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(Quinze heures huit minutes)
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
M. LEVESQUE: M. le Président, puis-je demander le consentement
unanime pour qu'un dépôt puisse se faire à un autre moment,
au cours de la présente séance?
LE PRESIDENT: Dépôt de rapports du greffier en loi sur les
projets de loi privés.
Présentation de motions non annoncées. Présentation
de projets de loi au nom du gouvernement.
M. LEVESQUE: Article a).
Projet de loi no 95 Première lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Fonction publique propose la
première lecture de la Loi sur les négociations collectives dans
les secteurs de l'éducation, des affaires sociales et des organismes
gouvernementaux.
L'honorable ministre de la Fonction publique.
M. PARENT (Hull): M. le Président, le présent projet a
pour objet de déterminer les règles qui régiront la
négociation des conventions collectives entrant en vigueur le 1er
juillet 1975 ou après dans les secteurs de l'éducation, des
affaires sociales, ainsi que la négociation des conventions collectives
dans le secteur des organismes gouvernementaux.
LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée?
M. ROY: Je demande le vote, M. le Président.
M. BURNS: D'accord, M. le Président
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Vote de première lecture
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Que ceux qui sont en faveur de la
motion de première lecture de la Loi sur les négociations
collectives dans les secteurs de l'éducation, des affaires sociales et
des organismes gouvernementaux veuillent bien se lever, s'il vous
plaît!
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Parent (Hull), Mailloux,
Saint-Pierre, Choquette, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Simard,
Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley, Drummond, Lacroix, Bienvenue,
Forget, Toupin, Massé, Harvey (Jonquière), Vaillancourt, Cadieux,
Arsenault, Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Bossé, Bacon,
Blank, Veilleux, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Picard, Gratton,
Carpentier, Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Bérard, Bonnier,
Chagnon, Marchand, Leduc, Caron, Côté, Déziel, Malouin,
Massicotte, Mercier, Pagé, Picotte, Tardif, Tremblay, Verreault, Morin,
Burns, Léger, Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi), Roy,
Bellemare (Johnson).
LE SECRETAIRE: Pour: 66 Contre: 0
LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou
séance subséquente.
Projet de loi no 92 Première lecture
LE PRESIDENT: Le ministre de la Justice propose la première
lecture de la Loi modifiant certaines prescriptions.
Le ministre de la Justice.
M. CHOQUETTE: M. le Président, ce projet établit un
délai de prescription particulier en matière de
responsabilité médicale ou hospitalière, que celle-ci
résulte d'un contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit, et
modifie certains délais de la Loi de l'indemnisation des victimes
d'actes criminels.
L'article 1 fixe le délai à trois ans à compter de
la faute. Cependant le point de départ du délai varie si le
préjudice se manifeste progressivement. Dans ce cas, le point de
départ consiste dans la date de la première manifestation du
préjudice. L'article 2 est un article de concordance. L'article 3
établit que ce nouveau délai est applicable depuis le 1er janvier
1972.
L'article 4 permet de faire réviser tout jugement ou d'annuler
toute transaction, règlement ou désistement intervenus entre le
1er janvier 1972 et le 1er janvier 1975, dans les cas où le motif de
rejet de l'action, le motif de tels règlement, transaction ou
désistement a été la prescription annale de l'article
2262, paragraphe 2, du code civil, pourvu toutefois que ce jugement ou ces
actes portent sur des cas de responsabilité survenus depuis le 1er
janvier 1972.
Les parties ont jusqu'au 1er juillet 1975 pour obtenir la
révision du jugement ou l'annu-
lation du règlement, de la transaction ou du désistement.
L'article 5 a pour objet de rendre inapplicable à une instance pendante,
au jour de l'entrée en vigueur de la loi, la prescription de trois ans
prévue par l'article 1 du projet et la prescription annale du code
civil.
L'article 5 donne un délai additionnel pour intenter une action
en responsabilité concernant une faute médicale ou
hospitalière survenue entre le 1er janvier 1972 et le 31 mars 1972, Les
articles 7, 8 et 9, qui modifient la Loi de l'indemnisation des victimes
d'actes criminels, visent à augmenter le délai de prescription de
toute demande d'indemnisation adressée à la Commission des
accidents du travail et à élargir les catégories de
bénéficiaire en vertu de ladite loi.
LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée?
DES VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture: Prochaine séance ou
séance subséquente.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles
Dépôt de documents
Questions orales...
M. LEVESQUE: M. le Président, au cas où il nous arriverait
d'autres documents, je demanderais le consentement unanime pour
dépôt au cours de la présente séance.
M. BURNS: Nous sommes d'accord, M. le Président.
LE PRESIDENT: Questions orales des députés.
QUESTIONS DES DÉPUTÉS
LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
Grève à la United Aircraft
M. BURNS: Hier, avait lieu une assemblée générale
des employés de United Aircraft de Longueuil qui sont en grève
depuis bientôt un an. Il semble c'est une confirmation que
j'aimerais obtenir du premier ministre en l'absence du ministre du Travail et
de la Main-d'Oeuvre que l'une des promesses qui aient été
faites aux employés de United Aircraft par le ministre du Travail et de
la Main-d'Oeuvre était que deux des points en litige, soit la formule
Rand et le problème du temps supplémentaire obligatoire ou
volontaire selon le point de vue patronal ou selon le point de vue syndical,
pourraient éventuellement être réglés par voie
d'intervention gouvernementale. Le premier point, par l'entremise d'un
amendement au code du travail, et le second, par l'entremise d'un amendement
à l'ordonnance no 4 de la Loi du salaire minimum.
J'aimerais d'abord que le premier ministre puisse me confirmer que c'est
bien là une position gouvernementale. D'autre part, si cela en est une,
j'aimerais savoir du premier ministre s'il a l'intention, avant l'ajournement
des Fêtes, de déposer la loi qui concerne le problème de la
formule Rand et, deuxièmement, de prendre les dispositions requises pour
que l'amendement à l'ordonnance no 4 soit fait avant l'ajournement des
Fêtes aussi.
M. BOURASSA: Dans le deuxième cas, comme vient de le
suggérer le député de Maisonneuve, il n'est pas question
de loi. Il s'agit d'un amendement à l'ordonnance. J'en ai discuté
avec le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Je ne sais pas si cela
faisait partie du contenu des propositions sur lesquelles le vote a
été pris hier.
C'est ce qu'examine le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre
aujourd'hui: quel était le contenu des propositions sur lesquelles a
porté le vote. Quant à une loi sur la formule Rand, cela n'a pas
encore été soumis au conseil des ministres.
Je sais que le député de Maisonneuve, leader
parlementaire, a déposé un projet de loi.
Je sais qu'il y a toutes sortes d'applications qui peuvent être
envisagées dans ce cas, mais cela n'a pas encore été
discuté au conseil des ministres.
Je dois dire que le ministre du Travail, aujourd'hui, examine, comme je
viens de le signaler, le contenu des propositions sur lesquelles le vote a
été pris. Il examine également les mesures à
prendre dans le cas de la construction. C'est ce qui l'a retenu à
Montréal aujourd'hui. Le député de Maisonneuve est au
courant que, comme l'a dit le ministre de l'Industrie et du Commerce, le niveau
de la productivité à Montréal actuellement est de quelque
30 p.c. Ceci a des conséquences extrêmement sérieuses sur
l'économie de Montréal et peut entraîner, d'ici à
six mois, quelques dizaines de milliers de chômeurs additionnels.
M. BURNS: Cela n'a rien à voir avec ma question.
M. BOURASSA: Je veux simplement mentionner les raisons pour lesquelles
le ministre du Travail est absent: c'est la gravité de la situation dans
le domaine de la construction qui va inciter le gouvernement à prendre
des mesures extrêmement énergiques pour y faire face.
M. BURNS: Une question additionnelle, M. le Président. Est-ce
que, d'une part, on est en droit de s'attendre à une réponse,
soit du premier ministre ou soit du ministre du Travail, relativement aux
questions que je lui ai posées en premier lieu, si possible dans le ou
les jours qui viennent? Quand je dis "les", je parle plutôt des deux
jours qui viennent, étant donné la proximité
appréhendée de l'ajournement des Fêtes.
Deuxièmement, est-ce que le premier ministre est en mesure de nous dire
si le rapport du ministre du Travail en vue de régler la grève de
la United Aircraft pourra être déposé devant
l'Assemblée nationale?
M. BOURASSA: Je ne sais pas quelle entente est intervenue entre
l'Opposition et le ministre du Travail là-dessus. Le ministre du Travail
devrait être ici demain matin ou au plus tard mercredi pour
répondre aux questions du député de Maisonneuve. Je
pourrai communiquer de nouveau avec lui tantôt et je pourrai
répondre plus en détail au député de
Maisonneuve.
LE PRESIDENT: Le député de Taillon.
M. BURNS: Une question additionnelle, M. le Président.
LE PRESIDENT: La dernière.
M. BURNS: Et c'est la dernière. Je le fais beaucoup plus parce
que le premier ministre semble jusqu'à un certain point prendre avis de
mes questions. Est-ce que le conseil des ministres, lorsqu'il examinera la
situation, tiendra compte également de la grève de Canadian
Gypsum à Joliette, dont le règlement, apparemment, n'est
bloqué que par une seule chose actuellement, c'est-à-dire
l'adoption de la formule Rand, en ce qui concerne cette entreprise, alors que
l'entente de retour au travail semble avoir été
négociée favorablement entre les parties. Egalement, semble-t-il,
ce problème de la formule Rand serait aussi une pierre d'achoppement au
règlement de la grève de Penmans à Saint-Hyacinthe.
M. BOURASSA: Le député de Maisonneuve fait une distinction
dans les deux cas.
Dans le cas de la United Aircraft, il exprime le point de vue que la
formule Rand est l'un des points de désaccord alors que dans le cas de
la Canadian Gypsum, c'est le seul point de désaccord. Je crois qu'il y
avait eu une entente, lorsque la commission parlementaire a été
convoquée, pour qu'après que la question de la United Aircraft
aura été discutée, on puisse discuter le cas de la
Canadian Gypsum.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Taillon, question
additionnelle.
M. LEDUC: Question additionnelle au premier ministre, M. le
Président. Est-ce que le premier ministre, dans ses conversations avec
le ministre du Travail, a causé de la possibilité de convoquer la
commission parlementaire en vue d'étudier la situation à la
United Aircraft, tel que le mentionne les journaux actuellement?
M. BOURASSA: J'en ai discuté, M. le Président, mais aucune
décision n'a été prise à l'occasion de ces
discussions.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
Subvention à l'Union des producteurs agricoles
M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
l'Agriculture et concerne la subvention de $15 millions qui a été
accordée à l'Union des producteurs agricoles. Est-ce que je
pourrais savoir de la part du ministre s'il a été consulté
et s'il a accepté les normes et les critères de
répartition qui ont été retenus par l'Union des
producteurs agricoles pour verser le montant de $15 millions aux agriculteurs,
montant qui a été littéralement arraché au
gouvernement du Québec par les agriculteurs?
M. TOUPIN: M. le Président, il n'y a rien eu d'arraché,
c'était simplement une décision gouvernementale pour
répondre à un besoin. Oui, effectivement, j'ai rencontré
les agriculteurs à quelques reprises depuis ce temps, quoiqu'on ait dit
récemment que les négociations étaient rompues. C'est
faux. Les négociations et les contacts avec l'Union des producteurs
agricoles sont demeurés ce qu'ils étaient, ils sont
demeurés bons et on a continué à discuter ensemble.
Quant au contenu, aux normes, de la répartition des $15 millions,
demain ou mercredi au plus tard, mais plutôt demain, je ferai une
déclaration ministérielle sur le sujet.
M. LESSARD: Dernière question additionnelle, M. le
Président. Est-ce que le ministre a l'intention, étant
donné que, selon les critères de répartition, l'UPA aurait
besoin de $18,500,000, d'accepter de verser $3,500,000 ou $4 millions pour
permettre justement une répartition équitable aux
agriculteurs?
M. TOUPIN: La déclaration que je ferai demain contiendra tous les
éléments de réponse à la question du
député de Saguenay.
LE PRESIDENT: Question additionnelle, l'honorable député
de Beauce-Sud.
M. ROY: Question additionnelle. Est-ce que le ministre de l'Agriculture
pourrait nous dire demain, à la même occasion, vers quelle date il
entend convoquer la commission parlementaire de l'Agriculture, puisqu'il a dit
lui-même à plusieurs occasions qu'il n'avait pas d'objection
à cela?
II pourra rencontrer le leader parlementaire du gouvernement pour en
discuter avec lui. Et, à l'occasion de cette commission parlementaire,
pourrons-nous examiner toute la question agricole, c'est-à-dire la
question agricole dans son ensemble? Il n'y a pas seulement la question des
éleveurs de bovins mais il y a également la question des oeufs de
consommation, FEDCO, au sujet de laquelle j'ai posé une question et
j'attends une réponse. Il y a aussi la question du sirop
d'érable, la question des génisses qui ont été
vendues et dans ce cas le gouvernement n'a pas rempli ses engagements.
Je demanderais au ministre, à ce moment-ci, s'il sera en mesure,
demain, de nous faire une déclaration d'ensemble de façon qu'on
sache, une fois pour toutes, quelles sont les intentions du
ministère.
M. TOUPIN: Disons d'abord, M. le Président, que le gouvernement
ne s'est pas dérobé à ses engagements. C'est que tout le
programme F-l va prendre fin d'ici quelques semaines. J'ai déjà
répondu au député de Beauce-Sud que je ferais une
déclaration avant que le programme ne prenne fin. Je suis allé
plus loin, j'ai dit que le gouvernement, à ce niveau, respecterait ses
engagements. Il va les respecter également. Donc, demain, cela se
trouvera dans le contenu de la déclaration que je ferai.
Quant à la commission parlementaire, je maintiens toujours
l'idée que j'ai émise il y a quelques mois ou quelques semaines,
à savoir qu'elle serait convoquée mais pas dans le mois de
décembre, probablement en janvier ou en février, après que
j'en aurai discuté avec M. Levesque.
Il y a trois points dont j'aimerais discuter à la commission
parlementaire: celui des revenus des agriculteurs, parce que nous allons
déposer aussi des documents relatifs à cette question, celui de
l'assurance-récolte, parce que je me suis engagé à ce que
la commission parlementaire regarde ce problème, et celui
également de l'ensemble de la commercialisation des produits de
l'agriculture, tant des oeufs, du poulet, etc. Mais cette dernière
question pourrait être abordée au moment où nous
discuterons du premier problème, c'est-à-dire celui des revenus
des agriculteurs, qui implique directement l'organisation de la mise en
marché et, par conséquent, la commercialisation du produit.
Donc, il s'agit maintenant d'en discuter avec mon collègue le
leader parlementaire pour décider des dates, mais sans doute pas avant
la fin de janvier ou le début de février.
