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(Dix heures quarante-deux minutes)
M. LEBEL (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre,
messieurs!
Présentation de pétitions» Lecture et
réception de pétitions. Présentation de rapports de
comités élus. Présentation de motions non
annoncées. Présentation de bill privés.
Formation de comités
M. BELLEMARE: M. le Président, dans les motions non
annoncées, j'aurais une série de motions à
présenter ce matin, pour la formation de certains comités qui
siégeront en dehors de la session.
Copropriété des immeubles
M. BELLEMARE: Je fais donc motion pour qu'un comité
spécial de neuf membres soit institué, avec pouvoir d'entendre
des témoins et de siéger après la prorogation, pour
continuer l'étude du projet de loi de la copropriété des
immeubles; que ledit comité fasse rapport à la Chambre au
début de la prochaine session; que MM. Bergeron, Binette, Choquette,
Gabias, Lavoie (Laval), Loubier, Paul, Théoret, Wagner forment ledit
comité et que M. Bergeron en soit le président.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. LESAGE: Le secrétaire étant M. Bonin, n'est-ce pas?
M. BELLEMARE: M. Bonin, dans tous les cas où le secrétaire
n'est pas nommé. Il y a des comités où ce sont des
députés qui sont nommés.
M. LESAGE: Oui, d'accord. Mais, au début de la session, lorsque
le comité des onze fait rapport, nous nommons habituellement le greffier
des comités ou secrétaire des comités. Il est
secrétaire de tous les comités.
M. BELLEMARE: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité de l'Assemblée
législative
M. BELLEMARE: Je fais motion qu'un comité spécial de
quatorze membres soit institué, avec pouvoir d'entendre des
témoins et de siéger après la prorogation, pour
étudier les moyens d'améliorer le travail de l'Assemblée
législative et de préparer à cet effet un nouveau
règlement comportant les transformations substantielles, ledit
comité devant faire rapport à la Chambre au début de la
prochaine session. Que MM. Bellemare, Bergeron, Cliche, Demers,
Fréchette, Hyde, Laporte, Lebel, LeChasseur, Lefebvre, Paul, Pinard,
Plamondon, Théoret forment ce comité spécial, le
président étant l'honorable président de la Chambre et le
secrétaire M. Raymond Desmeules.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Refonte du code de la route
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais motion pour qu'un
comité spécial de onze membres soit institué, avec pouvoir
d'entendre des témoins et de siéger après la prorogation,
pour entreprendre la refonte complète du code de la route; que ledit
comité ait le pouvoir de s'adjoindre des fonctionnaires pour
exécuter son travail, et que le secrétaire soit tenu de
transmettre le compte rendu de chacune de ces séances au greffier en loi
de l'Assemblée législative. Que Mme Claire Kirkland-Casgrain, MM.
Bergeron, Blank, Coiteux (Duplessis), D'Anjou, Gérin-Lajoie, Hamel,
Leduc (Taillon), Lizotte, Picard (Dorchester), Plamondon forment ledit
comité spécial, le président étant M. D'Anjou et le
secrétaire, M. Blank.
Mo LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité de la liberté de la
presse
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais motion pour qu'un
comité spécial de neuf membres soit institué, avec pouvoir
d'entendre des témoins et de siéger après la prorogation,
pour faire un examen du problème de la liberté de la presse, des
faits qui peuvent la mettre en danger et pour examiner si les lois de la
province en assurent la protection.
Que ledit comité fasse rapport à la Chambre à la
prochaine session. Que MM. Bourassa, Cardinal, Cloutier, Gabias, Laporte,
Lesage, Maltais (Limoilou), Michaud et Sauvageau forment ledit comité.
Que le président en soit M. Cloutier.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Secrétaire...
M. LESAGE: M. Bonin.
M. BELLEMARE: ... M. Bonin.
Comité de la jeunesse, des sports et des
loisirs
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais motion pour qu'un
comité spécial de dix membres soit institué, avec pouvoir
d'entendre des témoins et de siéger après la prorogation
pour étudier les problèmes relatifs à la jeunesse, aux
sports et aux loisirs. Que ledit comité fasse rapport à la
Chambre au début de la prochaine session. Que MM. Bergeron, Brisson,
Brown, Gardner, Grenier, Hamel, Houde, Leduc (Laviolette), Parent et Sauvageau
forment ledit comité spécial. Que M. Sauvageau en soit le
président.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Relations industrielles sur le camionnage
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais motion pour qu'un
comité spécial de douze membres soit institué, avec
mission de continuer le travail entrepris par le sous-comité des
relations industrielles sur le camionnage au cours de la session et avec
pouvoir de siéger après la prorogation et d'entendre des
témoins afin de poursuivre l'étude des normes de travail dans le
camionnage. Que ledit comité fasse rapport à la Chambre au
début de la prochaine session. Que MM. Beaupré, Bernatchez,
Flamand, Gagnon, Gardner, Grenier, Lafrance, Mailloux, Pinard, Plamondon, Roy
et Tremblay (Bourassa) forment ledit comité spécial. Que M. Roy
en soit le président et M. Jasmin, le secrétaire.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Pouvoirs des comités après la
prorogation
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais motion pour que le
comité de l'éducation de la Chambre, le comité de
l'industrie et du commerce, le comité permanent de la Chambre et le
comité des relations industrielles, institués au dé- but
de la présente session, soient autorisés à tenir des
séances avec les mêmes pouvoirs après la prorogation. Que
ces comités fassent rapport à la Chambre au cours de la prochaine
session. Les présidents de chacun de ces comités ont
déjà été nommés.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LAFRANCE: Une simple explication, M. le Président. Les autres
membres de la Chambre seront-ils admis?
M. BELLEMARE: Bien sûr. Il n'y a aucune objection, comme dans tous
les autres comités d'ailleurs.
M. LESAGE: J'espère que tous ces... UNE VOIX: Vous ne serez pas
là.
UNE VOIX: Est-ce que les députés vont être
avisés?
M. BELLEMARE: Ah oui, oui. M. Bonin, qui est le secrétaire des
comités, avisera tous les membres de la Chambre.
Particulièrement, je recommanderais, pour la date qui sera fixée,
qu'un avis soit donné dans les journaux. Ce serait plus pratique je
pense, pour tout le monde.
D'ailleurs, il sera question du comité, dans deux minutes.
M. le Président, je fais motion pour que la composition...
M. LESAGE: Il y a le comité de l'éducation en particulier
qui peut intéresser les députés non membres d'un
comité.
M. BELLEMARE: Tous les comités que je viens de nommer.
M. LESAGE: Evidemment, le journal des Débats ne peut pas rendre
le ton qu'a employé le ministre du Travail lorsqu'il a répondu:
« Bien sûr » à la question du député de
Richmond.
M. BELLEMARE: Est-ce que vous voulez que J'y mette du miel?
M. LESAGE: Non. Il y en avait, mais c'est cela. Il y en avait! Mais le
journal des Débats ne peut pas...
M. BELLEMARE: Alors là...
M. LESAGE: ... malgré les efforts des imprimeurs, imprimer au
miel!
M. BELLEMARE: Je suis convaincu, M. le Président, que ce sera
bien sûr!
Changements aux comités
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais motion pour que la
composition du comité des relations industrielles soit modifiée
de la manière suivante; M. Hamel remplace M. Boudreau, M. Sauvageau
remplace M. Charbonneau, M. Paul remplace M. Cloutier, M. Murray remplace M.
Johnston.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-telle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Je fais motion, M. le Président, pour que la
composition du comité de l'industrie et du commerce soit modifiée
de la façon suivante; Que M. Gauthier, de Berthier, remplace M.
Croisetière, que M. Sauvageau remplace M. Plamondon.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais motion pour que la
composition du comité de l'éducation soit modifiée de la
manière suivante; M. Johnston remplace M. Loubier, M. Martellani
remplace M. Masse, M. Théoret remplace M. Bergeron.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais motion pour que cette
Chambre recommande que les dispositions du deuxième alinéa...
M. LESAGE: M. le Président, avant de passer à cette
dernière motion, qui est un peu indépendante des autres...
M. BELLEMARE: Oui.
M. LESAGE: Pendant que nous en sommes aux motions concernant les
comités, je voudrais souligner qu'avant son départ pour voyage,
le président de notre caucus libéral avait remis des notes au
député de D'Arcy-McGee au sujet de la composition des
comités.
Je voudrais qu'il soit bien entendu que nous acceptons les motions qui
viennent d'être proposées par le leader du gouvernement, mais
sujet à rectification quant à la composition.
M. BELLEMARE: Je n'ai aucune objection. D'ailleurs, nous avons
suivi...
M. LESAGE: En autant que les députés libéraux sont
concernés.
M. BELLEMARE: Nous avons suivi fidèlement tout ce qui
était convenu ici...
M. LESAGE: Oui.
M. BELLEMARE: ... sauf que, lorsque le leader de l'Opposition est parti,
il n'était pas question de faire siéger complètement les
trois comités permanents...
M. LESAGE: C'est cela.
M. BELLEMARE: ... de l'éducation, de l'industrie et du commerce
et des relations industrielles.
M. LESAGE: Il y a aussi le comité de l'éducation...
M. BELLEMARE: Ces trois-là...
M. LESAGE: ... j'ai fait, hier soir, les remplacements. Quant aux deux
autres, nous voulons vérifier.
Absences en Chambre
M. BELLEMARE: D'accord. Je comprends l'attitude du chef de l'Opposition.
M. le Président, voici une motion d'un autre caractère. Je dis
à la Chambre que c'est la dernière année que je la
présente. Ce n'est pas raisonnable, pour ceux qui sont continuellement
en Chambre et qui paient des frais de séjour, qu'à la toute
dernière minute de la session certains autres députés
reçoivent une absolution générale. C'est un devoir civique
qu'on a de siéger dans cette Chambre et d'y être
présent.
Je pense que c'est la dernière année que je fais cette
motion à la Chambre. Je vous garantis que je ne serai sûrement pas
le proposeur, l'an prochain, d'une pareille motion. Il est temps que chacun de
nous prenne ses responsabilités et qu'on soit en Chambre puisque l'on a
été élu pour cela. Je fais donc motion pour que cette
Chambre recommande que les dispositions du deuxième alinéa de
l'article 95 de la Loi de la
Législature, Statuts refondus 1964, chapitre 6, ne soient pas
appliquées pour le député qui était en fonction le
29 novembre 1968. Je dois, ici, signaler à la Chambre que l'honorable M.
Kie-rans s'est acquitté et a remboursé les jours où il
était absent.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. LESAGE: M. le Président, sur la motion. Il y a une raison
péremptoire pour laquelle, évidemment, le ministre du Travail ne
pourra pas présenter une pareille motion l'année prochaine, c'est
qu'il sera rendu de ce côté-ci de la Chambre.
M. BELLEMARE: Pauvre lui, il rêve en couleur!
M. LESAGE: II y a trop longtemps que nous disons, d'un côté
et de l'autre, que ce sera la dernière fois. Cette fois-ci, c'est la
dernière et je m'y engage, M. le Président.
M. BELLEMARE: Merci. Alors, M. le Président...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): La reine ne négociera pas avec ses
sujets.
M. BELLEMARE: Je ne voudrais pas citer ici les noms de ceux qui ont
beaucoup d'absences, mais il me semble que cela ne devrait plus se
répéter.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: M. le Président, ce matin, nous avons reçu
les épreuves du bill...
M. LESAGE: II n'y a pas une autre procédure à faire...
M. BELLEMARE: Oui, oui.
M. LESAGE:... en ce qui concerne un comité?
M. BELLEMARE: M. le Président, ce matin, nous nous sommes
parlé au téléphone, pieusement.
M. LESAGE: Agréablement.
M. PINARD: Après votre prière ou avant?
M. BELLEMARE: Je ne sais pas s'il avait fait la sienne, mais la mienne
était sûrement faite. Nous nous sommes entendus...
M. LESAGE: Bien, il n'y a pas eu d'entente sur la date.
Comité de l'éducation
M. BELLEMARE: M. le Président, nous nous sommes entendus,
après l'appel du chef de l'Opposition, avec le nouveau leader, le
député de D'Arcy-McGee, quant à la date du 14 janvier.
Nous avons pensé que le comité...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! UNE VOIX: Un autre de ses bateaux! DES VOIX:
A l'ordre!
M. LESAGE: M. le Président, le député de
D'Arcy-McGee me dit que le ministre du Travail lui a mentionné une date,
mais il ajoute: Je n'ai certainement pas accepté, car je n'avais pas
autorité de le faire.
M. BELLEMARE: Ah! Je ne pense pas que l'honiteté du
député soit mise en doute. J'ai dit, M. le Président,
à ce moment-là, à l'honorable député de
D'Arcy-McGee, écoutez bien, je ne veux pas faire un débat,
ça ne sert à rien d'en faire un, je lui ai montré le
calendrier, je lui ai donné des raisons...
M. LESAGE: C'est le 23 décembre qui nous convient,
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: ... pour lesquelles il était difficile de
siéger durant la première semaine de janvier ou la
deuxième...
M. LESAGE: Bien, pourquoi pas le 23 décembre? Lundi.
M. BELLEMARE: ... M. le Président, et nous avons, d'un commun
accord, il a accepté ma suggestion, il a acquiescé que le 14
janvier était une date excellente. Alors M. le Président, je sais
que l'honorable député ne...
M. LESAGE: Je n'y étais pas.
M. BELLEMARE: . reviendra pas sur sa décision. C'est
pourquoi j'ai fait communiquer au greffier de la Chambre que la date du 14
Janvier était celle qui, d'un commun accord, était la plus
recommandable.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, l'honora-
ble ministre du Travail me fait nettement un excès d'honneur ce
matin. Nous avons causé entre nous deux du calendrier. Le ministre a
exprimé l'avis que, pendant la période des Fêtes, ce serait
difficile de réunir un comité. J'ai exprimé mon accord sur
ce point de vue. Mais je n'ai absolument pas d'autorité pour accepter
une entente, au nom du parti, ni au nom du comité. Celui qui est
chargé de diriger les travaux du comité de l'éducation, de
ce côté-ci de la Chambre, est le député de
Vaudreuil-Soulanges; je ne suis pas autorisé à parler en son nom.
J'ai exprimé, en conversant avec le ministre, une opinion personnelle
quant au calendrier, et j'ai compris qu'il exprimait, de son côté,
une opinion personnelle.
M. BELLEMARE: Alors, M. le Président, quand l'honorable
député me fera signe comme ça, il faudra que je prenne mes
précautions. Il faudrait qu'il fasse ça de même, il ne
faudrait pas qu'il se trompe. Quand il fait ça, moi, je pense qu'il veut
dire oui, s'il faisait ça, ça voudrait dire non. Alors, il a fait
ça, M. le Président, j'ai pensé que c'était
d'accord. Alors M. le Président...
M. MALTAIS (Saguenay): Il a dit oui, je ne suis pas « boss
».
M. LESAGE : J'ai quelque chose à dire là-dessus.
M. BELLEMARE: Bien oui. Nous sommes bien prêts à vous
entendre.
M. LESAGE: M. le Président, je ne vois pas pourquoi nous ne
siégerons pas le 23 décembre, lundi, au comité de
l'éducation, sur le bill 85.
Je pense que nous sommes prêts.
UNE VOIX: Vous n'y serez pas.
M. LESAGE: Certainement que je serai à Québec. Et je ne
serai pas seul, M. le Président, nous sommes prêts le 23
décembre.
M. GRENIER: Venez alors.
M. LESAGE: Est-ce que le ministre est disposé à accepter
la date du 23 décembre? Evidemment, la majorité peut
décider, nous sommes...
M. BELLEMARE: M. le Président, c'est un excès de
zèle et, comme pour la motion d'hier, c'est seulement...
M. LESAGE : Le ministre vient de faire signe que oui.
M. BELLEMARE: Pas d'autre chose, pour jeter de la poudre aux yeux. Il
n'est pas prêt à siéger le 23...
M. LESAGE: Oui, nous sommes prêts. Oui, nous sommes
prêts.
M. BELLEMARE: Non, ses députés n'ont pas été
consultés et c'est encore de la poudre aux yeux, de la petite
stratégie, pour dire que le gouvernement n'est pas prêt. Ce n'est
pas ainsi, M. le Président, qu'il s'agit d'envisager. Au contraire, nous
avons accepté ce matin une entente...
M. LESAGE: II n'y a pas eu d'entente. M. BELLEMARE: ... sur le 14
janvier...
M. LAFRANCE: II faudra inscrire ça dans les débats.
M. BELLEMARE: ... et, M. le Président, l'acquiescement de
l'honorable député de D'Arcy-McGee fait que je fais motion pour
le 14 janvier. D'ailleurs, je vais donner des avis dans les journaux.
M. LESAGE: M. le Président, est-ce que le ministre accepterait un
amendement? Est-ce qu'il accepterait que nous siégions le 7 janvier?
C'est un mardi, ce serait normal.
M. BELLEMARE: M. le Président, que le chef de l'Opposition
arrête donc, qu'il comprenne donc la situation de nos familles.
M. LESAGE: Les écoles vont être rouvertes à ce
moment-là.
M. BELLEMARE: De nos familles, M. le Président. Nos
députés ont passé ici, je dirai tout à l'heure, M.
le Président, le nombre d'heures qu'on a siégé ici, le
nombre de jours qu'on a faits, pour dire que le travail, M. le
Président...
M. LESAGE : Si le ministre continue, on n'a pas fini.
M. BELLEMARE: J'espère que le chef de l'Opposition va comprendre
que nous avons aussi des familles, et que nous aimons y être de temps en
temps.
M. LESAGE: Bien, moi aussi.
M. MALTAIS (Saguenay): On ne vous le reproche pas.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce que l'honorable chef de l'Opposition
fait une motion d'amendement formelle sur cette motion?
M. LESAGE: J'avais l'espoir que le ministre accepte une
contreproposition absolument raisonnable. Le 7 janvier, les classes sont
rouvertes ou rouvrent ce jour-là. Il me semble que nous pourrions
recommencer à travailler ce jour-là.
UNE VOIX: Pensez donc...
M. DOZOIS: M. le Président, si on me le permet, je pense qu'il
faut être objectif en fixant une date pour la convocation de ce
comité.
Je trouve que le leader du gouvernement en cette Chambre a
été objectif en suggérant cette date du 14 janvier. On l'a
dit au cours du débat, c'est un sujet des plus sérieux. Il faut,
à mon avis, avertir les gens qui sont intéressés à
venir présenter leur point de vue sur un sujet de cette nature et leur
donner suffisamment de temps pour se préparer. Nous avons la
période des Fêtes. On sait que, dans bien des groupements, des
associations, il est difficile de réunir des membres pour soumettre un
point de vue. Il faut également donner une chance à tous ces gens
de préparer des mémoires. Sur une question de cette nature, le
comité de l'éducation va recevoir des documents et des
mémoires pour se faire une idée de ce que les gens pensent. Une
semaine en somme, c'est cause de la chicane. Le chef de l'Opposition propose le
7 au lieu du 14.
M. LESAGE: J'ai proposé le 23 décembre.
M. DOZOIS: On voit, évidemment, que c'est pour nous
embêter, tout simplement.
M. LESAGE: M. le Président, j'invoque le règlement. Le
ministre n'a pas le droit, malgré sa mauvaise humeur, de m'imputer des
motifs. Je dis que nous sommes payés pour travailler.
M. DOZOIS: On travaille également.
M. BELLEMARE: Le député de Louis-Hébert vient de
dire qu'on est payé pour travailler.
M. GRENIER: Ils sont quinze en Chambre.
M. BELLEMARE: Veut-il que je lui nomme les membres de son parti qui ont,
ici, des absences répétées? Il serait honteux pour la
province de faire publier cette liste.
M. LESAGE: Les raisons que peuvent avoir mes collègues
d'être absents, c'est leur privilège.
M. GRENIER: En pleine période de travail, ils sont une
poignée de quinze, de l'autre côté.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESAGE: Les raisons que peuvent avoir mes collègues
d'être absents de la Chambre les regardent. Pour ma part, je n'ai pas
manqué une seule séance de la Chambre depuis le début de
la session. Pas une seule.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: Je puis dire que, parmi mes collègues en Chambre
ils sont très rares ceux qui ont trois ou quatre absences pendant toute
la session.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! La motion qui concernait les
présences et les absences a été adoptée.
Deuxièmement, comme il y a 365 jours dans l'année et que nous
serions susceptibles d'entendre 365 motions d'amendement à la motion
actuellement devant la Chambre, je suggère et je pense que ce
serait une bonne solution de mettre cette motion aux voix. Autrement, je
pense que chacun pourrait suggérer une date et qu'il y aurait tout de
même, au moins, 108 opinants sur ce cas.
M. BELLEMARE: D'accord. Je propose que le comité de
l'éducation, contrairement à la motion qui a été
faite d'ajournement au 19 décembre, soit reporté pour ses
séances à 10 heures, le 14 janvier.
M. LESAGE: Sur division, à cause de la date trop
éloignée.
M. LE PRESIDENT: La motion est adoptée sur division.
M. BELLEMARE: II apparaît, en appendice aujourd'hui, une motion
à mon nom sur la Loi modifiant le salaire minimum. Est-ce qu'il y aurait
consentement de la Chambre pour qu'on la présente en première
lecture?
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a consentement unanime à ce que
j'appelle cette motion de première lecture?
M. LESAGE: Un instant.
M. BELLEMARE: C'est l'avis qui est donné concernant la Loi du
salaire minimum.
M. LESAGE: Oui. Première et deuxième lecture, plus tard
dans la journée.
M. BELLEMARE: Oui, c'est ça. M. LESAGE: Le temps de
vérifier.
M. BELLEMARE: C'est simplement pour ratifier le changement qui est
survenu à la Commission du salaire minimum, qui a
déménagé à l'édifice Delta, en 1966.
Bill 291
M. LE PRESIDENT: De consentement unanime, l'honorable ministre du
Travail propose la première lecture de la Loi modifiant la loi du
salaire minimum. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la même
séance ou à une séance subséquente.
M. BELLEMARE: J'ai ici en main un document de travail que je voudrais
distribuer à tous les membres du comité des relations
industrielles, d'abord. Durant la matinée, d'autres copies vont me
parvenir pour les députés. Cela concerne la qualification
professionnelle des entrepreneurs en construction. C'est un outil de travail
que nous déposerons tel quel. Il n'a pas la forme d'un bill, mais il
pourra sûrement, lorsque le comité des relations industrielles se
réunira, apporter d'heureuses suggestions au cours des études qui
en seront faites. Nous allons en faire distribuer immédiatement à
tous les membres du comité des relations industrielles et, dès
que les autres copies arriveront, nous en ferons parvenir à tous les
autres membres de la Chambre.
Je demanderais d'en déposer deux copies tout de suite, sur la
table du greffier pour qu'on puisse considérer que le document de
travail est déposé.
Je serais maintenant disposé S. déposer...
M. LESAGE: Est-ce que nous ne pourrions pas procéder à la
période des questions?
M. BELLEMARE: Oui, oui, d'accord.
M. LESAGE: ... pour ensuite suivre la suggestion du leader de la
Chambre...
M. BELLEMARE: Oui.
M. LESAGE: ... de procéder à vider le feuilleton, comme on
dit, en partant de celui du 27 novembre?
M. BELLEMARE: Oui. Il y a cependant des questions qui sont
postérieures à cela. Il y en a trois ou quatre. Je donnerai la
date, d'ailleurs.
Questions et réponses
Procureur à l'enquête sur la Régie
des alcools
M. LESAGE: Très bien. J'aurais une question à poser au
ministre de l'Education en sa qualité de vice-premier ministre. Je dois
faire précéder ma question d'une courte préface. J'avais
demandé au premier ministre, ici en Chambre, il y a plusieurs semaines,
s'il voulait bien considérer l'opportunité de payer les
honoraires d'un procureur qui représenterait l'ancien gouvernement
devant la commission d'enquête sur la Régie des alcools. Je lui en
ai parlé une autre fols dans son bureau et il m'a dit qu'il
étudiait la chose. Etant donné que maintenant la commission a
commencé ses travaux, étant donné que les membres de la
commission ont été nommés par le gouvernement, que le
secrétaire a été nommé par le gouvernement actuel,
que les procureurs ont été nommés par le gouvernement
actuel, étant donné, de plus, que cette commission fera
enquête sur l'administration de la Régie des alcools au cours
d'une période où le gouvernement antérieur avait la
responsabilité de l'administration, est-ce que le vice-premier ministre
ne croit pas qu'il serait juste de donner suite à la suggestion que
j'avais faite au premier ministre?
M. CARDINAL: Je ne nie pas qu'il pourrait être juste de donner
suite à cette demande du chef de l'Opposition. Cependant, comme je n'ai
pas vu le premier ministre, M. Bertrand, à ce sujet, il me serait
difficile de prendre un engagement ce matin au nom du gouvernement et de donner
définitivement une réponse affirmative. Ce que je puis dire au
chef de l'Opposition, c'est que je ferai le nécessaire pour savoir, dans
les plus brefs délais, quels sont les résultats et les
conclusions de l'étude que l'honorable premier ministre a faite à
ce sujet pour en faire part à l'honorable chef de l'Opposition.
M. LESAGE: Je remercie le ministre de l'Education. Je n'ai
malheureusement pas à la portée de la main la
référence I l'échange de propos qu'il y avait eu en
Chambre & ce sujet et qui avait été suivi d'une mention au
cours d'une conversation privée.
M. CARDINAL: Je ferai relever...
M. LESAGE: II m'avait dit à ce moment-là, en Chambre,
qu'il croyait que ce serait raisonnable, ou quelque chose comme cela.
M. CARDINAL: J'ai commencé ma réponse en disant qu'il se
pourrait qu'il soit Juste qu'il en soit ainsi...
M. LESAGE: Oui, jel'aibienapprécié, d'ailleurs.
M. CARDINAL: Je pense que c'est dans le même sens. Cependant, je
répète qu'avant de prendre un engagement formel, j'aimerais
revoir le journal des Débats et en converser avec l'honorable premier
ministre.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Verdun.
Récompense à offrir
M. WAGNER: Ma question s'adresse au Solliciteur général.
Vu la déclaration de M. Saulnier, est-ce que le Solliciteur
général pourrait nous dire si le gouvernement a l'intention
d'Imiter l'exemple de la ville de Montréal et d'offrir une
récompense de $10,000 à toute personne capable d'offrir des
renseignements pouvant amener l'arrestation des auteurs des attentats à
la bombe?
M. MALTAIS (Limoilou): Je répondrai au député de
Verdun que j'ai lu avec intérêt la suggestion faite par le
président de l'exécutif de la ville de Montréal, M.
Saulnier, à cet effet. Il arrive également qu'une centrale
syndicale au moins a été mise en cause dans cette
déclaration, c'est-à-dire qu'il y a une centrale auprès de
laquelle on s'adresse, en somme, pour une participation à la
contribution. Je crois qu'il serait sage tout de même que je consulte
d'abord le ministre du Travail et subséquemment, le tout sera remis
à l'attention du conseil exécutif. Je trouve la suggestion
très intéressante pour ma part. C'est ce que je peux dire au
député de Verdun.
M. WAGNER: Merci.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
Edifice loué et non occupé
M. MALTAIS (Saguenay): M. le Président, ma question s'adresse
à l'honorable ministre des Travaux publics. Est-il au courant
qu'à Fo-restville, un édifice a été loué en
totalité, depuis de nombreux mois, et qu'il n'est pas occupé
présentement? Pourrait-il nous dire ce qu'il pense de cet état de
choses et si c'est normal?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: Toute la question est posée.
M. LE PRESIDENT: Cette question remplit toutes les conditions voulues
pour aller au feuilleton.
M. MALTAIS (Saguenay): Le ministre pourrait-il la prendre comme
préavis au feuilleton?
M. BELLEMARE: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Huntingdon.
Régie des marchés
M. FRASER: M. le Président, j'ai une question pour le ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation à propos de l'ordonnance 18 de la
Régie des marchés pour le prix du lait sur le marché de
Montréal et partout dans la province. Le ministre est-il au courant de
la quantité de lait embouteillé par les laiteries de
Montréal pour les laiteries de l'extérieur de la ville de
Montréal pendant le mois de novembre? A-t-il pris des dispositions pour
amender l'ordonnance de la Régie des marchés?
M. VINCENT: M. le Président, j'ai donné, l'autre jour, ici
en Chambre, les chiffres en ce qui concerne le mois d'octobre. A ce
mo-ment-là, j'ai informé la Chambre que, pour ce qui est du mois
de novembre, nous avions demandé à la Régie des
marchés agricoles du Québec de nous fournir les chiffres des
transactions, aussitôt qu'elle le pourrait. On m'informe que les pales
pour les producteurs de lait se font le 10 décembre, pour la
dernière semaine de novembre. Les formules de la RMA, que doivent
compléter les laiteries, parviennent à la Régie des
marchés le ou vers le 20 décembre. Aussitôt que ces
chiffres seront
compilés, nous aurons le rapport. Avec le rapport du mois
d'octobre, comme je l'avais dit en cette Chambre, ce rapport sera soumis au
comité consultatif de la régie.
M. FRASER: Je reçois la mienne le 20 du mois suivant. I received
my pay for the month of October, on November 20th. So, I understand that it
takes at least a couple of days to compile all the cheques and make the
necessary calculations, but Mr. Minister, as it is already the 16th or 17th,
the dairies of Montreal know very well how much milk has been bottled and that
the minister should know too.
M. VINCENT: Well, this is the answer I got yesterday from the Marketing
Board that the pay is given to the farmers or to the producers on December 10th
and right after the formulas are completed, it is directed to the Marketing
Board. The information I got yesterday is that as soon as these figures will be
ready, they are going to be given to the Government or to the Department, and
right after I am going to send a copy to the leader of the Opposition and to
the member of Parliament for Huntingdon. The member of Parliament for Rouville
is asking for one too and the advisory committee for the Marketing Board is
asking for one too.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales.
Déclaration ministérielle Structures
municipales
M. LUSSIER: M. le Président, j'ai une déclaration
ministérielle à faire. Je désire faire part à cette
Chambre que le gouvernement entend présenter, dès le début
de la prochaine session, des projets de loi concernant nos structures
municipales.
Ces projets de loi auront pour objet de modifier les structures
actuelles et d'en proposer de nouvelles. L'urbanisation du centre du
Québec exige de nouveaux outils afin que nos agglomérations
urbaines puissent assumer comme il convient les responsabilités qui sont
les leurs dans le nouveau décor où elles évoluent.
De même, il est également devenu nécessaire de
rajeunir et d'adapter les structures du milieu rural afin que nos
communautés rurales jouissent, elles aussi, des instruments requis pour
continuer de remplir pleinement le rôle bénéfique qu'elles
ont rempli dans le passé.
Enfin, l'un de ces projets prévoira l'instau- ration d'un nouveau
type de municipalité, là où la population est faible et
dispersée, de façon que tous les citoyens du Québec, sans
exception, puissent participer à ce grand mouvement de renouveau et de
rajeunissement du monde municipal que nous avons lancé.
Ces projets de loi seront suivis d'autres projets de modifications
à nos lois municipales, qui seront préparés au fur et
à mesure que les trois comités auxquels j'ai fait allusion, lors
de l'étude du bill 285, nous soumettrons le fruit de leurs travaux.
M. LESAGE: M. le Président, comme déclaration
ministérielle, c'est purement et simplement une déclaration de
très pieuses intentions...
M. BELLEMARE: A l'ordre!
M. LESAGE: ... d'un vague déconcertant. Le ministre n'a
absolument rien dit. On va adopter des modifications à la prochaine
session. C'est le genre de publicité...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre!
M. LESAGE: ... absolument condamnable du gouvernement actuel»
M. GRENIER: Nous allons encore être obligés de nous en
mêler.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail.
M. BELLEMARE: Est-ce que d'autres ont des questions, ce matin, avant que
je dépose les documents?
M. LESAGE: Non.
M. BELLEMARE: Vous êtes redevenu de bonne humeur?
M. LESAGE: Je suis de bonne humeur, c'est simplement que...
M. BELLEMARE: Bon, arrêtez donc de vous choquer, quand nous
faisons du bien.
M. LESAGE: Vous n'avez pas fait de bien ce matin.
M. BELLEMARE: A l'ordre!
M. LESAGE: Je n'ai jamais rien entendu d'aussi ridicule que la
déclaration que nous venons d'entendre.
M. LUSSIER: Vous n'avez rien compris.
Questions au feuilleton
M. BELLEMARE: M. le Président, dans le feuilleton du 27 novembre,
à la question numéro 1, question de M. LeChasseur, réponse
de M. Bertrand.
Article 8, question de M. Lacroix, réponse de M. Lafontaine,
Article 10, question de M. Houde, réponse de M. Bertrand.
Article 12, question de M. Harvey, réponse de M. Lafontaine.
Transformée en motion pour production de documents.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Article 15, question de M. Cliche, réponse de M.
Lafontaine.
Article 20, question de M. Courcy, réponse de M. Lafontaine.
Article 26, question de M. Cliche, réponse de M. Lafontaine.
Article 28, question de M. Lacroix, réponse de M. Loubier.
Article 29, question de M. Lacroix, réponse de M. Loubier.
Article 33, question de M. Lacroix, réponse de M. Loubier.
Article 42, question de M. Bergeron, réponse de M. Loubier.
Transformée en motion pour production de documents.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adotpé.
M. BELLEMARE: Article 45, question de M. Maltais (Saguenay),
réponse de M. Loubier.
Article 47, question de M. Laporte, réponse de M»
Lafontaine.
Article 51, question de M. Lesage, réponse de M. Bertrand.
Article 63, question de M. Courcy, réponse de M. Vincent.
Transformée en motion pour production de documents.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Article 64, question de M. Pinard, réponse de M.
Lafontaine.
Article 65, question de M. Pinard, réponse de M. Lafontaine.
Article 66, question de M. Pinard, réponse de M. Lafontaine.
Article 72, question de M. LeChasseur, réponse de M. Gabias.
Article 73, question de M. Courcy, réponse de M. Gosselin.
L'article suivant apparaît le jeudi 28 novembre au feuilleton de
l'Assemblée législative. C'est une question de M. Cliche...
M. LESAGE: C'était quel numéro, jeudi? M. BELLEMARE: Le
numéro de ? M. LESAGE: Du feuilleton?
M. BELLEMARE: Du feuilleton? C'est celui du 28 novembre, le
numéro 95. Je l'avais marqué ce matin, ici.
M. LESAGE: Très bien.
M. BELLEMARE: Le 28 novembre, le numéro
M. LESAGE: M. Cliche.
M. BELLEMARE: Question de M. Cliche, réponse de M. Allard.
L'article suivant apparaît encore au numéro 95, le jeudi 28
novembre. Question de M. Mailloux, réponse de M. Lafontaine,
transformée en motion...
M. LESAGE: Le numéro 95?Cela ne peut pas être le même
numéro.
M. BELLEMARE: Pardon?
M. LESAGE: Cela ne peut pas être le même numéro.
M. ROY: C'est le feuilleton numéro 95.
M. LESAGE: Ah, ce n'est pas la question numéro 95?
M. BELLEMARE: Non, c'est le feuilleton numéro 95.
Quand vous m'avez demandé le numéro tout à l'heure,
c'était le numéro du feuilleton, le numéro 95.
M. LESAGE: Non, je demandais le numéro de l'article.
M. BELLEMARE: Il n'y en avait pas.
M. LESAGE: II n'y en avait pas? Alors, c'était en appendice?
M. BELLEMARE: C'est en appendice. Comme elles sont reproduites seulement
le mercredi...
M. LESAGE: Oui, oui, très bien.
M. BELLEMARE: Le 4 décembre, la Chambre n'a pas
siégé. Il n'a pas pu y avoir...
M. LESAGE: Le jeudi 28 novembre, en appendice...
M. BELLEMARE: En appendice, oui. Question de M. Mailloux, réponse
de M. Lafontaine, transformée en motion pour production de
documents.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Encore le feuilleton numéro 95 du jeudi 28
novembre, en appendice. Question de M. Fortier, réponse de
M.Vincent.
Le vendredi 29 novembre, numéro de feuilleton 96, en appendice.
Question de M. Mailloux, réponse de M. Lafontaine, transformée en
motion pour production de documents.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Maintenant, nous revenons au feuilleton du 27 novembre,
article 79, réponse de M. Lafontaine, transformée en motion pour
production de documents.
M. LESAGE: Motion de production de documents.
M. BELLEMARE: Oui, c'est cela. C'est à l'ordre de la Chambre. Il
y a deux copies ici.
Alors, M. le Président, un autre ordre de la Chambre. L'article
86, M. Lacroix, réponse de M. Bertrand.
Article 93: Ordre de la Chambre. Question de M. Mailloux, réponse
de M. Russell. Article 94: Ordre de la Chambre. Demande de M. Tessier,
réponse de M. Gosselin.
M. le Président, quant à la production du rapport Dorion,
la motion avait été acceptée le 13 novembre 1966. Il
apparaît aux procès-ver- baux un document de la session portant le
numéro 266, qui n'aurait pas dû être un document de la
sorte, mais en tout cas...
M. LESAGE: Ce n'est pas un document, c'est une réponse.
M. BELLEMARE: C'est une réponse, purement et simplement, mais je
croyais pouvoir poser les documents en même temps. La motion a
été acceptée, sauf ce qui concerne le paragraphe 1 b). Il
n'est pas dans l'intérêt public de produire les mémoires et
rapports qui sont entre les mains d'un comité d'étude tripartite
formé de représentants de gouvernement du Québec, du
gouvernement de l'Ontario et du gouvernement fédéral.
C'était la réponse qu'on avait faite dans le temps. Ce
matin...
M. LESAGE: Y a-t-il eu seulement cette réponse de
déposée? Aucun document ne l'a été?
M. BELLEMARE: Non, non. Nous les déposons ce matin. C'est le
rapport Dorion. Maintenant, nous serons probablement prêts, cet
après-midi. Il reste encore quelques vérifications à
terminer pour les réponses complémentaires de M. Russell au sujet
de l'ameublement de l'édifice Joffre, la réponse
complémentaire de M. Loubier, relativement au terrain de camping de
Villeneuve. Nous aurons aussi la réponse complémentaire de M.
Loubier relative au parc d'Oka, la réponse complémentaire de M.
Loubier relative à la construction d'une usine d'épuration du
terrain d'Oka. Elles seront probablement prêtes cet après-midi ou
demain matin. Si nous pouvons les déposer cet après-midi, nous
verrons.
M. LESAGE: M. le Président, mon intervention est faite en vertu
de l'article 114, deuxièmement. Le ministre du Travail pourrait-il me
dire s'il y a des raisons particulières pour ne pas donner suite aux
motions pour production de documents apparaissant en mon nom sous les
numéros 80 et 91?
M. BELLEMARE: M. le Président, demain matin, à la fin de
la session, je ferai une déclaration au sujet de tout ce qu'il y a sur
le feuilleton.
M. LESAGE: Oui, mais les motions 80 et 91, ce sont des
arrêtés ministériels. Je n'ai pas mentionné ceux qui
concernent Churchill Falls.
M. BELLEMARE: Je comprends l'honorable
chef de l'Opposition. Demain, j'aurai une déclaration concernant
tous les autres articles dont les documents n'ont pas été
déposés.
M. LESAGE: Oui, mais la motion no 91, c'est pour production d'un
arrêté ministériel; ce n'est pas la mer à boire.
M. BELLEMARE: Non, je sais cela. Je suis au courant.
M. LESAGE: C'est facile.
M. BELLEMARE: C'est sûr. Le chef de l'Opposition nous
permettra-t-il...
M. LESAGE: C'est facile de copier des arrêtés. Il n'y a
qu'à les passer au Xerox.
M. ROY: C'est la secrétaire de l'Opposition, Mlle Xerox.
M. BELLEMARE: M. le Président, que le chef de l'Opposition ne
perde pas patience. Tout vient à point à qui sait attendre.
M. LESAGE: Cela fait longtemps.
M. BELLEMARE: M. le Président, pourrions-nous, avant
d'entreprendre le bill 56, du consentement unanime de la Chambre la
première lecture est maintenant faite faire la deuxième
lecture du bill 191 sur la Loi du salaire minimum? Il s'agirait de faire la
deuxième lecture, le comité, la troisième lecture si
l'Opposition n'a pas d'objection.
M. LESAGE: Le ministre du Travail est-il prêt à troquer mon
consentement contre la production des documents que j'ai demandés?
M. BELLEMARE: Ah! C'est du marchandage. Dans les relations
patronales-ouvrières cela ne se fait jamais, cela. Nous avons assez
d'ennuis avec le camionnage, ce temps-ci.
M. ROY: On charrie.
M. BELLEMARE: Alors, M. le Président; deuxième
lecture.
M. LE PRESIDENT: De consentement unanime, l'honorable ministre...
M. BELLEMARE: J'aimerais bien, M. le Président, dire de quoi il
s'agit simplement. La Commission du salaire minimum a transféré
en septembre 1966, son siège social de
Québec à Sainte-Foy, dans l'édifice Delta. Ce bill
a pour effet de ratifier cette décision et de dire que le siège
social de la Commission du salaire minimum, que la commission a son
siège social I Sainte-Foy ou 8. tout autre endroit dans les environs
qu'il plaira au lieutenant-gouverneur en conseil de déterminer. Et le
reste est exactement le même. J'ai ajouté le mot « environs
».
Bill 291
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail propose la
deuxième lecture de la Loi modifiant la loi du salaire minimum. Cette
motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
M. BELLEMARE: M. le Président.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail propose que je quitte
maintenant le fauteuil...
M. BELLEMARE: Non, non, non, M. le Président, je pense que le
comité plénler...
Comité plénier et 3e lecture
M. LE PRESIDENT: Alors de consentement unanime, les formalités de
formation du comité plénier, le rapport du président du
comité et la troisième lecture sont adoptés.
M. BELLEMARE: M. le Président: 8).
Bill 56
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail, pour et au nom de
l'honorable premier ministre propose la deuxième lecture de la Loi de
l'enseignement privé.
L'honorable ministre d'Etat à l'Education.
M. Jean-Marie Morin
M. MORIN: M. le Président, au tout début de mes propos, je
tiens à faire remarquer que le bill 56, Loi de l'enseignement
privé, tel que nous devons l'étudier aujourd'hui, si nous le
comparons aux bills 56 et 61, qui ont été amenés devant le
comité parlementaire de l'éducation, pour étude, si nous
le comparons dis-je, nous y trouvons des différences essentielles.
D'abord, l'extension aux écoles de forma-
tion professionnelle de la déclaration d'Intérêt
public qui était réservée aux écoles de formation
générale et aux écoles pour l'enfance inadaptée. De
plus, l'extension aux écoles maternelles, élémentaires et
professionnelles, de la reconnaissance pour fins de subvention qui était
réservée aux écoles secondaires et aux écoles
déclarées d'intérêt public.
Troisièmement, nous y voyons également le remplacement
dans le cas des écoles déclarées d'intérêt
public de la subvention basée sur le traitement du personnel par une
subvention per capita représentant 80% du coût moyen par
élève des écoles publiques de même niveau, et enfin
le remplacement dans le cas des écoles reconnues pour fins de subvention
du per capita fixe prévu, par un per capita représentant 60% du
coût moyen par élève des écoles publiques de
même niveau. Nous avons la conviction que ces modifications
améliorent sensiblement le projet initial et que cette loi
d'enseignement privé permettra vraiment l'exercice du droit à la
liberté de l'enseignement en même temps qu'une
réglementation Juste et efficace de l'exercice de ce droit.
Nous devons dire que la liberté de l'enseignement n'a jamais
été contestée au Québec, et que les institutions
privées ont pu naître et se développer librement sous
l'oeil bienveillant et souvent même avec l'aide de l'Etat qui
n'exerçait qu'un contrôle minimal, parfois même insuffisant.
Cette liberté dans certains cas devait inévitablement conduire
à certains abus, mais elle a par ailleurs permis à de très
nombreuses institutions et je pense notamment aux collèges classiques et
aux écoles normales de jouer un rôle de premier plan, surtout
à une époque où les responsabilités de l'Etat en
matière d'enseignement étaient moins bien définies, moins
reconnues et aussi moins exercées qu'elles ne le sont aujourd'hui. De
temps à autre diverses lois particulières sont venues
réglementer le développement et le fonctionnement de l'une ou de
l'autre catégorie d'écoles privées.
