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(Dix heures sept minutes)
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs !
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
M. LEVESQUE: M. le Président, il y a en appendice, ce matin, la
Loi modifiant la loi de la Législature et la loi de l'Exécutif,
afin que les députés puissent en prendre connaissance. Je
suggère que nous procédions à la première lecture
de consentement unanime.
M. ROY: Je ne peux pas donner mon consentement pour que la Chambre ait
le consentement unanime, ce matin, sur ce projet de loi, parce qu'en vertu de
mon privilège de député, il s'agit d'une loi qui nous
touche personnellement. J'estime qu'il aurait été normal que
chaque parti puisse en avoir une copie avant, afin que nous sachions à
quoi nous en tenir avant d'être appelés à voter en
première lecture.
M. MORIN: Nous ne donnons pas notre consentement non plus, M. le
Président.
M. LEVESQUE: Vous resterez dans l'ignorance de la loi.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles.
L'honorable ministre de l'Agriculture.
Aide aux éleveurs de bovins
M. TOUPIN: M. le Président, j'ai remis cette déclaration,
il y a quelques minutes, aux partis de l'Opposition. Je n'ai pas l'intention de
la lire. Je voudrais seulement la commenter rapidement.
Cette déclaration ministérielle concerne l'aide que le
gouvernement s'apprête à apporter aux éleveurs de bovins du
Québec. La situation actuelle, tout le monde la connaît, est
difficile. Non seulement il y eut diminution des prix du bovin, mais il y eut
également augmentation des coûts de production. Dans ce cadre,
nous avons rencontré les agriculteurs et nous nous sommes entendus avec
eux sur un certain nombre de principes, notamment sur celui d'apporter une aide
aux éleveurs de bovins et sur celui également de
reconnaître le principe que les travail- leurs agricoles, en termes
d'objectif, devaient s'orienter vers la parité des revenus avec les
travailleurs spécialisés.
La déclaration ministérielle contient une participation
gouvernementale de l'ordre de $22,850,000 pour l'aide aux bovins du
Québec. Cette aide s'appliquera à six catégories de
producteurs, notamment les producteurs spécialisés dans le
domaine de l'élevage du bovin de boucherie, les producteurs
spécialisés dans l'élevage des bovins laitiers, les
producteurs spécialisés dans l'élevage du bovin dit F-l et
les éleveurs spécialisés également dans les parcs
d'engraissement et également les éleveurs laitiers qui se sont
orientés au cours des dernières années vers la finition
d'un certain nombre ou d'une certaine quantité de bovins laitiers sur
les fermes.
Cette déclaration contient... Ce serait trop long et probablement
aussi trop fastidieux d'expliquer les chiffres qu'elle contient, mais nous
expliquons comment le gouvernement interviendra pour chacun des groupes de
producteurs.
Si nous avons agi ainsi et si nous avons pris un peu plus de temps que
prévu pour faire cette déclaration, c'est que nous voulions
c'était très important pour le ministère
être équitables pour tous les producteurs du Québec. Il ne
s'agissait pas pour nous de favoriser un groupe plutôt qu'un autre. Il
fallait placer tous les producteurs sur un pied d'égalité et
c'est la raison qui nous amène à déclarer, ce matin, que
les sommes disponibles seront de $22,850,000. Mais je dois ajouter qu'une
partie de ces sommes d'argent proviennent du budget régulier du
ministère, c'est-à-dire qu'on ne les retrouve pas dans le budget
supplémentaire, soit $750,000 et, également, $2,600,000 que
j'avais annoncés en septembre pour aider les éleveurs de bovins
du Québec.
Voilà la participation gouvernementale dans ce problème
des éleveurs de bovins, tant spécialisés que laitiers, au
Québec.
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.
M. MORIN: M. le Président, j'aurais souhaité que le
ministre nous fasse part de cette déclaration ministérielle
quelques heures à tout le moins avant de la faire, comme c'est la
coutume en cette Chambre. Nous avons eu cette déclaration il y a
exactement six minutes et je dois dire que je n'ai pas eu le temps d'en prendre
connaissance.
UNE VOIX: Cela n'aurait rien changé.
M. MORIN: Je me rends compte qu'on reconnaît enfin qu'il existe
une situation de crise dans l'industrie du boeuf de boucherie et que cette...
Est-ce que j'ai la parole, M. le Président?
LE PRESIDENT: S'il vous plait, messieurs! Messieurs, s'il vous
plaît!
M. MORIN: M. le Président, le gouvernement avait reconnu le
bien-fondé de la demande des producteurs en annonçant une somme
de $15 millions qui serait répartie par l'UPA entre les producteurs de
bovin de boucherie et de bovin laitier, en raison de l'effondrement des prix
dans ce domaine. A l'époque où cette subvention a
été annoncée, nous avons dit que nous étions
d'accord mais que cela nous paraissait insuffisant pour répondre aux
besoins. Nous allons examiner les subventions pour chacune des
catégories d'éleveurs, ceux qu'on appelle les éleveurs
naisseurs, les éleveurs finisseurs, aussi bien les producteurs laitiers
que ceux qui ont des parcs d'engraissement ou encore les finisseurs de 25
bouvillons et plus. Nous allons les examiner de très près et nous
allons aussi, selon notre habitude, consulter les milieux
intéressés avant de vous faire part d'une réaction plus
élaborée.
Ce sont en effet les agriculteurs, les principaux
intéressés, qui sont les mieux placés pour nous dire si la
subvention est suffisante et, en second lieu, si la répartition qui en
est faite par le document de ce matin est satisfaisante. Au cours des prochains
jours, M. le Président, nous aurons l'occasion de commenter longuement
le document qui vient d'être déposé par le ministre de
l'Agriculture.
Encore une fois, M. le Président, je souhaiterais que lorsque le
ministre fait des déclarations de cette importance devant la Chambre,
déclarations qui sont hautement techniques et qui comportent plus de
deux dizaines de pages, le ministre nous fasse parvenir copie au moins la
veille. Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce-Sud. S'il vous
plaît, messieurs!
M. ROY: M. le Président, comme mon collègue, je viens de
prendre tout simplement connaissance de ce document assez volumineux que vient
de nous faire parvenir le ministre de l'Agriculture, document qui
comporte...
UNE VOIX: Est-ce que vous êtes au courant?
M. ROY: Est-ce qu'on vous dérange? DES VOIX: Oui.
M. ROY: Voulez-vous les inviter à cesser de grogner, ce matin, M.
le Président, de façon que nos travaux se déroulent dans
l'ordre et dans l'harmonie et qu'on permette aux membres de s'exprimer
calmement et librement.
Je disais donc, au ministre de l'Agriculture, ce matin...
LE PRESIDENT: Messieurs, s'il vous plaît!
M. ROY: Je disais donc que le ministre de l'Agriculture, ce matin, vient
de nous annoncer un montant additionnel, suite aux $15 millions qui avaient
été annoncés, pour porter cette mesure d'assistance
à $22,850,000.
A première vue, après avoir fait un examen assez rapide du
document, j'ai cru déceler qu'un nombre assez restreint d'agriculteurs
pourront se prévaloir de cette aide supplémentaire. Il ne semble
pas que tous les producteurs concernés, par exemple ceux qui sont dans
l'industrie laitière et qui font de l'élevage, pourront
bénéficier de cette subvention.
De toute façon, M. le Président, je ne veux pas accuser le
ministre, mais, à première vue, il semble y avoir certaines
restrictions dans ce document.
M.MERCIER: Lis-le donc, après cela tu le commenteras.
LE PRESIDENT: Messieurs, s'il vous plaît!
Est-ce que je pourrais demander votre collaboration? Il reste quelques
jours, j'espère, avant la prorogation.
DES VOIX: Nous ne sommes pas pressés.
LE PRESIDENT: Pressez-vous, s'il vous plaît!
Ce n'est pas facile, vous savez, de présider dans de telles
circonstances. Je ne le sais pas, préférez-vous que je suspende
jusqu'à onze heures?
M. ROY: Merci, M. le Président, de votre intervention. Etant
donné que je vous ai promis de ne pas me fâcher, j'apprécie
le geste que vous venez de poser.
Le gouvernement, par cette mesure, évidemment, nous devons le
reconnaître, permettra aux agriculteurs du Québec, au plus grand
nombre possible et, je le souhaiterais, à tous les agriculteurs
concernés de bénéficier de cette subvention. Mais je me
dois d'ajouter, à ce moment-ci, que cette subvention ne fait que
prolonger la situation en permettant aux agriculteurs de respirer un peu plus
longtemps, mais que le problème demeure entier. Il n'y a absolument rien
de réglé à ce niveau. On sait que nous avons
demandé une commission parlementaire afin que nous puissions examiner la
question du cartel de la viande qui exploite les producteurs au moment de la
mise en marché et qui exploite les consommateurs en d'autres temps.
Actuellement, cette subvention est prise dans les poches des
contribuables du Québec, c'est-à-dire qu'on prend de l'argent
dans les goussets des contribuables, une catégorie de victimes qui sont
les consommateurs, pour dédommager d'autres victimes de la situation,
qui sont les producteurs. Mais cela ne règle absolument rien. Le cartel
de la viande, les trusts, les compagnies multinationales ne sont aucunement
dérangés. Ils sont en toute quiétude, derrière les
politiques gouvernementales.
J'ai hâte, en ce qui nous concerne, M. le Président, que le
ministère de l'Agriculture et le gouvernement prennent leurs
responsabilités dans ce domaine et prennent toutes les dispositions de
façon à examiner le problème dans son entier et à
connaître la situation telle qu'elle paraît.
Le ministre, ce matin, évidemment, dit ceci: Toutefois, nous
n'avons pu nous rallier à la proposition qui avait été
faite à l'endroit de tout bouvillon vendu aux abattoirs "Approuvé
Québec" ou "Approuvé Canada". On sait qu'il y a un
problème fondamental à ce niveau et très rares sont les
abattoirs au Québec qui peuvent mettre leurs produits approuvés
Canada sur le marché. On sait que toutes les grandes chaînes
d'alimentation, qui contrôlent plus de 50 p.c. du marché de la
consommation, s'approvisionnent à ce niveau, fermant la porte à
tous les abattoirs et à tous les organismes qui ont le permis
d'étiqueter leur viande "Approuvé Québec". M. le
Président, je dis que le gouvernement a raté une belle occasion
l'automne dernier, étant donné qu'il y avait eu des
manifestations dans tout le Québec, sur tout le territoire du
Québec, étant donné que l'opinion publique avait
été fortement sensibilisée sur la question. C'était
le temps comme jamais pour le gouvernement d'examiner la question dans son
ensemble et regarder réellement où est le mal, ou lieu de piger
dans les poches d'une catégorie de victimes pour dédommager
d'autres victimes.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Johnson.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, si je comprends bien le
ministre ce matin, il règle une partie du problème, il apporte
une solution à une partie du problème en ce qui regarde les
bovins, l'industrie de la viande. Est-ce que le ministre pourrait nous dire
s'il a aussi l'intention d'apporter un correctif pour les producteurs d'oeufs
et les producteurs de chair de volaille, qui ont eux aussi des instances de
faites auprès du ministre?
M. TOUPIN: M. le Président, cela peut venir...
LE PRESIDENT: Un instant là, je ne voudrais pas créer des
précédents. On n'en est pas encore à la période des
questions.
M. TOUPIN: Je suis d'accord.
LE PRESIDENT: S'il y a consentement unanime ou si vous voulez
rétablir...
DES VOIX: Non, non!
LE PRESIDENT: Bon! Vous pourrez poser votre question à la
période des questions.
M. BELLEMARE (Johnson): Je vais manquer mes autres questions.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
DÉPÔT DE DOCUMENTS
Situation économique en 1974/75
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer deux documents donnant un aperçu de la situation
économique au Québec en 1974/75.
LE PRESIDENT: Le ministre des Finances.
Rapport du Vérificateur
M. GARNEAU: M. le Président, conformément à la Loi
de l'administration financière je désire déposer le
rapport du Vérificateur qui a fait l'analyse des comptes relatifs
à l'administration du vérificateur général.
M. LEVESQUE: M. le Président...
LE PRESIDENT: Oui, le leader parlementaire.
Affaires intergouvernementales
M. LEVESQUE: ... tel que je l'avais mentionné lors de
l'étude des crédits du ministère des Affaires
intergouvemementales, j'ai l'honneur de déposer les deux rapports
annuels, c'est-à-dire 1972/73 et 1973/74, rapports annuels du
ministère des Affaires intergouvernementales.
LE PRESIDENT: Questions orales des députés.
QUESTIONS DES DÉPUTÉS LE PRESIDENT: Le
député de Lafontaine.
Coût des Jeux olympiques
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au premier
ministre. Hier, le premier ministre n'avait pas voulu s'aventurer sur le
coût supplémentaire des Jeux olympiques. Ce matin nous apprenons
qu'un officiel de la ville de Montréal confirmait une augmentation telle
qu'une aide du gouvernement provincial était nécessaire pour
faire face au coût accru de la construction pour les Jeux olympiques.
Est-ce que le premier ministre peut nous dire, ce matin, à quel montant
il estime cette augmentation puisque ces chiffres-là ont
été discutés entre lui-même et le maire Drapeau en
fin de semaine?
M. BOURASSA: Non, il n'y a pas eu de demande d'aide gouvernementale, M.
le Prési-
dent, parce qu'il y a des éléments qui restent encore
variables, c'est-à-dire les coupures qui sont possibles. On me dit qu'il
y avait des coupures possibles, de même que la croissance des revenus. On
sait que, dans le cas de la loterie olympique, on prévoyait $60 millions
et ça va être $200 millions, c'est-à-dire qu'au lieu de $60
millions de revenu ça va être $200 millions de revenu si mes
informations sont justes. Je crois que j'ai vérifié ça
avant-hier. Donc, la croissance des revenus et la possibilité de
coupures font qu'il est prématuré de parler, pour l'instant,
d'aide du gouvernement provincial pour la réalisation des Jeux
olympiques.
M. LEGER: M. le Président, le premier ministre a donc le tour de
tourner autour du pot! Je ne lui ai pas dit qu'il y avait une demande de M.
Drapeau pour une aide gouvernementale. Je lui ai dit qu'un officiel de la ville
de Montréal disait que ça prendrait l'aide du gouvernement
provincial pour faire face au coût. Je ne lui ai pas dit que le maire
Drapeau le lui avait demandé, je lui ai dit que le maire Drapeau a
discuté avec lui des coûts actuels. Alors, est-ce qu'il peut
répondre à la question au lieu de patiner?
Le plus grand patineur qu'il y a au Québec cet le premier
ministre Bourassa. Mais dans les olympiques, vous ne l'avez pas.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEGER: Puis-je demander au premier ministre s'il est prêt
à confirmer le prix actuel des Jeux olympiques puisqu'il est prêt
à nous dire que les revenus de la Loto vont passer de $60 à $200
millions? C'est une vérité. Peut-il nous dire le prix et,
deuxièmement, est-il prêt à déposer ce rapport
immédiatement, aujourd'hui ou demain, pour que l'Assemblée
nationale soit au courant, autant des revenus que des dépenses?
M. BOURASSA: Parce que je ne réponds pas ou que je ne tombe pas
dans les pièges du député, je me fais faire toutes sortes
d'accusations de la part du député. Le député me
demande si c'est un officiel qui dit: Nous aurons besoin d'une aide du
gouvernement provincial. C'est la question du député. Je
réponds que je n'ai pas eu, de la part des autorités
compétentes de la ville, une telle demande et je vais plus loin, pour
essayer de satisfaire la curiosité du député. J'aurais pu
simplement m'en tenir à cela pour répondre directement et
précisément à sa question, comme quoi les autorités
compétentes ne m'ont pas fait une demande d'aide. Sa question
était qu'un officiel avait dit qu'il ferait une demande d'aide. Je suis
allé plus loin que cela. Je lui ai donné des informations
additionnelles révélant qu'il y aurait des revenus beaucoup plus
importants que prévu et que, d'autre part, il y aurait des coupures
possibles. Il n'y a pas de réponse plus complète que cela, M. le
Président.
M. LEGER: Ha! Ha! Question supplémentaire.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LEGER: Le premier ministre peut-il nous dire, maintenant qu'il
connaît la situation il la prévoyait mais il ne l'a pas
dit...
LE PRESIDENT: Question, s'il vous plaît.
M. LEGER: M. le Président, est-ce que je peux expliquer
tranquillement... C'est assez difficile d'avoir une réponse, il faut que
ce soit le plus clair possible. Le premier ministre peut-il nous dire qu'il va
convoquer la commission parlementaire pour entendre les représentants de
Montréal nous dire exactement les coûts réels prévus
de construction des Jeux olympiques et les revenus réels prévus
pour financer les Jeux olympiques, ainsi que la différence que le
gouvernement provincial aura probablement à débourser. Et
à cette commission parlementaire, est-ce que le premier ministre
pourrait entrevoir, s'il l'accepte, qu'on ait des éclaircissements sur
les contrats sans soumission à Montréal, sur le contrat de
télévision avec ABC où on a obtenu moins qu'on
avait...
M. MERCIER: Au feuilleton... LE PRESIDENT: Un instant.
M. LEGER: ... sur le village olympique, sur les travaux
généraux du village olympique et sur le vélodrome qui a
été construit trop tard et à un coût plus cher.
Est-ce qu'on pourrait éclair-cir tout cela de façon que le
gouvernement et le Parlement puissent aller allègrement vers les Jeux
olympiques, connaissant combien cela coûte.
Tout le monde, peut-être, serait heureux d'aller ouvertement aux
Jeux olympiques sachant combien cela coûte.
M. BOURASSA: M. le Président, je comprends que le ton du
député peut être un peu déplaisant, mais le fond de
ses questions est justifié.
M. LEGER: C'est clair.
M. BOURASSA: Non, non! Je dis que le fond de ses questions est
justifié devant les nouvelles qui paraissent, ces jours-ci, même
si son ton est plus ou moins agréable. Je ne sais pas si le
député de Maisonneuve partage mon point de vue.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. LEGER: Vous allez oublier complètement ma question.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. BOURASSA: J'ai fait prévenir les autorités municipales
qu'elles auraient à venir donner des explications en commission
parlementaire. Il s'agira de choisir le moment, mais, étant donné
la hausse des coûts, je les ai fait prévenir qu'elles devraient
venir répondre aux questions des membres de l'Assemblée
nationale.
LE PRESIDENT: Dernière question additionnelle.
M. LEGER: Est-ce que le premier ministre peut me dire si cela va
être dans les quelques semaines après le jour de l'an, au mois de
janvier?
Le premier ministre fait signe que oui, pour le journal des
Débats.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.
Implication du député de Taillon
par la Commission sur
le crime organisé
M. BURNS: M. le Président, étant donné les
conclusions de la Commission d'enquête sur le crime organisé, ma
question s'adresse au premier ministre. A l'endroit du député de
Taillon, est-ce que le premier ministre a l'intention de demander au
député de Taillon de démissionner?
M. BOURASSA: M. le Président, je me serais attendu à un
mot de regret de la part du député de Maisonneuve pour les
accusations qu'il a faites pour la mémoire de M. Laporte. M. Laporte a
été complètement blanchi.
M. BURNS: M. le Président, une question de privilège.
Une question de privilège, M. le Président. Le premier
ministre non seulement ne répond pas à ma question, ce qui est
dans son habitude, mais m'accuse de choses dont, je pense, il n'est pas en
droit de m'accuser. Ce que j'ai demandé, M. le Président, tout au
long de cette affaire et c'est là que ma question de
privilège se situe c'est que la lumière soit faite. La
commission d'enquête, je pense, a fait la lumière à sa
façon. Ce n'est pas plus que cela. Je ne voudrais pas que le premier
ministre m'embarque dans un débat qui est tout autre que ce que je lui
demande. Tout simplement, à l'endroit du député de
Taillon, qu'est-ce qu'il a l'intention de faire? A-t-il l'intention de lui
demander de démissionner?
M. BOURASSA: M. le Président, je signalais simplement l'absence
d'un mot de regret, étant donné les moments très
pénibles qu'a dû supporter la famille de M. Laporte pendant
très longtemps. C'est quand même le député de
Maisonneuve qui a lancé ces accusations qui se sont
révélées non fondées.
M. BURNS: Je n'ai pas porté d'accusation; j'ai donné des
faits confirmés par la commission d'enquête.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. BOURASSA: Le député de Maisonneuve sait que la personne
était décédée quand même et que, dans un cas
comme celui-là, il aurait dû agir avec beaucoup plus de prudence
qu'il ne l'a fait. C'est mon opinion, et cela a été
confirmé par les conclusions de la commission d'enquête.
M. BURNS: Voulez-vous répondre à ma question
maintenant?
M. BOURASSA: M. le Président, nous allons prendre connaissance du
rapport. Comme l'a dit le ministre de la Justice, hier, il n'y a pas eu de
recommandations au sujet du député de Taillon. Nous allons
prendre connaissance du rapport. Le député de Taillon est
élu par ses électeurs. Evidemment, il a sa présence au
sein du caucus, sa présence au sein du parti, mais il est élu par
ses électeurs. Nous allons prendre connaissance du rapport et nous
aviserons.
M. BURNS: Une question additionnelle, M. le Président. Etant
donné les conclusions de ce même rapport à l'endroit de M.
René Gagnon, est-ce que le premier ministre a l'intention de prendre les
mesures nécessaires pour que M. René Gagnon quitte la Fonction
publique?
M. BOURASSA: C'est déjà fait, M. le Président.
M. BURNS: Depuis quand?
M. BIENVENUE: Quelques mois.
M. BURNS: Depuis quand? Depuis quand?
M. BOURASSA: M. René Gagnon nous a envoyé une lettre de
démission.
M. BURNS: Quand? Depuis quand? M. BOURASSA: Bien...
M. BIENVENUE: Je vais répondre à la question à la
place du premier ministre.
M. BURNS: Je ne dis pas qu'il est encore dans le cabinet du ministre de
l'Immigration, je sais que cela fait longtemps qu'il l'a quitté.
M. BIENVENUE: Est-ce que je peux répondre à la question?
Je réponds à la question: II y a quelques mois, le M. Gagnon en
question a envoyé sa lettre de démission à la Fonction
publique. Je n'ai pas la lettre devant moi, mais je pourrai l'apporter avec
plaisir en tout temps.
M. BURNS: D'accord.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
Malartic Hygrade Gold Mines
M. SAMSON: M. le Président, j'aurais aimé poser une
question à l'honorable ministre des Institutions financières. Je
pense qu'il vient de sortir. Je la poserai au premier ministre. Il s'agit d'une
question qui a été posée hier et qui intéresse
particulièrement le comté de Rouyn-Noranda. Elle a
été posée par l'honorable député de Saguenay
et je l'en remercie pour l'avoir fait. Elle concernait le problème qui a
été soulevé par la Malartic Hygrade Gold Mines.
Je voudrais demander au premier ministre s'il accepterait, suite aux
demandes nombreuses faites par la Malartic Hygrade Gold Mines et aux
différentes informations qui ont été données au
ministre des Institutions financières, compte tenu du fait que le
ministre des Institutions financières semble ne pas vouloir tenir
d'enquête sérieuse sur cette question, de décréter
une enquête publique sur le cas de la Commission des valeurs
mobilières du Québec. Selon pour l'information du premier
ministre, M. le Président, je pense que c'est important que je le lui
souligne le président de la Malartic Hygrade, M. Gérard
Paquet, un enquêteur du ministère, lui aurait mentionné que
M. Raymond Proulx, de la Commission des valeurs mobilières, aurait
confessé avoir tenté d'obliger la Malartic Hygrade de vendre
à la compagnie Kanflo.
Je demande au premier ministre s'il accepterait de demander une
enquête publique dans ce cas-là.
M. BOURASSA: Je vais en discuter avec le ministre, M. le
Président.
M. SAMSON: Et est-ce que le premier ministre...
LE PRESIDENT: J'aurais une remarque à faire. Je n'ai pas
d'objection à ce que la question soit posée, mais il ne faudrait
pas oublier... Je ne pense pas qu'elle respecte les critères de notre
règlement parce qu'il s'agit uniquement d'un cas particulier, d'une
compagnie en particulier. Il ne faudrait pas oublier qu'il n'est pas permis
à la période des questions de discuter le cas... C'est une
compagnie, c'est une personne morale, mais c'est un seul cas. A moins que vous
ne formuliez votre question autrement...
M. SAMSON: Oui, M. le Président, peut-être que vous allez
la comprendre mieux si je vous dis que ce qui m'a amené à poser
cette question, c'est qu'il semble, d'après les informations que nous
avons, y avoir nettement conflit d'intérêts. Ce qui amène
la demande d'enquête publique, ce n'est pas la question d'une compagnie
en particulier, mais il faut partir de ce cas pour expliquer que s'il y a des
irrégularités à la Commission des valeurs
mobilières, le seul moyen de le savoir, c'est pas une enquête
publique.
Les enquêtes en coulisses ne semblent pas donner satisfaction, et
comme c'est une mine qui est située dans le comté de
Rouyn-Noranda, cela m'intéresse particulièrement. Je demande donc
au premier ministre d'insister pour qu'il y ait enquête publique dans ce
cas.
M. BOURASSA: J'en prends avis.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Johnson.
Condamnation de M. Dell'Aniello,
président de la Régie de la
langue
française, pour n'avoir pas payé
ses impôts
M. BELLEMARE (Johnson): Ma question s'adresse à l'honorable
premier ministre. Est-ce que l'honorable premier ministre croit vraiment que M.
Dell'Aniello donne des garanties d'intégrité nécessaires
pour remplir le poste aussi prestigieux et délicat que celui de
président de la Régie de la langue française?
M. BOURASSA: M. le Président, M. Dell'Aniello est un
fonctionnaire parmi beaucoup d'autres. Je ne sais pas s'il y a des
précédents dans le cas des fonctionnaires qui ne paient pas les
impôts, mais je suis d'accord avec le député de Johnson que
le poste occupé par M. Dell'Aniello est très important. J'ai pris
connaissance hier de sa condamnation pour ne pas avoir payé
d'impôt. Alors, avec le ministre responsable, le député de
Marguerite-Bourgeoys, nous allons examiner les implications de cette
condamnation.
M. BELLEMARE (Johnson): Une question supplémentaire, M. le
Président. Je trouve anormal qu'un homme qui n'a pas payé ses
impôts au montant de $6,624.15, soit condamné à seulement
$5,800. Quant à celui qui n'a pas payé ses impôts et qui
aurait dû les payer, je demande au premier ministre si c'est son
intention de vérifier auprès du ministre du Revenu pour savoir le
pourquoi d'une pareille situation.
M. BOURASSA: C'est une condamnation, je ne sais pas si c'est une amende
s'ajoutant au montant dû.
M. LEVESQUE: Oui, qui s'ajoute.
M. BOURASSA: Je ne suis pas au courant des détails des causes
fiscales, mais il est possible que ce soit une amende qui s'ajoute au montant
dû.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Revenu.
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, le
député de Johnson devrait savoir ou je le lui dis
qu'une entente existe entre le ministère du Revenu du Canada et le
ministère du Revenu du Québec, afin d'éviter de tracasser
le même contribuable ou les mêmes corporations au niveau des
impôts, étant donné que nous avons une loi
québécoise à nous. L'entente veut que, quand l'un ou
l'autre trouve des revenus non déclarés ou intente une poursuite
à la suite du jugement qui est pris, le ministère qui n'a pas
introduit une procédure fait son avis de cotisation en fonction de sa
propre loi.
C'est notre cas quand le fédéral agit avant nous et c'est
le cas quand nous agissons avant lui. Les jugements que nous avons eus,
jusqu'à maintenant, et les rapports de notre entente avec le
fédéral nous prouvent que nous avons eu rarement à faire
une deuxième enquête. Les pénalités ont
été imposées en vertu des lois par les tribunaux.
Quelque individu que ce soit qui est pris par le fisc
québécois ou fédéral subit un jugement et nous nous
fions à la structure judiciaire de notre pays et de la province. Les
gens sont traités avec justice et équité autant par le
ministère du Revenu du Québec que par celui du gouvernement
fédéral.
M. BELLBMARE (Johnson): M. le Président, une question
supplémentaire à l'honorable ministre. C'est que je crois qu'il
n'a pas lu le jugement du juge Watson. C'est le juge Watson lui-même qui
dit que "cela coûte moins cher, au Québec, de tenter
d'échapper aux lois de l'impôt".
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, il s'agit purement
d'une opinion personnelle d'un type qui siège, qui est juge. Je l'ai
lue, contrairement à ce que pense le député de Johnson,
qui pourrait, lui, avoir une opinion personnelle qui ne refléterait pas
la réalité.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
Ile d'Anticosti
M. LESSARD: M. le Président, ma question concerne l'île
d'Anticosti et fait suite à la réponse que me donnait le ministre
des Travaux publics, hier, concernant les droits de pêche de la
Consol.
Etant donné certaines ambiguïtés, est-ce que le
ministre des Travaux publics pourrait, aujourd'hui, rétablir les faits,
s'il y a lieu, ou expliciter sa réponse, s'il y a lieu, étant
donné qu'il semble que des droits auraient été
concédés à la Consol?
Le ministre accepterait-il de déposer l'entente entre le
gouvernement du Québec et la compagnie?
M. MAILLOUX: M. le Président, je pense que la réponse que
le ministre des Travaux publics a donnée lundi est entière,
complète et sans ambiguïté. J'ai affirmé que le
montant de $23,700,000 n'était attaché d'aucune condition quant
aux droits de pêche, quant aux droits sous-marins et quant aux droits
miniers.
Si l'on se réfère à la réponse que j'ai
donnée, je pense avoir terminé en disant que quant à la
sollicitation qu'avait faite Consol Bathurst au sujet des réservations
qu'elle avait déjà acceptées pour les années
subséquentes, j'ai dit, dans ma réponse, qu'il appartenait,
après la signature du contrat par le ministère des Travaux
publics, à Consol Bathurst, d'aller rencontrer et je l'ai
mentionné le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la
Pêche qui, lui, devrait étudier si les engagements qu'avait pris
Consol à l'endroit de certaines personnes devraient être
respectés.
Il appartenait à Consol de plaider devant ce ministère. A
ce moment-là, le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche
était présent et aurait pu répondre.
Je voudrais ajouter ceci: II est bien sûr que, dans les
négociations qui se sont poursuivies pendant plusieurs mois, Consol a
demandé beaucoup plus de millions que le gouvernement voulait en offrir.
Il est bien sûr que Consol voulait conserver les droits sur des
recherches sous-marines à l'île d'Anticosti. Il est bien sûr
qu'elle voulait obtenir les privilèges que semblait vouloir lui
consentir le gouvernement fédéral: des baux sur le territoire de
pêche, sur la rivière Jupiter, pour vingt ans. Je me rappelle
qu'au conseil des ministres, c'est le ministre du Tourisme, de la Chasse et de
la Pêche qui a insisté afin que le contrat ne soit grevé
d'aucune hypothèque quant aux droits de pêche.
Est-ce qu'il y a eu, par la suite, de la part de la Consol, avec le
ministre titulaire du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, une entente
pour une période de quinze jours ou une chose semblable? Je pense que la
question devrait être posée au titulaire du ministère. Les
informations que j'ai sont tellement vagues que je pense que M. Gariépy,
évidemment, avec qui j'avais parlé entre deux portes, au
Concorde, n'a pas voulu induire personne en erreur, ni moi non plus, mais c'est
une entente sectorielle qui a pu être conclue par la suite. Quant au
contrat, que je pourrai d'ailleurs déposer, en aucune façon il
n'est grevé d'aucune condition.
M. LESSARD: M. le Président, je poserai ma question au ministre
du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jean.
Conflit des étudiants
M. VEILLEUX: M. le Président, ma question s'adresse au ministre
de l'Education. On sait que la semaine passée, vendredi passé, il
y a eu entente entre le comité des neuf des étudiants
et le ministère de l'Education où un document a
été signé. Le ministre pourrait-il nous mettre au courant
de la teneur de ce document qui a été signé entre le
ministère et les représentants des étudiants?
M. CLOUTIER: M. le Président, je remercie le député
de Saint-Jean qui me permet d'apporter quelques précisions. Dans
l'évolution de toute crise, il y a des moments plus favorables que
d'autres pour en arriver à des accords.
Depuis le début de ce malheureux conflit, j'ai toujours
indiqué qu'à mon avis, si l'on changeait les principes du
programme de prêts-bourses, si l'on dissociait les prêts des
bourses, par exemple, il me paraissait possible d'abolir la contribution des
parents pour ce qui est de la fraction prêt, et d'envisager la
possibilité d'abolir la contribution des parents pour ce qui est de la
fraction bourse.
Je l'ai dit publiquement à maintes reprises, je l'ai
répété dans cette Assemblée et j'en ai
également fait part aux étudiants lors d'une rencontre que j'ai
eue avec eux.
Vendredi dernier, j'annonçais un plan de rentrée en classe
dont j'ai fait état dans cette Assemblée. En même temps,
j'émettais un communiqué où je revenais sur cette
ouverture dont je viens de parler. J'en lis uniquement deux paragraphes: "Mais
étant donné les implications sociales et financières de
l'abolition de la contribution des parents, M. Cloutier demande au
comité spécial d'analyser, en priorité, la
possibilité de dissocier la question des prêts de celle des
bourses en ce qui a trait à la contribution des parents. Cependant,
lorsqu'il est question de prêts, M. Cloutier croit qu'il serait possible
d'abolir la contribution des parents dès 1975-76, tandis qu'au niveau
des bourses, il faudrait plutôt envisager une diminution progressive
échelonnée sur quelques années".
A la suite de l'annonce de ce plan de retour en classe et à la
suite de l'émission de ce communiqué, les étudiants ont
demandé de me rencontrer à nouveau de manière à
obtenir certains éclaircissements. Je les ai rencontrés avec
plaisir et je crois avoir été capable, dans la ligne de
l'ouverture manifestée depuis le début, d'apporter quelques
éclaircissements. Nous avons ensemble modifié
légèrement ce communiqué qui se lit maintenant de la
façon suivante. Le premier paragraphe est identique et fait allusion aux
implications sociales et financières. Le deuxième paragraphe
devient le suivant: "Cependant, lorsqu'il est question de prêts, M.
Cloutier est d'accord pour abolir la contribution des parents dès
1975/76, compte tenu des modalités à être proposées
par le comité spécial. Par ailleurs, en ce qui concerne les
bourses, il faudrait envisager plutôt une diminution progressive sur une
période ne dépassant pas quatre ans, compte tenu des
modalités proposées par le même comité." Nous avons
ensemble ajouté un paragraphe sur la contribution des étudiants:
"Pour ce qui est de la contribution des étu- diants dans le calcul des
bourses, M. Cloutier estime qu'il faut en arriver à une formule qui
tienne davantage compte des revenus réels des étudiants, et cela
sur une période ne dépassant pas quatre ans."
Par conséquent, M. le Président, les étudiants se
sont dits satisfaits des précisions apportées à
l'ouverture indiquée depuis le début et la crise a
évolué comme vous le savez. Je suis très heureux que les
étudiants aient accepté de faire partie de ce comité
spécial qui siégera dès aujourd'hui. Je crois que la
définition sur le plan des objectifs que j'ai apportée constitue
un élément sérieux qui a permis d'en arriver à ce
que certains ont appelé une trêve. En revanche, je suis bien
obligé d'admettre que certains éditorialistes, qui
n'étaient peut-être pas très informés des termes de
la modification du communiqué, ont fait allusion à des victoires
possibles ou à des défaites possibles. Pour moi, M. le
Président, je me refuse à parler de victoires ou de
défaites; ces mots ne font pas partie de mon vocabulaire, car, dans un
conflit de cette nature, les coûts sociaux sont beaucoup trop
élevés et je suis heureux que nous ayons enfin réussi
à arriver à la normale.
M. VEILLEUX: Question supplémentaire, M. le Président.
Dans les démarches entre le 19 novembre et le moment où ce
communiqué a été émis ou accepté par les
deux parties, on avait, à un certain moment, dans la formation des
comités, fixé une date, soit le 15 janvier, pour apporter des
amendements ou des changements aux prêts-bourses pour 1975/76. Est-ce que
cette date limite demeure toujours ou si elle a été
prolongée?
M. CLOUTIER: Cette date demeure toujours parce qu'il s'agit là de
contraintes administratives que nous ne pouvons pas éviter. Les
étudiants ont accepté de nommer leurs représentants, les
parents également, le ministère a fait de même; il reste
peut-être un ou deux membres à compléter. Je prévois
une réunion dès aujourd'hui. Maintenant, il faut bien s'entendre,
ce n'est pas le 15 janvier que la révision en profondeur sera faite,
mais je suggérerais au comité d'en arriver à un calendrier
de travail et également à un accord en ce qui concerne les
modifications nécessaires pour les changements qui, d'ores et
déjà, peuvent être faits pour l'an prochain.
Si j'avais, M. le Président, le consentement unanime de la
Chambre, je déposerais le communiqué.
LE PRESIDENT: Vous n'avez pas besoin du consentement; vous pouvez
déposer un document en tant que membre de l'Exécutif.
M. CLOUTIER: Alors, je vous remercie, M. le Président. Je le
dépose, ce qui permettra de compléter le dossier, étant
donné que régulièrement j'ai déposé des
documents au cours de l'évolution du conflit.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
Ecole pour enfants semi-éducables
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse encore au
ministre de l'Education. S'il n'a pas les renseignements, je lui demanderais
d'en prendre avis afin de vérifier. Hier, je lui posais une question
concernant la construction retardée depuis près de cinq ans de
l'école pour les enfants semi-éducables et handicapés; il
m'a répondu, M. le Président, qu'il y avait un plan quinquennal
et que ce n'était pas possible de le faire. Je lui demande de
vérifier si le sous-ministre n'a pas fait savoir à la Commission
scolaire régionale Le Royer et au conseil de l'île que l'accord du
ministère était qu'il acceptait la construction de cette
école à condition que le conseil scolaire de la régionale
Le Royer ne puisse pas aménager une nouvelle école.
J'apprends qu'avant-hier le conseil scolaire de l'île a
déterminé qu'il n'y avait pas possibilité de
réajustement des réaménagements d'écoles et qu'il a
décrété la construction de l'école pour les enfants
semi-éducables et handicapés de l'Est de Montréal. Est-ce
que le ministre peut vérifier si cet accord préalable tient
toujours ou s'il veut attendre le plan quinquennal?
M. CLOUTIER: M. le Président, en premier lieu, je désire
souligner que le député de Lafontaine m'a cité
inexactement. Je n'ai pas dit, hier, que le conseil scolaire se penchait sur le
problème et que par ailleurs le ministère avait refusé la
construction de cette école. Tout ce que j'ai dit, c'est que le conseil
scolaire était l'autorité suprême dans l'île de
Montréal pour les arbitrages nécessaires sur le plan des
équipements et que j'avais demandé à ce conseil scolaire,
de concert avec les commissions scolaires, de faire un plan quinquennal, lequel
doit me parvenir incessamment, et c'est dans le cadre de ce plan quinquennal
qu'une décision comme celle qui devra être prise le sera
définitivement. L'existence du conseil scolaire change les règles
du jeu sur l'île de Montréal.
Maintenant, ceci dit sans tomber dans le juridisme, je crois qu'il sera
possible d'en arriver à une solution rapide en ce qui concerne le cas de
cette construction.
M. LEGER: M. le Président, une question
supplémentaire.
M. CLOUTIER: Si le député posait des questions sans faire
de longs discours, il dirait...
M. LEGER: Bien, je voulais vous situer.
M. CLOUTIER: ... moins d'inexactitudes et me permettrait de
répondre plus facilement.
M. LEGER: Est-il exact que son ministère a dit au conseil de
l'île que la construction de l'école pour semi-éducables
serait confirmée par le ministère dès que le conseil de
l'île accepterait la construction comme telle, parce qu'il n'y avait pas
d'autres solutions? Donc, est-ce qu'actuellement, le ministère a
déjà donné son accord par le télégramme qui
a précédé la décision du conseil?
M. CLOUTIER: Je n'ai pas l'intention de répondre
immédiatement à cette question, parce que je tiens à
respecter la compétence du conseil scolaire de l'île. Je tiens
d'ailleurs à donner à cet organisme toute l'autorité
nécessaire pour faire ses grands arbitrages sur le plan des
équipements. Par conséquent, il reviendra au conseil de
l'île de faire cette annonce et non au ministère. C'est ainsi que
j'entends procéder, mais j'ai clairement indiqué, étant
donné qu'il y a des parents et des enfants qui sont en jeu, que dans ce
cas particulier, c'est une réponse favorable que j'escomptais.
M. LEGER: Une question supplémentaire, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Dernière.
M. LEGER: Comment le ministre peut-il concilier ce plan quinquennal
d'attente, quand je lui demande une réponse précise, et les
déblocages pour trois écoles anglophones, celles de Mgr Whelan,
de J.F. Kennedy et de la commission scolaire de Lakeshore, malgré le
plan quinquennal? Je lui dis que le conseil scolaire s'est prononcé et
que le ministre avait dit oui avant. Pour quelle raison ne dit-il pas
aujourd'hui: Oui, on est d'accord avec la construction d'écoles pour
semi-éducables? Les parents sont déjà assez
éprouvés par des difficultés...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre!
M. CLOUTIER: M. le Président, le député de
Lafontaine mélange absolument tout. Il est exact qu'il y a eu un certain
nombre d'écoles anglophones qui ont fait l'objet d'approbation, mais il
s'agissait de projets qui étaient en phase 3. Ceux qui connaissent
quelque chose au plan des investissements savent ce que je veux dire. Par
conséquent, ils n'avaient pas à être impliqués dans
le plan quinquennal du conseil de l'île. En ce qui concerne
l'école pour semi-éducables, je pense être en mesure, parce
qu'il s'agissait là aussi d'un projet moins avancé mais
suffisamment avancé pour qu'on ne soit pas obligé... Voulez-vous
me permettre de répondre...
M. LEGER: J'ai simplement fait signe. Cela fait cinq ans qu'ils
attendent, si c'est pas avancé monsieur, après cinq ans...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous
plaît.
M. CLOUTIER: Je dois dire, M. le Président, qu'il m'est plus
agréable de vous regarder que de regarder l'énergumène en
face.
LE PRESIDENT: Bon!
M. LEGER: C'est plus agréable d'avoir une école que de
vous entendre parler depuis cinq ans.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Eon, trois dernières courtes
questions, courtes, s'il vous plaît, dans l'ordre suivant: les
députés de Rivière-du-Loup, Beauce-Sud et Chicoutimi.
Politique québécoise sur les
ports
M. LAPRANCE: M. le Président, lors de l'étude du projet de
loi créant la Société Inter-Port de Québec, le
ministre de l'Industrie et du Commerce avait mentionné en
deuxième lecture et en commission parlementaire que le premier ministre
ferait une déclaration sur la politique québécoise
concernant les ports et je vais épeler le mot p o r t s du
Québec. Ma question s'adresse au premier ministre. Etant donné
qu'on peut dire aujourd'hui qu'il est logique de croire que la session va se
terminer dans les prochaines heures, est-ce que le premier ministre est
prêt à faire cette déclaration sur les ports?
M. BOURASSA: Je remercie le député de m'avoir donné
avis de la question, mais je ne crois pas que la session se termine dans les
prochaines heures. De toute manière, j'ai reçu des informations
sur cette question et je devrai retarder de quelques jours ma
déclaration. Probablement que cela ira au début de janvier.
LE PRESIDENT: Le député de Beauce-Sud.
Commission des comptes publics
M. ROY: J'ai une courte question, mais c'est une question de $10
milliards puisqu'il s'agit de l'examen des comptes publics concernant les
derniers rapports du vérificateur général. J'aimerais
savoir, du ministre des Finances, ce matin, quand il entend prendre des mesures
de façon à convoquer, de nouveau, la commission parlementaire des
comptes publics. Je sais que c'est impossible ces jours-ci, mais le ministre
pourrait-il nous assurer, ce matin, que la commission des comptes publics
pourra reprendre à nouveau ses activités dès le mois de
janvier?
M. GARNEAU: Si la session se poursuit après Noël et le
Nouvel An, j'imagine que nous aurons la possibilité de convoquer,
à l'intérieur du cadre sessionnel habituel, la commission des
comptes publics. Si une telle chose ne se produit pas, nous aurons certainement
la possibilité de terminer l'analyse du rapport du vérificateur
durant l'intersession. Pour donner le temps aux députés qui
veulent s'occuper des affaires de leur comté, et peut-être aussi
aux ministres, des affaires de leur ministère pendant les
premières semaines de janvier, peut-être qu'à la fin de
janvier ou début de février nous essayerons de concentrer un
certain nombre de réunions pour permettre d'avancer dans l'étude
du rapport.
M. ROY: Le ministre n'a pas d'objection à ce que la commission
reprenne ses travaux à la fin de janvier, au plus tard, au début
de février?
M. GARNEAU: C'est ce que je veux dire. Et comme il nous restait encore
un ministère, dans la première tranche du programme qui avait
été accepté par le comité de travail formé
à l'intérieur de la commission, la première réunion
portera, en définitive, là-dessus, mais avant de convoquer le
ministère des Terres et Forêts et des sociétés qui
s'y rattachent. Avant que la première rencontre ait lieu, si elle a
lieu, par exemple, fin janvier, je ferai le nécessaire pour convoquer
une réunion du comité de travail pour pouvoir déterminer
dès ce moment quels seront les autres ministères qui seront
analysés par la suite, afin de permettre au vérificateur et aux
ministères et également aux députés de se
préparer en conséquence.
LE PRESIDENT: Dernière courte question. Le député
de Chicoutimi.
Transport en commun dans le Haut-Saguenay
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, ma question s'adresse au
premier ministre. Comme le premier ministre le sait, lors des dernières
élections générales, il s'était engagé,
personnellement, à régler rapidement et définitivement le
problème du transport en commun dans le Haut-Saguenay.
Après plus d'un an, nous en sommes encore aux solutions
temporaires, aux subventions cataplasmes. Je voudrais demander au premier
ministre quand il entend donner suite à cet engagement personnel qu'il a
pris vis-à-vis de la population.
M. BOURASSA: Je crois qu'une subvention a été
donnée par le gouvernement, une subvention de $100,000, aux fins
d'arriver à une solution au problème. Mais quant aux autres
détails de la question du député, j'en prends note. Je
pourrai lui répondre dans les prochains jours.
M. BEDARD (Chicoutimi): Une courte question supplémentaire.
LE PRESIDENT: La dernière.
M. BEDARD (Chicoutimi): Nous savons
qu'il y a des subventions temporaires qui ont été
données et c'est justement le sens de notre question. L'engagement du
premier ministre était à l'effet de régler,
définitivement, le problème, et nous en sommes, à l'heure
actuelle, tout simplement encore à la solution de subventions, qui sont
plutôt des cataplasmes, qui obligent les conseils de ville à se
déplacer. Pendant ce temps, on laisse les lignes payantes à
l'entreprise privée, et les lignes où les citoyens doivent
débourser, on donne cela aux municipalités.
M. BOURASSA: Les membres du Parti québécois ne peuvent pas
parler 30 secondes sans faire de démagogie dans leurs questions.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous en avez fait lors des dernières
élections générales.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez fait cette promesse pour
récolter des votes.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BOURASSA: J'avais parlé, je crois, d'une somme de $20,000
à l'occasion des élections. C'est vrai?
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, M. le Président. C'est faux.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est faux, ce que vous dites.
M. BOURASSA: On pourra vérifier. Si je me trompe, je retirerai
mes paroles.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez promis de régler
définitivement et rapidement le problème, et vous le savez,
à part cela.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: II y a un comité qui était temporaire et qui
est devenu permanent depuis le 4 décembre. Donc, si le comité est
permanent, il devient... Et ce comité et les organismes...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Un peu de silence, s'il vous
plaît.
M. BOURASSA: ... qui y sont rattachés ont reçu des
subventions importantes. Je crois qu'il y a quand même eu progrès
très important depuis quelques mois sur cette question.
M. BEDARD (Chicoutimi): Des solutions temporaires.
LE PRESIDENT: Messieurs...
M. BOURASSA: J'ai les maires de votre région qui semblent
approuver ce que le gouvernement fait.
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre, s'il vous plaît! ... Ce
n'est pas permis, ce que vous faites là.
M. BEDARD (Chicoutimi): Question de règlement, M. le
Président.
LE PRESIDENT: De privilège.
M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce permis au premier ministre ou à
quelque membre de l'Assemblée nationale de faire référence
à des signes qui sont faits par la galerie?
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! ... A l'ordre! ...
Messieurs, l'honorable ministre de la Justice aimerait apporter une
courte réponse à une question posée
antérieurement.
Services de M. Jean Lesage au sujet de l'île
d'Anticosti
M. CHOQUETTE: M. le Président, je voudrais répondre
à une question qui m'a été posée par le
député de Johnson, au sujet de l'expropriation de l'île
d'Anticosti par le gouvernement.
Je voudrais lui dire, tout d'abord, que les services de M. Jean Lesage,
avocat et ancien premier ministre, n'ont pas été retenus par le
gouvernement à l'occasion de cette expropriation. L'expropriation a
procédé de la façon suivante: le sous-ministre de la
Justice, M. Robert Normand, a signé l'avis d'expropriation qui a
été déposé au bureau d'enregistrement, avis en
vertu duquel nous avons fait une offre à la compagnie expropriée.
Par la suite, les discussions ont été poursuivies de la part du
gouvernement par Me Lise Lemieux, chef du contentieux civil, et elles ont
abouti à une entente en vertu de laquelle la compagnie a accepté
les offres gouvernementales. Finalement, nous avions retenu les services de Me
Marcel Bélanger, un avocat spécialiste en expropriation, de
Montréal, au cas où il y aurait contestation de la part de la
compagnie du montant offert par le gouvernement. Mais, comme les offres
gouvernementales ont été acceptées, Me Bélanger n'a
pas eu à intervenir dans ce dossier. Je conclus donc à
l'égard de la question du député de Johnson qu'en aucune
façon M. Jean Lesage a-t-il été mêlé à
ce dossier, du côté gouvernemental.
M. BURNS: C'était plus payant de travailler pour la
compagnie?
LE PRESIDENT: Le ministre de l'Immigration aimerait apporter, je
crois...
M. CHOQUETTE: Pardon?
M. BURNS: Est-ce qu'il a trouvé cela plus payant de travailler
pour la compagnie?
M. CHOQUETTE: Je l'ignore, M. le Président. Ecoutez, je ne suis
pas au courant. Quand je réponds aux questions, elles sont
précises et au point, de façon qu'il n'y ait pas
d'ambiguité. C'est la raison pour laquelle j'ai répondu de cette
façon à la question du député de Johnson.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Immigration a une
réponse, je crois.
Démission de M. René Gagnon
M. BIENVENUE: Oui, M. le Président. Il y a quelques instants, je
complétais une réponse du premier ministre pour le
député de Maisonneuve, au sujet de M. René Gagnon. Pour
donner des précisions finales, je rappelle que M. Gagnon avait
été mis en congé sans solde de celui qui vous parle, le 17
septembre 1973 jusqu'au 19 juin 1974, alors qu'il m'a écrit une lettre
pour démissionner de la Fonction publique. Sa démission
était effective à compter du 19 juin 1974.
M. BURNS: Simplement pour demander au ministre s'il est d'accord pour
déposer la lettre de démission. Est-ce que le ministre est
d'accord pour déposer copie de la lettre de démission? Puisqu'il
l'a partiellement citée, en vertu de l'article 177, je pourrais
l'exiger, je pense.
M. BIENVENUE: Je la déposerai avec grand plaisir, je l'avais
offert précédemment. Je le ferai demain, si je l'ai entre les
mains.
M. BURNS: D'accord, merci.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Avant de passer aux affaires du jour, j'ai une question de
privilège qui m'a été demandée par l'honorable
ministre de l'Immigration et également par l'honorable
député d'Anjou.
L'honorable ministre de l'Immigration.
Question de privilège Accusation contre M.
Jacques-Yvan Morin
M. BIENVENUE: M. le Président, je désire, comme c'est
d'ailleurs manifeste, m'inspirer de quelques notes pour cette question de
privilège, en raison de la délicatesse du sujet dont j'entends
traiter et des responsabilités que je suis conscient de prendre, comme
l'avait fait déjà le député de Maisonneuve, en juin
dernier.
M. le Président, suivant l'avis que je vous ai donné
conformément à notre règlement, je soulève devant
cette Chambre la question de privilège qui va suivre. Mais, avant de le
faire, je vous informe, M. le Président, que j'entends bien me soumettre
en tout point à la jurispru- dence que vous aviez vous-même
établie en cette Chambre, le 26 juin 1974 et les jours qui ont suivi,
alors qu'un problème exactement semblable fut soulevé
relativement à l'ex-député de Johnson, M. Jean-Claude
Boutin.
C'est en vertu évidemment des articles 79 et suivants de notre
règlement que je pose ma question de privilège.
Conformément auxdits articles, je désire accuser un de mes
collègues d'un acte qui le rend indigne de siéger à
l'Assemblée nationale. A cette fin, je présenterai par la suite
une motion de fond dans laquelle j'énoncerai l'accusation et conclurai
que la commission de l'Assemblée nationale procède à une
enquête pour constater si mon accusation est fondée.
L'acte indigne auquel je fais allusion est expressément
prohibé par les dispositions du deuxième alinéa de
l'article 96 de la Loi de la Législature, Statuts refondus de
Québec 1964, chapitre 6 et ses amendements, lequel se lit comme suit:
"En outre de l'allocation prévue à l'article 99, il est aussi
accordé à tout député pour l'indemniser des
dépenses qu'il encourt pour les fins d'une mission officielle qu'il a
accepté d'accomplir à la demande du président, agissant
sur la recommandation des commissaires nommés en vertu de l'article 54
il est accordé, dis-je une allocation qui lui est
versée aux conditions et selon les barèmes et les
modalités qui sont établis par ces commissaires. "Aucune
allocation ne peut être accordée en vertu de la présente
disposition aux députés qui sont membres du Conseil
exécutif ou au député qui occupe le poste reconnu de chef
de l'Opposition. "Celui qui se rend coupable de l'acte ainsi prohibé
encourt les sanctions prévues par l'article 75 et les articles suivants
de ladite Loi de la Législature, qui conclut à
l'inégibilité et à l'inhabilité à
siéger ou voter à l'Assemblée nationale comme
député".
Le collègue que je désire ainsi accuser est le
député de Sauvé, qui occupe le poste reconnu de chef de
l'Opposition. Conformément aux dispositions de la Loi de la
Législature que je viens de citer, je l'accuse d'avoir accepté et
encaissé une allocation sous forme de chèque du gouvernement du
Québec, daté du 28 août 1974 soit dit en passant,
c'était la veille de l'élection de Johnson portant le
numéro 813025 et au montant de $1,796...
LE PRESIDENT: S'il vous plaît, messieurs!
M. BIENVENUE: ... comme indemnité de dépenses encourues
pour les fins d'une mission officielle qu'il a accomplie à Bruxelles, en
Belgique, du 16 au 22 septembre 1974, alors qu'il occupait le poste reconnu de
chef de l'Opposition, et ce, je le répète, contrairement aux
dispositions du deuxième alinéa de l'article 96 qui prescrit que:
"... aucune allocation ne peut être accordée en vertu de la
présente disposition aux députés qui sont membres du
Conseil exécutif ou au député qui occupe le poste
reconnu de chef de l'Opposition".
En concluant ma question de privilège, je vous remets ma motion
ainsi qu'au les petits pages, regardez ici et venez me voir
secrétaire général de l'Assemblée nationale. Je
vous demande de la mettre immédiatement en appendice au feuilleton et
elle se lit comme suit : "Que la commission de l'Assemblée nationale se
réunisse, après avis du leader parlementaire du gouvernement, au
cours de la présente session ou de la session subséquente de la
présente Législature en vue de procéder à une
enquête sur les faits suivants qui, s'ils sont fondés, rendront le
député de Sauvé et chef de l'Opposition, Me Jacques-Yvan
Morin, indigne de siéger à l'Assemblée nationale parce
qu'inhabile, en vertu des articles 96, 75 et suivants de la Loi de la
Législature, à savoir: Avoir accepté et encaissé
une allocation sous forme de chèque du gouvernement du Québec,
daté du 28 août 1974, portant le numéro 813025 et au
montant de $1,796 comme indemnité des dépenses encourues pour les
fins d'une mission officielle qu'il a accomplie à Bruxelles, en
Belgique, du 16 au 22 septembre 1974, contrairement aux articles 96 et 75 et
suivants de la Loi de la Législature.
M. MORIN: M. le Président, j'ai l'impression...
LE PRESIDENT: Une question de privilège?
M. MORIN: Oui, bien sûr! J'ai l'impression que la guerre
psychologique commence. Je vous avoue que je n'ai pas l'intention de me pencher
sur le fond du problème; c'est tout à fait inattendu. En ce qui
me concerne, je pense n'avoir enfreint la loi en aucune façon. C'est
vous-même, d'ailleurs, M. le Président, qui m'avez invité
à cette conférence, c'est vous-même qui m'avez
décrit les indemnités qui étaient payables à ceux
qui participaient à cette délégation. Je ne pense pas
avoir été traité autrement que mes collègues.
