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(Dix heures huit minutes)
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Excusez-moi, est-ce qu'il n'y a pas un rapport qui doit être
déposé?
M. LEVESQUE: Oui, M. le Président.
Rapport sur le projet de loi no 19
M. HARVEY (Dubuc): M. le Président, pour le député
d'Anjou, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission
élue permanente de l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse
et de la pêche, qui a siégé le mardi 10 décembre
1974 aux fins d'étudier le projet de loi no 19, Loi des agents de
voyages, dont elle a adopté tous les articles avec des amendements.
LE PRESIDENT: Rapport déposé.
M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce que je peux demander le
consentement de la Chambre pour que, lorsque le rapport de la commission
élue permanente des finances, des comptes publics et du revenu arrivera,
nous puissions le déposer?
M. BURNS: D'accord. M. LEVESQUE: Merci.
LE PRESIDENT:
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
DÉPÔT DE DOCUMENTS
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education.
Université du Québec
M. CLOUTIER: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le
rapport annuel 1973/74 de l'Université du Québec.
LE PRESIDENT: Questions orales des députés.
QUESTIONS DES DÉPUTÉS
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.
Banque fédérale d'expansion industrielle
M. MORIN: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
l'Industrie et du Commerce. Le ministre a-t-il pris connaissance du dernier
rapport de la Banque fédérale d'expansion industrielle qui montre
qu'au cours de l'exercice financier qui se termine en septembre, plus
exactement le 30 septembre 1974, la Colombie-Britannique, dont la population
n'atteint pas tout à fait le tiers de celle du Québec, a obtenu,
pour ses entreprises, près de deux fois plus de prêts que le
Québec? Le ministre s'est-il informé des raisons de cet
état de choses ou a-t-il l'intention de s'en informer?
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, la divergence soulignée
par le chef de l'Opposition peut résulter du fait de l'excellent
réseau et de la pénétration des institutions du
gouvernement du Québec qui tentent de faciliter le financement des
entreprises.
Effectivement, lorsqu'on regarde les immobilisations dans le secteur
manufacturier entre le Québec et la Colombie-Britannique, on conviendra
avec moi que, même sur une base per capita, la force du Québec est
beaucoup plus grande que celle de la Colombie-Britannique.
D'ailleurs, dans quelques jours, nous aurons l'occasion, comme nous
l'avons fait l'an dernier, de montrer que, pour la quatrième
année consécutive, au niveau des investissements, au niveau des
immobilisations, particulièrement dans le secteur manufacturier, le
Québec a connu un taux de croissance qui dépasse toutes les
régions du Canada, incluant l'Ontario et la Colombie-Britannique.
M. MORIN: Si j'ai bien compris le ministre, il accepte cette situation.
Je voudrais lui demander s'il ne devrait pas plutôt faire des
représentations immédiates auprès des responsables
fédéraux pour que les entreprises du Québec, au lieu de
recevoir seulement 18 p.c. des sommes qui sont prêtées par cette
banque fédérale, puissent à l'avenir obtenir une part plus
juste des ressources de cette banque qui est administrée par le pouvoir
fédéral et qui, comme le ministre le sait, est financée
à même les taxes payées par les Québécois
aussi bien que par les citoyens des autres provinces.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, il faut bien se rappeler que la
Banque d'expansion industrielle prête au taux courant du marché,
de telle sorte que les entreprises qui peuvent obtenir au Québec des
prêts, soit des caisses populaires, soit des caisses d'entraide
économique, soit des sept banques à charte qui ont tout un
réseau d'institutions ici, soit même de la
Société de développement industriel, ont ici
même toute une gamme d'institutions qui sont prêtes à les
aider.
Je ne comprends pas pourquoi il faudrait, chez une des institutions en
particulier, à savoir la Banque d'expansion industrielle qui
prête au taux du marché, je le répète
recevoir exactement et d'une façon mathématique le pourcentage
qui nous revient.
En fait, je me fais un peu, peut-être, l'avocat du diable. En
Colombie-Britannique, on pourrait signaler que le très fort pourcentage
qu'on obtient des prêts de cette banque reflète peut-être le
fait que les institutions bancaires canadiennes conventionnelles, les banques
à charte, n'y ont pas un réseau aussi étendu qu'au
Québec. Mais ce qui me semble le plus important, c'est le niveau de
l'activité manufacturière, le niveau des investissements
manufacturiers, et je me ferai un plaisir, demain, de dire, sur une base per
capita, jusqu'à quel point les performances du Québec sont
beaucoup supérieures à celles qu'a pu obtenir le gouvernement
Barrett en Colombie-Britannique.
LE PRESIDENT: Dernière question additionnelle.
M. MORIN: Si l'on croyait le ministre, il n'y aurait pas de banques en
Colombie Britannique!
M. LEVESQUE: II n'a pas dit cela!
M. MORIN: C'est ce que vous nous dites, en somme. Il y en a plus ici
qu'il n'y en a là-bas! Le ministre ne devrait-il pas tenir compte, tout
de même, du fait que pour l'année 1974, la Colombie-Britannique a
obtenu $165 millions ce ne sont pas de petits montants l'Ontario,
$110 millions et le Québec, $85 millions.
N'y a-t-il pas là, tout de même, un
déséquilibre dont le ministre devrait s'inquiéter? Ne
devrait-il pas voir, malgré l'existence du réseau de banques et
de caisses populaires au Québec, à ce que les entreprises
québécoises obtiennent leur juste part de cet argent?
M. BOURASSA: Ce ne sont pas des subventions, ce sont des
prêts.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je peux donner quelques
chiffres. Encore une fois, je le répète, je n'ai pas dit qu'il
n'y avait pas de réseau de banques là-bas. C'est tout simplement
qu'il y a toute une gamme d'institutions qui sont prêtes à
prêter aux investisseurs dans le secteur manufacturier et que la banque
fédérale n'est qu'une de celles-ci. Elle prête au taux du
marché, elle a donné 18 p.c. de ses prêts au Québec,
je prends votre chiffre, j'avais l'impression que c'était un peu plus
mais je vais prendre votre chiffre; c'est peut-être pour l'année
en cours ou globalement. Mais le déséquilibre, je vais
l'expliquer immédiatement. Lorsque le gouvernement Bourassa a pris le
pouvoir, il fallait ici se contenter d'avoir au Québec, dans le secteur
des immobilisations au Canada, environ 18.2 p.c. des investissements canadiens.
Dans l'espace de trois années, nous avons remonté cela au point
qu'en 1974 le Québec reçoit 26.1 p.c. des immobilisations dans le
secteur manufacturier.
Ce n'est pas important de savoir si cela vient du gouvernement
fédéral, de la Banque Provinciale, de la Banque
Canadienne-Nationale, de la Banque Royale ou de la Société de
développement industriel; ce qu'il est important de savoir c'est
qu'effectivement, dans chacune des régions du Québec,
l'activité manufacturière a rattrapé le terrain perdu au
cours des années 1966 à 1970.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
Expropriés de Sainte-Scholastique
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Affaires municipales. Le ministre est-il encore saisi du dossier des
expropriés de Sainte-Scholastique et compte-t-il intervenir devant les
injustices dont se plaignent les 3,000 familles qui sont
expropriées?
On me permettra quelques chiffres, M. le Président, pour
expliquer le dossier. Actuellement, les expropriés...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
Je me demande si cette question est de la juridiction du Québec.
Il s'agit d'une expropriation pour un aéroport
fédéral.
M. LEGER: M. le Président, il existe un organisme qui s'appelle
SATRA, Société d'aménagement du territoire de la
région aéroportuaire, qui est québécois.
LE PRESIDENT: Un instant.
M. LEGER: De toute façon, M. le Président, le ministre
peut répondre, il est compétent dans ce domaine, il en a une
partie. Entre autres, les expropriés qui ont été
payés de $90 à $210 l'acre, alors qu'à Toronto-Pickering,
ils ont été indemnisés de $1,800 à $3,000.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. GOLDBLOOM: M. le Président, c'est bien un dossier qui est
entre les mains du gouvernement fédéral; c'est lui qui a
posé les gestes et nous n'avons pas de responsabilité directe en
cette matière. Nous avons une responsabilité dans toutes les
autres matières comme, par exemple, l'aménagement du territoire
et l'implantation d'industries, mais dans cette question de l'expropriation,
c'est de juridiction fédérale.
M. LEGER: M. le Président, question supplémentaire.
LE PRESIDENT: Bien non, à l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre!
M. LEGER: M. le Président, j'avais parlé de...
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... Ne vous énervez pas, personne ne va
s'énerver. Posez votre question mais moi, si je considère qu'une
question principale n'est pas recevable à cause du manque de juridiction
de notre Assemblée sur ce sujet, comment pouvez-vous greffer une
question supplémentaire à cela? Posez-la et je vais voir.
M. LEGER: M. le Président, je voulais entendre le ministre dire
cela pour lui poser cette question suivante: Comment se fait-il, si ce n'est
pas de juridiction provinciale, que la Sûreté du Québec
soit allée défendre les intérêts du
fédéral sur un territoire québécois
dernièrement, à Sainte-Scholastique?
M. CHOQUETTE: M. le Président... LE PRESIDENT: A l'ordre,
messieurs!
M. CHOQUETTE: M. le Président, si on me permet une interruption.
Le député demande une opinion juridique.
M. LEGER: Non.
M. CHOQUETTE: Je vais lui dire que la Sûreté du
Québec fait la police partout au Québec, même dans les
réserves indiennes. Alors, Mirabel fait encore partie du territoire
québécois et c'est comme cela...
M. LEGER: La Gendarmerie royale?
M. CHOQUETTE: ... que nous avons la police à cet endroit.
M. LEGER: M. le Président, dernière question. Est-ce que
les citoyens de Sainte-Scholastique sont encore des Québécois qui
peuvent compter sur leur gouvernement quand ils sont mal pris ou si ce sont des
otages qui ont été vendus en même temps que le territoire
au fédéral?
DES VOIX: Ah! Ah!
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre, messieurs !
L'honorable député de Rouyn-Noranda.
Coût du voyage de M. Bourassa à
Paris
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais poser une question au
premier ministre que je me réjouis de voir de retour chez nous
après une absence prolongée. Il a d'ailleurs l'air tout heu-
reux, comme Ulysse qui a fait un bon voyage, un beau voyage.
LE PRESIDENT: Je préférerais une question.
M. SAMSON: M. le Président, ça ne soulèvera pas de
débat quand je félicite le premier ministre. Je voulais vous dire
qu'il a l'air tellement heureux qu'il se tient droit comme une épinette
ce matin. C'est peut-être parce qu'il a passé un sapin aux
Français.
Les rumeurs voulant que son voyage en France ait coûté
quelque $500,000 au Québec, dont environ $130,000 pour des annonces dans
le journal Le Monde, auxquelles 17 agences gouvernementales ou
ministères ont participé, le premier ministre peut-il nous dire
s'il est vrai que ce voyage a coûté environ $500,000 aux
Québécois? Si oui, de quelle façon explique-ton cette
extravagance de dépenses?
M. BOURASSA: M. le Président, je crois que la nouvelle a
été démentie durant mon voyage même. Je n'ai pas
l'intention de commenter le procédé utilisé dans cette
nouvelle, mais cela a été démenti. Hier, un rapport m'a
été remis. D'ailleurs, nous étions les hôtes du
gouvernement français, mais pour les dépenses qui étaient
reliées au voyage d'une façon normale, cela a coûté
$37,000 et non pas $500,000.
Pour ce qui a trait à la publicité dans le journal Le
Monde, ce n'est pas la première fois que le Québec fait un
numéro spécial dans un journal international, même dans un
journal canadien. Il en a fait un, je crois, dans le Financial Time, au
début de l'année, qui a coûté $85,000. II en a fait
un également dans le Financial Post. Je crois qu'il en a
déjà fait un dans le Times de Londres, The New York Times
également. Donc, je crois qu'il est tout à fait injustifié
d'inclure dans le voyage du chef du gouvernement du Québec un
numéro spécial sur le Québec dans un des journaux, alors
que nous avons appliqué cette politique de très nombreuses
façons.
Pour ce qui a trait aux autres dépenses, on avait
mentionné également qu'un certain nombre de journalistes
français étaient venus au Québec. On avait peut-être
mentionné 40, mais je crois que c'est 18; de toute façon, c'est
de cet ordre-là. Ces journalistes ont pu questionner non seulement les
dirigeants du Québec, mais également les dirigeants de
l'Opposition.
Je crois que le chef de l'Opposition a pu rencontrer de très
nombreux journalistes qui sont venus au Québec. Le chef du Parti
québécois également a pu faire des interviews qui ont eu
de la publicité en France.
M. MORIN: C'est exact. M. BOURASSA: Pardon? M. MORIN: C'est exact.
M. BOURASSA: Disons que la remarque du chef de l'Opposition, si je
l'interprète bien, se trouve à condamner ce qui a
été dit la semaine dernière sur le coût du voyage du
chef du gouvernement du Québec. Oui ou non?
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. SAMSON: M. le Président, je devrai poser une question de
privilège. Je ne veux pas que ça tourne comme la semaine
dernière.
M. BOURASSA: Non, non, d'accord!
M. SAMSON: C'est moi qui pose une question et je voudrais que le premier
ministre me réponde.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. SAMSON: La semaine dernière, il y a un ministre qui en a
profité pour détourner le sujet.
LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre, s'il vous plaît!
M. BOURASSA: D'accord. Je relatais des faits. Les journalistes en
question ont pu interroger des membres de l'Opposition qui ont pu donner de la
publicité.
M. SAMSON: Question de privilège, M. le Président, c'est
faux. Les journalistes n'ont pas questionné tous les membres de
l'Opposition. Je pense qu'il y a une nuance.
M. LACROIX: Les partis reconnus.
M. SAMSON: Faites la nuance entre l'Opposition officielle et
l'Opposition.
M. BOURASSA: D'accord. Ils auraient pu certainement interroger ou
rencontrer le chef parlementaire du Ralliement créditiste. Ils auraient
pu le faire.
M.SAMSON: M. le Président, on m'a téléphoné
du bureau du ministère des Affaires intergouvernementales pour prendre
un rendez-vous, qui n'a pas été respecté.
M. BOURASSA: Le ministre des Affaires intergouvernementales en prend
note. Donc, j'en conclus que les chiffres qui ont été soumis,
pour ce qui a trait aux frais normaux du voyage, sont de $37,000. Cela m'a
été remis hier par un des sous-ministres du ministère des
Affaires intergouvernementales. Donc, dire que ç'a été
$500,000, je crois que c'est complètement faux et je m'abstiens
on connaît ma patience orientale vis-à-vis de certains
journalistes de commenter ce procédé qui a
été employé alors que le chef du gouvernement du
Québec représentait le Québec dans un voyage très
important en France.
M. SAMSON: Question supplémentaire, M. le Président.
Est-ce que le premier ministre a l'intention de déposer le
rapport complet de son voyage, le rapport des dépenses, le rapport des
résultats concrets des ententes qu'il a signées ou qu'il n'a pas
signées, les ententes en voie de préparation? En même
temps, le premier ministre pourrait-il réaffirmer, devant cette Chambre,
ce qu'il a déclaré à Paris à l'effet que le
rôle du Québec...
UNE VOIX: C'est au feuilleton.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
UNE VOIX: C'est illégal.
M. HOUDE (Fabre): Vous n'êtes même pas dans
l'actualité.
M. SAMSON: ... aurait été déterminant.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît,
messieurs, à l'ordre!
M. TETLEY: C'est illégal.
M. SAMSON: Ce n'est pas tout au feuilleton, vous allez voir.
M. HOUDE (Fabre): Oui, c'est au feuilleton. Vous êtes en retard de
vingt-quatre heures.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! ... A l'ordre! ...
Si vous voulez intervenir, demandez la permission, en vertu du
règlement ou autrement... Bon!
M. SAMSON: M. le Président, est-ce que le premier ministre peut
réaffirmer devant cette Chambre ce qu'il a déclaré
à Paris, à savoir que le rôle du Québec avait
été déterminant quant à la vente de cinq CL 215
à la France?
M. BOURASSA: M. le Président, des discussions nombreuses ont
précédé cette vente. J'en ai discuté moi-même
avec le premier ministre, M. Chirac, à l'occasion d'une rencontre. J'ai
dit tout cela à une conférence de Presse à Paris. M.
Chirac a discuté avec les hauts fonctionnaires sur les implications
financières là-dessus. Donc, c'est évident que le
rôle du Québec a été très important ou
déterminant dans cette transaction qui a permis et qui va permettre
à Canadair de garder plusieurs centaines de travailleurs qui, autrement,
seraient mis en chômage.
J'ai déposé, hier, le document qui a été
signé par le premier ministre de France et par moi-même pour ce
qui a trait aux conclusions du voyage. Il y a une question au feuilleton
très claire sur tous les détails du coût du voyage. Ce qui
m'a été dit hier, et j'ai tout lieu de croire que c'est exact,
c'est $37,000. Les détails
seront donnés en réponse à la question du
député de Beauce-Sud.
Là-dessus, il y a deux ou trois réceptions qui ont
été faites par la délégation du Québec. J'ai
reçu plusieurs centaines de Québécois, le jeudi soir, et
j'ai donné une réception à certains journalistes de
l'endroit. Nous étions les hôtes du gouvernement français,
mais les réceptions de la délégation
générale du Québec étaient évidemment
payées par le gouvernement du Québec.
Je ne sais pas si c'est une façon d'évaluer les
résultats du voyage. Des progrès importants ont été
faits sur le plan économique, mais il y a eu des progrès
également exceptionnellement valables sur le plan culturel, puisque et
le président de la République française et le premier
ministre de France, M. Chirac, et les dirigeants français ont
exprimé, d'une façon on ne peut plus claire, le grand
intérêt et l'appui qu'ils apportent au Québec, dont nous
avons décidé de faire un Etat officiellement français.
M. SAMSON: Comment le...
LE PRESIDENT: Dernière question additionnelle.
M. SAMSON: Comment le premier ministre peut-il expliquer une
déclaration d'un représentant de Canadair sur les ondes d'un
poste de télévision, la semaine dernière, à l'effet
que le Québec n'aurait rien eu à voir dans cette question de
vente de CL 215, que c'était fait avant que le premier ministre soit
rendu en France, premier volet de cette question. Deuxième volet,
puisque je ne reviendrai pas, M. le Président...
M. BOURASSA: Si je peux répondre, M. le Président...
M. SAMSON: ... si vous voulez me permettre...
M. BOURASSA: Si je peux répondre d'abord à ce premier
volet...
M. SAMSON: Non, parce qu'on ne me permettra pas de poser l'autre.
Voulez-vous me permettre de finir et vous répondrez aux deux en
même temps?
M. BOURASSA: On va nous permettre de poser... Je vais vous
répondre au premier...
M. SAMSON: Dernière partie de cette question
supplémentaire, est-ce que le premier ministre est au courant qu'il y a
également un autre supplément spécial du Monde qui
paraîtra le 4 janvier prochain? Est-ce que le premier ministre a
donné son accord à cette publication, avec les dépenses
encourues par le Québec pour ce supplément?
M. BOURASSA: M. le Président, cela fait partie des
dépenses dont on a parlé tantôt. Et, dans ce
supplément, il y aura des articles de beaucoup de
Québécois, dont, je crois, MM. Claude Morin et Jacques Parizeau.
Donc, on ne peut pas dire que c'est un supplément partisan, puisqu'il y
aura des articles également qui ont été écrits par
les membres du Parti québécois. Alors, je ne vois pas pourquoi on
reprocherait au gouvernement de financer de la publicité où tous
les représentants québécois ou les principaux partis
québécois peuvent faire valoir leur point de vue.
Alors, je crois qu'il y aura 18 articles. Je ne sais pas si le chef de
l'Opposition a une question à poser là-dessus.
M. SAMSON: M. le Président, est-ce que le premier ministre
pourrait me répondre à l'autre partie de la question
immédiatement?
M. BOURASSA: La semaine dernière, il y a eu un communiqué,
à ce qu'on m'a dit, de Canadair exprimant clairement... Ce n'est pas un
des 5,000 employés qui est allé faire une déclaration
à la télévision...
M. SAMSON: Ah non! Pas un des 5,000. M. BOURASSA: Non. M.SAMSON: Ah
non!
M. BOURASSA: II y a eu une déclaration des dirigeants de
Canadair, je crois du président, M. Kearns. Le président de
Canadair a fait une déclaration la semaine dernière, je crois
mercredi ou jeudi je pourrai envoyer une copie de la déclaration
au député de Rouyn-Noranda exprimant clairement le
rôle du Québec et l'importance du rôle du Québec dans
cette transaction. Disons qu'au cours de l'après-midi je vais envoyer
une copie de cette déclaration au député de Rouyn-Noranda.
Demain matin, il pourra s'excuser de la question qu'il a posée.
M. SAMSON: Je pose la question de privilège, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Oh, là, là! Privilège!
M. SAMSON: Je n'ai pas l'intention de m'excuser...
LE PRESIDENT: Privilège! Il y a des abus sur cela.
M. SAMSON: Bien, écoutez, là! Le premier ministre tente de
dire que je serai obligé de m'excuser...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. SAMSON: ... parce que je lui ai posé une question. C'est pour
ça que je pose la question de privilège. Quant à y
être, est-ce que le
premier ministre pourrait déposer aussi le document...
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre! ... Je m'excuse, mais là
vous n'êtes plus dans la question de privilège... Bon! vous
pourrez revenir. Question additionnelle?
M. MORIN: Oui, M. le Président. Pendant son séjour
à Paris, le premier ministre a-t-il eu l'occasion de rendre visite au
Centre culturel canadien, animé par des Québécois? A-t-il
eu l'occasion de se rendre à l'Agence du livre canadien, qui diffuse des
livres québécois? A-t-il pris connaissance de l'accord sur le
cinéma intervenu entre Paris et Ottawa qui, sans doute, va s'occuper de
diffuser également des films québécois? Si tant est qu'il
ait eu le loisir de se livrer à toutes ces activités, peut-il
nous dire si cela est conciliable avec la prétendue "souveraineté
culturelle" du Québec?
M. BOURASSA: M. le Président, les journalistes qui
m'accompagnaient vont dire au chef de l'Opposition que je n'ai pas eu de tels
loisirs. Je peux lui envoyer le calendrier de mes activités de la
semaine dernière; il va voir que je n'ai pas eu le temps. J'aurais voulu
visiter beaucoup d'autres centres à Paris, participer à beaucoup
d'autres activités, donc me rendre à la résidence de
France-Québec. Malheureusement, je n'ai pas eu le temps.
Mais je comprends que cela fasse peut-être mal au Parti
québécois que le gouvernement français, que le
président de la République et que le premier ministre de France,
d'une façon aussi éloquente, aient manifesté leur
appui...
M. MORIN: Avez-vous bien compris ma question?
M. BOURASSA: ... à la loi 22 au point où, à mon
retour, je lisais dans un journal ce n'est pas moi qui le dis; c'est un
quotidien de Montréal qui disait: "La France bénit la loi 22".
C'est évident que cela vous fait mal. Le gouvernement
français...
M. LEGER: Prouvez-le dans le projet de loi no 26!
M. BOURASSA: C'est évident que c'est un coup très
dur...
M. LEGER: Prouvez-le dans le projet de loi no 26!
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre, messieurs!
M. BOURASSA: C'est évident que c'est un coup très dur au
parti séparatiste que la France, qui est quand même le principal
responsable de la culture française au monde, manifeste autant d'appui
au gouvernement du Québec qui a posé ce geste historique. Cela
fait suite à d'autres déclarations de
Québécois...
M. MORIN: Le gouvernement canadien aussi prétend avoir la
souveraineté culturelle.
M. BOURASSA: ... comme l'historien Michel Brunet, ancien collègue
du chef de l'Opposition, qui a dit que c'était la première fois
qu'un gouvernement agissait en majorité dans l'histoire du
Québec.
M. MORIN: Pourrais-je avoir une réponse à ma question?
LE PRESIDENT: L'honorable député de Johnson.
M. HARDY: ... bien répondu.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre, s'il vous
plaît!
L'honorable député de Johnson, s'il vous plaît.
Grève des transports en Mauricie
M. BELLEMARE (Johnson): Ma question, M. le Président, s'adresse
au ministre des Transports et peut-être aussi à l'honorable
ministre d'Etat, l'honorable député de Laprairie, au sujet d'une
grève du transport en commun, Saint-Maurice Transport, à
Trois-Rivières, au Cap-de-la-Madeleine, à Grand-Mère et
à Shawinigan.
Il y a une implication particulière à cette grève
qui perdure depuis le 24 octobre, c'est celle du transport des écoliers,
contrat qui est accordé à la même firme.
Ma première question: Est-ce que l'honorable ministre pourrait
nous donner des renseignements au sujet de la dernière entrevue qu'il a
eue avec la Commission scolaire régionale? Ma deuxième question:
Est-ce que l'honorable ministre des Transports a l'intention de mettre en
application l'article 99 du code du travail qui prévoit, dans ces
circonstances particulières, tout un procédé pour
régler un cas particulier, surtout quand c'est d'intérêt
public, comme c'est le cas pour les étudiants qui fréquentent les
écoles.
M. BERTHIAUME: M. le Président, j'ai effectivement
rencontré les gens de la Commission scolaire des Vieilles-Forges, hier
après-midi, et également le comité de parents. Ces gens
aimeraient que le ministère des Transports intervienne d'une
façon directe dans un conflit qui est légal et, comme je le leur
ai dit, qui est même légitime à certains égards.
Il n'est évidemment pas de la responsabilité du
ministère des Transports d'intervenir dans un conflit de travail de
cette nature. Tout ce que j'ai pu faire avec ces gens de la Mauricie, c'est de
les informer du problème du transport en commun, non seulement dans la
région de Trois-Rivières mais un peu partout dans la province
comme en Amérique du Nord, pour essayer de les sensibiliser,
étant donné qu'ils ont
un rôle vis-à-vis de la population eux aussi ont un
rôle vis-à-vis de la population de la Mauricie pour qu'ils
puissent au moins informer la population de l'ensemble de la situation et des
préoccupations du gouvernement.
En ce qui concerne les autres parties de la question, évidemment,
quand on parle de l'article 99, des lois du travail en général,
la question ne devrait pas s'adresser au ministère des Transports mais
bien au ministre du Travail.
J'ai eu plusieurs conversations avec le ministre du Travail à ce
sujet. Le ministre du Travail avait nommé, il y a trois semaines, un
conciliateur et, à la fin de la semaine dernière, il a
demandé à son chef du Service de la conciliation de s'occuper
directement du problème et, à ma connaissance, c'est ce que ce
conciliateur fait.
D'ailleurs, les autorités locales rencontrent aujourd'hui les
deux parties en cause, soit l'employeur et les syndiqués, pour essayer
d'agir un peu comme conciliateurs, eux aussi. Le conciliateur doit, par la
suite, une fois que les positions seront bien connues des deux parties, essayer
de les ramener pour régler ce problème le plus tôt
possible.
Il est évident que les premiers affectés par tout ce
conflit, ce sont les étudiants qui risquent ayant
déjà manqué plusieurs jours de classe de mettre en
danger leur année scolaire.
C'est là, M. le Président, où nous en sommes
à peu près. Nous espérons, naturellement, dans les
prochains jours, que les parties puissent s'entendre de façon à
ce que toute la population puisse être servie comme il se doit.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, question
supplémentaire. Le ministre d'Etat ne semble pas connaître
l'article 99 de notre code du travail et il a
référé...
M. BERTHIAUME: Je m'excuse, M. le Président!
LE PRESIDENT: Question de privilège?
M. BELLEMARE (Johnson): ... cette question au ministre du Travail. Mais
l'article 99 est bien clair et il est prévu ceci: Si le
lieutenant-gouverneur en conseil est d'avis que, dans un service public une
grève appréhendée ou en cours, met en danger la
santé ou la sécurité publique, il peut constituer à
ce sujet une commission d'enquête. S'il y a lieu de former une commission
d'enquête, c'est bien dans ce domaine, et c'est une question qui
s'adresse au ministre. A-t-il l'intention de se servir de l'article 99
prévu dans le code du travail pour instituer une commission
d'enquête? Il y a intérêt public pour les enfants qui ne
fréquentent plus les écoles depuis le 24 octobre. Cela, c'est un
danger aussi grand que celui que courent actuellement les étudiants qui
sont dans la rue pour protester contre le ministère de l'Education.
Mais, chez nous, c'est depuis le 24 octobre que les enfants ne vont plus
aux écoles et je pense qu'il y a intérêt public en cause.
En vertu de 99, est-ce l'intention du ministre ou du gouvernement d'instituer
une commission d'enquête, tel qu'il est prévu, pour régler
le problème au moins des enfants qui fréquentent les
écoles?
