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(Quinze heures trois minutes)
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
M. LEVESQUE: Article c).
Projet de loi no 6 Première lecture
LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire du gouvernement, pour le
ministre du Revenu, propose la première lecture de la Loi modifiant de
nouveau la loi sur les impôts et certaines autres dispositions
législatives d'ordre fiscal.
M. LEVESQUE: Ce projet de loi, par son article 1, corrige une
imprécision dans le texte de la Loi sur les impôts. L'article 2
permet au contribuable qui avait le droit de déduire, dans le calcul de
son revenu, le montant de tous les impôts sur le revenu provenant d'une
charge ou d'un emploi ou les bénéfices payés à un
Etat étranger de réclamer ces déductions de son
impôt autrement payable, et ainsi de suite. Il y a dans ce projet de loi
54 articles où il y a diverses dispositions amendant la Loi sur les
impôts et certaines autres dispositions législatives d'ordre
fiscal.
LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée? Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou
séance subséquente.
M. LEVESQUE: Article d).
Projet de loi no 8 Première lecture
LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire du gouvernement, pour le
ministre de la Justice, propose la première lecture de la Loi modifiant
de nouveau la loi des tribunaux judiciaires.
M. LEVESQUE: En l'absence du ministre de la Justice, qui est retenu
à Ottawa aujourd'hui, qu'on me permette de déposer...
M. BURNS: II est allé chercher de l'argent pour payer
l'augmentation de salaire des juges.
M. LEVESQUE : Est-ce qu'il y a une relation? M. BURNS: Je ne sais pas.
UNE VOIX: Voulez-vous être nommé? M. BURNS: Est-ce une
proposition?
M. LEVESQUE: L'article 1 de ce projet précise que le traitement
d'un juge à la retraite à qui on confie certaines tâches
judiciaires est égal à celui d'un juge puîné de la
cour à laquelle appartenait ce juge avant sa retraite.
Les articles 2 à 9 prévoient qu'à compter du 1er
juillet 1972 le traitement annuel des juges en chef et juges en chef adjoints
des Sessions, de la cour Provinciale et de la cour de Bien-Etre social est de
$35,000 et que celui des juges de ces cours est de $31,000 et qu'à
compter du 1er juillet 1973 le traitement est augmenté de $2,000.
LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée? Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou
séance subséquente.
Projet de loi no 10 Première lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la
première lecture de la Loi modifiant la loi concernant les
municipalités des paroisses de Saint-Gérard-des-Laurentides et de
Saint-Mathieu.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, ce projet corrige la description
de la municipalité de la paroisse de Saint-Gérard-des-Laurentides
apparaissant à l'annexe A du projet de loi no 35. Une erreur s'est
glissée là-dedans.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou
séance subséquente.
M. LEVESQUE: Article f).
Projet de loi no 12 Première lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires sociales propose la
première lecture de la Loi modifiant le régime de rentes du
Québec.
M. FORGET: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer ce
projet de loi numéro 12, Loi modifiant le régime de rentes du
Québec, et de déposer en même temps l'analyse actuarielle
spéciale effectuée en vertu de l'article 224 du régime de
rentes, modifiant celle de juin 1972 et indiquant les effets du projet de loi
sur les réserves actuarielles du régime de rentes.
M. le Président, ce projet de loi contient un certain nombre de
dispositions fort techniques. Avec la permission de l'Assemblée,
j'aimerais être dispensé de la lecture détaillée des
notes explicatives. Le but recherché par cette loi est double; d'une
part, prévoir une hausse du maximum des gains admissibles pour les
années 1974 et 1975 et, d'autre part, prévoir une revalorisation
des prestations du régime de rentes en vertu de la hausse du coût
de la vie, de l'indice du coût de la vie.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou
séance subséquente.
M. LEVESQUE: M. le Président, après consultation de
l'Opposition officielle, avec le consentement unanime de la Chambre, afin de
permettre aux députés de prendre connaissance de certains projets
de loi qui sont à l'appendice qu'il me soit permis de proposer la
première lecture du projet de loi, Loi concernant la division
territoriale, apparaissant à mon nom.
Projet de loi no 11 Première lecture
LE PRESIDENT: Le vice-premier ministre propose la première
lecture de la Loi concernant la division territoriale.
UNE VOIX: Explication.
M. LEVESQUE: Oui. Ce projet prévoit que le nom et le
délimitation des districts judiciaires, des divisions d'enregistrement
et des conseils de comté demeurent ce qu'ils étaient au moment de
la dissolution du Parlement, alors qu'est entrée en vigueur la
délimitation nouvelle des districts électoraux.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance ou à une séance subséquente.
M. LEVESQUE: M. le Président, qu'il me soit permis de demander la
même permission, le même consentement pour les deux premiers
projets de loi apparaissant au nom du ministre des Affaires municipales.
LE PRESIDENT: Le ministre des Affaires municipales propose la
première lecture...
M. LEVESQUE: M. le Président, le premier et le
troisième.
LE PRESIDENT: Le premier et le troisième.
Projet de loi no 16 Première lecture
LE PRESIDENT: Le ministre des Affaires municipales propose la
première lecture de la Loi concernant la ville des Laurentides.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, ce projet précise la
composition, depuis le 1er juillet 1957, du conseil de ville des Laurentides et
déclare que les actes officiels accomplis depuis cette date par les
membres du conseil et les fonctionnaires de la ville ne sont pas nuls par suite
du défaut de juridiction de ces personnes.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance ou à une séance subséquente.
Projet de loi no 18 Première lecture
LE PRESIDENT: Le ministre des Affaires municipales propose la
première lecture de la Loi concernant les villes d'Arthabaska, de
Belle-terre et de Malartic.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, l'article 1 de ce projet met fin
à la rotation pour l'élection du maire et des conseillers
à compter
de novembre 1974 dans le cas de la ville de Belleterre, et de novembre
1975 dans le cas des villes d'Arthabaska et de Malartic. L'article 2
déclare qu'aucune illégalité ne résulte du seul
fait que la ville de Belleterre ait appliqué dès septembre 1970
le nouveau système électoral qu'instaurait l'article 169 du
chapitre 55 des lois de 1968.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce projet de loi.
First reading of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance ou à une séance subséquente.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
DEPOT DE DOCUMENTS
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Transports.
Ministère des Transports
M. MAILLOUX: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le
rapport des activités du ministère des Transports pour l'exercice
financier se terminant le 31 mars 1973.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Communications.
Office franco-québécois pour la
jeunesse
M. L'ALLIER: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le
rapport annuel de l'Office franco-québécois pour la jeunesse,
pour l'année 1972.
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres documents à
déposer?
Régime de rentes
M. FORGET: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer
l'analyse actuarielle spéciale du régime des rentes.
LE PRESIDENT: Questions orales des députés.
QUESTIONS DES DEPUTES
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.
Langue d'enseignement
M. MORIN: M. le Président, ma première question est
destinée au ministre de l'Education. L'édition de la Presse de
samedi nous a révélé l'existence d'un document,
intitulé "La situation des langues dans les écoles du
Québec et de ses régions administratives, 1969-70 à
1972-73", document préparé par le démographe Louis
Duchesne pour la Direction générale de la planification et remis
au ministère en octobre dernier. Ce document établit
l'accroissement du pouvoir d'attraction du secteur public anglophone et la
diminution du pouvoir d'attraction du secteur francophone.
Pourquoi le ministre, lorsqu'il a voulu me répondre et, à
vrai dire, me reprendre, au cours du débat sur le discours inaugural,
quant au chiffre de 13,600 francophones qui étaient passés,
depuis 1970, du secteur français au secteur anglais, n'a-t-il pas
donné les chiffres véritables qu'il possédait
sûrement à ce moment-là?
M. CLOUTIER: M. le Président, le document dont parle le chef de
l'Opposition a été récemment l'objet d'une fuite.
Cependant, ce n'est pas le document définitif qui a été
publié; c'est un document préliminaire.
M. BOURASSA: Un peu de politesse. M. CLOUTIER: II m'a été
remis... M. CHARRON: Cela se peut-tu?
M. CLOUTIER: Qu'est-ce que dit le député de
Saint-Jacques?
M. CHARRON : J'ai dit : Cela se peut-tu?
M. CLOUTIER : Oui, M. le député, cela se peut.
M. CHARRON: Oui, bien, continuez.
M. CLOUTIER: Voilà. Ce document m'a été remis il y
a une dizaine de jours seulement et il est actuellement en cours d'analyse au
ministère de l'Education. J'ai autorisé le démographe en
question à faire état de ces renseignements lors d'un colloque
récent. De plus, je dois dire qu'il est basé sur des statistiques
qui sont publiques déjà au ministère de l'Education depuis
un certain temps. J'ai l'intention de le rendre public; je n'ai pas jugé
à propos de le faire précisément parce que toutes les
données n'étaient pas encore disponibles.
Soit dit en passant, je pense que l'immense majorité des
fonctionnaires québécois sont loyaux, mais il reste inadmissible
sur le plan de l'éthique professionnelle que de tels incidents puissent
arriver. D'ailleurs, l'exemple vient de
haut parce que l'ancien sous-ministre des Affaires
intergouvernementales, l'ancien candidat dans le comté de
Louis-Hébert, a fait état au cours de la campagne
électorale d'une conversation privée avec le sous-ministre.
M. LEGER: ... qui était en fuite, c'est le ministre qui
était en fuite.
M. CLOUTIER: II s'agit là d'une infraction flagrante.
M. LEGER: C'est le ministre qui était en fuite, ce ne sont pas
les documents.
M. CLOUTIER: Et je qualifie cela de malhonnêteté
intellectuelle.
Ceci dit, il faut interpréter ces chiffres un peu dans l'optique
dont je faisais état au cours de ma réplique au chef de
l'Opposition, à savoir que le phénomène reste tout de
même marginal; qu'il s'agisse de 15,000 ou de 25,000 étudiants, il
faut les rapporter à une population totale de 1,600,000 au niveau de
l'élémentaire et au niveau du secondaire. De plus...
M. MORIN: Quand est-ce que cela devient-il significatif? 50,000
100,000,150,000...?
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. CLOUTIER: De plus, j'ai eu l'occasion d'expliquer qu'il fallait faire
la distinction entre la fréquentation scolaire et le transfert
linguistique indiquant bien que ce n'était pas parce qu'un
élève francophone fréquentait le secteur anglophone qu'il
devenait nécessairement anglicisé. Je me souviens même
d'avoir cité d'autres facteurs qui influaient beaucoup sur les
transferts linguistiques, en particulier le mariage mixte. Tout ceci pour
placer les choses un peu en perspective, parce qu'il est bien évident
que le Parti québécois a choisi comme cheval de bataille la
langue, et il essaie...
M. MORIN: Allons donc!
M. CLOUTIER: ... d'en tirer le plus de profit possible. Mais il reste
que le gouvernement a commencé sa politique globale en 1970, en mettant
en place des structures, et ces structures seront coiffées de lois
appropriées, au moment opportun.
M.MORIN: Une question supplémentaire pour le même ministre,
M. le Président. A la suite de cette étude que le ministre a
maintenant entre les mains, et avant l'adoption des budgets des commissions
scolaires, le ministre va-t-il faire un relevé pour l'ensemble du
Québec, et en particulier pour l'île de Montréal, des
écoles anglophones dont l'existence ou le maintien est justifié
par une clientèle dont moins de 25 p.c. est de langue maternelle
anglophone?
M. CLOUTIER: M. le Président, le Conseil scolaire de l'île
de Montréal, créé par la loi no 71, a justement pour
mandat de voir l'ensemble de la situation sur l'île de Montréal.
Par conséquent, il n'est pas question de le court-circuiter. Il a en
particulier la responsabilité de faire les grands arbitrages qui
s'imposeront sur le plan des équipements scolaires.
M. CHARRON: Question additionnelle, M. le Président. Une question
double: Est-ce que le ministre a fait parvenir une réponse à la
Fédération des commissions scolaires qui demandait à son
tour, il y a quelque temps, le retrait du bill 63 et l'intégration des
anglophones...
LE PRESIDENT: II s'agit d'une question principale, je crois.
M. CHARRON: II s'agit du même sujet, de l'érosion de la
majorité francophone au sein des écoles anglaises.
LE PRESIDENT: De toute façon...
M. CHARRON: D'autres organismes se sont penchés sur le
problème et je demande...
LE PRESIDENT: Je la considère comme question principale. Cela ne
change rien de toute façon.
M. BOURASSA: Vous n'avez pas parlé de cela durant la campagne
électorale.
M. CHARRON: Est-ce que je peux demander au député de
Mercier...
M. BOURASSA: II parlait des comptes nationaux.
M. CHARRON: ... s'il entend donner une réponse, lui, à la
Fédération des commissions scolaires? Deuxièmement, je
voudrais demander si, dans la réponse que vient de fournir le ministre
de l'Education en faisant état d'une conversation privée entre un
ancien haut fonctionnaire et le premier ministre, il s'agit de la conversation
dans laquelle le premier ministre demandait au haut fonctionnaire de devenir
ministre de l'Education parce qu'il ne trouvait aucun député
compétent...
M. BOURASSA: Potinage.
M. CHARRON: ... pour occuper le poste dans sa propre
députation.
M. BOURASSA: Potinage.
M. CLOUTIER: M. le Président, je ne réponds pas, bien
sûr, à la deuxième partie de la question du
député de Saint-Jacques qui tente
d'oublier l'échec électoral de son parti en essayant de se
consoler avec de la démagogie facile.
M. LEGER: Les 30 p.c. vous font mal.
M. CLOUTIER: Je réponds à la première partie... Oui
et 70 p.c. qui ont voté contre.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. CLOUTIER : Je réponds à la première partie de sa
question. J'ai répondu immédiatement à la Commission des
écoles catholiques. Comme cet organisme avait choisi de rendre sa
déclaration et ses recommandations publiques, j'ai fait de même.
Dans les 24 ou 36 heures, j'ai émis un communiqué. La
résolution de la CECM comportait cinq points. Un point qui portait sur
le retrait de la loi 63 et quatre points qui portaient respectivement sur
l'amélioration du français, langue maternelle, sur
l'amélioration de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, sur les
critères qui déterminent la fermeture des écoles, le
critère, en particulier, de la clientèle. J'ai pu dire que le
gouvernement avait déjà agi, était déjà
intervenu sur quatre points sur cinq. Je me suis même
étonné qu'on n'en ait pas davantage fait état à ce
moment-là.
En effet, le plan d'enseignement des langues permet
l'amélioration du français langue maternelle, permet
l'enseignement du français et de l'anglais langue seconde, permet des
mesures d'intégration des immigrants au secteur francophone. Quant
à la question de la fermeture d'écoles, cette question repose sur
des critères qui sont propres à la commission scolaire et le
ministère est parfaitement disposé à les revoir avec cet
organisme. . En ce qui concerne la loi 63, je me suis abondamment
expliqué là-dessus et, au cours du discours que citait le chef de
l'Opposition, j'ai donné la position gouvernementale.
M. MORIN: Une question additionnelle, M. le Président. Est-ce que
le ministre est conscient du fait que dans certaines villes du Québec,
comme par exemple Trois-Rivières, il existe un certain nombre
d'écoles anglophones qui n'ouvrent leurs portes qu'en raison de l'afflux
des étudiants, des élèves, de langue française et
que, n'était la présence de ces étudiants ou de ces
élèves de langue française ces écoles ne
satisfai-raient pas aux normes du ministère de l'Education et devraient
fermer leurs portes?
M. CLOUTIER: C'est très possible, M. le Président, et
c'est la raison pour laquelle le gouvernement a commencé je dois
le répéter une politique linguistique en 1970. Il l'a fait
d'une façon responsable, il le fait en tenant compte de la
société telle qu'elle est et il a bel et bien promis d'arriver
avec les lois appropriées à la prochaine session. Ce que cherche
à faire le Parti québécois, actuellement, c'est de tirer
un tout petit peu de crédit de ce qu'a fait le gouvernement actuel.
M. MORIN: Allons donc!
LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
Assistés sociaux
M. SAMSON: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Affaires sociales. C'est une question que nous devons malheureusement poser
à peu près une fois l'an, à ce temps-ci de l'année.
Il s'agit de plaintes que nous recevons de certains assistés sociaux, au
Québec, qui se voient couper les services de l'électricité
pour raisons évidentes de paiements en retard. Je pense que le ministre
comprend que ces gens ont des difficultés pour effectuer ces paiements,
dû à l'insuffisance du budget ou des allocations sociales qui leur
sont versées.
Est-ce que le ministre peut nous dire s'il entend donner ou s'il a
déjà donné des directives aux différents
responsables du bien-être social, dans les différentes
régions du Québec, afin que des dispositions soient prises pour
que ces incidents regrettables soient évités surtout à ce
temps-ci de l'année, où il est totalement inacceptable de voir
des gens se faire couper les services d'électricité?
M. FORGET: M. le Président, le problème soulevé par
l'honorable député de Rouyn-Noranda revient, en effet, de
façon continuelle dans l'administration du programme d'aide sociale et
en vertu duquel certaines personnes aimeraient que le gouvernement devienne le
tuteur des assistés sociaux.
C'est une solution qui a toujours et à juste titre je
pense été repoussée, puisque tous les
créanciers des personnes qui sont économiquement marginales quant
à leurs revenus pourraient demander le privilège et la protection
d'une tutelle du gouvernement.
C'est une solution qui n'est pas dans l'intérêt des
assistés sociaux eux-mêmes, qui a toujours été
repoussée et qui continuera de l'être. Il reste des situations
individuelles qui, parfois, peuvent retenir notre attention et
bénéficier d'une certaine assistance temporaire, mais il demeure
que sur le principe, la tutelle par le gouvernement des assistés sociaux
est une mesure à laquelle nous résistons.
M. SAMSON: Question supplémentaire. Je voudrais bien quand
même faire comprendre au ministre que ce n'était pas mon intention
de lui suggérer une tutelle. Je lui demandais tout simplement s'il avait
trouvé une possibilité de régler ces cas qui se
présentent. Il s'en est présenté un hier encore dont j'ai
eu connaissance, et il est très malheureux.
Est-ce que le ministre peut nous dire cepen-
dant s'il a l'intention de communiquer, peut-être, avec le
ministre des Richesses naturelles afin que celui-ci entre en communication avec
les dirigeants de l'Hydro-Québec? Il y a peut-être de ce
côté possibilité d'une politique un peu plus souple. Quand
on voit, par exemple...
Je soumets à l'attention du ministre, M. le Président,
pour rendre ma question plus intelligible... Quand on voit que pour une somme
de $40 on va priver d'électricité une famille entière
à ce temps-ci de l'année, je pense que ça exige que le
ministre des Affaires sociales communique dans les plus brefs délais
avec le ministre des Richesses naturelles, afin de lui demander d'intervenir
lui aussi.
M. FORGET: Je prends note de l'intervention du député de
Rouyn-Noranda sur ce point particulier.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
Garderies populaires
M. BEDARD (Chicoutimi): Ma question s'adresserait au ministre des
Affaires sociales. Comme vous avez pu vous-mêmes le constater lors du
discours inaugural, M. le Président, en parlant de la qualité de
la vie, le gouvernement avait annoncé que de nouveaux programmes sociaux
viendraient répondre à des besoins spécifiques du milieu
québécois, tels que les garderies d'enfants.
D'autre part, nous savons que le Québec a exercé son veto
pour empêcher le fédéral de subventionner des garderies
populaires via le programme d'Initiatives locales.
LE PRESIDENT: Question.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ma question sera la suivante: Le ministre
peut-il nous dire quelles sont les raisons qui ont motivé cette
décision du Québec d'opposer son veto?
M. FORGET: Je demanderais au ministre d'Etat aux Affaires sociales de
répondre à la question.
MME BACON: On soutient que le Québec aurait utilisé un
droit de veto à l'égard de certains projets de garderies
populaires. La position du Québec peut s'expliquer ainsi: le
ministère des Affaires sociales est conscient des lacunes immenses qu'il
s'agit de combler dans le secteur des garderies. C'est justement parce qu'il a
l'intention ferme de travailler à améliorer cette situation qu'il
veut éviter à ce stade de poser certains gestes qui
créeraient des précédents et consacreraient des situations
de fait qu'on pourrait regretter ensuite.
En 1973, il existe au Québec 7,500 places dans 248 garderies
d'une capacité moyenne de 30 places; 70 de ces garderies sont
subventionnées dans le cadre des Projets d'initiatives locales et dix
par le ministère des Affaires sociales.
On estime que le Québec aurait besoin de 30,000 places pour les
enfants de 0 à 5 ans dont les mères sont au travail. Il y a un
autre problème capital, c'est celui du financement. Pour répondre
aux besoins immédiats de 25 garderies populaires qui offrent à
l'heure actuelle 715 places et accueillent 920 enfants, le ministère
devrait débourser une somme estimée entre $1,060,000 et
$1,381,000; le ministère des Affaires sociales, dans le moment, n'a pas
cet argent.
Pour mettre en place un réseau minimum de garderies, il faudrait
$30 millions. Le ministère des Affaires sociales n'a pas
présentement cet argent. Si on ne finance que les garderies populaires,
comment éviter de se faire reprocher par les autres garderies non
subventionnées par le ministère des Affaires sociales
d'être injuste à leur égard? Il y a un autre
problème important, c'est celui des locaux et de l'équipement des
garderies. A l'heure actuelle, certaines garderies sont loin de répondre
à toutes les normes de sécurité pour les enfants. En
subventionnant de telles garderies, le gouvernement se trouverait à
cautionner certaines situations qui répondaient sans doute à des
besoins urgents, mais qui ne sauraient être agréées par le
ministère des Affaires sociales.
Enfin, il reste à approfondir la place qu'occuperont les
garderies dans l'ensemble du réseau des affaires sociales et les
relations qu'elles établiront avec les autres établissements des
secteurs de la santé et des services sociaux. Je sais que ça ne
répond pas immédiatement et j'aimerais vous donner un espoir
à court terme, mais c'est tout ce que nous pouvons faire pour le moment.
Nous continuons à étudier la question.
M. CHARRON: Question additionnelle, M. le Président. Dans la
déclaration ministérielle que vient de faire le ministre,
pourquoi n'a-t-elle pas souligné en même temps qu'un des
problèmes que devait rencontrer le ministère est aussi la
formation du personnel et que les employés actuels des Projets
d'initiatives locales fournissent, en attendant la préparation du
ministère, amplement...
UNE VOIX: La question.
M. CHARRON: Cela a commencé par un pourquoi... à la
main-d'oeuvre dont on a besoin pour assurer les garderies populaires, en
particulier sur le territoire montréalais? Pourquoi avoir
évité de souligner cet aspect de votre déclaration
ministérielle?
M. BOURASSA: C'est la réponse à une question; ce n'est pas
une déclaration ministérielle.
UNE VOIX: Est-ce qu'elle répond?
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
M. CHARRON: M. le Président, je vais reprendre ma question, si
vous le permettez, en question supplémentaire.
LE PRESIDENT: A l'ordre! Un ministre est toujours libre de
répondre ou non.
M. CHARRON: Je crois, M. le Président, que la question est
d'importance et elle demande une réponse courte.
M. BOURASSA: Le ministre ne veut pas répondre.
M. LEGER: C'est parce qu'elle n'a pas entendu.
M. CHARRON: Je voudrais simplement poser ma question, M. le
Président, en quelques mots.
M. BOURASSA: Le ministre en a pris avis. M. CHARRON: Elle veut
répondre.
MME BACON: On peut peut-être ajouter un commentaire, M. le
Président. Nous sommes conscients qu'il y a un autre problème
ce n'est pas le moindre, nous le savons c'est celui du personnel
à former et à recruter. Il y a des jardinières d'enfants,
il y a des infirmières, il y a un personnel qu'on retrouve dans toutes
les garderies et, à court terme, il nous paraît difficile de nous
appuyer sur un nombre suffisant de tels spécialistes.
M. CHARRON: Pourquoi congédiez-vous des gens actuellement dans
des garderies? C'était le sens de ma question, M. le
Président.
MME BACON: Je fais remarquer au député de Saint-Jacques
que les garderies qui ont des problèmes dans le moment ne sont pas
subventionnées par le ministère des Affaires sociales.
M. CHARRON: Alors, pourquoi le ministère des Affaires sociales
est-il intervenu auprès des Projets d'initiatives locales pour demander
la juridiction sur ces projets et, ensuite, réduire le personnel en
cause actuellement, comme le souligne la population? Pourquoi se priver de ce
personnel en attendant d'avoir les garderies populaires?
M. BOURASSA : Le ministre a répondu. LE PRESIDENT: Le
député de Saguenay.
Assistés sociaux du Saguenay
M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre
des Affaires sociales. Est-ce que le ministre des Affaires sociales a
été informé que les bureaux locaux du ministère des
Affaires sociales, en particulier les bureaux dans le comté de Saguenay,
ne peuvent pas actuellement répondre aux nouvelles demandes de ceux qui
pourraient se classer comme bénéficiaires sociaux depuis le 1er
décembre? Après informations on nous dit que c'est parce que
l'ordinateur à Québec ne pourrait plus répondre à
ces nouvelles demandes à cause du changement de système. Est-ce
que c'est vrai que ça ne fonctionne plus? Est-ce vrai que les nouveaux
bénéficiaires sociaux devront attendre jusqu'au 20
décembre avant d'obtenir une réponse à leurs besoins?
M. FORGET: Je prends avis de la question, M. le Président.
LE PRESIDENT: Le député de Beauce-Sud.
Produits de l'érable
M. ROY: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
l'Agriculture. Concernant le problème des agriculteurs, des producteurs
agricoles qui ont encore à supporter un million de livres de sirop
d'érable qui n'est pas vendu, est-ce que le ministre de l'Agriculture
pourrait me dire si son ministère a porté une attention
spéciale à ce problème, si le gouvernement a pris des
mesures à ce sujet, et si oui, quelles sont-elles?
M. TOUPIN: Oui, M. le Président, nous portons toujours une
attention spéciale aux problèmes sérieux et nous portons
également une attention à ce problème. Je pense que j'ai
eu l'occasion de discuter assez longuement au téléphone avec le
député de Beauce-Sud de cette question, et je lui avais dit
très clairement que le problème tout compte fait,ne relevait pas
nécessairement de nous, c'est qu'on n'a pas au gouvernemnt d'agence de
vente. On ne peut pas vendre de sirop d'érable. Il appartient à
ceux qui sont propriétaires de trouver des acheteurs. Il appartient
surtout, je pense, aux deux groupes de producteurs impliqués soit
l'un dans le cadre d'une coopérative et l'autre dans le cadre d'un plan
conjoint de s'entendre pour unifier la mise en marché de ce
produit et ainsi parvenir par conséquent à le mettre en
marché sans que les uns et les autres se coupent l'herbe sous le pied en
ce qui a trait au prix. Et quand ce problème sera réglé
entre les deux groupes, nous ne voyons pas d'inconvénient à
intervenir sous quelque forme que ce soit pour la vente de ce produit.
Nous n'avons pas l'intention de nous substituer aux producteurs à
ce chapitre-là, ce sont des organismes qui leur appartiennent et dont
ils se sont dotés pour commercialiser le produit. Il s'agit pour eux de
s'entendre et de se servir de ces organismes.
Pousser plus loin l'action, vous n'hésiteriez pas à nous
accuser de nous mettre le nez où nous n'avons pas d'affaires.
M. ROY: M. le Président, une question additionnelle au ministre.
Depuis notre conversation téléphonique, est-ce que vous avez eu
des demandes, que ce soit de l'Union des producteurs agricoles, du plan
conjoint des producteurs de sucre et de sirop d'érable ou encore de la
Coopérative des producteurs de sucre et de sirop d'érable
à ce sujet? Est-ce que vous avez eu des entrevues? Est-ce qu'il y a eu
des contacts, est-ce qu'il y a eu des rencontres à ce niveau depuis
qu'on s'est parlé au téléphone?
M. TOUPIN: Non, M. le Président, je n'ai eu personnellement aucun
contact ni avec l'administration du plan conjoint des producteurs, ni avec la
coopérative des producteurs. Néanmoins, j'ai entendu dire,
probablement comme vous, à travers les branches, qu'il y avait certains
problèmes mais j'attends qu'on me les soumette, par écrit ou
autrement, ou que des rencontres soient organisées pour que nous
puissions bien les localiser; mais ça me paraît être un
problème purement et simplement de commercialisation.
M. ROY: Une question additionnelle au ministre. Est-ce que le
gouvernement, le ministère de l'Agriculture accepterait de se pencher
d'une façon particulière sur ce problème et d'essayer, par
l'entremise de ses bureaux régionaux ça concerne surtout
la région des Bois-Francs et la région de la Chaudière
d'étudier ce problème et de tenter de trouver des
solutions en vue de le régler avant la nouvelle production, avant la
nouvelle récolte?
Il y a des producteurs qui doivent supporter, M. le ministre,
jusqu'à concurrence de $2,000, $3,000, $4,000 et $5,000 de produits.
C'est assez important si on considère l'envergure de cette industrie
dans plusieurs régions du Québec.
M. TOUPIN: Oui, M. le Président, bien sûr, on se penche sur
ce problème, on essaie de trouver des solutions mais encore là on
ne peut pas remplacer les autres. Des démarches doivent être
faites par les producteurs à la base; si ces démarches ne sont
pas faites, on ne peut pas les faire à leur place. Il faut bien
être réaliste devant des problèmes comme cela. On est
prêt, bien sûr, à regarder dès demain matin comment
on peut commercialiser le produit, trouver des débouchés, etc.,
mais à condition qu'on ait des demandes formelles et des projets
précis.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
Producteurs de porcs
M. LESSARD: M. le Président, puisque le ministre de l'Agriculture
s'occupe de problèmes sérieux, est-ce qu'il a, d'abord, pris
connaissance du fait que les producteurs de porcs n'ont pu se former un plan
conjoint suite à une clause absolument injuste dans la Loi des
producteurs agricoles...
M. MARCHAND: Question principale. UNE VOIX: Question.
M. LESSARD: J'ai dit: Est-ce que le ministre a pris connaissance? J'ai
l'impression que les interrogations, ils ne comprennent pas cela, les
libéraux, M. le Président. Est-ce que le ministre a l'intention
de modifier la Loi des producteurs agricoles, qui exige que près des
deux tiers des agriculteurs se prononcent pour que le référendum
soit valable et, parmi ces deux tiers, 66 p.c. doivent se prononcer
affirmativement? On vient d'avoir un résultat concret en ce qui concerne
les producteurs de porcs qui n'ont pu se former un plan conjoint alors que 62
p.c. des producteurs de porcs ont répondu oui au
référendum.
