, le moindrement, d'éviter de réduire le niveau des emprunts par des augmentations d'impôts, bien sûr, il faut que ce soit essayé.

M. Forget: Question supplémentaire.

Le Président: Question supplémentaire, M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Est-ce que je comprends, des propos du ministre des Finances, qu'il n'a pas l'intention et que son gouvernement n'a pas l'intention de proposer aucune mesure de soutien de l'emploi avant le prochain discours sur le budget?

M. Parizeau: M. le Président, bien au contraire, nous avons déjà annoncé, il y a quelques jours, la mise en place d'une politique d'achat dans le secteur public, qui est déjà une première mesure de création d'emplois dans la mesure où elle démarre suffisamment rapidement. Le fait de commenter la préparation du prochain budget comme je viens de le faire n'implique pas que d'ici le 1er avril on ne fait rien.

Le Président: Le député de Lotbinière.

Perspectives économiques du Québec

M. Biron: M. le Président, ma question se serait adressée au ministre de l'Industrie et du Commerce ou, en son absence, au ministre du Développement économique.

Des Voix: II n'est pas là.

M. Biron: Je pense que je vais la poser au premier ministre. Il y a eu un rapport sur les perspectives économiques de 1977, comme chaque année il y a un rapport de perspectives économiques à l'automne qui est transmis au ministre de l'Industrie et du Commerce. Je voudrais savoir si le premier ministre a pris connaissance de ce rapport qui traite des perspectives économiques de 1977 pour le Québec en particulier, et si oui, quelles sont les grandes lignes de force de ce rapport? J'en avais déjà demandé copie à l'ancien ministre de l'Industrie et du Commerce et il semble que ce rapport soit resté secret.

M. Lévesque (Taillon): Je vais demander à mes collègues qui, malheureusement, sont absents, de non seulement me tenir au courant, mais de tenir le député de Lotbinière et la Chambre au courant aussi parce que, pour le moment, je n'ai pas eu le temps de l'étudier.

Le Président: Question accessoire, M. le député.

M. Biron: Une question supplémentaire là-dessus. Peut-être que le ministre de l'Agriculture a pris connaissance de ce qui traitait de l'agriculture dans ce rapport en particulier.

S'il en a pris connaissance, le paragraphe qui traite d'agriculture est-il conforme aux perspectives agricoles 1977 qui ont été déposées à Ottawa lors de la conférence sur l'agriculture?

M. Garon: J'ai pris connaissance de ce document sur les perspertives agricoles 1977 déposé à Ottawa.

M. Biron: Vous n'en avez pas pris connaissance?

M. Garon: Oui, j'en ai pris connaissance.

M. Biron: Cela est-il conforme à ce qui s'est passé avec le rapport de perspectives agricoles 1977 à Ottawa, remis lors de la conférence des ministres de l'Agriculture'

M. Garon: J'ai pris connaissance du rapport qui a été présenté lors de la conference qui a eu lieu à Ottawa. C'est ce que je disais.

M. Grenier: M. le Président...

M. Levesque (Bonaventure): ... le moins.

Propriétaires de petits abattoirs

M. Grenier: Je m'adresse également au ministre de l'Agriculture. Suite à une annonce qu'il a faite la semaine dernière, à savoir qu'il y aurait une déclaration ministérielle, nous avons en main un document qui nous a été remis par l'Association des petits abattoirs du Québec, et je pense qu'il est urgent que les petits abatteurs sachent à quoi s'en tenir puisque beaucoup d'entre eux sont poursuivis. Il y a une date limite, qui est le 31 décembre, et je ne voudrais pas voir la semaine se terminer sans que le ministre de l'Agriculture nous ait dit ce qu'il va arriver à ces gens qui sont poursuivis présentement et qui auront à rendre compte de leur petite entreprise d'ici le 31 décembre.

M. Garon: Je ferai une déclaration demain matin à ce sujet. On est en train de dactylographier la déclaration, présentement.

M. Forget: M. le Président...

Le Président: Le député de Saint-Laurent.

Restrictions budgétaires dans le secteur hospitalier

M. Forget: Ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Il y a une dizaine de jours, le ministre des Affaires sociales déclarait, à la suite de l'ultimatum qui lui était adressé par la Fédération des affaires sociales de la CSN, deux choses. D'une part, qu'à compter d'avril 1977 les contraintes budgétaires ne s'appliqueraient plus, et, deuxièmement, qu'aucune mise à pied de syndiqués ne serait faite sans son autorisation personnelle.

J'aimerais que le ministre des Affaires sociales nous indique, relativement à la première affirmation, quelle en est exactement la portée et le sens. Signifie-t-il par là que les coupures budgétaires de l'année en cours seront effectivement restaurées dans la base? Veut-il dire, au contraire, que les règlements de fin d'année seront repris comme antérieurement? Et, quant à la deuxième question, j'aimerais qu'il nous indique si, à la suite des protestations qu'ont enregistrées les membres de l'Association des hôpitaux la semaine dernière, il a entrepris de réviser la position qu'il communiquait au réseau par une directive en date du 10 décembre dernier.

Le Président: Le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: M. le Président, en ce qui a trait à la première question, la réponse que j'ai donnée, autant aux hôpitaux qu'aux employés d'hôpitaux, c'est-à-dire aux administrateurs et aux employés d'hôpitaux, c'était suite à la question bien précise qui m'était posée, à savoir: Est-ce que les restrictions budgétaires contenues dans ce qu'on a convenu d'appeler la réforme Forget vont continuer en 1977/78? La réponse laconique que j'ai donnée, je la répète, c'est non. Il est bien évident, surtout après les paroles de mon collègue, le ministre des Finances, qu'il y aura des restrictions budgétaires. Il y en a toujours. Mais nous avons l'intention de fabriquer, de composer le budget prochain 1977/78, pour ce qui a trait au ministère des Affaires sociales, d'une façon nuancée. Il y aura des restrictions budgétaires semblables à celles qui étaient appliquées uniformément à tous les établissements de soins de santé, mais ces restrictions pourront s'appliquer de façon nuancée à un certain nombre d'établissements, et je n'ai pas l'intention d'aller dans les détails ce matin.

La réponse est maintenue, à savoir que forcément nous aurons un plafond des dépenses pour 1977/78 dans les hôpitaux comme dans les autres établissements mais, en deux mots, ce plafond pourra être différent d'une sorte d'établissement à une autre sorte d'établissement, selon les priorités qui seront établies par le Conseil des ministres.

La deuxième question, les mises à pied. J'ai demandé aux administrations hospitalières, après avoir rencontré le président de l'Association des hôpitaux, auparavant, et le directeur général de l'Association des hôpitaux, d'essayer de demeurer au sein de ces contraintes budgétaires sans faire de mises à pied, si c'était possible, et, plus particulièrement, de mises à pied de syndiqués.

On sait malheureusement qu'une des façons les plus courantes utilisées par les directions hospitalières, quand il s'agit de restreindre le budget, c'est de faire des mises à pied de syndiqués.

Cela a été la façon la plus courante, la façon la plus habituelle de procéder. Je pense qu'il y a lieu, pour les administrations hospitalières, d'économiser par d'autres moyens, y compris par la fermeture de certains postes de cadre dans les établissements hospitaliers où il y a une surabondance de cadres par rapport au nombre de syndiqués, au nombre d'employés.

J'ai fait aussi d'autres suggestions quant à la réduction des dépenses. Par exemple, analyses de laboratoires en nombre excessif, examens de radiologie en nombre excessif. Finalement, j'ai demandé aux administrations hospitalières que, quand elles devaient absolument procéder à des mises à pied, elles obtiennent l'autorisation du ministère des Affaires sociales.

M. Forget: Question supplémentaire, M. le Président.

Le Président: Question accessoire, M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: J'aimerais que le ministre des Affaires sociales nous aide à comprendre véritablement le sens de ses remarques. Pour ce qui est des contraintes budgétaires, il semble nous dire que les contraintes budgétaires 1976/77 vont s'appliquer seulement jusqu'au 31 mars 1977. C'est une tautologie puisque, effectivement, c'est la fin de l'année financière.

Ce qui est significatif dans ses remarques, c'est qu'on a cru y lire une affirmation portant sur l'exercice suivant. Non pas que les budgets 1976/77 continueraient l'année subséquente, mais qu'ils seraient, eux, en réflexion des difficultés, des plaintes qui ont été soulevées par certains gestionnaires.

Est-ce que, effectivement, le budget de l'année suivante reflétera les coupures effectuées cette année ou si les sommes qui ont été coupées seront restaurées dans les budgets, ceci, indépendamment de la méthode ou des techniques au sujet desquelles on n'a rien à voir ici, à l'Assemblée nationale? Indépendamment de ces techniques, est-ce que ces sommes seront restaurées dans les budgets des hôpitaux ou si elles continueront de s'appliquer?

Pour ce qui est de la deuxième question, je crois que le ministre n'en a pas saisi le sens. Je ne lui ai pas demandé de quelle façon les administrateurs d'hôpitaux pourraient vivre avec les contraintes budgétaires, mais si, spécifiquement, il considérait que son intervention personnelle et directe dans la gestion des hôpitaux était encore appropriée, étant donné les observations qu'on lui a faites sur ce sujet. Il s'agit d'une intervention sans précédent dans un réseau décentralisé et je crois que c'est à ce sujet que l'Association des hôpitaux lui a fait parvenir certaines remarques, certaines observations. A-t-il l'intention de reconsidérer son action aussi interventionniste dans l'administration des hôpitaux?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: A la première question, je répète encore une fois que, pour 1977/78, il y a certains établissements hospitaliers qui auront des contraintes budgétaires semblables à celles qui existent dans le moment, d'autres qui auront des contraintes plus fortes et d'autres qui auront des contraintes moins fortes. C'est dans ce sens-là que je dis que les budgets de 1977/78 seront préparés de façon plus nuancée. Je ne voulais simplement pas m'amuser pour dire que le budget serait nouveau au 1er avril; c'est évident.

La deuxième question. Dans la mesure où les établissements du réseau des Affaires sociales fonctionnent en maintenant et en offrant des services publics convenables, je n'ai pas du tout l'intention d'intervenir.

Cependant, dans la mesure où soit la totalité ou une partie des établissements cessent de prodiguer des soins ou des services auxquels la population a droit, je donne comme exemple les soins d'urgence, dans cette mesure, je vous promets, M.

le député de Saint-Laurent, que j'interviendrai. Je pense que c'est mon devoir d'intervenir, comme dans le cas des urgences, alors qu'encore tout récemment, jusqu'à il y a deux semaines, dans la région de Montréal, des établissements fermaient fréquemment leurs portes, même si la loi actuelle et les règlements de la loi nous permettent d'intervenir dans des cas comme ceux-là, et vous le savez. Alors, j'ai simplement dit aux administrations supérieures, qu'il s'agisse des urgences ou qu'il s'agisse de gestions qui entraînent des conflits de travail majeurs, graves: Dans ces occasions, je pense qu'il est de mon devoir d'intervenir.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

Augmentation des primes d'assurance

M. Russell: M. le Président, par votre entremise, je voudrais m'adresser au ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières. Je suis convaincu qu'elle est soucieuse d'informer la Chambre sur ce qui concerne surtout les consommateurs.

M. le Président, vu la montée effarante dans le domaine des assurances, actuellement, je vois que les journaux annoncent une augmentation de 8%, quand on sait qu'effectivement, dans la plupart des corporations cela se traduit par des primes d'assurances qui montent en triplant, j'aimerais savoir du ministre quelles sont les mesures qu'elle a prises, ou qu'elle a l'intention de prendre, pour parer à cette montée en flèche ou galopante des primes d'assurance actuellement dans toute la province et peut-être le pays.

Le Président: Mme le ministre des Consommateurs.

Mme Payette: M. le Président, nous sommes présentement, au ministère, en train d'étudier tout le dossier concernant les consommateurs en général. Nous avons l'intention de reprendre, bientôt, un projet de loi concernant les consommateurs, si bien que je serai davantage en mesure de vous donner des détails dans un délai très court probablement.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: Une question supplémentaire, M. le Président. Etant donné que la fin de l'année est proche et que des corporations actuellement sont prises dans des ghettos d'augmentation presque impossible d'envisager, est-ce que le ministre a l'intention, d'ici la fin de l'année, de prendre des mesures ou d'informer le milieu des affaires des mesures que le nouveau gouvernement prendra pour freiner cette augmentation?

Mme Payette: M. le Président, hélas! je voudrais bien pouvoir dire oui, mais ce serait dans un délai beaucoup trop court pour intervenir. Je pense qu'il ne serait pas sage de prendre des dé- cisions aussi rapidement. Si vous permettez, M. le député, nous allons continuer d'étudier ces dossiers qui sont particulièrement complexes pour arriver avec des choses précises quand le moment sera venu.

Le Président: M. le député de Maskinongé.

Rôle des candidats défaits

M. Picotte: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Vous me permettrez, M. le Président, un court préambule. La semaine dernière j'avais demandé, au ministre de l'Industrie et du Commerce, un rendez-vous, au sujet de la ville de Louiseville et d'un promoteur industriel, un éventuel acheteur de la compagnie Associated Textile, à Louiseville. Or, la secrétaire du ministre m'avait demandé la liste de ceux qui devaient participer à cette rencontre. Il s'agissait en l'occurrence, du commissaire industriel, du maire de la ville, de moi-même, ainsi que deux fonctionnaires, l'un du ministère du Travail et l'autre, de l'Industrie et du Commerce.

Lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, au bureau du ministre de l'Industrie et du Commerce, le candidat défait du Parti québécois aux dernières élections et son organisateur en chef, étaient déjà présents pour cette réunion.

Est-ce que le premier ministre peut me dire si le bureau du premier ministre a donné des ordres, étant donné que ces deux personnes n'avaient pas été invitées, ni par celui qui avait demandé le rendez-vous, ni par la ville de Louiseville, ou si les cabinets de ministre ont reçu des ordres à l'effet d'inviter les candidats défaits?

Sinon, le premier ministre peut-il répéter la déclaration qu'il a faite au conseil national, en fin de semaine dernière?

M. Lévesque (Taillon): Sous toutes réserves, parce que, évidemment, j'accepte le récit—je prends la parole du député — qu'il vient de faire des circonstances, mais avec cette réserve qu'on comprendra. Ce n'est pas compliqué, je n'ai qu'à répéter ce qu'on a dit en fin de semaine, ce que j'ai dit personnellement aussi à ce sujet. D'ailleurs, c'est conforme aux statuts et à l'attitude générale du parti et on va la maintenir. J'ai dit qu'à compter du conseil national de samedi, le rôle des candidats défaits, sauf comme citoyens — parce qu'ils sont quand même des citoyens qui ont parfaitement le droit comme les autres et ils ont pris une connaissance des affaires publiques en tant que candidats — comme ou membres de leur association c'est très régulier, mais à part cela, leur rôle est terminé à compter de samedi dernier. Ils n'ont pas de rôle politique direct à exercer au nom du parti.

Le Président: M. le député de Portneuf.

Conflit de travail au Trust Général

M. Pagé: Ma question s'adresse au ministre du Travail. En marge du conflit qui existe présen-

tement au Trust Général à Québec, le ministre peut-il informer cette Chambre si le gouvernement entend intervenir ou encore faire adopter une loi interdisant aux employeurs d'embaucher du personnel en cas de grève, et aussi interdire aux employés, en cas de grève, d'occuper un autre emploi pendant le conflit, cela, afin de sauvegarder, d'une part, l'économie et l'équilibre de notre législation de travail?

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre.

M. Couture: Je dois dire, d'abord, qu'au Trust Général, la négociation continue. Le cas du Trust Général, évidemment, soulève ce problème auquel fait allusion M. le député de ce que je pourrais appeler l'esprit du Code du travail qui n'est pas respecté. Finalement, l'esprit du Code du travail c'est de vouloir qu'une grève ou un lock-out, qui est le dernier recours, qui est le recours ultime, puisse avoir toute sa signification. Il est évident qu'une compagnie qui, lors d'une grève ou d'un lock-out, continue sa production avec des employés irréguliers, ce qu'on appelle des scabs, c'est contre l'esprit du Code du travail.

Je crois que c'est un problème complexe. Plusieurs experts ont étudié la question. Vous me permettrez de me donner aussi un délai assez important pour reprendre toute la question et essayer de bonifier certaines dispositions du Code du travail. Pour ma part, je l'ai déclaré et je le répète ici en Chambre, je crois qu'il va falloir trouver des mécanismes véritables pour permettre que l'esprit du Code du travail soit respecté dans les cas de conflits. Sinon, les conflits pourrissent et, finalement, c'est au désavantage de tout le monde.

C'est ce que j'ai à répondre à cette question. Plus précisément, je vous dirai que, dans les prochaines semaines ou prochains mois, nous aurons à présenter quelque chose à ce sujet.

M. Pagé: J'ai une question supplémentaire.

Le Président: Une dernière question et c'est une question additionnelle.

M. Pagé: C'est une question additionnelle. Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: A la lueur des déclarations que le ministre a faites dans différents journaux, depuis quelques semaines, il est apparu que celui-ci avait l'intention d'agir de façon spécifique sur cette question, que lui qualifie le problème des scabs. Le ministre entend-il agir de façon particulière, par une mesure spécifique s'appliquant uniquement à ce problème, ou si encore il préfère attendre la refonte complète du Code du travail, telle que proposée par le ministre ou son parti?

Le Président: M. le ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre.

M. Couture: C'est mon intention d'agir d'une façon spécifique sur cette question dans les prochains mois, évidemment, en prévoyant aussi une réforme globale du Code du travail qui pourrait demander des délais plus prolongés.

M. Pagé: M. le Président, une dernière question et une petite. Serait-ce à l'ouverture de la prochaine session, en février?

M. Couture: On vous en informera, M. le député.

Le Président: Fin de la période des questions. Je suis informé que le ministre des Finances aimerait répondre à des questions qui ont été posées antérieurement.

M. le ministre des Finances.

Loi fédérale des banques

M. Parizeau: En réponse à quatre questions posées hier par le député d'Outremont, au sujet de la Loi fédérale des banques, je pense pouvoir apporter aujourd'hui un certain nombre de réponses.

Il y avait quatre volets à ces questions; la première, la position du gouvernement du Québec sur la révision de la Loi fédérale des banques; deuxièmement, on demandait si le mémoire commun des provinces représente le point de vue du gouvernement du Québec; troisièmement, on demandait si le ministre a l'intention de compléter cette représentation en touchant à d'autres aspects de la question autres que ceux qui ont fait l'objet du mémoire commun des provinces; quatrièmement, on demandait s'il y avait intention de déposer les études préparées à ce sujet dans soit le ministère des Finances, le ministère des Affaires intergouvernementales ou le ministère des Institutions financières.

A ce sujet, je vais répondre aux quatre questions globalement parce qu'elles sont interreliées. Le mémoire commun des provinces, qui a été présenté à la conférence des ministres des Finances, la conférence fédérale-provinciale, représente un effort des dix provinces pour s'entendre sur un certain nombre de propositions, en fait, chaque province se sentant, ensuite, d'autre part, libre de faire des représentations dans d'autres champs qui lui seraient propres.

Sur ces six propositions communes, le gouvernement actuel a adopté la même position que le gouvernement précédent. C'est qu'il s'agissait là d'une position qui était intéressante, non pas seulement parce qu'elle était commune, mais parce qu'effectivement, sur ces six points, il y avait quelque chose de majeur, des éléments majeurs de représentations à faire auprès des autorités fédérales.

En particulier, cette position commune manifestait le désir des provinces d'éviter que les institutions parabancaires aient des réserves à la Banque du Canada. Là-dessus, toutes les provinces se sont entendues. Dans ce sens, le gouvernement

actuel a adopté cette position commune, comme le gouvernement précédent l'avait fait.

Il reste, néanmoins, qu'il faut maintenant, surtout puisque les audiences publiques commenceront à Ottawa, que le gouvernement de Québec réexamine tout ce dossier pour voir si, en plus des six points de la position commune des provinces, il n'y a pas un certain nombre de représentations à faire. A cet égard, non seulement du travail se fait à l'intérieur d'un comité de fonctionnaires ici au gouvernement du Québec, mais, d'autre part, les caisses populaires, comme nous le savons, ont une équipe qui travaille sur cette question et les rapports entre les deux sont assez étroits.

C'est, finalement, des rapports entre, d'une part, l'équipe travaillant au sein des caisses populaires et, d'autre part, ce comité de fonctionnaires, qu'on aura, dans les prochaines semaines, à préparer des représentations auprès du gouvernement fédéral en dehors ou au-delà de l'entente commune des provinces.

Quant à savoir si ces études seront déposées, je pense qu'il faudra, à un moment donné, que mon collègue, le ministre des Institutions financières, détermine ce qui pourra être présenté de ces études, si tout doit l'être, puisque, en définitive, il s'agira directement de questions relevant de lui.

M. Raynauld: Mme le Président, je pense que j'ai droit à une question supplémentaire là-dessus, après ces déclarations.

Mme le Vice-Président: Question additionnelle.

M. Raynauld: Pourrais-je demander au ministre des Finances, étant donné qu'il parle de représentations à faire auprès du gouvernement fédéral, s'il n'envisage pas aussi, à l'occasion de ces études, d'examiner des législations provinciales, puisque les institutions parabancaires relèvent des provinces? Dans le passé, il est arrivé trop souvent que c'est le gouvernement fédéral qui a élargi les pouvoirs des banques. Les provinces ne bougent pas, de sorte que, finalement, on se retrouve avec un système encore plus bâtard qu'avant. Donc, je voudrais vous demander si, à l'occasion de ces études plus immédiates en ce qui concerne les représentations à faire, parallèlement à cela, il y aura aussi des révisions sur les lois provinciales de la province de Québec?

M. Parizeau: M. le Président, cette question, telle que présentée par le député d'Outremont, devrait vraiment être présentée au ministre des Institutions financières. Cela ne relève plus du tout des attributions du ministre des Finances, même si le ministre des Finances est très intéressé par la question, pour des raisons évidentes.

M. Raynauld: Je pourrai la poser aussi au ministre des Institutions financières.

Mme le Vice-Président: Vous vous en tiendrez à la période des questions, s'il vous plaît. Sur le même sujet.

M. Lavoie: II est de tradition, à la suite d'une réponse d'un ministre à des questions qui ont été posées à des séances précédentes, que sans abuser de questions supplémentaires un député peut poser une ou deux questions supplémentaires à l'occasion de cette réponse. C'est la raison pour laquelle, je crois, le député d'Outremont désire diriger cette question supplémentaire, qui était adressée au ministre des Finances, au ministre des Institutions financières. Le ministre désirerait-il répondre?

Mme le Vice-Président: Mme le ministre des Institutions financières.

Mme Payette: Mme le Président, je prends avis de la question du député d'Outremont.

Mme le Vice-Président: Affaires du jour.

M. Burns: Mme le Président, avant les affaires du jour, avec la permission de nos collègues d'en face, le ministre délégué à l'environnement aurait une très brève déclaration à faire qui n'est pas comme telle une déclaration qu'on aurait pu prévoir aux déclarations ministérielles, mais qui relève d'une situation qui vient à peine de se régler, il y a quelques minutes. Si on veut bien l'entendre. En ce qui me concerne, Mme le Président, je serais d'accord qu'on nous réponde du côté de l'Opposition à moins qu'on préfère qu'il fasse sa déclaration en même temps que le ministre de la Justice cet après-midi.

Une Voix: Avec une copie avant. M. Lavoie: Oui.

M. Burns: Ce n'est pas une déclaration rédigée. Malheureusement le ministre délégué à l'environnement est retenu pour des raisons bien évidentes au Conseil du trésor, qui doit siéger actuellement.

M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, ne pourrait-il pas la faire dactylographier comme le ministre de l'Agriculture fait dactylographier ses affaires?

M. Burns: C'est une courte déclaration d'une minute.

M. Levesque (Bonaventure): Raison de plus, il me semble qu'on pourrait l'avoir d'ici trois heures, dactylographiée.

M. Léger: Etes-vous d'accord ou non?

M. Lavoie: Non, non, si vous désirez la faire, vous la ferez à trois heures.

M. Léger: Vous privez les citoyens d'un renseignement dont ils ont besoin.

M. Lavoie: Nous les privons pendant quatre heures de votre déclaration.

Mme le Vice-Président: Affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

Travaux parlementaires

M. Burns: Mme le Président, immédiatement à la salle 81 se réunira la commission parlementaire des affaires municipales pour étudier, article par article, les projets de loi no 47, Loi autorisant les municipalités à percevoir un droit sur les mutations immobilières, et le projet de loi no 78, Loi prolongeant et modifiant la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires. Immédiatement à la salle 81-A.

Mme le Vice-Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Mme le Vice-Président: Adopté.

M. Burns: Peut-être pourrions-nous, si je ne dérange pas trop les gens de l'Opposition, adopter en troisième lecture l'article 2, c'est-à-dire le projet de loi no 84, concernant certaines ententes en matière de transport? Est-ce que c'est de l'avis de nos amis d'en face que ce projet de loi puisse être adopté? Le projet de loi no 84. Article 2, Mme le Président.

Projet de loi no 84 Troisième lecture

Mme le Vice-Président: M. le ministre des Transports propose la troisième lecture du projet de loi no 84, Loi concernant certaines ententes en matière de transport.

Cette motion est-elle adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Mme le Vice-Président: Adopté.

M. Garneau: Mme le Président, sur un point de règlement. N'y aurait-il pas lieu pour le journal des Débats d'indiquer que c'est le leader du gouvernement qui la propose, étant donné l'absence du ministre des Transports?

M. Burns: C'est vrai. Au nom du ministre des Transports, j'ai proposé cette motion de troisième lecture. Vous avez bien raison. Article 4, Mme le Président.

Projet de loi no 76 Deuxième lecture

Mme le Vice-Président: M. le premier ministre propose la deuxième lecture du projet de loi no 76, Loi modifiant la Loi de l'Exécutif et d'autres dispositions législatives.

M. le premier ministre

M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): L'honorable lieutenant-gouverneur, semble-t-il, a pris connaissance de ce projet de loi et en recommande l'étude à la Chambre.

M. Lavoie: Très fortement.

M. Lévesque (Taillon): Mme le Président, ce projet de loi demande à l'Assemblée nationale d'accepter de ratifier les changements qui ont été apportés dès le départ à la structure du Conseil des ministres pour les quatre prochaines années et, on l'espère, fructueusement pour l'avenir. Ces modifications, pour l'essentiel, on pourrait les voir comme ceci, pour essayer de les situer dans la perspective générale où nous sommes obligés de fonctionner comme gouvernement. On est —je pense que tout le monde en est conscient — dans une société de plus en plus complexe qui est devenue aussi terriblement compartimentée. En même temps, on s'aperçoit que les compartiments sont de plus en plus terriblement communicants, qu'on le veuille ou non; c'est quasiment comme le vieux proverbe baroque: "Tout est dans tout", et inversement. Dans cette complication de la société, on trouve forcément et, à cette complication croissante de la société, doivent correspondre forcément, tant bien que mal, le mieux possible ou le moins mal possible, l'Etat et son appareil administratif. Il faut bien voir que tout cela a amené, au cours des dernières années, un développement fantastique de cette machine administrative et pas seulement au Québec, ailleurs aussi. On peut dire que c'est dans toutes les sociétés modernes. En fait, l'Etat est l'entreprise qui a connu la croissance la plus rapide de toutes les entreprises qui peuvent fonctionner dans une société. Bien des gens disent d'ailleurs, ils n'ont peut-être pas tort, que cette croissance a été excessive, mais il faut bien admettre, et je pense que nos amis d'en face et l'autre parti de l'Opposition en ont des souvenirs pas tellement lointains, que cette croissance générale des administrations publiques, c'est presque toujours venu, peut-être trop facilement à l'occasion, en réponse à des besoins qui étaient soulignés, qui étaient poussés par des groupes, par l'ensemble de la population.

Personnellement, je dirais peut-être que, plutôt que la taille en soi de l'appareil de l'Etat, le grand danger, c'est peut-être du côté de sa concentration et de sa centralisation. On a des intentions éventuelles de ce côté-là, cela fait partie de notre perspective et on verra, en cours de route, si c'est possible d'arriver à cette déconcentration de l'appareil gouvernemental.

C'est simplement pour souligner, d'abord, ce phénomène de la taille et de la croissance; je n'apprendrai rien à personne, mais c'est un rappel qui peut être utile, en disant simplement ceci, qui donne une idée de la progression: le budget provincial du Québec en 1966, il y a dix ans, était de $2,1 milliards; en 1976, il dépasse les $10 milliards, ce qui veut dire que cela s'est multiplié par 5, en

attendant le budget de l'année zéro qu'on verra un jour.

Quant au personnel, évidemment, il y a complémentarité là-dedans. La progression n'est pas aussi forte, mais c'est quand même, là aussi, fantastique. Quant au personnel de l'Etat, en 1966, c'était 30 000 personnes. En 1976, c'est déjà 50 000. C'est énorme, évidemment, quand on regarde ces chiffres, et pourtant ça dit seulement une partie de la réalité. A peine une partie, parce que tout le monde sait que le rôle réel du gouvernement s'est étendu aussi à tout ce qu'on appelle le secteur parapublic, avec ses ramifications dans tous les coins de la société, ce secteur qui, avec l'appareil direct de l'Etat, permet ou oblige plutôt à toucher à peu près à tous les problèmes, à toutes les formes de problèmes socio-économiques qui nécessitent une intervention, encore une fois parce qu'elle est de plus en plus toujours réclamée, cette intervention.

On ne parle plus de 50 000 personnes; on sait, à cause de certains conflits qui ont permis de dramatiser ces chiffres, que ça va jusqu'à un quart de million, les effectifs globaux des secteurs qu'on appelle public et parapublic. Ce qui est frappant — on n'est pas les seuls à s'en rendre compte — c'est que, malgré toute cette évolution et cette espèce de croissance démesurée, l'organisation de la structure de décision politique, c'est-à-dire ce qu'on appelle le cabinet ou le Conseil des ministres, n'a presque pas changé. En fait, on a fait, si vous me permettez l'expression, du "patchage", sans arrêt, selon les gouvernements, selon les circonstances, en déléguant ci, en rempaillant ça, et, fondamentalement, on peut dire qu'à ce niveau-là, on gouverne encore, en gros, comme on gouvernait au temps de la Confédération. Ce n'est pas parce qu'une tradition est ancienne qu'elle est nécessairement mauvaise, mais ce n'est pas non plus parce que c'est ancien que c'est une garantie d'efficacité, surtout quand la société évolue aussi vite qu'elle le fait à notre époque.

C'est même un peu incroyable, justement, quand on considère toute la complexité de plus en plus grande des décisions, qu'elles soient politiques, administratives ou les deux ensemble, que doit prendre le gouvernement à peu près constamment, parce qu'autrefois et encore même naguère, gouverner, ça pouvait consister à choisir entre tel ou tel tracé de route, ou tel ou tel bout de chemin. Cela pouvait être d'aider financièrement telle ou telle institution, de choisir la question des concessions minières ou forestières qu'il s'agissait de concéder à telle ou telle compagnie, tandis qu'aujourd'hui, il s'agit de fixer le cadre général, qui est aussi important que le détail, dans lequel toute l'activité sociale, pour autant que la politique intervient là-dedans, doit se dérouler à partir de la langue qu'on doit utiliser au travail comme à l'école, par exemple, jusqu'à la façon dont doivent être transformées les richesses naturelles du sol, en passant par des sujets qui nous arrivent tout à coup comme des priorités ces années-ci. J'en nomme seulement deux, comme la préservation du patrimoine collectif ou encore la préservation de l'environnement, et ça va se multiplier, qu'on le veuille ou non. Par-dessus le marché, tout ça s'insère dans une société où les mentalités ont changé terriblement vite aussi.

L'uniformité idéologique... Je me rappelle qu'un de mes confrères journalistes avait dramatisé en parlant de feu l'unanimité. Alors, cette unanimité ou cette uniformité idéologique du passé, d'un passé pas tellement lointain, a fait place maintenant, à cause des progrès de l'éducation évidemment, et aussi à cause des progrès des moyens de communication et de la mobilité des populations, à une diversité qui est presque illimitée. Des intérêts particuliers de plus en plus puissants qui peuvent se rattacher au capital, au travail, aux groupements professionnels, etc., tous ces intérêts se sont fortement structurés ou cherchent à le faire, et leur affrontement — on n'a pas besoin de se faire de dessin — peut donner lieu fréquemment à des conflits multiples et persistants aussi et aigus, de plus en plus, ce qui veut dire que le degré de la tension sociale s'est élevé sans arrêt depuis bon nombre d'années, et on ne voit pas très bien comment on pourrait revenir au passé, c'est-à-dire au bon vieux temps de feu l'unanimité. On a même été jusqu'à dire dans certains milieux que le Québec était devenu ingouvernable. En tout cas, une chose certaine, sans tomber dans cette espèce de dramatisation excessive des difficultés, c'est que c'est beaucoup plus malaisé — je pense que ceux qui en ont fait l'expérience jusqu'à récemment le savent — de gouverner qu'autrefois.

C'est d'ailleurs le lot de toutes les sociétés contemporaines. Le problème, il est là. Entre autres choses, il importe de doter le Québec, si possible, d'un instrument qui soit plus adéquat, en tout cas, que celui qui nous semble avoir, en partie seulement, fait son temps, un instrument qui soit plus souple possible et qui puisse nous donner l'aptitude de faire face aux questions complexes, de plus en plus nombreuses, et aux situations nouvelles aussi.

Je ferai remarquer, sans entrer dans le détail, parce que ce n'est pas tout à fait la même idée, que la seule autre province du Canada actuel dont la complexité puisse se comparer à celle du Québec, l'Ontario, a fait une expérience analogue, pas similaire à celle que nous voulons entreprendre, mais analogue. Ils ont appelé cela, dans trois secteurs, des "policy ministers". Depuis quelques années que cela dure, les derniers rapports qu'on a pu avoir là-dessus de l'extérieur, c'est que, même s'il y a des critiques, dans l'ensemble, ceux qui regardent fonctionner cette forme interministérielle de coordination ont l'impression, en tout cas, que cela marche mieux que cela ne marchait avant.

C'est un peu dans cette perspective aussi, sans essayer de copier, pas du tout. Il suffit de voir, techniquement, les différences pour s'apercevoir qu'il ne s'agit pas du tout de la même chose; mais, analogiquement, il s'agit de la même perspective. C'est pour cela qu'on propose à la Chambre la modification qu'on a décidée dès le

début. Si on n'avait pas essayé dès le début, on ne l'aurait jamais faite, probablement. C'est trop facile de retomber immédiatement dans les routines déjà établies. Au moins, une modification qui essaie de s'approcher de cet objectif de souplesse et de proximité de la nouveauté, des questions rapides à traiter ou des questions complexes. Cela, on veut le faire parce que c'est là que c'est nécessaire au niveau le plus élevé, c'est-à-dire au Conseil des ministres, de la décision politique et de l'administration publique parce qu'il faut que ce soit présidé par des hommes politiques élus. Sinon, on peut tomber dans une technocratie plus ou moins irresponsable.

Il serait présomptueux de prétendre que, par les modifications qu'on propose, on est 100% certain d'avoir trouvé la formule magique; cela n'existe probablement pas. Nous croyons, en tout cas, que ce que nous proposons vaut la peine d'être essayé. D'ailleurs, on est parfaitement prêt, et on aura à le faire sûrement, à améliorer la formule avec le temps et avec l'expérience. A ce point de vue, il nous semble permis de faire appel à l'aide et à la collaboration de tous, y compris même l'Opposition, pour faire en sorte que cette amélioration porte tous ses fruits. Ce n'est pas une mesure partisane. Cela n'a rien à voir avec l'intérêt particulier d'un groupe politique. Au contraire, si cela réussit, cela peut profiter à tout le monde. Tous, me semble-t-il, ont intérêt à ce que cela réussisse. Pour que cela réussisse, il faudrait qu'il y ait le plus de collaboration possible de ceux qui sont intéressés directement — il n'y a personne qui ne l'est plus directement que les membres de l'Assemblée nationale — à la bonne marche des affaires publiques.

Je soulignerais aussi que cette modification — je pense que c'est important et que cela justifie ce que je viens de dire, d'ailleurs — s'inscrit, pour l'essentiel, dans la continuité de ce qui avait été amorcé déjà par des gouvernements antérieurs. C'est plus ou moins le chemin sur lequel on s'avançait, par exemple, quand il y a eu la création du secrétariat général; quand il y a eu aussi la mise sur pied de ce qu'on appelle — cela a été laborieux et c'est loin d'être complètement digéré — les grandes missions et les budgets-programmes. Aussi, la nécessité qu'on a sentie d'avoir des comités interministériels dont les quatre principaux deviennent — quant à nous, en gardant la souplesse qui permet quand même de faire face aux problèmes ad hoc — permanents, ce qui veut dire que déjà l'ancien gouvernement et d'autres qui l'avaient précédé avaient senti le besoin d'une réforme administrative mais, en même temps, de la river ou de la greffer à une réforme politique sans quoi, justement, la responsabilité peut se perdre. C'est à ce besoin que nous voulons essayer de répondre en poussant plus loin et en greffant, à la décision politique, les réformes qui étaient déjà entreprises.

Je veux surtout insister, très rapidement d'ailleurs, sur le cas des ministres d'Etat qui sont, quant à nous, l'essentiel de ce changement. Je ne veux pas sous-estimer l'importance de ceux qu'on appellera maintenant les ministres délégués parce qu'il s'agit de domaines qui ont besoin, quant à nous, de la responsabilité personnelle, politique et administrative d'un homme politique, d'une femme politique, autrement dit des élus du peuple.

Ils ne doivent pas, quant à nous, être laissés, on l'admettra, un peu à la traîne ici ou là, vu qu'il s'agit de domaines qui peuvent et qui doivent sûrement mener à des politiques plus cohérentes, à des politiques plus suivies, parce que des choses comme l'environnement, l'énergie, font partie des problèmes d'aujourd'hui, de problèmes dont on voit très bien qu'ils vont se profiler avec de plus en plus d'importance et de plus en plus d'impact dans les années qui viennent.

Cela peut mener éventuellement — le mot "délégué" est là pour l'indiquer — à la création de ministères en bonne et due forme, spécifiques. De toute façon, la délégation d'élus politiques à la direction de ces domaines nous paraissait indiquée dès le départ. Maintenant, je voudrais revenir quand même à l'essentiel de la modification, c'est-à-dire le cas des ministres d'Etat. Je dois dire que c'est une réforme qui exigera, qui exige déjà, d'abord, des hommes politiques impliqués beaucoup, beaucoup non seulement du leur, mais de ceux qui les entourent aussi.

Il va falloir — on espère y arriver, puis je pense que le début est bon — beaucoup de solidarité, beaucoup d'esprit d'équipe pour appliquer cette modification et l'insérer dans le processus courant de l'administration. Entre autres choses, il faut renoncer jusqu'à un certain point aux petits empires ministériels, très compartimentés, très jaloux. Il va falloir accepter une certaine discipline des décisions collectives et de la concertation, surtout quand il s'agit des priorités, parce que tout cela implique qu'il faut accepter entre nous, au gouvernement, des perspectives nouvelles et cela n'est jamais facile. C'est pour cela que je dis que, si on ne l'avait pas fait dès le début, il est fort probable qu'on ne l'aurait jamais fait.

Mais je suis très heureux, après à peine quelques semaines, même pas un mois d'expérience, du point auquel les membres actuels du Conseil des ministres ont accepté d'emblée et sans réticence de participer à cet effort de renouveau qui va être laborieux à mettre au point et qui va même, à l'occasion, nous écorcher un peu. Tout le monde a accepté de jouer le jeu suivant ces nouvelles règles afin d'arriver à améliorer la gestion générale et le processus des prises de décision. Et on a l'impression, si court soit le temps qui s'est écoulé depuis le début, que cela va pouvoir fonctionner.

Seulement, cela va exiger aussi — et, pour fonctionner, cela va être essentiel — beaucoup de la part des fonctionnaires et des cadres supérieurs de l'administration. A cause de l'habitude, de la carrière et de tout cela, c'est très normal, très humain, c'est peut-être là plus qu'ailleurs que règne davantage — tous ceux qui sont passés par là le savent — ce qu'on pourrait appeler l'esprit de clocher interne de l'administration publique.

C'est là que la tentation est souvent la plus forte de se replier sur soi-même et de protéger

avant tout, comme s'il s'agissait d'un domaine absolument sacré, les prérogatives et l'exclusivisme de chaque ministère ou de chaque organisme. Or, au contraire, il va falloir, dans la nouvelle formule, apprendre à partager avec d'autres, l'information et la gestion comme jamais auparavant, en participant à des approches interministérielles, en travaillant dans des équipes de travail formées spécifiquement sur des dossiers particuliers; il y a déjà des cas qui sont connus, à partir de mandats qui ont été rendus publics.

Il va falloir — ce qui est toujours assez difficile pour des fonctionnaires de carrière; je sais à quel point c'est vrai, car j'ai déjà eu cette expérience — apprendre à travailler avec plus d'un ministre très souvent et à coordonner, par conséquent, son action avec celle des autres. A ce point de vue, très peu de temps après l'élection, j'ai eu l'occasion de rencontrer les sous-ministres pour les mettre au courant du nouveau système qu'on voulait mettre en marche et pour demander leur collaboration. Ils l'ont promise. Evidemment, il va falloir les rencontrer à nouveau, et je compte bien le faire avec mes collègues, pour poursuivre ce dialogue et aussi pour recevoir en cours de route leurs commentaires et leurs suggestions, parce qu'eux aussi, évidemment, ont un rôle clé à jouer dans tout ce changement.

Enfin, cela va exiger aussi, sinon le soutien actif, du moins, on l'espère, une attention sympathique de la part des parlementaires et de la population, en tout cas des éléments conscients, politisés, comme on le dit couramment, de la population. En effet, quand on touche à la structure du cabinet, sans aller jusqu'à parler d'une vache sacrée, en tout cas, on touche à une institution qui a une espèce de poids historique particulièrement lourd et spécifique dans la société.

Tout le monde sait à peu près ou, en tout cas, s'imagine savoir à peu près ce que c'est un ministre.

Cela va demander qu'on essaie de se réconcilier, de pénétrer la nouvelle définition qu'on a donnée à ministre d'Etat.

Il faut s'habituer, par conséquent, à partir de là, à l'idée qu'on peut être ministre, et aussi complètement ministre que les autres, sans avoir de pouvoir direct d'administration sur un secteur bien délimité avec le poids du budget, des grands effectifs, etc. Cela non plus, ce ne sera pas nécessairement facile. Je dirais même que, par rapport au cliché si bien établi de la carrière ministérielle, qui implique tout cet appareil comme une espèce de support en même temps qu'un poids, il est évident que cette nouvelle définition a demandé pas mal d'abnégation, au départ, de la part de ceux qui ont accepté de l'assumer.

Le changement, c'est bien beau, mais il ne faut pas en faire trop en même temps; c'est pourquoi on a fait un effort particulier aussi pour changer le moins possible les formes traditionnelles. Les pouvoirs, en particulier, du Conseil des ministres restent, là-dedans, intacts et inchangés. C'est seulement le Conseil des ministres dans son ensemble qui pourra prendre des décisions et en- gager le gouvernement. Au sein du Conseil — cela, c'est nouveau, mais c'était pour souligner à quel point il n'est pas question de créer deux conseils — tous les ministres seront présents et seront égaux, même en ce qui concerne la rémunération. C'est peut-être la façon la plus concrète d'évoquer l'égalité.

Il est évident, il y a des gens qui l'ont dit, qu'on aurait pu aller pas mal plus loin. Comme en Angleterre, par exemple, instituer ce qui s'appelle un "inner cabinet où il y a seulement un nombre limité de ministres seniors — là, c'est senior dans le sens le plus complet et le plus tuteur du mot— qui décident au nom de tous les autres. On n'a pas voulu justement et, je pense, de bonne foi... Je comprends qu'on puisse "picocher" au début et s'amuser, qu'on cessera le plus vite possible d'employer des termes qui sont caricaturaux et qui ne correspondent pas à la réalité. On n'a pas voulu créer de superministres, justement, ni de ministres tuteurs avec des ministres pupilles, comme il en existe en Angleterre ou en France aussi où vous avez les ministres qui sont seniors, pendant que vous avez, plus juniors, les secrétaires d'Etat.

On aurait pu faire cela, essayer de commencer une formule comme celle-là, mais on a préféré essayer plutôt de rejoindre l'idée des priorités, l'idée de l'interministériel et de l'affrontement qu'il faut accepter face à la complexité des problèmes, plutôt que de fabriquer des structures hiérarchisées comme cela.

Donc, il n'y a pas d'autorité hiérarchique du côté des ministres d'Etat. Chaque ministre départemental reste donc pleinement responsable de son secteur devant l'Assemblée nationale et forcément devant la population. Lorsqu'une question particulière et qui peut être très vaste, et qui le sera souvent, sera confiée à un ministre d'Etat, il y aura chaque fois — et on a déjà commencé à le faire — un mandat spécifique approuvé par le Conseil des ministres et qui sera également rendu public dans les plus brefs délais. De cette façon tout le monde sera en mesure, s'il veut bien s'informer, de savoir qui est responsable de quoi. Il sera plus facile de s'y reconnaître qu'il pourrait paraître à première vue. Les ministres conserveront leur responsabilité normale dans les ministères dont ils seront chargés et les ministres d'Etat auront la responsabilité publique de mandats spécifiques qui leur sont confiés. Plus, évidemment, leur participation constante et absolument indispensable à l'étude des grandes priorités de l'action gouvernementale qui, très souvent, sinon la plupart du temps, déborde par-dessus beaucoup de ministères.

Maintenant, il y a une question que je voudrais toucher en passant, mais il semble que c'est relativement simple de donner la réponse. Il y a une question, je pense, qui est même apparue au feuilleton, à un moment donné, qui est là, qui est revenue dans une ou deux interventions, à propos de la responsabilité ministérielle en ce qui concerne les ministres d'Etat. Je sais que le député de Lotbinière en a parlé et je pense qu'il y a une question

au feuilleton aussi. Il me semble que c'est relativement simple à exprimer, quand on voit un peu la perspective dans laquelle c'est situé. C'est que les ministres chargés de services ou ministères sont responsables de leur secteur d'administration et les ministres d'Etat, selon les mandats qu'ils auront reçu, certains en ont déjà et la plupart en auront très bientôt, seront responsables devant la Chambre des projets qu'ils ont été appelés publiquement — c'est connu, il n'y a pas de secret — à piloter.

Ils seront aussi responsables devant l'Assemblée nationale et la population des lois et, le cas échéant, de tranches de budget qui peuvent leur être confiées. En même temps, et cela est vrai pour tout le monde, ils sont, comme ministres à plein titre, solidairement responsables, conjointement responsables, avec tous leurs collègues, de l'ensemble de l'action gouvernementale, là encore, devant l'Assemblée nationale et devant la population. Je ne vois pas de façon plus simple et plus concrètement accessible de répondre à la question.

Comme le ministre est responsable de son ministère, ou, dans le cas des ministres délégués, des secteurs d'intérêt politique ou d'intérêt administratif ou les deux conjointement qui leurs sont confiés, de la même façon le ministre d'Etat est responsable des projets qu'il a à piloter, qui lui ont été confiés, des lois dont il peut être chargé et aussi, le cas échéant, des tranches de budget qui accompagnent ces responsabilités. Et, avec tout le cabinet, il est forcément responsable de l'ensemble de notre action comme gouvernement.

Une chose que je voudrais ajouter aussi c'est que je crois, on s'en rendra compte tout simplement en regardant le détail très simple de la loi, que les changements que nous apportons ainsi, par le projet de loi no 76, à la Loi de l'Exécutif, sont rédigés de telle façon que si l'expérience se révélait moins fructueuse que nous l'espérons — ce qui peut toujours arriver — on pourrait facilement revenir au mode traditionnel de fonctionnement.

On n'a pas voulu engager irrémédiablement l'avenir dans des nouvelles lois qui, peut-être, n'ont pas encore été suffisamment explorées. Si on refuse de les explorer, on sera toujours collé au même endroit et on n'avancera pas dans la solution d'un problème qui se pose de façon assez aiguë, parce que nous savons qu'il est absolument essentiel — tous ceux qui ont passé par là le savent — de trouver des moyens plus efficaces d'assurer le gouvernement, au Québec comme dans toutes les sociétés contemporaines.

On sait également qu'il est toujours difficile de déterminer exactement — c'est à l'usage que cela se fait, en essayant de réfléchir là-dessus — de trouver exactement au départ les recettes magiques, les formules qui répondront à tout en même temps.

C'est pourquoi on a voulu procéder par étapes, et cette première étape est là devant vous. Avec le plus de prudence possible et avec une possibilité de retrait, mais pas de retrait au bout de trois semaines, un mois, deux mois ou trois mois parce que, tout simplement, il y aurait eu des problèmes d'accidents de parcours ou des difficultés. Il s'agit de l'amener le plus longtemps possible et, je crois, avec confiance parce qu'il nous semble, en tout cas, qu'il y a là l'amorce d'une solution à un problème fondamental du gouvernement.

On souhaite, dans cette optique, que tous les partis et tous les députés, les fonctionnaires, très particulièrement, et tous les citoyens qui sont conscients des enjeux politiques voudront bien s'associer à cette réforme du fonctionnement interne du Conseil des ministres. Je suis certain que tous ceux qui, à un titre ou un autre, ont participé à la gestion de l'Etat reconnaîtront qu'il importe de trouver ces meilleures façons de procéder que celles que nous avons connues jusqu'à maintenant.

Les améliorations que nous proposons, je l'ai souligné, s'inscrivent dans la continuité logique, en tout cas, de ce qui avait déjà été entrepris depuis un bon nombre d'années et, en même temps, elles respectent clairement et nettement le caractère de notre régime parlementaire. Nous croyons qu'elles valent la peine d'être mises à l'essai, quitte à les améliorer en cours de route, à la lumière de l'expérience et des suggestions qui pourront nous être faites par tous ceux qui ont à voir à leur bon fonctionnement.