De toute façon, je pense qu'il est une manière bien simple
de régler la question. Effectivement, c'est de me soumettre au jugement
de la commission parlementaire. Je souhaiterais, M. le Président,
étant donné que vous avez aussi été
mêlé à cette affaire, qu'elle ait lieu avant Noël.
M. BURNS: M. le Président, je ne vous demanderai peut-être
pas immédiatement...
LE PRESIDENT: Une question de privilège?
M. BURNS: Sur une question de règlement.
LE PRESIDENT: Une question de règlement, oui.
M. BURNS: Oui. Je ne vous demanderai pas une réponse
immédiate. Je vous demanderai simplement peut-être dans les
jours qui vont venir ou, en tout cas, peut-être d'ici demain, je ne veux
pas vous imposer de délai comme vous êtes
l'interprète de nos règlements et, en l'occurence, de
l'application de la Loi de la Législature dans ces cas, si, à
votre avis, un per diem est considéré comme une allocation
visée à l'article 96.
Evidemment, je partage l'avis du chef de l'Opposition, d'autre
part...
M. MORIN: II y avait aussi les frais de voyage, M. le
Président.
DES VOIX: Ah! Ah!
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BURNS: Alors, je vous demande simplement, M. le
Président...
M. MORIN: Bien oui!
LE PRESIDENT: S'il vous plaît, messieurs! S'il vous
plaît!
M. BURNS: ... éventuellement de considérer si ces
éléments sont visés par l'article 96 avant que nous ayons
à discuter de la motion que le ministre de l'Immigration veut
déposer.
LE PRESIDENT: D'accord. L'honorable député d'Anjou,
question de privilège.
Accusation portée contre le
député Yves Tardif
M. TARDIF: M. le Président, je désire soulever une
question de privilège qui fait suite à un article paru en page 1,
hélas! du journal La Presse du 17 décembre 1974, sous la
signature de Pierre Vennat. Dans cet article intitulé "La CSN
dénonce une nouvelle affaire Boutin", le journaliste rapporte des
allégations de la CSN à l'effet que j'aurais continué
à représenter le gouvernement du Québec à titre
d'avocat après l'élection générale du 29 octobre
1973.
M. le Président, je tiens à affirmer bien simplement mais
fermement, devant les membres de cette Chambre, que je n'ai jamais
représenté, à titre d'avocat, de procureur ou de
conseiller juridique, le gouvernement du Québec depuis octobre 1973.
J'aimerais également ajouter les précisions suivantes:
1.Il est vrai qu'avant octobre 1973 j'ai représenté le
gouvernement du Québec à titre d'avocat. J'en avais d'ailleurs le
droit puisqu'à cette époque je n'étais pas
député. 2.Immédiatement après l'élection de
1973, j'ai écrit quelques lettres aux conseillers juridi-
ques des ministères que je représentais pour leur laisser
savoir que j'avais été élu député à
l'Assemblée nationale, que je devrais refuser dorénavant tout
mandat éventuel du gouvernement du Québec et que je mettais fin
à mes mandats gouvernementaux existants.
Je demandais également aux conseillers juridiques de me laisser
savoir à quels avocats je devrais transmettre les dossiers dans lesquels
j'occupais. 3. Dans la plupart des dossiers, les conseillers juridiques du
gouvernement m'indiquèrent, dans les jours ou les semaines qui
suivirent, le nom des avocats à qui je devais remettre mes dossiers.
4.Toutefois, dans un ou deux cas, les conseillers juridiques ont attendu au
moins six mois, sinon plus, après ma première demande, avant de
m'indiquer à quels procureurs je devais remettre ce dossier ou ces
dossiers. 5. En aucun cas après l'élection du 29 octobre 1973, et
même après ma mise en candidature, je n'ai été
présent en cour au nom du gouvernement du Québec, je n'ai
signé de document juridique ou n'ai agi de quelque façon que ce
soit à titre d'avocat pour et au nom du gouvernement du Québec.
6. Lorsque j'ai facturé les ministères impliqués, je n'ai
jamais inclus les vacations ou, si vous préférez, le
travail effectuées après octobre 1973.
M. le Président, j'aimerais également rectifier
très brièvement les déclarations rapportées par le
journaliste quant à mon association avec le bureau d'avocats dont je
fais partie. Il y a fondamentalement deux sortes de sociétés chez
les avocats: la société réelle, où les avocats
partagent les revenus après dépenses, et la société
nominale, où les avocats conservent leurs revenus personnels mais
défraient les dépenses selon une entente établie entre
eux.
Le bureau d'avocats dont je fais partie est une société
nominale. Cela signifie qu'en aucun cas je ne retire de bénéfices
ou avantages matériels ou pécuniaires provenant des travaux de
mes confrères. Plus précisément, M. le Président,
même si certains de mes associés agissent parfois à titre
de procureurs pour le gouvernement du Québec, je ne retire aucun sou de
ces mandats. C'est clair, et j'insiste sur cet aspect de la question, car
l'article de la Presse et d'autres articles publiés ce matin
sous-entendent que mon association professionnelle m'apporte automatiquement
des revenus provenant de mandats gouvernementaux détenus par mes
associés, alors que rien n'est plus éloigné de la
vérité.
J'espère d'ailleurs que les media rapporteront cette
précision qui me paraît importante. Je pense avoir consacré
trop de temps, fait trop d'efforts et dépensé trop
d'énergies, comme les autres députés dans cette Chambre
d'ailleurs, dans le but de me bâtir une réputation honnête
pour accepter, du jour au lendemain, qu'un journaliste en mal d'écrire
en première page d'un grand quotidien et qui n'a jamais essayé de
vérifier avec le principal intéressé, et qu'un chef
syndicaliste, désireux d'attaquer, par le biais d'un
député, une centrale syndicale rivale, fassent un salissage
éhonté.
Aussi, j'exige donc: 1 De la part, premièrement, de la CSN
et de Florent Audette de se rétracter publiquement, d'ici le jeudi 19
décembre 1974, en reconnaissant que leurs allégations
étaient incomplètes, injustes et mal fondées. 2 De
la part du journaliste Pierre Vennat et du journal La Presse d'accorder, d'ici
le jeudi 19 décembre 1974, à la présente mise au point
autant d'importance qu'ils ont accordée à l'article diffamatoire
du 17 décembre 1974, en page 1 de la Presse. 3 De la part du
journaliste Pierre Vennat et du journal La Presse d'accorder, d'ici le 20
décembre 1974, à la rétractation éventuelle de la
CSN et de Florent Audette autant d'importance qu'ils ont accordée
à l'article du 7 décembre 1974.
Si les trois demandes précitées n'ont pas de suite, j'ai
l'intention de prendre les mesures qui s'imposent et qui sont prévues
à la fois par la loi et par les règlements de notre
Assemblée.
En conclusion, je voudrais ajouter ce qui suit: Normand Girard,
journaliste au Journal de Québec écrivait, ce matin: "Lorsque le
doute est semé, le mal est fait. Aucune dénégation
n'arrive à bout de convaincre vraiment". J'estime donc que la
présente question est fondamentale, non pas parce que je suis
impliqué personnellement. En effet, par rapport aux
intérêts supérieurs du Québec, mon sort compte peu.
Mais ce qui est important et ce qui est malsain en cette question, c'est cette
espèce de climat d'insinuations vicieuses, d'accusations voilées
et d'attaques mensongères qu'on semble vouloir instaurer, et qui tend
à miner à la fois nos hommes publics, nos institutions et les
fondements même de notre société.
Il est trop facile de jeter le discrédit sur ceux qui ont
été appelés démocratiquement à diriger les
destinées de cette société. Malheureusement, rien ne les
protège de ces attaques qui, même lorsqu'elles sont
réfutées, laissent des traces.
M. CHOQUETTE: M. le Président, si vous le permettez, je voudrais
poser une question au député d'Anjou.
LE PRESIDENT: Ah non! Ah non! Je m'excuse, vous ne pouvez pas poser une
question à un député.
M. CHOQUETTE: ... M. le Président, comme d'habitude, mais il y
avait quelque chose qui n'était pas...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce qu'il y a consentement unanime?
DES VOIX: Oui. On veut la lumière.
LE PRESIDENT: Je m'excuse, messieurs.
M. CHOQUETTE: Tout simplement, M. le Président...
LE PRESIDENT: Sans être une question, faites votre commentaire,
avec le consentement unanime.
M. CHOQUETTE: Je vous remercie, M. le Président. Tout simplement,
c'est que le député d'Anjou a demandé une
rétractation de la part du journaliste Pierre Vennat ainsi que de M.
Florent Audette. Je pense bien qu'il doit demander une rétractation de
la part du journal La Presse qui a imprimé l'article dans son journal.
Je pense que...
Je n'ai pas saisi si la déclaration du député
était assez claire sur ce point.
M. TARDIF: M. le Président, j'ai demandé, en trois points,
la rétractation de la part de la CSN, de Florent Audette, du journaliste
Pierre Vennat et du journal La Presse, c'est bien dans mon texte.
LE PRESIDENT: Affaires du jour.
Questions inscrites au feuilleton
M. LEVESQUE: Au feuilleton, article 8, question de M. Léger,
réponse de M. Bourassa. Pour M. Bourassa, lu et répondu. (Voir
Annexe)
Article 19, question de M. Bellemare (Johnson), réponse de M.
Cloutier.
M. CLOUTIER: Lu et répondu. (Voir annexe)
M. LEVESQUE: Article 78, motion de M. Bellemare (Johnson),
dépôt de M. Toupin.
M. TOUPIN: Document déposé, M. le Président.
M. LEVESQUE: Article 83, motion de M. Charron, dépôt de M.
Lalonde. Pour M. Lalonde, document déposé.
Motion pour faire siéger la Commission sur la
loi no 7
M. LEVESQUE: M. le Président, je fais motion pour qu'au salon
rouge, immédiatement, la commission des institutions financières,
compagnies et coopératives se réunisse pour poursuivre
l'étude du projet de loi no 7, article par article, c'est-à-dire
la Loi sur les assurances.
LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion est adoptée?
M. BURNS: Vote enregistré, M. le Président. LE PRESIDENT:
Enregistré? Combien...
M. BURNS: Le député de...
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés.
Vote sur la motion
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Que ceux qui sont en faveur de la
motion du leader parlementaire du gouvernement pour la convocation de la
commission des institutions financières, compagnies et
coopératives veuillent bien se lever.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Parent (Hull),
Saint-Pierre, Choquette, Garneau, Cloutier, Phaneuf, Lachapelle, Berthiaume,
Goldbloom, Quenneville, Hardy, Tetley, Drummond, Lacroix, Bienvenue, Forget,
Massé, L'Allier, Harvey (Jonquière), Vaillancourt, Cadieux, Houde
(Fabre), Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Fortier,
Kennedy, Bacon, Blank, Veilleux, Saint-Hilaire, Brisson, Séguin,
Saindon, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, La-montagne, Picard,
Gratton, Gallienne, Assad, Carpentier, Dionne, Faucher, Saint-Germain, Harvey
(Charlesbourg), Larivière, Pelletier, Pepin, Bellemare, (Rosemont),
Bérard, Bonnier, Boudreault, Boutin, Chagnon, Marchand, Leduc, Caron,
Ciaccia, Côté, Denis, Déom, Déziel, Dufour, Harvey
(Dubuc), Lapointe, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier,
Pagé, Picotte, Tardif, Vallières, Morin, Burns, Léger,
Lessard, Bédard (Chicoutimi), Samson, Roy, Bellemare (Johnson).
LE SECRETAIRE: Pour: 89 Contre: 0
LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée et cette commission des
institutions financières, compagnies et coopératives peut
siéger immédiatement. Y a-t-il consentement?
M. BURNS: Oui.
M. LEVESQUE: M. le Président, pourrait-on procéder
à quelques troisièmes lectures? Article no 39.
Projet de loi no 86 Troisième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire du gouvernement, pour
l'honorable ministre des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives, propose la troisième lecture du projet de loi no
86, Loi modifiant la loi des renseignements sur les compagnies. Est-ce que
cette motion est adoptée?
M. BURNS: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté. M. LEVESQUE: Article 43.
Projet de loi no 96 Troisième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la
troisième lecture du projet de loi no 96, Loi concernant ïa
protection de l'environnement. Cette motion est-elle adoptée?
M. LEGER: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEVESQUE: Article 44.
Projet de loi no 94 Troisième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la
troisième lecture du projet de loi no 94, Loi concernant les
régimes de retraite des maires et des conseillers des cités et
villes.
M. LEGER: M. le Président...
LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.
M. Marcel Léger
M. LEGER: Hier, le projet de loi en deuxième lecture a
passé tellement rapidement que, le temps de descendre de mon bureau, il
était déjà adopté en deuxième lecture. Ce
n'est pas parce que je m'y serais opposé, mais j'aurais eu, pour une
fois, l'occasion de féliciter le gouvernement, et cela aurait eu autant
d'effet que lorsqu'on le condamne. Il y a réellement de
l'objectivité derrière cela parce que concernant le projet de loi
no 94, qui concerne le régime de retraite des maires et des conseillers
des cités et villes, nous étions amplement d'accord.
Je dois dire qu'il est malheureux que nous soyons obligés, comme
d'habitude, à la fin d'une session, de bousculer une série de
projets de loi où il y a des choses importantes à dire,
même si on est d'accord sur un projet de loi. Ce sont les occasions
où un député peut exprimer des souhaits tout en appuyant
un projet de loi. Or, cela n'a pu être le cas parce qu'on a adopté
cela en vitesse. A toutes les sessions, c'est la même chose et, quelque
gouvernement que ce soit, c'est la même chose.
Je voudrais souligner que nous allons voter pour ce projet de loi en
troisième lecture, d'autant plus que nous nous étions
opposés, à l'occasion de l'adoption de plusieurs bills
privés présentés par des municipalités qui
poussaient dans le dos du gouvernement pour régler le problème de
pension de retraite des édiles municipaux.
Ces personnes donnent une bonne partie de leur santé, de leur
travail, de leur vie, de leurs loisirs à défendre les
intérêts de la population de leur municipalité. M. le
Président, plusieurs municipalités venaient tour à tour
demander différents moyens d'avoir les fonds de pension, d'avoir un
régime de retraite. A ce moment, je m'étais opposé en
disant: M. le Président, si on le fait une fois, il va falloir le faire
plusieurs fois; pour quelle raison n'aurait-on pas un projet qui engloberait
l'ensemble des quelque 1,500 municipalités du Québec? Le
ministre, d'ailleurs, m'avait dit qu'un projet s'en venait en ce sens et c'est
pour cela, aujourd'hui, que nous sommes heureux.
Je voudrais en profiter pour souligner l'importance de donner à
nos édiles municipaux, que ce soit des maires ou des échevins,
une certaine sécurité à ces personnes qui viennent
à l'école de l'administration. Je dirais qu'une des bonnes choses
des administrations municipales, c'est qu'elles sont une école pour
l'ensemble des Québécois qui apprennent l'administration, qui
tous les jours font face à des décisions dans le domaine des
affaires, le domaine des relations publiques, le domaine de projets, etc. C'est
donc dire, M. le Président, que c'est un des rares endroits qui ont
permis aux Québécois francophones de prendre une certaine
expérience, une certaine assurance et, de là, se diriger par la
suite dans le secteur privé, où ils ont fait preuve d'une
meilleure expérience pour obtenir des emplois à l'échelle
de cette expérience.
C'est donc dire, M. le Président, que les municipalités
sont des endroits privilégiés pour cela. De plus en plus, les
maires et les échevins ont des rôles difficiles à jouer, en
ce sens que, devant l'absence de plan national, gouvernemental, il est
difficile pour l'administration d'une petite municipalité de fonctionner
avec une planification complètement étanche. En effet, cela prend
des prodiges d'imagination, pour les maires et les échevins, pour
administrer un budget, planifier les solutions selon les besoins et
réclamations de leurs citoyens, parce que leur budget, la plupart du
temps, est insuffisant. Les subventions qu'ils reçoivent du gouvernement
sont souvent arbitraires, discrétionnaires, jamais les mêmes,
jamais statutaires. Parfois, ils doivent s'administrer en prévoyant une
subvention comme celle qu'ils ont eue l'année d'avant, mais qui ne vient
pas cette année. Je pense que c'est une situation très difficile
pour les administrateurs municipaux. S'ils avaient une assiette fiscale
à eux, bien déterminée, leur permettant de prévoir
les revenus et ensuite d'évaluer les dépenses et les services
qu'ils peuvent donner à leurs citoyens, je pense que ce serait beaucoup
plus facile pour nos édiles municipaux de s'exprimer et de
réaliser leur rôle d'élus du peuple.
Je terminerais en disant que c'est peut-être là, dans le
Québec surtout, et ailleurs nécessairement, dans une
municipalité, que s'exprime le plus la vraie démocratie
électorale. Les gens, à ce niveau, connaissent leurs
échevins et leur maire.
UNE VOIX: C'est pour ça que je suis maire.
M. LEGER: C'est ça. Mais ce n'est pas sûr qu'il va
être député la prochaine fois, par exemple.
Mais au niveau de la mairie, au niveau des échevins, les citoyens
sont proches de leurs élus. Ils peuvent les appeler pour leur dire ce
qui se passe dans tel ou tel problème. Ils se tutoient, même.
C'est là qu'on élit des personnes en connaissance de cause, ce
qui n'est pas toujours le cas dans des élections dans des grandes villes
comme Montréal ou Québec, comme dans de grands territoires comme
les conseils scolaires, comme c'est le cas pour les commissions scolaires des
grandes régionales, comme c'est le cas pour les gouvernements provincial
et fédéral. Les gens ne connaissent pas leurs élus. Ils
ont de la difficulté à les rencontrer.
Au niveau municipal, c'est un des endroits où s'exerce
réellement un vote d'une personne qui connaît la personne pour qui
elle va voter ou contre qui elle votera parce qu'elle la voit tous les
jours.
C'est la raison pour laquelle le rôle du maire et des
échevins est difficile, il n'offre pas de sécurité.
Souvent les gens y laissent leur santé, leur travail, leur revenu et
aussi subissent une certaine usure qui doit être compensée. Le
projet de loi permettra d'avoir peut-être encore de meilleurs candidats
dans les différentes municipalités, sachant qu'après avoir
donné une bonne partie de leur temps pour le bien de leur
communauté, ils auront droit à un honnête repos et une
honnête récréation possible par la suite. Merci.
M. CADIEUX: M. le Président, avant que le ministre exerce son
droit de parole en troisième lecture...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): C'est seulement un discours pour chaque
parti.
M. CADIEUX: Ah! Je ne peux même pas remercier le
député...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): L'honorable ministre des Affaires
municipales.
M. Victor Goldbloom
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je voudrais demander le
consentement unanime de la Chambre pour changer un mot dans ce projet de loi.
C'est une définition...
M. BURNS: Vous l'avez, le consentement.
M. GOLDBLOOM: Merci. M. LEGER: Cela dépend de quel mot! M.
GOLDBLOOM: Nous avons... M. LEGER: Un mot de cinq lettres.
M. BURNS: Si on est contre, on votera contre.
M. GOLDBLOOM: ... inséré, hier, la définition du
mot "année" et nous avons dit "période continue de douze mois".
Il serait plus logique de dire "période cumulative de douze mois" parce
qu'il y a des fois des interruptions, et si un maire ou un échevin
revient au service de sa municipalité, il devrait pouvoir additionner
les mois pour faire ses années de service pour les fins de sa
pension.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que les entrées peuvent
être faites pour cet amendement?
M. BURNS: Nous sommes d'accord M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que ce projet de loi est
adopté en troisième lecture?
M. BURNS: Adopté.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté.
M. LEVESQUE: Article no 45).
Projet de loi no 91 Troisième lecture
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre des Affaires municipales
propose la troisième lecture du projet de loi no 91, Loi modifiant de
nouveau la loi des citées et villes et le code municipal.
Est-ce que cette motion de troisième lecture est
adoptée?
M. GOLDBLOOM: M. le Président, là aussi je suis
obligé de demander le consentement unanime de la Chambre pour une
modification.
Nous avons été avisés par la ville de
Montréal, qui est soumise à l'application de cette loi, que la
rédaction que nous avons formulée ne convient pas parfaitement
parce qu'il n'y a pas, dans le système administratif de la ville de
Montréal, d'avis de motion. Il y a plutôt une résolution du
comité exécutif.
Or, pour établir la concordance, il faudra ajouter un
alinéa additionnel au premier article, M. le Président. Je l'ai
fait parvenir à l'Opposition officielle, qui semble d'accord. J'en fais
lecture: "Dans le cas d'une cité ou d'une ville
régie par une charte spéciale ne prévoyant pas
d'avis de motion avant l'adoption d'un règlement, la résolution
du comité exécutif recommandant au conseil l'adoption d'un
règlement prévue au présent paragraphe a le même
effet qu'un avis de motion et doit être envoyée
immédiatement au ministre des Affaires culturelles".
LE VICE-PRESIDENT (M.Blank): On fait les écritures, à
savoir que la Chambre est retournée en commission
plénière, a fait cet amendement et a fait rapport au
président pour les deux, l'autre bill et ce bill-ci.
M. BURNS: De consentement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que la motion de troisième
lecture est adoptée?
M. BURNS: Adopté.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté.
M. SEGUIN: M. le Président, j'aurais une question à poser
au ministre justement sur cette modification qu'il vient d'apporter.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Avec le consentement de la Chambre?
M. BURNS: Avec le consentement.
M. SEGUIN: Lorsqu'il s'agit de faire la distinction pour les villes qui
ont une charte spéciale, comme par exemple Montréal où il
ne s'agit pas d'avoir d'avis de motion, est-ce que j'ai bien entendu que vous
avez dit, dans le texte que vous avez lu, "présentation d'avis de motion
avant adoption"? C'est parce que ce ne serait pas le cas. Ce serait avant
présentation ou avant introduction d'une loi ou d'un projet de loi.
M. GOLDBLOOM: Non, M. le Président.
M. SEGUIN: L'avis de motion ne vient pas avant l'adoption, il vient au
tout début.
M. GOLDBLOOM: Non, non! Il s'agit de tenir compte de la situation
spéciale de la ville de Montréal où une éventuelle
résolution n'est pas présentée par avis de motion mais par
résolution du comité exécutif adressée au conseil
municipal. Puisque la loi qui permet aux municipalités de refuser,
pendant une année, les permis de démolition, prévoit que
l'avis de motion est envoyé immédiatement au ministre des
Affaires culturelles, pour lui permettre d'être saisi
immédiatement de la volonté de la municipalité de
protéger un immeuble ou un quartier, nous devons faire de même
dans le cas de la ville de Montréal. Tout ce que l'on fait, c'est
remplacer, à toutes fins pratiques, les mots "avis de motion" par les
mots "résolution du comité exécutif" parce que, dans le
cas de la ville de Montréal, c'est par ce mécanisme que la
résolution arrive devant le conseil.
Nous disons donc que la procédure normale prévue dans la
charte de la ville de Montréal est suivie. Dans le cas d'une
résolution qui prévoit la protection d'un immeuble ou d'un
quartier en vertu de la Loi sur les biens culturels, c'est la résolution
du comité exécutif qui tient lieu d'avis de motion et qui est
immédiatement envoyée au ministre des Affaires culturelles.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): D'accord, M. le leader, c'est
adopté?
M. LEVESQUE: Adopté. Alors, article 46, M. le
Président.
Projet de loi no 95 Troisième lecture
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre de la Fonction publique
propose la troisième lecture du projet de loi no 95, Loi sur les
négociations collectives dans les secteurs de l'éducation, des
affaires sociales et des organismes gouvernementaux.
Le député de Maisonneuve.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, simplement quelques très
brèves remarques sur le projet de loi no 95 pour exprimer notre regret
que le ministre parce que je suis limité, en troisième
lecture, au contenu du projet n'ait pas voulu accepter de réviser
son attitude concernant principalement les droits que le lieutenant-gouverneur
en conseil se réserve dans cette loi. Plus particulièrement, aux
articles 8, 16 et 32, le lieutenant-gouverneur en conseil, comme je l'ai dit
hier soir lorsque nous avons étudié ces articles les uns
après les autres, se réserve le droit de modifier la structure de
négociations, à toutes fins pratiques.
Ce que j'ai déploré, ce que je déplore encore et ce
pourquoi je voterai contre le projet de loi en troisième lecture, c'est
que le lieutenant-gouverneur en conseil, en l'occurrence, est ni plus ni moins
l'employeur. C'est l'exécutif du gouvernement qui décide des
politiques de négociations avec les gens visés par le projet de
loi no 95 et c'est ce même employeur qui, tout en décidant de sa
stratégie patronale, ce qu'il a parfaitement le droit de faire, est
aussi en mesure de changer certaines choses dans le cours de ces
négociations.
Il s'installe, à toutes fins pratiques, comme juge et partie.
C'est ce contre quoi nous en avons dans ce projet de loi. C'est ce pourquoi il
m'est absolument impossible de voter en faveur du projet de loi no 95 en
troisième lecture, même si, en deuxième lecture, je ne me
suis pas gêné pour dire que le projet de loi apportait
quand même un certain assouplissement dans les relations de
travail, dans le domaine des hôpitaux et dans le domaine de
l'éducation.
C'est particulièrement grave, vu qu'à l'article 8 et
à l'article 16 ce que le gouvernement se réserve sous la forme du
lieutenant-gouverneur en conseil, c'est le droit de décider quelles
choses vont être discutées à la table provinciale ou au
niveau local, s'il n'y a pas d'entente en vertu de l'article 7. Je trouve cela
absolument indécent, inacceptable. Je me demande je ne veux pas,
encore une fois, faire le prophète de malheur dans quelle
atmosphère les négociations vont commencer, si par malheur le
lieutenant-gouverneur en conseil est obligé de prendre le pouvoir qu'on
lui donne à l'article 8 et à l'article 16.
Imaginez-vous que la négociation, M. le Président, se fait
habituellement sur une base d'égal à égal; c'est ce
pourquoi les syndicats existent. L'individu vis-à-vis d'un employeur,
à cause de sa faiblesse économique, trouve une solution et forme
un syndicat. Ce syndicat qui le représente devient un objet ou un
instrument d'égalité vis-à-vis de l'employeur. Or, cette
égalité est brisée par le projet de loi et je trouve cela
déplorable. Je regrette infiniment que le ministre ne se soit pas rendu
à nos demandes, le député de Saint-Jacques et
moi-même, hier soir, surtout que je n'ai pas entendu d'argument valable
de la part du ministre. Tout ce que le ministre nous a dit, lorsque nous avons
demandé d'amender le projet de loi dans ce sens, c'est: Le gouvernement
ne peut pas se départir de ses droits. Bien, il s'en départit
constamment de ses droits; il le fait dans beaucoup de lois; à toutes
les fois où on accorde une juridiction à un tribunal, c'est une
juridiction que le gouvernement donne à quelqu'un d'autre, c'est une
juridiction dont il se départit.
Ce que nous lui demandions simplement dans ce cas-là,
c'était, s'il y a conflit quant à l'interprétation de ce
qui doit être discuté à la table provinciale ou à la
table locale, qu'il faut absolument que ce ne soit pas le gouvernement qui
décide; on a suggéré que ce soit le tribunal du travail.
Le tribuanl du travail, soit dit en passant, est spécialisé dans
ces domaines, est ouvert, est apte à comprendre les problèmes qui
peuvent se présenter et confronter les parties dans ce cas.
M. le Président, pour toutes ces raisons, je voterai contre le
projet de loi no 95, en troisième lecture.
M. Fabien Roy
M. ROY: M. le Président, quelques mots seulement sur le projet de
loi no 95. Evidemment, ayant été occupés ailleurs à
d'autres séances de commissions parlementaires pour l'étude
d'autres projets de loi, nous n'avons pu malheureusement faire d'intervention
en deuxième lecture et nous n'avons pu prendre part aux
délibérations lors de l'étude de ce projet de loi article
par article en commission plénière.
M. le Président, je veux attirer votre attention sur un seul
point. D'ailleurs je ne veux pas répéter mot à mot ce que
vient de dire l'honorable député de Maisonneuve, mais il y a un
principe qui est clair, qui est net dans le projet de loi. C'est que, si on
permet d'un côté aux gens de la fonction publique et parapublique
de se syndiquer et de négocier des conventions collectives avec le
gouvernement, comment peut-on logiquement, honnêtement, espérer
qu'il puisse y avoir des négociations valables si, d'autre part, le
gouvernement peut se retrancher derrière son projet de loi et dire:
Voici, j'ai l'article 8 et l'article 15 pour me protéger?
Il est évident qu'à partir de ce moment-là, la
négociation c'est de la foutaise, parce que le gouvernement, qui est
lui-même l'employeur, devient l'arbitre et devient, par la suite, le juge
lui-même. Il est évident que c'est une question
complètement inacceptable, surtout si on regarde d'autres politiques,
d'autres législations qui sont présentement devant
l'Assemblée nationale, et vous rappeler, M. le Président, le
fameux bill des droits.
Alors quels seront les droits des individus, quels seront les droits des
syndiqués de la fonction publique et parapublique? Je pense qu'il n'y en
a plus, de droits. On maintient le principe de la négociation, mais par
contre, par des subtilités législatives, des subtilités
légales, on leur enlève le droit justement de discuter. Le
gouvernement peut facilement se retrancher, étant soumis à des
contraintes budgétaires, étant soumis aux disponibilités
que le ministre des Finances veut bien laisser à ceux qui ont le mandat
de négocier. Il est évident que, même si le gouvernement
nous dit qu'il s'agit d'équité, il reste quand même que la
porte est ouverte à tous les abus.
Comme légiférer c'est, en quelque sorte, administrer, et
administrer c'est prévoir, alors il y a un danger extrêmement
grand que le gouvernement abuse des dispositions de ce projet de loi, et c'est
une porte ouverte à des abus terribles. En ce qui nous concerne, nous ne
pouvons aucunement être d'accord et nous allons voter contre, en
troisième lecture, ce projet de loi, même si nous n'avons pas pu
nous prononcer en deuxième lecture, pour les raisons que j'ai
mentionnées tout à l'heure.
M. Maurice Bellemare
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je voudrais simplement
ajouter un mot. J'ai déjà pris part à certaines
négociations entre les employés de la province, le groupement
gouvernemental et les paragouvernementaux, et je suis fort surpris, M. le
Président. Le ministre, qui a de l'expérience peut-être
dans les relations de travail, surtout dans l'établissement des
conventions collectives, sait qu'on ne peut pas donner des droits à une
certaine partie dans la convention collective qui sont une usurpation ni un
contrôle définitif de la table des négocia-
tions. J'attire l'attention du ministre sur les notes explicatives, pour
le ramener véritablement dans le vif du sujet. Il est dit: "Le
présent projet de loi a pour objet de déterminer les
règles qui régiront la négociation des conventions
collectives entrées en vigueur le 1er juillet 1975".
Alors c'est bien clair, on établit des règles puis, dans
ces règles, on donne une force particulière au
lieutenant-gouverneur en conseil qui n'est ni plus ni moins que le
gouvernement.
Je pense que, lorsqu'il est question de négociation, on ne peut
pas mettre une épée de Damoclès sur la tête de ceux
qui négocient, avec un tel bill.
Je pense que, puisque ce projet de loi a pour objet de déterminer
les règles qui régiront la négociation des conventions
collectives, le gouvernement se réserve un pouvoir
discrétionnaire. Dans toutes lois où le gouvernement s'est
gardé un pouvoir absolu, je pense que c'est voué à
l'échec.
Je connais trop la sensibilité des gens qui négocient
autour d'une table pour ne pas avertir le ministre que cela ne peut pas lui
rendre service, que c'est une arme dangereuse qu'il se donne. Peut-être
veut-on protéger véritablement et le gouvernement et les budgets
qui seront en cause, lors des négociations, cependant, il y a justement
des règles, comme celles qui sont inscrites dans l'article 8 et dans
l'article 15, qui vont nuire à toute la conciliation.
A l'article 8, c'est bien clair: "... détermine les
matières qui seront négociées et agréées". A
l'article 15, c'est encore plus fort: "Le lieutenant-gouverneur en conseil
détermine les matières qui seront négociées et
agréées soit à l'échelle provinciale, soit à
une échelle autre que provinciale". Mais l'article 16 va encore plus
loin: "Dans le cas prévu à l'article 15, le lieutenant-gouverneur
en conseil détermine comme matières de négociation
provinciale au moins celles des matières pour lesquelles toutes les
parties visées aux articles 3, 5 et 6 ont convenu de négocier
à l'échelle provinciale".
Mais j'admets que le gouvernement se réserve un droit, un
privilège que n'ont pas les autres parties, et particulièrement,
devant des négociations qui auront l'importance de celles de 1975.
Je n'ai pas besoin de vous rappeler, sans vouloir jeter de blâme
à personne, les conséquences terribles qui ont
précédé la signature des ententes lors de la
dernière convention collective. Lorsqu'on est allé jusqu'à
mettre en prison les trois chefs syndicaux, c'était à la suite de
ces négociations. Je prétends que ce n'est pas s'attirer la
sympathie des négociateurs de vouloir agir aussi arbitrairement.
Pour toutes ces raisons et, en particulier, pour dire au ministre qu'il
donne un pouvoir au lieutenant-gouverneur en conseil qu'il ne devrait pas
posséder lors des négociations, parce que cela amènera
certainement de la mésentente, je voterai contre le projet.
M.Oswald Parent
M. PARENT (Hull): M. le Président, je suis un peu
déçu de constater que les trois partis de l'Opposition ne peuvent
réussir à s'entendre pour accepter le projet de loi en
troisième lecture. Il semble sûrement qu'il y a une certaine
ambiguïté à savoir que ce projet de loi apporte, d'un
côté, une décentralisation de la table de
négociation, de l'autre côté, un assouplissement dans les
règles de la négociation.
Il faudrait dire, pour le bénéfice du député
de Beauce-Sud, que ce projet de loi n'affecte en rien la négociation
dans le secteur de la fonction publique, puisque le secteur de la fonction
publique est déjà prévu par la Loi de la fonction
publique. En vertu des pouvoirs qui me sont conférés comme
titulaire du ministère, la négociation au niveau des
fonctionnaires, se fait sous l'empire de la Loi de la fonction publique et non
du projet de loi qui est ici devant la Chambre en troisième lecture.
Le projet de loi qui est présenté sous le numéro
95...
M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce que le ministre de la Fonction publique
est en train de me dire qu'il y a une loi spéciale pour la
négociation avec les fonctionnaires? Simplement une question. Pourquoi
ajoute-t-il ainsi la négociation des conventions collectives dans le
secteur des organismes gouvernementaux, sauf les fonctionnaires?
M. PARENT (Hull): Les fonctionnaires sont déjà
couverts...
M. BELLEMARE (Johnson): Cela, je le sais.
M. PARENT (Hull): ... par la Loi de la fonction publique et le ministre
de la Fonction publique a comme responsabilités, entre autres, celle de
négocier les conventions collectives dans le secteur de la fonction
publique. Il n'y a pas besoin de loi pour donner le pouvoir au ministre de la
Fonction publique de négocier la convention collective dans le secteur
de la fonction publique.
La loi a pour effet de créer, contrairement au projet de loi no
46 de 1971, en somme, trois entités de négociation. Ces trois
entités, on les retrouve dans le projet de loi: l'éducation, les
affaires sociales, les organismes gouvernementaux. Quelle est la prise de
position de l'Opposition dans le cas présent? Elle dit: Le
lieutenant-gouverneur en conseil a trop de pouvoirs de décision, en
vertu de l'article 8, en vertu de l'article 15, en vertu de l'article 16 et en
vertu de l'article 32, comme on l'a dit hier soir. Le titulaire de la Fonction
publique a été désigné par le gouvernement pour
faire la coordination dans la négociation. Comme ministre de la Fonction
publique, j'ai mes responsabilités, en vertu de la loi, mais comme
membre du
gouvernement, j'agirai comme porte-parole pour tous les secteurs de la
négociation au cours de 1975.
Cela signifie la fonction publique, comme responsable du
ministère de la Fonction publique, et, en vertu du bill, de voir
à la coordination des affaires sociales, de l'éducation et des
organismes gouvernementaux.
Il y a donc un mécanisme mis sur pied pour permettre qu'il y ait
une coordination assurée dans le cadre de cette ronde de
négociations.
Pourquoi le gouvernement décide-t-il que s'il n'y a pas accord
sur les matières à être négociées à
l'échelle provinciale, dans les 90 jours, le gouvernement aura à
décider? On invoque que le gouvernement est juge et partie; or, on ne
fait pas la distinction. Si on parlait de cette façon en ce qui concerne
la Loi de la fonction publique, on aurait peut-être raison de dire que
nous sommes juge et partie. Mais il n'est pas question de la Loi de la fonction
publique, ni des fonctionnaires du gouvernement. Il est question de ceux qui
sont dans le domaine de l'éducation; les commissions scolaires, les
collèges d'enseignement général et professionnel, les
institutions qui se rattachent au système, au réseau et, dans les
affaires sociales, les centres hospitaliers, les centres d'accueil, les
organismes gouvernementaux, sociétés de la couronne, conseils
d'administration qui régissent des sociétés de la
couronne.
Il en devient donc que le gouvernement n'est pas, si on veut, partie
comme telle puisqu'à la commission scolaire les commissaires, à
ma connaissance, sont élus par le peuple. Les conseils d'administration,
dans les hôpitaux comme dans les collèges d'enseignement, il y a
toute une méthode pour procéder à leur élection en
vertu du bill 65 et en vertu de la Loi des collèges d'enseignement
général et professionnel. Dans les organismes gouvernementaux il
y a, par leurs lois constitutives, la détermination de la nomination des
membres du conseil d'administration.
La liste qu'on retrouve des organismes gouvernementaux, ce sont des
employés qui sont nommés par lesdites sociétés;
entre autres, la Société des alcools du Québec n'a rien
à voir avec la fonction publique, aucunement. Elle n'émarge
même pas au budget de la province, sinon qu'elle verse des revenus. La
société comme telle est assujettie, en vertu de la loi, à
la coordination du ministre désigné, dans les circonstances le
ministre de la Fonction publique, comme partie à la négociation.
Mais, le signataire de la convention, ce ne sera pas le ministre de la Fonction
publique, ce sera le président de la Société des alcools
du Québec...
M. BELLEMARE (Johnson): C'était de même autrefois.
M. PARENT (Hull): ... comme pour les autres organismes, les commissions
scolaires sont signataires, les CEGEP et ainsi de suite.
M. BELLEMARE (Johnson): C'était de même autrefois.
M. PARENT (Hull): Le gouvernement s'est réservé le droit
suivant, contrairement à la négociation de 1972 et contrairement
à la loi de 1971.
La loi de 1971 a été le fruit de deux négociations
collectives antérieures, 1966 et 1968, où la partie syndicale a
demandé que tous les sujets à négocier soient de
matière provinciale. Cela a été entériné en
1971 par une loi, la loi 46. Nous avons voulu, par le projet de loi no 95,
donner beaucoup plus de souplesse parce qu'il y a des problèmes qui se
rencontrent au niveau des régions et au niveau local, tant dans le
domaine des institutions hospitalières que dans le domaine des
commissions scolaires.
Nous avons maintenant souligné, dans la loi, qu'il y a un
délai de 90 jours pour s'entendre sur les matières qui seront
à négocier au niveau provincial et autre que provincial. C'est un
changement fondamental avec la loi de 1971, qui disait: Tout est
négocié au niveau provincial. La loi 46 de 1971
déterminait également quelles étaient les centrales
syndicales qui étaient pour négocier et qui représentaient
même les syndicats indépendants ou ceux, même, qui ne
faisaient pas partie de leur groupement.
Or, la souplesse de cette loi permet une rationalité dans les
tables de négociation, le respect de l'affiliation syndicale, la
représentativité au moment de l'établissement de la table
de négociation. Mais les sujets à être discutés au
niveau provincial, s'il n'y a pas entente, l'article 15, qu'a signalé
entre autres le député de Johnson, dit bien que ce qui aura
été agréé à la table pas de
négociation, parce qu'il s'agit de déterminer les matières
qui seront négociées ce qui aura été
agréé à la table entre les parties, c'est le minimum de ce
que le gouvernement doit avoir s'il doit décider s'il y a d'autres
sujets qui doivent faire partie de la table provinciale.
Mais nous allons laisser au niveau régional et au niveau local
des matières qui doivent être discutées à ce niveau.
C'est donc un assouplissement de la loi de 1971 qui, à ce
moment-là, empêchait tout avantage comme celui-ci de se
présenter. C'était au niveau provincial exclusivement.
Le ministre, comme la loi le dit à l'article 8, est partie
à la négociation, mais il n'est pas le signataire direct, par la
loi de la convention collective, pour les stipulations à
l'échelle provinciale. Dans les commissions scolaires régionales,
ce n'est pas le ministre de l'Education, ni le ministre des Affaires sociales
qui sont signataires des conventions, mais ceux qui seront
désignés, comme le prévoit le mécanisme actuel, par
le lieutenant-gouverneur en conseil. Mais découleront des conventions
collectives des stipulations de la table provinciale des sujets qui auront
été entendus et qui devront se négocier.
Le pouvoir, donc, qu'on s'arroge, comme le prétend l'Opposition,
d'être juge et partie, c'est sur les matières où il n'y
aura pas entente. Mais encore là, aujourd'hui, la partie syndicale, des
derniers renseignements que nous avons obtenus, voudrait que tout revienne
à la table provinciale. Conséquemment, nous prévoyons
qu'il y aura, à ce moment-là, des difficultés
énormes dans la ronde de négociations qui s'annonce.
Le gouvernement ne s'arroge aucun droit, mais il a une
responsabilité: c'est celle de contrôler les deniers publics. Il
ne peut pas laisser à un tribunal si compétent puisse-t-il
être, le soin de décider des matières pécuniaires.
Le gouvernement est élu pour ça, il a la responsabilité de
l'administration et il ne peut, pour aucune considération, céder
ce droit à une tierce partie qui n'a aucune responsabilité devant
l'électorat.
Dans les circonstances, nous recherchons une négociation dans un
climat serein. Nous avons tenté, par cette loi, de présenter une
atmosphère claire, qui permette d'entreprendre ces négociations
et de les mener à bien. Nous ne recherchons pas d'affrontement; nous
recherchons des moyens de résoudre les problèmes tant au niveau
provincial que régional et local. C'est dans cet esprit que j'ai
entrepris et accepté cette tâche délicate de diriger et de
coordonner toutes les négociations qui auront lieu au cours de 1975.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Cette motion de troisième lecture
est-elle adoptée?
M. BURNS: M. le Président, sur division. Je vous demanderais
d'enregistrer la dissidence des députés de Saguenay et de
Maisonneuve.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté sur division, avec la
dissidence des députés de Saguenay, Maisonneuve, Beauce-Sud,
Rouyn-Noranda et Johnson.
M. ROY: Le leader pourrait-il nous dire, dans l'intervalle, s'il a
l'intention d'appeler aujourd'hui les lois présentées hier, par
le ministre de l'Agriculture, M. Toupin?
M. LEVESQUE: Plus probablement demain. Est-ce que le
député de Rouyn-Noranda serait prêt à faire son
intervention sur le projet de loi des Affaires intergouvernementales? Oui.
Alors, projet de loi no 59, M. le Président. Article 48.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Article 48.
M. LEVESQUE: Le député de Rouyn-Noranda.
Projet de loi no 59 Deuxième lecture
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Reprise du débat sur la motion de
M. Levesque proposant que le projet de loi no 59 soit maintenant lu pour la
deuxième fois. Le député de Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M.SAMSON: M. le Président, c'est là un genre de loi qui
nous a été déposée la semaine dernière.
Evidemment, vous allez comprendre qu'avec le travail de la fin de session, la
surabondance du travail de la fin de session, il n'est pas toujours facile pour
les membres de l'Opposition d'étudier tellement en profondeur ces
projets de loi. J'ai eu la malchance en fin de semaine de ne pouvoir revenir
à Québec à temps à cause des tempêtes. Les
avions n'ayant pu me ramener de Rouyn-Noranda, j'ai dû passer la nuit
dans le train et, malheureusement, je n'ai pas eu le temps de fouiller à
fond ce projet de loi.
Il demeure quand même que le projet de loi du ministère des
Affaires intergouvernementales nous amène peut-être à
repenser en quelque sorte la philosophie du ministère des Affaires
intergouvernementales. C'est un ministère qui, en plus de coordonner les
efforts de tous les ministères du Québec, fait la liaison entre
les gouvernements, soit avec le gouvernement fédéral ou encore,
via le gouvernement fédéral, avec d'autres gouvernements.
Bien sûr, M. le Président, je suis de ceux qui ont
déploré dans le passé le manque d'outils du
ministère des Affaires intergouvernementales et, en plus d'un certain
manque d'outils, peut-être aussi la philosophie passée.
Je me rappelle, et j'ouvre une parenthèse pour le mentionner,
d'une certaine philosophie qui en quelque sorte n'a pas tellement aidé
certaines conférences fédérales-provinciales au moment
où un illustre personnage était sous-ministre des Affaires
intergouvernementales. Je veux parler de M. Claude Morin, qui était
celui qui préparait les conférences
fédérales-provinciales en même temps qu'il préparait
son entrée au Parti québécois. Il est évident, M.
le Président, que l'on ne pouvait retrouver à ce
moment-là, dans les discussions en provenance du Québec et dans
les dossiers préparés par le Québec, la philosophie du
gouvernement, quel qu'il soit. Il a été rouge, il a
été bleu, ce gouvernement, mais c'est en quelque sorte une
façon d'infiltrer une philosophie pour, à l'extérieur du
Québec, démontrer un visage différent de celui que les
Québécois veulent réellement.
Or, on peut facilement se rappeler certaines conférences
fédérales-provinciales. Je n'ai pas fait d'enquête
personnelle, je n'ai pas d'espion dans les bureaux du gouvernement, du
moins
pas dans les bureaux des Affaires gouvernementales, pas dans d'autres
non plus pour vous rassurer, M. le Président. Mais il est venu à
mes oreilles que, lors d'une certaine conférence
fédérale-provinciale conduite par un ancien premier ministre, le
premier ministre du Canada connaissait d'avance l'intervention du premier
ministre du Québec. Par quel moyen exactement? Je ne le sais pas.
On m'a évidemment informé de différentes
façons, et tout est possible lorsque nous sommes dans les affaires
intergouvernementales. Je pense qu'il faudrait être un enfant pour ne pas
savoir que chacun des partenaires concernés a son propre réseau
de renseignements, pour ne pas dire d'espionnage; je ne voudrais pas dire
espionnage mais réseau de renseignements. Cela fait que, sachant
à l'avance ce que le premier ministre du Québec va livrer
à l'occasion d'une conférence fédérale-provinciale,
il est facile pour des gens d'en informer l'interlocuteur ou encore de
préparer d'une façon telle les dossiers. C'est susceptible de
mettre le trouble pour ensuite justifier un parti séparatiste de dire:
Bien! vous voyez, il n'y a pas moyen de faire autrement.
Mais s'il n'y a pas moyen de faire autrement c'est peut-être parce
qu'on n'a pas présenté les dossiers autrement. Je ne veux pas
dire par là, M. le Président, que c'aurait réglé
tous les problèmes, au contraire. Il y a beaucoup de choses qu'il nous
faut réclamer, mais il nous faut les réclamer de façon
ferme et non seulement comme des voeux pieux. Malheureusement je dois aussi
dire que le ministère des Affaires intergouvernementales a
préparé des dossiers, même après le départ de
M. Morin, d'une façon telle que ça n'a peut-être pas
changé grand-chose.
Est-ce qu'il y avait continuité au ministère des Affaires
intergouvernementales de cette philosophie qui n'était pas celle du
gouvernement? Je ne le sais pas, mais il se trouve que, quand même, nous
avons les résultats de choses qui sont préparées chez nous
souvent.
J'aurais préféré de beaucoup, et je
préfère encore de beaucoup que ce ministère se donne des
outils valables. Il y va également de la philosophie du gouvernement,
que le gouvernement ait des revendications plus fermes vis-à-vis du
gouvernement fédéral, ce qui faciliterait la tâche du
ministère des Affaires intergouvernementales.
Vous savez, M. le Président, ce que j'ai maintes fois
clamé, et je continue à le faire. Dans un contexte
fédéral, tel que nous le vivons actuellement, nous avons
plusieurs petits anicroches qui souvent relèvent d'une molesse
passée des gouvernements. Qu'il suffise de mentionner les
problèmes que connaît le ministre de la Justice
présentement, vis-à-vis son homologue fédéral,
concernant sa réclamation juste. Et je n'hésite pas à dire
au ministre de la Justice qu'il a mon appui en ce qui concerne cette
revendication.
Peut-être qu'il n'a pas toujours mon appui en ce qui concerne sa
façon de déclarer certaines choses, mais si on pouvait
établir cela en termes de pourcentage, je pourrais dire qu'il l'a quand
même à 95 p.c, même dans certaines déclarations.
Ce qui veut dire que c'est un exemple, entre autres, que le gouvernement
du Québec n'est pas toujours traité justement par le
fédéralisme actuel. Cela ne veut pas dire qu'on doit condamner le
fédéralisme comme tel, car le fédéralisme est
représenté par un gouvernement. Et selon que le gouvernement
veuille donner telle ou telle tangente, cela peut démontrer ou faire
voir le fédéralisme d'une autre façon.
Mais je trouve que les dossiers qui sont actuellement débattus
devant le gouvernement fédéral sont sérieux, que ce soit
celui du ministère de la Justice, que ce soit celui du ministère
des Communications, que ce soit celui du ministère des Affaires sociales
ou les autres dossiers, nous sommes toujours à réclamer. C'est
là, je pense, une preuve assez concrète qu'il n'y a pas
satisfaction pour le Québec dans l'empire de l'actuelle
représentation fédérale, de ce fédéralisme
dit rentable ou non rentable, harmonieux ou non harmonieux, etc.
Je pense que le gouvernement aurait avantage et que le ministère
des Affaires intergouvernementales aurait avantage à préparer des
dossiers d'une façon peut-être différente, soit en prenant
le problème peut-être par le bon bout.
J'ai l'impression qu'actuellement, même malgré tous les
efforts que font le ministre de la Justice et les autres, on prend le
problème du mauvais bout. On réclame un résultat. On
réclame, évidemment, une guérison, mais on n'a pas
touché au mal. On n'a pas touché le bobo. On n'a pas
diagnostiqué le bobo, et avant de guérir je sais qu'il y a
des médecins dans cette Chambre qui savent ce que cela signifie
un mal, il faut le connaître, il faut le diagnostiquer. Même si on
applique de très bons remèdes, si on soigne une jambe quand le
mal est au coeur, cela ne réglera pas le problème. C'est dans ce
sens que je veux dire qu'il y aurait lieu, peut-être, de préparer
les interventions d'une autre façon, le faire de façon ferme.
Le fédéralisme ne pourrait être rentable sans qu'il
y ait une base importante de souveraineté pour chacun des partenaires y
participant, c'est-à-dire que chaque province doit avoir une base de
souveraineté en partant de l'essentiel, et l'essentiel, pour nous, est
que le Québec devrait contrôler son crédit. Si on ne
contrôle pas cela, je pense que nous pouvons revendiquer, nous pouvons
demander, mais on se retrouvera toujours avec le même problème du
chien qui court après sa queue. Il court tout le temps et il ne la
"pogne" pas souvent.
Il y a un deuxième point qui est important et c'est celui de la
reprise en main de notre fiscalité. Vous savez comme moi que cela a
été transmis à Ottawa pour les raisons de guerre, pour une
période temporaire. La guerre est finie
depuis longtemps, la période temporaire est devenue permanente,
et nous n'avons toujours pas en main nos sources de fiscalité au
Québec. C'est le fédéral qui s'en accapare de plus en
plus. Et le gouvernement du Québec, au lieu de réclamer le retour
de ses droits, réclame des équivalences comme le dossier de la
justice, comme un autre dossier.
On réclame des équivalences, on fait des guerres de
juridiction, mais on n'a pas le courage de réclamer la base, ce qui est
important. C'est celui qui paie qui est le patron et quand c'est Ottawa qui
ramasse les taxes, qui a le pouvoir de taxation, quand c'est Ottawa qui paie
par des subventions au Québec: subventions à l'industrie,
subventions ici, subventions là, bien, c'est Ottawa qui mène.
C'est clair que dans le contexte actuel, on se retrouve devant ça. On a
drôlement l'impression que c'est le gouvernement d'Ottawa qui mène
et que le gouvernement du Québec n'est qu'une succursale.
Pour changer cet état de choses, pour que le
fédéralisme redevienne exactement ce qu'il aurait dû
toujours être, il faut que le Québec possède ses droits.
Qu'il les reprenne en main, ses droits, et que là nous puissions avoir
un vrai fédéralisme de services et de participation, pour que
chacun, chacune des provinces possède entièrement ses droits et
qu'en collaboration avec le gouvernement fédéral et les autres
provinces on voie aux politiques interprovinciales, internationales. On n'a
rien contre cela, je pense que c'est établi, de par le Marché
commun européen, que nous avons avantage à ce qu'il y ait une
fédération dans ce sens, pour notre commerce, pour l'industrie,
pour l'économie, etc.
Mais, M. le Président, cela doit se faire en partant de provinces
qui ont des pouvoirs et non en partant d'un gouvernement fédéral
qui dicte sa volonté aux provinces. En partant de provinces qui ont des
pouvoirs, cela voudrait dire que nous aurions notre mot à dire en ce qui
concerne nos propres exportations et nos importations. Présentement,
personne ne peut dire que le Québec est maftre-d'oeuvre, sur son
territoire, de ces choses. C'est le fédéral. On nous dira que
dans le contexte actuel, le fédéralisme doit se faire comme
ça. Je dis: Cela peut se faire de telle façon, mais cela doit se
faire avec des pouvoirs accrus aux provinces qui pourraient, elles,
déterminer quelles sortes d'exportations elles veulent bien faire,
quelles sortes d'importations elles veulent bien endurer sur leur
territoire.
Voici une autre preuve de cet état de choses lamentable qui est
de ne pas contrôler ces choses nous-mêmes, ou du moins de ne pas
avoir suffisamment notre mot à dire dans cette situation, dans ce cas en
particulier.
Dernièrement, notre premier ministre du Québec, de passage
en France, par certaines déclarations, nous a laissé savoir qu'il
avait tenté d'intéresser les Français à l'achat
d'ura- nium enrichi. Le même jour, un ministre fédéral y va
d'une déclaration et le lendemain un autre ministre
fédéral d'une autre déclaration en menaçant le
Québec d'utiliser son droit de véto pour l'empêcher de
faire ce genre d'exportations. Ce genre de décisions, M. le
Président, est nettement au détriment du Québec. Dans le
contexte actuel, avec la philosophie qui est celle du ministère des
Affaires intergouvernementales ou du gouvernement, personne n'a cru bon de
répondre à cela. Aucun ministre du Québec ne s'est
levé pour dire: Enfin, on doit être maîtres chez nous au
Québec. Mais non, on a laissé le gouvernement
fédéral faire ses petites déclarations, on a laissé
à la France l'impression qu'on n'avait rien à dire
là-dedans. On a laissé, une fois de plus aux
Québécois l'impression qu'on n'avait rien à dire
là-dedans.
Ce qui m'amène, M. le Président, à dire que le
Québec doit également contrôler son commerce
intérieur et extérieur. Une autre chose qui est de plus en plus
importante au Québec. Nous avons eu, dernièrement, un
débat, qui a duré toute une journée, sur cette seule
question de l'immigration. Je n'ai pas l'intention de revenir sur ce
débat. Il a été fait. Je ne peux que continuer à
déplorer la faiblesse de l'argumentation québécoise. Je ne
peux que continuer à déplorer le manque de leadership du
Québec en ce domaine. Je ne peux que continuer à déplorer
le fait que le Québec ne se donne pas les outils nécessaires pour
être le maître d'oeuvre en matière d'immigration.
Mais non, on se retrouve toujours à la remorque du gouvernement
fédéral. On se retrouve non seulement à la remorque du
gouvernement fédéral en cette matière, mais encore le
Québec endosse les stupides décisions d'un ministre
fédéral, tel que nous l'avons vu dernièrement, de
déporter près d'un millier d'Haitiens dans leur pays, avec tout
ce que cela comporte.
Je pense que j'évalue bien la situation en disant que même
les députés libéraux étaient favorables à la
cause des Haïtiens, que les députés libéraux
étaient, en tout cas, très sympathiques à leur cause.
Mais, encore une fois, c'est le fédéralisme rentable qui a eu
raison. Encore une fois, c'est le fédéralisme rentable qui leur a
dicté leur conduite.
Le fédéralisme rentable, s'il en était, la conduite
serait différente. Il n'en est pas de fédéralisme
rentable. Il est actuellement un fédéralisme lamentable et c'est
le Québec qui est, encore une fois, victime de cette affreuse
situation.
