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(Dix heures neuf minutes)
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs.
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
Questions orales des députés.
QUESTIONS DES DEPUTES
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
Cartonnerie de Cabano
M. LESSARD: On devrait appeler les ministres ce matin, M. le
Président. J'en ai un, très bien. Ma question va s'adresser au
ministre de l'Industrie et du Commerce. En date du 29 novembre 1973, je lui
posais une question concernant la cartonnerie de Cabano sur laquelle je lui
demandais de faire le point et le ministre me confirmait qu'il y avait eu
modification au projet, mais que la participation populaire devrait continuer
d'exister dans le nouveau projet. Est-ce que le ministre pourrait faire le
point ce matin? Est-ce que le ministre pourrait nous dire si, dans le nouveau
projet, dont on parle, en tout cas, même s'il n'est pas annoncé
officiellement, la participation populaire continuera d'exister et que le
contrôle de ce nouveau projet appartiendra à la population?
M. SAINT-PIERRE : II y a plusieurs projets dans la région, qui
sont examinés actuellement et M. Saulnier continue son mandat. Il a
rencontré la population. Dans l'intérêt public et compte
tenu des ententes que nous avons eues avec la population à l'effet de
respecter une certaine confidentialité sur des aspects du projet, je ne
me sens pas en mesure, ce matin, de donner tous les détails connus.
Qu'il me suffise de mentionner qu'une nouvelle cartonnerie, qui est
envisagée pour la région, implique bien une participation
majoritaire de la population et des gouvernements, mais qu'il y a plus d'un
projet à l'étude. J'espère que, dans les premiers jours de
l'année 1974, nous serons en mesure de dévoiler et de rendre
publiques la nature des projets eux-mêmes, de même que que les
modalités de participation de la population et du gouvernement dans
chacun de ces projets.
M. LESSARD: Simplement une question additionnelle. Je comprends la
réponse du ministre, mais le ministre peut-il nous assurer que cette
participation populaire qui était impliquée dans les anciens
projets sera sauvegardée dans les nouveaux projets?
M. SAINT-PIERRE: Un des projets envisagés implique une
cartonnerie et, dans cette cartonnerie, comme je l'ai mentionné, le
gouvernement et la population se retrouveront au capital-actions
majoritaires.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
Vente des Iles Anticosti et Mingan
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au premier
ministre qui est en train de régler les problèmes de
l'agriculture, non? Est-ce que le premier ministre pourrait répondre aux
questions suivantes : Quels actes ont été posés par son
gouvernement, depuis l'annonce de la mise en vente de l'île d'Anticosti
et de la grande île de Mingan? Est-il exact que le gouvernement d'Ottawa,
par l'entremise de Parcs-Canada, a fait une offre d'achat de ces îles,
premièrement? Deuxièmement, si oui, quelle est la réponse
des compagnies Hudson Bay et la Consolidated Bathurst à ce sujet?
Troisièmement, est-ce que le premier ministre du Québec
considère que la vente de l'utilisation de ces territoires, grands comme
la Suisse, devrait faire l'objet d'un débat public et d'études en
particulier de la part de l'OPDQ?
M. BOURASSA: M. le Président, je n'ai pas été
informé, j'ai entendu des rumeurs qu'il pouvait avoir des discussions
entre le gouvernement fédéral et certaines compagnies
propriétaires de terrains sur l'île d'Anticosti. Je n'ai pas
été informé qu'il y avait des négociations
formelles, mais je dois, au nom du gouvernement... Le ministre des Terres et
Forêts, justement, doit me faire signer une lettre, qu'on va faire
parvenir aux entreprises pour commencer la discussion ou la négociation
sur le transfert de propriétés, si c'est à l'avantage du
Québec.
M. LEGER: Une question supplémentaire, M. le Président.
Est-ce que dans cette lettre ou dans une politique prochaine, le gouvernement
envisage de se porter acquéreur de l'île d'Anticosti?
Deuxièmement, envisage-t-il d'étudier avec l'OPDQ l'usage de ces
gigantesques territoires, dans une nouvelle politique?
M. BOURASSA: M. le Président, il est prématuré pour
moi d'en dire plus. J'en ai discuté brièvement avec le ministre
des Terres et Forêts, il y a quelques jours. Je dois le rencontrer, ce
matin, là-dessus, pour établir la stratégie du
gouvernement et je pourrai répon-
dre au député, au cours de la journée ou
demain.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
Nouveaux bénéficiaires de l'aide
sociale
M. LESSARD: M. le Président, je m'excuse, mais je soulève
quand même la question au ministre des Affaires sociales, dans l'espoir
qu'il en sera informé. Cela fait deux jours que j'ai annoncé au
ministre des Affaires sociales que je soulèverais cette question. Je
comprends qu'il ne soit pas ici, ce matin. Ma question est celle-ci, M. le
Président: Est-ce que le ministre des Affaires sociales et le
gouvernement, en particulier, vont prendre les mesures nécessaires pour
débloquer l'émission des chèques aux nouveaux
bénéficiaires de l'aide sociale qui s'inscrivent depuis le 1er
décembre? Cette question, je l'ai soulevée, il y a deux semaines;
le ministre m'avait répondu qu'il y avait possibilité de faire
des chèques à la main. Toutes les informations que j'ai me
prouvent que ce n'est pas le cas. Alors, M. le Président, le ministre
arrive. Est-ce que le ministre va prendre les mesures nécessaires pour
faire en sorte que les nouveaux bénéficiaires de l'aide sociale,
en particulier depuis le 1er décembre, puissent obtenir leur
chèque d'aide sociale avant Noël?
Cela n'est pas seulement dans mon comté. C'est
généralisé dans tout le Québec.
Vous êtes contents, les libéraux, que je pose cette
question. Vous êtes poignés avec cette question vous aussi.
M. FORGET: M. le Président, je suis extrêment sensible aux
préoccupations qu'exprime l'honorable député de Saguenay
relativement aux problèmes que peuvent causer certaines mesures
administratives pour les assistés sociaux, particulièrement ceux
qui s'inscrivent pour la première fois comme bénéficiaires
du régime.
J'ai entrepris de corriger, dans toute la mesure du possible, cette
situation. Malheureusement, les conditions climatiques ont fait que toutes les
communications nécessaires et les échanges de vues
nécessaires pour mettre en place certaines modifications n'on pu avoir
lieu au moment où je parle.
Cependant, au fur et à mesure des disponibilités à
cet égard, nous pourrons aviser. J'aimerais toutefois donner quelques
éléments de contexte aux collègues relativement à
cette question de l'introduction de mesures administratives.
Le but de ces mesures a été d'assurer un contrôle
plus adéquat sur une somme très considérable
déboursée au titre de l'aide sociale dont l'importance peut
s'évaluer à environ $100 millions, qui était,
jusqu'à tout récemment, déboursée selon des
procédures manuelles et sans l'intervention des autorités
centrales de l'aide sociale.
Il en résultait une absence presque totale de contrôle sur
une somme qui se chiffre, encore une fois, par environ 25 p.c. des
déboursés totaux de l'aide sociale. Ces nouveaux
mécanismes administratifs ont leurs aspects désagréables
que nous essaierons de minimiser, mais j'aimerais également que l'on
prenne note du fait que, grâce à ces contrôles, il a
été possible, durant les derniers mois, de diminuer les
déboursés de l'aide sociale en diminuant les cas de double emploi
de bénéficiaires inscrits à plus d'un bureau local.
L'ordre de grandeur de ces diminutions, à cause d'une meilleure
administration, est de l'ordre de 3 p.c. à 4 p.c. de
déboursés totaux qui, comme on le sait, se chiffrent par environ
$400 millions.
Donc, la valeur, sur un plan strictement administratif, de ces nouvelles
mesures a déjà été démontrée. Il
demeure que nous sommes très conscients des difficultés qu'elles
peuvent susciter pour certains individus et nous essaierons de les minimiser
dans toute la mesure du possible.
M. LESSARD: Une question additionnelle, M. le Président.
Malgré les informations que me donne le ministre, je voudrais savoir si
le ministre a l'intention, avant d'adopter complètement ce
système, en tout cas d'ici l'adoption de ce nouveau système, de
permettre aux bureaux locaux du ministère des Affaires sociales
d'émettre des chèques selon, justement, des procédures
manuelles afin de permettre aux nouveaux bénéficiaires sociaux
d'avoir leur chèque avant Noël?
M. FORGET: M. le Président, j'ai déjà
répondu partiellement à cette question au moins en indiquant que
toutes les mesures nécessaires pour diminuer l'impact négatif sur
certains bénéficiaires de nouvelles mesures administratives
seront employées. Il demeure que l'émission de chèques par
des procédures manuelles, dans chaque bureau d'aide sociale, constitue
précisément la difficulté que nous avons voulu corriger.
Il s'agissait d'un montant de $100 millions par année qui était
émis de cette façon et parfois aux mêmes
bénéficiaires, dans plus d'un bureau.
Il est donc nécessaire que, si l'on revient à la
procédure d'émission manuelle, cela ne peut se faire que pour un
délai extrêmement limité dans le temps et qu'il faut
s'attendre aussi à des doubles paiements dans certains cas.
M. LESSARD: Une question additionnelle et dernière question, M.
le Président. Etant donné les procédures qui ont
été appliquées par le ministère des Affaires
sociales, est-ce que le ministre peut nous assurer et assurer aux
députés de cette Chambre, qui doivent recevoir des appels
téléphoniques, que les nouveaux
bénéficiaires sociaux ou certaines catégories de
bénéficiaires sociaux recevront leur chèque avant le 25
décembre?
M. FORGET: M. le Président, je ne peux pas donner d'assurance
à cet effet. Tout ce qu'il est possible de faire pour obtenir ce
résultat sera fait mais il est évident que, dans les conditions
actuelles et à quelques jours seulement de Noël, il est impossible
d'assurer que tous les bénéficiaires nouveaux recevront leur
chèque avant le 25.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
Projet de garderies populaires
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, ma question
s'adresserait à l'honorable ministre des Affaires sociales. Je voudrais
lui demander comment il peut concilier la réponse que m'a donnée
hier le ministre d'Etat aux Affaires sociales au sujet des garderies, à
l'effet que le Québec n'avait exercé aucun droit de veto, et la
déclaration formelle faite à la Chambre des communes mardi
dernier, par le ministre fédéral de la Santé, M. Lalonde,
a l'effet, premièrement, qu'il y avait eu un arrangement de pris entre
les deux gouvernements concernant les garderies d'enfants.
D'une part, qu'il y avait eu un arrangement, deuxièmement, que
cet arrangement était à l'effet je cite le ministre de la
Santé, M. Lalonde pour être très clair que le
gouvernement fédéral n'approuverait pas des projets d'initiatives
locales touchant aux garderies, à moins qu'il n'ait obtenu une garantie
quelconque que ces projets seraient financés par l'administration
provinciale à l'expiration du financement du programme d'initiatives
locales.
Alors, la déclaration de l'honorable ministre de la Santé
au fédéral indique clairement, d'une part, qu'il y a eu
arrangement et qu'il y avait un droit de veto qui avait été
exercé la formule "à moins que" par le
Québec. Alors, comment concilier cette déclaration de l'honorable
ministre de la Santé, M. Lalonde et la déclaration de l'honorable
ministre d'Etat aux Affaires sociales, hier, que le Québec n'avait pas
exercé son droit de veto concernant les garderies populaires?
M. FORGET: M. le Président, pour ce qui est de la réponse
donnée hier, je ne crois pas qu'il faille discourir longuement. Il n'y a
pas eu, au début de ce programme d'initiatives locales de droit de veto
accordé aux provinces quant à l'initiative de ces projets et ce
droit de veto n'existe pas non plus maintenant quant à leur
continuation. Il est bien entendu que l'administration fédérale
peut choisir d'interpréter un avis sur l'envergure d'un projet comme la
liant, mais c'est une interprétation qu'elle choisit d'adopter librement
et cela ne représente pas un pouvoir effectif de notre ministère
ou du gouvernement du Québec quant à ces projets et quant
à leur renouvellement. Ce qui s'est passé relativement aux
garderies populaires a été précisément un
échange de vues sur l'envergure des projets sur les effectifs
engagés dans ces projets, mais non pas une indication imperative
à l'administration fédérale d'en réduire
l'envergure tout de suite ou encore moins d'en cesser le financement.
Pour ce qui est de l'entente à laquelle vous faites allusion, il
y a une entente de faite quant à l'inscription de nouveaux projets.
Pour ce, qui est de la continuation des projets existants, la situation
est telle que je l'ai indiqué dans ma première
réponse.
M. BEDARD (Chicoutimi): Question supplémentaire. Est-ce que je
dois déduire de la réponse de l'honorable ministre des Affaires
sociales qu'il y a eu une erreur, en fait, d'expression de la part de
l'honorable ministre de la Santé au niveau national concernant sa
manière d'interpréter les arrangements ou les ententes ou les
avis qu'il y aurait eu entre le fédéral et le provincial?
M. FORGET: M. le Président, à moins de prendre
connaissance de la déclaration qui a été citée, je
ne sais s'il s'agit d'une erreur d'interprétation du ministre Lalonde ou
s'il s'agit d'une erreur d'interprétation de l'honorable
député de Chicoutimi.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je vous prêterai le texte avec
plaisir.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
Avortement libre
M. SAMSON: M. le Président, ma question s'adresse à
l'honorable premier ministre. Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire
s'il aurait reçu de l'Association des parents catholiques du
Québec un mémoire faisant suite à une prise de position de
cette association, accompagné d'une prise de position de 38 associations
différentes qui regroupent 420,000 membres, à l'effet que ce
groupe demande au gouvernement du Québec de prendre une position
concernant la question de l'avortement libre? Est-ce que le premier ministre
peut nous dire s'il a reçu cette lettre, s'il y a donné suite.
Est-ce que le premier ministre peut informer cette Chambre de la position que
le gouvernement prend ou prendra concernant cette question?
M. BOURASSA: M. le Président, je me souviens d'avoir reçu
des représentations durant la campagne électorale sur cette
question. Si ma mémoire est bonne, ma réponse avait
été que,
d'abord, l'ancien ministre des Affaires sociales avait
déjà exprimé le point de vue du gouvernement sur cette
question et que, deuxièmement, c'était de juridiction
fédérale.
M. SAMSON: M. le Président, est-ce que...
M. BOURASSA: Quant à l'association en question, il faudrait que
je vérifie; je me souviens d'avoir, durant la campagne
électorale, reçu des représentations et c'était, je
crois, le sens de ma réponse ou, si ce n'est pas le sens, je vous le
donne ce matin.
M. SAMSON: Oui, M. le Président, pour l'information du premier
ministre, c'est le même groupe qui a communiqué avec vous pendant
la campagne électorale et qui l'a fait de nouveau en décembre
dernier. Puisqu'il vient de faire allusion à une prise de position de
l'ancien ministre des Affaires sociales, le premier ministre peut-il assurer
cette Chambre que la position du gouvernement est exactement la même que
celle énoncée précédemment par l'ancien ministre
des Affaires sociales, c'est-à-dire que le gouvernement est contre
l'avortement libre au Québec?
En même temps, est-ce que le premier ministre ou peut-être
le ministre des Affaires sociales pourrait nous dire, s'il est vrai que la
Régie de l'assurance-maladie continuerait toujours de payer pour des
frais d'avortement à l'extérieur du Québec,
c'est-à-dire dans l'Etat de New York?
M. BOURASSA: M. le Président, à la première
question, à ce moment-là, l'ancien ministre parlait au nom du
gouvernement et la position n'est pas changée; quant à la
deuxième question, j'aimerais vérifier, M. le
Président.
M. SAMSON: M. le Président, le ministre des Affaires sociales
pourrait nous donner peut-être la réponse là-dessus?
M. FORGET: Tous les résidants du Québec sont
assurés, relativement aux services hospitaliers qu'ils reçoivent
à l'extérieur du Québec, du remboursement, dans les cas
électifs, d'un maximum de $25 par jour. Cette réglementation n'a
pas été changée. Pour ce qui est des services
médicaux reçus à l'extérieur du Québec,
comme on le sait, la régie fait dans tous les cas, où,
évidemment, la légalité de la procédure ne peut pas
être mise en doute à sa face même, le remboursement, aux
taux versés aux médecins du Québec, des procédures
effectuées ou dont a bénéficié un résidant
du Québec à l'extérieur du pays.
M. SAMSON: Une question supplémentaire, M. le Président,
est-ce que le ministre ne pourrait pas être un peu plus clair dans sa
réponse et nous dire si la régie de l'assurance-maladie rembourse
effectivement les frais pour avortement à l'extérieur du
Québec, c'est-à-dire dans l'Etat de New York? Si oui, puisque
l'ancien ministre nous avait déjà dit que ça ne se faisait
pas, et si ça se fait présentement, est-ce que le ministre peut
nous dire s'il entend proposer des changements à cette
réglementation, pour qu'à l'avenir ça ne se fasse
plus?
M. FORGET: Je prends avis de la question du député de
Rouyn-Noranda, M. le Président.
LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition officielle.
Exploitation de la mine Home
M. MORIN: M. le Président, permettez-moi de poser une question au
ministre des Richesses naturelles. Le vice-président de la
Société No-randa Mines, M. Brissenden, déclarait le 10
décembre dernier, lors de l'assemblée annuelle de la Corporation
des ingénieurs du Nord-Ouest, que la durée à venir de
l'exploitation de la mine de cuivre Horne se mesurait maintenant "en termes de
mois". Je crois également qu'il a ajouté que, d'après les
prévisions, il ne resterait en septembre 1974 qu'un tonnage minime de
minerai à faible teneur dans cette mine. Le ministre peut-il nous dire
quelles sont les mesures envisagées par son ministère en vue de
temporiser au maximum ou d'atténuer au maximum les effets sur la
population locale de l'arrêt de l'exportation d'un des plus importants
gisements du Nord-Ouest québécois?
M. MASSE: En effet, depuis quelque temps, les autorités de la
mine Noranda ont l'intention, parce que la teneur du minerai n'est plus assez
élevée et que les réserves s'épuisent, de mettre
fin à l'exploitation de la mine Horne. En tant que ministre des
Richesses naturelles, évidemment, je suis concerné et,
lorsqu'arrive l'annonce de fermetures semblables, les moyens à mettre en
place pour remédier à cette situation sont à peu
près inexistants. Les gisements qui sont commercialement exploitables le
sont lors de leur découverte et nous n'avons pas de banque de
gîtes minéraux qui pourraient être exploités en
remplacement. Je dois souligner qu'actuellement, dans les mines du Nord-Ouest
et de la Côte-Nord, il manque énormément de main-d'oeuvre
et cela se chiffre par plusieurs centaines de mille mineurs qu'on recherche
actuellement pour répondre à la demande.
M. SAMSON: Supplémentaire, M. le Président.
M.MORIN: Une question supplémentaire, s'il vous pi art.
LE PRESIDENT: Oui.
M. MORIN: Puisqu'il en est ainsi, est-ce que
le ministre prévoit l'établissement d'un programme, aussi
vaste que nécessaire, de recyclage, par exemple, pour les mineurs et de
primes à la mobilité aussi? Je veux bien croire qu'il existe une
demande, mais cela n'est pas toujours le même genre de mine et cela n'est
pas toujours, non plus, au même endroit. Est-ce que le ministère a
prévu, peut-être, aussi des indemnités spéciales
pour les mineurs de la Noranda?
M. MASSE: Sur ces questions, nous avons à travailler avec le
ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre et, comme dans les cas de
fermetures survenus depuis 1970, nous avons l'intention de ne rien
négliger pour tenter d'assurer le remplacement et aussi pour
éviter les tracas que cela peut causer à ces travaillants.
M. MORIN: Une question supplémentaire encore, M. le
Président.
M. SAMSON: Une question additionnelle.
LE PRESIDENT: Oui. L'honorable chef de l'Opposition et...
M. MORIN: Je sais que cela intéresse fortement mon
collègue.
LE PRESIDENT: ... après, le député de
Rouyn-Noranda.
M.MORIN: Je pourrai revenir par la suite, parce que c'est un
problème humain assez complexe. Est-ce que le ministre entend prendre,
avec quelques-uns de ses collègues ou seul, des mesures
particulières en vue de s'assurer que les 950 travailleurs de l'usine de
"smeltage" je ne parle pas de la mine; je parle de l'usine de "smeltage"
de la compagnie puissent conserver leur emploi? Le ministre sait
peut-être que d'autres mines font effectuer le traitement primaire du
cuivre à l'usine de Rouyn.
M. MASSE: Selon mes informations, il n'est pas du tout question de
réduire les activités de cette usine parce que le minerai
traité provient de l'extérieur de l'Ontario surtout.
M. SAMSON: Est-ce que le ministre pourrait nous dire si, quant à
ce sujet, il a eu des discussions avec les autorités de la Noranda Mines
et s'il n'aurait pas eu dans ces discussions une communication à l'effet
que, lorsque ces réserves seront épuisées, la fonderie qui
est actuellement en construction pourra donner des emplois pour compenser pour
ceux qui seront perdus, quand les réserves seront épuisées
et que cette fonderie sera en activité très bientôt? Est-ce
que le ministre peut nous dire s'il n'aurait pas reçu aussi des
informations à l'effet que Noranda Mines pourrait exploiter des
gisements qui lui appartiennent et qui sont situés à
proximité de Noranda? Sinon, est-ce que le ministre pourrait nous dire
s'il accepterait d'en discuter avec les autorités de Noranda Mines aux
fins de leur demander d'envisager l'exploitation, à une courte
échéance, des gisements qui sont là, existants, à
proximité et qui appartiennent effectivement à Noranda Mines?
M. MASSE: M. le Président, je pense que le député
de Rouyn-Noranda a déjà soulevé cette question en Chambre,
dans l'ancien Parlement. J'ai la même réponse. Selon nos
informations, nos statistiques, il n'existerait pas d'autres gîtes
commercialement exploitables actuellement. Maintenant, je prends avis de la
question, quitte à voir, depuis le temps que la question avait
été posée, s'il y a eu des développements dans ce
sens. Quant aux travailleurs de la mine qui pourraient être
employés à la nouvelle raffinerie, il semble que ce soit
possible, mais pour une petite quantité des mineurs actuels.
M. MORIN: Une question supplémentaire, M. le Président. Le
ministre nous dit qu'il a des renseignements, à l'effet qu'il n'y a pas
de minerai autour de cette mine qui va fermer. Enfin, c'est ce que j'ai cru
comprendre. J'aimerais savoir si le ministre tient ces renseignements de la
société minière ou bien s'il a ses propres sources de
renseignements autonomes. Tout le monde sait que ça fait plusieurs
années, d'année en année, que la compagnie annonce qu'elle
va fermer ses portes; cela rend beaucoup plus facile la négociation des
conventions collectives avec les pauvres mineurs.
M. MASSE: M. le Président, quant aux informations que nous avons,
ce sont nos moyens, nos propres sources qui me permettent de donner la
réponse au député de Rouyn-Noranda. Le
député de Rouyn-Noranda faisait mention que cette compagnie
Noranda Mines posséderait un territoire qui serait commercialement
rentable. C'est le sens de la question du député de
Rouyn-Noranda. Je lui ai dit que selon nos informations cette compagnie ne
posséderait pas de terrains qui soient prometteurs en termes de
rentabilité.
M. BURNS: M. le Président, une question additionnelle. C'est la
dernière quant à moi.
M. SAMSON: Est-ce que le ministre pourrait nous dire...
M. BURNS: Oui, je vais le laisser aller...
M. SAMSON: Est-ce que le ministre pourrait nous dire si, selon ces
mêmes informations, il n'y aurait pas de compagnies filiales de la
Noranda qui posséderaient des territoires commercialement rentables,
à proximité de l'exploitation de Home?
M. MASSE : M. le Président, je prends avis de la question, quitte
à répondre, si possible, demain.
M. BURNS: Dernière question supplémentaire, M. le
Président. Pendant qu'on est sur le sujet, est-ce que le ministre serait
en mesure de rapporter à la Chambre où en est rendu le projet de
fonds miniers qui semblent avoir été réclamés
à grands cris par les gens de la région d'Abitibi?
M. MASSE: M. le Président, c'est une question, évidemment,
qui relève davantage de mon collègue du Travail et de la
Main-d'Oeuvre. Je prends également avis de la question. Je ne sais pas
si le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre a poursuivi, depuis un
an, les discussions ou les travaux sur cette question.
LE PRESIDENT: Deux courtes questions, l'honorable député
de Lafontaine et l'honorable député de Beauce-Sud.
Limites de comtés
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Transports. Le ministre pourrait-il nous dire quand son ministère a
l'intention de changer les panneaux routiers indiquant les limites de
comtés et les faire correspondre aux nouveaux comtés? Je ne parle
pas des conseils de comté mais des comtés électoraux.
Egalement, pourquoi le ministre n'a-t-il pas entrepris ce changement au mois
d'août, ce qui aurait permis aux électeurs de se familiariser
davantage avec les nouveaux comtés?
Finalement, est-ce que le ministre, pour accomplir tout ensemble le
travail, a l'intention de disposer ces panneaux indicateurs également
dans les. grandes municipalités où il y a plusieurs
comtés, comme Laval, Montréal, Québec, Sherbrooke?
M. MAILLOUX: M. le Président, comme il y a plusieurs
ministères d'impliqués dans la question que pose l'honorable
député de Lafontaine, je voudrais prendre toutes les informations
pertinentes pour ne pas mal informer la Chambre. Mais depuis la nouvelle carte
électorale et depuis le phénomène où nous avons
rattaché des comtés à plusieurs divisions, l'étude
est en train d'être complétée. Je pense que dans les jours
prochains, si ce n'est pas en Chambre, nous pourrons informer valablement le
public du moment où il sera possible de donner suite à la
question que pose le député de Lafontaine.
Quant à la deuxième partie de sa question, je ne l'ai pas
entendue.
M. LEGER: La deuxième partie, c'est simplement ceci : Dans les
villes, où il y a plusieurs comtés, comme Laval, Montréal,
Québec, Sherbrooke, est-ce que vous avez l'intention d'établir
des panneaux pour que les citoyens sachent dans quel comté ils sont? Il
y a plusieurs citoyens qui ne savent pas dans quel comté ils se
trouvent.
M. MAILLOUX: J'informerai le député dans le même
laps de temps.
LE PRESIDENT: Dernière question, l'honorable député
de Beauce-Sud.
Exportations de bois
M. ROY: Ma question s'adresse à l'honorable ministre des Terres
et Forêts. Est-ce que l'honorable ministre des Terres et Forêts
pourrait nous dire s'il a reçu des informations de l'Etat du Maine
voulant que cet Etat s'apprêterait à contingenter les exportations
de bois pour alimenter les usines du Québec, sises près de la
frontière américaine, à cause de la crise de
l'énergie? Est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il a reçu
des informations à ce sujet?
M. DRUMMOND: Je n'ai reçu aucune information à cet
égard, M. le Président.
M. ROY: M. le Président, devant l'inquiétude des
industriels, sis près de la frontière américaine, est-ce
que le ministre pourrait se renseigner, vérifier les faits de
façon à pouvoir donner des informations demain, en Chambre, en
vue de rassurer nos industriels sur ces rumeurs, qui sont peut-être
vraies ou peut-être fausses? Quand même, il faut faire le point de
la situation de façon que l'on puisse informer ces gens de la meilleure
façon possible.
M. DRUMMOND: M. le Président, je vais m'informer de cette
situation.
LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. LEVESQUE: Dépôt de documents, M. le Président, de
consentement.
LE PRESIDENT: Dépôt de documents.
DEPOT DE DOCUMENTS
Régie de l'électricité et du
gaz
M. MASSE: Merci M. le Président. J'ai l'honneur de déposer
le rapport annuel de la Régie de l'électricité du gaz pour
l'exercice financier 1972/73.
M. LEVESQUE: M. le Président, article 19).
Etude du rapport de la commission sur le projet de loi
no 8 (suite)
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: Merci, M. le Président. Lorsque nous avons
ajourné nos travaux, hier soir, j'étais à vous signaler,
parfaitement régulièrement...
M. ROY: M. le Président, sur une question de règlement,
j'aurais une directive à vous demander.
En vertu de notre règlement, l'année dernière et
l'année qui a précédé, la première
année où nous avons expérimenté notre
règlement, il avait été entendu que lors du
dépôt du rapport, nous aurions un certain temps pour apporter des
amendements au rapport et qu'il y aurait un débat, par la suite,
concernant les amendements qui seraient soumis.
Je ne veux pas du tout brimer les droits de l'honorable
député de Saint-Jacques, mais j'aimerais savoir si la
décision qui a été prise sera définitive et si elle
pourra s'appliquer à d'autres lois. Est-ce que, par la suite, on pourra
discuter sur le rapport pendant tout le temps que le règlement le
permettra, même s'il n'y a pas eu d'amendement d'apporté aux
différents articles de la loi?
Je pense, M. le Président, que nous nous étions toujours
limités à discuter des amendements qui étaient
apportés par différents partis politiques et il y a une
disposition, dans le règlement, qui veut qu'il y ait une réunion
des leaders et qu'on informe, en quelque sorte, pour qu'il y ait un certain
partage du temps.
J'aimerais, M. le Président, que si on procède d'une
façon devant l'étude de ce projet de loi et devant l'étude
de ce rapport, que les mêmes dispositions, la même
procédure, la même jurisprudence puissent s'appliquer à
d'autres projets de loi.
LE PRESIDENT: Je crois qu'en aucune façon nous n'avons
dérogé à l'usage et à la coutume qui a
été établie depuis l'adoption du nouveau
règlement.
Ce que le règlement dit, à l'article 123, c'est que le
jour du dépôt du rapport, il y a un délai jusqu'à 22
heures, je crois, pour les députés qui désirent apporter
des amendements aux articles ou au rapport. En somme, je pense bien que le
projet de loi fait partie du rapport.
Mon opinion, c'est qu'il y ait amendement ou non, il y a débat.
Quelle est la pertinence du débat à ce stade de la
procédure? Je crois que c'est sur le rapport lui-même, sur le
travail qui a été exécuté en commission et
également sur les articles du projet de loi. Etant donné que
c'est une motion de forme, c'est le droit de parole qui s'applique : 30 minutes
pour un chef de parti et un droit de parole de dix minutes par
député sur le rapport global.
Cela a toujours été la directive que j'ai donnée,
je crois.
M. ROY: Si je me réfère au sous-article 4 de l'article
123, on y lit: "Le président décide de la recevabilité des
amendements et les choisit pour en éviter la répétition.
Us sont ensuite ajoutés en annexe au rapport, suivant l'ordre
fixé par le président et le secrétaire en transmet sans
délai une copie à chacun des leaders parlementaires des partis
reconnus".
Au sous-article 5 de l'article 123, on dit: "Avant la prise en
considération du rapport, le président peut convoquer il
n'est pas obligé les leaders parlementaires des partis reconnus
pour les consulter sur l'organisation du débat et la mise aux voix des
amendements".
Il est toujours question des amendements, M. le Président. Et si
je me réfère aux discussions qui ont prévalu lorsqu'il a
été question de ce rapport, c'était toujours en fonction
des amendements qui pouvaient être apportés par les
différents partis politiques. Il n'en avait jamais été
question et je pense que c'est la première fois que nous discutons d'un
rapport comme tel alors qu'il n'y a pas d'amendement de proposé. Il n'y
a pas eu de précédent de créé à ce sujet
depuis que le nouveau règlement est adopté, à
l'Assemblée nationale.
LE PRESIDENT: Pour répondre à votre deuxième
intervention, on voit, au sous-article 4 que "Le président décide
de la recevabilité des amendements et les choisit pour en éviter
la répétition". C'est dans le cas où effectivement il y a
des amendements. Il peut y avoir quatre ou cinq amendements
présentés par des membres différents et qui peuvent, dans
l'étude qu'on en fait, porter sur le même sujet. C'est là
que le président intervient pour les grouper ou pour en éliminer
trois pour en garder un, au lieu d'avoir quatre amendements identiques au
rapport, qui viennent de quatre députés différents. C'est
en ce qui concerne le sous-article 4.
Actuellement, je n'ai pas eu à choisir ou à décider
de la recevabilité, car il n'y a pas d'amendement.
Nécessairement, je n'en ai pas transmis de copie au leader
parlementaire, n'en ayant pas.
Cinquièmement, il peut y avoir, à un certain moment, sur
des projets de loi très importants peut-être quarante ou cinquante
amendements. C'est arrivé, en l'occurrence, sur le projet de loi de la
division territoriale. Lorsqu'il y a une masse d'amendements, c'est là
que le président intervient pour organiser le débat dans un sens,
pour convenir avec les leaders parlementaires, s'il y a lieu, comment se
déroulera le débat, quels députés interviendront,
et dans quel ordre, et à quel moment le ministre désire
répondre à un bloc d'amendements, parce que le ministre peut
intervenir plus d'une fois dans le débat. Personnellement, tout me
parait assez clair. Je ne me rappelle pas, en dernière partie, s'il y a
déjà eu un débat sur un rapport où il n'y a pas eu
d'amendement. Je ne m'en souviens pas, mais je ne pense pas que cela
élimine le débat, de toute façon.
M. SAMSON: M. le Président, pour bien vous comprendre
parce qu'évidemment on veut le savoir pour l'avenir aussi nous
comprenons qu'aujourd'hui, sur cette question, il n'y a pas d'amendement de
déposé.
LE PRESIDENT: II n'y a pas d'amendement.
M. SAMSON: Cela veut dire que le débat que nous pourrions avoir
sur ce sujet donne le droit de parole à tous les membres de cette
Chambre, comme si c'était une motion ordinaire, une motion de fond.
LE PRESIDENT: C'est sur une motion de forme.
M. SAMSON: Une motion de forme.
LE PRESIDENT: Chaque député a droit à 10 minutes,
sauf ceux qui ont des droits de parole plus longs. Règle
générale, pour ceux qui ont des droits de parole d'une heure, ce
droit est réduit à une demi-heure. Pour les députés
qui normalement ont un droit de parole de 20 minutes il est réduit
à 10 minutes sur une motion de forme, sauf que, si le
député de Saint-Jacques parle au nom de son parti, il a droit
à une demi-heure.
M. SAMSON: Cela voudrait dire...
M. LEVESQUE: Est-ce qu'on peut changer de représentant du parti
dans un même projet de loi?
LE PRESIDENT: On en a discuté hier. Sans établir de
précédent, je sais qu'hier on en a discuté avec les
officiers de la Chambre. C'est une étape différente, mais je ne
voudrais pas établir un précédent.
M. BURNS: M. le Président, il est arrivé dans le
passé que vous ayez accepté que le représentant du parti
en deuxième lecture ne soit pas le même en troisième
lecture. Je peux vous citer, entre autres, le projet de loi en matière
de travail où je parlais au nom du chef en deuxième lecture et je
me rappelle que l'ex-député de Gouin, M. Guy Joron, avait
parlé au nom du parti en troisième lecture. Je vous cite en
particulier le cas du projet de loi no 19, forçant le retour au travail
des employés de la fonction publique.
LE PRESIDENT: Je vais vérifier les exemples que vous mentionnez.
Voulez-vous en prendre note, s'il vous plaît?
M. SAMSON: Je m'excuse, peut-être que je n'ai pas compris
complètement le fond de votre pensée. Cela voudrait dire que tout
rapport qui nous est présenté, après une commission, peut
amener un débat, peut nous amener à faire des griefs et, ensuite,
qu'il y a la troisième lecture.
Autrement dit, ce sont deux débats à la suite de la
deuxième lecture qui sont possibles en vertu de la décision dont
vous nous faites part ce matin.
LE PRESIDENT: Ce sont deux étapes. La Chambre ici, lors de la
considération du rapport, homologue ou ratifie ou modifie ce qu'un
démembrement de l'Assemblée a fait, ce qui s'appelle une
commission. C'est dans le sens que la commission n'a pas un pouvoir terminal,
ça doit être homologué, ratifié par la Chambre
à l'étape de l'étude en commission, ce qui se fait
actuellement, et, après, en troisième lecture. L'honorable
député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. le Président, j'espère que ces innombrales
questions de règlement ne comptent pas sur le temps de parole que
j'avais. Il me reste quelque chose comme 25 minutes depuis hier soir. Dans les
cinq premières minutes de cette intervention hier soir, j'avais à
peine eu le temps d'exprimer à la Chambre la surprise que l'Opposition
officielle, et par là la population du Québec, peut certainement
avoir de voir ce gouvernement, au moment où nous revenons, après
avoir abandonné une motion privilégiée longtemps
débattue, sur les travaux réguliers de la Chambre, de voir le
leader du gouvernement préférer, parmi tous les projets de loi
qui sont au feuilleton, le plus contesté de tous, le plus
réprouvé de tous, le plus regretté de tous, le projet de
loi 8.
J'ai le droit de dire et je le signale immédiatement
à l'intention du député de Bonaventure qui pourrait
essayer de m'interrompre au cours de cette intervention comment je
trouve anormal et indécent que ce rapport de la commission sur lequel
nous discutons ait été appelé à ce moment-ci de nos
travaux. Cela peut être la première remarque...
M. LEVESQUE : J'invoque le privilège.
M. CHARRON: ... que j'ai à faire sur le rapport de cette
commission.
M. LEVESQUE: Question de privilège. LE PRESIDENT: Question de
privilège.
M. LEVESQUE: M. le Président, notre règlement
prévoit que le leader du gouvernement peut appeler les articles qu'il a
à l'ordre du jour dans l'ordre qu'il choisit de le faire. M. le
Président, il n'y a rien dans cet ordre du jour qui soit
illégitime, illégal, odieux, honteux ou quoi que ce soit. Il
s'agit là de législation qui sera "the law of the land" dans
quelques minutes ou dans quelques heures et je ne crois pas que ma conduite
ainsi qualifiée soit de nature à vous inciter à dire qu'il
s'agit là de quelque chose que l'on peut réprouver. Je ne crois
pas, autrement dit, M. le Président, que le choix que je fais des
articles à l'ordre du jour puisse permettre au député de
Saint-Jacques de m'en faire un reproche, ou de dire que je posais un geste que
l'on qualifie comme on vient de le faire. Il s'agit là d'un droit que
j'exerce d'autant plus que j'ai eu la précaution et la courtoisie
habituelle d'en discuter avec mon homologue, le leader parlementaire de
l'Opposition officielle. J'ai même offert au leader parlementaire de
l'Opposition officielle de déterminer avec moi l'ordre des
travaux pour aujourd'hui, je lui ai même offert cela. Non pas ah! oui, M.
le Président. Je l'ai invité à le faire et à
indiquer ses préférences afin justement...
M. LESSARD: Une question de privilège, M. le
Président.
M. LEVESQUE: ... d'accommoder l'Opposition. Je trouve absolument
injuste... Et pendant que je parle, le député, même s'il
est assis, ne devrait pas parler...
M. LESSARD: M. le Président, une question de
règlement.
M. LEVESQUE: M. le Président...
M. LESSARD: M. le Président, question de règlement.
LE PRESIDENT: Question de règlement.
M. LESSARD: Question de règlement, M. le Président.
LE PRESIDENT: Question de règlement.
M. LESSARD: Sur la question de règlement, M. le Président.
D'abord, la question de privilège est terminée. Deuxième
chose, M. le Président, on sait...
LE PRESIDENT: Non, pas nécessairement.
M. LEVESQUE: Est-ce qu'il...
M. LESSARD: Bien, en tout cas...
LE PRESIDENT: C'est moi qui dois décider.
M. LESSARD: D'accord, M. le Président, mais ce qu'il dit, ce
n'est plus une question de privilège.
LE PRESIDENT: Bon!
M. LESSARD: Deuxièmement, M. le Président, on
reconnaît qu'il appartient au leader du gouvernement de décider
quel projet de loi sera appelé puisque c'est lui qui a l'initiative
parlementaire. Mais, par exemple, ceci permet aussi au député de
Saint-Jacques de se scandaliser devant le fait d'apporter un projet de loi
comme celui-là, extrêmement contesté. Vas-y.
Le PRESIDENT: Allez-y.
M. CHARRON: M. le Président, je crois que la nervosité du
leader du gouvernement vient de me donner une raison. Je n'aurai pas besoin
d'insister plus longuement là-dessus. On est même prêt du
côté du gouvernement à faire des pirouettes de
règlement et de privilège, pour couvrir une fois de plus le geste
qui a été fait, lorsque le leader du gouvernement vous a
demandé d'appeler l'étude du rapport de la commission sur le
projet de loi no 8.
Parce qu'ils ont raison d'être nerveux. Qu'est ce rapport de la
commission qui a étudié le projet de loi no 8 qui est
préféré à tous les autres articles au feuilleton et
sur lequel j'ai à intervenir ce matin? Je vais vous le dire, M. le
Président. C'est d'abord un rapport illégal, depuis le
début jusqu'à la fin. Il est porteur d'une fausse
unanimité d'une commission qui n'a eu qu'un début de
séance et qui n'a jamais été achevée
régulièrement.
Qu'est-ce que ce rapport? C'est le consensus honteux d'une commission
parlementaire unanime, et j'aurai l'occasion de vous le décrire tout
à l'heure, sur un projet de loi dont l'objectif principal et le
résultat principal seront, s'il est adopté par la Chambre, de
gratifier une catégorie de privilégiés dans la
société québécoise, de gens qui déjà
du poste qu'ils occupent, peuvent bénéficier d'un revenu annuel
garanti de $28,000 par année. Et l'objet du projet de loi que nous avons
en discussion présentement et dont nous étudions le rapport des
travaux de la commission est d'ajouter à ce revenu $5,000 par
année, soit $100 d'augmentation par semaine, M. le Président.
Je dis que ce rapport est irrégulier, parce que la commission
parlementaire n'avait reçu ordre de siéger que le 14
décembre dernier et il y a eu effectivement séance de la
commission parlementaire de la justice le 14 décembre dernier, selon les
ordres de la Chambre, jusqu'à minuit le soir. Où en
étaient les travaux, M. le Président, lorsqu'à minuit on
s'est arrêté? La commission n'avait même pas pu s'entendre
sur l'adoption de l'article de ce projet de loi, au moment où le travail
régulier de la commission a pris fin sous le coup de minuit.
On avait eu toute la difficulté du monde, et le rapport n'en fait
aucunement mention, à trouver un rapporteur qui soit le minimum
qualifié, pour informer la Chambre sur le contenu qui s'annonçait
déjà comme houleux des discussions qui devaient avoir lieu au
sujet de ce projet de loi. Parce que vous le saviez, depuis la discussion en
deuxième lecture, l'Opposition officielle s'était engagée
ici, mandatée qu'elle était par le congrès de son parti,
à faire flèche de tout bois contre un projet de loi aussi
indécent qui nous arrive à un moment où le ministre des
Affaires sociales nous parle d'un rajustement des barèmes de l'aide
sociale, suite à une augmentation des allocations familiales.
Nous avions le droit ici et nous avions exprimé notre intention,
il n'était aucunement question que le rapport soit aussi unanime que
celui qui vous a été faussement présenté mardi
dernier, M. le Président. Nous avions l'intention de mener une bataille
ardue et c'est exactement pourquoi nous avons fait énormément
attention lors de l'étude de ce projet de loi en commission, à ce
que le rapporteur qui allait informer
la Chambre des travaux de la commission, le fasse le plus
fidèlement possible. Il ne fallait pas que la Chambre soit
informée d'une fausse unanimité.
Or, c'est le cas, M. le Président. Le rapport que le jeune
député de Portneuf a déposé sur la table de cette
Assemblée mardi dernier porte en lui une fausse unanimité.
Laissez-moi vous informer où en étaient nos travaux lorsque les
heures régulières de la commission se sont terminées. Nous
venions à peine de nous entendre, parce que là, nous avions
choisi le rapporteur dans les formes, c'est-à-dire suite à une
motion.
Nous avions voté sur une motion présentée par le
ministre de la Justice. Quand je dis nous, M. le Président, je parle au
nom de l'Opposition officielle, puisque je n'en étais pas membre en
règle et qu'on m'avait bien exclu des travaux de la commission, mais je
dis, le député de Maisonneuve et le chef de l'Opposition,
député de Sauvé venaient de voter contre une motion du
ministre de la Justice, présentant un député
d'arrière-ban comme rapporteur de cette commission et la motion avait
été adoptée.
C'est tout ce qu'il y a de régulier dans la commission. En fait,
ce que le rapporteur aurait dû vous rapporter, c'est que la commission
avait mis énormément de temps à s'entendre sur les
qualités de ce rapporteur, sur sa compétence et sur sa
qualification pour être celui qui devait informer la Chambre d'un
débat aussi houleux que celui-là.
Mais lorsque la séance a pris fin, sans qu'une motion
d'ajournement n'ait été adoptée et en attendant qu'un
ordre de la Chambre nous convoque à nouveau pour nous pencher sur
l'article 1 de ce projet de loi, qui n'avait fait en aucun temps l'objet de
discussions en commission, il y a eu dans l'intervalle, entre la fin des
travaux de la commission et ce rapport qu'a déposé un
député sur cette table mardi dernier, un caucus libéral
qui en a été l'équivalent et qui a justifié comme
étant une réunion régulière la réunion de la
commission parlementaire de la justice dont nous étudions maintenant ce
rapport.
Laissez-moi vous dire comment il faut informer la population d'un projet
de loi, aussi discuté et discutable, qui augmente de $5,000 par
année le salaire d'une catégorie de professionnels qui en font
$28,000. Cela, M. le Président, au moment où un journal de ce
matin nous informe, par exemple, de ces statistiques, que tous les
députés libéraux auront à expliquer dans leur
comté au cours de l'ajournement des Fêtes, voulant que parmi la
catégorie de population qui gagne $15,000 et plus au Québec
et il faut là-dessus compter les honorables membres de cette
Chambre parmi les gens qui gagnent $15,000 et plus par année au
Québec, dis-je, on ne compte que 15 p.c. de francophones. C'est la
situation actuelle de l'échelle des revenus et de l'échelle des
salaires.
Ce projet de loi qui vise à favoriser davantage des gens qui sont
déjà au sein des privilégiés, savez-vous comment il
a été adopté? Savez-vous quelles discussions
intelligentes, quelles questions sérieuses se sont posées les
membres de la commission parlementaire réunis illégalement samedi
dernier? Savez-vous combien les députés libéraux ont mis
de temps à s'interroger sur le bien-fondé d'une nouvelle
augmentation de salaire pour des gens aussi privilégiés que le
sont les juges dans l'échelle des revenus? Savez-vous quel a
été le degré de préoccupation sociale des
honorables membres de cette commission samedi dernier? Savez-vous pendant
combien de temps les députés libéraux se sont posé
des questions sur le mandat que leur avait donné leurs électeurs
d'augmenter de $5,000 le salaire des juges qui en faisaient déjà
$28,000? Savez-vous combien de questions se sont posées ces membres de
la commission quand il s'agissait d'ajouter $100 d'augmentation alors que ce
même parti l'avait refusé comme salaire à des
employés des secteurs public et parapublic en 1972? Savez-vous quel a
été le degré d'interrogation dans cette commission, alors
qu'en 1969, sur un projet de loi présenté par l'Union Nationale,
le ministre roseau du cabinet, le député d'Arcy-McGee, avait
exprimé ses craintes, le député de Fabre avait
exprimé ses craintes, mon excellent ami, le député de
Huntingdon, avait voté contre l'augmentation du salaire des juges,
disant qu'à $23,000, c'était déjà suffisant en
1969? Eh bien, toutes ces tergiversations qui avaient au moins marqué un
peu d'hésitation dans un caucus qui n'avait quand même pas le
poids, la taille et l'énormité de celui qui nous entoure,
savez-vous jusqu'à quel degré elles sont réapparues au
moment où ces honorables membres réunis illégalement
samedi dernier avaient à se pencher sur le projet de loi no 8?
Je vais vous dire, M. le Président, le degré de conscience
sociale, le degré d'interrogation qui existent chez les
députés libéraux en vous faisant, à la lettre,
lecture de la transcription du caucus libéral de samedi dernier, qui a
tenu lieu de commission parlementaire de la justice et dont un
député d'arrière-ban vous a fait rapport et sur lequel
j'interviens présentement.
Le président, qui est le vice-président de la Chambre, M.
Lamontagne, dit: L'honorable ministre de la Justice. Et, immédiatement,
le ministre de la Justice prend la parole et dit: M. le Président, je
propose qu'on passe à l'étude de tous les articles du bill,
projet de loi no 8, Loi modifiant de nouveau la Loi des tribunaux judiciaires.
C'est le titre, mais en fait pour les citoyens c'est loi augmentant le salaire
des juges qui est déjà de $28,0000 de $5,000 par
année. Et il dit du même souffle, le ministre de la Justice,
député d'Outremont: Article 1. Et la transcription nous dit: Des
voix ça c'est le coeur des "backbenchers" on appelle
ça des voix au journal des Débats. Des voix disent:
Adopté. Le président, M. Lamontagne: Article
2. Des voix: Adopté. Le président, M. Lamonta-gne: Article
3. Des voix: Adopté toujours les mêmes voix. Le
président, M. Lamontagne: Article 4. M. Choquette répond au nom
du caucus: Adopté. Il faut voir que l'article 4 a été
adopté par M. Choquette. Le président, M. Lamontagne, dit:
Article 5. Des voix disent: Adopté. Le président, M. Lamontagne,
appelle l'article 6. M. Choquette, lui, adopte l'article 6. Le
président, M. Lamontagne, dit: Article 7. C'est M. Choquette qui
l'adopte. Le président, M. Lamontagne, dit: Article 8. Cette fois, ce
sont les "backbenchers", des voix qui disent: Adopté. Le
président, M. Lamontagne, appelle l'article 9. M. Choquette adopte
l'article 9. Le président, M. Lamontagne, dit: Article 10, et c'est
encore M. Choquette qui dit: Adopté. Et immédiatement il
enchaîne: "Ceci termine l'essentiel des travaux de la commission. Je
voudrais féliciter ici les députés présents pour
leur sens de la coopération et pour leur esprit de collaboration dans
l'étude de ce projet de loi. Je suis sûr..."
J'admets, M. le Président, que les députés
d'arrière-ban réagissent, ce matin, parce que cette scène
vaut vraiment le prix du Grand Théâtre à la fin. Je crois
bien que le ministre des Affaires culturelles pourra désormais mettre
comme candidat sur sa liste de prix littéraires le député
d'Outremont.
Et il termine, M. le Président: "Je suis sûr que notre
rapporteur, le député de Portneuf, fera un rapport tout à
fait approprié quant aux..."
M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!
M. CHARRON: Oui.
M. HARDY: Je veux rectifier. S'il y avait un prix à créer
dans le sens que le député de Saint-Jacques vient de le dire, ce
serait le prix du courage politique.
M. CHARRON: M. le Président, après avoir entendu le
"backbencher" de Terrebonne, je reviens. "Je suis sûr, disait le
député d'Outremont, que notre rapporteur, le député
de Portneuf, fera un rapport tout à fait approprié quant aux
travaux de la commission. M. le Président, est-ce qu'il faut faire une
motion quelconque. Disait-il, faisant encore preuve de son ignorance crasse du
règlement, après avoir manipulé le président de la
commission, tout au long des travaux. "Est-ce qu'il faut maintenant faire une
motion quelconque pour proposer que vous fassiez rapport à la
commission"? Le président a dit: "Oui". Alors le ministre a dit: "Je
fais une telle motion, M. le Président. Est-elle adopté"? Des
voix: "Adopté".
Dans ce caucus libéral, c'est ça le degré de
conscience sociale, c'est ça le degré d'interrogations que se
sont posées les députés libéraux, lorsqu'il
s'agissait d'augmenter le salaire des juges de $5,000 par année. Mais
vous, M. le Président, sans en faire partie, vous êtes quand
même au courant de ce qui s'est passé dans ce même caucus
libéral, où on a discuté, où on a
épluché une réforme aussi importante que celle qui
concerne 80 p.c. des Québécois, celle des locataires, et que nous
a présentée le ministre de la Justice. Dans les rapports sur ces
projets de loi, ne trouvez-vous pas, M. le Président, qu'il existe une
indécente différence entre les deux? Avez-vous vu comment ce
parti est ridiculement unanime, lorsqu'il s'agit de protéger des
privilégiés? Avez-vous vu comment ce parti est grotesque et
ridicule, lorsqu'il s'agit de favoriser des gens qui l'ont déjà
été par ce régime, de récompenser les gens qui,
dans notre échelle sociale, se trouvent déjà parmi la
catégorie qui bénéficie le plus de facilités.