M. ROY: M. le Président, une autre question.
LE PRESIDENT: Dernière question additionnelle.
M. ROY: Au cours de cette commission parlementaire, est-ce l'intention
du gouverne- ment de faire comparaître les différents organismes
devant la commission, de façon que nous puissions les interroger et
qu'ils puissent faire part de leurs observations et de leurs recommandations?
Quand je parle des organismes, je me réfère non seulement
à l'UPA mais on pourrait parler de FEDCO. Est-ce qu'il y aurait lieu,
aussi, que soient convoqués devant la commission parlementaire certains
représentants du monde du commerce?
En effet, j'ai soulevé déjà devant
l'Assemblée nationale ce point des méthodes d'approvisionnement
des grandes chaînes d'alimentation. Serait-il possible d'examiner cela
devant cette même commission parlementaire?
M. TOUPIN: M. le Président, dans le cadre des problèmes
qui seront discutés à la commission parlementaire,.notamment
celui des revenus des agriculteurs ou, tout au moins, de moyens pour tenter de
corriger le problème des revenus des agriculteurs et celui
également relatif à l'assurance-récolte, toutes les
parties intéressées à ces questions pourront se
présenter et venir donner leur point de vue.
LE PRESIDENT: Question principale, l'honorable député de
Johnson.
Pénurie de travailleurs
spécialisés
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, le 29 novembre, j'avais
demandé au premier ministre s'il était au courant que des firmes
québécoises se tournaient vers l'Europe pour obtenir des
travailleurs spécialisés. Je revois aujourd'hui, avec une
certaine anxiété, que d'autres compagnies cherchent sur le
marché européen des travailleurs spécialisés.
Ma première question: Est-ce que le premier ministre, le ministre
du Travail ou le ministre de l'Industrie et du Commerce ont fait quelque chose
pour détecter, parmi notre main-d'oeuvre, des travailleurs
spécialisés? Deuxièmement, est-il fondé que des
firmes engagent présentement des travailleurs spécialisés
en Europe?
M. BOURASSA: M. le Président, j'avais demandé au leader de
vérifier ce point-là et de répondre à la
question.
M. LEVESQUE: M. le Président, en effet, le député
de Johnson avait déjà posé la question en Chambre. J'en
avais pris avis pour en parler au ministre du Travail. J'avais, à ce
moment-là, mentionné que j'étais moi-même
préoccupé par cette question, vu que la région dont je
suis issu est également très intéressée à ce
que l'emploi soit le plus élevé possible. J'en ai parlé
avec le ministre du Travail. Il m'a fait cette distinction, je pense,
très importante. C'est qu'il ne s'agit pas d'ouvriers de la
construction, mais de mineurs ou de gens qui sont reliés au travail sous
terre, le travail dans les mines. Les rensei-
gnements que me fournit le ministre du Travail, c'est que les centres de
main-d'oeuvre du Canada et les centres de main-d'oeuvre du Québec ne
semblent pas avoir de demandes de ce côté-là, malgré
tous les efforts que ces centres auraient faits pour intéresser des gens
à occuper ces fonctions. C'est ce qui explique qu'on cherche
ailleurs.
M. BELLEMARE (Johnson): Question supplémentaire. L'honorable
leader du gouvernement, M. le Président, a l'air de trouver cela
très ordinaire que l'on cherche ailleurs. Mais je pense, quand on
connaît nos régions et particulièrement...
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement. J'ai
répondu exactement ce que j'ai perçu de la réponse du
ministre du Travail. Je n'ai pas l'intention de recevoir une leçon de
quelque nature que ce soit du député de Johnson. Je n'ai fait que
mon devoir et je demanderais au député de Johnson de poser de
nouvelles questions ou des questions additionnelles, s'il en a.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, si le ministre prend
cela comme une insulte, je ne le prends pas, moi. Je considère
plutôt ce que font les compagnies à l'extérieur comme une
insulte à la province de Québec quand nous avons...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE (Johnson): ... dans la province de Québec, des
employés, des travailleurs spécialisés...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
Question! Vous n'avez pas le droit d'argumenter.
Un instant, s'il vous plaît. Un instant. Vous avez posé une
question. Le ministre a répondu en donnant les renseignements qu'il
avait. Si ça ne fait pas votre affaire, cela ne regarde ni le ministre,
ni le président. Mais vous avez le droit de poser une autre question.
Vous n'avez pas le droit de commencer un débat sur cette question. Cela
a toujours été comme cela à l'Assemblée
nationale.
M. BELLEMARE (Johnson): Ah oui! Ah oui!
LE PRESIDENT: Avez-vous une autre question supplémentaire?
L'honorable chef de l'Opposition officielle.
Incendie à Thetford-Mines
M. MORIN: M. le Président, on sait qu'à la suite d'un
incendie survenu la semaine dernière, l'usine King Beaver, de l'Asbestos
Corporation, à Thetford-Mines, a été complètement
détruite et que, du jour au lendemain, 820 travailleurs se sont
retrouvés sans emploi. Ceux-ci, appuyés par la population,
veulent la reconstruction de l'usine. J'aimerais demander au premier ministre
s'il peut nous dire si son gouvernement ou ses représentants ont eu des
rencontres une ou des rencontres avec les administrateurs de la
compagnie. S'il y a eu rencontre, le premier ministre peut-il nous dire quelles
sont les intentions de la compagnie quant à la reconstruction de l'usine
et au placement des travailleurs, et quelles sont les intentions de son
gouvernement?
M. BOURASSA: M. le Président, je comprends que le chef de
l'Opposition s'intéresse à cette question, mais avant même
qu'il s'y intéresse, le député de Frontenac a fait de
très nombreuses représentations. Le ministre des Richesses
naturelles s'est rendu sur les lieux, plusieurs hauts fonctionnaires examinent
le dossier et nous espérons pouvoir prendre position très
rapidement. Je demanderais peut-être au ministre des Richesses naturelles
de compléter ma réponse.
M. MASSE: M. le Président, je me suis rendu effectivement jeudi
dernier à Thetford où j'ai eu l'occasion de rencontrer les
autorités de la mine King Beaver et des autres mines qui ont aussi une
activité dans cette région, de même que le directeur du
développement industriel, des représentants du syndicat et des
autorités municipales. Le but de ces rencontres était d'examiner
sur place quelle était la situation, tant du point de vue des
travailleurs que du point de vue municipal, et aussi en termes de
développement possible à court terme afin de réembaucher
ces personnes mises à pied.
D'autre part, on a tenté ensemble de trouver des solutions
à très court terme parce qu'il semble que la reconstruction de
cette usine qui a disparu à la suite de l'incendie ne pourrait se faire,
même s'il y avait une décision dès maintenant, avant deux
ans. Alors, il semble que certaines industries de Thetford puissent
connaître un développement plus grand, peut-être
accéléré. J'aurai, dès la rédaction de mon
rapport de cette visite au premier ministre, à rencontrer
évidemment le ministre de l'Industrie et du Commerce pour voir quelle
sorte d'aide spéciale pourrait être apportée à ces
industries qui pourraient réembaucher certains de ces travailleurs.
Aussi, on me dit qu'un certain nombre de travailleurs de la mine
pourraient être réembauchés à très court
terme. On parle de quelques centaines de travailleurs. D'autre part, en ce qui
concerne les affaires municipales, je dois dire que le maire a
été un brillant défenseur des intérêts de
Thetford-Mines et prévoit présenter au ministre des Affaires
municipales son budget à court terme, compte tenu de la perte
d'évaluation de cette usine, environ $300,000 de perte de taxes pour
Thetford.
Dans l'ensemble, c'est un rapport succinct de ma rencontre
là-bas. Evidemment, il restera à trouver des meilleures solutions
à court terme.
M. MORIN: M. le Président, c'est un rapport plutôt
succinct. J'aimerais demander au ministre s'il est au courant, au moment
où il nous parle de replacer des travailleurs dans d'autres industries,
du fait que deux autres entreprises ont fermé leurs portes dans cette
ville depuis quelque temps, nommément l'usine de roulottes Bellevue et
l'usine de motoneiges Snow Jet. Compte tenu de la situation, le ministre a-t-il
l'intention de poser des gestes concrets immédiatement, et lesquels? De
façon plus précise, a-t-il l'intention, même si ça
prend du temps, de participer à la reconstruction de l'usine King
Beaver?
M. MASSE: M. le Président, j'ai parlé d'usines existantes
qui pourraient augmenter leur production, donc embaucher de nouveaux
travailleurs. Evidemment, vous apportez le fait qu'il y en a d'autres qui ont
fermé, d'accord. Mais le jeudi 19, cette semaine, les
représentants du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre
rencontrent les syndiqués et les employeurs afin de mettre sur pied un
comité de reclassement.
Quant à la possibilité de participer à la
reconstruction de cette usine, je dois dire que les décisions qui
doivent être prises par la compagnie ne sont pas encore prises et qu'il
faudra de notre part attendre qu'elles le soient.
LE PRESIDENT: Une dernière question additionnelle.
M. MORIN: Bien, M. le Président. Le ministre nous parle de placer
des travailleurs dans d'autres usines. Je ne suis pas sûr d'avoir bien
saisi la portée de sa réponse. J'aimerais lui demander s'il
songeait à replacer ces travailleurs de l'amiante dans d'autres usines,
auquel cas sait-il que les travailleurs ont refusé, en fin de semaine,
d'allonger la semaine de travail à sept jours dans les deux autres
usines? S'il est au courant de cela, qu'entend-il faire pour éponger
tout le chômage qui va être créé non seulement par
l'incendie de cette usine, mais par la fermeture des autres usines dans la
même ville?
M. MASSE: M. le Président, je dis qu'avec les gens de
Thetford-Mines, on tente de trouver des solutions à court terme. Il
pourrait y avoir, dans certaines usines, une augmentation du nombre d'emplois.
Je n'ai pas dit que ça réglerait l'ensemble du chômage
à Thetford-Mines, qui se situe à un niveau très
élevé actuellement, mais qu'avec les syndiqués, avec les
patrons, nous avons examiné différentes possibilités telle
une production de sept jours.
Cela implique énormément de difficultés et, comme
vous dites, les syndiqués, selon mes informations, ont refusé
cette solution en fin de semaine. Il y en aura peut-être d'autres.
LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean.
Syndicalisme agricole
M. VEILLEUX: M. le Président, ma question s'adresse au ministre
de l'Agriculture. Suite à la loi qui avait été
votée en Chambre sur le syndicalisme agricole, est-ce que le ministre
sait qu'il y aurait des fonctionnaires du ministère qui obligeraient les
agriculteurs qui payent une cotisation mais ne veulent pas être membres
de l'UPA d'adhérer à l'UPA pour recevoir des subventions du
ministère ou pour recevoir un retour de taxe sur l'essence du
ministère du Revenu?
M. TOUPIN: M. le Président, le ministère de l'Agriculture
a ajusté un certain nombre de ses programmes sur la loi 64,
c'est-à-dire que les agriculteurs du Québec qui correspondent
à la définition de la loi 64 ont droit aux différentes
mesures que met à la disposition de l'ensemble des agriculteurs le
ministère de l'Agriculture du Québec. Il y a des exceptions pour
certains programmes, comme par exemple, le crédit agricole, où il
y a une définition particulière dans la Loi du crédit
agricole; les programmes de commercialisation, où se trouvent
également des définitions particulières et dans la Loi des
marchés agricoles dans les différents plans conjoints que se sont
donnés les producteurs.
A l'exception de ces programmes, c'est le critère sur lequel nous
nous sommes basés pour rendre éligibles aux programmes
gouvernementaux les agriculteurs du Québec.
M. VEILLEUX: Question supplémentaire, M. le Président.
Cela signifie-t-il que pour obtenir certaines subventions, comme vous le
mentionnez, les cultivateurs ou les producteurs doivent, nécessairement,
être membres de l'UPA, ou doivent-ils répondre à la
description qu'on donne dans la Loi des producteurs agricoles?
M. TOUPIN: II me semble que j'ai été net là-dessus.
Le député de Saint-Jean me demande une précision que je
vais lui donner tout de suite. Le critère sur lequel nous nous basons
n'est pas un critère de membre, n'est pas un critère
d'adhésion à une association. C'est un critère qui se
trouve dans une loi et le critère dans la Loi des producteurs agricoles
ne dit pas qu'ils doivent être membres de l'UPA. Le critère dit
qu'un agriculteur reconnu au sens de cette loi est un gars qui vend pour plus
de $1,000 de produits agricoles par année. C'est ce que dit la loi 64.
C'est simplement ce critère.
Et je suis persuadé qu'il y a des agriculteurs qui
reçoivent, présentement, des subventions gouvernementales en
vertu de programmes existants parce qu'ils vendent pour plus de $1,000 par
année et qui ne sont peut-être pas membres de l'UPA.
M. VEILLEUX: Question supplémentaire, M. le Président.
J'ai eu de nombreux appels téléphoniques. J'en ai encore eu un ce
matin selon lequel on oblige les producteurs à être membres actifs
de l'Union des producteurs agricoles pour avoir droit aux subventions...
LE PRESIDENT: Question.
M. VEILLEUX: ... et paraît-il que cela viendrait... Justement, je
demande au ministre s'il y aurait possibilité qu'il enquête dans
son ministère pour savoir s'il y a des fonctionnaires qui agissent de
cette façon et, s'il y en a, qu'il les arrête. Sinon, j'en
donnerai des noms.
M. TOUPIN: II est possible si le député de
Saint-Jean affirme qu'il a des exemples concrets que de telles choses se
produisent. Il y a un lien tellement étroit entre les deux qu'il est
possible que certains fonctionnaires du ministère abusent dans ce sens
et disent: Si tu veux avoir accès à telle mesure, il faudra que
tu sois membre de l'UPA. Personnellement, je n'ai eu aucune information encore
à ce sujet.
Néanmoins, je pense qu'il serait nécessaire, puisque la
question m'est posée, que nous regardions, tout au moins sommairement,
si tel est le cas. Si nous avons des exemples concrets, il est évident
qu'il s'agira pour nous de pousser beaucoup plus loin nos regards. On pourrait
même faire une enquête pour savoir si tel est le cas, mais ce n'est
pas la position du ministère. Je veux dire que la position du
ministère n'est pas cela du tout. Nous nous sommes servis de ce
critère pour verser des subventions.
M. VEILLEUX: Dernière question supplémentaire, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Dernière.
DES VOIX: Courte.
M. VEILLEUX: On est libre!
LE PRESIDENT: C'est la dernière, s'il vous plaît.
M. VEILLEUX: M. le Président, dernière question
supplémentaire. Est-ce que cela serait possible pour le ministre
d'envoyer une note de service disant qu'on ne doit pas dire de telles choses
aux producteurs?