Si cela réussit, je termine là-dessus, c'est tout l'appareil gouvernemental et, ultimement, c'est la société politique qui est la nôtre qui s'en trouveront mieux. Ce serait, quand même, apporter une solution originale qui viendrait de chez nous à un problème crucial parmi d'autres — il y en a beaucoup — mais un problème assez crucial d'efficacité de notre société politique.

Je recommande l'adoption, en deuxième lecture, de ce projet de loi.

Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, tout le monde reconnaît la complexité nouvelle et de plus en plus exigeante de la fonction gouvernementale dans notre société moderne. Complexité qui s'explique en raison de cette accélération sans précédent de l'histoire que le Québec connaît tout autant que les autres sociétés développées du monde.

Tous, nous vivons dans un tel univers de changements que bien peu de choses, que l'on considérait hier comme acquises, échappent au mouvement qui bouscule nos vies personnelles et qui rend très vite dépassé l'ordre politique et économique, culturel, social que nous avions pourtant gagné de haute lutte et auquel nous étions profondément attachés.

Si on demande tant aujourd'hui à l'Etat, c'est sans doute à cause de cela. Nous cherchons tous, dans ce contexte d'accélération et de changement, un point d'ancrage suffisamment solide qui

nous permettra de voir un peu là où nous allons et de nous donner le temps de définir, en conséquence, une ligne de conduite qui soit conforme à nos besoins et à nos espoirs. On demande en somme à l'Etat de résoudre la grande question à laquelle les individus tout autant que les collectivités ont à faire face, c'est-à-dire celle de notre adaptation au changement.

Chercher à nous adapter au changement, cela peut vouloir dire essayer d'en ralentir le rythme ou d'en modérer la cadence. Cela peut vouloir dire, aussi, d'assumer le changement, en prendre le parti, en canaliser les forces dans le sens qui nous semble le plus propice à l'épanouissement de l'individu et au progrès de la collectivité. Tous ceux, parmi nous, qui ont l'expérience du gouvernement savent que le choix entre l'une ou l'autre approche n'est pas facile à faire. Ils savent surtout que ce choix ne peut être uniforme dans le temps ni dans l'espace, en ce sens que, pour permettre à la société de s'adapter à un changement donné, le gouvernement doit être capable de déterminer quand il faut freiner le mouvement et quand il faut aller de l'avant. Il doit également savoir que pour tel genre de problème il faut être plus prudent alors que pour d'autres on peut se permettre d'être un peu plus audacieux.

Tout cela pour dire que l'Etat, c'est-à-dire le gouvernement, doit avoir assez de clairvoyance, de lucidité et de réalisme pour s'équiper le mieux possible pour faire face à ses responsabilités. Nous savons tous en cette Chambre jusqu'à quel point cela peut être vrai pour le Québec puisque, s'il est un endroit au monde où le changement a été considérable au cours des dix ou quinze dernières années, cela a bien été ici au Québec. C'est d'ailleurs dans cette perspective que l'une des toutes premières décisions qu'a prises le cabinet du premier ministre Bourassa en 1970 a été de doter le Québec d'une structure administrative financière moderne, dynamique, la budgétisation par programmes. La réforme du Conseil du trésor a permis au gouvernement d'améliorer d'une façon incontestable la gestion proprement administrative et financière de l'Etat. Je n'en veux pour preuve que le fait tout aussi incontestable, et d'ailleurs reconnu par nos amis d'en face, qu'en arrivant au pouvoir ils ont trouvé une situation financière fondamentalement saine dans le contexte même d'une conjoncture économique difficile et en dépit des investissements publics considérables faits par l'ancien gouvernement au titre des immobilisations, de l'injection de capitaux dans les sociétés d'Etat à vocation industrielle ou commerciale, comme à SIDBEC, la mise en route du gigantesque projet de la baie James, sans parler bien sûr de tous les nouveaux programmes sociaux et culturels mis de l'avant depuis 1970.

C'est d'ailleurs dans le prolongement même de cette réforme administrative et financière que, le 10 septembre 1975, le premier ministre, M. Bourassa, annonçait une deuxième grande étape de la réforme administrative en effectuant une réorganisation du ministère du Conseil exécutif. Quatre comités permanents du Conseil des ministres étaient constitués. Le secrétariat général du Conseil exécutif était réorganisé et renforcé et une nouvelle politique de mobilité des hauts fonctionnaires était annoncée. Comme nos amis d'en face ont tendance à croire que le monde a commencé avec eux, je leur rappelle que ces comités permanents avaient pour nom les suivants. D'abord, le comité des ressources humaines qui était dirigé, si ma mémoire est fidèle, par M. Jean-Paul L'Allier, excusez, par le député de Saint-Laurent. C'était le député de Saint-Laurent, je peux le nommer parce que c'était à cette époque Claude Forget — malgré que je n'aie pas le droit de le nommer puisqu'il est élu — qui présidait ce comité des ressources humaines. Aujourd'hui, on parle de développement social, c'est cela. Il y avait également le comité de la qualité de la vie qui était dirigé par M. Jean-Paul L'Allier. On parle aujourd'hui de développement culturel.

Troisième comité, celui des ressources naturelles et du développement économique, dirigé par M. Guy Saint-Pierre et on nous parle aujourd'hui du ministre d'Etat au développement économique, si je ne m'abuse. Le quatrième comité, celui de l'aménagement du territoire, était dirigé par M. Bernard Lachapelle. Aujourd'hui, on nous parle d'un ministre d'Etat à l'aménagement. Alors, qu'on ait un peu d'humilité ou de réalisme. Figurez-vous également qu'à l'occasion le premier ministre, le ministre des Finances, député de Jean-Talon, le ministre des Affaires intergouvernementales et les quatre présidents des comités permanents se réunissaient pour faire le point et dégager les grandes orientations de l'administration gouvernementale. On parle aujourd'hui du comité des priorités.

Dans cette même veine, je vois, demain, nos amis d'en face, avec toute l'humilité, la bonne foi et la très grande simplicité qu'on leur connaît, annoncer à la presse que le gouvernement, le bon, le vrai gouvernement provincial que l'on a maintenant, disent-ils, dans le cadre de cette réforme globale, Mme le Président, de la société québécoise, a un autre morceau de son projet collectif, au titre de la réforme administrative à nous livrer. On nous annoncera que le nouveau gouvernement a décidé de définir un nouveau type de rapports entre le gouvernement et les sociétés d'Etat. Ce ne sera, en fait, qu'une autre des choses déjà mises en route par l'ancien gouvernement et que l'on continuera, comme quoi, Mme le Président, le monde a bien commencé avant nos amis d'en face.

Mais laissons cela et revenons au projet de loi qui nous occupe. Je vous dis, tout de suite, Mme le Président, que l'Opposition officielle votera contre ce projet de loi; d'abord, parce qu'il est inutile; ensuite, parce qu'il porte directement atteinte aux droits des élus du peuple et de l'Assemblée nationale; enfin, parce qu'il consacre les tendances bureaucratiques du nouveau gouvernement péquiste et qu'il ne peut que contribuer à élargir le fossé qui sépare le citoyen, le monde ordinaire de l'administration gouvernementale.

Ce projet de loi est inutile, Mme le Président,

parce que le principe sur lequel il se fonde, c'est-à-dire l'idée d'une plus grande rationalisation cohérente et l'efficacité de l'administration auraient été bien mieux servies si l'on s'était abstenu d'engager le Conseil exécutif sur la voie de la structurite qui a toutes les apparences de l'improvisation.

En effet, on ne s'est même pas donné la peine d'expérimenter d'une façon raisonnable le système beaucoup plus souple des comités permanents du Conseil des ministres, dont le rodage n'était même pas complété et dont je sais qu'il offrait déjà de nombreux avantages sur le plan de la qualité du processus décisionnel de l'Etat.

Quant à moi, j'aurais aimé qu'on informe cette Assemblée, avant de lui présenter ce projet de loi, des études, analyses et recommandations que l'on a reçues pour ainsi nous proposer d'adopter rapidement, comme le disaient nos amis d'en face il n'y a pas si longtemps, à la vapeur un changement aussi important dans le fonctionnement du gouvernement. Il m'aurait semblé de beaucoup préférable que le premier ministre et son gouvernement prennent le temps de s'asseoir et de réfléchir un instant avant de se lancer pour la galerie, uniquement pour la galerie, dans une opération aussi tape-à-l'oeil. C'est, en effet, bien beau, un premier ministre, quatre superministres penseurs et une bonne vingtaine de ministres ordinaires et sectoriels. Ainsi, par exemple, lorsque l'on a apporté, au début des années soixante-dix la réforme de l'administration financière de l'Etat, cela faisait tout de même un certain temps que, dans les milieux de l'administration publique, on avait évalué les mérites et les démérites du système de budgétisation par programmes et de la modernisation du Conseil du trésor, si bien qu'à l'époque, autant avions-nous mis l'accent sur les exigences de cohérence et de rationalisation des décisions administratives et financières, autant avions-nous pu décider en pleine connaissance de cause de l'importance qu'il y avait de laisser à chaque ministère le soin d'élaborer lui-même sa planification, son développement et sa programmation.

On a donc aujourd'hui, Mme le Président, les superministres avant les superministères. Je me demande si l'expression de la charrue avant les boeufs est bien appropriée ici pour décrire la situation. Une chose certaine, c'est que cette pseudo-réforme du Conseil exécutif, dont on a grand-peine à trouver, a posteriori, un semblant de justification, cette poudre aux yeux qu'on a lancée à la galerie, le 26 novembre dernier, était tout aussi improvisée qu'inutile, et comme on a maintenant quatre superministres et qu'on ne peut tout de même pas créer pour eux, en si peu de temps, quatre superministères, cela donne... le présent projet de loi qu'il faudra mettre au titre de l'inexpérience, de la naïveté ou, devrais-je dire, de la suffisance du gouvernement péquiste.

Mme le Président, les choses inutiles sont souvent les plus dangereuses. En effet, l'institutionnalisation de ces superministres porte directement atteinte aux droits de l'Assemblée nationale. Si l'intention du gouvernement est de res- pecter la lettre de son programme politique et d'établir un régime présidentiel — et j'ai cru comprendre dans les remarques du premier ministre que c'était une étape parmi d'autres — c'est-à-dire de saborder le principe de la responsabilité ministérielle, qu'on le dise clairement, et non pas là encore en empruntant les voies d'un nouvel étapisme qu'on peut raisonnablement discerner dans ce fait accompli dans lequel cette Assemblée se trouve aujourd'hui.

Voilà, en effet, quatre superministres qui sont habilités à s'occuper de tout et de rien, et l'on ne peut à peu près pas savoir de quoi au juste ils sont responsables devant cette Assemblée. Le premier ministre a essayé de l'expliquer tout à l'heure en disant: Ils sont responsables de dossiers. Attendez et écoutez. Vous aurez les nouvelles qu'ils vont vous donner. Tel superministre est en charge de tel dossier. Mais ne manquez pas les nouvelles. Si vous manquez les nouvelles, vous ne saurez pas ce qu'il fait. C'est un peu ça comme message. Cela n'a pas été institutionnalisé. Cela n'a pas été dit dans la loi. C'est le premier ministre qui nous annonce que les "jobs" des superministres, qu'on voit rarement en Chambre, d'ailleurs, depuis le début de la session, ça sera annoncé. Suivez les nouvelles et on vous dira: Tel superministre n'a pas tellement d'affaire au ministre sectoriel. On ne voudrait pas qu'il dérange. Pas de chicane, pas de bisbille. On va laisser le ministre sectoriel faire sa "job". De temps en temps, quand il y aura une plus grosse "job" et qu'on verra que le ministre sectoriel est un peu étouffé, on va probablement donner ça au superministre, et là, on annoncera ça. Mais n'oubliez pas d'écouter les nouvelles, deux ou trois fois par jour, pour savoir ce que les superministres font. N'oubliez pas.

Mme le Président, ce qui est plus encore, cette Assemblée peut-elle avoir l'assurance qu'en cherchant à engager la responsabilité devant cette Chambre de l'un ou de l'autre ministre sectoriel, il s'agit bien de celui ou de celle qui a effectivement pris la décision dont quelqu'un, quelque part, doit être directement responsable devant les élus du peuple? C'est dans ce sens, c'est-à-dire dans cette dilution du principe de la responsabilité ministérielle, que le présent projet de loi porte atteinte aux droits de l'Assemblée.

On se rappellera, Mme le Président, que, lorsqu'il s'est agi de moderniser la gestion administrative et financière de l'Etat, nous avons, tout au contraire, cherché à sauvegarder le principe de la responsabilité ministérielle. En effet, on avait pris soin alors d'insister, en même temps qu'on renforçait les pouvoirs d'un organisme central, le Conseil du trésor, sur l'idée de décentralisation non seulement des opérations budgétaires et comptables des ministères, mais aussi sur la décentralisation même de leur planification. Chaque ministère a été, en effet, obligé de se prendre en main, de se tracer des priorités et des objectifs et si, par la suite, les mécanismes de contrôle ont pu apparaître à certains quelquefois embarrassants, ils n'avaient en fait d'autre but que d'éprouver la qualité des dossiers et non pas d'usurper aux mi-

nistères leurs obligations et leurs responsabilités. C'est ainsi que, dans le processus de l'élaboration du budget, chaque ministère doit élaborer un an à l'avance sa planification budgétaire. Dans le même ordre d'idées, en restructurant le comité de la législation en septembre 1975, les ministères se sont vu garantir leur droit d'élaborer leur législation, de faire leur recherche, leur consultation. C'est à chaque ministre qu'il revient de faire approuver par le Conseil exécutif le principe de chacun des projets de loi qu'il entend présenter.

Le comité de législation ne s'est jamais substitué à tel ministre sous prétexte qu'il était consituté de plusieurs ministres. Le comité de législation émet simplement un avis sur les implications d'un projet de loi, en vérifie la cohérence par rapport à l'ensemble de la législation et en arrête la rédaction. Les ministères demeurent, du début à la fin, les artisans véritables de leur législation. Tout cela pour dire que les chefs des ministères sont les véritables dirigeants et que leur autorité s'y exerce librement et d'une façon responsable. La ligne hiérarchique n'est pas brisée et le cheminement des dossiers législatifs, administratifs ou budgétaires permet à tout le monde, ministres, fonctionnaires ou citoyens, de s'y retrouver aisément.

Singulièrement, et c'est ce qui m'importe maintenant, l'Assemblée nationale pouvait alors s'y reconnaître. Ce ne sera certainement plus le cas lorsqu'on ne saura plus qui des superministres ou des ministres sectoriels est responsable devant notre Assemblée, surtout si on a manqué les nouvelles, à un moment donné. Au lieu de s'excuser, comme le rapporte le Devoir du 27 novembre, de n'avoir eu qu'une dizaine de jours pour former le cabinet, expliquant qu'il n'avait pas eu le temps de tout raffiner, le premier ministre aurait dû y penser deux fois avant d'annoncer la nomination de ses superministres et de se voir aujourd'hui forcé de présenter un projet de loi qui bat en brèche un principe aussi fondamental que celui de la responsabilité des ministres devant la Chambre, au moins, qui dilue grandement le principe de la responsabilité ministérielle.

Je lui dis en toute amitié, qu'en mettant aussi en tutelle ou en quasi-tutelle ses ministres sectoriels par des hommes qu'on dit bien près du premier ministre, le premier ministre se révélera le vrai chef d'un bon et vrai gouvernement. Un bon et vrai gouvernement, cela ne cherche pas à éviter le contrôle de l'Assemblée nationale. Un vrai chef ne devrait pas avoir besoin, me semble-t-il, selon ce qu'en dit Jean-Claude Picard, dans le Devoir du 3 décembre, de ce haut comité des priorités pour renforcer l'autorité du premier ministre sur tout l'appareil politique et administratif du gouvernement et s'assurer que toutes les réformes engagées se fassent sous bonne garde.

Je crois donc que le projet de loi que nous étudions constitue une première entorse au principe de la responsabilité ministérielle et qu'à ce titre il est mauvais. Je crois, en effet, malgré les faiblesses qu'il peut avoir, que le système de la responsabilité ministérielle mérite d'être maintenu non seulement parce que c'est un système qui nous est familier, mais surtout parce qu'il fait en sorte que les ministres soient pleinement responsables de l'administration des lois. Les ministres doivent se présenter en Chambre pour débattre la législation. Ils doivent écouter les représentations des députés, des citoyens, des corps constitués. Les ministres doivent être en commission parlementaire pour débattre les crédits qui leur sont votés. Tous les jours de session ils sont soumis, avec le premier ministre, aux questions orales ou écrites de l'Opposition. C'est ainsi qu'entre les élections la démocratie peut continuer à vivre et à s'épanouir de bien meilleure façon, à mon avis, que dans tout autre système que nous aurions adopté simplement pour le plaisir de changer. J'ajoute simplement cette demande: A qui, en cette Assemblée — aux superministres ou aux ministres sectoriels — s'adressent les remarques du Protecteur du citoyen, celles du Vérificateur général? Qui sera responsable, devant l'Assemblée nationale, des actes de l'administration? Qui, les ministres ordinaires ou les superministres?

C'est déjà arrivé. Seulement une petite expérience de quelques jours en cette Chambre et déjà nous cherchons, à gauche et à droite, à qui poser les questions pour avoir une réponse qui tienne compte de cette responsabilité que doivent avoir les ministres vis-à-vis des fonctions qui leur sont confiées. Peut-être qu'on dira: C'est votre faute, vous ne savez pas discerner assez bien.

Si nous avons de la difficulté à discerner ces responsabilités, comment voulez-vous que le citoyen peu habitué à cette structurite et les corps intermédiaires puissent s'y retrouver? D'ailleurs je reçois déjà des télégrammes adressés à gauche et à droite à tel ministre ou superministre. Finalement, je pense bien que les citoyens vont envoyer toute la correspondance au premier ministre, qui se fera le "dispatcher". C'est à peu près comme cela que je peux voir la situation et je pense bien qu'il va falloir qu'on augmente le nombre de fonctionnaires au "bunker" pour essayer de faire ce tri de la correspondance. Moi-même, si je suis intéressé à une question et veux avoir une réponse à laquelle j'attache une importance primordiale, je ne veux pas courir de risque et peut-être perdre une semaine ou deux à avoir ma correspondance dans le mauvais bureau.

Alors, je prierais le premier ministre, s'il reçoit ma correspondance quant à moi, vu qu'il est ici, qu'il se fasse un devoir de la diriger au bon endroit, en attendant que l'on puisse se familiariser avec ce genre de structurite et superstructurite. Enfin, si le premier ministre avait simplement voulu dégager des ministres pour leur confier des réformes plus importantes ou la coordination des travaux des comités permanents, nous aurions compris et peut-être même accepté qu'il le fasse en raison de la complexité des dossiers et de l'inexpérience de son équipe.

Dans un tel cas, notre système parlementaire n'en aurait pas souffert et le Conseil exécutif en aurait bénéficié. Il n'eût pas été nécessaire d'accepter de nouvelles dénominations ministérielles et le pouvoir réel serait encore entre les mains de

l'ensemble du Conseil des ministres. Mais, avec la création de cette superstructure que sera le comité des priorités, nous avons une réforme politique où le pouvoir se concentre, se cache et se dissout.

Mme le Président, je pense que c'est le leader de l'Opposition officielle qui avait fait une demande, je ne sais pas à quel ministre ou superministre, peut-être au leader responsable de la réforme parlementaire. De toute façon c'était une demande qui m'apparaissait empreinte de réalisme, dans le but d'éclairer cette Chambre pour l'étude du projet de loi. Je pense que le leader de l'Opposition officielle, le député de Laval, avait demandé aux responsables — et vu que le parrain est le premier ministre, je lui en fais la demande présentement — s'il n'y aurait pas moyen d'avoir un organigramme qui serait distribué aux députés, afin qu'ils puissent un peu voir comment marche cette patente, vous savez, où s'adresser, etc.

Comme cela n'a pas été fait, peut-être que je pourrais immédiatement faire parvenir au premier ministre notre projet d'organigramme, puis il pourrait dans sa réplique nous dire s'il a des corrections à apporter. J'en ai une copie pour le premier ministre puis j'en ai une copie également pour le leader du gouvernement, ministre d'Etat responsable de la réforme parlementaire. Comme je vois qu'il y en a plusieurs qui veulent en avoir, M. le Président, je suis certain que vous n'avez pas d'objection à ce que j'en passe à mes collègues. Et si le premier ministre trouve que cela a de la valeur, il pourrait peut-être me permettre d'en faire le dépôt pour que la population entière puisse être informée.

Maintenant, si ce n'est pas le cas, s'il y a des erreurs, bien...

M. Lévesque (Taillon): II y a un petit bout ici qui ne marche pas.

M. Levesque (Bonaventure): II y a un petit bout qui manque. C'est pour cela qu'on va vous demander de faire la correction, pour qu'au droit de réplique on puisse en distribuer une autre série corrigée et mise à jour, au point.

M. Garneau: Est-ce qu'il y a des...

M. Levesque (Bonaventure): II est inutile, Mme le Président, le présent projet de loi; de plus il est dangereux au titre du maintien du principe de la responsabilité ministérielle. Il est également dangereux en regard du rapprochement nécessaire du citoyen et de l'administration publique. En effet, M. le Président, ces superministres dont les responsabilités recoupent l'ensemble — j'aurais dû distribuer ces choses un peu plus tard, parce que je suis dérangé dans mes propos présentement, il se fait tellement d'interprétations...

M. Garneau: ... les pyramides d'Egypte.

M. Levesque (Bonaventure): Je vais vous demander, Mme le Président, de surveiller l'ordre pour que je puisse continuer.

Mme le Vice-Président: Restez vous-même à l'ordre.

M. Levesque (Bonaventure): En effet, ces superministres, dont les responsabilités recoupent l'ensemble du domaine public québécois et dont l'autorité, à tout le moins morale, sur les autres ministres sera ou deviendra très grande, seront nécessairement bien loin du monde ordinaire, comme on se plaisait il n'y a pas si longtemps à qualifier les citoyens du Québec.

J'ai déjà dit qu'en réalité ces superministres seront ou deviendront très vite des superhauts fonctionnaires. Je crois bien que la fonction publique québécoise n'avait pas besoin de cela. Les sous-ministres en poste dans chacun des ministères sont des hommes responsables, des hommes éclairés, des hommes d'expérience et de vision. Pourquoi leur superposer une superstructure bureaucratique?

S'il s'agissait simplement de mieux coordonner les activités sectorielles de l'Etat, il n'était pas nécessaire de recourir à un semblable appareillage, d'autant moins que le citoyen, qui trouve déjà suffisamment complexe la machine gouvernementale, se demandera à qui il doit s'adresser désormais pour faire valoir ses besoins et ses préoccupations. Les corps publics, municipalités et commissions scolaires, collèges, universités, institutions de santé et de services sociaux, les corps constitués: chambres de commerce, syndicats, comités de citoyens, les députés eux-mêmes; à qui tous ces organismes et ces gens devront-ils adresser leurs représentations? Au superministre qui les retournera au ministre sectoriel? Aux ministres sectoriels qui leur diront que tel ou tel projet qu'ils avaient a été écarté ou retardé par le ministre tuteur? A qui allons-nous nous adresser? J'ai fait une suggestion tout à l'heure. Ce sont là des choses qui doivent être précisées, et d'une façon claire, parce que, de toute évidence, par la force même des choses, ces superministres — il faut avoir l'expérience de l'administration publique pour le comprendre — seront ou deviendront rapidement bien loin du peuple, eux qui auront à jouer avec les grandes priorités de l'Etat, les grands dossiers, les grandes opérations du gouvernement.

D'ailleurs, on m'objectera peut-être que les actuels ministres de l'Education et des Affaires sociales sont en réalité des superministres, en raison de l'ampleur même de leurs responsabilités. Je réponds simplement, avec beaucoup d'autres, qu'il existe au Québec un courant d'opinion de plus en plus marqué pour précisément partager les responsabilités ministérielles dans ce domaine, en distinguant mieux, comme nous avions commencé à le faire, le secteur de l'enseignement élémentaire et secondaire de celui du collégial et universitaire et le secteur des prestations sociales du secteur de la santé. La raison en est bien simple, c'est que les grands ensembles les plus globaux ou globalisants, les grandes priorités, cela peut finir à la longue par très mal servir la qualité de l'administration publique. La qualité de l'administration publique, pour le monde ordinaire, ce

sont les besoins réels des citoyens et des régions du Québec.

Je ne crois pas, quant à moi, que l'on réussisse à satisfaire à ces exigences fondamentales d'une décentralisation et d'une régionalisation des services gouvernementaux en chapeautant, sans rien changer à ce qui existe, les ministères sectoriels d'une superstructure totalement artificielle. Ce n'est certainement pas là la voie d'une plus grande humanisation de l'administration publique. Lorsque je parlais de possibilités de division ou de partage des responsabilités aux Affaires sociales et à l'Education, je voyais le premier ministre prendre une note; je me demande s'il veut en profiter pour augmenter le nombre des membres du cabinet. Il a peut-être vu là une ouverture. Mais il faut aussi bien se rendre compte que, s'il veut le faire là et s'il veut donner suite également à ce qu'il avait laissé entendre, soit que plusieurs des nouveaux ministres cumulaient deux ministères et qu'il faudrait les libérer un peu éventuellement, par quel nombre se chiffrera la composition du cabinet? On arrivera à quel chiffre, lorsqu'on tient compte de ce qui a été doublé, déjà, comme responsabilités? En ajoutant des superministres, on arrivera sans doute à un chiffre assez élevé. Je ne le sais pas, je n'ai pas la réponse à cela. C'est le privilège du premier ministre, mais tout de même nous devrions surveiller cela de près.

En somme, l'Opposition officielle est contre ce projet de loi parce qu'il n'est pas nécessaire, parce qu'il fait subir un recul inadmissible au principe de la responsabilité ministérielle. Parce qu'il contribue à augmenter la confusion dans l'esprit de chacun, il contribue à éloigner l'administration publique des préoccupations réelles du citoyen et des groupes de notre société.

C'est un projet de loi à tendance nettement bureaucratique et technocratique, un projet de loi qui est contraire à ce que nous devrions d'abord chercher à faire, c'est-à-dire, humaniser l'administration gouvernementale.

Mme le Vice-Président: M. le député de Lotbinière.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: Mme le Président, j'ai écouté avec attention les explications du premier ministre sur son projet de loi. Je dois dire que chaque gouvernement, et c'est normal, veut se donner ses moyens à lui de gouverner qui lui conviennent le mieux. Animé, M. le premier ministre — et il n'est pas le seul — d'un souci d'efficacité accru au sein de l'appareil gouvernemental, le premier ministre a voulu, en plus de procéder à la nomination de plusieurs ministres délégués soit à l'environnement, à l'énergie, au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, se donner un état-major formel composé de ministres appelés "seniors" et qualifiés de ministres d'Etat responsables de la réforme parlementaire ou encore, du développement économique, social ou culturel ou de l'aménagement.

Au total, ces nominations, et conséquemment les modifications qu'elles appellent à la Loi de l'exécutif, se veulent des mesures pour assurer une meilleure administration au Québec. Dans cet esprit, nous voterons pour le principe du projet de loi.

Mais, auparavant, nous nous devons, à ce dernier titre, d'intervenir dans le débat, premièrement, quant aux ministres délégués, pour reconnaître qu'ainsi, et à bon droit, le premier ministre et le nouveau gouvernement veulent donner une priorité réelle à l'environnement, à l'énergie et au large secteur des loisirs et des sports. Pour préciser, quant à l'environnement, que la lutte nécessaire, sous toutes ses formes, à la pollution ne devra pas, par des gestes précipités, provoquer un autre type de pollution, à savoir un climat tel, à l'endroit des entreprises, qu'il nuise à leur expansion ou à leur désir de venir s'installer au Québec.

Quant à l'énergie, dont le titulaire délégué, on le sait maintenant, sera simultanément responsable du dossier de l'Hydro-Québec, c'est le temps de limiter l'autorité et l'autonomie abusive de l'Hydro-Québec.

Quant aux loisirs et aux sports, nous, de l'Union Nationale, préconisons la création d'un véritable ministère des loisirs et des sports axé sur l'amélioration de la qualité de la vie des Québécois.

Quant aux ministres d'Etat appelés à conseiller de près le premier ministre dans l'orientation de la planification de l'administration du Québec, l'Union Nationale en profite pour réaffirmer que c'est le temps que l'incohérence, l'attentisme, l'absence de planification et autres carences de l'administration soient remplacés par un esprit de décision et une meilleure communication entre-les fonctionnaires et les citoyens.

Il est important aussi de plaider bien haut que le gouvernement doit décentraliser les services de l'Etat au profit des institutions locales et régionales et non pas s'alourdir à un point tel que, sous prétexte d'efficacité, le contact entre l'administration et l'administré se déshumanise encore davantage.

J'ai été heureux d'entendre le premier ministre nous parler de planification à long terme des décisions du gouvernement. J'en suis. J'ai toujours aimé planifier à long terme. Mais avant de prendre une décision nous devons, bien sûr, faire de la recherche, faire les études nécessaires sur le résultat de la recherche, faire les discussions et, finalement, prendre des décisions.

Je répète ici que je suis heureux de voir que le premier ministre, quand même, veut prendre des décisions et, surtout, veut remplacer cette indécision chronique que l'on connaissait sous l'ancien gouvernement. Il ne faudrait pas que cette indécision chronique se change en décision prises à la hâte, sans efficacité et, surtout, sans planification.

Je veux mettre en garde le premier ministre contre une certaine résistance au changement qu'il y a partout, dans tous les peuples de la terre. Cette nouvelle diversité, cette nouveauté de gouvernement aujourd'hui — bien sûr, il le notait lui-

même — va nous apporter des affrontements et des tensions sociales. Il faut y mettre énormément de souplesse et énormément de prudence. Les objectifs d'efficacité avec les hommes politiques élus pour l'administration du gouvernement, nous en sommes totalement. Mais je veux aussi mettre en garde le premier ministre et les membres du Parti québécois. Car il faut aussi reconnaître ce que les autres avant nous, dans cette Chambre, dans cette province, dans ce pays, ont fait de bien. J'ai, comme le disait tout à l'heure le chef de l'Opposition, une grande crainte, en entendant plusieurs ministres ou députés du parti au pouvoir, de les voir penser que le monde a commencé avec le 15 novembre dernier.

Nous avons donc grand besoin de planification au Québec. Mais, tel que je le disais dans mon discours à l'ouverture de cette Assemblée nationale, de grâce, il faudrait que les ministres fassent une meilleure planification, et surtout les ministres seniors, afin d'arrêter toutes ces promesses à gogo que nous avons entendues ou ces déclarations fracassantes pour faire la une dans les journaux. Nous voulons de la décision, nous voulons de l'action, bien sûr, mais nous ne voulons pas d'incohérence. Ceci étant dit, il nous faut dire aussi aujourd'hui que te but recherché dans le réaménagement interne du cabinet des ministres, à savoir la planification des priorités, est évident. Mais je voudrais que le premier ministre regarde ce que ses ministres ont fait jusqu'à aujourd'hui et, dans toutes leurs déclarations, nous avons de la difficulté à voir ces démarches qu'il nous mentionnait tout à l'heure, à ce jour, pour une meilleure planification.

Qu'il me suffise de parler tout simplement de l'annonce de la hausse du salaire minimum, socialement justifiable, mais manque de planification parce qu'elle n'était pas assortie d'un train de mesures pour pallier et pour aider la petite et la moyenne entreprise au Québec. Qu'il me suffise aussi de parler de l'incohérence des deux mesures connues à ce jour concernant le projet de loi no 22. Soit, d'un côté, la poursuite des tests linguistiques, tests iniques, et, d'un autre côté, la suspension du programme, mal engagé bien sûr, de francisation des entreprises. Troisièmement, le projet de loi affectant la ville de Montréal, projet de loi présenté de façon inappropriée, projet de loi inapproprié aussi sur le plan social et de façon irraisonnable sur le plan économique. Ce sont trois exemples de ce qui nous apparaît être, pour le moins, un mauvais début du gouvernement au chapitre de la cohérence et de la planification des priorités.

Incidemment, M. le premier ministre, n'y aurait-il pas trop de ministres à ce jour qui ont multiplié des déclarations de manière impromptue et improvisée sur des dossiers qui auraient appelé davantage de temps, d'étude, de réflexion et de consultation? Voilà pourquoi nous sommes heureux de voir des ministres qui vont faire de la planification. La requête de notre part est que les ministres d'Etat soient responsables à l'Assemblée nationale, tout comme c'est le cas pour l'ensemble des ministres, et surtout que l'Assemblée natio- nale soit informée aussitôt qu'un nouveau dossier est confié à un de ces ministres d'Etat. Il ne faudrait pas nous indiquer trop tard, du côté du gouvernement, à qui poser nos questions. Le respect de l'Opposition et de son rôle en régime parlementaire démocratique devra être tel qu'on nous laisse le droit et le loisir d'interroger à notre guise celui des ministres touchant ou étant susceptible de toucher à un dossier donné. Nous voulons reconnaître ce qu'il y a de bon dans cette mesure et nous voulons reconnaître que le gouvernement du Parti québécois, jusqu'ici, a fait un effort énorme pour prendre des décisions rapides. Mais, comme je le disais tout à l'heure, j'ai été déçu, personnellement, de certaines déclarations de ministres et spécialement hier, dans cette Assemblée. Je les mets sur le compte de l'inexpérience et j'espère qu'avec le temps, le nouveau style de gouvernement que veut donner le premier ministre au Québec puisse passer à travers ses ministres. Je reconnais quand même la largeur de vue du premier ministre concernant les différents problèmes auxquels nous avons à faire face dans cette province.

Je voudrais aussi demander au premier ministre qu'il soit sûr que ses ministres d'Etat responsables de ces dossiers, de cette planification ne travaillent pas exclusivement au dossier du référendum sans que cette Assemblée ne le sache.

Mme le Président, depuis le début de cette session nous ne voulons pas critiquer inutilement et surtout nous ne voulons pas critiquer pour détruire, mais nous voulons construire avec le gouvernement que les Québécois se sont choisi un Québec meilleur pour tous. C'est dans cette recherche de solutions originales que notait tout à l'heure le premier ministre, pour une meilleure efficacité de notre système politique, pour une meilleure planification de nos actions politiques, que nous voyons cette mesure et que nous suggérons au premier ministre de former un réel comité de planification des décisions à prendre au niveau provincial composé, bien sûr, de ses ministres d'Etat et des ministres qu'il veut nommer à ce comité. Mais qu'il invite aussi, pour faire partie de ce comité, en toute recherche de cette nouveauté, de cette solution originale, les chefs des différents partis politiques. Nous aussi nous sommes québécois, nous aussi nous avons été élus par nos commettants pour le bien de la population du Québec et ce n'est pas parce que nous appuyons un autre parti politique que nous sommes contre le Québec ou contre les Québécois. Si le premier ministre veut réellement faire un bond en avant, je lui suggère, bien humblement, de former son réel comité de planification composé de tous les hommes, de tous les ministres qu'il veut y nommer, mais d'y inviter aussi l'honorable chef de l'Opposition et le chef de l'Union Nationale afin que nous puissions l'aider à former ce nouveau gouvernement pour un Québec nouveau, ce vrai gouvernement qu'il veut réellement pour tous les Québécois. D'une façon ou d'une autre, nous ap-puyerons le principe de cette mesure.

Mme le Vice-Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Claude Forget

M. Forget: Mme le Président, j'ai écouté attentivement les arguments présentés par l'honorable premier ministre pour justifier ce projet de loi. Son argumentation se résume, je crois, aux deux points suivants. D'une part, il est nécessaire que les mécanismes existants pour assurer une meilleure coordination de l'activité gouvernementale soient renforcés et, deuxièmement, qu'il est nécessaire que ce renforcement de la coordination gouvernementale se fasse par l'addition de ministre d'Etat, c'est-à-dire par l'intermédiaire de représentants élus de la population.

En réponse, le chef de l'Opposition officielle a indiqué qu'il nous apparaissait qu'une telle démarche était superflue et mal orientée ou inappropriée. Je n'ai pas l'intention, évidemment, de reprendre l'argumentation de mon collègue, le chef de l'Opposition officielle, mais j'aimerais contribuer au débat en offrant, en tout premier lieu, un témoignage de la part de celui qui vous parle et qui a vécu cette expérience des comités interministériels qui ont fonctionné pendant un peu plus d'une année et qui peut donc, par conséquent, témoigner de leur efficacité, puisque c'est une efficacité éprouvée.

En deuxième lieu, j'aimerais attirer l'attention de l'Assemblée sur ce qui m'apparaît être la signification véritable de cette modification dans le fonctionnement de l'Exécutif. Sur le plan général du besoin, de la nécessité de renforcer la coordination gouvernementale, je n'ai pas besoin de passer du temps, puisque tout le monde est bien conscient de la nécessité de mieux coordonner l'activité gouvernementale. D'ailleurs, comme à la fois le chef du gouvernement et le chef de l'Opposition l'ont fait, il est possible de retracer dans le développement du parlementarisme, à l'étranger et au Québec, les tentatives diverses qui ont été faites pour assurer une meilleure coordination.

On peut noter que l'idée en est venue pour la première fois dans les périodes de conflits armés, alors que les gouvernements parlementaires ont ressenti plus que jamais le besoin d'une plus grande efficacité dans leurs prises de décisions. C'est à ce moment-là qu'on a vu surgir les "war cabinets" et les "inner cabinets" qui, dans certains pays, sont demeurés jusqu'à maintenant. Donc, sur le plan de l'opportunité de mieux coordonner l'action gouvernementale, tout le monde s'entend. Cependant, comme n'importe quelle bonne idée, tout est de savoir où s'arrêter et comment effectuer ou mettre en oeuvre un tel principe. C'est sur cette base que l'Opposition officielle exprime de sérieuses réserves. Nous croyons qu'on ne sait pas, dans ce projet de loi qui nous est soumis, où s'arrêter et que les méthodes utilisées pour assurer la coordination sont inappropriées.

Donc, en premier lieu, j'aimerais, comme je l'indiquais tout à l'heure, témoigner de l'efficacité de ce mécanisme qui nous semblait et qui nous semble encore suffisant pour la coordination interministérielle, à savoir les comités permanents présidés par des ministres sectoriels. A cet égard, j'aimerais faire allusion à une expérience que nos amis d'en face, d'ailleurs, retrouveront dans les dossiers de ces comités interministériels, l'expérience de l'élaboration de la législation sur la sécurité et la santé des travailleurs. Comme on le sait, c'était là une préoccupation importante du gouvernement précédent et ça fournit encore une très bonne illustration de la nécessité d'une coordination interministérielle. En effet — et c'est la situation qui prévaut encore maintenant — tout le monde sait que quelque quatre ou cinq ministères sont impliqués dans cette question extrêmement complexe; je cite le ministère du Travail, bien évidemment, le ministère des Richesses naturelles, le ministère des Affaires municipales et de l'environnement et le ministère des Affaires sociales, encore que d'autres ministères, tels que celui de la Justice, aient un certain droit de regard sur ces questions.

Or, dans une question qui touche et affecte profondément les responsabilités de quatre ou cinq ministères, le comité des ressources humaines que j'avais l'honneur de présider a réussi, après le travail conjugué des ministres membres de ce comité et aussi des fonctionnaires du secrétariat général, à établir un plan d'ensemble qui permettait de mettre fin, de façon complète, de façon globale, aux querelles et aux conflits de juridictions. C'était là le premier résultat, après seulement quelques mois de travail, de l'existence de ces comités interministériels. Sub-séquemment, il nous a été possible de dégager un certain nombre de points de convergence pour une législation globale relativement à cette question, encore que, comme on le sait, les circonstances aient voulu que nous ne puissions mener à terme les efforts engagés de ce côté-là. Mais ces efforts — et c'est le but pour lequel je le mentionne ici — avaient permis, déjà, de développer un point de vue commun à la fois sur le plan juridictionnel, sur le plan des compétences administratives de quatre ou cinq ministères, mais également, à certains égards au moins puisque le travail n'était pas complété, sur les aspects substantifs mêmes de ce projet de loi en voie de gestation.

Il y avait donc, dans cette formule, un potentiel considérable. Si je ne parle pas plus longuement sur le sujet, c'est bien évidemment que ce projet a été le plus important soumis au comité interministériel dont je faisais partie, mais j'ai tout lieu de croire que le même travail de concertation et de coordination s'effectuait également dans les autres comités ministériels. Cette conviction profonde que nous avons de l'efficacité de la formule est la justification même des propos du chef de l'Opposition officielle tout à l'heure, selon lesquels des mécanismes existants, dont ces comités interministériels, suffisaient déjà à assurer toute la coordination voulue dans l'action gouvernementale.

Cependant, le projet qui nous est soumis va plus loin que cela. Il rend, bien sûr, d'une certaine manière, permanents ces comités puisque le nouveau gouvernement, en les changeant de nom, si

l'on veut, quelque peu reprend à son compte ces comités interministériels, mais y ajoute la notion de ministre d'Etat. C'est sur ce point-là que nous divergeons de point de vue avec le parti gouvernemental.

En effet, quelle est la signification véritable de la création de ces ministres d'Etat? Bien sûr, comme l'indiquait mon collègue, cela introduit, ne serait-ce que parce que c'est nouveau, que cela n'a pas été essayé, une certaine confusion dans l'esprit de l'observateur, à savoir qui sera véritablement responsable de tel ou tel dossier. Le premier ministre vient d'indiquer que, dans tous les cas — il faut souligner "tous"— les ministres d'Etat se verront investis d'une responsabilité en vertu d'une décision du Conseil des ministres.

Personnellement, je regrette que le projet de loi, qui amende la Loi de l'Exécutif, n'ait pas prévu, précisément, et rendu officielle cette délégation spécifique de responsabilités. Il me semble qu'il aurait été facile d'insérer dans le projet de loi un article prévoyant que ces décisions du Conseil des ministres devront revêtir un certain cachet officiel et de publicité tel que le dépôt qu'on ferait, par exemple, de la résolution du Conseil des ministres à l'Assemblée nationale. Ceci est un détail, mais, même dans l'optique où l'on accorde des mandats spécifiques à ces ministres d'Etat, je crois que la réalité, telle qu'elle sera vécue, sera bien différente de celle qu'on fait envisager par une telle référence spécifique.

En effet, tout le monde a pu constater, et particulièrement ceux qui vivent à l'intérieur du gouvernement — ils ont pu le constater, ceux-là, de première main et de très près — que la tâche actuelle du premier ministre, étant donné l'évolution très rapide du rôle du gouvernement dans notre société, est devenue une tâche presque impossible. Enfin, on pourrait faire l'histoire personnelle, si l'on veut, des premiers ministres que le Québec a eus successivement depuis une vingtaine d'années et se rendre compte que presque chacun d'entre eux est mort à la tâche ou a été l'objet d'un tel stress que sa santé personnelle et même sa capacité de décider rationnellement a été, à la longue, sérieusement affectée, sérieusement minée. C'est le témoignage que l'on peut certes rendre des premiers ministres que l'on a connus plus récemment que ce fardeau, même pour un homme jeune et en bonne santé, avec toutes ses capacités intellectuelles, constitue une tâche presque impossible.

Il est donc normal que, dans un tel contexte, la création des ministres d'Etat prenne un sens qu'elle n'a pas dans les textes de loi. En effet, ce qui me paraît significatif — et cela paraît, d'ailleurs, aussi significatif, je pense, au premier ministre puisque c'est ainsi qu'il l'a présenté — c'est que ces ministres d'Etat sont, essentiellement, des hommes politiques élus et ce sont des hommes politiques qui partageront avec le premier ministre, en définitive, une partie de sa tâche, une partie de ses responsabilités. En effet, le gouvernement parlementaire que nous connaissons dispose déjà, et depuis son début, d'un mécanisme de coordination et c'est le premier ministre lui-même. A ce titre, le premier ministre est toujours un superministre. On n'y peut rien, c'est la doctrine constitutionnelle qui le veut. C'est la pratique, l'expérience de tous les jours qui en décident ainsi.

Donc, ceux qui sont proches de lui, d'une façon ou d'une autre, même si la loi prétend le contraire, risquent de devenir — et ce risque est très élevé — des premiers ministres substituts, suppléants ou adjoints. Tout ce que l'on voudra. Dans le contexte où ce sont des hommes élus, on voit tout de suite le genre de situation vers laquelle nous pouvons très bien évoluer. Nous verrons un renforcement du bureau du premier ministre. Je ne voudrais pas confondre les esprits en disant que c'est peut-être une amorce d'un régiment présidentiel, mais je crois qu'il y a quelque chose d'un peu analogue à cela qui va se passer, c'est-à-dire un renforcement du bureau du premier ministre et un renforcement d'autant plus significatif qu'il sera le fait, cette fois-ci, non pas d'adjoints nommés selon le bon plaisir du premier ministre, mais qui n'ont pas d'existence politique indépendante, mais d'hommes qui sont eux-mêmes élus comme le sont les ministres ordinaires, mais qui, contrairement aux ministres ordinaires, n'ont pas tout le fardeau administratif, toutes les responsabilités d'un ministère.

Ils seront désormais donc beaucoup plus libres, beaucoup plus disponibles pour jouer un rôle de coordination et pour grignoter, peut-être — et à mon avis, très probablement — progressivement le rôle, l'autorité et le prestige du premier ministre.

C'est dans cette évolution que je vois les dangers de la formule actuelle, puisque c'est une évolution qui n'est pas, je pense, vraiment voulue et qui nous fait déboucher sur une espèce de presidium plutôt que sur la fonction traditionnelle de premier ministre où cette responsabilité-là, qui est peut-être la plus fondamentale dans notre vie parlementaire, deviendra un peu plus confuse. Il s'agira beaucoup plus, avec les années, d'une direction collective, mais non pas d'une direction collective basée sur le sens concret des responsabilités administratives qui viennent à n'importe qui, à force de plonger dans la réalité quotidienne d'un ministère, mais qui sont éminemment politiques. C'est là un aspect qui m'apparaît également dangereux dans cette évolution de la Loi de l'Exécutif.

Dans l'institution d'un tel leadership collectif, au niveau du bureau du premier ministre, composé d'hommes qui n'ont pas de responsabilité administrative, nous verrons probablement une politisation de plus en plus grande du processus de décision gouvernementale. Je n'ai rien contre la politisation de l'administration publique et du processus gouvernemental en soi, mais il devient évident, lorsque l'Etat représente presque la moitié de l'activité économique, globale d'une collectivité, que l'on ne peut pas abandonner l'évolution et la marche des affaires de l'Etat, dans

sa totalité et d'une façon aussi prépondérante, aux avatars de la vie politique d'un Etat ou d'une province.

Il est très difficile d'envisager comment cette orientation extrêmement politique, extrêmement coupée des réalités quotidiennes, des réalités administratives, des contraintes dont doit tenir compte le gouvernement, ne pourra pas nous engager dans des avenues peut-être extrêmement aventureuses. C'est donc là les dangers, Mme le Président, que je vois dans une évolution de la Loi de l'Exécutif qui, sans aucun doute, est intéressante. Elle est intéressante parce que, comme l'a souligné à la fois le premier ministre et le chef de l'Opposition, tous les gouvernements successivement, ici comme ailleurs, tentent de résoudre les problèmes, évidemment non pas entièrement résolus encore, que pose l'administration de l'Etat moderne.

A première vue, il semblerait que tous les partis d'Opposition devraient se dire: Bien voici, ce nouveau gouvernement, qu'il gouverne donc selon les procédures, selon les modalités qui lui paraissent les plus acceptables, les plus agréables. Après tout, s'il échoue, cet échec lui incombera seul, et s'il réussit, ce sera un gain permanent pour le Québec.

Malheureusement, Mme le Président, il n'est pas possible de prendre une attitude aussi détachée, aussi désintéressée de l'évolution de la structure gouvernementale, parce que cette loi, dans le fond et au-delà de son intention manifeste, va nous entraîner dans une modification permanente et irréversible de la fonction même de premier ministre. Bien au-delà des modifications de structure, nous avons un changement constitutionnel qu'on nous propose, tout à fait à la fin d'une session, avec, au hasard, quelques modifications de routine. On nous présente une modification constitutionnelle, non pas dans son effet immédiat, mais inéluctablement dans son effet à plus long terme. C'est cette conséquence très considérable que l'Opposition officielle ne peut accepter, parce qu'il faudrait au moins voir exactement et comprendre où on veut nous mener.

Il nous semble qu'il est trop important de modifier ainsi la constitution et la façon de fonctionner du gouvernement.et de l'ensemble du Parlement pour le faire aussi rapidement, sans le bénéfice d'opinions d'experts. Je comprends, sans aucun doute, l'urgence qu'y a vue le gouvernement puisqu'il devait bien se constituer d'une façon ou d'une autre. Je crois que tout le monde connaît bien que, de toute manière, le gouvernement est assuré, avec sa majorité, d'obtenir gain de cause.

Il est essentiel toutefois que ce débat ait lieu à l'Assemblée nationale et que l'ensemble des Québécois soient avertis de l'orientation que le nouveau gouvernement fait prendre, non seulement à la structure du Conseil des ministres, mais à sa conception même du fonctionnement de la démocratie au Québec. Merci.

M. Garneau: Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Jean-Talon.

M. Raymond Garneau

M. Garneau: Juste quelques mots pour expliciter davantage les raisons qui amènent l'Opposition à se prononcer contre ce projet de loi.

Il est intéressant de constater que, dans l'évolution normale de nos démocraties, les gouvernements qui arrivent au pouvoir sont bien souvent emballés par des modifications importantes soit aux structures parlementaires, soit aux structures administratives. S'il y a quelqu'un qui peut comprendre ce processus de tout nouvel élu, c'est bien celui qui vous parle, celui qui a proposé également en cette Chambre, en 1970, des modifications, modifications à la Loi de l'administration financière, qui étaient importantes et qui étaient, et de loin, en deçà de ce que nous propose aujourd'hui le nouveau gouvernement.