Mais avez-vous vu, lorsqu'il s'agit de penser à la
majorité des Québécois, qui, aujourd'hui, j'en suis
convaincu, sont derrière l'Opposition officielle contre un projet de loi
aussi dégoûtant, présenté quatre jours avant
Noël, comment disparaît automatiquement cette unanimité
lorsqu'il s'agit de protéger l'ensemble des Québécois et
comment, à l'intérieur d'un aussi grotesque caucus, les
divisions, les tiraillements commencent à apparaître et comment on
réussit, automatiquement, à faire diviser et à faire
reculer le ministre de la Justice sur des projets de réforme?
C'est cela le rapport que nous avons à étudier ce matin.
Cette commission, à cause de l'absence de l'Opposition officielle lors
d'un caucus libéral il n'y a aucune raison pour que nous
assistions à ces caucus qui vous fait rapport de travaux qui sont
disproportionnés et indécents, il n'y a pas un électeur, y
compris, je dirais, un électeur libéral du comté de
Saint-Jacques, de ceux qui restent du Parti libéral dans le comté
de Saint-Jacques, qui accepterait qu'un projet de loi aussi
débattable... Tenons-nous en là. Vous admettrez avec moi qu'un
projet de loi, qui arrive à une époque aussi difficile de
l'année, pour augmenter de $100 par semaine le salaire des consommateurs
québécois qui en font déjà $28,000 et qui sont
ainsi déjà fort bien équipés pour faire face
à la hausse du coût de la vie... Même un électeur
libéral le plus réactionnaire s'interrogerait sur l'utilisation
et l'utilité de son vote du 29 octobre dernier lorsqu'il verrait que les
élus, qu'il a envoyés nombreux au Parlement pour appuyer la
politique d'un gouvernement, ont eu autant de conscience sociale, ont eu autant
de degré de préoccupation que cette scène ridicule qui
tient en deux feuillets des travaux de la commission et dont je vous ai fait
lecture maintenant.
Je suis convaincu, au moment où je vous parle, que je ne parle
pas seulement au nom des 52 p.c. de la population de Saint-Jacques qui
m'ont appuyé et qui ont appuyé le Parti
québécois et qui ont appuyé l'Opposition que j'allais
faire à ce projet de loi. Je l'ai défendu sur toutes les tribunes
politiques dans le comté de Saint-Jacques au cours de la campagne
électorale, parce que je représente ici également des
électeurs libéraux du comté de Saint-Jacques, parce que je
suis convaincu que tous ces gens, chez nous, dont le revenu minimum annuel
n'atteint même pas $4,000 en moyenne, ne sauraient aucunement comprendre,
ce matin, comment il se fait qu'un projet de loi, qui, au minimum, était
à tout le moins discutable et où devrait exister un minimum de
conscience sociale chez des gens qui venaient d'être élus et
auraient voulu au moins demander au ministre de la Justice, sans
nécessairement être à l'encontre du projet de loi, comme
l'était l'Opposition officielle, mais un minimum de décence
sociale aurait fait qu'au moins un des douze "backbenchers", qui se trouvaient
à cette commission, aurait pu dire au ministre de la Justice:
Croyez-vous vraiment, dans tout le respect que j'ai pour vous et pour le parti
auquel j'appartiens c'est leur droit d'appartenir à ce
parti qu'il est vraiment important, à cette époque de
l'année, parmi les priorités que le gouvernement a devant lui,
d'augmenter de $5,000 par année le salaire de gens qui en font
déjà $28,000? Peut-être que le ministre de la Justice
l'aurait convaincu. Peut-être que le député aurait
été alors convaincu. Mais il n'a même pas posé une
question. "Adopté", qu'on disait à chaque fois. "Adopté".
Est-ce que tout le monde, ici, est convaincu que tous les électeurs
libéraux favorisent l'augmentation de salaire des juges? Est-ce que tout
le monde a cette conviction? Si tel est le cas, c'est une ignorance crasse de
ce que la politique réserve au Québec.
C'est une ignorance intolérable et un mépris des citoyens
québécois, parce que je suis convaincu qu'il ne se trouve plus,
dans cette majorité, hélas, M. le Président, un seul homme
qui ait un minimum de préoccupation, comme le roseau du cabinet en a au
moins eu en 1969. Au sein d'une aussi grosse députation, il ne s'est pas
trouvé, dans le caucus, un seul député sur 101 pour
demander au ministre de la Justice: Croyez-vous? Non! Adopté! Des voix:
Adopté! Des voix: Adopté! C'est comme cela, M. le
Président, que ce rapport vous est parvenu. Aucune discussion. Aucun
député libéral n'a posé la question au ministre de
la Justice: M. le ministre, n'est-il pas vrai que, parmi tous les juges de
juridiction provinciale, dans le Canada, les nôtres sont
déjà les plus payés? M. le Président, aucune de ces
questions n'a été posée aux travaux de la commission.
C'est pourquoi je vous dis, comme mes collègues auront l'occasion
de vous le dire, que nous ne devons pas accepter le rapport d'une commission
comme celle-là. Merci M. le Président.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, le discours du
député de Saint-Jacques, vous voyez jusqu'à quel point il
nous éclaire sur la question que pose ce projet de loi et jusqu'à
quel point il serait utile d'entretenir un débat sur les questions de
fond qui justifient le projet de loi et l'augmentation proposée.
M. le Président, depuis une demi-heure que le
député de Saint-Jacques parle, tout ce que nous avons entendu de
lui, ce sont des injures à l'adresse des députés
libéraux qui siégeaient à cette commission parlementaire,
c'est une attaque incessante qui se résume à faire état de
cette augmentation de salaire comme si elle était scandaleuse,
indéfendable. En fait, M. le Président, son intervention ne
s'appuie sur aucune espèce d'argumentation concrète et
réelle.
Cependant, M. le Président, je n'ai pas l'intention de suivre le
député de Saint-Jacques sur le terrain qu'il a choisi ce matin,
parce qu'en fait le vide de sa pensée se cache derrière un
déluge de paroles et de mots. Je n'ai pas l'intention de prendre le
débat sur ce ton. Je crois que les deux jours de débat que nous
avons eus sur la motion faite par le Parti québécois à
l'adresse du député de Roberval devraient quand même avoir
permis aux députés du Parti québécois de
s'être défrustrés. C'est la raison pour laquelle je pense
qu'il est temps que l'on délaisse le ton de la polémique, de
l'attaque et des injures pour, peut-être, prendre certains aspects
réels qui justifient la proposition gouvernementale.
M. le Président, étant donné que j'ai
exposé, en d'autres circonstances, à cette Chambre, à
savoir au mois de juillet 1973, lors de la présentation du même
projet de loi, tous les arguments statistiques, tous les arguments de fait,
tous les principes en cause à l'occasion de la présentation d'un
tel projet de loi, je n'ai pas cru nécessaire, au moment où je
suis revenu en deuxième lecture, lors de la présentation du
même projet de loi à la session actuelle, de revenir dans le
moindre détail sur toute la justification que j'avais de
présenter le projet de loi.
Cependant, j'ai quand même résumé l'ensemble de
l'argumentation que j'avais faite précédemment, en juillet. J'ai
exposé les grands principes. Les députés libéraux,
qui sont des gens intelligents, sans préjugés, et qui ne partent
pas d'un point de vue démagogique lorsque le ministre de la Justice
propose une augmentation de salaire aux juges, se sont rendus à mon
argumentation et ils ont vu clair, parce qu'ils voulaient voir clair. Ils
n'étaient pas, comme le député de Saint-Jacques,
obnubilés par le problème d'une augmentation à
l'égard d'une catégorie limitée d'individus.
Us ont cru que le temps était venu de faire justice aux juges
même si ceux-ci n'ont que peu d'appui, en fait, dans l'opinion publique,
même si ceux-ci ne peuvent pas se réclamer de groupes
de pression considérables, même si ceux-ci ne peuvent que
difficilement chercher des appuis dans la presse. C'est la raison pour laquelle
la députation libérale a agi en toute objectivité, et se
situant au-delà des passions et des conflits de classe et se situant
au-delà de ces raisonnements dont nous entretient le Parti
québécois et en particulier le député de
Saint-Jacques, ces raisonnements qui partent de comparaisons mesquines et
basses entre des salaires qui sont payés à des gens qui n'ont pas
les mêmes fonctions que celles des juges.
Donc, M. le Président, ceci étant dit, je voudrais quand
même en profiter ce matin pour répondre à une comparaison
qui est faite dans un communiqué émis par le Parti
québécois et qui a été remis à la presse il
y a quelques jours. Je me réfère en particulier à la page
h) de ce communiqué où l'on lit ceci: Dépenses
fédérales et provinciales pour le salaire des juges en 1973. Dans
cette page, on fait la comparaison entre le coût des salaires des juges
en Ontario et au Québec en cumulant les budgets fédéraux
et provinciaux. Alors, dans le tableau produit par le Parti
québécois, je lis qu'en Ontario les dépenses
fédérales pour les juges seraient de $4,353,000, et les
dépenses provinciales pour les juges de $500,000, pour former un total
de $4,853,000. Dans la colonne "Québec" je lis que les dépenses
fédérales pour les juges seraient de $4,108,000, et les
dépenses provinciales pour les juges, de $5,600,000, pour un total de
$9,708,000. Par conséquent, le tableau cherche à illustrer en
quoi le salaire des juges au Québec représenterait des montants
beaucoup plus considérables, donc un poids fiscal beaucoup plus
important pour les citoyens québécois.
De là, on continue et on dit, par exemple, que la population de
l'Ontario est de 7,703,106 habitants, celle du Québec de 6,027,764 et on
dit: Dépenses per capita pour les salaires des juges, en Ontario $0.63
per capita et au Québec $1.61 per capita. Alors, voilà la
comparaison que le Parti québécois veut établir entre les
coûts des salaires de juges au Québec et en Ontario.
Tout d'abord, M. le Président, je voudrais signaler que nous
avons étudié la question du nombre de juges que nous avons au
Québec comparativement au nombre de juges que nous avons en Ontario. La
comparaison n'est pas nécessairement aisée à faire parce
que le système judiciaire est un peu différent au Québec
et en Ontario. Mais, je vais donner les chiffres suivants qui permettent quand
même de faire une comparaison. Au Québec, nous avons à la
cour d'Appel, c'est-à-dire le tribunal suprême au niveau
provincial, 15 juges; nous avons à la cour Supérieure 93 juges;
et nous avons à la cour Provinciale, agissant comme juges et non pas
comme présidents ou membres de commissions, 104 juges, pour un total de
212 juges administrant la justice civile, criminelle, pénale. Donc 212
juges.
Evidemment, je ne dis pas, M. le Président, qu'il n'y a pas, en
plus de ces 212 juges, une trentaine d'autres juges qui sont présidents
qui de la Commission de police, qui de la Commission de contrôle des
permis d'alcool et de diverses autres commissions. Mais je ne compte pas les
salaires de ces juges-là étant donné que ces
juges-là font plutôt un travail administratif ou quasi judiciaire
et qu'en Ontario, il n'y a pas de tels postes de juge. Ceci ne veut pas dire
que je ne me rallie pas à l'idée de créer une magistrature
administrative justement pour que ces juges, soit de la cour Provinciale ou des
Sessions de la paix soient éventuellement membres d'une magistrature
administrative, mais je pense que lorsque l'on fait la comparaison entre le
Québec et l'Ontario au point de vue de l'administration de la justice,
on doit écarter les gens qui occupent ces postes dans des commissions
administratives ou quasi judiciaires parce que leurs équivalents, qui
existent en Ontario, ne sont pas compris dans les chiffres cités par le
Parti québécois puisqu'ils n'ont pas le titre de juge.
M. LESSARD: Question de règlement, M. le Président. Pour
vous démontrer combien ça peut intéresser les
libéraux, la question du salaire des juges, je dois vous dire que nous
n'avons pas quorum.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice.
M. CHOQUETTE: M. le Président, j'établissais donc le
nombre de juges actifs au Québec au chiffre de 212. Je regarde
maintenant les chiffres du côté de l'Ontario; à la cour
d'Appel, il y a dix juges; dans la "High Court", il y a 33 juges; dans les
"County Courts", il y a 105 juges et dans les "Provincial Courts", il y a 150
juges. Evidemment, M. le Président, il ne faut pas comparer d'une
façon absolue les deux systèmes judiciaires parce qu'ils sont un
peu différents. Evidemment, la cour Supérieure au Québec
se rapproche plus de la "High Court" si on doit la comparer à la
juridiction d'une cour ontarienne. Par contre, nos juges de la cour Provinciale
se rapprochent en large partie des juges des "County Courts", les 105 juges, et
peut-être en partie aussi des "Provincial Court Judges" qui sont au
nombre de...
M. MORIN: Est-ce que le ministre de la Justice, M. le Président,
me permettrait une question?
M. CHOQUETTE: Non, non, là, je ne permets pas de questions. Vous
me les poserez à la fin de mon exposé, ça me fera plaisir
d'y répondre.
M. MORIN: C'est parce que c'est fort intéressant, ça
m'intéresserait de bien comprendre les chiffres.
M. CHOQUETTE: A la fin de mon cours, vous pourrez me poser des
questions.
M. le Président, je répète donc les chiffres que je
donnais. En Appel, en Ontario, dix juges; "High Court", 33 juges; "County
Courts", 105 juges; "Provincial Courts", 150 juges; pour un total de 298 juges
en Ontario, comparativement à 212 au Québec. Dans le tableau
publié par le Parti québécois, on a fait une erreur
monumentale, on a oublié de calculer le coût des 150 "Provincial
Court Judges"; les 150 juges, ils les ont oubliés tout simplement. Or,
ces 150 personnes représentent un coût, en fin d'année
dernière, je pense, ou cette année, de $4,201,300. Bon!
$4,201,300. Tout ce que le Parti québécois a pris en
considération, c'est les "allowances" que la province d'Ontario paie aux
juges de la "Supreme Court" et à d'autres juges des "County Courts",
parce que l'on sait que le système de paiement de salaire est
différent en Ontario de celui du Québec. Ici, au Québec,
le fédéral paie intégralement les salaires des juges de la
cour d'Appel et de la cour Supérieure et nous, nous payons du
provincial intégralement les salaires des juges de nos cours
Provinciales. Tandis qu'en Ontario, le fédéral paie une partie
des salaires des juges de la "High Court" et des "County Courts" et le
provincial paie une "allowance", un montant extra qui représente,
d'après les "Public Accounts" de la province d'Ontario que j'ai ici,
environ $500,000 qui viennent s'ajouter à ce que le
fédéral paie.
Par conséquent, quand, dans le tableau du Parti
québécois, on dit pour l'Ontario : dépenses provinciales,
$500,000, tout ce que ça représente, ce sont les "allowances"
extra. Mais on a oublié les 150 juges provinciaux qui
représentent un coût de $4,201,300, ce qui change... Mais je ne
dirais pas qu'ils mentent délibérément, M. le
Président, je voudrais que le débat retombe, je voudrais
aujourd'hui faire un effort pour faciliter les travaux de la Chambre et ne pas
attaquer nos adversaires quand je n'ai pas la preuve de leur mauvaise foi.
Je dis donc, M. le Président, qu'ils ont fait un oubli, mais
c'est un oubli grave lorsqu'on émet dans le public et qu'on combat un
projet de loi à partir d'arguments, à partir de faits aussi
tronqués que cela. On a oublié un montant de $4,201,300. Pour
montrer jusqu'à quel point je suis parfaitement de bonne foi et ouvert
dans cette discussion-là, ces chiffres me proviennent d'un M. Russell,
du Department of Justice de l'Ontario. Si les recherchistes du Parti
québécois veulent lui téléphoner, libre à
eux. Qu'on prenne le téléphone immédiatement pour
vérifier si le ministre de la Justice dit la vérité.
Par conséquent, quand on ajoute les $4,201,300 qui manquent, en
fait, on arrive à des coûts à peu près similaires ou
comparables entre les salaires totaux des juges au Québec et les
salaires totaux des juges en Ontario.
M. le Président, maintenant, je voudrais faire une autre
comparaison, parce que je ne l'ai pas soulevée dans mon discours de
deuxième lectu- re. D faut comparer, quand même, les salaires de
nos juges du Québec avec les salaires des juges ayant une juridiction
semblable ou équivalente ailleurs.
Je soumets, M. le Président, qu'une comparaison qui peut
être faite avec avantage, c'est de comparer la fonction des juges de nos
cours provinciales à celle des juges des "County Courts" ontariens. Or,
dans les "County Courts" ontariens, les juges, à l'heure actuelle,
gagnent un salaire de $33,500. En fait, le projet de loi que j'ai l'honneur de
présenter ferait simplement que nos juges auraient un salaire de
$33,000, ce qui est de $500 inférieur au salaire des juges des "County
Courts" en Ontario.
Evidemment, j'admets que, dans ce domaine-là, toute comparaison
est boiteuse, à cause des différences de compétence et de
juridiction, à cause du fait que la juridiction des juges dans les
"County Courts" peut être plus étendue à certains points de
vue, mais moins étendue à d'autres points de vue. C'est la raison
pour laquelle toute comparaison nécessairement n'est pas absolue dans ce
domaine-là. Mais, si on devait chercher une catégorie de juges
auxquels on pourrait comparer nos propres juges provinciaux, je dirais que les
"County Courts Judges" seraient sûrement une catégorie que l'on
peut comparer avec avantage.
D'autre part, M. le Président, pour les "Provincial Court Judges"
en Ontario, qui ont une juridiction en large partie inférieure à
celle de nos propres juges de nos cours Provinciales, les salaires
s'établissent à environ $28,000 à $30,000, d'après
ce que l'on me dit. Mais la juridiction est nettement inférieure dans
les "Provincial Courts", parce que les "County Court Judges" jouent un
rôle très important en Ontario.
Alors, M. le Président, à tout considérer, je pense
que, lorsqu'il soumet un salaire de $33,000, qui, comme je l'ai expliqué
en deuxième lecture est de $5,000 inférieur à celui de nos
juges de la cour Supérieure ce qui est la différence
historique établie entre les juges de la cour Supérieure et les
juges des cours Provinciales, ici au Québec le gouvernement
actuel, en fait, suit la tradition. Il se fonde sur des façons d'agir
qui se sont établies historiquement sur une période de
peut-être un quart de siècle, sinon plus. Il se situe dans la
bonne voie au point de vue d'une comparaison avec les salaires des juges
payés en Ontario.
Le ministre de la Justice est obligé de tenir compte des salaires
que gagnent les avocats qu'il peut recruter pour sa magistrature. Ce ne sont
pas les pires avocats ou les moins compétents que l'on veuille que le
gouvernement désigne à la magistrature. On a voulu justement, M.
le Président, depuis des années, élever la qualité
de la magistrature au Québec. S'il y a des milieux où on a fait
cette revendication, est-ce que ce n'est pas souvent dans les milieux
représentés par le Parti québécois qu'on est
tellement exigeant pour les magistrats lorsqu'ils sont sur
le banc, lorsqu'ils sont obligés de faire face à des
difficultés et à trancher des décisions? C'est
peut-être dans ces milieux intellectuels qu'on est le plus critique
à l'égard des magistrats.
Mais il faut encore donner les moyens au gouvernement de recruter la
qualité de juges, justement pour éviter ces critiques. Alors, moi
je le sais, je connais les problèmes concrets du recrutement, ce que ne
connaissent pas le député de Maisonneuve et le
député de Sauvé.
Je les connais, parce que c'est moi qui prends l'appareil pour
téléphoner à un avocat et lui offrir: Veux-tu être
nommé à telle ou telle cour? Comment voulez-vous que cela se
passe?
M. le Président, il ne faut quand même pas être faux
jeton, hypocrite et sépulcre blanchi au point de venir nous faire des
observations de ce genre. Il est évident, avant de
téléphoner à un avocat, que je regarde d'abord dans la
région où sont les avocats disponibles et combien ils ont
d'années de pratique. Il se fait que j'ai pratiqué le droit
pendant 20 ou 25 ans. Je connais pas mal d'avocats dans la province de
Québec. J'ai plaidé dans toutes les régions et quand on me
parle d'un tel, à tel endroit, j'ai souvent son pedigree. Je n'ai pas
besoin d'avoir des dessins pour savoir de qui il s'agit et quel est son
calibre. Un instant. Je dis que j'ai la plupart du temps une assez bonne
connaissance du Barreau. Si, par exemple, je regarde la liste, là je
vois des candidats qui ont l'air d'être valables. Je réfère
évidemment au Barreau à un certain moment quand je pense à
mon choix et le Barreau me dit : Oui ce candidat serait acceptable, mais il y a
tel autre candidat qui est très valable, ou autrement. Je discute et je
prends ma décision. Mais quand je suis mûr et que je prends le
téléphone, si j'appelle un avocat qui gagne $45,000, $50,000 ou
$60,000 par année et que je lui offre un salaire de $28,000 pour venir
remplir un poste à la cour Provinciale, est-ce que je vais être
capable de recruter cet avocat, ce magistrat, ce juge dont on exige tellement
dans les milieux représentés par le Parti
québécois?
C'est la quadrature du cercle, si on veut enfermer la magistrature dans
une échelle de salaires qui ne correspond pas à la
réalité. Et le député de Maisonneuve qui a de
l'expérience en relations de travail, qui a de l'expérience,
parce qu'il a représenté des syndicats à de nombreuses
occasions, sait qu'il n'y a rien de plus déterminant dans ce domaine que
le marché. Vous pouvez élaborer toutes les théories du
monde, si dnas une société vous ne pouvez pas donner à vos
employés des salaires qui se comparent avantageusement aux emplois
qu'ils peuvent obtenir ailleurs, vous ne retiendrez pas ces bons
employés que vous voulez embaucher. C'est déterminant. C'est une
loi économique. Que voulez-vous que j'y fasse? Et c'est moi qui les vis
les problèmes du recrutement de la magistrature au Québec et je
vous dis, aujourd'hui, qu'il faut être en mesure de payer le salaire
proposé par le gouvernement si nous voulons recruter des magistrats qui
aient la qualité qu'on est en droit d'exiger d'eux.
Et je vais même rendre mon argument un peu plus concret pour le
bénéfice du député de Maisonneuve. Je faisais
allusion à l'expérience du député de Maisonneuve en
relations de travail. Il sait que la création du tribunal du travail a
été un progrès par rapport à l'ancienne commission
des relations ouvrières. Je crois que c'est admis autant du
côté patronal qu'ouvrier. Or et ceci est à l'actif
de l'ancien gouvernement, je le dis sans hésitation quand on a
créé le tribunal du travail, on a dit: II faut aller chercher des
avocats compétents pour ce tribunal du travail. Et je dois dire que
l'ancien gouvernement a fait un excellent recrutement.
Il est bien connu que l'ancien ministre du Travail, qui avait à
coeur de faire cette réforme du tribunal du travail, n'y a pas
été avec mesquinerie et avec étroitesse lorsqu'il a dit
à ces nouveaux juges: Ecoutez, vous êtes parmi les meilleurs
avocats en relations de travail. Nous voulons vous avoir. Nous allons vous
payer des salaires convenables. Et on m'a même dit je ne l'affirme
pas sous serment, je n'étais pas présent qu'il avait dit:
Ecoutez, le principe de la parité avec la cour Supérieure est
établi. Et c'est ainsi qu'il a recruté des juges qui ont
reçu l'approbation depuis qu'ils sont sur le banc pour la
majorité d'entre eux autant de la partie patronale que des
syndicats.
Et j'ai peu de plaintes, je dois l'avouer, autant de la FTQ, de la CSN,
de la CSD et de tous les organismes syndicaux que des organismes patronaux sur
le travail de ces magistrats au tribunal du travail. On a voulu avoir une bonne
magistrature dans un secteur.
Je ne dis pas que le même raisonnement ne s'applique pas aux
autres parce qu'un effort a vraiment été fait, partout,
pour obtenir la qualité de magistrats qu'il nous fallait. Je donne
l'exemple du tribunal du travail, parce qu'il est de création
relativement récente. Je dis au Parti québécois: Vous
voulez nous aider à avoir la paix sociale, vous voulez nous aider pour
que, dans le domaine des relations de travail en particulier, la
société soit en mesure de rendre des décisions impartiales
pour les parties, autant patronales que syndicales? C'est ça que vous
voulez avec nous? Permettez-nous de payer des salaires convenables aux juges
qui vont occuper ces postes. C'est évident.
M. le Président, cela saute tellement aux yeux, cette obstruction
du Parti québécois, vraiment, que je me demande si elle ne vient
d'un parti pris au départ, qui, malheureusement, l'empêche
d'exercer pleinement son jugement. En effet, s'il occupait la même
position que nous, du gouvernement, si l'un des membres du Parti
québécois était ministre de la Justice, il serait
obligé moralement de présenter ce projet de loi, aujourd'hui.
C'est la raison pour laquelle, M. le Président, s'il avait nos
responsabilités de voir à ce que la société
fonctionne... Dieu sait si le pouvoir judiciaire
j'hésite, je n'emploie pas beaucoup le mot "pouvoir", je
n'aime pas beaucoup ce mot si la fonction judiciaire est importante dans
une société! C'est l'assise de la paix sociale, c'est la base de
la confiance des citoyens dans la société. Est-ce qu'on va se
mettre à lésiner ou mesquiner sur une institution aussi
fondamentale et sur le salaire de ceux qui la servent? Je dis non, M. le
Président, nous ne pouvons pas faire ça. Le gouvernement doit
faire adopter ce projet de loi. C'est simplement faire justice aux magistrats
et aux juges que je considère le mériter, à l'heure
actuelle.
J'ajouterais quelque chose. J'ai plus d'âge que les honorables
députés d'en face. J'ai commencé à exercer ma
profession vers 1951 à Montréal et je vous dirai qu'à
cette époque, la cour Provinciale je ne veux pas décrier
le type de cour que c'était à cette époque, en 1951
faisait pitié, faisait pitié au point de vue de la
qualité. Il y avait sans doute, parmi les magistrats qui existaient,
dans ce temps, de bons et sincères juges. Je ne dis pas le contraire,
mais disons que la qualité n'y était pas. Ce que le Québec
a accompli, depuis 30 ans, à travers différents régimes
politiques ce n'est pas strictement le Parti libéral qui l'a fait
ou l'Union nationale fait que la qualité des juges, dans les
cours Provinciales, n'a cessé d'augmenter.
Ceci est particulièrement vrai, comme je l'ai dit tout à
l'heure, au tribunal du travail. Ceci est également vrai à la
cour Provinciale où les nominations récentes parmi la
magistrature, au cours des dix ou quinze dernières années, ont
été triés sur le volet, et on a des avocats
respectés. A la cour des Sessions de la Paix, c'est la même chose.
J'entends fort peu de critiques de la part du Barreau, sur les nominations que
j'ai faites et, depuis quatre ans que je suis ministre de la Justice, je
commence à en avoir un certain nombre à mon actif. Je peux dire
franchement, quand je rencontre des avocats et je ne dis pas ça
pour faire mon éloge que j'ai maintenu la qualité, que
j'ai augmenté la qualité de la magistrature. Aujourd'hui, est-ce
que je vais aller détruire tout ça, par une espèce de vote
de non-confiance â l'égard de cette magistrature en ne lui donnant
pas la justice qu'elle mérite sur le plan du traitement? Je ne le ferai
pas. C'est mon devoir de présenter ce projet de loi.
Il ne fait pas preuve de générosité excessive. Il
ne déborde pas d'un faux sentiment de reconnaissance à
l'égard de la magistrature ou d'une espèce de désir
d'être excessif dans l'octroi de traitements ou de salaires. Au
contraire, M. le Président, je crois qu'il est plutôt
pondéré. Mais, malgré tout, il manifeste de ma part ma
reconnaissance pour le travail que font les juges pour la justice au
Québec et pour le travail qu'ils ont fait récemment.
Je donnerai un exemple auquel le député de Maisonneuve va
être particulièrement sensible, parce qu'il a fait allusion, hier
soir, au cours de son intervention, à la collaboration qu'il m'avait
donnée à l'occasion de l'adoption de certaines lois, et je lui en
sais gré, M. le Président. Justement, si on parle de la loi de
l'aide juridique, celle-ci augmente le travail des juges, parce qu'aujourd'hui
tout devient sujet de contestation devant nos tribunaux. Tout est
contesté je veux dire, de la bonne façon tout est
sujet à litige.
Naturellement, l'augmentation du travail judiciaire s'accroît.
J'ajouterais, dans la même veine, la Loi favorisant l'accès
à la justice, qui a amené de 70,000 à 80,000 causes au
cours de la première année d'activité de cette cour,
où les cas se sont régies, en moyenne, avec un délai de 43
jours, ce qui est un record. Est-ce que l'on pense que ces causes se jugent
sans juge? Mais les juges sont obligés de faire le circuit et d'aller
dans tous les endroits qu'on a établis et d'entendre les causes.
Evidemment, c'est leur devoir, ils le font, ils l'ont accepté. Mais il
faut quand même admettre que, si le système fonctionne, c'est
grâce à la collaboration des juges.
Quand, justement, j'ai fait appel au juge Cliche, qui est devenu le juge
en chef adjoint de la cour Provinciale et qui s'occupe du district de
Québec, je voulais amener une figure qui pourrait être un peu
symbolique de ce nouveau mouvement, de cette démocratisation de la
justice. Le juge Cliche m'a donné, avec ses juges et les autres juges du
Québec, une collaboration extraordinaire dans la réalisation de
ce projet de loi.
Alors, je dis à nos collègues: Ils veulent la paix
sociale? Sans doute, ils ont le droit d'avoir des idées
différentes de nous sur la façon de la réaliser. Il peut y
avoir des divergences sur la politique qui devrait être mise en place par
le gouvernement. Mais je suis sûr qu'ils veulent que les institutions
essentielles soient sauvegardées, soient bien assises, que la
magistrature soit respectée. Eh bien, prenons les moyens et offrons
à nos magistrats des salaires convenables et décents.
Alors, je conclus ces observations, qui ont peut-être
été un peu longues mais, étant donné que nous
n'avions pas peut-être pu aborder certains aspects du projet de loi en
toute sérénité, j'ai cru que c'était une bonne
occasion, au moment du dépôt de ce rapport, de faire ces
observations. Merci.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, on nous demande, ce matin, d'adopter
le rapport de la commission de la justice qui a étudié le projet
de loi no 8. Je l'ai devant moi ce rapport. Un projet de loi de cette
nature-ci, il me semble, aurait pu commander un rapport plus important que
celui-ci. Je ne vous le citerai pas au long mais je
vais vous dire, tout simplement au départ, que ce rapport
contient six paragraphes. Cela m'a frappé quand j'ai vu cela: Une page,
8 1/2 x 14. Au début, dans le premier paragraphe, on nous dit que c'est
l'honorable député de Roberval qui a présidé. Au
deuxième paragraphe, on nous dit qui sont les membres de cette
commission: Les députés Bienvenue, Boutin, Burns, Ciaccia,
Choquette, Desjardins, Harvey, Levesque, Morin, Pagé, Samson, Springate
et Sylvain. Cela est le deuxième paragraphe. Au troisième
paragraphe, on nous dit que la commission a tenu deux séances, soit les
14 et 15 décembre, et que le député de Portneuf a
été nommé rapporteur. Je n'ai pas besoin de revenir sur
ces faits. Nous les avons discutés longuement à l'occasion de la
motion que nous avons faite avant-hier réprouvant la conduite du
député de Roberval à ce sujet. Je passe au
quatrième paragraphe, encore une phrase: Au début de chacune des
séances, les changements parmi les membres de la commission furent
annoncés par le président. Je n'ai pas vu de substance encore
dans ce rapport. Ce sont des paragraphes préparatoires. C'est ça
le rapport qu'on nous demande d'adopter ce matin.
Le cinquième paragraphe: Les buts de ce projet de loi sont de
prévoir l'augmentation du traitement des juges des cours Provinciales.
Finalement, le sixième: La commission a adopté tous les articles
du projet de loi sans amendement et a ajourné ses travaux sine die.
C'est cela qu'on nous demande d'adopter ce matin et cela ne
reflète pas du tout, à mon avis, le fond d'une discussion
importante qui aurait pu avoir lieu à cette commission.
M. le Président, je ne reviendrai pas sur le fait de la
légalité ou de l'illégalité de l'ajournement qui a
eu lieu le 14 décembre. Je pense que cette Chambre s'est
prononcée sur cette légalité en rejetant, si vous voulez,
la motion que nous avons formulée hier. Je pense que cette Chambre a
bien compris que c'était le seul moyen pour nous d'en appeler de la
légalité de la séance qui a été tenue le 15
décembre au matin. Je n'ai pas l'intention d'y revenir.
Cependant, M. le Président, je profite de l'occasion qu'on
ait eu tort ou qu'on ait eu raison de ne pas être là le 15 au
matin, je le mets de côté, je ne le discute même pas
ce matin, de la considération de ce rapport, pour vous dire que ce
projet de loi, qui a été adopté en quelque 30 ou 40
secondes, mériterait une considération beaucoup plus importante
qu'il n'a eue.
Je ne reviendrai pas sur ce fait, M. le Président. Le
député de Saint-Jacques a été assez clair
là-dessus. Il vous a même lu la transcription qui a
rapporté l'appel des articles, les uns après les autres, à
la suite duquel on entendait: Adopté. J'ai été
moi-même étonné, M. le Président, de voir que
même aucun député libéral présent à
cette commission n'a pensé à poser des questions sur certains
articles. C'était leur droit. Ce n'est pas parce que le ministre de la
Justice proposait ce projet de loi et que le ministre de la Justice s'adonnait
à être du même parti que lui que le député
libéral présent à cette commission n'avait pas le droit de
poser des questions.
Cela m'a étonné, M. le Président. De sorte que je
vais terminer, tantôt je vous en avise tout de suite mon
intervention par une motion. Mais avant d'y arriver évidemment ce
sont les remarques que je viens de faire qui vont justifier ma motion
étant donné que vous avez permis au ministre de la Justice de
parler de statistiques, je pense que vous allez me laisser également
cette possibilité. Il y a une de ces statistiques qui n'a pas encore
été donnée dans le présent débat et que
j'aimerais bien soumettre à l'appréciation du ministre de la
Justice et de nos collègues libéraux avant qu'ils en viennent
à adopter ce rapport, qui est une étape de l'adoption du projet
de loi.
J'ai entendu le ministre de la Justice dire tantôt et cela
semble être la base de son argument que pour avoir des juges
compétents, il faut quand même que ces juges compétents
aient des salaires au moins semblables et aussi avantageux par rapport à
ce que gagne un avocat en pratique privée. Or, M. le Président,
il y a des statistiques qui valent bien la peine d'être examinées,
eu égard à la constance de la fonction, si vous voulez, ou au
maintien du salaire de la fonction du juge, une fois nommé,
jusqu'à l'âge de sa retraite. Je m'explique, M. le
Président.
Selon les statistiques fiscales, les groupes professionnels où on
puise, entre autres, chez les avocats, pour nommer des juges, ont un salaire
décroissant au fur et à mesure que leurs années
d'âge augmentent. Simplement pour vous en citer quelques-unes, M. le
Président, selon ces statistiques, en 1971 et je vais me
référer tout le temps à 1971, je pourrais vous parler de
1970, 1969, 1968 et 1967, je me bornerai tout simplement à 1971,
c'est-à-dire les dernières statistiques à ce sujet qui
sont disponibles les professionnels, de 45 à 49 ans avaient un
revenu moyen de $31,646 par année. Ceux de 50 à 54 ans, pour la
même année 1971, avaient un revenu de $31,105. On voit
déjà une diminution et c'est toujours pour la même
année. Pour ceux de 55 à 59 ans, cela descend à $29,756
par année.
M. HARDY: M. le Président, est-ce que le député de
Maisonneuve me permet une question?
M. BURNS: Certainement.
M. HARDY: Ne reconnaît-il pas justement, en fonction des
statistiques qu'il énumère, que, de plus en plus, on tend
à nommer des juges dans la force de l'âge, des juges plus jeunes,
justement pour améliorer la qualité de la magistrature?
Cette tendance précisément contredit la thèse qu'il
semble élaborer actuellement.
M. BURNS: Laissez-moi terminer mon raisonnement et, après cela,
vous pourrez me poser cette question à nouveau.
Je disais donc, M. le Président, que dans les âges de 55
à 59 ans, les professionnels canadiens ont un revenu moyen de $29,756.
De 60 à 64 ans, on voit une baisse extraordinaire de ce montant qui va
descendre, en 1971 toujours, à la somme de $25,547 par année. Ce
sont ceux de 60 ans à 64 ans.
M. LACROIX: Les revenus officiels ou officieux?
M. BURNS: C'est censé être officiel; c'est tiré des
statistiques fiscales.
M. LACROIX: II y en a peut-être un peu de cachés.
M. BURNS: Je l'ignore. Ce n'est pas censé.
M. LACROIX: Les avocats sont forts là-dessus.
M. BURNS: Est-ce que c'est le comptable qui parle ou si c'est celui qui
a fait déjà des rapports d'impôt?
M. le Président, c'est assez intéressant que l'on ait
cette espèce d'évolution des revenus des professionnels. Ceux de
65 à 69 ans ne vous inquiétez pas, je n'irai pas plus loin
reçoivent $22,929 par année, toujours selon ces
statistiques fiscales de 1971. Ce que je dis, M. le Président, c'est
qu'au fond il ne faut pas se leurrer, vous savez. Le ministre de la Justice
tente de nous faire un peu pleurer sur le salaire de ces pauvres avocats qui
deviennent juges, mais ces mêmes avocats, en les nommant juges,
même à $28,000 actuellement, on leur donne une
préférence.
C'est pourqoui, en terminant, comme je vous l'ai annoncé
tantôt, je propose que la motion, qui est devant nous en
considération, soit amendée de la façon suivante :
Motion d'amendement de M. Burns
M. BURNS: Que les mots "maintenant adopté" soient
remplacés par les suivants "retourné à ladite commission
afin qu'elle poursuive l'examen dudit projet de loi". C'est, entre autres, une
discussion sur ces chiffres-là, M. le Président, que nous
aimerions bien avoir. J'en ai des copies pour vous M. le Président.
Le leader adjoint me demande de la relire; alors, je le fais. Je propose
que la motion qui est en discussion actuellement soit amendée de la
façon suivante: Que les mots "maintenant adopté" soient
remplacés par les suivants "retourné à ladite commission
afin qu'elle poursuive l'examen dudit projet de loi". J'en ai des copies, M. le
Président.
Je suis prêt à argumenter sur la recevabilité de
cette motion, si vous le désirez.
LE PRESIDENT: Brièvement, oui.
M. BURNS: Est-ce que cela se pose comme question ou si vous n'êtes
pas sûr de la recevabilité?
LE PRESIDENT: Non. J'ai pas mal une opinion de faite, mais si vous
voulez argumenter.
M. BURNS: D'accord. M. le Président, vous vous souviendrez
qu'hier soir, avant l'ajournement de nos travaux, je vous ai demandé si,
lors de la considération d'un rapport de cette nature-ci, nous avions
affaire à une motion. Vous m'avez indiqué que oui. En fait, je
n'aurais même pas dû vous poser cette question-là, M. le
Président; j'aurais dû tout simplement me référer au
feuilleton de la Chambre. Au feuilleton, on lit actuellement, à
l'article 19), ce qui suit: "Reprise du débat sur la motion de M.
Pagé le député de Portneuf, qui a proposé le
rapport proposant que le rapport de la commission permanente de la
justice, qui a étudié le projet de loi no 8, Loi modifiant de
nouveau la loi des tribunaux judiciaires, soit maintenant adopté". Donc,
M. le Président, c'est assez clair, de par le feuilleton des travaux de
la Chambre, que nous sommes en présence d'une motion.
Si nous sommes en présence d'une motion et que nous ne voulons
pas que cette motion soit adoptée, il y a évidemment un premier
geste que l'on peut faire, c'est de voter contre la motion. Mais, si nous ne
voulons pas tout à fait que la motion soit rejetée, il y a une
autre méthode, mais je ne la trouve pas, sauf dans les
définitions générales de notre règlement actuel qui
dit ce qu'une motion d'amendement peut être, comment elle peut être
faite, quand elle peut être faite.
Mais le cas précis auquel je m'attache actuellement, je ne le
retrouve pas dans notre règlement. A ce moment-là je suis
obligé encore une fois de me référer à l'article 4
de notre règlement, qui nous dit que, dans un cas non prévu par
les règles de procédures, le président devra tenir compte
des précédents de cette Assemblée depuis son origine.
Or, M. le Président, parmi ces précédents il y a le
fameux article 458 de notre ancien règlement, qui dit ceci: "Les
recommandations d'un comité spécial et on sait que dans
notre ancien règlement les règles des comités
spéciaux s'appliquaient à tous les comités, comités
élus et même à certaines occasions, mutatis mutandis,
à ce qu'on appelait le comité plénier. Je cite donc ce
premier paragraphe de l'article 458: "Les recommandations d'un comité
spécial de même que les résolutions ou écrits qu'un
comité spécial présente avec son rapport peuvent
être agréés, rejetés ou agréés avec
des amendements". C'est ça, M. le Président, que je
vous suggère qu'on fasse; qu'on accepte ce rapport mais avec
amendements. Et un des amendements qui peuvent être faits est le suivant;
on le lit au paragraphe 2 de cet article 458: "Les rapports d'un comité
spécial peuvent, avant d'être adoptés, être
renvoyés, en tout ou en partie et avec ou sans instructions, au
même comité ou à un autre comité".
Je dis tout simplement, M. le Président, qu'il n'y a rien dans le
règlement actuel qui me défend de faire une telle motion. Par
contre, si je veux faire passer le message que j'ai mentionné
tantôt, je n'ai qu'une seule façon de le faire, c'est de demander
le retour en commission de ce rapport pour qu'on puisse en discuter en
commission. Je n'ai pas à argumenter longuement sur le fait, je vous ai
lu le rapport qui a six paragraphes, qu'il soit pauvre à un tel point
qu'on se demande si c'est un rapport de commission, surtout lorsqu'il s'agit
d'un projet de loi de l'importance de celui-ci.
Alors, le seul moyen que j'ai, M. le Président, c'est celui de
demander que le rapport ne soit pas adopté immédiatement mais
qu'il soit retourné en commission pour que cette commission poursuive
l'examen du projet de loi. Pour toutes ces raisons, le fait que je n'aie pas
d'autre moyen de le faire, le fait que notre règlement ne le
défende pas, la motion que je vous soumets actuellement, amendant la
motion du député de Portneuf qui nous demande l'adoption de son
rapport, je pense qu'elle est parfaitement recevable, parfaitement acceptable,
M. le Président. Pour ces raisons, je vous demande bien respectueusement
de la juger comme telle, c'est-à-dire recevable.
M. BIENVENUE: Sur la...
M. BURNS: Juste une dernière phrase. J'ajoute à mon
argument qu'il s'agit bien d'une motion de forme, que la motion que le
député de Portneuf nous soumet et qui paraît au feuilleton,
comme je l'ai mentionné tantôt à l'article 19, c'est
évidemment, et vous l'avez admis vous-même ce matin, une motion de
forme. Or, la mienne aussi, M. le Président, est une motion de forme.
Donc, je ne vois pas comment une motion de forme en amendement ne pourrait pas
se greffer à une motion de forme. On fait progresser le projet de loi
dans un sens ou dans l'autre. Dans le moment le député de
Portneuf veut le faire progresser vers la troisième lecture. C'est
sûr que c'est l'avant-dernière étape du projet de loi. J'ai
aussi le droit d'essayer de le faire progresser vers l'endroit d'où il
nous vient, M. le Président. C'est uniquement une question de forme de
part et d'autre; le député de Portneuf nous propose l'adoption de
son rapport et moi, je vous propose en amendement qu'on n'adopte pas ce rapport
tout de suite mais qu'on retourne à la commission, avec instructions
d'examiner à nouveau le projet de loi.
M. BIENVENUE: Sur la recevabilité et très
brièvement, M. le Président, je vous suggère qu'en vertu
des dispositions de l'article 125, soit directement, soit par analogie
seulement, la motion que fait le député de Maisonneuve ne peut
pas être reçue.
M. BURNS: En vertu de l'article 125?
Décision de M. le Président
LE PRESIDENT: Ecoutez, la décision que je vais rendre
d'ailleurs, on a eu l'occasion d'en discuter brièvement c'est une
décision que je vais rendre, si vous voulez, dans l'économie
générale de la procédure, au chapitre du processus
législatif qui a été rédigé dans des textes
nouveaux parce qu'il y a énormément d'éléments
nouveaux dans notre règlement.
Je le disais encore, même si on a gardé les principes de
base du droit parlementaire anglais, il y a énormément de droit
nouveau. Nous vivons notre règlement de plus en plus et surtout depuis
quelques jours, et sans aucun doute que déjà à peu
près sur tous les articles j'ai des notes en vue de la
préparation d'une troisième édition et je pense que c'est
tout à fait normal...
UNE VOIX: J'espère que vous ne ferez pas disparaître...
LE PRESIDENT: Non, non, tout de même.
Surtout, lorsqu'on considère que ç'a été une
grande aventure, un peu notre affaire qu'on a vécue depuis un an ou
deux, et surtout lorsqu'on rédige un code parlementaire nouveau,
attaché sur des traditions de 600 ans pratiquement; on a
été, je crois, un peu aventurier. Au moins dans la conception que
j'en ai, et lors des discussions de ceux qui ont procédé à
la codification de ce règlement, il a été dit entre
autres, et il est stipulé au 7e paragraphe qu'aucun sous-amendement ne
peut être proposé, et je comprends facilement que ce sont des
sous-amendements aux amendements qui seraient proposés.
Je crois bien...
M. BURNS: Juste avant, je vois dans quel sens vous vous dirigez, M. le
Président, si vous vous référez à l'article 123,
avec tout le respect que je puis avoir, je veux tout simplement vous dire que
ma motion d'amendement n'est pas un amendement comme ceux qui sont visés
à l'article 123, auquel cas j'aurais été obligé de
vous donner l'avis, etc.
Ma motion ne vise pas à amender le rapport, mais à amender
la motion qui nous amène le rapport.
LE PRESIDENT: Je comprends tout à fait bien.
M. BURNS: D'accord?
LE PRESIDENT: Je me rappelle également
que lorsque nous avons étudié lors de nos séances
la rédaction du règlement, on se plaignait souvent de ces motions
qui pouvaient se faire dans l'ancien règlement, à certaines
étapes, entre autres, lorsqu'un projet de loi était
étudié en commission plénière. Les motions
pouvaient se greffer à la troisième lecture, pour que tous les
députés, puissent intervenir. Car on a assisté à un
certain moment à 53 ou 55 discours en troisième lecture, pour que
le projet de loi soit déféré à la commission
plénière pour y apporter des amendements.
Je pense bien que le but justement que nous visions dans la
rédaction du nouveau règlement était, comme il est dit
dans la préface entre autres, de faciliter dans un certain cas à
la majorité de passer sa pièce de législation tout en
respectant un droit de parole le plus généreux possible pour les
partis d'Opposition. Encore là, où ça se faisait
anciennement, en général, c'était au moment de la
troisième lecture, parce qu'on sait que, dans tous les cas, si on
retourne à sept ou huit ans en arrière, tous les projets de loi
étaient étudiés en commission plénière
à ce moment-là, et les commissions permanentes se sont mises
à étudier les projets de loi uniquement depuis quelques
années.
La règle générale, c'est que cette motion-là
se faisait en troisième lecture, pour que le projet de loi retourne en
commission plénière pour y apporter des amendements et justement
par l'éclairage que m'apporte le ministre de l'Immigration à
l'article 125, on a éliminé les motions d'amendement en
troisième lecture, pour prohiber, pour empêcher ces retours.
Même si je reconnais que peut-être notre rédaction de
l'article 123 n'est pas parfaite, je pense bien que, l'économie
générale, dans l'esprit qui a animé ceux qui ont
rédigé ce projet de loi-là, dans tout le processus
législatif, lorsqu'on part, on commence au début de
l'étude d'un projet de loi, première lecture, débat de
fond, de principe en deuxième lecture avec droit de parole pour tout le
monde, une motion d'amendement, déférence à la commission
où, sauf dans des circonstances comme celles que nous avons
vécues cette semaine, il y a une latitude très large en
général pour l'étude d'un projet de loi.
On a bien dit ici que l'étude du rapport était une
étape nécessaire. Je pense bien que plusieurs l'ont dit,
d'ailleurs. L'ancien député de Maskinongé se demandait
pourquoi cette étape existait. Si je me le rappelle bien, il trouvait
que c'était même une étape de trop, celle de la
ratification ou de l'adoption du rapport. Moi, j'y ai soutenu dans l'opinion
que j'avais que, justement, une commission ne peut pas parachever un projet de
loi, qu'un démembrement de l'Assemblée n'avait que des pouvoirs
limités et qu'il fallait que cela soit homologué ou
ratifié par la Chambre. C'est cette étape ici qui, en
général, est assez rapide, justement. Pourquoi? Parce que nous
n'avions prévu aucun amendement et seulement des droits de parole
applicables aux motions de forme, cela veut dire des droits de parole
très limités. C'est uniquement une étape de ratification
et, après cela, c'est la troisième lecture où il y a un
discours par parti.
Selon toute économie, je ne voudrais pas accepter cet
amendement.
L'honorable député de Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, je voudrais ajouter quelques mots
à ceux que tenait tout à l'heure le député de
Saint-Jacques pour m'opposer, moi aussi, à la prise en
considération du rapport du député de Portneuf dont
l'objet était justement le projet de loi no 8, projet de loi qui
augmente le salaire des juges de $100 par semaine, ou de $5,000 par
année.
Je constate ce matin, comme nous l'avons constaté depuis quelques
jours, que ce gouvernement est prêt à tout pour voter
l'augmentation des salaires des juges. Quant à nous, nous sommes aussi
prêts à tout pour nous opposer à l'augmentation des
salaires des juges.
Nous sommes prêts parce que nous avons, d'abord, un mandat
précis. Personnellement et je voudrais bien que les
députés libéraux fassent la même chose que moi, j'ai
faite dans le comté j'ai consulté des électeurs du
comté et j'ai eu un mandat des électeurs de mon comté, un
mandat que je vais remplir jusqu'au bout, c'est-à-dire de m'opposer
à l'augmentation des salaires des juges.
Nous avons aussi un mandat des membres, parce que les membres dans le
Parti québécois représentent quelque chose. Les membres du
Parti québécois ont des choses à dire à
l'intérieur du parti. Nous avons eu un mandat, lors d'un dernier
congrès du Parti québécois, de nous opposer jusqu'à
la dernière énergie à l'augmentation des salaires des
juges.
Non seulement avons-nous ce mandat, mais encore nous déplorons
aussi le temps que ce gouvernement a choisi pour essayer de nous faire avaler
un projet de loi comme celui-là. Ce n'est pas la première fois
que nous avons à goûter à ce système parlementaire.
Ce n'est pas la première fois que nous avons à discuter de
l'augmentation des salaires des juges. C'est la troisième fois que ce
gouvernement tente de nous faire avaler ce projet de loi. C'est la
troisième fois que le Parti québécois continue de
façon systématique à s'opposer à ce projet de loi
et nous avons l'intention de nous y opposer, en particulier, dans ces
circonstances des Fêtes, où on se prépare à donner
un cadeau de $100 par semaine d'augmentation à des gens qui sont
déjà fortement favorisés. On se prépare à
donner un cadeau à des gens qui sont parmi le groupe des 3 p.c. les plus
favorisés au Québec. Et quel moment a-t-on choisi?