Cela dit, je voterai, bien sûr, pour le projet de loi qui a
été déposé, le projet de loi no 59, car nous y
retrouvons certaines améliorations. Nous espérons que le ministre
des Affaires intergouvernementales utilisera au maximum ces quelques nouveaux
outils, si petits soient-ils, pour tenter de faire en sorte que le
Québec non seulement reprenne sa place, mais prenne toute sa place dans
ce contexte canadien. Que le
Québec contrôle son crédit, sa fiscalité, son
commerce et son immigration et, à ce moment-là, nous serons dans
un fédéralisme de services et de participation, mais nous serons,
pour une fois, maîtres chez nous. Rien ne sert de dire maître chez
nous, de le crier, de le prétendre, si on n'obtient pas ces quatre
points. Pour les obtenir, il faut avoir le courage non seulement de les
demander, mais de les exiger. Pour être en mesure de les exiger, il faut
que le ministère des Affaires intergouvernementales se donne plus de
pouvoirs.
Le ministre, dans sa réplique je ne suis pas tellement au
fait de son personnel devrait peut-être nous rassurer à
savoir que son ministère ou que les fonctionnaires qui prennent des
décisions, du moins les prennent bien en relation avec les objectifs du
Québec.
En tout cas, je m'inquiète encore. Je ne suis pas certain qu'il
n'y a pas d'autres Claude Morin, dans ce ministère, qui profitent de la
situation. Le ministre est peut-être mal placé pour me
répondre, M. le Président. Il est peut-être très mal
placé parce qu'il est dans une situation délicate. Il a à
travailler constamment avec des gens qui, peut-être, sont encore sous la
direction de M. Claude Morin ou d'autres de même acabit.
M. le Président, voici mon voeu, en terminant; même si le
ministre ne peut pas nous le dire, je formule le voeu qu'il prenne cela en
sérieuse considération. S'il y a un ménage à faire,
je lui souhaite tout le courage possible pour faire ce ménage pour qu'au
moins, quand il y aura des décisions de prises, des gestes de
posés, nous sachions bien que ce sont les gestes du gouvernement. Et, si
ce sont bien les gestes du gouvernement, si ces gestes ne sont pas posés
en faveur des Québécois, nous serons en mesure de frapper plus
fort sur le gouvernement.
Mais présentement, je n'ai pas tout à fait la certitude
que ce qui sort du ministère est bien la philosophie du gouvernement. Je
demande à être rassuré sur ce sujet, M. le
Président. Merci.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): L'honorable député de
Johnson.
M. Maurice Bellemare
M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce qu'il est entendu qu'on suspend à
midi et demi ou à une heure?
M. LEVESQUE: Une heure. Est-ce que le député en a pour
longtemps?
M. BELLEMARE (Johnson): A peu près quinze minutes.
M. LEVESQUE: Est-ce que le député de Maisonneuve est
ici?
M. CHARRON: II est à son bureau, je crois.
M. LEVESQUE: Vous pouvez commencer.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, lors du discours
inaugural, ce qu'on appelle communément le discours du trône, le
14 mars dernier, on lisait dans un des paragraphes: Une nouvelle étape
dans l'adaptation constante des mécanismes de coordination des relations
intergouvernementales. Ceci laissait prévoir sûrement, M. le
Président, que le ministère des Affaires intergouvernementales
proposerait une nouvelle loi-cadre.
Ce ministère, M. le Président, fut créé en
1961 par l'honorable M. Lesage, alors premier ministre de la province, sous le
nom de ministère des Affaires fédérales-provinciales. A
cette époque, particulièrement, où on défendait
plus que jamais l'autonomie de la province et les droits qui nous sont
réservés en vertu de la constitution canadienne, les fonctions du
ministère étaient bien limitées aux relations entre le
Québec et le gouvernement fédéral et les gouvernements des
autres provinces canadiennes.
En plus, M. le Président, que le ministère veille à
la bonne marche de ces relations, on disait, au deuxième paragraphe de
l'article 2 du chapitre 56: "II doit spécialement favoriser le plein
épanouissement de l'autonomie provinciale j'attire l'attention du
ministre et faciliter la collaboration intergouvernementale dans le
respect de la constitution".
Donc, M. le Président, l'idée du législateur, dans
le temps, était d'abord de favoriser le plein épanouissement de
l'autonomie provinciale.
C'était un des critères de base de la loi de 1961. Comme
corollaire, la collaboration intergouvernementale dans le respect de la
constitution canadienne.
Je pense que c'est ce qu'ont fait les gouvernements de MM. Lesage et
Johnson, chacun dans leur juridiction et dans le temps où ils ont
gouverné la province.
Nous retrouvons, dans l'esprit de la loi qui nous est offerte ce matin
en deuxième lecture, un peu de ce qu'avait voulu le législateur
en 1961, et je trouve des passages comme ceux-ci: "veiller à ce que soit
respectée la compétence constitutionnelle du Québec".
C'est encore un impératif: "veiller à ce que la
compétence constitutionnelle du Québec soit véritablement
respectée".
A mon avis, toute la force de ce projet de loi réside dans ce
petit article no 13, à condition que l'application pratique soit faite
avec vigueur et détermination.
Or, à en juger par la performance du gouvernement que nous avons
devant nous et par les gestes qu'il a posés jusqu'ici, je
n'hésite pas à dire que nous avons peu d'espoir que cet article
soit appliqué en vue de préserver l'autonomie de notre
province.
Le gouvernement fait-il tout en son pouvoir, à l'heure actuelle,
pour que les compétences constitutionnelles du Québec soient
vérita-
blement respectées, comme l'ont fait tous les autres premiers
ministres jusqu'à maintenant, même si on remonte dans l'histoire
politique de la province? Nous retrouvons, chez ceux qui ont été
de farouches défenseurs de l'autonomie de la province, sans avoir
écrit dans une loi les principes que je viens de vous citer, et dans la
loi de 1961 et dans celle d'aujourd'hui, le respect intégral de
l'autonomie de la province.
Nous avons connu des grands hommes. Il y a eu Alexandre Taschereau, qui,
dans le temps, a fait une lutte titanesque contre le gouvernement
fédéral, même si c'étaient des amis politiques. M.
Taschereau a laissé son nom comme un grand autonomiste dans la province.
Vous avez eu M. Duplessis qui a fait une lutte acerbe pendant des
années, il a même lutté seul contre le pouvoir central.
Toutes les provinces l'ont abandonné et il a été
obligé de faire ses revendications, pendant des années, seul
contre le pouvoir central qui, à la fin, à cédé aux
pressions qui étaient faites par les arguments très solides
qu'ont apporté M. Sauvé, par exemple, M. Barette, dans le
règlement des questions des universités, M. Johnson quand il a
établi clairement la position du fédéral à la
réunion de Toronto et M. Lesage qui, lui même, a été
un défenseur virulent de l'autonomie de la province. Selon la loi qu'il
avait passée en 1961, il a véritablement et clairement
établi que le premier but de la Loi du ministère des Affaires
provinciales était de favoriser le plein épanouissement de
l'autonomie provinciale. Nous le retrouvons dans l'article 13 de ce projet de
loi.
Mais qu'a fait le gouvernement aujourd'hui?
Pourquoi, comme le disait mon collègue de Rouyn-Noranda tout
à l'heure, ce "fédéralisme rentable" qui, en somme, quand
on le regarde de près, ne rapporte absolument rien à la province,
sauf des génuflexions, sauf de la soumission qu'un gouvernement comme le
nôtre ne devrait pas montrer devant les autorités
fédérales?
M. le Président, je vous rappelle ici la question que j'ai
posée à l'honorable premier ministre, le 21 novembre, lui
demandant quelle serait son attitude vis-à-vis des ressources naturelles
de la province de Québec devant l'empiètement
décidé, voulu, prémédité, du ministre des
Finances, M. Turner, qui n'a pas craint d'entrer dans un domaine strictement
provincial et d'imposer, dans son budget fédéral, des taxes sur
des redevances qui appartiennent exclusivement aux provinces. J'ai eu comme
réponse de l'honorable premier ministre: "II y a une conférence
des ministres des Finances les 9 et 10 décembre où on va
réitérer le point de vue du gouvernement du Québec qui est
bien connu là-dessus".
Eh bien, on en a eu une conférence, les 9 et 10 décembre!
Qu'est-ce qui s'est passé, M. le Président? Quelle a
été l'attitude héroïque du ministre des Finances
devant le gouvernement fédéral? Il a lui-même fait une
juste revendication de ce qui nous appartient en droit dans la province de
Québec, surtout au point de vue de l'autonomie. M. le Président,
le ministre des Finances n'a pas reculé, puisqu'il a dit: "Je soutiens
que le gouvernement fédéral se livre à un abus de
confiance, un abus du droit bien distinct qui appartient aux provinces, en
augmentant substantiellement sa part des revenus provenant des compagnies qui
exploitent les ressources naturelles de nos provinces". L'honorable ministre
des Finances continue: "Ottawa devait maintenir la
non-déductibilité des redevances provinciales s'il consentait
à augmenter l'abattement fiscal spécial pour les compagnies
minières ou de pétrole".
Cela, M. le Président, c'est un geste positif. Et qu'a
répondu le gouvernement fédéral? Il a dit: C'est notre
champ, c'est notre budget, nous allons l'exécuter. Le
fédéral empêche les provinces véritablement de jouer
le rôle de leadership auquel aspirent naturellement en ce domaine tous
ceux qui, comme nous, ont des droits; non pas des privilèges. Cela
n'existe pas quand on parle de constitution canadienne; ce sont des droits
acquis. Je vous cite un article de Claude Ryan, le 11 décembre 1974:
"Encore là, il serait néanmoins désastreux que, dans le
seul dessein de porter ses revenus à un niveau arbitrairement et
unilatéralement fixé, le gouvernement fédéral
risque de compromettre le développement futur des provinces ou
d'empêcher ces provinces intéressées de jouer le rôle
de leadership auquel elles aspirent normalement dans ce domaine
provincial."
Eh bien, M. le Président, est-ce qu'on peut dire que le
gouvernement québécois, d'une manière normale, d'une
manière ordinaire, a respecté véritablement sa
première loi, qui lui donnait comme responsabilité de favoriser
le plein épanouissement de l'autonomie provinciale? C'était, M.
le Président, le premier diktat de la loi de 1961, chapitre 56. Est-ce
que les droits de la province de Québec au point de vue de l'autonomie
n'ont pas reculé?
Est-ce que, M. le Président, on n'est pas inquiets, actuellement,
tous ce que nous en sommes, devant les empiétements du gouvernement
fédéral? M. Garneau, le ministre des Finances, disait qu'il
était inquiet du fédéralisme de M. Trudeau et de M.
Turner. M. Garneau revient très déçu d'Ottawa, M. le
Président, et je suis heureux de constater qu'au moins il y a un
ministre qui sait le dire aux gens d'Ottawa.
Il y en a un autre aussi, le ministre de la Justice, et j'y reviendrai
tout à l'heure, qui a été... Non, je dis que j'ai pour
vous, je pense, une reconnaissance que je veux vous manifester devant le geste
que vous avez posé dernièrement. M. le Président, je pense
que par son silence comme président, comme président du Conseil
exécutif et comme premier ministre de la province, le premier ministre
ne remplit pas véritablement son rôle au point de vue de
l'autonomie, ce que tous ses prédécesseurs dans la province de
Québec ont fait.
II a été, jusqu'à aujourd'hui, un homme
fidèlement soumis aux directives, aux diktats d'Ottawa. Cela, dans la
province de Québec, on ne le lui pardonnera pas, M. le Président.
Il a de très belles qualités, je l'admets, mais sur l'autonomie,
je crois qu'on n'a pas le droit d'être soumis vis-à-vis les gens
d'Ottawa. On n'a pas le droit non plus d'agir par compromis comme il l'a dit
l'autre jour, devant son ministre des Finances. Je n'ai pas aimé
ça, de la part du premier ministre, l'entendre dire à son
ministre de la Justice: II y a telle chose que nous avons obtenue, mettez un
peu la sourdine à votre affaire.
Non ce n'est pas par ces compromis que nous allons obtenir
véritablement la reconnaissance de nos droits, qui nous sont
donnés en vertu d'une constitution pour laquelle tous les premiers
ministres de la province, pendant des années, se sont battus. Si,
véritablement, on peut respirer, nous le peuple québécois,
le peuple canadien-français un peu plus dans cette province qui nous
appartient, c'est grâce aux luttes qu'on faites tous les premiers
ministres, qu'ils aient été libéraux, qu'ils aient
été de l'Union Nationale, qui, comme M. Lesage, ont porté
le feu de la guerre véritablement là où il fallait le
faire. Pas en Chambre par des déclarations, pas sur des ordinateurs, par
des déclarations qui ne valent rien, mais véritablement devant
notre adversaire; pas notre ennemi, mais notre adversaire qui est le
gouvernement centralisateur d'Ottawa.
Par de la complaisance, on fait rire de soi. Essayer de les attirer dans
des considérations un peu grandiloquentes, non, M. le Président!
Ce n'est pas par de la complaisance qu'on va réussir à
mâter ce gouvernement centralisateur, ce pouvoir fédéral
qui en somme n'a qu'un but, tâcher de grouper tout ce qui est
administrativement financier sous sa coupole. Je dis et je répète
que c'est de la lâcheté que de ne pas se battre et continuer ce
combat qu'ont livré tous les autres premiers ministres vis-à-vis
les autorités centralisatrices d'Ottawa, cette arrogance que manifeste
le premier ministre d'Ottawa devant des justes réclamations d'une
province qui a des besoins. Eh bien, M. le Président, nous ne sommes pas
seuls qui affirmons que le gouvernement est un gouvernement de centralisateurs,
un gouvernement d'accapareurs. M. Lougheed de l'Alberta l'a dit lui en termes
catégoriques: Ottawa est en train de détruire complètement
la confédération canadienne. "Avant longtemps, dit M. Lougheed,
nous aurons à payer cher la division de notre Canada. C'est M. Blakeney,
de Saskatchewan, qui dit qu'il a véritablement peur que la
confédération canadienne soit secouée sur ses bases, qui
ont fait la grandeur de notre pays.
C'est aussi M. Kierans, un ancien ministre de ce gouvernement
libéral, qui est allé en Colombie-Britannique dernièrement
et qui a dit: "Où va-t-on avec le partage de ces pouvoirs, si ce n'est
à un désastre évident"? M. Kierans a été
ministre libéral dans cette Chambre. Il n'a pas craint d'élever
la voix, et fortement, contre le budget Turner. Les ressources des provinces
doivent demeurer exclusivement sous le contrôle provincial. C'est M. Roch
LaSalle, un député que vous connaissez, le député
de Joliette, qui s'est élevé fortement contre le budget
Turner.
C'est aussi M. Guy Saint-Pierre, le ministre qui demande un front commun
des provinces, un front commun pour faire échec à la
centralisation d'Ottawa, et c'est contenu dans un article du 12 novembre
1974.
M. M. Lougheed, c'est la destruction de la confédération.
Pour M. Saint-Pierre, c'est un front commun des provinces. Pour M. Blakeney,
c'est une question de principe fondamental. Pour M. Wagner, cela compromet
sérieusement l'unité nationale.
Je n'ai pas besoin de vous dire que ce sont des gens qui ont vécu
en politique depuis des années et qui ont apporté leurs
témoignages à ce que nous essayons de faire valoir ce matin
devant le ministre à l'occasion de la refonte de la loi 59...
M. LEVESQUE: ... les affaires intergouvernementales.
M. BELLEMARE (Johnson): ... les affaires intergouvernementales. Ce sont
des termes. Il s'agit de se familiariser avec eux.
M. le Président, qu'ont fait le gouvernement et
particulièrement le premier ministre en vue de sortir de l'impasse dans
le domaine névralgique des communications?
Là, comme dans le domaine de la police, où le ministre de
la Justice avait fait preuve d'audace, avait fait preuve de
détermination, on préfère laisser le ministre responsable
se débattre seul au lieu de s'élever en bloc contre une
ingérence inadmissible du fédéral et cela, en dépit
d'une politique savamment orchestrée où l'on se proclame en
faveur...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): La pertinence...
M. BELLEMARE (Johnson): La pertinence? C'est l'article 13 du projet de
loi: "Le ministre doit, dans la conduite des affaires intergouvernementales,
veiller à ce que soit respectée la compétence
constitutionnelle du Québec". Si ce n'est pas de la pertinence, M. le
Président, c'est moi qui suis impertinent. Je ne le pense pas. Demandez
au ministre pour voir si c'est la pertinence du débat.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): En fait, je suis tout à fait
d'accord que le domaine est de la pertinence du débat, mais de parler du
dossier spécifique et des résultats que les négociations
peuvent donner...
M. BELLEMARE (Johnson): Non, M. le Président, je cite des choses
en passant. Je pourrais parler de la police, des démarches qui ont
été
faites, le nombre d'intervention et, particulièrement, celle qu'a
fait le ministre, dimanche il y a quinze jours, à la
télévision.
Je pourrais dire tout ça, mais je ne le dis pas. J'en parle en
passant, je dis que l'honorable premier ministre a laissé tomber son
ministre de la Justice, l'autre jour, à ma honte. Je n'ai pas pu
accepter ça, un homme d'une vaillance pareille le ministre de la
Justice se laisser bafouer par son premier ministre, en pleine Chambre
et avec une gifle, M. le Président, qui a retenti jusque de ce
côté-ci de la Chambre. Je l'ai vu rougir...
M. CHOQUETTE: Est-ce que l'honorable...
M. BELLEMARE (Johnson): ... le ministre de la Justice. Cela ce n'est pas
de la pertinence, M. le Président.
M. CHOQUETTE: Est-ce que l'honorable député de Johnson me
permettrait une question?
M. BELLEMARE (Johnson): Oui.
M. CHOQUETTE: II a vu l'émission que j'ai faite à
Politique Atout, il y a quinze jours, mais est-ce qu'il a vu l'émission
du premier ministre, il y a une semaine, au même programme?
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, mais je ne l'ai pas trouvée aussi
intéressante que la vôtre. Vous aviez plus de "punch", comme on
dit. Vous l'avez traité d'hypocrite, et dit qu'il se cachait
derrière les colonnes du temple.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! C'est justement
là que je parlais tantôt de la pertinence.
M. BELLEMARE (Johnson): J'ai dit que ce n'était pas de la
pertinence. Là, je vais revenir à la pertinence, mais j'ai dit
que j'aurais pu dire tout cela. Je ne l'ai pas dit.
M. le Président, face à toutes ces merveilleuses
réalisations, je pense que le Québec n'a pas à craindre
pour l'avenir, ses compétences constitutionnelles sont entre bonnes
mains et sont protégées. Dormons tranquilles, on a un ministre
des Affaires intergouvernementales serein, aimable et surtout, comme disent les
journaux, on ne pourrait pas faire de peine à cet honorable ministre.
Mais il y a un article qui m'a réellement beaucoup plu quand on a
parlé de l'honorable ministre des Affaires intergouvernementales. Ce
n'est pas tout d'être bon garçon, ce n'est pas assez d'être
un bon parlementaire, ce n'est pas de trop de connaître sa
procédure, mais il y a une chose, par exemple, qui lui manque, c'est
cette force qu'avait le ministre des Finances, l'autre jour, à Ottawa
pour dire en face de ses interlocuteurs: Messieurs, vous êtes
après saboter la confédération canadienne. Ce sont des
droits exclusifs aux provinces. Cela, c'est positif. Comme le ministre de la
Justice, positivement a dit: Cela, c'est à nous autres. Comme le
ministre des Communications, quand il a entrepris, avec son collègue
d'Ottawa, une véritable lutte de droit constitutionnel, il avait raison.
Cela c'est de l'autonomie positive et non pas, comme le premier ministre, de la
complaisance, des compromis ou un silence qui le condamne.
M. le Président, j'attache trop, personnellement, de respect aux
compétences constitutionnelles pour ne pas me lever, à l'occasion
de l'adoption de ce projet de loi, pour demander au gouvernement, plus que
jamais, afin qu'on puisse véritablement dire du gouvernement de la
province de Québec, comme on le dit présentement de M. Lougheed,
comme on le dit de M. Blakeney, comme on le dit de M. Moores qui,
dernièrement, n'a pas eu peur de dire:
Si on est de trop dans la confédération canadienne, on
peut en sortir. Ce n'est pas un Canadien français qui a dit ça;
c'est M. Moores, le premier ministre de Terre-Neuve. Ce sont des gestes
positifs.
Qu'attend notre premier ministre ou qu'attend notre si bon ministre des
Affaires fédérales-provinciales ou intergouvernementales pour
faire une vraie scène, lui aussi? Je me demande s'il en fera une. Mais
je dis, par exemple, que nous avons la ferme intention de lutter contre cet
arrogant, le premier ministre, contre ceux qui, à Ottawa, pensent que
ces droits acquis depuis des décennies sont véritablement de
juridiction fédérale.
Ce n'est pas logique. Je pense que le premier ministre admet
lui-même qu'en termes logiques c'est l'un des dossiers les plus solides
qu'ait jamais présenté le Québec au gouvernement
fédéral, celui de la police. J'ai le droit de dire ça, M.
le Président, en passant?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Oui.
M. BELLEMARE (Johnson): C'est le premier ministre lui-même qui a
dit: C'est un des dossiers les plus solides qu'a le ministre de la Justice.
Tout de suite, il lui a dit : Je pense que vous devriez laisser passer d'autres
intérêts supérieurs avant de défendre la police. Ce
n'est pas bon. Ce n'est pas ça. Pourquoi décourager ses ministres
quand ils veulent véritablement assurer une parfaite autonomie?
Cependant, il n'a pas l'intention de le défendre lui-même
devant M. Trudeau, comme celui-ci le lui demandait à la suite des
attaques du ministre de la Justice. Cela, c'est de la logique. Cela est agir
dans le meilleur intérêt des Québécois, car c'est se
battre pour le respect des compétences constitutionnelles du
Québec. D'ailleurs, pourquoi se battrait-il puisqu'il admet
lui-même qu'on a perdu la bataille de la compensation pour les forces
policières? Mais on gagne l'inclusion des impôts scolaires par la
formule de la péréquation.
Je voudrais, en quelques mots, terminer. Jamais la conjoncture politique
n'a été plus
favorable à l'affirmation des autonomies provinciales. Nous avons
présentement, chose assez rare, des alliés dans les autres
provinces. Nous n'en avons jamais eu auparavant. Nous avions contre nous des
gens qui étaient dans un organisme centralisateur et qui appuyaient le
gouvernement dans sa législation. Jamais le gouvernement du
Québec n'a été plus ambigu, lui, dans son comportement et
plus faible dans sa détermination. Pourquoi ne pas faire, comme le
disait M. Saint-Pierre, un front commun pour assurer nos ressources naturelles?
Quand je parle de ressources naturelles, on voit ce qui vient d'arriver dans le
budget Turner à l'Alberta et à la Saskatchewan.
Peut-être que cela nous arrivera demain, dans cette richesse
naturelle qui nous appartient, l'électricité. Cela, c'est une
richesse naturelle qui nous appartient de droit en vertu de la
constitution.
M. le Président, pour ce qui est du reste du projet de loi, ce
n'est que la suite logique des réformes que le gouvernement Johnson
avait entreprises en 1967, lorsqu'il a élargi le rôle de ce
ministère en y ajoutant toutes les relations avec les autres
gouvernements ou organismes à l'extérieur du Québec.
M. le Président, je voterai pour le projet de loi, mais je
demande en terminant à l'honorable ministre d'y apporter tout son
dynamisme. Il n'aura sûrement pas de difficulté à
convaincre la majorité de ses collègues, que ce soit le ministre
des Communications, que ce soit le ministre des Finances, que ce soit le
ministre de la Justice. M. le Président, je semble même
détecter dans les positions que prend l'honorable ministre de
l'Education une certaine forme d'autonomisme. Je suis assuré qu'avec ses
collègues, s'il pouvait rejoindre l'esprit fédéraliste,
bien entendu, mais avec le respect intégral qui existe pour combattre le
gouvernement fédéral j'ai fini, M. le Président, je
m'assois il pourrait peut-être faire un pacte sacré et
obtenir plus de respect pour ce que la loi prévoit à l'article
13, le respect intégral de la constitution canadienne.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires
intergouvernementales.
M. CHOQUETTE: Félicitations, M. le député.
M. CLOUTIER: On n'applaudit pas pour le son mais pour le style.
LE PRESIDENT: II s'agit de la réplique de l'honorable ministre,
qui mettra fin au débat de deuxième lecture.
M. LEVESQUE: M. le Président, je voudrais exercer mon droit de
réplique. Cependant, comme il est déjà treize heures, je
propose la suspension jusqu'à quinze heures. A quinze heures, nous
entreprendrons l'étude du projet de loi relativement aux fusions de
certaines municipalités.
LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion d'ajournement du débat est
adoptée?
M. BURNS: J'aurais une question à poser à l'honorable
leader du gouvernement. Actuellement, la commission parlementaire des
institutions financières siège relativement à la Loi des
assurances. Je sais que le député de Lafontaine est...
M. LEVESQUE: Je lui en ai parlé. M. BURNS: Est-il d'accord?
M. LEVESQUE: C'est-à-dire que je pense que c'est le
député de Chicoutimi qui va le remplacer là-bas.
M. BURNS: Bon!
M. LEVESQUE: S'il y avait d'autres problèmes, on pourra s'en
reparler.
M. BURNS: On s'accommodera.
UNE VOIX: On a fait des arrangements...
LE PRESIDENT: Cette motion d'ajournement du débat est-elle
adoptée?
M. BURNS: Adopté. UNE VOIX: Of course.
LE PRESIDENT: L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à
quinze heures.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
Reprise de la séance à 15 h 8
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. LEVESQUE: Article 58.
Projet de loi no 98 Deuxième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la
deuxième lecture du projet de loi no 98, Loi concernant certaines
municipalités de l'Outaouais et du Haut-Saguenay.
L'honorable ministre des Affaires municipales.
M. Victor Goldbloom
M. GOLDBLOOM: M. le Président, la présentation de ce
projet de loi est rendue nécessaire par une constatation. Cette
constatation est que la loi qui est identifiée comme le chapitre 53 des
lois de 1971, communément appelé le bill 276, n'est pas, dans les
faits, applicable et utile. L'expérience vécue dans certaines
régions de la province nous mène forcément à cette
conclusion.
Donc, en abordant la présentation de ce projet de loi, je
voudrais immédiatement indiquer mon intention de proposer une refonte
complète de la Loi sur le regroupement des municipalités. Cette
réforme s'impose pour plusieurs raisons, mais la plus importante est
celle que j'ai déjà énoncée, c'est-à-dire
que nous trouvons, par l'expérience de plusieurs dossiers, que la loi
n'est pas applicable.
Ayant pris cette décision, j'avais deux choix: celui de laisser
tomber tous les dossiers qui sont encore actifs ou bien de prendre une
décision quelconque dans chacun de ceux qui sont toujours ouverts,
chacun de ceux qui représentent pour les municipalités d'une
région donnée un intérêt certain, un point de
litige, je l'admets facilement, dans quelques cas, mais quand même une
solution possible à un ensemble de problèmes que nous ne pouvons
résoudre autrement.
M. le Président, je voudrais dire un mot à l'intention de
l'Union des conseils de comté du Québec. Je suis très
conscient du fait que chaque fusion qui implique une municipalité rurale
diminue d'autant la force, l'importance numérique, la présence
sociale des municipalités rurales et donc du monde rural au
Québec. Je suis d'accord, M. le Président, qu'il ne faut pas
toucher à la légère à ce milieu qui, à cause
d'autres forces aussi, subit certaines diminutions d'effectifs et donc de
présence.
Je voudrais souligner, M. le Président, que j'ai rejeté
l'idée que, dans l'Outaouais, toutes les municipalités que nous
créerions par un tel projet de loi soient régies par la Loi des
cités et villes. Effectivement, vous constaterez que sur les huit dont
nous proposons la création, quatre seulement seraient régies par
la Loi des cités et villes et quatre par le code municipal.
J'irai plus loin, M. le Président. Je sais que les
municipalités rurales qui sont à la fois membres de la
Communauté régionale de l'Outaouais et du conseil de comté
éprouvent une difficulté financière à payer
annuellement deux cotisations. M. le Président, je suis prêt
à développer une formule pour aider ces municipalités
à fonctionner dans les deux organismes parce que je ne voudrais pas que
l'un ou l'autre souffre de ce qui a été fait en 1969, quand la
Communauté régionale a été créée, ni
de ce que nous nous proposons de faire présentement.
Dans la région du Haut-Saguenay, M. le Président, il y a
des municipalités à caractère rural, régies par le
code municipal, qui sont visées par les fusions proposées. Il y
en a une dont je voudrais, et le moment viendra quand nous discuterons des
articles du projet de loi, déjà annoncer mon intention de
proposer le retrait du Canton Tremblay de l'unité dans laquelle son nom
est présentement inscrit, et cela, à cause de l'orientation
actuelle de son développement.
Puisque j'en parle, je pourrais peut-être vider cette question
rapidement, c'est une municipalité qui avait accepté
volontairement la fusion avec la ville de Chicoutimi-Nord. Son attitude
vis-à-vis d'un regroupement plus important, à cause du
développement qui prend une orientation différente de celle
connue à l'époque, est donc différente. Je crois qu'il
serait préférable que nous laissions cette municipalité
à l'extérieur de l'unité de regroupement.
Je reviens, M. le Président, parce que cela intéresse
très particulièrement l'Union des conseils de comté, mais
l'Union des municipalités aussi, à mon intention de proposer une
refonte en profondeur du bill 276. Je voudrais dire à l'Union des
conseils de comté du Québec qu'en même temps et en
consultation avec elle et avec l'Union des municipalités j'ai
l'intention d'entreprendre la refonte du bill 277, qui touche les territoires
non organisés, aussi.
J'ai un autre message un peu particulier à adresser à un
groupe de municipalités, M. le Président. A toutes fins
pratiques, nous n'avons que trois dossiers qui demeurent actifs, les deux
visés par l'actuel projet de loi et l'agglomération de
Saint-Hyacinthe. Je voudrais dire aux citoyens de cette agglomération
que j'ai l'intention de poursuivre l'analyse de ce dossier. Je leur avais
indiqué que je chercherais à prendre une décision, en
même temps que j'en prendrais une sur les deux autres régions, et
que, dans la mesure du possible, la décision serait la même. Je ne
crois pas que nous soyons en mesure de prendre une telle décision
aujourd'hui dans le cas de Saint-Hyacinthe, mais cela ne veut pas dire que le
dossier est abandonné.
Au contraire, j'ai nettement l'intention de
consacrer le mois de janvier, tel que promis, à l'étude et
à l'analyse de ce dossier, et à l'évaluation
détaillée de l'opinion publique dans le secteur concerné,
et de recommander des conclusions.
M. le Président, l'Outaouais québécois est une
région un peu particulière. Elle représente pour nous
notre participation à une collaboration qui existe entre le
Québec et l'Ontario à cause de la frontière
constituée par la rivière des Outaouais que nous partageons et
elle constitue aussi notre participation aux activités qui
intéressent tout le Canada, les activités d'une capitale
nationale.
On sait que la présence de la Commission de la capitale nationale
est importante dans l'Outaouais québécois et que notre
participation, pour la majorité d'entre nous, est une participation
précieuse qui doit être assurée par des instances de
responsabilité administrative qui sont compétentes, qui sont
à la hauteur de leur tâche, qui sont capables d'exprimer
véritablement la présence québécoise
vis-à-vis de l'Ontario, à travers la rivière et dans les
activités pertinentes à une capitale nationale.
Nous avons présentement 32 municipalités. Elles
constituent le même territoire que celui qui est défini pour la
Communauté régionale de l'Outaouais et effectivement, les
32 en sont membres mais la Communauté régionale de
l'Outaouais a été définie aussi par rapport à la
présence de la Commission de la capitale nationale sur notre
territoire.
Il est donc logique que nous visions ce même territoire en
regardant la restructuration que nous proposons présentement pour les
municipalités. Je pense qu'il n'est pas difficile d'accepter la
thèse qu'administrer à 32, ce qui veut dire à 227
personnes, maires et conseillers, un territoire qui doit avoir une
cohérence et une population qui ne compte que 160,000 en chiffres ronds,
si nous sommes pour faire cela d'une façon raisonnable, les conditions
actuelles sont loin d'être idéales.
C'est pour cette raison fondamentale que nous n'avons pas voulu laisser
tomber ce dossier, en décidant de modifier la loi en profondeur en vertu
de laquelle les unités de regroupement ont été
créées.
J'ai pris certaines précautions, M. le Président, il
était normal que j'en prenne. J'ai écouté beaucoup, j'ai
fait faire des analyses scientifiques des tendances de l'opinion publique. J'ai
constaté que dans l'Outaouais québécois, sur les personnes
interrogées et ces personnes démontraient une connaissance
de la question qui a impressionné ceux qui ont fait le sondage 53
p.c. se sont déclarées carrément favorables à une
fusion et 22.5 p.c. seulement se sont déclarées opposées
à une fusion quelconque. Cela m'a encouragé à poursuivre
l'étude du dossier et à tirer des conclusions qui,
évidemment, se retrouvent dans le projet de loi que nous avons devant
les yeux.
M. le Président, même si la proposition originale faite
avant mon arrivée au ministère a été de former cinq
villes, nous avons décidé de constituer huit
municipalités, quatre villes et quatre municipalités rurales. En
faisant cela, nous ne touchons pas au territoire actuel de la ville de Hull ni
à celui du Canton de Hull, partie ouest.
Mais nous savons, M. le Président, que la ville de Hull est et
doit demeurer la capitale régionale de l'activité
économique, sociale, interprovinciale et
provinciale-fédérale. Nous savons que c'est une ville qui subit
présentement un développement impressionnant.
Nous savons aussi que c'est une ville qui occupe presque tout son
territoire et qui a besoin d'espace vital pour pouvoir continuer un
développement ordonné et équilibré.
L'équilibre de ce développement est important. Il serait trop
facile de laisser une ville qui aurait un centre fortement
développé, avec des édifices gouvernementaux et
commerciaux, sans équilibre quant à des éléments
résidentiels, récréatifs et autres.
Pour cette raison, le projet de loi prévoit des
négociations entre la cité de Hull et le canton de Hull, partie
ouest, et, d'autre part, entre la cité de Hull et la future ville de
Lucerne, quant à une nouvelle délimitation possible de leur
territoire respectif.
J'ai l'intention d'offrir aux municipalités
intéressées les services d'un urbaniste professionnel, autonome,
indépendant. Je ne voudrais pas que ce genre de décision soit,
à son origine, pris par les hommes politiques au niveau provincial.
Je crois que si les hommes politiques, au niveau local, peuvent
s'entendre, ce sera facile pour nous d'entériner leur entente. Sinon,
que nous ayons une recommandation professionnelle et nous l'examinerons en vue
de son application possible.
Or, j'ai voulu sortir cette considération de ce contexte
politique dans lequel nécessairement le projet de loi est
discuté. Il faudra nécessairement certaines modifications
à la structure de la Communauté régionale de l'Outaouais
et il y a des propositions dans le projet de loi quant à ces
modifications.
J'arrive maintenant à la région du Haut-Saguenay.
Là aussi, c'est un dossier que nous ne pouvions simplement pas laisser
tomber. D'ailleurs, le sujet est en discussion depuis plus de cinq
années.
Beaucoup d'argent a été dépensé pour
analyser la situation actuelle, le développement futur et la structure
administrative de cette région. Nous sommes devant une conclusion qui
est aussi proche d'être unanime qu'une considération de cette
nature peut l'être. C'est que l'on veut, en majorité, une
importante ville dans le Haut-Saguenay et l'on veut doter cette importante
ville d'une deuxième ville qui sera pour elle son port de mer. C'est ce
que le projet de loi propose, M. le Président.
Pour modifier la structure actuelle, nous avions trois options. Nous
aurions pu créer un gouvernement régional. M. le
Président, je dois
vous dire très simplement que le gouvernement actuel ne favorise
pas la création de gouvernements régionaux. Il est clair que, si
l'on en créait un dans une région, il faudrait faire la
même chose dans toutes les autres.
Deuxième option, une communauté urbaine. Vous pourrez fort
bien vous imaginer, M. le Président, que celui qui vous parle n'a pas
l'intention d'en créer une autre avant d'avoir résolu les
problèmes de celles qui existent, et encore.
Par ce processus d'analyse des options, je reviens à la
conclusion qui se dégage de ce que l'on peut sentir dans l'opinion
publique dans la région. C'est que la solution la plus acceptable
à tout le monde sûrement pas à chaque citoyen, ce ne
serait pas imaginable, mais à une majorité significative
serait la constitution d'une seule ville.
Comment le faire? Le faire immédiatement, d'un coup sec, comme on
pourrait le dire, ou le faire par étapes?
Je vous avoue que j'ai été tenté par l'idée
d'aller directement à la création d'une seule ville. Mais en
étudiant la question je me suis dit et je ne suis pas le seul
à le dire qu'il faudra, avant d'arriver à ce point, avoir
créé un schéma valable d'aménagement pour la
région concernée. Cela ne se fait pas du jour au lendemain.
Effectivement, M. le Président, dans le projet de loi, nous proposons
que les intéressés prennent trois années pour le
faire.
Vous savez que trois unités de regroupement ont été
créées, il y a plus de deux ans, dans cette région.
Effectivement, il n'y en a qu'une seule qui a, depuis lors, suivi les
procédures prévues dans la loi. C'est justement parce que cette
unité de regroupement a suivi les procédures prévues que
nous avons été à même de constater que la loi n'est
pas applicable, parce qu'il y a une multitude de portes qui sont grandes
ouvertes à toutes sortes de mesures pour en empêcher
l'application.
J'avais donc deux choix: ou bien laisser tomber toute la question ou
bien agir. Le gouvernement a choisi d'agir et d'agir en vertu de ce que j'ai
indiqué tout à l'heure, du consensus qui semble se dégager
autour de la nécessité de créer une seule ville de
Jonquière à Chicoutimi.
M. le Président, nous avons suivi l'évolution de cette
situation et nous avons constaté que parmi les quatre
municipalités intéressées par cette unité de
regroupement, l'une a choisi de ne pas s'asseoir à la table où se
discutaient toutes les considérations.
J'ai essayé de compenser pour cette situation; j'ai essayé
d'assurer des communications entre la ville dissidente et les trois
municipalités qui poursuivaient l'étude du dossier.
Je ne suis pas en mesure, personnellement, d'évaluer
l'efficacité de ces communications. La ville d'Arvida me dit aujourd'hui
qu'elles n'ont pas été suffisantes. Je trouve regrettable
qu'elles n'aient pas été suffisantes. J'aurais bien voulu que
même si Arvida avait choisi d'être absente de la table, elle se
soit tenue au courant de ce qui se discutait et ait communiqué son point
de vue; parce qu'après-tout, elle a invoqué comme raison de son
absence le fait qu'elle avait décidé spontanément de tenir
un référendum, et ce référendum a donné un
résultat négatif vis-à-vis de la fusion de l'unité
de regroupement en question.
Si tout ce que je faisais en proposant ce projet de loi était de
constituer, par lui, la nouvelle ville de Jonquière proposée, des
actuelles villes de Jonquière, Kénogami et Arvida et de la
paroisse de Saint-Dominique-de-Jonquière, je poserais, M. le
Président, le geste d'un petit politicailleur.
Ce que je suis obligé de faire, c'est de viser l'objectif ultime
et fondamental et de prévoir des étapes pour le
réaliser.
M. le Président, tout à l'heure, je vous ai cité
quelques chiffres en ce qui concerne l'opinion publique dans la région
de l'Outaouais. Je voudrais faire de même en ce qui concerne celle du
Haut-Saguenay. L'ensemble de la population interrogée manifestait un
grand intérêt et une grande connaissance de la situation et dans
cet ensemble de la population, 68 p.c. se sont exprimés en faveur d'un
regroupement en général; 20.5 p.c. seulement se sont
exprimés contre.
Si l'on regarde les municipalités une par une, on trouve que,
dans Kénogami, c'est 71 p.c. pour, 16 p.c. contre; dans
Jonquière, 80.5 p.c. pour, 9.5 p.c. contre; dans Arvida, 13.5 p.c. pour,
78.5 p.c. contre; dans Chicoutimi, 83.5 p.c. pour, 9 p.c. contre; dans
Chicoutimi-Nord et Rivière-du-Moulin prises ensemble, 62 p.c. pour, 13.5
p.c. contre; dans Bagotville, 75 p.c. pour, 7.5 p.c. contre; dans Port-Alfred,
92.5 p.c. pour, 3.5 p.c. contre. M. le Président, si l'on analyse ces
chiffres et on laisse de côté l'opposition bien connue de la ville
d'Arvida, on arrive à 77 p.c. des personnes interrogées dans les
autres municipalités qui s'exprimaient en faveur de la fusion.
Alors, M. le Président, nous fixons cet objectif et nous
établissons un cheminement. Il y en a qui diront peut-être que des
gouvernements changent et que des gouvernements peuvent même changer
d'idée; il est vrai, M. le Président, tout cela est possible.
Mais je pense bien qu'un gouvernement qui, sur un dossier de cette importance,
publiquement devant l'Assemblée nationale, trace un chemin, ce
gouvernement aurait beaucoup de difficultés par la suite à en
prendre un autre.
On me dit, M. le Président, que, dans ce qui est proposé,
il y a des choses qui ne seraient pas applicables, ou qui ne seraient pas
acceptables, surtout par la ville d'Arvida. Je souligne que, si l'on accepte le
cheminement et son but ultime, il y a moyen pour un conseil de modifier un
large éventail de considérations par résolutions.
Si vraiment nous constatons qu'il y a des éléments
inapplicables et qui doivent être corrigés, je serai heureux de
les corriger. Et si, pour discuter de ces modalités je parle des
modali-
tés et pas de la décision fondamentale, parce qu'elle est
contenue dans le projet de loi si, pour atteindre une harmonie hautement
désirable, il faut entendre des gens devant une commission
parlementaire, nous pourrons le faire au cours des prochains mois et, quand
nous nous réunirons de nouveau, apporter les modifications qui
découleront de cette discussion.
M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce que le ministre me permettrait juste une
question? Merci. M. le Président, le ministre vient de nous dire qu'une
commission parlementaire pourra entendre publiquement certains
témoignages. Est-ce qu'il a l'intention de les entendre avant la fin de
cette session ou au commencement de l'année prochaine ou à
l'occasion de la prochaine session? Avant que la loi soit adoptée, c'est
bien sûr.
M. BEDARD (Chicoutimi): Avant que la loi soit adoptée? Ce n'est
pas ça?
M. GOLDBLOOM: M. le Président...
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je voudrais bien qu'il
n'y ait pas d'ambi-guité et que l'on comprenne bien...
DES VOIX: ...
M. BELLEMARE (Johnson): II y a un ministre qui est bien plus
compétent que n'importe quel de vous autres. Le ministre est bien plus
compétent que vous autres, surtout en affaires municipales puis en
immeubles. C'est clair ça? Alors...
M. BACON: Est-ce que je pourrais poser une question au
député de Johnson?
M. BURNS: Est-ce qu'on a peur de répondre à la
question?
M. LESSARD: Le président de la commission, allons!
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): A l'ordre! Le
député de Johnson est en train de poser une question.
M. BELLEMARE (Johnson): C'est parce qu'il y a une ambiguïté.
Le ministre vient de dire qu'il pourra entendre les intéressés,
en commission parlementaire. Je voudrais bien qu'il définisse ce
point.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, j'ai dit clairement que le
principe du projet de loi est effectivement le sujet d'un débat en
deuxième lecture. Le gouvernement propose un principe et je crois que le
gouvernement va maintenir sa décision quant au principe. Quant aux
modalités, je serai heureux d'entendre les gens. J'aimerais que cela se
fasse dans une atmosphère de calme plutôt que de survoltage. Pour
cette raison, je pense qu'il serait logique, au lieu d'essayer de
légiférer sur le coin d'une table, de permettre au conseil
municipal provisoire de se constituer, de se réunir, d'examiner les
problèmes et de venir nous les exposer s'il y en a. Donc, c'est au cours
des premiers mois de l'an prochain que je serai, pour ma part, disposé
à convoquer la commission parlementaire pour discuter des
modalités de ce que nous aurons créé.
M. BELLEMARE (Johnson): Cela veut dire après que la loi sera
adoptée?
M. GOLDBLOOM: Oui, M. le Président, effectivement nous sommes en
deuxième lecture, et le règlement de la Chambre prévoit
que c'est avant la deuxième lecture que l'on convoque une commission
parlementaire pour entendre des témoignages.
Je voudrais faire lecture d'un télégramme qui est
arrivé à mon bureau à midi: "Votre projet de loi
concernant certaines municipalités de l'Outaouais et du Haut-Saguenay,
déposé hier à l'Assemblée nationale, traduit
fidèlement dans les faits les prises de position de notre Conseil
régional de développement depuis trois ans. Nous avons eu une
mission de planification régionale en 1969 qui a coûté
plusieurs centaines de milliers de dollars et qui déplorait le
développement anarchique du territoire du Haut-Saguenay, en raison du
trop grand nombre de centres de décision. Si nous voulons mettre en
oeuvre, au plus tôt, le schéma d'aménagement du secteur
concerné, schéma qui activera le développement industriel,
le regroupement proposé s'impose sans délai. Sincères
félicitations pour décision courageuse et apolitique. Souhaitons
fermement que la nouvelle loi soit votée avant l'ajournement de la
période des Fêtes." Et c'est signé...
M. LEGER: Faut-il pleurer ou faut-il en rire?
M. GOLDBLOOM: "... Thomas-Eugène Simard, directeur
général du Conseil régional de développement
Saguenay-Lac-Saint-Jean-Chi-bougamau".
M. VEILLEUX: Cela fait mal! Cela fait mal!
M. GOLDBLOOM: M. le Président, il est évident que nous
devons viser au Québec le meilleur développement de chacune des
régions. Si je regarde seulement l'unité de regroupement
appelée communément JAK, je constate que, dans cette
unité, il n'y a pas de consensus; il y a une dissidence importante.
Mais si je ne me limite pas à ce secteur et si je regarde le
Haut-Saguenay dans son ensemble, je suis obligé de conclure qu'il y a
des impératifs. Ces impératifs, qui sont définis de la
façon dont j'ai exposé la situation, se regroupent
autour d'un consensus qu'il faut créer une ville de
Jonquière à Chicoutimi. C'est pour cette raison que nous
proposons le projet de loi en question.
M. le Président, je pense qu'en toute logique, à l'avenir
mais nous sommes trop avancés dans ce dossier et nous sommes trop
certains de ce qui est nécessaire dans cette région pour mettre
un cran d'arrêt et repenser toute l'affaire nous devrons essayer
de faire découler de la constitution d'un schéma
d'aménagement les décisions à prendre quant aux structures
administratives d'une région. Ce n'est pas chose faite, loin de
là.
Nous avons beaucoup de travail à faire, mais je pense que ce que
nous proposons ici pour les deux régions concernées, et cela dans
l'optique d'une refonte de la Loi favorisant le regroupement des
municipalités, est coherent, logique, constructif et représente
l'expression d'un souci de faire développer et progresser deux des plus
importantes régions du Québec.
Ces régions, de l'avis de celui qui vous parle et de l'avis du
gouvernement, ne peuvent pas faire le progrès qu'elles méritent
dans les conditions actuelles de leur administration et elles pourront le faire
avec l'adoption de ce projet de loi.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M.Lafran-ce): L'honorable député
de Lafontaine.
M. Marcel Léger
M. LEGER: M. le Président, si vous me permettez nous allons
admettre l'autre facette du problème. Le regroupement municipal...
M. LACROIX: Avez-vous l'autorisation du conseil national?
M. LEGER: ... est un sujet...
M. LACROIX: Etes-vous autorisé par le conseil national?
M. LEGER: ... politique. Est-ce que le whip me pose une question?
M. LACROIX: Oui, je vous demande si vous êtes autorisé par
votre conseil national.
M. LEGER: Certainement, certainement, M. le Président, c'est
démocratique, justement...
M. LACROIX: Parce que je sais que vous n'êtes pas capables de vous
conduire tout seuls.
M. LEGER: Justement, je vais prouver au cours de la prochaine heure la
façon démocratique dont fonctionne le Parti libéral.
M. LACROIX: Etes-vous démêlés avec l'affaire Morin,
là?
M. LEGER: M. le Président, le regroupement municipal est un sujet
politique...
M. LACROIX: M. Morin se porte bien?
M. LEGER: ... sur lequel bien des orateurs se sont exprimés au
Québec, depuis longtemps. En effet, M. le Président, M.
René Lévesque, alors membre du gouvernement, il y a maintenant
douze ans, déclarait que notre régime d'administration municipale
était désuet...
M. BELLEMARE (Rosemont): $14,000 par année de pension.
M. LEGER: ... premier homme public à absorber...
M. le Président, le député de Rosemont
m'interrompt; est-ce que vous pouvez le rappeler à l'ordre, s'il vous
plait?
M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président, question de
privilège. On m'a nommé.
M. LEGER: Est-ce que j'ai...
M. BELLEMARE (Rosemont): Question de privilège. Il a
mentionné le nom de M. Lévesque...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Question de privilège.
M. LESSARD: A l'ordre!
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Question de privilège.
M. BELLEMARE (Rosemont): ... et j'ai dit que M. Lévesque...
M. LESSARD: Question de règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Question de règlement, le
député de Rosemont.
M. LESSARD: Question de règlement.
M. BELLEMARE (Rosemont): ... avait $14,000 de pension par
année.
M. LESSARD: Question de règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Question de règlement, on
reviendra à la question de privilège par la suite.
M. LESSARD: M. le Président, je pense que le député
de Rosemont et, en citant le député de Rosemont, je pense
que je ne brime pas ses droits n'a pas le droit d'utiliser l'article 49
concernant les questions de privilège. L'article 49, M. le
Président, se lit comme suit et je voudrais que vous en preniez note:
Lorsqu'un
député veut soulever une question de privilège, il
doit avant l'appel des affaires du jour, à la suite d'un avis
écrit donné au président au moins une heure... etc.
Deuxièmement, M. le Président, un député
peut toujours soulever une question de privilège à
l'Assemblée immédiatement après qu'ont été
prononcées les paroles ou que se sont déroulés les
événements qui y donnent lieu. Cependant, M. le Président,
il faut quand même savoir ce que c'est une question de
privilège.
Une question de privilège c'est une question qui brime les
droits, c'est une chose qui arrive au niveau de l'Assemblée qui brime
les droits d'un des députés ou de l'ensemble de
l'Assemblée nationale. Je ne pense pas, M. le Président, que le
fait que nous ayons cité le nom à l'Assemblée nationale du
député de Rosemont ait brimé les droits de ce
député. C'est pourquoi je vous invite, M. le Président,
à ne pas reconnaître qu'il s'agit là, tel qu'il nous l'a
exprimé tout à l'heure, d'une question de privilège.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Suivant l'article 49, sur la
question de privilège du député de Rosemont, au paragraphe
2, on dit: Un député peut toujours soulever une question de
privilège à l'Assemblée immédiatement après
qu'ont été prononcées les paroles ou que se sont
déroulés les événements qui y donnent lieu. Je
crois que je dois reconnaître la question de privilège au
député de Rosemont, selon le paragraphe 2. Deuxièmement,
le député de Rosemont n'ayant pas pu se faire entendre, on ne
peut pas connaître sa question de privilège. Je donne la parole au
député de Rosemont.
M. LESSARD: M. le Président, s'il s'agit d'une question de
privilège...
M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président, qui a une question de
privilège?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Laissez-le parler et on le
saura.
M. LESSARD: On va le voir.
M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président, je voulais tout
simplement mentionner je ne sais pas pourquoi mon collègue de
Saguenay...
M. LESSARD: En quoi es-tu brimé dans tes droits?
M. BELLEMARE (Rosemont): ... pourquoi... Moi, je ne m'aperçois
pas pourquoi...
M. LESSARD: C'est de la niaiserie puis de la folie que vous faites
à l'Assemblée nationale.
M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président, pour le journal...
M. LESSARD: C'est toujours ce que vous avez fait à
l'Assemblée nationale.
M. BELLEMARE (Rosemont): ... des Débats, M. le
Président...
M. LESSARD: ... avec la collaboration et l'hypocrisie du
président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): A l'ordre!
M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président, pour le journal des
Débats, je voudrais dire que je suis très calme, comparativement
à mon collègue de Saguenay. M. le Président, la seule
chose que je voulais dire, c'est qu'on a mentionné le nom de M.
Lévesque et je dis ici que M. Lévesque a $14,000 par année
de pension, point.
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): L'honorable député
de Lafontaine, sur une question de règlement.
M. LEGER: Je dois vous dire, M. le Président, que le
député de Rosemont n'a pas le droit de soulever une question de
privilège concernant une personne autre que lui-même ou une
personne qui est présente à l'Assemblée nationale et qui
aurait été brimée dans ses droits.
J'espère que le député de Rosemont connaît
maintenant l'article 49. Il lui en reste 183 autres à apprendre.
J'espère que cela va lui prendre moins d'un an pour savoir
ça.
M. BELLEMARE (Rosemont): Mettez-les en pratique pour partir.
M. VEILLEUX: M. le Président, je soulève une question de
règlement.
M. LEGER: Alors, M. le Président...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Une question de règlement,
l'honorable député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: Sur la question de règlement soulevée par le
député de Lafontaine, je dirai au député de
Lafontaine que s'il ne veut pas que. les députés du Parti
libéral soulèvent des questions de privilège, il n'a
qu'à s'en tenir...
M. LEGER: Question de règlement. M. VEILLEUX: Je parle sur... M.
LEGER: Question de règlement. M. VEILLEUX: ... sur la question...
M. LEGER: Ce n'est pas une question de règlement, M. le
Président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Sur la question de
règlement, l'honorable député de Saint-Jean.
M. LACROIX: Assoyez-vous donc!
M. LEGER: Ce n'est pas une question de règlement, M. le
Président. Il est en train de donner des conseils.
M. LACROIX: Ce n'est pas à vous à juger.
M. VEILLEUX: Non.
M. LEGER: La question de règlement...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Sur la question de
règlement...
M. LEGER: ... c'est pour rappeler un député...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): ... l'honorable
député de Saint-Jean.
M. LEGER: ... qui a la parole à l'ordre.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): A l'ordre!
M. LEGER: Alors, il n'y a rien... M. LACROIX: Rappelez-le à
l'ordre!
M. LEGER: ... dans ce que j'ai dit qui le concerne.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): A l'ordre! A l'ordre! ... A
l'ordre! ... A l'ordre! L'honorable député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: Je ne fais que donner une explication...
M. LEGER: M. le Président, j'ai invoqué le
règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): L'honorable député
de Saint-Jean l'a demandé...
M. LEGER: Oui. Et une question...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): ... sur la question de
règlement.
M. LEGER: ... peut être soulevée sur une question de
règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): C'est sur la question de
règlement de tout à l'heure. Alors, il a le droit de parler.
UNE VOIX: Assoyez-vous donc!
M. LEGER: Je viens de vous demander la parole sur une question de
règlement, sur le comportement du député qui parle sur une
question de règlement.
UNE VOIX: II veut se faire sortir. M. VEILLEUX: M. le
Président... M. LEGER: Alors, si vous le laissez parler...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): J'ai reconnu l'honorable
député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: M. le Président... M. LEGER: Bien oui, mais...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Vous parlerez après.
M. LEGER: ... je viens de vous demander la parole sur une
question...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Vous parlerez après.
M. LEGER: ... de règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): La question de règlement,
vous y reviendrez après. Vous parlez toujours...
M. LEGER: Non, M. le Président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): ... du règlement sur
votre...
M. LEGER: Je veux vous dire...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): ... question de
règlement.
M. LEGER: ... que ce n'est pas une question de règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): L'honorable député
de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: M. le Président...
M. LEGER: Est-ce qu'on pourrait avoir un autre président, M. le
Président...
M. VEILLEUX: ... il y a un article...
M. LEGER: ... parce que je pense que vous ne l'avez pas, cet
après-midi, l'affaire.
DES VOIX: Ah!
M. LACROIX: ... avoir le député de Lafontaine...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): L'honorable député
de Saint-Jean.
UNE VOIX: ... léger.
UNE VOIX: II n'y a que vous autres qui êtes fins!
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. VEILLEUX: M. le Président...
M. COTE: ... le député de Chicoutimi comme
président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): A l'ordre! A l'ordre!
M. VEILLEUX: M. le Président, sur la question de règlement
soulevée par le député de Lafontaine, j'aimerais ajouter
ceci. S'il ne veut pas que les députés du Parti libéral
soulèvent des questions de règlement, il n'a qu'à s'en
tenir à la pertinence du débat qui est le projet de loi no 98,
Loi concernant certaines municipalités de l'Outaouais et du
Haut-Saguenay. J'ai bien entendu le député de Lafontaine
mentionner le nom du député de Rosemont. S'il ne veut pas que le
député de Rosemont soulève des questions de
privilège, il n'a qu'à s'en tenir à la pertinence du
débat qui est un autre article du règlement, M. le
Président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): L'honorable député
de Lafontaine.