M. BERTHIAUME: M. le Président, l'article 99 du code du travail
ne semble pas, pour le moment, ce qu'il faut invoquer.
M. BELLEMARE (Johnson): II y a intérêt public ou il n'y en
a pas?
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!
M. BERTHIAUME: J'ai cru avoir, dans ma réponse antérieure,
laissé entendre qu'il y avait espoir que les choses se règlent
normalement. Des rencontres ont lieu aujourd'hui. J'ai eu des rencontres avec
le ministre du Travail, et notre appréciation de la situation est la
suivante: C'est qu'il se peut que les choses se règlent cette
semaine.
En ce qui concerne la préoccupation des étudiants, je suis
complètement d'accord avec le député de Johnson. Tout le
monde est d'accord, c'est la chose la plus facile à dire.
M. BELLEMARE (Johnson): Question supplémentaire.
LE PRESIDENT: La dernière.
M. BELLEMARE (Johnson): La dernière sûrement.
M. le Président, est-ce l'intention du ministre ou du conseil des
ministres d'appliquer l'article 99? C'est ma question. Je connais le service de
transport Carrier et Frères, Saint-Maurice Transport. Une grève a
perduré au moins cinq mois, je la connais cette grève et je sais
combien actuellement...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît
!
Je m'excuse, ce n'est pas permis ce genre de question, c'est de
l'argumentation.
M. BELLEMARE (Johnson): C'est un préambule.
LE PRESIDENT: Bon!
M. BELLEMARE (Johnson): C'est mon préambule, M. le
Président, une grève perdure, les enfants sont en danger, il y a
intérêt public.
LE PRESIDENT: Bon, d'accord! Votre message...
M. BELLEMARE (Johnson): On peut, en vertu de 99, instituer une
commission d'enquê-
te; je pense que ça rendrait service pour le règlement de
la cause.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.
Frais policiers au Québec
M. BURNS: M. le Président, hier à la Chambre des communes,
le premier ministre du Canada, comme le titraient certains journaux, donnait
une giffle au premier ministre du Québec en l'accusant ni plus ni moins
de se cacher derrière le ministre de la Justice dans ses
réclamations concernant la compensation financière pour les frais
policiers au Québec. J'aimerais savoir du premier ministre si, à
compter de maintenant, c'est lui qui prend le dossier en main.
Si oui, qu'a-t-il l'intention de faire en vue d'aider son ministre de la
Justice qui se débat comme un diable dans l'eau bénite pour
obtenir une compensation financière pour la police au Québec?
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai discuté avec le premier
ministre au moins une demi-douzaine de fois de cette question des coûts
de la police. Je crois que cela fait peut-être deux ou trois ans que le
gouvernement du Québec et en particulier le ministre de la
Justice ont soulevé cette question des coûts de la police
et du statut discriminatoire du Québec et de l'Ontario, ce qui aurait pu
être fait il y a dix ou quinze ans. Donc, c'est le ministre de la Justice
et notre gouvernement qui, il y a deux ans, je crois, ont soulevé cette
question.
La position du gouvernement du Québec est très logique. Je
l'ai dit privément et publiquement à de très nombreuses
reprises.
Il est plausible que lorsque les contrats seront
renégociés en 1976, en bonne partie à cause de la campagne
qu'ont menée le ministre de la Justice et le gouvernement, cette
attitude du gouvernement fédéral soit modifiée ou
corrigée, c'est-à-dire que toutes les provinces, à toutes
fins pratiques, soient sur le même pied. Mais nous sommes en 1974, nous
ne sommes pas en 1976; il reste donc d'ici là une année où
le Québec devra être compensé pour la perte qu'il a
connue.
J'en ai discuté avec le premier ministre et avec le ministre des
Finances. Dans les relations de tout gouvernement, il y a des dossiers qui
fonctionnent bien, il y en a d'autres qui fonctionnent moins bien. C'est le cas
entre Québec et Ottawa, c'est le cas entre Québec et
Montréal, c'est le cas entre tous les gouvernements. Lorsque nous avons
fait ces représentations pour le service de la police, nous avions
également fait une demande pour ce qui a trait à l'inclusion des
impôts scolaires dans la formule de péréquation. Vous savez
qu'il y a quatre ans, comme ministre des Finances le
député de Jean-Talon a fait cette demande également
dès qu'il a été nommé ministre des Finances
je l'avais demandé moi-même, à Winnipeg. Il y a deux ans,
il y avait cette possibilité pour le Québec d'obtenir soit
l'inclusion des impôts fonciers scolaires dans la
péréquation, qui lui donnait $80 millions ou $85 millions,
d'obtenir la compensation pour les coûts de police ou d'obtenir les deux.
Nous avons demandé les deux; nous aurions voulu les deux, les deux se
justifiant, mais le gouvernement fédéral a opté pour la
formule qui se trouvait à aider les cinq provinces qui reçoivent
la péréquation, c'est-à-dire les cinq provinces de l'Est
du pays de même que le Manitoba. A ce moment-là cela a
été la raison qui a été donnée pour ne pas
répondre à une demande qui est logique et bien fondée.
L'année dernière, nous avons maintenu cette demande. Mais
la question pétrolière a fait en sorte que le gouvernement
fédéral ne voulait pas modifier la formule de
péréquation, parce qu'il y avait des sommes considérables
qui allaient aux provinces productrices sous forme de revenus à ces
provinces, créant par le fait même une déficience au niveau
des richesses naturelles pour les autres provinces, une déficience assez
imprévue et qui fait que le gouvernement du Québec va recevoir,
cette année, non seulement de $700 millions à $800 millions sous
forme de subventions pour empêcher que l'essence coûte $0.14 de
plus aux Québécois, mais va recevoir, à cause de la
déficience des revenus des richesses naturelles par rapport à
l'Alberta, notamment de $125 millions à $150 millions de plus. Cela
n'était pas prévu dans notre budget l'année
dernière.
Lorsque j'ai parlé au ministre des Finances et au premier
ministre surtout au ministre des Finances, M. Turner de la
question des coûts de la police, sa réponse a été
qu'à cause de ces contraintes de la formule de
péréquation, le Québec va recevoir quelque $125 millions
à $150 millions de plus. Donc ç'a été la
réponse qui a été donnée quand j'ai posé la
question des coûts de la police.
C'est évident que nous ne sommes pas satisfaits, loin de
là, et nous considérons qu'en termes logiques c'est l'un des
dossiers les plus solides qu'ait jamais présenté le Québec
au gouvernement fédéral. Il reste qu'en termes concrets le
gouvernement du Québec a obtenu, au niveau de la
péréquation scolaire, au niveau de la péréquation
des richesses naturelles, des sommes supérieures à celles des
coûts de la police. Cela n'empêche pas que jusqu'à ce que
les ententes soient renégociées en 1976, le ministre de la
Justice et moi-même et tout le gouvernement, parce que c'est une position
unanime du gouvernement plus que ça, des centaines de
municipalités appuient le ministre et le gouvernement sur cette question
nous allons poursuivre nos efforts pour obtenir gain de cause
jusqu'à ce que les ententes soient renégociées avec toutes
les provinces.
J'essaie de donner une réponse réaliste et aussi
concrète que possible au député de Maisonneuve.
M. BURNS: Alors, M. le Président, une question additionnelle. Je
veux tout simplement dire que moi aussi je suis d'accord, que c'est un dossier
très bon, qui est très bien préparé, et on ne se
querellera pas là-dessus. Probablement qu'un des dossiers les plus
justifiés, au point de vue réclamation, c'est celui-là.
Mais dans la réponse que M. Trudeau donnait hier à la Chambre des
communes, il laissait entendre qu'il s'attendait à une communication de
la part du premier ministre, et c'est ce pourquoi je disais qu'il laissait
entendre aussi que le premier ministre se cachait derrière son ministre
de la Justice.
Est-ce que... Non, non, je dis tout simplement que c'est comme ça
que la nouvelle paraît ce matin.
M. BOURASSA: Hier soir, on a communiqué avec moi et ce ne sont
pas les échos qu'on m'a dits.
M. BURNS: Non, non, c'est comme ça. C'est à titre de
préambule que je disais ça. Ma question, le fond de ma question
c'est: Est-ce que le premier ministre a l'intention de poser des gestes
concrets dans l'immédiat, soit communiquer avec M. Trudeau ou encore
communiquer avec M. Allmand ou je ne sais pas qui, pour aider son ministre de
la Justice dans ses réclamations dans ce domaine?
M. BOURASSA: M. le Président, c'est déjà fait. J'ai
répondu. Il n'y a pas une fois, depuis six mois, quand j'ai parlé
au premier ministre du Canada, où je n'ai pas soulevé cette
question des coûts de la police, et j'ai dit les réponses
tantôt. Il y a plusieurs dossiers entre les deux gouvernements. Les
réponses qui ont été données sont que, cette
année, à cause de la situation imprévisible sur le plan
pétrolier, le gouvernement fédéral était
obligé d'ajouter $125 millions à $150 millions. Au total, c'est
$1 milliard qu'on va recevoir environ sur le plan des paiements de la
péréquation. Seulement à cause de la déficience des
revenus sur le plan pétrolier, le gouvernement va recevoir $125 millions
à $150 millions de plus.
Théoriquement, on peut affecter ça aux coûts de la
police, mais là on n'est pas d'accord sur cette attitude du gouvernement
fédéral. Disons que c'est un argument qu'il peut donner en
disant: cette année, à cause de cela, il faut que j'ajoute,
à même les fonds fédéraux, $125 millions au
gouvernement du Québec; vous pouvez prendre ces montants-là, ces
$65 millions, ces $70 millions, dit le gouvernement fédéral, pour
les fins de la police. Nous, nous ne sommes pas d'accord. Nous croyons que ce
sont deux problèmes différents.
La formule de péréquation doit être
appliquée. C'est vrai que cela cause des contraintes financières
additionnelles au gouvernement fédéral, mais elle doit être
appliquée. La formule existe depuis quinze ans, et les revenus des
richesses naturelles d'une province sont extrêmement importantes, les
autres provinces doivent pouvoir en bénéficier. C'est la raison
d'être de la formule de péréquation, mais nous allons
poursuivre nos démarches. Je tiens à rappeler au
député de Maisonneuve que les ententes doivent être
renégociées pour 1976, que nous allons poursuivre nos
démarches pour 1975, comme je l'ai fait d'une façon
systématique, comme le ministre des Finances l'a fait également
dans ses discussions.
M. BURNS: Est-ce que je dois comprendre... LE PRESIDENT: Dernière
question.
M. BURNS: Une dernière question, M. le Président. Est-ce
que je dois comprendre, de tout ce que le premier ministre vient de me dire,
qu'il y a eu effectivement négociation entre Ottawa et Québec, et
qu'un des éléments en négociation que Québec a
laissé tomber c'est la compensation financière des policiers?
M. BOURASSA: C'est absolument faux.
M. BURNS: Bien, c'est ce que je comprends de ce que vous m'avez
répondu.
M. BOURASSA: Le député de Maisonneuve ne comprend rien ou
ne veut pas comprendre. J'ai dit qu'il y avait plusieurs dossiers. Il me semble
que c'est très clair. C'est peut-être parce que c'est tellement
clair que vous ne voulez pas l'admettre. Il y a plusieurs dossiers entre les
deux niveaux de gouvernement. Je crois que la position sur les coûts de
la police a été exprimée de très nombreuses
façons. Je l'ai fait moi-même publiquement au moins une dizaine de
fois. Je vous exprime le point de vue du gouvernement fédéral et
nous allons maintenir nos demandes là-dessus. Il ne faut pas oublier,
quand même, que d'autres dossiers, dans le cas de la
péréquation scolaire et dans le cas du pétrole, ont valu
au Québec environ $250 millions.
M. SAMSON: Question supplémentaire, M. le Président. Le
premier ministre peut-il nous dire s'il est d'accord sur la déclaration
qu'a faite le ministre de la Justice, en fin de semaine, à l'effet que
le premier ministre du Canada se cache derrière M. Warren Allmand dans
ce cas-là?
LE PRESIDENT: Question d'opinion personnelle, je crois. C'est une
appréciation personnelle.
M.SAMSON: Non, non! c'est une bien bonne question, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Elle est très bonne.
M. SAMSON: C'est une déclaration du ministre de la Justice. Ce
n'est pas une opinion personnelle. Est-ce qu'il est d'accord sur cette
déclaration-là?
UNE VOIX: C'est une opinion.
M. SAMSON: Non, non! ce n'est pas une opinion. Est-ce que le
gouvernement est d'accord avec le ministre de la Justice là-dessus? Ce
n'est pas une opinion personnelle, cela. Est-ce que le gouvernement est
d'accord avec les déclarations du ministre de la Justice?
M. CHOQUETTE: M. le Président...
LE PRESIDENT: Je me demande si c'est de juridiction provinciale.
M. SAMSON: C'est un plan conjoint, d'après ce que je peux voir,
et le Québec n'a pas grand-chose à dire.
M. CHOQUETTE: ... puis-je éclairer la lanterne du
député de Rouyn-Noranda et dire que, dans notre gouvernement,
nous sommes solidaires, nous sommes unis, mais que chacun a droit à ses
nuances personnelles?
LE PRESIDENT: L'honorable député de
Rivière-du-Loup. Une courte question, s'il vous plaît.
M. LAFRANCE: Oui, M. le Président.
LE PRESIDENT: Je sais que la question va être courte;
j'espérerais également une réponse courte.
Escalade des débrayages des
étudiants
M. LAFRANCE: D'accord, M. le Président. La question va être
assez courte. Ma question s'adresse au ministre de l'Education. Face à
l'escalade des débrayages des étudiants dans les CEGEP et dans
les écoles polyvalentes, le ministre de l'Education entend-il prendre
des mesures? Dans l'affirmative, quelles sont les mesures qu'il entend prendre
pour favoriser le retour à l'école de la majorité des
étudiants québécois qui veulent continuer à
étudier?
La deuxième partie de ma question: Le ministre entend-il
suggérer ou prendre des mesures pour faire discontinuer le transport
scolaire dans les écoles qui sont présentement
fermées?
M. CLOUTIER: M. le Président, je vais essayer d'y répondre
brièvement. Je crois pouvoir y arriver, cette fois-ci. Je rencontre,
demain après-midi, les directeurs généraux des
différents CEGEP. C'est au cours de cette réunion que nous
prendrons toutes les décisions nécessaires de manière
à rendre les institutions accessibles et à permettre la reprise
des cours pour ceux qui veulent étudier. Vous comprendrez que, pour le
moment, je ne puisse vous donner d'autres détails sur ces mesures. Je
pense pouvoir, dès vendredi, rendre public le plan qui sera
adopté à ce moment-là.
M. MARCHAND: Supplémentaire, M. le Président.
LE PRESIDENT: Oui, l'honorable député de Laurier, question
supplémentaire.
M. MARCHAND: M. le Président, puis-je demander au ministre de
l'Education s'il peut féliciter les élèves du CEGEP
Saint-Laurent qui ont voté à 80 p.c. pour le retour à
l'école? En même temps, que cela serve d'exemple à tous les
CEGEP de la province de Québec. Pourriez-vous surtout demander aux
petits gars de 14 et 15 ans, dans les écoles secondaires, de retourner
à l'école, s'il vous plaît, et demander aux "souleveurs",
au moins, de ne pas s'attaquer aux garçons de 13, 14 et 15 ans?
M. CLOUTIER: M. le Président, je pense que l'inquiétude de
la population est réelle. J'ai dit hier qu'à bien des points de
vue le mouvement était devenu un mouvement de contestation qui
débordait beaucoup la question des prêts-bourses. Je sais
pertinemment que les étudiants, lors d'une assemblée
générale, ont reçu un document qui fait état de
certains communiqués en provenance, surtout, de la
Fédération des enseignants des CEGEP. Si je crois
nécessaire de lire deux ou trois extraits de ce document, c'est sur un
ton extrêmement calme et pas sur un ton provocant. Je crois que la cause
de l'éducation est tellement importante et que notre
société y a consacré tellement d'efforts et de sacrifices
que c'est mon devoir d'informer l'opinion publique.
On a toujours peur, à notre époque, de choquer certains
groupes et on a peur de dire la vérité. Or, il est bien
évident qu'actuellement les étudiants sont, sinon
encadrés, du moins, travaillent de façon très
étroite avec certains groupes d'enseignants. Je souhaite que les
étudiants s'organisent en tant qu'association, mais je ne vois pas
pourquoi il est nécessaire, pour ce faire, de mettre en péril le
système scolaire. C'est là la question que je leur pose quand je
fais appel à leurs responsabilités.
Voici, par exemple, une résolution de la FNEQ du 6
décembre 1974: "II est suggéré fortement,
premièrement, qu'étudiants et professeurs établissent un
protocole d'entente portant sur le réaménagement du contenu des
cours, du mode d'évaluation et de tout autre point particulier à
chaque collège, afin de ne pénaliser en aucune façon les
étudiants, à cause de leur action. "Deuxièmement, qu'en
cas de refus de l'administration des CEGEP les professeurs ne retournent pas
à leurs cours".
Voici une deuxième citation, toujours dans le même esprit
d'informer l'opinion publique; il
s'agit à ce moment d'une déclaration de M. Gaston Sanchez,
président de la Fédération des enseignants de CEGEP, qui
relève de la CEQ. C'est une longue résolution qui se termine de
la façon suivante: "Les enseignants considèrent que la lutte
actuelle des étudiants est une oeuvre sociale et politique et qu'elle
mérite d'être portée comme telle au crédit
académique de l'étudiant indiscipliné".
Troisième citation, M. le Président, 7 décembre
1974: "Que tous les CEGEP et institutions d'enseignement impliqués dans
le conflit convoquent une assemblée générale pour lundi
matin il s'agissait de lundi de cette semaine et qu'on prenne les
mesures nécessaires pour que le plus d'étudiants possible y
participent. Le but: Conscientiser c'est l'expression à la mode,
M. le Président la masse étudiante à la position du
conflit et, en particulier, en faire ressortir la signification.
C'est-à-dire qu'il faut bien comprendre que toutes les
déclarations que diffuse le MEQ, le ministère de l'Education,
à partir de maintenant, n'ont raison d'être qu'en fonction d'un
but spécifique, la propagande, c'est-à-dire ameuter l'opinion
publique, car il est bien évident que toute cette propagande ne vise
qu'à exterminer le mouvement étudiant. Il ne faudra quand
même pas jouer leur jeu. Nous nous devons de continuer notre lutte
jusqu'à ce que le ministère de l'Education réalise qu'il
se doit de respecter nos droits".
Je m'arrête là, M. le Président, je ne fais pas
d'autres commentaires, mais je souligne que la situation est grave, est
très grave. Je considère qu'il est nécessaire que le
gouvernement prenne ses responsabilités et, puisqu'il ne peut pas agir
unilatéralement dans le cas des institutions d'enseignement dans le
contexte de notre système décentralisé, que ces
dernières également travaillent avec le gouvernement pour que
nous restaurions un peu d'ordre et j'irais même jusqu'à dire un
peu de rationalité dans le monde de l'éducation.
LE PRESIDENT: Dernière question. Dernière courte question,
et courte réponse, si possible.
Le député de Beauce-Sud.
Approvisionnement en grains de provende
M. ROY: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse à
l'honorable ministre de l'Agriculture. Est-ce que le ministre de l'Agriculture
pourrait, ce matin, nous faire le point sur la situation qui prévaut en
ce qui a trait à l'approvisionnement et à l'entreposage des
grains de provende dans les silos situés le long du Saint-Laurent, les
entrepôts de l'Est du Canada? Est-ce qu'il pourrait nous dire
également si toutes les mesures ont été prises en vue
d'augmenter les réserves qu'il y a actuellement dans les silos, de
façon que nous puissions avoir la certitude de ne pas être en face
d'une pénurie, justement à cause de la navigation qui ferme?
M. TOUPIN: M. le Président, je n'ai pas de statistiques
fraîches à ma portée, concernant les expéditions,
soit par bateau ou par voie ferrée. Tout ce que je puis dire, c'est que
les récents contacts que j'ai eus avec l'Office canadien des provendes
laissent entendre clairement que des chargements seront bientôt
dirigés vers les entrepôts de l'Est, notamment ceux du
Québec, par voie fluviale et que, par la suite, des trains seront
mobilisés pour assurer une permanence. Ce que je puis faire maintenant,
à compter de demain, est de m'informer à nouveau auprès de
l'Office canadien des provendes et des propriétaires d'entrepôts
québécois, pour savoir exactement ce qu'il y a
présentement, ce qu'ils s'attendent d'avoir dans les entrepôts
pour les prochaines semaines et ce qui se produira d'ici un mois.
Je pense que, demain ou après demain, je serai en mesure de
donner une réponse plus élaborée à cette
question.
M. ROY: D'accord, M. le Président. LE PRESIDENT: Affaires du
jour.
Travaux parlementaires
M. LEVESQUE: M. le Président, nous répondrons demain
à quelques-unes des questions qui paraissent aujourd'hui au
feuilleton.
Motion pour faire siéger la commission de
l'industrie et du commerce
M. LEVESQUE: M. le Président, puis-je faire motion pour que la
commission élue permanente de l'industrie et du commerce, du tourisme,
de la chasse et de la pêche siège immédiatement à la
salle 81-A pour étudier le projet de loi no 4, Loi constituant la
Société Inter-Port de Québec?
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté... Et que cette commission puisse
siéger immédiatement.
M. LEVESQUE: Pour renseigner la Chambre, dès que cette commission
élue permanente de l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse
et de la pêche aura terminé son travail, elle sera suivie,
à la même salle 81-A, par la commission élue permanente des
institutions financières, compagnies et coopératives pour
l'étude du projet de loi no 7, Loi sur les assurances. J'en fais
également motion.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: Vote enregistré, M. le Président.
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a cinq députés?
M. BURNS: Ils sont tous là, les cinq.
LE PRESIDENT: Un, deux, trois, quatre, cinq. Il y a cinq
"front-benchers" qui demandent un vote.
M. BOURASSA: Le chef de l'Opposition, pour la commission des richesses
naturelles, je ne sais pas s'il est encore intéressé à
faire comparaître l'Hydro-Québec. Il y a...
M. MORIN: Tout à fait. J'attendais...
M. BOURASSA: Ah! Je croyais que depuis la rencontre secrète de
lundi, vous aviez perdu intérêt.
M. MORIN: M. le Président, je voudrais signaler au premier
ministre simplement que les rencontres que nous avons avec
l'Hydro-Québec n'ont rien à voir avec le contrat Bechtel et que
je m'attends à ce que le premier ministre, effectivement, convoque la
commission parlementaire à ce sujet.
M. BOURASSA: D'accord. Je pensais que vous auriez pu, à la suite
de rencontres avec les dirigeants de l'Hydro-Québec, perdre votre
intérêt. Mais de toute manière nous aurions insisté,
même si vous ne le vouliez pas, pour convoquer...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: ... cette commission...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! ... A l'ordre! Je m'excuse, nous
sommes aux affaires du jour... A l'ordre! A l'ordre! ... Je m'excuse. Bon! Nous
sommes à un vote, je crois. Oui, messieurs, appelons les
députés.
Qu'on appelle les députés.
Vote sur la motion
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Que ceux qui sont en faveur de la
motion du leader parlementaire du gouvernement pour la convocation de la
commission des institutions financières, compagnies et
coopératives, pour étudier le projet de loi no 7, Loi sur les
assurances, veuillent bien se lever s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Parent (Hull),
Saint-Pierre, Choquette, Cloutier, Phaneuf, Lalonde, Lachapelle, Goldbloom,
Simard, Quenneville, Tetley, Drummond, Lacroix, Bienvenue, Forget, Toupin,
Massé, Harvey (Jonquière), Vaillancourt,
Cadieux, Arsenault, Houde (Fabre), Desjardins, Perreault, Brown,
Fortier, Bossé, Bacon, Blank, Bédard (Montmorency), Veilleux,
Saint-Hilaire, Brisson, Séguin, Saindon, Cornellier, Houde (Limoulou),
Lafrance, Pilote, Lamontagne, Picard, Gratton, Assad, Dionne, Faucher,
Saint-Germain, Harvey (Charlesbourg), Larivière, Pelletier, Shanks,
Springate, Pepin, Beauregard, Bellemare (Rosemont), Bérard, Bonnier,
Boudreault, Boutin, Chagnon, Marchand, Caron, Dufour, Harvey (Dubuc), Lapointe,
Lecours, Malépart, Mercier, Pagé, Parent (Prévost),
Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Vallières, Verreault, Morin, Burns,
Léger, Charron, Bédard (Chicoutimi), Samson, Roy, Bellemare
(Johnson).
LE SECRETAIRE: Pour: 85. Contre: 0.
LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée, et cette commission
pourra siéger une fois que la commission de l'industrie et du commerce
aura terminé ses travaux.
M. LEVESQUE: Article 52.
M. ROY: Avant d'entreprendre l'article 52, le leader du gouvernement
pourrait-il nous donner, grosso modo, une idée de l'ordre des travaux de
la Chambre aujourd'hui? Je pense qu'il est normal, M. le Président,
qu'on le demande.
M. LEVESQUE: A peu près, toujours avec les mêmes
réserves que je fais.
LE PRESIDENT: Un peu de silence, messieurs, s'il vous plaît.
M. LEVESQUE: II y a le projet de loi no 77, qui apparaît à
l'article 52; article 45, projet de loi no 41; article 53, projet de loi no 90;
article 50, projet de loi no 40; article 44, projet de loi no 46, et article
43, budget supplémentaire.
Je pense bien qu'avec ça nous allons pouvoir procéder avec
sérénité et célérité.
M. ROY: Le leader du gouvernement pourrait-il nous dire s'il n'est pas
prévu aujourd'hui d'appeler le projet de loi no 57, Loi sur les
réserves écologiques?
M. LEVESQUE: M. le Président, c'était justement ce projet
de loi que j'avais l'intention d'ajouter à la liste, si
nécessaire.
M. ROY: Est-ce que je pourrais poser une deuxième question, M. le
Président, au leader du gouvernement? Est-ce que la Chambre entend
siéger ce soir?
M. LEVESQUE: Nous allons pouvoir répondre à cette question
avant l'ajournement.
M. ROY: Je ne voudrais pas faire une motion pour féliciter le
leader du gouvernement pour la manière dont il nous répond, parce
que ce serait à l'encontre de ce que j'ai à l'esprit. Mais je le
demande, en guise de bonne collaboration. Nous avons offert notre
collaboration...
M. LEVESQUE: Lorsque j'ai dit avant l'ajournement, je ne voulais pas
dire au moment de l'ajournement.
M. ROY: Est-ce qu'on pourrait le savoir? M. LEVESQUE: Dès que
possible.
M.ROY: Est-ce qu'on pourrait le savoir avant la reprise de nos travaux,
cet après-midi?
M. LEVESQUE: Oui, M. le Président. M. ROY: J'ai des raisons
personnelles.
M. LEVESQUE: Oui, M. le Président, avec plaisir.
Projet de loi no 77 Deuxième lecture
LE PRESIDENT: Le ministre des Institutions financières,
Compagnies et Coopératives propose la deuxième lecture du projet
de loi no 77, Loi modifiant la loi des compagnies de fidéicommis.
L'honorable ministre.
M. William Tetley
M. TETLEY: M. le Président, apparemment, le lieutenant-gouverneur
n'a pas lu la loi, mais je suis certain qu'il serait d'accord s'il l'avait
lue.
M. le Président, le projet de loi no 77 est un amendement
à la loi déjà existante. C'est un amendement qui apporte
quelques changements dont l'un, le plus important, crée ce qu'on appelle
en anglais les "subordinated notes". Je vais brièvement noter les
amendements à la loi que nous proposons aujourd'hui à cette
Assemblée.
Tout, d'abord, les articles 2 et 7 de la loi proposent un
capital-actions ordinaire d'au moins $1 million.
A la suite des responsabilités accrues dévolues aux
compagnies de fiducie et à cause de la part de plus en plus importante
qu'elles prennent dans l'évolution du marché financier, il
devenait impératif d'exiger de toute compagnie dont la création
est projetée un capital versé d'au moins $1 million. M. le
Président, depuis quatre ans, nous avons exigé en effet un
capital-ations d'au moins $1 million et l'amendement n'est qu'une
déclaration officielle donnée d'un fait déjà
adopté au ministère.
Le deuxième amendement, aux articles 1, 3 et 6 du projet de loi
no 77, va permettre aux compagnies enregistrées l'émission
d'actions privilégiées rachetables.