M. TOUPIN: Je pense que la suggestion est bienvenue. C'est probablement
la première chose qu'on devrait faire, soit d'informer tous les
fonctionnaires, à la base notamment, ceux qui sont dans les
régions, et leur dire qu'il ne s'agit pas du tout, comme condition, de
devenir membre d'une association mais bien, comme condition, d'une
définition que nous retrouvons dans une loi pour l'élargir
à l'application de programmes.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce-Sud, et la
suivante et dernière question ce sera l'honorable député
de Saguenay.
Approvisionnement en grains de provende
M. ROY: M. le Président, ma question s'adresse encore à
l'honorable ministre de l'Agriculture. Elle fait suite à une question
que je lui posais mercredi dernier, le 11 décembre, alors que je lui
avais demandé s'il pourrait nous faire le point de la situation qui
prévalait en ce qui avait trait à l'approvisionnement et à
l'entreposage des grains de provende dans les entrepôts de l'Est du pays.
Le ministre de l'Agriculture m'avait répondu la semaine dernière
qu'il répondrait demain, comme il a répondu tout à l'heure
au député de Saint-Jean et aux questions que je lui ai
posées: Demain. Est-ce que demain est arrivé et est-ce
qu'aujourd'hui c'est considéré, dans l'esprit du ministre, comme
demain, et est-ce que je pourrais avoir une réponse?
M. TOUPIN: M. le Président, à la suite d'une
réunion tenue dans le comté de Bellechasse par le
député de Beauce-Sud et le député de
Saguenay...
M. MERCIER: Deux agitateurs professionnels.
M. ROY: J'invoque le règlement. La réunion qui a eu lieu
dans le comté...
M. TOUPIN: Je peux répondre à la question, M. le
Président...
M. ROY: ... de Bellechasse a traité de la question du transport
de lait en bidons. Je veux avoir des réponses en ce qui a trait à
la production.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, messieurs!
L'honorable ministre.
M. MERCIER: Agitateurs professionnels.
M. TOUPIN: Je continue seulement pour relever une erreur du
député de Beauce-Sud. J'espère que c'est une erreur qu'il
a commise lorsqu'il a affirmé ici que je disais toujours: demain.
Lorsque vous avez rencontré ces producteurs laitiers, effectivement, un
télégramme est parvenu à mon bureau, et la journée
même, je vous ai répondu, à vous et au député
de Saguenay, que le problème était réglé. Il n'a
même pas été question que vous souleviez cette question en
Chambre, on l'a réglée immédiatement parce qu'on avait les
moyens de la régler sur-le-champ.
Quant aux provendes, j'ai répondu, effectivement, à une
question qui me fut posée, que
demain ou après-demain j'apporterais des statistiques. J'ai
demandé aux fonctionnaires du ministère de préparer des
statistiques. On m'a répondu ceci: Ce qu'on peut vous dire pour le
moment, c'est que des bateaux se dirigent vers l'Est et doivent
décharger leur cargaison dans les entrepôts ou de
Trois-Rivières ou de Montréal ou de Québec, mais nous ne
pouvons, pour le moment, vous dire exactement ce que nous trouvons dans ces
entrepôts tant et aussi longtemps que ces bateaux ne seront pas
entrés dans les ports. J'ai trouvé cela tout à fait
logique. Néanmoins, je suis allé un peu plus loin. J'ai
demandé: Est-ce que ces cargaisons qui viennent vont répondre
à un besoin plus saisonnier qu'immédiat? On m'a dit: Oui, mais il
faut encore garder une restriction. Au moment où les
déchargements seront faits, c'est à ce moment qu'on sera en
mesure de dire si nous en avons assez pour le moment ou s'il y a encore danger,
non pas de pénurie, mais danger qu'il y ait un manque, au cours des mois
de printemps, notamment. Alors, je ne sais pas si je pourrai faire cette
déclaration statistique d'ici deux ou trois jours, mais aussitôt
que les cargaisons seront entrées, je ferai le point et j'informerai la
Chambre.
M. ROY: M. le Président, une question additionnelle. Je voudrais
savoir quelle est la restriction à laquelle le ministre vient de nous
référer. Deuxièmement, j'aimerais bien savoir du ministre
de l'Agriculture s'il a l'intention de charger quelqu'un, au Québec, de
se tenir au courant constamment, de façon que nous puissions être
informés lorsque nécessaire et assurer les cultivateurs, les
agriculteurs, les producteurs agricoles du Québec d'un approvisionnement
stable et suffisant. Est-ce que le ministre trouve normal qu'actuellement le
ministre lui-même ne soit même pas en mesure d'informer la Chambre,
parce qu'il n'est pas au courant de la situation? On parle de bateaux qui
arrivent. Quand les bateaux vont-ils arriver? Quel est le tonnage de ces
navires? Quelle est la réserve actuellement qu'il y a dans les silos
à grains de l'Est?
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. ROY: C'est la question que je pose: Quelles réserves y a-t-il
à l'Est? On a eu une grève l'autre jour, et rien ne nous dit que
nous n'en aurons pas d'autres.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît! Un peu de
calme, messieurs, un peu de calme! Il faudrait commencer la semaine sur un bon
pied, quand même. Un peu de calme!
M. ROY: Oui, M. le Président, mais à condition d'avoir des
réponses.
M. TOUPIN: Je suis d'accord, M. le Président, pour qu'on commence
la semaine sur un bon pied.
UNE VOIX: Un pied-de-roi.
M. TOUPIN: Le député de Beauce-Sud devrait prendre la
situation avec un peu plus de calme. De toute façon, cela ne
règle pas le problème de monter sur ses grands chevaux, pour
employer une expression populaire.
M. ROY: Enlevez vos patins et cela va faire.
M. TOUPIN: Alors, si vous voulez, je vais vous répondre. Mes
patins sont suffisamment bien aiguisés pour savoir où je
vais.
M. ROY: Cela paraît.
M. TOUPIN: Quand le député de Beauce-Sud m'a posé
la question, il y a trois semaines ou un mois, sur les provendes au
Québec, j'ai déposé sur la table de cette Chambre un
document dans lequel on pouvait, chiffre après chiffre, dénombrer
ce qu'il y avait, en termes de boisseaux, de céréales au
Québec.
Depuis ce temps, tous les jours, nous suivons la situation de
près. Je ne pense pas qu'il soit de coutume, d'abord, et qu'il soit, en
même temps, logique que, tous les matins, j'arrive avec mon petit papier
et que je dépose sur la table de la Chambre un rapport sur la situation
des provendes au Québec.
M. ROY: Ce n'est pas ce que j'ai demandé.
M. TOUPIN: Laissez-moi terminer. On finirait par trouver cela ennuyant.
J'ai dit qu'on a déposé un document une fois. Le document a fait
l'état de la situation. J'ai déclaré, en même temps,
que cet état était précaire et qu'il fallait faire en
sorte que le problème se règle. Effectivement, le lendemain, la
grève s'est réglée, pas la grève des
manutentionnaires, mais celle des inspecteurs de provendes.
Maintenant, on reprend une situation normale. Je sais qu'il y a cinq ou
six bateaux qui se dirigent vers l'Est. Ce que je ne puis vous dire pour le
moment, parce que je ne le sais pas, c'est si toutes ces céréales
seront réservées pour l'Est ou si certaines quantités
devront aller à l'exportation. C'est seulement lorsque ces
céréales seront entreposées que je saurai à quelles
fins elles seront destinées. C'est seulement à ce
moment-là que je pourrai intervenir de façon valable. Sinon, je
parle pendant que des bateaux voguent sur le Saint-Laurent. Cela ne m'avance
pas plus que ça, pour le moment. Je vous dis qu'il y en a qui viennent.
Je suis allé plus loin tantôt. Je vous ai dit que ce qui s'en
vient assure un minimum de sécurité. Mais je vous ai dit aussi
que cette sécurité ne me paraît pas encore assez
acceptable. C'est seulement lorsque ce sera entré que je vous dirai ce
qui se passe.
LE PRESIDENT: Dernière question, l'honorable député
de Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, ma question...
M. CADIEUX: II est ministre. Il n'est pas pilote. Il ne peut savoir
où s'en vont tous les bateaux.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Expropriation de l'île d'Anticosti
M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre
des Travaux publics et concerne l'expropriation de l'île d'Anticosti.
Est-il exact que le gouvernement du Québec a dû concéder
des droits de pêche à l'ancienne compagnie? Concernant les droits
miniers, les négociations se continuent-elles ou est-ce qu'une
décision a été prise à ce sujet? Enfin, est-ce que
le ministre, suite aux explications qu'il nous donnera, accepterait de
déposer l'entente qui a été conclue entre l'ancienne
compagnie et le gouvernement?
M. MAILLOUX: M. le Président, est-ce que le député
de Saguenay veut une réponse complète quant à la
transaction?
La question m'avait été posée par un journaliste en
fin de semaine et cela m'a permis depuis de revoir les notes des discussions et
de la transaction. Je pense qu'il faudrait quand même se rappeler qu'au
moment où le gouvernement du Québec a pensé se porter
acquéreur de l'île d'Anticosti un autre ordre de gouvernement y
songeait également. Les renseignements assez valables qu'avait le
gouvernement du Québec, étaient les suivants: c'est que cet autre
ordre de gouvernement était prêt à verser entre $25
millions et $30 millions. Ajouté à cette offre monétaire,
il semblait également que la Consol pourrait disposer des droits de
pêche pour une période de 20 ans sur la rivière Jupiter,
droits de pêche renouvelables.
C'était, semble-t-il, l'offre qui aurait pu être consentie
par le gouvernement fédéral. Comme le gouvernement du
Québec, connaissant ces discussions, voulait se porter acquéreur
de cette parcelle de terre, qui n'appartenait ni au Canada, ni à la
province de Québec, nous avons fait faire deux évaluations. La
première, faite par le ministère des Travaux publics, rencontrait
l'offre monétaire à peu près à mi-chemin entre $25
millions et $30 millions.
Il y a eu une deuxième tentative d'évaluation,
celle-là faite par le ministère des Terres et Forêts.
LE PRESIDENT: Un peu de silence, s'il vous plaît! Un peu de
silence.
M. MAILLOUX: Au ministère des Terres et Forêts, si l'on
compare les prix payés dans tout le Québec pour les transactions
que l'on connaît dans les dernières années, le prix moyen
des trans- actions est $18.34 l'acre. En Gaspésie, le prix payé
dans les dernières années est $17.17 l'acre. Dans l'expropriation
dont je parlerai tantôt, le prix payé à la Consol est
$10.35 l'acre. Sur la valeur des équipements, l'estimation était
de $625,000 de la part de la Consol et le prix versé a été
de $460,000.
Il y a eu un avis d'expropriation qui contenait une offre ferme de
$23,780,000 sans condition. Malgré les tentatives de la compagnie
d'obtenir un montant supplémentaire, la discussion a commencée
à $27 millions et $26 millions et le gouvernement du Québec n'a
pas voulu modifier l'offre ferme contenue dans l'avis d'expropriation.
Par la suite, il y a eu une déclaration de règlement hors
cour pour un montant de $23,780,000. Il y a eu un deuxième document
fixant les modalités du transfert de la propriété. On sait
que le gouvernement du Québec demandait à la Consol de faire le
nécessaire jusqu'au 31 décembre 1974. Par la suite, il y a eu une
troisième entente en vue de reporter le paiement qui devait se faire de
manière directe pour la somme de $23,700,000. Il y a eu un montant
initial de $4 millions de versé et le solde d'environ $20 millions,
à intérêt légal de 8 p.c, est payable pour le 15
avril. Il n'y a aucune condition sur les droits de pêche de la
rivière Jupiter. Je veux comprendre que la Consolida-ted-Bathurst avait
peut-être des réservations de clients éventuels. Il lui
appartiendra de s'adresser à un des ministères, qui est le
ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, à
savoir si elle peut accommoder certains des clients à l'endroit desquels
elle avait pu s'engager.
M. LESSARD: M. le Président, une question additionnelle. Si je me
fie à la déclaration du ministre, il n'y a actuellement, en vertu
de cette entente, aucun droit exclusif en ce qui concerne les ressources de
pêche ou les ressources minières qui aurait été
cédé à la Consol.
M. MAILLOUX: M. le Président, le contrat d'expropriation stipule
que pour les $23,700,000, payables de la manière dont j'ai parlé
tantôt, il n'y a pas de droit de pêche d'accordé, ni de
droit minier ou de droit sous-marin.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, une question
supplémentaire à l'honorable ministre. Est-ce que l'honorable
ministre peut nous dire quel est le bureau d'avocats qui a transigé,
puisque cela s'est fait hors cour?
M. CHOQUETTE: Je ne crois pas qu'il y ait eu de bureau d'avocats qui ait
transigé cela.
M. BELLEMARE (Johnson): L'honorable ministre vient de dire que cela
s'est fait hors cour.
M. CHOQUETTE: Je crois que ce sont les
conseillers juridiques du ministère de la Justice et les
fonctionnaires du ministère de mon collègue qui ont
transigé ce règlement.
M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce que l'honorable ministre pourrait me
donner une réponse demain?
M. MAILLOUX: Oui, je prends avis de la question. Je pense que c'est le
contentieux du ministère qui, en fait, a agi.
LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. LEVESQUE: M. le Président, je fais motion pour
qu'immédiatement...
LE PRESIDENT: Un instant. Excusez-moi, j'oubliais une question de
privilège que m'avait soulignée l'honorable ministre des Affaires
sociales.
Question de privilège Article de
journal
M. Claude Forget
M. FORGET: Merci, M. le Président. Certains journaux de jeudi ou
vendredi ont reproduit une dépêche de la Presse canadienne, qui
faisait suite à une question qui m'a été posée la
semaine dernière par le député de Saguenay. Dans cette
question, le député de Saguenay m'interrogeait pour savoir si le
ministère des Affaires sociales attachait l'importance qu'il faut
à la carence de services hospitaliers sur la Côte-Nord et s'il
envisageait des mesures concrètes afin de remédier à cette
carence.
M. LESSARD: Les services ambulanciers.
M. FORGET: Ma réponse, M. le Président, fut
affirmative.
M. LESSARD: Les services ambulanciers.
M. FORGET: Services ambulanciers, c'est bien ce que j'ai dit.
Ma réponse, M. le Président, fut affirmative. Cependant,
j'ai eu la surprise de constater, à la lecture des journaux, qu'un
compte rendu en avait été donné qui en faussait le sens,
reproduisant exclusivement la dernière des remarques du
député de Saguenay à l'effet de me demander si le
gouvernement attendait qu'il y ait des morts avant de prendre action.