M. LESSARD: Sur la question de règlement...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): L'honorable député
de Saguenay sur la question de règlement.
M. LESSARD: ... soulevée par le député de
Saint-Jean. Nous n'avons aucunement l'intention d'empêcher un
député de l'Assemblée nationale, quel qu'il soit,
d'intervenir sur des questions de privilège ou d'intervenir sur des
questions de règlement.
Cependant, ce que nous exigeons de la part du président
c'est reconnu en vertu des articles du règlement et, selon vos
responsabilités, en vertu de l'article 10 c'est qu'il fasse
respecter les règlements. Ce n'est pas parce que le député
de Lafontaine a cité le nom du député de Rosemont que pour
autant le député de Rosemont a le droit de poser une question de
privilège.
Le député de Lafontaine n'a aucunement tenté de
brimer les droits du député de Rosemont et ce n'est
qu'après l'intervention du député de Rosemont que le
député de Lafontaine a cité le député de
Rosemont. C'est le député de Rosemont qui est intervenu dans le
débat pour empêcher le député de Lafontaine de
s'exprimer. C'est dans ce sens que nous voulons que, comme président de
l'Assemblée nationale, vous fassiez respecter le règlement, en
vertu de l'article 10.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Sur la question de
règlement?
M. GRATTON: Sur la question de règlement, très
brièvement. Pourrais-je vous demander de remettre la parole à
l'honorable député de Lafontaine? Je brûle du désir
de l'entendre et surtout de lui répondre.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Si vous me le permettez, avant de
redonner la parole au député de Lafontaine moi aussi, j'ai
hâte d'entendre le député de Lafontaine je dirai
qu'à l'article 49, paragraphe 2, il n'est aucunement fait mention qu'une
question de privilège est à l'effet que quelqu'un est
brimé dans ses droits. C'est tout simplement une interprétation.
Mais du moment que quelqu'un...
M. LESSARD: Qu'est-ce que c'est, un privilège, M. le
Président?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Si vous voulez vous asseoir. Une
question de privilège, c'est que si quelqu'un est cité
faussement, pour une raison ou pour une autre, il a le droit d'invoquer une
question de privilège. Il ne s'agit pas de brimer le droit de parole
d'un député. Cela ne peut pas être restreint seulement
à ça.
Si vous voulez, la question de privilège ou la question de
règlement est close. Je remets la parole au député de
Lafontaine. Sur l'invitation du député de Saguenay, je
demanderais au député de Lafontaine de s'en tenir à la
pertinence du débat et de parler sur le projet de loi déjà
à l'étude.
M. LESSARD: M. le Président, je soulève une autre question
de règlement concernant votre interprétation. En ce qui concerne
la pertinence du débat, tel qu'on l'a souligné tout à
l'heure ou que l'a souligné tout à l'heure le
député de Saint-Jean, à mon sens il vous appartient, comme
président, d'indiquer, de démontrer au député de
Lafontaine qu'il était à côté du projet de loi.
A ce que je sache, M. le Président, vous ne l'avez pas fait. Ce
n'est pas sur ce point que s'est déroulée la question de
règlement.
En ce qui concerne, M. le Président, la question de
privilège, l'article 48 dit: "Une violation des droits de
l'Assemblée ou d'un de ses membres constitue une question de
privilège". Or, à ce que je sache, M. le Président, le
député de Lafontaine n'a aucunement cité des propos du
député de Rosemont. A ce que je sache, M. le Président, le
député de Lafontaine
a simplement demandé au député de Rosemont de
rester calme et de lui laisser la possibilité d'intervenir dans ce
débat.
C'est dans ce sens, M. le Président, que je vous indiquais que,
comme président de l'Assemblée nationale, vous avez la
responsabilité de voir à ce qu'on n'utilise pas des questions de
règlement pour en faire des questions de privilège et de fausses
questions de privilège. Cela, on va le surveiller, je vous le
garantis.
L E PRESIDENT SUPPLEANT ( M. Lafrance): Je remercie infiniment le
député de Saguenay de m'avoir mentionné cet aspect du
règlement. Je vais être aussi sévère pour tous les
membres de l'Assemblée nationale, qui doivent respecter le
règlement.
J'accorde la parole au député de Lafontaine, et je lui
demande de s'en tenir à la pertinence du débat, s'il vous
plaît.
M. LEGER: Je pense que jusqu'à maintenant, vous ne pouvez pas me
dire que je n'étais pas dans le débat.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafrance): A l'ordre!
M. LEGER: M. le Président, on vient de me faire perdre dix
minutes. J'espère que c'est bien calculé parce que dix minutes,
dans un sujet aussi important, cela compte.
J'étais en train de dire, M. le Président, que M.
René Lévesque avait été le premier homme public
à aborder la question du regroupement municipal d'une façon aussi
directe. Je disais que M. Lévesque déclarait que le morcellement
des corporations municipales en quelque 1,600 unités on est rendu
à environ 1,580 municipalités était une entrave
sérieuse à notre développement social et
économique.
Depuis ce temps, plusieurs hommes publics, sans parler des autres
intervenants, sont venus s'enligner derrière ces propos et
réclamer, eux aussi, une réforme urgente. Bien inspiré par
son chef, M. le Président, le Parti québécois, dès
ses débuts, a fait de la concentration des gouvernements municipaux un
de ses grands thèmes.
M. BACON: Est-ce le conseil national qui compose les discours?
M. LEGER: La preuve, M. le Président, c'est que, depuis ce temps,
nous avons adopté...
M. BACON: Aux innocents les mains pleines!
M. LEGER: ... des amendements à notre programme, qui met de
l'avant le regroupement municipal. C'est la raison pour laquelle nous avons
toujours été pour un regroupement municipal.
Aussi, ce n'est pas sur le terrain des principes que nous nous
éloignons aujourd'hui de la position adoptée par le ministre et
le gouvernement. D'ailleurs, le ministre responsable sait fort bien
même s'il s'en va qu'à cet égard, l'Opposition
officielle a prôné bien souvent sa foi en la fusion et au
regroupement.
Alors que le calcul politique aurait pu nous en empêcher, nous
avons proclamé, au cours des deux campagnes électorales, notre
volonté ferme de réunir les unités qui sont trop petites.
Toutefois, il y a des choses qui doivent être faites, mais s'il y a des
choses qui doivent être faites, il n'en demeure pas moins qu'il y a
toujours une manière de les faire. C'est ce que professent, sans aucun
doute, l'actuel ministre des Affaires municipales, le député de
Hull, le député de Jonquière, lorsqu'au cours des
campagnes électorales passées, ils ont assuré à des
populations que vise aujourd'hui le projet de loi no 98 que jamais le
regroupement municipal ne se ferait sans l'appui de la population.
Ce n'est pas avec un sondage comme vient de le démontrer
le ministre des Affaires municipales dans la région du Saguenay
qu'on peut dire que c'est la volonté populaire, parce que s'il fallait
se fier au dernier sondage sur la popularité du Parti libéral et
du Parti québécois, nous serions pratiquement égaux en
Chambre, actuellement. On n'aurait pas besoin d'élection. Nous serions
pratiquement égaux.
UNE VOIX: C'est hors d'ordre!
M. LEGER: Donc, un sondage n'est qu'une certaine indication et il faut
quand même passer par la démocratie et aller voir les gens.
UNE VOIX: La pertinence du débat.
M. LEGER: M. le Président, c'est le député d'Anjou
qui est intervenu. Je tiens à le dire pour le journal des Débats,
pour que les intervenants qui interrompent les gens qui interviennent soient
cités et non pas qu'on s'aperçoive que l'intervenant se fait
simplement dire à l'ordre par le président, alors que le
président devrait dire à l'ordre au député qui nous
interrompt.
M. le Président, ce n'est pas...
DES VOIX: ...
M. LEGER: A l'ordre!
M. TARDIF: Je n'ai rien dit, là, Marcel!
M. LEGER: Ce n'est pas sans étonnement...
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, une question de
règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): L'honorable député
de Chicoutimi.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je voudrais simplement demander pourquoi le
ministre est
dans l'ordre lorsqu'il parle de sondages et pourquoi nous, du Parti
québécois, de l'Opposition officielle, serions hors d'ordre
lorsque nous parlons du sondage et que nous donnons notre opinion
là-dessus.
Est-ce qu'il y a deux poids, deux mesures?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): A l'ordre! A l'ordre! A
l'ordre!
A l'ordre, s'il vous plaît!
L'honorable député de Portneuf sur une question de
règlement.
M. PAGE: Ma question de règlement, M. le Président, c'est
que je tiens à souligner au député de Chicoutimi que le
sujet soulevé par le député de Lafontaine n'était
pas pertinent au débat qu'il s'en tienne strictement au
débat.
M. LESSARD: M. le Président, le ministre a eu l'occasion de
parler, il n'a pas été interrompu par les députés
de l'Opposition. Je vous inviterais, M. le Président, comme ceci vous
est demandé en vertu du règlement, à faire respecter les
articles 26 à 100 du règlement.
En effet, l'article 26 est assez clair, il me semble, lorsqu'on dit:
"Pendant le cours des séances, les députés prennent la
place qui leur a été assignée par le président,
demeurent assis et gardent le silence à moins d'avoir obtenu la parole,
et ils doivent éviter tout ce qui est de nature à nuire à
l'expression d'autrui et au bon fonctionnement de l'Assemblée".
Article 100: "Tant qu'un député a la parole, aucun
député ne doit l'interrompre si ce n'est pour lui demander la
permission de poser une question ou de donner des explications, pour soulever
une question de règlement ou une question de privilège ou pour
signaler un défaut de quorum".
Si un député veut soulever une question de
règlement, il a le droit de le faire, comme vous, M. le
Président, avez le droit d'indiquer au député de
Lafontaine que l'intervention qu'il fait n'est pas pertinente au débat.
Cela n'a pas été le cas jusqu'ici et je vous invite, M. le
Président, à faire respecter les articles 26 et 100 du
règlement de telle façon que le député de
Lafontaine ait la possibilité de s'exprimer.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Le député de
Saguenay invoque deux articles du règlement. Je demande la
collaboration, je l'ai déjà demandée, je la demande
à nouveau, de tous les membres de cette Chambre afin de laisser parler
le député qui a la parole. Je demande aussi à celui qui a
la parole de bien vouloir s'en tenir à la pertinence du débat
aussi. Si vous me forcez à être plus strict sur le
règlement, je le serai. Je vais être obligé de demander au
député de Lafontaine de parler des sondages qui ne sont pas du
tout cohérents avec le projet de loi en cours.
M. LEGER: M. le Président, je veux bien comprendre qu'il y a des
députés qui sont à côté de la "track" et qui
ne comprennent pas mais il y a quand même une relation. Le ministre se
sert d'un sondage pour exprimer une volonté populaire, et je viens de
vous prouver qu'un sondage n'indique pas que la population va le faire tel
quel. Je donne un exemple que si l'on se fait au sondage du journal La Presse
de la semaine dernière, on aurait déjà des
députés élus ici, le même nombre de chaque
côté.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Excusez, à l'ordre! A
l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!
L'honorable député de Rosemont, s'il vous plaît.
S'il vous plaît, l'honorable député de Rosemont.
Je voudrais parler d'abord sur la question qui a été
soulevée par l'honorable député de Maisonneuve. Le sondage
qui a été mentionné par l'honorable ministre des Affaires
municipales est tout simplement un sondage qui a été fait
spécifiquement pour le projet de loi en cause, alors que le sondage
auquel vous faites allusion n'est pas du tout en concordance avec le projet de
loi en cause.
Je vous demanderais de revenir à la pertinence du
débat.
M. LESSARD: Puis-je vous rappeler un autre article du règlement,
M. le Président, et vous le citer encore une fois? Sur un point de
règlement, je vous rappelle aussi l'article 120 des règlements:
"Le débat sur toute motion de deuxième lecture doit être
restreint à la portée, à l'à-propos, aux principes
fondamentaux et à la valeur intrinsèque de projet de loi,
n'oubliez pas, M. le Président, ce qui vient par la suite ou
à toute autre méthode d'atteindre ses fins".
Le député de Lafontaine utilise simplement une
argumentation pour combattre l'argumentation qui a été
exposée et je pense que c'est de bonne guerre par le
ministre des Affaires municipales en donnant comme exemple un sondage qui ne
correspond pas à la réalité. C'est cela, M. le
Président, cela correspond à ce qui est prévu par
l'article 120 des règlements.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Lafran-ce): Le député de
Lafontaine. Je vous demanderais votre collaboration encore une fois afin
d'écouter le député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, ce n'est pas sans étonnement
que nous voyons aujourd'hui ces mêmes personnes, qui avaient promis de ne
pas faire de regroupement municipal sans l'appui de la population, se servir
d'un sondage comme si un sondage équivalait à une
consultation.
M. le Président, ces mêmes personnes veulent imposer des
structures municipales et je vais vous lire des recommandations précises
dans le sens inverse. Voici la lecture d'une lettre du premier ministre M.
Bourassa, à mon collègue, le député de Gatineau,
qui lui dit: "Mon cher M. Gratton, "Je donne suite à votre lettre du 6
novembre
dernier relative au regroupement municipal. Il est évident que
l'administration municipale doit s'adapter aux exigences des temps modernes.
Les problèmes qui, hier, pouvaient être convenablement
solutionnés au niveau simplement local doivent désormais
être abordés dans une perspective plus large afin d'assurer
l'efficacité et la permanence des solutions. Cependant, le gouvernement
est déterminé à respecter la volonté des
citoyens".
Or, M. le Président, le regroupement municipal qui est
proposé va à l'encontre d'une consultation populaire, autant dans
la région de Hull que dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Je vais vous donner une preuve de ce que je viens de dire. A l'occasion du
congrès du Parti libéral auquel vous assistiez, M.
le-Président, une résolution est venue de la région de
Hull qui disait justement: "Attendu que l'Association libérale de la
Gatineau a présenté une résolution à la convention
des associations libérales du Québec tenue récemment,
laquelle résolution dénonce le regroupement de Hull, Aylmer,
Lucerne, Deschênes et attendu que l'Association libérale du
Québec, dans sa convention du 23 novembre 1974, adoptait une
résolution à l'effet que des municipalités rurales et
urbaines ne devraient pas être forcées à se fusionner,
etc." Cela, c'était la proposition de la région qui a
été battue, M. le Président. La région avait
clairement démontré son intention à ce
moment-là.
M. le Président, cela est d'autant plus étonnant qu'on a
mis peu de hâte jusqu'à maintenant à promouvoir le
regroupement sur l'ensemble du territoire. Plutôt que de voir une action
aussi absolue et aussi soudaine, nous aimerions que le ministre des Affaires
municipales fasse preuve d'une détermination plus
régulière et moins isolée. Lorsque nous avons
adopté la loi 276, nous avions cru pouvoir atteindre les objectifs que
nous partagions avec le gouvernement. C'est le gouvernement lui-même qui
nous demandait, par ailleurs, de lui faire confiance sur ce choix. Cela,
c'était en décembre 1971, il y a trois ans. Nous l'avons fait,
nous avions voté avec lui sur ce projet de loi no 276. Aussi, c'est avec
une certaine surprise que nous voyons le ministre revenir aujourd'hui en
Chambre et soustraire à l'application de cette loi deux regroupements
parmi les plus avancés que les mécanismes de la loi 276
pourraient couvrir. M. le Président, la loi 276 nous disait: II faut
d'abord décréter les unités de regroupement. Cela a
été fait. La deuxième étape, c'était de
publier les décisions pour que chaque citoyen, dans chaque unité
de regroupement, soit renseigné via la Gazette officielle. Cela a
été fait, M. le Président. La troisième
étape permettait à ceux qui s'opposaient au regroupement
d'être entendus par la Commission municipale. Dans la région de
Hull, cela a été fait. Dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, cela n'a jamais été fait et je laisserai
parler tantôt le député de Chicoutimi qui a beaucoup de
choses à dire sur le fonctionnement de la démocratie
libérale dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Je reviens à la région de Hull; il y avait 32
municipalités, on avait décrété six unités
de regroupement. La Commission municipale n'a pas fait rapport au ministre tel
que la loi le demandait. La Commission municipale aurait dû donner au
ministre des recommandations sur la situation après avoir entendu ceux
qui étaient pour et ceux qui étaient contre le regroupement, tel
que décrété par les unités de regroupement, M. le
Président. A ce stade-là, les recommandations auraient pu
être de trois ordres: premièrement, recommander la fusion quand
tout le monde est pratiquement d'accord; soit recommander que des études
soient faites pour évaluer les avantages ou les désavantages de
ces regroupements et, finalement, la commission aurait pu recommander au
ministre une consultation populaire des propriétaires et des locataires,
chose qui n'a pas été faite.
C'étaient des mécanismes normaux, par lesquels le ministre
aurait pu avoir une possibilité de regrouper ces municipalités en
ayant consulté la population. M. le Président, au lieu de cela,
tout à coup arrive avec une rapidité inhabituelle chez le
ministre une loi de fusion obligatoire.
M. le Président, il est rare que le ministre des Affaires
municipales, tant dans son comportement législatif que dans son
comportement personnel fasse preuve d'impatience. Habituellement il est calme;
il est rare qu'il s'emporte. Lorsqu'il fait preuve d'une impatience aussi
injustifiée que maintenant, il ne peut qu'amener l'Opposition à
s'inquiéter. Quand on veut une fusion de municipalités, d'une
façon cohérente, il faut permettre aux gens qui auront à
vivre cette fusion de s'exprimer.
Si c'est pour l'avantage des citoyens, il faut leur demander ce qu'ils
en pensent. C'est comme dans le mariage, il est toujours
préférable d'avoir une période de fréquentation
pour connaître le plus possible les défauts et les qualités
de la personne avec qui nous allons être uni.
M. VALLIERES: II y en a qui ne seront pas d'accord.
M. LEGER: C'est mieux qu'un mariage rapide, forcé, obligatoire et
qui se solde par la suite par des tares, par des difficultés qui
n'étaient pas visibles au départ mais qui vont apparaître
par la suite parce qu'on n'aura pas permis aux gens concernés de
s'exprimer. Actuellement c'est une fusion forcée où les citoyens
qui auront à la vivre ne seront pas consultés. Des édiles
municipaux peuvent être pour; ça ne veut pas dire
nécessairement que les citoyens sont exactement pour. Pour qu'un citoyen
puisse s'exprimer librement, il faut nécessairement qu'il soit
informé. Pour informer les citoyens, il faut nécessairement qu'il
y ait des études de faites déterminant quels sont les avantages
et les désavantages du projet qu'on veut présenter.
Quand on a des études de faites, ce qui n'est pas le cas, on les
présente à la population. On leur dit: Voici, vous avez un
référendum et, dans un référendum, vous pouvez dire
que vous êtes d'accord ou que vous êtes contre et voici les
avantages et voici les désavantages.
A ce moment-là, M. le Président, une population peut
librement s'exprimer parce qu'elle est bien renseignée. Ce n'est pas le
cas actuellement. On a utilisé des sondages dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean et on a demandé aux maires de la région
de donner leur opinion là-dessus. Mais, M. le Président, il faut
réaliser une chose, c'est que la ville de Gatineau a proposé par
résolution qu'il y ait un référendum. La ville de Lucerne
a proposé par résolution qu'il y ait un référendum.
La ville de Aylmer-Lucerne a fait même une pétition dans laquelle
uniquement 30 p.c. de gens se sont exprimés et où la
majorité était contre le regroupement avec la ville de Hull. Nous
le savons.
A la suite de ces renseignements que je viens de vous donner, quand on
voit une fusion rapide, forcée mettre de côté une loi qu'on
a votée il y a trois ans, pour imposer une fusion rapidement,
contrairement aux habitudes du ministre, on se dit : II y a anguille sous
roche.
Et on se dit que peut-être, quand on regarde certains chapitres de
cette loi, il y a des anomalies cachées à l'intérieur de
ce beau tricot, parce qu'on peut dire que c'est un projet de loi qui est
très bien amalgamé avec tellement de situations de toutes les
régions; on se demande à ce moment-là: Le principe est
quoi là-dedans? C'est la fusion forcée ou si ce sont des
avantages particuliers, temporaires qui peuvent se corriger à mesure
qu'on avance? Ce n'est pas tellement facile de voir un principe qui se
dégage quand on englobe 32 municipalités de la région de
Hull et toute la région du Haut-Saguenay; il n'y a pas tellement de
principe directeur, sauf peut-être un certain intérêt
à faire vite, et pourquoi, M. le Président?
Quand on voit dans le projet de loi un article qui dit que,
dorénavant, la ville de Hull et dans un air candide le ministre
nous dit : II faut que la ville de Hull augmente son territoire. Il est
comprimé, il faut qu'il puisse s'étendre. C'est vrai, c'est une
vérité de La Palice, c'est sûr que Hull est
renfermée, a besoin d'agrandissement, d'agrandir son territoire. Mais on
dit qu'il va négocier avec la ville de Hull-Ouest et qu'il pourra
négocier avec la grande ville de Lucerne, qui comprendra Aylmer et
Deschênes, qu'il négociera le futur territoire.
A-t-on déjà vu une municipalité qui va
décréter: Ce territoire, je vais le céder? Pour quels
avantages? Est-ce qu'on l'achète le territoire, M. le Président?
La ville de Hull n'a pas l'intention d'acheter tous les territoires. Il y en a
pour seize milles de long, M. le Président, seize milles carrés
de territoire possible qui peut aller du côté de la ville de Hull.
Quelle sorte de négociation? Avec qui? Qui est arbitre, M. le
Président? Est-ce qu'on va donner de l'argent, est-ce qu'on va donner
des faveurs? Pourquoi on négocie, sur quoi? Pour dire à quel
endroit va se trouver la ligne de démarcation?
Mais que la ligne soit là ou ici ou plus loin, quel que soit le
stade des négociations, je pense que dans des négociations,
habituellement, des personnes donnent, retiennent des avantages ou des sommes
d'argent. On achète ou on promet des postes. Quel sorte de
négociation y aura-t-il entre les deux villes?
Et de toute façon, un peu plus loin on dit: Tôt ou tard,
s'il n'y a pas d'entente, le gouvernement tranchera.
Mais, ces terrains, actuellement, sont tellement nombreux et risquent de
prendre tellement de valeur qu'il y a grave problème de
spéculation foncière. Le ministre était tout surpris, lors
de l'étude des crédits du ministère des Affaires
municipales, lorsque je lui ai posé la question suivante: Quelle est la
quantité de terrains en spéculation foncière au
Québec? Il a failli tomber de sa chaise, M. le Président, Je le
retenais pour l'empêcher de tomber. Il n'était pas au courant. Il
ne savait même pas qu'il y avait, dans tout le Québec, une
spéculation foncière telle sur les terrains qu'il y avait un
danger énorme pour la démocratie et pour le regroupement
municipal. Là, on en voit un exemple flagrant.
A qui profitera le transfert des terrains de Lucerne à Hull, la
grande ville qui deviendra peut-être une ville de 75,000 à 100,000
de population, selon le développement domiciliaire et les routes qui
passeront par là? Pourquoi cette hâte à vouloir faire une
fusion sans procéder par les moyens normaux du bill 276? Nous avons le
droit de nous poser des questions à ce stade-ci, et je sais que le
ministre de la région va me répondre tantôt. Il pourra me
dire quels sont les motifs purs et simples qu'il y a derrière cette
expansion possible de la région de Hull.
Prenons le cas de l'Outaouais. On sait que c'est dans cette
région que les mécanismes de la loi 276 ont joué.
D'ailleurs, nous attendons encore le rapport de l'enquête de la
Commission municipale sur les unités de regroupement proposées
l'été dernier.
Alors que ce rapport est encore pendant, on arrête la
démarche dans lequelle on avait lancé toute cette population. Ou
bien le gouvernement ne croit plus au bill 276, et alors il doit le retirer
après nous avoir expliqué les raisons de cette perte de
confiance, ou bien il y a d'autres motifs à la présentation du
projet de loi que nous avons maintenant, et nous aimerions bien les
connaître.
Chose certaine, dans un débat comme celui du regroupement des
municipalités, s'il y a des exigences qu'il faut que l'Opposition ait
envers le gouvernement, c'est celle de la cohérence. Elle nous semble
bien en péril aujourd'hui. Le ministre devrait penser à une
erreur, celle de Gaspé, la ville de Gaspé, la grande ville de
Gaspé
qui est une erreur magistrale. C'était une fusion obligatoire.
Moi-même, je dois admettre que nous avons fait une erreur, mais je
l'admets, et j'espère que le ministre l'admettra. Mais ce n'est pas une
façon de l'admettre que de refaire un projet comme celui qu'il nous
présente actuellement. Gaspé est une erreur. Il ne faut pas qu'il
y ait d'autres erreurs comme celle-là.
De même au Saguenay, avant même que la Commission municipale
ne se soit rendue dans cette région, ce qu'elle devait faire ces
jours-ci, le gouvernement suspend des mécanismes normaux, qu'il a
prévus pour la situation que nous devons maintenant trancher, et impose
tout un cadre de regroupement municipal échelonné sur quatre
ans.
L'Opposition, comme l'ensemble des Québécois, est en droit
de croire que le gouvernement, s'il croit encore au regroupement municipal, ne
croit plus qu'au regroupement municipal imposé. Il ne croit qu'à
cela.
En effet, il serait bien naiï de croire que la conclusion
hâtive des manoeuvres de regroupement qu'on nous présente
aujourd'hui ne sera pas sans influence sur les futurs requérants que
voulait encourager le bill 276. Il faut penser au reste du Québec et non
pas uniquement à certains intérêts régionaux.
On saura, dès l'adoption du présent bill, que la
clé la plus importante du regroupement municipal passe par le cabinet du
ministre et les bureaux des députés. On vient d'ajouter, aux
moyens que prévoyait le bill 276, une nouvelle méthode de
regroupement, la vraie, celle qui passe non pas par les mécanismes
démocratiques mais via certains élus qui vont décider pour
le peuple.
On se plaint, dans le cas du Haut-Saguenay et de l'Outaouais, d'une
information insuffisante sur les unités de regroupement imposé
par arrêté en conseil. Plutôt que de chercher à
compenser cette faiblesse, le gouvernement incite les citoyens favorables au
regroupement des municipalités à faire campagne auprès des
hommes politiques plutôt qu'auprès des populations
impliquées.
Nous, du Parti québécois, avons cru et nous croyons encore
à l'acceptation volontaire du regroupement municipal, dans certaines
conditions.
En tout cas, nous croyons que les populations concernées doivent
avoir leur mot à dire, que ce soit par référendum ou par
d'autres techniques. C'est donc dire que nous ne voyons aucune raison pour
procéder comme on le fait aujourd'hui, pour interrompre les
démarches déjà entreprises ou sur le point d'aboutir. Si
le regroupement municipal nous paraît souhaitable, il ne nous
paraît pas absolument souhaitable. Il doit se soumettre à
certaines exigences et faire l'objet d'un minimum d'apprentissage par les
municipalités concernées.
Ce que nous savons maintenant, c'est qu'une partie au moins des
éléments impliqués par le projet de loi s'opposait au
regroupement auquel on veut procéder aujoud'hui.
M. le Président, vous savez fort bien que, dans la nouvelle ville
de Gatineau, Templeton-Ouest et Templeton-Est, partie Est s'étaient
opposées lors d'une rencontre avec la Commission municipale. Dans la
ville de Buckingham, la ville de Masson et de Buckingham, partie Sud-Est
s'étaient opposées. Dans la ville de Val-des-Monts,
Portland-Ouest s'était opposée à ce regroupement
municipal. La partie Ouest de Hull s'était opposée aussi à
partir de la partie nord du rang 12 et, elle, on a acquiescé à sa
demande.
Et le regroupement préconisé était justement la
ville de Hull, Aylmer, Lucerne, Deschênes et Hull-Ouest. On a
préféré, M. le Président, céder à un
groupe qui voulait Aylmer, Lucerne, Deschênes ensemble et laisser Hull
d'un autre côté. En faisant cela, quels sont les
intérêts qu'on voulait protéger? Nous croyons qu'il sera
plus coûteux à la longue de forcer les choses, comme le ministre
le fait maintenant, que de travailler encore sur les consensus à venir
et à obtenir.
Nous n'avons pas l'intention, au cours de ce débat, d'entrer dans
le détail de ce que prévoit le projet. De la même
façon qu'il n'appartient pas au gouvernement de décider à
la place des contribuables, il n'appartient pas à l'Opposition de
compenser par ses interventions les consultations et le
référendum qui n'ont pas eu lieu.
Nous pouvons cependant remarquer que certains mécanismes du
projet sont ambigus et témoignent de l'absence de réflexion du
gouvernement dans toute cette affaire. La hâte et la
précipitation, l'impatience même dont je parlais tout à
l'heure devront être corrigées à la commission
plénière. En effet, mentionnons en passant qu'on ne sait pas
comment seront choisis les conseillers appelés à
représenter telle ou telle municipalité.
M. le Président, on dit dans le projet de loi que, dans telle
nouvelle municipalité, il y aura automatiquement le maire de la
municipalité et deux conseillers. Mais, comme cette ancienne petite
municipalité en avait quatre ou cinq, les trois autres ne seront pas
représentés. Qui va décider cela? Ils vont décider
cela entre eux? Ils vont être nommés par qui? Quel va être
le processus de cela?
En effet, M. le Président, telles et telles municipalités
devront déterminer quels seront leurs représentants à la
nouvelle ville. Je veux dire avant les nouvelles élections de novembre
1975. De même, on peut se demander comment peut se faire une
négociation entre deux villes à propos d'un territoire qu'il
s'agit non pas d'acheter ou de vendre, mais d'assujettir ou de soustraire
à une juridiction. M. le Président, c'est la question de $64,000,
pour ne pas dire de $100 millions, pour la valeur que ces terrains ont.
Tout compte fait, l'Opposition ne peut pas appuyer le projet de loi
qu'on nous soumet aujourd'hui. Il aurait dû être introduit
après que le gouvernement eut constaté, analysé et
expliqué l'échec du projet de loi no 276. Il ne
l'a pas fait de façon satisfaisante. Même si ce constat
avait été fait, les solutions vers lesquelles on s'oriente
maintenant nous paraîtraient incompatibles avec les objectifs que l'on
poursuit. On prétend regrouper les municipalités. On les enferme
dans un petit enclos où les antagonismes pourront jouer au maximum. Il
n'y a aucune raison pour que l'Opposition cesse de croire que le regroupement
municipal n'est possible que lorsqu'il est accepté. Il ne s'agit pas,
bien sûr, d'atteindre un consensus universel, mais, au moins, de suivre
une certaine procédure, une certaine démarche pendant un certain
temps afin qu'elle soit comprise. Nous ne sommes pas sûrs que les
conséquences des fusions que l'on propose maintenant soient suffisamment
pesées, tant par ceux qui favorisent que par ceux qui s'opposent
à des regroupements.
L'Opposition ne veut pas souscrire à l'abandon par le ministre
des Affaires municipales du projet de loi no 276. Nous ne voulons pas que cet
appui soit invoqué lorsque le gouvernement imposera d'autres
regroupements ailleurs au Québec.
Les Québécois doivent savoir que tant l'Opposition que le
gouvernement favorisent le regroupement des municipalités. Ils doivent
aussi savoir que le gouvernement et l'Opposition ne se rencontrent pas sur la
façon d'y arriver. Les méthodes qu'on utilise aujourd'hui, ne
peuvent qu'entacher une idée comme celle du regroupement, qui est encore
trop jeune et trop fragile pour être le prétexte de bousculades et
de tripotages de territoires. Bien loin de servir la cause qu'il prétend
défendre, ce projet de loi va saper la confiance que quiconque aurait pu
placer dans les mécanismes instaurés en 1971. Les tensions, les
conflits qu'il va engendrer vont créer une grande inquiétude, une
grande amertume autour de l'idée de regroupement. Ce n'est pas
nécessaire et ce n'est pas souhaitable ni pour l'Outaouais, ni pour le
Haut-Saguenay, ni pour le Québec.
Je voudrais parler des conséquences de ce projet de loi sur
l'ensemble du Québec. Les structures municipales à travers le
Québec vivent actuellement, autant dans l'Outaouais, dans le Saguenay
que dans les communautés urbaines que mentionnait le ministre
tantôt, des malaises profonds. Parler de malaises, c'est poli. Parmi les
quelque 1,585 municipalités québécoises, il y a plus de
1,100 d'entre elles qui ont une population inférieure à 1,500
habitants. Ainsi, 70 p.c. des municipalités représentent à
peine 18 p.c. de la population du Québec. Cette multiplication des
municipalités vient du temps où le rôle des gouvernements
locaux était très restreint, où la population était
en majorité rurale et donc très dispersée.
Regrouper dans le projet de loi actuel des municipalités rurales
et urbaines, avec des mentalités rurales, des mentalités
urbaines, des besoins ruraux, des besoins urbains, ce n'est pas faire preuve de
grandeur de vue. Il y a des problèmes de distance. Il y a des
problèmes de représentation. Qui va représenter qui
là-dedans? Il y a des problèmes de langue, on le sait.
Or, le système municipal est demeuré morcelé,
figé, et les conséquences néfastes de cet immobilisme sont
nombreuses. D'abord, par manque de budget et de population, les petites
municipalités n'ont pas les moyens d'engager des administrateurs
compétents. Elles ne peuvent pas non plus planifier leurs
activités de façon décente parce qu'elles ne savent pas
les sommes qu'elles ont à leur disposition, ni quelles sortes de
subventions elles vont obtenir, et le côté discrétionnaire
d'une subvention ne permet justement pas une planification pour les petites
municipalités.
Elles ne peuvent pas non plus, en troisième lieu, offrir certains
services comme les organisations de loisirs, de la protection de
l'environnement, de la construction d'habitations à loyer modique, les
transports en commun, etc.
D'autre part, le morcellement en petites municipalités d'une
même agglomération urbaine fait souvent que chacune d'elles se
lance dans des entreprises qui coûteraient moins cher si elles
étaient regroupées au niveau de la région. Ou encore, on
se lance dans les entreprises dédoublées, où chacune va
avoir son poste de police, chacune va avoir son poste de pompiers et ce sont
des coûts inutiles. D'autres veulent avoir leur usine de filtration,
leurs propres égouts, etc.
Dans une même agglomération urbaine, certaines villes
centrales doivent assumer des dépenses qui, en fait, devraient revenir
à tous les contribuables de la région. Par exemple, les villes du
centre d'une agglomération ont des dépenses fortes en protection
policière, enlèvement des ordures, rénovation, choses dont
toutes les municipalités autour d'elles bénéficient. Mais
quand on veut regrouper tout ça ensemble, dans une Communauté
régionale de l'Outaouais, où une ville est plus grosse, dans la
Communauté urbaine de Montréal, où Montréal est un
géant, ou dans la Communauté urbaine de Québec, où
la ville de Québec est trop grosse pour ses partenaires, le
déséquilibre fait que la façon de voter les budgets est
absolument absurde.
Si on pouvait rééquilibrer la taille de ces
municipalités, M. le Président, je vais jusqu'à dire que
si on pouvait rapetisser les villes dans ces unités pour en faire de
vrais grands quartiers, qu'on appellerait des petites patries, comme le
programme de télévision du dimanche soir, des endroits où
les gens s'identifient...
DES VOIX: Ha! Ha!
M. LEGER: Dans une petite municipalité comme, par exemple,
Pointe-aux-Trembles, ville d'Anjou, Saint-Jérôme, les gens peuvent
rapidement appeler leur maire, leurs échevins, les rejoindre. A ce
moment-là, ils savent que leurs édiles connaissent leurs
problèmes. C'est une
municipalité d'une certaine grandeur. Mais il y a des services
qui pourraient être donnés par des municipalités plus
grosses. C'est pour cela qu'on devrait repenser les communautés en ayant
un certain équilibre entre les représentants, pour qu'il n'y ait
pas, ce que Lafontaine disait dans la fable, la rencontre du pot de terre et du
pot de fer. S'il y en a un qui est trop gros, il écrase les autres. A ce
moment-là, quand arrive le moment de prendre des votes au sujet d'un
budget, le budget de la Communauté urbaine de Montréal, comme
pour celle de Québec, ils sont obligés d'avoir des votes
prépondérants pour empêcher que l'un écrase trop
l'autre. Et le budget est adopté tel quel, même si les gens ont
des objections à cela. On arrive à des absurdités comme
celle-là.
La seule solution, M. le Président, c'est de tenir compte des
faits suivants. Lorsqu'une municipalité n'est pas trop grosse, les gens
s'identifient à elle: Quand elle est trop grosse, les gens sont perdus
et ne peuvent pas se défendre. Quand elle est trop petite, elle ne peut
pas donner les services voulus. Quand elle est trop grosse, elle peut donner
des services mais, à ce moment-là, elle ne peut pas demander
à ses citoyens ce qu'ils en pensent car elle est trop loin de ses
citoyens.
Donc, M. le Président, il faut peut-être repenser toutes
nos communautés en ayant un meilleur équilibre des partenaires
des communautés. Quand je vais en dehors du pays et que les gens me
demandent: Tu demeures à Anjou? Tu demeures à
Pointe-aux-Trembles? On dit, en réalité, pour que les gens se
retrouvent: Je demeure à Montréal, je demeure à
Québec, je demeure à Hull. Parce que c'est le nom de la plus
grosse ville que tout le monde identifie. Si l'île de Montréal
était Montréal et qu'à l'intérieur de
Montréal il y avait plusieurs partenaires à peu près
d'égale force qui seraient soit les municipalités actuelles ou
des quartiers de même grosseur, à ce moment-là il y aurait
une identification particulière des citoyens à leurs élus,
dans chacun des quartiers. Chaque quartier aurait à peu près,
démocratiquement, le même nombre de votes et il y aurait la
possibilité d'avoir aussi des consultations au niveau des comités
de quartiers, ce qui permettrait d'avoir réellement une administration
qui irait selon le pouls et les désirs de la population et non pas
imposer, comme on le fait là, des unités de regroupement et des
fusions à des gens de qui on ne peut même pas dire qu'ils ont
été renseignés.
M. le Président, il faut aussi tenir compte du problème,
dans un regroupement, de la flexibilité. Dans toute cette question, il
est important de bien avoir un objectif à l'esprit, que la protection
des îlots municipaux, surtout en milieu rural, est un objectif et une
contrainte à considérer dans toute réforme. Il faut
éviter d'étudier le problème en vase clos. Cela paraft
très bien, ici, de Québec, sur une carte. On découpe, on
fait un carré et cela vient de finir.
La ville de Gaspé, c'est réglé. On l'a vu, il y a
quelques années, et on a vu les conséquences sur place, la
différence entre une politique qui est faite d'une façon
technocrate par des députés à l'Assemblée nationale
et la situation des gens qui ont à la vivre par la suite. Il faut
préparer des encadrements qui permettent que la démocratie puisse
se vivre à l'intérieur de ces cadres et non pas les imposer de
force.
Il faut éviter de survoler le problème et de tailler
abstraitement sur papier des solutions percutantes et s'imaginer que les
hésitations ou les refus des conseils municipaux devant le regroupement
ne proviennent que d'un esprit de clocher ou de la peur de perdre leur job. Ce
n'est pas uniquement cela, M. le Président. Il y a autre chose. C'est
peut-être exact souvent mais, règle générale, il y a
plus. Il y a le thème de l'autonomie municipale, si exploitée
à tort et à travers, qui recouvre quand même une certaine
réalité. C'est l'appartenance locale, le sentiment
d'identification à son patelin. On aime cela, dire: Moi, je viens de
là. Quand je rencontre des gens, au centre commercial ou sur la rue
principale, c'est du monde que je connais. On a ensemble les mêmes
préoccupations et c'est ensemble qu'on va régler nos
problèmes. Mais quand on est noyé dans un grand tout, M. le
Président, il n'y a plus cette identification. Il faut tenir compte de
cette mentalité rurale qu'on veut intégrer de force à des
municipalités qui ont une mentalité urbaine.
On peut contester l'absurdité d'enclaves municipales comme
Baie-d'Urfé ou Senneville, qui ne correspondent à aucune
réalité sociale ou culturelle, M. le Président. Mais du
même souffle, rattacher d'un coup de crayon Lévis à
Québec ou Longueuil à Montréal est dangereux et uniformise
des territoires sociaux sans doute bien différents.
Mais il ne faut pas oublier que les entités municipales tirent
leur origine d'un besoin historique des habitants à un moment de leur
développement, et la destruction technocratique de certaines structures
administratives locales peut créer des problèmes sociaux et
politiques encore plus marqués que la surpopulation municipale
actuelle.
Tout particulièrement hors des grands centres, il est important
que, face à des difficultés économiques et même
démographiques qui font stagner le développement, qui vident des
comtés complets de leur substance, ces gens trouvent au moins une
instance politique à eux qui peut parler pour eux.
C'est la raison pour laquelle, ce matin, dans un autre projet de loi, je
parlais justement de la ville, de la petite municipalité, où peut
s'exercer le mieux la démocratie électorale parce que les gens
savent pour qui ils votent dans une petite municipalité. Ils connaissent
leurs élus. Ce n'est pas le cas au niveau des communautés
urbaines. Au niveau des gouvernements provinciaux et fédéral,
c'est très rare qu'ils connaissent tous leurs élus. Cela prend
des gens qui s'occupent
réellement de leur comté pour qu'ils puissent être
élus et réélus, sinon les gens ne les connaissent pas.
DES VOIX: ...
M. LEGER: Oui mais agissez comme député et non pas juste
comme maire. Il faut penser à ces villes minières de l'Abitibi et
à ces villages dits marginaux de Gaspésie qui sont souvent au
bord de la dislocation. Leur enlever la forme naturelle d'expression collective
que peut être leur conseil municipal pour les noyer dans un gouvernement
régional lointain constitue alors une sorte de coup de grâce de la
part des législateurs de Québec. C'est un bel exemple d'un coup
de crayon technocratique, sans emprise sur les faits, qui nous est donné
par la création récente de la nouvelle ville de Gaspé
où on a fusionné douze municipalités s'étendant de
Rivière-au-Renard à l'ouest de Gaspé. La nouvelle
entité se révèle un monstre administratif et le
mécontentement est très vif.
Le regroupement municipal doit être fait mais il faut
éviter qu'il soit un regroupement forcé. Face à la mise
sur pied de municipalités régionales, que devient le regroupement
des municipalités et les annexions? On peut penser que l'urgence se sera
amoindrie. Par exemple, une cause première qui pousse au regroupement
est souvent de mettre en commun les systèmes d'approvisionnement en eau
potable et le traitement des eaux usées. Cette responsabilité
retombant à l'administration régionale, des regroupements sous
cette pression ne seront plus nécessaires. En deux mots, la
régionalisation pourra permettre de limiter au strict minimum
l'importance des regroupements municipaux.
La vraie solution, c'est le gouvernement régional, des
gouvernements régionaux, à travers le Québec. Et c'est
parce que le gouvernement libéral refuse la régionalisation
politique qu'il se trouve dans une position délicate, composée,
entre les forces locales centrifuges et centripètes, dans un
équilibre à ce point précaire qu'il a gelé les
regroupements et applique la formule du statu quo.
Il restera évidemment les cas dits aberrants, comme plusieurs sur
l'île de Montréal. Mais ces fusions exceptionnelles et peu
nombreuses réalisées, les autres qu'on pourrait envisager
seraient alors forcées, et jusqu'à un certain point on peut
prévoir que les regroupement deviendront phénomènes
limités dans une atmosphère régio-naliste.
Il ne faut pas oublier que l'existence d'une instance régionale,
donc forcément un peu plus loin des gens, doit être
compensée, dans certaines régions, par cette protection du
patelin local qui correspond à la vie de quartier des grandes villes. Il
faudra alors être avares avec les regroupements. Le programme de notre
parti, le Parti québécois, parle déjà de
consultation obligatoire dans le processus de regroupement. C'est la raison
pour laquelle nous nous oppo- sons au projet de loi. Il n'y a pas eu de
consultation de la population. Il faut se demander si on ne devrait pas aller
plus loin et laisser d'emblée tous les regroupements du ressort des
municipalités régionales dans les gouvernements régionaux
qui sont plus au courant des faits et causes que Québec peut
l'être parce que nous sommes trop loin, à Québec, des
réalités locales.
Pour revenir à notre exemple, un gouvernement régional
aurait-il procédé à la naissance de la nouvelle ville de
Gaspé? On peut en douter. La modification radicale des sources
municipales de revenus dont nous avons souvent parlé pourrait rendre les
regroupements plus faciles en faisant disparaître la disparité
dans l'imposition foncière entre les deux municipalités.
Une fusion doit être bien préparée. Il faut voir le
problème, il faut procéder à des études, tel que la
loi 276 le préconisait. Ces études étant faites, il faut
présenter à la population des solutions et lui demander de voter
sur ces solutions. Cela, c'est réellement une consultation populaire. Le
ministre se doit de procéder à une fusion après que les
gens ont été consultés. La Commission municipale n'a pas,
à ce jour, joué le rôle que la loi lui donnait.
Le ministre Goldbloom avait déclaré qu'il n'y aurait pas
de fusion forcée, même si les maires sont d'accord. Si un maire
est d'accord ou si des maires ne sont pas d'accord, cela ne veut pas dire que
la population a le même avis. Je dois vous dire que les
négociations qui devront être entamées nous
préoccupent énormément et j'ai hâte de voir le
ministre, député de Hull, et le ministre des Affaires municipales
nous donner leur version de cela, M. le Président.
Je voudrais aussi qu'on réalise jusqu'à quel point il est
important, avant d'adopter ce projet de loi, de demander la convocation de la
commission des affaires municipales pour entendre tous les citoyens qui
auraient pu être entendus soit au Saguenay-Lac-Saint-Jean, soit dans la
région de Hull, venir nous dire ce qu'ils pensent de cette fusion
forcée. Il faut procéder de façon logique, selon les voeux
de la population, et non pas obliger les gens à être
fusionnés malgré eux. Parce que ceux qui auront à vivre
cela, M. le Président, ce ne sont pas uniquement les futurs maires;
c'est la population elle-même. Alors, nous disons oui au regroupement
municipal à travers tout le Québec, selon la formule de la loi
276 avec quelques améliorations, mais non à une fusion
forcée, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): L'honorable député de
Hull.
M. LACROIX: II vous reste encore trois ou quatre supporteurs.
M. Oswald Parent
M. PARENT (Hull): M. le Président, je suis
le plus surpris du monde de constater l'attitude du député
de Lafontaine en regard d'une opération comme la fusion des
municipalités en vertu du bill 98. Il est inconcevable de voir la prise
de position du Parti québécois au moment où nous
procédons à l'étude du bill 98, en regard de
l'élection du mois d'octobre 1973, alors que celui qui est maire de
Gatineau était candidat officiel du Parti québécois et
préconisait la fusion des municipalités dans des étendues
beaucoup plus grandes que celles que prévoit la loi actuelle.
Encore samedi dernier, M. le Président, je recevais le maire de
Gatineau à mon bureau. Il venait faire des pressions pour que nous
adoptions cette loi dans les plus brefs délais possible. C'est le
candidat du Parti québécois dans le comté de Papineau aux
élections de 1973. Il avait mentionné au cours des
élections l'intérêt qu'il y avait de faire du regroupement
dans l'Outaouais. Même, samedi dernier, il m'a
répété que malgré les mesures dilatoires
entreprises par certains favoris du Parti québécois il
était préférable de laisser les mesures dilatoires devant
les tribunaux et de procéder au regroupement municipal. A cet effet, le
maire de Gatineau est allé aussi loin que de fixer la réunion du
conseil municipal, qui n'était pas prévue, au 30 décembre
pour nommer les représentants qui siégeront au conseil provisoire
en vertu de la loi.
On peut voir, M. le Président, jusqu'où on peut porter
l'illusion de vouloir défendre des grands principes
démocratiques, esprit que le Parti québécois veut faire
naître et veut faire paraître sous un jour bien différent.
Je ne peux pas parler au nom des gens du Haut-Saguenay; je ne connais pas le
cas comme je connais celui de l'Outaouais. Mais la région de
l'Outaouais, je la connais et si j'en suis le représentant depuis 20 ans
dans cette Chambre, ce n'est pas parce que j'ai fait des coups de travers, ce
n'est pas parce que, selon l'insinuation du député de Lafontaine,
j'ai encouragé le regroupement pour favoriser des spéculateurs.
Loin de moi cette pensée de favoriser des spéculateurs.
S'il y a quelqu'un qui actuellement spécule, mais sans
regroupement, ce sont les gens de l'Ontario qui ont acheté tous les
territoires de la municipalité de Lucerne, depuis des années. On
vient, au moment où une loi vient d'être présentée
en cette Chambre, faire des insinuations que nous avons des objectifs bien
différents du regroupement municipal dans cette région, soit
celui d'apporter la spéculation foncière dans un territoire. Elle
n'est pas dans les territoires qui vont s'annexer, la spéculation
foncière; elle est déjà faite, la spéculation
foncière actuellement. Dans la ville de Hull, nous sommes à
reconstruire une ville dans son entier en prenant l'île de Hull pour en
faire un secteur qui puisse apporter à la région de l'Outaouais
la vie économique, sociale et culturelle dont elle a besoin et que les
gouvernements ne lui ont jamais donnée dans le passé.
On oublie, M. le Président, que le territoire de la région
de l'Outaouais, pour lequel nous présentons un projet de loi, fait
partie du territoire de la capitale nationale sur le sol
québécois, qu'il y a 750 milles carrés qui appartiennent
à la capitale du pays, ce dont je suis fier, et, M. le Président,
nous comptons dans ce territoire 168,000 de population, 32
municipalités, 227 maires et échevins. Si nous ne sommes pas
suradministrés et si nous ne sommes pas dans l'embarras pour venir
à bout de créer des structures sur place, pour permettre à
cette région de se développer dans son ensemble, je ne sais pas
pourquoi le gouvernement n'agirait pas au moment où, contrairement
à ce qu'a dit le député de Lafontaine, la population veut
le regroupement. Il y avait désaccord sur les modalités, mais il
n'y avait pas désaccord sur la volonté de la population de se
regrouper, de se donner des structures, de vouloir prendre en main son
économie, ce que le Parti québécois nous a reproché
longtemps de ne pas faire dans cette région de l'Outaouais
québécois.
Nous sommes en train de le faire et aujourd'hui on veut détruire
ce que nous sommes en train de bâtir avec cette population qui, elle, est
d'accord. Quant aux modalités, nous en sommes arrivés à
des accords, le ministre des Affaires municipales et les députés
de la région, pour convenir d'un plan, peut-être par
étapes, qui pourrait faire l'accord de toutes les municipalités,
de toute la population et qui, de cette façon, va améliorer d'une
façon considérable la façon de vivre et d'harmonie dans
cette région pour nous permettre d'entrevoir l'économie de la
région.
M. le Président, les étapes du bill 276 ont
été suivies dans la région de l'Outaouais. Elles ont
été suivies puisque, dès le mois d'août dernier, les
trois unités urbaines avaient adopté leur requête
conjointe. Depuis ce temps, la nouvelle municipalité de Val-des-Monts a
adopté la requête selon les règles établies par le
bill no 276 et l'avis a été publié dans la Gazette
officielle au mois d'octobre.
Depuis, également, l'unité de Masham, Wakefield,
Masham-Nord et Aldfield, trois municipalités déjà ont
signé la requête conjointe, mais il n'y a pas eu publication de
cet avis. Une région s'oppose, un secteur, le secteur de Pontiac, les
municipalités de Quyon, Eardley et Onslow. Il est vrai que ces
municipalités s'opposent, mais pour la région, c'est l'immense
majorité de la population de tout ce coin du Québec qui veut le
regroupement. Les méthodes que le ministre des Affaires municipales a
convenu d'accepter d'incorporer au texte de loi conviennent à la
population. Elles conviennent aux hommes publics qui sont ici comme
représentants de ces différents comtés et conviennent
également au gouvernement comme étapes à entreprendre en
vue d'en arriver à une réalisation concrète pour
l'établissement de structures municipales qui soient conformes aux
besoins, selon les circonstances.
Si je parle de la question de la présence de la Commission de la
capitale nationale, on aura à considérer que cet organisme
comprend actuellement plusieurs centaines d'employés. Elle existe depuis
1899. Elle a du personnel en quantité, des ressources humaines et
financières pour faire de la planification sur toute l'étendue du
territoire, tant du côté ontarien que du côté
québécois. Mais nous, du côté
québécois, nous sommes divisés entre nous, divisés
entre 32 unités disparates dont les populations varient de 200
âmes à 63,000 pour la cité de Hull, mais plus de 25
municipalités ont moins de 1,500 de population, mais elles ont un maire
et six conseillers.
Dans le contexte de la négociation que nous avons poursuivie
depuis 1970 pour amener un renouveau dans cette région, pour amener la
présence du gouvernement du Québec dans cette région, pour
amener le gouvernement du Québec à s'intéresser davantage
à investir d'une façon massive pour permettre à cette
région de se suffire à elle-même, nous avons donc dû
faire face à énormément de difficultés à
cause de ce surnombre de municipalités, d'intérêts locaux
qui se présentaient dans l'élaboration des différents
plans.
Nous avons négocié avec le gouvernement
fédéral une entente de réseaux routiers qui couvre ces
quatre comtés de l'Outaouais, qui couvre les 32 municipalités de
la région. Nous avons un système d'autoroute qui est en train
d'être construit dans la direction est-ouest, sur une longueur de 70
milles. Nous avons également une autoroute en direction sud-nord pour
couvrir l'étendue des limites de la Commission de la capitale nationale.
Cette opération nécessitera des déboursés d'environ
$200 millions.
Nous avons de plus commencé à pourvoir à
l'implantation des infrastructures dans toute cette région, pourvoir
à la construction d'une usine d'épuration et la construction de
l'égout collecteur régional desservant toutes les
municipalités urbaines du territoire de l'Outaouais. C'est justement
pour permettre que ce coin du Québec puisse se développer
harmonieusement, mais en ayant à sa disposition les infrastructures qui
lui sont nécessaires.
Il y a également l'alimentation en eau potable, dont les accords
ont été signés et en voie d'être
réalisés. Tout cela pour dire que la région de
l'Outaouais, par la présence du gouvernement du Québec, par la
présence également du gouvernement fédéral, qui
fait des investissements de l'ordre de $500 millions, vient assurer, par
l'harmonie entre les deux gouvernements, une présence nécessaire,
essentielle, vitale à une partie de la société
québécoise qui fait partie de cette région de l'Outaouais,
mais, jusqu'ici, nous l'avions négligée. Nous avons maintenant
entrepris de vouloir réaliser des objectifs.
Le gouvernement du Québec a créé cette
communauté régionale. Elle exerce ses prérogatives avec
beaucoup de difficultés à cause de la divergence et à
cause de la diversité des problèmes de chacune des
municipalités concernées.
Et, de là, cette communauté régionale. Même
si elle avait des responsabilités et si elle avait des
prérogatives, elle ne s'en est pas prévalue dans les
dernières années. Elle devait faire compléter un
schéma d'aménagement pour le 31 décembre 1971. Elle devait
prévoir les nouvelles limites territoriales des municipalités
pour le 31 décembre 1971, mais, parce que c'était un sujet
brûlant, jamais les maires n'ont voulu apporter leur collaboration
à ce qu'il y ait une délimitation de territoire entre eux.
Jamais, non plus, on n'a préparé le schéma
intérimaire d'aménagement du territoire dans la période
requise. Ce n'est qu'au mois de juin 1973 qu'un schéma
intérimaire a été déposé. En vertu de la loi
54 que nous avons adoptée ici le 31 juillet dernier, nous avons
obligé la Communauté régionale de l'Outaouais à
compléter son schéma d'aménagement de territoire pour le
1er septembre 1975. Pourquoi le gouvernement a-t-il agi de la sorte en imposant
ce devoir et cette responsabilité à un organisme que, s'il ne
faisait pas le schéma pour cette date, c'est le gouvernement qui
prendrait la responsabilité de l'exécuter et de le charger
à la communauté régionale? Mais, dans la même loi
54, il y avait obligation également pour les municipalités de
faire leur plan directeur, le règlement de zonage, le règlement
de construction, le plan quinquennal d'investissement. Encore, si les
municipalités ne complétaient pas dans le cadre du schéma
d'aménagement régional le plan directeur et les autres
règlements, la communauté avait l'obligation de les faire et de
les faire payer par les municipalités.
Nous sommes, de cette façon, dans la sphère de
l'implantation de structures pour faire bénéficier une
région et, contrairement à ce qu'on a dit, elle se fait dans
l'harmonie. Elle ne se fait pas dans la dispute, si ce n'est sur les
modalités, où il y a eu dispute dans l'Outaouais.
Aylmer-Lucerne-Deschênes voulaient rester ensemble, même si Lucerne
et Deschênes avaient signé la requête conjointe avec Hull.