M. le Président, certaines compagnies de fiducie
extra-provinciales, c'est-à-dire des compagnies qui n'ont pas de charte
québécoise, travaillant dans la province de Québec ont
obtenu de leur juridiction respective le pouvoir de se financer par
l'émission d'actions privilégiées rachetables. Ces
compagnies ne pourraient, vu l'exigence actuelle d'un capital permanent,
poursuivre leurs activités dans la province à moins de s'adresser
à l'Assemblée nationale pour l'adoption d'un projet de loi
privé. Deux requêtes en ce sens ont déjà
été produites au ministère. Il y a donc lieu, pour
éviter cette procédure, que la loi soit amendée afin que
ces compagnies puissent voir leur certificat renouvelé à
échéance et également pour autoriser nos compagnies
québécoises à faire de telles émissions.
La permanence du capital est de toute façon assurée par la
nécessité de maintenir à $1 million le capital
initialement requis. Toutefois, toute autre modification au capital-actions
devra au préalable recevoir l'approbation du lieutenant-gouverneur en
conseil.
M. le Président, j'arrive au point le plus important, les billets
en sous-ordre, c'est-à-dire les "subordinated notes".
L'amendement qui se trouve à l'article 4 du projet de loi a pour
but d'autoriser les compagnies québécoises à emprunter des
fonds en émettant des billets en sous-ordre ou en acceptant des
prêts en sous-ordre consentis par les actionnaires.
Permettez-moi d'expliquer la portée de cet amendement important,
parce que nous voulons que nos compagnies de charte québécoise
puissent concurrencer les autres compagnies de charte d'Ontario,
fédérale ou étrangère.
Afin de permettre à nos compagnies de fiducie
québécoises de bénéficier de mêmes avantages
que leurs concurrentes extraprovinciales faisant affaires au Québec, ces
compagnies pourront à l'avenir emprunter des fonds en émettant
des billets en sous-ordre. Cette nouvelle modalité de financement, dont
l'importance par rapport au dépôt et à la couverture de
l'avoir net sera exprimée par des formules qui seront adoptées
par règlement, permettra aux compagnies, dans l'exercice de leur pouvoir
d'emprunt, à accepter davantage des dépôts du public tout
en ne diminuant en aucune façon la protection accordée à
ces dépôts. En effet, en cas d'insolvabilité ou de
liquidation de la compagnie, ces billets prendront rang après les autres
créances de la compagnie.
Les compagnies de fiducie tant à charte fédérale
que de l'Ontario sont limitées quant au montant total des
dépôts qu'elles peuvent accepter du public. Notre loi actuelle ne
prévoit pas de limite à cet effet.
Cette restriction fédérale et ontarienne qui était
de quinze fois l'avoir net des actionnaires au cours des années soixante
a été relevée à
vingt fois en 1970 alors que plusieurs compagnies de fiducie avaient
atteint le premier plafond.
A l'heure actuelle les compagnies les plus importantes ont atteint ou
même, pour quelques-unes, dépassé ce deuxième
plafond de vingt fois et réclament un élargissement de ce
pouvoir. Les autorités fédérales et ontariennes ont
accepté par des amendements récents à leur loi respective
que les compagnies répondant à de sérieux critères
de solvabilité, de liquidité et de rentabilité puissent
emprunter des fonds pour plus de vingt fois l'avoir net des actionnaires pour
autant qu'une proportion de l'excédent soit empruntée sous forme
de billets en sous-ordre.
Ces billets en sous-ordre ne sont pas destinés à
être vendus au public épargnant mais plutôt à des
investisseurs parfaitement conscients qu'ils ne comportent pas la garantie
réservée à un certificat de dépôt. Ces
billets ne seront pas admissibles à la garantie de la Régie de
l'assu-rance-dépôts. C'est pourquoi un billet en sous-ordre ne
pourra être émis que sur demande au siège social de la
compagnie pour un montant minimum important, c'est-à-dire $25,000, et
stipulant expressément le rang que prendra la créance advenant la
liquidation de la compagnie.
De plus, la loi d'amendement prévoit que le ministre peut, selon
les circonstances, imposer à une compagnie particulière des
conditions et modalités restreignant ce pouvoir d'emprunt. Nos
compagnies québécoises opérant à l'extérieur
de la province sont tenues de maintenir en tout temps la couverture de l'avoir
net conforme aux normes précitées, c'est-à-dire la limite
de vingt fois l'avoir net. Elles doivent donc de temps à autre
émettre du capital-actions additionnel pour respecter cette exigence.
Afin de permettre à une compagnie de choisir le temps le plus
approprié pour effectuer cette opération, elle pourra de
façon temporaire s'assurer une source de fonds assimilable au capital en
empruntant de ses propres actionnaires des sommes dont le remboursement prend
rang après toute autre créance de la compagnie.
Encore là, il s'agit d'un prêt d'importance et consenti par
un actionnaire détenant un intérêt important dans la
compagnie. Comme dans le cas des billets en sous-ordre, les modalités
d'émission de ces prêts seront déterminées par
règlement.
M. le Président, voici une explication compliquée d'un
sujet compliqué, mais important. Un autre amendement permet aux
compagnies québécoises d'acquérir les actifs et d'assumer
les obligations d'une compagnie extra-provinciale, cela pour aider nos
compagnies à concurrencer les autres compagnies de fiducie, mais de
charte fédérale et ontarienne. Un autre amendement exige que la
raison sociale d'une compagnie québécoise soit en langue
française, accompagnée ou non d'une version anglaise.
Voilà, M. le Président, le projet de loi no 77.
J'espère, après avoir étudié avec l'Ontario et le
fédéral leur loi projetée sur les compagnies de
fidéicommis, vous présenter, avant Pâques et vers le temps
de Pâques de l'année 1975, une refonte complète de notre
loi. Il faut, pour l'instant, donner à nos compagnies
québécoises ces pouvoirs et je crois que la loi est, en
conséquence, importante.
Puis-je noter, en terminant, que nous avons au Québec 34
compagnies de fiducie ou de fidéicommis, dont 17 sont de charte
québécoise et 17 extra-provinciales, c'est-à-dire neuf
d'autres provinces et huit du Parlement du Canada. D'autres chiffres et
d'autres faits, même le bilan de chaque compagnie se trpuvent dans le
rapport annuel de notre ministère concernant les compagnies de fiducie,
lequel rapport est intitulé Rapport de l'inspecteur des compagnies de
fidéicommis. Ce rapport, évidemment, est bilingue. Je le note
pour le député de Louis-Hébert qui me fait signe de son
accord. Oui ou "yes"? Je crois qu'au Québec on peut être fier de
nos compagnies de fiducie. Il faut les protéger. Il faut même les
aider, ce que nous avons fait et ce que nous voulons faire.
Mr. President, to give a certain amount of pleasure to my distinguished
friend, the Member from Lafontaine riding, I would like to terminate my remark
by saying that this law, "projet de loi no 77" or bill 77, is important for
Québec trust companies. You will see, if you study our annual report on
trust companies, how important they are, how many millions and how many
billions of dollars are under their control, and how many important trust
companies are Québec ones. You will be very surprised how many have a
Québec charter.
Mr. President, I terminate by saying that I suggest to all the Members
of this House that this law be adopted without undue haste but without further
delay. Thank you.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): Le député de
Lafontaine.
M. Marcel Léger
M. LEGER: M. le Président, le ministre des Institutions
financières, Compagnies et Coopératives, comme c'est son habitude
depuis l'adoption de la loi 22, nous fait toujours une présentation
bilingue, ce qui caractérise la loi 22 continuellement.
M. le Président, sur le projet de loi 77 modifiant la Loi des
compagnies de fidéicommis, on peut quand même dire que c'est un
projet qui présente des amendements mineurs pour tenter de mettre en
accord une loi sur la pratique actuelle et les lois qui régissent
l'Ontario et le Canada.
C'était un peu un genre de "patchage" nécessaire qui
n'apporte rien de nouveau, mais qui nous amène à la question
suivante...
M. DUFOUR: Le "patchage"?
M. LEGER: Oui, le "patchage", paroe qu'on est dans le régime de
la loi 22 où il faut se servir d'expressions anglaises et
françaises régulièrement. Je vais vous le prouver
même dans ce projet de loi, M. le Président.
Nous nous demandons quand le ministre va avoir le désir de donner
suite au rapport de la commission Parizeau qui, justement, préconisait
la refonte complète des lois des assurances, des fidéicommis et
des placements dans une seule et même loi qui ramènerait tout cela
dans une politique globale définie par le gouvernement.
Je vois sourire le ministre quand on parle du rapport Parizeau, mais ce
rapport était un des bons rapports que le Québec a eus. Il y
avait à la même commission Parizeau des types aussi influents et
capables que Michel Bélanger, Robert Després, qui s'est
occupé de l'assurance-maladie...
M. BACON: Une chance qu'il était là. M. LEGER: ... que M.
Fullerton. M. BACON: C'est un bon rapport.
M. LEGER: ... ainsi que différentes autres personnes, et c'est un
rapport qui est encore sur les tablettes.
Je pense que le ministre devrait nous rapporter cela au plus tôt,
au lieu de nous présenter une loi qui est un peu du "patchage".
M. TARDIF: "Patchage".
M. LEGER: M. le Président, est-ce que vous pourriez...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): A l'ordre, s'il vous
plaît...
M. LEGER: ... rappeler le député d'Anjou à
l'ordre?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): Est-ce que je pourrais demander aux
honorables députés...
M. LEGER: Le député d'Anjou continue
régulièrement d'interrompre les citoyens et les
députés de cette Chambre qui s'expriment et, d'une façon
impunie et inconnue, il se cache derrière le dernier banc des
"back-benchers" pour essayer de nuire aux députés qui ont des
choses à dire.
M. TARDIF: II est fatigant, ce collecteur.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): A l'ordre, s'il vous plaît
!
M. LEGER: M. le Président, vous avez noté que le
député d'Anjou va se taire maintenant quand je vais intervenir.
S'il veut dire quelque chose, il se lèvera, fera un discours puis on
verra s'il a des choses intéressantes à dire, à part les
louanges habituelles du gouvernement.
M. TARDIF: Tu n'as rien à dire. UNE VOIX: Tu nous provoques.
M. LEGER: M. le Président, je voudrais quand même relever
trois points dans ce projet de loi qui nous paraissent des points qu'il faut
soulever. Nous pourrons revenir sur des remarques particulières à
l'occasion de l'étude article par article. Le projet de loi permet,
dorénavant, un pouvoir d'emprunt par l'émission de billets en
sous-ordre. Je pense qu'on a des commentaires plus précis, parce que
c'est un article en particulier, ce n'est pas un principe, mais c'est un point
qu'il va falloir rediscuter. J'ai aussi des remarques concernant la dispense
accordée aux compagnies extra-provinciales, les 17 compagnies qu'on nous
mentionnait tantôt, quant au maintien d'un capital-actions permanent de
$1 million. Finalement, M. le Président, le point que je veux relever
à chaque fois, pour que le gouvernement n'essaie pas de se cacher
derrière sa loi 22, c'est que le projet de loi actuel, dans un de ses
articles, va obliger les nouvelles compagnies qui vont s'enregistrer au
Québec à avoir un nom français, c'est-à-dire une
raison sociale française.
M. le Président, cela peut paraître très bien quand
on voit cela dans les notes explicatives: L'article 8 exige que la raison
sociale d'une compagnie québécoise soit de langue
française, accompagnée ou non d'une version anglaise et ce
dès qu'elle sollicite un nouvel enregistrement".
M. le Président, cela veut dire d'un autre côté
qu'une compagnie qui est déjà enregistrée n'est pas
obligée, dans le Québec, d'avoir une version française.
C'est donc dire que la loi 22 ne fait pas du domaine des affaires un milieu qui
favorise le français. Aucunement, M. le Président. Il faut le
dire à chaque fois pour montrer les trous que le manteau pudique du
premier ministre a essayé de cacher dans son voyage à Paris, pour
montrer les trous de cette loi 22.
Et le ministre Tetley le voit très bien quand il essaie de le
camoufler en disant: Ils auront dorénavant un nom français. Mais
les 34 compagnies actuelles sont enregistrées. Elles n'auront pas
l'obligation d'avoir une raison sociale française. Il faut le noter.
C'est important. Celles qui existent actuellement, n'auront pas à avoir
une raison sociale française.
De plus...
M. BACON: M. le Président...
M. LEGER: ... on parle dans ces articles...
M. BACON: M. le Président, est-ce que le député de
Lafontaine me permettrait une question?
M. ROY: M. le Président, j'invoque le règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Bon! A l'ordre, s'il vous plait!
M. ROY: Je m'excuse auprès de mon collègue.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Trois-Rivières...
M. ROY: L'honorable premier ministre, le député de
Mercier, est complètement hors d'ordre à ce moment-ci.
M. BOURASSA: C'est parce que j'entendais les trous du manteau
pudique...
M. LEGER: Vous avez essayé avec le manteau pudique de votre
propagande de cacher les trous du bill 22, qu'on retrouve. Ceux-là, on
les retrouve dans tous les projets de loi, l'un par derrière l'autre. Le
projet de loi no 77 aujourd'hui, le projet de loi no 26, sur les agents de
recouvrement, où on voit les failles de la propagande mensongère
du gouvernement qui essaie de faire croire qu'il a fait du français la
langue officielle du Québec, alors qu'à chaque projet de loi on
lui démontre jusqu'à quel point il a menti à la
population. C'est ça qu'on ne peut pas accepter d'un premier ministre du
Québec.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Bon! A l'ordre, s'il vous
plaît! L'honorable député de Trois-Rivières...
M. LEGER: ... je n'ai que quelques minutes pour m'exprimer.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaft!
L'honorable député...
M. LEGER: M. le Président, dans ce projet de loi il est bien dit
qu'une compagnie ne peut être enregistrée à moins qu'elle
ait une raison sociale française, pour le futur. Pour quelle raison le
ministre n'accepte-t-il pas le même principe pour la Loi des agents de
recouvrement, ce qu'il a refusé? Une agence de recouvrement qui
désire un permis devrait avoir une raison sociale française. Il
le refuse, là. C'est là un manque de volonté et une
question de propagande, de poudre aux yeux pour tromper et les
Québécois francophones et les Québécois anglophones
sur le fait français au Québec.
Le projet de loi no 77 est un autre exemple. Je lui promets qu'à
chaque loi où le gouvernement lancera de la poudre aux yeux nous allons
le dénoncer, et c'est la quatrième fois que je le
dénonce.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. ROY: M. le Président, quelques mots sur ce projet de loi,
qu'on peut qualifier de très technique. Evidemment, il l'est, c'est un
projet de loi très technique. Mais c'est un projet de loi qui est
très important sur le plan économique parce qu'il comporte des
dispositions nouvelles et, également, enlève de l'ancienne loi
certaines dispositions.
Nous allons profiter de l'étude de ce projet de loi article par
article pour bien mesurer la portée de chacune de ces modifications et
de leurs conséquences sur le plan économique.
Ce projet de loi, comme l'a dit le ministre tout à l'heure,
stipule que toute compagnie à capital-actions, compagnie de fiducie
devra avoir un capital versé d'au moins $1 million pour pouvoir agir
dans la province de Québec alors que, dans l'ancienne loi, ce montant
était seulement de $100,000.
Il est évident que le ministre pourra nous dire, lors de
l'étude de ce projet de loi en commission plénière ou en
commission élue, que ceci a pour objet de garantir une plus grande
solvabilité et, par voie de conséquence, protéger la
population, protéger l'épargnant, protéger l'investisseur,
en d'autres termes protéger le public québécois.
Le ministre n'aura pas tout à fait tort. Mais on oublie de nous
dire qu'actuellement concernant toute la réglementation et tout
ce qui est établi au ministère des Institutions
financières, Compagnies et Coopératives plusieurs petites
sociétés québécoises qui font des opérations
au Québec, des opérations nécessaires, offrent des
services indispensables à leur milieu se verront dans l'obligation de
s'enregistrer comme étant une société de fiducie. Cela, le
ministre ne nous le dit pas.
Mais le ministre devrait nous le dire, parce que la
réglementation les dirige tout droit vers l'obligation de se
déclarer comme sociétés de fiducie. Et, comme elles ne
pourront pas satisfaire aux exigences de la loi des sociétés de
fiducie, elles n'auront pas d'autre choix que de fermer leurs portes.
M. TETLEY: Par exemple?
M. ROY: On lui en citera des exemples tout à l'heure, M. le
Président, on va en citer des exemples. On pourrait en citer dans le
domaine des assurances. On pourra y revenir dans le projet de loi no 7. Je le
fais à titre de parallèle. Le ministre le sait parce qu'il a les
dossiers au ministère des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives.
Il y a des genres d'opérations qui se font, dans le
Québec, présentement, et on veut les orienter vers les
sociétés de fiducie pour en faire des sociétés de
fiducie. Mais avec l'exigence du million de dollars, ces petites entreprises,
ces petites sociétés devront, comme je viens de le dire, tout
simplement disparaître. Je pense que
c'est cela qui est grave et c'est la raison pour laquelle je veux
attirer l'attention du ministre de ce côté.
M. le Président, si tous les critères, toute la
réglementation et toutes les garanties que veut se donner le
ministère des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives, critères, voeux et principes qui sont mis de
l'avant et qui, justement, appuient le présent projet de loi qui est
devant l'Assemblée nationale avaient été appliqués
dès le début du siècle il est bon de le dire
nous n'aurions pas de caisses populaires, au Québec, il n'y aurait pas
de coopératives d'épargne et de crédit dans la province de
Québec, il n'y aurait jamais eu de compagnies d'assurance
canadiennes-françaises, il n'y aurait pratiquement jamais eu non plus de
sociétés de fiducie canadiennes-françaises,
québécoises, au-thentiquement québécoises.
C'est là que c'est sérieux. Si on part seulement du
critère de solvabilité, de rentabilité et de
capital-actions suffisant, il ne faut jamais oublier que seuls ceux qui ont
beaucoup d'argent peuvent se permettre d'organiser des sociétés
de ce genre. Qu'il suffise de nous rappeler, M. le Président, la
naissance des caisses populaires, la naissance des petites mutuelles, qui ont
été organisées et qui ont donné des services de
fiducie à bien des Québécois, dans des milieux
éloignés, dans les différentes régions du
Québec. Qu'il suffise de nous rappeler la naissance des caisses
d'économie, la naissance des caisses d'établissement, parce qu'il
y a une partie de leurs opérations qui ressemble à la fiducie
également. Le ministre sait ces choses. Il y a les caisses d'entraide
économique, et j'en passe.
Si le ministère avait exigé ce qu'il exige aujourd'hui ces
institutions ne seraient jamais nées, elles n'existeraient pas. Comment
peut-on, M. le Président le ministre pourra revenir
là-dessus lorsqu'on fonde une société, une
mutuelle, une petite entreprise sur des principes coopératifs, des
principes d'entraide mutuelle et qu'on met un petit peu de capital et qu'on a
recours au bénévolat, au dévouement d'une population qui
veut se donner des services, offrir en partant des garanties de
solvabilité et des garanties de rentabilité?
M. BACON: ... consommateur, vous?
M. ROY: Je ne suis pas contre cela, je viens de le dire, M. le
Président. Le ministre pourra dire qu'il faut protéger le
consommateur. Mais, M. le Président, s'il faut protéger le
consommateur et offrir le maximum de garanties, nous, les
Québécois francophones, on n'a qu'une chose à faire:
laissons la finance entre les mains des autres, allons chercher les plus gros
financiers internationaux, parce qu'ils ont les plus gros portefeuilles, ce
sont eux qui sont en mesure de nous offrir le plus de garanties.
M. BACON: Voyons donc! Vous ne connaissez pas cela!
M. ROY: C'est ce que cela veut dire, M. le Président. Que le
député de Trois-Rivières ne s'énerve pas, M. le
Président. Il pourra intervenir tout à l'heure. Il a le droit de
ne pas être d'accord avec les propos que je tiens, il a le droit
même de se permettre de répondre aux questions à la place
du ministre. C'est son droit le plus strict. Mais tout à l'heure, quand
j'aurai terminé, il pourra vous demander la parole et intervenir sur
l'actuel projet de loi présenté à l'Assemblée
nationale.
M. le Président, c'est un des points sur lesquels je voulais
attirer l'attention du ministre ce matin. Il y a un deuxième point sur
lequel aussi je veux intervenir.
Je me réfère au document que le ministre nous a remis, et
aux remarques du ministre concernant des amendements à la Loi des
compagnies de fidéicommis.
Il est dit ceci à l'article b) de la première page: "De
permettre aux compagnies enregistrées l'émission d'actions
privilégiées racheta-bles."
Je me demande sincèrement quel service réel on peut rendre
à la population québécoise en permettant à des
compagnies, ayant leur siège social à l'extérieur du
Québec, possédant une charte fédérale...
M. SAMSON: M. le Président, je m'excuse auprès de mon
collègue de Beauce-Sud, mais nous n'avons pas le quorum, et je pense
qu'il serait assez important que nous ayons un peu plus de monde pour entendre
nos revendications.
LE VICE PRESIDENT (M. Lamontagne): Qu'on appelle les
députés! A l'ordre, messieurs! L'honorable député
de Beauce-Sud.
M. ROY: M. le Président, je disais donc que, dans ce projet de
loi, il y a également des dispositions qui permettent aux compagnies
enregistrées d'émettre des actions privilégiées
ra-chetables.
Je me demandais jusqu'à quel point cette disposition pouvait
permettre justement aux sociétés qui ne sont pas
québécoises, qui n'ont pas de charte québécoise,
d'avoir accès au marché québécois, d'aller sur le
marché de l'épargne québécoise pour justement
inviter les Québécois à souscrire dans des
sociétés qui sont établies en dehors du Québec.
M. le Président, j'aurais une remarque de portée
générale à faire à ce moment-ci. Est-ce que le
ministère des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives est réellement conscient des pouvoirs qu'il a en
main actuellement pour que le marché financier du Québec, le
marché de l'épargne québécoise, cet ensemble de
capitaux que nous avons au Québec servent les meilleurs
intérêts de la collectivité québécoise, de la
société québécoise comme telle? M. le
Président, nous avons actuellement la preuve et
nous avons à déplorer qu 'il en fut pratiquement toujours
ainsi parce que nous n'avons pas suffisamment de leviers de commande dans le
domaine économique et dans le domaine financier. Aujourd'hui, le
ministère des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives par ses structures, par son pouvoir de
réglementation et par la possibilité qu'il a d'apporter des lois
devant l'Assemblée nationale, devrait faire en sorte que les capitaux
québécois, l'épargne québécoise servent
d'abord et avant tout les intérêts de la société
québécoise.
Je pense, M. le Président, qu'il n'y a personne au Québec,
sauf ceux qui ont intérêt à faire une piastre envers et
contre tous et pour n'importe quelle considération, actuellement qui ne
soit conscient de cette responsabilité, qui ne souhaite que
l'épargne et les capitaux québécois servent à
developpper l'économie québécoise. Or, M. le
Président, pour ces sociétés qui viennent chercher
l'épargne québécoise, qui font appel, dans le
Québec, à la souscription d'actions privilégiées
qui font appel à l'achat d'obligations, de débentures comme on
les appelle, pour tâcher d'augmenter leur capital, leur fonds
consolidé, pourquoi ne fait-on pas en sorte que ces entreprises soient
obligées d'avoir une filiale québécoise, avec un
siège social dans le Québec, et publient des états
financiers séparément pour leurs opérations dans le
Québec?
Je pense, M. le Président, que nous aurions là un outil,
les moyens nécessaires pour favoriser et développer, je dirais
bien la libération économique des Québécois. Mais
si, par contre, le ministère des Institutions financières,
Compagnies et Coopératives regarde uniquement le critère de
rentabilité et de la solvabilité, nous n'en sortirons jamais. Je
pense qu'il faut en être conscient; il faut regarder les choses en pleine
conscience et regarder la réalité telle qu'elle est.
M. le Président, on voit actuellement des institutions
financières nationales qui ne se sont jamais souciées de faire
autre chose, ou à peu près pas autre chose que de venir au
Québec alimenter leur réservoir de capitaux, prendre les capitaux
du Québec, prendre l'épargne québécoise puis aller
développer d'autres secteurs de l'activité économique dans
d'autres provinces, dans d'autres régions du pays, laissant ainsi le
Québec à lui-même, laissant ainsi le Québec devant
une situation telle qu'il est obligé d'aller chercher
l'équivalent aux Etats-Unis, en Angleterre, en Europe et ailleurs, pour
inviter les financiers internationaux à venir développer nos
richesses naturelles.
Je pense, M. le Président, qu'une politique de libération
économique, une politique de développement économique, une
politique de développement économique québécoise
dans son ensemble doit être élaborée en collaboration avec
le ministère des Institutions finaiciè-res, Compagnies et
Coopératives. Les lois et les règlements adoptés par
l'Assemblée nationale, les règlements adoptés par le
lieutenant-gouverneur en conseil en ce qui a trait aux institutions
financières devraient justement être faits en collaboration et en
coordination avec les autres politiques gouvernementales, de façon que
les capitaux du Québec demeurent au Québec pour développer
l'économie québécoise, de façon à pouvoir
réaliser un jour ce que tout le monde souhaite, la libération
économique des Québécois, comme je viens de le dire.
Or, si on fait en sorte d'augmenter la pression en augmentant le
marché, en élargissant le marché des obligations pour
permettre aux sociétés nationales, aux sociétés
ayant un siège social dans d'autres provinces du pays, aux
sociétés qui fonctionnent selon une charte fédérale
de venir concurrencer le marché des débentures et le
marché des obligations, dans quelle situation nous trouvons-nous, alors
que nous avons tout le problème du financement de nos
municipalités, tout le problème du financement de nos commissions
scolaires, les commissions scolaires régionales, le problème du
financement du gouvernement de la province, le financement du secteur public
comme l'Hydro-Québec et plusieurs autres secteurs?
On voit actuellement c'est un exemple que je donne les
banques à charte émettre des obligations puis venir surcharger
davantage le marché des obligations et en quelque sorte concurrencer le
secteur public parce que le gouvernement n'a pas encore fait d'effort à
ce que je sache, du moins ce n'est pas apparent, de façon à
permettre que le secteur public puisse être financé de
façon différente, tel que nous l'avons mentionné, tel que
nous l'avons suggéré et tel que nous le prônons depuis fort
longtemps.
Or, dans le contexte actuel, dans le système actuel, il me
paraît impérieux, il me parait primordial de faire en sorte que
cette Loi modifiant la loi des compagnies de fidéicommis, qui n'est pas
une loi mauvaise en soi, je tiens bien à le dire, il y a des
dispositions dans cette loi avec lesquelles nous sommes d'accord...
Je dis que le gouvernement aurait dû aller plus loin pour faire en
sorte que nous gardions au Québec de véritables leviers de
commande, des leviers de direction, de façon à devenir les
maîtres d'oeuvre dont le développement économique du
Québec.
Il y a un quatrième point, celui de permettre à une
compagnie québécoise d'acquérir les actifs et d'assumer
les obligations d'une compagnie extra-provinciale. C'est une disposition sur
laquelle nous sommes entièrement d'accord pour qu'on permette aux
Québécois de pouvoir élargir leur champ d'activité,
compte tenu de la situation actuelle, pour faire un peu le contrepoids de ce
que nous vivons, de ce que nous avons l'occasion de constater. C'est une
disposition mais dans la loi il y a des dispositions qui permettent l'inverse,
aussi. On sait qu'en pratique et l'expérience passée est
là pour le démontrer ce ne sont pas les
Québécois qui vont acquérir, dans la majorité des
cas, des sociétés nationales mais ce sont les autres qui viennent
chercher nos sociétés chez nous.
M.BACON:...
M. ROY: Je dis que dans la majorité des cas ce sont les autres
qui viennent chercher des sociétés chez nous. D'accord, il y en a
qui vont en chercher mais faisons le bilan, dans son ensemble, et regardons ce
que nous avons gagné. D'un côté, nous avons gagné,
je l'admets et tout le monde l'admettra il faut regarder cette question
en toute objectivité nous avons gagné sur certains points
mais, par contre, il nous faut aussi, en toute objectivité, examiner ce
que nous avons perdu.
Si nous faisons le bilan, avons-nous gagné, en définitive?
C'est la question que je me pose. A ce niveau le ministère des
Institutions financières, Compagnies et Coopératives, en accord
sur des politiques gouvernementales d'ensemble visant à faire en sorte
qu'au Québec nous ayons de véritables pouvoirs
économiques, doit aller plus loin, beaucoup plus loin que les deux seuls
points vers lesquels il semble vouloir se diriger: les garanties de
solvabilité et les garanties de rentabilité. C'est là le
point que je veux soulever devant l'Assemblée nationale, ce matin. Je
veux demander au gouvernement, à mes collègues de quelque
formation politique que ce soit de bien examiner cette question qui nous
concerne tous, dans nos comtés respectifs.