M. TOUPIN: Je voudrais d'abord souligner, M. le Président, que ce
n'est pas injuste, cet article de la loi; il fut d'abord demandé par les
producteurs il y a déjà de cela plusieurs années. Ils s'en
sont servi pour mettre en place tous les plans conjoints outre celui du porc
qui malheureusement, après deux essais, n'a pas réussi à
réunir suffisamment de suffrages pour être accepté par
l'ensemble des producteurs. Donc, je ne crois pas qu'il y ait là
injustice à l'égard des producteurs. C'est attribuable beaucoup
plus à une forme de mise en marché qui ne parvient pas à
convaincre l'ensemble des producteurs. Les suggestions que me font
présentement les producteurs agricoles ne sont pas de cette nature, ils
ne me demandent pas d'amender la loi pour diminuer à 50 p.c. le chiffre
plutôt que 66 p.c; ce n'est pas ce qu'ils me demandent. Ils me demandent
de regarder ensemble comment on pourrait trouver de nouvelles formules de mise
en marché. Vous aurez pleinement l'occasion d'en discuter, de ces
nouvelles formules-là, lorsque nous apporterons, soit à cette
session-ci ou à l'autre session, le projet de loi sur les amendements
à la Loi des marchés agricoles où on prévoira tous
les mécanismes nouveaux de commercialisation des produits.
M. LESSARD: Est-ce que le ministre pourrait me dire en quoi le
syndicalisme agricole dans ses modalités d'application, en particulier
ces 66 p.c, serait différent du syndicalisme, par exemple, des
travailleurs au Québec où 50 p.c. plus 1 permettent justement
l'accréditation? Est-ce que le ministre...
M. LEVESQUE: Question, M. le Président.
M. LESSARD: ... pourrait nous dire quelle distinction il y a entre le
travailleur...
M. TOUPIN: M. le Président, je voudrais établir cela
clairement. Pourtant, le député de Saguenay devrait le savoir.
Lorsque vous discutez de commercialisation, mettez donc de côté le
syndicalisme agricole; ce sont deux choses différentes. Le bill 64
concerne la profession des agriculteurs et la Loi des marchés agricoles,
qui est une loi essentiellement centrée sur la commercialisation des
produits n'est pas nécessairement une loi du syndicalisme.
C'est une loi de commercialisation. Jusqu'à maintenant, les
producteurs ont toujours bien composé avec cette loi. Tous les plans
conjoints que les producteurs ont voulu se donner dans le passé, ils
sont parvenus à les avoir en vertu de cette loi. Maintenant, ils
considèrent qu'ils devraient regarder d'autres formes d'organisation des
producteurs. Si jamais la loi est amendée, elle ne le sera pas à
ce chapitre, mais à d'autres chapitres ou on ajoutera de nouveaux
articles pour faciliter la commercialisation des produits. Donc, il faut
distinguer très clairement entre la commercialisation et la
syndica-lisation des producteurs agricoles.
M. LESSARD: Une question additionnelle, M. le Président. Est-ce
que le ministre a l'intention de soumettre cette loi avant l'ajournement de
l'Assemblée nationale, c'est-à-dire avant la fin de
décembre?
M. TOUPIN: J'ai déjà déposé en
première lecture, à la dernière session, un projet de loi.
Il est passé une fois en commission parlementaire. Je vous disais,
tantôt, que, si ce n'est pas à cette session, ce sera probablement
l'autre que le projet de loi sera redéposé en première
lecture et qu'on le rediscutera en commission parlementaire.
LE PRESIDENT: Dernière question, l'honorable député
de Lafontaine.
Avions gouvernementaux
M. LEGER: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Transports. Pour quelle raison le ministre des Transports a-t-il maintenu le
statu quo...
M. LACROIX: C'est le temps, si vous voulez avoir des ponts sur les
Iles-de-la-Madeleine.
M. LEGER: Les richesses naturelles des Iles-de-la-Madeleine?
M. LACROIX: Posez donc des questions sur les Iles.
M. LEGER: M. le Président...
M. LACROIX: On va vous descendre des nuages.
M. LEGER: ... pour quelle raison le ministre des Transports a-t-il
maintenu le statu quo et n'a pas rendu plus rigides et précises les
directives sur l'utilisation des avions gouvernementaux on se rappelle
les 14 soleils compte tenu des abus flagrants que j'avais
dénoncés l'année dernière avec preuves à
l'appui? Pour quelle raison le ministre n'a pas émis des directives plus
rigides que celles qu'il y avait l'année dernière?
M. MAILLOUX: M. le Président, l'inventaire des voyages faits dans
les derniers mois me permet de conclure que les directives étaient assez
précises pour qu'elles soient bien entendues par tout le monde.
M. LEGER: Une question supplémentaire, M. le Président. Je
ne sais pas si c'est le scandale ou les directives...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, messieurs !
M. LEGER: M. le Président...
LE PRESIDENT: Posez donc des questions suivant le règlement.
M. LEGER: Elle s'en vient, M. le Président. LE PRESIDENT: Cela va
être si simple.
M. LEGER: J'ai écouté le député des
Iles-de-la-Madeleine qui m'a donné un exemple flagrant. Est-ce que le
ministre peut nous expliquer pourquoi...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LEGER: ... aucune sanction n'est prévue pour les utilisations
abusives des avions, sauf le fait que le monde le sait? Pour quelle raison n'y
a-t-il pas de sanction prévue? Le ministre préfère ne pas
répondre?
M. MAILLOUX: Ma présence au ministère des Transports est
très récente. Je viens de répondre que, dans la liste que
j'ai vue des voyages qui sont faits depuis les derniers mois, cela me semblait
répondre aux exigences de l'arrêté ministériel qui
fixe l'utilisation de ces avions.
LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce qu'on nous permettrait de
revenir au dépôt de documents?
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a consentement, oui?
Dépôt de documents.
DEPOT DE DOCUMENTS (suite) Rapports agricoles
M. TOUPIN: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer deux
exemplaires du rapport demandé relativement aux arrêtés en
conseil adoptés en vertu de la Loi pour augmenter le domaine cultivable
de la province de Québec.
J'ai également l'honneur de déposer deux exemplaires du
rapport demandé relativement aux arrêtés en conseil
adoptés pour réserver des cantons ou parties de cantons en faveur
des sociétés de colonisation. Cela commence à être
moins vrai.
J'ai l'honneur de déposer deux exemplaires du rapport
demandé relativement aux sommes payées en vertu de la Loi des
sociétés de colonisation.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances.
Crédits supplémentaires
M. GARNEAU: C'est un message du lieutenant-gouverneur, signé de
sa main.
LE PRESIDENT: Voici lecture d'un message de l'honorable
lieutenant-gouverneur: "L'honorable lieutenant-gouverneur de la province de
Québec transmet à l'Assemblée nationale les crédits
supplémentaires numéro 2 pour l'année financière se
terminant le 31 mars 1974, conformément aux dispositions de l'article 54
de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, et recommande ces
crédits à la considération de la Chambre."
Signé, Hugues Lapointe, Hôtel du Gouvernement,
Québec, le 6 décembre 1973.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que ces crédits
supplémentaires soient étudiés en commission
plénière, à cette séance ou à une
séance subséquente.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté. Est-ce que vous désirez que je donne
lecture de votre motion?
M. BURNS: Oui, M. le Président.
Motion de M. Lévesque concernant les heures de
séance
LE PRESIDENT: II s'agit d'une motion du leader parlementaire du
gouvernement: "Qu'à l'avenir et jusqu'à l'ajournement de la
présente session pour la période des Fêtes,
l'Assemblée tienne une séance tous les jours de la semaine, sauf
le dimanche, de dix heures jusqu'à minuit, avec suspension des travaux
de treize heures à quinze heures et de dix-huit heures à vingt
heures, et qu'à toutes ces séances, l'ordre des affaires du jour
soit celui qui est prévu pour le mardi par l'article 35 du
règlement; que l'article 174 du règlement soit suspendu et que le
débat prévu aux articles 24 et 78 du règlement se termine
trois heures après l'heure indiquée pour le début de la
séance'..
M. Gérard-D. Lévesque
M. LEVESQUE: M. le Président, il s'agit de la motion
traditionnelle qui nous arrive à la fin d'une session, quelques jours
avant l'ajournement.
M. MORIN: Nous venons de commencer la session !
M. LEVESQUE: Bien, écoutez, il y a eu des élections. Je ne
sais pas si le député est inconscient.
M. le Président, il est normal qu'à ce moment-ci le
gouvernement propose une motion afin d'accélérer les travaux de
la Chambre. Nous avons en effet, au feuilleton et à venir, un train
d'environ 25 projets de loi qui doivent être discutés et nous
voulons donner à tous les députés l'occasion de s'exprimer
s'ils le jugent à propos. Nous croyons qu'il est assez clair que la
session doit se terminer la semaine prochaine, la semaine suivante
étant, comme on le sait, occupée par la fête de Noël,
mardi le 25 décembre. Je crois qu'il est dans l'ordre que nous puissions
disposer des travaux de la Chambre cette semaine et la semaine prochaine.
Cela ne veut pas dire que nous voulions à tout prix utiliser
toutes les heures additionnelles qui sont prévues dans la motion. Mais
il est normal pour le gouvernement de prendre les mesures nécessaires
afin de nous assurer que la population puisse bénéficier des bons
projets de loi présentés par le gouvernement libéral. Je
crois que je manquerais à mon devoir en ne prévoyant pas,
à ce moment-ci, que certaines discussions puissent tramer en longueur.
Nous serions alors privés de lois attendues par le peuple.
Cette motion, comme on le verra, est différente de certaines
motions qui ont déjà été adoptées en cette
Chambre, particulièrement quant aux heures additionnelles
dépassant minuit. On se rappelle, en effet, que de telles motions
comportaient dans le passé un passé pas très
lointain parce qu'on s'en rappelle de part et d'autre la
possibilité de pouvoir siéger aussi longtemps que la Chambre ne
décide pas de s'ajourner, c'est-à-dire qu'on pouvait passer des
nuits blanches. Nous avons, dans cette
motion tenu compte de représentations qui ont déjà
été faites par certains membres de l'Opposition et nous avons
voulu réduire cette possibilité à minuit, sauf
évidemment avec le consentement unanime de la Chambre.
Nous croyons que nous aurons le concours des membres de cette Chambre
et, en particulier, des députés de l'Opposition qui eux aussi,
j'en suis convaincu, veulent voir les travaux de la Chambre
accélérés et voir les lois adoptées sans être
obligés de les remettre à une session ultérieure.
Il y a environ, comme je l'ai mentionné, 25 projets de loi
à l'étude ou qui seront présentés à cette
Chambre. Nous avons voulu déposer la plus grande partie des projets de
loi qui sont prêts. Demain et au cours de la semaine, nous serons en
mesure, tout probablement, de déposer à l'attention, pour
étude, des députés les 25 projets de loi en question.
On sait que le projet de loi no 1, projet de loi relatif aux allocations
familiales, est déjà à l'étude. Bien que nous
soyons tous d'accord sur le bien-fondé de ce projet de loi, sur son
à-propos, sur le principe, etc., on n'a pas encore disposé, en
commission élue, de ses divers articles. C'est donc dire que nous avons,
en plus de ce projet, 24 autres projets de loi environ. Nous croyons que nous
ne faisons que preuve du sens de nos responsabilités en proposant
à cette Chambre cette motion dont je le répète
nous n'aurons pas, possiblement, à tenir compte jusqu'à
ses limites. Je crois bien qu'à certains moments nous verrons que, les
travaux s'accélérant, nous pourrons travailler de la façon
la plus normale possible. A ce moment-ci, à une semaine ou au plus dix
jours de la fin de la présente session, je crois qu'il était de
mon devoir, comme leader parlementaire du gouvernement, de proposer à
cette Chambre l'adoption de cette motion, mais le tout ayant en vue seulement
l'intérêt public.
LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
M. Robert Burns M. BURNS: M. le Président...
LE PRESIDENT: Avec votre permission, est-ce que je pourrais vous
demander si vous parlez au nom de votre parti ou comme leader?
M. BURNS: M. le Président, je parle comme leader, je ne parle pas
comme chef du parti.
LE PRESIDENT: En somme, vous avez droit à 20 minutes.
M. BURNS: Soyons clairs. Je ne prends pas le temps du chef du parti.
D'accord? De sorte que je vous prie, M. le Président, de m'arrêter
si jamais je me rends à 20 minutes d'intervention.
M. LEVESQUE: II va faire, comme les autres, un discours court, bref.
M. BURNS: Toujours!
M. LEVESQUE: Comme les leaders.
M. BURNS: Sûrement. Les leaders ont pris cette bonne habitude, en
Chambre.
M. le Président, je dois dire, au départ, sur cette motion
traditionnelle de fin de session, que ce soit aux fins de session des
Fêtes ou aux fins de session à l'été, que je suis
prêt à admettre un certain nombre de faits pour bien placer le
débat, bien l'engager. Je ne veux pas que mon bon ami, le
député de Bonaventure, s'imagine que je veux l'accuser d'un
certain nombre de choses qui n'effleurent même pas ma pensée
actuellement.
Moi aussi je me souviens, comme il l'a mentionné tantôt, de
l'époque où ce genre de motion, M. le Président,
était adoptée en fin de session pour nous faire siéger
selon le bon vouloir de la Chambre, c'est-à-dire, à toutes fins
pratiques je me rappelle entre autres d'un projet de loi très
important que le ministre des Institutions financières avait
présenté, la Loi de la protection...
M. TETLEY: Elles sont toutes importantes.
M. BURNS: C'est la seule importante que vous ayez
présentée.
M. TETLEY: Elles le sont toutes, les 44.
M. BURNS: C'est pour cela que je m'en souviens.
M. le Président, je me rappelle que lors de l'étude de la
Loi de la protection du consommateur on avait siégé, je pense,
jusqu'à quatre heures du matin. Je me souviens très bien de cette
époque.
M. LEGER: A la même heure que le laitier.
M. BURNS: Je me souviens également et je le dis à
la décharge du leader parlementaire du gouvernement que le
député de Beauce-Sud et moi-même avions fait des
représentations auprès du leader du gouvernement pour que la
motion traditionnelle soit fixée, si vous voulez, au point de vue de
l'heure de l'ajournement, à minuit. Je me souviens également
encore une fois, je suis prêt à lui rendre cette justice
que le leader du gouvernement avait accepté nos recommandations
là-dessus. C'est, dans le fond, cette motion qui nous revient
aujourd'hui, cette motion que déjà, M. le Président, dans
une autre fin de session, nous avons acceptée d'emblée sans
aucune difficulté, sans nous y opposer, sans même demander un vote
et sans même voter contre.
Cependant, autres temps, autres moeurs. Et je pense que les membres de
cette Chambre doivent comprendre que la situation n'est plus
nécessairement la même. Elle ne l'est plus, dans un sens positif
et dans un sens négatif.
Dans un sens positif, il y a actuellement, de façon bien claire,
huit députés de l'Opposition. On ne se le cache pas. Au cas
où quelqu'un n'aurait pas fait le décompte, il y a huit
députés de l'Opposition. Il y en a six de l'Opposition officielle
et deux du Parti créditiste.
De sorte que si véritablement les gens d'en face, tant par les
interventions du premier ministre que par les interventions d'autres personnes
de ce parti, croient véritablement à ce qu'ils disent lorsqu'ils
disent qu'il est nécessaire qu'il y ait une Opposition, que cette
Opposition ait tous les moyens de fonctionner, il va falloir qu'ils le prennent
à compter de cette motion-ci, entre autres seulement.
Je dis que la situation est différente pour bien des raisons.
Même si le nombre absolu des députés de l'Opposition a
diminué de 36 du Parlement précédent à huit
à la présente Législature, il y avait aussi un autre
phénomène qu'il est important de comprendre, et je le dis dans
l'intention de convaincre peut-être un certain nombre de
députés libéraux qui croient encore que c'est vrai ce que
le premier ministre a dit, c'est-à-dire qu'il faut que l'Opposition
s'exprime dans ce Parlement, etc.
La dernière fois vous aviez trois partis d'Opposition, ce qui
fait une situation tout à fait différente de la situation
actuelle. Et c'est ça que je dis qui sont les raisons positives militant
contre l'adoption d'une telle résolution. Quand vous aviez trois partis
d'Opposition, il était fort évident, à certaines
occasions, qu'on pouvait se retrouver avec une espèce de concours de
beauté entre les trois partis d'Opposition en fin de session.
M. LEVESQUE: ... ou le contraire.
M. BURNS: C'est fort possible. Soyons réalistes. Je suis
prêt à admettre ça. Mais vous ne l'avez plus ce
problème. Vous avez un parti reconnu actuellement en Chambre, et vous
avez deux députés d'Opposition qui s'ajoutent aux partis
reconnus. Il n'y a pas de doute.
De sorte que le risque de concours de beauté de fin de session,
il est vous allez l'admettre sensiblement réduit. Il est,
à mon avis, à peu près inexistant. Mais de façon
négative cependant. C'est assez important de voir la différence
que ça peut créer, cette situation.
C'est qu'alors qu'un projet de loi venait devant la Chambre, au cours
d'une Législature antérieure, avec trois partis d'Opposition, il
y avait toujours une possibilité que les députés de
l'Opposition appelés à critiquer ces projets de loi se relaient,
dans le sens que c'était d'abord l'Union Nationale qui critiquait le
projet et ensuite le Ralliement créditiste, et ensuite le Parti
québécois. De sorte que d'une critique à l'autre au sein
de l'Opposition, il se passait au moins deux ou trois interventions en comptant
l'intervention du côté ministériel.
Chose qui risque de ne pas se produire. Je vous donne un exemple
purement et simplement concret : nous avons un certain nombre de projets de loi
qui sont actuellement déposés devant nous. Le leader dit qu'il y
en a à peu près 25 en tout. Je me dis que si cette motion est
acceptée actuellement, il est fort possible que les
députés de l'Opposition, que ce soit les membres du Parti
créditiste ou du Parti québécois, soient forcés de
faire, dans une même journée, avec ce rythme, de six à
sept, huit et même dix interventions différentes sur des projets
de loi.
Il est fort possible que nous ayons des deuxièmes lectures de
projets de loi qui se succèdent au rythme de dix par jour. C'est fort
possible. Ce n'est pas difficile à calculer. Chaque député
qui parle au nom de son parti a droit à une heure. Il est possible
qu'à certains projets de loi le député n'utilise pas son
heure, que le ministre qui soumet le projet de loi ne l'utilise pas.
De sorte qu'il est fort possible aussi que dix projets de loi se
succèdent devant la Chambre au cours d'une même
journée.
Alors, je vous demande, M. le Président, simplement ceci: Si on
fait du travail sérieux ici, si c'est véritablement de la
législation que nous faisons, qui doit, éventuellement,
régir la vie dans certains cas, la vie très intime
de nos concitoyens, n'est-ce pas normal que ces lois soient
étudiées à un rythme beaucoup moins rapide que celui que
je vous décris? Peut-être, vous allez me dire, M. le
Président, que je suis défaitiste quand je dis que nous aurons
peut-être une dizaine de projets de loi dans une même
journée, mais, à écouter le leader parlementaire du
gouvernement, c'est possible que son enthousiasme nous amène à
discuter d'une dizaine de projets de loi dans la même journée.
C'est à regret, remarquez, que je suis obligé de dire cela et que
je n'accommode pas mon bon ami, le député de Bonaventure, mais
nous serons forcés de voter contre cette motion du leader du
gouvernement.
Je vous ai donné des raisons d'ordre général; il y
a aussi, M. le Président, des raisons d'ordre particulier qui font que
nous sommes contre la motion proposée par le leader du gouvernement. Il
est à remarquer d'abord, dans un premier temps, que, dans notre
règlement, le mercredi est la journée on l'appelle comme
ça des députés. Depuis le début de la
session, c'est-à-dire le 22 novembre, il n'y a eu aucune journée
des députés pour une raison, encore une fois je l'admets,
parfaitement acceptable, parfaitement normale. C'est notre règlement, M.
le Président, qui nous dit que, tant que le débat sur le discours
inaugural n'est pas terminé, il n'y a pas de journées des
députés, entre autres.
M. LEVESQUE: Nous n'avons eu que ça, des journées de
députés.
M. BURNS: M. le Président, je parle de la journée des
députés telle qu'on la comprend traditionnellement,
c'est-à-dire la journée des députés de
l'Opposition. Mon bon ami, le député de Bonaventure, je le sais,
le fait exprès pour me faire parler.
M. LEVESQUE: Non, non, tous les députés de l'Opposition
ont parlé.
M. BURNS: Je sais qu'il comprend ce que je veux dire.
M. LEVESQUE: Tous les députés de l'Opposition ont
parlé.
M. BURNS: Je veux dire tout simplement ceci, au cas où des gens
ne comprendraient pas ce que je veux dire: II y a une journée par
semaine que notre règlement réserve aux députés de
l'Opposition, la seule où ils ont l'initiative de présenter des
motions, de présenter des projets de loi. Or, à cause du fait que
le débat sur le discours inaugural ne s'est terminé
qu'après mercredi dernier, il n'y en a pas eu, de ces journées de
députés. La première devait avoir lieu demain, M. le
Président. Nous avons un certain nombre de motions inscrites au
feuilleton, dont une en particulier que nous aimerions voir discutée.
Alors, si cette motion est adoptée, c'est sûr qu'il n'y aura plus
de journées de députés d'ici la fin de la session. On ne
peut pas accepter ça. C'est une autre raison pour laquelle on est contre
la motion du leader du gouvernement.
Egalement, M. le Président, il y a un autre facteur, encore
à caractère particulier. Tout le monde a sans doute
remarqué, au feuilleton d'aujourd'hui, que l'honorable chef de
l'Opposition avait inscrit une motion de censure, qui apparaît en
appendice. Selon notre règlement, normalement, elle devrait être
discutée jeudi prochain, avec l'avis d'un jour franc, demain
étant le jour franc. Cette motion est, à notre avis, d'une
importance capitale puisqu'elle concerne tout le problème de
l'énergie.
M. LEVESQUE: Est-ce que le député me permet de
l'interrompre...
M. BURNS: Certainement.
M. LEVESQUE: ... juste un instant? Je voudrais demander à la
commission parlementaire des affaires sociales de se réunir au salon
rouge immédiatement pour la poursuite de l'étude du projet de loi
sur les allocations familiales.
M. BURNS: M. le Président, on a commencé le débat
sur cette affaire, je suggère qu'on va...
M. LEVESQUE: Cela avait été ajourné à quatre
heures, c'est simplement pour le rappeler.
M. BURNS: Voyez-vous, M. le Président, je n'aurai pas d'objection
à ce que la commission siège si ça peut aider à
avancer les travaux. Je vais vous montrer, justement, qu'on est prêt
à vous aider pour que ça marche vite, rondement et rapidement.
Mais vous venez justement de donner un exemple assez concret, c'est qu'il y
aura sans doute un député du Ralliement créditiste qui
devra s'absenter et sans doute un député du Parti
québécois, le député de Chicoutimi, qui devra se
rendre à la commission.
Là, on ne sera plus huit dans l'Opposition, on va se retrouver,
à partir du moment où ça siège, à six dans
l'Opposition.
Je suis d'accord c'est ce que j'essaie de vous expliquer
que si vous voulez vraiment fonctionner avec une Opposition présente, il
y a des méthodes autres que la motion qui est mise sur la table. En tout
cas, M. le Président, je dis tout simplement que je n'ai pas d'objection
à ce que la commission siège immédiatement.
M. LEVESQUE: Ils sont partis.
M. BURNS: M. le Président, j'étais à dire qu'une
des raisons d'ordre particulier qui nous faisaient nous opposer à ce
genre de motion, c'est que le chef de l'Opposition a déposé une
motion de censure contre le gouvernement. C'est un des droits des
députés de l'Opposition. Cette motion, qui devrait normalement
être discutée jeudi, touchera à un problème qui est
d'une actualité vraiment criante, le problème de
l'énergie.
Or, avec la motion que le leader nous soumet aujourd'hui, nous serons
limités, en vertu des dispositions de la motion qui se
réfère à l'article 174, à ne tenir qu'un
débat se terminant trois heures après le début de la
séance, c'est-à-dire, à toutes fins pratiques, un
débat de deux heures sur un problème actuel, sur un
problème d'importance, tel que celui de l'énergie, de la crise du
pétrole, si vous voulez.
M. le Président, comment peut-on accepter, sans que des raisons
importantes nous soient amenées du côté du gouvernement,
comment peut-on accepter, avec la difficulté que comporteront des
séances qui commencent à dix heures le matin et qui se terminent
à minuit le soir, c'est-à-dire quatorze heures de temps de
disponibilité à l'Assemblée nationale, qu'en plus de
ça on réduise nos possibilités d'intervention comme
députés d'Opposition? On les réduit au niveau du
débat de censure. On les réduit également, en vertu
toujours de cette motion, du fait qu'on limite aussi les débats en vertu
de l'article 78, c'est-à-dire des débats qui pourraient
être faits à cause de situations d'urgence et
d'intérêt public.
Encore une fois, on nous limitera, s'il y a
une situation d'urgence, à avoir un débat qui ne durera
que trois heures après le début de la séance, ce qui donne
à peu près deux heures, deux heures et quart une fois la
période de question utilisée. On nous enlève
également le droit de faire ce qu'on appelle un minidébat
amendement qui avait été apporté à nos
règlements par le président de l'Assemblée nationale, le
député de Laval, et sur lequel nous avons toujours
été d'accord le soir, si nous ne sommes pas satisfaits de
réponses apportées à nos questions. Encore là,
c'est une autre façon que l'Opposition possède actuellement,
aussi petite numériquement parlant qu'elle puisse être, de
s'exprimer et encore une fois on nous enlève ces choses sans nous donner
de véritables bonnes raisons pour le justifier.
M. le Président, nous sommes d'avis que de la législation
importante si on prend le temps de se pencher dessus, ça doit
être important; si on prend le temps de l'examiner, de la faire passer
à travers un certain nombre de stades tels que la première
lecture, la deuxième lecture, la commission et finalement la
troisième lecture et si on prend la peine dans notre règlement de
dire qu'entre chaque stade de l'étude d'une législation il doit
se passer au moins une journée, c'est-à-dire que la
première, la deuxième et la troisième lectures ne doivent
pas se faire la même journée, si on prend la peine de faire
ça, c'est peut-être qu'on juge ça important, la
législation qu'on fait ici c'est dans la
sérénité la plus totale que cela doit se faire...
Si elle doit se faire dans la sérénité, ce n'est
sûrement pas en siégeant de dix heures le matin à minuit le
soir. Je le sais et j'ai compris le leader du gouvernement qui nous a dit:
Peut-être que je ne l'utiliserai pas. Cela semblait nous indiquer qu'on a
besoin d'être bons garçons, dans l'Opposition, parce que,
autrement, il va l'utiliser.
M. LEVESQUE: Ce n'est pas cela...
M. BURNS: Je pense bien que ce n'est pas son intention...
M. LEVESQUE: ... c'est difficile, pour moi, d'évaluer le temps
qu'utilisera l'Opposition pour chacun des projets de loi.
M. BURNS: ... mais ça pouvait sembler cela. Je pense bien que ce
n'est pas son intention mais, en ce qui nous concerne, nous avons l'intention
d'utiliser tout le temps nécessaire pour critiquer, de façon
constructive et positive, les attitudes du gouvernement pour lui montrer les
endroits où il commet des erreurs. Je ne pense pas qu'on nous facilite
la tâche en nous obligeant, si vous voulez, à être
disponibles en Chambre quatorze heures par jour. Cela, M. le Président,
vous ne pourrez pas m'en convaincre et, surtout, le leader du gouvernement ne
pourra pas me convaincre non plus de l'aspect essentiel de cette motion.
J'ajouterai, entre autres choses, un certain nombre de faits qui sont
assez importants, c'est-à-dire qu'on n'en est rendu qu'à la
neuvième séance. Si je regarde mon feuilleton d'aujourd'hui,
c'est le feuilleton no 9 en date du 11 décembre, c'est la
neuvième séance depuis que cette Législature a
commencé à siéger, de sorte que je trouve qu'on
s'énerve un peu vite à l'égard de cette motion. D'autre
part, admettant qu'il est possible qu'en fin de session il soit
nécessaire... Combien de temps?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Une minute, à peu
près.
M. BURNS: II me reste une minute, bon. Admettant qu'il soit possible
qu'en fin de session il soit nécessaire de faire cela mais que ce ne
soit pas nécessaire tout de suite, et offrant d'avance au leader du
gouvernement ma collaboration la plus entière pour siéger
en vertu du règlement il peut siéger le lundi, il n'y a pas de
problème, c'est déjà prévu pour
siéger le maximum de temps possible, je lui mentionne justement que je
ne veux pas que l'Opposition se fasse dire : Soyez bons garçons et si
vous êtes bons garçons, on ne l'utilisera pas.
M. le Président, je veux apporter un amendement à la
proposition du leader du gouvernement. Je vais proposer...
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. BURNS: Je vais proposer, M. le Président...
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Le leader parlementaire, question de
règlement.
M. LEVESQUE: Si je comprends bien la teneur du règlement de
l'Assemblée nationale, à l'article 84, paragraphe 3, on dit que
la motion de suspension de l'application d'une règle ne peut être
ni amendée ni divisée. M. le Président, je crois que c'est
clair, à moins que je ne me fourvoie.
M. BURNS: M. le Président, il s'agit actuellement d'une motion de
fonctionnement. C'est une motion purement et simplement au sens du
règlement. On nous dit dans quelles normes, dans quel cadre on devra
fonctionner. Je ne vois pas pourquoi je ne vous suggérerais pas, M. le
Président, que certaines de ces normes-là ne seraient pas
acceptables, que certaines de ces normes ne devraient pas être
changées, modifiées. Ce ne sont pas des motions typiques de
celles visées à l'article 84, c'est-à-dire que...
M. LEVESQUE: C'est en vertu de l'article 84 que je présente la
motion.
M. BURNS: M. le Président, il me semble que de la façon
dont est présentée la motion, on devrait être capable de
faire un amendement. M. le Président vous nous dites qu'à compter
de maintenant... Pourquoi la Chambre ne penserait-elle pas que c'est à
compter de plus tard qu'on doive siéger comme cela? Qu'est-ce que vous
voulez, M. le Président? Justement, on me signale qu'il ne s'agit pas
d'une motion du type...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. BURNS: M. le Président, juste une seconde. Me
permettez-vous?
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Je suis prêt à rendre ma
décision. Je ne puis, en vertu de l'article 84, recevoir l'amendement
que se propose de présenter le député de Maisonneuve.
M. MORIN: M. le Président, j'admets que...
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): Ma décision est rendue.
M. LEVESQUE: La décision est rendue.
M. MORIN: Oui, mais à l'égard de toute la motion parce que
la seconde partie de la motion ne porte pas sur une suspension du
règlement, c'est une modification du règlement.
M. LEVESQUE: C'est évident qu'il y a une suspension du
règlement lorsque...
M. MORIN: Ah! non.
M. LEVESQUE: Voyons.
M. MORIN: ... pas une suspension.
M. LEVESQUE: C'est une suspension des règles, autrement on
n'aurait pas apporté une motion.
M. MORIN: Ce n'est pas une suspension du règlement, je
regrette.
M. LEVESQUE: Voyons.
M. BURNS: La fin du règlement et, plus, de nouvelles
règles, M. le Président.