Hull-Ouest voulait demeurer seule. Mais, dans les autres secteurs où la
Commission municipale est allée siéger, l'opposition ne s'est
même pas manifestée à l'exception de Aylmer et Lucerne.
Ce sont les seuls endroits où la Commission municipale a
siégé, par avis public dans les journaux. Ce sont les deux seules
municipalités où il y a eu de l'Opposition devant la Commission
municipale. Il y a eu peut-être, à Buckingham, une douzaine de
personnes qui se sont présentées. A Masson, une trentaine de
personnes se sont présentées devant la commission. A Hull, un
citoyen s'est présenté. Il avait dit qu'il était contre
et, le soir de la Commission municipale, parce qu'il représentait un
groupe de citoyens, il s'est déclaré favorable à la
fusion, après avoir eu les renseignements qui lui étaient
nécessaires.
Mais pourquoi avons-nous procédé par législation?
C'est que depuis deux semaines, un avocat de Hull et un citoyen de Touraine ont
pris des mesures dilatoires, ils ont présenté une pétition
devant la cour Supérieure pour demander l'émission d'un bref de
mandamus. Pourquoi? Parce que 1 dans la Gazette officielle et dans les
journaux quotidiens, on n'a pas publié l'annexe A qui constituait la
description du territoire de la nouvelle municipalité, et 2 parce
qu'on n'a pas publié la carte qui démontrait les nouveaux
quartiers des nouvelles municipalités. Le juge, avant-hier, a
accordé droit au bref de mandamus, ordonnant de recommencer à
neuf la procédure entreprise: signature de pétitions, publication
des avis, audition de la Commission municipale. Mais ce n'est pas la
majorité. Ce sont quelques individus qui, voulant dilapider la question,
voulant éliminer, voulant proposer de faire des changements, de modifier
le cours de route, d'empêcher la réalisation d'un objectif, se
prévalent de mesures dilatoires comme telles devant les tribunaux et
empêchent ainsi le projet de se réaliser.
Il était beaucoup plus pratique de faire ce que les
députés de la région ont fait, en collaboration avec le
ministre des Affaires municipales, en collaboration avec les
municipalités, soit de s'entendre sur une phase première à
être exécutée, sachant que la ville de Hull a besoin de
territoire. M. le Président, le dialogue existe dans la région,
malgré ce que le Parti québécois dit à mon endroit
dans la région. Il y en a un, dialogue, entre les hommes élus du
peuple, entre les représentants municipaux et avec le ministre des
Affaires municipales, que je félicite, en passant, d'avoir eu le courage
et la détermination de présenter un projet de loi de cette
nature.
M. le Président, on a parlé tout à l'heure de
Lucerne qui était contre la fusion. Le conseil municipal de Lucerne vous
félicite pour le projet des divers regroupements dans l'Outaouais, selon
le bill 98, et apprécie vivement votre considération des
aspirations des citoyens de Lucerne dans la formation de la nouvelle ville de
Lucerne. Cordialement, Henri La-flamme, maire.
M. LEGER: Je comprends, je comprends! On comprend pourquoi.
M. PARENT (Hull): Vous comprenez? Vous n'avez jamais compris, parce que
le coin de l'Outaouais ne vous sera jamais acquis.
M. LEGER: Procédez avec ce projet de loi, puis vous l'aurez
perdu.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre!
M. PARENT (Hull): M. le Président, je voudrais conclure en disant
que le projet de loi représente les aspirations de l'Outaouais. Il
représente le désir de la population de vouloir se doter
d'équipement, d'infrastructure, de structures municipales qui lui
permettent vraiment, avec la participation du gouvernement du Québec,
avec la participation du gouvernement fédéral, de
s'épanouir et de pouvoir, dans les quelques années à
venir, être dépendante d'elle-même et se suffire à
elle-même, dans l'intérêt de toute sa population.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): L'honorable député de
Dubuc.
M. Ghislain Harvey
M. HARVEY (Dubuc): M. le Président, la loi qui entrera en vigueur
bientôt, favorisant le regroupement, en ce qui nous concerne, dans le
Haut-Saguenay, arrive en temps nécessaire. Surtout lorsqu'on pense que
le sujet de la fusion est discuté, chez nous, depuis de nombreuses
années.
M. le Président, ce projet de loi crée chez nous, d'abord
trois municipalités d'ici 1976, et deux autres d'ici 1978,
c'est-à-dire la ville de La Baie et la ville Saguenay. C'est une loi
importante pour notre région et je félicite le ministre des
Affaires municipales pour son sens de la réforme et son esprit du bien
commun municipal.
Par ce projet de loi, nous créerons, en plus, un conseil
métropolitain du Haut-Saguenay où siégeront, pour ce qui
m'intéresse particulièrement, les municipalités de La Baie
et les deux Laterrière, et cela à la même table que les
autres municipalités du Haut-Saguenay.
Ce conseil verra particulièrement au développement
harmonieux de notre région économique.
Il est évident, d'autre part, que le ministère des
Affaires municipales aura à jouer un rôle impératif pour
ces développements futurs.
De même que la quasi-totalité des maires du Haut-Saguenay
et que l'ensemble des maires de La Baie que j'ai consultés, je suis
d'avis que ce projet de loi favorisera le développement de notre
région. Nous aurons chez nous, à La Baie, une municipalité
de 22,000 âmes à peu près.
Particulièrement pour La Baie, ce projet de loi fera en sorte que
les conseils municipaux se rencontreront et mettront en commun leur
intelligence et leurs compétences pour créer cette future ville.
L'ensemble dés citoyens de La Baie profiteront de cette future
municipalité. L'unité chez nous est nécessaire et nous
sommes, avec différents points de vue, tous de cet avis.
Port-Alfred est un pionnier du regroupement. En effet, dès la fin
des années cinquante, 1956 si ma mémoire est bonne, Port-Alfred
regroupait déjà, et ce fut une bonne décision de la part
des citoyens de Saint-Alexis de s'intégrer à la ville de
Port-Alfred. Nous le voyons aujourd'hui.
J'ai consulté beaucoup et particulièrement les maires de
La Baie, c'est-à-dire ceux de Bagotville paroisse, Bagotville,
Port-Alfred et Grande Baie, ainsi que celui du Canton Tremblay. C'est l'opinion
de ceux-ci que je livre aujourd'hui, ainsi que l'opinion de la population de La
Baie.
La fusion pour 1976, après plusieurs rencontres, sera une chose
importante pour le progrès économique et administratif de cette
future municipalité qu'est la ville de La Baie. Quant à Canton
Tremblay, je suis d'avis que le ministre a raison d'amender le projet de loi
afin de le retirer de la future ville de Chicoutimi. C'est là faire
preuve d'un réalisme évident.
Enfin, je verrai personnellement d'ici peu les responsables municipaux,
c'est-à-dire les maires et conseillers, afin de discuter ensemble de ce
projet de loi et dans le but de commencer tout de suite la préparation
de la ville de La Baie. Nous aurons des discussions franches et
honnêtes.
Je souligne, enfin, que je suis personnellement heureux que la nouvelle
ville de La Baie forme un territoire regroupé, indépendant de la
future ville de Saguenay. La Baie est une entité géographique
à part. Je suis heureux et fier de voir que le ministre respecte cette
volonté et cette opinion. Merci, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): L'honorable député de
Gatineau.
M. Michel Gratton
M. GRATTON: M. le Président, comme vous le savez, à titre
de membre de cette confrérie des présidents de commissions, j'ai
assez rarement l'occasion de m'exprimer de façon sinon partisane tout au
moins partisane d'un point de vue, à l'occasion d'un débat de
deuxième lecture.
Mais le projet de loi no 98 présenté par l'honorable
ministre des Affaires municipales a fait l'objet de tant de tergiversations et
de discussions dans la région de l'Outaouais et, plus
particulièrement, dans le comté de Gatineau que je manquerais
certainement à mon devoir de député et de
représentant du comté de Gatineau si je n'exprimais pas mon point
de vue au moment de l'adoption de ce projet de loi des plus importants et tout
à fait souhaité par la population de mon comté et de ma
région.
J'aurais bien voulu parler surtout des réformes importantes que
le ministre des Affaires municipales a mentionnées dans son discours;
réforme, par exemple, de la CRO, la Communauté régionale
de l'Outaouais, qui, par le fait qu'un bon nombre de municipalités, en
fait 24, de l'Outaouais disparaîtront, verra modifié son
fonctionnement comme circonstance ou comme résultat de ce
fusionnement.
Je voudrais bien, et je le ferai sûrement en commission
parlementaire, souhaiter que cette réforme se fasse de façon
à promouvoir une plus grande participation des élus municipaux
à la communauté régionale, afin d'accroître la
participation et l'esprit régional chez les conseillers et les maires de
nos municipalités.
Mais, M. le Président, à écouter les propos du
député de Lafontaine, porte-parole officiel, je suppose, du Parti
québécois en matière d'affaires municipales, il m'est bien
difficile de demeurer serein, de demeurer tout à fait objectif dans mes
propos.
En tout cas, il me sera sûrement impossible de demeurer sans
partisanerie.
M. le Président, le député de Lafontaine vient de
nous dire qu'ils préconisent, eux du Parti québécois, le
fusionnement des municipalités. Il peut difficilement s'en cacher. Le
ministre de la Fonction publique, député de Hull, l'a
mentionné tantôt. Cela a fait l'objet d'une grande partie de leur
programme électoral dans la région de l'Outaouais et surtout dans
le comté de Papineau, où leur candidat, le maire de la ville de
Gatineau, un monsieur que certains appellent Jean Lachance mais dont le vrai
nom est John Luck, en fait, a préconisé du fusionnement à
l'emporte-pièce. Ce même M. Luck et je lui rends un hommage
cet après-midi est tout à fait d'accord sur le projet de
fusionnement de sa municipalité avec six autres, à l'Est de la
rivière Gatineau.
M. le Président, on voudrait nous faire croire, du
côté de l'Opposition, qu'on est pour le fusionnement mais qu'on
est contre la façon qu'on emploie dans le projet de loi no 98 pour le
faire. En fait, on tente de ménager le chou et la chèvre. En
définitive, M. le Président, dans l'Outaouais en tout cas
je ne parlerai pas du Haut-Saguenay, je ne connais pas la région
il n'y a pas une seule unité de regroupement qui n'a pas indiqué
d'une façon quelconque, soit en signant des requêtes conjointes,
soit en envoyant des résolutions des conseils municipaux, soit par
l'entremise des sondages effectués par le ministre des Affaires
municipales, soit par la grande participation des citoyens devant la Commission
municipale qui est venue siéger dans la région, il n'y a pas une
seule unité de l'Outaouais, pas une seule des huit, qui n'a pas
indiqué qu'une majorité des conseils municipaux ou une
majorité de la population qui désirait le fusionnement tel que
décrété par le projet de loi no 98. M. le
Président...
M. LEGER: Est-ce que le député me permet une question?
M. GRATTON: Oui.
M. LEGER: Est-ce que la ville de Hull, dans l'unité de
regroupement, ne devait pas être regroupée avec Aylmer, Lucerne et
Deschênes, et non pas uniquement Hull avec Hull-Ouest?
M. GRATTON: Justement, ils ne comprennent rien, M. le
Président!
M. LEGER: Donnez-moi Une réponse.
M. GRATTON: Bien oui, je vais vous la donner. Je viens de dire, M. le
Président, que le tout est volontaire. Mais ces gens sont de
Montréal. Ils voudraient venir nous faire la leçon dans
l'Outaouais et dans le Haut-Saguenay. En fait, je souhaite entendre le
député de Chicoutimi, tantôt. Peut-être qu'il nous
donnera un son de cloche un petit peu plus local. Mais à chaque fois
qu'on a un débat qui concerne une autre région que
Montréal, dans cette Chambre, on vient nous rabâcher des histoires
sans savoir de quoi on parle et on vient poser des questions aussi insipides
que celle-là.
M. le Président, tout le monde sait, dans l'Outaouais, et
même dans toute la province, que le fusionnement de
Hull-Aylmer-Lucerne-Deschênes ne s'est pas fait par le projet de loi no
98, justement parce que les gens n'en voulaient pas. On ne l'impose pas. Les
gens ne voulaient pas du fusionnement. Il y a eu un télégramme de
4,000 noms des gens d'Aylmer et de Lucerne qui disait: On n'en veut pas, du
fusionnement avec Hull. Il y a eu des représentations à la tonne,
non seulement à la tonne au point de vue de la quantité mais
à la tonne au point de vue de la qualité, surtout, qui ont dit:
On n'en veut pas, du fusionnement avec Hull.
Ce que le député de Lafontaine ne sait pas, parce qu'il ne
vient pas souvent chez nous, je le comprends, il n'y a pas beaucoup
d'adhérents à son parti, chez nous, il se retrouve tout seul, la
plupart du temps, quand il vient dans l'Outaouais...
M. LACROIX: ... de toute façon.
M. GRATTON: M. le Président, ce que le député de
Lafontaine ne sait pas, c'est qu'il y a un an et demi, les municipalités
de Deschênes, de Lucerne et d'Aylmer avaient fait parvenir au
ministère des Affaires municipales une résolution chacune pour
demander de fusionner ensemble. Les gens s'opposent au fusionnement avec Hull
mais ils souhaitent le fusionnement ensemble. Qu'est-ce que le projet de loi no
98 fait? Il fusionne Aylmer, Lucerne et Deschênes ensemble et dit: Hull
reste de côté jusqu'à ce qu'il y ait des
négociations.
Sur le point des négociations, l'honorable député
de Lafontaine, sans le dire, fait allusion à toutes sortes
d'espèces de négociations secrètes qui pourraient avoir
lieu et de pressions, j'imagine, qui pourraient venir de la part d'on ne sait
qui, peut-être d'un conseil national quelconque, on n'en sait rien, qui
interviendraient dans la procédure des négociations. Ce n'est pas
si mal. On comprend. Quand on ne sais pas quoi dire sur un projet de loi, on
lance des petites flèches sans trop accuser spécifiquement, parce
qu'on aurait peur de se faire répondre.
Mais là où c'est plus grave c'est quand le
député de Lafontaine vient parler de la possibi- lité que
dans les négociations il y ait des échanges d'argent. On parle de
terrains, d'achats de terrains, de cessions de terrains. Le
député de Lafontaine a-t-il si peu confiance en ces
municipalités? Il porte même atteinte à la
réputation et à l'intégrité des conseils municipaux
de la ville de Hull et de Lucerne et Hull-ouest en pensant qu'il pourrait y
avoir entre eux collusion pour faire, je ne sais pas comment on pourrait
appeler cela, mais quelque chose de malhonnête avec cela.
Si c'est ce que le député de Lafontaine veut dire, je
l'invite à venir chez moi rencontrer le conseil de Lucerne, dont le
maire a fait parvenir un télégramme que le ministre de la
Fonction publique a lu tantôt.
J'ai entendu la remarque du député de Lafontaine: On sait
pourquoi. Moi aussi je sais pourquoi le maire de Lucerne nous a écrit
pour nous féliciter de notre bill 98. C'est qu'il est heureux du bill
98. C'est ce qu'il souhaitait voir, c'est ce que sa population souhaitait voir.
J'invite tout de suite le député de Lafontaine à venir
avec moi samedi soir prochain à l'aréna d'Aylmer où il y
aura...
M. LEGER: Nous siégeons samedi soir.
M. GRATTON: Nous irons après la session, ce n'est pas grave, ce
ne sera pas terminé après minuit. On y verra probablement de
2,000 à 3,000 personnes, citoyens des villes d'Aylmer-Lucerne qui
célébreront le résultat qu'ils ont contribué
à obtenir par leurs représentations devant la Commission
municipale.
Il y a eu un mouvement d'esprit communautaire dans ces
municipalités qui a fait que le ministre des Affaires municipales, le
gouvernement n'ont eu qu'à réaliser qu'il ne fallait pas imposer
un fusionnement, non volontaire. Celui-là aurait été avec
Hull et il fallait plutôt faire ce que la loi 98 fait,
c'est-à-dire le fusionnement Aylmer-Lucerne-Deschênes, en
constatant bien entendu le besoin de la ville de Hull d'acquérir des
terrains, sans, par exemple, prendre pour acquis que ce seront des terrains de
plusieurs milliers d'acres ou quoi que ce soit.
Quand le député de Lafontaine parle de soi-disant
spéculations, il pourrait peut-être nous accuser d'en faire de la
spéculation si on avait imposé le fusionnement de
Aylmer-Lucerne-Deschênes avec Hull. C'est justement ce que nous n'avons
pas fait, ce que nous avons refusé de faire.
Cela est tout à fait malhonnête de la part du
député de Lafontaine, qui ne connaît rien à la
situation, de toute façon, car je sais où il prend ses
informations et ce n'est pas fort comme source de renseignement, je vous
l'assure.
J'aurais bien voulu avoir l'occasion d'entendre le député
de Johnson, que je considère comme mon bon ami même si je ne le
connais pas depuis longtemps. Le député de Johnson a ici un de
ses anciens collègues, dont je salue la présence dans les
galeries, M. Roland Théoret,
ancien député de l'Union Nationale du comté de
Papineau, On ne pourra pas m'accuser de faire de l'électoralisme, il
n'est même pas électeur de mon comté. Mais je le salue
parce que lui, qui a eu la chance de consulter le projet de loi no 98, m'a
exprimé non pas son entière satisfaction je ne veux pas
l'embarquer non plus mais en tout cas ne m'a pas fait assez de grimaces
cet après-midi pour me faire croire qu'il n'est pas d'accord sur le bill
98 tel que présenté par le ministre.
En terminant, j'aimerais réitérer l'hommage que j'ai rendu
tantôt aux populations des municipalités Aylmer, de Lucerne pour
l'esprit civique qu'elles ont démontré devant la Commission
municipale, auprès des autorités gouvernementales. Elles ont
démontré qu'on n'avait pas chez nous l'esprit de
défaitisme, qu'on ne tenait pas pour acquis que le gouvernement du
Québec était un gouvernement qui imposait ses
volontés.
J'ai fait campagne en 1972, j'ai été élu, pour la
première fois, le 11 octobre en fait, pas élu le 11 octobre, cela
a été annulé, j'ai recommencé le 15 novembre de la
même année. Les deux fois j'ai parlé des... Voulez-vous que
nous en parlions des billets? Lors de la première, le 11 octobre, il y
avait une candidate du Parti québécois qui a eu quelque chose
comme 3,000 votes; elle a perdu son dépôt, son remboursement
d'élections, elle a tout perdu sauf ses dents. A la deuxième,
elle ne s'est pas représentée, elle a été sage.
M. LESSARD: Pertinence du débat.
M. GRATTON: On ne peut pas en dire autant de la défunte
Unité-Québec, mais cela n'existe plus, c'est maintenant la grande
Union Nationale et nous en sommes fort fiers.
Je disais, M. le Président, que j'ai fait, depuis deux ans et
trois mois, trois élections; au cours de ces trois campagnes
électorales, j'ai toujours soutenu que le principe du fusionnement des
municipalités en était un que je défendrais. Je n'ai pas
l'intention de cerner tous les avantages du fusionnement des
municipalités, surtout dans une région limitrophe comme celle de
l'Outaouais où nous sommes non seulement assujettis à la
proximité de la province de l'Ontario mais surtout à la
présence du siège du gouvernement central.
Mais, M. le Président, le principe du fusionnement ne doit pas et
ne devrait pas et c'était d'ailleurs inscrit au programme du
Parti libéral en 1973 se faire contre la volonté de la
population. Le projet de loi no 98, en tout cas à ma connaissance,
puisque ma connaissance se limite à la région de l'Outaouais, ne
fait aucun fusionnement qui n'est pas volontaire. Prétendre le
contraire, M. le Président, est soit malhonnête ou fait preuve
d'une méconnaissance des faits qui aura sûrement des
résultats électoraux encore plus néfastes que les derniers
pour le Parti québécois à la prochaine
élection.
M. le Président, en terminant, j'aimerais rendre un hommage tout
particulier au ministre des Affaires municipales qui a hérité de
ce dossier brûlant et contentieux en février 1973. Au moment de sa
nomination au ministère des Affaires municipales, il est venu dans la
région, à plusieurs occasions, écouter ce que les gens
avaient à dire, ce qu'ils pensaient du fusionnement. Il a modifié
le décret original par deux fois pour en arriver à des solutions,
à des unités que les gens accepteraient de façon
volontaire. Envers et contre tous, il a su impliquer à ce projet de loi
no 98 un élément humanitaire qu'il est rare de voir dans un
gouvernement aussi important que celui du Québec.
M. le Président, je suis tout à fait à l'aise pour
vous dire que non seulement je voterai pour l'adoption en deuxième
lecture de ce projet de loi mais je participerai à la commission
parlementaire qui en étudiera les articles.
M. le Président, nous verrons, par la voie des media
d'information et de toutes les façons possibles, que la population de
l'Outaouais, à quelques exceptions près, et on les connaît
d'avance celles-là, est unanime à proclamer la valeur du projet
de loi no 98. Je ne pourrais taire la contribution qu'a apportée
à ce dossier et à la préparation de ce projet de loi mon
collègue le député de Hull, ministre de la Fonction
publique, qui, depuis plusieurs années, depuis pas mal plus
d'années que je ne suis député, prêche le
fusionnement des municipalités de l'Outaouais. Lui aussi en a
reçu des coups de toutes les sortes; cela ne l'a jamais
empêché de poursuivre les grands objectifs qu'il s'était
tracés. Aujourd'hui, le projet de loi no 98, au moment de son adoption
en troisième lecutre, sera l'aboutissement d'efforts soutenus et
constants de la part de ce député toujours accessible et toujours
prêt à écouter.
M. le Président, je vous remercie de votre bonne attention
personnelle.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M. SAMSON: M. le Président, quand on arrive à cette
période-ci de l'année, vers la fin de la session, il y a une
chose qui se ressemble à tous les ans. A la dernière semaine, on
nous dépose des projets de loi, on n'a même pas le temps de les
imprimer, des galettes chaudes qui sortent du fourneau même pas cuites,
puis on veut nous demander, à nous les gars de l'Opposition, de voter
pour ça. Oui.
UNE VOIX: On n'a pas besoin de vous autres.
M. SAMSON: Qui est-ce qui a dit ça, qu'on n'a pas besoin de nous
autres, là? Je vous demanderai de vous lever tantôt et de
parler
pour le bill si vous n'avez pas besoin de nous autres. Levez-vous donc
quand c'est le temps. Levez-vous dans le cours de l'année, pas rien
qu'à la fin de la saison.
M. MERCIER: On n'a pas besoin d'attendre ça, mon vieux, pour
parler.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!
M. SAMSON: M. le Président, c'est honteux...
M. MERCIER: On ne parle pas pour ne rien dire.
M. SAMSON: ... de nous apporter des lois comme ça en fin de
session. Comment voulez-vous que des gens...
M. HARDY: On n'a pas fini.
M. SAMSON: ... aient le temps d'étudier tout ça alors que
le ministère, lui, a pris tout le temps qu'il faut pour étudier
le projet. Même plus que ça, on vient de nous dire qu'ils ont
même fait des enquêtes scientifiques. Imaginez-vous donc ça!
Puis on voudrait nous faire passer ça à la vapeur à la fin
de la session, comme ça, les fusions forcées. Le ministre des
Affaires municipales devrait savoir que l'an passé, il y a eu un
ministre qui s'est fait "déministrer" justement parce qu'il a
tenté d'en imposer, des fusions forcées comme ça.
Est-ce que c'est parce qu'on est la veille d'un remaniement
ministériel puisqu'il va changer de ministère qu'il veut nous
laisser un cadeau de Noël? M. le Président, ça nous fait
penser drôlement, une loi comme ça à la dernière
minute, à un cadeau de Noël dans une grosse boite d'où le
récipiendaire est obligé de sortir les papiers pour trouver le
cadeau, puis quand il arrive enfin dans le fond, comme ils disent à la
télévision, il n'y en a pas de cadeau.
M. MALOUIN: II y a un créditiste dans le fond.
M. SAMSON: Alors, M. le Président... Ah! je sais que ça
fait mal aux rouges, les "backbenchers" en arrière, ça leur fait
mal. Je sais que ça leur fait mal, mais on n'a pas le droit d'imposer un
regroupement malgré la volonté d'une population. Que ce soit la
population du Haut-Saguenay, la population de l'Outaouais ou d'ailleurs
parce que j'ai entendu parler des députés de l'Outaouais, j'en ai
entendu parler du Haut-Saguenay il reste une chose, c'est qu'on doit
parler sur un principe en deuxième lecture, et le principe est le
suivant: Est-ce qu'au Québec on va permettre que des fusions soient
faites contre la volonté de la population? C'est ça, le principe
et ce principe se retrouve aussi bien dans la région de la Mauri- cie,
dans la région de l'Ouest québécois que dans la
région du Nord-Ouest que je représente, M. le Président,
et je peux vous dire ceci.
Nous avons, particulièrement chez nous, des gens qui justement
sont aux prises avec certains fonctionnaires qui voudraient leur imposer une
fusion de municipalités, une fusion de villes, alors que la population
n'en veut pas. Bien sûr, vous retrouverez toujours peut-être un
maire, deux maires, trois maires favorables à un regroupement, mais
ça ne veut pas dire que la population est d'accord sur ça. S'il y
a un seul maire sur l'ensemble de ceux qui veulent fusionner, s'il y a un seul
qui ne veut pas fusionner, vous n'avez pas le droit de l'imposer sans au moins
faire un référendum sur l'ensemble du territoire, parce que, M.
le Président, il y a des intérêts là-dedans.
Je n'irai pas jusqu'à dire, comme le député de
Gatineau tantôt... On nous accuse ou on nous dit qu'il y a
peut-être des possibilités de transfert d'argent. Non, je n'irai
pas là-dedans, mais je vous dirai, par exemple, que je crois à
une chose. Quand quelqu'un veut regrouper un partenaire qui ne veut pas se
faire regrouper, c'est parce que celui qui veut regrouper a des
intérêts à regrouper. Le partenaire qui ne veut pas se
laisser regrouper, est-ce que vous avez pensé que ça peut arriver
des fois qu'il aime mieux sa situation à lui, payant peut-être
moins cher de taxes que les "regroupeux" voudraient lui faire payer sur le
même territoire après un regroupement?
C'est le cas des villes de Rouyn et de Noranda. Noranda ne veut pas du
tout se laisser regrouper alors qu'à Rouyn les édiles municipaux
voudraient absolument regrouper l'autre. On veut regrouper également la
municipalité d'Evain village et la municipalité d'Evain campagne,
on veut regrouper tout ce monde-là.
M. le Président, si on laissait faire ça, sans un
référendum, sans consulter la population, le résultat
serait le suivant.
C'est qu'au moins trois des quatre partenaires devraient payer plus cher
de taxes sans recevoir de meilleurs services. Est-ce qu'on a déjà
pensé à cela parmi ceux qui veulent imposer des regroupements
municipaux? Est-ce qu'on a déjà pensé à cela?
Probablement oui, et c'est peut-être par déformation
professionnelle qu'on veut les regrouper malgré eux, parce que le
gouvernement libéral est quand même assez
expérimenté dans la taxation. On n'a rien à apprendre au
gouvernement libéral en matière de taxation. Tout le monde sait
cela.
Bien sûr, ici, on s'est fait dire souvent par le premier ministre
ou le ministre des Finances: Deuxième budget sans augmentation de taxes,
troisième budget sans augmentation de taxes. Pendant ce temps, on
favorisait l'inflation et on ramassait plus dans les coffres du
gouvernement.
Le premier ministre arrive justement. Vous lui en parlerez. Vous allez
voir. Il nous a chanté cela deux fois, trois fois, quatre fois:
Budget
sans augmentation de taxes et, pourtant, il a augmenté sa
taxation. Avez-vous déjà vu pire que cela? Avez-vous
déjà vu quelqu'un ne pas augmenter les taxes et retirer plus
d'argent?
M. BOURASSA: Un exemple.
M. SAMSON: II arrive justement et il voudrait parler. Je vais lui
demander...
M. BOURASSA: Un exemple.
M. SAMSON: ... de parler sur le regroupement des municipalités,
tantôt.
M. BOURASSA: Un cas.
M. SAMSON: Je vais lui demander de dire à la population, aux gens
qui sont là, pourquoi on veut regrouper, malgré eux, ceux qui ne
veulent pas l'être. Pourquoi le premier ministre n'est-il pas allé
faire un petit tour dans ces régions pour s'informer auprès de la
population, pour consulter, puisqu'on dit vouloir consulter la population?
Mais, M. le Président, quand on veut consulter la population,
c'est par voie de référendum qu'on fait cela, pas comme vous
faites les élections provinciales. A ce moment, vous ne consultez pas;
vous imposez encore une fois.
Je vous dis que nous n'avons pas le droit d'imposer et je ne parle pas
particulièrement pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean ou
pour la région de l'Outaouais ou pour une autre région. Je parle
pour toutes les régions du Québec. Je ne me rappelle que trop,
lorsque nous avons discuté de la ville de Gaspé, que
l'Opposition, en bloc, a tenté d'amener le gouvernement à une
commission parlementaire, a tenté d'amener le gouvernement à
consulter. Bien sûr, nous n'avions peut-être pas des
télégrammes de 4,000 noms, des tonnes de noms, comme le disait le
député de Gatineau tantôt, mais on n'avait pas besoin de
tonnes de noms pour comprendre. Cela nous en prend moins que cela dans
l'Opposition. On comprend plus vite que du côté libéral.
Des gens nous disaient leur désir de ne pas se voir regrouper
malgré eux. Pourtant, le gouvernement libéral a passé
outre au désir de la population.
On les a regroupés, malgré eux. Aujourd'hui, on est
à même de voir ce qui s'est passé. On est à
même de voir comment la population est déçue, parce qu'on
lui a fait miroiter des choses qui n'ont jamais existé et qui
n'existeront jamais.
C'est pourquoi nous disons que, si le gouvernement est réellement
sérieux, s'il se dit ou s'il veut continuer à se prétendre
le serviteur du peuple, il doit consulter le peuple. Cela voudrait dire donner
la possibilité à tous ceux qui sont intéressés de
venir nous faire part de leurs revendications devant une commission
parlementaire sur ce sujet. Ce n'est pas nouveau. Des commissions
parlementaires, on en tient sur tous les autres sujets.
De l'autre côté de la Chambre, ils nous diront probablement
qu'ils sont disposés à convoquer une commission parlementaire,
mais après que le coup sera fait, pas avant. C'est toujours la
même chose. Quand la patate est trop chaude, on nous dit: Oui, mais vous
viendrez en commission parlementaire. Laissez-nous adopter le bill et vous
viendrez après.
Ce n'est pas après que les mauvais coups sont faits qu'on
consulte; c'est avant. Nous avons aussi, du côté de l'Opposition,
le droit, comme députés, d'être éclairés. On
m'a dit tantôt qu'on ne nous demande pas de voter. Non. Je vais vous dire
une chose: Je ne siège pas ici, moi, comme membre du gouvernement. Je ne
siège pas, non plus, comme membre d'une corporation municipale. Je
siège ici comme député élu, représentant la
population. La population a le droit d'être consultée et nous
avons le droit, en tant que députés c'est notre droit
comme du côté ministériel d'avoir tous les
renseignements en notre possession avant de prendre une décision, soit
en deuxième ou en troisième lecture.
Est-ce qu'on nous a donné cette possibilité? Je dis: Non.
Du côté gouvernemental, bien sûr, vous avez tous les
détails. Vous avez commandé des études scientifiques. Vous
avez pris le temps qu'il vous fallait pour préparer tout ça, mais
on nous amène ça, nous autres, la veille de Noël;
regardez-moi cette brique, M. le Président, et on voudrait que
l'Opposition donne le feu vert à tout ça? Il y en a qui vont plus
loin que ça, ils disent: On n'a pas besoin de l'Opposition, ne nous
donnez pas le feu vert, on va vous l'imposer. C'est ça la philosophie du
gouvernement. On veut imposer un regroupement municipal comme on veut imposer
aux députés de l'Opposition l'adoption de ce projet de loi en
vitesse, à la vapeur, à la dernière minute. C'est
là la philosophie du gouvernement; vouloir imposer toujours sa
volonté, sans consultation.
C'est pourquoi, M. le Président, je pense qu'il est juste et
raisonnable que nous donnions à tous et à chacun de ceux qui sont
intéressés la possibilité de venir faire valoir leur point
de vue. Ceux qui sont pour on les écoutera également. Et à
la suite de ça, M. le Président, on pourrait prendre une
décision à la lumière des faits présentés
devant la commission parlementaire.
Motion de report à trois mois
M. SAMSON: C'est pourquoi, en terminant mon discours, je désire
présenter un amendement, M. le Président, qui se lirait comme
suit: Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant le
mot "maintenant" par les mots "dans trois mois" aux fins de permettre qu'une
commission parlementaire puisse entendre toutes les parties concernées.
Après cela, nous reviendrons devant le Parlement à la reprise de
la session et on verra de quelle façon nous serons en mesure de voter.
Mais présentement,
honnêtement, M. le Président, il est impossible de pouvoir
se faire un jugement valable, n'ayant pas en main tous les détails, tous
les renseignements et surtout, quand on connaît tellement la philosophie
du gouvernement, c'est-à-dire d'imposer et d'imposer...
Oui, M. le Président, je pense que vous me demandez, je m'excuse,
je n'ai pas eu le temps d'aller faire écrire cela à la
machine.
De toute façon, ce n'est pas nécessaire, en vertu de nos
règlements.
M. le Président, en terminant, je vous dis ceci: C'est que nous
ne devons pas laisser passer cette possibilité de consulter les gens qui
sont intéressés, en leur annonçant d'avance qu'on voudrait
les entendre afin de leur permettre de se déranger pour venir devant
cette commission parlementaire. Merci infiniment, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Sur la motion?
M. BELLEMARE (Johnson): Oui.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Sur la motion d'amendement?
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, monsieur.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de Johnson.
M. Maurice Bellemare
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, le projet de loi qui est
devant nous et qui vient de subir un amendement du député de
Rouyn-Noranda amène dans la discussion bien des problèmes et des
aspects techniques et même répond à plusieurs questions que
se posent bien des gens. Je suis, comme mes collègues de Rouyn-Noranda
et de Lafontaine, un peu pris à la dernière minute. L'amendement
qui est apporté est surtout pour nous donner le temps, à
l'Opposition, de vérifier tout ce que nous a dit l'honorable
député de Hull, particulièrement lui qui s'est fait
très élogieux. Je pense qu'un projet de loi aussi volumineux, qui
surtout concerne dans la province deux grandes régions, a besoin
d'être plus éclairé et de recevoir plus de
renseignements.
Pourquoi l'amendement, M. le Président? Premièrement,
parce que, comme dit l'honorable député de Rouyn-Noranda, ce
n'est pas unanime, contrairement à tout ce qu'on a pu lire. Ce n'est pas
unanime, contrairement à ce qu'a dit l'honorable ministre des Affaires
municipales. J'ai ici en main plusieurs télégrammes je ne
voudrais pas tous les lire mais il y en a un particulièrement qui
vient des échevins et du maire d'une municipalité qui va
être assujettie à cette réorganisation municipale et qui
proteste très vivement, pour répondre à ceux qui disent
que c'est unanime. "Face à une loi déposée à la
dernière minute pour décréter la fusion de notre ville
avec Jonquière-Kénogami, les paroisses de Saint-Dominique de
Jonquière, nous demandons, avec beaucoup d'insistance, et au nom de la
justice la plus élémentaire, la convocation immédiate de
la commission parlementaire des affaires municipales afin de faire entendre
toutes les représentations que nous aurions faites devant la Commission
municipale du Québec, avant l'adoption du projet de loi proposé
et suivant l'esprit de la nouvelle charte des droits de l'homme du
Québec". Signé, M. le maire Francis Dufour, maire d'Arvida, M.
Marcellin McNicoll, maire suppléant...
M. PARENT (Hull): Un candidat péquiste de 1973 dans...
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je ne m'occupe pas du
candidat ou pas candidat. Je lis une pièce qui m'est remise, que je
viens de recevoir...
M. SAMSON: ... de la partisanerie.
M. BELLEMARE (Johnson): Arrêtez-moi donc ça, les PQ ou les
UN, ou bien la CP ou les C... Il y a une limite...
M. LESSARD: C'est un droit de citoyen, être candidat.
M. BELLEMARE (Johnson): Alors, il y a des limites à ça, M.
le Président. On est en Chambre pour être des parlementaires et
parler des protestations contre le projet.
L'amendement, qu'a apporté le député de
Rouyn-Noranda, en a ici une confirmation. Ce n'est pas unanime. Un autre maire
d'une municipalité de la province de Québec, qui joue un
rôle assez important dans l'Union des municipalités, voici son
télégramme: "Après dépôt de la loi de
regroupement Outaouais et Haut-Saguenay, sommes très déçus
de l'exclusion que l'on fait de Saint-Hyacinthe, malgré votre assurance,
M. le Ministre, que le traitement serait le même pour les trois
unités de regroupement. Insistons beaucoup pour faire partie du
présent projet de loi et demandons d'être entendus". Signé,
M. Grégoire Girard.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, est-ce que l'honorable
député me permet une question? Est-ce qu'il invoque...
M. BELLEMARE (Johnson): Certainement, M. le Président.
M. GOLDBLOOM: ... ce télégramme pour suggérer que
nous ne devrions pas...
M. BELLEMARE (Johnson): Non, M. le Président. C'est simplement
pour demander au ministre: Pourquoi ne pas convoquer la commission
parlementaire? Pourquoi ne pas répon-
dre à la demande de l'honorable député de
Rouyn-Noranda qui demande de le remettre à trois mois et d'entendre les
parties? Il y en a un qui dit: Je ne suis pas là-dedans, je ne suis pas
content. Il y en a un autre qui dit: Moi, je suis mis dedans et je ne suis pas
content. Alors, pourquoi ne pas donner la chance d'entendre ces messieurs en
commission parlementaire? Ras après que le projet de loi sera
adopté mais avant que le coup soit fait. C'est un coup de Jarnac. C'est
un boomerang qu'on impose. Et l'amendement est catégorique: trois mois.
Ce n'est pas trop pour découvrir les patroneux reconnus dans les
régions: d'abord, le député de Hull dans l'Outaouais, et
le député de Jonquière, M. le grand patroneux!
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): S'il vous plaît, on n'a pas le droit
de manifester dans les galeries. On ne veut pas être obligé de
vider les galeries... Vous avez le droit d'être là, mais soyez
tranquilles, s'il vous plaît.
M. BELLEMARE (Johnson): Une chose est certaine, c'est qu'ils l'ont
reconnu! Le grand patroneux, lui qui va passer à l'histoire du patronage
avec les grandes médailles, avec toutes les médailles des
patroneux.
M. LACROIX: M. le Président, sur une question de
privilège.
M. BELLEMARE (Johnson): Et c'est ça...
M. LACROIX: Est-ce que le député de Johnson veut que je
lui en parle, de patronage?
M. BELLEMARE (Johnson): Pardon?
M. LACROIX: Est-ce que le député de Johnson veut que je
lui parle de patronage?
M. BELLEMARE (Johnson): Oui.
M. LACROIX: Vous êtes le grand-père de cela, vous.
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, bien une minute, une minute.
M. LACROIX: J'ai de bonnes preuves pour vous et je peux...
M. BELLEMARE (Johnson): Quand ce sera le temps...
M. LACROIX: ... vous donner des noms à part ça.
M. BELLEMARE (Johnson): Non, non. Mais j'ai...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre ! Ce n'est pas une question de
privilège.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Prési- dent, j'ai fait exactement
ce que le député vient de faire. Quand j'étais, moi aussi,
whip en chef, j'avais des dossiers comme ça dans mon tiroir et je les
sortais. Quand quelqu'un me faisait mal, je disais: Voulez-vous que je vous en
parle? Et le député avait l'air pris...
M. LACROIX: Mais, dans mon cas, c'est vrai.
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, mais moi aussi, c'était vrai. J'en
avais moi aussi, des dossiers. Mais ce n'est pas de ça qu'on parle. Que
le député des Iles-de-la-Madeleine...
M. LACROIX: Si vous voulez parler de patronage, on va en parler.
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, oui, on va en parler.
M. LACROIX: Et on va en parler avec le PQ aussi.
M. BELLEMARE (Johnson): On va en parler, pas seulement des graines de
semence à la Bégin, on va parler d'autres choses. C'est clair
ça.
UNE VOIX: La margarine.
M. LACROIX: On va parler de n'importe quoi.
M. BELLEMARE (Johnson): De la margarine, tant que vous voudrez, et
n'importe où, en commission parlementaire...
M. LACROIX: Cela beurrait pas mal, ça.
M. BELLEMARE (Johnson): ... et les délateurs publics qui veulent
venir contre moi, ils viendront. Je suis prêt mon cher monsieur, à
mettre mon siège en jeu. Que le petit député en fasse
autant, qu'il ait le courage de le faire, par exemple. C'est un lâche,
pas d'autre chose que ça.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre!
M. BELLEMARE (Johnson): II y a une limite, M. le Président,
à se faire attaquer impunément par des gens de bas étage,
qui ne sont pas capables de prouver un avancé. Je mets mon siège
en jeu. Ayez le courage de le faire, vous.
UNE VOIX: Nommez-le.
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, nommez-le, oui.
Quand on voit ces grands patroneux, et surtout reconnus, avec toutes les
médailles de la grande guerre, la guerre contre tous les ennemis de leur
parti se demander, en bonne vérité,
pourquoi l'honorable député de Rouyn-Noranda apporte une
motion de trois mois. C'est facile à comprendre. Pourquoi cette fusion?
Pourquoi?
Consultez les statistiques officielles, les dernières qu'on vient
de recevoir, et vous allez voir que la ville de Jonquière a, elle, une
estimation de $71 millions, mais que son pouvoir de crédit est à
la limite. Pourquoi vouloir fusionner Arvida? Parce qu'Arvida, M. le
Président, a bien plus en évaluation municipale: $87
millions.
Voilà le chat ! On veut donner du crédit à la ville
de Jonquière. Parce que son crédit est épuisé, on
veut aller puiser dans une autre municipalité, en l'annexant,
l'évaluation de $87 millions que possède la ville d'Arvida.
Ce n'est pas tout, M. le Président. Quand on voit...
M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de
Johnson me permettrait une question?
M. BELLEMARE (Johnson): Vous allez avoir le temps, grand patroneux, tout
à l'heure, de parler. Assoyez-vous!
DES VOIX: Ha! Ha!
M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député...
M. BELLEMARE (Johnson): Non, M. le Président, non. Assoyez-vous!
Non. Vous en avez assez dit !
DES VOIX: Peureux!
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président...
M. BELLEMARE (Johnson): Vous en avez assez dit!
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! Il n'y a pas de
permission. La parole est au député de Johnson, à qui il
reste encore une minute et demie.
M. HARVEY (Jonquière): Je voulais lui rendre un service. Qu'il
change son livre parce que c'est un vieux livre !
M. BELLEMARE (Johnson): Combien?
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Une minute et demie.
M. BELLEMARE (Johnson): Une minute et demie. Ce n'est pas long, une
minute et demie, M. le Président.
M. HARVEY (Jonquière): C'est son vieux livre.
M. BELLEMARE (Johnson): On en aurait peut-être...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Vous aurez la chance de parler sur la
motion de fond après.
M. BELLEMARE (Johnson): Je me demande pourquoi ces honorables amis se
choquent.
M. HARVEY (Jonquière): Je ne suis pas fâché.
M. BELLEMARE (Johnson): On parle fort, c'est vrai, mais on dit des
vérités, des vérités qui sont confirmées par
vos statistiques.
M. HARVEY (Jonquière): J'ai voulu vous rendre service.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, cela leur fait mal.
Voyons donc, qu'ils fassent comme nous. On en endure assez, nous autres, de
leur part, à longueur d'années et de semaines. Prenez patience un
peu. Ne soyez pas si nerveux. Le député, le patroneux de
Jonquière, qu'il prenne son temps un peu, M. le Président. Il va
avoir le temps de parler sur la motion, comme je vais avoir le temps, tout
à l'heure, de parler sur le projet de loi. Là, je ne parle que
sur la motion et je dis que le député de Rouyn-Noranda a raison
de vouloir remettre l'étude du bill à trois mois, pour qu'on
puisse entendre d'abord les patroneux c'est important ensuite,
les maires qui sont contre et surtout la population.
Vous savez, M. le Président, comme le disait le
député de Rouyn-Noranda je le cite plusieurs fois parce
que je pense qu'il a parfaitement raison si, dans ma région, le
ministre des Affaires municipales décidait d'imposer la fusion au
Cap-de-la-Madeleine de Trois-Rivières et Trois-Rivières-Ouest, il
y aurait un tollé général. Pourtant, il n'y a pas neuf
milles qui nous séparent comme de Chicoutimi à
Jonquière.
Il y a neuf milles qui séparent Chicoutimi de Jonquière,
tandis qu'au Cap-de-la-Madeleine et à Trois-Rivières, il y a un
pont. Mais on n'en veut pas de fusion au Cap-de-la-Madeleine, à
Trois-Rivières et à Trois-Rivières-Ouest. On veut
l'assurance de services communautaires...
M. HARVEY (Jonquière): Cela fait longtemps que le
député n'y est pas allé. Vous vieillissez, vous
vieillissez, le père!
M. BELLEMARE (Johnson): Prenez votre règle, vous, et mesurez vos
pas !
M. le Président, on n'en veut pas de fusion au
Cap-de-la-Madeleine...
M. HARVEY (Jonquière): Vous vieillissez, le père!
M. BELLEMARE (Johnson): ... et à Trois-Rivières et
à Trois-Rivières-Ouest. Si cela fonctionne, demain, ce sera
peut-être à notre tour de tomber sous le couteau du
ministère des Affaires municipales.
On veut un rassemblement possible de certains services publics,
d'accord, mais la mentalité du Cap-de-la-Madeleine comme la
mentalité de Trois-Rivières ou de Trois-Rivières-Ouest est
complètement différente. Comment?
MME BACON: Revenez au projet de loi no 98.
M. GRATTON: Atterrissez!
MME BACON; Continuez, continuez.
M. BELLEMARE (Johnson): C'est sur ma motion, M. le Président, que
je parle. Allez-vous vous lever, vous, madame, pour parler sur la motion?
M. GRATTON: Adressez-vous au président.
MME BACON: Je vous laisse aller, mais revenez à 98.
M. BELLEMARE (Johnson): J'aimerais que vous vous leviez, pour vous
entendre, connaître votre ton de voix, je ne vous ai pas encore entendue
depuis que je suis arrivé. Ce serait intéressant.
UNE VOIX: Elle peut vous parler de la bourse d'étude.
MME BACON: Je ne patronne pas, moi.
M. HARVEY (Charlesbourg): Vous connaissez ça, le patronage.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!
M. BELLEMARE (Johnson): Parce qu'il ne faudrait pas s'occuper seulement
des "baby sitters". Il faudrait s'occuper de nous autres un peu.
M. le Président, je vais donc appuyer la motion de mon
collègue pour protester et j'aurai mon droit de parole en
deuxième lecture. J'ai encore des choses qui vont intéresser
cette honorable Assemblée.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de Chicoutimi, sur
la motion.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, j'interviendrai pour
appuyer la motion qui a été faite par le député de
Rouyn-Noranda. Je sais que reporter l'étude de ce projet de loi, ou son
adoption, peut amener certaines difficultés, étant donné
le fait qu'il y a déjà le bill 76 que nous avons adopté et
qui a remis à trois mois certaines élections qui devaient
être tenues dans le secteur JAK.
Cependant, même si cela peut représenter quelques
difficultés, je suggère respectueusement que, puisqu'il s'agit de
décider, par ce projet de loi, non seulement l'avenir de l'unité
de regroupement JAK mais également l'avenir de tout le secteur de la
Baie, l'avenir de la ville de Chicoutimi et des villes avoisinantes, autrement
dit l'avenir de tout le Haut-Saguenay, même si ça peut apporter
quelques difficultés dans une unité précise, il reste
quand même que le bien général concernant la portée
de ce projet de loi m'oblige à appuyer cette motion faite par le
député de Rouyn-Noranda.
Cette commission parlementaire permettra aux gens de venir exprimer leur
opinion. Cela est un droit fondamental des citoyens, de quelque population que
ce soit, de pouvoir exprimer leur accord ou leur désaccord dans l'ordre
et selon la saine tradition d'une vraie démocratie, d'exprimer leur
accord ou leur désaccord à l'intérieur d'une commission
parlementaire qui serait tenue à ce moment-là, selon la
proposition faite par le député de Rouyn-Noranda.
Je suis convaincu qu'on ne peut pas prendre cette proposition à
la légère, même s'il y a certains inconvénients. Ce
délai de trois mois pourra peut-être permettre au ministre des
Affaires municipales de repenser, puisqu'il nous a dit tout à l'heure,
et je l'ai bien noté, dans son discours, textuellement: "Nous sommes
trop avancés pour repenser ce projet".
Quand on décide avec une loi qui force tout un secteur qui est le
Haut-Saguenay d'adopter une politique bien précise, ce n'est pas parce
que nous sommes trop avancés politiquement qu'on doit refuser de
continuer à penser et de permettre aux citoyens de pouvoir
s'exprimer.
Ceci permettra au ministre des Affaires municipales d'être logique
avec toutes les déclarations qu'il a faites depuis des années
à l'effet qu'il n'y aurait plus de fusion forcée tant qu'il
serait ministre des Affaires municipales.
Ce ministre est venu à maintes et maintes reprises dans la
région nous dire qu'il n'y aurait pas de fusion forcée. Ce
délai permettra également au ministre du Revenu d'être
logique avec ces mêmes déclarations, où il a très
bien insisté sur le fait qu'il était contre les fusions
forcées; ceci permettra de réfléchir parce qu'il n'y a pas
seulement le ministre des Affaires municipales et le ministre du Revenu qui ont
fait de telles affirmations à la population. Il y a également le
ministre de l'Agriculture, qui, lors de sa dernière tournée dans
la région, a carrément déclaré qu'il n'y aurait pas
de fusion si les quatre maires des municipalités concernées
n'étaient pas d'accord. Or, les quatre maires ne sont pas d'accord, M.
le Président.
Alors, on ne joue pas comme cela avec une population à qui on
vient faire des déclarations pour l'endormir. M. le Président,
une fusion ce n'est pas un vil geste politique qu'on fait, cela ne doit pas
être une décision politique mais c'est l'aboutissement d'un
processus qui fait que des populations qui ont été
habituées à
vivre ensemble décident à un moment donné de s'unir
mais de s'unir librement. C'est la meilleure manière de faire une fusion
qui puisse porter des fruits valables pour l'avenir. Une fusion, M. le
Président, ce n'est pas le résultat de combines de petits
politiciens; ce ne doit pas être tout simplement la conclusion...
M. HARDY: Les faux purs.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... d'une certaine hypocrisie qui s'est
faite...
M. HARDY: Oui, oui.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... au niveau de certaines déclarations.
C'est quelque chose...
M. HARDY: Les faux purs.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... de sérieux, M. le
Président.
M. HARDY: Les faux purs.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ce sont des populations qu'on oblige et, dans le
cas dont nous parlons, il s'agit de tout le Haut-Saguenay, M. le
Président. Il s'agit de...
M. HARDY: Les sépulcres blanchis.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... plusieurs municipalités. Il s'agit de
l'avenir de toute une région. Le ministre des Affaires municipales nous
a dit tout à l'heure qu'il est trop avancé, peut-être
politiquement, pour s'astreindre à repenser le problème; bien, M.
le Président, je commence à avoir des doutes. C'est d'autant plus
nécessaire que la loi telle qu'elle est formulée je
n'entrerai pas dans les articles, nous le ferons en commission parlementaire
nous montre jusqu'à quel point on peut avoir des doutes sur
l'objectif principal de cette loi, qui est une seule ville au Haut-Saguenay,
une seule ville de Jonquière à Rivière-du-Moulin. Je suis
d'accord, M. le Président, sur cet objectif. Mais, à la lecture
seulement du projet de loi, on s'aperçoit qu'on prévoit
danger encore des élections générales en 1979. Il y
a plusieurs articles qui prévoient des gestes qui seront posés en
1979 par cette nouvelle ville qui sera la ville de Jonquière alors qu'on
nous dit d'un même souffle, dans ce projet de loi, que la grande ville du
Haut-Saguenay je suis d'accord, M. le Président, qu'elle soit
formée mais qu'elle soit formée librement doit être
formée en 1978.
M. le Président, il y a avantage à ce qu'on remette
à trois mois, non seulement pour permettre aux populations
intéressées de s'exprimer, permettre aux maires qui sont d'accord
de s'exprimer, à ceux qui ne sont pas d'accord de le faire aussi, M. le
Président, mais, au-delà des maires, au-delà des
députés et des ministres, il y a quand même la
population.
Je crois qu'il est important que cette population puisse se faire
entendre et que cette commission parlementaire puisse nous permettre
d'étudier sérieusement ce projet de loi. Trois mois ce n'est pas
trop, lorsque l'avenir de toute une région est concerné, pour
étudier sérieusement ce projet de loi, non pas par le biais d'un
filibuster ou quoi que ce soit, mais faire une étude sérieuse du
projet de loi, étudie sérieuse que nous ne pourrons pas faire,
parce qu'on vient juste de nous présenter ce projet de loi.
On est à quatre ou cinq jours peut-être d'un ajournement.
Nous sommes astreints aux règles, aux procédures d'urgence qui
accompagnent les fins de session, et on essaie de nous faire croire que le
ministre des Affaires municipales agit en homme sérieux en
présentant un projet de loi comme ça, dans des conditions comme
celles-là. On essaie de nous faire croire que le ministre du Revenu est
sérieux en présentant un projet de loi comme celui-là dans
des circonstances qui sont inacceptables.
Je m'excuse de m'emporter, M. le Président, mais c'est difficile
de ne pas être émotif lorsqu'on a à coeur l'avenir d'une
région. Je sais que le ministre du Revenu l'a aussi. Je sais que les
autres députés de la région l'ont aussi. Et au nom,
justement, de ces bons mouvements qu'ils peuvent avoir pour l'avenir de la
région, je leur dis ceci: Nous sommes dans des conditions inacceptables
pour étudier sereinement un tel projet de loi. Et il convient
c'est le moins qu'on puisse donner aux populations du Haut-Saguenay de
prendre au moins un délai de trois mois pour permettre, encore une fois,
à la population de s'exprimer plus librement, de manière à
ce que, si nous en venons à une fusion, elle ait eu l'occasion
d'être étudiée dans des conditions valables et en
respectant ce que nous devons respecter: la démocratie, et non pas en
essayant, comme l'a fait le gouvernement, d'imposer ses volontés
à toute une population. Merci, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de
Jonquière sur la motion d'amendement.
M. Gérald Harvey
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, sur la motion
d'amendement pour remettre à trois mois le projet de loi et faire
siéger la commission parlementaire, je crois qu'il serait inutile
d'énumérer avec quelle insistance, depuis le décret de ces
unités de regroupement, au Saguenay-Lac-Saint-Jean ou, plus
précisément, dans la trame urbaine du Haut-Saguenay, tout a
été fait pour procéder selon le bill 276.
Malheureusement, il a été impossible de le faire par
l'organisme décrit dans la loi 276, adoptée le 23 décembre
1971 et devenue le chapitre 56 des Lois de 1971. Nous étions conscients
de cela après une étude sérieuse dans la région du
Saguenay, entreprise alors que celui
qui vous parle était un membre de la loyale Opposition de Sa
Majesté, sous le règne du parti du nouveau et vieux
député de Johnson, qui était, à ce moment, ministre
vigoureux et député de Champlain de cette défunte Union
Nationale. Il a eu, comme d'habitude, la délicatesse d'y aller
d'insinuations malveillantes et poltronnes à l'endroit d'un homme qui
n'a pas peur de marcher la tête haute dans sa région devant des
gens dont je respecte l'opinion, que je trouve cohérente et logique
parce qu'ils sont tous et je vais vous le dire dans mon propos
contre le regroupement municipal sous toutes ses formes. Je ne les blâme
pas; je les trouve cohérents.
Comme je trouve cohérents également et incohérents
les propos tenus par le député de Chicoutimi quand j'ai devant
moi non pas trois maires sur quatre, mais huit maires sur neuf, avec l'appui de
leur conseil municipal, dont un dissident, une population dissidente, qui
approuvent et félicitent le gouvernement de ne pas retarder de trois
mois une décision qu'il doit prendre, malgré qu'elle demande le
courage que doivent avoir des hommes publics après avoir tenté
tout ce qui est humainement possible pour amener à une table ceux dont
l'avenir est en jeu.
En 1968, le CER, Conseil économique régional, devenu le
CRD, a fait une mission d'une année, avec les meilleurs cerveaux de la
région économique 02. Conclusion: diminuer les centres de
décision dans la trame urbaine du Haut-Saguenay.