C'est normal que l'on veuille, je crois, à son arrivée au pouvoir — comme le disait mon collègue tout à l'heure — vouloir structurer l'appareil gouvernemental suivant son idéologie, suivant son appréciation de la chose publique. Je pense qu'il est du devoir de l'Opposition et particulièrement de ceux qui viennent de quitter les banquettes ministérielles, au moins d'attirer l'attention des membres du gouvernement sur les dangers qu'il y a. Je voudrais attirer l'attention du premier ministre et des membres de l'équipe ministérielle et peut-être souligner l'aspect strictement administratif, mon collègue ayant traité des aspects plus larges, plus importants sur le plan de l'orientation politique. Mais, sur le strict plan de l'administration quotidienne de la chose publique, nous nous retrouvons maintenant avec une pyramide structurale, une grande pyramide, avec des sous-secteurs, pour établir la planification gouvernementale.

Je comprends et j'accepte l'orientation que veut donner le gouvernement, comme nous avions tenté de le faire pour assurer une meilleure planification de la chose publique. Mais nous sommes maintenant rendus sur le plan strictement administratif. Il y aura d'abord le Conseil des ministres, il y aura ensuite le Conseil du trésor, qui, qu'on le veuille ou non, ramasse toutes les connotations financières de n'importe quel projet, qu'il vienne d'un ministre sectoriel, d'un ministre d'Etat ou d'un ministre délégué. A côté ou par-dessus, existeront des ministres d'Etat qui seront responsables de deux ou trois ministères sans nécessairement couvrir l'ensemble des problèmes de coordination et de planification qui doivent exister dans un gouvernement.

Tout à l'heure, mon collègue de Saint-Laurent mentionnait un seul dossier. Je regardais, en l'écoutant parler, le genre d'organigramme qui a été tracé. Même si on le trouve très exagéré et peut-être un peu artificiel, il faudra voir comment le gouvernement justifiera et précisera cet organigramme qui montre toute une série de flèches et

de relations entre différents ministères. J'écoutais mon collègue de Saint-Laurent parler du problème de la question de la santé dans le milieu de travail et je regardais sur l'organigramme qui a été préparé par le chef de l'Opposition comment tout cela pourrait fonctionner. Je constatais qu'aucun des ministres d'Etat qui existent là ne pourraient assumer cette coordination, parce que dans le fond les champs d'action que couvrent les différentes lois qui ont été votées et qui seront votées par ce Parlement imbriquent la responsabilité de beaucoup plus de ministères que ne peut le représenter, par exemple le ministre d'Etat au développement économique, le ministre d'Etat au développement culturel, etc.

Ceci m'amène à conclure que l'administration et la coordination des politiques gouvernementales ne seront pas plus assurées par la création de ces ministres d'Etat que, d'une façon strictement détaillée, par les comités ministériels auxquels, dans la plupart des cas, nous devions inviter des ministres et des fonctionnaires d'autres secteurs qui ne faisaient pas nécessairement partie, au point de départ, du comité.

C'est donc dire qu'en structurant d'une façon formelle et juridique l'administration et la prise de décisions, non seulement nous n'assumerons pas et nous n'aurons pas un appareil administratif capable d'assumer l'élément essentiel de coordination, au contraire, je crois que nous allons amener beaucoup plus de confusion non seulement dans l'esprit des députés — évidemment les députés pourraient s'adapter assez facilement — mais aussi dans l'esprit des milliers de fonctionnaires. Le premier ministre parlait tout à l'heure de 50 000 fonctionnaires dans la fonction publique.

Je vois, par exemple, le sous-ministre des Terres et Forêts qui est en contact continuel avec le milieu et la clientèle qui touche à ce ministère, c'est-à-dire, les cultivateurs, les propriétaires de boisés de fermes, les entreprises de bois de sciage, les entreprises de pâtes et papiers, en fait, tout ce secteur de l'aménagement des terres de la couronne et des terres forestières.

J'essayais de me demander où moi, par exemple, comme propriétaire d'une petie scierie dans une campagne, je devrais m'adresser pour régler mon problème. Je me mets subséquemment dans la peau du sous-ministre, qui reçoit peut-être à un moment donné une délégation, et je me demande comment, comme sous-ministre, je pourrais réagir face à un problème bien précis qui m'est posé, un problème de coordination, parce que si une scierie ferme ses portes à Senneterre ou à Taschereau, comme nous l'avons vu, cela touche énormément plus de monde qu'uniquement le ministre ou le sous-ministre des Terres et Forêts. Je me mettais dans sa peau pour essayer de voir comment il allait réagir face à un problème aussi concret. Le référera-t-il au comité ou au ministre d'Etat? Le référera-t-il au premier ministre? Le référera-t-il, si c'est une question financière, au Conseil du trésor? Mais nous aurons toujours, je crois, ce méli-mélo qui va non seulement retarder la planification de l'administration publique, mais qui retardera de façon incroyable la prise de décision.

M. le Président, il y a un autre aspect du problème sur le plan administratif que je voudrais toucher, et je le fais sans aucune espèce de malice, parce que je crois que le débat, jusqu'à maintenant s'est fait uniquement sur des questions d'opinions et sur la façon dont on voit et l'on croit que l'administration publique peut être le mieux assurée et que la coordination peut être le mieux assumée par ceux qui ont la responsabilité publique.

Je pense, par exemple, à la délégation de dossiers dont on a parlé. Il y a, dans l'administration publique, ce qu'on appelle le contrôleur des finances et tout son appareil administratif, qui a une autonomie qui lui est donnée par la loi et qui est au-dessus des directives que pourrait donner même le ministre responsable qui est le ministre des Finances. La Loi de l'administration financière confie au contrôleur des finances des responsabilités qui sont précises et il doit en répondre via, évidemment, le ministre des Finances, à l'Assemblée nationale, mais il porte la responsabilité lui-même des gestes qu'il pose en vertu de la Loi de l'administration financière.

Si, par exemple, un dossier est transféré, je ne sais pas, supposons que c'est le dossier d'un éboulement de terrain, je prendrai un exemple bien concret, évidemment, il y a eu un effondrement de terrain à Saint-Flavien, dans le bas du fleuve, et que l'on veut confier ce dossier à un ministre quelconque, il faut, évidemment, pour que ce ministre soit responsable à l'Assemblée nationale, qu'il ait le pouvoir, qu'il ait la responsabilité des gestes qu'il a posés, donc, qu'il ait le pouvoir de signature. C'est là en effet que s'exerce la responsabilité ministérielle, effective, et les ministres qui n'ont pas l'honneur d'être actuellement à l'échelon supérieur des ministres d'Etat réaliseront très bientôt quel est le pouvoir qu'ils ont par rapport à leur ministre tuteur.

Ils s'apercevront très rapidement que, dans le fond, ce sont eux qui détiennent le pouvoir et la pyramide, vous verrez, et cela ne sera pas long, virera tête en bas. C'est normal et c'est humain, évidemment, je suis d'autant plus à l'aise pour en parler aujourd'hui que le problème ne s'est probablement pas encore posé.

Je dis donc à mes collègues de ce côté de la Chambre, à ceux de l'Union Nationale et aussi aux députés qui viennent d'arriver en cette Chambre qu'à un moment donné vous vous apercevrez qu'un dossier dans votre région ne fonctionne pas.

Vous irez voir le premier ministre et il va vous dire d'aller voir le ministre d'Etat. Je pense bien que le premier ministre n'est pas là pour régler tous les problèmes, c'est bien normal. Il va aller voir le ministre d'Etat. Le ministre d'Etat va lui dire ceci, pour des raisons dont parlait mon collègue de Saint-Laurent tout à l'heure. Le ministre d'Etat est un ministre politique, parce qu'il trace la politique d'une façon générale; donc, il n'a pas à se préoccuper toujours du quotidien administratif. Ce

ministre d'Etat va lui dire: Oui, mon gars, écoute on a pris la décision au niveau ministériel, au niveau du comité des priorités, etc., et ton problème va être réglé. Mais, à un moment donné, au bout de deux semaines, le député va se demander comment il se fait que ce n'est pas réglé. Il va retourner voir le ministre d'Etat qui va dire: Le ministre responsable n'a pas encore voulu signer le CT, n'a pas encore voulu signer l'arrêté en conseil qui donnerait suite à la décision qu'on aura prise et le ministre responsable aura toutes sortes de bonnes raisons administratives pour ce faire. On va voir, très rapidement probablement, la pyramide se renverser et finalement retrouver ce qu'on doit constater en Ontario. Les ministres, les "policy makers", finalement, ont été très dépréciés à leurs propres yeux et aux yeux de leurs collègues. J'en connais quelques-uns du moins qui ont démissionné, qui ont quitté la politique. Cela a été l'écho, l'interprétation que j'ai eue de ces gens qui, au moment où ils pensaient être les presque alter ego du premier ministre, se sont aperçus qu'ils avaient moins de pouvoirs qu'un fonctionnaire.

C'est pour cela et c'est dans cet esprit que je fais mes remarques. Si on veut déléguer un dossier quelconque à un ministre à un moment ou l'autre, il faudra assurément que la loi prévoie que le pouvoir de signature lui soit transféré. Si le pouvoir de signature ne lui est pas transféré, je crois qu'il s'agit là d'un geste inutile, qui ne réglera pas les problèmes et qui n'assumera pas la prise de décision dans le sens que le comité de coordination et de planification formé des ministres d'Etat aura voulu prendre même au niveau du Conseil du trésor qui pourrait avoir même des ré-sonnances financières importantes. C'est donc dire, Mme le Président, que ce n'est pas uniquement pour des raisons de vouloir déplaire au nouveau gouvernement. Ce n'est pas pour faire de l'obstruction; d'ailleurs je ne sais pas s'il y a d'autres personnes de mon côté qui ont l'intention d'intervenir. C'était simplement pour attirer l'attention des membres du gouvernement sur les limites qu'il y a dans ce projet de loi et sur certains de ses dangers et, peut-être, vouloir qu'on accepte bien humblement les remarques de personnes qui, au cours des dernières années, ont pu constater par l'expérience combien il était difficile, à un moment donné, de vouloir faire des changements sur papier s'il n'y a pas, dans tout l'appareil administratif, une résonance à cette transformation, résonance qui ne m'apparaît pas évidente à ce moment puisqu'elle n'a pas été préparée. Cela a été une décision qui est arrivée avec le nouveau gouvernement, quelques jours après l'élection. Je souhaite tout au moins, même si je vais voter contre ce projet de loi, que des efforts importants soient menés au niveau des fonctionnaires parce que ceux-ci peuvent bousiller tout un projet comme cela, plus que n'importe qui d'autre, beaucoup plus que les gens de l'Opposition. On devra faire un effort bien important au sujet de l'autorité des ministres qui ont le pouvoir de signature. C'est comme cela que j'ai été à même d'apprécier le pouvoir d'un ministre et sa responsabilité, c'est que finalement c'est lui qui met sa signature au bas du papier. C'est lui qui fait la recommandation au Conseil des ministres. Quand cela ne marchera pas plus tard, si une erreur est commise, si une faute a été commise de bonne foi, de mauvaise foi, peu importe la façon, c'est lui qui va en porter la responsabilité et celui qui serait son ministre senior qui aurait recommandé la politique, vous ne verrez son nom apparaître nulle part.

Finalement, c'est à cela que va se ramener probablement l'expérience que nous avons vécue dans d'autres secteurs. Elle va également jouer au niveau des sous-ministres. C'est pourquoi il faudra être capable, tout au moins, de faire un effort de vente considérable au niveau des sous-ministres et de s'assurer du concours des sous-ministres, de celui de leurs adjoints et de ceux qui sont dans les comités de planification dans chacun des ministères, parce que, dans la plupart des ministères, il y a des sections de planification. Si ces gens se rendent compte, à un moment ou à l'autre, que leur travail ne sert à rien, mais qu'il est remplacé par le travail d'un groupe qui est autour du ministre d'Etat responsable de tout un secteur, nous aurons une fonction publique qui sera malheureuse et, finalement, nous aurons probablement un ensemble administratif qui sera complètement mêlé. Je vous assure, Mme le Président, qu'il n'y a rien pour bousiller un beau projet ministériel comme un groupe de fonctionnaires qui ne sont pas contents, parce qu'à ce moment les poignées de sable dans l'engrenage émanent de partout et, finalement, vous avez ce qui arrive à tout gouvernement lorsque les bouleversements sont trop grands.

Je pense, par exemple, dans mon esprit, à la mécanisation des opérations comptables, comment ce processus commencé sous l'ancien gouvernement, a été difficile. Messieurs les ministres, vous verrez qu'à un moment donné on va vous écrire, on va vous téléphoner pour vous dire: II y a tant de chèques qui n'ont pas été émis à telle place. Evidemment, changer toutes les habitudes de l'appareil administratif en quelques semaines, ce n'est pas une tâche facile, même si, au demeurant, nous avions, dès le début de cette opération de transformation, engagé une opération de relations publiques vis-à-vis de tous les secteurs de l'administration publique. Malgré tout cela, malgré la bonne volonté qu'y ont mise les sous-ministres, les sous-ministres adjoints et les responsables des services comptables, c'est une opération qui a pris presque cinq ou six ans à se roder. Aujourd'hui, on commence à peine à atteindre l'objectif que nous recherchions, c'est-à-dire diminuer de plusieurs semaines les délais de paiement en pensant que la mécanographie était plus vite que le geste humain. Mais il y avait des systèmes qui étaient organisés, des procédures qui étaient organisées et, avant que tout cela soit modifié, cela a pris cinq ou six ans. Même si je vais voter contre ce projet de loi parce que je le trouve inutile, dangereux en termes de planification et de responsabilité ministérielle, je vais certainement quand même souhai-

ter et suggérer au gouvernement qu'il consacre des efforts importants au niveau de l'administration pour convaincre, même à partir des troisième et quatrième paliers de l'administration publique, ces gens qu'il y va de l'avantage de l'administration publique et d'une planification de procéder et d'accepter ces modifications.

Mme le Vice-Président: La réplique de M. le premier ministre.

M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): Je veux entamer rapidement...

M. Levesque (Bonaventure): Personne ne vous appuie?

M. Lévesque (Taillon): Je voudrais commencer en remerciant beaucoup le député de Lotbinière, le député de Jean-Talon et le député de Saint-Laurent pour beaucoup de suggestions valables, de réflexions valables qu'ils ont déjà faites sur ce projet de loi. Je remercie également le chef de l'Opposition pour son début qui était solennellement dans le sens de l'adaptation au changement, pour sa fin qui était très drôle, surtout accompagnée du graphique qu'on va essayer d'examiner et d'ajuster le mieux possible.

Je dois dire que le corps du sujet, dans le cas du chef de l'Opposition était moins bon, parce que, d'une part, il commence par réclamer, a toutes fins utiles, la paternité à peu près totale des mesures que nous prétendons prendre, et, après ça, il fait tout un effort presque hargneux, à un moment donné, pour essayer de tuer l'enfant. Je n'ai pas trouvé ça très bien au point de vue de la légitimité dont essayait de se réclamer le chef de l'Opposition. Il a voulu se relier à une continuité — mais je l'avais fait déjà — par exemple, à ces comités interministériels permanents. D'accord! Cela découle de cette perception, pas seulement au Québec, qu'on a eue dans la plupart des gouvernements contemporains, qu'ils soient provinciaux, nationaux, peu importe, de l'absolue nécessité d'essayer de passer à travers la complexité que présentent les problèmes et de dégager une perspective prioritaire dans bien des cas ou interdépartementale aussi, parce que là, ça demande des coordinations.

C'est pour ça que sont apparus ces comités interministériels dans notre cas spécifique. C'est également pour ça aussi qu'à l'occasion — je sais bien que c'était vrai — l'équivalent de ce qu'on appelle le comité des priorités maintenant, c'est-à-dire les cinq ministres d'Etat, le ministre des Finances et du Conseil du trésor, le ministre des Affaires intergouvernementales, pour des raisons évidentes, viennent participer au travail de priorité. Cela se faisait déjà à certains moments, je pense, sous l'ancien gouvernement.

Il s'agit non pas d'institutionnalier ça de façon bureaucratique; il s'agit plutôt, de façon très souple, d'essayer de mettre des hommes politiques en charge d'une bonne partie de ce travail. Avec un négativisme que j'ai trouvé un peu décevant tout à l'heure, c'est parfaitement le droit de quiconque en Chambre d'avoir son opinion, le chef de l'Opposition a essayé d'établir que c'était inutile et superflu, après avoir, à toutes fins utiles, souligné encore mieux que moi, que ça découlait plutôt d'une logique et d'un développement qui étaient appelés au moins comme un essai de solution politique. On dit que c'est inutile. Pourquoi? Parce que les comités permanents seuls — je pense que celui qui a surtout développé l'argument, c'était le député de Saint -Laurent, à partir de son expérience — tels qu'ils étaient, présidés par des ministres départementaux ou sectoriels, pouvaient faire le travail; il a donné l'exemple, entre autres, du cas des maladies industrielles.

Sans vouloir être méchant, je pourrais dire que — on est au courant un peu de l'héritage qu'on a assumé après quelques semaines — justement, c'est un beau cas où peut-être que le ministre des Affaires sociales du temps, chargé de l'énorme poids de son ministère sectoriel, pouvait faire un excellent président académique de ce comité interdépartemental, mais, au point de vue de la décision politique, on peut dire une chose, par exemple, c'est que tout ce que ça implique dans le domaine des maladies industrielles de complexité et de volonté d'agir, ça ne s'est pas particulièrement dégagé de l'action de l'ancien gouvernement.

On a vu, bloquées dans le pipe-line, comme on dit dans le jargon administratif, toute une série d'études qui ont été, finalement, complétées, en partie au moins, dans un secteur, par le rapport Beaudry, tout récemment, sur l'amiante. On a vu se dégager de ces études — et on n'a pas fini de les étudier, justement, ces études — toute une perception interdépartementale des problèmes, mais ce qu'on n'a vu nulle part, et ce qu'on chercherait longtemps si on voulait suivre, là-dessus, les traces de l'ancien gouvernement, c'est la volonté politique de déboucher sur quelque chose et non pas simplement de continuer indéfiniment à étudier et à raffiner des politiques potentielles.

On pourrait dire la même chose dans le domaine économique, en ce qui concerne le secteur des achats du domaine public. Je pense qu'il est reconnu, c'est presque devenu folklorique, qu'à peu près à tous les deux ou trois ans il y a une étude qui se refait, à partir des constatations qui s'accumulent d'année en année, sur une politique des achats du gouvernement. C'était devenu vraiment du folklore. J'en connais le début, j'ai participé au début. Dans une des grandes régies publiques, qu'est I'Hydro-Québec, il y a une dizaine d'années, on avait établi une politique préférentielle des achats québécois. Il y a eu une certaine répercussion du côté de l'appareil gouvernemental dans son ensemble et de là ont découlé des études, mais des études qui sont toujours restées bloquées dans le pipe-line et n'ont jamais abouti.

Un des anciens collègues de nos amis d'en face, qui était ministre des Institutions financières, en particulier, M. Tetley, avait promis que sur la

dernière des études on aboutirait à quelque chose après les élections. Vu que cela implique, là encore, plusieurs départements du gouvernement, il y a un mandat très clair qui a été donné à un des ministres d'Etat de cesser d'étudier et d'aboutir, bon Dieu! A ce point de vue, le mandat est clair, la responsabilité aussi. Cela a été rendu public et il n'y a pas de cachette là-dedans. Je crois que cela va pouvoir déboucher mieux que quand c'était un comité permanent ad hoc, qui était présidé comme cela, par un ministre qui était déjà surchargé non seulement de responsabilités, mais aussi d'aspirations, et qui était l'ancien ministre de l'Industrie et du Commerce. Ce sont des domaines où le résultat tangible et concret, après six ans et demi de gouvernement de nos amis d'en face — après tout, j'ai bien le droit de le souligner, on ne s'est pas gêné pour souligner que nous, en quelques semaines, on pouvait avoir fait des improvisations — non seulement on n'a pas improvisé sur des sujets aussi importants que ceux-là, mais on n'a abouti à rien de concret et de définitif comme politique et surtout comme application des politiques.

Il nous semble qu'en institutionnalisant, à la tête de ces comités et aussi, par voie parallèle, dans le comité des priorités, la présence d'hommes politiques ou de femmes politiques chargés de mener, comme mandat précis, les études, les recherches, le travail interdépartemental jusqu'à des aboutissements, qui sont des politiques et qui impliquent une action concrète dans le paysage, il me semble que c'est non seulement la conclusion logique des démarches qui avaient été faites, mais que c'est une façon d'essayer politiquement de régler le problème et non pas justement de le laisser traîner indéfiniment dans la bureaucratie.

Parce que moi, je vois beaucoup plus de dangers de bureaucratisme s'il n'y a pas de responsabilité politique à l'endroit où se trouvent les mandats, à l'endroit où se trouvent les problèmes de complexité et de priorités — c'est là où se trouve le danger d'un maquis bureaucratique — plutôt que s'il y a une responsabilité politique très claire qui est maintenant, si vous voulez, une institution du cabinet et qu'on va mettre à l'essai pendant les mois qui viennent.

On a dit que, peut-être, ce genre de décision politique pour assurer la cohérence de l'action gouvernementale, cela pouvait miner la responsabilité ministérielle. J'ai dit tout à l'heure ce qui me paraît évident. On peut bien raffiner, si on veut, à l'extrême, puis même "chinoiser" sur les conséquences possibles, mais j'ai dit tout à l'heure ce qui me paraissait très clair de façon immédiate. C'est que, par rapport aux mandats précis qui seront rendus publics, qui doivent d'abord être approuvés par le Conseil des ministres dont disposeront les ministres d'Etat, ils seront responsables devant la Chambre. Ils seront responsables des lois qu'ils auront à piloter en fonction, le cas échéant, de ces mandats. Ils seront responsables, le cas échéant aussi, des tranches budgétaires qui seront clairement définies.

A ce moment-là, le pouvoir de signature sera entraîné automatiquement aussi, pour répondre aux préoccupations du député de Jean-Talon. Pour ce qui est de cette espèce de commencement de mutation constitutionnelle — on sait qu'on est en institution britannique et que l'usage, des fois... mais cela ne se fait pas si vite que cela, quand même, mais que l'usage, des fois, peut amener des changements fondamentaux — pour ce qui est donc de ces mutations constitutionnelles possibles que voyait le député de Saint-Laurent, l'ancien ministre des Affaires sociales, et même de dangereuses érosions que cela pourrait signifier pour le pouvoir traditionnel du premier ministre, moi, il me semble qu'on peut penser qu'il peut y avoir comme cela, peu a peu, progressivement, une sorte de réorientation de la définition du cabinet. Mais je crois que c'est dans le sens logique que d'autres ont découvert dans le monde. C'est qu'il faut que le gouvernement devienne de plus en plus un travail d'équipe, collégial et de moins en moins, si vous voulez, non seulement centralisé, mais souvent paralysé — cela, je suis sûr que l'ancien gouvernement l'a connu et moi je l'ai connu dans un autre gouvernement — paralysé par la surcharge constante qu'on met toujours sur le bureau du même ou qui finit toujours par aboutir, dans le système traditionnel, sur le bureau du même.

Ce n'est pas pour rien que, par exemple, en Angleterre, et personne ne soupçonne, officiellement en tout cas, que la mère des Parlements puisse s'en aller vers un régime présidentiel, et pourtant, en Angleterre, on a créé le "inner cabinet", qui a découlé de l'expérience du temps de guerre, mais qui s'est admirablement adapté, en tout cas d'après l'expérience et ce que les observateurs en ont constaté.

Il s'est admirablement adapté à la reconstruction d'après-guerre et ensuite à cette énorme complexité de l'accélération du changement auquel ils avaient à faire face là aussi.

Evidemment, quand on regarde l'état actuel de l'Angleterre, ce n'est peut-être pas le résultat le plus brillant de l'histoire contemporaine, mais en tout cas, ils sont contents de leur expérience gouvernementale.

Je crois que l'expérience de l'Ontario, contrairement à ce que disait le député de Jean-Talon, n'est pas du tout négative dans ses résultats. Cela peut être négatif pour un ou deux personnages politiques qui ont trouvé qu'ils fonctionnaient trop dans un vacuum, que cela ne répondait pas à leurs aspirations, à leurs ambitions normales, mais je sais, au contraire, d'après ce que j'en ai su récemment, que l'ensemble de l'expérience — il y a toujours des gens qui la critiquent — après quelques années, est considérée comme positive, et qu'il y a des gens qui ont appris à fonctionner dedans et à fonctionner valablement, même si la part de responsabilité, de mandat clair, etc., n'est pas du tout comparable à celle que nous, nous prévoyons, pour éviter qu'il y ait cette espèce de sentiment de vide dans la carrière de quelqu'un.

J'ai presque terminé, parce que je ne vois pourquoi on prolongerait indéfiniment. Me

permet-on, Mme le Président, de dépasser de deux ou trois minutes pour terminer ma réplique? Je veux dire simplement, sur un autre point, très rapidement, que je ne partage pas et que le gouvernement ne peut partager non plus l'inquiétude qu'on a exprimée aussi à propos des conséquences, par rapport à la confusion des citoyens et à l'éloignement éventuel des citoyens. Je crois que c'est exactement le contraire. Si on essaie cette réforme ou cette modification, pour ne pas employer le mot présomptueux, avec bonne foi et qu'on a — et je suis d'accord avec le député de Jean-Talon — le plus possible — et j'y compte, parce qu'après tout, ils sont des serviteurs de l'Etat, comme on l'est, nous aussi provisoirement — la coopération convenable, en particulier, au niveau des cadres supérieurs du fonctionnarisme, je crois qu'au contraire cela peut diminuer la confusion — parce que Dieu sait qu'on a nagé dedans à bien des points de vue — et diminuer aussi le délai des décisions importantes.

Il ne faut pas non plus caricaturer. L'ancien ministre et député de Jean-Talon était en train de nous parler des boisés, des petits boisés. Si j'ai bien compris le dessin faramineux qu'il était en train de faire, le propriétaire de petits boisés ne saura plus à qui s'adresser. Bien voyons! Le propriétaire de petits boisés continuera normalement, quand il s'agit de choses concrètes d'administration, à s'adresser au ministère des Terres et Fôrets dont cela relève à ce moment-là.

Concrètement, il n'y a rien de changé dans l'administration courante des ministères, au contraire. Mais pour ce qui est de dégager une perspective, et quand tu prends les petits boisés et les eaux d'une région et qu'on veut commencer à parler d'aménagement et d'essayer de voir un peu — puisque gouverner c'est, en principe, prévoir — où tout cela nous mènera dans cinq ou dix ans, là je crois que l'interministériel et le rôle du personnel professionnel qui sera autour des ministres d'Etat et ce qu'ils peuvent tirer des ministères départementaux peut aider beaucoup, comme jamais auparavant, à essayer de dégager cette perspective, au lieu de toujours arriver tête la première dans les glissements de terrain, si on veut, mais aussi des glissements administratifs ou une espèce de paralysie de la décision.

Je pense que, dans le système traditionnel — je l'ai assez connu — il fallait pousser sans arrêt, il fallait littéralement faire des pressions et, parfois, du chantage pour essayer d'obtenir des décisions de l'ensemble de l'appareil politique. Je pense qu'il y en à parmi nos amis d'en face qui l'ont assez vécu pour savoir que c'est vrai et que, peut-être, la seule façon de corriger cela, c'est que justement on essaie de développer une collégialité d'équipe à l'intérieur de l'appareil de décision politique.

A ce point de vue, l'instauration des ministres d'Etat comme des égaux absolus, pas super, mais chargés essentiellement de mâcher les priorités et d'essayer de trouver une cohérence dans les choses qui affectent plusieurs ministères, peut aider à cette collégialité, pourvu qu'on l'accepte de bonne foi. Cela peut aider aussi à empêcher le citoyen d'avoir l'impression qu'il est complètement perdu — je parle surtout non pas d'un citoyen individuel, mais d'un groupe de citoyens; cela peut être une région, un secteur de l'économie ou de la société — qu'il n'y a plus de moyens de déboucher, que tout est bloqué parce que cela a le malheur de frapper deux ou trois ministères en même temps, le problème qu'il pose. Cela aussi, on en voit les résultats dans tous les coins du Québec après quelques années.

Je ne dis pas que nous avons trouvé la recette magique pour en sortir. Je dis simplement que cela vaut la peine de faire un effort de bonne foi, qui est, en fait, une conclusion logique de certaines approches qui ont été faites depuis plusieurs années, qui rejoint analogiquement ce qui s'est fait ailleurs, et qui, à notre humble avis, sauf à très long terme, ne présente pas de grands dangers de mutation constitutionnelle profonde.

Cela vaut la peine de faire l'expérience et — je le répète de nouveau, malgré la déception que j'ai eue à certains moments du discours du chef de l'Opposition — on compte quand même sur la vigilance pratique et critique de l'Opposition, y compris probablement sur une amélioration du graphique, de l'organigramme qu'on nous a remis tout à l'heure.

Si, par hasard, il arrivait, après le vote que nos amis du Parti libéral, de l'Opposition officielle donneront, qu'ils avaient raison, nous l'admettrons. Même l'Opposition, à ce moment, devrait s'en chagriner parce que ce serait un échec qui signifierait quand même que nous n'avons pas encore réussi à amorcer, à trouver le moyen pour aménager le changement et aménager les priorités qui, souvent, sont devenues très urgentes, à force de négligence.

Si l'expérience doit, au contraire, nous donner raison, je comprendrai quand même, très démocratiquement, très parlementairement, parce que ça nous a été utile cette discussion, que l'Opposition ait justifié son vote par le doute initial qui a été exprimé par le chef de l'Opposition. On admet tout de suite, dès le départ, que certaines des remarques qui ont été faites vont nous aider dans notre propre réflexion et à aménager l'expérience. Tout ce qu'on demande, c'est qu'il n'y ait pas de négativisme systématique et, si possible, qu'on sorte de ce langage caricatural qui pourrait entretenir la confusion. Cela serait vraiment prendre une attitude purement partisane sur une mesure qui n'a rien foncièrement de partisan. On va la garder comme cela, non partisane, quoi que fassent ceux qui ne sont pas d'accord.

Mme le Vice-Président: Cette Assemblée est-elle prête à procéder à l'adoption de la deuxième lecture de cette motion?

NI. Lavoie: Mme le Président, nous allons demander un vote enregistré et nous aimerions que ce vote s'exprime dès la reprise de la séance à 15 heures.

M. Burns: Entièrement d'accord, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: Cette Assemblée suspend ses travaux jusqu'à quinze heures.

(Suspension de la séance à 13 h 8)

Reprise de la séance à 15 h 10

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Vote de deuxième lecture

Le Président: Nous allons maintenant procéder au vote sur la motion de deuxième lecture. Qu'on appelle les députés!

A l'ordre! Nous allons maintenant procéder au vote. Que ceux qui sont pour la motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Burns, Mme Cuerrier, MM. Cardinal, Bédard, Lau-rin, Morin (Sauvé), Parizeau, Marois, Landry, Léonard, Duhaime, O'Neill, de Belleval, Mme Payette, MM. Lessard, Proulx, Lazure, Chevrette, Paquette, Marcoux, Alfred, Vaugeois, Martel, Fallu, Ran-court, Mme Leblanc, MM. Bertrand, Godin, Desbiens, Johnson, Laplante, Guay, Mercier, Laberge, Marquis, Lacoste, Ouellette, Perron, Brassard, Clair, Gosselin, Lavigne, Dussault, Charbonneau, Jolivet, Boucher, Gravel, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Biron, Grenier, Russell, Goulet, Fontaine, Brochu, Shaw, Le Moignan, Dubois, Cordeau.

Le Président: Que ceux qui sont contre la motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Bonaventure), Lavoie, Mackasey, Forget, Garneau, Mailloux, Goldbloom, Saint-Germain, Raynauld, Mme Lavoie-Roux, MM. Giasson, Lamontagne, Lalonde, Blank, Caron, O'Gallagher, Picotte, Larivière, Ciaccia, Marchand, Gratton, Pagé, Springate.

Le Président: Que ceux qui veulent s'abstenir veuillent bien se lever.

Le Secrétaire: Pour: 60 — Contre: 23 Le Président: Cette motion est adoptée.

Motion de déférence à la commission plénière

M. Burns: M. le Président, je pense que je dois faire motion immédiatement pour que ce projet de loi soit déféré à la commission plénière de l'Assemblée.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

M. Burns: ... cet après-midi.

Le Président: La commission siégera cet après-midi.

Conformément à l'ordre qui a été donné par cette Chambre ce matin, je voudrais maintenant

laisser la parole au ministre de la Justice, qui a une déclaration à faire.

Déclaration ministérielle

Mandats juridiques du gouvernement

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, j'ai le plaisir et l'honneur de faire part aux membres de cette Assemblée du changement que le gouvernement entend apporter à la politique d'octroi des mandats juridiques du gouvernement.

Les gouvernements antérieurs ont eu recours à des bureaux de la pratique privée pour plaider les plaintes pénales intentées en vertu de plus de 250 lois statutaires et pour représenter le gouvernement du Québec dans les nombreuses causes civiles où il est impliqué.

En vertu de cette pratique, près de $5,4 millions ont été versés au cours de la dernière année en honoraires à des avocats et notaires de la pratique privée. Pour l'année financière 1977/78, il était prévu d'augmenter cette somme à $6,1 millions. En 1976, dans le secteur civil, M. le Président, $2,2 millions ont été versés en honoraires à 225 avocats. Dans le secteur pénal, 200 avocats ont reçu un peu plus de $2,3 millions. Je rappelle simplement qu'il y a actuellement 6155 avocats inscrits au Barreau. Quant aux notaires, 967 d'entre eux ont reçu un peu plus de $875 000. Le recours systématique aux bureaux de pratique privée, en plus de favoriser un nombre restreint d'avocats et de notaires, s'est révélé assez coûteux sans pour autant assurer une meilleure qualité des services rendus.

Le recours à l'extérieur a aussi entraîné la démobilisation et le désintéressement de plusieurs avocats et notaires de la fonction publique. Comment aurait-il pu en être autrement lorsqu'un avocat qui a préparé un dossier le voit transféré, au dernier moment, à un avocat de la pratique privée, ou lorsqu'un notaire n'a pas souvent l'occasion de pratiquer les différents aspects de sa profession?

Poursuivant le triple objectif d'économie des deniers publics, de revalorisation de la fonction publique et d'élimination du favoritisme, j'ai l'intention de mettre un terme à cette pratique et il me fait plaisir de tracer les grandes lignes de la nouvelle politique que nous entendons suivre.

En matière pénale, à compter du 15 janvier 1977, toutes les plaintes par suite d'infraction aux lois statutaires seront plaidées par les procureurs de la couronne, à l'exception de celles du ministre du Revenu qui continueront d'être intentées par l'intermédiaire de ses propres bureaux de procureurs et des causes relevant de la Cour du bien-être social où il existe des bureaux de procureurs permanents.

Dans les matières civiles, j'ai l'intention de créer un bureau composé d'avocats plaideurs permanents, dynamiques, compétents et efficaces pour desservir tous les districts judiciaires, avec bureaux régionaux à Montréal, à Québec et des sous-bureaux à Rimouski, Chicoutimi et Hull. J'ai également l'intention de faire procéder au recrutement de quelques notaires qui agiront tout comme ceux qui exercent dans la pratique privée. Ces notaires, employés du gouvernement, seront, dans un premier temps, intégrés au bureau des procureurs permanents et, compte tenu des besoins, pourraient être rattachés aux différents districts judiciaires. Ils auront la charge des 10 000 mandats que le gouvernement octroie chaque année.

Pour réaliser cette réforme, nous devrons procéder progressivement à l'engagement de 20 à 30 nouveaux procureurs de la couronne, de 20 à 30 avocats plaideurs et de 10 notaires, ainsi que du personnel de soutien dont ils auront besoin. Il est évident que les conseillers juridiques actuellement en place dans les contentieux auront la possibilité de se présenter aux concours qui seront ouverts prochainement. Mes collègues de la Fonction publique, des Travaux publics et du Conseil du trésor m'ont assuré de leur entière collaboration de façon à mettre en oeuvre, dans les plus brefs délais, cette politique qui permettra d'épargner, une fois le régime mis en place, plus de $2 millions par année, tout en améliorant la qualité des services juridiques du gouvernement du Québec.

Quant aux mandats en cours, j'ai l'intention de laisser généralement aux mandataires le soin de les terminer avec la plus grande diligence et au moindre coût.

Par ailleurs, dans les cas exceptionnels où le personnel juridique du ministère ne pourra offrir au gouvernement les services juridiques requis, nous aurons recours aux spécialistes qui sont dans la pratique privée et dont la compétence à cette fin aura été reconnue par le Barreau.

Je suis convaincu, M. le Président, que tous les organismes gouvernementaux, indépendamment de leur degré d'autonomie, suivront la voie que nous traçons aujourd'hui. J'ai déjà l'assurance du ministre du Travail, dont relève la Commission des accidents du travail, la Commission du salaire minimum et l'Office de la construction, qu'il mettra sur pied une politique analogue. J'ai l'intention, au cours des prochaines semaines, de contacter les organismes qui ont recours aux avocats et notaires de la pratique privée afin d'envisager l'implantation d'une politique uniforme.

En terminant, M. le Président, je profite de cette occasion pour annoncer que nous sommes parvenus à un accord de principe avec les avocats et notaires du gouvernement. Ces négociations, qui duraient depuis près d'un an et demi, m'ont permis de rencontrer leurs représentants, qui m'ont assuré de leur entière collaboration pour mener à bien la réforme importante que nous entreprenons aujourd'hui.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, à la lecture de la déclaration ministérielle du ministre de la Justice, mon bon ami le député de Chicoutimi, la première remarque qui m'est venue à l'esprit, c'est que plus cela change, plus c'est pareil. On a un problème et on pense le régler en engageant des fonctionnaires. On dit que cela coûte $5 millions, mais on ne sait pas combien cela coûterait de le faire faire par la fonction publique. On n'a pas fait d'étude et on a fait cette déclaration, on a pris cette décision qui m'apparaît tout à fait improvisée; je me demande si c'est parce que le ministre de la Justice s'est fait assaillir en fin de semaine par les patroneux pé-quistes, lors de la réunion du conseil national, qui ont la dent longue et l'estomac creux. C'est peut-être pour se protéger contre...

M. Burns: II n'a pas le tour pantoute.

M. Lalonde: C'est peut-être pour se protéger qu'il a pensé, en toute bonne foi, à régler le problème en décidant, de façon apparente, de recourir simplement à des employés du gouvernement pour exercer les fonctions d'avocat. Il faut dire tout d'abord qu'on n'a rien inventé.

Les procureurs de la couronne permanents existent depuis quand même un bon moment. C'est l'ancien gouvernement, le gouvernement précédent qui a mis de l'avant cette réforme qui était fondamentale au niveau de l'administration de la justice criminelle.

Mais dans les autres secteurs, je vois que le ministre n'a pas démontré que ce serait plus économique et plus efficace de recourir. On dit: Cela va être plus économique, mais on ne le démontre pas. On parle de $5 millions que cela coûte actuellement. C'est beaucoup d'argent, $5 millions, mais la vraie question c'est: Est-ce trop? En avons-nous pour notre argent?

Quand on pense que tous les professionnels de la santé nous coûtent $540 millions, il ne faut quand même pas être impressionné outre mesure par les chiffres qu'on nous a mentionnés. Combien cela coûterait-il pour engager ces dizaines et ces dizaines de fonctionnaires, avocats, notaires, une centaine, je crois, qu'on a dit, les bureaux, d'après la déclaration ministérielle, on est rendu à 70 au moins, le personnel clérical, les secrétaires, les bureaux, l'équipement?

J'invite le ministre à venir nous faire rapport là-dessus, et dans quelque temps, il verra jusqu'à quel point sa décision est prématurée et jusqu'à quel point on a besoin d'une façon plus rationnelle pour régler les problèmes de l'administration publique.

Doit-on voir — et c'est là-dessus que je veux terminer — dans cette décision, un peu jetée à la va-comme-je-te-pousse, un signe précurseur d'un refus systématique de recourir à l'entreprise privée, surtout en matière de services professionnels? On voit la valse des déclarations ministérielles depuis quelque temps, il y en a encore quelques-unes qui s'en viennent. Le gouverne- ment va-t-il bientôt nous annoncer qu'on va socialiser tous les services professionnels, y compris les services de la santé? Est-ce une décision ponctuelle ou est-ce une approche générale que le gouvernement veut nous imposer? Ce sont les véritables questions qu'on doit se poser et je n'en ai pas de réponse actuellement.

Le Président: M. le ministre de la Justice veut-il exercer son droit de réplique?

M. Bédard: Oui, M. le Président.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: Ma première remarque serait de vous dire que j'ai déjà entendu des répliques, de la part de l'ex-Solliciteur général, qui étaient beaucoup plus éloquentes que celles qu'il nous fait aujourd'hui. Sa critique — c'est le moins que je puisse en dire — est très courte et très laborieuse. L'ex-ministre s'est avancé tout d'abord en nous disant que nous avions fait cette réforme sans avoir fait les recherches nécessaires sur l'implication des coûts. Je dois lui dire qu'au Conseil du trésor, avant de présenter l'énoncé de cette politique, nous avions également fait les représentations nécessaires avec chiffres à l'appui pour, d'une part, prouver ce qu'avaient coûté les services juridiques jusqu'à maintenant, en ayant recours à la pratique privée, et, d'autre part, expliquer quelle était l'économie que nous pouvions faire en changeant ce système de patronage.

M. le Président, jamais, je vous le dis bien sincèrement, j'aurais cru que l'Opposition pousserait l'indécence jusqu'à réagir négativement à l'énoncé de cette politique que nous faisons connaître aujourd'hui. Je crois pouvoir dire... M. le Président, le gouvernement et le ministre de la Justice ont eu le courage de poser un geste pour abolir ce système de patronage qui était entretenu par les ex-gouvernements, geste de courage que n'ont jamais eu les gouvernements qui nous ont précédés.

Leurs réactions, surtout venant de l'ex-Solliciteur général, prouvent tout simplement que le gouvernement qui nous a précédés était assurément, tel que nous le disions dans le temps, un gouvernement de patroneux et qu'il entend demeurer un gouvernement de patroneux.

L'ex-Solliciteur général s'est avancé dangereusement en affirmant que le ministre de la Justice et le gouvernement avaient pu mettre de l'avant cette politique à la suite de pressions de la part d'avocats péquistes patroneux.

Je pourrais lui faire lire des lettres où pas moins d'au-delà d'une trentaine d'avocats, justement péquistes, ont écrit au ministre de la Justice afin de lui demander d'agir dans le sens que nous le faisons aujourd'hui, à savoir, une fois pour toutes, de mettre fin au régime de favoritisme et de patronage qui existait.

Je tiens personnellement...

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que ce sont les trente que vous allez engager?

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. Bédard: M. le Président, il y aura des concours pour ceux qui devront être engagés, pas des concours paquetés comme dans le temps des libéraux, à part cela.

M. Levesque (Bonaventure): C'est pour cela qu'on était accusé d'engager seulement des pé-quistes.

Le Président: A l'ordre! A l'ordre, M. le chef de l'Opposition!

M. Bédard: M. le Président, je tiens justement à féliciter ces avocats péquistes qui m'ont encouragé, moi et le gouvernement, à agir dans le sens que nous le faisons aujourd'hui, autrement dit qui ont eu une attitude de respect envers leur profession et envers la justice, attitude qui est propre à revaloriser la profession du droit, plutôt que d'avoir une attitude de gens affamés qui sont pressés de remplacer ceux qui se gavaient avec le gâteau qui existait auparavant. Concernant une critique, que je crois majeure, qui a été faite encore, je crois, à la légère, par l'ex-Solliciteur général, qui est celle consistant à dire qu'on avait un problème et que nous l'avons réglé en en créant un autre en faisant appel aux fonctionnaires, je crois qu'il n'a pas lu l'essence même de la politique annoncée où nous disons que nous voulons créer pour le secteur civil un bureau d'avocats plaideurs aussi efficace, dynamique et compétent que celui des procureurs de la couronne. Quand l'ex-ministre de la Justice critique l'aspect de la fonctionnarisation de ces avocats, je pense qu'il dresse un bilan sévère et injuste envers le travail des procureurs de la couronne. Le ministre de la Justice actuel a pleine confiance aux procureurs de la couronne qui, à mon sens, font un travail formidable. C'est l'intention du ministre de la Justice de les aider et non pas de faire preuve d'un manque de respect en les dévalorisant comme l'a fait...

M. Lalonde: C'est déjà fait. C'est nous qui l'avons construit.

M. Bédard: ... l'ex-Solliciteur général. M. le Président, je n'ai pas d'autre chose à ajouter.

Travaux parlementaires

M. Burns: M. le Président, dans un premier temps, je fais part à nos collègues de la Chambre qu'il semble y avoir un consentement à l'effet que demain, c'est-à-dire mercredi, normalement une journée réservée aux députés, nous puissions siéger en vertu des ordres du jour prévus pour le mardi et le jeudi. Il semble également qu'on accepterait que la Chambre puisse se réunir à dix heures. Je fais donc motion, M. le Président, et je voudrais que ce soit un ordre de la Chambre, que demain elle se réunisse à compter de dix heures, selon l'ordre du jour prévu pour le mardi à notre règlement, et que nous puissions terminer nos travaux avec la suspension normale à onze heures, demain soir.

M. Lavoie: Après consultation de notre côté, l'Opposition officielle, nous voulons aujourd'hui offrir notre collaboration positive aux travaux de cette Assemblée durant cette mini-session. Je voudrais bien que le leader du gouvernement se rappelle que nous n'avons pas l'intention de retarder des travaux inutilement et priver les familles des membres de cette Assemblée de leur présence durant la période des Fêtes de fin d'année, de Noël et du Jour de l'an.

Nous avons l'intention d'étudier à fond tous les projets de loi. Nous considérons, actuellement, que nous sommes dans une mini-session et nous tenterons de ne pas copier, peut-être, l'exemple du gouvernement actuel alors qu'il siégeait de ce côté-ci de la Chambre. Par contre, nous le prévenons que ce n'est pas une habitude que nous voulons prendre actuellement, et que s'il entend nous bousculer lors des fins de sessions, cette collaboration positive que nous lui offrons aujourd'hui ne se répétera nécessairement pas.

M. Burns: M. le leader de l'Opposition, avec votre permission, M. le Président, je vous prie de remarquer qu'il n'y a pas actuellement au feuilleton d'avis de suspension des règlements de la Chambre, qu'il n'y en aura pas. Je prends l'engagement formel qu'il n'y en aura pas.

M. Lavoie: C'est justement à cause de notre collaboration, incidemment.

M. Burns: Si votre collaboration continue à être aussi constante et positive qu'elle l'est actuellement, je ne vois pas pourquoi j'imposerais des règles spéciales de fin de session pour faire siéger les gens jusqu'à trois, quatre ou cinq heures du matin. Ce n'est pas du tout mon intention.

Jusqu'à maintenant, ce que nous avons fait, M. le Président, c'est toujours par consentement avec l'Opposition que nous avons modifié les règles de notre règlement, et j'en suis fier. Je félicite d'ailleurs le leader de l'Opposition, ainsi que le chef de l'Opposition, qui m'ont, jusqu'à maintenant, donné une collaboration des plus entières.

M. le Président, je fais donc cette motion avec le consentement de l'Opposition et, je le présume également, avec le consentement de l'Union Nationale.

M. Grenier: M. le Président, je pense bien que de notre côté il n'y a pas d'objection, à condition qu'on s'entende pour qu'il y ait bien une période de questions demain matin à dix heures, qu'on ne la supprime pas.

M. Burns: Cela ne supprime pas la période de

questions. C'est l'ordre du jour du mardi, sauf que la période de questions est avancée à dix heures ou, en fait, dans les minutes qui suivront au lieu d'être à trois heures ou dans les minutes qui suivraient. D'accord?

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président... Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Le leader du gouvernement avait très bien parlé jusqu'au moment où il a évoqué des périodes qui pouvaient durer jusqu'à trois ou quatre heures du matin. Or, M. le Président, comme il y a plusieurs nouveaux députés dans cette Assemblée, je ne voudrais pas que ces paroles soient interprétées comme se référant à quelque chose de récent. Durant les dernières années, le leader du gouvernement admettra qu'à la suite des consultations que nous avions régulièrement nous nous sommes souvent entendus pour éviter même qu'une motion soit déposée ou, même si elle l'était, pour éviter qu'elle ne soit même adoptée. Je pense bien que c'est cette coopération que je veux évoquer plutôt que les heures tardives qui sont maintenant des choses d'un passé assez lointain.

M. Burns: M. le Président, je pense que je dois rendre justice au chef de l'Opposition. Dans les deux dernières années, le chef de l'Opposition, qui était leader du gouvernement à l'époque, et moi-même, qui étais le leader de l'Opposition, nous avons réussi à nous entendre, et, effectivement, je lui rends justice là-dessus. Nous avons réussi à manipuler, si vous voulez, les règles de la Chambre dans des cadres normaux.

Le Président: Est-ce que la motion du leader parlementaire du gouvernement est adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Président: Adopté. Cela devient alors un ordre de la Chambre.

M. Burns: M. le Président, une dernière chose avant de revenir à l'ordre du jour régulier. On m'informe qu'il serait assez rapide et assez facile de régler le projet de loi no 83, Loi modifiant la Loi de l'administration financière, du moins de l'avis que j'ai reçu du député de Jean-Talon. Ce que le député de Lotbinière m'a dit tout à l'heure me laisse croire que nous pourrions très facilement révoquer l'ordre qui remet ce projet de loi à la commission parlementaire des affaires municipales, le ramener en commission plénière et faire les écritures nécessaires...

Une Voix: Des finances...

Projet de loi no 83

Révocation de l'ordre de déférence en commission élue

M. Burns: M. le Président, je fais donc motion pour que l'ordre de déférence du projet de loi no 83 à la commission des Affaires municipales soit révoqué...

Une Voix: Des finances...

M. Burns: Excusez-moi, des finances, comptes publics et revenu soit révoqué et que ce projet de loi revienne en commission plénière.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Garneau: Adopté.