Ces lois particulières pouvaient suffire alors que les
écoles dites publiques étaient elles-mêmes régies
par des lois semblables. Mais, aujourd'hui que le Québec est à se
donner un système d'enseignement unifié, coordonné et
cohérent, les institutions privées ne peuvent plus vivre et
fonctionner en quelque sorte en marge de ce système. Elles doivent s'y
intégrer. Le bien commun et le bien des enfants l'exigent. Il faut
reconnaître que, d'une façon générale, les
institutions privées ont fort bien compris ces exigences nouvelles et
qu'elles ont apporté une contribution valable et une précieuse
collaboration à l'édification du système d'enseignement
au
Québec. Cependant, dans l'esprit du gouvernement, dans l'esprit
du ministre de l'Education ou de celui qui vous parle, secteur public ne veut
pas dire secteur unique. Ainsi, intégration ne veut pas dire absorption
ni suppression.
Autant il peut être souhaitable pour diverses raisons que
certaines de ces institutions perdent leur caractère d'écoles
privées, autant il est nécessaire à la liberté de
l'enseignement que d'autres le conservent et continuent de dispenser à
la population du Québec, avec le même dévouement et la
même compétence, l'enseignement qu'elles ont donné dans le
passé dans des conditions financières parfois plus que
précaires. Ces institutions, je le répète, doivent avoir
la liberté et les moyens de continuer leur oeuvre
bénéfique. Le Québec ne peut se permettre de voir
disparaître ces institutions plus que méritantes. Ce principe de
la liberté a maintes fois été proclamé par les
représentants du gouvernement et il a été inscrit dans nos
lois, notamment dans le préambule de la Loi du ministère de
l'Education et dans celui de la Loi du Conseil supérieur de
l'éducation, dont je rappelle ici les trois premiers paragraphes:
« Attendu que tout enfant a le droit de bénéficier d'un
système d'éducation qui favorise le plain épanouissement
de sa personnalité; « Attendu que les parents ont le droit de
choisir les institutions qui, selon leurs convictions, assurent mieux le
respect des droits de leurs enfants; « Attendu que les personnes et les
groupes ont le droit de créer des institutions d'enseignement autonomes
et, les exigences du bien commun étant sauves, de
bénéficier des moyens administratifs et financiers
nécessaires à la poursuite de leurs fins. »
Or, cette déclaration de principe n'a de sens et de raison
d'être que si la liberté qu'elle affirme peut de fait être
exercée, c'est-à-dire si des écoles privées peuvent
exister, se développer et être accessibles à une proportion
convenable de la population. D'autre part, le bien commun exige que les
subventions du gouvernement, subventions nécessaires aux fins
mentionnées, soient proportionnées à la fois à la
valeur intrinsèque des institutions et à la contribution qu'elles
apportent au développement de l'enseignement au Québec, donc, au
bien-commun. C'est pourquoi cette loi de l'enseignement privé
prévoit diverses catégories d'institutions privées.
En premier lieu, viennent les institutions déclarées
d'intérêt public. En vertu de la loi, le ministre peut,
après avoir obtenu l'avis de la commission, déclarer
d'intérêt public une institution qui, selon les critères
déterminés par règlement, assure des services de
qualité et
contribue au développement de l'enseignement au Québec en
raison des caractéristiques de l'enseignement qu'elle donne, de la
compétence de son personnel et des méthodes pédagogiques
qu'elle utilise. Une institution déclarée d'intérêt
public reçoit, pour chaque année scolaire et pour chaque
élève qui y est inscrit à temps plein le 30 septembre de
cette année scolaire, une subvention égale à 80% du
coût moyen par élève, telle que calculée pour
l'année scolaire précédente pour les établissements
publics de même catégorie, selon les normes en vigueur pour
l'approbation des budgets de ces établissements. Telle institution, pour
être admissible à cette subvention, ne doit pas exiger de ses
élèves des frais de scolarité et autres frais
afférents supérieurs à la différence à
combler pour atteindre le coût moyen mentionné plus haut, plus 10%
dudit coût moyen.
En second lieu, les institutions reconnues pour fins de subventions. Le
ministre peut, après avoir obtenu l'avis de la commission,
reconnaître pour fins de subventions une institution qui n'a pas
été déclarée d'intérêt public et qui
répond aux exigences des règlements édictés
à cette fin.
Une institution ainsi reconnue reçoit, pour chaque année
scolaire et pour chaque élève qui y est inscrit à temps
plein le 30 septembre de cette année scolaire, une subvention
égale à 60% du coût moyen par élève, tel que
calculé pour l'année scolaire précédente pour les
établissements publics de même catégorie, selon les normes
en vigueur pour l'approbation des budgets de ces établissements.
Telle institution, pour être admissible à cette subvention,
ne doit pas exiger de ses élèves des frais de scolarité et
autres frais afférents supérieurs à la différence
à combler pour atteindre le coût moyen mentionné plus haut,
plus 10% dudit coût moyen.
Je tiens à clarifier ici un point très important. Pour
établir ce coût moyen, tant pour les institutions
déclarées d'intérêt public que pour les institutions
reconnues pour fins de subventions, il sera tenu compte des dépenses
affectées au service de la dette et aux immobilisations.
Enfin, pour respecter la liberté d'enseignement, même dans
les cas où l'octroi de subventions n'est pas Justifié par les
exigences du bien commun, on pourra tenir une institution privée, mais
à la condition de détenir un permis délivré par le
ministre conformément aux dispositions de la loi ou des
règlements édictés I cette fin.
Telles sont les principales dispositions de cette loi en ce qui concerne
la reconnaissance et l'exercice de la liberté de l'enseignement.
Un deuxième objectif de cette Loi de l'enseignement privé
est d'assurer aux élèves et aux parents la meilleure protection
possible, tant au point de vue matériel que financier et
pédagogique. C'est un fait connu que de trop nombreuses écoles
privées exposent la santé et même la vie des enfants
à de graves dangers; que d'autres exploitent financièrement leurs
élèves ou les parents par des procédés quasi ou
nettement frauduleux et que d'autres, enfin, ne donnent qu'un simulacre
d'enseignement ou un enseignement tout à fait inadapté aux
besoins de leurs élèves. L'Etat a la devoir de protéger
les enfants et le public en général contre ces exploiteurs. C'est
la raison d'être du permis obligatoire pour toute institution qui n'est
pas déclarée d'Intérêt public ou qui n'est pas
reconnue pour fins de subventions.
C'est aussi la raison d'être d'une section intitulée:
« La protection des élèves », ainsi que de plusieurs
autres dispositions.
Enfin, un troisième objectif consiste à faciliter
l'intégration des institutions privées au système
unifié et coordonné que le Québec est à
édifier. A cette fin, diverses sections de la loi précisent les
obligations auxquelles devront se conformer les différents types
d'institutions, compte tenu de leur niveau et de la nature de l'enseignement
qu'elles donnent. L'Etat ne peut tolérer qu'une liberté absolue,
dans le domaine des structures pédagogiques de l'organisation scolaire,
des programmes, des méthodes, des examens et des diplômes,
permette aux institutions privées de créer un état
d'anarchie qui pourrait compromettre l'unité et la coordination de tout
le système.
Tels sont donc les principaux objectifs que cette loi de l'enseignement
privé veut atteindre au moyen de dispositions qui sont à la fois
le fruit de l'expérience, d'une mûre réflexion et d'une
participation active de tousles intéressés.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. Jean Lesage
M. LESAGE: Avant d'intervenir dans le débat, Je voudrais poser
une question, soit au ministre d'Etat à l'Education, soit au ministre de
l'Education, pour bien clarifier la situation. J'ai eu une conversation
privée avec le ministre de l'Education sur le sujet, mais Je voudrais
bien que cela soit consigné au journal des Débats.
Dois-je comprendre que, dans le calcul du coût moyen par
élève, dans les écoles publiques, le gouvernement tiendra
compte, en vertu des dispositions de la présente loi, de ce qu'on
ap-
pelle communément le service de la dette, ou si l'on veut, les
immobilisations, la dépréciation et l'intérêt sur le
capital?
M. CARDINAL: M. le Président, comme l'honorable Jean-Marie Morin
l'a mentionné dans son texte, et suivant les dispositions de l'article
21 de cette loi, on constate qu'il n'y a que deux choses qui sont exclues des
subventions, que ce soit en vertu de l'article 14, qui s'applique aux
institutions que l'on appelle d'intérêt public, ou en vertu de
l'article 17, aux institutions qui sont reconnues. Ces exceptions sont le
transport et le coût per capita des étudiants, qui sont
assumés par une commission scolaire.
Donc, je dis très clairement que ce qu'on appelle
communément le service de la dette est compris dans les frais
d'opération ou de fonctionnement d'une institution privée. Par
conséquent, il est contenu dans le calcul pour établir la
subvention de 60% ou de 80%, selon les cas.
M. LESAGE: Je remercie bien le ministre de l'Education. Je pense que
cela nous permettra à nous, de ce côté-ci de la Chambre,
d'approuver sans réserve le principe du bill 56. Je dois vous dire que
lorsque j'ai vu apparaître hier au feuilleton l'avis de motion du
ministre du Travail, pour référer le bill 56 au comité de
l'éducation avant le stade de deuxième lecture, j'ai
été passablement inquiet.
C'était un peu la confirmation de certaines craintes que
j'entretenais avec mes collègues. Nous craignions que le gouvernement,
comme d'habitude, continue de temporiser comme il l'a fait dans tellement de
cas, qu'il continue d'attendre dans l'immobilité et l'immobilisme et,
pour me servir des termes d'un air d'opéra bien connu, qu'il continue
d'avoir peur d'avoir peur.
M. GRENIER: Le grand théâtre est ouvert.
M. LESAGE: Non, c'est de l'opéra, et franchement ce n'est pas mon
fort.
M. DE MERS: Il y a aussi le grand air de la jalousie.
M. LESAGE: C'est dans Carmen, et c'est l'air « J'ai peur d'avoir
peur ».
M. DE MERS: Oui, mais il y a aussi le grand air de la jalousie.
M. LESAGE: Ce n'est pas Carmen qui le chante.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est Micaéla.
M. LESAGE: C'est Micaéla qui chante: J'ai peur d'avoir peur.
C'est un air de Micaéla, dans l'opéra Carmen.
M. BOUSQUET: Il y a aussi l'air de la jalousie.
M. LESAGE: On m'a posé une question. Le ministre des Affaires
culturelles veut absolument savoir jusqu'à quel point va mon petit
bagage de culture?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas ça. M. LESAGE: Pardon?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je disais à mon collègue que
madame votre épouse avait été une excellente
cantatrice.
M. LESAGE: C'est peut-être pour ça que je connais l'air en
question.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ça.
M. LESAGE: Le gouvernement a donc finalement décidé de
nous laisser agir, c'est-à-dire de nous laisser approuver le bill 56,
parce qu'il ne faut pas trop compter sur lui. Nous étions bien
décidés, quant à nous, à faire la même
bataille sur la motion du ministre du Travail que nous avions faite sur une
motion similaire présentée au sujet du bill 85.
Tous les intéressés avaient été entendus sur
le principe et sur les modalités du projet de loi à
l'étude. Si le leader de la Chambre n'avait pas consenti hier soir
à retirer sa motion de renvoi au comité avant la deuxième
lecture, nous aurions certainement bataillé jusqu'au dernier
retranchement, même s'il avait fallu siéger pour cela entre
Noël et le Jour de l'An.
Il s'agit en effet d'une question trop importante, trop urgente. Toutes
les maisons d'enseignement privé veulent absolument savoir à quoi
s'en tenir, et dès maintenant. Cela se comprend, dans les
circonstances.
Aussi sommes-nous heureux, nous, de l'Opposition libérale, que le
gouvernement se soit rendu aux pressions que nous avons exercées sur lui
pour que soit adopté et sanctionné, dès la présente
session, le bill 56.
Les institutions privées, du moins la plupart des plus
importantes, se sont déclarées satisfaites de la nouvelle version
du bill 56. Elles le seront encore plus à la suite de la réponse
que vient de donner le ministre de l'Education
à la question que je lui ai posée tout à l'heure au
sujet de l'inclusion du coût du service de la dette dans le calcul du
coût moyen de fonctionnement.
Ces représentations ont été reçues de
nombreuses sources. J'ai, ici, des lettres et des télégrammes -
du révérend père Legault, jésuite, de l'Association
des collèges classiques de Québec; de mademoiselle Gilberte
Riendeau, de l'Association des institutions d'enseignement secondaire du
Québec et de l'abbé Louis-Joseph Lépine, membre du conseil
général de l'Association des institutions secondaires du
Québec nous pressant, nous les députés de
l'Assemblée législative, de voir à ce que le bill 56 soit
adopté dès la présente session.
Vous me permettrez, M. le Président, de lire une partie du
télégramme signé par les trois personnes que je viens de
mentionner. « Nous avons pris connaissance de la nouvelle version du bill
56 déposé en première lecture. Nous avons examiné
les articles relatifs à l'enseignement privé de formation
générale, aux niveaux secondaire et collégial. Nous
estimons que les membres de l'Association des collèges du Québec
et de l'Association des institutions d'enseignement secondaire
considéreront que les modifications apportées au contenu de la
première version du bill 56 constituent une amélioration
sensible. Au nom des membres de nos associations, nous engageons l'Opposition
à faire en sorte que cette loi soit votée avant l'ajournement de
la session. L'urgence est telle, pour l'ensemble de nos membres, qu'il nous
apparaît illusoire d'attendre le projet parfait. C'est après sa
mise en application et après expérience suffisante que des
rajustements pourront s'imposer. » Suit un autre paragraphe où les
signataires demandent d'être rassurés au sujet des articles 14 et
17. J'ai mentionné une seule fois, M. le Président, des
numéros d'articles, malgré que ce soit contraire au
règlement, à ce moment-ci. Mais étant donné que
ça s'est fait tout à l'heure... Ces gens demandaient donc
d'être rassurés au sujet des articles 14 et 17. Or, le ministre de
l'Education nous a donné cette assurance, il y a un instant.
J'ai également reçu un télégramme du conseil
du collège de Montréal. Evidemment, des copies de ce
télégramme ont été envoyées au ministre de
l'Education et au ministre d'Etat à l'Education. J'ai reçu
je le mentionne d'une façon spéciale, parce que c'est mon alma
mater un télégramme de M. Henri Racine, de l'Association
des parents et élèves du séminaire de Québec; de M.
Camille Lévesque, commissaire, de M. Paquin, aumônier des parents
catholiques et du directeur du séminaire de Sherbrooke. Je voudrais
lire, M. le Président, une lettre que j'ai reçue de deux de mes
électeurs - des parents, le mari et la femme, le père et la
mère, si l'on veut - c'est l'exemple typique de centaines de lettres que
j'ai reçues de parents dans toute la province. « Nous
connaissons... » ah non, je vais passer ce bout-là, parce
que c'est un compliment « Nous sommes assurés de votre
désir de laisser aux parents, les premiers responsables de
l'éducation de leurs enfants, la possibilité de choisir le genre
d'école qu'ils veulent pour leurs jeunes. Nous voulons la liberté
de choix entre les écoles publiques et les écoles privées.
Vous ne pouvez pas nous refuser ce droit. Il vous faudra trouver une formule
équitable pour permettre à ces maisons d'éducation
indépendantes de fonctionner efficacement. Aussi, nous voulons que les
subventions versées pour les frais de scolarité suivent l'enfant,
peu importe l'institution qu'il fréquente. » C'est signé M.
et Mme Fernand Guay, de Sillery.
Donc, M. le Président, nous sommes extrêmement heureux
d'avoir réussi à convaincre le gouvernement de voir à ce
que soit adopté dès la présente session le bill 56, ce qui
permettra aux institutions d'enseignement privé, qu'il s'agisse des
anciens collèges classiques, des autres collèges ou de cet autre
groupe qui était l'objet des dispositions du bill 61 alors qu'il y avait
deux projets de loi... d'être assurés qu'ils pourront survivre
dans l'ordre.
Il y a déjà longtemps qu'il est prévu que les
institutions d'enseignement privé devront continuer à vivre au
Québec en dépit des transformations survenues dans le domaine de
l'éducation. Le préambule même de la loi créant le
ministère de l'Education établit les quatre principes
fondamentaux sur lesquels repose toute la réforme de l'éducation
au Québec. Parmi ces principes, l'un des plus importants a trait
à ce qu'il est convenu d'appeler le droit des parents de choisir les
institutions qui, suivant leur conviction, assureront le mieux le respect du
droit de leurs enfants. C'est le deuxième attendu dans le
préambule de la Loi du ministère de l'Education, qui est le
chapitre 233 des Statuts refondus, 1964. « Attendu que les parents ont le
droit de choisir les institutions qui, selon leur conviction, assurent le mieux
le respect des droits de leurs enfants ».
Le bill 56, présentement à l'étude, apporte aux
parents la garantie de pouvoir choisir pour leurs enfants les institutions
qu'ils veulent, savoir celles du secteur public ou encore celles du secteur
privé, les secondes, probablement et la plupart du temps, avec un
léger supplément, supplément qui, étant
donné la
contribution de 80% dans le cas des institutions qui sont
déclarées d'intérêt public et de 60% pour les
autres, me semble pour le moment, jusqu'à preuve du contraire,
raisonnable.
Par ailleurs, toujours dans le préambule de la Loi du
ministère de l'Education, en contrepartie du droit des parents de
choisir les institutions, il y a l'affirmation du droit pour des personnes ou
des groupes de créer des institutions d'enseignement autonomes. C'est le
troisième attendu. « Attendu que les personnes et les groupes ont
le droit de créer des institutions d'enseignement autonomes et, les
exigences du bien commun étant sauves, de bénéficier des
moyens administratifs et financiers nécessaires à la poursuite de
leurs fins ».
Le bill 56, encore dans ce cas-ci, a précisément pour
objet de réglementer la création et le fonctionnement de ces
institutions autonomes qui constituent le secteur privé de
l'enseignement au Québec. Le rapport Parent lui-même, au volume 4,
qui a été rendu public à l'été 1966, est
formel sur la nécessité de conserver le système
d'enseignement privé au Québec. A la page 44, paragraphe 73 du
chapitre 1, intitulé « Pour une politique générale
de l'éducation », on peut lire ceci: « Au Québec, les
établissements privés existants, religieux ou laïcs, sont
nombreux et jouent un rôle important dans l'enseignement régulier
». Et plus loin, dans le même paragraphe; « Les
établissements privés déjà existants s'acquittent
d'une partie du service d'enseignement. L'Etat doit reconnaître la
fonction publique exercée par ceux de ces établissements qui sont
déjà bien équipés et bien organisés. «
II y a par ailleurs avantage, tout en veillant à la coordination
générale du système scolaire, à s'assurer le
concours d'établissements dont les constructions et l'équipement
représentent un investissement privé ou public
considérable et qui disposent d'équipes de professeurs et
d'administrateurs compétents. Une politique clairement définie
d'entente et de coopération entre ces établissements et le
système scolaire public est donc avantageuse. C'est ce qu'est
chargé, en vertu du bill 56, de faire le ministre de l'Education: la
coordination entre le secteur public et le secteur privé, tout en voyant
à ce que le secteur privé continue d'être bien vivant et
continue de rendre à la population les services essentiels qu'elle lui a
toujours rendus. »
D'ailleurs, dans le même rapport Parent, à la page 219,
toujours dans le volume 4, paragraphe 340, on peut lire: « Par ailleurs,
le tour d'horizon que nous venons de faire nous aide aussi à comprendre
que le système scolaire ne peut se passer des établissements
privés. » Je ne saurais plus concourir avec cette
déclaration. Je considère que les établissements
privés doivent vivre, doivent être en mesure de préparer
leurs élèves aussi bien, sinon mieux, que les
élèves du secteur public. « Ces établissements
privés occupent je continue ma citation une place trop
importante, notamment dans l'enseignement secondaire, la formation
professionnelle, l'éducation permanente, la formation des maîtres,
l'enseignement préuniversitaire et supérieur. » Plus loin,
au paragraphe 364: « C'est aussi en nous plaçant dans cette
perspective que, pour ce qui concerne les subventions, nous distinguons
nettement deux types d'institutions: Les institutions semi-publiques et les
institutions privées subventionnées. »
Donc, déjà, dans le rapport Parent, on retrouvait la
distinction que le gouvernement nous propose, dans le bill 56, entre les
institutions privées à caractère semi-public et les
autres. M. le Président, je crois que les fonctionnaires du
ministère de l'Education, le ministre de l'Education et le ministre
d'Etat à l'Education méritent nos félicitations. Ils ont
fait un travail considérable dans peu de temps. Ce n'était pas
tellement facile de prendre le bill 56 et le bill 61, et de n'en faire qu'un
bill, qui soit complet et bien coordonné, qui contienne dans ses cadres
une politique déterminée dans ce domaine, et
déterminée suivant les désirs de la masse de la
population. C'est entendu que nous pouvons nous attendre à des
critiques. Il y a des gens qui ne prisent pas beaucoup la coexistence d'un
système d'enseignement privé avec un système
d'enseignement public.
Mais, je ne puis partager leur avis, quandon pense à tout ce que
le secteur de l'enseignement privé a fait au Québec depuis la
naissance de la colonie française, quand on pense que c'est ce
système qui a formé presque tous les dirigeants du
Québec...
M. BELLEMARE: C'est vrai.
M. LESAGE: ... et dans tous les domaines d'activité, quand on
pense que ce système a continué d'être respecté. Je
n'ai jamais pu admettre et je n'admettrai pas que la nécessité de
renforcer le secteur public, afin que l'éducation la plus poussée
soit offerte à tous les enfants du Québec, dans le secteur
public, de façon que chaque enfant soit en mesure d'obtenir le plus haut
degré d'instruction compatible avec ses talents et sa volonté de
s'instruire, indépendamment de ses moyens financiers, exige la
disparition des institutions privées.
Il fallait faire ça. C'était une priorité; il
fallait le faire. Mais il ne fallait pas, par exemple, dans les efforts que
nous faisions pour atteindre ce but extrêmement louable, que,
volontairement ou par accident, nous détruisions le système qui a
si bien servi le Québec jusqu'à aujourd'hui, parce que... Qu'il y
ait entre le secteur public et le secteur privé, une concurrence
oui on peut aller jusqu'à appeler ça de la concurrence
ça ne peut qu'aider les deux secteurs de l'enseignement en créant
dans chacun, je l'espère, une émulation qui ne peut qu'avoir
d'excellents résultats.
Je le répète, la mise en oeuvre, la réforme de
l'enseignement visait essentiellement à assurer à tous les
Québécois l'égalité de chances d'avoir accès
à l'instruction, sans égard à la fortune ou à la
situation géographique ou aux autres circonstances de la vie.
C'est donc dans ce cadre de politique générale
d'accessibilité à l'instruction, que nous avions donné
et que le gouvernement actuel comme le gouvernement
précédent avaient donné la priorité à
la mise sur pied, à l'organisation et à la structuration d'un
système d'enseignement cohérent et rationnel.
Et c'est pourquoi, je pense bien, tous les efforts qui ont
été faits depuis six ou sept ans, en matière
d'éducation ont porté presque tous sur ces secteurs publics de
l'enseignement. Et c'est probablement cela, peut-être, qui a
plongé ceux qui s'intéressent plus spécialement au secteur
privé de l'enseignement dans un état d'inquiétude et
d'insécurité.
Et je suis cetain que, même si nous avions été
inquiets, nous conviendrons qu'avant de chercher à déterminer la
place et le rôle du secteur privé dans l'ensemble du
système public de l'enseignement, il fallait que les assises de ce
dernier soient à peu près mises en place... Maintenant que la
réforme de l'enseignement a atteint l'université, il devenait de
plus en plus urgent de définir le statut de l'enseignement privé
au Québec, afin de l'Intégrer au nouveau système de
l'enseignement, mais en lui conservant sa personnalité,
c'est-à-dire tous ses avantages. Il est certain que nos écoles
publiques, ne peuvent pas convenir à tous les cas. Je pourrais citer
l'exemple de députés en cette Chambre, qui justement parce qu'ils
sont députés, parce qu'ils sont tellement absents de chez eux,
sont obligés de placer leur petit gars ou leur petite fille dans des
pensionnats. Or dans le secteur public, il n'y a pas de pensionnat. Je
comprends que des parents qui ont de petits « bonshommes » au
secondaire ou au collège, et que ceux-ci n'ont pas de parents dans la
ville où est situé l'école secondaire ou le
collège, parents chez qui un enfant de douze, treize, quatorze, quinze
ans pourrait demeurer, préfèrent la sécurité d'un
pensionnat.
Il y a de multiples autres raisons qui font que, pour un tas de gens,
seul le secteur privé peut offrir à leurs enfants les conditions
d'éducation, si vous voulez, ou d'instruction qui conviennent. Il faut
donc que ce système soit maintenu. C'est le devoir de l'Etat de lui
permettre de dispenser l'enseignement avec le même degré
d'efficacité que dans le secteur public. Pour cela, évidemment,
il faut que le gouvernement, il faut que ceux qui ont la responsabilité
des affaires de l'Etat voient à ce que les institutions puissent vivre
financièrement. Je ne veuxpas me répéter, mais je suis
très heureux que ce projet de loi puisse être adopté avant
la fin de la présente session. Je suis convaincu qu'en votant pour ce
projet de loi en deuxième lecture, en troisième lecture, en
voyant à ce qu'il soit sanctionné dès maintenant, nous
rendrons un immense service à ceux qui, presque tous, se dévouent
sans intérêt personnel pour la cause de l'éducation de nos
enfants, les grands éducateurs du secteur privé de l'enseignement
au Québec.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education.
M. Jean-Guy Cardinal
M. CARDINAL: On me permettra de remercier l'honorable chef de
l'Opposition de ses félicitations. Je pense, de plus en plus, que ce que
le chef de l'Opposition mentionnait hier, qu'il veut devenir mon ami, va
devenir vrai, et je l'en remercie.
M. LESAGE: Attention!
M. CARDINAL: Attention, justement, attendez. Il a cependant assorti ses
félicitations de quelques remarques que je ne puis pas laisser dans
l'oubli. Ce n'est pas par immobilisme que le gouvernement a attendu
jusqu'à ce matin pour indiquer sa position quant au projet de loi dit
bill 56. C'est par sagesse et par prudence, par désir de voir
fonctionner, comme le fait toujours l'Union Nationale, la démocratie de
participation. Si l'on se rappelle les séances du comité de
l'éducation, ou plus de 35 associations ou groupes ont fait part aux
députés des deux côtés de la Chambre, aux membres du
comité et à ceux qui y assistaient, de leurs suggestions, de
leurs critiques, de leurs recommandations, l'on se rappellera qu'à la
fin des séances de ce comité, l'on avait demandé
spécialement deux choses au ministre de l'Education.
On avait demandé tout d'abord au ministre de l'Education qui,
alors, était, paraît-il, un témoin, parce que le 4
décembre n'était pas encore arrivé, de revenir devant le
comité pour représenter le nouveau projet unifié afin que
les associations puissent voir ce nouveau texte, et exprimer leur satisfaction
ou leur critique avant son adoption. On avait aussi suggéré au
ministre que soient préparés, en même temps que le projet
de loi, les règlements dont il est question dans le bill 56.
Cependant, à la suite de la déclaration que j'ai faite
jeudi dernier, déclaration où je n'ai pas indiqué que le
bill serait abandonné ou serait immédiatement adopté,
où j'en ai appelé à la perspicacité d'un honorable
député de POpposition, à la suite de cette
déclaration et à la suite du dépôt du bill 56,
plusieurs associations, comme l'a mentionné l'honorable chef de
l'Opposition, ont écrit soit au ministre de l'Education, soit au
ministre d'Etat à l'Education soit en même temps à
l'honorable chef de l'Opposition pour leur faire part de leur satisfaction, de
leur désir de voir ce projet de loi adopté, de voir la loi
sanctionnée.
Le gouvernement a préparé ce projet. Les
intéressés ont été entendus. Ils avaient
demandé d'être de nouveau entendus. Ils nous libèrent en
nous écrivant, en nous faisant parvenir des télégrammes,
en nous mettant au courant de leur désir de voir immédiatement ce
projet de loi passer en deuxième et en troisième lecture pour
être sanctionné.
D'avance, je remercie l'Opposition de la collaboration qu'elle nous
apporte pour que ce projet de loi si important soit enfin sanctionné. Ce
projet de loi, le bill 56, si on l'ajoute aux nombreuses lois que le
gouvernement de l'Union Nationale a adoptées durant la présente
session et la session précédente en matière
d'éducation, complète les structures de l'e'ducation jusqu'au
niveau de l'université, tant dans le secteur public que dans le secteur
privé.
Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de rappeler aux honorables
membres de cette Chambre ces lois qui ont été adoptées au
cours des deux dernières années. De 1964 à 1966 si
on veut parler d'immobilisme ces projets de loi, qui déjà
étaient prévus ou recommandés dans le rapport Parent, ou
qui déjà étaient contenus dans les principes du bill 60,
auraient pu être préparés...
M. LESAGE: J'invoque le règlement, question de privilège.
Les recommandations que je viens de lire sont des recommandations du rapport
Parent Volume IV qui a été reçu par celui qui vous parle
en 1966, alors que les élections générales étaient
déclenchées. Par conséquent, s'il y a eu retard, c'est par
le gouvernement actuel et non par le gouvernement précédent.
M. CARDINAL: L'honorable chef de l'Opposition a parfaitement raison. On
se rappelle tous, lui particulièrement, le dépôt du rapport
Parent au moment des élections de 1966.
M. LESAGE: Oui, et l'utilisation que votre parti en a faite.
M. BELLEMARE: Cela va aider le débat.
M. LESAGE: Oui, mais il n'a qu'à ne pas en parler et à ne
pas nous faire des reproches surtout quand il sait fort bien que ce rapport a
été déposé et rendu public durant la campagne
électorale de 1966. Que le ministre soit juste et il n'y aura pas de
chicane. Mais qu'il ne vienne pas nous raconter des blagues...
M. BELLEMARE: M. le Président, si...
M. LESAGE: ... parce que l'amitié ne durera pas longtemps.
M. BELLEMARE: M. le Président, ni l'amitié, ni les
règlements...
M. COURCY: Un « brouteux. »
M. BELLEMARE: S'il faut dire comment les collèges
classiques...
M. LESAGE: La partisanerie politique, le ministre est mieux d'abandonner
ça.
M. BELLEMARE: ... et les collèges privés ont
été traités sous votre régime, on peut en
parler.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESAGE: Vous êtes mieux de faire attention, vous aussi.
M. BELLEMARE: On peut dire comment ils ont été
poussés au pied du mur, à la famine. Vous les avez
affamés.
M. LESAGE: Il faut s'en tenir à la vérité.
M. COURCY: M. le Président, vous faites rire de vous par le
leader de la Chambre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: On peut dire ça aussi.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition a invoqué une
question de privilège qui est maintenant close. J'invite l'honorable
ministre de l'Education à continuer son intervention.
M. CARDINAL: M. le Président, ce que je veux souligner, c'est que
le gouvernement ne cède en rien aux pressions de l'Opposition pour
proposer la deuxième lecture de ce bill. Cette loi est une loi juste,
vraiment, une loi-cadre...
M. LESAGE: Que vient de dire le ministre? Je n'ai pas très bien
compris; il a mâché ses mots.
M. CARDINAL: Une loi juste.
M. LESAGE: Non, qu'a-t-il dit? Que le gouvernement n'avait pas
cédé aux pressions de l'Opposition hier soir?
M. BELLEMARE: Jamais!
M. LESAGE: Voyons, quand j'ai demandé au leader du gouvernement
de retirer la motion!
M. BELLEMARE: Jamais, j'ai dit...
M. LESAGE: C'est la pression des députés de l'Opposition
qui a fait agir le gouvernement.
M. BELLEMARE: Jamais dans cent ans!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: Nous l'avons dit.
M. LESAGE: Vous ne bougez pas autrement.
M. BELLEMARE: M. le Président, je soulève un point d'ordre
pour expliquer les faits. Nous avons fait siéger le comité de
l'éducation et l'honorable ministre l'a dit - nous avons entendu
les parties. Une fois que le bill a été réimprimé,
tout dernièrement, nous avons communiqué avec tous les
intéressés. Nous attentions justement les mémoires. Comme
nous pensions que la session devait se terminer la semaine dernière,
nous avions cru que c'était de bonne guerre d'inscrire une motion, en
cas que nous n'ayons pas le temps de faire adopter le bill 56, parce que nous
attendions encore des rapports qui devaient nous être transmis.
C'est de bonne guerre. Nous avons introduit une motion pour dire
qu'advenant le cas où la session se terminerait abruptement, il faudrait
garder, au moins un lien entre ce qui avait été fait et surtout
ce qui restait à faire. Cela a été ternr.né lundi,
au plus tard. Nous avons eu les derniers renseignements lundi; à ce
moment-là, notre motion était inscrite. Ce n'est pas
l'Opposition; c'est moi personnellement qui suis allé voir l'Opposition
pour lui dire...
M. LESAGE: Non.
M. BELLEMARE: ... nous sommes prêts à procéder
à la deuxième lecture, au comité plénier et
à la troisième lecture.
M. LESAGE: Relisez le journal des Débats.
M. BELLEMARE: C'est ça qu'ils appellent de la collaboration?
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education.
M. LESAGE : Histoire romancée. Une chance que nous avons le
journal des Débats !
M. CARDINAL: M. le Président, donc le gouvernement ne cède
en rien aux pressions de l'Opposition pour faire adopter cette loi juste, cette
loi-cadre, cette loi tant attendue et cette loi si bien accueillie.
Le gouvernement ne recule ni devant l'Opposition, ni n'avance
poussé par elle. Les lettres et les télégrammes
reçus dans la journée d'hier; une lettre reçue ce matin,
d'ailleurs, et dont l'honorable ministre d'Etat à l'Education pourra
donner lecture, s'il le juge à propos, indiquent la satisfaction des
groupes qui se sont présentés devant le comité de
l'éducation.
La préparation de ce projet de loi, comme l'honorable chef de
l'Opposition l'a dit lui-même en félicitant les fonctionnaires et
les ministres concernés, manifeste la diligence, l'intelligence...
M. LESAGE: Des fonctionnaires.
M. CARDINAL; ... et la volonté du gouvernement de l'Union
Nationale de servir le Québec selon les aspirations des
Québécois.
M. LESAGE: Si c'est ce ton-là que vous allez prendre en Chambre,
vous allez y goûter.
M. COURCY: Regardez-le donc! Regardez le prince, les deux mains sur les
hanches.
M. LESAGE: Vous n'êtes pas en campagne électorale.
M. COURCY: M. le Président, il se pense à St-Pie.
M. BELLEMARE; Cela leur a fait mal; la défaite. Cela faisait
longtemps qu'il voulait l'avoir devant lui. Là, le ministre de
l'Education les a, droit devant lui. Leurs manières...
M. LESAGE: M. le Président, si le leader du gouvernement veut
intervenir dans le débat, il a le droit de parole.
M. BELLEMARE: Oui, vous êtes intervenu, et vous parlez assis.
M. LESAGE: Je n'ai plus le droit de parole.
M. BELLEMARE: Et vous parlez assis. Taisez-vous, au moins. Voyons donc,
le règlement, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Il n'y en a qu'un seul qui a le droit de
parole, c'est l'honorable ministre de l'Education.
M. CARDINAL: Merci, M. le Président. Je félicite
d'ailleurs l'honorable chef de l'Opposition d'avoir bien vu le lien, la
relation, la voie de cause à effet, entre le rapport Parent, le bill 60
et le bill 56. Mais il fallait le gouvernement de l'Union Nationale pour rendre
concrets, pour réaliser, pour rendre existantes ces
recommandations...
M. LESAGE: Non mais, il se pense encore dans Bagot.
M. CARDINAL: ... et ces principes. M. le Président, oublions, au
sujet d'un projet si important, la partisanerie.
M. COURCY: La pose du prince.
M. CARDINAL: M. le Président, oublions la partisanerie dans ce
domaine. Ce projet de loi qui est soumis...
M. COURCY: Contremaître d'asphalte.
M. CARDINAL: ... par le gouvernement, reconnaît une saine
concurrence entre...
M. ROY: Oui, mais le Québec n'oublie pas qu'il paie $15,000 par
année pour vos petits oublis...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CARDINAL: M. le Président, cette loi. M. LE PRESIDENT: A
l'ordre!
M. LESAGE: Cela ira avec vos conseillers législatifs.
M. BELLEMARE: Trois heures, avec vous.
M. LE PRESIDENT: Je pense qu'il devrait être permis à
l'honorable ministre de l'Education de compléter son exposé et de
nous permettre ainsi de progresser dans nos travaux parlementaires. Pour
ça, il y a une règle importante à suivre, c'est qu'il n'y
ait qu'un seul opinant qui opine à la fois.
L'honorable ministre de l'Education.
M. CARDINAL: Merci, M. le Président. Je rappelle que je n'ai
à aucun moment interrompu l'honorable chef de l'Opposition. J'ai
écouté religieusement ses paroles, J'ai été fort
intéressé et je les ai retenus. Et c'est d'ailleurs pourquoi Je
tente de lui répondre tout à fait dans le même sens ou il
l'a fait au sujet du bill 56.
Ce projet de loi établit ou reconnaît donc une saine
concurrence entre le réseau public et un groupe d'institutions
privées. L'on peut s'interroger, comme on l'a fait au comité,
pour savoir s'il s'agit de concurrence ou de complémentarité.
Ne jouons pas sur les mots, M. le Président. Le bill 56
reconnaît à la fois la concurrence et la
complémentarité des deux réseaux d'institutions publiques
et d'institutions privées. Il permet en même temps au
Québec de conserver un certain nombre de traditions auxquelles les
Québécois tiennent. Il reconnaît au Québec ce qui
existe dans tous les autres Etats: ce double réseau, cette coexistence
des institutions privées et des institutions publiques.
Le secteur privé et le secteur public au Québec, à
tous les niveaux, sont donc maintenant reconnus par l'Etat pour tous les
enfants du Québec, pour que tous ceux-ci aient des possibilités
égales de recevoir un enseignement d'une qualité minimale
égale, bénéficiant soit de la gratuité dans les
institutions publiques, soit du régime de prêts-bourses dans les
institutions privées, auxquels s'ajoutent aujourd'hui ces subventions de
l'ordre de 80% ou de 60% pour ces institutions.
Cette dernière loi, M. le Président, comme je l'indiquais
il y a quelques instants, complète la réforme et surtout
je désire le souligner rassure la population et démontre
le travail remarquable du ministère de l'Education et du
gouvernement dans ce domaine. L'Etat remplit ainsi ses devoirs envers la
population. Et je suis heureux d'apprendre, par la voix de l'honorable chef de
l'Opposition, la satisfaction de l'Opposition au sujet de ce projet de loi et
son désir d'approuver le projet présenté par le
gouvernement.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Richmond.
M. Emilien Lafrance
M. LAFRANCE: M. le Président, je regrette que le débat se
soit détérioré au cours des derniers instants. Quant
à ce qui me concerne, je dois dire que même, et peut-être
surtout, dans la vie publique, les jours se suivent et ne se ressemblent pas.
Autant nous nous sommes cru hier obligés, justifiés de
désapprouver l'attitude du gouvernement, autant nous nous croyons
autorisés à l'approuver aujourd'hui. Non pas, M. le
Président, comme l'a d'ailleurs dit le ministre, parce que le
gouvernement recule, mais parce qu'il revient sur sa décision
première en se rendant à la voix du simple bon sens.
Remettre au lendemain la solution de certains problèmes dont on
connaît les principaux éléments de solution, c'est souvent
léser des droits et causer des torts considérables, come
c'était précisément le cas pour les maisons visées
par ce bill.
M. le Président, de vénérables institutions au
service de notre peuple depuis plus de cent ans se trouvent présentement
dans une situation vraiment tragique. Il n'est pas exagéré de
dire qu'elles sont à la porte de l'agonie. On m'a signalé, par
exemple, le cas de maisons qui connaissaient un déficit de plus de $100
par jour. Au niveau collégial, on m'affirme que sur un total d'environ
70 institutions, il en resterait à peine une dizaine. Je ne veux pas,
devant de si belles dispositions du gouvernement, gâter ce commencement
de sérénité que nous avons connu au début de la
séance en déplorant l'incurie dont on a fait preuve pour apporter
une solution au maintien des institutions privées.
Cependant, je dois dire que le retard du gouvernement à accorder
à ces maisons l'aide et la reconnaissance auxquelles elles avaient
droit, les a forcées certaines d'entre elles, le couteau sur la
gorge à disparaître ou à se transformer en CEGEP,
comma ce fut le cas d'une institution des plus vénérables qui,
durant plus de 170 ans, a rendu d'éminents services à notre
peuple je veux parler du séminaire de Nicolet. Il était normal
qu'un certain nombre d'entre elles cèdent leur place au secteur public.
Mais il est malheureux qu'on n'ait pas arrêté plus tôt cette
saignée, cette hémorragie dont on aurait pu s'exempter de se
payer le luxe à un moment aussi critique de la survivance de notre
peuple.
Une autre anomalie que je déplore depuis que je siège en
cette Chambre, c'est cette espèce de tradition qu'on semble avoir
consacrée, celle de profiter de la cohue des derniers jours de la
session pour soumettre à l'étude des députés, des
législations d'une très grande importance, ce qui nous oblige
trop souvent à adopter à la vapeur des mesures qui
nécessiteraient une étude plus approfondie.
Un autre point que je tiens à souligner à l'attention des
membres de cette Chambre, et en même temps à toute la province,
c'est cette grande leçon que viennent de nous donner les
représentants des parents et des institutions, au cours des
différentes étapes qu'a dû franchir la marche de projet,
avant d'en arriver à la deuxième lecture et à la
troisième, je l'espère, dès aujourd'hui.
Il est vraiment réconfortant de voir qu'il est encore possible au
Québec, en 1968, en dépit du spectacle peu édifiant que
nous offrent parfois certains contestants, il y a une distinction avec des
contestataires, qu'il est encore possible, dis-je, d'obtenir dans l'ordre, dans
le respect de l'autorité constituée, la reconnaissance de ses
droits. Voilà, à mon humble avis, ce que vient de nous prouver,
de façon éclatante, tout un réseau d'organisations
familiales et de représentants d'institutions, et ce réseau en
particulier qui s'est affirmé par son dynamisme, par son
énergique et intelligente action. Je veux leur rendre publiquement
hommage à mon tour et les féliciter du résultat qu'ils ont
obtenu, tous sans exception, mais, en particulier, une de ces associations, qui
s'est montrée des plus actives au cours de ces démarches, soit
l'Association catholique des parents du Québec, qui est dirigée,
comme on le sait, par son distingué président, M. Louis
Bouchard.
Comme d'autres voix plus autorisées que la mienne ont
déjà analysé les principes fondamentaux de cette
importante législation, je me limiterai donc surtout à faire
quelques très brèves observations personnelles,
conformément aux règlements de la Chambre, sur ce qui me semble
être l'a-propos et la portée de ce bill. Je me propose cependant,
s'il est nécessaire, d'intervenir encore brièvement en
comité sur certaines dispositions du bill. Je crois, M. le
Président, que les députés qui ont eu l'avantage de
participer aux séances du comité de l'éducation ont sans
doute été frappés par un phénomène
relativement nouveau auquel nous assistons présentement au
Québec. C'est celui de
la prise de conscience des parents, qui sont enfin résolus
à s'occuper de leurs affaires, en contestant au pouvoir public, et en
particulier à une certaine bureaucratie, un droit qu'ils ont de plus en
plus tendance à s'arroger, soit celui de tenter d'édifier un
certain monopole d'Etat dans le domaine de l'éducation. Depuis
longtemps, chez nous, on déplorait, et avec raison, l'apathie, voire
même la démission, d'un trop grand nombre de parents face aux
obligations que leur impose le renouveau scolaire actuel.
Aussi, ce n'est pas en vain que depuis 1960 en particulier, les
gouvernants qui se sont succédé à la direction de
l'administration provinciale ont à tour de rôle multiplié
les professions de foi publiques concernant les droits sacrés et
inaliénables des parents en matière d'éducation; ils les
ont instamment invités à faire connaître leurs exigences
dans ce domaine. Après avoir quelque peu hésité,
voilà qu'ils viennent enfin relever de façon éclatante et
éloquente ce défi qu'on leur avait lancé et devant lequel
ils sont bien déterminés à ne plus reculer quoi qu'il
advienne. Voilà, quant à moi, l'impression qui a semblé se
dégager de la participation des parents aux dernières
réunions du comité de l'éducation. Je crois que cette
volonté de prendre leurs affaires en main, cette prise de conscience des
parents du Québec ne devra pas inquéter nos pouvoirs publics.
Bien au contraire, car ils trouveront chez eux, s'ils savent l'accepter
franchement, une précieuse collaboration et un appui dont ils ont,
à l'heure actuelle, grandement besoin pour résister aux pressions
démagogiques et irraisonnables qui sont exercées par des groupes
minoritaires qui, en dépit de leurs clameurs bruyantes, ne
représentent aucunement les aspirations de la population
québécoise. Personnellement, je tiens à féliciter
bien chaleureusement tous les parents et tous les représentants de ces
mouvements familiaux ou des institutions qui ont bien voulu apporter leur
précieuse collaboration et leur expérience dans
l'élaboration de cette importante loi-cadre qui sera sans aucun doute
appelée à exercer une influence considérable sur
l'orientation future de tout notre système scolaire
québécois.