Toujours dans l'Opposition, donc à l'extérieur de
l'Exécutif du gouvernement du Québec, mission de planification
commandée par un excellent ami, un ami intime du député de
Johnson, M. Marcel Masse, qu'il adorait particulièrement, responsable de
l'ODEQ et de l'OPDQ. Mission d'une année, avec les meilleurs cerveaux
des ministères concernés: Ressources,
Affaires municipales, Education. Conclusion: diminuer le nombre des
centres de décision dans la trame urbaine, pour faire un
développement harmonieux de cette trame urbaine où l'on passe
d'une ville à l'autre. Si on tombe à droite, notre service est
chanté à Kénogami; à gauche, à
Jonquière et, en arrière de nous, à Arvida. Conclusion:
réclamation unanime des maires du Haut-Saguenay présidait
cette conférence le premier citoyen de la ville dissidente d'une
communauté municipale dans le Haut-Saguenay.
Le ministère des Affaires municipales, à la fin de 1971,
après l'expérience des communautés urbaines,
décide, malgré la publication d'un livre blanc, d'abandonner
définitivement la création de communautés municipales.
Mais le premier désir, M. le Président, de faire du regroupement
municipal, est-ce qu'il est né dans l'esprit du député de
Jonquière devenu, par la confiance que lui a faite le premier ministre
du Québec, le ministre du Revenu et le ministre responsable de la
région économique de Québec à l'Office de
planification et de développement? Pas le patroneux comme l'a dit
l'ex-dé-puté de Champlain. Je l'ai mieux connu, M. le
Président; il est devenu le député de Johnson. Je vais me
priver du plaisir que j'aurais à vous raconter tout ce qu'on m'a dit de
lui.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! Je constate qu'il
est six heures. Voulez-vous demander la suspension du débat?
M. HARVEY (Jonquière): Huit heures et quart? D'accord.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): La Chambre suspend ses travaux
jusqu'à vingt heures quinze.
(Suspension de la séance à 18 h 1)
Reprise de la séance à 20 h 21
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! La parole est au ministre
du Revenu sur l'amendement proposé par l'honorable député
de Rouyn-Noranda.
M. HARVEY (Jonquière): Alors, M. le Président, au moment
même où je demandais la suspension du débat, à six
heures ce soir, pour nous permettre d'aller casser la croûte, le
député de Bagot je voudrais qu'il m'écoute un petit
instant ...
DES VOIX: Johnson.
M. HARVEY (Jonquière): Le député de Johnson. Le
député de Johnson, dis-je, s'est appliqué, sur la motion
d'amendement, remettant à trois mois la discussion du bill, à
faire de la démagogie et des insinuations malveillantes sur le
député de Jonquière.
Je lui dirai que mon maître m'a inspiré dans le choix d'un
excellent fonctionnaire qui est à mon service et qu'il a
déjà eu à son emploi. Son nom est Paul. Et à
l'instar de son saint patron sur le chemin de Damas, il a laissé le
chemin tortueux sur lequel l'avait engendré l'ex-député de
Champlain...
M. BELLEMARE (Johnson): Je soulève un point de règlement,
M. le Président.
M. HARVEY (Jonquière): ... pour revenir sur le boulevard de la
liberté.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît
!
L'honorable député de Johnson sur une question de
règlement.
M. BELLEMARE (Johnson): ... l'honorable ministre parle... Il est sorti
de...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît
!
M. BELLEMARE (Johnson): ... il est sorti de...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît
!
M. BELLEMARE (Johnson): ... la motion. Je dirai à l'honorable
député que c'est lui qui m'a appelé pour savoir s'il
devait le prendre ou ne pas le prendre à son service.
M. HARVEY (Jonquière): Alors, je répète...
M. BELLEMARE (Johnson): Alors, qu'il revienne à la motion. Ce
n'est pas dans la motion. Qu'on laisse donc les absents tranquilles.
M. HARVEY (Jonquière): D'accord. D'accord. Et je termine en
disant...
M. BELLEMARE (Johnson): II fait bien son travail, il sert bien...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Bon.
M. BELLEMARE (Johnson): II remplit bien son mandat auprès du
ministre.
M. HARVEY (Jonquière): Et j'allais terminer, M. le
Président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne ) : Là, je suis debout.
M. BELLEMARE (Johnson): Et, M. le Président, pourquoi...
M. HARVEY (Jonquière): ... mon intervention...
M. BELLEMARE (Johnson): ... parler d'un absent?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Là, je suis debout. Je vous
invite à vous asseoir tous les deux.
L'honorable ministre du Revenu.
M. HARVEY (Jonquière): Le député de Johnson a
raison et je termine en disant qu'il est revenu sur le boulevard de la
liberté, dégagé et travaillant à sa fonction
d'administrateur agréé.
Alors, au moment où je demandais la suspension, vous avez
été témoin, ainsi que les membres de cette Chambre, de la
démonstration qui identifie exactement le climat serein que nous aurions
à la commission parlementaire si nous retardions de trois mois, comme le
veut l'amendement du député de Rouyn-Noranda, l'étude de
ce projet de loi.
Alors, ma preuve est faite et, encore une fois, dans des dossiers
positifs, où la vérité et la tentative de dialoguer avec
tout le monde accouchent d'un projet de loi, on doit procéder avec
célérité. Je voterai donc contre l'amendement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, j'ai écouté
l'intervention de celui qu'on pourrait appeler le parrain de ce projet de loi
dans la région du Saguenay, c'est-à-dire le député
de Jonquière. J'ai essayé de percevoir à travers son
intervention une argumentation qui nous aurait démontré la
nécessité d'adopter à la vapeur, d'adopter
immédiatement ce projet de loi.
M. HARVEY (Jonquière): Attendez mon discours.
M. LESSARD: Je n'ai pas rappelé à l'ordre, sur la
pertinence du débat, le député de Jonquière mais
nous aurions pu le faire. C'est en vain que nous avons attendu qu'on nous
propose une certaine argumentation s'opposant à la motion
présentée par le député de Rouyn-Noranda.
En effet, M. le Président, qu'est-ce qui presse tant, tout
à coup, le gouvernement, lors d'un moment qui est assez difficile, au
moment où nous vivons avec des procédures qui sont
extraordinaires, au moment où nous sommes dans une période
où il est difficile de consulter la population? Qu'est-ce qui presse
tant le gouvernement?
UNE VOIX: Cela fait dix ans que...
M. LESSARD: M. le Président, oui, peut-être, il est vrai
que cela fait dix ans qu'on parle de fusions régionales, de fusions de
certaines villes. Mais ce n'est pas en imposant d'une façon
systématique un projet de loi comme celui-là, sans aucune
consultation, sans référendum qu'on va véritablement
valoriser les politiques du gouvernement actuel, les politiques de fusions
municipales.
M. le Président, ce projet de loi m'inquiète d'autant plus
que, chez nous, j'ai aussi des villes qui, probablement, trouveraient avantage
à fusionner. Je sais que, tôt ou tard, il faudra envisager des
possibilités de fusion entre deux villes comme Baie-Comeau et Hauterive.
Cependant, dans la région et je pense que ce sera la même
chose pour certaines régions du Québec et il semble que ce soit
la même chose pour la région du Saguenay jamais nous
n'accepterons que le gouvernement, contrairement à ce qu'a toujours dit
le ministre actuel des Affaires municipales, vienne nous imposer une fusion
sans aucune consultation, sans qu'il y ait au préalable
référendum au niveau de la population.
En effet, ce n'est pas de l'enfantillage quand on parle de fusion de
certaines villes. Il ne s'agit pas de jouer avec l'avenir des citoyens de ces
régions.
Le député de Chicoutimi l'a dit,il s'agit d'un des projets
de loi les plus importants qui toucheront à la région du
Saguenay.
Il nous paraîtrait tout à fait normal et logique que les
populations concernées puissent être consultées. Ce n'est
pas parce que nous nous opposons actuellement à ce projet de loi tel
qu'il est que nous nous opposons au principe de la fusion. Le
député de Lafontaine l'a affirmé cet après-midi:
Nous sommes favorables au regroupement municipal, nous sommes favorables
à diminuer le nombre de villes à l'intérieur du
Québec.
Cependant, il semble qu'on n'ait pas compris l'intervention du
député de Lafontaine.
M. BACON: C'est écrit si fin qu'on ne comprend pas, certain.
M. LESSARD: Cependant, nous ne le sommes pas à n'importe quel
prix.
M. BACON: On ne comprend pas son texte.
M. LESSARD: Nous voulons que les populations qui seront
fusionnées aient d'abord appris à vivre ensemble. Nous voulons
que ces populations, qui seront les premières touchées, les
premières impliquées dans ce nouveau système, soient
d'abord consultées par référendum. D'ailleurs, le ministre
n'avait pas besoin de présenter un projet de loi spécial pour
favoriser la fusion des villes concernées. Il n'avait qu'à
appliquer de façon intégrale ce qui existe actuellement, soit la
Loi 276 favorisant le regroupement des municipalités. On m'informe que
la Commission municipale n'est même pas allée dans la
région, que pratiquement aucune étude n'a été faite
sur le regroupement de ces différentes villes. La Commission municipale
ne s'est pas présentée dans la région.
Je pense qu'attendre trois mois, ce n'est pas risquer l'avenir de ces
villes; c'est probablement permettre de valoriser cette fusion. Attendre trois
mois, c'est permettre qu'une population vienne se faire entendre ici devant les
parlementaires, c'est permettre que les organismes, les corps
intermédiaires, les maires, les différents conseils municipaux
viennent expliquer aux parlementaires de quelle façon ou selon quelles
modalités ils accepteraient cette fusion.
Attendre trois mois, M. le Président, c'est, une fois que ces
personnes auront été entendues, avoir la possibilité de
faire un référendum, avoir la possibilité de consulter la
population, avoir la possibilité de recevoir les doléances de la
population, afin que cette population vienne nous dire exactement si elle est
pour cette loi, si elle est favorable à ce regroupement et de quelle
façon ce regroupement devrait être fait.
M. le Président, c'est toujours la même habitude qu'a ce
gouvernement: les projets de loi qui touchent passablement de monde, les
projets de loi qui sont d'une certaine importance nous sont toujours
présentés à la fin d'une session. Or, nous trouvons cela
absolument anormal. Des projets de loi qui mériteraient une certaine
réflexion, tant de la part des députés de l'Opposition que
de la part de certains députés libéraux, des projets de
loi qui mériteraient une étude probablement plus approfondie, des
projets de loi qui devraient être étudiés selon les
procédures normales et non pas selon le système du rouleau
compresseur, c'est ce que nous demandons, M. le Président, quand nous
appuyons la motion du député de Rouyn-Noranda.
Il me semble qu'il n'y a pas péril en la demeure dans la
région. Il me semble que cette période de trois mois ne risque
pas l'avenir de cette région. Il me semble que si on veut
prouver à cette population, si on veut lui démontrer qu'on
est sérieux, si on veut, non seulement pour cette région mais
pour d'autres régions du Québec dont la mienne, M. le
Président, prouver que les fusions municipales devront se faire avec le
consentement, avec la participation de la population, il semble, dis-je, que le
ministre des Affaires municipales devrait au moins accepter la proposition qui
est faite par le député de Rouyn-Noranda et que nous
appuyons.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable chef de l'Opposition
officielle.
M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN: M. le Président, je voudrais donner mon opinion sur la
motion de report à trois mois de ce projet de loi. J'ai eu l'occasion
récemment... M. le Président, ai-je la parole? Si avant
même de commencer, je suis interrompu, j'aime autant...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Vous avez la parole.
M. MORIN: J'ai eu l'occasion, au cours de mes tournées à
travers le Québec, de me heurter à des cas de fusions qui avaient
été imposées par des lois spéciales.
J'ai pu constater à maintes reprises à quel point ces
municipalités vivaient dans la tension, à quel point ces
unités artificielles, recouvrant souvent des territoires trop vastes,
imposées malgré la volonté des populations, ne
correspondant pas à une cellule cohérente et naturelle,
créaient plus de tensions qu'elles n'en pouvaient résoudre.
Je pense en particulier à un cas qui sera bien connu du ministre
et dont j'ai longuement entendu parler, soit celui de Gaspé. Je pourrais
en citer d'autres, mais je m'étendrai sur ce cas parce qu'il est
particulièrement probant et qu'il nous rappelle qu'on a
procédé, là aussi, de façon autoritaire. Parce que
"ça tramait", parce que depuis un certain nombre d'années cela
devait se faire et que cela ne se faisait pas parce que les populations n'en
voulaient pas, alors, lestement, on a sauté par-dessus les étapes
du cheminement psychologique qui est nécessaire quand on veut faire
vivre ensemble des gens qui n'en ont pas l'habitude. Lestement, on a
écarté la consultation, on a fait fi des volontés locales.
On a mis ensemble ceux qui n'allaient pas ensemble et, aujourd'hui, quand nous
allons du côté de Gaspé, on n'entend parler que de
cela.
J'invite mes collègues à aller de ce côté.
J'invite les députés à causer avec n'importe quelle
personne dans cette ville. Tôt ou tard et, plutôt tôt que
tard, on verra les gens mentionner ce problème et en discuter pendant
des heures. Cela a été mon cas.
M. LACROIX: Voulez-vous entendre le député de
Gaspé?
M. MORIN: J'aperçois le député de Gaspé, il
connaît très bien ce dont je parle.
M. LACROIX: II est beaucoup plus crédible que vous.
M. MORIN: J'imagine qu'il connaît mieux le problème que
moi. Je n'en disconviendrai pas. Il est bien placé pour savoir; il va
sans doute nous en parler tout à l'heure.
M. FORTIER: Puis-je poser une question au chef de l'Opposition, M. le
Président?
M. MORIN: Je n'autorise pas, pour l'instant, le député de
Gaspé à m'interrompre. Pour quelle raison? Une question de
règlement?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Non, non, c'est pleinement votre
droit, mais je voudrais vous rappeler que c'est vous qui avez signalé sa
présence. Mais pas de question permise? Non. Il n'y a pas de
question.
M. FORTIER: J'ai seulement une question à vous poser.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): II n'y a pas de question.
M. MORIN: Non, tout à l'heure. UNE VOIX: II a peur. Il a
peur.
M. FORTIER: Est-ce que le chef de l'Opposition sait...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre! La question n'est pas permise et est refusée.
M. MORIN: M. le Président, je tremble à l'idée que
le député pourrait dire ce qu'il pense. Voyez, je tremble. Il
pourra le dire tout à l'heure. Je tremblerai à ce moment, si cela
ne vous fait rien.
M. LACROIX: II n'y a pas de chèque au bout de sa question.
M. MORIN: II pourra le dire tout à l'heure à quel point
cette fusion est mal ressentie, mal acceptée par les gens de son
comté. Il est évident que l'exemple de Gaspé devrait nous
servir d'avertissement. Tôt ou tard, le ministre sera forcé de
revoir cette fusion arbitrairement imposée. Tôt ou tard, le
ministre sera obligé qu'il le veuille ou non de faire au
moins deux municipalités dans cette immense territoire.
On dit, pour rire dans le pays, que la
municipalité de Gaspé, telle qu'elle existe actuellement,
doit être la seule du Québec où l'on puisse se perdre dans
le bois la nuit. C'est une municipalité totalement artificielle,
où les gens n'ont pas ce sentiment de vivre en commun des
problèmes, de tenter de les résoudre ensemble. Ce ne sont que
tensions. Il suffit qu'on soit d'un côté ou de l'autre de la baie
pour entendre des sons de cloches différents, pour entendre des gens se
plaindre de l'autre moitié de cette grande municipalité.
Cet exemple aurait pu servir d'avertissement au ministre, lui qui
prétend qu'il est sensible à l'opinion des gens. Ne nous
parlait-il tout à l'heure de sondages? Non. Le ministre n'a pas assez de
cette expérience probante dont, j'espère, le député
de Gaspé nous parlera tout à l'heure. Je suis très
intéressé à l'entendre. Le ministre n'a que faire des cas
qui, pourtant, démontrent, sinon son autoritarisme, du moins son
incompétence. Il veut, une fois de plus, imposer, peut-être pas sa
volonté, mais la volonté de certains "hommes forts" locaux,
à deux regroupements qui n'en veulent pas, ou, en tout cas, dont on ne
connaît pas vraiment la volonté.
Le principe de la loi 276 était la consultation. Je sais bien que
ce n'est pas facile de mettre les gens ensemble pour leur faire réaliser
un dessein commun, pour leur permettre d'affronter des problèmes communs
et de trouver des solutions communes. C'est en effet difficile. Il faut y
mettre le temps.
M. le Président, on nous a dit tout à l'heure: Cela fait
dix ans, dans le cas du Saguenay-Lac-Saint-Jean. A mon avis, cela semble
plutôt prouver que le regroupement ne va pas de soi dans cette
région. Cela semble prouver que le ministre n'a pas su respecter les
étapes que la loi lui suggère. Il y a, dans la loi 276, plus
qu'une simple exigence de cheminement administratif. Il y a, dans la loi 276,
un cheminement psychologique. Quand on veut grouper le monde ensemble, il faut
l'y préparer. Cela ne s'improvise pas.
Le ministre, dans les cas qui nous intéressent, improvise et il
récoltera, d'ici quelque temps, les fruits de ce qu'il est en train de
semer. Le ministre sait ce qu'il en est à Gaspé. Le ministre sait
les maux de tête que cela lui vaut et il veut recommencer ailleurs, pour
des raisons qui ne sont probablement pas les siennes. Je pense qu'il est un
homme de jugement, dont le jugement s'égare, pour des raisons que je
voudrais bien comprendre, dans les cas qui nous intéressent.
M. le Président, quand on veut regrouper, qu'il s'agisse
d'ailleurs de municipalités ou de groupes humains de n'importe quelle
sorte, il faut préparer le terrain. J'identifierais trois ou quatre
nécessités absolues qui font que, dans ces cas-ci, nous devons
remettre au moins à trois mois l'étude de ce projet de loi pour
donner le temps de donner suite à ces nécessités.
La première nécessité, c'est d'informer. J'ai cru
comprendre, lorsque je suis passé dans ces régions, que tous les
citoyens étaient loin d'avoir été aussi informés
qu'ils le devraient sur ces questions. Bien sûr, si l'on parle aux
maires, ils connaissent la question, quoique j'aie vu des cas où
même les maires étaient perplexes et se demandaient quels
étaient vraiment les tenants et aboutissants, les conséquences,
tous les effets que pourrait avoir la fusion sur leur municipalité.
Il ne suffit pas d'informer les maires, les conseils municipaux, il faut
informer la population. Si on prend le temps de le faire, bien des obstacles
peuvent être abolis. Il faut y mettre le temps.
Je sais bien que le ministre va me dire: On ne peut tout de même
pas attendre quinze ans. Dans certains cas, peut-être. Dans d'autres,
non. Dans certains cas, cela peut se faire très rapidement si les gens
voient qu'il est dans leur intérêt de procéder à un
regroupement; cela peut se faire relativement vite. D'ailleurs, il y a des cas
où cela s'est fait de consentement, assez rapidement.
Mais lorsque les gens ne savent pas qu'il est de leur
intérêt de se regrouper, il n'est pas étonnant qu'ils s'y
opposent. Le ministre sait bien que devant l'inconnu ou devant des changements
dont les gens ne peuvent pas mesurer toutes les conséquences, ils
hésitent quelquefois. Mais nous savons bien que les
Québécois, lorsqu'on les informe, lorsqu'on les met devant les
faits, ont assez de bon sens et d'intelligence pour prendre leurs
responsabilités et les décisions qui s'imposent.
Je pense que sur le plan national, nous sommes en train de le
démontrer. Mais revenons au plan municipal. Revenons à ras de
terre; c'est sans doute ce qui est le plus important ce soir. Il faut donc
informer. J'ai pu constater à de nombreuses reprises, à travers
le Québec, à quel point, quand on informe sur les aspects
financiers en particulier des regroupements, quand on rassure les gens ainsi,
quand on leur explique que s'il se présente des problèmes qui,
vraiment, sont presque insurmontables sur le plan financier ou qui
entraînent des conséquences financières très graves
pour certaines villes, quand on prend le temps de les informer, les gens
finissent par accepter. Ils finissent même non seulement par accepter,
parce que parfois on accepte à contre-coeur, mais ils finissent par se
rendre compte que c'est dans leur intérêt de participer à
un regroupement.
C'est la première nécessité. Mais il y en a
d'autres. Dans ce cheminement psychologique, il y a également une
nécessité de débattre en public ces questions de
regroupement. Il ne faut pas avoir peur de faire la lumière parce que si
on ne la fait pas avant, on sera obligé de la faire après. Le
ministre sait ce que cela signifie. Je lui ai donné l'exemple de
Gaspé; il en connaît certainement d'autres.
La troisième nécessité que j'identifierais, c'est
celle d'entendre les intéressés, c'est-à-dire de se
pencher sur les problèmes de ceux qui en particulier s'opposent au
regroupement, à la fusion. L'intervention de la Commission municipale a
précisément pour objet d'entendre les intéressés,
de faire connaître au gouvernement objectivement les sources de friction
et d'opposition.
Je termine, puisque mon temps est écoulé.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Excusez-moi, je voudrais savoir si
vous parlez au nom du parti, évidemment...
M. MORIN: Non, je parle en mon nom personnel, comme
député.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): C'est dix minutes dans ce
cas-là.
M. MORIN: Merci, M. le Président. Je suis sur le point d'en venir
à mes conclusions.
Compte tenu du fait que les exigences tout à fait fondamentales
en régime démocratique, d'informer, de débattre en public,
d'entendre et de consulter n'ont pas été observées dans
les cas qui nous intéressent et, en particulier, la dernière
étape qui est peut-être la plus importante, c'est le bon sens qui
nous dicte, à la suite de l'échec de Gaspé et des
problèmes que cela soulève, de reporter ce projet à trois
mois au moins. Merci.
M. PILOTE: Parlez-nous donc de la réussite d'Alma! La grande
ville d'Alma, pourquoi n'en parlez-vous pas? Je vais en parler, moi,
tantôt.
M. MORIN: M. le Président, est-ce qu'on m'invite à
répondre à cette question?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! Vous m'aviez
indiqué que vous aviez terminé.
M. MORIN: Oui, effectivement, mais le député me demande
s'il n'existe pas des réussites. C'est un fait qu'il y a des
réussites dans le domaine des regroupements. Mais nous ne sommes pas
devant de tels cas.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. MORIN: Elles n'ont pas été forcées. M. PILOTE:
Oui, oui.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Saint-Jacques.
M. Claude Charron M. CHARRON: M. le Président,
j'étais heu- reux d'apprendre que le député de
Rouyn-Noranda avait présenté cette motion. Le moins que l'on
puisse dire, selon les premières réactions, c'est que la
décision, qui, pour nous, est bien traditionnelle, du gouvernement de
présenter un projet de loi aussi contesté dans la dernière
semaine de la session n'a pas réussi à obtenir tout
l'acquiescement de la population que, probablement, le gouvernement
espérait.
M. le Président, la motion présentée par le
député de Rouyn-Noranda permet à la Chambre et permettra
ensuite au gouvernement de franchir une étape qu'il a pris
cavalièrement l'habitude de franchir sans mot dire, celle de la
consultation et du dialogue avec la population, avant d'étudier un
projet de loi.
M. le Président, celui qui vous parle pourrait vous dire, dans
bien d'autres domaines, comment on a pris je ne fais
référence à aucune autre loi en particulier tellement
elles sont nombreuses à venir à votre idée comme exemples
l'habitude d'établir un carcan. On invite la population à
venir donner son avis par la suite. On procède radicalement, motion de
clôture s'il le faut, et on adopte un projet de loi que l'on impose
littéralement à la population.
Aujourd'hui, nous sommes touchés par deux régions du
Québec, deux régions qui, dans ce projet de loi, n'ont pas eu le
plaisir ou le droit d'avoir le même traitement. S'il est vrai que la
Commission municipale s'est rendue dans l'Outaouais, dans une période
qu'elle avait elle-même choisie, il n'en est pas de même pour la
région du Haut-Saguenay, dont nous parlons également ce soir. La
Commission municipale du Québec a manqué à une de ses
responsabilités fondamentales, celle avant de porter avis, avant
de conseiller au ministre de procéder à une fusion ou à
quelqu'autre décision de ce genre d'aller consulter les gens qui
seront directement impliqués.
Si nous adoptions la motion du député de Rouyn-Noranda,
puissent les trois mois que nous donnerait cette décision permettre
à la Commission municipale du Québec de rejoindre et de jouer le
rôle que nous lui avions donné lorsqu'elle a pris structure dans
la vie municipale du Québec. Mais aussi cela permettrait au gouvernement
surtout au ministre qui parraine ce projet de loi et aux deux ministres
régionaux qui l'ont présenté à l'Assemblée
nationale et qui l'ont défendu de retourner devant ceux qui seront
directement impliqués dans le projet de loi.
M. le Président...
M. PARENT (Hull): En connaissance de cause.
M. CHARRON: En connaissance de cause. M. PARENT (Hull): On comprend
cela.
M. CHARRON : Si vous ne croyez pas que les citoyens d'une ville peuvent
parler, en
connaissance de cause, de ce qu'ils espèrent de la ville dont ils
sont les contribuables et des villes avoisinantes dont ils sont les partenaires
dans le développement de la région, si vous croyez que les
citoyens sont incapables de se prononcer avec dignité, avec, en
même temps, autant de bon sens et d'intelligence que n'importe quel
patroneux régional sur un sujet quelconque, c'est que vous avez une
drôle de conception de ce que les régions du Québec sont
capables d'apporter à leur propre développement...
M. HARDY: Le député de Saint-Jacques me permet-il une
question?
M. CHARRON: Cela ne m'étonne pas de retrouver ce comportement de
la part du gouvernement.
M. HARDY: Me permettez-vous une question?
M. CHARRON: Chaque fois que vous intervenez de façon directe dans
la vie et dans l'édification des régions, c'est toujours par
décision unilatérale qu'on impose aux citoyens de ces
régions.
Le chef de l'Opposition a mentionné plusieurs exemples où
les décisions...
M. HARDY: Le député de Saint-Jacques ne me permet pas une
question?
M. CHARRON: ... prises en un seul sens par le ministère des
Affaires municipales a porté des fruits douteux. Il est bien possible
qu'en d'autres endroits, sans consultation de la population, on ait pu aboutir
à des aménagements qui n'ont pas encore donné tous leurs
fruits. Mais à combien d'autres endroits cette manie, qui est presque
devenue la façon de gouverner de ceux qui sont en face de nous, cette
manie de s'interposer au-delà de la tête des citoyens parce qu'on
a préparé dans un endroit quelconque une structure où on
veut les encarcaner, cette manie mérite-t-elle d'être
dénoncée? J'ai la conviction que ce qu'a proposé le
député de Rouyn-Noranda constitue un aveu de sa part,
également du fait qu'il dénonce cette attitude du gouvernement du
Québec.
Les régions ont chacune quelque chose de particulier à
apporter au Québec. Les villes de ces régions ont, chacune
d'entre elles, participé jusqu'ici, avant même que nous
n'intervenions avec une décision unilatérale, à leur
façon, au développement de leur région et, par la suite,
au développement du Québec.
Ces villes qui ont fait vivre le Québec tel que nous le
connaissons aujourd'hui ont, avant de disparaître, si elles ont à
disparaître, au moins le droit de faire entendre pourquoi, dans certains
cas, elles peuvent accepter de fusionner à une voisine, et pourquoi,
dans d'autres cas, elles jugent que leur contribution à la vie
démocratique du Québec, depuis qu'elles existent, depuis qu'elles
sont fondées, et depuis qu'elles participent au développement de
leur région mérite d'être intégralement soutenue et
retenue dans la forme actuelle.
Ce droit n'a pas été accordé aux
municipalités dont nous parlons ce soir, ce droit n'a pas
été reconnu par le gouvernement lorsqu'il a décidé
de procéder de façon unilatérale. Si les trois mois,
auxquels nous invite le député de Rouyn-Noranda, de
réflexion et en même temps de consultation auprès de cette
population pouvaient être utilisés à bon escient, je suis
loin d'avoir à l'esprit que c'est un pareil projet de loi qui nous
reviendrait à la suite de ces trois mois.
Je n'ai qu'à apporter, en dernier témoignage, que cette
habitude non seulement peut miner la vie d'un gouvernement et de l'ordre social
qu'il est censé faire régner mais en même temps miner la
confiance des gens dans les institutions démocratiques où on les
invite à participer.
Chaque attaque sur ce manque de confiance dans les institutions en
place, le genre d'invitations hypocrites qu'on peut leur faire à une
consultation artificielle ou, comme on l'a vu dans un projet de loi à
envergure nationale, consultation limitée dans le temps jusqu'à
ce que le gouvernement ait décidé de procéder, cette
habitude finit par menacer la vie non seulement des régions du
Québec mais du Québec en entier. Merci, M. le
Président.
DES VOIX: Vote.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Lafontaine.
M. Marcel Léger
M. LEGER: M. le Président, concernant la motion du
député de Rouyn-Noranda, je pense que nous ne pouvons faire
autrement qu'appuyer une telle motion puisqu'elle permettrait au gouvernement,
durant les prochains trois mois, de vérifier réellement
auprès des populations concernées et de prendre le pouls
réel, et non pas uniquement par sondage, de la situation dans les deux
grandes régions concernées par le projet de loi no 98.
M. le Président, une population qui se fait charrier d'un
côté ou de l'autre, renseignée d'une façon par l'un,
renseignée d'une façon par l'autre, peut difficilement
évaluer à ce stade-ci les avantages et les désavantages
d'un regroupement. La loi 276 permettait d'établir des mécanismes
les plus souples possible pour qu'une fusion se fasse avec la participation
démocratique des citoyens. Si le projet de regroupement des
municipalités tant dans la région de Hull que dans la
région du Haut-Saguenay avait procédé par les
mécanismes de la loi 276, il se peut fort bien que, même dans
trois mois, le ministre aurait été prêt à
présenter une fusion quelconque, un regroupement quel-
conque qui aurait correspondu aux désirs des citoyens.
Les trois mois que nous voulons donner au gouvernement pour y repenser,
c'est pour lui éviter, à lui comme à nous, de faire des
erreurs majeures dans un domaine aussi important que la vie municipale. Je
disais tantôt, M. le Président, qu'un mariage entre
municipalités il y a une analogie facile à
présenter c'est comme un mariage dans la vie de tous les jours.
Il faut une période d'adaptation, de connaissance, de
fréquentations, qui permet d'évaluer quels sont les avantages et
les désavantages cachés que nous ne connaissons pas et qui
pourraient être reconnus, préparés, corrigés,
adaptés au moment de la grande décision. C'est pour cela qu'il
est important que le gouvernement ne fasse pas l'erreur de fusionner d'une
façon arbitraire, d'une façon obligatoire, d'une façon
forcée deux régions aussi importantes que celles
mentionnées.
M. le Président, si je m'en rapporte aux déclarations du
ministre dans le passé, je me surprends de le voir agir d'une
façon aussi rapide. Les pressions ont dû être dures sur lui
durant les dernières semaines pour qu'il arrive à décider
de présenter ce projet de loi dans la période des Fêtes,
période où on est bousculé par d'autres projets de loi,
période où il y a peu de place pour une réflexion
sérieuse et solide, période où les gens à travers
le Québec ont d'autres chats à fouetter que de discuter d'un
problème aussi sérieux qui va les impliquer le lendemain du jour
fatidique, c'est-à-dire du 1er janvier 1975.
Le premier ministre a déjà promis qu'il ne ferait pas de
fusions forcées. Je donne comme exemple une déclaration du
premier ministre, rapportée dans le Montréal-Matin du lundi, 17
décembre 1973. Le premier ministre était conférencier
invité au 31e congrès de l'Union des conseils de comté du
Québec; il avait dit qu'il était farouchement opposé aux
fusions forcées, M. le Président. Qu'est-ce qu'une fusion
forcée, si ce n'est pas une fusion faite sans que les gens aient leur
mot à dire? Est-ce que la population des régions
concernées a eu son mot à dire? Est-ce que le ministre confond
des souhaits de maires ou de conseillers avec des souhaits d'une population? Il
y a des maires qui ont le pouls de la population. Il y a des maires qui savent
très bien qu'une majorité de leurs commettants pourraient
être d'accord sur une fusion; d'autres maires savent que leurs
commettants en majorité y seraient défavorables, mais il y a
beaucoup de maires aussi qui peuvent penser qu'une majorité l'est ou ne
l'est pas. Comment le savoir, M. le Président? Eh bien, il faut
nécessairement, avant de passer à l'étape aussi importante
de cette décision, passer par l'étape d'une étude
sérieuse.
Il faudrait une étude faite par des spécialistes, une
étude absolument apolitique, une étude absolument sans aucune
émotivité, aucun intérêt, une étude froide de
la situation qui nous permettrait de savoir quels sont les avantages d'une
fusion de telle ou telle façon et quels sont les désavantages
d'une autre. Je donne un exemple. Dans la région de Hull, le
gouvernement avait, d'un trait de plume, fait six unités de regroupement
qui paraissaient, à première vue, bonnes, valables. Elles
étaient peut-être théoriquement une bonne donnée de
base pour une discussion.
Or, le gouvernement s'est aperçu que dans cette unité de
regroupement, il y avait une quantité de municipalités qui
n'étaient pas d'accord. Il y a même une municipalité qui a
changé deux fois d'avis, la municipalité de Deschênes, qui
avait signé la requête, avec la municipalité de Hull, pour
accepter le regroupement. Par la suite il y a eu de l'opposition. Il y avait
les villes de Lucerne et d'Aylmer qui n'étaient pas d'accord avec cette
unité de regroupement.
C'est donc dire, M. le Président, que vu de Québec, on
peut se tromper; c'est donc dire que même vu du conseil municipal on peut
même se tromper, puisque Deschênes a changé d'idée.
C'est donc dire qu'il y a une importance vitale à demander son avis
à la population qui vit là et qui aura à vivre les
conséquences de cette fusion d'une façon ou de l'autre. Il faut
que cette population soit capable de s'exprimer. Comment peut-elle s'exprimer,
cette population, si elle est charriée par les différents
porte-parole de tout parti politique, quel qu'il soit, de tout palier de
l'administration publique, quel qu'il soit? Comment cette population peut-elle
être capable de poser un diagnostic bien précis et de voter dans
une direction, si elle n'a pas une étude sérieuse sur laquelle
elle peut se baser pour dire: Voici, si je vote dans telle direction, il y aura
tels avantages et tels inconvénients, si je vote dans telle autre
direction, j'aurai tels avantages et tels inconvénients, parce que ces
données ont été faites d'une façon impartiale par
des spécialistes?
C'était ce que prévoyait le bill 276, M. le
Président. Au moment où la Commission municipale a vu qu'une
unité de regroupement décrétée avait passé
l'étape d'une requête faite par 50 p.c. des édiles
municipaux de cette unité de regroupement et 50 p.c. de la population,
elle avait le devoir de rencontrer les opposants à cette
décision.
Ces opposants ont été rencontrés et la Commission
municipale s'est aperçu que la ville de Lucerne et la ville d'Aylmer ne
voulaient pas se joindre à la ville de Hull, pour différentes
raisons. Est-ce qu'on peut se permettre de dire qu'une municipalité qui
ne désire pas fusionner peut bloquer indéfiniment une
unité de regroupement? C'est là le problème de la
démocratie. C'est complexe. C'est complexe. Je prends la ville d'Arvida.
Est-ce que la ville d'Arvida, entre autres, elle-même, a une
décision à prendre dans cette unité de regroupement de
JAK? Si ses citoyens voient un avantage à demeurer comme ils sont,
est-ce que c'est démocratique de les
obliger, parce que le gouvernement a décidé de dire que
selon lui, selon certaines données, c'est préférable de
cette façon? Ils ont leur mot à dire, M. le Président, les
citoyens d'Arvida. Est-ce qu'on va les consulter, les citoyens d'Arvida, s'ils
ne sont pas d'accord?
La période d'écoute de la Commission municipale pour
entendre les personnes ou les groupes concernés était absolument
importante et essentielle et là la Commission municipale
s'aperçoit qu'il y en a qui sont opposés. Elle doit faire
à ce moment-là un rapport au ministre des Affaires municipales.
Le ministre en ayant ce rapport, a aussi le devoir de demander à cette
Commission municipale, si les gens sont tous d'accord. Et là, la
Commission municipale aurait dû lui dire oui ou non, selon les
unités de regroupement.
Si c'était oui, le ministre avait le choix de faire une fusion
immédiate, tout le monde étant d'accord. S'il y en avait un
nombre suffisamment important de personnes qui s'opposaient, le ministre
pouvait demander une recommandation à la Commission municipale qui lui
aurait dit: Bien voici, dans cette circonstance on s'est aperçu
qu'idéalement il semble qu'il y ait plus de gens qui sont plutôt
de l'avis d'une autre sorte de regroupement à l'intérieur de
cette unité de regroupement.
A ce moment, le ministre avait le pouvoir, avec ces recommandations, de
dire: Pour être certain qu'il n'y a pas d'erreur, on va commander des
études spécialisées, soit aux frais des
municipalités concernées, soit subventionnées par le
gouvernement, dépendant des cas. Ces études, d'une façon
impartiale, donnaient justement une base de référence sur
laquelle les citoyens, par la suite, pouvaient se prononcer. Et le ministre,
à ce moment, pouvait faire deux choses. Devant les études, il
pouvait demander à la population de s'exprimer par une consultation
populaire des propriétaires et des locataires. Il pouvait aussi,
dépendant des circonstances, décréter une fusion. Il avait
aussi ce pouvoir, mais ce que nous disons, c'est que cela aurait
peut-être pris quelques mois de plus. Mais on nous arrive, à la
veille de Noël, avec un projet de loi qui a été fait
très vite, c'était tellement pressé qu'on ne l'a
même pas imprimé sur le papier normal habituel d'un projet de loi;
plus que cela, on a eu les annexes le lendemain. C'était donc
pressé ce projet de loi! C'est donc pressé de passer cela pendant
que les gens ont l'esprit des Fêtes, alors qu'ils se réveilleront
le lendemain des Fêtes, comme souvent le lendemain d'un "party", en se
disant: Qu'est-ce qu'ils nous ont passé comme sapin? Est-ce que c'est le
sapin de Bourassa à Paris qu'ils nous ont passé? Et les gens
seront obligés après cela de vivre avec ce nouveau sapin. Est-ce
que ce n'est pas préférable que la décision soit prise en
accord avec la population qui aura à le vivre? Il y a beaucoup de
personnes qui pourraient donner leur avis là-dessus. Je pense, entre
autres, aux conseils de comté.
M. PARENT (Hull): Surtout vos partisans, contestataires !
M. LEGER: Si le ministre nous dit... M. PARENT (Hull): Surtout!
M. LEGER: ... que toute personne qui conteste au Québec est du
Parti québécois, que toute personne non satisfaite est du Parti
québécois, décrétez des élections demain et
on prend le pouvoir avec 110 députés. Alors, pensez-y deux fois
avant de dire que tous les gens.
M. BELLEMARE (Rosemont): Avec votre accusé?
M. LEGER: ... qui contestent sont du Parti québécois.
M. BELLEMARE (Rosemont): Avec votre accusé?
M. LEGER: Parce qu'en ce moment il y a tellement de gens insatisfaits au
Québec...
M. BELLEMARE (Rosemont): Avec votre accusé?
M. LEGER: ... que, s'ils sont tous du Parti québécois, je
vous défie de déclencher une élection
immédiatement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. BELLEMARE (Rosemont): On est trop honnête pour vous autres.
M. LEGER: Comme le ministre de la Fonction publique vient de
m'interrompre, je vais lui donner une occasion de répondre
peut-être dans sa prochaine intervention, s'il le veut bien. Il me
répondra à ce qui s'est écrit dans un journal, Le Droit
d'Ottawa, pour lui permettre de dire jusqu'à quel point on se sent
charrié par là, et je cite ici le Droit d'Ottawa. Le titre
était "Le regroupement: La communauté régionale de
l'Outaouais accuse Parent de faire du chantage".
M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président, point de
règlement.
M. LEGER: Le ministre et député...
M. BELLEMARE (Rosemont): Point de règlement, M. le
Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de Rosemont,
sur un point de règlement.
M. BELLEMARE (Rosemont): Nous n'avons pas droit de citer des rapports de
journaux...
M. LEGER: Quel article?
M. BELLEMARE (Rosemont): Ne vous occupez pas de l'article. Vous n'avez
pas droit...
M. LEGER: Quel article?
M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président., on cite le journal et
on n'a pas le droit.
M. LESSARD: M. le Président, je demande une directive pour...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Vous me demandez une directive?
M. LESSARD: ... expliciter au député de Rosemont en vertu
de quel article on n'a pas le droit d'illustrer certains témoignages
qu'on fait ici à l'Assemblée nationale en utilisant des
témoignages qui sont donnés dans les journaux.
M. BELLEMARE (Rosemont): Je demande une directive parce que je n'ai pas
l'expérience de mes vicieux collègues. Je vous demande, mon cher
Président, si vous pouvez me citer quel article parce que je le connais
pas par coeur.
M. SAMSON: Question de privilège, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de
Rouyn-Noranda. Question de privilège.
M. SAMSON: Question de privilège, M. le Président. Mon
privilège de député ainsi que le privilège de cette
Chambre comme corps. M. le Président, je pense que les paroles de mon
collègue de Rosemont ont sûrement dépassé sa
pensée, car il n'a sûrement pas voulu dire qu'il y a des vicieux
collègues en cette Chambre. Je vous demanderais de lui demander de nous
dire que sa parole a dépassé sa pensée.
M. BELLEMARE (Rosemont): Avec plaisir. Je retire les vicieux
collègues ministériels, le député de Johnson et les
créditistes.
M. LESSARD: On est heureux de constater qu'il y a des vicieux parmi les
ministériels.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, je disais justement, et je cite, pour
l'argumentation sur cette bousculade et la raison pour laquelle nous voulons
que ce soit reporté à trois mois: "Le ministre,
député de Hull, M. Oswald Parent, se livrerait à du
chantage auprès des municipalités de l'Outaouais en les
menaçant de tarir le flot de subventions provinciales tant qu'elles
n'auront pas décidé un regroupement. C'est ce qu'ont
affirmé, jeudi, les membres du comité exécutif de la
Communauté régionale de l'Outaouais alors qu'ils discutaient de
la nécessité d'obtenir une subvention gouvernementale pour aider
à défrayer le coût de construction de l'usine de filtration
de Buckingham-Masson. "Entre autres, selon le président du comité
exécutif de la communauté régionale de l'Outaouais, M.
Jean-Marie Séguin, le ministre Parent lui aurait affirmé, au
cours d'un appel téléphonique, que le gouvernement n'envisageait
pas de subvention pour ce problème tant que le regroupement ne serait
pas décidé".
M. MALOUIN: Ce n'est pas pertinent.
M. LEGER: C'est justement, M. le Président, pour ceux qui ne
suivent pas, pour prouver jusqu'à quel point on veut bousculer cette
décision. "Cette affirmation de M. Séguin devrait soulever un
commentaire du maire de Hull, M. Rocheleau. Le gouvernement
québécois devrait se brancher. D'une part, le ministre des
Affaires municipales, M. Victor Goldbloom, dit qu'il ne veut pas imposer un
regroupement obligatoire. D'autre part, le ministre Parent, qui est favorable
au regroupement, semble prendre des mesures pour forcer les
municipalités à prendre une décision dans le sens d'un
regroupement municipal". Enfin, on ne semble pas prêt, au gouvernement,
à imposer le regroupement, mais il semble que la veille de Noël, le
moment semble venu de l'imposer. Tout à coup, on semble désirer
l'imposer. Il y a eu au conseil des ministres, je suppose, des arguments du
ministre de la Fonction publique qui ont fait que le ministre, habituellement
calme et qui ne force rien, le ministre des Affaires municipales, se sente tout
à coup le besoin de devenir celui qui va imposer aux
municipalités des choses sur lesquelles elles n'ont pas
été consultées.
Il faut se rappeler que le ministre samba, celui qui a
précédé le ministre actuel des Affaires municipales, a eu
à affronter justement, quand il est allé trop rapidement, la
colère de l'Union des conseils de comté. Nous avons vu qu'il est
rendu à une autre fonction. Il est peut-être plus heureux, mais de
toute façon il est rendu à une autre fonction depuis ce temps. Il
faut connaître aussi la raison pour laquelle il est important de repenser
la chose et de voir à ce que la population soit bien au fait des
conséquences d'une fusion. Peut-être qu'il y a des avantages
supérieurs aux désavantages, comme je le disais, ce matin. Comme
exemple, M. le Président, vous me permettrez un petit aparté.
Pour les Jeux olympiques, tout le monde serait peut-être d'accord si on
savait combien cela coûte. Il s'agit de savoir combien cela coûte.
Tout le monde serait peut-être bien d'accord dans le...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!
Je dois avouer que pour cette fois-ci vous avez même
décidé que vous aviez droit à un aparté. Je
voudrais vous rappeler que vous intervenez sur une motion de trois mois et
à aucun moment vous n'y avez même fait allusion. Je voudrais que
vous interveniez strictement sur cette motion de trois mois.
M. LEGER: M. le Président, je voulais simplement donner un
exemple que les gens peuvent suivre.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Excusez-moi, encore une fois, et cela
vaut pour tous ceux qui désirent intervenir sur une motion d'amendement
en deuxième lecture pour reporter cette étude à trois
mois. C'est un corridor qu'on se donne soi-même, mais qui est assez
étroit. Je prierais tous ceux qui veulent intervenir, d'abord, de ne pas
se donner le droit à certains apartés. Mais, s'il vous
plaît, pour ne pas provoquer inutilement d'autres collègues de
part et d'autre, respectez le corridor de la motion d'amendement à trois
mois.
M. LEGER: M. le Président, est-ce que je peux simplement demander
une directive? Est-ce qu'on peut quand même donner un exemple pour
prouver l'avantage pour les gens de connaf-tre l'ensemble d'un problème
avant de se décider? C'est un exemple que je donnais.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Ecoutez, si vous me permettez, vous
me demandez une directive.
M. LEGER: Laissez-moi finir ma question. J'ai hâte d'avoir votre
réponse, mais je veux poser ma question. Si vous voulez que je m'assoie,
je vais m'asseoir.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Non, non, mais... Vous m'avez
demandé une directive pour un exemple. J'ai remarqué et je le
porte à votre attention, le plus objectivement possible, que vous avez
donné en dix minutes de multiples exemples pouvant provoquer de
multiples débats. C'est dans cet esprit que je me suis levé sur
un de ces apartés pour vous rappeler l'amendement de trois mois
proposé par l'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. LEGER: Je vous remercie, M. le Président, je me soumets
à votre directive. Justement, j'étais en train de dire
jusqu'à quel point il est important de donner au moins trois mois de
réflexion pour que la population puisse, au cours de ces trois mois,
être consultée.
M. le Président, voici un autre exemple de renseignements que la
population peut avoir dans les prochains trois mois. Je lis encore, dans une
coupure du quotidien Le Droit, le titre: Hull vient de découvrir un des
désavantages du regroupement, le recyclage des policiers.
Alors, c'est parce que, justement, les gens commencent à
réaliser qu'il peut y avoir des désavantage et certains
avantages, et qu'on ne peut pas précipiter les choses. Je cite: "Un
regroupement des cinq municipalités, à l'ouest de la
rivière Gatineau, entraînerait une dépense additionnelle
d'environ $100,000 au seul item du service de la police. D'après un
rapport du service de la police de Hull, remis mardi au comité
exécutif, dans un éventuel regroupement des villes de Hull,
Aylmer, Lucerne, Deschênes, Hull-Ouest, il serait nécessaire de
faire recycler 23 policiers à l'Institut de police de Nicolet, cependant
qu'à Hull ce cours entraînerait des déboursés
d'environ $4,000, un des prérequis pour être admis au service de
la police de cette ville. "Les désavantages. Ainsi donc, s'il y a un
regroupement, la nouvelle ville à l'ouest de la rivière Gatineau
se verrait donc obligée d'envoyer ses 23 policiers à l'Institut
de police de Nicolet. A $4,000 pièce, cela signifierait donc une
dépense totale de $92,000. Et la cité de Hull se verrait donc
forcée de défrayer environ 75 p.c. de cette dépense
additionnelle même si, depuis 1971, tous les policiers embauchés
ont dû se rendre faire un stage à Nicolet."
Et commentant le rapport du service de police, le maire Rochelot a
précisé: "Nous avons là un bel exemple de
désavantages que subira la cité de Hull en se regroupant. Quand
les municipalités en périphérie de Hull Soutiennent
qu'elles seront désavantagées, ce n'est pas toujours vrai, c'est
même faux".
Alors, vous voyez l'importance que la population connaisse, dans cette
période de réflexion, un ensemble de faits qui sont encore mal
connus. Je pense, entre autres, à un autre problème qui,
souvent...
M. PARENT (Hull): ... ceux qui ne veulent pas comprendre. Les documents
que vous avez là...
M. LEGER: M. le Président, est-ce que j'ai la parole?
LE VICE-PRESIDENT (M.Lamontagne): A l'ordre!
M. PARENT (Hull): ... il y a eu des documents...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! ... A l'ordre! ... A
l'ordre, s'il vous plaît! ... A l'ordre, s'il vous plaît!
M. PARENT (Hull): ... dire quoi que ce soit. Vous ne connaissez pas le
problème...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. LEGER: Attention, il y a des choses que je pourrai dire
bientôt.
M. PARENT (Hull): ... vous ne savez pas de quoi vous parlez.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! ...
A l'ordre! ... A l'ordre, s'il vous plaît! ... Bon, je voudrais rappeler
à l'honorable ministre de la Fonction publique... A l'ordre, s'il vous
plaît! Tous ceux qui veulent intervenir ont jusqu'à minuit ce
soir, mais chacun à votre tour.
L'honorable député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, j'étais justement à dire
qu'il y a des désavantages et je prends encore comme exemple le fait
que, dans un regroupement municipal, il est normal que les fonctionnaires de
toutes les petites villes soient réengagés,
réembauchés ou, du moins, confirmés dans leurs fonctions
ou dans une autre similaire avec une protection dans la nouvelle ville.
Ceux qui l'ont fait ont réalisé souvent des
problèmes latents, des conflits de personnalité qui existaient
avant, des façons de fonctionner différemment.
M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable ministre des Affaires
culturelles, question de règlement.
M. HARDY: M. le Président, si je comprends bien, nous
étudions actuellement une motion pour reporter la motion de
deuxième lecture à trois mois. Or, j'écoute depuis un bon
moment le député de Lafontaine divaguer sur ce qu'il voudrait
être le fond du problème.
Je pense qu'il y a deux étapes bien distinctes prévues par
nos règlements. Le député de Lafontaine, à ce
stade-ci, devrait nous dire uniquement pourquoi on devrait remettre la
deuxième lecture de ce projet de loi à trois mois ou à six
mois, je ne sais plus trop. Mais de toute façon, c'est une motion
dilatoire, peut-être parce que justement le député de
Lafontaine n'a rien compris encore. Il veut trois mois pour essayer de
comprendre! Mais au moins, qu'il s'en tienne...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. HARDY: ... qu'il nous dise si c'est ça la raison. S'il veut
qu'on le remette à trois mois pour comprendre, qu'il nous le dise.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît ! A
l'ordre ! ...
M. LESSARD: Je me suis levé, M. le Président, je me suis
levé.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Là, tout de même,...
Ecoutez...
M. LESSARD: M. le Président, je soulève une question de
règlement suite à la question de règlement qui est
soulevée par le ministre des Affaires culturelles.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Ecoutez. Je vais vous l'accorder.
Mais, avant de vous l'accorder, je voudrais tout de même pour tout
le monde en fait,... Reprenons les choses. L'honorable ministre des Affaires
culturelles se lève sur une question de règlement pour rappeler
que l'honorable député de Lafontaine, selon lui, ne suit pas le
corridor. C'est assez difficile pour un autre d'appler une question de
règlement sur une telle question de règlement.
M. LESSARD: Je soulève une question de règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Non, j'ai dit que je vous
l'accordais, de toute façon. J'ai dit que je vous l'accordais.
M. LESSARD: Bon.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, l'interprétation que donne le
ministre des Affaires culturelles n'est pas nécessairement la bonne
interprétation et je voudrais vous expliquer ceci, très
brièvement. Ce que fait le député de Lafontaine
actuellement, c'est démontrer que ce projet de loi est
contesté.
M. le Président, si ce projet de loi n'était pas...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LESSARD: M. le Président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! ... Je vais vous expliquer
pourquoi. Bien oui, mais tout de même. Assoyez-vous un instant... Je vous
redonnerai la parole. Mais là, vous vous levez sur une question de
règlement, faisant suite à l'honorable ministre des Affaires
culturelles, pour expliquer que ce fait actuellement l'honorable
député de Lafontaine. Eh bien, il se lèvera, s'il veut
l'expliquer.
M. LESSARD: M. le Président, c'est que le ministre des Affaires
culturelles se lève sur une question de règlement concernant
particulièrement la pertinence du débat. Je dis, M. le
Président, que ce que fait le député de Lafontaine
actuellement est pertinent au débat, dans le sens que, si le
député de Rouyn-Noranda a présenté la motion de
renvoi à trois mois, c'est justement parce que ce projet de loi
soulève quantité de points d'interrogation dans la population. Je
pense qu'il est normal que le député de Lafontaine dise, pour
appuyer cette motion,
pourquoi cela soulève un certain nombre de points
d'interrogation. C'est justement parce que cela soulève des points
d'interrogation que la motion du député de Rouyn-Noranda est
justifiée. C'est dans ce sens que je vous dis que l'intervention du
député de Lafontaine est très pertinente.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Je voudrais, une fois de plus, avec
votre permission à tous, profiter de cette circonstance pour rappeler au
député et à ses collègues qui appuient ou qui sont
contre la motion de renvoi que c'est celui qui propose cet amendement qui fixe
le corridor de l'amendement.
Evidemment, c'est un corridor restreint. Mais oui. Ecoutez, sur un
amendement pour reporter un débat à trois mois, il faut dire
d'abord qu'on veut le reporter à trois mois et en donner les
raisons.
Il arrive je pense que tout le monde comprendra cela facilement;
on a juste à écouter ce qui se passe généralement
qu'évidemment, par la force des choses, par oubli sans aucun
doute, un député puisse dévier de cette question.
Lorsqu'on parle assez longuement sur une question de renvoi à trois
mois, il est presque inévitable soit qu'on se répète, soit
qu'on soit obligé de faire des digressions sur d'autres sujets.
C'est dans cet esprit que je demanderais à l'honorable
député de Lafontaine, comme je l'ai fait tout à l'heure,
de s'en tenir à la motion d'amendement proposée par l'honorable
député de Rouyn-Noranda.
L'honorable député de Lafontaine.
M. LEGER. M. le Président, je pense qu'il était tout
à fait normal, si on appuie la motion d'amendement du
député de Rouyn-Noranda de reporter ce projet de loi à
trois mois, de dire les motifs pour lesquels on veut le reporter à trois
mois. Je sais que cela peut ne pas plaire à des députés du
gouvernement, mais c'est normal que j'exprime des raisons et que je donne des
preuves de l'importance de reporter cela à trois mois.
Je soulève, depuis tantôt, des exemples précis qui
dénotent le problème qu'il y a et qui montrent que ce n'est pas
urgent de fusionner ces municipalités, mais plutôt de donner une
période supplémentaire de trois mois pour permettre
peut-être au gouvernement d'utiliser cette période, s'il est
suffisamment sage, pour obtenir le point de vue de la population.
M. le Président, le ministre des Affaires municipales
lui-même avait au début, j'avais commencé à
présenter ce qu'il avait dit quand il s'opposait farouchement aux
fusions forcées invité les municipalités à
dialoguer ensemble. Il avait insisté sur la participation de toutes les
municipalités d'une région, tant rurales qu'urbaines, à la
planification de leur développement collectif. Cela n'a pas
été fait jusqu'ici.
Au contraire, après une période d'essai de la loi 276, on
s'est tout à coup senti obligé de mettre de côté la
loi 276, sans consulter les citoyens et d'utiliser immédiatement un
rouleau compresseur. D'ailleurs, c'est le terme précis que l'on voit
dans un autre article du journal Le Droit, au mois d'août 1974. Le titre
était: "Regroupement, Parent met en marche le rouleau compresseur".
M. le Président, si on remet cela à trois mois, c'est
parce que les gens ne sont pas d'accord. Je vais vous en donner une autre
preuve. Ici, les gens de Templeton, partie Est, qui recevaient la Commission
municipale. Le titre était: "Les citoyens s'opposent au regroupement et
réclament la protection de leur mode de vie rural".
M. le Président, il y a tellement d'exemples comme cela. Un peu
plus loin, on rapporte ce que le ministre des Affaires municipales disait, au
cours d'une conférence de presse: "Le ministre a rappelé que son
ministère éprouvait beaucoup de difficultés en ce qui
concerne les regroupements. C'est un problème compliqué et il
faut avant tout envisager la situation très froidement.