On a choisi justement le moment où les Québécois
sont actuellement dans des difficultés financières.
M. le Président, des libéraux il y en a qui
nous ont parlé depuis quelques jours, eh oui! Le "fair play"
m'empêche de les nommer. Mais il y en a...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LESSARD: II y a des députés libéraux qui ne sont
pas prêts à défendre ce projet de loi. Il y a même
des députés qui ont décidé de "sacrer leur camp"
pour ne pas voter sur ce projet de loi. Oui.
M. le Président, cela a été donné à
titre confidentiel. Demandez donc... Il y en a des députés
libéraux qui nous disent: Ne lâchez pas les gars! Et regardez donc
votre ministre des Affaires municipales, quelle face il nous présente
actuellement, lui qui, en 1969, a eu au moins un peu plus de courage que vous
avez, parce qu'il s'était opposé à l'augmentation du
salaire des juges.
M. le Président, c'est au début d'un mandat, au moment de
la période des Fêtes, au moment où les gens sont
occupés ailleurs, au moment où les gens ne peuvent plus suivre la
politique. C'est le moment qu'on choisit, parce qu'on n'a pas le courage de
choisir un moment où les gens peuvent suivre la politique. Et c'est
toujours ces moments qu'on a choisis pour faire passer le salaire des
juges.
Mais, M. le Président, encore... Je regarderai où je
voudrai, ce n'est pas vos troubles, bande d'écoeurants.
M. BIENVENUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre!
M.LESSARD: D'accord, M. le Président. Avant que le
député le demande, d'accord, je retire mes paroles.
M. BIENVENUE: J'invoque le règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): II a retiré le mot.
M. LESSARD: Je le retire, M. le Président, mais qu'on
arrête de m'écoeurer. D'accord. Les libéraux nous disent :
Nos électeurs vont oublier ça, nos électeurs vont oublier
ça, on a quatre ans pour leur faire avaler ça. On a quatre ans
pour leur faire oublier ça. Nous autres, on vous dit que vos
électeurs vont savoir que vous avez permis l'augmentation du salaire des
juges. Où est-il, M. le Président, ce gouvernement si avare des
deniers publics quand il s'agit de demander des augmentations pour les
bénéficiaires sociaux? Où est-il? Oui, je dis que nous
nous opposons à la considération de ce rapport, parce qu'il y a
d'autres priorités au Québec que de favoriser scandaleusement une
minorité qui est déjà amplement favorisée.
Où est-il ce gouvernement si avare des deniers publics quand il s'agit
de négocier avec les fonctionnaires du gouvernement, avec des
fonctionnaires de l'Etat, à qui on a refusé un salaire moyen, pas
une augmentation de salaire, un revenu minimum de $100 par semaine? Où
est-il ce gouvernement si avare des deniers publics le
député de Saint-Jean le sait, lui qui a goûté aussi
au bill 25 qui écrasait les enseignants où est-il ce
gouvernement si avare des deniers publics?
M. VEILLEUX: M. le Président, une question de
privilège.
Je tiens à signaler au député de Saguenay que le
bill 25 c'est l'Union Nationale qui a voté ça, ce n'est pas le
Parti libéral.
M. LESSARD: M. le Président, j'ai dit lui qui a
goûté à ce projet de loi matraque qu'était le bill
25 ; je n'ai pas dit que c'était le Parti libéral. Avec la
complicité du Parti libéral, oui, par exemple, mais je n'ai pas
dit que c'était le Parti libéral. Je me rappelle, M. le
Président,...
M. HARDY: M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, messieurs!
M. HARDY: Le député de Saguenay me permet-il une
question?
Comment le député de Saguenay peut-il... pas de
questions?
M. LESSARD: M. le Président, le problème fondamental dans
tout ça, si le ministre veut qu'on en parle, c'est toujours la question
qui revient chaque fois qu'on a à négocier avec le
gouvernement.
Quelle est la capacité de payer des contribuables
québécois? C'est ça le problème de fond. C'est cela
le problème fondamental. Est-ce que les contribuables
québécois sont prêts à accepter qu'un petit groupe
privilégié de la société québécoise
s'écarte de plus en plus du revenu moyen des contribuables
québécois? C'est cela le problème.
Chaque fois que les fonctionnaires, chaque fois que les employés
de l'Etat ont eu à négocier avec ce gouvernement ou avec d'autres
gouvernements, la même question revenait continuellement. On ne peut pas
payer les enseignants plus cher que les enseignants de l'Ontario; on ne peut
pas payer les fonctionnaires plus cher que les fonctionnaires de l'Ontario;
mais, nous, par exemple, on peut se permettre de payer les juges plus cher que
les juges de l'Ontario.
Nous disons qu'il y a d'autres priorités au Québec que
l'augmentation du salaire des juges. Nous avons des projets de loi passablement
plus importants que celui qu'on nous apporte actuellement. Nous avons le code
des loyers que nous devons adopter et que le ministre...
M. BIENVENUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LESSARD: ... sur lequel le ministre... M. BIENVENUE: Voulez-vous
garder... M. LESSARD: ... a plié...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! ...
M. BIENVENUE: Ce n'est pas pour rien, M. le Président, que je
vous ai invité, à plusieurs reprises, à garder à
l'oeil et à l'oreille le député de Saguenay qui, à
nouveau, viole le règlement.
M. LESSARD: M. le Président, je...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! ...
M. LESSARD: ... regrette...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! J'ai jeté un
coup d'oeil à l'horloge et votre temps est terminé. Cela ne
change rien. Sur la question de règlement.
M. LESSARD: Sur le point de règlement, M. le
Président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, s'il vous plaît! C'est
une question de règlement.
M. LESSARD: Je pense que tout député, qui devra intervenir
et qui interviendra par la suite, a le droit d'expliquer, même
malgré ce que peut en penser l'émigré de Crémazie,
le député émigré...
M. BIENVENUE: M. le Président...
M. LESSARD: ... d'expliquer pourquoi...
M. BIENVENUE: ... je soulève une question de
privilège.
M. LESSARD: ... il s'oppose...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! ... A l'ordre! ...
M. BIENVENUE: M. le Président, je soulève une question de
privilège. On m'a qualifié, c'est la deuxième fois
d'ailleurs, d'émigré de Crémazie. Je vais être bref.
Après avoir battu le PQ dans Matane et l'avoir battu dans
Crémazie, je demande au député de Saguenay d'être
prudent. Je pourrais m'aviser de retourner dans l'Est mais dans Saguenay, cette
fois!
M. LEGER: M. le Président, si le député de
Crémazie s'en va dans le Saguenay, il va devenir l'émigré
du Parlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, j'aimerais répondre, à
l'occasion de la prise en considération de ce rapport, à
certaines questions que le ministre de la Justice nous a posées
tantôt et qui demandent réponse.
Le ministre, tantôt, nous a dit: Le Parti québécois,
est-ce que vous voulez la paix sociale? Est-ce que vous allez vous opposer au
salaire des juges qui peut ramener la paix sociale au Québec? Je veux
répondre à cette question. Le Parti québécois veut
la paix sociale. Et les moyens qu'il a pris depuis trois ou quatre jours vont
peut-être ramener la paix sociale que le juge, que le ministre
c'était trop tôt veut obtenir uniquement par sa loi des
juges, et pour trois raisons.
Aujourd'hui, par la prise en considération de ce rapport, par le
"filibuster" que nous avons mené depuis trois ou quatre jours, nous
voulions atteindre trois objectifs.
Les objectifs concilient l'objectif que le ministre veut atteindre avec
un moyen que nous qualifions d'absolument inadéquat pour ces mêmes
objectifs.
Premièrement, il est important, pour la paix sociale, que les
citoyens du Québec croient encore au parlementarisme. Le
parlementarisme, le mot le dit bien ils ont parlementé
cela veut dire qu'on a parlé longtemps et qu'on a discuté avant
de prendre une décision. Or, le parlemantarisme, M. le Président,
est une chose dont les gens doutaient, avec une majorité de 102
députés contre 6, se demandant: Est-il encore possible qu'il y
ait du parlementarisme au Québec? Nous avons prouvé, pendant ces
quelques jours, qu'en manquant de quantité, nous avions la
qualité, la détermination et un idéal derrière
cette détermination permettant de jouer notre rôle quand c'est le
temps. C'est le premier objectif pour permettre de garder cette paix sociale au
Québec.
Deuxième objectif pour cette paix sociale: c'est que, justement,
on veut que le gouvernement prenne l'habitude de corriger ce qu'il fait depuis
déjà quatre ans, c'est-à-dire de présenter à
la toute fin d'une session des projets de loi controversés pendant que
d'autres projets de loi, moins controversés mais plus importants, comme
le code des loyers, etc., pourraient être adoptés facilement, sans
obliger les partis de l'Opposition d'user d'un "filibuster" à la fin
d'une session sur des projets controversés. S'ils sont
controversés, M. le Président, le parlementarisme dit: Si on veut
en parlementer, qu'on ait tout le temps voulu, qu'on les présente au
début d'une session et non pas à la fin.
Le troisième objectif, M. le Président, c'est le contenu
même du projet de loi dont nous discutons actuellement. M. le
Président, pour le projet de loi d'augmentation du salaire des juges, en
ce qui nous concerne, nous sommes rendus à l'étape de la
considération de ce rapport. Nous considérons que ce rapport
n'est
pas acceptable, parce qu'il ne contient pas toute la qualité et
la substance d'une commission parlementaire qui aurait siégé
d'une façon régulière, qui aurait permis, pendant le temps
où elle siégeait, à tous les députés, autant
du côté de l'Opposition que du gouvernement, de poser les vraies
questions lors de l'adoption des différents articles de ce projet de
loi.
Entre autres, M. le Président, est-ce que, pendant les 40
secondes où on a adopté les huit articles, comme le disait le
député de Saint-Jacques, rapidement, sans poser une seule
question, les neuf députés libéraux membres de cette
commission ont eu l'occasion, n'étant l'objet d'aucune obstruction par
une Opposition qui, elle, s'en allait dans une direction différente, de
poser des questions pertinentes pour éclairer la commission et
éclairer aussi l'Assemblée nationale, qui est aujourd'hui saisie
de la considération de ce rapport?
Si tel avait été le cas, M. le Président, nous
aurions eu aujourd'hui un rapport qui aurait peut-être apporté non
seulement des articles adoptés d'un coup et six paragraphes, mais
peut-être des amendements majeurs. Les députés qui
assistaient à cette commission illégale auraient peut-être
pu demander au ministre de la Justice: Est-ce qu'en augmentant le salaire des
juges, on va augmenter le niveau de la qualité de l'administration de la
justice? Est-ce qu'il n'y a pas autre chose que seulement l'augmentation du
salaire des juges qui peut amener une augmentation de la qualité du
niveau de l'administration de la justice?
M. CHOQUETTE : Est-ce que le député veut que je lui donne
une réponse?
M. LEGER: Oui.
M. CHOQUETTE: II n'y a pas seulement l'augmentation du salaire des
juges. H y a d'autres aspects aussi. Je le reconnais facilement.
M. LEGER: M. le Président, ce sont des questions qui auraient pu
être apportées lors de cette commission parlementaire.
La deuxième question que les députés
libéraux auraient pu poser et que nous aurions vue, dans la
considération de ce rapport, aurait été justement:
Jusqu'à quelle somme l'État peut-il se permettre de consacrer
pour la partie de sa responsabilité qui est celle du salaire des juges?
Est-ce que cela correspond à un certain équilibre dans la
société? Est-ce que les sommes qu'on affecte au salaire des juges
correspondent à peu près d'une façon
équilibrée aux autres sommes que l'on octroie à d'autres
groupes de la société? Ce sont des questions qui auraient pu
être posées par des députés libéraux, qui
n'avaient plus dans leurs jambes les députés de l'Opposition qui
s'en allaient dans une direction différente.
M. CHOQUETTE: Est-ce que le député veut une réponse
à cela? Le salaire des juges, dans le budget total du gouvernement, ne
représente pas un dixième de 1 p.c.
M. LEGER: M. le Président, une somme de $9 millions, c'est quand
même un montant assez important.
Vous l'appellerez en français et à ce moment-là
cela vient quand même de la même poche des Québécois
puisqu'on a prouvé que le fédéralisme n'était pas
rentable, qu'on en recevait moins qu'on en donnait.
De toute façon, M. le Président, les députés
libéraux auraient pu, à cette occasion4à, poser d'autres
questions au ministre entre autres lui demandant: Est-ce que réellement
l'augmentation du salaire des juges va permettre d'atteindre cette
indépendance de la magistrature? Le député de Maisonneuve
tantôt, lors de sa répartie, a prouvé que les avocats qui
étaient appelés à devenir des juges avaient un choix
à faire. Le député de Terrebonne, lui, disait: Oui, mais
on prend des juges plus jeunes maintenant. C'est vrai mais les juges plus
jeunes vont vieillir aussi. Les avocats, en vieillissant, voient leur revenu
diminuer et ils voient aussi qu'ils n'ont pas cette sécurité que
leur permettent le salaire et la fonction de juge; ils sont très
intéressés à être nommé juges. Ce n'est pas
parce qu'ils ont de plus gros salaires à un moment donné de leur
vie qu'ils doivent accepter qu'ils vont toujours avoir ces salaires-là,
qu'ils auront cette sécurité-là, qu'ils auront ce
prestige-là.
M. CHOQUETTE: Le député pose la question de
l'indépendance de la magistrature. Je crois qu'il met le doigt sur un
facteur très important dans l'analyse d'une situation comme
celle-là. Il est incontestable qu'un des grands principes c'est
justement d'assurer l'indépendance de la magistrature en
général et l'indépendance des magistrats en particulier.
Il faut que le magistrat ait un salaire convenable pour être
indépendant. Alors, c'est fondamental. Je trouve que le
député touche du doigt un principe très important qui est
sous-jacent à ce projet de loi. Je peux lui répondre que cela
favorise l'indépendance de la magistrature.
M. LEGER: Alors, M. le Président, je continue. Le ministre a dit
tantôt: Quand un avocat se fait $45,000 et $50,000 par année,
est-ce qu'il peut accepter un salaire de juge de $28,000? Je me dis: II n'est
pas plus intéressé à gagner $33,000 que $28,000 puisqu'il
est déjà à $50,000. L'argumentation du ministre de la
Justice est quand même un peu fausse; cela aide $5,000 de plus, d'accord,
mais cela ne règle pas le problème de celui qui gagne $50,000. La
vraie question que les députés libéraux auraient dû
poser au ministre de la justice pendant la commission parlementaire,
c'était: M. le ministre de la Justice, pour assurer cette
indépendance, cette sérénité qu'on veut avoir chez
les juges, ce recrutement plus facile chez les juges, cette qualité de
l'administration de la justice, plutôt
que de nous amener une série d'articles qui ne fait que toucher
l'aspect pécuniaire de la situation, surtout à la suite de deux
échecs successifs d'un projet de loi qui ne touchait qu'à
l'aspect pécuniaire j'achève M. le Président
du rôle du juge, est-ce que cela n'aurait pas été
préférable d'amener une loi de révision complète de
la Loi des tribunaux judiciaires, incluant l'aspect de l'augmentation du
salaire des juges? Je termine en répétant ce que le juge
Guérin disait hier: Nous ne pouvons pas nous défendre, mais nous
dirons plus tard ce que nous pensons de la loi du Parti libéral, en ce
sens peut-être que les juges auraient préféré avoir
d'autres avantages qui ne sont pas pécuniaires plutôt que
d'être limités à passer devant l'opinion publique pour des
gens qui reçoivent de l'argent alors qu'ils auraient besoin d'autres
choses.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! Je ne peux pas vous permettre
une question parce que son temps est fini. Demandez cela à l'autre
député.
M. CHOQUETTE: Je trouve que c'est le seul intervenant intelligent, ce
matin, de l'autre côté et je regrette qu'il ne soit pas plus
souvent à la commission de la Justice. Je trouve que le
député de Lafontaine pose des questions intéressantes et
auxquelles j'aimerais répondre.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce qu'il y a d'autres opinants? Le
député de Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, il est clair que la
question de l'augmentation du salaire des juges est une question
importante.
D'ailleurs, l'opposition que le Parti québécois a faite
concernant ce projet est au moins l'illustration, en fait, que, pour notre
parti, pour l'Opposition, ce projet est d'une importance capitale, non pas en
raison des sommes qui devront être déboursées
quoique, encore là, on ait certaines réserves, et j'y reviendrai
tout à l'heure mais surtout en raison de l'illustration de
certaines priorités que se donne le gouvernement par rapport à ce
besoin au niveau de la Justice et à d'autres besoins, en fait, qui sont
sentis au niveau de la population. Une chose sur laquelle, je crois, on ne peut
qu'être d'accord, c'est qu'au niveau de la commission parlementaire on
peut dire non seulement qu'il n'y a pas eu d'ailleurs, le
député de Saint-Jacques en a parlé tout à l'heure;
je ne crois pas que ce soit de la démagogie de ce côté,
c'est tout simplement la triste réalité de discussion de
fond, mais qu'il n'y a pas eu de discussion du tout, en ce sens qu'on a
adopté, sans aucune remarque, tous les articles concernant ce projet de
loi.
Il est évident que, dans un premier temps, on pourrait
peut-être se dire: Tous les juges qui sont nommés par le
fédéral gagnent de très gros salaires, des salaires
supérieurs à ceux du Québec; au moins ceux qui sont
nommés par le provincial devraient gagner le même salaire que ceux
qui sont payés par le fédéral. Il est évident qu'il
n'y a pas que cet argument qu'on doit envisager. Refuser une augmentation aux
juges j'espère, à moins que je ne comprenne mal le
débat ce n'est pas contester, d'une part,
l'intégrité, d'autre part, le travail que ces hommes ont à
accomplir pour remplir leurs fonctions. Ce n'est pas, non plus, minimiser les
capacités et je dirais aussi l'intégrité que ces hommes
doivent avoir et le travail qu'ils doivent faire pour accomplir correctement
leurs fonctions.
Refuser une augmentation, ce n'est pas du tout contester cela, M. le
Président. De même refuser à un groupe de travailleurs
souvent des augmentations, que ce soit de la part des employeurs
ou de la part du gouvernement, ce n'est pas, à ce moment-là,
contester en fait la nécessité de ces groupes au niveau de la
société. J'étais très heureux tout à
l'heure, lorsque l'honorable ministre de la Justice a commencé son
intervention en disant qu'il fallait laisser le ton de la polémique
là-dedans et éviter les comparaisons basses ou mesquines. Je me
disais: Nous aurons un exposé qui sera dénué de toute
partisanerie. Mais du même souffle, l'honorable ministre de la Justice,
qui disait qu'il fallait laisser le ton de la polémique, dans la
même intervention, se permettait d'affirmer: Si le Parti
québécois veut la paix sociale, qu'il vote ce projet.
M. le Président, je trouve qu'il n'y a rien de plus
démagogique que cela. Je vous le dis bien honnêtement: II n'y a
rien de plus démagogique que cela. En effet, on pourrait bien dire,
même si l'augmentation des salaires des juges ne représente que $4
millions à $5 millions, pour répondre à l'honorable
ministre de la Justice: Si le gouvernement veut la paix sociale, qu'il vote
donc l'argent qui est nécessaire pour les garderies d'enfants et les
garderies populaires de Montréal qui ne représentent qu'un
déboursé de $1 millions ou $1.5 million. Je suis très dans
l'ordre, M. le Président. On pourrait bien dire, si on voulait continuer
à être démagogique: Si le gouvernement veut la paix
sociale, comment se fait-il qu'en même temps qu'on annonçait une
hausse d'allocations familiales ce même gouvernement se soit permis de
diminuer les barèmes ou les tables d'aide sociale, de manière
à pénaliser, à ce moment-là, ceux qui sont les plus
défavorisés dans notre société? Si on avait voulu
continuer sur un ton de polémique, on aurait bien pu dire: II y a
peut-être d'autres priorités. Ce matin, par exemple, on disait
qu'il était nécessaire que les chèques parviennent au plus
vite aux assistés sociaux.
J'imagine que les mêmes problèmes ne se poseront pas en
fait concernant les hausses, soit
les chèques qui seront expédiés à la suite
des hausses que le gouvernement s'apprête à voter. Ce ne sont pas
de gros montants, $5 millions, que représente la hausse dont on nous
parle concernant les salaires des juges.
M. CHOQUETTE: Le député me permettrait-il une
interruption?
M. BEDARD (Chicoutimi): Bien, si ça ne compte pas sur mon
temps.
M. CHOQUETTE: La hausse ne représente pas $5 millions.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous venez de le dire, entre $4 millions et $5
millions.
M. CHOQUETTE: Le total.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est ça.
M. CHOQUETTE: Mais non.
M. BEDARD (Chicoutimi): Mais oui, c'est ça. Mais écoutez,
il ne faut quand même pas tomber dans les détails. C'est
évident que c'est l'ensemble de la hausse dont on parle qui
représente $4 millions à $5 millions. Vous l'avez dit
vous-même.
La hausse, c'est ça. Arrêtez donc! Cela
représente... Alors, si on voulait continuer de cette manière
démagogique, je pense qu'on pourrait aller très loin et ne
régler absolument pas le problème. C'est bien beau de dire, de
prendre des airs d'objectivité comme l'a fait le ministre de la Justice
et en même temps se permettre, autrement dit, d'affirmer que si le Parti
québécois veut la paix sociale, qu'il vote un projet comme
celui-là. Je considère que c'est se contredire dans très
peu de temps.
Il y a des choses dont le ministre de la Justice a parlé et qui
ont attiré mon attention. Il a parlé beaucoup et je pense,
avec raison, à part de ça du problème du
recrutement des juges. Mais il a situé tout le problème, tout ce
problème du recrutement des juges, en fonction des salaires à
être accordés à ces juges-là.
M. le Président, le problème du recrutement des juges, ce
n'est peut-être pas seulement la question du salaire. C'est
peut-être le système. C'est une question qu'on peut se poser. Il
n'en a pas été question. Je suis convaincu que le ministre de la
Justice va accepter qu'on puisse se poser non seulement le problème, la
question du salaire des juges, quand on parle de recrutement, mais qu'on peut
se poser très honnêtement la question de savoir si le
système de recrutement des juges est adéquat. Nous aurons
à voter une augmentation du salaire des juges. Est-ce que les juges qui
sont déjà nommés et qui verront leur salaire augmenter ne
seront pas plus compétents parce que leur salaire a augmenté?
Leur compétence n'aura pas diminué, n'aura pas changé. Ce
qui veut dire que le raisonnement qui veut évaluer la compétence
ou la qualité de l'avocat, ou la compétence ou la qualité
des juges en fonction d'un salaire à donner, à mon sens, est
démagogique aussi; puis, c'est une fausse manière de regarder le
problème. On a mentionné que de plus en plus la tendance du
ministère était de nommer des avocats jeunes, comme juges.
Nous savons que les très hauts salaires, au niveau des avocats,
sont surtout gagnés par des avocats qui ont beaucoup
d'expérience, propriétaires de grands bureaux. On ne leur en veut
pas qu'ils les gagnent ces salaires-là, d'accord quoiqu'on
pourrait en discuter mais cette politique justement du ministère
permet, à mon sens, à l'heure actuelle, d'aller recruter, tout en
y retrouvant la compétence, tout y en retrouvant la qualité, dans
des sphères, ou chez des avocats qui sont capables d'accepter le salaire
qui est donné à l'heure actuelle.
Avant d'avoir à voter là-dessus, je me suis posé
honnêtement la question suivante: s'il y avait en même temps dans
cette Chambre un projet de loi pour voter l'augmentation de salaire des
députés, même si cette augmentation pouvait être
justifiée, je voterais contre, parce qu'en ce moment, quand il y a
tellement de classes défavorisées qui ont besoin, elles aussi,
d'être mieux traitées, je voterais contre le projet de loi.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): L'honorable chef de l'Opposition.
M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN : Le ministre de la Justice, tout à l'heure dans son
discours, a aligné des chiffres très intéressants que je
me propose de commenter, des chiffres même aussi intéressants
quoique moins complets que ceux que nous désirions apporter au
débat, soit dit en passant. Son intervention, qui était
excellente à plusieurs points de vue, a démontré la
nécessité qu'il y aurait eu à s'enquérir à
fond, de part et d'autre, de tous les chiffres pertinents, de comparer nos
chiffres avec ceux du gouvernement, comme il eut été utile que
nous procédions ensemble, en commission, à une étude
exhaustive, à une étude complète de toute cette question
une fois pour toutes, alors que nous avons été témoins
d'une tentative de nous passer ce bill au rouleau compresseur sur le corps, en
fin de session.
Je pense que si le ministre avait voulu faire preuve d'un peu de bonne
volonté, nous aurions pu, une fois pour toutes, régler la
question. Nous aurions pu, notamment, obtenir qu'il dépose devant la
commission un certain nombre de documents car j'imagine qu'en plus de ceux
qu'il a mentionnés tout à l'heure, il en existe peut-être
d'autres dans ses dossiers qui peut-être viendraient appuyer encore
davantage sa thèse, par exemple, une comparaison avec toutes les
provinces canadiennes pour les juges de niveau analogue.
Nous aurions aimé que soit déposée devant
la commission copie, par exemple, de toutes les études, travaux,
recherches entrepris par les fonctionnaires du ministère de la Justice
ou même par d'autres personnes, à la demande du ministre
relativement à l'objet du projet de loi no 8.
Nous aurions aimé que soit déposée devant cette
commission, pour être vraiment éclairés parce que le
gouvernement a quelquefois des sources de renseignement plus complètes,
je n'en disconviens pas la correspondance échangée, par
exemple, entre le ministre et le juge en chef de la cour Provinciale, le juge
en chef de la Cour des Sessions de la Paix, la cour du Bien-être social
ou de tout autre juge de ces cours en ce qui a trait à leur traitement,
à l'insuffisance dont on fait état dans ces traitements.
Nous aurions aimé que soit déposé également
devant la commission, rapport des rencontres, des communications qu'il aurait
pu y avoir entre les personnes que je viens de mentionner sur le même
sujet.
Enfin, est-ce que nous n'aurions pas également pu demander au
ministre, comme minimum, qu'il convoque devant la commission le
président du Conseil consultatif de la justice? C'étaient
là des demandes raisonnables que nous aurions aimé faire, mais il
était bien clair et il reste clair aujourd'hui qu'il n'entre pas dans
les intentions du ministre de nous éclairer pleinement sur la
question.
Tout à l'heure, il a apporté certains chiffres. Prenons
par exemple, le coût total des salaires des juges en Ontario et au
Québec. Le ministre a affirmé, si j'ai bonne mémoire,
qu'en Ontario il se dépense $4,201,300 environ pour le salaire des juges
des "Provincial Courts". C'est bien ça, je crois. Je dois lui dire bien
franchement que la chose n'apparaît pas de façon explicite dans
les comptes publics de l'Ontario. Il pourra chercher, j'ai le document ici.
C'est bien clair.
M. CHOQUETTE: C'est à "allowances".
M. MORIN: Oui, il y a "allowances", c'est ça, mais je me demande
où vous les prenez dans les comptes publics; ils n'y sont pas.
J'aimerais bien savoir où. Voilà ce que vous auriez pu
nous dire en commission, M. le ministre, et ce que vous n'avez pas fait.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! à l'ordre!
M. MORIN: M. le Président, vous tiendrez compte de
l'interruption, dans le temps...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Quinze secondes.
M. MORIN: ... qui m'est alloué.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Quinze secondes de plus.
M. MORIN: Vingt, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Vingt, d'accord.
M. MORIN: Merci. M. le Président, voici un autre point que j'ai
relevé dans les observations du ministre. Selon lui, le salaire des
juges des "County Courts" serait de $33,500. Or, nous avons
vérifié; nous avions les chiffres là-dessus. Il est bien
clair que le fédéral verse $28,000, mais je crois que les autres
chiffres du ministre, le supplément provincial... Non, il a
été diminué. Il a été diminué. J'ai
la loi ici, la plus récente. C'est ce qui vous trompe. Quand le
ministère fédéral a augmenté les salaires de ses
juges, "l'allowance", le supplément provincial a été
diminué lui par une loi de 1971, le 17 décembre. J'ai la loi
ici.
Vous allez me dire: Je suis pris de court, etc. Oui, bien, c'est
ça dont on aurait pu parler en commission. M. le Président, la
loi ici prouve bien que les $5,500 dont a parlé le ministre ne
s'appliquent qu'aux juges en chef. Les juges, eux, n'ont que $2,000 de
supplément provincial, ce qui leur fait un total, non pas de $33,500,
mais de $30,000 pour les "County Courts" en Ontario. Où avez-vous pris
la différence?
M. CHOQUETTE: Un de mes fonctionnaires a appelé à Toronto,
ce matin.
M. MORIN: Vos chiffres sont erronés, parce qu'ils ne sont pas
conformes à la loi.
En tout cas, M. le Président, voilà ce que nous aurions pu
étudier en commission. Voilà pourquoi nous pensions qu'il fallait
prendre le temps d'aller au fond des choses au lieu de se lancer des chiffres
comme ça à la tête et sans pouvoir les comparer
méthodiquement. Nous n'avons pas été méthodiques et
ce n'est certainement pas la faute de l'Opposition.
Etant donné ce que je viens de dire, j'estime, pour ma part, que
ce projet de loi demeure prématuré. Tout à l'heure, vous
avez refusé une motion qui tendait à renvoyer l'affaire devant la
commission pour que nous puissions l'étudier en bonne et due forme,
prendre tout le temps requis.
Motion d'amendement de M. Morin
M. MORIN: Eh bien, puisqu'il en est ainsi, je voudrais proposer
maintenant que la motion, dont nous discutons, soit amendée en
retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à la fin les mots "dans
six mois". J'ai une copie ici.
LE PRESIDENT: Page.
M. MORIN: Je pense que le leader de l'Opposition fait un très
joli page !
LE PRESIDENT: Au lieu de les prendre page par page, il faudrait sauter
des pages!
M. MORIN: M. le Président, je ne suis pas en mesure, comme
modeste chef de l'Opposition, de commenter votre humour ce matin.
Mais je me permettrais donc de vous lire la motion telle qu'elle se
lirait: Que le rapport de la commission permanente de la justice, qui a
étudié le projet de loi no 8, etc., soit adopté dans six
mois. Le but de cette motion est carrément dilatoire. Qu'on ne vienne
pas nous crier à la tête que c'est dilatoire, cela l'est. C'est de
prendre le temps d'étudier les chiffres que le ministre de la Justice
nous a apportés ce matin dans un discours dont je dis qu'il était
excellent, à bien des égards, mais il n'était pas complet.
Il ne suffit pas de comparer l'Ontario et le Québec. Allons voir ce qui
se fait dans les autres provinces. Prenons le temps de
réfléchir.
Pour le cas où l'on croirait que les honorables juges seraient
pénalisés par notre attitude, qu'on maintienne dans le projet de
loi les dispositions rétroactives. Le premier ministre disait, hier, que
la rétroactivité est un mauvais principe. Bien sûr, lorsque
la rétroactivité tend à pénaliser un citoyen. Mais,
comme dans ce cas-ci, elle tend, au contraire, à les avantager, nous
n'avons aucune objection à ce que le projet de loi demeure
rétroactif.
Donc, si nous attendons six mois, qu'est-ce que ces honorables juges
auront perdu? Est-ce qu'avec $28,000, ils n'ont pas de quoi faire leurs
emplettes de Noël, M. le Président? Je vous soumets bien humblement
qu'ils ne sont pas parmi les plus défavorisés. C'est pourquoi je
vous soumets cette motion.
M. BIENVENUE: M. le Président, je serai aussi bref que tout
à l'heure. J'invoque l'article 125, directement ou par analogie.
M. BURNS: Sur la question d'analogie, M. le Président, c'est une
motion qui peut retrouver une autre analogie. C'est cette analogie que nous
retrouvons à la motion à l'amendement que nous pouvons faire
à l'encontre de la motion traditionnelle de deuxième lecture,
motion de forme elle aussi, M. le Président, mais qui pour les fins de
notre règlement, est considérée comme une motion de fond,
uniquement quant au temps de parole.
Or, cette motion de deuxième lecture est traditionnelle. Elle se
fait régulièrement. D'ailleurs, nous l'avons faite, même,
sur ce projet de loi quant au principe. Et je fais bien la distinction.
C'était le principe de la loi que nous demandions de reporter à
six mois ou l'adoption du principe.
Maintenant, M. le Président, ce n'est pas l'adoption du principe
que nous demandons de reporter à six mois, puisqu'il a
déjà été adopté. Nous demandons que dans le
fond, le détail du projet de loi, lui, soit reporté à six
mois, de sorte que, si mon bon ami, le député de
Crémazie, nous parle d'analogie par rapport à l'article
125, je peux lui parler aussi d'analogie par rapport à la motion
traditionnelle de deuxième lecture, qui elle est permise.
Je vous prie de remarquer, M. le Président, que la forme dans
laquelle cette motion-ci est faite, est absolument identique à la forme
que nous utilisons pour faire la motion de reporter à six mois
l'étude du principe d'un projet de loi. J'insiste, à part
l'argument d'analogie, sur l'argument suivant: II n'y a rien, M. le
Président, qui nous empêche de faire cette motion dans le
règlement, même pas l'esprit de notre règlement.
Si on nous soumet une motion, si on doit nous soumettre une motion pour
faire adopter le rapport de la commission et si on ne nous prive pas de notre
droit d'amender spécifiquement cette motion, je vous soumets que nous
pouvons l'amender. Ceci est basé sur un grand principe
d'interprétation que vous connaissez beaucoup mieux que moi, M. le
Président, j'en suis certain. C'est celui que, lorsqu'il y a privation
de droits, il faut que la mesure restrictive des droits soit clairement et
spécifiquement mentionnée.
Je ne le dis pas de façon péjorative. C'est
peut-être un trou dans notre règlement, c'est possible. Vous avez
d'ailleurs fait remarquer vous-même, M. le Président, à
plusieurs occasions, que ce règlement est, à toutes fins
pratiques, de la nouvelle législation. Comme pour toute nouvelle
législation, il est possible que, de bonne foi, le législateur y
ait laissé des trous béants. La législation en question se
trouve être notre nouveau règlement, auquel j'ai travaillé
moi aussi, comme le député de Beauce-Sud et comme le
député de Bonaventure, comme l'ancien député de
Maskinongé et vous-même, M. le Président. Peut-être
avons-nous, quand nous avons eu les séances de préparation de ce
nouveau règlement, oublié je le dis en toute
humilité puisque j'ai participé à ces travaux un
certain nombre de trous, et c'en est un, je pense. Si ce n'était pas
l'intention du législateur de le faire, il aurait dû
l'écrire, parce que cela devient restrictif des droits, et dès
que cela devient restrictif, dès qu'on diminue des droits en
l'occurrence ce sont ceux des députés de l'Opposition je
trouve qu'il faut l'écrire directement pour qu'on puisse dire qu'il est
absolument irrecevable de faire la motion que l'honorable chef de l'Opposition
vient de faire.
Décision de M. le Président
LE PRESIDENT: Mes remarques vont être très brèves.
Je crois que je suis lié par la continuité de mes remarques et la
décision un peu plus élaborée que j'ai rendue sur la
motion précédente de l'honorable député de
Maisonneuve. C'est la même raison que j'ai invoquée tout à
l'heure. Pour l'économie générale de
notre droit nouveau, périlleux, je dois refuser cette motion.
M. BURNS: II est une heure, M. le Président. UNE VOIX: Moins
deux.
M. BURNS: Si vous appelez les députés, M. le
Président, on va voter après une heure. J'ai peur que ce soit
illégal. M. le Président, il y a eu assez
d'illégalités dans cette affaire.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Vote sur le rapport concernant le projet de loi no
8
LE PRESIDENT: A la demande du député de Beauce-Sud, voici
la motion qui est devant l'Assemblée. C'est la motion de l'honorable
député de Portneuf, proposant que le rapport de la commission
permanente de la justice qui a étudié le projet de loi 8, Loi
modifiant de nouveau la loi des tribunaux judiciaires, soit maintenant
adopté.
Que ceux qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever,
s'il vous plaît !
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Mailloux, Choquette Garneau,
Phaneuf, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley,
Drummond, Lacroix, Bienvenue, Forget, Massé, Harvey (Jonquière),
Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Per-reault, Brown, Kennedy, Bacon,
Blank, Veilleux, Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote,
Ostiguy, Carpentier, Dionne, Faucher, Marchand, Harvey (Charlesbourg),
Larivière, Pelletier, Shanks, Springate, Pépin, Beauregard,
Bérard, Bonnier, Boudreault, Boutin (Johnson), Chagnon, Caron, Denis,
Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance, Lecours, Malépart,
Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Parent (Prévost), Picotte,
Sylvain, Tardif, Tremblay, Samson, Roy.
LE PRESIDENT: II n'est pas permis de manifester durant un vote.
Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous
plaît !
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard,
Bédard (Chicoutimi ).
LE SECRETAIRE: Pour: 67.
Contre: 6.
LE PRESIDENT: La motion est adoptée. L'Assemblée suspend
ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 7)
Reprise de la séance à 15 h 5
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LEVESQUE: Alors, M. le Président, article 5.
LE PRESIDENT: Article 5, d'accord. Le député de
Saguenay.
Projet de loi no 2 Deuxième lecture
(suite)
M. BURNS: M. le Président, il y a quelques jours, je vais
regarder mon feuilleton...
LE PRESIDENT: Ce que m'indique le feuilleton.
M. BURNS: II y a quelques jours. Non, il n'est pas loin, je viens juste
de le quitter au bord de la Chambre, M. le Président.
M. LEVESQUE: Est-ce que vous parlez pour lui donner une chance
d'arriver?
M. BURNS: Non, non, je veux simplement, vous allez admettre, M. le
Président, que, depuis la discussion du projet de loi no 2 en
deuxième lecture, il y a quand même eu un certain nombre de
choses, c'est dans ce sens-là que je dis... C'est ça qui est
important, c'est pour ça que je pose la question. Est-ce qu'il avait
commencé? S'il n'a pas commencé, il ne fait que perdre sa
priorité...
LE PRESIDENT: Perdre sa priorité.
M. BURNS: ... alors que s'il a commencé à parler.
M. LEVESQUE: On verra ce qu'il a perdu ou non.
M. BURNS: Bien, je pense bien que c'est la solution, M. le
Président, je ne veux pas retarder les travaux de la Chambre.
LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Maisonneuve a
déjà parlé sur ce projet de loi? D'accord.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, après avoir discuté
d'un projet de loi fort contentieux, nous voici maintenant avec un projet de
loi qui est plutôt une reformette.
Ce projet de loi est le quatrième que nous propose le ministre de
la Justice concernant la réforme des loyers.
Nous avons eu, d'abord, un projet de loi sur lequel les membres du Parti
québécois étaient d'accord, projet de loi no 59. Par la
suite, le ministre de la Justice, encore une fois, contrairement à ce
qu'il fait justement sur le projet de loi no 8, a reculé. Le ministre de
la Justice, qui pour une fois, nous présentait un projet de loi valable
et qui, pour une fois, nous présentait un projet de loi qui nous
proposait une véritable réforme des loyers, le ministre de la
Justice, soumis à ses backbenchers libéraux ou à d'autres
interventions beaucoup plus occultes, a décidé de reculer et de
nous présenter cette fois un autre projet de loi, le projet de loi no
2.
Un certain nombre de députés se posaient certaines
questions, en particulier, le député d'Anjou, qui nous disait:
Oui, mais en quoi ce projet de loi no 2 est-il différent du premier
projet de loi qui nous avait été présenté par le
ministre de la Justice? Et c'est là justement le fond du
problème. Et c'est là qu'a été le fond de la
discussion. C'est là qu'il y a eu une opposition entre 80 p.c. de la
population québécoise et les quelques organismes très
limités qui financent le Parti libéral. Le député
de Maisonneuve et le député de Lafontaine ont prouvé,
à partir d'articles de journaux, quelles influences étaient
intervenues, soit des Chambres de commerce, des organisations de
propriétaires, auprès du ministre de la Justice soit encore
probablement des députés libéraux qui eux aussi sont
propriétaires et peut-être propriétaires de maisons
d'appartements.
Quelle différence y a-t-il entre ce projet de loi et le premier
projet de loi qui nous avait été présenté par le
ministre de la Justice, le projet de loi no 59? D'abord, il faut dire que le
ministre de la Justice nous avait, en 1970, au moment de la campagne
électorale, promis une grande réforme concernant le code des
loyers.
Il est vrai, M. le Président, que le projet de loi 59 n'apportait
pas une véritable réforme en ce qui concernait toute la politique
d'habitation au Québec, mais encore, M. le Président, il restait
qu'au moins, il y avait une réforme, une protection des locataires,
parce qu'une fois pour toutes, il faut quand même se le mettre dans la
tête et des députés libéraux qui ont adopté,
qui ont accepté ou qui se préparent à accepter
l'augmentation du salaire des juges, devraient justement, une fois qu'ils
auront accepté l'augmentation du salaire des juges, au moins se dire
qu'il y a des gens qui n'ont pas les salaires des juges. Il y a des gens qui
sont poignes, qui sont obligés de grever leur revenu, de plus en plus,
pour payer leur logement et qui n'ont aucune protection. C'est justement, je
parle de la motion.
Or, cette protection elle était accordée dans le premier
projet de loi qui nous a été soumis par le ministre de la
Justice. D'abord, il y avait cette augmentation, cette norme de 5 p.c,
augmentation maximale de 5 p.c. du prix des loyers, afin de protéger le
locataire, mais cela ne voulait pas dire que le propriétaire ne pouvait
pas augmenter plus, il y avait certaines conditions précises qui
étaient déterminées dans le projet de loi. Donc, il y
avait cette norme. Où est-elle, cette norme, dans le nouveau projet de
loi qu'on nous soumet? Où est-elle, cette protection nécessaire,
obligatoire même pour 80 p.c. des citoyens du Québec? On accepte,
et je vois le ministre des Affaires sociales. Je suis assuré que les
chèques pour les juges vont être faits probablement avant le 25
décembre, j'espère au moins qu'on pourra le faire aussi pour les
assistés sociaux. Cette norme, on ne la retrouve plus dans le nouveau
projet de loi qui nous est soumis. Les locataires sont encore laissés
mains et poings liés entre les mains de quelques
privilégiés, encore, comme cela a été le cas pour
les juges, de quelques privilégiés de la société.
'
LE PRESIDENT: La pertinence du débat dans ce cas-ci est assez
facile, parce que nous avons pratiquement trois projets de loi greffés
à cela. De grâce, n'allez pas dans un quatrième. Il y en a
déjà trois.
M. LESSARD: D'accord, M. le Président, mais j'ai simplement fait
une relation, comme cela a été le cas. Les locataires donc, 80
p.c. de la population du Québec sont encore laissés mains et
poings liés à la merci de quelques privilégiés de
la société québécoise.
Les locataires ne demandaient pas des choses absolument anormales
lorsqu'ils sont venus soumettre leur mémoire à la commission
parlementaire. Ils demandaient tout simplement certaines choses qui nous
paraissent, pour nous du Parti québécois, normales. Ils
demandaient, d'abord, que l'on puisse empêcher une hausse abusive des
loyers. Ils demandaient que l'on fasse disparaître cette incertitude dans
les relations entre locataires et propriétaires. Justement, le bill 59
leur donnait cette assurance. Quand on a vu les financiers de la caisse
électorale du Parti libéral venir faire des pressions à la
commission parlementaire, présenter leur mémoire, devant ces
exigences normales, qu'est-ce qu'on a apporté?
On a parlé du socialisme. C'était du socialisme d'imposer
une loi comme celle-là. C'était intervenir dans la liberté
de contracter entre locataires et propriétaires. Quelle est la
liberté d'un gars qui est obligé de donner 25 p.c. à 30
p.c. de son revenu pour être locataire? Comme le disait justement le
député de Rouyn-Noranda, quelle liberté a-t-il, ce gars,
lorsqu'il va signer un bail avec son propriétaire, lui qui n'est pas
capable de se payer un avocat alors que le propriétaire est capable de
se payer un avocat?
Atteinte à la liberté humaine, atteinte à la
liberté des gros, atteinte à la liberté des
propriétaires dont, peut-être, un certain nombre de
députés libéraux. C'est pourquoi le ministre,
probablement, a reculé devant ses "backbenchers" libéraux.
Atteinte à la liberté, attein-
te à la propriété privée. Mais il n'y avait
aucune atteinte à la propriété privée. Il
était même dit, dans l'ex-projet de loi... C'est justement
pourquoi nous allons, encore une fois, comme nous nous sommes battus contre un
projet de loi que vous connaissez, nous battre pour faire en sorte que ce
projet de loi soit amélioré.
Non, M. le Président, il n'y avait aucune atteinte à la
liberté de contracter, il n'y avait aucune atteinte à la
liberté de propriété puisqu'il était prévu,
dans le projet de loi, que le propriétaire pouvait augmenter le prix de
son logement. C'était même prévu dans le projet de loi.
Mais, cependant, le locataire avait la possibilité d'en appeler à
un tribunal.
Il fallait, M. le Président, que le propriétaire prouve
devant le tribunal que, suite à l'augmentation, par exemple, des taxes,
suite à l'augmentation du coût de la construction, suite à
toutes ces augmentations que nous donne, depuis 1970, le gouvernement Bourassa,
il devait augmenter son loyer.
Mais, M. le Président, c'était justice à la fois,
dans ce premier projet de loi, et pour le propriétaire et pour le
locataire. Il fallait que le propriétaire justifie sa décision.
Non, M. le Président. C'était encore une mesure
exagérée pour le ministre de la Justice, encore intervenir dans
la liberté de contracter. Mais on intervient continuellement, M. le
Président, dans cette liberté de contracter, par exemple le
ministre responsable de l'exploitation du consommateur non, je m'excuse,
M. le Président, de la protection du consommateur. On aurait dû
intervenir et accepter cette norme, réimprimer, en tout cas, dans le
projet de loi cet article qui imposait cette norme d'une augmentation maximum
de 5 p.c. Il y avait donc la possibilité, pour le propriétaire,
d'augmenter mais il y avait aussi une possibilité pour le locataire de
contester.
A quelle place le trouve-t-on, dans le projet de loi no 2, ce tribunal
administratif siégeant en première instance, la Commission des
loyers? Est-ce qu'on le retrouve, M. le Président? Non. Et, justement,
le député d'Anjou nous demandait: Mais en quoi ce projet de loi
no 2 est-il différent du premier projet qui nous a été
présenté? La différence, c'est que dans le premier projet
on avait quelque chose. Dans le premier projet, on avait une réforme.
Mais là, malheureusement, on n'a absolument rien.
Et pour vous le prouver, M. le Président, ce n'est pas le
député de Saguenay qui va vous le dire, je vais vous lire les
notes explicatives du projet de loi, si je peux les trouver, où on dit
que ce projet de loi n'est pas une grande réforme. C'est simplement
quelques innovations qu'on présente. C'est simplement une question de
concordance. Et c'est dans les notes explicatives. Je regrette, je ne les
trouve plus, M. le Président.
M. BIENVENUE: M. le Président...
LE PRESIDENT: Une question de règlement?
M. LESSARD: C'est simplement une question de concordance. On dit
justement...
M. BIENVENUE: M. le Président...
LE PRESIDENT: Question de règlement?
M. LESSARD: Aux forces ou aux financiers...
M. BIENVENUE: M. le Président, question... M. LESSARD: ... du
Parti libéral...
LE PRESIDENT: Un instant, question de règlement.
M. BIENVENUE: Enfin, règlement plus ou moins, mais c'est pour
venir en aide au député de Saguenay. On pourrait peut-être
suspendre quelques minutes pour qu'il trouve la référence qu'il
cherche, si la Chambre...
M. LESSARD: Je suis prêt. Je ne l'appellerai même pas
l'immigré, je remercie l'ex-député de Matane de m'avoir
permis cette possibilité et en même temps de m'avoir permis de
souffler, vous comprendrez qu'après le repas, j'ai été
obligé de monter.
Et voici, je vous donne les notes explicatives que l'amabilité du
député actuel de Crémazie et du député de
Chicoutimi vont me permettre de faire. "Le proiet lit-on contient
dans une première section des dispositions applicables à toutes
les catégories de baux, civils, commerciaux, industriels, mobiliers,
immobiliers." "Cette section le ministre de la Justice pourrait
peut-être écouter contient quelques innovations." Ce n'est
pas une grande réforme, ce sont quelques innovations. "... et en outre
aligne les dispositions du code civil sur les décisions des tribunaux
qui sont parues avec le temps conformes aux nécessités du louage
des choses." C'est strictement une question de concordance, l'ajustement avec
la jurisprudence, quand on sait que les lois sont très en retard sur la
réalité québécoise, bien souvent sur la
réalité d'une société.
Ce n'est donc pas nous qui critiquons ce projet de loi, c'est le
ministre lui-même qui nous a ouvert la porte en disant dans ses notes
explicatives: Ce n'est pas une grande réforme le projet de loi qu'on
vous soumet, ce n'est pas une grande transformation et justement pour
tranquilliser ces "backbenchers" libéraux probablement
propriétaires de maisons d'appartements et tranquilliser les influences
occultes qui agissent auprès de ce gouvernement, on leur dit: Ce sont
quelques innovations, ce n'est pas grand-chose.
Encore un projet de loi de dix pages, M. le
Président. Le principe à l'Assemblée nationale,
depuis 1970, ce n'est pas de présenter des projets de loi importants, ce
n'est pas de présenter des réformes. Le principe, c'est de
multiplier les projets de loi, c'est de présenter quantité de
projets de loi pour être capable de dire, comme le député
d'Anjou, au moment de la campagne électorale: Figurez-vous que nous
avons réussi au cours de quatre ans de mandat à présenter
400 projets de loi. Mais quels projets de loi? Des projets de loi
insignifiante. Des projets de loi qui nous amènent à perdre notre
temps à l'intérieur de l'Assemblée nationale. Quand on
pense que c'est la troisième fois que nous avons à discuter
à l'Assemblée nationale du code des loyers. Chaque fois que nous
avons eu à en discuter, il fallu constater un recul constant du ministre
de la Justice. Pourtant il n'a pas reculé sur le projet de loi no 8,
pourtant il n'a pas reculé lorsqu'il a décidé d'augmenter
le salaire des juges de $5,000, soit $100 par semaine, M. le
Président.
Les petits, même si cela représente 80 p.c. de la
population québécoise, on ne s'en occupe pas dans ce parti. Les
petits, M. le Président, ce n'est pas une préoccupation
importante pour les députés libéraux, c'est l'image qui
est importante. Présenter quelquefois des projets de loi épais,
des projets de loi qui ressemblent justement à cette majorité
grotesque dont parle souvent le député de Saint-Jacques,
majorité épaisse. C'est cela qui est malheureux. Quant à
nous du Parti québécois, nous sommes prêts, comme nous
l'avons dit à maintes reprises, à étudier des projets de
loi, mais des projets de loi qui sont sérieux, surtout quand il s'agit
de la réforme du code des loyers. C'est là un des
éléments essentiels dans notre société parce que,
justement, 80 p.c. de la population sont des locataires. Vous serez
jugés comme les gouvernements précédents l'ont
été. Parce qu'à 102 députés, M. le
Président, il y a une chose dont on est sûr, vous ne pouvez pas
augmenter et nous, nous ne pouvons pas diminuer.
Alors, M. le Président, les petits, les 80 p.c. ne sont pas
représentés dans ce gouvernement.
Parce que le ministre de la Justice, parce que ce gouvernement-là
n'a jamais été capable de présenter une véritable
réforme de l'habitation familiale, parce que le ministre des Affaires
municipales, comme l'a dit le député de Saint-Jacques, ce roseau
du gouvernement actuel, n'a jamais été capable d'appliquer une
véritable réforme. C'est pour ça que les
Québécois sont des locataires comme ils seront des locataires
à l'intérieur de leur propre pays, parce que ce gouvernement est
un gouvernement de soumission, de capitulation tranquille. Merci, M. le
Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de
Saint-Jacques.