Je formule le voeu que tous les parents du Québec, quelles que
soient leurs origines ethniques ou religieuses, conjuguent leurs efforts et
leurs voix pour bien informer les pouvoirs publics, quels qu'ils soient, de
leurs aspirations en tout ce qui touche les problèmes de famille et en
particulier en tout ce qui a trait à l'enseignement où se joue,
en définitive sachons le bien l'avenir même des
familles québécoises. En ce qui me concerne, je tiens à
les assurer de ma plus entière collaboration et de mon appui sans
réserve à toutes les revendications que je considérerai
justes, raisonnables et d'intérêt public.
Avant de tenter d'esquisser en deux mots une brève
synthèse des positions claires et nettes qui ont été
prises par ceux qui ont jugé à propos de soumettre des
mémoires au comité, je voudrais souligner le fait que les quelque
trente organismes familiaux qui ont exprimé leurs vues ne sont pas,
comme on serait porté à le croire dans certains milieux, des
quantités négligeables.
Le gouvernement, en particulier, aurait à se repentir
amèrement s'il s'avisait, à l'avenir, de prendre à la
légère leurs doléances.
Notons, en passant, qu'un seul de ces organismes a réussi, il y a
à peine un an environ, à recueillir plus de 100,000 signatures
pour appuyer ses revendications. D'autre part, la Fédération des
associations de parents d'étudiants des collèges classiques, par
exemple, compte plus de 56 associations locales, réunissant plus de
30,000 membres. C'est donc dire qu'il ne s'agit pas d'une simple agitation
passagère, d'une simple velléité sentimentale ou
conservatrice de la part de parents retardataires, mais bel et bien d'une
nouvelle génération de parents, à la volonté bien
mûrie et bien arrêtée, qui sont totalement engagés et
qui ne capituleront jamais plus, quelle que soit la durée et
l'âpreté des exigences de la lutte qu'ils auront à
entreprendre.
Est-ce nécessaire également de souligner à
l'attention de cette Chambre que les parents et les responsables des
institutions privées ont, enfin, réussi à réaliser
l'unanimité concernant cet épineux problème du secteur
semi-public de l'enseignement? Seules deux voix dissidentes se sont fait
entendre devant le comité je crois que ce sont celles de la CSN
et de SPEQ d'ailleurs, de façon très
modérée. Toutes les autres, y compris celles représentant
les communautés protestantes et juives, ont été unanimes
à réaffirmer et à réclamer le respect
intégral, non seulement en théorie, mais aussi en pratique, du
droit des parents au libre choix de l'institution.
Voilà le principe fondamental qui a servi de base à toutes
leurs revendications. Je crois que ceux qui ont été
témoins des prises de position très fermes des mandataires des
parents et des institutions ont sans doute compris qu'il s'agissait là
de l'affirmation d'un droit sacré auquel ils tenaient comme à la
prunelle de leurs yeux et qu'ils sont bien déterminés,
dorénavant, à défendre à tout prix. Aussi, bien mal
avisés seraient ceux qui se leurreraient au point de croire que ces
institutions et que ces parents fini-
ront bien, comme bien d'autres, par capituler devant certaines pressions
d'une certaine bureaucratie ou toute autre pression» Il est vrai que
beaucoup d'entre eux, à contrecoeur, ont déjà
cédé et sacrifié des institutions auxquelles ils
étaient très attachés afin de faire place aux CEGEP.
Mais qu'on se rappelle bien qu'ils l'ont fait avec l'assurance formelle
que le gouvernement reconnaîtrait, dans un avenir rapproché, un
certain nombre d'institutions privées. Eh bien! reconnaissons-le, c'est
cet engagement que veut accomplir le gouvernement, en présentant le bill
56. C'est cette promesse solennelle, faite devant toute la province par les
deux partis, et en particulier par le gouvernement actuel, qui en a fait un
article bien précis de son programme électoral. C'est enfin ce
droit naturel et sacré, reconnu par toutes les autorités
religieuses et autres, par exemple par la déclaration universelle des
droits de l'homme, par Vatican II, par le rapport Parent, par le
préambule du bill 60, c'est ce droit, dis-je, que vient enfin
concrétiser et inscrire dans nos statuts le bill 56.
Donc, je le répète intentionnellement, afin qu'on en
tienne bien compte, les parents viennent de parler haut et ferme, et
clairement. Ils refuseront dorénavant toute mesure qui serait de nature
à conduire fatalement à un monopole d'Etat dans le domaine de
l'Education. Ils veulent qu'on respecte leur liberté de pouvoir choisir
eux-mêmes, soit le secteur public, soit le secteur semi-public, selon ce
qu'ils jugeront le plus conforme à leurs croyances.
N'est-ce pas légitime, en démocratie, que certains parents
et je suis de ceux-là à tort ou à raison,
n'aiment pas ces campus géants où sont parqués des
milliers d'adolescents, ou encore qu'ils craignent l'influence néfaste
de certains professeurs, pour une raison ou pour une autre, et qu'ils
préfèrent confier leurs enfants à certaines institutions
plutôt qu'à certains CEGEP. Il me semble que c'est là un
droit bien humain et naturel, dont peuvent se prévaloir les parents qui
le jugeront à propos.
Voilà pourquoi je soutiens que, jamais, au Québec, les
parents n'accepteront de camisole de force en éducation, devraient-ils
être obligés de soutenir les luttes les plus âpres. Si, par
hasard, on venait un jour à leur refuser ce droit, je crois que le
Québec connaîtrait à son tour ces luttes épiques
qu'ont été forcés de soutenir d'autres groupes de ce que
l'on appelle la francophonie, soit en Ontario, en France, en Belgique ou
ailleurs.
Je voudrais maintenant, très sommairement, tenter de
réfuter certains arguments qui ont été
allégués par ceux qui s'objectent au maintien d'un certain nombre
d'institutions privées.
Il est bon, je crois, de dissiper certains préjugés qui
sont de nature à jeter de la confusion et à engendrer une
certaine suspicion dans l'opinion publique à l'endroit de ces maisons.
Nous nous opposons au maintien de deux secteurs parallèles dans
l'enseignement, dit-on dans certains milieux hostiles aux institutions
privées. Eh bien, personnellement, M. le Président, j'ai suivi
avec la plus vive attention le débat qui s'est tenu sur la place
publique. J'ai entendu l'exposé de tous les mémoires qui ont
été soumis au comité de l'éducation et jamais, en
aucune occasion, je n'ai entendu une seule voix, tant du côté des
parents que du côté des institutions, une seule voix pour
réclamer deux secteurs parallèles d'éducation chevauchant
côte à côte.
Ce que veulent les parents ils l'ont dit très clairement
c'est qu'on maintienne un nombre suffisant d'institutions privées
dans une région afin de mettre à la disposition des parents qui
le désireront l'institution de leur choix. Donc, il est contraire aux
faits et aux dires de soutenir que les parents exigent la présence de
deux réseaux identiques, l'un public et l'autre privé.
Ces institutions privées, a-t-on encore soutenu en d'autres
milieux, étalent dans le passé et demeureront le fief d'une
classe de privilégiés. Eh bien, on ne peut là encore,
honnêtement, à la lumière des faits qui nous ont
été révélés par certaines enquêtes,
faire une telle affirmation car ces enquêtes nous ont informés que
plus de 60%, et même 70% des élèves qui
fréquentaient par exemple, nos collèges classiques étalent
issus de familles à revenu modique, familles ouvrières, familles
agricoles, ou provenant de la classe moyenne ou la classe des cols blancs.
D'autres disent: Nous refusons que nos taxes servent à entretenir
à nos frais, des institutions privées qui seront
réservées à quelques préférés. Ici
encore, M. le Président, ces parents qui réclament le droit du
libre choix de l'institution ne sont-ils pas, eux aussi, au même titre
que les autres, des contribuables assujettis aux mêmes impôts et
taxes? De plus, comme le disait si justement l'un des mandataires des parents
au comité, si demain on ferme les institutions privées, ces
enfants ne se retrouveront-ils pas automatiquement après-demain matin
dans l'institution publique? Le gouvernement ne sera-t-il pas obligé de
débourser, en plus, le coût total de l'instruction de cet
étudiant, soit jusqu'à $1,300, comme c'est le cas S. l'heure
actuelle dans certains CEGEP?
Alors pourquoi ne pas, comme le veut la simple équité,
remettre ces montants ou une partie de ces montants à l'institution qui
donne ce service à l'enfant? Car pourquoi les parents de cet enfant
fréquentant une institution autre que celle de l'Etat, dite publique,
n'auraient-ils pas, eux aussi, droit à leur juste part de la
répartition des fonds publics, auxquels ils souscrivent au même
titre que tous les autres citoyens?
Contrairement à ce que soutiennent certains contestataires,
l'institution privée n'est pas réservée à une
classe de privilégiés. C'est d'ailleurs précisément
pour cette raison que les parents ont fait entendre leur voix au comité,
ont réclamé une certaine parité de traitement, afin de la
rendre accessible aux économiquement faibles, et afin qu'il n'existe
aucune discrimination à l'endroit des moins fortunés.
Pourquoi soutient-on encore ce dédoublement d'institutions qui
seront, en définitive, tenues d'offrir les mêmes cours? Pourquoi?
Tout d'abord pour laisser aux parents la possibilité du choix
d'éduquer leurs enfants selon leur désir et leurs aspirations.
Deuxièmement, pour favoriser, comme l'a dit l'honorable chef de
l'Opposition, une certaine émulation entre deux secteurs
différents d'enseignement ayant chacun leur discipline, leurs
professeurs, leurs méthodes d'enseignement bien caractéristiques.
Et enfin, pour offrir la possibilité d'expérimentations
pédagogiques grâce à des expériences pilotes en
enseignement, ce qui est pratiquement impossible, on le sait, avec un secteur
unique et public.
Il n'est pas nécessaire, je crois, d'être docteur en
pédagogie pour comprendre que cette diversité constitue une
richesse inappréciable, non seulement pour la réforme
pédagogique, mais aussi au point de vue culturel. N'est-ce pas que cette
émulation contribuera à éviter cette routine
bureaucratique qui menace fatalement tous les services gouvernementaux, qui ont
tendance à fabriquer dans un moule étatique des espèces de
citoyens-robots?
D'ailleurs, il est assez significatif de constater, à l'heure
actuelle, que tous les pays démocratiques, sans exception, qui ont
commis l'erreur d'abandonner ou de supprimer les institutions
indépendantes, se voient maintenant contraints à reviser leur
attitude intransigeante à leur endroit. Alors, pourquoi notre petit
peuple se paierait-il le luxe de laisser disparaître des institutions
qu'il sera forcément obligé demain de réédifier de
peine et de misère? Voilà ce que soutenaient les parents et les
représentants des institutions.
M. le Président, je tiens enfin à relever un dernier
argument soulevé par certaines personnes.
N'y a-t-il pas danger de voir un jour l'institution publique
supplantée par l'institution privée? Je crois que c'est là
un aveu assez révélateur sur la valeur des institutions en
présence. C'est pour ainsi dire la reconnaissance, jusqu'à un
certain point, de la supériorité du système privé.
Alors, pourquoi donc l'Etat en priverait-il les familles qui veulent en faire
bénéficier leurs enfants? affirmaient les parents avant la
présentation de ce projet de loi. Qu'on sache bien qu'il ne s'agit
aucunement, dans l'esprit de ces parents, de concurrence, mais bel et bien
plutôt d'une espèce comme le soulignait le ministre
de complément à ce que donne déjà l'école
dite publique.
Je m'excuse auprès des membres de cette Chambre de m'être
attardé à relever ce que Je considère être des
préjugés contre l'institution privée, mais je crois que je
me devais, afin de créer un climat de franche collaboration entre les
deux secteurs, de rétablir certains de ces faits. Cette loi constitue un
pas en avant dans la bonne direction et répond en grande partie au voeu
des parents du Québec. Elle vient enfin remplir cet engagement
qu'avaient pris publiquement les deux grands partis politiques durant les
dernières années. Même s'il y a, aux yeux de certains, des
points faibles concernant les droits des parents et des institutions
concernées, il n'en demeure pas moins qu'il y a dans ce texte de loi une
solution qui me semble acceptable et raisonnable dans les circonstances et qui
devrait par conséquent recevoir l'appui de tous les membres de cette
Chambre. Je ne doute pas que ceux qui seront chargés de l'application du
bill 56 sauront le faire en respectant l'esprit du législateur,
c'est-à-dire en faisant tout en leur pouvoir pour assurer le
développement harmonieux de tout un secteur d'institutions dites
d'intérêt public, et cela pour le plus grand bien des familles du
Québec et pour l'épanouissement de notre peuple.
UNE VOIX: Très bien.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmorency.
M. Gaston Tremblay
M. TREMBLAY (Montmorency): M. le Président, il m'est tout
à fait superflu de souligner de nouveau S. cette Chambre, au
début de mes remarques, que la philosophie que je professe se situe bien
loin du socialisme d'Etat en éducation que défend le gouvernement
actuel et ce-
lui qui l'a précédé au pouvoir. Je tiens toutefois
à appuyer sur le fait que certains technocrates du ministère
s'évertuent à presser le gouvernement, que dis-je, à lui
faire prendre l'épouvante afin, semble-t-il, de consommer totalement
cette politique du socialisme d'Etat et essayer de placer la population tout
entière devant l'éventualité néfaste de
l'irréversible.
De plus, ce qui est encore pis, ce processus de l'étatisation
totale est conduit contre la volonté du peuple qui a clairement
défini sa position à l'élection générale de
1966.
Le bill 56, M. le Président, vient par ailleurs à
l'encontre du programme électoral de l'Union Nationale. Il
matérialise l'antithèse de ce que le gouvernement actuel a
défendu avant juin 1966. L'adoption de cette loi, M. le
Président, amènera certainement et à brève
échéance la mort de toutes les institutions privées du
Québec. Le bill a de telles exigences lorsqu'il y est dit, surtout dans
tout ce qu'il laisse entendre, que la survie des institutions privées
paraît complètement impossible dans les faits. La loi fait du
ministre, donc de l'Etat, le dictateur absolu à tous les degrés
de l'enseignement du préélémentaire jusqu'au CEGEP qu'il
va rejoindre donc jusqu'au bill 21 de si triste mémoire. Il a aussi tous
les vices d'omission de celui-ci et il a des conséquences encore
beaucoup plus graves, puisqu'il s'applique 3 l'enfance et non plus seulement
à l'adolescence.
Je crois bien sincèrement, M. le Président, pour prouver
toute la logique du geste que j'ai posé récemment, qu'il soit
devenu essentiel pour moi de relire à la Chambre les conclusions du
programme de l'Union Nationale en 1966 au sujet de l'enseignement. Et je cite
la recommandation no 9: « Maintien des institutions privées dont
le^Québec a besoin pour ses propres fins en matière
d'éducation et aide à ces institutions. » Recommandation no
10: « Maintien du principe de la confessionnalité de
l'enseignement », ainsi qu'à b): « droits pour les neutres
d'obtenir leurs propres écoles dans la mesure des besoins de la
population dite non confessionnelle. »
Il faut relire ces quelques articles du programme du gouvernement actuel
pour constater dans toute son ampleur, l'abîme qui sépare les
actes du gouvernement actuel de ses promesses formelles faites au corps
électoral du Québec.
Le bill 56, M. le Président, qui est une loi-cadre de
l'enseignement privé et qui régira toute l'éducation de
nos enfants, du préélémentaire jusqu'au collégial,
pour la troisième fois consacre par son omission, la neutralité
absolue de nos écoles au point de vue juridique.
De nouveau, les chrétiens catholiques et protestants
qui sont l'immense majorité, sont dans l'obligation d'aller
quémander une permission d'exception afin d'obtenir l'école
confessionnelle, ce qui veut dire, dans les faits, après
l'expérience des CEGEP...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A moins que je ne me trompe
sérieusement, et j'aimerais qu'on me le prouve, je ne vois rien dans le
bill qui puisse toucher de près ou de loin aux droits et à la
liberté de religion ou de confessionnalité.
M. TREMBLAY (Montmorency): Ce qui veut dire, dans les faits,
après l'expérience des CEGEP, que tout notre système
éducationnel, de la maternelle jusqu'à l'université, sera
devenu neutre après l'adoption de cette loi. En éducation, cette
loi adoptée, il est facile d'imaginer que le secteur public suivra
fatalement la même tendance neutraliste très bientôt. On
connaît le zèle des technocrates pour déchristianiser nos
écoles et l'apathie chronique du Parlement devant ces faits.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. MALTAIS (Limoilou): Des affirmations révolutionnaires et
ridiculesI
UNE VOIX: II ne sait pas ce qu'il dit.
M. LE PRESIDENT: J'ai invité l'honorable député de
Montmorency à éviter cette question qui, d'après moi,
n'est touchée en aucune façon par le bill présentement
à l'étude. Je ne vois rien, dans ce bill, qui regarde la
liberté et la confessionnalité.
M. TREMBLAY (Montmorency): C'est en relation avec le bill actuel. La
population du Québec tombera presque entièrement sous le joug de
l'intolérance administrative, dans un pays qui lui appartient de droit.
Tout ça pour faire plaisir à une poignée d'agnostiques et
d'anticléricaux qui trônent au ministère de
l'Education.
M. BELLEMARE: M. le Président, à l'ordre! Vous avez,
à deux reprises, rappelé l'honorable député au
principe du bill. Vous lui avez fait remarquer qu'il n'était pas
question de certains sujets qu'il vient de mentionner. Vous lui avez dit qu'en
deuxième lecture on devait discuter strictement du principe du bill.
L'honorable député, qui lit un discours d'un autre,
est obligé de continuer. Il n'est pas capable de changer de
sujet, puisque c'est une manière de...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: Non, mais je voudrais simplement...
M. LE PRESIDENT: A l'ordrel J'ai rappelé à Pordre
l'honorable député de Montmorency. Il m'évitera, j'en suis
sûr, le déplaisir de le rappeler à l'ordre formellement en
vertu de nos articles qu'il connaît sans doute très bien, car cela
constituerait pour moi une tâche très désagréable.
S'il revenait sur le sujet, je devrais le rappeler formellement à
l'ordre.
M. GRENIER: Passez un paragraphe.
M. BELLEMARE: On va suspendre nos délibérations, car il
est une heure. Pendant ce temps, il en fera un autre.
Les travaux sont suspendus jusqu'à trois heures. Il va avoir le
temps d'ouvrir ses antennes.
M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à trois
heures.
Reprise de la séance à 15 h 6
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! L'honorable député
de Montmorency.
M. TREMBLAY (Montmorency): M. le Président, vous avez rendu une
décision tout à l'heure concernant mon droit de parler de
confessionnalité à propos de ce bill. J'ai le profond regret de
dire à la Chambre que, même si je suis un nationaliste fervent, je
ne croyais pas voir le jour où je serais forcé de me servir de la
constitution canadienne actuelle pour défendre les écoles
confessionnelles catholiques, et cela contre le Parlement de la nation. A
l'article 93, paragraphe un, de la constitution, il est bien dit: « Ces
lois ne devront aucunement porter préjudice aux droits ou avantages que
la loi, au momsnt de l'Union, conférera à une classe
particulière de personnes relativement aux écoles
confessionnelles. »
Ensuite, une multitude de jugements ont été rendus par le
Conseil privé. Vous avez comité judiciaire...
M. LE PRESIDENT: A l'ordrel Je dois d'abord demander aux honorables
députés de me favoriser un peu de leur attention pour me
permettre de comprendre l'énoncé que fait actuellement
l'honorable député de Montmorency. Il semble se
référer actuellement à l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique. Inutile de vous dire qu'à ce moment-ci, j'ai besoin
d'entendre parfaitement les arguments de l'honorable député de
Montmorency afin d'intervenir s'il y a lieu.
M. TREMBLAY (Montmorency): Je n'ai plus le droit de dire ce que j'ai
à dire sur ce bill en ce qui concerne certains aspects et points
particuliers.
M. MALTAIS (Saguenay): C'est du sabotage chrétien.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Montmorency): La survie du secteur privé
déconfessionnalisé complètement et juridiquement ne sera
pas longue. On s'en rend compte quand on relit attentivement la note
explicative du bill, les exigences des articles de la loi et les
règlements du ministère dont parle le bill, et qui ne sont pas
connus ni du peuple, ni du Parlement. Le bill parle d'une commission
consultative dont les membres seront nommés par le lieutenant-gouverneur
en conseil. Il est facile de prévoir que le ministère verra
d'abord
à ne pas se créer d'ennui par ces nominations.
Deuxièmement, la commission étant un organisme consultatif, il
est bien évident que ses recommandations n'engageront ni le ministre, ni
les technocrates du ministère. Cet autre organisme à ajouter
à tous les autres ne sera dans mon esprit qu'un paravent dont se servira
le ministère pour faire endosser certains de ses actes.
La lecture du bill confirme aussi la crainte des parents et des
institutions privées quant à l'émission des permis ou leur
annulation.
A plusieurs reprises, le bill fait mention d'une réglementation
que personne ne connaît et qui pourrait facilement devenir
discriminatoire contre le secteur privé.
Bien plus, les exigences du ministère, par la
réglementation, peuvent aussi devenir, pour les écoles
concernées, impossibles à satisfaire. La résultante est
facile à prévoir. Le secteur privé gêne le
gouvernement, et les technocrates, pour parfaire l'étatisation de
l'enseignement, vont le faire mourir en douceur.
Le bill 21 nous a déjà confirmé ce fait, par la
disparition de nos collèges classiques et de nos écoles
normales.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A moins que l'honorable député
ait l'intention de présenter une motion pour que le bill 21 soit
retiré, il ne peut le critiquer à ce moment-ci, parce qu'il a
été adopté par la Chambre.
M. TREMBLAY (Montmorency): Pour les institutions privées
concernées par le bill 56, je n'ai aucun doute que l'histoire se
répétera et, cette fois-ci, encore plus rapidement que pour le
bill 21.
Si l'on ajoute à ces arguments précis la
possibilité de chantage que peut fournir le bill aux technocrates, en
établissant l'émission annuelle des permis et la subordination du
secteur privé au secteur public, il serait illusoire, et même
déraisonnable, de penser un seul instant que le secteur privé
puisse survivre à l'adoption d'une pareille loi.
En résumé, il n'aura fallu que huit petites années
à une poignée de technocrates pour casser les reins de deux
gouvernements, pour détruire totalement un système
d'éducation confessionnel, pour égorger tout un peuple par des
taxes extravagantes et souvent impossibles à acquitter pour les
citoyens, pour instaurer à tous les stades d'enseignement chez nous une
école polyvalente et optionnelle qui est en train de provoquer le
génocide de notre population, d'instaurer le désordre en loi de
continuité, de désaxer toute une génération et de
conduire toute une jeunesse au désespoir, à l'habitude de la
drogue et au suicide.
J'ai hâte de voir l'attitude de certains députés de
cette Chambre lors du vote sur les principes du bill 56. Ai-je besoin d'ajouter
en terminant que je voterai contre le présent bill?
M. Jean Bienvenue
M. BIENVENUE: M. le Président, il arrive parfois au gouvernement
actuel de proposer d'excellents projets de loi et, ce qui est mieux encore, de
les faire adopter en deuxième et en troisième lecture le
même jour, sans les référer à des comités et
sans les remettre à plus tard.
De cela, je félicite le gouvernement actuel. J'ai mis, M. le
Président, comme vous pourrez le constater de visu, ma plus belle
chemise bleue. Je suis, de fait, habillé en bleu de la tête aux
pieds pour faire cette intervention, car il m'arrive parfois d'être
conservateur, évidemment, au sens propre du mot.
Avant de poursuivre mes remarques, je veux et c'est avec plaisir
que je le fais exprimer toute mon appréciation aux responsables
de la réalisation de ce projet de loi. Comme il se doit, mes paroles
s'adressent d'abord au député de Lévis, ministre d'Etat
attaché à l'Education. Je connais ses vues sur la question; je
connais la somme de travail et les efforts personnels auxquels il s'est
astreint relativement au bill 56.
Il a, d'ailleurs, d'autant plus de mérite, M. le
Président, que nous connaissons tous l'état lamentable des
finances du Québec actuellement. Je le félicite
sincèrement, de même que le ministre de l'Education, pour le
travail qu'ils ont fait, grâce auquel, aujourd'hui, nous sommes
appelés à nous prononcer sur le principe du bill.
Je félicite aussi le leader du gouvernement, député
de Champlain, ministre du Travail je donne tous ses titres pour qu'il me
regarde qui a retiré sa motion. Hier, malheureusement, le leader
n'était pas...
M. BELLEMARE: Timeo Danaos et dona ferentes!
M. BIENVENUE: ... il supportait Bona! Hier, M. le président, le
ministre n'était pas sur une vague de retraite. Aujourd'hui, il
retraite, c'est-à-dire il retire...
Hier, il donnait l'impression mais ce sont des choses aimables
que je me proposais de dire...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Hier, j'ai eu beaucoup de difficulté
à maintenir le débat dans les cadres de la motion. Aujourd'hui,
je ne vou-
drais pas avoir de difficulté à maintenir le débat
dans la motion de deuxième lecture.
M. BIENVENUE: M. le Président, lorsque l'Union Nationale recule,
c'est notre devoir de nous en plaindre, mais lorsqu'elle avance, c'est notre
plaisir de le lui dire et c'est ce que je viens de faire.
Mes remarques s'adressent aussi, non pas au député de
Chicoutimi, mais aux divers groupements et associations de parents et de
responsables d'institutions indépendantes qui ont lutté sans
relâche pour faire triompher leurs justes revendications, tant sur la
place publique que devant le comité de l'éducation.
Je rends hommage à leur persévérence et à
l'intelligence, à la sincérité de leur combat,
livré sans haine, sans menace, sans injure, sans même l'aide de la
Société Radio-Canada, mais dans l'ordre, l'harmonie et le respect
de la charité et de la législature.
J'ai, à mes côtés, le député de
Richmond, qui m'encourage à continuer en disant, en scandant mes
phrases, des mots... très bien. Je vais aborder un sujet où je
vous demande, M. le Président, de voir s'il va scander à nouveau
les mots... très bien.
Ces groupements et organismes ont eu aussi la finesse de confier partie
de la surveillance de leurs intérêts à un parlementaire
chevronné à qui il y a longtemps que je désirais rendre un
hommage public. Or, je ne puis trouver de forum plus approprié pour
parvenir à mes fins que cette Chambre du Parlemant de Québec dans
laquelle il siège depuis longtemps. C'est ici, en effet, que le
député de Richmond...
M. LAFRANCE: Al'ordre! Al'ordre!...
M. BIENVENUE: Je demande au député de Richmond de regagner
son siège, s'il veut m'interrompre... que le député de
Richmond...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Comme moi, je suis à mon
siège, je me permets d'interrompre l'honorable député de
Matane, et je le prierais d'enlever de ses roses les épines qui me
rendent malheureux.
M. BIENVENUE: ... je le disais donc, M. le Président, s'est
illustré, depuis plusieurs années, par sa
sincérité, son esprit de travail et par la ferme expression de
ses convictions. Certains partagent ou non ses vues ardentes sur
différentes questions, peu importe. Mais tous les membres de cette
Chambre, je le crois bien, s'inclineront devant l'immense courage avec lequel
il a toujours défendu ces causes, se retrouvant trop souvent seul...
J'ai fini, M. le Président... Je finissais ma phrase pour qu'elle
soit...
M. LE PRESIDENT: J'ai cru que l'honorable député de Matane
voulait féliciter l'honorable député de Richmond de son
intervention de ce matin, ce qui serait parfaitement dans l'ordre...
M. BIENVENUE: J'arrive à cela.
M. LE PRESIDENT: ... mais s'il veut le féliciter pour toute sa
carrière, je dois malheureusement m'y opposer... pour aujourd'hui.
M. LAFRANCE: Vous pouvez vous y opposer M. le Président...
M. BIENVENUE: J'arrivais à cela, parce que tous savent
évidemment que toute la carrière du député de
Richmond l'a préparé à l'intervention brillante qu'il a
faite ce matin.
Je voulais, M. le Président, au moment où vous m'avez
demandé d'être modéré dans mes hommages, lui dire,
de même qu'au député de Lévis et à d'autres
de cette Chambre, qu'ils ne sont pas seuls.
Il y a des centaines de milliers de citoyens qui veulent l'ordre, la
paix et le respect de l'autorité sous différentes formes, dont la
survie des institutions indépendantes n'est pas la moins importante. A
ce point de mon intervention, je crois de mon devoir de me porter
j'espère qu'on va me laisser continuer à la défense
du gouvernement de l'Union Nationale devant non, je demande au leader de
ne pas être inquiet, je me porte réellement à la
défense du gouvernement devant certaines accusations ou certaines
phrases du député de Montmorency.
M. le Président, c'est le temps des Fêtes. Cela porte
à l'esprit de charité et de fraternité et je ne pouvais
pas résister au regard suppliant que m'adressait le leader du
gouvernement pendant les propos du député de Montmorency.
M. BELLEMARE: C'est pourquoi vous êtes bienvenu.
M. BIENVENUE: Le ministre ne mourra pas de sa belle mort. M. le
Président, je tiens à dire que la présence approbative en
cette Chambre de représentants distingués de l'enseignement
privé, de communautés religieuses, de même que les lettres
et les messages qu'ils nous ont transmis devraient rassurer la conscience
troublée du député de Montmorency face à ce qu'il a
appelé, dans ses remarques, l'action socialisante du gouvernement actuel
et du gouvernement qui l'a précédé. M. le
Président, vous savez que la
meilleure façon pour quelqu'un de faire triompher ses
idées ou de les améliorer en les entourant de pondération
est, je pense, de rester dans le parti politique qui l'a élu. Je dis au
député, je le rassure...
M. LE PRESIDENT: Malheureusement, je ne peux permettre ces remarques que
l'honorable député de Matane est sur le point d'entamer.
M. BIENVENUE: M. le Président, vous ne me rendez pas le travail
facile.
M. BELLEMARE: Très bien, ne lâchez pas! M. LE PRESIDENT:
C'est assez réciproque.
M. BIENVENUE: M. le Président, j'allais m'apprêter à
dire au gouvernement les choses les plus aimables dont je sois capable et vous
me privez de cette joie. Ce n'est pas facile. Ni le gouvernement, ni celui qui
l'a précédé ne veulent, face au problème des
institutions indépendantes, dont parle le bill 56 dans son principe,
faire du Québec un Etat totalitaire ou brimer les libertés
individuelles des parents puisqu'on parle d'éducation
qu'ils soient catholiques, protestants, juifs ou autres. Je pense, toujours au
sujet du principe de ce bill 56, que c'est encore au sein des deux grands
partis et seulement au sein de ces deux grands partis qu'on pourra contribuer
au respect des personnes et des institutions au Québec.
Quand je dis « on », J'inclus évidemment le
député de Montmorency.
M. TRE MBLAY (Montmorency): Est-ce que c'est du bill 56 que vous
discutez?
M. BIENVENUE: M. le Président, gardant toujours présente
en moi, une reconnaissance éternelle pour ceux qui m'ont prodigué
l'enseignement qui m'a permis d'être ce que je suis, désirant
ardemment que mes propres enfants, et ceux des autres qui le veulent, puissent
bénéficier du même haut niveau d'éducation, je
désirais depuis longtemps l'adoption d'un tel projet de loi.
D'ailleurs, après avoir résisté longtemps à
la tentation de faire de la politique j'y ai succombé en ayant avant
tout présent à l'esprit les dangers immenses que couraient
certains modes d'enseignement, certains groupes confessionnels dans cette
province. Si ces dangers étaient devenus réalité, le
Québec serait tombé, sous le faux prétexte de progresser,
loin derrière tous les pays du monde occidental, qu'ils soient
Scandinave, français, allemand, américain ou anglais ou que
sais-je encore. Dans ces pays on s'est vite rendu compte, comme le soulignait
le député de Richmond ce matin, du calibre non seulement
égal mais souventefois supérieur de ces institutions souvent
centenaires, qui ont formé le cerveau merveilleusement
équilibré de centaines et de milliers d'hommes de science et
d'hommes de lettres.
J'ai aussi, comme d'autres membres de cette Chambre, reçu ces
lettres et ces télégrammes dont parlait ce matin le chef de
l'Opposition. Je puis dire, et je le dis avec fierté, que l'Opposition a
eu un rôle à jouer dans le travail de coordination
nécessaire à la mise à la poste urgente de ces
différents messages qui ont rechargé la batterie passablement
faible du gouvernement. Mais je n'avais pas besoin, et l'Opposition non plus,
de la lecture de ces documents. Pour les raisons que j'ai déjà
mentionnées, les seules dictées de ma conscience étalent
suffisantes pour m'inciter de prendre la position qui est mienne aujourd'hui.
On a cité, M. le Président, le préambule du bill 60, on a
cité certaines tranches du rapport Parent; je désire ajouter
à ce dossier des pièces tout aussi sinon plus convaincantes. Le
concile et c'est avec plaisir que je le cite disait ceci:
or, ça se rapporte directement à la question qui fait l'objet du
principe du bill, M. le Président, même si c'est le concile
« Le pouvoir public, dont le rôle est de protéger et de
défendre les libertés des citoyens, doit respecter la justice
distributive en répartissant les subsides publics de telle sorte que les
parents puissent jouir d'une vraie liberté dans le choix de
l'école de leurs enfants. »
J'ajoute je fais un peu comme le leader qui citait à la
barre hier soir M. le Président j'ajoute au dossier un extrait de
l'article 26 de la déclaration des droits de l'homme adoptée en
1948, qui reconnaît: « Les parents ont, par priorité, le
droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs
enfants. » Je cite maintenant la déclaration des droits de
l'enfant, adoptée, en novembre 1959, par l'ONU: «
L'intérêt supérieur de l'enfant doit être le guide de
ceux qui ont la responsabilité de son éducation et de son
orientation. Cette responsabilité incombe en priorité à
ses parents. » Enfin, la charte de l'enseignant, adoptée plus
près de nous, en octobre 1966, lors d'une conférence
Intergouvernementale spéciale tenue sous les auspices de l'UNESCO,
prévoyait à son tour: « Il ne faut pas porter atteinte
à la liberté des parents et éventuellement des tuteurs de
choisir pour leurs enfants d'autres écoles que celles qui sont
établies par l'Etat, ni com-
promettre la liberté des particuliers et des personnes morales
d'ouvrir et de diriger des établissements d'enseignement qui
répondent aux normes minimales fixées ou approuvées par
l'Etat en ce qui concerne l'enseignement. »
Il n'y a pas que le seul enseignement sur le plan de la scolarité
qui à mes yeux je ne veux pas parler pour d'autres fait
que le secteur privé demeure le champion indiscutable de l'enseignement
chez nous. En effet, on ne fait pas qu'y enseigner ou instruire en fournissant
au cerveau de l'enfant le bagage des connaissances scolaires basées
rigoureusement sur les programmes froids et techniques du ministère de
l'Education; le tout conformément aux heures, conditions et normes
autorisées par les conventions collectives liant les enseignants du
secteur public. Il y a bien davantage.
Je ne voudrais pas que l'on voie ici une attaque, même par
ricochet, à l'impérieuse raison d'être du secteur public
qui permettra à des centaines de milliers d'enfants de s'instruire et de
s'épanouir pour créer au Québec des forces nouvelles, des
sources d'eau vive, trop longtemps dormante chez nous. Non, je respecte le
parallélisme et je dis qu'il est nécessaire. Il reste, quand
même, que, dans ces institutions privées dont j'ai parlé,
on continue l'oeuvre gigantesque, commencée il y a des siècles,
et qui a produit, comme on le disait ce matin, les têtes dirigeantes de
l'histoire de cette province.
Je veux rendre un hommage particulier, non seulement à tous les
enseignants du secteur privé en général, mais à
ceux, parmi eux, qui ont consacré, de façon encore plus directe,
de façon plus globale, leur vie à enseigner, à instruire
et à former. Parmi ceux-là, il m'est impossible d'oublier
il y en a des représentants ici dans la galerie les membres du
clergé ou de communautés religieuses qui continuent à
enseigner à nos enfants, qui ont consacré leur vie à
l'enseignement, et dont le premier souci, quelle que soit l'heure, quelles que
soient les conditions, est de s'acquitter de leur mission et de travailler pour
le résultat, ceux pour qui l'enfant ou l'éducation est une fin
exclusive et non un moyen.
Je tiens à leur dire que leur présence est bienvenue pour
longtemps dans notre monde de l'enseignement du Québec et que
j'espère, comme plusieurs autres, comme, j'en suis sûr, la
totalité des membres de cette Chambre, qu'ils seront encore longtemps
dans l'enseignement la source la plus pure d'éducation pour ceux qui
formeront la génération de demain.
Pour toutes ces raisons et d'autres encore, longues à
énumérer, ne voulant pas répéter ce que d'autres
ont dit avant moi, même si le bill n'est pas parfait et je ne
connais pas de loi parfaite, d'ailleurs je dis que c'est avec joie et
avec conviction que je voterai pour le principe de ce bill, tout comme le
feront, je le pense, mes collègues de l'Opposition.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de D'Arcy-McGee.
M. Victor-C. Goldbloom
M. GOLDBLOOM: Je voudrais citer brièvement un paragraphe
écrit il y a quatre ans par un des plus grands citoyens du
Québec: « Au trois niveaux, primaire, secondaire et universitaire,
l'action des parents restera toujours très difficile, puisqu'ils n'ont
pas nécessairement toute la compétence requise pour assumer
directement leurs responsabilités. Mais ce n'est pas là une
raison pour qu'ils négligent leurs devoirs ou abandonnent leurs droits
à l'Etat. Ils doivent veiller à se grouper en
sociétés intermédiaires, dirigées par des hommes
clairvoyants et compétents. C'est par elles qu'ils pourront collaborer
avec les éducateurs et exercer une influence sur les structures
elles-mêmes. Affirmer au contraire qu'à cause de leur
inexpérience ou de leur manque d'aptitudes, les parents doivent renoncer
à leur droit et s'en remettre à l'Etat, c'est déjà
une invitation au totalitarisme. »
Par ces paroles lumineuses du cardinal Paul-Emile Léger,
publiées en 1954 dans un livre intitulé « Réflexions
chrétiennes sur l'éducation», je voudrais dire
brièvement comment je suis heureux de pouvoir appuyer le gouvernement
qui présente aujourd'hui un projet de loi renouvelé sur des
institutions d'enseignement privé.
Malgré le rôle énorme que l'Etat doit jouer dans
notre système d'éducation, un rôle directeur, un rôle
catalyseur, un rôle d'appui financier surtout, je crois qu'un monopole
étatique dans un domaine si crucial et si délicat
présenterait certains dangers. Je crois qu'il est essentiel que nous
confirmions le rôle des institutions privées dans notre
société moderne.
Nombreuses sont celles qui méritent de survivre. Evidemment,
comme dans toute oeuvre humaine, il se peut qu'il y en ait qui ne
méritent pas de survivre. Cependant, celles qui ont atteint dans
l'enseignement un niveau de qualité qui justifie que la
société les appuie sont demeurées trop longtemps dans
l'incertitude. Elles trouvent, aujourd'hui, la confirmation de leur droit
d'exister et de fournir une éducation de qualité à nos
jeunes de demain.
Ces institutions jouissent, dans plusieurs cas,
d'une participation toute particulière de la part des parents des
élèves. Voilà une chose à encourager, à mon
sens, d'autant plus que certaines de ces écoles et je ne parle
pas d'un groupement particulier dans la société ont un
caractère confessionnel. Aux yeux des parents, cette qualité
confessionnelle offre des valeurs toutes particulières qu'ils
désirent ardemment voir maintenues et conservées.
Chacun de nous a son opinion sur cette question extrêmement
délicate et personnelle. Il ne s'agit pas, pour nous ici, d'examiner ces
opinions, mais plutôt de tenir compte du désir exprimé dans
la province par un grand nombre de parents, en légiférant de la
façon dont nous le faisons aujourd'hui.
Il y a lieu, pour moi, de dire une chose supplémentaire. Parmi
les écoles de caractère confessionnel, il y en a qui n'ont pas
joui d'un appui financier de l'Etat. A l'avenir, par le truchement de cette loi
que nous allons adopter, elles pourront bénéficier d'un tel
appui. Je crois que si, parmi les religions majeures, seules des écoles
représentatives de certaines ont pu obtenir cet appui de l'Etat par le
système que nous avons érigé au siècle dernier,
c'est une justice normale que les écoles de toutes les confessions
majeures soient reconnues de la même façon.
Il y a un autre élément important du rôle des
institutions privées, celui qu'on appelle, en anglais, « the
lighthouse principle », le principe du phare. Parmi ces institutions, il
y en a qui sont en mesure de faire certaines expériences:
expérience de méthodes pédagogiques, expérience des
systèmes d'options et autres. Par ces expériences, ou, si vous
voulez, par cette éducation expérimentale, ces institutions
privées peuvent servir de phares à d'autres institutions qui ne
sont pas en mesure de faire de telles expériences ou qui
préfèrent attendre le fruit de ces recherches avant de modifier
leur propre système.
C'est de cette façon que tout notre système
d'éducation peut progresser. Je voudrais ouvrir ici une petite
parenthèse pour rendre hommage à une école qu'ont
fréquentée mes propres enfants au niveau maternel, l'école
Weston de Montréal qui, justement dans ce domaine de l'e'ducation
expérimentale, a fait des études particulières sur
l'enseignement de la langue française à des enfants anglophones
de très jeune âge, et avec un succès tel que cette
école a déjà publié deux manuels permettant
à d'autres de suivre les mêmes traces.
Il y a donc, parmi nos institutions d'enseignement privé
plusieurs écoles qui, indépendamment, pour le moment parce
que nous n'allons pas les examiner immédiatement; nous le ferons au
comité des exigences qui seront inscrites dans la loi, sont
d'intérêt public. Je suis heureux qu'elles soient reconnues ou
qu'elles aient au moins la possibilité, selon cette loi, d'être
reconnues comme telles.
Finalement, je suis particulièrement heureux de constater que ce
projet de loi consacre, et de façon tangible, un des principes qui,
à mon humble avis, est des plus fondamentaux de notre
société: celui du droit des parents de choisir le genre
d'institution d'enseignement qu'ils désirent pour leurs enfants. Je
félicite le gouvernement d'avoir, dans ce projet de loi, reconnu ce
principe et j'espère qu'il continuera de le reconnaître dans les
autres projets de loi qu'il nous apportera bientôt.
M. Maurice Bellemare
M. BELLEMARE: M. le Président, c'est l'expression d'une
très vive gratitude que je voudrais adresser à tous les membres
de ce Parlement, pour l'unanimité totale et parfaite qui se fait
présentement autour de l'adoption du bill 56.
Ce bill, tel que le dit son titre, vous l'avez remarqué, Loi de
l'enseignement privé, est, pour tous et chacun dans cette Chambre, une
loi qui apporte beaucoup d'espoir et surtout consacre une fois pour toutes la
présence de l'enseignement privé dans notre système
scolaire. Si nous voulons simplement remonter de quelques années dans
l'histoire de notre race, qui est bien particulière, nous verrons que,
dès le début de la colonie, ce sont des êtres à
l'âme généreuse qui, sans appât du gain, sans fracas,
avec beaucoup de dévouement et de désintéressement,
s'étaient faits, eux particulièrement, les éducateurs. Et
c'est à eux que nous devons aujourd'hui d'avoir, après trois
siècles d'histoire, conservé presque intactes et notre langue et
notre foi.
Nous sommes heureux de redire aujourd'hui d'une manière toute
particulière, dans ce Parlement, en mon nom personnel et au nom de tous
mes collègues, notre profonde gratitude à toutes ces
communautés religieuses d'hommes et de femmes qui, pendant des
années, ont formé notre jeunesse et ont préparé
l'élite pour assurer chez nous la relève des hommes
nécessaires dans la vie publique d'aujourd'hui.
Quel est celui qui n'a pas bénéficié, de
près ou de loin, de cette formation répandue à pleines
mains par ces institutions et par ces collèges classiques, ces
communautés religieuses, particulièrement ceux qui ont, dans le
domaine de l'enseignement privé, depuis
des années, assuré la relève. M. le
Président, ils ont connu des années difficiles. Ils ont
été, dans bien des cas, tentés par l'appât d'un gain
passager, mais je dois dire aujourd'hui combien nous sommes
particulièrement heureux de voir que ceux qui ont reconnu le bien
fondamental de l'enseignement privé ont choisi malgré les offres
alléchantes qu'on leur a faites, de conserver ces collèges, ces
institutions privées, et de les empêcher de passer à
l'étatisation. Il en reste de ces collèges classiques, il en
reste de ces collèges d'enseignement privé. Nous sommes heureux
de constater, particulièrement dans ma région, à
Trois-Rivières, que le grand séminaire a été pour
nous un phare lumineux éclairant toute notre région, grâce
au dévouement de ces prêtres, au dévouement de tous ces
laïcs qui, pendant des années, ont assuré la relève.