Or, M. le Président, ma réponse affirmative dans un tel
contexte tendait à suggérer que nous n'avions pas l'intention de
prendre des mesures concrètes, ce qui est exactement le contre-pied de
mon affirmation puisque ma réponse s'adressait à ce qui avait
fait l'objet de la question plutôt qu'à ce qui a été
dit à la toute fin. A cause des bruits de fond qui accompagnent parfois
la période des questions, je n'en ai pris connaissance qu'à la
lecture des journaux et subséquemment à la lecture du
procès-verbal ou du compte rendu des Débats. Je crois donc, M. le
Président, que cette mise au point était appropriée, de
façon que l'impression qui a pu se dégager à la lecture de
ces journaux soit corrigée, puisque encore une fois on a fait dire, par
ces comptes rendus, exactement le contraire de ma pensée.
LE PRESIDENT: Affaires du jour.
Travaux parlementaires
M. LEVESQUE: M. le Président, d'abord je fais motion pour qu'au
salon rouge, immédiatement, la commission des institutions
financières, compagnies et coopératives se réunisse pour
l'étude, article par article, du projet de loi no 7, Loi sur les
assurances.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
Cette commission des institutions financières peut siéger
immédiatement.
M. LEVESQUE: M. le Président, voici nos intentions. Elles peuvent
être modifiées en cours de route, selon les circonstances, mais
nos intentions à ce moment-ci sont les suivantes: Que la Chambre
siège cet après-midi pour disposer des articles 2, 3 et 10 du
feuilleton. Si tel est le cas, nous ajournerions, à la suite de
l'adoption de ces articles, jusqu'à demain dix heures et trois
commissions siègeraient simultanément par la suite.
Il y aurait la commission qui vient d'être convoquée au
salon rouge et la commission de la justice, à la salle 81-A, pour
l'étude des deux projets de loi sur le louage des choses, au nom du
ministre de la Justice. A la salle 91, nous étudierions, article par
article, le projet de loi no 93, qui normalement aura été
adopté en deuxième lecture. Loi modifiant la loi de
l'assurance-maladie et la loi de la Régie de l'assurance-maladie du
Québec.
Si, par hasard, il se développait certains pépins dans
l'étude de ce projet de loi, à ce moment-là ce serait le
ministre de l'Agriculture qui serait convoqué avec la commission de
l'agriculture pour l'étude du projet de loi no 20, article par
article.
Est-ce que cela convient à tout le monde? Alors,
procédons. Article no 2.
Projet de loi no 19 Troisième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Tourisme, de la Chasse et de la
Pêche propose la
troisième lecture du projet de loi no 19, Loi des agents de
voyages.
L'honorable député de Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, j'aurais quelques commentaires
à faire concernant une des lois que nous considérons très
importantes et sur laquelle nous avons été d'accord en
principe.
Le 18 juin 1971, alors que nous discutions avec l'ex-ministre du
Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, Mme Claire Kirkland-Casgrain, des
crédits du ministère du Tourisme, j'avais posé la question
suivante au ministre: Au sujet de ces agences de voyages, considérant le
fait que ces agences peuvent influencer le tourisme, les endroits où ce
tourisme peut se rendre, est-ce que le ministre a l'intention d'organiser un
certain contrôle sur ces agences de voyages?
Le ministre a-t-il l'intention d'établir une loi-cadre qui les
obligerait à demander un permis du ministre du Tourisme, de la Chasse et
de la Pêche et aussi à faire superviser leur administration par ce
ministère? La réponse de l'ex-ministre du Tourisme, de la Chasse
et de la Pêche avait été, à ce moment-là,
négative sous prétexte que le ministre ne voulait pas s'immiscer
dans une décision qui relevait des agences de voyages elles-mêmes.
Vous comprendrez, M. le Président, que puisque dès 1971 nous
demandions un certain contrôle des agences de voyages, c'est donc dire
qu'aujourd'hui nous ne pourrons qu'appuyer ce projet de loi. D'ailleurs, par
l'intermédiaire de mon collègue, le député de
Saint-Jacques, nous avons appuyé le principe de ce projet de loi en
deuxième lecture.
Cependant, M. le Président, nous avions indiqué un certain
nombre de réserves qui nous paraissaient très importantes. En
effet, il est certain que si nous adoptons une loi comme celle-là, c'est
d'abord en vue de protéger le public. A maintes reprises, nous avons eu
l'occasion de le constater, les voyageurs ont été aux prises avec
des problèmes considérables, soit parce que certains agents de
voyages faisaient de la fausse publicité, soit parce que certaines
agences de voyages ne pouvaient plus répondre aux responsabilités
auxquelles elles s'étaient engagées vis-à-vis du public
voyageur.
Cela ne veut pas dire, M. le Président, que nous n'avions pas au
Québec un certain nombre d'agences de voyages qui étaient
responsables, qui remplissaient leurs obligations. Cependant, quelques agents
de voyages, étant donné qu'il n'y avait à peu près
pas de contrôle, sinon un contrôle par l'entremise d'un organisme
étranger au Québec, pouvaient s'intégrer dans ce secteur
et étaient plus ou moins responsables. C'est donc dire, M. le
Président, que le premier principe, la première
nécessité pour un projet de loi comme celui-ci, c'est d'abord de
protéger le public. Je pense que le projet de loi qui nous est soumis va
certainement permettre d'en arriver à avoir un certain contrôle
efficace et surtout arriver à protéger le public voyageur.
Cependant, M. le Président, nous nous sommes
inquiétés, au cours de la deuxième lecture, d'un article
de ce projet de loi no 19, en particulier l'article 36 h). En effet, cet
article avait pour but, je pense, de céder l'administration comme telle
d'un organisme, qui était créé par le gouvernement, aux
agences de voyages elles-mêmes, et ceci nous inquiétait avec
raison, je pense. Je cite ce que le député de Saint-Jacques avait
dit, au cours du discours en deuxième lecture. Il disait ceci ou
à peu près ceci: Une loi des agences de voyages devrait aussi
protéger les agences elles-mêmes; or, d'après les
consultations que nous avons effectuées récemment auprès
de quelques agences du Québec, l'enthousiasme à l'endroit du bill
19 semble mitigé. En effet, l'article 36 h), qui semblait soulever
plusieurs réactions, se lit comme suit: "Le lieutenant-gouverneur en
conseil peut faire des règlements pour confier à une corporation
formée d'agents de voyages le mandat d'appliquer, en tout ou en partie,
aux conditions qu'il détermine, la présente loi et les
règlements adoptés en vertu du présent article".
Les réserves que nous avons soulignées concernant ces
articles c'est qu'encore une fois il nous paraissait que le gouvernement du
Québec délaissait ses responsabilités concernant le
contrôle des agences de voyages.
Le gouvernement voulait laisser à d'autres, c'est-à-dire
aux agences de voyages elles-mêmes, la responsabilité de
s'autocontrôler, si vous voulez. Cela ne nous paraissait pas être
un article du projet de loi qui respectait le principe essentiel pour lequel
nous avions demandé, en 1971, un contrôle des agences de voyages,
à savoir la protection du public.
En effet, M. le Président, l'Opposition officielle s'est
opposée, comme l'a affirmé le député de
Saint-Jacques, catégoriquement à cette délégation
de pouvoirs réglementaires et a exigé, tant au niveau de la
deuxième lecture qu'en commission parlementaire, que l'émission
des permis soit effectuée par l'administration publique
québécoise et non par un organisme qui serait
contrôlé par les agences de voyages.
En effet, nous avions affirmé qu'il fallait absolument que ce
soit le gouvernement du Québec qui ait le contrôle sur
l'émission des permis et non une agence extérieure au
gouvernement, parce que les agents de voyages étaient, selon nous, de
véritables professionnels appelés à être
réglementés par une corporation. D'ailleurs, s'est
constituée, il y a quelques mois, la Fédération des
agences de voyages du Québec.
Cette délégation de pouvoirs à une corporation, en
tout cas selon ce que nous affirmions, aurait permis, en fait, de donner
à une corporation l'arbitrage quand il se serait posé des
conflits internes, sans que personne ne puisse avoir la garantie que
l'intérêt public puisse être protégé, comme le
voulait l'esprit de la loi. Je voudrais répéter une comparaison
que le député de Saint-Jacques faisait au cours de la
deuxième
lecture, qui était assez claire et qu'on retrouve dans le rapport
Castonguay-Nepveu concernant les organismes professionnels.
On peut faire une analogie entre cette corporation d'agents de voyages
et les nombreuses corporations professionnelles qui existent au Québec.
C'est, en effet, le rapport Castonguay-Nepveu qui, se penchant sur la
problématique des organismes professionnels au Québec, a
déclaré: "Les besoins de la profession et de la
société ne sont pas nécessairement identiques. Le
rôle des représentants d'un groupe est incompatible avec celui
d'agents de la collectivité". De même qu'on ne peut pas confier
exclusivement le contrôle de la santé publique à un
organisme médical, soit le Collège des médecins, de
même on ne peut accorder exclusivement à un organisme comme le
Barreau le soin de protéger le public en ce qui concerne
l'administration de la justice, de même qu'on ne peut accepter qu'on
puisse confier à un organisme professionnel réunissant les
agences de voyages le soin de voir exclusivement à la protection du
public.
D'ailleurs, le rapport Castonguay-Nepveu continuait en disant ceci: "Les
corporations se voient conférer le pouvoir de contrôler
l'admission à l'étude et à l'exercice de la profession
qu'elles régissent. La possibilité existe que cet organisme se
serve de ces pouvoirs à mauvais escient et en vienne à
créer une rareté artificielle de ses membres de façon
à les faire bénéficier des conditions de travail plus
avantageuses". Par suite du fait qu'avant l'adoption du projet de loi no 65 sur
les services de santé on trouvait un peu trop exclusif pour certaines
professions le pouvoir de contrôler le bien public.
Il a donc fallu modifier ou déplacer cette responsabilité
par un projet de loi.
Alors qu'on n'acceptait pas d'accorder ce principe à des
organismes de santé ou à des organismes qui ont à
travailler au niveau de la justice, nous trouvions extrêmement curieux
qu'on puisse accorder ce pouvoir aux organismes que sont les agences de
voyages.
M. le Président, je suis extrêmement heureux de constater,
après avoir lu les débats qui se sont déroulés tant
au niveau de la deuxième lecture qu'au niveau de la commission
parlementaire, que le ministre a présenté un amendement à
l'article 36 qui répond, je pense, aux inquiétudes que nous
avions soulevées. Nous craignions, encore une fois, que les agences de
voyages puissent établir, comme cela a été le cas dans
certaines professions au Québec, un certain monopole qui leur aurait
permis de contrôler le marché.
Nous craignions aussi que les agences de voyages plus importantes, qui
sont souvent des agences de voyages qui ne sont pas sous le contrôle des
Québécois, aient une force telle qu'elles puissent
contrôler les petites agences de voyages du Québec.
En effet, nous avions la crainte que la Corporation des agents de
voyages tente de se garder la plus grande part du marché par le biais
d'une administration de la loi et de ses règlements qui peut toujours
prêter à interprétation.
On savait déjà que, même actuellement, les petites
entreprises qui essaient de naître ou de survivre dans ce secteur ont la
vie assez difficile. Par exemple, on demande des lettres de recommandation de
trois agences de voyages, qui sont naturellement concurrentes, pour
l'accréditation de nouvelles agences. Or, il est normal que ces
concurrentes se fassent tirer l'oreille et refusent quelquefois d'accorder les
lettres de recommandation.
Il aurait été extrêmement dangereux de laisser
à cet organisme professionnel le soin non seulement de surveiller les
agences de voyages, mais le soin d'émettre de nouveaux permis.
Bref, nous disions que ce projet de loi favoriserait encore les grosses
entreprises les plus puissantes aux dépens des petites. C'est pourquoi
nous nous étions opposés à conserver l'article 36 tel
quel.
Comme je le disais, je pense que le ministre a accepté les
revendications qui ont été faites par l'Opposition officielle et
a soumis, en commission parlementaire, un amendement qui remplace
complètement l'article 36. Cet amendement nous parait satisfaisant et
permettra surtout de pouvoir surveiller les agences de voyages, de confier au
gouvernement le soin de surveiller les agences de voyages. Il accordera au
gouvernement le soin d'émettre les permis concernant les agences de
voyages ce qui permettra d'avoir une meilleure protection du public
et lui permettra en même temps d'exercer une surveillance sur les
agents de voyages, protégeant ainsi les petites agences contre le
monopole qu'auraient pu appliquer les grandes agences de voyages dans le projet
de loi comme il nous avait été soumis au cours de la
première et de la deuxième lecture.
Donc, M. le Président, l'Opposition officielle se réjouit
de cet amendement, comme elle se réjouit du projet de loi qui nous a
été soumis et qui a été demandé par
l'Opposition officielle dès 1971.
Il est entendu que nous voterons en faveur du projet de loi en
troisième lecture, comme nous l'avons fait en deuxième
lecture.
M. Claude Simard
M. SIMARD: M. le Président, très brièvement, je me
rends compte que même les Oppositions sont en faveur du projet de loi no
19, mais j'aimerais ajouter ceci. C'est que l'inquiétude du monopole
qu'avaient le député de Saguenay et l'Opposition, en ce qui a
trait à l'article 36 h), nous l'avions prévue bien avant. Etant
donné que l'association des agents de voyages a été
fondée seulement il y a quelques mois, que le projet de loi avait
été déposé au comité de législation
à peine quelques semaines après la formation de cette association
d'agents
de voyages et que c'était la seule et la première agence
de voyages à être constituée comme telle, M. le
Président, nous avons révisé notre tir, parce que nous ne
voulons pas qu'il y ait seulement une agence de voyages qui représente
tous les agents de voyages de la province de Québec. Au contraire, nous
sommes pour le fait qu'il y ait plusieurs associations d'agents de voyages qui
regroupent enfin les agents de voyages de cette province.
Maintenant, seulement un mot pour terminer. Le congrès de l'ASTA
a eu lieu, comme vous le savez, M. le Président, il y a quelque
semaines, à Montréal; c'est le congrès le plus prestigieux
qu'ait connu la ville de Montréal. Ce congrès regroupait plus de
60 pays, plus de 2,000 membres et plus de 5,000 congressistes. Lors des
discours de clôture, il a été dit par le nouveau
président élu "que tous les gouvernements, autant des pays que
des provinces, devraient légiférer sur les agents de voyages". Je
suis très heureux, M. le Président, d'annoncer que c'est la
première fois, en Amérique du Nord, qu'un gouvernement
légifère sur les agents de voyages et la province de
Québec est la première.
M. le Président, je remercie autant l'Opposition officielle que
les autres Oppositions, tous les membres de la commission et tous les membres
de cette Assemblée qui voudront bien voter en faveur du projet de loi no
19, en troisième lecture.
Je vous remercie.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que le projet de loi no 19 est
adopté en troisième lecture?
M. MORIN: Non, on a demandé un...
M. VEILLEUX: Adopté.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté.
M. VEILLEUX: Le conseil national n'est pas ici pour décider.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! Adopté.
Projet de loi no 4 Troisième lecture
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre de l'Industrie et du Commerce
propose la troisième lecture du projet de loi no 4, Loi constituant la
Société Inter-Port de Québec.