M. Claude Charron M. CHARRON: M. le Président, les
collègues du Parti québécois qui sont intervenus avant moi
vous ont signalé comment il nous apparaît aberrant de voir le
ministre de la Justice successivement diminuer une réforme qu'on est
venu bien près d'adopter, mais que des pressions en coulisse, à
l'extérieur des travaux normaux de l'Assemblée nationale, ont,
par deux fois déjà, paralysée pour aboutir finalement
à ce trognon de réforme qu'est le projet de loi no 2 et
éventuellement le projet de loi no 3 sur lequel j'interviendrai tout
à l'heure également.
M. le Président, j'espère que parmi les
députés libéraux du caucus, parmi cette majorité du
caucus libéral qui a poussé le ministre à laisser tomber
une réforme que 80 p.c. des Québécois attendaient, il s'en
trouvera seulement un qui, d'une façon claire, précise et exacte,
au nom de la majorité du Parti libéral, prendra la parole au
cours du débat sur le projet de loi no 2 et nous dira pourquoi, non
seulement à nous, pas simplement à l'Opposition officielle, mais
aux Québécois, pourquoi il s'est trouvé une
majorité d'élus, anciens et nouveaux, du 29 octobre dernier, qui
ont fait reculer le ministre de la Justice sur un projet de loi que tout le
monde attendait.
A moins que ce ne soit complètement qu'une masse qui n'agit que
dans le secret et dans les coulisses, comme le financement de leur parti,
à moins que ce ne soient que de gens qui n'agissent que pour des
intérêts qu'ils ont honte de révéler à la
population, à moins que ce ne soient que des députés
marionnettes, M. le Président, et qui ne dépendent que de
pressions que l'on fait jouer sur eux dans leur comté ou à
l'intérieur même de cette enceinte, j'espère que, dans ce
groupe anonyme et atrocement amorphe de 101 députés
libéraux qui nous entourent, il s'en trouvera au moins un qui, sans
être un félin, sans être absolument un grand courageux, mais
en étant simplement un homme qui respecte le mandat qu'il a reçu
de la population et qui n'a pas honte de ses opinions, se lèvera au
cours de ce débat. Il viendra sauver la face du ministre de la Justice
qui nous a présenté le projet de loi no 2 d'une manière
tellement ridicule qu'elle lançait elle-même appel à l'aide
à un ou deux ou trois de ces innombrables "backbenchers" pour qu'il y en
ait un au moins qui vienne justifier la reculade du ministre de la Justice.
Je me souviens très bien de la fierté qu'avait le ministre
de la Justice, c'était le même à l'époque, lorsqu'en
commission parlementaire on étudiait le projet de loi 59. Il
était fier de la réforme qu'il avançait. Il l'avait soumis
au Parlement en première lecture.
Il l'avait déjà, l'appui des trois autres partis de
l'Opposition à l'époque. Il avait l'appui de tous ces groupes qui
représentent les locataires québécois. Où
était passée cette fierté, lorsque mardi soir dernier,
à la sauvette, en cachette, avec des excuses qui ne tiennent pas debout,
avec des bouts de ficelle d'explications, il a été obligé
de nous dire que cette Chambre va
maintenant se contenter d'une version aussi réduite que ne l'est
le projet de loi no 2 sur la réforme des loyers?
En attendant, il se trouve que cette majorité n'est bonne
qu'à ne lancer des invectives aux députés qui prennent la
parole. Les connaissant assez, je peux très bien identifier parmi ce
groupe les plus réactionnaires, les plus tenants et probablement ceux
qui ont fait le plus de pressions auprès du ministre de la Justice pour
qu'il recule. Ce sont souvent aussi ceux qui ont la plus mauvaise conduite
à l'intérieur de cette Assemblée. J'espère que se
prévalant de leur droit que nous sommes prêts à leur
reconnaître quitte à allonger un débat, peu importe,
je suis intéressé et les citoyens de mon comté aussi,
parce que ce sont des locataires qui attendaient depuis longtemps cette
réforme ils expliqueront pourquoi il s'est trouvé dans ce
groupe une majorité de gens qui ont saccagé cette réforme
que nous attendions...
Je vous faisais mention tout à l'heure que lors des projets de
loi précédents, 59 et la version édulcorée 78 et 79
et finalement jusqu'au trognon qu'est le bill 2, il s'est trouvé des
groupes dont l'oeuvre essentielle depuis quelques années a
été et ils ont souvent reçu l'hommage du ministre
responsable de la protection du consommateur, soit dit en passant
d'organiser des associations de locataires pour défendre leurs droits.
Chez nous, dans le bas de la ville de Montréal, ils ont fait un travail
extraordinaire. L'ensemble des taudis qui s'allongent entre la rue Saint-Denis
jusqu'à Delori-mier, entre la rue Ontario jusqu'à la Place
Radio-Canada, tout le monde le sait, appartiennent la plupart du temps au Royal
Trust, au Montreal Trust, aux sociétés de fiducie qui se sacrent
comme de l'an quarante des locataires qui sont dans ces maisons, excepté
pour augmenter les loyers chaque année, qui attendent simplement qu'un
projet d'expropriation, genre autoroute est-ouest arrive et leur permette de
spéculer sur la valeur des terrains sur lesquels reposent ces taudis et
où doivent vivre des familles qui dépendent de l'aide sociale que
vient de réduire le ministre des Affaires sociales. C'est le cas, M. le
Président, pour ces gens et il s'est trouvé de ces citoyens, non
pas comme on aime souvent les décrire à l'intérieur de la
majorité libérale, non pas des anarchistes et des agitateurs
c'est beaucoup trop facile mais des locataires, eux-mêmes
pères de famille ou mères de famille, qui ont pris sur
eux-mêmes de corriger leurs problèmes et qui se sont
regroupés dans des associations de locataires.
Ils se sont trouvés tellement nombreux à un certain moment
qu'ils ont voulu, face au pouvoir énorme qu'ont les
propriétaires, ces sociétés de fiducie et toutes les
entrées en coulisse qu'ils ont auprès du gouvernement, au point
de le faire reculer, la preuve en est là, qu'ils ont senti le besoin de
se structurer dans une fédération des associations de locataires,
et le ministre de la Justice s'en souvient. Ces groupes sont venus nous
rencontrer au moment où nous étudiions l'intéressante
réforme qu'était le projet de loi 59 et je retrouve dans le
témoignage d'un de ces citoyens qui était venu s'adresser
à la commission, une clairvoyance que je voudrais soumettre à la
Chambre aujourd'hui. Vous savez, ces citoyens qui ont l'habitude de grignoter
chacun de leurs droits, de se battre pour le respect du minimum vital qu'un
gouvernement se refuse toujours à leur donner, que cela soit dans le
revenu ou dans leur protection comme consommateurs, ces citoyens ne sont pas
fous. Ils savent voir venir les choses, et je me souviens très bien que
lorsqu'ils sont venus témoigner lors de l'étude du projet de loi
59, il se trouvait des citoyens du comté que je représente ici et
qui m'ont dit en parlant du projet de loi 59: Cela n'est pas possible. On a des
amendements à suggérer, mais la loi est carrément
très bonne. Et ils ont dit: Cela n'est pas possible, M. Choquette va
reculer à un certain moment.
Et je lis la fin d'un témoignage alors qu'ils soulignent à
bon droit que la loi était encore amendable, mais qu'ils l'appuyaient de
façon non équivoque.
Je termine. C'était le 29 novembre 1972, ils disaient: "Mais on
est loin de cette solution. Non seulement le projet de loi 59 est-il
menacé, mais il y a même un risque que tout le travail de
sensibilisation que les associations de locataires ont effectué, partout
en province et dans les grandes villes du Québec, ne serve à la
fin qu'à de la désillusion chez une population qui croyait que le
gouvernmeent envisageait enfin de légiférer pour le vrai
monde."
Ils étaient légitimés de le croire, on travaillait
à un projet de loi qui avait reçu la sanction du cabinet, qui
était parrainé par le ministre de la Justice et qui occupait les
travaux de la commission parlementaire. Jusque-là, ils avaient tellement
de doute sur ces gouvernements que même cette étape franchie, ils
ont dit: Tant qu'elle ne sera pas sanctionnée, on ne le croira pas. Et
comme ils avaient raison, aujourd'hui, M. le Président, quand on se
penche sur ce ridicule projet de loi no 2!
Je poursuis. C'est un locataire qui parle: "II y a peu de lois à
chaque session qui touchent toute la population directement ou qui concernent
des aspects majeurs et vitaux pour la vie collective. Il y a peu de lois
surtout qui suscitent une attention suivie, comme c'est le cas pour le bill 59.
Les députés qui la voteront représentent d'abord une
population de locataires et ce phénomène est surtout
marqué par ceux qui sont élus par les populations urbaines. Au
lieu de composer avec les intérêts économiques de ceux qui
contrôlent la ville, ne doivent-ils pas, ces députés, avant
tout, assurer la possibilité, pour les citoyens urbains du
Québec, d'améliorer cette qualité de vie dont on parle
dans les journaux, dans les écrits de sociologues et dans les programmes
politiques, mais dont on retrouve souvent peu d'écho dans les textes de
loi. Ce sera à M. le ministre Choquette et aux autres
députés de présenter
leurs choix et leur options clairement au public."
C'est le président de la Fédération des
associations de locataires qui nous adressait son opinion le 23 novembre
1972.
Je reprends à mon compte, de mon siège, au nom de la
population que je représente ici, cet appel dans les trois
dernières lignes de leur mémoire: "Ce sera à M. le
Ministre Choquette et aux autres députés de présenter
leurs choix et leurs options clairement au public." Dites-nous clairement,
maintenant, pourquoi vous avez saccagé le projet de loi 59. Dites-nous
clairement, dites-le au président, si vous voulez, si vous avez peur de
nous regarder en face, dites clairement à la population, aux locataires
que vous représentez, pourquoi vous avez demandé qu'on retire du
projet de loi une première protection qui arrivait finalement chez les
locataires, pourquoi vous avez refusé les conditions, le plafond qu'on
mettait à l'augmentation de salaire. Il y avait même des
dispositions, je l'ai dit, lors des travaux de la commission, dans ce projet de
loi, des dispositions telles que moi-même, je me disais: Ce n'est pas
possible, Choquette va "scrapper" ça à un moment donné ou
à un autre. Et cela s'est produit, M. le Président.
M. BIENVENUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
De plus en plus, de façon insidieuse mais voulue, on prend
l'habitude chez les députés d'en face d'appeler les honorables
députés de cette Chambre par leur nom. Tout à l'heure,
c'était le ministre Choquette et là, on en est rendu à
Choquette, ça va être Jérôme bientôt, M. le
Président, puis vous pourrez aller siéger à
l'extérieur et on fera le débat entre nous. Je vous demande de
rappeler le député à l'observance du règlement sur
ce point.
Je n'ai pas terminé.
Ou alors changeons le règlement.
M. CHARRON: M. le Président, sur le point de règlement
soulevé par l'ancien député de Matane, je dois dire que
j'avais à la tête le mot Choquette parce que je venais de faire
référence à un texte qui disait exactement ceci: "Ce sera
à M. le ministre Choquette les locataires l'appelaient M. le
ministre Choquette et aux autres députés de
présenter leurs choix et leurs options clairement au public." Mais je
suis prêt à revenir et à appeler le député
d'Outremont, le député d'Outremont, le ministre de la Justice. Je
ne crois pas que nous arrivions jamais à nous appeler plus intimement
que ça, M. le Président.
Mais, puisque le député des Iles-de-la-Madeleine vient de
m'y inviter en participant, de façon irrégulière, au
débat, comme c'est sa marque de commerce, et en faisant
référence aux tavernes de mon comté, comme il dit,
exactement comme vient de le faire le député des
Iles-de-la-Madeleine, effectivement, au cours de l'ajournement des fêtes,
j'irai dans les taver- nes de mon comté, comme c'est mon droit, et
j'aurai l'occasion de discuter, avec mes concitoyens, de ce que j'ai
vécu ici depuis quatre semaines. Je leur expliquerai, du mieux que je
peux, comment un gouvernement a préféré augmenter le
salaires des juges plutôt que d'apporter une protection au consommateur.
Et je leur dirai aussi, à ce moment-là, qu'ils ont eu
parfaitement raison, le 29 octobre dernier, d'augmenter la majorité que
le Parti québécois avait déjà dans ce territoire
depuis 1970.
Je leur parlerai également des références, aussi
bien inédites qu'intéressantes, que m'invite à faire le
député des Iles-de-la-Madeleine; je rapporterai exactement et
fidèlement toutes les raisons que m'auront données, au cours de
ce débat en deuxième lecture, les députés
libéraux. J'attends du député des Iles-de-la-Madeleine,
puisqu'il est, comme tout le monde le sait, le roi des "backbenchers", qu'il
intervienne dans le débat sur le projet de loi no 2. J'attends de lui
qu'il vienne nous l'expliquer. Si les autres n'en ont pas le courage, s'il est
à ce point le "boss" qui est capable de les faire taire même quand
ils voudraient intervenir, alors qu'il intervienne et qu'il nous dise pourquoi
le caucus libéral a saccagé le bill 59 jusqu'à le
réduire aux bills 78 et 79. Et puis, le tout nouveau caucus
libéral dont il est le maître incontesté, tout le
monde en conviendra pourquoi avez-vous, encore une fois, fait reculer le
ministre de la Justice sur le feuilleton? J'espère, M. le
Président, qu'au lieu d'intervenir comme un "fafouin" comme il le fait
actuellement et en dehors du règlement, au lieu d'intervenir comme un
imbécile en Chambre...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! ... A l'ordre!
M. CHARRON: ... qu'il se lèvera à un moment donné
et qu'il nous dira exactement pourquoi. Depuis que je suis en Chambre,
j'attends de lui une intervention régulière, je ne dis pas
intelligente, j'ai déjà démissionné dans mon espoir
sur ce plan-là mais simplement une intervention régulière;
je lui demanderais cette fois-ci, non seulement régulière mais
franche. Dites-nous franchement pourquoi il s'est trouvé, dans le caucus
libéral, une majorité qui a forcé le ministre de la
Justice à avoir l'air aussi ridicule qu'il avait l'autre soir lorsqu'il
a dû parrainer le projet de loi no 2, et nous demander à nous
pourquoi on arrivait.
Je vous rappelle, M. le Président, que ce député
qui intervient à tort et à travers n'a jamais ici en cette
Chambre et j'aimerais bien l'entendre voulu protéger les
locataires du Québec. Je ne l'ai jamais entendu intervenir et
défendre le projet de loi 59, probablement parce qu'il se tenait parmi
ceux qui s'apprêtaient à le saccager. Il a laissé le
ministre de la Justice annoncer sa réforme, et par la suite, en
coulisse, en montant ses gars et en contrôlant son caucus, après
que le ministre eut fait un
pitre de lui et annoncé qu'il irait jusqu'au bout avec cette
réforme, il s'est arrangé, en coulisse c'est sa
façon de travailler pour saccager le projet de loi.
Le ministre est revenu avec les projets de loi 78, 79. Cette fois, il
s'attendait bien que la réforme était arrivée. Il est
arrivé que cela ne s'est pas produit quand même. Le chef des
"backbenchers" libéraux, le roi, le valet du gouvernement s'est soumis
encore une fois au même appel, à la même volonté et,
encore une fois, a réprimandé ceux qui, parmi ses
députés, voulaient probablement s'exprimer, parce qu'il s'en
trouve, parmi les députés libéraux, de ces gens qui
représentent largement une majorité de locataires.
C'est le choix que nous avons, au cours de ce débat. Ce sont les
locataires eux-mêmes, comme je vous le rappelais, M. le Président,
dans le texte que j'ai déposé tout à l'heure, ce sont les
locataires eux-mêmes qui, même lorsque nous étudiions le
projet de loi 59, qui était parrainé par un ministre du
gouvernement libéral, nous disaient: Cela ne se peut pas, il va se
produire quelque chose ou bien on ne comprend plus rien à la
politique.
Ils comprennent beaucoup à la politique, ils savent qu'il ne
suffit pas qu'un ministre dépose une projet de loi. En effet, le fait de
déposer un projet de loi est souvent le début d'une bataille et
non pas la fin. C'est alors que tous les intérêts
économiques qui grenouillent en coulisse, tous ceux qui ont leurs
entrées directes via la caisse électorale du parti, toutes ces
pressions qui peuvent se faire, c'est alors qu'elles se mettent à jouer,
et nous en avons aujourd'hui le triste résultat.
Nous devons nous contenter d'une réforme qui ne fait que mettre
à jour ce que la jurisprudence, dans la plupart des cas du code civil,
avait déjà reconnu, M. le Président. C'est une mise
à jour des droits du locataire que les forces politiques et
l'organisation des citoyens avaient simplement fait gagner au cours des
années. Mais, en aucun temps, il ne faut considérer le projet de
loi no 2 comme une véritable réforme et une loi assurant la
protection des locataires québécois. Merci, M. le
Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, à l'ordre!
Le chef de l'Opposition.
M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN: M. le Président, je voudrais commencer cette
intervention par une sorte de revue des événements depuis 1970,
alors que fut présenté la projet, alors que, du moins, le
ministre de la Justice avait promis une réforme dans le domaine de la
loi sur les loyers.
En 1972, sans doute, de la part du ministre, dans une perspective de
volonté d'enfin doter les Québécois d'un véritable
code des loyers, sans doute aussi à la suite de très longs
travaux de fonctionnaires honnêtes et compétents, nous
étions témoins, en 1972, de la première lecture du bill
59, qu'on appelait communément le code des loyers.
Ce bill nous avons dit à l'époque et nous avons
redit à quelques reprises, au cours de ce débat à
quel point nous étions disposés à l'appuyer, à quel
point il comportait des éléments novateurs par rapport au
laisser-faire économique et social qui caractérisait le droit
antérieur.
Ce bill prévoyait, si je puis me permettre un bref
résumé et un bref rappel de ses principales dispositions, d'abord
un tribunal administratif siégeant en première instance et,
venant chapeauter ce tribunal administratif comme juridiction d'appel, un
tribunal des loyers qui, si ma mémoire est bonne, se trouvait
rattaché à la cour Provinciale.
On avait donc, sur le plan institutionnel, créé deux
tribunaux, dont l'un était rattaché à la cour Provinciale
et dont le premier celui de première instance était
un tribunal de type administratif, où la procédure est
évidemment beaucoup plus expéditive et où on peut obtenir
des résultats beaucoup plus tangibles dans la protection des locataires,
notamment, mais peut-être aussi des locateurs lorsqu'il s'agissait de
protéger des droits qui leur étaient également reconnus
par ce bill 59.
En second lieu, il convient de souligner l'applicabilité
universelle de la loi d'un point de vue territorial. Le code des loyers avait
cet immense avantage qu'il ne comportait pas des énumérations sur
lesquelles on pouvait toujours revenir, qui pouvaient éventuellement
entraîner toutes sortes de suppressions par rapport à la liste. Il
était d'application uniforme et universelle, sauf évidemment pour
une ou deux exceptions, comme par exemple les logements de moins de deux ans ou
encore les municipalités où moins de 50 locataires étaient
concernés.
La troisième caractéristique importante de ce bill
et je ne les mentionne surtout que pour montrer les carences, par la suite, du
projet actuel par rapport à cet excellent code qui nous était
donné à l'époque qui était peut-être
la principale, était qu'on nous proposait un contrôle des
loyers.
Pour arriver à ce contrôle des loyers, dispositions qui,
pour la première fois, allaient à l'encontre du laisser-faire
traditionnel, de ce qu'on appelait euphémistiquement la liberté
contractuelle. Pour la première fois, on voyait apparaître un
certain nombre de moyens de contrôle qui n'ont jamais existé
auparavant ou qui existaient sous des formes beaucoup moins
détaillées, beaucoup moins précises.
Par exemple, la création d'un registre des loyers et de leur
coût, tenu par la commission. Deuxièmement, l'augmentation maximum
de 5 p.c. du prix des loyers. Une entente d'augmentation pouvait intervenir
évidemment entre les parties, si elle était de moins de 5
p.c.
Dans le cas, dis-je, d'une augmentation impé-
rieuse, le locateur pouvait obtenir une décision de la
commission, sinon le locataire pouvait toujours contester l'augmentation. Une
autre...
M. LESSARD: M. le Président, encore pour vous démontrer
que les libéraux s'occupent énormément de ce projet de
loi, la Loi des locataires, je vous invite à vérifier si nous
avons quorum.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Qu'on appelle les députés !
Le député de Sauvé.
M. MORIN: M. le Président, je suis prêt à m'excuser
auprès des collègues de l'Assemblée du caractère un
peu technique de toute cette rétrospective. J'admets que ce n'est pas ce
qu'il y a de plus passionnant. Moi-même, j'ai dû faire un effort
pour m'astreindre à passer au travers de ce dossier, et ce n'est pas le
plus intéressant que j'aie eu entre les mains.
Et forcément, ce n'est pas la loi la plus stimulante que nous
ayons eue devant nous. Seulement, il convient de l'analyser de très
près.
La quatrième caractéristique de ce projet, de ce code des
loyers, auquel est-il besoin de le rappeler au ministre nous
avons apporté tout notre appui à l'époque, c'était
la date uniforme de cessation des baux le 30 juin, ce qui constituait une
innovation extrêmement utile, surtout dans les grandes villes.
Cinquièmement, nous allions être dotés à
compter de ce moment de normes d'évaluation de la valeur locative, chose
qui, vous le savez, fait grandement défaut, chose qui entraîne des
abus flagrants. Enfin, nous étions aussi dotés de normes de
maintien dans les lieux et de prolongation judiciaire du bail dans certaines
conditions.
Nous étions également pourvus d'une possibilité
pour un nouveau locataire de faire réduire le montant du loyer.
Evidemment, il faut interpréter cette disposition par rapport aux autres
dont j'ai parlé, notamment les normes d'évaluation de la valeur
locative.
Egalement, on prévoyait des conditions particulières
à la reprise de possession du local par le locateur, les rares cas de
reprise de possession étaient fixés par la loi.
Le cas de résiliation du bail et d'expulsion du locataire
était également fixé par la loi. Et enfin, soulignons la
dernière caractéristique importante. Je laisse de
côté toutes les autres caractéristiques moins
essentielles.
Il y avait dans ce projet des dispositions d'ordre public qui
concernaient le prix fixé par la commission, le refus de louer en raison
de la race, de la couleur, de la religion, le refus de louer en raison du
nombre d'enfants, toutes dispositions d'une très grande portée
sociale. Or, que s'est-il passé à la suite de ce code des loyers
dont on peut voir, par le résumé que j'en ai fait, qu'il
constituait et il fallait en rendre hommage au ministère de la
Justice et à l'auteur du projet de loi une mesure vraiment
progressiste par rapport au droit des loyers que nous avons tous appris sur les
bancs de l'école, sur les bancs des facultés?
Il s'est produit qu'à l'étape de l'étude en
commission, les locataires, eux, se sont dit satisfaits, même fort
satisfaits du projet de loi et ont présenté quelques suggestions
mais qui n'allaient pas au coeur du projet de loi, des suggestions portant sur
des améliorations de détail. Tandis que les propriétaires
ont comparu devant la commission, les propriétaires, mais aussi les
courtiers, les constructeurs, et ils l'ont fait pour s'élever avec
j'allais dire avec violence, je pense que c'est exact, on en a assez
parlé à l'époque violence contre le projet et en
particulier contre un certain nombre de dispositions qu'ils
interprétaient comme étant contraires à leurs droits les
plus traditionnels, les plus stricts, comme étant des atteintes aux
principes soi-disant sacro-saints de la liberté contractuelle. Ils
s'élevaient en particulier contre le contrôle du jeu de l'offre et
de la demande qui, enfin, se trouvait réglementé. Ils
s'élevaient contre les limitations imposées au locateur quant au
choix des locataires. Ils s'élevaient contre la limite maximum de
l'augmentation de 5 p.c. du prix des loyers et, naturellement, ils ont fait
valoir que ce projet constituait ou entraînait une brèche
et, reconnaissons-le, c'était vraiment le cas, c'était le but
même du projet une brèche dans le principe que j'estime,
pour ma part, désuet sur le plan de la location, le principe de la
liberté contractuelle.
Devant ces protestations qui ne venaient pas, encore une fois, des
locataires mais surtout des locateurs, des propriétaires, et de tous
ceux qui sont intéressés et de tous ceux qui grenouillent autour
de la construction, le gouvernement a décidé de retirer ce projet
de loi 59. Cela a été le commencement de la reculade, le
commencement de la glissade qui nous mène aux deux projets qui sont
devant nous aujourd'hui.
Seconde étape, je m'excuse, combien de temps me
reste-t-il, je voudrais être sûr d'avoir le temps.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Sept minutes.
M. MORIN: Sept minutes! Quand on parle, le temps passe vite, M. le
Président, c'est une chose que je commence à apprendre dans cette
Chambre. Plus vite que quand on doit écouter.
En décembre 1972, nous nous sommes trouvés devant deux
nouveaux projets de loi, les projets de loi 78 et 79 qui, comme je viens de le
souligner, constituaient par rapport au projet antérieur, par rapport au
projet de loi 59 un recul considérable, sur plusieurs points. Tout
d'abord, on créait, bien sûr, une chambre des loyers à la
cour Provinciale, mais on abandonnait ce dispositif administratif dont je
parlais tout à l'heure, beaucoup plus expéditif, qui
permettait d'ouvrir et de fermer un plus grand nombre de dossiers. On
abandonnait je m'excuse, tout à l'heure, il me reste sept
minutes, vous aurez l'occasion de me reprendre si j'ai mal
interprété vos projets, M. le ministre, j'espère que vous
le ferez, parce que je ne demande qu'à être éclairé
et on était témoin également de l'abandon de
plusieurs mesures prévues dans le projet de loi 59, notamment le seuil
maximum d'augmentation de 5 p.c.
Donc sur ce point, on donnait raison aux pressions du lobby de la
construction et du lobby des propriétaires. 2) Les maisons de moins de
cinq ans n'étaient plus couvertes, encore une reculade. 3) La Commission
des loyers n'avait plus à tenir les registres des loyers et des prix,
comme c'était le cas antérieurement dans le projet 59. 4) On
voyait disparaître la date du 30 juin comme date de cessation uniforme
des baux.
On le voit bien, quand on regarde les projets de près, M. le
Président, ça saute aux yeux. A moins d'être vraiment
complètement aveugle ou d'être de mauvaise foi, je ne vois pas
comment on peut interpréter autrement qu'un recul devant les pressions
ces modifications apportées au projet. Evidemment, lors de
l'étude en deuxième lecture, il ne faut pas s'étonner que
les locataires aient affiché leur déception, comme ils
l'affichent encore devant les bills 2 et 3 qui nous sont soumis à cette
session, tandis que les propriétaires eux n'étaient pas encore
satisfaits. Ce bill édulcoré contenait encore trop de
restrictions par rapport au laisser-faire traditionnel.
Je voudrais dire deux mots de la réimpression des bills 78 et 79.
On y voyait apparaître un bail type, disposition contre laquelle je n'ai
personnellement rien, à condition que le bail type contienne des
dispositions qui sont vraiment favorables aux locataires. On y apportait aussi
certaines précisions à quelques articles et puis aussi
l'introduction de mesures d'ordre public.
Mais, j'en viens rapidement aux bills 2 et 3 qui sont devant nous et
surtout, évidemment, en insistant sur le bill 2. Le ministre de la
Justice nous a annoncé la formation d'un groupe de recherche, mais on
peut se demander quel sera l'objet de la recherche. J'aimerais bien que le
ministre nous offre quelques précisions là-dessus. Quels sont les
facteurs nouveaux qui n'existaient pas lors des recherches qui ont mené
au bill 59? Je me permets de noter au passage ici une chose qui m'a
frappée.
Comment se fait-il que le sous-ministre, M. Alary, ait
déclaré aux locataires avoir appris le retrait du bill 79 par la
voie des journaux? Cela est une chose qui m'a beaucoup frappé en
feuilletant le dossier. C'est une chose qui m'a mis la puce à l'oreille.
Peut-être le ministre pourra-t-il me renseigner là-dessus.
Il existe une différence considérable de contenu entre la
réimpression du bill 78 et l'actuel bill no 2. Certains articles ont
été enlevés en conséquence du retrait du projet de
loi 79 et se retrouvent dans le projet de loi no 3, qu'on nous dit temporaire.
Cependant, M. le Président, on a profité de l'occasion pour
soustraire à notre attention certains éléments qui avaient
été apportés par la réforme proposée et qui
étaient à mon avis parfaitement justifiables, même dans
l'optique de ce retour en arrière que constitue le bill no 2.
En premier lieu, on a omis de reprendre l'article 1664 1), si ma
mémoire est bonne c'est bien le numéro, qui fixait les normes de
détermination de la valeur locative d'un local d'habitation. Ces normes
n'existent pas actuellement. Elles n'existent ni dans le code civil, ni dans la
Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et
propriétaires.
Deuxième caractéristique. On a omis de reprendre l'article
1664 du bill 78, version réimprimée, qui donnait à un
nouveau locataire la possibilité de s'adresser au tribunal pour faire
réduire le prix du loyer si celui-ci est établi.
La loi de la Commission des loyers prévoit aux articles 29 b), c)
et d) qu'un nouveau locataire peut faire une demande de révision du prix
seulement dans les cas où le loyer de ce logement particulier a
déjà été fixé par une ordonnance de la
commission.
Dans l'optique d'une refonte de notre législation en
matière de louage de chose, il est aberrant que cette disposition
restrictive subsiste.
En troisième lieu, il est important de noter que la disparition
énoncée à l'article 1665 c) du bill 78, encore une fois, a
pris le chemin des oubliettes. Cet article de loi interdisait aux parties sous
peine de nullité de convenir d'une augmentation de loyer en cours
est-ce que je peux finir simplement cette phrase, M. le Président
de bail. Cette disparition ayant pour but de protéger le locataire
contre toute pression du locateur ne faisait certainement pas l'affaire de ces
derniers, évidemment. Il n'est donc pas étonnant que le
gouvernement l'ait retiré et je dis en conclusion que l'histoire de
toute cette législation, la chronologie des événements
nous le révèle, a été l'histoire d'un recul
constant sur les dispositions essentielles qui avaient pour but de
protéger les locataires. Le gouvernement, dans cette affaire, a fait le
jeu, consciemment ou inconsciemment, je ne veux pas le savoir, des
propriétaires et des constructeurs.
Merci, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): L'honorable député de
Saint-Jean.
M. Jacques Veilleux
M. VEILLEUX: M. le Président, j'ai écouté
attentivement tout à l'heure le député de Saint-Jacques
nous parler des problèmes qu'affrontaient les locataires dans son
comté, le
comté de Saint-Jacques. Il ne faudrait quand même pas
oublier et je ne conteste pas les problèmes qu'il a pu soulever
tout à l'heure en ce qui concerne les locataires de son comté
de prendre en considération les problèmes que peuvent
avoir les locataires, même les petits propriétaires dans des
comtés comme le mien.
Peut-être que, dans le comté de Saint-Jacques, tous les
propriétaires sont, soit Montreal Trust, Royal Trust, etc., mais dans un
comté comme le comté de Saint-Jean, je tiens à vous dire
que, bien des fois, le propriétaire est un travailleur qui gagne
à la sueur de son front un salaire normal chaque semaine, qu'il
construit bien souvent de ses propres mains sa maison le soir et les fins de
semaine et pour l'aider à assumer les obligations du fait qu'il se
construit une maison, le petit propriétaire de mon comté doit
louer le sous-sol pour assumer ses obligations.
Lorsqu'on discute d'une loi comme celle qui est devant nous, louage de
chose, une loi ne doit pas uniquement protéger une catégorie
d'individus, mais doit protéger toutes les catégories
d'individus. Vous devez, d'une part, faire plaisir à mon collègue
et voisin, le député de Laprairie, il y a des locataires et il y
a des locateurs.
J'ai le très nette impression, parce que cela fait quand
même un certain temps que nous discutons de cette loi, non seulement
parce qu'elle a été présentée ici à la
Chambre, mais, comme le disaient si bien nos collègues du parti
séparatiste, parce que nous en avons discuté... Il n'y a aucune
gêne là-dessus et c'est normal que, dans le processus de
présentation d'une loi, le ministre discute d'un tel projet de loi avec
les députés du Parti libéral, notamment.
Nous avons discuté des problèmes qui avaient
été connus lors des discussions à la commission
parlementaire et je tiens à vous dire que les locataires de mon
comté et les petits propriétaires de mon comté n'avaient
pas les moyens de venir ici à Québec pour soumettre à la
commission parlementaire leurs problèmes et c'est là qu'ils ont
demandé à celui qui vous parle, le député du
comté de Saint-Jean, de soumettre au ministre qui parrainait ce projet
de loi les problèmes de ces locataires et de ces propriétaires du
comté de Saint-Jean.
Les problèmes que les gens de mon comté rencontrent, je
les ai soumis au ministre de la Justice, en l'occurrence, et mes
collègues des autres comtés semblables au mien, des comtés
ruraux, semi-ruraux ou semi-urbains en ont fait autant. Compte tenu de cela, le
ministre a apporté quelques modifications et des modifications mineures,
très mineures au projet de loi qu'il avait déjà soumis
précédemment à l'Assemblée nationale. Dire que ce
projet de loi détruit complètement tous les autres projets de loi
déposés par le ministre de la Justice, ici à
l'Assemblée nationale, M. le Président, tenir de tels propos,
c'est simplement de la démagogie.
J'ai la très nette impression que ceux qui tiennent ces propos
n'ont pas pris la peine de relire attentivement le projet de loi que nous avons
devant nous, de relire attentivement les projets de loi
précédents du ministre de la Justice, parce qu'ils se seraient
rendu compte que les problèmes qui ont été soulevés
à la commission parlementaire, à l'Assemblée nationale,
les problèmes que mes locataires dans le comté de Saint-Jean et
les petits propriétaires ouvriers du comté de Saint-Jean ont
soulevés et que nous avons soumis au ministre de la Justice, ils se
rendraient facilement compte que ce projet de loi répond très
adéquatement aux problèmes soulevés par les locataires et
les propriétaires du comté de Saint-Jean, en tout cas.
Le député de Saint-Jacques a été élu
par les électeurs du comté de Saint-Jacques, il parle
supposément au nom des électeurs du comté de
Saint-Jacques. Je ne pense pas qu'il puisse dire que celui qui vous parle ne
parle pas au nom des électeurs du comté de Saint-Jean.
Il n'y a pas seulement les députés du parti
séparatiste qui se tiennent à l'affût des problèmes
de leurs électeurs, mais je tiens à vous dire que, si le Parti
libéral a été capable en 1973 de faire élire 102
députés au lieu de 72, c'est parce que les 72 entre 1970 et 1973
se sont tenus près de la population de leur comté, ont
été capables d'apporter, à l'intérieur du caucus,
les problèmes de leurs électeurs. Les ministres ont eu assez de
maturité pour comprendre les problèmes qu'on soulevait et ont
accepté d'apporter d'eux-mêmes, à l'Assemblée
nationale, des amendements appropriés. Je ne crois pas qu'agir de cette
façon, c'est se vendre au Montreal Trust, c'est se vendre au Royal
Trust. Je dirais qu'un gouvernement qui agit comme celui-là se vend aux
électeurs de chacun des comtés.
M. le Président, je suis fier de me vendre pour les
électeurs du comté de Saint-Jean. Mes 101 collègues sont
fiers de se vendre pour les 101 comtés où ils ont
été élus.
J'ai écouté attentivement mes collègues du parti
séparatiste, ils n'ont fait que jeter leur fiel sur les
propriétaires. Je répète encore une fois que dans des
comtés comme le mien, nous avons de petits propriétaires et ce
qu'ils ont dit, tout à l'heure, contre les propriétaires,
retombent sur ces propriétaires des comtés comme le mien. Je vous
dis qu'ils sont mieux de ne pas venir tenir ces propos dans le comté de
Saint-Jean, parce que les travailleurs propriétaires du comté de
Saint-Jean vont les refaire sortir du comté, exactement comme on a fait
au représentant du parti séparatiste dans le comté de
Saint-Jean, en 1970 et en 1973.
Les discours que tiennent les représentants du parti
séparatiste prouvent exactement ce que j'ai entendu de la part d'un de
ces représentants devant des étudiants en science politique, ici
même au Parlement: Moi, je suis baveux, je vais continuer à baver
sur les députés du Parti libéral, les gens m'aiment comme
ça.
M. le Président, je m'engage à la prochaine
élection à aller démontrer aux électeurs de ce
comté que ce n'est pas comme ça qu'on travaille pour eux, en
bavant sur des collègues, en disant des mots antiparlementaires, en
sacrant contre ses collègues ici à l'Assemblée
nationale.
A les entendre parler, ce projet de loi va permettre aux
propriétaires d'exiger n'importe quel loyer, n'importe quelle
augmentation de loyer aux locataires. Je dirais qu'ils ont encore une fois
menti.
D'ailleurs, je laisse au ministre de la Justice le soin de
répondre aux "faites ceci, faites cela" de ses collègues du parti
séparatiste.
En terminant, M. le Président, à l'instar de mes 101
autres collègues, je tiens à féliciter le ministre de la
Justice pour la présentation de ce projet de loi qui diminuera
énormément les problèmes qu'ont et les locataires et les
locateurs dans la province de Québec. Même s'il n'y avait qu'un
propriétaire qui abuse de l'ensemble des locataires, ce projet de loi a
sa raison d'être; même si un locataire abuse de ses droits
vis-à-vis d'un propriétaire, ce projet de loi a sa raison
d'être et il protège à la fois le propriétaire et
à la fois le locataire. Merci, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A moins qu'il n'y ait d'autres
députés qui veuillent parler, le ministre peut exercer son droit
de réplique.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, j'ai écouté avec un
intérêt différent les honorables opinants qui se sont
exprimés sur ce projet de loi. J'ai admiré, dans certaines
interventions, celle du député de Saint-Jean en particulier,
même celle du chef de l'Opposition, un désir d'établir un
équilibre approprié dans le domaine des relations entie
locataires et prorpiétaires. Mon intérêt n'a pas
été le même et j'ai pris la liberté de m'absenter au
moment de certaintes interventions à qualité démagogique
que nous sert en particulier le député qui se décrit comme
baveux et qui est content de se conférer ce titre puisque j'avais le
plaisir de lire une déclaration de sa part dans les journaux
récemment.
M. le Président, dans un certain nombre de ces interventions que
j'ai entendues, tout ce que l'on m'a dit c'était que le gouvernement et
que moi en particulier, nous avions reculé sur ces projets de loi, sur
un certain nombre de mesures. Ce n'est pas mon attitude comme ministre de la
Justice d'arriver avec des projets de loi, surtout dans des domaines
fondamentaux de l'activité sociale ou économique, de les
soumettre au Parlement, de demander au leader du gouvernement qu'ils soient
déférés à des commissions parlementaires pour plus
amples études avec l'attitude qu'au bout de ces com- missions
parlementaires le projet de loi doit être maintenu dans sa forme
originale sinon mon orgueuil va avoir subi une blessure ou une entaille
terrible. Au contraire, M. le Président, je pense que les commissions
parlementaires sont justement faites pour permettre d'améliorer, de
corriger, de se sensibiliser à un certain nombre des problèmes
qui peuvent surgir dans la discussion. Si j'ai joué le jeu des
commissions parlementaires dans ce domaine-là, peut-être que je
devrais m'en repentir, M. le Président, alors qu'aujourd'hui tout ce que
j'entends du Parti québécois, c'est qu'il y a eu recul sur toute
la ligne. Mais on oublie les secteurs dans lesquels justement il y a eu des
améliorations apportées au projet de loi en question.
Je ferais remarquer, par exemple, au chef de l'Opposition, qui n'a pas
été mêlé directement à ces discussions, que
dans le projet original du bill 59 il n'était pas question de bail type.
Cela a été une amélioration qui a été
apportée et ceci à la suggestion d'une association de locataires
qui est venue nous exposer l'utilité d'une telle réforme.
M. le Président, quitte à discuter le contenu du bail, je
pense que le bail type qui est proposé dans le projet de loi no 2 est
passablement strict. Les clauses sont d'ordre public, les parties n'y peuvent
déroger, car presque tous les aspects du contrat entre locataire et
propriétaire sont prévus.
Par conséquent, on ne peut sûrement pas se plaindre du fait
que le gouvernement, au cours du processus des commissions parlementaires, ait
amélioré la situation sous ce rapport et dans le but c'est
évident quand on parle de bail-type bien plus de protéger
les locataires que les propriétaires. Parce que comme je l'ai dit dans
mon exposé en deuxième lecture, mon exposé principal, il
est évident que ce sont les locataires qui peuvent le plus souvent avoir
à se plaindre de différentes formules de baux qui leur sont
imposées par des propriétaires qui utilisent indûment leur
force économiquee.
Par conséquent, dire que le gouvernement a reculé,
à mon sens, M. le Président, c'est une absurdité, c'est
une fausseté, ce sont des propos que l'on tient de façon à
réduire l'impact important de ces projets de loi.
En deuxième lieu, M. le Président, le chef de l'Opposition
a dit que nous avions abandonné la date du 30 juin pour la terminaison
des baux et c'est exact, que, dans la version originaire, le 30 juin
apparaissait, si je me rappelle bien, dans le projet de loi. Mais au cours de
la discussion, nous nous sommes rendu compte que d'aller remplacer la date du
30 avril par le 30 juin, avec tous les déménagements massifs se
produisant à une date ou à l'autre, cela n'améliorait pas
complètement les choses.
C'est la raison pour laquelle, M. le Président, nous avons
décidé d'utiliser une autre formule qui va repousser la fin des
baux en 1975, de deux mois, et qui va faire que ces baux vont se terminer le 30
juin mais sans que, pour les baux
indéterminés, la date se trouve au code civil et, par
conséquent, qu'elle acquière ce caractère sacro-saint
qu'avait acquise, précédemment, dans notre ancienne
législation, la date du 30 avril ou du 1er mai.
Par conséquent, encore un point sur lequel l'Opposition se
trompe. Il y a eu amélioration. Nous changeons cette coutume du 1er mai
mais nous la changeons d'une façon différente, parce que la
technique législative utilisée dans le projet originaire
n'était pas appropriée et aurait entraîné un certain
nombre d'inconvénients dont justement, nous voulions nous
débarrasser, c'est-à-dire les déménagements en
masse, à date fixe, au Québec.
M. le Président, finalement, dans le projet de loi original, il
est évident qu'il s'agissait d'une commission administrative qui
administrait la loi. Nous avons, au fur et à mesure de la discussion,
changé cette disposition parce que nous avons pensé qu'il serait
préférable de rattacher l'adjudication en matière de baux
au système judiciaire en général et non pas laisser cela
à une commission administrative.
J'admets que sur ce point, les deux écoles de pensée
peuvent se soutenir. Certains peuvent dire: II est préférable de
rendre permanent un organisme comme la Régie des loyers. D'autres
peuvent dire: Non, dans votre optique de réforme du système
judiciaire, l'idée de créer cette chambre des loyers était
peut-être une idée supérieure à la première
idée d'une commission administrative.
Mais ce n'est pas parce que nous avons changé d'idée sur
cette formule que nécessairement, cela équivalait à un
recul ou au mépris des droits des locataires. Je dis donc, M. le
Président, que la décision dans ce domaine peut être
discutée et discutable. Je suis le premier à l'admettre.
Maintenant, quant à dire que les droits des locataires ne sont
pas adéquatement protégés à l'heure actuelle
pendant la poursuite des études sur le système de la fixation
judiciaire des loyers et sur le droit du locataire d'être maintenu dans
les lieux et sur la création d'une chambre des loyers, eh bien, M. le
chef de l'Opposition, sachez que les droits des locataires, cette année,
reçoivent l'entière et complète protection par le bill no
3, avec les amendements que je vais y apporter; ce qui fait que la situation,
à l'heure actuelle, elle n'est pas faite, en pratique, pour faire
souffrir aucun locataire du Québec. Au contraire, M. le
Président, elle le protège mieux qu'à aucun endroit du
Canada, alors que nous vivons cette période inflationnai-re que nous
connaissons et qui risque de toucher un certain nombre de locataires mais qui
auront un droit d'appel à cette Régie des loyers tellement
admirée, tellement aimée parce que, au fond, on voulait cette
formule dans certains milieux lorsque nous avons eu à présenter
le bill 59.
Il est vrai que dans l'intervalle, j'avais pensé, à la
suite de certaines représentations qui m'avaient été
faites, que nous serions mieux avec une chambre des loyers.
Mais puisque nous revenons à la Régie des loyers, pourquoi
s'en plaindre à l'heure actuelle de l'autre côté de la
Chambre? Pourquoi ces pseudo-associations de locataires qui sont constamment
déçues, qui ne seront jamais heureuses des projets de loi que le
gouvernement apporte, qui trouveront toujours de la critique à
formuler?
Est-ce qu'on s'imagine que moi, ça m'affecte de voir ça
dans les journaux, ces déclarations d'associations de locataires qui
existent probablement exclusivement sur papier? Cela ne me fait ni chaud ni
froid, parce que je légifère pour les locataires réels,
pas pour les associations de locataires et pas pour les associations de
propriétaires non plus.
J'ai conscience de faire mon devoir tel que je l'entends. Cela n'est pas
parce que je vois des titres de déception, de recul et de ci et de
ça que ça m'impressionne. Heureusement que j'ai la peau un peu
plus épaisse que ça et qu'à l'heure actuelle, je peux me
dire que je ne légifère pas en fonction d'un certain nombre de
titres de journaux ou de déclarations de pseudoassociations qui n'ont
aucun caractère représentatif.
J'ai conscience malgré ce que l'on peut en dire de l'autre
côté de la Chambre, malgré ce que l'on peut en dire dans
certaines déclarations parues dans les journaux que nous faisons
avancer la législation québécoise dans les relations entre
propriétaires et locataires, et que cette tâche, elle n'a
été entreprise par aucun gouvernement depuis cent ans, depuis que
la Confédération existe.
Est-ce qu'on s'imagine que nettoyer les écuries d'Augias, que
renouveler tout ce secteur extrêmement large, extrêmement
compliqué qui touche tout le monde, c'est facile? Ce n'est pas facile et
moi, tant que je serai ministre de la Justice, je ferai mon devoir comme je
crois devoir le faire en prenant en considération les avis qui peuvent
m'être donnés et qu'il me parait utile de retenir.
Il est vrai que nous n'avons pas rendu permanent pour cette année
cet arbitrage judiciaire des loyers, parce que nous avions encore des
hésitations devant la permanence de cette formule, parce que nous
n'étions pas encore persuadés complètement que cette
innovation, par rapport à tout ce qui existe dans le monde, que
ça méritait d'être retenu d'une façon absolue et
d'être incorporé au chapitre du code civil.
Et c'est la raison pour laquelle nous avons créé ce groupe
de travail qui se penchera sur la question et qui nous rapportera une
étude motivée, une étude exhaustive de la situation, qui
étudiera cette affaire sous son aspect juridique, son aspect social et
son aspect économique, et je pense que le gouvernement pourra
alors prendre ses responsabilités d'une façon
décisive et d'une façon qui sera claire, nette et précise
pour l'avenir.
Je dis donc en terminant que la législation que nous
présentons aujourd'hui, représente véritablerment un
progrès par rapport à ce qui a existé. Elle est bien plus
qu'une mise à jour de ce qui existait dans la jurisprudence parce
qu'après tout, s'il fallait s'en rapporter aux connaissances juridiques
du député de Saint-Jacques, je pense que cette Chambre se
laisserait facilement tromper et conduire dans l'erreur.
Au contraire, l'incorporation de la législation touchant les
relations entre propriétaires et locataires dans le code civil est une
législation à caractère non statutaire qui devrait plaire
au chef de l'Opposition, lui, ce brillant juriste, éminent
universitaire, avant d'arriver dans cette Chambre.
Est-ce que le chef de l'Opposition ne voit pas l'intérêt
qu'il y a de reprendre ce chapitre entier du code civil plutôt que de se
contenter d'une vague législation statutaire établissant un vague
organisme administratif comme la Régie des loyers? Nous sommes
allés au fond des choses et dans ce que nous étions sûrs
d'accomplir à l'avantage des citoyens du Québec dans leur
ensemble. Nous avons progressé dans ce qui restait discutable et
discuté, dans ces parties sur lesquelles nous n'avions pas conclu d'une
façon définitive, c'est-à-dire l'établissement de
cette formule permanente d'adjudication des loyers et du droit des locataires
d'être maintenus dans les lieux.
Nous avons décidé d'attendre cette étude que nous
allons faire faire et qui pourra nous renseigner plus adéquatement avant
que le gouvernement ne s'engage plus loin.
M. le Président, j'ai conclu mes observations, je n'ai rien
d'autre à ajouter sur le projet de loi 2. Maintenant, j'aurais
évidemment des observations à faire sur le projet de loi 3; elles
seront nécessairement très brèves parce que je crois que
l'ensemble du sujet a été exploré à l'occasion de
la deuxième lecture sur le projet de loi 2.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que la deuxième lecture sur
le projet de loi 2 est adoptée?
Adopté.
UNE VOIX: Vote enregistré.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Vote enregistré?
M. LESSARD: Non, non!
M. ROY:... si, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Qu'on appelle les
députés!
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Vote.
Vote de deuxième lecture
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion de
deuxième lecture du projet de loi no 2 concernant le louage de choses
veuillent bien se lever s'il vous plaft.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Mailloux, Saint-Pierre, Choquette,
Garneau, Phaneuf, Lalonde, Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Tetley,
Drummond, Lacroix, Forget, Massé, Harvey (Jonquière), Houde
(Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Kennedy, Bacon, Blank,
Lamontagne, Veilleux, Brisson, Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou),
Lafrance, Pilote, Ostiguy, Picard, Assad, Dionne, Faucher, Marchand, Harvey
(Charlesbourg), Larivière, Shanks, Springate, Pepin, Beauregard,
Bonnier, Boudreault, Boutin (Johnson), Caron, Denis, Déziel, Harvey
(Dubuc), Lachance, Lapointe, Lecours, Malouin, Massicotte, Mercier,
Pagé, Picotte, Sylvain, Tremblay, Verreault, Samson, Roy, Morin, Burns,
Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi).
LE SECRETAIRE: Pour: 69.
Contre: 0.
LE PRESIDENT: Le résultat est de 69 à 0.
Projet de loi déféré à la commission
M. LEVES QUE: Je propose que ce projet de loi soit
déféré à la commission parlementaire de la justice
et que nous puissions suivre les règles de la commission
plénière.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEVESQUE: Comme le projet de loi no 3 est intimement lié au
projet de loi no 2, je ferai la même référence une fois que
nous en aurons disposé pour que les deux projets de loi soient
étudiés en même temps à la commission parlementaire
de la justice.
DES VOIX: Adopté.
Projet de loi no 3 Deuxième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la
Justice propose la deuxième lecture du projet de loi no 3, Loi
prolongeant et modifiant la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires
et propriétaires.
DES VOIX: Adopté.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: Comme je l'ai dit tout à l'heure, je crois que le
débat sur le projet de loi no 2 nous a suffisamment permis d'explorer le
projet de loi no 3 par des incursions que vous nous avez permis de faire et que
nos collègues de l'autre côté de la Chambre nous ont permis
de faire et qu'ils ont d'ailleurs faites eux-mêmes.
Le projet de loi no 3 comporte cependant des amendements et je me
demande si je devrais les soumettre immédiatement en deuxième
lecture. Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'ils en changent essentiellement
le principe. Us sont dans le sens que tous les logements sont couverts,
où qu'ils soient au Québec, il n'y a pas de réserve, il
n'y a pas "d'opting-in et d'opting-out" de la part des municipalités.