Nous sommes heureux de voir que le collège classique, que le
séminaire de Trois-Rivières est resté en dehors de
l'enseignement public.
Le séminaire de Trois-Rivières, le collège
classique de Trois-Rivières, est un modèle.
Il a lutté contre ceux qui voulaient, un jour, le faire
disparaître en l'achetant, en l'étatisant. Je félicite
très sincèrement ceux qui n'ont pas voulu céder aux
pressions qui leur ont été faites de se départir de ces
institutions qui, malgré les temps extrêmement difficiles au point
de vue financier depuis quelques années, ont passé à
travers leurs difficultés et ont montré que pardessus ce qu'on
nomme l'appât du gain, il y a ce qu'on nomme l'appel patriotique. Je les
félicite de défendre des institutions qui sont nôtres d'une
manière particulière parce qu'elles ont façonné ces
grands hommes, ces professionnels, ces hommes qui, aujourd'hui,dans la
société et un peu partout dans les différents secteurs de
l'administration publique, font la gloire et sont l'honneur de notre
province.
Je suis heureux de joindre ma voix aujourd'hui à celle de tous
les honorables députés qui ont bien voulu apporter leur
témoignage et de leur dire que nous sommes très sensibles
à cette expression de félicitation que mérite ces membres
de l'enseignement privé de même que ceux qui dirigent nos
collèges. Ce bill aura... nous n'avons pas le droit d'entrer dans les
détails. Mais ces cours secondaires au niveau collégial rendront
d'Immenses services à plusieurs de nos concitoyens. Je comprends
qu'après de longues études en comité, après des
représentations particulièrement bien faites auprès des
membres du comité de l'éducation, il ait été
décidé de fondre les deux bills en un seul. Mais, ce bill
aujourd'hui a l'avantage marqué de créer une commission
consultative d'au moins neuf membres.
Cela je crois que c'est une amélioration
considérable prévoit une commission de neuf membres dont
six seront nommés en vertu de l'arrêté en conseil. Ce
conseil consultatif émettra des permis qui seront justifiés dans
tous les cas, nous l'espérons. Je pense que nous vivons dans cette
Assemblée législative aujourd'hui des heures d'espoir, des heures
bien douces à vivre à la suite des épreuves qu'ont
traversées nos collèges classiques et l'enseignement privé
depuis quelques années. Inquiétude bien compréhensive de
la part de ceux qui, pendant des années, avaient investi jusqu'à
leurs dernières économies, avaient sacrifié la vie de
combien de prêtres, de combien de religieuses sans aucun salaire, ou
à des salaires qui s'élevaient de $100 à $150 par
année. Ces collèges ont été payés par la
générosité, par leur dévouement, par le sacrifice
qu'ils ont fait en voulant maintenir un enseignement privé.
En certaines circonstances, nous avons été fort inquiets
de les voir sombrer, de les voir disparaître. Aujourd'hui, toute
l'Assemblée législative à quelque parti que l'on
appartienne, est unanime pour se donner la main et pour adopter une
législation qui, enfin, reconnaîtra l'enseignement privé au
même titre que l'enseignement public et qui surtout consolidera un peu
partout dans notre région cette foi que nous avions dans nos
institutions privées.
Elles ont formé, à coups de sacrifices et de
dévouement, des hommes de bien, des hommes qui ont assuré la
relève chez nous. Nous devons leur en être très
reconnaissants. Aujourd'hui, ceux qui, dans cette Chambre, assistent à
nos délibérations verront avec quel empressement nous voulons
adopter unanimement cette législation. Nous remercions très
sincèrement l'honorable ministre d'Etat à l'Education, le
député de Lévis. Nous lui savons gré d'avoir
défendu courageusement cette législation. Nous disons un merci
très sincère à celui qui, particulièrement comme
ministre de l'Education, a eu à voir, à préparer et
à faire étudier cette législation qui, aujourd'hui, est
concrétisée dans un bill qu'on appelle le bill 56.
L'honorable député de Bagot, ministre de l'Education, et
l'honorable député de Lévis, ministre associé
à l'Education, méritent que toute cette Chambre leur redise notre
profonde gratitude et surtout nos sincères remerciements.
Il en est de même pour leurs dévoués collaborateurs.
Ici, Je veux faire une mention toute particulière à l'endroit
d'une femme qui possède vraiment l'âme d'une grande
éducatrice. Cette femme a été nommée, pour la
première fois dans
l'histoire de notre province, sous-ministre à l'Education, il
s'agit de mademoiselle Baron. Je la nomme, parce que, dans tous les milieux de
l'éducation, elle s'est assuré le respect et surtout la
considération que lui valent son expérience et les nombreux
services qu'elle a rendus, particulièrement à l'enseignement
privé chez nous.
Nous la verrons, dans quelques minutes, venir s'asseoir à
côté du ministre dans cette Chambre. J'espère bien
qu'à son arrivée nous lui rendrons le témoignage que lui
mérite tout son dévouement, en l'applaudissant à chacune
des banquettes.
M. le Président, je termine, sic locotus est leo.
M. BIENVENUE: Léo Tremblay?
M. BELLEMARE: M. le Président, ça peut surprendre mes
amis, mais cela veut dire: Ainsi parla le lion.
Je termine en remerciant mes honorables amis d'en face, qui ont bien
voulu apporter leur contribution, particulièrement, l'honorable
député de Richmond et l'honorable chef de l'Opposition, qui a
été, ce matin, très éloquent pendant un certain
temps.
Mais, M. le Président, chassez le vieil homme, il revient au
galop; qu'est-ce que vous voulez, il a fait des efforts! Il est resté
suave pour un certain temps. En tout cas, je remercie le député
de Richmond...
M. LESAGE: Faites un petit effort, vous aussi.
M. BELLEMARE: ... l'honorable député de Matane,
l'honorable député de D'Arcy-McGee. Le député de
Matane a été particulièrement juste à l'endroit de
son collègue, le député de Richmond et,
s'iln'apaspululfairedes compliments comme il l'aurait voulu...
M. LAFRANCE: Je demanderais au député de Champlain de ne
pas faire de personnalités.
M. BELLEMARE: Je ne veux pas parler du député de Richmond,
mais de l'oeuvre à laquelle il s'est dévoué.
M. TREMBLAY (Montmorency): N'en parlez pas, si vous ne voulez pas en
parler.
M. BELLEMARE: Je ne parle pas de lui, M. le Président, mais Je
parle de son oeuvre. Je dis que l'enseignement privé était bien
représenté et bien servi dans la province de Québec quand
l'honorable député de Richmond s'en occupait. Il l'a bien
défendu dans cette Chambre.
Alors, que ceux qui sont témoins de nos débats tiennent
pour acquis que c'est l'unanimité la plus totale que nous faisons en
cette journée, à l'occasion de l'adoption de ce bill, de cette
loi, en témoignage des nombreux services rendus à l'enseignement
privé par ces communautés religieuses et par ces prêtres
qui ont, au nom de l'anonymat, pratiqué cet apostolat de la
présence qui a fait tant de bien au peuple du Québec.
M. LE PRESIDENT: Je dois faire remarquer aux honorables membres que
l'intervention et la réplique de l'honorable ministre d'Etat
attaché à l'Education mettront fin au débat de
deuxième lecture.
L'honorable ministre d'Etat à l'Education.
M. Jean-Marie Morin
M. MORIN: Je serai très bref dans mes remarques. Nous avons
entendu, depuis ce matin, plusieurs interventions. Je ne voudrais pas, au
début, souffler sur les illusions du chef de l'Opposition, surtout
depuis qu'il a menacé le ministre de l'Education d'une rupture d'un
pacte d'amitié avec lui. Je ne voudrais pas que la même chose se
produise entre nous, mais je voudrais quand même lui dire que, si nous
avons eu, à un moment, une hésitation quant à savoir si
nous devions ou non adopter ce bill avant la fin de cette session, cette
hésitation s'explique. Elle s'explique de cette façon. Le
ministre de l'Education, à la suite des recommandations faites au
comité parlementaire de l'éducation, avait laissé entendre
que nous retournerions devant le comité avec le bill refondu, et que
nous le soumettrions de nouveau à l'attention des groupes
intéressés. Mais, devant les réactions très
heureuses que nous avons remarquées depuis samedi dernier, jour
où le bill fut déposé, notre hésitation est
complètement disparue, surtout depuis hier, alors que le ministre de
l'Education a reçu à son bureau un monceau de lettres et de
télégrammes dont il m'a fait tenir copie, lettres et
télégrammes venus de tous les coins du Québec,
d'individus, de groupes, d'associations dont plusieurs se sont fait entendre au
comité de l'éducation.
C'est devant cette unanimité qui se faisait autour du nouveau
projet que nous avons voulu le présenter dès ce moment-ci.
D'ailleurs, quelle autre raison pouvait nous justifier d'attendre? Aucune.
C'était la seule et, une fois disparue, à notre grande
satisfaction, nous avons voulu procéder. Du côté
ministériel, nous voulions tous que cette loi soit sanctionnée le
plus tôt possible,
mais cette loi, nous la jugions et nous la jugeons très
importante. C'est pourquoi nous étions disposés, nous
étions prêts à consulter à nouveau. Le chef de
l'Opposition s'est dit satisfait du projet de loi, je m'en réjouis. Si
cette loi était sanctionnée aujourd'hui, ce 17 décembre
serait sûrement un très beau jour pour les institutions
privées, qui étaient si justement inquiètes depuis
quelques années. Le député de Richmond s'est
déclaré, lui aussi, satisfait du bill. Plusieurs de ses remarques
étaient très justifiées. Je partage également
plusieurs de ses regrets. Cependant, il demeure encore chez nous plusieurs
institutions privées de grande valeur qui continueront, je n'en cloute
pas, leur magnifique travail auprès de la population. Et pour
l'information du député de Richmond, je dois lui dire que, pour
l'année 68/69, il y avait encore 227 institutions privées
reconnues, plus 28 écoles normales privées. Quant au
député de Montmorency, je suis un peu étonné de ses
propos, vu que les institutions privées elles-mêmes et que
l'Association des parents catholiques elle-même se déclarent
satisfaites. Il n'a qu'à lire attentivement le texte de loi, et il verra
que la liberté de l'enseignement est assurée aux institutions
privées. Il peut être assuré que les institutions qui
désireront enseigner la religion, la cathéchèse, ou les
sciences religieuses pourront le faire en toute liberté.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Malheureusement, j'ai interrompu ce matin
Phonorable député de Montmorency sur ce point. Il va sans dire
que je dois me servir de la même mesure pour tous les membres de cette
Chambre.
M. MORIN: Je vous remercie, M. le Président. J'avais d'ailleurs
terminé. Quant au député de Matane, il a tenu avec humour
des propos positifs et constructifs. Je le remercie de ses paroles à
l'endroit du ministre de l'Education, du ministre du Travail et à mon
endroit. Dans le domaine des institutions privées, le
député de Matane et moi avons plusieurs opinions en commun. Au
moins à ce titre, je ne crois pas qu'il y ait jamais de chicane entre
nous.
Le député de D'Arcy-McGee a tenu lui aussi le débat
à un niveau très élevé. J'ai apprécié
ses remarques très sérieuses et fort à point. Quant
à l'honorable ministre du Travail, il a fait une intervention tort
intéressante et a voulu reconnaître publiquement la valeur de nos
institutions qui ont beaucoup mérité de la population du
Québec et qui ont oeuvré dans des circonstances difficiles, pour
ne pas dire parfois très pénibles.
J'espère qu'en comité plénier, le même climat
de saine compréhension et de collaboration se maintiendra, conscients
que nous sommes tous de l'importance de ce projet de loi.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée? Adopté.
M. TREMBLAY (Montmorency): Voulez-vous enregistrer ma dissidence, s'il
vous plaît?
M. LE PRESIDENT: Malheureusement, on ne peut l'enregistrer à ce
moment-ci.
M. TREMBLAY (Montmorency): Pourquoi?
M. LE PRESIDENT: Elle est déjà enregistrée au
journal des Débats.
L'honorable ministre de l'Education propose que je quitte maintenant le
fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier pour
l'étude du bill 56. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
Comité plénier
M. FRECHETTE: (Président du comité plénier): A
l'ordre! Bill 56, article 1.
M. LAFRANCE: A l'article 1, à titre d'information, est-ce que le
ministre pourrait dire quelle est la loi qui détermine
présentement ce que comprend l'élémentaire, le secondaire
et le collégial? Est-ce en vertu du règlement numéro
1?
M. CARDINAL: C'est en vertu des règlements numéro 1 et
numéro 2.
M. LAFRANCE: Alors, quelles sont les années qui sont comprises
dans l'élémentaire, par exemple? Est-ce de un à sept ou de
un à six?
M. CARDINAL: II y a la situation de fait et le règlement
numéro 1. D'après le règlement numéro 1,
l'élémentaire va de un à six. Vous avez ensuite cinq ans
pour le secondaire et deux ou trois ans pour le collégial selon que
c'est l'entrée à l'université ou l'entrée sur le
marché du travail spécialisé qui est choisi.
M. LEVESQUE (Laurier): Je me pose une question. Vous en êtes aux
définitions, là à Particle 1?
M. CARDINAL: Pardon?
M. LEVESQUE (Laurier): Vous en êtes aux définitions de
l'article 1?
M. CARDINAL: Oui.
M. LEVESQUE (Laurier): Cela évitera de revenir sur ces questions
plus tard. Vous avez dans la loi des chapitres, enfin des sections, en tout
cas, qui concernent l'élémentaire et le secondaire. Est-ce que le
ministre pourrait donner des chiffres sur l'élémentaire et le
secondaire, c'est-à-dire l'école publique dans son sens le plus
précis quand on va dans le secteur public? Combien y a-t-il
d'élèves ou d'institutions, ou les deux, qui donnent actuellement
dans le Québec, en dehors du secteur public, l'enseignement
élémentaire et l'enseignement secondaire? J'avoue simplement,
comme d'autres, que j'ai été surpris d'apprendre qu'on pouvait de
façon substantielle enfin, je suppose que le bill ne parle pas
seulement de « grenailles » avoir encore de l'enseignement
privé au niveau élémentaire et secondaire dans le
Québec, sauf des cas exceptionnels ou des...
M. CARDINAL; Au niveau élémentaire, il est difficile
d'avoir des chiffres précis parce que plusieurs de ces écoles
existaient jusqu'à présent sans qu'une loi les régisse et
sans qu'il y ait de permis spécifiquement émis par le
ministère.
Cependant, si l'on prend les chiffres que j'ai devant moi, quant au
nombre d'étudiants, aux maternelles, dans les commissions scolaires,
c'est-à-dire publiques, vous avez 96,924 étudiants, tandis que,
dans les autres, c'est-à-dire ce qui ne relève pas d'une
commission scolaire, qui sont du secteur privé, vous avez 5,870
étudiants.
A l'élémentaire, aux commissions scolaires, vous avez
911,725 étudiants, tandis que, dans les autres institutions,
c'est-à-dire qui ne sont pas des commissions scolaires, il y a 25,965
étudiants.
Au secondaire, dans les commissions scolaires, il y a 425,729
étudiants. Dans ce qu'on appelle les collèges classiques, il y en
a encore 4,309; dans les écoles de métier, il y en a 4,562; dans
les institutions associées, c'est-à-dire des institutions
privées qui ont un contrat d'association avec une commission scolaire,
il y en a 20,162, dans les autres, qui ne sont ni associées ni
publiques, d'une façon ou d'une autre, et qui ne sont pas celles que
j'ai appellées collèges classiques, vous avez 23,997
étudiants.
Voulez-vous que je poursuive, au collégial?
M. LEVESQUE (Laurier): Non, ça, c'est pour le secondaire?
M. CARDINAL: C'est exact, c'est pour le secondaire.
M. LEVESQUE (Laurier): Non associées, 24,000. Et pour les
associées, 20,000 en gros?
M. CARDINAL: En gros.
M. LEVESQUE (Laurier): Au niveau secondaire?
M. CARDINAL: Au niveau secondaire. Ceci répond-il à la
question?
M. LEVESQUE (Laurier): Oui, d'accord. Le ministre peut-il donner des
précisions sur ce que représentent les 26,000 à
l'élémentaire, en particulier? Où les
dénichons-nous? Je suppose qu'il ne s'agit pas d'exceptionnels...
M. CARDINAL: Je ne pourrais pas donner une énumération
complète, cet après-midi. Je vous dirai, par exemple, comme on
l'a mentionné indirectement, qu'il existe les écoles juives
privées il y en a deux ou trois variétés,
d'ailleurs. Vous avez encore ce qu'on appelle ou ce qu'on n'appelle plus les
jardins de l'enfance. Vous avez certaines institutions strictement
privées, qui sont souvent de petites institutions créées
par des individus ou, enfin, par des compagnies, des corporations ou des
sociétés sans but lucratif ou avec but lucratif.
Il y en a vraiment un nombre assez imposant. Vous avez aussi les
écoles créées pour l'enfance exceptionnelle. On pourrait
continuer l'énumération, mais je n'ai pas un tableau
précis. Il serait difficile d'en tracer un à moins de faire un
inventaire. Cet inventaire devra cependant être fait à l'occasion
de l'application de cette loi, puisque ces institutions devront demander ou un
permis ou d'être reconnues d'intérêt public.
M. MORIN: Je pourrais peut-être ajouter que, parmi les
institutions privées non subventionnées, on retrouve en mai 1967
environ 1100 institutions d'enseignement élémentaire, secondaire
et une centaine d'institutions postsecondaires.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, à l'article 1, paragraphe
b), un bref commentaire. Le terme « enseignement professionnel »
est traduit correctement en anglais par « vocational » ou «
education », mais, à la définition de cet enseignement, le
bout de phrase « d'une profession ou d'un métier » se
traduit par « of a profession or a trade », alors qu'en anglais le
mot « profession » est réservé surtout aux
professions dites libérales. Le mot « vocation » serait plus
approprié, je crois.
M. CARDINAL: En faites-vous un amendement?
M. GOLDBLOOM: Je ne veux pas en faire une affaire formelle...
M. BELLEMARE: D'accord; « vocation » au lieu de «
profession ».
M. GOLDBLOOM: J'aimerais savoir aussi si la définition
donnée à cet article inclut les institutions d'enseignement qui
se trouvent dans les hôpitaux pour enfants, c'est-à-dire qu'il s'y
trouve un secteur où l'on donne un enseignement aux enfants, pour que
leur formation ne soit pas retardée. Je ne sais pas je m'excuse
de mon ignorance si cela est intégré dans le budget de
l'assurance-hospitalisation ou si cela fait partie de la responsabilité
du ministre.
M. CARDINAL: En autant que je suis informé, il s'agit de services
qui sont rendus, disons, par certains hôpitaux, et non pas d'institutions
d'enseignement. Dans plusieurs institutions qui ne sont pas des institutions
d'enseignement, vous avez parfois des services d'enseignement. On l'a vu au
comité de l'éducation. Vous avez des société
commerciales, par exemple, qui donnent des cours à leurs
employés. Vous avez des groupes professionnels qui, eux aussi organisent
des cours de perfectionnement.
La loi ne vise pas en général, ces services
d'éducation, qui ne sont pas des institutions privées
d'enseignement.
M. LE PRESIDENT: Alors, article 1, avec tous les paragraphes,
adopté.
M. CARDINAL: Avec le mot « vocation ».
M. LE PRESIDENT: Oui, d'accord. Article 2.
M. LAFRANCE: A titre d'information, M. le Président, le ministre
pourrait-il dire ce que vont devenir, après l'adoption de cette loi, les
institutions associées? Seront-elles obligées de demander un
permis de reconnaissance?
M. CARDINAL: Ceci est facultatif. La loi qui crée le contrat
d'association, qui le permet, n'est pas abrogée par le bill 56. Ces
institutions auront donc le choix entre, en fait, être associées,
recevoir l'application de cette loi selon un des systèmes qui s'y
trouvent, ou tout simplement demeurer en dehors de l'application de toute loi.
Les institutions sont toujours libres d'être strictement privées
et de ne bénéficier de rien si elles veulent se financer
entièrement. L'article 66 de la loi le prévoit.
M. GOLDBLOOM: Au paragraphe g) de l'article 2, M. le Président,
que je trouve surprenant, il est indiqué que cette loi ne s'applique pas
à « une personne physique qui donne des cours sans exiger ou
recevoir de rémunération, directement ou indirectement. »
Mais qu'arrive-t-il à une personne qui donne de tels cours en recevant
une telle rémunération? La loi ne s'appliquera sûrement pas
à un particulier qui donnera de tels cours. Pourquoi cette restriction
additionnelle est-elle inscrite dans la loi?
M. CARDINAL: Je vais donner l'explication. La loi que nous avons devant
nous réunit les anciens bills 56 et 61 qui ont été
retirés. Entre autres, dans l'enseignement qu'on appelle professionnel
ou « vocationnel » si vous voulez, il y a des corporations, des
sociétés et même des individus qui ont de telles
écoles, mais il faut prévoir qu'il y a aussi des individus qui,
pour rendre service, vont aider des enfants. Cet article est dans la loi pour
que ne soient pas frappés par la loi ceux qui, volontairement, sans
aucune rémunération d'aucune espèce, rendent de tels
services. D'autre part, non pas dans la partie des institutions privées
au sens où on l'emploie, mais dans la partie qui se rapporte à
toutes ces espèces de cours qui sont donnés pour des fins
spécifiques, cours techniques, professionnels ou autres, il peut arriver
qu'il n'y ait pas d'institution mais que ce soit l'individu qui soit
propriétaire de l'école. Dans ce cas-là, la loi
s'appliquerait à lui et il pourrait demander à en
bénéficier.
M. GOLDBLOOM: Merci.
M. LE PRESIDENT: Alors, article 2, adopté. Article 3.
M. LAFRANCE: Une seule observation à l'article 3, M. le
Président. Il est dit ici que « six de ces membres sont
nommés après consultation des groupes les plus
représentatifs des dirigeants, des enseignants et des parents
d'élèves de l'enseignement privé ». Je crois qu'il
serait injuste de se limiter aux parents d'élèves de
l'enseignement privé, car il y a dans la province des organismes
familiaux, je crois, qui sont beaucoup plus représentatifs. Il faudrait
aussi tenir compte de ce point.
M. CARDINAL: Pour répondre à l'honorable
député, il y en a six qui sont nommés parmi ces gens et il
y en a trois qui sont pris en dehors de ces groupes, nécessairement.
M. LAFRANCE: Mais si on s'en tient au texte, c'est limitatif. On dit
« des parents d'élèves de l'enseignement privé
seulement ».
M. CARDINAL: Reprenons l'article, si vous permettez... « au moins
six de ces membres sont nommés après consultation des groupes...
» On ne dit pas parmi ces groupes, mais après consultation des
groupes ».
M. LAFRANCE: « ... les plus représentatifs des dirigeants,
des enseignants et des parents d'élèves de l'enseignement
privé ». Est-ce que ça veut dire des associations de
parents d'élèves ou...
M. CARDINAL: C'est ce que ça veut dire.
M. LAFRANCE: Parce qu'il ne faudrait pas se limiter. Je vais citer un
exemple de ce que je veux dire. L'association des parents catholiques est
certainement l'une des plus importantes dans la province de Québec
à l'heure actuelle, mais si on s'en tient textuellement à la loi,
je me demande si elle pourrait être représentée?
M. CARDINAL: Ecoutez, je ne sais pas si j'ai le droit... le
législateur n'interprète pas sa loi, mais je pense que et le sens
commun et la pratique de textes semblables dans le passé incitent
à répondre que oui. D'ailleurs, il faut refaire l'historique de
l'article 3. Dans la première version du bill 56, la commission
consultative ne comptait que sept membres ceci a été
discuté au comité de l'éducation dont quatre
étaient nommés après consultation des groupes les plus
représentatifs de l'enseignement privé. On a trouvé que
c'était trop général. C'est pourquoi on a dit « les
groupes les plus représentatifs des dirigeants, des enseignants et des
parents ». Il s'agit des groupes représentatifs des parents
d'élèves, et non pas directement des parents
d'élèves.
M. LAFRANCE: Je tenais, M. le Président, à ce que le
ministre précise ce point-là. Je le remercie.
M. CARDINAL: D'accord. C'est un examen que vous me faites subir.
M. LAFRANCE: Je serais bien mal placé pour faire subir un examen
au ministre.
M. LE PRESIDENT: Article 3, adopté. Article 4, adopté.
Article 5, adopté. Article 6, adopté. Article 7,
adopté.
M. GOLDBLOOM: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Article 8, adopté; article 9, adopté.
M. LAFRANCE: Ici, M. le Président, à l'article 9,
j'aimerais, si c'est possible, connaître les intentions du gouvernement.
Ces institutions d'intérêt public représenteraient-elles
l'ensemble des institutions privées qui dispensent présentement
l'enseignement général?
M. CARDINAL: Ce n'est pas l'opinion du gouvernement qui prévaut
ici. Si nous examinons l'article 9, nous voyons qu'il y a trois
éléments. Il y a le ministre qui doit, d'après l'article,
rendre une décision. Mais le ministre ne rend une décision
qu'après avoir vu la commission qui, elle, fait des recommandations. Et
la commission ne fait des recommandations qu'après que des institutions
en aient fait la demande; ces institutions assurent des services de
qualité et contribuent au développement de l'enseignement au
Québec, soit en raison de l'enseignement qu'elles donnent, de la
compétence de leur personnel, de leurs méthodes
pédagogiques ou de l'ensemble des trois ou encore soit,
deuxièmement, selon les critères déterminés par
règlements parce qu'il y aura des règlements. Ces
règlements, qui ne pourront être rédigés aussi
qu'après le travail de la commission, seront adoptés en vertu de
l'article 67, paragraphe a), après avis de la commission. Ces
amendements proviennent, encore une fois, du comité de
l'éducation.
L'objet de la loi ou de l'article 9, c'est que les institutions
privées qui sont vraiment de qualité, qui rendent des services
indiscutables à la société québécoise, qui
répondent à des besoins aussi identifiés qu'identifiables
en fonction d'une clientèle donnée, puissent répondre
à la notion de service public et Jouer dans le système scolaire
un rôle d'intérêt public. Elles peuvent rendre des services
parfois d'une façon plus directe que les établissements publics.
Ce matin, on a parlé par exemple des pensionnats. Je pourrais souligner
le cas des écoles pour l'enfance inadaptée. D'ailleurs, ce matin,
on a fait allusion au rapport Parent.
Ce qu'il y a de nouveau dans l'article 9, c'est que cette notion
d'Institutions privées, déclarées, d'intérêt
public, n'existait nulle part dans notre loi scolaire et dans aucune des
législations que nous avons. Mais ce n'est pas
une nouveauté dans la réalité sociologique du
Québec que de constater que des institutions privées ont, dans le
passé, fourni des services publics et continuent à rendre
aujourd'hui des services publics.
Cette nouvelle catégorie d'Institutions couverte par tout le
chapitre 3 dont l'article 9 est l'article préliminaire le premier
article vient au fond, je pense, donner une réponse positive aux
parents et aux associations d'institutions qui demandent, depuis plusieurs
années, que dans le cadre d'un système québécois,
d'un système national d'enseignement, les institutions privées
puissent apporter une contribution reconnue et subventionnée par
l'Etat.
Alors la politique générale du gouvernement a
été mentionnée dans les interventions de cette Chambre
avant qu'elle ne se réunisse en comité: il y a ce
mécanisme prévu par les articles 9 et les suivants qui font que
le ministre ne peut se prononcer qu'aprls la demande d'une institution
qui fournit évidemment un dossier et la recommandation de la
commission. Pour sa part le ministre ne vient qu'à la fin du processus.
Je puis assurer l'honorable député que ce qui existe de fait
déjà et que tout le monde reconnaît au fond parce
que c'est souvent l'évidence sera reconnu par le ministre sur
recommandation de la commission.
M. LAFRANCE: Le ministre comprendra que la véritable valeur de la
loi réside sur ce point: Quelles sont celles qui seront reconnues
d'intérêt public et quelles sont celles qui seront tout simplement
reconnues? Par exemple, dans l'esprit du ministre, est-ce qu'un
séminaire serait reconnu d'intérêt public?
M. CARDINAL: Je ne répondrai pas à cette question, parce
qu'il serait prématuré pour le ministre, avant que la loi ne soit
en vigueur et que la commission ne soit créée et qu'il en ait
reçu des recommandations, de se prononcer. Ce serait indiquer qu'il est
préjugé. Je ne puis ni prendre de type, ni d'espèce, ni
d'institution spécifique, si vous voulez, pour donner une
réponse. Je pense que je ne puis pas me permettre de le faire.
M. LAFRANCE: Le ministre comprendra l'urgence qu'il y a de
désigner cette commission afin que les institutions puissent savoir
à quoi s'en tenir, préparer leur budget, et les parents aussi,
savoir quelle contribution ils vont avoir à donner.
M. CARDINAL: Le ministre reconnaît l'urgence, mais comme il l'a
déjà mentionné dans le cas de la loi elle-même, il
faut que cette commission soit créée d'une façon sage,
prudente, intelligente et judicieuse. Et ceci demandera le temps de le
faire...
M. LAFRANCE: Je pense que le ministre cherche trop la perfection;
ça va prendre du temps.
M. CARDINAL: Le ministre, tout en cherchant la perfection, agira avec la
plus grande diligence.
M. LAFRANCE: Espérons.
M. PINARD: Est-ce que le ministre n'admettrait pas par hasard que cette
distinction qu'il fait entre une institution d'enseignement privé qui
peut être déclarée d'intérêt public et les
institutions d'enseignement qui sont déjà
considérées comme étant d'intérêt public. Ce
n'est pas là que réside le critère de base quant à
l'attribution éventuelle des subventions l80% ou à 60%, selon le
cas. Je pense que cette définition des mots « intérêt
public » celle de façon bien spécifique au critère
qui servira de base quant à la détermination des subventions qui
seront payées.
Avec l'expérience que nous avons vécue jusqu'ici, nous,
qui sommes quand même des parents pour suivre les remarques faites
par le député de Richmond c'est cela qui nous
inquiète, probablement à bon droit, à moins que l'on nous
donne des précisions qui nous justifieraient de ne plus être
inquiets. L'expérience que j'ai me révèle que certaines
communautés religieuses ayant la direction d'institutions qui
prodiguaient de l'enseignement au niveau privé, mais qui n'avaient pas
été déclarées jusqu'ici d'intérêt
public se sont vues aux prises avec des difficultés
financières considérables.
Une directrice d'institution, à qui Je suis allé faire
part de mes appréhensions quant à l'avenir scolaire de mes
propres enfants, m'a répondu: Comment voulez-vous, monsieur, que nous
puissions survivre, alors que nous calculons que, pour un an d'enseignement,
cela nous coûte environ $800 par enfant et que nous ne recevons qu'un
montant d'environ $300 par enfant? Donc, il y a un décalage de $500
environ. Tant et aussi longtemps que la politique de subvention ne sera pas
modifiée pour nous permettre d'obtenir une subvention globale annuelle
plus considérable, c'est évident que nous allons être
obligés de nous affilier ou de passer carrément dans le secteur
public après avoir vendu notre institution au ministère de
l'Education.
Et c'est ce qui est arrivé. Après avoir
écouté tous les discours qui ont été
prononcés de part et d'autre dans cette Chambre sur le débat en
deuxième lecture, je me dis: C'est bien beau de lire des principes dans
la note explicative du bill, de retrouver ces principes dans les
différents articles du bill, mais, combien restera-t-il d'institutions
qui prodigueront de l'enseignement privé dans deux, trois ou cinq ans,
puisque le véritable malaise est précisément au niveau
financier? Il est clair que ces institutions, dont on a parlé
abondamment jusqu'ici, ne seront plus capables de donner cet enseignement
privé.
M. CARDINAL: Je ne voudrais pas interrompre l'honorable
député, mais il débat le fond de la question. On ne peut
pas comparer le passé et l'avenir. Il n'y avait pas d'institutions
recon-connues, d'intérêt public avant. Je viens de dire que c'est
nouveau, que cela n'a jamais existé. Il y avait cette subvention de $350
ou de $550. Ceci est aboli et remplacé par une subvention de 60% ou 80%.
Par conséquent, on ne peut pas comparer la situation qui existe avec
celle qui existera quand la loi sera en vigueur. Bien au contraire, quand la
loi sera en vigueur j'ai répondu tantôt à une
question d'un autre député les institutions privées
pourront ou bien demeurer strictement privées, parce que c'est leur
désir il y en a qui ne voudront pas être
subventionnées; on en connaît ou elles pourront être
associées, si c'est leur désir, ou elles pourront devenir des
institutions reconnues d'intérêt public.
Ce n'est pas le ministre seul qui prendra la décision. Si on lit
l'article 67 qui donne tout le mécanisme de la commission qui va
établir des règlements, lesquels vont donner ces critères,
la commission ne jugera pas uniquement en fonction de dossiers et de sa bonne
volonté. D'abord, la commission rédigera des règlements;
ce n'est qu'après que ces règlements auront été
rédigés et adoptés qu'ils seront appliqués à
des cas particuliers. La situation sera toute différente. Pour
répondre à votre question, c'est justement pour éviter ce
que vous venez de décrire que cette loi est adoptée.
M. PINARD: Oui, mais le ministre admettra que, dans un régime
d'austérité financière, comme l'a décrit le
ministre des Finances il y a deux jours, alors que tout le monde craint que les
finances de la province de Québec ne soient pas suffisamment fortes pour
soutenir le mouvement, de plus en plus généralisé, qui se
fait dans le secteur de l'enseignement vers la création d'Institutions
à caractère public, quel sera le sort d'institutions à
caractère privé?
C'est ça, le point d'interrogation, c'est ça,
l'inquiétude des parents, c'est ça, l'inquiétude des
dirigeants des institutions privées. Le gouvernement n'est
peut-être pas en mesure de répondre aujourd'hui, mais je pense que
tout le monde a le droit et a même le devoir de se poser la question, et
publiquement. Il me semble que c'est mon devoir, aujourd'hui, de dire au
ministre de l'Education que, s'il n'est pas en mesure de donner aujourd'hui une
réponse probante bien détaillée, et s'il n'est pas en
mesure de le dire assez vite, comme le soulignait tantôt le
député de Richmond..,
M. CARDINAL: Quelle est la question précise?
M. PINARD: ... cette inquiétude va s'aggraver dans les milieux de
l'éducation.
M. CARDINAL: Quelle est la question précise, s'il vous
plaît, au sujet de l'article 9?
M. PINARD: Je veux savoir quel est le sort réservé aux
quelques institutions privées d'enseignement qu'il reste dans la
province?
M. CARDINAL: II est dans la loi, monsieur.
M. PINARD: Mol je trouve qu'on les a forcées, jusqu'ici, à
se vendre ni plus ni moins, au ministère de l'Education,
précisément pour des raisons financières que j'ai
invoquées plus tôt. A cause du décalage financier...
M. MORIN: Evidemment, c'est l'avenir qui...
M. PINARD: ... qu'il y avait dans le coût réel de
l'enseignement prodigué à un enfant, qui était en moyenne
de $800 par année, alors que la subvention n'était, comme le
ministre l'a admis plus tôt, que de $350 ou de $550 selon le cas. Il y
avait donc un décalage financier qu'il fallait combler, et personne ne
l'a comblé. A ce moment-là, si on demande aux parents qui veulent
maintenir, selon leur propre choix, leur enfant à l'institution
privée, est-ce qu'on va pénaliser ces parents qui, en plus de
payer des taxes générales aux commissions scolaires, auront
à payer le surplus? Je serais probablement en faveur de ce
principe-là, en autant qu'il n'y aura pas de pénalisation
véritable au niveau de ceux qui n'auront pas les moyens financiers de
payer.
M. CARDINAL: II n'y a pas de pénalisation.
Le mécanisme de la loi est très simple, si on prend la
base de subvention, 80% ou 60%. La loi dit, dans chaque cas, que l'institution
privée va aller chercher chez les parents, disons, la différence
qui est 20% ou 40%. Et ce 100%, c'est un 100% qui se compare exactement i ce
qu'il en coûte dans une institution publique, c'est ça, la base.
Il n'y a donc pas des institutions qui sont favorisées ou
défavorisées. A ce moment-là, ce 40% ou ce 20% qu'on va
chercher chez les parents, parce que c'est une institution privée, il y
a un autre mécanisme qui vient le compenser pour ceux qui, même
dans ce cas-là, ne pourraient pas le payer, et ce qui est beaucoup moins
que ce qui existe actuellement. Prenez un étudiant de collège,
qui coûterait disons $1,200 par année et qui a une subvention per
capita de $500. Je prends des chiffres qui ne sont pas exacts mais qui sont
ronds. Le père avait à payer la différence, qui
était de $700. Mais, avec la nouvelle méthode de calcul, si le
coût est de $1,000, et si c'est une institution publique, le père
n'aurait payé que $200. C'est-à-dire trois fois et demie moins.
Par conséquent, c'est là la réponse. C'est dans ce
mécanisme qui fait que, non seulement, il y a une subvention qui est
laissée en blanc, mais c'est qu'il y a un chiffre de 100% comparable
à ce qui existe dans les institutions publiques.
M. LESAGE: Oui. M. le Président, est-ce que je pourrais prendre
un cas concret? Je pense bien qu'il n'y a aucun doute que si, par exemple, une
institution comme le vieux séminaire de Québec, le plus vieux
collège au Québec, demande d'être considéré
comme une institution d'intérêt public, elle n'aura aucune
difficulté à se qualifier d'après les critères que
l'on a l'intention d'établir. Je n'ai qu'à lire l'article 9,
c'est l'article à l'étude, je crois, pour en conclure que je
pense bien qu'il faudrait que les règlements soient extrêmement
sévères pour que le Séminaire de Québec ne puisse
pas se qualifier. Très bien. Voici maintenant ma question, parce que je
tiens pour acquis que le Séminaire de Québec serait
déclaré une institution d'intérêt public...
M. CARDINAL: Voici ma réponse, si vous le permettez. Je vous
dirais que, sans préjuger d'une recommandation de la commission, dans un
cas qui est l'hypothèse que vous présentez, il n'y a aucun doute
dans mon esprit que la loi ne serait pas préparée, si ça
ne s'appliquait pas dans ces cas-là, en ce sens que...
M. LESAGE: C'est l'hypothèse. C'est à partir de cette
hypothèse, à laquelle je réponds dans l'affirmative, que
je désire poser ma question. Au niveau secondaire, est-ce que je saisis
bien le sens du projet de loi? Je comprends qu'il y a d'autres articles, mais,
enfin, qu'est-ce que vous voulez, est-ce que je comprends bien le sens du
projet de loi, si j'en conclus que les arrangements actuels avec la Commission
des écoles catholiques de Québec, par exemple, continueront
d'exister et que la subvention par élève qui serait versée
par le gouvernement serait la différence entre le montant reçu de
la commission scolaire de Québec et le coût moyen par
élève dans le secteur public?
M. CARDINAL: Non, vous avez un choix. Ou bien l'institution
privée préfère avoir le statut d'institution
associée.
M. LESAGE: Bon, très bien.
M. CARDINAL: A ce moment-là, ça demeure comme c'est
actuellement.
M. LESAGE: Comme c'est actuellement.
M. CARDINAL: Ou bien elle préfère ne pas avoir de contrat
avec la commission scolaire, disons de Québec, et
bénéficier de cette loi. Alors, à ce moment-là, il
fait sa demande, vous avez la recommandation de la commission, selon les
critères établis dans les règlements, etc. A ce
moment-là, si on prend votre hypothèse au secondaire,
d'après les chiffres que nous avons présentement au
ministère, un étudiant, au niveau secondaire, coûte environ
$750 par année.
M. LESAGE: Oui.
M. CARDINAL: S'il s'agit d'une institution reconnue ou
d'intérêt public, la subvention serait alors d'environ $600.
M. LESAGE: Et d'après l'entente entre la Commission des
écoles catholiques de Québec et le Séminaire de
Québec, le versement par élève est de?
M. CARDINAL: Si elle est celle d'une institution associée, c'est
complètement gratuit, à ce moment-là, pour les
parents.
M. LESAGE: C'est de combien?
M. CARDINAL: C'est le coût réel, c'est-à-dire le
coût moyen, c'est $750, par hypothèse.
M. LESAGE: Si c'est une entente de tant par élève, c'est
combien par élève?
M. CARDINAL: II n'y a pas d'entente de tant par élève.
M. LESAGE: II faut qu'elle soit associée.
M. CARDINAL: Oui, c'est ça. C'était vraiment le coût
que ça coûtait à l'intérieur d'une commission
scolaire.
M. LESAGE : Dans le calcul des coûts moyens pour les
collèges qui ont à la fois le secondaire et le niveau
collégial, est-ce que les coûts seront calculés
séparément pour le niveau secondaire et le niveau
collégial?
M. CARDINAL: C'est exact comme niveau.
M. LESAGE: Bon. Maintenant, autre question, hypothèse plus
difficile. Ce qu'on appelle communément les collèges commerciaux,
qui sont la propriété de citoyens, comme exemple, je connais le
propriétaire, c'est un collège qui a une bonne réputation
à Québec, ici, il a même deux immeubles, le collège
O'Sullivan, où l'on prépare les jeunes gens à des
fonctions de commis, d'assistant-comptable, où on enseigne la
sténographie, la dactylographie, enfin la comptabilité. Est-ce
que, de façon générale, je comprends que le ministre ne
peut pas me répondre tant qu'il n'a pas une demande précise,
est-ce que, de façon générale, ce genre d'institutions
est, dans l'esprit du ministre, de celles qui pourraient éventuellement
être déclarées d'intérêt public ou si c'est
justement le genre d'institutions qui devront demeurer dans le secteur
strictement privé, c'est-à-dire celles qui pourraient
éventuellement bénéficier de subventions de 60% au lieu de
80%?
M. CARDINAL: Je fais une réponse nuancée parce
qu'évidemment, à partir d'hypothèses
générales...
M. LESAGE: C'est très difficile, je l'admats.
M. CARDINAL : Mais je donnerai quand même deux réponses. La
première, c'est que la réponse pourrait être oui, si ces
institutions étaient créées en vertu de la
troisième partie de la Loi des sociétés ou des compagnies,
c'est-à-dire sans but lucratif, et non pas des institutions qui
recherchent un but lucratif. C'est une première distinction que
j'apporte.
M. LESAGE: C'est bien. Elle est admise, celle-là.
M. CARDINAL: Deuxième distinction, c'est que, si on prend
l'exemple du collège O'Sullivan, parmi ces institutions, il se pourrait
qu'il y en ait, mais en très petit nombre, à première vue,
en autant que je connaisse la situation, qui pourraient atteindre ce niveau,
mais il nous paraîtrait étonnant qu'il y en ait beaucoup.
M. LESAGE: Si vous me le permettez, le dernier exemple que je donnerai
sera celui de l'élémentaire. Je vais y prendre des institutions
que je connais, le pensionnat Saint-Louis-de-Gonzague, une autre de mes alma
mater, à l'élémentaire, et l'institut
Saint-Joseph-de-Saint-Vallier, chemin Sainte-Foy, une autre institution qu'on
appel jardin de l'enfance. Ce sont deux institutions qui préparaient
pour le classique. Saint-Louis-de-Gonzague existe toujours. Les bonnes
religieuses sont extrêmement inquiètes de ce qui va leur arriver,
même qu'il y a une association de parents d'élèves et
d'anciens qui a été formée, pour tenter d'obtenir des
fonds des anciens pour faire des réparations urgentes. C'est donc dire
que la situation est difficile. Quelle est l'attitude du ministère
vis-à-vis de ces institutions au niveau élémentaire?
M. CARDINAL: Reprenons la situation. Actuellement, au niveau
élémentaire, il n'y en a aucune qui soit
subventionnée.
M. LESAGE : Je le sais, de là ma question.
M. CARDINAL: Par conséquent, leur inquiétude devrait de
beaucoup diminuer parce qu'à l'avenir, elles ont l'espoir de
l'être.
M. LESAGE : Bien, disons que c'est de l'espoir, plutôt que de
l'inquiétude ou un mélange des deux.
M. CARDINAL: Deuxièmement, la loi nous place devant une situation
nouvelle où là, vraiment, je suis obligé d'attendre les
critères établis par règlement et les recommandations de
la commission pour répondre.
Mais disons qu'il n'y a, dans le texte de loi, rien...