Est-ce qu'il y a des débats?
Le chef de l'Opposition officielle.
M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN: M. le Président, il me paraît important de
revenir sur certains aspects de ce projet de loi. J'ai déjà eu
l'occasion, en deuxième lecture, de dire pourquoi nous nous opposons
à son adoption. Depuis lors, au cours des séances de la
commission, j'ai tenté d'obtenir des éclaircissements sur divers
aspects du projet, lesquels je n'ai guère obtenus. J'ai tenté
également avec d'autres membres de l'Opposition d'obtenir quelques
changements, sans succès.
Aussi, vais-je prendre l'occasion de cette troisième lecture pour
ramasser les observations qui s'imposent à l'égard du projet de
loi portant sur la Société Inter-Port. Je regrette que le
député de Montmorency ne soit pas là, car j'ai
l'impression qu'il a légèrement induit la commission en erreur,
l'autre jour, lorsqu'il a laissé entendre à la commission
parlementaire que tous les maires des villes situées à
l'intérieur de la zone spéciale de Québec étaient
d'accord sur le projet de Société Inter-Port.
Je voudrais citer certains extraits de la transcription des
Débats de la commission qui ont eu lieu le 11 de ce mois.
Le député de Montmorency nous apprenait que, le mardi
précédent, il y avait eu une assemblée de la
Communauté urbaine de Québec, et il ajoutait: "Nous nous sommes
divisés en secteurs parce qu'il fallait un représentant
additionnel pour former le comité dont M. Goldbloom parlait jeudi
dernier. Lors de cette réunion, continue le député, j'ai
demandé à chacun des représentants de secteurs de parler
à tous les maires de municipalités pour m'assurer que l'avance
qui avait été faite je pense que le député
voulait dire l'avancé qui avait été fait à
l'effet que tous les maires sont pour la Société Inter-Port..."
il y a trois points de suspension dans le compte rendu. Plus loin, le
député continue: "Lorsqu'ils ont donné leur compte rendu
concernant le délégué qu'ils voulaient avoir au sein du
comité, on a ajouté que tous les maires de la Communauté
urbaine de Québec étaient d'accord avec le projet Inter-Port qui
avait été adopté en deuxième lecture, hier".
Plus loin, plus exactement à la page R/16-B/1C de la
transcription, le député de Montmorency répétait
ses affirmations: "Vous pouvez être assuré, disait-il, M. le chef
de l'Opposition, que ce n'est pas souvent que je fais des avances
j'imagine qu'il voulait dire des avancés et lorsque je vous
avance que tous les maires sont d'accord, je vous prierais de me croire, s'il
vous plaît. Ce n'est pas un avancé gratuit". Le ministre avait
l'air satisfait de ces interventions d'un député dont la
circonscription se trouve à l'intérieur de la CUQ.
Nous sommes allés aux nouvelles de notre côté pour
tenter de savoir si vraiment il en était ainsi. Or, je n'hésite
pas à dire que nous avons été induits en erreur et je
souhaiterais que le député de Montmorency soit en cette Chambre
pour pouvoir nous donner des précisions sur ce qu'il a dit à ce
moment.
M. BACON: Allez le chercher.
M. MORIN: M. le Président, il semble bien que la majorité
des maires de la région de Québec soit plus ou moins au courant
de ce projet de Société Inter-Port. Le ministre nous a
affirmé que cela fait deux ans qu'on en discute. Il aurait pu dire qu'on
en discute en catimini, parce que, de fait, la plupart des maires, en tout cas
une majorité, semblent en avoir très peu entendu parler et
semblent peu enclins à prendre position. La plupart ne savent pas de
quoi il s'agit, se montrent réticents, n'ont pas d'opinion
arrêtée sur le sujet et je crois savoir que certains d'entre eux
sont même contre le projet.
Je conseillerais en tout cas au ministre, avant la troisième
lecture, de s'enquérir de façon plus précise auprès
des maires de la zone spéciale de Québec et de s'assurer que les
avancés sinon les avances du député de
Montmorency sont exacts. Nous avions proposé au tout début, avant
la deuxième lecture, qu'on entende les principaux
intéressés sur ce projet de loi, c'est-à-dire la
Communauté urbaine de Québec et les maires des villes
situées à l'intérieur de la zone spéciale.
Depuis lors, les 222 maires appartenant à la Conférence
administrative des maires du Bas-Saint-Laurent et de la Côte-Nord, ont
fait savoir au ministre qu'ils étaient inquiets de ce projet de loi. Ils
ont dû se déplacer, je crois, M. le Président, pour se
faire entendre. Cela nous donnait raison. Il a fallu que les maires fassent une
démarche auprès du ministre pour lui signifier leur opposition,
en tout cas leurs doutes, leur anxiété devant ce projet de
loi.
Mais le ministre nous avait dit qu'il n'avait pas l'intention de les
entendre. Il n'avait pas l'intention de les entendre publiquement. Je ne sais
s'il les a reçus. Je pense qu'il a reçu les représentants
de la Conférence de l'Est du Québec. Mais il ne les a pas
reçus en plein jour, il ne les a pas reçus en commission
parlementaire. Il les a reçus derrière des portes closes,
à ce que nous croyons savoir. M. le Président, j'estime, pour ma
part, que les événements, depuis que ce projet de loi a
été déposé, donnent raison à l'Opposition.
Nous étions inquiets de voir un projet de loi être
expédié à la vapeur sans que l'on consulte les principaux
intéressés. Aussi, je voudrais faire appel une dernière
fois au ministre. Je voudrais lui demander de remettre ce projet, de permettre
aux intéressés de venir dire tout haut ce qu'ils pensent tout
bas, de permettre aux intéressés de prendre connaissance du
dossier.
Il y a plusieurs maires de la région de Québec qui sont
peu au fait de ce qui se passe, qui ne comprennent pas que l'on puisse
créer un organisme qui va, de fait, se trouver en concurrence avec la
Communauté urbaine. Celle-ci, en effet, a été l'objet de
bien des critiques, comme sans doute la plupart des communautés
urbaines, mais, s'il est un domaine où la CUQ s'est montrée
efficace, c'est bien celui du développement industriel.
Or, que fait ce projet de loi? M. le Président, il retire, dans
les faits, à la Communauté urbaine de Québec ses
compétences en matière de développement industriel pour
les donner à une société
fédérale-provinciale qui, bien sûr, gérera,
planifiera le développement d'une zone qui est plus vaste que celle de
la Communauté urbaine, mais qui va le faire dans un contexte qui n'est
plus celui de la décentralisation auquel le ministre semblait attacher
beaucoup d'importance.
M. le Président, ou bien l'on veut décentraliser le
développement économique et reconnaître aux régions
de véritables compétences, auquel cas, pourquoi ne respecte-t-on
pas l'organisme déjà en place, qui fait bien son travail dans ce
domaine, et qui est la CUQ? Ou bien la zone de la CUQ n'était pas assez
vaste et il faudrait envisager de planifier le développement
économique sur une aire géographique plus étendue. Mais,
alors, pourquoi s'arrêter en chemin, pourquoi ne regrouper que les
municipalités de la zone spéciale, inquiétant par le fait
même tous les ports situés en aval de Québec?
M. le Président, il semble s'échapper de ce projet de loi
une odeur que l'Opposition a toutes les raisons de redouter. Pourquoi ce
traitement spécial pour la région de Québec?
Pourquoi ne donne-t-on pas le même traitement à d'autres
régions du Québec, qui ont bien plus besoin encore que leur
développement portuaire et industriel soit planifié? Bien
sûr, on ne peut en vouloir à une ville comme Québec de
vouloir se développer, c'est tout naturel. Mais alors, pourquoi ne pas
laisser la chose entre les mains des gens compétents qui ont
commencé à développer la région et qui, de
surcroît, ont obtenu un certain nombre d'investissements que le ministre
connaît très bien, investissements qui n'ont pas tous
été annoncés?
M. le Président, il ne fallait pas s'arrêter en si bon
chemin. Puisqu'on prétend créer une "société
inter-port", il fallait voir à ce que le développement portuaire
et industriel mais surtout portuaire de toute la vallée du
Saint-Laurent située à l'intérieur des frontières
du Québec profite d'une société comme celle-là.
Il fallait, si vraiment l'on prétend créer une
"société inter-port", songer qu'il n'y a pas que Québec
qui soit appelé à se développer comme port dans la
vallée du Saint-Laurent. Il fallait songer que, dans le
Bas-Saint-Laurent et sur la Côte-Nord, il y a également des
régions qui demandent à se développer, qui ont les
ressources et qui ont les chemins de fer qui pourraient se rendre
jusqu'à quai. Je pense, en particulier, au projet du port de
Gros-Cacouna.
Pourquoi, puisque l'on parle de façon enflée il faut
l'avouer, d'une "société inter-port", n'avoir pas songé
qu'il existe des ports en aval de Québec et pourquoi n'avoir pas saisi
l'occasion de développer et de planifier, les uns par rapport aux
autres, tous les ports de la vallée du Saint-Laurent?
C'est avec raison que le député de Johnson a
proposé de modifier le titre de ce projet de loi, qui est trop
ambitieux par rapport au développement qu'il veut créer.
"Société Inter-Port": il ne s'agit, en fait, que du port de
Québec et des berges, des rives du Saint-Laurent situées dans les
environs immédiats. De surcroît, cette société
inter-port n'aura même pas la compétence voulue pour
développer les ports eux-mêmes. Sur ce point, le ministre en a
quelque peu rabattu depuis que le bill 23 a été soumis à
cette Assemblée, dans lequel on faisait allusion à la possibilit
que cette société s'occupe également de
développement portuaire.
Désormais, on nous parle plutôt de développement
industriel qui pourrait profiter des développements portuaires existants
ou à venir. Mais il faut préciser que l'existence de cette
société ne va modifier en aucune façon le partage des
compétences en matière de navigation et en matière
portuaire, existant entre Québec et Ottawa. Que l'on aime la chose ou
qu'on la regrette pour notre part, nous la regrettons, tout le monde le
sait la compétence en matière de navigation et en
matière portuaire échappe entièrement au Québec;
entièrement.
Le pouvoir fédéral a pris soin, en 1865, de se
réserver exclusivement ce qui constituait, à l'époque, les
grandes compétences d'ordre économique. Il n'a laissé au
Québec que les questions qui paraissaient secondaires, locales.
Le pouvoir fédéral savait très bien que les chemins
de fer, la navigation et les ports constituaient la base même du
développement économique et c'est pourquoi il a jalousement
veillé depuis à conserver ces compétences, à ne les
laisser jamais diluer par quelque volonté provinciale ou locale que ce
soit. Nous connaissons les conséquences, M. le Président;
conséquences terribles pour le Québec, tant dans le domaine de la
navigation, d'ailleurs, que dans le domaine des chemins de fer. Nous avons au
Québec neuf fois moins de rails de chemins de fer que dans l'Ontario; je
pense que cela est suffisamment éloquent.
En ce qui concerne les ports, chacun sait la difficulté qu'il y
a, chaque hiver, à obtenir que l'entretien du cours d'eau du
Saint-Laurent soit exécuté au moment où il doit
l'être. Chacun sait que les brise-glaces ont leur port d'attache avant
tout à Halifax. Chacun sait que, dès que l'hiver se fait dur et
que le fleuve est encombré de glaces, la navigation est interrompue.
Chacun sait que Québec même, M. le Président, se trouve en
quelque sorte assis entre deux chaises, entre deux pôles de
développement: d'une part, Halifax à une extrémité,
d'autre part, les ports des Grands Lacs.
M. le Président, cela n'a rien d'étonnant. Comment
voulez-vous qu'un Etat qui ne possède pas les compétences
nécessaires puisse voir à développer ses propres ports,
ses propres chemins de fer? Le Québec n'a reçu que la portion
congrue de l'infrastructure nécessaire au développement
économique à la fin du 19e siècle et au cours de la
première moitié du 20e, je devrais dire les trois quarts du 20e.
Le Québec, dans ce domaine des ports et des transports en
général, est un Etat impuissant, un Etat qui ne maîtrise
pas son développement, son destin économique. Le Québec
est un Etat tronqué. Et les ministères qui prétendent
s'occuper d'industrie et de commerce, de planification, de
pseudo-planification, même de transports, n'exercent que des bouts de
compétence. Les ministres pe vent s'illusionner, se rengorger mais
ils savent bien que sur l'essentiel ils sont impuissants. Ce ne sont pas eux
qui vont prendre les décisions ultimes quant au développement
industriel et portuaire du Québec; ce sont d'autres et toujours dans le
même sens, dans le sens des intérêts de la majorité
qui domine le Canada.
M. le Président, si encore cette "Société
lnter-Port" méritait son nom! Si encore cette société
valait au Québec la possibilité de s'occuper de son
développement portuaire, de planifier les ports de Québec et des
environs et du Bas-Saint-Laurent, l'Opposition applaudirait à
l'initiative du ministre. Mais ce n'est pas le cas. Cette société
est faussement inter-port, c'est en réalité une
société de développement industriel régional. Dans
la réalité des choses, ce n'est pas plus que cela.
Malheureusement, si ce n'est que cela, comme je l'affirme, ce projet vient en
conflit avec un organisme existant qui s'occupe déjà de
développement régional, qui est la CUQ. J'estime, M. le
Président, que la façon de procéder du ministre constitue
un coup de Jarnac aux gens qui s'occupent de développement industriel
à la CUQ.
Un jour, le chat sortira du sac. Un jour, nous saurons pourquoi ce
gouvernement a choisi de procéder de la sorte et d'imposer à des
gens qui n'en veulent guère un nouvel organisme qui va venir manger les
compétences de l'autre, qui va sans doute même, avant longtemps,
être en conflit avec l'autre, à moins que le ministre, mettant
toutes ses cartes sur table, ne fasse adopter un projet de loi au terme duquel
la CUQ se verrait amputée de ses compétences dans le domaine du
développement économique.
M. le Président, la CUQ est un organisme exclusivement
voué aux intérêts de la région de Québec,
alors que la Société lnter-Port va tomber, elle, sous la coupe
des gouvernements d'Ottawa et de Québec. Si encore on avait prévu
le raccordement avec le CUQ, autre qu'une simple présence de la CUQ au
conseil d'administration de la Société lnter-Port; si encore on
avait prévu par exemple que la CUQ put avoir un certain nombre d'actions
dans les 1,000 qui sont créées par le projet de loi; si on avait
prévu, par exemple, que le Québec aurait 60 p.c. des parts
comme c'est le cas la CUQ, 20 p.c, 25 p.c. ou 30 p.c. et le gouvernement
fédéral, le résidu, nous nous serions dit: Le gouvernement
québécois entend véritablement coordonner le
développement de la zone spécia-
le de Québec et il n'hésite pas à inclure la CUQ,
reconnaissant de la sorte le rôle déjà assumé par
cette communauté dans le développement de la région. Mais
ce n'est pas le cas, M. le Président. A toutes fins pratiques, il ne
faut pas se le cacher, à toutes fins pratiques, la société
dite Inter-Port, qui en fait n'en est pas une, prend la place, se substitue
à la CUQ. C'est alors que l'on se rend compte de toute l'importance de
la façon de procéder du gouvernement. Si, comme je l'affirme,
l'effet de ce projet de loi va être de réduire les
compétences de la CUQ dans ce domaine au profit d'une
société fédérale-provinciale, si tel est bien le
cas, on n'aurait jamais dû procéder de la sorte sans consulter
tous les intéressés. Sans doute aura-t-on craint la consultation.