M. Burns: M. le Président, je propose donc, au nom du ministre des Finances, que ce projet de loi soit soumis à la commission plénière et, si on a le consentement de nos amis d'en face, que les écritures nécessaires soit faites pour la commission plénière.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour les écritures?

M. Lavoie: Oui.

Commission plénière

Le Président: En commission plénière, adopté. Rapport de la commission, adopté. Troisième lecture...

M. Lavoie: Demain.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'il y a une suspension pour une minute?

M. Burns: C'est adopté, M. le Président. Troisième lecture demain.

Le Président: Troisième lecture demain. La séance est suspendue pour quelques instants. A l'ordre, mesdames et messieurs!

M. le leader du gouvernement.

M. Burns: Avant d'appeler l'article suivant, il me fait plaisir de souligner la présence dans les galeries — je pense que cette habitude a été délaissée mais il ne serait pas mauvais qu'on la reprenne sans faire de pathos — d'étrangers, de gens qui viennent de l'extérieur du Québec, bien que ce soient de véritables Québécois: le député de Matane au fédéral, M. Pierre de Bané, et le député de Maisonneuve-Rosemont, mon collègue fédéral, mon homologue fédéral, M. Serge Joyal. Cela me fait plaisir de souligner leur présence, même s'ils viennent de loin. Je présume que ce

n'est pas un message qui vient de loin à cause du genre d'activité — je présume — qui les amène parmi nous aujourd'hui. Je tiens à souligner leur présence et cela me fait plaisir de les saluer.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, vu qu'on a semblé briser une tradition récente, il me fait plaisir de "réciproquer" en saluant un collègue de cette Assemblée nationale d'il n'y a pas tellement longtemps, l'ancien député de Laprairie et ancien ministre d'Etat aux Transports, qu'il me fait plaisir, également, de saluer d'une façon cordiale.

M. Burns: Avant de retourner au projet de loi no 76, j'appellerais l'article 8, c'est-à-dire le projet de loi no 77.

M. Lavoie: II y a eu consultation pour que le leader du gouvernement appelle la deuxième lecture du projet de loi no 77. Nous avions compris, d'après nos discussions et nos pourparlers, qu'il n'y aurait pas de long discours en deuxième lecture. Nous donnons ce consentement à la condition qu'il n'y ait pas de long discours d'une demi-heure ou de trois quarts d'heure. J'aurais besoin d'à peine deux minutes et on pourrait liquider cette deuxième lecture.

M. Burns: Excusez-moi. Avant d'entreprendre l'étude de ce projet de loi, je souligne, pour ceux qui l'auraient oublié, que la commission des affaires municipales continue ses travaux, actuellement, à la salle 81-A. Ceux qui sont concernés par ce projet de loi devraient peut-être s'y rendre immédiatement.

Projet de loi no 77 Deuxième lecture

Mme le Vice-Président: Le leader du gouvernement propose la deuxième lecture du projet de loi no 77, Loi concernant la Loi de la Législature et la Loi électorale.

M. Lévesque (Taillon): Alors, l'article 1 est adopté?

M. Robert Burns

M. Burns: Le lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à l'Assemblée.

M. Morin (Sauvé): Avec vigueur.

M. Burns: Avec vigueur, oui, comme le dit le ministre de l'Education.

Mon discours de présentation de ce projet de loi en deuxième lecture sera très bref. Il est, je pense, notoire que lors des dernières élections un parti politique en particulier, nommons-le, l'Union Nationale, a réussi à faire élire onze députés et a obtenu comme pourcentage de vote— mes chif- fres, là-dessus, ne sont pas tout à fait exacts, mais en tout cas, je vous demande d'accepter, pour le moment, les seuls chiffres qui sont à ma disposition — environ 19,4%.

Tout le monde sait que la loi actuelle de la Législature, pour reconnaître un parti au sens parlementaire du mot, exige qu'il fasse élire douze députés ou bien — et c'est là l'autre partie de l'alternative — ait reçu 20% du vote.

J'ai toujours été de ceux qui croient que les lois, et surtout dans le domaine électoral, doivent avoir cette flexibilité pour s'ajuster à des situations. Actuellement, la situation, à mon sens, me permet de dire qu'il serait véritablement injuste à l'endroit de l'Union Nationale et surtout des personnes qui ont voté pour l'Union Nationale de décider d'être très dogmatique et très légaliste et de refuser d'ajuster la loi à cette situation qui, admettons-le est tout à fait à la limite des normes.

C'est pour cette raison, Mme le Président, que nous avons, du côté gouvernemental, décidé de présenter le projet de loi no 76, pour ajuster justement la situation à ce que l'électorat nous a démontré comme son désir en ce qui concerne l'Union Nationale. En ce qui nous concerne, ce serait de la mesquinerie, je crois, de dire: Non, l'Union Nationale n'a pas 20% du vote; donc, elle ne doit pas être reconnue. Non, l'Union Nationale n'a pas douze députés; donc, elle ne doit pas être reconnue. Nous avons plutôt pensé...

Excusez-moi, le premier ministre me souligne que je parlais en termes de chiffres du projet de loi no 76, mais c'est le projet de loi no 77. Alors, je fais cette correction.

Donc, nous pensions qu'il était normal que cette correction se fasse. D'autre part, on se posera peut-être la question: Pourquoi ne pas régler la situation de façon définitive en corrigeant de façon permanente la Loi de la Législature, au lieu de dire que l'Union Nationale n'est reconnue que pour la durée de cette Législature?

La réponse à cela — je précède probablement les questions qui me seront soumises lors de la commission plénière — c'est que nous envisageons actuellement une réforme globale de la Loi de la Législature. Dans ce sens, selon les conseils qui m'ont été donnés par nos légistes, ce serait probablement un manque de prudence de faire un changement unique, pour un cas unique, alors qu'on envisage une réforme globale. Ce que cela donne, cependant, c'est l'assurance à l'Union Nationale, une fois ce projet de loi adopté, que, tout au long de cette Législature, c'est-à-dire jusqu'aux prochaines élections, ce parti sera considéré comme reconnu.

Alors, c'est la technique législative qui nous a, à toutes fins pratiques, suggéré cette méthode de garder uniquement la durée de la présente Législature, c'est-à-dire jusqu'aux prochaines élections, pour la reconnaissance que nous donnons à l'Union Nationale. Personnellement, je suis fier — j'en parle non seulement comme leader gouvernemental, mais aussi comme ministre d'Etat à la réforme parlementaire — de vous montrer cette première ouverture que nous avons sur

la tendance que nous aurons et que nous maintiendrons tout au cours de cette Législature où nous serons appelés à diriger le gouvernement.

Cette tendance nous porte à dire: II y a, quand même, des gens qui ont été élus pour faire un travail à l'Assemblée nationale; nous voulons qu'ils aient en main tous les moyens pour faire ce travail le mieux possible. Que cela s'appelle l'Opposition officielle ou l'Union Nationale, même si ces deux partis doivent à l'occasion nous critiquer et même souvent le faire de façon un peu difficile à supporter pour nous, nous considérons comme gouvernement qu'il est normal que cette Opposition ait tous les moyens en sa possession pour le faire. C'est dans ce sens et uniquement dans ce sens que nous proposons l'adoption du projet de loi no 77.

Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Jean-Noël Lavoie

M. Lavoie: Mme le Président, tel que nous l'avions annoncé déjà depuis quelques jours, l'Opposition officielle sera d'accord sur ce projet de loi et nous voterons d'une manière positive pour ce projet de loi.

Ce projet de loi vise surtout nos collègues de la gauche, ici, de l'Union Nationale, qui, depuis quelques années, sont passés du gouvernement à l'Opposition, à la non-reconnaissance, à la semi-reconnaissance et, aujourd'hui, à une reconnaissance plutôt complète. Je voudrais faire remarquer que parmi les projets de réforme qu'a mentionnés le leader parlementaire du gouvernement, cette réforme parlementaire date déjà de plusieurs années, même avant la venue d'un ministre délégué à la réforme parlementaire. Même dans les années 1960, la réforme parlementaire avait été amorcée du temps de MM. Bellemare, Bertrand, Pierre Laporte et d'autres, dans une revalorisation du rôle de l'Assemblée nationale et du Parlement.

D'ailleurs, c'est le Parti libéral auquel j'appartiens qui, le premier, en 1970, a passé les amendements à la Loi de la Législature pour établir ce principe de parti reconnu. Ce premier geste qui a été posé en 1970 était justement à l'avantage du parti qui forme le gouvernement aujourd'hui. Cette loi avait été adoptée pour donner tous les éléments et tous les moyens au PQ, alors naissant, aui faisait ses premières armes, ici, à l'Assemblée Nationale. Cette loi avait été, on le sait, ajustée au résultat obtenu par les différents partis, autant le Parti créditiste, à l'époque, que le Parti québécois. C'est la base des normes que nous conservons encore aujourd'hui, avec la légère modification que le gouvernement y apporte, que douze députés devaient satisfaire aux résultats obtenus par le Parti créditiste. Les 20% des voix étaient justement pour accorder au Parti québécois, alors naissant, une reconnaissance officielle, reconnaissance qui octroyait au chef du parti, au leader parlementaire et au whip certains avantages pécuniaires nécessaires au bon accomplissement de leurs devoirs.

En somme, sans vouloir atténuer les efforts du nouveau ministre de la Réforme parlementaire, je voudrais lui dire qu'il est prisonnier d'une lancée qui date déjà de quelques années, avant même la création d'un tel ministère. La démocratisation — d'ailleurs, je n'y reviendrai pas — nous l'avons posée déjà non seulement dans des paroles, mais par une loi qui date de 1970.

Le deuxième volet à ce projet de loi est justement de donner l'occasion à l'Union Nationale de participer à un fonds voté encore l'année dernière par l'ancien gouvernement, que nous représentons temporairement de ce côté-ci de cette Chambre, de participer à un fonds de recherche de $400 000, ce qui permettra, je crois à l'Union Nationale d'y puiser une somme d'environ $80 000. Encore là, cela a été un geste de démocratisation qui a été posé avant la création du ministère de la Réforme parlementaire, avant la création d'un étagement de ministères par un ministère tout à fait conventionnel, par un exécutif conventionnnel qui avait déjà de très nombreux fruits à son arbre.

Le Parti libéral, comme Opposition officielle, aura le droit de recueillir dans ce fonds $140 000, d'après les proportions que nous avons eues lors du dernier scrutin du 15 novembre. Ce fonds qui a été créé par un amendement à la loi électorale dit bien que cette allocation qui est accordée à chacun des partis doit être utilisée par les partis politiques pour payer les frais de leur administration courante, pour diffuser leur programme politique et pour coordonner l'action politique de leurs membres. Elle n'est versée que si ces frais sont réellement encourus et payés.

Je voudrais donner un préavis à cette Assemblée.

Vous pouvez être assurés qu'en ce qui concerne le Parti libéral, ces fonds serviront à diffuser notre programme politique et coordonner notre action politique. J'inviterais dès maintenant notre parti soeur de gauche, l'Union Nationale, à se servir également des fonds qui lui sont attribués, totalisant environ $20 000, pour qu'il puisse diffuser son programme et coordonner son action politique.

Déjà, je voudrais assurer nos collègues d'en face qu'en ce qui concerne le Parti libéral ces fonds serviront à inviter nos autres collègues de cette Assemblée à serrer les coudes surtout sur un programme politique que nous avons à coeur. Nous inviterons, vous pouvez en être assurés, messieurs du gouvernement, la population du Québec, les 60% qui se sont exprimés lors du dernier scrutin contre l'idée de l'indépendance ou de la séparation du Québec. Il y a déjà 60% bien établis qui ont conservé l'idée d'unité canadienne et l'option canadienne.

Sans doute que ces 60%, d'après certains sondages, devraient représenter au moins 75% ou 80% et même plus. Nous voyons déjà, dans la répartition des fonds, la minorité gouvernementale non seulement dans le consensus constitutionnel, mais également dans le partage des fonds parce que le gouvernement n'aura droit qu'à 40% des $400 000, ce qui représente $164 000.

Nous voyons tout ce parallèle et cette analogie et soyez assuré que le Parti libéral invitera tous les Québécois bien-pensants, des Québécois à part entière à se serrer les coudes pour combattre la politique néfaste proposée par nos amis d'en face en ce qui concerne la séparation du Québec du Canada car nous désirons, nous, rester citoyens québécois à part entière, mais également canadiens à part entière.

Mme le Vice-Président: M. le député de Lotbinière.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: Vous ne serez pas surprise de voir que j'appuierai ce projet de loi.

M. Lavoie: Et l'adoption également.

M. Biron: J'aurais aimé, Mme le Président, pouvoir remercier le gouvernement pour l'adoption de ce projet de loi en présence de mon collègue, le député de Johnson. Peut-être que je l'aurais laissé, lui, le premier, remercier le gouvernement parce qu'il s'est battu si longtemps pour la renaissance de l'Union Nationale.

En fait, aujourd'hui, par ce projet de loi, le gouvernement reconnaît ce que la population du Québec a reconnu le 15 novembre dernier. Quand même, je suis très heureux et très fier de voir que le Parti québécois, dans cette grande lancée de refonte de la Loi électorale, veut tout de suite faire montre d'honnêteté et de largesse de vue en reconnaissant l'Union Nationale comme parti officiel dans cette noble Assemblée.

Je suis, Mme le Président, très fier de pouvoir ici, à la tête de ce parti, assurer la continuation de ceux qui ont présidé à la destinée de l'Union Nationale au cours des quarante dernières années, dans cette noble Assemblée.

L'histoire veut peut-être qu'aujourd'hui un parti purement québécois reconnaisse un autre parti purement québécois. Le premier, Maurice Duplessis, à la tête de l'Union Nationale, a entrepris de nobles batailles contre le gouvernement canadien...

M. Lavoie: II y a Honoré Mercier, aussi. Cela va plus loin...

M. Biron: ... pour avoir ici, au Québec, les droits des Québécois. Duplessis s'est battu pour l'autonomie québécoise. Daniel Johnson, après lui, s'est battu pour l'égalité ou l'indépendance au Québec. Jean-Jacques Bertrand s'est aussi battu pour ces mêmes fins et Maurice Bellemare, bien sûr, s'est battu aussi.

Finalement, nous assurons ici aujourd'hui le Parti québécois de notre collaboration efficace comme nous l'avons fait à plusieurs reprises depuis le début de cette session. Cela ne nous empêchera pas de critiquer lorsqu'il y aura des mauvaises décisions ou de mauvaises lois de présentées qui ne sont pas, à notre point de vue, à l'avantage de tous les citoyens du Québec.

Quand même, nous voulons collaborer, et notre présence ici en tant que parti reconnu officiellement nous aidera à collaborer au meilleur de nos connaissances et de nos capacités à construire un Québec meilleur.

Mme le Vice-Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: Mme le Président, vous me permettrez, bien sûr, une courte intervention pour remercier le gouvernement, le leader parlementaire pour cette adoption de la loi cet après-midi. Personnellement, j'en suis profondément touché puisque j'ai travaillé activement à bâtir ce parti, principalement depuis 1970 à titre de président. J'ai tenté, à quelques reprises, avec des figures connues dans le gouvernement — au moins une — de redonner une image à notre parti au cours de l'année 1969. Je n'ai pas réussi à ce moment. Je l'ai tenté de nouveau en 1971 avec une autre, mais je n'ai pas réussi. On s'est repris en 1976 et, cette fois, nous avons fait une trouée dans le Québec. C'est celle-là que vous reconnaissez aujourd'hui.

J'apprécie également le jugement du gouvernement. Je pense que, bien sûr, il y aura peut-être des députés du gouvernement qui diront plus tard: C'est donc dommage qu'on ait donné à ce parti les armes qu'il faut pour venir nous combattre chez nous. Mais c'est cela une saine démocratie. C'est de fournir aux 20% de la population du Québec ce dont ils ont besoin pour se faire entendre en Chambre, et du personnel, et les montants d'argent nécessaires. C'est cela que le parti gouvernemental a voulu reconnaître aujourd'hui.

Soyez assurés que notre collaboration sera toujours bien positive, toujours constructive. C'est peut-être cette image nouvelle que sera l'Union Nationale à partir de maintenant. Je suis assuré que c'est celle-là que le gouvernement attend: ne pas démolir le travail que fera le gouvernement, mais suggérer, parfois durement, y aller de nos propositions.

J'entendais tout à l'heure le leader parlementaire du gouvernement qui regardait vers sa gauche en parlant de "parti soeur." J'espère qu'avant longtemps il parlera de sa gauche comme de son grand frère. Je pense que ce qu'on a aujourd'hui nous permettra d'être traités en grand frère de l'Opposition officielle avant bien longtemps. Ce sont des remerciements que je fais tout simplement.

Quand on entendait le premier ministre dire l'autre jour qu'il voyait une Chambre vraiment plus équilibrée par le vote de 1973, c'est cela qu'on attendait. Quand il y avait une opposition réellement pas représentée en Chambre entre 1973 et 1976, c'est peut-être pour cela qu'on voyait tant de gens qui criaient dans la rue. C'est peut-être pour cela qu'on aura maintenant une période d'accalmie parce que, sans avoir un équilibre vraiment exact du pourcentage du vote, on est beaucoup plus près des volontés du peuple du Québec. C'est ce

que vous reconnaissez aujourd'hui dans votre projet de loi. Je pense que vous pouvez avoir l'assurance de notre équipe— elle est presque complète malgré la commission qui siège en bas—qu'elle donne un consentement unanime aujourd'hui. On est pleinement satisfaits et je pense que vous obéissez aujourd'hui non pas à la lettre de la loi, mais à son esprit.

Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): Mme le Président, un mot seulement pour tenir compte du temps. Devant ces remerciements à peine voilés de la part de nos petits frères, je tiendrais à leur rappeler qu'il n'y a rien de nouveau dans le geste posé par le gouvernement. Ce n'est que dans la continuité des choses. Il faut se rappeler que c'est nous qui avons proposé la loi actuelle. Si on retrouve le nombre "douze" dedans et le pourcentage de "20%", c'est parce que cela tenait compte du fait que douze députés créditistes étaient assis à votre place...

Une Voix: Ils ont disparu depuis ce temps.

M. Levesque (Bonaventure): C'étaient des petits frères qui sont disparus. Enfin, c'était parce qu'il y en avait douze. Il y avait nos autres petits cousins en face qui étaient seulement sept. Le "douze" ne marchait pas. Alors, on a sorti les "20%" parce qu'ils avaient 23,4% du vote, à peu près.

M. Burns: Mais ils ont grandi vite, vos petits cousins.

M. Levesque (Bonaventure): Les petits cousins ont grandi vite. Peut-être d'une façon précoce. Cela ne vit pas vieux quand cela grandit trop vite.

Je voulais simplement rappeler ces faits à nos amis parce que c'est — ce que le gouvernement actuel fait, ce que le Parlement, parce qu'il y a unanimité là-dessus, fait présentement — justement dans un sens de continuité. D'ailleurs, nous sommes revenus à la charge en 1973 à la suite du vote qui avait été donné et de la représentation qu'il y avait en Chambre. Là, notre gouvernement a présenté un autre amendement pour tenir compte de certains changements, particulièrement chez les créditistes.

Je pense que cela s'appliquait également à l'Union Nationale. On a apporté un amendement qui disait que ceux qui s'étaient qualifiés dans la Législature précédente seraient qualifiés encore. Vous ne pouvez pas dire qu'on n'a pas fait l'impossible pour tenir compte, à la suite de chacune des élections, de la représentation. C'est dans la continuité que cela se fait. Vous n'avez pas à vous mettre à genoux devant le gouvernement pour le remercier.

Il faut bien comprendre que, dans tous les partis ici représentés, chacun a eu besoin d'un amendement pour se faire reconnaître, sauf le Parti libéral qui est reconnu à travers le Québec et à travers les temps. Parlant du Parti libéral du Québec, je tiendrais à rappeler à nos amis d'à côté — je vois l'heure qui avance, je ne veux pas abuser — que, lorsqu'ils parlent de M. Duplessis et de tous les Pères de la Confédération, il ne faudrait pas qu'ils oublient une chose, c'est que le Parti libéral a toujours montré une fermeté vis-à-vis de l'autonomie du Québec également, vis-à-vis des droits du Québec. Le fait d'être fédéraliste, cela ne veut pas dire qu'on accepte toutes les politiques du gouvernement fédéral. Il y a là une distinction importante. Nous avons maintes et maintes fois dénoncé certaines politiques du gouvernement fédéral, qu'il soit libéral ou qu'il soit conservateur, et nous allons continuer, dans l'intérêt des Québécois, de dénoncer toute politique qui ne fera pas notre affaire au niveau fédéral. Mais nous demeurons Canadiens, nous voulons que le Québec demeure à l'intérieur du Canada. A ce moment, il ne faut pas faire de ces rapprochements qui seraient de nature à être équivoques ou à créer une ambiguïté. Quant à nous, c'est très clair: nous sommes fédéralistes, mais pas nécessairement pour un gouvernement fédéral qui préconise des politiques qui, à notre sens, ne favorisent pas le Québec.

Mme le Président, vous me permettrez, en terminant, de dire que nous sommes bien d'accord avec la motion de deuxième lecture. Nous sommes très heureux de reconnaître l'Union Nationale et nous espérons que cette reconnaissance permettra à ce groupement politique de faire connaître à cette Assemblée ses vues et d'apporter sa contribution, comme d'ailleurs cela a été évoqué et exprimé il y a quelques instants.

Mme le Vice-Président: La réplique du leader du gouvernement.

M. Robert Burns

M. Burns: Mme le Président, je suis très heureux de voir que le premier projet de loi que je pilote en Chambre reçoive une telle unanimité. Je remercie très sincèrement l'Opposition officielle. Evidemment, quant à l'Union Nationale, je ne m'attendais pas à avoir une très sérieuse objection là. Mais je remercie, quand même, les députés de l'Opposition de concourir à cette décision que nous avons prise, parce que j'aurais été très déçu, comme ministre d'Etat à la réforme parlementaire, que, dans un premier geste d'ouverture sur les droits de l'Opposition, quelqu'un puisse, à un moment donné, tenter de vouloir restreindre ces droits ou tenter d'y voir une façon mesquine d'agir du gouvernement. Je vous dis, en tout cas, en ce qui me concerne, que c'est une façon tout à fait ouverte. C'est dans ce sens que nous le faisons et on espère que c'est comme cela que sera compris notre geste.

Quant à notre ami, le chef de l'Opposition,

qui, il y a quelques secondes, se vantait d'être le seul parti de l'Opposition à n'avoir jamais eu besoin d'une loi, je vous dis que, même dans votre cas, après les prochaines élections, on sera prêt à faire une loi comme celle-là pour vous autres.

Mme le Vice-Président: Cette motion de deuxième lecture est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

M. Burns: Mme le Président, je propose que ce projet de loi no 77 soit déféré à la commission plénière de l'Assemblée.

Mme le Vice-Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Lavoie: Adopté. On peut procéder aux écritures.

M. Burns: Si on n'a pas d'objection, je pense qu'on pourrait faire les écritures.

Je tiens simplement à mentionner qu'on m'a fait un certain nombre de représentations concernant la modification du système de pension parce que ça vise, à l'article 1 de ce projet, des corrections ou des correctifs à être apportés au système de pension, lequel s'ajuste sur une base mensuelle et non pas sur une base régulière.

Loin de mettre de côté les représentations qui m'ont été faites, en particulier par le whip en chef de l'Opposition officielle — et je lui ai répondu aujourd'hui, j'espère qu'il recevra très bientôt cette lettre. Je ne savais pas si la lettre arriverait avant le projet de loi, mais je pense que c'est plutôt le projet de loi qui arrive avant — je ne suis pas prêt actuellement à m'engager dans une modification, si partielle qu'elle soit, du système de pension qui est calculé sur une base mensuelle, sans qu'on revoie l'ensemble du projet. Cela poserait un problème, je pense, vraiment systématique et compliqué pour nos gens qui administrent le fonds de pension des députés. Dans ce sens, je fais simplement cette remarque, au niveau de l'examen du projet de loi en commission plénière.

M. Lavoie: Si je comprends bien, vous ne désirez pas apporter ces amendements...

M. Burns: Pas maintenant.

M. Lavoie: ... durant la présente session.

M. Burns: Non, pas à cette session-ci. Je peux vous assurer qu'avant de faire quelque amendement que ce soit là-dessus, je consulterai les partis d'Opposition, puisque maintenant, on peut parler des deux partis d'Opposition qui sont ici en Chambre. Cela veut dire les deux.

M. Lavoie: Est-ce que je pourrais demander au leader parlementaire du gouvernement quand il s'attend d'apporter une refonte ou une nouvelle Loi de la Législature? Dès le début de la prochaine session?

M. Burns: Je souhaite — et vraiment, quand je dis je souhaite, c'est qu'au moment où je vous parle, je ne suis pas tout à fait en mesure de vous dire si c'est possible — je souhaite que même pendant l'intersession, la sous-commission de l'Assemblée nationale, qui existait en vertu de la Législature précédente, puisse se réunir et, entre autres, puisse examiner et, d'une part, les travaux qui ont été faits en vertu de la Législature précédente et sous le gouvernement précédent, et peut-être continuer ses travaux pour nous présenter un rapport. C'est d'ailleurs un peu dans cet esprit que j'ai proposé la motion, hier, de permettre aux sous-commissions et à toutes les commissions parlementaires de siéger dans l'intersession. Je n'ai pas encore, de façon formelle, la date de reprise de la prochaine session, ce qui fait que je serai obligé, sans aucun doute, de demander à la commission parlementaire de l'Assemblée nationale et à ses sous-commissions, dont l'une est affectée à la révision de la Loi de la Législature, de siéger dans l'intersession.

M. Lavoie: Mme le Président, si vous voulez faire siéger cette sous-commission durant l'intersession, il faudrait l'instituer de nouveau, et pour l'instituer, il faudrait tenir une séance de la commission de l'Assemblée nationale également.

M. Burns: J'ai l'intention, M. le leader parlementaire de l'Opposition — je vous en donne un avis tout de suite — de faire siéger la commission parlementaire dans la journée de demain. Quand je vous dis dans la journée de demain, c'est que je ne peux pas vous dire encore, à cause de la séance du Conseil des ministres, à quelle heure et à quel moment exactement, dans la journée de demain, je pourrai faire siéger cette commission, mais c'est mon intention de la faire siéger. C'est bon que je le mentionne tout de suite. Je vous en donne avis, et cela vous permettra peut-être de penser déjà aux députés que vous voudrez assigner à ces sous-commissions. A toutes fins pratiques, j'ai l'intention de recréer les sous-commissions qui existaient en vertu de la Législature précédente.

M. Lavoie: Les écritures...

M. Burns: Les écritures, oui, je serais d'accord aussi.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que le leader du gouvernement, Mme le Président, nous dirait à quelle date environ il pense pouvoir déposer, à la suite de toutes ces consultations et de ces travaux, vers quelle date, lui, prétend-il pouvoir déposer une loi refondue?

M. Burns: De la Législature? M. Lavoie: De la Législature.

M. Burns: Encore une fois, je ne suis pas capable de prendre des engagements fermes sans avoir l'air ridicule en ne les respectant pas.

Je souhaiterais que parmi les premiers projets de loi que nous déposerions après l'examen des crédits des différents ministères, au cours de la session du printemps, celui-là soit de la lignée. Maintenant, comme je vous dis, cela dépendra — je pense que le chef de l'Opposition va très bien me comprendre— d'un tas de facteurs, de priorités qui seront probablement fixés autrement par le gouvernement. Je souhaiterais que ce soit un des premiers projets, tout au moins pour l'examiner, même si on n'arrive pas à l'adopter au complet durant la prochaine session.

Commission plénière

Mme le Vice-Président: Le projet de loi no 77, en commission plénière, est-il adopté?

M. Lavoie: Le rapport est adopté.

M. Levesque (Bonaventure): Rapport adopté.

Mme le Vice-Président: Le rapport est adopté. Troisième lecture?

M. Burns: Est-ce qu'on veut faire la troisième lecture tout de suite?

M. Lavoie: Troisième lecture, prochaine session.

M. Burns: Prochaine session?

Mme le Vice-Président: La troisième lecture est-elle adoptée?

M. Lavoie: Non, non, demain. Mme le Vice-Président: Bon.

M. Burns: J'ai également, maintenant que nous avons disposé du projet de loi no 77... Troisième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. Soyons prudents.

Mme le Vice-Président: Troisième lecture, séance subséquente.

M. Burns: Mme le Président, étant donné que le projet de loi n'est pas adopté, je me sens mal à l'aise de vous faire cette proposition, mais je donne avis tout de suite, au député de Lotbinière en particulier et aux autres membres de l'Opposition, qu'il faudra, pour véritablement compléter cette reconnaissance de l'Union Nationale, amender le règlement de l'Assemblée nationale, en particulier le paragraphe f) de l'article 1 qui, lui aussi, définit le parti reconnu. Cela a été adopté dans la loi et je ne pense pas qu'il y ait de problème. En temps normal, je devrais soumettre cet amendement à la commission de l'Assemblée nationale et, par la suite, revenir en Chambre ou en- core faire adopter une résolution par l'Assemblée nationale.

Je vous demanderai éventuellement votre consentement pour que, par pure et simple motion non annoncée, nous amendions le paragraphe f) de la même façon que nous venons d'amender la Loi de la Législature, c'est-à-dire de changer, à la troisième ligne du paragraphe f), le mot "douze" par le mot "onze" pour donner à l'Union Nationale tous les droits qui sont permis à un parti reconnu en vertu de notre règlement. S'il y a quelqu'un qui pourrait s'en plaindre, c'est bien moi, je vais avoir un parti de plus sur le dos. Moi, je suis prêt à le prendre.

M. Lavoie: Si cela vous soulage, je crois que dans le respect des lois on vous permettra d'apporter cet amendement une fois que la loi sera sanctionnée.

M. Burns: C'est ce pourquoi...

M. Lavoie: Sanctionnée, et non pas la troisième lecture.

M. Burns: Ah bon! II faudra peut-être déranger Son Excellence le lieutenant-gouverneur avant la période où nous avions l'intention de le déranger. Le train de lois que nous soumettons à l'Assemblée nationale...

M. Levesque (Bonaventure): Vous nous inviterez à aller chez le lieutenant-gouverneur.

M. Burns: Je vous inviterai.

M. Levesque (Bonaventure): Oui!

M. Burns: Nous pensions peut-être attendre à la toute fin avant de demander au lieutenant-gouverneur de venir sanctionner les lois. Je suggérerais plutôt au leader de l'Opposition de modifier son affirmation et de dire qu'il sera d'accord que je présente cet amendement dès que la troisième lecture sera adoptée.

M. Lavoie: Vous solliciterez notre consentement, qu'on refuse rarement.

M. Burns: C'est vrai. Alors, c'était un avis que je vous donnais, une espèce de préavis que je vous donnais à l'amendement que j'ai l'intention de proposer au règlement.

Mme le Président, ce matin nous avons terminé l'étude du projet de loi no 76, Loi modifiant la Loi de l'Exécutif et d'autres dispositions législatives. Le vote a été pris à trois heures, dès le début de la séance et à la suite du vote positif, j'ai proposé que le projet de loi soit déféré à la commission plénière. En conséquence, Mme le Président, je propose que vous quittiez maintenant le fauteuil pour que nous étudiions ce projet de loi en commission plénière.

M. Levesque (Bonaventure): Lequel?

M. Burns: Le projet de loi no 76, Loi modifiant la Loi de l'Exécutif et d'autres dispositions législatives.

Mme le Vice-Président: Cette motion d'aller en commission plénière est-elle adoptée?

M. Burns: Adopté.

Projet de loi no 76 Commission plénière

Mme Cuerrier (président de la commission plénière): A l'ordre, messieurs! Projet de loi no 76, Loi modifiant la Loi de l'Exécutif et d'autres dispositions législatives. Article 1.

M. Lévesque (Taillon): L'article 1 est tout simplement celui qui ratifie concrètement la création des postes de ministres d'Etat qui seraient installés, si vous voulez, dans la Loi de l'Exécutif, après le premier paragraphe, c'est-à-dire tout de suite après le premier ministre, président du conseil, et qui placerait à la fin, après le ministre des Communications, les ministres délégués, c'est-à-dire que c'est de la concordance par rapport à la structure du Conseil des ministres avec les décisions qui ont déjà été prises.

M. Lavoie: Un instant, s'il vous plaît.

M. Lévesque (Taillon): Oui, oui.

M. Lavoie: Mme le Président, l'ancienne Loi de l'Exécutif prévoyait, à l'article 4, les ministres conventionnels, si on peut dire.

M. Lévesque (Taillon): Pas encore.

M. Lavoie: Je crois qu'il y en avait 24 suivant les ministères établis. L'article 5 prévoyait le poste de Solliciteur général.

M. Lévesque (Taillon): Oui, oui, avec quinze ans de pratique.

M. Lavoie: Quel était l'article qui prévoyait les ministres d'Etat, les anciens ministres d'Etat, les autres personnes qui étaient invitées à faire partie de l'Exécutif, ce qu'on appelait les ministres sans portefeuille?

M. Lévesque (Taillon): Apparemment, vous retrouvez cela sous-jacent dans le deuxième alinéa de l'article 4. Cela reste là au besoin; cela n'a pas été abrogé, c'est-à-dire: peut nommer ministre de la même manière. Il n'y avait pas de définition de ministre d'Etat.

M. Lavoie: Avez-vous l'intention de biffer cette section?

M. Lévesque (Taillon): Non. Cela peut rester là sous toutes réserves. Ce n'est pas opératoire pour l'instant, c'est évident, mais on n'a pas vu de raison de l'enlever. Attendez un instant. Oui, au deuxième alinéa de l'article 7, vous avez aussi ce qui se trouve à représenter une sorte de délégation, si l'on veut, mais qui en fait est plutôt pour définir un peu le mandat possible. L'article 7 est un peu pour illustrer ce que pouvait vouloir dire en pratique le deuxième alinéa clé de l'article 4.

M. Lavoie: Cela voudrait dire, en somme, qu'il pourrait y avoir des ministres, ce que vous appelez vos ministres d'Etat, qui ont des responsabilités globales.

M. Lévesque (Taillon): Ou intersectorielles.

M. Lavoie: Oui. Je ne voudrais pas employer des termes comme "seniorité" ou autres, mais vous auriez des ministres, on pourrait dire, conventionnels, ce qu'on avait auparavant, des ministres avec portefeuille, à chacun des ministères et également, sans vouloir les appeler les ministres juniors, des ministres délégués qui, eux, en somme — c'est le cas de ceux que vous avez actuellement — n'ont pas de portefeuille bien identifié. Je crois que c'est le ministre délégué à l'énergie et le ministre délégué au haut-commissariat.

M. Lévesque (Taillon): ... et à l'environnement.

M. Lavoie: Vous pourriez avoir une quatrième sorte de ministres, si vous conservez ce deuxième paragraphe de l'article 4. Comment les appelleriez-vous, ces ministres, étant donné que vous ne pouvez plus les appeler ministres d'Etat, parce qu'ils sont déjà en haut de l'échelle?

M. Lévesque (Taillon): Comme on n'y pense pas activement, peut-être que le leader de l'Opposition pourrait nous faire des suggestions, le cas échéant.

M. Lavoie: Ce n'est pas une invitation que vous me faites de devenir ministre au quatrième échelon? Ce serait difficilement acceptable.

M. Lévesque (Taillon): Je sais que le député de Laval a toujours eu un très grand penchant pour le style. Il nous trouvera peut-être quelque chose de stylistique.

M. Lavoie: De toute façon, ce sera un étagement de plus, c'est tout.

M. Lévesque (Taillon): D'accord. Cela va pour l'article 1 du projet de loi no 76?

M. Lavoie: Cela va. Avant de passer à l'article 2, j'aimerais peut-être intervenir assez brièvement et sans aucune partisanerie exagérée pour... Cela fait peur?

M. Lévesque (Taillon): Juste le minimum qu'il faut.

M. Lavoie: Juste cela. En conservant ma tradition d'objectivité, tout en péchant légèrement sur le côté de la neutralité, j'aimerais poser la question suivante au gouvernement qui, il n'y a pas tellement longtemps, il y a à peine deux ans, faisait partie de l'Opposition officielle. Je me souviens d'un certain 23 décembre 1974, lorsque, ensemble, l'Assemblée nationale a étudié la Loi de la Législature et la Loi de l'Exécutif, lors d'un fameux débat qui avait couvert une période s'étendant d'avant Noël et pratiquement pendant Noël et après Noël, entre Noël et le Jour de l'An. J'ai voulu mentionner tout à l'heure que nous ne pensons pas, de ce côté-ci, d'une manière plus ou moins sérieuse entreprendre ce qu'on appelle communément des "filibusters" à cette période-ci de l'année.

Mais nous avions assisté, à ce moment-là, à un vrai "filibuster" de la part du Parti québécois, alors qu'il siégeait comme Opposition officielle. Je voudrais savoir, sans faire d'allusion trop piquante à l'ambiguïté et à la contradiction qui commencent à être la marque du gouvernement actuel tant durant la campagne électorale: indépendance, souveraineté; on n'en parlait plus, on en parle plus maintenant; l'autre volet, socialisant ou non, du Parti québécois...

Ce contexte d'équivoque et d'ambiguïté, de contradiction semble devenir la marque du gouvernement actuel.

Ce n'est peut-être pas un discours de mon propre cru que je vais vous apporter, mais je voudrais localiser où est le sérieux et la logique du gouvernement actuel en le ramenant à un débat qui s'est déroulé ici à l'Assemblée nationale, il y a à peine deux ans, lors de l'étude de la loi qui avait indexé ou rajusté le traitement des députés, de tous les autres membres de l'Assemblée qui occupent des postes spéciaux à l'Assemblée nationale, également les membres de l'Exécutif. A ce moment-là, il y avait les ministres avec portefeuille et les ministres sans portefeuille, d'autres qui occupent des postes comme vice-président de l'Assemblée. On avait fait une espèce de marchandage, des motions, une multitude de motions sur le traitement que méritait un membre de l'Assemblée.

Justement, le député de Saint-Jacques, aujourd'hui ministre délégué au haut-commissariat, selon le journal des Débats du jeudi 26 décembre 1974, annonçait en commission qu'il présenterait un amendement. Je le cite: "Vous pourrez immédiatement deviner que l'amendement que je vais vous proposer pour la fixation de l'indemnité de M. le Président de l'Assemblée nationale, je proposerai le même amendement lorsque nous traiterons des membres du Conseil exécutif ou, un peu plus loin, lorsque nous traiterons du traitement du chef de l'Opposition officielle."

Un peu plus loin, à la même page: "Je suis d'opinion, M. le Président, — et c'est toujours le député de Saint-Jacques qui parle — avec mes collègues qui auront l'occasion d'exprimer la leur à leur tour, qu'une indemnité supplémentaire ne doit jamais doubler l'indemnité de base. Si, par dé- finition, c'est une indemnité supplémentaire à cause d'une charge supplémentaire, elle ne doit jamais atteindre le double, sinon elle fait apparaître une chose — plus que le double, comme c'est le cas dans la rédaction actuelle de l'article no 48 — c'est affirmer que la charge supplémentaire est plus valorisante que la charge originale. Or, il faut toujours que la charge originale demeure — la base à partir de laquelle on fait le calcul — celle qui est la plus valorisée, le reste doit s'y greffer. On peut être large dans ces cas en fonction de la charge."

Je vous avise immédiatement que je me pose la question si je ne devrai pas proposer le même amendement que le député de Saint-Jacques ou le député de Sauvé, chef de l'Opposition officielle de l'époque, aujourd'hui ministre de l'Education.

Surtout, je profite de cette occasion-là, alors que vous proposez une loi qui non seulement conserve les mêmes traitements pour les députés, mais accorde, dans la loi actuelle, une augmentation de traitement à vos ministres délégués, que j'assimile un peu à nos anciens ministres d'Etat étant donné qu'ils n'ont pas de portefeuilles et que, dans votre loi actuelle, tous les ministres seront payés au même traitement le plus élevé, soit celui d'un ministre avec portefeuille, le ministre conventionnel que nous avions, je profite de cette occasion où vous apportez une augmentation de salaire à certains membres du cabinet pour citer et rappeler au gouvernement d'aujourd'hui les propos qu'il tenait alors qu'il siégeait de ce côté de l'Assemblée.

Je continue les propos du député de Saint-Jacques. "Mais, M. le Président, lorsqu'on double — par exemple, la proposition est de 1,1%..." (Je devrais corriger et dire plutôt 110%) "...c'est plus que doubler le salaire de $21 000 auquel aura droit le Président de l'Assemblée nationale comme simple député — c'est affirmer que son rôle de Président de l'Assemblée nationale, en quelque sorte, est plus important que ce qui l'a amené dans cette Chambre, soit son titre de député, dans le cas qui nous occupe, de député de Laval, ce serait de n'importe quel comté. C'est un peu une allégorie boiteuse, j'en conviendrai, mais qui est basée sur un sain principe, un peu comme le principe qui apparaît dans nos lois de l'impôt sur le revenu qui dit qu'aucune allocation de dépenses ne doit totaliser plus que les 50% de ce qui est calculé comme indemnité".

Je pourrai citer toute la page du journal des Débats du jeudi 26 décembre 1974, la page B-8943. Je retiens un autre paragraphe ici. Je voudrais citer plutôt la page B-8945. Les propos que je vais citer sont tenus par le député de Sauvé, aujourd'hui ministre de l'Education, M. Morin. "A l'heure actuelle, ils gagnent — en parlant du président de l'Assemblée — les trois quarts en plus, .75 en gros, en plus du salaire des députés. Nous pensons qu'il n'y a pas lieu de porter ce .75 à 1.10 pour le président et, dans le cas des vice-présidents, nous pensons qu'il n'y a pas lieu de porter le chiffre à .50, mais, au contraire, de le réduire à .30. Mais ce n'est pas que nous voulons

réduire le rôle, minimiser le rôle constitutionnel représentatif du président et des vice-présidents. Bien au contraire. — Toujours, M. Morin.— Cet amendement que nous proposons pour le président et les vice-présidents, nous entendons le faire pour les ministres et pour le chef de l'Opposition tout aussi bien. Il n'y a pas de raison, qu'il s'agisse des fonctions de ministre ou de chef de l'Opposition, pour qu'ils soient payés deux fois le salaire d'un député."

M. Morin, également à la page B-8947. "Un président qui doit être à la hauteur de ces tâches de représentation doit être bien rémunéré. C'est bien certain. Mais, encore une fois, doit-il pour autant être payé deux fois plus qu'un député ordinaire? C'est là la question que soulève l'amendement du député de Saint-Jacques."

M. Morin, à la page B-9003. "Notre but n'était pas de réduire leur rôle en réduisant leurs émoluments. Notre intention était plutôt de réduire le traitement non seulement du président et des vice-présidents, mais également celui des ministres et celui du chef de l'Opposition, parce que nous estimons que, par rapport aux députés, ces traitements vont être trop considérables."

Je ne citerai pas, mais on répète encore la même argumentation aux pages B-9006, B-9007, B-9009, également toute la page B-9065. Vous voyez, déjà 65 pages plus loin nous étions dans le même "filibuster". Là, nous étions rendus au vendredi 27 décembre, après la fête de Noël. Là, non seulement cet amendement était apporté à ce moment à l'article 2, mais il fut rapporté à l'article 7 lors d'une deuxième tentative du député de Sauvé et du député de Saint-Jacques pour invoquer que le traitement de 1.10 était vraiment exagéré, autant pour le président, le chef de l'Opposition que les ministres. Un troisième amendement était apporté encore dans ce fameux "filibuster" dans un autre article du projet de loi.

Ecoutez, je ne voudrais pas tourner le fer dans la plaie plus longuement. Je voudrais uniquement connaître jusqu'où le gouvernement actuel était sérieux en décembre 1974, s'il est toujours sérieux, logique dans sa continuité. Je vais me permettre, Mme le Président, de citer un texte — et ce n'est pas une question de marchandage ou de maquignonnage, je vais vous redonner la parole. Vous l'aviez à ce moment, je vous la remets aujourd'hui en défense et non pas en poursuite. Votre amendement qui diminuait le multiplicateur de 1 à 1.10, ce qui faisait 210% pour les ministres en titre, vous le réduisiez à .75. Je fais le même amendement qui a été fait par le député de Saint-Jacques à ce stade-ci de la discussion. Si vous croyez que c'est trop bas, vous voyez la lourdeur de la tâche, le fardeau — et je vois le sourire du ministre des Finances — je conçois que ce chiffre de 1.10 à ce moment avait été pesé, avait été considéré à la suite même d'un comité non partisan où siégeaient M. Bonenfant et d'autres.

Cela a été fait après une multitude de consultations. Personnellement, j'étais président de l'Assemblée, à ce moment. Je n'ai pas participé au débat. Je suis solidaire du multiplicateur qui avait été décidé, soit 110%. Je n'étais pas d'accord, même si je n'ai pas participé au débat, sur la réduction proposée par le député de Saint-Jacques qui était de 0,75. Si vous croyez, messieurs, que ce n'est pas suffisant 0,75, libre à vous, membres de l'Exécutif, ministres de la couronne, de l'augmenter, c'est votre droit. Vous aurez le droit d'apporter un sous-amendement à mon amendement. A partir de maintenant, la parole est à vous.

M. Lévesque (Taillon): Je pense que le député de Saint-Jacques, ministre aujourd'hui, peut peut-être évoquer brièvement le contexte dans lequel ce "filibuster" s'est déroulé. Tout ce que je dirais, c'est simplement ceci: On pourra reprendre le sujet dans le détail si le leader de l'Opposition le veut, mais il me semble qu'il y aurait des moments plus indiqués que celui de cet amendement purement structurel à la Loi de l'Exécutif. Je comprends que cela paraît de bonne guerre d'évoquer des choses comme cela. J'ai moi-même trouvé cela instructif, mais ce n'est pas le moment où on peut faire des amendements comme cela, je ne pense pas.

Si le député de Saint-Jacques veut évoquer de nouveau ce contexte-là, il avait l'air d'en avoir le goût...

M. Charron: M. le Président, l'invitation que nous fait le leader de l'Opposition officielle aujourd'hui de reprendre une partie d'un débat qui portait strictement à l'époque sur la rémunération des membres de cette Assemblée, qu'ils soient ministres ou députés, me donne l'occasion de reprendre et de réaffirmer un principe qui sous-tendait chacune des propositions que nous faisions à cette époque et qui constitue encore, j'en suis convaincu, l'opinion du gouvernement.

Il a été d'ailleurs réexprimé très clairement le jour où un certain nombre de mes collègues et moi avons été présentés aux Québécois comme devant former le Conseil exécutif de la province par le premier ministre lui-même. C'est que la charge première de ceux qui forment le Conseil exécutif, de tous les membres de cette Assemblée, leur titre premier, leur responsabilité première, fondamentale, est celle d'être d'abord et avant tout députés d'une circonscription du Québec et représentants, dans cette Assemblée, d'une partie de la population du Québec qui les a élus.

Ce principe est à la base de la formation du cabinet, le premier ministre l'a rappelé lorsqu'il a présenté le cabinet à l'opinion publique. Il est à la base du fonctionnement de cette Assemblée puisque c'est d'abord comme députés que nous avons le droit de siéger ici et que nous devons répondre aux questions de l'Opposition comme à celles de nos collègues. Ce principe demeure fondamental. Quand on nous a amenés, au moment de la discussion d'une loi présentée par l'ancien gouvernement et qui portait uniquement sur la rémunération des membres de l'Assemblée, à le formuler sous forme d'amendement aux propositions gouvernementales de l'époque, c'était ce principe qui était à l'origine de nos amendements, et nous y souscrivons encore.

Je suis convaincu que le responsable chargé par le premier ministre de la réforme parlementaire aura, lors des consultations, même avec les différents partis de l'Opposition, à refaire tout le portrait du fonctionnement de l'Assemblée nationale, du fonctionnement des députés, des rapports entre les députés et les ministres, du rôle de l'exécutif par rapport au législatif. Il n'oubliera pas, dans le cadre de cette réforme générale qui devra se faire, cette vérité fondamentale du fonctionnement de notre système démocratique qui veut que nous sommes d'abord et avant tout députés avant d'être membres du Conseil exécutif. Il ne l'oubliera pas lorsqu'il façonnera le nouveau fonctionnement de l'Assemblée nationale; il ne l'oubliera pas lorsqu'il rétablira un équilibre des pouvoirs. Je suis convaincu que le député de Laval est d'accord avec moi pour dire qu'il y a actuellement un déséquilibre anormal entre les pouvoirs du législatif et de l'exécutif et je suis convaincu que le député de Maisonneuve, ministre d'Etat à la réforme parlementaire, ne l'oubliera pas lorsqu'il s'agira de fixer également les traitements qu'on doit recevoir, le nouveau partage et le rétablissement d'un équilibre qui n'existe pas. Tout cela, je pense que le député de Maisonneuve, dans une intervention antérieure à la mienne au cours de ce débat, l'a fait valoir au député leader de l'Opposition officielle, et je ne puis que souscrire à cette intention maintenant.

M. Lavoie: Ne croyez-vous pas quand même... Je voudrais répondre au premier ministre. Il me dit que ce n'est pas le moment opportun de traiter de cette question. Je n'en vois pas d'autre. C'est le moment le plus opportun alors que nous étudions ce projet de loi. Je ne pourrais pas faire cet amendement sur un projet de loi de l'agriculture, quand même!

M. Lévesque (Taillon): D'accord! N'en faites pas une discussion, je suis d'accord, c'est l'endroit.

M. Lavoie: C'est l'endroit privilégié. Ecoutez, quand même, j'ai entendu un son de cloche du ministre délégué au haut-commissariat. Je vois que son argumentation était beaucoup plus puissante et forcenée il y a deux ans. Aujourd'hui, d'un autre côté de la Chambre...

M. Marchand: Du socialisme.

M. Lavoie: ... je me demande où était le sérieux de ce "filibuster" qui avait duré une quinzaine de jours et qui avait été télécommandé, d'ailleurs, je pense, par le conseil national du parti. J'aimerais également savoir si l'honorable député de Sauvé, ministre de l'Education, nous tiendrait aujourd'hui les mêmes propos qu'il a tenus à ce moment-là. Je l'inviterais immédiatement à le faire.