Nous sommes ici pour représenter les intérêts du
Québec, les intérêts de la province, de chacun de nos
comtés. Nous avons le devoir et la responsabilité d'exiger du
Conseil exécutif qu'à ce niveau il y ait des politiques
cohérentes, des politiques de coordination; qu'on fasse en sorte que les
ministères à vocation économique et les ministères
qui ont à jouer un rôle prépondérant dans ce
domaine, le jouent en fonction des meilleurs intérêts du
Québec et des Québécois.
M. le Président, on dit, quatrièmement, qu'on veut exiger
que la raison sociale d'une compagnie québécoise soit en langue
française, accompagnée ou non d'une version anglaise. M. le
Président, je suis bien d'accord sur cela. Il n'y a personne qui peut
être contre cela que les sociétés qui font affaires au
Québec aient une raison sociale française. Mais ce n'est pas le
simple fait qu'une compagnie a une raison sociale française qui nous
donne les garanties que ces sociétés, ces entreprises sont notre
propriété, d'abord, et qui nous donne des garanties que ces
entreprises travaillent dans notre intérêt. Je pense que ces
choses doivent être dites. Exiger seulement une raison sociale
française, c'est berner la population, c'est induire la population en
erreur et c'est faire ce que je pourrais appeler du sentimentalisme.
Il faut aller plus loin que ça, parce qu'il y en a des
sociétés au Québec qui ont des raisons sociales
françaises et qui ne sont aucunement la propriété des
Québécois et qui ne travaillent pas dans l'intérêt
des Québécois; qui travaillent dans leur intérêt
personnel et qui travaillent seulement avec la seule préoccupation de
faire le plus d'argent possible, par tous les moyens possibles, légaux
ou etc. C'est cela que je veux dire à l'intention du ministre, ce matin.
Je suis heureux que le ministre ait exigé qu'ils aient une raison
sociale française, mais que ce ne soit pas seulement de l'illusion.
Lorsqu'on demande qu'une compagnie ait une raison sociale française, on
veut que cette entreprise travaille dans le meilleur intérêt des
Québécois.
Il est de devoir et de la responsabilité du ministère des
Institutions financières Compagnies et Coopératives et de son
titulaire, l'actuel ministre qui est devant moi, de prendre toutes les mesures,
toutes les dispositions pour que le Québec soit le mieux servi possible
et que, dans le domaine économique, dans le domaine financier, nous
puissions, un jour, espérer avoir entre les mains un véritable
pouvoir économique.
M. BACON: M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Trois-Rivières.
M. BACON: Vu l'heure, M. le Président, je demanderais la
suspension des travaux de la Chambre.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Cette motion de suspension est-elle
adoptée?
M. BIENVENUE: Suspension jusqu'à trois heures. Avant de vous
laisser prononcer la suspension, je pense que le député de
Beauce-Sud avait posé une question au sujet des travaux ce soir.
M. ROY: Oui, M. le Président, est-ce qu'on est en mesure de me
fournir la réponse?
M. BIENVENUE: Est-ce que le député de Beauce-Sud aimerait
mieux qu'on ne siège pas ce soir?
M. ROY: M. le Président, je n'ai jamais demandé au
gouvernement de ne pas siéger et de ne pas faire son devoir. Je veux
savoir quelles sont les intentions du gouvernement de façon que nous
puissions nous organiser en conséquence.
M. BIENVENUE: Je change ma question, M. le Président. Est-ce que
le député de Beauce-Sud serait choqué si on ne
siégeait pas ce soir?
M. ROY: Non.
M. BIENVENUE: Alors, pour qu'il ne se choque pas, on ne siégera
pas ce soir.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): La motion de suspension des travaux
jusqu'à trois heures est-elle adoptée?
M. ROY: Oui, adopté. Je remercie l'honorable leader adjoint.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): La Chambre suspend ses travaux
jusqu'à quinze heures.
(Suspension de la séance à 12 h 2)
Reprise de la séance à 15 h 6
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, messieurs!
M. LEVESQUE: M. le Président, pouvons-nous revenir un instant aux
rapports de commissions élues?
Rapport sur les projets de loi nos 67 à
74
M. MASSICOTTE: M. le Président, pour le député de
Bellechasse, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission
élue permanente des finances, des comptes publics et du revenu qui a
siégé, le mardi 10 décembre 1974, aux fins
d'étudier les projets de loi nos 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73 et 74, dont
elle a adopté tous les articles avec leurs amendements.
M. LEVESQUE: Article 52.
Projet de loi no 77 Deuxième lecture
(suite)
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de
Trois-Rivières.
M. Guy Bacon
M. BACON: M. le Président, je pense qu'il n'y a pas un
Québécois qui n'est pas d'accord sur les propos ou les
énoncés que nous avons entendus ce matin de la part des
députés de l'Opposition. Je pense que chaque
Québécois voudrait bien s'assurer une présence dans le
monde financier, une présence dans le développement
économique de la province et ne voudrait tout simplement pas agir en
spectateur et regarder la province se faire développer par des
étrangers.
Mais, M. le Président, même si je suis d'accord sur ces
énoncés, je dois immédiatement vous spécifier que
c'était plutôt désordonné et un peu décousu.
Il faut bien regarder, d'abord et avant tout, ce qu'est une compagnie de
fiducie, bien définir la philosophie des compagnies de fiducie pour
être capable aussi d'en comprendre certaines exigences que veut lui
donner le projet de loi no 77.
Lorsque le député de Beauce disait, par exemple, que
l'exigence pour les nouvelles compagnies de fiducie d'un capital-actions de $1
million c'était d'empêcher la naissance des compagnies de fiducie,
je pense que non seulement on ne tue pas les compagnies de fiducie mais on leur
facilite la tâche et on leur donne une structure de façon à
pouvoir évoluer normalement et se développer.
Il ne faut pas mêler compagnies de fidéicommis et caisses
d'entraide ou caisses populaires; la
compagnie de fidéicommis est fort différente, elle a
besoin d'un capital-actions assez élevé pour pouvoir
évoluer. Je pense que les propos du député de Beauce-Sud
étaient un peu farfelus sur le sujet.
C'est bien sûr que nous avons besoin d'investissements au
Québec. Plus nous aurons d'organismes, plus nous aurons d'institutions
qui pourront canaliser l'épargne des Québécois, qui pourra
être réinvestie chez nous dans notre développement. C'est
quand même la formule qui, je pense, fait l'unanimité et l'accord
chez tous les Québécois.
Il ne faut pas dire que la situation des Québécois dans
l'industrie des compagnies de fiducie est si mauvaise. Nous possédons
actuellement des compagnies de fiducie comme Québécois et, dans
d'autres compangies de fiducie, il y a des Québécois qui non
seulement travaillent mais dirigent. Le député de Lafontaine
parlait entre autres de l'article relativement aux raisons sociales. Si on
examine la majorité des compagnies de fiducie, la plupart d'entre elles,
bien avant qu'il y ait des projets de loi, bien avant qu'il y ait des demandes
de la part du ministère des Institutions financières, se sont
donné un nom français ou une version française de leur
nom.
Je pense que ces soupçons, ces susceptibilités du
député de Lafontaine sont plus ou moins valables. Même s'il
a fait allusion à certains rapports qui ont déjà
été présentés au gouvernement, il a
été très peu probant en essayant de nous prouver que le
bill 77 ne serait pas une acquisition dans le développement des
compagnies de fiducie.
On parle de compagnies multinationales, de compagnies qui font affaires
dans d'autres provinces canadiennes; on demande ou on exige que ces compagnies
aient des états financiers spécialement pour leurs
opérations québécoises; on exige qu'elles investissent un
certain montant d'argent. Je pense que ce n'est pas tellement drôle pour
le gouvernement de s'immiscer jusqu'à ce point dans les affaires des
compagnies de fiducie.
Il est certain que ces compagnies qui viennent chez nous et qui ont
peut-être des sièges sociaux ou un siège social à
l'extérieur de la province, c'est bien évident que les
épargnes, que l'argent qui est canalisé est investi en bonne
partie dans la province de Québec. Il y a quand même des
marchés financiers dont il faut tenir compte; il y a quand même
des équilibres de portefeuille dont il faut tenir compte et auxquels le
député de Beauce-Sud et le député de Lafontaine ont
fait allusion. Il serait peut-être néfaste si, dans un même
marché, on investissait dans les mêmes entreprises, dans des
entreprises de même nature de façon à mettre en
péril les sommes dont les compagnies sont fidéicommis-saires, et
que les compagnies ont la responsabilité d'administrer. Mais,
naturellement, ce sont des sommes qui appartiennent d'abord et avant tout
à leurs clients.
M. le Président, ce projet de loi est sûrement de nature
à aider les compagnies de fiducie. J'entendais ce matin le niinistre des
Institutions financières dire que, dans la réforme qu'il a
apportée aux institutions comme les compagnies d'assurance et les
caisses d'entraide, il voulait, dans cette continuité, réviser en
profondeur la loi des compagnies de fiducie. J'ai assez confiance dans le
ministre des Institutions financières et je peux lui dire que, d'ici
cette réforme en profondeur, je pense que le projet de loi no 77 sera
sûrement de nature à aider les compagnies de fiducie. C'est la
raison pour laquelle je voterai pour.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce qu'il y a d'autres opinants?
UNE VOIX: Adopté.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre a un droit de
réplique?
M. TETLEY: Oui, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Droit de réplique du ministre pour
clore le débat.
M. William Tetley
M. TETLEY: M. le Président, je suis reconnaissant des remarques
des députés d'en face et gouvernementaux. Je crois que le projet
de loi est important. Je note que le député de Lafontaine a
mentionné le rapport Parizeau; je suis de son avis que le rapport
Parizeau a été la cause de la naissance de notre
ministère. Cela a été le rapport par excellence qui a
créé le ministère. Je l'ai ici, j'en garde toujours un
exemplaire dans mon pupitre au Parlement. Le rapport Parizeau a fait 82
recommandations et vous verrez, après étude, que nous avons
remplies la plupart et beaucoup plus.
Au sujet, par exemple, des investissements étrangers etc., dont
le député de Lafontaine a parlé un peu, de même que
le député de Beauce-Sud, vous verrez que la commission Parizeau
n'était pas très avancée. Je suggère la lecture de
la recommandation 66 qui était à l'effet que la commission ne
recommande pas l'adoption de lois destinées à empêcher
l'acquisition du contrôle des institutions financières par des
intérêts étrangers. Cela, c'est le rapport Parizeau.
Je suis content que le député de Lafontaine trouve bien
l'article au sujet de la langue ou du nom des compagnies. Le
député de Beauce-Sud a mentionné les petites compagnies.
Je crois qu'une compagnie qui a moins de $1 million n'est pas fiable comme
compagnie de fiducie. En effet, aucune compagnie, à l'heure actuelle,
qui a moins de $1 million n'existe comme compagnie de fiducie.
Je crois qu'il est essentiel que nous traitions
avec justice les compagnies extra-provinciales, parce qu'une des plus
grandes compagnies de fiducie au monde et la plus grande au Canada a une charte
québécoise; je parle du Trust Royal. Si le Québec veut
imposer des lois aux compagnies des autres provinces, qui sont injustes, nous
allons voir que certaines de nos institutions, qui sont beaucoup plus fortes
que toute autre institution au Canada, vont en souffrir. Nous sommes
très bien munis de compagnies de fiducie au Québec et ce n'est
pas le moment d'imposer des sanctions, M. le Président. Peut-être
dans d'autres domaines, mais pas aux compagnies de fiducie.
Ces quelques remarques, M. le Président, répondent au
député de Beauce-Sud qui avait fait des commentaires au sujet des
compagnies extra-provinciales. Je termine en proposant l'adoption du projet de
loi no 77 sans autre délai.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Ce projet de loi est-il adopté en
deuxième lecture?
M. BURNS: Adopté, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce projet de loi.
Second reading of this bill.
M. BIENVENUE: Je fais motion, M. le Président, pour que vous
quittiez maintenant le fauteuil et je vous le demande avec beaucoup de
respect pour que nous étudiions ce projet de loi en
commission.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): La motion pour que je quitte maintenant le
fauteuil pour que la Chambre se forme en commission plénière
est-elle adoptée?
M. BURNS: Avec plaisir, M. le Président.
M. KENNEDY (président de la commission plénière): A
l'ordre, messieurs! La commission suspend ses travaux à loisir.
Commission plénière
LE PRESIDENT (M. Kennedy): A l'ordre, messieurs !
Je demanderais aux gens qui sont dans la galerie de bien vouloir
respecter le silence, s'il vous plaît.
Projet de loi no 77, Loi modifiant la loi des compagnies de
fidéicommis. Article 1.
M. LEGER: M. le Président, en ce qui nous concerne, à
moins d'amendements du ministre, c'est adopté.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Adopté. Article 2. Adopté.
M. LEGER: Le ministre n'a rien à dire? Un instant, M. le
Président, le ministre...
M. TETLEY: C'est tout simplement vrai.
M. LEGER: Article 2, M. le Président, en ce qui nous concerne,
adopté.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Article 3. Adopté?
M. LEGER: Un instant, M. le Président, on va le lire. Donnez-nous
au moins le temps de le lire.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Je pensais que c'était fait.
M. LEGER: C'est lu, mais on va relire.
M. BURNS: On va relire, M. le Président, pour être
sûrs de ce qu'on adopte.
M. VEILLEUX: Pour la dixième fois on le relit.
M. BURNS: C'est cela.
M. LEGER: Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Article 4.
M. LEGER: A l'article 4, M. le Président, on dit: "Sauf les
dispositions contraires contenues dans une charte spéciale, une
compagnie ne peut contracter d'emprunts moyennant la réception de
dépôts ou l'émission d'obligations. Elle peut cependant
emprunter des fonds en émettant des billets en sous-ordre..." Est-ce que
le ministre pourrait nous expliquer ce qu'il entend par billets en
sous-ordre?
M. TETLEY: Un billet en sous-ordre c'est un "subordinated note".
M. LEGER: ... parfaite, en anglais.
M. TETLEY: C'est un billet de deuxième ordre, parce que c'est un
billet subordonné, ou c'est prendre sa créance après toute
autre créance de la compagnie. Cela va aider la compagnie à
augmenter son capital-actions ou l'argent disponible sans affecter le capital
déjà en place. C'est un moyen adopté par les autres
provinces et par le fédéral, mais que nous n'avons pas
adopté.
Vous verrez, à l'article 4 de ce projet de loi, qui sera le
nouvel article 7: "Un billet en sous-ordre s'entend, pour les fins du
présent paragraphe, d'un titre de créance stipulant
expressément qu'en cas d'insolvabilité ou de liquidation de la
compagnie, la créance prendra rang:". Voici l'ordre: "a) après
les autres créances de la compagnie; "b) avec les autres billets en
sous-ordre émis par elle; évidemment
"c) avant les prêts en sous-ordre consentis par les
actionnaires".
En effet, le sociétaire ou celui qui a une action ou un
prêt en sous-ordre... Mais l'anglais est beaucoup plus clair que le
français là-dessus. Le dernier paragraphe de l'article 7... Je
peux le traduire mais je crois que l'anglais est clair: "Subordinated
shareholder loan" means, for the purposes of this subsection, a loan for a
fixed term granted to the company by one of its shareholders or by a person who
controls one of its shareholders..." En effet, c'est un moyen pour les
compagnies de fiducie, y compris les compagnies québécoises et
les petites compagnies, d'obtenir de l'argent, des capitaux qui auront une
créance subordonnée ou des droits moins élevés que
les droits ordinaires, les créances et même les créanciers
ordinaires.
C'est très subordonné.
M. BURNS: M. le Président, je ne veux pas vous interrompre dans
l'étude de l'article 4, mais le ministre nous a fait distribuer, il y a
quelques instants, les amendements qu'il entend proposer. On est rendu à
l'article 4 et il y a un amendement à l'article 3. Je veux revenir
à l'article 3.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): C'est inscrit.
M. BURNS: C'est fait?
LE PRESIDENT (M. Kennedy): ...
M. BURNS: Je ne l'ai pas vu passer, en tout cas.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Je m'excuse, je croyais qu'il avait
été distribué à ce moment-là.
M. BURNS: II a été distribué mais l'amendement n'a
pas été voté.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Alors, l'article 3 est adopté avec
amendement?
M. BURNS: Si vous voulez revenir à l'article 3, on va l'adopter
avec amendement.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Très bien. Je suis les conseils d'un
expert en procédure.
M. BURNS: A l'article 4, il y a un autre amendement.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): L'article 4, avec amendement,
adopté?
M. LEGER: A l'article 4, on a discuté de l'explication de
l'article comme tel. Mais là, le ministre apporte un amendement
remplaçant, dans la septième ligne, le mot "accepttant" par le
mot "acceptant".
M. TETLEY: C'est cela.
M. LEGER: Qu'on enlève un "t" pour en mettre seulement un, quoi.
A la 7e ligne.
M. BURNS: C'est parce qu'il y a un "t" de trop.
M. LEGER: Vous enlevez un "t" tout simplement.
M. TETLEY: C'est ça.
M. LEGER: Une chance que vous avez remarqué cela!
M. TETLEY: Cela ne change pas le sens beaucoup.
M. BURNS: Cela nous montre justement que nos légistes ne sont pas
forts en anglais et qu'il serait peut-être temps qu'on se mette à
faire des lois en français, tout simplement.
M. TETLEY: Cela, c'est un autre débat.
M. CHARRON: II a déjà eu lieu, ce débat-là,
et vous n'avez pas voulu.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): A l'ordre, à l'ordre!
Article 4, avec amendement, adopté?
M. TETLEY: La Loi de la Législature, c'est peut-être le
moment pour demander...
M. LEGER: Article 4, adopté, avec un "t" en moins.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): A l'ordre, messieurs ! Article 5?
M. LEGER: Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Article 6?
M. LEGER: M. le Président, pour quelle raison les compagnies
extra-provinciales se voient-elles accorder une sorte de privilège de
maintenir un capital-actions permanent, en n'ayant pas à accepter cela,
contrairement aux compagnies québécoises?
M. TETLEY: Après le discours de l'honorable député
de Beauce-Sud et du député de Lafontaine, ce matin, je me suis
posé la question encore et j'ai vérifié. Il n'y a qu'une
seule compagnie en cause. J'ai décidé que vous aviez raison. Avec
votre permission, nous allons mettre $1 million comme tout le monde.
M. LEGER: Parfait, M. le Président. Cela met toutes les
compagnies sur le même pied.
M. ROY: J'aimerais intervenir sur l'amendement, parce que, M. le
Président, je pense que cet amendement était quand même
important, de façon qu'il n'y ait pas de restriction ou d'obligation
plus grande pour les entreprises du Québec que pour les entreprises
extra-provinciales, les entreprises qui sont situées ailleurs. Il est
évident que, si on avait laissé cela de cette façon, il y
avait une discrimination très sérieuse à l'endroit de nos
entreprises, chez nous.
M. TETLEY: Nous allons intituler l'amendement, l'amendement
Beauce-Sud-Lafontaine.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Article 6, adopté avec amendement?
M. LEGER: Avec l'amendement de $1 million.
M. ROY: On n'a pas demandé cela au ministre. Ce qu'on veut, ce
sont des lois sans trop de dentelle, des lois claires et nettes et qu'on tienne
compte de la situation qui prévaut, de façon que, comme je viens
de le dire, il n'y ait pas de discrimination à l'endroit des
sociétés québécoises par rapport aux autres.
M. TETLEY: Parfait.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Article 7?
M. LEGER: Article 7, M. le Président, adopté.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Article 8?
M. LEGER: Voilà le point, M. le Président, à
l'article 8.
D'abord, est-ce que le ministre pourrait nous expliquer, à
l'article 8, dans les notes explicatives...
M. TETLEY: On revient encore sur ça, M. le Président.
M. LEGER: Je lis la note explicative: L'article 8 exige que la raison
sociale d'une compagnie québécoise soit en langue
française, accompagnée ou non d'une version anglaise, et ce,
dès qu'elle sollicite un nouvel enregistrement".
Pourquoi dites-vous un nouvel enregistrement? Cela veut dire que celles
qui sont déjà là, on ne les touche pas et qu'elles
continueront à fonctionner sans avoir une raison sociale
française, que cela ne sera pas obligatoire.
M. le Président, le gouvernement s'esl beaucoup vanté de
vouloir faire du français la langue du travail, la langue officielle, la
langue du milieu des affaires. Voici que, pour la quatrième fois, on
présente au ministre une occasion de rendre vrai ce qu'il prétend
lui et son premier ministre, qui a fait un voyage à Paris en
prétextant que le bill 22 avait fait...
M. TETLEY: Je n'étais pas présent!
M. LEGER: ... du français la langue officielle.
M. le Président, c'est le temps de passer de la parole aux actes.
A l'article 8, si le ministre veut réellement montrer que son premier
ministre ne ment pas à la population, c'est le temps de prouver...
LE PRESIDENT (M. Kennedy): A l'ordre, messieurs! Cela suffit.
M. LEGER: ... le défenseur de la langue anglaise au
Québec, le Parti libéral... C'est le temps de demander dans les
actes, à l'occasion d'un article précis, que toutes les
compagnies qui voudront faire affaires au Québec aient le respect des
Québécois, des francophones québécois qui, eux, ont
la possibilité de vivre chez eux. Qu'on les respecte en obligeant les
compagnies à avoir un nom français, non pas dans le futur,
c'est-à-dire les compagnies n'y faisant pas affaire actuellement, mais
les compagnies qui ont fait beaucoup de profits au Québec, avec les
Québécois. Qu'elles les respectent en ayant un nom
français et qu'elles soient obligées de l'avoir non pas quand
elles vont solliciter un nouvel enregistrement mais que toute compagnie
québécoise ait au moins un nom français, sinon le bill 22
est, tel qu'on l'a dit, une fumisterie.
M. TETLEY: M. le Président...
M. BOUTIN: M. le Président, si on suit bien le raisonnement du
député de Lafontaine, on pourrait aller plus loin dans cette
manière de procéder et on pourrait peut-être demander au
leader du Parti québécois de changer son nom aussi.
UNE VOIX: C'est très intelligent.
M. BURNS: Une question de privilège, M. le Président.
M. TETLEY: J'étais debout.
M. BURNS: Voyons donc, M. le Président! Le député
stupide qui vient de parler ne se rend pas compte que vous auriez
également des problèmes vous aussi, car vous seriez obligé
de changer de nom. Il a simplement oublié, et cela est peut-être
une leçon qu'on devrait donner vous et moi à des colonisés
comme le député qui vient de parler, qu'il est fort probable que
des personnes qui s'appellent Kennedy et qui s'appellent Burns soient
intégrées à la communauté francophone, et cela est
tout à la gloire do la communauté francophone.
Un député devrait penser deux fois avant de faire une
suggestion comme celle qu'il vient de faire.
M. TETLEY: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Merci.
M. BURNS: Tetley, dans le cas de Tetley, à ce moment-là,
c'est quasiment peine perdue.
M. TETLEY: M. le Président, sans entrer dans le
débat...
M. LEGER: Entrez dans le débat.
M. TETLEY: Je crois que le député de Maisonneuve doit
être fier de porter le nom du plus grand poète d'Ecosse. Le plus
grand, très romantique.
Mais, M. le Président, revenons à l'article 8 du projet de
loi no 77. Il y a cinq compagnies de fidéicotnmis au Québec qui
n'ont pas de nom français et c'est notre intention, lors du
renouvellement, le 30 juin 1975, d'insister pour que leurs noms soient
changés, autrement elles n'auront pas de renouvellement.
C'est-à-dire d'ici six mois et vingt jours.
C'est l'idée et le but de l'article 8. Pourquoi avons-nous cet
article dans la loi? C'est parce qu'apparemment les grands experts de la langue
française ont discuté pendant près de trois mois la
question de savoir si le mot trust est français ou anglais. Je vois
que...
M. LEGER: ... les truster.
M. TETLEY: Le député de Saint-Louis trouve cela un peu
ridicule mais il donne son assentiment à cette idée. En tout cas,
apparemment trust est accepté en France, à Paris, à
Québec, au Québec, à Montréal et partout. Nous
allons l'accepter en droit ici comme mot français mais il faut
évidemment changer...
UNE VOIX: Cela existe en France?
M. TETLEY: Cela existe même en France apparemment. Je ne voulais
pas entrer dans un débat créé un peu par l'Office de la
langue française et autres et c'est pourquoi une compagnie peut avoir
dans son nom français le mot trust. Mais ces cinq compagnies vont
changer leurs noms le ou avant le 30 juin par règlement des compagnies,
non pas par bill privé incidemment.
M. BIENVENUE: Est-ce qu'on peut vous "truster" là-dessus?
M. TETLEY: Oui.
M. LEGER: M. le Président, dans les notes explicatives, il est
bien dit: "L'article 8 exige que la raison sociale d'une compagnie
québécoise..." Alors, cela touche les 17 compagnies
québécoises et non pas les huit ou neuf compagnies canadiennes ou
d'une autre province.
M. TETLEY: C'est vrai.
M. LEGER: Ces 17 compagnies vont pouvoir continuer à agir au
Québec, je n'ai pas d'objection; si elles ont de l'argent à faire
au Québec et que les Québécois sont heureux, pas de
problème, on est heureux de les avoir. Mais qu'elles aient un nom
français, M. le Président. Le ministre devrait intégrer
dans l'article 8 l'obligation que toute compagnie qui veut faire affaires au
Québec ait un nom français de façon à respecter les
gens avec qui et sur qui elle va faire de l'argent. La même chose pour le
projet de loi sur lequel nous nous sommes attardés l'autre fois, la Loi
des agents de recouvrement. Si on leur donne des permis, ils devraient au moins
avoir un nom français. Vous avez refusé la dernière fois
et vous avez même refusé qu'ils communiquent en français
avec les citoyens québécois. C'est une autre loi qui
démontre jusqu'à quel point le bill 22 ne couvre pas cela et
c'est de la fumisterie. Alors, c'est le temps de passer aux actes, M. le
Président. Que les 34 compagnies touchées par le projet de loi no
77 voient que vous avez l'intention de passer aux actes et d'arrêter de
faire une grande propagande fause qui trompe tous les Québécois
et qui mêle autant les anglophones que les francophones.
M. ROY: M. le Président... UNE VOIX: De la démagogie.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Beauce-Sud.
M. ROY: M. le Président, je suis bien d'accord, en ce qui me
concerne, que les entreprises...
UNE VOIX: ... péquistes...
M. ROY: Pardon? Je viens d'entendre les voix de certains loyalistes, M.
le Président. Si on veut intervenir, on pourra le faire tout à
l'heure mais qu'on laisse donc parler ceux qui ont demandé la parole et
à qui le président l'a accordée. Qu'on leur laisse donc le
droit de s'exprimer. Ayez donc le courage de vous lever à votre tour
quand c'est le temps, au lieu de murmurer, de chuchoter et de déranger
tout le monde.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): A l'ordre!
M. ROY: Ce que je veux dire à l'intention de l'honorable ministre
ainsi qu'au gouvernement, c'est que je suis bien d'accord que les entreprises
qui font affaires au Québec aient une raison sociale française.
Mais cela ne doit pas s'arrêter là, il faut aller plus loin. Les
entreprises, dans le passé, qui étaient identifiées au
grand capital anglo-saxon au Québec avaient un nom anglo-saxon dans le
Québec. Cela permettait aux Québécois qui voulaient
investir leurs capitaux dans leurs institutions à eux d'identifier les
entreprises et de savoir l'appartenance des entreprises qui sollicitaient leur
appui, qui sollicitaient des dépôts ou des affaires.
Si on fait en sorte que les entreprises, même multinationales,
viennent fonctionner au Québec avec une raison sociale française,
comment pourra-t-on savoir, et comment le public québécois
pourra-t-il savoir s'il fait affaires avec une entreprise de chez nous, une
entreprise québécoise, plutôt qu'avec une entreprise
nationale voire même une entreprise multinationale, si on ne fait pas en
sorte que ces entreprises soient bien identifiées? Parce que, M. le
Président, l'article 8 a pour objet de modifier l'article no 25 de la
loi.
Il y a quelque chose de très important et de très
précis dans la loi: "Une compagnie ne peut être enregistrée
sous un nom identique à celui sous lequel une compagnie a
déjà été enregistrée ou lui ressemblant
tellement qu'il y ait danger de les confondre ou sous aucun autre nom qui, dans
l'opinion du ministre des Finances, pourrait induire en erreur sur son
identité les membres ou le public". C'est ce que je dis: induire les
membres en erreur ou bien le public.