M. LESAGE: ... qui les exclut!
M. CARDINAL: ... qui les exclut, et c'est à tous les niveaux.
M. LESAGE: C'est ça.
M. CARDINAL: C'est à tous les niveaux, toutes ces institutions
sont bienvenues si vous voulez pour demander à
bénéficier de
la loi. Au fond, ma réponse serait: Il est évident que si
on ne demande rien, on ne reçoit rien. Quand il n'y a pas de loi qui
permette de recevoir quelque chose il est naturel que l'on ne reçoive
rien. A compter du moment où il y a une loi, il est évident que
les demandes seront nombreuses.
M. LESAGE: Ah! j'en suis assuré.
M. CARDINAL: Le ministre agira sur recommandation de la commission dans
le meilleur intérêt de l'éducation. Il ne s'agit pas ici
d'un pouvoir discrétionnaire. Au contraire! Si on regarde les
mécanismes qui sont établis, je pense qu'ils assurent par la
représentativité à la commission, par le travail de cette
commission qui établit d'avance des règlements et des
critères, que l'on pourra rassurer ces institutions. Parce que au sujet
de ces institutions que vous venez de mentionner, il n'y a rien qui à
première vue fasse répondre négativement.
M. LESAGE: Rien qui les exclut. Cela a été...
M. CARDINAL: Absolument rien. Il n'y a rien qui répugne...
M. LESAGE: C'est comme cela que j'ai interprété l'ensemble
du projet de loi.
M. CARDINAL: C'est ça. Sans préjudice à ce qui peut
arriver, il n'y a rien qui répugne à ce qu'elles soient reconnues
d'une façon ou d'une autre.
M. LESAGE: D'accord. Au contraire, J'ai pensé que mon
interprétation du texte du projet de loi était à l'effet
que ces institutions pourraient être reconnues même comme
institutions d'intérêt public si elles répondaient
si vous voulez à certains critères, lesquels
j'espère ne seront pas tellement sévères qu'ils auraient
pour effet d'exclure certaines institutions qui ont eu énormément
de difficulté à vivre depuis quelques années et qui ont
besoin de subventions gouvernementales pour survivre. Ces institutions qui, le
plus souvent sont de vieilles institutions avec une tradition bien
établie, méritent certainement de survivre parce qu'elles ont
rendu dans le secteur élémentaire c'est de cela que nous
parlons d'immenses services à la population des régions
qu'elles desservent. Il n'y a pas que Saint-Louis-de-Gonzague à
Québec. Il y a le jardin de l'enfance des soeurs de la Providence
à Montréal qui est une autre de mes alma mater, puisque j'ai
commencé mes études élémentaires à Mont-
réal où je suis né, au coin de la rue Saint-Dominique et
du boulevard Saint-Joseph.
M. CARDINAL: Je répondrai à l'honorable chef de
l'Opposition qu'il est même prévisible que certaines institutions
de niveau élémentaire seront certainement reconnues
d'intérêt public. Nous travaillons à des hypothèses
puisque nous n'avons pas le travail de la commission. J'ai mentionné
tantôt le cas des écoles pour l'enfance inadaptée. Ces
écoles n'étalent pas subventionnées. Il apparaît
à première vue qu'elles ont un rôle particulier, une
clientèle particulière dans une région donnée.
Déjà, cela obéit à des mots que l'on trouve dans la
loi.
M. LESAGE: C'est cela.
M. CARDINAL: Soit dit sans préjudice, j'ai déjà
rencontré des gens d'une communauté d'une des grandes religions,
la religion juive, à qui j'avais mentionné que l'adoption de la
nouvelle loi leur donnait des espérances qui n'existaient pas
auparavant. Evidemment, tout ceci sera dans les limites des cadres
budgétaires, des critères établies, des règlements
établis, des recommandations de la commission.
M. PINARD: Est-ce que le ministre me permettrait une autre question? Je
suis informé que des conflits assez graves sont survenus, et qui
pourraient survenir encore, dans le cas d'institutions qui ont demandé
au ministère le statut d'institution associée; le conflit est
survenu au niveau des commissions scolaires qui ont refusé que ce
statut-là soit accordé à des institutions. Alors,
qu'advient-il...
M. CARDINAL: Justement, cela ne se place pas du tout au niveau du
ministère. Il y a une loi-cadre qui permet l'association. C'est purement
deux institutions à ce moment-là, l'une qui est une institution
publique la commission scolaire et l'autre qui est une
institution privée; en somme elles font un contrat. Si elles ne
s'entendent pas pour faire un contrat, dont le schéma est donné
dans la loi, le ministère n'intervient pas, ni pour défendre le
contrat, ni pour le pousser. C'est purement une liberté contractuelle
laissée à deux institutions.
Il est exact que certaines commissions scolaires n'aimaient pas faire
des contrats d'association, comme il est exact que certaines institutions
privées ne voulaient pas en faire. Vous avez actuellement les
institutions privées qui n'ont pas voulu être associées. Je
prends un exemple que je connais. J'ai des enfants qui vont au collège
Brébeuf de Montréal. Cette ins-
titution a voulu demeurer strictement privée dans tous les sens
du mot. C'est son droit.
M. PINARD: Qui demandait ou non le statut d'association?
M. CARDINAL: Personne ne l'a demandé dans ce cas-là.
Certains parents auraient bien voulu qu'il le soit. Mais la direction du
collège ne le voulait pas. Je n'appelle pas cela des difficultés.
Ce sont des gens ou des institutions qui librement décident de
contracter ou de ne pas contracter. Il faut qu'il y ait deux parties
contractantes on le sait, M. Pinard a fait son droit pour qu'il y
ait un contrat.
Alors, si l'une des deux ne le désire pas, le contrat n'existe
pas, même si les parents le souhaitent.
M. PINARD: Oui, mais, là, avec le nouveau mécanisme
prévu par le bill 56, n'y aurait-il pas une espèce de
mécanisme d'arbitrage dans les cas de conflit?
M. CARDINAL: Non, il n'y a pas de mécanisme d'arbitrage. Avec la
nouvelle loi, au lieu de demander l'association, elles vont demander
d'être reconnues.
M. LESAGE: Cela peut être plus avantageux de ne pas être
associée pour une institution.
M. CARDINAL: Oui.
M. LESAGE: De ne pas être associée à une commission
scolaire, j'entends.
M. CARDINAL: C'est ça. Dans le fond, cela dépend de
l'endroit où l'on se trouve et des services qu'on rend. Il est
peut-être plus avantageux d'être associé que d'être
une institution reconnue, par exemple, ou le contraire.
C'est d'abord pour l'institution une question de dollars et de cents. Il
s'agit aussi de savoir si elle préfère être associée
à une commission scolaire locale ou si elle préfère
dépendre d'une reconnaissance du ministère. C'est une
décision, si vous voulez, qui laisse place à un jugement.
M. LESAGE: L'initiative du choix appartient à la commission
scolaire?
M. CARDINAL: Non, non.
M. LESAGE: Au ministre?
M. CARDINAL: L'initiative est...
M. LESAGE: ... à l'institution, excusez-moi. M. CARDINAL: A
l'institution, c'est ça. M. LESAGE: J'ai mal posé ma question. M.
CARDINAL: D'accord, à l'institution.
M. LESAGE: Une autre question. Je vois que les frais de transport des
écoles sont exclus. Ne devrait-on pas en tenir compte lorsqu'il s'agit
de pensionnats?
M. CARDINAL: Enfin, ils les ont exclus parce que...
M. LESAGE: Non, je demande au ministre d'y songer.
M. CARDINAL: La raison pour laquelle ils sont exclus, c'est que c'est
très variable d'une région à l'autre.
M. LESAGE: Oui, très bien.
M. CARDINAL: D'autre part, il y a la bourse qui peut être
accordée à certains niveaux.
M. LESAGE: Non, mais le pensionnat au secondaire. Il n'y a pas de
bourse...
M. CARDINAL: C'est exact.
M. LESAGE: ... il y a des pensionnaires. Le fait qu'ils soient
pensionnaires évite les frais de transport.
M. CARDINAL: Oui. On ne les a pas inclus, parce que, dans les
coûts établis par élève dans le secteur public, ce
coût-là n'est pas prévu. C'est une somme qui est
prévue à part d'ailleurs, elle a été
augmentée cette année pour le transport et pour le
séjour, parce que ceci est très variable d'une région
à l'autre.
Lorsque nous avons débattu, en juin, les crédits de
l'éducation, je me rappelle que ceux qui étaient de
régions éloignées ont souvent soulevé ce
point-là. Il n'y a pas de comparaison possible; on ne peut donner un
chiffre moyen. Je ne sais pas si je peux apporter un détail
particulier...
M. LESAGE: Je peux vous donner des exemples. Lorsqu'on transporte des
élèves de La Sarre à Val-d'Or, évidemment,
ça coûte plus cher que de les transporter de Sainte-Foy à
Québec.
M. CARDINAL: Oui, et en Gaspésie, ce n'est pas comme à
Québec. De toute façon, on sait qu'en vertu de l'article 206, la
Loi de l'instruction publique, une commission scolaire peut pourvoir au
transport d'élèves de son territoire, qui fréquentent une
institution d'enseignement privé . Il y a ce débouché.
Cela existe dans certaines régions. Je connais des cas
particuliers où, soit parce qu'il y a de la place dans les autobus ou
soit parce que la commission scolaire veut s'entendre avec les institutions
privées, ce sont les autobus qui font le service dans les institutions
publiques c'est-à-dire les commissions scolaires et qui,
en même temps, transportent les élèves des institutions
privées. Il y a donc un moyen d'en sortir.
M. LESAGE: Cela existe dans le Nord-Ouest québécois.
M. CARDINAL: L'article 206 permet ce genre d'ententes.
M. LE PRESIDENT: Alors, article 9, adopté. Article 10,
adopté. Article 11?
M. COLDBLOOM: L'article 11, dans son premier alinéa, est
très clair, très précis et ne permet pas de nuances.
L'institution doit être la propriété d'une corporation qui
n'a pas d'autre objet que celui de donner un enseignement prévu par la
présente loi.
Je comprends la nécessité d'un tel article. Il y a, quand
même, des institutions religieuses qui ont, en même temps, des
écoles qui fournissent un enseignement général, tel que
défini au premier article de la loi. Dois-je comprendre que ces
institutions seraient obligées, afin de pouvoir bénéficier
de cette loi, de former une deuxième corporation pour satisfaire aux
exigences de cet article?
M. CARDINAL: Oui. Je reviens à une réponse que j'ai
donnée à une question que vous aviez posée quand vous avez
parlé des services d'enseignement dans les hôpitaux, par exemple.
C'est la même chose.
Il existe des groupements religieux qui vont donner un enseignement.
Cela existait autrefois dans la religion catholique, des cours de
catéchisme étaient donnés, etc. A ce moment-là, le
ministère de l'Education serait obligé de partager les
coûts entre ce qui est service religieux, service d'éducation,
etc.
La réponse à la question est donc très pré-
cise. Oui, il faudrait que le service d'enseignement soit incorporé dans
une autre institution.
M. GOLDBLOOM: C'est l'interprétation que je donnais à
l'article. Je voulais simplement en être certain.
M. CARDINAL: C'est exact.
M. LE PRESIDENT: Article 11, adopté. Article 12, adopté.
Article 13?
M. LAFRANCE: A l'article 13, est-ce que l'institution concernée
aura le droit de se faire entendre, M. le Président?
M. CARDINAL: Oui, c'est prévu dans la loi. Je ne connais pas
l'article par coeur, mais la réponse est oui. Ceci avait
été soulevé au comité.
M. LE PRESIDENT: Article 14, adopté.
M. LAFRANCE: A l'article 14, dans le coût moyen, on a dit ce matin
que la dette en investissement serait reconnue. Est-ce que les
réparations, par exemple une espèce de catastrophe qui pourrait
arriver dans une institution, un mur qui... est-ce prévu?
M. CARDINAL: Je suis obligé de répondre au sens du code
civil qui fait la distinction entre les grosses réparations et les
petites réparations. S'il s'agit de dépenses de fonctionnement,
c'est inclus. S'il s'agit de grosses réparations et qu'on est
obligé d'emprunter, ce sera reconnu comme service de la dette. Je veux
bien faire la distinction. Ce n'est pas la dépense en capital qui sera
incluse dans une dépense de fonctionnement.
M. LAFRANCE: Le ministre a donné tout à l'heure le
coût moyen dans le secteur public au secondaire. Pourrait-il le donner
aussi à l'élémentaire et au collégial?
M. CARDINAL: Le coût moyen au niveau élémentaire est
d'environ $450; au niveau secondaire de $750 et au niveau collégial de
$1,200. Ce coût moyen veut dire que vous avez des coûts
supérieurs et des coûts inférieurs. Vous vous rappelez ce
savant qui s'est noyé dans un ruisseau qui avait une moyenne de tros
pouces d'eau; il était tombé dans un trou de trente pieds.
M. LAFRANCE: M. le Président, dans le
premier alinéa, on dit ici « tel que calculé pour
l'année scolaire précédente pour les établissements
publics de même catégorie ». Que signifient ces mots?
M. CARDINAL: De même niveau, de même catégorie, qui
donne un enseignement de même nature au même niveau.
M. LAFRANCE: Le ministre a-t-il prévu le cas de certaines
régions défavorisées où les parents ne pourraient
pas payer le supplément qui est exigé par l'institution? Si ces
parents ne peuvent pas payer ce montant, ça devient presque des
institutions réservées à une classe de
privilégiés. Y a-t-il un moyen, une aide quelconque?
M. CARDINAL: Je regrette. La réponse est vraiment non, en ce sens
que la loi crée un plan général qui est 80% d'un chiffre
établi en fonction du coût dans le domaine public l'année
précédente. C'est un coût moyen. Il avantagera certaines
régions et en désavantagera d'autres, mais la loi ne
prévoit pas une régionalisation qui permette d'établir des
coûts variés pour le moment.
M. LAFRANCE: Une question qui paraîtra peut-être un peu
simpliste au ministre. Ces subventions, quand seront-elles versées?
M. CARDINAL: Pour le moment, écoutez, je ne peux pas
répondre. Ce sera prévu dans les règlements. L'article 67
prévoit que des règlements établiront en combien de
versements et à quelle époque ces versements seront faits.
M. LE PRESIDENT: Article 14, adopté. Article 15.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, en quelques mots, le ministre
pourrait-il nous donner ses idées maîtresses sur les distinctions
qui seront faites entre les institutions de la catégorie dont nous
venons de parler et celles de cette nouvelle catégorie que nous abordons
maintenant?
M. CARDINAL: Non, le ministre ne peutpas le dire parce que c'est
justement la commission qui va établir les règlements qui va le
dire. C'est encore l'article 67. La commission établit les
critères qui vont déterminer les catégories d'institutions
d'intérêt public ou simplement reconnues.
Je n'ai donc pas d'opinion à transmettre à la commission;
j'attendrai ses recommandations. Ma réponse n'est pas une réponse
de casuïste pour éviter la question. C'est le mécanisme de
la loi qui est ainsi. C'est encore l'article 67.
M. GOLDBLOOM: C'est quand même le ministre qui édictera les
règlements. Ou est-ce la commission?
M. CARDINAL: Non, c'est la commission qui prépare les
règlements, lesquels passeront, comme tous les règlements, par
les mécanismes prévus dans les lois qui existent
présentement.
M. LE PRESIDENT: Article 15, adopté. Article 16, adopté.
Article 17, adopté.
M. GOLDBLOOM: Un instant.
M. PINARD: M. le Président, avec votre permission et avec la
permission du ministre, y aurait-il moyen de clarifier un point à la
suite de l'échange de vues de tout à l'heure à l'article
9? Sur le statut des institutions associées, le ministre m'a dit
tantôt que c'était une question locale qui se transigeait entre la
commission scolaire d'une part et l'institution,
M. CARDINAL: C'est en vertu d'une autre loi. Ce n'est pas en vertu de
celle-ci. Il n'est pas ici question des institutions associées.
M. PINARD: Oui, très bien. A l'article 66, contrat de
services...
M. CARDINAL: Ah, c'est autre chose le contrat de services.
M. PINARD: Oui? Est-ce que c'est relié quand même au
problème que j'ai évoqué tantôt?
M. CARDINAL: Non, c'est quelque chose de complètement nouveau.
Dans la Loi de l'instruction publique, l'article 206 existe
déjâ,qui permet de conclure certains contrats, entre autres les
contrats de transport. Mais ce qui est prévu dans cette loi, c'est
quelque chose de nouveau qui permet de conclure des contrats de services avec
certaines institutions qui seront payées pour leurs services.
M. PINARD: Des services de quelle nature?
M. CARDINAL: Service d'enseignement... M. PINARD: D'enseignement, oui.
M. CARDINAL: ... mais spécialisé.
M. PINARD: Oui.
M. CARDINAL: Supposons qu'on aurait besoin, dans une commission scolaire
régionale, au niveau secondaire, d'un enseignement électronique
et qu'il y a une institution privée très bien cotée qui
donne justement des cours en électronique. On pourrait requérir
les services de cette institution. A ce moment-là, il y aurait un
contrat de service, mais ceci ne se ferait pas par voie d'association. Le
contrat d'association, qui existe en vertu de notre loi, c'est que la
commission scolaire prend I sa charge les élèves d'une
institution privée et que l'éducation devient, pour ces
élèves, entièrement gratuite.
M. PINARD: Alors, ça n'aurait aucune conséquence au niveau
du problème que j'ai soulevé tantôt...
M. CARDINAL: Non, ça n'a pas de rapport.
M. PINARD: ... concernant le statut d'association.
M. CARDINAL: C'est ça, c'est différent. M. LE PRESIDENT:
Article 17, adopté?
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je m'excuse, S. la fin de
l'article 17, dans la première version réimprimée, on ne
faisait pas allusion au 10% de supplément et, ici, dans le texte final,
on accorde la même permission de 10% de supplément à ces
institutions. Est-ce qu'il y a une explication particulière?
Déjà, des institutions, qui ont eu l'occasion de prendre
connaissance de cette première version, se sont posées la
question.
M. CARDINAL: La deuxième version est une correction de la
première où il y avait un oubli.
M. LE PRESIDENT: Article 17, adopté. Article 18, adopté.
Article 19, adopté. Article 20?
M. MORIN: A l'article 20, M. le Président, il y aurait un
amendement. L'article 20 se lirait comme suit: « Si elle est
déclarée d'intérêt public ou reconnue pour fins de
subvention, une institution qui donne l'enseignement pour l'enfance
inadaptée aux niveaux préscolaire, élémentaire,
secondaire ou collégial, reçoit, nonobstant les articles 14 et
17, pour chaque année scolaire, une subvention par élève
déterminée par règlement du lieutenant-gouverneur en
conseil, après consultation de la commission. »
II s'agit d'un article qui vient clarifier tout simplement.
M. LESAGE: C'est beaucoup plus la phraséologie qui est
changée.
M. CARDINAL: Oui, mais c'est un peu plus que la phraséologie. On
aurait pu essayer d'interpréter l'article, car rien, dans l'article 20,
ne disait que les institutions qui sont mentionnées, par exemple,
l'enfance inadaptée, etc, auraient du être reconnues
d'intérêt public ou pour fins de subvention.
M. LESAGE: D'accord. Quand même, disons que la rédaction
est meilleure.
M. CARDINAL: Oui, c'est une amélioration. M. MORIN: C'est
ça. M. LESAGE: D'accord.
M. PINARD: M. le Président, j'aimerais avoir une explication. Par
les mots « enfance inadaptée », est-ce que le ministre
comprend également les institutions qui prodiguent l'enseignement aux
enfants qui sont considérés comme des aveugles ou des
demi-voyants?
M.MORIN: Exact.
M. CARDINAL: Exactement, ça entre là dedans. L'enfance
inadaptée comprend tous les enfants qui, en raison d'une
infirmité physique, mentale ou autre, s'il en existe, ne sont pas
adaptés à la vie courante, comme le sont tous les autres enfants
normaux. C'est un terme général.
UNE VOIX: Adopté.
M. PINARD: C'est parce que si...
M. CARDINAL: Si vous préférez, c'est ce qu'on appelle en
anglais, si je ne me trompe pas, « handicapped », les enfants
handicapés.
M. LE PRESIDENT: Alors, article 20, tel qu'amendé, adopté.
Article 21?
M. LESAGE: En anglais, c'est bien traduit par « handicapped
» dans le bill.
M. CARDINAL: Bon.
M. LAFRANCE: L'article 21, M. le Président, au deuxième
alinéa: « Dans le calcul des subventions visées aux
articles 14 et 17, il
n'est cependant pas tenu compte des élèves pour lesquels
une corporation scolaire assume les frais d'enseignement en vertu de l'article
496 ». Est-ce que le ministre pourrait dire quels sont ces
élèves?
M. CARDINAL: Bien, écoutez, je vais donner une réponse
générale. L'on ne compte pas, dans le coût d'une
institution privée, des élèves dont le coût est
déjà assumé par l'institution publique, si vous voulez. Je
ne sais pas si le ministre d'Etat à l'Education pourrait donner une
réponse plus précise, mais si, déjà, une commission
scolaire assume entièrement les frais de l'éducation d'un enfant,
ces enfants-là, s'ils vont dans une institution privée, ne seront
pas subventionnés comme tels, si vous voulez, puisqu'ils le sont
déjà.
M. BEAUPRE: M. le Président...
M. CARDINAL: Permettez-moi un exemple. Dans une institution à
plusieurs niveaux, si les élèves, à un certain niveau, ont
le statut d'associés avec la commission scolaire, ils sont
déjà payés 100%.
M. LAFRANCE: Très bien.
M. BEAUPRE: M. le Président...
M. MORIN: Pour clarifier davantage; on ne tiendra pas compte des
élèves pour lesquels une commission scolaire paie
déjà les frais d'enseignement en vertu d'une entente
d'association conclue conformément à l'article 496 de la Loi de
l'Instruction publique, ni des élèves qui font l'objet d'un
contrat de service visé à l'article 66 du présent projet
de loi.
M. BEAUPRE: M. le Président, j'aurais voulu que le ministre me
précise également cet article, deuxième paragraphe de
l'article 21. Je vais lui donner des exemples plutôt que lui poser des
questions. Supposons qu'un élève de Québec qui,
normalement, devrait recevoir sa formation de la Commission des écoles
catholiques de Québec va au collège Bellevue. Est-ce qu'il pourra
être, si le collège Bellevue choisit d'être une institution
subventionnée, être considéré comme un
élève de cette institution ou soustrait du calcul du nombre
d'élèves? Je répète ma question, car Je vois que le
ministre était occupé.
M. CARDINAL: Un élève ne comptera jamais à deux
places.
M. BEAUPRE: Non. Mais, je suppose qu'un élève qui devrait
normalement recevoir sa formation de la Commission des écoles
catholiques décide d'aller au collège Bellevue, qui est
situé dans les limites de la ville de Québec.
M. CARDINAL: Un collège privé?
M. BEAUPRE: Oui, un collège privé. A ce moment-là,
est-ce que cet élève, si le collège Bellevue est une
institution subventionnée plutôt qu'affiliée...
M. CARDINAL: Il sera subventionné. Il n'y a pas d'obligation.
M. BEAUPRE: Non, mais je mets la condition: Si le collège
Bellevue est subventionné et non pas affilié, est-ce qu'à
ce moment-là, vous compterez cet élève comme étant
un élève de Bellevue, participant à 80% du coût des
subventions ou si l'on va déclarer qu'on ne peut pas le compter?
M. CARDINAL: Mais, oui, nous pouvons le compter. D'abord, vous ne
pourrez jamais établir ceci: Quand un élève va dans une
institution privée, c'est parce qu'il n'est pas dans une institution
publique. L'alternative est...
M. BEAUPRE: Oui. Ce que le ministre oublie...
M. CARDINAL: C'est pour cela que je ne comprends pas la question.
M. BEAUPRE: ... c'est qu'il y à une loi votée l'an
dernier, qui est le chapitre 65, article 14, et qui dit que la Commission des
écoles catholiques de Québec, comme la Commission des
écoles catholiques de Montréal, ne reçoit en subvention
c'est un régime de discrimination contre lequel j'ai
protesté énergiquement l'an passé que $175, alors
que toutes les autres commissions scolaires reçoivent $200 de plus, je
crois.
Un exemple: Mon fils, qui est de Québec, va aller au
séminaire de Québec. S'il est au classique, le séminaire
ne recevra pas la même subvention que s'il vient de Sainte-Foy ou de
Sillery. Alors, je repose ma question au ministre. Compte tenu de ce chapitre
65, une loi adoptée l'an dernier, comme l'élève est de
Québec et qu'il ne reçoit pas les mêmes subventions,
puisqu'on ne reçoit pas à Québec les mêmes
subventions qu'ailleurs est-ce que, s'il va dans
une institution subventionnée, le gouvernement va continuer la
même discrimination ou si on le comptera comme un élève
normal venant de n'Importe quelle région de la province?
M. CARDINAL: Je ne comprends vraiment pas la question. Dès que
l'élève sera à l'institution privée, peu importe
qu'il vienne de n'importe quelle commission scolaire, de n'Importe où
dans le territoire du Québec, que cette commission reçoive la
même somme que les autres ou non, cela ne changera rien, la loi va
s'appliquer.
M. BEAUPRE: Et le ministre...
M. CARDINAL: En anglais « it is a relevance », cela n'a
aucun rapport avec la loi.
M. BEAUPRE: A toutes fins pratiques, est-ce que je peux en
déduire que cette discrimination qui existe présentement dans le
chapitre 65...
M. CARDINAL: Ecoutez, je m'excuse, mais est-ce qu'on parle du bill
56?
M. BEAUPRE: Oui, je parle du bill, mais comme il y a un ensemble de lois
et qu'on est gouverné par plusieurs lois, il faut les regarder dans le
contexte, toutes ensemble.
M. CARDINAL: II n'y a aucun rapport entre l'autre loi et celle-ci, comme
j'ai indiqué tantôt qu'il n'y avait aucun rapport entre le contrat
de l'association et cette loi.
M. BEAUPRE: Ecoutez, on réfère à l'article 496:
« Toute commission régionale ou commission scolaire peut conclure,
après une période déterminée avec l'autorisation du
ministre, une entente... »
M. CARDINAL: J'ai répondu trois fois à cette
question-là.
M. BEAUPRE: D'accord. Je continue, car j'avais deux questions. A
supposer que la commission scolaire de Québec a négocié
une entente avec le collège Bellevue, à ce moment-là il y
a $175 par enfant. D'accord? S'il venait de Sainte-Foy, c'est $200 de plus au
classique. D'accord? Maintenant, avec la loi, si la même entente existe,
l'élève qui ira à Bellevue et qui n'est pas compté
pour fin de subvention rece-vra-t-il à toutes fins pratiques, le
même... permettra-t-il à l'Institution, à toutes fins
pratiques, de recevoir les mêmes subventions que s'il venait d'un autre
territoire?
M. CARDINAL: Si la même entente existe, la situation n'est pas
changée. C'est la réponse de tantôt. Je reviens toujours
à la même réponse. Supposons que le collège Bellevue
a un contrat avec la commission scolaire de Québec pour que des enfants
soient affectés par ce contrat et qu'à ce moment-là la
subvention du gouvernement soit $175, peu importe, il recevra $175 par
élève.
Mais le collège de Bellevue a le choix, ou d'être
institution associée ou d'être institution reconnue ou
d'être institution reconnue d'intérêt public ou d'être
institution privée sans être reconnue d'aucune façon.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BEAUPRE: Je dois conclure que toutes nos institutions privées
qui sont installées dans les limites de Québec et de
Montréal, ont intérêt à ne pas continuer ces
contrats d'association et que les commissions scolaires seront
déchargées d'un coût assez onéreux compte tenu des
subventions moindres que nous recevions à Québec et à
Montréal.
M. CARDINAL: La réponse que j'ai donnée tantôt,
c'est le choix à chaque institution privée de choisir le statut
qui lui plaît.
M. LESAGE: II est clair que des institutions comme le Séminaire
de Québec et le Collège Bellevue ont tout intérêt
à être des institutions reconnues d'intérêt public
plutôt que de continuer leur contrat d'association avec les commissions
scolaires environnantes.
M. CARDINAL: D'accord, dans ce cas il est possible et probable que ce
que vous dites soit exact. Mais, comme je l'ai dit tantôt, c'est un
jugement de valeur, une décision à être prise.
M. LESAGE: Disons que vu leur intérêt c'est exact
ce que ces institutions feront c'est probable.
M. CARDINAL: Ah! ça c'est autre chose. Cela tombe dans les
probabilités.
M. PINARD: C'est une hypothèse de plus en plus probable.
M. LE PRESIDENT: Article 21, adopté. Article 22, adopté.
Article 23, adopté. Article 24, adopté également. Article
25, adopté. Article 26, adopté. Article 27, adopté.
Article 28, adopté. Article 29, adopté. Article 30,
adopté. Article 31, adopté. Article 32, adopté.
Article 33, adopté. Article 34, adopté. Article 35,
adopté. Article 36, adopté. Article 37, adopté. Article
38, adopté. Article 39, adopté. Article 40...
M. GOLDBLOOM: Excusez-moi, M. le Président, à l'article
39, le même commentaire au sujet du mot « professions » qui
devrait être remplacé par « vocations ».
M. CARDINAL: D'accord, merci.
M. GOLDBLOOM: A l'article 40, le même mot revient, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Alors article 40, adopté avec un amendement dans
le texte anglais. Article 41, adopté. Article 42, adopté. Article
43, adopté. Article 44, adopté. Article 45, adopté
également.
M. GOLDBLOOM: Excusez-moi, M. le Président, à l'article 44
la même correction, à deux endroits, à la deuxième
ligne et à l'avant-dernière ligne.
M. LE PRESIDENT: Article 46, adopté. Article 47, adopté.
Article 48, adopté.
M. GOLDBLOOM: Même correction, M. le Président, à la
5e ligne.
M. LE PRESIDENT: Article 50, adopté. Article 51, adopté.
Article 52, adopté. Article 53, avec les sous-paragraphes adopté.
Article 54, adopté. Article 55, adopté. Article 56 et les
sous-paragraphes, adopté. Article 57...
M. GOLDBLOOM: M. le Président, on va un peu vite; à
l'article 56, y aurait-il lieu de faire allusion à la tenue d'un dossier
sur la santé des enfants? Est-ce que c'est prévu dans d'autres
lois du ministère de l'Education? Est-ce que ça fait normalement
partie des dossiers qui sont normalement tenus dans les institutions
d'enseignement?
UNE VOIX: Quel article?
M. MORIN: Il n'y aurait rien, semble-t-il, de prévu pour les
étudiants. Il y aurait un article de prévu en ce qui concerne les
enseignants.
M. LEDUC (Taillon): Est-ce qu'il n'y aurait pas une
nécessité de prévoir ça vis-à-vis des
enfants? Je connais quelques-unes des institutions qui sont des institutions
privées qui ont commencé à tenir un dossier sur la
santé des élèves, leurs différentes
activités, et ça semble, du moins dans un cas bien
spécifique, avoir donné des résultats très
concrets.
Une sous-question à ça, voyant les dossiers et tout ce que
cette loi exige des institutions privées qui seront reconnues et qui
auront leur permis, je vois qu'au point de vue administratif et certainement au
point de vue pédagogique, le ministère va y mettre le nez comme
jamais il n'a mis le nez dans ces institutions. Alors je me demande s'il n'y a
pas lieu de craindre, pour certaines institutions privées de perdre le
droit à certaines activités qu'elles ont actuellement à
leur programme et que le ministère ne reconnaîtrait pas dans les
coûts d'administration pour l'institution.
M. MORIN: Disons qu'on prend bonne note des remarques du
député. D'ailleurs, on me dit qu'il y a déjà
certains travaux d'entrepris au ministère de l'Education, dans le sens
du dossier cumulatif de l'élève.
M. LE PRESIDENT: Alors, l'article 56, adopté. Article 57,
adopté. Article 58, adopté également. Article 59,
adopté. Article 60, adopté. Article 61, adopté. Article
62, adopté.
M. GOLDBLOOM: Une petite question sur ces quatre articles que nous
sommes en train d'adopter, 59 à 62 inclusivement. Si je les comprends
bien, la personne qui s'engage à suivre des cours n'est pas
obligée de continuer, mais peut, par lettre recommandée,
démissionner ou décommander son adhésion à cette
institution. Selon l'article 62, si cette personne envoie sa lettre, sans
même avoir fréquenté l'institution, il y aura une
indemnité n'excédant pas un dixième du prix qui pourrait
être exigé. La personne qui fréquente disons un cours, qui
y va une fois, qui trouve que ce n'est pas à son goût, que
c'était représenté de façon à la tromper,
est obligée de payer une proportion selon le nombre de cours
fréquentés et une indemnité d'un cinquième. Il y a
aussi un article qui dit qu'à l'occasion d'une rencontre pour expliquer
ce qu'est le cours, il n'y a pas de possibilité d'inscrire des
étudiants à ce moment-là. Il faut qu'ils soient inscrits
à un autre moment. Donc, celui qui arrive s'inscrit, écoute la
première classe, trouve que ce n'est pas à son goût. S'il
se retire, il est obligé de payer une proportion du coût total
plus une indemnité d'un cinquième du coût total.
M. CARDINAL: Il y aurait deux réponses à une seule
question. La première est dans l'ar-
ticle 65 tout d'abord qui défend ce que j'appellerai la vente
à la vapeur je m'excuse d'employer ce mot ou sous
pression, ou enfin sans témoin, etc. On suppose donc que quelqu'un qui
s'est inscrit et qui n'a pas suivi de cours... Ce n'est pas le cas marginal de
quelqu'un qui n'a pas pu suivre les cours, mais quelqu'un qui a
décidé de ne pas les suivre. Je suis d'accord avec vous, c'est la
deuxième partie de ma réponse, qu'il faut s'arrêter
à un moment donné. Est-ce qu'on va dire: celui qui a suivi un
cours, deux cours, trois cours, quatre cours, il faut que la loi mette une
coupure à un moment donné. Il pourra toujours arriver, avec
quelque loi que ce soit, c'est regrettable mais c'est ce qui est humain, qu'il
y ait quelques rares personnes qui soient prises dans la situation que vous
avez décrite.
Mais, comme dirait l'honorable M. Bellema-re, « de minimis non
curat pretor ».
M. PINARD: Vous n'êtes pas encore sorti de l'enseignement du
droit.
M. LE PRESIDENT: Article 63, adopté? M. GOLDBLOOM: Adopté,
pro bono publico. M. LE PRESIDENT: Article 64. Adopté.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je m'excuse mais, à
l'article 63, il y a la même correction à faire à la
troisième ligne. Merci.
M. LE PRESIDENT: Article 65, adopté. Article 66, adopté.
Article 67.
M. CARDINAL: Article 67, oui.
M. MORIN: II y a une modification à l'article 67, à
insérer après le paragraphe a), le suivant...
M. LESAGE: Paragraphe a?
M. MORIN: ... b) « Déterminer les critères selon
lesquels une institution peut être reconnue pour fins de subventions
». C'est une omission, si vous voulez, à l'article 67, en haut. On
lit ici: « Déterminer les critères en outre de ceux qui
sont prévus par la présente loi ». Il faudrait y ajouter
aussi: « Déterminer les critères sur lesquels doit
être basée une déclaration d'intérêt public
». On pourrait y ajouter; « Déterminer aussi les
critères selon lesquels une institution peut être reconnue pour
fins de subventions ». Cela avait été oublié.
M. LESAGE: D'accord.
M. MORIN: Ensuite, il y a le paragraphe b), à l'article m). Ils
sont numérotés et deviennent respectivement les paragraphes c)
à m).
M. LESAGE: D'accord, ça va.
M. LE PRESIDENT: Article 67, adopté. Article 68, adopté.
Article 69, adopté. Article 70, adopté. Article 71,
adopté. Article 72, adopté. Article 73, adopté. Article
74, adopté.
M. GOLDBLOOM: M. le Président...
M. MORIN: A l'article 75, il y a une modification également.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que l'honorable député de
D'Arcy-McGee voulait revenir sur l'article 74?
M. GOLDBLOOM: Pas spécialement. C'était une question qui
ne s'applique pas nécessairement à un article en particulier.
M. MORIN: Alors, il faudrait ajouter à la fin de l'article 75 ce
qui suit: « Et les permis délivrés en vertu de ladite loi
demeurent en vigueur jusqu'à la date d'échéance ».
Autrement, les permis actuels seraient annulés automatiquement, la loi
étant abrogée. C'est en vigueur, justement, jusqu'à la fin
de juin.
M. LESAGE: Une des choses que je demanderais au ministre d'expliquer, ce
sont les articles d'entrée en vigueur. Voyez-vous, nous abrogeons
dès maintenant à l'article 73 la Loi des subventions aux
institutions d'enseignement privé. A partir de la sanction de la loi,
c'est abrogé.
Or, il y a l'article 72 qui entre en vigueur le 1er juillet 1967; les
articles 9, 15, 23 et 73, sur proclamation du lieutenant-gouverneur en conseil.
Il serait peut-être bon que le ministre nous expose le
mécanisme.
M. CARDINAL: Je peux essayer. La question que vous posez, je l'ai
posée hier aux juristes ou aux légistes, comme vous voudrez,
parce que quand j'ai lu ces quatre articles-là, je me suis dis; Oui,
mais enfin, la!
Disons qu'en principe la loi, dans son ensemble, entre en vigueur le
jour de sa sanction. C'est la règle du dernier article. L'article
précédent dit que cependant certains articles n'entreront en
vigueur que sur proclama-
tion. Ce sont les articles de base de la loi; les articles 9, 15, 23,
73. L'article 9, c'est justement l'article où nous nous sommes
arrêtés assez longuement qui permet de déterminer les
institutions d'intérêt public. L'article 15, c'est l'article qui
permet de déterminer les institutions reconnues pour fins de
subventions.
L'article 23, c'est l'article qui établit le permis pour
l'école et l'article 73, c'est l'article qui parle des subventions aux
autres institutions privées. Ces quatre articles, pour entrer en
vigueur, doivent nécessairement être appuyés de
règlements qui ne sont pas encore rédigés et qui vont
être établis par la commission qui va être
créée immédiatement de par la loi.
Il est impossible que tout ceci puisse entrer en vigueur
immédiatement. Il faudrait qu'il y ait un délai qui permette de
créer la commission en nommant ses membres, de faire travailler la
commission qui va établir ce qui est prévu à l'article 67,
et ces règlements étant adoptés, on pourra, par
proclamation, mettre en vigueur des articles qui permettront d'établir
les quatre catégories d'institutions.
L'on prévoit et je pense que l'honorable chef de
l'Opposition sera d'accord avec le ministre que nous sommes en cours
d'année scolaire et que ceci ne pourra s'appliquer qu'avec
l'année qui débuterait en septembre 1969, c'est-à-dire que
Ja loi entrerait en vigueur à une date entre le jour de la sanction,
supposons aujourd'hui, et ce qui est nécessaire pour commencer
l'année 1969.
Quant aux articles...
M. LESAGE: Ce qui m'inquiète le plus, ce sont les articles qui
ont pour effet d'abroger la loi...
M. CARDINAL: L'article 72 est à l'effet...
M. LESAGE: ...ou un article de loi et ce sont les articles 73, 74, 75 et
76. Je comprends qu'un amendement est suggéré à l'article
73, c'est ça?
M. CARDINAL: Article 73, non à l'article 75.
M. LESAGE: Alors à l'article 73, que se passe-t-il?
M. CARDINAL: Article 73, la Loi des subventions aux institutions
d'enseignement privé est abrogée mais n'entre pas en vigueur tout
de suite. Elle n'entrera en vigueur que lorsque les quatre articles que j'ai
mentionnés entreront en vigueur.
M. LESAGE: Comment se fait-il que l'article 73 ne peut pas entrer en
vigueur tout de suite?
M. CARDINAL: Parce qu'il faut, d'ici la fin de l'année, pour
l'année courante, payer les subventions en vertu de cette loi.
M. LESAGE: Oui, mais comment pourrez-vous les payer?
M. CARDINAL: En vertu de la loi qui existe actuellement et qui ne sera
abrogée que sur proclamation. La nouvelle loi venant remplacer...
M. LESAGE: C'est-à-dire que la Législature s'en remet au
lieutenant-gouverneur en conseil.
M. CARDINAL: La Loi des subventions aux institutions d'enseignement
privé existe actuellement.
M. LESAGE: J'ai tiré la conclusion, c'est que la
Législature s'en remet au lieutenant-gouverneur en conseil.
M. CARDINAL: Pour ce qui est de la date de mise en vigueur de ces
articles par conséquent...
M. LESAGE: Sur la date de prorogation de la Loi des subventions aux
institutions d'enseignement privé.
M. CARDINAL: C'est ça parce que cette loi remplacera l'autre et
à ce moment-là les deux se rejoindront dans un instant de
raison.
M. LESAGE: C'est ce que je voulais faire dire au ministre. C'est le
ministre qui va recommander au Conseil des ministres l'abrogation d'une loi, ce
n'est pas la Législature qui va le faire.
M. CARDINAL: C'est exact.
M. LESAGE: C'est un pouvoir exorbitant.
M. CARDINAL: C'est écrit dans la loi.
M. LESAGE: C'est ce qui est écrit dans la loi, mais ce que je
veux dire, c'est que le ministre demande un pouvoir exorbitant.
M. CARDINAL: Le ministre ne demande aucun pouvoir. Il accepte d'avoir
des responsabilités exorbitantes.
M. LESAGE: C'est le ministre qui présente
ce bill, comme c'est lui qui a présenté le bill 85, qu'il
ne l'oublie pas.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CARDINAL: M. le Président, je ne commencerai pas de discussion
sur ce sujet.
M. LE PRESIDENT: Le dernier article adopté était l'article
75.
Article 76, adopté. Article 77, adopté. Article 78,
adopté. Article 79, adopté. Article 80, adopté.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je voudrais dire simplement ceci,
c'est qu'il reste quand même que la loi, si ces articles 9 et 15 surtout
n'entrent pas en vigueur immédiatement, est dans une large mesure
inopérante pour le moment. Le ministre peut-il nous donner une
idée de ses prévisions pour la constitution de la commission, et
quand demandera-t-il à la commission de lui fournir les
règlements et les exigences qui sont énumérés dans
la loi?
M. CARDINAL: L'engagement du ministre, c'est une prévision du
ministre, d'après le travail qu'il y aura nécessairement à
accomplir. Disons trois à quatre mois avant que tous les
mécanismes ne soient mis en place, que les règlements, etc.,
soient préparés.
C'est-â-dire que nous nous placerons à ce moment-là
aux environs de Pâques, c'est-à-dire en un temps suffisant pour
que les institutions visées par la loi puissent
bénéficier, dès le prochain exercice, des avantages de
cette loi.
M. GOLDBLOOM: Je crois que c'est très important.
M. PINARD: Il y a quand même à ce jour des projets de
règlements...
M. CARDINAL: Non, il n'y en a pas, parce qu'encore une fois, si on se
rappelle ce qui s'est passé au comité de l'Education, on avait
prévu antérieurement que le ministre aurait fait des
règlements, mais là, c'est une commission qui fait les
règlements. Le ministre ne peut certainement pas arriver à la
commission et dire: voici les règlements que nous avons
préparés, êtes-vous d'accord? C'est la commission,
d'après l'article 67, qui va établir les règlements, les
critères, etc. On nous a dit, au comité de l'éducation
qu'il fallait démocratiser davantage, qu'il ne fallait pas que le
ministre ait des pouvoirs exorbitants, et qu'il ne fallait pas que le ministre
établisse lui-même ses règlements puisqu'il pouvait,
à ce moment-là, restreindre la portée de la loi. On a
demandé que la commission le fasse. Nous sommes liés par ces
recommandations. Les projets de règlement, c'est la commission qui les
fera.
M. LESAGE: M. le Président, Je trouve que c'est bien tard, le
mois d'avril, parce qu'il est certain que les institutions tiennent à
engager leur personnel enseignant autant que possible avant la fin de
l'année scolaire qui précède le début de la
suivante. Je pense que l'ancien doyen de la faculté de droit...
M. CARDINAL: C'est l'intention du ministère...
M. LESAGE: ... de l'université de Montréal sait cela mieux
que mol. Les institutions ne pourront, d'après ce que je comprends de la
réponse du ministre, faire leur demande de reconnaissance comme
étant d'intérêt public que vers le mois de mai ou le mois
de juin. Avant que le ministère n'ait donné une réponse
à ces demandes, ça peut être très long et nous
pourrons être rendus au milieu de l'été prochain. Cela
m'inquiète.
M. CARDINAL: II est possible de prévoir une autre façon de
procéder, à savoir que nous lancions une invitation aux
institutions privées, et qu'elles puissent faire leurs demandes
dès maintenant, pour que ces demandes soient reçues avant
même que tout le travail ne soit fait. Il y a, dans ce domaine, des
choses qui peuvent se faire en même temps, si vous voulez, et non pas
bout à bout.