C'est le sens des amendements que j'ai. Je les ai d'ailleurs annoncés en
gros. En fait, il s'agit d'une intégration de la loi d'urgence à
la loi s'appli-quant à la Régie des loyers et avec les
mêmes effets, et à peu près le même régime
juridique que nous avons connu au cours de l'année 1973. C'est l'objet
des amendements que je soumettrai tout à l'heure à la commission
parlementaire.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: M. le Président, comme l'a signalé le ministre
de la Justice, je suis d'accord avec lui là-dessus, la largeur du
débat que vous nous avez permis au moment de la loi no 2 que nous venons
d'adopter a fait que l'essentiel des commentaires que nous avions à
faire sur l'ensemble du problème de la protection des locataires a
été fait à cette occasion. Mais le projet de loi no 3
lui-même nous invite à faire ressortir quelques remarques plus
précises que nous n'avons pas eu l'occasion d'explorer lors du
débat du projet de loi no 2.
D'abord, en affirmant notre accord, comme nous l'avons toujours fait en
1970, en 1971, en 1972 et encore cette année avec cette reconduction de
la loi favorisant la conciliation entre locataires et propriétaires,
nous déplorons à nouveau l'absence de mécanisme permanent
de ce genre.
Puis-je vous le répéter à nouveau, le ministre
lui-même nous avait convaincus, lors de l'étude en commission
parlementaire du projet de loi no 59, que toutes les études, toutes les
analyses nécessaires à l'instauration d'un mécanisme
permanent avaient été faites, puisque, ministre responsable, il
avait été jusqu'à déposer un projet de loi à
l'Assemblée nationale?
Or, en annonçant cette reculade que sont les bills 2 et 3, il
nous dit qu'un nouveau groupe fera une nouvelle recherche devant conduire
à l'établissement prochain il nous avait dit la même
chose en 1970 et en 1971 d'un mécanisme permanent. Ce qui fait
que, sans mettre en doute la parole du ministre, puisque les règlements
me l'interdisent, je puis quand même prendre son affirmation avec un
grain de sel, si vous le permettez, puisque ça fait exactement quatre
ans que j'entends la même chose et qu'on se prépare probablement
à subir le même traitement en 1974.
Pour ce qui est des amendements qu'annonce le ministre, il nous avait
effectivement prévenus qu'il allait faire des amendements lors du projet
de loi no 2 et ces amendements sont dans leur pratique connus, non seulement de
l'Opposition officielle, mais de la population également. En effet, vous
vous souviendrez que, l'année dernière, à l'époque
où reposait sur la table le projet de loi 59, qui n'avait pas
été adopté lors de l'ajournement des Fêtes, le
ministre de la Justice avait été appelé à
présenter un projet de loi spécial dès la reprise de
février puisque certains propriétaires et on nous faisait
grief, tout à l'heure, d'avoir soulevé le problème
il s'est tellement bien soulevé lui-même dans le décor
québécois l'année dernière qu'il avait même
obligé l'Assemblée nationale à voter une loi
spéciale je dis donc que certains propriétaires, voyant
venir la fin du paradis, si vous voulez, la fin de l'ère de la jungle et
l'établissement d'un code des loyers qui visait nommément
à protéger les locataires, étaient allés à
certains endroits et le ministre en conviendra avec moi à
exiger des hausses abusives. Le truc était simple. Ils se disaient,
lorsqu'ils étudiaient le projet de loi 59: Si ce projet de loi est
adopté, à partir de l'année prochaine, toute hausse
supérieure à 5 p.c. devra être soumise à la
Régie des loyers et je devrai obtenir un consentement. Profitons donc de
ce que c'est encore la loi de la jungle; je puis profiter en invoquant parfois,
et avec raison, des motifs valables tels que la hausse des taxes dans les
municipalités ou, par exemple, pour ce qui concerne les loyers
chauffés, la hausse du combustible, valables. Mais, à partir de
motifs valables on extrapolait et on s'étirait un droit qui, finalement
constituait, pour le locateur, une injustice. Nous n'en avons pas en principe,
et je le répète, à l'intention particulière de
certains députés qui sont intervenus dans le débat, contre
l'augmentation de loyers dans le Québec, c'est un service, c'est un
besoin qui connaît une hausse comme à tous les endroits. Les
municipalités qui ont à donner un plus grand nombre de services
ont parfois à augmenter les taxes. Or, les propriétaires
normalement
ont à aller chercher une partie de cette augmentation des taxes,
et la plupart du temps, c'est la totalité avec profit, mais au moins ils
sont justifiés d'aller en chercher une partie dans une hausse des
loyers. Nous n'en avons pas contre cela et nous ne réclamons pas le gel
des loyers pour les quinze prochaines années au Québec. Je sais
qu'il se trouvera des députés pour interpréter notre
position sur les projets de loi 2 et 3 de cette façon. Je tiens à
réaffirmer ce que nous avons dit devant les hausses de loyers.
Certaines sont carrément abusives et celui qui peut l'affirmer
plus que moi dans cette Chambre, M. le Président, c'est le ministre de
la Justice. L'année dernière, devant ce fléau qui s'est
abattu je dois malheureusement me limiter, en particulier sur le
territoire de Montréal j'ai eu, à mon propre bureau de
comté, énormément de plaintes à cet effet. Le
ministre a été témoin de hausses qui allaient, à
certains endroits jusqu'à 20 p.c. à 25 p.c. sur le loyer annuel
de l'année dernière. J'avais donc de moi-même, M. le
Président, en janvier dernier, lors d'une conférence de presse,
demandé au ministre de la Justice d'intervenir, dès la reprise de
l'ajournement des Fêtes. Je ne prends pas à mon crédit le
fait que le ministre de la Justice avait soulevé un projet de loi
spécial dès la reprise des travaux en février dernier et
qu'il veut reconduire maintenant dans les amendements du projet de loi no 3.
Non, je n'ai pas cette prétention. Je sais que le ministre de la Justice
a eu bien d'autres pressions que la mienne, que celle du Parti
québécois à l'époque, même si nous avions
été le premier parti politique à en susciter
l'adhésion et à en réclamer l'adoption par
l'Assemblée nationale. Je sais bien que le ministre de la Justice a eu
plusieurs appels pour intervenir de son poste responsable de ministre de la
Justice pour protéger les locataires qui faisaient face à des
hausses abusives. Parmi ces appels, M. le Président, il y avait
probablement ceux de ce qu'il a appelé ces pseudo-associations qui ne
lui font ni chaud ni froid et dont il entend se débarrasser. Le ministre
de la Justice, dans sont droit de réplique, aura l'occasion de me
répondre à cette question. N'est-ce pas arrivé
l'année dernière, lorsque sont intervenues la
Fédération des associations de locataires, quelques associations
de locataires, dont celle d'Outremont, qui devait certainement concerner le
ministre de la Justice. Je peux en témoigner, dans le cas de celle
d'Outremont, parce que j'ai encore dans mes papiers l'appel qu'elle faisait en
même temps que le Parti québécois le demandait
l'année dernière. Mais peu importe, M. le Président,
peut-être que le ministre de la Justice est insensible aux besoins de ses
électeurs, je n'en sais rien.
Il s'est donc trouvé des associations, ce que le ministre de la
Justice appelle des pseudo-associations, qui ne lui font ni chaud ni froid qui,
l'année dernière, avaient demandé au ministre de la
Justice d'intervenir. Il était donc intervenu par une loi
spéciale qui avait marqué la fin de la session, qui avait
été ajournée à Noël, avant le début de
la nouvelle session et qui avait reçu, je crois, si ma mémoire
est fidèle, l'unanimité de la Chambre ou à peu
près, en tout cas l'adhésion du parti qui est aujourd'hui
l'Opposition officielle, j'en suis assuré puisque nous l'avions
réclamé.
Or, le ministre nous annonce les amendements qu'il entend
présenter lorsque nous serons en commission parlementaire et
j'espère, M. le Président que vous aurez l'honneur de
présider les travaux de la commission parlementaire de la justice.
M. le Président, il fallait bien que je dise cela pour être
applaudi par les libéraux. C'est la première fois que cela
m'arrive. Vous voyez, cela n'a pas pris de temps, que cela s'est
gâché.
Je dois vous dire, M. le Président, que les amendements qu'a
annoncés le ministre, donc que nous étudierons en commission
parlementaire, recevront probablement aussi nous attendrons d'en voir
quand même la lettre mais dans leur esprit, certainement,
l'adhésion de l'Opposition. Puisque la loi 3 se refuse à
créer un mécanisme permanent malgré les espoirs et les
justifications même de ce mécanisme que nous avait apporté
le ministre lors de la présentation de la loi 59, puisque nous devons
nous contenter d'une reconduite de cette loi vieille déjà de
plusieurs années, il est essentiel que les amendements annoncés
s'y trouvent greffés pour qu'elle soit la moins boiteuse possible.
Donc, M. le Président, nous apporterons notre consentement
à l'adoption du projet de loi no 3, mais nous annonçons
immédiatement et c'est peut-être à votre intention
plus particulière que, lors de cette étude du projet de
loi no 3 en commission parlementaire, le Parti québécois a un
certain nombre d'amendements à présenter. Il y en a de ceux-ci
qui nous en prévenons le ministre de la Justice pour qu'il ne nous
accuse pas de filibustering ou n'importe quoi apparaissent suffisamment
importants pour l'amélioration de cette loi pour que les deux membres de
la commission parlementaire et d'autres députés, je n'en doute
pas, de l'Opposition officielle recevront alors le consentement habituel pour
prendre la parole lors de la commission parlementaire.
On oubliera l'exception qui a marqué nos travaux au cours de la
fin de la session pour que les députés de l'Opposition aient
l'occasion de défendre avec vigueur certains amendements que nous
considérons essentiels à voir apportés au projet de loi no
3. Merci, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Cette motion de deuxième
lecture est-elle adoptée?
L'honorable chef de l'Opposition officielle.
M. Jacques-Yvan Morin M. MORIN: Merci. M. le Président, la
Loi
pour faciliter la conciliation entre propriétaires et locataires
a toujours été, dans le passé, d'application restreinte.
Elle était applicable, en effet, sur le territoire des
municipalités qui en faisaient la demande et certains types de
logements, vous le savez, étaient soustraits à la
compétence de la Commission des loyers.
Depuis plusieurs années, les groupements de locataires, que le
ministre affecte de qualifier de groupements de papier, dont certains sont des
groupements fort sérieux et qui ont à coeur... Oui, si j'ai bien
compris, ceux qui sont d'accord avec vous sont des groupements valables et ceux
qui sont en désaccord avec vous sont des groupements de papier. C'est
cela.
Qu'ils soient des tigres de papier ou n'en soient pas, M. le
Président, ces groupements de locataires et aussi les syndicats, les
corps intermédiaires réclament du gouvernement une loi
d'application universelle c'est-à-dire dont
l'applicabilité sur un territoire donné ne serait pas
laissée au bon vouloir des conseillers municipaux ce qui la
rendrait, on en conviendra facilement, d'application aléatoire.
En 1970, lors de l'étude du projet de loi sur la Régie des
loyers qui revenait encore une fois, faut-il le souligner, en fin de session,
le ministre de la Justice nous disait, en réponse à une question
du leader parlementaire de l'Opposition, à ce moment-là, le
député de Maisonneuve, dans les Débats de 1970, page 2135:
"Avant de rendre la loi applicable à tout le territoire du
Québec, il faudrait savoir si l'état de crise existe d'une
façon suffisamment généralisée pour que nous
devions abandonner le système en vertu duquel la décision finale
repose sur les autorités locales".
Or, à notre avis, M. le Président, cet état de
crise existe bel et bien sur l'ensemble du territoire. Au lieu de rendre la loi
universelle, comme nous aurions aimé qu'elle le soit, comme nous l'avons
toujours réclamé par le passé, on nous propose de donner
au lieutenant-gouverneur en conseil le pouvoir de la rendre applicable sur tel
ou tel territoire où elle ne le serait pas. Autrement dit, on
enlève la discrétion au autorités locales, aux conseils
municipaux et on la donne au lieutenant-gouverneur en conseil. Et on
prétend qu'il y a là une amélioration
considérable.
Je veux bien que ce soit peut-être un peu mieux, peut-être
un peu plus centralisé mais, en même temps, cela comporte des
désavantages que le ministre connaît bien. Nous croyons en tout
cas, qu'il s'agit là d'une disposition qui est dangereuse, compte tenu
de la faiblesse qu'a démontrée le gouvernement face aux
propriétaires lors des retraits successifs des bills 59 et 79.
M. le Président, s'il était facile aux associations de
propriétaires de faire pression sur les conseillers municipaux pour
obtenir l'"opting out", il ne sera pas tellement plus difficile, que je sache,
de faire pression sur le gouvernement pour obtenir que celui-ci rende la loi
inapplicable sur telle ou telle partie du territoire.
Le bill 3 qu'on nous présente maintenant contient de plus une
disposition visant à soustraire à l'application de la loi tous
les logements de moins de cinq ans. Nous aurons des choses à dire
là-dessus en commission tout à l'heure. Pour l'instant, je me
contente d'une critique générale du projet de loi.
Je vais vous donner l'occasion tout de suite après, de
répondre. Vous avez des amendements à apporter. Je vous laisserai
répondre tout à l'heure. Laissez-moi terminer, je ne veux pas
m'engager tout de suite dans un débat. En commission, nous allons avoir
amplement le temps de nous pencher là-dessus. Nous avons l'intention de
le faire article par article.
Donc, ce bill 3 contient une disposition qui permet de soustraire tous
les logements de moins de cinq ans à l'application de la loi. Et cette
disposition a été réintroduite après le bill 59,
sans doute c'est la seule interprétation qui nous paraisse
valable afin de plaire, une fois de plus, aux constructeurs et aux
courtiers qui avaient protesté récemment contre ces
dispositions.
Le gouvernement nous parle d'associations de locataires sur le papier,
mais il faut constater que les associations de propriétaires, de
courtiers et de constructeurs, elles, ne sont pas des tigres de papier.
Nous nous demandons sincèrement quels ont pu être les
fondements, disons logiques, d'une telle décision. Comment concevoir
qu'un propriétaire de maison neuve puisse avoir des augmentations de
charges tellement importantes, tellement imprévisibles, qu'il soit
malsain de le soumettre au contrôle de la Régie des loyers.
Il ne faut pas oublier que les deux projets de loi actuellement à
l'étude ne donnent pas à la régie le pouvoir de
réviser le loyer initial d'un appartement, la Régie des loyers
ayant un pouvoir seulement sur l'augmentation. Comment justifier que les
logements de moins de cinq ans n'y soient pas soumis? En stricte logique,
ça n'a pas de sens.
Et il faut sans doute interpréter cette disposition, non pas en
fonction de la logique, mais en fonction des intérêts qui ont fait
sentir leur pression sur le gouvernement.
On me permettra de rappeler les protestations de locataires de logements
neufs qui, suite à une publicité frauduleuse des promoteurs, ont
loué des logements qui ne répondaient pas aux descriptions du
prospectus. Ils se sont trouvés sans recours autres que les tribunaux
civils. Or, on sait que dans un domaine comme celui-là, avoir recours
aux tribunaux civils, c'est pour ainsi dire peine perdue en raison des
délais, en raison du coût que cela représente pour un
contribuable moyen, pour quelqu'un qui a déjà enfoui, très
souvent, presque toutes ses économies pour retenir un logement neuf et
qui se retrouve devant les tribunaux civils avec les frais d'avocat à
payer, avec des procédures à n'en plus finir et qui se trouve
finalement renvoyé aux calendes grecques.
Pour tout dire, nous n'avons pas beaucoup le
choix, nous allons également appuyer ce projet de loi, mais nous
allons proposer quand même des amendements. Et je voudrais terminer en
lisant un extrait du programme officiel du Parti québécois,
à la page 99. Nous nous engagions je voudrais lire ces
dispositions parce qu'elles résument bien ce que nous voudrions faire
dans ce domaine à protéger plus efficacement le
locataire.
Premièrement, en étendant la juridiction de la
Régie des loyers à tous les types de logement et,
deuxièmement, en lui donnant un droit de contrôle sur les taux des
loyers pour les assujettir à des barèmes fixés en fonction
du coût de la vie et du salaire minimum et pour qu'ils incluent le
coût de l'assurance-incendie et celui de
l'assurance-responsabilité; troisièmement, en lui permettant un
droit de recours à la Régie des loyers pour fins d'inspection ou
d'attestation et enfin, quatrièmement, dernière disposition
destinée à rendre plus efficace la protection du locataire, en
établissant une formule de bail type, formule de bail dont nous avons
parlé tout à l'heure au sujet du projet de loi no 2, projet de
bail type dont le ministre est très fier, mais dont nous avons dit qu'il
ne fallait pas simplement juger un bail type à son titre. Ce n'est pas
parce qu'on a dans la loi une disposition, une annexe qui dit bail type qu'on
peut simplement se féliciter de la chose. Encore faut-il voir ce qu'il y
a dans le fameux bail type.
M. le Président, peut-être devrais-je vous donner une
idée de ce que cette formule de bail type pourrait contenir. J'ai voulu
le faire il y a quelques jours, mais je n'ai pas eu le temps. Nous pensions,
par exemple, que le bail type devrait contenir une disposition sur le
chauffage. "Le locateur chauffera les lieux loués je cite cette
première clause à une température raisonnable, dans
la période comprise entre le 1er octobre et le 30 avril et durant toute
autre période qui peut être requise afin de donner au locataire le
plein usage et jouissance des lieux loués et fournira au locataire l'eau
chaude pour son usage domestique. Le locateur, toutefois, ne sera pas
responsable des dommages causés par un manque de chauffage ou d'eau
chaude, lorsqu'il s'agit d'événements fortuits ou de force
majeure." On voit, M. le Président, dans cette disposition, une
protection qui n'existe pas à l'heure actuelle, du moins pas de cette
façon précise pour les locataires.
Ce n'est pas tout. On aurait pu, par exemple, prévoir et
je pense à ces grands édifices multifamiliaux qui poussent
partout à l'heure actuelle, qui poussent dans nos banlieues comme
champignons on aurait pu prévoir notamment et c'est, je
crois, pertinent à tout ce problème de la location des espaces
des espaces communs. La clause aurait pu se lire comme ceci, par
exemple: "Le locateur devra, dans un édifice multifamilial c'est
ce qu'on appelle quelquefois, M. le Président, vous serez certainement
au courant de cela, la location par étage maintenir en bon
état de réparation et de propreté les espaces, endroits et
objets communs à plusieurs locataires, tels que les cages d'escalier,
les marches, les portes, la région de l'incinérateur, les
corridors, les lumières, leurs parties fixes, les salles de lavage, les
vestibules, les ascenseurs, les escaliers roulants, les voies d'accès au
garage et, en général, tous les endroits et toutes les
utilités d'accès communs à plusieurs locataires."
Je sais que la lecture de ces clauses n'a rien de
particulièrement réjouissant, mais il me paraît important
d'entrer dans les détails, de faire réfléchir le ministre
de la Justice parce que, dans son bail type, il n'y a rien qui approche la
protection que nous proposons dans ce projet que nous avions
rédigé d'ailleurs à l'occasion du bill 46, si ma
mémoire est bonne.
Quand on a affaire à un rapport entre locataire et locateur ou
propriétaire, il faut être précis, parce que le
propriétaire voudra profiter de tous les silences du bail et de tous les
silences de la loi ils sont nombreux à son avantage. Le
propriétaire voudra abuser de toutes les dispositions qui ne sont pas
claires, surtout dans les logements multifamiliaux, où il est si facile
de faire payer l'entretien commun, de mettre ça sur le dos des
locataires.
Il y a un grand adage que je voudrais rappeler, un adage qui je crois
remonte à Lacordaire: Entre le fort et le faible, dit Lacordaire, la
liberté opprime et la loi libère. Eh bien! c'est le cas ici.
Entre le fort, celui qui a des capitaux, celui qui est propriétaire,
celui qui est indépendant de fortune et le faible, qui est souvent le
travailleur démuni, celui qui est obligé de louer de peine et de
misère des logements dans ces grands ensembles multifamiliaux par
exemple, entre ce fort et ce faible, la liberté contractuelle, la bonne
vieille liberté contractuelle du passé, du 19e siècle dont
on avait fait un principe sacro-saint, cette liberté-là elle
opprime. Ce n'est pas une liberté qui libère, c'est une
liberté, bien sûr, qui libère le fort et qui opprime le
faible.
Et je pense que dans une Chambre comme celle-ci, Chambre de
législateurs, on devrait se le rappeler constamment. On devrait
peut-être faire graver au lieu de ces gerbes insignifiantes qui font le
tour des balustrades...
M. LESSARD: M. le Président, je m'excuse auprès de mon
collègue. Puis-je vous faire remarquer encore une fois que,
malgré qu'il y ait 102 députés libéraux qui ont
été élus le 29 octobre, nous n'avons pas quorum? Il y en a
qui commencent à rentrer, mais nous n'avons pas quorum. Il y a 25
députés, dont quatre du Parti québécois.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Qu'on appelle les
députés.
Le chef de l'Opposition officielle.
M. MORIN: Merci, M. le Président. Le minis-
tre de la Justice vient de revenir. Est-ce que je pourrais savoir
combien il me reste de temps? J'ai commencé à 4 h 55. Bon!
M. BURNS: H reste encore une demi-heure.
M. MORIN : Même plus que ça. Peu importe. M. le
Président, je voudrais rappeler à l'intention du ministre de la
Justice, qui s'était absenté momentanément pour traiter de
questions de règlements me dit-il, ce grand principe dont je disais
qu'il devrait être inscrit sur ces balustrades au lieu de ces gerbes
insignifiantes et de ces symboles d'un autre âge.
On pourrait faire graver en pensant à ce bill, mais sans doute
aussi à plusieurs autres qui ne manqueront pas d'échoir sur nos
bureaux, cette phrase de Lacordaire. Je pense à votre bail type en
particulier. "Entre le fort et le faible, la liberté opprime et la loi
libère." Nous devrions constamment avoir ça à l'esprit,
vous n'en disconviendrez pas.
J'étais en train d'analyser les détails parce qu'il faut
toujours entrer dans les détails quand on protège le faible. Si
on se contente de grands principes trop généraux, si les
dispositions ne sont pas suffisamment précises, qui va abuser des
silences de la loi? Qui va les interpréter à son avantage? Qui va
être en mesure d'aller devant les tribunaux avec avocat, conseiller
juridique et tout le bataclan? Qui va être en mesure de dicter ses
conditions? Le fort. Le propriétaire, celui qui a des réserves,
celui qui ne vit pas d'une journée à l'autre, d'une semaine
à l'autre ou d'un mois à l'autre.
C'est pour cela que dans le domaine de la protection du locataire, comme
dans le domaine de la protection du consommateur, on n'aura jamais suffisamment
à l'esprit cette maxime et cette préoccupation qu'on doit
toujours protéger de manière précise, en entrant dans les
détails, le faible, l'économiquement faible surtout.
Nous sommes dans un siècle où le contrat, tel qu'on le
connaissait autrefois au 19e siècle, fondé sur cette
pseudo-liberté contractuelle, n'a plus de sens. Le contrat qui
était fondé sur cette fiction, ce n'était pas autre chose
qu'une fiction de liberté car, dans un contrat, il est très rare
qu'il n'y ait pas l'une des deux parties qui soit en mesure de dicter ses
conditions, l'autre devant les accepter.
Heureusement, au 20e siècle, on a dégagé cette
catégorie qu'on appelle le contrat d'adhésion. Le ministre en
sera conscient puisque nous avons étudié ces choses sur les
mêmes bancs, nous avons usé nos fonds de culotte sur les
mêmes bancs, et nous avons enduré les mêmes professeurs.
C'est sans doute pour cela que le style professoral du ministre de la Justice
n'est pas sans rappeler celui de votre humble serviteur, sauf qu'il est plus
éloquent encore, il a le ton plus docte, plus professoral encore; c'est
lui-même qui nous le disait tout à l'heure, sans fausse
modestie.
M. le Président, puisqu'au 20e siècle, on s'est
éloigné, et le contrat d'adhésion en est la preuve, de la
liberté contractuelle classique, il faut bien reconnaître que cela
est applicable aussi dans le domaine plus restreint de ce contrat qu'on appelle
le bail. Le locataire aujourd'hui, lorsqu'il veut se loger, la plupart du temps
se trouve dans une situation de contrat d'adhésion. Est-ce que le
ministre est d'accord avec moi là-dessus? Bon. Puisque c'est le cas, je
suis bien content que nous nous retrouvions au moins sur un point.
Dans le contrat d'adhésion... Ah! le second, on va y venir tout
à l'heure, nous avons le temps. A partir du moment où on admet
que nous sommes devant un contrat d'adhésion comme, par exemple,
la personne qui monte dans un autobus, chacun sait que dans un tel contrat, il
y a une des parties qui est en mesure de dicter ses conditions, et souvent, les
conditions se trouvent au verso du billet qu'on achète ou elles sont
inscrites quelque part dans le véhicule ou dans l'établissement
où l'on pénètre souvent la loi est obligée
d'intervenir dans le contrat d'adhésion pour dicter une protection
très stricte. D'ailleurs, déjà au 19e siècle, si on
grattait un peu, on trouverait déjà de ces dispositions de la loi
destinées à protéger les usagers communs des
véhicules et notamment des chemins de fer, on trouverait des
dispositions, une intervention de la loi destinée à
protéger justement les usagers.
De même, lorsqu'on aborde le bail et, en particulier, le bail type
proposé par le ministre, il faut être bien sûr d'avoir
couvert toutes les situations, le plus de situations possible, en tout cas.
Je voudrais, par exemple, vous citer encore quelques dispositions. Je
garde pour la fin la plus importante, celle sur les mesures d'urgence. Je sais
que là, le ministre ne sera plus d'accord avec moi, mais voyons
jusqu'où il pourrait me suivre. Par exemple, en matière de
déménagement, nous proposions à propos du bill 46, cette
disposition: le locateur se charge d'enlever la neige et la glace des
trottoirs, marches, balcons, chemins et entrées de garage avec une
diligence raisonnable durant les mois d'hiver. En été, le
locateur devra entretenir les environs naturels du local loué, parterre,
arbres, plantes, etc.
Je sais notamment, que, dans le cas des logis multifamiliaux,
déjà le propriétaire, dans la plupart des cas, se conforme
à tout ce qui concerne les environs naturels; mais combien de fois
n'a-t-on pas vu des abus pour ce qui est de l'enlèvement de la neige,
par exemple on pourrait en parler ces jours-ci la glace sur les
trottoirs, de ces fameux édifices multifamiliaux et même, des
édifices de quatre, six ou huit logements, des édifices qui ne
sont donc pas énormes, qui ne sont pas ces grands HLM qu'on voit
aujourd'hui dans les banlieues.
M. le Président, combien de fois n'a-t-on pas vu c'est
courant ces entrées qui ne sont
jamais entretenues! Et si vous osez vous plaindre au
propriétaire... J'ai été locataire suffisamment longtemps
moi-même, non loin d'ailleurs de chez M. le ministre de la Justice,
à l'époque où il habitait la même avenue que moi, je
crois que M. le ministre a habité longtemps avenue Maplewood, n'est-ce
pas? Nous étions presque voisins, près de l'université et
le ministre se souviendra sûrement des difficultés d'obtenir un
entretien convenable de ces logements où il y avait six, huit, dix
logements et pas plus. Nous estimons qu'une clause comme celle-là serait
utile, elle est plus précise, elle comporte des obligations plus
strictes, nous pensons qu'elle serait de nature à favoriser les
locataires plus qu'ils ne le sont à l'heure actuelle.
Je disais que c'est une expérience commune; encore il n'y a pas
tellement longtemps, j'ai falli me casser le figure, je sais bien que plusieurs
députés de cette Chambre seraient heureux que cela se fût
produit sans doute...
Je suis touché de ce témoignage à la veille de
Noël, et je le rendrai au ministre de la Justice, je dirai que
moi-même je ne souhaiterais pas le voir dans une situation où,
dérapant sur l'un de ces trottoirs mal entretenus à la sortie de
ces grands immeubles, il soit en danger de se casser la figure. C'est une
figure que je connais depuis trop longtemps maintenant et dont j'ai pris
l'habitude. Je suis sûr que cela doit être mutuel et
réciproque.
M. CHOQUETTE: C'est mutuel et réciproque, et je peux vous en
assurer, mais je vais demander au président de vous rappeler à
l'ordre. Je me lève donc sur une question de règlement.
L'honorable chef de l'Opposition, si intéressant soit-il, si
docte soit-il, cet après-midi est hors d'ordre, M. le Président,
il est dans les détails du projet de loi et sur des amendements qu'il
n'a pas encore proposés. Je lui suggère de garder ces savantes
considérations pour la présentation à la commission
parlementaire.
M. MORIN: M. le Président, je voudrais bien que le ministre
m'explique où se situe la frontière entre les principes et les
détails. Bien sûr, je me penchais sur des dispositions qui ont
l'air d'être assez détaillées, mais quand on parle du
principe de la protection des locataires, encore faut-il montrer comment
appliquer ce principe dans la réalité quotidienne. Encore faut-il
entrer légèrement dans des principes plus
détaillés. Le ministre de la Justice peut-il et je serais
prêt à l'entendre, s'il voulait prendre quelques minutes, mais pas
plus m'expliquer la différence?
Après tout, j'ai une heure pour parler de ce bill, il faut bien
que je dise quelque chose. Il faut bien que je sois le plus pertinent possible.
Par exemple, M. le Président, on va voir que quelquefois les situations
concrètes peuvent toucher à des questions de principe. Prenons la
question des ascenseurs.
Dans beaucoup d'édifices multifamiliaux, c'est une question,
c'est un problème qui revient constamment, encore, il y a quelques
semaines. Dans mon comté, j'ai plusieurs résidences de vieilles
personnes qui habitent des édifices multifamiliaux, en ce sens qu'on
voit dans ces édifices de petits logements de deux pièces et
demie, trois pièces et demie, habitées par ces vieilles
personnes. M. le ministre de la Justice, ce n'est pas à vous que j'ai eu
à m'adresser pour ces problèmes, mais comme maintenant je suis le
député de cette circonscription, j'ai reçu je ne sais
combien d'appels et j'ai dû m'en soucier. Le ministre me dira que ce sont
des problèmes concrets, oui mais ce sont ceux-là qui font
quand on en est conscient qu'on fait de la bonne ou de la mauvaise
législation. Dans je ne sais combien de cas, j'ai reçu des appels
téléphoniques de ces vieilles personnes qui me disaient: Nous
avons été coincés entre les étages, et constamment
on voit ces problèmes. Lorsqu'il s'agit de vieilles personnes, cela peut
être très grave, M. le Président. Lorsque c'est quelqu'un
comme le ministre de la Justice, qui est débrouillard, qui
peut-être a un minimum d'intelligence pour se tirer d'affaire dans la
vie, il va trouver le moyen de sortir de cet ascenseur coincé entre deux
étages, quoiqu'il devra se surveiller, il prend du poids depuis que je
l'ai connu, mais c'est un détail et j'avoue que ce n'est pas
pertinent.
M. le Président, songez maintenant aux vieilles personnes
coincées entre deux étages, et cela arrive plusieurs fois par
mois. Pourquoi? Lorsqu'elles s'adressent au propriétaire pour protester,
que leur répond-on, M. le Président? On leur répond que ce
n'est pas dans le bail. Le propriétaire ne s'est jamais engagé
par écrit à faire entretenir les ascenseurs. Bien sûr, cela
coûte cher, l'entretien des ascenseurs, c'est évident. C'est comme
tout ce qui est hautement mécanique. Aujourd'hui, il y a des
systèmes de contrôle électronique en plus de cela. Donc,
cela prend une main-d'oeuvre spécialisée, donc cela coûte
cher. Personne n'en doute.
M. le Président, vous voyez la situation de ces vieilles
personnes prises dans un immense complexe multifamilial, qui constamment
s'adressent au propriétaire après avoir passé, dans un
cas, deux heures, coincés entre deux étages, parce qu'il y avait
un autre problème, il n'y avait pas de service de concierge. On avait
prévu un logement pour le concierge, mais ce n'était pas dans le
bail qu'il devait y avoir un concierge. Ce n'était pas dans le bail et
le propriétaire dit: Moi, j'ai les mains nettes, vous ne pouvez pas me
forcer, je n'en trouve pas de concierge. Entre parenthèses, il ne
voulait pas le payer. Il ne voulait pas avoir à payer un concierge.
Encore un exemple, M. le Président, de silence du bail, de silence de la
loi. Vous allez me dire: Oui, mais les tribunaux sont là pour
protéger ces braves gens coincés entre deux étages dans
les ascenseurs. Oui, mais premièrement il faut en sortir de l'ascenseur,
c'est la première chose
pour aller porter plainte, M. le ministre en conviendra.
Deuxièmement, ces vieilles gens vont devoir s'adresser à un
avocat peut-être pour faire respecter leur droit strict à
l'utilisation d'un ascenseur qui fonctionne, qui est en bon état
d'entretien. Alors, cela va metrre combien de temps avant que cette affaire
puisse se régler devant les tribunaux? Des mois, des années
peut-être. Encore une question qui relève de mon ami, le ministre
de la Justice, que je vois rire, M. le Président, alors que, s'il
était lui même coincé entre deux étages, je voudrais
bien voir la tête qu'il ferait. Je voudrais bien voir cela.
M. le Président, je parlais tout à l'heure de ce
défaut d'entretien des trottoirs aussi.
Dans une maison de vieillards qui se trouve dans mon comté, qui
se trouve dans Montréal-Nord, où il y en a plusieurs,
constamment, on voit... Je pense en particulier, si cela peut intéresser
le ministre d'Etat, à ces appartements qu'on appelle "Le Fontainebleau",
dont elle entendra sûrement parler tôt ou tard. Il se pourrait
même que ce soit votre honorable serviteur qui ait à s'adresser
à vous, pour faire respecter certains règlements, parce que la
ville, elle, s'en lave les mains. Ce n'est pas son problème. Il y a
aussi d'autres logements que vous connaissez, dans la ville, mais je pense
surtout au Fontainebleau.
M. le Président, on a vu des vieilles personnes partir, le matin,
et se casser la figure en sortant, sur de la glace vive, des personnes qui
peut-être venaient d'être coincées dans l'ascenseur pendant
je ne sais combien de temps. Le ministre de la Justice rit mais lui, si jamais
il glisse et se casse quelque chose, il rira moins, M. le Président. Je
sais que le ministre a le sourire facile, c'est une caractéristique
qu'il a toujours eue et qui, d'ailleurs, ne le rend pas antipathique, mais
lorsqu'il s'agit de problèmes comme ceux-là, lorsqu'on parle
surtout de vieilles personnes, je ne trouve plus cela drôle du tout, M.
le Président.
Nous aurions proposé, par exemple, une clause qui aurait dit que,
si un ascenseur est en usage dans l'édifice, le locateur devra s'assurer
de sa parfaite condition et de son bon fonctionnement. Voilà ce qui
n'est pas prévu dans les baux. Je ne crois pas que ce soit prévu
dans votre beau bail type, M. le ministre. On pourrait ajouter,
évidemment, des clauses qui protégeraient aussi le
propriétaire. On pourrait dire: "Toutefois, lorsqu'un tel ascenseur est
temporairement hors d'état de fonctionnement, le locateur ne devra pas
être tenu responsable pour les inconvénients ou délais
causés, pour autant que la défectuosité ou le mauvais
fonctionnement est réparé par le locateur immédiatement
après réception d'un avis d'une telle défectuosité
ou mauvais fonctionnement."
M. le Président, est-ce que le ministre de la Justice n'aurait
pas pu songer à inclure une clause comme celle-là dans son bail
type, surtout lorsqu'il s'agit de grands logis multifa- miliaux? On ne peut pas
dire que cela aille à l'encontre des droits du propriétaire. On
protège le propriétaire en exigeant un avis. Est-ce que ce n'est
pas déjà faire preuve de grande tolérance, quand on sait
combien les propriétaires, quelquefois, en prennent à leur aise
avec les droits des locataires?
Je vois que le ministre est éveillé et me suit avec
beaucoup d'attention. J'en suis très satisfait, M. le Président.
Cela doit être de bon augure. Peut-être voudra-t-il accepter
quelques-uns des amendements que nous proposerons à ce projet de loi, en
commission, tout à l'heure.
Puis-je demander, avec votre permission, combien de temps il me reste?
Bon. Je voudrais peut-être parler d'un autre problème. Ah! le
ministre de la Justice va me dire que la plomberie, cela n'a aucune importance
dans un logement, dans un immeuble, mais pour quiconque a été
locataire et il l'a été comme je l'ai été
Dieu sait que nous avons été exposés à des
ennuis de cette sorte! Dieu sait, en particulier, dans certains quartiers
démunis. Le ministre de la Justice et moi-même, M. le
Président, nous n'habitions pas un quartier particulièrement
démuni. La plomberie fonctionnait à peu près
convenablement, quoique, à l'occasion, il fallait voir.
M. le Président, le ministre de la Justice ne pouvait faire
autrement que me forcer à esquisser un sourire devant ce geste tellement
familier qu'il esquissait et qui lui sied si bien.
Pour en revenir aux choses sérieuses, le locataire a des
obligations strictes surtout dans les quartiers défavorisés
où dans les logis, quelquefois est-ce que tout à l'heure
le député de Saint-Jacques n'avait pas l'occasion de nous le
rappeler, lui qui représente un quartier où il se trouve de
nombreux logis de cette sorte? l'une des premières choses qui
manquent avec le chauffage, c'est souvent justement la plomberie?
Nous proposons, nous, qu'il y ait une clause bien précise, non
seulement une clause générale qui vise l'entretien et qui
invariablement comporte des échappatoires pour le propriétaire,
qui pourrait par exemple se lire comme ceci: "Le locateur devra réparer
la plomberie, les plafonds, les systèmes électriques, les toits
et les appareils du local loué avec diligence et
célérité aussitôt qu'il reçoit un avis
écrit du locataire l'avisant de la défectuosité."
C'était peut-être un peu précis, mais je reviens
à des questions de principe plus générales. Là
encore, on cherche un juste équilibre entre les droits du
propriétaire et les droits du locataire en prévoyant que le
locataire doit donner un avis circonstancié...
M. CHOQUETTE: M. le Président, sur une question de
règlement. J'ai déjà attiré l'attention à
celui qui siégeait tout à l'heure au fauteuil sur le fait que le
chef de l'Opposition s'est égaré dans les détails du bill
sur des amendements même qu'il n'a pas encore présen-
tés en commission parlementaire et qu'il se prépare
à présenter plus tard.
Non seulement ça, il n'est pas sur le bon bill, parce
qu'actuellement nous sommes sur le projet de loi no 3 et les amendements qu'il
veut nous suggérer devrait normalement s'étudier dans le projet
de loi no 2, qui a déjà été adopté par cette
Chambre. Je savais tout cela, mais devant l'éloquence exquise du chef de
l'Opposition, je n'ai pas pu me lever pour faire une opposition. Mais là
vraiment, vous me forcez, parce que je crois que là on est rendu dans la
tuyauterie et dans le chauffage, dans les chasses-d'eau, et je ne sais pas
où nous allons.
M. BURNS: M. le Président, sur la question de
règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Maisonneuve.
M. BURNS: Vous avez suivi avec beaucoup d'attention, je pense, ce
débat sur les deux projets de loi nos 2 et 3; et ce qui a semblé
paraître comme consensus, moi, ça m'a paru ainsi, c'est que j'ai
entendu le président de l'Assemblée nationale et votre
collègue le vice-président, le député de
Saint-Louis, également le député de Gatineau, à
plusieurs reprises, dire C'est clair que le débat sur ces deux projets
de loi se tient de façon presque parallèle.
C'est évident que si on veut imposer tout simplement,
strictement... D'ailleurs, le ministre de la Justice lui-même a
commencé par pécher, il nous a donné un peu l'ouverture de
la voie en nous parlant des deux projets de loi en même temps.
C'est un peu dans ce sens que le chef de l'Opposition fait actuellement
une espèce de survol de ces deux projets de loi, bien qu'actuellement il
parle sur le projet de loi no 3. Je vous réfère tout simplement
parce qu'on est sur une question de règlement à des
articles du projet de loi qui font que clairement le projet de loi no 2 est
absolument indissociable du projet de loi no 3.
Je vous cite simplement l'article 3 du projet de loi actuel no 3
où on nous dit que c'est la commission des loyers qui je pense,
le ministre de la Justice acceptera sûrement cet avancé est
régie par le projet de loi prolongeant et modifiant la loi pour
favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires, que cette
commission aura à appliquer des amendements que nous avons
apportés ou que nous nous apprêtons à apporter au code
civil.
Il s'agit notamment à l'article 19 a) de cette fameuse loi de la
Régie des loyers, où on voit le cas du locataire qui
reçoit l'avis prévu à l'article 1660 du code civil. M. le
Président, le projet de loi 2 amende le code civil. Le projet de loi que
nous étudions actuellement, le projet de loi 3, constitue le
mécanisme de plaintes en vertu du droit substantif que nous ajoutons,
que nous améliorons nous avons voté en faveur, alors nous
admettons qu'il s'agit là d'une amélioration dans le code
civil au titre du louage de choses. Je pense que le ministre de la Justice
aimerait peut-être que le chef de l'Opposition se taise
immédiatement, mais qu'il le supporte encore pour quelques instants,
ça ne sera pas tellement long. Le droit de parole du
député de Sauvé, du chef de l'Opposition, achève.
Je pense que la façon dont les deux projets de loi ont été
constitués, la façon dont ils ont été
présentés par le ministre de la Justice, la façon dont le
ministre de la Justice lui-même en a argumenté, tant en
présentation qu'en réplique, faisait qu'il était clair aux
yeux de tous les députés de cette Chambre que ces deux projets de
loi sont intimement liés, sont pratiquement indissociables. Je tiens
à dire au ministre de la Justice de ne pas s'inquiéter, il ne
s'agit pas d'un "filibuster". C'est le chef de l'Opposition qui désire
s'exprimer, et je pense que c'est son droit, sur l'ensemble du problème
qu'on appelle les relations entre propriétaire et locataire. Cela peut
nécessairement à l'occasion et à cause du genre de
dispositions que je vous ai citées tantôt nous appeler à
faire référence à un projet de loi et à un
autre.
C'est uniquement dans ce sens, M. le Président. Et encore une
fois je rassure le ministre de la Justice, je vous rassure, M. le
Président, il ne s'agit pas d'un "filibuster". Vous n'aurez même
pas je vous le dis d'avance de motion de rapport de
l'étude de ce projet de loi à six mois soyez chanceux,
comme le dit le député de Saguenay, je pense que vous devez en
être content il n'en est pas question. Mais j'aimerais que le chef
de l'Opposition ait la possibilité de s'exprimer, même si dans
l'esprit de l'étude d'un projet de loi habituel, en matière
d'examen d'un projet de loi en deuxième lecture, il semble que le chef
de l'Opposition déborde un peu le cadre de la discussion,
c'est-à-dire de l'à-propos de la loi. Mais, comme les deux lois
sont intimement liées, comme il y a référence d'une loi
à l'autre, je pense que vous devez maintenir et je vais vous
féliciter de le faire dans les minutes qui viennent cette
attitude large que nous avons vue chez les autres personnes qui ont
été appelées à rendre les décisions sur ce
sujet.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable chef de l'Opposition
officielle.
M. MORIN: M. le Président, j'en étais à rappeler
que, dans ce domaine contractuel et en particulier dans le domaine du droit de
louage, de la location des appartements ou des maisons, il importe de
rechercher un équilibre, un juste équilibre entre les droits des
propriétaires, d'une part, et les droits des locataires, d'autre
part.
Et ce principe devrait informer toute la législation, aussi bien
le bill 2 que le bill 3. D'ailleurs, je crois bien que c'est ce qu'a
recherché le ministre. Seulement, le reproche
qu'on pourrait lui faire, c'est de n'avoir pas appliqué ce
principe du juste équilibre, dans toutes ses ramifications, dans toutes
ses conséquences.
Vous prenez, par exemple, je parlais de la plomberie à l'instant.
Il est évident qu'on ne peut pas tenir le propriétaire
responsable des dégâts, par exemple, qui pourraient être
commis par les locataires. Cela va de soi. Je pense bien qu'on pourrait
nuancer, peut-être, la proposition que je faisais, il y a un instant, de
cette façon. Mais, nous pensons, nous, que l'équilibre est
établi par cette obligation du locataire de donner un avis et, si un
locataire donne un avis, en général, ce n'est pas pour des
vétilles. C'est parce que, vraiment, il existe quelque chose qui ne
fonctionne pas dans ce logement. Et une fois que cet avis a été
donné, nous pensons qu'il y a une obligation stricte de la part du
propriétaire de faire le nécessaire pour remettre la tuyauterie,
le chauffage, l'éclairage, tout ce que je mentionnais il y a un instant,
en bon état de fonctionnement. Autrement, on peut dire que le contrat de
location lui-même devient sans objet. On pourrait même, à
partir des vieux et des anciens principes du droit des contrats, raisonner de
cette façon. On n'aurait même pas besoin de faire appel à
des notions modernes comme celles qu'on retrouve dans les savants recueils de
doctrine.
On pourrait dire tout simplement, on pourrait raisonner de cette
façon. A compter du moment où un logement n'est pas
chauffé ou n'est pas bien entretenu, ce logement en
réalité n'en est plus un, ne remplit pas les fins pour lesquelles
il a été loué.
Peut-être vaut-il mieux laisser de côté ces
détails, comme le disait le ministre de la Justice, sur la plomberie, et
en venir à des questions plus sérieuses, qui touchent de plus
près aux principes que nous devons avoir à l'esprit.
Je pense en particulier à la question des assurances. Vous savez
que, dans la plupart des cas, le locateur, le propriétaire
possède des assurances, mais seulement pour assurer son immeuble contre
l'incendie, contre la perte, partielle ou totale, et contre les dommages que
lui, le propriétaire, pourrait causer à des tiers et dont il
pourrait être tenu responsable. Souvent même, on trouve dans les
contrats de location, des clauses d'exonération du propriétaire
à l'égard des dommages causés aux locataires, ce qui est
déjà faire porter aux locataires, on en conviendra, un poids
qu'ils ne devraient pas être appelés à porter. Mais on doit
aller beaucoup plus loin dans la protection des droits du locataire.
Je verrais très bien dans un bail type une clause comme celle-ci:
"Le locateur devra maintenir en vigueur une ou des polices d'assurance de
responsabilité civile dans le but d'indemniser les locataires ou les
tierces parties qui seraient blessés à la suite d'une
défectuosité ou d'une négligence quant à la
réparation et à l'entretien du local loué."
C'est un peu, M. le Président, la sanction de tout ce que j'ai
dit auparavant, de tous les inconvénients du louage dont j'ai
parlé depuis le début de cet exposé, tant pour ce qui est
du déneigement que des ascenseurs, que des espaces communs, que du
chauffage.
Dans le droit classique et, encore aujourd'hui, dans la plupart des cas
je parle du droit de la responsabilité que va-t-il se
produire si le locataire ou si un tiers qui n'a rien à voir sur les
lieux peut-être comme, par exemple du moins je dis qu'il n'a rien
à voir, il faudrait s'entendre un livreur qui apporte à
l'un des locataires dans l'immeuble des fleurs, des cadeaux à
l'intention de Noël ou du Jour de l'An, puisque nous sommes à cette
époque de l'année, un livreur se casse la figure dans
l'entrée d'un immeuble, un livreur manque une marche qui est mal
entretenue et déboule l'escalier, un livreur reste coincé dans
l'ascenseur? Cela arrive, M. le Président, par accident; j'ai
déjà vu le cas d'un livreur, pensant qu'il pénètre
dans un couloir, qui ouvre une porte qui en réalité donne sur un
escalier de sauvetage qui est mal entretenu; le livreur passe au travers du
grillage et se casse la figure royalement. En fait, dans le cas de
jurisprudence auquel je pense, le livreur s'était tué.
Dans ce cas-là, il va arriver généralement que le
propriétaire va être assuré, parce qu'il s'agit d'un tiers,
mais si c'est un locataire vous le croirez ou vous ne le croirez pas
qui se casse la figure, la plupart du temps, il n'est
protégé ni par la loi, ni par son bail, et, je dirais même
plus, le bail souvent va exonérer le propriétaire; on va
prévoir dans le bail même qu'en cas d'accident survenant au
locataire, le propriétaire n'est pas responsable. Autrement dit, dans
les cas que je mentionnais tout à l'heure, il y a le cas d'une vieille
personne, par exemple, qui reste prise dans un ascenseur entre deux
étages, d'une vieille personne qui se casse la figure dans un escalier
parce qu'il a été mal entretenu ou parce qu'une marche a
été cassée; il y a le cas d'une personne qui pense qu'une
rampe d'escalier qui se trouvait là la veille s'y trouve encore. Vous le
savez, comme d'instinct, la main porte par habitude sur une rampe d'escalier
qu'on imagine être là. Or je connais un cas peut-être
le ministre le connaît-il également, parce que les avocats qui ont
pratiqué le droit, et le ministre de la Justice nous rappelle tout le
temps qu'il a pratiqué le droit pendant je ne sais trop combien
d'années.
Mais, imaginez que, dans cette affaire à laquelle je me
réfère, la rampe avait été enlevée
temporairement pour être réparée ou plus
précisément parce qu'il y avait des peintres qui devaient refaire
le plâtre et peindre un certain mur dans cet escalier. Une personne, je
ne me souviens pas de son âge, c'est un cas de jurisprudence qui est trop
ancien, croyant saisir la rampe, met la main dans le vide et se trouve
précipitée au bas de l'escalier. Dans cette affaire, jamais le
locataire n'a été capable de
tenir le propriétaire responsable. Et pourtant, il y avait
négligence, il n'y avait aucune indication pour attirer l'attention des
personnes qui descendaient cet escalier à l'effet qu'elles risquaient de
se casser la figure.
M. le Président, je sais que vous allez me dire que je ne pense
qu'à des cas de catastrophe. Oui, bien sûr, mais la pratique du
droit est faite de cas de catastrophe; le ministre de la Justice le sait, les
médecins aussi. Quand est-ce qu'on va voir le médecin? Quand
est-ce qu'on va voir l'avocat? Toujours alors que l'accident est survenu,
naturellement. Oui, je n'en disconviens pas, le ministre de la Justice a tout
à fait raison. Dans le cas de la prévention, lorsqu'on va prendre
un conseil sur un contrat et tout ça, oui, bien sûr. Mais dans les
cas d'accidents, ce n'est pas avant qu'on va voir l'avocat ou le
médecin, c'est après, n'est-ce-pas? Que le ministre de la Justice
n'essaie pas de passer à côté de la question. Le ministre
de la Justice se targue toujours d'avoir pratiqué le droit, il nous
remet ça dans la figure constamment, M. le Président, il a
pratiqué le droit, il n'est pas un vulgaire professeur
d'université. Il nous l'a dit encore, il y a deux jours. Ces enseignants
qu'il affecte de mépriser et de repousser du bout du pied comme si
c'étaient des mégots de cigarette, ces enseignants qui ne sont
pas...
M. le Président, j'ai été interrompu à
plusieurs reprises, je vous ferai remarquer. Je n'ai pas terminé.
M. le Président, je voudrais terminer peut-être par cette
question.
Ces applaudissements sont de bon augure, M. le Président,
j'espère qu'ils signifient, surtout que je vois un député
qui m'envoie la main là-bas, avec un sourire bienveillant sur les
lèvres, j'espère qu'ils signifient que mes propos, si
soporifiques qu'ils soient, ont pu retenir légèrement leur
attention.