M. MORIN: La fin du règlement. Ce sont de nouvelles
règles, M. le Président: Et que le débat prévu aux
articles 24 et 78 du règlement se termine trois heures après
l'heure indiquée pour le début de la séance. Ce n'est pas
une suspension, c'est une modification du règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne):
Malheureusement, je pense que ceux qui étaient à
l'Assemblée nationale auparavant se souviennent que plusieurs
décisions similaires ont été rendues par le
président de l'Assemblée nationale, et je dois m'y conformer. Je
n'accepte pas d'amendement, quel qu'il soit, à la motion proposée
par le leader parlementaire du gouvernement.
M. LEGER: M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Beauce-Sud.
M. LEGER: M. le Président, j'ai demandé la parole
avant.
M. ROY: Non, non, je m'étais levé. J'ai dit, M. le
Président.
M. LEGER: Est-ce sur le règlement ou sur...
M. ROY: Non, non, c'est sur la motion même.
LE VICE-PRESIDENT (M. Lamontagne): J'ai reconnu le député
de Beauce-Sud. Après.
M. Fabien Roy
M. ROY: M. le Président, inutile de vous dire que j'ai
été des plus surpris de retrouver, cette année, cette
motion omnibus dans le feuilleton de l'Assemblée nationale. Le
gouvernement, par l'entremise de cette motion, veut répéter les
exploits qu'il avait faits dans le passé, à l'effet de suspendre
certaines règles de procédure, afin de limiter les droits, les
pouvoirs et les privilèges de l'Opposition.
M. le Président, on se rappellera qu'au cours des autres sessions
il y avait à l'Assemblée nationale du Québec trois partis
d'Opposition, soit l'Union Nationale, le Ralliement créditiste et le
Parti québécois. Il y avait 36 députés de
l'Opposition sur 108, c'est-à-dire un tiers des députés
étaient de l'Opposition. Les conditions que nous avions avant la
présente session n'existent plus. Je me demande comment il se fait que
le gouvernement a osé, dans les circonstances, présenter sa
petite motion omnibus.
M. le Président, je serais porté à penser, pour
donner tout le bénéfice du doute à notre bon ami, le
leader du gouvernement, qu'il s'agit d'une erreur. Le connaissant, s'il
était à notre place, alors que nous serions, nous, à sa
place, il me semble que je l'entends déjà, dans son
exposé, dans ses propos, crier à la guillotine, crier au
bâillon, crier à l'arrogance du gouvernement, pour ne pas dire le
culot du gouvernement. Je ne voudrais pas prêter ces propos à mon
bon ami, le leader du gouvernement. Je crois plutôt que le gouvernement
vient de commettre une erreur ou, encore, le gouvernement a peur de son
équipe. Le gouvernement a
peut-être peur des nouveaux élus de l'Assemblée
nationale, qui, comme nous, ne sont pas au courant des projets de loi que le
gouvernement dépose, qui n'ont pas un mot à dire sur les projets
de loi. Les projets de loi sont préparés dans les cabinets des
ministres, par les conseillers juridiques, passent par l'entremise du
comité de législation et arrivent devant l'Assemblée
nationale. Les députés élus dans chacun de leur
comté, avec toute la sincérité et la bonne foi que je peux
leur accorder, sont comme nous, ils sont intéressés à
participer et à étudier la législation que le gouvernement
présente, de façon à être en mesure de
représenter, de la meilleure façon possible, et le plus
adéquatement, leurs électeurs, ce qui est chose normale.
Lorsqu'on se fait élire par une population, c'est normal qu'on
représente cette population, une fois élu. C'est normal qu'on
prenne les intérêts de cette même population.
Dans les circonstances, je ne parle pas seulement des
députés de l'Opposition. Que les députés
ministériels, les simples députés, les nouveaux
arrivés à l'Assemblée nationale puissent prendre part
à la législation que le gouvernement présente devant cette
Chambre. C'est pour ça que je dis que le gouvernement fait une erreur,
ou il a peur de sa propre équipe. Je n'ose pas croire, connaissant
l'intelligence du leader du gouvernement, qu'il peut prétendre qu'on
peut faire des "filibusters" à huit et bloquer le gouvernement, au cours
des derniers jours qui nous restent.
M. le Président, ce n'est certainement pas un manque de
collaboration de notre part qui aura empêché le gouvernement de
suggérer que la Chambre ajourne ses travaux à dix heures de la
matinée et nous aurions accepté de bonne grâce de
collaborer.
Nous étions même prêts à accepter de venir
siéger le samedi parce que nous comprenons également que le
gouvernement, à la veille de la période des Fêtes, veuille
faire le plus de travail possible pour adopter le plus de lois possible, mais
dans des conditions normales et non pas dans les conditions comme celles que le
gouvernement nous propose aujourd'hui.
J'entendais le leader du gouvernement nous parler d'efficacité,
tout à l'heure. Ce n'est certainement pas un critère
d'efficacité qui guide le gouvernement dans cette motion; c'est un
critère de rapidité. Il faut faire vite, vite, vite avant qu'on
ait le temps d'informer la population, avant que ses propres
députés aient le temps de prendre connaissance des lois et avant
que l'Opposition ait le temps d'étudier cette législation de
façon à faire, non pas des "filibusters", mais son devoir compte
tenu des responsabilités que lui a accordées la population. Je
dis que vite et bien, cela ne marche pas ensemble. Le gouvernement ne peut pas
sérieusement présenter son menu législatif de la
façon dont il le présente présentement face au nombre de
membres de l'Opposition extrêmement limité que nous sommes.
L'Opposition a quand même des obligations. L'Opposition a quand
même des devoirs et des responsabilités. Nous avons deux
possibilités auxquelles l'Opposition se réfère
habituellement pour être en mesure de faire son devoir, de parler au nom
de la population du Québec également et de faire connaître
l'autre côté de la médaille, de même que les
revendications de cette population. Parce que les députés de
l'Opposition, surtout en ce qui nous concerne, nous, les députés
créditistes, ont les pieds et les mains libres. Nous sommes libres de
représenter nos électeurs et de dire à cette Chambre ce
que nos électeurs...
UNE VOIX: Libres de Dupuis!
M. ROY: Le mercredi est la journée des députés
où l'on peut discuter de questions d'intérêt public. Alors,
il est coupé, parce que le gouvernement a décidé, dans son
arrogance: Non, vous n'en parlerez pas. La journée des
députés, on vous l'enlève.
Il y a une deuxième possibilité de soulever certains
problèmes à l'Assemblée nationale, c'est l'article 174.
Lorsque nous posons une question à un ministre et que nous ne sommes pas
satisfaits de la réponse ou encore lorsque le règlement ne nous
permet pas d'élaborer plus longtemps sur le sujet, nous pouvons nous
prévaloir de l'article 174 et faire, ce qu'on appelle, un
minidébat, le soir, à la fermeture de nos travaux parlementaires.
Le député qui a posé la question a droit à cinq
minutes et le gouvernement a droit à cinq minutes pour répondre;
un minidébat de dix minutes, la seule chose que l'Opposition avait entre
les mains pour être capable de revendiquer et de parler au nom d'une
certaine partie de la population du Québec.
Encore une fois, on aurait pu l'exclure de cette motion bâillon.
Je ne vois pas pourquoi dans une motion de ce genre, même si
c'était nécessaire, on enlève les privilèges
prévus à l'article 174 de notre règlement. Sur ces points,
je pense que le gouvernement a fait une erreur monumentale aujourd'hui, une
erreur de stratégie et une erreur dont il devra répondre devant
la population du Québec.
Le gouvernement veut hâter les travaux et il n'est même pas
prêt. Sa législation n'est pas déposée devant la
Chambre. Nous avions quatre dépôts de projets de loi avant
aujourd'hui, quatre! Aujourd'hui, on nous annonce six nouveaux projets de loi,
ce qui fait dix. Le gouvernement nous en annonce 25 à venir que nous ne
connaissons pas.
M. LEVESQUE: Incluant les dix que vous avez en main.
M. ROY: C'est encore beaucoup trop, M. le Président. Cela fait
quinze autres projets de loi que personne ne connaît, même pas les
députés ministériels, les nouveaux élus. Et on
arrive
pour nous faire siéger dans cette situation.
Je dis au gouvernement ceci: C'est une violation des droits de la
Chambre.
M. LEVESQUE: Vous charriez.
M. ROY: Les députés sont des législateurs. Ils sont
mandatés comme tels.
M. LEVESQUE: Soyez sérieux.
M. ROY: Le leader du gouvernement se lèvera tantôt; il a un
droit de réplique sur sa motion. Je comprends que c'est passablement
agaçant, ce que je lui dis à l'heure actuelle, mais il y a des
choses qui doivent être dites. C'est une violation flagrante des droits
de l'Assemblée nationale du Québec et des droits d'une partie de
l'électorat, d'une partie des membres de la Chambre, c'est-à-dire
toute l'Opposition. Si les députés sont des législateurs
et c'est ce que l'on répète un peu partout, que le
rôle du député, c'est d'être avant tout un
législateur il faut quand même qu'ils aient le temps et les
moyens d'étudier de façon objective, de façon intelligente
la législation que le gouvernement présente.
Mais, M. le Président, de la façon dont le gouvernement
procède encore une fois cette année, compte tenu du nombre
limité de représentants de l'Opposition, le gouvernement abuse de
sa grande majorité, abuse de sa force et brime les droits de la
population du Québec dans un régime qu'on osait, que nous osions,
M. le Président, encore considérer comme un régime
démocratique.
M. le Président, on se rend compte d'une chose, et
malheureusement c'est un fait: la Chambre, le Parlement n'est pas souverain. On
parle beaucoup de souveraineté au Québec. Je pense que la
première chose et la chose la plus importante, c'est que la Chambre,
l'Assemblée nationale soit souveraine. On se rend compte, M. le
Président, que la Chambre est contrôlée par
l'Exécutif, qui devrait être le mandataire de la Chambre. C'est
l'inverse qui se produit. La Chambre est contrôlée par
l'Exécutif et l'Exécutif est contrôlé par le parti.
Or, on sait que le parti est contrôlé par la caisse
électorale, dans l'intérêt des fournisseurs.
DES VOIX: Ah! Ah!
M. ROY: On pourra rire, M. le Président, mais c'est
malheureusement vrai. C'est malheureusement vrai. La Chambre est
contrôlée par l'Exécutif et l'Exécutif, on sait que
c'est contrôlé par le parti, la caisse électorale et les
fournisseurs de la caisse électorale. M. le Président, on aura
beau rire dans certaines banquettes ministérielles, mais vos
électeurs le savent fort bien; non seulement les nôtres, mais les
vôtres le savent. Ils savent que ce sont des choses qui existent.
M. le Président, en ce qui nous concerne, nous n'accepterons pas
cette motion. Nous ne pouvons pas l'accepter parce que si nous acceptions cette
motion, nous ne serions pas honnêtes à l'endroit des
électeurs, à l'endroit de ceux qui nous ont mandatés pour
venir à l'Assemblée nationale. On ne peut pas travailler dans les
circonstances et dans les conditions dans lesquelles le gouvernement place les
députés de l'Opposition. Encore une fois, je le
répète à ces députés, nouveaux
arrivés ici, à l'Assemblée nationale, qui sont
intéressés et qui ont leur mot à dire dans la
législation.
M. le Président, le gouvernement profite aussi du fait que les
media d'information ne peuvent quand même pas consacrer tous leurs
journaux, tous leurs bulletins de nouvelles pour informer la population sur la
législation qui est adoptée à l'Assemblée
nationale. Comme les espaces sont limités, il est évident qu'on
fait d'une pierre deux coups. Cela nous permet d'adopter beaucoup de lois sans
que la population s'en rende compte, sans que la population le sache. L'on voit
des avocats dans des bureaux de députés, venir nous dire ceci:
Aujourd'hui, il n'y a pas un avocat, dans la province de Québec
et le rôle de l'avocat est d'informer la population sur les lois
qui est en mesure de suivre l'évolution législative de
l'Assemblée nationale du Québec...
M. HARDY: Ce ne sont pas des avocats forts.
M. ROY: Et comme pas un seul citoyen ne peut ignorer la loi, M. le
Président. Vous voyez de quelle façon on traite la population du
Québec dans des situations de ce genre.
M. le Président, en ce qui nous concerne, nous-je ne pense pas
que l'honorable leader du gouvernement puisse avoir peur que nous fassions un
"filibuster". On ne veut même pas nous reconnaître comme parti
à l'Assemblée nationale. Pourtant, il y a 15 p.c. de la
population qui n'est pas représentée, qui n'accepte pas la
formule présentée par le gouvernement et qui n'acceptait pas non
plus la formule présentée par l'Opposition officielle, une
population du Québec qui se situe au centre. M. le Président,
cette population n'est pas représentée à
l'Assemblée nationale.
Je constate, M. le Président, que le gouvernement n'a même
pas encore osé nous dire et admettre que nous pourrions participer et
faire connaître notre point de vue sur les motions de troisième
lecture. En ce qui nous concerne, n'importe quel député, dans
l'Assemblée nationale du Québec, peut nous empêcher
d'intervenir sur des motions de troisième lecture, au nom de nos
électeurs. On n'a pas choisi un statut de député
indépendant, M. le Président. Nous nous sommes
présentés sous une étiquette, pour une formation politique
et nous avons été élus et mandatés comme tels.
Je dis qu'à l'heure actuelle nous sommes brimés dans nos
droits, nous sommes brimés
dans nos privilèges et on nous empêche d'être ce que
nous devrions être en premier lieu, des législateurs, puisqu'on
n'a même pas le droit de parler sur des motions de troisième
lecture, sur certains rapports ou sur certaines motions qui peuvent être
discutés en Chambre.
M. le Président, on n'a pas non plus de budget de recherche, ce
dont nous aurions besoin.
LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! A l'ordre! J'ai
déjà permis un léger péché à
l'honorable député de Beauce-Sud. On ne peut pas lier la
reconnaissance d'un parti politique à une motion de suspension des
règles qui est devant la Chambre. Le fait qu'il n'ait pas le droit de
parler en troisième lecture n'a aucune relation avec la motion qui est
devant la Chambre actuellement. Qu'elle soit acceptée ou rejetée,
dans la situation actuelle, le règlement doit être suivi. Et
là, je l'arrête immédiatement lorsqu'il veut me parler des
budgets de recherche des partis reconnus.
M. ROY: Ce que je voulais dire, c'est simplement ceci...
LE PRESIDENT: Vous n'avez pas le droit de le dire.
M. ROY: ... c'est qu'en ce qui nous concerne, nous devons faire notre
travail, notre devoir, et comme nous ne pouvons pas avoir l'aide que nous
devrions normalement avoir, ceci nous demande des heures de travail
additionnelles, et la motion que vient de nous présenter le gouvernement
complique encore davantage notre travail. M. le Président, je m'excuse
si j'ai pu violer un peu le règlement de l'assemblée nationale,
sachez bien que c'était involontairement, c'était surtout pour
faire ressortir un principe, pour démontrer au gouvernement qu'il nous
bâillonnait, qu'il se foutait tout simplement de l'Opposition de
l'Assemblée nationale du Québec.
Encore une fois, j'espère que le gouvernement se ressaisira et
acceptera de reconnaître l'erreur qu'il est en train de commettre
aujourd'hui, parce qu'il a encore la possibilité de retirer sa motion.
Et c'est pourquoi, en terminant parce que je suis bien conscient que
l'Opposition ne pourra pas renverser le gouvernement, même si elle fait
un front commun je demande au gouvernement de retirer cette motion que
nous considérons comme une violation flagrante à l'endroit des
parlementaires, des législateurs élus par la population du
Québec.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
M. Marcel Léger M. LEGER: M. le Président, je pense bien
qu'on ne pourra pas renverser le gouvernement; on peut quand même essayer
de le renverser par nos arguments. Le leader du gouvernement ne semble pas
être convaincu.
Le leader du gouvernement nous a présenté sa motion en
disant que c'était une motion traditionnelle. Traditionnelle, ça
veut dire qu'auparavant c'était une chose normale qu'on acceptait dans
les autres législatures. Mais la tradition est revenue au bipartisme, et
la situation n'est pas la même.
Et proposer, à ce stade de nos travaux parlementaires, une motion
visant à permettre des heures supplémentaires, et même
laissant une discrétion au gouvernement pour user et abuser de
l'Opposition, je pense que c'est inadmissible. C'est une motion bâillon,
en d'autres termes. Le gouvernement avait peut-être raison, dans
l'ancienne Législature, de présenter, une dizaine de jours avant
la fin prévue d'une session, une motion de ce style parce qu'il avait
devant lui trois partis d'Opposition qui entre eux, souvent, malheureusement
s'enfargeaient, nous amenaient des arguments qui poussaient le gouvernement
à répondre à l'un et à l'autre, et souvent
amenaient les partis d'Opposition à se disputer entre eux, et ça
pouvait retarder les travaux de l'Assemblée nationale.
Ce n'est plus le cas. Nous avons maintenant, d'un côté de
la Chambre, un parti qui prône l'indépendance, et, de l'autre
côté, un parti qui prône le fédéralisme.
Alors, il n'y a que...
Je vous remercie de l'appui de ce côté-ci de la
Chambre.
M. VEILLEUX: C'est pour le fédéralisme.
M. LEGER: Cela s'en vient tranquillement. Il y a quand même des
éléments chez vous, je présume, qui sont avant-gardistes
et qui vont avancer tranquillement.
M. VEILLEUX: Que le député de Lafontaine ne se fasse pas
d'illusion.
M. LEGER: Je pense que la situation n'est pas du tout la
même...
M. VEILLEUX: On est ici pour mieux les écraser.
M. LEGER: ... et que l'argument massue du député de
Bonaventure qui est d'accélérer les travaux ne tient pas devant
les faits. Et c'est pour ça que j'essaie de lui dire que c'est
plutôt par des arguments renversants que je voudrais que le
député de Bonaventure retire sa proposition. A ce jour, nous
siégeons habituellement seize heures par semaine. Vous avez
déjà calculé ça, M. le Président, seize
heures par semaine, alors que le règlement lui permet, sans faire de
motion qu'on appelle de fin de session ou motion bâillon tout
simplement de siéger jusqu'à trente heures par
semaine.
En effet, le lundi c'est possible de siéger six heures sans faire
d'accroc au règlement. Le mardi on siège cinq heures
actuellement, on pourrait siéger six heures sans faire d'accroc au
règlement. Le mercredi, on siège trois heures, on pourrait
siéger six heures.
Jeudi, on siège cinq heures; on pourrait siéger six
heures. Vendredi, on siège trois heures; on pourrait siéger six
heures. Cela veut dire qu'on pourrait faire 30 heures par semaine, plutôt
que 16 heures, selon les besoins, l'urgence et l'importance des lois que le
gouvernement veut nous présenter.
M. HARDY: C'est le règlement Léger, ça, un nouveau
règlement?
M. LEGER: On sait fort bien qu'il n'y a que très peu de lois que
le gouvernement peut juger importantes. Je sais que le gouvernement en a une
qu'il trouve urgente et il veut se servir du bâillon pour la faire
adopter. C'est justement cette loi qu'on a déposée aujourd'hui
sur l'augmentation du salaire des juges. Il s'est dit: On va épuiser
l'Opposition en la faisant siéger à des heures inacceptables,
insupportables et on va lui passer ça entre les pattes. Il veut, d'un
autre côté, empêcher qu'on discute, à l'occasion de
la journée des députés, d'une autre motion très
importante qui est déposée et qui aurait pu être
discutée le jour des députés, le mercredi; c'est celle
présentée par le chef de l'Opposition officielle qui parle de
réduire la concentration des media d'information et spécialement
de convoquer la commission sur la liberté de la presse. On ne veut pas
discuter de ces choses-là; on veut permettre à Power Corporation
d'acheter le Soleil d'en dehors, pendant qu'on ne peut pas en discuter. C'est
une raison, c'est un motif qui fait que le gouvernement...
UNE VOIX: Hors d'ordre!
M. LEGER: ... nous présente cette motion-bâillon. M. le
Président. C'est la raison majeure qui fait que le député
de Bonaventure nous présente cette motion-bâillon.
Nous aurions pu obtenir la même accélération, 30
heures par semaines au lieu de 16, et n'avoir aucune épée de
Damoclès au-dessus de la tête en disant par cette motion: Nous
allons siéger jusqu'à minuit, demain matin, samedi, etc., pour
essayer d'avoir l'Opposition par la fatigue et l'épuisement, en la
dispersant dans les différentes commissions.
M. le Président, un parti qui se targue d'être un parti
démocratique, quand on regarde une telle motion, on ne peut faire
autrement que conclure qu'il a des intentions très peu avouables
derrière la tête. Je vais vous donner un exemple, M. le
Président, pour montrer jusqu'à quel point cette motion est
inacceptable. Nous avons commencé à siéger le 22 novembre;
depuis cette date, il n'y a eu que 30 heures de travaux parlementaires. Par
exemple, on a siégé le 22 et, immédiatement ç'a
été le cocktail et, le lendemain, on retourne chez nous. Il n'y a
pas eu de session le lundi. Si on était tellement pressé... Ce
n'est pas notre faute si les élections ont eu lieu le 29 octobre. Vous
avez décidé de faire ça en pleine période
où, habituellement, l'Assemblée siège.
M. BACON: C'était pas mal comme "timing".
M. LEGER: On a eu des élections dans ce temps-là. Alors
vous avez perdu un mois où vous auriez pu faire de la
législation.
M. BACON: Ça faisait des mois que vous en vouliez.
M. LEGER: Un gouvernement qui avait trois ans et demi seulement de
mandat...
M. BACON: Ça faisait des mois que vous en vouliez.
M. LEGER: ... a fait cela en pleine période où il devait y
avoir de la législation. S'il avait quelque chose de sérieux
à présenter...
M. BACON: Vous en vouliez, des élections! M. LEGER:...
c'était de le faire.
M. BERTHIAUME: Vous en vouliez, des élections.
M. LEGER: On a préféré faire une élection
parce qu'on voyait différentes choses...
M. BACON: Parlez-nous de votre budget.
M. LEGER: ... se passer sur le plan électoral. Comme le disait le
député de Beauce-Sud, les gens qui dirigent le Parti
libéral ne sont pas les gens de cette Chambre. Les études avaient
été faites.
M. BACON: On voulait siéger avant l'an 1.
M. LEGER: C'était préférable de faire une
élection plutôt que de la législation. A ce
moment-là, on a perdu un temps énorme. Il aurait pu y avoir un
mois de législation; on aurait même pu déposer, M. le
Président, dans les premiers jours...
M. BACON: Le budget.
M. LEGER: ... de la session, immédiatement des lois. On en a
déposé une, deux, trois. On parle de 25 lois qu'on a à
étudier et on dit qu'elles sont importantes. Comment se fait-il M. le
Président, qu'après tant de jours on en a juste 18 de
déposées? Cela aurait pu être déposé les
premières journées et étudié rapidement. Il y avait
55 heures, M. le Président...
M. BACON: On va vous laisser tout le temps.
M. LEGER: ... on a perdu 25 heures. On aurait eu le double de temps,
sans règlement de censure et sans motion de blâme, M. le
Président, parce qu'on aurait pu siéger le 22, le vendredi, le
lundi, mardi, mercredi, jeudi, selon les règles normales de
procédure sans se servir de cette motion bâillon.
Si on veut réellement, comme le disait avec un sourire un peu
narquois le député de Bonaventure, faire de la bonne
législation libérale, il faut que cette bonne législation
libérale soit mêlée avec une bonne critique de l'Opposition
du Parti québécois. Il faut lui permettre de travailler dans un
climat et dans une situation normale et non pas dans une situation absolument
inacceptable, afin qu'un parti d'Opposition puisse remplir son rôle d'une
façon sérieuse, systématique, en apportant justement
à cette bonne législation libérale tous les correctifs qui
s'imposent et, souvent, une opposition systématique à des lois
qui ne sont pas acceptables par une bonne partie de la population.
M. le Président, jusqu'ici, je ne pense pas que nous ayons fait
d'opposition systématique, sauf pour des points précis où
on veut signifier au gouvernement qu'il a devant lui une Opposition
déterminée, une Opposition qui veut jouer son rôle, et
féliciter le gouvernement quand c'est le temps. D'ailleurs, je l'ai fait
quand j'ai félicité notre ministre des Affaires municipales, mais
son premier ministre n'a pas voulu l'appuyer. Quand c'est le temps de le
condamner, on est là pour le faire et quand c'est le temps de faire des
amendements, on le fait. Cela se fait dans un temps normal, dans des heures
normales et non pas avec une épée de Damoclès sur le
tête, à des heures inacceptables.
Je me rappelle quand le ministre des Institutions financières a
adopté la loi 45; est-ce acceptable, cela a fini à cinq heures du
matin? Je suis arrivé chez moi en même temps que le laitier, M. le
Président. On essaie de régler des problèmes alors que
tout le monde est fatigué, épuisé, et ce sont ces lois qui
vont être adoptées et pratiquées, qui vont être en
vigueur, que les citoyens vont subir, M. le Président. Et les juges, les
avocats vont avoir des problèmes avec ces lois, parce que nous, les
législateurs, on va siéger à des heures inacceptables,
dans des conditions absolument pas normales.
M. le Président, je pense que le geste posé par le
député de Bonaventure est un abus d'un système
électoral vicié, qui a permis qu'avec 30 p.c. du vote on ait
seulement six députés. Avec six députés...
M. LEVESQUE: M. le Président, la pertinence du débat.
M. LEGER: ... nous ne pouvons pas jouer le rôle de l'Opposition si
on ne respecte pas les règlements habituels, les règlements
normaux. C'est peut-être un peu difficile à six
députés d'être continuellement présents, mais je
doute fort qu'avec les règlements anormaux qu'on veut nous proposer par
cette suspension des règlements, les 102 députés
libéraux vont être présents pendant tout ce temps. Je vous
mets au défi de les voir, les 102. On ne les a pas vus une seule fois,
les 102, présents pour voter. Il n'y a eu aucun vote jusqu'ici où
il ne manquait pas de 25 à 30 députés libéraux.
M. BERTHIAUME: Combien y a-t-il eu de votes?
M. LEGER: Alors, quand on veut exiger d'un parti d'Opposition
d'être présent continuellement en Chambre à des heures
inacceptables...
M. BERTHIAUME: Combien y a-t-il eu de votes? Démagogue!
M. LEGER: M. le Président, que le ministre s'empresse
immédiatement d'exiger que les 102 députés libéraux
viennent dormir s'ils le veulent, mais qu'ils soient présents en Chambre
pour assister...
UNE VOIX: A l'ordre! A l'ordre!
M. LEGER: ... à ce qui va se passer dans une période
où on a une législation si importante à
présenter...
M. BERTHIAUME: Démagogue!
M. LEGER: Je pense que s'il y a... Pardon?
UNE VOIX: Tu veux y goûter?
M. LEGER: Je pense que si le gouvernement veut faire sauter les
règlements quand ça lui nuit et quand ça le
dérange, c'est parce que c'est un gouvernement faible, qui n'est pas
capable de venir à bout d'une Opposition avec les lois
régulières. Quand on essaie de se battre contre quelqu'un puis
qu'on voit qu'on ne gagne pas, on essaie de prendre des méthodes
supplémentaires parce qu'on ne se sent pas assez fort. Si, à 102,
vous n'êtes pas assez forts pour faire face à six
députés je voudrais quand même parler aussi des deux
députés du Parti créditiste si vous ne vous sentez
pas assez forts pour recevoir des motions de censure, ça dénote
très bien ce qui va se passer dans les trois prochaines années.
Cela prendra des moyens anormaux pour venir à bout d'une Opposition qui
s'en va en montant. C'est la raison pour laquelle je vous dis que c'est une loi
inacceptable, une loi-bâillon. Le parti de l'Opposition ne peut pas
accepter cette chose. La population va juger de la faiblesse d'un gouvernement
de 102 députés qui ne peut même pas les avoir
présents en Chambre pour voter et qui veut exiger que les six
députés du parti de l'Opposition officielle et les deux
députés indé-
pendants du Parti créditiste soient présents constamment,
tous et toujours sur la sellette.
M. le Président, la population vous jugera, et elle a
déjà commencé.
LE PRESIDENT: Le député de Saguenay. UNE VOIX: Debout.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: Oui debout, M. le Président, debout, vous autres les
libéraux aussi à un moment donné, debout les
libéraux pour faire valoir à l'Assemblée nationale
certaines choses, qui sont importantes. Vous autres, la seule chose que vous
avez à faire, c'est de rester... Oui, M. le Président, justement
on va en parler, de la motion. La seule chose que vous avez à faire en
cette Chambre, c'est de rester assis sur vos bancs ou bien dormir à
l'extérieur de la Chambre. Regardez la représentation
libérale ici dans cette Chambre actuellement, M. le Président,
à peine 20 députés libéraux...
M. BERTHIAUME: Vous n'êtes pas facile à endurer.
M. LESSARD: Je comprends...
M. VEILLEUX: Une question de privilège, M. le Président.
On ne peut pas dormir avec les bavures qu'on reçoit dans le dos.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je demanderais au
député de Saguenay de s'adresser à la
présidence.
M. LESSARD: D'accord, M. le Président...
M. BURNS: Sur la question de règlement.
LE PRESIDENT: II n'y a pas de question de règlement.
M. BURNS: J'en soulève une, M. le Président.
LE PRESIDENT: Ah! bon.
M. BURNS: Je vous la soumets en tout respect, M. le Président. Si
on veut véritablement qu'il n'y ait pas ce genre de débat, comme
celui qu'on vient de voir entre le député de Saguenay et le
député de Saint-Jean, je pense que le député de
Saint-Jean, entre autres, devrait lire, tranquillement pas vite, l'article 26
et le respecter. S'il veut intervenir dans le débat, qu'il se
lève et qu'il vous demande la parole pour intervenir
régulièrement dans le débat. Ceci vaut pour n'importe qui
du côté ministériel.
M. VEILLEUX: Vous autres aussi.
M. LEVESQUE: M. le Président, parlant sur la question de
règlement. Vous vous êtes aperçu vous-même, et nous
avons tous vu, que le député de Saint-Jean ne s'est levé
qu'après la provocation du député de Saguenay. C'est le
député de Saguenay, M. le Président, qui, au tout
début de son intervention, s'est tourné vers les
députés libéraux...
M. BURNS: C'est lui qui est intervenu.
M. LEVESQUE: ... pour les insulter bassement.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: Et chaque fois qu'il fera cela, M. le Président, il
peut s'attendre que quelqu'un se lèvera...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je me suis rendu compte qu'il y
avait eu provocation un peu des deux côtés. Je demanderais aux
honorables députés de respecter le droit de parole de ceux qui
l'ont.
M. LESSARD: M. le Président, la provocation, je le dis, est venue
du député de Saint-Jean.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! M. LESSARD: M. le
Président...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Je vous l'ai dit. Voulez-vous revenir à
la motion, s'il vous plaît?
M. LESSARD: Je reviens à la motion, M. le Président et,
d'ailleurs, je parlais de la motion. C'est facile, pour les
députés libéraux... M. le Président, une minute; on
va se parler et je vais expliquer pourquoi je suis contre.
LE PRESIDENT: Attention, à l'ordre! Allez-vous parler de la
motion?