Combien d'entreprises au Québec, sollicitent des affaires au
Québec et accumulent l'épargne des Québécois, nos
capitaux bien à nous, qui sont notre propriété personnelle
et, par voie de conséquence, notre propriété collective?
Ces institutions viennent chercher nos épargnes chez nous pour les
investir ailleurs, pour des fins qui ne nous concernent pas et qui
n'améliorent en rien la qualité de vie et la condition
économique du Québec et des Québécois. M. le
Président, j'ai dit ce matin, devant l'Assemblée nationale, qu'il
était temps qu'au gouvernement, qu'au ministère des Institutions
financières, Compagnies et Coopératives on prenne ses
responsabilités. Le ministère a en main les moyens, il peut se
donner des mécanismes, il peut adopter une réglementation qui lui
permettrait de nous assurer, de nous garantir, dans la plus grande
majorité des cas, que l'épargne québécoise servira
à celui qui veut investir dans sa province pour le développement
économique des siens, et aura certaines garanties lorsqu'il fait
affaires dans certaines institutions.
On fait un "melting pot" j'appelle ça un "melting
pot" avec les entreprises américaines, les entreprises
canadiennes, nationales, les entreprises européennes et de toute nature,
dans le domaine des institutions financières. Et on fait en sorte que
ces entreprises, sous prétexte de satisfaire à l'exigence de la
loi sur la langue officielle ou sur les langues officielles parce que
c'est une loi sur les langues officielles, ce n'est pas une loi sur la langue
officielle, même si le premier ministre essaie de faire accroire
ça au premier ministre de la France ou encore au président de la
France, M. Giscard d'Estaing. Même s'il a assisté à une
séance du conseil des ministres en France, ça ne nous
impressionne pas. La réalité est tout autre. Il faut regarder la
réalité au Québec, et ça ne nous impressionne pas
...
M. TETLEY: Toronto récemment.
M. ROY: ... et ça ne nous dérange pas non plus.
M. BELLEMARE (Rosemont): M. le Président, j'invoque une question
de privilège.
M. ROY: Je dois dire que ça ne nous dérange pas non plus.
Il y en a un qui s'est senti visé, M. le Président.
M. BELLEMARE (Rosemont): Une question de privilège. Je voudrais
savoir, comme je ne parle pas l'anglais et qu'on peut parler français,
je voudrais savoir du député de Beauce-Sud ce qu'il entend par
"melting pot", est-ce que c'est ce qui se passe dans son parti?
M. ROY: M. le Président, c'est un mélange à tarte;
vous connaissez ça des tartes?
M. BELLEMARE (Rosemont): C'est ridicule.
M. ROY: Une question ridicule ne mérite pas une réponse
beaucoup plus intelligente.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): A l'ordre, messieurs!
M. ROY: C'est ça que j'allais dire au ministre et au
gouvernement. Je dis que le gouvernement a les moyens, a les techniciens, les
légistes nécessaires. Lorsqu'on amende une loi comme
celle-là et qu'on touche la question linguistique, je comprends les
intentions du député de Maisonneuve: il veut que les entreprises
s'intègrent à la communauté québécoise. Mais
je ne suis pas satisfait du fait que les entreprises uniquement par le
fait qu'elles portent un nom français mais qui ne s'intègrent pas
à la société québécoise et qui ne
s'intègrent pas à l'économie québécoise
puissent avoir la bénédiction du ministère des
Institutions financières, Compagnies et Coopératives.
Je dis qu'il faut aller plus loin, si on a réellement à
coeur de promouvoir la libération économique des
Québécois. On manque de pouvoir économique au
Québec. Nous avons un ministère des Institutions
financières, Compagnies et Coopératives qui a le mandat et la
responsabilité de régir les institutions financières, puis
on va se battre uniquement au niveau des mots, par rapport à la langue?
Je dis, moi, que c'est berner la population. Il faut aller plus loin que
ça. Les institutions qui font affaires au Québec devraient avoir
l'obligation de publier un bilan séparé des activités
qu'elles exercent au Québec.
Lorsqu'on touche au domaine de la finance, on touche à la
clé de l'économie.
L'économie peut se développer à la condition que
nous ayons des capitaux pour ce faire. Il y en a des capitaux au Québec,
c'est notre épargne. Il y a les sociétés de fiducie et les
sociétés de fidéicommis dont parle le projet de
loi que nous avons devant nous. Je pense qu'il est drôlement
important et impérieux qu'on prenne toutes les dispositions et toutes
les mesures pour s'assurer que les gens qui reçoivent ces capitaux, ceux
à qui on confie ces capitaux, ceux qui ont à administrer un
réservoir d'épargne qui provient du Québec, qui est la
propriété des Québécois, les fassent servir
à des fins qui contribuent au développement économique du
Québec, au développement de nos richesses naturelles. Il faut
s'assurer que ces entreprises offrent des services aux hommes d'affaires du
Québec, au lieu d'investir les capitaux des Québécois dans
des entreprises nationales voire même multinationales qui viennent, par
la suite, investir au Québec, mais pour concurrencer et détruire
la petite et la moyenne entreprise québécoise.
Ce projet de loi est très technique, comme je l'ai dit ce matin.
Pour exposer mes vues, je profite de l'article 8, qui est présentement
en discussion ici et qui touche un point important de la question. Mon
collègue de Lafontaine a parlé de la langue. Je suis d'accord sur
ce point. Cependant, si on se limite uniquement à cette
question-là, on fait fausse route et on induit encore une fois les
Québécois en erreur. C'est pourquoi, dans le cadre du projet de
loi tel que formulé et tel que présenté par le
gouvernement actuel, on ne peut pas insérer des amendements de cette
nature. Le ministre nous a proposé des amendements et il a quand
même le pouvoir d'apporter d'autres amendements qui pourraient être
ajoutés à la loi. On peut proposer des amendements, des
modifications à la loi, d'accord, mais c'est la responsabilité du
ministre seul, à ce moment-ci, de s'assurer qu'il y ait des dispositions
dans le projet de loi actuellement en discussion, Loi modifiant la loi des
compagnies de fidéicommis, qui nous donnent des garanties sur le plan
économique. C'est cela que je demande au gouvernement et c'est de cette
façon seulement qu'on travaillera à la libération
économique des nôtres.
M. LEGER: M. le Président, à l'article 8, je voudrais
proposer un amendement, pour répondre non seulement à ma
préoccupation, mais à celle du député de
Maisonneuve et à celle du député de Beauce-Sud. Il faut
quand même commencer par un commencement.
Etant donné que les compagnies de fidéicommis, qui feront
affaires au Québec, se servent justement de droits
québécois, de droits civils québécois, de
juridiction provinciale, je vais nommer ces pouvoirs que l'on peut voir au
chapitre 287, page 725 de la Loi des compagnies de fidéicommis. Les
pouvoirs de ces compagnies sont les suivants: "Conformément à ses
règlements ou à sa constitution, une compagnie enregistrée
peut qu'elle soit Québécoise, Canadienne ou d'une autre
province a) posséder absolument pour ses propres usage et
avantage toute propriété immobilière qui peut lui
être nécessaire et utile pour la poursuite de ses affaires;" elle
peut aussi "b) acquérir, pour protéger ses intérêts,
toute propriété immobilière engagée ou
hypothéquée en sa faveur; c) louer, hypothéquer, vendre ou
aliéner les propriétés immobilières visées
aux sous-paragraphes a) et b)". Ce sont des pouvoirs de juridiction
québécoise. C'est du droit civil québécois, on leur
donne ces pouvoirs.
Il faudrait leur donner une obligation supplémentaire.
L'amendement que je propose serait celui-ci: A l'article 8, ajouter, à
la première ligne, après le mot "peut", les mots suivants "faire
affaires au Québec ni". Donc, l'article 8 se lirait maintenant comme
suit: "Une compagnie ne peut faire affaires au Québec ni y être
enregistrée à moins que sa raison sociale ne soit en langue
française". C'est donc dire que les 34 compagnies qui veulent
fonctionner au Québec, avec les Québécois, qui vont faire
de l'argent avec les Québécois et elles sont heureuses de
venir faire de l'argent avec les Québécois, parce que nous sommes
une source énorme de revenu pour ces compagnies, puisque souvent ce sont
nos capitaux qui les aident à venir s'intégrer chez nous
le fassent au moins en ayant le respect du pays dans lequel elles sont et le
respect du français.
C'est un début; ce n'est pas l'argumentation complète du
député de Beauce, je l'admets.
Ma proposition est d'amender l'article 8 de façon que toute
compagnie qui est visée par la loi 77 soit obligée pour faire
affaires au Québec, d'avoir une raison sociale française.
M. TETLEY: M. le Président, je trouve intéressante mais
très peu pratique la suggestion du député de Lafontaine.
Intéressante parce que le but est valable peut-être d'imposer
à toute personne qui vient ici, toute personne incorporée,
l'obligation de changer son nom en un nom français.
C'est pourquoi la suggestion de mon ami...
M. LEGER: Je n'ai pas dit changer. C'est qu'elle ait une raison
sociale...
M. TETLEY: Changer son nom en un nom français et anglais.
M. LEGER: C'est ça. Elle peut garder le nom anglais, on n'a pas
d'objection.
M. TETLEY: Ajouter un nom français. C'est pourquoi il n'est pas
si ridicule. C'était très intelligent, la suggestion de mon
collègue lorsqu'il a suggéré qu'un certain
député qui habite le comté de Maisonneuve et qui a un nom
très anglais change peut-être son nom Burns pour
Brûlé...
M. LEGER: Qui s'y frotte s'y brûle. M. TETLEY: Les deux noms. M.
BURNS: Tetley comment est-ce... M. TETLEY: Tetley est très
français.
M. LEGER: Oui, mais cela n'a pas la même signification.
M. BURNS: M. Blank alors? M. TETLEY: C'est très
français.
M. LEGER: Vous avez eu un blanc de mémoire.
M. BURNS: Blanc de mémoire, M. Rien.
M. TETLEY: Je trouve la suggestion peut-être valable à long
terme. Ce pourrait être une étape un bon jour, je me le demande.
Pour l'instant, je ne peux pas appuyer cette demande. Je ne peux pas l'appuyer,
parce que c'est anticonstitutionnel dans notre Etat fédéral, dans
le Québec.
M. LEGER: Ah! Ah! C'est de juridiction provinciale.
M. TETLEY: Dans notre pays, que je nomme le Canada, évidemment,
c'est anticonstitutionnel. Le député de Saint-Louis, un avocat de
longue expérience, diplômé de l'université McGill et
de l'armée, avec une grande expérience comme avocat a noté
lors de vos remarques, M. le député de Lafontaine, que Bonanza
Creek, qui est un jugement très bien connu a stipulé que toute
compagnie québécoise ou fédérale peut faire
affaires par tout le Canada sans permission ou sans restriction autres que les
restrictions normales de l'endroit.
De plus, je crois que pour l'instant, sinon pour toujours
peut-être, il faut adopter tranquillement les idées sur la langue
qui sont adoptées par notre gouvernement. C'est un reproche que vous ne
pouvez pas faire au ministère des Institutions financières,
Compagnies et Coopératives: c'est le ministère qui a fait le
premier pas. Vous l'avez noté vous-même le 14 juillet 1971, lors
de l'adoption de l'article 4 du projet de loi no 45, M. l'honorable
député de Lafontaine.
M. LEGER: La loi 45, c'était à cinq heures du matin,
cela.
M. TETLEY: C'était à cinq heures du matin, vous
étiez fatigué, mais vous avez fait des compliments.
M. LEGER: Je ne suis pas trop sûr si je me rappelle ce qui se
passait.
M. TETLEY: Je crois pour l'instant...
M. ROY: A cinq heures du matin, il est permis de faire des erreurs.
M. TETLEY: II fait des erreurs même à onze heures et trois
heures du matin. M. le Président, je ne peux pas appuyer cette
idée, et je crois que l'amendement doit être refusé et
renvoyé.
M. LACROIX: M. le Président, là-dessus, je voudrais
personnellement m'opposer également à cet amendement à
l'article 8, puisque nous sommes encore au Canada et que tant que l'article 133
de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique ne sera pas
changé...
M. BURNS: L'article 133 ne vise pas cela du tout. Cela vise les
tribunaux, puis...
M. LACROIX: L'article déclare que les deux langues sont
officielles au pays...
M. BURNS: L'article 133 vise les affaires publiques, les tribunaux.
M. LACROIX: ... et les implications du bill 22 viendront, par
étapes. Je crois qu'à ce moment-ci on veut faire de cette
question de la langue française ou, si vous voulez, de la traduction, un
ballon politique. Et ce qui m'étonne...
M. BURNS: C'est déjà dans votre projet de loi.
M. LACROIX: ... c'est quand on va en Guadeloupe, par exemple... J'ai eu
l'occasion d'aller en Guadeloupe, une vraie colonie française,
où, sur la route, vous voyez des arrêts. C'est marqué:
"Stop" simplement. Ce n'est même par marqué "Arrêt". On voit
nos petits séparatistes, ici, qui s'amusent à barbouiller les
enseignes où c'est marqué "arrêt, stop", où les deux
sont marqués, alors que dans une colonie française, vous n'avez
que le mot "stop" de marqué.
Ici, on veut faire des chiures de mouches pour mettre des "i" sur les
points de la constitution. Je pense à l'intervention du
député de Beauce-Sud, par exemple, qui, quand on parle de donner
des institutions complètement françaises, des institutions
canadiennes, des institutions françaises, demande de faire une
démarcation et demander à quoi servent les fonds qui sont
déposés dans ces sociétés de fiducie.
Que ces sociétés de fiducie appartiennent aux caisses
populaires ou qu'elles appartiennent au Trust Général du Canada,
est-ce qu'on identifie les fonds qui sont investis dans ces
sociétés en disant qu'elles sont allemandes, polonaises,
anglaises, américaines ou d'une autre sorte? Je pense que c'est
là faire de l'extrémisme, qui n'est pas à l'avantage ni du
Québec, ni de ces institutions.
Je ne crois pas qu'en amendant l'article 8, selon le désir du
député de Lafontaine, on améliore d'aucune façon ce
projet de loi. La langue française sera respectée en autant que
nous verrons à donner à chacun les possibilités de faire
affaires dans la province de Québec, et ils viendront d'eux-mêmes,
avec l'incitation que nous faisons, à la suite de la loi 22 à se
franciser davantage. D'ailleurs, le gouvernement a déjà
commencé à procéder. Le ministre l'a dit
tantôt. A compter du mois de juin prochain, les compagnies, pour
avoir un renouvellement de leur enregistrement, devront indiquer du
français dans leur façon d'afficher et de transiger en
français.
M. ROY: M. le Président, suite aux remarques que vient de faire
l'honorable député des Iles-de-la-Madeleine, je voudrais bien
apporter une précision à son endroit, avec votre permission. Tout
à l'heure, quand on a parlé des institutions avec raisons
sociales françaises, le pourquoi de mon intervention et ce que j'ai
voulu développer à ce sujet-là, c'est que dans le
passé, il y a eu une quantité d'institutions qui ont fait
affaires au Québec, qui n'étaient pas obligées d'avoir une
raison sociale française. Je pense que le député des
Iles-de-la-Madeleine pourra bien me saisir. C'est que ces
sociétés étaient identifiées, par leur raison
sociale, comme étant des sociétés qui n'étaient pas
québécoises. Les gens le savaient à partir du moment
où ils faisaient affaires avec elles.
Si on ouvre la porte et qu'on oblige toutes les sociétés
qui viennent faire affaires au Québec, surtout pour solliciter des
dépôts d'argent, solliciter des capitaux au Québec, il y a
danger de saigner le Québec davantage dans des entreprises non
identifiées et non identifiables, dans des entreprises qui sont
contrôlées par des étrangers, qui viennent chercher des
capitaux chez nous, nos épargnes de façon à renforcer des
institutions ou des entreprises qui font concurrence aux nôtres. C'est
ça que j'ai voulu dire.
J'ai voulu dire qu ministre des Institutions financières,
Compagnies et Coopératives, tout en étant d'accord sur ce
principe que les raisons sociales des entreprises qui font affaires au
Québec devraient être françaises, j'ai voulu dire au
ministre que, même si je suis d'accord sur ça, j'ai voulu
souligner qu'il y a un danger et un danger très sérieux. Les
institutions financières, ce ne sont pas des entreprises qui viennent
développer le Québec. Il ne faudrait pas se faire d'illusion
là-dessus. Ce sont des entreprises qui viennent chercher des capitaux au
Québec et qui les placent dans des entreprises, dans des institutions,
qui font des placements dans des secteurs pour avoir le meilleur rendement
possible, pour offrir le maximum de revenus aux déposants à qui
on a confié des capitaux.
C'est uniquement un critère de rendement, un critère de
rentabilité qui entre en ligne de compte. Et si on prend
l'épargne québécoise pour financer le développement
économique de l'Ontario et de l'Ouest canadien par le truchement de ces
entreprises, et que parce qu'elles ont une croissance économique plus
forte que la nôtre, le rendement des capitaux est meilleur, il ne nous
reste plus rien, nous, au Québec, pour pouvoir faire notre
développement économique.
Alors, c'est un point, je pense, que le député des
Iles-de-la-Madeleine comprendra. Je ne veux pas faire un nationalisme
arbitraire et un nationalisme fermé. Mais je pense que c'est une
question de sain nationalisme.
Je pense que nous avons un problème de développement
économique au Québec. Tout le monde sait le ministre des
Finances est le premier à le dire et à le répéter
que nous manquons de capitaux. Alors, je dis que nous devrons être
extrêmement prudents vis-à-vis des institutions qui viennent
solliciter, au Québec, l'épargne des Québécois pour
l'administrer en leur nom. C'est le point que j'ai voulu souligner. Je pense
que le député des Iles-de-la-Madeleine va être d'accord
avec moi sur ce point.
M. LACROIX: Cela peut arriver, mais l'inverse arrive également.
Par exemple, autrefois, il y avait la Barclays Bank qui venait ici. Elle ne
venait pas pour accumuler, pour exploiter, ou pour drainer les fonds
québécois à l'extérieur. Tout comme, par exemple,
nous, nous avons des banques ou des succursales de trust ou de fiducie dans
d'autres pays, qui ne servent pas à attirer les capitaux des autres pays
dans leurs institutions, mais servent plutôt de canal aux capitaux
québécois, aux capitaux canadiens, pour investir dans les autres
pays. C'est la même chose pour les autres institutions d'autres pays qui
sont implantées ici qui servent beaucoup plus de canal pour permettre
d'entrer des fonds à être investis ici. Cela arrive
également.
Je pense que, là, on ne doit pas verser dans un nationalisme
étroit, parce que cela pourrait jouer également contre nous et
peut-être davantage qu'en notre faveur.
M. ROY: M. le Président, je comprends l'argument de mon
collègue des Iles-de-la-Madeleine de ce côté, mais, si on
regarde la réalité en face, bien en face, et qu'on examine le
bilan, à ce jour, de tout ce phénomène, je dis que nous
sommes perdants et que nous avons toujours été perdants. En
effet, les entreprises que nous avons réussies, au Québec, et qui
ont réussi à devenir des entreprises sur le plan national, nous
les avons perdues, dans la très grande majorité des cas. Nous les
avons perdues et elles sont allées s'établir ailleurs. C'est le
point. Ce que je veux souligner et ce sur quoi je veux attirer l'attention du
gouvernement, c'est que les entreprises étrangères
québécoises je veux parler des entreprises nationales,
voire multinationales, mais nationales d'abord lorsqu'elles viennent
investir au Québec pour le développement, elles ne viennent pas
pour développer l'entreprise québécoise. Elles fournissent
des capitaux à des entreprises nationales et multinationales qui
viennent concurrencer nos entreprises, chez nous. De cette façon, nous
sommes toujours les perdants.
J'aimerais que ce soit bien compris. Il ne s'agit pas de faire du
nationalisme étroit, mais je pense que nous avons une question devant
nous et que, si nous voulons un jour avoir un pouvoir économique, si
minime soit-il, mais un pouvoir économique réel... Je parle du
projet de loi, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Vous n'êtes pas dans l'économie
de l'article 8.
M. ROY: Voici, c'est un parallèle que je fais. En effet, on dit
qu'une compagnie "ne peut faire affaires au Québec" dans l'amendement
proposé par l'honorable député de Lafontaine. Je dis
qu'une compagnie qui fait affaires au Québec devrait être
astreinte, devrait être soumise à l'obligation de publier des
états financiers séparés et de faire un rapport au
gouvernement sur le montant des capitaux qu'elle a reçus du
Québec, sur le montant de son portefeuille qu'elle a investi au
Québec, de façon que nous puissions savoir clairement si les
capitaux qui ont été pris au Québec servent à
développer l'économie québécoise.
Nous sommes sur un point extrêmement important et c'est justement
sur ce point que j'insiste énormément aujourd'hui. Ce n'est pas
la première fois que j'interviens à l'Assemblée nationale
sur ce point, mais nous touchons là un point prioritaire, auquel le
gouvernement devrait apporter une attention plus que particulière, une
attention très spéciale.
Ce sont les mises au point que je voulais faire suite aux remarques de
mon collègue, le député des Iles-de-la-Madeleine,
également à celles du ministre qui ne m'a pas répondu ce
matin et qui ne me répond pas encore cet après-midi sur les
points que j'ai soulevés.
M. BURNS: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, j'ai été
étonné mais je ne parlerai pas longtemps là-dessus
d'entendre le député des Iles-de-la-Madeleine nous parler
de l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, qui n'a
rien à faire dans le présent débat. Si le
député des Iles-de-la-Madeleine était encore ici
j'espère qu'il m'entend de son bureau je pourrais lui dire que
l'article 133 s'applique au droit de parole, en français et en anglais,
devant les tribunaux et dans les administrations publiques. Il ne s'occupe pas
du tout des compagnies de fidéicommis.
M. le Président, une fois cette rectification faite, une fois ce
bref cours donné au député des Iles-de-la-Madeleine, je
pense que je dois dire pourquoi je suis entièrement d'accord sur la
motion d'amendement faite par le député de Lafontaine.
J'ai entendu le ministre dire, à ma grande horreur, tout à
l'heure, qu'il n'avait pas juridiction sur ce type d'amendement, que le
Québec excéderait vraiment sa compétence s'il adoptait,
dans une de ses lois, la motion que le député de Lafontaine
propose en amendement à l'article 8 du projet de loi.
Je pense, M. le Président, bien au contraire, que nous avons une
parfaite et entière compétence dans ce domaine. Le
député de Lafontai- ne a lu, à l'article 12, je crois, de
la loi, c'est bien ça, les pouvoirs que cette loi le chapitre 287
des Statuts refondus de 1964 accorde à des compagnies. Vous les
énumérez, M. le ministre, et je me réfère, non pas
au ministre mais à mon ancien professeur de droit commercial, qui dans
le temps avait tout mon respect parce qu'il avait des positions beaucoup...
M. TETLEY: A l'université McGill.
M. BURNS: A l'université McGill, oui, c'est vrai et
c'était en anglais qu'il m'enseignait. Mais je réfère le
ministre tout simplement à la description des pouvoirs qui sont
émunérés à l'article 12; ce sont tous des pouvoirs
qu'on peut classer sous le chapeau des droits civils, qui sont de
compétence québécoise. C'est ce que donne cette loi comme
droits à des compagnies de fidéicommis. Par le chapitre 287, Loi
des compagnies de fidéicommis, et par l'amendement proposé par le
projet de loi actuel, vous ne faites que réglementer des droits civils
pour des compagnies. Un de ces droits peut être le nom. Vous avez
tellement pensé que vous pouviez le réglementer que, dans
l'article 8 du projet de loi no 77, vous imposez aux compagnies l'obligation
d'avoir au moins une raison sociale en français.
Ce que vous dit le député de Lafontaine c'est quelque
chose qui est déjà dans votre projet de loi mais qui veut
être plus clair que votre projet de loi. Ce que le député
de Lafontaine vous demande c'est de dire à des compagnies, comme vous le
dites partout ailleurs dans le projet de loi: Vous n'exercerez pas vos affaires
au Québec si vous ne vous conformez pas à certaines conditions.
Je vais vous en donner, dans la loi actuelle, des exemples où vous avez
imposé ces choses à des compagnies.
Je vous réfère d'abord, dans la loi actuelle, à
l'article 36, qui nous dit tout simplement ceci, cela vaut la peine de le
citer: "Pour assurer la mise à exécution de la présente
loi, le lieutenant-gouverneur en conseil peut nommer un officier appelé
inspecteur des compagnies de fidéicommis et tous autres officiers ou
employés attachés à la mise à exécution de
la présente loi. L'inspecteur et les autres officiers ou employés
ainsi nommés sont sous le contrôle du ministre des Finances, et le
lieutenant gouverneur en conseil peut définir leurs fonctions et leurs
devoirs".
Vous avez le droit de nommer des inspecteurs; vous avez le droit
à 39, on s'en aperçoit de leur imposer des conditions;
vous avez le droit d'imposer vos inspecteurs; vous avez même le droit de
demander à ces compagnies un rapport qui devrait comprendre, comme dit
l'article 39, une liste des officiers de la compagnie, un état du
capital autorisé, etc. Cela a l'air beau, vous posez des conditions mais
ça va plus loin que cela. Dans votre loi, qui est la Loi des compagnies
de fidéicommis, les articles 26 et suivants, cela vaudrait la peine, M,
le ministre, que vous les relisiez.
A l'article 26 on traite particulièrement des compagnies
extra-provinciales et que dit-on de ces compagnies? On dit qu'une corporation
extra-provinciale ou étrangère, dont le siège social est
situé en dehors de la province, doit, de plus, avoir, avant d'avoir
droit à l'enregistrement, déposé au ministère des
Finances une procuration, une copie des lettres patentes et, dans le cas d'une
compagnie constituée par un statut fédéral, ou provincial,
il suffit d'indiquer le ou les statuts qui la concernent.
A l'article 27, vous imposez d'autres obligations aux compagnies
extra-provinciales et étrangères. A l'article 28, la même
chose, vous dites que si une compagnie extra-provinciale ou
étrangère enregistrée change son nom, elle doit vous en
aviser. Bien, on est justement dans le domaine du nom, de la raison sociale
d'une compagnie. Ce que le député de Lafontaine vous demande de
dire clairement dans votre loi, c'est ce qui existe déjà, c'est
qu'une compagnie étrangère, extra-provinciale ne puisse faire
affaires au Québec sans qu'elle ait accepté d'avoir au moins un
nom français. Imaginez-vous, ce n'est pas beaucoup demander, cela! C'est
juste dire au moins un nom français puisque vous permettez que le nom
anglais continue d'exister.
Ce n'est que cela, M. le Président, que l'amendement du
député de Lafontaine vous demande. A l'article 33, on trouve une
autre désignation qui englobe le tout. J'aimerais que le ministre
m'écoute à ce moment-ci parce que c'est peut-être la partie
importante. Lui qui dit qu'il n'a pas juridiction pour empêcher des
compagnies étrangères de fonctionner ici, si toutes les
conditions que je vous ai citées relatives aux articles 26, 27, 28, 33,
36 et 39 de la loi actuelle sont nécessaires et même, je vais plus
loin, peuvent, si elles sont contrevenues, entraîner des poursuites, cela
va plus loin à l'article 33, où on dit: "Dès que son
certificat d'enregistrement est suspendu ou annulé, ou dès que
son terme d'enregistrement est expiré sans renouvellement, une compagnie
de fidéicommis ne peut plus transiger d'affaires dans la province".
C'est ce qu'on vous demande de dire clairement lorsque vous vous prononcez sur
une chose aussi essentielle que la raison sociale en français d'une
compagnie de fidéicommis.
Ce problème, comme le député de Lafontaine vous le
disait tout à l'heure, va revenir à chacune de vos lois, M. le
ministre. On va être obligé, à chaque fois, de
vérifier, de jauger, de soupeser l'utilisation que vous faites de la loi
22. On va être obligé de se demander à chaque fois si vous
avez été sérieux quand vous avez dit que vous proclamiez
une loi qui était soi-disant la loi de la langue officielle au
Québec, le français. C'est ce qu'on se pose comme question et ce
qu'on vous demande de faire, tant au point de vue de l'éducation des
compagnies de fidéicommis en question qu'au point de vue du
réalisme d'une loi, dans l'article 8 que vous nous proposez actuellement
et qui semble, comme le disait encore une fois le député de
Lafontaine, être de la poudre lancée à l'ensem- ble de la
population. Si vous le laissez comme cela sans accepter l'amendement du
député de Lafontaine, on saura exactement de quel bois vous vous
chauffez ou plutôt de quel bois vous ne vous chauffez pas.