En tout cas, on aura eu peur d'une confrontation publique. On aura eu peur,
comme le disait le député de Johnson, que la queue du chat ne se
voie. Ce projet reflète-t-il la méfiance du ministre a
l'égard du régionalisme? Je suis porté à le croire.
Quand je parle de régionalisme, je veux dire par là, la
constitution de régions qui s'occupent elles-mêmes de leurs
intérêts, qui négocient bien sûr avec les
gouvernements supérieurs, notamment avec le gouvernement
québécois, mais qui gèrent elles-mêmes leur
développement, quitte à voir le gouvernement
québécois harmoniser le développement des diverses
régions. C'est cela que j'entends par régionalisme.
Or, si je considère les effets de ce projet de loi, je suis
obligé de constater qu'il prive un organisme régional valable qui
a fait preuve de ses compétences et qu'il l'a fait sans qu'il y ait
confrontation publique avec la communauté en question, sans que les
maires de la zone spéciale aient pu venir donner leur sentiment à
l'égard du projet de loi. Pourquoi a-t-on procédé de la
sorte? Nous le saurons un jour. Je ne doute pas que nous finirons par
comprendre ce qu'il y a là-dessous. Pour l'instant, nous ne pouvons que
le soupçonner et je n'irai pas plus loin.
Quand on considère le contrôle qu'exerce le pouvoir
fédéral sur les ports du Québec, on ne peut que
s'inquiéter. On voit des parcelles entières du territoire
québécois qui nous échappent, à toutes fins
pratiques, et qui sont sous le contrôle de l'étranger. Je prenais
connaissance, récemment, d'un article paru le 18 août 1973 dans le
Soleil. Cet article, intitulé "2,000 petits ports confiés au
Service des pêches et des sciences de la mer", nous apprenait qu'au
Québec 427 petits ports de pêche ou de plaisance sont soit
propriété fédérale, soit sous le contrôle du
gouvernement fédéral. Cet article nous apprenait également
que les crédits affectés par Ottawa à la gestion de ces
ports vont plus largement aux autres provinces par comparaison. Par exemple,
sur une somme de $10 millions apparaissant au budget, le Québec obtenait
$830,000. Double désavantage, M. le Président, que de voir un
pouvoir étranger régir le territoire québécois sur
certains points qui lui sont essentiels; danger d'un pouvoir qui ne
connaît pas nos besoins et qui n'en a cure, danger d'un pouvoir qui ne
consacre même pas à l'étude des problèmes de ces
ports l'argent qu'il convient.
M. le Président, je pense que cet exemple illustre fort bien la
méfiance qui devrait habiter tout Québécois à
l'égard du développement du Québec par d'autres. Le
développement du Québec ne se fera pas désormais par
d'autres. Il ne peut se faire que par les Québécois et à
partir de centres de décision situés ici au Québec. Le
reste n'est qu'illusion. Quand il faut aller quémander à Ottawa,
quand un ministre nous répond et combien de fois devons-nous nous
satisfaire de cela pour réponse . Je vais d'abord aller voir
à Ottawa ce qu'on pense faire, quels sont les projets, les intentions du
gouvernement fédéral et, ensuite, je reviendrai et je vous dirai
ce qu'il en est et je vous ferai part des intentions du gouvernement
québécois...
M. SAINT-PIERRE: Point de règlement, M. le Président.
M. MORIN: Vraiment de règlement?
M. SAINT-PIERRE: Oui, point de règlement. Est-ce qu'on peut
inviter le chef de l'Opposition à s'en tenir à la
troisième lecture du projet de loi no 4 qui touche la
Société Inter-Port de Québec?
M. MORIN: M. le Président, ce projet de loi pour
répondre au ministre s'inscrit, à moins que je ne m'abuse,
dans un projet plus vaste, peut-être, de développement industriel
au Québec. Pour montrer la portée du projet de loi ou son absence
de portée, il faut scruter le contexte à l'intérieur
duquel il s'inscrit.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Oui, sauf que je rappellerai au
chef de l'Opposition que le débat de troisième lecture doit
surtout se limiter aux détails du projet de loi.
M. BURNS: Ses implications.
M. MORIN: M. le Président, je regrette, mais j'ai des choses
à dire sur ce projet de loi.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Allez-y! Je ne vous ai pas encore
arrêté.
M. MORIN: Le ministre me répondra tout à l'heure, si
j'erre. J'ai tout lieu de croire que ce projet reflète une fois de plus
l'état général du Québec qui n'a pas changé
depuis 100 ans. Ce n'est pas le Québec qui prend les principales
décisions relatives à son développement et ce projet de
loi en est une illustration de plus.
Nous ne pourrons même pas, M. le Président, prendre des
décisions relatives au développement portuaire de Québec.
On pourra développer des centres industriels dans la mesure où il
y aura des ports pour répondre aux besoins,
mais le Conseil des ports est un organisme fédéral, que je
sache. En créant cette Société faussement Inter-Port, le
Québec ne va pas récupérer du même coup la
compétence relative à la navigation, ni la compétence
relative aux ports. C'est une compétence fédérale qui nous
échappe totalement.
M. le Président, il est sans doute temps que j'en vienne à
mes conclusions.
Je regrette que ce projet de loi soit de nature, en fin de compte,
à nuire à l'esprit d'entreprise dont a fait preuve jusqu'ici la
CUQ en matière de développement industriel. Si, encore, nous
comprenions toutes les raisons qui ont motivé le ministère de
l'Industrie et du Commerce dans la rédaction du projet de loi, si nous
pouvions connaître tous les dessous de ce projet, toutes les tractations
qu'il cache, tous les intérêts qu'il prétend
protéger, tous ceux qu'au contraire il entend combattre, nous pourrions
peut-être comprendre mieux pourquoi on nous l'a proposé.
Je ne voudrais pas affirmer que si nous avions eu plus de détails
sur le projet, nous aurions voté contre. Si le ministre avait consenti
à ce que la commission parlementaire reçoive les principaux
intéressés et j'entends par là la Communauté
urbaine de Québec, les maires des villes situées à
l'intérieur de la zone spéciale de Québec ainsi que les
maires ou les organismes qui s'intéressent au développement
portuaire dans le Bas-Saint-Laurent et sur la Côte-Nord si nous
avions pu mettre toutes les cartes sur table et si le ministre avait pu
s'expliquer devant tout le monde, nous aurions sans doute fini par conclure que
ce projet avait l'appui de tous les intéressés.
M. le Président, il semble bien que ce soit tout le contraire, en
fait. D'après ce que nous savons, ce projet inquiète au moins
deux régions du Québec: le Bas-Saint-Laurent et la
Côte-Nord. Ce projet n'a pas été débattu ouvertement
à la Communauté urbaine de Québec. Il a peut-être
fait l'objet de tractations de couloirs ou derrière des portes closes,
c'est possible, mais nous n'en savons rien. Si tel était le cas,
d'ailleurs, j'aurais des réserves à exprimer, car ce genre de
tractations doit se faire au grand jour, surtout quand il existe
déjà un organisme compétent.
M. le Président, ce qui nous rend méfiants à
l'égard de ce projet de loi, je le répète pour la
nième fois, c'est, d'abord et avant tout, la façon dont on a
procédé pour l'amener devant cette Chambre et nous le faire
ingurgiter pour ainsi dire de force, en l'absence des principaux
intéressés. Si on avait pu nous démontrer devant les
intéressés en leur présence que ce projet de
loi va favoriser la zone spéciale de Québec sans nuire au
développement des autres régions; si on avait pu nous
démontrer que ce projet de loi constituant la Société
Inter-Port de Québec avait quelques chances de rapatrier au
Québec un certain pouvoir de décision en matière
portuaire; si on avait pu nous démontrer que ce projet de loi
correspondait à une certaine idée des régions et du
régionalisme et de l'autonomie que l'on doit reconnaître aux
régions dans le domaine du développement économique, nous
aurions voté en faveur du projet de loi. Je n'hésite pas à
le dire.
Ce qui nous fait voter contre, c'est avant tout la façon choisie
par le gouvernement pour faire adopter ce projet de loi, à l'abri des
regards indiscrets des intéressés, sans qu'un débat public
et complet n'ait lieu. C'est d'abord et avant tout pour cela que nous
continuerons de nous y opposer. Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): L'honorable député de
Johnson.
M. Maurice Bellemare
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, j'ai dit et
répété devant la commission parlementaire de l'industrie
et du commerce que cette loi était un écran de fumée et
que je ne pouvais comprendre pourquoi un homme d'une grande puissance de
travail et qui a surtout des principes se soit laissé entraîner,
un peu malgré lui, dans ce rouage qu'il défend aujourd'hui bien
maladroitement.
Il est pris, on dirait, avec une loi qu'il n'a pas voulue mais qu'on lui
a imposée. Je regrette l'absence du député de Montmorency
parce que je crois deviner que c'est lui qui a été l'instigateur
de tout ce mouvement d'Inter-Port, lui qui est maire d'une ville voisine qui
s'appelle Beauport et qui, il ne l'a pas caché à la commission
parlementaire, a dit: Nous allons en venir à bout, de la CUQ, de la
Communauté urbaine de Québec.
Pourquoi cette provocation? Est-ce que c'est là tout l'enjeu du
projet de loi qui est devant nous, de la Société Inter-Port?
Est-ce que c'est une promesse d'élection? Est-ce qu'on ne s'en servira
pas en 1976 et en 1977 comme on l'a fait en 1973, quelques heures avant
l'annonce des élections provinciales, avec le port pour les
pétroliers géants de Cacouna pour annoncer de nouveau
qu'il y a des développements extraordinaires qui vont s'accomplir dans
ce grand port, qui est tant souhaité par tous ceux qui vivent dans cette
région?
Je pense que l'honorable député de Montmorency a
"bulldozé" l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce, ce grand
gentilhomme qui ne se laisse pas facilement manoeuvrer, puisque c'est un
dauphin à la succession possible de la grande chefferie libérale.
Et je sais qu'hier il faisait état de ses pronostics de l'année
et je trouvais qu'il faisait une très bonne photographie.
Je ne peux pas comprendre son attitude dans la défense si
véhémente qu'il apporte à ce projet
de loi. Comme l'a dit tout à l'heure l'honorable chef de
l'Opposition, moi aussi je m'insurge contre cette participation
fédérale, surtout après l'amendement que j'ai
proposé et que l'honorable ministre a rejeté du revers du gant en
disant: Non, ce n'est pas possible. Nous n'acceptons pas. Dans le bill 23,
préalablement à celui que l'on dépose maintenant, le bill
no 4, le titre lui-même de la Société Inter-Port de
Québec n'atteignait pas véritablement le but pour lequel ce titre
avait été donné puisqu'on a fait disparaître dans le
nouveau projet de loi le mot "portuaire". C'est là que je me demande en
vertu de quoi le gouvernement provincial peut concurrencer la CUQ, qui a
déjà, comme l'a dit le chef de l'Opposition, des pouvoirs
extraordinaires.
Même s'il en manque, il vaudrait mieux lui en donner de nouveau
pour ne pas mettre deux organismes en concurrence lorsqu'il s'agit d'un
développement portuaire et du développement d'un complexe
industriel de cette importance. Mais, M. le Président, laissez-moi
attirer votre attention sur un fait un peu particulier. Le gouvernement
fédéral vient, dans un ordre bien spécifique, celui d'un
complexe industriel, y porter son argent, y porter son contrôle, exercer,
en vertu du protocole d'entente véritablement sa juridiction, qui n'est
pas la sienne. Vous le remarquerez, M. le Président, dans le premier
attendu, qui est cité au protocole d'entente concernant le mandat et le
début des opérations: "Attendu que le gouvernement du
Québec a défini certaines zones du Québec à titre
de zones spéciales, après consultation avec le Québec"...
Donc, c'est l'initiative du gouvernement fédéral qui, lui,
décide, après consultation avec les autorités du
Québec, de définir ce que sera le plan industriel, et
particulièrement dans la cité de Québec.
Au deuxième attendu, M. le Président, on dit: "Attendu
qu'en vertu du paragraphe 3 de la loi fédérale le ministre peut
conclure avec une province un accord prévoyant que le Canada et cette
province peuvent obtenir la constitution en corporation d'un ou de plusieurs
organismes"... C'est toujours l'initiative du gouvernement
fédéral dans une province qui se veut véritablement
bénéficiaire d'un fédéralisme rentable. Mais si le
fédéralisme rentable, c'est d'être à genoux devant
le veau d'or d'Ottawa, je dis que je n'en suis pas, M. le Président. Et
je pense que, là, on a véritablement une conception
différente de ce qu'on peut appeler la véritable autonomie et le
respect intégral des droits sacrés qui nous appartiennent dans la
province de Québec, en vertu de la constitution canadienne.
M. le Président, pourquoi laisser pénétrer encore
le gouvernement fédéral? Pour quelque $100,000? M. le
Président, devant et au su de tout le monde, dans un protocole
d'entente, lui donner large partie dans le bureau de direction comme
contrôleur, je dis qu'il y a là, au début, une
mésentente formelle entre le député de
Montmorency, qui ne partage pas les points de vue de la CUQ, et son
petit patrimoine à lui, à Beauport. Cela, ce n'est pas
véritablement travailler en faveur de la collectivité quand on
exploite à fond de train et qu'on fait marcher un ministre de la
qualité de celui qui est devant moi, M. le Président, pour
réaliser ce petit objectif. Cela va causer certainement préjudice
à la CUQ, qui a fait véritablement un bon travail jusqu'à
maintenant.
M. le Président, pourquoi dire Inter-Port quand on sait que ce
n'est pas véritablement le but, que c'est plutôt un complexe
industriel qu'on veut établir, avec la bénédiction, la
surveillance et surtout la participation fédérale? Croyez-vous
que les gens d'en bas, que les gens qui ont désiré depuis
longtemps un port pour les pétroliers géants, comme celui de Gros
Cacouna, qui a été annoncé à grande
publicité, sont heureux de ce soupçon d'un port pour
Québec? Non, il n'est pas question de cela, pas du tout. On leur a dit,
en commission parlementaire: N'ayez crainte, une déclaration va
être faite par l'honorable premier ministre, demain ou
après-demain, au sujet de Gros Cacouna et on va vous assurer qu'il va se
faire quelque chose.