M. LESSARD: Oui, M. le Président, je parle contre la motion.
LE PRESIDENT: Bon, allez-y!
M. LESSARD: Chaque fois qu'on nous a présenté une motion
comme celle-là, on a essayé de négocier avec le Parti
libéral. Nous avons réussi, au moins, à limiter les
conséquences néfastes des motions qui nous étaient
présentées auparavant. En effet, maintenant, on nous dit qu'au
moins les travaux de l'Assemblée nationale vont s'arrêter à
minuit. C'est un appel aux députés libéraux, justement.
Qu'on prenne donc conscience qu'on est venu ici, nous de l'Opposition, pour
faire un travail sérieux, pas un travail d'assistance ou d'absence
à l'Assemblée nationale. On n'a pas le choix, on est
obligé d'être là et on va être là.
Pour être là, il ne s'agit pas seulement six
députés péquistes et deux députés
créditistes, ça représente huit députés
d'être présents physiquement; il faut aussi, nous,
contrairement encore à la majorité des députés
libéraux, être présents qualitativement, il faut être
là avec des dossiers sur les différents projets de loi qui nous
sont présentés. Le leader parlementaire du gouvernement nous dit
qu'il y a des lois importantes à présenter à cette
Chambre. Je suis d'accord avec lui, il y a des lois importantes. C'est
justement lorsqu'une loi est importante que nous avons besoin, nous de
l'Opposition, de tous les avantages du règlement. Le règlement,
pourquoi a-t-il été fait? Il n'a pas été fait
seulement pour être utilisé en cas de panique, pour être
suspendu; il a été fait justement pour permettre à chacun
des députés de cette Chambre, tant les députés
libéraux, qui ont des revendications peut-être sérieuses
à faire sur les projets de loi, qu'aux députés de
l'Opposition, de faire leur travail sérieusement.
Or, à chaque fois qu'on nous a présenté cette
motion, c'est là qu'on se faisait passer des lois à la vapeur et
des lois sérieuses, des lois importantes. Je ne voudrais, M. le
Président, que vous citer un exemple: toute la question concernant
Rayonier-Québec. Cela a été adopté dans une nuit du
mois de juillet. Je me rappelle avoir discuté de cette loi-là
jusqu'à quatre heures moins cinq du matin avec le ministre des Terres et
Forêts alors que vous, les députés libéraux,
étiez à l'extérieur de cette Chambre et que vous dormiez,
dans l'ensemble. C'est cela qui se passe. Je comprends les
députés et je ne les attaque pas, M. le Président.
M. VEILLEUX: II attaque.
M. LESSARD: Je comprends les députés libéraux, je
les comprends et je les plains donc à part ça. Je comprends
qu'ils trouvent ça tellement plate en cette Chambre ces gens. Je
comprends que ces gens n'ont pas d'intervention à faire...
UNE VOIX: C'est plate. M. VEILLEUX: La motion. M. HARDY: La motion.
M. LESSARD: Oui, mais je comprends pourquoi les députés
libéraux sont d'accord sur cette motion.
M. HARDY: Si on avait une bonne Opposition.
M. LESSARD: Pour eux cette motion ce n'est pas important. Mais nous
autres, dans l'Opposition, c'est important. C'est pendant cette période,
au moment où on nous a passé, par exemple, une motion comme
celle-là, qu'on a discuté non seulement ITT-Rayonier mais qu'on a
discuté, par exemple, certaines lois antisyndicalistes du gouvernement
actuel. Mais encore là, nous autres de l'Opposition, on devait
être là. Dans ce temps, au moins on était, je pense, 36 ou
38 députés, mais là on est huit députés de
l'Opposition. Non seulement vous êtes 102, non seulement vous avez la
force majoritaire grossie par la distorsion électorale, d'accord...
M. HOUDE (Abitibi-Est): La qualité aussi.
M. LESSARD: Mais, au moins, qu'on nous laisse les instruments
nécessaires, les instruments dont on a besoin pour faire notre travail.
Il faut aussi non seulement étudier le projet de loi interne qu'on nous
présente, mais il y a certains dossiers qui sont connexes à ces
lois. Ces dossiers, il faut, nous autres, en prendre connaissance,
contrairement encore à certains libéraux, ce n'est pas leur
faute, qui laissent comme ça voter des projets de loi, parce que,
justement, à cause du nombre, ils ne sont pas directement actifs
à l'intérieur des discussions.
M. le Président, des règlements c'est fait pour être
suivis surtout lorsqu'une Opposition a été, par le vote du 29
octobre, réduite aussi simplement que c'est le cas actuellement à
huit députés. Essayez donc au moins, si vous avez la force de la
majorité, de comprendre que nous autres on a un travail à faire
et les règlements nous permettent de faire ce travail, mais pour autant
que les règlements sont respectés. Pourquoi la panique, M. le
Président? A la fin de la session, au mois de décembre, on dirait
que les libéraux sont pris de panique. Pourquoi? Après
décembre, il y a encore janvier, on est prêts, nous autres,
à revenir ici en cette Chambre, si ce sont des projets de loi
importants, pour discuter des projets de loi importants de ce gouvernement. Il
me semble qu'il n'y a pas de tradition qui dise qu'on doit
nécessairement commencer la session en février ou en mars.
Pourquoi devrait-on prendre un repos d'un mois et demi, après
l'ajournement de décembre? Moi, je ne vois aucune raison qui permette
aux libéraux de paniquer, au gouvernement de paniquer et de nous
présenter ce règlement qui va absolument à l'encontre des
intérêts de la population, parce que c'est nous autres, qu'on le
veuille ou pas, qui avons été délégués par
la population, huit députés, pour surveiller ce gouvernement.
C'est là l'un des rôles importants dans le système
parlementaire, mais il faut avoir des instruments pour le faire. Il faut
être capable de le faire, non seulement qualitativement mais physiquement
aussi. Je comprends qu'on va peut-être nous dire: II ne s'agit pas pour
le gouvernement d'utiliser toutes ces heures qui nous seront disponibles. Mais
que le gouvernement, avant de présenter une motion comme
celle-là, commence donc par nous prouver qu'il veut travailler. Le
gouvernement, en vertu de l'article 30, a toutes les possibilités pour
nous faire siéger le lundi. Pourquoi le gouvernement, à partir du
29
novembre, n'a-t-il pas utilisé ces possibilités? Non, M.
le Président, parce que, comme le disait le leader parlementaire du
gouvernement, c'est qu'on a des lois importantes, on a des lois importantes
qu'on veut voter à la vapeur, on a des lois importantes qu'on ne
voudrait pas trop faire connaître à la population. Il faut les
multiplier et les voter dans les quantités de lois qu'on a, en
particulier l'augmentation des salaires des juges. On sait que là on va
l'utiliser le règlement, on va l'utiliser la motion qui nous est
soumise, actuellement, pour faire passer ça. Bien nous, on dit: Non.
Personnellement, j'ai toujours été, en principe, opposé
à une telle motion. Lorsque vous avez travaillé, M. le
Président, au code Lavoie, vous avez quand même conservé
ces règlements que l'on veut abolir. Vous avez conservé les
articles 24 et 78. L'article 78, c'est un article qu'on a même
ajouté pour permettre aux députés, lorsqu'ils ne sont pas
satisfaits d'une réponse à une question, d'intervenir. On a la
journée du mercredi qui est une journée importante pour les
députés de l'Opposition. En tout cas, on veut en faire une
journée importante. Pourquoi bloquerait-on l'Opposition dans son
travail? Pourquoi utiliserait-on comme cela, à chaque session, un
règlement comme celui-là pour nous empêcher de faire notre
travail? Est-ce qu'on aurait peur de cette petite Opposition? Est-ce qu'on ne
serait pas assez de 102 députés libéraux?
M. VEILLEUX: Non.
M. LESSARD: Le député de Saint-Jean répond non. Si
le député de Saint-Jean répond non, qu'il parle donc
contre la motion qui nous est présentée. Le député
de Saint-Jean pourrait être à notre place. Je comprends, au point
de vue idéologique, qu'il est contre ce pourquoi l'on se bat, d'accord,
mais que le député de Saint-Jean se place donc, par exemple, si
la situation était renversée...
M. VEILLEUX: Impossible.
M. LESSARD: II est possible que cela soit renversé un jour ou
l'autre.
M. VEILLEUX: II parle d'une chose impossible.
M. LESSARD: Que le député de Saint-Jean se place donc dans
notre situation, où nous avons chacun quatre ministères à
surveiller, à surveiller non seulement au niveau des crédits mais
à surveiller aussi dans les lois que chacun de ces ministres
présente...
M. VEILLEUX: A la pêche et à la chasse.
M. LESSARD: Je regrette, M. le Président, je dois dire au
député que depuis 1970 mes parties de pêche ont
été fort limitées contrairement probablement au
député de Saint-Jean. Je pense bien que le député
de Saint-Jean a juste à vérifier...
M. VEILLEUX: La chasse.
M. LESSARD: ... dans les Débats, depuis 1970, et il va
s'apercevoir que je suis intervenu passablement plus souvent que lui à
l'intérieur des débats.
M. VEILLEUX: M. le Président, question de privilège.
M. LESSARD: M. le Président...
M. VEILLEUX: Question de privilège, M. le Président.
M. LESSARD: ... qu'il explique sa question de privilège.
M. VEILLEUX: M. le Président, question de privilège. Quant
à intervenir comme intervient le député de Saguenay...
M. LESSARD: M. le Président, il n'y a pas de question de
privilège...
M. VEILLEUX: ... il est bien mieux de rester assis et de ne pas
intervenir.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! J'ai eu l'impression que la question
de privilège aurait soulevé un débat et je vous remets la
parole.
M. LESSARD: Alors, M. le Président, j'ai l'impression que ce
n'était pas une question de privilège, l'article 49.
UNE VOIX: Une directive.
M. LESSARD: A notre sens, il n'y a aucune raison qui justifie cela. Si,
par exemple, il y a des projets de loi qui viennent, pourquoi a-t-on
retardé à ce jour pour nous dire qu'il y avait des projets de
lois importants? Pourquoi n'a-t-on pas utilisé tous les instruments qui
sont prévus par les règlements à ce sujet-là?
Pourquoi utiliser une motion traditionnelle, qu'on va adopter? Je sais qu'on va
l'adopter mais c'est à cause du nombre. On va se faire écraser
par le nombre. Mais cela n'aura pas pour autant justifié ce gouvernement
de présenter une motion comme celle-là. C'est strictement
l'utilisation du bâillon vis-à-vis de l'Opposition. C'est cela que
l'on veut faire. C'est utiliser l'épuisement des députés
pour faire adopter des projets de loi d'importance. C'est là qu'on se
fait passer des bateaux. C'est normal, cela m'est arrivé à
quelques reprises, certaines personnes viennent me voir dans mon comté
et me disent: Comment se fait-il que vous avez laissé passer cela? Bien,
il faudrait se le demander et expliquer à la population de quelle
façon on utilise tous les
instruments possibles du nombre, tous les instruments possibles du
règlement pour nous faire voter des choses comme celles-là, faire
voter des choses d'importance.
Comme on nous enlève nos outils, comme on nous enlève nos
instruments, que voulez-vous qu'on fasse? On n'a pas le choix. On est
obligé de tourner les pages, M. le Président, sans être
capable de prendre véritablement connaissance en profondeur des
dossiers, comme cela est nécessaire pour une Opposition qui se veut
efficace et qui veut travailler de façon sérieuse. On nous
enlève ces outils.
Mais on se demande, devant cela, M. le Président, si le
gouvernement est sérieux, si ce n'est pas un gouvernement qui voit une
mutliplication, à un moment donné, de différentes choses,
une multiplication de projets de loi, une multiplication d'interventions par
l'Assemblée nationale, mais pas plus que cela. Le premier ministre
disait au cours de la campagne électorale: Nous avons adopté 400
projets de loi. Lesquels? Peut-être 400 projets de loi, mais est-ce que
ce sont des projets de loi sérieux?
M. le Président, si ce sont des projets de loi sérieux, il
me semble...
M. VEILLEUX: Nommez-les!
M. LESSARD: Probablement que le député de Saint-Jean
serait bien embêté de les nommer, M. le Président.
Probablement qu'il serait bien embêté. Oui, oui, M. le
Président, mais faites appliquer l'article 26. D'accord?
LE PRESIDENT: A l'ordre! Vous savez qu'actuellement je tente par tous
les moyens possibles de respecter votre droit de parole.
M. LESSARD: D'accord, M. le Président. Je comprends parfaitement
votre situation, M. le Président, et je sais que vous devez
malheureusement intervenir après que c'est fait. Mais c'est d'ailleurs
la troisième fois que le député de Saint-Jean
intervient.
LE PRESIDENT: Vous lui rendez bien la monnaie, par contre.
M. VEILLEUX: Oui.
M. LESSARD: M. le Président, c'est moi qui ai la parole.
LE PRESIDENT: Bon, allez, continuez.
M. LESSARD: J'ai le droit, M. le Président, par votre
intermédiaire, de parler au député de Saint-Jean.
M. le Président, on n'accepte pas ces méthodes. On les
accepte de moins en moins, depuis le 29 octobre. Il est vrai qu'avec un certain
nombre de députés, comme on le disait, avec trois oppositions, il
pouvait y avoir des pertes de temps considérables. Ce n'est plus le cas,
M. le Président. Mais on faisait, à ce moment-là, notre
travail aussi et on a l'intention de continuer à le faire, n'en
déplaise aux députés libéraux. Mais on va
être obligé de le faire à huit et le faire à huit,
c'est plus difficile que de le faire à 36. Le faire à huit, cela
nous oblige, contrairement à certains libéraux, à limiter
considérablement nos nuits, M. le Président. Justement, en nous
faisant siéger, figurez-vous, du lundi au samedi, de dix heures du matin
jusqu'à minuit, quand je vous pose la question, M. le
Président, mais, par votre intermédiaire je veux la poser aux
députés libéraux aurons-nous le temps,
jusqu'à la fin de la session, jusqu'à l'ajournement,
peut-être le 21 décembre d'étudier
sérieusement ces projets de loi? Quand, M. le Président je
comprends que les députés libéraux ne connaissent pas
cela, des dossiers nous, de l'Opposition, aurons-nous le temps d'aller
voir, au niveau des dossiers sérieux préparés par certains
fonctionnaires du gouvernement ou préparés par d'autres, les
connotations du projet de loi, les conséquences peut-être
néfastes, mais aussi les conséquences positives du projet de loi?
On va être obligés de travailler en pleine nuit, M. le
Président, nous autres. On va être obligés de travailler de
minuit jusqu'à cinq ou six heures du matin. Cela, les
députés libéraux, M. le Président, ne semblent pas
en avoir conscience.
M. LEVESQUE: Mais vos recherchistes?
M. LESSARD: M. le Président, des recherchistes, c'est là
pour préparer des dossiers, d'accord, mais les dossiers doivent
être assimilés par des députés qui doivent venir
ici, en cette Chambre.
M. LEVESQUE: C'est là, le problème. C'est là!
M. BACON: C'est l'assimilation qui est longue!
M. VEILLEUX: L'assimilation!
M. LESSARD: M. le Président, est-ce que vous pourriez demander,
encore une fois, au député de Saint-Jean de suivre l'article
26?
M. LEVESQUE: Ce serait peut-être une excellente occasion pour dire
au député de Saguenay que son temps est expiré.
M. LESSARD: M. le Président, est-ce que mon temps est
expiré? Je surveillerai le député de Saint-Jean. S'il
intervient à nouveau, M. le Président vous l'avez averti
deux fois comme j'ai déjà été suspendu de
mon droit de parole, vous appliquerez vis-à-vis du député
de Saint-Jean les mêmes procédures. D'ailleurs, je suis
assuré que vous le ferez, M. le Président. Merci.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M. SAMSON: M. le Président, je désire remercier mes
honorables collègues de cette manifestation à mon endroit, les
remercier de leurs applaudissements. J'espère qu'ils sauront applaudir
également à la fin de mon discours.
De toute façon...
UNE VOIX: On est moins sûrs. M. LEVESQUE: ... au début.
M. BIENVENUE: Le député est sympathique.
M. SAMSON: ... je n'ai pas l'impression que les arguments que j'ai
à apporter contre cet amendement vont leur plaire à un tel point
qu'ils voudront m'applaudir à la fin de mon discours.
Ce que je trouve curieux malgré que je m'y habitue un peu,
parce que depuis quelques années je siège en cette Chambre
c'est qu'au moins deux fois par année nous revoyons cette motion
omnibus, deux fois par année nous avons à discuter de cette
motion, deux fois par année nous nous y opposons, et deux fois par
année on se fait battre par le gouvernement qui l'applique quand
même.
Ceci nous amène à dire au gouvernement que, même si
nous savons à l'avance que toute l'argumentation possible et valable que
nous amenons ne suffit pas à lui faire comprendre que, dans un
système parlementaire, nous devons reconnaître non seulement des
droits, mais que nous devons les respecter en pratique aussi, le gouvernement
libéral ne semble pas considérer toute l'importance qu'il doit
donner à notre système parlementaire. Et chaque fois que
l'occasion lui en est donnée, il profite de la situation pour user de sa
force, et c'est ce qui est mauvais. Je pense que si nous avons une fois,
sérieusement, à discuter de la possibilité et de la
nécessité de reconnaître et de respecter le système
parlementaire, c'est cette année que nous devons faire nos preuves.
C'est cette année que nous devons permettre que le système
parlementaire se manifeste, ou bien on fait comme d'habitude, on laisse faire,
on abuse de la situation et de moins en moins nous pourrons dire que nous avons
un vrai système parlementaire, et malheureusement de plus en plus la
population aura probablement raison de penser que nous nous dirigeons au
Québec vers une dictature, au lieu d'un système
parlementaire.
Que ça presse énormément, à la veille de
Noël, de déposer 25 projets de loi, que ça presse à
un tel point qu'on veuille suspendre des articles du règlement et qu'on
veuille à l'avenir obliger tous les députés à
siéger à compter de dix heures le matin à minuit le soir,
peut-être que la population ne sait pas exactement ce que ça veut
dire siéger de dix heures du matin à minuit le soir. Il serait
peut-être bon de donner de plus amples explications.
Quand on oblige un député à être ici à
dix heures le matin, et qu'il ne peut repartir avant minuit le soir, ça
veut dire qu'avant d'arriver à nos sièges à
l'Assemblée nationale, il faut au moins passer deux heures dans nos
bureaux pour préparer le travail de la journée, pour
étudier les reportages des journaux pour être au courant de la
situation provinciale et nationale, pour être au courant des nouvelles.
Il faut savoir ce qui se passe à l'extérieur de la Chambre. Cela
nous oblige à préparer les interventions que nous aurons à
faire. Je ne sais pas si vous le savez, M. le Président, mais en tout
cas plusieurs d'entre nous ne logent pas à l'intérieur des murs
de l'Assemblée nationale. Cela veut dire que nous devons quand
même circuler à travers les rues de la ville pour nous rendre
à nos différents logements.
Cela veut dire que si on veut arriver ici pour dix heures du matin,
faire deux heures de bureau avant d'entrer en Chambre, il faut partir de chez
nous à six heures et sept heures le matin. Et lorsque nous terminons
à minuit, je pense que...
M. BACON: Vous restez loin.
M. SAMSON: M. le Président, ça me déçoit
énormément d'entendre les remarques que je viens d'entendre de
députés libéraux. Avec tout l'effort pour les faire
comprendre, je pense que même des enfants comprendraient facilement et
eux ne comprennent pas encore. M. le Président, ce sont des membres de
votre groupe, je fais appel à vous. Pour tenter de les amener à
mieux comprendre, donnez-leur des cours, M. le Président. Je sais que
vous, vous avez, M. le Président, par votre âge surtout, une
grande expérience de la vie et vous saurez vous en servir positivement
à l'endroit de ces nouveaux venus qui ne semblent pas encore comprendre
le système parlementaire.
M. le Président, j'en étais à vous dire que si on
laisse l'Assemblée nationale à minuit il n'y a personne d'entre
nous, parmi ceux qui veulent bien faire leur travail évidemment
vous aurez compris ça, vous, M. le Président qui part
à minuit juste des bureaux; on sort de là souvent à une
heure du matin. Je pense que nous sommes tous des humains et que nous avons
tous besoin, aussi, d'une période de repos. Si la situation était
urgente, j'ouvre une grande parenthèse pour le dire au leader du
gouvernement, je ne parlerais pas de cette façon. Le leader du
gouvernement, comme mes autres collègues libéraux qui
siègent en cette Chambre qui étaient là avant la
dernière élection savent qu'à l'occasion de
périodes d'urgence nous n'avons jamais, quant à nous du Parti
créditiste,
refusé notre collaboration. A l'occasion d'une période
d'urgence, quand on nous a demandé de siéger jusqu'à sept
heures du matin, nous l'avons fait et nous ne nous sommes pas sauvés
devant nos responsabilités.
Il faut cependant que nous fassions remarquer que, s'il y a des
périodes d'urgence, il y a d'autres sortes de périodes. Je ne
considère pas que le dépôt de 25 lois du gouvernement
constitue de ce fait une période d'urgence. Ce n'est pas parce que le
gouvernement a décidé de déposer 25 lois... Pour
l'information des nouveaux venus, les députés libéraux, si
vous ne le savez pas il est temps qu'on vous le dise, des ministères il
y en a plusieurs. Et ils s'arrangent toujours, à l'ouverture d'une
nouvelle Législature, pour déposer des projets de loi, même
s'ils n'ont pas besoin de les discuter immédiatement; ça fait
bien, ça parait bien au feuilleton, ça remplit et ça jette
de la poudre aux yeux. Vous le saurez dans un an ou deux ans, vous verrez que
c'est toujours la même chose. A l'ouverture d'une session, on nous bloque
le feuilleton de projets de loi. Mais, M. le Président, pour le
bénéfice de ceux qui sont nouvellement arrivés parmi nous,
nous leur ferons connaître l'expérience des autres.
L'expérience des autres, c'est que, lorsque nous arrivons au mois de
mai, généralement on nous amène cette motion sous
prétexte qu'il y a urgence, et pourtant on n'ajourne jamais avant le 14
juillet, qui est la fête nationale des Français et la fête
de notre premier ministre; c'est son jour d'anniversaire. C'est
généralement le jour que l'on choisit pour terminer la
session.
On n'a rien contre ça, parce qu'on en profite, nous de
l'Opposition, pour lui exprimer nos souhaits. Mais on pourrait terminer le
même jour en n'ayant pas à utiliser cette motion, vous savez cette
motion qui nous pousse à siéger sous vapeur. Il y a une
deuxième période de l'année où on nous amène
cette motion; habituellement, quand il n'y a pas d'élections
générales dans le mois d'octobre, on nous amène cette
motion dans le mois de novembre, un mois et demi à deux mois avant la
fin de la session, comme quoi, M. le Président, le gouvernement semble
mal à l'aise devant le règlement de la Chambre. Le
règlement de la Chambre, M. le Président, ce petit livre vert que
j'ai ici, semble être un règlement qui dérange le
gouvernement car il donne apparemment trop de droits aux députés
de l'Opposition. Imaginez-vous, là-dedans on va jusqu'à nous
donner le droit de parole une fois de temps en temps. Imaginez-vous donc, c'est
inconcevable, M. le Président; ça dérange donc ce
gouvernement qu'on donne le droit de parole à l'Opposition.
Alors, qu'est-ce qu'on fait? Quand on arrive vers la fin d'une session,
on dit: Ils l'ont eu trop, le droit de parole, puis on va leur couper
ça. On va leur couper le sifflet, en bon Canadien, et puis on nous le
coupe, à part de ça, le sifflet.
M. le Président, je vais vous dire une chose, c'est qu'il va y en
avoir d'autres jours après Noël. Noël, M. le Président,
ce n'est pas la fin du monde. Ce gouvernement agit tout comme s'il n'y avait
rien après les Fêtes, tout comme si, après les Fêtes,
personne ne pouvait travailler. Pourtant, dans ma région, les mineurs,
qui vont travailler à 3,500 pieds sous terre pour gagner leur vie,
entrent dans la mine le jour de Noël comme le lendemain de Noël. On y
va à la sueur de son front pour gagner sa vie. Pourquoi, nous, parce
qu'on est des députés ou vous, parce que vous êtes 102 de
la dernière pluie libérale, vous ne voudriez pas travailler dans
le mois de janvier ou encore dans le mois de février?
On oblige l'Opposition à passer sous le rouleau à vapeur,
mais, M. le Président, il n'y a pas de bonnes raisons. Sous
prétexte que l'Opposition utiliserait peut-être les derniers jours
qui restent pour faire un "filibuster"? M. le Président, c'était
bon avant les dernières élections, ça, quand nous
étions 36, trois douzaines dans l'Opposition. C'était le bon
vieux temps, n'est-ce pas? C'est disparu, ça! Quand on nous accusait de
faire un "filibuster", malgré qu'on était 20 à 25 de moins
qu'on aurait dû être, quand même là, c'est un peu
vrai, on en faisait. On pouvait peut-être faire un peu de "filibuster",
mais, aujourd'hui, c'est changé.
Le seul groupe qui peut faire un "filibuster" en cette Chambre, c'est le
groupe libéral. Ce sont eux qui le font, le "filibuster". Vous l'avez vu
à l'occasion du discours inaugural. Nous autres, les pauvres membres de
l'Opposition, à huit, on a fait notre possible. On n'a même pas pu
prendre un tiers du temps qui a été utilisé par la Chambre
à ce moment-là. Est-ce que le leader de la Chambre a cru bon de
demander à ses députés, à ce moment-là, de
sacrifier leur droit de parole pour donner plus de temps avant les Fêtes?
Mais non! On les a laissés aller. Charrions, faisons un "filibuster"
contre l'Opposition, puis, la semaine prochaine, on leur passera le rouleau
à vapeur pour les retourner chez eux, les gars de l'Opposition. C'est
comme ça qu'on nous a traités!
Bien oui, le rouleau à vapeur. Savez-vous, M. le
Président, une chance que j'ai pris la parole; il y en a quelques-uns
qui sont rentrés, mais ils n'étaient qu'une vingtaine de
libéraux tantôt, malgré que vous êtes 102. Qu'est-ce
que vous allez faire avec ça? Laissez-les ici, emmenez-les travailler.
Laissez-les à l'ouvrage, puis vous n'aurez pas besoin d'une motion
spéciale, vous n'aurez pas besoin d'une motion de bâillon, c'est
ça.
Nous ne sommes que huit dans l'Opposition, puis le gouvernement sent le
besoin d'utiliser sa force, d'utiliser ce genre d'abus de pouvoir, parce que
c'est de l'abus de pouvoir, pour nous présenter 25 lois en nous disant:
On vous amène ça à la vapeur. Ce n'est même pas de
la vapeur; on nous donne ça à la mitrailleuse, les lois, de ce
temps-là, 25! Regardez les lois qu'on
dépose. Est-ce qu'il y a quelque chose de pressant
là-dedans? Il y a des choses que ça fait tellement longtemps
qu'elles sont demandées que, lorsque les gens auront obtenu leur loi,
ça va tellement les surprendre que ce ne sera plus temps. Ils ne
voudront plus s'en servir, tellement ça prend du temps.
C'est l'été dernier qu'on aurait dû nous
présenter ça. Mais non, ça presse, on n'a pas
siégé depuis le mois de juillet. On a repris le 22 novembre, mais
vous auriez pu nous faire siéger au mois d'août. Vous auriez pu
nous faire siéger au mois de septembre. Vous auriez pu nous faire
siéger au mois d'octobre; cela aurait été plus positif que
votre campagne électorale à ce moment-là. Eh non! M. le
Président, qu'est-ce qui obligeait ce gouvernement-là à
faire des élections au mois d'octobre? Il avait un mandat jusqu'au mois
d'avril. Vous n'aviez qu'à prendre vos responsabilités. Vous
n'aviez qu'à vous tenir debout, à vous rendre à la fin
d'avril. A ce moment-là, on aurait siégé, puis on n'aurait
pas besoin de la motion, du rouleau à vapeur, ni de la mitrailleuse dans
le dos pour travailler, pour adopter des lois pour notre province de
Québec.
Bien non, c'est ça, on en profite. Vous ne croyez pas à
ça, vous, M. le Président. Je sais que vous n'avez pas le droit
de parler.
Mais, si vous aviez le droit de donner votre opinion, je sais bien que
vous iriez voir le leader du gouvernement et que vous lui diriez: II n'y a pas
nécessité d'apporter une motion comme cela, il n'y a qu'un parti
de l'Opposition de reconnu; l'autre, vous ne l'avez pas reconnu encore. Vous
leur diriez cela, M. le Président. Vous leur diriez en même temps:
Reconnaissez-les au moins d'abord avant de leur passer le rouleau à
vapeur. Donnez-leur d'abord des outils avant de les leur enlever. Mais non, on
n'a pas cru bon de nous donner ces outils-là encore. Nous
siégeons ici, deux députés créditistes qui
représentons chacun 150,000 électeurs qui ont voté
créditiste au Québec. Savez-vous que si on en exigeait autant que
cela de chacun de vos députés libéraux, M. le
Président...
M. VEILLEUX: II y a des étrangers chez vous.
M. SAMSON: ... vous et moi, on se retrouverait presque seuls à
l'Assemblée nationale? Mais non, ils ne représentent pas
grand-chose...
M. VEILLEUX: II y a des étrangers.
M. SAMSON: ... chacun d'eux autres, comparativement à ce qu'on
représente. Pourtant, c'est à nous qu'on passe le rouleau
à vapeur, c'est nous qu'on tente de bâillonner. On nous dit : On
ne peut pas les reconnaître, il paraît que le PQ est contre cela,
il parait que le PQ va faire un "filibuster" si on ose les reconnaître
pour leur donner des outils. On les a vus, les membres du Parti
québécois; ce sont des gens qui veulent la démocratie, eux
aussi, et on vient justement de nous dire: Quand le gouvernement criera qu'il
ne veut pas vous reconnaître parce que le Parti québécois
est contre cela, vous leur direz que ce n'est pas vrai.
M. le Président, je le dis parce que le leader du Parti
québécois vient de nous le mentionner. Il a dit: Ne te gêne
pas pour le dire. Cela, c'est un message direct, c'est un message qui est
clair. A l'avenir, quand vous ne voudrez pas nous reconnaître, ne dites
pas que ça dépend du Parti québécois, dites que
ça dépend de vous autres. Cela vous gênerait trop, parce
que déjà, à huit, vous trouvez qu'on est trop, vous voulez
réduire cela à six. M. le Président, le système
parlementaire ne tiendra pas si on continue comme cela. Le système
parlementaire tiendra seulement à la condition qu'on reconnaisse les
élus du peuple, qu'on les reconnaisse en leur donnant leurs droits.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement. Il y
a quelque temps que le député parle sur un sujet que la
présidence a refusé il y a quelques minutes parce que cela
était une infraction au règlement ou à la règle de
la pertinence du débat. Je sais que le député de
Rouyn-Noranda a suffisamment d'expérience pour revenir au sujet de la
motion. Puisqu'il a, dans ses propos, manifesté une certaine
velléité ou un désir encore plus ferme de la part du
leader parlementaire du Parti québécois, je le prierais de
demander au leader parlementaire du Parti québécois, avec lequel
il semble bien s'entendre, de faire publiquement ce qu'il a pu dire. Ce qu'il a
pu dire...