M. le Président, je terminerai simplement en disant que les
données du recensement de 1971 confirment un état de choses qui
est déjà vieux au Québec et qui doit nous donner à
réfléchir. C'est un état de choses qui est
déjà vieux d'une génération au moins et qui
explique un peu l'agitation sociale à laquelle le ministre se
référait plus tôt aujourd'hui et qu'il semble craindre,
comme nous la craignons d'ailleurs, mais il semble qu'il la craigne encore plus
que nous, que ce soit une sorte de hantise chez lui. M. le Président,
est-ce que l'une des causes de cette agitation ce ne serait pas le fait que,
sur 1,604,780 logements dénombrés dans le Québec,
seulement 47.4 p. c. étaient occupés en 1971 par leur
propriétaire? Le ministre de la Justice me regarde comme si
c'était lapremière fois qu'il entendait parler de cela. Vraiment,
cela me dépasse, lui qui légifère en ce domaine et qui ne
connaît pas les statistiques de base.
M. le Président, pour qu'il en tienne compte au cours des
débats que nous allons avoir tout à l'heure à la
commission de la justice, je lui ferai remarquer que le reste, soit 52.6 p. c.
des logements au Québec, abritent des locataires. Merci, M. le
Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de
Maisonneuve.
M. Robert Burns
M. BURNS: Vraiment très brièvement, je vous l'assure, ce
que je veux dire en deux minutes, c'est ceci. M. le Président, nous
voterons en faveur du projet de loi qui est proposé par le ministre de
la Justice, mais c'est avec beaucoup de déception que nous voterons en
faveur de ce projet de loi. Nous nous sommes placés dans la position
suivante, à savoir si on s'attaquait à un tel genre de projet de
loi, étant donné qu'il n'y a rien de mieux actuellement, c'est
encore toujours la solution du moindre mal que nous sommes obligés de
prendre dans l'Opposition, un peu comme nous avons tenu la même attitude
à l'occasion de l'étude du projet de loi no 2.
Je n'ai pas besoin de répéter, M. le Président,
toutes les critiques que mes collègues ont adressées à
l'endroit du projet de loi no 2 et du projet de loi no 3. Il y en a une, M. le
Président, et c'est véritablement au niveau de ce projet de loi
qu'on peut l'adresser au ministre de la Justice, c'est d'avoir laissé
tomber, en cours de route, cette espèce de seuil d'augmentation qui
était apparu dans la première version de sa réforme des
relations entre locataires et propriétaires, cette espèce de
seuil d'augmentation de 5 p.c. au-delà duquel, M. le Président,
cela aurait été le locataire qui aurait dû faire la demande
à la Régie des loyers ou, comme on l'appellera à l'avenir,
à la Commission des loyers.
M. le Président, il y a une disposition, dans le projet de loi
actuel, qui fait qu'il n'y a aucune limite, il n'y a aucun plafond, il n'y a
aucun endroit où véritablement, le propriétaire se sent
obligé de s'adresser à la Régie des loyers, se sent
obligé de dire : Je veux augmenter mon loyer de tel et tel montant et si
ce montant dépasse X p.c, que ce soit 3 p.c, que ce soit 5 p.c. ou autre
pourcentage, il n'y a rien qui force le propriétaire à justifier
lui-même cette augmentation.
C'est un peu pour cela, M. le Président, que nous sommes
déçus de voter en faveur de ce projet de loi, mais c'est aussi
pour la même raison que nous voterons en faveur, parce
qu'évidemment, s'il n'y a pas reconduction du projet de loi no 3, qui
maintient en vigueur la Loi de la Régie des loyers, évidemment,
je pense que la situation des locataires va être encore pire qu'elle ne
l'est actuellement.
Je finis, M. le Président, en exprimant un souhait auprès
du ministre de la Justice qui, je le sais, est intéressé à
faire cette réforme globale, souhait que je lui adresse en disant,
encore une fois, comme je l'ai fait à l'occasion
de l'étude sur l'aide juridique, de tenter de résister
à toutes les pressions dont il sera l'objet tant et aussi longtemps
qu'il essaiera de faire des réformes fondamentales en matière de
protection de ce qu'on appelle dans la société les petits. Je
n'ai pas du tout l'intention de faire un discours sur la lutte des classes, M.
le Président, en disant cela. Je dis tout simplement qu'il est
évident qu'il y a des gens, dans la société, qui sont
moins protégés que d'autres et les locataires sont une de ces
catégories.
Toutes les fois que le ministre de la Justice tentera de faire des
améliorations à ces dispositions, je suis sûr qu'il sera
l'objet de pressions extérieures assez fortes.
En ce qui me concerne, ce sont les seules remarques que j'avais à
faire, et c'est pourquoi nous voterons en faveur du projet de loi.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Cette motion de deuxième
lecture est-elle adoptée?
Adopté.
M. BURNS: Je m'excuse, M. le Président, on est cinq!
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Qu'on appelle les
députés!
Vote de deuxième lecture
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont pour la motion de deuxième
lecture du projet de loi 3 veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Mailloux, Saint-Pierre, Choquette,
Phaneuf, Berthiaume, Goldbloom, Mme Bacon, MM. Tetley, Drummond, Bienvenue,
Forget, Massé, Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Gias-son, Perreault,
Brown, Kennedy, Bacon, Lamontagne, Veilleux, Brisson, Séguin,
Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Ostiguy, Picard, Carpentier,
Dionne, Faucher, Larivière, Shanks, Springate, Pepin, Beauregard,
Bonnier, Boudreault, Boutin (Johnson), Leduc, Caron, Denis, Déziel,
Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance, Lecours, Malouin, Massicotte, Mercier,
Pagé, Picotte, Sylvain, Tremblay, Verreault, Morin, Burns, Charron,
Lessard, Bédard (Chicoutimi), Samson, Roy.
LE SECRETAIRE: Pour: 64 Contre: 0
LE PRESIDENT: La motion est adoptée.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que ces deux projets de
loi 2 et 3...
LE PRESIDENT: La motion est adoptée.
Projet de loi déféré à la
commission
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que ces deux projets de
loi 2 et 3 le bill 2 a été déféré
déjà, mais pour que ce soit bien clair soient
déférés à la commission parlementaire de la
justice. Une fois que cette motion sera adoptée, je voudrais donner avis
qu'on pourra siéger à vingt heures quinze au salon rouge, et si
le salon rouge n'était pas libre, ce serait à la salle 81-A, et
si celle-ci n'était pas libre, ce serait à 91-A, à vingt
heures quinze.
LE PRESIDENT: Bon, il...
M. BURNS: M. le Président, je n'ai pas d'objection à ce
méli-mélo, mais pendant qu'on y est, le leader du gouvernement
peut-il nous dire avec quel projet de loi il a l'intention de commencer la
séance à l'Assemblée nationale à huit heures et
quinze?
M. LEVESQUE: Oui, je l'avais déjà indiqué
d'ailleurs au leader de l'Opposition. Ce serait avec le projet de loi no 7, Loi
modifiant la loi de l'Hydro-Québec quant au rapport. Et nous essayerons
de suivre l'ordre que j'ai déjà indiqué, mais pas d'une
façon absolue nécessairement. Alors la motion est-elle
adoptée?
LE PRESIDENT: D'accord. Il y a deux motions même. Il y a la motion
de renvoi. Adopté. Deuxièmement, motion que cette commission
siège durant les travaux de la Chambre à 20 h 15.
UNE VOIX: Avec les deux commissions plénières.
LE PRESIDENT: Les deux, avec les règles de la commission
plénière.
M. LEVESQUE: Quant au rapport. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEVESQUE: M. le Président, avec le consentement de la Chambre,
le ministre des Affaires sociales aurait à compléter une
réponse qu'il a donnée ce matin.
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a consentement unanime?
M. FORGET: M. le Président, je remercie la Chambre de son
consentement. J'aimerais compléter la réponse que j'ai
donnée au député de Saguenay ce matin relativement
à certains problèmes que soulève l'administration de
l'aide sociale. Il s'agit, selon la question soulevée, de nouveaux
bénéficiaires du régime qui ont présenté des
demandes à certains bureaux locaux, depuis le 5 décembre, et qui
n'ont pas, dans tous les cas, reçu des réponses favorables ou des
réponses tout court.
J'ai indiqué ce matin qu'il ne m'était pas possible,
à cause de conditions climatiques, de donner l'assurance que tous les
chèques parviendraient avant Noël. Il me fait plaisir
d'annoncer,
M. le Président, que cette assurance peut désormais
être donnée. Tous les bénéficiaires nouveaux d'aide
sociale qui ont fait des demandes jusqu'à aujourd'hui inclusivement
recevront, dans les cas où ils ont satisfait aux conditions de l'aide
sociale, leur chèque avant Noël.
LE PRESIDENT: L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à
vingt heures et quinze.
(Suspension de la séance à 18 h 11)
Reprise de la séance à 20 h 21
Etude du rapport de la commission sur le projet de loi
no 7
LE PRESIDENT: Prise en considération du rapport de la commission
permanente des richesses naturelles et des terres et forêts sur
l'étude du projet de loi no 7, Loi modifiant la loi
d'Hydro-Québec. Proposition de l'honorable député de
Shefford.
DES VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, nous avons étudié en
commission parlementaire le projet de loi no 7 concernant
l'Hydro-Québec. Encore une fois, nous sommes dans l'obligation
d'accepter un rapport, mais les mains liées, dans le sens que ce
rapport, qui fait suite à l'étude du projet de loi no 7 veut tout
simplement confirmer l'augmentation des tarifs d'électricité
concernant l'Hydro-Québec.
J'ai fait valoir, au cours de la deuxième lecture, un certain
nombre de choses à ce sujet, que je voudrais reprendre quelque peu.
Cependant, je voudrais dire, au début, qu'encore là nous
constatons comment le gouvernement actuel manque de stratégie, parce
qu'il me semble, M. le Président, qu'il y a d'autres lois; il y a
actuellement 19 lois qui sont encore au feuilleton. Parmi ces 19 lois, il y en
a qui sont certainement plus importantes que le projet de loi dont on nous
soumet aujourd'hui le rapport.
Je pense que j'ai le droit de critiquer justement le fait qu'on apporte
ce rapport.
LE PRESIDENT: Très brièvement.
M. LESSARD: Je dis qu'il y a, en particulier, la loi sur l'agriculture,
sur le crédit agricole, qui me paraît importante et qu'on doit
présenter. Or, on dirait que le gouvernement fait tout pour
empêcher que les députés ne puissent adopter les
véritables et nécessaires lois dont nous avons besoin.
M. le Président, cette loi aurait pu venir au mois de mars, et
nous aurions pu adopter des lois importantes. Qu'est-ce que vous allez dire aux
ouvriers de la construction qui attendent leur rétroactivité?
M. le Président, lorsque l'Hydro-Québec a demandé
au lieutenant-gouverneur en conseil, comme c'est exigé par la loi,
d'augmenter ses tarifs, la seule chose et c'est là qu'on constate
que ce gouvernement ne peut pas protéger les citoyens du Québec,
parce qu'il s'effondre tant devant l'Hydro-Québec que devant les
pro-
priétaires, comme on l'a vu en ce qui concerne le code des
loyers, devant les juges aussi... Le gouvernement s'est effondré aussi
devant une société de la couronne, société de la
couronne que nous respectons, société de la couronne que nous
avons eu à défendre, à maintes et maintes reprises,
à l'Assemblée nationale, en particulier lorsque nous avons
discuté le projet de loi 50. Qu'est-ce que le lieutenant-gouverneur en
conseil a fait, qu'est-ce que le cabinet a fait, avant d'accepter les
augmentations de tarifs? La seule chose qu'on a faite, c'est qu'on a
demandé un rapport à un comité de planification où
il y avait des responsables du ministère des Richesses naturelles et des
responsables d'autres ministères. Mais dans ce rapport, comme je le
disais, M. le Président, il était bien souligné qu'on ne
pouvait pas voir, étant donné la comptabilité de
l'Hydro-Québec, si ces augmentations étaient justifiées,
si ces augmentations étaient nécessaires. C'est pourquoi nous
avons, nous, demandé la convocation de la commission parlementaire. Mais
qu'est-ce qui est arrivé entre-temps? Deux jours après que
l'Hydro-Québec eut accepté, lors d'une réunion du conseil
d'administration, l'augmentation des tarifs, par le règlement no 150,
deux jours après, le lieutenant-gouverneur en conseil, ce gouvernement,
ce cabinet, acceptait, sans autres informations, l'augmentation des tarifs.
Alors, qu'on sait très bien l'inflation que subissent actuellement les
citoyens québécois, dans l'alimentation et dans d'autres
secteurs, ou en ce qui concerne le pétrole, M. le Président.
Oui, je dis que nous avons, encore une fois, accepté un rapport
d'une commission parlementaire qui a étudié la loi de
l'Hydro-Québec, au cours de laquelle nous n'avons pas encore
été capables d'obtenir les véritables informations que les
citoyens devaient avoir.
En acceptant ce rapport, nous accordons encore une augmentation de taxes
aux citoyens québécois. Que cette augmentation de taxes vienne de
subventions du gouvernement ou qu'elle vienne directement de l'imposition de
nouveaux tarifs aux contribuables québécois, c'est exactement la
même chose. C'est toujours le même qui paie et ce sont les citoyens
québécois qui paient. Encore là, on n'a pas su pour
quelles raisons l'Hydro-Québec a dû augmenter ses tarifs, en
particulier. Comme nous l'avions dit au gouvernement lorsque nous avons
étudié le projet de la baie James, c'est probablement pour
financer les investissements dans la région de la baie James que le
gouvernement québécois accorde encore $10 millions, sans savoir
exactement si c'est justifié.
Ce cabinet est impuissant; il n'est pas capable de protéger les
citoyens québécois. C'est pour cela que j'ai soumis, au cours de
la deuxième lecture, certaines propositions au ministre des Richesses
naturelles.
C'est vrai que nous sommes fatigués, parce que nous, nous avons
l'occasion de travailler. De toute façon, vous ne me dérangez
pas. J'ai soumis différentes propositions au ministre des Richesses
naturelles pour tenter, si le cabinet n'est pas capable de contrôler les
augmentations de tarifs de l'Hydro-Québec, d'avoir au moins un organisme
où les citoyens québécois, qui sont directement
impliqués dans cette situation, directement impliqués dans
l'augmentation des tarifs de l'Hydro-Québec, pourraient se faire
entendre et s'opposer, s'il y a lieu, avec raison, à l'augmentation des
tarifs.
L'Hydro-Québec n'est pas soumise, comme c'est le cas pour
d'autres sociétés privées, mais qui donnent des services
publics, à la Régie des services publics.
Ne pourrait-on pas cela me paraît, en tout cas, important
soumettre l'Hydro-Québec à l'obligation de justifier ses
taux auprès d'une régie comme la Régie des services
publics? En effet, comme nous avons eu l'occasion de le constater, la
commission parlementaire ne nous a jamais permis, à cause de
l'obstruction du Parti libéral, de poser de véritables
questions.
C'est pourquoi, M. le Président, je m'interroge
énormément sur ce rapport.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre!
M. LESSARD: Je m'interroge énormément, M. le
Président, sur ce rapport qui nous est présenté
aujourd'hui.
M. le Président, il y aurait peut-être aussi lieu
d'analyser la possibilité d'un organisme indépendant je le
soumets très respectueusement au ministre des Richesses naturelles
afin justement de permettre aux citoyens québécois de se faire
entendre.
M. le Président, nous n'avons pas le choix. Les tarifs sont
maintenant augmentés.
LE PRESIDENT: A l'ordre! Je vous ai laissé, depuis au moins un
gros cinq minutes, vous... Malheureusement, vous ne respectez pas... Ecoutez,
nous étudions le rapport d'une commission qui a étudié le
projet de loi no 7 article par article. Cela n'a aucun rapport avec les taux
d'électricité, aucun, aucun. Que voulez-vous que je vous
dise?
M. LESSARD: M. le Président, je voudrais bien vous expliquer
qu'il y a un rapport.
LE PRESIDENT: Expliquez-le moi, c'est ce que je veux savoir.
M. LESSARD: Oui, M. le Président. LE PRESIDENT: Dites-moi
comment.
M. LESSARD: C'est qu'on veut, M. le Président, accorder $10
millions ou réduire de $30 millions à $20 millions, par ce
rapport, le paiement des taxes...
LE PRESIDENT: Le dégrèvement.
M. LESSARD: ... au gouvernement québécois. Pourquoi, M. le
Président? A la suite d'une demande d'augmentation des tarifs
d'électricité par l'Hydro-Québec et de la commission
parlementaire...
LE PRESIDENT: C'est cela que je veux que vous m'expliquiez.
M.LESSARD: Oui, M. le Président, A la suite de la commission
parlementaire c'est parce que je l'avais tellement expliqué en
deuxième lecture, M. le Président le gouvernement a
décidé d'accorder une certaine augmentation de tarifs à
l'Hydro-Québec, mais le gouvernement a promis, par contre, de diminuer,
pour empêcher une augmentation plus forte, la taxation de
l'Hydro-Québec de $30 millions à $20 millions. C'est en ce sens,
M. le Président, qu'il y a une relation directe entre l'augmentation des
tarifs de l'Hydro-Québec et la loi qui nous est soumises
aujourd'hui.
Je pense bien que ceux qui ont eu, justement, à discuter en
commission parlementaire ou qui ont assisté aux
délibérations de la commission parlementaire ont pu constater que
c'est bien le cas.
M. le Président, je pense bien que je suis parfaitement dans mon
droit, lorsque j'ai à étudier un rapport comme celui-là,
de dire pourquoi je m'interroge sur l'acceptation du rapport. C'est dans ce
sens que je faisais mes remarques.
Je disais que nous n'avions pas le choix de l'accepter ou de le refuser
ce rapport, parce qu'on a décidé d'accorder la permission
à l'Hydro-Québec d'augmenter ses tarifs, et on a
précisé une certaine limitation à l'augmentation des
tarifs. Et c'est dans ce sens que l'Hydro-Québec devra, au lieu de payer
$30 millions au gouvernement québécois, comme c'était le
cas, devra payer $20 millions.
Mais encore là et j'espère que le ministre va me
répondre et je termine sur cette question: Est-ce que ça
va être une taxe fixe de $20 millions? Est-ce que ça va être
continuellement $20 millions ou s'il y aura la possibilité de modifier
cette taxation?
Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M. SAMSON: Nous avons devant nous le rapport de la commission
parlementaire des richesses naturelles et des terres et forêts. Je ne
sais pas si c'est parce que nous approchons de la période de Noël,
mais j'aurais presque envie d'offrir un cadeau à nos amis du Parti
québécois et m'associer à eux dans leurs intentions de
faire avancer les travaux de la Chambre.
J'ai cru comprendre du moins qu'ils avaient ce souci de faire avancer
les travaux de la Chambre. Et parce que je pense que c'est absolument
raisonnable de le faire d'une façon très positive, avec votre
permission, je réserverai mes commentaires pour le débat de
troisième lecture.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Richesses naturelles.
M. Gilles Massé
M. MASSE: M. le Président, seulement un mot pour souligner que le
discours du député de Saguenay a été exactement son
discours de deuxième lecture. Cette loi amendant la loi de
l'Hydro-Québec ne confirme pas une augmentation de taxe qui a
été discutée longuement le printemps passé à
la commission parlementaire, mais confirme une exemption de $10 millions sur
les estimés de 1973 de paiement de droits que l'Hydro-Québec
devait payer au gouvernement.
Il fallait adopter cette loi qui permet cette exemption à
l'Hydro-Québec avant le 1er janvier 1974 pour faire
bénéficier, dès 1973, l'Hydro-Québec de cette
mesure. Je pense que je n'ai pas à relever les inexactitudes du
député de Saguenay, auxquelles je pense avoir répondu au
cours de la deuxième lecture, et je recommande l'adoption, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEVESQUE: Troisième? Non. Est-ce qu'on serait prêt pour
la communauté urbaine? Projet de loi 22, article 10.
Projet de loi no 22 Deuxième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la
deuxième lecture du projet de loi 22, Loi concernant la
communauté urbaine de Montréal.
M. Victor Goldbloom
M. GOLDBLOOM: M. le Président, très brièvement, il
s'agit d'un projet de loi qui vise à régulariser un état
de fait. La répartition des dépenses entre les
municipalités membres de la communauté urbaine de Montréal
a été faite selon des ententes qui ont, par la suite,
été modifiées par des amendements à la Loi de
l'évaluation foncière, entre autres choses. Les
municipalités concernées s'entendent pour les accepter,
nonobstant les nouveaux éléments apportés à la loi,
la répartition déjà faite pour 1972 et 1973.
Autrement, sur le plan administratif, il serait extrêmement
difficile d'ouvrir de nouveau ces dossiers et de faire une nouvelle
répartition. Certaines municipalités seraient gagnantes, d'autres
seraient perdantes. Toutes semblent d'accord pour accepter et entériner
le statu quo et pour laisser la nouvelle formule s'appliquer à partir de
1974.
LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture est-elle
adoptée?
UNE VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce projet de loi.
Second reading of this bill.
LE PRESIDENT: Est-ce qu'on peut faire les écritures de la
commission plénière?
M. BURNS: M. le Président, le projet de loi no 22, je
tiens...
LE PRESIDENT: A parler en deuxième lecture?
M. BURNS: Oui.
LE PRESIDENT: Bien...
M. BURNS: II est adopté déjà?
LE PRESIDENT: Ecoutez, on a formé la commission
plénière.
M. BURNS: Allez-y, M. le Président.
LE PRESIDENT: Voulez-vous parler en troisième lecture, on va
faire les écritures?
M. BURNS: On parlera en troisième lecture. On parlera n'importe
où.
LE PRESIDENT: Non, non, mais moi, je n'ai pas d'objection.
Est-ce qu'on peut faire les écritures de la commission
plénière sur le projet de loi no 22?
M. BURNS: Oui.
Commission plénière
LE PRESIDENT: Formation de la commission plénière et
écritures, adoption du rapport.
Voulez-vous parler en troisième lecture tout de suite ou
quoi?
M. BURNS: M. le Président, je ne parlerai pas en troisième
lecture tout de suite, alors, demain.
LE PRESIDENT: D'accord.
M. BURNS: M. le Président, je suis sûr que mon "monologue"
est aussi mal pris que moi par la situation, mais on est tous les deux
coupables. J'aurais voulu dire quelques mots, mais je réserve mes
remarques en troisième lecture, je ne demande même pas de
consentement, d'ailleurs je...
M. LEVESQUE: Mes propos pour la prochaine session.
M. BURNS: D'accord, M. le Président. Mais, en tout cas...
M. LEVESQUE: Article 9.
M. ROY: J'aimerais bien, si c'était possible, que le leader du
gouvernement nous dise immédiatement dans quel ordre il entend demander
ses projets de loi, au cours de la soirée.
M. LEVESQUE: Je vais essayer de voir le député de
Beauce-Sud pour le lui indiquer aussitôt que j'aurai fait le tour de mes
propres collègues.
M. ROY: H reste que, tout à l'heure, j'ai remarqué qu'il
est arrivé un désagrément à notre collègue
de Lafontaine. Il faut, quand même, avoir nos dossiers aussi. On ne peut
pas descendre tous nos dossiers en même temps. Il faudrait, quand
même, qu'il y ait un certain ordre, de façon que nous puissions
avoir nos dossiers ici lorsque le projet de loi est appelé.
M. LEVESQUE: Mais si l'Opposition a objection à ce que nous
passions à un bill, qu'on me le fasse savoir et je tâcherai
d'accommoder nos amis d'en face, s'il leur manque un dossier ou s'il leur
manque quelque chose.
M. SEGUIN: Je voudrais demander des directives en ce qui concerne les
travaux de la Chambre, plus particulièrement en ce qui concerne la
commission de la justice qui siège présentement en commission
plénière. Il semble y avoir ambiguïté; du moins, il
semble y avoir divergence d'opinions entre certains membres de la commission
sur certaines précisions et sur certaines responsabilités qu'on
aurait données à cette commission.
Tout d'abord, c'est la commission élue de la justice qui doit
siéger en commission plénière. Lorsque je vous en ai
parlé, avant la suspension des travaux à six heures, la directive
que vous m'avez donnée en ce qui concerne les travaux de ce soir
établissait que la seule différence qui existait était que
le président de la commission devra faire rapport de cette commission en
Chambre. D'un autre côté, nous devons siéger comme
commission élue. C'est dire que la commission élue demande que
nous reconnaissions les membres qui doivent y siéger, et que
nous nommions aussi un rapporteur. Quelle est la fonction du rapporteur
si le président doit faire rapport comme à une commission
plénière en Chambre? Si nous devons nous dispenser de nommer un
rapporteur, quelle est la loi ou le règlement qui nous permet de le
faire? Je ne voudrais pas qu'il y ait de problème ensuite. Je suis
prêt, comme président de cette commission, à revenir en
Chambre, à la fin de la soirée ou lorsque nos travaux seront
complétés, faire rapport de cette commission, comme nous le
faisons en Chambre pour la commission plénière.
Mais voici ce qui est arrivé. C'est que deux membres de
l'Opposition, représentant le Parti québécois, par
exemple, ne veulent pas, au nom de leur caucus, s'engager sur le débat.
Alors, si nous siégeons en commission plénière, je
voudrais qu'il y ait une certaine responsabilité à cette
commission.
M. MORIN: M. le Président, sur un point de règlement. Je
ne crois pas qu'il soit permis à une commission élue de demander
l'avis du président de cette Chambre de la façon dont cela vient
d'être fait.
Et je pense que vous avez rendu cette semaine, à moins que je ne
m'abuse, des décisions qui vont dans ce sens. Comme j'ai eu l'occasion
de faire la recherche, parce que je scrutais de très près les
opinions que le digne président de cette Chambre avait l'occasion
d'émettre, je pourrais citer là-dessus Erskine May qui est
très clair. Effectivement, c'est pour ça finalement qu'on n'a pas
poussé plus loin notre argumentation. "The opinion of the Speaker cannot
be sought regarding an occurrence in a committee although a committee to obtain
the advice of the Speaker has reported progress for that purpose under the
exceptional circumstances, etc." Donc la règle est claire et je pense
qu'elle n'est pas appliquée seulement au Parlement britannique, elle est
appliquée dans la plupart des Parlements du Commonwealth et, si j'en
juge d'après vos décisions, elle est appliquée ici
même. La commission est juge de sa propre procédure et si, par
hasard, son président rend une décision qui n'est pas conforme
aux règlements ou à l'usage, la seule façon de mettre en
cause cette procédure, c'est de proposer une motion de blâme
à l'endroit du président.
M. LEVESQUE: M. le Président, il s'agit, je crois, simplement, de
préciser le mandat que vous donnez à la commission qui est un
mandat qui a été explicité, mais qui ne se retrouve pas
dans son application totale dans les règlements que nous avons.
Nous avons simplement fait cette proposition et donné le mandat,
à mon sens, à la commission. C'est que ce mandat que nous avons
donné comportait ceci de différent des séances ordinaires
d'une commission élue. C'était que le rapport, au lieu de se
faire par un rapporteur, désigné par la commission, se faisait
comme en commission plénière, par le président à
l'Orateur, si vous voulez, au Président de l'Assemblée. Nous
avons accepté cette procédure pour une raison bien simple, c'est
que nous ne voulions pas prolonger indûment la procédure qui
prévoit que, lorsqu'une commission élue a terminé ses
travaux, un rapport est rédigé, ensuite le rapporteur qui a
été désigné doit faire, le lendemain, un rapport
à la Chambre, et ce rapport ne peut être pris en
considération que le lendemain et nous n'arrivons en troisième
lecture que la journée suivante.
Alors, nous avons convenu que c'est ça, autrement nous n'aurions
pas parlé de ça avant l'ajournement; nous avons convenu que nous
procéderions pour le rapport, selon les méthodes prévues
dans le cas d'une commission plénière. Nous avons fait cela,
simplement dans le but d'éviter une multitude de procédures qui
nous paraissaient, à nous tous, dans les circonstances actuelles, comme
prolongeant inutilement les travaux de la Chambre. Une fois que nous avons
accepté ça, c'est le mandat que nous avons donné à
la commission. Je pense, M. le Président, que vous avez peut-être
une autre opinion. Je m'y soumets d'avance, mais je crois que ce qui arrive
présentement, et si j'avais à répondre au président
de la commission, je lui dirais qu'il a été dispensé de
nommer un rapporteur et que c'est lui-même le président lorsque
les travaux seront ajournés, qui, au moment où la Chambre ne sera
saisie d'aucun autre article, c'est-à-dire entre deux articles, se
lèvera ou peut-être demain, si c'était terminé ce
soir, lors du rapport des commissions élues, ou enfin à un moment
donné que vous pouvez indiquer, M. le Président, se
lèverait et ferait rapport.
Le Président dirait: La commission a siégé et a
adopté les articles avec ou sans amendement. Et c'est la
procédure de la commission plénière. C'est comme ça
que j'ai compris le mandat que nous avons donné à la commission,
et je suis d'accord avec le chef parlementaire de l'Opposition qui a justement
rappelé une de vos décisions récente, M. le
Président, que la commission est certainement maîtresse de ses
destinées et qu'elle doit elle-même prendre ses
responsabilités.
A ce moment-ci, comme il peut y avoir confusion entre le mandat d'une
commission plénière, qui se rapporte directement au
président, et la commission élue qui se rapporte via le
rapporteur, je crois que, M. le Président, vous seriez bien
excusé et justifié de donner un avis à celui qui
préside une commission élue mais qui doit se rapporter
directement à vous. C'est une procédure un peu
irrégulière, j'en conviens, mais nous l'avons fait de bonne foi,
dans le sens que nous l'avons déjà fait lors d'autres sessions
précédentes, surtout à la fin des sessions, afin de ne pas
multiplier les actes de procédure et de ne pas, non plus, obliger,
simplement pour
quelques minutes, les députés à vivre plusieurs
jours de séance simplement pour une question de rapport.
M. BURNS: M. le Président, simplement deux mots sur cette
question de règlement. Comme j'ai compris l'intervention du chef de
l'Opposition et comme j'ai compris d'ailleurs l'intervention du leader du
gouvernement c'est un peu la mienne aussi et comme cette attitude
est un peu nouvelle qu'un président de commission s'adresse à
vous, en plein milieu des travaux de l'assemblée, je pense qu'il
était normal et c'est dans ce sens-là que le chef
de l'Opposition s'adresse à vous ou s'en-quière auprès de
vous de cette nouvelle attitude. Nous aimerions savoir si ce sera un
précédent, si ce sera une façon de fonctionner, remarquez,
contre laquelle nous n'en n'avons pas. Mais le chef de l'Opposition a
été logique. Dans l'attitude que vous nous avez indiquée,
vous nous avez dit, il y a quelques jours: II n'y a pas d'appel des
présidents de commissions à cette Chambre. Ce n'est pas un appel,
je suis prêt à l'admettre, c'est une demande de renseignements. M.
le Président, je ne le sais pas, à long terme, il faudrait
peut-être peser la valeur de ces attitudes, c'est quelque chose de
très constructif comme approche, et si cela doit être, c'est un
peu dans ce sens que le chef de l'Opposition vous demandait: Est-ce que, dans
le fond, ce sera une façon normale de fonctionner, qui a ses bons
côtés, mais qui comporte un certain nombre
d'embêtements...
M. LEVESQUE: M. le Président, si le leader de l'Opposition le
permet, peut-être afin de ne pas créer de précédent,
si vous étiez remplacé durant quelques instants au fauteuil, la
question pourrait vous être posée en dehors du fauteuil que vous
occupez actuellement. Cela ne créerait pas de précédent et
on éviterait beaucoup de discussions.
M. SEGUIN: M. le Président, puisque la commission elle-même
ne s'entend pas sur les directives qu'on lui avait donnée et qu'il
semble y avoir une irrégularité qui se présente, c'est
afin de prévenir des difficultés, je vous le rappelle, que je
suis revenu en Chambre. Il faudrait comprendre, M. le Président, qu'il
ne s'agit pas ici que le président de la commission n'assume pas les
responsabilités qu'il a le devoir d'accepter, de reconnaître, mais
il faudrait aussi que l'Assemblée, ayant fait un
à-côté, si vous voulez, sur la procédure normale des
commissions élues, à cette occasion, ait une directive assez
claire, afin de ne pas tomber dans des problèmes et des discussions
inutiles dans les jours qui viendront.
LE PRESIDENT: Je pense que, même si nous pouvons avoir chacun des
opinions plus ou moins semblables ou différentes, il serait bon qu'il y
ait une rencontre entre les leaders, durant cinq minutes. Je pense bien qu'on
peut trouver une solution pour qu'il y ait une continuité à
l'avenir sur cela. En présence d'ailleurs du député de
Pointe-Claire.
Nous allons suspendre pour environ cinq minutes.
LE PRESIDENT: Pour l'information de la Chambre, il serait bon qu'on vous
mette au courant de la décision ou du consensus, parce qu'il y a des
députés qui n'appartiennent pas à un parti encore
officiellement reconnu.
La décision qui a été prise, c'est que le
président, en bas, agit comme le président de la commission
plénière. Il n'y a pas de rapporteur nommé et il n'y a pas
un rapport distinct. Lorsqu'un article est adopté, on l'initiale, je
crois: initiales, initiales, initiales. Non seulement les membres de la
commission, mais tous les députés ont le droit de parole, parce
que c'est assimilé à une commission plénière, mais,
s'il y a un vote, uniquement les membres de la commission peuvent voter.
Lorsque l'étude sera terminée, au lieu d'un rapporteur, ce sera
le président de la commission qui fera rapport. Comme pour le rapport de
la commission plénière, il n'y a aucun débat ou amendement
sur ce rapport.
Nous sommes dans le droit nouveau, messieurs.
M. ROY: M. le Président, est-ce que vous avez besoin du
consentement unanime de la Chambre pour cela?
LE PRESIDENT: Non. Il y a déjà eu un consentement unanime
pour que ce projet de loi soit déféré à la
commission avec les modalités de la commission plénière.
C'est déjà fait. Ce sont des questions d'interprétation
seulement.
M. ROY: Alors, pourquoi une réunion des leaders, à ce
moment-là, M. le Président?
LE PRESIDENT: Pour faire un consensus et dispenser le président
de donner lui-même la directive. Cela pourrait déplaire à
certains, alors que, là, il y a consensus.
M. ROY: II y a consensus, en somme, mais, en quelque sorte, un consensus
sans unanimité.
LE PRESIDENT: Dans ce cas, pour exempter le consensus, ce que je viens
de dire, c'est ma directive. Là, il n'y a plus besoin de consensus. Cela
élimine le consensus.
C'est ce qu'on appelle une directive collégiale!
Quel article?
M. LEVESQUE: Article 9).
Projet de loi no 9 Deuxième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des
Transports propose la deuxième lecture du projet de loi no 9, Loi
modifiant le code de la route.
M. Raymond Mailloux
M. MAILLOUX: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur
de la province a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande
l'étude à l'Assemblée.
M. le Président, le projet de loi modifiant le code de la route,
projet de loi no 9, apporte des modifications au système de
contrôle dans le secteur de la réglementation de la pesanteur des
véhicules automobiles, de même que celui de la conduite
automobile.
On se rappelle qu'avec l'adoption de la loi no 23, Loi des transports,
le gouvernement avait mis en application un système plus complet de
réglementation des charges lourdes sur nos routes, afin de les
protéger plus adéquatement, surtout en période de
dégel, pour ainsi contrôler davantage les augmentations de
coûts dans le secteur de la conservation du réseau routier.
Ce système fut mis en application le 1er novembre 1972 avec,
comme base, le contrôle de la charge axiale. Les amendements que nous
suggérons aujourd'hui visent plutôt les modalités
d'application et de calcul des infractions. L'expérience des derniers
mois, en fait, surtout en période de dégel, a
démontré la trop grande sévérité du
système de contrôle et des infractions impliquant souvent des
montants de nature à compromettre la rentabilité des travaux de
camionnage.
Les différentes associations de protection des
intérêts des camionneurs, artisans ou entrepreneurs, ont
d'ailleurs fait part à quelques reprises au gouvernement de leurs
inquiétudes à ce sujet. Les amendements proposés sont donc
susceptibles de diminuer la valeur même des infractions, tout en les
fixant à un niveau permettant un contrôle vraiment
sérieux.
Dans le calcul des pénalités, sans éliminer le
contrôle des charges exiales, nous avons surtout insisté sur le
poids total en charge, puisque, de toute façon, l'excédent total
implique toujours un excédent au niveau de l'un des essieux.
M. le Président, le projet de loi à l'étude fait
donc disparaître l'amende de $0.05 la livre excédentaire lorsque
la charge par essieu d'un véhicule automobile dépasse celle qui
est fixée par le gouvernement.
Il impose plutôt une amende de $2 par 100 livres
excédentaires sur le poids total en charge autorisé.
Le nouveau mode de calcul des pénalités soustrait de plus
le propriétaire du véhicule au paiement de l'amende pour
surcharge à l'essieu lorsqu'il y a infraction au niveau de la surcharge
totale. Dans un souci d'équité, nous proposons aussi que les
modifications suggérées aient un effet rétroactif au 1er
novembre 1972, date de l'entrée en vigueur de ce système de
réglementation des charges lourdes, et que les accusations et amendes
qui ont suivi ces infractions soient reconsidérées et
recalculées en conséquence.
Au chapitre de la conduite automobile, le projet de loi no 9 apporte
aussi un amendement à l'article 69 du code de la route, qui traite
notamment de la responsabilité du propriétaire d'un
véhicule automobile en cas d'infraction. L'amendement proposé
vise à faire disparaître l'obligation qui incombe
présentement au propriétaire d'un véhicule automobile de
prouver qu'il n'était pas au volant d'un véhicule lorsqu'une
infraction à certaines règles concernant la circulation a
été commise.
Ceci implique donc que le conducteur du véhicule devra être
identifié au moment de l'infraction, et cette règle trouvera
dorénavant pareille application dans les cas de règlements
municipaux. L'amendement proposé a aussi une conséquence directe
dans l'application du système de points de démérite
puisque, dans le cas où le conducteur n'était pas
identifié au moment de l'infraction, les points étaient
débités au dossier du propriétaire plutôt
qu'à celui du conducteur, rendant de ce fait le système
inéquitable puisqu'il veut blâmer le comportement du conducteur en
cas d'infraction aux règles de la circulation automobile.
De plus, dans de pareils cas, les procédures de défense
étaient rendues difficiles pour le propriétaire du
véhicule à cause des délais entre le moment de
l'infraction et celui de l'inscription de points à son dossier. Cette
nouvelle procédure d'avis se rapproche aussi beaucoup plus de notre
objectif de prévention et d'éducation en matière de
sécurité routière puisque la faute est signalée au
conducteur au moment précis de l'infraction.
De plus, cette procédure contribuera à diminuer l'usage
abusif de radars et autres appareils du même genre dans certains
endroits, situation que nous avons eue à commenter à quelques
occasions et que les parlementaires des partis d'Opposition ont eu à
commenter également.
En conclusion, le projet de loi modifiant le code de la route veut donc
corriger certaines situations qui, d'après notre expérience, nous
ont semblé inéquitables, tout en nous permettant de maintenir des
contrôles susceptibles de protéger les droits collectifs de tous
les résidents du Québec.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard ): Le leader parlementaire de
l'Opposition officielle.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, le projet de loi no 8 a l'avantage de
replacer dans une certaine réalité... Le no 9, je m'excuse
on a tellement parlé du projet de loi no 8
c'est-à-dire la Loi modifiant le code de la route, a l'avantage,
donc, de replacer dans une réalité assez concrète
le domaine que j'avoue assez délicat de l'application du code de la
route. Assez délicat d'une part en ce sens que l'automobile, le
véhicule à quatre roues ou à dix roues, peu importe, est
devenu maintenant en 1973 un moyen de locomotion très courant, est
devenu d'ailleurs la chose la plus régulièrement utilisée
soit pour se déplacer ou déplacer des marchandises. Je pense
qu'il fallait et c'est l'avantage du projet de loi proposé par le
ministre des Transports reconnaître cette situation.
D fallait aussi, au moins quant à deux cas assez précis,
rétablir certaines règles qui avaient peut-être
été pensées en des termes différents de ce que la
réalité actuelle nous propose.
Je ne m'attacherai pas, d'ailleurs, à l'aspect tracassier,
à mon avis, du problème qui existait à l'égard du
nombre d'infractions par essieu, etc. Je m'attacherai plutôt, M. le
Président, à féliciter le ministre d'apporter au projet de
loi la modification à ce qu'on appelle le fameux problème des
radars. Dans le fond, ce que le projet de loi 9 règle, c'est cette
espèce de situation absolument incompréhensible selon laquelle un
automobiliste ou un camionneur et j'y reviendrai en ce qui concerne les
chauffeurs professionnels se retrouvait dans une situation d'avoir
à faire face, plusieurs mois l'expérience nous prouve que
c'est habituellement un minimum de trois mois plus tard après
l'infraction, à une accusation d'infraction au code de la route
captée par l'entremise d'un radar. Le texte, tel qu'il est
rédigé évidemment, n'est peut-être pas aussi
explicite que cela, mais si je l'interprète bien le ministre des
Transports me dira le contraire, si jamais je l'interprète mal il
semble vouloir nous dire que le fardeau de la preuve qui, dans le fond, dans le
passé, était imposé sur les épaules du conducteur
de véhicule automobile est maintenant inversé.
C'est-à-dire qu'au départ, de par le code de la route actuel, on
se retrouvait devant la situation que le moindrement qu'un véhicule,
immatriculé sous la plaque tel numéro, commettait une infraction,
c'était le propriétaire qui devait se présenter à
la cour, à la suite de l'assignation qui lui était faite, et qui
devait dire: Bien, ce jour-là, ce n'était pas moi, M. le juge,
qui conduisais mon véhicule; c'était une autre personne. La
plupart du temps, c'était trois, quatre mois plus tard. Je n'ai pas
connaissance de cas qui remontent plus loin que ça. Moi, M. le
Président, si vous me demandiez si je conduisais mon automobile il y a
trois mois, à telle date précise, je serais absolument incapable
de vous le dire; surtout si c'est une personne qui, à l'occasion,
prête sa voiture à quelqu'un d'autre. Je pense que c'est une
très bonne mesure; elle est beaucoup plus réaliste et elle a, au
moins, la valeur de ramener à certaines normes absolument acceptables
ces pénalités qui sont difficiles actuellement à supporter
pour les conducteurs professionnels, les chauffeurs professionnels. Je pense,
en particulier, aux chauffeurs de taxi, aux chauffeurs de camion, aux gens qui,
comme les commis voyageurs, etc., ont besoin de leur voiture. Est-ce que le
député de Trois-Rivières veut intervenir dans le
débat ou quoi? Je pense, par exemple, à tous ces gens qui sont
des professionnels de la route, qui, depuis que le système de
démérite comme le disait le ministre tantôt
est mis en application sont placés dans une situation qui risque de leur
faire perdre leur instrument de travail qui s'appelle dans le fond leur permis
de conduire. Or, je pense qu'à ce moment-là un camionneur qui
voyage sur la Transcanadienne, entre Québec et Montréal ou entre
Trois-Rivières et Berthierville, se doit absolument d'être
assuré que c'est lui qui a commis cette infraction-là. En effet,
si, éventuellement, c'est prouvé que c'est une autre personne, le
système de points de démérite, qui normalement risque de
l'amener tranquillement, pas vite, à une perte de son permis de
conduire, peut être écarté. Au moins, la porte que nous
laissons ouverte au propriétaire du véhicule par le projet de loi
lui permettra, à ce moment-là, de se défendre. Cela lui
permettra de dire: Bien, tel jour, de par un certain c'est ce qu'on dit
dans le milieu "log", ce n'était pas moi qui conduisais mon
véhicule, etc. Surtout en obligeant la police, qu'elle soit municipale
ou provinciale, à faire la preuve de la personne qui était au
volant du véhicule au moment de l'infraction, je trouve qu'à
toutes fins pratiques on impose aux policiers qui ont à appliquer le
code de la route l'obligation d'arrêter la personne, de l'identifier, de
savoir si c'est bien monsieur X ou monsieur Y qui est au volant du
véhicule.
Dans ce sens-là, M. le Président, c'est avec plaisir que
nous adopterons cette mesure que nous croyons absolument normale et absolument
régulière pour améliorer et rendre un petit peu plus
réaliste le système de points de démérite qui,
encore une fois, a sa valeur, il n'y a pas de doute, et le ministre des
Transports sera peut-être en mesure, à un moment donné, de
nous donner des statistiques relativement à ça.
Je ne veux pas le précéder là-dessus, ce
système de points de démérite a sa valeur, il n'y a pas de
doute, mais il a peut-être été au départ mis en
vigueur sans tenir compte d'un certain nombre de contingences donc celui du
radar, dont cette imposition absolument inattendue et incroyable de sanctions
qui peuvent, à un moment donné, enlever ce que j'appelais
tantôt l'instrument de travail d'un chauffeur professionnel.
Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, il nous fera
plaisir de voter en faveur du projet de loi no 9.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): Le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M. SAMSON: M. le Président, le projet de loi no 10 nous
plaît également énormément. Il n'est pas besoin de
vous dire que l'ancien député d'Abitibi-Ouest et l'ancien
député de Frontenac, deux députés
créditistes qui avaient l'occasion, lors de la dernière
Législature, de surveiller le ministère des Transports pour notre
formation politique, avaient je pense, à quelques reprises,
formulé des voeux dans ce sens-là. D'ailleurs, le parti que je
représente a aussi formulé des voeux dans ce sens-là. Nous
avions même un article à notre programme électoral qui
ressemblait grandement à ce qui nous est présenté
aujourd'hui par le ministre des Transports, notamment lorsqu'il s'agit de la
question des amendes pour les poids des véhicules tels que les camions.
Nous en avions parlé. Mais ce qui nous amène à parler du
système de points de démérite c'est l'article suivant
lequel, à l'avenir, les policiers devront identifier le
propriétaire ou le conducteur d'une automobile, avant de faire parvenir
une contravention au propriétaire, comme c'était le cas, dans le
code de la route.
M. le Président, cette partie-là nous intéresse
énormément parce que nous considérons qu'en vertu du code
de la route que nous connaissons, il y avait, selon nous, de graves injustices
de commises, comme, par exemple, toute cette question de l'utilisation des
radars, de la photo, etc., etc. On fait de nos policiers, dans certaines
municipalités, non pas des policiers qui, comme cela devrait se faire,
font de la prévention. Sur la route, un jour ou l'autre, tous les
conducteurs, quand ils ont surtout plusieurs milles de faits, sur un long
voyage, sont tentés un peu par l'excès de vitesse et je pense que
c'est humain. Mais nous croyons qu'il vaut mieux que nos policiers utilisent
leur temps à la prévention, c'est-à-dire faire en sorte
que sur les routes, les conducteurs voient la présence des policiers. En
tant que conducteur j'ai eu l'occasion de parler avec plusieurs conducteurs, et
nous le savons tous, lorsque les conducteurs sentent la présence des
policiers, M. le Président, tous sont portés à ralentir
leur vitesse, à être plus prudents.
Donc, nous considérons qu'il vaut mieux oeuvrer dans le sens de
la prévention, pour éviter des accidents. Je pense que le
rôle de la police ne doit pas être strictement un rôle
punitif et à mon sens justement, le policier ne doit pas être une
personne qui doit punir, mais quelqu'un qui doit prévenir. Alors quand
on parle du code de la route, de l'application du code de la route, quant
à nous, en tout cas, on préfère de beaucoup des policiers
qui font de la prévention, qui par leur présence et en
démontrant qu'ils sont présents feront en sorte que les
automobilistes ralentiront et qu'ils seront prudents.
Ainsi, par le fait même, il y aura moins d'accident.
Ce qui nous intéresse, c'est qu'il y ait moins d'accident de la
route. On n'est pas intéressé, quant à nous, que le corps
policier, de quelque municipalité que ce soit, soit un
département à profit. Et, malheureusement, par les abus qu'il y a
eu de l'utilisation des radars dans plusieurs localités, nous avions
l'impression que les policiers étaient là pour faire la chasse au
trésor, étaient là, non pas comme des policiers mais comme
des espèces de chasseurs de trophées qui avaient, comme but de
chasse, des têtes d'automobilistes.
Cela nous paraissait un peu ainsi dans certains cas que, plus les
chasseurs de têtes d'automobilistes réussissaient à
descendre des têtes d'automobilistes, plus c'était payant pour la
municipalité. On a même entendu parler de cas dans une
région où le radar était loué et où
celui-là qui louait le radar travaillait pour le corps de police ou pour
la municipalité à commission.
Quant à nous, on considère que cela n'est pas de cette
façon que cela doit se produire. Il y a trop de municipalités qui
ont abusé, par exemple les municipalités qui ont la chance de
voir traverser dans leur municipalité une route provinciale où il
y a beaucoup de trafic. On dirait que dans certaines de ces
municipalités vous avez le conseil municipal et la chambre de commerce
qui tentent d'attirer le touriste par des moyens de publicité de toutes
sortes; d'autre part vous avez le corps de police qui tente de les attraper
comme on joue à l'attrape-nigaud chaque fois que les touristes
s'amènent dans ces municipalités.
Je pense qu'il faut quand même être logique. Ces
municipalités et il y en a plusieurs faisaient, font et
feront encore appel aux touristes, aux gens pour aller les visiter. Qu'on ne
les appelle pas pour que, d'autre part, on tente de profiter de la situation et
de les exploiter en jouant à cache-cache au lieu de donner un service de
police.
Cela n'est pas un système de billet de loto, des billets
donnés par des policiers. Bien entendu, nous savons qu'il y a des abus.
Bien entendu, nous sommes d'accord que ces abus soient punis mais je pense que
nous pourrions faire qu'il y ait beaucoup moins de ces abus en
démontrant un sens des responsabilités et en faisant plutôt
de la prévention.
Dans plusieurs municipalités où cela se fait, où
cela se fait encore, je vous donne un exemple. Si je demeure à
Rouyn-Noranda et si, à un certain moment, je reçois chez nous une
contravention en provenance de la ville de Québec, trois ou quatre mois
après que l'infraction ait été commise, bien entendu il se
peut que la mémoire fasse défaut. D se peut qu'on ne se rappelle
pas au juste si oui ou non on était à ce moment-là
à cet endroit mais qu'est-ce qui nous arrive? C'est qu'étant loin
de l'endroit de l'infraction, on nous envoie une sommation et on vous dit
suivant l'actuel code: Défendez-vous. Vous êtes reconnu coupable,
à moins que vous ne prouviez le contraire.
Alors, quelqu'un qui demeurerait, par exem-
ple, à Rouyn-Noranda, il est bien logique qu'il en
coûterait beaucoup plus cher pour se déplacer et venir se
défendre à Québec qu'il en coûte de payer une
amende, même si l'amende est assez élevée.
Alors, comme conséquence, il se trouve que dans une forte
proportion certaines de ces municipalités perçoivent des montants
d'argent de propriétaires d'automobile qui ne sont coupables sous aucune
considération mais les gens paient parce que cela coûte encore
moins cher de payer, parce qu'on est trop loin, que d'aller se
défendre.
Je pense que ceci est très sérieux. Evidemment, vous allez
me dire qu'il y a des cas d'exception. J'en ai un à vous citer.
C'est évidemment un cas d'exception. Mais ce cas d'exception peut
peut-être nous démontrer qu'il y en aurait aussi d'autres de ce
genre.
J'ai à vous citer, M. le Président, à l'appui de
mes remarques, le cas d'un citoyen de Rouyn-Noranda qui, un jour, reçoit
une contravention de la ville de Joliette. On l'accuse pour une infraction au
code de la route. Il se trouve et cela est rare, mais c'est
arrivé comme ça que le monsieur, le policier qui l'a
arrêté a pris le numéro de licence, on a envoyé
ça au ministère des Transports, probablement, et, de là,
avec le numéro de licence, on a déterminé le nom du
propriétaire et le numéro du permis de conduire. Chose assez
curieuse, mais cela arrive, deux personnes portant le même nom dans la
province de Québec, étant nées le même jour, ont
exactement le même numéro de permis de conduire. Par voie de
conséquence, notre type de Rouyn-Noranda reçoit une contravention
pour une infraction commise à Joliette, alors qu'il n'a jamais
été là et que cette infraction, après
enquête, a été commise par quelqu'un qui réside
à Montréal. Cela n'est rien encore. Ce qui est pire, c'est que
notre type, après avoir reçu cette sommation, alors qu'il n'a
jamais été là de sa vie, ne s'en est pas occupé. Il
n'a pas pensé non plus aller consulter un avocat. C'est un travailleur,
évidemment, ce n'est pas un juriste, alors il a laissé passer
ça. Comme conséquence, il a été condamné par
défaut d'être présent le jour de la comparution, et,
à un certain moment, le type était condamné et
menacé d'emprisonnement.