Quand vous dites, M. le ministre, que vous ne sentez pas que vous avez
la juridiction ou la compétence pour adopter un tel amendement, je vous
rappelle l'article que je viens de citer, celui qui porte dans votre loi le
numéro 33 et qui empêche une compagnie de transiger au
Québec, de faire affaires au Québec si cette compagnie ne
respecte pas les conditions que vous imposez dans la Loi des compagnies de
fidéicommis. Ce n'est pas plus compliqué que cela, vous savez. Il
s'agit tout simplement d'avoir enfin, enfin et j'espère que vous
seriez peut-être le premier de ces ministres à l'avoir une
attitude agressive à l'endroit de la loi, une attitude agressive
à l'endroit de la division des pouvoirs entre Ottawa et Québec.
Tant et aussi longtemps que le Québec ne sera pas un Etat souverain, au
moins prenez donc les compétences que vous avez et n'ayez pas peur,
à chaque fois, en disant: Peut-être que si je
légifère dans ce domaine, j'outrepasse mes pouvoirs. Cela
s'appelle, M. le Président, un gouvernement qui a peur. Et un
gouvernement qui a peur ne légifère pas; un gouvernement qui a
peur ne mérite pas de légiférer. C'est le problème
qui se pose.
Ce que le député de Lafontaine vous demande, c'est
simplement de retransposer à l'article 8 une disposition qui existe
déjà dans la loi, c'est-à-dire que vous n'avez pas le
droit, vous, compagnies de fidéicommis, de transiger, de faire affaires
au Québec si vous ne vous conformez pas aux règles que le
gouvernement du Québec, le gouvernement des Québécois
impose à des compagnies même extra-provinciales, même
étrangères. C'est le problème qui se pose par l'amendement
du député de Lafontaine. A mon humble avis, vous n'excédez
pas vos pouvoirs, vous ne sortez pas de la compétence que l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique donne au Québec.
Vous ne faites qu'exercer votre compétence dans un domaine
particulièrement réservé aux provinces, celui des droits
civils.
Alors, ayez donc le courage de reconnaître ça, de
reconnaître que la condition que le député de Lafontaine
vous demande d'ajouter à l'article 8 apparaît déjà
dans la Loi des compagnies de fidéicommis, qu'elle est carrément
et clairement, sans aucune hésitation, de la juridiction du
Québec.
M. BLANK: Je me suis engagé dans le débat, il n'y en avait
pas d'autre. Je ne suis pas tellement d'accord avec le député de
Maisonneuve. Le député de Maisonneuve mélange deux
problèmes dans le même. Il parle des conditions de fonctionnement
au Québec, mais il a oublié qu'il y a une partie qui n'appartient
pas au Québec mais à la juridiction qui a incorporé la
compagnie, ce qui est complètement différent. Avant qu'on
vienne agir, des...
M. BURNS: Excusez, le député de Saint-Louis! Non, non!
Avec sa permission, je veux tout simplement dire ceci. Je ne dis pas qu'une
compagnie qui est incorporée, soit en Ontario ou au Canada, à
Ottawa, n'a pas les droits que lui confère l'organisme
accréditeur, si on peut dire, ou l'organisme incorporant. Je parle de
quand vous êtes dans un territoire particulier comme celui du
Québec. Dans ce territoire, dans la compétence précise de
ce territoire, c'est-à-dire les droits civils, il n'y a aucune
restriction qui est imposée au législateur
québécois en ce qui concerne les droits civils. Entre autres, il
peut imposer à qui que ce soit des règles, faute de quoi
et ça ça peut être une sanction et c'est la sanction de la
loi actuellement faute de quoi vous n'avez pas le droit d'y faire
affaires.
M. BLANK: Je ne suis pas d'accord, je dis qu'on parle de deux sections.
On parle des conditions de travail au Québec, des activités au
Québec, mais il y a l'autre côté, qui est l'âme de la
compagnie, "the soul of the company"; ça c'est la charte. La charte
inclut le nom, ce n'est pas notre juridiction. On ne peut pas forcer, on peut
faire du chantage, on peut essayer de convaincre, comme le ministre a dit; il
est pour que ces compagnies agissent au Québec en français. On
veut qu'elles fassent ça, mais on n'a pas le droit de toucher à
leur charte. Oui, mais c'est ça, on leur dit d'amender leur charte.
M. BURNS: Non, on n'a pas le droit de toucher à leur charte. On a
le droit de leur dire. Oui, on a le droit de dire ça.
M. BLANK: On n'a pas le droit de dire ça. M. BURNS: Oui on a le
droit de dire ça.
M. BLANK: On n'a pas le droit, je ne suis pas d'accord.
M. BURNS: Oui, on a le droit de dire: Amendez votre charte, ou bien vous
ne faites pas affaires ici.
M. BLANK: Non, on n'a pas le droit de dire ça, parce que le fait
d'amender cette charte ce n'est pas de notre juridiction; on doit aller
à Toronto ou à Ottawa pour amender la charte.
M. BURNS: C'est ça. D'accord.
M. BLANK: On ne peut pas forcer un homme à faire quelque chose
dans une autre juridiction. On peut le forcer à faire quelque chose
ici.
M. BURNS: II a le choix, vous savez; s'il ne veut pas nous respecter, il
retourne là-bas, puis il ne fait pas affaires ici, c'est tout.
M. BLANK: Si vous lisez ce fameux cas que le ministre a cité et
que je lui ai suggéré, "Bonanza Creek", vous verrez qu'on ne peut
pas imposer ces sortes de conditions de la langue à la compagnie. C'est
là qu'est la différence. Dans les compagnies extra-territoriales,
qu'on peut les appeler, on ne contrôle pas l'âme, on contrôle
le corps, mais pas l'âme; c'est la différence. A ce moment-ci, on
n'a pas le droit légal de l'imposer.
M. LEGER: M. le Président, sur la déclaration du
député de Saint-Louis, la province de Québec a le droit de
réglementer, dans le domaine de sa juridiction, le fonctionnement des
compagnies sur son territoire. Elle peut dire dans ses règlements: Si
vous voulez faire affaires au Québec, vous compagnies qui avez une
charte fédérale ou une charte d'une autre province, si vous avez
uniquement un nom anglais, vous n'aurez pas le droit de faire affaires chez
nous. Mais comme vous avez beaucoup d'intérêts à venir
travailler chez nous, parce que vous allez pouvoir utiliser les épargnes
des Québécois, vous allez pouvoir faire de l'argent avec les
Québécois, et comme c'est intéressant pour vous, tout ce
qu'on vous demande, c'est d'avoir un nom français.
A ce moment, on ne les oblige pas, mais elles ont un stimulant tellement
fort qu'elles vont tout simplement demander une traduction française,
qui peut coûter peut-être $300 pour une compagnie qui va faire des
millions. Alors c'est simplement se tenir debout. Si je prenais le
problème à l'inverse, les compagnies francophones du
Québec qui font affaires au Manitoba, pensez-vous que,
d'elles-mêmes, elles n'ont pas choisi un nom anglophone pour pouvoir agir
là-bas, pour que ça fonctionne bien là-bas?
Pour quelle raison, nous les Québécois, sommes-nous
capables d'endurer que les compagnies qui font affaires avec nous aient un nom
anglais et qu'on les encourage quand même? Si on avait un gouvernement
qui se tient debout, qui ne fait pas que de la fanfaronnade, il dirait:
Ecoutez, on est d'accord que vous veniez chez nous, mais ayez au moins un nom
français pour nous respecter. On est obligé de faire ça
parce que nous sommes une minorité, tandis que dans le reste du Canada,
qui sont une majorité, c'est d'elles-mêmes que les compagnies
francophones, qui font affaires avec le reste du Canada, ont un nom aussi
anglophone.
L'amendement que j'ai proposé est qu'elles fassent affaires au
Québec uniquement si elles ont un nom français. Ce serait la
suite logique et normale de la loi 22. Si vous ne le faites pas, c'est une
quatrième preuve consécutive que la loi 22 est une
fumisterie.
M. BURNS: Je suis entièrement d'accord, M. le Président,
et je veux juste, en terminant, citer au ministre c'est un ministre
concerné une autre de ses lois qu'il a adoptée, avec notre
appui, d'ailleurs, la Loi de la protection du consommateur qui, elle, impose ce
type con-
trairement à ce que dit le député de Saint-Louis
d'obligation, pas au niveau linguistique mais à d'autres niveaux.
Je donne comme exemple les vendeurs itinérants qui ne peuvent pas faire
affaires au Québec. Ce peut être ces compagnies-là, des
compagnies canadiennes, ce peut être des compagnies incorporées
ailleurs, mais ce sont des compagnies qui doivent, à un moment
donné, se plier à un certain nombre de règles.
Les vendeurs itinérants peuvent être des Ontariens, peuvent
être des citoyens du Manitoba mais à qui on refuse le droit de
faire affaires au Québec s'ils ne se conforment pas à un certain
nombre de règles. C'est ce qu'on vous dit et c'est ce que votre loi dit
également. On vous demande d'être clair, on vous demande de le
faire sans aucune ambiguïté. Quand j'entendais le
député de Saint-Louis tout à l'heure et c'est
là-dessus que je termine dire qu'on ne peut pas forcer une
compagnie à changer de nom, c'est sûr qu'on ne peut pas la forcer.
Mais de façon accessoire on peut lui dire: Vous venez faire affaires
chez nous; si vous avez tel nom alors, votre choix c'est de venir faire
affaires chez nous ou pas. Si vous venez faire affaires chez nous, à ce
moment-là, vous exercerez votre droit de changer votre nom au Manitoba,
en Saskatchewan ou à Ottawa. C'est cela qu'on vous demande de dire
clairement si vous avez été sérieux et si, comme le
député de Lafontaine le disait, ce n'est pas de la fumisterie, la
loi 22; on vous demande de montrer qu'on est sérieux aussi au
Québec lorsqu'on demande à une compagnie d'avoir une raison
sociale au moins en langue française.
M. TETLEY: M. le Président...
M. LEGER: Adopté.
M. TETLEY: Adopté?
M. LEGER: L'amendement adopté.
M. TETLEY: Non, pardon. J'ai des instructions de "make it snappy" du
leader parlementaire, mais c'est une question importante et je voudrais
répondre à des observations pesées de l'Opposition mais,
je crois, erronées. Permettez-moi de dire "erronées".
J'ai écouté l'honorable député de
Saint-Louis et j'ai écouté un autre avocat, l'honorable
député de Maisonneuve. Je ne suis pas juge, je n'ai pas cet
honneur et je n'ai pas même cette ambition, mais je crois que je dois
rendre jugement officieux en faveur du député de Saint-Louis.
Pourquoi? Parce qu'en vertu de la jurisprudence qui est assez claire, je me
base sur mes collègues, confrères et conseillers Great
West, Bonanza Creek, etc. une province ne peut pas empêcher une
compagnie fédérale ou une compagnie d'une autre province de
s'installer et de faire affaires au Québec ou dans une autre
province.
M. BURNS: Votre loi ne veut plus rien dire, M. le ministre.
M. TETLEY: On ne peut pas forcer cette compagnie, en conséquence,
à changer sa charte. C'est mon opinion. Permettez-moi de terminer. C'est
mon opinion, c'est l'opinion du député de Saint-Louis et c'est
l'opinion de mes conseillers. Peut-être faut-il changer la constitution,
peut-être, et c'est votre option, mais il y a une autre raison et
permettez-moi de m'exprimer en anglais.
The second reason is even more important. The Member from Maisonneuve
said and he was very eloquent: "We must take an aggressive attitude towards
this question of language". And this is where I disagree. I think we must take
not an aggressive attitude but a friendly attitude.
M. BURNS: "An aggressive attitude in legislating", that is what I
mean.
M. TETLEY: Bon, je me corrige. Il avait stipulé une attitude
agressive en ce qui concerne la législation. Très bien. And I
would say that, instead of taking an aggressive attitude, we should take a
friendly attitude as concerns that legislation. Je traduis, une attitude
amicale au sujet de la législation. Why, Mr President? Because I think
language is something that can be taught but it cannot be forced on people. I
will give you an example: I received, very recently, a letter from the minister
of Consumer and Corporate Affairs who has the same portfolio that I have, in
Ontario. And as the result of our legislation, they are thinking and
considering changing theirs concerning the names of companies and so on,
something we did two years ago, that our ministry did two years ago. This is
very important and this is the option we have in Québec and in Canada.
Are we going to impose a language or languages or are we going to try to do it
by friendly persuasion?
Voilà le dilemme, voilà l'option du Parti libéral.
Je vois à côté de moi, ici, mes collègues que
j'admire; le ministre des Affaires sociales, le ministre de l'Immigration et le
ministre des Terres et Forêts me font l'honneur de m'écouter, au
lieu de signer leurs cartes de Noël.
M. BIENVENUE: Et le député de Laurier.
M. TETLEY: Le député de Laurier, le député
de Saint-Louis, Gaspé, Louis-Hébert...
M. BURNS: Vous pouvez tous les nommer, il n'y en a pas tellement en
Chambre actuellement.
M. TETLEY: Ils sont tous présents, celui de Saint-Jean aussi.
M. BURNS: II y en a tellement peu qu'on
pourrait peut-être demander le quorum, à un moment
donné.
M. TETLEY: Laissez-moi terminer. Je note qu'ils m'écoutent, parce
que, pour eux, c'est aussi important que pour moi, un Anglo-Canadien ou un
Canadien de langue anglaise. C'est important, à mon avis, que nous
légiférions et que nous n'imposions pas d'une manière
agressive tel que prôné par le député de
Maisonneuve...
M. BURNS: Ce n'est pas cela que j'ai dit.
M. TETLEY: ... en ce qui concerne la législation, mais que notre
législation soit amicale. C'est la raison pour laquelle, M. le
Président, je suggère le refus de cette motion de l'honorable
député de Maisonneuve.
M. BURNS: Non, je veux tout simplement dire ceci. Cela va être
très bref. Lorsque je parle d'agir de manière agressive au point
de vue de la législation, le ministre fait semblant de ne pas me
comprendre. Il devrait pourtant me comprendre. Quand on est dans un domaine
concurrentiel et le domaine fédéral est un domaine
où il y a concurrence de pouvoirs il y a même des pouvoirs
résiduaires, le ministre le sait fort bien; s'ils ne sont pas
utilisés par certains, ils peuvent être utilisés par
d'autres tout est dans la mentalité qui préside à
la fabrication d'une loi. C'est là, M. le Président, que je
prétends que le gouvernement du Québec n'a pas cette
agressivité nécessaire au point de vue législatif. Je ne
parle pas d'agressivité à l'endroit des anglophones ou à
l'endroit des francophones ou à l'endroit des étrangers, de qui
que ce soit. Cela n'a rien à faire avec cela. Je dis simplement
qu'à partir du moment où on est dans un domaine où il y a
concurrence, le mot "concurrence" lui-même incite à
l'agressivité pour quelqu'un qui veut rester debout, pour quelqu'un qui
veut gagner. Le gouvernement du Québec devrait normalement vouloir
gagner; normalement, sur son territoire, dans le cadre de ses
compétences et de sa juridiction, il devrait avoir cette
agressivité qu'il n'a pas, qu'il aurait s'il acceptait une attitude
telle que celle proposée par le député de Lafontaine.
Le député de Lafontaine dit tout simplement: Voici dans
quel cadre vous allez exercer les pouvoirs que nous, nous vous accordons dans
notre territoire et dans notre juridiction. Ce n'est que ça et ce n'est
pas plus que ça. Mais il faut avoir au moins le courage de le faire,
chose que je constate que le gouvernement actuel n'a pas.
M. LEGER: Mr President, I would like to talk to the Honourable Member,
the Minister of... He is traumatized gravely by the emotional reactions of
people of his riding since the bill 22 has been adopted. They are wrongly
impressed by it and he wants to impress his riding. But he could be a nice,
good and great Quebecer if he would accept the amendment protecting the French
in Québec.
I want him to know that we understand these problems. He is traumatized
by it because since bill 22 has been adopted he always talks half of his
speeches in English. And right now he has a chance to talk, to put into the law
an amendment that would put the French where it should be.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): A l'ordre!
M. TETLEY: Mr President, I would just like to say to my Honourable
friend from Lafontaine that I appreciate his remarks. My own views on language
are very well known. I think that we should be bilingual. I appreciate that he
is so bilingual and I appreciate the fact that many people here are
bilingual.
Encore une fois, je dois proposer le refus de votre motion d'amendement,
ou qu'on vote contre.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): L'amendement est rejeté.
M. BURNS: On demande le vote, M. le Président.
M. LEGER: On demande le vote. C'est debout et assis.
LE PRESIDENT (M.Kennedy): Que ceux qui sont en faveur veuillent bien
lever la main ou se lever.
M. BURNS: En faveur?
LE PRESIDENT (M. Kennedy): En faveur.
Que ceux qui sont...
M. MARCHAND: Deux séparatistes et demi parce qu'il y en a un qui
ne s'est pas levé.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Que ceux qui sont contre l'amendement
veuillent bien se lever.
L'amendement est rejeté. L'article 8 est adopté.
M. BURNS: Sur division.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Sur division.
M. LEGER: Sur division, M. le Président. LE PRESIDENT (M.
Kennedy): Article 9? M. LEGER: Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Adopté. Article 10?
M. LEGER: Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): A l'article 11, il y a un amendement.
M. TETLEY: Je propose cet amendement parce que je veux... Vous
êtes d'accord?
M. BURNS: Non, on n'est pas sûr qu'on va être d'accord. Vous
n'acceptez pas les nôtres, je ne vois pas pourquoi on accepterait les
vôtres.
M. TETLEY: La raison de l'amendement, c'est parce que par l'article 6
tel qu'amendé par les députés de Beauce-Sud et de
Lafontaine, nous avons augmenté le capital-actions d'une compagnie de
$500,000 à $1 million et je veux donner à cette compagnie, qui
est la Continental Trust, le temps d'augmenter son capital-actions. Je ne veux
pas qu'on proclame le bill demain soir et que la compagnie n'ait pas eu au
moins six mois pour trouver les fonds.
LE PRESIDENT (M. Kennedy): Article 11 amendé, adopté?
M. LEGER: Adopté, M. le Président. LE PRESIDENT (M.
Kennedy): Adopté.
M. KENNEDY (président de la commission plénière):
M. le Président, la commission pléniè-re de
l'Assemblée nationale a étudié le projet de loi no 77 et
l'a adopté avec des amendements.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que ces amendements sont
agréés? Agréé. Troisième lecture de ce
projet de loi?
M. BURNS: Non, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Troisième lecture, prochaine
séance ou séance subséquente.
M. BIENVENUE: Article 10, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): 10? M. BIENVENUE: Article 45,
plutôt. LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): 45. M. BIENVENUE: Article 45,
forty-five.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Forty-five. I hope that the students from
William Hingston High School and Mr Marchand's county of Laurier enjoyed the
bilingual debate today.
Projet de loi no 41 Deuxième lecture
(suite)
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Reprise du débat sur la motion de
M. Forget, proposant que le projet de loi no 41, Loi modifiant la loi sur les
services de santé et les services sociaux, soit maintenant lu pour la
deuxième fois.
Le député de Gaspé.
M. Guy Fortier
M. FORTIER: M. le Président, lors de son discours en
deuxième lecture sur le projet de loi no 41, le ministre des Affaires
sociales a dit que, comme conséquence directe des travaux de la
commission des affaires sociales, de multiples changements sont intervenus dans
le texte du projet adopté en première lecture et que ces
dispositions ont subi des améliorations qui seront de nature à
répondre à un certain nombre d'inquiétudes ou d'objections
qui avaient été formulées envers la version originale.
Afin de bien comprendre le principe de ce bill 41, qui fait suite au
bill 65, je voudrais mentionner que, depuis quelques années
déjà, le ministère des Affaires sociales travaille
à effectuer des transformations profondes dans le réseau de
services sociaux et de services de santé. Le but de ces transformations
est de faire place, sous le système de santé, à deux
dimensions nouvelles des soins, soit la prévention, d'une part, et
l'intégration des parties composantes, d'autre part.
Cette orientation au chapitre de la prévention implique un
changement de cap radical car, comme vous le savez, le système de
santé actuel est surtout orienté vers le traitement et la
réadaptation. La réforme des services de santé est
basée sur une idée toute simple et j'emprunte à un auteur
américain l'image qu'il nous en donne, répartissant le
système de santé en ces composantes: éducation,
prévention, dépistage, consultation externe, hospitalisation et
réadaptation. Voici ce que dit cet auteur américain: "Tous ces
éléments sont interdépendants et complémentaires.
Dans la mesure où l'éducation et la prévention atteignent
leurs buts, il y a moins de maladies à diagnostiquer. Dans la mesure
où le dépistage permet des diagnostics précoces, il y a
moins de soins à donner. Un investissement relativement modeste au
niveau de la prévention est susceptible de réduire sensiblement
le coût du système entier et d'améliorer sensiblement la
qualité des résultats obtenus dans le domaine de la
santé."
Dans tout ceci, M. le Président, il faut réaliser que nos
orientations sont à contre-courant des demandes formulées par la
grande majorité de la clientèle.
Pour elle, les services de santé sont souvent synonyme de
réponses diagnostiques à un ma-
laise, et cette réponse commande, dans son esprit, l'utilisation
de médicaments, de tests diagnostiques et de procédures
thérapeutiques.
L'évolution des attitudes, des mentalités et des
conceptions est, jusqu'à un certain point, à la base de toute
réforme, et le plus difficile consiste à stimuler cette
évolution. Cela peut se faire techniquement, en assortissant le
système d'un ensemble d'incitatifs. Je crois qu'il y a plus et que ce
virage ou le changement de cap, si l'on souhaite le réaliser dans un
délai raisonnable, exige que la réforme soit prise en main par
les agents de changement oeuvrant à l'intérieur du réseau
des services.
Pour cela, il faut considérer l'effort constant apporté
par la fédération et les conseils des médecins et
dentistes depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les services de
santé et des services sociaux pour réorganiser la dispensation
des soins médicaux, favoriser leur excellence et assurer un
contrôle plus efficace de leur qualité.
A ce chapitre, nous avons notamment rappelé le travail imposant
accompli par la profession médicale dans l'implantation des nouvelles
structures des conseils de médecins et dentistes et sa participation aux
initiatives du ministère des Affaires sociales relatives aux
règlements édictés en vertu de la loi.
Aux contrats d'affiliation et aux plans d'organisation dans la loi no
41, les amendements relatifs aux structures de fonctionnement et qui concernent
le régime d'organisation des soins médicaux ont surtout pour
objet les attributions du directeur général. Il faudrait
être très prudent au niveau de ces attributions, direction et
coordination de toutes les activités exercées dans
l'établissement, prudent dans le choix d'un directeur
général qui soit vraiment un leader, donc un chef d'équipe
qui saura faire corps avec les médecins, les infirmières, les
techniciens qui seront avant tout des collaborateurs l'aidant à relever
le véritable défi qu'est l'orientation et l'utilisation des
ressources humaines, physiques et financières.
Je veux insister pour dire que le bureau des médecins et
dentistes est responsable de l'acte médical. Seul le médecin est
responsable du diagnostic, du traitement médical et dans
l'accomplissement de cette tâche il peut toujours compter sur l'aide
précieuse des infirmières et des infirmiers.
Par contre, l'ensemble du régime de nominations et de
renouvellement de nominations fait l'objet d'intéressants amendements
dans ce sens qu'il clarifie le rôle joué par le conseil des
médecins et dentistes vis-à-vis les nominations ou les
renouvellements de nominations.
Il y a tout d'abord une consultation obligatoire du directeur
général au conseil des médecins et dentistes et une
indication claire, nette et précise des possibilités de refus,
soit un refus motivé et fondé uniquement sur des critères
de qualification, de compétence scientifique ou de comportement.
Ceci consacre le principe du libre accès du médecin au
centre hospitalier. Au chapitre de la responsabilité de l'acte
médical, il faut considérer que le dynamisme dont font preuve les
conseils de médecins et dentistes depuis la mise en vigueur de cette Loi
sur les services de santé et les services sociaux garantit
déjà l'efficacité des contrôles.
Là-dessus, il faudra être prudent dans une refonte purement
théorique des structures. Je suis d'avis que la loi sur les services de
santé et les services sociaux devrait assortir le contrôle et
l'appréciation des actes médicaux des garanties au code des
professions en regard des procédures mues devant le comité de
discipline d'une corporation professionnelle.
Un autre point sur lequel je veux attirer votre attention est celui des
fonctions exercées par le directeur des services professionnels et sur
sa juridiction. Je crois que l'amendement prévu a pour objet de
départager l'autorité du directeur des services professionnels
pour conférer une base légale plus consistante aux fonctions du
directeur des soins infirmiers, du directeur des services auxiliaires ou
administratifs déjà établis par le règlement
adopté en vertu de la loi. Si nous considérons attentivement ces
dispositions, l'amendement devrait clairement établir que la juridiction
qui échappe au directeur des services professionnels concerne les
professionnels de la santé autres que les médecins et
dentistes.
Un dernier point que je juge important, M. le Président, est
celui de la nomination des chefs de services cliniques. Actuellement, la
nomination des chefs de services cliniques est faite par le conseil
d'administration du centre hospitalier aux termes d'une consultation du conseil
des médecins et dentistes, des membres du service clinique et du
directeur des services professionnels. Telle est la portée du paragraphe
4.5.1.4 du règlement adopté en vertu de la Loi sur les services
de santé et les services sociaux.
Cette procédure de nomination est fonctionnelle et acceptable.
L'amendement proposé aurait pour effet d'abolir le processus de
nomination prévu par le règlement en lui substituant des
procédures qui pourront différer au hasard des plans
d'organisation et des contrats d'affiliation. Un plan d'organisation, en ce qui
a trait aux services cliniques, a pour objet leur organisation, leur
nomenclature et aussi leur mode de fonctionnement. Cet instrument a pour fins
d'adapter les structures d'un centre hospitalier aux besoins spécifiques
du milieu, en tenant compte des politiques de régionalisation du
ministère des Affaires sociales. Par analogie, le contrat d'affiliation
a pour objet l'organisation de l'enseignement. Je crois essentiel que des
médecins et dentistes soient consultés sur la procédure de
nomination des chefs de services cliniques, que cette procédure soit
uniforme et que sa mise en place soit faite par le règlement
adopté en vertu de la loi.
Il ne faudra pas réintroduire des procédures de nomination
disparates, qui paraissaient trop arbitraires et que les règlements
édictés en vertu de la loi des hôpitaux ont
supprimées dès 1968.
Tous les points énumérés méritent qu'on s'y
arrête de façon attentive pour éviter, par exemple, que les
conseils des médecins et dentistes se sabordent pour refus de structures
de regroupement moins participantes. Je vous remercie, M. le
Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce qu'il a d'autres
députés? Le député de Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M. SAMSON: M. le Président, seulement quelques brèves
remarques. Le projet de loi no 41 nous a paru, au tout début,
très technique et ne changer que des choses susceptibles
d'améliorer l'ancien. Cependant, après plusieurs séances
de la commission parlementaire, après l'audition de plusieurs personnes
qui s'y sont présentées, nous croyons que ce projet,
contrairement à ce que nous avions pensé au début, apporte
certains inconvénients et même, dans plusieurs cas, pourrait
entraîner des services de santé qui seraient plutôt
administratifs que réels. En effet, nous avons la drôle
d'impression que ceux-là même qui devraient être le plus
concernés par ce projet de loi, soit la population, les patients actuels
ou éventuels ou encore les professionnels de la santé, se verront
peut-être, par la philosophie de ce projet de loi, retirer certains de
leurs pouvoirs.
Nous avons cru comprendre, au cours du déroulement des
séances de la commission parlementaire, que la philosophie du
ministère était de permettre davantage à des
fonctionnaires d'assumer des responsabilités en matière de soins
et en matière de santé. Je trouve un peu curieux que,
malgré toutes ces auditions, le ministre n'ait pas cru bon de retenir
davantage certaines suggestions du corps médical.
En effet, M. le Président, je recevais, en date d'hier, un
télégramme adressé probablement à tous les
représentants des partis politiques qui s'occupent des affaires
sociales. Ce télégramme est signé par le Dr Augustin Roy,
président secrétaire du Collège des médecins du
Québec. Pour mieux me faire comprendre, il me sera permis, je pense, de
faire lecture de ce télégramme d'hier qui disait ceci: "La
Corporation professionnelle des médecins du Québec a pris
connaissance de la version réimprimée du bill 41. Cette version
contient d'importantes améliorations sur le projet antérieur.
Cependant, vu l'addition d'articles totalement nouveaux et de grande
importance, par exemple l'addition de l'article 7 a) et de plusieurs autres, la
corporation demande que le bill 41 soit référé à la
commission parlementaire des affaires sociales pour étude approfondie.