Mais, M. le Président, est-ce que, depuis qu'on parle de la
réouverture prochaine du canal de Suez, il n'y a pas là une
raison supérieure, puisque les superpétroliers ont perdu beaucoup
de leur attrait? Est-ce que c'est normal, M. le Président, que l'amiante
qui est sortie ici, une richesse naturelle de notre province, puisse être
manipulée et envoyée directement dans les ports des Maritimes?
Pourquoi pas chez nous? Ce minerai qui est une ressource naturelle du
Québec, pourquoi pas chez nous, dans notre propre port?
Non, M. le Président, M. Marchand semble négliger
très fortement sa province qui lui a pourtant donné un
témoignage très éloquent encore le 8 juillet dernier.
Je pense que c'est une décision certainement reliée
à la guerre qui se fait au Moyen-Orient et plus particulièrement
au rôle que jouent les Etats-Unis dans tout ce problème.
Le Québec n'aura pas, au cours des années à venir,
les moyens financiers de réaliser ce grand projet; c'est trop
considérable pour que le Québec puisse véritablement payer
de ses fonds. En voulez-vous une preuve? Son collègue, le ministre des
Finances, disait dernièrement ceci: "Je ne crois pas, par exemple, qu'on
pourrait facilement se lancer dans la construction d'un secteur témoin
dans le pétrole, s'il s'agit d'investir $300 millions ou $400 millions."
Ces propos sont rapportés dans le Soleil du 15 novembre 1974, il y a
à peine un mois. Non, je pense qu'on s'est fait passer un joli sapin,
pas celui qu'on a passé à Paris, mais un joli sapin. Le ministre
y va très prudemment, mais, mon Dieu, que ce serait donc encore le temps
de dire non, au moins de changer le titre.
Je comprends que les étapes sont franchies,
mais, dans le temps, il aurait pu accepter, au moins, d'en changer le
titre et de lui donner véritablement sa valeur. Il s'agit d'un complexe
industriel, demandé, exigé, défini par le gouvernement
fédéral, qui a imposé son protocole d'entente, et dont il
va diriger toutes les activités, à côté d'une
organisation provinciale qui a été faite par une loi de notre
Parlement et qui constitue la Communauté urbaine de Québec.
On va les mettre en concurrence et vous allez voir dans quelques
années, dans quelques mois à peine, la concurrence terrible qui
va se produire. Pourquoi? Parce qu'il y a un maire qui est un adjoint
parlementaire, qui est le député de Montmorency, qui a fait
chanter le gouvernement. Il fait tellement chanter le gouvernement qu'il a
réussi à la commission parlementaire à fiare imposer un
membre de sa section à lui, en plus.
Le ministre l'a accepté avec beaucoup de révérence.
Mais quelle importance a donc ce député contre tout
l'intérêt public qui est en cause?
Le ministre, qui a véritablement fait sa marque au
ministère après ses nombreux prédécesseurs, je
pense, s'est laissé entraîner dans un guet-apens. Il est mal pris
parce qu'il est prêt à accepter n'importe quel amendement qui
pourrait donner raison au député, et cela, tout au long de la
commission parlementaire, nous l'avons remarqué. Lui qui n'est pas
timide s'est laissé influencer.
Je pense que, si le port de Cacouna nous est repromis pour 1975, 1976,
ça pourrait encore être un autre objectif pour les prochaines
élections.
Je n'ai pas, je crois, plus de temps à ma disposition, mais je
dis que ce complexe industriel aurait pu se réaliser facilement sans que
le gouvernement fédéral vienne y mettre son nez, sous le
contrôle de la Communauté urbaine de Québec, avec les
moyens qu'aurait pu lui fournir le Commerce et l'Industrie, notre gouvernement.
Je pense que c'est là encore une erreur stratégique dans ce qu'on
quémande actuellement au fédéral.
Nous sommes devenus des assistés sociaux du gouvernement
fédéral, nous sommes des gens qui, à genoux, demandons
notre juste part, qui nous est donnée en vertu de la constitution
canadienne, si on la respecte intégralement.
Aujourd'hui, nous assistons, dans plusieurs ministères, à
des quémandages, à des promenades. Même le ministre des
Finances est revenu dernièrement déçu de l'attitude du
gouvernement fédéral face à la requête qu'il a faite
pour protéger des ressources naturelles qui nous appartiennent et sur
lesquelles nous avons pleine et entière juridiction.
Aujourd'hui, nous avons la démonstration du ministre de
l'Industrie et du Commerce qui, lui aussi, prend une attitude de
quémandeur, d'assisté social du gouvernement
fédéral pour obtenir, pour un député, un projet que
la CUQ aurait pu réaliser dans des conditions aussi acceptables, comme
l'est, M. le Président... Oui, j'ai fini, je termine, M. le
Président...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! Je rappelais simplement
au député de Johnson ce qu'il me rappelait lui-même...
M. BELLEMARE (Johnson): C'est-à-dire que le contenu...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): ... l'article 126.
M. BELLEMARE (Johnson): ... le contenu. Pardon? Je ne vous comprends
pas, M. le Président, on parle comme dans un poulailler, là.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je termine et je
félicite le chef de l'Opposition du courage qu'il a
démontré dans le débat et particulièrement des
arguments qu'il a apportés pour prouver à la population qu'il y
avait là un enjeu dont on ne connaît pas la fin, mais qu'on voit
aujourd'hui, par des modalités d'application différentes, sortir
véritablement en dehors des cadres de la juridiction provinciale et se
soumettre encore à un gouvernement fédéral.
M. DUFOUR: ... le spectacle...
M. Guy Saint-Pierre
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, sur un projet de loi qui, je
l'admets, est important, mais qui ne semblait pas porter à autant de
contestation de la part de l'Opposition, je n'avais pas l'intention en
troisième lecture de m'étendre énormément pour le
justifier. Cependant, face au réquisitoire que le chef de l'Opposition
officielle nous a donné sur le projet de loi constituant la
Société Inter-Port, sur la politique économique, sur les
avenues de notre coopération avec d'autres niveaux de gouvernement et le
rôle qu'on doit laisser au gouvernement, à la fois
supérieur et à la fois inférieur, je dois soulever
quelques points.
Je l'avoue au tout départ, M. le Président, c'est
inquiétant. J'ai été surpris des propos du chef de
l'Opposition officielle. Il me semble qu'à la commission parlementaire
il a pu aborder le sujet dans un climat beaucoup plus serein, en tentant de
cerner davantage le problème, que peut-être l'approche beaucoup
trop globale à mon sens qu'il a eue dans ses remarques de
troisième lecture. Cela me paraît inquiétant pour la
démocratie puisque j'ignore si, en fait, j'ai devant moi des
marionnettes qui
répondent à des désirs et des choix qui ont
été faits non pas par d'autres députés, mais par
des membres extérieurs à cette Chambre.
UNE VOIX: C'est vrai.
M. SAINT-PIERRE: En fait, voyant le comportement et les changements, les
volte-face des députés du Parti québécois sur, il
semble, la rémunération des députés et sur d'autres
points de vue, je suis très inquiet pour la démocratie. On
pourrait se poser une question: Quel serait notre régime si jamais un
jour ce parti prenait le pouvoir et qu'il nous faudrait constater que ceux qui
ont la responsabilité de diriger la province ne sont que des
marionnettes qui répondent aux assemblées d'hôtels, dans
des couloirs, près de la fumée, à Sorel ou ailleurs?
M. MORIN: Le ministre me permettrait-il une question, M. le
Président?
M. SAINT-PIERRE: Non, M. le Président, non.
M. MORIN: Puis-je poser une question?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Le ministre a répondu non.
L'honorable ministre.
M. MORIN: Parce que...
M. SAINT-PIERRE: Je vois que mon point de vue...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! ... A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre!
L'honorable ministre.
M. MORIN: Sur une question de privilège, M. le
Président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!
M. MORIN: Question de privilège.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): L'honorable chef de l'Opposition
officielle, question de privilège.
M. MORIN: Le ministre a semblé indiquer que nous avions
changé plusieurs fois d'opinion sur ce projet de loi. Je tiens à
dire, sur une question de privilège, que c'est faux; nous avons maintenu
le même cap depuis le début.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!
M. BACON: Ce n'est pas une question de privilège. A l'ordre!
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): II ne s'agit pas là d'une
question de privilège. L'honorable ministre...
M. BACON: Assoyez-vous, votre conseil national ne veut pas que vous vous
leviez. Sis, sis, reste tranquille; attends les ordres des autres.
M. MORIN: Le député de Trois-Rivières...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!
M. MORIN: ... aimerait voir augmenter son salaire.
M. BACON: Attendez les ordres des autres.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!
M. BACON: Je ne gagne pas $41,000 et je n'ai pas de chauffeur.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. BACON: Hypocrite.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je vois que mon point de vue a
excité au plus haut point le chef de l'Opposition. Jamais je n'ai dit
qu'il a changé son point de vue sur le projet de loi no 4. J'ai dit
qu'en commission parlementaire il avait une approche beaucoup plus sereine,
tentant de cerner davantage le problème et que, sur un plan plus vaste,
je me posais des questions sur le lien qui semble réunir un conseil
confédéral ou général je ne sais comment on
l'appelle et ce qui semble maintenant être des marionnettes.
Venons-en au projet de loi no 4, M. le Président, pour voir les
contradictions de l'Opposition. Souvent on accuse le gouvernement de faire
faire des études et de ne pas y donner suite. Dans le projet de loi no
4, non seulement le gouvernement provincial, mais la communauté urbaine,
la ville de Québec, la chambre de commerce et le gouvernement
fédéral, conjointement, il y a quelques années, avaient
convenu de la nécessité d'examiner la santé
économique de la ville de Québec, du Québec
métropolitain.
Suite à ces études qui ont duré beaucoup de temps
et j'en passe parce qu'on a déjà débordé
qu'on a appelées le rapport ABBDL, il est sorti une
recommandation. C'est la nécessité de doter la région de
Québec d'un élément nouveau, qui ne pouvait être la
panacée à tous les problèmes mais un instrument nouveau
qui avait donné des résultats dans d'autres pays du monde, une
société mixte chargée en particulier de développer
plus l'avantage que pouvait représenter le port dans
l'agglomération métropolitaine de Québec.
Les maires, bien sûr, ont été mis au courant. Les
chambres de commerce ont ce rapport depuis deux ans, depuis trois ans. Nous
avons eu de multiples discussions. Déjà, je pense, il y a deux
ans, on déposait un premier projet de loi qui tentait de mettre sur
papier comment nous envisagions la structure d'un pareil organisme. Depuis ce
temps, de multiples rencontres ont eu lieu entre mes fonctionnaires,
moi-même et à peu près tous les gens dans le Québec
métropolitain qui sont intéressés réellement par le
développement économique. Même, à l'époque,
je pense qu'un des illustres représentants du Parti
québécois de la région de Québec, M. Taillon, a
participé de ce côté-ci des négociations, pour
tenter de nous justifier comment Inter-Port était une
société nécessaire.
Maintenant qu'il est dans l'Opposition, évidemment, il doit se
conformer à un schème de négativisme et dire que ce n'est
pas bon, que c'est un ballon politique.
M. MORIN: M. le Président, sur un point de
privilège...
M. SAINT-PIERRE: Ce que nous avons fait, M. le Président, c'est
une série...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre! Une question
de privilège.
M. MORIN: On met en cause un fonctionnaire qui n'est pas là pour
se défendre.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! Bien justement ce n'est
pas à vous d'invoquer le privilège.
Le ministre.
M. SAINT-PIERRE: Heureusement qu'il n'est pas ici parce que j'aurais de
la misère à m'en tenir au projet de loi no 4. Je pourrais parler
longuement de la loyauté des fonctionnaires vis-à-vis d'un
gouvernement, quel qu'il soit, sur le plan du parti politique qu'il
représente. Mais revenons au projet de loi no 4, M. le Président.
Nous avons donc depuis deux ans déposé un projet de loi, eu de
multiples consultations. Nous n'avons pas voulu obtenir de cette Chambre un
chèque signé en blanc. Nous avons préparé
même un projet de protocole d'entente que nous avons largement
distribué pour montrer à tous les intéressés
où nous tentions d'aller.
Inutile de reprendre tous les débats, on sait qu'il y a une
opposition qui est représentée dans la personne de M. Armand
Trottier. Ce dernier nous a envoyé un mémoire et je le
félicite de l'intérêt qu'il porte au projet de loi. Nous
l'avons invité au ministère de l'Industrie et du Commerce.
Pendant une réunion de trois ou quatre heures, avec M. de Coster, mon
sous-ministre en titre, et d'autres fonctionnaires, nous avons revu l'ensemble
de tout ceci.
Par après, un projet de loi, légèrement
modifié pour éviter tout malentendu en ce qui touchait l'aspect
portuaire du projet de loi, fut présenté; il est devant nous.
Nous enregistrons la désapprobation de M. Armand Trottier quant à
ce projet de loi, mais nous constatons que, dans tous les autres milieux,
personne ne nous envoie de télégramme, sauf ceux que vous avez
mentionnés, le conseil des maires, que nous nous sommes empressés
de recevoir, pas en cachette. Mais il ne nous a pas semblé
nécessaire qu'à chaque fois que le gouvernement veut parler
à des représentants de la population il faille
nécessairement le faire devant la commission parlementaire.
Je pense que ce serait abuser du temps de cette Chambre. La suggestion
du chef de l'Opposition c'est que la zone de la communauté urbaine n'est
peut-être pas assez grande, qu'il faudrait, pour fins économiques,
élargir la communauté urbaine, présenter devant cette
Chambre un projet de loi qui, sur le plan municipal, amènerait d'autres
municipalités dans la Communauté urbaine de Québec.
M. MORIN: Ce n'est pas cela.
M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas ça? Très bien. M. le
Président, il nous a semblé, en particulier, qu'en voulant doter
la région de Québec d'un instrument nouveau en matière de
promotion industrielle il était inutile de tenter d'alourdir ce qui est
déjà un processus fort complexe, fort controversé dans la
population et qui sûrement mérite un rythme de croisière
plus lent. Cet organisme ne doit pas être alourdi de problèmes
additionnels à ceux qu'il a déjà en matière de
transport en commun, en matière d'évaluation foncière ou
autres.
M. le Président, nous nous faisons accuser de donner un
traitement spécial, un traitement particulier à la région
de Québec. La réponse est simple, c'est qu'il y a un
problème particulier dans la région de Québec, un
problème que je me suis efforcé de vous expliquer, un
déséquilibre sur le plan de l'emploi, où le secondaire est
à la fois faible et cantonné dans des secteurs traditionnels dans
des secteurs où la croissance n'est pas suffisamment forte.
C'est justement le but de la Société Inter-Port de tenter,
grâce à l'avantage que peut avoir non seulement sur le plan du
port, mais sur le plan de l'ensemble de son agglomération la ville de
Québec pour la développer, de combler cette lacune dans le
secteur secondaire.