M. Lévesque (Taillon): Je ne vois pas quels propos il tiendrait, mais une chose que je sais, par exemple, c'est que — non, mais le multiplicateur, les traitements additionnels, etc., concernant soit le président de l'Assemblée, le vice-président, les ministres, les députés — tout ça affecte l'économie générale de ce qu'on pourrait appeler la rémunération parlementaire ou ministérielle. Une chose certaine, on peut faire encore de l'éloquence un bout de temps et de l'humour sur les Noëls passés, mais je peux dire tout de suite au leader parlementaire qu'on ne s'embarquera pas dans son amendement. Cela ne veut pas dire que la question ne doit pas être posée, affectant tout, les parlementaires et l'économie, si vous voulez, des échelles de rémunération. Il faudra la situer dans le temps et voir si on peut ajuster, parce que c'est quand même une question de principe, convenablement toute cette échelle de nouveau, en cours de route, peut-être au moment de la réforme parlementaire quand on entrera dedans, mais certainement pas aujourd'hui, trois semaines après un changement de gouvernement. On n'a pas eu le temps d'y penser et j'avoue que, quant à moi, en tout cas, je ne suis pas vraiment porté à discuter de l'amendement. Si on veut le voter, on peut le voter.

M. Lavoie: Je croyais, d'ailleurs, donner une occasion tout à fait avantageuse et propice non seulement aux anciens parlementaires du dernier Parlement, mais également au premier ministre qui, lui, si je me le rappelle bien, je crois, durant la campagne tout à fait récente, disait, avec son honnêteté qu'on lui reconnaît à certaines occasions, que, dans une certaine conjoncture économique difficile, même lorsque nous nous dirigerons vers l'indépendance, il va falloir que les Québécois songent à payer une certaine partie de la note et que, pour un certain moment, ils devront se serrer la ceinture.

Je fournis l'occasion aujourd'hui au premier ministre de se donner en exemple à tous les Québécois, aux six millions de Québécois en fermant sa ceinture d'un seul cran. Il ne veut même pas profiter de l'occasion que je lui procure aujourd'hui.

M. Lévesque (Taillon): Votre générosité me renverse, mais, enfin, donnez-nous le temps de réfléchir sur ces questions aussi.

M. Lavoie: Si vous réfléchissez trop longtemps, vous allez augmenter le cran vers l'extérieur et non pas vers l'intérieur.

M. Lévesque (Taillon): Ecoutez! Même là, faites attention, parce que cela affecte les députés, cela affecte les ministres, cela affecte aussi deux années qui se sont écoulées, qui n'ont quand même pas été des années de baisse d'inflation, ni d'augmentation des revenus réels. Cela affecte les indexations auxquelles, suivant l'exemple qui avait été donné in extremis par l'ancien gouvernement, on a renoncé. Pour l'instant, ne demandez pas qu'on réforme, en plus, toute l'économie de ces histoires. Je sais bien que, pour vous, c'est amusant d'y penser, mais nous, on n'a pas eu le temps

de réfléchir là-dessus. Je ne me sens pas du tout tenu aux retombées d'un long débat de 1974.

M. Lavoie: D'accord. Je vous ai promis que je ne ferais pas une longue diatribe de cette question, mais moi, qui ai été habitué pendant de très nombreuses années à entendre des discours et des interventions longues et épuisantes du député de Sauvé et ministre de l'Education, je prends acte, quand même, de son silence aujourd'hui. Je croyais quand même que, lorsque vous aviez proposé cet amendement de ,75, en décembre 1974, au lieu de 1,10, cela avait été vraiment considéré, pensé, pesé et tout. Aujourd'hui, je me rends compte que, même après deux ans — c'est vrai que vous avez plusieurs problèmes à régler — ce fameux "filibuster" de 1974, que je crois que nous pouvons pratiquement faire la promesse de ne pas répéter cela dans des périodes où, peut-être, notre présence est plus utile ailleurs qu'ici.

Je me permets de douter du sérieux et de la logique de ce "filibuster" du Parti québécois en 1974. Je demanderais, s'il n'y en a pas d'autres qui désirent intervenir sur cet amendement, qu'on prenne le vote.

Le Président (Mme Cuerrier): Que ceux qui sont en faveur de cet amendement veuillent bien lever la main, s'il vous plaît!

Que ceux qui sont contre cet amendement veuillent bien lever la main, s'il vous plaît!

L'amendement est rejeté.

L'article 1 du projet de loi no 76 est-il adopté? Est-il adopté, M. le leader de l'Opposition?

M. Lavoie: Oui, adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Adopté. Article 2. L'article 2 est-il adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Adopté. Articles.

M. Lavoie: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Article 3, adopté. Article 4.

M. Lavoie: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Article 4, adopté. Article 5.

M. Lavoie: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Article 5, adopté. Article 6.

M. Lavoie: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Article 6, adopté. Article 7.

M. Charron: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Article 7, adopté.

M. Charron: Mme le Président, je vais vous demander de faire rapport.

Mme Cuerrier (président de la commission plénière): J'ai l'honneur de vous faire rapport que le projet de loi no 76 a été adopté sans amendement.

Le Président suppléant (M. Marcoux): Ce rapport est-il agréé?

Une Voix: Agréé.

Le Président suppléant (M. Marcoux): Agréé.

M. Charron: Troisième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. Lavoie: Prochaine session.

Le Président suppléant (M. Marcoux): Troisième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. Charron: Mme le Président, voudriez-vous appeler l'article 1?

Qu'il me soit permis de faire motion pour que la Chambre se forme à nouveau en commission plénière pour l'étude des crédits du budget supplémentaire.

Mme le Vice-Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Lalonde: Adopté. Mme le Vice-Président: Adopté.

Etude des crédits supplémentaires

Commission plénière (suite)

Mme Cuerrier (président de la commission plénière): Nous étudions les crédits supplémentaires pour l'année financière se terminant le 31 mars 1977.

M. le ministre des Finances.

Réponses du ministre des Finances

M. Parizeau: Avant que nous n'abordions les crédits, je souhaiterais présenter des réponses aux questions qui avaient été posées, vendredi, à l'occasion de la première séance de la commission plénière sur les crédits. La première de ces questions venait du député de Jean-Talon, qui demandait par combien s'étaient chiffrées les entrées de la taxe de vente au détail en novembre, et jusqu'en novembre de cette année. Les chiffres de novem-

bre ne sont pas encore disponibles et d'ailleurs à des fins de comparaison avec l'année dernière ne serviraient pas a grand-chose, en ce sens qu'en novembre 1975 nous traversions une grève des postes qui avait complètement perturbé les rentrées. Mais, d'avril à octobre, le montant cumulatif des entrées de taxes de vente est de $680 914 000, ce qui représente par rapport à la même période de l'année précédente 15% de plus.

Or, les projections de taxes de vente, pour 1976/77, sont justement de 15% plus élevées que l'année précédente. Alors, jusqu'à maintenant, en tout cas, on peut considérer que les réalisations sont en ligne avec les projections.

La deuxième question avait été d'abord soulevée par le chef de l'Union Nationale, député de Lotbinière, et reprise par le député de Jean-Talon. Il s'agissait des écarts de taux de rendement, entre les obligations du Québec et celles de l'Ontario, exprimés en points de base. J'avais à cette occasion indiqué qu'à titre d'exemple on pouvait retenir 60 points de base comme étant l'écart ce vendredi dernier ou tout au moins comme un exemple de tels écarts.

Vérification faite, si l'on compare deux émissions de l'Ontario et du Québec ayant le même coupon 10 1/4% et la même échéance 2001, l'écart vendredi était de 62 points de base. Si on prend deux autres émissions, l'une du Québec, l'autre de l'Ontario, ayant un coupon de 10% et la même échéance de 2001, l'écart était de 68 points de base. Ceci se compare à des écarts au début de novembre qui étaient de l'ordre de 30 à 35 points de base. Donc les écarts se sont accrus mais, comme je le disais vendredi dernier, on a déjà vu des écarts plus élevés.

Troisième question venant du député de Jean-Talon. Il me demandait dans quelle mesure la marge de crédit du gouvernement auprès des banques était utilisée et dans quelle proportion. En date de vendredi dernier, il n'y avait aucun emprunt, aucun usage de fait de cette marge de crédit. Elle avait été en partie utilisée dans les jours qui avaient précédé mais les remboursements s'étaient faits le 16, si bien que le 17 la situation nette était de zéro.

Finalement, quatrième question venant du député de Lotbinière et chef de l'Union Nationale, au sujet des rentrées de fonds à la Caisse de dépôt. Si l'on tient compte des augmentations venant du fonds général, des fonds ségrégatifs et des fonds sous mandat, de 1974 à 1975, c'est la période qui correspond aux derniers états financiers publiés de la Caisse de dépôt, j'avais dit autour de $600 millions; c'étaient $649 millions.

Le Président (Mme Cuerrier): Affaires culturelles, programme...

M. Garneau: Mme le Président, concernant les questions que j'avais posées également — j'avais donné avis au ministre des Finances de cette question par écrit — je voulais savoir si des municipalités ou encore des commissions scolaires avaient été autorisées, depuis son as- sermentation comme ministre des Finances ou du nouveau gouvernement, à emprunter sur les marchés étrangers.

M. Parizeau: Alors, cette question qui n'était pas apparue à l'occasion de la séance plénière mais dont le député de Jean-Talon m'avait donné préavis avant qu'elle ne commence, vérification faite, aucune municipalité n'a obtenu d'autorisation depuis que le présent gouvernement est au pouvoir d'emprunter sur le marché américain. Ces emprunts se sont faits essentiellement sur le marché canadien.

Emprunts sur les marchés étrangers

M. Garneau: Le ministre des Finances pourrait-il nous dire si à toutes fins pratiques les renseignements qui avaient paru — je lui en ai parlé — dans le journal Le Soleil, le jour où il a donné sa conférence de presse concernant le dépôt du budget supplémentaire, rapportant les propos du ministre des Finances, avait eu indiqué que ce dernier avait soumis à l'attention de la presse que depuis l'assermentation du nouveau gouvernement les municipalités continuaient à emprunter sur les marchés étrangers et qu'elles n'avaient aucune difficulté. Je comprends, d'après les propos qu'il tient, que ce reportage du Soleil était inexact, parce que, après vérification, c'est bien au sujet des marchés étrangers qu'on rapportait les propos du ministre des Finances, non pas des marchés canadiens.

M. Parizeau: Effectivement, les propos que j'avais tenus quant à l'activité d'emprunts d'une municipalité — j'ajoutais d'ailleurs les CEGEP et les hôpitaux qui avaient eu un programme assez chargé d'emprunts au cours de ces semaines — concernaient le marché canadien, et non pas sur le marché américain. La seule transaction qui, je pense, est significative à cet égard a été l'achat de $5 millions d'obligations par une maison de Montréal, revendues ensuite sur le marché américain. Mais il ne s'agissait pas d'un emprunt en dollars américains.

M. Garneau: Mme le Président, revenant à une réponse que le ministre des Finances vient d'indiquer, je regarde l'évolution de l'écart entre les taux d'intérêt payés pour des émissions identiques dans le Québec et en Ontario et je constate que l'écart serait rendu maintenant à 68 points de base — si j'ai bien compris — pour une émission dont il a donné l'exemple et, dans un autre cas, à 62.

Je constate, Mme le Président, que dans l'espace de quelques mois — et cela recoupe la période électorale — au terme du troisième trimestre de 1976, ce qui veut dire la fin de septembre 1976, et pour le dernier trimestre, l'écart entre le Québec et l'Ontario, pour des émissions de type identique, était de 20 points de base, 23 points de base. Et quand je remonte les années antérieures, l'année 1975, l'année 1974, je constate que l'écart entre le

Québec et l'Ontario a été et s'est maintenu entre 20 et 23 points de base. Même pour l'année 1973, je vois que pour un trimestre entre autres, le deuxième trimestre de 1973, l'écart entre le Québec et l'Ontario était descendu aussi bas que trois points de base. Il y a même eu des semaines, durant ce trimestre, où les émissions du Québec se transigeaient à des taux de rendement inférieurs à celles de l'Ontario.

Je dois donc constater que ce que je soulignais durant la lutte électorale, soit que l'ambiguïté dans laquelle l'option séparatiste et l'option du Parti québécois face à l'avenir du Canada plaçaient les marchés financiers était bien réelle. Cela coûte maintenant de l'argent je constate, par exemple, que pour aller sur le marché financier, il faut concéder quelques avantages à une nouvelle émission par rapport à une émission existante. Cela veut dire que si je prends le troisième trimestre de 1976 et que je le compare avec un emprunt que devrait faire le gouvernement du Québec aujourd'hui, il lui faudrait payer presque 1/2 de 1% de plus en taux d'intérêt sur les marchés pour obtenir les même sommes d'argent. Quand on regarde le programme d'emprunt dont nous a parlé le ministre des Finances lorsque nous avons entrepris l'étude des crédits l'on constate que le nombre de millions de dollars à emprunter est quand même énorme: il s'agira de plus de $400 millions et il peut varier selon l'évolution dans les obligations d'épargne, puisque, là aussi, je dois constater que depuis le troisième trimestre il y a eu tout près de $100 millions d'obligations d'épargne de rachetées. Il faut même constater que cela augmentera le programme d'emprunts à long terme du gouvernement. Si le gouvernement du Québec emprunte $500 millions ou $400 millions d'ici la fin de l'exercice — ces emprunts se font habituellement pour des périodes de quinze à vingt ans — et que l'on calcule que le taux d'intérêt augmente de 1/2 de 1% sur 20 ans, on doit constater avec regret que pour l'économie du Québec et pour les contribuables québécois, il s'agit là d'une charge qui représente plusieurs millions de dollars et qui affectera, je crois, les investissements du Québec et également les investissements privés, puisque les taux d'intérêt payés par l'Etat, par la province, par l'Hydro, affectent d'abord les taux payés par les CEGEP, les hôpitaux et les commissions scolaires, également les centres d'accueil et que, par ricochet, évidemment, cela frappe les emprunts que le secteur privé doit effectuer pour financer des investissements à long terme.

Je veux donc, déplorer cette attitude et soumettre à l'attention du ministre des Finances qu'il doit, de même que son gouvernement, le plus tôt possible, clarifier cette situation d'ambiguïté sans laquelle les contribuables québécois auront à supporter un coût additionnel considérable.

M. Parizeau: Mme le Président, je suis charmé d'apprendre que le député de Jean-Talon considère les besoins d'emprunts que j'ai exprimés comme étant énormes. Sans doute, mais ce ne sont pas les besoins d'emprunts du nouveau gou- vernement. Ce sont les besoins d'emprunts qui nous viennent du gouvernement antérieur. La nuance est importante.

Il est clair, comme je l'ai déjà dit ce matin, que ces besoins d'emprunts sont considérables. Il est évident que des besoins de cette importance, découlant, comme on l'a déjà dit, de règlements de conventions collectives qui ont été très onéreuses, se conjuguent avec l'espèce d'inquiétude psychologique qui a régné pendant quelques jours sur les marchés financiers pour faire une pression sur les écarts.

Il faudra que l'on revienne éventuellement là-dessus, que l'on établisse un certain nombre de comparaisons. Nous avons connu au Québec, dans le passé, des écarts supérieurs à ceux-là et, à ces époques, on ne considérait pas que c'était nécessairement et inévitablement l'option d'un Parti québécois, qui, sauf erreur, n'existait pas encore dans le cas de certains écarts supérieurs à ceux-là, qui en était la cause.

Il est clair que je préférerais infiniment et, j'imagine, le député de Jean-Talon aussi, qu'il n'y ait pas d'écarts pareils à l'heure actuelle ou qu'ils soient plus faibles. Mais le fait est qu'il faut tenir compte non seulement des considérations d'ordre politique qu'il apportait, mais aussi des besoins d'emprunts très considérables du secteur public québécois cette année, qui ont été rendus plus considérables encore par les crédits supplémentaires dont nous parlerons tout à l'heure.

M. Garneau: Revenant sur le même sujet, je voudrais attirer l'attention du ministre des Finances sur le fait que, si l'on regarde un peu l'évolution des taux d'intérêts entre le Québec et l'Ontario au cours de l'histoire, sans remonter à Adam et Eve, mais en remontant à une époque aussi récente que 1970, on se rendra compte que c'est au deuxième trimestre de 1970 que les écarts entre le Québec et l'Ontario ont été les plus élevés. Cela a atteint, à ce moment, jusqu'à 102 points de base, c'est-à-dire, 1.02% de plus pour un emprunt québécois que pour un emprunt ontarien. Sur le même thème qu'il vient de développer et que j'avais développé antérieurement, je dois quand même souligner que cela coïncide aussi avec l'époque où un gouvernement, par la voix de ses ministres, parlait d'égalité ou d'indépendance et à l'époque où le ministre des Finances du temps s'était associé à la thèse que proposait un des membres actuels du gouvernement, le ministre de l'Industrie et du Commerce, c'est-à-dire la séparation du reste du Canada et l'association avec les Etats-Unis.

Si je remonte un peu plus loin dans le temps, je me rends compte aussi qu'en 1966, au moment où une équipe ministérielle qui avait fièrement manifesté son option canadienne existait, nous avions des écarts entre le Québec et l'Ontario, qui variaient autour de 25 points de base, ce qui correspond à la situation qui prévalait au troisième trimestre de 1976, à l'arrivée d'un gouvernement qui proposait une thèse très ambiguë également, avec une administration qui flottait toujours entre

la figue et le raisin, nous avons vu, de 1966 à 1970, une ascension lente et continuelle des taux d'intérêt, des écarts entre le Québec et l'Ontario. Ces écarts, qui sont passés au deuxième trimestre 1966 à 25, comme je vous le mentionnais tout à l'heure, sont passés à 102. Et, de 1970 jusqu'à 1976, nous avons réduit ces écarts. Cela a été réduit sur une période relativement courte, parce que, au deuxième trimestre de 1970, nous étions revenus, dès 1972 et avant même, à un écart de 19 sur le premier trimestre.

C'est donc dire qu'il y a, à mon sens, une relation très étroite entre les thèmes que développent les partis politiques et aussi, je pense, c'est le cas dans la situation présente. Quand le ministre des Finances parle du programme d'emprunt, il le relie très justement, je crois, au règlement des conventions collectives.

Mesures anti-inflationnistes et conventions collectives

M. Garneau: Je profite de l'occasion pour demander au ministre des Finances, ayant dit ce qu'il a dit, et considérant que le règlement des conventions collectives — parce que c'est comme cela que j'analyse ses propos — a été fait à des taux trop élevés, s'il a l'intention de solliciter le plus rapidement possible l'opinion de la Régie des mesures anti-inflationnistes du Québec et de voir s'il n'y a pas lieu, pour le gouvernement, d'accepter les recommandations, ou les suggestions, ou les décisions de la régie si, par hasard, le gouvernement précédent avait consenti des augmentations de salaires trop importantes? Si ce n'est pas l'intention du gouvernement d'appliquer les normes anti-inflationnistes, je voudrais dire au ministre des Finances que ce n'est plus l'ancienne administration qui devra en porter le blâme, mais la sienne.

M. Parizeau: On pourrait récrire l'histoire des écarts en fonction aussi de la façon dont les finances ont été gérées. Je suis un peu étonné de constater que le député de Jean-Talon voit dans l'accroissement des écarts de 1967 à 1970 le reflet de thèses politiques d'un parti, sauf erreur. Le goût que le parti de l'Union Nationale pouvait avoir pour l'indépendance était nettement plus accentué avant la déclaration dite d'Hawaii qu'après. Le gouvernement de l'Union Nationale, au fur et à mesure de cette époque, n'a pas accentué les — comment dire — débats autour de l'égalité ou de l'indépendance. La façon, cependant, dont ses projets d'ordre financier pouvaient être perçus par les milieux financiers eux-mêmes explique probablement davantage le fait que, graduellement à travers cette époque, les écarts se soient agrandis.

Si la thèse politique du député de Jean-Talon pouvait s'accréditer, ce serait l'inverse qui se serait produit. On aurait vu des écarts considérables en 1966 et des écarts s'atténuant jusqu'en 1970, sauf peut-être pendant cette campagne électorale de 1970 où certains membres du gouvernement de l'Union Nationale ont laissé passer un certain nombre de choses. Mais, en tout cas, de 1966 à 1970, on aurait vu les écarts se refermer. Ce qui n'est pas le cas. Il est bien possible aussi qu'une des raisons majeures pour lesquelles les écarts ont été faibles de 1970 à 1972 ou 1973, c'est qu'en somme, l'augmentation de l'endettement du gouvernement de Québec était pas mal plus faible qu'elle ne l'a été depuis quelques années.

Sous l'effet conjugué, d'une part, d'un déficit budgétaire croissant, du financement des jeux olympiques et du financement de la baie James, la pression sur les marchés financiers a été considérable depuis deux ans. Elle l'est singulièrement cette année. Il va de soi que cela a un impact sur les écarts, quand bien même on ne discuterait pas de politique du tout au Québec. Si bien que la thèse qu'il faisait, quant à l'évolution de certaines idées politiques et l'évolution des écarts, on pourrait la présenter bien autrement si on tenait compte, en particulier, des besoins d'emprunt du secteur public. Je ne tiens pas, remarquez bien, à faire de l'exclusif là-dedans. Il est clair qu'à l'heure actuelle i'augmentation des écarts est liée à toute une série de facteurs. A mon sens, la thèse du député de Jean-Talon, cependant, est beaucoup trop exclusive.

Deuxièmement, pour ce qui a trait à la Régie des mesures anti-inflationnistes, je ne pense pas que je vais tomber dans la trappe qui consisterait essentiellement à faire en sorte que les augmentations de salaires qui ont été consenties à l'occasion des dernières négociations deviennent les augmentations de salaires du présent gouvernement, à moins qu'ayant demandé l'avis de la Régie, il n'accepte de les couper, ou se sente forcé de les couper. Le précédent gouvenrement n'a pas, au fond— et on s'en rend compte en étudiant les augmentations de salaires qui ont été consenties — accordé une importance particulière aux normes qu'il connaissait émanant de la commission des mesures anti-inflationnistes, aussi bien d'Ottawa que de Québec.

Ceci me semble être très différent du comportement qui s'est produit à Ottawa. Après un accrochage entre le gouvernement fédéral et la commission anti-inflationiste à l'occasion des conflits des postiers, le gouvernement fédéral a quand même, au fur et à mesure de ses négociations, accordé une importance à des normes qu'il connaissait. Il est tout à fait clair qu'en particulier au cours des dernières semaines, qui ont amené le conclusion ou la signature des conventions le gouvernement de Québec n'a pas accordé une importance particulière aux normes de sa propre commission. A cet égard, même s'il s'agit des crédits des finances que nous aurons l'occasion d'examiner tout à l'heure, je ne veux pas en rendre particulièrement responsable le député de Jean-Talon, parce que je sais très bien à quel genre de pression le gouvernement tout entier pouvait être soumis à ce moment. Il n'en reste pas moins qu'ayant laissé de côté les normes de la commission des mesures anti-inflationistes à l'occasion de ces dernières semaines le gouvernement a si-

gné ces conventions collectives. La signature du gouvernement est engagée. Si on veut rétablir un climat à peu près possible — je ne dis pas serein, ce serait trop demander — dans les relations avec les centrales syndicales, le gouvernement ne peut pas revenir sur sa signature, ainsi que le premier ministre l'expliquait pendant sa campagne électorale. Dans ce sens, la position que le gouvernement défend ici est claire. Il reste maintenant à déterminer avec la commission des mesures anti-inflationistes comment on procède à partir de là. J'aurai l'occasion de faire une déclaration à ce sujet, mais ce ne sera pas ce soir.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Lotbinière.

M. Forget: J'aimerais intervenir...

M. Biron: Je voudrais demander au ministre des Finances s'il a l'intention de retarder les paiements de transfert aux municipalités et aux commissions scolaires afin d'améliorer le "cashflow" de la province et de demander aux commissions scolaires et aux municipalités de se financer à même leur marge de crédit dans les banques.

M. Parizeau: Pour ce qui a trait aux municipalités, il ne s'agit pas de retarder vraiment les paiements de transfert à l'heure actuelle. Il s'agit de démêler, si on me passe l'expression, les paiements de transfert. Toute une série de promesses ont été faites, singulièrement au cours des dernières semaines qui ont précédé l'élection, si bien que le travail, à l'heure actuelle, consiste à savoir ce qui est engagements fermes, ce qui est engagements moins fermes et ce qui n'est pas engagements du tout, etc. Le travail à cet égard est assez avancé.

Pour ce qui a trait aux commissions scolaires, il est clair que déjà le gouvernement doit passablement d'argent à celles-ci. Faire en sorte qu'elles empruntent davantage auprès des banques parce que le gouvernement retarderait ses paiements n'est pas le genre de solution qui me plairait personnellement, particulièrement. Est-ce que je pourrai l'éviter complètement? C'est difficile de m'engager à ce stade. J'ai trop vu des ministres des Finances autrefois se servir de cette soupape pour ne pas imaginer qu'elle n'est pas là. Mais je souhaiterais vivement ne pas avoir à l'utiliser.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: J'aimerais faire un bref commentaire sur un sujet que le ministre des Finances vient de toucher et qui, à cause de son importance, mérite, je pense, une certaine mise au point. Il s'agit des augmentations salariales dans le secteur public et surtout dans le secteur parapublic. Le ministre des Finances indique, à juste titre, que si l'on veut un climat à peu près possible — je suis content de voir son réalisme à se sujet — il est absolument primordial que l'Etat, puis- que c'est l'Etat qui a signé et ce n'est pas un parti politique, honore sa parole dans un tel processus. Cependant, il ne faut pas sauter aux conclusions tout de suite et c'est sur ce point que j'aimerais apporter une mise au point.

Je demeure persuadé, et jusqu'à preuve du contraire c'est une conviction dont je ne démords pas, que les conventions collectives que le gouvernement précédent a signées se conforment, dans leur essence et leur totalité, aux normes anti-inflationistes.

Si on considère ces conventions collectives dans leur totalité. Ce que je veux dire, c'est qu'il est à peu près certain qu'effectivement, si on considère, pour une certaine catégorie d'emplois en particulier, les infirmières, par exemple, les hausses salariales qui ont été consenties en première année, nous avons peut-être, sur un plan technique, un léger dépassement, encore que cela dépende d'une interprétation que l'on donne aux normes de la Régie des mesures anti-inflationnistes, qui ne sont pas absolument sans ambiguïté.

Cependant, si l'on considère la totalité des conventions collectives signées pour trois ou quatre ans, nous nous retrouvons en face d'augmentations cumulatives qui sont en deçà de ce que permettent les normes anti-inflationnistes. Je crois que dans l'évaluation qu'on fait de ces conventions collectives, c'est une chose dont il devra être tenu compte. On doit se rappeler que les normes anti-inflationnistes ont été édictées dans le contexte général de contrats annuels. Le gouvernement précédent ayant conclu des ententes de trois ou quatre ans, les normes doivent être réinterprétées à la lumière de ce contexte et aussi à la lumière d'une règle absolument importante qui consiste dans les relations historiques. Or, on sait très bien que, dans le secteur parapublic, qu'il s'agisse des enseignants ou qu'il s'agisse du personnel des établissements de santé, les relations historiques et les comparaisons que l'on peut en tirer doivent aller trouver leur point d'appui, en quelque sorte, à l'extérieur du Québec, puisque dans le cas des infirmières, par exemple, il n'y a pas de marché privé auquel on puisse comparer leur traitement. Si l'on tenait compte de ce critère qui existe aussi, qui est tout aussi valable dans les normes anti-inflationnistes, je crois qu'on aurait un jugement définitif et final qui serait beaucoup plus nuancé et peut-être même — c'est ma conviction encore aujourd'hui qui serait favorable aux ententes qui ont été signées.

Un dernier point, Mme le Président, puisque je ne veux pas prendre trop de temps là-dessus. Je crois qu'il faut faire une distinction entre deux choses. C'est une chose, en effet, que de dire que l'Etat respectera ou ne respectera pas la parole donnée, mais c'est une autre chose que d'affirmer, avant même de savoir si la question se pose, de dire d'avance qu'on ne respectera pas, qu'on ne se conformera pas au jugement de la Régie des mesures anti-inflationnistes. Je comprends qu'il y avait une conjoncture électorale, mais c'est, malgré tout, l'essentiel qui divise l'Opposition et le

gouvernement actuel et qui l'a divisé au cours des dernières semaines. Nous n'étions pas prêts à dire, avant même d'en avoir la preuve, que ces conventions collectives seraient respectées en dépit d'un jugement défavorable de la Régie des mesures anti-inflationnistes. Nous attendions de voir ce jugement, parce que c'est une chose assez grave de dire: Nous avons créé une institution, l'Etat a créé une institution pour contrôler l'inflation, et d'avance, quelque soit le jugement que portera cette régie, nous ne le respecterons pas. C'est une chose beaucoup plus grave et tout aussi grave au point de vue de la crédibilité de l'action étatique, de l'action gouvernementale que celle que constituerait le non-respect de la parole donnée vis-à-vis des centrales syndicales.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Mme le Président, je voudrais, en réponse à ce qui vient d'être dit, présenter quelques réflexions très courtes, parce que, encore une fois, j'aurai l'occasion de revenir beaucoup plus longuement là-dessus. Je ne suis pas étonné qu'on réagisse comme on vient de le faire, peut-être essentiellement pour la raison suivante: C'est que beaucoup— et je parle ici singulièrement des dernières semaines qui ont précédé l'élection — des renseignements qui sont maintenant disponibles ne l'étaient pas à ce moment-là quant aux coûts des conventions, quant aux comparaisons d'échelles, etc. Je pense que lorsque ces chiffres seront tous disponibles, on se rendra compte qu'effectivement, il y a des dépassements qui sont peut-être un peu plus nombreux et un peu plus importants que ce qui vient d'être souligné.

Deuxièmement, je reconnais que, dans le cas de certains groupes, comme, par exemple, les infirmières et les ouvriers en particulier, l'ancien gouvernement, à l'avance, avait averti qu'en raison du caractère particulier de ces deux groupes, il allait offrir des augmentations de salaires qui dépassaient les normes et qu'il en était conscient. Ceci, bien sûr, la loi le lui permettait. On n'a pas à reprocher ici à un gouvernement — autrement que discuter de son jugement à cet égard, mais enfin — on n'a pas à critiquer un gouvernement parce qu'en vertu des dispositions de la loi il avertit à temps et détermine qu'effectivement, il faudra des dépassements dans certains secteurs, pour des raisons qu'il a expliquées.

Je pense qu'on se rendra compte, cependant, assez rapidement que, dans d'autres secteurs, les augmentations n'ont pas été données de cette façon et qu'en particulier certaines normes ont été complètement rompues à la dernière minute. Je me rends très bien compte qu'indiquer que le gouvernement respectera sa parole, comme cela a été fait par le Parti québécois pendant la campagne électorale, comporte des exigences.

D'un autre côté, je ne vois pas comment— et cela continue, dans un certain sens, de me dépasser— on a pu négocier, dans le cas d'un certain nombre de groupes, sans se rendre compte qu'on allait inévitablement vers un problème sérieux avec la Régie des mesures anti-inflationnistes. Il y aura, à un moment donné, une sorte d'explication, qu'il faudra essayer de trouver, de négociations pendant quelques semaines où on se rend compte que la pression est très forte et où on a l'impression que tout se passe comme si le précédent gouvernement avait oublié sa régie. Quant aux détails, quant aux comparaisons de chiffres, j'aurai l'occasion de revenir là-dessus plus tard.

M. Garneau: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: ... quant au débat sur la Loi sur les mesures anti-inflationnistes, je n'ai pas d'objection, personnellement, à ce qu'il ait lieu maintenant. Je crois que l'ancien ministre des Affaires sociales est disposé à le faire, surtout dans le contexte. Une des raisons pour lesquelles je voulais me lever, c'était pour dire ce que le ministre des Finances vient de dire concernant les infirmières. En ce qui me concerne, j'approuve et j'appuie l'attitude du député de Saint-Laurent, surtout en plaçant cela dans le contexte de ce que vient de dire le ministre des Finances concernant les infirmières.

Si on fait une exception pour les infirmières comme nous avions dit que nous le faisions, et qu'on admet que la Régie des mesures antiinflationnistes va analyser l'ensemble du secteur des affaires sociales pris globalement, je suis de l'opinion de l'ancien ministre des Affaires sociales, le député de Saint-Laurent, à l'effet que les conclusions, à mon sens, seront que les augmentations de salaires sont à l'intérieur des normes anti-inflationnistes en faisant l'exception des infirmières. Je pense qu'on pourra avoir ce débat dans une autre circonstance et il sera beaucoup plus éclairé lorsque nous aurons les décisions de la Régie des mesures anti-inflationnistes.

Dans ce sens, je voudrais aussi ajouter, avant de passer à un autre sujet, que la régie anti-inflation a eu à analyser des conventions collectives entre des employeurs et des employés. Cette régie a eu à analyser des conventions signées entre un employeur, soit du secteur municipal et un groupe d'employés représenté par son syndicat, soit dans le cas des policiers, par exemple. La Régie des mesures anti-inflationnistes est intervenue. Il s'agissait là de conventions collectives signées de bonne foi. Je pense qu'il ne serait pas sain que le gouvernement, qui a édicté des règlements, les interprète lui-même à sa façon. C'est pourquoi il y avait une régie qui était dotée d'un grand caractère d'autonomie. Nous verrons ce qui va en sortir. J'ai hâte de voir la proposition ou l'analyse faite par la Régie des mesures anti-inflationnistes. J'espère qu'elle sera de la même nature que l'opinion donnée en ce qui regarde les fonctionnaires où, dans le cas des fonctionnaires de l'Etat, la régie a statué que la convention collective signée était

conforme, dans son ensemble, aux mesures antiinflationnistes.

Je voudrais revenir à la question posée par le député de Lotbinière, qui est fort intéressante. Je suis un peu surpris. Evidemment, je pense que c'est de bonne guerre. Le ministre des Finances fait un peu de politique en jouant sur la marge de $3 millions ou $4 millions, alors que le gros paquet à côté, il n'en dit guère mot.

Je pense que, quand il aura fait l'addition et surtout après le geste extrêmement prudent qu'a posé l'ancien ministre des Affaires municipales concernant les propositions de règlement pour les égouts et les aqueducs, il verra que c'est très marginal dans l'ensemble du budget de la province: $10 milliards, s'il y a $3 millions, $4 millions ou $5 millions, ce n'est pas cela qui va placer les finances de la province dans une situation délicate.

La question du député de Lotbinière était beaucoup plus précise et j'étais heureux qu'il la pose, puisque cela dénote qu'il a entendu, lui aussi, les mêmes opinions que moi. Cela me permet de poser au ministre des Finances la question suivante en la précisant, la même question que le député de Lotbinière, le chef de l'Union Nationale:

Transferts aux commissions scolaires

M. Garneau: Est-ce l'intention du ministre actuel des Finances d'utiliser, en entier, les crédits votés par cette Assemblée, souvent dans sa forme actuelle, dans sa forme antérieure, mais quand même des crédits votés par l'Assemblée nationale en ce qui concerne les transferts aux commissions scolaires. Est-ce qu'il a l'intention de payer en entier et d'utiliser 100% des crédits autorisés par l'Assemblée nationale et les verser aux commissions scolaires ou si, dans ces crédits autorisés, il n'y a pas une marge qu'il a utilisée pour augmenter à $350 millions ces crédits périmés? Je voudrais en être bien certain.

M. Parizeau: Oui c'est mon intention d'utiliser les crédits prévus dans le budget pour les versements aux commissions scolaires. En somme, nous n'avons pas périmé, en utilisant cela dans le sens transitif direct, nous n'avons pas périmé des crédits à cet endroit.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: Mme le Président, est-ce que le ministre des Finances pourrait nous dire si tous les paiements qui sont dus aux commissions scolaires ont été faits pour les années précédentes et l'année courante à ce jour ou s'il y en a qui traînent encore depuis deux ou trois ans?

M. Parizeau: Je ne pourrais pas dire encore quel est l'échéancier des retards. D'après ce que je peux voir, il y a à peu près $300 millions qui sont en retard. Mais de combien d'années, ce n'est pas la même chose, et là je n'ai pas l'échéancier des retards spécifiques.

M. Russell: Quel est le montant que le ministre des Finances possède actuellement de la taxe de vente qui est perçue et qui n'est pas remise aux municipalités? Il semble y avoir chaque année un ballon. Le ministre a toujours de la difficulté à trouver la façon d'en faire la distribution aux municipalités. Est-ce que ce montant est assez considérable?

M. Parizeau: Je ne pourrais pas dire, je vais vérifier et je reviendrai avec la réponse.

M. Biron: Le ministre des Finances a parlé de $300 millions en retard aux commissions scolaires. Est-ce qu'on pourrait avoir devant cette Chambre, dans un avenir rapproché, la liste de ces commissions scolaires et les dates d'échéance, si c'est dû depuis un an ou deux ans? $300 millions, c'est une somme considérable.

M. Parizeau: C'est compte tenu des retards dans l'adoption des budgets et qui ne sont pas nécessairement la faute du gouvernement. D'ailleurs, à cet égard, ils peuvent être dus à des tas de causes, compte tenu, d'autre part, des transferts qui sont considérables. Non, ce n'est peut-être pas compte tenu de certains retards qu'on a déjà vus dans le passé, ce n'est peut-être pas extraordinaire. C'est vrai que cela devrait être réduit au minimum. Le problème, évidemment, à l'heure actuelle, c'est de savoir où est le minimum, compte tenu des délais normaux dont on parlait tout à l'heure.

Est-ce que je pourrais demander quelques jours avant de répondre à cette question? Est-ce que vous pourriez la faire par écrit, de façon que je puisse y répondre par écrit? Je doute qu'on puisse vraiment y répondre de façon spécifique avant la fin de la présente session. Cela demande quand même, comment dire, des recherches en dehors du ministère où je suis, et je voudrais simplement être certain de ne pas la promette, mettons, d'ici deux jours, et de ne pas pouvoir tenir ma promesse. Alors vous ferez la question par écrit, j'y répondrai.

M. Russell: Si je comprends bien, Mme le Président, le ministre veut avoir une communication directe par écrit, non pas nécessairement par une question en Chambre, soit qu'on transmette une demande par écrit directement au ministre, sans passer par une demande...

M. Parizeau: Que ce soit une demande écrite, inscrite.

M. Russell: ...pas même à la Chambre. Au feuilleton.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Mme le Président, je suis bien heureux que le ministre des Finances ait indiqué qu'il a l'intention d'utiliser l'ensemble des crédits

qui ont été autorisés par cette Assemblée pour le paiement des sommes dues aux commissions scolaires. Comme c'est un dossier auquel j'ai apporté beaucoup d'attention dans les mois qui ont précédé l'élection, je dois dire au ministre des Finances que si les fonctionnaires qui, je crois, sont les mêmes que ceux qui me fournissaient les statistiques, les mêmes qui sont restés en fonction, à moins qu'il y ait eu des changements récents dont j'ignore la teneur, les statistiques que j'avais au moment où j'occupais vos fonctions étaient à l'effet que si les crédits autorisés par l'Assemblée nationale pour l'exercice financier 1976/77 étaient complètement versés aux commissions scolaires, les sommes dues aux commissions scolaires le 30 juin 1975 — c'est-à-dire la dernière année financière des commissions scolaires pour lesquelles nous ayons un compte rendu détaillé des opérations, puisque je ne crois pas que les bilans des commissions scolaires soient encore tous entrés au ministère de l'Education et tous analysés — et si les statistiques qu'on m'avait fournies dans le temps étaient justes,— je crois qu'elles l'étaient — il y avait des crédits pour payer l'ensemble des sommes dues aux commissions scolaires jusqu'au 30 juin 1975 et que les mêmes sommes étaient maintenues dans le budget pour les années à venir puisque nous avions réinscrit $145 millions dans le budget de base.

Si ce budget de base était maintenu pour les autres années, nous escomptions en fait prendre trois ans pour laver complètement et ramener sur la véritable base 70/30 les arrérages aux commissions scolaires qui s'étaient accumulés au cours des années. C'est l'indication que je voulais donner à cette Chambre, étant donné que j'avais les statistiques qui m'avaient été fournies par les fonctionnaires et de l'Education et du Conseil du trésor. A moins qu'il y ait eu des raffinements dont j'ignore la teneur, le budget, s'il est utilisé en entier cette année, devrait régler l'ensemble des sommes dues aux commissions scolaires au 30 juin 1975.

M. Parizeau: Mme le Président, sur le plan des statistiques, bien sûr, je ne disconviens en rien de ce que vient de dire le député de Jean-Talon mais, si je comprends bien le député de Lotbinière, ce qu'il voulait, ce n'étaient pas seulement des statistiques globales, c'était le détail. Si c'est le détail qu'il veut, évidemment, c'est une autre opération. Donner une réponse avec des chiffres statistiques globaux, je peux le faire demain matin. Donner le détail, c'est une autre paire de manches. C'est tout ce que je voulais dire.

Le Président (Mme Guerrier): Cette Assemblée est-elle disposée à passer à l'étude des crédits des différents ministères? Affaires culturelles, programme 1. Adopté?

Affaires culturelles

M. Garneau: II n'y a pas de question sur l'ensemble des programmes du ministère des Affaires culturelles; s'il n'y en a pas d'autres, on est prêt à considérer comme adoptés les crédits additionnels de ce ministère.

Le Président (Mme Cuerrier): Elément 2, adopté.

M. Biron: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): Oui.

M. Biron: ... j'aurais juste une question sur les crédits des Affaires culturelles. Je vois qu'on a un crédit pour les fêtes de la saint Jean et je retrouve un peu plus loin, à la page du Conseil exécutif, un autre crédit pour les fêtes de la saint Jean. Tous ces crédits additionnés sont-ils véritablement pour l'année 1976 ou si on a payé d'avance des montants pour 1977?

M. Parizeau: Pour 1976 seulement.

Le Président (Mme Cuerrier): Elément 3, adopté. Affaires culturelles, programme 3, élément 1, adopté, élément 2, adopté. Programme 4, élément 2, adopté. Programme 5, élément 1, adopté, élément 2, adopté.

Affaires municipales. Elément 1. Adopté.

Affaires municipales M. Garneau: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Elément 2. Adopté. Elément 11.

M. Garneau: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Brochu: A l'élément 11, j'aimerais demander au ministre s'il entre dans ce secteur les engagements qui avaient été pris par l'ancien gouvernement pour les travaux déjà en cours. Diverses municipalités, par exemple, suite aux engagements qui avaient été pris par le gouvernement, ont commencé certains travaux et se retrouvent dans la situation où elles doivent reprendre les démarches pour ainsi dire à zéro. Je compte entre autres la municipalité d'Asbestos à ce chapitre; il y avait environ pour $3 millions, je pense, d'engagements pris par le gouvernement pour des travaux d'égout et d'aqueduc qui sont en train d'être complétés actuellement. A ce stade-ci, le ministre peut-il nous indiquer s'il y aura un ordre de priorités dans les études de ces demandes qui étaient en cours et si on donnera une attention spéciale à celles qui sont déjà en marche, parmi ces municipalités qui ont des projets?

Le ministre serait-il en mesure, maintenant, de faire le point sur cette situation, s'il a eu le temps d'étudier le dossier et nous dire s'il y a des priorités qui seront accordées éventuellement?

M. Parizeau: Pour le moment, tout ce que je

peux dire là-dessus, c'est que le million qui se trouve là semble, au ministère des Affaires municipales, suffisant pour aller au plus pressé. C'est très peu, compte tenu du genre de problèmes que vous venez de soulever.

Je ne pense pas qu'on puisse vraiment démêler la question qui vient d'être soulevée avant le prochain budget. En ce sens qu'il y a, effectivement, des travaux qui ont été mis en cours par certaines municipalités, souvent avec imprudence d'ailleurs, c'est-à-dire sur des promesses verbales ou des promesses écrites, mais qui n'avaient rien d'officiel. Bien sûr, les subventions ne sont pas venues. A l'heure actuelle, il semble y avoir passablement de municipalités qui éprouvent des difficultés considérables d'avoir à transformer en obligations à long terme certains crédits bancaires avec lesquels elles ont financé des projets.

Je doute, personnellement, que tout cela puisse être démêlé avant le prochain budget. Il est évident qu'il faut y mettre une priorité considérable. Il est évident aussi qu'il faut essayer d'y mettre plus d'argent qu'on a pu en mettre jusqu'à maintenant.

Je ne vois vraiment pas, au point où nous en sommes à l'heure actuelle, que je puisse présenter quelque chose de plus précis.

M. Biron: Mme le Président, le ministre des Finances pourrait-il nous donner des directives dans des cas particuliers? J'ai une lettre ici de l'ancien ministre des Affaires municipales écrite à l'ancien député de Saint-Hyacinthe autorisant, je crois, pour une paroisse du comté de Saint-Hyacinthe, une subvention de $144 000.

L'ancien député de Saint-Hyacinthe a écrit au maire de cette paroisse, disant: Cette lettre d'intention vous autorise à procéder aux travaux à votre discrétion. Les travaux sont maintenant en marche et, le 23 novembre, on reçoit une autre lettre pour annuler tout cela.

Alors, quelles sont les directives que vous prévoyez donner — c'est arrivé à plusieurs reprises; je pense que l'ancien ministre des Affaires municipales l'a dit au moins à 75 reprises — à ces municipalités qui sont déjà engagées, celle-là en particulier, pour une somme de $144 000.

M. Parizeau: Elle est datée de quand cette lettre? La première lettre?

M. Biron: Du 28 octobre et la lettre du député du 2 novembre.

M. Parizeau: Alors, cela fait partie du stock de lettres dont nous découvrons des exemplaires. Je pense, personnellement, que l'estimation de 1975 est conservatrice. Il y en a beaucoup en circulation. Je pense que le ministre des Affaires municipales a passé passablement de temps sur cette question et c'est lui qui aura à émettre des directives, à savoir quoi en faire.

M. Biron: Pour le moment, vous n'avez aucune directive à donner à ces municipalités?

M. Parizeau: Ce n'est pas moi qui dois les donner. Le ministre des Affaires municipales aura à le faire. Je sais que normalement il sera amené à le faire assez rapidement. Cela relève de lui. Je ne peux donner, en tant que ministre des Finances, des directives aux municipalités.

M. Biron: Méfiez-vous des lettres d'anciens ministres libéraux.

M. Parizeau: Timeo Danaos...

M. Mailloux: Mme le Président, si on me le permet.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Si nous prenions la peine de lire attentivement la lettre qui a été envoyée à ces municipalités, on verrait la précaution qu'a prise l'ex-ministre des Affaires municipales quand il dit que cette lettre devra par la suite faire l'objet de l'acceptation du Conseil du trésor avant que les travaux ne soient engagés. Il y a une précaution bien indiquée qui est incluse dans les lettres qui étaient envoyées.

M. Grenier: C'est peut-être bon que je dépose un document qui est très clair ici, il me semble, et qui pourrait aller...

M. Russell: Vous pouvez le lire.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Compton.

M. Grenier: C'est une lettre qui est signée par M. Goldbloom, en date du 5 novembre, et qui est envoyée à M. Orner Dionne, député de Compton. "Faisant suite à votre représentation que vous m'avez faite en faveur de la municipalité de Saint-Isidore-d'Oakland, Mégantic-Compton, relativement à la possibilité d'une aide financière afin de permettre la réalisation des travaux d'extension du réseau d'aqueduc et d'égout sanitaire avec protection contre les incendies dans quelques rues de la municipalité, projetés par cette dernière et décrétés au règlement no 120.

J'ai le plaisir de vous informer que le ministère des Affaires municipales mettra à la disposition de cette municipalité une subvention de $21 454. Cette subvention sera payée en un seul versement — en un seul, non pas répartie sur dix ans comme on le disait l'autre jour — et ce dernier sera effectué à même les crédits mis à la disposition de mon ministère pour le présent exercice fiscal. Je vous laisse le soin d'en informer la municipalité en conséquence. Je vous prie d'accepter, mon cher collègue, l'assurance de mes sentiments les meilleurs, "Victor Goldbloom."

C'était le 5 novembre. Je pense qu'on était en période électorale.

M. Mailloux: Mme le Président, il est vrai...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. Duhaime: Mme le Président, pourrait-on demander le dépôt de cette correspondance?

Le Président (Mme Cuerrier): On est en commission plénière, M. le ministre.

M. Charron: Pour l'information de la Chambre, le député accepterait-il de déposer copie de cette lettre?

M. Garneau: Avant que le député ne dépose cette lettre, pourrait-il dire s'il existe une deuxième lettre annulant cette subvention et en faire lecture à la Chambre?

M. Grenier: Le 23 a été une grosse journée pour l'ancien ministre. Il a écrit plusieurs lettres.

M. Charron: Mme le Président, me permettez-vous de signaler au député de Jean-Talon que, dans le ministère que je dirige maintenant, il y a 169 lettres de ce genre qui ont toutes été annulées — j'en conviendrai très bien — le 17 novembre par une lettre du ministre défait, mais qui a quand même occasionné, à plusieurs endroits, un début de travaux avec lesquels j'ai à me déprendre maintenant puisqu'il n'y avait, à ce moment, aucune disponibilité financière pour faire ce genre d'engagement. C'est exactement pourquoi, un peu plus loin dans le budget supplémentaire, on trouvera, avec la collaboration du ministre des Finances, un montant de $1 million à mon ministère pour faire face non pas à des programmes nouveaux que le gouvernement a à faire, mais pour corriger les erreurs et les maladresses du gouvernement sortant et aussi les fausses promesses faites en pleine campagne électorale.

Le Président (M. Cuerrier): M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Je dois vous dire que les propos de...

M. Alfred: Mme le Président, j'aurai également à déposer en Chambre une lettre de ce genre qui va démontrer qu'une lettre a été envoyée, le 8 novembre 1976, à M. Marc Assad, député de Papineau, alors que celui-ci a été limogé par l'administration libérale, avant le 15 octobre.