M. LESAGE: Du moment que les institutions ne se feront pas dire,
après avoir rempli une première formule: nous avons
décidé que la première formule n'était pas bonne,
il faudrait que vous en remplissiez une nouvelle, à la lumière
des nouveaux règlements qui nous sont recommandés par la
commission, etc.
Nous avons connu ça.
M. LAFRANCE: On connaît ça.
M. BELLEMARE: Pourquoi rappeler des mauvais souvenirs de votre
administration?
M. LESAGE: Oh! de la vôtre aussi. Des deux.
M. CARDINAL: M. le Président, je vou-
drais dire à l'honorable chef de l'Opposition que ce sera trois
ou quatre mois ou avant, si possible, mais que nous ferons l'impossible pour
que ce soit possible.
M. LEDUC (Taillon): C'est ça, mais ce n'est pas une très
forte garantie.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. FRECHETTE (Président du comité plé-nier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que votre comité a
adopté avec des amendements le bill 56.
M. LE PRESIDENT: Al'ordre! Le bill amendé sera-t-il
agréé?
Agréé.
Je pense que l'honorable ministre d'Etat à l'Education aurait une
recommandation à nous signifier.
M. MORIN: Oui, M. le Président, il semble qu'il y ait eu une
omission qui pourrait être assez grave, c'est ceci: L'honorable
lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en
recommande l'étude à la Chambre.
M. PINARD: Nous lui faisons des voeux de prompt
rétablissement.
M. LE PRESIDENT: La Chambre donne-telle son consentement à la
troisième lecture?
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education propose la
troisième lecture du bill 56.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. LESAGE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. BELLEMARE: Vous allez voir que le lieutenant-gouverneur, si nous ne
le respectons pas, va s'offusquer et va partir en guerre.
Bill 89
M. BELLEMARE: M. le Président, à l'article 6, je
demanderais simplement le consentement unanime de la Chambre pour faire motion
pour retirer la deuxième lecture et demander la révocation de la
deuxième lecture du bill 89 et le référer au comité
de l'industrie et du commerce.
Il s'agit des heures d'affaires des établissements.
M. LESAGE: Oui.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: M. le Président, 3.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. BELLEMARE: M. le Président: 3).
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de D'Arcy-McGee.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, est-ce que le ministre me permet
une question? Il vient de dire « au comité de l'industrie et du
commerce », n'est-ce pas un comité spécial qui a
été formé pour l'étude de ce projet de loi?
M. BELLEMARE: Ce n'est pas un comité spécial; c'est un
comité régulier de la Chambre. Ce matin, j'ai fait une motion
tout à fait spéciale pour qu'il puisse siéger entre les
sessions et faire rapport au cours de la prochaine session.
M. LESAGE: Est-ce que le leader du gouvernement me le permet? Avec le
consentement unanime, Je voudrais revenir à l'article « Motions
non annoncées ».
M. BELLEMARE: Oui, d'accord, c'est pour les changements.
Changements aux comités
M. LESAGE: Je propose que le nom de M. Wagner soit substitué
à celui de M. Binette sur la liste des membres du comité de
l'éducation. Je propose que les noms de messieurs Tessier et Tetley
soient substitués à ceux de messieurs Choquette et Wagner sur la
liste des membres du comité spécial qui doit étudier le
projet de loi sur la copropriété des immeubles. Et si ces deux
motions sont acceptées, M. le Président, je voudrais attirer
l'attention...
M. LE PRESIDENT: Ces motions sont-elles adoptées?
M. BELLEMARE: Oui.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LESAGE: Je voudrais attirer l'attention
du ministre du Travail sur l'embarras suivant qui peut se produire:
c'est qu'à tous ces comités qui vont siéger entre les deux
sessions, vu qu'il y a un assez bon nombre de membres, il est fort possible que
le leader du gouvernement ou le leader de l'Opposition, désire à
un moment donné changer un des membres.
M. BELLEMARE: Oui.
M. LESAGE: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu que nous adoptions une
motion autorisant par exemple le comité de l'éducation
nous pourrions peut-être faire la même chose sur les autres qui
auront le droit de siéger entre la prorogation de la présente
session et l'ouverture de la prochaine pour autoriser, dis-je, par
exemple, le comité de l'éducation, après la prorogation de
la présente session et jusqu'au premier jour de la prochaine session,
à remplacer un ou des membres dudit comité par un ou d'autres
membres de la Chambre, c'est-à-dire donner la permission au
comité de faire ce que nous pouvons faire ici en Chambre.
M. BELLEMARE: Je serais bien disposé à concourir à
la motion de l'honorable chef de l'Opposition s'il voulait ajouter simplement
une prescription nouvelle, c'est-â-dire 48 heures d'avis à
être remis au président. Au moins 48 heures parce qu'il faut
être certain, 48 heures avant la réunion du comité.
M. LESAGE: C'est l'article 400. Au lieu de dire tout ça, nous
pourrions simplement dire « conformément à l'article 400 du
règlement ».
M. BELLEMARE: C'est l'article 400, oui, c'est ça.
M. LESAGE: Si le ministre veut ajouter « mutatis mutandis »,
on peut l'ajouter.
M. BELLEMARE: Oui, mutatis mutandis. « Après la
constitution d'un comité spécial, la Chambre peut, sur une motion
préalablement annoncée, nommer de nouveaux membres »...
M. LESAGE: Mais comment pouvons-nous avoir une motion
préalablement annoncée quand ce sont des comités qui n'ont
pas d'archives et que la Chambre ne siège pas, par-dessus le
marché? C'est pour cela qu'il serait utile de faire...
M. BELLEMARE: Je pense qu'en donnant un avis de 48 heures au
président, le comité serait justifié de pouvoir
procéder aux changements.
M. LESAGE: Très bien. Si le greffier voulait bien préparer
une motion qui permettrait d'avoir un mécanisme qui fonctionnerait, nous
pourrions l'examiner ce soir.
M. BELLEMARE: D'accord. D'ailleurs, je...
M. LESAGE: Et couvrir, évidemment, le cas de tous les
comités qui doivent siéger entre les deux sessions.
M. BELLEMARE: Il est bien entendu aussi que nous avons
réservé les fonds nécessaires pour que les membres des
comités puissent recevoir un supplément spécial.
M. LESAGE: J'en suis fort heureux pour mes collègues.
M. BELLEMARE: Vous, je comprends...
M. LESAGE: C'est pour mes collègues, parce que le gouvernement a
vu à ce que le chef de l'Opposition soit respectueusement exclu...
M. BELLEMARE: Comme nous, d'ailleurs, tous les ministres qui en font
partie.
M. LESAGE: Oui, mais le chef de l'Opposition ne reçoit pas
d'indemnité de dépenses, comme en reçoivent les
ministres.
M. BELLEMARE: Vous êtes justement à
Québec, pas loin, alors...
M. LESAGE: Je ne me plains pas.
M. BELLEMARE: J'ai moins de compassion.
M. LESAGE: Je veux bien spécifier que le seul qui ne
reçoive pas de supplément est le chef de l'Opposition.
M. BELLEMARE: Alors, les ministres non plus. Mais tous les membres des
comités...
M. LESAGE: Les ministres sont payés autrement et les
députés sont payés... mais le chef de l'Opposition,
lui...
M. BELLEMARE: Ah, cela c'est...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: Nous allons nous enliser dans une discussion qui ira bien
loin.
M. LESAGE: Cela n'ira pas bien loin.
M. BELLEMARE: M. le Président, nous avons fait un beau geste.
M. LESAGE: Oui, d'accord.
M. BELLEMARE: Nous avons demandé de réserver les fonds
nécessaires...
M. LESAGE: Je tiens à souligner que cela me fait plaisir de
participer aux travaux des comités, et gratuitement.
M. BELLEMARE: Comme nous, d'ailleurs, M. le Président.
M. LESAGE: Non, non. Les ministres voient leurs dépenses de
voyage payées en plus de leurs allocations.
M. BELLEMARE: M. le Président, je n'ai pas à faire ici la
nomenclature de toutes les allocations spéciales ou
extraspéciales qui sont allouées au chef de l'Opposition.
M. LESAGE: II y a celles qui sont... M. BELLEMARE: La loi y
pourvoit.
M. LESAGE: Non. Les seules allocations que reçoit le chef de
l'Opposition...
M. BELLEMARE: Alors, M. le Président, nous allons demander au
comité...
M. LESAGE: ... apparaissent au budget. Ce n'est pas le cas des
ministres.
M. BELLEMARE: Nous allons retirer cette proposition.
M. LESAGE: Non, ne la retirez pas.
M. BELLEMARE: Non? Vous ne voulez pas?
M. LESAGE: Non, parce que cela ne s'applique pas à moi.
M. BELLEMARE: Alors, je ne la retire pas...
UNE VOIX: Avez-vous payé votre compte chez le dentiste?
M. BELLEMARE: ... pour mes collègues, les distingués
membres de la Chambre.
M. le Président, article 3. Il est bien préparé, il
est réchauffé.
M. LE PRESIDENT: A l'ordrel Reprise du débat sur la motion de
l'honorable ministre des Affaires...
M. LESAGE: Je ne suis pas prêt et ne le serai pas avant huit
heures. J'avais compris que c'était le débat sur
l'aéroport.
M. BELLEMARE: Je n'ai aucune objection. M. LESAGE: C'est là que
le ministre avait...
M. BELLEMARE: D'accord, je n'ai aucune objection. Je croyais que vous
aviez tellement hâte de nous manifester votre intérêt pour
la ville de Montréal.
M. LESAGE: Vous allez, peut-être, être bien surpris.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales.
M. BELLEMARE: L'aéroport, ça ne devrait pas être
très long. A huit heures, ça sera votre...
M. LESAGE: Cela ne sera pas long, mais...
M. BELLEMARE: Bon, très bien. Alors, M. le
Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESAGE: En avion, ça va vite, surtout en «
réacté » supersonique.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. BELLEMARE: M. le Président,
article 7.
Bill 296
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose
la deuxième lecture de la Loi favorisant l'aménagement des
environs du nouvel aéroport international de la région de
Montréal. L'honorable ministre des Affaires municipales.
M. Robert Lussier
M. LUSSIER: M. le Président, il y a quelques mois, le
gouvernement du Canada annonçait son
intention d'aménager, au Québec, un nouvel aéroport
international. Le gouvernement du Canada, constatant que la réalisation
de son projet soulèverait des problèmes impliquant directement le
Québec, a cru nécessaire de convier le Québec à une
première réunion de discussion. Elle c'est tenue le 10 septembre
1968 etaété suivie, par la suite, de plusieurs autres.
Plusieurs ministères étant concernés, un
comité interministériel a été formé pour
étudier les diverses implications du projet fédéral.
Depuis, ce comité a examiné et examine en profondeur tous les
aspects du problème. A notre connaissance, le gouvernement du Canada n'a
pas encore pris de décision définitive quant au site, mais
l'honorable Hellyer nous a fait part, il y a quelques jours soit par
télégramme, le 12 décembre de cette année de
son intention de le faire très prochainement.
Quel que soit le site du nouvel aéroport international, il faut
prévoir que, dès qu'il sera connu, les terres comprises dans le
territoire choisi pourront faire l'objet de nombreuses transactions et surtout
de transformation, à moins qu'entre-temps on prenne les mesures qui
s'imposent.
Pour limiter au minimum la spéculation, le présent projet
de loi interdira la construction, la reconstruction et les annexes à des
bâtiments, sauf pour fins agricoles sur des terres en culture. Il
interdira également les subdivisions. Ce projet de loi constitue une
mesure transitoire et d'urgence.
C'est pourquoi il n'aura d'effet que jusqu'au 15 juin 1969. Entretemps,
nous mettrons la dernière main à une législation qui
tiendra compte de tous les problèmes en jeu. Le territoire requis pour
cet aéroport sera évidemment important et l'existence de
l'aéroport entraînera tout le problème d'un
aménagement des environs. Cet aménagement ne saurait se faire
à la va-comme-je-te-pousse ni dans la municipalité des
autorités. Si on veut s'assurer que le développement
économique que suscitera cet aéroport profite à l'ensemble
du Québec, si on veut que l'aménagement du territoire environnant
l'aéroport se fasse de façon rationnelle et harmonieuse, des
mesures législatives s'imposent.
Elles sont déjà en préparation. Elles seront
complétées dès que nous connaîtrons le site et elles
seront soumises à l'assemblée en temps utile. Pour l'instant,
comme le site n'est pas encore connu, il le sera, selon le
télégramme de M. Hellyer, comme je le disais il y a quelques
minutes, très bientôt, nous devons prendre une mesure d'urgence et
permettre au lieutenant-gouverneur en conseil de délimiter un
territoire, afin de minimiser les dégâts que pourrait
entraîner une spéculation intense et d'éviter un
aménagement anarchique. Dès que le gouvernement du Canada fera
connaître le site, le cabinet prendra ses responsabilités. Nous
nous trouvons en face d'un cas à peu près identique à
celui de Bécancour, quand il fut question d'y établir une
sidérurgie. La construction fut interdite sur tout le territoire de la
ville jusqu'à ce que le plan directeur soit complété.
Je répète qu'il s'agit d'une mesure d'urgence, que
l'intérêt public nous justifie de présenter à la
considération des parlementaires du Québec.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. LESAGE: II s'agit d'un projet de loi qui, quant à moi, ne
présente pas de grandes difficultés.
Ce sont passablement on les trouve dans le projet de loi à
l'étude les mêmes formules et sensiblement la même
rédaction que dans la loi 13-14, Elizabeth II, chapitre 109, concernant
la ville de Bécancour que vient de mentionner le ministre. C'est un
projet de loi qui avait été adopté également pour
éviter la spéculation, comme dans ce cas-ci.
Dans le cas de Bécancour, le territoire était
déterminé. Il était connu. Ici, il ne l'est pas. C'est ce
qui fait la différence dans la rédaction du projet de loi. A part
cela, c'est sensiblement la même chose. Nous sommes parfaitement d'accord
qu'il faille éviter la spéculation.
Pour ce qui est de l'emplacement, le ministre s'est bien gardé de
se prononcer. Il a dit que c'était le gouvernement fédéral
qui devait déterminer l'emplacement dans un assez court délai. Je
sais cependant que le gouvernement du Québec a son mot à dire
dans la détermination de l'endroit. Le gouvernement
fédéral étudie un certain nombre d'emplacements possibles
dans le Québec et il y a clairement des critères techniques qui
doivent être appliqués à chacun des endroits que l'on
envisage en vue d'établir cet aéroport pour avions
supersoniques.
Quant au gouvernement du Québec, je crois que sa
préoccupation devrait être la même que celle du chef de
l'Opposition. Ce serait de voir à ce que l'emplacement qui sera choisi
parmi ceux qui sont examinés et qui sont conformes aux exigences
techniques, soit celui qui puisse le mieux assurer le développement
économique, harmonieux du Québec, en tenant compte de tous les
facteurs y compris celui de la décentralisation, etc.
M. VINCENT: C'est bien couvert...
M. LESAGE: Bien, je pense que c'est exactement la position que doivent
prendre tous les députés de cette Chambre.
M. GRENIER: C'est précis.
M. LESAGE: Le gouvernement, dans ses discussions avec le
fédéral...
M. GRENIER: C'est engageant.
M. LESAGE: ... le gouvernement du Québec n'est pas celui qui a
à se préoccuper des critères techniques.
Si je comprends bien, c'est le ministère fédéral
des Transports qui s'en occupe. Ce qui doit préoccuper le gouvernement
du Québec, c'est que le site qui sera choisi parmi ceux qui sont
conformes aux exigences techniques, sera celui qui est le plus susceptible
à cause de sa location géographique dans le Québec,
d'assurer un développement harmonieux de notre économie en tenant
compte de tous les facteurs, y compris celui de la décentralisation. Je
vois que le ministre de l'Industrie et du Commerce est grandement tenté
de hocher affirmativement la tête parce qu'il est un peu dans la
même situation que celle dans laquelle je suis, et ce qu'il cherche,
comme moi, ce n'est pas tellement de protéger une région
donnée comme d'assurer l'essor économique du Québec.
Alors, il n'y a qu'une chose qui m'inquiète un peu dans le bill,
c'est de savoir ce qu'est la définition de la région de
Montréal. La région économique de Montréal est une
chose pour le ministère de l'Industrie et du Commerce, c'est autre chose
pour la cour d'Appel, autre chose pour les tribunaux, autre chose pour d'autres
ministères. Il faudrait savoir exactement ce que c'est que la
région de Montréal. Cela arrête où? A partir du coin
de Peel et Sainte-Catherine en allant vers l'est, en allant vers le sud, en
allant vers l'ouest ou en allant vers le nord?
M. GRENIER: Quelle question!
M. LESAGE: Non, ce ne sera pas long, mais il faudrait tout de même
savoir ce que c'est que la région de Montréal.
Je pense que c'est une précision que le bill n'apporte pas mais
qu'il devrait apporter.
M. BELLEMARE: M. le Président, j'ai entendu avec...
M. LESAGE: Voici le plaidoyer pro domo.
M. BELLEMARE: ... beaucoup de plaisir le chef de l'Opposition faire...
surtout j'ai constaté qu'il avait fait un patinage de fantaisie fort
remarquable. Il est habile, il sait retomber sur ses pattes. Il me fait
quasiment penser à son chat, à la queue du chat. Mais il a dit
que cela devait être quelque part dans la province et que, probablement,
la région de Montréal, c'était bien grand.
M. LESAGE: Sainte-Foy, c'est vaste aussi.
M. BELLEMARE: Moi, je trouve qu'il y a des régions qui sont plus
belles que d'autres, plus avantageuses que d'autres...
M. LESAGE: Ce sont vos affaires.
M. BELLEMARE: ... plus décentralisées que les autres. Il y
en a une en particulier que j'ai dans la mémoire, que je connais
plus...
M. LESAGE: Je pensais que c'était dans le coeur.
M. BELLEMARE: Dans mon coeur et dans ma pensée, M. le
Président.
M. LESAGE: Vous avez dit dans la mémoire; je pensais que
c'était devant le coeur.
M. BELLEMARE: Et je sais, M. le Président, que je ne suis pas
seul dans cette Chambre à dire qu'il y a au Québec une
région particulière qui est tout à fait
prédestinée. Je ne dis pas que c'est la mienne. Non. Je dis qu'il
y en a une, très belle, qui est tout à fait bien ordonnée,
avec de grandes routes qui y conduisent facilement, un chemin de fer qui
pourrait conduire directement en rapide, de ce côté-là,
à Montréal ou à Québec. Ça pourrait se faire
en dix ou quinze minutes...
M. MAILLOUX: De ce coté-là.
M. BELLEMARE: Cela pourrait rallier une immense partie de cette
région-là. M. le Président, en tout cas, je suis bien
content de voir qu'au moins dans une région en particulier on s'en
occupe particulièrement, que des démarches sont faites, que des
chambres de commerce, que des municipalités, que des ministres, que des
députés, que des anciens ministres sont favorables un peu plus
à un centre en particulier. Et je suis d'accord que c'est le
gouvernement fédéral qui décide. Nous n'aurions rien
à dire. Mais vu que c'est le gouvernement fédéral qui va
décider, M. le Président,
nous aimerions sûrement que cette région soit
considérée d'une manière particulière.
Il y en a de très belles en Gaspésie; mais c'est un peu
loin. Il y en a de très belles du côté de l'Outaouais;
c'est un peu loin. Il y en a aussi, M. le Président, dans les Cantons de
l'Est; c'est peut-être un peu loin. L'Abitibi c'est un peu loin de
Montréal.
Il en reste quelques-unes qui approchent assez celle que tout le monde,
je pense bien, a sur le bout des lèvres. Je sais que le
député de Drummond va faire un grand discours aujourd'hui. Je
suis convaincu que le député de Drummond va être
catégorique.
Lui, M. le Président, son chef ne l'a pas dit mais le
député de Drummond qui a un amour particulier pour une
région, lui aussi va dire, comme moi, pour quelle région il
est.
M. LAFRANCE : Il ne le dira pas-
M. BELLEMARE : II a de grands amis à Ottawa; il a même un
ministre chez eux, qui est près du premier ministre, qui lui a rendu de
grands services. Je connais l'influence du député de Drummond
auprès de son député fédéral qui est
ministre dans un autre gouvernement. Je sais, M. le Président, que
ça va être important pour tout le monde; on va jouer son meilleur
atout. Eh bien là, nous allons voir s'il est influent ou non!
M. LEVESQUE (Laurier): Je voudrais juste souligner une chose, c'est
qu'à mon humble avis le gouvernement du Québec, non seulement a
quelque chose à dire, mais sans compter les influences que vient
d'évoquer le ministre du Travail et qui peuvent jouer il doit
être conscient du fait que si cet investissement-là d'une
importance assez extraordinaire, car il paraît que ça peut aller
jusqu'au demi-milliard de dollars d'investissements directs, sans compter les
services qui s'ajoutent, etc...
M. BELLEMARE: La ville complète que l'on va construire.
M. LEVESQUE (Laurier): Bien, enfin, il ne faut peut-être pas
rêver complètement, mais il reste que ça implique un des
plus gros investissements d'infrastructure que le Québec ait eu depuis
des années. Ceci sera fait dans le Québec où le
gouvernement du Québec a beaucoup de choses à dire en ce qui
concerne forcément la disponibilité des terrains le bill
qu'on discute est là pour le prouver et aussi les
facilités routières et ferroviaires qui peuvent être
disponibles, de même que d'autres moyens de transport rapide.
Cela permet d'éclairer un peu le mot « région de
Montréal » sur lequel, comme d'autres, comme le chef de
l'Opposition, je me posais moi aussi, des questions; c'est flou un peu la
région de Montréal. Il est évident qu'une distance de 50
milles je donne ça comme exemple ou de 40 ou de 45, avec
les facilités routières modernes, sans compter les autres moyens
de transport rapide qui sont là et qui peuvent être
améliorés, nous amène à une définition un
peu spéciale de région dans ce cas-là; c'est une
région en fonction de l'accessibilité d'un grand aéroport
de Pavenir, c'est-à-dire d'un aéroport pour les avions
supersoniques.
Si la région se définit comme ça, en tenant compte
des facilités disponibles, il est sûr que des rayons de 40 ou de
50 milles, c'est loin d'être excessif. Cela étant dit, sans
vouloir viser directement Drummondville ou les environs, c'est un secret de
polichinelle que c'est de ce côté-là que s'exercent les
pressions, à la fois les plus logiques, les mieux organisées et,
à première vue, les plus rationnelles et les plus conformes aux
besoins. Sans tenir compte de ça, qui est un secret de polichinelle, il
y a une chose que l'on peut demander avec instance au gouvernement, c'est de
tenir compte du fait que comme la plupart des développements qui
peuvent être orientés chez nous c'est vers l'est de
Montréal que ça doit se diriger, autant qu'il est humainement
possible. Que ce soit l'est-nord, l'est-sud, peu importe. Forcément,
l'est-sud semble avoir actuellement le « poll », si on me permet
l'expression. Il faut absolument qu'on oriente au maximum et qu'on aille vers
l'est de Montréal. Autrement, parler de politique de
développement et d'investissements rationnels dans le Québec,
ça ne tient pas debout.
Maintenant, on a parlé des critères techniques. Je
voudrais juste faire une mise en garde et terminer là-dessus. S'il y a
des gens, dans un autre endroit, se servant, à toutes fins pratiques, de
l'argent des contribuables québécois comme des autres, qui
avaient des critères techniques à évoquer.
Je demandrais en grâce au gouvernement, d'aller plutôt vers
l'ouest ou plutôt dans une direction qui se rapprocherait de la
rivière Outaouais, etc. Je demanderais en grâce au gouvernement
d'avoir, le plus vite possible, ses propres experts. Ce n'est pas des
mystères les critères techniques, météorologique,
qualité des terrains, etc., y compris aussi les corridors
aériens. Qu'il ait le plus vite possible ses propres experts de
façon à éviter qu'on nous jette de la poudre aux yeux, ce
qui peut arriver. Je ne veux pas dire que c'est ce qui arrivera, mais j'ai
déjà vu, dans des négociations
fédérales-provinciales, à quel point
on peut se servir des critères techniques, faire dire aux
chiffres et à des faits compliqués, des choses qui ne sont pas
exactement la vérité absolue.
Si possible, le gouvernement québécois, qui a plus que son
mot à dire là-dedans, en fonction de ce qui est prévu dans
ce bill, ne pourrait-il pas avoir le plus vite possible un assemblage minimal
d'experts qui puisse lui permettre d'évaluer les critères
techniques qu'on prétendrait faire jouer en fonction de tel site quand
viendra le moment d'appliquer le bill en question?
M. PINARD: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Drummond.
M. PINARD: ... vous me permettrez bien de dire aussi quelques mots sur
un bill aussi important relativement au développement économique
du Québec. J'ai beaucoup apprécié les remarques faites
tantôt par le chef de l'Opposition à la suite des remarques
d'introduction faites par le ministre des Affaires municipales qui a la
responsabilité de présenter le bill. Il est vrai que la
décision, pour la plus large part, devrait être prise par le
gouvernement fédéral parce que c'est de son ressort. Mais je
pense que le Québec a tout intérêt à faire valoir
son point de vue vigoureusement et en toute célérité, de
toute urgence aux autorités fédérales quant à
l'emplacement éventuel de ce nouvel aéroport internationnal si
tant il est vrai que le Québec a véritablement une politique de
déconcentration économique, non seulement pour la prêcher
mais pour la mettre en pratique dans les délais les plus brefs, surtout
à l'occasion de l'annonce d'un investissement aussi considérable
que celui que le gouvernement fédéral s'apprête à
faire dans le Québec. Il ne fait aucun doute à mon esprit que ce
nouvel aéroport international sera situé quelque part au
Québec. Où sera-t-il situé exactement?
Je l'ignore, tout comme le ministre du Travail l'ignore, tout comme le
ministre des Affaires municipales et le ministre de l'Industrie et du Commerce
l'ignorent. Les tractations ne sont pas terminées, les études
techniques ne sont pas complètement terminées. Je sais que de
nouvelles études seront faites et seront portées en annexe aux
documents qui ont déjà été soumis aux
autorités fédérales et en partie aux autorités
provinciales, mais nous n'insisterons jamais trop sur la
nécessité et l'urgence pour le gouvernement du Québec de
faire connaître vigou- reusement, et avec tous les détails que
cela pourra impliquer, sa politique de déconcentration
économique.
Je sais qu'un comité technique provincial est à l'oeuvre.
Ce sont d'éminents techniciens pour ne pas employer le mot technocrates,
qui travaillent sur cette étude qui sera complétée
bientôt par les travaux qui viendront d'experts plus versés dans
le domaine de l'aviation, dans le domaine de l'électronique et des
transports et communications. Mais nous n'avons pas reçu cette assurance
aujourd'hui, ni du ministre des Affaires municipales, ni du ministre du Travail
à l'effet que les autorités du Québec s'apprêtent
à aller rencontrer les autorités ministérielles à
Ottawa pour faire connaître la nécessité pour le
Québec d'avoir un investissement considérable sur son territoire,
investissement qui va aller directement dans la ligne de l'orientation
économique du ministère de l'Industrie et du Commerce.
C'est pourquoi il est tellement important que le gouvernement
fédéral sache très rapidement quels sont les
critères de ce mouvement d'expansion économique sur le territoire
du Québec. Il faut absolument que leQuébec fasse comprendre aux
autorités d'Ottawa que la province est dans une situation qui est sans
rapport avec la situation économique qui prévaut dans d'autres
provinces, que le Québec veut, à l'occasion d'un si gros
investissement, partir un mouvement d'expansion économique qui ne cadre
pas avec les mouvements naturels des investissements de capitaux. Cette
question de principe étant discutée, étant admise par les
deux niveaux d'autorité, nous serons sûrs que l'Investissement que
nous espérons se dirige à la bonne place.
Je ne plaide pas plus pour mon territoire que pour le territoire des
autres, mais je crois que c'est la responsabilité du gouvernement du
Québec, par le truchement du ministère de l'Industrie et du
Commerce, par le truchement du ministère des Affaires municipales, de
bien faire connaître la position du Québec en la
matière.
Je sais que ces travaux sont actuellement en voie de préparation,
mais je pense que le fait est beaucoup plus urgent que certaines personnes ne
se l'Imaginent dans cette Chambre, car il y a à Ottawa des techniciens
qui sont à l'étude de ce projet depuis déjà un an
et demi et qui sont à la veille de faire des recommandations
précises au conseil des ministres. C'est pourquoi, à Ottawa, des
ministres, au nombre de cinq ou six, ont décidé de former une
espèce de comité d'étude pour précisément
recevoir le mémoire du Québec. J'espère, encore une fois,
qu'il sera produit dans le plus bref délai. C'est la situation que je
connais personnellement à
l'heure actuelle, et je ne saurais trop encourager les ministres du
gouvernement du Québec qui sont plus particulièrement
responsables de cette question à travailler vite et à travailler
avec vigueur. Je ne voudrais pas qu'on politise la question. Je ne voudrais pas
faire des reproches au ministre du Travail, mais cette annonce
prématurée d'un site plutôt que d'un autre n'a pas
été Je regrette de le dire une bonne manoeuvre,
parce que ç'a alerté d'autres autorités, à d'autres
niveaux, et que celles-ci viennent faire biaiser toutes les études qui
sont en préparation à l'heure actuelle. Cela va peut-être
aussi retarder certaines recommandations qui étalent prêtes pour
décision au conseil des ministres, à Ottawa.
M. BELLEMARE: Je pense que le député ferait bien de nous
raconter l'entrevue qu'il a eue dimanche avec son ministre, son
député, M. Jean-Luc Pépin...
UNE VOIX: Et M. Marchand.
M. BELLEMARE: Il ferait mieux de nous raconter ça.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je dois signaler aux membres de la Chambre
qu'il est maintenant six heures et trois minutes et qu'il y aurait lieu de
suspendre puisque d'autres députés ont demandé de
s'exprimer sur ce point.
M. BELLEMARE: A huit heures.
M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à huit
heures.
Reprise de la séance à 20 heures
M. LEBEL (président): A l'ordre, messieurs! L'honorable
député de Drummond.
M. PINARD: Je disais, avant la suspension de la séance, qu'il
était absolument indispensable que Québec fasse connaître
immédiatement son point de vue, de façon qu'il soit bien entendu
et clairement exprimé que le gouvernement du Québec veut que ce
nouvel aéroport soit implanté dans la région de
Montréal. Mais, je remarque que le titre de la loi prête à
confusion et qu'il pourrait, peut-être, induire les autorités en
erreur sur la véritable portée des recommandations que le
gouvernement du Québec sera appelé à faire au gouvernement
fédéral. Je dis que le titre du bill est fautif, en ce sens... M.
le Président, je voulais épargner du temps, si vous me le
permettez, en accord avec le leader de la Chambre, qui m'a demandé
de...
M. LE PRESIDENT: Très brièvement, je voudrais signaler
à l'honorable député de Drummond que le titre du bill doit
être la dernière procédure à corriger au
comité plénier. Si vraiment le titre ne correspondait pas au
projet de loi qui est devant la Chambre actuellement, c'est en comité
plénier qu'on pourrait formuler un amendement.
M. PINARD: Je ne formule pas mon amendement de façon
précise, mais je dis que, s'il n'y a pas un amendement au titre du bill,
ça pourrait conduire l'autorité fédérale, par
exemple, à conclure que le Québec entend recommander
l'implantation d'un nouvel aéroport dans un territoire qui est
très limité, par le titre du bill lui-même. En
réalité, le gouvernement du Québec, je le crois,
s'apprête à recommander un territoire beaucoup plus
considérable que ne le laisse apparaître le titre du bill
lui-même.
Je m'explique. Dans les travaux effectués par le service
d'urbanisme de la ville de Montréal et intitulés: «
Montréal, Horizons 2000 », on délimita le territoire de la
région de Montréal en disant: « Montréal,
aujourd'hui, c'est non seulement la ville, mais c'est également la
région qui l'entoure. Ses véritables limites sont marquées
par un rayon qui va depuis le centre jusqu'à 35 milles à la
ronde. » Vous voyez, tout de suite, que c'est trop limitatif. Cela
exclurait automatiquement certaines localités qui, malheureusement, sont
situées en dehors de ce rayon de 35 milles.
C'est pourquoi je dis qu'il faudrait apporter un amendement au titre du
bill, tout à l'heure. Ma suggestion, c'est que le bill devrait avoir
pour titre non pas Loi favorisant l'aménagement des environs du
nouvel aéroport international de la région de Montréal,
mais celui de: Loi favorisant l'aménagement des environs d'un
aéroport international au Québec ou Loi favorisant
l'aménagement du nouvel aéroport international au Québec.
A ce moment-là, il n'y a pas de discrimination envers quelque
localité que ce soit, et ça permet au gouvernement du
Québec de recommander, dans son mémoire aux autorités
fédérales, l'endroit, ou la région du moins, où le
gouvernement du Québec voudrait voir implanter ce nouvel
aéroport.
Je voudrais faire remarquer aux ministres du gouvernement actuellement
en Chambre ce que M. Hellyer a dit lui-même, dans sa réponse
à une question à la Chambre des communes, réponse qui a
été rapportée dans le journal des Débats, le 9
décembre 1968 et je cite: « Les pourparlers avec la province de
Québec ne sont pas encore terminés. Nous espérons pouvoir
annoncer une décision au sujet de l'emplacement dès le
début de la nouvelle année. Une vaste région comprise
entre les Laurentides au nord, la ligne de démarcation des provinces de
Québec et d'Ontario à l'ouest, la frontière
américaine au sud et une ligne tirée à environ 70 milles
à l'est de Montréal, a été étudiée.
On y a relevé une vingtaine d'emplacements possibles. »
Et un peu plus loin, le ministre Hellyer explique quels sont les
barèmes de la détermination du choix à venir. Dans le
choix de l'emplacement d'un nouvel aéroport, il faut tenir compte de
critères nombreux, complexes et étroitement liés entre
eux.
Voici certains des principaux critères:
A- L'utilisation de l'espace aérien.
B- Le bruit pour des régions urbaines.
C- L'accessibilité.
D- La réparation des usagers.
E- Le rapport entre cet aéroport et celui de Dorval.
F- Le coût et la disponibilité du terrain.
G- La topographie.
H- L'état du sol.
I - La météorologie.
Alors, il faut aussi que le gouvernement du Québec fasse
connaître le plus rapidement possible ses recommandations, non pas
seulement dans le cadre des discussions actuellement en cours, entre les
membres du comité technique du Québec et les membres du
comité technique qui relèvent de l'autorité du
gouvernement fédéral, mais il faut aussi que les recommandations
soient faites au niveau ministériel. Je m'explique. Il faut que le
Québec, tôt ou tard, en recommandant les normes de
l'établisse- ment d'une politique de déconcentration
économique, fasse connaître aussi au gouvernement d'Ottawa les
éléments de son plan directeur d'aménagement du territoire
qui sera en conséquence immédiate de l'implantation de ce nouvel
aéroport dans une des régions déterminées par le
gouvernement fédéral en accord avec le gouvernement du
Québec.
Il faut, de toute évidence et de toute nécessité,
une coordination beaucoup plus étroite entre le gouvernement d'Ottawa et
le gouvernement du Québec pour l'établissement des politiques
d'aménagement du territoire, pour les politiques économiques
à court et à long terme. Evidemment, cette coordination devra se
faire aux deux niveaux de gouvernement, Ottawa et Québec, mais aussi
avec certains gouvernements à l'échelle municipale.
J'aurai d'autres remarques à faire tantôt en comité
quant aux dispositions de l'article 1 qui limite la superficie maximale
à 60 milles, je dirai pourquoi il faudra augmenter la superficie qui
fera l'objet de l'homologation ou du gel du territoire pour éviter la
spéculation.
Je voudrais aussi insister sur la nécessité, pour le
gouvernement du Québec, d'inclure dans le mémoire qui sera
présenté au gouvernement d'Ottawa les éléments du
plan directeur qui assurera l'aménagement rationel du territoire. On ne
peut plus permettre, au train où vont les choses, de conserver au
développement actuel son caractère spontané; il faut que
ce soit pensé à l'avance, mais il faut également que ce
soit pensé pour longtemps.
M. le Président, en terminant, je voudrais dire que je suis au
courant des tractations actuellement en cours entre les membres du
comité technique du Québec et les membres du comité
technique qui travaillent pour le ministère des Transports à
Ottawa. Il faut absolument que l'autorité politique du Québec
s'en mêle et qu'elle se mette immédiatement en contact avec le
cabinet fédéral, ou du moins avec certains membres du cabinet
fédéral de façon que les ministres influents du
Québec à Ottawa puissent connaître dans le détail
les désirs du Québec sur le plan de l'aménagement du
territoire, sur le plan de son système de déconcentration
économique et aussi les moyens par lesquels le Québec veut
arriver à appliquer ce nouveau système de déconcentration
économique, de façon que tous nos représentants à
Ottawa soient bien sensibilisés à cette importante question et
qu'au niveau des deux gouvernements des mesures urgentes et nécessaires
soient prises pour que le Québec ne manque pas son coup.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation.
M. VINCENT: M. le Président, juste quelques instants pour
commenter cette question ou ce bill que nous sommes à discuter en
deuxième lecture. L'honorable chef de l'Opposition a couvert le terrain.
Quand je dis cela, je veux dire qu'il a couvert tout le terrain dans la
province de Québec. Je crois qu'il a, quand même, donné des
indications dont nous devrons tenir compte au cours des prochaines discussions,
tant au niveau provincial que fédéral.
L'honorable député de Drummond a mentionné, tout
à l'heure, qu'il ne fallait pas politiser la question. Je suis d'accord
sur ce point. D'ailleurs, depuis que l'on parle d'un endroit dans la province
de Québec, l'honorable député de Drummond peut convenir
très facilement qu'il n'a jamais été question de politiser
ces études ou encore ces discussions, tant avec les autorités
fédérales qu'avec les techniciens ou les ministres du
gouvernement provincial.
D'ailleurs, M. le Président, à plusieurs occasions, nous
avons eu des entretiens, l'honorable député de Drummond et
moi-même. Même, nous avons, un après-midi, assisté
à une réunion, à mon bureau du ministère, en
compagnie des techniciens chargés de faire ces études et de
travailler avec les autorités fédérales. Il a pu
constater, à ce moment, que nos techniciens avaient déjà
beaucoup de pain sur la planche, que plusieurs rencontres avaient eu lieu avec
les autorités fédérales et qu'ils avaient
présenté, au sujet de la décentralisation ou de
l'organisation de nouvelles zones d'attraction dans la province, des arguments
valables dont le gouvernement fédéral devra tenir compte, en
temps et lieu.
L'honorable député de Drummond a mentionné que le
gouvernement du Québec doit faire connaître, le plus rapidement
possible, les vues du Québec aux autorités
fédérales. Encore là, il a pu constater, au cours de ces
rencontres et même à cette réunion, que le gouvernement
provincial par l'entremise du ministre des Affaires municipales, que je
voudrais féliciter, ce soir, d'avoir consacré son temps à
cette question a fait connaître, jusqu'à ce moment, ses
vues au gouvernement fédéral. Nous souhaitons qu'au cours des
prochains jours, des prochaines semaines, les autorités
fédérales puissent prendre une décision en respectant les
vues du gouvernement et de la population du Québec et en respectant
également nos vues en ce qui concerne la décentralisation.
Je voudrais ajouter ceci, qui est probablement un élément
nouveau qui entre dans la dis- cussion non pas au cours des jours derniers avec
les autorités fédérales, mais aujourd'hui, ici, à
l'Assemblée législative. Lorsqu'il s'agira de choisir le lieu du
futur aéroport international de la province de Québec, il faudra
également tenir compte des sols. Je crois que ce facteur est d'une
importance capitale non pas seulement pour l'avenir de l'aéroport
international, mais pour l'avenir de l'agriculture dans nos régions
dites les plus favorisées.
Nous avons, autour de la ville de Montréal, des régions
agricoles ou des parcelles de terrain qui sont plus que propices à
l'agriculture. Il ne faudrait pas choisir un endroit où nous
enlèverions à la culture nos meilleures terres arables sur une
superficie de 60 ou 65 milles carrés, tenant compte de l'endroit et
également des autres constructions qui pourront venir s'ajouter
lorsqu'il sera choisi. C'est donc dire que dans ce choix que le gouvernement
fédéral aura à faire sur l'endroit du futur
aéroport international, nous devrons tenir compte de cette question
très importante. De plus en plus, on constate que dans les pays d'Europe
on veut faire autour des villes des zones agricoles où on pourrait
conserver les éléments les plus dynamiques de la classe agricole
à proximité des marchés.
Je crois bien que les honorables députés de cette Chambre,
comme les représentants de la classe agricole, sont parfaitement au
courant des endroits autour de la région de Montréal où
nous avons nos meilleures terres productives qui fournissent des produits pour
le marché de Montréal. Si nous allions amputer ces régions
de 60 milles carrés de très bonnes terres agricoles, nous
reculerions ainsi l'agriculture de la ville de Montréal ou de nos belles
régions non pas pour rendre service, mais plutôt pour
désorganiser un secteur de l'économie qui mérite
déjà une attention particulière.
Comme les autres membres de cette Chambre l'ont souligné, tant
à l'intérieur qu'à l'extérieur de la Chambre, il
s'agira d'un choix qui devra se faire d'ici quelques jours ou quelques semaines
par les autorités fédérales pour permettre au
lieutenant-gouverneur en conseil, dès l'annonce du choix de l'endroit,
d'homologuer les terrains en vue d'éviter les spéculations. Nous
avons étudié les autres législations qui ont
été adoptées pour des cas semblables, c'est-à-dire
pas pour un aéroport international, mais pour des cas où il
fallait que le gouvernement provincial agisse. Je crois que si
l'Assemblée législative donne cette permission, le ministre des
Affaires municipales pourra en temps et lieu, et le plus tôt possible,
souhaitons-nous, soumettre au conseil des ministres cette question
d'homologation d'une partie de terrains.
Je n'ai pas besoin de mentionner qu'en ce qui me concerne, tout comme
l'honorable député de Drummond, nous avons certains
intérêts qu'il n'est pas bon aujourd'hui de discuter publiquement,
mais nous les comprenons, du moins entre nous.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée?
M. LUSSIER: M. le Président, si vous me le permettez, simplement
un mot, tout d'abord, pour remercier les honorables députés de la
façon dont ils ont pris part à ce débat et,
deuxièmement, pour rassurer l'honorable chef de l'Opposition et les
honorables députés qui ont pris la parole. Un mot pour les
rassurer dis-je, pour, une fois de plus, dire que, dans toute cette affaire de
l'aéroport international, nous poursuivons trois buts. C'est tout
d'abord l'épanouissement le plus complet de notre économie
québécoise, quant au site de cet aéroport. Nous voulons,
deuxièmement, éviter, dans la mesure du possible, le plus
possible évidemment, les dégâts d'une spéculation
intense, et, troisièmement, faire en sorte que l'aménagement de
ces territoires se fasse d'une façon très rationnelle et
harmonieuse, c'est-à-dire selon un plan d'urbanisme. Nous voulons aussi
dire que, jusqu'à maintenant, depuis le 10 septembre, où les gens
du gouvernement fédéral nous ont pressentis, le principal point
que nous avons étudié et développé et que nous
avons fait valoir, c'est celui du développement économique, dans
sa plus grande dimension, au point de vue de la population du
Québec.
Quant aux deux autres points, celui de la spéculation et celui
aussi de l'aménagement du territoire des environs de ce futur
aéroport international, c'est ce qui fait l'objet du bill, et tous les
députés sont d'accord quant au principe de ce bill. Mais je veux
bien rassurer tous les gens de cette Chambre et leur dire que nous sentons
évidemment que nous devons insister énormément sur cet
argument du grand développement économique qu'apportera aux
Québécois cet emplacement, s'il est bien situé pour
nous.
C'est pourquoi le comité d'orientation était formé
de cinq ministères, soit celui de l'Industrie et du Commerce, celui de
la Voirie, celui des Affaires intergouvernementales, celui des Affaires
municipales et l'Office de développement. Pour ce qui est de la
consultation d'experts, disons que nous avons consulté des experts en
aéronautique autres que ceux que les gens du gouvernement du Canada ont
consultés ou ont pu consulter, et que rien n'est négligé
pour que notre dossier soit le plus complet possible et que nous discutions
d'égal à égal avec le gouvernement
fédéral.
Pour ce qui est du nom ou du membre de phrase « région de
Montréal », je crois bien que nous pourrons en discuter beaucoup
plus librement en comité plénier. A ce temps-là, nous
pourrons faire valoir de part et d'autres certains arguments.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée? Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
Comité plénier
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose
que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en
comité plénier pour l'étude du bill 296. Cette motion
sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. FRECHETTE (président du comité plénier): A
l'ordrel Article 1.