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): Ce n'est pas dans l'ordre.
M. LEVESQUE: ... ou ce que prétend lui avoir dit le
député de Rouyn-Noranda.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): J'inviterais le député
de Rouyn-Noranda à revenir à la motion.
M. LEVESQUE: Qu'il demande au leader parlementaire du Parti
québécois de le dire en Chambre, pas en coulisse.
M. SAMSON: M. le Président... M. LESSARD: Présentez-la, la
loi
M. BEDARD (Chicoutimi): Présentez-la, la loi.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): A l'ordre, s'il vous plaît
!
M. LEVESQUE: Pardon?
M. LESSARD: Présentez-la, la loi.
M. BEDARD (Chicoutimi): On va voir.
M. LEVESQUE: Est-ce réellement une suggestion que faisait le
leader parlementaire du Parti québécois?
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): A l'ordre, s'il vous plaît,
messieurs ! J'inviterais le député de Rouyn-Noranda...
M. LESSARD: Auriez-vous peur de la présenter, la loi? Prenez donc
vos responsabilités.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard ): ... à revenir à la
motion, s'il vous plaît.
M. SAMSON: M. le Président...
M. LEVESQUE: Ce n'est pas de cette façon-là qu'il aurait
réagi en Chambre.
M. SAMSON: ... je vous remercie énormément de m'avoir
redonné le droit de parole. Je fais appel à votre bonne
compréhension, M. le Président. Lorsqu'on présente une
motion qui, en quelque sorte, interdira le droit de parole à des
parlementaires pendant un certain temps et pour certaines raisons, bien entendu
je pense que cette motion qui nous est présentée nous donne au
moins le droit de dire si on est pour ou contre la motion. Ce droit que nous
avons de dire si on est contre doit aussi nous donner le droit de dire pourquoi
on est contre la motion.
C'est donc pour toutes ces raisons que je vous ai mentionnées
tantôt. Je mentionne aussi à l'endroit du leader du gouvernement
que, si nous avions tous les outils que, normalement, nous devrions avoir,
probablement qu'on n'aurait pas besoin de se battre autant contre cette
motion-là. Même si, en principe, c'est inacceptable, au moins,
nous aurions les outils pour nous en sortir. C'est justement une des raisons
fondamentales pourquoi on est obligé d'être contre la motion,
parce qu'on n'a pas les outils nécessaires en mains pour pouvoir se
défendre devant ce rouleau à vapeur, devant cette mitrailleuse
qui est la motion proposée par le leader du gouvernement.
Et puisque nous devons donner toutes ces raisons, j'ai dit devant le
leader du gouvernement, tantôt, qu'il ne pouvait pas continuer à
dire publiquement que c'est parce que le Parti québécois s'y
opposait. J'ai même dit que le leader du Parti québécois
m'avait autorisé à le dire. Il est arrivé, le leader
parlementaire du Parti québécois. Je pense qu'on n'a pas à
s'en cacher, il n'est pas gêné, lui, le leader du Parti
québécois de dire publiquement...
M. LEVESQUE: Le député de Maisonneuve ne semble pas
entendre, ne semble pas comprendre, il ne veut pas vous entendre.
M. SAMSON: ... qu'il est en faveur de la démocratie.
Est-ce que vous soulevez un point de règlement?
M. LEVESQUE: Non, mais je pensais que le député de
Maisonneuve soulèverait une question de privilège à la
suite des propos que le député de Rouyn-Noranda a tenus.
M. BURNS: Ce n'est pas méchant, ce que dit le
député de Rouyn-Noranda. Il n'y a rien de mauvais...
M. LEVESQUE: II a cité le député de
Maisonneuve...
M. BURNS: Je ne me sens pas brimé par ce que dit le
député de Rouyn-Noranda.
M. LEVESQUE: ... comme ayant dit qu'il voulait la reconnaissance du
Parti créditiste.
M. BURNS: J'ai dit clairement au député de Rouyn-Noranda
s'il me le permet, parce que c'est son droit de parole et je le
dis bien clairement également au leader du gouvernement que je serais
d'accord, et sans aucune hésitation, pour que les deux
députés du Ralliement créditiste aient un budget d'au
moins $25,000.
UNE VOIX: Ce n'est pas la même chose.
M. LEVESQUE: Ah! un budget de recherche. Le budget de recherche, c'est
une chose qui a été réglée.
M. BURNS: Quant au reste... Laissez-moi terminer.
M. LEVESQUE: On ne parlera pas du passé.
M. BURNS: Laissez-moi terminer. Je dis que ce soit bien clair
que ces deux députés ont quand même
été élus sous une étiquette créditiste.
Cela, on ne peut pas le nier. Il faut leur donner les moyens, je pense, de
fonctionner normalement à l'Assemblée nationale. Je dis qu'il
faut leur donner $25,000, au moins, pour qu'ils puissent avoir un budget de
recherche.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement. Ce
n'est pas ce qu'a dit le député de Rouyn-Noranda.
M. BURNS: Laissez-moi terminer. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. BURNS: Le
député m'a...
LE PRESIDENT: Si je comprends bien là, heureusement...
M. BURNS: Le leader m'a invité...
LE PRESIDENT: ... que la procédure parlementaire est très
souple. J'accorderai à l'honorable leader parlementaire de la
majorité, pas un droit de réplique, mais, avec votre
consente-
ment, la permission de faire certains commentaires après.
M. BURNS: Sûrement, M. le Président. D'ailleurs, c'est
uniquement parce que le leader du gouvernement m'a invité à
répondre que je le fais. Quant au reste, qu'il soit bien clair que je ne
suis pas le seul à décider, que je ne peux pas décider
seul et que le conseil des députés du Parti
québécois me donnera des instructions en temps et lieu
là-dessus.
M. LEVESQUE: Ah! bon, ah! bon.
M. LESSARD: Présentez-la, la loi et vous verrez.
M. LEVESQUE: C'est suffisant pour ramener le député de
Rouyn-Noranda à être plus prudent en citant le
député de Maisonneuve.
M. LESSARD: Présentez la loi. Vous êtez 102,
présentez-en une loi.
M. SAMSON: M. le Président, c'est mon droit de parole.
LE PRESIDENT: J'ai cru remarquer que lorsque ce minidébat, cette
digression a débuté, votre droit de parole était
pratiquement expiré. Je serais bien prêt à vous accorder
quelques...
M. LEVESQUE: Le temps est expiré, M. le Président.
LE PRESIDENT: Oui, mais nous étions dans un autre
débat.
M. SAMSON: M. le Président, j'ai beaucoup de choses à dire
et je suis très heureux que ce minidébat ait donné
l'occasion au moins au gouvernement de comprendre que si du côté
du Parti québécois on n'a pas encore donné un consentement
complet, on est "sacrement" bien parti, en tout cas.
M. le Président, ce qui est important pour nous, parce qu'il ne
s'agit pas simplement d'avoir un budget de recherche, c'est d'avoir une
reconnaissance complète et totale. C'est important pour nous,
ça.
M. le Président, là-dessus, j'aurais encore tellement de
choses à vous dire que ça m'amène à vous demander,
avec votre permission, l'unanimité de la Chambre pour pouvoir continuer
le discours que, normalement, je pourrais continuer si nous étions
normalement reconnus. Vous vous rappelez, M. le Président, en invoquant
le règlement, que pour déroger à ce règlement, nous
avons besoin de l'unanimité de la Chambre et que la dernière fois
que je l'ai demandée, le Parti libéral, avec ses 102
députés, me l'a accordée, le Parti québécois
ayant subi l'odieux...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. SAMSON: Alors je vous demande, M. le Président, croyant savoir
que le Parti québécois est prêt à nous accorder
cette unanimité, si le Parti libéral est maintenant prêt,
lui, à faire ce qu'il voulait faire l'autre jour, et je vous demande
l'unanimité.
M. BURNS: M. le Président, en ce qui me concerne, je suis
prêt à consentir à ce que le député de
Rouyn-Noranda continue son intervention. Je ne m'y opposerai pas.
LE PRESIDENT: Pendant combien de temps? Une journée, deux jours?
Pendant combien de temps?
M. BURNS: Aussi longtemps que le Parti libéral le voudra.
M. CHARRON: De dix heures à minuit. M. SAMSON: Est-ce que j'ai
l'unanimité?
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a unanimité?
DES VOIX: Non.
M. BURNS: Oui. Bien oui.
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a unanimité clairement ou non?
M. BURNS: Oui, M. le Président.
DES VOIX: Non.
LE PRESIDENT: J'entends des non.
M. BURNS: Bien non. Ce sont des non qui sont mêlés, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Bon, je regrette, mais il ne semble pas y avoir
unanimité.
M. SAMSON: Si je comprends bien, M. le Président, si, l'autre
jour, le Parti québécois m'avait accordé
l'unanimité, le Parti libéral aurait dit non. Donc, il se cache
derrière...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! L'honorable député de
Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: Merci, M. le Président. Le leader du gouvernement a
pris la malheureuse habitude, chaque fois qu'il voit arriver une fin de
session, de bousculer les solides traditions parlementaires qui sont celles qui
prévalent normalement à nos travaux. A chaque occasion, je crois,
que ce soit à l'ajournement d'été ou à
l'ajournement de Noël, comme celui-là, où le leader du
gouvernement a suggéré cette motion,
derrière l'excuse traditionnelle aussi traditionnelle que
l'est le député de Bonaventure, en fin de compte, en cette
Chambre camouflé derrière un vocabulaire parlant des
choses expresses, des besoins de l'Etat, de l'urgence de la nation, du grand
désir du gouvernement de légiférer, enfin toute cette
panoplie d'arguments qu'il nous a encore servis cet après-midi
vous vous le rappellerez quand même, M. le Président, puisque vous
l'avez vécu aussi bien que moi; on était, tous les deux,
même plus près que nous ne le sommes là pour surveiller ce
gouvernement il y avait toujours, au fond, un problème politique
qui embêtait sérieusement le gouvernement qui nous
présentait cette motion. Puis-je vous rappeler quelques exemples?
Juillet 1971 les plus vieux se le rappelleront
c'était le dépôt prématuré d'un projet de loi
devant assurer le développement de la baie James. Vous savez qu'à
ce moment-là, M. le Président, comme vous le rappelait mon
collègue de Maisonneuve, il y avait trois partis d'Opposition en
Chambre. Le premier, qui était l'Opposition officielle, c'était
connu du gouvernement, et qui est maintenant disparu complètement de la
carte, nous appuyait dans notre opposition à un déclenchement
prématuré d'un projet de cette envergure. Au moment où le
leader du gouvernement avait présenté sa motion, ils avaient bien
laissé sentir qu'ils allaient s'opposer jusqu'à la fin, ce qu'ils
n'ont pas fait; ils ont voté en faveur du projet de loi en
troisième lecture. Les créditistes, qui existaient à ce
moment-là en Chambre, s'étaient opposé également au
développement du projet, le temps des discours. Quand était venu
le temps du vote, par une manoeuvre que seuls peuvent nous expliquer les
députés qui appartenaient jadis à cette formation, ils
nous avaient fait faux bond. Finalement, nous avions été les
seuls à continuer l'opposition. Elle était nécessaire, la
motion à ce moment-là, sur le plan...
M. ROY: J'invoque le règlement, M. le Président.
L'honorable député de Saint-Jacques est en train de parler d'un
projet de loi en particulier. Je ne vois pas ce que cela a à faire avec
la motion actuelle. Je tiendrais à lui faire remarquer que nous sommes
entièrement souverains, nous, et autonomes pour prendre nos
décisions concernant tel ou tel projet de loi.
UNE VOIX: Absolument.
M. ROY: Alors, cela n'a rien à voir avec l'étude du
règlement actuel, que nous ayons pris la position que nous avons
décidé de prendre sur l'étude de tel ou tel projet de loi.
La motion a tout simplement pour but de suspendre les règlements de la
Chambre. Cela n'a pas trait à l'attitude qu'a pu prendre tel ou tel
parti face à tel ou tel projet de loi.
LE PRESIDENT: Je comprends l'argumenta- tion de l'honorable
député de Saint-Jacques qui veut faire des comparaisons ou
allusions à certaines autres expériences de la Chambre lors d'un
projet de loi, comme l'a fait, d'ailleurs je ne sais pas si c'est le
député de Maisonneuve, ou le député de Lafontaine,
ou le député de Saguenay pour vous donner des exemples de
ce qui s'est passé à certaines occasions. Je pense que,
jusque-là, c'est permissible, à la condition que ces exemples ou
ces allusions ne fassent pas partie uniquement...
Parce qu'il reconnaît, actuellement, que son droit de parole est
de vingt minutes, dans ce débat. Je ne pourrais pas lui permettre de
parler cinq minutes sur le projet. C'est ce qui est arrivé lors de
l'adoption du projet sur la baie James ou d'autres projets de loi sur les
métiers de la construction, alors que les règles de la Chambre
avaient été suspendues également.
Qu'à l'occasion, il en fasse mention, je le permettrai mais il ne
faudrait pas aller trop loin, quand même, dans ces débats.
M. CHARRON: C'est ce que je faisais, M. le Président. Je me
soumets, comme je l'ai toujours fait, respectueusement, à la mise en
garde que vous venez de me donner.
Mais ce que je faisais, c'était de vous rappeler et je ne
vois pas pourquoi le député de Beauce-Sud a pris la mouche tout
d'un coup ce qui s'était réellement passé, à
ce moment-là. Je vous dis qu'à ce moment-là, la motion,
presque mot à mot, celle que nous retrouvons devant nous, était
justifiée politiquement par le gouvernement en place. Il s'agissait de
hâter un débat, faire qu'il s'écoule le moins de temps
possible pour que l'opinion publique ait le moins de temps possible pour
s'informer auprès d'une opposition qui, à ce moment-là et
dans les circonstances exactement comme celles que je viens de vous raconter,
M. le Président, groupait, du moins temporairement, les trois partis de
l'Opposition. C'était un sérieux embarras, et la manoeuvre
politique de supprimer le règlement habituel pour nous forcer à
siéger de dix heures du matin à minuit le soir était un
bon coup dans le sac du gouvernement.
Puis-je développer mon argumentation, M. le Président, en
vous redonnant, puisque le règlement me le permet et vous allez
me le permettre également un autre exemple d'une pareille
situation, comme quoi et c'est la raison fondamentale de mon opposition
à cette motion il s'agit presque constamment d'une manoeuvre
politique à l'arrière?
Décembre 1971, M. le Président, le bill 28 que le
gouvernement avait décidé de retirer sous la pression des
anglophones, vers la fin. C'était un projet aussi contesté. Vous
vous rappelez la chaleur de nos débats, à ce moment-là, et
de l'opposition qui croissait un peu partout. Politiquement, il devenait donc
très avantageux pour le gouvernement en place d'encore une fois
restreindre les débats. Et évidemment, ceux qui ont pour fonction
de suivre les débats du
Parlement et de les transmettre à la population par les media
d'information se trouvent aussi bousculés que nous, en fin de compte, et
la qualité de leurs comptes rendus, la teneur de leurs comptes rendus,
leur capacité intellectuelle, physique de suivre les débats s'en
trouvent affectées, aussi bien pour eux que pour nous de l'Opposition,
en même temps. La motion guillotine était donc à ce
moment-là adoptée.
Or, M. le Président, nous sommes au début d'une nouvelle
Législature, encore dirigée par à peu près la
même équipe. Je regarde le feuilleton, M. le Président. Je
ne vois rien à l'origine qui soit aussi contesté et contestable
que ne l'étaient les deux projets de loi que je vous ai donnés en
exemple, tout à l'heure, le projet de loi no 50 et le projet de loi no
28. Donc, politiquement, où repose maintenant la raison de supprimer les
heures normales de travail de l'Assemblée nationale pour nous remettre
à fonctionner à fond de train, comme cela a toujours
été marqué?
Le député de Bonaventure aurait été beaucoup
mieux de nous donner cette raison et peut-être aurait-il reçu
l'assentiment de l'Opposition officielle plutôt que d'utiliser le
charabia habituel des besoins de la population et du grand désir du
gouvernement. Voyons donc, M. le Président! On les voit fonctionner
depuis trois ans et demi, nous autres, et ils découvrent, tout d'un
coup, les besoins de la population, et cela devient tout d'un coup urgent,
juste quand il reste dix jours d'une session. Le reste du temps, on passe notre
temps à demander, nous, des commissions parlementaires. On en a
demandé pour la question de la transaction du Soleil, dont nous devions
parler demain. Est-ce là la raison politique? Nous devions en parler
demain. Nous l'avons demandée. Nous avons été prêts
à travailler tout le temps. C'est nous qui passons notre temps à
les harponner. Et tout à coup, dix jours avant la fin de la session, il
y a péril en la demeure, il y a urgence.
Je regarde le feuilleton. Je me dis: il doit certainement y avoir une
couleuvre quelque part. Il y a la petite couleuvre des juges, M. le
Président. C'est bien connu.
Vous vous rappelez comment l'ancienne Législature a mis fin
à ses travaux tout à coup parce que nous avions organisé,
du mieux que nous pouvions, et transporté ici sur le parquet de
l'Assemblée nationale l'opposition énorme qui existait dans la
population devant une catégorie de citoyens déjà fort bien
rémunérés qui prenait des avantages par rapport au reste
de la population.
Et le leader du gouvernement, qui sait maintenant que nous sommes
appuyés sur un vote encore plus fort que celui de 1972 ou 1973, sait
très bien que nous allons reprendre cette opposition. Bien sûr,
c'est un vétéran de la Chambre, un vieux guerrier, et je suis
parfaitement convaincu qu'il nous voit venir là-dessus. Mais est-ce
juste à cause des juges? Sont-ils si importants? Est-il si important de
camoufler leur augmentation de salaire dans un débat qui ne durerait,
à toutes fins pratiques, qu'une seule journée, même
malgré toute l'énergie que nous devrions y mettre pour faire
entendre la voix de la population?
Est-ce seulement à cause des juges que pendant les dix jours qui
vont suivre il imposera cette motion à l'Opposition d'abord, bien
sûr et à ceux qui sont payés et chargés de
transmettre autant que possible la qualité, sinon, à
défaut de qualité, la quantité des débats qui ont
lieu dans cette Chambre à la population via les media d'information?
Ou alors est-ce un projet de loi qui n'est pas encore annoncé et
qui constituerait, encore une fois, un outil politique à double
tranchant pour le gouvernement et qui nécessiterait cette attitude
défaitiste, en fin de compte, de fin de session qu'ils ont toujours
maintenue devant nous?
Mon collègue de Maisonneuve, je pense, en ouvrant le débat
pour ce qui nous concerne, a fait état des difficultés,
déjà depuis trois semaines, ou si peu vous en savez
vous-même quelque chose d'accomplir notre travail du mieux que
nous pouvions dans les circonstances difficiles que nous avons.
Nous allons remplir cette tâche, et je pense que vous admettrez
avec nous qu'on s'en est fort bien tiré également depuis le
début. Mais c'est à force de travail, à force aussi de
disponibilité qu'on peut apporter notre attention aux différents
problèmes qui surgissent partout et pour lesquels inévitablement,
à cause de la fonction que nous occupons maintenant, nous allons
être sollicités.
Mais adopter un projet à la vapeur parce que la motion que
présente actuellement le leader du gouvernement aurait été
adoptée par la Chambre devient en quelque sorte harassant. Je me
souviens d'avoir déjà participé à un débat
sur cette traditionnelle motion et d'avoir signalé au gouvernement que
mon opposition à ce genre de motion serait peut-être moins
catégorique en fin de compte si j'avais d'abord l'assurance que le menu
législatif qu'il reste aux honorables membres de cette Chambre à
étudier au cours de la session était parfaitement connu des deux
côtés de la Chambre et qu'il ne s'agisse pas là du
début et de l'entrée en scène d'une loi surprise, d'une
motion surprise que le gouvernement devrait apporter et qui, sous l'empire de
cette motion, ne recevrait pas toute l'attention à laquelle elle a
droit.
Si c'est le cas, en exerçant son droit de réplique, le
leader du gouvernement devrait à tout le moins, sinon rassurer
l'Opposition officielle je sais que ce n'est pas sa fonction
première mais au moins rassurer ceux qui attendent de ce
gouvernement un énoncé clair en ce qui le concerne.
Est-ce que le menu législatif qui a été
annoncé aussi bien déjà au feuilleton qu'en appendice au
feuilleton est complet?
S'il n'est pas complet, le ministre peut-il nous dire, au nom du
gouvernement, dans quel domaine, de quelle façon, sur quels
problèmes
cette Assemblée nationale sera appelée, d'ici Noël
1973, à étudier les intérêts québécois
que voudra bien soumettre à son attention le gouvernement qui est en
face?
Nous ne pouvons pas, à cause de la difficulté physique
dans laquelle nous devons travailler maintenant, admettre une difficulté
politique qui deviendrait plus grande. Y a-t-il anguille sous roche
derrière cette motion? Y a-t-il une autre décision du
gouvernement qui viendra affecter encore plus physiquement le travail des
députés de l'Opposition que la tenue de cette motion? J'attends
bien une réponse claire, comme il n'en fournit pas souvent, mais
j'espère de sa part une exception cet après-midi puisque nous
entrons, à partir de l'adoption de cette motion, dans un régime
d'exception de nos travaux. Peut-être que le leader du gouvernement
devrait donner exemple lui-même et, pour la première fois
peut-être depuis le début de la Législature, nous laisser
entendre clairement où s'en va ce gouvernement d'ici Noël 1973.
Pour le reste, M. le Président, dans les conditions de travail
les plus difficiles qui soient pour une Opposition, nous allons quand
même assurer du mieux que nous pouvons la vigilance que la population
nous a appelés à exercer face à ce gouvernement au cours
des prochaines années.
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.
M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN: M. le Président, à l'ouverture de la
présente session, il m'a été donné de souligner que
l'on juge l'état d'une démocratie au sort qui est fait aux
membres de l'Opposition. Nous avons un rôle à remplir dans cette
Chambre, un rôle qui, en régime parlementaire britannique, est
tout aussi important que celui du gouvernement. Ceux qui ont lu un tant soit
peu les grands commentateurs du régime parlementaire britannique savent
que le gouvernement propose et que l'Opposition est appelée, par le jeu
des débats, à améliorer la législation, à
raffiner les techniques de gouvernement.
L'Opposition n'a pas seulement pour but de s'opposer à tout ce
que propose le gouvernement; elle n'a pas pour but de faire obstruction,
quoique, des fois, lorsqu'un principe qui lui paraît important
intervient, est en cause, il peut être à l'occasion juste que
l'Opposition fasse de l'obstruction. Mais ces tactiques, ces moyens sont
inhabituels. De façon générale, l'Opposition est
appelée en quelque sorte et je ne veux pas exagérer la
portée du mot à coopérer, à collaborer avec
le gouvernement pour le plus grand bien des administrés.
Nous avons donc un apport positif à faire au travail de cette
Chambre. Mais ceci prend du temps. Lorsque le gouvernement présente un
projet de loi, nous avons le devoir de l'étudier, de le scruter article
par article.
Nous avons le devoir de nous mettre à l'écoute aussi de la
population à l'extérieur de cette Chambre, pour savoir ce qu'elle
en pense, parce qu'il y a quelquefois des projets de lois, vous le savez, qui
mettent en cause des principes fondamentaux de l'ordre social, de l'ordre
politique, de l'ordre économique. Ce rôle de l'Opposition, j'ai
dit, dès le début de cette session, que nous entendions le jouer
malgré le nombre restreint de nos députés.
M. le Président, puisque je suis, comme beaucoup d'entre nous, un
néophyte ici, lorsqu'on m'a appris que je devais siéger dans
cette Chambre, le 29 octobre, je pensais, je tenais pour acquis...
M. MARCHAND: II est encore dans les nuages.
M. MORIN: ... que nous serions traités comme il convient à
une Opposition officielle. Je tenais pour acquis que le jeu parlementaire
serait respecté. Je tenais pour acquis qu'il ne se passerait pas ce qui
s'est passé dans plusieurs autres Législatures ou Parlements du
Commonwealth où des régimes, qui aujourd'hui ont effacé le
parlementarisme, ont commencé par des petites tracasseries, par des
petits accrocs aux règles du "fair play", par des petites exceptions en
apparence insignifiantes aux règlements, par des suspensions de
règlements inopportunes, alors que rien ne requiert qu'on
s'éloigne de la procédure habituelle.
Puis-je faire remarquer au leader du gouvernement qu'il s'engage
très tôt sur une pente qui me paraît très glissante?
Après à peine neuf séances de cette Législature, il
nous propose ce qui est, en fait, une forme de bâillon. Je sais bien que
cela s'abrite sous le décor, sous les dehors de la procédure
habituelle. Le leader parlementaire nous dit que c'est toujours comme ça
à la fin des sessions, mais cette session, elle vient de commencer.
Puis-je attirer l'attention du leader du Parlement sur un
éditorial de la Gazette, l'autre jour? La Gazette semble très
sensible, et à bon droit, au sort que le gouvernement nous
réserve non seulement depuis le début de cette session, mais
depuis le 29 octobre. La Gazette a fait un éditorial qui était
intitulé "Off to a bad start", en bon français: ça
commence mal. J'estime, en effet, que le gouvernement avait commencé mal
la présente session, en nous rendant la vie la plus difficile
possible.
J'estime qu'il continue dans la même ligne, dans la même
stratégie, en présentant maintenant cette motion, qui est
prématurée, c'est le moins qu'on puisse dire. M. le
Président, on a pu noter aussi, au cours des dernières
séances, le sort fait aux questions que nous avons posées au
gouvernement.
Là-dessus, comme sur le point qui nous est soumis en ce moment,
le gouvernement n'a pas joué pleinement le jeu de la démocratie
parlementaire qui veut que, pour pouvoir faire une critique fondée des
projets gouvernementaux,
l'Opposition, et par derrière elle la population toute
entière, soit saisie des faits, des renseignements sans lesquels elle ne
peut pas fonctionner.
Le gouvernement ne répond pas pleinement à nos questions,
et je mets en cause le premier ministre; bien qu'il ne soit pas là en ce
moment, il aura toujours le loisir de me répondre. Le premier ministre
se contente, à l'occasion de quelques-unes des questions les plus
sérieuses que nous ayons posées au gouvernement, de rire, de
faire des "farces plates" comme il ne sied pas à un premier ministre qui
se respecte. La chose, d'ailleurs, a été relevée dans la
presse. Je me demandais quand elle serait relevée, cette tactique de
toujours passer à côté de la question, de refuser de nous
répondre, de ne jamais se compromettre. Il n'y a guère que le
ministre de la Justice qui jusqu'ici, à l'occasion, ait tenté de
bonne foi et je pense pleinement de répondre à nos
questions. Quant aux autres ministres, je ne pourrais pas leur décerner
le même certificat.
Cette façon de ne pas répondre pleinement à nos
questions, cela se rattache à une attitude que je qualifierais de manque
de respect du jeu démocratique, manque de respect du rôle
indispensable de l'Opposition en régime parlementaire. On a vu bien des
régimes, dans plusieurs pays du Commonwealth, s'engager sur cette pente,
au début, par de petits accrocs. Je pourrais, et je ne le ferai pas,
évoquer de nombreux précédents, en Rhodésie, au
Ghana, où le gouvernement a commencé par des accrocs de ce genre
avant d'en venir à des accrocs plus graves à la liberté,
aux privilèges, aux droits de l'Opposition. Ce n'est pas à vous,
M. le Président, que je vais apprendre où en est aujourd'hui la
Rhodésie, où en est aujourd'hui le Ghana, qui ont vécu
sous l'empire d'un régime semblable au nôtre, exactement semblable
au nôtre.
Nous sommes à la neuvième séance de cette session
mais on nous annonce, alors qu'aucun projet de loi n'a encore été
adopté de manière définitive, 24 ou 25 projets, a dit le
leader du gouvernement.
Cela veut dire que dans les huit ou dix jours qui restent, plutôt
huit que dix et plutôt six que huit, à moins que le gouvernement
ne nous fasse siéger en dehors des jours ordinaires, nous allons
être appelés à passer à la vapeur, à nous
prononcer de manière éclairée sur 24 ou 25 projets de loi.
M. le Président, ce n'est pas sérieux. Je ne le dis pas seulement
pour cette Chambre, je le dis pour que les Québécois en soient
conscients; c'est de la foutaise. Ce n'est pas une façon de mener une
Législature.
Le règlement actuel permet au leader du gouvernement ce
n'est pas à moi à le lui apprendre de demander à la
Chambre de siéger le lundi, sans modification de règlement. Le
leader du gouvernement peut nous demander de rester dans cette Chambre
jusqu'à onze heures du soir, sans modification du règlement. Au
lieu tout simplement de suivre les chemins normaux sur lesquels nous
étions prêts à nous engager, avec le leader du
gouvernement, on tente je reviendrai tout à l'heure, à ce
qui me paraît être le fond de cette motion, les véritables
motifs de cette motion de nous bâillonner, M. le Président.
Ce n'est pas autre chose. Un fait qui me met sur cette piste, c'est que nous
aurions pu, M. le Président, siéger vendredi dernier. Où
étaient les ministres, vendredi dernier? Déjà partis pour
le week-end.
M. HARDY: Je travaillais.
M. LEVESQUE: C'est faux, M. le Président.
M. MORIN: ... déjà partis dans leur famille
sûrement.
M. LEVESQUE: Un instant, M. le Président, j'invoque une question
de privilège. J'espère que le chef de l'Opposition officielle a
un respect de la vérité. Je ne sais pas où il a pris ses
renseignements, mais vendredi cela a été une réunion du
cabinet pour des questions très importantes qu'il y avait à
discuter.
M. LESSARD: Pourquoi pas samedi? UNE VOIX: A Old Orchard ou à
Miami?
M. LEVESQUE: Nous avons même dépassé l'heure du
déjeuner sans manger.
M. LESSARD: Pourquoi pas samedi?
M. BURNS: D'habitude, on a de la difficulté à les avoir
pour la période des questions du vendredi, parce qu'ils sont partis
dès le jeudi soir.
M. LESSARD: Vendredi, c'était pour siéger.
LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable chef de l'Opposition.
M. MORIN: M. le Président, on ne peut pas fonctionner dans cette
Chambre si ces messieurs, déjà, prennent de longues fins de
semaine. On ne pourra pas fonctionner....
M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai soulevé une question de
privilège.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: J'ai soulevé une question de privilège. Je ne
veux pas insister, mais je ne veux pas voir le député de
Sauvé récidiver. Il doit prendre ma parole, et...
LE PRESIDENT: A l'ordre! s'il vous plaît. M. LEVESQUE: ... j'ai
parlé de mon siège.
UNE VOIX: Tiens-toi tranquille, n'interviens pas.
M. MORIN: Alors, M. le Président, nous sommes prêts
à reprendre le travail de cette session après les Fêtes.