Le Président (M. Cuerrier): M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Mme le Président, je ne sais pas au juste si les députés de cette Chambre veulent se payer une pinte de bon sang. Si c'est cela, je suis bien prêt à collaborer, vous savez, je ne suis pas tellement nerveux. La seule chose que je voudrais dire aux gens de l'Union Nationale qui soulèvent ces points est que j'espère que le nouveau gouvernement fera comme celui de 1970 et qu'il respectera les lettres qui avaient été envoyées par votre prédécesseur, M. le député de Lotbinière, lettres qui n'avaient pas été suivies par un geste de responsabilité comme celui qu'a posé l'ancien ministre des Affaires municipales et celui qui était responsable du haut-commissariat.

Je dois dire à cette Chambre que, dans les deux cas — je pense qu'on peut vérifier auprès de l'administration — j'avais indiqué au ministre des Affaires municipales du temps, comme ministre des Finances — et c'est la raison pour laquelle j'interviens à ce moment parce que cela donne suite aux propos que vient de tenir l'actuel ministre des Finances — et au ministre responsable du haut-commissariat, qui m'avait demandé par écrit, depuis un certain temps, des ajustements au niveau du budget des Affaires municipales et du haut-commissariat mon intention de proposer à cette Chambre des crédits additionnels.

Ces crédits additionnels étaient pour faire face à ces obligations et répondre à certains travaux urgents dans des municipalités, que ce soit au niveau des sports et des loisirs ou au niveau d'aqueducs et d'égouts. On peut soumettre qu'il s'agissait là de promesses faites à l'aveuglette, mais je dois vous dire que, dans les deux cas, il y avait ces crédits. C'est la raison pour laquelle c'est moi-même qui ai demandé aux deux ministres en question, pour laisser à l'actuel gouvernement l'entière décision et le champ de manoeuvre dont il a besoin pour agir — ce sont ses décisions, de telle sorte que, si vous décidez de les réintroduire dans le budget 1976/77, cela fera partie de vos réalisations, messieurs des banquettes ministérielles — j'ai demandé, dis-je, à ces deux ministres, compte tenu de la situation que moi-même j'avais connue en 1970 et pour éviter que des gens ne prennent des décisions trop hâtives, de bien indiquer dans quel contexte cela avait été fait.

Le ministre des Affaires municipales m'a assuré que, dans les cas où il s'agissait de crédits qui devaient être pris sur les budgets supplémentaires, il avait indiqué que ces crédits devaient recevoir l'autorisation du Conseil du trésor. Il semble bien que, selon certaines lettres, cela n'ait pas été fait. Mais, de toute façon, je veux indiquer au ministre des Finances actuel qu'il ne réglerait pas un problème des libéraux, parce que, dans le fond, nous répondions à des demandes qui étaient beaucoup plus considérables de la part des citoyens des différentes municipalités. Je vois que les députés qui ont été élus dans ces municipalités font les mêmes pressions que leurs prédécesseurs pour tenter de trouver des solutions à des problèmes municipaux, qu'ils soient des loisirs ou des services publics.

Je suggère au ministre des Finances — il n'aura certainement pas d'objections de ma part — qu'il ajoute à son budget supplémentaire ces sommes qui ne sont pas énormes lorsqu'on les additionne. Je pense que ce serait assez facile de le vérifier. Cela ne dépasserait pas les $5 millions ou $6 millions et cela réglerait non pas des problèmes de l'ancien ministre — en effet, il est rendu député comme moi et il y a un autre ancien ministre qui n'est plus membre de cette Chambre;

je pense bien que cela ne l'empêchera pas de dormir demain matin — mais cela réglerait les problèmes de l'ensemble des municipalités qui sont affectées. Je dois vous dire que nous avions pris cette décision, en 1970, de respecter, entre autres, les engagements de l'ancien chef de l'Union Nationale, l'ancien député de Bellechasse, M. Loubier. Nous avions également respecté plusieurs des engagements, lorsque c'était possible de le faire, concernant les hôpitaux. Je crois, surtout lorsqu'il s'agit de centaines et de centaines de citoyens, que ce serait un geste qui serait certainement très apprécié de la part du gouvernement par les électeurs et les contribuables municipaux, que ce soit pour fins de services municipaux ou de services de loisirs. Ce serait certainement très apprécié que ces sommes soient réintroduites.

Comme je constate la réaction des membres de cette Chambre, je crois qu'il aurait été sans doute préférable que nous ne posions pas ce geste et que nous laissions le nouveau gouvernement dans l'obligation de respecter des lettres qui ont été envoyées par un ancien ministre. Parce que nous avons voulu laisser à ce gouvernement l'entière marge de manoeuvre et l'entière liberté de décision de réintroduire ces sommes, je crois qu'il devrait au moins en profiter pour ne pas pénaliser les contribuables qui, de bonne foi, je crois, d'aussi bonne foi que le ministre pouvait l'être... En effet, lorsqu'on regarde le nouveau ministre des Affaires municipales... Je ne sais pas s'il est ici, dans cette Chambre. Non, il n'est pas là.

M. Grenier: Les visages ne sont pas les mêmes.

M. Garneau: Si le nouveau ministre des Affaires municipales était ici, il pourrait certainement témoigner que dans toutes les régions du Québec il y a des travaux que les municipalités veulent faire, des travaux d'aqueduc et d'égout pour lesquels des sommes d'argent venant du gouvernement provincial sont nécessaires. Je suis certain que cela serait un geste apprécié par les électeurs de ces différents comtés qui ne sont pas représentés ou ne sont plus représentés par des députés libéraux. Cela réglerait le problème d'une façon beaucoup plus positive que de vouloir reprocher à l'ancien gouvernement d'avoir eu la délicatesse d'avertir les contribuables et les autorités d'un geste qu'il avait posé et de laisser au gouvernement le soin de prendre la décision finale.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Charlevoix.

M. Mailloux: J'ai été tantôt assez surpris de voir applaudir les membres de l'Union Nationale qui sont à ma gauche. J'étais moi-même au ministère des Transports à l'arrivée du Parti libéral en 1970, et j'ai souvenance qu'après avoir fait la cueillette de toutes les lettres d'intention envoyées par vos collègues du temps, que ce soit M. Paul Allard, M. Lafontaine ou d'autres, le ministère des Transports a dû honorer jusqu'à $4,1 millions de lettres d'intention. J'affirme en cette Chambre que jusqu'au dernier cent, même les lettres envoyées par des députés élus ont été honorées par mon prédécesseur, M. Bernard Pinard.

Tantôt, Mme le Président, à l'adresse du ministre des Finances, je faisais référence à deux lettres qui ont été envoyées dans mon comté, soit à la ville de La Malbaie—vous pouvez prendre note—et à la municipalité de Saint-Fidèle-de-Mont-Murray, à deux subventions qui avaient été sollicitées depuis de nombreux mois, pour lesquelles les municipalités avaient demandé des soumissions publiques déjà à deux reprises et sur lesquelles le ministère des Affaires municipales ne s'était pas prononcé. Dans les deux lettres auxquelles je fais référence, il était indiqué d'une manière formelle qu'aucuns travaux ne pourraient commencer tant et aussi longtemps que le Conseil du trésor ne se serait pas prononcé sur le bien-fondé de la suggestion qui était faite par le ministre des Affaires municipales.

Tantôt, on faisait référence aux subventions payées en un seul versement. Je pense qu'à côté de vous il y a un membre du Conseil du trésor. Il est vrai que dans la dernière année, le Conseil du trésor avait sollicité que les subventions d'un montant minime, $10 000, $15 000 ou $20 000, qui étaient accordées à une municipalité en particulier, plutôt que d'être réparties sur une période de dix années, soient payées en un seul versement — je pense que c'était une pratique assez logique — et que les subventions importantes de $500 000, $600 000, $1 million ou $2 millions, soient, elles, plutôt réparties sur dix ans.

De toute façon, il a peut-être été hasardeux de la part d'un de mes collègues d'envoyer des lettres d'intention à cette période. On remarquera que j'ai été plus prudent au ministère des Transports où, en dehors des montants qui m'étaient consentis par le Conseil du trésor, autorisés par le Conseil du trésor ou par le Conseil des ministres, j'ai refusé systématiquement d'envoyer toute lettre d'intention durant cette période.

Je pense que quand on connaîtra les besoins importants de toutes les régions du Québec en réseaux d'aqueduc et d'égout, on comprendra peut-être davantage le problème auquel faisait face mon collègue le député de D'Arcy McGee.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: J'ai écouté avec énormément d'attention les propos tenus par l'ancien ministre des Finances et le député de Charlevoix concernant ce qui est arrivé à l'Union Nationale en 1970, et ils ont payé chèrement en 1973. C'est peut-être ce qui va arriver, à la prochaine élection, avec nos amis les libéraux.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: On parle d'une somme totale de $5 millions à $6 millions. M. Goldbloom est venu

dans mon comté, par hasard, le 8 novembre. Il ne voulait pas que la lettre se perde. Il est venu la porter lui-même. $5 800 000 à la seule municipalité de Saint-Damien. C'est vrai que c'est sur dix ans, mais ce sont des engagements, $5 800 000. Lorsque le député de Jean-Talon parle d'une somme totale de $5 millions à $6 millions, j'ai tout eu dans mon comté!

M. Russell: Je ne veux pas...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: ... soulever de débat, je veux essayer de contribuer à l'éclaircissement de cette situation de fait qui existe actuellement. Quelques-uns ont déposé des lettres ici, d'autres ont des représentations à faire verbalement, d'autres encore ont reçu un paquet de lettres chacun dans son comté. Moi, comme tous les autres, j'en ai reçu, j'en ai vu et j'en ai examiné de plusieurs municipalités. Dans le contexte actuel, la chose est assez importante pour qu'on puisse suspendre l'article et attendre que le ministre des Affaires municipales soit ici pour connaître exactement la politique qu'il a l'intention de suivre et afin qu'on puisse intervenir auprès de ces municipalités pour aider à clarifier cette situation.

Certaines municipalités ont été obligées de commencer les travaux à la suite d'ordonnances émises par le ministère des Affaires municipales ou la division de l'environnement et ces travaux ne pouvaient pas être financés totalement par la municipalité parce qu'elle n'avait pas le moyen de le faire. A la suite du commencement de ces travaux et après l'augmentation des coûts, le ministre des Affaires municipales est intervenu avec des engagements comme quelques-uns ont été mentionnés tout à l'heure. Ce qui m'a surpris, c'est qu'après les élections et le changement de gouvernement, et même avant le changement de gouvernement, une municipalité a reçu une lettre comme quoi la lettre d'engagement qui avait été envoyée précédemment ne tenait plus. C'est ce qui m'a surpris. On peut se référer aux élections passées, j'en ai vu quelques-unes, j'ai vécu quelques changements de gouvernement.

Je peux dire, à l'exception près de la courtoisie habituelle, c'est qu'en 1960 cela n'a peut-être pas été suivi à la lettre. En 1960, on a plusieurs engagements qui ont été chambardés; il y avait un petit peu d'agitement, de radicalisme à ce moment-là. En 1966, les engagements, sauf quelques-uns, ont été suivis à la lettre. En 1970, je peux dire que, sauf quelques-uns, le gouvernement précédent, qui vient d'être défait, a respecté les engagements du gouvernement du temps, excepté peut-être quelques hôpitaux, quelques bâtisses administratives, quelques projets d'arénas qu'ils ont refusé de respecter, mais les municipalités n'étaient pas prises financièrement. Il s'agissait de cas où le gouvernement a consenti volontairement à payer des dépenses, à respecter des engagements qui avaient été pris ou à arrêter les travaux.

Mais, dans le cas actuel, c'est important parce qu'il y a des municipalités qui sont prises financièrement et on n'a pas le droit, par un peu, je pourrais qualifier cela de mauvaise interprétation d'engagements, de laisser des municipalités prises dans des situations semblables.

Je pense qu'on devrait suspendre cet article, arrêter peut-être de travailler sur les émotions politiques qu'on peut avoir et laisser une chance au ministre des Affaires municipales. Je pense qu'il est bien intentionné; il pourra peut-être consulter l'ex-ministre des Affaires municipales et, ensemble, avec le ministre des Finances, essayer de trouver une solution rationnelle à ces situations qui, de fait, existent actuellement. J'ai deux ou trois municipalités dans le comté que je représente, et je pense qu'en toute objectivité on devrait régler leur problème. Il y en a d'autres qui ont eu une lettre d'intention, mais, comme il n'y a pas d'engagement pris, à ce moment-là c'est facile, peut-être de dire: On va remettre cela d'un an ou deux. Mais, il faut aider celles qui sont prises avec des contrats et qui n'ont pas le moyen de payer, qui sont obligées de fonctionner sur des emprunts temporaires ou des taxes additionnelles, là où des contribuables n'ont pas le moyen de supporter le fardeau imposé par des erreurs administratives. Moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'un gouvernement en place, un Exécutif en place prenne des engagements dans le temps des élections parce qu'ils sont encore en fonction, mais j'ai objection, par exemple, à ce qu'après qu'on a pris des engagements envers une municipalité on tente de se désengager par une lettre; là, je m'oppose un peu.

On a chacun nos manières de travailler, mais le fait demeure que ces municipalités sont déjà engagées et je pense qu'on devrait tâcher de trouver une solution plutôt que d'essayer de faire de la politique sur le dos des municipalités.

M. Charron: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): Juste une petite seconde. Est-ce que tous les crédits des Affaires municipales sont adoptés?

M. Charron: Non, Mme le Président. Sur cette motion j'estime que le ministre des Finances aimerait bien répondre au député. Je ne puis garantir ce soir la présence du ministre des Affaires municipales pour lui faire plaisir, mais je sais que le ministre des Affaires municipales a l'intention d'émettre une déclaration ministérielle avant la fin de la session sur cette question.

De toute façon, le ministre des Finances aura le loisir de répondre aux interrogations du député ce soir, puisque nous devrions continuer ce soir l'étude du budget supplémentaire. Mais la séance de ce soir débutera d'abord par l'adoption, si l'Opposition y consent rapidement, de deux projets de loi qui sont inscrits au feuilleton en deuxième lecture, soit celui au nom du ministre de la Fonction publique — la loi 80 — et la loi 81 au nom du ministre des Affaires sociales. Par la suite, Mme le Président, nous devrions revenir sur le sujet qui vient d'être laissé en plan, et avec droit de parole

au ministre des Finances pour la poursuite de l'étude du budget supplémentaire.

Je vous demanderais donc, Mme le Président, de faire rapport, puisque nous ne pourrons poursuivre immédiatement l'étude du budget supplémentaire à la reprise.

Mme Cuerrier (président de la commission plénière): M. le Président, je vous fais rapport que la commission n'a pas fini de délibérer et demande la permission de siéger à nouveau.

Le Président: Quand siégera-t-elle?

M. Charron: Le plus rapidement possible, M. le Président.

Le Président: Même séance. Adopté.

M. Charron: Je propose la suspension jusqu'à vingt heures quinze.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

Reprise de la séance à 20 h 21

Mme Cuerrier (vice-président): A l'ordre, mesdames, messieurs!

M. Burns: Je propose à nouveau que nous revenions à la commission plénière et que, par conséquent, vous quittiez votre siège immédiatement.

Le Vice-Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Garneau: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Affaires municipales, programme 1, élément 1, adopté? M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Lorsque nous avons suspendu cet après-midi, Mme le Président, il était entendu que j'aurais quelques secondes pour faire une dernière intervention sur ce poste des subventions aux municipalités.

Tout ce que je voudrais dire ici, Mme le Président, essentiellement, c'est ceci: Nul dans cette Chambre n'est plus alerté que moi aux besoins des municipalités, singulièrement sur le plan des travaux publics tels que les aqueducs et les égouts.

J'ai eu l'occasion d'en parler à plusieurs reprises en dehors de cette Chambre. Il me paraît tout à fait évident que dans la préparation du prochain budget qui sera, en fait, le premier budget du nouveau gouvernement, des sommes importantes, beaucoup plus importantes que celles qu'il y avait cette année, devront être trouvées pour ce type de travaux. A cet égard, on n'a pas besoin de me convaincre. Je pense que l'on prêche un convaincu.

Ceci étant dit, j'aurais seulement une observation à faire, quant aux suggestions que me faisait le député de Jean-Talon, pour, comment dire, rendre heureux tant de conseils municipaux au Québec qui attendent des subventions.

Je suis tout à fait disposé à les rendre heureux, mais je suis étonné, cependant, que l'on cherche à nous rappeler tout à coup l'importance de l'énorme arriéré qui existe au Québec sur le plan des travaux municipaux, de l'arriéré scandaleux qui existe sur le plan de la dépollution et du contrôle de la pollution, que, tout à coup l'illumination soit venue au gouvernement précédent essentiellement après le 15 octobre.

Il faudra qu'on m'explique, à un moment donné, pourquoi tout à coup les langues de feu sont descendues pendant trois semaines.

Je m'excuse d'entrer ici dans quelque chose qui me paraît un peu émotionnel, cela n'est pas dans mes habitudes, mais je dois reconnaître qu'après que ce budget, tel qu'établi pour les affaires municipales pour l'année 1976/77, et compte tenu des contraintes qui me paraissent tout à fait évidentes qu'il y avait dans le budget du

précédent gouvernement, qu'on ait limité à aussi peu d'argent des subventions pour des centaines de municipalités qui en ont besoin, que tout à coup on voie la lumière pendant trois semaines me paraît un phénomène surprenant. J'espère être en mesure, à l'occasion du prochain budget, de faire en sorte que l'on évite dorénavant que dans une municipalité du Québec il y ait 132 cas de fièvre typhoïde, que l'on évite que dans d'autres municipalités du Québec il y ait 2000 cas de gastroentérite. Le Québec n'est plus, à notre époque, vraiment capable d'accepter des choses pareilles et de les considérer comme normales. Dans ce sens, il va de soi que dans la préparation du prochain budget on va mettre un accent considérable sur ce type de travaux. Déjà, il est notoire que le Québec a pris un retard dramatique par rapport à d'autres provinces canadiennes ou à d'autres Etats américains sur ce plan, et j'ai bien l'intention de le corriger.

Ceci étant dit, et avec la permission de la présidence, je voudrais simplement répondre à une question qui m'a été posée par le député de Brome-Missisquoi au sujet du ballon des paiements gouvernementaux, des transferts gouvernementaux au titre de la taxe de vente. De la façon dont le régime fonctionne à l'heure actuelle, les paiements aux municipalités, quant à la taxe de vente, sont faits sur une base bi-mensuelle, mais à partir des données de l'année précédente. Ceci veut donc dire que, dans la mesure où les affaires se développent dans une municipalité, les paiements du gouvernement sont toujours un peu en retard par rapport à la réalité. Une fois l'année terminée, les paiements de rattrapage sont faits entre la fin de l'année et juin.

Normalement, le ballon dont le député parlait est quelque part entre 5% et 15% du montant dû, rarement plus. Il arrive, cependant, que certaines municipalités, tenant compte des développements exceptionnels des affaires et des ventes sur leurs territoires, demandent des sortes d'avances, si bien que le ballon peut être inférieur à cela. Ce qu'on me dit, c'est que le ballon dont il parlait dépasse rarement 15% et se situe habituellement entre 5% et 15% des sommes dues dans le courant de l'année.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: Quel montant global, en millions de dollars?

M. Parizeau: Si c'était 15%, nous allons prendre des montants précis de transferts au titre de la taxe de vente, ce serait autour de $50 millions. Les 15%, d'après ce qu'on m'assure, sont vraiment la limite maximale. Si on prend 10%, cela ferait $32 millions.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Mme le Président, je prends acte des propos que vient de tenir le ministre des Fi- nances concernant l'aide aux municipalités. Evidemment, je suis surpris de voir jusqu'à quel point le ministre des Finances peut verser rapidement dans la politique partisane lorsqu'il ne prend pas le temps de lire des statistiques financières concernant l'aide aux municipalités, en particulier concernant l'épuration des eaux. Quand je regarde ce qui s'est fait au cours des dernières années, je demanderais uniquement au ministre des Finances de poursuivre au même rythme l'accroissement qui a été consenti dans le budget des Affaires municipales concernant l'épuration des eaux vannes. Je pense que s'il tient le même rythme, nous aurons réussi à doter la presque totalité des municipalités du Québec d'un réseau d'épuration des eaux qui soit relativement conforme à certaines attentes de la population.

Le budget de cette année comporte des transferts de $22 millions, et probablement qu'avec le budget supplémentaire, même s'il n'y a pas d'ajouts, il atteindra $24 millions ou $25 millions. Si je prends ce qui était consacré à ce chapitre en 1972/73, ce n'était même pas $1,5 million. C'est donc dire qu'il y a eu une amélioration considérable. Je suis prêt à reconnaître que ce n'est pas suffisant, mais je prends acte des propos qu'il vient de tenir.

Je dois l'assurer que, s'il est capable — et je le lui souhaite de tout coeur — de dégager des crédits additionnels en provenance d'autres ministères, à moins qu'il ne veuille augmenter le rythme de croissance des dépenses publiques d'une façon draconienne, donc, s'il y a des suggestions valables à cet effet, il trouvera de la part du député de Jean-Talon un appui certain puisqu'il s'agit là d'une opération qui est absolument essentielle dans les petits centres urbains, mais particulièrement dans les grands centres urbains.

Comme on le sait, il y a la ville de Montréal, la région métropolitaine de Québec, la ville de Hull, le bassin de la rivière Yamaska et certains travaux dans des municipalités de moindre dimension. Mais uniquement les trois ou quatre premières et la région de Hull ont entrepris des travaux de plusieurs centaines de millions de dollars. Cela dépasse peut-être sans doute les $2 milliards, avec l'augmentation des coûts. Il s'agit de réaliser et de compléter ce réseau et, pour ce qui est de Montréal, de le compléter par des usines d'épuration au point de chute des égouts collecteurs.

J'appuie à 100% la proposition du ministre des Finances et j'espère que le budget de l'an prochain traduira le même rythme de croissance au niveau des dépenses en 1976, 1977 et 1978 que l'année 1976/77 connaissait par rapport à l'année précédente. Dans ce sens, nous atteindrons, je crois, des objectifs qui sont désirés par l'ensemble des Québécois et par tous les partis politiques en cette Chambre, c'est-à-dire doter le Québec d'un réseau d'égouts et d'usines d'épuration qui soient conformes aux exigences qu'ont tracées les maires de municipalités et leur conseil municipal, au nom de leurs citoyens.

Cela étant dit, M. le Président, on ne règle pas le problème qui a été soulevé par des collègues de l'Opposition en ce qui regarde certaines municipa-

lités qui étaient mal prises. En ce qui me concerne, je ferais une suggestion au ministre des Finances. J'avais l'intention de lui poser quelques questions sur l'augmentation du fonds de suppléance. Sans augmenter le budget supplémentaire qui est inscrit au budget du ministère des Affaires municipales au chapitre de l'aide aux municipalités, j'inviterais le ministre des Finances et le ministre des Affaires municipales, une fois qu'ils auront terminé l'étude cas par cas des problèmes qui ont été soulevés par les députés, à réfléchir à ceci. Je crois que la marge de manoeuvre qui sera celle du ministre des Finances par rapport au fonds de suppléance accru dont il propose l'adoption dans ce budget supplémentaire pourrait constituer la source de crédits autorisés par l'Assemblée nationale pour régler les cas-problèmes où certaines municipalités pourraient être en sérieuses difficultés financières s'il n'était pas donné suite, par le gouvernement, aux engagements pris par l'ancien gouvernement. Je le fais, tout simplement, à titre de suggestion.

M. Parizeau: Mme le Président, je suis un peu étonné de la sortie du député de Jean-Talon à ce sujet. En dehors de cette Chambre et dans d'autres capacités, y compris celle d'activités parascolaires comme journaliste, j'ai toujours soutenu que de 1971 à 1974 le député de Jean-Talon avait fort bien compris les problèmes des municipalités, de budget en budget qu'il préparait. J'ai toujours indiqué qu'à mon sens ce qu'il y avait de plus valable dans ses politiques, c'était justement l'augmentation des subventions aux municipalités.

Une chose est claire cependant depuis un an et demi ou deux ans, c'est que les finances du Québec ne permettaient plus, sans vraiment une modification radicale des priorités, de mettre suffisamment d'argent là-dedans. Ceci étant dit, la question du fonds de suppléance et son utilisation, tel que vient de le suggérer le député de Jean-Talon, est-ce que je pourrais me permettre de la commenter, puisque c'est une initiative à moi, que j'ai prise — c'est une des seules que j'ai pu prendre dans ces crédits supplémentaires — quand cela viendra au ministère des Finances?

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Mme le Président, comme mon prédécesseur, j'étais très heureux d'entendre les propos, les commentaires du ministre des Finances. Il a signalé l'énorme retard ou "arriéré" qu'il y avait à l'endroit des problèmes vécus par les municipalités du Québec: besoin de services additionnels pour la population, besoin de combattre la pollution, d'améliorer la qualité de l'environnement. Il se dit également surpris par l'intérêt tout à fait nouveau manifesté au cours de la dernière campagne par le gouvernement d'alors.

Ce qui m'a plu particulièrement — je le note et je vais en aviser mes municipalités — c'est qu'il nous a indiqué, de façon fort nette et précise, qu'il avait une intention ferme, dès son prochain budget, de consacrer les sommes ou les crédits nécessaires de manière à apporter cette aide aux municipalités du Québec. Si vraiment c'est l'intention du ministre des Finances de mettre en application le programme qu'il a à l'esprit et qu'il vient d'exposer, j'en suis fort heureux pour les municipalités du Québec et particulièrement celles de mon comté. A toutes fins utiles, je lui demanderais tout simplement, dans ce désir de vouloir collaborer avec les municipalités, de consacrer peut-être pas des sommes additionnelles ou plus importantes aux municipalités de chez moi, mais, tout au moins, les montants qui ont été accordés depuis trois ans aux municipalités de Montmagny-L'Islet. Je crois qu'appliquer un principe d'équivalence à ce que nos municipalités ont touché, ce serait déjà très bien. Je ne demande pas qu'il fasse davantage, mais qu'il fasse tout aussi bien que ce que l'ancien gouvernement a fait à l'endroit des municipalités de chez nous.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Richmond.

M. Brochu: Mme le Président, j'aimerais revenir sur un sujet qu'on a traité un peu avant le souper tout à l'heure et apporter certaines précisions. J'aimerais faire une mise au point au ministre aussi. Voyant que le ministre des Affaires municipales n'a pu se rendre en Chambre, j'aimerais en faire part à la Chambre pour que ce soit inscrit au journal des Débats. J'aurai l'occasion de lui faire d'ailleurs des représentations à ce sujet.

J'aimerais faire une mise au point puis citer ici ce que j'appellerais peut-être un cas type, qui est arrivé malheureusement depuis un an. Ce n'est pas un cas qui date de la campagne électorale, mais qui date quand même d'un an et où une municipalité se retrouve finalement dans une situation assez précaire sur le plan financier.

Le ministre des Finances, lorsque j'ai fait cette intervention tout à l'heure, laissait entendre qu'il s'agissait d'une promesse électorale, mais c'est beaucoup plus, parce que cela avait été en réalité un engagement financier en bonne et due forme, pris non pas durant la campagne électorale, mais il y a un an, plus exactement au mois d'août 1975, et qui trouve ses suites dans le néant, pour ainsi dire, actuellement, à cause d'une maladresse administrative, si vous voulez, ou parce qu'on s'en est servi durant la campagne électorale comme d'un ballon politique devant servir d'autres fins que celles auxquelles la subvention devait servir. Il s'agit de la municipalité d'Asbestos.

J'en fais un cas type parce que je pense que cet exemple va s'appliquer à plusieurs autres municipalités à travers le Québec qui, si elles n'ont pas déjà fait des représentations, vont en faire éventuellement. Pour bien situer le problème, j'aimerais ici citer une résolution de la ville d'Asbestos qui m'a été adressée et qui souligne exactement le cheminement du problème auquel la ville à faire face actuellement. Je vous fais grâce du début de la résolution pour vous dire ceci:

"Attendu que la ville d'Asbestos a réalisé en 1975/76 des travaux d'envergure, tel que décrété par les règlements d'emprunt— alors il y avait eu des règlements d'emprunt en bonne et due forme— nos 654, 657, 658, 660, 661 et 663, dûment approuvés par la Commission municipale du Québec et par le ministère des Affaires municipales, d'une part; "Attendu que, par la suite de l'étude générale des règlements précités, le ministre des Affaires municipales s'était engagé, par lettre datée du 21 août 1975, à verser une subvention d'un minimum de $2 millions avec majoration de cette subvention si elle était répartie sur une période de dix ans; "Attendu que par suite de la réalisation des travaux et analyse des coûts, la subvention définitive a été fixée à $3 254 900 par lettre signée par le ministre et datée du 25 octobre 1976".

On voit qu'arrive la période électorale; on avait dûment accordé $2 millions, mais là on dit: Ce n'est pas assez, on va vous en donner en masse pour être sûr que vous n'aurez pas de problème. On monte cela à $3 254 900 par lettre signée par le ministre et datée du 25 octobre 1976. "Attendu que des émissions d'obligations ont été émises en vertu du règlement 654 et doivent être souscrites en février 1977 sur les règlements nos 657 et 658 et que le remboursement du capital et intérêts de ces émissions doit être inscrit au budget 1977 de la ville; à ces causes, il est proposé par M. Leopold Fréchette, appuyé par M. Marcel Brown et résolu unanimement de demander à Me Guy Tardif, ministre des Affaires municipales, de confirmer dans les plus brefs délais la subvention accordée à la ville d'Asbestos, au montant de $3 254 900, subvention d'importance vitale pour l'équilibre du budget 1977."

Je pense que cela se passe, à ce stade-ci, de commentaires ou d'autres détails. Je pense que la résolution est claire en soi. On voit exactement le cheminement qui a été suivi dans cette situation où on se retrouve avec un problème majeur.

Si vous me le permettez, aussi, pour bien clarifier la situation, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté ou d'interprétation qui puisse être donnée, afin que et le ministre des Finances et le ministre des Affaires municipales puissent être dûment au courant de toute la situation, j'aimerais aussi mentionner quelques passages des lettres qui ont été envoyées à ce moment-là, celle en particulier datant du 21 août 1975 et qui avait été signée, à ce moment-là, par le ministre.

C'est daté du 21 août 1975 et c'est adressé au docteur Lucien Bachand, maire de la ville d'Asbestos. "M. le maire, je suis heureux d'avoir pu — on comprend les bons sentiments, etc. — vous rencontrer aujourd'hui avec votre conseil municipal et vos principaux fonctionnaires. Maintenant que vous avez pu me fournir les coûts définitifs des trois premières phases de la reconstruction de l'infrastructure de la ville, suite aux récentes ouvertures de soumissions, nous procéderons dans les meilleurs délais à calculer la subvention que vous accordera le gouvernement du Québec. Comme vous le saviez, nous avons déjà, peu après le désastre qui a affligé votre ville, fait une estimation approximative de l'ordre de grandeur de cette éventuelle subvention."

Je fais un aparté, ici, pour m'expliquer. C'est que la ville d'Asbestos avait connu des glissements de terrain assez importants qui ont occasionné un déplacement de la ville. D'ailleurs, je profite de l'occasion pour souligner que c'est peut-être la seule ville sous le gouvernement libéral qui a bougé. Mais cela n'a pas été à cause du qouvernement. Je reviens donc à ma lettre.

Alors, le ministre continue: "Je suis donc en mesure de vous assurer d'un minimum de $2 millions." Je pense que, si j'ai bien appris mon français, il n'y a pas de conditionnel. Il n'y a pas de peut-être, etc. "Je suis donc en mesure de vous assurer d'un minimum de $2 millions." Au moins. Pour cela, il n'y a pas de problème. "L'analyse détaillée du dossier pourra conclure à un montant plus élevé. Si tel est le cas, ce sera ce dernier que vous recevrez ". C'est un peu comme dans les beaux contes. Cela finit toujours bien. Si vous en avez besoin de plus, il y en aura. Mais au moins on dit que pour les $2 millions de base, il n'y a pas de problème. Je continue la lettre, Mme le Président. "Il va sans dire que si, vu l'importance du montant, le gouvernement est obligé de le répartir sur dix années, la subvention sera majorée pour tenir compte du service de la dette. Confiant d'un meilleur avenir pour la ville d'Asbestos, je vous prie d'agréer, M. le maire, l'expression de mes sentiments les meilleurs etc. etc." C'est de toute beauté!

Par contre, la seule chose qu'il y a, c'est que ce n'est pas vrai. C'est beau, mais ce n'est pas vrai. C'est là la lettre qui date non pas de la période électorale, mais d'un an avant; donc c'est un engagement formel. Je comprends que l'on vit peut-être dans une société où une parole donnée a de moins en moins d'importance, mais je pense que lorsqu'une personne est le ministre, le député ou qu'elle occupe une fonction, non seulement la parole donnée doit avoir plus d'importance, mais encore l'engagement écrit doit-il en avoir davantage. Surtout pour que l'intégrité de l'appareil gouvernemental et de nos ministères soient reconnue par la population. Je pense que des choses comme celles-là sont vraiment regrettables lorsque l'on voit par la suite ce qui est arrivé.

Je vous fais grâce d'une autre lettre qui dit que l'on donne $1 million supplémentaire, parce qu'il y a une autre lettre. Aimeriez-vous l'avoir? Certainement.

Cette fois-ci ce n'est pas adressé directement. Cela sera intéressant aussi. Je vous remercie de me le suggérer. Cela n'est pas adressé directement au maire d'Asbestos parce que nous avions un secrétaire qui faisait les commission pour la publicité, pour les photographes.

M. Mailloux: Mme le Président, vous me permettez un point de règlement?

M. Brochu: C'est adressé... pardon?

M. Mailloux: Me permettez-vous un point de règlement? Devant le fait que, depuis la fin de la dernière séance et le début de cette séance, on attaque directement un des membres de la Chambre qui actuellement est pris devant la commission des Affaires municipales, je préviens la Chambre que ce poste budgétaire sera retardé dans son acceptation si l'on continue à agir de cette façon vis-à-vis de mon ex-collègue des Affaires municipales.

M. Charron: Un point de règlement, Mme le Président. Non seulement le député de D'Arcy McGee est-il aussi aux prises avec les travaux de la commission des Affaires municipales, mais il faut noter que le ministre des Affaires municipales lui-même, directement impliqué et je dirais directement concerné par les immenses problèmes que vient de lui laisser le député de D'Arcy McGee comme héritage, ne peut être ici aujourd'hui pour dire quelles difficultés il a à résoudre, dont un certain nombre de problèmes comme celui que le député de Richmond est en train de porter à l'attention de l'Assemblée nationale.

J'estime tout à fait régulier que le député de Richmond soulève, à partir d'un cas particulier, mais qu'un grand nombre de députés de cette Assemblée seraient capables de multiplier comme exemple précis, l'héritage lourd, dans le domaine des Affaires municipales, du gouvernement libéral qui a été défait le 15 novembre dernier.

M. Mailloux: Mme le Président, je n'ai aucune objection quelconque à ce que tous les députés puissent intervenir, comme c'est leur droit. Mais je pense que ce serait la plus élémentaire décence que de permettre que celui qui est responsable ou qui était responsable des affaires municipales puisse être ici pour entendre les doléances qui sont faites de l'autre côté de la Chambre, comme le ministre des Affaires municipales pourrait être ici également, quitte à reporter l'étude des affaires municipales à la fin de ce programme pour que tous deux puissent être...

Le Président (Mme Cuerrier): Vous remarquerez...

M. Charron: Est-ce que je comprends que c'est la proposition du député de Charlevoix de suspendre le débat sur...

M. Mailloux: Ce serait la plus élémentaire décence.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre, messieurs! Je ferai remarquer à cette Assemblée que j'ai été assez large quant aux interventions, tout l'après-midi, tant que cela touchait aux affaires municipales. Je vous demanderais de conclure assez rapidement, s'il vous plaît!

M. Brochu: Mme le Président, je tiens tout d'abord à bien souligner et à bien spécifier une chose. Je ne m'en prends pas à la personne de l'ancien ministre député de D'Arcy McGee, je m'en prends à l'attitude qui sous-tend tout le débat actuellement et qui apporte les problèmes qu'on connaît. Je vous ferai grâce de cette lettre qui ajoutait le million en conséquence pour simplement souligner une dernière lettre qui avait été envoyée, celle-là, après la période du 15 novembre et qui disait, substantiellement — elle était adressée encore au maire d'Asbestos par la même personne — : "M. le maire, je vous informais récemment que je recommanderais au Conseil du trésor une subvention pour votre municipalité. Cette initiative découlait d'une décision du Conseil des ministres de présenter avant la fin de l'année un budget supplémentaire et d'augmenter aussi pour 1977/78 les disponibilités au poste aide financière pour la construction de réseaux d'aqueduc et d'égout". On continue en disant: "Adressez-vous au nouveau gouvernement, etc., etc.

Je trouve extrêmement curieux — si on regarde le scénario ou le portrait de situation dans laquelle on se trouve— qu'il y a un an on a dit à une municipalité: "Engagez-vous, faites vos règlements d'emprunt, on les accepte", etc. On commence les travaux, on a même $6 millions engagés actuellement sur ce projet. Le règlement d'emprunt est passé et la ville commence déjà à le rembourser. Après cette période, on dit: Voici, ce n'était pas passé au Conseil du trésor, adressez-vous donc au nouveau gouvernement. Ce n'est pas une question de deux semaines, cela fait au-delà d'un an.

C'est cela que j'ai voulu décrire comme type de situation anormale, complètement inacceptable et tout à fait malheureuse, Mme le Président, parce que je trouve que c'est une forme d'injustice envers nos administrateurs municipaux qui se trouvent dans une situation fort délicate et intolérable. D'ailleurs, le ministre responsable du haut-commissariat a, je pense, très bien compris la situation. Il s'est d'ailleurs retrouvé lui-même — il l'a souligné tout à l'heure avant le souper — devant des faits accomplis à son ministère. Il a trouvé dessituations exactement identiques — j'aurai d'ailleurs à lui faire certaines représentations à ce chapitre — où il est pris avec des engagements, des immobilisations qui sont déjà commencées. Les gens sont assis entre deux chaises et il faut qu'une décision soit rendue.

J'en profite pour demander au ministre responsable, aussi au ministre des Affaires municipales, lorsque ce sera possible, de nous éclairer sur la situation, et demander si ce serait possible de tenir compte, dans les engagements futurs du gouvernement, du cas de ces municipalités qui sont vraiment aux prises avec une situation désastreuse s'ils n'ont pas une aide vraiment directe, immédiate à la suite de ces déclarations d'intention, non seulement déclarations d'intention, mais à ces engagements qui ont été pris. Il y a plusieurs autres municipalités, j'ai, entre autres, celle de Sainte-Clothilde-de-Horton, dans mon comté, où c'est la même chose, maison pourrait en citer énormément de ce côté.

Le Président (Mme Cuerrier): Voulez-vous conclure, M. le député de Richmond, s'il vous plaît?

M. Brochu: Mme le Président, je me soumets volontiers et de bonne grâce à vos recommandations. Je termine tout simplement en faisant ce souhait et je demande ceci à notre nouveau gouvernement: Que cette façon de procéder, de bonbon électoral — même plus, étant donné que le cas date de plus longtemps — que cette façon d'administrer sur le dos de nos administrateurs municipaux disparaisse en même temps que va finir de se résorber tout ce qui reste du Parti libéral au Québec. Je pense que ce serait souhaitable, pour la bonne marche de notre administration, que le gouvernement qui est devant nous aujourd'hui — je lui reprocherai, si l'occasion se présente, s'il n'agit pas de la bonne façon — à l'approche d'une autre élection, ne prenne pas d'engagement de la sorte. Qu'il se présente au peuple sur des principes administratifs, sur des choses réalisées ou sur des choses qu'il a l'intention de faire, mais ne pas placer les gens entre deux chaises comme actuellement. J'en fais la recommandation et je demande au ministre des Finances, comme au ministre des Affaires municipales, de porter une attention spéciale à ces cas vraiment désastreux.

M. Parizeau: Mme le Président, en réponse au député de Richmond, je voudrais tout simplement lui indiquer dans quelle situation un peu délicate je me trouve, dans le sens suivant. De la même façon que je reconnaissais cet après-midi que la signature du gouvernement sur une convention collective doit valoir quelque chose et que ce doit être respecté, de la même façon la signature des gouvernements, dans tous les autres domaines, doit être respectée. Ce qui m'embête, à l'heure actuelle, de m'engager sur des dossiers précis de telle ou telle ville, c'est que ce n'est pas moi qui examine les dossiers de chaque ville pour savoir si, effectivement, la signature du gouvernement est engagée ou non. Dans ce sens, bien sûr, je suis forcé de remettre cela entre les mains du ministre des Affaires municipales. Ceci étant dit, le principe général que vous avez exposé, j'y concours de tout coeur. La signature de l'Etat doit quand même valoir quelque chose.

M. Russell: Mme le Président, j'avais fait une suggestion au début, afin de suspendre cet article. Je crois concourir avec le député de Charlevoix et même le député de Saint-Jacques, ministre des loisirs pour donner une chance à l'ancien ministre des Affaires municipales et au nouveau ministre d'être ici. Ils pourront répondre à la satisfaction des députés.

M. Mailloux: Attaquez ceux qui sont ici, ils vont se défendre.

M. Russell: On peut continuer à discuter sur le budget. Il y a tellement d'autres articles qu'on peut étudier, si c'est le voeu unanime de la Chambre.

Le Président (Mme Cuerrier): A l'ordre! Y a-t-il consentement unanime dans cette commission pour reporter l'étude des crédits sur les Affaires municipales?

M. Russell: De cet article.

M. Charron: Mme le Président, sur la suggestion faite par le député de Brome-Missisquoi, le gouvernement n'a aucune objection à ce que cela se fasse ce soir, mais nous tiendrions beaucoup à ce que le budget supplémentaire puisse être accepté ce soir.

Autrement dit, que l'on poursuive les débats en espérant que nos collègues qui travaillent à la commission des affaires municipales, où, me dit-on, le député de D'Arcy McGee est assez volubile, terminent leurs travaux pour nous permettre d'achever l'étude du budget supplémentaire ce soir. J'espère avoir la collaboration du leader parlementaire de l'Opposition officielle sur ce sujet.

M. Lavoie: Mme le Président, on me rapporte des choses, je ne voudrais pas aller plus loin avant d'en connaître plus long. On me dit que certains députés se sont permis de critiquer, c'est normal, c'est l'endroit, mais je crois que ce serait une meilleure éthique, si on veut attaquer quelqu'un, de l'attaquer de front. Comme disait un ancien chef de l'Union Nationale: A visière levée. Cela vous retourne quelques années en arrière. Je crois que s'il y a un membre de cette Assemblée dont on ne devrait pas attaquer la probité et la conscience professionnelle, autant au point de vue strictement personnel que public, à cause de toutes les fonctions publiques qu'il a occupées, c'est bien le député de D'Arcy McGee.

Pour le moment, nous allons nous opposer à l'adoption des crédits en ce qui concerne les Affaires municipales, pour donner toute l'occasion voulue au député de D'Arcy McGee de relire, s'il le faut, la transcription du journal des Débats...

M. Grenier: Nous avons relu des documents du député de D'Arcy McGee. On n'a pas fait d'interventions outre mesure.

On a pris les documents du député de D'Arcy McGee et on les a lus; il n'y a rien d'extravagant là-dedans. Il n'y a pas d'affaires personnelles là.

Le Président (M. Cuerrier): M. le député de Mégantic-Compton. M. le leader de l'Opposition.

M. Lavoie: De toute façon, c'est le voeu du gouvernement de passer à un autre poste budgétaire et nous allons donner l'occasion au député de D'Arcy McGee de relire et de répondre, s'il y a eu des attaques malsaines.

M. Roy: Mme le Président...

M. Charron: Ce que nous suspendrions, en acceptant la suggestion faite par le député de Brome-Missisquoi, c'est le programme 11 du ministère des Affaires municipales, les deux autres ayant été précédemment adoptés.

Le Président: A l'ordre! Si vous me permettez...

M. Roy: Mme le Président, sur le point qui a été soulevé, j'aimerais qu'on tienne compte des dispositions de l'article 128 de notre règlement, dans la deuxième partie, où il est dit que dans le cas d'un budget supplémentaire dont l'étude a été envoyée globalement à la commission plénière le délai d'étude pour le budget supplémentaire n'est que de huit heures. Si on veut revenir pour réexaminer un crédit supplémentaire visant le ministère des Affaires municipales, il faudrait qu'on décide immédiatement que, lors de la reprise de la prochaine séance, on recommence par cet article. Pendant huit heures, et avec tous les ministères qui sont concernés dans le budget supplémentaire, nous risquons fort de ne pas retoucher aux crédits du ministère des Affaires municipales si on procède à l'étude de tous les autres ministères jusqu'à la fin, avant de revenir au ministère des Affaires municipales.

J'aimerais bien qu'on établisse clairement, peut-être à la prochaine séance, qu'on puisse recommencer par cet article.

M. Biron: Sur ce point-là, très brièvement, au nom des députés de l'Union Nationale, nous n'avons jamais voulu attaquer l'honnêteté ou la probité de l'ancien ministre des Affaires municipales. Ce sont tout simplement des informations que nous avons demandées au ministre des Finances, à savoir comment se comporter devant certaines municipalités qui avaient eu des promesses de subventions et que les subventions n'ont pas été versés quand ces municipalités ont déjà entrepris des travaux. Il n'a jamais été question d'attaquer l'honnêteté ou la probité de l'ancien ministre des Affaires municipales.

Le Président (Mme Cuerrier): L'étude des crédits du ministère des Affaires municipales est suspendue...

M. Charron: ... n'est-ce pas, Mme le Président?

Le Président (Mme Cuerrier): D'accord. Si vous voulez, nous allons revenir aux affaires municipales, programme 1, élément 1. On avait dit, cet après-midi, que c'était adopté. Adopté. Programme 2, élément 5, adopté.

M. Garneau: Mme le Président, je pense que la discussion avait commencé sur l'élément au programme 2. Si je regarde le programme 11, il vise l'aide financière à la construction de réseaux d'aqueducs et dégoûts. Pour ma part, je n'ai pas d'objection à ce qu'on dise que le programme 2 est adopté, mais qu'on maintienne ouvert l'ensemble de cette discussion sur le programme 11. Je n'ai pas d'objection.

M. Parizeau: Mme le Président, pour le programme 2, je pense que l'explication est facile et n'a aucun rapport avec les discussions que nous avons tenues depuis quelque temps. Le programme 2 s'explique de la façon suivante: Programme 2, élément 5. Il s'agit de la subvention d'équilibre budgétaire à la ville de Montréal pour l'exploitation de Terre des hommes en 1975 et les subventions aux municipalités de Sainte-Anne-de-Beaupré, Saint-François-Xavier-de-la-Petite-Rivière et Saint-Joachim, comté de Charlevoix, pour la réalisation de travaux correctifs aux équipements, suite aux dommages importants occasionnés par les fortes précipitations du mois de juillet.

Cela n'est pas contentieux, compte tenu de ce que nous avons discuté.

Le Président (Mme Cuerrier): Elément 5, adopté?

M. Garneau: Mme le Président, est-ce qu'il y a une raison particulière pour laquelle le ministre des Finances ou le gouvernement a rattaché la subvention de $4 millions à Terre des hommes? Est-ce que c'est l'intention du gouvernement de poursuivre cette subvention à Terre des hommes, puisque vous l'avez identifiée comme telle, alors que nous l'avions laissée ouverte au niveau des subventions d'équilibre budgétaire du ministère des Affaires municipales? Est-ce l'intention du gouvernement, en l'identifiant clairement, de la maintenir? Je vois les recherches qu'effectue M. Poitras. Habituellement, cette subvention, lorsqu'elle était versée pour Terre des hommes, l'était par le biais du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Si cet équilibre a été mis au niveau du ministère des Affaires municipales, c'était pour des raisons bien précises. Ma question est de savoir si c'est l'intention du ministère des Finances ou du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, de maintenir cette subvention à Terre des hommes.

M. Parizeau: II ne s'agit absolument pas d'intention dans un sens ou dans l'autre; il s'agit d'un paiement de facture. Puisqu'il s'agit essentiellement des comptes de 1975, quoi qu'il ait été fait de ce côté n'implique rien pour l'avenir.

M. Garneau: Est-ce que je peux connaître l'opinion du ministre des Finances? Je pense que c'est le moment pour les députés de cette Chambre, lorsqu'on étudie un budget supplémentaire, de poser des questions au gouvernement. La question que je pose est celle-ci: Est-ce que le ministre des Finances entend continuer cette mesure particulière d'aide à Terre des hommes, oui ou non?

M. Parizeau: Si j'étais en mesure de répondre, je présenterais le budget aujourd'hui. Ce que je présente aujourd'hui, ce n'est pas le budget; c'est le budget supplémentaire no 2, enfin, les estimations budgétaires, les crédits supplémentaires no 2. C'est la liquidation des comptes de 1975. Quant à savoir ce que nous ferons dans l'avenir, cela viendra au discours du budget.

M. Garneau: Le ministre des Finances sait fort bien que les crédits des ministères doivent être approuvés longtemps avant le discours sur le budget et que les budgets des municipalités doivent être préparés et déposés également bien souvent avant le discours sur le budget. Si le ministre des Finances n'est pas en mesure de répondre aujourd'hui, je suis prêt à accepter sa réponse— de toute façon, je suis obligé de l'accepter— mais je voudrais attirer son attention sur le fait qu'il faudra quand même que cette décision soit connue publiquement par l'administration de Montréal avant que son discours du budget ne soit lu en Chambre.

M. Parizeau: Le député de Jean-Talon peut-il me donner un exemple où les crédits budgétaires sont sortis quatre mois et demi avant le discours du budget? Une année seulement?