Il faut aussi, a-t-il dit, que les membres des conseils municipaux
impliqués puissent s'asseoir autour d'une table et comprendre tous les
avantages et les désavantages de la fusion."
Voyez-vous jusqu'à quel point les conseils de ville ainsi que les
citoyens ne peuvent pas savoir tous les avantages sans qu'il n'y ait eu ces
fameuses études, d'une façon absolument indépendante
permettant de voir le pour et le contre? La motion de remise à trois
mois du député de Rouyn-Noranda permettrait d'obtenir ces
études. Sinon nous n'obtiendrons pas les meilleures solutions pour la
population mais pour les politiciens en place qui n'ont pas tous eu, eux, les
vraies possibilités dans ce regroupement.
Le ministre continuait: "II est certain que la situation est encore plus
difficile lorsque les passions sont soulevées." Je pense qu'il est
préférable qu'on demande leur opinion aux gens avant plutôt
que de leur imposer une chose, de façon que les passions ne se
soulèvent pas après et qu'il n'arrive pas ce que nous voyons dans
la région de Gaspé. Ces gens ne voulaient absolument pas
continuer à fonctionner et tous les maires avaient l'intention de
démissionner.
C'est la raison pour laquelle nous avons plusieurs questions à
poser au ministre si jamais il convoque la commission durant les trois mois que
permettrait la motion du député de Rouyn-Noranda, si elle
était adoptée. Il y a plusieurs questions auxquelles nous
aimerions que le ministre réponde. D'abord, le ministre a-t-il eu une
sorte de rapport caché ou verbal de la Commission municipale, qui a
étudié et qui a entendu les groupes qui s'opposaient à ce
regroupement dans la région de Hull? Ce n'est pas le cas dans la
région du Saguenay puisqu'il n'y a pas eu de visite de la Commission
municipale.
La Commission municipale aurait-elle pu suggérer un
référendum? Ce sont des questions auxquelles on pourrait
répondre. La meilleure question qu'on pourrait poser et à
laquelle on pourrait obtenir une réponse dans les trois mois concerne
Lucerne. Dans la prochaine ville de Lucerne, les municipalités
pourront-elles réellement céder du territoire comme cela? Peut-on
les obliger d'une façon légale et quelles mesures
législatives doit-on utiliser pour demander à une
municipalité de céder une partie de son territoire? Selon quels
critères et selon quelles négociations? Ce n'est pas prévu
dans le projet de loi cela. Comment les négociations vont-elles avoir
lieu? Quels avantages quand il y a négociation habituellement,
cela veut dire qu'on donne quelque chose pour recevoir autre chose en retour
que donne-t-on? On ne peut pas vendre le territoire de Lucerne, il
n'appartient pas à Lucerne, c'est seulement sous la juridiction
municipale de Lucerne. Ce sont des territoires qui appartiennent à des
personnes privées, très souvent avec des noms "in trust" qu'on
appelle.
Je conclus, M. le Président. Donc, il faudrait une réponse
à ces questions. Il nous faut un arbitre, il nous faut une série
de renseignements que les trois mois que nous propose l'amendement du
député de Rouyn-Noranda nous permettraient d'éclaircir,
non seulement pour nous mais surtout pour la population des deux régions
concernées.
Si le député de Hull veut répondre,
DES VOIX: Vote.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Alors, vote.
DES VOIX: Vote. Pas de temps à perdre.
M. LEGER: Je demande au député de Hull s'il veut me
répondre.
Pas de temps à perdre, on fusionne.
M. BURNS: M. le Président....
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de
Maisonneuve.
M. HARDY: II n'est pas sûr. Il branle dans la manche.
M. BURNS: M. le Président,..
M. LACROIX: Va-t-on l'envoyer en limousine ce soir?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. BURNS: Merci, M. le Président.
M. Robert Burns
M. le Président, sur cette motion de reporter à trois mois
la deuxième lecture du projet de loi, motion faite par le
député de Rouyn-Noranda, comme mes collègues ont eu
l'occasion de vous le dire, nous serons en faveur de cette motion.
Nous pensons qu'un projet de loi de cette nature, alors qu'existent
déjà des règles, alors qu'existent déjà un
certain nombre de dispositions qui font que, lorsqu'une fusion municipale doit
se faire, elle se fasse avec et c'est cela, je pense, qui est
l'idée de base de la loi 276 le consentement des personnes, des
contribuables ou des groupements concernés.
Je pense qu'au fond c'est cela que pose le problème du projet de
loi que nous avons à discuter actuellement.
Ce que nous voulons, ce n'est pas empêcher des fusions, M. le
Président, bien au contraire. Je pense que le programme du Parti
québécois est très clair là-dessus. Nous avons dit
à plusieurs reprises, et cela se retrouve dans notre programme, que
lorsque, à un moment donné, une espèce de communication,
de communauté d'idée, si on peut dire, se fait dans un territoire
particulier, et que cette communauté d'idée respecte une
projection que le gouvernement peut faire au niveau d'un regroupement
municipal, nous n'avons aucune objection que cela se fasse. Cela s'appelle, M.
le Président, une fusion volontaire, qui est tout à fait
planifiée et en accord avec la planification que le gouvernement
envisage.
Actuellement, nous n'avons pas devant nous un projet de loi où
nous sommes assurés de ce fait. Nous ne sommes pas assurés, par
exemple, que toutes les municipalités, même s'il y a quelques
maires et quelques conseillers qui ont été consultés, nous
ne sommes pas convaincus que ces municipalités sont véritablement
d'accord. Parce que c'est qui, exactement, les municipalités? Les
municipalités en question, M. le Président, c'est d'abord et
avant tout les contribuables; ce ne sont pas des conseillers et ce ne sont pas
des maires, qu'on le veuille ou non. Il me semble que si nous acceptions la
proposition de reporter à trois mois le projet de loi en deuxième
lecture, proposition faite par le député de Rouyn-Noranda, cela
permettrait plusieurs possibilités dont l'une serait d'inviter les gens
devant une commission parlementaire. Pardon? Est-ce que le député
de Jonquière a quelque chose à dire?
M. HARVEY (Jonquière): Je dis que ce serait joli, on en a eu une
preuve autour de six heures.
M. BURNS: Ce serait joli?
M. HARVEY (Jonquière): Ce serait le climat.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. BURNS: Non, écoutez, M. le Président, je veux tout
simplement enregistrer que le député, ministre du Revenu, nous
dit que ce serait joli.
M. MALOUIN: Le député de Maisonneuve n'était pas
ici à six heures.
M. BURNS: Bien, je ne sais pas, M. le Président, mais si c'est
cela le problème...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Je vous invite à continuer
votre intervention.
M. BURNS: C'est cela. Si c'est cela le problème, si on a peur de
véritablement consulter la population, qu'on nous le dise de l'autre
côté. Si c'est cela votre problème et si vous voulez
passer, comme les autres projets de loi en fin de session, à la vapeur,
allez-y et dites-le à la population. Dites-le que vous êtes
pressés de passer des projets de loi sans aucune consultation, dans les
cas où cela les concerne. Si c'est cela votre intention, allez-y mais
dites-le!
M. HARVEY (Jonquière): II y en a une.
M. BURNS: Dites-le! Il n'y en a pas eu de consultation, il n'y a pas eu
de véritable consultation. Une véritable consultation... bien
oui, imaginez-vous donc qu'il y a des façons de consulter le monde. Il y
en a une, et c'était la moindre que je suggérais,
c'est-à-dire la commission parlementaire. Et, à mon avis,
là vous parlez à l'establishment des représentants. Bien
oui! Ils vont venir et ils vont vous dire, peut-être, qu'ils sont
d'accord sur la fusion. Mais une véritable consultation des populations
concernées, c'est une forme qu'on appelle référendum. C'en
est une des formes, cela aussi. Et là on pourrait savoir exactement ce
que la population, ce que les contribuables pensent.
Il ne faut jamais oublier ce nom, M. le Président, les
contribuables, ce sont des gens qui contribuent à faire vivre un
organisme, une créature provinciale, il ne faut jamais l'oublier, qui
s'appelle une municipalité. Et pourquoi avoir peur de s'assurer d'avance
qu'une fusion, dans un cas comme ceux qu'on nous propose, reçoit
complètement l'approbation de la population? Qu'est-ce qui nous fait
tellement peur là-dedans? Ce n'est que cela, qu'on pose comme
problème et c'est le temps qu'on vous donne. Si la motion du
député de Rouyn-Noranda est acceptée, on vous donne le
temps de vérifier cela par les moyens qu'on vous suggère ou par
d'autres, si vous en trouvez de meilleurs. S'il y en a de meilleurs,
allez-y.
Si vous nous revenez avec un appui massif, global et carrément
majoritaire en faveur de ces fusions, on va dire: Ecoutez, la population s'est
quand même prononcée, mais jusqu'à maintenant je ne suis
pas capable, mais vraiment absolument pas capable de voter pour un projet de
loi comme celui-ci, qui est contraire à l'opinion exprimée par le
ministre des Affaires municipales actuel, comme par le ministre des Affaires
municipales antérieur, qui est maintenant juge et qui siège dans
une commission, un organisme public relié aux affaires
gouvernementales.
Ces deux opinions, M, le Président, nous disent que jamais une
fusion va se faire de façon obligatoirement forcée auprès
des gens concernés. Je ne suis pas certain que la loi qu'on nous
présente actuellement respecte ce critère, parce que,
écoutez, on a des oreilles pour entendre, on a entendu un tas de gens
qui ne sont pas d'accord sur ça. On a même vu certaines
élections municipales qui se sont faites sur ce sujet. On a même
vu, par les résultats, que l'élection municipale en question
était presque un référendum contre une fusion. Je parle en
particulier de la région de Saguenay-Lac-Saint-Jean. Vous savez de
quelle ville je parle, M. le Président.
Nous sommes rendus à ce point de décider au nom de gens
qui vivent déjà dans une communauté organisée, qui
vivent déjà dans un cadre très précis; nous sommes
rendus au point de décider pour eux qu'ils doivent fusionner. C'est dans
leur intérêt, disons-nous, c'est dans leur intérêt de
fusionner. Mais, M. le Président, on ne peut pas accepter ça tant
qu'on ne nous présentera pas clairement et carrément, sans aucune
ambiguïté, que la population concernée est d'accord sur ce
remaniement, sur ce rajustement des situations municipales, soit dans la
région de l'Outaouais ou dans la région du Saguenay.
M. le Président, je n'ai pas à faire des discours pendant
des heures pour tenter de vous convaincre de ça. Il me semble que c'est
la chose la plus évidente, la chose qui a été
endossée, comme je le disais tout à l'heure, par le ministre des
Affaires municipales. Je ne sais pas si à un moment donné il a
été obligé de faire un virage en U à
l'intérieur du cabinet des ministres. C'est possible. Cela fait
déjà deux ou trois fois qu'il se fait rabrouer et surtout deux ou
trois fois qu'il se retrouve tout seul, sans support, devant un
problème. On n'a qu'à citer le problème des Jeux
olympiques. Cela ne m'étonnerait pas que, malgré l'opinion
exprimée publiquement par le ministre des Affaires municipales, il ait
été obligé, faute de support à l'intérieur
du conseil des ministres, de virer son capot de bord.
Si c'est le cas, M. le Président, j'ai beaucoup de sympathie pour
le ministre, mais j'ai très peu de sympathie pour son projet de loi. Et
j'espère que non seulement les députés de l'Opposition
vont défendre le point de vue des populations régionales
visées par ce projet de loi, mais qu'il y aura aussi des membres du
côté ministériel qui, au-delà et en-deça des
lignes de parti, auront le courage de tout simplement affirmer le principe
qu'on ne fait pas, de façon artificielle et décidée par le
haut, des fusions sans aucunement consulter la population.
C'est ce que la motion nous permettra de
faire. Il y aura une possibilité de consulter la population de
deux façons, comme je l'ai suggéré tout à l'heure.
Peut-être d'autres façons si le ministre des Affaires municipales
en trouve d'autres et si elles sont meilleures, on sera d'accord avec lui.
Mais, actuellement, il m'est absolument impossible de voter pour le projet de
loi sans avoir l'assurance que les populations concernées sont d'accord,
ce qui me permettra, M. le Président, de voter entièrement et
sans aucune restriction pour la motion du député de
Rouyn-Noranda.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le ministre des Affaires
municipales.
M. Victor Goldbloom
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je voudrais dire quelques mots
seulement au sujet de cette motion qui propose la remise à trois mois de
l'étude de ce projet de loi.
Il y a une différence assez importante entre la thèse
avancée du côté de l'Opposition et les points de vue
exprimés du côté ministériel de la Chambre.
C'est que l'Opposition parle de façon théorique en termes
de principe. De ce côté-ci de la Chambre, nous parlons de deux
problèmes réels que nous avons la conviction de connaître
à fond et pour lesquels nous proposons des décisions.
M. le Président, le chef de l'Opposition a invoqué
l'exemple de la ville de Gaspé. Je pense qu'il est facile d'être
d'accord avec lui sur le fait que la création de la ville de
Gaspé a entraîné de nombreux problèmes qui ne sont
pas encore résolus. Ce n'est pas un geste que je recommanderais dans un
autre cas, mais nous ne parlons pas de la même situation.
Dans le cas de Gaspé, nous parlons d'une population de 18,000 sur
un territoire plus grand que l'île de Montréal et, dans le cas du
Haut-Saguenay, nous parlons de plus de 100,000, presque 120,000 sur un
territoire plus restreint que l'île de Montréal. Si l'on compare
le caractère et la force économique et sociale des deux
régions, nous constatons que nous parlons de pommes et d'oranges.
Je voudrais souligner deux ou trois autres choses. La Commission
municipale n'est pas allée siéger dans le Haut-Saguenay. Vous
n'êtes pas sans savoir qu'il y a eu des actions intentées devant
les tribunaux et que la plus récente de celles-ci est une action en
nullité. La commission, malgré le fait que son président
soit un juge et qu'il y ait des avocats parmi ses membres, a cru bon de
consulter des conseillers juridiques pour savoir si cette action en
nullité lui permettait ou ne lui permettait pas légalement
d'aller siéger. Au dernier rapport, elle n'était pas encore
convaincue parfaitement de ce qu'elle devait faire et, pour cette raison, a
annoncé une remise additionnelle.
On me demande de remettre pour trois mois l'étude du projet de
loi, mais je n'ai pas entendu une seule personne, jusqu'à maintenant,
mettre en doute la validité de la solution fondamentale et ultime: la
création d'une seule ville dans le Haut-Saguenay. Alors, nous ne parlons
pas de principe. Nous parlons de modalités.
Le chef de l'Opposition a parlé d'une chose très
importante. Il a parlé de cheminement psychologique. C'est justement
parce que nous regardons le cheminement psychologique que nous proposons
l'action contenue dans ce projet de loi. Pourquoi n'agissons-nous pas de la
même façon dans le cas de Saint-Hyacinthe? La raison est simple.
C'est parce que, dans le cheminement psychologique, l'Outaouais et le
Haut-Saguenay sont mûres. Nous ne voulons pas perdre cette occasion
d'amener la population qui est mûre à accepter ces fusions et,
malgré des difficultés dans la ville d'Arvida, que je reconnais
et que je prévois, cela sera quand même relativement facile. Je
suis foncièrement convaincu que les résultats seront heureux.
C'est parce que ces deux dossiers sont mûrs que le projet de loi est
présenté maintenant, parce que l'autre possibilité est de
vivre des mois et peut-être des années de mesures dilatoires.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Vous êtes prêts à
vous prononcer sur la motion d'amendement proposée par le
député de Rouyn-Noranda?
M. LESSARD: Vote enregistré, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Qu'on appelle les
députés!
Vote sur la motion
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement
proposée par l'honorable député de Rouyn-Noranda, motion
d'amendement à la motion de deuxième lecture du projet de loi no
98, veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Samson, Morin, Burns, Léger, Charron,
Lessard, Bédard (Chicoutimi), Bellemare (Johnson).
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Parent (Hull), Mailloux,
Saint-Pierre, Choquette, Phaneuf, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy,
Tetley, Lacroix, Bienvenue, Forget, Toupin, Harvey (Jonquière),
Vaillancourt, Cadieux, Houde (Fabre), Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Fortier,
Bossé, Kennedy, Bacon, Saint-Hilaire, Brisson, Séguin,
Saindon,
Houde (Limoilou), Pilote, Lamontagne, Picard, Carpentier, Dionne,
Faucher, Harvey (Charlesbourg), Larivière, Pelletier, Bellemare
(Rosemont), Bérard, Bonnier, Boutin, Chagnon, Marchand, Leduc, Caron,
Déom, Harvey (Dubuc), Lecours, Malépart, Malouin,
Massiçotte, Mercier, Pagé, Parent (Prévost), Picotte,
Sylvain, Tremblay, Verreault.
LE SECRETAIRE: Pour: 8 Contre: 60
LE PRESIDENT: Cette motion est rejetée. Est-ce que
l'Assemblée est prête à s'exprimer sur la motion de
deuxième lecture?
UNE VOIX: Vote.
Reprise du débat de deuxième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, faisant partie d'une
région qui est directement touchée par ce projet de loi, je sais
qu'il est facile de céder à la tentation de
l'émotivité concernant ce débat. J'essaierai de centrer
toute mon intervention en tenant compte, d'une part, du respect de la
démocratie qui est nécessaire et, d'autre part, de
l'intérêt et de l'avenir de la région du Haut-Saguenay.
Le moins qu'on puisse dire jusqu'à maintenant, c'est qu'on a
assisté, depuis quelques années, à l'incapacité des
gouvernements d'élaborer des politiques municipales qu'ils pouvaient
mener à bonne fin.
Comme vous le savez, en 1969, il y a eu la Communauté urbaine,
dont la preuve de rentabilité n'est pas encore assurée et qui,
d'ailleurs, représente un problème majeur pour le ministre des
Affaires municipales, tel qu'il l'a exprimé tout à l'heure.
Il y a eu, en 1970, un essai de créer des communautés
municipales et ce projet a été abandonné suite à
des pressions nombreuses et justifiées. Il y a eu, en 1972, la loi 276
concernant les unités de regroupement. Aujourd'hui, lors de la
présentation du projet de loi no 98, le ministre a lui-même
avoué ou constaté que cette loi n'était pas applicable,
d'où la nécessité de procéder autrement en nous
présentant le projet de loi no 98.
Depuis que ces différentes formes de regroupement de
municipalités ont été proposées et, par la suite,
abandonnées ne pouvant être menées à terme, nous
avons entendu, tant de la part des ministres que de la part d'organismes,
à des déclarations dans le sens du respect de l'autonomie
municipale.
Il y a eu également aussi le rapport de la commission
d'enquête sur la refonte des lois municipales qui, très
clairement, en vient à la conclusion qu'il faut revenir aux fusions
volontaires.
Durant tout ce temps, des déclarations ont été
faites par l'Union des conseils de comté, par l'Union des
municipalités du Québec qui, à bon droit,
réclamaient le respect de l'autonomie municipale.
M. le Président, concernant le projet de loi dont il est
question, je l'ai dit lors de l'intervention que j'ai faite sur la motion du
député de Rouyn-Noranda, concernant l'objectif qui est de former
une ville au Haut-Saguenay, je le dis très clairement, nous sommes
d'accord sur l'objectif poursuivi. Le Parti québécois, au niveau
national, est d'accord avec les regroupements. Cependant ceci a
été confirmé lors de son dernier congrès il
est contre les fusions forcées.
Concernant notre région, le chef du Parti québécois
est venu dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et a indiqué
et en cela je l'appuie que l'avenir de la région se
trouvait dans la formation d'une seule ville au Haut-Saguenay. Au niveau de la
région, nous sommes d'accord avec les objectifs qui sont poursuivis dans
le projet de loi no 98, à savoir la formation d'une grande ville dans le
Haut-Saguenay, c'est-à-dire de Jonquière jusqu'à
Rivière-du-Moulin.
M. HARVEY (Jonquière): C'est plus qu'un objectif, c'est un ordre!
C'est un ordre, c'est plus qu'un objectif!
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, d'ailleurs, cet
objectif, nous l'avons à maintes et maintes reprises
réitéré publiquement. Nous l'avons fait lors de la
dernière campagne électorale, nous l'avons fait depuis 1970 d'une
façon très claire et très précise.
Pour simplement appuyer ce que je vous dis, M. le Président, on
n'a qu'à consulter notre programme régional de la dernière
élection pour constater que le Parti québécois et
l'équipe des candidats, du point de vue régional, de notre
région favorisaient la création, d'ici cinq ans, disait-on
à ce moment-là, de la quatrième plus grande ville du
Québec formée des municipalités qui se trouvent entre
Jonquière et Rivière-du-Moulin.
M. le Président, sur ce point, il n'y a pas de désaccord.
Nous voulons la grande ville au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Elle s'impose. Mais
ceci ne veut pas dire que nous la voulons à n'importe quel prix, de
n'importe quelle manière. Nous le disons ce soir et nous l'avons dit
également dans notre programme régional, tout ce processus de la
formation d'une grande ville devrait s'accompagner d'un
référendum qui serait fait au niveau des populations
intéressées, et tout projet de restructuration ou de regroupement
et fusion devrait être précédé d'un
référendum au niveau des populations concernées, parce que
ce sont elles dont on dispose.
M. le Président, le ministre a fait état des sondages qui
ont été faits dans la région. Il a dit que, certainement,
la tendance était à la fusion. C'est vrai, M. le
Président. C'était un sondage en vue de savoir si les gens
étaient pour la fusion mais non pas un sondage sur le projet de loi tel
que présenté aujourd'hui.
A ce que je sache, au niveau de ce sondage, il n'y a pas eu de question
à savoir si la population qui était portée vers la fusion
était pour une fusion forcée ou pour une fusion imposée.
Cela est bien différent. On peut être pour la fusion, pour le
regroupement mais il y a quand même certaines conditions.
La condition que nous y posions, c'est de trouver, par la voie d'un
référendum, l'accord des populations qui sont
concernées.
Ce projet de loi est d'une grande importance puisqu'il va décider
pour les années à venir de l'avenir non seulement d'une ou de
deux villes, mais de l'avenir de toute la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Il ne doit pas être, j'en suis convaincu, le fruit de certaines
combines de politiciens, mais il doit être le fruit du consentement de la
population majoritairement. Je ne dis pas que c'est cela...
M. HARVEY (Jonquière): Vous avez du respect pour vos maires qui
vous écoutent.
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, non, vous êtes d'accord avec moi
qu'il ne doit pas être le fruit de cela. Je ne vous ai pas affirmé
qu'il était le fruit de cela.
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, le
député de Chicoutimi me permettrait-il une question?
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, vous allez me laisser terminer mon
intervention et je vous permettrai toutes les questions que vous voudrez
après.
M. HARVEY (Jonquière): D'accord.
M. BEDARD (Chicoutimi): Alors, M. le Président, je pense que le
ministre... Je suis surpris de voir le ministre du Revenu sursauter quand je
dis cela, je pense qu'il est d'accord avec moi.
M. HARVEY (Jonquière): Je suis insulté pour vos maires qui
vous voient.
M. BEDARD (Chicoutimi): Mais non, les maires j'en suis convaincu, ont
compris ce que vous n'avez pas compris. Je suis convaincu qu'ils sont d'accord
avec moi qu'une fusion de cette importance ne doit pas être le
résultat de combines politiques. Vous êtes d'accord avec cela.
M. HARVEY (Jonquière): Ce n'en est pas une. Pourquoi dire
cela.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BEDARD (Chicoutimi): Je ne vous dis pas que cela en est une; je vous
dis que ça ne doit pas être ça. Vous êtes d'accord
avec moi, sinon vous n'êtes pas logique. Vous commencez à me faire
douter de certaines choses.
La fusion doit être le fruit du consentement des populations qui
ont eu l'occasion de s'exprimer majoritairement.
Le ministre des Affaires municipales nous a dit que dans son projet de
loi il y aurait la possibilité que la commission parlementaire puisse
siéger après son adoption. Si on veut être sérieux,
si une commission parlementaire veut vraiment être sérieuse dans
la recherche de l'opinion populaire d'une population, une telle commission
parlementaire ne doit pas se tenir après l'adoption du projet de loi
mais elle doit se tenir avant cette adoption. Sinon, il n'y a aucune logique
là-dedans et je me demande où se situe le principe qu'une
population doit se prononcer elle-même avant qu'on décide de son
sort.
Adopter dès maintenant un projet de loi qui impose la fusion et
simplement promettre une commission parlementaire après l'adoption du
projet de loi c'est tout simplement dire que cette commission parlementaire va
entendre les organismes non pas sur l'avenir global de la région, mais
simplement sur des sujets qui peuvent se situer surtout du point de vue
administratif, qui peuvent concerner les modalités administratives.
Le principe ou l'imposition d'une idée du gouvernement est clair
à ce moment-là, étant donné que le projet de loi
est accepté. C'est cela, M. le Président. Autrement dit, cela
équivaut à la mise en tutelle politique de toute une
région, de tout un ensemble à qui on dit: Votre avenir est
décidé par un projet de loi, qui est le projet de loi no 98;
maintenant, nous allons tenir une commission parlementaire sur les
modalités pour arriver à la concrétisation de cet avenir
que nous avons décidé pour vous et vous pourrez venir vous faire
entendre pour discuter des modalités.
M. le Président, non seulement on n'a pas tenu de
référendum au niveau de la région, au niveau des
unités concernées, mais la Commission municipale n'est même
pas venue siéger dans la région. Pourtant, M. le
Président, c'est important que la Commission municipale vienne
siéger, surtout dans un cas aussi important que celui dont nous parlons.
Je veux simplement exprimer l'opinion d'un fonctionnaire qui est venu dans la
région, M. Bruno Beaulieu, et qui en fait reconnaissait la
nécessité que la Commission municipale vienne siéger. Il
disait ceci: "Le ministre des Affaires municipales ne s'est pas donné le
pouvoir de forcer certaines municipalités à se fusionner; la
décision finale appartient à la Commission municipale." Comment
peut-elle décider si elle n'est pas venue nous entendre? "Le
regroupement disait-il
est lié à un corps organique et non à la
politique." M. le Président, l'importance qu'une commission
parlementaire vienne siéger, ce n'est pas moi qui ai inventé
cette réalité; le ministre des Affaires municipales
lui-même l'a clairement exprimé le 24 mai 1973, ici à
l'Assemblée nationale, alors qu'il disait ceci: "Je serais
profondément malheureux si on s'opposait à ce que la Commission
municipale aille siéger dans quelque région que ce soit de la
province pour entendre les intéressés parce que c'est comme cela
que nous allons nous pencher. C'est un organisme indépendant qui a la
responsabilité de conseiller le ministre sur certaines choses, de faire
des recommandations. Il faut que la commission aille siéger et que les
renseignements qui se dégageront de ces audiences soient fournis
à la population. Ce n'est qu'une étape qui n'a rien
d'exécutoire; donc, j'y tiens beaucoup et je pense que c'est une formule
qui est logique et que nous allons poursuivre."
M. le Président, le ministre des Affaires municipales a en
très grande estime et en très haute considération cette
Commission municipale puisqu'en date du 15 novembre 1974 il écrivait
à un citoyen d'Arvida qui lui avait fait voir ses vues, M.
Désiré Bilocq: "L'enquête de la Commission municipale du
Québec s'avérera significative dans les semaines qui viennent. La
commission siégera dans chacune des municipalités de votre
région en parlant de notre région et sera heureuse
de recevoir toute représentation faite de façon courtoise et
objective. Il serait des plus regrettables c'est le ministre des
Affaires municipales qui parle voire même un mauvais service
à la démocratie que les contribuables de votre région
adoptent une attitude défaitiste et concluent que toutes les
décisions avaient été prises à l'avance et que leur
présence aux séances de la commission ne serait qu'une perte de
temps."
M. le Président, les citoyens de la région n'ont pas perdu
de temps. Elle n'est pas venue siéger, la commission en question, elle
n'a donc pas pu faire ses recommandations.
Je veux continuer à être convaincu de toute la
considération que le ministre des Affaires municipales peut avoir envers
la Commission municipale. Dans ce sens-là, il est impossible de penser
qu'on puisse procéder d'une façon imposée, d'une
façon forcée, si on veut être logique avec les principes
qu'il a énoncés, à des regroupements sans avoir au
préalable associé la population au processus de regroupement. Le
ministre des Affaires municipales nous a dit qu'il y avait eu des sondages qui
se montraient favorables, qu'il y avait des maires des municipalités qui
étaient d'accord.
Dans cela il a raison, mais s'il prétend que tout le monde est si
d'accord que ça, au niveau des dirigeants, il reste une chose c'est
qu'il n'y a pas seulement les dirigeants qui sont impliqués
là-dedans, c'est toute la population. Et s'il a la conviction que toute
la population est d'accord, pourquoi à ce moment-là refuser le
référendum pour lui permettre de s'exprimer?
M. le Président, le projet de loi tel que rédigé
nous fait douter grandement que la grande ville puisse se réaliser si on
garde le projet de loi tel qu'il est. J'ai soulevé, et je suis d'accord
avec ça, qu'il ne faut peut-être pas perdre l'occasion de former
cette grande ville, telle que l'a dit le ministre des Affaires municipales,
tantôt, mais il faut être sûr d'avoir la population de notre
côté. Autrement dit, il faut que nous ayons la conviction que la
population accepte ce sur quoi nous légiférons et pas seulement
les dirigeants. Encore une fois, si c'est si clair que ça, un
référendum peut se tenir très vite et, à ce
moment-là, permettre une loi qui ne soit pas coercitive.
J'ai dit que je doutais de la possibilité que justement cet
objectif de la grande ville puisse se réaliser si on garde le même
schéma, parce qu'il y a des articles, je sais que nous
l'étudie-rons surtout en commission, il y a des articles qui
prévoient dans certaines unités, entre autres l'unité JAK,
qu'une deuxième élection générale se tiendra en
1979. C'est confirmé dans bien d'autres articles mais je n'entre pas
dans le détail, et du même souffle on nous dit que la grande ville
va se faire en 1978.
Il est clair que nous avons besoin d'éclaircissement. Et si les
éclaircissements ne se font pas lumineux, à ce moment-là,
nous aurons de vrais motifs, de véritables raisons de croire
jusqu'à quel point le gouvernement est sérieux quand il dit qu'il
veut faire la grande ville.
M. le Président, je vais lui soumettre une possibilité de
la faire, cette grande ville, puis très vite à part ça.
Sous toute réserve de l'objection que nous faisons et que nous
maintenons à savoir qu'une population doit être consultée
avant qu'on décide de son sort, il reste qu'il y a un moyen qui,
à mon sens, serait plus efficace pour arriver à l'objectif,
à savoir la grande ville.
Plutôt que de former la grande ville en deux étapes, comme
cela nous est proposé dans le projet de loi, je soumets qu'il ferait
mieux, si on la veut vraiment cette grande ville, de la réaliser non pas
en deux étapes, mais en une seule étape. Ceci éviterait,
des bouleversements de population, un double bouleversement de population. Si
on le fait en deux étapes, on demande à une population, dans
l'espace de quelques années, d'être un certain temps dans une
unité spéciale mais bien déterminée, à une
autre population d'être dans une autre unité
déterminée, et ensuite, dans l'espace de quelques années,
trois à quatre ans, encore une fois on leur demandera un nouveau
bouleversement, à savoir celui d'être dans une grande unité
qui serait la grande ville.
Si le ministre des Affaires municipales voulait se pencher vraiment sur
cette possibilité de la réaliser, il en arriverait
peut-être à des conclusions qui pourraient faire avancer bien des
choses.
Je pense que, si on veut vraiment la grande ville, il faut la faire en
une étape, éviter, comme je l'ai dit, un double bouleversement
des populations, éviter aussi un double bouleversement du point de vue
administratif.
On ne peut pas jouer avec des populations comme cela dans un temps aussi
restreint que celui qui est présenté dans le projet de loi.
Si le projet de loi décidait demain de former la grande ville
dès maintenant, en une étape, puis y installait, dès
maintenant, le conseil métropolitain du Haut-Saguenay qui aurait les
pouvoirs qui sont déterminés dans la loi ou d'autres pouvoirs
additionnels qu'on trouverait nécessaires, si le gouvernement
décidait dès maintenant d'accorder des subventions
nécessaires pour en arriver à la concrétisation des
objectifs qui seront fixés par ce conseil métropolitain, à
ce moment, le gouvernement montrerait sa détermination d'arriver
à un but que nous poursuivons tous, à savoir la formation d'une
grande ville au Haut-Saguenay. Naturellement, avant d'y procéder, il y
aurait toujours la nécessité d'un référendum.
Si le ministre nous refuse cela, je lui dis à l'avance que, lors
de la commission parlementaire, nous apporterons des amendements à
l'effet qu'à chacune des étapes qui sont dans son projet de loi
il se doit quand même de procéder à un
référendum. Mais, encore là, je suis convaincu que ce
n'est pas la manière d'arriver, et ce le plus vite possible, à la
formation d'une grande ville, ce que nous voulons.
M. le Président, une fusion n'est pas le début d'un
processus. Ce n'est pas une simple décision politique...
M. LEVESQUE: C'est fini.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... mais c'est l'aboutissement d'un processus.
Ce sont des populations qu'on veut réunir, mais qu'on habitue à
vivre ensemble...
M. LACROIX: Le temps est écoulé, M. le
Président.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... de manière qu'elles soient d'accord
une fois pour toutes à avoir un avenir commun. C'est ce que je souhaite
le plus ardemment possible pour l'ensemble de la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean.
LE PRESIDENT: Le député du Lac-Saint-Jean.
M. Roger Pilote
M. PILOTE: M. le Président, étant moi-même
président de commissions parlementaires comme mon collègue, le
député de Gatineau, je n'ai pas souvent l'occasion d'intervenir
en Chambre ou en commission parlementaire, si ce n'est pour diriger les
débats.
Par esprit d'impartialité et tenant compte de la fonction que
j'occupe, je voudrais que mon intervention ne soit pas teintée de
politique. Je voudrais, dans ce témoignage que je vous présente,
que vous voyiez non seulement celui du député du Lac-Saint-Jean,
mais celui, d'abord et avant tout, du simple citoyen ou des concitoyens de mon
comté, surtout ceux d'Alma.
Je voudrais représenter assez fidèlement leur point de vue
sur le projet de loi no 98, Loi concernant certaines municipalités de
l'Outaouais et du Haut-Saguenay. Je me limiterai à parler du
Haut-Saguenay, ne connaissant pas suffisamment le territoire de
l'Outaouais.
Faisant partie, comme les gens du Haut-Saguenay, de la région
0-2, je crois que nous recherchons ensemble à travailler harmonieusement
au mieux-être de notre population.
J'ai vu se dérouler le film de négociation de cette
fusion. J'ai vu surtout non seulement je l'ai vu, mais j'ai vécu
celui de la fusion de la grande cité d'Alma. J'aurais aimé
que le chef de l'Opposition officielle parle de la grande réussite que
fut et qu'est cette fusion, mais je sais que son rôle est de parler de ce
qui va mal et non pas de ce qui va bien.
Je me permets de vous faire un court historique...
M. HARVEY (Jonquière): Est-ce qu'il y a des dissidents
là?
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît.
M. PILOTE: ... de cette fusion. Au début de 1960, le gouvernement
du temps, après de nombreuses négociations avec les villes
intéressées, a décidé, par une loi parrainée
par le député du temps, un député libéral,
M. Lucien Collard, de fusionner ces villes concernées.
Il s'agissait d'Alma, Naudville, Riverbend, Isle-Maligne. Ce fut une loi
imposée, il est vrai. Au début, les gens l'acceptaient
difficilement, ne l'acceptaient guère. Mais quelques mois ont suffi pour
permettre aux gens concernés à apprendre à travailler
ensemble pour le plus grand bien de cette population, et ceci sans aucune
subvention.
Ce fut une fusion de territoire, il est vrai, comme toute fusion,
d'ailleurs. Mais ce fut, d'abord et avant tout, une mise en commun des
ressources humaines qui a provoqué une volonté ferme de
travailler au bien du milieu. Ce fut une fusion des cerveaux. Le grand Alma
devenait, par le fait même, un centre de décision
intégré à la réalité du milieu. Aima
possédait désormais un mécanisme d'économie de
temps et d'argent dans ses négociations gouvernementales,
paragouvernementales ou autres.
On retrouvait à Alma ce qu'on recherchait depuis longtemps,
c'est-à-dire l'identité des intérêts entre les
diverses parties fusionnées au plan socio-économique. Enfin, les
citoyens, de par leur collaboration, voulaient participer au bien commun de
tous. Ce fut et je me plais à l'appeler ainsi la fusion
des cerveaux.
Voilà, M. le Président, ce qu'est devenu Alma. Je voudrais
vous parler un peu des effets bénéfiques de cette fusion. Alma
fut la première municipalité de la province à profiter du
programme de rénovation urbaine. Alma fut la première
municipalité, dans la région du Lac-Saint-Jean-Saguenay, à
posséder son parc industriel, où on retrouve aujourd'hui une
douzaine de petites et de moyennes industries. On retrouve également
à Alma, à cause de cette fusion des coeurs et des cerveaux, un
des plus beaux centres sportifs et un des plus modernes. Ceci est dû
à une participation tant municipale que scolaire et à un
financement municipal et scolaire. Cette fusion des esprits a
entraîné la création du Conseil économique qui
travaille à la promotion, à l'éducation et à
l'animation économique du milieu. Le Conseil économique d'Alma a
donné naissance à un comité intermunicipal formé de
municipalités autour du comté du Lac-Saint-Jean, qui en plus
petit, il est vrai, a les mêmes fonctions que le Conseil
économique d'Alma.
Nous connaissons également une société de gestion,
et j'en passe. Il n'est pas étonnant qu'aujourd'hui des centaines de
personnes du comté, particulièrement les maires, les
échevins, les ouvriers, les professionnels, les syndicalistes pensent et
vivent développement économique. La fusion d'Alma fut avant tout,
comme je le disais tantôt, la fusion des cerveaux. Les citoyens sont
fiers de leur ville. Ils sont fiers de leur comté et je vous invite, et
surtout j'invite le chef de l'Opposition à venir voir ce qui se passe
à Alma, à venir voir ce qui se passe au Lac Saint-Jean depuis
cette fusion.
M. BACON: En limousine avec son chauffeur.
M. PILOTE: M. le Président, le jour n'est pas loin où nous
verrons au lac Saint-Jean une communauté rurale regroupant de sept
à dix municipalités mettant en commun leur énergie en vue
d'un développement plus harmonieux de leur milieu.
Fusion forcée, il est vrai, mais je réitère mon
invitation non seulement de venir voir ce qui se passe à Alma, mais de
venir interroger les gens. Quant au projet de loi no 98, j'inviterais les gens
du Haut-Saguenay à réfléchir sur les bienfaits que peut
apporter, dans un premier temps, les fusions de Chicoutimi, Chicoutimi-Nord et
Rivière-du-Moulin, les fusions de Jonquière, Kénogami et
Arvida et, dans un deuxième temps, la grande ville.
Le député de Chicoutimi disait tantôt: Laissons
tomber ces fusions partielles et fusionnons, une fois pour toutes, de
Chicoutimi à Jonquière. Si on faisait l'inverse, si on fusionnait
immédiatement pour une grande ville dans le Haut-Saguenay, je suis
sûr que les arguments du député de Chicoutimi seraient les
suivants, s'il est sincère avec lui-même: Ecoutez, les gens du
gouvernement, commencez par fusionner Jon- quière, Kénogami,
Arvida, Chicoutimi, Chicoutimi-Nord et Rivière-du-Moulin et ensuite vous
passerez à la grande ville. S'il est sincère, je suis sûr
qu'il va répondre oui à cette question que je lui pose.
Je tiens à souligner également l'effort des gens de
Bagotville, Port-Alfred et Grande-Baie, qui ont accepté de fusionner en
vue d'harmoniser leurs efforts et, partant, leur développement
économique.
Fusion forcée, il est vrai, mais combien bénéfique
à l'ensemble de la population, comme j'ai tenté de vous le
démontrer. Si on dit que le présent est la
répétition, sous une autre forme, de l'historique, pour un plus
grand bien dans notre région, j'inviterais les gens, qu'ils soient de
Jonquière, d'Arvida, de Kénogami, de Chicoutimi, de
Chicoutimi-Nord, de Rivière-du-Moulin, à accepter ce défi
de fusion physique qui entraîne nécessairement une fusion des
cerveaux.
Le défi de 1975 de notre région et je connais ma
région comme les députés de cette région, le
ministre du Revenu c'est de travailler à maximiser nos ressources
naturelles et surtout nos ressources humaines. Qu'on pense qu'actuellement la
population est de 275,000 alors qu'elle devrait être de 325,000; c'est
dû à l'exode de nos jeunes cerveaux, qui sont obligés
d'aller travailler ailleurs. Et s'il n'y a pas une concertation, s'il n'y a pas
un travail venant de l'ensemble du Lac-Saint-Jean comme du Saguenay, ce sont
ceux qui vont nous suivre qui vont en souffrir.
Ensemble, nous devons relever ce défi. Séparés, les
résultats sont très incertains, les messieurs du Haut-Saguenay,
les gens du Lac-Saint-Jean sont inquiets.
Pour toutes ces raisons que je viens de vous énoncer, je voterai
pour ce projet de loi en deuxième lecture. Merci.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, est-ce que le
député du Lac-Saint-Jean me permettrait seulement une
question?
M. PILOTE: Oui.
M. BEDARD (Chicoutimi): Cette fusion des cerveaux dont vous parlez, qui
est nécessaire pour arriver à un résultat concret,
pourquoi ne croyez-vous pas qu'elle ne serait pas possible dans le fait
on a le même objectif de réaliser cette grande ville, cet
objectif dans une étape plutôt que dans deux étapes, ce qui
amène un bouleversement des populations?
M. PILOTE: Pour répondre à la question du
député de Chicoutimi, je crois que,...
M. BEDARD (Chicoutimi): Si les gens sont d'accord.
M. PILOTE: ... actuellement, il est impossible de penser à une
grande ville, physiquement,
et en raison disons de la santé des spécialistes qui sont
attirés à cela. Je crois que physiquement c'est impossible, pour
le moment. Mais deux fusions: une avec Jonquière-Kénogami-Arvida
et une avec Chicoutimi - Chicoutimi-Nord - Rivière-du-Moulin pour
commencer par Chicoutimi - Chicoutimi-Nord - Rivière-du-Moulin et
ensuite, les deux ayant fusionné, il sera plus facile d'avoir une grande
ville.
M. BEDARD (Chicoutimi): Si vous aviez la conviction...
DES VOIX: A l'ordre!
M. LEVESQUE: On n'est pas en commission.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous
plaît! L'honorable ministre...
M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas au leader du gouvernement...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Houde, Limoilou): ... du Revenu.
M. BEDARD (Chicoutimi): ...de décider si un député
veut se faire poser une question ou non. Je pense que ce sont des questions qui
sont très raisonnables.
UNE VOIX: A l'ordre!
M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai simplement mentionné
qu'on n'était pas en commission. Vous comprenez.
M. Gérald Harvey
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, je remercie mon
collègue du Lac-Saint-Jean d'avoir bien voulu livrer à cette
Chambre le résultat ou l'analyse des résultats obtenus à
la suite d'un regroupement municipal dans le réservoir naturel du
Lac-Saint-Jean que constitue l'île d'Alma.
L'île d'Alma a été convertie en une magnifique
cité qui progresse et qui fait l'orgueil de ceux qui suivent son exemple
malgré deux dissidences et malgré des dissidences appuyées
par ceux qui avaient été les investisseurs premiers du
développement industriel du Saguenay Lac-Saint-Jean. Sans dire
leurs noms, j'identifie les secteurs, l'aluminium et le papier.
C'est un geste historique que pose le gouvernement du Québec ce
soir. Je ne ferai pas de démagogie, ce serait trop facile, parce que
j'ai assisté tout à l'heure au comble de l'illogisme. J'en
parlerai pour terminer et je ne serai négatif que quelques secondes.
Je vais dire au dissident, le seul, qui, à la dernière
minute, devant ce qui se passe et ce qui se dit, autant par les gens de
l'Outaouais que par les gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean, avec cette
unanimité presque complète, étant la seule partie
dissidente, j'ai l'intention, M. le Président, de vous dire qu'est-ce
que le législateur québécois fait ce soir dans la province
de Québec en ce 18 décembre. Il échange, ce dissident, sa
place actuelle d'être une ville avec un nom connu qui demeurera
également pour être le coeur d'une ville au Québec qui sera
incomparable. Je m'explique.
Connaissez-vous des villes, au Québec, M. le Président,
dont les quatre quartiers... C'est le titre du bill que nous étudions ce
soir, et contrairement à ce que disait le député de
Chicoutimi, tout à l'heure, on dit, à l'article 12, qu'à
compter du 1er janvier 1978 ce n'est pas peut-être, cela
les habitants et contribuables des territoires des villes de Jonquière
et de Chicoutimi forment la corporation de ville sous le nom de ville de
Saguenay. Ce sera quoi, M. le Président, cette ville de Saguenay? Cette
ville a quatre quartiers: quartier Jonquière, quartier Chicoutimi,
quartier Arvida, quartier Kénogami. Le coeur, le quartier d'Arvida, en
échange de sa dissidence, nous lui offrons ce coeur d'une ville qui a
une université, une population de 125,000 habitants, un hôpital
avec des soins hautement spécialisés, deux autres hôpitaux
généraux, centre administratif régional qui a semé
la panique, que l'on va retrouver maintenant à l'Ouest de la ville,
l'université à l'Est, le Saguenay demeurant toujours à
gauche, et le sud à développer pour venir vous trouver plus vite
à Québec, si on réussit à faire investir davantage
dans cette région remplie de dynamisme.
M. le Président, on y retrouve également trois CEGEP: le
CEGEP régional à Arvida, au coeur de cette grande ville
très populeuse, deux CEGEP à vocation différente, celui de
Jonquière, spécialisé dans les options terminales,
générales et professionnelles.
M. le Président, connaissez-vous des villes, dans le
Québec, de cette envergure, qui peuvent se vanter, en plus, d'avoir deux
usines de pâtes et papiers, un conseil municipal qui parlera au nom du
pôle de croissance, appuyé par deux quartiers de cette ville assez
populeux pour avoir chacun deux députés? Le quartier de
Jonquière a son député provincial, c'est celui qui vous
parle; le quartier de Jonquière a son député
fédéral; le quartier de Chicoutimi a son député
fédéral et, à entendre parler, tout à l'heure, le
député de Chicoutimi, j'ai l'impression qu'il est ici par
accident, à cause de la dissidence des libéraux dans le
comté de Chicoutimi.
M. BEDARD (Chicoutimi): Cela fait sérieux dans le débat
!
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, le
député de Chicoutimi ne me fera pas fâcher.
M. BEDARD (Chicoutimi): Cela fait sérieux dans le
débat.
M. HARVEY (Jonquière): II m'a dit tout à l'heure de parler
si je voulais parler. C'est à mon tour de parler. Il parlera en
commission.
M. HARDY: C'est un accident.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je n'ai pas parlé de vous, moi, parce que
j'en aurais eu long à dire. J'en aurais eu pour deux heures.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous
plaît! L'honorable ministre du Revenu.
M. LACROIX: ...
M. HARVEY (Jonquière): M. le Président, en plus, cette
magnifique ville possède dans ses murs, le centre régional des
services psychiatriques, à Chicoutimi-Nord, M. le Président,
cette trame urbaine qu'on a toujours voulu développer gagne, ce soir, en
éliminant ses frontières imaginaires. Malgré son
non-consentement du moment et notre tentative de nous faire comprendre, je vais
vous énumérer ici avec quel souci nous avons tenté de
faire pénétrer la Commission municipale dans le secteur.
M. le Président, regardez le rythme, quand on veut donner
à une population ce qu'elle désire: 1968, étude du CRD.
Conclusion: Diminuer les centres de décision.
Conclusion: diminuer les centres de décision. 1969, le
gouvernement agit; mission économique de planification. Conclusion:
diminuer les centres de décision. 1970, changement de gouvernement, mais
immédiatement réclamation unanime. A sa tête, le maire de
la cité dissidente demande la création d'une communauté
municipale. C'est abandonné au début de 1971, finalement, par
l'autorité politique du Québec, le gouvernement, à la
suite des difficultés rencontrées dans celles de l'Outaouais, de
Montréal et de Québec.
Mais jusqu'où va la cohérence? Le même gouvernement
décide d'accoucher d'une loi que j'ai appuyée, se voulant
très démocratique, le chapitre 53 des Lois de 1971. Fusion,
respect de la démocratie, majorité des municipalités,
majorité des populations plus de 50 p.c. et la voici partie, cette loi.
Janvier à mai 1972, étude par le ministère selon des
normes et critères sévères, très juridicieux,
concluant au décret de trois unités de regroupement. On
décrète l'unité JAK, Jonquière paroisse,
Chicoutimi, Rivière-du-Moulin, Canton Chicoutimi en première
phase d'un regroupement qui devait inclure, en deuxième phase,
Chicoutimi-Nord et Canton Tremblay et, finalement, l'unité de
Port-Alfred, Bagotville, Bagotville paroisse.
On va dire que c'est fort; dans la loi, on dit: Les villes n'existent
plus la loi parle par elle-même à compter de... On
donne une date limite, le 10 octobre 1972. Que fait-on? Cela va vous
surprendre, on décrète cela au mois de juin, mais,
déjà en janvier, il y en a une qui avait pensé à
confier à une firme de vrais spécialistes, Surveyer, Nenniger et
Chenevert, firme internationale, le soin d'étudier les avantages et les
désavantages pour sa propre gouverne, pour elle-même. Mais on
s'est fait jouer un tour. On a dit à cette firme: Ne commencez pas, nous
allons spécifier notre demande. Nous sommes votre client. Le tour qu'ils
se sont fait jouer, c'est que les autres partenaires de l'unité,
conscients que ce dossier indispensable qui sortirait... On le prévoyait
certainement de la part des partenaires, parce que je ne suis pas un
partenaire, je ne suis pas maire d'une ville, je suis au service de ces gens
élus par les populations qui ont la responsabilité de bien
administrer l'argent des contribuables dans leur municipalité
respective.
Eux, ils ont choisi le même consultant. Le résultat: aucun
travail effectué jusqu'à la date limite, tout le monde à
défaut le 11 octobre. Le consultant, consciencieux, est obligé de
venir s'asseoir au gouvernement pour nous dire: Mais que voulez-vous, je n'ai
pas pu rien faire; j'ai un mandat et il a été étendu dans
des endroits où je n'ai pas fait de sollicitation. N'est-ce pas la
preuve que les partenaires étaient de bonne foi? Ils voulaient
connaître, par des gens compétents, les avantages et les
désavantages. On dresse aux Affaires municipales une liste des inconnues
où on voulait avoir des réponses. Le 10 janvier 1973, remise du
rapport SNC et, là, on voit des commentaires. Ouf! Bon, pas bon,
professionnellement prudent. Je vous montrerai cela un jour; vous allez me dire
que j'ai de la patience. Mais il fallait que je sois au courant de ce dossier,
parce qu'on me disait, depuis le début, que je n'étais que
député de Jonquière et que je n'avais pas à m'en
mêler. Très bien. On laisse aller les choses et, là,
ça commence à se détériorer.
Malgré les nombreuses demandes des partenaires de
Kénogami, de Jonquière paroisse et de Jonquière, une
municipalité refuse de ratifier cette étude et nous voilà
arrivés au 23 mars 1974, soit quinze mois après. Nenni, rien! Eh!
bien, comme député du comté, est-ce que je devais dire non
à trois maires appuyés unanimement par leur conseil qui sont
venus chez le ministre des Affaires municipales, non pas lui demander une
faveur, mais dire: M. le ministre, la loi 276 est dans les statuts, on est venu
vous dire de la laisser suivre son cours et on vous demande un chargé de
dossier pour être capable de mettre à jour cette étude.
Pendant ce temps-là, le ministère dépensait une somme
d'au-delà de $100,000 pour donner un outil indispensable dans le
secteur, un plan directeur d'aqueduc et d'égouts.
L'échéancier serré a amené, à la
suite d'un travail efficace et de collaboration de trois sur quatre, à
une requête adoptée le soir du 6 août. Et c'est là
que je veux de nouveau dire au
député de Chicoutimi d'arrêter d'être naif.
Quand il parle de sondage, il faudrait savoir, M. le Président, que le
soir de l'adoption de la requête, le 6 août, malgré un
référendum tenu dans un secteur trois mois préalablement,
la population n'avait pas été chauffée à blanc par
les "profusionnistes" ou les "antifusionnistes." Il est arrivé une firme
de professionnels sous surveillance d'officiers du ministère des
Affaires municipales. Ils n'ont pas posé la question: Aimez-vous un tel?
N'aimez-vous pas un tel autre? C'était fait d'une façon
scientifique. Je suis persuadé que mon collègue des Affaires
municipales voulait vérifier ce que mon collègue de l'Outaouais,
le député de Hull et ministre de la Fonction publique et
moi-même lui rapportions constamment concernant l'évolution de nos
dossiers respectifs.
L'Institut québécois de l'opinion publique, M. le
Président, c'est une insulte à lui faire que de dire qu'il a fait
un sondage. C'est un travail professionnel de 1,000 répondants,
répartis entre des degrés de scolarité, des âges
différents, hommes, femmes. Pour 25 questions, un taux de réponse
d'au-delà de 75 p.c. Or, dans des travaux de ce genre, on peut calculer
qu'avec un taux de répondants de 75 p.c, tous les travaux ont
donné des résultats de plus cinq ou moins cinq. Et je vais donner
une preuve qui est complètement en dehors du regroupement municipal.
Dans ce travail non pas de sondage mais ce travail professionnel
à la 25e question, on a posé dans les différents secteurs
des trois unités cette question: Votre maire, êtes-vous satisfait
en général de son travail? Très satisfait, satisfait,
insatisfait, très insatisfait, et ceux qui ne répondaient pas.
Savez-vous, M. le Président encore une fois je ne nommerai pas de
nom que le sondage indiquait un taux d'insatisfaits et de très
insatisfaits qui dépassait les 40 p.c? Cela ne devient plus une surprise
quand on connaît ce qui s'est passé il y a quelques semaines. Cela
nous indiquait également avec quelle logique les gens de la ville
dissidente ont réélu par acclamation leur conseil municipal parce
qu'eux-mêmes ont répondu, dans un pourcentage très
élevé, "non" au regroupement sous toutes ses formes.
M. le Président, la Commission municipale a tenté
d'appliquer des mesures.
Je n'appellerai pas mesure dilatoire la première mesure, parce
que la première mesure c'était uniquement pour sauver de l'argent
aux contribuables, épargner de publier dans les journaux de langue
anglaise et française et dans la Gazette du Québec une
description technique, que seuls peuvent lire les
arpenteurs-géomètres. Le hasard voulait que le maire de
Jonquière en soit un, il ne pouvait pas la faire. L'autre qui a eu
à lire le devis technique, et le seul qui pouvait comprendre, avait eu
le contrat pour le faire.
C'était un gros résultat quand, au départ, tout le
monde savait que s'ils résidaient à Jonquière, Arvida,
Kénogami, ou dans la parois- se, ils formaient l'unité JAK.
Impossibilité de la commission de s'y rendre. Nouvelle publication avec
tout ce que ça comporte, obligation de voter une loi, loi 76 pas trop
agréable à présenter. Nonobstant l'article 23 du bill 276,
elle donnait la permission aux villes de se voter une résolution
prolongeant pour une deuxième fois leur mandat. Cela ressemble un peu au
genre de loi qu'on a dans le domaine des salaires des membres des Chambres
élues où l'odieux de faire rémunérer les membres
repose sur une décision où toutes sortes de prétextes sont
bons pour se faire du capital politique.
Nous avons décidé, devant la dernière mesure
dilatoire, de légiférer. Trois choix s'imposaient, le premier, ne
rien faire. Le deuxième, JAK, décréter des nouvelles
unités dans Chicoutimi pour inclure Chicoutimi-Nord, qui avait
été épargnée la première fois. Le
troisième, le projet de loi actuel, le respect intégral d'une
requête conjointe signée, fruit d'un travail laborieux, travail
sérieux, avec tant d'études sérieuses, pour lancer cette
ville.
M. le Président, je termine avec mes 30 secondes de
négatif. Comment pouvez-vous concilier la philosophie de ces gens qui
veulent séparer le Québec unilatéralement, sans consulter
les autres provinces, avec leur refus devant l'unanimité pratiquement
complète huit sur neuf de voter un projet de loi qui donne
la chance à ceux qui veulent faire le travail sérieux qui n'a pas
été fait, le travail préliminaire, de se rejoindre dans la
magnifique cité que je viens de décrire?