Plusieurs de mes collègues l'ont dit déjà. Je suis
sûr qu'il en est de même du député de Rouyn-Noranda.
Nous sommes tout à fait disposés. Je dis cela tout à fait
sincèrement. Si vraiment il y a tant de lois qui nous attendent, tant de
projets, dont certains sont importants je ne dis pas qu'ils le sont
tous, il y en a qui sont des projets mineurs, il y en a quelques-uns qui
mettent en jeu des principes nous sommes prêts à reprendre
après les Fêtes. Est-ce que le leader peut nous demander plus que
cela? Nous le lui offrons. Mais qu'on n'aille pas nous passer des projets
à la vapeur, qu'on n'aille pas nous bâillonner. Ce qui est
à prévoir, c'est que nous allons, évidemment, vouloir
étudier ces projets avec attention en commission et l'on peut s'attendre
que le leader du gouvernement soit appelé à ce moment-là,
à invoquer l'article 160 pour nous bâillonner également en
commission. C'est ce qui va se produire inévitablement. Parce qu'avec 24
projets de loi en six ou huit jours je ne vois pas comment le gouvernement peut
décemment y arriver.
Alors, soi-disant pour accélérer le débat, tout
à coup...
M. LEVESQUE: II est six heures.
M. MORIN: ... le gouvernement nous présente cette motion...
M. LEVESQUE: II est six heures.
M. MORIN: ... qui, en fait, est destinée à nous
réduire au silence. M. le Président, je propose
l'ajournement...
LE PRESIDENT: La suspension.
M. LEVESQUE: Non, la suspension serait mieux.
M. MORIN: ... du débat puisqu'il est six heures.
M. LEVESQUE: Suspension jusqu'à vingt heures quinze.
LE PRESIDENT: L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à
vingt heures quinze.
(Suspension de la séance à 18 heures)
Reprise de la séance à 20 h 18
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! L'honorable chef de l'Opposition
officielle.
M. MORIN: M. le Président, j'en étais à dire
qu'après avoir fait l'école buissonnière le vendredi et
alors qu'on s'apprête sans doute à aller se chauffer au soleil au
mois de janvier et au mois de février...
M. VEILLEUX: En Algérie! Demandez cela aux autres ! En
Algérie !
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît !
M. VEILLEUX: En Algérie et en Tunisie!
M. MORIN: ... le gouvernement tente, par cette motion, d'écourter
les débats et, en somme, compte tenu de toutes les lois qui sont devant
nous, de nous réduire au silence ou quasiment au silence.
Parce que, M. le Président, l'effet net de la motion du leader du
gouvernement, quel est-il? L'effet net est double. Premièrement, il est
de supprimer la journée des députés. Je serais prêt
à parier n'importe quoi que, tout à l'heure, le leader du
gouvernement va nous annoncer, comme par hasard, que cela s'applique dès
demain matin, cette histoire-là et que donc il n'y aura pas de
journée des députés. Je serais prêt à le
parier.
M. LEVESQUE: Ce soir, ce soir. Ce soir.
M. MORIN: Oui, c'est ce que je pensais. Nous allons donc avoir une
situation, M. le Président, où pendant cette session, il n'y aura
eu aucune journée des députés ou est-ce que je me
trompe? aucune journée des députés. Et on vient
encore nous raconter, après cela, qu'on respecte les droits de
l'Opposition, qu'on ne fait pas obstruction à l'exercice, par
l'Opposition, de ses privilèges et de ses droits.
Bien. Il y a aussi un second effet qui est le suivant: c'est
d'écourter le débat sur les motions d'urgence, comme celle que
nous entendons proposer sur l'énergie pour ce jeudi. En vertu de
l'article 78 du règlement, ce débat va désormais se
terminer trois heures après l'heure indiquée pour le début
de la séance, c'est-à-dire que si la séance commence en
retard, si j'ai bien compris et cela arrive quelquefois, M. le
Président c'est du temps perdu pour l'Opposition.
En somme, nous n'allons avoir que trois heures pour permettre à
l'Opposition d'établir le bien-fondé de sa motion et pour que le
gouvernement puisse y répondre. A notre avis, c'est une caricature de
débat que nous allons avoir à cette occasion.
Je ne veux pas m'éterniser. Je voudrais simplement dire au leader
du gouvernement
dans cette Assemblée que sa motion nous paraît être
de la provocation. Oui. Le leader du gouvernement voudrait notre
coopération, notre collaboration, comme nous la lui avons offerte
à maintes reprises.
Et comme preuve que le gouvernement est, lui aussi, de son
côté, prêt à accepter cette coopération, alors
que nous n'avons eu aucune journée des députés, aucune
occasion de provoquer un débat d'urgence, il nous envoie dans les jambes
cette motion sous prétexte que la session va se terminer. Mais cette
session, elle vient tout juste de commencer. C'est donc faire obstruction au
travail de l'Opposition.
Le gouvernement, bien sûr, est en mesure de faire un peu ce qu'il
veut. Il ne faut pas se le cacher. Le premier ministre peut, par exemple, se
permettre de se lever en Chambre et de dire n'importe quoi, il va se trouver du
monde pour applaudir. On a vu ça à maintes reprises.
Il se permettrait de braire dans la Chambre qu'il se trouverait encore
des députés pour l'applaudir.
M. HARDY: II n'est pas péquiste.
M. MORIN: D'ailleurs, je pense que nous avons constamment des exemples
de ce que je viens de dire.
M. GARNEAU: ... braie, on applaudit aussi.
M.MORIN: Le gouvernement peut aussi tenter, peut même
réussir, dans une certaine mesure, à bâillonner
l'Opposition, je n'en doute pas. Il peut adopter même toutes les lois
qu'il veut, iniques, même. Je ne dis pas qu'il va le faire, je dis qu'il
peut le faire avec la majorité qu'il a, majorité sans doute
circonstancielle, majorité artificielle, mais majorité existante
quand même, majorité réelle avec laquelle il peut abuser de
son pouvoir.
Je vais terminer en disant ceci: Nous allons tout de même faire
notre part pour que cet abus de pouvoir ne puisse se concrétiser. Et
finalement, je me demande si le leader du gouvernement n'obtiendra pas le
contraire de ce qu'il recherchait avec son abus de pouvoir.
M. LEVESQUE: D'accord.
M. MORIN: M. le Président, je sais que vous avez dit à
maintes reprises que vous étiez toujours ouvert à des suggestions
sur l'amélioration du règlement. Mes collègues m'ont dit
qu'ils avaient trouvé auprès de vous, à l'occasion, une
oreille bienveillante. Eh bien! au sujet de l'interprétation qui a
été donnée de l'article 84, cet après-midi, je me
permets très respectueusement de faire valoir qu'on ne distingue pas
suffisamment entre suspension et modification du règlement.
UNE VOIX: A l'ordre, à l'ordre!
M. MORIN: Et, lorsqu'on a refusé, cet après- midi, de
considérer la distinction entre suspension et modification du
règlement...
M. LEVESQUE: C'est élémentaire, ça, en
procédure parlementaire.
LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre, messieurs!
M. MORIN: ... M. le Président, je me permets de penser
respectueusement que cette décision n'était pas
éclairée et j'espère...
M. LEVESQUE: A l'ordre, M. le Président! C'est un
précédent qu'il ne faudrait pas admettre à ce moment-ci,
M. le Président.
M. MORIN: M. le Président, je me permets, tout simplement, de
dire, en terminant, que cette décision contribue dans une certaine
mesure à nous bâillonner. J'espère que, dans
l'intersession, nous pourrons nous permettre de vous rendre visite pour
reparler de cette interprétation de l'article 84. Merci, M. le
Président.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, parlant contre la
motion, j'ai relu avec beaucoup d'attention votre discours lors de l'ouverture
de la Chambre. Vous avez dit, à ce moment-là, que nous avions
assisté à un progrès du point de vue parlementaire
particulièrement ici au Québec.
Vous avez dit que la dernière Législature avait
donné naissance à des réformes, par exemple: "la
reconnaissance légale des partis reconnus, en leur fournissant des
ressources additionelles je cite textuellement vos paroles et en
octroyant à leur chef, leader parlementaire et whip, un personnel de
soutien mieux rémunéré et, l'attribution aux partis
reconnus et aux membres de l'Assemblée de conditions et d'outils de
travail plus élaborés." Vous étiez peut-être
prophétique d'une certaine façon, à ce moment-là,
M. le Président, parce que vous ajoutiez, dans une autre partie de votre
exposé, concernant cette Législature: "J'avais et j'ai encore
beaucoup d'appréhension." Vous ajoutiez, et je crois que vous aviez
parfaitement raison: "Notre système veut que le président
émane de la majorité tout en lui imposant l'obligation de se
porter le défenseur des groupes minoritaires." Vous ajoutiez:
"Même si je sais fort bien que les membres de ces groupes minoritaires
sauront fort bien se défendre et faire valoir leurs droits, j'entends
que cette tradition soit scrupuleusement respectée." Vous porter le
défenseur des groupes minpritai-res: c'est ce que nous vous demandons
aujourd'hui.
En effet, le gouvernement veut travailler en tout cas il
l'affirme, d'une façon efficace concernant l'administration
publique et ce dans l'intérêt de tous les Québécois.
L'Opposition veut également faire son travail dans l'optique que ce soit
avantageux pour tous les Québécois.
L'Opposition, autrement dit, veut jouer un vrai rôle d'Opposition.
J'ai remarqué, lorsque nous avions l'occasion d'intervenir, nous de
l'Opposition, que plusieurs députés libéraux faisaient
continuellement le reproche à l'Opposition d'être négative.
Eh bien, si nous voulons faire notre travail d'Opposition correctement, d'une
façon positive, je pense que, comme vous le disiez, il nous faut nous
donner les instruments nécessaires pour faire ce travail d'une
façon efficace.
Dans la motion, le gouvernement nous annonce en fait la
présentation dans un très court laps de temps de plusieurs lois.
Tenant compte que l'Opposition ne représente que huit
députés, si nous voulons faire un travail efficace, il ne faut
pas agir de manière à compliquer le travail de l'Opposition, qui
est quand même déjà assez onéreux, pour lui
permettre de répondre à toutes les nécessités.
Nous sommes prêts, nous de l'Opposition, à travailler
très fort. Nous y sommes décidés. Nous sommes
déterminés à employer tous nos efforts, toutes nos
ressources physiques pour pouvoir le mieux possible jouer ce rôle
d'Opposition, qui n'est pas seulement, encore une fois, de critiquer le
gouvernement, mais apporter des suggestions positives, proposer des amendements
qui s'imposent, apporter, autrement dit, une collaboration positive aux lois
qui sont présentées devant ce Parlement,
II est évident qu'à certains moments nous nous devons de
critiquer le gouvernement. D'ailleurs, je pense qu'il est normal que nous le
fassions. Si ce n'était plus possible, je pense bien que nous pourrions
changer le mot "démocratie" dans laquelle le gouvernement nous dit que
nous vivons à l'heure actuelle. Pour faire ce travail-là, nous
sommes même prêts à nous exténuer physiquement et ce,
dans l'intérêt de tous les Québécois. Nous sommes
prêts à le faire mais à une condition: qu'on nous donne la
chance, au moins, d'apporter une contribution positive face aux lois
présentées devant le Parlement. Comment pouvons-nous le faire, M.
le Président, alors qu'il est facile de reconnaître, de constater
que l'Opposition ne compte que huit députés, même si elle
représente 45 p.c. de la population?
Comment pouvons-nous le faire à huit, ce travail
positif-là? C'est impossible. C'est déjà très
difficile, c'est déjà très exténuant de fonctionner
selon la normalité des choses, selon le règlement actuel; ce sera
tout à fait impossible si on donne suite à la motion qui est
présentée par le gouvernement à ce stade-ci. Vous savez,
M. le Président, le gouvernement a parlé il avait raison
d'en parler parce qu'on a besoin d'en parler à l'heure actuelle
de la qualité de la vie des citoyens avec emphase. Il a parlé
d'humaniser ses lois, d'humaniser les conditions de vie. Je pense qu'on devrait
commencer par humaniser les conditions de vie, les conditions de travail de
l'Opposition; sinon, à mon sens, ce serait ne pas être logique de
croire le gouvernement sincère quand il parle de la qualité de la
vie alors qu'il n'est pas capable de commencer, à l'intérieur
même de ce Parlement, à humaniser un peu les conditions dans
lesquelles se trouve l'Opposition.
Je sais que les Fêtes approchent; il y a une chose qui est plus
importante que le temps des Fêtes, c'est de continuer à travailler
efficacement. Si toutes ces lois ne peuvent pas être
présentées avant les Fêtes, nous sommes disposés,
nous de l'Opposition à faire le nécessaire pour que le
gouvernement les présente dans le plus bref délai, après
les Fêtes.
Mais à une condition: qu'on ait la chance, au niveau des projets
de loi, de pouvoir les critiquer, de pouvoir les examiner, de pouvoir les
analyser et de pouvoir faire les amendements positifs qui peuvent
s'imposer.
Nous sommes six. On a parlé, à plusieurs reprises, de
"back-benchers" ou de néophytes. Remarquez que je n'ai aucun complexe
concernant les hommes d'arrière ban; je pense qu'il y en a beaucoup plus
dans les autres partis qu'il n'y en a chez nous, cela se comprend...
M. MARCHAND: Le contraire...
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est ça, cela se comprend très
bien de par le nombre que nous avons devant nous, mais je pense qu'on pourrait,
par exemple, réfléchir sur une chose. C'est qu'il y a une petite
différence entre les autres députés d'arrière ban
du gouvernement et ceux de l'Opposition. La différence est la suivante,
M. le Président: c'est qu'un député d'arrière ban
du Parti québécois ou de l'Opposition officielle a quand
même à s'occuper de pas mal de choses, ce qui n'est pas le cas de
tous les autres. Je m'explique, M. le Président. Mes confrères de
l'Assemblée nationale seront à même de le constater et je
serais très heureux, dans le fond, s'il y en avait un du gouvernement
qui me disait: On a autant de travail que ça au niveau de la
législation et au niveau du travail à faire en cette Chambre.
Même, je leur souhaite d'avoir à le faire. Personnellement, M. le
Président, pour ne prendre que le cas de celui qui vous parle, nous
avons, entre autres, à nous occuper d'être le critique de
l'Opposition dans quatre ministères différents et je ne crois pas
que ce soit les moindres: entre autres, le ministère des Affaires
sociales. Quand on pense à tout le "staff", excusez l'expression,
à tout le personnel qui est autour...
M. MARCHAND: C'est britannique, ça.
M. BEDARD (Chicoutimi): De temps en temps, il faut bien en parler, du
Britannique.
M. MARCHAND: Le leader veut rapatrier la reine.
M. BEDARD (Chicoutimi): Quand on pense à tout le personnel qui
est autour d'un ministre des Affaires sociales pour lui permettre de remplir
adéquatement son rôle, on peut imaginer un peu le travail de celui
qui a, au niveau de son parti ou de l'Opposition officielle, à assurer
le travail d'être le critique en matière d'affaires sociales
concernant ce ministère. Personnellement nous avons également la
responsabilité d'être le critique, en Chambre, de l'Opposition
concernant le ministère des Travaux publics, concernant le
ministère des Transports, concernant le ministère du Revenu.
Je pense que ce sont de grandes responsabilités. Remarquez que je
n'en suis pas déçu, au contraire, j'en suis très heureux
parce que cela nous permet tout simplement de travailler plus et de pouvoir
être plus en contact avec tous les projets de loi qui sont
présentés devant la Chambre et de pouvoir y apporter, quand c'est
possible, certaines suggestions qu'on veut les plus positives possible. Mais il
reste quand même que c'est un travail que l'on doit faire et qui nous est
imposé, un travail que l'on doit faire avec un ou deux recherchistes,
avec un personnel tout à fait restreint, Certains disent: L'Opposition
officielle, qui ne compte que six députés, devrait être
très heureuse si elle a à son service le même personnel
qu'avait, en fait, l'Union Nationale lorsqu'elle représentait
l'Opposition officielle en cette Chambre, et comptait environ 17
députés.
Je pense qu'on ne peut pas raisonner de cette façon-là.
Moins il y a de députés dans l'Opposition, plus les
députés ont besoin d'un personnel de plus en plus nombreux de
manière que les six députés en question ou les huit
députés en question, qui représentent l'Opposition et qui
représentent, encore une fois, 45 p.c. de la population, puissent
remplir leur devoir d'Opposition en cette Chambre.
Egalement, nous avons, en plus d'être le critique de l'Opposition
officielle dans quatre ministères, comme tous les autres
députés, soit de l'Opposition ou du parti au pouvoir, un
comté à nous occuper. Nous avons des individus à
rencontrer au niveau de chacun de nos comtés. Nous avons une
région aussi, à laquelle nous sommes intéressés et
qui a le droit de s'attendre à ce qu'une partie de nos efforts y soient
consacrés. Je pense que, honnêtement, si cette proposition
était acceptée, cela équivaudrait, à mon sens,
à un bâillon de l'Opposition. Une des choses dont avait peur le
parti au pouvoir durant la campagne électorale et qu'il accusait le
Parti québécois de vouloir instaurer, c'est bien le parti
unique.
Si l'Opposition, parce qu'elle est placée dans des conditions de
vie, dans des conditions de travail très difficiles, ne peut pas jouer
ce rôle de l'Opposition qu'elle est en droit de s'attendre de jouer, on
en revient à quoi? Sinon à un bâillon, du moins on en
revient tout simplement, à mon sens, à une sorte de
démocratie de façade, à une caricature de la
démocratie.
C'est pour cela que lorsque l'Opposition au complet, les huit de
l'Opposition s'opposent à la résolution du gouvernement au
pouvoir, ce n'est sûrement pas pour le plaisir de critiquer ou de vouloir
contrer le gouvernement. Au contraire, c'est dans un but très positif,
celui de vouloir tout simplement jouer le rôle pour lequel les
députés ont été élus, ici, à savoir
le rôle de l'Opposition officielle.
M. le Président, le gouvernement veut faire son devoir en
légiférant. Nous sommes d'accord là-dessus. On ne veut pas
l'empêcher d'accomplir ce devoir. L'Opposition veut faire son devoir en
ayant le temps, tout simplement, de scruter les projets de loi qui sont
présentés devant ce Parlement, en ayant le temps, une fois pour
toutes, de voir jusqu'à quel point ces lois ne peuvent pas être
amendées et ce, non pas pour le plaisir de l'Opposition mais dans le
plus grand intérêt de tous les citoyens du Québec.
M. le Président, je me permettrai de conclure tout simplement en
vous rappelant des paroles très sages et ce sont les vôtres
que vous avez prononcées, à l'effet que vous vous imposiez
l'obligation de vous porter le défenseur des groupes minoritaires. S'il
y a une occasion tout à fait spéciale de donner suite à
cet engagement que vous avez pris et que je trouvais très valable, lors
de l'ouverture de la Chambre, s'il y a une occasion où vous pouvez y
donner suite d'une façon très positive, je pense bien que c'est
cette motion, en donnant raison à l'Opposition.
LE PRESIDENT: En réponse à votre intervention, je ne
pourrai pas exprimer mon vote. Je ne pense pas.
M. BEDARD (Chicoutimi): On vous accorderait une demi-heure
d'intervention, M. le Président.
LE PRESIDENT: Avant d'avoir un vote prépondérant, cela va
être...
M. BEDARD (Chicoutimi): Une demi-heure d'intervention, M. le
Président.
M. BURNS: Comme un chef de parti, on vous donnerait bien une heure !
LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion est adoptée?
M. LEVESQUE: M. le Président... LE PRESIDENT: Le droit de
réplique.
M. Gérard-D. Lévesque
M. LEVESQUE: M. le Président, je ne sais
pas réellement si ce que j'ai entendu de l'autre
côté devrait provoquer ou mériter l'exercice d'un droit de
réplique mais, tout de même, je ne voudrais pas tout laisser
passer sans au moins m'opposer à ce qu'on appelle charrier, en termes
parlementaires. C'est ce qu'ont fait non seulement les députés de
l'Opposition officielle mais également les députés non
reconnus du Parti créditiste.
Nous avons devant nous, à l'étude, une motion de fond,
c'est ce qui nous permet d'avoir le droit de réplique. Mais on sait fort
bien qu'il s'agit, en fait, d'un genre de motion de forme, parce
qu'après tout il s'agit simplement de savoir si nous allons
siéger jusqu'à minuit au lieu de onze heures, si on va
siéger un peu plus dans la matinée que normalement. Il s'agit,
autrement dit, de questions de détail et on en fait une tempête
dans un verre d'eau.
Même si on avait voulu en faire un "filibuster", on n'aurait pas
mieux réussi, parce que tout le monde a utilisé son droit de
parole et pratiquement jusqu'à la limite.
On voit que ce nouveau Parti québécois qui nous arrive en
1973 est un spécialiste des questions de forme, de détail:
questions de bureau, questions de sièges, questions d'effaces et de
crayons, questions d'étages, et, maintenant, questions d'heures.
Voilà la spécialité qui semble être celle du nouveau
chef parlementaire, le député de Sauvé. On attendait
beaucoup de lui et voici ce qu'il nous a livré jusqu'ici, lui et son
équipe.
Au lieu d'avoir adopté cette motion qui, de leur propre
aveu, normalement devait être adoptée, évidemment, comme
cela se fait à ce moment-ci dans toutes les sessions; c'est une motion
traditionnelle rapidement et de passer sérieusement à
l'étude des problèmes qui intéressent la province, on
s'est attardé pendant des heures; on a fait perdre des heures à
cette Chambre, sachant d'avance le sort que ce Parlement réservait
à cette motion.
M. MORIN: Alors, on va laisser tomber les principes?
M. LEVESQUE: Sachant cela, on s'attarde à ces genres de
détails qui sont la spécialité, je le
répète, du député de Sauvé en particulier,
celui qu'on appelle le chef parlementaire de l'Opposition officielle.
A-t-on vu une Opposition officielle faire état d'un tel
dynamisme, d'une telle recherche de la solution des véritables
problèmes? On a vu ces gens charroyer sur la question de la
démocratie qui était en péril. Si ces gens, pour un
instant, étaient au pouvoir, là, on pourrait se poser des
questions sur la sécurité de la démocratie.
Mais, grâce à Dieu et grâce au peuple du
Québec, nous n'avons pas ce sort et nous pouvons maintenant nous mettre
au travail et continuer, dès ce soir, les travaux parlementaires
sérieux. Nous osons croire que le Parti québécois et nos
amis non reconnus nous aideront à étudier d'une façon
objective, sérieuse, cette législation importante que nous avons
devant nous.
Evidemment, on a fait état des 25 projets de loi à
l'étude. C'était épouvantable d'arriver avec 25 projets de
loi dans les dernières semaines de la session. Si on avait
été le moindrement objectif, on aurait jeté un coup d'oeil
sur les projets de loi et on se serait aperçu immédiatement, avec
un peu d'expérience si le chef parlementaire de l'Opposition
officielle prenait un peu plus conseil de son ami de gauche, le
député de Maisonneuve, ce dernier aurait pu le lui dire
que dix ou quinze de ces projets de loi pouvaient être
réglés dans quelques minutes.
Je comprends, M. le Président, qu'il manque d'expérience
mais...
M. LESSARD: C'est ça les projets de loi importants du
ministre?
M. LEVESQUE: ... M. le Président, s'il manque
d'expérience, il ne devrait pas cependant se permettre de manquer de
modestie et admettre qu'en arrivant ici, à l'Assemblée nationale,
il y a des choses très simples mais qu'il faut étudier, qu'il
faut apprendre. L'expérience seule, M. le Président, lui
permettra de franchir ce pas et, en attendant, il pourrait se permettre de se
tourner, sinon gentiment au moins chrétiennement c'est
peut-être un nom qui lui échappe du côté de
son ami et camarade de Maisonneuve qui lui dirait: Mon cher ami de
Sauvé, il n'y a rien là-dedans, c'est une tempête dans un
verre d'eau. C'est bon d'en faire une, tempête, de temps en temps et de
l'exploiter si c'est possible, mais voici, entre nous, là, il y a, dans
ces 25 projets de loi, dix ou quinze projets de loi dont nous pouvons disposer
dans quelques minutes, M. le Président.
M. LESSARD: Vous parlez des projets de loi importants?
M. LEVESQUE: Mais cependant...
M. LESSARD: Pourquoi avez-vous parlé des projets de loi
importants?
M. MORIN: Alors, pourquoi nous bâillonner?
M. LESSARD: C'est pas sérieux ça.
M. LEVESQUE: ... M. le Président, il y a quelques projets de loi
que le Parti québécois aimerait discuter plus longuement, je le
devine. Cela ne prend pas une expérience bien longue pour savoir que sur
la question du salaire des juges, nous allons avoir...
M. BURNS: Est-ce que le leader me permet une question?
M. LEVESQUE: ... quelques points de vue exprimés par certaines
personnes qui sont...
M. BURNS: Est-ce que le leader du gouvernement me permet une
question?
M. LEVESQUE: ... amies des gens qui n'aiment pas tellement les juges.
Pardon?
M. BURNS: Est-ce que le leader du gouvernement me permet une
question?
M. LEVESQUE: Oui, certainement.
M. BURNS: Bon, en fait je dis une mais ça va être deux
questions.
M. LEVESQUE: Le droit de réplique m'appartient en
exclusivité.
M. BURNS: D'accord, je ne veux pas vous bloquer dans votre droit de
réplique. Je veux tout simplement vous poser deux questions. La
première: Est-ce qu'il est exact que vous n'avez pas l'intention de
mettre en application immédiatement la motion en question, la motion
qu'on discute actuellement? Est-ce qu'il est exact que vous n'avez pas
l'intention de la mettre en application, par exemple...
M. LEVESQUE: Deuxième question?
M. BURNS: ... dès ce soir? C'est la première question qui
peut peut-être suggérer une deuxième question.
M. LEVESQUE: Voici, M. le Président, j'ai déjà
répondu à la première il y a quelques minutes.
M. BURNS: Alors, est-ce que j'ai bien compris que sur cette
première question, le leader du gouvernement n'a pas l'intention de la
mettre en application tout de suite?
M. LEVESQUE: M. le Président, le député de
Maisonneuve était probablement bien justifié de ne pas être
en Chambre au moment où j'ai répondu, mais son ami vers lequel il
pourrait se pencher maintenant, le député de Sauvé,
pourrait sans doute l'informer de la réponse que j'ai donnée
et...
M. MORIN: Répondez donc! M. LEVESQUE: Pardon? M. BURNS:
Répondez donc!
M. LEVESQUE: J'ai répondu déjà, M. le
Président, et je continue d'exercer mon droit de réplique.
M. MORIN: Vous jouez à cache-cache, comme des enfants. Allons
donc !
M. LEVESQUE: M. le Président, lorsqu'on m'a posé la
question tout à l'heure, j'ai...
Pardon? Qu'est-ce que c'est que le ministre des Affaires sociales avait
pourtant bien qualifié, comment appelait-on cela? Cette cocasserie,
coquetterie?
UNE VOIX : Une coquetterie parlementaire.
M. LEVESQUE: Une coquetterie, oui. Alors, M. le Président, je
voudrais simplement rappeler que parmi ces projets de loi, un certain nombre
méritent d'avoir le plus d'attention et le plus d'études
possibles et nous voulons permettre à chacun des députés
qui veulent s'exprimer lors de l'étude de ces projets de loi, d'avoir le
temps de le faire.
M. LEGER: La motion sur le journal Le Soleil.
M. LEVESQUE: Oui, il ne semble pas que vous soyez de la même
nature que le soleil.
UNE VOIX: Ce n'est pas le roi-soleil.
M. LEVESQUE: M. le Président, je voudrais tout simplement
rassurer l'Opposition et surtout celle qui n'a pas l'expérience du
passé. En effet, on se rappellera que le gouvernement dont je fais
partie, l'équipe libérale, n'a jamais abusé, jamais, d'une
situation de majorité et nous n'avons pas l'intention de le faire. C'est
simplement pour établir à l'avance certaines règles de
procédure, pour apporter certains changements, qui sont normaux à
ce moment-ci de nos délibérations, que nous avons
présenté cette motion. Mais je puis assurer et rassurer
particulièrement celui dont on parle de la quoi? de la
coquetterie de ne pas s'inquiéter. Il n'a qu'à discuter de
ça bien amicalement et chrétiennement avec son voisin de gauche
et il s'apercevra que cette procédure est tout à fait normale,
que nous allons dès maintenant commencer...
M. BURNS: Ce n'est pas ce que j'ai dit du tout; vous ne m'avez pas
écouté quand j'ai fait l'intervention cet après-midi.
M. LEVESQUE: J'ai très bien écouté, mais je l'ai
écouté avec la même expérience que nous partageons,
le député de Maisonneuve et moi, sachant fort bien que ce qu'il
dit, il le dit parce qu'il est assis où il est et que, si j'ai
présenté cette motion, c'est simplement en vertu du sens des
responsabilités que doit avoir celui qui s'assoit où je m'assois.
C'est tout.
Alors, le reste, M. le Président, c'est simplement une question
de forme et je reviens au tout début; tempête dans un verre d'eau.
Mais remettons-nous au travail sérieusement et je suis convaincu que la
population du Québec en sera la première
bénéficiaire.
M. BURNS: Alors, M. le Président, avec la permission du leader du
gouvernement, je lui pose la question suivante et ceci avant le vote...
M. LEVESQUE: M. le Président, il s'agit là d'un
précédent extrêmement...
M. BURNS: Non, non.
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a consentement?
DES VOIX: Vote, vote.
M. LEVESQUE: Non, non, il n'y a pas consentement.
Non, M. le Président. Cela va être chaque fois la
même chose. Vous viendrez la poser ici, pendant qu'on va attendre le
vote.
M. BURNS: Pas de consentement. On ne veut pas éclairer cette
Chambre, M. le Président, avant le vote; on ne veut pas
l'éclairer? Non, non, je vais vous la poser publiquement. Est-ce qu'on
va avoir droit à la journée des députés de
demain?
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, messieurs! A l'ordre! A l'ordre! A
l'ordre, s'il vous plaît! Le député de Maisonneuve,
à l'ordre, s'il vous plait ! Pour la deuxième fois, je rappelle
le député de Maisonneuve à l'ordre. Bon. Est-ce que cette
motion est adoptée?
M. BURNS: Je demande un vote enregistré, M. le
Président.
DES VOIX : Vote ! Vote !
LE PRESIDENT: Vote immédiat?
M. BURNS: Qu'on appelle les députés, M. le
Président !
M. LEGER: On veut voir combien il y a de députés
libéraux présents, M. le Président.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Vote sur la motion de M. Lévesque
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion de l'honorable
leader parlementaire du gouvernement veuillent bien se lever, s'il vous
plait.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Lévesque, Parent (Hull), Mailloux,
Garneau, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy,
Bienvenue, Forget, Vaillancourt, Arsenault, Houde (Fabre), Houde (Abitibi-Est),
Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Kennedy, Bacon, Blank, Lamontagne,
Veilleux, Saint-Hilaire, Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance,
Pilote, Fraser, Picard, Gratton, Assad, Carpentier, Dionne, Faucher, Marchand,
Harvey (Charlesbourg), Larivière, Pelletier, Shanks, Springate,
Pépin, Bellemare,
Bonnier, Boudreault, Boutin (Johnson), Boutin (Abitibi-Ouest), Chagnon,
Caron, Ciaccia, Côté, Déom, Déziel, Dufour, Harvey
(Dubuc), La-chance, Lapointe, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte,
Mercier, Pagé, Parent (Prévost), Picotte, Sylvain, Tardif,
Tremblay, Verreault.