Vous voyez, M. le Président, c'est une situation qui n'arrivera
évidemment pas tous les jours. Je le conçois, mais je pense que
cela met en cause toute la philosophie que nous discutons présentement.
Si les policiers avaient eu l'obligation d'identifier le conducteur, ceci ne
serait pas arrivé. Il y a peut-être d'autres exemples, il y en a
sûrement, le ministre des Transports en a sûrement à nous
citer, mais il n'est pas nécessaire, je pense, de citer tous les
exemples que nous avons. A l'appui de nos remarques, je pense qu'il est
cependant important que nous fassions bien comprendre à ceux qui
voudraient contester le bien-fondé de la loi no 9... M. le
Président, il se trouvera des maires de ville ou de municipalité
pour contester le bill 9, par intérêt, parce que, suivant la
façon dont cela se produit présentement, l'utilisation du radar
est devenue une espèce de chasse au trésor, c'est payant et
ça rapporte. H arrivera peut-être que certains maires de
municipalité ou de ville voudront contester le bien-fondé du bill
no 9. Je vous cite le cas du maire de Québec, qui est un gentil
garçon, pour qui j'ai beaucoup d'admiration, mais lorsque, ce matin, sur
les ondes d'un poste radiophonique de Québec, je l'ai entendu contester
le bill no 9, M. le Président, je n'ai pas reconnu l'homme que je
croyais connaître. Ce n'est pas pour faire de la personnalité,
mais je pense qu'il est bon, puisque ces gens ont une tribune publique et que
cette tribune publique leur permet de donner leur point de vue, ce qu'ils ont
évidemment le droit de faire... Je crois qu'il faut regarder les deux
côtés de la médaille. Les conducteurs, ainsi que les
propriétaires d'automobile ont le droit d'être
protégés. Un corps de police, quel qu'il soit, que ce soit le
corps de police de la ville de Québec, de la ville de Montréal ou
d'ailleurs, n'a pas pour fonction de punir. Il a pour fonction de
prévenir. Evidemment, lorsqu'il n'y a pas moyen de faire autrement, il a
d'autres fonctions. Mais, avant tout, il faut prévenir. Avant tout, ce
sont les accidents qu'on veut prévenir. Avant tout, c'est la vie des
gens, la vie des automobilistes qui nous importe. Ce ne sont pas les petites
amendes puis les candy de caméra ou les insolences d'une caméra.
Quand je vois les policiers cachés pour prendre les photos des
conducteurs, pour nous envoyer ça trois mois après, je vais vous
dire une chose: Je n'ai pas besoin du service de police pour faire prendre mon
portrait. Quand je voudrai le faire prendre, je paierai pour, puis je le ferai
prendre sous l'angle qui me plaira. On ne sera pas obligé d'endurer les
mauvaises photos qui nous arrivent, du moins.
Nous en avons assez de voir certains procureurs des municipalités
jouer au bluff avec la population. Je dis bien jouer au bluff, parce que, quand
on vous envoie une facture d'infraction quatre mois après et que vous
êtes à 500 milles de l'endroit de l'infraction, que cela vous
coûterait $200 plus cher d'aller vous défendre que de payer
l'amende, qu'est-ce qui arrive? On paie et on se tait dans ce temps-là.
J'appelle cela jouer au bluff avec la population et on ne veut pas que cela
continue.
M. le Président, c'est pour toutes ces raisons que non seulement
nous appuierons le bill 9, mais que nous avons le devoir de le faire comprendre
dans nos comtés respectifs. Nous avons des tribunes publiques et c'est
notre rôle, notre devoir de faire comprendre à la population le
pourquoi de l'appui que nous avons donné à cette loi no 9. Comme
je vous le dis, il faut s'attendre que ça continue. Je trouve que le
ministre est assez courageux, à ce moment-ci, de nous présenter
ce bill no 9, alors que déjà il y a des gens qui je ne
parle pas d'intérêts
personnels, bien entendu pour les intérêts d'une
municipalité, pour tenter d'augmenter les revenus d'une
municipalité d'une façon quelconque, n'hésiteraient pas
à continuer à jouer à ce petit jeu de cache-cache.
Moi, j'aime les choses claires, les choses nettes. Les
municipalités ont d'autres sources de revenus. De grâce, qu'on ne
tente pas de mettre toujours sur le dos des automobilistes, comme cela se fait
présentement, le poids de certains fardeaux.
Je pense que c'est sérieux. Les corps policiers des
municipalités ne doivent pas être considérés comme
un service à revenus. C'est un service au public, qui doit coûter
des sous. J'ai entendu, dans certaines municipalités, des
représentants de conseils municipaux me dire: Chez nous, cela va bien;
notre corps de police nous a rapporté tant d'argent cette année.
Quand on vient se vanter de cela, c'est simple, c'est décourageant,
parce que je pense que le but visé par le code de la route c'est la
protection des automobilistes. Pourquoi avons-nous des règlements?
Pourquoi devons-nous circuler de telle façon, plutôt que de telle
autre façon? Pourquoi devons-nous circuler à telle vitesse,
plutôt qu'à telle autre vitesse? C'est justement par prudence,
pour éviter qu'il n'y ait des accidents. Si c'est pour éviter
qu'il n'y ait des accidents, qu'on ne se cache pas pour laisser les gens
s'emballer et rouler trop vite, qu'on ne se cache pas pour les laisser risquer
de se casser la gueule et, après cela, dire: Vous avez été
trop vite. Notre rôle, c'est d'inciter les corps policiers à la
prévention et, pour toutes ces raisons, nous allons voter en faveur du
bill no 9.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le ministre des Transports, sur son
droit de réplique.
M. Raymond Mailloux
M. MAILLOUX: M. le Président, j'ai tantôt
écouté le député de Maisonneuve et c'est un fait
que, par le projet de loi no 9, le fardeau de la preuve, qui auparavant
était à la charge du propriétaire d'un véhicule
automobile, est renvoyé vers tous les corps de police quels qu'ils
soient. Il y a quand même une constatation brutale qui se dégage
de l'expérience qui a été vécue dans les derniers
mois, c'est que la Sûreté du Québec, qui peut-être a
à oeuvrer sur des routes où il n'y a pas tellement de feux de
circulation ou d'obstacles semblables, a quand même depuis que le
système de points de démérite a été mis en
application, dans 99 p.c. des cas où il y a eu constatation d'une
infraction par le système de radar ou par interception, a fait le
nécessaire pour elle-même faire la preuve, même quand elle
n'y n'était pas obligée.
J'ai tantôt écouté le député de
Rouyn-Noranda et c'est un fait que, dans d'autres municipalités, le
même souci n'a pas été, je pense, tellement mis en
évidence et le fardeau de la preuve, c'est à la charge des
propriétaires de véhicules qu'il a été
renvoyé.
Avant la présentation du bill 9, j'ai peut-être
hésité à aller d'une manière aussi
catégorique dans les corrections à apporter, corrections que nous
reverrons d'ailleurs en période de printemps j'en parlerai
tantôt. Des solutions étaient proposées dans le but de
tâcher de venir en aide aux municipalités qui nous accusent de
renvoyer à la charge des contribuables de ces municipalités
l'obligation de faire la preuve et de faire des dépenses
supplémentaires. La seule suggestion qui m'avait été
transmise était la suivante: C'était de permettre à un
propriétaire d'aller faire une preuve par affidavit, à l'effet
que ce n'était pas lui qui était au volant d'un véhicule
au moment de l'infraction.
M. le Président, voici ce que je pense, comme ministre des
Transports. Cela a été dit tantôt par les honorables
membres de l'Opposition, on sait que les infractions arrivent des fois avec
deux, trois et quatre mois de retard. Et cela n'a pas semblé être
tellement facile de restreindre ces délais, malgré l'insistance
que mettent nos fonctionnaires pour que ces envois soient faits dans un plus
bref délai. Il ressort que cela aurait quasiment été de la
part du ministre des Transports, inviter collectivement les citoyens du
Québec, qui n'ont quand même pas souvenir de chaque heure de la
journée, à aller, après trois ou quatre mois, tâcher
de faire un affidavit. Dans la majeure partie des cas, c'était tenter
des gens à faire de faux serments.
Je veux croire et je le dis maintenant que c'était
l'intention du ministre des Transports, dans les mois qui vont suivre, de
suggérer la convocation de la commission parlementaire. Après
l'expérience que nous avons vécue, que nos officiers ont
vécue avec le système de points de démérite, qui
fait ses preuves mais qui amène peut-être quelques faiblesses,
tous les parlementaires pourraient, avec nos officiers, nos conseillers
juridiques, revoir l'ensemble du système de points de
démérite et tâcher d'apporter certains correctifs que nous
savons devoir apporter dans les mois qui vont suivre.
Je voudrais que le public du Québec fasse quand même
attention parce qu'il sera peut-être dit, demain matin, que les radars
sont disparus dans le Québec. Les radars demeureront. La
Sûreté du Québec s'en sert actuellement. Mais les
municipalités qui voudront conserver des radars devront, à
quelques centaines ou à quelques milliers de pieds plus loin, faire une
interception et les lois municipales devront être de la même
façon que la loi provinciale.
M. le Président, il y a un autre article sur lequel les membres
de l'Opposition n'ont pas trop insisté et je voudrais faire un aveu.
C'est que, dans la modification que nous apportons à la Loi de la
pesanteur sur la charge axiale ou sur la pesanteur totale en charge, il sera
peut-être dit, dans un proche avenir, que l'amende, qui
est demeurée de $0.02 la livre en poids excédentaire, est
peut-être très lourde. Mais, dans les mois qui ont
précédé je regardais l'ensemble des contraventions qui ont
été données dans le Québec. Est-ce que c'est parce
que nous sommes des Latins et que cela nous prend plus de temps que d'autres
à observer des règlements? L'on sait que le ministère des
Transports, dans son souci de protéger le réseau routier, a voulu
imposer des conditions qui existent ailleurs, dans d'autres provinces.
Si nous avons laissé une amende dont devront se rappeler les
camionneurs qui voudront outrepasser les charges permises, c'est qu'à
l'intérieur de cette liste nous constations que c'étaient
principalement des récidivistes qui, à longueur de semaine,
violaient systématiquement la Loi des pesanteurs. Alors je veux croire
que, sachant que le ministère restera intransigeant sur le dernier
amendement que nous avons apporté, il appartient aux camionneurs de
respecter la loi telle qu'elle est présentée mais je pense que le
correctif que nous avons apporté et que l'Opposition semble vouloir
accepter est quand même un allégement qui prouve notre bonne
volonté.
Je veux dire en terminant, M. le Président, que dans cette loi,
dans le système de points de démérite il faudrait que les
municipalités comprennent et aient le même souci que le
gouvernement provincial, dont parlaient tantôt mes honorables
collègues, que c'est la sécurité du public que nous
voulons, que les municipalités doivent avoir à leur attention et
ce ne sont pas des taxes indirectes qu'on doit aller chercher par de tels
moyens.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Cette motion de deuxième
lecture est-elle adoptée?
Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce projet de loi.
Second reading of this bill.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que vous quittiez le
fauteuil et que la Chambre se forme en commission plénière pour
étudier ce projet de loi article par article.
Commission plénière
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable leader du gouvernement
propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la commission
plénière soit formée pour l'étude du projet de loi
no 9 article par article. Cette motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
M. PILOTE (président de la commission plénière):
Article 1.
M. BURNS: M. le Président, est-ce que le ministre peut nous dire
si la modification qu'il nous propose aux articles 1 et 2 on peut
peut-être réduire la discussion là-dessus, poser une
question pour ces deux articles a été faite à la
suite de demandes soit d'associations de camionneurs ou de groupements
intéressés au camionnage? Est-ce que le ministre peut nous donner
simplement l'historique?
M. MAILLOUX: Je voudrais simplement dire qu'il y a eu rencontre entre
l'Association du camionnage du Québec et entre les divers groupes de
camionneurs du Québec. Il est indiscutable que nous ayons
constaté que les infractions ne pouvaient définitivement pas
demeurer aussi élevées qu'elles avaient été
indiquées.
Je pense que les infractions ont dépassé
catégoriquement l'esprit du législateur, de même que la
volonté exprimée par nos officiers. C'est après rencontre
avec les différents intéressés que le ministère a
décidé d'apporter les modifications qui s'imposent.
M. BURNS: C'était cette espèce de répartition par
essieu qui donnait lieu à une interprétation abusive.
M. MAILLOUX: II y avait un problème auparavant: le
propriétaire pouvait être condamné et pour la charge axiale
et pour le poids total de la charge. H y avait une amende minimum, amende pour
la charge axiale, et amende pour le poids total de la charge. Dans ce projet de
loi, dans la presque totalité des cas, ce sera une amende de base de
$200 s'il y a excès du poids total de la charge, plus $0.02 la livre en
excédent. Mais à ce moment disparaît l'infraction qui
devait également être payée sur la charge axiale et qui, de
toute façon, était à l'intérieur d'un surplus de
poids de la charge totale.
M. BURNS: En somme c'est pour faire disparaître une espèce
de forme de double pénalité qu'on amène ça.
M. MAILLOUX: C'était une double pénalité. Quand
j'ai dit tantôt que ça dépassait l'esprit du
législateur, il y a un "et" qui avait été mis à la
place d'un "ou" qui obligeait nos services à exiger les deux amendes
â la fois. C'est là que ç'avait dépassé
l'esprit du législateur.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Viau.
M. PICARD: Est-ce que le ministre pourrait nous dire si les officiers
qui sont chargés de faire la surveillance ou de vérifier la
pesanteur des camions sont des officiers du ministère des
Transports?
M. MAILLOUX: C'est exact.
M. PICARD: Est-il exact que ces officiers du ministère des
Transports qui ne sont pas des gendarmes, qui ne sont pas armés font
appel, dans certaines circonstances, au corps de police de la ville de
Montréal dans le cas d'infractions dans la région de
Montréal?
M. MAILLOUX: Je pense que les officiers du ministère des
Transports sont également armés. Mais il ressort qu'ils sont
là pour faire une constatation, et diriger les camions qui ont un
excédent de pesanteur vers les balances qui appartiennent
également au ministère.
Je ne peux vous dire si, effectivement, nos officiers font appel, dans
la ville de Montréal, à ceux de la Sûreté
municipale, mais peut-être qu'il a quelques problèmes à
l'intérieur des villes.
M. PICARD: Est-ce que le ministre me permettrait de lui relater ce qui
m'a été raconté il n'y a pas tellement longtemps en
rapport justement avec ces infractions? Il semblerait que, dans la
région de Montréal, les officiers du ministère des
Transports...
M. BERTHIAUME: Est-ce que le député de Viau me permet une
explication?
M. PICARD: Pardon, je n'ai pas compris?
M. MAILLOUX: Est-ce que vous parlez de la ville de Montréal ou de
la région de Montréal?
M. PICARD: La région de Montréal. Ce sont les officiers du
ministère des Transports avec les camionnettes bleues...
M. BERTHIAUME: Est-ce que le député de Viau me permet une
explication?
M. PICARD: Oui.
M. BERTHIAUME: En ce qui concerne les chemins municipaux, à
Montréal notamment, le ministère des Transports n'a pas
juridiction à ce moment-là. Autrement dit, le but de cette loi,
c'est de protéger les routes provinciales. Etant donné que les
rues de la ville de Montréal ne nous appartiennent pas, elles ne nous
concernent pas spécifiquement. Alors, nos surveillants routiers n'ont
pas juridiction et ne font pas l'inspection ou la surveillance des rues de
Montréal.
M. PICARD: Est-ce qu'ils font la surveillance des rues de
Saint-Léonard?
M. BERTHIAUME: Non plus.
M. PICARD: Est-ce qu'ils font la surveillance des rues quelque part sur
l'île de Montréal?
M. BERTHIAUME: Sur les chemins provinciaux de l'île de
Montréal, oui.
M. PICARD: Si vous me le permettez, je vais vous donner l'explication.
Apparemment, les officiers du ministère des Transports, qui ne sont pas
des officiers de police, des gendarmes armés, ont des
difficultés, à certains moments, à convaincre les
conducteurs de certains camions de se rendre en dessous du boulevard
Métropolitain, à telle intersection, pour faire peser les
camions. A ce moment-là, ils font appel aux policiers de la ville de
Montréal. Si vous me permettez de terminer l'explication, c'est plus
sérieux que ça peut en avoir l'air. Donc, il semblerait que les
officiers du ministère des Transports font appel aux officiers de la
ville de Montréal, à la police de Montréal, à des
jours fixes. Je vais donner un exemple: presque tous les mardis matin, le corps
de police de la ville de Montréal reçoit un appel d'envoyer deux
ou trois motocyclistes pour surveiller les camions qui passent à un
certain endroit et de les diriger vers tel endroit en dessous du boulevard
Métropolitain pour permettre aux officiers du ministère des
Transports de faire la pesée de ces camions.
Il semblerait, d'après les plaintes que j'ai eues, que certaines
grosses compagnies ont ouï-dire de ces temps et lieu où les membres
du ministère des Transports font cette surveillance et, ces
jours-là c'est bien drôle à dire elles ne se
font jamais prendre. J'irais même plus loin: si ça arrive le mardi
c'est juste une hypothèse que je vous donne c'est bien de
valeur, mais les camions de cette compagnie ne dépassent jamais la
charge maximum permise par la loi, même d'une seule livre. Par contre, on
attrape les petits et on leur envoie des amendes de $300, $400 et $500.
Alors, je me demande s'il n'y aurait pas lieu de faire une correction
à ce système. S'ils sont pour faire appel aux services de la
police de Montréal, qu'on change les heures et qu'on s'arrange pour que
personne n'ait un tuyau disant: Faites attention sur telle route, vous allez
vous faire arrêter par les gars du ministère des Transports et
vous allez être obligés de payer. Ce qui arrive à ce
moment-là, M. le Président, c'est que les grosses corporations
je ne veux nommer personne en particulier, mais vous les connaissez
les gros transporteurs en vrac, s'ils se font prendre et sont
obligés de payer $300 ou $400 d'amende, rient dans leur barbe, parce
qu'à partir de une heure dans l'après-midi le gars du
ministère des Transports n'est plus là; ils chargent pendant
deux, trois heures et ils ont récolté les $500 d'excédent
de charge.
Le point que je veux soulever, c'est que, s'il doit y avoir un
système de vérification, ce ne soit pas simplement pour le petit
camionneur, mais pour les grosses compagnies. Voici ma suggestion à cet
effet: Pourquoi, pour les compagnies qui font du transport en vrac, je parle du
caillou cassé, du "screening" et des choses comme ça, ne fait-on
pas la pesée directement où on va chercher ce matériel? Il
y
a ce qu'ils appellent des récépissés de livraison,
ce que vous appelez un "bill of lading" que le chauffeur souvent refuse de
montrer aux policiers. Et, sur ce "bill of lading", on indique la pesanteur; si
on veut être payé par l'acheteur, il faut qu'on indique la
pesanteur du camion. Je pense qu'il y aurait lieu pour la police d'aller faire
une vérification dans les carrières et de dire: Sortez-nous vos
"bills of lading" de tous les camions qui sont sortis sur les routes du
Québec depuis le matin. S'il y a des excédents de charge, vous
l'avez sur le "bill of lading". Si le camion avait le droit de transporter
50,000 livres, s'il sort avec 70,000 livres, mettez-les à l'amende
exactement là.
M. VEILLEUX: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Saint-Jean.
M. MAILLOUX: Je voudrais quand même faire quelques observations
suite à ce que vient d'avancer mon collègue. Je voudrais lui dire
que, dans la liste d'infractions dont on parle depuis quelques minutes, dans
tous les chemins qui sont sous la surveillance du ministère des
Transports, quelle que soit la compagnie, quelle que soit son importance, les
infractions ont été livrées de la même
façon.
Quand je constate qu'une seule compagnie a ramassé pour
au-delà de $70,000 d'infractions, je pense que le ministère n'a
pas fait d'injustices à qui que ce soit.
Il y a cependant un problème en particulier qui se pose. C'est
qu'à l'intérieur d'une ville comme Montréal, la
responsabilité de la surveillance et des charges n'appartient pas
à la police du ministère des Transports, mais à la
Sûreté de Montréal, qui, malgré l'insistance du
ministère des Transports, laisse des charges circuler dans la ville, qui
dépassent parfois les limites de la ville et tombent sous notre
responsabilité, et la ville n'a pas toujours donné la
collaboration qu'on espérerait.
Le seul recours qu'aurait le gouvernement contre les surcharges qui sont
accordées dans la ville de Montréal et qui parfois
dépassent les limites de la ville est que le gouvernement, dans ses
discussions avec la ville de Montréal, tienne compte du fait qu'elle ne
veut pas protéger un réseau routier qu'elle devrait
protéger autant que la province de Québec. Je veux affirmer, M.
le Président, que quant à la police du ministère des
Transports sur les chemins provinciaux, si nous réduisons l'amende, ce
n'est pas parce que ce sont de grosses ou de petites compagnies, c'est parce
que cela avait dépassé notre intention comme amende. Quand je
vois qu'une seule charge de camion pouvait coûter en amende
jusqu'à au-delà de $7,000, il est indiscutable que cela avait
dépassé de beaucoup l'amende que nous voulions imposer.
Sur le réseau provincial, il appartient à la police des
transports de faire la surveillance et elle le fait dans tout le territoire du
Québec.
M. PICARD: M. le Président, une dernière question au
ministre. Est-ce que le ministre peut m'affirmer qu'il n'y a pas un seul
policier du ministère des Transports qui est en devoir sur l'île
de Montréal avec ses balances portatives, comme on dit?
M. MAILLOUX: M. le Président, je ne suis pas capable d'affirmer
une chose semblable: qu'un policier fermerait les yeux. Quand même on
demanderait au ministère des Transports de surveiller les centaines
d'inspecteurs à travers le Québec sur 44,000 milles de route, je
pense que même si je faisais une telle affirmation, il n'y a pas un
individu dans cette Chambre qui me croirait.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: Le ministre a dit tout à l'heure que la
première loi avait dépassé l'esprit de ce que voulait le
ministère parce qu'il y avait double amende pour une même
infraction. Etant donné que, dans un comté comme le mien, les
transporteurs sont surtout des petits transporteurs, des gars qui n'ont qu'un
camion, qui ont eu à payer d'énormes amendes d'ailleurs, j'en ai
relevés plusieurs dans mon comté est-ce que l'application
de cet amendement a un effet rétroactif?
M. MAILLOUX: M. le Président, elle a effectivement un effet
rétroactif depuis, je pense, le 1er novembre 1972. L'amendement à
la loi fait d'abord disparaître près de 50 p.c. des infractions
qui ont été livrées. Pour ceux qui en ont fait paiement,
le ministère de la Justice pourra, par cette loi, en faire
remboursement. Seul ce qui demeure dans la loi devra être payé sur
un nouvel avis qu'enverra le ministère de la Justice.
M. VEILLEUX: Merci.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'article 1 est adopté. Article 2.
Adopté. Article 3. Adopté.
M. BURNS: M. le Président, si vous me permettez, ce ne sera pas
long, juste sur le 2e paragraphe de l'article 2, c'est-à-dire celui qui
commence en disant a) en remplaçant les sous-paragraphes a) et b) du
paragraphe 12, est-ce que vous me permettez M. le Président, de revenir
sur ce...
LE PRESIDENT (M. Pilote): Oui.
M. BURNS: Très brièvement. C'est un article où l'on
donne au lieutenant-gouverneur en conseil un pouvoir réglementaire qui,
il n'y a aucun doute, sera publié, à la suite de l'exercice de ce
pouvoir réglementaire, dans la Gazette officielle. Est-ce que le
ministère a déjà prévu un mode de publicité
autre que la Gazette officielle? Je m'explique là-dessus. La Gazette
officielle du Québec est évidemment le mode de
publicité le plus légal, si vous voulez, qui puisse exister, mais
je serais curieux de savoir le nombre de nos concitoyens qui lisent la Gazette
officielle, à part un certain nombre de spécialistes.
Il y en a qui veulent savoir quelle compagnie était
incorporée, quelle personne a changé de nom, quel
règlement le lieutenant-gouverneur en conseil a adopté. Est-ce
que le ministère, en plus de cette publicité normale qui est
donnée aux règlements adoptés par le lieutenant-gouverneur
en conseil, a prévu une publicité venant du ministère
lui-même à l'adresse des gens concernés? S'il y a des
minimums et des maximums qui sont changés, je pense que c'est important
que les gens puissent s'ajuster et qu'ils ne se fassent pas prendre par
surprise.
Je sais que techniquement et légalement le ministre pourrait me
dire: La Gazette officielle est une publication. Mais est-ce que le ministre,
quand même, veut aller un petit peu plus loin au niveau de cette
publicité?
M. MAILLOUX: Je voudrais dire au député de Maisonneuve que
dans le règlement no 12, malgré tous les avis qu'avait
donnés la Gazette officielle et les rappels que j'avais faits
moi-même à la radio et à la télévision, il a
fallu que nos officiers à la grandeur du Québec cela s'est
terminé, je pense, il y a quelques jours fassent une
tournée provinciale d'information invitant les gens à venir pour
avoir toutes les informations pertinentes à l'ensemble du
règlement no 12. Dans le cas qui préoccupe le
député de Maisonneuve, malgré évidemment l'avis qui
sera donné dans la Gazette officielle, je ferai le nécessaire
auprès des officiers afin que, pour ceux que cela concerne plus
directement, nous puissions en faire une diffusion raisonnable pour que chacun
en soit valablement informé.
M. BURNS: Est-ce que vous êtes aussi prêt à le faire
auprès des gens qui sont immédiatement concernés,
c'est-à-dire ceux qui sont près de l'industrie du camionnage?
M. MAILLOUX: D'abord, ceux qui sont directement concernés sont
ceux-là que nous viserons.
M. BURNS: D'accord.
M. LESSARD: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de
Saguenay.
M. LESSARD: Au sujet de ceux qui sont directement concernés, le
ministre va certainement communiquer avec l'Association des camionneurs
artisans, qui pourra certainement informer ses membres.
M. MAILLOUX: Sûrement. Aux organismes et même plus loin que
l'Association du camionnage et que l'ANCAI. Il y a quand même d'autres
associations et d'autres organismes qui sont directement
intéressés par le problème.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Article 3. Adopté? Article 4.
M. BURNS: A l'article 4, j'ai deux questions seulement. D'abord, on voit
qu'on impose, selon la disposition de l'article 2, un effet rétroactif.
Est-ce que le ministre est en mesure de nous dire, au point de vue statistique,
ce que cela veut dire actuellement? Est-ce qu'il y a un certain nombre de
causes qui sont pendantes devant les tribunaux relativement à cela? Si
oui, autant que possible, quel en est le nombre, quelle en est
l'importance?
M. MAILLOUX: Je sais qu'il y avait de nombreux avis d'infraction qui
avaient été envoyés depuis le mois de novembre 1973. Je
n'ai pas le tableau actuellement devant moi. Est-ce qu'il y a des causes
pendantes en lisant l'article? Je pense que cela devrait quand même
couvrir peut-être deux ou trois causes pendantes qui avaient pu faire
l'objet de demandes devant les tribunaux. Il y a un remboursement
rétroactif au 1er novembre.
M. BURNS: Remarquez que je ne m'y oppose pas. Je me rends compte, comme
le ministre l'a si bien dit tantôt, qu'il s'agit tout simplement de
régulariser une situation.
M. MAILLOUX: II y a ceci que je pourrais ajouter. Durant l'automne 1973,
des contraventions furent délivrées à l'ensemble de ces
camionneurs, l'Association du camionnage, les artisans et d'autres. Le
ministère de la Justice, devant une erreur qui s'était
glissée dans la loi, a informé tous et chacun de ne pas tenir
compte des dix jours qu'ils avaient pour retourner la contravention, d'attendre
une deuxième note qui serait envoyée par le ministère de
la Justice. Il ressort qu'entre temps quelques camionneurs avaient
déjà payé la contravention. Pour ceux-là, il s'agit
forcément d'un remboursement. Pour d'autres qui avaient payé, il
s'agira d'un remboursement partiel parce qu'il y a une partie de la
pénalité qui pourra demeurer. Alors, c'est pour rétablir
la situation en tenant compte de ce qu'acceptera tantôt la Chambre dans
le projet no 9.
M. BURNS: La deuxième question que je veux poser est
peut-être un petit peu plus pesante que la première.
Est-ce que le ministre a considéré la possibilité
de rendre rétroactive aussi la disposition de l'article 3, en plus des
dispositions de l'article 2? Je m'explique là-dessus, M. le
Président. Depuis, je pense, le 1er mars 1973 qu'est en vigueur, sauf
erreur, le système de points de démérite, le poids des
dispositions prévues à l'amendement de l'article 3 est d'autant
plus
important, est d'autant plus grand. Encore là, peut-être
qu'il y a eu énormément d'infractions qui ont fait perdre des
points de démérite à des conducteurs, soit des conducteurs
professionnels ou des gens qui conduisent des voitures de promenade. Est-ce
que, d'une part, le ministre a considéré la possibilité de
rendre cette disposition aussi rétroactive, tout au moins jusqu'au 1er
mars 1973? Si oui, est-ce le grand nombre d'infractions que devrait couvrir
cette rétroactivité qui l'a incité à ne pas rendre
les dispositions de l'article 3 rétroactives?
M. MAILLOUX: M. le Président, ce dont parle le
député de Maisonneuve n'a pas été
étudié, n'a pas été considéré. Je
n'ai pas eu à refuser, ce n'est pas venu, à aucun moment. Est-ce
qu'il appartiendra à l'éventuelle commission qui pourrait
étudier l'ensemble du système de points de démérite
de revoir ce problème? Je dois confesser que cela n'a pas
été notre intention d'annuler rétroactivement les
infractions qui découlent de l'article no 3 du projet de loi 9.
M. BURNS: Est-ce que le ministre, en terminant, est en mesure de nous
dire, à peu près, combien de conducteurs ou de chauffeurs ont
été, depuis le 1er mars 1973, l'objet de poursuites en vertu de
l'article qu'on corrige par l'article 3?
M. MAILLOUX: Est-ce que le député de Maisonneuve
accepterait, ainsi que le député de Rouyn-Noranda et de
Beauce-Sud, que je dépose, même après la session, les
chiffres qui me seront fournis? Je pense les avoir dans ma valise, mais je ne
voudrais pas mal informer personne. Je préférerais que le
directeur du bureau des véhicules automobiles, M. Laflamme, me fournisse
les chiffres, au moment où l'on parle, et dans les premiers jours de
janvier, je pourrais informer les partis de l'Opposition de l'expérience
vécue.
M. BURNS: D'accord, M. le Président. M. SAMSON: D'accord, M. le
Président.
M. BURNS: D'ailleurs cela pourrait nous aider justement, à
l'égard des séances de la commission. Maintenant, le ministre a
bien saisi la précision. C'est relativement aux infractions que corrige,
dans le fond, l'article 3.
M. MAILLOUX: Oui.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Adopté?
M. BURNS: Adopté.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Adopté. Article 4. Article 5,
adopté?
M. PILOTE (président de la commission plénière): M.
le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission
plénière a adopté le projet de loi no 9, sans
amendement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Ce rapport est-il
agréé?
M. BURNS: Agréé.
M. LEVESQUE: Troisième lecture?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Troisième lecture, prochaine
séance ou séance subséquente.
M. LEVESQUE: Article 16.
Projet de loi no 27 Deuxième lecture
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le ministre des Transports propose la
deuxième lecture du projet de loi 27, Loi modifiant la loi de la
société de développement immobilier du Québec.
M. Raymond Mailloux
M. MAILLOUX: M. le Président, le lieutenant-gouverneur, ayant
pris connaissance du projet de loi, en recommande l'adoption à cette
Assemblée.
M. le Président, le projet de loi modifiant la Loi de la
Société de développement immobilier du Québec,
projet de loi no 27, vise à donner à la société les
pouvoirs nécessaires pour permettre à Place Desjardins Inc. de
finaliser son programme de financement à court et à long
termes.
On se rappelle que le 7 mai 1971, la loi numéro 29 autorisant la
création de la société avait été
sanctionnée pour pouvoir représenter le gouvernement du
Québec dans l'aménagement et l'exploitation du complexe
immobilier de Place Desjardins et l'autoriser à investir un montant de
$10 millions dans la réalisation du projet.
Ainsi, la Société de développement immobilier du
Québec et le mouvement Desjardins devenaient les deux actionnaires de
Place Desjardins Inc., détenant respectivement 49 p.c. et 51 p.c. du
capital-actions ordinaire de l'entreprise.
Les amendements que nous proposons aujourd'hui à cette loi no 29
et qui constituent le projet de loi à l'étude sont de nature
à confier à la Société de développement
immobilier du Québec les pouvoirs qui lui permettront, en tant
qu'actionnaire, de garantir le parachèvement des travaux du complexe
immobilier et de garantir aussi le remboursement et l'exécution des
autres obligations de Place Desjardins Inc.
En effet, dans l'organisation du financement à long terme d'un
projet de ce genre, il est
essentiel que les actionnaires puissent garantir que tous les fonds
requis sont investis en ce qui a trait au capital de risque et que le paiement
des primes et frais fiduciaires relatifs au financement des travaux soit
effectivement assuré.
Etant donné que les travaux de construction ne sont pas
complétés définitivement à ce stade-ci, il est
normal que les détenteurs éventuels de créances à
long terme s'assurent que les actionnaires soient investis de pouvoirs
nécessaires pour garantir effectivement la réalisation
complète et finale du projet, condition première de la
rentabilité de l'entreprise.
L'amendement que nous proposons à l'article 19 de la Loi de la
Société de développement vise à porter de $10
millions à $30 millions les sommes que le ministre des Finances est
autorisé à verser à la société pour la
réalisation de son mandat.
En effet, étant donné que les travaux de construction du
complexe se poursuivent normalement et avant que l'organisation du financement
à long terme soit définitivement réglée, il
convient que les actionnaires soient en mesure d'assurer le financement
temporaire du projet et de ne pas ralentir la bonne marche des travaux.
L'augmentation de l'avance ainsi consentie à la Société de
développement lui permettra donc, en tant qu'actionnaire, de contribuer
à la réalisation de ce programme de financement temporaire.
Pour terminer, rappelons qu'au moment de l'adoption de la Loi de la
Société de développement immobilier du Québec, nous
avions souligné que le gouvernement innovait en s'associant à
l'entreprise privée, en l'occurrence le mouvement Desjardins, dans la
réalisation de ce vaste complexe immobilier.
Les perspectives de succès de Place Desjardins Inc., nous
paraissent aujourd'hui aussi excellentes que lorsque la loi 29 fut
adoptée. Les amendements à cette loi, qui forment maintenant le
projet de loi no 27, permettront donc à notre mandataire dans cette
entreprise de réaliser pleinement son mandat.
Je voudrais ajouter, pour l'information des membres de cette Chambre,
qu'au moment où le gouvernement augmente son capital-actions de $10
millions à $20 millions, si cette Chambre le permet, la
Société Desjardins augmente, de la même façon, le
capital de $10 millions qu'elle avait investi en 1971 également.
C'est donc dire que le gouvernement porterait de $10 millions à
$30 millions son capital-actions et que la Société Desjardins
porterait également de $10 millions, en 1971, à $30 millions
aujourd'hui le capital qu'elle avait également souscrit.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Deuxième lecture?
M. ROY: Est-ce que le Parti québécois a une intervention
à faire en deuxième lecture?
M. MORIN: Non.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de
Beauce-Sud.
M. Fabien Roy
M. ROY: M. le Président, quelques brèves remarques sur ce
projet de loi no 27 que le gouvernement a déposé, hier, devant
cette Assemblée et dont on nous demande d'adopter la deuxième
lecture aujourd'hui.
Après avoir examiné brièvement, je dis bien
brièvement, ce projet de loi parce que nous n'en avons quand
même pas eu le temps, il y a eu trop de travaux législatifs
à faire à l'Assemblée nationale, jusqu'à minuit
hier soir et ce matin; on sait de plus dans quelle situation nous sommes
placés concernant notre bureau de recherche et toutes ces choses
je veux quand même faire part de quelques observations à l'endroit
du ministre. Je voudrais, bien clairement, au début de mon intervention,
préciser une chose. D'abord, nous avions voté en faveur de ce
projet de loi, lorsqu'il a été présenté devant
l'Assemblée nationale et lorsqu'il a été discuté au
cours du mois d'avril 1971.
Vous connaissez mon opinion concernant le mouvement coopératif,
le mouvement des caisses d'épargne et de crédit, qui est un
excellent moyen de libération économique pour les
Québécois. Vous savez également jusqu'à quel point
je peux être fier des réalisations qui ont été
faites dans ce domaine.
Mais, M. le Président, nous sommes en face d'une situation un peu
particulière. Si on se rappelle les longs débats qui avaient eu
lieu à ce moment-là, au moment de l'organisation de Place
Desjardins, il avait été clairement indiqué,
stipulé, affirmé et déclaré par l'honorable M.
Pinard, ministre responsable du temps, que la participation du Québec ne
devait pas engager plus de $7.5 millions alors que le projet de loi nous
demandait de voter une somme de $10 millions.
On se souviendra, M. le Président, du protocole d'entente qui a
existé à l'époque et qui a été
déposé à la demande des parlementaires de la Chambre qui
ont travaillé à ce projet de loi. On sait également, M. le
Président, que le négociateur du gouvernement n'était nul
autre que ce personnage très célèbre, qui passera sans
doute à l'histoire du Québec, M. Paul Desrochers. M. le
Président, aujourd'hui, on nous fait une autre demande, dernier jour
avant la clôture de nos travaux, du moins on l'imagine. Ce n'est pas
sûr, mais, dans le contexte, on sait très bien que normalement on
aurait dû terminer nos travaux ce soir, pour faire comme les autres. Mais
on est prêt à travailler demain, jusqu'à minuit, M. le
Président, parce qu'on n'est pas des gens comme les autres. Aujourd'hui,
donc, on nous demande $20 millions.
Est-ce que c'est la dernière fois que le gouvernement s'adresse
à l'Assemblée nationale pour ce projet? Je n'en sais rien. On ne
nous a rien dit tout à l'heure. Qu'est-ce qui me dit que
le gouvernement ne reviendra pas devant la Chambre, l'an prochain, pour
nous demander encore $10 millions, $15 millions, $20 millions ou $25 millions,
à même le fonds consolidé de la province? Je n'en sais
rien.
M. le Président, lorsqu'une entreprise sérieuse s'adresse
à une institution bancaire pour demander des crédits
additionnels, elle présente son bilan. Et même un gérant de
banque consciencieux, compétent exige au moins d'avoir les trois
derniers bilans. S'il s'agit d'un projet d'investissement nouveau, le
gérant de banque compétent demande d'avoir au moins un
prospectus, d'avoir au moins une vue d'ensemble de la situation pour savoir de
quelle façon l'argent va être dépensé et pour voir
si le projet va être rentable. On ne sait rien de cela, M. le
Président, et on nous demande d'adopter un petit million comme cela.
"That's a peanut", comme diraient les Américains, un petit $20 millions
par ici, un petit $20 millions par là! Je regarde le ministre de
l'Industrie et du Commerce, qui attend, lui aussi, encore $25 millions,
à même le fonds consolidé des revenus de la province. Et,
durant ce temps, on se promène aux Etats-Unis, en Europe et on va
emprunter pour grossir le fonds consolidé de la province. On paie de
gros intérêts aux Américains, pour être maîtres
chez nous, on paie de gros intérêts aux Allemands, on va
même au Japon pour être maîtres chez nous, à 10 p.c.
d'intérêt, 12 p.c. dans certains cas parce qu'aujourd'hui on
connaît les fluctuations du marché monétaire
international.
M. le Président, ceci va coûter aux
Québécois, à même le Service de la dette provincial,
$2 millions additionnels par année, qui ne figureront pas dans
l'administration de l'entreprise, parce que c'est un capital qui est fourni par
la province.
Il avait été clairement stipulé, M. le
Président, au moment où cette loi avait été
déposée devant l'Assemblée nationale, que Place Desjardins
se financerait à même des obligations qu'elle mettrait
elle-même sur le marché, qu'elle s'autofinancerait, autrement dit,
suite au montant d'argent investi par le gouvernement de la province. Et on
nous demande tout bonnement, comme cela, la dernière journée, $20
petits millions et cela va faire $30 millions en tout de la part du
Québec.
Maintenant, aucune certitude, aucune garantie que la province ne sera
pas appelée à amender la loi à nouveau de façon
à réinvestir encore $10 millions, $15 millions ou $20 millions.
M. le Président, on n'a aucun document pour nous attester quoi que ce
soit et, pourtant, on est appelé à se prononcer. Tout à
l'heure, il y aura un vote: $20 millions. L'année dernière, nous
avions demandé des rencontres. Il y avait eu une motion, à
l'Assemblée nationale, pas l'année dernière mais en 1971,
à l'effet qu'on puisse rencontrer les promoteurs du projet afin de
discuter avec eux. Ceci était tout à fait normal.
Comme il s'agit d'un changement de situation je dis bien un
changement de situation dans le projet initial et qu'on attend à
la dernière minute de nos travaux parlementaires pour venir nous
demander de voter $20 millions additionnels, alors que nous n'avons pas le
temps de faire en sorte qu'une commission parlementaire puisse être
convoquée, nous aurions souhaité entendre ces personnes devant
nous, qui viendraient expliquer aux parlementaires, aux élus du peuple,
des personnes responsables qui viendraient nous dire de quelle façon le
projet s'oriente, s'il y a des augmentations de coût qui n'avaient pas
été prévues, ce que nous soupçonnons. Compte tenu
de l'inflation galopante dans laquelle nous nous trouvons présentement,
il est entendu que c'est une chose qui serait tout à fait normale.
Je suis convaincu, sans avoir interrogé ces gens, qu'ils ont des
problèmes à l'heure actuelle avec des augmentations de coût
de construction. Mais ceci a pour conséquence de changer la
rentabilité du projet, du fait qu'il y a augmentation des
coûts.
Est-ce qu'il y a des contrats de signés, des engagements de pris?
Quelles sont toutes les ententes qui ont pu être prises avec les
locateurs éventuels? Est-ce que le projet est réellement
rentable? Est-ce que le projet, à l'heure actuelle, ne serait plus
rentable? Ce sont des choses que nous ignorons totalement. Et, pourtant, ce
sont $20 millions.
En ce qui me concerne, je dois vous dire que je suis fort mal à
l'aise parce que le mouvement Desjardins est la propriété des
Québécois. Il a un grand projet à l'heure actuelle. Je
suis ici à l'Assemblée nationale du Québec non pour
représenter un mouvement, mais pour représenter une population,
le contribuable du Québec. Et nous avons un devoir et des
responsabilités. C'est pourquoi nous sommes placés dans une
situation qui nous amène à nous prononcer sur toutes ces
questions sans savoir à quoi nous en tenir, sans savoir aucunement
où nous allons et sans savoir réellement si pour employer
un terme cher à l'honorable chef de l'Opposition officielle il ne
s'agit pas d'un nouveau tonneau des Danaides. Les Québécois
appellent ça des paniers percés, c'est la même chose. C'est
un peu la question qu'on se pose à l'heure actuelle.
Je pense qu'on a le droit de se poser cette question. Où
allons-nous de ce côté-là? On sait très bien que le
gouvernement n'est pas chanceux présentement avec ses
sociétés gouvernementales ou paragrouvernementales. Il y a des
déficits partout, des petits millions de dollars par ci et par
là. Des déficits partout dans l'ensemble. On paie les achats et
les profits...
Loto-Québec! Il est intelligent, le député de
Trois-Rivières. Il va avoir un premier prix d'intelligence, il
mériterait une loto spéciale. Quand je parle des
sociétés gouvernementales, je parle du cas de SIDBEC, de la
SGF.
Je parle de différentes choses. L'Hydro-
Québec, on peut en parler longtemps. On peut parler des Simard,
des petits cousins des Simard, des "mon oncle" et des "ma tante", de la
parenté, parce que la parenté, dans le temps des Fêtes,
c'est une chose normale.
M. le Président, est-ce que j'ai la parole?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!
L'honorable député de Beauce-Sud.
M. ROY: Sur des questions très précises, et je me base sur
la déclaration de l'honorable Bernard Pinard lui-même, il serait
beaucoup plus économique de le faire en vertu de la formule choisie,
parce qu'il avait été question de deux formules. Je cite la page
1209 du journal des Débats de l'Assemblée nationale du jeudi 29
avril 1971: "C'est-à-dire qu'il en coûtera beaucoup moins d'argent
au gouvernement du Québec qui, à toutes fins pratiques, ne
devrait pas engager plus de $7.5 millions. Nous avions mis un montant possible
de dépenses de $10 millions, mais notre tableau des coûts indique
à l'heure actuelle que le gouvernement du Québec ne devrait pas
engager plus de $7.5 millions et que Place Desjardins Inc. ne devrait pas
dépasser ce montant de $7.5 millions. En effet, comme je l'ai
expliqué l'autre soir, c'est l'intention de Place Desjardins Inc.,
lorsqu'elle aura été constituée par lettres patentes
émanant du gouvernement du Québec, de faire une émission
d'obligations pour financer le coût de réalisation du projet de
façon globale".
Le gouvernement vient de changer d'idée. Pourquoi a-t-on
changé d'idée? Pourquoi aime-t-on mieux aller touiller encore
dans la poche des contribuables du Québec et camoufler les frais
d'intérêt dans le Service de la dette de la province?
Pourquoi? Ce sont des questions auxquelles j'aimerais avoir des
réponses, M. le Président.
Ce projet, d'après le tableau des coûts que nous avons
actuellement dans nos dossiers, est évalué à un montant
approximatif de $125 millions, compte tenu de l'augmentation des coûts de
la construction, de l'augmentation du coût des matériaux, de la
main-d'oeuvre et compte tenu de différents autres éléments
qui entrent en ligne de compte dans la réalisation d'un pareil projet.
Je pourrais citer plusieurs déclarations que l'honorable Bernard Pinard
avait faites à ce moment-là, c'est aux questions que les
parlementaires avaient posées à l'Assemblée nationale et
ça avait été clairement indiqué, clairement
déclaré que Québec souscrivait $10 millions mais qu'on
avait une marge de manoeuvre de $2.5 millions et que, par la suite, Place
Desjardins Incorporée se financerait par la vente d'obligations et que
le projet global coûterait en tout quelque $125 millions.
J'aimerais savoir une chose ici ce soir: à combien est
estimée aujourd'hui la réalisation totale de Place Desjardins
Incorporée? C'est une question qui mériterait une bonne
réponse, une réponse vraie, avant de nous prononcer sur la
deuxième lecture de ce projet de loi. Nous devrions également
savoir pourquoi le gouvernement a décidé de changer le mode de
financement de Place Desjardins? Nous aimerions le savoir; si le gouvernement
ne l'a pas changé, comment se fait-il que le gouvernement décide
de porter les $10 millions à $30 millions? Ce sont toutes des questions
auxquelles nous aimerions avoir une réponse, M. le Président, et
je pense que c'est tout simplement normal que tous les parlementaires à
l'Assemblée nationale sachent ces choses; que ce soient les
députés élus et "backbenchers", comme on les appelle, du
Parti libéral, ils ont également des responsabilités et
ils seront appelés, eux aussi, à se prononcer sur ce projet de
loi. Leurs électeurs leur demanderont des comptes à un moment
donné.
M. le Président, il avait été
considéré à ce moment4à, il avait été
discuté d'une certaine participation du fédéral, une
participation du provincial et une participation de Place Desjardins; il avait
été question également d'une possibilité d'autres
actionnaires ou d'autres personnes qui viennent s'y joindre, comme
l'organigramme que j'ai ici l'indique très bien. Où en sont
rendues toutes ces choses, tous ces pourparlers? Où en sont rendues
toutes ces réalisations? Où en est rendu tout ce projet dans son
ensemble? Nous n'en avons pas entendu parler depuis le temps que nous avons
voté la loi au mois de mai 1971, nous n'en avons à peu
près pas eu de nouvelle à l'Assemblée nationale.
Aujourd'hui, encore une fois je le répète, à la
dernière minute, messieurs les députés, $20 millions; pas
d'explications, pas de prospectus, pas de détails. On ne sait pas
où on va mais on est quand même appelé à se
prononcer pour voter $20 millions. $20 millions qu'on va aller emprunter
à New-York; on va aller emprunter dans certaines grandes
métropoles américaines pour tâcher d'être
maîtres chez nous et créer des servitudes qui ne s'effacent jamais
dans le système actuel qui contribue à l'endettement collectif et
à l'endettement pyramidal de la collectivité.
M. le Président, j'ai beaucoup de réserve à l'heure
actuelle et avant de faire mon choix pour savoir si je vais appuyer en
deuxième lecture ce projet de loi, je dis que je ne suis pas en mesure,
je n'ai pas eu suffisamment d'informations pour être capable de me faire
une opinion précise, pour être capable de prendre la bonne
décision et respecter le mandat qui m'a été confié
par les électeurs de mon comté.
Pourquoi le gouvernement, M. le Président, a-t-il attendu,
d'abord, aux deux dernières journées de la session pour nous
présenter le projet de loi? Il ne doit quand même pas être
si mal pris. Je pense que ce projet de loi devrait être suspendu ; on
devrait suspendre le projet de loi pour permettre justement à ces gens
de venir se faire entendre devant la commission parlementaire et on pourrait,
à la reprise de nos
travaux parlementaires quitte à convoquer la Chambre trois
jours plus tôt, M. le Président, pour adopter ce projet de loi
savoir ce qui se passe, savoir où on en est rendu et savoir
également où on va là-dedans. Il faudrait un délai
de cinq, six semaines, et même on peut revenir la semaine prochaine pour
en discuter, on peut revenir dans quinze jours, dans trois semaines, ça
ne nous fait rien. On est disponible, on est habitué à travailler
et on va continuer à travailler quand même.
Motion de report à deux mois
M. ROY: M. le Président, pour toutes ces considérations,
compte tenu des circonstances et compte tenu également que mon temps de
parole est presque terminé, je fais donc motion, M. le Président,
que ce projet de loi soit retardé à deux mois, de façon
à permettre la convocation de la commission parlementaire.
Je demande que le projet de loi ne soit pas lu maintenant, mais dans
deux mois.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le ministre des Finances.
M. Raymond Garneau
M. GARNEAU: Lorsque nous avons présenté le projet de loi
créant la Société de développement immobilier pour
participer au développement de Place Desjardins, il s'agissait, M. le
Président, d'une expérience, d'une initiative qui était
complètement nouvelle de la part du gouvernement du Québec. En
fait, le gouvernement s'associait à l'entreprise privée, mais non
pas à n'importe quelle entreprise privée, au mouvement
Desjardins. C'étaient en quelque sorte des fonds publics, les uns
administrés par le gouvernement, les autres administrés par le
mouvement Desjardins qui répond, évidemment, aux contribuables
québécois en tant qu'épargnants et non pas en tant que
contribuables.
Il s'agissait d'une association pour réaliser, dans l'est de la
ville de Montréal, un développement immobilier important et
contribuer ainsi au déplacement de l'axe de développement de
l'ouest de Montréal vers l'est de Montréal. On sait que le
gouvernement fédéral, via la Société Radio-Canada,
s'était implanté dans l'est, mais il fallait, je pense, une
intervention encore plus forte de la part du gouvernement pour assurer ce
développement non seulement au niveau des transports en commun par les
réseaux routiers, mais également sur le plan économique,
en amenant dans l'est de Montréal des développements et de
l'activité commerciale qui puissent donner un élan nouveau
à cette partie de la métropole du Canada.