Nos commentaires écrits suivront incessamment." C'est hier, M. le
Président, que la Corporation professionnelle des médecins
manifestait le désir de voir ce projet de loi
déféré à nouveau à la commission
parlementaire, non pas pour étude au complet, mais pour étude des
articles nouveaux qui sont apparus après la réimpression du
projet de loi no 41.
Or, je reçois aujourd'hui un autre télégramme de la
même corporation professionnelle, qui, je pense, mérite aussi
l'attention de cette Chambre. En effet, nous retrouvons dans ce
télégramme des remarques qui sont, je pense, très bien
fondées quant aux dispositions qui paraissent aux articles 7, et 39,
ainsi qu'à d'autres articles. Mais ce qui est important à ce
moment-ci, c'est de faire comprendre aux représentants parlementaires
que le ministère des Affaires sociales, dans sa volonté de
vouloir chapeauter tout le système et de le contrôler, a
peut-être oublié certaines parties de l'essentiel. J'en suis
à me demander malgré que ce projet de loi soit devant nous depuis
déjà un certain temps, si son adoption maintenant n'est pas un
peu trop hâtive.
Voici ce que l'on nous dit dans ce télégramme
d'aujourd'hui, M. le Président.
On a dit qu'il est considéré d'extrême importance
que la Corporation professionnelle des médecins du Québec puisse
être entendue devant la commission parlementaire. Le projet de loi no 41,
d'après sa réimpression, à l'article 4 du projet de loi
qui modifie l'article 7, permet, entre autres, aux héritiers d'une
personne décédée de prendre connaissance de son dossier
médical. J'ai discuté avec des médecins et on m'a
informé que ceci peut constituer un certain danger.
En effet, les héritiers d'un patient décédé
pourraient, en vertu de ce projet de loi, à l'avenir, prendre
connaissance d'un dossier médical. C'est manquer de respect, même
après la mort, alors que nous savons tous que dans d'autres projets de
loi qui sont actuellement à l'étude et qui nous
reviendront pour une deuxième lecture probablement en mars, avril ou mai
prochain on insiste beaucoup sur la vie privée des gens, sur le
respect de la vie privée des individus. Or, un dossier médical,
ça fait partie delà vie privée d'un individu, à
moins que cet individu permette lui-même, sur sa demande, que son dossier
médical soit connu. Mais si cet individu ne le permet pas, après
sa mort on se demande pourquoi ce serait permis à des
héritiers.
Evidemment, ceci veut dire tous les héritiers ou quelqu'un qui
fait partie des héritiers. Cela veut dire que dans certaines
circonstances il y aurait peut-être abus. Cela ne veut pas dire qu'il y
aurait toujours abus mais, parce que la règle permettrait ces abus, je
pense qu'il nous faut être prudents. Il y aurait peut-être,
cependant, une possibilité de modifier à nouveau la loi pour
permettre à un médecin, à un professionnel de la
santé de prendre connaissance d'un dossier sur la demande des
héritiers. Le professionnel de la santé, qui est
compétent, capable d'étudier un dossier, capable
d'interpréter un dossier, peut faire la part des choses mais sous
certaines réserves qui sont d'ordre médical ou qui sont
d'intérêt médical.
D'après le projet de loi actuel, il n'y a pas de réserve.
Le projet de loi actuel pourrait susciter certains abus. Je continue ce
télégramme. La Corporation professionnelle des médecins a
absolument raison. "Par respect du secret professionnel, qui n'appartient
qu'à la personne concernée, la Corporation professionnelle des
médecins du Québec s'objecte à un tel amendement. Tout en
étant consciente que certaines informations puissent être
nécessaires pour solutionner certains problèmes relatifs à
une succession ou à des dommages subis par la personne
décédée, la corporation attire l'attention du
législateur" c'est nous autres, M. le Président, le
législateur ... Oui, j'en ai perdu un bout. Quand on saute des
lignes, ça se lit mal. Je l'ai repris, là.
Le ministre des Transports devrait me comprendre. D doit savoir que,
quand on saute certains cahots de ses chemins, ça lit mal.
M. MAILLOUX: II y a un président de commission scolaire qui s'est
trompé de feuille, chez nous, et ç'a mal été
aussi.
M. SAMSON: M. le Président, je continue. Il va encore me faire
sauter une ligne, s'il continue, lui. "La corporation attire l'attention du
législateur sur les nombreuses autres conséquences qui pourraient
découler de la divulgation aux héritiers d'informations
strictement confidentielles concernant la personne
décédée. Le secret professionnel doit être
respecté et même au-delà de la mort, étant
donné son importance et ses répercussions". Je pense que
ça explique exactement ce que ces gens pensent et ce qu'on doit tous
penser dans les circonstances. Le législateur ne devrait pas permettre
d'apporter un tel amendement sans qu'il puisse être discuté devant
une commission parlementaire où les compétences dans le domaine
pourraient s'exprimer .
L'alinéa c) de l'article 4, permettant au titulaire de
l'autorité paternelle d'obtenir des informations relativement au dossier
d'un mineur, va à l'encontre des objectifs visés par le premier
paragraphe de l'article 36 de la Loi de la protection de la santé
publique.
Il faudrait donc ajouter, à la fin de l'alinéa c), les
mots suivants: "âgés de moins de 14 ans," article 39 du projet de
loi no 41.
Pour assurer et maintenir un excellent contrôle de l'exercice de
la médecine, la corporation, dans son mémoire sur le projet de
loi no 41, avait demandé: 1.- Que les dossiers constitués pour
les fins de contrôle de l'exercice de la médecine soient
déclarés confidentiels et ne puissent être utilisés
qu'à ces fins. Je pense que ceci a beaucoup d'importance et je vois que
le ministre des Affaires sociales écoute avec beaucoup d'attention.
M. FORGET: Est-ce que je peux faire une mise au point?
M. SAMSON: Oui, M. le Président, avec plaisir.
M. FORGET: Relativement à ce deuxième point, la
confidentialité des dossiers utilisés pour l'évaluation de
la qualité des actes, c'est une disposition qui a été
suggérée, en effet, par le Collège des médecins
anciennement connu sous le nom de Collège des médecins
et maintenant la Corporation professionnelle des médecins, et qui
a été retenue dans le projet d'amendement comme telle. Je ne peux
pas vous citer l'article de mémoire, mais on le retrouve dans le projet
d'amendement tel que réimprimé.
M. SAMSON : Je ne sais pas si on se comprend mal, M. le
Président, mais le Collège des médecins nous fait ces
remarques même après avoir lu le projet de loi no 41
réimprimé. De toute façon, le ministre pourra
peut-être, avec ses conseillers, tantôt, nous donner plus
d'explications. Je pense qu'il est important, pour les fins du débat,
que nous fassions connaître cette position.
Je continue.
Deuxièmement, que les membres de comité de contrôle
ne puissent être contraints de dévoiler, devant une cour de
justice, des informations obtenues dans l'exercice de leurs fonctions, au sein
de ces comités.
Et troisièmement, que les membres du comité de
contrôle ne puissent être poursuivis en justice pour acte accompli
de bonne foi dans l'exercice de leurs fonctions au sein de ces
comités.
Si mes informations sont bonnes, M. le Président, il s'agit
là de médecins qui peuvent faire partie de comités, et ces
comités pourraient faire des recommandations, à un moment
donné, d'ordre disciplinaire à l'endroit d'un collègue.
Par les dispositions actuelles, il se peut que ces mêmes médecins,
ayant agi de bonne foi à un de ces comités, puissent être
poursuivis en justice, pour avoir agi de bonne foi et avoir fait des
recommandations, soit pour dommages et intérêts ou autre chose
comme cela.
C'est un genre d'immunité qui est réclamée pour ces
gens qui ne font, en quelque sorte, que leur devoir. Et pour avoir fait leur
devoir et puisque c'est un cas d'ordre administratif, il est normal que ces
gens ne soient pas passibles de poursuites pour avoir donné leur
opinion.
L'amendement apporté, je continue toujours, M. le
Président, par cet article 39 ne répond qu'à une partie de
la demande faite par la corporation lors des séances de la commission
parlementaire.
L'autre partie qui a été omise était cependant tout
aussi importante. D'ailleurs, cette demande avait été
agréée par le ministre des Affaires sociales lors de la
commission parlementaire, etc.
Je continue plus loin: Nous demandons, tel que la loi le stipule dans
plusieurs Etats
américains, que les documents constitués pour les fins de
contrôle de l'exercice professionnel soient protégés et ne
puissent être déposés ou admissibles devant une cour de
justice.
L'article 34 de la Loi du Protecteur du citoyen accorde d'ailleurs cette
protection à tous les dossiers constitués par le Protecteur ou un
de ses employés. Cet article pourrait être inséré
mutatis mutandis dans le projet de loi no 41.
Article 34. Nonobstant toute autre loi générale ou
spéciale, ni le Protecteur du citoyen, ni son adjoint, non plus
je vous cite l'article que ses fonctionnaires ou employés ne
peuvent être contraints de faire une déposition ayant trait
à un renseignement obtenu dans l'exercice de leurs fonctions, ni
produire un document contenant un tel renseignement.
Nous demandons aussi à nouveau qu'une immunité semblable
et je pense qu'à ce moment-ci, je vais demander au ministre de
porter une attention particulière, parce qu'il a reçu
lui-même ce télégramme et c'est là le point
principal de la demande à celle accordée par le code des
professions aux articles 187 à 190 inclusivement soit accordée
aux membres de comité de contrôle de l'exercice de la
médecine.
Sans cette protection légitime, il devient pratiquement
impossible pour les médecins d'un établissement d'exercer un
contrôle adéquat sur les activités professionnelles de
leurs confrères dans l'intérêt du public et d'une meilleure
médecine.
Je pense que cela est assez important car ces comités sont la
garantie donnée au public que les professionnels de la santé
feront leur devoir en tout temps. S'il advient que quelqu'un ne fasse pas son
devoir, que ce comité puisse prendre toutes les mesures qui s'imposent,
mais sans que ni l'un ni l'autre des membres du comité ne puisse
être amené devant une cour de justice pour avoir émis une
opinion qui n'a été émise, en fin de compte, que pour
mieux protéger l'intérêt du public.
C'est pourquoi j'appuie de toutes mes forces ces demandes de la
Corporation professionnelle des médecins, autrefois le Collège
des médecins, qui, je pense, a absolument raison. C'est beau, je suis
bien d'accord pour qu'on donne à des fonctionnaires plusieurs pouvoirs.
Mais là il ne s'agit pas simplement d'administrer des budgets. Il s'agit
de la santé des citoyens. A ce moment, les principaux
intéressés sont les patients et ceux qui prodiguent les soins,
soit le corps médical.
Dans un autre ordre d'idées, nous retrouvons dans le nouveau
projet de loi no 41 réimprimé une disposition qui dit que le
lieutenant-gouverneur en conseil peut déterminer par règlement la
contribution qui peut être exigée des bénéficiaires
qui sont hébergés dans un établissement, etc., etc.
Je pense que plusieurs débats ont été
soulevés dans le passé quant à ces fameuses contributions
qui sont fixées par règlement. Fixées par
règlement, cela veut dire que les gens ne sont jamais certains de ce qui
leur pendra au bout du nez quant aux demandes de contributions pour les
personnes qui sont en hébergement, soit les enfants, les personnes
invalides ou encore les personnes âgées... Justement,
dernièrement, à l'occasion d'une réunion de la
Fédération de l'âge d'or du Québec, on nous
transmettait la copie d'une résolution qui a été
adoptée le 26 novembre dernier, résolution qui a une grande
importance et qui dit: "que tout adulte bénéficiaire dans un
centre d'accueil touchant la pension fédérale de vieillesse et le
maximum du supplément de revenu paie, en frais de séjour au
susdit centre pas plus de 75 p.c. des montants ci-avant prévus et
retienne 25 p.c. du solde de ces montants pour ses menues dépenses,
etc., et que toute personne hébergée âgée de moins
de 65 ans reçoive pour solder ses dépenses personnelles un
montant d'allocation égal à celui que garde pour les mêmes
fins toute personne hébergée recevant la pension
fédérale de vieillesse et le supplément de revenu
garanti". Je pense qu'il en a été question à plusieurs
reprises. Le ministre nous a semblé inflexible sur ces questions. En
tout cas, si je n'ai pas suivi toutes les péripéties du
débat et s'il est devenu plus flexible pendant que je n'étais pas
là, cela me ferait grandement plaisir d'entendre de sa bouche des
déclarations pouvant amener des améliorations au système
de contributions pour le cas des personnes en hébergement.
Bien entendu, nous avons fait valoir à maintes reprises
qu'à chaque fois que le gouvernement fédéral augmentait la
pension fédérale pour les personnes âgées, il
arrivait que le gouvernement du Québec, par l'augmentation de ses
demandes de contributions à ces personnes, venait chercher d'une main ce
que le gouvernement fédéral donnait de l'autre, pour, à
toutes fins pratiques, s'accaparer de cette augmentation ou une forte partie de
cette augmentation.
Nous avons à maintes reprises, M. le Président,
demandé au ministre de considérer le cas de ces personnes
âgées qui, quand même, dans la société, nous
ont précédés et ont fait des choses. Elles ont construit
le Québec. Ce sont elles qui sont responsables de ce que nous avons
aujourd'hui, au Québec, et ce ne sont pas des cadeaux que le
gouvernement fédéral fait à ces gens. Ce n'est pas un
cadeau que ces gens reçoivent. Ils ont payé toute leur vie de
l'impôt sur le revenu pour en arriver, au jour de leur retraite, à
obtenir une pitance.
Vous savez, la pension de vieillesse, M. le Président, on aura
beau faire la propagande qu'on voudra, on aura beau mettre des roses autour de
la propagande, il reste que c'est une pitance qu'on donne à nos
personnes âgées. Elles sont obligées de vivre avec cette
pitance au moment où cela leur coûte plus cher pour vivre, parce
que l'âge fait qu'on est obligé d'avoir recours à des
médicaments, d'aller chez le médecin plus souvent, de payer des
taxis pour se déplacer. On ne peut pas marcher quinze milles quand on
est rendu à l'âge de la retraite.
On est obligé de prendre l'automobile à partir de la porte
de sa résidence et, bien des fois, on est obligé de se faire
aider pour descendre l'escalier. Ce sont des choses qui arrivent à cet
âge et que ceux qui sont moins âgés ne connaissent pas
encore même si, par le système dans lequel nous vivons, ils ont un
meilleur revenu que ceux-là qui en auraient besoin de plus et qui en ont
moins présentement.
Je ne suis pas, évidemment, pour utiliser le présent
débat pour réclamer une augmentation de la pension
fédérale, parce que vous seriez le premier, M. le
Président, à me dire que cela ne relève pas de la
compétence provinciale et vous auriez raison, d'ailleurs. Mais c'est
quand même intéressant de savoir que ce qu'un autre gouvernement
décide de donner en augmentation, c'est notre gouvernement et de
compétence provinciale qui l'accapare presque au complet.
Je voudrais demander au ministre d'être plus flexible qu'il ne l'a
été dans le passé. Vous allez me dire, M. le
Président: C'est un ministre inflexible. Je vous dirai que vous avez
raison. Quand même, si on continue à revendiquer, peut-être
qu'un jour il passera aux actes. Quant à savoir s'il nous a compris ou
non, je pense qu'il nous comprend depuis longtemps. Je lui prête, en tout
cas, ces bonnes intentions, celle de nous comprendre depuis longtemps et de
comprendre depuis longtemps que cela en prend plus que ce qui est donné
à nos vieillards présentement. Mais de comprendre à passer
aux actes, il y a une marge qui n'a pas été franchie, encore, par
le ministre des Affaires sociales.
Alors, conformément à ces demandes qui sont faites par la
Fédération de l'Age d'or du Québec, je pense, M. le
Président, que le ministre serait très bien vu de nous annoncer
des améliorations et même de nous annoncer qu'il donne
entièrement raison à ces gens qui revendiquent aujourd'hui, en
leur communiquant qu'à l'avenir on prendra en considération cette
juste parce que je pense qu'elle est juste, M. le Président
suggestion qui est faite par la Fédération de l'Age d'or
du Québec.
M. le Président, comme ce projet de loi est très
technique, il nous faudrait presque discuter de tous les articles qu'il
contient. C'est un peu un coq-à-1'âne, le principe de ce projet de
loi. En deuxième lecture, évidemment, on ne doit parler que d'un
principe. Vous conviendrez avec moi, M. le Président, que, dans le
projet de loi no 41, Loi modifiant la loi sur les services de santé et
les services sociaux, le seul principe qu'on retrouve, c'est que cela modifie
une autre loi. Il n'y a pas d'autre principe que cela. Le reste, c'est un
coq-à-1'âne extraordinaire. Alors, on ne peut pas,
évidemment, s'en tenir à un principe. On est obligé de
discuter de certains articles, qui nous paraissent ne pas avoir
été changés et qui auraient dû l'être. Il y en
a d'ailleurs d'autres.
Mais, M. le Président, je ne retiendrai pas le ministre plus
longtemps sur ce projet. En terminant, je laisse une porte ouverte au minis-
tre parce que mon intention n'est pas de débattre ce projet de loi de
façon négative; je veux être le plus positif possible. Ces
amendements ne donnant pas justice, ces revendications faites qui n'ont pas
trouvé preneur de la part du ministre, demandent une prise de position
différente.
Je vous dis tout de suite que si le ministre nous annonce dans sa
réplique il aura le droit de réplique tantôt
qu'il a l'intention de donner une suite positive à ces quelques demandes
que j'ai faites, qui ne sont pas les miennes mais qui viennent de la
Corporation professionnelle des médecins et de la
Fédération des clubs de l'âge d'or du Québec, je
voterai pour le projet de loi no 41. Sinon, malheureusement, je voterai contre
le projet et nous continuerons le débat plus tard pour tenter d'amener
le ministre d'une autre façon à revoir ses positions pour donner
justice.
Maisje réclame en terminant, encore une fois, du ministre qu'il
accepte ces justes demandes de la part de ces deux organismes que je viens de
mentionner.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): L'honorable député
de Bourget.
M. Jean Boudreault
M. BOUDREAULT: M. le Président, je regrette que l'Opposition
officielle ne soit pas représentée, elle aurait eu l'occasion de
connaf-tre mon point de vue...
M. SAMSON: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une
question à l'honorable député?
M. BOUDREAULT: J'ai bien mentionné l'Opposition officielle.
M. SAMSON: Est-ce que le député me permet une
question?
M. BOUDREAULT: Oui.
M. SAMSON: Est-ce que le député ne reconnaît pas
que, faute d'Opposition officielle, il a devant lui l'opposition objective?
M. BOUDREAULT: Pour autant que l'on ne parle pas de l'opposition
négative.
M. le Président, l'honorable ministre des Affaires sociales
propose à notre attention la Loi de la Commission des affaires sociales.
Je dois remarquer là-propos de cette commission qui vient de rendre
encore plus fonctionnels les dispositifs offerts à la population du
Québec au chapitre des Affaires sociales.
En clair, ce qui frappe au premier abord, ce sont les recours offerts
par la Commission des affaires sociales en remplacement de trois organismes
regroupés maintenant, à savoir, la Commission d'appel de l'aide
et des allocations
sociales, la commission de révision sur la protection du malade
mental...
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, je crois que le
député est en train de parler sur la loi no 40, nous sommes sur
la loi 41.
M. BOUDREAULT: C'est un préambule au bill 41, que je fais. Le
bill 40 est un préambule au bill 41. Alors, est-ce qu'on se comprend
à ce moment-là?
M. BEDARD (Chicoutimi): Très bien, c'est parce que 40 vient avant
41.
M. BOUDREAULT: Oui. C'est un préambule que je fais.
M. SAMSON: C'est élémentaire, mon cher Watson.
M. BOUDREAULT: Vous avez compris, j'espère, vous êtes
tellement intelligents dans l'Opposition, vous autres.
La loi 40 veut aussi regrouper, par le biais de la Commission des
affaires sociales, les recours qui sont actuellement de compétences
diverses. Ces dispositifs sont les suivants que je mentionne pour que vous
compreniez bien: les appels des décisions relatives aux permis
émis en vertu de la Loi sur les services de santé et les services
sociaux et de la Loi de la protection de la santé publique, le tout
actuellement sous la compétence de la cour Provinciale; les
requêtes en contestation ou annulation des élections et
nominations, ce qui relève présentement de l'honorable ministre
des Affaires sociales; les appels concernant l'exonération du paiement
d'une contribution exigible d'un bénéficiaire ou le paiement
d'une allocation de dépenses par le ministre; finalement, l'audition des
requêtes des bénéficiaires pour accès à leurs
dossiers médicaux ou sociaux, ce dernier point se faisant concurremment
avec d'autres tribunaux.
Il est donc facile de constater et d'apprécier à sa juste
valeur une telle refonte et j'appuie en tous points de pareils amendements.
Permettez-moi d'apprécier maintenant certains points forts du
projet de loi no 41, ce dernier modifiant la Loi sur les services de
santé et les services sociaux. L'article 2 permet à toute
personne de s'adresser soit à la cour du Bien-Etre social, soit à
la Commission des affaires sociales lorsqu'un établissement lui refuse
l'accès à son dossier médical ou à son dossier
ayant trait aux services sociaux qu'elle a reçus.
Dans la même ligne, celle des services, il est aussi
intéressant de noter deux autres points importants pour les usagers. A
l'article 37, obligation est faite aux détenteurs de permis, aux
familles d'accueil et aux personnes qui maintiennent des installations autres
qu'un cabinet privé de professionnel ou de service de logement, de garde
où les soins sont fournis de se soumettre à l'enquête du
ministre.
Il est rassurant, à la lecture de cet article, de constater
l'intérêt que porte le ministre des Affaires sociales à la
qualité des soins et à la sécurité à
laquelle le public doit s'attendre vis-à-vis de la structure des
services de santé. Enfin, un dernier point touchant les services
eux-mêmes est celui se rapportant à l'article 42, alinéa
c), où l'on oblige les centres d'accueil à recevoir des centres
de services sociaux les enfants qui leur sont confiés et, toujours
à cet article, les familles d'accueil doivent se soumettre à la
surveillance des centres de services sociaux.
La structure administrative est aussi une partie vitale de
l'organigramme des services de santé et des services sociaux et le
rôle appartenant au directeur général est de
première importance. C'est pour cela que nous retrouvons, en plus de la
définition complète des fonctions et des tâches du
directeur général d'un établissement public, le point
suivant, soit la sélection et l'engagement des membres du personnel non
cadre, et les recommandations au conseil d'administration sur l'engagement, la
promotion ou la nomination du personnel de cadre conformément aux
règlements.
Au chapitre des différents postes de direction, à
l'intérieur d'un établissement hospitalier, il est très
important de souligner la nomination d'un directeur de soins infirmiers et, si
le plan d'organisation le prévoit, d'un directeur des services
hospitaliers et d'un directeur des services administratifs. Mais, pour en
revenir au directeur général, nous nous devons d'accepter cet
élargissement de son autorité, ceci dans le but de lui faciliter
sa tâche de médiation entre l'Etat, les conseils
d'administrations, les professionnels, les syndicats et la population. Et si on
ajoute à ce programme déjà bien chargé le
défi que représente la transformation du système des
services de santé, qui s'oriente maintenant vers la prévention,
tout ceci nous conduit à identifier le responsable de la gestion des
établissements comme agent de changement privilégié. Car
l'expérience nous démontre que le véritable défi ne
consiste pas à mettre sur pied des services de prévention ou tout
autre type de services jugés prioritaires; il consiste surtout à
introduire les implications au plan de l'orientation et de l'utilisation des
ressources humaines, physiques et financières.
Le rôle du directeur général sera d'être un
leader au plan de la compréhension des objectifs globaux du
système social et de santé et de la prise de décision, qui
a une incidence sur la réalisation de ces objectifs. Si le directeur
général doit développer une vue globale du système
social et de santé, ceci implique un contact plus étroit avec le
milieu environnant et le réseau d'établissements. Dans mon
esprit, les conseils régionaux constituent la plaque tournante de ces
rencontres pour que ces contacts soient établis sur une base
rationnelle. Les directeurs généraux des établissements
pourront participer d'une façon plus dynamique aux gestes de
planification et de rationalisation des
ressources qui doivent, par leur dimension, se situer au niveau
régional.
Voilà donc l'appréciation objective et enthousiaste que
j'apporte à cette série d'amendements qui permettront de
rationaliser encore plus la structure de la Loi sur les services de
santé et les services sociaux. Pour toutes ces raisons, M. le
Président, je voterai en faveur de cette loi. Je regrette encore une
fois que l'Opposition officielle n'ait pas eu le plaisir de m'entendre, aucun
représentant de l'Opposition officielle n'a dû entendre mon
discours. Je le regrette infiniment. Merci.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M.Cornellier): Le député de
Vanier.
M. Femand Dufour
M. DUFOUR: M. le Président, peu importe qu'il y ait opposition ou
pas, je ferai mon discours quand même. Je vous remercie d'abord de
l'occasion que vous me donnez de m'exprimer sur le projet de loi no 41, projet
de loi qui vient modifier le projet de loi no 65. Je serai bref, car je n'ai
que deux commentaires à faire au sujet de ce projet de loi.
Le premier commentaire touche l'article 4 modifiant l'article 7. Cet
article semble donner le feu vert aux héritiers d'une personne
décédée, en leur permettant de prendre connaissance de son
dossier médical. Solidaire de la Corporation professionnelle des
médecins du Québec, je voudrais dire mon désaccord
à l'égard de cet article qui met en péril le secret
professionnel des médecins du Québec. Je comprends très
bien qu'il peut arriver que certaines informations soient nécessaires
pour résoudre les problèmes survenant lors du règlement de
certaines successions. J'ai toujours été et je demeure encore
convaincu aujourd'hui que le secret professionnel doit être
respecté, même au-delà de la mort. Je m'opposerai donc de
toutes mes forces, jusqu'à explication valable, à faire rejeter
cet amendement, à moins d'avoir la certitude que des experts reconnus
viennent m'expliquer, en commission parlementaire, toutes les raisons qui
motivent cet amendement.
Si nous passons à l'alinéa c) du même article qui
parle du titulaire de l'autorité paternelle relativement au dossier d'un
mineur, n'y au-raiit-il pas une certaine incohérence avec l'article 36
de la Loi de la protection de la santé publique?
Mon second commentaire, M. le Président, est le suivant. Lors des
auditions des mémoires présentés à la commission
parlementaire des affaires sociales, nous avons entendu les mémoires,
premièrement, de la Corporation professionnelle des médecins du
Québec, de la Fédération des médecins
spécialistes du Québec et, finalement, de la
Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.
Tous ces médecins ont été unanimes à demander
l'immunité pour les médecins siégeant
bénévolement à ce comité de contrôle de
l'acte médical. Ces organismes sérieux et reconnus sont
conscients du problème, ayant étudié le dossier à
fond avec leurs conseillers juridiques. Ils sont tous convaincus de
l'importance d'une telle immunité.
Cette immunité devrait être donnée à tous les
membres du comité de contrôle de l'acte médical, afin que
ceux-ci ne puissent être poursuivis en justice pour des actes accomplis
de bonne foi, dans l'exercice de leurs fonctions au sein de ce comité.
Dixit, Corporation des médecins du Québec.
L'article 39 ne répond qu'à demi à la demande de la
Corporation professionnelle des médecins du Québec. Il faudrait
ajouter à cet article un alinéa dans lequel on donnerait à
ces membres du comité de contrôle de l'acte médical
l'immunité réclamée. De concert avec mes collègues
médecins, je voudrais que la loi le stipule de la même
façon que plusieurs Etats américains l'ont fait,
c'est-à-dire, que les documents constitués pour fins de
contrôle de l'acte professionnel soient protégés et ne
puissent être déposés ou admissibles devant une cour de
justice. D'ailleurs, M. le Président, cette protection a
été accordée à tous les dossiers constitués
par le Protecteur du citoyen ou par un de ses employés par l'article 34
de la Loi du Protecteur du citoyen.
Je veux en terminant, M. le Président, rendre hommage au ministre
des Affaires sociales qui, lui-même, est convaincu de
l'opportunité d'une telle immunité. Je voudrais, en même
temps, l'inviter à continuer son travail de persuasion, à des
niveaux supérieurs et législatifs, afin que justice soit faite
aux médecins sur ce point précis de l'immunité.
Déjà nous avons constaté des déficiences
dans la loi et nous avons vu de nos confrères poursuivis devant les
tribunaux par d'autres confrères médecins ayant été
causes de réprimandes par ledit comité. Etre poursuivi pour avoir
fait son devoir en vue de protéger la santé du public, est-ce
là véritablement une justice bien administrée?