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever, s'il
vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard,
Bédard (Chicoutimi), Samson, Roy.
LE SECRETAIRE: Pour: 72 Contre : 8
LE PRESIDENT: La motion est adoptée. M. LEVESQUE:
Troisième lecture... LE PRESIDENT: Non, le rapport. M. LEVESQUE:
D'abord, un rapport.
Projet de loi no 1 Rapport de la commission
M. LAFRANCE: M. le Président, je fais rapport à cette
Chambre que la commission des affaires sociales a étudié le
projet de loi no 1 et qu'elle en a adopté tous les articles avec
quelques modifications.
LE PRESIDENT: Ce rapport est-il agréé? UNE VOIX:
Agréé.
LE PRESIDENT: Avec les amendements, agréé.
M. LEVESQUE: Troisième lecture, M. le Président.
Troisième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires sociales propose la
troisième lecture du projet de loi no 1.
M. LEVESQUE: Régime des allocations familiales.
LE PRESIDENT: Projet de loi no 1, intitulé Régime des
allocations familiales du Québec. L'honorable député de
Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, nous avons
déjà dit dans une intervention que nous étions d'accord
sur cette loi.
J'aurais simplement une remarque, un regret à exprimer face
à un amendement que nous voulions apporter à l'article 4 de la
Loi du régime des allocations familiales du Québec, parce que
nous regrettons que le gouvernement ait cru bon de recourir à une sorte
de rédaction démagogique de l'article 4, dans le sens suivant.
C'est qu'on nous a imposé d'une certaine façon, en n'enlevant pas
le premier paragraphe de l'article 4, à voter sur un texte de loi sur
lequel nous n'avions pas juridiction, parce que c'est de juridiction
fédérale. On a simplement gardé les deux alinéas
pour créer une sorte d'impact électoral et nous empêcher de
voir le vrai portrait, dans le sens qu'on mêle dans cet article, d'une
part, la juridiction fédérale et, d'autre part, la juridiction
provinciale, ce qui nous a empêchés, autrement dit, de voir le
vrai portrait en ce sens que le Québec donne simplement les sommes
mentionnées au paragraphe 2 de l'article 4, à savoir $3 pour le
premier enfant, $4 pour le deuxième, $5 pour le troisième, $6
pour le quatrième et les suivants. On a cru bon d'y ajouter le premier
paragraphe qui, à mon sens, n'a pas sa place dans ce texte de loi, parce
qu'il nous oblige, encore une fois, à légiférer d'une
certaine façon sur un texte sur lequel nous n'avons pas juridiction. On
nous impose d'inclure dans la loi, de par ces deux alinéas, une sorte de
récit du roman d'amour qui peut exister entre le fédéral
et le provincial concernant ce projet de loi.
Nous aurions aimé que le premier paragraphe soit enlevé
parce que c'est tout simplement une disposition déclaratoire qui aurait
pu très bien se retrouver au niveau des notes explicatives ou au niveau
d'une annexe et non pas dans le texte de loi parce qu'il n'apporte aucune
lumière concernant l'aspect légal.
Nous soumettons également que nous regrettons qu'on n'ait
même pas, au niveau de la commission parlementaire, accepté de
donner la priorité au projet de loi québécois en acceptant
que le deuxième paragraphe, qui est le texte de loi sur lequel nous
avons à voter et sur lequel nous avons juridiction, ait au moins la
priorité sur la juridiction fédérale.
Nous soumettons que cela aurait été au moins un minimum
auquel nous aurions pu nous attendre au niveau de la commission parlementaire.
Nous ne l'avons pas eu tout simplement parce que nous n'avons pas,
naturellement, la majorité. La commission parlementaire, n'a tout
simplement pas voulu donner priorité au texte qui est voté par la
présente Législature.
Je crois que notre amendement se justifiait d'autant plus qu'il
permettait une lecture, plus intelligente et plus logique de l'article 4 au
complet.
Alors, pour le reste, nous l'avons dit, nous sommes d'accord sur le
projet de loi.
Droit de parole réclamé par M. Fabien
Roy
M. ROY: M. le Président...
M. LEVESQUE: Ce n'est pas encore le vote. Vous n'avez pas le droit.
M. ROY: Un instant, M. le Président. Je conçois
très mal qu'on empêche un législateur... Un instant, M. le
Président, question de règlement.
M. LEVESQUE: Personne ne vous empêche, c'est le règlement
qui vous empêche.
M. ROY: Je conçois très mal... Est-ce qu'on me permet de
faire quelques commentaires, oui ou non?
DES VOIX: Non.
M. ROY: M. le Président, une question de règlement, une
question de privilège.
M. LEVESQUE: M. le Président, moi, je n'ai pas le droit de
parler. Est-ce que j'ai le droit de parler, moi?
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! M. LEVESQUE: Est-ce que j'ai le
droit?
M. ROY: Question de privilège, M. le Président.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: Est-ce que j'ai le droit, M. le Président?
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. SAMSON: C'est lui qui a la parole.
LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce que votre question de privilège
un instant, s'il vous plaît est sur le droit de parole?
M. ROY: Elle est sur le droit de parole, ma question de
privilège, M. le Président, mais elle est très
importante...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. ROY: ...et je tiens à être entendu...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Je ne peux
pas. A l'ordre! Je rappelle à l'ordre! Un instant. Est-ce qu'il y a
consentement unanime?
DES VOIX: Non.
LE PRESIDENT: Est-ce que vous désirez que je prenne les mesures?
Est-ce que vous m'invitez à prendre les mesures que je dois prendre? A
l'ordre! A l'ordre! Je vous demanderais de reprendre votre siège. Je
vais vous parler. Vous allez vous asseoir et je vais parler debout. Bon. C'est
le règlement.
Ecoutez, je suis lié par le règlement. S'il n'y a pas
consentement unanime, c'est votre droit d'inscrire au feuilleton un amendement
au règlement. Cela est votre droit de député et ce serait
le moyen logique et normal que vous inscriviez au feuilleton un désir
d'amendement au règlement. Mais, actuellement, s'il n'y a pas
consentement unanime de la Chambre, je n'ai pas l'autorité de vous
donner le droit de parole. On est lié par un règlement.
Je demande encore une fois s'il y a consentement unanime. Sinon, je
n'accepterai pas de question de privilège et je devrai faire respecter
le règlement.
Est-ce qu'il y a consentement unanime?
DES VOIX: Non.
M. ROY: M. le Président, je voudrais vous demander une
directive.
LE PRESIDENT: Ecoutez, ne contournez pas le règlement. Cela va
être très vite.
M. ROY: Non, M. le Président. Il ne s'agit pas de contourner le
règlement. Je pense que nous avons devant nous un principe, à
l'heure actuelle, et c'est pourquoi je vous demanderais une directive.
DES VOIX: Non.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. ROY: Un député...
M. LEVESQUE: Ce n'est pas une demande de directive, cela, M. le
Président.
M. ROY: M. le Président, je vous demande une directive. Un
député est élu pour représenter...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! Vous abusez. A
l'ordre, s'il vous plaît! Je vous rappelle à l'ordre pour la
deuxième fois. A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! A
l'ordre!
Question de règlement, l'honorable... Si c'est pour
inviter...
M. BURNS: Non, non! M. le Président, je dis tout simplement et,
au nom de mon parti, je le mentionne...
LE PRESIDENT: Si vous dites que votre parti est d'accord et que l'autre
parti n'est pas d'accord, on n'avance pas.
M. BURNS: Je dis, M. le Président, qu'on est d'accord...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!
Est-ce que cette motion de troisième lecture est adoptée?
Est-elle adoptée?
Adopté.
M. ROY: En vertu de quel principe, M. le Président,
empêche-t-on...
M. le Président, j'aimerais savoir en vertu de quel principe
démocratique... Cela va durer longtemps, je suis très
patient.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! Je
vais répondre. A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que
je pourrais vous demander d'être respectueux du règlement? Est-ce
que vous pourriez vous asseoir? Je vous rappelle à l'ordre pour la
deuxième fois. Vous voulez un petit spectacle? C'est cela que vous
voulez?
A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaft!
De toute façon, vous n'êtes pas enregistré, vous savez.
A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaft! A l'ordre! A l'ordre!
A l'ordre! A l'ordre! Je vais être obligé de prendre les
mesures... Est-ce que vous avez terminé? A l'ordre!
Suspension de la séance
LE PRESIDENT: La séance est suspendue pour dix minutes.
Projet de loi no 4 Deuxième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Fonction publique propose la
deuxième lecture du projet de loi no 4, Régime de retraite des
employés du gouvernement et des organismes publics.
M. Oswald Parent
M. PARENT (Hull): M. le Président, l'honorable
lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce projet de loi et
il en recommande l'étude à l'Assemblée.
Au mois de juillet 1973, les membres de cette Assemblée ont
étudié et recommandé l'approbation de la loi no 31, Loi
établissant le régime de retraite des employés du
gouvernement et des organismes publics. Cette loi a permis au gouvernement de
constituer une structure administrative efficace au moyen de laquelle nous
avons pu organiser, au cours des quatre derniers mois, une véritable
consultation auprès des représentants des employés,
des
autorités des divers ministères, ainsi qu'avec leurs
partenaires afin de nous assurer que le texte du présent projet de loi
soit conforme au contenu des conventions collectives et aux protocoles
d'entente signés au cours du mois de mai 1973.
Le bureau d'organisation du régime de retraite nous a
également permis de réunir ensemble des spécialistes de
diverses disciplines, qui ont mis au point les techniques et mécanismes
administratifs complexes nécessaires à la gestion efficace des
régimes de retraite auxquels adhèrent quelque 300,000
employés.
Par conséquent, le projet de loi que j'ai le privilège de
soumettre à la considération de cette Assemblée
reflète fidèlement les résultats des consultations
constantes que nous avons entretenues avec nos interlocuteurs. De plus, ce
projet de loi tient compte des critères exigeants de la gestion efficace
des affaires publiques et répond aux désirs des
représentants des employés à qui le gouvernement avait
déjà indiqué son intention de mettre en vigueur par
législation un nouveau régime universel de retraite.
Une des caractéristiques principales du régime de retraite
des employés du gouvernement et des organismes publics dans sa version
légale et conformément à la politique salariale du
gouvernement et aux conventions collectives intervenues, c'est
l'universalité. En effet, le régime de retraite proposé
est universel, parce qu'il couvre non seulement les employés
syndiqués, mais aussi les cadres oeuvrant dans ce que l'on a convenu
d'appeler les secteurs public et parapublic. Le régime de retraite
proposé pourra également s'appliquer à d'autres groupes
d'employés avec lesquels le gouvernement n'a pas signé de
convention collective de travail, mais oeuvrant dans le domaine du secteur
public, tels que les employés des maisons d'enseignement privées
et reconnues d'intérêt public, la protection civile et d'autres
organismes du même genre.
Ce principe d'universalité trouve encore son application par le
fait que le régime proposé, tout en permettant de maintenir les
régimes actuels de retraite et de rentes, facilite le transfert des
droits des employés d'un régime à un autre. De plus, le
projet de loi comporte des modifications substantielles au régime de
retraite des fonctionnaires et des enseignants, notamment pour que ces
régimes concordent avec les régimes dont le projet de loi propose
l'établissement.
Par ailleurs, pour démontrer le plus globalement et le plus
succinctement possible la conformité entre les conventions collectives
de travail et les protocoles d'entente intervenus, d'une part, et le projet de
loi, d'autre part, qu'on me permette d'énumérer les principes
directeurs qui sous-tendent cette version légale du régime de
retraite des employés du gouvernement et des organismes publics.
Le régime de retraite prévu aux conventions collectives
doit être obligatoire et couvrir tous les employés
embauchés après le 1er juillet 1973 et tous ceux qui, au 30 juin
1973, ne participaient pas à un régime de retraite.
Les employés en fonction participant à un régime de
retraite conservent le droit de maintenir leur participation à un tel
régime, comme ils peuvent également opter pour le nouveau
régime avant le 1er juillet 1974. Quant aux autres employés
participant à un régime supplémentaire de rentes, ils
conservent également le droit de maintenir leur participation à
un tel régime ou d'opter pour le nouveau régime dans un
délai raisonnable.
Le nouveau régime de retraite doit être
équilibré, c'est-à-dire que les contributions tant des
employés que des employeurs doivent être équivalentes au
coût qu'entraînent les bénéfices accordés aux
employés. La cotisation de l'employé qui participera au
régime proposé sera calculée de la façon suivante:
une retenue de 7 1/2 p.c. est faite sur le traitement admissible qui
excède de 35 p.c. le maximum des gains admissibles au sens du
régime de rentes du Québec. L'exemption de 35 p.c. du maximum des
gains admissibles au sens du régime de rentes du Québec ne doit
toutefois pas être inférieure à $2,500. La cotisation de
l'employé en fonction le 1er juillet 1973, qui devient de plein droit
régi par le nouveau régime ou qui opte par la suite pour
participer au nouveau régime, est diminuée de 2 p.c. du
traitement admissible du 1er juillet 1973 au 30 juin 1974, de 1 1/2 p.c. du 1er
juillet 1974 jusqu'au 30 juin 1975, et de 1 p.c. du 1er juillet 1975 jusqu'au
30 juin 1976.
Cette façon de calculer la cotisation de l'employé a pour
effet d'échelonner sur une période de temps acceptable l'apport
financier qu'on lui demande. La participation de l'employeur, qu'il s'agisse du
gouvernement ou d'un organisme public, a été limitée
à 140 p.c. de la contribution des employés. Les droits acquis des
employés qui participent au régime de retraite des fonctionnaires
ou des enseignants, s'ils optent pour le régime universel, sont
transférables au nouveau régime de retraite des employés
du gouvernement et des organismes publics. Les employés qui participent
à un régime supplémentaire de rentes, auquel le
gouvernement du Québec est signataire avec la partie patronale et les
représentants des employés, ont droit à un crédit
de rentes équivalent à celui qui leur est acquis dans le
régime supplémentaire de rentes, advenant leur transfert au
nouveau régime de retraite des employés du gouvernement et des
organismes publics.
Les employés qui participent à un régime
supplémentaire assuré de rentes peuvent, s'ils optent pour le
régime de retraite du gouvernement, bénéficier d'un
crédit de rentes garanti par un certificat libéré de
rentes. Les employés qui participent à un régime
supplémentaire de rentes auquel le gouvernement n'est pas signataire
recevront un crédit de rentes équivalent aux montants qui sont
disponibles advenant
leur transfert au régime de retraite des employés du
gouvernement et des organismes publics, à moins qu'un certificat de
rentes libéré leur soit accordé par l'assureur. Les
employés à l'emploi, le 30 juin 1973, d'un des organismes
visés par la présente loi ou nommés avant le 30 juin 1974
auront droit à un crédit de rentes calculé en fonction du
nombre d'années de services antérieurs non contribuées
jusqu'à un maximum de quinze. Toutefois les années
transférées dans le régime de retraite doivent être
réduites de ce maximum de quinze années. Les employés
syndiqués ou syndicables dans le secteur des affaires sociales qui ne
participent pas, le 30 juin 1973, à un régime
supplémentaire de rentes ou qui participent à un régime
facultatif de rentes se verront accorder un crédit de rentes égal
à la portion de la part que l'employeur aurait acquittée si les
régimes de retraite facultatifs dans ce secteur avaient
été obligatoires.
Pour donner suite aux conventions collectives de travail et aux ententes
intervenues subséquemment, il sera possible au gouvernement d'accorder,
en vertu du régime de retraite proposée les
bénéfices suivants: une pension obligatoire à 65 ans ou
facultative à partir du moment où l'âge et les
années de service totalisent 90 ou plus; une pension obligatoire
retardée jusqu'au 30 avril 1974 et à 66 ans jusqu'au 31
décembre 1975; une pension différée facultative
après deux années de participation, obligatoire après dix
années de service, si l'employé est âgé de 45 ans et
plus à son départ; une pension de 2 p.c. par année, y
compris la rente provenant du régime de rentes du Québec
basée sur la moyenne des cinq années les mieux
rémunérées payable la vie durant, et la moitié
payable à la veuve ou au veuf invalide si le décès de
l'employé survient alors qu'il est à la retraite ou qu'il
était éligible à une pension.
Le service transféré d'un régime
supplémentaire de rentes ou le service racheté donne droit
à un crédit de rentes payables à compter de 65 ans, la vie
durant du bénéficiaire. Les remboursements avant la retraite
porteront intérêt à un taux variable selon la durée
de participation. Les employés pourront participer au régime sans
verser de contribution durant la période de temps que s'appliquera
l'assurance-salaire, sauf pour la période compensée par les
crédits de maladie.
Les pensions seront indexées annuellement selon les mêmes
pourcentages que ceux utilisés par la Régie des rentes du
Québec pour l'indexation des rentes payables selon le régime de
rentes du Québec. J'ai indiqué il y a quelques minutes
l'utilité de la loi 31 qui créait un bureau d'organisation du
régime de retraite.
En effet, jusqu'à maintenant, ce bureau d'organisation a pris
soin d'une façon efficace des difficultés administratives qui
découleront de l'application du projet de loi actuel. Cependant, le jour
où le présent projet de loi sera sanctionné, le bureau
d'organisation du régime de retraite sera remplacé
conformément aux désirs des représentants syndicaux et
gouvernementaux, par une commission administrative. La création de cette
commission permet de clarifier les responsabilités du pouvoir
législatif par rapport au pouvoir administratif. D'après les
renseignements dont je dispose, huit autres provinces canadiennes ont
déjà constitué des organismes semblables pour administrer
les régimes de retraite des employés des services publics.
En ce qui concerne la gestion des fonds, le gouvernement propose, par ce
projet de loi, de comptabiliser la contribution des employeurs et d'obtenir une
comptabilité distincte pour chaque secteur d'emploi, soit les secteurs
de la fonction publique, de l'éducation et des affaires sociales
le ministre des Finances déterminera les montants qui pourraient,
d'année en année, être capitalisés pour tenir des
engagements ou garanties du gouvernement à l'égard des
contributions de l'employeur verser à la Caisse de
dépôt et placement du Québec les fonds provenant des
cotisations déduites du traitement des employés ainsi que les
contributions de certains employeurs tandis que les autres contributions seront
déposées au fonds consolidé du revenu, donner suite
à une autre disposition des conventions collectives à l'effet que
la commission administrative du régime de retraite soit assistée
dans l'exécution de ses tâches de deux comités, l'un
d'administration et l'autre de placement.
Le comité d'administration, composé de 36 membres dont 15
désignés par les représentants des employés
syndiqués, pourra être constitué par le
lieutenant-gouverneur en conseil et aura pour fonction de recevoir les rapports
financiers, les rapports d'évaluation actuarielle, d'étudier les
demandes de révision et de conseiller la commission sur l'application de
la présente loi.
Par ailleurs, le comité de placement aura la
responsabilité de déterminer les normes générales
de répartition entre les divers fonds ségrégatifs
régissant le placement des fonds confiés à
l'administration de la Caisse de dépôt et placement du
Québec.
Il pourra être constitué par le lieutenant-gouverneur en
conseil et être composé de trente membres dont les quinze membres
du comité d'administration qui représenteront les employés
syndiqués et quinze autres membres choisis parmi les autres membres du
comité d'administration. Comme on s'en rendra compte à
l'étude du projet de loi, le gouvernement entend prendre tous les moyens
nécessaires pour s'assurer que soient respectées les conventions
collectives et le protocole d'entente du 4 mai dernier concernant
l'évaluation actuarielle du régime et la révision des
pensions aux bénéficiaires en établissant les dates et les
règles régissant de telles évaluations.
De plus, le projet de loi prévoit un mécanisme d'arbitrage
par lequel un employé ou un bénéficiaire qui ne sera pas
satisfait d'une
décision rendue par la commission sur une demande de prestations
quant à l'admissibilité, au calcul des années de service,
au montant ou à l'admissibilité au présent régime
ou à un bénéfice prévu par le présent
régime pourra en appeler à la commission, qui devra
réexaminer sa décision. Si l'employé n'est pas satisfait
du réexamen, il pourra faire une demande écrite de
révision au comité d'administration. S'il n'a pas encore obtenu
ce qu'il croit raisonnablement devoir lui revenir, il lui restera un dernier
recours en soumettant son cas à un arbitre dont la décision
deviendra finale et sans appel.
Tout compte fait, le régime de retraite des employés du
gouvernement et des organismes publics permettra au gouvernement de mettre en
application un élément important de sa politique et d'appliquer
les privilèges consentis aux employés dans les conventions
collectives de travail après s'être assuré que toutes les
précautions ont été prises pour respecter les droits des
employés qui participent à d'autres régimes de retraite ou
à des régimes supplémentaires de rentes. Il est de mon
devoir de demander à cette Assemblée d'apporter certaines
modifications au régime actuel de retraite des fonctionnaires et
à celui des enseignants afin de les uniformiser dans la mesure du
possible avec le régime de retraite des employés du gouvernement
et des organismes publics.
Les plus importantes modifications proposées aux lois des
régimes de retraite des enseignants et des fonctionnaires visent
à définir les conditions d'admissibilité à ces
régimes de retraite, à définir ce qui constitue une
année de service, à définir un traitement admissible et
à confier l'administration des deux régimes à la
commission administrative. D'autres propositions de changement aux
régimes de retraite des fonctionnaires et des enseignants ont pour but
de les adapter aux réalités courantes. Ces changements sont les
suivants: le droit pour l'épouse de droit commun de
bénéficier des avantages du régime, le droit de conserver
le montant payable au conjoint même si la veuve se remarie, maintenir le
montant minimum de la pension même si la personne atteint l'âge de
la pension de sécurité de la vieillesse, de calculer toute
pension ou demi-pension sur un traitement moyen d'au moins $5,000. Vous vous
souvenez sans doute qu'une telle mesure a été adoptée en
juillet 1973 par cette Assemblée mais son effet était
limité aux pensions accordées avant le 1er juillet 1973.
Maintenir le droit de participer aux régimes de retraite
impliqués même s'il y a changement de juridiction pour certains
employés par suite de modifications de programme.
Le gouvernement a présenté ce projet de loi à cette
Assemblée afin de permettre, avec les nombreux programmes d'assurance
collective consentis dans les conventions de travail, de donner aux
employés du gouvernement et à ceux de ses partenaires le meilleur
programme possible de protection à court et à long terme et leur
assurer une retraite convenable, selon les critères d'une politique
sociale moderne et avant-gardiste.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de
Maisonneuve.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, mon intervention en deuxième
lecture, sur le projet de loi no 4, sera brève et, j'espère,
directement au point. Je dois dire, d'abord, quelque chose qui est
peut-être un lieu commun, que tout le monde, sans doute, dans cette
Assemblée est prêt à admettre, c'est-à-dire que le
domaine des fonds de pension est un domaine assez réservé
à certains spécialistes.
Comme tel, sans que cela ait l'air péjoratif à
l'égard des députés, il y a, sans aucun doute, une
espèce de difficulté de compréhension face à tout
ce milieu qui s'appelle le milieu des régimes de rentes, des fonds de
pension, des régimes de retraite, etc. Tout ceci pour vous dire qu'il
s'agit d'un problème d'ordre très technique et que j'admets
être plus compliqué, en général, que d'autres genres
de problèmes en matière de relations de travail que l'on est
habitué de rencontrer.
Cependant, M. le Président, il y a quelque chose de plus que
sous-tend ce projet de loi. Le ministre l'a bien dit dans son allocution. A
deux reprises, entre autres, il mentionne qu'il y a, dans ce projet de loi,
à toutes fins pratiques, l'essence même d'un certain nombre
d'ententes, de protocoles d'entente qui sont intervenus à la suite de la
dernière négociation, soit pendant, soit après. Cela a
été surtout après, si je comprends bien, mais cela a
commencé à être élaboré au cours des fameuses
discussions avec le front commun.
Ma première réaction n'est pas du tout de mettre en doute
la parole du ministre et je voudrais bien qu'il me comprenne là-dessus.
Je n'ai pas l'intention de dire au ministre qu'il ne reflète pas
véritablement, par son discours, ce qu'est le projet de loi. Je veux
dire, cependant, au ministre que, même si le projet de loi a
été déposé il y a à peine cinq jours,
déjà, j'ai reçu, comme membre de l'Assemblée
nationale, certaines représentations je ne suis même pas en
mesure de juger si elles sont exactes ou pas de la part de permanents
syndicaux, représentant des employés visés par ces
régimes de retraite, à l'effet que certains aspects du projet de
loi ne rencontraient pas tout à fait les protocoles d'entente ou les
ententes signés entre les parties, à la suite de la grève
du front commun.
J'insiste sur le fait qu'il s'agit de certains aspects seulement. Dans
l'ensemble, je pense que tout le monde est prêt à admettre qu'il y
a un très grand nombre de choses dans ce projet de loi qui ne viennent
pas de la cuisse gauche de Jupiter, qui viennent d'une négociation entre
les parties.
Cependant, M. le Président, avec le fait qu'on est dans un
domaine très technique, avec le fait que, déjà, on nous
dit, du moins quant à certains représentants syndicaux, que
certains aspects du projet de loi ne reflètent pas exactement le sens
des protocoles d'entente on est en matière quand même
d'interprétation; il est possible que, du côté
gouvernemental, on l'interprète d'une façon et que, du
côté syndical, on l'interprète d'une autre je me dis
que peut-être la meilleure façon pour s'assurer, nous, comme
législateurs, qu'on est en train d'adopter un projet de loi qui respecte
véritablement le protocole d'entente serait d'inviter les parties
concernées, c'est-à-dire, de l'autre côté, les
associations de salariés, à venir nous dire, en commission
parlementaire, si elles sont satisfaites, si le projet de loi respecte
véritablement l'entente intervenue entre elles, les représentants
du gouvernement et les représentants des organismes publics et
parapublics mentionnés ou visés par le projet de loi.
C'est pour ça, M. le Président, que je vais vous faire une
suggestion, je vais la faire au ministre. C'est en m'appuyant sur une
déclaration qui parait dans son discours même que j'oserai faire
une suggestion à l'Assemblée nationale. J'extrais de son discours
de tantôt les mots suivants: "tous les moyens nécessaires pour
s'assurer que soient respectés les conventions collectives et le
protocole d'entente du 4 mai, concernant l'évaluation actuarielle du
régime et la révision des pensions seront assurés". Je
pense que le ministre a dit ça au bas de la page 20 de son discours dont
j'ai copie devant moi. Je suis entièrement d'accord. S'il veut prendre
tous les moyens nécessaires ce n'est pas moi qui le dis; ce sont
ses mots pour s'assurer que ces conventions et ces protocoles d'entente
soient respectés, je lui en suggère un de plus, qui peut se faire
dans les jours qui viennent.
Il s'agirait simplement d'ajourner la discussion de l'adoption de la
deuxième lecture de ce projet pour une semaine, par exemple, en invitant
les associations de salariés concernées à venir nous dire,
en commission parlementaire, ce qu'elles pensent du projet de loi.
Déjà, elles ont eu quatre à cinq jours pour l'examiner. Le
projet de loi a été déposé le 6 décembre et
on est rendu au 11 décembre. Il y a de fortes chances que
déjà un certain nombre d'associations aient pu en prendre
connaissance. Si c'est fait et que déjà leur opinion est
formée à cet égard, ce sera très facile, dans
l'espace de quelques jours, de les inviter à venir nous voir et à
nous dire, en commission parlementaire de la fonction publique, si
véritablement encore une fois, pas que je mette en doute
l'opinion du ministère là-dessus le protocole d'entente et
les conventions collectives ont été respectés lors de la
rédaction du projet de loi.
Je signale au ministre qu'à plusieurs reprises, dans le
passé, il est arrivé que des ententes entre organisations de
salariés et représentants patro- naux n'ont pas été
nécessairement tout à fait respectées dans un projet de
loi. Je lui en cite un qui est déjà au feuilleton. Sans parler du
fond ni du mérite de ce projet de loi, je sais que le ministre du
Travail s'apprête à nous présenter un amendement à
la Loi concernant les relations de travail dans l'industrie de la construction,
un domaine qui est quand même semblable à celui dont discute le
ministre de la Fonction publique.
Or, même après une longue discussion sur le projet de loi
no 9, qui a amendé les relations de travail dans le domaine de la
construction, même après cela, ni les employeurs, ni les
associations de salariés n'ont réussi à s'entendre
parfaitement, à un point tel qu'on est obligé, maintenant, de
revenir à l'Assemblée nationale et d'amender cette loi par le
projet de loi que le ministre du Travail va nous soumettre d'ici quelques
jours, qui est déjà en avis au feuilleton.
Alors, je dis que ce serait tellement simple, comme le dit le ministre,
s'il veut prendre tous les moyens nécessaires pour s'assurer que soient
respectés les conventions collectives et le protocole d'entente,
d'inviter les gens concernés à venir nous dire si, d'après
eux, parce qu'on est dans un domaine où l'interprétation est
possible, le projet de loi colle à la réalité du protocole
d'entente et des conventions collectives.
Motion de report à une semaine
M. BURNS: C'est pour cette raison, M. le Président, et sans plus
retenir le temps de la Chambre, que je vais vous suggérer, par une
motion d'amendement à la motion que nous discutons actuellement,
d'amender la motion de deuxième lecture en y retranchant le mot
"maintenant" et en le remplaçant par les mots "dans une semaine". Vous
voyez que je n'exagère pas, je n'en demande pas plus qu'il faut. Je ne
demande pas que ce projet de loi soit bloqué indéfiniment, loin
de là. Dans une semaine, temps où normalement on sera encore en
séance, on sera encore en train de discuter d'autres projets de loi, du
moins par ce que j'ai entendu cet après-midi de la part du leader du
gouvernement, il est fort possible que dans une semaine on soit encore ici, il
me semble que cela nous donnerait, d'ici mardi prochain, le temps de convoquer
les parties concernées, tant du côté patronal d'ailleurs
que du côté syndical. Je n'ai pas d'objection. Si,
véritablement, comme le dit le ministre, le projet de loi respecte
fidèlement non seulement l'esprit mais la lettre des ententes
intervenues entre les parties, je suis convaincu que l'on va pouvoir
régler cela en dedans de quelques heures. Quand je dis quelques heures,
c'est une heure ou deux, au fond. C'est que tout le monde va venir nous dire:
Oui, c'est bien exact, cela respecte le protocole d'entente, cela respecte les
conventions collecti-
ves. C'est dans ce sens-là que je fais la motion d'ajournement de
la décision de deuxième lecture à une semaine pour nous
permettre de siéger en commission parlementaire et d'inviter les parties
concernées afin d'écouter ce qu'elles ont à dire
là-dessus.