Les prévisions de dépenses qui ont été
faites à ce moment-là, de même que la participation dans le
capital-actions des deux sociétés, tant de la part du mouvement
Desjardins que du gouvernement du Québec, ont été
appréciées avec, je pense, passablement de justesse. Il s'agit
quand même d'un projet colossal. Au fur et à mesure que les
travaux avançaient, nous nous sommes rendu compte, surtout le mouvement
Desjardins qui a quand même le contrôle de cette
société, que, pour assurer le financement à long terme de
cette société, il fallait donner l'assurance du
parachèvement des travaux.
C'est évident que ce n'est pas de gaieté de coeur, M. le
Président, que le ministre des Travaux publics, le ministre des
Finances, le gouvernement en général ont présenté
ce projet de loi, mais il s'agit en quelque sorte de garantir que le projet,
qui est en voie d'exécution et qui se développe normalement,
puisse se compléter. En effet, le financement à long terme d'un
tel projet ne peut être assuré que s'il est
complété, parce que c'est uniquement s'il est
complété que les loyers pourront être perçus par la
Société Place Desjardins, qu'évidemment l'exploitation
commerciale pourra s'effectuer normalement et que les revenus pourront entrer
pour faire face aux obligations de la société.
Il s'agit maintenant, M. le Président, d'accroître le
capital-actions de la société pour assurer le financement
à court terme des opérations, mais aussi de garantir le
parachèvement des travaux. Place Desjardins Inc. et le mouvement
Desjardins ont demandé à un groupe d'experts d'étudier
toutes les possibilités de financement à long terme et les
conditions qu'il fallait rencontrer pour assurer un financement à long
terme au meilleur coût possible. Cela justement pour rencontrer les
exigences que soulève le député de Beauce-Sud, à
l'effet que le service de la dette soit le plus bas possible. Les experts qui
ont été consultés par le mouvement Desjardins et
également des fonctionnaires du Québec, qui ont une
expérience quand même assez grande dans ce domaine, nous ont
recommandé de procéder à l'adoption de cette loi 27, parce
que c'était la condition la plus sûre d'avoir non seulement
l'assurance d'un financement à long terme, mais également un taux
d'intérêt qui soit le plus bas possible, pour assurer la meilleure
rentabilité de l'opération.
M. le Président, si nous reportions, comme le suggère le
député de Beauce, à deux mois l'adoption de la loi 27,
c'est évident que nous placerions Place Desjardins dans un contexte,
dans une difficulté un peu particulière.
En effet, elle serait obligée, surtout à l'époque
actuelle, de financer à court terme, pour une période beaucoup
plus longue, à des taux d'intérêt qui, chose assez curieuse
mais qui est quand même la réalité, à court terme
qui sont plus élevés que les taux d'intérêt à
long terme. C'est assez curieux, mais nous vivons actuellement cette situation
où le taux préférentiel est plus élevé que
les taux d'intérêt que l'on paie à long terme sur les
marchés financiers.
Et, si nous voulons assurer ce financement à
long terme et diminuer en quelque sorte les frais
d'intérêt, il nous faut créer une situation de garantie. Il
est possible que cela soit des Québécois, des Canadiens ou des
étrangers qui achètent les titres à long terme de Place
Desjardins, mais il est évident que nous devons donner à ces
détenteurs de titres à long terme les garanties
nécessaires, sans quoi le financement serait peut-être toujours
possible mais à des conditions beaucoup plus dispendieuses, ce qui ne
serait ni à l'avantage de Place Desjardins Inc., ni du mouvement
Desjardins, ni de la Société de développement immobilier
du Québec, dont le gouvernement détient la majorité des
actions.
Alors ce sont pour ces raisons que je crois que nous devons nous opposer
à la motion du député de Beauce-Sud. Je comprends que ce
projet de loi arrive un peu à la fin de la session mais... M. le
Président, est-ce que le député de Saguenay pourrait
arrêter de cacasser? Il me semble qu'il a cacassé suffisamment
longtemps aujourd'hui. Il a suffisamment épilogue, causé sur
toutes sortes de sujets. Il devrait attendre un peu. Il me semble que je ne
l'ai pas insulté, que je ne l'ai pas agacé. S'il veut engager une
discussion, évidemment, je suis toujours disponible mais...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre!
M. GARNEAU: M. le Président, nous ne pouvons pas changer les
dates. Il y a eu une élection le 29 octobre et nous avons repris les
travaux parlementaires aussi vite que nous le pouvions. Cela n'est pas notre
faute si ce projet de loi arrive aujourd'hui au lieu d'il y a deux jours. Cela
n'est pas notre faute. Peut-être qu'on aurait eu le temps de discuter
plus longuement mais telle est la situation. Je pense que retarder l'adoption
de cette loi à la prochaine session, parce que c'est cela que
suggère le député de Beauce-Sud, cela serait placer Place
Desjardins Inc. dans une situation véritablement intenable qui
empêcherait non seulement le succès de l'opération mais
également le financement à long terme et occasionnerait des frais
additionnels et pour le gouvernement et pour le mouvement Desjardins.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Houde, Limoilou): L'honorable chef de
l'Opposition.
M. Jacques-Y van Morin
M. MORIN: M. le Président, comme vous le savez peut-être,
nous nous sommes toujours montrés favorables, en principe, aux
activités de la Société de développement immobilier
mais, cette fois-ci, j'avoue que je me pose de sérieuses questions au
sujet de cette participation dans le capital-actions de Place Desjardins. On
nous dit que les perspectives d'avenir paraissent encoura- geantes et je veux
bien le croire quoique je n'en ai pas vu l'ombre du commencement d'une
preuve.
On ne nous éclaire pas non plus sur le coût total des
travaux. Il n'y a pas de rapport financier devant nous qui nous donne la
situation qui nous permette de voir si cette requête, qui, après
tout, est considérable, est justifiée. Je veux bien croire qu'il
y a des fonctionnaires compétents qui sont d'avis qu'on doive
répondre à cette demande de Place Desjardins. Je veux bien croire
que le personnel politique lui aussi, que le ministre ont étudié
le dossier avec beaucoup d'attention. Mais c'est à cette
Assemblée de voter les crédits nécessaires et, en ce qui
me concerne, je me pose un certain nombre de questions. Peut-être que le
ministre, tout à l'heure, pourra nous éclairer en commission
plénière, c'est possible. Mais j'eusse
préféré que dans son exposé il nous donne plus de
détails, il nous permette de nous faire une idée plus juste de la
question.
M. le Président, on nous dit qu'il s'agit de financer à
court terme des travaux, de donner une garantie et le ministre des Finances
vient de nous dire qu'il ne le fait pas de gaieté de coeur. Où en
est le financement à long terme? Comment est-ce que le remboursement de
cette avance parce que, si j'ai bien compris, il s'agit d'une avance
va être effectué?
Voilà les questions que je me pose. J'ai trouvé le
député de Beauce-Sud extrêmement convaincant dans son
exposé et je voudrais en conclusion appuyer sa motion de remise à
deux mois.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Houde, Limoilou): L'honorable
député de Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M. SAMSON: M. le Président, j'ai entendu l'honorable ministre des
Finances parler sur la motion de renvoi à deux mois qu'a faite
l'honorable député de Beauce. M. le Président, l'honorable
ministre des Finances m'a paru être pressé, d'une façon
extraordinaire. Je ne m'explique pas que, tout à coup, ça presse
tellement.
M. le Président, on n'a pas commencé à
siéger hier, on a commencé à siéger le 22 novembre
dernier. Nous avons eu plusieurs jours sur le discours inaugural où il
nous a semblé que le gouvernement avait même dû faire
pression sur des députés pour qu'ils prennent la parole afin de
tuer le temps, parce que la législation ne semblait pas prête.
M. le Président, cette législation n'était
sûrement pas prête, parce que ce n'est que dernièrement
qu'on nous l'a déposée. Si la législation avait
été prête, on aurait pu, dès les premiers jours de
la session... Regardez-moi, M. le Président, regardez-moi bien dans les
yeux et
on va bien se comprendre tous les deux. Je parle, sur la motion de
renvoi à deux mois et j'explique pourquoi on doit renvoyer le projet de
loi à deux mois. Parmi les explications que j'ai à vous donner,
M. le Président, j'ai des reproches à faire au gouvernement de ne
pas avoir utilisé le temps qu'il avait à sa disposition. Si cela
pressait tant, M. le Président, de revenir devant le Parlement pour $20
millions supplémentaires, ce n'est pas hier qu'on aurait dû
déposer le bill. On aurait dû le déposer dans la
première semaine. C'est probablement pourquoi le gouvernement n'a pas
voulu déposer son bill: ceci aurait donné trop de temps à
l'Opposition, nous permettant ainsi de faire certaines vérifications et
nous permettant peut-être de rencontrer des gens susceptibles de nous
donner beaucoup plus de détails que nous en avons
présentement.
Je suis prêt à prêter au ministre des Transports les
meilleures intentions. Mais, M. le Président, le ministre des Transports
n'est qu'un homme comme les autres et il se peut que lui aussi manque
actuellement d'informations; il se peut encore que les informations qu'il a
à transmettre à cette Chambre ne soient pas complètes et
il se peut qu'il ne soit pas parfaitement conscient, M. le Président, de
tout ce qui peut se tramer peut-être à l'extérieur.
Actuellement, j'ai l'impression et c'est notre droit d'avoir des
impressions nous avons, quant à nous, du Parti créditiste,
l'impression que des gens voudraient se servir de la bonne foi de l'honorable
ministre des Transports pour venir débattre devant cette Chambre un bill
qui, en d'autres circonstances n'auraient pas été adopté,
si nous avions eu en main toutes les informations. Mais malheureusement, encore
une fois, nous nous retrouvons devant un gouvernement de pompiers, un
gouvernement qui arrive à la toute dernière minute, alors que le
feu est pris. C'est le ministre des Finances qui nous fait poser ces questions,
M. le Président, en nous ouvrant cette grande parenthèse, disant
que ça presse parce que ça pourrait compromettre le projet.
M. le Président, si ça pressait tant que ça, ce
n'est pas hier qu'on aurait dû déposer le bill. Ce gouvernement
manque de prévision, de planification. Si ça pressait et si
ça peut, aujourd'hui, compromettre la réalisation du projet,
c'est que le gouvernement est à blâmer. Le gouvernement est
à blâmer d'avoir attendu encore une fois à la toute
dernière minute. Aussi, une autre chose qu'il est important de faire
remarquer ici, c'est que le 29 avril 1971, devant cette même Chambre, le
ministre qui précédait l'actuel ministre des Transports, en toute
bonne foi, nous présentait le bill no 29 et nous demandait $10 millions.
Il demandait aux députés de l'Assemblée nationale de voter
$10 millions et le même ministre nous assurait que voter $10 millions,
c'était suffisant, car, disait-il, ça va coûter $7.5
millions environ.
Ou bien on a abusé de notre bonne foi à ce
moment-là, ou bien on abuse de notre bonne foi aujourd'hui. On veut
savoir quand on a abusé de notre bonne foi. Ce sont les questions que
nous avons à poser au gouvernement. C'était beau, quand on a
présenté ce projet il y a deux ans et demi, de voir les journaux.
Comme d'habitude, le gouvernement libéral présente toujours ses
petits projets de loi avec la même philosophie qui est la suivante:
d'abord de créer des "jobs" à des amis. On le voit bien dans un
article de journal ici. On dit que la nouvelle corporation sera formée
d'un président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! La motion.
M. SAMSON: M. le Président, je suis sur la motion, que cela
plaise au gouvernement libéral ou non.
LE VICE-PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! Question de
règlement.
M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.
Le député de Rouyn-Noranda peut parfaitement avoir le
droit de prétendre ce qu'il prétend, mais, à ce stade-ci,
il n'a pas le droit de le faire; il n'a que le droit de dire pourquoi la
deuxième lecture devrait être retardée d'un certain laps de
temps. Actuellement, le député de Rouyn-Noranda est à
faire un discours de deuxième lecture sur le principe de la loi et non
pas sur la raison de retarder l'adoption de la motion de deuxième
lecture.
Je vous demanderais, M. le Président, d'inviter, comme je le
faisais autrefois et je suis sûr qu'il se rendra de bonne
grâce à cette invitation le député de
Rouyn-Noranda à bien vouloir s'en tenir à la pertinence du
débat.
LE VICE-PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le député de
Rouyn-Noranda, sur la motion.
M. SAMSON: M. le Président, même si l'ancien
vice-président de la Chambre a soulevé une question de
règlement, je voudrais, très amicalement, lui dire que les
remarques que je faisais étaient pour mieux vous faire comprendre, M. le
Président, le pourquoi du retard de la deuxième lecture. J'ai
dit, à l'appui de mes remarques: Ou bien aujourd'hui on abuse de notre
bonne foi ou bien on a abusé de notre bonne foi il y a deux ans et demi.
Cela, c'est suffisamment important pour que nous exigions de ce gouvernement
que la deuxième lecture soit retardée de deux mois aux fins de
nous permettre de nous informer davantage, de rencontrer les gens que nous
aimerions rencontrer, les représentants de Place Desjardins, afin de
déterminer à quel moment on a abusé de
notre bonne foi. Le fait de retarder la deuxième lecture de deux
mois nous permettrait aussi de faire convoquer la commission parlementaire aux
fins d'entendre les représentants de Place Desjardins, aux fins d'exiger
d'eux des chiffres et les informations qui nous manquent.
Nous pourrions aussi convoquer le maître d'oeuvre de tous les
projets auxquels s'est associé le gouvernement, c'est-à-dire le
grand chef, le véritable chef, celui qui se cache derrière toute
grande décision gouvernementale, M. Paul Desrochers. Nous aimerions
bien, une bonne fois, le voir devant une commission parlementaire, en plein
jour, en plein soleil. Nous aimerions le voir aux fins de l'interroger lui
aussi. Cela fait assez longtemps qu'on entend parler de lui comme de celui qui
se cache derrière les rideaux, comme de celui qui est le maître
d'oeuvre de tout ce qui se passe; c'est le temps que nous découvrions
qui est ce monsieur, que nous le montrions à la face de la population
pour qu'enfin ces gens-là sachent qui il est, celui qui mène par
le bout du nez le premier ministre de la province de Québec, que nous
sachions d'où il vient, ce qu'il veut...
LE VICE-PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous
plaît! Votre temps est terminé.
M.SAMSON: M. le Président, je regrette, j'en avais tellement
à vous dire, mais je souscris à votre demande.
LE VICE-PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Merci.
L'honorable député de Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, je voudrais, à mon tour, en
quelques minutes, appuyer la motion qui est présentée par le
député de Beauce-Sud.
Il ne s'agit pas, je pense, de soulever certains doutes sur
l'administration de la Société de développement immobilier
du Québec.
Mais, vous conviendrez avec nous, M. le Président, que le
gouvernement nous demande, à quelques jours des Fêtes, $25
millions, que le gouvernement, en fait, nous permet de nous poser des
questions.
On avait à ce sujet certaines choses à dire. On voulait le
dire au niveau de la commission parlementaire. Nous n'avions pas l'intention de
présenter cette motion, nous voulions demander des explications au
ministre. Mais je pense bien que c'est notre rôle, comme parlementaires,
même si on est à la veille de la clôture d'une session, de
vérifier comment sont dépensés les deniers publics.
Il s'agit de $20 millions, M. le Président. C'est justement
à la fin d'une session qu'on donne des $25 millions, des $20 millions.
Cela a été le cas, par exemple, pour la Société
générale de financement. On nous arrive encore avec une demande
de $20 millions. Pourquoi avoir choisi ce moment? Pourquoi ce projet de loi
n'aurait-il pas été déposé avant, pour permettre au
moins aux députés de pouvoir s'informer de ce qui se passe
à la Société de développement immobilier?
Vous conviendrez que quand on agit comme cela et c'est comme cela
que le gouvernement agit cela amène les députés
à se poser des questions sur l'administration et à se demander
pourquoi le gouvernement retarde toujours à la fin d'une session, au
moment où on a appliqué un règlement qui nous amène
à siéger à des heures anormales. Pourquoi juste à
ce moment-là? Pourquoi, M. le Président, ne pas avoir
déposé cette loi?
Mais si, encore là, M. le Président, on doit se poser des
questions, c'est à la suite de l'adoption de la Loi de la
Société de développement immobilier du Québec. On
nous avait très bien expliqué, comme le disait tout à
l'heure le député de Beauce-Sud, qu'on avait besoin d'environ
$7.5 millions et que cela allait se financer par des obligations. Or, M. le
Président, comme parlementaire et c'est dans ce sens que j'appuie
la motion du député je ne peux quand même pas
accepter un projet où on nous demande $20 millions c'est quand
même de l'argent les yeux bandés. Je ne peux pas accepter
sans autres explications, à moins que le ministre tout à l'heure,
ce qu'il aurait dû faire en deuxième lecture, nous informe, en
commission plénière, d'exactement quelles modifications on a
apportées, quels coûts supplémentaires on a
ajoutés.
M. le Président, j'invite les députés
libéraux qui, eux aussi, ont une responsabilité publique,
à surveiller les dépenses des deniers publics. Or, M. le
Président, est-ce que les députés libéraux sont
plus informés que je ne le suis? Est-ce qu'ils sont plus
informés? Est-ce que vous en avez discuté au caucus? Est-ce qu'on
vous a donné les informations? Mais il aurait fallu les donner, aussi,
les informations, à l'Opposition.
Nous, du Parti québécois, je pense bien, M. le
Président, qu'on n'a jamais tellement protesté contre la
création de sociétés québécoises, surtout
lorsqu'il s'agissait de s'associer avec l'un des grands mouvements
québécois dans le secteur financier, le mouvement Desjardins.
Nous avions appuyé, en mai 1971, ce projet de loi. Mais, M. le
Président, il y a maintenant deux raisons particulières, soit la
période de temps qu'on a choisie pour étudier ce projet de loi et
les déclarations de l'ex-ministre des Travaux publics du temps, M.
Bernard Pinard, lorsque nous avons adopté la loi créant la
Société de développement immobilier.
Le ministre des Finances nous dit: Mais c'est pressant, c'est urgent.
Mais c'est $20 millions. Il serait quand même important, avant de donner
encore à la Société de développement immobilier du
Québec $20 millions, qu'on soit informés. Est-ce que le projet
est bon? Est-ce que le
projet est encore rentable? Moi je ne suis pas prêt à
donner comme ça un chèque en blanc au gouvernement.
Déjà on sait qu'à cause de son importance
numérique, on est, par la force des choses, obligés de lui donner
un chèque en blanc. Mais on voudrait quand même et il
aurait été normal que le ministre des Travaux publics
dépose un certain nombre de documents concernant la
Société de développement immobilier. Peut-être que
si nous avions eu ces documents le député de Beauce n'aurait pas
eu à faire la motion qu'il a déposée.
C'est nous prendre pour des mitaines que de nous présenter comme
ça un projet de loi sans nous informer plus que ça. C'est nous
prendre pour des irresponsables. Et je fais appel aux journalistes qui ont,
à plusieurs reprises, l'occasion de nous critiquer, mais est-ce qu'on
peut même et les journalistes nous blâment bien souvent de
faire des débats à l'Assemblée nationale comme
ça donner un chèque en blanc au gouvernement?
Est-ce que nous, comme responsables de surveiller les deniers publics,
on peut dire au gouvernement: C'est vrai, la Société de
développement immobilier a besoin de $20 millions, et sans autres
informations, on vote et on vous donne ça. Moi, si je le faisais en tout
cas, je me sentirais irresponsable. Et je ne veux pas le faire.
D'autant plus que c'est justement des périodes comme celle-ci
qu'on choisit pour nous passer des sapins. On s'en est déjà fait
passer des sapins, on n'a pas le choix. Vous êtes plus nombreux que nous
autres. Et quand, à un moment donné, vous décidez de
demander le vote, vous réussissez et vous gagnez, c'est normal, c'est la
majorité qui l'emporte. Mais, justement parce qu'on s'est
déjà fait passer des sapins, on voudrait avoir des explications
concernant la nécessité de verser $20 millions à la
Société de développement immobilier du Québec.
Et je prends à témoin chacun des députés
libéraux. Je suis assuré que s'ils étaient à notre
place, à moins qu'ils soient des irresponsables, que si ces
députés étaient membres de l'Opposition officielle de Sa
Majesté, ils feraient exactement la même chose.
Il y a des députés comme le député
d'Abiti-bi, par exemple Est, je ne le sais jamais si c'est Est ou Ouest
mais j'ai eu l'occasion de travailler avec ce député alors
qu'il était conseiller du ministre des Terres et Forêts. Je sais
que c'est un gars qui est responsable, et je suis assuré que le
député d'Abitibi-Est, s'il était à notre place ici
ce soir ferait exactement la même chose. On n'engouffre pas comme
ça $20 millions sans avoir des informations.
Moi, je ne l'accepte pas. Je ne sais pas de quelle façon vous
voulez qu'on prenne notre rôle, comme Opposition. Si vous autres vous
avez accepté qu'un projet de loi soit présenté comme
ça sans qu'il soit discuté au caucus, moi je ne suis pas
d'accord. Je me dis que j'ai certaines responsabilités comme
député et je souhaite si c'est urgent comme ça, je
ne veux pas mettre en doute l'administration de la Société de
développement immobilier et je ne veux pas bloquer ce projet puisqu'on y
croyait, et je me rappelle que le député de Gouin avait
appuyé fortement ce projet que le ministre nous donne toutes les
informations nécessaires. Mais je pense qu'il ne peut même pas ce
soir nous donner toutes les informations nécessaires parce qu'il n'a pas
ce soir tous les documents. Le député de Beauce dit deux mois,
peut-être qu'après le 25 décembre on pourrait se
réunir encore et convoquer les témoins, et on pourrait accepter
de verser probablement les $20 millions . En tout cas, c'est comme ça
que j'accepte de jouer mon rôle.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous
plaît!
L'honorable ministre des Travaux publics.
M. Raymond Mailloux
M. MAILLOUX: M. le Président, le plus sobrement possible, je
voudrais apporter quelques arguments contre la demande du député
de Rouyn-Noranda voulant que le projet de loi soit retardé pour une
période de deux mois. Je voudrais assurer immédiatement à
la Chambre que cela n'a jamais été l'intention du ministre des
Travaux publics de ne pas fournir aux partis d'Opposition et à la
Chambre toutes les informations pertinentes. C'était mon intention
d'avoir, durant l'étude en commission, des officiers responsables et de
permettre à ces officiers de répondre à toutes les
questions que voudraient poser les membres de l'Opposition.
M. le Président, je pense que tout le monde dans la province sait
quel temps nous avons connu dans les dernières heures. J'en profite
incidemment pour offrir mes sympathies aux familles des quelques fonctionnaires
de la voirie qui, malheureusement, on perdu la vie aujourd'hui dans l'entretien
des routes au Québec. Ceci m'amène à dire que les
fonctionnaires qui, incidemment, devaient donner au ministre des Travaux
publics des informations supplémentaires et devaient être ici dans
le but, en commission, de renseigner les membres de l'Opposition, les
conditions du temps ont été telles que malgré ma
volonté, je n'ai pu me mettre en communication avec eux durant la
soirée, et faire revenir de Montréal vers Québec les
documents dont j'avais besoin, de même que les fonctionnaires qui
auraient pu donner les informations pertinentes. Celles-ci pourraient
être données demain en commission pour que la Chambre soit
valablement informée.
Tantôt, M. le Président, on a dit que le gouvernement
agissait comme pompier dans les derniers jours de la session. Les mandataires
du gouvernement on fait part au ministre des
Travaux publics, dans les quatre derniers jours, des difficultés
que rencontraient nos mandataires dans le financement des travaux. Je veux
croire qu'il serait difficile au gouvernement du Québec de mal informer
la Chambre alors que la partie qui est avec le gouvernement du Québec
est le mouvement Desjardins qui a quand même un mot à dire. Au
moment où on demande à la Chambre d'investir en garantie un
montant de $20 millions supplémentaires, le mouvement des caisses
Desjardins et ses filiales doivent également mettre la contrepartie de
$20 millions. J'imagine mal, M. le Président, que si une telle demande
est faite, ce n'est que pour faire plaisir au Parti libéral dans la
poursuite des travaux.
On a demandé tantôt quel était le coût des
travaux. Je sais qu'au départ les quelques chiffres qui sont devant moi
indiquent que ça devait être un projet d'une centaine de millions.
M. le Président, on comprendra quand même que depuis que le projet
a été mis en marche, il s'est produit certaines hausses, dans la
province de Québec, dans la construction, hausses qui dépassent
de beaucoup les probabilités. Quand on constate que pour les
infrastructures routières, viaducs, ponts, les soumissions qui entrent
actuellement au ministère nous annoncent des coûts trois fois plus
élevés que dans les derniers mois, il est indiscutable que
ça a une incidence directe sur le coût de la construction. M. le
Président, dans la demande qui est faite on dit que le gouvernement
engloutit de l'argent sans savoir où il va. Le gouvernement,
actuellement, autant dans la périphérie de Québec que dans
la périphérie de Montréal, a besoin d'espaces; toutes les
sociétés paragouvernementales en ont besoin également dans
Montréal; on a besoin d'espaces nombreux, et l'on supposait qu'en 1975
tous les services gouvernementaux pourraient, être logés dans le
quadrilatère qu'on connaît. Pour ce faire, il est indiscutable
qu'il faut que les travaux soient poursuivis.
Il y avait au départ deux mises de fond de $10 millions.
Actuellement, pour la poursuite des travaux, pour la bonne marche des travaux,
je sais que c'est une somme de $70 millions qui est en cause. C'est pour cette
raison qu'on demande au Parlement un montant supplémentaire de $20
millions, aux caisses Desjardins un montant de $20 millions et nos mandataires
ont une marge de crédit de $10 millions pour ce montant global de $70
millions. Pourquoi a-t-on besoin d'un tel montant? Pour la poursuite des
travaux, mais principalement pour permettre que le financement à long
terme puisse être complété par les mandataires du
gouvernement. S'il y avait défaut de poursuivre les travaux, il faudrait
forcément aller vers des financements temporaires qui seront plus
dispendieux. Cette garantie de $70 millions permet que la fin des travaux soit
garantie, et pour que ce soit valable la Place Desjardins, M. le
Président, il faut au moins que les travaux soient
complétés, que la bâtisse puisse être utilisée
et que les loyers soient payés pour l'utilisation de tous les
espaces.
Cette garantie permet que les mandataires puissent aller sur le
marché en ayant la solvabilité nécessaire, soit la
garantie de $70 millions qui permet le complément des travaux.
Je n'ai pas d'objection, M. le Président, à ce que la
Chambre vote sur cette motion, parce que jamais, dans mon intention, je ne
voudrais mal informer les membres de l'Opposition. Je pense qu'en commission
vous auriez, demain, toutes les informations pertinentes. A moins que la
température ne soit encore pire que celle que nous avons connue dans les
dernières heures, je pense que nous pourrions espérer que le
sous-ministre des Transports, également le sous-ministre des Travaux
publics et de l'Approvisionnement soient de retour à Québec.
Comme ils sont tous deux membres du bureau de direction de notre
société mandataire, je pense qu'ils pourraient, à ce
moment, informer valablement les députés de l'Opposition. Je ne
voudrais pas que le projet de loi soit bloqué en deuxième lecture
parce que le 31 décembre est une date fatidique que nous ne pouvons
dépasser. Je pense que les membres de la Chambre pourront mieux se
prononcer en commission, demain. Si les informations qui vous sont
données vous permettent de penser que c'est votre droit de bloquer le
projet et que ça peut aller après le 31 décembre, vous en
déciderez à ce moment-là. Je m'excuse de ne pouvoir donner
d'informations plus valables mais ce sont les conditions atmosphériques,
que tout le monde connaît, qui ont prévalu qui font que les
informations supplémentaires que je devais donner dans mon discours de
deuxième lecture n'ont pu être valablement données. Je
pense que demain, ça pourrait être rendu ici au Parlement.
M. LESSARD: Je pourrais invoquer l'article 96, mais ce que je voudrais
que le ministre comprenne bien il ne s'agit pas de mettre en doute
l'intégrité du ministre; au contraire, je connais très
bien le ministre des Travaux publics et ce n'est pas dans ce sens-là
c'est que nous voulons avoir des informations. Quant à nous, que
ce soit deux mois ou que ce soit justement entre la période des
Fêtes, l'important, vous le comprendrez, c'est qu'on a besoin
d'informations.
DES VOIX: Vote.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le vote sur la motion. Qu'on appelle
les députés!
Vote sur la motion de M. Roy
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement de
l'honorable député de Beauce-Sud veuillent bien se lever, s'il
vous plaît!
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Roy, Samson, Morin, Burns, Charron, Lessard,
Bé-dard (Chicoutimi).
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever, s'il
vous plaît !
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Lévesque, Mailloux,
Choquette, Garneau, Phaneuf, Lalonde, Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme
Bacon, MM. Hardy, Tetley, Drummond, Forget, Massé, Harvey
(Jonquière), Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault,
Kennedy, Bacon, Lamontagne, Veilleux, Brisson, Séguin, Cornellier, Houde
(Limoilou), Pilote, Ostiguy, Picard, Assad, Carpentier, Dionne, Faucher,
Larivière, Shanks, Springate, Beauregard, Bonnier, Boudreault, Boutin
(Johnson), Leduc, Caron, Denis, Déziel, Harvey (Dubuc), Lecours,
Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Picotte, Sylvain, Verreault.
LE SECRETAIRE: Pour: 7 Contre: 56
LE PRESIDENT: La motion est rejetée.
Deuxième lecture (suite) LE PRESIDENT: Le
député de Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, la majorité l'a
emporté, mais cela ne veut pas dire que la majorité a raison.
Ecoutez, pendant qu'il y a de bonnes relations cordiales, s'il vous
plaît, ne mettez pas le chiard. Je voudrais qu'on discute ce projet de
loi calmement, d'autant plus que le premier ministre est là. Lui qui se
présente à la population du Québec comme grand
administrateur des deniers publics, comme avare dans les dépenses des
deniers publics, il devrait particulièrement comprendre que nous, de
l'Opposition, étant donné le travail qu'on a de surveiller le
gouvernement, on ne peut pas accepter aveuglément un projet de loi comme
celui-là.
Je suis d'accord que vous avez réussi, grâce à votre
majorité, à renverser une motion du député de
Beauce-Sud. J'en appelle à votre sens libéral et à votre
sens même de l'intégrité.
Je suis assuré que le ministre des Travaux publics lui-même
est prêt à trouver une solution, le ministre des Travaux publics
lui-même, que je connais et dont je respecte énormément
l'intégrité.
On n'est pas ici tout le temps pour s'engueuler, mais je respecte
énormément l'intégrité...
M. le Président, ça va bien, puis j'emploie des termes
parlementaires; alors que le député de Saint-Jean reste bien
assis sur son siège.
M. le Président, article 92.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): Une question de
règlement.
M. LESSARD: Article 92, il va vous citer l'article 92.
M. VEILLEUX: M. le Président, pour parler un député
doit se lever, l'article 92.
M. LESSARD: Vous voyez, je demanderais aux journalistes de noter encore
une fois, pour la cinquième ou sixième fois, l'intelligence du
député de Saint-Jean. Les seules interventions qu'il a faites, au
cours de ces débats, depuis quelques jours, cela a été
cette question de règlement, application de l'article 92.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): La pertinence du débat, s'il
vous plaît.
M. LESSARD: M. le Président, on va parler avec des gens
sérieux. On va laisser de côté le député de
Saint-Jean, parce qu'il semble que tous les autres députés
libéraux...
M. VEILLEUX: M. le Président...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): Question de règlement.
M. LESSARD: Pour une fois que j'essaie d'être calme.
M. VEILLEUX: M. le Président l'article 98 il faut parler sur la
motion.
M. LESSARD: Bien, c'est exactement ce que je fais.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): La pertinence du débat, le
député de Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, je veux qu'on parle entre gens
sérieux et, comme je le disais, le député de Saint-Jean
est exclu de cela. J'en appelle au premier ministre Bourassa, j'en appelle au
ministre des Transports dont je respecte énormément
l'intégrité. Il s'agit d'un projet de loi important, qui donne
des pouvoirs considérables à une autre société
d'Etat qu'on a appuyée lors de sa création mais, pas à
n'importe quel prix. Nous sommes favorables au développement de
sociétés qui appartiennent à des Québécois,
surtout, dans ce cas-ci, que le gouvernement québécois s'associe
avec l'un des mouvements les plus importants au Québec, le mouvement
Desjardins, qui appartient à des Québécois; nous y sommes
favorables mais pas à n'importe quel prix. Je ne suis pas prêt,
malgré qu'on soit, en général, favorable à ces
sociétés d'Etat, à accepter de créer une autre
société générale de financement quand je vais
adopter ce projet de loi.
Avant de l'adopter, j'ai d'abord une responsabilité, étant
donné ma fonction de député. Et même tous les autres
députés libéraux devraient
intervenir auprès du ministre des Travaux publics, auprès
du leader du gouvernement, de leur premier ministre pour exiger qu'on trouve au
moins un moyen, que ce soit la commission parlementaire, pour faire entendre
les parties, les administrateurs, mais qu'on exige plus que cela avant
d'approuver un projet de loi comme celui-là.
Je ne veux pas, comme c'est malheureusement arrivé lors de
certaines commissions parlementaires, qu'on nous arrive, au moment de la
commission parlementaire, avec une série de documents où nous
avons de nombreux chiffres, une comptabilité extrêmement complexe,
qu'on dépose ça et qu'on nous dise: Voici, messieurs, nous sommes
ici, nous sommes prêts à témoigner et posez-nous des
questions.
Je suis assuré que, pour un complexe aussi important que
ça, ce n'est pas comme ça, comme je le disais, du jour au
lendemain, dans l'espace de quelques minutes, qu'on peut constater, analyser la
comptabilité d'une société.
Justement, et j'ai eu l'occasion de le dire, on n'a pas la sagesse de
ces députés libéraux qui, en un tournemain peuvent
visionner immédiatement un projet de loi, toute une série de
documents, comme ils l'ont prouvé, lors de l'étude en commission
parlementaire...
Je pourrais dire au député de Saint-Jean qu'il n'a pas
été discuté en caucus. Je pourrais dire que le
député de Saint-Jean vient de mentir à l'Assemblée
nationale.
M. le Président, je ne fais que cette affirmation, mais je ne
pense pas que ce projet de loi ait été étudié au
caucus.
S'il a été étudié au caucus, sur quels
documents précis les députés libéraux se sont-ils
basés pour accepter un projet de loi comme celui-là?
Si les députés libéraux ont été
informés, lors de la discussion en caucus, pourquoi le ministre des
Travaux publics n'a-t-il pas aujourd'hui ces documents à déposer?
Et là nous pourrions analyser ces documents.
Je serais heureux si les députés avaient pu
démontrer une telle responsabilité remarquez que j'en
doute dans l'administration des deniers publics, je dis tant mieux, M.
le Président, et je vous en félicite. Mais de grâce! M. le
Président je suis gentil ce soir qu'on nous donne ces
mêmes informations. Nous serions probablement prêts, si nous avions
tous les éclaircissements, à adopter ce projet de loi. Si les
députés libéraux ont eu l'avantage d'avoir ces documents,
je les supplie de nous les donner. Nous sommes prêts, comme nous le
faisons d'habitude, à étudier les documents de minuit à
dix heures, demain matin, et par la suite on reprendra la discussion de ce
projet.
Mais, comme député de l'Opposition, et même si
j'étais un député libéral et je les prends
à témoin je suis assuré que si vous étiez
à notre place, aussi peu informés que nous le sommes, vous feriez
exactement pareil. Je ne suis pas informé. C'est cela, des informations,
que je demande. Je suis assuré, M. le Président, que les
députés libéraux, s'ils sont responsables, feraient
exactement la même chose que nous autres. Celui qui intervient à
l'encontre des règlements mais que j'aime bien, M. le Président
voyez comme je suis gentil ce soir le responsable du
Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, lui qui doit
être, je pense bien, un bon administrateur, je suis assuré que,
s'il était à notre place, il ferait exactement la même
chose, il aurait exactement les mêmes exigences. S'il ne le faisait pas,
il serait un irresponsable, ce à quoi je ne crois pas.
Or, on ne peut pas accepter un projet de loi comme celui-là. On
ne peut pas accepter, les yeux fermés, un projet de loi comme
celui-là. Il y a trop de pouvoirs importants. Quand on pense, par
exemple, que le gouvernement du Québec garantit complètement
l'exécution de toute obligation de Place Desjardins Inc. Mais il faut
savoir où on s'en va avec cela. Il faut savoir si ce ne sera pas un
tonneau sans fond ou un panier percé, dont on parlait tout à
l'heure. Moi, je ne sais pas et je ne veux pas intervenir dans le débat
et j'ai tenté, justement, d'enlever tout à l'heure toute
partisanerie. C'est trop important, voter $20 millions. C'est trop important et
je ne veux pas intervenir de façon partisane. J'ai tenté de ne
pas le faire, M. le Président, et je vais continuer de ne pas le
faire.
Mais on se demande, des fois, sérieusement si le leader du
gouvernement ne s'apprête pas à bloquer toute une série de
projets de loi en nous présentant des projets de loi contentieux comme
celui-là. Je sais que c'est nous qui aurons le blâme, M. le
Président, d'avoir fait durer la session mais comment voulez-vous,
messieurs les journalistes et mademoiselle, si nous sommes responsables, qu'on
accepte ça aveuglément?
Le ministre du Revenu, M. le Président, lui-même un
administrateur, lui-même qui est responsable d'un important secteur de la
société québécoise, devrait savoir, lui qui a connu
cela aussi être député de l'Opposition, qu'un
député de l'Opposition ne peut pas engager, comme cela,
aveuglément, $20 millions dans une société que nous ne
connaissons que de nom, dont nous ne connaissons aucun chiffre, dont nous ne
connaissons aucunement la comptabilité.
Le ministre du Revenu probablement la connaît, cette
comptabilité, mais on sait que c'est secret.
Je suis assuré que le ministre des Travaux publics n'aurait,
comme il le disait tout à l'heure, aucune raison de faire siéger
cette commission parlementaire, pour faire en sorte que certaines personnes
puissent venir témoigner, ou nous donner des explications, mais je
demande qu'on suspende... Je pourrais pour faire de la procédure,
présenter une autre motion que vous battriez probablement dans votre
irresponsabilité.
Mais nous autres, on n'est pas irresponsables à ce
point-là.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): A l'ordre, s'il vous plaît
!
M. LEVESQUE: Est-ce que le député de Saguenay me
permet?
M. LESSARD: Vous avez été convaincu?
M. LEVESQUE: J'écoutais attentivement le député de
Saguenay et je crois que je pourrais lui faire une suggestion. Vu qu'il semble
vouloir avoir des renseignements additionnels qui permettraient de
l'éclairer dans, son vote de deuxième lecture, vu
également les propos tenus par nos amis d'en face et de biais, du Parti
créditiste, qui également avaient émis certaines
réserves en attendant des explications additionnelles, et comme ces
explications selon le témoignage du ministre n'ont pu se
rendre ici à cause de certaines conditions climatiques, je
suggérerais au député de Saguenay, s'il est d'accord avec
moi sur les prémisses, de demander l'ajournement du débat, quitte
a le poursuivre lorsque nous pourrons fournir aux députés de
cette Chambre les explications additionnelles, afin d'éclairer leur vote
en deuxième lecture.
M. LESSARD: Vous voyez, messieurs, un homme qui a compris. Encore
là, pour démontrer...
M. LEVESQUE: C'est l'ajournement du débat.
Motion d'ajournement du débat
M. LESSARD: D'accord. Mais je voudrais donner quand même quelques
explications. Pour démontrer notre non-partisanerie politique, pour
démontrer notre collaboration que nous avons toujours voulu apporter
depuis le début de cette session, j'accepte la proposition du leader du
gouvernement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): Cette motion d'ajournement est-elle
adoptée?
M. SAMSON: M. le Président...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Heard): Le député de
Rouyn-Noranda, sur la motion d'ajournement?
M. SAMSON: C'est une motion débattable?
Je voudrais bien être gentil à l'endroit de mes
collègues d'en face. Je sais que je déplairai peut-être
à mes collègues libéraux, mais ...
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
L'article 77 dit: "Une motion non annoncée d'ajournement du débat
peut être faite en tout temps; une telle motion, sauf si elle est faite
par un ministre, ne peut-être faite qu'une seule fois au cours d'une
séance. Elle est mise aux voix sans amendement, à la suite d'un
débat restreint au cours duquel un représentant de chaque parti
reconnu peut prononcer un discours de dix minutes, le proposeur pouvant exercer
un droit de réplique de même durée." Je prétends
respectueusement que, jusqu'à maintenant, le député de
Rouyn-Noranda ne fait pas partie d'un parti reconnu, selon les termes de notre
règlement.
M. SAMSON: M. le Président, sur le point de règlement.
Nous avons droit de parler sur le règlement. Est-ce que nous avons ce
droit, oui ou non?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Très brièvement.
M. SAMSON: D'accord, très brièvement. Je voudrais vous
dire que le point de règlement qui vient d'être soulevé par
l'honorable leader du gouvernement, je m'attendais qu'il serait utilisé
ce soir ou peut-être demain. C'est là démontrer, une fois
de plus, la façon dont le leader du gouvernement et le
gouvernement...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!
Sans aucun doute, le député de Rouyn-Noranda aura d'autres
occasions d'exprimer son point de vue sur le même sujet.
M. ROY: Je soulève une question de privilège en vertu de
l'article 50. Je suis en pleine conformité avec le règlement et
je cite: "Un député qui soulève une question de
privilège doit se borner à protester". Je proteste, M. le
Président, encore une fois, contre la façon, l'arrogance, le
culot que vous mettez à toujours vouloir essayer de bâillonner les
deux députés du Parti créditiste. M. le Président,
nous représentons quand même un certain pourcentage de la
population...
M. LEVESQUE: Tout ce que j'ai fait, M. le Président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. ROY: M. le Président, j'ai soulevé une question de
privilège.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement. Tout
ce que j'ai fait c'est de lire un article de notre règlement. L'exemple
que devrait donner le député de Beauce-Sud, qui parle toujours de
son respect de l'autorité, c'est justement de respecter le
règlement et l'autorité constituée. Quant à nous,
nous avons été très large jusqu'à maintenant, M. le
Président, nous avons cherché toutes sortes de moyens
d'accommoder nos deux amis du Parti créditiste. Mais qu'ils s'en
prennent à eux-mêmes, en
particulier le député de Beauce-Sud, qui a
participé à la rédaction du règlement dont il se
plaint aujourd'hui. C'est lui-même également, dans la
préparation du règlement, qui a oublié le
député Bois, de Saint-Sauveur, indépendant, et le
député Masse, de Montcalm. A ce moment-là, M. le
Président, il avait beau en parler.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! ...
A l'ordre! Sur la question de privilège.
M. ROY: Sur une question de privilège.
L'honorable leader du gouvernement intervient pour la deuxième
fois. Que le leader du gouvernement se rappelle, je pense qu'il a de la
mémoire, que le règlement a été soumis à
l'Assemblée nationale du Québec; l'Assemblée nationale a
voté unanimement pour le règlement et il n'y a pas eu de
protestation de qui que ce soit. M. le Président, c'était dans le
contexte du temps mais le règlement actuel, nous le contestons, le
gouvernement le sait. S'il était à nouveau soumis devant
l'Assemblée nationale du Québec, il ne recevrait pas
l'unanimité de la Chambre.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. SAMSON: M. le Président, je pose également une question
de privilège. C'est mon privilège de député de
représenter en cette Chambre les électeurs qui m'ont élu
et laissez-moi parler, M. le Président le président
de la Chambre...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): J'aimerais que vous m'indiquiez votre
question de privilège.
M. SAMSON: Mais oui, M. le Président, si vous me laissez la dire,
je vais vous la dire.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Oui, tout de même. Si c'est une
question de privilège en contravention d'un article, je vais vous
écouter quelque temps.
M. SAMSON: C'est mon privilège de député...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): On va vous écouter.
M. SAMSON: Le président qui occupait le fauteuil avant vous a dit
qu'une question de privilège a préséance sur une question
de règlement, M. le Président.
M. LEVESQUE: Non, M. le Président, j'invoque...
M. SAMSON: Le leader devrait savoir cela. Une question de
privilège a toujours...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!
L'honorable leader du gouvernement a une question de règlement.
M. LEVESQUE: M. le Président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! Je
vais vous donner la parole après. Ecoutez, j'aime autant vous avertir,
si vous continuez, je ne vous la donnerai pas du tout. A l'ordre! ... A
l'ordre, s'il vous plaît! ...
M. SAMSON: M. le Président, j'allais vous dire aussi calmement
que possible...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): J'espère.
M. SAMSON: ... que le président qui occupait le fauteuil avant
vous nous a répété toute la journée que nous
étions en droit nouveau; il nous a répété ça
toute la journée. Compte tenu du nouveau règlement que nous
avons, nous exerçons aujourd'hui du droit nouveau. M. le
Président, l'an passé on a adopté un règlement,
compte tenu des circonstances. Or il y a des circonstances nouvelles que le
gouvernement devrait prendre en considération. Ce n'est pas parce qu'il
y a 102 députés libéraux qu'on va tenter de nous
écraser par cette majorité. M. le Président, si on veut
utiliser la majorité pour nous écrasser, libre à eux mais
il reste que dans la population il y a des gens qui comprennent encore...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! ... A l'ordre! ... Les
honorables députés de Beauce-Sud et de Rouyn-Noranda comprendront
que le président ne peut que faire respecter le règlement. Il ne
lui appartient pas de décider si les honorables députés de
Beauce-Sud et de Rouyn-Noranda seront reconnus par l'Assemblée
nationale. Nous devons, nous, être très respectueux des
règlements.
S'il intervient une entente, nous serons très heureux, à
ce moment-là, de faire respecter les règlements en
conformité avec une entente qui pourrait éventuellement
intervenir, mais pour le moment, mon seul devoir est de faire respecter le
règlement en conformité avec l'appel au règlement qui a
été fait par le leader du gouvernement.
Ecoutez, une question sur quoi?
M. ROY: Est-ce que vous nous permettriez de vous dire que nous le
contestons, ce règlement? Nous ne l'acceptons pas durant la
présente session. Le règlement ne correspond pas à la
réalité.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! ... A l'ordre!
J'inviterais le député de Beauce-Sud... A l'ordre! ... A l'ordre!
... A l'ordre!
Je voudrais profiter de cette circonstance pour rappeler aux
députés de Beauce-Sud et de Rouyn-Noranda que, bien que ce soit
avec beaucoup de sympathie qu'on puisse recevoir leurs représentations,
tout de même, il y a des articles de règlement qu'il faut
respecter. Quel que soit le président qui soit ici, lorsqu'il est
debout, il y a tout de même certains règlements qu'il faut
respecter. Vous pourrez en certains autres endroits ou autrement faire les
représentations que vous voulez, mais vous ne pouvez pas les faire
à la présidence.
La question d'ajournement avait été adoptée.
M. SAMSON: Non, M. le Président, elle n'avait pas
été adoptée.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Elle avait été
adoptée.
M. SAMSON: Non, elle n'a pas été adoptée, M. le
Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Je ne puis pas...
M. SAMSON: Elle n'avait pas été adoptée parce que
je vous ai demandé le droit de parole.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Je ne peux pas vous le donner.
M. SAMSON: Ce n'est pas vous qui m'avez empêché de parler;
c'est le gouvernement qui m'a empêché de parler et c'est ça
que je voudrais vous dire, M. le Président. Ce n'est pas à la
présidence qu'on en a, aucunement et vous le savez. Lors du débat
sur l'article 68 de notre règlement, on s'est même abstenus de
parler. Ce n'est pas contre vous qu'on en a; c'est contre le gouvernement.
C'est lui qui a le pouvoir de décision, de permettre aux élus du
peuple...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! ... A l'ordre! ...
Est-ce que je peux maintenant compter sur votre collaboration? A
l'ordre! ... A l'ordre! J'indiquerais au député de Rouyn-Noranda
qu'on ne peut pas continuer indéfiniment à être aussi
irrespectueux des règlements. Bien écoutez, actuellement...
Est-ce que vous voulez nous donner un instant, s'il vous plaît? Il n'est
pas de mon intention de vous rappeler à l'ordre inutilement, mais, tout
de même, je vous invite, à titre de député
responsable, à être, pour le moins, un peu respectueux de certains
règlements lorsque le président est debout.
On vous a laissé pendant cinq, six minutes, à tour de
rôle, parler sur un sujet qui est complètement hors d'ordre. Je
demande maintenant votre collaboration pour vingt minutes. Vous vous reprendrez
à une autre occasion.
Ecoutez, à l'ordre! C'est assez, je ne puis pas continuer
à...
J'inviterais l'honorable député de Rouyn-Noranda à
l'ordre! ...
Je suspends pour cinq minutes.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Après quelques instants de
repos, est-ce que je pourrais demander si cette motion d'ajournement est
adoptée?
M. BURNS: Je ne sais pas, M. le Président. Moi, je suis
prêt à l'adopter mais, par contre, s'il y a des
députés qui veulent demander le vote enregistré, je suis
bien prêt à leur manifester que trois députés du
Parti québécois seraient d'accord.
M. SAMSON: M. le Président, le vote enregistré s'il vous
plaît sur cette motion.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Qu'on appelle les
députés!
Prêts à voter? Un instant.
M. BURNS: Est-ce que les cloches ont sonné, M. le
Président? Je m'aperçois que les députés qui sont
en commission ne sont pas avec nous, les députés de Saint-Jacques
et de Chicoutimi. J'aimerais qu'ils puissent voter.
Vote sur la motion d'ajournement de M. Lessard
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion d'ajournement
proposée par l'honorable député de Saguenay veuillent bien
se lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Charron, Lessard, Bédard
(Chicoutimi),
LE PRESIDENT: Etes-vous en faveur?
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Mailloux, Choquette,
Garneau, Phaneuf, Lalonde, Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM.
Hardy, Tetley, Drummond, Forget, Massé, Harvey (Jonquière), Houde
(Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Kennedy, Bacon, Lamontagne,
Veilleux, Brisson, Séguin, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Ostiguy,
Picard, Carpentier, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Larivière, Shanks,
Springate, Beauregard, Bonnier, Boudreault, Boutin (Johnson), Leduc, Caron,
Denis, Dufour, Harvey (Dubuc), Lecours, Malouin, Massicotte, Mercier,
Pagé, Picotte, Sylvain, Tremblay, Verreault.
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plait.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Samson, Roy.
LE SECRETAIRE: Pour: 61
Contre: 2
LE PRESIDENT: La motion est adoptée. Article 3). L'honorable
député de Roberval. Commission plénière.
Projet de loi no 12
Commission plénière (suite)
M. LAMONTAGNE (président de la commission
plénière): A l'ordre, messieurs! L'honorable député
de Maisonneuve.
M. BURNS: Je viens de consulter très rapidement les
députés du Parti québécois. Malheureusement,
j'aurais aimé accommoder le gouvernement et lui dire que je suis
prêt à dépasser minuit, ce qui est un peu la guillotine de
nos travaux, mais je pense que lorsqu'on exige de la part des
députés de l'Opposition la présence en Chambre à
compter de dix heures je ne le dis pas méchamment, je le dis tout
simplement sur une question factuelle quand on exige cette
présence, dis-je, de dix heures du matin jusqu'à minuit,
malheureusement, après une rapide consultation avec mes
collègues, je ne peux pas accorder mon consentement pour dépasser
minuit.
M. LAMONTAGNE (président de la commission
plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire
rapport que la commission plénière étudiant le projet de
loi no 12, Loi modifiant le Régime de rentes du Québec, n'a pas
fini de délibérer et demande la permission de siéger
à nouveau.
LE PRESIDENT: L'Assemblée ajourne ses travaux à demain,
dix heures.
(Fin de la séance à 0 h 1)