M. Garneau: Je serais en mesure d'employer beaucoup d'articles de journaux que j'ai lus depuis le 15 novembre et qui indiqueraient quelles sont les intentions budgétaires du gouvernement. Je ne vois pas pourquoi le ministre des Finances fait une tempête dans un verre d'eau sur une simple question. S'il me dit: Non, je ne peux pas répondre, je vais accepter sa réponse. Je lui demande à quel moment il va le dire, s'il est en mesure de confirmer ou d'infirmer cette décision du gouvernement. Je ne vois pas pourquoi il se choque là-dessus.

M. Parizeau: Je ferai appel à une formule utile dans les circonstances de ce genre: En temps utile.

M. Garneau: C'est la réponse usuelle du gouvernement.

Le Président (M. Cuerrier): Elément 5, adopté?

M. Garneau: De toute façon, ils ne répondent pas aux questions.

Le Président (Mme Cuerrier): Le programme 11 est suspendu.

M. Roy: Est-il suspendu avec reprise en priorité? Est-ce que ce sera le premier point qui sera discuté à la prochaine séance ou allons-nous y revenir après que tous les autres ministères auront été discutés?

M. Charron: Ce que nous espérons, c'est qu'avant la fin de l'étude du budget supplémentaire comme tel les travaux de la commission parlementaire des affaires municipales soient terminés, ce qui permettrait, avant même que vous fassiez rapport, que le ministre des Affaires municipales puisse répondre aux questions. De l'avis de ceux qui suivent les travaux de la commission actuellement, il est possible d'espérer que nos collègues, critiques de l'Opposition officielle en ma- tière d affaires municipales, et le ministre des Affaires municipales soient des nôtres avant la fin de nos travaux. Autrement, nous choisirons la solution de circonstance.

Affaires sociales

Le Président (Mme Cuerrier): Affaires sociales. Programme 2, élément 1. Adopté?

M. Forget: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ...j'aimerais que le ministre des Finances ou le ministre des Affaires sociales, le cas échéant, nous décompose ce montant de près de $35 millions à l'aide sociale. En particulier, j'aimerais qu'il puisse nous indiquer quelle est la partie de ce budget supplémentaire pour l'aide sociale, qui est attribuable à une indexation qui, si je comprends bien, se fera au taux de 8,2%, selon l'indice des rentes pour l'année 1977, au-dessus de ce qui avait été envisagé ou utilisé, du moins, comme hypothèse de travail lors de la préparation du budget original. Qu'est-ce qui est représenté par l'accroissement de la clientèle au-delà des prévisions originales?

Qu'est-ce qui pourrait être attribuable à d'autres éléments tels que, peut-être, une modification possible des règlements au 1er janvier à la suite d'autres dispositions qui sont devant cette Assemblée?

M. Parizeau: La première décomposition, Mme le Président, que j'ai de ce montant est de presque $30 millions, à toutes fins pratiques, pour l'aide aux ménages privés de moyens de subsistance proprement dits et $4 900 000 pour les prestations à être versées aux Indiens et aux Inuit. Alors revenons à ces $30 millions, les $29 900 000. Le coût de l'indexation représenterait, le coût additionnel, de $5 millions à $6 millions sur les $30 millions dont il s'agit.

M. Forget: Est-ce qu'on peut nous indiquer quels sont les autres éléments?

M. Parizeau: Essentiellement l'accroissement de la clientèle.

M. Forget: Est-ce qu'il serait possible de préciser si une modification est envisagée aux barèmes de l'aide sociale, en particulier pour ce qui est des enfants de premier, deuxième et troisième rang, modification qui semblerait tout indiquée, étant donné le projet de loi que nous étudierons peut-être ce soir, si le temps le permet, mais qui, à tout événement, a pour effet de majorer de façon particulièrement sensible les prestations d'allocations familiales fédérales pour les enfants de quatrième rang? L'on se souviendra que, à compter de 1974, les barèmes de l'aide sociale, eu égard à la présence des enfants dans une famille bénéfi-

ciaire de l'aide sociale, avaient été ajustés de manière que I on garantisse, pour les enfants de rang inférieur au quatrième, le même niveau de prestations que celui que l'on garantit pour les enfants de quatrième rang et plus. Il semblerait donc tout à fait logique, dans le contexte d'une modification aux barèmes des allocations familiales, que cet équilibre soit rétabli. Je crois d'ailleurs que, puisque cette question était à l'étude, qu'elle était d'ailleurs sur le point d'être amenée par l'ancien gouvernement, le coût d'une telle mesure pour les bénéficiaires de l'aide sociale s'élevait à une somme relativement très modique. Je serais intéressé de savoir si on a décidé, si le nouveau gouvernement a décidé de ne pas donner suite à ces recommandations des fonctionnaires et à figer en quelque sorte, par conséquent, les barèmes de l'aide sociale au niveau actuel, évidemment compte tenu de l'indexation.

M. Parizeau: II me semble que c'est une question qui sera remarquablement intéressante à discuter quand on abordera l'examen du bill portant sur le relèvement des allocations familiales. Dans l'état actuel des choses, n'est-ce pas, le montant qui paraît ici est composé essentiellement et ne peut vraiment se discuter que dans le sens suivant: l'augmentation de la clientèle d'une part, que l'on constate et puis, deuxièmement, ce sont les factures à payer et l'indexation qui, de toute façon, devait être faite.

Bien sûr, le problème qui est soulevé me paraît extraordinairement intéressant, mais il me semble que c'est à l'occasion du projet de loi qu'il faudrait le faire.

M. Forget: Mme le Président...

M. Biron: Si je comprends bien, on a un accroissement considérable de la clientèle au ministère des Affaires sociales. J'aurais une question à poser aussi au ministre des Affaires sociales. Est-il au courant que des officiers de son ministère, à l'heure actuelle, recommandent à des couples de se séparer s'ils veulent pouvoir bénéficier des allocations d'assistance sociale?

M. Lazure: Je dois avouer que je ne suis pas au courant. Je vais m'en informer. Cela ne me paraîtrait pas régulier qu'il y ait de tels conseils de donnés.

M. Forget: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Merci, Mme le Président. J'aimerais être bien sûr que l'on se comprend quant à ce qui est de cette question des allocations familiales. Entendons-nous bien. Je sais fort bien que nous devons discuter des allocations familiales à l'occasion de l'étude d'un autre article au feuilleton qui est une loi portant spécifiquement sur ce sujet. Cependant — et c'est le seul endroit pour en discuter — il serait normal, et nous avions envisagé, je dois le dire, de le faire simultanément, il serait normal, dis-je, qu'à l'occasion d'une majoration des allocations familiales qui profite de façon privilégiée, et ce sera encore plus vrai à l'avenir, aux enfants de quatrième rang, la même garantie financière soit donnée à tous les ménages, à toutes les familles bénéficiaires de l'aide sociale, de manière que le même montant soit donné aux enfants de premier, deuxième et troisième rang. Encore une fois, si je comprends bien la réponse donnée par le ministre des Finances, le nouveau gouvernement a répondu par la négative à cette question, c'est-à-dire que les bénéficiaires de l'aide sociale ne recevront pas cette garantie.

Encore une fois, je m'en étonne, puisqu'il s'agit d'un montant relativement modeste, effectivement une fraction minime du budget supplémentaire qu'on nous propose et qui aurait permis d'accorder une telle garantie.

M. Parizeau: Je pense que le ministre des Affaires sociales va répondre à cette question.

M. Lazure: Mme le Président, la question que soulève le député de Saint-Laurent est fort complexe. Non seulement sa question serait plus pertinente au moment de l'étude du projet de loi sur les allocations familiales, mais à ce moment-là, nous pourrions aussi donner de plus amples explications sur les réconciliations qu'il y aura lieu de faire avec les barèmes de l'aide sociale. C'est un projet qui est à l'étude actuellement. Nous sommes conscients qu'il doit y avoir une concordance entre les augmentations que nous allons proposer dans le projet de loi tantôt, concordance avec tous les barèmes de l'aide sociale. Je pense que la question pourra être débattue plus amplement un peu plus tard.

M. Forget: Mme le Président, je vais céder ma parole au député de Rouyn-Noranda, mais j'aimerais revenir après pour une brève question.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je remercie le député de Saint-Laurent. J'aurais quelques brèves remarques à faire concernant ce programme qui intéresse particulièrement les personnes qui ont besoin d'avoir recours au programme d'aide sociale qui est celui du revenu familial. On a porté un fait à mon attention, et je pense que cela a été porté à l'attention de plusieurs députés aussi. Je ne sais pas si cela a tendance à se généraliser, mais avant que cela se généralise, il est peut-être bon que nous saisissions la Chambre de ce problème et que le nouveau ministre des Affaires sociales puisse en prendre connaissance, s'il n'a pas eu l'occasion d'en prendre connaissance déjà, et peut-être apporter des correctifs qui pourront s'imposer.

On nous rapporte qu'il y a une forte tendance, depuis quelques mois — ce n'est donc pas nécessairement depuis les élections — à partir des bu-

reaux d'aide sociale, à faire des vérifications auprès des bénéficiaires et presque de l'ensemble des bénéficiaires, si mes renseignements sont valables, et on utilise les renseignements ainsi obtenus pour ou bien diminuer l'aide sociale de certains bénéficiaires ou bien la couper totalement.

Je me reporte à certains faits bien précis qui nous reviennent plus souvent. C'est que, semble-t-il, après inspection, on avertit les assistés sociaux qu'à partir de telle date, il y aura diminution de l'aide sociale parce que l'on présume, dans le cas d'une veuve, par exemple, qui a des enfants, qu'il y aurait cohabitation. Or, si c'est le cas, bien sûr, selon les règlements de l'aide sociale, la personne qui cohabite doit assumer certains frais. Mais là où je trouve que ce n'est pas normal, c'est que l'on avise d'abord les bénéficiaires de ces changements sur une simple présomption. On ne fait pas nécessairement la preuve qu'il y a effectivement cohabitation.

Donc, c'est, en quelque sorte, la présomption de culpabilité que nous ne trouvons pas dans nos lois, normalement, mais, dans l'administration, c'est du droit administratif.

Dans ce droit administratif, il semble que la présomption de culpabilité devient, en quelque sorte, une présomption qui se généralise.

Or, Mme le Président, bien sûr on informe ces bénéficiaires de leurs droits de révision de dossiers. Et comme la révision de dossiers se fait généralement par un représentant régional qui connaît passablement les dossiers, il n'y a pas de changement après la révision dans la majorité des cas. Mais il y a un autre appel possible. Là, on informe le bénéficiaire qu'il a un droit d'appel à la commission d'appel. Mais ce sur quoi je voudrais saisir ce soir la Chambre c'est que tous ces droits d'appel qui semblent bien valables et bien beaux font qu'entre-temps, en attendant que ces honorables hauts fonctionnaires aient le temps de prendre l'appel en considération, il peut y avoir des personnes et des enfants en cause dont le responsable familial n'a pas les moyens de pourvoir à leur subsistance.

Je me demande, et je pose la question à l'honorable ministre, si ceci a été porté à son attention, et sinon, s'il a l'intention de faire les vérifications qui s'imposent et de voir s'il n'y aurait pas lieu, lorsqu'un tel cas peut se présenter, de continuer, tout en avertissant le bénéficiaire, les versements pour s'assurer qu'il n'y a pas des enfants qui souffriront de cette situation jusqu'à ce que la preuve puisse être faite qu'il y a effectivement cohabitation.

Nous avons des cas qui sont portés à notre attention où il serait extrêmement difficile de faire cette preuve et pourtant, les allocations ont été coupées. C'est un cas. En même temps, parce que je ne voudrais pas revenir avec trois ou quatre questions inutilement, j'en profite pour demander au ministre aussi s'il lui serait possible de nous faire part des décisions qui pourraient éventuellement être prises quant à l'éventualité d'en arriver à un paiement bimensuel de l'aide sociale, sinon, au moins que le paiement mensuel soit fait avant la fin du mois.

Autre chose, n'y aurait-il pas possibilité de prévoir un mécanisme humain qui pourrait remplacer le mécanisme actuel, c'est-à-dire, la fameuse machine ordinatrice qui effectue des paiements et qui traite, en fait, les cas des assistés sociaux, surtout dans les cas des machines locales. Je ne connais pas trop la terminologie qu'il faut employer, mais il reste que c'est une petite machine qui transfère des données à la machine centrale. J'ai été informé qu'à Rouyn-Noranda la machine est brisée depuis une couple de jours et, entre-temps, il n'y a pas moyen d'aider personne.

On m'a même dit qu'il y avait un expert de Los Angeles qui était arrivé. On attend l'expert pour aider ces pauvres gens qui sont dans le besoin. Je n'ai rien contre les experts. Je n'ai rien contre le fait que la mécanographie peut nous aider, mais quand cela ne fonctionne pas, n'y aurait-il pas moyen de prévoir quelque chose pour au moins parer aux obligations les plus urgentes?

Si je soulève cette question, ce n'est pas parce que c'est arrivé avant-hier et que cela a été porté à ma connaissance avant-hier, c'est parce que cela a été porté à ma connaissance à plusieurs reprises. Donc, cela se produit. On fait affaires avec de la mécanique. Cela se produit apparemment plusieurs fois, et chaque fois que cela se produit, on dirait que c'est presque toujours au moment où les assistés en ont le plus besoin et où c'est le plus pressant.

Il y a, dans certaines régions, si je ne m'abuse, des mécanismes qui font qu'on peut aider les gens par une caisse de dépannage. Je pense que, dans le Nord-Ouest québécois — il me semble que cela a l'air trop loin ou que c'est trop froid; il y a quelque chose qui ne va pas, en tout cas — la caisse de dépannage n'existe pas.

M. Lazure: Les crédits sont gelés.

M. Samson: Ils sont peut-être congelés. Cela pourrait peut-être arriver, mais il me semble qu'après l'avoir demandé à quelques reprises à l'ancien ministre cela devrait être pris en considération non seulement pour la région que je représente, mais pour les autres régions qui sont éloignées aussi où je sais, à moins que cela n'ait été changé dernièrement, qu'il n'y a pas de caisse de dépannage. Les fonctionnaires qui font leur travail du mieux possible sont victimes et otages de la machine, comme les bénéficiaires de l'aide sociale le sont. J'aimerais connaître le point de vue du ministre des Affaires sociales sur ce sujet.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Mme le Président, en ce qui concerne les caisses de dépannage, j'ai pris note qu'une telle caisse n'existerait pas dans la région du Nord-Ouest. Cela m'étonne. Je vais faire une vérification. Normalement, ces caisses devraient exister partout. Pour ce qui est du chèque mensuel, je remercie le député de Rouyn-Noranda de me donner l'occasion d'informer l'Assemblée qu'il est maintenant devenu possible de distribuer les

chèques, qui sont dans le moment mensuel, assez tôt pour que les bénéficiaires les reçoivent le premier du mois et non pas le cinq du mois. Ceci devrait commencer au mois de février.

La possibilité d'envoyer deux chèques par mois est actuellement à l'étude. Personnellement, je favorise cette distribution bimensuelle. Aussitôt qu'on aura d'autres renseignements, je les communiquerai à la Chambre avec plaisir. Votre première question, cette présomption de la cohabitation qui amènerait la discontinuation de l'aide sociale, vous me l'apprenez. On ne m'a pas informé de cette situation. J'en prends note et je vous donnerai des renseignements dans quelques jours.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Mme le Président, j'aurais d'autres questions complémentaires à celles qui ont été posées par mon collègue de Rouyn-Noranda. On a parlé de la caisse de dépannage. J'aimerais dire, tout simplement, qu'il n'y a pas de caisse de dépannage dans la région de la Beauce non plus. J'ai souvent communiqué avec les bureaux d'aide sociale à ce sujet pour des cas extrêmement urgents, des cas qui sont surtout devenus urgents à cause de la machine pour laquelle on semble vouloir faire venir un expert de Los Angeles pour aller dans le Nord-Ouest; il serait également obligé de passer dans le comté de Beauce, Mme le Président. Je me demande si ce n'est pas devenu un slogan ou un mot d'ordre qu'on donne à la grandeur de la province à l'heure actuelle pour essayer de se justifier du fait que, n'ayant pas de caisse de dépannage, on essaie de trouver des moyens pour tâcher de faire attendre les gens davantage. J'ai eu à intervenir, pas plus tard que lundi, pour plusieurs dossiers. Des familles qui, normalement, auraient dû recevoir leur chèque au début de décembre n'auront même pas leur chèque pour Noël. Quand on songe qu'il y a quatre, cinq ou six enfants dans ces familles, il est inutile de vous dire que ce sont des problèmes qui sont extrêmement sérieux.

Mme le Président, j'aimerais demander également au ministre s'il est possible pour lui de nous dire ce soir, étant donné que nous sommes à l'étude de ses crédits, puisqu'on a parlé d'indexation tout à l'heure, que l'aide sociale a été indexée il y a deux ans et qu'elle a été indexée également l'année dernière, s'il est prévu que l'aide sociale sera indexée cette année et quel est le pourcentage d'indexation qui sera accordé par le ministère des Affaires sociales. Je pose cette question au ministre. Je ne sais pas s'il est en mesure de nous le dire ce soir. De toute façon, s'il n'est pas en mesure de nous le dire immédiatement, quand sera-t-il en mesure de nous faire part de cette nouvelle? En effet, nous avons plusieurs demandes qui nous sont faites par les gens justement sur ce point afin de connaître les possibilités qu'il peut y avoir de voir leur allocation augmenter au mois de janvier, compte tenu des augmentations de loyer auxquel- les ils doivent faire face et compte tenu également des augmentations du coût du chauffage. Cela dit, Mme le Président, j'aimerais, avec votre permission, puisque le règlement me le permet quand même, attirer l'attention du nouveau ministre des Affaires sociales sur un point. Dans la préparation des politiques de son ministère, dans le budget qui sera présenté au gouvernement le printemps prochain, il y a un point sur lequel je voudrais attirer son attention.

Dans les milieux ruraux, surtout, il y a plusieurs personnes qui, étant propriétaires d'une résidence, sont également propriétaires d'un petit chalet ou d'un lopin de terre, compte tenu du fait que dans les milieux ruraux, comme on le sait, 85% de la population sont propriétaires. Lorsqu'une femme devient veuve, soit à l'âge de 61, 62 ou 59 ans ou lorsque des personnes deviennent invalides avant d'avoir 65 ans, les règlements de l'aide sociale les obligent à vendre leur deuxième propriété pour pouvoir continuer à être bénéficiaires de la Loi de l'aide sociale. On leur accorde, à ce moment, un prêt sur une période de six mois, en les obligeant à contacter un courtier immobilier ou quelqu'un qui s'est spécialisé dans cette vente de terrain pour tâcher de négocier la vente de leur terrain à un prix inférieur à la valeur marchande. On n'a qu'à se référer aux règlements et aux dispositions qui prévalent à la Loi de l'aide sociale pour s'en rendre compte, et le ministre sera en mesure de vérifier la justesse de mes propos.

Or, il arrive que des gens soient obligés de se départir d'un petit emplacement de chalet ou d'un petit chalet alors que, lorsqu'ils sont bénéficiaires d'allocation de sécurité à la vieillesse, ils peuvent garder leur propriété. Les barèmes pour accorder le supplément de revenu garanti par le gouvernement fédéral ne se réfèrent pas aux propriétés possédées par le bénéficiaire, mais se réfèrent surtout au revenu de cette personne. On oblige ces gens à se déposséder parfois d'une deuxième propriété comme un chalet, et c'est la situation particulière que je veux souligner. Il y a des familles nombreuses qui assez souvent ont gardé cette deuxième propriété pour permettre à ceux qui sont établis au loin, voire aux Etats-Unis, comme c'est le cas dans les régions proches des frontières américaines, ou dans les autres provinces canadiennes, de pouvoir venir passer quelques semaines dans la province de Québec au cours de la période de vacances. J'ai souvent été témoin de cela, et je pense que tous les membres de l'Assemblée nationale sont en mesure de le constater, ceux qui ont fait du bureau et qui ont eu l'occasion d'examiner ces dossiers de près. C'est pourquoi je demande — je ne demande pas au ministre de me donner une précision ce soir — d'examiner cette situation avec toute l'attention qu'elle mérite et de voir à ces nouvelles politiques dans la préparation du nouveau budget. On devrait tenir compte de ce facteur, parce que je ne pense pas que ceci pourrait constituer, pour le gouvernement, des sommes astronomiques. Mais cela pourrait rendre service à des gens, qui peuvent bénéficier de certains loisirs puisqu'on accorde énormément d'importance aux loisirs du troisième âge à ce

moment-ci. Je pense qu'il ne faudrait quand même pas que nos lois visent à les déposséder avant d'avoir atteint l'âge de la retraite. C'est un peu la situation qui prévaut et c'est la raison pour laquelle je demande au ministre des Affaires sociales, au nouveau gouvernement, de tenir compte de ce point de vue de façon à pouvoir corriger la situation au plus tôt.

M. Biron: Mme le Président, je voudrais parler brièvement sur une question de privilège. Cet après-midi, le leader du gouvernement et le chef de l'Opposition ont voulu saluer, dans les galeries, des personnages de marque. Ce soir, il me fait plaisir de saluer deux des grands personnages de marque dans ma vie, mon fils et ma fille, qui viennent saluer leur père, alors que son parti a été reconnu cet après-midi.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Mme le Président, je remercie le député de Beauce-Sud d'avoir attiré mon attention sur cette réglementation concernant la deuxième propriété et j'en ai pris note. En ce qui a trait à votre première question, l'indexation des barèmes d'aide sociale, il nous fait plaisir d'informer cette Assemblée que je dois faire une proposition au Conseil des ministres demain qui viserait à indexer ces barèmes.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Pardon!

Le Président (Mme Cuerrier): Oui.

M. Forget: Merci. J'aimerais faire deux brefs commentaires, le deuxième ayant pour but de m'assurer d'avoir bien compris la réponse que nous a faite le ministre des Affaires sociales. J'aimerais, avant, commenter l'annonce que vient de faire le ministre des Affaires sociales relativement à la date d'émission des chèques d'aide sociale. A ce sujet, je dois dire que je n'ai aucune félicitation à lui faire.

En effet, cette question de la date de versement des chèques d'aide sociale a longtemps été examinée et l'on a remarqué une heureuse coïncidence dans la date d'émission des chèques de l'aide sociale, particulièrement depuis 1974.

En effet, un très grand nombre de familles qui sont bénéficiaires de l'aide sociale sont également bénéficiaires de chèques d'allocation familiale qui sont versés, comme on le sait, le 20 du mois et qui constituent un montant approximativement équivalent à ce qu'elles reçoivent de l'aide sociale. Ainsi, en ayant ses paiements le cinq et en ayant les paiements d'allocation familiale le vingt, nous avions une division du mois en deux, puisque ces deux dates sont séparées de quinze jours, si je sais bien compter, ce qui permettait de mieux planifier le budget familial pour ces familles.

En avançant ainsi du cinq au premier le versement de l'aide sociale, tout ce que le nouveau gouvernement aura fait, c'est de rendre plus compliquée la budgétisation pour ces familles, puisque, recevant un chèque le premier, il s'écoulera trois semaines avant qu'elles ne reçoivent un autre versement, cette fois-ci sous forme d'allocation familiale, et seulement une semaine entre ce versement et le versement de l'aide sociale pour le mois suivant.

Je ne sais pas si le ministre des Affaires sociales a l'intention, pour l'an prochain, de nous réserver un autre grand succès comme celui-là, en avançant du premier au 31 du mois précédent les chèques d'aide sociale, mais je crois que ce n'est pas un substitut pour une majoration des barèmes.

Je reviens, Mme le Président, à mon autre question du début qui, je pense, est très importante. Si je peux comprendre le sens des remarques du ministre des Affaires sociales, qui nous a dit que c'était une question compliquée, je ne vois pas en quoi il est compliqué de majorer les barèmes de l'aide sociale pour mieux refléter le coût de la présence des enfants dans une famille, pour les enfants de premier, deuxième et troisième rangs. Cela me paraît la simplicité même. Si je comprends bien, puisqu'on n'en parle pas dans ce budget supplémentaire, c'est qu'il n'en sera pas question et que ces familles n'en bénéficieront donc pas à compter de janvier prochain.

Je crois, encore une fois, que c'était une mesure facilement adoptable par le nouveau gouvernement, qui avait été envisagée et prévue et pour laquelle les calculs ont été effectués; c'est une décision négative qui désavantage le bénéficiaire de l'aide sociale. Je veux m'inscrire tout de suite en protestation contre une mesure qui, encore une fois, était à la portée de la main du nouveau gouvernement et que celui-ci refuse de prendre pour des raisons qui ne nous ont pas été expliquées.

M. Lazure: Mme le Président, je m'inscris en faux devant cette conclusion du député de Saint-Laurent, puisque j'ai dit tantôt que tout le secteur de l'aide sociale, non seulement de l'indexation, mais de certaines concordances qu'il y avait à faire, compte tenu du projet de loi qui est présenté pendant cette session sur les allocations familiales, devait être discuté au Conseil des ministres.

M. Forget: ...pas l'argent pour l'appliquer.

M. Lazure: Vous présumez de la conclusion de ces discussions; c'est votre privilège. Quant à la première partie de votre intervention, vous dites que cela n'est pas une surprise tellement agréable pour vous ou pour cette Chambre, que les chèques de l'aide sociale arrivent le premier du mois au lieu du cinq ou du six. Mais je peux vous assurer que des centaines et des milliers de bénéficiaires ont fait une telle demande dans le passé, non seulement via le ministre actuel, mais via d'autres partis, puisque la question a été soulevée la semaine dernière. Je pense que le député de Saint-

Laurent était absent. Des milliers de citoyens désirent recevoir le chèque le premier du mois, puisqu'ils doivent payer le loyer ce jour-là.

Je ferai également remarquer au député de Saint-Laurent que ces allocations d'aide sociale ne vont pas seulement aux familles qui reçoivent des allocations familiales. Enfin, comme je le disais tantôt, notre intention, mon intention, c'est de faire en sorte qu'à l'avenir, et dans un avenir assez rapproché, l'aide sociale soit distribuée deux fois par mois. Le faux problème que vous soulevez sera évidemment réglé, puisqu'il est faux au départ et puisqu'il y aura deux chèques par mois dans quelque temps.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Mme le Président, je voudrais souligner que, quoique je ne sois pas toujours d'accord avec ce qui est annoncé et que je ne serai peut-être pas toujours d'accord, dans l'avenir, avec ce qui sera annoncé, je suis d'accord avec ce qui est annoncé ce soir. Ce que le ministre des Affaires sociales vient d'annoncer, je suis d'accord avec cela. Cela m'a été demandé souvent.

C'est bien beau, les allocations familiales qui arrivent à une certaine date du mois, de programmer la machine ordinatrice pour que le paiement des allocations sociales soit fait quinze jours après, mais ce qu'on oublie trop souvent, c'est qu'en matière d'aide sociale les barèmes sont trop bas. Tout ce que l'ancien ministre — je le lui ai déjà dit à l'occasion de l'étude de crédits — a trouvé de bon pour aider ces gens-là, c'est de diviser le mal en deux périodes dans le mois, mais il n'a jamais corrigé le mal, par exemple. C'est ce qu'on demande, corriger le mal. Les barèmes sont trop bas, tout le monde le sait.

L'ancien ministre devrait savoir, comme j'aimerais que le nouveau ministre le sache — il le sait peut-être — que le premier du mois, c'est généralement la date de paiement du loyer. Le test de loyer, dans le barème actuel, est de $85 par mois. Or, il n'y a pas un sacré loyer en bas de $100, $125 et $150 pour loger une famille de deux ou trois enfants. Je parle de logement salubre. Donc, le barème ou le test de loyer étant à peu près à 50% de l'exigence réelle, ces personnes, même en recevant une allocation familiale assez élevée, n'en ont pas suffisamment pour payer le loyer à temps. Résultat: les paiements du loyer sont faits en retard chez les assistés sociaux. Résultat: les propriétaires qui ont des logements à louer en sont presque rendus à ne pas vouloir les louer à des assistés sociaux. Résultat: ces personnes deviennent des citoyens de deuxième et de troisième ordre par la force des choses.

C'est pourquoi, quand on ramène cela au 1er du mois, pour le moment en tout cas, on fait un pas. Quand on corrigera le test de loyer, comme j'espère que cela va se faire bientôt, ce sera un autre pas.

Une autre correction qui devrait être apportée dans le domaine des barèmes — l'ancien ministre des Affaires sociales devrait savoir cela, lui, surtout — c'est que dans le barème actuel on a des dispositions pour un adulte, deux adultes, un enfant, deux enfants, trois enfants, mais il n'y a rien après le troisième. Après le troisième enfant, on se fie seulement sur l'allocation familiale. On a parlé, tantôt, du troisième ou du quatrième enfant; il faudrait parler aussi du barème d'aide sociale pour le quatrième enfant, le cinquième ou le sixième parce qu'il y en a encore qui ont plus de trois enfants. Je pense que le sixième enfant a autant le droit de manger que le premier. Dans l'ancien barème, dans l'ancien règlement et celui qui existe encore actuellement, c'était cousu d'injustices sociales. Ce n'est pas pour rien qu'il y a eu une commission parlementaire; ce n'est pas pour rien qu'on a écouté les représentants d'assistés sociaux, du monde défavorisé qui sont venus nous expliquer ce que nous savions déjà. Ils sont venus confirmer ce que nous savions déjà. Cela s'est passé au mois de juin, et cela devait être corrigé. On a dit, comme toujours à une commission parlementaire quand on reçoit du monde: On va étudier votre cas et on va essayer de corriger cela. Je ne sais pas si le cas a déjà été étudié, mais je sais qu'il n'a pas été corrigé, par exemple.

Je demande à l'actuel ministre — et cela s'adresse évidemment aussi au ministre des Finances parce que, bien sûr, on ne pourra pas corriger cela sans faire appel un peu au ministre des Finances parce qu'il est question d'argent — que ce soit pris en considération.

Une autre chose qui mérite d'être portée à l'attention du ministre actuel, c'est qu'il arrive parfois — c'est arrivé dans plusieurs cas, puis cela pourra arriver encore — que, par des erreurs quelconques, soit d'une personne qui reçoit de l'assistance sociale, soit d'un fonctionnaire — c'est humain et c'est normal — qu'il y ait ce qu'on appelle des trop-perçus. Il y a une division de la perception au ministère des Affaires sociales pour percevoir les montants qu'on a versés en trop pour une raison ou pour une autre ou qu'on peut avoir versés en trop. Même si c'est contesté, en tout cas, le compte est envoyé et puis on essaie de se faire rembourser par ces personnes.

Or, j'ai entendu dire — là, je voudrais me le faire confirmer; c'est quelqu'un qui m'a rapporté ce fait et je voudrais bien savoir si c'est vrai que cela se passe comme cela — qu'à la division de la perception il y aurait eu apparemment des directives nouvelles dernièrement, à l'effet qu'on voudrait même se faire rembourser pour des personnes qui, à la suite d'un compte qui leur a été envoyé, ont peut-être eu la chance de travailler un mois ou deux, mais qui sont redevenues admissibles aux bénéfices de l'aide sociale. On m'a rapporté que, dans certains cas, les directives étaient qu'on pouvait prendre à même les montants d'aide sociale qui seraient normalement versés à un bénéficiaire pour rembourser un trop-perçu qui date de quelques mois ou peut-être d'un an ou deux.

Il semblerait que ce soient des directives nouvelles. J'espère bien que non, mais j'aimerais bien que le ministre puisse nous dire s'il est vrai qu'il y

a de telles directives et, s'il y a de telles directives, j'aimerais bien qu'on puisse en discuter.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Alors, je puis assurer le député de Rouyn-Noranda et l'Assemblée que je n'ai pas émis de directives dans ce sens et que, si directives il y a eu, cela a été fait sous le gouvernement antérieur. Alors, je vais vérifier et je pourrai renseigner l'Assemblée à ce sujet. Je profite de l'occasion pour dire deux mots sur la complexité des règlements d'application de l'aide sociale et aussi sur une certaine tendance que les gens ont pu déceler dans les quelques années antérieures, une certaine tendance à tracasser les gens, une tendance à la tracasserie, surtout sur des montants qui sont relativement minimes. Ces tracasseries s'adressent à des gens qui sont très démunis, des gens qui sont les moins privilégiés dans notre société.

Alors, j'ai certainement l'intention, avec mes collègues du gouvernement actuel, de remédier à cette réglementation le plus tôt possible. Je suis en train de prendre connaissance du journal des Débats de la commission parlementaire du 8 juin 1976. Dans ce journal des Débats, on retrouve plusieurs des remarques du député de Rouyn-Noranda qui sont constructives et on retrouve aussi, évidemment, plusieurs remarques très constructives de mes collègues qui étaient alors dans l'Opposition officielle.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Est-ce que je pourrais demander au ministre si c'est dans son intention également de se pencher sur le problème des personnes âgées en hébergement, qui, depuis déjà plusieurs mois, sont toujours collées avec un chèque, qui augmente aux six mois, du fédéral et dont on va chercher les sommes par le provincial. On sait que le coût de la vie continue d'augmenter et ces personnes, quand elles vivent seules dans une chambre et son hébergées dans une résidence pour personnes âgées, ont $55 par mois. Si elles sont deux, cela leur fait $110 mais, si elles sont seules, cela fait déjà plusieurs mois qu'elles sont collées avec $55 et c'est nettement insuffisant.

Je ne sais si dans cette somme vous prévoyez déjà aborder un peu ce problème, puis déjà leur venir en aide. Si vous allez vous promener un peu dans les centres d'accueil, vous allez vite vous rendre compte qu'elles sont dans un besoin réel. Je vois le député de Saint-Jacques, le ministre délégué au haut-commissariat, qui est vraiment mêlé à la question dans son coin et qui témoigne de cette situation qui est vraiment pénible dans nos centres d'accueil.

M. Lazure: Mme le Président, je connais cette situation pour l'avoir moi-même combattue il y a un an, alors que j'étais directeur d'un centre hospitalier où il y a une section pour soins prolongés.

On perçoit là des sommes et, en même temps, on exige que ces personnes déboursent une somme qui peut aller jusqu'à $120 par mois, dont $10 par mois pour leurs besoins personnels. Encore une fois, il s'agit d'une espèce de jungle où il y a une infinité de règlements qui ont besoin d'être révisés. Je demande l'indulgence de cette assemblée pour prendre connaissance, d'abord, du dossier le plus complètement possible et apporter des correctifs dans les mois qui viennent.

Le Président (Mme Cuerrier): Programme 2, élément 1. Adopté. Programme 3, élément 1. Adopté.

M. Russell: Je voudrais intervenir en ce qui concerne l'administration des hôpitaux. Je me demande si je dois le faire à ce programme ou attendre l'autre, dans le budget. Puis-je le faire à celui-ci?

Le Président (Mme Cuerrier): Cela regarde quoi?

M. Russell: C'est l'administration des hôpitaux, les soins médicaux.

M. Charron: C'est le programme 11, ou 13. M. Russell: Programme 13. M. Charron: Programme 13.

Le Président (Mme Cuerrier): Elément 1, adopté? Adopté. Elément 2, adopté. Elément 3, adopté. Programme 11, élément 1 adopté.

M. Biron: Mme le Président. Je comprends...

Le Président (Mme Cuerrier): Qui s'est levé le premier, je n'ai pas vu? M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Le ministre pourrait-il nous confirmer si ce montant de $3 500 000 représente effectivement le coût des vaccins pour la grippe porcine, c'est-à-dire la part du Québec dans le coût de ces vaccins? Pourrait-il nous indiquer si, suite à la décision qu'il rendait publique la semaine dernière de mettre fin à ce programme, il envisage la possibilité d'obtenir de retourner les vaccins qui ont été ainsi achetés pour une fin qui ne sera plus désormais nécessaire ou s'il a l'intention de continuer le stockage de ces vaccins afin de parer à une éventualité possible dans ce secteur?

M. Parizeau: Avant que le ministre des Affaires sociales ne commente les aléas de la grippe porcine, je voudrais simplement indiquer ici que l'élément 1 du programme 11, soins des maladies physiques: $3 500 000, ne comporte que les crédits nécessaires pour couvrir le coût des soins hors province. Cela n'a manifestement rien à voir avec la grippe porcine, à moins de supposer qu'elle est entièrement extérieure.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Lotbinière.

M. Biron: J'ai compris qu'il y avait beaucoup de ces soins qui étaient reçus par des citoyens de l'Outaouais et dans la région d'Ottawa en particulier. Le ministre a-t-il déjà envisagé quelque chose pour que ces citoyens québécois puissent recevoir des services hospitaliers nécessaires au Québec?

M. Lazure: Pour être franc, depuis les quelques semaines que je suis en fonction, je n'ai pas étudié cette question. Evidemment, les citoyens de cette région peuvent recevoir des soins à Hull, en particulier, où il y a un hôpital général, mais il y a quand même des citoyens qui ont recours aux soins qui sont dispensés dans la province voisine. Les dispositions actuelles prévoient des ententes interprovinciales pour qu'il y ait des remboursements.

Pour revenir à la question du député de Saint-Laurent, dans la déclaration de vendredi dernier, j'ai dit que nous entrerions en pourparlers avec le ministre de la Santé à Ottawa, afin d'explorer la possibilité de retourner une quantité de vaccins. Nous avons l'intention de garder en stock une quantité de vaccins aussi.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Bien sûr, s'il y a des ententes interprovinciales, comme cela, pour des soins hospitaliers, je comprends qu'au Québec on doive débourser une somme additionnelle de ce qui rentre des citoyens de l'Ontario. Il y a beaucoup plus de citoyens du Québec qui vont se faire soigner en Ontario. C'est donc que notre service hospitalier n'est pas adéquat dans l'Outaouais, en particulier.

M. Lazure: Je pense qu'il faut avouer que les services hospitaliers sont plus adéquats dans la ville d'Ottawa que dans la ville de Hull.

M. Forget: Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Pour retourner à ma question de tout à l'heure, je demanderais un éclaircissement au ministre des Finances. Mon examen de ces crédits supplémentaires ne me permet pas de voir à quel poste budgétaire le coût de ces vaccins a été affecté. Est-ce qu'il en a effectivement tenu compte dans ces crédits supplémentaires ou si cela figurera comme compte à payer, en quelque sorte, dans les comptes publics? Il me semble que les crédits réguliers déjà adoptés par l'Assemblée nationale pour l'année en cours ne prévoyaient pas — forcément, parce qu'ils ont été préparés à une époque antérieure à cette question — le montant nécessaire pour défrayer le coût de ces vaccins.

M. Parizeau: Je pense que le député de Jean-Talon, le collègue du député de Saint-Laurent, pourrait lui rappeler que c'est passé sur un mandat spécial, ces vaccins contre la grippe porcine. Donc, cela a été un des mandats spéciaux avant que l'ex-gouvernement quitte le pouvoir.

Le Président (Mme Cuerrier): Programme 11, élément 1, adopté. Programme 13, élément 2. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Russell: Mme le Président, je voudrais demander au ministre s'il peut informer la Chambre sur la politique qu'il entend suivre en ce qui concerne les soins dans les hôpitaux actuellement. Dans le comté que je représente, nous avons un hôpital qui a été construit il y a déjà plusieurs années et qui a à sa disposition 127 lits. On nous informe qu'actuellement, avec les budgets qu'il détient, il ne peut en faire fonctionner que 65 à 70, lorsqu'on a des listes d'attente apparemment, qui me dit-on, sont assez impressionnantes. Je demande au ministre s'il a l'intention de faire en sorte de modifier cette politique, si c'est dû à la politique du gouvernement. Si c'est l'administration des hôpitaux qui est mauvaise, a-t-il l'intention de prendre des mesures pour qu'on utilise au maximum l'équipement qui est sur place pour répondre à un besoin qui semble pressant?

Je peux informer le ministre que l'expérience personnelle vécue par celui qui vous parle a été désastreuse en ce qui concerne les services dans cet hôpital. Je ne sais pas si c'est dû au responsable de l'hôpital, mais le service se détériore de jour, en jour. Actuellement il y a des spécialistes qui déménagent dans d'autres hôpitaux. Est-ce que nous allons veiller à cette situation qui se détériore de jour en jour ou si nous prendrons des mesures radicales, s'il le faut, pour corriger cette situation et utiliser au maximum l'équipement qui est sur place.

M. Lazure: Mme le Président, je remercie le député de Brome-Missisquoi...

Le Président (Mme Cuerrier): Le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: ...d'avoir soulevé cette question. J'en profite pour renseigner l'Assemblée sur la situation qu'il vient de décrire, qui n'existe pas seulement dans son comté, mais dans plusieurs comtés du Québec actuellement.

J'ai constaté avec un peu de stupéfaction ces jours derniers qu'il existe au moins huit centres hospitaliers importants au Québec où on a dépensé des sommes impressionnantes, des millions de dollars, pour ajouter des lits, pour ajouter une aile à l'hôpital ou réaménager l'hôpital et que, un an et demi, deux ans après la fin de ces travaux, ces nouveaux locaux ne sont pas encore occupés.

Je pense que c'est la conséquence d'une certaine incurie, d'un certain manque de planification

à la fois des administrations hospitalières et à la fois du ministère. Les fonctionnaires au ministère me laissent entendre que les administrations hospitalières qui avaient à réclamer de tels agrandissements s'étaient engagées à utiliser ces nouveaux espaces sans demander de nouveaux budgets de fonctionnement. La position du ministère, jusqu'au changement de gouvernement, était de répondre aux administrations hospitalières: Vous pouvez utiliser les nouveaux locaux, mais vous n'avez pas de budget additionnel.

Les hôpitaux répondent au public et à leurs employés: Nous avons des espaces nouveaux, mais nous n'avons pas de budget pour utiliser ces espaces. Il s'agit d'un problème très grave puisqu'on a englouti des millions de dollars dans ces travaux et, pendant ce temps, on retrouve dans les même hôpitaux des salles d'urgence où plusieurs patients passent plusieurs heures sur des civières. On retrouve des espaces libres dans ces hôpitaux. C'est un des héritages assez lourds que le gouvernement qui vient d'entrer en fonction reçoit comme cela, au départ. C'est un des problèmes les plus compliqués auxquels je fais face actuellement dans le ministère.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Mme le Président, concernant le problème des ambulances, actuellement, j'ai dans mon comté, particulièrement à Nicolet, l'hôpital Christ-Roi qui administre le service ambulancier et, depuis qu'ils sont en opération, ils ont un déficit de $12 700; ce déficit était en date du 17 novembre. Ce service se termine le 5 mars 1977. Le ministre pourrait-il nous dire si, dans ce budget, il y a des crédits qui seront votés pour que ce service ambulancier puisse continuer à fonctionner? Actuellement, ils demandent aux gens des contributions volontaires pour pouvoir continuer à fonctionner avec ce service. J'ai même envoyé une lettre au ministre, il y a quelques jours, qui lui rappelait les contributions volontaires dans ce domaine et qui lui expliquait la situation. Je ne sais pas si le ministre a contribué, mais il pourrait peut-être contribuer dans le budget.

M. Grenier: L'ambulance bénévole.

M. Lazure: Mme le Président, les fonctionnaires de mon ministère rencontrent, ces jours-ci, cette semaine, des représentants de chacun des comtés, de chacune des zones où il y a des déficiences graves actuellement dans le fonctionnement du service ambulancier. Je me suis engagé, l'autre jour, devant l'Assemblée à ce qu'on trouve des solutions, que ce soit par les services de l'Ambulance Saint-Jean, que ce soit par les services d'un hôpital public, que ce soit par les services d'une municipalité. Je me suis engagé, avec l'aide des fonctionnaires, à trouver une solution pour chacune des zones avant la date d'échéance des contrats.

M. Grenier: Mme le Président, dans le même ordre d'idées, au sujet des ambulances, vous dites dans les zones où c'est plus pressant. Je vous mettrais en garde qu'il y a des régions qui crient peut-être moins fort qu'ailleurs, mais le problème n'est pas moins criant. Il y a des zones où les gens ne se sont pas plaints du tout — j'en ai une chez nous — où on a vu tripler le prix des ambulances avec les exigences et les normes qui ont été demandées par le gouvernement. Il y a des gens qui ne vous ont probablement pas écrit, mais qui paient le double et le triple pour les voyages ambulanciers.

Je voudrais bien que vos gens qui vont s'inquiéter des zones des gens qui parlent s'inquiètent aussi des zones des gens qui ne parlent pas. C'est pas mal comme cela dans toute la province, je pense.

M. Russell: Mme le Président, je suis heureux de voir que le ministre est conscient du malaise qui existe actuellement, dans les hôpitaux. Mais je voudrais lui faire ma demande pour voir quelle politique il a l'intention d'adopter. S'il ne peut pas nous donner une réponse immédiatement, dans quel délai pourra-t-il informer la population de la nouvelle politique qu'il entend suivre en vue de parer à ces situations?

M. Lazure: Mme le Président, ce serait vraiment trop prématuré d'essayer de formuler une politique après trois semaines. Encore une fois, je vous répète qu'il s'agit là d'un problème compliqué et certainement d'ici à la prochaine session nous serons en mesure d'apporter des correctifs qui seront transmis à l'Assemblée lors de l'ouverture de la prochaine session. Je me permets un dernier commentaire à ce sujet. M. le député de Saint-Laurent, ce matin, s'est indigné de l'intervention du ministre des Affaires sociales dans la marche des hôpitaux. C'était une ingérence dans l'autonomie des conseils d'administration des hôpitaux.

Je veux répéter, encore une fois à cette Assemblée et au public à travers l'Assemblée qu'aussi longtemps qu'une corporation hospitalière, le conseil d'administration d'un hôpital fait son travail de façon satisfaisante pour le public, je n'ai pas l'intention de m'ingérer dans ses affaires.

A partir du moment où un hôpital ne fournit pas des services d'urgence, à partir du moment où un hôpital n'utilise pas des espaces qui ont coûté des millions, à ce moment, j'informe le député de Saint-Laurent que j'ai l'intention de m'en occuper, même s'il appelle cela une ingérence.

M. Forget: Mme le Président, je n'avais pas l'intention de participer à cette discussion, mais puisque le ministre des Affaires sociales revient à la charge sur cette question, je le fais aussi parce que je crois qu'il contribue, par ses propos, à créer une certaine équivoque.

En effet, il ne fait pas de doute que lorsque les problèmes qu'il soulève surviennent, il est de la

responsabilité du ministre des Affaires sociales et de la responsabilité équivalente d'autres ministres, dans d'autres secteurs, d'intervenir. Le problème qui se pose n'est donc pas de savoir s'il doit intervenir ou ne pas intervenir. S'il n'intervient pas, naturellement il ne fait pas son devoir.

Mais il y a bien des façons d'intervenir. Lorsque le ministre des Affaires sociales intervient, les lois que cette Assemblée a adoptées prévoient un certain mode d'intervention et c'est un mode qui tombe sous le sens commun que lorsque l'on n'a plus confiance dans la gestion d'un établissement décentralisé — qu'il s'agisse d'une ville, on a un autre projet de loi devant nous qui en donne une certaine illustration, qu'il s'agisse d'une commission scolaire, qu'il s'agisse d'un centre hospitalier, c'est la même chose — lorsqu'on n'a plus confiance dans la direction de ces organismes, on change la direction des organismes, mais on ne fait pas le travail à leur place, parce qu'il est inconvenant et inapproprié que le ministre devienne un administrateur d'école ou un administrateur municipal ou un administrateur de centre hospitalier. De toute manière, même s'il prétendait le faire, il en sera incapable, puisqu'il ne peut pas être partout à la fois.

Pour ce qui est des façons qui sont prévues dans la loi pour intervenir dans des instances décentralisées lorsqu'elles ne font pas leur devoir, il y a la mise en tutelle. La mise en tutelle a été utilisée abondamment dans le secteur des affaires sociales et cela demeure une solution. Il y a aussi d'autres solutions qui ont été utilisées moins souvent, telles que l'enquête publique, etc., lorsque les faits en cause sont eux-mêmes imprécis. Mais je soutiens encore une fois, Mme le Président, que ce n'est pas du tout la question de savoir si le ministre a une responsabilité ou pas. Il est évident qu'il en a une, mais il doit l'exercer selon ce que les lois prévoient et sans se prendre pour un autre, c'est-à-dire, sans se prendre pour un administrateur d'hôpital, ce qu'il n'est pas, ce qu'il était peut-être, mais il ne l'est plus par définition puisqu'il est maintenant un ministre et il doit se comporter comme tel et non pas faire le travail des autres.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le ministre des Affaires sociales.

M. Lazure: Mme le Président, les remarques du député de Saint-Laurent me font sourire un peu lorsqu'il me dit: Si les administrateurs hospitaliers ne sont pas compétents, il ne s'agit pas d'intervenir, il s'agit soit de les mettre en tutelle ou de les faire destituer par les voies normales. Je me souviens, il n'y a pas si longtemps, que l'ex-ministre des Affaires sociales se faisait accuser par un grand nombre d'administrateurs hospitaliers, y compris l'Association des hôpitaux du Québec, d'ingérence et d'injustice puisqu'il tenait l'ensemble des administrateurs hospitaliers comme imcompétents publiquement quand il les comparait aux administrateurs de l'Ontario. Cela me fait un peu sourire.

Je sais fort bien qu'il y a des mécanismes de tutelle, mais je vous dis encore une fois qu'en ce qui concerne les urgences, il serait assez embêtant de placer en tutelle, dans la région de Montréal, une dizaine d'hôpitaux, comme vous le saviez fort bien à l'époque, tous les deux ou trois jours, qui fermaient leur salle d'urgence. En faisant ceia, ils enfreignaient la loi. Quand il s'agit d'une situation aussi généralisée, je ne pense pas qu'on doive recourir à une mise en tutelle.

Je pense qu'on doit rappeler aux administrateurs hospitaliers qu'il y a des sanctions prévues dans la loi et les règlements. C'est ce que j'ai fait.

M. Shaw: Madam President, I would like to direct a question to the minister of Social Affairs concerning a promise made prior to this election by the previous minister of Social Affairs concerning Lake Shore General Hospital, which leads the province in number of emergency cases received in any given year, to the last six years, which has the highest proportion of bed demand for a hospital in the province of Québec, and has asked for an expansion of its budget of $2 million.