M. LUSSIER: Si on enlevait les mots « région de
Montréal », de quelle façon pourriez-vous rédiger le
texte?
M. PINARD: Je n'ai pas d'objection. Comme l'a fait remarquer le chef de
l'Opposition, la dernière correction devra être apportée,
alors que l'étude en comité plénier sera en voie de se
terminer, c'est le titre du bill, mais on peut l'aborder tout de suite. Je
voudrais corriger le premier « attendu », qui devrait se lire comme
ceci: « Attendu que la construction d'un nouvel aéroport
international doit commencer sous peu au Québec. »
M. DOZOIS: Dans la province de Québec. M. LESAGE: Au
Québec.
M. PINARD: Quant aux autres « attendus », je n'ai pas de
remarque à faire. Je pense que tout est dans l'ordre.
M. DOZOIS: Et le titre alors, comment le changerait-on?
M. LESAGE: II y a deux choses qui ne vont pas dans le titre: Loi
favorisant l'aménagement non seulement des environs, mais c'est
l'aménagement du terrain et des environs.
M. DOZOIS: Non.
M. LESAGE: Si l'on me permet de donner des explications, ça va me
prendre deux secondes. C'est une loi favorisant l'aménagement du
terrain. Il n'est pas question de loi pour aménager le terrain. Il est
certain que le fait, pour le Parlement du Québec, de prendre les
dispositions nécessaires pour éviter la spéculation
favorise l'aménagement du terrain et des environs. C'est global. Il
n'est pas question de laisser entendre que le gouvernement du Québec est
chargé par le Parlement du Québec d'aménager le terrain,
mais de favoriser l'aménagement du terrain. Or, il est certain qu'en
évitant la spéculation, on favorise l'aménagement du
terrain et des environs. Quand on prend les dispositions nécessaires
pour éviter la spéculation, c'est ça qui est le principe,
l'objet du bill, on favorise non seulement l'aménagement des environs,
mais l'aménagement du terrain lui-même. Cela ne veut pas dire
ici, je voudrais bien enlever tout doute au ministre des Finances
ça ne veut pas dire que le Parlement engage le gouvernement à
faire des dépenses, pas du tout. C'est de favoriser, purement et
simplement.
M. DOZOIS: Quand on nous a présenté ce bill au conseil des
ministres, on nous avait dit et je le lis pour la première fois
dans le texte définitif on nous avait dit que l'objet de ce bill
était de permettre, au point de vue de l'urbanisme, qu'il se fasse un
aménagement autour de la région.
M. LESAGE: II y a beaucoup plus que ça.
M. DOZOIS: Je viens de constater que la rédaction qu'on en a
faite peut inclure le terrain même de l'aéroport. Ce qu'on nous
avait expliqué avant la rédaction, c'est que le gouvernement
fédéral prendrait soin, lui, d'acheter et d'aménager le
terrain servant à l'aéroport même et que notre action
à nous se ferait à l'extérieur de cet aéroport dans
un rayon de 60 milles.
M. LESAGE: Evidemment, la loi favorise l'achat du terrain
nécessaire par le gouvernement fédéral en évitant
la spéculation. C'est le cas de Bécancour.
M. DOZOIS: Je pense bien qu'on a aussi des pouvoirs d'expropriation.
M. LESAGE: Oui, je le pense.
M- PINARD: A titre de suggestion, est-ce qu'on pourrait dire Loi
favorisant la construction et l'aménagement?
M. LUSSIER: Non, ce n'est pas nous qui allons faire la construction.
M. PINARD: II faudrait que la construction se rattache aux mots «
aéroport international » et que l'aménagement se rattache
aux mots « des environs du nouvel aéroport international
».
M. LESAGE: C'est l'aménagement de l'emplacement et des
environs.
M. LUSSIER: Tenez, ceci...
M. DOZOIS: Pourquoi ne dirait-on pas tout simplement Loi concernant le
nouvel aéroport international du Québec ou au Québec.
M. LUSSIER: On pourrait dire aussi Loi favorisant l'aménagement
du terrain aux environs. C'est plus long cependant.
M. LESAGE : Cela autorise. M. LUSSIER: Pardon?
M. LESAGE: Ce n'est pas autorisant. Le ministre des Finances aurait
raison de se plaindre si c'était une loi autorisant... parce que le
Parlement ne pourrait pas autoriser...
M. LUSSIER: Je m'excuse...
M. LESAGE: ... gouvernement du Québec
M. LUSSIER: J'ai bien dit favorisant ou encore concernant. Disons
concernant l'aménagement du terrain...
M. LESAGE: Je ne suis pas certain que le ministre des Affaires
culturelles serait heureux.
M. LUSSIER: Pardon?
M. LESAGE : Je ne suis pas certain que le ministre des Affaires
culturelles serait très heureux.
M. BOURASSA: Concernant, « concerning».
M. DOZOIS: Que suggérez-vous pour dire la même chose?
M. VINCENT: ... du terrain et des environs du nouvel aéroport
international.
M. LESAGE: C'est une loi favorisant l'aménagement du terrain, de
l'emplacement.
M. VINCENT: ... aux environs du terrain.
M. LESAGE: ... du site et des environs d'un nouvel aéroport
international au Québec.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. VINCENT: Loi favorisant l'aménagement du site et des environs
d'un nouvel aéroport international.
M. LE PRESIDENT: Point.
M. PINARD: J'aurais une suggestion, Loi favorisant l'emplacement...
M. VINCENT: Non, le site de l'aéroport...
M. PINARD: ... qui se rattache à la construction de
l'aéroport lui-même et l'aménagement des environs du nouvel
aéroport international au Québec.
M. LUSSIER: Je pense bien que nous garderions le mot aménagement,
Loifavorisant l'aménagement du site comme le chef de l'Opposition
le suggérait et des environs du nouvel aéroport
international.
M. LESAGE: D'un nouvel... M. LUSSIER: D'un nouvel.
M. LESAGE: Il y en a déjà un. D'un nouvel aéroport
international au Québec.
M. DOZOIS: Est-ce qu'on me permettrait de dire juste un mot? J'aurais
dû le faire en deuxième lecture, mais j'ai vu le ministre des
Affaires municipales donner saréplique. Je veux tout simplement dire que
comme député d'une circonscription de Montréal,
personnellement ou au nom de mes électeurs, je ne favorise aucun endroit
en particulier. Ce que j'espère, c'est que ceux qui prendront cette
responsabilité situeront ce nouvel aéroport le plus près
possible de la ville de Montréal en tenant compte de tous les facteurs.
J'espère qu'on le situera le plus prêt possible de la ville de
Montréal parce qu'il est évident que la très grande
majorité des gens qui arriveront et qui partiront de cet aéroport
auront la ville de Montréal comme destination. Il y a là une
concentration...
M. LESAGE: Le ministre des Finances devrait peut-être avoir un
petit caucus particulier avec le ministre du Travail.
M. DOZOIS: Je ne favorise aucun endroit en particulier, je le
répète. Comme Montréalais, je tiens à ce que cela
soit le moins loin possible parce que lorsqu'on arrive à
l'étranger dans n'importe quelle ville, ce n'est pas drôle,
après avoir fait plusieurs heures d'avion, d'être obligé de
faire une heure, deux heures ou trois heures en véhicule pour se rendre
à destination. C'est tout ce que j'espère.
M. PINARD: Est-ce que le ministre est en faveur de l'emplacement dans le
sud-est de la région de Montréal?
M. DOZOIS: Aucune région en particulier mais j'espère,
parce qu'on en a parlé que tout le monde s'objectera à ce que cet
aéroport soit situé en Ontario. Il en a été
question. J'espère qu'il y aura une levée de boucliers pour
empêcher une telle infamie.
M. LESAGE: La loi que nous sommes en train d'adopter prévoit le
cas de la construction au Québec.
M. BOURASSA: Eh bien! il y en a un également à
Toronto.
M. BOUSQUET: Je voudrais tout simplement, dans la même veine et en
mon nom personnel, suggérer que l'aéroport soit situé
entre Saint-Hyacinthe et Drummondville. Je pense qu'il y aurait là
peut-être un compromis intéressant pour l'ensemble de la province.
D'un côté, cet aéroport serait assez près du grand
réservoir de population qui se trouve à Montréal.
D'un autre côté, ce site tiendrait compte de la politique
de développement économique de la province et de la
nécessité de développer le centre de la province.
M. LE PRESIDENT: Un instant, je voudrais m'assurer que j'ai bien
noté l'amendement au titre. Est-ce bien Loi favorisant
l'aménagement du site et des environs d'un nouvel aéroport
international au Québec?
M. LUSSIER: Oui, c'est bien ça.
M. TREMBLAY (Bourassa): M. le Président, je me joins au ministre
des Finances pour dire que l'aéroport devrait être près de
Montréal. Je ne veux pas nommer de site en particulier, comme le
ministre l'a fait tout à l'heure, mais je me joins à lui pour
dire que, si l'aéroport est loin de Montréal, il ne donnera pas
le service qu'il pourrait donner, puisqu'il faudra faire une heure ou deux
d'automobile pour se rendre à Montréal.
Je me joins au ministre des Finances pour
une fois que nous nous entendons très bien là-dessus
pour demander que ce soit près de Montréal. Pour le titre,
je laisse le soin à d'autres de le choisir, mais là-dessus nous
sommes d'accord.
M. VINCENT: II faudrait, quand même, tenir compte de ce que sera
Montréal dans vingt-cinq ans.
M. TREMBLAY (Bourassa): Il faudrait comprendre aussi que Montréal
ne pourra pas dépasser les cours d'eau qui l'entourent.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre [Alors, le premier « Attendu »
est adopté avec son amendement. Le deuxième « Attendu
»?
M. PINARD: Je voudrais également apporter une correction à
« l'Attendu », au deuxième paragraphe.
M. DOZOIS: II faut mettre un point-virgule après « sous peu
», au premier « Attendu ». C'est ça? Non, on ajoute
« au Québec. »
M. LE PRESIDENT: C'est ça. On biffe « dans la région
du Québec ».
Alors, le deuxième « Attendu », adopté tel
quel.
Troisième « Attendu », adopté aussi.
Article 1.
M. BOURASSA: M. le Président, Je voudrais poser une question au
ministre des Affaires municipales. Pourrait-il nous dire le nombre d'emplois
qui seront créés en raison de l'établissement d'un nouvel
aéroport? Des études ont dû être faites sur ce
point-là.
M. LUSSIER: C'est une entreprise fédérale. Des
données, tout le monde en a, mais, à ce stade-ci des discussions,
je pense bien que donner un chiffre, même hypothétique, n'est pas
de ma compétence. Je pense bien que ce ne serait pas exact.
M. BOURASSA: Dans les discussions que vous avez eues avec les
autorités fédérales, a-t-on mentionné un chiffre
quant au nombre d'emplois qui seraient créés? Cela n'engage pas
le ministre; c'est simplement à titre d'information, pour qu'on puisse
avoir une idée des répercussions économiques.
M. LUSSIER: J'ai des chiffres qui sont très hypothétiques.
Comme je vous le disais, c'est de la compétence du
fédéral. Lorsque ce sera complètement
développé, il semble que ça pourrait aller, pour les gens
qui travailleraient à l'aéroport lui-même...
M. BOURASSA: Directement?
M. LUSSIER: Directement jusqu'à près de 30,000. Ce sont
les chiffres qu'on a avancés. Je vous les donne, évidemment, sous
toute réserve.
M. BOURASSA: Merci.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. PINARD: M. le Président, l'article 1 limite la superficie
maximale du territoire à être homologué à 60 milles
carrés. Le ministre pourrait-il me dire si cela a été la
première exigence posée par les autorités
fédérales au début des pourparlers avec les
représentants du Québec et si cette superficie de 60 milles
carrés reste encore la même exigence, alors que les pourparlers
ont beaucoup avancé et que l'étude des divers problèmes
techniques a été faite plus en profondeur? Le ministre ne
croit-il pas qu'il faudrait augmenter cette superficie, de façon
à permettre une planification plus rationnelle et plus harmonieuse du
territoire qui entourera le site du nouvel aéroport international?
Si je me réfère à la brochure publiée par le
ministère des Transports du gouvernement du Canada, à la page 22,
il est question d'une superficie de terrain de 7,500 acres pour la construction
de l'aéroport lui-même et il faudra ajouter, d'ici à 1985,
2,500 acres supplémentaires pour les travaux futurs d'expansion.
On m'a dit je ne voudrais pas révéler ma source
d'information, parce que je crois qu'elle peut être la même que
celle du ministre des Affaires municipales on m'a dit que depuis...
M. VINCENT: ... qu'on s'en tienne à la superficie qui pourrait
être déterminée par le lieutenant-gouverneur en conseil,
sans qu'il y ait de chiffres.
M. PINARD: Oui.
M. VINCENT: Je pense que ça...
M. PINARD: Oui, l'arrêté ministériel qui viendra au
sens de la loi pourrait...
M. VINCENT: C'est ça. Il y sera déterminé si c'est
62 milles carrés, 70 milles.
M. DOZOIS: Si on pense que 30 milles, c'est suffisant.
M. PINARD: Mettez donc 30 milles carrés ou plus.
M. VINCENT: Pourquoi mettre un chiffre dans la loi?
M. PINARD: ... c'était un minimum.
M. VINCENT: C'est parce que, dans la loi, ici on indiquait une
superficie maximale de 60 milles carrés. Enlevons dans la loi...
M. DOZOIS: Est prohibé « sur un territoire d'une superficie
qui pourra être déterminée ».
M. VINCENT: Par le lieutenant-gouverneur en conseil.
M. PINARD: C'est parce que, M. le Président, le ministre admettra
que f ai raison.
M. DOZOIS: Moi, je suis satisfait de ça.
M. PINARD: C'est vrai que la superficie était
délimitée à 60 milles. On nous a dit que ça pouvait
être un peu plus. Alors 60 milles au minimum, moi, je dirais 60 milles ou
plus, de façon que l'arrêté ministériel vienne
couvrir la superficie exacte qui sera requise au moment où la
décision sera prise.
M. LACROIX: De toute façon...
M. LUSSIER: C'est une nouvelle ville.
M. BELLEMARE: C'est bien simple.
M. LUSSIER: C'est une superficie minimum.
M. LACROIX: C'est un deuxième Bécan-cour que vous allez
faire.
M. LUSSIER: Cela dépend de l'ampleur du projet et des
premières données. Je rappelle ceci, c'est qu'aux environs de
cette ville, aux environs de cet aéroport international se créera
une nouvelle ville. D'après les premières données
techniques les plus valables, et d'après aussi les premières
implantations d'un genre de ville semblable, pour un premier jet
d'aménagement de plan directeur et de zonage, nous croyons que 60 milles
carrés, c'est une superficie suffisante.
M. DOZOIS: Adopté.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LACROIX: J'espère que ce ne sera pas un deuxième
Bécancour pour les Cantons-de-l'Est.
UNE VOIX: J'espère que non.
M. LE PRESIDENT: Article 1, adopté. A l'ordre! Article 2,
adopté. Article 3, adopté. Article 4, adopté. Article 5,
adopté.
M. PINARD: Le ministre prévoit-il bientôt une rencontre au
niveau ministériel avec le ministre des Transports d'Ottawa?
M. LUSSIER: Je prévois une rencontre très bientôt au
niveau ministériel.
M. PINARD: A ce moment-là, est-ce que la remise officielle du
mémoire du Québec sera faite au ministre des Transports à
Ottawa?
M. LUSSIER: II y a des documents qui ont déjà
été échangés au niveau technique, il y en aura
d'autres, j'en ai la certitude, qui seront échangés à
d'autres niveaux.
M. PINARD: Adopté.
M. FRECHETTE (président du comité plénier): M. le
Président, J'ai l'honneur de vous faire rapport que votre comité
a adopté, avec des amendements, dont un au titre, le bill 296, qu'il
vous prie d'agréer.
M. LE PRESIDENT: Le bill amendé sera-t-il agréé?
Agréé.
M. BELLEMARE: Troisième lecture.
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: De consentement unanime, l'honorable ministre des
Affaires municipales propose la troisième lecture du bill 296. Cette
motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Trois.
M. LESAGE: M. le Président, avant que nous reprenions
l'étude en deuxième lecture du bill de la ville de
Montréal, je désire proposer que, sur la liste des membres du
comité de l'industrie et du commerce, les noms de MM. Pierre Laporte et
Victor Goldbloom soient substitués à ceux de MM. Gérard-D.
Lévesque et Pierre Maltais.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Trois.
Bill 295
M. LE PRESIDENT: Reprise du débat sur la motion de l'honorable
ministre des Affaires municipales, proposant que le bill 295, intitulé
Loi concernant la ville de Montréal, soit maintenant lu la
deuxième fois.
L'honorable chef de l'Opposition.
M. Jean Lesage
M. LESAGE: M. le Président, après la longue Intervention
du ministre des Finances, vendredi, et après que le député
de Mercier lui eût donné la réplique, j'ai traité
brièvement deux sujets, juste avant l'ajournement de la Chambre. C'est,
premièrement, la carence d'investissements au Québec depuis deux
ans ou deux ans et demi, principalement à cause de l'instabilité
politique causée autant par l'Union Nationale que par le Parti
québécois et par les bombes. J'y reviendrai tantôt.
Deuxièmement, j'ai avancé la proposition suivante : Les
revenus gouvernementaux provenant de la perception des impôts à
des taux donnés ne peuvent actuellement s'accroître du seul fait
de l'augmentation de la population et de la production. Ils ne peuvent
actuellement s'accroître, dis-je, aussi rapidement que les
dépenses à encourir pour l'exécution des programmes
existants, programmes de dépenses dans tous les domaines, principalement
dans le domaine social.
Je soumets, M. le Président, que l'exactitude de cette
proposition est apparue d'une façon éclatante, lorsque nous avons
vu les chiffres compilés par le comité
fédéral-provincial du régime fiscal chiffres dont nous
avons pris connaissance a l'automne 1965 ou à l'hiver 65/66,
Le député de Laurier, au cours du débat, a voulu
tirer de ces chiffres une conclusion à laquelle je regrette de dire
qu'il n'a pu arriver que par un raisonnement sophistiqué. En effet, il a
prétendu que le régime actuel nous conduirait
inéluctablement à un cul-de-sac. Il a ajouté que le
régime fédératif, ce devait être sans doute
lorsqu'il prononçait le mot « régime », ce à
quoi il référait, était cause d'étouffement.
Quelle que soit la division des compétences entre Ottawa et
Québec, les projections de revenus pour les mêmes taxes demeurent
les mêmes et les projections de dépenses restent les mêmes
pour les mêmes services à la population. Le fait que le
Québec serait souverain ne ferait, en définitive,
qu'accroître le coût de l'administration, nous priver des paiements
de péréquation et diminuer le rendement des impôts à
cause de la plus grande faiblesse économique qui en
résulterait.
Toutes les dépenses fédérales, au Québec et
pour le Québec, devraient être assumées par le gouvernement
d'un Québec souverain. Cela voudrait dire des impôts plus
élevés et, comme l'a établi clairement à plusieurs
reprises le député de Mercier, entre autres, des mesures
d'austérité absolument inacceptables en Amérique du
Nord.
A l'argument que les paiements de péréquation qui sont de
l'ordre de $375 millions cette année, d'Ottawa à Québec,
sont essentiels au Québec, le député de Laurier s'est
contenté de répondre qu'ils réflètent un rendement
inférieur des impôts. C'est une vérité de La Palice,
puisque les paiements de péréquation sont justifiés
justement par le rendement inférieur des impôts, c'est vrai. Mais
ce n'est pas la preuve qu'ils ne constituent pas un avantage certain pour le
Québec, dans les circonstances. Au contraire, cela prouve justement que,
dans un Québec séparé, les citoyens verraient baisser leur
niveau de vie.
Je n'ai pas l'intention de reprendre tous les arguments, appuyés
sur des chiffres, apportés par le député de Mercier, en
différentes occasions, à l'encontre des affirmations du
député de Laurier et de ceux que ce dernier a suivis. Oui, parce
qu'il les a suivis dans l'erreur et dans ce que j'appelle le schisme. Je
voudrais signaler seulement que la situation d'un Québec
séparé ou souverain, quant à sa balance des paiements, qui
serait absolument Intenable, aurait pour effet de reléguer dans une
condition de sous-développement, tous les citoyens du Québec,
sauf ceux qui le quitteraient avec leurs capitaux ou encore le petit groupe de
privilégiés qui usurperaient le pouvoir.
Voyons ce qui se passe au Québec, depuis deux ans ou deux ans et
demi. L'instabilité politique a marqué le Québec. Cette
instabilité politique est causée par le manque de leadership de
l'Union Nationale, par son absence de politique définie, par sa division
interne, par le flirt de plusieurs de ses membres avec le séparatisme,
par le Parti québécois, par le Front de libération du
Québec et par les bombes dans la région de Montréal. Ce
sont là les causes qui font qu'il y a un manque de confiance envers le
Québec et envers son avenir présentement. Dans un tel climat, les
investissements fuient le Québec. Imaginez ce qui se passerait dans un
Québec indépendant, alors
que seulement le manque de leadership et les frasques de violence d'un
petit groupe ont pour conséquence la fuite des investissements et son
résultat inévitable, le chômage.
Le chômage augmente sans cesse, et en chiffres absolus et en
pourcentage, au Québec. Pour la première fois dans notre
histoire, depuis quelques mois, le chômage est proportionnellement plus
élevé au Québec que dans les Maritimes même. Lorsque
nous avons pris le pouvoir, en 1960,nous avons dit que le Québec avait
le championnat du chômage; c'était vrai. Nous avions dit que nous
enlèverions au Québec ce championnat; nous avons réussi,
alors que nous étions au pouvoir. De fait, d'année en
année, à partir de 1960-1961, les taux de chômage ont
baissé jusqu'en 1966. Depuis ce temps-là, ils remontent. Pour
chacun des mois de l'année 1967, le pourcentage des chômeurs au
Québec a été plus élevé que le pourcentage
du mois correspondant de l'année 1966. Pour chacun des mois de 1968, le
nombre et le pourcentage de chômeurs a été plus
élevé au Québec que pour chaque mois correspondant de
l'année 1967.
Prenons comme exemple le mois de novembre, si l'on veut. En 1960, nous
venions de prendre le pouvoir, le chômage était de 7.9%. En 1961,
6.2%; il a baissé graduellement jusqu'à 4%, en 1966. Au mois de
novembre 1967, 4.6% novembre 1968, 6%. Nous sommes donc revenus à peu
près au taux de 1961. Tous les efforts que nous avions faits pour
établir un climat de confiance, qui a amené des investissements
au Québec et a permis d'augmenter à un rythme plus rapide
l'emploi au Québec, de 1960 à 1966...
Depuis que l'Union Nationale est au pouvoir, la situation a
été renversée et, de mois en mois, les nouveaux
arrivés sur le marché du travail sont plus nombreux que les
nouveaux emplois créés.
Et c'est la cause de cette recrudescence du chômage, mois
après mois. C'est devenu une situation presque intolérable, M. le
Président. Voyez-vous, au mois d'octobre 1968, il y avait une
augmentation de 33,000 chômeurs par rapport à septembre, et cela
pour tout le Canada.
M. BELLEMARE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LESAGE: Or, 15,000 de ces nouveaux chômeurs étaient du
Québec, alors que la moitié...
M. BELLEMARE: J'invoque le règlement.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail.
M. LESAGE: Ah, pardon, M. le Président, je pensais que le
ministre lisait son Evangile.
M. BELLEMARE: Non, je...
M. BOURASSA: Je pensais que vous étiez d'accord avec ces chiffres
officiels.
M. BELLEMARE: ... suis d'accord avec les règlements aussi.
M. le Président, c'est bien spécifique à l'article
285 de nos règlements, nous ne pouvons pas revenir sur un débat
antérieur. Si vous consultez les motions qui ont été
faites pendant la présente session, vous trouverez, à la page 466
du journal des Débats, un débat sur le chômage où M.
Lesage a dit exactement les mêmes choses qu'il dit
présentement.
M. LESAGE: Non, parce que le mois d'octobre et le mois de novembre
n'étaient pas passés encore.
M. BELLEMARE: M. le Président, je vous ferai remarquer que le
député de Louis-Hébert vient de faire une admission qui
devrait être retenue. Tout ce qui regarde le problème du
chômage a été discuté pendant la motion qui
apparaît...
M. LESAGE: Non, il n'y a pas eu de motion.
M. BELLEMARE: M. le Président, ça apparaît dans les
discours qui ont été lus, relus, dits et redits dans cette
Chambre, lorsque nous avons débattu la motion du discours du
trône. Vous retrouverez ça, M. le Président, aux pages 466
et 561; il y a un débat qui s'est vidé au point de vue du
chômage.
Si l'honorable député voulait bien ne pas
répéter...
M. LESAGE: C'est le gouvernement qui est vidé.
M. BELLEMARE: ... les mêmes choses durant les mêmes
sessions, M. le Président. Je n'ai pas d'objection.,.
M. LESAGE: Voyons! Vous faites perdre le temps de la Chambre; ça
va aller bien plus vite autrement. J'aurais fini, déjà.
M. BELLEMARE: Ah bon, très bien, je vais écouter
ça.
M. LESAGE: M. le Président, il n'y a pas eu de motion touchant
directement le chômage.
Quand on parle de taxes, de revenus gouvernementaux, et
d'investissements, comme l'a fait, d'ailleurs, le ministre des Finances, et
qu'on arrive au chômage, on voit bien que, puisque les chômeurs ne
payent pas de taxes, le gouvernement est d'autant plus pauvre qu'il y a plus de
chômeurs.
M. BELLEMARE: Sur la motion.
UNE VOIX: Cela boucle d'autant plus serré qu'il y a plus de
bien-être social.
M. LESAGE: Cela ne fait rien. Je vais tout recommencer demain, si on
m'arrête ce soir.
M. BELLEMARE: Demain? L'assistance-chômage.
M. LESAGE: Sur l'assistance-chômage, sur le budget
supplémentaire.
M. BELLEMARE: Ah oui! M. LESAGE: Bien oui.
M. BELLEMARE: Vous allez avoir le droit d'en faire quand même?
M. LESAGE: Certainement.
M. BELLEMARE: En vertu de quel règlement? La motion de
non-confiance...
M. LESAGE: Le coût de l'assistance-chômage, on le verra
demain, est directement lié au nombre des chômeurs. C'est
l'assistance-chômage. Si je n'ai pas le droit de parler de chômage
sur l'assistance-chômage.
M. BELLEMARE: M. le Président, Oui, c'est ça. Cela va mal,
votre affaire.
M. LE PRESIDENT: A l'ordrel A toutes fins pratiques, même
si...
M. LESAGE: Bien oui, mais c'est en passant.
M. LE PRESIDENT: ... j'empêchais l'honorable chef de l'Opposition
de faire ses remarques sur ce point-là, je devrais prendre l'affaire en
délibéré ou sous réserve pour rendre une
décision plus tard, alors que vraiment les propos auraient
été tenus. Alors, j'invite l'honorable chef de l'Opposition
à continuer.
M. LESAGE : Au mois d'octobre, 50% pratiquement de l'augmentation du
nombre de chômeurs au Canada était dû au Québec et,
en novembre par rapport à octobre, c'est 42%. Il y en a eu 50,000 au
Canada, dont 21,000 au Québec, ça fait 42%.
Au mois de novembre, au Canada, il y avait 338,000 chômeurs. Il y
en avait 134,000 au Québec, 40%, alors que le Québec a moins de
30% de la population.
C'est donc que nous sommes revenus au championnat du chômage. Les
chiffres montent, s'accroissent constamment et la population s'accroît
aussi. Cette terrible situation du chômage est due à un manque de
confiance qui est, je le répète, une des conséquences du
flirt de certains membres du parti de l'Union Nationale ce n'est pas le
député de L'Islet avec les séparatistes, et des
explosions de séparatisme elles-mêmes.
Il est bien entendu qu'il continue et qu'il continuera, même dans
un Québec séparé, de se faire des investissements au
Québec. Le ministre de l'Industrie et du Commerce pourra me
répondre: Bien sûr, il y a eu des investissements au
Québec. C'est vrai. Parce que malgré le manque de confiance des
investisseurs, ces derniers y trouvent un profit assuré. Ils continuent
et continueront d'établir des industries susceptibles de satisfaire les
besoins de biens de consommation des Québécois, mais des
Québécois seulement. C'est le cas, par exempte des raffineries de
pétrole. Il est clair que du capital étranger viendra n'importe
quand pour transformer le pétrole brut en essence pour la vendre aux
Québécois. Les investisseurs sont sûrs d'y trouver leur
profit parce que le marché est là. Mais ce n'est pas du tout la
même chose lorsqu'il s'agit de biens durables. Une chose est certaine,
c'est que, dans un Québec séparé, nous verrions
s'accentuer terriblement ce qui se passe actuellement. Les industries
secondaires de transformation, les industries lourdes et semi-lourdes ne
viendraient pas s'installer elles ne viennent déjà plus,
il faut penser à la General Motors sous le régime libéral
dans un pays où ne règne pas un climat de confiance. Les
investisseurs n'établiraient pas ici des industries pour la
transformation de biens durables destinés à l'exportation en
dehors du Québec.
Quand un investisseur investit une somme le moindrement
considérable, il veut être assuré, premièrement, de
ne pas perdre tout ou une partie de l'argent qu'il investit. Je pense que c'est
là une vérité que tout le monde va admettre.
Deuxièmement, il veut faire fructifier son investissement non seulement
pour un an ou deux, mais sur une période prolongée
d'années. Il faut donc qu'il ait confiance dans la stabilité
politique de la région ou du pays où il investit. Il est
sûr aussi qu'un investisseur qui songe à établir
une industrie de transformation pour produire des biens durables
destinés à l'exportation n'ira pas s'établir dans une
région ou dans un pays lorsqu'il entretient des inquiétudes sur
la politique tarifaire ou monétaire de ce pays.
Or, le genre d'industrie secondaire dont je parlais est justement ce qui
fait la principale force économique d'un pays ou d'une région.
C'est justement le genre d'activité, le genre d'industrie qui
crée le plus grand nombre d'emplois stables et
rénumérateurs. Si on veut en avoir la preuve, on n'a qu'à
tourner les yeux vers les Etats-Unis ou même vers nos voisins
d'Ontario.
Malgré tout ce qu'on pourra dire, les avantages d'appartenir
à la fédération canadienne l'emportent à mon sens
par une forte marge sur les inconvénients et les désavantages
économiques de la séparation. Le député de Laurier
a déclaré en terminant son intervention l'autre jour que seul
sera sûr, entre autres pour des milliers de nos jeunes
compétences, un Québec souverain.
Cela a été sa péroraison. Quant à moi, c'est
justement pour elles, ces jeunes compétences, que je crains le plus la
séparation. Baisse du niveau de vie, monnaie dévalorisée,
chômage sur une vaste échelle voudraient dire la fuite de nos
jeunes compétences vers les Etats-Unis ou vers ce qui resterait du
Canada, fuite qui, hélas! est déjà le sort d'un trop grand
nombre à l'heure actuelle.
Que nous arriverait-il à nous, du Québec? Nous serions
démunis de capital humain et de capital argent. Sans compter qu'un
Canada divisé, qu'on en dise n'importe quoi, devient une proie facile
pour les Etats-Unis. On se plaint déjà de l'influence de nos
voisins du Sud sur toute la vie canadienne, et même sur la vie
québécoise, malgré la différence de langue. Il
n'est pas besoin d'être grand clerc pour savoir qu'un Québec
souverain tomberait vite sous la tutelle des Etats-Unis, dans le contexte
continental nord-américain. Je crois bien qu'alors, tous nos beaux
discours sur la langue française deviendraient vraiment folkloriques,
deviendraient inutiles.
Nous nous plaignons aujourd'hui que les affaires se font trop souvent en
anglais au Québec. Qu'arrivera-t-il lorsque Washington et New York
tireront toutes les ficelles, et en anglais, s'il vous plaît! Le reste du
Canada, au moins, fait des efforts de plus en plus concrets, me semble-t-il,
pour reconnaître le français à travers le pays, pour
reconnaître dans sapléni-tude le fait français au
Québec. Ce ne seraient certainement pas Washington et New York qui le
feraient.
Quel que soit l'aspect de l'avenir du Québec que l'on envisage,
qu'il s'agisse de l'économique, du social ou du culturel, la
souveraineté ou l'indépendance ne demeurent toujours que la
grande illusion de ceux qui s'imaginent que le changement doit se faire pour le
changement, peu importe les conséquences, pour une population qui veut
progresser dans l'ordre et dans la paix.
Je sais que vous allez m'arrêter, M. le Président. Je
m'aperçois moi-même que je viens de me laisser entraîner un
peu en dehors des stricts aspects économique et financier, mais j'ai
pensé que je devais profiter de cette occasion pour rencontrer le
député de Laurier sur son terrain.
Revenons au discours du ministre des Finances. Je voudrais lui redire
que nous croyons en une fédération canadienne où chaque
ordre de gouvernement s'en tiendra strictement au champ de sa
compétence. D'accord. Je l'ai dit et je l'ai redit je ne sais combien de
fois. J'ai aussi dit et j'ai redit depuis plusieurs années qu'il fallait
que soit reconnue la priorité des investissements économiques et
sociaux des provinces. J'ai dit et redit que le partage fiscal devait se faire
suivant les besoins de chaque ordre de gouvernement, besoins prioritaires dans
les limites de sa compétence et suivant les projections pour ses besoins
pour l'avenir. Le tout, dans un pays comme le nôtre, doit
nécessairement être accompagné de la
péréquation, et c'est évidemment là un des
avantages du fédéralisme.
A l'intérieur de ce fédéralisme, le gouvernement du
Québec doit faire preuve de leadership, de courage et de force dans le
choix des priorités.
Si, depuis deux ans et demi, le gouvernement de l'Union Nationale avait,
je crois, donné je l'ai dit à plusieurs reprises
une plus grande priorité aux mesures propres à encourager les
investissements et à promouvoir la croissance économique
plutôt que de laisser s'accroître à un rythme effarant
nous le verrons demain encore des dépenses dites sociales,
il serait, j'en suis sûr, dans une meilleure situation financière
et pourrait aider directement la ville de Montréal au lieu d'être
forcé d'avoir recours à des subterfuges comme celui que nous
propose le ministre des Finances... Parce que c'est un subterfuge que nous
propose le ministre des Finances.
Je pense que nous devons nous attendre à ce que le déficit
de la ville de Montréal soit de l'ordre de $25 millions à $30
millions. Dix cents les $100 de taxe foncière à Montréal
rapportent environ $6 millions. Si le déficit
est de $24 millions et qu'on veut le combler seulement par une
augmentation de la taxe foncière, il faudra augmenter cette taxe de
$0.40. Elle est déjà de $1.30. Si le déficit est de $30
millions ou approche $30 millions, cela prendra $0.50, c'est-à-dire cinq
fois six, ce qui porterait la taxe foncière de $1.30 à $1.80. Je
donne ça à titre d'exemple parce que, évidemment, il
pourrait y avoir d'autres répartitions dans l'augmentation des taxes. Il
y aurait peut-être moyen d'augmenter les licences, les permis, etc., mais
il est clair que le ministre des Finances comprend qu'il serait difficile,
sinon impossible à la ville de Montréal d'aller chercher tout le
montant du déficit dans le revenu d'impôts accrus, et qu'il veut
aider la ville de Montréal.
Pour l'aider, en vertu du projet de loi qui est devant nous, tel que le
projet de loi est rédigé, il suggère comme alternative que
la ville de Montréal soit dispensée de payer comptant pendant
deux ans sa quote-part dans les fonds de pension des employés de toute
catégorie. Je n'ai pas besoin de répéter, le ministre des
Finances a déjà mentionné les catégories
d'employés qui ont des fonds de pension distincts.
Il suggère qu'au lieu de payer comptant cette somme annuelle de
$10 millions et demi, la ville de Montréal fasse une émission
d'obligations qui équivaudrait à un billet promissoire qui
pourrait être déposé au lieu et place d'un paiement
comptant pour cette année et l'an prochain, à $10 millions et
demi par année.
Lorsque j'ai demandé au ministre des Finances ce qu'il pensait
que cela pourrait avoir comme effet sur le crédit de la ville de
Montréal vis-à-vis des prêteurs, il m'a répondu:
« J'ai pensé à ce problème... » Je cite
R/5913. Je n'ai pas encore eu le temps de vérifier au journal des
Débats imprimé, je cite l'épreuve. C'est le ministre des
Finances qui parle: « J'ai pensé à ce problème, mais
je ne vois pas c'est une opinion, peut-être d'autres ne la
partagent-ils pas quelle différence il peut y avoir entre
l'obligation de la ville de Montréal qui s'en acquitte parce que c'est
une obligation qui deviendra échue dans dix ou quinze ans.
Actuellement, la ville de Montréal verse sa contribution pour des
gens qui prendront éventuellement leur retraite. Les fonds sont
suffisants pour payer les retraites courantes. Or, c'est un engagement pour
l'avenir. Je me suis fait le raisonnement suivant: Obligeons la ville de
Montréal à déposer cet argent, qui sera utilisé en
temps utile. « En somme, nous disons de même à la ville de
Montréal, pour des dépenses d'immobilisation. Vous faites un
pavage qui durera vingt ou trente ans. Alors, vous empruntez et vous paie- rez
ce pavage en vingt ans, c'est-à-dire que la génération qui
utilisera ce pavage paiera au fur et à mesure qu'elle l'utilisera.
« J'ai assimilé cela un peu à ce raisonnement.
Peut-être cela fera-t-il du tort au crédit de Montréal. Je
l'avoue, c'est une question d'opinion, comme ça peut lui faire du tort
de reculer son année financière. « Je tiens cependant
à dire à cette Chambre que si je sentais que c'est le
désir unanime des membres de cette Chambre d'exempter temporairement la
ville de Montréal de toute contribution au fonds de pension, pour un
temps limité, en attendant que nous fassions cette étude, je
pourrais considérer une modification au projet de loi, avec l'entente,
cependant, qu'une fois l'étude terminée, etc. »
M. le Président, j'ai mûrement réfléchi
à cette déclaration du ministre des Finances. J'avoue que je
crains un peu que ça puisse entacher le crédit de la ville de
Montréal d'avoir une émission d'obligations forcée
à un taux d'Intérêt qu'il sera très difficile
d'établir, pour boucher un trou pendant deux ans de suite. Le risque
d'une perte de crédit pour la ville de Montréal est-il tel qu'il
pourrait nous justifier de dire: Eh bien, passons pour deux ans; en suivant
l'argumentation que le ministre des Finances a faite au cours de son discours
surtout dans cette partie que j'ai citée tout à l'heure?
C'est dans vingt ans qu'il faudra payer. Parce que c'est à peu
près dans vingt ans que le fonds deviendrait insuffisant...
M. DOZOIS: Je ne sais pas.
M. LESAGE: ... d'après de que l'on m'a dit. C'est-à-dire
que les entrées de cotisations au fonds de pension seraient
inférieures aux versements de prestations, globalement.
Evidemment, je ne suis pas prêt, pas plus que le ministre des
Finances, à reconnaître, pour la ville de Montréal ou pour
toute autre municipalité du Québec, à ce moment-ci, qu'un
système de « pay as you go » serait recommandable. Pour en
venir à cette conclusion, il me faudrait d'ailleurs, je suis dans
la même situation que le ministre des Finances des recommandations
d'experts reconnus qui auraient étudié la question à
fond.
Pouvons-nous dire: Nous laissons passer la ville de Montréal
pendant deux ans, mais il est bien entendu qu'à moins que nous ayons des
recommandations d'un comité spécial d'étude, nous
n'établirons pas un système de « pay as you go », et
la décision que nous prenons ne pourra jamais être invoquée
comme un précédent.
Si, tous, tant que nous sommes, nous donnons
notre consentement, en étant bien déterminés que ce
consentement ne pourra pas être invoqué comme un
précédent, c'est ce que le ministre des Finances a dit
c'est ce que je répète : Si les députés sont
d'accord sur ce point, quant à moi, le ministre des Finances peut
modifier son projet de loi comme il l'a suggéré, comme il a
suggéré qu'il pourrait le faire, s'il avait le consentement de la
Chambre.
Je pense que je puis difficilement être plus clair que je viens de
l'être, M. le Président, c'est une façon que nous avons
d'aider la ville de Montréal. Il va clairement falloir que les
autorités de la ville de Montréal fassent comme bien d'autres,
qu'elles soient peut-être obligés de serrer la vis et de faire
preuve d'énormément de prudence dans l'administration, dans les
entreprises nouvelles.
D'un autre côté, il ne faut pas brimer la ville de
Montréal dans ses possibilités d'investissement susceptibles
d'entraîner le développement économique parce que c'est lui
seul qui est créateur de revenus pour les gouvernements de tous les
ordres.
Alors, M. le Président, dans les circonstances, il est impossible
de placer les autorités de la ville de Montréal dans une
situation où elles auraient, c'est un exemple que je donne, à
augmenter l'impôt foncier de $0.40 à $0.50 1es $100, cela n'aurait
pas de bon sens. Et, même si c'est une espèce de
stratagème, de subterfuge ou de « stop-gap », que nous
acceptons, pour éviter le pire, je pense qu'on peut se permettre de
prendre ce risque, mais à la condition qu'il soit bien entendu que
ça ne peut être invoqué, contre la Législature, ni
contre le gouvernement, comme un précédent en vue de
l'établissement du système de « pay as you go » pour
les fonds de pension de la ville de Montréal ou de quelque ville ou
municipalité du Québec.
M. DOZOIS: On en reparlera au comité.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. Jean-Paul Beaudry
M. BEAUDRY: M. le Président, on a parlé plus tôt
dans le débat de la situation économique du Québec et en
particulier des investissements, principalement le député de
Mercier, le député de Laval et le chef de l'Opposition. Je n'ai
pas l'impression que je pourrais régler à jamais la question en
intervenant maintenant, mais je voudrais, assez brièvement, et le plus
froidement possible, tenter de placer les faits en perspective.
Qu'il y ait un problème économique au Québec,
personne n'en doute. Il n'y a pas un seul endroit au monde où il n'y en
a pas. Mais ces problèmes sont suivis chez nous et on trouve et on
applique des solutions. On n'a pas encore trouvé toutes les solutions,
d'accord, et on n'a pas réglé tous les problèmes, mais
c'est là la règle normale des plus grands pays et des plus
petits.
Ainsi, il y a du chômage au Québec Sans partisanerie
politique, on peut noter que le chômage moyen de 1968, s'il sera plus
élevé que celui de 1967 et de 1966, ne dépassera
guère celui de 1965, mais sera définitivement inférieur
à celui de 1964, de 1963, de 1962, et de 1961. Et je m'explique.
Si on compare le taux de chômage durant l'année
entière de 1961, il était de 9.3%; 1962, 7.5%; 1963, 7.5%; 1964,
6.4%; 1965, 5.5%; 1966, 4.7%; 1967, 5.3%. Cela ne règle pas le
problème de mentionner ceci, mais ça rappelle au moins que le
problème du chômage au Québec ne date pas d'hier ou
d'aujourd'hui. Raison de plus pour trouver au plus vite des solutions. Je le
veux bien. Mais quand même, raison de plus aussi pour ne pas nous faire
croire qu'il s'agit là d'un nouveau drame quand il s'agit au contraire
d'un problème permanent chez nous au Québec.
Il y a d'autres cas où les faits différent beaucoup de ce
qu'on en dit. Pendant longtemps, nous avons entendu, à gauche et
à droite, parler de baisse des investissements. Pourtant, les faits sont
tout autres. En 1968, au Québec, apparaît une croissance
remarquable, on ne semble pas vouloir le croire, mais c'est bien vrai.
D'après les prévisions du ministère
fédéral de l'Industrie et du Commerce, on note une hausse de
l'immobilisation de 6.6% dans le secteur de la fabrication, c'est-â-dire
toute l'Industrie manufacturière secondaire, pour un chiffre de $634
millions. Il y à une augmentation au Québec, alors qu'il y a une
baisse de 2.4% pour l'ensemble du Canada et de 2.4% pour l'Ontario.
M. BOURASSA: Le ministre me permettrait-il une question? Le ministre
pourrait-il dire le chiffre d'investissements en Ontario? Le chiffre, au lieu
du pourcentage.
M. ROY: Vous avez fait votre discours, alors, laissez parler le grand
monde.
M. BEAUDRY: Je ne vous ai pas interrompu. Vous poserez des questions
après.
M. BOURASSA: Non, c'est parce que là la comparaison est
trompeuse.