Si cet amendement n'est pas inclus dans la loi, le jour n'est pas
très loin où il n'y aura plus de médecins qui oseront
siéger à ces comités d'évaluation médicale
et cela sera toujours au détriment du public.
Je demande donc avec insistance qu'on accorde, au moins, une
immunité semblable à celle accordée par le code des
professions, aux articles 187 à 190 inclusivement, pour les membres du
comité de contrôle de l'exercice de la médecine. Encore une
fois, sans cette immunité, sans cette protection légitime, il
devient pratiquement impossible aux médecins d'un établissement
d'exercer un contrôle adéquat sur les actes professionnels de
leurs confrères, et cela dans l'intérêt du public et d'une
meilleure médecine. J'invite donc tous mes collègues, qui auront
à siéger à la commission parlementaire des affaires
sociales sur ce projet de loi no 41, à appuyer cette demande de
l'immunité, et cela pour le bien de tous.
Merci.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): D'autres députés
veulent-ils s'exprimer avant que le ministre exerce son droit de
réplique?
UNE VOIX: Vote!
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): L'honorable ministre des
Affaires sociales.
M. Claude Forget
M. FORGET: M. le Président, je serai extrêmement bref pour
cette réplique, car, après avoir écouté avec
beaucoup d'attention et d'intérêt ceux qui ont opiné sur ce
projet de loi, il me paraît que les travaux de la commission élue,
qui sera sans doute appelée à considérer le projet de loi
réimprimé, nous donneront peut-être un cadre plus
convenable pour discuter d'un certain nombre des points qui ont
été soulevés et qui sont soulevés à
l'égard, la plupart du temps, d'un seul article d'un projet qui en
groupe 72.
Je désirerais, cependant, retenir quelques-unes des indications
qui ont été fournies et faire, à leur égard,
certains commentaires généraux. L'Opposition officielle,
reprenant en cela un thème qui lui est cher depuis plusieurs mois, nous
indique que, selon elle, la gratuité ou le caractère universel de
tous les services dont est responsable le ministère des Affaires
sociales devrait être assuré. C'est, sans aucun doute, un point de
vue qui est défendable, mais qui l'est, cependant, peut-être plus
en théorie que dans les faits. En théorie, on peut souhaiter, en
effet, que tous les biens et tous les services qui sont nécessaires pour
les individus et les familles soient accessibles gratuitement. On peut
souhaiter éliminer toute espèce de barrière
financière entre les besoins et la satisfaction de ces besoins.
Cependant, il n'y a pas que cette considération dont il faut
tenir compte quand, dans les faits, on cherche à appliquer une politique
d'accessibilité la plus large possible, mais qui doit, malgré
tout, tenir compte de l'état de la société dans laquelle
nous vivons, un état qui, on le sait, recèle des
disparités de revenu très considérables. Je ne reviendrai
pas sur les observations que j'ai faites il y a quelques jours à peine,
lorsque j'ai eu à entretenir cette Assemblée des objectifs qu'il
nous faudrait nous fixer durant la prochaine année ou durant les
années subséquentes, pour ce qui est de l'élimination de
la pauvreté. Sans aucun doute, ce problème demeure avec nous et
nous aurons, comme je l'ai indiqué à ce moment-là, des
options extrêmement importantes à prendre.
Cependant, tenant compte de ces options et de la nécessité
d'y faire face, on ne peut pas, dans la distribution d'une catégorie
donnée de services, faire absolument abstraction de toute
considération économique, financière et faire abstraction
de l'état d'inégalité, encore une fois, qui prévaut
dans la société. Certains services, et peut-être de plus en
plus dans le secteur des services sociaux, se développeront.
Ces services, pour une part, ne sont pas absolument identifiés
à l'élimination de la pauvreté, ce sont des services dont
toutes les couches sociales peuvent éventuellement avoir besoin et
auxquels elles peuvent, éventuellement, avoir recours.
Dans des circonstances comme celles qui sont les nôtres, où
la pauvreté demeure un problème préoccupant et qui
nécessitera des ressources très importantes pour sa solution, on
doit envisager qu'il serait déraisonnable de donner tous ces services,
sans contribution financière de la part des usagers. Certains d'entre
eux qui visent à des fins de réadaptation, à des fins
d'intervention professionnelle dans des moments de crise peuvent, sans aucun
doute, être offerts gratuitement et de façon universelle à
toutes les couches sociales, précisément parce qu'il n'y a, de la
part des utilisateurs, aucun élément de choix, aucun
élément en vertu duquel ils peuvent eux-mêmes
déterminer l'utilisation plus ou moins grande qu'ils feront de ces
services.
Lorsque l'on débouche sur d'autres services qui sont beaucoup
plus facultatifs, qui représentent des choix quant à un mode de
vie, qui représentent aussi, peut-être, le prolongement de
certaines responsabilités que nul ne peut ignorer et que nul ne peut
écarter, et que l'Etat ne devrait pas d'ailleurs chercher à
écarter des individus et des familles sur lesquels ils reposent, alors,
là, M. le Président, on est en droit de se poser des questions
sur la gratuité des services. C'est d'ailleurs ce que l'on retrouve dans
tous les gouvernements, c'est ce que l'on retrouve dans les gouvernements qui
ont adopté, à l'égard de l'ensemble de l'organisation
sociale, les théories sociales les plus avancées. L'on sait
même, par exemple, qu'en Suède, où il y a un gouvernement
socialiste depuis 40 ans, je crois, les garderies, puisqu'on en a parlé,
ne sont pas gratuites et impliquent, au contraire, une contribution très
importante des familles, peut-être plus importante que celles que nous
envisageons même au Québec.
C'est donc une réalité avec laquelle il faut vivre, cette
réalité des contraintes économiques et financières,
et cette nécessité d'une certaine justice sociale dans la mise
à la disposition d'un public, qui est composé de gens pauvres et
aussi de gens riches, des services qui sont d'usage facultatif pour les
individus et les familles qui y ont recours.
Les difficultés qu'on a soulevées à l'égard
des familles, à l'égard des personnes âgées sont,
sans aucun doute, des difficultés réelles, mais encore une fois,
là aussi, c'est-à-dire pour ce qui est des personnes
âgées comme pour ce qui est des familles, nous devons compter avec
les réalités, ce que l'Opposition je ne lui en fais pas le
reproche, je ne fais que l'observer peut ignorer pour un temps. C'est
cette préoccupation qui fait que les règlements sur la
contribution des bénéficiaires sont précisés
dans le projet de loi: l'obligation de publier, avec un délai de 90
jours; les modalités de contribution sont prévues dans le projet
de loi.
C'est donc dire qu'il n'est pas question, pour les
bénéficiaires, d'être soumis à des impositions,
à des changements rapides et sans préavis. Au contraire, le
régime lui-même, en vertu duquel ces prestations seront
établies, sera très bien connu et sera publié à
l'avance.
Pour ce qui est des prestations elles-mêmes, pour ce qui est des
contributions elles-mêmes, il est bien évident que l'on ne peut
s'astreindre, dans des dispositifs financiers, par exemple dans le dispositif
qui prévoit l'indexation des prestations ou des contributions, à
des délais de 90 jours, puisque l'utilisation même de l'indice des
rentes ne nous donne jamais plus de 40 jours pour effectuer des changements,
puisque l'indice des rentes est connu à la mi-novembre et qu'il
s'applique au début de janvier.
C'est donc un délai avec lequel il faut vivre et qui est en
général dans l'intérêt même du public et des
bénéficiaires.
Les deux autres aspects qu'on a soulevés, c'est-à-dire
l'article 7 a) relativement à la question de confidentialité des
données, des contenus dans les dossiers médicaux, nous reportent
à une recommandation que la commission a entendue.
C'est dans ce contexte, je crois, qu'il sera utile de reprendre la
discussion.
Mais j'aimerais m'arrêter pendant quelques minutes pour terminer,
sur le problème de l'immunité. Oh a soulevé, de part et
d'autre, les problèmes de l'immunité qui pourrait être
accordée aux professionnels médecins qui ont à porter des
jugements à la fois sur la qualité des actes posés par
leurs collègues et sur leur compétence professionnelle. La loi
prévoit et je fais référence pour le
bénéfice du député de Rouyn-Noranda à
l'article 39 du projet réimprimé la confidentialité
des dossiers. Elle ne prévoit pas, cependant, dans son état
actuel, l'immunité.
Il faut se poser de très sérieuses questions quant
à cette immunité. On a entendu ici les raisons qui pouvaient
militer en faveur d'une immunité. On a allégué, avec
raison, un danger réel de poursuite pour ceux qui sont actifs et qui
agissent de façon responsable dans de tels comités de
surveillance professionnelle à l'intérieur des
établissements. Ce que l'on n'a peut-être pas suffisamment mis en
lumière, ce sont les conditions normales pour l'obtention d'une
immunité. Ces procédures qui se déroulent au sein des
comités d'évaluation des titres et des comités
d'évaluation de la pratique médicale au sein de chaque centre
hospitalier sont marquées par une très grande informalité.
Ces procédures ne donnent peut-être pas, à ceux qui peuvent
en être affectés dans leur vie professionnelle, dans leur revenu
et dans leur réputation, des garanties suffisantes de pouvoir être
entendus et de pouvoir en appeler d'une décision qui les affecte de
manière adverse.
Si on pouvait satisfaire à ces conditions, il serait
peut-être moins difficile d'envisager des règles
d'immunité. Mais je crois que c'est l'ensemble de ce problème qui
doit être envisagé et non seulement les désavantages
évidents, que je suis le premier à reconnaître, d'une
situation où des individus qui agissent de façon responsable dans
le cadre de fonctions et de responsabilités attribuées à
l'ensemble d'un cadre professionnel sont malgré tout, comme individus,
appelés à en supporter les conséquences et le
coût.
Mais c'est un dossier qui n'est évidemment pas fermé
puisque j'ai eu l'occasion, comme on le sait, de m'adresser à des
associations, à l'Association des médecins de langue
française, il y a quelques semaines, pour souligner l'opportunité
de donner des moyens à la profession médicale et à
d'autres groupes professionnels de faire cette autoévaluation de leur
travail. Ces moyens débouchent non seulement sur des modalités
techniques et sur des formules techniques mais, également, sur les
considérations juridiques que cette observation que nous avons entendue
a fait ressortir.
C'est donc un dossier dont nous aurons l'occasion de reparler et il est
peut-être impossible, à ce stade-ci de la discussion, de le
régler totalement dans le cadre du projet de loi no 41.
Alors, M. le Président, c'est tout pour mes remarques sur la
deuxième lecture de ce projet de loi. Je propose, à nouveau,
qu'il soit adopté en deuxième lecture et
déféré à une commission.
L E PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Est-ce que cette motion de
deuxième lecture du projet de loi no 41 est adoptée?
M. SAMSON: Sur division.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Adopté sur division.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce projet de loi.
Second reading of this bill.
Projet de loi déféré à la
commission
M. BIENVENUE: M. le Président, avant d'appeler l'article suivant,
je fais motion pour que le projet de loi no 41 soit déféré
pour étude à la commission parlementaire des affaires
sociales.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que cette motion de
déférence est adoptée?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté.
M. BIENVENUE: Article 53, M. le Président.
Projet de loi no 90 Deuxième lecture
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre des Affaires sociales propose
la deuxième lecture du projet de loi no 90, Loi modifiant la loi de la
protection du malade mental.
M. Claude Forget
M. FORGET: M. le Président, comme vous le savez, la Loi de la
protection du malade mental a été sanctionnée par
l'Assemblée nationale le 30 juin 1972. Les articles 30 à 45, qui
concernent la constitution de la Commission de révision, sont
entrés en vigueur le 31 juillet de la même année et les
autres articles le 1er octobre.
L'expérience de deux ans démontre que cette loi a
contribué de façon probante à améliorer le sort des
malades mentaux. Les témoignages reçus l'indiquent clairement et,
en particulier, le second rapport annuel de la commission, que j'ai
déposé à l'Assemblée nationale en juin dernier.
Il n'en demeure pas moins que cette loi n'était pas parfaite. La
Commission de révision ainsi que plusieurs groupes ont fait certaines
suggestions visant à l'améliorer. C'est à la suite de ces
suggestions que nous avons examiné de nouveau la question, et j'ai
décidé de proposer aux membres de cette Assemblée les
amendements qui sont devant vous. J'aimerais maintenant faire une brève
description de chacune de ces dispositions.
En premier lieu, l'article 1 a pour effet d'amender l'article 17 de la
loi, afin de permettre à un juge à qui on présente une
requête pour examen psychiatrique une certaine discrétion quant
à l'interrogatoire de la personne au sujet de laquelle la requête
lui est présentée.
Actuellement, un juge doit interroger la personne et l'expérience
a démontré que ceci avait souvent pour effet de troubler
davantage le malade au point de précipiter une crise, en plus de
créer des difficultés considérables à toutes les
personnes concernées. Il ne faut pas oublier, en effet, que lorsqu'une
telle requête est présentée à un juge, c'est parce
que la personne visée refuse de subir un examen psychiatrique et,
conséquemment, de se faire traiter. Il s'ensuit qu'une personne dans un
tel état n'est pas disposée à se rendre devant un juge
pour faire valoir son point de vue. Actuellement, la plupart des juges
accordent leur requête sans procéder à l'interrogatoire. De
plus, l'article a comme effet de forcer le juge, en quelque sorte, à se
prononcer sur l'état mental de la personne, alors qu'il ressort de la
loi que ceci est une prérogative médicale.
L'amendement corrige donc cette situation et, tout en maintenant
l'obligation d'interroger, permet au juge d'user de sa discrétion et de
ne pas le faire s'il estime que c'est préférable pour la
santé ou la sécurité de la personne au sujet de laquelle
la requête est présentée ou de la santé ou la
sécurité d'autrui.
L'article 2, pour sa part, modifie l'article 21 de la loi, qui
décrète que seul le directeur des services professionnels d'un
centre hospitalier peut admettre provisoirement une personne sans qu'elle ait
subi un examen clinique psychiatrique, s'il juge que l'état mental de
cette personne est tel qu'il présente pour elle ou autrui un
péril grave et immédiat.
L'amendement a pour effet de permettre à tout médecin d'un
centre hospitalier d'admettre une telle personne en cas d'absence du directeur
des services professionnels, qui, évidemment, ne peut pas être
constamment présent sur les lieux.
L'article 3 modifie l'article 27 de la loi et a pour effet d'obliger
tout centre hospitalier ou centre d'accueil où une personne est admise
en cure fermée à l'aviser, par écrit, dès que sa
cure fermée est terminée.
La Commission de révision a constaté que des malades
s'adressaient à elle pour lui demander de mettre fin à leur cure
fermée, alors qu'il s'avérait, après vérification,
que cette cure fermée était terminée, parfois depuis
plusieurs semaines.
Comme la cure fermée est une situation d'exception où la
personne qui y est soumise est privée de toute liberté il
s'agit, en quelque sorte, d'une incarcération il paraît
important qu'elle soit prévenue dès qu'elle prend fin, puisque,
comme on le sait, une personne peut être dans un établissement
psychiatrique sans être en cure fermée.
L'article 4 est un nouvel article qui a pour effet d'obliger tout
établissement où une personne est en cure fermée depuis 30
jours à transmettre, sans délai, à la commission un avis
donnant le nom de la personne et la date du début de la cure
fermée. Un tel avis doit aussi être transmis de six mois en six
mois, si la cure fermée se poursuit.
Si la commission le requiert, une copie complète du dossier
médical de la personne en cure fermée doit lui être
transmise. La commission peut alors faire enquête et rendre une
décision comme si une demande de révision avait été
formulée en vertu de l'article 46. Le but de cet article est de
s'assurer que personne n'est gardé en cure fermée plus longtemps
que nécessaire, car, même si l'article 46 permet à une
personne en cure fermée ou à un membre de sa famille de demander
à la commission de réviser son cas, l'expérience a
démontré que relativement peu de personnes en cure fermée
utilisent ce recours. Il s'agit donc de donner un droit d'initiative à
la commission dans ces cas.
L'article 5, enfin, a pour effet d'obliger les établissements
où une personne est en cure fermée depuis plus de 30 jours, lors
de l'entrée en vigueur de la présente loi, à transmettre,
sans délai, l'avis prévu au premier paragraphe de l'article
4.
Il serait important, M. le Président, de mentionner que je
présenterai bientôt en deux-
ième lecture le projet de loi no 40. Ce projet de loi remplace la
Commission de révision par la Commission des affaires sociales, de
même que l'article 48 du même projet de loi qui a pour effet de
modifier l'article 20 de la Loi de la protection du malade mental.
Ce dernier amendement a pour but de permettre à la commission de
remplir adéquatement son rôle en décrétant que,
dès qu'une ordonnance est rendue par un juge, le greffier transmet
à la commission une copie du dossier complet et non pas seulement une
copie de l'ordonnance, comme l'exige l'article 20.
Voilà, M. le Président, les effets anticipés par ce
projet de loi no 90.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, même si le nombre
des personnes qui sont touchées par ce projet de loi est limité,
il n'en reste pas moins que ce sont des mesures législatives très
importantes, puisqu'elles touchent d'une façon toute particulière
la liberté des gens et que ce sont des dispositions qui se
répercutent sur le droit fondamental de tout citoyen, à savoir sa
liberté. Je crois que, dans un domaine comme celui-là, un
législateur n'est jamais trop minutieux.
En ce qui regarde l'Opposition officielle, concernant le projet de loi
no 90, je dois vous dire que nous voterons contre si le gouvernement
s'entête à garder l'article 1 dans sa forme actuelle.
Cet article tel que rédigé, M. le Président
c'est notre humble opinion doit être amendé puisqu'il ouvre
la porte à des abus possibles et n'améliore en aucune
façon l'exercice de la justice, tel que l'a prétendu tout
à l'heure le ministre des Affaires sociales.
Cet article, comme nous le savons, amende l'article 17 qui stipulait
ceci: "Lorsque la requête vise à faire subir par une personne un
examen clinique psychiatrique, le juge doit interroger la personne au sujet de
laquelle la requête lui est présentée, à moins que
cette personne ne soit, pour le moment, introuvable." Ce qui veut dire qu'on
fait une obligation au juge de procéder à un interrogatoire
lorsqu'une requête lui est présentée, alors que le nouvel
article dispense le juge de l'obligation de cet interrogatoire, amendant
l'article en question en disant que le juge ne sera obligé à un
interrogatoire que s'il estime préférable pour la santé ou
la sécurité de cette personne ou d'autrui de ne pas
l'interroger.
On ne fait plus une obligation au juge à qui une requête
est présentée de procéder à un interrogatoire. M.
le Président, nous pensons que ceci peut ouvrir la porte à des
abus parce que cette disposition augmente les dangers de l'arbitraire. Je crois
que dans une matière aussi importante, il faut garder un processus
contradictoire, tel qu'il existait auparavant. Le ministre prétend qu'il
y a danger de traumatisme pour les personnes qui pourraient être
interrogées par un juge. D'accord, cela peut sûrement arriver, ce
danger peut être présent dans certains cas. Mais je me dis que
c'est justement dans un tel cas que le juge doit user de sa discrétion
pour procéder selon les formes à un interrogatoire qui tiendra
compte justement de l'état dans lequel se trouve la personne au sujet de
laquelle est demandé un placement.
S'il y a, comme l'a dit le ministre tout à l'heure, un danger de
traumatisme pour certaines personnes, il y a un danger que des injustices se
commettent, si on enlève cette obligation d'un interrogatoire par le
juge.
Sans y référer d'une façon tout à fait
particulière, puisqu'il y a quand même une question de secret
professionnel en cause, je dois vous dire que j'ai déjà eu
à occuper dans certains dossiers, où il s'est
présenté entre autres le cas d'une personne âgée
qu'on voulait placer je ne dirai pas dont on voulait se
débarrasser suite à une requête qui avait
été faite pour placer cette personne âgée. Au stade
de l'interrogatoire du juge, cette personne âgée a
été tout de suite libérée. La preuve s'est faite
tout de suite, à l'effet que c'était loin d'être un cas de
placement mais tout simplement un cas de vieillesse et que ça n'avait
rien à voir avec l'urgence d'un placement.
Nous avons eu personnellement aussi à vivre le cas d'un mari qui,
à la suite d'une requête très explicite, très
motivée, essayait d'obtenir le placement de sa femme en cure
fermée. Encore là, seulement à l'occasion de
l'interrogatoire fait par le juge, le juge en est venu à la conclusion
qu'il n'y avait absolument pas matière à la requête qui
était faite pour placer cette personne en cure fermée.
Or, notre opposition, M. le Président, est que, s'il y a des
dangers de traumatisme suite à un interrogatoire qui doit être
fait par le juge, encore une fois c'est au juge d'user de sa discrétion
et il est bien placé pour en user. Agir autrement, enlever l'obligation
de cet interrogatoire par le juge, c'est encore une fois permettre
l'arbitraire.
L'article, tel qu'il est rédigé, ne nous indique pas sur
quels critères doit se baser d'une façon très
précise le juge afin de ne pas procéder à un
interrogatoire. On nous dit qu'il n'y aurait pas d'interrogatoire lorsque "le
juge estime préférable pour la santé ou la
sécurité de cette personne ou d'autrui de ne pas
l'interroger".
Il arrive souvent que des requêtes déposées devant
un juge sont accompagnées de motivations qui peuvent, à
première vue, paraître très convaincantes; elles sont
accompagnées également de témoignages à sens unique
d'un psychiatre, de sorte que le juge, n'ayant en main que ces
éléments, peut fort bien en arriver à la conclusion de ne
pas interroger la personne dont on demande le placement. Il y a
déjà trop de cas, M. le Président j'ai eu
l'occasion d'en
vivre et je suis convaincu que d'autres ont eu également cette
occasion qui peuvent se présenter où on a à faire
face à des gens qui essaient d'en placer d'autres, pas toujours avec des
motivations très généreuses.
Je crois que ce qui est important pour le législateur, c'est de
voir surtout à adopter une loi très stricte de ce
côté pour éviter les abus, ce qui n'empêche pas,
encore une fois, le juge d'user de sa discrétion. C'est pour cela que
l'Opposition officielle croit que la rédaction du premier article
était encore la plus valable.
J'en aurais, M. le Président, encore pour quatre ou cinq
minutes.
M. LEVESQUE: D'accord.
M. BEDARD (Chicoutimi): Dans cette optique, nous croyons que non
seulement le juge doit interroger la personne au sujet de laquelle est faite
une demande de placement en cure fermée, mais qu'il faudrait encore
aller plus loin.
Il faudrait exiger que le juge se fasse un devoir, une obligation
d'exiger que cette personne soit assistée d'un avocat ou d'une autre
personne, parce que les personnes dont on demande le placement en cure
fermée sont souvent et c'est clair atteintes de
traumatismes, elles sont souvent désorientées. Lorsque c'est une
demande qui se fait avec peu d'à-propos, ces personnes ont besoin
d'être aidées de manière que le juge, avant de se
prononcer, puisse le faire en toute connaissance de cause, ayant eu l'occasion
non seulement d'interroger la personne, mais ayant eu l'occasion de voir cette
personne défendue par quelqu'un, représentée par quelqu'un
et également de voir à ce qu'il y ait toujours le processus
contradictoire qui continue au niveau même des examens
psychiatriques.
M. le Président, je crois également qu'on devra aller plus
loin et je termine là-dessus c'est que nous le savons, le
projet de loi no 40 amende la Loi de la protection du malade mental, chapitre
44, à l'article 46, par la formation d'un comité de
révision.
En terminant, nous soumettons que cette obligation pour une personne
d'être représentée par un avocat ou encore par une autre
personne de son choix devrait également être exigée par la
commission de révision, de manière que lorsqu'une demande de
révision est faite, encore une fois, toute la lumière soit faite
devant l'instance concernée. Il s'agit de disposer de la liberté
d'un citoyen dans tous les cas et, encore une fois, le législateur ne
peut se permettre de ne pas être très minutieux, même
exagérément souvent, plutôt que de prendre le risque de
donner l'ouverture à l'arbitraire et, d'une certaine façon,
à l'injustice.
M. SAMSON: M. le Président, j'ai le choix entre demander la
suspension du débat ou bien parler deux minutes.
M. LEVESQUE: Deux minutes?
UNE VOIX: II est six heures et deux minutes.
M. SAMSON: Comme vous voudrez. M. LEVESQUE: Allez-y. M.SAMSON: On y va?
M. LEVESQUE: Allez-y.
M. Camille Samson
M. SAMSON: Voici, M. le Président, cela va être un discours
assez court cette fois-ci. C'est que je suis absolument d'accord sur les propos
que vient de tenir l'honorable député de Chicoutimi quant
à l'article 1. En effet, je trouve absolument dangereux et imprudent de
permettre qu'une personne qui sera amenée devant un juge, dans des
circonstances que nous connaissons, ne soit pas nécessairement
interrogée ou vue par le juge. On a trop d'exemples de personnes qui ont
intérêt à faire interner d'autres citoyens, monter ce qu'on
appelle, depuis le bill 22, des "frame-up", pour en arriver à utiliser
ou se saisir de certains biens via la loi, etc.
Alors, quant à nous, nous ne sommes pas du tout d'accord sur ce
projet de loi parce que l'article 1 du projet de loi défait les
améliorations qui sont apportées par les autres articles.
A l'article 3, il est dit que, quant à un centre hospitalier ou
un centre d'accueil, lorsqu'une personne est admise en cure fermée, il
faut l'aviser, par écrit, que sa cure est terminée. Je pense
qu'il faudrait ajouter aussi: II faudrait en aviser d'autres. Pas seulement la
personne concernée mais peut-être d'autres. Dans certains cas,
cela pourrait être extrêmement pratique.
Alors, je n'irai pas plus loin, j'ai promis de parler deux minutes. Je
ne dépasserai pas les deux minutes. Mais tel que le projet est
là, à moins que le ministre, dans un droit de réplique de
30 secondes, nous dise qu'il va amender l'article 1, je serai obligé de
voter contre.
M. Claude Forget
M. FORGET: M. le Président, relativement à l'article 1, je
crois que les travaux de la commission élue sur le projet nous
permettront de tirer au clair ce qui me paraît être une confusion,
confusion dans le sens suivant: Pour mettre en branle le processus de
protection du malade mental et de sa famille, il faut essentiellement
l'intervention d'un juge. Lorsqu'une personne devient violente dans un
épisode de maladie mentale, il est impossible de lui faire acquiescer
à la démarche de se présenter devant un juge. Les forces
policières, d'autre part,
n'ont aucune autorité pour appréhender cette personne et
la conduire devant un juge. Elles ont effectivement refusé leur concours
de peur d'être poursuivies pour arrestation illégale.
Il n'y a pas, dans la loi, de pouvoir de subpoena ou de pouvoir
d'émettre des mandats d'arrestation. Et dans un tel contexte, la
décision première d'une cure fermée, qui est sujette
à révision et sujette à une deuxième expertise
médicale, donnera d'autres occasions de vérifier le
caractère régulier du processus.
Cependant, la loi actuelle est mise en échec par
l'impossibilité d'assurer la présence physique de la personne
dont l'interrogatoire est légalement requis pour mettre en branle le
processus. C'est un cercle vicieux qu'il faut briser, et je crois que la
commission élue, considérant ce projet, pourra
bénéficier des suggestions de nos collègues d'en face et
de tous nos collègues membres de la commission pour nous aider à
résoudre cette difficulté.
Si une autre formulation s'avère propice, je n'ai aucune
objection à la retenir, mais il y a cette impossibilité
juridique, dans le moment, de mettre en marche, de faire s'appliquer la loi
à son point de départ.
Là-dessus, M. le Président, je demanderais l'ajournement
du débat.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que cette motion d'ajournement du
débat est adoptée?
M. LEVESQUE: Adopté.
M. le Président, je voudrais donner un avis, avis de la
convocation de la commission parlementaire des richesses naturelles et des
terres et forêts, pour entendre les représentants de
l'Hydro-Québec et de la Société d'énergie de la
baie James, aux fins suivantes: 1 Etudier l'organigramme fonctionnel de
la Société d'énergie de la baie James. 2 Etudier les
contrats de gérance et d'ingénierie-conseil de la
Société d'énergie de la baie James.
Cela pour le mardi 17 décembre prochain, à quinze
heures.
M. BURNS: Adopté
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté.
M. LEVESQUE: Au salon rouge, ou autre salle qui sera
déterminée à ce moment-là. Mais on peut mettre au
salon rouge, pour le moment, dans l'avis au feuilleton.
M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à
demain, dix heures.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): La Chambre ajourne ses travaux à
demain, dix heures.
(Fin de la séance à 18 h 9)