M. le Président, je vais prendre le député de
Chicoutimi au mot. Ce n'est pas moi qui est le maître là-dedans et
je respecte le voeu de la ville dissidente. Qu'il fasse accepter, pas aux trois
partenaires, aux huit partenaires de la dissidence l'accélération
de cette ville, de cette ville qu'il faut créer si on veut garder nos
jeunes, nos cerveaux. Il va s'apercevoir que le député de
Jonquière, contrairement à ce qu'a décrit
l'ex-député de Champlain, devenu le non moins jeune
député de Johnson, que le député de
Jonquière, sa région non seulement il l'a à coeur mais
celui qui est capable de lui faire perdre son siège ce soir en posant ce
geste et en votant pour le projet de loi vient de se faire élire puis il
sortira de la politique fatigué parce que ce n'est pas un PQ qui va le
battre.
DES VOIX: Vote.
LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition officielle.
M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN: M. le Président, je voudrais maintenant...
M. LACROIX: Avez-vous l'autorisation pour parler à
l'Assemblée nationale?
M. MORIN: ... parler de la question de principe qui forme le
fondement...
LE PRESIDENT: Messieurs, s'il vous plaît.
M. MORIN: M. le Président, c'est la même chose que tout
à l'heure; avant même que j'aie commencé, on tente de
m'empêcher de parler. Ai-je maintenant la parole et voulez-vous, s'il
vous plaît, protéger mon droit de m'exprimer?
LE PRESIDENT: Et je souhaite que vous l'exerciez en toute liberté
et en toute tranquillité, monsieur.
M. MORIN: Merci, M. le Président. Je voudrais donc, puisque nous
sommes en deuxième lecture, parler de la question du principe qui
sous-tend ce projet de loi.
Il ne faudrait pas qu'on se méprenne sur le sens de nos
interventions, que l'on ait l'impression que nous nous opposons au regroupement
de municipalités.
Après tout, l'un des premiers Québécois, l'un des
premiers hommes politiques qui ait soulevé ce problème, ici
même à l'Assemblée et au gouvernement, était M.
René Lévesque, à l'époque où il était
ministre. Il s'élevait contre le morcellement du Québec en de
nombreuses municipalités. Il en reste encore aujourd'hui plus de 1,500
et nous n'avons pas changé d'idée sur ce problème. Le
morcellement, c'est bien certain, contribue au sous-développement et
contribue aussi à la création de problèmes sociaux
particulièrement dans les régions où l'on trouve de
véritables poussières de petites municipalités.
Dans le programme du parti que je représente en cette Chambre, le
regroupement municipal est l'un des thèmes fondamentaux que l'on trouve,
l'un des thèmes sur lesquels nous avons, à de multiples reprises,
débattu au sein du Parti québécois.
En effet, les gens craignaient le regroupement parce qu'ils
étaient attachés à leur petite ville ou à leur
petite municipalité. Il ne faut pas jeter la pierre
systématiquement à ces gens parce que, derrière ce qu'on
appelle quelquefois l'esprit de clocher, se retrouvent des sentiments
d'appartenance qu'on doit respecter, qui ne sont pas méprisables.
Lorsqu'on prend le temps de préparer le terrain pour surmonter ces
"esprits de clocher," qu'il n'est facile de réconcilier lorsqu'on prend
le temps de ménager les étapes psychologiques qui mènent
vers des regroupements naturels, on récolte, après beaucoup
d'efforts, de nouvelles mentalités, des mentalités
élargies au sein desquelles on trouvera encore, à l'occasion, de
l'esprit de clocher. Mais cet esprit, encore une fois, nous ne pouvons
condamner tout ce qu'il peut comporter de positif, tout ce qu'il peut comporter
d'attachement à des traditions locales, à des us et coutumes et,
aussi, d'attachement à la démocratie locale.
D'autres, au sein du Parti québécois, disaient que cet
esprit de clocher avait vraiment trop cours au Québec, que le nombre de
municipalités minuscules était infiniment trop grand et, en fin
de compte, on s'est mis d'accord dans le programme pour favoriser le
regroupement municipal, mais sur une base volontaire. Cela est beaucoup moins
facile que d'imposer des regroupements. Cela demande quelquefois des
années d'efforts, d'études, de commissions, de sondages, de
référendums. C'est vrai, mais c'est la seule vraie façon
de construire de façon durable.
L'Opposition n'a donc pas de position systématiquement
opposée au regroupement des municipalités. Bien au contraire. Je
pourrais énumérer plusieurs cas qui me viennent à
l'esprit, lorsque je songe à tous ces maires et conseillers municipaux
que j'ai rencontrés à travers le Québec depuis quelques
mois. Il y a de nombreux cas qui nécessitent des fusions, des
regroupements.
Cependant, toute la question est de savoir comment procéder,
quelle est la façon de constituer des unités qui seront viables,
non seulement sur le plan administratif mais qui seront viables sur le plan
humain et sur le plan de l'esprit communautaire.
Tout à l'heure l'un des députés mentionnait cette
"fusion des esprits", cette concorde, dirait-on, pour employer le vieux mot
dans son sens étymologique, cette "fusion des coeurs" qui est le seul
gage de la durée d'une unité sociale et politique.
Comment procéder? Jette-t-on les uns sur les autres des gens qui
n'ont pas l'habitude de vivre, qui n'ont pas fait l'apprentissage de la vie en
commun, qui n'ont jamais mis ensemble des services en commun? Est-ce qu'on
jette les uns sur les autres des gens qui se méfient, certaine
municipalité ayant des finances saines, la voisine ayant des finances
déficitaires, comme cela se voit presque partout? Est-ce qu'on jette les
unes sur les autres des municipalités qui se méfient les unes des
autres? Quand on procède de la sorte, M. le Président, on ne
récolte que la tempête.
Je donnais tout à l'heure l'exemple de Gaspé. Je ne veux
pas le reprendre en long et en large. Le député de Gaspé,
d'ailleurs, aurait dû intervenir là-dessus. Voilà une
intervention que j'attendais devant cette Chambre. Voilà un
député silencieux qui pourrait nous parler des problèmes
des fusions imposées...
M. VEILLEUX: Venez au sujet.
M. MORIN: M. le Président, je serais heureux de l'entendre par la
suite. Il pourrait nous dire ce qui arrive quand on impose de Québec un
regroupement, sans aller consulter les principaux intéressés. Il
pourrait vous dire: On va en parler longtemps dans Landerneau. On dira
longtemps dans Gaspé que les gens n'ont jamais accepté la fusion,
que c'est un sujet d'aigreur et
de débats quotidiens. C'est ce qui se passera probablement dans
ces nouveaux regroupements qu'on veut maintenant imposer.
M. le Président, il y a des étapes psychologiques. Il n'y
a pas que des étapes juridiques ou administratives; il y a dans tout
cela des étapes psychologiques à respecter. Tout d'abord, il faut
voir à ne pas constituer des villes trop grandes. Trop grandes sur le
plan du territoire je songe au cas de Gaspé que je mentionnais
à l'instant dont on dit que c'est probablement la seule ville du
Québec où l'on peut se perdre en forêt ou trop
grandes par le nombre d'individus.
Je pense, en ce qui me concerne c'est une opinion personnelle que
je donne qu'une ville qui compte de 100,000 à 125,000 individus a
atteint son maximum sur le plan humain. Au-delà de ce chiffre, M. le
Président, ce ne sont plus des villes à taille humaine devant
lesquelles on se trouve. Ce sont des mégapoles devenues totalement
inhumaines, dans lesquelles les administrés n'ont aucun contact avec les
administrateurs, où il est difficile de rencontrer même les
conseillers municipaux qui sont trop lointains, aussi lointains que les
députés de cette Assemblée. Quand on veut constituer des
unités trops grandes, on tue le sens de la participation à la
chose publique.
M. le Président, il faut donc commencer par les regroupements de
services. Il faut donc faire la démonstration dans les faits que le
regroupement est une bonne chose financièrement et administrativement.
Les citoyens, qui ne sont pas plus bêtes que les députés ou
les ministres, comprennent bien quand une mesure est profitable. Ils l'ont vue
à l'oeuvre, ils l'ont vue dans les faits, ils peuvent juger que cela
leur coûte moins sur le plan des taxes, que cela fonctionne mieux, qu'ils
n'ont pas perdu le contact avec les édiles. Et peu à peu, ils
sont amenés, par ces regroupements sectoriels, à
considérer que peut-être la fusion, le regroupement n'est pas une
si mauvaise solution et qu'on est prêt à procéder à
une autre étape. Cela prend du temps, c'est un fait. Mais on verra dans
quelques mois, voire même dans quelques années, ce que vont
donner ces regroupements imposés où l'on n'a pas voulu justement
respecter le rythme normal des collectivités, ainsi que
l'évolution psychologique normale des individus qui les composent.
Il faut avoir aussi le souci de constituer des unités
géographiques et sociales qui soient cohérentes. Je ne peux pas
juger, dans le cas du Saguenay-Lac-Saint-Jean, jusqu'à quel point ces
unités sont socialement et géographiquement cohérentes. Je
parlerai plus volontiers, dans un instant, de la région de l'Outaouais
où j'ai eu l'honneur de passer à plusieurs reprises et où
l'on m'a entretenu, sans discontinuer, chaque fois que j'y suis allé, de
ces problèmes et du ministre que nous connaissons.
Une autre étape, ce peut être celle des sondages, mais
à condition que les sondages fassent suite à une information
largement diffu- sée, qui mette les citoyens à même de se
rendre compte des avantages et des inconvénients que comporte le plan
qu'on leur propose. Des sondages, c'est utile, mais c'est insuffisant. D'abord,
les sondages se font généralement en catimini et d'individu
à individu. Ce qui est nécessaire, ce qui est essentiel pour
créer cette allégeance élargie dont je parlais tout
à l'heure, c'est un débat public. Les sondages ne peuvent donner
que des indications. Ils sont certes utiles aux administrateurs et aux hommes
politiques qui ont à prendre des décisions, mais les sondages ne
règlent pas tout.
J'écoutais le ministre, ce matin, essayer de nous impressionner
avec des pourcentages quasiment staliniens: 92 p.c. par ici et 80 p.c. par
là. Tant que ce seront des sondages, je ne pense pas que cela doive nous
impressionner outre mesure. Le seul vrai sondage, c'est celui qui se fait en
public, au grand jour, et qui s'appelle le référendum.
M. HARDY: Comme celui de la fin de semaine?
M. MORIN: Je lisais récemment, il y a quelques mois, des propos
du ministre des Affaires municipales. Le ministre disait qu'il ne ferait plus
de regroupements sans l'appui de la population. Permettez-moi de citer, en
particulier, des extraits fort éloquents du journal
Montréal-Matin, en date du 17 septembre 1973. On nous dit ceci:
"Conférencier invité au 31ème congrès de l'Union
des conseils de comté du Québec, les congressistes ont
écouté le ministre des Affaires municipales, M. Victor Goldbloom,
leur révéler qu'il était farouchement opposé aux
fusions forcées". Farouchement opposé, c'est textuel. Ces propos
ont eu l'heur de plaire aux nombreux congressistes présents car
plusieurs voient de nombreux désavantages à la fusion. "De plus,
le ministre a convié les municipalités à revenir devant la
commission parlementaire des affaires municipales pour y discuter
l'évolution possible d'une politique de regroupement municipal."
Et le journaliste continue: "Dans les corridors du congrès,
plusieurs maires ont fait écho aux propos du ministre en disant : Nous
serons à Québec afin d'exprimer nos vues. Il est temps que les
fonctionnaires prennent la place qui leur revient. Ils n'ont pas le droit de
décider pour les municipalités, car ils ne connaissent pas nos
problèmes, de dire l'un des directeurs de l'UCCQ qui désire
garder l'anonymat." On comprend pourquoi, quand on connaît les
procédés de certains hommes politiques. "Le ministre Goldbloom
nous dit-on a invité les municipalités à
dialoguer ensemble et il a insisté sur la participation de toutes les
municipalités d'une région, tant rurales qu'urbaines, à la
planification de leur développement collectif."
Voilà le grand mot lâché, la participation. Mais la
participation, c'est une attitude qui
vient de l'intérieur de l'individu ou du groupe humain auquel on
fait appel. La participation n'est pas une chose qui s'impose.
Je voyais, dans ce même extrait de journal, le ministre faisait de
longs développements sur la "flexibilité" qu'il avait
tenté d'imprimer aux regroupements municipaux. M. le Président,
je me demande ce qu'il est advenu de cette attitude du ministre. Ah!
peut-être le ministre n'est-il pas tout à fait responsable du
projet de loi qu'il nous soumet aujourd'hui! Peut-être le ministre
cède-t-il à des gens qui ont plus de poigne que lui! C'est
possible et c'est l'une des explications probables de ses projets de loi. On ne
m'en voudra pas de le regretter.
Je voyais aussi une lettre du premier ministre au député
de Gatineau, dans laquelle il disait: "Le gouvernement est
déterminé à respecter la volonté des citoyens". M.
le Président, s'il en est ainsi, pourquoi écarter le processus
normal prévu par la loi 276, de 1971, qui prévoit des
enquêtes, des consultations, des référendums, qui
prévoit tout un processus de participation et d'évolution
psychologique et administrative qu'on n'entend pas respecter cette fois?
Nous étions d'accord sur les objectifs de cette loi, je l'ai dit.
Nous avons même voté en faveur. Quelle raison peut-on aujourd'hui
invoquer pour la façon autoritaire dont le ministre ou, devrais-je dire,
les ministres veulent procéder? M. le Président, dans ce projet
de loi, il y a une sorte de mécanisme, un mécanisme que nous
pourrions qualifier de démocratique. Il y a un cheminement psychologique
qui correspond à cette flexibilité que souhaitait tout à
l'heure le ministre.
Puis-je vous demander combien de temps il me reste, M. le
Président?
LE PRESIDENT: II vous reste trois minutes.
M. MORIN: Je devrai donc en venir rapidement à mes conclusions.
J'aurais aimé entrer dans les détails pour ce qui est de
l'Outaouais mais je me contenterai...
M. PARENT (Hull): Dans les détails.
M. MORIN: Oui, dans les détails. II. y a des choses très
"intéressantes" qui se passent dans cette région, comme le
ministre le sait. Les étapes de ce mécanisme démocratique,
de ce cheminement psychologique doivent être respectées si l'on
veut que les regroupements puissent durer, qu'ils puissent entrer dans les
moeurs, qu'ils puissent faire cette concorde dont je parlais au début de
mon exposé.
Bien sûr, le gouvernement doit prendre l'initiative de la chose,
il doit décréter des unités de regroupement, après,
sans doute, une consultation préliminaire des villes
intéressées. Il faut que le gouvernement prenne l'initiative,
mais de là à laisser les populations de côté, de
là à faire des fusions par le truchement de manoeuvres politiques
ou encore en menaçant de ne pas donner certaines subventions qui sont
nécessaires, comme cela s'est vu dans la région de l'Outaouais,
pour tenter de forcer les regroupements, il y a une marge.
La deuxième étape, c'est la publicité,
publicité-information, pour que les populations sachent exactement
à quoi s'en tenir. S'il y a débat, comme cela arrive assez
fréquemment, s'il y a de l'insatisfaction, s'il y a des opposants, la
Commission municipale doit entendre tous les intéressés et faire
ses recommandations. Cela a été fait du côté de Hull
mais, du côté de Saguenay, je ne sache pas que nous ayons franchi
cette étape.
La commission fait ensuite des recommandations. Elle peut recommander la
fusion, s'il y a consentement, mais c'est plutôt rare que cela se
produise de façon aussi simple. Elle peut recommander des études
préliminaires, notamment sur les aspects financiers, qui font toujours
problème. Elle peut prendre l'initiative de provoquer des
négociations, d'organiser le dialogue entre les intéressés
et enfin, cette étape qui me paraît particulièrement
importante, la commission peut recommander une consultation populaire.
Dans le cas qui nous intéresse, cette consultation populaire n'a
eu lieu ni dans l'Outaouais ni dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean.
M. le Président, je conclus en disant qu'une nouvelle cellule
sociale, un nouveau territoire politiquement organisé, cela se
prépare, cela ne s'invente pas dans l'abstrait, cela ne s'improvise pas!
Il faut qu'il y ait une volonté de vivre ensemble. C'est un principe
d'application générale, on peut l'appliquer aussi bien à
l'ensemble du Québec qu'aux regroupements qu'on tente d'effectuer.
Aller à l'encontre de ce principe, de cette psychologie
élémentaire, c'est se promettre des ennuis sans fin. Je trouve
que, dans ce domaine, les métaphores matrimoniales sont peu utiles mais
elles peuvent quand même illustrer les difficultés vers lesquelles
on se dirige avec ce projet de loi. Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Johnson.
M. Maurice Bellemare
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je voudrais
féliciter l'honorable ministre, député de Hull,
particulièrement, pour avoir regroupé certaines
municipalités dans la Gatineau, comme les municipalités de
Buckingham, Masson, Anger, Buckingham-Ouest, Buckingham-Sud-Ouest,
Ange-Gardien, Notre-Dame-de-la-Salette, Canton de Buckingham, qui comptent
à peu près 12,000 de population, et d'en avoir fait un centre.
Quand on voit les difficultés qu'il y a dans cette partie de la province
et particulièrement quand je regarde l'évaluation qui est faite,
cette partie de Buckingham,
Masson et les autres villes représente un actif, au point de vue
évaluation, de $45,863,685.
Je pense que c'était souhaitable que cette fusion se fasse, comme
d'ailleurs la fusion de Perkins, Portland et Wakefield, qui
représentaient un petit groupe un peu séparé qui, à
mon sens, certainement bénéficieront de la fusion. Cela
représente pour eux une évaluation de $3,948,510. Là je
crois qu'on a véritablement fait quelque chose de recommandable au point
de vue de la fusion.
Comme d'ailleurs aussi, si je regarde mes chiffres, on a fait pour
Gatineau, Pointe-Gatineau, Touraine, Templeton-Sud, Ouest et partie Est, qui
regroupent une unité de 53,000 citoyens pour une évaluation
totale de $176,148,045.
Le ministre ne sera peut-être pas d'accord avec le
procédé que l'on apporte aujourd'hui qui, à mon sens,
n'est pas démocratique. Je ne pense pas qu'à la toute fin d'une
session, qui peut durer encore quelques jours, on pouvait apporter aux
législateurs une convention, un ordre de grandeur d'un bill qui nous
impose un travail gigantesque et qui nous laisse sur notre faim.
Je comprends qu'il y a des problèmes de négociations dans
Hull, Hull-Ouest, avec particulièrement Hull et Lucerne, je comprends
que c'est une autre entité où il y a des difficultés
énormes pour faire la consolidation et la fusion de cette partie.
Mais ce que je reproche particulièrement au ministre de la
Fonction publique, c'est de nous apporter un projet de loi à la toute
dernière minute. Que voulez-vous que les législateurs puissent
faire avec des briques qui ont à peu près 100 pages? Etudier
article par article? J'entendais, cet après-midi, le ministre des
Affaires municipales dire: Nous allons former le conseil temporaire, provisoire
et, après cela, nous convoquerons les parties. Mais c'est de l'illogisme
parlementaire le plus absolu.
Si on prétend qu'il y aura des difficultés et qu'on les
prévoie avant l'adoption de la loi. On dit qu'en janvier ou sera
prêt, après la formation du comité provisoire, à
faire siéger la commission parlementaire des affaires municipales pour
entendre ceux qui ne sont pas satisfaits. M. le Président, quelle
logique pour un ministre qui me semble posséder une certaine assurance
au point de vue parlementaire et qui dit: Bien, si cela ne fonctionne pas,
à ce moment-là, on fera les ajustements nécessaires. M. le
Président, je trouve, premièrement, que la loi est venue trop
tard, à la dernière minute, comme une boîte à
surprise; on dirait qu'on veut prendre la Chambre par l'épuisement et
qu'on veut lui faire accepter quelque chose qui, à mon sens,
reflète énormément de responsabilités
publiques.
Le ministre sait, par exemple, que le problème qui se pose dans
le Lac-Saint-Jean, dans Chicoutimi, Kénogami, Jonquière, n'est
pas le même que celui qu'à à affronter l'honorable ministre
de la Fonction publique. Il sait pertinemment qu'en mettant les deux dans le
même bill nous sommes obligés, M. le Président, de voter
pour ou contre; mais ce ne sont pas les mêmes mentalités. La
mentalité de Chicoutimi et de Jonquière là encore,
j'y reviendrai est tout à fait différente de celle qui
existe dans le comté de Hull, de Gatineau et de Papineau. Pour ce qui
est fait dans Gatineau et Papineau, je suis d'accord, M. le Président,
c'était nécessaire. On est en face d'un géant qui
s'appelle Ottawa, qui gruge tous les jours dans le domaine provincial, par
toutes sortes d'émissions, soit en terrains, soit en achats de
propriétés. Par exemple, dans Lucerne, on est en face d'un
problème où tous les terrains ont été
achetés par des gens de l'Ontario. On nous gruge à la
journée. Je dis que le ministre a bien fait; cela, c'était
nécessaire. Même si c'était à la dernière
minute, il faut lui rendre le témoignage qu'il a fait quelque chose de
bien. Mais pourquoi à la dernière minute? Pourquoi ajouter cette
fusion à celle de Chicoutimi et de Jonquière, quand c'est toute
la différence au monde?
M. le Président, si on a décidé, de 32
municipalités, d'en faire huit, soit quatre municipalités rurales
et quatre municipalités urbaines, je trouve que c'est logique, surtout
parce qu'on a de bonnes raisons de le faire. En effet, il y a des fusions, des
ralliements, des rassemblements qui sont devenus nécessaires par leur
importance afin de capitaliser toutes les énergies dans un groupe pour
lutter davantage contre un envahisseur qui est à deux pas de nous. Je
pense que celle-là est juste. Mais l'autre, par exemple, celle de
Chicoutimi, M. le Président, celle de Jonquière, quand on voit
les statistiques... L'honorable ministre disait: Le vieux là, il a de
vieilles statistiques. Bien, j'encourage le ministre à aller voir
à la bibliothèque; c'est la dernière statistique qu'il y a
à la bibliothèque. J'espère que le ministre ira voir;
c'est la dernière statistique qu'on a sur les affaires municipales.
J'espère que le ministre, avant de se vanter qu'il en a d'autres, m'en
produira au moins.
M. le Président, que voit-on dans la statistique? On voit que
Jonquière représente $71 millions d'évaluation, que
Kénogami représente $36 millions, qu'Arvida représente $87
millions, que Saint-Dominique représente $6 millions, ce qui fait un
total de $201 millions. Mettons $210 millions, si la statistique de 1971 a
changé. Faisons maintenant la comparaison avec les populations de ce
groupe. Qu'y trouvons-nous? Eh bien, M. le Président, dans
Jonquière, on trouve 28,000 personnes, mettons-en 30,000...
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, je m'excuse
auprès du député de Johnson, mais nous n'avons pas
quorum.
M. BELLEMARE (Johnson): Ah! C'était donc bon, mon affaire!
C'était beau, hein?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Kennedy): Qu'on appelle les
députés. Le député de Johnson.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, établissons donc
une comparaison, si vous le voulez bien, entre l'évaluation et la
population pour en venir, à la fin de mon discours, à vous
prouver qu'il y a un manque de préparation. C'est un non-sens d'arriver
à la dernière minute d'une session avec une pièce
pareille. Jonquière: $71 millions d'évaluation, population
28,000. Remarquez bien les chiffres, M. le Président, ils sont
importants. Kénogami; $36 millions, population, 10,955. Arvida,
là par exemple c'est intéressant. Arvida: $87 millions
d'évaluation, population 18,433,000...
UNE VOIX: Dix-huit millions?
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je vous en demande
pardon.
M. LACROIX: Ce sont des familles nombreuses.
M. BELLEMARE (Johnson): 18,433, et Saint-Dominique: $6 millions
d'évaluation avec 4,577. Mais voyez-vous Jonquière? 28,000 de
population avec une évaluation moindre et Arvida 18,000 de population
avec $87 millions.
M. VEILLEUX: M. le Président...
M. HARVEY (Jonquière): J'invoque le règlement. J'invoque
le règlement. M. le Président, le député de
Johnson, je lui suggère de changer le vieux livre qu'il a devant lui
parce qu'en citant l'évaluation à $36 millions pour
Jonquière il ne se trompe que de $19 millions. C'est comme son vieux
livre de règlement, jetez ça puis demandez le nouveau.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, le ministre aurait
dû être en Chambre tout à l'heure...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Kennedy): A l'ordre! A l'ordre!
M. BELLEMARE (Johnson): ... car je lui aurais dit que c'est le dernier
rapport de son gouvernement qui est à la bibliothèque. Mettez-en
un autre, rapport. Tâchez d'avoir au moins la
générosité d'en produire un autre. C'est sur...
M. HARVEY (Jonquière): Quelle date?
M. BELLEMARE (Johnson): ... ça qu'on se base pour faire nos
chiffres.
M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de
Johnson...
M. BELLEMARE (Johnson): Vous avez fait votre discours, assoyez-vous. M.
le Président, je pense que...
M. HARVEY (Jonquière): Est-ce que le député de
Johnson...
LE PRESIDENT: A l'ordre, un instant! A l'ordre! Un instant! A l'ordre! A
l'ordre, messieurs! A l'ordre! Si le ministre du Revenu le désire
il a déjà épuisé son droit de parole en
vertu de l'article 96, s'il juge à propos de rétablir certains
faits, s'il a été mal interprété, mais sans
élément nouveau, il a le droit de le faire, soit avec la
permission du député ou à la fin de l'intervention du
député de Johnson.
M. BELLEMARE (Johnson): Soyez assuré qu'il n'en aura pas de
permission.
M. HARVEY (Jonquière): Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT: Une question de règlement?
M. HARVEY (Jonquière): Merci, M. le Président, je
m'exécute. Est-ce que le député de Johnson me permettrait
de rafraîchir son vieux livre?
M. BELLEMARE (Johnson): Dites à votre gouvernement qu'il en
produise un autre puis qu'il aille à la bibliothèque le
déposer. C'est clair, ça.
M. HARVEY (Jonquière): D'accord.
M. BELLEMARE (Johnson): Votre gouvernement est en retard. Puis quand je
l'aurai, je pourrai vous donner les statistiques officielles. Mais M. le
Président, c'est assez, il me fait perdre mon temps.
M. HARVEY (Jonquière): D'accord, ne vous fâchez pas, le
père.
M. BELLEMARE (Johnson): II l'a fait assez perdre aujourd'hui à la
province, le temps, puis il coûte assez cher, lui, comme ministre.
M. HARVEY (Jonquière): Ne vous fâchez pas, le
père.
M. BELLEMARE (Johnson): J'espère que le petit dictateur de
Jonquière va se taire.
M. HARVEY (Jonquière): Ne vous fâchez pas, le
père.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, il a beau me faire
insulter par les maires à la sortie... Quand je suis sorti à six
heures, les maires m'ont assailli, ils m'ont abimé de bêtises.
C'était l'organisation du petit dictateur de Jonquière. M. le
Président, j'ai un droit de
parole dans cette Chambre et je n'entends pas qu'on vienne m'insulter
quand je sortirai...
M. HARVEY (Jonquière): Question de privilège, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Question de règlement?
M. HARVEY (Jonquière): Question de privilège.
LE PRESIDENT: Question de privilège.
M. HARVEY (Jonquière): Le député de Johnson vient
dans ses propos de faire allusion à un fait auquel j'étais
présent et qui s'est produit à la suspension de 6 heures. A ma
connaissance, aucun des maires qui ont rencontré le député
de Johnson ne l'a insulté, et ma preuve est de nouveau dans la galerie.
C'est faux.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je vais continuer mon
intervention. Je dis que j'ai le droit de parole dans cette Chambre et si les
maires veulent s'opposer à mon discours, qu'ils viennent me rencontrer.
Ce n'est pas la place, dans un corridor, pour discuter d'une question aussi
importante, surtout quand on a comme instigateur ce petit dictateur de
Jonquière. C'est un dictateur, un patroneux, le chef des patroneux.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. BELLEMARE (Johnson): ... et c'est lui qui a tout inspiré cette
loi.
LE PRESIDENT: Question de règlement.
M. LEVESQUE: Je crois que celui qui est arrivé ici en Chambre,
récemment, et qui nous avait donné ou essayé de nous
donner des leçons de parlementarisme, lui qui voulait assainir le climat
en cette Chambre et donner un peu de décorum à ce Parlement,
devrait modérer ses transports, sinon ses paroles...
M. BELLEMARE (Johnson): Ce n'est pas un point d'ordre.
M. LEVESQUE: ... et je dis que les paroles prononcées par le
député de Johnson, comme il le sait, sont antiparlementaires et
ont dû certainement dépasser sa pensée.
M. BELLEMARE (Johnson): Le tracas a commencé, vous avez
remarqué, quand cet honorable ministre du Revenu est entré pour
venir fourrer son nez où il n'avait pas d'affaire, comme d'habitude.
C'est là que c'est arrivé. Qu'il se mêle donc de son
affaire ici dans la Chambre et chez lui.
M. LEVESQUE: C'est parce qu'il se mêle de ses affaires.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je continue.
LE PRESIDENT: Revenez à la motion.
M. BELLEMARE (Johnson): Ce n'est pas la motion. C'est le bill en
deuxième lecture.
LE PRESIDENT: Nous sommes sur une motion de deuxième lecture.
M. BELLEMARE (Johnson): Merci, M. le Président, mais c'est la
deuxième lecture, c'est sûr. Quand je vois un homme qui a
été l'instigateur... J'ai félicité le ministre de
la Fonction publique. C'est un homme sage. C'est un homme qui a
été prudent. Il a travaillé pendant des mois et des mois
et des années à tâcher de mettre de l'ordre; et avec
beaucoup de conviction, il a persuadé presque la totalité des
gens que c'était devenu nécessaire, à cause de
l'empiètement fédéral. Je l'ai félicité
parce que je dis que cela doit être reconnu dans le bill.
Mais pas l'autre partie. Jamais dans 100 ans. Il a fait démarche
après démarche, pas pour faire de la conciliation, non, M. le
Président, pour imposer son diktat. Et il a réussi à nous
apporter un bill à force d'insinuations et de persuasion auprès
du cabinet et auprès du ministre. Mais je vous ai lu un
télégramme cet après-midi d'un maire et des conseillers
qui protestent. On a demandé à l'honorable ministre: Pourquoi
faire siéger la commission parlementaire après que le
comité provisoire sera formé pour entendre, comme il l'a dit, les
parties ou ceux qui ne seront pas satisfaits? Pourquoi ne pas les faire
entendre immédiatement? Et là on verrait si,
véritablement, il y a eu, de la part de l'honorable ministre de la
Fonction publique ou du ministre du Revenu, quelques influences qui sont
intervenues. On pourrait se faire une idée, mais à la toute
dernière minute, nous apporter un bill de la sorte, un bill aussi
contentieux, surtout quand il s'agit...
Je répète ce qu'a dit le chef de l'Opposition, et il a
raison. Ce ne sont pas des populations qui peuvent facilement se mixer
ensemble. Je suis sûr que le chef de l'Opposition qui, comme moi, a
visité les lieux depuis quelque temps, a entendu parler dans chacune de
nos rencontres, de ce grave problème. On nous a dit presque partout: II
y a du malaise. On ne peut faire des mariages forcés, des mariages de
raison. C'est impossible. Cela ne pourra pas durer, surtout dans ce coin
pittoresque si charmant du Lac-Saint-Jean, de Chicoutimi et du Saguenay.
Non, M. le Président. On établit, véritablement,
une dictature parce qu'on aura demain, un budget municipal, en 1975, de $201
millions
par la fusion de Jonquière-Kénogami-Arvida et
Saint-Dominique et, en 1976, on aura une évaluation de $380 millions
pour faire un total, en 1977, d'au-delà d'un demi-milliard. Et vous
pensez qu'on peut laisser passer cela sans rien dire, sans élever la
voix, surtout quand on voit la pression, le "bulldosage" qu'on nous fait?
Voyons donc, M. le Président.
M. le Président, vous seriez convaincu comme nous de nos
propos.
LE PRESIDENT: Ne m'invitez pas à participer au débat. Je
vous inviterais plutôt à me bâillonner.
M. BELLEMARE (Johnson): Non, M. le Président, vous feriez
peut-être un excellent ministre de la Justice.
On vous a vu rendre, ici en Chambre, avec beaucoup de justice et
d'à-propos, de bonnes décisions. Je sais que je ne vous insulte
pas quand je dis que vous seriez peut-être un bon candidat comme ministre
de la Justice. Cela vous plairait probablement. En tout cas, M. le
Président...
J'en ai connu, M. le Président, d'autres comme vous qui sont
allés du fauteuil vers des ministères très
réconfortants.
LE PRESIDENT: Cela n'a pas été leur meilleur sort.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, est-ce que je vous
insulte?
LE PRESIDENT: Quasiment. Je suis à la veille d'invoquer mon
privilège de député.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, mes vingt minutes sont
écoulées. Je termine en vous répétant mon
approbation, d'abord, pour le travail merveilleux qu'a fait le ministre de la
Fonction publique, avec beaucoup de discrétion, d'à-propos, sans
y mêler aucune partisanerie. Il a fait oeuvre de bien, je tiens à
le dire d'une manière particulière. On aurait pu le
séparer de l'autre projet de loi, parce que l'autre ministre qui s'en
fait aujourd'hui le défenseur va, demain, avoir des regrets amers.
Particulièrement, je me souviens d'un jour où il avait
décidé de faire bâtir un édifice à bureaux,
qui représentait le gouvernement provincial dans son comté. C'est
grâce à l'intervention du premier ministre du temps que le bureau
est allé directement à Chicoutimi. Cela l'a choqué, parce
qu'il perdait encore un patronage sur lequel il ne pouvait plus contrôler
rien. Cela, il le reprend par l'arrière-plan. Il s'en va chercher la
ville de Chicoutimi... Bien, allez-vous-en à votre bureau. Cela, M. le
Président, c'est de l'influence indue.
M. MAILLOUX: C'est à Jonquière qu'il est.
M. LACROIX: Un gros gars comme vous avoir peur d'un petit gars, tout
petit.
M. BELLEMARE (Johnson): Non, je n'ai pas peur.
M. LACROIX: II est tout frêle.
M. BELLEMARE (Johnson): Je pense que le débat que nous faisons
est très serein, même si le ton de ma voix est un peu fort.
M. LACROIX: Je pense qu'on a un problème de ce côté,
nous autres.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je sais que ceux qui
m'ont connu pendant des années, si je parlais d'une voix très
faible, diraient: Ce n'est pas Bellemare.
M. LACROIX: On a un problème de ce côté, tous les
deux.
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, on en a peut-être d'autres aussi.
M. le Président, je termine. Je vous remercie de la latitude que
vous m'avez donnée. Je ne peux pas vous féliciter, M. le
Président, parce que je ne peux pas féliciter votre gouvernement
d'apporter un projet de loi aussi contentieux à la dernière
minute et, surtout, à la vapeur.
M. le Président, c'est un projet de loi dans lequel il y a
énormément de bon sens je l'ai dit et
répété tout à l'heure parce que le ministre
de la Fonction publique a démontré que c'était
nécessaire contre un envahisseur, contre un centraliseur, contre des
gens qui achètent des terrains et qui vont donner, demain, une force
particulière à ces municipalités. Je dis que, dans l'autre
cas, M. le Président, celui de ce qu'on appellera demain la grande ville
de Saguenay, j'y vois de l'arbitraire, du patronage, sicut erat in
principio.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Est-ce que l'Assemblée est
prête à se prononcer sur cette motion de deuxième
lecture?
DES VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: Un instant.
M. CHARRON: M. le Président...
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. le Président, avant que j'intervienne, est-ce que
je peux proposer au leader du gouvernement ou, en son absence, au ministre des
Affaires municipales, parrain de la loi, d'ajourner le débat?
LE PRESIDENT: Un instant, messieurs. Il faudrait attendre le leader, je
crois. Nous allons suspendre les travaux pour deux ou trois minutes.
Est-ce qu'on pourrait avoir le leader, s'il vous plaît?
Le député de Saint-Jacques, vous pouvez faire cette
motion.
M. LEVESQUE: Oui, si vous voulez en discuter, on vote. Vote.
M. LESSARD: Voici, M. le Président. Si le leader parlementaire
acceptait, on pourrait le proposer c'est-à-dire qu'on le propose.
Mais, si ce n'est pas le cas, on va prendre les dix minutes qui sont permises
en vertu de cette motion.
M. LEVESQUE: Faites-le.
LE PRESIDENT: Bon. L'honorable député de Saint-Jacques a
droit à dix minutes sur cette motion d'ajournement.
M. HARDY: Dites pourquoi vous allez vous coucher.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. CHARRON: M. le Président, si je fais cette motion
d'ajournement, cela ne me fait pas perdre mon droit d'intervenir en seconde
lecture demain, si la motion devait être adoptée, ou après,
ce soir, si elle devait être rejetée, mon intervention de
deuxième lecture sur le projet de loi no 98.
M. LACROIX: Si vous voulez parler, parlez tout de suite, ne perdez pas
de temps pour rien.
M. LEVESQUE: M. le Président, celui qui prend la parole...
LE PRESIDENT: Vous perdez votre droit de parole.
M. LEVESQUE: ... perd son droit de parole s'il l'utilise pour
ça.
LE PRESIDENT: Celui qui fait la motion doit, à cette occasion,
exercer son droit de parole.
M. CHARRON: D'accord, M. le Président. Je n'ai aucune objection
à faire mon intervention ce soir. C'était simplement pour savoir
si, de l'autre côté, on acceptait de disposer
immédiatement.
LE PRESIDENT: II me semble qu'il n'y a pas de consentement.
M. CHARRON: Bien, M. le Président.
LE PRESIDENT: Vous exercez, actuellement, votre droit de parole sur la
motion de deuxième lecture.
M. HARDY: Vous avez trois minutes de passées.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: Bien, M. le Président. A son dernier congrès,
le Parti québécois apportait à son programme une
modification qui a été reconnue comme essentielle et qui
était basée sur un principe, celui par lequel nous
répétions notre engagement de ne pas procéder à un
changement majeur et profond de la société
québécoise sans nous assurer, à chacune des étapes
de ce changement, du consentement, par référendum, de la
majorité des Québécois.
Le même congrès amendait le programme du Parti
québécois au chapitre des affaires municipales et reprenait dans
ce domaine la même logique, le même engagement et le même
principe que nous nous étions nous-mêmes imposé à la
première ligne de notre programme lorsqu'il s'agissait de la vie du
Québec en général.
Et nous disons qu'aucune municipalité, aucune ville, aucune
agglomération urbaine ne devrait subir de changements majeurs, profonds,
qui vont même, à l'occasion, jusqu'à la fusion avec
d'autres municipalités, sans que les citoyens de cette
municipalité n'aient, par le même principe, par un
référendum clair, net et précis sur la question,
acquiescé à la proposition soit des édiles municipaux
qu'ils ont élus, soit du gouvernement du Québec qu'ils ont
également élu.
Ce principe, que nous retrouvons donc non seulement dans chacune des
étapes ou dans chacun des chapitres du programme du Parti
québécois, cet engagement et cette volonté nette de ne
jamais procéder à des changements qui ont des conséquences
quotidiennes sur la vie des citoyens sans que ceux-ci n'aient
préalablement été informés, obligatoirement
été consultés sans qu'ils n'aient eux-mêmes
librement décidé du sort de ce changement, c'est ce
principe-là que nous défendons ce soir lorsque nous nous opposons
au projet de loi no 98, tel qu'il a été
présenté.
Mon collègue de Lafontaine, le député de Chicoutimi
et le chef de l'Opposition ont déjà fait valoir ce que je
m'apprête à vous répéter, M. le Président, en
une phrase: L'opposition que nous apportons à ce projet de loi n'est pas
une opposition à la fusion des municipalités concernées de
l'Outaouais ou à la fusion des municipalités concernées du
Haut-Saguenay. Au contraire. Un député provenant de cette
région, véritable dynamo de cette région, qui a toujours
représenté les intérêts de cette région
à l'Assemblée nationale, le député de Chicoutimi, a
répété qu'il y a dans le programme du Parti
québécois, celui de 1973, celui à partir duquel le
député de Chicoutimi s'est fait élire, cet
engagement...
M. BACON: C'est épouvantable!
M. CHARRON: ... de procéder le plus rapidement possible
nous sommes aussi d'accord à la création d'une grande
ville dans cette région du Saguenay que représente le
député de Chicoutimi. Mais le même principe de ne jamais
procéder à ce changement sans avoir consulté la population
était aussi au programme à partir duquel s'est fait élire
le député de Chicoutimi et que nous véhiculons ce soir en
cette Chambre.
M. le Président, cette volonté qu'a montrée le
député de Chicoutimi et qu'ont exprimée mes
collègues de voir effectivement le développement
économique du Québec, cette conviction que nous avons que le
développement et la vitalité de chacune des régions ne
peuvent plus reposer sur des structures qui ont été
édifiées à une autre époque, au moment où le
Québec vivait avec une autre mentalité, avait un autre rythme de
développement, n'avait pas les générations instruites que
nous avons, n'avait pas le rythme de croisière qu'il s'est
lui-même donné au fil des années; cette conviction que nous
avons qu'il faut procéder à des aménagements de ces
structures qui ont, jusqu'ici, présidé au développement
économique des régions du Québec, nous la partageons tous
dans cette Chambre, j'en suis convaincu. Quant à la
nécessité de modifier des structures, nous en sommes, nous, M. le
Président, à proposer la modification de la structure
québécoise elle-même parce qu'elle est elle-même, par
son archaïsme, un facteur opposé au développement du
Québec dans son entier. Là n'est pas la question, M. le
Président. Mais devons-nous procéder de cette façon sans
que les citoyens impliqués n'aient l'occasion, eux, de juger des projets
que nous leur préparons?
Le député de Chicoutimi a soutenu un projet, une
hypothèse que, je me propose de vous le suggérer avec
l'ajournement, M. le Président, à la fin de mon intervention, les
ministériels auraient peut-être avantage à
considérer au cours de la nuit qui vient. Pourquoi, par exemple, dans
cette région du Haut-Saguenay, procéderait-on à un double
ballottement de la population? Pourquoi le projet de loi no 98? Parce qu'on se
refuse à aller consulter la population, par un oui ou par un non clair,
on s'est trouvé à trafiquer des structures qui vont se superposer
dans un rythme déjà prévu au projet de loi et qui
transposera la population dans deux structures que ni une ni l'autre elle
n'aura eu l'occasion de choisir et d'accepter d'habiter.
Nous accepterions peut-être probablement plus, comme l'a
suggéré le député de cette région, que le
projet de loi comporte plutôt la création de cette grande ville
que nous souhaitons le plus rapidement possible, parce que nous
considérons également qu'il en va de l'intérêt de
cette région, mais seulement uniquement lorsque les citoyens de cette
région auront accepté cette proposition sans aucune
majorité artificielle d'une Assemblée nationale
éloignée des préoccupations de ces citoyens, de ceux qui
ont fait vivre ces villes, de ceux qui ont élu des gens pour les
représenter dans ces villes, de ceux qui sont les contribuables de ces
villes. Ces gens devront avoir eu l'occasion de parler dans ce projet de
loi.
Nous accepterions probablement plus que demain matin le parti
ministériel nous revienne avec un acquiescement, pour supprimer ces
étapes intermédiaires superfétatoires qui n'ont pour
unique objet que de déguiser la volonté nette du gouvernement de
procéder sans consultation populaire sur ce projet de loi.
Dites-nous quand vous la voulez cette fusion, comment vous voulez
qu'elle se fasse, quelles villes, quelles municipalités, quels
territoires, quel nouveau partage. Nous sommes prêts à discuter de
cette question à condition que vous vous engagiez à ne le faire
que lorsque le débat aura sorti de cette Chambre, aura atteint les
municipalités concernées de ces régions et qu'elles nous
répondront, par un vote majoritaire, oui.
Le jour où cette Assemblée, où le ministre des
Affaires municipales et les deux ministres régionaux pourront revenir
dans cette Chambre avec une majorité affirmative de la population
concernée, les députés du Parti québécois
procéderont rapidement à l'adoption et à l'étude
d'un projet de loi qui répondra aux voeux de la population.
Mais nous ne l'avons pas ce voeu de la population. Et, quoi que je doive
de respect à chacun des membres de cette Chambre, ce n'est pas sur la
seule affirmation d'un ministre élu dans un seul comté d'une
région ou qui s'est imposé par sa seule force dans une
région que nous pouvons, ce soir, procéder, sur sa simple parole,
sur son simple appel, à catapulter un grand nombre de contribuables dans
des structures provisoires. Ils devront d'abord s'habituer à y vivre et,
lorsqu'ils auront pris le tour d'y vivre, immédiatement on leur
catapultera une nouvelle structure qu'encore une fois ils n'auront pas
choisie.
Cette question est fondamentale, parce que pour nous il est essentiel de
ne jamais procéder à un changement majeur en profondeur,
où que ce soit dans la société québécoise,
sans consulter ceux qui ont à le vivre, ceux qui ont à en assurer
les fruits, ceux qui ont a en assurer les frais également en même
temps. Car il y a des contribuables de certaines municipalités, des
villes en projet de fusion qui auront effectivement à payer les frais de
cette fusion, sans qu'ils n'aient eu l'occasion de juger, après avoir
été informés, éclairés, consultés,
après que chacun des tenants de chacune des thèses n'ait eu
l'occasion de dire: II faut voter pour la fusion car je crois que c'est
l'essentiel pour le développement de la région et de nos
municipalités, et sans qu'un autre n'ait eu l'occasion d'aller donner la
version contraire.
C'est ce principe fondamental que nos adversaires nous narguaient de
dénier quand notre programme politique ne comportait pas, pour l'avenir
du Québec, cet engagement à procéder par un oui ou un non
clair à tout changement majeur de la société.
Puisqu'ils nous ont nargués sur ce sujet, l'ont-ils, eux, M. le
Président, le respect de ce principe? Pour aujourd'hui inclure dans un
projet de loi la création de deux grandes agglomérations
urbaines, de deux grandes villes dans chacune des deux régions
concernées, je dis, M. le Président: L'ont-ils cette conviction
du principe, de la nécessité de retourner à la population,
de ne jamais imposer à une population ce qu'elle n'est pas prête
à recevoir, comme il y en a de tragiques exemples déjà
dans le Québec?
Motion d'ajournement
M. CHARRON: M. le Président, parce que ce principe est
fondamental et parce que je crois aussi que l'heure nous permet de dire qu'il
est encore possible de le sauver dans le projet de loi no 98 avant que nous
n'en adoptions la deuxième lecture, je crois qu'il serait essentiel que
nous ajournions immédiatement ce débat; que les ministres
régionaux en cause n'hésitent pas à poursuivre avec les
élus de la population une dernière consultation et surtout
reprennent une dernière fois en considération ce principe de ne
jamais procéder à un changement majeur sans s'assurer que les
gens qui auront à le vivre aient consenti à le faire. C'est donc
pourquoi, M. le Président, je vous propose l'ajournement du
débat.
DES VOIX: Vote.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, parlant sur la motion
d'ajournement, puisque l'article 77 me le permet, je pense que l'honorable
député a parfaitement raison dans les arguments qu'il vient
d'apporter et qui sont certainement d'un sérieux remarquable. Nous
sommes rendus à minuit moins dix et je pense que nous sommes en Chambre
depuis dix heures, ce matin. Je crois que véritablement la nuit porte
conseil et que nous devrions, M. le Président, demander l'ajournement
pour permettre peut-être à l'honorable ministre des Affaires
municipales d'avoir une dernière rencontre avec les maires et puis
peut-être de s'entendre. Peut-être que, cette nuit, il y aurait
lieu de faire des négociations qui seraient opportunes pour la
région, particulièrement celle qui est la plus affectée
d'avoir un ministre comme le ministre du Revenu. En discutant avec les maires
qui sont ici même à Québec, il y aurait
peut-être...
M. LEVESQUE: Est-ce qu'on parle sur la motion d'ajournement?
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, l'article 77.
M. LEVESQUE: D'accord.
M. BELLEMARE (Johnson): Merci, frère directeur. Tous les chefs de
parti mais, M. le Président, j'en suis un ont le droit de
parler dix minutes. D'accord? Bon, merci, monsieur.
M. LEVESQUE: Je vous remercie de m'avoir rappelé que vous
étiez chef de parti.
M. BELLEMARE (Johnson): Oui, M. le Président, vous allez
peut-être connaître d'autres problèmes, mais pas celui que
vous pensez. Alors, je continue, M. le Président, j'ai été
dérangé.
M. LEVESQUE: Si vous êtes dérangé, ne vous plaignez
pas à moi.
M. BELLEMARE (Johnson): Pardon?
M. LEVESQUE: Si vous êtes dérangé, ne vous plaignez
pas à moi.
M. BELLEMARE (Johnson): Je ne le comprends pas, M. le
Président.
M. LEVESQUE: Si vous êtes dérangé, ne vous plaignez
pas à moi.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BELLEMARE (Johnson): Je n'ai rien compris.
M. LEVESQUE: C'est ce que j'avais compris.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, si le ministre veut
faire de l'esprit, on pourra peut-être lui en revendre. Ce n'est pas le
temps, M. le Président. Il n'a pas passé une heure en Chambre
aujourd'hui, il a été continuellement en dehors; il a
peut-être fait d'autres choses, mais nous avons été ici et
on a siégé. C'est peut-être la différence de climat,
M. le Président.
LE PRESIDENT: Motion d'ajournement.
M. BELLEMARE (Johnson): Je pense que la motion d'ajournement qu'a faite
le député est certainement raisonnable. Peut-être que,
durant la nuit, le ministre ou le ministre du Revenu pourrait faire des
rencontres qui soient très fructueuses pour que, demain, nous puissions
reprendre la discussion dans un climat beaucoup meilleur que celui que nous
avons présentement. C'est pourquoi je suis d'accord sur la motion
d'ajournement de ce soir.
M. LEVESQUE: Je tiendrais simplement, M. le Président, à
faire une rectification.
LE PRESIDENT: Est-ce que vous prenez la parole sur la motion
d'ajournement?
M. LEVESQUE: Non, simplement pour rectifier ce que vient de dire le
député de Johnson. Je pense que, même si j'ai
été occupé en dehors de la Chambre, j'ai passé plus
d'heures que le député de Johnson en Chambre aujourd'hui.
M. BELLEMARE (Johnson): Aujourd'hui? Bien, écoutez, je n'ai pas
laissé mon siège une seule fois, depuis dix heures ce matin.
M. MORIN: Cela n'a pas d'importance.
M. BELLEMARE (Johnson): Cela n'a pas d'importance, mais je tiens
à le rectifier pour le journal des Débats.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Le député de Saguenay.
Vous parlez au nom de l'Opposition officielle sur cette motion.
M. LESSARD: M. le Président, à moins que le leader
parlementaire ne veuille acccepter immédiatement l'ajournement,
j'utiliserai les dix minutes qui me restent.
M. LEVESQUE: Je n'ai pas d'objection à accepter l'ajournement,
mais j'aimerais entendre au moins le début de l'intervention du
député.
M. LESSARD: M. le Président, si le député de
Saint-Jacques a proposé cette motion, c'est que nous avons à
discuter d'un projet de loi qui est fort important. Nous savons, d'autre part,
qu'au cours de cette nuit il serait certainement possible au ministre des
Affaires municipales, comme aux deux ministres régionaux de consulter la
population, tel qu'on le lui a demandé. Il serait certainement possible,
après cette consultation, de nous revenir, demain probablement, avec un
projet de loi qui représente mieux les intérêts de la
population. Soyez assuré que nous, du Parti québécois,
nous serions heureux de l'appuyer, si on acceptait le principe du
référendum.
Alors, M. le Président...
LE PRESIDENT: Est-ce que je pourrais vous interrompre avec votre
permission? On pourrait considérer qu'il est minuit et la motion devient
caduque. C'est vous qui aurez le droit de parole, il vous restera trois minutes
lorsque cette motion sera appelée de nouveau.
M. LESSARD: Elle devient caduque, elle ne peut pas...
M. LEVESQUE: On n'a pas dit que le député devenait caduc,
on a dit que la motion devenait caduque.
M. LESSARD: C'est ça, très bien.
LE PRESIDENT: On considère qu'il est minuit.
M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce que le député
de Johnson avait quelque chose à ajouter?
M. BELLEMARE (Johnson): En vertu de l'article 34, quel sera l'ordre des
travaux de demain, parce qu'en vertu de l'article 34, le leader peut, s'il le
veut...
LE PRESIDENT:... après la période des questions. Ecoutez.
Vous pouvez le demander. Il y a une coutume d'établie, avant de
procéder à l'ajournement.
M. BELLEMARE (Johnson): Je pense que c'est pas mal traditionnel que le
leader nous donne un peu l'ordre des travaux de demain.
M. LEVESQUE: Nous poursuivrons l'étude du projet de loi
présentement à l'étude et... Pardon?
M. BELLEMARE (Johnson): II y a des lois de troisième lecture.
M. LEVESQUE: Les troisièmes lectures, c'est évident.
M. BELLEMARE (Johnson): C'est évident? M. LEVESQUE: Oui. Cela va
de soi.
M. BELLEMARE (Johnson): 40, 41, 42.
M. LEVESQUE: 90, 40 et 41. Les projets de loi 46 et B9...
M. BELLEMARE (Johnson): Le ministère des Affaires
intergouvernementales, ce n'est pas terminé?
M. LEVESQUE: II est possible que nous entreprenions l'étude des
projets de loi 78, 92, 85, 97, 49, ainsi que tout autre que la Chambre jugera
à propos d'étudier.
Je propose l'ajournement de la Chambre à demain, dix heures.
LE PRESIDENT: L'Assemblée ajourne ses travaux à demain
matin, dix heures.
(Fin de la séance à 23 h 57)
ANNEXE
Question de M. Léger 1. Quels sont les montants
versés par le gouvernement à M. Paul Desrochers depuis le 29
avril 1970? 2. Pour chacun de ces paiements, quelle était la tâche
confiée à M. Desrochers? 3. Sur quels dossiers a-t-il
travaillé en tant que conseiller spécial du Premier ministre ou
de tout autre ministre? 4. Dans quels dossiers a-t-il été
impliqué comme représentant du Premier ministre ou de son
cabinet? 5. Quels furent les montants qui lui ont été
versés à titre de frais de voyage depuis le 29 avril 1970?
Réponse de M. Bourassa 1. Voir document annexé. 2.
3. et 4.
Les citoyens, groupes et associations diverses adressent
régulièrement au Premier ministre de très nombreuses
représentations sur toutes sortes de questions qui relèvent de
l'administration publique québécoise. La tâche essentielle
des membres du bureau du Premier ministre consiste à préparer
pour le Premier ministre un état complet de la question soulevée
afin que ce dernier puisse prendre une décision informée ou, le
cas échéant, référer la question au membre du
Conseil des ministres plus directement concerné par la question
soulevée. On comprendra donc alors qu'il est à peu près
impossible d'effectuer le relevé détaillé des tâches
spécifiques, des dossiers où l'un ou l'autre membre du bureau du
Premier ministre a agi de fait comme Conseiller ou représentant du
Premier ministre. 5. Voir document annexé.
MONTANTS VERSES A MONSIEUR PAUL DESROCHERS 1970-71 1971-72
1972-73 1973-74 1974-75
Traitements.......... 20,911.79 25,475.12 11,421.83
Frais de représentation et d'automobile........ 3,164.52 3,600.00
3,300.00 2,400.00
Frais de voyage ........ 3,736.61 5,097.10 5,556.90 3,783.73
1,931.09
Honoraires........... 13,249.98 29,250.00
Question de M. Bellemare (Johnson) 1. La Commission scolaire de
Drummondville offre-t-elle aux étudiants de niveau collégial
l'option secrétariat? 2. Le ministère de l'Education a-t-il
accordé la permission à l'école Ellis de Drummondville
d'offrir cette même option à ses élèves? 3. Quelle
distance y a-t-il entre l'école Ellis et l'institution publique la plus
proche qui offre cette même option? 4. Quels sont les
propriétaires de l'école Ellis? 5. Quel est le nom des personnes
qui ont recommandé au ministère l'octroi de ce privilège
à l'école Ellis?
Réponse de M. Cloutier 1. La Commission scolaire de
Drummondville n'offre aucun cours de niveau collégial. 2. Le
ministère a accordé une reconnaissance pour fins de subventions
au Collège d'Affaires Ellis pour dispenser l'option secrétariat
412 au niveau collégial mais pour l'année 1974/75 seulement. Il
est possible que ce cours soit modifié ou aboli, c'est pourquoi
l'autorisation n'a été donnée que pour un an. 3. Le CEGEP
Bourgchemin, Campus Drummondville, dispense le cours de secrétariat 412.
4. L'école est constituée en compagnie dont les deux principaux
actionnaires sont MM. Jacques Scalzo et Laurier Rousseau. 5. Tous ceux qui ont
recommandé le statut de reconnaissance pour fins de subventions pour
cette école sont: Le Service général de l'enseignement
privé (MM. Vézina, Moreau, Bibeau, Demers), la Commission
consultative et le sous-ministre adjoint, Mlle Thérèse Baron.