Is this $2 million grant that has been promised by the previous minister of Social Affairs being considered in the supplementary budget?

M. Lazure: Mme le Président, je sais que dans le plan quinquennal des immobilisations, il y a des sommes d'argent prévues pour l'hôpital La-keshore. Je ne peux pas vous donner plus de détails pour le moment, mais je le ferai avec plaisir si vous m'adressez une demande écrite, afin d'avoir plus de détails. Je sais qu'il y a des prévisions dans le plan quinquennal pour l'hôpital La-keshore.

Le Président (Mme Cuerrier): Programme 5, élément 2, adopté? Agriculture. M. le député de Maskinongé.

Agriculture

M. Picotte: Avant de procéder à l'adoption des divers programmes, j'aimerais vous demander une directive. Est-ce qu'il est possible, au tout début, de poser au ministre responsable de l'Agriculture certaines questions d'ordre général, avant l'adoption des programmes et des divers éléments?

Le Président (Mme Cuerrier): C'est une permission que vous demandez au ministre de l'Agriculture?

M. Picotte: A vous, Mme le Président.

Le Président (Mme Cuerrier): A moi?

M. Picotte: Oui, Mme le Président. C'est possible?

Le Président (Mme Cuerrier): Je trouvais cela étrange. Allez.

M. Picotte: Est-ce que je pourrais savoir de la part du ministre de l'Agriculture, concernant surtout le "kidnapping" des terres arables au Québec, s'il a l'intention sous peu de présenter une loi concernant le zonage agricole, et dans quel délai nous promet-il de présenter cette même loi?

M. Garon: Je vous répondrai que, dans le programme du Parti québécois, un des points importants était le zonage agricole. C'est un dossier que j'ai actuellement et que je me propose de voir en entier dans le temps des Fêtes. Vous comprendrez que c'est un dossier complexe. C'est un des points les plus importants du programme du Parti québécois et on entend passer là-dessus le plus rapidement possible. Il serait difficile, à ce moment-ci, de vous donner une date précise.

M. Biron: Mme le Président, avant de passer à cette étude du dossier de l'Agriculture, je voudrais demander au ministre de l'Agriculture — on sait qu'il y a eu des coupures dans certains ministères depuis le 15 novembre — s'il y a eu des coupures dans le budget du ministère de l'Agriculture depuis cette date?

M. Garon: Pas davantage au ministère de l'Agriculture que dans d'autres. C'est-à-dire qu'il n'y a pas eu de coupure particulière au ministère de l'Agriculture. Les voyages à l'étranger sont tous aussi coupés pour ce qui est de l'Agriculture comme pour n'importe quel autre ministère. Les coupures qui ont eu lieu ont été des coupures générales sur des types de dépenses.

M. Biron: Est-ce que c'est possible qu'il y ait eu des coupures très fortes au ministère de l'Agriculture, qui vont empêcher le ministère de l'Agriculture d'aider les fermiers québécois au cours de la prochaine année, quant aux crédits périmés ou autres, pour plusieurs millions de dollars?

M. Garon: Pas que je sache. Je ne crois pas que l'application générale du CT, quant au type de gel auquel on procède, ait eu sur l'agriculture un impact plus particulier ou plus spécifique qu'ailleurs.

M. Biron: Merci. Considérant le très faible budget laissé au ministre de l'Agriculture, est-ce qu'il se peut quand même que ces coupures aient un impact finalement? Ce n'est pas un budget de plusieurs centaines de millions de dollars, c'est un budget de quelques millions de dollars, tout simplement.

M. Parizeau: C'est tout de même $200 millions.

M. Picotte: Mme le Président... M. Roy: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: ... j'aimerais poser une question au ministre de l'Agriculture, étant donné que l'ensemble des crédits concerne l'aide à la production agricole et la commercialisation agricole... Je vais les prendre d'une façon globale et c'est une question globale que je vais poser. Cela ne comporte que des crédits de $7 350 000 additionnels. Il y a eu de nombreuses interventions à l'Assemblée nationale, débats auxquels le Parti québécois avait participé, le député de Saguenay, plus précisément, à l'époque, en commission parlementaire. Des représentations ont été faites au cours de l'été concernant la fameuse politique laitière imposée par la Commission canadienne du lait, qui, comme on le sait, a procédé à la saisie des revenus des agriculteurs dans leur totalité. Des agriculteurs se sont fait saisir la totalité de leur paie pendant trois quinzaines de suite, ils ont été sans revenu. On sait qu'un très grand nombre d'entre eux ont connu et connaissent encore des difficultés considérables.

Le gouvernement provincial, dans les derniers jours de septembre, premiers jours d'octobre, a annoncé, à grand renfort de publicité, qu'il avait décidé d'injecter, j'emploie ses termes, de faire une injection directe — je ne parle pas de vaccin, je parle de capitaux, de dollars — de $25 millions.

M. Garon: $22 millions.

M. Roy: $22 millions. On a parlé de $25 millions, à un moment donné. Disons $22 millions pour venir en aide aux agriculteurs et compenser, en quelque sorte, pour les pertes subies par rapport aux politiques de la Commission canadienne du lait. Evidemment, il y avait un programme de $15 millions ou $16 millions qui devaient être versés en subventions directes; il y avait $8 millions qui devaient contribuer au remboursement des paies saisies, si je me réfère aux déclarations qui ont été faites, mais on n'a jamais eu la déclaration officielle, le document gouvernemental à ce sujet. On s'est basé sur des renseignements qu'on a eus par les media d'information.

Ces $25 millions ont été annoncés et ont fait l'objet de passablement de verbiage de la part de nos ex collègues ministériels au cours de la campagne électorale. Je retrouve dans le budget du ministère de l'Agriculture, dans le budget supplémentaire, $7 350 000. J'aimerais savoir du ministre si le programme, dont la réglementation avait été préparée par l'ancien gouvernement, l'ancien ministre de l'Agriculture, a été modifié ou si on avait tout simplement mis beaucoup de chiffres pour donner une meilleure image et laisser l'impression qu'on aide davantage la classe agricole. J'aimerais que le ministre fasse la lumière là-dessus.

J'aurai, Mme le Président, d'autres questions à poser sur ce sujet.

M. Parizeau: Si vous le permettez, comme il s'agit essentiellement de technique d'inscription ou de présentation financière, je vais d'abord répondre quitte à ce que mon collègue, le ministre de l'Agriculture, complète ces informations. La

première partie... Il y a une tranche du programme annoncé par le précédent gouvernement qui est passée dans un mandat spécial; donc, elle ne paraît pas ici. La deuxième...

M. Roy: Quelle somme?

M. Parizeau: $10 millions. Qui ne sont pas là, mais qui sont déjà passés dans un mandat spécial. La deuxième tranche devait être incorporée dans les crédits de 1977/78, c'est-à-dire à partir du 1er avril et, donc, ne paraît pas dans les crédits supplémentaires jusqu'au 31 mars. C'est essentiellement pour cela que ni la première ni la seconde tranche ne paraissent dans les budgets supplémentaires. Il y en a une partie qui est passée avant et l'autre partie va passer après.

M. Roy: Est-ce qu'on peut savoir, étant donné qu'il y en a une partie qui va...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Beauce-Sud, le député de Maskinongé m'avait demandé la parole. Est-ce sur le même sujet?

M. Picotte: Non, je reviendrai après. C'est sur un autre sujet.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, Mme le Président. J'aimerais savoir, du ministre des Finances ou du ministre de l'Agriculture, si le fait que ces sommes seront prises à même le prochain budget, si les déboursés qui devaient être faits aux agriculteurs d'ici la fin de l'année financière gouvernementale, puisque les politiques de la Commission canadienne du lait, je pense, se terminent le 31 mars, si ma mémoire est bonne, si les cultivateurs, si les agriculteurs du Québec, les producteurs laitiers du Québec pourront bénéficier quand même de ces chèques, de ces montants avant le 31 mars.

M. Parizeau: Non, compte tenu de la façon dont le partage des fonds a été fait, le mandat spécial et ensuite avril, ce n'est qu'au début d'avril qu'ils auraient ces chèques, normalement.

M. Roy: Mme le Président, étant donné que les agriculteurs n'ont reçu à l'heure actuelle qu'un chèque, qu'on leur a dit, que c'était tout simplement un acompte, un chèchèque, comme on l'a appelé durant la campagne électorale, qu'un autre chèque devait suivre éventuellement, j'aimerais savoir s'il y a des crédits qui sont prévus ici, dans les postes budgétaires à l'intérieur du budget supplémentaire, pour faire un autre versement aux agriculteurs du Québec bientôt. Je ne parle pas du montant de la deuxième tranche qui serait prévue dans le budget de 1977/78, mais étant donné qu'il y a eu $10 millions de mandat spécial, étant donné qu'il y a actuellement $7 350 000, mettons $6 350 000 qui doivent être affectés partiellement à cela, j'aimerais savoir quand le gouvernement pré- voit faire parvenir le deuxième chèque aux producteurs laitiers.

M. Parizeau: Je répète ce que je disais, Mme le Président. Les $7 350 000 qui se trouvent ici, à toutes fins pratiques, c'est du paiement de factures déjà passées. Ce n'est pas de l'argent qu'on prévoit affecter dans les trois mois qui viennent à quoi que ce soit. Vous comprenez, les travaux mécanisés sur les fermes, ce sont des factures; le drainage souterrain, ce sont des factures, ce sont des travaux déjà faits. Alors, quand vous voyez $7 350 000, vous ne demandez pas si c'est la politique du gouvernement du Parti québécois pour les trois prochains mois, c'est la liquidation des factures du dernier gouvernement. Ceci étant dit...

M. Picotte: Mme le Président...

M. Roy: J'aimerais quand même apporter une précision. Je ne veux pas parler du tout du programme...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Oui.

Le Président (Mme Cuerrier): Quand est arrivé le moment de donner de nouveau la parole, c'est le député de Maskinongé qui l'avait demandée depuis longtemps.

M. Picotte: Ma question...

M. Parizeau: Si vous voulez me donner un moment, je vais en avoir pour trente secondes. Ceci étant dit, je répète ce que je disais avant. Le deuxième chèque ne peut intervenir, compte tenu du budget des crédits supplémentaires tels qu'ils sont présentés aujourd'hui, qu'au moment où il avait été prévu — en tout état de cause, c'est comme cela qu'il est prévu pour le moment — au début d'avril.

M. Picotte: A la suite d'une demande de l'UPA, une demande formelle de l'UPA concernant une loi sur la stabilisation du revenu agricole...

M. Roy: Mme le Président, là on change de sujet, la question de l'aide à la politique laitière n'est pas complètement vidée. Avant qu'on aborde un autre sujet, il me semble qu'on devrait vider cette question. J'aurais une question, probablement, à poser là-dessus.

Le Président (Mme Cuerrier): Vous reviendrez tantôt, M. le député de Beauce-Sud, j'ai déjà donné la parole au député de Maskinongé.

M. Picotte: D'ailleurs, cela se rejoint très bien. A la suite d'une demande formelle de l'UPA concernant la stabilisation du revenu agricole, loi d'ailleurs votée par le précédent gouvernement, est-ce que le ministre a l'intention d'incorporer à

cette loi la production laitière, tel que demandé par l'UPA, surtout à la suite des déboires qu'ont connus les producteurs laitiers depuis quelques mois? Est-ce qu'il prévoit incorporer à cette loi la production laitière?

M. Garon: Pas immédiatement. Je suis au courant de la demande de l'UPA, que j'ai rencontrée pendant deux jours à Montréal. Il n'est pas question de faire une stabilisation des revenus dans le domaine laitier pour l'instant.

M. Picotte: Est-ce que cela veut dire que...

M. Garon: Cela fait partie de ce qui a été étudié.

M. Picotte: Est-ce que cela veut dire que si éventuellement il y avait encore pénurie du côté de la production laitière, le ministère arriverait avec des crédits additionnels, comme l'a dit le député de Beauce-Sud tantôt concernant cette question, avec des millions additionnels et des "candy", comme l'auraient aussi dit certains députés, ou si vous avez l'intention quand même, d'ici peu, d'incorporer à cette loi la production laitière? Ou allez-vous procéder toujours par subventions? A ce moment-là, vous ne seriez pas différents des autres gouvernements. Vous ne seriez pas un vrai gouvernement, vous seriez exactement comme tout le monde? C'est cela?

M. Garon: Je pense que ce n'est pas là le problème. L'affaire des $22 millions est arrivée à cause d'une circonstance exceptionnelle du gouvernement fédéral que vous défendez si bien où on a décidé de réduire d'une façon draconienne les quotas dans la province de Québec. C'était une mesure d'urgence visant un problème particulier créé par le gouvernement fédéral.

M. Picotte: Est-ce uniquement dans la province de Québec? Question additionnelle. Vous parlez de la province de Québec, mais est-ce uniquement dans la province de Québec que les quotas ont été réduits ou si c'est partout au Canada? A ce moment-là, que préconisez-vous d'apporter pour que ce soit mieux qu'ailleurs? C'est surtout cela, le sens de ma question. Je ne vous demande pas ce qui se fait partout ailleurs, ni ce qui se passe, mais je vous demande: Qu'allez-vous apporter de mieux, vous, comme vrai gouvernement?

M. Garon: II va y avoir des négociations, éventuellement, sur les prochains quotas pour l'année qui s'en vient. Actuellement, j'ai rencontré des gens de l'UPA, les deux fédérations à ce sujet. A ce point de vue, on est en discussion pour les montants qui sont demandés au point de vue des quotas dans les prochaines négociations.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, Mme le Président. En ce qui me concerne, je n'ai pas l'intention de jouer au ping-pong, Québec-Ottawa, sur cette question. On en a passablement entendu parler au cours des derniers mois, ici, à l'Assemblée nationale. Les producteurs laitiers du Québec sont en face d'un problème et il est unique dans la province de Québec. Il n'existe pas dans les autres provinces. Il est unique dans la province de Québec, à l'heure actuelle. Je veux savoir, en termes bien clairs, bien précis, si le programme provincial de $22 millions, qui a été annoncé pour venir en aide aux producteurs laitiers du Québec, sera continué par le nouveau gouvernement. C'est ce que je veux savoir. Il y a eu une annonce de faite. Il y a eu deux programmes distincts à l'intérieur de ce programme de $22 millions. Je veux savoir s'il est maintenu, s'il est suspendu ou s'il sera reporté à plus tard. Mais je veux savoir exactement a quoi m'en tenir.

M. Parizeau: II est maintenu, comme il avait été annoncé.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Lotbinière.

M. Biron: II est maintenu, mais on a annoncé $22 millions au total, dont $16 millions devaient être payés immédiatement. Vous nous avez parlé tout à l'heure de $10 millions. Je pense que les producteurs laitiers ont raison, maintenant, de demander les $6 millions additionnels qui avaient été donnés. On a parlé toujours de $16 millions. C'est important pour les producteurs laitiers du Québec, surtout quand on songe — et c'est un peu ridicule aussi — que, tout dernièrement, on nous annonçait qu'il y avait une pénurie de lait et qu'on était obligé d'augmenter le prix de la livre de beurre parce qu'on manquait de lait. Il y a des politiques là-dessus qu'il faudrait certainement que le ministre de l'Agriculture revoie. Ma question est: Qu'est-ce qu'on a fait maintenant avec les $6 millions additionnels qu'on devait payer immédiatement aux producteurs laitiers du Québec? On devait payer $16 millions.

M. Parizeau: Ce que je comprends, c'est que ce sont des ajustements qui devaient être faits en fin de période. C'est dans ce sens qu'ils intervenaient dans le budget suivant, c'est-à-dire 1977/78, au départ de l'année. C'est dans ce sens que je répondais tout à l'heure; Oui, le programme est maintenu comme il avait été établi.

M. Biron: Je pense qu'on a $6 millions de différence, quand même. On a annoncé un programme de $22 millions; $16 millions devaient être payés immédiatement et $6 millions plus tard. Les $6 millions plus tard, je comprends qu'ils aillent au 1er avril 1977, mais il manque quand même $6 millions aux producteurs laitiers du Québec.

M. Parizeau: Le mandat spécial, tel qu'établi pour refléter les déclarations qui ont été faites à cette époque — il y a eu des déclarations publiques par l'ancien gouvernement qui se sont reflétées par un mandat spécial prévoyant des paiements — comportait essentiellement $10 millions.

Que dans certaines déclarations publiques ils soient allés au-delà, il faudrait que je me trouve dans la situation très bizarre d'avoir à défendre ce que des gens qui sont antérieurs à nous ont pu annoncer et ce qu'ils ont pu faire. Il reste que le mandat spécial, tel qu'établi avant que nous prenions le pouvoir, était de $10 millions, indépendamment des déclarations qui ont pu être faites dans le public. D'autre part, le reste était payable en 1977/78. Si on nous demande si ce qui avait été prévu en 1977/78 sera payé, on répond oui.

M. Biron: Par contre, en terminant sur ce sujet, on a annoncé $16 millions immédiatement à nos producteurs, quand on a des mandats spéciaux pour seulement $10 millions.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Bellechasse.

M. Goulet: Sur les questions...

M. Garon: Les quotas ont été réduits de façon draconienne. Après cela, il y a eu des rajustements dans les quotas. A ce moment-là, l'indemnité ne peut pas être la même, parce que les pénalités au point de vue des quotas ont été plus faibles qu'elles ne l'avaient été initialement. Il y a eu des rajustements dans les quotas après.

M. Roy: Serait-ce possible que le ministère de l'Agriculture, le ministre de l'Agriculture nous remettre une copie intégrale de cette politique qui avait été préparée par le gouvernement, de façon à ce que nous sachions clairement à quoi nous en tenir relativement à ces deux programmes d'aide spéciale que le gouvernement provincial avait décidé d'accorder aux producteurs laitiers? Pourrait-on avoir une copie du document, de l'arrêté en conseil et des documents gouvernementaux concernant ce programme? Le ministre peut-il nous garantir qu'il nous remettra ces documents?

M. Garon: Oui. M. Roy: Merci.

Le Président (Mme Cuerrier): Une question du député de Bellechasse. Une de celui de Montmagny-L'Islet et une du député de Jean-Talon.

M. Goulet: Merci, Mme le Président. Dans le même sens que le député de Beauce-Sud et de mon chef, on parle de $10 millions. Durant la campagne électorale, ce que le Parti libéral avait promis c'était $22 millions. Je l'en remercie pour les agriculteurs, $22 millions globalement. Ces $22 millions représentaient $1 par $2.35 de perte pour les agriculteurs. Vous nous arrivez avec $10 millions et $6 autres millions. On est rendu à 85 cents par $2.35. Le $1.50 qu'il manque par $2.35 de perte, allez-vous, à un certain moment, le prévoir dans un budget, l'an prochain, en 1977 ou 1978?

Avez-vous quelque chose de prévu pour cela? Il manquera encore $1.50 par $2.35 de perte. On remboursera 85 cents. Ce sont des chiffres qui ont couru durant la campagne et certains candidats péquistes ont dit qu'ils avaient la solution. Je ne sais pas où ils l'ont prise, mais j'aimerais l'avoir ce soir pour la donner aux agriculteurs, surtout de mon comté.

M. Parizeau: Répondre maintenant c'est préjuger de ce qui viendra dans le budget général, le premier que l'on présentera. Je doute beaucoup personnellement qu'on ait la solution indépendamment de toute politique que le gouvernement fédéral pourrait adopter. Il y aura toujours une part d'ajustement par rapport à la politique du gouvernement fédéral.

Compte tenu de ce qui s'est passé l'été dernier, compte tenu des pertes réelles qui ont été encourues, je pense que vous avez raison de les souligner, il est évident que dans le prochain budget, il faut d'une part, pour répondre à ce que disait le député de Beauce-Sud, respecter les promesses qui ont été faites et, d'autre part, voir si l'on fait quelque chose par-dessus. Cela est peut-être un peu prématuré de répondre à cela aujourd'hui.

L'important c'est de souligner à nouveau, comme je le disais tout à l'heure, que les promesses qui ont été faites dans les budgets 1977/78 quant à ces pertes seront maintenues. Il faudra voir si l'on fera quelque chose par-dessus cela. Toujours sujet à un nouveau changement dans la politique fédérale, bien sûr.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: J'aimerais savoir, du ministre des Finances, comme du ministre de l'Agriculture, s'ils ont l'intention de continuer de réclamer avec force une compensation du gouvernement fédéral afin de pallier de façon raisonnable ces pertes volumineuses que les producteurs laitiers du Québec ont subies au cours de 1976. Ils devront continuer de les subir au cours des premiers mois de l'année qui vient à la suite des mesures excessivement restrictives de la Commission canadienne du lait dans la politique de réduction dans les contingentements de volumes de lait produits au Québec comme dans les autres provinces canadiennes.

Deuxièmement, on a parlé tout à l'heure d'application d'une politique de stabilisation des prix de produits à l'industrie laitière. J'ai apprécié que le ministre ne veuille s'engager immédiatement. Nous savons tous que présentement dans le domaine de l'industrie laitière il y a une forme de stabilisation qui n'est pas de la nature de celle que l'on voudrait appliquer ici au Québec à toutes les productions agricoles. Mais il y a tout de même une forme de stabilisation, de contribution du gouvernement fédéral. S'il fallait instaurer chez nous un véritable programme de stabilisation de prix en ce qui touche l'industrie laitière, il faudrait d'abord être assuré que le gouvernement cana-

dien maintienne des formules compensatoires à l'endroit de cette industrie. Si on allait instaurer une politique de stabilisation sans avoir la certitude ou la conviction que le gouvernement canadien continue dans ses politiques d'aide à l'industrie laitière, nous perdrions sur deux plans.

Nous obligerions les producteurs laitiers du Québec à contribuer personnellement à un fonds de stabilisation complété par la quote-part de l'Etat et nous perdrions ce que nous avons acquis de peine et de misère après de grandes luttes du gouvernement central, du gouvernement d'Ottawa. J'apprécie bien que le ministre de l'Agriculture ne veuille pas trop plonger rapidement dans un programme de stabilisation de l'industrie laitière parce qu'il y a là des éléments qu'on ne retrouve pas dans d'autres productions agricoles chez nous.

Maintenant, en ce qui a trait aux engagements que l'ancien gouvernement a pris, j'ai eu l'occasion de participer à des débats au Conseil des ministres et j'en ai discuté avec mon collègue de l'Agriculture. Le principe qui avait été retenu en matière de remise était celui de verser aux producteurs laitiers du Québec, dans un premier temps, une somme de $10 millions qui était obtenue par mandat spécial. Dans une deuxième opération, il devait y avoir, à la fin de l'année financière de la Commission canadienne du lait, une première remise dès la fin de l'année, au 31 mars ou dans les jours qui suivraient, et une autre remise de $6 millions. Enfin, à la suite de la statistique établie par la Commission canadienne du lait sur la production effectivement faite au cours de l'année financière, on devait déterminer de quelle façon les derniers $6 millions pouvaient être appliqués s'il y avait lieu de les appliquer à ce moment, compte tenu des productions, des dépassements de quotas, du maintien de la production dans une proportion établie à 95% et, enfin, devant tenir compte également des pénalités qui avaient été payées par certains producteurs à la suite des dépassements des nouveaux quotas réduits.

M. Garon: ...quatre.

M. Giasson: ...dix, six...

M. Lessard: Vingt-deux, d'accord.

M. Giasson: Je veux dire que les cultivateurs devraient toucher immédiatement $10 millions, une autre tranche de $6 millions dès que le prochain budget sera accepté et l'ajustement final basé sur les productions totales au Québec au cours de l'année financière.

M. Parizeau: Parfaitement d'accord.

M. Lessard: Mme le Président, je voudrais répondre très brièvement quand même à la première question qui a été posée par le député de Montmagny-L'Islet concernant la décision que le nouveau gouvernement devrait prendre vis-à-vis du gouvernement fédéral au sujet des politiques laitières de lait industriel. Je pense, Mme le Président, et je suis intervenu à maintes reprises, comme député de l'Opposition et critique de l'Opposition à ce sujet, en ce qui me concerne en tout cas, que nous allons intervenir de façon beaucoup plus forte, de façon beaucoup plus intensive — je ne doute pas à ce sujet de la décision du ministre de l'Agriculture actuellement — que vous l'avez fait auprès du gouvernement fédéral pour faire en sorte qu'il modifie ses politiques laitières.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Concernant le mandat spécial, je n'ai malheureusement pas la copie qui a été déposée par le greffier de l'Assemblée nationale concernant les montants engagés pour le mandat spécial. Le ministre des Finances sait-il combien il y en avait d'engagés sur les $10 millions? Le chèque qui a été envoyé couvrait-il l'ensemble des $10 millions ou une partie seulement des $10 millions? Si vous n'avez pas la réponse, je comprendrai que c'est assez technique d'avoir un détail comme cela. Peut-être, si vous l'avez, cela répondrait-il à plusieurs préoccupations qui ont été soulevées dans ce débat, à savoir si le montant total de $10 millions a été effectivement payé ou si un autre chèque doit être prévu à même ces $10 millions. A-t-il été divisé en tranches selon les informations sur le niveau de la production ou si la première tranche couvrait l'ensemble des $10 millions et si elle a été effectivement payée? Si vous n'avez pas la réponse aujourd'hui, je pense bien que cela se comprendrait.

M. Parizeau: Non, je ne pourrais vraiment pas dire quelle partie des $10 millions du mandat spécial a donné lieu effectivement à l'émission de chèques. Je peux me renseigner cependant et rapporter le renseignement.

M. Garneau: Cela répondrait sans doute à plusieurs des préoccupations qui ont été soulevées.

M. Parizeau: Oui, c'est possible, bien sûr.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Bellechasse et, après, le député de Maskinongé.

M. Goulet: Merci. A la suite des propos du ministre des Transports, ce que les producteurs agricoles demandent du gouvernement d'en face n'est pas de renégocier des quotas, c'est de faire en sorte que le fédéral respecte les quotas déjà négociés.

Au Québec, cette année, les producteurs agricoles ont été pénalisés pour 20%, alors qu'ils ont eu un surplus de production de 8%. Ce ne sont pas des gros chiffres, mais cela dit beaucoup. Ce qu'on vous demande, c'est d'être fermes face à Ottawa, pas de négocier des quotas. Pour l'instant, qu'Ottawa respecte les quotas qui ont été négociés antérieurement et ce serait déjà suffisant.

M. Garon: Vous connaissez la raison d'agir d'Ottawa. Ils ne nous demandent pas la permission pour faire leurs choses, habituellement.

Je vais vous dire une chose, parce qu'il y a différentes questions qui m'ont été posées à plusieurs reprises. Ma façon, depuis le 25 novembre, de travailler a été de rencontrer différents organismes agricoles eux-mêmes. J'ai déjà rencontré l'UPA une couple de journées et je la rencontre encore au début de janvier. A ce moment, je préfère, plutôt que de dire quelles sont les politiques immédiates, rencontrer les gens dans les secteurs concernés pour penser avec eux et établir avec eux ces politiques. Plutôt que des pensées en serre chaude, avoir une politique d'écoute pour pouvoir discuter avec eux. Je vous dis que, jusque à maintenant, plusieurs personnes m'ont dit, à plusieurs reprises: C'est la première fois qu'un ministre de l'Agriculture fait cela, venir nous rencontrer comme cela pour parler avec nous de nos problèmes.

M. Goulet: M. le ministre, les chiffres que je vous donne, ce ne sont pas des chiffres que je suis allé chercher après le 25 novembre. Je suis allé les chercher avec les agriculteurs bien avant le 25 novembre et c'est eux, dans leur milieu, qui me les ont donnés et qui m'ont fait ces revendications. Il me semble que vous auriez dû commencer bien avant le 25 novembre, parce qu'avant le 15 novembre vous sembliez, tout le monde, avoir les solutions. Ce sont les solutions que je suis allé chercher auprès des agriculteurs avant le 15 novembre.

M. Garon: Je suis d'accord avec vous, excepté que, pour la prochaine politique laitière, j'ai rencontré les deux fédérations de producteurs de lait nature et de lait de transformation, pour avoir une politique de concertation. J'ai même rencontré les gens du domaine de l'industrie laitière pour avoir une politique de concertation, non pas une politique de division, non pas une politique où il y a deux ou trois groupes qui parlent un langage différent, mais une politique unifiée et d'ensemble, une politique uniforme. C'est à cela que je me suis attaché depuis le 25 novembre et c'est dans cette direction que je veux continuer à me diriger pour qu'il y ait une politique d'ensemble et non pas une politique complètement divisée et en chicane dans le domaine de l'agriculture. C'est comme cela que je pense que l'agriculture dans le Québec va se développer.

M. Picotte: Mme le Président, puisque le ministre parle des deux productions, il est sans doute au courant...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Maskinongé, est-ce que c'est une réponse à la question?

M. Lessard: Mme le Président, je dois souligner ceci en réponse au député qui a posé la question tout à l'heure. Ce qu'il nous a dit, c'est exactement ce que nous avons tenté de faire quand nous étions dans l'Opposition. Nous allons continuer de le faire au pouvoir et je suis convaincu, avec la concertation dont nous parle le ministre de l'Agriculture, que nous allons essayer, avec les agriculteurs québécois, avec les producteurs de lait industriel de négocier avec Ottawa. Comme vous le disait le ministre de l'Agriculture, dans les circonstances actuelles, comme nous l'avons vu, d'ailleurs, avec l'ancien ministre de l'Agriculture, M. Drummond, ce n'est pas le gouvernement du Québec qui décide des quotas; c'est le gouvernement d'Ottawa. Cela vous démontre que, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas la responsabilité de nos affaires, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas les instruments politiques pour négocier nos marchés, on sera toujours poignés avec le gouvernement d'Ottawa quoi que vous puissiez en dire, M. le député.

M. Burns: Mme le Président, j'ai une question de règlement. Je ne veux pas brimer qui que ce soit à l'Assemblée nationale. Je ne veux pas réduire le droit de parole de qui que ce soit, mais je pense que nous avons déjà décidé que nous étions rendus à examiner les programmes les uns après les autres. Je ne suis pas sûr qu'actuellement nous ne sommes pas en train de nous répandre un peu partout. Je n'ai pas d'objection, sauf qu'il y a des gens qui vont venir me demander quand finit la session. Cela va venir, je vous en assure, beaucoup plus vite que vous ne le pensez, ces demandes.

Je demande simplement la collaboration des députés d'Opposition pour nous en tenir aux différents programmes, tel que nous l'avons décidé après les discussions d'ordre général que nous avons eues la semaine dernière. Je vous fais cette remarque, Mme le Président, en vous demandant, si possible, sans brimer le droit de parole de qui que ce soit, de nous en tenir à l'examen des programmes les uns après les autres; autrement, je vous avoue qu'on va encore être ici à Pâques en train de discuter de la mini-session.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Mme le Président, sur la question de règlement soulevée par le leader gouvernemental, si je comprends bien l'étude du budget supplémentaire, nous sommes au programme 1, qui est l'aide à la production agricole. S'il y a un endroit où les députés de cette Chambre peuvent poser des questions concernant les politiques gouvernementales d'aide à la production agricole, c'est bien là.

Je ferai remarquer au leader du gouvernement que ce débat, de toute façon, est limité à huit heures.

M. Burns: Je le sais très bien.

M. Garneau: Si les députés — personnellement, je n'ai pas abusé, je crois que j'ai posé sim-

plement une question sur ce programme — de l'Opposition veulent poser des questions, je ne peux rien y faire et lui non plus, parce que je pense que c'est leur droit strict. C'est cela que je voulais souligner.

M. Burns: Comprenez bien le sens de mon intervention. Je me demandais, avec le ministre des Finances, depuis quelque temps, si on n'était pas en train de se répandre un peu partout. C'est beaucoup plus une remarque que je fais qu'un rappel à l'ordre. D'accord? Répandez-vous si vous voulez.

M. Garneau: ... plus tard au ministre de l'Agriculture.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Maskinongé.

M. Picotte: En ce qui me concerne, une dernière question d'ordre général. Je sais que le lait se transporte dans de gros camions-citernes et je comprends que le ministre des Transports vienne à la rescousse du ministre de l'Agriculture. Quand même, je voudrais lui poser une question, puisqu'il a parlé de deux productions laitières, soit la production de lait industriel et la production de lait nature. Il est sans doute au courant que c'est peut-être une source de problèmes spéciaux, surtout du côté des quotas, qu'il y ait deux productions laitières.

Est-ce que le ministre de l'Agriculture est d'avis, ou encore, est-ce qu'il pourrait me mentionner s'il est d'accord qu'on devrait avoir uniquement une production laitière au Québec et s'il a l'intention de faire des démarches de ce côté, afin qu'il n'y ait qu'une production laitière, pour une meilleure unification de production laitière, du côté agricole?

M. Garon: Je remarque que vous n'écoutez pas la Semaine verte, parce que j'en ai justement parlé. Dans le domaine du lait, j'ai dit aux cultivateurs qu'il faudrait qu'ils en arrivent à une entente entre eux, autrement le gouvernement va prendre position.

Dans une première étape, je souhaite que les producteurs des deux fédérations forment une entente, s'entendent entre eux. S'ils ne peuvent pas le faire, pour une raison ou l'autre, à ce moment-là, le ministère de l'Agriculture et le gouvernement prendront position.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Bellechasse.

M. Goulet: Mme le Président, suite aux propos de l'honorable ministre des Transports, il semble que la vraie solution serait la séparation du Québec pour régler le problème du lait. Je lui dis ceci. Nous consommons au Québec, actuellement, le gras que nous produisons. Mais le problème est qu'à toutes les huit livres de poudre de lait que nous produisons, nous en consommons seulement trois livres. Il en reste donc cinq livres.

Si, dans une famille de dix enfants, nous ne sommes pas capables de consommer plus de trois livres de poudre, qu'allons-nous faire lorsque nous serons seulement dans le Québec? Qu'allons-nous faire avec les cinq livres? Je pense que votre solution ne tient pas du tout. En tout cas, moi je n'embarque pas.

M. Lessard: Demandez-vous donc combien on importe de beurre et combien on importe de fromage. Demandez donc, justement au député de Beauce-Sud, vous allez peut-être avoir la réponse.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: J'aurais une dernière question touchant l'industrie laitière chez nous. Je voudrais d'abord indiquer au ministre que, sur un dossier particulier, en industrie laitière au Québec, j'ai rencontré une résistance assez farouche de la part de fonctionnaires du ministère de l'Agriculture. C'était le dossier touchant la possibilité de permettre un certain nombre de moyens, aux petits producteurs, d'être en mesure de continuer de faire la livraison de leur lait dans les contenants qu'on appelle les bidons.

Il s'agit, dans la plupart des cas, de fermes que je ne dirais pas marginales, mais qui sont au bord de la marginalité, qui sont exploitées par des producteurs laitiers, des agriculteurs dont l'âge, sans être avancé, est plutôt moyen et qui, souven-tefois, n'ont pas de relève derrière eux mais qui voudraient encore, pour quelques années, continuer d'exploiter les fermes laitières qu'ils possèdent. Ils sont placés dans un contexte ou devant une volonté très évidente, depuis quelques années du moins, d'aller vers une concentration des usines laitières, de très grandes usines qui posent des exigences et des conditions que ces cultivateurs de ferme moyenne ne peuvent accepter parce qu'elles nécessitent des investissements assez lourds compte tenu de la période au cours de laquelle ces gens devront continuer d'agir.

Or, j'ai dans ma région, plus précisément à Montmagny, une coopérative laitière qui a continué, ces dernières années — et c'est la seule au Québec — à recevoir le produit de ces petits producteurs qui livraient le lait ou la crème en bidons. Des directives restrictives provenant du ministère de l'Agriculture les avaient avisés que dorénavant le permis ne serait pas renouvelé, permis qui était sous le contrôle de la Régie des marchés agricoles. La cause, du moins celle qu'on nous a indiquée pour le refus de renouvellement du permis, découlait de conditions qui étaient posées par le service de l'inspection des produits laitiers qui voulait obliger l'entreprise ou l'usine en question à faire certains investissements afin de répondre, de façon plus convenable, aux conditions de salubrité des lieux, d'hygiène et de qualité de produit.

Ces petits producteurs, qu'on retrouve dans

les comtés de Kamouraska, Montmagny-L'Islet, Bellechasse, Dorchester, Beauce, il y en a même du comté de Lotbinière, voudraient que les fonctionnaires du ministère de l'Agriculture révisent le dossier et qu'on revoie la capacité de permettre à cette usine de continuer de fonctionner pour quelques années encore, tant et aussi longtemps que le volume produit sur ces fermes le justifierait.

J'inviterais le ministre de l'Agriculture, au cours des prochaines semaines ou au cours des prochains mois — parce que là, la production à l'usine s'est arrêtée sur un ordre venant de son ministère— à examiner sérieusement ce dossier afin que le permis d'exploitation soit renouvelé. Même s'il fallait apporter certaines réparations soit à la machinerie ou à l'usine elle-même, il faudrait voir la possibilité que le ministère de l'Agriculture accorde des subventions qui pourraient être de l'ordre de $50 000, pas plus que cela, pour permettre à environ 200 petits ou moyens producteurs laitiers de continuer. Si on ne le fait pas, ces gens vont être devant un problème de continuité de vie.

Ils peuvent difficilement s'intégrer dans le monde industriel, ils peuvent difficilement se trouver des emplois en dehors de l'expérience qu'ils ont acquise. Je crois qu'on ferait aussi oeuvre utile. Je n'ai pas de peine à croire que des députés comme celui de Beauce-Sud, comme celui de Saguenay, qui un jour ont voulu examiner la situation, pourraient m'appuyer car ils comprennent, je pense, la situation vécue par ces gens.

M. Garon: ...souligné le problème. Je sais que le député de Saguenay et le député de Beauce-Sud sont venus me dire que vous aviez déjà défendu ces problèmes. Ecrivez-moi donc un mot à ce sujet, M. le député de Beauce-Sud et vous aussi le député de Montmagny-L'Islet, puis on va regarder cela.

Le Président: Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Mme le Président, c'est un problème extrêmement important; c'est un problème qui en plus d'être un problème économique devient un problème social, comme l'a dit le député de Montmagny-L'Islet. J'ai été surpris de la demande qu'il vient de faire de l'appuyer. Je ne veux pas parler au nom de mon collègue, le député de Saguenay, mais il doit probablement avoir la même surprise.

M. Lessard: Parlez-en!

M. Roy: Pendant deux ans, Mme le Président, pendant deux ans à l'Assemblée nationale, nous avons plaidé la cause de ces gens et jamais on n'a pu entendre un mot du côté ministériel, un mot de la part de quelqu'un. Je suis en train de me demander si le député de Montmagny-L'Islet, mon excellent ami d'ailleurs, n'a pas été dans mon bureau et que je n'aurais pas oublié mon vieux dossier.

Je suis en train de me poser la question. Je suis très heureux que le débat soit soulevé devant l'Assemblée nationale parce que ce n'est pas encore réglé. Il y a encore quelque chose à faire, mais je trouve quand même curieux que des gens qui, pendant qu'ils étaient au pouvoir, pendant qu'ils avaient la responsabilité et pendant qu'ils contrôlaient les décisions provinciales, n'ont pas trouvé le moyen de décider semblent vouloir aujourd'hui s'en remettre aux fonctionnaires. Je pense que, quand on a élu un gouvernement, c'est un gouvernement qui doit gouverner. Or, M. le Président, je m'excuse, Mme le Président — étant un un habitué de l'Assemblée nationale, vous comprenez que quand on chasse le naturel il revient au galop, je m'en excuse, c'est une question d'habitude — j'aimerais dire ceci aux membres de cette Assemblée. Le problème soulevé par le député de Montmagny-L'Islet est un problème réel qui mérite qu'une attention particulière soit portée. Je suis heureux de constater qu'avec le député de Saguenay nous avons pu faire des débats de ce côté et d'apprendre que le gouvernement se penchera sur cette question et verra à faire en sorte d'aviser les usines laitières pour qu'elles continuent à recevoir les produits de ces petits producteurs, de ces producteurs qui, quand même, sont en mesure de gagner leur vie à l'heure actuelle, je dirai même sans subventions gouvernementales additionnelles à condition qu'on leur permette tout simplement de continuer de livrer tous leurs produits. Je compte que le nouveau ministre de l'Agriculture, fort de l'appui de son collègue le député de Saguenay, saura donner suite à l'excellente recommandation, d'ailleurs, faite par le député de Montmagny-L'Islet et que nous avions faite il y a deux ans ici à cette Assemblée.

M. Giasson: Mme le Président, je viens d'entendre des propos qui veulent indiquer à cette Chambre que je n'aurais pas suivi le dossier en cause. De mon siège de député, suite à de nombreuses interventions que j'ai faites d'abord auprès de mes deux ex-collègues MM. Drummond et Toupin, suite à des rencontres et à des discussions que j'ai eues avec des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture, je suis parvenu à faire reporter à une année la décision d'annuler le permis de la Fabrique laitière de Montmagny.

Il avait été décidé, surtout au niveau des fonctionnaires, qu'elle devait cesser de fonctionner à la fin de l'année 1975. A la suite de discussions, de pressions et voulant les convaincre du bien-fondé d'apporter une tolérance, de reporter la décision d'enlever le permis, on a obtenu que l'usine de Montmagny fonctionne une autre année, ce qui n'était pas prévu dans les recommandations de hauts fonctionnaires vis-à-vis du ministre de l'Agriculture d'alors.

Je ne suis peut-être pas intervenu à l'Assemblée nationale, mais je considère, je l'avoue, avoir fait un travail qui n'apparaissait pas dans le public, mais qui a fait en sorte que cette usine a certainement fonctionné une année de plus que toute prévision de certains fonctionnaires au ministère de l'Agriculture.

Le Président (Mme Cuerrier): Programme 3, élément 2, adopté. Elément 3, adopté.

M. Picotte: Mme le Président...

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: ... concernant les travaux mécanisés, est-ce que le ministre de l'Agriculture pourrait me mentionner, aujourd'hui, à l'Assemblée nationale... C'est vous qui en faites du patronage...

M. Lessard: Plus de patronage.

M. Picotte: ... avec le ministère de l'Industrie et du Commerce et les candidats défaits. Vous savez, j'ai posé la question au premier ministre, d'ailleurs, ce matin.

Une Voix: Très bien.

M. Picotte: Concernant les travaux mécanisés, est-ce que le ministre de l'Agriculture pourrait me mentionner s'il veut immédiatement s'organiser pour que soit révisée cette politique, surtout depuis qu'on a incité les agriculteurs à agrandir leur ferme, c'est-à-dire à acheter des fermes voisines et à avoir deux ou trois fermes? L'agriculteur a droit à quarante heures de travaux mécanisés, selon les normes. Lorsqu'il a acheté des terres avoisinant la sienne, il a toujours droit à ces mêmes quarante heures, sauf, évidemment, s'il utilise l'autofinancement, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Le ministre s'engage-t-il à réviser cette politique dans les plus brefs délais, afin que ces gens ne soient pas pénalisés à l'avenir?

M. Garon: J'ai demandé, dès les premiers jours où j'ai été au ministère, d'avoir des rapports sur la politique des travaux mécanisés. Maintenant, sur cet aspect particulier, je ne peux pas vous donner une réponse immédiatement, mais j'ai demandé surtout que cela se fasse en l'absence de patronage, que cela se fasse d'une façon équitable pour tout le monde, que cela soit pour le bénéfice de l'agriculture, d'une façon égale pour tout le monde.

M. Picotte: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Elément 3, adopté?

M. Picotte: Adopté.

Le Président (Mme Cuerrier): Programme 5, élément 1.

M. Picotte: J'aurais une question.

Le Président (Mme Cuerrier): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Vu qu'il est question de producteurs d'oeufs, on pourrait parler de FEDCO.

Concernant les nombreuses saisies qui ont été faites surtout dans la Mauricie, concernant FEDCO et certains producteurs d'oeufs, est-ce que le ministre de l'Agriculture pourrait me dire si, à l'avenir, il a l'intention d'appliquer, à la rigueur et à la lettre, la loi de FEDCO concernant les producteurs d'oeufs ou s'il entend demander à plus de 50% des producteurs d'oeufs apparemment, selon les gens que j'ai consultés, qui contestent déjà la loi de FEDCO, de se réunir pour discuter d'une nouvelle politique future?

Le ministre entend-il tout simplement appliquer à la lettre la loi de FEDCO ou s'il entend la réviser et présenter une nouvelle loi dans le futur ici à l'Assemblée nationale?

M. Garon: A ce moment-ci je ne me prononcerai pas sur ces questions, pour une raison très simple. C'est qu'il y a eu des rencontres dans le bureau du juge en chef Deschênes de Montréal et il doit y avoir des causes types qui doivent procéder, je ne suis pas certain si c'est dans la semaine du 10 janvier ou du 17 janvier.

J'avais des rendez-vous avec des fédérations et j'ai préféré rester complètement en dehors du débat pendant que les causes procèdent devant les tribunaux.

Le Président (Mme Cuerrier): Programme 5, élément 1, adopté.

M. Garon: Mais, par ailleurs, je peux vous dire qu'auparavant...

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Maskinongé et le député de Mégantic-Compton.

M. Giasson: En matière de commercialisation des produits agricoles, j'aimerais savoir du nouveau ministre quelle est son opinion sur l'application de certains plans conjoints. A-t-il l'intention de reconnaître ou d'instaurer d'autorité des plans conjoints ou des offices de producteurs sans tenir compte de la volonté de ceux qui sont directement intéressés dans leur production? Autrement dit, est-il prêt, d'autorité, à instaurer au Québec certains plans conjoints sans aller, par le jeu du référendum, chez les producteurs qui sont impliqués dans différents plans conjoints qui ont fait l'actualité récemment au Québec? On a même déjà eu cette possibilité de voir les producteurs intéressés se prononcer au référendum parce qu'on sent des demandes d'imposer des plans conjoints dans des champs de production agricole sans respecter la volonté des producteurs directement impliqués.

Le ministre des Transports...

M. Garon: Je suis au courant de cette question parce que j'en ai discuté avec des gens.

M. Lessard: ...matin.

M. Garon: Voyez-vous, c'est une question plus complexe que cela parce que vous n'êtes pas sans savoir que les cartes sont vendues en disant qu'on est favorable au plan conjoint.

Alors, il y a une question qui... J'ai été saisi du problème. J'en ai discuté avec les gens concernés, mais il est trop tôt pour que je me prononce sur cette question. Le député de Saguenay va me donner un coup de main.

Le Président (Mme Cuerrier): Le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Mme le Président,...

Le Président (Mme Cuerrier): Mégantic-Compton.

M. Grenier: ...seulement une petite question. Le ministre qui va faire sa déclaration ministérielle demain matin — on l'attend à l'ouverture — pourrait-il me dire si cela va comprendre une partie qui va traiter de nos petits abattoirs? Dans le document que vous avez eu de l'association, de l'exécutif, le paragraphe B de la page 6 est extrêmement important pour la survie de ces gens. Allez-vous nous en parler demain matin, M. le ministre, ou pouvez-vous nous en dire un mot ce soir?

M. Garon: Demain matin.

Le Président (Mme Cuerrier): Programme 5, adopté?

M. Garon: Je pense que c'est demain après-midi.

Le Président (Mme Cuerrier): Programme 5, adopté? Adopté.

M. Burns: Mme le Président, j'ai l'honneur de vous suggérer de faire rapport au président de l'Assemblée nationale que nous n'avons pas terminé nos travaux et que nous espérons siéger et les terminer lors d'une séance subséquente.

Le Président (Mme Cuerrier): J'ai l'honneur de vous faire part que la commission des crédits n'a pas terminé ses travaux et qu'elle demande la permission de siéger à une séance subséquente.

Le Vice-Président: Quand siégera-t-elle? M. Burns: A une prochaine séance.

Le Vice-Président: A une prochaine séance ou à une séance subséquente.

M. Burns: C'est cela.

Le Vice-Président: Pardon, M. le leader, ce rapport est-il adopté?

M. Lavoie: II n'y a pas de rapport à adopter.

Le Vice-Président: Non, d'acoord. M. le leader du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, je m'apprête à faire la motion traditionnelle d'ajournement à demain, dix heures. Je peux indiquer peut-être à nos collègues ce qui sera le menu de la journée de demain. Immédiatement après la période de questions, je demanderai à nos collègues d'en face d'être assez compréhensifs relativement à l'absence d'un certain nombre de ministres parce qu'il y aura Conseil des ministres demain, réunion que nous avons retardée à onze heures pour qu'ils puissent participer à la période de questions et aux travaux préliminaires, aux affaires courantes. Par la suite, évidemment, il n'y aura en Chambre, à peu près, que les ministres qui seront conce nés par les problèmes que nous discuterons.

Je suggérerai, demain, à la Chambre, de continuer et de terminer l'examen des crédits supplémentaires. Par la suite, on pourra s'attaquer aux projets de loi qui sont inscrits au nom du ministre de la Fonction publique, au nom du ministre — pas nécessairement dans cet ordre — des Affaires sociales, au nom, également, si c'est possible, du ministre des Finances. Ces projets sont inscrits actuellement en deuxième lecture.

Je suggérerai également à la Chambre de recevoir le rapport de la commission des Affaires municipales qui a siégé relativement aux projets de loi no 47 et no 78, et je suggérerai également à la Chambre d'adopter les troisièmes lectures que vous retrouverez au feuilleton demain matin. C'est globalement, le projet que je formule dans la journée. Si tout va bien, nous continuerons l'examen du projet de loi 82 qui en est rendu toujours au stade de la motion de report à un mois. Si tout va bien, nous pourrions peut-être nous en aller chez nous demain soir. Sinon, peut-être jeudi, peut-être vendredi, peut-être la semaine prochaine, en tout cas, peu importe. Je vous donne à peu près le portrait tel que je le vois avec la collaboration des députés de l'Opposition.

Le Président (M. Cuerrier): M. le leader de l'Opposition.

M. Lavoie: Mme le Président, à chaque jour suffit sa peine et actuellement nous avons le programme de demain, et demain vous nous donnerez le programme d'après-demain.

M. Burns: C'est cela.

Pour ce soir, M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 23 h 4)

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