M. le Président, le rejet par le Parti québécois de
la Société Inter-Port est pour moi un refus de donner à la
ville de Québec, à la région de Québec, les
instruments qu'elle réclame et dont elle a besoin pour corriger tant de
choses.
Je lisais, récemment...
M. MORIN: Relisez ce que j'ai dit.
M. VEILLEUX: Ecoutez et vous allez comprendre.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!
M. SAINT-PIERRE: On sait, à plusieurs reprises, comment le Parti
québécois, en invoquant des arguments d'ordre constitutionnel,
s'oppose et, en fait, fait des crises de toutes sortes lorsqu'on tente, au
niveau fédéral, d'établir des liens avec les
municipalités.
Sur ce point, le gouvernement provincial est d'accord sur cette position
d'éviter, pour les fins de respect de notre constitution canadienne, que
des liens directs ne s'établissent entre le gouvernement
fédéral et les municipalités. Pourtant, dans le projet de
loi qui nous concerne, nous avons pris cette précaution pour que toutes
les sommes d'argent, que toute l'approbation des plans de développement,
les schèmes de préparation, la planification en ce qui touche ce
complexe industriel se fassent directement entre le gouvernement
fédéral et le gouvernement provincial. Mais le parti
séparatiste n'aurait aucune crise de conscience il faut bien le
voir dans ses propos si, après avoir refusé cette
Société Inter-Port, le gouvernement fédéral
commençait à subventionner directement non seulement la
Communauté urbaine, mais même un organisme à
l'intérieur de la Communauté urbaine de Québec? N'y a-t-il
pas une contradiction éclatante et qui invite à tellement de
désordre?
Je lisais récemment dans le journal Le Jour que M. Pierre
Bourgault trouvait que les gens du parti séparatiste jouent trop souvent
aux scouts. J'ai un peu l'impression que, devant le projet de loi sur la
Société Inter-Port, en le qualifiant de ballon politique, on veut
jouer aux scouts, mais, en même temps, on donne un coup bas aux
aspirations des gens de la région de Québec qui ont besoin de la
Société Inter-Port et qui la réclament.
Il ne me semble pas que c'est le moment de dire ici ce qu'a fait le
gouvernement fédéral. Je n'ai pas à le défendre. Il
est capable de se défendre seul. Le chef de l'Opposition a-t-il une
objection au fait qu'en 1973 les chemins de fer du Québec ont
déchargé 121,783,000 tonnes de marchandises? A-t-il des
objections au fait qu'au niveau des ports je lui mentionne en passant
pour la première fois de son histoire, en 1973, le port de
Québec a fait plus de transbordement, a manipulé plus de
marchandises que le port d'Halifax qui a toujours été son
concurrent numéro 1? Peut-être que ce sont les politiques du
gouvernement fédéral amorcées il y a quelques
années, à la demande du gouvernement du Québec, pour
déblayer les glaces sur le Saint-Laurent qui ont donné ce premier
résultat.
Nous ne voulons pas arrêter là. Nous voulons aller plus
loin. Nous ne pensons pas que la Société Inter-Port soit une
panacée à tous les problèmes du Québec
métropolitain, mais c'est un instrument, c'est un outil fort important.
Le Parti québécois refuse à la ville et à la
région de Québec cet outil important.
Le bilan du Parti libéral, en matière économique,
me semble fort imposant et il est inutile, pour moi, de transporter des
chiffres. Cela m'inquiète, d'ailleurs, premièrement parce que, du
côté séparatiste, en matière économique ou en
matière de régionalisme, par ce qu'on a entendu dire, on est
plutôt toujours dans des schèmes théoriques.
Cela m'inquiète également, dans un deuxième temps,
puisque les nouveaux venus du côté séparatiste sont les
éléments les moins valables de l'Union Nationale. Voyez quelle
combinaison nous allons avoir tantôt!
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!
M. SAINT-PIERRE: Brièvement, en matière économique,
on pourrait projeter dans l'avenir ce qui arriverait avec
l'indépendance. Dieu sait les nuages noirs! On se rappelle, d'ailleurs,
que, tentant d'expliquer les difficultés qu'avait le gouvernement de
l'Union Nationale en matière d'investissements, un groupe de
spécialistes internationaux à l'intérieur d'une
étude très poussée de l'OCDE, les avait attribuées
à deux causes: le terrorisme et les possibilités de la
séparation du Québec du Canada.
M. LESSARD: Question de règlement, M. le Président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Le député de Saguenay
sur une question de règlement. A l'ordre!
M. MALOUIN: Parle-nous des salaires!
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! Le député
de Saguenay sur une question de règlement.
M. LESSARD: Question de règlement...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce que l'honorable ministre...
M. LESSARD: Sur une question de règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Grat-ton): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. SAINT-PIERRE: Une question de privilège.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Le député de Saguenay
sur une question de règlement.
M. LESSARD: M. le Président, question de règlement, est-ce
que le ministre...
M. SAINT-PIERRE: Question de privilège.
M. LESSARD: ... pourrait s'asseoir, M. le Président?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. SAINT-PIERRE: Question de privilège.
M. LESSARD: M. le Président, j'ai soulevé une
question...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! L'honorable ministre sur
une question de privilège. Je reviendrai à votre question de
règlement après.
M. LESSARD: En quoi une question de privilège?
M. SAINT-PIERRE: Très sereinement, M. le Président, c'est
pa: que le député de Johnson a pensé que je l'avais
associé aux séparatistes et aux éléments moins
valables de l'Union nationale, ce qui n'était pas mon intention. Le
député de Johnson et le député de Montmagny sont
parmi les éléments valables de l'Union nationale, ce sont les
autres...
M. LESSARD: M. le Président, question de règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! L'honorable
député de Sague-nay sur une question de règlement.
M. LESSARD: Une question de privilège, M. le Président,
c'est en vertu de l'article 49. Je vous indique, M. le Président, que d
après l'article 126 des règlements...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. LESSARD: ... "le débat sur la motion de troisième
lecture d'un projet de loi est restreint à son contenu. Cette motion ne
peut être amendée...
M. MASSICOTTE: Cela vous fait mal. M. LESSARD: Voici, M. le
Président...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre!
M. LESSARD: ... Chaque parti reconnu n'a droit qu'à un seul
discours."
M. MASSICOTTE: Pour un chanteur, cela fait mal.
M. LESSARD: C'est que tout à l'heure, lorsque le
député de Sauvé, le chef parlementaire, a parlé du
projet de loi, il parlait des implications de ce projet de loi vis-à-vis
du gouvernement fédéral, mais le ministre est en train de nous
faire le discours qu'il a fait hier sur le développement
économique du Québec. Je vous inviterais à demander au
ministre de se soumettre à l'article 126 du règlement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M.Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre! ... A l'ordre! ......A l'ordre! ... J'inviterais le ministre... J'ai
tâché d'être large envers le chef de l'Opposition, je l'ai
été avec le ministre, peut-être que nous pourrions
maintenant tous revenir sur une note harmonieuse.
M. SAINT-PIERRE: En conclusion, M. le Président, je pense qu'en
matière de développement régional, en matière
économique, le gouvernement libéral a su non pas s'emprisonner
dans une théorie dogmatique quelconque, mais faire preuve à
chaque instant, pour capter le maximum et donner les avantages sur le plan
économique... Qu'il me suffise de signaler que cela montrera
jusqu'à quel point et dans quel contexte doit s'inscrire la
Société Inter-Port, qui ne répond pas à une
théorie qu'on peut retrouver dans un grand livre, mais qui répond
à une analyse réelle de la situation économique du
Québec qui tente justement de donner aux Québécois
eux-mêmes ici, à 60 p.c. de majorité, un instrument
pas la panacée qui permettra de corriger l'écart que nous
avons décelé au niveau de la faiblesse de l'industrie secondaire
dans la région métropolitaine de Québec.
M. le Président, je pense que ce ne sont pas des voeux pieux,
surtout lorsqu'on sait que dans les quatre années qui ont
précédé notre venue au pouvoir, les investissements totaux
n'avaient augmenté que de 4 p.c. de 1966 à 1970, alors qu'ils ont
augmenté de 83 p.c. depuis la venue du gouvernement Bourassa.
M. le Président, il y aura bien sûr d'autres mesures qui
seront prises par le gouvernement, que ce soit dans la région de Gros
Cacouna et dans la région de Sept-Iles, dans toutes les régions
du Québec. Le projet Inter-Port s'inscrit dans ce souci que, sur le plan
économique, il nous faut faire preuve à la fois de
maturité, d'audace et de réalisme, trois qualités qu'on ne
peut retrouver dans le programme économique du parti
séparatiste.
Pour ces raisons, M. le Président, le projet de loi no 4
mérite l'approbation de cette Chambre.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): L'honorable chef de l'Opposition,
sur une question de règlement.
M. MORIN: En vertu de l'article 96, M. le Président, j'aimerais
rétablir les faits. Parmi toutes les choses étonnantes que le
ministre a dites, il y en a une qui m'étonne plus que les autres. Il m'a
fait dire des bêtises que je n'ai jamais dites. Le ministre a soutenu que
je m'était montré favorable à des contacts directs entre
le pouvoir fédéral et les municipalités
pour fins de subvention ou de financement. C'est une insinuation
incompréhensible. Je pensais qu'il avait suivi mon discours et qu'il
avait compris les motifs que j'ai invoqués. Je l'ai toujours pris pour
un honnête homme, pour un homme intellectuellement droit; je ne
m'explique pas...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!
M. MORIN: Je ne m'explique pas pourquoi il me fait dire des choses que
je n'ai pas dites.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Les faits sont rétablis.
Est-ce que cette motion de l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce,
que ce projet de loi no 4, Loi constituant la Société Inter-Port
de Québec, soit lu pour la troisième fois sera
adoptée?
M. LESSARD: Vote enregistré, M. le Président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Est-ce qu'il y a cinq
députés?
UNE VOIX: Non.
M. LESSARD: On demande le vote enregistré, M. le
Président.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): Qu'on appelle les
députés!
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Vote de troisième lecture
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion de
troisième lecture du projet de loi no 4, Loi constituant la
Société Inter-Port de Québec, veuillent bien se lever,
s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Saint-Pierre, Garneau, Lachapelle,
Berthiaume, Goldbloom, Simard, Quenneville, Mme Bacon, MM. Tetley, Lacroix,
Bienvenue, Forget, Massé, Harvey (Jonquière), Vaillancourt,
Cadieux, Houde (Fabre), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Bacon,
Blank, Veilleux, Pilote, Lamontagne, Picard, Gratton, Carpentier, Dionne,
Faucher, Harvey (Charlesbourg), Bérard, Bonnier, Chagnon, Marchand,
Leduc, Côté, Denis, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc),
Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay,
Verreault.
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard,
Bédard (Chicoutimi), Roy, Bellemare (Johnson).
LE SECRETAIRE: Pour: 53 Contre: 8
LE PRESIDENT: La motion est adoptée.
Travaux parlementaires (suite)
M. LEVESQUE: M. le Président, bien que notre programme n'ait pas
été complété tel que prévu à cause
des pépins que nous avions et je ne regarde pas
particulièrement le chef de l'Opposition officielle lorsque je parle de
pépins malgré cela, nous allons essayer...
M. ROY: Est-ce que vous regardez le député de
Sherbrooke?
M. LEVESQUE: ... de donner suite au programme tel que prévu, avec
amendements. Nous allons proposer l'ajournement de la Chambre afin que trois
commissions puissent siéger ce soir. Celle qui est présentement
au salon rouge continuera l'étude du projet de loi no 7; à la
salle 81-A, la commission de la justice entreprendra l'étude des projets
de loi nos 79 et 80 et, à la salle 91-A, la commission parlementaire de
l'agriculture entreprendra l'étude du projet de loi no 20, article par
article.
Avant de demander l'ajournement", M. le Président, nous allons,
à cause de certaines exigences du ministère des Finances,
dès demain ajouter une heure à l'étude du budget
supplémentaire. Les questions qui seront alors abordées seront au
choix de l'Opposition ou des Oppositions. Nous avons l'intention de commencer
vers onze heures la poursuite de l'étude du budget supplémentaire
pour la terminer à midi. Ensuite, nous reprendrons les projets de loi
suivants, pas nécessairement dans l'ordre que je vais les donner:
article 14, projet de loi no 86; article 15, projet de loi no 91; article 16,
projet de loi no 96; article 18, projet de loi no 90; article 4, projet de loi
no 46 et article 5, projet de loi no 59.
Evidemment, M. le Président, l'article 10, projet de loi no
93.
M. le Président, tel qu'entendu, il y avait eu consentement pour
qu'on puisse revenir au dépôt de rapports de commissions
élues; j'aimerais, avant de proposer l'ajournement, revenir à cet
article.
Le député de Taschereau.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Taschereau.
Rapports sur les projets de loi nos 40 et 41
M. BONNIER: M. le Président, j'ai deux
rapports. Le premier, c'est: Conformément au règlement de
l'Assemblée nationale, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la
commission élue permanente des affaires sociales qui a
étudié le projet de loi no 40, Loi de la Commission des affaires
sociales.
En deuxième lieu, conformément à notre
règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission
élue permanente des affaires sociales qui a étudié le
projet de loi no 41, Loi modifiant la loi sur les services de santé et
les services sociaux.
LE PRESIDENT: Ces deux rapports sont déposés. Peut-il y
avoir entente pour que les députés qui désireraient
apporter des amendements soit aux rapports ou d'autres amendements aux projets
de loi aient jusqu'à demain midi, au lieu de jusqu'à ce soir?
M. LEVESQUE: D'accord.
M. BURNS: Etendre un peu le délai.
LE PRESIDENT: D'accord.
M. LEVESQUE: Est-ce que, depuis que nous avons annoncé le budget
supplémentaire pour demain, il y a un sujet qui est venu à
l'esprit de l'Opposition et qu'elle voudrait privilégier?
M. CHARRON: L'éducation.
M. MORIN: Les finances, les terres et forêts.
M. ROY: M. le Président, j'aimerais bien discuter de
l'agriculture aussi.
M. LEVESQUE: Je vois que l'on s'entend aussi bien là-dessus que
sur autre chose.
M. MORIN: Nous avons des questions sur tous les ministères.
M. LEVESQUE: Peut-être feriez-vous mieux de consulter le conseil
national.
M. MORIN: M. le Président, je vois qu'on ne sait pas ce que c'est
qu'un parti démocratique.
M. LACROIX: On sait ce que le parti pense de ses députés,
par exemple. Il les traite comme des imbéciles et des enfants, des
séniles.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose l'ajournement de la
Chambre à demain dix heures.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: L'Assemblée ajourne ses travaux à demain
matin, dix heures.
(Fin de la séance à 17 h 59)