M. BEAUDRY: II y a également une augmentation au Québec
dans le secteur industriel primaire et construction, soit 2.4%, alors que, dans
l'ensemble du Canada, il y a une baisse de 1.1% et, en Ontario, une baisse de
6.5%. Il y a au Québec une baisse prévue dans l'immobilisation en
construction et en équipement...
M. BOURASSA: Le chômage augmente.
M. BEAUDRY: ... le commerce, la finance et les services commerciaux. On
sait que le développement de la région montréalaise avant
l'Expo nous avait permis d'atteindre des sommets dans ce secteur. Mais, ce qui
est le plus intéressant, c'est le tournant indiqué par la
revision faite au milieu de l'année. Au début de l'année,
on prévoyait une baisse de 22.2% dans ce secteur. L'amélioration
des perspectives a fait changer et augmenter les immobilisations
prévues. Au lieu d'être de $297 millions, elles seront de $325
millions.
M. ROY: C'est bon.
M. BEAUDRY: La baisse dans ce secteur n'est donc plus estimée
qu'à 14%, alors qu'aux secteurs secondaire et primaire, la hausse se
confirmait. Dans le secteur tertiaire, on notait une reprise dans le même
sens. Il faut souligner enfin que consciemment, le gouvernement, s'est
appliqué lui-même à favoriser la croissance. Ici, je cite
Le Soleil de samedi le 7 décembre, dans un article intitulé:
« Le Québec à l'heure de la consolidation de son
économie. « Des investissements massifs dans des secteurs clefs de
l'économie québécoise en 1968 sont à l'origine de
la croissance marquée de l'économie du Québec, par rapport
à celle des autres provinces et même du Canada entier. C'est ce
que laissent clairement voir les chiffres publiés par le bureau
fédéral de la statistique d'une part et certaines estimations
faites par le ministère de l'Industrie et du Commerce du Québec.
« Les dépenses dans les institutions et les ministères
gouvernementaux atteindront cette année au Québec le chiffre
de$l,036,000,000, soit une hausse de 23.5% par rapport à 1967, et
comparativement à des hausses respectives de 8.5% et 11.4% en Ontario et
au Canada ».
M. BOURASSA: Quelle est la proportion par rapport au Canada?
M. BEAUDRY: Le secteur de la construction des industries
primaires...
M. ROY: Prenez donc votre siège.
M. BEAUDRY: ... avec des dépenses d'immobilisation
estimées à $266.6 millions en 1968, connaîtra un taux de
croissance de 2.4% par rapport à l'année 1967. Au Canada et en
Ontario, ce secteur subira des baisses respectives de 1.1% et de 6.5%. Je suis
également fier de constater que la région de Québec
à elle seule, a connu en 1968 une période exceptionnellement
fructueuse, en ce qui a trait à la construction. Mentionnons
l'achèvement des travaux de la transcanadienne dans le comté de
Lévis, au coût total de $15 millions; l'érection du Grand
Théâtre au coût de $7 millions; l'aménagement des
berges de la Saint-Charles: $16 millions; la construction d'un centre
d'habitation à logements multiples près du centre commercial
Fleur-de-Lys, au coût de $35 millions...
M. GRENIER: Cela y va.
M. BEAUDRY: L'érection d'un deuxième pont pour relier
Québec à la rive sud, au coût de $56 millions...
M. LESAGE: C'est pour les automobiles cela. Grosse production
secondaire.
M. BEAUDRY: ... y compris les échan-geurs.
M. LESAGE: Les berges de la Saint-Charles.
M. BEAUDRY: Retournons maintenant dans le secteur manufacturier.
UNE VOIX: Grand Théâtre.
M. BEAUDRY: Le Québec a encore connu des gains sur l'Ontario en
ce qui concerne les industries de fabrication de produits chimiques et des
produits dérivés du pétrole et du charbon. Dans
l'industrie chimique, les immobilisations au Québec atteindront,
à la fin de 1968, le chiffre de $83 millions, comparativement à
$75.7 millions pour l'Ontario, soit un taux d'accroissement de 50% au
Québec et une baisse de 19% en Ontario. Quelques exemples, à
Va-rennes une usine de fabrication d'alcool éthyli-que
synthétique a été mise en chantier, au coût de $10
millions, alors qu'à Rivière-des-Prairies la Corporation de gaz
naturel donnait un contrat à Air liquide du Canada pour la construction
de la plus grande usine de liquéfaction de gaz au Canada, au coût
de $5 millions. La
compagnie Sico, pour sa part, augmentait de 50% ses installations au
Québec Du côté des produits dérivés du
pétrole et du charbon, les dépenses d'immobilisation au
Québec atteindront la somme de $75.3 millions, en regard de $42.3
millions en Ontario pour l'année 1968.
Ce qui représente, pour le Québec, une hausse de 143.7%
comparativement à 1967 et une baisse de 5.2% pour l'Ontario. Grâce
aux investissements considérables faits dans le Québec...
M. BOURASSA: Dans un secteur.
M. BEAUDRY: ... le taux de croissance dans l'ensemble de
l'économie canadienne à ce poste sera de 49%. Il ne fait pas de
doute que les dépenses considérables d'immobilisation de la
compagnie Shell du Canada, pour la construction d'une usine de fabrication
d'huile au coût de $25 millions et pour agrandir sa raffinerie de l'ordre
de $55 millions, travaux qui se poursuivront jusqu'à la fin de 1969,
sont pour beaucoup dans cette hausse exceptionnelle...
M. BOURASSA: Ce sont des marchandises importées.
M. BEAUDRY: ... du niveau d'activité dans l'industrie des
produits du pétrole.
M. LESAGE: On est interrompu par un honorable député. Je
voudrais lui rappeler que j'ai justement, au cours de mon exposé, dit
que le seul genre d'investissements que nous pouvions espérer, ce sont
des investissements dans la production de biens de consommations,
consommés par les Québécois, à l'intérieur
du Québec, mais rien pour l'exportation. C'est la preuve, nous l'avons
là.
M. BOURASSA: M. le Président... M. BEAUDRY: M. le
Président...
M. LEDUC (Laviolette): Cela ne sera pas long, ils vont ouvrir le Grand
Théâtre.
UNE VOIX: Il faut et vous y irez toujours prendre des renseignements
additionnels.
M. BEAUDRY: M. le Président, l'année 1969 promet
également d'être prolifique en investissements dans ce secteur. En
effet, nous avons raison de croire que, dans la région de Québec,
une compagnie investira une somme de $50 millions pour la construction d'une
raf- finerie et que la compagnie Imperial Oil of Ca-nana étudie
présentement la possiblité de réinvestir quelque $90
millions pour subvenir aux besoins du marché
québécois.
L'industrie du caoutchouc, qui n'est pas tellement
développée chez nous actuellement, aura également connu
une année exceptionnelle avec une hausse de 189.5%, pour des
dépenses d'immobilisation de $16.5 millions en 1968, en regard de $5.7
millions en 1967. La compagnie Goodyear of Canada, avec des investissements de
$11 millions à Valleyfield, a certes été la
première à contribuer à l'expansion considérable de
cette industrie au Québec. Firestone, pour sa part, dépensait
également, pour agrandir son usine de Joliette, $1 million.
La fabrication de produits métalliques a également connu
une hausse appréciable de son niveau. Elle s'est accrue de 18.5%, avec
des dépenses d'immobilisation de $29.5 millions en Ontario. Ce secteur
subira vraisemblablement une baisse de 16.1%, parallèlement à la
baisse de 6% observée au niveau de l'économie. Parmi les
innovations dans ce secteur en 1968, il y a l'ouverture d'une usine de $10
millions à Tracy, pour la fabrication de poudre métallique par la
compagnie Les poudres métalliques du Québec.
D'autres secteurs ont connu des regains d'activités
considérables au Québec, au cours de la présente
année. Parmi ceux-ci, les secteurs de fabrication de produits textiles,
de matériel électrique, de matériel de transport, de
machinerie, de vêtements, ainsi que le secteur de l'imprimerie, et de la
publication. Des industries connexes ont également
bénéficié d'investissements accrus.
En voici quelques exemples.
La maison Larousse pour sa part a investi $2 millions dans une
imprimerie. Deux compagnies ont également investi dans des
activités nouvelles: la National Cash Register a érigé
à Dorval un centre de calcul de $1.2 millions alors que la R.L. Grain
Limited investissait $1 million pour l'établissement d'une usine de
fabrication de formules commerciales. La construction du barrage de Churchill
Falls au Labrador donne également lieu à une activité
fébrile dans la fabrication de biens d'équipement, tels que
générateurs et alternateurs donnés en sous-contrats
à des entreprises québécoises. La compagnie Miron
Limitée, par exemple, a bénéficié de contrats de
l'ordre de $23 millions de la Churchill Falls tandis que Marine Industries a
jusqu'ici des commandes d'alternateurs et de turbines, tant pour les derniers
aménagements de la Manicouagan que pour les chutes Churchill, pour plus
de $40 millions.
M. LESAGE: On peut dire merci à celui qui est maintenant chef de
l'Opposition si nous avons tout ça.
M. ROY: Je pensais que le député de Mercier allait dire
quelque chose sur Marine parce que c'est flottant ça, un peu.
M. LESAGE: Pour les contrats de Churchill Falls, le gouvernement actuel
peut remercier le gouvernement précédent.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOURASSA: Je vais invoquer mon privilège.
M. ROY: Celui de demander d'autres contrats?
M. BEAUDRY: Cette quantité considérable de contrats
importants à remplir, dans une grande proportion au cours de la
prochaine année, est un heureux présage de ce que pourra
être l'économie québécoise de 1969.
M. BELLEMARE: Très bien.
M. BOURASSA: Oui mais il y a 30% d'augmentation du chômage depuis
l'an dernier. Je ne comprends pas ça, moi.
M. BEAUDRY: Ce tableau comparatif des dépenses d'immobilisation
au Québec...
M. BOURASSA: Le chômage a augmenté de 30%.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BOUSQUET: II n'y a pas qu'un économiste.
M. LE PRESIDENT: Depuis deux minutes au moins, f ai
énormément de difficulté à reconnaître la
voix de l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce.
L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. BEAUDRY: Ce tableau comparatif des dépenses d'immobilisation
au Québec, en Ontario et au Canada dans son ensemble prouve que le
secteur manufacturier s'est proportionnellement plus développé au
Québec qu'en Ontario et au Canada en 1968. Ce qui signifie que
l'économie québécoise a repris quelque peu du retard
qu'elle avait et qu'elle a encore d'ailleurs par rapport à l'ensemble
canadien.
M. BOURASSA: Cela ne paraît pas.
M. BEAUDRY: Ces investissements d'aujourd'hui seront appelés
à produire demain. Comme ils ont été assez substantiels,
il est possible de prétendre que l'année 1969 connaîtra un
record dans la production industrielle. Les immemses travaux qui se
poursuivront encore durant toute l'année prochaine, reliés
à de nouveaux investissements, notamment dans le domaine du
pétrole, permettent d'être optimistes quant à l'avenir
économique du Québec pour les prochaines années. Il y a au
Québec un retard à rattraper. Il faudra que celui-ci connaisse de
nombreuses autres années où l'économie
québécoise marquera un taux de croissance supérieur
à celui qui est observé au Canada et dans la province voisine,
l'Ontario, du moins en ce qui concerne les investissements. Depuis 1966,
l'emploi a augmenté de 4.3% au Québec, au regard de 3.5% en
Ontario et de 3.6% pour l'ensemble du Canada. Cet apport de main-d'oeuvre,
proportionnellement plus considérable qu'ailleurs, ne
bénéficiera au Québec que si l'infrastructure
économique elle-même est en mesure de l'utiliser de façon
substantielle. D'ailleurs, depuis les dernières années, nous
avons créé au Québec 177,000 emplois, pour une moyenne de
83,500 emplois par année, et la moyenne des cinq années
précédentes est de 65,000 emplois. Donc, différence
remarquable.
M. GRENIER: Ce n'est pas exactement ça, l'immobilisme.
M. BEAUDRY: Permettez-moi d'apporter certaines précisions
relativement au climat qui existe présentement au Québec à
l'endroit des investisseurs. Quand l'honorable chef de l'Opposition affirme
qu'un climat de méfiance existe au Québec à l'endroit des
investisseurs, je dis qu'il n'est pas tout à fait sincère et
qu'il fait preuve de partisanerie aveugle.
M. LESAGE: Je regrette, je suis obligé d'interrompre. Je n'ai
certainement pas dit qu'il existait au Québec un climat de
méfiance à l'égard des investisseurs.
J'ai dit qu'il existait chez les investisseurs un climat de
méfiance à l'endroit du Québec. C'est le contraire que
j'ai dit.
M. ROY: Quand il parle de méfiance, il parle de son parti.
M. BELLEMARE: En parlant sur le point d'ordre...
M. LESAGE: J'ai dit le contraire exactement.
M. BELLEMARE: Je n'ai pas besoindevous dire que l'honorable
député de Louis-Hébert a fait son discours. Je l'ai tout
entendu avec beaucoup de patience. Je voudrais que l'honorable
député de Lafontaine puisse faire le sien.
M. LESAGE: Oui, moi aussi.
M. BELLEMARE: Il dit des choses extrêmement sérieuses.
M. LESAGE: II essaye de refaire mon discours et le refait à
l'envers.
M. BELLEMARE: Laissez-le donc...
M. LESAGE: Non, je ne le laisserai pas me mettre dans la bouche des mots
que je n'ai pas dits.
M. BELLEMARE: II y a toujours une limite pour être
désagréable à ce point-là. Le jeune et brillant
député de Lafontaine fait un exposé... j'ai rarement vu un
discours si bien charpenté.
Il détruit toute l'Opposition.
M. GRENIER: Cela leur fait mal.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. BEAUDRY: Quand l'honorable chef de l'Opposition affirme qu'un mauvais
climat existe, s'il n'aime pas le mot méfiance au Québec,
à l'endroit des investisseurs...
M. LESAGE: Non, je n'ai jamais dit cela.
M. BEAUDRY: ... je dis qu'il n'est pas sincère.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. LESAGE: Voyons donc!
M. BEAUDRY: ... et qu'il fait preuve d'une partisanerie aveugle...
M. GRENIER: C'est une partie de yo-yo...
M. BEAUDRY: ... et d'un manque d'objectivité.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BEAUDRY: Plusieurs hommes d'affaires ont noté récemment
qu'on avait exagéré les problèmes d'investissements au
Québec. Qu'il me soit permis de citer aux membres de cette Chambre des
commentaires que j'ai recueillis dans quelques journaux et qui contredisent
nettement les avancés de l'honorable chef de l'Opposition.
M. BOURASSA: Le chômage.
M. BEAUDRY: Ici, je cite Le Soleil du samedi, 30 novembre 1968: «
Progrès constant de l'économie québécoise
».
M. BELLEMARE: A l'ordre! A l'ordre! M. GRENIER: Ecoutez donc un peu!
M. BEAUDRY: « Contrairement I certaines rumeurs qui ont
circulé dernièrement, l'économie du Québec a
continué de progresser au cours des derniers mois, a
déclaré M. John R. O'Day, président de l'Association des
manufacturiers canadiens... »
M. BELLEMARE: Très bien.
M. BEAUDRY: « Selon M. O'Day, qui s'adressait aux membres du
conseil exécutif national de la division du Québec de l'AMC, le
rythme auquel le Québec se développe est loin d'être
insignifiant. La meilleure preuve qu'au fond tout va bien chez vous, a-t-il dit
aux membres de la section québécoise de l'AMC, c'est la
décision de plusieurs industriels d'implanter de nouvelles
entreprises... »
M. GRENIER: Eh bien!
M. BEAUDRY: « ... ou d'agrandir les entreprises existantes.
Après avoir donné quelques exemples, il a estimé les
investissements de l'industrie manufacturière au Québec en 1968
à $634 millions, soit 6.6% de plus que les sommes investies dans ce
secteur en 1967. M. O'Day, qui avait été mis au courant des
rumeurs selon lesquelles l'économie québécoise se trouvait
dans une situation alarmante, qu'elle connaissait la stagnation, le
déclin, a avoué avoir fait faire des études
spéciales avant de se prononcer. J'ai été heureux, a t-il
affirmé, de découvrir quelle est la situation réelle.
Votre province progresse, l'emploi et les salaires sont à la hausse, vos
expéditions de produits manufacturiers, vos immobilisations
s'accroissent. » Voici la situation.
M. BELLEMARE: Très bien.
M. LESAGE: ... les statistiques prouvent...
M. BEAUDRY: Dans un autre article, une déclaration.
M. BOURASSA: Pour moi, il s'est trompé d'année.
M. BEAUDRY: ... de M. Taylor Kennedy, président du Canada Cement,
dit que: « l'accroissement de la construction au Québec en 1969
sera comparable aux autres régions. Les investissements dans la
construction augmenteront au Québec au cours de l'année
prochaine... »
M. GRENIER: II y en a encore un autre à...
M. BEAUDRY: « ... leur accroissement sera comparable à
celui des autres régions du pays. C'est ce qu'a dit le président
directeur général de la Société Canada Cement
limited, M. Taylor Kennedy, dans un exposé présenté devant
les membres de la section des manufacturiers et fournisseurs de l'Association
de la construction de Montréal. »
M. BOURASSA: Hier, cela?
M. BEAUDRY: M. Taylor... c'est le 13 décembre. M. Kennedy, qui
estime que les déclarations que nous avons tous entendues au sujet de
l'évolution du Québec comportent trop d'émotions, a
affirmé que les sentiments ne constituent une saine motivation dans la
décision d'investir, mais qu'il faut plutôt s'en tenir aux
faits.
M. GRENIER: Ah!
M. BEAUDRY: Malgré la difficulté d'établir, avec
une certaine précision, les prévisions pour les diverses
régions du pays, M. Kennedy est convaincu que la situation au
Québec ne différera pas de celle des autres régions du
Canada.
M. GRENIER: Parfaitl
M. BOURASSA: M. le Président, je n'ai pas compris. Au
Québec, du Québec?
M. BEAUDRY: Le nouveau président de la Banque de Montréal,
M. John Walker, notait lui aussi, la semaine dernière, que la situation
de l'Investissement au Québec était bien meilleure qu'on ne
l'avait laissé entendre dans le Globe and Mail.
Quand les hommes d'affaires...
M. GRENIER: On n'a pas les renseignements au mêmes places.
M. BEAUDRY: ... comme ceux que je viens de citer plus haut trouvent
qu'au Québec il existe un climat favorable à l'endroit des
investisseurs, j'ai de fortes tendances à attacher plus d'importance
à leurs déclarations qu'aux avancés nébuleux du
chef de l'Opposition.
Les mesures qu'a prises le gouvernement du Québec pour favoriser
le développement industriel ont commencé déjà
à porter leurs fruits. Ainsi l'Office de crédit industriel qui a
commencé à fonctionner depuis peu de temps en définitive,
depuis janvier 1968, aura fait $10 millions de prêts dans ses douze
premiers mois d'exploitation.
M. BOURASSA: $30 millions avant avec la banque d'expansion...
M. BEAUDRY: A ce stade-ci j'aimerais à relever certaines
affirmations faites voilà quelque temps par l'honorable
député de Mercier au sujet de l'Office de crédit
industriel. Je cite entre autres deux avancés faits par le
député de Mercier et auxquels je voudrais répondre d'une
façon plus spécifique.
M. BOURASSA: Bon, on va écouter ça.
M. BEAUDRY: Si je me réfère au journal des Débats,
pages 3860 et 3861, le député disait: « Qu'est-ce qu'on a
fait avec d'autres instruments comme l'Office de crédit industriel? Nous
constations que les résultats concrets de cet office sont très
minces. Depuis que cet office est en fonction, on n'y a déboursé
qu'une somme légèrement supérieure à $1 million et
demi ».
M. BOURASSA: C'était dans le rapport officiel.
M. BEAUDRY: « Nous avons là des gestes, des mesures qui ont
été proposés parle gouvernement dont le ministre du
Travail et le ministre de l'Industrie et du Commerce de l'époque a
signalé l'importance considérable ».
Deuxième question, page 3862: « Quant on sait, M. le
Président, qu'il en coûte aujourd'hui en moyenne $40,000 pour un
nouvel emploi, si l'on se fie aux résultats des autres mesures, on ne
peut pas être tellement optimiste pour l'avenir. Donc, si nous
considérons toutes les mesures qui ont été jusqu'à
maintenant présentées et leur très mince effet sur la
situation économique globale et les autres mesures que nous attendons
encore. »
Le député de Mercier, dans ses commentaires sur l'Office
de crédit industriel, conteste le bien-fondé et la valeur de cet
organisme comme instrument qui peut contribuer d'une manière très
importante pour encourager et faciliter le développement industriel
régional. Lorsqu'il souligne que l'office avait déboursé
environ $1 million et demi au 30 septembre 1968 et qu'en conséquence, il
ne s'agissait que de gestes bien minces, je crois qu'il ne donne pas justice
aux efforts très considérables et très valables qui ont
été faits par cet organisme depuis le début de ses
opérations.
M. BOURASSA: M. le Président, je crois que je peux invoquer le
règlement. Je crois qu'on interprète mal ce que j'ai dit. J'ai
dit que ce qui était fait par l'office était excellent, mais que
je comparais ça à d'autres organisations comme la Banque
d'expansion industrielle qui déboursait peut-être quinze à
vingt fois plus que l'Office du crédit industriel.
M. BEAUDRY: Je vais vous répondre. Cela s'en vient.
M. BELLEMARE: Très approprié ça, déranger le
ministre! C'est pour ça qu'après ça, quand vous parlez,
nous sommes portés nous aussi à vous déranger.
M. BOURASSA: Non, mais il m'a mal cité, j'ai le droit...
M. BELLEMARE: Faites comme les autres. M. ROY: ... pendant tout le
discours,... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BEAUDRY: Je crois que le député de Mercier, en
définitive, n'a pas donné justice aux efforts très
considérables et très valables qui ont été faits
par cet organisme depuis le début de ses opérations, il y a moins
d'un an. Les statistiques de l'office, au 30 septembre 1968, indiquent que 65
prêts avaient été approuvés pour un montant global
de $6,516,000.
M. le Président, je suis heureux de mentionner que ces chiffres,
en date de ce soir, ont augmenté à 88 prêts pour un montant
de $8,623,200.
M. BOURASSA: Pourrais-je demander au ministre...
M. BEAUDRY: M. le Président, il faut bien réaliser que les
prêts approuvés par l'office sont en très grande
majorité destinés à financer des projets de construction
de nouvelles usines, d'agrandissement d'usines ou d'achats de machinerie et que
les prêts consentis ne peuvent être déboursés
qu'après que les documents devant constituer les garanties sont
signés, et au fur et à mesure que les projets approuvés
progessent.
Il n'est donc que normal que les déboursés accusent un
retard sur les approbations, et il en sera toujours ainsi, M. le
Président. Les demandes que reçoit l'office augmentent sans cesse
et l'expérience acquise dans ce champ d'activités, depuis un an,
indique clairement que ces services répondent réellement à
un besoin réel et représentent une contribution très
importante au développement industriel du Québec.
La structuration et la mise en marche des services de l'office se sont
faites très rapidement. Nous ne croyons pas qu'aucun autre organisme
semblable au Canada puisse démontrer un rendement aussi impressionnant
au cours d'une première année d'opérations.
Lors de l'étude de cette loi, l'on nous a à la fois
reproché de voir trop petit et à la fois mis en garde contre les
dangers inhérents au financement industriel. Si nous n'avons
prévu qu'un montant de $10 millions par année pour cet organisme,
c'est que nous réalisions, à ce moment-là, qu'il fallait y
aller prudemment et que l'office aurait besoin d'un certain temps pour
développer ses affaires de façon à dépasser ce
montant annuel.
A la lumière de l'expérience que nous acquérons
actuellement, il semble bien qu'il nous sera possible de recommander
prochainement que les montants mis à la disposition de l'office soient
augmentés substantiellement.
Puisqu'il s'agit de prêts qui doivent...
M. LEVESQUE (Laurier): Le ministre me permettrait-il...
M. BEAUDRY: ... être récupérés
intégralement avec des intérêts, ce service est peu
coûteux pour le gouvernement, en comparaison des bienfaits qu'il
occasionne.
M. LEVESQUE (Laurier): Le ministre permet-il une question?
M. BELLEMARE : Il n'a pas le temps.
M. LEVESQUE (Laurier): Il n'a pas le temps?
M. BELLEMARE: Non.
M. BEAUDRY: Dans le rapport semestriel de l'office en date du 30
septembre 1968, le président mentionne que les projets rendus
possibles,
grâce à l'aide financière de l'office, doivent
porter le nombre total des employés de ces emprunteurs de 2,150 à
2,692, soit 542 nouveaux emplois. Le député de Mercier a
déjà mentionné qu'il en coûte aujourd'hui en moyenne
$40,000 pour un nouvel emploi.
Si l'on se fie à ce chiffre, les 542 nouveaux emplois que
l'Office de crédit a créés par les projets financés
par lui peuvent représenter un investissement total de $21,680,000.
Pour un organisme qui fonctionne depuis moins d'un an et qui
coûtera très peu à la province, il faut bien admettre qu'il
s'agit d'une contribution qui ne peut être qualifiée de miette et
dont on peut attendre beaucoup dans un avenir très proche.
UNE VOIX: Parfait.
M. BEAUDRY: M. le Président, l'on parle, depuis plusieurs
années, du besoin de créer une banque d'affaires pour faciliter
la croissance de nos industries. Nous croyons que l'Office de crédit
représente enfin la base de cet organisme si longuement souhaité.
Les primes au développement industriel régional, en vertu du bill
23, ont amené, depuis quatre mois seulement, des engagements totaux de
$3,921,300 en faveur de 28 entreprises, particulièrement dans des
régions comme celle de Québec, de l'Abitibi, de
Trois-Rivières et des Cantons de l'Est.
Nous avons actuellement à l'étude 228 projets d'expansion
ou d'implantations nouvelles, d'un montant moyen de $300,000 par projet, soit
un grand total de $70 millions en investissements qui sont projetés pour
l'année 1969. Depuis quelques semaines, l'importance des projets
présentés au comité des primes est de plus en plus
frappante. D'ailleurs, les quelques chiffres que je viens de citer ne tiennent
pas compte de certains grands projets de plusieurs millions de dollars
actuellement à l'étude.
Je note, en terminant, que, contrairement à 1967, où
l'Expo avait provoqué une augmentation de l'indice des prix plus
élevé à Montréal qu'ailleurs au Canada, la hausse
des prix au Québec, en 1968, est inférieure à la moyenne
canadienne.
Si nous faisons une revue des mesures que le ministère a prises
cette année, nous commençons par l'Office de crédit
industriel, qui s'est avéré une mesure, je crois, très
rentable pour la province. Nous avons, de plus, établi le bill 23,
primes sur les investissements. De plus, nous avons fait adopter le bill 24,
crédit fiscal sur les corporations; le bill 82, parc industriel du
centre du Québec, sur lequel nous comptons beaucoup pour la
décentralisation et pour le développement du centre du
Québec. Dès janvier, nous lancerons une promotion de vente des
produits du Québec qui s'avérera, je l'espère, une
promotion fantastique. De plus, au cours de la prochaine année, nous
ouvrirons cinq nouveaux bureaux additionnels aux Etats-Unis et un en Allemagne.
Si nous regardons la section commerce, nous sommes partis de cinq
employés et nous en avons maintenant dix-sept. De plus, nous sommes sur
le point de créer le conseil spécial de Pindustrie,
composé de cinquante industriels représentant tous les secteurs
de l'industrie et du commerce du Québec, qui prêtera main-forte au
ministère.
De plus, nous sommes sur le point de créer le centre de
recherches industrielles. Voilà des mesures qui, je crois, aideront le
Québec à se développer d'une manière raisonnable.
Compte tenu de ces faits et tenant compte des problèmes graves qui
demeurent à résoudre, entre autres la rareté et la
cherté de l'argent, problèmes auxquels ont à faire face et
le secteur public et le secteur privé, il n'y a pas lieu d'être
pessimiste quant à l'avenir économique immédiat du
Québec.
M. ROY: Parfait!
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Outremont.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je n'ai pas voulu interrompre le
ministre de l'Industrie et du Commerce au cours de son exposé et je
n'avais pas moi-même l'intention de faire un exposé,
excepté qu'après l'avoir entendu, après avoir entendu le
ton optimiste...
M. ROY: Il pose la question que le député de Mercier
voulait poser.
M. CHOQUETTE: Non, non.
M. ROY: Je vous ai entendu, j'étais à côté de
vous.
M. CHOQUETTE: Non, mais après avoir constaté l'optimisme,
n'est-ce pas...
M. ROY: C'est cela.
M. CHOQUETTE: ... qui caractérise la description du paysage
économique qu'a fait...
M. ROY: II va lui demander s'il est dans le même parti que M.
Dozois. C'est cela?
M. CHOQUETTE: ... le ministre de l'Indus-
trie et du Commerce, et le pessimisme du ministre des Finances...
M. ROY: Elle n'est pas bonne!
M. CHOQUETTE: ... dans son exposé de l'autre jour à la
Chambre. Je voudrais demander au ministre de l'Industrie et du Commerce...
M. ROY: Cela était tout arrangé d'avance.
M. CHOQUETTE: ... s'il fait partie du même gouvernement que...
M. GRENIER: On le savait. Il a perdu l'effet de sa « joke
».
M. ROY: Une petite question arrangée.
M. GRENIER: Ce n'est pas Jérôme qui a pensé à
celai
M. LEVESQUE (Laurier): Une question, M. le Président.
M. BELLEMARE: Peut-être pourriez-vous la poser en comité
plénier. Nous allons aller finir la deuxième lecture.
M. LEVESQUE (Laurier): M. le Président, c'est une question
d'information, si le ministre veut. Je ne sais même pas s'il citait le
député de Mercier. Il a parlé du coût d'un
emploi.
M. BEAUDRY: A ce moment-là, je citais des déclarations du
député de Mercier qui mentionnait que, pour créer un
emploi, cela coûtait $40,000.
M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais simplement signaler
que...
M. BELLEMARE: Non, à votre siège!
M. ROY: A votre siège!
M. BOURASSA: J'invoque le règlement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. ROY: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Malheureusement, je ne peux
reconnaître l'honorable député de Chambly.
M. BEAUDRY: M. le Président, à ce moment-là, je
citais la page 3862 du journal des
Débats: « Quand on sait qu'il en coûte en moyenne
$40,000 pour un nouvel emploi ».
M. BOURASSA: M. le Président, le chiffre s'obtient en comparant
les différents secteurs. Dans le secteur pétrochimique, cela
coûterait $200,000 pour créer un nouvel emploi; dans d'autres
secteurs, cela coûte beaucoup moins.
Donc, nous pouvons dire en moyenne qu'un nouvel emploi dans le secteur
manufacturier pourrait coûter quelque $40.000...
M. ROY: Pas de discours, c'est le journal des Débats que j'ai
cité là.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée?
M. BELLEMARE: Comité plénier.
Comité plénier
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose
que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en
comité plénier pour l'étude du bill 295. Cette motion
sera-t-elle adoptée?
M. FRECHETTE (président du comité plénier)! Alors
bill 295, article 1.
M. LESAGE: Si je comprends bien, M. le Président, par le
paragraphe b) de l'article 1, on ajoute les trois paragraphes qui sont
suggérés après les mots »
délégué au comité exécutif les pouvoirs
ci-dessus ou certains d'entre eux à sa discrétion. » Est-ce
bien ça?
M. LUSSIER: L'article 1?
M. LESAGE: L'article 528 avec toutes les modifications est de nouveau
modifié a) en retranchant dans le dernier alinéa du paragraphe 3
les deux dernières phrases. Est-ce que ce sont les deux phrases «
pour les fins des susdites activités... » et le reste.
Comment se fait-il que le ministre n'a pas ça à
portée de la main?
M. LUSSIER: Nous arrivons; nous nous installons. On enlève
à partir « pour les fins des susdites activités...
»
M. LESAGE: Le ministre répète ce que je viens de dire.
Merci.
M. LUSSIER... « parce que nous n'en n'avons plus besoin.
»
M. LESAGE: Je n'ai pas besoin d'explications; je voulais simplement
savoir si j'avais bien compris que c'était à partir de ces
mots-là qu'on retranchait les deux dernières phrases.
M. LUSSIER: Vous avez bien compris, M. le chef de l'Opposition.
M. LESAGE: Très bien, adopté. M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Article 1 adopté avec les paragraphes a), b).
Article 2 adopté. Article 3, adopté également. Article 4,
adopté aussi. Article 5?
M. BELLEMARE: Adopté.
M. LESAGE: On référait toujours à l'article 840,
mais depuis deux ans, au fur et à mesure que nous avons modifié
des articles de la charte de la ville de Montréal, on
réfère constamment maintenant à l'article 1169.
M. DOZOIS: C'est maintenant 1169.
M. LESAGE: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: Alors, article 5, adopté?
M. BOURASSA: A l'occasion de cet article, est-ce que je peux demander au
ministre des Finances si c'est son intention, évidemment sans lui
demander de dévoiler à l'avance des secrets de son discours du
budget, si c'est son intention ou au ministre des Affaires municipales
de recommander un changement de la formule de distribution de la taxe de
vente?
M. DOZOIS: C'est à l'étude actuellement.
M. BOURASSA: C'est à l'étude. Le ministre ne peut pas
répondre?
M. DOZOIS: Non.
M. LE PRESIDENT: Article 6, adopté. Article 7, adopté.
Article 8?
M. LESAGE: Un instant. Le conseil a et a toujours eu le pouvoir de
déléguer par règlement au comité exécutif le
droit de fixer tout taux d'Intérêt sur les emprunts
autorisés par le conseil. Si je comprends bien, cette pratique est la
pratique normale.
M. LUSSIER: C'est demandé par les prêteurs.
M. LESAGE: Ce n'est pas du tout demandé par les prêteurs
d'après mes informations. Voici ce qui se passe. Je vais l'expliquer au
ministre des Affaires municipales. Il va comprendre. Depuis 1944, ç'a
toujours été le comité exécutif de la ville de
Montréal qui a approuvé les taux et les conditions d'emprunt
parce que, c'est très simple, lorsque la province, l'Hydro ou la ville
de Montréal décident d'aller sur le marché, il faut que la
décision se prenne dans une heure ou deux. On n'a pas le temps d'aller
devant le conseil. D'ailleurs, ce n'est pas d'intérêt public
d'aller devant le conseil.
M. DOZOIS: On a confirmé ça.
M. LESAGE : Mais on le fait confirmer après. De la même
façon que quand on fait approuver le budget ici, on se trouve à
approuver les emprunts faits par le gouvernement de la province, et par l'Hydro
quand on approuve les investissements de l'Hydro.
Mais, si je comprends bien, c'est pour régulariser une situation
de fait qui existe depuis 1944.
M. DOZOIS: Non, pas nécessairement, M. le Président,
justement. C'est que la première partie décrite par le chef de
l'Opposition est vraie. Mais il est arrivé que, dans le bill 100, que
nous avons adopté au mois de mal, on a changé l'article 756, puis
on a dit: Le conseil peut déléguer au comité
exécutif. Or, les avocats disent: Bien, puisqu'on a confirmé dans
cette loi ce pouvoir de délégation, on affirme qu'on ne l'avait
pas avant et on met en doute toutes les obligations qui ont été
émises pendant cette période. Alors, on veut bien dire qu'il a
toujours eu ce pouvoir.
M. LESAGE: Bien oui, d'accord.
M. LE PRESIDENT: Alors, article 8, adopté. Article 9?
M. BOURASSA: Il y a un amendement. M. DOZOIS: L'article 9, M. le
Président...
M. LESAGE: Est-ce que l'article 8 a été adopté?
M. DOZOIS: Bien, on peut revenir à 8...
M. LESAGE: Non, ça va très bien, c'est très
complet, c'est pour assumer les obliga-
tions de Saint-Michel à partir du 1er janvier, et puis imposer
les résidents du quartier Saint-Michel à partir du 1er janvier,
étant donné que leur année financière se termine le
31 décembre.
M. DOZOIS: L'année de calendrier, alors il n'y aurait pas eu
d'imposition...
M. LESAGE: C'est ça.
M. DOZOIS: ... pour la période du 1er janvier au 1er mai.
M. LESAGE: Est-ce que l'amendement, à l'article 9, proposé
par le ministre des Finances, dont il a eu l'amabilité de me donner une
copie, remplace tout l'article, il n'y a plus d'alternative, n'est-ce pas?
M. DOZOIS: Oui, oui. UNE VOIX: Cela s'ajoute.
M. LESAGE: II n'y a plus d'alternative, M. le Président, d'autant
plus que l'alternative n'est plus nécessaire. Je pense que le ministre
des Finances et quelques députés en cette Chambre sont au courant
des désirs de la ville de Montréal et ce que désire la
ville, c'est l'amendement apporté à l'article 9. Je crois que la
ville de Montréal n'a plus besoin de ce que j'appellerai la branche A de
l'alternative.
M. DOZOIS: Je crois. Je pense que c'est le désir de la ville de
Montréal. La ville de Montréal a demandé d'être
exemptée de cela, et si on lui accordait ce privilège, je pense
qu'elle n'a pas besoin de l'alternative qu'on offrait.
M. LESAGE: Je suis sûr que non. L'amendement devrait être
là.
M. DOZOIS: Oui.
M. LESAGE: Si le ministre préfère être
rassuré, nous pourrions peut-être adopter l'article tel quel en
comité et puis compléter en troisième lecture, de bonne
heure demain matin.
M. DOZOIS: Très bien. M. le Président, vous me permettrez
cependant, de façon que ce soit consigné au journal des
Débats, de répéter, avant l'adoption de cet amendement, ce
que je disais lors de la deuxième lecture. Je cite textuellement, car
j'ai gardé je pourrais le relire dans le journal des
Débats la phrase que j'ai prononcée à ce moment.
Après avoir exposé cette situation et ce que contenait le bill
j'ai dit ceci: « Cependant, si je sentais que c'était le
désir unanime des membres de cette Chambre d'accéder à la
demande de la ville, je serais prêt à considérer une
modification au projet de bill, pourvu que cette exemption soit limitée
à une courte période. Si le rapport du comité est
convaincant au point qu'il faille revenir à la base actuarielle, la
ville devra déposer, à ce moment, des obligations, plus
l'intérêt, pour combler ce vide. »
Or et je tiens à ce que cela soit enregistré au
journal des Débats au cours de la discussion que nous avons eue
en deuxième lecture, tout d'abord, le député de Laurier a
dit qu'il était d'accord pour appuyer un tel amendement et le chef de
l'Opposition, tout à l'heure, a dit qu'il était également
d'accord, dans les circonstances, pour appuyer cet amendement.
Or, Je veux qu'il soit bien entendu et les législateurs de
1970, qui seront autres que ceux qui sont ici, pourront référer
au journal des Débats de façon à se rendre compte de
l'esprit de cet amendement que, si on en vient à la conclusion
qu'une base actuarielle doit être maintenue, la ville de Montréal
sera obligée de renflouer ou de rembourser les différentes
caisses de retraite des montants que la ville n'aura pas versés pendant
ces deux exercices.
Maintenant que ces remarques sont consignées au journal des
Débats, je propose que cet amendement soit voté comme alternative
a).
M. LESAGE: M. le Président, je pense que c'est comme article
9.
M. DOZOIS: Comme article 9. Demain, après vérification, si
ce n'est pas ça...
M. LESAGE: Le ministre pourrait vérifier et donner un coup de
téléphone à Montréal. Je suis sûr...
M. DOZOIS: Oui, je crois, moi aussi.
M. LESAGE: L'article 9, tel qu'il est rédigé, est
complet.
M. DOZOIS: Il est complet, oui, d'accord. Alors, on remplace l'article 9
par cet amendement.
M. BOURASSA: M. le Président, avant de ter-
miner les articles, je voudrais faire part au ministre des Finances
qu'en ce qui a trait aux amendements à la charte de Montréal, de
façon générale, j'avais discuté avec M. Saulnier
qu'un amendement pourrait peut-être être apporté dès
aujourd'hui pour ce qui a trait aux pouvoirs accrus de la ville de
Montréal pour empêcher la sollicitation des taxis Murray Hill dans
les grands hôtels de Montréal.
Alors j'ai discuté avec M. Saulnier, il m'a suggéré
que ce soit fait lorsque le bill de Montréal sera présenté
au printemps, en espérant que le gouvernement serait d'accord.
M. DOZOIS: C'est un problème très considérable. Si
le député de Mercier veut faire un amendement, nous allons
l'étudier.
M. BOURASSA: M. le Président, j'en ai discuté avec M.
Saulnier qui préfère que ce soit fait au printemps.
M. DOZOIS: Ah bon!
M. BOURASSA: Le ministre des Finances a autant de chauffeurs de taxi
dans son comté que je peux en avoir dans le mien, il devrait accorder
plus d'importance à ce problème-là.
M. DOZOIS: J'ai beaucoup de chauffeurs de taxi dans mon comté,
j'ai beaucoup de gens qui utilisent des taxis, probablement autant que dans le
comté de Mercier. Mais comme c'est un problème très
complexe, c'est le député de Mercier qui soulève le
problème, s'il est prêt à soumettre un amendement, je lui
dis que nous sommes prêts à l'étudier.
M. BOURASSA: J'ai dit que j'en ai discuté avec M. Saulnier...
M. BELLEMARE: II ne veut pas.
M. LE PRESIDENT: Article 9, adopté tel qu'amendé.
Article 10, adopté.
M. FRECHETTE (Président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que votre comité
a adopté avec un amendement le bill 295, qu'il vous prie
d'agréer.
M. LE PRESIDENT: Le bill amendé sera-t-il
agréé?
Agréé.
Y a-t-il consentement unanime pour la troisième lecture?
M. LESAGE: Demain.
M. BELLEMARE: Demain.
M. LE PRESIDENT: Alors, troisième lecture à la prochaine
séance ou à une séance ultérieure.
Bills rayés du feuilleton
M. BELLEMARE: M. le Président, à l'article 4, si j'avais
le consentement unanime, nous pourrions rayer du feuilleton la Loi modifiant la
loi de l'instruction publique. Il y a des causes pendantes que nous ne pouvons
pas régler actuellement...
UNE VOIX: Sub judice.
M. BELLEMARE: Sub judice oui, qui vont être décidées
très prochainement. Je pense qu'on devrait remettre ça
pour...
M. LESAGE: Cela ne donne rien de le laisser au feuilleton.
M. BELLEMARE: C'est ça. Alors, nous l'enlevons avec l'assentiment
général. Maintenant, l'autre, la Loi de l'office du
développement et de l'aménagement, il faut que le comité
interministériel fasse les structures avant que ce bill ne soit
introduit. Alors, je fais motion pour qu'il disparaisse du feuilleton pour le
moment.
M. LE PRESIDENT: De consente ment unanime, les articles 4 et 5 sont
rayés du feuilleton.
M. BELLEMARE: M. le Président, je fais la motion de l'honorable
chef de l'Opposition, cet après-midi, la suggestion pour remplacer des
membres sur certains comités.
M. LESAGE: C'est votre motion.
M. BELLEMARE: C'est ma motion, sans doute, mais je remercie de sa
suggestion, l'honorable chef de l'Opposition. Je propose donc que motion soit
faite pour que tous les comités permanents et spéciaux qui ont
reçu l'autorisation de siéger après la prorogation de la
Chambre soient autorisés a remplacer un ou plusieurs membres sur chacun
de ces comités pourvu que la liste de ces membres soit
déposée par le chef d'un parti ou son représentant au
bureau du président de l'Assemblée nationale 48 heures avant la
réunion desdits comités.
M. LESAGE: Le ministre sait que 24 heures, c'est certainement suffisant,
parce que lorsqu'on dit un délai de 24 heures, ça ne peut pas
être le dimanche, ça ne peut pas être le samedi. Il faut que
ce soit 24 heures ouvrables. Enfin, ne nous chicanons pas. Donc 48 heures, cela
veut dire que si on veut faire un changement pour le lundi suivant, il faudra
donner l'avis le...
M. BELLEMARE: Le Jeudi.
M. LESAGE: ... jeudi.
M» BELLEMARE: Ce n'est pas si mauvais.
M. LESAGE: Bien.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: M. le Président, je proposerais l'ajournement de la
Chambre à demain matin, dix heures trente. J'ai dit à l'honorable
chef de l'Opposition que nous aurions demain matin une motion inscrite au
feuilleton permettant de siéger sans interruption de dix heures trente
jusqu'à dix heures demain soir pour essayer de hâter et de finir
cette session.
Je remercie les membres de l'Opposition de leur collaboration et nous
ajournons à demain matin, dix heures trente.
M. PINARD: Allez-vous fournir les sandwiches et le café?
M. BELLEMARE: Nous allons nous arranger pour que personne ne tombe en
défaillance.
M. LE PRESIDENT: La Chambre s'ajourne à demain matin, dix heures
trente.
(22 h 12)