Ce sont les quelques remarques que j'avais à faire, M. le
Président. J'espère que le ministre se rendra à ma demande
qui, je pense, dans les circonstances, n'a vraiment rien
d'exagéré.
M. SAMSON: M. le Président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Sur la motion d'amendement.
M. Camille Samson
M. SAMSON: Sur la motion, M. le Président. Il est bien entendu
que nous allons appuyer la motion qui vient d'être
présentée. Nous n'avons peut-être pas les mêmes
raisons que le député de Maisonneuve, leader de l'Opposition
officielle, lorsqu'il l'a présentée mais j'aimerais prendre les
quelques minutes à ma disposition pour tenter, une fois de plus, de
faire comprendre une chose à cette Chambre, par le biais, cette fois, de
cette motion visant à retarder la deuxième lecture du bill 4. Je
considère que nous nous devons d'appuyer cette motion, non seulement de
l'appuyer mais je pense que le délai aurait pu être plus long, et
cela n'aurait été que meilleur, pour nous permettre, à
nous en tout cas, d'étudier le bill qui nous est
présenté.
M. le Président, il n'est pas question pour moi de revenir sur
une motion de la Chambre qui a été étudiée cet
après-midi et dont la Chambre a disposé. Quand même, pour
faire mieux comprendre ce que je veux vous dire, M. le Président, les
bills qu'il nous reste à étudier d'ici l'ajournement de la
présente session nous sont déposés à un tel rythme
que les deux représentants du Parti créditiste, entre
parenthèses non reconnu...
M. HARDY: Entre parenthèses, ralliement!
M. SAMSON: Cela vous en a bouché un coin, ce n'est pas cela que
vous pensiez que j'étais pour dire, n'est-ce pas?
M. GARNEAU: Cela dépend desquelles. Par qui?
M. SAMSON: Entre parenthèses, non reconnu, M. le
Président.
M. HARDY: Vous êtes rendus avec deux parenthèses!
M. SAMSON: Les deux représentants du Parti créditiste
siègent en cette Chambre, en vertu de nos règlements et en
dépit du fait que nous ne sommes pas reconnus, et on se retrouve avec
devant nous le bill no 4. Je sais que le ministre qui nous l'a
présenté, lui, il connaît son bill, il a
étudié son bill. Il a des recherchistes, il a des conseillers
juridiques, il a tout ce qu'il faut.
Seulement, M. le Président, vous allez comprendre la situation
avec moi. Les représentants d'un parti non reconnu n'ont pas d'outils,
pas de possibilités et doivent étudier une brique de 68 pages et
213 articles qui vient de nous être présentée comme cela.
On nous demande, nous autres, de nous faire une opinion là-dessus, M. le
Président. Cela équivaudrait à dire à des
créditistes: Vous êtes des gens qui voulez prendre des
décisions sans avoir étudié et sans savoir de quoi vous
parlez.
Je regrette, M. le Président. C'est mal nous connaître que
de prétendre que, nous autres, on va embarquer dans ce jeu-là et
que, nous autres, on va voter sur un bill, sur une brique de 68 pages, 213
articles, en n'ayant pas les outils nécessaires, en n'ayant pas les
recherchistes, en n'ayant pas ce qu'il nous faut pour travailler en cette
Chambre.
Je pense, M. le Président, qu'il est temps qu'on comprenne, une
fois pour toutes, que les députés du Parti créditiste sont
des députés à 100 p.c. comme les autres, élus de la
même façon que les autres, avec des majorités
exigées comme cela a été exigé dans le cas des
députés libéraux. Même si vous en avez 102, cela ne
veut pas dire que vous êtes élus plus démocratiquement que
nous autres. Cela veut dire que vous avez été plus chanceux parce
que vous avez mis plus d'argent, cela vous a coûté plus cher.
Mais, M. le Président, on a été élu, nous
autres, librement. C'est peut-être pour cela qu'on nous en veut tant, de
l'autre côté de la Chambre, parce qu'on est libre à un
point de ne pas se laisser piler sur les pieds, ni par cette Chambre, ni
à l'extérieur de cette Chambre.
Je pense, M. le Président, que vous devez d'intervenir. On l'a
dit au tout début de nos assises, ici. Au tout début, la
présidence a dit qu'elle se devait de protéger les groupes
minoritaires. S'il y a un groupe minoritaire en cette Chambre, c'est bien le
nôtre, M. le Président. Si vous voulez protéger les groupes
minoritaires, c'est à votre gauche que vous devez regarder et non
à votre droite, parce qu'ils ne sont pas minoritaires de l'autre
côté, M. le Président.
Je peux vous dire une chose cependant. On n'est pas un parti reconnu et
on est obligé de faire ça, parce qu'on n'aime pas cela, M. le
Président, on n'aime pas cela être obligé de faire cela, je
pense qu'il est temps que vous le sachiez. Si on le fait, c'est parce qu'on est
obligé de le faire. C'est parce qu'on ne nous donne pas de chance et
qu'on ne nous laisse pas le choix des moyens que nous avons à employer.
On est obligé d'utiliser tout ce qu'on peut utiliser pour se faire
reconnaître en cette Chambre.
Bien que, M. le Président, on ne soit pas reconnu, cela ne veut
pas dire qu'on va se laisser piler sur les pieds pour cela. Il y a au moins une
chose qu'on a sur vous autres. Vous êtes 102, vous avez un paquet de
"back-benchers". On n'est que deux mais on n'en a pas de "backbenchers", nous
autres. Je peux vous dire cela. On n'en a pas.
On est des créditistes, on a été élus comme
ça, en vertu de la Loi électorale. On était ici avant la
dernière pluie et on va l'être encore. Je pense que c'est le temps
...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre! Vous avez le droit de parole mais sur la motion.
M. SAMSON: M. le Président, je parle de la motion.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Donnez-moi la raison pour laquelle vous
voulez appuyer cette motion.
M. SAMSON: Je n'ai pas besoin de vous dire pourquoi, je viens de vous le
dire depuis le commencement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Oui.
M. SAMSON: Vous n'avez pas encore compris qu'on n'est pas
capables...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Je comprends assez...
M. SAMSON: ... de prendre une décision sur un bill comme
ça tant qu'on ne nous donne pas les outils nécessaires...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!
M. SAMSON: ... pour en arriver à prendre une décision?
Vous allez nous demander à nous autres de voter, mais pour qui est-ce
que vous nous prenez? On a à voter sur le bill no 4, une brique comme
ça. Au moins, si on nous coupe les micros, les journalistes
présents ont encore les micros ouverts, eux, et ils sont capables de
parler à la population du Québec, capables de dire à la
population de Québec de quelle façon les créditistes sont
traités en cette Chambre et de quelle façon on nous refuse non
seulement le droit de parole sur la troisième lecture, mais
également les outils nécessaires à la bonne marche, parce
qu'on est ici, nous aussi, pour étudier les lois.
On n'est pas ici seulement pour vous regarder, M. le Président,
parce que si c'était ça, le seul but de notre ...
M. BELLEMARE: Question de privilège, M. le Président.
M. SAMSON: ... action, c'est avec plaisir qu'on le ferait.
M. BELLEMARE : Je voudrais savoir exactement quel parti mon honorable
collègue représente. Le Crédit social ou le Parti
créditiste du Québec?
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Ce n'est pas une question de
privilège.
M. BELLEMARE: Je m'excuse si je ne suis pas dans l'ordre.
M. SAMSON: L'honorable collègue qui se pose des questions est un
tout nouvel arrivé de la dernière pluie. Et j'ose espérer
qu'il apprendra en cette Chambre qu'au lieu de s'en prendre à ses
collègues il devrait au moins apprendre à parler au nom des
électeurs de son comté, ce que je ne l'ai pas encore vu faire
tellement depuis qu'il est à l'Assemblée nationale, et ce que
j'espère qu'il aura le courage de faire durant les jours, les
années qui vont suivre, si jamais ses électeurs lui font encore
confiance, chose dont je ne suis pas certain non plus.
M. BELLEMARE: Cela ne donne rien de raconter des balivernes au nom de
mes électeurs.
M. SAMSON: Si vous pensez que je suis pour me laisser arrêter par
un "back-bencher" du Parti libéral qui a été élu il
ne sait pas trop même pourquoi. Il n'a pas été élu,
il a été parachuté à l'Assemblée nationale
avec la caisse électorale du Parti libéral. Ce n'est pas sa faute
s'il a été élu, celui-là, et ça parait
d'ailleurs dans ses propos.
Je veux qu'on comprenne une fois pour toutes que nous sommes ici pour y
rester. Ce sont les électeurs de nos comtés qui nous ont
élus, les électeurs que nous représentons et on va rester
ici aussi longtemps que nos électeurs vont nous envoyer au Parlement de
Québec.
Et c'est bien dommage, mais si le règlement n'est pas ce qu'il
doit être, je suis allé chercher l'autre et en vertu de l'actuel
règlement on nous dit qu'on peut référer aux traditions,
aux précédents. Et dans les traditions et les
précédents vous verrez que dans les autres Parlements...
DES VOIX: A l'ordre!
M. SAMSON: ... même précédant celui-ci, on
respectait les députés à l'Assemblée nationale du
Québec, on respectait le désir de la population et le
privilège d'un député.
J'ai vu souvent mes collègues, ministres actuellement, et j'en ai
même un dont je me rappelle le nom qui se levait souvent pour invoquer
son privilège de député. Notre privilège de
député, c'est de parler au nom de la population qui nous a
élus, au nom de ceux que
nous représentons. Si on ne nous donne pas ces outils... Ce n'est
pas à vous, M. le Président, qu'on s'en prend, parce que vous
n'êtes pas celui qui nous empêche d'avoir les outils;
ceux-là qui nous en empêchent, c'est le gouvernement ...
M. MALOUIN: C'est le peuple.
M. SAMSON: ... qui prépare lui-même ...
M. MALOUIN: C'est faux, c'est le peuple qui n'a pas voulu.
M. SAMSON: Ne vous en faites pas, les "back-benchers" libéraux,
vous allez voir que ce que vous êtes en train de semer dans la
population, vous allez un jour le récolter. N'oubliez pas ça.
Quand on passe le rouleau à vapeur sur l'Opposition, quand on
empêche dans un système parlementaire l'Opposition de
représenter ses électeurs, un jour ou l'autre la population vous
demande des comptes. Et quand la population va vous demander des comptes,
n'oubliez pas, qu'il y a une seule chose ...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
Je voudrais vous rappeler à l'article 98 qui vous donne un droit
de parole tout à fait libre.
Article 98: "Un député qui a obtenu la parole doit limiter
son discours à la question qu'il soulève, à la question
qu'il entend proposer ou à la question dont l'Assemblée est
saisie, et il ne peut s'en écarter, à moins que ce ne soit pour
répondre brièvement à des digressions."
Je crois que nous avons une motion d'ajournement de la deuxième
lecture à une semaine. Vous avez le droit de parler sur ça. Oui,
il reste une minute.
M. SAMSON: M. le Président, j'ai sûrement le droit de
parler là-dessus. C'est pour ça que je disais au gouvernement que
non seulement une semaine, ça fait notre affaire, mais que ce n'est pas
encore assez, parce qu'on a besoin d'outils que nous n'avons pas. Je vous le
disais au tout début, M. le Président: Regardez donc cette
brique-là, regardez-la, vous allez voir que c'est impossible,
honnêtement. Est-ce qu'il y a un député... Vous autres, les
"back-benchers", l'avez-vous étudié?
DES VOIX: Oui.
M. SAMSON: II n'y en a pas un parmi vous autres, les "back-benchers",
qui est capable d'arriver avec un bon discours là-dessus et, pourtant,
vous avez un budget de recherche avec le Parti libéral. Ce n'est pas
l'argent qui vous manque, chez les "back-benchers". Nous autres, il nous manque
des moyens. C'est ça, M. le Président...
M. MALOUIN: Servez-vous des 106 battus.
M. SAMSON: ... que j'étais en train de vous dire, parce que
ça va se répéter souvent. On nous présente des
projets de loi; on nous donne ça à la mitrailleuse et on voudrait
que deux représentants d'un parti politique aient le temps
d'étudier tout ça, alors qu'on s'efforce de nous empêcher
de faire notre devoir, alors qu'on s'efforce de nous empêcher de
travailler, alors que, de toutes parts, M. le Président, on essaie de
nous arrêter, on essaie de nous bloquer pour faire adopter cette loi.
Qu'est-ce qui presse tant dans votre législation? Avez-vous peur de
votre législation au point de ne pas permettre à deux
représentants de l'Opposition d'avoir les outils nécessaires pour
la critiquer? M. le Président, il y a une limite à tout et je
pense que ce soir, c'est le temps que le gouvernement prenne en
considération ceci: aussi longtemps qu'on n'aura pas les outils
nécessaires, on va revenir et aussi souvent que nous le jugerons
à propos.
M. le Président, je demande, en terminant, que le gouvernement le
prenne en considération, parce que ce n'est surtout pas de gaieté
de coeur qu'on est obligé de prendre ces moyens à notre
disposition. Je n'aime pas ça, M. le Président, et je suis
persuadé que vous êtes le premier à ne pas aimer, non plus,
la façon dont ça se déroule présentement. Mais, M.
le Président, le gouvernement est le responsable et c'est à lui
de prendre ses responsabilités. Mais, compte tenu des circonstances,
compte tenu...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, à l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre! Terminez votre phrase.
M. SAMSON: ... du fait qu'on n'a pas les outils nécessaires, le
groupe du Ralliement créditiste et du Parti créditiste va
s'abstenir.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. SAMSON: Voulez-vous arrêter les "backbenchers"?
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, à l'ordre! A l'ordre, s'il
vous plaît !
M. SAMSON: Notre groupe, M. le Président, va s'abstenir de voter
sur cette motion de deuxième lecture. On va voter en faveur de la motion
du député de Maisonneuve pour retarder la deuxième lecture
dans l'espoir que, pendant ce temps-là, on aura des outils, mais si, au
bout d'une semaine, on n'a pas d'outils, on s'abstiendra de voter encore une
fois. On va s'abstenir, M. le Président et je tiens à le
dire pour que la presse le rapporte parce qu'on ne nous a pas
donné les outils nécessaires pour travailler.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre, messieurs, à
l'ordre! Sur la motion d'amendement, l'honorable ministre de la Fonction
publique.
M. Oswald Parent
M. PARENT (Hull): M. le Président, je suis surpris de la
scène que vient de faire le député de Rouyn-Noranda. Je me
demande s'il était à mémoriser la dernière fin de
semaine. Je pense qu'il n'a pas raison de prétendre, quant à la
brique qu'il a devant lui, comme il l'a souligné, qu'il n'a pas les
outils nécessaires pour pouvoir donner une version de ce document. On se
rappellera que j'ai déposé en cette Chambre, à la fin de
juin...
M. SAMSON: M. le Président, je soulève une question de
privilège pour faire remarquer, puisqu'on m'attribue des propos,
à l'honorable ministre que cette brique, qui a été
déposée avant aujourd'hui, nous le savons, n'était sous la
responsabilité, dans notre parti, ni du député de
Rouyn-Noranda, ni du député de Beauce-Sud. Elle était la
responsabilité, M. le Président, de quelqu'un...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. SAMSON: ... elle était la responsabilité, M. le
Président laissez-moi finir de quelqu'un...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Un instant...
M. SAMSON: ... qui n'est plus en cette Chambre. Quant à nous, on
vient juste d'en prendre connaissance tout dernièrement.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. ROY: M. le Président, sur une question de
privilège.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Il n'y a pas
deux députés qui vont parler sur la même question de
privilège. La preuve, c'est que le règlement dit qu'il n'y a pas
de débat sur une question de privilège. Tâchez d'être
respectueux du règlement, je ne sais pas...
M. PARENT: M. le Président, ça dénote, je pense,
une chose de plus...
LE PRESIDENT: Parlez sur la motion d'amendement.
M. PARENT: M. le Président, sur la motion d'amendement, je
soulignais justement que j'avais déposé des documents à la
fin de juin. C'est là que je constate le manque de continuité
dans je ne sais pas si c'est le Parti créditiste ou le Ralliement des
créditistes, mais...
M. ROY: Une question de privilège. Je tiens à dire au
ministre, M. le Président, sur une question de privilège, que ce
projet de loi vient d'être déposé devant l'Assemblée
nationale et, en ce qui nous concerne, on n'a pas eu les outils pour
vérifier avec ce que vous aviez déjà fait auparavant.
M. LEVESQUE: Ils feraient bien mieux d'aller à la
télévision voir leur chef parler présentement,
là.
UNE VOIX: C'est vrai.
M. PARENT: Je vais tenter d'éviter des propos qui peuvent
soulever des débats. Je voudrais simplement souligner à la
Chambre qu'à la fin de juin j'ai déposé en cette Chambre
copies des conventions collectives qui ont été signées
entre le gouvernement et les employés syndiqués, entre le
gouvernement, ses partenaires dans le domaine de l'éducation et des
affaires sociales et les ministères de l'Education et des Affaires
sociales. J'ai déposé à ce même moment le document
du protocole d'entente signé par les trois chefs des trois centrales
syndicales, entente intervenue le 4 mai, dont les trois parties aux
présentes, la CEQ, la CSN et la FTQ ont dûment signé le
protocole d'entente suite aux conventions collectives.
M. BURNS: Est-ce que le ministre me permet?
M. PARENT: Oui.
M. BURNS: Est-ce que le ministre n'admet pas qu'un protocole d'entente
une fois devenu projet de loi peut avoir des divergences ou peut être
différent une fois rédigé sous forme de projet de loi?
C'est rien que ça que j'ai dit, M. le Président.
Alors, est-ce que le ministre n'admet pas qu'il peut y avoir des
divergences dans l'interprétation même du protocole d'entente
quand on le transfère sous forme de projet de loi? C'est uniquement
à ce niveau que je pense nécessaire d'entendre les gens.
M. PARENT: Si le député de Maisonneuve me laisse continuer
mon exposé, il va apprendre toute la procédure que nous avons
suivie. Si le député de Maisonneuve, en plus, avait
été renseigné sur le dossier, il saurait qu'actuellement,
au moment où je parle, je n'ai reçu aucune demande d'aucune des
centrales syndicales pour des séances publiques.
Aucune des centrales syndicales...
M. BURNS: Pour une raison bien simple, c'est que le front commun se
rencontre demain matin.
M. PARENT: M. le Président, je ne sais pas s'il y a un front
commun demain, mais je sais une chose, c'est que je suis arrivé au
ministère de la Fonction publique le 14 février et que les
négociations n'étaient pas entreprises en ce qui concerne le
protocole d'entente pour le régime de retraite, même si la date
était expirée. C'est à
ce moment-là que j'ai entrepris les discussions avec les trois
centrales syndicales. Je suis même allé au-delà en ayant
quatre rencontres avec l'exécutif, du Syndicat des fonctionnaires du
gouvernement. Or, nous avons convenu de part et d'autre, depuis février,
premièrement, du protocole. Deuxièmement, au moment où
j'ai déposé la loi 31 pour former le bureau d'organisation du
régime de retraite, nous avions déjà préparé
le projet de loi et il a été soumis aux trois centrales
syndicales.
Il en a été de même à la suite de l'adoption
de la loi 31, qui donnait le pouvoir au ministre de la Fonction publique de
procéder par règlement pour la période n'excédant
pas le 31 décembre 1973. Il y a donc eu 31 règlements de soumis
jusqu'ici aux trois centrales syndicales. Comme j'avais convenu au moment de la
signature du protocole d'entente qu'il y aurait des consultations continuelles,
dans tout ce secteur, comme les ententes avaient été conclues
entre les centrales syndicales et le ministre de la Fonction publique, nous
avons respecté, à chaque étape du processus
législatif, la consultation avec les centrales syndicales.
Ils ont même donné leur approbation sur les 31
règlements que l'on retrouve maintenant à l'intérieur de
cette loi et sous réserve; dans les approbations que j'ai reçues
des trois centrales syndicales, quelques points demeurent en litige, il est
vrai, sur la question de l'interprétation. Non pas des points majeurs,
mais des points mineurs.
D'un autre côté, j'ai eu l'impression qu'on voulait tenter
d'obtenir, par le moyen d'une commission parlementaire, de pouvoir
renégocier des choses qui n'étaient pas dans les conventions
collectives ou qui portent à mauvaise interprétation dans les
conventions collectives comme telles. Il y a également, je pense, deux
précédents.
M. BURNS: Vous avez eu cette impression-là de remarques faites
par les représentants syndicaux?
M. PARENT (Hull): II est normal, simplement dans le secteur, par
exemple, des religieux où on aurait voulu que ce soit quinze ans directs
plutôt que quinze ans avec effet pour ceux qui ont racheté depuis
1965, depuis que la loi le permet, que ce soit quinze ans en sus des huit ans
pendant lesquels ceux qui étaient à l'emploi en 1965 ont
contribué jusqu'ici. La convention, à ce moment-là...
M. BURNS: A ce moment-là, vous avez reçu des
représentations.
M. PARENT (Hull): ... elle est claire, la convention.
M. BURNS: Vous avez reçu des représentations, alors.
M. PARENT (Hull): Ce sont les suites des négociations à la
table du front commun, les rapports que m'ont soumis les négociateurs;
à la suite du protocole d'entente on a essayé de nous amener vers
cette compréhension, que nous devrions avoir quinze ans directs
plutôt que d'avoir, comme il est dit dans le projet de loi, quinze ans y
compris les années pour lesquelles on a contribué. Or, ce ne sont
pas, si on veut, dans l'ensemble des difficultés ou des
interprétations de part et d'autre. Nous avons fait venir chacune des
parties. Chacune des parties est consciente du problème que cela pose et
surtout du déficit actuariel. On n'a pas voulu s'aventurer plus loin
dans les revendications parce qu'il y a contribution ou partage de 5/12 et
7/12. A ce moment-là, on voulait tenir le taux le plus bas possible.
Dans le processus que nous avons suivi jusqu'ici, tous les
renseignements que nous avons déposés en cette Chambre, au cours
de la présentation du bill 31, les ententes, les consultations qui ont
été poursuivies encore jusqu'à il y a une dizaine de jours
nous permettent de croire qu'il n'est pas nécessaire de recourir
à une semaine de délai pour la présentation et
l'étude de cette loi, surtout que la loi actuelle se termine le 31
décembre; nous ne pouvons pas jouer avec la date limite.
M. BURNS: Est-ce que le ministre me permet une question? Si je diminue
mon délai d'une semaine à trois jours, est-ce qu'il est
prêt à l'accepter? Ce n'est pas du tout dans l'intention de perdre
du temps que j'ai fait cette motion-là, c'est uniquement dans le but
d'amener les personnes concernées à discuter ou, tout au moins,
à donner leur point de vue à la commission parlementaire. Je suis
bien prêt à dire, si on peut les faire siéger demain ou
après-demain, à dire dans deux jours, cela ne me dérange
pas, c'est uniquement une question de possibilité ou, si vous voulez, de
mobilité que j'ai mis une semaine. Si vous me dites qu'on peut
rencontrer ces gens-là dans trois jours, je n'ai pas d'objection
à changer ma motion. Ce n'est pas du tout dans le but de retarder
l'adoption du bill que je le fais.
M. PARENT (Hull): M. le Président, je pense bien exprimer ma
pensée en disant que toutes les négociations, toutes les
consultations ont été faites. S'il y a encore des points qui
restent en litige, que je ne connais pas, je suis fort sensible à savoir
que le député de Maisonneuve recevra sûrement les
renseignements, même si nous sommes en commission parlementaire.
M. BURNS: Le projet de loi risque d'être adopté à ce
moment-là, c'est ça le problème.
M. PARENT (Hull): M. le Président...
M. BURNS: Je pourrais vous donner des exemples. Est-ce que, par exemple,
à l'article 4, on est absolument certain de l'entente ou de la
projection de l'entente dans le projet de loi
relativement au mot "votant" ou au mot "cotisant"? C'est un petit
problème que je pose en passant.
M. PARENT (Hull): ... toutes ces questions ont déjà
été soumises à la consultation; elles sont même
appliquées déjà depuis le 1er juillet.
Depuis le 1er juillet cette loi est déjà opérante.
Elle remplace la loi 31 qui avait un objectif temporaire jusqu'au 31
décembre, parce que nous n'avions pas eu le temps de consulter...
M. BURNS: ...qu'on adopte un projet de loi.
M. PARENT (Hull): ...les centrales syndicales pour connaître
exactement l'interprétation que les centrales avaient sur le projet de
loi. Nous n'avons pas voulu le voter à la vapeur. Il s'agissait d'une
fin de session et, le 6 juillet, nous avons adopté un projet de loi
temporaire qui permettait au bureau d'organisation du régime de retraite
de poursuivre les consultations, de soumettre à l'attention des trois
centrales syndicales les projets de règlement que nous aurions dû
adopter pour la régie interne de l'administration du régime. Nous
n'avons pas voulu même procéder à l'adoption de
règlements, même si nous les avions soumis et obtenu le
consentement des trois centrales syndicales.
Je pense, M. le Président, que nous ne pouvons pas recommencer
les négociations à néant; nous ne pouvons pas reprendre
tout ce qui a été fait depuis au-delà d'un an et demi au
front commun d'abord par la négociation collective, par la suite, toutes
les consultations et négociations qu'il y a eu aux tables pour arriver
au protocole d'entente, les consultations successives pour permettre d'obtenir
l'accord des trois centrales syndicales sur les règlements qui
constituent, aujourd'hui, le projet de loi. Je pense que, c'est de
l'absurdité de croire que nous allons recommencer tout autour d'une
table où, je pense', nous n'aurions rien à gagner, sinon quelques
points peut-être qui pourraient être soulevés et qui,
à mon sens, sont très minimes.
M. BURNS: M. le Président, est-ce votre interprétation de
l'article 101 que j'ai un droit de réplique?
Ce n'est pas votre interprétation?
LE PRESIDENT: C'est une motion de forme.
M. BURNS: J'aurais bien aimé répliquer au ministre
là-dessus, parce que j'aurais bien aimé lui dire que tout ce
qu'on lui demandait...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Que ceux qui sont en
faveur.
M. BURNS: Je demande un vote, M. le Président.
LE PRESIDENT: Un vote enregistré? M. BURNS: Oui.
LE PRESIDENT: Est-ce que vous êtes prêts à voter? Si
vous voulez prendre vos sièges respectifs, on pourrait voter.
Vote sur la motion de report à une
semaine
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement de
l'honorable député de Maisonneuve veuillent bien se lever, s'il
vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Burns, Léger, Charron, Lessard,
Bédard (Chicoutimi), Samson, Roy.
LE PRESIDENT: Que celle et ceux qui sont contre cette motion veuillent
bien se lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Parent (Hull), Mailloux, Garneau,
Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley, Bienvenue,
Forget, Vaillancourt, Houde (Fabre), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown,
Bacon, Blank, Lamontagne, Veilleux, Saint-Hilaire, Séguin, Cornellier,
Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Fraser, Picard, Gratton, Carpentier,
Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Larivière, Shanks, Springate,
Pépin, Bellemare, Bonnier, Boudreault, Boutin (Johnson), Boutin
(Abitibi-Ouest), Chagnon, Caron, Ciaccia, Côté, Déom,
Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Lapointe, Lecours, Malépart,
Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Parent (Prévost), Picotte,
Sylvain, Tardif, Verreault.
LE SECRETAIRE: Pour: 7 Contre: 64
LE PRESIDENT: La motion est rejetée. M. BURNS: La majorité
baisse. UNE VOIX: II manque encore 38 députés! M. LEVES QUE:
Deuxième lecture.
Vote de deuxième lecture
LE PRESIDENT: Vote de deuxième lecture. Est-ce que cette motion
est adoptée?
DES VOIX: Vote!
M. BURNS: M. le Président, nous allons voter en faveur de la
deuxième lecture, malgré la défaillance gouvernementale.
Je veux tout
simplement dire que je ne demande pas un vote mais que nous allons voter
en faveur parce que quand même, dans l'ensemble, le projet
améliore une situation. Cela, je ne veux pas le nier du tout. Mais
j'aurais aimé, comme je l'ai dit tantôt, qu'on soit...
M. LEVESQUE: Enregistré, M. le Président. M. BURNS:
Enregistré? D'accord.
M. ROY: M. le Président, avant que le vote ne soit
enregistré, j'aimerais quand même vous signaler que le
député de Rouyn-Noranda et moi-même, nous allons nous
abstenir.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. ROY: Vous trouvez cela
drôle?
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Vote enregistré.
Que celle et ceux qui sont en faveur de cette motion de deuxième
lecture veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Parent (Hull), Mailloux, Garneau,
Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley, Bienvenue,
Forget, Vaillancourt, Houde (Fabre), Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson,
Perreault, Brown, Bacon, Blank, Lamontagne, Veilleux, Saint-Hilaire,
Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Fraser, Picard,
Gratton, Carpentier, Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Larivière,
Shanks, Springate, Pépin, Bellemare, Bonnier, Boudreault, Boutin
(Johnson), Boutin (Abitibi-Ouest), Chagnon, Caron, Ciaccia, Côté,
Déom, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance, Lapointe,
Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Parent
(Prévost), Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Verreault, Burns,
Léger, Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi).
LE PRESIDENT: Abstentions?
M. SAMSON: Le député de Rouyn-Noranda et le
député de Beauce-Sud.
LE PRESIDENT: Veuillez inscrire les deux abstentions.
LE SECRETAIRE: Pour: 72. Contre: Aucun. Deux abstentions.
Projet de loi déféré à la
commission
M. LEVESQUE: Je voudrais, M. le Président, proposer que ce projet
de loi soit déféré à la commission parlementaire de
la fonction publique.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
UNE VOIX: Adopté.
M. BURNS: M. le Président, nous serons favorables à cette
motion...
LE PRESIDENT: Je crois qu'il n'y a pas de droit de parole sur cette
motion, si je me rappelle bien.
M. BURNS: Puis-je quand même?
LE PRESIDENT: S'il y a consentement unanime.
DES VOIX: Consentement.
M. BURNS: Je veux simplement...
M. ROY: Nous sommes en faveur qu'on puisse s'exprimer dans cette
Assemblée, M. le Président. Consentement accordé?
M. SAMSON: Consentement.
UNE VOIX: Si le député de Beauce-Sud a dit oui, on
peut.
M. BURNS: Cela ne me fait rien; le "chiard", vous allez l'avoir en
commission. Je ne veux pas vous faire de "chiard", là; je veux juste
dire...
M. LEVESQUE: Non, non! on va attendre.
M. BURNS: Je veux juste poser une question.
M. LEVESQUE: On va attendre.
M. BURNS: Vous aimez mieux attendre en commission? D'accord, M. le
Président, je suis respectueux des règles de la Chambre, de votre
personne, je me rassois.
LE PRESIDENT: Cette motion de déférence est
adoptée? Oui.
M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce qu'il y a des questions sur
la journée de demain, non?
M. BURNS: Oui, à quelle heure on siège?
M. LEVESQUE: Ah bon, je propose l'ajournement de la Chambre à
demain, quinze heures.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
L'Assemblée ajourne ses travaux à demain, quinze
heures.
(Fin de la séance à 22 h 26)